Oe i~>< ry + TETE Pere + ere Fy + ereepeery ss. ess): 2 37 DENETENETEA ae rÉtisiesrpiers > = rit 25 °—e 7 + 7 Tighe fst of Nehatet Tite HE Se penta RTE gis eee th} ait a + TINTIN HU IE laters iit Sanit ce ee ih fy! lett ‘ rey Fit ti à Hit RUE RATE tif By ui ae slrletelelotel a EEE ris He Hoi feat sietets RTE 1310 Afagasté sir En vede aed ; Tite ete Qt _ Teeter qu #17] Palatal it: jus qu se islets! ‘ miel role pie yann) ERTORITE rooivanie tes Talal tals lat Inritiois aah a A \¢ rite at A leant if fiat ii! {oi (siglalstal Ipiett part ne by ait te Teter SH lETETITENITINES 100 (pi iets ris +) ww tirieisielel eee heie tels leis BARON, 5 . bi nimeteist titizipicls RTE yee ehey ri RRQ res hair Hptlittieil pride rialeie el et dur $ fuit ik rieteiete ral rielgtéletst {ih 1} RES FT Pisteie heh erehe St 4941 (161670) nt mai it no tuant Hrleiplolsleleten i ptt Hi aT ia if beh ah? HO RE HT Ë hiait pie} “a pepdeleitielel Tipit hetsiels oles iblateh hit 11 th fArtpitishsis on 2 RARE jt us ptit Hit Forte mines Et beth He TE Heteleielelel matt obsraratsteestetitanitesieltte ts) rats à, Patate rirtieir Bearer thal Ant weyeeeagheed Hal ie) , al ia si ree it tr tI ity sit Hie piele] sieht [2 UT Ru _ # 1 FAURE it tif _ ye rbetelale SERA ap >| pits ie; i an itt etets rit] hele tt tt lt et RES eh petits elenster. it Behe lel ely] lolelels “i Le ui que bath He Ha i ii ata brits! lel elelalsial TETE uth Rien ui it cate if : tthe aa ita at tial “ i i Hit ah as tater it ui Arann t hanté 4 AIARRTIEN ati uit AUTRE tt 4 RER + ’ { ty hh ie neal role 2 bia ate sabe shite Hrirh 1530) (riririttet ne A + RP RATE 16 Hotel giant nel nn Shel ete fie elelehersiotaratititt tis te} : olelelsieisis iit ie 2 RTE TE ) x eee OS i + AE Pers teet stata ote UE Mets tot, Hotisit rititets $ oleletelersteds; ett el tise tbtishs hi ui i ie tit i #he RTE HAE if oi biere ith Hee sRAUTENE Piel At PIE # sa Saat i salah liételelet {i 4 10) RUE eieibhat. | LS the qi prise 144 34)0) vtt elotelaletelteletel hote malepiritieteit 12721 ia) At ets teil + , pl Piel pren neleiétetstitatieieteel Hélelereri tire PITIT) fi HE Etiriritietel hs RTE Les tt otalere! abe : t CO bEnN: ATEN HAN Hs ana rs else Hetstteterster ee Teese: Mriettie toe tat ahs Apt ph de dl rie Tete +1 léleiél je Hi shel slesaiel et iriPisletisiets Mitihoatau AAA +4 11e it rer bial) oils 4 is eTalelotal isi aleletelele eter ele TENTE | atsietel elt Hin te RUE label al iat) alter nnrite plsisl STATE! 1721 sleterele 494 le Neletetety fl ipigleis Ptizie PETITION RE + van pe sie lsispsl 1 tolaloi at 4 iP ielebera! + ele ri Troll Ta) hits 171 peek ay AAA) 7 felelat. ,! apatite rhin gitioiriqie NeSIS Te rerl AA atelier ees 121 | Niessie rater hit Titi see blelateleleistal. #4 stat fatal, piel ele als Pislsisly: lelsteteteisl esate, > si ot ot pip: rite 11 tieiels il UE tne bah LL +14 truite RTE } LIL! (06 (Pleteiehs ginipiot REeTeTTITITITISIeIeN belsisielelelale «diet à 4 +) : ’ tes as ei lets Titisishaieloiets HALSRETITIPETE triut +lbtstetelel tir, ATEN Pig elalolels Hit tira [St IUETI Tin LTLTITI EN ele el phptph 1134 Talal, +s += 444} pirat Le (vhets RIUUET à DTA TETE Perit Pt ele) Tela! rlelslel sini; IUT pirinieistere Tru eitieis [TITRE ition s! alaSelarieite fe} a Saas + BE IP si: DUR 14454 HE Mie pels related els dits HATATI ON fais aT ah Tiitivieislels one Wrhihapteh Hi Terpstra ly [rar pe * A tete taleTiPiris : k Wi ay Ry AE # st) FEI La) Pe Pee 15 Bat ‘ À il PARIS. — L. MARETHEUX, IMPRIMEUR, ite RUE CASSETTE. ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR FONDÉES SOUS LE PATRONAGE DE M. PASTEUR PAR E.- DUCLAUX COMITE DE REDACTION D: CALMETTE, directeur de l’Institut Pasteur de Lille; D’ CHANTEMESSE, professeur à la Faculté de Médecine; Dr LAVERAN, membre de l'Institut de France ; D' L. MARTIN, directeur du service de Sérothérapie ; P' METCHNIKOFF, sous-directeur de l’Institut Pasteur ; Dt ROUX, directeur de l’Institut Pasteur ; D' VAILLARD, membre de l'Académie de Médecine. TOME VINGT-NEUVIEME 1915 AVEC 11 PLANCHES PARIS MASSON ET Ci, ÉDITEURS LIBRAIRES DE L’ACADEMIE DE MÉDECINE 120, Boulevard Saint-Germain (6°). 29° ANNEE JANVIER 1915 Nod ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR! LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX par A. LAVERAN lll. — INFECTIONS EXPERIMENTALES PRODUITES CHEZ DIFFERENTES ESPECES ANIMALES PAR LA LEISHMANIA DONOVANI |! Ona admis, pendant plusieurs années, qu'un des principaux caractères différentiels du kala-azar méditerranéen et du kala- azar indien était fourni par ce fait que la premiére de ces mala- dies était inoculable à certains animaux, notamment au singe et au chien, qui se montraient réfractaires à la deuxième. Cette opinion n'est plus soutenable aujourd'hui. Il est démontré que la L. Donovani, agent du kala-azar indien, est inoculable. comme la L. infantum, agent du kala-azar méditerranéen, à certaines espéces animales. Nous aurons a voir si les conditions d'inoculation et les maladies expérimentales provoquées par les deux virus sont identiques ou non. Une autre différence, très intéressante au point de vue spécial qui nous occupe, subsiste entre le kala-azar méditerranéen et le kala-azar indien. On a vu, dans la première partie de ce travail, que la leishmaniose canine naturelle a été observée à (4) Voir, pour les premieres parties du travail, ces Annales, t. XXVIII, p- 823 et p. 885. 2 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR l'état enzootique dans tous les pays où le kala-azar méditerra- néen est endémique et que vraisemblablement l'agent du kala- azar chez l'homme et chez le chien est le même; or les recherches poursuivies dans l'Inde pour y découvrir des foyers de leishma- niose canine ont été infructueuses Jusqu'ici. Donovan a examiné à Madras, du mois de mai au mois d'août 1909, 1.150 chiens au point de vue de la présence dans leur rate de la L. Donovant; 256 de ces chiens provenaient du quartier de Madras dans lequel l’endémie de leishmaniose est la plus forte, et cependant l'existence des parasites n'a été notée dans aucun cas (1). Des recherthes ultérieures de Donovan et de Patton ont abouti également à des résullats négatifs; sur plus de 2.000 chiens tués à la fourrière de Madras, on n'a constaté aucun cas de leishmaniose (2). Mackie rapporte que 93 chiens ont été tués dans les villages du Nowgong (Inde) où le kala-azar régnait avec intensité dans les maisons où il y avait des malades, et que la rate et la moelle osseuse de ces chiens ont été examinées avec résullat négatif, au point de vue de l'existence des Leishmantia ; la moelle osseuse d'un certain nombre de chiens a été inoculée, également avec résultat négatif, à 2 singes, à 2 Pteropus Edwardsi et à un chien (3). Korke, qui a examiné un grand nombre de frottis de moelle osseuse et de rate de chiens dans l'Inde aurait vu, dans 4 cas, des éléments ayant une grande ressemblance avec des Leishma- na (4). Castellani a observé, & Colombo (Ceylan), quelques cas de leishmaniose canine naturelle, mais, comme beaucoup de chiens de Colombo sont importés, il n’a pas conclu de ces faits à l'exis- tence de la maladie à Ceylan (5). Bahr a recherché, sans succès, le kala-azar chez les indigènes (1) C. Donovan, Lancet, 20 novembre 1909. (2) CG. Donovan, W.-S. Patron, Proc. of the third meeting of the gen. malaria Committee held at Madras, novembre 1912, Simla, 1913. (3) F.-P Mackig, Indian Jl. of med. Research, avril 1914, p. 654. (4, Sir Parpry Lukis, All’ India sanitary Conference Lucknow, janvier 1914. Supplem. au Indian Jl. of med. Research, Calcutta, 1914. (5) A. Casrectanr et A.-J. Cnatmers, Manual of trop. Medicine, 2° édit., 1913. p. 363. LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 113 de Ceylan; il pense que la leishmaniose canine ne se rencontre pas non plus dans cette région (1). Le kala-azar indien a été inoculé avec succès au chien, au chacal, aux macaques, au Petropus Edwardsi (chauve-souris), à la souris et au rat. Les procédés d’inoculation sont les mêmes que pour le kala- azar méditerranéen ; il est nécessaire d'employer de fortes doses du virus; c'est probablement parce que Donovan et Patton avaient inoculé à leurs animaux de trop faibles doses que leurs premiers essais ont élé négatifs (2). Cuiex. Cuacaz. — En 1912, Donovan a annoncé qu'il avait réussi à infecter un jeune chien en lui inoculant une forte quan- tité (3 c. c. 1/2) du sang splénique d’un sujet arrivé à la période terminale du kala-azar. A l’autopsie du chien, on ne trouva de Leishmania ni dans la rate, ni dans le foie, mais les parasites étaient nombreux dans la moelle osseuse (3). Il est à remarquer que chez 2 chiens inoculés antérieurement par Donovan, et chez les chiens examinés à Madras au point de vue de la leish- maniose naturelle, l'examen histologique de la moelle osseuse, siège d'élection des Leishmania, n'avait pas été fait. En mème temps que Donovan, Patton a réussi à inoculer au chien le kala-azar indien. Sur 8 chiens inoculés avec de fortes quantités du produit du broyage de la rate de malades morts du kala-azar depuis quelques heures, 4 se sont infectés ; 3 chiens ont eu de fortes infections; chez l’un d'eux, l'infection sanguine était remarquable; trois jours avant la mort on compta plus de 500 Leishmania dans un frottis de sang, un seul polvnu- cléaire en renfermait 12; deux jours avant la mort, on compta jusqu'à 1.000 parasites dans un frottis du sang périphérique (4). Patton a profité de ce cas remarquable d'infection sanguine (1) P.-H. Baur, Transact. of the Soc. of trop. med. a. hyg., janvier 1914, t. VII. p. 114. (2) W.-S. Parron, Parasitology, décembre 1908 et mars 1909, Transact. of the Soc. of trop. med. a. hyg., février 1909 et Lancet, 30 janvier 1909. (3) C. Donovan, Proceed. of the third meeting of the gen. malaria Committee held at Madras, novembre 1912, Simla, 1913 et The indian Jt. of. med. Research, juillet 1913, t. 1, n° 4. ‘4) W.-S. Parrox, mêmes indications que pour les travaux de Donovan mentionnés ci-dessus. 4 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR pour faire une expérience très intéressante au point de vue du rôle des puces dans la transmission de la maladie (1). Plusieurs centaines de puces, Cf. felis (2), furent nourries sur le chien, quatre jours avant sa mort, et le contenu du tube digeslif de plus de 200 de ces puces fut examiné. Patton résume comme il suit les résultats de l’expérience. Deux heures après l'ingeslion du sang par les puces, on trouve dans l'intestin moyen, et dans les feces de ces insectes, des Lezshmania incluses dans des leucocytes. Beaucoup de parasites paraissent être déjà en voie de dégénérescence. Quatre heures après, les leucocytes sont dégénérés et les parasites devenus libres ne montrent aucun signe de développement; au contraire, ils deviennent granuleux. Six heures après, il ya une diminution marquée du nombre des parasites, et ceux qui existent encore sont for- tement altérés. Un petit nombre de parasites se colorant faible- ment sont trouvés dans la partie terminale du tube digestif. Huit heures après, il est très difficile de trouver un seul para- site, et chez toutes les puces examinées à des époques plus éloignées on n'en trouve plus aucun. Ces fails, qui sont en contradiction avec ceux relatés par Basile (3), tendraient à prouver que la L. Donovani ne peut pas se développer chez Ct. felis, et par suite que cet insecte ne joue aucun role dans la propagation du kala-azar ; il est vrai de dire que Basile a expérimenté sur L. infantum et non sur L. Donovant et Cl. canis. Un chacal (sur 4 inoculés) présenta une forte infection. Patton insiste avec raison sur ce fait que, pour obtenir de bons résultats dans les inoculations du kala-azar aux animaux, il faut employer de fortes doses de virus. Wenyon, à Londres, a infecté un chien avec la pulpe de la rate d’un Indien mort de kala-azar à l'hôpital Albertdock (4). Grâce à Pobligeance du D" Row, de Bombay, j'ai pu entre- prendre à Paris des expériences sur différents animaux avec la L. Donovani (5). (4) W.-S. Parron, Indian Jl. med. Research, juillet 1914. 2) A Madras, la puce du chien est C{. felis (Bouché). (3) V. première partie de ce travail, Ann. de l'Institut Pasteur, t. XXVIII, p- 831. (4) C.-M. Wenyon, Transact. of the Soc. of trop. med. a. hyg., janvier 1914. 5) A. Laveran, Acad. des Sciences, 17 novembre 1913 et 44 avril 1914. LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 5 Le 2 mai 1913, j'ai recu un tube de culture qui avait été ensemencé par le D™ Row, à Bombay, le 29 mars précédent, avec une culture de L. Donovani ayant subi une série de pas- sages, depuis le mois de décembre 1912; le tube contenait encore quelques flagellés mobiles qui, repiqués sur milieu de Novy simplifié, donnèrent de belles cultures; ce sont ces cul- tures qui ont été utilisées pour mes expériences. On s'accorde à reconnaître qu'il est plus difficile d’infecter des animaux avec les cultures de Leishmania qu'avec le produit du broyage de la rate ou de la moelle osseuse d'hommes ou d'animaux morts du kala-azar; néanmoins, mes expériences sur les chiens, et surtout sur les singes, ont souvent donné des résultats positifs. Sur 12 chiens inoculés uniquement avec des cultures de la L. Donovani dans le foie ou dans les veines, 5 se sont infectés (Obs. 1 à 5); les chiens 1, 2 et 3 n'ont reçu. dans les veines ou dans le foie, que 2 cent. cubes de culture, le chien 4 a recu, dans le foie, 3 cent. cubes de culture. A la vérité, les infections ont été légères, mais j'avais choisi comme étant plus sensibles au virus des chiens très jeunes, et plusieurs d'entre eux ont succombé à des broncho-pneumonies, trop rapide- ment après l'inoculation pour laisser au kala-azar le temps d'évoluer. Les formes légères, latentes, sont communes dans les infec- tions du chien dues à la L. Donovani, comme dans celles que produit la L. infantum, si bien que, sur le cadavre, pour recon- naître l'existence de la maladie, il est parfois nécessaire de faire des ensemencements de la moelle osseuse ou de la rate. Il est à noter que 2 chiens (Obs. 1 et 5) ont présenté de lopa- cité des cornées, passagère dans un cas (1), permanente dans l’autre ; on a vu dans la deuxième partie de ce travail que ce symptôme avait été noté également chez des chiens infectés avec la L. infantum. Sur 3 chiens inoculés à la fois avec des cultures et avec le produit du broyage de la rate et du foie d'un macaque forte- ment infecté de kala-azar indien, 2 se sont infectés et chez un (1) A. Lavera, Soc. de path. exotique, 9 juillet 1913. Présentation du chien qui fait l'objet de l'observation 1 du présent travail. 6 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR de ces animaux l'infection a élé de moyenne intensité (Leish- mania non rares dans la rate, très rares dans le foie). Comme dans les infections produites chez le chien par la L. infantum, c'est dans la moelle osseuse qu’on a le plus de chances de trouver les Leishmania quand il s’agit d'infec- tions légères; l’observation 7 fait toutefois exception à la règle. Je résume les 7 observations. 1° Un jeune chien, pesant 4 kilogr. 480, reçoit le 10 juin 1913, dans l’une des veines saphènes, 2 cent. cubes d'une culture très belle de Leishmania Dono- vani. — 8 juillet, le chien pése 4 kilogr. 500; on constate que la cornée du côté gauche s’est opacifiée ; la cornée était en très bon état lors de l'arrivée du chien au chenil; elle a dû s’opacifier rapidement. car le chien est souvent examiné. — 13 juillet, la partie externe de la cornée gauche est redevenue transparente. — 16 juillet, l'opacité de la cornée a encore diminué, elle n’oc- cupe plus que le quart interne environ. — 18 juillet, le chien maigrit, il ne pèse plus que 4 kilogr. 100. Mort le 19 juillet. Le tissu conjonctif a une teinte ictérique très marquée ; les urines donnent la réaction de Gmelin. La rate pèse 6 gr. 50. Foie d'aspect normal. Ganglions mésentériques augmentés de volume. Petites ecchymoses sous-pleurales, broncho-pneumonie bien caractérisée qui, certainement, a été la cause de la mort. Rien d’anormal au cœur. Dans les frottis de moelle osseuse, on trouve des Leishmania très rares. L'examen des frottis du foie et de la rate est négatif. 2° Un chien âgé de 45 jours, pesant 840 grammes, reçoit, le 30 juin 1913, dans le foie, 2 cent. cubes d'une belle culture de la L. Donovani, — 12 juillet, le chien pèse 920 grammes. — Les jours suivants le chien présente les symptômes de la maladie des jeunes chiens et il meurt le 21 juillet. Le chien pèse 860 grammes; la rate pèse 2 gr. 30. Foie pâle, d'aspect grais- seux. Lesautres viscères ne présentent pas d’altération macroscopique notable. Dans ies frottis de moelle osseuse et de rate, on trouve des Leishmania très rares ; l'examen d’un frottis du foie est négatif. 3° Un chien âgé de 1 mois environ, pesant I kilogr. 080, reçoit le 25 juillet 1913, 2 cent. cubes de culture très belle de L. Donovani, moitié dans le foie, et moitié dans une des veines saphenes. Le chien pèse 1 kilogr. 500 le 19 aout, 2 kilogr. 100 le 31 août, 2 kilogr. 250 le 23 septembre, 3 kilogr. 450 le 25 octobre. — Le 28 octobre, le chien a des convulsions, il respire difficilement, et pré- sente de la parésie du train postérieur; il s’agit probablement de la maladie des jeunes chiens. Le chien est sacrifié le 29 octobre 1913; il pèse 3 kilogr. 470. La rate, d’as- pect normal, pèse 10 grammes. Les autres viscères ne présentent pas de lésions macroscopiques. Dans les frotlis de moelle osseuse, on trouve des Leishmania très rares. L'examen des frottis de rate et de foie est négatif. Deux tubes du milieu de Novy simplifié sont ensemencés avec la moelle osseuse : à la date du 19 novembre, on constate une belle culture de flagellés dans un des tubes, l’autre tube est resté stérile. LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 7 4° Un chien, âgé de 40 jours, du poids de 1 kilogr. 300, reçoit le 4 août 1943, dans le foie,1 cent. cube d’une culture très riche de L. Donovani. — 10 août, le chien, qui pèse 1 kilogr. 400, est inoculé une deuxième fois ; il reçoit, dans le foie, 2 cent. cubes d’une culture très riche. — 31 aout, le chien va très bien, il pèse 1 kilogr. 840. — 23 septembre, le chien pèse 2 kilogrammes; il ne parait pas malade. — 25 septembre, le chien est pris brusquement de mou- vements convulsifs, il reste couché sur le côté gauche; quand on le place sur le côté droit, il se retourne de l’autre côté. Le chien est sacrifié le 25 septembre. La rate pèse 7 grammes. Le foie, les reins, le tube digestif, le cœur, les poumons ne présentent rien d’anormal. Les méninges cérébrales sont vivement injectées du côté gauche. Les frottis de moelle osseuse montrent quelques Leishmania; les frottis de rate et de foie n’en montrent pas. Deux tubes du milieu de Novy simplifié, ensemencés avec la moelle osseuse, donnent de belles cultures de flagellés caractéristiques. 5° Une jeune chienne pesant 6 kilogr. 700 recoit, les 24 et 26 novembre et le 6 décembre 1913, des injections intraveineuses de cultures très belles de L. Donovani. — 9 décembre, on constate que la cornée gauche est trouble. — 10 décembre, la cornée gauche est presque complètement opaque ; conjonc- tivite double. — 13 décembre, la conjonctivite va bien, mais la cornée droite s'est opacifiée à son tour. Le chien y voit encore un peu. Amaigrissement, poids : 5 kilogr. 700. — 15 décembre, les cornées redeviennent transparentes. — 20 décembre, le chien ne pèse plus que 5 kilogr. 200; lopacité des cornées augmente de nouveau. Le chien qui paraît très malade est sacrifié le 21 décembre 1913; il pèse 4 kilogr. 750. La rate pése 11 grammes. Les autres viscéres ne présentent aucune altération macroscopique. Dans les frottis de la moelle osseuse on trouve des Leishmania très rares. Les examens des frottis du foie et de la rate sont négatifs. ; 6° Un chien âgé de 3 semaines environ, pesant 700 grammes, reçoit dans le foie, le 19 juillet et le 31 août 1913, des injections de cultures très belles de L. Donovani, 2 cent. cubes environ à chaque injection. — Au mois de novembre 1913, le chien est en très bon état, il pèse 4 kilogrammes. — Le 8 novembre, on inocule dans le foie le produit du broyage de la rate et du foie d’un singe infecté de kala-azar indien. — Le chien continue à augmenter de poids; il pèse, le 9 janvier 1914, 7 kilogrammes; le 27 février, 8 kilogrammes. Trouvé mort le 3 mars 1914. Le chien pèse 6 kilogr. 900; la rate meee. 6 grammes. Les viscères ne pré- sentent pas d’altérations pouvant expliquer la mort qui est due sans doute a la maladie des jeunes chiens. Les urines sont albumineuses. Leishmania très rares dans les frottis de rate et de moelle osseuse. L'examen d'un frottis du foie est négatif. 7° Un jeune chien pesant 6 kilogr. 500 reçoit, le 12 décembre 1913, dans le foie, une injection de 4 cent. cubes du produit du broyage de la rate et du foie d’un singe fortement infecté de kala-azar indien; le produit du broyage a été dilué dans un peu d’eau physiologique. Le chien reçoit en outre, les 22 et 30 décembre 1913, deux injections intraveineuses de très belles cultures de la L. Donovani; chaque injection est de 2 cent. cubes. Le chien pèse, le 30 décembre, 7 kilogr. 250; le 27 février 1914, 8 kilogrammes; le 16 mars, 8 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR 8 kilogr. 100; le 14 avril, 8 kilogr. 200; le 19 juin, 9 kilogr. 200; le 2 aout, 8 kilogr. 300. Le chien est sacrifié en bon état le 2 août 4944. La rate pèse 17 grammes, sa consistance est normale. Les autres viscères abdominaux ou thoraciques ne présentent pas d’altérations macroscopiques. La moelle des os est rouge, diffluente. Lezshmania non rares dans les frottis de la rate, très rares dans les frottis du foie; l'examen d'un frottis de moelle osseuse est négatif. SINGES. — Le Macacus sinicus s’infecte facilement quand on lui inocule le virus du kala-azar indien: le M. sinicus de la La figure reproduit la photographie du M. sinieus inoculé par Row avec une culture de la L. Donovani. On distingue un bouton formant une forte saillie de chaque côté du front. Je dois la photographie reproduite ici à l'obligeance du Dr Row. petite variété des environs de Madras est, d'après Row, plus sen- sible que le M. sinicus de la grande variété de Bombay; on peut obtenir aussi des résultats satisfaisants avec le M. cynomolgus. D'après les recherches de R. Row, les inoculations de la L. Donovan au M. sinicus donnent lieu tantôt à des infections localisées, tantôt à des infections généralisées (1). Deux M. sinicus ont été inoculés au front par Row, l’un dans (1) R. Row, Brit. med. Assoc., Liverpool, juillet 1912; Jl. tropical med. a hyg., 1er novembre 1912 et 1er janvier 1913; Indian Jl. of med. Research, avril 1914. LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 9 la peau scarifiée avec, pour virus, la pulpe de rate d'un homme mort du kala-azar, l'autre par injection sous-cutanée d'une cul- ture de 5° passage du même virus humain. Chez le premier macaque on a vu apparaître, après une incu- bation de 3 mois 1/2 à 5 mois, 3 nodules cutanés qui se sont développés aux points d’inoculation et on a trouvé des Leish- mania, en pelit nombre, dans ces nodules qui avaient la struc- ture de jeunes fibromes. L’infection locale n'a pas été suivie chez le singe d’une infection générale. Chez le second macaque (inoculé avec la culture) on vit se développer au bout de 5 mois un nodule de chaque côté du front (fig.ci-contre),aux points d’inoculation, avec des Leishinania nonrares. Le singe a guéri et n'a pas présenté d'infection générale. Un troisième macaque, inoculé avec le virus d’un des nodules du premier singe, a eu également une infection localisée (nodule cutané). Un dés nodules du deuxième singe a été excisé une quinzaine de jours après son apparition et une de ses moitiés, broyée dans 1 cent. cube d'eau salée à 6 p. 100, a servi à inoculer, dans le péritoine, 2 souris et un M. sinicus. Ces 3 animaux ont eu des infections générales, sans lésion locale, avec nombreuses Leish- mania dans les organes ; chez le singe, on a trouvé des Leishrmna- nia dans le foie 5 mois après l'inoculation; chez les souris, au bout de 6 semaines. Les meilleurs résultats (lésions localisées et généralisées) ont élé obtenus par Row chez le M. sinicus (petite variété de Madras) avec des cultures vieilles contenant principalement des éléments arrondis en cocci. L’injection intrapéritonéale des cultures, si elle est suivie de succès, produit toujours l'infec- tion généralisée, l'injection sous-cutanée produit tantôt une lésion localisée (nodule), tantôt une infection généralisée. Les cultures deviennent de moins en moins actives à mesure que le nombre des repiquages augmente, mais on peut main- tenir leur virulence en les renouvelant sur les animaux infectés. Ces expériences de Row ont un double intérêt; elles montrent: 1° qu’on peut provoquer chez le M. sinicus des infections géné- ralisées avec la L. Donovani, comme avec la L. infantun; 2° qu'avec la L. Donovani on peut obtenir, chez le même animal, des lésions cutanées (non suivies d'infection générale) qui ont 10 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR une grande ressemblance avec les lésions expérimentales de la L. tropica; nous aurons l’occasion de revenir sur ce point dans une autre partie de ce travail. Sur 11 Macacus sinicus inoculés par Patton avec la pulpe plénique de malades morts de kala-azar depuis quelques heures, se sont infectés ; 3 ont présenté une forte infection (1). Les singes qui avaient reçu de très fortes doses de pulpe splé- nique se sont seuls infectés; ils ont eu des infections généra- lisées. Korke a répété avec succès, aux Indes, les expériences de Row sur les singes (2). Le 11 janvier 1913, à Bombay, dans le labo- ratoire de Row, 2 M. sinicus ont été inoculés, l’un dans le péri- toine, l’autre sous la peau, avec le produit de la ponction du foie d'un singe infecté de kala-azar. Korke a emporté ces deux singes a Madras, en même temps qu'un macaque qui, inoculé par Row dans la peau, présentait un nodule cutané riche en Leishmania. Le M. sinicus inoculé, à Bombay, dans le péritoine, ne mon- trant pas de signes d'infection, est réinoculé le 2 septembre 1943, sous la peau, des deux côtés du front, avec la moelle osseuse d’un sujet mort de kala-azar. Treize jours après l'inoculation, des nodules apparaissent aux points dinoculation et, dans ces nodules, on trouve des Leishmania. Le singe inoculé le 11 janvier 1913, à Bombay, sous la peau, ne présentant pas de signes d'infection, est réinoculé sous la peau, à Madras, avec le sang d'un sujet ayant des Leishmania non rares dans le sang; pas de nodules aux points d’inocula- tion, mais, à lautopsie, Leishmania dans la rate et la moelle osseuse; done infection généralisée après inoculations sous- cutanées. Le troisième singe provenant de Bombay et porteur d’un nodule a montré, à l'autopsie, des Leishmania dans le nodule, dans la rate et dans la moelle osseuse ; il ya donc eu, dans ce cas, infection locale et infection générale, probablement consé- Ss | (1) W.-S. Parron, Proceed. of third meeting of the gen. malaria Committee held at Madras, novembre 1912, Simla, 1913. Je tiens compte des expériences additionnelles. (2) Visaxu T. Korke, Third AU India sanitary Conference, Lucknow, janvier 191% et Indian Jl. of med. Research, avril 1914. LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 44 cutive, car les Leishmania étaient rares dans la rate et dans la moelle osseuse. Korke cite encore les faits suivants : un M. sinicus inoculé le 26 mai 1913, des deux côtés du front, avec la moelle osseuse d’un sujet mort du kala-azar, à Madras, a, au mois d’août, des nodules aux points d’inoculation et, dans ces nodules, on trouve des Leishmania. Chez 2 M. sinicus, les résultats de inoculation sous-culanée au moyen de sang ou de pulpe de rate de sujets atteints de kala-azar ont été négatifs. Sur 5 M. rhesus, inoculés dans le péritoine, Mackie note deux succès ; un essai d'infection par ingestion qui a porté sur 2 singes a échoué (1). J'ai dit plus haut, à propos des infections expérimentales du chien, comment j'avais réussi à instituer des recherches sur la virulence de la L. Donovani pour différentes espèces ani- males. Mes expériences sur les singes ont porté sur 7 M. sinicus et sur 9 M. cynomolgus. 3 M. sinicus inoculés dans le foie avec le produit du broyage des viscères d'animaux infectés de kala-azar se sont infectés, et chez 2 d’entre eux l'infection a été forte. 4 M. sinicus inoculés dans le foie avec des cultures de la L. Donovani se sont infectés, et 2 d’entre eux ont eu des infec- tions fortes. 7 M. sinicus inoculés se sont donc tous infectés et, chez 4 d'entre eux, l'infection a été forte. De 3 M. cynomolqus inoculés dans le foie, avec le produit du broyage des viscères d'animaux infectés de kala-azar, 2 se sont infectés, et l’un d’eux a eu une infection forte. De 6 M. cynomolqus inoculés dans le foie avec des cultures de la L. Donovani, 3 se sont infectés, et chez l'un d'eux l’infec- tion a été forte. De 9 M. cynomolgus inoculés, 5 se sont done infectés, ce qui donne une proportion de succès moins forte que pour les M. sinicus, mais encore belle. Les singes inoculés avec le produit du broyage de la rate et du foie de singes infectés ont reçu, dans le foie, 4 cent. cubes (1) E.-P. Mack, Indian Jl. of med. Research, avril 1914, p. 653. 12 ANNALES DE LINSTITUT PASTEUR de la pulpe des viscères délayée dans un peu d'eau physio- logique. Les singes inoculés avec les cultures ont reçu 4 à 8 cent. cubes de cultures, en deux ou trois injections, dans le foie. J'ai injecté presque toujours des cultures jeunes, de quinze jours environ; J'ai essayé une fois comparativement, chez 2 M. cynomolqus, les cultures jeunes et les cultures vieilles. Un des singes, qui fait l’objet de l'observation 8, résumée plus loin, a reçu trois injections dans le foie de cultures de 15 jours, il a présenté une infection légère; l’autre singe a reçu, dans les mêmes conditions que le premier, et aux mêmes doses, trois injections de cultures de 30 jours, il ne s’est pas infecté. L'infection donne lieu en général, chez les singes, à des symptômes plus apparents que chez les chiens. L’amaigrisse- ment est le signe le plus constant avec l'hypertrophie de la rate qui peut être constatée facilement, sur le singe vivant, quand elle est bien marquée. A la dernière période, les singes s’ané- mient, ils n'ont plus la vivacité habituelle de leurs mouve- ments et restent blottis dans un coin de leur cage; ils perdent l'appétit et sont souvent pris de diarrhée. Sur les 12 singes qui se sont infectés, 3 seulement sont morts de leishmaniose, 91 jours, 152 jours et 169 jours après linoculation ; les autres singes sont morts de complications ou bien ils ont été sacrifiés à différentes périodes de l'infection. La lésion la plus commune, constatée à l’autopsie chez les singes infectés, est l'hypertrophie de la rate. Chez 9 singes, d'un poids moyen de 1 kilogr. 250, infectés par la L. Donovani, le poids moyen de la rate a élé de 7 gr. 23, notablement supé- rieur au poids normal qui, chez les singes de 1 kilogramme à 1 kilogr. 250 ne dépasse pas 2 à 3 grammes. Chez un singe de 1 kilogr. 500, la rate, fortement hypertrophiée, pesait 14 grammes (Obs. 3); chez un singe de 1 kilogr. 350, le poids de la rate était de 11 grammes (Obs. #) ~ un À :) et chez um singe de 950 grammes, de 10 gr. 50 (Obs. 10); dans d'autres cas, le poids de la rate s'éloignait peu du poids normal. Sur 11 singes chez lesquels j'ai recherché les Leishmania dans la rate, le foie et la moelle osseuse, j'ai noté : parasites très nombreux ou nombreux dans la rate, le foie et la moelle osseuse, 4 fois; parasites assez nombreux dans la rate et la LES LEISHMANIOSES CHES LES ANIMAUX 13 moelle osseuse, rares dans le foie 1 fois; parasites assez nom- breux dans la rate, rares dans le foie et la moelle osseuse, 1 fois; parasites rares dans la rate et la moelle osseuse, examen du foie négatif, 2 fois; parasites rares dans la rate, examens du foie et de la moelle osseuse négatifs 2 fois; enfin, dans un cas, les examens de la rate, du foie et de la moelle osseuse ont été négatifs, mais l'ensemencement de la moelle osseuse dans le milieu de Novy simplifié a donné des cultures de flagellés caractéristiques (Obs. 9). Il ressort de cette étude que c'est dans la rate et ensuite dans la moelle osseuse que les Leishmania ont été trouvées le plus souvent et en plus grand nombre; le foie ne vient qu'en troisième ligne. Ce qui a été dit précédemment au sujet du diagnostic des infections produites par la L. infantum chez le singe s'applique exactement au diagnostic des infections dues à la L. Donovani. Lorsqu'un singe qui a été inoculé avec le virus du kala-azar indien maigrit, et que sa rate présente une hypertrophie mani- feste, on peut en conclure avec toutes probabilités qu'il s’est infecté. Mais ces signes ne sont pas constants et, alors même qu'ils existent, il faut, pour confirmer le diagnostic, procéder à la recherche des Leishmania. La ponction du foie ne donne de bons résultats que lorsqu'il s'agit d'infections très fortes, avec de nombreux parasites dans le foie. L'examen direct du sang permet quelquefois de constater l'existence des Lezshmania. L’ensemencement du sang constitue un bon procédé de dia- gnostic. J'ai procédé 2 fois à cet ensemencement avec le sang du cœur, chez des singes qui venaient d'être sacrifiés, et en ense- mencant chaque fois 2 tubes avec 10 gouttes de sang j'ai obtenu dans les deux cas de belles cultures de flagellés (Obs. 4 et 10); cependant, dans un de ces cas, il s'agissait d’une infection légère avec parasites rares, dans la rate seulement. Sur le cadavre, lorsque l'examen des frottis de la rate, du foie et de la moelle osseuse est négatif, ou ne révèle que l'existence de Leishmania très rares, parfois assez mal caractérisées, il est indiqué de faire des ensemencements de moelle osseuse sur le milieu de Novy simplifié, comme cela a été fait chez les singes qui font l’objet des observations 1, 8 et 9. Des singes sacrifiés en bon état, plusieurs mois après l’ino- 14 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR culation, ont été notés comme ayant des infections légères qui paraissaient en voie de guérison. Il ne paraît donc pas douteux que les infections du singe par la L. Donovani peuvent, comme les infections dues à la L. infantum, se terminer par gué- rison. 3 Je résume les observations de 7 M. sinicus et de 3 M. cyno- molgus inoculés avec succès, dans mon laboratoire, avec le virus du kala-azar indien. 4° Un Macacus sinicus, du poids de 1 kilogr. 850, reçoit le 10 juin 1913, dans le foie, 4 cent. cubes dune culture très riche de L. Donovani. — 30 juin, le singe a maigri, il ne pèse plus que 1 kilogr. 650. — 21 juillet, le singe a repris son poids primitif de 1 kilogr. 850. — 29 juillet, la rate est un peu augmentée de volume. Le singe reçoit encore, dans le foie, 2 cent. cubes d'une culture riche de L. Donovani. — 18 août, le singe a beaucoup maigri, il ne pèse plus que 1 kilogr. 480. — 30 août, lamaigrissement continue, le singe est moins vif, il mange moins qu'à l'ordinaire, diarrhée. Le singe est trouvé mort le 9 septembre, il ne pèse plus que 1 kilogr. 200. La rate pèse 2 kilogr. 30. Foie pâle. Petites ulcérations sur la muqueuse du côlon. Poumons pales. Anémie et maigreur extrêmes. Dans les frottis colorés de la moelle osseuse et de la rate, Leishmania très rares. On ne trouve pas de Leishmania dans les frottis du foie. La moelle osseuse ensemencée, le 9 septembre, sur le milieu de Novy simplifié, donne, le 23 septembre, une belle culture de flagellés, bien carac- térisés, qui est repiquée avec succès en série. 20 Un M. sinicus, du poids de 1 kilogr. 850, reçoit le 10 juin 1913, dans le foie, 4 cent. cubes d’une culture très riche de L. Donovani. — 30 juin, le singe a maigri, il pèse 1 kilogr. 710. — 28 juillet, l'amaigrissement s’accentue, le singe ne pèse plus que 1 kilogr. 550. — 18 août, poids : 1 kilogr. 500; injec- tion, dans Je foie, de 2 cent. cubes d’une culture très riche de L. Donovani. — 30 septembre, poids: 4 kilogr. 500; injection, dans le foie, de 2 cent. cubes dune culture très riche de L. Donovani. — 5 novembre, le singe a encore un peu maigri, il ne pèse plus que 1 kilogr. 400; il est moins vif qu'à l'ordinaire; on le trouve presque toujours blotti dans un coin de sa cage; il mange peu. La rate est légerement augmentée de volume. Le singe est trouvé mort le 9 novembre. Il pèse 1 kilogr. 400. La rate pèse 7 grammes, elle est dure. Foie d’aspect normal. Reins pales. Rien a noter du côté du cœur ni des poumons. Dans les frottis de la rate, du foie et de la moelle osseuse, on trouve des Leishmania en grand nombre. Beaucoup de cellules du foie et de la moelle osseuse sont bourrées d'éléments parasitaires caractéristiques. Dans le foie, les Leishmania siègent principalement dans les cellules endothéliales des capillaires sanguins. 3° Un M. sinicus, du poids de 1 kilogr. 300, est inoculé à trois reprises, dans le foie, avec des cultures très riches de la L. Donovani de Bombay. Les inocu- lations sont faites les 26 juin, 12 juillet et 6 septembre 1913, chaque fois avec 2 cent. cubes du liquide de culture. Le singe ne maigrit pas, il pèse le LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 15 30 septembre 1 kilogr. 500; même poids le 14 novembre. Au mois de novembre, on note une anémie très marquée (décoloration des muqueuses). Le singe est trouvé mort le 12 décembre 1913; il pèse 1 kilogr. 500. Le foie et la rate sont hypertrophiés; la rate pèse 14 grammes, sa consistance est irès ferme. Reins, poumons très pales (anémie). Moelle osseuse diffluente. Les Leishmania nombreuses dans les frottis de rate et de moelle osseuse sont assez nombreuses dans les frottis de foie. 40 Un M. sinicus pesant 1 kilogr. 100 reçoit à trois reprises les 5, 17 et 29 janvier 1914, dans le foie, des injections de très belles cultures de la L. Donovani; on injecte chaque fois 2 cent. cubes environ de culture jeune (15 jours environ). Le singe pèse, le 6 février, 1 kilogr. 150; le 3 mars, 1 kilogr. 235; le 3 avril, 1 kilogr. 250; le 25 mai, 1 kilogr. 260; le 10 juin, 1 kilogr. 300. A partir du mois d'avril, on note une légère augmentation de volume de la rate. Le singe est sacrifié, en bon état, le 19 juin 1914, Le singe pèse 1 kilogr. 350. La rate qui est augmentée de volume pèse 11 grammes; sa consistance est plus grande qu'à l’état normal. Rien d'autre à noter à l'examen macroscopique. L'examen histologique des frottis de rate révèle l'existence de Leishmaniu rares. L'examen des frottis du foie et de la moelle osseuse est négatif. Deux tubes du milieu de culture de Novy simplifié sont ensemencés le 19 juin, chacun avec 10 gouttes du sang du cœur; le 7 aout, on constate l'existence de flagellés caractéristiques dans les deux tubes; le sang du singe contenait donc des Leishmania bien que l'infection fut légère (peu avancée ou plutôt en voie de régression). 5° Un M. sinicus du poids de 1 kilogr. 150 est inoculé le 12 janvier 1914, dans le foie, avec une forte dose du produit du broyage de la rate et du foie du M. cynomolgus qui fait l'objet de l'observation 11. Le singe est trouvé mort le 3 février 1914; il a maigri, son poids n'est plus que de 920 grammes. La rate pèse 2 gr. 80. Le foie, les reins, le tube digestif ne présentent rien @anormal. Foyers de pneumonie à droite. Péricarde, cœur à l'état normal. Leishmania typiques, non rares, dans les frottis de rate et de moelle osseuse, rares dans les frottis de foie. Un tube du milieu de Novy simplifié, ensemencé le 3 février, avec la moelle osseuse, donne le 18 février une belle culture de flagellés. 6° Un M. sinicus, pesant 1 kilogr. 560, reçoit le 4 mars 1914, dans le foie. 4 cent. cubes du produit du broyage de la rate et du foie d'un singe forte- ment infecté de kala-azar indien: le produit du broyage est dilué dans un peu d’eau physiologique. — Le singe pèse, le 24 mars, 1 kilogr. 650; le 3 avril, 1 kilogr. 400; le 25 mai, 1 kilogr. 500. — Le 26 mai 1914, le macaque meurt à la suite d'un brusque refroidissement de la singerie. La rate, légèrement hypertrophiée, pèse 8 grammes; sa consistance est augmentée. Les autres viscères ne présentent aucune altération macrosco- pique. On trouve des Leishmania, non rares, dans les frottis de la rate; très rares dans les frottis du foie et de la moelle osseuse. Un tube du milieu de Novy simplifié, ensemencé avec la moelle osseuse, donne à la date du 9 juin une très belle culture de formes flagellées de ja Leishmania. 7° Un M. sinicus pesant 1 kilogr. 330 recoit le 4 mars 1914, dans le foie, 4 cent. cubes de la bouillie fournie par le broyage de la rate et d’une portion 16 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR du foie d'un singe fortement infecté de kala-azar; le produit du broyage est mélangé à un peu d'eau physiologique. — Le singe pèse, le 24 mars, | kilogr. 300; le 25 mai, 1 kilogr. 250. Le 9 avril, on note une légère hyper- trophie de la rate. — 26 mai, à la suite d’un brusque refroidissement de la singerie, le macaque est trouvé mourant, il meurt le 27 mai. La rate pèse 8 grammes; sa consistance est augmentée. Les autres viscéres ne présentent pas d'altérations macroscopiques. Leishmania rares dans les frottis de la rate el de la moelle des os. L'examen des frottis du foie est négatif. So Un M. cynomolgus pesant 1 kilogr. 725 recoit à trois reprises, les 28 février, 14 et 20 mars 1914, dans le foie, des injections de très belles cul- tures de la Z. Donovani; on injecte chaque fois 2 cent. cubes environ de culture jeune. — Le singe pèse, le 24 mars, 1 kilogr. 700; le 14 avril, | kilogr. 760; le 25 mai, 1 kilogr. 770; le 20 juin, 1 kilogr. 800. Le singe est sacrifié en bon état le 4 juillet 1914. Le singe pèse 1 kilogr. 980. Les viscères ne présentent rien d’anormal à l'examen macroscopique; la rate n'est pas hypertrophiée. Dans les frottis de rate, on trouve des Leishmania très rares; l'examen histologique des froltis de foie et de moelle osseuse est négatif, mais deux lubes du milieu de Novy simplifié, ensemencés avec la moelle osseuse du singe, le 4 juillet, donnent de belles cultures de Leishmania à la date du 23 juillet. 90 Un M. cynomolgus, pesant 1 kilogr. 550, reçoit à deux reprises, dans le foie, les 29 mai et 4 juin 1914, des injections de très belles cultures de la L. Donovani; on injecte chaque fois 2 cent. cubes de culture de trois semaines. — 10 juin, le singe a maigri, il ne pèse plus que 1 kilogr. 350. — 13 juillet, le singe, toujours maladif, pèse 1 kilogr. 300. Mort le 27 juillet avec de la diarrhée. Le singe pèse 1 kilogr. 260. La rate, petite, ne pèse que 1 gr. 50. Matières liquides dans toule la hauteur du tube digestif. Le foie, les reins et les viscères thoraciques ne présentent aucune altération apparente. L'examen histologique des frottis de rate, de foie et de moelle osseuse ne révèle l'existence d'aucune Leishmania, mais deux tubes du milieu de Novy simplifié ensemencés le 27 juillet avec la moelle osseuse donnent, à la date du 11 août, de belles cultures de Leishmania. 109 Un M. cynomolqus male, du poids de 1 kilogramme, reçoit à trois reprises, les 18 octobre, 12 novembre el 9 décembre 1913, dans le foie, de la 2 c. c. 50 de cultures très belles de L. Donovani. — 10 décembre, le singe pèse 1 kilogr. 120, il ne paraît pas malade. — 13 janvier 1914, le poids est de 1 kilogr. 280. — 2 février, le singe a maigri, il ne pèse plus que 1 kilogr. 020. — 26 février, l'amaigrissement fait des progrès; le singe ne pèse plus que 950 grammes. Anémie marquée, muqueuses décolorées. Le singe est sacrifié le 4 mars 1914. La rate, qui est hypertrophiée, pèse 10 gr. 50; sa consistance est augmentée. Foie gros. Reins normaux. Cœur normal. Poumons très pales. Anémie très marquée. Moelle osseuse rougeatre, semi-liquide. Dans les frottis colorés de la rate, du foie et de la moelle osseuse, on trouve de nombreuses Leishmania. Deux tubes du milieu de Novy simplifié, ensemencés avec le sang du cœur (10 gouttes de sang dans chaque tube), donnent, au bout de quinze jours, de belles cultures de flagellés caractéristiques. LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 17 Etant donné, d'une part, que l'identité de L. Donovani et de L. infantum n'est pas encore complètement démontrée, et d'autre part, qu'une première atteinte de kala-azar méditerra- néen donne au singe, comme au chien, une immunité solide contre cette maladie (1), il était indiqué de rechercher si un singe guéri d'une infection due au kala-azar méditerranéen pourrait être infecté à l'aide du kala-azar indien; j'ai pu réaliser çette expérience, comme le prouvent les observations qui suivent. 119 Un M. cynomolgus, du poids de 1 kilogr. 200, est inoculé, le 8 novembre 1913, avec le produit du broyage du foie et de la rate dun M. sinicus forte- ment infecté à la suite dinoculations de cultures de la L. Donovani provenant de Bombay. Le singe maigrit à la suite de cette inoculation, il ne pèse plus le 10 décembre que 1 kilogramme. Le singe est trouvé mort le 12 janvier 1914, il pèse 1 kilogramme. La rate et le foie sont légèrement augmentés de volume. Moelle osseuse rouge, fluide. Rien d'autre à noter. Dans les frottis de moelle osseuse, de rate et de foie, on trouve des Leishmania typiques, en grand nombre. 120 Un M. cynomolgus, femelle, du poids de 2 kilogr. 500, est inoculé le 24 avri 4909, avec le virus du kala-azar tunisien. Le 30 octobre 1909, l'animal est splénectomisé ; la rate pèse 19 grammes, elle contient des Leishmania rares, décelées par la culture. Le 23 août, la guenon qui est en très bon état est réinoculée, sans résultat, avec une très forte dose du virus tunisien. Le 8 août 1911, la guenon met bas un petit qui s'élève bien. Le 8 novembre 1913, la guenon est inoculée, dans le foie, avec le virus du kala-azar indien, dans les mêmes conditions que le M. cynomolqus qui fait l'objet de l'observation précédente. La guenon pèse 2 kilogr. 300; elle ne présente rien d’anormal à la suite de Vinoculation. La guenon est sacrifiée en lrès bon état le 7 février 1914; elle pèse 2 kilogr. 280. La rate a été enlevée complètement. Il n'y a pas d'hypertrophie compensatrice des ganglions lymphatiques. On ne trouve de Leishmania ni dans les frottis de la moelle osseuse, ni dans ceux du foie. La moelle osseuse est ensemencée largement dans deux tubes du milieu de Novy simplifié, les deux tubes restent stériles. ; Un M. cynomolgus ayant Vimmunité pour le kala-azar médi- terranéen s'est donc montré réfractaire au kala-azar indien, alors qu'un M. cynomolgus, inoculé dans les mêmes condi- tions que le premier et servant de témoin, contractait une infection rapidement mortelle (2); cette expérience fournit, ce 4) GC. Nicoze et C. Comte, Arch. de l'Institut Pasteur de Tunis, 1910, 3° fase., p. 103 (2) A. Laveran, Acad. des Sciences, 14 avril 1914, Comptes rendus, t. CLVITI, p. 1060. bo 18 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR me semble, un puissant argument en faveur de l'identité des deux virus. Preropus Enwarpsr. — Cette chauve-souris, qui est commune dans Inde, est désignée par les auteurs anglais sous le nom de flying fox; d'après Mackie, elle est assez sensible au kala- azar; sur 4 Pleropus inoculés par Mackie avec le virus du kala- azar indien, par voie intrapéritonéale, 2 se sont infectés et Pun d'eux a eu une infection généralisée (Mackie, op. cit.). Souris. — On a vu plus haut que Row a réussi à infecter 2 souris blanches en leur inoculant, dans le péritoine, le virus fourni par le broyage dans l’eau physiologique d'une partie d’un nodule cutané d’un M. sinicus; le nodule du singe était survenu à la suite de Vinoculation d’une culture du virus humain du kala-azar indien. L'une des souris mourut 46 jours après l’inoculation, l’autre fut sacrifiée 49 jours après l’inocu- lation ; chez les deux souris des Leishmania existaient, en grand nombre, dans la rate, dans le foie et dans la moelle osseuse. Une troisième souris, inoculée dans le péritoine avec une très petite quantité du suc fourni par le nodule cutané du même macaque, et sacrifiée au bout de 3 mots environ, était atteinte aussi d’une infection généralisée (1). Row, ayant obtenu facilement des infections généralisées chez la souris blanche avec le virus fourni par un macaque, se flattail, avec raison, d'obtenir plus facilement encore des infections des souris à l’aide du virus fourni par les souris infectées ; il n'en a rien été et il est arrivé (comme moi pour, la L. infantum) à cette conclusion que la L. Donovani perdait une partie de sa virulence en passant par la souris. On verra dans une autre partie de ce travail que la virulence de la L. tropica, agent du bouton d'Orient, semble au contraire augmenter chez la souris. Row a réussi également à infecter des souris blanches avec des cultures de la L. Donovani; les résultats de ses expériences se résument ainsi : les inoculations sous-cutanées de cultures ne produisent pas de lésions locales; après une longue période (1) R. Row, Jl. of trop. med, a. hyg., novembre 1912 et 1er janvier 1913. LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 19 d'incubation, on observe souvent des lésions généralisées ; une souris sacrifiée 14 mois après linoculation avait une forte infection (rate, foie, moelle osseuse); les inoculations intrapéri- tonéales produisent plus rapidement l'infection généralisée. La période d’incubation (ou plutôt de latence) est de 5 mois 1/2 environ (1). D'après Row, la souris grise (sauvage) serait réfractaire au kala-azar indien. Sur 11 souris blanches inoculées par Mackie (op. cit.) dans le péritoine, 3 se sont infectées. Sur 15 souris blanches inoculées par moi, 5 se sont infectées: elles avaient reçu toutes les 5, dans le péritoine, du virus prove- nant du broyage de la rate et du foie de singes infectés avec la L. Donovani; l'infection a été d'intensité moyenne dans 1 cas (Obs. 1), légère dans les autres cas. .3 souris inoculées dans le péritoine avec des cultures de la L. [Donovani, de 15 jours environ, ne se sont pas infectées: 2 souris inoculées dans le péritoine avec des cultures vieilles de 4 mois ne renfermant plus que des formes arrondies, avec des flagellés très rares, ne se sont pas infectées non plus, comme on pouvait s y attendre; je ne les fais pas entrer en ligne de compte. ? Chez des souris sacrifiées 8 à 12 mois après l’inoculation, et chez lesquelles l'examen histologique des viscéres et de la moelle osseuse ne révélait pas l'existence de Leishmania, la rate a été trouvée notablement hypertrophiée, ce qui parait indiquer qu'il y avait eu infection et que les souris avaient été sacrifiées tardivement. Je résume les observations des 5 souris blanches qui, inoculées avec le produit du broyage de Ja rate et du foie d'un singe atteint de kala-azar indien, se sont infectées. lo Une souris adulte est inoculée à 2 reprises, dans le péritoine, aux mois de juin et juillet 1913 avec de très belles cultures de la L. Donovani. Le 8 novembre 1913, la souris qui est en très bon état est inoculée, dans le péritoine, avec le produit du broyage du foie et de la rate d'un singe infecté de kala-azar indien. — 29 décembre 1913, la souris est malade, il y a de la parésie du train postérieur. La souris est sacrifiée le 29 décembre ; elle pèse 23 grammes; la rate, (4) R. Row, Indian Jl. of med. Research, avril 1914. 20 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR fortement hypertrophiée, pèse 25 cenligrammes. On trouve des Leishmania non rares dans les frottis de la rate, rares dans les frottis du foie et de la moelle osseuse. 20 Une jeune souris est inoculée le 8 novembre 1913, dans le péritoine avec le produit du broyage de la rate et du foie d'un singe infecté de kala-azar indien. — 30 décembre, la souris pèse 18 grammes; la rate parait grosse. La souris est sacrifiée le 10 janvier 1914; elle pèse 17 grammes; la rate notablement hypertrophiée pèse 22 centigrammes. On trouve des Leish- mania, très rares, dans les frottis de la rate; examen des frottis du foie et de la moelle osseuse est négatif. 3° Une souris adulte est inoculée le 9 novembre 1913, dans le péritoine, avec le produit du broyage de la rate et du foie d'un singe infecté de kala- azar indien. — 30 décembre, la souris pèse 25 grammes; la rate paraît augmentée de volume. — 27 mars 1914, la souris a maigri, elle ne pèse plus que 19 grammes. La souris est sacrifiée le 29 mars 1914; elle pèse 19 grammes; la rate, nola- blement hypertrophiée, pèse 21 centigrammes. Les ganglions inguinaux onl augmenté de volume. On trouve des Leishmania très rares dans les frottis de la rate; l'examen des frottis du foie et de la moelle osseuse est négatif. 40 Une souris adulte est inoculée le 12 janvier 1914, dans le péritoine, avec le produit du broyage de la rate et du foie dun singe infecté de kala-azar indien. La souris qui est en bon état est sacrifiée le 31 août 1914; elle pèse 20 grammes; la rate est grosse, elle pèse 22 centigrammes. On trouve des Leishmania tres rares dans les frottis de la rate et de la moelle osseuse. L'examen d'un frottis du foie est négatif. 5° Une souris adulte est inoculée le 5 mars 1914, dans le foie, avec le produit du broyage de la rate et du foie d'un singe infecté de kala-azar indien. Le 27 mars, la souris pèse 27 grammes; le 10 avril, elle ne pèse plus que 20 grammes, elle est visiblement malade, le poil est piqué, la souris se met en boule; elle meurt le 20 avril. On constate à lautopsie une anémie profonde. Foie et poumons très pales. La rate pèse 20 centigrammes. Leishmania tres rares dans les frottis de rate. Examen négatif des frottis?de foie el de moelle osseuse. Rars. — Patton a réussi à infecter un rat blanc (sur 17 ino- culés) en lui injectant, dans le péritoine, 3 cent. cubes d’une émulsion faite avec la rate d’un sujet mort de kala-azar indien ; l'infection du rat était généralisée (Leishmania dans la rate et dans le foie) (1). De 7 rats blanes inoculés dans le péritoine par Mackie (op. cit.) aucun ne s'est infecté. Le rat paraît donc être très peu sensible au virus du kala- azar indien. (1) W:-S. Patron, Scientif. Mem. by Offic. of the med. a. sanit. Dep. of the Gov. of India, 1912, N. 5, n° 53, p. 33, nole; Indian Jl. of med. Research, juillet 1913, te tL enot: LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 24 Cosaye. Lapin. Cuat, etc. — D'après Row, le cobaye et le lapin sont réfractaires à la L. Donovant. Mackie a inoculé sans succès un chat, dans le péritoine, avec le virus du kala-azar indien. J'ai injecté, à différentes reprises, des cultures de la L. Dono- vani dans le péritoine de 3 Meriones Shawi et de 3 Ger- billus hirtipes provenant de Tunisie; aucun de ces animaux ne sest infecté. En résumé, on produit avec la L. Donovani, comme avec la L. infantum, des infections généralisées chez le chien, chez certains singes et chez la souris blanche, plus difficilement chez le rat. Les mêmes procédés d'inoculation sont applicables aux deux virus et les infections provoquées présentent de très grandes ressemblances au point de vue des symptômes, de l'évolution et des lésions. On ne peut donc plus, pour con- tester l'identité des 2 virus, objecter que les animaux sensibles à la L. infantum sont réfractaires à la L. Donovani. Il y a lieu toutefois de noter les différences suivantes : le chien se montre moins sensible au kala-azar indien qu'au kala-azar méditer- ranéen et la leishmaniose canine naturelle, observée dans tous les pays où le kala-azar méditerranéen est endémique, n'a pas encore été signalée dans les régions de l'Inde les plus éprouvées par la leishmaniose humaine; d'autre part, Row et Korke ont provoqué, chez des macaques, des lésions locales en inoculant, dans le derme ou sous la peau, du virus du kala-azar indien, tandis que les essais d’inoculation de la L. infantum faits dans ces conditions ont échoué Jusqu'ici. Un M. cynomolgus qui avait acquis l’immunité pour le kala- azar méditerranéen a été inoculé sans succès avec le virus du kala-azar indien, alors qu'un macaque témoin contractait une infection rapidement mortelle. Je n’entends pas tirer de ce dernier fait, qui est unique, une conclusion ferme, mais il me semble incontestable qu'il fournit un argument de grande valeur en faveur de l'identité de la L. infantum et de la L. Donovant. (A suivre.) ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU par CHARLES RICHET. Ce mémoire a pour but d'établir un fait qui avait été soup- conné et même établi depuis longtemps, mais qui n'avait pas recu, semble-t-il, de solution précise, peut-être parce qu'au lieu de s'adresser à des organismes simples, dont la vie est rapide, on avait pris des organismes supérieurs, compliqués, à lente évolu- tion. Dans un être complexe, comme une plante phanérogame, ou un insecte, ou un mammifére, on ne peut suivre bien long- temps le développement de plusieurs générations successives, tandis qu'avec des organismes monocellulaires, qui donnent, en 24 heures, 40 ou 50 générations, quelques jours équivalent à quelques siècles, au point de vue de la transformation par Phérédité. On avait cependant déjà pu démontrer l'adaptation des mi- crobes, en prouvant que, par des cultures successives sur un certain milieu, les microbes s’habituent à ce milieu, mais jamais encore on n'avait pu donner de chiffres précis pour établir les conditions et les degrés de cette accoutumance. Et en effet la propriété pathogène d'un microbe, ou même l'intensité de sa coloration, sont des données difficiles (impos- sibles) à représenter par des chiffres, tandis qu'avec la fermen- tation lactique on arrive à des chiffres exacts: un degré d’acidité qui comporte une précision remarquable très facile à obtenir. On s'appuie d’ailleurs sur d’extrèmement nombreuses moyen- nes, et non sur quelques observations presque isolées. Le point essentiel que je veux essayer de démontrer est le suivant : Un organisme, S'il a vécu dans un milieu À, pousse plus faci- lement sur ce milieu A que le méme organisme, de méme origine, qui a vécu sur un milieu différent de A. Donc Ul s'est accoulumé au milieu A, el il a transmis son accoulumance à toute sa des- cendance. ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU 23 Pour résoudre cette question, je me suis adressé au ferment lactique, que depuis longtemps je considère comme le ess de choix pour les expériences de ce genre. 1. — TECHNIQUE La technique employée pour faire cette mesure de l'acidité est des plus simples : du lait de vache, additionné de son vo- lume d'eau distillée et de quelques gouttes de phtaléine, est neutralisé par addition de quelques gouttes de potasse caus- tique, juste assez pour qu'une coloration à peine rosée appa- raisse, si faible encore qu'on n'est pas sûr que la liqueur soit colorée. I] ne convient pas d'ajouter plus de potasse, non parce que cela modifie quelque chose à la fermentation du lait, mais parce qu'alors la stérilisation à 110° caramélise quelque peu le lait, et rend moins facile la perception des colorations acidi- métriques. Le liquide lacté est alors réparti dans des tubes en U, ala dose exactement mesurée de 10 cent. cubes. Des appareils de mesure précise permettent de faire exactement et rapidement cette répartition. Tous les tubes sont recouverts d’un tampon d'ouate et mis à lautoclave pour stérilisation, à la température de 110° pendant trois minutes. Au cas où l'on veut que ce lait soit additionné d'une substance toxique quelconque, à la dose, par exemple, de À, par litre, au lieu d'eau distiilée, on emploie la solution de ce sel à 2A par litre, ce qui fait que le lait contient A de la substance toxique. Pour avoir à on mélange volumes égaux de la solution de lait contenant A avec le lait dilué normal; en mélangeant la solu- tion lactée des avec du lait normal, on 12 , et ainsi de suite. Ce qui permet d’avoir des liqueurs parfaitement comparables ne différant entre elles que par les quantités A, — de la subs- tance toxique que l’on veut étudier. Ces tubes étant ainsi préparés, on ensemence par les procédés habituels les tubes contenant le lait normal N avec le ferment lactique, et, le méme jour, on ensemence aussi un des tubes 24 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR contenant A. Donc on a un ferment ayant poussé sur du lait normal (N) et un ferment ayant poussé sur du lait toxique (A). On recommence le lendemain la même opération. Seulement, pour semence, on prend, d’une part, le ferment qui a poussé sur N et, d'autre part, le ferment quia poussé sur A. Les jours suivants on fait de méme, de sorte qu’au bout de quelques jours on a deux variétés de ferment, l’une qui, par ensemence- ments successifs a poussé de N, en N, en N, l'autre qui, par en- semencements successifs, a poussé de A, en A, en A. [I s'agit de comparer l'activité de ces deux variétés. La principale précaution à prendre est de rendre la fermen- tation bien homogène, pour éliminer toute influence perlur- batrice : la température par exemple, ou la différence de . forme des tubes. A cet effet, les tubes en U qui servent à la fermentation ne sont pas placés seulement dans l’étuve à l'air libre, mais encore dans un récipient plein d’eau, placé lui-même dans l'étuve. Dans ces conditions, la température des divers tubes est absolument identique. Pour le dosage de l'acidité, il se fait par une solution de 2 potasse à 000 Mais comme, avec la phtaléine, l'indice colori- métrique varie notablement avec la quantité de phtaléine employée, on ajoute à la solution potassique une assez forte quantité de phtaléine, et on s'arrête dans le titrage quand une coloration nettement rosée apparaît. Le plus souvent, on faisait deux Utrations : la première après 16 heures, la seconde après 22 heures de fermentation, ce qui nécessite, bien entendu, deux tubes différents. C’est la somme de ces deux quantités, celle de 16 et celle de 22 heures, qui était comparée à la somme des deux quantités, de 16 et de 22 heures aussi, pour le ferment normal et le ferment ayant poussé sur A. Quant à l’ensemencement, il se faisait d’après les procédés _ classiques, au moyen d'un fil de platine, stérilisé, puis plongé dans la solution où était la semence. Dans certains cas, quand il était nécessaire d'introduire exactement la même quantité de ferment (ce qui est parfois difficile avec le fil de platine), je procédais autrement. J'introduisais quelques gouttes d’un petit- lait ayant fermenté (par un ferment lactique pur) dans un litre d’eau distillée stérilisée. Cette eau, convenablement agitée, ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU 25 élait versée, à la dose de 1 cent. cube, ou de 1/2 cent. cube, dans les flacons où devait s’opérer la fermentation. Telles sont les conditions techuiques pour le dosage de laci- dité et la préparation du lait à fermenter. Quelques précautions spéciales sont & prendre pour le dosage, quand la liqueur est elle-méme acide, comme cela est le cas pour le sulfate de cadmium, par exemple, ou le phosphate acide de potassium, ou l'arséniate de potassium. Pour ces deux sels, on remarque que la liqueur est très alcaline au tournesol, alors qu’à la phtaléine elle réagit comme un acide. Dans ces cas, je neutralisais la liqueur mère,additionnée de phtaléine, par de la polasse jusqu’à ce quappartt une leinte à peine rosée. Il s'ensuit que toute modification de l'acidité de cette liqueur mère neutralisée, mélangée au lait neutralisé, est bien due à la formation de telle ou telle quantité de sel lactique. : Mais je ne procédais pas ainsi dans tous les cas. Et si, pour une raison ou pour une autre, le lait, additionné de la substance saline, réagissait encore & Ja phtaléine comme un acide, on dosait cette acidité avant la fermentation. Et cette quantité d'acide préformé était, dans les calculs, retranchée de la quan- tité d’acide trouvée après fermentation, la différence donnant évidemment la réelle quantité d'acide lactique produit par le ferment. Cela posé, il s'agit maintenant de savoir comment les calculs peuvent ètre faits. : Evidemment, ce qui importe dans ce cas, c'est moins la quan- tité absolue d'acide lactique formée que la comparaison entre l'activité des deux ferments : le ferment N et le ferment A, lorsque tous les deux poussent dans des milieux identiques. af 3 A Soit alors, je suppose, une série de tubes contenant 0.00; 5> A, di et2A de substance toxique. J’ensemence ces divers tubes avec N. Soit une autre série tout à fait comparable de tubes conte- A nant 0.00, 3 A et 2A de la méme substance; je les ensemence pareillement tous avecle ferment A. Ce qu'il faut comparer, dans ce cas, c'est le ferment N ayant poussé sur 0.00 et le ferment A ayant poussé sur 0.00; le ferment N ayant poussé sur A et le ferment A ayant poussé sur A, etc. 26 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Supposons alors, pour prendre un exemple réel, que dans un cas [ensemencement avec le ferment lactique ayant poussé sur du lait normal (N) etce même ferment ayant poussé sur du lait additionné de 0.9 par litre de bromure de potassium (A)| nous ayons, après 24 heures de fermentation, les chiffres suivants : Ensemencement par N. QUANTITÉ DE KOH EN KBr Mrs pour neutralisation. INR SIS PÈRES 0.0 8 » A AS re 10 Be est 0.45 p. 1000 t.8 AU an eae 0.90 p. 1000 5.4 DA... : eB pe 4000 3.5 Ces chiffres, pris en soi, n'ont aucun autre intérêt que de prouver que le ferment pousse d’autant moins bien que la quantité de bromure de potassium dans ie lait est plus grande. Mais ils prennent tout leur intérêt, ces chiffres, lorsque Je les compare à ce que donne Je même ferment qui a poussé depuis quelques jours sur A. Alors nous avons pour le ferment A les chiffres suivants : QUANTITE DE KOH Ex KBr pour neutralisation. ING. ee Wall 6.6 A k ae Sie 0.45 p. 1000 1.5 A. Her LD GUL. 4000 18 2A. 1.8 p. 1000 3.1 Alors, pour les comparer, je supposerai que dans tous les cas la quantité d'acide lactique formée par l’ensemencement du ferment N a été égale à 100. La quantité formée par l’ensemen- cement du ferment A sera dans ce cas: EN KBr RAPPORT D'ACTIVITÉ Nee 0.0 $3 A e in eine 0.45 p. 1000 456 ARE. CT pOs90gpet000 154 OA... . . 4.8 p. 1000 106 Cela veut dire que, si le ferment N a donné dans N une quan- tité égale à 100, le ferment A, ensemencé dans N, n'aura donné que 88 el, par conséquent, aura moins bien oussé. D’autre ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU 27 É A i part, si le ferment N, ensemencé dans 5: a donné 100, le ‘ A Be ; ferment À, ensemencé dans 3’ aura donné 156 ; par conséquent il aura mieux poussé que le ferment N dans le liquide. J'appelle, pour simplifier, rapport d'activité, ce chiffre qui compare la croissance du ferment A à la croissance du ferment N dans le même milieu. C'est ce chiffre que vont déterminer les nombreuses expé- riences qui suivent. On voit tout de suite que, plus le rapport est élevé, plus le ferment A, c'est-à-dire ayant poussé sur un lait toxique, l'emporte en activité sur le ferment N, c’est-à-dire un ferment ayant poussé sur un lait normal. Il. — RÉSULTATS DES EXPERIENCES Jusqu'à présent, on n'avait pu encore donner ce chiffre indiquant numériquement les degrés de l’accoutumance du ferment aux milieux toxiques dans lesquels on le contraint à vivre. De là, semble-t-il, le grand intérèt de donner à cette loi générale, quelques constantes numériques. 1° Séléniate de potassium (1). On commence par établir la dose toxique de séléniate de potas- sium et son influence sur le développement du ferment lactique. SELENIATE DE K en gr. par litre. Exe: I. — : 0.0 100 2.5 101 550 102 FE) 74 Exe. Il. 0.0 100 PE 65 5.0 66 TD 62 Moyenne. . . 0.0 100 225 83 5.0 84 1.5 68 (1) Les quantités indiquées se rapportent toujours à des grammes par litre de liquide. 28 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Le 3° jour on prend comme semence le ferment qui a poussé sur 5 (1) > et par comparaison avec le ferment normal on a les trois séries suivantes : 0.00 2.5 5 BED SERIE 1. — = _— = Troisiéme jour, . 72 18 146 11 Quatrième jour... 89 117 124 142 Cinquièmerour eee 128 78 126 156 Moyenne . . 96 98 132 125 Le 6° jour on ensemence avec le ferment qui a poussé sur 1.5 et ona: 0.00 5 TER 10 SERIE 2. — — = — SIMIEME JOULE. ete ele 94 106 126 56 DÉDHeMENOUTI erence Ti 116 117 214 UII Me OULD CRE 96 ail 151 188 Moyenne 22). - 89 111 138 153 Alors on ensemence avec le ferment qui a poussé sur 10 et ona: 0.00 7.5 10 20 SERIE 3. — — = = Netuvieme your. ee ae 73 82 158 168 DixVe mes OUre es ieetee ae 82 100 180 115 ONZIÈME OUTRE TEE 90 102 128 240 Dourème our... ur 110 150 124 235 Moyennes 89 108 148 189 On ensemence avec le ferment qui a poussé sur 20 et on a; ; 0.00 10 20 43 SÉRIE 4, = = = = Treizième route ee 111 122 152 148 Quatorziéme jour. . . . . 89 118 150 250 Oumzièeme jours 20 : 96 103 131 194 DEIZICMeC mM] OUI ial feel mre 94 144 166 246 Dix-septi¢me jour... 69 104 140 242 Moyenne. 91 148 149 222 On ensemence avec le ferment qui a poussé sur 43 et on a: À : 0.00 20 43 65 SERIE 5. — — — — Dix-huitième jour. . . . . 75 92 105 93 Dix-neuviéme jour . . 70 131 123 131 Vingtième jour. . . 0" 82 122 145 176 Moyenne = ome 78 115 124 133 (1) Pour simplifier, nous dirons dans le cours de ce travail : ferment à 2 ou à 4, ou à 5, selon qu'il a poussé sur des liqueurs contenant 2, 4, ou 5 grammes par litre de la substance toxique spécialement étudiée. ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU 29 De cette expérience on peut déduire diverses conclusions : 1° D'abord, quelle que soit la concentration, en séléniate de potassium, de la liqueur où a végété le ferment, quand il a végété sur du lait normal, il a à peu près toujours la même activité par rapport au ferment normal. Elle a été en effet : 5 96 (as 89 Ferment ayant végété sur. . . . . . 4 10 89 20 91 43, 78 Moyenne générales: 2 =... - - 48 85 Toutefois, il semble que le ferment sélénié soit a la longue devenu un peu moins apte à végéter sur le lait normal ; car, si l’on prend la moyenne des groupes de six en six jours, on a: Groupe ay see) se 93 Groupe 2 sn cance ons 93 Crna Bo bab B80 be 81 Mais ce n'est qu une nuance. 2° Dans toutes les séries il est évident que, plus la quantité de séléniate de potassium est forte, plus, dans ces laits séléniés, le ferment sélénié l'emporte en activité sur le ferment normal. 0.00 2 A 2A Premiérersérie (5) 40sec. « 2. 96 98 132 125 Deuxième série (7.5). . . . . . . 89 4M 138 Troisieme série (10)... 2... 89 108 148 189 Quatrième série (20). . . . . + « sul 118 149 229 Cinquième série (43). ..... . 78 115 424 133 L'inspection de ces rapports, qui vont en croissant à mesure que la liqueur est plus concentrée en séléniate, montre en toute évidence cette accoutumance du ferment sélénié a des solu- tions de plus en plus concentrées. La généralité de ces lois va nous être prouvée par étude documentaire d’autres substances anormales, introduites dans le lait. 2° Phosphate de potassium. Avec le phosphate de potassium il faut, pour faire des dosages par la phénolphtaléine, employer un phosphate de potassium 30 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR neutre (tribasique) qui, au tournesol, donne une coloration bleue intense. On Vobtient en saturant le phosphate acide par la potasse, en une liqueur contenant quelques gouttes de phé- nolphtaléine, ef on s’arréte dès qu’une coloration rosée apparait. Les premiers dosages ont donné les chiffres suivants : QUANTITE MOYENNE de PO‘K? par litre. de 111 dosages. O00 ns EME 6.0 PRE RO ps he tcl «Pe 6.4 DORE EMEA re 6.9 18.0 hee SHOP ARE DA Alors le 4° jour on ensemence avec le ferment contenant 18 de phosphate de potassium, et on continue pendant longtemps. Voici la série successive des rapports d’activité : 0.00 4.5 9 18 37 75 PATES 160 35 102 3 65 0.0 Meee SAR 100 51 62 88 100 0.0 REINE 66 58 71 93 413 710 PVC: 102 100 100 129 276 443 Bee ae SL. 107 96 101 437 265 329 GSTs 6) 100 114 117 130 271 344 ea 106 97 37 67 425 433 Sh on Te 97 100 103 106 142 325 der mu 93 72 115 100 148 0.0 AOn4 oe ne 102 107 . ,107 113 137 200 Mise ac! 93 159 152 395 180 0.0 AOL 93 108 198 192 205 237 AGE, 104 135 180 210 955 190 PE AN CIE TS 99 104 116 ATA 175 162 PSA Se bes tee 104 106 124 160 167 116 AGH Re 93 102 136 155 290 ? i eee 84 110 136 163 150 182 LAN ER 100 105 422 157 215 150 HOME ae 95 417 132 159 125 205 20 100 140 115 158 167 450 21 88 84 106 137 395 280 22 x 95 92 162 113 21% 395 23 96 100 429 196 188 175 24 70 85 73 164 134 180 25 15 84 150 14% 370 162 2 de 39 87 220 650 190 ? 27 62 103 145 178 205 208 ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU 34 De cette première longue série peuvent déjà se constater divers faits importants. D'abord, pour les liqueurs contenant 18 grammes, c’est-à-dire identiques à la concentration de la liqueur dans laquelle le ferment a poussé, il s’est fait dans les premiers cinq jours une vraie accoutumance, et le rapport d'activité a été en croissant très régulièrement, 3 88 93 129 137 Ensuite il y a eu quelques irrégularités, facilement expli- cables par ce fait que ces rapports multiplient énormément les divisions trouvées par le titrage acide. Mais on retrouve cette progression de l’accoutumance en prenant, pour ces vingt-sept jours, la moyenne de neuf jours. Premier-eroupe: des jours) 2). UE é 83 Deuxièmersroupe, Gero jOUrS! ET Troisième groupe, de 9 jours . . . . . PNA re 2 Ainsi Vaccoutumance s’est établie de plus en plus avec le temps, et même au bout de dix-huit jours, elle n'était pas encore maximale. { Nous allons retrouver la même loi, mais en sens inverse, pour les liqueurs témoins; c’est-à-dire que le ferment phos- phaté, habitué de plus en plus au phosphate, pousse, relative- ment au ferment normal, de moins en moins bien sur du lait normal. PLE SLOUp Crp C ex MOUTURE 85 97 Deuxième eroupe; de.9 jours. 22 = = -/'- LR 96 Troisieme groupe; de J'JOUrS-. - . . . a ban 82 Pour les autres concentrations on a, en prenant des groupe- ments de 9 en 9, les moyennes suivantes : 0.00 4.5 9 18 37 Premier groupe. . 97 80 92 201 Deuxième groupe . 96 115 133 191 197 Troisième groupe . 82 99 429 224 221 Ainsi est rendue manifeste l'augmentation avec le temps de l’'accoutumance, mais surtout pour les laits phosphatés à 18 grammes, c'est-à-dire pour la concentration à laquelie ont élé habitués les ferments servant de semence. 32 ANNALES DE LINSTITUT PASTEUR Nous n'avons pas pris les laits ensemencés sur du phosphate de potasse très concentré (75 p. 1.000), car alors ils ne poussent pas toujours. Quelquefois le ferment normal n’y pousse pas; quelquelois ni le ferment normal, ni le ferment phosphaté n’y peuvent pousser. En ne tenant pas comple des cas où le ferment n'a pas poussé, on trouve les chiffres suivants : Premrersoroupe see. ene) esl seks oe on eC Deuxiéme groupe. A CE Peas ll TrOISIeMeECTOUDE RE ER EC CCE ID Si l'on élimine le chiffre évidemment trop fort du 1° groupe, on voit bien qu'à partir d’une certaine concentration l'accou- tumance n’augmente plus, et même qu'elle diminue, comme si le ferment phosphalé, déjà quelque peu modifié, n'avait pas assez de vitalité pour prospérer sur des liqueurs très fortement phosphatées. Il est bon de comparer ces progressions à celles que donne le séléniale de potassium. Soit A la concentration de la liqueur A 7 d’ensemencement : appelons > le lait à 9 de phosphate; A, le lait à 148: 2 A, le lait avec 37, ona: A 0.00 3 A 2A Séléniate de potassium. 85 1415 138 164 Phosphate de potassium. 89 118 199 206 Eafin, dans un grand nombre d'expériences on trouve, comme dans la moyenne générale, des progressions vraiment typiques : 0.00 45 9 18 37 75 Ser OUT es eas 66 58 74 93 413 770 Uf Hee ere ve 102 100 100 129 276 443 GEL PINS, PE 100 11 417 130 271 344 SE Par ue 97 100 103 106 142 325 AO ae ees 402 107 107 113 137 200 IEEE D 93 108 425 492 205 237 TOR teres co Acie 400 405 122 157 245 150 DA eee 88 84 106 137 395 280 Rs as COTE 95 92 102 113 214 395 25 75 84 150 144 370 462 En présence de ces chiffves on doit être convaincu que le fer- ment phosphaté s’accoutume au phosphate de potassium. ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU 33 L’expérience a été poussée plus loin, et pendant assez long- temps encore on a suivi les variations du rapport d'activité avec un ferment ayant poussé sur du lait additionné de 37 grammes de phosphate de potassium. 0.00 4.5 9 18 . 37 75 18 97 99 105 216 200 82 93 109 134 94 120 100 84 100 400 350 ? 93 146 150 141 355 400 91 15% 136 200 180 182 94 116 122 143 154 134 63 93 108 451 180 us Moyenne. 86 112 418 182 247 ? Ici encore, nous voyons très nettement l’accoutumance, d'autant plus évidente que la solution est plus concentrée. 3° Nitrate de potassium. Les premières expériences ont eu pour objet de déterminer les doses d’azotate de potassium qui agissent sur le ferment sain parlitre:62er.;31gr.; 7 er. 5; etc.; on a: 0.00 100 DA am a age 95 QROS arc ARR oe 61 VE RS EE ARS 31 LA eee ie ae: 35 DAME ae oe 29 DA Wage Oe Lou 2 - Alors on fait (au 3° jour), pendant un mois (34 jours), des ensemencements avec du ferment ayant poussé sur du lait nitraté; et on obtient les chiffres suivants : PREMIERE SERIE. — Ensemencement pur de ferment ayant poussé sur 0.11. 0.00 0.11 0.22 0.43 LE TE One 75 96 . 137 147 RENAN UE 63 96 126 89 dde scl ic : 11 87 122 130 NES TON ae 71 94 164 125 ong etter oc 78 93 205 142 Moyenne. . 73 93 154 127 3 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR DEUXIÈME SÉRIE. — Ferment ayant poussé sur 0.22. 0.00 4.75 3,85 7.50 (OE Ueto Oe otis 64 86 137 11% TR MERE © de : 58 72 120 158 SRE 61 84 116 120 et ken. 01g apo 75 94 462. 172 HUE NE 8S by à © 67 83 144 300 Moyenne. . 65 84 136 173 TROISIÈME SÉRIE. — Ferment ayant poussé sur 0.43. 0.00 0.22 0.43 0.85 ATEN SERRES ° 83 110 160 412 1220 . 82 410 144 205 13e a à se ie Jem 86 131 160 202 LS NES 82 154 180 315 Moyenne. . 84 126 161 208 OUATRIÈME SÉRIE, — Ferment ayant poussé sur 0.85 0.00 0.43 0.85 1.75 M EU A) 60 85 124 148 RP Lo 88 122 167 165 AA Lajas? so eta . 84 122 167 205 A Sires ecm eae a oe 71 100 154 290 Moyenne. . 75 107 153 202 CINQUIEME SERIE. — Ferment ayant poussé sur 1.73. 0.00 0.85 4975 3.85 AO EE. (a 76 88 118 134 20m. ete 19 102 128 156 DA dis aise, + 84 444 422 450 22 sets 12 112 140 210 23 ce ee 59 19 102 190 Moyenne. . 14 98 422 166 SIXIÈME SERIE. — Ferment ayant poussé sur 3.85. 0.00 475 3.85 7.50 DEE aie se ee 67 96 405, >. 146 DDR le ee 58 75 82 127 AO CR ne : 62 114 126 129 OPEN ONCE EEE S1D 125 173 196 2 renee nee 76 114 154 310 Moyenne. . 68 105 128 175 ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU 35 SEPTIEME SÉRIE. — Fermeni ayant poussé sur 7.5 0.00 3.85 7.5 15 2 PRÉC 5 89 112 172 og D pets 84 111 150 212 Moyenne. . 80 100 151 192 HuiTIÈME SÉRIE. — Ferment ayant poussé sur À5. 0.00 7.5 15 31 RES 26 85 101 135 217 NEUVIÈME SÉRIE. — Ferment ayant poussé sur 31. 0.00 15 31 62 D Chr sl 86 [10 16: Soa Oro 6 Diobe 64 81 107 211 Moyenne. . 73 84 123 187 On remarquera tout d'abord Vextréme homogénéité de ces chiffres. Pour toutes les séries, et mème pour les chiffres de chaque série, il y a, presque sans exception, une accoutumance d'autant plus manifeste que la solution est plus riche en nitrate de potassium. La moyenne générale, si on suppose l’ensemencement fait par À, donnera pour l’ensemble des séries : 0.00 = A ? À Première série. .- 73 93 151 127 Deuxième série. . 65 84 136 173 Troisième série . 84 126 161 208 Quatrième série . 75 107 153 202 Cinquiéme série . 14 98 122 166 Sixième serie... 68 105 128 175 Septième série. . 80 100 131 192 Huitième série . . 85 101 135 217 Neuvième série. . 73 84 123 187 Moyenne. . 75 100 138 183 Ce qui concorde d’une manière tout à fait satisfaisante avec les chiffres précédents, & savoir : Séléniate de potassium. . 85 115 138 164 Phosphate de potassium. 89 118 199 206 36 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Plus encore avec le nitrate de potassium qu'avec le séléniate de potassium et le phosphate de potassium, le ferment s’est habitué à vivre sur des solutions nitratées, de manière à mal végéter sur du lait normal. Ainsi, le ferment normal sur du lait normal donnant 100, le ferment nitraté, poussant sur du lait normal, ne donne plus que 75. Parfois même, par exemple, pour la 2° série, le rapport d'activité n’est plus que de 65, en moyenne. Presque jamais, avec le phosphate de potassium, on n'est descendu aussi bas. 4° Sulfate de cuivre (1). Le 3° jour, après que le ferment a poussé sur 12 de SO‘Cu, on prend le ferment qui a poussé sur 3 de SOCu, et on trouve : 0.00 3 6 12 1e Sie ae 78 106 120 108 2. 107 130 84 100 3. 79 96% 69 49 4 102 122 100 84 DC DORE 112 125 81 112 MMA AREA tae: 75 108 112 94 TGS ARE tare LE 106 99 99 19 SAM. er 105 114 174 67 Or rect: Es es Be 106 409 168 70 NÉ RSS SUR 106 130 320 78 En faisant deux groupes de 5 ona: 0.00 2 6 12 Premier groupe... ...-. 96 116 91 91 Deéeuxieme groupe. . ... 104 112 175 78 Moyenne générale. . . 98 114 133 85 On remarquera combien, en réalité, il y a eu une nette accoutumance pour la solution à 6 de SO“Cu. Dans les cinq premiers jours, et même jusqu'au septième inclusivement, le ferment a très mal poussé. Mais à partir du 8° jour, il a donné des chiffres très forts et croissants, comme si alors, presque soudainement, il s'était habitué au cuivre. D'autre part, poussant sur du lait très riche en cuivre (12), au lieu de s’habituer, il pousse mal; plus mal même que le ferment normal, comme si, déjà un peu malade, il ne pouvait 1) Les doses de sulfate de cuivre sont données non plus en grammes, mais en milligrammes par litre. ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU 37 plus supporter aussi bien que le ferment normal une liqueur très cuivrique. Mais peu à peu il s’habitue à des liqueurs très cuivriques, comme on le verra par la suite. DEUXIÈME SÉRIE. — Ensemencement par ferment sur 6. 0.00 3 6 12 lobe a ok 105 134 158 149 125 Se: 104 100 150 140 TIME RE ESS 110 162 168 136 USE RER 109 135 206 110 ‘lio. LA Soci oan 107 118 158 340 SCENE 411 116 141 205 Moyenne. . 106 129 163 180 TROISIÈME SÉRIE. — Ensemencement par ferment sur 12. 0.00 6 12 25 AV erm eet sty ot eye 101 {11 124 120 RE STE 93 125 109 111 Re Lee 107 109 93 109 DORE a sees 116 83 114 120 Puls eee Die Le 128 98 117 119 PAS NE acy CR 424 102 118 135 Moyenne. . 110 105 112 117 QUATRIÈME SÉRIE. — Ensemencement par ferment sur 25. 0.60 12 25 50 Doi te ones 104 94 111 134 DR metres 107 136 136 118 DD eesti ee 130 129 180 180 PA DIR DUT Bae 106 110 131 73 PTE NT EN 108 100 106 94 Riera ENS give 106 125 462 100 AYES Moro CLÉ 98 116 1147 119 JUS SEE EEE dE 18 96 71 60 SiGe Gaines ous 102 123 100 97 Moyenne. . 104 114 124 108 CINQUIÈME SÉRIE. — Ensemencement par ferment sur 50. 0.00 25 50 75 Poe od ole 114 126 82 113 S35 ccc: LS 82 109 414 95 Bh iol aloe aoe 105 105 83 103 30) Gr RATER 106 128 155 76 36 cc. Seimei ees 106 120 168 130 Sill, fon oot See eee 104 121 129 176 SÉICPAS ONDE 105 119 129 209 DO CE 103 117 125 181 Moyenne. . 103 118 132 135 38 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR SIXIÈME SÉRIE. — Ensemencement par ferment sur 75. 0.00 50 75 152 ADP ete cee 106 125 127 59 LIRE Te 16 83 81 70 PME eect ell 104 119 100 112 LES NN sl 108 102 107 166 LEVELS CLR 111 119 200 88 AR SR ea ae ae 410 128 152 255 BGS voter | crt Stile 104 105 146 88 TA ane 105 107 130 159 CRI Ger ae oe 114 129 162 162 EE EE 108 115 152 247 Moyenne. . 104 113 140 140 En divisant en deux groupes, on a: Premier etToupe «ena s 102 109 140 100 Deuxième sroupe :5.-.. 107 117 140 181 On remarquera ici que, contrairement à ce qui s’est passé pour la 1" série, l’accoutumance à la solution cuivrique forte s’est faite assez difficilement. SEPTIÈME SÉRIE. — Ensemencement par ferment sur 125. 0.00 75 125 520 4100 tr aos dre ° 102 124 136 172 iy, Peto eee ARE A 103 118 112 104 Dee ete ae 100 110 87 98 Done 116 88 109 109 DAS NS tbe 104 126 122 123 Moyenne. . 108 112 113 121 HUITIÈME SÉRIE. — Ensemencement par ferment sur 250. 0.00 125 250 500 DORE Re Lee 142 225 200 226 HG Seer re cme tye 107 119 168 qu DH Te 134 100 132 103 ew Un 106 127 173 200 DAS ee cle 116 100 125 134 CORPS ia 110 131 140 385 CARRE 0 111 117 124 302 SPAS dE 10% 92 104 121 CE ne 105 110 132 106 (EE CES 106 116 116 250 Moyenne. . 112 124 141 195 ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU 39 NEUVIÈME SERIE. — Ensemencement par ferment sur 500. 0.00 250 500 700 ON à à MR AOD 100 124 118 GOT CEE 104 100 451 140 Giese ne eee 107 117 140 154 HOT CRETE 107 124 150 106 Moyenne. . 10% 110 141 129 DixièME SERIE. — Ensemencement par ferment sur 150. 0.00 500 150 1.000 GMs 5 6G) oe 6 104 103 103 87 Te SAME SU 10% 96 444 132 EES Slo as 403 276 196 232 PSS cire 76 224 225 255 Moyenne. . 96 175 159 176 En réunissant ces diverses séries, on a les chiffres suivants : 0.00 = A 2A 98 114 133 85 106 129 163 180 110 115 1142 117 104 114 124 108 103 118 132 135 10% 113 140 140 108 412 113 121 112 12% 144 195 104 110 141 129 96 175 159 176 Moyenne générale. 104 122 136 138 L’accoutumance est donc très nette pour le sulfate de cuivre, puisque cette moyenne générale, bien homogène en somme, résulte d’un nombre considérable d'expériences. On remarquera que le ferment ayant vécu sur du lait cui- vrique donne presque toujours sur du lait normal des quantités d'acide lactique plus fortes que le ferment ayant vécu sur du lait normal. Cest le contraire de ce que nous avions vu pour les laits contenant du séléniate ou du phosphate de potassium. On remarquera aussi qu'entre A et 2A de concentration la différence est presque nulle. Enfin l’accoutumance ne paraît guère augmenter avec le temps. [1 est vrai qu’on fait croître la concentration de la solu- 40 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR tion sur laquelle pousse le lait, de sorte qu'il est difficile de savoir quelle est la part de l’accoutumance même, ou de la concentration croissante de la solution. L'identité presque absolue entre les chiffres des cinq premières séries et les chiffres des cinq dernières semblerait prouver qu’à partir du huitième ou dixième jour l’accoutumance s’est établie, et qu'elle ne va plus s’accroitre. 5° Chlorure de sodium. Les doses de chlorure de sodium doivent ètre très fortes pour que quelque différence se manifeste dans le croît du fer- ment. Les chiffres indiqués ici se rapportent toujours, en grammes, à un litre de liquide. Voici d'abord quelques chiffres se référant à un autre liquide que le lait employé précédemment : j’opérais sur une solution de petit-lait presque neutralisé. Les expériences sont peu nom- breuses. Ensemencement par ferment ayant poussé sur 150 grammes de NaCl. g 0.00 150 200 93 82 124 107 101 124 103 134 94 94 141 118 Moyenne, 99 114 115 Elles semblent montrer une certaine accoutumance crois- sante; et d’ailleurs, ce qui les rend intéressantes, c’est que le dosage dans la solution de lactose peut se faire avec une grande précision. Ensemencement par le ferment ayant poussé sur 150. 0.00 150 200 250 ET ere Low RC 93 104 106 104 odes Gy Sue ee 10% 130 124 330 Site ea Se à 422 136 128 114 od BU NS 445 154 158 150 DER Ue, : 2 120 130 140 124 CREER 0: 121 135 129 136 TR SCORE 89 89 11 136 Moyenne . 114 125 123 156 ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU 41 Ensemencement par le ferment ayant poussé sur 75. 0.00 75. 150 250 Cane ROUE 105 105 144 171 OÉR ance fo ses 116 109 450 135 Moyenne . 110 107 141 153 Ensemencement par le ferment ayant poussé sur 150. 0.00 75 150 250 Nees eee rs 123 (148) 158 (155) TMS erste. Tah ae (156) ait 121 132 1 eh Oe a LE RNE CRE 91 127 76 100 LS ER PRES 103 103 91 98 1 a eee od Se 87 81 153 437 SE NE ee ER 93 92 71 112 AGP Re 4105 102 101 130 TAN SRE BTE 77 71 67 120 ASE EE Te 95 111 146 98 AD A ES 96 110 (195) 118 Moyenne . 103 106 116 120 En comparant cette troisième série, on voit qu'il n'y a pas de progrès dans l'accoutumance. Au contraire, les rapports sont notablement moins réguliers; car, si de la troisième série on retranche le chiffre le plus fort, celui que nous mettons entre parenthèses, on aurait une moyenne assez différente. Moyenne . 18 101 107 116 Tout de même, même après cette élimination, iln’en reste pas moins établi qu'avec NaCl il y a accoutumance, mais que par le temps elle ne semble pas s’accroitre. La moyenne d'ensemble pour l'accoutumance du ferment au NaCl nous donne : 0.00 107 = in 5 - PE 120 2A. 138 6° Bromure de potassium. Avec le bromure de potassium les expériences ont été trés nombreuses. Je donnerai d'abord la première série de ces 42 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR expériences; on verra qu'elles sont à peu près identiques aux secondes qui les contrôlent. PREMIÈRE SÉRIE. — Ferment ayant poussé sur 0.45 p. 1000. 0.00 0.22 0.45 0.90 ule 98 106 107 100 PSO. Plane 92 98 103 91 al oo Ge oe 93 102 107 143 RARE ene 76 92 125 110 Banc 76 91 107 116 Wo GBA Baca 87 93 11% 138 Moyenne. 87 98 110 116 DEUXIÈME SÉRIE. — Ferment ayant poussé sur 0.9 p. 1000. 0.00 0.22 0.45 0.90 18 Re OS RE 11 93 107 124 2 SR ENT 85 94 105 178 9 MO PT ART 83 ? 156 156 106 HOP AN AE 83 ? 103 195 115 11. 89 ? 10% 105 119 Oe rece ee 94 2 105 127 154 Moyenne. 85 96 113 136 193 TROISIÈME SÉRIE. — Ensemencement avec 1.8 p. 1000. 0.0 0.9 1.8 Sul 13 67 86 LPS. 89 14: 91 105 125 128 A5 69 106 126 128 16. 94 10% 122 160 Moyenne. 80 100 121 126 QUATRIÈME SÉRIE . — Ensemencement avec 3.7 p. 1000. 0.0 1.8 3.7 7.5 DRE CR cts 82 107 108 24 AS eon De 92 108 106 18 10. 72 105 122 70 20. 64 126 143 225 Moyenne. T1 112 120 157 CINQUIÈME SERIE. — Ensemencement avec 7.5 p. 1000. 0.0 3.7 5 15 21 90 107 132 14% 22} 73 136 153 210 23 59 117 114 174 24. 72 132 150 223 Moyenne. T4 123 137 188 ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU 43 SIXIÈME SÉRIE. — Ensemencement avec 15 p. 1000. 0.00 7.5 15 30 D'OR TE 69 122 140 208 DONS UNE 11 113 138 150 TN ee 73 127 156 216 DB we alee 65 146 178 245 Moyenne. . it 127 153 197 Ainsi, pour ces six premières séries, on voit avec une netteté éclatante que le ferment s'est successivement habitué a vivre sur des milieux de plus en plus riches en bromure de potassium. Nous avons, en effet : 20) = A 2A N= eR Première série. . . 87 98 110 116 A — 0/90 Deuxième série. . . 85 96 113 136 At 465 Troisième série. . . 80 100 121 126 AS i cell Quatrième série. . . 77 112 120 157 A ie Cinquième série . . 74 123 137 188 Ae— 50 Sixième série. ... 11 127 153 197 Moyenne. . . 19 108 126 153 Et cette accoutumance se traduit par deux phénomènes con- nexes, qui ont autant de valeur l’un que l’autre pour prouver l’accoutumance, à savoir : d'une part, que le ferment qui a poussé sur bromure de potassium pousse (relativement au témoin) de moins en moins bien sur le fait normal; d'autre part, que le même ferment qui a poussé sur bromure de potassium pousse (relativement au témoin) de mieux en mieux sur du lait normal. Il n'est pas probable que cette accoutumance croissante dans les séries soit due uniquement à ce que la solution dans laquelle végète le ferment qui ensemence est de plus en plus concentrée. Car, dans une même série, toutes conditions égales d'ailleurs, on voit bien que dans les derniers jours le rapport est plus fort que dans les premiers. Soient les moyennes que nous avons données, égales à 100; on a dans chaque série, pour les tubes des premiers jours et les tubes des seconds jours, les moyennes suivantes : ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR + += 1° Pour les premiers jours : 0.00 = \ A Première série. .<:- 108 103 96 96 Deuxiéme série . . 97 ? 108 97 Troisième série . . 99 $5 108 85 Quatrième série. . 113 95 89 72 Cinquième série. . 110 99 10% 94 Sixième série . . . 103 93 91 92 Moyenne. . 104 95 98 91 2° Evidemment, les chiffres des seconds jours sont complé- mentaires, de sorte qu'on aurait pour eux : 96 105 102 109 Ces chiffres montrent bien que, d'une part, avec le temps, les ferments habitués au bromure de potassium finissent par pousser moins bien que les ferments normaux dans le lait normal; d'autre part, que ces ferments habitués finissent par pousser mieux que le ferment normal dans le lait contenant du bromure de potassium. Mais ce ne sont, à vrai dire, que des nuances, et on peut dire que dès le deuxième ou troisième jour l’accoutumance s’est manifestée nettement, encore qu’elle ne soit pas aussi complète qu'elle sera plus tard. 7° Arséniate de potassium. C'est avec l’arséniate de potassium que les expériences ont été le plus nombreuses. Il s’est trouvé, en effet, que c’est surtout avec l’arséniate de potassium que l’accoutumance s’établit. On sait depuis longtemps d'ailleurs que les arséniates, si toxiques pour les animaux (qui ont un système nerveux), sont à peu près inoffensifs pour les ferments et levures végétales. Dans des solutions aqueuses contenant 5 p. 100 d’arséniate de bromure de potassium, les champignons et les moisissures poussent en grande abondance. Afin de ne pas multiplier les chiffres, je ne donnerai que mes derniéres expériences. On commence par ensemencer avec du ferment normal des liqueurs contenant des quantités variables d’arsenic, et on a, ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU 45 déduction faite de l'acidité primitive (car l'arséniate de potas- sium n'avait pas été complètement neutralisé) : QUANTITÉ D'ARSÉNIATE DE POTASSIUM ACIDITÉ EN CC. DE KOH par litre. 0.0 6.7 bo toiS Eee Goulot IekomO re Ded Dollis et 0 à A OOOO CIO 4.5 Géo 6s 6 66 OO CORNE 1.9 Oly MPR 1 Peet rst EE, ONE MES 4.2 Cela fait, on ensemence par du ferment normal N, et d'autre part par du ferment ayant poussé sur 1.5; et trois jours après par du ferment ayant poussé sur 3.1. On a alors les suivants rapports d’activité : 0.00 1.5 3.4 6.2 1.25 (5) (A) (2 A) (4 A) 93 83 123 250 188 82 96 425 269 250 100 94 104 (285) 230 (112) 130 152 167 163 79 452 141 158 235 84 148 168 175 195 87 427 148 190 205 90 122 138 188 200 92 152 132 154 220 3 160 135 144 270 97 125 49: 144 305 82 101 422 150 322 95 107 150 245 400) 93 (217) (215) 201 177 Moyenne (en éliminant le chiffre le plus fort de chaque colonne) : 1er groupe den 88 119 138 201 209 2° groupe den 91 128 130 175 249 Moyenne générale 89 124 134 188 229 De ces chiffres, qui sont en somme très cohérents, on peut en déduire que l’accoutumance n’a pas notablement cru dans le second septénaire. Eniprenant comparativement les quatre premiers et les 46 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR quatre derniers jours, et toujours en éliminant le chiffre le plus fort, on a, pour les rapports d'activité : 4 premiers jours . 91 101 126 229 208 4 derniers jours. . 92 111 126 185 268 On voit qu'il y a eu quelque accroissement, mais, en somme, assez peu notable, sinon pour les solutions très concen-, trées. Il est vrai que le ferment arsenical, même avant ces expériences, avait poussé pendant quatre jours déjà sur des solutions arsenicales, avec quatre ensemencements successifs. Au 24 janvier, c'est-à-dire au quinzième jour, on ensemence avec le ferment qui a poussé sur 6.2; et on a: 0.00 4.5 3.4 6.2 12.5 (127) 156 180 204 127 70 æ (110) 170 (330) (141) 48 150 (230) 190 130 70 114 205 250 120 18 109 116 140 190 90 102 130 210 310 88 110 150 190 210 85 102 122 162 300 100 154 168 154 270 13 120 160 178 272 91 134 168 170 265 82 112 154 162 ce 15 89 110 114 235 82 104 109 106 46 30 100 128 135 178 Quoiqu'il y ait quelque incohérence dans ces chiffres, on peut cependant en déduire une moyenne générale (toujours en éliminant le chiffre le plus fort de chaque colonne) et on a alors : 1er groupe de 8. . 76 421 153 £92 198 2° groupe de 7. . 76 116 442 146 214 (?) Moyenne générale. 76 119 147 169 204 En comparant les chiffres de cette série (à 6 p. 1.000) aux chiffres de la série précédente (à 3 p. 1.000) on voit que le rapport d'aclivité n’a pas augmenté; au contraire, quila semblé Se dom Éd ut Éd ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU 47 diminuer, comme si le ferment arsenical légèrement malade ne pouvait plus aussi facilement végéter dans les liqueurs arse- nicales. Et cela apparait nettement si on compare le premier groupe de huit jours au second groupe de sept jours. Là, évide mment, il y a une notable diminution. D'autre part, très nettement aussi, l'accoutumance a augmenté par la plus grande difficulté du ferment arsenical à vivre sur du lait normal. Alors que le rapport d'activité était de 92 dans la première série, il est de 76 dans la seconde. Ainsi, ’accoutumance du ferment arsenical se manifeste par une bien moindre aptitude (que le ferment normal) à pousser sur du lait normal. Une troisième série a été poursuivie dans laquelle l'ense- mencement était fait par du ferment ayant poussé sur 12.5 darséniate de potassium. Les résultats sont assez peu cohérents. Toutefois, nous croyons les devoir donner : 0.00 4.5 3.4 6.2 42.5 25 85 46 90 100 100 11 58 110 105 100 123 205 86 23 35 47 100 ? 96 (435) (146) 37 100 67 96 87 106 124 205 147 87 100 89 154 212 265 62 67 62 68 94 56 (97) 107 100 140 (350) (400 57 67 103 177 110 100 12 88 108 190 170 154 92 100 100 120 109 132 90 121 68 (215) 150 100 Moyenne des 6 premiers jours : 85 T5 85 94 140 ? Moyenne des 6 derniers jours : 75 91 90 39 126 ? Moyenne générale : 80 83 87 110 133 130 Ainsi quand on fait pousser le ferment sur une liqueur trop riche en arsenic, loin de s’accoutumer, le ferment devient malade, et pousse, même dans des liqueurs arsenicales, moins bien que le ferment normal. Il y a donc un optimum pour laccoutumance du ferment aux liqueurs arsenicales, et celte 48 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR accoutumance semble être aux environs de 5 grammes d'arsé- niate de potassium par litre, en chiffres ronds. D'autres expériences, très nombreuses, ont été encore faites par cette même méthode sur l'accoutumance du ferment lac- tique à l’arsenic; mais je ne les donne pas, car elles ne font que confirmer les résultats qui viennent d'être indiqués ici. Je retiendrai seulement ceci, c'est que, dans certains cas, sans * que j'aie pu encore en déterminer les conditions, le ferment arsenical est si bien habitué à l’arsenic qu'il ne pousse plus du tout sur du lait normal, ou du moins avec une très grande lenteur. La moyenne des rapports a donc été, pour l’arséniate de potas- sium : Première série. . (A = 3.1) 89 424 134 188 Deuxième série. . (A = 6.2) 76 147 169 204 Troisième série. . (A = 12.5) 80 87 410 130 Moyenne générale. . . 81 119 138 174 8° Nitrate de thallium. Le ferment lactique normal est ensemencé sur du lait conte- nant par litre 0,166 de nitrate de thallium. A cette dose, le nitrate de thallium ralentit notablement la fermentation, comme l'indique l’expérience suivante : ACIDITÉ (EN CENT. CUBES DE KOH AU MILLIÈME) POUR 10 CENT. CUBES DE LIQUEUR Lait Lait Témoins. avec 0 gr. 08 avec 0.166 de nitr. de Tl. de nitr. de Tl 8.8 4.7 4.0 9.0 4.9 3.9 Beal 5.0 4.1 Sail 4.8 4.1 11.4 6.0 5.3 10.1 6.0 Died 10.9 6.2 5.0 Moyenne. . . 68.0 37.6 31.7 Soil, en faisant les tubes témoins — 100, ona : Solution à 02082 4 7 a he 55 Solution €:0.166 a6 3,7. « z's 17 ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU 49 On détermine alors dans une premiére série (ensemence- ments par du ferment à 0.166) le rapport d'activité. 0.00 = A 0.00 0.08 0.166 Premier OUT CE 83 110 114 Deuxième jour. . . . 89 108 109 Troisiéme jours) <1 - (57) (205) (190) Quatrième jour. . . . 71 95 99 Cinquième jour... . 75 107 106 SIMIEMen;OUL sis. of.) 50 102 101 Septième jour... 69 103 12 Moyenne (en éliminant l’exp. 3 qui est aberrante) : 020078 À — 404 2 A = 407 DEUXIEME SERIE. — Ensemencement par 0.12. 0.00 0.12 0.25 0.5 1 53 105 45 112 15 50 47 79 52 92 93 65 100 92 83 90 105 95 58 72 17 131 103 125 67 (412) 113 178 225 200 64 128 290 (318) 270 66 (291) 250 188 107 88 184 375) 255 130 12 57 85 129 (330) 80 91 100 94 36 76 86 103 109 48 74 109 119 113 84 Moyenne (en éliminant le chiffre le plus fort de chaque colonne): Lessix premiers. 75 94 100 {11 98 Lesseptderniers 66 109 457 148 412 Moyenne. 70 104 128 129 105 TROISIÈME SÉRIE. -- Ensemencement par 0.25. 0.00 0.12 025 0.5 1 56 108 81 141 92 58 53 115 7 73 {1 104 102 117 a Moyenne. 70 88 99 124 82 ee 50 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR QUATRIEME SERIE. — Ensemencement par 0.25. 0.00 0.42 0.25 0,5 1 33 al 130 147 142 77 98 102 118 138 102 112 413 108 255 96 119 136 115 295 Moyenne. 77 “96 120 . 122 207 CINQUIEME SÉRIE. — Ensemencement par 1. 0.00 0.12 0.25 5 1 ui 113 124 102 189 18 11% 136 123 181 97 108 127 110 145 87 104 114 85 174 108 116 109 128 169 Moyenne. 96 113 122 110 171 La moyenne des rapports d’activité a donc été pour le nitrate de thallium : A 0.00 5 A 2A Première série. ... (A = 0.16) 78 104 107 » Deuxième série... MA — 02) 77 » 101 128 Troisième série . . . (A — 0.25) 70 88 99 124 Quatrième série... (A = 0.50) 71 120 122 207 Cinquième série... (A = À ») 96 110 171 » MOoyenne Le. son. 78 104 120 153 Ainsi, l’accoutumance au nitrate de thallium est très nette, comme aux autres sels. Mais il semble que pour bien voir la différence de croît (sur le lait normal) entre le ferment normal et le ferment habitué au thallium, il soit préférable d’ensemen- cer avec un ferment qui a poussé sur 0,12, au lieu d’un fer- ment quia poussé sur 1. 9° Saccharose. PREMIÈRE SERIE. — Ensemencement par du ferment ayant poussé sur 6 gr. 25 de saccharose par litre. 0.00 3.1 ° 6.25 12.5 84 107 128 98 91 100 425 66 100 112 111 99 98 119 130 132 100 131 AA 120 103 151 133 120 Moyenne. 96 117 124 106 ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU * 54 DEUXIÈME SÉRIE. — Ferment à 12.5. 0.00 6.2 12.5 25 100 110 110 107 ? 427 108 lit 143 155 176 10% 104 ALT 151 Moyenne. . 105 119 127 133 TROISIÈME SERIE. — Ferment à 25. 0.00 12.5 25 50 98 110 99 92 105 al 132 97 110 AAT 172 139 100 114 136 121 87 110 177 181 82 95 150 166 108 423 2 Wes 140 103 AL 146 160 105 116 176 188 Moyenne. . 100° 112 151 143 QUATRIEME SERIE. — Ferment à 50. 0.00 12.5 25 50 100 114 134 138 151 88 114 125 134 97 » 98 112 83 104 » 113 130 84 97 » 107 124 118 98 » 110 131 162 89 » 123 130 425 97 » 105 119 106 97 » 104 ANT 103 102 » 96 134 107 17 » 164 181 440 Ici un seul dosage : 103 » 106 124 113 100 » 94 109 107 98 » 105 131 130 104 » 114 WT 160 Moyenne. 91 (124) 123 134 136 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR CINQUIEME SÉRIE. — Ferment à 15 (un seul dosage). 0.00 50 75 100 103 110 117 88 115 413 148 13 88 95 124 100 105 120 140 85 85 100 138 10% 97 101 168 134 93 100 104 d'A 99 108 117 14% Moyenne. . 98 105 132 110 SIXIÈME SÉRIE. — Ferment à 100 (un seul dosage). 0.00 50 75 100 150 99 124 441 95 » 101 99 116 138 » 101 » 113 124 118 103 » 120 131 105 128 » 127 133 103 Moyenne. 106 all 117 124 109 En reprenant dans leur ensemble ces expériences avec le sucre, on trouve les moyennes suivantes : A MOTS Première série. ...... O6 147 424 106 = 116 Deuxième série. Meme 105 119 127 133 — 1126 Droisièeme séries. > 2100 112 151 443 — 195 Ouatrièmersérie sv. 210.091 123 134 136 — 1} Cinquièemeïsérie 4. HIS 105 132 110 == 446 SIXIGM@@SELIC ee et chases OG 117 124 109 = 116 Moyenne... 099 415 132 123 Ces expériences, très homogènes, montrent divers phéno- mènes intéressants, et permettent de fixer en quelque sorte un maximum pour le rapport d'activité. 1° Lorsque le ferment a poussé sur le liquide A, c'est lorsque le ferment est ensemencé dans A, que le rapport d'activité est 2 i ,° 2 5 A c maximal, plus grand que lorsqu'il est ensemencé sur 7 ou 2A. 2° C’est pour des concentrations moyennes gue le rapport ADAPTATION DES MICROBES (FERMENT LACTIQUE) AU MILIEU 53 d'activité est maximal (Troisième série) quand le ferment est ensemencé sur une liqueur contenant 25 grammes par litre de saccharose. 3° Il y a certainement une accoutumance, notamment pour la concentration 2A ; car si, dans chaque série, nous prenons les premières mensurations de 2A, nous les trouvons toujours plus faibles que les dernières. Ill. — CONCLUSION Reprenons maintenant ces chiffres dans leur ensemble, et nous pourrons en dégager plus nettement les lois générales. sey Lee: Soient les concentrations 3? A et 2A, nous aurons pour la vie du ferment A comparée à la vie du ferment N : 0.00 = A 2A Séléniate de kK. . 85 445 138 164 Phosphate de K. . 89 118 199 206 Azotaté de K. . . 75 100 138 183 Sulfate de Cu. . . 104 192 136 138 Chlorure de Na. . 107 111 120 138 promure de K . . 19 108 126 153 Arséniate de K. . 81 119 138 174 Nitrate de TI. . . 18 104 120 153 Saccharose. . . . 99 115 132 123 Moyenne. . . . 88 112 138 159 Cette moyenne, qui résulte d'un nombre considérable de dosages, — plus de 10.000, — prouve en toute évidence l’accou- tumance des microbes aux substances toxiques. I] semble donc que le fait soit établi en dehors de toute contestation. Les substances avec lesquelles il a été expérimenté sont assez diverses et nombreuses, pour que désormais on puisse affirmer qu'une non-accoutumance, si on la rencontre, sera l'exception. Bien entendu, on ne pourra alors parler de non- accoutumance que Jorsqu’on aura expérimenté avec des solu- tions de concentration trés différente. Non seulement l’accoutumance est la loi; mais encore la diminution d’activité du ferment accoutumé quand on le remet à pousser sur du lait normal. Presque constamment (sauf le cas 0 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR du NaCl) il pousse alors moins bien que le ferment normal : cela n’est pas surprenant, puisque aussi bien ce ferment a été altéré par un poison: mais, ce qui est remarquable, c'est que cette diminution de vitalité coïncide avec une vitalité plus grande (par rapport au ferment normal) quand on le faitpousser sur des solutions auxquelles il a été habitué. Par cette méthode, bien des questions relatives à T'hérédité sont encore à résoudre, sur lesquelles va porter mon attention maintenant (1). 1° A partir de quelle limite l’accoutumance commence- t-elle? 2° Combien de temps persiste-t-elle? 3° Y a-t-il interchange entre les diverses substances toxiques ; et peut-on considérer, au moins dans certains cas, cette accou- tumance comme un phénomène osmotique ? Il est vraisemblable que cette méthode permettra de résoudre ces différentes questions, si importantes dans l'histoire de Vhérédité et de l'adaptation. “4 (1) Depuis que ce mémoire a été écrit (mars 1914) j'ai fait quelques expé- riences nouvelles qui seront prochainement publiées. ESSAIS D’IMMUNISATION DES PETITS RONGEURS CONTRE LES PARATYPHIQUES NATURELLEMENT PATHOGÈNES POUR CES ANIMAUX par J. DANYSZ et Z. SKRZYNSKI. (Laboratoire de Parasitologie agricole de l'Institut Pasteur.) On connaît aujourd'hui plusieurs races ou variétés de cocco- bacilles appartenant au groupe de paratyphiques ou de bac. enteritidis qui sont naturellement pathogènes pour les petits rongeurs. Ils peuvent infecter ces animaux quand ils sont absorbés avec un liquide ou un aliment quelconque ou bien par simple contact avec les muqueuses buccales ou nasales. Les animaux infectés meurent avec des lésions de la rate, du foie et de l'intestin grêle qui présentent beaucoup d’analogie avec celles de la fièvre typhoïde de l’homme; aussi Leefiier, qui le premier a observé, parmi les souris blanches de son laboratoire, une épi- démie due à un de ces microbes, lui a donné le nom de bacillus typhi murium. Nous proposons de conserver ce nom pour tous les microbes de ce groupe pathogène pour les petits rongeurs, bien que, d’aprés les recherches les plus récentes sur leurs propriétés biochimiques et notamment d’après celles de Mühleus, Dahm et Fiirst [1] et celles de Hurler [2], il faudrait classer le bac. typhi murium de Leffler parmi les paratyphiques B, et /es bacillus ratti de Danysz, Dunbar, Issatchenko et Neumann parmi les bacilles de l’enté- rite de Gaertner. Il nous semble, en effet, que pour un essai de classification de microbes pathogènes, l'identité des propriétés pathogéniques (comme c'est le cas ici) est tout au moins aussi importante que l'identité des propriétés biochimiques observée zn vitro. Par l’ensemble de leurs caractères, ces microbes forment un 56 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR groupe bien homogène, et nous proposons de désigner chaque type par une lettre différente. Toutes nos expériences avaient été faites avec le bac. typhi murium, type B, qui a déjà été décrit dans ces Annales [3]. VIRULENCE. Le bac. typhi murium, type B, est actuellement pathogène pour toutes les espèces de Microtinées (campagnols) et pour un grand nombre d'espèces du genre Mus et notamment pour le M. musculus, M. sylvaticus, M. decumanus, M. rattus, — mais sa virulence pour toutes ces espèces n’est pas de même degré ni de la même nature. A l’origine, il n’était virulent que pour les campagnols et les souris blanches ou grises, et n’est devenu pathogène pour les rats qu’à la suite d’une adaptation obtenue par des cultures en séries dans des milieux contenant des humeurs de rat plus ou moins modifiées par la digestion [3]. Un procédé analogue a permis à Dujardin-Beaumetz [4] de rendre le microbe de la péripneumonie des bovidés pathogène pour les moutons et les chèvres. L'expérience suivante nous a prouvé, en outre, que la virulence naturelle et la virulence acquise sont dues à des principes différents. En effet, quand on conserve dans de petites ampoules en verre, scellées à la lampe, un virus qui tuait les souris en 5 à 7 jours et les rats en 5 à 15 jours, et quand on essaie la viru- lence des cultures obtenues de ces ampoules, d’abord tous les 2 ou 3 mois et ensuite une ou deux fois par an, on constate que, pour les souris, la virulence de ces cultures reste d’abord constante et qu’ensuite elle augmente même un peu avec le temps, tandis que, pour les rats, la virulence diminue progres- sivement et se perd complètement au bout de quelques années. Ainsi, nous possédons de ces cultures conservées depuis 4901 qui, au moment de leur mise en ampoules, étaient très viru- lentes pour les rats et ne tuaient les souris qu'en 5 à 8 Jours, et qui, réensemencées et essayées l’année dernière, tuaient toutes les souris en 3 à 4 jours et étaient absolument inoffen- sives pour les rats. IZ est donc impossible d'admettre que la substance virulente soit la méme dans les deux cas. Pour les campagnols et les souris, la virulence est, pour ESSAIS D’IMMUNISATION DES PETITS RONGEURS 57 ainsi dire, une propriété naturelle que ces microbes conservent aussi longtemps que leur vie. Ceux qui survivent le plus long- temps, qui ont fait preuve par conséquent de plus de vigueur et de résistance, se montrent également les plus virulents. On constate, en effet, en ensemencant le contenu des ampoules sur des milieux solides, que le nombre des microbes qui repoussent et donnent de nouvelles colonies diminue progressivement. Après une conservation de 10 ans à la température de labora- toire, une ampoule de 1 cent. cube ensemencée sur une plaque de gélose ne donnera qu'un petit nombre de colonies isolées qu'il sera facile de compter. On peut hater ce processus de sélection en conservant les ampoules à l’étuve, à une température de 36-37 degrés, ou bien en cultivant le microbe dans un milieu plus pauvre en substances nutritives; on peut le prolonger, par contre, en gar- dant les ampoules à la glacière (4). La virulence du bac. typhi murium pour les rats est, au con- traire, une propriété acquise qui se transmet par hérédité à tra- vers un grand nombre de générations dans les passages succes- sifs in vitro, mais qui s’atténue avec le temps. Le microbe finirait même par la perdre complètement si on ne la lui rendait par un traitement approprié. Merechkowsky [5], qui a publié sur la culture et la virulence de ce même microbe une série de travaux remarquables, a fait sur ce sujet une expérience des plus démonstratives. Il a fait de très nombreux passages (près de 1.500) renouvelés chaque jour, d’une part, dans un milieu très riche en substances nutri- tives (bouillon de viande peptonisé), d'autre part, dans un milieu très pauvre (extrait aqueux à 10 p. 100 de blanc d'œuf cuit), et il a remarqué que, dans le premier cas, la virulence du microbe pour les rats se conservait moins longtemps que dans l’autre. IL est évident que cette différence dans la durée de la viru- lence doit être attribuée principalement, sinon exclusivement, à la différence de rapidité avec laquelle les microbes se multi- plient dans les deux cus. Pour un temps donné, le nombre des générations successives sera beaucoup plus grand dans le (1) Il est à noter que les cultures en milieu de Merechkowsky conservées en ampoules scellées à 37° sont stérilisées déjà après 8 à 10 mois. 38 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR bouillon riche que dans le bouillon pauvre, et pour ie même nombre de générations le résultat serait très probablement identique. Le bac. typhi murium B. est inoffensif par ingestion pour tous les autres animaux, mais il tue les cobayes inoculés dans le péritoine et les lapins inoculés dans les veines. DOSAGE DE LA VIRULENCE POUR LES SOURIS BLANCHES [: — INOCULATION SOUS LA PEAU. Avec une culture de 24 heures en bouillon peptonisé, on fait une série de dilutions de 1 p. 2.500 à 4 p. 4 milliard, on inocule sous la peau chaque dilution à 3 souris, à la dose de 1 cent. cube pour chaque souris, et, en même temps, pour se rendre compte de la quantité de microbes injectés, on ense- mence 4 cent. cube de chaque dilution sur plusieurs plaques de gélose. Voici les résultats que nous avons obtenus : Exe. 1. DILUTIONS SOURIS MORTES EN NOMBRE DE COLONIES 1 pour 2.500 . 3 à 4 jours innombrables 1 pour :25:000 - . . 3 à 4 jours innombrables 1 pour 250.000 . . . 7 à 8 jours innombrables 1 pour 500.000 . . . 4 à 5 jours plus de 40.000 1 pour 1 million . 4 à 6 jours 17.000 1 pour 2 millions. 5 à 6 jours 3.000 1 pour 5 millions. 5 à 6 jours 1.600 1 pour 10 millions, 5 à 6 jours 600 1 pour 20 millions. T à 8 jours 270 1 pour 40 millions. 4 à 5 jours 130 1 pour 100 millions. 4 à 5 jours 60 1 pour 4 milliard. Sur 6 souris, 4 meurent 10 à 30 en 5 à 8 jours; 2 survivent. IL. = INFECTION PAR INTRODUCTION DE MICROBES DANS LA BOUCHE. Avec la même culture qui a servi à |’expérience précédente, on fait des dilutions dont 0,05 cent. cube correspond à 1 cent. cube des dilutions à 1 p. 2.500, 25.000, 250.000, 500.000 et 5 millions, et on introduit 0,05 cent. cube de cha- 4 ESSAIS DIMMUNISATION DES PETITS RONGEURS 59 cune de ces dilutions dans la bouche de chaque souris à l'aide d'une canule appropriée. Exp. 2. DILUTIONS NOMBRE DES SOURIS RÉSULTATS ‘pour 2500. 3 mortes en 4 à 8 jours. AS pour 25-000: . . 3 mortes en 5 à 12 jours. 4 pour 250.006... 3 mortes en 5 à 12 jours. 1 pour 500.000. . . 13 5 souris mortes en 5 à 8 jours, 8 restent vivantes. 1 pour 5 millions. 13 toutes restent vivantes. La dose minima mortelle serait donc un peu plus grande que 1 cent. cube d’une dilution à 1 p. 500.000, c'est-à-dire qu'il faut introduire dans la bouche de l'animal environ 40.000 microbes pour qu'un certain nombre de ces microbes (au moins 10 à 30) puissent pénétrer dans le sang et donner à l'animal une infec- tion mortelle. Nous avons constaté, en effet, en prélevant et en ensemencant sur gélose quelques gouttes de sang de toutes les souris en expériences, que le sang des souris qui ont fini par succomber contenait toviours des microbes en plus ou moins grande quantité, tandis que celles qui ont survécu ont donné toujours des ensemencements stériles. Il est donc plus que probable que les souris qui ont survécu ont réussi à détruire dans la bouche et dans le tube digestif tous les microbes ingérés et échappèrent ainsi à l'infection pro- prement dite. Ces mèmes souris infectées à nouveau 15 jours plus tard de la même manière, mais avec une dose de microbes plus forte, ont succombé en mème temps que les témoins. IT]. — INFECTION AVEC DU PAIN MOUILLÉ AVEC DES CULTURES VIRULENTES. Une culture préparée de la méme facon que précédemment est diluée à 4 p. 50, 500, 5.000, 50.000 et 500.000. On fait absorber 2 cent. cubes de chacune de ces dilutions par 2 petits cubes de pain et on donne à manger ces 2 petits cubes à chaque souris. Toutes les souris sont placées une à une dans des bocaux ‘séparés, et privées de toute autre nourriture pendant 24 heures. Dans tous les bocaux le pain ainsi préparé a été mangé com- plétement. 60 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Exp. 3. DIT.UTIONS NOMBRE DES SOURIS RÉSULTATS 1/50 3 souris mortes en 5 jours. 1/500 3 souris mortes en 5 jours. 1/5.000 3 souris mortes en 6 jours. 1/50.000 3 souris 2 souris mortes en 6 jours, 1 souris reste vivante. 1/500.000 3 souris toutes restent vivantes. La dose minima mortelle pour du virus mélangé avec du pain serait done à peu près égale à 1 cent. cube d’une dilution à 1 p. 25.000, soit plusieurs millions de microbes. Il est done cer- tain que, dans ce cas, immense majorité de microbes périssent dans les différents changements de milieu qu’on leur fait subir, dans le pain avant que les souris l’aient mangé et ensuite dans le tube digestif. Le nombre de microbes nécessaires pour tuer les souris par les différents modes d’infection que nous venons d'indiquer nest, bien entendu, que très approximatif, et il n’est guère possible de chercher dans ces expériences une précision plus grande; mais on peut dire que, si pour l'infection par inocula- tion sous la peau la dose sûrement mortelle est de quelques unités, ou de quelques dizaines de microbes, il en faut quelques milliers pour produire le même effet, quand on introduit la culture telle quelle dans la bouche et quelques millions quand on la donne à manger avec du pain. ESSAIS DE VACCINATION Nous avons vu plus haut que les bac. typhi murium donnent aux petits rongeurs une maladie présentant quelques analogies avec la fièvre typhoide ou paratyphoide de l’homme: il nous a donc semblé intéressant de rechercher s'il est possible de vac- ciner ces animaux contre cette maladie ou les en guérir par un sérum spécifique, et surtout s’il est possible d'apprécier la valeur d'un vaccin ou d’un sérum pour une maladie naturelle d’après son action sur les maladies artificielles provoquées par l’inocu- lation du virus typhique sous la peau ou dans le péritoine. De nombreuses expériences ont montré qu'il est possible, de vacciner les cobayes contre une inoculation mortelle du bac. d'Eberth et qu'un sérum suffisamment actif peut les en guérir, ESSAIS D'IMMUNISATION DES PETITS RONGEURS 61 et Brückner [6j a pu vacciner avec succès les souris blanches contre un paratyphique B qui les tuait par injection sous- cutanée à la dose de 0,1 cent. cube de culture et était avirulent par ingestion. Brückner a nourri 16 souris pendant 9 jours de suite, avec des aliments trempés dans une culture de ce para- typhique B. Une seule souris a succombé pendant la vaccina- tion et son sang a donné une culture de paratyphique. Les survivantes et 10 souris témoins avaient été injectées ensuite avec une dose mortelle du même microbe. Une seule des souris traitées est morte en mème temps que les témoins, toutes les autres ont survécu. Les résultats que l’on obtient en cherchant à immuniser les souris ou les rats contre les paratyphiques naturellement patho- gènes sont loin d'être aussi favorables. Leffler [7] a essayé d’abord de vacciner des souris en les nourrissant plus ou moins longtemps avec des émulsions de son bac. typhi murium chaullées à 70 degrés. Il a obtenu les résultats suivants : 8 souris ont reçu à manger ces émulsions 17 fois en 29 jours. De ces 8 souris, 4 sont mortes pendant la vaccination, 1 avait été sacrifiée pour étude des propriétés agglutinantes de son sérum ; des 3 dernières, contaminées une première fois, 18 jours après la dernière vaccination, 1. a succombé le 11° jour, les 2 autres ont survécu à cette première infection, mais ont succombé a une deuxiéme contamination faite 7 jours aprés la premiére. En même temps Leeffler vaccinait des campagnols par imo- culation avec les mêmes microbes séchés et chauffés à sec à 120 degrés pendant 2 heures ou à 150 degrés pendant 1 heure. Le produit ainsi obtenu s’est montré très toxique, une dose supérieure à 0,1 milligramme inoculée sous la peau tuait tous les campagnols. Tous les animaux vaccinés deux fois à 3 semaines d'inter- valle et contaminés 18 jours après la deuxième vaccination ont succombé en même temps que les témoins. Le même savant à réussi plus tard [8] à vacciner avec succès quelques souris en leur injectant à plusieurs reprises un virus séché et tué par un chauffage à 75 degrés pendant 7 à 8 jours. Les souris ainsi traitées ont supporté ensuite 10 doses mortelles du même virus vivant inoculé sous la peau, mais nous verrons 62 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR plus loin que le méme traitement appliqué aux souris avec notre virus, nous a donné des résultats moins favorables. Eïjiro Yoshida [9] a cherché à immuniser les souris et les campagnols contre le bac. typhi murium de Leeffler en les nourrissant pendant 1 à 30 jours avec les cultures = paraty- phique B vivantes, mais non virulentes. Sur 24 souris ainsi traitées, 7 ont résisté & une premiére infection et 3 de ces T à une deuxième infection. La même expérience répétée avec le paratyphique A et le bac. d'Eberth, pris comme vaccins, lui a donné toujours des résultats négalifs. Les essais de vaccination par des injections sous-cutanées, répétées 3 fois à 10 jours d'intervalle, du mème paratyphique B, n'ont donné aucun résultat quand on infectait les souris par la bouche, mais ont permis de sauver quelques souris inoculées sous la peau. M'e Edna Steinhardt et M. Th. Tournoy [10] ont fait sur le méme sujet une longue série d’expériences avec le bac. Danysz. Ils ont trouvé qu'il est impossible de vacciner les souris, mais que l’on peut immuniser wae certaine proportion de rats. Les résultats de ces expériences indiquent donc nettement que, sil est possible d’immuniser les souris contre un virus qui ne les tue que par inoculation sous la peau, il est presque impossible de les vacciner contre un microbe naturellement pathogène et que, dans ce dernier cas, l'infection par la bouche est aussi dangereuse que l'infection par inoculation seus la peau. Toutefois, en considérant la très grande virulence du bac. typhi murium pour les petits rongeurs, nous avons pensé que, dans les travaux que nous venons de résumer, on n'a pas suffisamment tenu compte de ce fait et il nous a semblé inté- ressant de répéter ces expériences, en éprouvant les animaux (railés par des vaccins, par des doses /nites mortelles (exp. 1, 2 et 3), pour nous rapprocher autant que possible des conditions dans lesquelles un animal peut s'infecter normalement. Nous avons donc traité des séries de souris blanches par tous les vaccins découverts jusqu’à présent et essayés dans la lièvre typhoide et notamment : 1° Cultures chauffées en bouillon ou en émulsion dans l’eau physiologique (méthode de Chantemesse) ; ESSAIS D'IMMUNISATION DES PETITS RONGEURS 63 2° Cultures tuées. par l'éther (méthode de Vincent); 3° Cultures sensibilisées (méthode de Besredka); 4° Cultures séchées et chauffées à sec (méthode de Lœïfler). VACCINATION AVEC DES CULTURES OU EMULSIONS CHAUFFÉES. (Méthode de Chantemesse. ) 1° Traitement par une seule injection d'une culture chauffée en ampoules scellées : a) pendant 1 heure à 60 degrés; 4) pen- dant 15 minutes à 75 degrés ; c) pendant 5 minutes à 100 degrés. On prépare la même série de vaccins avec une culture en bouillon de 24 heures et, pour éviter les effets toxiques de la peptone, avec une émulsion dans l’eau physiologique d’une culture sur gélose, en prenant soin d’avoir la même quantité de microbes dans les deux cas. Exe. 4. — Les doses injectées étaient de 0,1, 0,2, 0,4, 0,6 et 0,8 cent. cube. Pour chaque dose on a pris 2 souris pour la culture en bouillon et 2 souris pour l'émulsion dans l’eau physiologique, — soit 20 souris en tout. Toutes les souris ont très bien supporté ces injections. Résultats. — On éprouve 26 jours après, 10 souris par infection par la bouche et 10 souris par inoculation sous la peau. Dans les deux cas, les doses d'épreuve étaient minima mortelles. Résultats. — Les souris traitées sont mortes en mêmetemps que les témoins. 2° Traitement par deux injections. Exp. 5. — On traite 20 souris exactement dans les mêmes conditions que dans l'expérience précédente, avec cette seule différence qu elles reçoivent 2 injections de vaccin à 15 jours d'intervalle. Résultats. — Toutes ces souris éprouvées 20 jours après la 2° injection meurent, quelques-unes avec un léger retard sur les témoins. 3° Le traitement des souris par 3 injections répétées à 15 et 20 jours d'intervalle n'a pas eu plus de succès (Exp. 6). Exp. 7. — Dix souris sont nourries pendant 10 jours de suite avec de grandes quantités de microbes tués par un chauffage à 65 degrés pendant 1 heure. Toutes ces souris ont succombé en même temps que les témoins. VACCINATION AVEC DES CULTURES TUÉES PAR L'ÉTHER. (Méthode de Vincent.) Les cultures tuées par l’éther se sont montrées plus toxiques que celles tuées par la chaleur en ampoules scellées. Les doses 64 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR de 0,1 cent. cube dans le péritoine et de 0,5 cent. cube sous la peau tuent toutes les souris. Exp. 8. — Une série de souris sont injectées sous la peau, deux fois a 20 jours d'intervalle, avec 0,1 cent. cube de vaccin, d’autres avec 0,2 cent. cube du même vaccin. Toutes supportent bien ce traitement. Résultats. — Une première épreuve (contamination par la bouche avec une dose minima mortelle), faite 25 jours après la dernière injection donne 2 souris mortes sur 6, de celles qui ont reçu deux injections de 0,4 cent. cube de vaccin et toutes celles qui ont recu 0,2 cent. cube de vaccin. Les 4 souris qui survivent sont éprouvées 20 jours après par une dose de virus un peu plus forte et meurent en même temps que les témoins. VACCINATION AVEC DES MICROBES SÉCHÉS ET TUÉS PAR UNE CHALEUR SÈCHE DE 75 DEGRÉS. (Méthode de Loeffler.) Nous avons vu plus haut que Leeffler préparait son vaccin en chauffant le virus, préalablement séché a 75 degrés pendant 7 à 8 jours. Nous avons constaté que les microbes provenant d’un raclage d’une culture sur gélose, séchés dans le vide sur de l'acide sulfurique et chauffés ensuite à 75 degrés à sec, n’ont jamais pu être tués en si peu de temps, — et que le temps nécessaire pour tuer sûrement tous les microbes dépendait de l'épaisseur de la couche de microbes soumis à ce traitement. Ainsi, il fallait 12 jours pour tuer 1 centigramme de microbes étalés sur une plaque de verre, 15 jours pour 1 décigramme et 35 jours de chauffage pour tuer 1 gramme de microbes étalés de la même façon sur une plaque de verre. Beaucoup de précision et un contrôle très rigoureux sont donc nécessaires pour préparer ce vaccin ui, bien préparé, n'est pas très toxique. Les souris en supportent très bien 2 milligrammes en injection sous-cutanée. Exp. 9. — On injecte deux fois de suite à 15 jours d'intervalle 3 séries de souris avec 0,01 milligramme, 0,1 milligramme et 1 milligramme d'une culture chauffée à sec et émulsionnée ensuite dans l’eau physiologique. Résultats. — Toutes ces souris sont éprouvées 20 jours après par une pre- miere ingestion avec une dose limite mortelle qui a tué 5 souris sur 6. Sur 9 souris vaccinées, 3 meurent en même temps que les témoins, 6 survivent. Ces dernières sont éprouvées une deuxième fois avec une dose dix fois plus forte, elles meurent loutes en même temps que les témoins. ESSAIS D’IMMUNISATION DES PETITS RONGEURS 65 VACCINATION AVEC DES MICROBES SENSIBILISÉS SÉCHÉS ET TUES ENSUITE PAR UNE CHALEUR SÈCHE DE 75 DEGRÉS. (Méthode de Besredka modifiée.) Les essais de vaccination par les cultures virulentes sensi- bilisées à l’aide d’un sérum qui les agglutinait dans des dilu- tions à 4 p. 2.000 ne nous ont donné aucun résultat appré- ciable. Les microbes restaient toujours agglomérés, de sorte que, dans les dilutions plus fortes que 1 p. 10 millions, les mêmes quantités de liquide étaient tantôt mortelles, {tantôt ne produisaient aucun effet, et, comme les souris qui ont bien sup- porté la premiére injection succombaient souvent a la seconde, il n'était guère possible de savoir si, à la première injection, elles ont bien reçu quelques microbes sous la peau ou non. D'ailleurs, toutes les souris qui ont survécu à une ou deux de ces injections sont mortes plus tard à la suite de linfection d’épreuve. Toutefois, comme la méthode de Læffler semblait donner des résultats un peu meilleurs que les deux méthodes précé- dentes, nous avons eu l'idée de la combiner avec celle de Besredka, c'est-à-dire de dessécher et de chauffér à sec des microbes préalablement sensibilisés. Exe. 10. — On injecte 9 souris, deux fois à 15 jours d'intervalle avec 0,01 milligramme, 0,1 milligramme et 1 milligramme du vaccin ainsi préparé ire épreuve par infection par la bouche avec une dose limile mortelle : 1 souris meurt, 8 survivent. 2° épreuve, 17 jours après la précédente avec une dose de virus dix fois supérieure : 7 souris meurent en même temps que les témoins, 1 seule souris survit. De cette série d'expériences on peut donc conclure qu avec les méthodes que nous venons d'indiquer, la vaccination des souris contre le bac. typhi murium, type B, n'est pas pratiquement possible; mais, en comparant les résultats obtenus par les quatre méthodes essayées, on est obligé de reconnaitre que c'est le virus chauffé à sec, et surtout le virus chauffé à sec et préalablement sensibilisé, qui donne les résultats les meilleurs. Les souris traitées par cette dernière méthode résistent, en effet, presque toutes à une première infection et une sur huit a D 66 ANNALES DE LINSTITUT PASTEUR résisté à une deuxième infection plus sévère, tandis que le virus chauffé en ampoules a donné des résultats absolument négatifs et le virus tué par l'éther n'a vacciné que 2 souris sur 12 contre une première infection, mais n'a empêché la mort d'aucune des survivantes soumises à une deuxième infection plus sévère. VACCINATION DE RATS Les résultats à peu près négatifs de nos essais de vaccination de souris sont dus probablement à ce fait que les souris sont d’une sensibilité pour ainsi dire absolue à l’action de ce virus. L’in- jection de quelques microbes suffit pour les tuer el, sur des milliers de souris que nous avons sacrifiées pour les essais de virulence de nos cultures, nous n’en avons pas vu une seule quérir après une infection certaine, — c'est-à-dire après que son sang avait été envahi par les microbes. Nous avons, par contre, observé quelquefois des cas de maladie incontestables suivis d'une guérison spontanée chez les rats, et ilétait naturel d’en conclure que ces animaux, capables de com- battre victorieusement cette infection, seraient aussi plus faciles à vacciner que les souris. La virulence de nos cultures pour les rats est de beaucoup moindre que pour les souris, et, comme les rats d’égout que l'on peut se procurer à Paris ont pu vivre dans des milieux fort différents et acquérir des sensibilités aux infections trés variables, un dosage de la virulence aussi exact que celui que nous avons établi pour les souris était à peu près impossible. Toutefois, une longue série d'essais nous a permis de constater qu'une dose de 0,01 cent. cube d’une culture de 24 heures inoculée sous la peau était sûrement mortelle, et qu'une dose de 0,4 cent. cube de la même culture introduite dans la bouche tuait 95 rats sur 100. Contrairement à ce que nous avons vu chez les souris, les humeurs de rats sont done capables de détruire un grand nombre de microbes, fait que nous avons pu confirmer en soumettant ces derniers in vitro à l'action du sérum de souris et du sérum de rat. — Nous avons constaté que le sérum de souris favorisait le développement des microbes, tandis que le sérum de rats s’est montré fortement bactéricide. ESSAIS D'IMMUNISATION DES PETITS RONGEURS 67 Vaccination par des cultures chauffées en ampoules pendant une heure à 60 degrés. Exp. 11. — 10 rats gris reçoivent sous la peau 0,1 cent. cube de vaccin deux fois de suite à 15 jours d'intervalle. Eprouvés 15 jours plus tard, ils meurent tous en 2 à 21 jours. Vaccination par les cultures tuées par l'éther. Exp. 12. — L'expérience faite exactement dans les mêmes conditions que la précédente a donné aussi exactement les mêmes résultats. Ces deux modes de vaccination ont donc donné des résul- tats complètement négatifs. Vaccination par des microbes séchés et chauffés à sec. Exp. 13. — 10 rats recoivent sous la peau deux injections, a 15 jours d'intervalle, de 4 milligrammes de culture séchée et chauffée pendant 35 jours à 75 degrés. Pour éprouver la toxicité de ce vaccin, on injecte à 3 rats, une seule fois, respectivement 4, 6 et 10 centigrammes de la même culture. Ces doses énormes sont très bien supportées, les animaux inoculés pré- sentent des œdèmes plus ou moins étendus à l'endroit de l'injection, mais ces réactions locales ne sont pas douloureuses et ne sont le siège d'aucun processus inflammatoire. Tous ces rats sont éprouvés: les 10 premiers 20 jours après la deuxième injection, les 3 derniers 35 jours après l'injection du vaccin. Ils reçoivent tous 0,4 cent. cube d’une culture de 24 heures dans la bouche. Des 10 premiers, 8 rats meurent en 8 à 11 jours, 2 survivent, des 3 der- niers À survit. Vaccination par injection d'une faible dose de culture vivante. Exp. 14. — 10 rats recoivent dans la bouche 0,1 cent. cube d'une dilution au centième d'une culture de 24 heures. Un de ces rats meurt 3 jours, un autre 19 jours apres cette injection. Tous les deux ont du virus dans le sang. Les 8 survivants sont éprouvés 25 jours après l'injection par 0,4 cent. cube dune culture de 24 heures dans la bouche. 4 de ces rats meurent en 2, 4, 8 et 13 jours, les 4 autres survivent. Cette méthode de vaccination (virus vivant) donne donc des résultats moins bons que la vaccination par les microbes séchés et tués par la chaleur séche et présente, en outre, l'inconvénient d’étre moins précise. Il est impossible de savoir si les rats qui ont résisté à l’épreuve n'étaient pas réfractaires à l’action du virus. 68 ANNALES DE LINSTITUT PASTEUR Les essais de traitement préventif ou curatif des souris par un sérum d'animaux fortement immunisés n'ont pas eu de résultats plus heureux que les essais de vaccination. Les sérums de chèvres et de lapins immunisés pendant plus de six mois par des cultures mortes d’abord, et ensuite par des cultures vivantes injectées dans les veines, ne préservait pas les souris à la dose de 1 cent. cube contre une infection sim- plement mortelle. VACCINATION DES COBAYES Pour terminer cette étude, il nous a semblé important d’essayer de vacciner contre ce méme paratyphique les cobayes qui, ainsi que nous l’avons vu plus haut, sont complètement réfractaires à l'infection par la bouche et assez sensibles à Vinoculation des microbes dans le péritoine. Exp. 15. — Virulence du virus normal. 5 cobayes de 350 à 400 grammes reçoivent dans le péritoine, respectivement, 4, 0,8, 0,6, 0,4 et 0,1 cent. cube d’une culture en bouillon de 24 heures. Ils meurent, le 4er en 24 heures, les 4 autres en 2, 4, 5 et 6 jours. Exp. 16. — Virulence du virus sensibilisé. 5 cobayes recoivent chacun 0,1 cent. cube; 4 autres, respectivement, 1, 2, 3 et 5 cent. cubes de virus sensibilisé. Des 5 premiers, 2 meurent en 6 et 8 jours, 3 survivent. Les 4 autres meurent en 3, 4, 5 et 6 jours. Les 3 survivants et 2 témoins reçoivent, 15 jours plus tard, 0,2 cent. cube de virus normal dans le péritoine. Les cobayes vaccinés survivent, les témoins succombent en 5 et 6 jours. Ainsi, il a suffi d’une seule injection, il est vrai assez sévère, de virus sensibilisé pour ‘immuniser les cobayes contre une dose sûrement mortelle. Dans ce cas, la vaccination est donc relativement très facile et nous avons constaté aussi qu’il est assez facile d’immuniser les lapins par 1 ou 2 injections de cultures mortes sous la peau contre l’inoculation consécutive de virus vivant dans les veines. La facilité dimmunisation des animaux naturellement réfractaires à une maladie contre une péritonite ou une septi- ESSAIS: DIMMUNISATION DES PETITS RONGEURS 69 cémie artificielle ne permet donc pas de conclure à la possi- bilité de vaccination par les mémes méthodes des animaux naturellement sensibles à la mème maladie. CONCLUSIONS. a> tl est impossible de vacciner les souris par les méthodes connues jusqu'à présent contre le bac. typhi murium, type B, ni de les guérir par un sérum spécifique. 2° On pourrait supposer que cette impossibilité de vaccina- tion est due au manque absolu des moyens de défense naturels de l’organisme de la souris contre l’action du microbe; mais, comme il est presque tout aussi difficile de vacciner les rats, animaux bien moins sensibles,'on est obligé d’en conclure que ce fait est dû à une particularité inhérente à la nature du microbe. 3° Il est très facile de vacciner les animaux (cobayes et lapins) réfractaires à l'infection par la bouche ou par piqüre sous la peau contre les inoculations mortelles dans le péritoine ou dans les veines. 4° Il faut donc conclure que la possibilité de l’immunisation des animaux naturellement réfractaires à une maladie contre une infection provoquée artificiellement ne permet pas de con- clure qu'il sera possible d’immuniser par les mêmes méthodes les animaux naturellement sensibles à la même maladie. BIBLIOGRAPHIE 1. Mcntevs, Daum und Furst. — Untersuchungen über Bacterien der Enteritisgruppe, etc. Centralbl. f Bakt. Orig., Bd XLVIII, 1908. 2. K. Hurter. — Vergleichende Untersuchungen über den B. paratyph. B, den Bac. enteridis und die Rattenbacillen Danysz, Dunbar, Issatchenko, Neumann. Centralbl. f. Bakt. Orig., Bd LXII, p. 341. 3. J. Danysz. — Un microbe pathogène pour les rats. Annales de l'Institut Pasteur, 1900, p. 193. 4. Dusarvin-Beaumetz. — Transmission de la péripneumonie des bovidés aux espèces ovine et caprine. Annales de l'Institut Pasteur, 1906, p. 449. 5. S. S. Merescukowsky. — Ein neuer Närboden auf dem der Bac. Danysz selbst nach langdauernden, fortlaufenden Ueberimpfungen seine Virulenz nicht verliert. Centralbl. f. Bakt. Orig., Bd LXV, 1912, p. 393, 400 et 482. 70 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR S. S. Merescukowsky. — Die Beeinflüssung der Virulenz des Bac. Danysz durch fortlaufende Ueberimpfungen in Bouillon. Centralbl. f. Bakt. Orig., Bd LXII, 19f2, p. 64. 6. G. Bruckner. — Ueber ae imminente, Zeitschr. f. Immu- nitätsforsch. Orig., Bd VIII, 9 janvier 1911, p. 439. 7. F. Loerrter. — Ueber inmates per os. Leuthold Festschr., Bd I. 8. F. Lorrrcer. — Die Verwendung von trockenerhitzten Microorganis- men, etc. Deutsche med. Woch., 29 mai 1943, p. 1025. 9. Euio Yosuipa. — Ueber Immunisierung per os. Arch. f. Hyg., Bd LXIX, 4999, p. 21. 10. Epna Sreixmarpr and Tuomas FLourxoy, — The effect of specific vaccines on Rat Typhoid. The Journal of infectious Diseases. Vol. IX, 1911, p. 229. Le Gérant : G. Masson. Paris — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. + : I ' ; Ï mn i ‘ é : ot | 1 ho i hi 4 ï . nl . 1 4 + / { ï ' i ï i ’ ‘ pall 5 ï it { ‘ | | $ 11 ‘ i ‘ ï ‘ 1 1 i Ch ihe 1 ’ \e uh i \ J na x } ty 1 f ne fn 1 0 on: | É am à ñ 1 | ine ae | Li . on “À L eu , a 9 k : 7 aero eae a " a si 29° ANNEE FEVRIER 1945 N° 2 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX par A. LAVERAN. (Avec les planches I et II.) IV. — INFECTIONS NATURELLES OU EXPERIMENTALES PRODUITES CHEZ DIFFERENTES ESPECES ANIMALES À LA LEISHMANIA TROPICA |!) A. — Infection naturelle du chien par la Leishmania tropica. Plusieurs observateurs ont signalé l’existence chez les chiens, dans les pays où le bouton d'Orient est endémique, de lésions cutanées analogues à celles qu'on observe chez l'homme et, dans un certain nombre de cas, il a été démontré que ces lésions jétaient dues à la présence de Leishmania tropica ou d'une Leishmania très voisine de cette espèce. Les chiens de Delhi (Inde) présentent assez souvent des ulcères qui rappellent ceux que produit chez l'homme le bouton de Delhi; James a trouvé dans le pus de ces ulcères des spirilles en grand nombre qui sont peut-être les agents de la maladie (2). Dschunkowsky et Luhs ont observé, en Transcaucasie, un (1) Voir pour les premières parties du travail ces Annales, t. XXVIII, p. 823 et p. 885 et t. XXIX, p. 1. 2) S.-P. James, Scientific Mem. by Offic. of the med. a. sanit. Dep. of the Gov. ojélndia 1905, Ne Sv, ne 43: 72 ; ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR im chien très amaigri et anémié qui avait des ulcérations de la peau et des muqueuses; des Leishmania nombreuses existaient dans la rate, dans le foie et surtout dans la moelle osseuse; les auteurs ont recherché en vain ces parasites dans les ulcéra- tions (1). Neligan, le premier, a démontré qu'on observe chez le chien des lésions cutanées produites par une Leishmania. A Téhéran, le bouton d'Orient est commun chez le chien, comme chez l’homme, mais chez les chiens les Leishmania ne se trouvent pas seulement dans les lésions cutanées, elles se montrent aussi dans la rate, dans le foie et dans la moelle osseuse (2). S'agit-il d’une infection généralisée par L. tropica ou d’une infection mixte par L. tropica et par L. Donovani? Neligan pose la question. Une infection généralisée produite par la L. tropica semble peu probable; d'autre part, il est difficile de croire à une association, chez le chien, des infections dues à L. tropica et à L. Donovani, alors que cetle association ne s’observe jamais chez l’homme. Il y a une troisième hypothèse à faire, c'est que, peut-être, la leishmaniose cutanée du chien est pro- duite par une troisième espèce de Leishmania, ou du moins par une variété de la L. {ropica; on verra plus loin que cette hypo- thèse a été faite. Pedroso a observé, au mois de juillet 1912, dans la région nord-ouest du Brésil, 2 chiens qui avaient des ulcérations de la muqueuse nasale (3). L’un des chiens a été trouvé dans un village où il n'y avait qu'un cas de leishmaniose chez l’homme; le malade était atteint d'ulcérations du nez et de la gorge dont le début remontait à 5 années. Le chien était en mauvais état, il portait, en outre de Vulcération siégeant sur les bords de la narine gauche, des ulcérations cutanées; des frottis faits avec le produit du raclage de l’ulcération nasale permirent de constater l'existence de nombreuses Leishmania, identiques à celles du malade. Le maitre de l’autre chien avait un ulcère du pied diagnostiqué leishmaniose, et il faisait (1) E. Dscauxkowsky et J. Luss, IX° Congrès internat. de méd. vétér., La Haye, septembre 1909. - 2) A.-R. NeLIGAN, Jl. of trop. med., 15 mai 1913 et C.-M. Wenyon, Transact. of the Soc. of trop. med. a. hyg., juin 1914, t. VII, p. 215. 3) A.-M. Peproso, Annaes Paulistas de Medicina e Cirurgia, septembre 1943. LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 18 lécher cet ulcère par son chien qui se serait infecté ainsi directement, mais il est à noter que, dans ce second cas, l'examen histologique de l'ulcération nasale du chien n’a pas été fait, et que le diagnostic ne repose que sur l'aspect macro- scopique de cette ulcération et sur les circonstances étiolo- giques. G. Vianna quia examiné une coupe de la peau du nez du premier chien de Pedroso, infecté de leishmaniose, dit avoir vu des Leishmania dans les muscles lisses d’une artériole: d’après lui, la L. brasiliensis serait voisine du Schizolrypanum Cruzi (1). Yakimoff et Schokhor ont publié l'observation d’un chien du Turkestan qui était atteint de leishmaniose cutanée (2). Le chien, très amaigri, au poil rare, avait une conjonclivite purulente et présentait des ulcères sur le dos et sur un côté du cou. Les Leishmania trouvées dans les ulcérations atteignaient parfois 1:85 de long, sur 2435 de large, dimensions de beaucoup supérieures à celles de la L. tropica; les auteurs proposent de donner à l'agent de la leishmaniose cutanée du chien au Turkestan le nom de L. {ropica var. canina. En somme, la leishmaniose cutanée naturelle du chien esl rare, et quelques-uns des faits signalés semblent se rapporter à une ou à plusieurs Leishmania différant de L. tropica. Nous allons voir cependant que la L. tropica est inoculable au chien. | B. — Infections expérimentales produites chez différentes espèces animales par la Leishmania tropica, Curen. — Le bouton d'Orient est inoculable de l’homme au chien (3). 4 chiens inoculés par Nicolle et Manceaux sur des malades qui avaient contracté leurs boutons en Tunisie se sont infectés. Les inoculations intradermiques avaient porté sur le front, sur le nez ou sur l’une des paupières supérieures (1) Gaspar Vianna, Memorias do Inst. Oswaldo Cruz, 1914, t. VI, p. 40. (2) W.-L. Yakimorr et N.-L. Scnoknor, Soc. de path. exotique, 11 mars 1914. (3) C. Nicozce et L. Manceaux, Acad. des Sciences, % avril 1910, et Annales de UInst. Pasteur, septembre 1910. 74 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR des chiens. Après une incubation de 36 à 37 jours, on vil appa- raître, aux points d'inoculation, des boutons indurés qui pré- sentèrent une évolution tout à fait comparable à celle des boutons d'Orient chez l'homme, d'une durée de 20 à 63 jours. On trouvait, à l’examen histologique des boutons, des Leish- mania typiques et l’ensemencement donnait des cultures de flagellés. L'inoculation, dans le péritoine du chien, de grandes quan- tités de cultures de L. tropica n'a rien donné; un chien de 6 kilogrammes qui avait reçu chaque ljour, pendant 5 jours, dans la cavité péritonéale ou dans le foie, 20 cultures de L. tropica, soit 100 cultures, ne s'est pas infecté; 3 mois après les inoculations, le chien a été sacrifié et on n’a trouvé aucune Leishmania dans les viscères ni dans la moelle osseuse. L'inoculation, dans la peau du nez d’un chien, de cultures du bouton d'Orient du chien, a donné un résultat positif; après une incubation de 80 jours, on a vu apparaître 2 boutons. Une première atleinte du bouton laisse à sa suite, chez le chien, un état dimmunité évident, écrivent Nicolle et Man- ceaux, mais ce résultat n'est obtenu que si la guérison du pre- mier bouton est complète; si la guérison est incomplète ou trop récente au moment de Vinoculation d’épreuve, il y a, au contraire, sensibilisation et la période d’incubation est rac- courcie. Chez un chien réinoculé le lendemain de l'apparition de son premier bouton, il y a eu réinfection rapide (incubation 8 jours) et grave; un autre chien réinoculé avec son propre bouton en pleine activilé a été réinfecté. Dans un travail postérieur, C. Nicolle et L. Manceaux constatent que l’immunité conférée par une première inocula- tion expérimentale de L. {ropica ne paraît ni bien solide ni bien durable chez le chien (1); ils citent l'exemple d'un chien guéri d'un double bouton qui, inoculé 5 mois et demi plus tard avec le virus humain, a présenté, après une incubation de 28 jours, un bouton très net, alors qu'un singe et un chien neufs, inoculés dans les mêmes conditions, ne s’infectaient pas. Nicolle et Manceaux ont obtenu des passages en série du bouton d'Orient de chien à chien et de singe à chien, ce qui 1) C. Nicozze et L. Manceacx, Soc. de path. exotique, 8 mars 1911. LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 75 leur a permis de garder le virus pendant plus d’une année au laboratoire. Wenyon a réussi à inoculer à un chien la leishmaniose cutanée américaine, par introduction directe dans le derme du virus humain; un jeune chien, inoculé dans la veine, ne s’est pas infecté (1). J'ai inoculé sans succès 2 chiens avec une culture de L. tro- pica obtenue d'un bouton de Delhi qui m'avait été envoyée de l'Inde par le D' Row; les premières inoculations avaient été pratiquées en différents points du corps, dans le derme ou dans le tissu conjonctif sous-cutané; des injections de fortes doses de cultures faites ensuite dans les veines restèrent aussi sans résultat. J'ai obtenu, au contraire, de beaux boutons chez les chiens en les inoculant sur des rats ou des souris infectés avec la L. tropica d'origine africaine, comme le prouve l’ observation résumée CI-après. Le mode le plus pratique d'inoculation du bouton d'Orient chez le chien me paraît être le suivant : on rase la base d'une oreille et, avec un vaccinoslyle chargé de virus, on fait 2 à 3 piqtres dans le derme. On peut aussi, chez les jeunes chiens dont la peau n’est pas dure, faire des inoculations a la face externe de la cuisse préalablement rasée. Le chien qui fait l'objet de l'observation suivante a été pré- senté à la Société de pathologie exotique dans la séance du 9 décembre 1914. Un chien âgé de 4 mois est inoculé, le 30 octobre 1914, avec le produit du broyage d’un testicule de rat ‘contenant des Leishmania en grand nombre; à l'aide d'un vaccinostyle chargé de virus je fais 3 piqüres à la base de l'oreille droite préalablement rasée.—7novembre,on ne constate encore rien aux points d'inoculation; je réinocule le chien avec le testicule d'une souris contenant des Leishmania en grand nombre; à l’aide d’un vaccinostyle chargé de virus, je fais 3 piqüres à la base de l'oreille gauche préalablement rasée, et avec la seringue de Pravaz j'injecte dans le derme, en 3 points de la face externe de la cuisse gauche, quelques gouttes du produit du broyage du testicule de la souris dilué dans l'eau physiologique. — 13 novembre, on sent un petit nodule à la base de l'oreille droite, au niveau d’une des piqüres dinoculation. — 24 nevembre, le nodule cutané de la base de l'oreille droite a grossi, il a le volume d'un grain de chénevis. La peau de la cuisse gauche, (1) C.-M. Wenyon, Jl. London School of trop. medicine, avril 1913. 76 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR . à la face externe, est épaissie et indurée au niveau des points d’inoculation. — 26 novembre, le bouton de l'oreille droite est ponctionné et dans le frottis fait avec le produit de la ponction je constate l'existence de Leishmania en grand nombre, libres ou incluses dans des éléments anatomiques quien sont souvent bourrés. — 29 novembre, le bouton de l'oreille droite a grossi, ila le volume d'un pois, il se forme de petites croûtes à la partie saillante ; on sent à côté un autre nodule, très petit. — 3 décembre, le premier bouton de l'oreille droite a pris le volume d'un gros pois et le deuxième bouton grossit. A la cuisse gauche, l'épaississement et linduration de la peau augmentent aux points d'inoculation, sans qu'on sente des boutons distincts comme à l'oreille. — 4 décembre, on sent un nodule à la base de l'oreille gauche au niveau d’un des points d’inoculation. Je ponctionne les 2 boutons de l'oreille droite et je constate, dans les produits des ponctions, l'existence de Leishmania en grand nombre. Je fends le plus gros bouton de l'oreille droite et, avec le produit de grattage, j'inocule un chien à l'oreille et à la cuisse droites. — 6 décembre, le bouton incisé suppure ; un troisième bouton s’est développé à l'oreille droite; le bouton de l'oreille gauche grossit. — 10 dé- cembre, des croûtes se forment à la surface des boutons de l'oreille droite et, au-dessous, on trouve un peu de pus. A la cuisse gauche, il existe des indurations de la peau au niveau des points d'inoculation. Une ponction faite au niveau d'une de ces indurations donne une goutte de sérosité sanguino- lente, contenant des Leishmania en assez grand nombre {Une goutte d’exsudat recueillie à la surface d'un bouton ulcéré de l'oreille droite montre des Leishmania nombreuses, et en bon état, malgré l'existence de la suppuration. — 12 décembre. Les boutons de l'oreille droite sont toujours couverts de croûtes. Le bouton de l'oreille gauche a augmenté de volume. On sent très nettement 3 boutons à la cuisse gauche, aux points d'inoculation. — 28 dé- cembre. Les boutons de l'oreille droite sont en bonne voie de cicatrisation; la sérosité fournie par un de ces boutons ne contient plus de Leishmania. Les boutons de l'oreille et de la cuisse gauches diminuent de volume. — 20 janvier 1915, tous les boutons sont en bonne voie de régression. Le chien inoculé le 4 décembre 1914 sur le précédent présente, à la date du 20 janvier 1915, un bouton de la grosseur d’un grain de chènevis à l'un des points d’inoculation de l'oreille droite. Une ponction de ce bouton donne une goutte de sérosité sanguinolente contenant des Leishmania non rares. Une jeune chienne inoculée, comme le chien qui fait l'objet de l'observation précédente sur une souris infectée de L. tropica (V. plus loin Souris) a présenté également de beaux boutons avec Leishmania nombreuses. Cuar. — Un chat inoculé directement par Wenyon avec le virus emprunlé à un bouton d'Orient a eu 2 nodules avec Leishmania, aux points d'inoculation (1). Nicolle et Manceaux ont inoculé sans succès 2 chats avec la L. tropica. (1) C.-M. Wenyon, Op. ci. aa rs ta PO LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 77 Singes. — Nicolle et Sicre ont réussi, les premiers, à à inoculer le bouton d'Orient au singe (1). Un Macacus sinicus a été ino- culé, le 25 mars 1908, sur un chamelier négre atteint depuis trois mois de boutons d’Orient contractés & Tébessa (Algérie) ; les inoculations intradermiques ont été faites dans les régions suivantes : paupières supérieures, arcades sourciliéres et racine du nez. Les lésions qui ont commencé à se montrer le 19 avril, 24 jours après Vinoculation, sont décrites comme il suit par MM. Nicolle et Sicre : « Du côté de l’arcade sourcilière du côté droit, la seule lésion produite a été un petit élément de 3 % millimètres de diamètre, rougeatre, ferme et non douloureux ; le 4 mai, nous ie trouvons légèrement excorié; le 4 mai, il est complètement guéri. « Les lésions des deux paupières et de la racine du nez ont présenté une évolution parallèle plus caractéristique et iden- tique, sauf la durée, à celle du bouton d'Orient humain. Elles ont débuté par la production d’une petite tache rouge sombre avec induration très légère et très limitée de la peau. A cette tache a fait suite une papule rapidement couverte de fines squames. En augmentant de volume, la lésion a pris l'aspect d'un petit tubercule dur, bien limité, non douloureux à la pression. L'accroissement des boutons a continué Jusqu'au 4% mai (13° jour), leurs caractères restant sensiblement les mêmes. Ces éléments mesurent alors de 6 à 8 millimètres de diamètre et l'on observe, autour d'eux, une très légère zone œdématiée et érythémateuse. Les jours suivants, les trois boutons ont commencé à suinter, probablement à la suite d’excoriations dues au grattage ; le liquide qui s'en écoule est clair; il se concrète en petites crotites jaunâtres. État station- naire jusqu'au 4 mai. A cette date, l'aspect est celui du clou de Gafsa ulcéré ; lorsqu'on soulève la croûte, on trouve au-dessous une petite ulcération, à bords assez réguliers, et assez profonde. Une légère suppuration s'est ensuite établie, puis les lésions ont très rapidement évolué vers la guérison. Celle-ci était complète le 9 mai. Nous n'avons observé à la suite aucune (4) C. Nrcozce et A. Srcre, Soc. de Biologie, 20 juin 1908 et Arch. de l'Inst. Pasteur de Tunis, juillet 1908. \ 78 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR cicatrice définitive. La durée de ces lésions a done été de 21 jours. » L'examen d'un petit fragment de tissu prélevé sur le bouton de la racine du nez a permis de constater l'existence de Leishmania typiques, et l'ensemencement du même bouton dans le milieu de Novy simplifié a donné une culture caracté- ristique de flagellés. Nicolle et Manceaux ont inoculé avec succès au moyen du virus humain du bouton d'Orient : un Macacus cynomolqus "incubation 37 jours, durée du bouton 26 jours) ; un M. rhesus (incubation 104 jours, durée une dizaine de jours) ; un M. inuus (incubation 37 jours, durée 11 jours). 3 M. sinicus inoculés dans le derme, avec des cultures de la L. tropica, se sont éga- lement infectés (incubation 38 à 68 jours, durée des boutons 38 à 90 jours). Les lieux d'élection pour les inoculations intra- dermiques ou par scarifications superficielles de la peau sont, d'après Nicolle et Manceaux, les arcades orbitaires, la base du nez et les paupières supérieures (1). Les inoculations faites dans la cavité péritonéale et dans le foie ont donné des résultats négatifs, malgré les fortes doses de cultures employées. Avec le virus des boutons du singe, les auteurs ont pu obtenir l’inoculation du singe en série (3 passages) et, 2 fois, celle de l'homme; dans un de ces cas, l’incubation a été excep- tionnellement longue puisqu'elle a atteint 7 mois. Le passage de singe à chien a aussi réussi. Un singe réinoculé, 10 jours aprés guérison de son premier bouton expérimental, avec un virus très actif pour un témoin, ne s’est pas réinfecté. Une première atteinte du bouton d'Orient confère au singe un certain degré de résistance, mais non une immunilé com- plète, contre le virus du kala-azar (2). « Une atteinte expérimentale de bouton d'Orient, écrit Nicolle, vaccine contre le bouton d'Orient, mais ne confère qu'un cerlain degré de résistance vis-à-vis du kala-azar ; une première atteinte du kala-azar vaccine contre le kala-azar et (4) C. Nicotte et L. Manceaux, Ann. de UInst. Pasteur, septembre 1910, Lt. XXIV, p. 682 et p. 699 et Soc. de path. exotique, 8 mars 1911. (2) C. Nicozze et L. Manceaux, Arch. de l'Inst. Pasteur de Tunis, 1909, p. 193. LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 79 contre le bouton d'Orient. Dans ces expériences, trop peu nombreuses pour que leur signification soit absolue, le virus du kala-azar semble se comporter par rapport à celui du bouton d'Orient, comme un virus fort par rapport à un virus faible » (1). R. Row a inoculé un Macacus sinicus, par scarifications, avec un bouton humain de Cambay (Inde). Au bout de 2 mois, 3 petits nodules apparurent aux points d’inoculation; au bout de 15 jours, les nodules avaient le volume de têtes d’épingles. Un des nodules fut incisé el, dans le liquide séro-sanguinolent recueilli sur la surface de seclion, on trouva de nombreuses Leishmania plus grandes que celles des boutons humains. Le contenu d’un des boutons ensemencé donna une belle culture qui fut inoculée à un singe avec résultat négatif. Au contraire, des singes inoculés directement avec le contenu des boutons du premier singe s infectérent (2). R. Row constate que les résultats de ses expériences difièrent un peu de ceux qui ont été obtenus par Nicolle quant a la durée de Pincubation et des lésions, aux caractères des boutons et‘au nombre des parasites; ces différences paraissent être sans importance (3). Le singe infecté par Row a pu être réinfecté avec le virus du bouton d'Orient un mois après l'apparition des premières lésions. On a vu, dans une autre partie de ce travail, que R. Row avait réussi à produire des boutons chez des singes avec le virus du kala-azar indien, comme avec le virus du bouton d'Orient, ce qui tendrait à rapprocher la L. Donovanr de la L. tropica. Wenyon a inoculé un babouin avec la leishmaniose cutanée d'origine américaine (4). F. Sant’ Anna a infecté, avec le virus d'un cas de leishma- niose cutanée de l’Amazone, deux cercopithèques par inocula- tion dans la peau de la région sus-orbitaire. Chez un des singes, l’ulcère qui s'est développé au point d’inoculation a ) W.-B. Letsuman, The quarterly Jl. of med., octobre 1911. ) C.-M. Wenyon, Jl. London School of trop. med., juillet 1912. 80 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR guéri rapidement, l’autre singe a été atteint d’une ulcération qui s'est beaucoup étendue. Un singe tnoculé sur le bord des narines, avec le virus emprunté à l'un des cercopithèques, s'est également infecté (1). J'ai réussi à infecter des singes : 1° au moyen de cultures du bouton de Delhi que je devais à l’obligeance du D" Row, de Bombay ; 2° au moyen du virus fourni par des souris infectées avec des cullures de la L. tropica provenant de l'Institut Pas- teur de Tunis. 6 Macacus cynomolgus, 2 M. sinicus et 1 Cynocephalus ont été inoculés avec les cultures du bouton de Delhi; les résultats des inoculations n’ont été positifs que chez un M. sinicus et chez un jeune M. cynomolqus. Le procédé qui m'a donné les meilleurs résultats a consisté à inoculer dans le derme, à l’aide d'un vaccinostyle, une culture riche en flagellés. Dans les 2 cas où les inoculations ont réussi, J'avais employé des cultures des premiers passages du virus provenant de l'Inde; les repiquages multipliés ont diminué la virulence de la L. tropica. Les inoculations ont été faites aux tempes ou à la face externe des cuisses; des inoculations faites sur les muqueuses (lèvres, orifices des fosses nasales) n'ont pas réussi. En présentant à la Société de pathologie exotique, le 9 octobre 1912, les deux singes infectés, j'ai décrit, comme il suit, les symptômes observés (2). Après une période d@incubation dont la durée n’a pas pu être fixée exactement, les 2 singes ayant été inoculés à plu- sieurs reprises, on à vu apparaître de petites indurations intra- dermiques aux points d'inoculation. « L’induration qui, au début, présente à peine le volume d’un grain de millet, peut acquérir celui d'un grain de chènevis ou même d’un pois; il n’y ani rougeur inflammatoire, ni douleur apparente à la pression. Lorsque le bouton a pris le volume d’un grain de chènevis ou d’un pois, il s'acumine et, si on l’incise, on constate souvent qu'il existe sous l’épiderme une gouttelette d'un liquide épais, blanchâtre. Si l'incision est faite trop tot, on ne trouve pas de l) F. Sant’Anna, Medicina conlemporanea, 2% août 1913. (2) A. Laveran, Bull. de la Soc. de path. exotique, t. V, p. 574. LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 81 gouttelette liquide, mais seulement un tissu dense qu'il faut gratter avec le scalpel pour obtenir la matière d'un frottis. « Les boutons non incisés, comme les boutons incisés, se recouvrent d'ordinaire de petites croûtes brunâtres qui se détachent facilement en laissant voir des ulcérations sous- jacentes. Les boutons peuvent aussi se résorber. « Dans les frottis faits avec les croûtes ou avec la sérosité san- guinolente sous-jacente, les Leishmania sont rares, elles sont, au contraire, nombreuses ou assez nombreuses dans les frottis faits avec le produit de raclage du fond des ulcérations. Les parasites sont presque toujours libres, probablement parce que le raclage détruit les éléments analomiques dans lesquels ils étaient inclus; ils ont les dimensions et l'aspect caractéristique des L. tropica; on trouve des formes en voie de division. » Je résume les observations des 2 macaques qui se sontinfectés. 1° Un M. sinicus pesant 1 kilogr. 750 est inoculé, le 9 mai 1912, avec une culture de la Leishmania du bouton de Delhi; l'inoculation intradermique et sous-cutanée est faite à l'aide de la seringue de Pravaz à la face externe de la cuisse droite et à la lèvre inférieure. — 1°" juin, il n'y a pas d'induration aux points d'inoculation. Les 1er et 13 juin, on réinocule le singe avec une belle culture de la même Leishmania, à l'aide d’un vaccinostyle qui se prète mieux que la seringue de Pravaz aux inoculations intradermiques; 3 piqures sont faites à la tempe droite, 3 à la face externe de la cuisse droite. — 23 aout, deux des piqûres faites à la tempe sont le siège de nodules très nets,faciles à constater surtout lorsqu'on pince la peau à ce niveau; l'une des piqüres faites à la cuisse est {également le siège d'un nodule. — 30 août, les nodules de la tempe ont grossi. — 14 septembre, les nodules de la tempe et de la cuisse ont le volume de petits pois; le nodule de la cuisse recouvert d'une croûle a bien l'aspect d'un bouton d'Orient, — 16 septembre, après avoir enlevé la croûte qui recouvre le bouton de la cuisse, je fais des frotlis avec le produit du grattage de l'ulcération mise à nu. Dans ces frottis on voit, après coloration, des Leishmania lypiques, non rares. Les parasiles sont rares dans les frottis faits avec la croûte qui recouvrait l'ulcération. — 19 septembre, les nodules de la tempe, très apparents (Planche I), ne se sont pas encore ulcérés ; l'ulcération de la cuisse s’est un peu élargie, une croûte se reforme à sa surface. — 21 septembre, les boutons de la tempe se sont recouverts d’une croûte; dans les frottis faits avec le produit du grattage de ces boutons (après enlèvement des croûtelles), on trouve des Leishmania typiques, en petit nombre. — 30 septembre, les boutons de la tempe dimi- nuent de volume; l’ulcération de la cuisse qui mesure 1 centimètre au moins de diamètre est recouverte d’une croûte épaisse, elle a tout à fait l'aspect d'un bouton d'Orient. — Les boutons de la tempe et de la cuisse diminuent assez rapidement de volume et les ulcérations se cicatrisent ; la guérison est presque complète le 30 octobre; elle est complète le 20 novembre, au point de vue des lésions cutanées, mais l'état général devient mauvais; au mois de décembre, le singe maigrit beaucoup et meurt le 25 décembre 1912. 82 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Poids du singe, 1 kilogr. 370. La rate, petite, ne pèse que 4 grammes. Pas daltérations macroscopiques des viscéres pouvant expliquer la mort. Dans les frottis de foie, de rate et de moelle osseuse, on trouve de gros diplo- coques; il n'y a pas trace de Leishmania. 2° Un M. cynomolgus, né à la singerie de l'Institut Pasteur, le 8 août 1911, est inoculé à trois reprises, le 8 juin, le 13 juillet et le 31 août 1912, avec des cultures de la Leishmania du bouton de Delhi; chaque inoculation comprend 3 piqûres au vaccinostyle à la face externe de la cuisse droite et 3 piqures à la tempe du côté droit. — 19 septembre, on note, pour la première fois, des nodules à la face externe de la cuisse droite et à la tempe droile, aux points dinoculation. Les nodules ont la grosseur de grains de millet, ils sont intradermiques. — 25 septembre, les nodules ont grossi, ils atteignent le volume de grains de chénevis; on compte 3 nodules à la tempe droite, 2 à la face externe de la cuisse droite. Jincise un des nodules de la tempe et, avec le produit du grattage du derme épaissi, mis à nu, je fais un frottis dans lequel, après coloration, je constate l'existence de Leishmania nom- breuses, libres, probablement parce que les éléments anatomiques qui les contenaient ont été détruits par le grattage. — 2 octobre, un nouvel examen du produit de grattage du nodule, déja examiné le 25 septembre, montre des Leishmania typiques, assez nombreuses. — 4 octobre, un nouveau nodule s'est formé à la face externe de la cuisse droite. L’examen de frottis du con tenu dun nodule du front et d'un nodule de la cuisse montre des Leishmania typiques, mais plus rares que lors des examens précédents. — 12 octobre, les 3 boutons de la tempe et les 3 boutons de la cuisse qui se sont recou- verts de petites croûtes brunâtres sont toujours très apparents. — 17 octobre, un frottis fait avec le produit de grattage d'un bouton de la cuisse montre des Leishmania nombreuses ; un frottis d'un des boutons de Ja tempe montre des Leishmania non rares. — 24 octobre, les boutons de la tempe et de la cuisse sont encore très beaux, leur aspect est bien celui de boutons d'Orient. — 30 octobre, les boutons diminuent de volume, les petites ulcérations sous-jacentes aux croûtes tendent à se cicatriser; malgré cela, des frottis faits avec un bouton de la tempe et un bouton de la cuisse montrent encore des Leishmania non rares. — 14 novembre, les boutons sont encore recou- verts de croûtes. — 27 novembre, bien que les boutons soient tous en voie de cicatrisation, on trouve encore des Leishmania nombreuses dans un frottis d'un bouton de la cuisse; non rares dans un frottis d'un bouton de la tempe. — Le singe quia toujours été malingre et qui présente des déformations rachitiques du squelette est trouvé mort le 7 décembre 1912; il pèse 5.0 gr. La rate pèse 2 grammes. Les viscéres ne montrent pas d'altérations macro- scopiques. Le squelette du thorax et Jes os des membres inférieurs pré- sentent des déformations rachitiques très prononcées. L'examen de frottis de la rate, du foie et de la moelle osseuse ne révèle l'existence d'aucune Leishmania. Des tubes du milieu de Novy simplifié ensemencés avec la rate restent stériles. Avec le virus fourni par une souris infectée au moyen d’une culture de la L. tropica d'origine africaine, conservée à l'Institut Pasteur de Tunis, j'ai obtenu chez un M. cynomolgus, le seul qui fat à ma disposition, de très beaux boutons comme le prouve l'observation suivante. sn L'art LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 83 3° Un M. cynomolgus femelle, du poids de 4 kilogr. 990, est inoculé le 45 octobre 1914 avec le virus fourni par le testicule droit de la souris qui fait plus loin l'objet de l'observation 4. Avec un vaccinostyle enduit de la matière virulente, je fais trois piqüres à la tempe droite, et je pratique, à la face externe de la cuisse droite, trois petites injections intra et sous-der- miques avec le produit du broyage du testicule, dilué dans un peu d'eau physiologique. — 24 octobre, à la face externe de la cuisse droite, deux des points dinoculation, le supérieur et Vinférieur, sont le siège de nodosités intradermiques du volume de grains de chénevis. Rien d'anormal à la tempe droite. — 27 octobre, les deux nodosités de la cuisse ont grossi, elles ,se sont allongées suivant l'axe du membre; leur volume peut être comparé à celui de grains de blé. Les nodosités font une saillie très apparente; la peau a conservé son aspect normal. A la tempe droite, on distingue à l'œil et au palper trois petites nodosités; les deux plus grosses ont le volume de grains de chènevis. Avec une pipette fine, je ponctionne une des nodosités de la cuisse et je retire une parcelle dune matière blanchâtre qui, examinée en frottis coloré, montre des Leishmania en très grand nombre, libres pour la plupart, au milieu de leucocytes mono ou polynucléés. — 1° novembre, les deux nodosités de la cuisse continuent à augmenter de volume en s’éta- lant, elles ont maintenant la grosseur de petites amandes et, dans linter- valle, on distingue une troisième nodosité, plus petite, qui correspond au siège de la troisième inoculation. Les trois nodosités de la tempe ont aug- menté un peu de volume. La ponction de la deuxième grosse nodosité de la cuisse donne, comme celle de la première, une gouttelette de matière blan- châtre contenant des Leishmania en grand nombre. — 3 novembre, les nodo- sités de la cuisse ont encore un peu augmenté de volume, elles forment des saillies visibles de loin; des croûtes commencent à se former à la surface, la peau brunit et se dessèche. Les nodules de la tempe diminuent de volume, des croutelles brunâtres se sont formées aux parties saillantes; avec une de ces croûtelles que je détache, je fais un frottis dans lequel je trouve, au milieu de globules rouges et blancs, des Leishmania non rares.— 6 novembre, les boutons de la cuisse se couvrent de croûtes brunâtres au-dessous des- quelles suinte un exsudat puriforme; une goutte de cet exsudat examinée ne contient pas de Leishmania, — 3 décembre, les boutons de la tempe sont com- pletement cicatrisés; les boutons de la cuisse sont encore apparents, mais la sérosité sanguinolente obtenue par ponction de ces boutons ne contient plus de Leishmania. — 21 décembre, la guérison des boutons pouvant être consi- dérée comme complète, je réinocule le singe sur souris, dans les mêmes conditions que la première fois, mais du côté gauche. — 31 décembre, on constate aux points d'inoculation de petites élevures qui paraissent être inflammatoires; la ponction d'une de ces élevures donne une goutte de sang qui ne contient aucune Leishmania. — 11 janvier 1915, les petites élevures constatées à la suite de la seconde inoculation ont disparu complètement. Il est à remarquer que, chez ce macaque, les 6 inoculations faites le 15 octobre ont donné lieu à des lésions cutanées com- parables à celles du bouton d'Orient, et que l’incubation a été très courte, puisque 9 jours après Vinoculation on trouvait des nodosilés au niveau des piqûres. Le virus de la souris utilisé dans cette expérience s’est montré plus actif que la culture de 84 ANNALES DE L'INSTITUT. PASTEUR la Leishmania du bouton de Delhi utilisée antérieurement ; les altérations cutanées produites par les deux virus ont présenté d'ailleurs la plus grande ressemblance. Souris. — Delanoë a essayé sans succès d’infecter des souris en leur injectant, dans la cavité péritonéale, des cultures de L. tropica; il a constaté que les flagellés devenaient rapide- ment la proie des phagocytes (1). Wenyon a inoculé également sans succès des souris avec des cultures de L. tropica provenant d'un cas de leishmaniose cutanée d'Amérique, ou directement avec le virus du bouton (2). Gonder à réussi, au contraire, à obtenir des infections chez les souris avec des cultures de L. tropica provenant de l'Institut Pasteur de Tunis et ayant subi de nombreux repiquages (3). Les cultures contenant, en grand nombre, des flagellés longs et minces se sont montrées plus virulentes que celles qui con- tenaient beaucoup de petites formes rondes ou ovalaires agelomérées. Le liquide de culture était mélangé à un peu d’eau physiologique et on injectait, à une souris de 20 grammes, 1 cent. cube du mélange, dans la veine ou dans le péritoine. L'injection des cultures pures dans la veine a entrainé plu- sieurs fois la mort des souris, après quelques minutes ou après quelques heures. L'incubalion avec la L. fropica, comme avec la L. infantum, est de plusieurs mois. Les premiers parasites ont pu être trouvés par ponction du foie, chez une souris, au bout de 1 mois; au bout de 2 mois, chez une deuxième; au bout de 3 à 4 mois, chez les autres. Les souris infectées avec L. {ropica ne montrent en général, dit Gonder, aucun symptôme pendant les premiers mois après l'inoculalion, alors même que le foie et la rate sont parasités ; après 4 mois, on observe chez quelques animaux des signes très apparents, le ventre est ballonné, le foie et la rate sont hypertrophiés. Chez 2 souris qui ont succombé il y avait, dans le foie et dans la rate, une énorme quantité de parasites; le foie avait 4 à 5 fois et la rate 10 à 12 fois le volume normal. ) P. Devanok, Soc. de Biologie, 11 mars 1911. 1 (2) C.-M. Wenyon, Jl. London School trop. Med., avril 1913. (3) A. GonnEr, Arch. f. Sch. u. Trop. Hyg., 1913, t. XVII,.p. 397. . LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 85 Chez les autres souris, l'hypertrophie du foie et de la rate était moins marquée ; chez 2 souris, infectées cependant, il n’y avait pas d’hypertrophie du foie ni de la rate. Chez 4 souris, Gonder a vu survenir, 4 mois après l’ino- culation, de l'ædème des pattes; dans la sérosité de ces ceedémes, on trouvait des Leishmania nombreuses, libres ou intracel- lulaires. Des ædèmes avec Leishmania se sont montrés aussi aux oreilles et à la queue; au bout de quelques jours, les parties œdématiées se nécrosaient. 2 souris, qui, avant l’appa- rition des œdèmes, avaient montré à la ponction du foie des Leishmania assez nombreuses, n'avaient plus, après forma- tion de ces œdèmes, que des parasites rares dans le foie. Le foie et la rate avaient l'aspect normal. Une troisième souris qui avait montré un fort œdème aux pattes, à la queue et aux oreilles avait encore des parasites dans le foie, elle n’en avait plus dans la rate. Une quatrième, qui avait des ulcérations produites par les Leishmania, montrait en même temps des hypertrophies du foie et de la rate avec un grand nombre de Leishmania dans ces viscères, comme dans les ulcérations. Chez aucune des souris la moelle osseuse ne contenait de parasiles. | Les ulcérations ont pris souvent un grand développement. Chez une souris, une des pattes antérieures, chez une autre les creilles furent détruites. La queue est particulièrement alteinte ; chez une souris elle était réduite à un petit lambeau de chair. L’infection secondaire par les bactéries aggrave les accidents. Ce sont les parties du corps les moins fournies de poils qui sont les plus frappées : paltes, queue, oreilles. Gonder n'a pu produire aucune infection par la voie sous- cutanée, chez les souris, avec les cultures de la L. tropica; au contraire, avec les émulsions d’organes infectés (foie et rate) et avec les émulsions d’ulcérations il a obtenu, par cette voie, de belles infections, aprés une incubation de 5 & 6 semaines. Il n'y a pas de différence nolable entre les altérations du foie et de la rate dans les infections provoquées chez les souris par la L. tropica ou la L. infantum (1). Au stade initial des infections, les L. fropica trouvées dans le foie atteindraient des (1) Note du D' CREUTZFELD en post-scriplum au travail de Gonper. 86 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR dimensions plus grandes, d’après Gonder (jusqu'à 7 » de long sur 4 p de large), que les L. infantum (5 y de long au maximum sur 3 » 8 de large). | R. Row a constaté l'existence d’une leishmaniose généralisée chez une souris blanche dans le péritoine de laquelle il avait injecté, à quatre reprises, des cultures de L. tropica (1). Ces cultures provenaient de boutons de Cambay et de Bagdad; Row utilisait seulement des cultures de 4 à 7 semaines dans lesquelles on ne voyait plus que trés peu ou point de formes flagellées. La souris, sacrifiée 9 mois et 13 jours après la pre- mière inoculation, avait des lésions du foie et de la rate iden- tiques à celles qu'on observe chez les souris infectées par la L. Donovan; les Leishmania typiques abondaient dans la rate, dans le foie et dans la moelle osseuse. Des parcelles du foie, de la rate el de la moelle osseuse, ensemencées dans le milieu de Novy simplifié, donnèrent des cultures de flagellés caractéristiques. Il est à noter que la souris de Row n’a présenté aucune lésion tégumentaire. Le D° Row a bien voulu m'envoyer des préparations de la rate, du foie et de la moelle osseuse de cette souris; j'ai constaté l’existence de Leishmania typiques, nombreuses dans les frottis de rate et de moelle osseuse, plus rares dans les frottis du foie. Les parasites mesuraient 2 & à 3 » de long, sur 1 5 25 à 2 y de large. Ed. Sergent a inoculé, à Alger, 6 souris blanches, dans la veine ou dans le péritoine, avec des cultures d'une L. tropica isolée d'un bouton de Biskra; 5 souris sacrifiées 4 mois après l'inoculation ont montré des infections généralisées, sans lésions culanées; la sixième souris est restée indemne (2). En 1912, J'ai essayé d’infecter des souris blanches avec la culture de L. tropica qui m'avait été envoyée de l'Inde par le D' Row et qui provenait d’un bouton de Delhi; je me servais de cultures jeunes (de 12 à 15 jours) et les injections étaient faites sous la peau, dans le péritoiné ou dans la veine. Sur 10 souris inoculées, à plusieurs reprises pour la plupart, aucune ne sinfecta. (1) R. Row, Soc. de path. exotique, 8 avril 1914; Indian Jl. med. Research, avril 1914, p. 620. 2) Ep. SERGENT, Soc. de path. exolique, 13 janvier 1915. LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 87 En 1914, j’ai repris ces expériences en me servant cette fois de cultures de L. fropica provenant de l’Institut Pasteur de Tunis (de méme origine par conséquent que celles utilisées par Gonder), et ayant subi, depuis l'année 1909, un grand nombre de repiquages (1). Dans une première série d'expériences qui a porté sur 12 souris, le liquide de culture recueilli dans des tubes du milieu de Novy simplifié a été injecté pur, à plusieurs reprises, dans le péritoine des souris; suivant le conseil de Row, je me suis servi, non de cultures jeunes, mais de cultures âgées de 4 semaines environ dans lesquelles les formes sphériques ou ovalaires, peu mobiles, étaient plus nombreuses que les longues formes flagellées bien mobiles (2) Dans une deuxième série d'expériences, j'ai inoculé des souris dans un des testicules avee quelques gouttes de la cul- ture de L. tropica. Dans une troisième série, j'ai inoculé des souris dans le péri- toine ou sous la peau avec à produit du broyage des testicules d'un meriones ou de souris infectés de Leishmania au moyen de cultures. Sur 8 souris mâles, inoculées dans le péritoine avec des cultures de L. tropica,7 se sont infectées et ont présenté, après une incubation qui à été de plusieurs mois chez quelques-unes, des lésions caractéristiques ayant leur siège principal dans les testicules et dans le tissu cellulo-adipeux voisin. On peut résumer comme il suit l’évolution de l'infection (Obs. 1 à 4). Les testicules augmentent de volume et s'indurent ainsi que le tissu cellulo-adipe ux voisin; les testicules s’em- pâtent de plus en plus et il se forme, dans la région abdominale inférieure, une tumeur oblongue, transversale par rapport à l'axe longitudinal du corps, plus ou moins dure au toucher. De pelites eschares cutanées se montrent souvent au niveau de la tumeur ou bien à la queue qui peut être détruite en entier. Lorsque, à l’aide d’une pipette fine, on ponctionne la tumeur, on en relire facilement une goutte d'une sérosilé dans laquelle (1) C. Nicozce et Ep. Cuarron, Soc. de path. exolique, 9 décembre 1914. (2) Les premiers résultats de ces experiences ont été communiqués à l'Académie des Sciences dans la séance du 5 octobre 1914 et Ala Société de pathologie exotique dans la séance du 11 novembre 1914. 88 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR les Leishmania abondent. Chez les souris sacrifiées à une période avancée de l'infection, les testicules sont profondément altérés, hypertrophiés, déformés, indurés; la subslanee testi- culaire fait place à un tissu lardacé, et les testicules sont plus ou moins englobés dans une masse néoplasique. A l’examen histologique, on trouve dans les testicules, comme dans la masse néoplasique qui les enserre, des Leishmania en quantité prodigieuse. Sur souris femelles inoculées, dans le péritoine, avec des cultures de L. fropica, 2 se sont infectées; une de ces souris a eu un bouton à la paroi abdominale, et l'infection locale s’est compliquée chez elle d’une infection générale (Obs. 5); l’autre souris infectée est encore vivante. Des deux souris notées comme non infectées, l’une qui est morte n'avait de Leishmania ni dans le tissu cellulo-adipeux sous-péritonéal, ni dans la rate, ni dans le foie, l'autre est encore vivante, mais ne présente aucun signe de leishmaniose. Après avoir constaté que, chez les souris inoculées dans le péritoine avec des cultures de L. fropica, les parasites se mul- tipliaient principalement dans les testicules, j'ai supposé, comme il était naturel, que l’inoculation directe dans les testi- cules réussirait mieux encore que l inoculation intrapéritonéale, ce qui s'est vérifié. 5 souris inoculées, dans le testicule droit, avec quel- ques gouttes .de culture de L. fropica, se sont toutes intec- tées. Les symptômes et les lésions ont été les mêmes qu'après Vinoculation intrapéritonéale, mais l’ineubation a été beaucoup plus courte et l'évolution de Pinfection a élé plus rapide (Obs. 6). Sur 9 souris mâles inoculées, dans le périloine, avec le pro- duit du broyage de testicules d’un meriones ou de souris infec- tés avec L. tropica, 7 ont présenté des lésions typiques loca- lisées aux testicules et au tissu cellulo-adipeux voisin (Obs 10), 1 est encore en vie, avec infection douteuse, 1 est morte de seplicémie. La recherche des Leishmania dans la rate, dans le foie et dans la moelle osseuse a été négative chez toutes les souris de cette série autopsiées Jusqu'ici. De 2 souris femelles, inoculées, dans les mêmes conditions que les précédentes, lune est encore vivante et ne présente pas LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 89 de symplômes pouvant permettre d'affirmer l'existence de l'infection, l'autre est morte de septicémie. De 4 souris males inoculées, dans une des cuisses, avec le produit du broyage de testicules d’un meriones ou de souris infectés avec L. tropica, 2 ont eu des lésions locales (tissu conjonctif et peau) qui se sont propagées aux testicules (Obs. 7), 1 a présenté des lésions testiculaires semblables à celles obser- wées à la suile des inoculations intrapérilonéales, 1 est morte de septicémie. Dans aucun cas il n'y a eu infection géné- rale. Deux souris femelles inoculées, comme les précédentes, dans une des cuisses, ont présenté des lésions locales qui, chez l’une d'elles, se sont compliquées d'une infection générale (Obs. 8). En résumé, sur 34 souris inoculées avec la L.tropica, 26 se sont infectées, sur lesquelles 2 seulement ont présenté une infection générale, en même temps qu'une infection locale; chez 2 souris, encore vivantes, le résultat de l’inoculation est incertain ; 3 souris sont mortes de septicémie; 2 ne se sont pas infectées. La fréquence des gangrènes cutanées explique que la septi- cémie soit fréquente et qu'on observe souvent l'hypertrophie de la rate chez des souris qui n’ont pas de leishmaniose généra- lisée. La seplicémie est particulièrement fréquente chez les souris qui sont inoculées avec le produit du broyage de tumeurs testiculaires présentant déjà de petites eschares cutanées. Tandis que le virus du kala-azar indien ou méditerranéen s’alténue à la suite du passage par souris, le virus du bouton d'Orient provenant de la souris se montre très actif. On obtient facilement des infections au moyen d'inoculations de souris à souris (Obs. 9 et 10), et les infections ainsi produites ont une incubation plus courte et une évolution plus rapide que celles qui sont provoquées au moyen des cultures de L. tropica; on a vu plus haut qu'un macaque et des chiens, inoculés sur souris, ont présenté des boutons bien caractérisés et que la plupart des inoculations faites dans ces conditions ont réussi, ce qui n'est pas le cas lorsqu'on opère avec les cultures de L. tropica. A la suite des inoculations intrapéritonéales chez les souris males, ou intratesticulaires, les lésions se localisent d'ordinaire dans les testicules ef dans le tissu cellulo-adipeux voisin, 90 ANNALES DE L°INSTITUT PASTEUR comme il a été dit plus haut; à la suite des inoculations sous- cutanées, il se produit des œdèmes locaux, de la tuméfaction des ganglions lymphatiques correspondant au siège de l’inocu- lation, des boutons ou de petits abcès; quelquefois l'infection se généralise, ce que j'ai noté 2 fois sur 26. Les figures 1 et 2 donnent une idée de la quantité énorme de Leishmania que Von trouve dans les lésions locales. La figure 1 représente des éléments anatomiques parasités, vus dans des frottis faits avee le produit d’une ponction d’un testi- cule, chez une souris infectée de L. tropica, ou avec le tissu cellulo-adipeux voisin. Fie. 1. — 1-5, éléments parasités dans un frottis fait avec le produit d'une ponction d'un testicule chez une souris infectée par L. fropica. 1, grand élé- ment parasité. — 2-4, grands mononucléaires parasités ; les éléments 3 et 4 sont bourrés de Leishmania ; par suite, les noyaux ont été refoulés à la péri- phérie. — 5, polynucléaire avec 3 Leishmania. — 6, grande cellule du tissu conjonclif parasitée, dessinée dans un frottis fait avec le tissu cellulo-adipeux détaché au-dessus d'un testicule malade de la même souris: au milieu des éléments parasités on voit des Leishmania libres. — Gross., 1.000 D.environ. La figure 2 représente des éléments anatomiques parasités dessinés dans un frottis fait avec la matière puriforme fournie par le bouton cutané de la souris qui fait l'objet de Pobserva- tion 5. La quantité énorme des Leishinania explique la fréquence des gangrènes sèches. Les éléments anatomiques distendus par les parasites compriment les petits vaisseaux et l’oblitération de ces derniers entraîne la mortification des tissus. Dans les deux cas où il ya eu infection générale, c'est dans la rate et dans le foie que les Lershmania ont été trouvées en plus grand nombre; dans un des cas, les parasites étaient rares LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 94 dans la moelle osseuse; dans l’autre cas, la moelle osseuse a été notée comme indemne. Les Leishmania trouvées chez les souris infectées ont tous les caractères de la L. troprca. Les parasites sont libres ou inclus dans des éléments anatomiques (leucocytes mono ou polynucléaires, cellules endothéliales); ils ont d’ordinaire une forme ovalaire plus ou moins allongée et mesurent de 2» à 4» de long, sur 1 & à 2p de large, parfois la forme est sphé- rique. Dans chaque élément, après coloration, on distingue un Fic. 2. — Eléments dessinés dans un frottis fait avec la matière puriforme fournie par la tumeur cutanée de la souris 5 infectée par L. tropica. — 1-4, grands éléments parasités; dans les éléments 3 et 4 qui sont bourrés de Leishmania, les noyaux sont refoulés à la périphérie. — 5, 6, 7, mononucléaires parasités. — 8, 9, 10, polynucléaires parasités. Au milieu des éléments para- sités, on voit des Leishmania libres. Gross., 1.200 D. environ. noyau et un centrosome souvent bacilliforme. Dans les Lersh- mania en voie de multiplication par bipartition, on voit 2 noyaux et 1 ou 2 centrosomes, suivant que la division est plus ou moins avancée. L’ensemencement dans le milieu de Novy simplifié donne facilement de belles cultures de fla- gellés. La planche IT représente des éléments anatomiques forte- ment parasités dessinés dans des frottis de lésions observées chez des souris infectées par L. ¢ropica et des formes flagellées des cultures. Les éléments allongés reproduits dans la figure 9 92 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR ont été dessinés dans un frotlis d'un boutondu macaque, inoculé sur souris, qui fait l'objet de l'observation 3. Les L. /ropica inoculées sous la peau se multiplient lente- ment dans le tissu conjonctif et dans les ganglions lympha- tiques voisins du point d’inoculation; parfois l’infectioe, après inoculation dans une cuisse, gagne le tissu cellulo-adipeux abdominal et les testicules (Obs. 7); les lésions cutanées : bou- tons, abeés, eschares, ne sont pas rares. Inoculées dans le péritoine, à l'état préflagellé ou à l'état flagellé, les L. #ropica s'insinuent plus ou moins rapidement à travers le péritoine et se multiplient dans le tissu cellulo-adi- peux sous-jacent; les testicules sont un de leurs lieux d’élec- tion; ici encore les lésions cutanées et en particulier les eschares sont communes. Il est rare que les Leishmania soient trés nombreuses dans les ganglions lymphatiques et que ces derniers acquièrent, même au voisinage des points d'inoculation, un très gros volume. Je résume les observations de 10 souris blanches qui ont été inoculées avec succès soit avec des cultures de L. fropica, soit avec le produit du broyage de viscères d’un meriones ou de souris infectés par cette Leishmania. Une souris grise sauvage, inoculée dans les mémes condi- lions que les souris blanches, s’estinfectée comme ces dernières. 1° Une souris adulte, mâle, reçoit, dans le péritoine, les 18 et 22 mars, lev avril, 11 mai, 31 juillet, 8 aout et 4 septembre 1914 des injections de cul- tures de L. lropica; la quantité de culture injectée chaque fois varie de 0 c.c. 25 à 0c¢.c. 50. Jusqu'au mois de septembre 1914, la souris ne présente rien d’anormal. Le 25 septembre, je constate qu'il existe, à la face ventrale, deux plaques brunâtres situées l'une en avant de l'anus, l'autre en avant du pénis; ces plaques qui ont l'étendue de pièces de 20 centimes environ sont indurées, parcheminées; il s'agit évidemment de foyers de gangrene sèche. s La souris est sacrifiée le 26 septembre 1914; elle pèse 18 grammes; la rate, fortement hypertrophiée, pèse 33 centigr.; au-dessous des plaques gangréneuses, on trouve un peu de pus caséeux dans lequel les Leishmania, sont très rares. Les testicules sous-jacents sont altérés tous les deux; les altérations du testicule droit sont plus marquées que celles du testicule gauche ; les testicules sont gros, fortement indurés, difficilement reconnais- sables au milieu du tissu conjonetif el graisseux qui les enserre. Après avoir incisé le testicule droit, je fais-des frottis qui, colorés, montrent des Leish- mania typiques en nombre énorme, libres ou incluses dans des éléments anatomiques. Les parasites sont également très nombreux dans les frottis LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 93 faits avec un lambeau du tissu conjonctif induré détaché au-dessus du tes- ticule droit. Les Leishmanit se montrent beaucoup plus rares dans les frottis du testicule gauche que dans ceux du droit. Je m'attendais à trouver des Leishmania dans la rate qui était fortement hypertrophiée ; cette attente a été décue, je nai trouvé de parasites ni dans les frottis de rate, ni dans ceux de foie et de moelle osseuse. 20 Une souris adulte, mâle, reçoit, dans le péritoine, les 1+r, 8 et 15 avril, 46 mai et 21 juillet 1914, des injections de cultures de L. tropica. La quantité de culture injectée chaque fois varie de 0 c.e. 25 à 0 c.c. 50. Jusqu'au mois de septembre 1914, la souris ne présente rien d’anormal. Le 15 septembre, on constate une gangrène sèche de la queue qui fait de rapides progrès. Le 25 septembre, la queue esl tombée en entier et il existe à la face ventrale, en avant de l'anus, une plaque de gangrène sèche de la grandeur d'une pièce de 20 centimes environ. Les poils sont tombés à ce niveau, la peau est brunâtre, sèche, parcheminée, et l'on sent au-dessous une tumeur oblongue de consistance assez ferme. La souris dont l'état général ne paraît pas mauvais est sacrifiée le 25 sep- tembre; elle pèse 24 grammes; la rate, fortement hypertrophiée, pèse 35 centigrammes. Les testicules qui sont gros, indurés, infiltrés dune matière caséeuse, sont enlevés avec la plaque ventrale de gangrène sèche, à laquelle ils adhèrent. Après avoir incisé les testicules, je fais des frottis qui, colorés, montrent des Leishmania typiques en très grand nombre; les para- sites sont tantôt libres, tantôt inclus dans des éléments anatomiques. Je ne trouve de Leishmania ni dans les frottis de la rate, qui cependant a subi une forte hypertrophie, ni dans les frottis de foie ou de moelle osseuse. 3° Une souris adulte, male, recoit, dans le péritoine, les 28 mai, 11 et 25 juin, 10 juillet et 25 août 1914, des injections de cultures de L. tropica; la quantité de culture injectée chaque fois varie de 0 c.c. 25 à 0 e.c. 50. Jusqu'au mois de septembre, la souris ne présente rien d'anormal. Le 1°r octobre, on constate l'existence, en avant de l'anus, de deux petites taches brunatres de la grandeur de lentilles; la peau est, au niveau de ces taches, dure, des- séchée. En avant de ces points de gangrène sèche se trouve une tumeur saillante, dure, transversale par rapport à l'axe du corps, oecupant Fempla- cement normal des testicules. La souris est sacrifiée le 17 octobre ; elle pèse 24 grammes; la rate, forte- ment hypertrophiée, pèse 30 centigrammes. Après avoir incisé la paroi abdo- minale, on met à nu la tumeur qui est constituée par du tissu cellulo- adipeux très dense, induré ‘par places et, après enlèvement de ce tissu, on distingue les deux testicules hypertrophiés, indurés, présentant une surface très irrégulière. Le tissu normal testiculaire a fait place, presque partout, à un tissu lardacé, blanchatre. Dans les frottis du tissu de nouvelle formation qui recouvrait les testicules, et dans ceux des testicules, on trouve des Leishmania typiques en très grand nombre, libres ou ineluses dans des élé- ments anatomiques qui parfois en sont littéralement bourrés. On ne voit de Leishmania ni dans les frottis de la rate, pourtant hypertrophiée, ni dans les frottis de foie ou de moelle osseuse. 4° Une souris adulte, mâle, reçoit, dans le péritoine, les 28 mai, 6 et 25 juin, 10 juillet et 20 août 1914, des injections de eultures de L. tropica de 0 e.c. 25 à 0c.c. 50 chaque. Jusqu'au mois de septembre 1914 on ne constate rien 94 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR danormal. — 28 septembre, les testicules sont gros, bosselés, indurés ; il n’y a pas de lésion cutanée. — 7 octobre, les testicules sont dans le même état que le 28 septembre. — 11 octobre, on ponctionne le testicule droit et l'on obtient une gouttelette d'une matière blanchatre, puriforme, qui contient des Leishmania en quantilé énorme. — 14 octobre, toute la région testiculaire s'empâte, on ne distingue plus les testicules l’un de l’autre. Une goutte d'un exsudat sanguinolent obtenue par ponction de la région testiculaire est ense- mencée sur milieu de Novy simplifié ; à la date du 24 octobre, on obtient une culture très belle de flagellés typiques. La souris est sacrifiée le 45 octobre 1914, elle pèse 25 grammes; la rate pèse 11 centigrammes. Les testicules sont très gros, indurés, surtout à leur partie inférieure ; le tissu cellulo-adipeux qui entoure les testicules est également épaissi et induré par places. Dans les frottis faits avec les testicules, et avec le tissu cellulo- adipeux voisin, on trouve des Leishmania en quantité énorme, libres ou incluses dans des éléments anatomiques. Il n'y a de Leishmania ni dans la rate, ni dans le foie, ni dans la moelle osseuse. 5° Une souris adulte, femelle, reçoit, dans le péritoine, les 28 mai, 11 et 25 juin, 10 juillet et 20 août 1914, des injections de cultures de L. lropica. La quantité de culture pure injectée chaque fois varie de 0 c.c. 25 à 0 c.e. 50. Jusqu'au mois d'octobre 1914, la souris ne présente rien d'anormal. Le 44 octobre, on note à la paroi de l'abdomen, au niveau de la mamelle posté- rieure gauche, une induration de la grosseur d’un grain de chènevis, avec un point blanchâtre ; après avoir détaché l’épiderme à ce niveau, on peut enlever une parcelle de matière blanche, d'aspect caséeux, qui s'étale mal en frottis. Dans le frottis coloré, on voit des Leishmania, en nombre énorme, libres ou plus souvent incluses dans des éléments anatomiques (fig. 2). — 45 octobre, Vinduration persiste ; petite croûte brunâtre à la surface. — 49 octobre, Vinduration persiste; au-dessous de la croûte, on trouve une goutte de liquide puriforme qui contient encore des Leishmania, beaucoup moins nombreuses que lors du premier examen. — 29 octobre, la petite tumeur parait êlre en voie de résolution, il n'y a plus de suintement. — 2 novembre, il existe encore à la place de la tumeur une induration marquée. La souris est trouvée morte le 5 novembre 1914, elle pèse 19 grammes; la rate pèse 12 centigrammes. Le lissu cellulo-adipeux, situé dans l'abdomen, sur les côtés de la vessie, présente des indurations et des épaississements. Un frottis fait avec ce tissu montre des Leishmania en grand nombre, il en est de même d'un frottis fait avec la peau épaissie et indurée, siège de la petile tumeur abdominale. Il existe des Leishmania nombreuses dans le foie, non rares dans la rate, rares dans la moelle osseuse. La souris parait avoir succombé à l'infection générale. 6° Une souris adulte est inoculée les 10, 24 et 28 octobre, dans le testi- cule droit, avec des cultures récentes de L. lropica; on injecte chaque fois 2 gouttes de culture. — 11 novembre, le testicule droit est gros, induré. — 24 novembre, les deux testicules sont gros, indurés, empâtés. La peau pré- sente une petite eschare sèche, brunâtre, au niveau du testicule droit. Une ponction pratiquée dans le testicule droit donne une goutte de sérosité trouble qui contient des Leishmania en très grand nombre. — 11 décembre, la tumeur testiculaire augmente de volume et l’eschare s'étend. La souris est sacrifiée le 21 décembre 1914; elle pèse 19 grammes. Sous l'eschare, on trouve une couche de pus. Les testicules sont profondément LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 95 altérés, le droit surtout qui est à peine reconnaissable au milieu du tissu cellulo-adipeux épaissi qui l'entoure. Leishmania en très grand nombre dans le testicule gauche ; le testicule droit déjà atteint par la suppuration n'a pas été examiné. Leishmania non rares dans les ganglions inguinaux qui sont hypertrophiés. La rate, fortement augmentée de volume, pèse 20 centi- grammes. Il n’y a de Leishmania ni dans la rate, ni dans le foie, ni dans la moelle osseuse. 7° Une souris adulte, male, est inoculée le 30 septembre 1914, dans la cuisse gauche, avec le produit du broyage d’un testicule d'un meriones infecté de L. fropica. — 25 octobre, petite ulcération dans le pli de laine gauche, c'est-à-dire du côté de l'inoculation. Une goutte de sérosité fournie par l'ulcération contient des Leishmania en grand nombre. — 29 octobre, une petite croûte s'est formée à la surface de l'ulcération. — 3 et 10 novembre, l'ulcération de laine est toujours le siège d'un léger suintement. — 15 novembre 1914, la souris meurt brusquement pendant l'examen; elle pèse 20 grammes. La rate, très grosse, pèse 34 cenligrammes. Les testicules ont un aspect à peu près normal. Les ganglions inguinaux sont hypertrophiés des deux côtés. L'examen des frottis colorés donne les résultats suivants : Leishmania nombreuses dans le tissu cellulo-adipeux cedémateux de laine gauche, non rares dans le testicule gauche, très rares dans le droit. Aucun parasite dans les frottis de rate, de foie, ni de moelle osseuse. 8° Une souris adulte, femelle, est inoculée le 30 septembre 1914, dans la cuisse droite, avec le produit du broyage d'un testicule d’un meriones infecté de L. {ropica. Jusqu'au 21 décembre, on n’observe rien d’anormal. — 21 décembre, la souris est maigre, en mauvais état. La souris est sacrifiée le 23 décembre 1914; elle pèse 13 grammes. Les ganglions inguinaux sont hypertrophiés, le ganglion inguinal droit est plus eros que le gauche. La rate pése 8 grammes. Dans un frottis fait avec une goutte de sérosilé recueillie dans l’aine droite, on trouve des Leishmania nombreuses, ainsi que dans les frottis faits avec le ganglion inguinal droit; les parasites sont moins nombreux dans le ganglion inguinal gauche. Leish- mania non rares dans la rate, très rares dans le foie; la moelle osseuse esl indemne. 99 Une souris adulte, femelle, est inoculée le 1 octobre 1914, dans la cuisse droite, avec le produit du broyage d’un testicule d'une souris infectée de L. tropica. — 8 octobre, un abcès qui s’est formé à la partie supérieure de la cuisse droite est ouvert. Le pus contient des bactéries en grand nombre, on n’y trouve pas de Leishmania. — 26 octobre, Vabcés donne encore un suintement dans lequel je constate l'existence de Leishmania non rares, libres ou incluses dans des éléments anatomiques. — 2 novembre, la fistule consécutive à l’abcès donne encore un peu de pus séreux dans lequel on constate, malgré l'existence de bactéries nombreuses, des Leishmania rares, mais typiques. — 15 novembre, l'abcès s'est reformé à la partie supérieure de la cuisse droite; le ventre est gros. La souris est sacrifiée le 15 novembre 1915; elle pèse 22 grammes; la rate, très grosse, pèse 55 centigrammes; l’abcès qui a le volume d’une cerise fait saillie dans l'abdomen, il contient un pus très épais. Le ganglion inguinal droit est hypertrophié. Les frottis du ganglion inguinal droit con- tiennent des Leishmania non rares. On ne trouve de Leishmania ni dans le pus, ni dans la rate, ni dans le foie, ni dans la moelle osseuse. 96 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR 40° Une souris adulte, mâle, est inoculée le 7 novembre 191%, dans le péri- toine, avec le produit du broyage des testicules d'une souris infectée de L. tropica. — 2 janvier 1915, les testicules sont gros, empatés; on sent des nodosités au-dessus. — 10 janvier, le produit d'une ponction du testicule droit contient des Leishmunia en grand nombre. — 14 janvier, tumeur testi- culaire typique, pas de points de gangrène. La souris est sacrifiée le 16 janvier 1915; elle pèse 27 grammes. Les testi- cules sont gros, indurés,et le tissu cellulo-adipeux voisin est épaissi. La rate, augmentée notablement de volume, pése 23 cenligrammes. Les gan- elions inguinaux sont hypertrophiés. Leishmania en grand nombre dans les testicules et dans le tissu cellulo-adipeux voisin. On ne trouve de Leish- mania ni dans le foie, ni dans la rate, ni dans la moelle osseuse, ni dans les ganglions inguinaux. Des résultats que j'ai obtenus chez 26 souris, je crois pouvoir conclure que la L. tropica, inoculée sous la peau ou dans le péritoine, produit, en général, chez la souris, des accidents et des lésions anatomiques qui diffèrent de ceux qu’on observe dans les infections dues à la L. infantum ou à la L. Donovana. La divergence des résultats obtenus par les différents expé- rimentateurs qui ont réussi à infecter les souris à laide de L. tropica peut s'expliquer par ce fait que les virus inoculés étaient plus ou moins actifs et par cet autre fait que les pro- cédés d’inoculation employés n'ont pas été les mêmes. Rar. — Ayant constaté que la L. tropica se développait avec une grande facilité dans le testicule des souris, j'ai inoculé un rat dans un testicule avec le virus fourni par une souris; l'observation résumée ci-dessous montre qu'il y a eu, chez le rat, une infection très nette localisée au testicule inoculé et au tissu cellulo-adipeux voisin. Un jeune rat blanc et noir est inoculé le 15 octobre 1914, dans le testicule droit, avec le produit du broyage d'un testicule de la souris qui fait l'objet de l'observation 4. A cet effet, le produit du broyage est délayé dans un peu d'eau physiologique et on injecte, dans le testicule, un dixième de cent. cube du mélange. Le rat est trouvé mort le 30 octobre, il pèse 65 grammes. La rate est grosse, elle pèse 95 centigrammes, mais l’autopsie démontre que le rat était infecté de 7r. Lewisi (infection naturelle), ce qui explique lhyper- trophie de la rate. Le testicule droit a seulement la moitié du volume du gauche el sa consistance est diminuée. Dans les frottis faits avec le tes- ticule droit, et avec le tissu cellulo-adipeux qui le surmonte, on trouve des Leishmania typiques en très grand nombre, libres ou incluses dans des éléments anatomiques. Les examens du testicule gauche, du tissu cellulo- adipeux voisin, de la rate, du foie et de la moelle osseuse sont compiète- ment négalifs au point de vue de l'existence des Leishmania. LES. LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 97 Il est à noter que, dans ce cas, les altérations testiculaires étaient trés différentes de celles observées chez les souris. Un autre rat, inoculé dans un des testicules avec des cultures de L. tropica, s'est infecté comme le premier. Deux rats inoculés dans les testicules avec des cullures de L. Donovani ne se sont pas infectés. Meriones Saw. — 3 M. Shawi, 1 male et 2 femelles, pro- venant de Tunisie, ont été inoculés, dans le péritoine, avec des cultures de L. tropica, vieilles de un mois environ; le mâle seul s’est infecté et a présenté des lésions identiques à celles des souris. L’une des femelles, qui avait reçu 3 injections dans le péritoine, sacrifiée en mauvais état, un mois et demi après la première inoculation, n’a pas montré trace d'infection par la L. tropica; l'autre femelle, qui a reçu 7 injections intrapérilonéales de cultures, vit encore et ne présente aucun signe d'infection. Je résume l’observation du meriones mile. Un Meriones Shawi, male, reçoit, du 8 avril au 25 juillet 1914, dans le péri- toine, 5 injections de cultures de L. /ropica; on injecte chaque fois de 1/4 à 1/2 cent. cube de culture de 1 mois environ. — 28 septembre, les testicules sont gros, indurés; on constate l'existence d'une petite plaque de gangrene sèche à la peau qui recouvre la tumeur testiculaire. Une ponction faite le 29 septembre, dans le testicule droit, donne une goutte d’un liquide sangui- nolent qui contient des Leishmania en très grand nombre, libres ou incluses dans des éléments anatomiques. Les parasites mesurent 3 à 4 » de long, sur i y 1/2 à 2 y de large. Les débuts de la maladie ont évidemment échappé a notre observation qui n'était pas encore éveillée sur la fréquence des lésions testiculaires dans les infections produites par L. tropica. Le meriones est sacrifié le 30 septembre 1914; il pèse 100 grammes; la rate pèse 20 cenligrammes. Les testicules sont gros, le droit, plus malade que le gauche, est induré à sa partie inférieure où l'on trouve un petit abcès a contenu caséeux, correspondant à l'eschare cutanée à laquelle adhère le testicule. /eishmania en grand nombre dans le testicule droit et dans le tissu cellulo-adipeux voisin, en moins grand nombre dans le testicule gauche. On ne trouve de parasites ni dans la rate, ni dans le foie, ni dans la moelle osseuse. Lor (Myoxus glis). — Sur 2 loirs inoculés, 1 au moins s'est infecté. Un loir mâle est inoculé les 13, 17, 25 novembre, 2, 12, 22 et 27 dé- cembre 1914. avec des cultures de L. tropica. Les 6 premières inoculations sont faites dans le péritoine, avec des cultures âgées de 1 mois environ; la 98 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR sepliéme inoculation est faite dans la cuisse droite avec une culture jeune. On injecte chaque fois un demi cent. cube de culture trés belle. — 6 jan- vier 1915, les testicules sont légèrement indurés. — 10 janvier, une ponction pratiquée au niveau du testicule droit donne une goutte d’un liquide san- guinolent qui contient des Leishmania non rares. — 14 janvier, une nouvelle ponction du testicule droit donne une goutte de liquide sanguinolent avec Leishinania en assez grand nombre. — 18 janvier, testicules augmentés notablement de volume et indurés. Un autre loir, inoculé dans les mémes conditions que le premier, présente, à la date du 18 janvier, une légère indura- tion des testicules; l'infection est probable, non certaine encore. CoBaye. — Nicolle et Manceaux ont inoculé à plusieurs reprises 2 cobayes, dans la cavité péritonéale ou dans le foie, avec des cultures de L. tropica; les résultats ont été négatifs. Deux cobayes inoculés par moi dans le testicule droit avec le produit du broyage des testicules d'une souris infectée de L. tropica ont eu des infections limitées au testicule droit avec atrophie de ce testicule. Je résume l'observation d’un de ces cobayes. Un cobaye est inoculé les 5 et 7 novembre 1914, dans le testicule droit, avec le produit du broyage des testicules de souris infectées de L. tropica. — 30 novembre, je pratique une ponction dans le testicule droit qui ne parait pas altéré. Le frottis fait avec la goutte de sérosité trouble ainsi obtenue contient des Leishmania en assez grand nombre. A partir du 5 décembre, le testicu e droit s’atrophie; il est plus petit que le gauche et sa consistance est diminuée. — Le cobaye est sacrifié le 25 décembre 1914; il pèse 520 gr. Le testicule gauche pèse 1 gr. 50; le testicule droit ne pèse que 65 centi* grammes, il est donc fortement atrophié, sa consistance est diminuée ; la coloration est normale, il n'y a pas d'injection des vaisseaux. Un frottis du testicule droit montre des Leishmania rares; onne trouve de Leishmania ni dans le testicule gauche, ni dans la rate, ni dans le foie, ni dans la moelle des os. C. — Animaux inoculés sans succès avec la Leishmania tropica. Mamwmirzres. — C. Nicolle et L. Manceaux ont inoculé sans succès, avec le virus provenant directement de boutons d'Orient 6 ou avec des cultures de L. tropica : 2 anes, 1 cheval, 2 chèvres, k moutons, 1 lapin (1). (1) Nicozze et MancEaux, Ann. Institut Pasteur, septembre 1910, t. XXIV, p: 103. LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 99 Les anes et le cheval ont été inoculés dans la peau et le tissu conjonctif sous-cutané du nez et à la partie interne de l'oreille par scarification. Les chèvres et 2 moutons ont été inoculés dans et sous la peau du nez directement avec le virus du bouton, les 2 autres moutons ont été inoculés avee de fortes doses de cultures de L. tropica dans le péritoine et dans le foie. Wenyon a inoculé sans succes des cultures de L. tropica a des lapins (1). Deux lapins inoculés par moi, dans un des testicules, avec le produit du broyage des testicules d’une souris fortement para- sités par L. fropica ne se sont pas infectés. Un lérot (Myoxus nitela) et 3 gerbilles (Gerbillus hirtipes) inoculés à plusieurs reprises, dans le péritoine ou sous la peau, avec des cultures de L. /ropica ne se sont pas infectés. Oiseaux. — Nicolle et Manceaux ont inoculé sans succès, dans la cavité péritonéale, avec des cultures de la L. ¢ropica, 3 moineaux et 4 pigeons. ANIMAUX A SANG-FROID. — J'ai inoculé sans succès, dans le péritoine ou sous la peau, 3 Lacerta viridis, avec des cultures de L. tropica ou avec le résultat du broyage de produits fournis par des souris infectées. D. — Parasites de Lacertiens et d’Insectes suceurs de sang pouvant être soupconnés d'avoir des relations avec la Leishmania tropica. Quelques faits permettent de supposer que le gecko d'Algérie, Tarentola mauritanica, peut servir de réservoir au virus du bouton d'Orient. Ed. et Et. Sergent, G. Lemaire et G. Sénevet ont constaté que l’ensemencement des organes des tarentes de Biskra (Algérie) donnait, dans 15,7 p. 100 des cas, des cultures pures d'un Herpetomonas semblable aux Leishmania des cultures (1) C.-M. Wenyon, Jl. London School of trop. med., avril 1913. 100 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR du bouton d'Orient (1). Les cultures du sang de ces tarentes donnent, dans 14,4 p.100 des cas, un trypanosome à formes par- fois crithidiennes, toujours bien distinct des Herpetomonas ; il s'agit sans doute de la forme de culture du Tr. platydactyli que l'on trouve, à l'examen direct du sang, chez 10 p. 100 des tarentes de Biskra. Les auteurs supposent que la tarente sert de réservoir au virus du bouton d’Orient et que le Phlebotomus minutus afri- canus, qui est commun à Biskra et qui pique l'homme et la tarente, sert au transport et à Vinoculation de la L. /ropira. Howett a signalé que le Phlebotomus minusus de l'Inde se nourritconstamment aux dépens des lacertiens et en particulier des geckos (2); Roubaud a confirmé le fait pour le Phlebotomus minutus var. africanus (3). Au cours de ses recherches sur le bouton d’Orient, Wenyoa a trouvé des Herpetomonas chez 6 p. 100 des Phlebotomus qu'il a examinés à Alep (4). F.-P. Mackie a trouvé, aux Indes, un Herpetomonas assez commun chez Phlebotomus minutus (5). Wenyon et Mackie pensent que ces Herpetomonas sont des parasites naturels des simulies, sans rapport avec le bouton d'Orient. Il est à noter que, dès 1909, J. Georgevitch avait décril un trypanosomide d’une simulie de Serbie sous le nom de Crithidia simuliæ (6). Laveran et Franchini ont montré qu'on pouvait infecter des Mammifères avec des Flagellés des puces et des moustiques ct qu'on trouvait, en petit nombre il est vrai, des éléments tout à fait comparables aux Leishmania chez les animaux ainsi infectés (7). La fréquence de ces parasites chez les simulies, et le fait que l'existence de ces mouches a été signalée dans beau- coup de localités où le bouton d'Orient est endémique, suggère 1) Ep. et Er. SERGENT, G. JLEMAIRE et G. SÉNEVET, Soc. de path. exotique, 8 juillet 1914. (2) Howerr, Indian Jl. of med. Research, juillet 1913. (3) E, Rousaup, Soc. de path. exotique, 14 janvier 1914. 4) C.-M. Wenyon, Jl. of the Lon:ton Sch. of trop. med., 1912, t. I, p. 98. 5) F.-P. Mackig, Indian Jl. of med. Research, juillet 1914, t. Il, p. 377. 6) J. Georcsvircn, Soc. de Biologie, 13 novembre 1909 7) A. Laveran et G. Francuint, Acad. des Sciences, 1° septembre et 4 no- vembre 1913, 16 février et 16 mars 1914 et Soc. de path. exotique, 8 juilret 1914, PT TS TS et CO ET CT TE LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 104 qu il pourrail exister une relation entre les Flagellés des simulies et L. tropica. Chatton et Blanc ont trouvé, dans le sang de 8 geckos de Metlaoui (Tunisie), de petits éléments groupés dans une vacuole occupant un des pôles du globule parasité dont le noyau est refoulé à l’autre pôle. Les parasites, en forme de fuseau ou de croissant, ont l’aspect de toxoplasmes, mais en dehors du noyau médian on trouve, comme chez les Leishmania, un blé- pharoplaste ou centrosome. Le nombre des éléments para- sitaires, groupés parfois en barillet, dans un hématoblaste est de 5 a 10. Le nombre des éléments parasités est peu élevé (1). Ces corps leishmaniformes sont-ils le point de départ des flagellés constatés par Ed. et Et. Sergent, Lemaire et Sénevet dans les milieux de culture ensemencés avec les organes des tarentes de Biskra? C'est la une question qu'il sera très inté- ressant d’élucider. Au point de vue du rôle que les Reptiles peuvent jouer dans l’étiologie des leishmanioses, le fait suivant, signalé par Lindsay (2), est fort intéressant. Au Paraguay, c'est une opi- nion très répandue parmi les travailleurs des forêts que la buba (leishmaniose de la peau et des muqueuses) est produite par la piqûre d’ixodes ou de simulies (désignées sous le nom de mhariquies) qui se sont nourris sur des serpents à sonnettes ; quand on trouve dans la forêt un de ces serpents enroulé, on observe presque toujours une nuée de simulies au-dessus et, si on tue le serpent, on constate que des Amblyomma striatum adherent en beaucoup de points à sa peau. Pour éviter les piqûres des simulies, les péones s'’enduisent les bras et les jambes avec de la graisse de volailles. CONCLUSIONS GENERALES. La leishmaniose naturelle du chien quia été observée dans toutes les régions où le kala-azar méditerranéen est endémique présente la plus grande ressemblance, au point de vue des (1) Ep. Cuarton et G. Buianc, Soc. de Biologie, 25 juillet 1914. (2) J.-W. Linpsay, Transact. of the Soc. of trop. med. a. hyg., juillet 1944, t. VII, p. 259. 102 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR symptômes, de l'évolution et de l’anatomie pathologique, avec la leishmaniose que l’on provoque facilement chez le chien en lui inoculant la L. infantum. La Leishmania de l'infection natu- relle du chien ne peut pas étre distinguée morphologiquement de la L. infantum. Toutes les probabilités paraissent donc étre en faveur de l'identité de la L. infantum et de la Leishmania de l'infection naturelle du chien ; il n’est pas douteux cependant qu'il existe encore des obscurités : le rapport de fréquence de la leishma- niose du chien et dela leishmaniose infantile est inconstant ; il est rare d’observer des chiens infectés de leishmaniose dans les maisons où se trouvent des malades atteints de kala-azar ; enfin le kala-azar indien étant inoculable au chien, comme le kala-azar méditerranéen, plus difficilement à vrai dire, on s'explique mal pourquoi toutes les recherches faites dans l'Inde pour découvrir des cas d'infection naturelle du chien sont demeurées infructueuses. Ces obscurités se dissiperont vrai- semblablement quand nous saurons comment se propagent les Leishmania. Les infections expérimentaies du chien, des macaques et de la souris blanche réussissent avec la L. Donovant comme avec la L. infantum; les mêmes procédés d’inoculation sont appli- cables aux deux virus, et les infections provoquées présentent une grande ressemblance. Pour contester l'identité du kala- azar indien et du kala-azar méditerranéen, on ne peut donc plus objecter que les animaux sensibles à la L. 2n/antum sont réfractaires à la L. Donovani. Il y a lieu de noter toutefois que le chien est moins sensible au virus du kala-azar indien qu'à celui du kata-azar méditerranéen, et qu'on a réussi à provoquer chez des macaques, avec la L. Donovare, des lésions cutanées semblables à celles du bouton d'Orient, alors que les essais d’inoculation de la L. infantum dans la peau ou dans le tissu conjonctif sous-culané ont échoué jusqu ici. Un M. cynomolgus ayant Vimmunité pour le kala-azar méditerranéen a été inoculé sans succès avec le virus du kala- azar indien, alors qu'un M. cynomolgus lémoin contractail une infection rapidement mortelle; ce fait fournit un argument de grande importance en faveur de l'identité des deux virus; mar dés de be di SEE LES LEISHMANIOSES CHEZ LES ANIMAUX 103 l'expérience qui est unique est malheureusement difficile à répéter. Il existe dans la science un certain nombre de cas de leishma- niose cutanée naturelle du chien qui paraissent relever de la L. tropica. La question se pose, comme pour les leishmanioses cutanées de l’homme, de savoir si la Leishmania américaine constitue une espèce à part ou si elle n’est qu'une simple variété de la L. tropica. La L. tropica qui est inoculable au chien, aux macaques, à la souris blanche et à quelques autres petits Rongeurs, produit d'ordinaire chez ces animaux des affections localisées qui, chez le chien et chez les macaques, ont la plus grande ressem- blance avec le bouton d'Orient de l’homme. Chez la souris, il n'est pas rare qu'on provoque par l’inoculalion intrapéri- tonéale ou intraveineuse de la L. fropica des infections géné- rales, sans lésions locales, identiques à celles qui peuvent être provoquées par la L. infantum ou la L. Donovani ; comme d'autre part ona obtenu, dans quelques cas, chez des macaques, au moyen du virus du kala-azar indien, des lésions locales, assimilables à celles du bouton d'Orient, sans infection géné- rale, on doit se demander si la L. tropica nest pas une simple variété de la L. Donovani ou de la L. infantum qui se serait adaptée & des conditions de vie et de transmission différentes de celles de ces dernières Leishmania. Il y aura lieu de poursuivre les expériences ayant pour but de rechercher si des animaux qui ont acquis une immunité solide pour la L. ¢ropica peuvent être infectés par la L. Dono- vani où la L. infantum ou inversement. Il y aura lieu également de poursuivre l'étude des parasites des Lacertiens et celle des Flagellés et des autres parasites des Insectes suceurs de sang (puces, moustiques, simulies); on réussira peut-être ainsi à élucider la question encore si obscure de l'étiologie des leishmanioses. 104 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR EXPLICATION DES PLANCHES PLANCHE I. Macacus sinicus présentant des boutons d'Orient non ulcérés à la tempe droite et un bouton ulcéré à la face externe de la cuisse droite. PLANCHE II. Les figures 1 à 19 représentent différents aspects de L. lropica dans les tissus. — 1 à 6, éléments anatomiques parasités dans un frottis fait avec le produit d'une ponction d'un testicule chez une souris infectée par L. tropica. — À, 2, grands éléments parasités. — 3 à 5, grands mononucléaires parasités. — 6, polynucléaire avec 3 Leishmania. — 7, grande cellule du tissu conjonctif parasitée, dessinée dans un frottis fait avec le tissu cellulo-adipeux pris au- dessus du testicule de la méme souris. — 8, amas de Leishmania simulant une forme de schizogenie. — 9, 3 Leishmania de forme allongée dessinées dans un frottis de bouton d’un macaque inoculé avec L. lropica sur souris. — 10 à 19, éléments anatomiques parasités dessinés dans un frottis fait avec le bouton de la souris qui fait l'objet de l'observation 5. — 10 à 13, grands éléments parasités ; dans les éléments 12 et 13 qui sont bourrés de Leishma- nia, les noyaux sont refoulés à la périphérie. — 14 à 16, mononucléaires parasilés. — 17 à 19, polynucléaires parasités. — Au milieu des éléments anatomiques parasités, on voit des Leishmania libres dont 2 sont en voie de division. Gross., 1.200 D. environ. Les figures 20 à 30 représentent différents aspects de L. tropiva dans les cultures. — 20, flagellés groupés en rosace. — 21, un flagellé isolé d’une rosace. — 22 à 25, formes flagellées longues et effilées, — 26, forme flagellée sphérique. — 27, petite forme flagellée. — 28 à 30, formes flagellées en voie de division. Gross., 1.500 D. environ. brie, à CE oe | DEUX EPIDEMIES DE FIEVRE TYPHOIDE VACCINATIONS ANTITYPHIQUES AU VIRUS SENSIBILISE VIVANT DE BESREDKA par M. CIUCA, D. COMBIESCU, et J. BALLEANU, Médecins de l’armée roumaine. (Travail du Laboratoire de médecine expérimentale du Professeur CANTACUZENE et du laboratoire volant du II° corps d'armée. Bucarest.) L’épidémie de fièvre typhoïde, qui a sévi dans deux régi- ments d'infanterie en des garnisons différentes, nous a procuré l’occasion d’ajouter aux mesures prophylactiques habituelles la ~ vaccination des soldats avec le virus sensibilisé vivant. En dehors du grand nombre de contre-indications des vaccins antityphiques, préparés par l’action brutale des agents phy- siques ou chimiques sur le microbe, des données recueillies dans les nombreuses statistiques publiées, des considérations biologiques ainsi que des faits expérimentaux nous ont déter- minés à choisir le vaccin sensibilisé vivant, mis gracieusement à notre disposition par M. Besredka. Qu'il nous soit permis de lui exprimer ici nos plus vifs remerciements. Des essais antérieurs d’immunisation passive, appliqués par l'un de nous au traitement des cas très graves de typhoide, ont réalisé, à notre avis, une atténuation sensible de la gravité des symptômes. Sur 15 cas choisis parmi les plus graves et traités avec de grandes quantités de sérum antityphique Besredka (300 à 400 cent. cubes dans les muscles, jusqu’à 40 cent. cubes dans la veine), l'évolution de la maladie, la marche des phéno- mènes immunisants, mises en évidence par des procédés bac- tériologiques et sérologiques, nous donnent un tableau com- parable à celui présenté par un sujet préalablement vacciné et devenu typhique ultérieurement. La mise au point faite par M. Besredka dans le Bulletin de l’Institut Pasteur (p. 15-16, 1943), ainsi que les Mémoires sur les vaccinations antityphiques publiés dans les Annales de 106 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR l'Institut Pasteur (août 1913, p. 880-881 et 1911), résument toute la bibliographie de cette question. Avant d'aborder la question de la vaccination, nous allons donner un court historique des deux épidémies, qui ont sévi dans les 3° et 30° régiments d'infanterie de l'armée roumaine. CONSIDÉRATIONS ÉPIDÉMIOLOGIQUES. Vers le commencement du mois de janvier 1913, la fièvre typhoide se déclara au 30° régiment d'infanterie (Gampu-Lung) ; la marche de l'épidémie ainsi que les recherches du laboratoire volant, installé dans la caserne même, établirent nettement qu'il s'agissait d'une épidémie de contact, entretenue par des porteurs de germes. La caserne, située dans un des plus jolis endroits montagneux, au milieu d'un parc, est alimentée d'eau de source. L'éclosion de l'épidémie coincida avec le déversement du contenu des latrines dans la cour même de la caserne, alors complètement dépourvue d’égouts. Un lac situé dans le jardin de la caserne, et qui servait de lavoir clandestin, avait égale- ment contribué à entretenir l'épidémie. Sur un effectif approximatif de 7.300 hommes, on constate en deux mois 80 cas de typhoide et 11 porteurs de germes, dont quelques-uns étaient affectés au service des cuisines et des réfectoires; la mortalité était de 5 p. 400 de la morbidité totale. Une enquête épidémiologique, faite par l’un de nous, vers la fin du mois de février 1913, au 3° régiment d'infanterie (Sla- tina), établit les causes d'une épidémie de typhoide avec 61 cas, en moins de 95 jours. Bien que l'épidémie fit plutôt bénigne, la mortalité atteignit 8 p. 100 de la morbidité totale. Le caractère spontané de l'épidémie, ainsi que la répartition uniforme des cas parmi toutes les petites unités, nous ame- nèrent à incriminer l’eau du puits qui alimentait la caserne. L'analyse bactériologique de l’eau du puits, de la conduite principale et des branches de distribution dans l’intérieur de la caserne, a donné les résulats suivants : plus de 100.000 colo- nies microbiennes par 1/10° de cent. cube; des colonies liqué- fiantes, très nombreuses. Sur des milieux à glucose, on isole du VACCINATIONS ANTITYPHIQUES 107 premier coup, à 40 degrés, le B. coli, que l'on identifie entre autres par la réaction de l'indol et les autres réactions basées sur la fermentation des sucres. Les milieux à bile, à extraits de bile et à sels biliaires, que nous considérons comme les meilleurs pour l'isolement du bacille typhique, ont donné constamment des résultats négatifs. I] n'était pas étonnant que l’eau du puits soit si chargée de matières organiques, élant donnés emplacement du puits et la manière dont se faisait l'alimentation de la caserne. Situé à 50 mètres d’une mare stagnante, sur les bords de laquelle on déposait le fumier et les ordures ménagères de la ville, ce puits était creusé dans un terrain très perméable. Deux conditions nouvelles achevèrent de saturer l’eau en matières organiques : la mare, située à proximité du puits, recevait une partie des restes de l’abattoir de la ville, et la conduite principale d’eau côtoyait Pégout de la caserne, avec lequel elle était en contact sur une longueur d'à peu près 50 mètres. En un point de celte zone de contact, par suite d’une rupture de l'égout, le terrain était infiltré par les eaux sales. L'examen des matières fécales de tous les soldats de ce régi- ment a confirmé les résultats des recherches sur le terrain : nous n'avons pas trouvé un seul porteur de germes parmi les hommes bien portants. Les cas de typhoide cessèrent brusque- ment, dès qu'on eut condamné le puits infecté et utilisé l'eau de source qui alimentait la ville. Nouvelle raison pour attri- buer cette épidémie à l’eau infectée plulôt qu'au contact. VACCINATION. Convaincus de la grande utilité des vaccinations antity- phiques dans l’armée, surtout dans notre pays où il y a encore des foyers endémiques de fièvre typhoide, nous avons proposé l'application du virus vivant sensibilisé dans ces deux régi- ments. Le vaccin nous était envoyé concentré par 100 doses en 10 cent. cubes d’eau physiologique. Avec les dilutions faites à 1 cent. cube, nous avons pratiqué des injections à huit jours d'intervalle, la deuxième contenant la quantité double de vaccin. Les injections ont été faites dans la masse muscu- laire, de préférence dans la région supéro-externe de la fesse. 108 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Comme antisepsie locale, de la teinture diode à 1 p. 100 avant et après l'injection. Pour mieux nous rendre compte de la marche des réactions, nous avons pris nous-mêmes les températures, en continuant l'observation des hommes jusqu'à l’apyrexie complète. Nous avons vacciné de cette manière, pendant l'épidémie méme (du mois d'avril 1913), une moitié des hommes de chaque compagnie, l'autre moitié nous servait de témoin. 1 faut ajouter que tous les soldats d’une même compagnie vivent dans des conditions semblables : ils habitent une grande chambre commune, rarement deux; se servent du même lavabo, ont le même réfectoire, le même terrain d'exercices, etc. Le nombre de soldats vaccinés dans ce régiment a été de 398. On a vacciné également 31 convalescents porteurs ou non porteurs de germes et /es 13 infirmiers et brancardiers qui les soignaient. Au 30° régiment nous avons vacciné (vers la fin du mois de mai), 634 hommes, toujours par moitié de chaque compagnie. 22 convalescents porteurs ou non porteurs ont été également ingeclés. L’épidémie était, en ce moment, éteinte; le dernier cas paru remontait à plus de six semaines. RÉACTIONS CONSTATÉES APRÈS LA VACCINATION. Voilà le résumé de nos observations faites sur un nombre total de 1.298 vaccinés avec un nombre égal de témoins non injectés. Une réaction locale douloureuse a été la règle; chez un grand nombre de soldats, elle a été remplacée par une faible sensalion d’engourdissement du membre inférieur corres- pondant. L'inflammation à l'endroit de l'injection se manifestait par une zone d'œdème, qui ne dépassait pas 3 centimètres de dia- mètre. Quarante-huit heures après, il n’en restait plus traces. Quelques soldats, le jour même de l'injection, vaquèrent à leurs occupations. Dans un seul cas, la réaction a duré 8 jours. Gela ne nous a pas empêché de faire la deuxième injection, qui a été d'ailleurs parfaitement supportée. La réaction générale (d'après les chiffres du tableau ci-contre) D D es JET @AIPIEY Semi ey MEANS le LE « = Go8E ~~ Sa ~ xe ae ae se 20 2 juessedap CDD CO SHS 65100 EN St | | 23 6 earnyerodure f, o _ = _ = — — : sone MANHOOD NSMD NW œ = sed juessedop ou SSM MAMMMNE A = 20 a einer due], 32 jan à ST NS eee Z apie < 7 55 7 Go8E a> Sonia’ - an pm oO a quessedop NID NIONmONN EM | LE a ormjetydui J, = GoSE-CoL€ 20 29 0220 C2 CO — 40090020 MD 00 a ginyeig duo y = RIT = ga Ê = CoLE ra = Je tO F-20 -# = 2 en ven Sessa aera sas a | = = a oinyeigduay, + i © © = SQUI998A 9P - Oro # © + Fe aa [8107 - coins Sess GI = of 2 Oy ULONT © — £ 5 ao à . — 7 — ~ ies = kak ES bat ol LA Le A a Lae 2 Y £ = er an = 4 © = Ss — S A w = © : oot 5 © D UE 3 = © = = res a6 asa © 8 + d SS un oe) es es 9AIPIP udltpeIY = ene 2 juessedyp [| clic za cues Aas Hem = | = © oamez) dura J, © = 5 Go8E-Gol€ ONrMNIOSMOMEDS Fr = 00 om = ere = mt — ei of 3 einyeigduta J, = = ES em = CoLE Re Om 00 om © 2 20 del a > sed ynessedap ou Seca NE Gace ea Se eae > : oinqjeiodute J, as = L —— = 9AIPI87 MMIDINDOO | MASSY 2 | # = UO1JOBIU | eZ ! = Z _ | 7 Ro 20 DONNE | 20 = D 3 juessedap 2 | Ute 1 1 Fe Z aimjyeirgduia J, a Go8£ GoLE 169 © D D #4 20 = ainyergdway, SES = St Zz Be ae 2 r= ae oO.) MOD Der 29 0 = = 2 sed quessedop ou | SELNASSÉÉSRS Na | 3 aS oe} oinjergdute J st = — 7 dL load © Se st = SQUID9BA 9 2 = SQU1998/ ) a _ >. t= S> oP | = cn io ee f= 16107 BSRSSSS5S55 oa = = © 91ŒQUON = 2 Biwi ee _— © é = 3 L Ep NE ; RE al LE ler tele) Sots SE = DO w ©. F = pS se = CA wn © [ae = 52) © i) ss = — = whic o © ‘ < € © © © © = = < SAHIN SHODROAWN D = — _— 110 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR s'est manifestée par un mouvement fébrile qui ne dépassail 385 que dans 5 p. 100 des cas; dans 15 p.100 la fièvre oscillait entre 37°5 et 38%; la température restait inférieure à 37°5 dans 74 p. 100 des cas. Le maximum de la fièvre se manifestait dix a douze heures après l'injection. Dans 6 p. 100 des cas seulement l'élévation de la température a duré plus de trois à quatre jours. Chez quelques sujets nous avons observé des réactions fébriles tardives (de trente-six heures jusqu'à quatre jours après l'injection) qui duraient plus longtemps que les réactions immé- diates. Après la deuxième injection la réaction fébrile est plus fré- quente qu'après la première, mais elle est moins forte. D'ail- leurs il n'y a aucun rapport entre les oscillations thermiques qui se produisent chez le même individu après chacune des deux injections, comme en témoignent les deux tableaux nomi- naux suivants (p. 114 et 112). La plupart des soldats qui ont fortement réagi après la pre- mière injection gardent une température inférieure à 37° après la deuxième. Il est probable que les écarts de température tiennent aussi, en dehors de la sensibilité spéciale de chaque individu, aux petites variations de doses de vaccin injectées, quand on se sert de seringues de gros calibre. La réaction générale était particulièrement accentuée si on blessait accidentellement un petit vaisseau. Dans tous ces cas nous avons constaté à l'endroit de l'injection un petit nodule, qui ne mettait pas plus de quatre jours pour se résoudre. Nous avons examiné de près un grand nombre de soldats qui avaient présenté des oscillations thermiques tardives. Comme il s'agissait de jeunes soldats de vingt et un à vingt- trois ans, il n'y avait pas parmi eux d'individus atleints de maladies chroniques. Parmi les 24 sous-officiers du 30° régiment (âgés de vingt et un à quarante-deux ans) 21 n'ont pas réagi. Pour compléter nos observations, nous avons injecté les mémes doses de vaccin à quatre tuberculeux (du service des maladies contagieuses de Fhôpital militaire « Regina Elisabeta » où l'un de nous remplissait les fonctions de médecin en VACCINATIONS ANTITYPHIQUES 141 3° REGIMENT DINFANTERIE PREMIERE COMPAGNIE. 1T° INJECTION (1 CENT. CUBE) 2e INJECTION (2 c.c. Température après : Temp. après : INJECTION CA : Z F : < ñ DP wn VA ñ n n A À ñ = < 72 2 PA mn y n 4 ia a n > Oo 2 ro) 2 © 2 LS ua O D © < © 24 = Fa = ss = = = Fa = i | = S = = = = = — = 5 = = SAISIR |e 2 2 2 5 © 2 © = = is at = = = 2 = = =- = oa = = <= S| a = LH fe Xe) = = = # cn o ce oO = & = S = o à oe Ss [=] © D -1 -1 NN D Oro OS 1 3609]: 3895 |379 »|3608 CosteassD tench 12 Saulescu, G...... MEODESCU ACTE SATDIeSCUS Weta ET Tone SUD EEE MRC ei se). Amareilimsctr one : PRPERUESUI. AREAS oi bie ise 1 HI DD © =1 O0 ctw m1 - DHAAARH CROO Rm 19 = & LO © D -1MD OF HB WhO s an = DID DD 1 : 1 me NO NO HO co Ot WWWWWWWWWWWWwWWwWWWwWWww D 1 I O À O I I Où I © Où I-11 Ds wo 0 09009 WD UE LO» 2. Christian, A...... . Dumitiana, G.... RNIGI LEO. SEE RSS : — > Ot HON & = DD O0 vive ww m DO =]: soMarimescu, Ca. SPaduraru. G..... 37 MINachewiNs = casas: PP eESOMls santo : oe vo D > = = a de] oo | t 2 Co | ww — [er] © OX ~ rr) > PR RS vs . \ 2 Vire ROLE Ce D ND OT = © = OR Où CO de OU = ND DH O0 DD OO ND OF Ss de AS Mmhdtiraseu: 1... m= Ob ce “| 35. Cosma, CS CO =] be C8 bO Co Hs Cr © D DO OC CO OO GO WH Go CO Co Lo Co VW Go Wo Co OO Co 0 Co Co : fue 4131,9|: 36, ADiaconu He Al 37 »|: 6,4136,4137,5137 »136 7 D SO EN PP EE »138,4131,4138,1138,2131,1|.... :2137,5131,3136.8 JPOPA LG Eee 36,41 1,8137,2136,5136,8 . Navalici, I 137,1136, :5137.»136,9137 »136.9 -AManea; Dern ,613: ,3136 ,8]36,5/36, 4 . Georgescu, P. .../37 »|: ,5137,9136,7/37,2/36.8 À Vanea, Pere aida E 6,5136.8137,1136.6| LT RE Aa 1113 37,2137,1/37,3136,5 wild ; — |38,1/37,4/36,4 . Nita 413 3620 9137,3) — 31. Gheorghe, F..... 36,7 3 36,2 7437 ,2|36, 3136.3 2. Ghenea, G. ...... 136,8 38,5136,5 »[3T, À . Cojocaru, G. 1371137,2137:3 A Be 3 913 8136 “als ON 113 413 3 3 3 > OO 1 OO mb = ON I I OC I Had HID i 7 6 Woe iy a ol 7 6 6,613 Te » [37,5 |: 6[36,3136,8136,2 1137,2138,8/: 9! — |37,5/36,6 eee “8197 ,1137,3|.. 8/37, 1137,4|37, 2136.7 9. Tudorascu, A...../36,8]37,5/37 »|: 56 .8137,2/37 »|36,4 ee in Cas Vines ea ,9138,3137,4 D537 »137 »|36,8 - Caprita, C ee ,4131,4131 » 10137:4131,2|31; 1137 & Orn GLI OLE AGREE 943 36,9]: 5,5136,4136.1136,4137 » 43> Parvany M0 as 36,8131,1 »136,5137,2137,2 44. Caracaleanu, F..157,4131,4|31,2 5,1136,9136,9137,5136,5 Bie RAG D... ee 373 37,337 »|: :8137,3136,8136.5136.7 AGUS GE 137,3137,6137,4|: 8137,3137,4131,2136.8 ki. Stefanescu, D:::.137:1 36,5]: 5, 5137, 7/36, 8/36 6136, 4 48, Craciun, B....... 8}: pl — 138 »|37 »/36,6 290 Dolana D:, .. 2..-. 37, : : 36, Seas ahaa 7131 »|38,1136,9| 50. Viadescu, N..... 5, 7437 »|36,2|: RE epee OOM OT a2tS OFT 3672 Ser Sora eevee. cas. | Renée lc 31,6137,3137,1136.3 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR 30° RÉGIMENT D'INFANTERIE LA 1'® INJECTION TiuCa ME LC : = Dita.) G: : 40 Pinar (Gide, 5. Colonel Dtru ....|: 5. Marfu, N : . Arasene, Gh., N..136.5£ . Basaraga, B. ....136 > Muranuy INR 21206! . Cernatescu, I. ...136,: Bichi,, C . Mateescu, I . Mitu, I . . Carmaniei 0:21; 5. Visoiu, B. Olteana-O.. Eur 36 > Buluged, Ge ven. 36 Be BUM aly Ite areroa-t iste 136 Zauta, G: Sfetcu, V. 2. Simioana, Gh....136,: 2 DUO, ¢ Vist xo secs 36 . Costallu,, G: ...". EH MHOC as Ie en 36 6. Cotauda, E. ...../: JE 38. Y Madreatev a2ecane 36,8]36,: | .. Vanatorul, 1.4: 136 . Maorodrinescu, I.| D Ferrari, A. 136,946 lof TONI TAG: Lee | 321, Glorgaul, (Getic. 3. Mariu, B . Matei, I 136, : 5. Viadescu, À ….…. 136,¢ 5. Dumitrescu, P...|36,5 . Bunbeneci, L. où J0,c . INiteseu, Pi... 36,3136 36.5136 - (COSack (Pear ee 136,9136 -1Danoiu, IN. csc |36, 8]: 136,41: 9. Avramescu, G... 2. Preoveanu, G... .. Préda, P . Fulga, I . Ghileucea, | . Duteseu,. A. . Ivascu, G . Donescu, P . Vasile, I, . Andrei, G . Chelu, P: I 2. Satta, Gh. B. 1 :./: PREMIERE COMPAGNIE 4re€ INJECTION (1 CENT. CUBE) Température après : CC ee 9 heures. heures, 33 heures. AS heures, 57 heures. 168 heures. 3 4 ey ow Ke ee CO — CO Cot Do ce Ot or co ee WONW ——— cr > OO’ GX 36,7/: 36,3/36,6 36,81... seed 2€ INJECTION (1 C. CUBE) Température aprés : er ae 24 heures. 48 heures. 57 heures. | 9 heures. ww ce ei 33 heures. Dt © © > Crew CEE 1 10 € 37,1136,7136,5|36 VACCINATIONS ANTITYPHIQUES 113 second) : /es oscillations fébriles n'ont pas dépassé la moyenne observée chez les soldats bien portants. Dix soldats atteints d’oreillons (du méme service), en pleine période d'infection, ne se sont pas montrés particulièrement sensibles au vaccin. En ce qui concerne la prétendue hypersensibilité des vaccinés pour l'infection typhique, il faut rappeler : 1° qu'au 3° régi- ment nous avons pratiqué les injections pendant l'épidémie méme et que nous n'avons constaté pendant les jours suivants aucun cas nouveau; 2° Que tous les malades suspects, en observation de fièvre typhoide, a séroréachion et hémoculture négatives, ont été vac- cinés sans que l’on eut constaté ultérieurement des cas de typhoide parmi eur. 3° Nous n'avons eu aucun cas de typhoide parmi les infir- miers qui les soignaient el que nous avons vaccinés en même temps. Dans un seul cas nous avons constaté des phénomènes d’ana- phylaxie locale à l'endroit de la première injection, vingt- quatre heures après la deuxième injection faite dans l'autre fesse. Les phénomènes dans l’anaphylaxie se traduisaient par œædème dur et douloureux de la région, accompagné d'un engourdissement du membre inférieur correspondant; en trente-six heures tout était rentré dans l’ordre. Nous avons constaté également trois cas d'urticaire généralisé trois quarts d'heure après l'injection. Ces phénomènes, qui n'ont duré que vingt-quatre heures, n'étaient pas en rapport avec l'état général antérieur. Dans les selles des 31 convalescents et des 13 infirmiers appartenant tous au 3° régiment, nous n'avons jamais constat de porteurs de germes après la vaccination. RÉSULTATS DES VACCINATIONS. Cinq mois plus tard, au retour de l'expédition de Bulgarie, les deux régiments (vaccinés au mois d'avril et mai 1913) rentrent au milieu d'une population civile infectée par la typhoïde. Les médecins des deux régiments demandèrent du 114 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR vacein antityphique pour les hommes témoins non vaccinés par nous au mois d'avril et mai. On leur délivra cette fois le vaccin chauffé une heure à 60 degrés (Kolle-Pfeiffer); le labo- ratoire du professeur Cantacuzène avait épuisé la quantité de sérum antityphique nécessaire à la préparation du vaccin sen- sibilisé, qui avait servi à la préparation de 40.000 premières doses distribuées dans d'autres garnisons et dans la population civile. La plupart des hommes non encore vaccinés aux 3° et 30° régiments d'infanterie ont done été inoculés avec le vaccin chauffé, on a vacciné de même dans le 3° régiment les recrues de la classe 1914 (1). Huit mois après nos vaccinations, des médecins des deux régiments ont envoyé à la Direction générale du Service sani- laire de l’armée les renseignements suivants sur l'état épidé- miologique de cette période (ces dates ont été mises en paral- lèle avec nos tableaux) : l° Au 3° régiment: Pas un cas parmi les soldats vaccinés avec le virus vivant sensibilisé; À cas de typhoide (soldat Flori- cica (V.), 10° compagnie) parmi les témoins non vaccinés par nous. Ce malade avait reçu, un mois avant, du vaccin chauffé. 2° Au 30° régiment : Aucun cas parmi les soldats vaccinés au virus sensibilisé; 8 cas de typhoide parmi les non vaccinés (2) (nos témoins) : Vedelcu (I.), 3° compagnie (mort); Tordachi (lon), 9° compagnie; Gheorghe (Andrei), 7° compagnie; Spa- taru ([.), 8° compagnie; Stoica (V.), compagnie des mitrail- leuses; Vlad (Nic), 9° compagnie; deux malades encore parmi les soldats mobilisés de ce régiment qui.ont pris la maladie en Bulgarie méme. La recrue Caramet (V.), inoculée deux mois avant, avec le vaccin chauffé, prend la typhoide au mois de février. (4) Ila été fait deux et trois injections dans l'épaisseur des muscles de la fesse (1 cent. cube, 2 cent. cubes.) 1 cent. cube d’émulsion typhique corres- pondait à peu près à 1/50 de culture sur gélose, donc il renfermait environ deux fois plus de microbes que 1 cent. cube de vaccin. ‘2) Sur ce nombre sept cas se sont produits dans l'intervalle (mai-octobre) qui a précédé les vaccinations, avec les bacilles chauffés, chez les soldats laissés comme témoins lors de la vaccination avec le vaccin sensibilisé. VACCINATIONS ANTITYPHIQUES 115 CONCLUSIONS. 1° On n'a constaté aucun cas de typhoïde parmi les 1298 soldats vaccinés avec le virus vivant de Besredka, tandis qu'un nombre égal de témoins non vaccinés ont eu 8 cas (1 suivi de mort). Il faut ajouter que, parmi ceux qui ont reçu du vaccin chauffé, on a constaté également 2 cas de fièvre typhoide. 2 Il n'y a pas eu de phénomènes d'hypersensibilisation, même quand on a pratiqué la vaccination au milieu de l'épidémie. Les porteurs de germes ne réagissent pas au vaccin autrement que les non porteurs. 3° On n'a pas constaté @éliminations de bacilles dans les selles des 44 vaccinés qu'on a fait examiner. TROISIEME NOTE SUR LA CONSERVATION DES « TOXINES SOLUBLES » par V. MORAX Il nous a paru intéressant de publier, comme suite aux deux notes de MM. Nicolle et Truche (Conservation des toxines diphtérique et tétanique et de la ricine) (1), les documents sui- vants concernant la toxine botulinique. Cette toxine avait été préparée, en cullivant, en milieu van Ermenghem anaérobie et en présence de carbonate de chaux, le bacille du botulisme. Le ballon ensemencé le 9 novembre 1899 et placé à l’étuve à 36° a été décanté et le liquide filtré le 28 no- vembre, soit après 19 jours de culture. Le filtrat possédait la toxicité que voici (injections sous- cutanées) : COBAYES DE 300 a 350 Gr. 1/10 cent. cube. . . . . . . . . mort en 12 heures. 1/100 cent. cube. . . . . mor enw sheures: 4/200 cent. ‘cube... 2 7.11% mort en 2 jours. 1/500/Cent: Cube nr... mort en 3 jours. LAPINS DE 1.100 a 2.500 Gr. 1/50 cent. cube. . . . . . . . +. mort en 2 jours et demi. 1/400 cent..cube. . . . .15 = . « mort én 5 jours. 1/300 cent. cube. ..... . - . mort en 6 jours. Une petite quantité de filtrat a été conservée, en tube scellé complètement rempli, dans l'armoire du laboratoire et titrée de nouveau en juillet 1913 (soit après plus de 13 ans et demi). La 1) Ces Annales, t. XXIV, p. 921, décembre 1910 el t. XXVI, p. 1030, décembre 1912. SUR LA CONSERVATION DES « TOXINES SOLUBLES » 417 toxine s’est encore montrée active ainsi que l'indique le tableau suivant : COBAYES DE 400 a 450 Gr. 4 cent. cubes 2a eee . mort en 1 jour et demi. ‘decent: cubes EEE mort en 2 jours. lACCeNt ICUDe RE mort en 12 jours. LAPINS DE 2.000 A 2.500 Gr. 4 cent Cube 9-5. 0. mort en, I jour’ et demi: 1A0Mcent cube 1. mort én -4 jours’ et demi. 1/4100Fcentecube nt 0 = Mork en 12 jours: Les symptômes observés en 1913 comme en 1899 correspon- daient à la description de van Ermenghem. Done aucune mo- dification qualitative du poison. Quantitativement, on reconnai- tra que la baisse d'activité demeure bien faible, comparée au long temps de conservation et à l'absence totale de soins destinés à combatire le fléchissement. Forssmann dit avoir conservé la toxine botulinique 10 mois, en tube scellé, à l'obscurité, sans noter de modifications; c’est le seul document connu de nous sur la question. Le Gérant : G. Masson. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette, : Te de 4 | HAE 4 aC a ie re … se 29° ANNÉE MARS 1915 N@xs ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR LA PRETENDUE DESTRUCTION DES BAC. DE KOCH DANS LE PERITOINE DES COBAYES TUBERCULEUX par Et. BURNET. (Laboratoire de M. Metchnikoff.) Lorsqu'on réinocule sous la peau d'un cobaye tuberculeux des bacilles tuberculeux, à condition de prendre une dose de bacilles assez forte et un cobaye dont la maladie ne soit ni trop récente ni trop ancienne, on observe, au lieu des phéno- mènes bien connus qui suivent une première inoculation, une nécrose rapide, une élimination par escarre et une euérison locale par cicatrice : c'est le phénomène de Koch, d'où est venue la découverte de la tuberculine. Les expériences de réinoculation de l'organisme tuberculeux ont pris un regain d'intérêt depuis qu'on cherche le méca- nisme de Vimmunité antituberculeuse avec l'idée qu'elle se ramène au fond au phénomène de Koch. A l'hypothèse d'une destruction complète des bacilles réino- culés s'opposent des expériences d'après lesquelles les bacilles de réinfection peuvent se conserver vivants et virulents dans les tissus des animaux qui ont acquis la résistance. Si l'organisme tuberculeux est capable de détruire les bacilles tuberculeux réinoculés, la destruction s'accomplit-elle par cette lente digestion intracellulaire, dont Metchnikoff a 9 120 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR décrit le type classique chez la gerbille ; ou se fait-il une destruc- tion rapide par les humeurs, qui serait une vraie bactériolyse ? Dans ces derniers temps, ce sont les réinoculations dans le péritoine qui ont été le principal thème d'expériences, et elles ont suscité une sorte de résurrection du phénomène de Pfeiffer en matière de tuberculose. A en croire des travaux récents, des doses considérables de ce bacille tuberculeux dont on ne connait que trop la nature réfractaire aux moyens d'action de l’organisme, seraient dissoutes, dans l’exsudat péri- tonéal du cobaye réinoculé, en quelques instants et avec une facilité inconnue des plus fragiles vibrions cholériques. A cette disparition rapide des bacilles flottants dans l'exsudat on oppose la résistance des bacilles englobés par les leucocytes; et tandis que l'on affirme la toute puissance de l'action humo- rale, on montre que les phagocytes ont reçu la mission provi- dentielle de préserver les bacilles. « Les bacilles tuberculeux, disent textuellement Arima et Sakamura (1), bien loin d'être détruits dans les leucocytes, semblent au contraire s'y multi- plier progressivement, de telle sorte que les fameux phagocytes, au lieu d'être des cellules dévoratrices, sont pour les bacilles un abri contre les substances défensives et bactéricides de l'organisme ; ils peuvent même s’y multiplier. » Moins radi- caux, Kraus et Hofer {2) admettent que la phagocytose existe comme la bactériolyse, mais que la phagocytose est le mode dominant chez l'animal neuf, la bactériolyse chez l'animal tuberculeux. « L'immunité bien démontrée de l'organisme tuberculeux vis-à-vis de la réinfection pourrait s'accorder assez bien avec l'accroissement du pouvoir bactériolytique. » Ces derniers mots ne sont pas, on le voit, des plus catégo- riques, et la plupart des auteurs font tout au moins des réserves sur cette action bactériolytique. Le probléme ayant une grande importance au point de vue du mécanisme de la résistance à la tuberculose, ces expériences méritaient d’être reprises. Selon nous, les faits ont été déligurés au nom des 1) Arma et Sakamura, Ueber die Bildung des Bakteriolysins durch T. Bazillen u. deren Gifte. Centralbl. f. Bakter., Orig., t. LXXII, 1913, p. 389. 2) Kraus et Horer, Ueber die Auflésung von Tuberkelbazillen im Perito- neum gesunder und tuberkuléser Meerschweinchen. Deulsche m. W., 1912, n° 26, p. 1227 et Wiener klin. W., 18 juillet 1912, p. 1112. B. TUBERC. CHEZ LES COBAYES TUBERCULEUX 121 théories. On n'a jamais pu fournir de cette bactériolyse hu- morale la démonstration la plus solide et la plus simple, qui consisterait à nous la montrer, comme on montre sous le microscope la réduction en granules des vibrions dans le péritoine du cobaye immunisé. Les expériences destinées à en donner la preuve indirecte ne soutiennent pas la discus- sion. Ce que l’on trouve dans les faits, c'est d'une part une action toxique qui n’est pas niable (mais personne ne peut avoir aujourd'hui la prétention de réinventer la tuberculine) ; d'autre part, ces actions cellulaires qui justement ne sem- blent dans aucune infection aussi évidentes que dans la tuber- culose. Décrivons d’abord les expériences de réinoculation telles que nous les avons observées bien des fois. Nous insisterons ensuite sur les principaux faits au nom desquels on aflirme la bactériolyse. DESCRIPTION DES FAITS Résorplion progressive du liquide chez le cobaye neuf, presque complète en vingt-quatre heures; au contraire, augmentation de volume, au double, au triple et davantage, par exsudation péritonéale, chez les cobayes tuberculeux; mort en 5 à 6 heures, avec syndrome tuberculinique, des cobayes réinoculés à trop forte dose ou déjà trop peu résistants; longue survivance d’un certain nombre de cobayes réinoculés : inutile de décrire longuement ces phénomènes bien connus. Les cobayes, inoculés, la première fois, de bacilles humains ou bovins, et porteurs de ganglions nets et déjà de lésions viscérales, ne doivent avoir une tuberculose ni trop jeune, ni trop vieille et confinant déjà à la cachexie. On fait les expériences avec diverses souches microbiennes; les bacilles de la première et de la seconde inoculation sont, selon les cas, les mêmes ou différents. On réinocule de 3 à 15 milligrammes de bacilles pesés frais, d’une culture de trois semaines environ, en suspension dans 5-10 cent. cubes d’eau physiologique. L’exsudat est prélevé au moyen de pipettes très fines, comme dans l'expérience de Pfeiffer, après 15, 30, 50, 90 minutes, 2, 3, 4,... 8 heures, par exemple. A chaque prise on dépose une goutte d’exsudat de cobaye reinoculé et une goutte d’exsudat de cobaye inoculé pour la première fois, sur une même lame, de facon à leur appliquer exactement la même coloration. Au début, on voit beaucoup de bacilles libres dans un exsudat à peu pres dénué d'éléments cellulaires ; déja après une 122 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR vingtaine de minutes, les bacilles libres deviennent moins nombreux, le liquide se peuple de lymphocytes et devient plus riche en albumine. A la fin de la 1" heure apparaissent les pre- miers polynucléaires, dont un certain nombre ont incorporé des bacilles; ils abondent de plus en plus à mesure que les bacilles deviennent plus rares. Les bacilles libres ont à peu près disparu à la fin de la 3° heure : on a quelque peine à en trouver. Vers la 5e heure, apparaissent de grands mononucléaires. On voit, dès la première demi-heure, dans l’exsudat des cobayes tuberculeux, des bacilles libres qui prennent le Ziehl plus faiblement que les bacilles normaux. On voit un certain nombre de formes altérées, courbées, raccourcies ou amincies, comme rongées, ou mème réduites en granules : ce sont les formes qui sont prises comme indices d’une lyse humorale. On voit dans les polynucléaires, puis dans les mononucléaires, des formes analogues, indices d’une lyse intracellulaire. Mais on peut affirmer calégoriquement, d’après des examens répétés, que non seulement de pareilles formes existent dans l’exsudat des cobayes neufs, mais qu'il y ena déjà dans la cullure qui a fourni les bacilles. Chez certains cobayes tuberculeux, ces formes allérées parais- sent plus nombreuses que chez les témoins neufs; mais le fait, qui dépend pour une part des hasards des prélèvements, est loin d'être constant. Dans la généralité des cas, on peut mettre au défi un observateur non prévenu de distinguer sous le microscope lexsudat de cobaye neuf de l’exsudat de cobaye réinoculé. Quant aux granulations, que décrivent Kraus et Hofer, dérivées de bacilles bactériolysés, apparaissant nombreu- ses dès la première demi-heure, ne gardant plus le Ziehl et prenant seulement la contre-coloration bleue, ces auteurs sont les seuls à les avoir vues. Même au bout de sept, dix et vingt-quatre heures, si l'on a soin de faire la même coloration sur les deux exsudats, les bacilles englobés par les polynucléaires ne sont pas différents chez les cobayes neufs et chez les cobayes tuberculeux ; si chez ces derniers on voit des bacilles en partie réduits en gra- nules (d’ailleurs parfaitement acido-résistants), ces images sont rares, et elles ne font pas défaut dans l’exsudat de cobayes neufs. Bien entendu la bonne méthode, dans ces examens, ne B. TUBERC. CHEZ LES COBAYES TUBERCULEUX 123 consiste pas à rechercher exclusivement les bacilles altérés chez les cobayes tuberculeux et les bacilles normaux chez les cobayes neufs, mais aussi, avec non moins d'attention, les bacilles altérés chez les cobayes neufs et les bacilles d'aspect normal chez les cobayes tuberculeux. On voit alors s’évanouir les différences si nettes que les auteurs ont signalées entre les deux exsudats, et que j'avoue ne pas avoir vues malgré mon désir de les retrouver. Ce n’est pas à dire que cobayes tuberculeux et cobayes neufs se comportent de la même facon, loin de là; mais les diffé- rences ne sont pas inscrites sur les préparations et les phéno- mènes essentiels ne se voient pas au microscope. La diffé- rence, c'est que le cobaye tuberculeux fait une réaction tuberculinique, tandis que le cobaye neuf n'en fait pas. Dans Vexsudat du cobaye tuberculeux, les polynucléaires phagocylants semblent moins nombreux que dans l’exsudat de cobaye neuf: mais il faut tenir compte de ce que l’exsudat étant plus abondant chez le cobaye tuberculeux les cellules y sont moins denses. Bien plus, si (les animaux étant sacrifiés de la 7° environ à la 24° heure) on centrifuge les exsudats de facon à isoler dans des tubes effilés de même calibre les éléments cellulaires, on voit que malgré son volume moindre le liquide d’exsudat du cobave neuf renferme, en quantité absolue, beaucoup plus de cellules que l’autre, — de 3 à 5 fois plus. En outre, les bacilles s’agglutinent plus vite en amas chez le cobaye tuberculeux que chez le cobaye neuf. Il ne faut donc pas s'étonner de trouver chez le cobaye neuf, dans une goutte portée sur lame, cette plus grande abondance de polynucléaires phagocytants, qu'on a opposée à la prétendue disparition lytique chez le cobaye tuberculeux. A l’autopsie des cobayes, sacrifiés de la 8° à la 24° heure, mêmes observations. L'exsudat très pauvre du cobaye neuf est plus riche en bacilles phagocytés que l'exsudat abondant du cobaye tuberculeux. Au point de vue de la conservation et de la coloration des bacilles, on peut trouver dans certains cas des formes plus endommagées, peut-être aussi plus faiblement colorées, chez le cobaye tuberculeux. La différence n’est pas frappante et elle n'est pas constante. Mais il ne faut pas considérer seulement l’exsudat. 124 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR . En dehors de l’exsudat, où sont allés les bacilles? 1° Si Von gratte soigneusement avec une spatule le péritoine pariétal et la séreuse qui recouvre les anses de l'intestin, les préparations montrent la présence d’assez nombreux bacilles, par petits paquets (presque tous phagocytés) chez le cobaye neuf; on en trouve trés peu ou on nen trouve pas chez le cobaye tuber- culeux. Cette constatation se rencontre avec celle-ci, à laquelle Rist, Léon-Kindberg et Rolland (1) attachent une importance capitale : on ne voit jamais, chez les cobayes tuberculeux, qui ont survécu des semaines à la réinoculation, cette tuberculose à granula- tions du péritoine pariétal et de la séreuse que l’on voit à la suite d’une première inoculation dans le péritoine; il existerait done chez le cobaye tuberculeux une immunité de la séreuse. Mais, comme on en trouvera la preuve plus loin, cette affirmation n’est pas exacte. 2 Si l'on fait des préparations de l’épiploon, on y trouve des masses énormes de bacilles; ces amas de bacilles (englobés par des leucocytes qui se sont déposés sur l’épiploon) paraissent encore plus massifs et se forment en tout cas plus vite chez le cobaye tuberculeux. I] y a aussi des masses de bacilles, phago- cytés ou entourés de cellules, dans ces flocons ou dépôts fibri- neux, qui sont plus abondants chez le cobaye tuberculeux que chez le cobaye neuf. Ce qui saute aux yeux, c'est que la presque totalité des bacilles sont transportés sur l’épiploon. Il est singulier que plusieurs observateurs n’en parlent pas ou n’en fassent qu'une mention secondaire. Ceux qui affirment la lyse humorale sont ceux qui parlent le moins de l’épiploon. Selon Arima et Sakamura, cet entrainement en masse des bacilles sur l’épiploon serait le propre du cobaye neuf. Kraus et Hofer n’en parlent pas. Manwaring et Bronfenbrenner (2) reconnaissent qu'une forte partie de bacilles gagnent l’épiploon. Rist parle de dépôts d’aspect fibrineux, extrèmement chargés de bacilles, qui flottent dans l’exsudat ou se déposent sur les (1) Etudes sur la réinfection tuberculeuse, Annales de Médecine, t. I, f.3 et 4, mars-avril 1914. (2) Manwanrine et BRONFENBRENNER, On intraperitoneal lysis of tubercle bacilli, Journ. of exp. Medicine, t. XVIII, f. 6, p. 604. eo es © eS be SY eee B. TUBERC. CHEZ LES COBAYES TUBERCULEUX 125 viscères, il ne mentionne pas d'examens propres de l’épiploon. Or on ne peut comprendre les préparations d’exsudat qu’en les comparant avec les préparations d’épiploon. Il est évident que les bacilles qui disparaissent si rapidement de l’exsudat sont entrainés sur l’épiploon par les cellules : c’est le sort banal de tous les microbes et, en général, de tous les corps étrangers introduits dans le péritoine, qu'il s'agisse de grains de carmin ou de bacilles de Koch. Si lVexsudat du cobaye tuberculeux s’appauvrit plus vite en bacilles et même en cellules, c'est que les bacilles sont entraînés plus vite et plus violemment sur l'épiploon. Ce qui caractérise le cobaye tuberculeux, c’est la réaction tuberculinique ; or, on sait que la tuberculine provoque un fort appel de polynucléaires, comme le prouve l’examen histologique d'une cutiréaction (1). Quant aux bacilles des flocons et de l'épiploon, presque tous sont parfaitement colorés et d'aspect normal, et les formes altérées se trouvent chez le cobaye neuf comme chez le tuberculeux. Lorsqu'on fait la réinoculation dans la plèvre au lieu de la faire dans le péritoine, on observe les mêmes faits. Le péricarde et les ligaments qui l’attachent au diaphragme jouent le rôle de l’épiploon, mais d'une facon beaucoup moins prononcée. Quelques heures après l'injection dans la plèvre, on trouve des bacilles qui sont passés dans la cavité péritonéale et se sont fixés sur l’épiploon. Après injection dans le péritoine, on trouve des bacilles dans le sang. Ils y passent (dès la 4° heure) en assez grand nombre, puisque avec la méthode Staübli-Schnitter on les retrouve sans peine sur les préparations. On objectera qu'il y a des bacilles dans le sang des cobayes tuberculeux, même non réinoculés. Mais on en trouve (quoique peut-être en moindre quantité) dans le sang des cobayes neufs fraichement inoculés dans le péritoine. Donc les bacilles sont en partie absorbés par les lymphatiques, contrairement à l'opinion de Manwaring et Bronfenbrenner. En somme, la rapide disparition des bacilles libres est affaire de phagocytose et la presque totalité des bacilles sont entrainés (1) E. Burnet, C. R. de la Soc. de Biologie, 1907, t. LXII, p. 1156. 126 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR sur lépiploon, avec plus d'énergie chez le cobaye tuberculeux que chez le cobaye neuf. L'aspect de l’épiploon, congestionné, tuberculinique, montre a quel point cet organe est en jeu. Pas de dissolution rapide dans les humeurs (surtout pas en 30 à 60 minutes, comme le disent Kraus et Hofer); ef méme pas de destruction cellulaire rapide. Quant à un phénomène de Pfeiffer dans le péritoine du cobaye tuberculeux, cela n'existe pas. Y A-T-IL DES PREUVES DIRECTES D'UNE BACTÉRIOLYSE ? La réduction en granules des vibrions cholériques est facile à voir au microscope. De même, selon Deycke et Much, Kraus et Hofer, la « tuberculolyse », qui est déjà manifeste chez le cobaye neuf (une à plusieurs heures après Vinoculation), plus intense et plus rapide (déjà après 15-30 minutes) chez le cobaye tuberculeux. Ils voient dans les bacilles colorés en rose faible des granulations bleues « de telle sorte que les bacilles tuberculeux ressemblent beaucoup aux bacilles diphtériques... Il semble qu'il y ait dans le sérum des substances qui condi- tionnent la bactériolyse péritonéale ». Aucun autre observateur n'a vu cette bactériolyse. « Nous n'avons jamais vu ces granulations », disent Rist, L. kK. et R. — Manwaring et Bronfenbrenner reconnaissent qu'à cause de l’épiploon il est bien difficile de prouver la bactériolyse. « La seule preuve directe que nous en ayons obtenue était fournie par des préparations d’exsudat de cobayes tuberculeux faites 30 minutes environ après l'injection. Dans un cas, on voyait de nombreux granules acido-résistants, fragments indubitables de bacilles. Quant à des granules non acido-résistants (granules de Much), on en voit habituellement chez les cobayes normaux comme chez les tuberculeux et on ne peut les prendre pour preuve d'une lyse spécifique ». Il faudrait pouvoir exposer les bacilles aux humeurs du péritoine sans les exposer aux leucocytes : les sacs de collodion ordinaire ne peuvent servir, parce quils empéchent la péné- tration des humeurs telles qu'elles sont dans le péritoine. On peut au moins laisser affluer les humeurs tout en retardant l’arrivée des leucocytes (ce qui doit suffire, la bactériolyse étant donnée comme très prompte) en les enfermant dans un petit sac en papier-filtre : c'est le dispositif imaginé par Metchnikoff dans ses anciennes expériences sur la phagocytose du bacille B. TUBERC. CHEZ LES COBAYES TUBERCULEUX 197 charbonneux chez la grenouille. On enroule un fragment de papier de façon à en faire un petit tube; quelques gouttes d’une suspension de bacilles y sont placées entre deux ligatures. Ce sac est retiré du péritoine au bout de plusieurs heures. Les choses s’y passent comme dans une petite cavité péritonéale : les bacilles disparaissent plus vite du sac chez le cobaye tuber- culeux que chez le cobaye neuf : on les retrouve, phagocytés, sur les faces interne et externe de la paroi en papier. Le sac du cobaye tuberculeux est plus sanguinolent, plus chargé de leuco- cytes, tout comme un épiploon de cobaye tuberculeux. Le liquide qu’on en retire est plus clair que dans le cas du cobaye normal, les bacilles y sont (aprés plusieurs heures) agglutinés en amas : dans le sac du cobaye normal ils ne seront agglu- tinés au même degré que le lendemain. Le contenu d'un sac, resté 2-3 jours dans le péritoine d’un cobaye tuberculeux, a tuberculisé aisément le cobaye sain. Si les humeurs sont capables de dissoudre en deux heures la plus erande partie de 10 milligrammes de bacilles que l’on injecte couramment dans ces expériences, comment des bacilles en quantité infiniment moindre résistent-ils plusieurs Jours? Voici une expérience encore plus démonstrative. Le bord de la feuille de papier enroulée et les ligatures du sac sont obturés au collodion, de telle sorte que le sac soit encore moins per- méable aux leucocytes. Une faible quantité de bacilles — 1/10 de milligramme — passe dans 3 péritoines tuberculeux, en changeant de sac (pour éviter le colmatage des pores du papier). Il y a certainement une déperdition de bacilles, à cause des manipulations et parce que des leucocytes traversent le papier. A Ja fin, on ne trouve pas de bacille à l'examen microscopique, et cependant la faible quantité du liquide que l'on retire tuber- culise le cobaye : 0,1 milligramme de bacilles tuberculeux dans un sac bordé au collodion. Séjour de 18 heures dans le péritoine d'un cobaye tuberculeux (tuberculose de 78 jours : à l'autopsie, ganglions, grosse rate tuberculeuse, tuberculose discrète des poumons). Le contenu du sac est porté dans un sac neuf et mis dans le péritoine d'un 2e cobaye tuberculeux (tuberculose de 49 jours). Vu dans une goutte de ce contenu : polynucléaires, mononucléaires; polynucléaires phagocytants; bacilles en bon état. Séjour dans ce cobaye, 22 heures. Report du contenu dans un sac neuf et chez un 3° cobaye tuberculeux 128 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR (tub. de 4 semaines). Vu dans une minime gouttelette quelques bacilles bien colorés, à l'intérieur d’un leucocyte. Le lendemain, le contenu est prélevé. On lave soigneusement avec 3-4 gouttes d'eau stérile, à l’aide d'une pipette fine, l’intérieur du sac. Pas vu de bacilles au microscope. Inoculation sous la peau du ventre a deux jeunes cobayes qui sont sacrifiés après 51 jours. Tous deux sont tuber- culeux (ganglions et rate: — poumons chez l'un) sans chancre, comme après les inoculations de doses très faibles. EVALUATION DE LA QUANTITÉ DE BACILLES RETROUVÉS DANS LE PÉRITOINE PLUSIEURS HEURES APRÈS LA RÉINOCULATION. Manwaring et Bronfenbrenner prélèvent l’exsudat une heure et demie après l'injection, lavent le péritoine à l’eau citratée, réunissent les liquides de lavage, traitent par l’anti- formine, centrifugent, mettent le culot en suspension dans un volume connu de sérum, ajoutent une quantité connue de leucocytes, et comptent les bacilles recueillis en rapportant leur nombre à celui des leucocytes. Ils retrouvent, en moyenne, dans le péritoine normal 106 p. 100 des bacilles injectés, c’est-à-dire qu'il y a eu croissance légère, et 65 p. 100 seulement dans le péritoine du cobaye tuberculeux. La différence, 35 p.100, mesure la quantité détruite par le péritoine du cobaye tuberculeux. Cette expérience est discutable. Il y a trois éléments en jeu, les bacilles en suspension, les bacilles fixés sur l’épiploon, les bacilles supposés détruits. Il ne suffit pas d’en évaluer un seul pour être renseigné sur l’un des deux autres. L’entrainement sur I’épiploon et la phagocytose étant plus intenses chez le cobaye tuberculeux, les deux exsudats ne se correspondent pas et l'évaluation des bacilles de l’exsudat ne donne pas la quantité de bacilles détruits. L'expérience serait bonne si, en lavant le péritoine, on pouvait reprendre les bacilles déjà fixés : mais on ne lave pas l'épiploon; après l'avoir agité fortement tour à tour dans de l’eau physiologique, de l’eau légèrement alcalinisée, de l’eau légèrement acidulée, on y retrouve encore une grande quantité de bacilles en paquets. Comment tenir compte aussi des flocons, chargés de bacilles, qui se forment dans le péritoine? De plus, l’antiformine n'agit pas favorablement. Si elle permet de faire d'abord une bonne sus- pension, la centrifugation agglutine le flocon fibrineux en un coagulum qu'il est impossible de dissocier parfaitement. Ensuite, la numération n'a plus de sens, tant est irrégulière la répartition des bacilles : comme au moment du prélèvement il n'y a que très peu de bacilles libres, presque tous ceux que l’on retrouve sont adhérents à des débris de cellules et forment des amas incomptables. La technique suivante est plus simple et meilleure. On inocule au cobaye, avant de le sacrifier, un peu de solution citratée qui empèche la coagula- tion de lexsudat; après prélèvement du liquide, on lave le péritoine à l'eau cilratée; bien entendu, on ne reprend pas plus que dans le cas précédent B. TUBERC. CHEZ LES COBAYES TUBERCULEUX 129 les bacilles fixés. Le liquide est amené à un volume connu et l'on y ajoute une quantité connue de globules rouges nucléés, par rapport auxquels on compte les bacilles. Inutile de centrifuger et de remettre en suspension. On soumet aux mêmes manipulations une suspension de bacilles identique à celles qui ont été injectées. La numération est plus facile qu'avec la pre- mière technique, mais il s’en faut encore de beaucoup quelle soit sure. Méme en agitant les liquides avec des billes de verre (quantités égales de billes pour chacun), on ne peut éviter la formation d’amas. En opérant avec tout le soin possible, j'ai trouvé qu'il a disparu de l’exsudat, dès la fin de la première heure, non pas 40 p.100, mais de 90 à 98 p. 100 de bacilles injectés, et que les chiffres sont à peu près les mêmes pour le cobaye neuf et le cobaye tuberculeux. 1. — EXPÉRIENCE SUR DES EXSUDATS RETIRES APRÈS 1 HEURE. bac. retrouvés disparus SUSPENSION TÉMOINS Eee : 100 Cop neue ENONCE. SSSR 8 92 Gob Stilt ESS PEN RE ne. 2 98 Cob. tube ie EN RER NE o.: = 4,8 98,2 CODE CUISINE a tenes eae ease oe ec Se 10 90 2. — EXPÉRIENCE SUR DES EXSUDATS RETIRÉS APRÈS 4 H. 1/2. SUSPENSION ÉÉMOIN: <= 1s) uss). 100 Cob. neuf . . . 255 97,5 Cob. tub. 1. NOTÉE Er 4 96 COD AUDE SR oe anes 2e 2 98 Manwaring et Bronfenbrenner essaient de prouver la bacté- riolyse par une expérience iv vitro qui met en jeu les cellules fixes du revètement péritonéal. Ils plongent dans une suspen- sion tiède de bacilles et mettent plusieurs heures à l’étuve des organes abdominaux de cobaye tuberculeux et de cobaye sain : ils trouvent que le nombre des bacilles augmente dans le cas du cobaye neuf et diminue considérablement dans le cas du cobaye tuberculeux. J'ai répété cette expérience en employant tantôt l'intestin grêle, tantôt le tube digestif abdominal dans sa totalité, estomac, épiploon et cæcum. J'ai retrouvé à très peu près le même nombre de bacilles dans les deux cas. Un grand nombre disparaissent parce qu'ils s’attachent mécaniquement aux parois, où on les retrouve avec une forme et une coloration 130 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR normales. L'épiploon est resté inerte; après plusieurs heures d'immersion, on n'y voit ni figures de phagocytose ni aspects de bactériolyse. Mème inertie de la part des cellules à noyau rond, desquamées du péritoine, que l’on recueille en grande quantité en centrifugeant le liquide; les bacilles mélés aux cellules sont aussi bien colorés, dans les deux cas, que sur une préparation faite avec la culture d’origine. VIRULENCE DES EXSUDATS DE RÉINOCULATION. D'après Rist et ses collaborateurs, dans beaucoup de cas, on ne réussit pas à donner la tuberculose avec 1 cent. cube dexsudat péritonéal (de cobaye tuberculeux réinoculé) où l’on découvre aisément, au microscope, des bacilles tuberculeux, mais altérés dans leur forme et prenant mal la coloration; on ne donne qu'une tuberculose très lente avec des exsudats conte- nant une grande quantité de bacilles : c'est qu'il n'y reste que peu d'unités virulentes. Donc les bacilles sont tués dans Vexsudat avant d'être détruits dans les leucocytes. Sur 12 inoculations d’exsudats obtenus par réinoculation de 10 à 20 milli- grammes de hacilles, ces auteurs oni eu 7 cas négatifs (exsudats de 3 jours, 3 1/2, 34/4, 7, 24, 20, 4 1/2 heures) et 8. positifs (exsudats: de 5,.6, 6, 16, 16 heures). J'ai constaté la virulence de l’exsudat dans tous mes cas sans exception, même avec moins de 1 cent. cube d’exsudats pro- voqués, non par 10 et 20, mais seulement par 5, par 3 et même 2 milligrammes de bacilles, et lors mème qu'au microscope on ne voyait pas de bacilles dans le liquide inoculé. J'ajoute qu'en prélevant Vexsudat, je prenais soin de ne pas toucher avec la pipette les organes tuberculeux et l'épiploon chargé de bacilles, et de ne pas aspirer de ces flocons fibrineux, toujours riches en bacilles. Si les cobayes se tuberculisent lentement, le fait n’a rien d'étonnant, puisque l’exsudat s'appauvrit en bacilles très rapidement. On tuberculise très bien les cobayes neufs auxquels on insère sous la peau un mince lambeau d’épiploon de cobaye réinjecté dans le péritoine depuis 3, 10, 15 et même 17 jours, et plus. (Tableau I.) a fe SDS B. TUBERC. CHEZ LES COBAYES TUBERCULEUX 131 TagLeau I. — Virulence de l'exsudat péritonéal de réinoculation. Les 5 premiers cobayes sont dune méme série (tub. de 45 jours). à | 2 cob.| 1 cob. 2 cob.{ 3 cob.| 2 2 cob.|} RÉSULTATS Tub.. L'un a le 40e jour rate et poumons tuberculeux. Tub.. Mort le 38e jour. Rate et poumons tuberculeux. Tub. . Évolution lente. Tub. . Début lent. Tub. L'un. tub. lente; l'autre, mort le 12° jour ; bac. tub. ‘dans ganglion inguinal. 2 cob.| 2 cob.| 2 cob. 3 cob. 13 cob.| 12 cob. 12 cob. l'autre Tub.. L'un, mort prématuré- ment; l’autre tub. Tub.. L’un, mort le 8° jour ; le 12° jour; ganglion avec bacilte tuberculeux. Tub. lente. Tub. Tub. Tub. Tub. Réinoculation de l'épiploon. n ses) EH 5 QUANTITÉ = 2 E : oo : a = © | © inoculée = % fat ol css coal | Eee a 3 SRE LES % [sous la peau. 5 ; CA > =| par cobaye AN OES 8 h. a Path (EE 2 |45mer | 20 h.| + 2 Ca < LGC. | mer 9: + 3 5ms 5h. — 2 c.c. 4 | 2mer | 50 h.| + aay (este 5 | Qmer | 70h.) + 0,33) (CC: 6 | 3msr | 48 hit + Hela) Ca 7 | 3mer | 48 h.| + NAB} tee | Shige) 72) he | — OF 25 1CaG. 9 Faible quantité contenue dans un sac en papier, deux jours dans le péritoine. A0 |A5mer | 24 h.| + | 0,33 c.c. 1 ümer | 48h) + 0,75 €.c. 12 |15mer | 96 a ze | 1,7 C.c. 1) , 2 ( des cob. ci-dessus 11 et 12. 3 d’un cob. réin. avec 3 mgr. d'un cob. réin. de 5 mgr. retiré apres \ retiré après retiré après Épiploon de cob. tub. réin., ayant fait passages consé- cutifs par 3 péritoines de cobayes tubereuleux (b.bovin). 6 JV 2NOUrS-H2NCob-MTUP HMjours-02EcobTub; 17 jours. 2 cob. Tub. : jours. 2 3cobs ub: cob. Tub. ETAT DU PERITOINE DES COBAYES TUBERCULEUX QUI ONT SURVECU A LA REINOCULATION PÉRITONÉALE. Lorsque les cobayes tuberculeux survivent à la réinoculation et qu'ils succombent ou sont sacrifiés au bout de plusieurs 432 ANNALES DE L°INSTITUT PASTEUR semaines, l’autopsie, disent Rist, Léon-Kindberg et Rolland, «ne montre que des lésions viscérales dues à la diffusion de la tuberculose initiale. Elle ne permet de constater aucune lésion due à la réinfection intrapérilonéale : la séreuse est intacte et l'on n'y voit pas de granulations tuberculeuses ». Je nie cette conclusion, Mème si la séreuse était intacte et exempte de granulations, la réinfection laisserait des traces qui sautent aux yeux, car, dans tous les cas, on observe d’énormes lésions de l’épiploon, qui est transformé en un gros cordon ou en boules adhérents à l'estomac et aux anses intes- tinales. Lorsque l’on tranche transversalement ce cordon, la coupe est tout à fait pareille à celle d’un ganglion lymphatique en train de se caséifier. Il y a, sur la surface et sur la coupe de l'épiploon des amas considérables de bacilles qui ne paraissent pas plus dégénérés après quarante jours qu'après huit heures. On en voit qui paraissent endommagés, mais la grosse majo- rité prennent très bien la coloration; il y a plus de formes longues qu'on n'en voyait dans la culture. En admettant qu'une partie des bacilles soient ‘détruits, il est certain qu'un grand nombre se conservent et créent des lésions pour leur propre compte. Peut-on parler d’ «intégrité absolue du péri- toine ? » Mais il n'est pas vrai que la séreuse soit intacte et exempte de granulations. La séreuse des cobayes tuberculeux réinoculés dans le péritoine ne se comporte pas autrement que celle des cobayes neufs : on trouve des granulations sur la face abdo- minale du diaphragme et sur le péritoine pariétal, plus ou moins nombreuses selon les cobayes, mais de même aspect et de même grosseur dans les deux séries. (Tableau IL.) Dans le tableau II, les 7 premiers cobayes doivent être mis à part, parce que, la 1re inoculation ayant été faite sous la peau du ventre, on pourrait dire qu’elle est la cause des granulations qui ont suivi la réinoculation dans le péritoine. Il n'en est rien, parce que chez ces cobayes la paroi musculaire était intacte. D ailleurs, on voit par centaines, dans les laboratoires, des cobayes tuberculisés par inoculation sous la peau du ventre et n'ayant aucune granulation sur la séreuse, malgré la tuberculose de la rate, du foie el des ganglions lombaires. Chez les 5 cobayes suivants, la première inoculation a été faite sous la peau de la cuisse. | | B. TUBERC. CHEZ LES COBAYES TUBERCULEUX 133 TABLEAU II. SS EE = 10 11 RE INOCULATION Ê PREMIE Date, mal. dl ow oe bo bo avril. 17 mai. 30 30 30 RÉINOCULATION Cobayes tuberculeux réinoculés dans le périle Date, juin. 22 ho nw bo te ho to 22 to bo bo bo 1 lo SACRIFIES Date, juil. 20 20 20 [er] 17 17 ETAT DU PÉRITOINE Grosse corde épiploïque avec adhérences. Semis de granula- tions sur le périloine pariétal. Gran. sur le diaphragme; peu sur le périt. pariétal. Corde épiploique avec adhé- rences. Très nombreuses gran. sur la! paroi, pas sur le diaphragme. Epiploon ramassé avec adhé- rences. Epiploon ramassé avec adhé- rences. Semis de gran. sur la paroi. Epiploon ramassé avec adhé- rences. Gros semis de gran. sur le diaphragme et sur la paroi. Les granulationstub. couvrent presque tout le périt. pariétal. Epiploon ramassé avec adhé- rences. Granul. nombreuses sur dia- phragme et péritoine. Epiploon ramassé avec adhé- rences. Gran. sur le diaphragme et sur la paroi. Epiploon ramassé avec adhé- rences. Nombreuses gran. sur le dia- phragme et sur la paroi. Epiploon ramassé avec adhé- rences. Epiploon ramassé et adhérent. Nombreuses gran. diaphr. et} paroi. Epiploon ramassé et adhérent. Semis de granul surle diaphr. | et sur une partie de la paroi. ÉTAT DES ORGANES ine. Gros ganglions caséeux. Tuber. rate el poumons. lily Id. Id. Id Id. Id. Id. Id. Id. Id. ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Le — jw + Z Zz one eo ro ales a fas <5 bp | NS | Sn Bes = ÉTAT DU PÉRITOINE ÉTAT DES ORGANES Bo CA £ Oo x © 410) ao LA < Cu» 2 2 00 x z a 4 | go = 42 30 22 17 | Epiploonramassé et adhérent. | Id. Semis de granul. sur le diaphr. | et paroi. Cobayes témoins, inoculés pour la première fois dans le périloine méme culture el méme dose (3 milligrammes). Date, Date. |Date, | mal, juin. 1 30 » +2 0] Granul. peu nombreuses sur Début le diaphragme et sur la paroi! de tuberculose | au-dessous du diaphragme. | pulmonaire. | Epiploon ramassé, caséeux. juil 2 30 » 6 Epiploon ramassé, caséeux. Id | Granul. plus nombreuses. | | | 3 30 » 6 | Gran.seulement surle diaphr.| ld. 4 30 » 6 Gran.seulement sur le diaphr. | Id. 5 30 » 6 Epiploon ramassé et adhérent. Id. Gran, seulement sur le diaphr. | 6230 » 6 Gran. abondantes sur le dia- Id. phragme et sur la paroi. | | | DESTRUCTION DES BACILLES DANS LES CELLULES. On ne peut qu'être d'accord avec Rist pour dire que s'il y a destruction de bacilles, c'est à l’intérieur des phagocytes. Nous avons vu aussi des phagocytes qui ne contiennent qu'une sorte de poussière acido-résistante : mais ils sont très rares, et même à l'intérieur des phagocytes les bacilles ne sont pas détruits en quelques heures. I] y aun moyen de renforcer l’action du péritoine de cobaye tuberculeux sur les bacilles réinjectés, c'est de faire passer les bacilles de cobave à cobaye. On ne peut insérer l’épiploon tout d'une pièce dans le péritoine du cobave suivant, par laparo- lomie; les chances d'infection seraient trop grandes. Il faut inoculer l’épiploon avec une grosse aiguille, après l'avoir réduit en pate et mis en suspension, ce qui nest possible qu'après B. TUBERC. CHEZ LES COBAYES TUBERCULEUX 135 l'avoir desséché dans le vide et broyé dans un mortier. En exa- minant le péritoine à chaque passage, on voit que les bacilles se raréfient rapidement et que leur forme s’altére. Ce n'est cependant qu'après le quatrième passage qu'ils sont rares au point d’être difficiles à trouver au microscope. On en voit encore au sixième passage. Il faut éviter une cause d erreur, qui consisterait à érailler les organes du cobaye et à prélever quelques-uns de ses propres bacilles tuberculeux. Beaucoup de bacilles échappent aux prélèvements, et tous ceux qui man- quent n’ont pas été détruits. Des bacilles de troisième passage, ayant séjourné six jours dans les péritoines de cobayes tuberculeux et une dizaine de jours en dehors de l'organisme (dans la cloche à vide) ont tuberculisé les cobayes. Une inoculation de sixième passage (où quelques bacilles ont élé vus au microscope) n'a pas tuberculisé. La disparition des bacilles se fait à peu près de même au cours des passages par cobayes neufs : la raréfaction paraît. moins rapide et il y a moins de formes altérées. Des cobayes inoculés avec une inoculation de quatrième passage ne sont pas devenus tuberculeux. - | Il est certain que les cellules du péritoine détruisent peu à peu les bacilles tuberculeux dans les conditions de cette expé- rience, où les tissus sr” tués à chaque passage. I] n'y a pas de différence du tout au tout entre cobayes neufs et cobayes tuberculeux. RÉSISTANCE AUX RÉINOCULATIONS. Il n'ya donc pas de destruction humorale, et la destruction phagocytaire est très lente. Les auteurs qui croient à une lyse rapide expliquent la résistance aux réinfections par l'action d'anticorps circulants, n’est pas démontré. Manwaring et Bron- fenbrenner, qui ont fait en vain toutes sortes d'expériences pour les mettre en évidence, concluent qu'il est seulement possible qu'ils soient pour quelque chose dans la bactériolyse, laquelle s'accomplirait surtout sous l'influence des cellules fixes du péritoine. Le mème pouvoir lytique, ajoutent-ils, appartient sans doute aussi à d’autres cellules fixes de lorga- nisme. Mais si ceite lyse plus ou moins rapide existait chez un 10 136 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR organisme résistant, comme l’homme, et soumis presque tou- jours à des réinfections faibles, comment les réinfections réus- sissent-elles — s'il est vrai qu'elles sont la cause de laphtisie — à moins de croire qu'elles soient toujours « endogènes » et que vis-à-vis d'elles l'organisme n'ait pas de défense ? A ces expériences qui consistent à réinoculer dans le péri- toine de cobayes tuberculeux des doses colossales de bacilles, s’en opposent d'autres, très nombreuses, qui se rapprochent beaucoup plus des conditions naturelles, tant par les doses employées que par la durée des observations. Ce sont les essais de boôvovaccination d'après Behring. Depuis l'expérience de Melun, de Vallée et Rossignol, jusqu'aux expériences récentes de Galmette (1), en passant par celles de Rémer, il a été montré dix fois pour une que les bacilles inoculés pour éprouver les animaux vaccinés et résistants peuvent bien ne pas causer de tubercules, mais qu'ils se conservent vivants el virulents même pendant 18 mois. Ces faits ne sont pas en faveur d'une baclériolyse. La « tuberculolyse » ne s'accorde pas non plus avec les observations classiques de Metchnikoff sur la digestion lente des bacilles dans les cellules géantes du spermophile et dans les cellules géantes de la rate de la gerbille (2). Il est vrai que dans ces observations il ne s’agit pas de réinfections, et Kraus et Hofer attribuent la résistance des primo-infectés à la phago- cytose, et spécialement la résistance des réinfectés à la bacté- riolyse humorale. Mais les corps calcaires, analogues à ceux de la gerbille, décrits par Schüppel et autres dans les ganglions tuberculeux chez l’homme, répondent-ils nécessairement a des lésions de première infection ? S'il est exagéré de dire que pour le tuberculeux le bacille est exclusivement loxique, il est certain qu'il l’est à un haut degré, comme il ne Pest pas pour Je cobaye neuf. Rist a montré que l'exsudat de réinoculation intrapéritonéale exerce une action toxique, violente et immédiate, sur le cobaye tuberculeux, et non sur les cobayes normaux. Il faut donc un organisme tuber- culeux, el pour préparer le poison, et pour le recevoir. Mais 1} Annales de l'Institut Pasteur, avril 1914. 2) Pathologie comparée de Vinflammation, p. 392 et suivantes. B. TUBERC. CHEZ LES COBAYES TUBERCULEUX 137 rien ne prouve que l'action toxique ait pour condition une fonte rapide de corps bacillaires. Les actions dites anaphyla- toxiques, quelle qu'en soit la nature, ne consistent pas essen- tiellement en une destruction de microbes. J'ai fait aussi des essais variés pour créer la sensibilité à la tuberculine chez le cobaye neuf en le préparant avec de l’exsudat péritonéal de cobayes tuberculeux réinoculés. Inoculé dans le péritome avec 3-5 cent. cubes de cet exsudat, le cobaye neuf fait presque toujours une réaction thermique (de 1, 1 1/2. et même 2 degrés), vers la quatrième heure: jamais de malaise visible, jamais la mort, jamais de sensibilité à la cuti-réaction. On obtient d’ailleurs la même élévation thermique en injectant des exsudats préparés avec le B. subtilis. En somme, la seule notion que nous avons acquise depuis que Koch a déerit le phénomène qui porte son nom est celle d'une action lytique dont le mécanisme reste inexpliqué et dont nous ne connaissons que l'effet toxique. Je ne dis pas que toutes les lésions tuberculeuses d'un homme tuberculeux doivent ètre mises sur le même plan, je ne nie pas cet état d'allergie dont on abuse peut-être. On. peut, avec Besancon et de Serbonnes (1), donner un sens bactériologique à la notion de terrain tuberculeux. Mais c’est autre chose que de la bacté- riolyse, et l'exsudat péritonéal de réinoculation ne montre pas ce que l'on a voulu y voir. ConcLusIONS. 1. Il ne se produit pas, dans le péritoine des cobayes tuber- culeux réinoculés, de phénomène analogue au phénomène de Pfeiffer. 2. Les formes allérées que l’on trouve dans le péritoine du cobaye tuberculeux réinoculé ne font défaut, ni chez le cobaye inoculé pour la première fois, ni dans la culture qui fournit les bacilles. ; 3. Les bacilles qui disparaissent de lexsudat ne sont pas (1) Annales de Médecine, t. I, f. 1, et Journal de Médecine interne, 10 juin 1914. 138 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR détruits. La presque totalité est phagocytée et ixée sur Pépi- ploon. Il en passe dans le sang par les voies lymphatiques. La phagocytose et l'entrainement sont plus intenses et plus rapides chez le cobaye tuberculeux que chez le cobaye neuf. 4. Les cobayes tuberculeux qui survivent à la réinoculation intrapéritonéale présentent d'énormes lésions de réinoculation sur l’épiploon. Leur séreuse n'est pas intacte, ni exempte de granulations tuberculeuses, ni douée d'immunité. Elle se comporte comme celle des cobayes neufs. 5. L'exsudat de cobaye tuberculeux réinoculé est toujours virulent. 6. Les bacilles détruits le sont par phagocytose; la destruc- tion par les cellules est une digestion lente. 7. Les réinoculations massives dans le péritoine des cobayes ne représentent pas ce qui se passe dans les réinfections natu- relles. Les réinoculations aux bovidés vaccinés et résistants ont établi que les bacilles d'épreuve se conservent longtemps vivants et virulents dans les lissus. Juillet 1914. L'ACIDE BUTYRIQUE ET LA SCLÉROSE par GEORGE-E. COLEMAN. (Travail du laboratoire de M. Metchnikoff. ) (Avec la planche III.) Depuis les recherches de Gilbert et Lion (1), en 1889, et de Josué (2), en 1900, de nombreux chercheurs ont réussi & pro- duire des lésions sclérotiques dans les organes d'animaux au moyen d’injections de microbes et de leurs toxines, ainsi que de substances chimiques diverses. Pendant ces dernières années, un grand nombre de recherches ont été entreprises dans le but d’élucider le rôle joué par certaines substances, élaborées dans l'organisme même, dans la production de la sclérose. Pour Metchnikoff, le facteur qui joue le rôle prédominant dans la production de la sclérose en général et de la sénilité précoce, est l’intoxication du système due à l'absorption conti- nuelle, à petites doses et pendant une longue période, des produits de la putréfaction intestinale. En parlant, en particulier, de l'indol et du phénol, Metch- nikoff (3) dit que, les bactéries de l'intestin produisant seule- ment de petites quantités de ces substances toxiques, l'influence de ces dernières sur l'organisme ne peut se manifester que sous la forme d'intoxication chronique, ce qui suppose, de leur part, une action cumulative. Cette idée de Metchnikoff n'est plus une hvpothèse, mais un fait bien établi, démontré par ses propres expériences avec le paracrésol (4), ainsi que par. celles de plusieurs autres obser- vateurs. Dans la production expérimentale de l'artério-sclérose, on a (1) Gizserr et Lion, Artérites expérimentales. Comptes rendus de la Soc. de Biologie, 1889. (2) Josué, Comptes rendus de la Soc. de Biologie, 1903. (3), (4) Metcunikorr, Annales de l'Institut Pasteur, t. XXIV. 1910, p. 761. 140 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR donné généralement des doses massives de diverses substances pendant une période relativement courte. Afin de vérifier la théorie de l’action cumulative de petites doses de poisons intestinaux, on a dernièrement, poursuivant les recherches abordées par Metchnikoff lui-méme, administré de faibles quantités de ces substances toxiques pendant une période de plusieurs mois. Le travail soigné de Dratchinski (41) sur l'indol est particu- lièrement intéressant et démonstratif à ce point de vue. Dratchinski, après avoir éliminé toutes les causes possibles d'erreur, a démontré que Vabsorption de 0,0% gramme d'indol par jour (par voie buccale) pendant une période de plusieurs mois, provoque des lésions incontestables dans l’aorte et les autres organes de cobayes. | A côté des corps aromatiques, l'activité des microbes intes- tinaux se traduit par la production d'autres substances qui passent sans cesse dans la circulation et qui peuvent jouer un rôle très important dans la production de lartério-sclérose, l'usure et le vieillissement de l'organisme en général. Sur la proposition du professeur Metchnikoff, nous avons essayé de déterminer si l'acide butyrique, qui est produit plus ou moins constamment dans le tube digestif, joue un rôle quelconque dans la production de la sclérose. Dans l'étude des différentes maladies et au cours de recherches expérimentales, on a trouvé l'acide butyrique en quantités considérables dans l'organisme humain, soit sous forme d'acide libre, soit en combinaison avec d’autres sub- stances, v. Rubner |cité par Schmidt et Strassburger (2) | a trouvé que, dans les matiéres fécales de personnes au régime du pain, 79,2 p. 100 de l'acidité totale sont dus à Vacide butyrique et 20,8 p. 100 à l'acide acétique. Les graisses et les acides gras volatils se trouvent dans le sang, dans la leucémie et dans d'autres conditions pathologiques. D'après van Noorden (3), von Jaksch a trouvé l'acide butyrique dans le sang de malades atteints de cirrhose du foie et Herter (4) a fait une étude assez 1) Drarcumski, Contribution à l'étude de l'influence de l'indol sur les sclé- roses. Annales de l'Institut Pasteur, t. XXVI, juin 1912. 2) SCHMIDT und STRASSBURGER. Die Feces des Menschen. 3) Van Noorpven. Handbuch der Path. des Stoffwechsels, vol. I. 4) Herrer, Bacterial Infections of the Digestive Tract., 1907. vos ee ee a ee ee ae ovr L'ACIDE BUTYRIQUE ET LA SCLÉROSE 144 complète de la fermentation saecharo-butyrique dans Tes intestins. On trouve cet acide dans les matières fécales de l'homme normal, dans la sueur et les tissus musculaires. Suivant van Noorden, l'urine humaine de vingt-quatre heures contient 60 milligrammes d'acides gras. D'après Ham- marsten (1) aussi, Purine en contient de petites quantités. Une partie de l'acide butyrique que l’on trouve dans le tube digestif est produite par l’action des ferments digestifs. Le lait contient 4 p. 100 de graisse, dont 4 à 5 p. 100 sont constitués par la tributyrine; le beurre contient 2 p. 100 d’un mélange de graisses et d’acides volatils, qui sont mis en liberté par la lipase du suc pancréatique. D'autre part, l'acide butyrique est un produit ordinaire de la putréfaction. L’acide se forme non seulement dans les milieux qui contiennent de la graisse et des hydrates de carbone, mais aussi dans les milieux relativement simples auxquels on a ajouté dés acides aminés (2). Parmi les anaérobies qui produisent la plus grande quantité d'acide butyrique, on peut mentionner le Bacillus butyrieus, B. Welchii (perfringens), B. putrificus et B. sporogenes de Metchnikoff, qui, tous, se trouvent plus ou moins fréquemment dans le tube digestif. Quelques-uns de ces microbes paraissent agir directement sur les sucres, tandis que les autres agissent seulement sur de acide lactique précédemment formé. Comme Pacide lactique se forme en assez grande quantité pen- dant la digestion et qu'il peut servir de source d’acide buty- rique, la question prend une importance considérable. A côté de la fermentation d'hydrates de carbone, ces microbes décomposent plus profondément la molécule d’albumine avec la formation d'acides volatils. La réaction acide de lintestim grêle (acides lactique, butyrique, acétique et succinique) due à la fermentation des graisses, hydrates de carbone, fibrine, cellulose et peut-être de lécithine (3), est maintenue en dépit des sécrétions alcalines qui sont déversées pendant la digestion. Une partie de ces acides est neutralisée aussitôt formée, mais une partie considérable est absorbée et peut, quand elle n’est (1) Hammarsten, Lehrbuch für phys. Chim., Wiesbaden, 4910. (2) Frourn et Lepest, Comptes rendus de la Soc. de Biologie, 1911, vel E, p. 24. (3) Herter, loc. cit. 142 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR pas brûlée dans le sang, fixer de Valeali et produire de l'acidose. Suivant Daunby (1) l'acide butyrique (el Vacide acétique), mème en quantités notables, produisent seulement une slimu- lation locale, et Combe (2) admet « avec la grande majorité des observateurs, que la proportion d'acides gras dérivés de la putréfaction des composés azotés est en trop petile quantité pour causer la moindre intoxicalion de l'organisme ». Par contre, Herter pense que tous ces acides sont irritants et insiste sur leur faculté d’accaparer Jes alcalis de l'organisme, quand ils sont absorbés en quantité. Il dit, de plus, que ces acides sont neutralisés par les bases formées pendant la pulréfaction intestinale et spécialement par l'ammoniaque, car on trouve le butyrate d’ammoniaque en quantités considérables dans les intestins. Or ce savant croit que ce sel en quantité excessive agit comme un irritant. Brunton et Harley (3) sont du même avis que Herter. Celui-ci trouve que l'acide butyrique est particulièrement irritant lorsqu'il se forme dans l'estomac. Nos expériences confirment cette observation. Harley dit d'ailleurs : « Évidemment, tous ces acides sont absorbés dans la circulation générale et, dans des conditions ordinaires, ils sont assez rapidement oxydés. Dans les cas où ils se sont formés en excès ou lorsque l'absorption par la paroi du tube digestif est excessive, il se peut que les quantités soient trop grandes pour être brilées dans le sang et, dans ce cas, on les retrouve dans l'urine. Dans ces circonstances, ils peuvent exercer une action toxique. » Nous avons fait des recherches pour déterminer s'il y avait élimination d'acide butyrique avec l'urine ou les feces. D'après Herter, l'organisme oxyde les acides volatils très facilement, mais lorsque l'acide butyrique se trouve dans l'urine, c'est sous la forme de sel d’ammoniaque. Méme dans le cas ou il y aurait une absorption excessive d'acide, tant que le pouvoir oxydant de l'organisme n'est pas diminué, on ne pourrait pas compter trouver une augmentation de l’'excrétion d'ammoniaque par l'urine consécutive à cette absorption excessive. Nos expériences ont confirmé cette manière de voir. (1) Dauxey, Alimentary Toxiemias. British. med. Jour., 25 mars 1913. (2) Comps, Intestinal auto-intoxication, American edition, 1910. (3) Hartey, The Toxines of the Alimentary Canal. Proc. Roy. Soc. Med., mars 1913. L'ACIDE BUTYRIQUE ET LA SCLÉROSE 143 Dans une expérience avec le butyrate de calcium (deux doses de 0,225 gramme par la bouche pendant deux jours), l'urine du cobaye en expérience, aussi bien que celle du témoin, étaient acides au tournesol, mais le produit de distillation de l'urine des deux cobayes, après qu'on ett éliminé Vindol, le scatol et le phénol, na donné aucune odeur d'éthyl-bu- tyrate après l'addition d'acide sulfurique et d’alcool. Nous avons fait des expériences sur des cobayes qui recevaient de l'acide butyrique, en quelques cas avec l'urine et les feces séparément (mais qui ne correspondaient pas à la même période) et aussi avec un mélange des quantités totales d'urine et de fèces excrétées pendant une période donnée. Nous nous sommes servis pour ces expériences de cobayes qui recevaient 0,004 gramme d'acide par jour. L’urine, dans tous les cas, était alcaline. Dans un seul cas seulement (5 cobayes pendant trois jours), nous avons trouvé l'acide butyrique (éthyl-butyrate dans le distillat). Dans d'autres cas, nous avons trouvé, par la méthode de Duclaux, de l'acide acétique et formique en proportions égales (0,1 gramme p. 100 de chacun); ou encore une partie d'acide valérianique pour vingt parties d'acide acétique. Dans un cas, le mélange d'urine et de matières fécales nous a donné une partie d’acide butyrique pour dix parties d'acide acétique. Nous avons fait une expérience avec des fèces seulement (60 grammes recueillis de 14 cobayes pendant trois heures) et nous n'avons pas trouvé d'acide butyrique. D'après Herter, il n'y a pas de doute que le distillat d'une émulsion du contenu du tube digestif humain normal contient surtout de l'acide acétique et, d'ordinaire, on trouve une quantité modérée d’ammoniaque, en quantité à peu près suffisante pour neutraliser cel acide acétique. Larue et Labbé (1) ont trouvé une quantité moindre d'acides volatils chez les personnes qui sont au régime végétarien et, d'après van Noorden, Langstein et Meyer auraient trouvé que les fèces de malades atteints de catarrhe inteslinal contiennent plus d'acides volatils qu'il ne s’en trouve dans les fèces de personnes nor- males. La présence de plus grandes quantités d'acide acétique paraitrail indiquer un processus fermentatif d'origine bactérienne dans les intestins. Malheureusement, nos expériences ont été interrompues avant que nous ayons pu faire des témoins avec des cobayes normaux et n'ont donc pas, par conséquent, de signification spéciale. De cette brève revue de la formation de l'acide butyrique dans l'organisme, il résulte que cet acide et ses sels peuvent être irritants pour le tube digestif et toxiques, lorsqu'ils sont absorbés en quantité plus ou moins considérable. Parle fait qu'il se produit, de temps en temps, des variations dans la production d'acides et dans l'intensité des phénomènes d'absorption chez chacun de nous, il est difficile de saisir le moment où il s’agit de conditions pathologiques ou normales. Souvent, pendant la durée de la vie, quand la santé, en général, (1) Larue et Hener Lagsé, L'acidité volatile des matières fécales. Arch. des maladies de l'appareil digestif, 1912, p. 329. 144 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR paraît bonne, il y a des périodes plus ou moins longues pendant lesquelles, sans être précisément malade, on ne se porte cependant pas: très bien. Il se peut que, justement pendant de telles périodes, les effets cumulatifs de cette auto-intoxication se soient produits sur l'organisme, dont le résultat final se manifeste si fréquemment par la selé- rose. Nous allons maintenant considérer nos propres expé- riences. Bien que les lésions artérielles spontanées, spécialement celles d’un caractère calcaire, se rencontrent plus souvent parmi les herbivores que parmi les omnivores, nous nous sommes servis du cobaye pour nos expériences. Il peut y avoir un avantage particulier dans le choix de ces animaux dont les aliments sont riches en sels de chaux, car ils sont spécialement portés à avoir des lésions selérotiques avec calcification finale. Selon l'opinion de Loeper et Boveri (1), « cette surcharge calcique est une des raisons de l'extrême facilité avec laquelle on réalise la calcification artérielle (chez le lapin) avec des doses minimes de substances toxiques, tabac, ergotinine, plomb et surtout adrénaline, qui n’ont aucun effet chez le chien et le chat, par exemple ». Plusieurs savants ont fait des recherches pour déterminer la proportion de cobayes (supposés normaux) qui présentent de l’athérome spontané de l'aorte. Weinberg (2) n’en a pas trouvé un seul cas parmi 236 cobayes examinés. On peut faire un grand nombre de coupes, même au niveau des valvules et quelquefois ne trouver qu'une petite partie de l'artère présentant des plaques cartilagineuses ou autres lésions caractéristiques. La partie où ces lésions existent peut, par conséquent, très facilement échapper à l'examen. En étudiant les aortes, nous avons d'habitude fait, dans la région des valvules, des coupes à peu près tous les 2 milli- mètres, car il nous parait plus important de faire un grand 1) Lorrer et Boveri, La chaux et les artères. Comptes rendus de la Soc. de Biologie, 22 juin 1907, p. 1160. 2) WeinserG, Comples rendus de la Soc. de Biologie, 5 décembre 1908, p. 564. sit at rotin tte din L'ACIDE BUTYRIQUE ET LA SCLÉROSE 145 nombre de coupes à ce niveau que d'en faire quelques-unes seulement dans cette partie, et un petit nombre au hasard dans les autres parties de l'artère. Dratchinski (4), quia fait une étude assez complète des aortes de 54 cobayes normaux en a trouvé, en moyenne, 50 p.100 avec des plaques cartilagineuses. Chez 22 cobayes d'un poids au-dessus de 450 grammes, il a trouvé 99 p. 100 de cartilagi- nation. Sur nos 12 cobayes témoins qui ont été placés dans les mêmes conditions que nos animaux d'expérience, il a fallu en éliminer trois, pour diverses causes. Les cobayes pesaient en moyenne 560 grammes. Tous ont été chloroformés, la stérilité du sang du cœur vérifiée. Les frottis de leurs organes, qui étaient macroscopiquement normaux, ne montraient pas de micro-organismes. Ce sont les conditions que nous nous sommes imposées dans nos expériences. Sur ees 9 cobayes, nous en avons trouvé 4 avec plaques cartilagi- neuses neites, et 1 dont le commencement de cartilagination était évident. Aucun de ces animaux ne montrait de dépôts calcaires ni dans l'aorte, ni dans les autres organes. A noter que, dans le cas de notre plus lourd cobaye (735 grammes) tous les organes paraissaient parfaitement normaux. Nos résultats nous ont donné une proportion d'au moins 50 p. 100. Tout en admet- tant que le nombre de cobayes est trop petit pour fonder une opinion sur la proportion de cobayes dans lesquels on trouve des lésions sclérotiques de l'aorte, nous croyons, en comparant nos résultats à ceux de Dratchinski, qu'au moins 50 p. 100 des cobayes d'un poids au-dessus de 350 grammes présentent l'athérome spontanée de l'aorte. Comme l'acide butyrique est un fort irritant, et étant donné que dans nos expériences nous nous étions proposé de voir s'il était possible de produire une intoxication chronique, nous devions, vu Faction véritable de l'acide butyrique, déter- miner une dose à donner qui ne provequerait chez nos animaux aucune manifestation visible de malaise ou d’em- poisonnement. (1) Dratcuinskt, loc. cil. 146 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Le tableau suivant résume les expériences faites pour déter- miner cette dose : | | | =| Bln] wa 8 a © =) sl c = 8 late] et ee = = À me ae Sipe ecnen ae 2 ele de © ED © a | a | 3/630/0.088] 1 »| 2h 1/2 » |Péritoine.|Congestion d'organes et in- testins. Liquide sanguino- lent dans le péritoine. 4|52010.044| 0.5) 4 h. 1/2 » — Comme le n° 3. — La vessie et les intestins contiennent du sang. 5/400} — | — |23 heures. » — Organes, comme les n° 3 et 4. — Intestins très conges- | | tionnés. 6/380} — | — |36 neures. 40 gr.) Bouche. [Comme le n° 5. — Liquide san- guinolent dans l'estomac. 7/420} — | — | 3 jours. 25 gr.| Sonde. |Foie brûlé. Estomac brülé et ulcéré. Poumons conges- | tionnés. 8150010.07 | (1) | 4 jours. | 70 gr. — Inflammation de l'estomac et des intestins. Poumons con- geslionnés. 9|480}0.088) 1 »|20 heures. » = Tous les organes très brûlés. n° $ a rejeté une partie de sa dose. (1) Il est tres probable que le Dans tous les cas il y avait de la dyspnée, de Vhypothermie et les mouvements du cœur étaient ralentis. Comme nous supposions que l'acide, ingéré en petite quan- lilé, serait promptement neutralisé, ef comme nous voulions donner une dose dont une partie, au moins, passerait dans la circulation, nous avons commencé nos expériences avec une dose de 1 cent. cube (0,011 gramme) d'acide par jour, en solu- tion 1/8 normale. Nous avons injecté cette quantité à l’aide de la sonde dans Pestomac à six cobayes et une quantité double a une autre série de six cobayes. Mais dans les deux séries la dose s'est montrée ètre trop forte. En moins d’un mois plusieurs animaux étaient morts et les autres élaient si maigres qu'il a fallu rejeter tous ces cobayes el recommencer une nouvelle série. A Vautopsie, dans la plupart des cas, il y avait une ulcéra- lion ou une inflammation de l'estomac, une congestion plus ou L'ACIDE BUTYRIQUE ET LA SCLEROSE ' 147 moins sévére des poumons et, en général, un état hémorragique de Vintestin gréle. Dans toutes nos autres expériences nous avons introduit Vacide dans la bouche à l’aide d'une seringue et avec les pré- cautions nécessaires. Dans la série suivante (série A) nous avons dilué la solution de façon que | cent. cube contint 0,0011 gramme d'acide, et nous avons donné cette dose chaque jour, a dix-sept cobayes. Une autre série (série B) de douze cobayes a recu une dose double, soit : 0,0022 gramme d’acide. Après un mois, comme les cobayes paraissaient bien supporter ces doses et comme la quantité d'acide nous semblait très petite, nous avons doublé la dose de chaque série en donnant la même quantité de liquide. Comme les cobayes de la série B (2c.c.—=0,0044 gramme) ont commencé bientôt à maigrir, nous avons dû au bout d'un mois revenir pour les deux séries à la dose primitive. Ne pouvant donner que de très pelites quantités d'acide libre, nous avons décidé de donner un sel d'acide butyrique, espé- rant de cette facon pouvoir donner une quantité beaucoup plus grande. Comme on le verra, nous avons pu, en effet, donner sous celte forme vingt-trois fois plus d'acide qu'à la série B et quarante-six fois plus qu'à la série A. Morel (1) a montré que les butyrates et les autres sels de calcium des acides gras volatils étaient plus toxiques que les sels minéraux de calcium. De plus, le butyrate de calcium était plus toxique que les butyrates des corps monovalents. D’après lui, les carnivores sont trois fois plus sensibles à ces sels que les herbivores. Il a trouvé que, pour le cobaye, la dose mortelle de butyrate de chaux, en injection péritonéale, était de 0,4 gramme par kilogramme d'animal, ou de 0,1 gramme pour un cobaye de 250 grammes (butyrate de Ca, à 5 p. 100 dans l’eau physiologique.) Nous avons décidé de nous servir de ce sel dans nos expé- riences, car il nous semblait que, sil y avait une tendance à la production de lésions de sclérose et spécialement de dépôts calcaires dans l'aorte par l'acide butyrique en doses très faibles, la présence dans l'organisme de calcium en excès concourrait (1) Morez, Recherches sur les propriétés biologiques des sels de calcium, des acides gras saturés. Journ. Phy. et Path. générale, mai 1912, p. 453. 148 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR à faciliter cette production. Loeper et Boveri (1) avaient déjà montré qu'en donnant des sels de chaux en même temps que des doses très faibles d’adrénaline, des lésions étendues se produisaient dans l'aorte des lapins, pendant que les témoins qui n'avaient reçu que de l’adrénaline étaient absolument indemnes. Ils ont fait aussi la contre-épreuve, en donmant une dose d’adrénatine toxique à des lapins au régime normal el en prenant comme témoins des lapins dont le régime con- tenait peu de chaux (pommes de terre, carottes, son). Ils ont trouvé des dépôts calcaires seulement dans l'aorte des lapins au régime normal, Ces savants ont conclu de leurs expérienees que « la surcharge calcique, en effet, ne crée pas la pétrifica- tion artérielle, mais elle en facilite singulièrement la produc- tion et en augmente l'étendue ». Dans ses expériences, Ott (2) ajoutait du phosphate de calcium aux substances irritantes employées, en même temps qu il châtrait (3) ses animaux afin de faciliter la production de lésions artérieHes. Comme témoins de notre expérience avec le butyrate de chaux, nous donnons actuellement à une autre série d’animaux la mème quantité d'acide sous forme de sel de sodium. Nos résultats seront communiqués plus tard. Le tableau ci-dessous résume d'autres expériences faites pour n = = 5 Ss a oe a Oo > A © E © o re Si Od fas mal ak D DS) & a : = n © ep oy 1134510.25 | Sonde. [Rétabli.| Hypothermie. Rétabli au bout de 4 jours. Perte : 20 grammes 30010.375 — 30 Dyspnée. Estomac normal. Intestins un | heures.|peu irrités. ; 3126010 .5 -— 47 Dyspnée. Poumons très congestionnés. | | | heures |Intestins très hémorragiques. :1420/0.475|Péritoine.|2 1h. 4/4] Températ. tombée de 2 degrés. Dyspnée. | Viscères Lrès hémorragiques. to (1) Lorrer et Bovert, loc. cil. 2) Orr, L'arterio-sclérose gastrica ed intestinale. Test de libera Docenza, Sassari, 1910. 3) WeineerG et VaizLarn, Comples rendus de la Soc. de Biologie, 1908, ont trouvé que l'athérome des artères de chevaux chatrés n’est pas aussi fré- quente que dans le cas de chevaux ‘entiers. L'ACIDE BUTYRIQUE ET LA SCLÉROSE 149 déterminer la dose de butyrate de Ca que l’on peut donner, sans produire de signes visibles d’empoisonnement. Nous nous sommes servi d’une solution à 12,5 p. 100 dans de l’eau distillée (pour l'injection intrapéritonéale, dans de l'eau phy- siologique). La dose donnée au n° 4 est la dose mortelle de Morel. A la suite de ces expériences, nous avons décidé de donner à nos cobayes (série C), par la bouche, tous les jours, 0,5 cent. cube d'une solution à 12,5 p. 100 (soit 0,0625 gramme) de butyrate. Pendant ces expériences, les animaux sont res- tés en bonne condition et ont gagné en poids comme les témoins. Comme nous l'avons déjà dit, seuls les animaux dont le sang et les organes étaient stériles et dans lesquels il n’y avait pas d'anomalies d'un caractère anatomo-pathologique, ont été pris en considération. Dans aucun cas, nous n'avons trouvé de lésions macrosco- piques de l'aorte. Nous nous sommes servi de la technique usuelle pour la préparation et la coloration des coupes. Comme matières colo- rantes nous avons employé généralement l'hématéine-éosine et la méthode de van Gieson, et, pour les libres élastiques, le colo- rant de Weigert. Pour l’examen de l'aorte abdominale, nous avons trouvé la méthode suivante très commode. L’aorte, de la crosse jusqu'aux branches des artères fémorales, est fendue avec des ciseaux et roulée autour d’un objet cylindrique quel- conque. On la lie avec un fil, on dégage l’objet cylindrique central et on fixe. Une seule coupe, faite dans le sens longitudinal de l'artère, dans la partie centrale de ce rouleau, montrera la plus grande partie de l'aorte thoracique et abdominale (pl. IE, fig. 1). Pour diverses causes nous n'avons pu prendre en considé- ration pour nos résultats que cing cobayes dans la série A, cing dans la série B, et huit dans la série C. Tous ces animaux ont survécu Jusqu'à la fin de l'expérience et ont été chloroformés ou saignés à blanc. 150 ANNALES DE LDINSTITUT PASTEUR Le tableau ci-dessous contient un résumé de nos expériences avec le résultat de l'examen histologique des organes. SS LT PSP POSE TT LL ARE UT TT SEE EE CES ER KT SEEN ALAN ES CENT n | | | Le] | n D = u FS] = AU Sela à 5 © = z © 4 < a) = m= ee PHONE) ely 25 | as 5 | 3 ih Es Se) SES Ses ESS) 78 | 23 | os RO a1 RS) | 2 ee Slee are Qa | a | oe eee eae eee A Zz = = =| > a E ons = 2 = rs] = =) NOUS iil pet ia) DATES | ir an 2 ONE d Le ais IE iS © oe = 2 < = =) | = =) = T > = 5 a A | En 1612401320 12 05132 = +- » a = + — = ». - | = 1713351470! 16 0.165) — a a + — » (1) SA = , . £ Pre PUIS fort grossissement on pouvait voir des restes de cellules hépatiqnes et conjone tives dégénérées. G = 80/1. Vic. 5. — Rein. Cobaye 3. Série CG. Sclérose au début de la substance cor- ticale. G— 250/4- Fic. 6. — Foie. Cobaye 9. Série C. Prolifération de tissu conjonctif consé- cutive à la phase primaire de cirrhose. G — 60/1. Fic. 7. — Rein. Cobaye 54. Série C. Dépôts calcaires dans et entre les tubes. Hémorragie diffuse. Tissu conjonctif contenant un foyer de cellules embryonnaires. G = 60/1. eS CU Cl LINFLUENCE DES ACIDES SUR L'ACTIVITÉ DE LA MALTASE DIALYSÉE par W. KOPACZEWSKI. Au cours de nos recherches sur la dialyse de la maltase [4}, nous avons constaté que la dialyse enlève à la maltase de Koji (takadiastase du commerce) 94,5 p. 100 de ses matiéres solides et 74,4 p. 100 de ses cendres. Nous avons pensé que, lorsqu'on étudie l’activité de la maltase en présence des acides, il était probable qu'une si grande quantilé d'impuretés devait avoir une certaine influence sur les quantités oplimales des acides à employer. Il fallait done, pour préciser les conditions exactes de l’activité diastasique, chercher un moyen de rendre négli- geables les impuretés qui accompagnent toujours les prépara- tions des diastases. G. Bertrand et ses élèves [2] ont cherché à réaliser ce pro- blème : 4° par la pureté des préparations; 2° en employant de très petites doses de diastases pauvres en cendres et très actives, et 3° en vérifiant avec des solutions diastasiques bouil- lies, ajoutées au lieu de l’eau, si l'influence d'impuretés est encore notable. Nous avons pensé qu'on pourrait atteindre le méme but en dialysant les solutions diastasiques brutes du commerce. Il était surtout intéressant de voir si les différences établies par nous [3| pour certains acides entre leurs propriétés acti- vantes pour la maltase et leurs propriétés physico-chimiques (hydrolyse des sucres, conductivité spécifique) persistent lors- qu'ils agissent sur la maltase dialysée ; en d'autres termes, si l'activité de la maltase dépend exclusivement des concentrations enions H, ou bien si d’autres facteurs interviennent aussi. La maltase et le maltose ont été les mêmes que dans nos travaux sur la dialyse de la maltase 4). La dialyse était effectuée comme dans nos recherches précé- dentes; toutefois, au lieu du dispositif ordinaire, nous nous 158 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR 1 sommes servi de notre dialyseur analylique {5} et nous avons dialysé pendant 72 heures. La solution de maltase dialysée élail neutre vis-à-vis de l'héliantine; elle contenait 1,0 p. 100 des cendres; sa conductivité électrique était K —9,5 >< 10. La marche des expériences était la suivante : d'un certain +150% T | T Eo mee Meee Jen Fa] a er aT Ca Tt ii Li ; | à; +100% : ry “ | \ | 2 oer : Qi NS ul G Sang = SUR AN RE 8D 4 3 4 À al LE S À ! ww | . | [RS Q 4 v D 4 50% _ & Je } ST | 2] | OR RS jee Ne | ne ù % / S Sc L h on = | - + H : aa arte CHU LES | ee 1e LEE D : | Sa — KL | 36] Yoo 730 23 7 Do 360 400 450 500 i550 600 650 700 7 apo abo 50 90 oo, v | af TT | RTE : + ——— | $ À | 1 | Ÿ È E a RS PER et SES | | SN 502 RE beats Bt EU | eal ++ Lt v ! & [1 7 ea 2 + 100% | | sl Concentration (normale) de l'acide sulfurique. Fic. — Influence de l'acide sulfurique sur l’action de la maltase ordinaire ou dialysée. nombre de tubes à essai en verre d’lena, préalablement net- loyés pendant 15 minutes à la vapeur d’eau, quelques-uns étaient remplis avec 2 cent. cubes d'eau pure (K — 1,5 à 2,0 X 10), les autres avec le méme volume d'acide à diffé- rentes concentrations. Ces tubes, ainsi que les solutions de maltase dialysée et fraîchement préparée et de maltose, ont été INFLUENCE DES ACIDES SUR L’ACTIVITE DE LA MALTASE 159 placés dans Vétuve à + 37 degrés-+0,5 degré centigrade et laissés pendant 30 minutes. Après ce temps, on mélangeait la solution sucrée avec chacune des solutions diastasiques et on versait dans chaque tube à essai 3 cent. cubes du mélange. On a expérimenté sans vérifier hydrolyse du sucre par la dose la plus forte d'acide |6), et sans antiseptique [7]. Après 3 h. 1/2, on à retiré les tubes de l'étuve et on a arrêté l'hydrolyse en ajoutant de la soude caustique jusqu'au virage rouge de la phtaléine du phénol. Les sucres ont été dosés par la méthode de G. Bertrand. Les solutions d'acide ont été titrées en présence de phénol- phtaléine. Chaque acide était étudié en deux ou trois séries afin de préciser la dose en présence de laquelle la maltase pos- sède son optimum d'activité. Les acides employés étaient les produits « chimiquement purs » du commerce. Les concentra- tions finales de la maltase et du maltose étaient respective- ment de 1 p. 100 et 2 p. 100. Le tableau I montre la marche générale des expériences pour l'acide sulfurique. TABLEAU I. CONCENTRATION MALTASE ORDINAIRE | MALTASE DIALYSEE en | ire | e ure rre 11° rire ACIDE SULFURIQUE série. | série. série. série. série. série. — net Stes EU Sin — 100,0 NS T:2)R SE EU LÉ OR nee — 100,0 a ERA AL D PERS AE CE — 100 0! 1/10 1/20 1/40 1/60 1/80 1/100 4/450 1/160 4/170 1/180 1/190 4/250 1/500 4/600 1/700 4/725 1/750 1115 1/800 4/900 et | k/1000 N MAS ES... oe res RAS oy | EEE 1/2250 N CNE 7. ÉRRMENET | Diner | 58-4 | a Sta AS Ree — 100,0) SO oo sinsiols ee = |} e 01.20 20.0 D ho -1 Otros E> pe ow, SE ZAZA LZ Ly Ly LL, Ly Ly Ly Ly Ly 2, Ly Ly Ly Ly OO += tos] 7 a +- + 44444 160 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Les chiffres indiqués représentent l'augmentation (+) ou la diminution (—) du pouvoir hydrolysant de la maltase en pré- sence de l'acide; par le Zéro nous entendons les doses sans aucune action sur l'hydrolyse. En construisant une courbe, on peut constater que l’activité de la nialtase dialysée en présence d'acide sulfurique est beaucoup plus régulière que dans le cas de maltase non dialysée (fig. 1). Comme on le voit; la solution non dialysée présente son activité maximale dans un milieu d’une acidité 1/170 N; tandis que, pour la solution dialysée, l'activité maximale en présence d'une concentration de 1/725 N. Il en est de même en général. L’optimum de l’activité est atteint, dans le cas de maltase dialysée, avec des doses d’acide inférieures à celles qui sont nécessaires à l'activation de la mal- tase non dialysée (1). C'est ce que montre le tableau IF, qui donne TABLEAU II. CONCENTRATIONS OPTIMALES POUR LA MALTASE _ ACIDES Non dialysée. Dialysée. Ghlarkydrique:.: hac. ta. EH 1/160 SUMURIQUE eee tes ates ee een 4/170 Phosphorique Formique INTENSE yee or ihe Monochloracétique , Dichioracétique Trichloracétique . Propionique . 3utyrique normal Oxalique . 4/600 1/725 N N N N JN N N N N N N A les résultats obtenus avec les acides, présentant le maximum des différences entre leurs propriétés physico-chimiques et leurs influences sur l'activité de la maltase, et choisis parmi les 62 acides précédemment étudiés par nous |3). En prenant l'acide chlorhydrique comme base des calculs et 1) Étant donné que les solutions de maltase subissent une dilution pendant la dialyse, on a toujours opéré avec des solutions plus fortes. — INFLUENCE DES ACIDES SUR L’ACTIVITE DE LA MALTASE 161 en rangeant les autres acides suivant leur activité, nous verrons que, pour tous les äcides étudiés, les différences entre leurs propriétés physico-chimiques et leur influence sur le pouvoir hydrolysant de la maltase dialysée sont les mêmes que pour la maltase rion dialysée (voir le tableau III). TagLeau [II. 2 I AR EP EN IRD RTE RE EE EE LL D 7 ACTIVITÉ DES ACIDES| ACTIVITÉ 2 ca go) des acides |CONDUCTIVITE Tia vis-a-vis mA mas a de Ta maltase: (HCl = 100) spécifique 5 & à VIS-à-VIS des acides Ee ¥ du saccharose.| (HC1 — 100.) ~ [Ordinaire.| Dialysée. | [8] Chlorhydrique . 36,5 | 100 » 100 » 100 » | 100 » Sulfurique , 98,0 106,2 120,8 53,6 65,4 Phosphorique . . . . .| 98,0 15,6 20,8 6,23 ites ROLIDIQUC ser mmon carte 46,0 3135 20,0 1,53 ~ Reatiques smc. >: 60,0 | 24,8 5.8 0,40 1,4 Monochloracétique. . 94,5 93,7 3340 4,84 4,9 Dichloracétique . . . .| 129,0 195,0 83,3 21,1 2513 richloracétique. 163 ,5 156,2 104,2 15.4 62:3 Propionique. . 74,0 4355 4,1 — — Butyrigue . 88,0 6,2 i = = Oxalique. 90,0 92:5 | 108,3 18,6 49,7 Si on calcule, suivant la formule (K est la constante de dissociation et C représente la concen- tration moléculaire de l'acide en question), les concentrations en H. pour les doses optimales des acides étudiés, calculs rendus possibles grace à l'élimination des différents sels, on constate que Pu log {H:|= 3,6 à 5,8, suivant la nature de acide employé {9} (voir le tableau IV). Tout dernièrement, Michaelis et Rona 10); en faisant varier les concentrations ioniques au moyen des acétates ou des phosphates, ont trouvé comme optimum d'activité de la maltase non dialysée une concentration en ions acides correspondant à A6: 14.058 Le chiffre obtenu par ces auteurs est assez rapproché du nôtre pour l’acide acétique, mais diffère de ceux pour les autres acides. 162 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Si nous comparons les résultats obtenus par de nombreux auteurs au sujet de l'influence des acides sur de multiples phénomènes biologiques, nous pouvons constater que, dans chaque cas, les acides se rangent d’après leur activité d’une flacon toute spéciale; jamais aucun parallélisme ne pouvait ètre constaté entre le degré de dissociation électrolytique et l'activité catalytique. Donc il y a la un facteur inconnu qui intervient et qui trouble les résultats observés. TagLEaAu IV. CONCENTRATIONS CONCENTRATIONS EN tons H. OPTIMALES POUR LA MALTASE POUR LA MALTASE ACIDES Non dialysée.} Dialysée. |Non dialysée.| Dialysée. Formique. 2,5 ><10-4 [1,2 10-4) 4/60) SNe 2S Acétique . Mrs 1,2 X10—1 |8,4X 410-5] 4/35 N [4/50 N Monochloracétique. 2.6 ><40—* [4,8 10-4) 1/150 N, /4)/2008N Dichloracétique 4,4 410-3 |4,5 X 10-4} 1/200 N /|1/500 N Trichloracétique . 4,4 X 10-3 11,6 X 10-3} 41/250 N |4/625 N Propionique . 158010 1455 X 40—4|) 4/20) SIN Se OSeeN Butyrique 3,8 X 104 1358 X 10=4) 1/40 IN ON Oxalique . 2,250 15 0 it > £ Ini s à l'étuve | toxine leucocytes joe Résultats : Dee Résultats : | animaux | Mort apres | animaux | Mort après 2 heures. 0,008 0,5 185 er. 2 jours. 170 gr. 4 jours. 2 heures. 6,01 0,4 5er , jours. |180 gr.| 2 jours. i heures. 0,01 0,5 200 gr. Survit. 170 gr. 4 jours. 4 heures. 0,015 0,5 195) sr |) JOURS: 180 gr. 2 Jours. 6 heures. 0.01 0,4 200 gr. Survil. 170 gr. 4 jours. 6 heures. 0,045 0,4 95m or: — 170 gr. | 2 jours. 6 heures. 0,045 0,4 185 gr. Survit. 170 gr.| 4 jours. 6 heures. 0,02 0,4 190 gr. | - 180 gr. | 2 jours. Ainsi nous voyons qu'il suffit d’un séjour de quatre heures à l'étuve pour que la neutralisation de la toxine par les globules blanes se produise. En ce moment, 85 p. 100 des leucocytes gardent encore leur vitalité. Je passe à présent aux expériences faites avec la toxine téta- nique. Dans ce dernier cas, J'ai étudié l'influence des leucocytes extraits du sang de cheval. La méthode d'extraction des leuco- cytes nous est déjà connue et je cite seulement les résultats obtenus. TasLeau XVII. Leucocyles de cheval + {oxine tétanique. — Inoculation sous- cutanée du mélange aux cobayes après un séjour d’une heure a létuve. Les animaux témoins ont été inoculés avec la toxine seule. ANIMAUX D’EXPERIENCE ANIMAUX TEMOINS QUANTITE QUANTITE de de HORS leucocytes Poids Résultats : Poids Résultats : des animaux | mort après | des animaux | mort après 0,015 0,5 220 gr. 7 jours. 210 gr. 6 jours. 0,0025 | 0,4 200 gr 5 Jours. 215 gr. 5 jours. 0,0055 | 0,5 195 er. 3 jours. 200 er. 5 jours. 206 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR TasLeau XVIII. Leucocytes de cheval + loxine tétanique — Inoculation aux cobayes du liquide séparé de leucocytes par centrifugation après un séjour du mélange à l'étuve pendant une heure. Les animaux témoins ont été inoculés avec la toxine seule. ANIMAUX D'EXPÉRIENCE ANIMAUX TÉMOINS QUANTITÉ QUANTITÉ 3 de de toxine leucocytes Poids Résultats : + Résultats : À oids Poids mort mort : : des animaux au bout de 2S a au bout de des animaux 210 185 195 ber} 8 jours. : 6 jours. 5 jours. Mer: 5 jours. og 3Q dO er 3 jours. iT. 5 jours. Tout d'abord, j'ai étudié Vinfluence sur les cobayes de ces leucocytes après leur séjour durant une heure à l'étuve en présence de la toxine et ensuite après un séjour de douze heures. La dose mortelle de toxine tétanique était de 0,002 et tuail un cobaye du poids de 200 grammes dans l’espace de cing jours. De sorte que nous voyons que les leucocytes de cheval sont incapables d’absorber ou de neutraliser la toxine tétanique. Pour confirmer l'absence d'absorption, je cite une expérience faite avec la toxine tétanique. TagLeau XIX. Leucocytes de cheval + toxine létanique. — Après un séjour d'une heure à l'étuve, j'ai inoculé aux cobayes séparément le liquide et les leucocytes. La portion des leucocytes provenait d’une dose double du mélange toxique. Le liquide a été inoculé comme d'habitude. Les animaux témoins ont élé inoculés avec la toxine seule. I PI EEE TN I CSA AE 2 EP VAE SE TT ER DR RCE ESS ME EIRE ANIMAUX D EXPÉRIENCE] ANIMAUX D EXPÉRIENCE ANIMAUX TÉMOINS = w (OY LIQUIDE LEUCOCYTES = 4 = ~~ Sod |ho0S en Ty |ATO . . | . ROUES VS | Poids Résultats : Poids Poids Résultats : © des mort des Résultats des mort animaux | au bout de | animaux animaux | au bout de 0,002 | 0,5 } 190 gr.| 5 jours. 190 gr. Survit. 200 gr.| 6 jours. 0,0035| 0,6 | 215 er. : jours. 190 er. Survit. 218 gr.| 3 jours. 0,004 0,6 | 185 gr. | 2 jours. 185 gr. Survil. 220 gr.| 2 jours. 0,0045) 0,6 1170 gr. | 2 j. 1/2 185 gr.| Survit. 200er PMU eae | ae ee QE OL ES LL NE I AL OPEN SUR LA FIXATION DES TOXINES SUR LES LEUCOCYTES 207 Cette expérience nous montre que les leucocytes n’absorbent dans aucun cas la toxine tétanique, car tandis que le liquide provenant du mélange des leucocytes avec la toxine est aussi toxique que la toxine elle-méme, les leucocytes restent inof- fensifs. De sorte que nos résultats different complétement de ceux obtenus par M. Wolff. D’aprés cet auteur, la toxine téta- nique est absorbée non seulement par les leucocytes vivants, mais aussi par les leucocytes morts. Il me semble que les résultats obtenus par M. Wolff dépendaient de la méthode qu'il employait. Du mélange de toxine et de leucocytes après son séjour à l’étuve il inoculait non la partie liquide, mais les leuco- cytes soigneusement lavés en se servant d'une forte quantité de toxine. Les leucocytes se trouvant dans un milieu très toxique cardaient, mème après des lavages répétés, une dose de toxine suffisante pour tuer les souris. Si M. Wolff réussissait à obtenir des eaux de lavage non toxi- ques, nous pouvons expliquer ce phénomène par la supposition que la membrane des leucocytes était imbibée par cette solution si riche en toxine, ce qui empéchait le passage de cette dernière. dans les eaux de lavage. Pour rendre ces expériences probantes, il aurait fallu montrer qu'une poudre inerte quelconque mélangée dans les mémes conditions à de la toxine tétanique pourrait en être complète- ment débarrassée par une triple centrifugation. Tapiteau XX. — Leucocytes de cheval + toxine létanique. — Inoculation du mélange après un séjour de douze heures à l’étuve. Les animaux témoins ont été inoculés avec la toxine seule. ANIMAUX D'EXPÉRIENCE ANIMAUX TÉMOINS QUANTITÉ QUANTITÉ de de toxine leucocytes Poids Hewes : Poids De ae g des animaux arnt Parade des animaux a hout de —_——— 0,002 055 215 gr 6 jours. 220 gr. 5 jours. 0,0025 0,5 225 gr. 4 jours. 210 gr. | 4 jours. 0,003 0,5 260 gr. 5 jours. 230 gr. 3 jours. 0,004 0,6 230 gr. | 3 jours. 225 gr. 2 jours. 208 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR TagcEau XXI. — Leucocyles de cheval + loxine tétanique. — Inoculation aux cobayes du liquide séparé par centrifugalion après un séjour de douze heures à l'étuve. Les leucocytes sont inocuiés séparément comme dans le tableau XIX. Les animaux témoins reçoivent la toxine seule. ANIMAUX )}) EXPÉEIENCE | ANIMAUX D EXPERIENCE ANIMAUX D’EXPERIENCE a ga 2 LIQUIDE LEUCOCYTES SPORE vo Si Et @ RS 7 = el Zs 2 À J : a S| ene Poids Résultats : Poids Poids Résultats : = + =) = P > © © des mort des Résultats des mort animaux | au bout de | animaux animaux | au bout de 0,002 0,6 1210 gr.| 8 jours. | 220 gr. Survit. 220 gr.| 6 jours. 0,0025| 0,5 1235 gr.| 6 jours. | 220 gr.) Survit. 210 gr.| 4 jours. 0,003 0,5 | 220 gr.| 4 jours. | 235 gr.| Survit. 230 gr.| 3 jours. 0,004 0,6 | 215 gr.| 4 jours. | 235 gr. Survit. 225 O¥. | 2) jOULS. On voit d'après ces expériences que les leucocytes de cheval sont incapables, même après un séjour de douze heures à l’éluve, de neutraliser ou d’absorber Ja toxine tétanique, car, tandis que le liquide reste aussi toxique que la toxine elle-même, les leucocytes séparés de ce liquide restent tout à fait inoffensifs. Il est évident que la toxine tétanique est un poison sur lequel les globules blanes du cheval sont sans action, au moins en dehors de l'organisme. I] est possible qu'une durée plus longue et des conditions plus favorables soient nécessaires pour que la réaction se produise. J'avais l'intention de conti- nuer mes recherches en expérimentant avec le sang de lapins, qui sont des animaux moins sensibles, mais malheureusement je n'ai pas réussi à en extraire les leucocytes, car leur sang se dépose si lentement que les globules blancs tombent au fond du vase en même temps que les globules rouges, et la quantité de leucocytes obtenus dans cette opération n'était pas suffisante. Voilà pourquoi j'ai décidé de continuer mes recherches sur les globules blancs provenant de lexsudat péritonéal de lapins. Pour extraire les globules blancs, j'ai inoculé dans le péri- toine de lapins du bouillon mélangé avec de Valeurone et con- tenant du blanc d'œuf à 1/10. J'ai injecté ce mélange à deux reprises dans l'intervalle de quatre jours. Ensuite, j'ai lavé le périloine par la méthode ordinaire en me servant de solution EE mnt ee SUR LA FIXATION DES TOXINES PAR LES LEUCOCYTES 209 physiologique contenant 0,4 p. 100 de citrate de soude et j'ai obtenu 1.2 gr. de globules blancs de chaque lapin. Les globules blanes obtenus renfermaient 15 à 20 p. 100 de macrophages. TasLeau XXII. ANIMAUX D'EXPÉRIENCE ANIMAUX TÉMOINS QUANTITÉ QUANTITÉ de de | ; toxine leucocytes. Poids ; Pods | Résultats : A G Résultats oe a mort des animaux | des animaux | au bout de 0,002 0,4 180 gr. Survit. 170 gr. 3 jours 0,0003 0,4 175 gr. MAD 2008SE MIS jours: 0,0035 0,5 190 gr. |m. ap. 6 j. 185 gr. 2 jours. 0,004 0,5 MMS ore aim. ap oy: tirer 4 | 22 jours: | Dans cette expérience J'ai inoculé aux cobayes le liquide séparé par centrifugation du mélange de globules et de toxine qui a séjourné à l’étuve pendant douze heures. TagcEau XXIII. Toxine tétanique + globules blancs, contenant la même quan- tité de macrophages. Après un séjour à l’étuve de douze heures on inocule le mélange. Les animaux témoins ont été inoculés avec la toxine seule. ANIMAUX D'EXPÉRIENCE ANIMAUX TÉMOINS QUANTITÉ QUANTITÉ de de toxine leucocytes Poids Poids Résultats : des animaux | Résultats des animaux mon ete maa 7 SC au bout de | a , = | . ‘ . e 0,002 0,4 110 gr. Survit 130 gr. 4 jours. 0,003 4 165 gr. | m. ap. 7 j. 200 er. 3 jours. 0.0035 0,4 [80 gr. |m. ap. 5 j. 185 gr. 3 jours. 0,004 0,4 iD) Sts m. ap. 4 |. 115227: 1015472 Ces expériences nous montrent que les globules blancs pro- venant de l’exsudat qui contenait 20 p. 100 de macrophages sont capables, quoique très faiblement, de neutraliser la toxine tétanique. Faute de temps, je n'ai pu continuer mes recherches, et la question de savoir si ce sont les leucocytes polynucléaires 210 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR ou les macrophages qui ont agi dans ce dernier cas reste pour le moment ouverte. M. Petterson considère que les macrophages sont les seuls éléments capables d'agir sur la toxine diphtérique. En tout cas, on peut supposer que les globules blancs de lapin, qui con- tiennent également dans leur composition des macrophages, sont capables de neutraliser la toxine tétanique. Les résultats peu nets que j'ai obtenus dépendent probablement de ma tech- nique que, faute de temps, je n’ai pu perfectionner. Il est fort probable que les leucocytes des autres animaux neutralisent également cette toxine, mais il peut aussi arriver que les leuco- cytes de différentes origines se comportent différemment envers diverses toxines. Si les recherches faites avec la toxine tétanique sont incom- plètes et ont besoin d'être confirmées, on ne peut pas en dire autant de l’action des leucocytes de cheval sur la toxine diphté- rique. Ce fait de la neutralisation de la toxine nous montre nettement que les globules blancs sont les défenseurs de l’orga- nisme non seulement contre les bactéries, mais aussi bien contre leurs toxines et constiluent un facteur important d’im- munilé naturelle contre ces dernières. En résumé, nous pouvons formuler les conclusions sui- vantes : 1. Les leucocytes de cheval possèdent la propriété de neutra- liser le poison diphtérique et cette capacité ne dépend pas de la propriété physico-chimique de leur protoplasme, mais bien de leur activité vitale. 2. Les leucocytes de cheval ne sont capables ni d’absorber, ni de neutraliser le poison tétanique. Seuls les leucocytes de lapin renfermant 15 à 20 p. 100 de macrophages possèdent cette propriété, mais l'effet de ce mélange n'est pas très pro- noncé. 3. Les leucocytes sont les défenseurs de l'organisme dans sa lutte contre les agents pathogènes et leurs toxines et déterminent limmunité naturelle contre ces dernières. Avant de finir, je prends la liberté d'exprimer ma plus pro- fonde reconnaissance à M. le professeur Metchnikoff aussi bien SUR LA FIXATION DES TOXINES PAR LES LEUCOCYTES 211 pour le sujet du présent travail que pour ses précieuses indi- cations. J'exprime également ma gratitude à MM. les D's Besredka et Wollman, qui se sont toujours montrés disposés à me servir de leurs conseils amicaux. INDEX BIBLIOGRAPHIQUE [4] Mercanixorr. — Annales de UInstitut Pasteur, t. III, 1889. [2] Mercunrxorr. — Ergebn. d. allgem. Pathol., Lubarsch und Ostertag, Bd Il. [3] Scnarrenrron. — Arch. f. Hyg., Bd XXXI-XXXV. [4] ScunewerR. — Miinch. med. Woch., 1908, n° 10; — Arch. f. Hyg., Bd LXX. [5] Mucu. — Mitteil. a. d. Hamburger Staatskrankenanstalt, Bd III. (6] Perrerson. — Zeilschr. f. Immunit., Bd I, Orig.; — Zentralbl. f. Bakter., À Abt., Orig., Bd L. [7] Grier und Furaki. — Miinch. med. Woch., 1907, p. 249. [8] Bait. — Arch. f. Hyg., Bd XXX-XXXII;— Centralbl. f. Bakter., Bd XXXII. [9] Wem. — Arch. f. Hyg., Bd LXX-LXXI. [40] Wassermann et Takaki. — Berlin. med. Wochenschr., 1898, p. 5. [44] Perrerson. — Zeitschr. f. Immunit., Bd VIII, Orig. [42] Mercanikorr. — Annales de l'Institut Pasleur. Vol. VI, 1897. 43] VarsrarD et Roux. — Annales de l'Institut Pasteur. Vol. VI, 1892. [14] Brrecer, Kirasato et WAsSERMANN. — Zeilschr. f. Hyg., etc., Bd XII, 1892. [45] Mancinr. — Biochemische Zeitschr., Bd XXIX, p. 140, 1910. [46] SrensrRôM. — Zeilschr. f. Immunil., Bd VIII, Orig. [47] Wozr. — Zeitschr. f. Immunit., Bd XVIII. [48] FRIEDBERGER und SzyMaxowski. — Zeilschr. f. Immunit., Bd XI, Orig. [49] Massoxe. — Berlin. klin. Wochenschr., n° 52, 1911. [20] Mivasr. — Zeilschr. f, Immunit., Bd XII. [21] Kninc. — Zeitschr. f. Immunit., Bd VII. [22] Hexra. — Bioch. Zeitschr., Bd XI, 1908. [23] HamBurGer. — Untersuchung. von Leucocyten, 1913. [24] Nakanisar. — Deutsch. med. Wochenschr., n° 6. 1900. [25] Varzzar et Rocer. — Annales de l'Instilut Pasteur, t. VI, 1892. [26] Satomonsen et Mapsen. — Annales de l'Institut Pasteur, t. XI, 1897. 212 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR ERRATUM Mémoire de Er. Burnet : La prélendue destruction des bacilles de Koch dans le périloine des cobayes tuberculeux (mars 1915). Page 135, ligne 8, en partant du bas, lire : d'anticorps circulants, dont le rôle n'est pas démontré. Le Gérant : G. Masson. Paris — L. MARETHRUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 29° ANNEE MAI 1915 N° 5 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR SUR LA RESISTANCE DES POULES A L'INFECTION PAR LE « SPIROCHÆTA GALLINARUM » APRES THYROIDECTOMIE OU SPLENECTOMIE par L. LAUNOY et M. LEVY-BRUHL Au cours des recherches hématologiques sur la spirillose des poules {4|, nous avons été frappés de certains caractères de cette affection quien font un objet particulièrement favorable pour l'étude de l’immunité et de la résistance de l'organisme à l'infection. On observe, en effet, d’une part, une évolution clinique toujours identique, à marche cyclique, accompagnée de réactions sanguines constantes el très nettes; d’autre part, l'établissement d'un état d'immunité absolue avec pouvoir vac- cinant du sérum de la poule guérie. L'existence au cours de cette affection d’une splénomégalie déjà signalée par Marchoux et Salimbeni [2] dans leur étude de la spirillose spontanée des poules du Brésil (rate triplée de vo- lume), splénomégalie que nous avons retrouvée dans l'infection expérimentale, et la constatation de l'hypertrophie de glandes thyroïdes, nous ont amenés à rechercher si ces organes jouent un role essentiel dans Ja résistance de l’animal à l'infection et dans la production des anticorps, et si leur ablation préalable modifie l’évolution de la maladie. Nous apportons ici les résultats de ces expériences. Nous nous servions de poules adultes, du poids de 1 à 2 kilogrammes, que nous infections avee du sérum frais ou * 15 214 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR conservé à la glacière. Nous ne reviendrons pas ici sur les caractères cliniques et hématologiques de l'affection ainsi produite (voir notre mémoire précédent). Rappelons seulement que la poule guérie se trouve immunisée contre un nouvel essai de réinfeclion et que, de plus, son sérum possède un pou- voir vaccinant; injecté préventivement à un animal neuf, il prévient le développement de la spirillose. |. — ROLE DES GLANDES THYROIDES La participation des glandes thyroides a l'établissement de l’état d'immunité active a fait l'objet d’une série de recherches : M'° Fassin [8] a observé, après thyroïdectomie, une dimi- nution de Valexine hémolytique et bactéricide. Marbé [4| a trouvé après thyroidectomie une diminution des pouvoirs opsoniques et phagocytaires. Frouin |[5|] a confirmé partiellement les faits relatifs à la diminution de l’alexine, mais il a vu, d'autre part, que les chiens éthyroïdés, immunisés contre la toxine tétanique, fournissent un sérum dont les propriétés antitoxiques sont plutôt supérieures à celles du sérum des animaux normaux pareillement traités. G. Lerda et S. Diez [6] ont vu que les cobayes thyroidecto- misés résistaient aux intoxications (toxines tétanique et di- phtérique, strychnine, caféine) à peu près aussi bien que les cobayes normaux. Fjeldstad !7! n'a pas trouvé de différence appréciable dans le degré d'immunité et dans la rapidité de son développement chez les lapins thyroidectomisés et les lapins normaux vac- cinés avec le bacille d’Eberth. Dans toutes ces recherches, il s'agit en somme de réactions arlificiellement provoquées dans l'organisme par des agents microbiens ou toxiques qui ne réalisent pas une maladie déterminée comparable à celles qu'on observe en clinique. Dans nos expériences, au contraire, nous avons cherché dans quelle mesure les glandes thyroïdes intervenaient dans la a RESISTANCE DES POULES AU « SPIROCHÆTA GALLINARUM » 245 résistance à l'infection et la production de l'état d'immunité aucours d'une maladie bien caractérisée. Nos expériences ont porté sur cinq poules, simplement éthy- roidées, ou éthyroïdées et partiellement paraéthyroïdées (1). Voici les résultats obtenus : Premiere série. — Poule F. 9 juin 1913, ablation des deux thyroides et d’un groupe parathyroïde à gauche. 13 juin, injection de 0 c.e. 5 de virus, relativement atténué. Le 16, très rares spirilles ; le 18, plus de spirilles. Signes cliniques habr- tuels ; le 20, l'animal est complètement guéri. L’autopsie vérifie l'intervention. Poule Il, témoin. Infection le 13, avee 0,5 e.c. du même virus. Spirilles dans le sang les 16, 17 et 18. Donc, pendant vingt-quatre heures de plus que la poule H. Deuxièue série. — Poule HI, 1 kilogr. 250. 11 juin, ablation des deux thyroïdes et du groupe parathyroidien droit. Infection le 27, avec 0,2 c.c. de virus Argas (premier passage). Spirilles les 28, 29 et 30 juin. Suites normales. Survie. L'autopsie con- firme lablation glandulaire (2). Poule EV, 1 kil. 700. 21 juin, ablatjon des deux thyroides; le 27, infection avec 0,2 c.c. de virus Argas. Spirilles du 28 juin au 2 juillet inclus. Survie. L’autopsie confirme l'intervention. Poule V, témoin des deux précédentes, 27 juin, infection avec 0,2 c.c. du mème virus. Spirilles du 29 juin au 1° juillet inclus. Survie. TROISIÈME séRIE. — Poule iV. 26 juin, ablation des deux thyroides et du groupe parathyroidien gauche. Le 27, injection de 0,5 c.c. de virus Argas. Quatre jours de septicémie. Survie. L’autopsie confirme l'exérèse. Poule VIL, témoin. Infection le 27, avec 0,5 c.c. de virus Argas. Cinq jours de septicémie. Mort le 2 juillet. (1) Le procédé opératoire, suivi pour Vablation des thyroides chez la poule, a été décrit avec détails par l'un de nous: L. Launoy, Thyroides, Parathyroides, Thymus, Thèse d'agrégation, J.-B. Bailliére. Paris, 1914. (2) Nous désignons sous le nom de «virus Argas » le virus obtenu chez uue poule infectée au moyen du sang d'un animal auquel la maladie avait été transmise par des Argas spirillosés. 216 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR QuarRiÈME SÉRIE. — Poule VIII. 2 juillet, thyroidectomie bilatérale. Le 5 juillet, 0,5 c.c. virus Argas. Trois jours de septicémie. Survie. Poule IX. Normale, simulacre d'opération. Le 14 juillet, 0,5 c.c. virus Argas. Le 16 juillet, rares spirilles; le 17, très nombreux spirilles. Mort dans la soirée. Ainsi, chez des animaux respectivement infectés de sprro- cheta gallinarum : un, quatre, six, seize jours après l’ablation des thyroïdes, avec ou sans parathyroïdectomie partielle, la résistance à l'infection n’a nullement été diminuée. Les trois poules éthyroïdées ont survécu, deux témoins sur quatre ont succombé. La recherche du pouvoir immunisant du sérum après infee- tion nous a montré que le sérum des poules éthyroïdées était aussi actif que celui des animaux témoins ayant survécu. Cette étude a été faite sur 8 poussins dont le poids variait entre 167 et 190 grammes. Chez trois animaux pesant respectivement 167, 187 et 190 grammes, l'injection intraveineuse — faile vingt-quatre heures avant l'infection — de 0,5 c.c. du sérum de la poule II (éthy- roidée) a protégé d’une facon absolue contre l'infection avec 0,15 c.c. de virus Argas conservé 27 jours à la glacière. Chez trois autres poussins de 167, 159 et 184 grammes, l’in- jection intraveineuse, préventive, de 0 c.c. 5 de sérum de la poule V (non éthyroïdée), a protégé intégralement dans deux cas contre l'infection par le même virus; dans le troisième cas, nous avons eu une seplicémie très atténuée qui n'a duré que vingt-quatre heures. Les deux autres animaux injectés avec 0,5 c.c. de sérum physiologique et 0,15 c.c. du même virus ont succombé tous deux au bout de 12 à 15 jours après guérison apparente de la spirillose et cachexie consécutive. Il. — ROLE DE LA RATE Le rôle de la rate dans les maladies infectieuses a fait éga- lement l’objet d’une série de recherches dont les résullats sont contradictoires. Nous ne ferons que rappeler ici les expériences de Kourloff 8] sur la résistance des lapins dératés à diverses RESISTANCE DES POULES AU « SPIROCHÆTA GALLINARUM » 21° infections (charbon, rouget du porc, choléra des poules, strep- tocoque). L'auteur conclut que « le rôle de la rate dans la lutte de l'organisme contre les parasites qui l’envahissent n'est nul- lement plus important que celui de tous les autres organes. C'est leur ensemble et non un organe ou un tissu quelconque qui lutte contre les envahisseurs ». Au contraire, Bardach [9] trouve que le chien dératé résiste beaucoup moins au charbon que le chien normal. Sur 25 chiens splénectomisés, 19 succombent à l'infection charbonneuse. Sur 25 chiens témoins, splénectomisés, 5 seulement suc- combèrent. Dans les maladies à protozoaires on a attribué à la rate un role particulièrement important dans la destructiondes parasites. Bradford et Plimmer M0] trouvent que les animaux dératés inoculés avec le Trypanosoma Brucei meurent plus vite que les témoins. Sauerbeck {11} a vu que chez les rats et les chiens dératés, l'infection par le Trypanosoma Brucei évolue plus rapidement que chez les témoins. Pour Rodet et Vallet [12] la rate aurait des propriétés trypa- nolytiques remarquables. Laveran et Thiroux [18] ont fait des expériences sur des rats et des cobayes dératés inoculés avec le Trypanosoma du Surra. Ils trouvent que chez les animaux splénectomisés l'évolution de la trypanosomiase n'est pas sensiblement modifiée. Le rôle de la rate au cours des infections spirillaires à fait l'objet de quelques travaux : Soudakewitch [14! conclut de ses expériences sur le singe infecté avec le spirille d'Obermeyer que l’extirpation de la rate entrave l'apparition de la crise; l'animal meurt en pleine infec- tion, alors que les témoins survivent. Tournade [45] a pu, par la splénectomie préalable, rendre le rat gris sensible à l'infection par le spirille de Dutton, alors que normalement cet animal est tout à fait réfrac- taire; mais l'infection ne se produit pas à coup str. L'auteur conclut en accordant à la rate contre l'infection spirillaire « un rôle protecteur certain, mais qu'elle ne détient pas exclusive- ment ». 218 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Nos expériences ont porlé sur des poules adultes splénecto- misées; puis, quand elles étaient tout à fait remises de linter- vention (8 à 10 jours), infectées par le Sp. gallinarum. En même temps, on infectait des poules témoins normales ou bien ayant subi un simulacre d'opération. | La splénectomie est une opération délicate à effectuer chez la poule en raison de la situation profonde de l'organe; quand Vablation est bien faite, l’exérèse de Ja rate n’entraine aucune suile facheuse; ni troubles généraux, ni troubles locaux. D'une manière générale, chez la poule dératée, l'évolution de la maladie suit son cours habituel. Aucun de nos animaux n'a succombé à la spirillose. Toutefois, chez les poules sans rate, l'allure de la seplicémie est modifiée. Ainsi l'apparition des spirilles dans le sang s’observe plus tot que chez la poule témoin. Au bout de vingt-quatre heures, quelquefois avant (18 à 20 heures), on trouve sur les lames quelques rares spi- rilles; chez le témoin, ceux-ei ne sont mis en évidence qu'après quarante-huit heures. De plus, pendant la période de septicémie, l'abondance des spirilles est beaucoup plus grande chez l'animal splénecto- misé. Ce phénomène est constant el très marqué. La crise, au lieu de se produire en un seul temps, comme chez les témoins, s'effectue en deux temps. D'abord une partie des spirilles s'agglulinent en gros amas; vingt-quatre heures après, les agelulinats sont disparus, mais on retrouve des spirilles libres. Ceux-ci disparaissent à leur tour, en quarante-huit heures habituellement. La septicémie dure, en définitive, plus long- temps chez l'animal sans rate que chez l'animal témoin; elle commence vingt-quatre heures plus tôt, et se termine vingt- quatre heures ou quarante-huit heures plus tard. A cette septicémie d’une durée plus longue et d’une abon- dance plus considérable ne correspond pas une allure clinique aggravée. Bien au contraire, la diarrhée est aussi marquée que chez le témoin, mais les phénomènes d'intoxication : abatte- ment, torpeur, parésie, sont beaucoup moins accusés; parfois mème ils s’observent à peine. Il y a la, entre la poule dératée el son témoin, une différence frappante; nous l’avons notée chaque fois. RESISTANCE DES POULES AU « SPIROCHÆTA GALLINARUM » 219 On peut, croyons-nous, expliquer ce fait paradoxal d’une septicémie plus forte et d’une évolution cliniquement atténuée, de la manière suivante. Habituellement, il se ferait au niveau de la rate une destruction considérable de spirilles; il y aurait done mise en liberté, à dose massive, de substances toxiques qui réalisent le syndrome adynamique si caractéristique et si constant. Chez la poule dératée, cette destruction massive n'aurait plus lieu, d’où à la fois abondance plus grande de spi- rilles dans le sang et absence ou atténuation des phénomènes d'intoxication. Quand la destruction spirillaire se produit, celle-ci, plus lente, se fait au niveau d'organes (le foie en parti- culier) capables de retenir, vraisemblablement, la majeure partie des produits de désintégration spirillaire. L'absence de rate n’empéche pas la production des anticorps spirillaires; l'état d'immunité s'établit comme chez la poule témoin, ainsi que nous l'avons constaté. L'étude hématologique nous a montré, dans la spirillose de nos poules splénectomisées, les mêmes réactions sanguines que celles décrites par nous chez la poule normale spiril- losée. Tels sont les phénomènes que l'on constate au cours de la maladie et dans les jours qui suivent la crise. En prolongeant l'observation des animaux après guérison apparente, nous avons vu survenir dans un cas des phénomènes de cachexie dont l'interprétation nous a longtemps paru difficile. IL s’agis- sait d’une poule splénectomisée, puis spirillosée qui, un mois après la crise, se mit à maigrir rapidement. Cet amaigrisse- ment s'accompagnait d’inappétence, de parésie, de perte des plumes, et aussi d’une leucocytose croissante qui atteignit 152.000 leucocytes. L'animal mourut au bout de quelques semaines de maladie et l’autopsie nous montra une tuberculose prédominant au niveau du foie, qui était très volumineux. criblé de tubercules où fourmillaient les bacilles. Cette infec- tion tuberculeuse spontanée expliquait à la fois la cachexie post-spirillaire et l’état leucémique du sang. 220 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR CONCLUSIONS. 1° L'ablation préalable des glandes thyroïdes et de la rate n'entrave pas chez la poule adulte la résistance à l'infection spirillaire ni la production de l'état @immunité. 2° Chez la poule éthyroïdée l’évolution de la spirillose n'est pas sensiblement modifiée. 3° Chez la poule dératée, la septicémie spirillaire est sensi- blement plus forte que chez le témoin; par contre, l'allure clinique de la maladie est beaucoup plus bénigne et les phéno- mènes d'intoxication très peu marqués. Juin 1914. INDEX BIBLIOGRAPHIQUE (4) L. Lavnoy et M. Lévy-Brouz. — Annales de l'Institut Pasteur, mai 1914. [2] Marcnoux et Satimeent. — Annales de l'Institut Pasteur. (3) Fassix (Mie). — Comples rendus de la Sociélé de Biologie, 20 avril 1907, p.647. 4 Margé. — Comptes rendus de la Société de Biologie, 20 juin 1908, p. 1113, et 26 juin 1909, p. 1073. (51 Frouix. — Comptes rendus de la Société de Biologie, 30 juillet 1910, p. 237. [6] Lerpa et S. Drez. — R. Accad. Med. di Torino, XI, 18 mars 1907. [7| Fusetpstap. — Amer. Journ. of Physiology, vol. XXVI, p. 72, 1910. (8) KourLorr. — Cité par SoupakewiTon. (9! Barpacn. — Cité par SoupakEWITCH. 10, Braprorp et Primer. — The quarterly journal of microscop. science, février 1902, t. XLV. (44) Saverseck. — Zeilschrifl f. Hygiene, 1906, t. LIL. (42) Roper et VALLET. — Comples rendus de l’Académie des Sciences, 28 mai 1906, et Archives de médecine expérimentale, juillet 1906. 13) Laveran et Triroux. — Annales del Institut Pasteur, aott 1907, t. XXI, p. 593. (44) Soupakewircu. — Annales de l'Institut Pasteur, t. V. 15, Tournape. — Comptes rendus de la Société de Biologie, 1911. SUR LA VIRULENCE DES BACILLES TUBERCULEUX par Er. BURNET (Travail du Laboratoire de M. Metchnikoff, à l'Institut Pasteur.) Les observations qui suivent s'ajoutent à celles qui ont fait l'objet d'un premier mémoire, et se rapportent à la même question : le rôle des bacilles atténués dans la vaccination spontanée chez l'homme (1). Sous l'influence des recherches bactériologiques, les cliniciens commencent à abandonner l'ancienne notion simpliste du terrain, propice ou défavorable à la tuberculose ; ils accordent, avec raison, une vive atten- tion aux phénomènes de réinfection, où le bacille s'implante sur un terrain déjà modifié; et l’un des plus expérimentés en matière de tuberculose présentait, tout récemment, le « concept bactériologique » du terrain tuberculeux (2). Les bacilles atté- nués étant les plus aptes à modifier l'organisme en lui causant le moins de dommages, à la manière de vaccins naturels, il est important de connaître leur place dans la nature. On la connait mal parce que les notions exactes ne peuvent être acquises qu'au prix d'observalions minutieuses et longues. Ainsi, l'enquête de l'Office sanitaire allemand sur la virulence des bacilles bovins chez Venfant, commencée depuis six ans environ, est encore loin d’être achevée. Des bacilles atténués ont été trouvés dans l'organisme des animaux. N'en existe-t-il pas autour de nous dans le monde extérieur, et les enfants qui grandissent en acquérant une résistance certaine à la tuberculose, ne sont-ils pas ceux qui ont eu la chance de les rencontrer? Il faut donc les chercher dans le milieu extérieur. Il faut, d'autre part, les suivre dans les organismes, pour savoir dans quelles conditions peut se maintenir ou varier leur degré de virulence. (1) Ces Annales, novembre 1912, t. XXVI, p. 868. (2) F. BEzANCON, Journal de médecine interne, 10 juin 1914. € 22 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR to C'est le cobaye qui a servi comme sujet ordinaire d’expé- rience. La virulence a été appréciée d’après la dose inoculée et Pétal anatomique des cobayes autopsiés en séries, après un temps déterminé. Comme, après Vinoculation sous-cutanée, c'est le poumon qui forme le dernier les masses tuberculeuses visibles, Vextension de la tuberculose au poumon semble donner la mesure la moins incertaine de la rapidité de la maladie et de la virulence du bacille. LES BACILLES TUBERCULEUX DANS LE MILIEU EXTERIEUR 1° BACILLES RECUEILLIS DANS LES POUSSIÈRES. Les hygiénistes ont bien souvent cherché le bacille tuber- culeux dans la poussière des rues et des habitations, surtout a l'époque où lon discutait la notion de Vubiquité du bacille. La bibliographie de ces recherches remplirait des pages. Mais si lon s'est beaucoup préoccupé de leur présence, on ne s’est pas souvent soucié de déterminer leur virulence. Le bacille de Koch a été trouvé dans les poussières et balayures des rues (anciennes recherches de Manfredi, a Naples; de Marpmann, à Leipzig) et des locaux très fréquentés (Carlo Mazza, dans les cafés de Tunis), sur des fruits exposés aux élalages (Schnirer), dans la poussière recouvrant des objets. mililaires d'équipement (des ouvriers tuberculeux avaient travaillé dans le magasin, — Kirchner), dans les salles d'hôpital (Strauss, Le Noir et Camus), dans des livres, sur le corps des mouches (Nuttall, André, etc.), dans la poussière des salles d'Université (Heymann), sur des vètements (Joseph- son, Nôülel, Chaussé), elc. Après avoir constaté la présence du bacille, on a surtout étudié les conditions de conservation. (Voy. les mémoires de Lindemann, Flügge, Cornet, Kirstein, Heymann, Joussel, Kiiss, Chaussé, elc. {1 ).) 1) On trouvera aisément l'indication des principaux travaux dans le travail de Cornet et Kossen (Handbuch der path. Mikroorganismen, de KOLLE el vy. WasserRMANN, 2 édit., t. V) et dans les récentes études publiées par Cuaussé, dans la Revue d'Hygiène et de Police sanitaire, t. XXXV, 1913. Le SUR LA VIRULENCE DES BACILLES TUBERCULEUX 223 On trouve comme une quintessence des poussières atmo- sphériques dans ces poussières fines que lon pompe par le vide (Vacuum cleaner); avec elles s'est déposé ce qu'il y a de plus léger dans ce que soulèvent nos semelles et l’intense circulation de nos rues, et ce que crache une population malheureusement trop insouciante. Les netloyages par le vide, faits à intervalles assez éloignés, fournissent des poussières vieilles et sèches. Comme terme de comparaison, il est inté- ressant d'examiner des poussières relativement fraiches, ramassées en des endroits de grande circulation et que l’on balaie et nettoie tous les jours : planchers d’omnibus, de voitures, de wagons de métropolitain et autres trains, encoi- gnures de portes, au bord des trottoirs. Si l’on inocule directement les cobayes sous la peau avec ces poussières lelles quelles, on risque de perdre la plupart des animaux avant qu'un ganglion ait eu le temps de se tuméfier. L'antiformine permet dinoculer des quantités beaucoup plus grandes avec des risques à peu près nuls. J'ai em- ployé couramment Vantiformine à 10 pour 100 pendant 20-35 minutes, suivie de deux lavages-centrifugations à l'eau stérile. Ce traitement ne laisse guère survivre que les spores du B. sporogenes et de divers Mesentericus. Avec chaque échan- tillon ont été inoculés de 3 à 6 cobayes, qui ont été observés aussi longtemps que possible. Les résultats auraient évidem- ment une plus grande valeur si l'on inoculait des cobayes par centaines. Sur Î8 échantillons de poussières sèches de nettoyage par le vide, aucun n'a tuberculisé les cobayes. Sur 18 échantillons de poussières fraîches, 3 ont donné la tuberculose, à savoir : 1° de la poussière prélevée sur les barreaux supérieurs d’une fenêtre d'un laboratoire, à 3 mètres environ au-dessus du sol; 2° et 3° de la poussière, mélangée de terre, prélevée entre les lattes du plancher de deux autobus différents. Il est à remarquer que les poussières d'autobus m'ont donné un résultat positif dans 2 cas sur 7, ce qui n’est pas à traiter par le dédain; tandis que des échantillons prélevés très super- ficiellement au jardin du Luxembourg (allée où les enfants 224 ANNALES DE LINSTITUT PASTEUR jouent tous les jours par centaines), sur le plancher de plusieurs voitures du métropolitain, dans des encoignures de portes de maisons donnant sur un trottoir, n’ont rien donné. Les prélèvements ont été faits au printemps de 1913 (voy. Note 1 ci-dessus). Note 1. — INOCULATIONS DE POUSSIERES NOMBRE RESULTAT PROVENANCE de DURÉE D’ OBSERVATION Cobae ee (tuberculose) 1° Poussiéres séches. (Seuls figurent les cobayes qui ont vécu longtemps. ) 1. Maison de tailleur 0 6 semaines, = W. E. 4 mois, 7 semaines, 5 mois, 5 mois. 2. Théâtre Montm... 3 3 pendant 6 mois. — 3. Théâtre Mone... 4 6 et 7 mois. — 5 semaines. 4. Théâtre B.-Par... 2 5 mois. — 1 mols. Sa Théatre Mic... 2 6 mois. — G.* Dhéatre App... a] 56, Mimet As2 ej Ours: —_ Ie Théatre Ré]... 3 66, 80 et 118 jours. — 8: Cinéma Pig... 2 5 et 8 mois. os 9. . Appartement. Sg! 2, 5 et 8 mois. oa 10. Malmaison. 2 2 et 6 mois. — 4147 Appartement. 3 x, 4 mois et demi et 5 mois. — 12. Facade d’un hôtel 2 2 mois. -- (M. X.) 43. Grand magasin H... 2 2 mois. — 14. Grand magasin F... 2 45 et 60 jours. | = 15. Magasin rue P... k 2, 5, 5 et 6 mois. — 16. Salle des mariages, 2 2 mois. = Mairie X... Appartement. 4 de 6 semaines à 3 mois. = \ppartement. I 2 mois et demi. — ae cs NT PS à SUR LA VIRULENCE DES BACILLES TUBERCULEUX 225 NOMBRE RESULTAT PROVENANCE de DUREE D OBSERVATION cobayes (tuberculose) 20 Poussières fraîches. Jardin du Lux 2 2 mois. — ; De Id. 2 5 mois. — 3. Laborat. Poussière 2 L'un 6 mois, négatif: — non lavée à l’antifor. l’autre +. 4. Autobus. 2 L'un, tubereuleux; _ + l'autre 2 mois et demi. 5. Métro. 2 4 mois et demi et 6 m. et demi. ~ 6. Id. 2 4 mois et demi. — ÿle Id. 2 4 et 8 mois. — 8. Id. 2 3 et 4 mois. — 9. Autobus. 2 1 mois et 4 mois et demi. —— 10. Id > 4 mois et demi. — AA Autobus. 2 5 et 8 semaines. — 12. Id. 3 38, 44 et 50 jours. — 13. Autobus, 3 3 tuberculeux. a antiformine, 40 min. 14. Id. 4 42, 70 jours, el 5 mois. = 45: Id. i 10 à 14 semaines. — 16. Id. 4 6 à 14 semaines. — Wie Encoignure 3 3 mois et demi. = du trottoir P... 18. Enc. du trottoir V... 2 38 et 105 jours. | — Les 3 bacilles désignés se sont montrés d'une virulence au moins égale à ceux que l’on isole des crachats de tubercu- loses en activité. Il n’est pas douteux que les bacilles des autobus proviennent de crachats fraichement projetés sur le plancher, comme c’est trop souvent le cas à Paris. En somme, ces examens n ont pas découvert de bacilles atténués. S'il en existe autour de nous, ils sont difficiles à trouver. Pour savoir comment les bacilles échappés d'un organisme sont impressionnés par les influences en jeu dans le monde exté- rieur, — oxygène, lumière, dessiccation, vieillissement, — il faut recourir à l'expérience. 226 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR 20 BACILLES EXPOSÉS AU VIEILLISSEMENT SOUS LA LUMIÈRE, DIFFUSE. L'expérience est très simple et reproduit les conditions natu- relles où se trouvent des poussières exposées à la lumière diffuse, dans un coin d'appartement. Quoique étalée aussi mince que possible, sur le fond d'une boîte de Petri, la couche de poussière gardait toujours une certaine épaisseur : on l’agi- tait périodiquement pour faire passer tous les bacilles, autant que possible, au contact de l'air et de la lumière. L'expérience a duré jusqu'ici dix mois. A 2 grammes de fine poussière (de nettoyage par le vide) stérilisée, on mêle 100 milligrammes de bacilles tuberculeux, mis en suspension dans l’eau physiologique; le tout est divisé en deux parties égales, mises chacune dans une boîte de Petri et desséchées, l’une à l’étuve, l'autre sous la cloche à vide. A partir de ce moment, l'une des boîtes a toujours élé tenue sous la cloche à vide, au-dessus de l'acide sulfurique; l’autre à l’air du laboratoire. Les deux lots étaient toujours placés au même endroit de la même table, avec la même exposition; le soleil n'a donné sur eux qu'à de très rares exceptions: c'est la lumière diffuse qui a agi, à travers la paroi de la cloche. Au début, croyant à une atténuation ou même à une destruction rapide des bacilles, on inoculait au cobaye de sept en sept jours. Comme la résistance a été longue, les inoculations ont, dans la suite, élé faites de mois en mois. Pour chaque cobaye élait mise en suspension une quantité de poussière correspondant au quart ou au huitième de milligramme de . bacilles : dose très forte. Les irrégularités, inévitables, se compensent, parce que l'expérience a été prolongée longtemps avec des cobayes nom- breux. Inoculations sous la peau du ventre. Vitalité et virulence ont baissé très lentement. A peine a-t-on noté, pendant les trois premiers mois, un retard dans le déve- loppement des ganglions inguinaux et dans l'extension des lésions : les bacilles exposés à l'air retardent sur les bacilles maintenus dans le vide, et les bacilles maintenus dans le vide relardent sur les bacilles de la culture. A la neuvième moeu- lation (trois mois et demi), la baisse de virulence s’accuse, la tuberculose évolue lentement; chez bon nombre de cobayes on note un phénomène qui deviendra de plus en plus fréquent et à peu près général, l'absence de chancre, laquelle, avec les bacilles normaux, ne s observe (et pas toujours) que si la dose est minime, inférieure au millième de milligramme. A la même SUR LA VIRULENCE DES BACILLES TUBERCULEUX 227 date, les bacilles conservés dans le vide sont plus virulents que les bacilles exposés à l'air : la différence est très nette. Après quatre mois et demi, les cobayes inoculés avec les bacilles gardés à l'air n’ont, au bout de huit semaines, que de petits ganglions inguinaux, sans lésions viscérales. Dans la onzième série (cinq mois), par suite d’un hasard dans la dis- tribution des bacilles, l’inoculalion accuse une plus grande virulence que dans la précédente. Dans la douzième série, les cobayes n'ont, après deux mois et demi, qu'un ganglion minuscule, dans le cas des bacilles à l'air; mais les bacilles maintenus dans le vide, quoique moins actifs que les bacilles normaux, donnent à ce moment une tuberculose nette. A quoi tient la diminution d'activité des bacilles exposés à l'air et à la lumière diffuse? Ou bien tous subissent un affai- blissement uniforme; ou bien il se fait une sélection, d’après la vigueur individuelle des bacilles et la facon dont la lumière les a touchés. L'expérience suivante, sans être absolument coneluante (puisque l'organisme du cobaye peut modifier les bacilles), est en faveur de la seconde interprétation : au moment où la virulence commence à baisser (quatrième mois), on isole le bacille des ganglions des cobayes et, avec la culture obte- nue, on inocule une série : la tuberculose évolue comme avec les bacilles normaux originels. En résumé : 1° chez la majorité des cobayes inoculés, les bacilles affaiblis ne produisent pas de chancre; 2° les bacilles maintenus dans le vide conservent beaucoup mieux leur viru- lence que les bacilles maintenus dans lair; 3° les bacilles tuberculeux, mêlés à de la fine poussière, exposés à la lumière diffuse et agités fréquemment, conservent longtemps leur virulence; la conservation s’évalue non en jours, mais en mois. Ces dernières conclusions paraissent contraires à l'opinion courante, fondée sur de nombreuses expériences. Il est admis que les bacilles sees se conservent plus longtemps que les bacilles humides; or les bacilles exposés à lair, bien qu ayant subi une première dessiccation, étaient plus exposés à la vapeur d’eau de l'atmosphère que les bacilles de la cloche à vide, et ils ont perdu plus vite leur virulence. Sans doute il faut tenir compte d'un autre élément : l'oxygène de l'air. La longue survivance des bacilles tient à ce que la poussière 228 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR fine leur fournissait un bon abri. Dans les appartements, sur- tout dans les taudis privés de soleil et même de lumière dif- fuse, les bacilles doivent se conserver très longtemps vivants et virulents. Ce qui stérilise, c'est la grande lumière du jour et, surtout, l’insolation directe. La réforme de l'habitation est bien un point essentiel de la lutte contre la tuberculose. Les recherches sur la présence et la durée de conservation des bacilles dans le milieu extérieur sont extrêmement nom- breuses; elles se rattachent aux anciennes expériences de Koch : « Les bacilles tuberculeux, suivant l'épaisseur de la couche exposée au soleil, sont détruits au bout de quelques minutes ou de quelques heures;... la lumière diffuse peut aussi, quoique plus lentement, exercer la même action, car les bacilles meurent en cing à sept jours, quand on les expose immédiatement à la fenêtre (1). » Les expérimentateurs don- nent des chiffres très divers, et tous doivent avoir raison : le résullat dépend des conditions d'expérience, de la facon dont les bacilles sont exposés, prélevés dans une culture ou laissés dans des crachats, protégés ou nus. J'ai répété l'expérience classique des bacilles mis en suspen- sion dans l’eau et étalés en couche très mince sur une lame de verre, rapidement séchés à l'étuve et exposés à la lumière dif- fuse : après six jours et à la dose de 0,1 milligramme, ils n'ont rien donné au cobaye. (Méme bacille que dans l’expé- rience sur les poussières.) Liatténuation des bacilles exposés à la lumière du soleil a été observée par Magneco (2); Vinsolation, selon lui, ne modifie pas la virulence, quand elle ne dure pas plus de deux heures; à partir de trois heures, l’atténuation augmente progressive- ment avec la durée de l’exposition. Chaussé (3), sur des bacilles desséchés dans les conditions de l'appartement, a mis l'atté- nuation en évidence, d’une facon ingénieuse, en comparant les effets des mêmes bacilles, administrés par inoculation sous- cutanée et par inhalation. Le même virus, actif par inoculation après dix, vingt, trente jours d'exposition à la lumière diffuse, s'est montré inoffensif par inhalation (chez le cobaye), à partir 1) Congrès de médecine inlerne. Berlin, 1890. (2) Ann. d'Ig. sperim., 1895, t. V, p. 215. 3) Comples rendus de VAcad. des Sciences, t. CLV, p. 486, 26 août 1912. SUR LA VIRULENCE DES BACILLES TUBERCULEUX 229 du dixième jour au plus et à dose plus considérable. A partir du moment de Vinnocuité par inhalation, le bacille donne par inoculation des tuberculoses de plus en plus atténuées, jusqu'à la perte complète de la virulence. D'après tous ces faits, il n’est pas douteux qu'il y ait dans le milieu extérieur des bacilles atténués, et que l'enfant en ren- contre à l’âge où il commence à marcher, en touchant à tous les objets; il n’est pas douteux que l'infection première varie, non seulement en quantité, mais en qualité. Ce sont la les élé- ments de la vaccination spontanée de l'homme. IT LES BACILLES TUBERCULEUX DANS L'ORGANISME 1° BACILLES ATTÉNUÉS DANS LES TUBERCULOSES CUTANÉES. Sur les 14 bacilles, isolés de tuberculoses cutanées (parmi lesquelles ne figurent pas les lésions de peau produites par une lésion osseuse ou ganglionnaire sous-jacente), que j'ai éprouvés sur cobaye, 4 ont paru nettement atténués. Sur 4 lupus, 2 ont donné des bacilles atténués. BACILLES NON ATTENUES : BACILLES ATTÉNUÉS : 1. Gomme du bras. 1. Tuberculose cutanée de la jambe 2. Lupus d’adulte. chez un homme de dix-neuf ans 3. Lupus d'adulle. (Z). 4. Gomme de la joue, fillette de deux ans et demi. . Lupus {adulte). . Lupus de la joue chez une femme & bo 5. Gomme du mollet (fillette de de vingt ans. sept ans). i. Lésion cutanée de la tempe chez 6. Tuberculose cutanée de la jambe un homme de vingt-sept ans. (garçon de treize ans et demi). (tuberculeux depuis l’âge de 7. Lésion cutanée du genou (garcon huit ans). de dix ans). 8. Ulcère atypique de la peau (femme de dix-sept ans). 9. Ulcération tuberculeuse de la cuisse (femme de vingt ans). 0. Tubercul. verruqueuse (adulte). Ces 4 bacilles sont du type humain. — Les bacilles atténués se rencontrent surtout dans les lésions tuberculeuses de la peau. C’est aussi la conviction de Stanley 46 230 = ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Griffith, qui a fait une étude très complète des bacilles isolés des lupus (1). Dans aucune autre forme de la tuberculose chez l'homme, dit-il, on ne trouve une telle diversité de virulences et une aussi grande fréquence de bacilles atténués, tant du type bovin que du type humain. Des vingt-cinq cas de lupus qui font le sujet de son plus récent mémoire, Stanley Griffith a cultivé 25 bacilles, dont 12 bovins et 13 humains; sur les 12 bovins, 9 atténués, et 10 sur les 13 humains (plusieurs degrés d'atténuation). Les bacilles sont-ils atténués par le fait de leur séjour dans la peau, ou l'étaient-ils avant d'y pénétrer? Stanley Griffith a cherché à déterminer l'ancienneté de ses cas, afin de mettre en parallèle le degré d'atténuation et la durée du séjour dans la peau. Pas de rapport entre l'ancienneté et Patténuation pour les bacilles du type bovin; pour les bacilles du type humain, une certaine correspondance : 3 bacilles de virulence normale provenaient de cas récents et les 3 bacilles les plus atténués provenaient des cas les plus anciens; mais il y a des excep- lions, l'un des bacilles atténués provenant d'un lupus de six mois. L'auteur annonce des observations plus étendues sur le même sujet. Rappelons l'opinion de Lindemann (2), d'après laquelle la peau de l'homme alténuerait les bacilles bovins et non les bacilles humains. Il ne manque pas d'observations qui montrent qu'un bacille peut séjourner des années dans l'organisme sans perdre sa virulence. Sur l’action qui peut appartenir en propre à la peau, on n'a pas de renseignements exacts. On ne peut pas négliger le terrain, c'est-à-dire l'organisme que des infections anté- rieures doivent avoir modifié. L’atténuation serait un effet d’ «allergie ». 9° LA TUBERCULINE DES BACILLES ATTENUES La production de tuberculine est un caractère essentiel du bacille tuberculeux. Un bacille acido-résistant qui n’en produit pas nest pas classé comme tuberculeux. On sait que le bacille (1) Journal of Pathology and Bacteriology, t. XVIII, f. 4, p. 591. 2) Berliner klin, Woch., 11 juin 1912, p. 1185. SUR LA VIRULENCE DES BACILLES TUBERCULEUX 234 aviaire produit une tuberculine qui agit faiblement sur les cobayes tuberculeux. D’aprés les observations suivantes, les bacilles atténués donnent une tuberculine normale. On prépare dans des conditions identiques (milieu, vase, étuve, temps) de la tuberculine brute avec le bacille atténué Z et avec un bacille bovin, connu comme excellent producteur d’une tuberculine active. L’essai est fait aux mêmes doses, sur des cobayes appareillés aussi exactement que possible (bacille tuberculeux, mode et date d’inoculation, résistance, poids). La tuberculine du bacille atténué a causé une réaction thermique en général plus faible; mais elle a tué les cobayes à peu près dans la même propor- tion que l’autre tuberculine (Voy. Note 2). J'ai répété la comparaison, en faisant la cutiréaction sur moi-méme, avec plusieurs tuberculines (liquide du milieu minéral de Sauton, chauffé trois quarts d’heure à 100 degrés, après six semaines de culture). Les inoculations ont élé faites sur le méme bras avec la tuberculine du méme bacille bovin et des bacilles atténués 1, 3 et 4. Des réactions antérieures avaient prouvé la sensibilité. Les tuberculines de bacilles atté- nués n'ont pas été moins actives que l’autre; au contraire, la réaction (étendue et épaisseur de l’œædème) était plus marquée avec deux des bacilles atténués ; la différence correspondait à une plus grande luxuriance de la culture de ces deux bacilles. Mémes résultats en faisant ces cutiréactions sur un même cobaye tuberculeux à peau fine et blanche. 3° PASSAGE D'UN BACILLE ATTÉNUÉ SUR COBAYES ET SUR SINGES. Par passage sur cobayes avec alternances de cultures, le bacille atténué Z est resté peu pathogène, et a plutôt continué à baisser. Un séjour de soixante-douze jours chez un lapin ne l’a pas modifié pour le cobaye. Les passages sur singes ont relevé la virulence pour le cobaye. 1. Premier séjour de neuf mois chez un Rhesus; la culture, à partir de ce rhesus, s'est montrée plus virulente pour les cobayes. Puis le bacille est redescendu à sa faible virulence pour cobaye. 2. Cynocéphale 243 recoit du 7 avril au 20 octobre 1913, par ingestion, en 25 fois, par doses variant de 0,1 à 1 milligramme, en tout 9 milligrammes de culture pure du même bacille Z. Il meurt le 4 novembre avec une grosse tuberculose des ganglions mésentériques et trachéo-bronchiques, et une tuberculose discrète, abondante, des poumons. . : . ! ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR 15 Go to SUR LA VIRULENCE DES BACILLES TUBERCULEUX 233 Note 2. — COMPARAISON UBERCULINES, SUR COBAYES. Tuberculine Z. i Tuberculine du bacille bovin. SDS DOSE TEMPERATURE DOSE TEMPERATURE e PR, Er 5 Ga he eel ee Bs, 5 ap RESULTATS ET AUTOPSIE ’ de COBAY ES tuberculine brute apres heures après 5 heures a après 6 heures 39,2 mort / Ont 40 ,4 40,4 | » eS Survit. Très peu de tuberculose, sauf un gros ganglion inguinal. } Plus maigre que le cobaye ci-contre.. Mort dans la nuit. Tuberculose, rate et ganglions. us Pas de tuberculose viscérale. Mort dans la nuit. Gros ganglions trachéaux el inguinaux. Grosse rate très tuberculeuse. Tuber- culose discrète des poumons. Avec la #nalière caséeuse d'un de ses ganglions mésentériques, sont inoculés des cobayes qui ont, au bout de quarante jours : tuberculose pulmonaire abondante; grande ulcération purulente au point d'inoculation. Du même ganglion du cynocéphale a été obtenue une culture pure. La première culture est inoculée sous la peau de cobaves, à la dose de 1/4 de milligramme. Au bout de quarante jours, tuberculose pulmonaire assez étendue, surtout chez l'un des cobayes, qui a au moins 200 tubercules dans ses poumons : ce que n’ayait jamais donné le bacille primitif. La seconde culture est inoculée à la même dose et donne en quarante jours de la tubereulose pulmonaire; une particularité qui n'a été vue que dans cette série : les cobayes avaient tous sur leur chancre une croûte grosse ; grise, sèche, écailleuse, surélevée en cône de 6 à 7 millimètres, semblable à une culture de teigne. Cette mème cullure a été donnée par ingestion, à haute dose (6 milli- grammes en deux fois, à 2 jours d'intervalle) au Rhesus 272, qui est mort le cinquantième jour, avec de petits ganglions mésentériques caséeux, de pelits sanglions trachéo-bronchiques caséeux et un gros bloc de pneumonie tuber- culeuse dans le poumon droit, contenant une multitude innombrable de : bacilles. Un petit morceau de celle pneumonie est broyé dans de l’eau phy- siologique, et la suspension (liquide surnageant) inoculée à des cobayes à la dose de 1/3 de centimètre cube. (Une goutle sur lame montrait une trentaine de bacilles par champ de microscope.) Après quarante-cinq jours, les | tuberculine brute après | après après RÉSULTATS ET AUTOPSIE avant 5 6 heures | heures | heures —— 40,2 —_ | ee 39,2 Mort le lendemain. Tubereulose discrète pou- | mon et rate. 39,9 À survécu. » _ A survécu. Lésions cependant un peu plus étendues que chez le cobaye ci-contre. Peu de tuberculose viscérale. / Ont 7) or Tuberculose plus étendue que chez le témoin. » cobayes ont eu de la tuberculose pulmonaire, sans parler des ganglions caséeux el de la rate très tuberculeuse (1). D'après les expériences de Stanley Griffith, lorsqu'on éprouve comparativement la virulence d’un bacille sur les espèces lapin, veau, chèvre, cobaye et singe, les résultats sont concor- dants; en tenant compte de la sensibilité des espèces, un bacille atténué pour l’une l’est aussi pour l’autre. Le bacille Z est relativement alténué pour les cynocéphales et les rhesus, comme il l’est pour les cobayes, mais les singes sont toujours beaucoup plus sensibles. Is ne font pas de culi- réactions, ce qui est un signe de moindre résistance. Les pas~ sages équivalent à des passages par espèce plus sensible, rele- (1) Une tuberculose spontanée, à bacille pleinement virulent, est-elle intervenue dans cette expérience? On ne peut l’exclure d'une façon absolue ; mais elle est très invraisemblable chez des cynocéphales soigneusement isolés. 234 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR vant le bacille pour une autre espèce moins sensible, ce qu! est conforme aux idées pastoriennes sur la virulence des bactéries. En médecine, on n'a guère à envisager que les passages sur l'homme. Nous n'avons pas de données sur ce que peut être un bacille humain repris par l’homme après un détour sur une espèce animale, par exemple le chien ou le chat. 4° ACTION DES RAYONS X. Que deviennent les bacilles tuberculeux qui sont soumis, dans l'organisme, à l'action de ces rayons, aujourd'hui si sou- vent employés? Une expérience, faite avec le D" Mahar, sur cobayes inoculés dans l'épaisseur de la peau et exposés aux rayons, n'a pas abouli à une alténuation.. Un cobaye reçoit par inoculation intradermique 1/200 milligramme de bacilles bovins, Le surlendemain, première irradiation; après intervalle de 7 jours, deuxième irradiation (peau à 15 centimètres de Vanticathode; 10 mi- nutes; appareil employé pour le traitement des tuberculoses cutanées et ganglionnaires). Une petite papule s’est développée, à partir du 8e jour, chez le cobaye irradié comme chez les témoins; elle est plus rouge, d'aspect plus enflammé chez le cobaye irradié. On Vexcise le 16° jour et on la réinocule sous la peau de cobayes neufs qui prennent une tuberculose ni plus ni moins rapide que les cobayes ino- culés de la même manière avec la papule analogue d'un cobaye non irradié. Un autre cobaye, inoculé de même dans la peau, est soumis à 4 irradia- tions, à intervalles de 7 jours. Le 44° jour, on excise la papule: la plaie ainsi faite d'un coup de ciseaux guérit parfailement, tandis que le cobaye suc- combe à la tuberculose généralisée. De la papule on inocule séparément, à des cobayes neufs, la croûte sèche et la base dermique. Le tissu dermique donne une tuberculose rapide (généralisée dès le 45e jour); dans le même temps, la croûte a donné une tuberculose plus lente. A cause de l'incertitude sur les quantités de bacilles, on ne peut conclure à une atténuation des bacilles renfermés dans la croûte. Il est facile de prélever les bacilles sur un sujet humain avant le traitement par les rayons, mais difficile d'en prélever après, lorsque les rayons ont amené la guérison superfi- cielle. Une fille de quatorze ans, de très bonne santé générale, est traitée pour une adénite sous-maxillaire propagée à la peau. Deux prélèvements tout à fait superficiels ont été faits, l’un avant, l'autre après deux irradiations (huit jours après la t SUR LA VIRULENCE DES BACILLES TUBERCULEUX 235 ~ deuxième), ef on a obtenu sur cobayes les deux cultures correspondantes. Elles ont accusé la méme virulence. Une cullure de virulence normale a été obtenue avec des croutes d’une lésion tuberculeuse de la malléole externe d'une jambe, chez une fille de sept ans et demi, après application de courants à haute fréquence et 3 irradiations. Le bacille: obtenu n’élait pas atténué, mais il n’a pu être comparé avec le bacille primitif. Ces observalions, faites en commun avec le D’ Mahar, ne suffisent pas à déterminer le mode d'action des rayons; elles indiquent que les bacilles n’ont pas été dans les tissus l’objet d'une destruction rapide. CONCLUSIONS 1. Dans le milieu extérieur, le bacille tuberculeux n'a pu ètre isolé de 18 échantillons de poussières sèches (nettoyage par le vide). Il a été isolé de 3 échantillons (sur 18) de pous- sières fraiches; 2 de ces bacilles proviennent de poussières terreuses ramassées sur des planchers d’omnibus, et sans doute fraichement souillées de crachats. Ces 3 bacilles ont été reconnus très virulents. 2. Des bacilles tuberculeux pris dans une culture, mélés à de la poussière fine (stérilisée) placée en couche mince dans une boîte en verre, exposés au vieillissement à la lumière diffuse, dans des conditions pareilles aux conditions naturelles (appartements), n’ont perdu de leur virulence qu'au bout de huit mois. 3. Au début du déclin de la virulence, on a isolé de la tuber- culose lente des cobayes inoculés un bacille pleinement viru- lent. t. Il se fait des bacilles atténués dans le monde extérieur, bien qu'on n'en ait pas encore isolé. 5. Dans l'organisme les bacilles atténués se trouvent surtout dans les tuberculoses cutanées, en particulier dans les lupus. 6. ll y a un élément inconnu dans la provenance des bacilles de ces lésions : l'état de l'organisme, que des infec- tions antérieures ont modifié. 7. La tuberculine de plusieurs bacilles atténués s'est mon- 236 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR trée aussi active que la tuberculine active d'un bacille bovin trés virulent. 8. Un bacille atténué ne se renforce pas pour le cobaye par passages sur cobayes. Les passages sur singes ont relevé la virulence pour le cobaye. 9. Des bacilles inoculés dans la peau du cobaye, et soumis aux rayons X, n’ont pas subi d’atténuation pendant la courte durée de l'expérience. Des bacilles cultivés à partir de lésions culanées superficielles ont montré la même virulence avant et après les irradiations. 7 Juillet 1914. ETUDES SUR LA RICINE V. — SUR LE SORT DE LA RICINE (TOXINE ET AGGLUTININE ) PENDANT LA GERMINATION DES GRAINES DE RICIN par H. AGULHON. On ne sait rien, pour ainsi dire, sur le sort de la ricine pendant la germination des graines de ricin. D’après G. Cruz (1), la germination ne détruit pas la toxine : la macération de 6 jeunes tiges de 7 jours tue le cobaye-en 5 jours (injection D ] J sous-cutanée). Or, à notre connaissance, on n'a pas signalé l’existence de la ricine dans le ricin adulte. Au bout de 7 jours “ 1 la germination n'est qu'à son début, Valbumen est encore oonflé de réserves; rien ne prouve que la toxine ne disparait ©. , pas à un stade plus avancé. La ricine (toxine et agglutinine) est-elle détruite pendant la \ DD } œermination? A quelle époque disparait-elle? Passe-t-elle de è | Valbumen dans la plantule? Autant de questions qui restaient sans réponse et dont nous avons entrepris systématiquement Vétude. Nos expériences se classent en deux séries : Dans la première, nous avons étudié les propriétés toxiques et agglutinantes des précipités alcooliques obtenus à partir : 38 | d'abord, de plantes entières; puis, séparément, des albumens et des plantules. 1° ETUDE DES PRECIPITES ALCOOLIQUES I. — PLANTES ENTIEBES. Les graines sont mises à germer sur de la sciure de bois humide, d’abord à l’étuve à 35 degrés pendant 3 jours, puis à (1) Annales d'Hygiène publique, 3° série, t. XL, p. 350, 1898. 238 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR la température de la chambre (expériences faites en été). Après des temps variés, 9, 14 et 30 jours, on récolte 20 jeunes plantes (albumen compris); on les broie au mortier et on les fait macérer pendant 18 heures dans une quantité d'eau suffisante pour amener le volume total à 200 cent. cubes; on filtre, on précipite, par 3 volumes d'alcool à 96 degrés, un égal volume du filtrat de chaque essai (170 cent. cubes) et on centrifuge. Le précipité est repris par eau; on centrifuge pour séparer la portion insoluble et la solution est précipitée par l'alcool (3 volumes); on centri- fuge à nouveau et le précipité est séché dans le vide. Pour la seconde précipitation, on est obligé d'ajouter au liquide un peu de chlorure de sodium; sans celte précaution, la précipitation est très lente et souvent incomplète. Les précipités secs obtenus pèsent : Pour 20 graines nôn germées, décortiquées . . . 0,180 gr. Pour 20 plantes de: 9 jours, it NRC NEO IDE Pour 20 plantesvde Ai: jouns®:. ai.) eh Carter Pour20/plantes de 30jours: -< aes. MT 2.605 NO MO DRE Ces différentes préparations sont mises en solution dans Peau physiologique, à raison de 0 gr. 01 par centimètre cube. On litre, d’une part, la toxicité de ces solutions; d'autre part, leur pouvoir agglutinant. Comme animaux d'expérience, nous employons le cobaye male de 400 à 500 grammes et la souris de 20 grammes; des dilutions successives dans l'eau physiologique nous permettent d'injecter, sous le volume de 1 cent. cube, des doses de plus en plus faibles de toxine. Les animaux sont observés pendant une semaine; on note la lésion locale, pour ceux qui vivent encore après ce temps. Pour l'étude de Vagglutinine, nous nous servons d'hématies de lapin lavées, en suspension à 5 p. 100 dans l’eau physiolo- gique. À 1 cent. cube de cette suspension d'hémalies, nous ajoutons | cent. cube des dilutions successives des préparations; on note le résultat après 24 heures à lempérature ordinaire. Ces méthodes expérimentales seront celles suivies dans tout le cours de ce travail.) Les résultats obtenus dans cette première série d'essais sont exprimés dans les tableaux suivants : ETUDES SUR LA RICINE TABLEAU A. — Toxicité. POIDS DE PRECIPITE injecté. Cobaye. Souris. | Cobaye. [esr Souris. GRAINES (1) J- à ! jour 1/2. Mort en 1 PLANTES de 9 jours. Mort en moins ( Cobaye. | Souris. Mort en 2 j. à 2 j. 1/2. Mort en 1 j. PLANTES de 14 jours. Mort PLANTES de 30 jours. Tres petite ( Cobaye. Os OAme® | Souris. Eschare. Mort en 2 j. ase (1) Deux expériences. POIDS de précipité. 1Omgr » [mer » 0 ,1mer 0 ,01mer I GRAINES Totale. Totale. Totale. I de 1 jour. en 1 jour. eschare. SEIS SOI Sess teh tan. Sok Mishoo the: Petite eschare. Mort Mort Rien. en 1 jour. en 3 j. 1/2 RS El en A | eee erence teen Très petite eschare. Mort Eschare. Rien. en 2 jours. Re easy pena rene A CR tate toes Rien. Eschare. Tres petite eschare. TasLeau B. — Agglutination. PLANTES PLANTES PLANTES de 9 jours. de 14 jours. de 30 jours. Totale. Totale. Incomplète. Totale. 0 0 ncomplète. 0 0 0 0 0 ncomplète. L'examen des tableaux A et B montre que /a ricine (torine el agglutinine) disparait progressivement pendant la germina- tion. Au 9° jour, la toxine n'a pas sensiblement diminué, mais l’agelutimine est déjà moins active. Après 14 jours, la toxicité et le pouvoir agglutinant des précipités alcooliques se trouvent trés abaissés. Le 30° jour, il n’y a pratiquement plus de ricine dans la plante. A cette époque l’albumen est desséché et tombe. Si nous tenons compte, dune part, du poids de substance 240 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR obtenu dans nos diverses préparations; d'autre part, de leur activité, en prenant comme unité toxique la dose qui tue le cobaye en 2 à 3 jours, el comme unité agglutinante la plus petite dose agglutinant totalement 1 cent. cube d'hématies de lapin en 24 heures, on peut résumer de la façon suivante les résultats obtenus : Les 20 graines ou jeunes plantes traitées dans chaque opéra- tion renfermaient : Graines non germées. 1.800 unités toxiques. 41.800 unités agglutinantes. Plantes de 9 jours. . 4.000 a 100 — Plantes de 14 jours. . 70 — 7 — Plantes de 30 jours. . moins de 1 unité. moins de 1 unité. La disparition de l’activité apparaît de la sorte très nette- ment; on constate que l'agglutinine disparait proportionnel- lement plus vite que la toxine; Müller (1), traitant des prépa- rations de ricine par la pepsine chlorhydrique, a vu disparaitre l'agglulinine alors que la toxine subsistait; la disparition plus rapide de Pagglutinine dans le phénomène de la germination peut élre rapprochée du fait observé par Müller. II. — Preparations SÉPARÉES DES PLANTULES ET DES ALBUMENS. Dans la série d'essais que nous venons d’exposer, les jeunes plantes étaient traitées en entier, plantule non séparée de l'albu- men; la disparition de la ricine coïncidait avec le flétrissement de albumen. Il y avait lieu de rechercher si la ricine restait localisée dams Valbumen ou si elle passait dans la plantule pendant la digestion des réserves. La question est résolue par les expériences suivantes : Des graines sont mises à germer dans la sciure à 30 degrés; après 9 et 16 jours, on sépare les albumens des plantules; on les broie et on les traite à part, comme dans les essais sur les plantes entières. Les précipités alcooliques obtenus sont mis en solution dans l’eau physiologique à raison de 1 centigramme par centimètre cube, et on titre leur toxicité et leur pouvoir agglutinant. . 1, Arch. f. experim. Pathol. und Pharmak., 1898, t. LI, p. 439. ETUDES SUR LA RICINE 12 cS = ; - PLANTES LE 9 JOURS PLANTES DE 46 JOURS POIDS ee a de précipité ALBUMENS PLANTULES ALBUMENS PLANTULES sec a oe | F — | employé. =v Cobaye. | Agel. | Cobaye. | Agel. | Souris. | Aggl. | Souris. | Aggl. 1028: Mort en| To- Eschare| In- » Trace | Petite | Trace 1 jour | tale comp. eschare Amgr Mort en| To- .|Eschare|Trace [Mort en 0 0 0 1" 4/2) || tale 2 j--1/2 0. Amer Eschare| In- 0 0 Petite 0 0 0 comp. eschare 0,01 0 0 0 (] 0 0 0 0 On constate que la ricine reste localisée en majeure partie dans L'albumen; on n'en trouve qu'une très faible quantité dans la plantule pendant la germination; comme elle s’atténue peu à peu dans l’albumen, ona l'impression qu'au fur et à mesure qu'elle pénètre dans la plantule, elle y est détruite par un pro- cessus particulier, sur lequel nous ne savons encore rien de précis. Ce ne semble pas être une digestion par une diastase « ordinaire »; en effet, nous avons préparé un mélange d'une petite quantité de ricine et d’une préparation de plantules (précipité alcoolique); après filtration à la bougie et répartition dans des tubes stériles, nous avons titré la toxicité du mélange, puis nous l'avons abandonné, pendant plus d'un mois, à l'étuve à 35 degrés; en titrant le mélange toutes les semaines, nous n'avons observé aucune atténuation de sa toxicité. 2 ETUDE DES MACÉRATIONS DE PLANTULES ET D’ALBUMENS Les macérations de graines sont obtenues par broyage en présence d’eau physiologique ; après quelque temps de contact, on filtre sur filtre humide. Dans ces conditions, ou obtient un liquide clair trés actif. La méme méthode est suivie pour les albumens des graines germées. Pour obtenir les macérations de plantules, on broie celles-ci avec de Peau physiologique, on exprime dans un linge et on centrifuge. 242 ; ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Les faits énoncés dans la première partie de ce travail se trouvent confirmés dans cette seconde série d’expériences ; mais avec les macérations, les phénomènes sont plus compli- qués qu'avec les précipités alcooliques, comme d’ailleurs on pouvait le penser a priori étant donnée la complexité de compo- sition chimique que peut avoir un extrait aqueux de plante. A un certain moment de la germination, nous avons pu observer l'apparition dans les macéralions : 1° d’une hémolysine qui accompagne l’agglutinine à la fois dans l'albumen et dans la plantule ; 2° d'une substance toxique pour la souris, résistante à l’ébul- lition, non précipitable par l'alcool. Afin de pouvoir mieux étudier ces faits, nous considérerons séparément l'action sur les hématies et l’action toxique sur les animaux que nous avions rapprochées dans la première partie du travail. 1. — ACTION SUR LES HEMATIES. Les hématies employées sont des hématies de lapin lavées, en suspension à 5 p. 100 dans l’eau physiologique. On ajoute à 1 cent. cube de cette suspension des quantités variées de macé- rations amenées au volume constant de 1 cent. cube, par des dilutions successives dans l’eau physiologique. Dans une première série d'essais nous avons préparé les macérations de plantules provenant de germinations à l’étuve à 30 degrés après 5, 12 et 24 jours. Une plantule correspond à environ 2 cent. cubes de macération centrifugée. Voici les résultats observés après 24 heures : VOLUME PLANTULES DE de — nn re errnm macération. 5 jours. 12 jours. 24 jours —— tl | Hémolyse Ilémolyse | Agelutination totale. totale. incomplete. Hémolyse Hémolvse légère Trace — incompleéte. et agglut. incompl.| d'agglutination. ETUDES SUR LA RICINE 243 Ainsi, alors qu'au départ on observe seulement dans la graine de ricin la présence d’une agglutinine, nous voyons apparaître à côté de celle-ci, après quelque temps de germination, une hémolysine dans la plantule; la présence de cette hémolysine s’observe pendant un certain temps, puis elle disparait et les propriétés de la petite quantité d'agglutinine encore présente apparaissent seules. La propriété hémolytique des macérations est détruite par chauffage à 100 degrés; par chauffage à 55 degrés elle est atténuée; on continue à observer Vagelutination aux deux doses étudiées. Le sérum antiricinique de chèvre (préparé par M. Truche) n'empêche pas l'hémolyse : 1 cent. cube de macération — 1/10 de cent. cube de sérum anti donne, après une demi-heure de contact, les mêmes résultats qu'un mélange au sérum normal sur les hématies de lapin. Dans une seconde série d'essais, nous avons recherché si l'hémolysine apparaissait aussi dans l’albumen, et nous avons comparé les macérations d’albumen et de plantules aux macéra- tions de graines non germées, obtenues dans les mémes condi- tions. La germination a eu lieu à la température du laboratoire en décembre, c'est-à-dire assez lentement. 1 cent. cube de macération — 1 graiñe ou un albumen ; pour les plantules il n'a pas été possible d'obtenir un volume constant, correspondant à une plantule pour les différentes préparations; la quantité d’eau absorbée par les plantules el qui en sort par simple expression fait que les préparations sont d'autant plus diluées que la germination est plus avancée: dans les expériences ci-dessous le volume de liquide corres- pondant à une plantule varie de 1 cent. cube à 2,5 cent. cubes. Le tableau suivant présente les résultats obtenus (mêmes conditions expérimentales que dans les essais antérieurs). Dans les conditions de cette germination, on voit au 10° jour l'hémolysine apparaître dans les plantules, alors que les albumens ne renferment que l'aggiutinine; mais au 15° jour l’hémolysine est présente dans les deux parties de la jeune plante. Elle disparait progressivement dans la suite, et, au 40° jour, les plantules ne présentent plus qu'un faible pouvoir agelutinant. 244 ANNALES DE L’INSTITUT. PASTEUR PLANTES DE VOLUME | GRAINES ——$—$—$<$<—$<$< $a ©" "©—©Ù | Russ 40 jours. 15 jours. 24 jours. 40 jours. macération.| germées, | ur [aan Aïbum. | Plant. | Album. | Plant. | Album. | Plant. | Plantul. yee [A ++ (1) H-++ H +4 | HAS AIRE avec saa {H+ JA ++/H ++/A ++, Dj ge AN ALL NA Gal on . “ou 0° NA ates) en 0 0,001cc | À ++ A ++ 0 A + 0 0 0 0 0,0001cc |A + 0 0 0 0 0 0 0 (1) A ++ : Agelutination totale. A = : Agglutination incomplète. H ++ : Hémolyse nette. H-+ : Hémolyse légère. Nous avons dit précédemment que le chauffage à 55 degrés atténue Vhémolysine, sans toucher sensiblement à l’agglu- linine. Nous avons étudié systématiquement l'action de la chaleur sur les propriétés hémolytique et agglutinante des macérations de la germination à température ordinaire. II. ACTION DE LA CHALEUR SUR L’AGGLUTININE ET L'HÉMOLYSINE. Liagelutinine des macérations de graines non germées nest pas sensible à un chauffage d’une demi-heure à 60 degrés et même d'un quart d'heure à 80 degrés; elle est donc très résistante à la chaleur (1). L'hémolvsine au contraire est relativement thermolabile; chauflée une demi-heure à 55 degrés elle est atténuée; chauffée une demi-heure à 60 degrés elle est complètement détruite et les macérations ainsi traitées ne présentent plus que le pouvoir agglutinant. Le tableau suivant témoigne de ces faits : O¢ 1) Il en est de même de la toxine. Ces macérations tuent encore le cobaye en 1 jour et demi, à la dose de 0,01 c. c., après chauffage d'une demi- heure à 60 degrés, ou d’un quart d'heure à 80 degrés. faut atteindre 100 degrés pour que la toxicité soit détruite ” La, ET nn STE SE ETUDES SUR LA RICINE 245 VOLUME MACERATION D’ALBUMENS DE 45 JOURS de EE macération. Non chauffée. 1/2 heure à 55 degrés.|1/2 heure à 60 degrés. ONE c- Agglutination Agglutination Agglutination et hémol. nette. et hémol. faible. seule. 0,01 c.c. Agglutination Agglutination Agglutination et trace dhémol. et trace d’hémol. seule. 0,001 c. c. Trace d’agglutin. | Trace d’'agglutin. | Trace d'agglutin. MACÉRATION DE PLANTULE DE 15 JOURS Le KMS Hémol. complète Hémolyse nette Agglutination. et rapide. et agglutination. ONCE: Hémol. nette ; agg. 0 | Nous pouvons donc résumer ce paragraphe de notre travail de la facon suivante : Il apparaît à une certaine période de la germination, à la fois dans l’albumen et la plantule, mais plus rapidement dans cette dernière, une hémolysine. Cette hémolysine est thermo- labile; elle est détruite à 60 degrés, alors que l’agglutinine qu'elle accompagne est plus stable et résiste à 80 degrés. L'hémolysine disparaît dans la suite de la croissance de la plante, assezrapidement pour que l’on n'en trouve plus trace au 24° jour, dans une germination à 30 degrés. L’hémolysine n'est pas sen- sible à l'action empéchante de sérum antiricinique; elle est détruite par précipitation des macérations par l'alcool; en effet, nous n’en avons pas trouvé trace dans nos premiers essais, faits avec des précipités obtenus par deux traitements à l'alcool; une seule précipitation par l'alcool suffit d'ailleurs pour Vatténuer considérablement. Ill. — Action ToxIQUE. Dans l'étude de l'action toxique des macérations, nous retrouvons le phénomène de disparition de la ricine pendant la germination; nous constatons de nouveau que très peu de toxine passe dans la plantule. Voici les résultats obtenus sur le cobaye, dans une germina- 17 246 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR tion lente (température du laboratoire en hiver), avec les macé- rations d’albumens. ALBUMENS DE QUANTITE GRAINES el IVECO 10 jours. 45 jours. 24 jours. Acc » Mort Mort en moins Mort en Mort en dans la nuit. de 1 jour. 4 jour 1/2. 4 jour 1/2. 0,1cc Mort en moins [Mort en moins Mort en Mort en de 1 jour. de 1 jour. 1 jour 1/2. 2 jours 1/2. 0,014cc Mort en Mort en Mort en Mort en 1 jour 1/2. 1 jour 1/2. 2 jours. 6-jours 1/2. 0,001cc | Eschare étendue. » » » Avec les plantules de 10 à 40 jours correspondantes, on n'oblient, chez le cobaye, qu'une eschare locale par injection de 1 cent. cube de macération. L'importance de l’eschare décroît avec l’âge des plantules. La macération des plantules de 40 jours contenait encore de petites quantités de ricine, car elle tuait la souris er 2 à 3 jours pour 1/2 cent. cube (des témoins bouillis ne donnant rien sur la souris). On voit nettement combien la ricine reste localisée dans l’albumen. Dans l'expérience ci-dessus, sa disparition esttrèslente dans l’albumen, la germination étant faite à basse température. La très faible toxicité des macérations de plantules pour le cobaye nous a amené à faire la recherche de la ricine toxine sur la souris aux différents stades de la croissance. Nous avons alors constaté qu'une substance toxique, différente de la ricine, intervenait à une certaine période de la croissance des plantules. Dans une première expérience, nous avions préparé une ma- cération de plantules de 16 jours à 30 degrés. Sous la peau et dans le muscle, le cobaye supportait l'injection de 4 cent. cubes de macération. Nous avons alors injecté à 3 souris 1/2 cent. cube de macération : 3 heures après, elles étaient mortes. L’expé- rience, recommencée en faisant des témoins avec macération bouillie (un quart d'heure à 100 degrés), nous a montré que le même phénomène se reproduisait avec ces derniers. ETUDES SUR LA RICINE 947 Nous nous trouvions donc en présence d’une substance toxique autre que la ricine, résistant au chauffage à 100 degrés et provoquant rapidement la mort. Dans quelques cas nous avons vu dans un lot de souris un animal ou deux résister à cette intoxication rapide ; si l'animal passe les premières heures, il est sauvé. Nous en avons ainsi vu se remettre après un malaise de quelques heures et nous avons pu les conserver pendant plusieurs semaines après l'injection. Nous avons cherché à déterminer l’époque de l'apparition de cette substance toxique dans la plantule. Une série de germi- nations a été mise à l’étuve à 30 degrés. Aw bout de cing jours, _ nous déterminons la toxicité de la macération obtenue (1 plan- tule= 1,5 cent. cube de liquide). 3 souris reçoivent 1/2 cent. cube sous la peau : pas de mort immédiate; mais elles meurent en 1 jour 1/2 et 3 jours 1/2 (deux expériences concordantes). 3 souris reçoivent 1/2 cent. cube de la même macération bouillie ; elles n’ont rien. Nous nous trouvons en présence de ricine seulement et non pas de la substance toxique résistante à l’ébullition. D'ailleurs, la macération étant précipitée par l'alcool, on fait une solution du précipité à raison de 1 centigramme par cent. cube : l’injec- tion sous la peau du cobaye provoque une eschare typique. Au bout de 12 jours nous faisons une nouvelle préparation (4 plantule — 1,8 cent. cube de liquide). 3 souris recoivent 1/2 cent. cube de liquide frais sous la peau: 2 meurent dans la nuit, une troisième résiste et 8 jours après elle est encore en bonne santé. 3 souris recoivent 1/2 cent. cube de liquide bouilli pendant un quart d’heure : elles meurent dans la nuit. A cette époque de la germination, le corps thermostabile toxique se trouve présent dans la plantule, alors qu’il manquait au 5° jour. Nous avons précipité la macération par l'alcool et essayé la toxicité, d’une part du précipité, d'autre part de la solution alcoolique débarrassée de l'alcool par concentration dans le vide et ramenée au volume primitif par de l'eau physiologique. Nous avons constaté que le précipité était dénué de toxicité pour la souris, tandis qu’au contraire le liquide alcoolique 248 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR avait gardé la totalité de l'action toxique. Le corps toxique thermostabile n'est done pas précipitable par l'alcool. Au bout de 24 jours, nouvelle préparation, qui nous donne les mêmes résultats que la préparation de 12 jours. Quelle est cette substance toxique, provoquant la mort par empoisonnement rapide, résistant à la chaleur, non précipi- table par l'alcool? Probablement un alcaloïde. La préparation de grandes quantités de jeunes plantes nous est nécessaire pour essayer d’en déterminer la nature. Peut-être s'agit-il de la ricinine. On ne trouve pas dans la littérature de données sur la toxicité de cet alcaloide. Mais E. Schulze et E. Win- terstein (1) ont constaté que la ricinine se trouve chez les jeunes plantes en quantité 12 à 15 fois plus grande que dans les graines. L'apparition du poison thermostabile des plan- tules pourrait s’expliquer par la production de cette grande quantité de ricinine. La question demande à être étudiée, mais elle sortirait du cadre de notre présent travail. En résumé, l'ensemble de ce travail nous permet de poser les conclusions suivantes : La ricine toxine disparait lentement dans la germination des eraines de ricin; elle reste objectivement localisée dans l'albumen ; on n'en trouve que très peu dans la plantule; sa disparition coincide avec le flétrissement de l’albumen. Il en est de même de la ricine agglutinine ; cette dernière semble disparaître proportionnellement plus vite que la toxine. Pendant une période assez courte de la croissance, à côté de l'agglutinine, une hémolysine apparaît, à la fois dans la plan- tule et dans lalbumen; cette hémolysine est thermolabile, détruite par précipitation alcoolique et insensible à l’action du sérum antiricinique. La question se pose de savoir si l’appari- tion de cette hémolysine présente un rapport quelconque avec la destruction de l'agglutinine. A un certain moment de la germination, une substance toxique pour la souris, résistante à l’ébullition, non précipi- table par l'alcool, apparaît dans la plantule ; sa nature n'est pas encore déterminée, mais tout porte à croire qu'il s'agit d’un poison alcaloïdique, peut-être de la ricinine. 1) Zeilsch. physiol. Chem., 1904, t. XLIIT, p. 211-221. ETUDES EPIDEMIOLOGIQUES ET PROPHYLACTIQUES DU PALUDISME ONZIEME ET DOUZIEME CAMPAGNES EN ALGERIE EN 1912 ET 1913 (1) par EDMOND SERGENT et ÉTIENNE SERGENT (Institut Pasteur d'Algérie.) ÉTUDES ÉPIDÉMIOLOGIQUES Les années 1912 et 1913 ont été peu fiévreuses en Algérie, continuant ainsi une longue série d'années favorisées, depuis la formidable épidémie de 1904, dont le souvenir hante encore le colon. Malgré cette bénignité générale, il y eut, durant ces deux années, comme chaque année, des foyers de paludisme qui se sont allumés en certains endroits, par suite de la rencontre fortuite des facteurs déterminants des épidémies palustres. Une fois de plus, nous voyons ainsi que /e paludisme est une maladie locale. Toute réserve étant faite au sujet des causes profondes de la virulence (génie épidémique des anciens, cycle pluri-annuel de A. Celli), on peut dire ceci : en un lieu donné, le danger de contamination et la gravité des attaques sont proportionnels au nombre d'anciens paludéens non traités (réservoir de virus); mais l'extension géographique de l’épi- démie est limitée par la portée du vol des Anophélines autour de ce réservoir de virus. C'est ainsi qu'on a vu, au milieu de régions relativement saines, éclater de petites épidémies de paludisme très distantes (4) Campagne dirigée pour le compte du Gouvernement général de l'Algérie. Pourles campagnes précédentes, voir : Annales de l'Institut Pasteur et Atti della Società per gli Studi della Malaria, Rome. Les rapports complets publiés chaque année par le Gouvernement général de l'Algérie peuvent être demandés à l’Institut Pasteur d'Algérie. 250 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR les unes des autres : en 1912, à Maison-Carrée, aux abords du barrage de l’oued-Fergoug, dans la vallée de la Tafna. En 1913, à Batna, à Palikao. A Oued-el-Alleug en pleine Mitidja, en septembre 1913, à 30 kilomètres d'Alger, une violente épidémie : sur 300 personnes, aucune n'échappe au mal et 30 au moins en meurent. I. — Gres a ANOPHÉLINES. Les hivers 1911-1912 et 1912-1913 ont été très peu pluvieux, comme plusieurs de ceux qui les précédérent. Cette sécheresse générale, qui, dans certaines régions, a tari des puits ot, de mémoire d’homme, l'eau n'avait jamais manqué, a aussi contribué à supprimer de très nombreux gîtes à Anophélines. Cependant, tant en 1912 qu'en 1913, la sécheresse a amené parfois ce fait paradoxal de la production de gîtes à Anophé- lines nouveaux : c'est qu'en effet la baisse de la nappe souter- raine a transformé des lacs salubres en marécages pestilentiels, des oueds & eaux vives et courant continu en chapelets de mares et marelles stagnantes. A Palikao, la transformation en marécage anophéligène d’un lac, inoffensif jusque-là, résulte d’une autre cause : ce lac, qui couvre un hectare environ, fournit l’eau potable aux habitants. I] est désherbé chaque année. En 1913, ce travail n’est pas exécuté, les jones poussent avec vigueur, recouvrant rapidement la moitié de sa surface : les habitations les plus proches du lac sont envahies par les Anophélines nés dans ce gîte favorable et cette invasion d'Anophélines est bientôt suivie de celle du paludisme. Nous devons signaler enfin l’existence de gîtes à Anophé- lines de lespèce Pyretophorus myzomyifacies presque au niveau de la mer, à quelques mètres des vagues, dans des suintements d’eau douce sourdant de falaises marneuses (Aïn- Taya). Une observation attentive nous a montré en 1912 que les trains qui traversent les marais de la Macta (département d'Oran) ou qui longent les bords du lac Fetzara (région de Bone) recueillent, à l'aube et au crépuscule, des essaims d'Anopheles que les wagons transportent au loin. EPIDEMIOLOGIE ET PROPHYLAXIE DU PALUDISME 251 Les examens entomologiques ont montré que le Pyretophorus myzomyifacies d'Algérie existe aussi au Maroc, à Souk-el- Arba des Zemmour (exemplaires recueillis par le D’ Lapin). Nous savions déjala présence d’Anopheles maculipennis dans le Maroc entier. A Mraier (Oued-Rhir) des Pyretophorus chau- doyei présentent certaines particularités dans la disposition des taches de l'aile (1). II. — RÉSERVOIR DE VIRUS. 1° Tableaux des index endémiques. Index endémiques relevés en 1912. Proportion de grosses rates Pourcentage de 0 à 5ans. 144 sur 491 Enfants ? de 6 à 10 ans. 126 sur 689 } 591 sur 2.101 de 11 à 15 ans. 321 sur 921 Adultes au-dessus de 13 ans . . . . 116 sur 1.104 Totaux. . 2.0 707 sur 3.205 23,5 p. 100 DÉPARTEMENT D'ALGER. — Localités : Birtouta, Boufarik, Attatba, Chiffa, Marengo, Montebello, Mouzaïaville, lit de l’oued Djer, Chéragas,El-Amri. DÉPARTEMENT DE CONSTANTINE. — Mondovi, Penthièvre, Bou-Otman. DÉPARTEMENT D'OrAN. — Tourville, Sainte-Léonie, Port-aux-Poules, domaine de Chantrit. Index endémiques relevés en 1973. Proportion de grosses rates Pourcentage dew Oran Danse 9 2iesur 103 Enfants à de 6 à 10 ans. 43 sur 193 97 sur 426 fde44a45 ans: 27 sur 130 Adultes au-dessus de 15 ans .... 43 sur 270 Dotaux tue 140 sur 696 21,6 p. 100 Localités : Attatba, Birtouta, Boufarik, Chéragas, Chiffa, Maison-Carrée, Marengo, Montebello, région de l'ancien lit de l'oued Djer, Oued-el-Alleug. (1) Voir la description dans notre Rapport complet, Institut Pasteur, Alger. 252 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR 2° Tableaux des résultats des examens microscopiques du sang de sujets habitant des localités paludéennes. PARASITES NOMBRE D’EXAMINES par l'hématozoaire CORPS CORPS AVEC SS a ee ne a nie } ; en demi- en grosse en 1912 Tierce Tierce As lune rate A A Quarte . maligne | bénigne | ~ pessaire 22 fébricitants 3 8 2 il 2 air 45 non fébricitants . . » 6 1 3 7 37 MOtalx 7 cae ent 3 14 3 4 9 54 20 à hématozoaire du paludisme. PARASITÉS NOMBRE D'EXAMINÉS par l’hématozoaire CORPS CORPS AVEC ‘ ; en demi- en grosse en 1913 Tierce Tierce Ouarte lune À rate bénigne | maligne = pessaire a —————— 87 fébricitants . . . . 66 29 8 4 6 24 31 non fébricitants . . 8 1 1 4 4 30 ILOLAUX as... *: 14 30 9 8 10 54 113 a hématozoaire du paludisme. 3° Relation d’une épidémie localisée, trés meurtriére, due a un apport de virus exogène. Durant été 1913, un groupe d’environ 300 indigènes du Sud, hommes, femmes et enfants, originaires de la région de Boghari, viennent s'installer pour travailler dans une ferme de la commune d’Oued-el-Alleug au milieu de la Mitidja. Cette région est fort marécageuse, et cette ferme était trés malsaine autrefois; elle l'est beaucoup moins. Ses habitants, européens ou indigénes sédentaires, gagnant de bons salaires et vivant bien, se sont cuéris, et le réservoir de virus autochtone est fort réduit. Au contraire, les indigènes du Sud nouveau-venus (appelés Guebla), éternels errants des routes algériennes, portent un passé pathologique lourdement chargé, sont imprégnés de diverses infections, dont le paludisme: Travail- leurs médiocres, ils gagnent des salaires fort bas. proportionnels au rende- ment deileur travail. Arrivant dans un pays marécageux, ils infectent les EPIDEMIOLOGIE ET PROPHYLAXIE DU PALUDISME 253 Anophélines autochtones qui leur réinoculent leur propre virus multiplié : en septembre 1913, en 15 jours, sur 300 âmes environ, ils comptent 30 morts (il y a des morts non déclarées). Avertis par le dévoué Dr Plantier, nous vérifions au microscope le diagnostic d’épidémie massive de paludisme a forme pernicieuse. Nous multiplions, avec le Dr Plantier, les iniections intra- musculaires de quinine, et organisons la quininisation journaliére de tout le groupement. L'épidémie fut enrayée aussitôt, et la population sédentaire voisine, européenne et indigéne, fut préservée. Mais si le médecin, appelé par le colon, n’avait pas, dés le premier moment, pensé au paludisme et provoqué les mesures antipaludiques, ce virus importé aurait réinfecté gravement une région en voie d'assainissement. Cette observation montre, une fois de plus, le danger, au point de vue de l'hygiène, des migrations non surveillées des indigènes, tour à tour cueilleurs et semeurs de virus. 4° Fièvre bilieuse hémoglobinurique. Quelques cas sont signalés à Batna, département de Cons- tantine (D° Mondelin), à Palikao, département d'Oran (D° Hau- tefeuille). ÉTUDES PROPHYLACTIQUES 1° L'amendement du réservoir de virus, par la quininisation des indigènes, anciens infectés, est la mesure la plus facile a appliquer partout en Algérie. Le nombre de personnes quininisées au moyen d’agents qui- ninisateurs a été augmenté en 1913. Environ 3.500 personnes en ont profité, au lieu de 3.000 en 1912. 18 agents quininisateurs (au lieu de 16 en 1912) ont effectué des distributions de quinine sous la direction des médecins locaux ou du D* Etienne Sergent. 39 institutrices et instituteurs (au lieu de 18 en 1912) ont quininisé leurs élèves à l’école : 2, à Attatba (printemps et automne); 1, à Montebello; 3, à l'Alma; 2, à Réghaïa; 1, au Corso; 6, à Mondovi; 2, à Penthièvre; 7, à Jemmapes; 1, à Bayard; 1, à Lannoy; 2, à Foy; 1, à Robertville ; 1, à Gastonville; 2, à Aïn- Khiar; 4, à Mexna; 1, à Siliana; 2, au Vieux-Biskra; 1, à El-Hannser; 1, à Tour- ville. 2° Les petites mesures antilarvaires donnent des résultats 254 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR excellents, très nets, et sont applicables pratiquement dans de nombreuses localités. 3° La défense mécanique reste une mesure de luxe, applicable aux fonctionnaires de l Administration ou des Compagnies de che- mins de fer, et chez les particuliers soigneur de leur con- fort. Enfin la propagande antipaludique par les brochures, affiches et pancartes a été continuée comme les années précédentes. I. — CHAMPS DE DEMONSTRATION. Parmi les champs de démonstration, le plus ancien, celui de Montebello, choisi dans l'un des endroits les plus tristement célèbres de toute l'Afrique du Nord pour son insalubrité, donne un exemple magnifique de l'efficacité des mesures antipalu- diques bien surveillées. En ce petit village les nouveau-nés élaient tous autrefois infectés au berceau; or, depuis 1904, date du commencement de la campagne, on n’a pas contracté un seul cas de paludisme à Montebello. Tous les enfants au-dessous de neuf ans ignorent le paludisme : et tous les enfants au-dessus de neuf ans ont été infectés. Deux mesures sont appliquées : antilarvaires, quini- nisation. Résumé pes 9° ET 102 CAMPAGNES A MONTEBELLO, DÉPARTEMENT D’ALGER. Traités. — Européens : 74, 1 nouveau-né, en 1913; indigènes, 220. 0 cas de premiére invasion. Rechutes très rares et très légères. Témoins. — Localités voisines : 12 cas de première invasion (au moins); 3 décès en 1912, 34 décès (au moins) en 1913. A Tourville et à Sainte-Léonie, champs de démonstration du département d'Oran dirigés par le D* Bories d’Arzew, voici plusieurs années qu'aucun cas de paludisme ne s’est produit et que les nombreux enfants de ces populations prolifiques nais- sent et croissent sans fièvres. La bilieuse hémoglobinurique qui apparaissait annuellement autrefois jusqu'aux portes d’Arzew y est inconnue depuis le début de la campagne antipaludique ( (1906). Mesures appliquées : antilarvaires et quininisation. | | | | | | | | re, 4 to Qt Qt ÉPIDÉMIOLOGIE ET PROPHYLAXIE DU PALUDISME RESUME DES 7° ET 82 CAMPAGNES A TOURVILLE, DÉPARTEMENT D'ORAN. Traités. — Européens : 800 environ, 28 nouveau-nés en 1912, 31 nouveau-nés en 1913; indigènes : 100. 0 cas de première invasion. ~ RESUME DES 7° ET 8& CAMPAGNES A SAINTE-LEONIE, DÉPARTEMENT D'ORAN. Traités. — Européens : 250 environ, 13 nouveau-nés en 1913 ; indigènes : 100. 0 cas de première invasion. A Mondovi, champ de démonstration du département de Constantine depuis 1907, les difficultés sont très grandes : l'apport hivernal de moustiques ailés du lac Fetzara rend la tâche du D* Marbot et de ses dévoués collaborateurs partieuliè- rement ardue. Pourtant les bons résultats de leurs efforts com- mencent à se faire sentir. La, comme ailleurs, il faut procéder, pour établir son jugement, par comparaison avec des localités témoins, placées dans des conditions analogues, et ne profitant pas des mêmes mesures antipaludiques. La comparaison, pour- suivie tous les ans, est convainquante. Mesures appliquées : antilarvaires, quininisation, grillages aux habitations des fonctionnaires. RÉSUMÉ DES 6° ET 7° CAMPAGNES A MONDOVI, DÉPARTEMENT DE CONSTANTINE. Traités. — Européens : 900 environ, 100 nouveau-nés en 1912, 102 nouveau- nés en 1913; indigènes : 500. En 1912, 5 cas de première invasion. Chez les anciens infectés, 2 cas d’hé- maturie chez deux enfants non quininisés. En 1913, d'après le Dr Marbot, 4 cas de première invasion (un seul euro- péen). En août-septembre, d'après le Dr Parrot, pas un seul accès de paludisme. Témoins. — Villages de Barral et de Guébar : 400 Européens, 61 nouveau-nés en 1912. D'après le Dr Marbot, en 1912, 9 cas de première invasion. En 1943, 10 cas de première invasion. En août et septembre 1913, d'après le Dr Parrot, 38 cas de paludisme dans les villages voisins (1.133 Européens). IT. — CAMPAGNES ANTIPALUDIQUES. Le Service antipaludique collabore à de nombreuses campa- gnes antipaludiques demandées par les populations et que dirigent les médecins résidents. Le nombre de ces campagnes 256 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR na d’autres limites que celles des crédits disponibles. Il y a eu 105 kilogrammes de bichlorhydrate de quinine distribués par _ le Service antipaludique durant l’année 1913. DÉPARTEMENT D'ALGER. — Plaine de la Mitidja : Chéragas, Coléa, Attatba, région de l’ancien lit de l’oued-Djer, Marengo, Chiffa, Oued-el-Alleug, Bou- farik, Birtouta, Gué de Constantine, domaine de l'Harrach à Maison-Carrée. Écoles de l’Alma, la Rhégaia, du Corso. Port-Gueydon, Adélia, Brazza, Vialar. DÉPARTEMENT DE Constantine. — Gambetta, Penthiévre, Robertville, Ecole d’el Ilannser, Ecole de Jemmapes, Ecole de Bayard, Ecole de Lannoy, Ecole de Foy, Ecole de Siliana, Ecole du Vieux-Biskra, Oued Hammimime, Ecole de Mexna, Ecole de Ain Khiar, Taher, Khenchela, Foum-el-Gueiss. DÉPARTEMENT D'ORAN. — Arlal, Montagnac. Ill. — Enquères. En dehors de l’organisation de ces campagnes prophylacti- ques, le Service antipaludique a procédé, en 1912 et en 1915, à des enquêtes épidémiologiques demandées par l'État, des collec- tivités ou des particuliers dans des localités où de futurs cen- tres de colonisation ou bien des exploitations agricoles sont projetés. IV. — CHEMINS DE FER. Les huit réseaux de chemins de fer algériens continuent à être l’objet, de la part de leurs directions, d’une protection antipaludique attentive. Sur le réseau de l'État deux agents spéciaux chargés de cette tâche s’en acquittent avec zèle : M. La- brousse (Ouest) et M. Petit (Est). Sur les autres réseaux les mesures antipaludiques sont ordonnées : sur le Bône-Guelma par M. l'ingénieur en chef, sur le Bône-Mokta-Saint-Charles par M. le directeur de Cerner, sur le P.-L.-M. par M. Treuvelot, sur l’Ouest-Algérien par M. l'ingénieur des services de Blida- Boghari et par M. l'ingénieur Elliker (Oranie), sur le Bône- La-Calle et sur le chemin de fer sur routes du département d'Alger, par MM. les directeurs de ces réseaux. Nous avons l’agréable devoir de remercier de leur bienveil- lante collaboration nos confrères des trois départements algé- EPIDEMIOLOGIE ET PROPHYLAXIE DU PALUDISME 257 riens, le Gouvernement général, les autorités départementales et communales, les ingénieurs et agents des Ponts-et-Chaus- sées, les ingénieurs et agents des chemins de fer, les institu- trices et instituteurs. Nous remercions enfin cordialement de leur coliaboration M. Pellegrin, inspecteur du Service antipaludique, les quinini- satrices et quininisateurs, qui ont compris la beauté de leur mission et la remplissent avec une conscience et une bonté exemplaires. Grace à la bonne volonté de tous, chaque année marque un progrès de l'œuvre antipaludique en Algérie. La prophylaxie contre le paludisme est surtout une affaire d'éducation. Cette éducation est poursuivie inlassablement à l’école : excellents manuels à l’usage du maitre et à l'usage de l'élève, du D' Parrot, planches murales, affiches et tracts, propagande par le fait au moyen de la quininisation scolaire. L'éducation du public se poursuit dans les gares, modéles de défense mécanique, et dans les champs de démonstration disséminés dans l'Algérie. Les champs de démonstration sont des leçons de choses perma- nentes, qui enseignent au colon la manière d'éviter le palu- disme, et l'intérêt direct qu'il a à guérir les indigènes qui l'entourent. Pendant l'année 1913, 330 personnes ont subi le traitement antirabique à l’Institut Pasteur; aucune mort n’a été signalée. LES VACCINATIONS ANTIRABIQUES A L'INSTITUT PASTEUR EN 1913 par Jutes VIALA, Préparateur au service antirabique. La statistique s'établit donc ainsi : Le tableau ci-dessous indique les résultats généraux des vac- cinations, depuis l’origine : ANNÉES | 1886 1887 1888 1889 1890 1891 1892 1893 1894 1895 1896 1897 1898 1899 1900 1901 1902 1903 1904 4905 4906 4907 4908 4909 1910 1914 1912 1913 Personnes traitées. Morts. . Mortalité, p. 100. SE EE GE 0) PERSONNES TRAITÉES .671 .710 .622 .830 . 540 hp) , 190 .648 .381 520 .308 .b24 -465 .614 .420 fool 005 628 159 721 7172 786 524 467 404 344 395 330 MORTS r BS OO OD O7 AE Où Dee 9 CO ND DO C7 330 MORTALITE 0,94 p. 100 0,79 — ‘ 0:55. | 0,38 — | 0,32 — | 0,25 — | 0,22 — 0,36 — 0,50 — à 0,38 — 0,30 — | 0,39 — | 0,20 — (ON — | 0,28 — 0,38 — 048 — 0,32 — 0:39) = 0,44 — 0,13 — 0,38 — 0,19 0,21 — 0,00 — OL 0,00 0,00 — VACCINATIONS ANTIRABIQUES A L'INSTITUT PASTEUR EN 1913 259 Les personnes traitées à l'Institut Pasteur sont divisées en trois catégories, correspondant aux tableaux suivants : Tableau A. — La rage de l'animal mordeur a été expérimen- talement constatée par le développement de la maladie chez les animaux mordus par lui ou inoculés avec son bulbe. Tableau B. — La rage de l'animal mordeur a été constatée par examen vétérinaire. Tableau C.— L'animal mordeur est suspect de rage. dix Nous donnons ci-après la répartition, entre ces catégories, des personnes traitées en 1913. MORSURES MORSURES MORSURES à la tête aux mains aux membres “© © £ = = = = = a wo = = © © = À Tableau A. Tableau B. ableaus CE en Au point de vue de leur nationalité, les personnes traitées se répartissent de la facon suivante : Bran CES RTE oe oa, nl) Luxembourg 4 Gréce. . AR eran FIST 1 AT RE Re te a SU NOR 1 Russie . 1 Espagne 2 Maro CMP cere en he co, oe 6 Guinée Francaise = . à en 2 Répartition par départements des 313 Français traités. Aisne. Aveyron Ardennes. Cantal Calvados . Côte-d'Or . . Corrèze. Finistère . Ille-et-Vilaine. Indre-et-Loire. Isere . Loir-et-Chir ot. sak Manche. Maine-et-Luire. Mayenne . Meuse. . Nièvre . ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR Orne . ‘ Pas-de-Calais . Puy-de-Dôme . Pyrénées (Basses- ) }- Pyrénées (Hautes-). . Pyrénées-Orientales . Sarthe . Saône (Haute-). Savoie . Le Seine-Inférieure. Seine-et-Marne Seine-et-Oise . Seine. Somme. Vendée . Vienne . Vosges . Yonne Le Gérant : G. Masson. Paris — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 1 D ©. I to & D be OT Ww me © > Oo — JE I CO OC + bo 29° ANNEE JUIN 1915 N° 6 ANNALES DE LINSTITUT PASTEUR CONTRIBUTION A L’ETUDE DE L’ACTION DU RADIUM ET DE SON EMANATION SUR LA GERMINATION DES VEGETAUX SUPERIEURS par HENRI AGULHON et THERESE ROBERT. (Avec les planches IV et V.) (Institut Pasteur. Laboratoire de M. Gabriel Bertrand.) L'influence du radium et de son émanation sur la germina- tion et la croissance des végétaux supérieurs a déjà fait l'objet d’un certain nombre de travaux. Les premiers auteurs, opérant avec des doses de radium importantes, avaient conclu à une action empéchante sur le développement des plantes (1). C'était une constatation nor- male, étant donné ce que l’on savait sur l'action bactéricide du radium et les accidents que ses radiations provoquent chez les animaux supérieurs. En 1909, Hébert et Kling étudient l’action du radium sur l'assimilation chlorophyllienne; ils n observent aucun effet appréciable (2). Molisch, le premier, signale en 1912 la possibilité d'obtenir avec le radium et son émanation des effets d'activation sur la croissance des végétaux supérieurs (3). Il observe dans ses pre- (1) GieseL, 1899; Conapom, 1911. (2) Comptes rendus de l Acad. des Sciences, t. CIL, p. 230, 1909. (3) Sitzungsber. Acad. Wien., t. CXXI, 1912. 262 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR mières expériences qu'en exposant des bourgeons de marronnier ou de lilas en novembre ou décembre à l’action des rayons du radium pendant un ou deux jours, le départ de ces bourgeons se fait plus hâtivement. Dans un second travail (1), il étudie l'action de l’émanation; il opère en appareil clos et constate que, pour de fortes doses d’émanation, 1,8 à 3,5 millicuries dans 5 litres d'air, les végétaux sont défavorablement influencés, les feuilles deviennent transparentes et tombent; pour des doses faibles, 0,1 microcurie, il se produit au contraire une activation de la croissance. Stoklasa (2) étudie l’action du Nasturan (minerai renfermant 0,136 milligr. de radium par kilogramme) sur la culture des plantes en milieu liquide de Knopp; en présence de 0,5 gr. de ce minerai en {ubes de verre scellés, il observe une action acti- vante ; à partir de 1 gramme, l’action est défavorable. L'eau de Joachimsthal à 600 unités Mache par litre (soit 0,22 microcurie) (3) est aussi susceptible d'activer la germina- tion des plantes, alors qu’elle est défavorable au développement de certains micro-organismes; les témoins sont faits avec « une eau de même composition chimique ». Stoklasa et Zbodnicky (4) observent de nouveau des activa- lions nettes avec des eaux radio-actives naturelles et artificielles ; ils font des cultures dans des vases de terre arrosés de solu- tions radio-actives; ils soumettent dans des récipients de 85 litres des plantes à l’action de ’émanation (air activé de 10 à 30 unités Mache par litre, soit 0,004 à 0,011 microcurie). Dans tous les cas, ils signalent une notable activation. Petit et Ancelin (5) étudient l'influence de l’eau, activée par séjour dans une fontaine en ciment radifére; ils notent une action favorisante qui se manifeste au bout d’une dizaine de jours sur la germination. Nous ne parlons pas des expériences d'application agricole faites avec des engrais radio-actifs de composition chimique complexe et mal connue. (1) Sitzungsber. Acad. Wien., t. CXXI, 1912. (2) Comptes rendus de VAcad. des Sciences, t. CLV, p. 1096, 1912. —9 (3) 4 unité Mache = a curie. +) Comptes rendus de l’Acad. des Sciences, t. CLVII, p. 1082, 1943. 5) Comptes rendus de Acad, des Sciences, t. CLVI, p. 903, 1913. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE L'ACTION DU RADIUM 263 Les expériences de MM. Petit et Ancelin ne sont pas très démonstratives en ce sens que l’eau, pendant son séjour dans une fontaine en ciment radifére, peut dissoudre des traces de substances minérales; on sait combien les graines en germi- nation sont sensibles à la présence d’une faible quantité de certains sels. La même critique peut ètre faite aux expériences de Stoklasa avec l'eau de Joachimsthal : ses témoins étaient cultivés sur de l’eau de « même composition chimique »; mais est-on sûr de connaître la composition chimique exacte des eaux minérales, surtout en ce qui concerne les substances pré- sentes à l'état de traces. Les expériences avec l’eau radio-active artificielle et celles avec l'émanation publiées par Stoklasa et Zbodnicky sont à cet égard beaucoup plus intéressantes. Dans les expériences de Stoklasa avec le Nasturan en tubes de verre, ilest un fait qui frappe immédiatement l'esprit, c’est la faible teneur en radium des échantillons agissant de facon empêchante sur la culture des végétaux. On sait que le verre arrête les rayons « du radium, les plus actifs, et cependant avec { gramme de Nasturan, soit 136.10 gramme de radium, l'action est empéchante; dans ses expériences sur l’eau de Joa- chimsthal, Stoklasa observe une activation avec de l’eau à 600 unités Mache, soit 220.10 curie. On ne s'explique pas facilement que des quantités de produit actif du même ordre de grandeur puissent correspondre à des actions si différentes; il faudrait supposer que les rayons + ont une action favorisante, susceptible de compenser l’action défavorable des rayons y agis- sant seuls dans le cas du tube de Nasturan. On voit quelle incertitude règne encore sur le problème de l’action du radium sur les végétaux; nous pensons apporter une légère contribution à l'étude de ces phénomènes dans les expériences que nous allons exposer. Nos expériences ne portent que sur la germination des graines, c'est-à-dire sur la période où la plante vit aux dépens de ses réserves ; elles se classent en trois séries : 1° Expériences avec le radium en tube scellé dans lesquelles les plantes en germination sont soumises à l’action des radia- tions susceptibles de traverser le verre; 2° Expériences avec une solution très étendue de bromure 264 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR de radium dans laquelle germent directement les graines ; 3° Expériences avec un échantillon de radium en ampoule non scellée, permettant à l’émanation de diffuser dans une enceinte close dans laquelle sont disposées les cultures. Toutes ces expériences ont été effectuées suivant la technique indiquée antérieurement par l’un de nous (1). Les graines, après quarante-huit heures de germination sur une couche d'ouate humide, étaient choisies aussi semblables que possible et disposées sur des baguettes de verre maintenues à la surface du liquide de culture; celui-ci était, suivant les cas, de l'eau redistillée dans un appareil de verre sous pression réduite ou de l’eau de source, en général bouillie, pour éviter le dévelop- pement des végétaux inférieurs. 1° ExPÉRIENCES AVEC LE RADIUM EN TUBE SCELLÉ. Ces expériences ont été effectuées sur le Pois. Le tube de radium renfermait 7,05 milligr. de radium élément à l'état de bromure. Exp. I (eau redistillée). — Le tube de radium était placé dans un second tube de verre de 0,6 mm. d'épaisseur ; il plongeait dans l’eau à 4 centimètres de la surface; un petit électroscope à feuille d’or, qui nous a servi dans tous nos essais pour comparer grossièrement la radio-activité mise en jeu, placé à 8 centi- mètres au-dessus de l’eau, se déchargeait complètement en » minutes. Le tableau suivant donne les moyennes (sur 8 plantes) des longueurs des racines et des tiges des plantes germées, d'une part sur un témoin, d'autre part dans le récipient contenant le tube de radium, après 14 jours de culture. RACINE TIGE PLANTE TOTALE millimètres millimètres millimètres TéMOIM NE NAT 45 79 124 RGU Fe NATURE EE 46 84 130 Dans ces conditions, on n’observe aucune action de la radio- activité. 1) Me T. Rosert, Fixation du calcium par les plantes calcifuges. Bull. Soc. chim. biol., t. 1, p. 88, 1914. eet ce) CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE L'ACTION DU RADIUM 265 Exp. IT (eau de source). — Le tube de radium était directe- ment placé, sans nouvelle enveloppe de verre, dans le liquide de culture à 4 centimètres de la surface; l’électroscope se déchar- geait en 30 secondes. Moyenne de 8 plantes ; durée de la culture : 8 jours. RACINE TIGE PLANTE TOTALE millimètres millimètres millimètres = 67 41 108 ins Laine 61 38 99 ERC A ae ce hae aS test oe 4 32 76 Dans cette expérience où la radio-activité agissante était nettement plus forte, on observe une influence empéchante qui était visible dès le sixième jour. Les radicelles de la culture exposée à l’action du radium étaient petites et peu nombreuses et la racine principale renflée à l'extrémité. Exe. Il]. — Dans cette expérience, les conditions étaient les mêmes que dans l'expérience précédente; nous avions disposé le tube de radium de facon que la moitié des jeunes plantes soient placées immédiatement au-dessus du tube de radium, les autres en étant écartées de quelques centimètres. Durée de la culture : 7 jours. RACINE TIGE PLANTE TOTALE millimétres millimétres millimétres toe 80 35 445 REM GINS Ce seul ies ue 2 15 38 143 Plants au-dessus du tube de Ra. 40 35 75 Plants éloignés du tube de Ra. 69 27 96 Les racines des plantes, placées immédiatement au-dessus du tube de radium, étaient nettement plus courtes que les autres; elles s’arrétaient d’ailleurs exactement au niveau de ce tube. Les expériences Il et II] montrent nettement l'influence empêchante des radiations susceptibles de traverser le verre. Cette influence ne paraît pas cependant si considérable que les expériences de Stoklasa le feraient croire. Cet auteur note une action importante avec une dose de 1,36. 1077 gramme de 266 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR radium (1); pour nous 7,05 milligr. de radium sont loin d’ar- réter complètement la culture, et, lorsque les radiations tra- versent deux épaisseurs de verre, elles sont complètement inactives (Exp. I). 2° ExPÉRIENCES AVEC LE RADIUM EN SOLUTION. Grâce à Vobligeance de M. Debierne, nous avons eu une solution renfermant un millième de milligramme de radium à l'état de bromure. Nous en avons profité pour voir ce qui se passe lorsque les plantes germent directement dans les solu- tions de élément radio-actif. Les doses expérimentées sont de l'ordre de grandeur des quantités de radium présentes dans les échantillons de Nasturan employés par Stoklasa. Dans ces essais, la totalité des radiations du radium est susceptible d'entrer en action. La solution de radium était répartie aux doses indiquées dans un litre d'eau redistillée pour chaque essai. Voici les moyennes des longueurs obtenues sur 8 plantes après 12 jours de culture : DOSE DE Ra par litre RACINE TIGE PLANTE TOTALE en grammes millimètres millimètres millimètres (0) 112 47 159 10 —7 89 50 139 D lO) =F 2110 46 163 BAN =e 87 55 442 On n'observe dans cette expérience aucune action nette ni dans un sens favorable, ni dans un sens défavorable. En solu- tion, les trés faibles doses de radium sont inactives. (1) Il est vrai que le Nasturan contient d’autres substances radio-actives que le radium, en particulier Puranium; mais le rayonnement de l'uranium est considéré comme un rayonnement a, et il ne traverse pas l'épaisseur d'un tube de verre; les rayons y, de l’uranium qui proviennent de l'ura- nium X, ont une intensité très faible. Du reste, dans d’autres expériences, nous avons pu constater que la présence de 5 grammes de sulfate d'urane pur en tube scellé était sans action sur les racines des plantes qui pous- saient contre le tube. —s CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE L'ACTION DU RADIUM 267 3° EXPÉRIENCES AVEC LE RADIUM EN AMPOULE NON SCELLÉE, L’échantillon de radium dont nous disposions pour cette série d'expériences correspondait à 3 milligrammes de radium métal environ. [] se trouvait placé dans une petite boîte d’ébo- nite; une lame de mica maintenue par un couvercle sim- plement vissé fermait cette boîte, permettant ainsi la diffusion de l’émanation. Nos cultures sur eau de source bouillie étaient placées sous des cloches de verre de 45 litres de capa- cité, dont la base reposait sur une cuvette à photographie remplie de mercure ou d'huile de vaseline. L’ampoule de radium était placée dans un petit verre à pied, au centre de la cuvette, le couvercle vissé seulement à moitié. L’émanation s échappait donc librement dans la cloche, et c’est à son action et à celle de la radio-activité indirecte qu'elle produit sur toute substance à son contact qu'il faut attribuer les phénomènes que nous allons décrire ; en eflet, les résultats obtenus ont été les mêmes lorsque nous entourions notre ampoule d'une lame de plomb, suffisante pour empêcher le passage de la presque tota- lité des radiations directes. Nous n'avions pas à notre disposition les appareils néces- saires pour mesurer la quantité d’émanation qui se trouvait dans l'air de notre cloche. L'émanation en équilibre avec 3 milligrammes de radium est égale à 3 millicuries; dans notre cas, la quantité d’émanation que nous pouvions avoir était beaucoup plus faible; l'équilibre n’est en effet atteint qu'au bout d'un mois et nos expériences n'ont pas dépassé 15 jours; d'autre part, la dose d'émanation émise pour un temps donné, avant la période d'équilibre, est beaucoup moins élevée (40 fois) pour un sel solide que pour les solutions; et elle dépend de l'état plus ou moins aggloméré du composé radifère solide et, pour les sels solubles, de l'humidité de l’atmosphère (1). De plus, il faudrait tenir compte, dans les expériences où la fermeture du dispositif est assurée par de l'huile de vaseline, de la solubilité de l’émanation dans ce liquide. Malgré cette incer- titude sur la quantité d’émanation agissante, il nous paraît (4) Curie et DEBIERNE, Comples rendus de l'Acad. des Sciences, 1901. 268 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR intéressant de donner les résultats que nous avons obtenus. A côté de la cloche où on placait le radium, une cloche identique renfermait les témoins qui, de la sorte, se trouvaient placés dans Jes mémes conditions de culture. Les expériences ont été faites avec le pois, le soja, le lupin blanc, le blé. Partout les résultats observés ont été les mêmes, à savoir une activation considérable de la croissance; cette acti- vation porte principalement sur les parties aériennes de la plante, les seules en contact direct avec l'air émané; la racine principale, plongeant dans l’eau (1), bénéficie dans certains cas (pois, blé) d’une augmentation d’allongement; par contre, les radicelles paraissent parfois moins nombreuses et moins bien développées. Les tableaux suivants donnent les longueurs observées dans différentes expériences de germination. Pois (moyenne de 16 plantes). RACINE TIGE PLANTE TOTALE millimètres millimètres millimètres Exp. I. — 10 jours. ( Témoin . . 4136 23 159 Cloche sur mercure (2). ( Emanation. 142 42 184 Bp ties sonra Témoin .. 118 68 186 or JOUÉS: 7 fmanation. 161 99 260 (hemomen +, 2110 81 101 BRU Mousa emanation. =" 450 207 357 Les différences apparaissent dès le troisième jour. Pour l'expérience HI, nous avons déterminé le poids sec de plante formé et le poids des cotylédons après les deux jours d’expé- rience, d’une part dans les témoins, d'autre part dans les plantes exposées à l’émanation; nous en avons tiré le rapport Poids de plante Réserves non utilisées nature du phénomène d'activation. Plus la plante aura con- sommé ses réserves, plus ce rapport sera élevé, et nous en , qui nous donne une indication sur la (1) Les parties plongeant dans l’eau sont en contact avec un milieu beau- coup moins riche en émanation que lair de la cloche : le coefficient de solu- bilité de l'émanation étant, à 15 degrés, d'environ 0,3 dans l’eau. 2) Les vapeurs de mercure étant toxiques pour les plantes, nous avons renoncé à ce mode d'isolement; les autres expériences sont faites sur l'huile de vaseline. CONTRIBUTION A L'ÉTULE DE L'ACTION DU RADIUM 269 tirerons la conséquence que son activité vitale aura été plus : ie yee grande : dans le cas présent le rapport 7 est égal a 0,67 pour les témoins et 1,35 pour les plantes soumises à l’action de l'émanation. Il y a donc dans ce dernier cas, non seulement un allongement de la plante, mais une plus active consommation des réserves, une réelle activation des fonctions vitales, Sosa (moyenne de 6 plantes de 11 jours) : RACINE AXE HYPOCOTYLÉ PLANTE TOTALE millimètres millimètres millimètres PRETO UTS eee en Sets eye RTE ey oe 51 97 148 PMANRATONR IE MN UNE 41 158 199 Brie (moyenne de 10 plantes de 45 jours) : RACINE TIGE ET FEUILLE PLANTE TOTALE millimètres millimètres millimètres EMU OM AE SR RENE ste. LAO 210 350 Étnatalion te Metro 2MI80 250 430 Lupin 8Laxc (moyenne de 6 plantes de 45 jours) : RACINE AXE HYPOCOTYLÉ TIGE ET FEUILLE PLANTE TOTALE millimètres millimètres millimètres millimètres Témoin . . 169 56 0 295 Emanation. 159 94 10 323 > Pour l'expérience avec le Lupin, le rapport = est égal dans R le cas des témoins à 1,71 et dans le cas des plantes soumises à l’action de l’émanation à 2,02. Les conclusions admises pour le Pois sont donc contrôlées dans cette expérience. La planche IV montre l'aspect de quelques-uns des plants de lupin récoltés. On voit que le développement est bien plus avancé pour les plantes soumises à l’émanation, puisqu'elles ont déjà des feuilles, alors que les plantes témoins ont seulement écarté leurs cotylédons. Dans cet ensemble d’essais, l’action favorisante de lémana- tion sur la germination et le premier développement des plantes 270 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR s'affirme d'une façon saisissante. Une critique peut être faite : le milieu n'est pas stérile, et l’on sait l’action antiseptique du radium ; celui-ci n'agirait peut-être qu’en assurant la stérilité du liquide de culture. Cette critique ne semble pas avoir une grande valeur, car nous avons pu cultiver des micro-organismes en présence de l'émanation de 3 milligrammes de radium ; de plus, nos plantes n'ont jamais présenté dans les cultures témoins l'aspect de végétaux infectés, et les augmentations de longueur des tiges ne semblent pas a priori pouvoir s'expliquer de cette façon. Néanmoins, nous avons cru devoir faire une expérience en milieu stérile. Des graines de Pors ont été stérilisées par agitation avec du sable stérile, lavages au sublimé et à l’eau stérilisée. On les fait germer dans des boîtes de Petri stériles contenant du coton hydrophile humide. Après quarante-huit heures, on ensemence aseptiquement les plus belles dans des flacons (contenance 500 cent. cubes) d’eau de source stérilisée par chauffage de 25 minutes à 120 degrés; un petit tube fermé par de la gaze à sa partie inférieure permet de maintenir les graines au-dessus de la surface du liquide dans lequel plongent les racines (voir planche V). On place sous les cloches un certain nombre des flacons ainsi ensemencés. Après 6 jours, la différence est extrémement nette entre les flacons placés sous la cloche témoin et les flacons placés sous la cloche renfermant le radium. La récolte faite après 12 jours sur 6 plants donne les résultats suivants : LONGUEUR MOYENNE DES P ES Es RAPPORT = RACINES TIGES PLANTES TOTALES R millimétres millimètres millimètres Témoin st.) (2 164 426 290 1,3 Émanation . . 197 244 AAA 4,75 La planche V montre la photographie de quelques plants de cette expérience. L’allongement de la tige dans les plantes soumises à l’émanation est considérable par rapport aux témoins. La racine principale subit aussi un allongement, mais les radicelles sont moins développées. Le diamètre des tiges est légèrement diminué; les espaces entre les nœuds sont très allongés, car il est à remarquer que le nombre des nœuds est le CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE L'ACTION DU RADIUM 274 méme pour les deux séries de plantes. Voici, par exemple, les mensurations comparées des deux plus beaux plants de lexpé- rience (mensurations faites avec un pied à coulisse de précision donnant le centième de millimètre) : DIAMÈTRES TT nt TT TT TT TÉMOIN ÉMANATION millimètres millimètres AS lap DAS ENS CNRS RE AN Es à JS 2,85 Aten Cem tee oe kan seh dr 88 7; 2,8 2,4 AURA TEE UE try ET DE Ma: 3,1 2,8 AES: NOU site eae MEP ER ane 2,45 py) ESPACES ENTRE LES NOEUDS a. SS ee = TÉMOIN ÉMANATION millimètres millimètres De la base au 1er nœud. . . . . . . 45 » 32,25 DES a s22 nus gs sis. ko yee 9,3 48,1 Bureau go meen die es a; e- er Os 5352 97,1 Il semble done qu'il y ait un allongement des tissus. Les coupes microscopiques permettent de se rendre compte qu'il en est bien ainsi : le nombre des cellules sur une coupe transver- sale prise au même niveau de la tige est sensiblement le même ; mais ces cellules sont d'un diamètre un peu plus faible dans le cas des plantes exposées à l'émanation. Sur des coupes longitu- dinales, la forme des cellules apparaît comme très différente, les cellules des plantes exposées sont fortement développées dans le sens de la hauteur et légèrement rétrécies en largeur. Voici les chiffres obtenus en mesurant les largeurs et lon- gueurs d’un certain nombre de cellules du parenchyme cortical de la tige sur des photographies d’égal grossissement (G—35). NéBémoin #0 2 100 p à 142 vp Lersenpides celles ( Emanation. ... 1: -42.% à 185 2 Témoin .) 2-777 7420p a B30 fe Emanation, .... 310 uw à 420 p Longueur des cellules. ; Ces constatations tendraient à faire penser à une sorte de phénomène d'étiolement qui s ajouterait à une évidente accé- lération de la croissance et des phénomènes d'assimilation des réserves, 272 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Les tissus des animaux soumis à Vinfluence de |’émanation du radium présentent une certaine radio-activité (Curie, Bou- chard et Balthazard (1)}; de même d’ailleurs que tout objet exposé à l’émanation présente de la radio-activité induite. Les plantes germées sous la cloche renfermant le radium sont assez fortement radio-actives : une plante, placée sous le petit élec- troscope dont nous nous sommes déjà servis, le décharge com- plètement en 15 secondes, une heure après qu’elle a été trans- portée à l’air libre; mais le lendemain, cette radio-activité a presque complètement disparu, l'électroscope reste encore chargé après 10 minutes. Il s’agit donc bien de radio-activité induite. Placée sur une plaque photographique enveloppée de papier noir, la plante n’a pas donné d'impression visible après seize heures de pose. L'ensemble de cette troisième série d'expériences paraît bien apporter la preuve d’une indéniable activation de la croissance des végétaux par l’émanation du radium. Cependant un doute peut encore subsister : en milieu confiné, le radium et son éma- nation produisent de petites quantités d’ozone (Demarçay, P. Curie, Nasini et Lévy, Kernbaum, Lind). Or, Sigmund (2) a montré que de petites quantités d’ozone sont susceptibles d'activer la croissance de certaines plantes, en particulier du pois. Nous avons recherché l’ozone dans lair de nos cloches: malgré l'emploi de réactifs très sensibles (papier à l’iodure de potassium amidonné, papier à l’iodure de potassium et à la phtaléine), les résultats ont été négatits. La quantité d’ozone formée dans nos conditions expérimentales (3 milligrammes de radium à l’état de sel solide dans 45 litres d'air) est au-dessous de la limite de sensibilité de ces réactifs. L’odorat ne nous a, lui non plus, rien indiqué à l'ouverture des cloches. Sigmund, d'autre part, a toujours observé une action empéchante sur le développement des racines. Cette action n’est pas visible dans nos expériences. De plus, l'ozone, à toutes les doses, s’est ma- nifesté comme un antiseptique net; des cultures de levures, de Comptes rendus de l'Acad. des Sciences, t. CXXXVIII, p. 1385, 1904. Centr. f. Bakt. (2), t. XIV, p. 400, 1905. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE L'ACTION DU RADIUM 273 bacilie pyocyanique ne nous ont montré dans les conditions expérimentales employées pour les végétaux supérieurs, aucune différence appréciable entre les témoins et les cultures expo- sées à l'action de l'émanation. Il paraît donc bien que l'émana- tion entre seule en jeu dans nos expériences. L'activation de la croissance des végétaux supérieurs par des doses assez élevées d’émanation du radium peut faire concevoir que la radio-activité permanente du sol (1) n’est pas sans jouer un rôle dans la vie végétale. Il est maintenant nécessaire de préciser ces premiers résul- tats sur la germination par des mesures exactes des quantités d'émanation favorables, et de les étendre, si possible, à la crois- sance complète de la plante dans des milieux naturels ou de synthèse ; il faut essayer de délimiter la part des différentes radiations dans les phénomènes observés; l'étude histologique des tissus,que nous avons amorcée dans ce travail, permettra peut-être des constatations du plus haut intérêt pour la biologie végétale. (1) D’après les mesures de Strutt (Proceed. Roy. Soc., 1906), les-roches ignées renferment en moyenne 1,7.10—1? gramme de radium et les roches sédimen- taires 1,1.10—12? gramme de radium, par gramme de roche. QUAND ET COMMENT APPARAIT LA SENSIBILITE A LA TUBERCULINE par Er. BURNET. (Laboratoire de M. Metchnikoff.) Les plus beaux travaux de Pasteur enseignent que les expériences de laboratoire ne dispensent jamais d'étudier la maladie naturelle. Depuis que l’on sait quil se développe spontanément chez l’homme une résistance à la tuberculose, on s'est mis à observer de plus près comment la maladie naît et évolue. « Il est nécessaire, disions-nous dans les conclusions d’un travail précédent (1), de continuer l'étude de l’épidémio- logie de la tuberculose dans les conditions les plus variées, et de préciser le mécanisme de l'infection par le bacille de Koch qui amène à la réaction positive. » La réaclion de v. Pirquet permet de saisir le moment de la première infection, qui tour- nera du côté de la résistance ou du eôté de la maladie; il faut noter en même temps les rapports entre l'organisme et le milieu, et observer le sujet dans la suite de sa vie. Ce programme très simple est d’une exécution très difficile. Ce nest ni dans les erèches, ni dans les hôpitaux qu'on peut suivre des individus pendant des années. Ce serait aux méde- cins de famille, mieux encore aux médecins pères de famille, à faire sur les enfants de leur clientèle ou sur leurs propres enfants la réaction de v. Pirquet, de temps en temps et surtout aux moments importants du développement : sevrage, premiers pas, changements de séjour, entrée à l’école, maladies de l’en- fance, rougeole et coqueluche, etc. On réunirait ces observa- tions pour le plus grand profit de l'hygiène individuelle et sociale. Comme il n'y a rien de plus inoffensif que la réaction de v. Pirquet, même répétée cinquante fois, ces recherches ne connaissent guère d’autres obstacles que quelques préjugés, et (1) Ces Annales, ts XXV, novembre 1911. St mer se ne COMMENT APPARAIT LA SENSIBILITE A LA TUBERCULINE 275 un peu trop d'indifférence dans le public et même chez les médecins. Ayant pu faire une enquête sur un certain nombre d’enfants élevés dans leurs familles, dans un méme canton rural et a peu près dans les mêmes conditions de vie, je désire faire connaitre les résultats des trente premiers mois, sachant trop bien que ce n’est qu'un commencement, mais désireux d’en- gager d’autres médecins à faire de semblables observations. L'idée est si naturelle et si simple qu'elle ne pouvait manquer de venir à d'autres : ils ont rencontré, devant une enquête étendue, les mêmes difficultés, mais ils ont recueilli des faits extrêmement instructifs qui, joints aux nôtres, montrent bien l'intérêt de ces recherches et ce qu'on doit en attendre. Mon groupe d'enfants vit dans une contrée agricole, à une trentaine de kilomètres de la mer. Fort peu d'industrie. Le pays est beau, fertile, et mème les paysans pauvres n’y sont pas misérables. La végétation est abondante, les eaux sont bonnes. Les villages comprennent, comme presque partout, une ou deux rues de maisons contiguës, et un certain nombre de maisons isolées. Les enfants que l’on voit passer le matin se rendant à l’école frappent par leur air de propreté et de bon entretien. Tous ceux que j'ai observés ont été élevés au sein; le lait qu'ils ont bu dans la suite était du lait bouilli; les exceptions à cette règle sont extrèmement rares dans ce pays. On y connait fort peu de cas de tuberculose humaine. A signaler une seule famille où la maladie a fait plusieurs vic- times depuis quatre ans, et cela par suite d’incurie; en plus, deux jeunes filles atteintes, l’une est au début de la maladie, l'autre est phtisique : la première a perdu antérieurement deux frères par le fait de la tuberculose. Dans ces deux familles, pauvres, l'isolement n'était guère possible et l’on ne prenait pas de mesures préventives. Les logements sont salubres ; quelques- uns ont des pièces trop petites, mais toujours bien aérées et bien éclairées. Assez grande consommation d'alcool. Le département est un de ceux qui possèdent un inspecteur départemental d’hy- giène. On ne signale pas de tuberculose bovine. = : ENT ZOYO JUIUIOW UN R 910] SQaq opOUOA “noo np suolsues SJl9d ‘otuounsud-oyouo0ig ap JON C16] ‘120 Ua 2[829nq “youlj}o BJOoSNOY ‘08e osed ‘401 ‘aAn941d9 of EI op Juoutouw ne uoldnig us 2/098n0} “08 osed “AOA ‘XNPBOIAIDO SUOISUES SJ1jod op outre”) ‘09g osed “AoA “XNBIIALID SUOT[SUeS SJ19q ‘161 ‘1dos Ud aTjooNeA *6La o5ed “AOA “ogc osed “AOA “nod np SUuOISUES syqod *6La osed ‘AOA 0sz o5ed ‘AOA JON-IDS-H9194 vB SJULJU9 P wiNW0TeU -es un suep ‘JFG Uo anofos op SIOU F ‘ogz “d 21x27 9] “AOA “XNBOIAIIN SUOI[SUBS SOIF Z9SSY SaNOUuVNaY sell ell ‘ul ge F UW 9 F UW L 7 I Que ‘WG 8 F ‘Ul GR F ‘Ul OP'S # Bg ‘6 ç eg SU 1G Ce ‘ul GES ‘UI 1 <2) 1G SUL. eaG dv ON EC "Ul ge g UW Se Gg ‘Ul g “ec TUDE opal) Ce 29 “eg ‘Ulf B69 (05 OO 89 mW ee 9 ul 9 ‘E 9 Ul 6 eR 9 ‘ul 689 “ui FF 'e 9 ‘U FFE 9 HOTTE ES ALES wags) HULA CES 0 yer yrtinl 8 A ‘DONI —|"ur ges m6, 6 € —['u OTe € nm OTe S ne 10 0 UN pes EP — NUIT SEL — |l'U ce y — j'U G ‘te y —|'ul 9 ‘e # MMOG — NUE UEEr = "BUG — “eG = ‘ec — “ec RUB =e Ue Gs — ‘6 9 —l'U 3 ‘9 Fe PUL 8-9 UL Ope 9 yey[Dsyy £T6T 9140790 AI ‘90NI G ‘um 7B € (ULE (9) PES Ue eee THe Le WEY see ‘Ul 7 4 F Ul Z ‘8 F w 9 ‘Et ¥ U9 ‘e F ‘Ul 9 ‘e 7 ‘Ul G ‘Be ¥ ‘Ul 6 'e# ‘Ul OTR # “Ul FI‘ 7 Ul 9 ‘BG “Ul 12) G TG “BS Wl 7 ‘6 9 #60 6 016) 081.0 4.10 ywinsay | CIGT SEU By II] ‘O0NI ‘Ul § 8 “WU LE boss... ss UL. TTA NZ AA U € TW CA TS AZUR E ‘ee ‘Ul 7 'e £ ON 6 EX HET ‘WU ge ge ‘Ul OF 'e & ‘ul OF’e £ ‘Ul Fy ‘E F ‘Ul 8 Pl? 10.0 Gea pr eee st... sjareiaia.ttt ele es ‘Ul OTe Ç G16} ‘des ¢ I] ‘OONI ‘oyonbuey] op [18394 — ‘| Avatavy uw ye G 1016) ‘Ul € CS |0I6HF DRE PTT ‘ul 9 ‘e & |6061 ‘Ul L ‘6 G |6061 cesser Tenge ‘Ul 8 E G 16061 ‘Ul 6 € Z [6067 RER PTT “UW OPC G 16046) ‘Ul OPE & {6064 € 6 [6067 ‘be € 16061 CE PTS ‘tu % “€ 6 1606) ‘ul YY € |6067 ‘ua 9 € § 1806) ‘U 9 ‘6 € 18061 resstessetele0ct ‘ul 9 ‘6 € |IS06I ‘Ul OPE § J806T ‘Ul OR € 18061 cesser... lee] ‘6e % 18064 EE TT EE TT corses io Gr ‘ 6 “8 F |L061I TT EE TT ‘ul 9 “EB G 19061 DEEE Leger GIG) J ‘9ONI Teul 0] |HAB “Auel ‘09pP “AOU “AOU dos dos nor ‘nl ‘rl Tal 1eul 1euL S.eUul ‘Auel ‘Auel "AOU ‘120 190 ‘190 Tal ‘nl uin{ Te UL [HA “auel 190 qnoe ‘qn! um “O9p Te ul €} 6] 9 &¢ Ke EI 06 al Vi 6 a “Aey H ‘04 H ‘oY H ‘day Cima H ‘pin q ‘uny HA JISA H ‘5191 ï ‘ISA H ‘y H ‘419 I "Sao À H ‘IN Ua, IV A ‘TA q ‘udq H ‘It H P99 HI ‘un A ‘HS Hd 1Vd H “nO H ‘S424 X 04 JL SNVIN aq “due” A ‘die "HMO'] “Old ‘LL4" “bog ‘Udy | | LM + PI 0 Aie] eo oo ON OT CE ECS OUEST EE Ne Cr “AOU DT H ‘Sey ‘Dy _ SU SA ee RE ot 9 lan ton ‘DI he “TMS (VPs ol OR ieee al ATOS OS SET ES) SERRES ES ESC leet ‘das ¢ J coseg DI a ur gy Ce fet FREE oe ea nov rely ‘UD PI me HS Eee ne eee LR. Re noce Le “tH ‘PI Cu al Qi rep taal PS ee) MON OO ONE RÉICN POSE case vie wif EE LENS ARR Gr 7 ‘rl ez} ‘07 ‘PI = Z/T “TU VI DCE! che v4 <..8}6 erwle DOI NOEL ee 6 Faite leteuete ne Ss ee OTE ‘nul 98 Il ‘ued ‘PI Ps Su Pardi AO OUT AO senda PSC SOC OC LEE ES SEC ON CT GO CET Tr TIN 39% 1 oe ‘ules ne SPAOTA + SUL Op os SE OO Ile SORTE AO CSC EC) ES ON IIDC MFO FA unt SHH ‘aid “OITPOUOA 10 ojoesnod “OO lle ofelte: seer aires |e — “Ul G ane n|elalote ei onaceltaleve’ Non ious bive etre ere elles lettre eines ee CIGT TRU Chl CH "VION co] qienelerieresele bres] “UH ol alt ‘Ww € De | Ra LENS See Lo ES GDI EN ET ‘29P OT II *Or) A ‘ul f2|— we pl — 110670) CDI PEER leis A o ln “ZEN *£T6T ‘AOU g ‘91098 NO op 9JINS EI R JON selle a ys euwtelehwbe etl 57 of lies ne sente sus | ee ‘Ul € CA] acs Gite Ore COSCO Cul Nc TOO MDDOT ay ‘190: LT Il “JO “099e[d9(] dollA DR Eee TEEN LEE Ur Op OI Gc al e's aie clea PF, ian SES CR SOS rte nf ARR ON x ; . even lis PIRSA rear ‘uni CON Od np SUOSUCS S11j94 |—|'wW L 'e g | — JUN OT | °° SUT Gia |= UTC hokey i OCTO AUIN TS | ET cae Ce er Sen ern een cis Re Eu gt 1x “o90erd9( 00 | OI in OO IN IE | MADIDIO) Di0-A00 0 Di] leu ‘wl 47 — ele ‘ul & [SEE ‘AQT Oa ‘ue —|l'wù 9 ‘eZ els ele eee te ét ete ons lle ral ||eNenenerehele:oiole ave » lee « suele + are Oil Fig Die OOOO aia “auel g a Bele pov Oe Oo EN ES SEEN CE “UW EC — “Ur LY|— UG ye = "UL G |FI67 “99P Lila ‘OU et) OOM eee |e tee | — ‘WU ez|— “WI gy |— ‘Ww OT/— ‘UW 9 |TIGh “AOU O£|H ‘os *S9AN91d9 ,8 EI 19 oa} EI 21JU9 QUADS |— a |— ‘Ut LG|— “Wh yg|— UNE | ‘ul 6 |FI6E 900 ETITT ‘[Pd “ooer do |’: ae od "Ul gz/— Wee | — UT "We OFITT6T um LalH ‘eN “299erd9(] D lle ‘ul ç2|— ‘ui ex — “tl {7166 uni aopla “AGS ‘OANA 417 UT JUBAK Stouw a ouyonçponbon |—/ut 8 ‘e ¢ |--lur ¢ce z [lu oye F [lu % ce y |— ‘UW SY|TI6Y IC + |H ‘IPN “099e81do SN OT ON 0) ON SOS EI ON OO OO 0 0001 Fons ‘UL ETITIGT [MAG tel: ‘14 = [cone Wate | A AR POI DER CEE OS [ons Sa] loess pee Re : tee cesse seche rer seu cel “aL T |vr67 ‘auel ç 4 ‘do F (016) ‘99P GI ‘TON 6 P |016F “99P 6 JH ‘eu F I = & |[—|'w —|"ù Le g |—/\'uw ope g |—|l'uwu ‘goeidaq OO DD) iherry aye ee | OL ‘stout g e onbuoqjqdip vuisuy |—|‘ur g ce ¢ |—l'w ype z |—l|-u “poerd9(] 22 a 5 OR ERGO ic a-carbon Ca “oANOId? ef BE Op JUOWOUT Ne 9095N01 Vp JUBDSeTRAUOD ‘99HINOU sug eT Jed ules ne 94919 quejuo 99 |—|‘w oye g |—|-m pce e | — lu 9 ‘e 3 |— es |—|"Ur, 826 F |0161- Ides THEL 107 ra noo np SUOIS “UBS SIN9d ‘£IGY ‘190 Ue sjoosnoy |—|-w py'e € | ‘QOULJUS sap CL SULP 97P919P Seay, |—| we 07e 8 |—l-ur 7 ‘OOUBJUS orf VB] JUEAB SIOUW G oyonponbor) |—j|'ur y -e 7 |—|'u Fe 2 ¥ @ OT6F ‘AOU ZIT ‘og O16) “AOU JF! ‘ae YO MAI TS NN a = Ct UE RE = SO 20 20 © à, 25 = SE = Pe ec Pen kay ceed oar NO ets ae Tableau A. 10 0 0 38 0 0 | 20 0 0 | 68 0 0 tableau Bea. eel ail 0 0 | 44 0 0 1 0 0 7102 0 0 Tableau C.,. -::|1 13 0 0 | 91 0 0 | 99 0 0 4203 0 0 30 0 OTS 0 0 4170 0 0 1373 0 0 Au point de vue de leur nationalité, les personnes traitées se répartissent de la facon suivante : ÉDATIC epee EE ges eke rast afer OOF Luxembourg fey aa acct tye 3 Del Re PE, tee sre oe 1 Russie . l Maroc 2 308 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Répartition par départements des 364 Français traités. EE TN ES SSSR RC PE SE IE es ORNE AISNE: 3 yee, ie es LS Meurthe. 2." ten ATACNNES SRI PARA ANNE RE Meuse. A 5 AMEN) Aveyron . abs PRAY Morbihan: 3.2.9) 4:0 See oe Cantal ee bee MOV Nord: 5 140 MR SERRES Calvados mae 2 hat sce ee Oise... oh ae Corrèze. : 8 Orne; à; ac. URSS Côtes-du-Nord. 11 Pas-dé-Calais::*, 0.) 3 eee Doubs. 9 Pyrénées 5 M RS 5. 5a Eure . 3 Rhin (Haut-) 5 Ille-et-Vilaine. 15 Saône. Bhs ET AMENER RE? Indre-et-Loire. 8 Sarthe 20 22 0 Wz ee Bee Loire (Haute-). 2 Sèvres (Deux-). 4 Loire-Inférieure . 4 Seine-Inférieure. 4 Loiret. 2, Seine-et-Marne ...... 4 Loir-et-Cher 3} Seine-et-Oise . A 25 Lottie 4 Seine. LUE ANS CORE Maine-et-Loire. 5 Somme. 2 Manchego aa eee 20 Vienne. : 5 MONET MOTS pee 22705 Vienne (Haute- 4 Mayenne ein wiaieh aq ak eee o Yonne 3 PERSONNE PRISE DE RAGE, EN COURS DE TRAITEMENT. GoupE (MÉLANIE), douze ans, demeurant à Sion (Loire-Inférieure), mordue le 29 octobre, à la lèvre supérieure, 2 morsures péné- trantes ; au front, 2 morsures profondes; au pouce droit, 4 morsures : aucune de ces morsures n’a élé cautérisée. Goude (Mélanie) a été traitée à l'Institut Pasteur du 5 au 10 no- vembre; les premiers symptômes rabiques se sont manifestés chez elle le 9 novembre. Morte le 12 novembre à l'Institut Pasteur. Le même chien a mordu deux autres personnes, qui ont subi le traite- ment antirabique à l'Institut Pasteur, et qui se portent bien. Le chien avail été reconnu enragé par M. Halgand, vétérinaire, à Saint- Pére-en-Retz (Loire-Inférieure). Le Gérant : G. Masson. Paris — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 29° ANNEE JUILLET 1915 Noes ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR HYPOTHÈSE SUR LE PHLEBOTOME ( TRANSMETTEUR » ET LA TARENTE « RESERVOIR DE VIRUS » DU BOUTON D'ORIENT par EDM. SERGENT, ET. SERGENT, G. LEMAIRE et G. SENEVET. (Institut Pasteur d'Algérie.) Les notes qui suivent ont été écrites au mois de février 1914, nous ne comptions les publier qu'au terme des recherches expérimentales qu'elles comportent. Un court résumé ena paru dans le numéro du 8 juillet 1914 du Bulletin de la Société de pathologie exotique. Une note de MM. E. Chatton et G. Blanc, présentée le 25 juillet à la Société de Biologie, est venue corro- borer l'hypothèse et les faits que nous apportions. Nos recherches ayant été arrêtées par la guerre, nous publions telles quelles ces notes écrites il y a un an. Nous ayons incriminé en 1904 les Phlébotomes comme agents de linoculation à l'Homme du clou de Biskra (1). Quelques essais de transmission tentés en automne 1904 avec les Phlébotomes et un Culicide, Grabhamia subtilis, restèrent infructueux à Biskra et dans la plaine d'El-Outaya, à 30 kilo- mètres au nord de Biskra, mais les conditions de ces expé- (1) Comptes rendus de la Soc, de Biologie, t, LVII, p. 673, 8 avril 1905. 21 310 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR riences n'étaient pas très favorables. En raison des observa- tions épidémiologiques, nous avons persisté à dire que les Phiébotomes devaient être les inoculateurs de la Leishmania tropica (1). Nous trouvames dans le livre de Pressat sur le paludisme, paru en 1905 (2), un dessin représentant : « Un petit Diplére suceur de sang, nommé en arabe : Akhl-ou-eskout, qui passe à travers les mailles des plus fines moustiquaires. Il vole silencieusement, et ses piqûres provoquent une démangeaison persistante; il semble jouer un rôle important dans la propa- gation du Bouton d'Orient ». Pressat n'avait pas déterminé le nom de ce Diptère, mais son dessin, fort bien fait, nous permit d'y reconnaitre un Phle- bolomus, comme nous Vindiquames dans notre analyse du Bullelin de UIns- litut Pasteur (3). Le nom d’Akhl-ou-eskoul (en arabe nord-africain : Koul-ou- eskout) qui signifie « mange, et tais-toi », correspond exactement au nom de pappalaci donné par les Italiens au Phlébotome. En 1911, Wenyon, après une étude du bouton d'Orient à Bagdad et Alep, arrive à incriminer la Mouche commune, comme vecteur mécanique du virus (hypothèse déjà émise par Row) (4), et comme agent transmetteur plus habi- tuel un Moustique ou le Phlébotome (5). Patton affirme en 1912 qu'à Cambay (Indes) le seul insecte susceptible de convoyer la Leishmania tropica est la Punaise des lits, Cimex rolondatus (6). Wenyon a obtenu comme Patton le développement des Leishmania en Leptomonas dans l'intestin des Punaises gorgées de sang, et, de plus, dans l'intestin de Sfegomyia fasciala, mais il estime que cela ne prouve pas que ces Insectes soient les transmetteurs de la maladie dans la nature, et qu'il s'agit sans doute d'une simple culture de la Leishmania en milieu sanguin, opinion également émise par F. Mesnil. A Biskra la Stegomyia fasciata n'existe pas, la Punaise des lits ne semble pas pouvoir y ètre incriminée. Au contraire, l'abondance des Phlébotomes, au moment ot l’on contracte le clou de Biskra, c'est-à-dire en automne (7), la prédominance (1) Bull. Soc. Path. exot., t. 11, p. 390, 21 juillet 1909, « Nouvelle force donnée à l'hypothèse du Phlebotomus propagateur du clou de Biskra. » Détermina- tion des Insectes piqueurs el suceurs de sang. O. Doin, 1909, p. 37. « Les Phlé- bolomes sont très nombreux à Biskra, où j'ai émis l'hypothèse qu'ils propa- geaient peut-être le bouton de Biskra, mais on les trouve aussi dans tout le reste de l'Afrique du Nord » (Edm. Sergent). (3) A. Pressat, Le paludisme et les Moustiques, Masson, 1905, pl. IL, fig. 2. (2) Bulletin de l'Instilut Pasteur, t. II, p. 626, 1905. (4) R. Row, Journ. of. british med. Assoc., p. 867, 24 septembre 1910. Proceed. of the Bombay branch of the Brit. Med. Ass., 29 janvier 1911. (5) GC. M. Wenyvon, Parasitology, t. IV, p. 273, 24 octobre 1911, Journ. of. London Sch. of. trop. Med., t. 1, parties 2 et 3. (6) W. S. Parron, Se. mem. by Off. of the med. a san. Depart. of India, n° 50 new series), Calcutta, 1912. 7) Les Arabes appellent parfois le clou de Biskra habb-mta-el-tmer, le bouton des dattes. parce qu'il apparail en seplembre, au moment où murissent les dattes. HYPOTHESE SUR LE PHLEBOTOME ET LA TARENTE 311 des lésions sur les régions découvertes (qui est en faveur d’une inoculation par un Insecte ailé), la multiplicité fréquente des clous sur un méme individu (explicable par la facon de piquer des Phlébotomes), toutes ces circonstances s'accordent très bien avec l'hypothèse de ia transmission des boutons d'Orient par les Phlébotomes. Nous avions fait nous-mêmes une objection à notre hypo- thèse : le clou n’est endémique en Algérie qu'à Biskra, et les Phlébotomes sont très nombreux dans toute l'Afrique du Nord : grandes villes du Tell jusqu'aux hauts étages des maisons modernes, campagnes, Hauts-Plateaux, steppes et Sahara. Ils sont spécialement abondants dans les régions sahariennes; Foley et Leduc les ont étudiés à Beni-Oumif-de-Figuig où le bouton d'Orient n’est pas connu (1). Cette objection perd beaucoup de sa valeur à la suite de la constatation que l'aire de diffusion du bouton d'Orient est plus étendue en Afrique du Nord qu'on ne le croyait autrefois. Nous avons fait remarquer (2) que des boutons d’Urient ont été cliniquement signalés à Alger par Brault (3). Nous avons connu des exemples cliniques personnels à Mila (Hauts-Pla- teaux constantinois). Gros (4) a apporté la première preuve microscopique de l'existence de la Leishmania tropica dans une vallée de la côte méditerranéenne (1 cas vérifié au microscope, 3 cas cliniques). Cambillet (5) en mème temps en signale un autre cas, vérifié au microscope, près de la mer dans la région de Ténès. Cambillet en a constaté un autre depuis lors, dans les mêmes conditions (6). Enfin Foley, Vialatte et Adde ont montré récemment l'existence d'un foyer endémique de bouton d'Orient à Bou-Anane, dans le Sud-marocain (Haut-Guir), à 10 degrés à l’ouest de Biskra (7). La distribution géographique du bouton d'Orient n’est donc pas limitée à la région de Biskra en Algérie. J] existe deux centres endémiques : Biskra et Bou- Anane, et des cas sporadiques peuvent se présenter sur des (1) Bull. Soc. Path. exot., t. V, p. 511, 10 juillet 1912. 2) Bull. Soc. Path. exot., t. Il, p. 390, juillet 1909. 3) Soc. dermat. et syphil. de Paris, janvier 1899. Ann. dermatol., 1899. 4) Bull. Soc. Path. exot., t. II, p. 298, juin 1909. 5) Bull. Soc. Path. exot., t. Il, p. 388, juillet 1909. ») Communication inédite. ( ( ( ( (7) Bull. Soc. Path, exot., t. VII, p. 114, 11 février 1914. 312 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR points très lointains et très différents de ces localités saha- riennes. Pour expliquer que toutes les régions infestées de Phlébo- tomes ne sont pas également infectées de boutons d'Orient, deux hypothèses sont à considérer. 1° Existence, en certains lieux seulement, d'un réservoir de virus pour la Leishmania tropica. 2° Aptitude de certaines espèces seulement de Phlébotomes à jouer un rôle dans la propagation du bouton d'Orient. I. — RÉSERVOIR DE VIRUS. Il semble certain que l'Homme ne constitue pas le réservoir de virus de la Leishmania tropica. Malgré les intéressantes expériences de Gonder (1), il ne parait pas probable que le bouton d'Orient puisse être considéré comme une maladie géné- rale, et en tout cas les Leishmania tropica ne circulent pas en assez grande quantité dans le sang périphérique, pour fournir un virus suffisant aux Insectes piqueurs. D'autre part, il est rare qu'un clou dure plus d’un an, et puisse conserver ainsi le virus d’une année à l'autre. Enfin, si les Mouches peuvent lécher la sanie de boutons ulcérés, jamais les Insectes piqueurs et suceurs de sang ne le font; d'ailleurs, cette sanie ne contient toujours que de très rares Leishmania. Il semble inadmissible que l'Insecte propagateur s'infecte uniquement en piquant la zone périphérique des boutons croûteux où se trouvent en abondance les Leishmania. Il fallait done chercher le réservoir de virus parmi les ani- maux que les Phlébotomes peuvent piquer. Dès 1841-1843 (2) Rondani pensait que le Phlebolomus minutus se nourrit du sang de Vertébrés autres que l'Homme. Eaton, en 1904 (3), rapporte qu'il a trouvé du sang qui n'est pas du sang humain dans l'abdomen d'un Insecte appartenant aux Phlebotominæ (du genre Sycorax). D'après Lutz et Neiva les Phlébotomes au Brésil piquent le Cheval de préférence au cavalier dans les 1) Arch. jf. Sch.u. Trop.) t. XVII; p. 397, 4919. 2) Ann. Soc. entomol. de France, p. 263-267, 12 août 1843, « Si fæminæ abdomine sanguine expleto inveniuntur, ille. forsitan ex aliis vertebratis expectus fuit. » (p. 266). Voir aussi: B. Grassi, Ricerche sui flebotomi. Mem. d. Soc. ttal.id. Sc:, t. XIV, p- 22; 4907: 3) Lnlomologist monthly Magazine, 2° série, t. XV, Londres, 1904. HYPOTHESE SUR LE PHLEBOTOME ET LA TARENTE 313 lieux inhabités (1). Roubaud observe qu'en Afrique occidentale française, le Phlebotomus minutus var. africanus vit dans la familiarité d'un Lézard, Agama colonorum (2). Des nuées d'Insectes couvrent le corps du Lézard, le piquent, sans être chassés. Aux Indes, Howlett arrive à la conviction que « l'hôte naturel » de Phlebolomus minutus est le Gecko [Hemidactylus gleadovii et H. Ceclaei (Brokii et flaviviridis)] (3). Le Phlébotome préfère se nourrir sur le Gecko que sur l'Homme, et l'auteur n’a trouvé qu'une fois ces Insectes sur un Lézard agamide, et une autre fois sur un Crapaud. Au contraire, il les a vus très souvent se gorger de sang sur les Geckos. A peu près au même moment, Townsend écrit que dans l'Amérique du Sud les Phlébotomes sucent le sang de presque tous les animaux à sang chaud et même des Lézards. Ainsi ils sont à peu près indépendants de l'Homme (4). R. C. Schan- non (5) a vu, avec P. Bartsch, de nombreux Phlebotomus vexator sur un Ser- pent dans le Maryland et sur un autre Serpent en Virginie. Il conclut que cet Insecte vit normalement sur les Reptiles. Enfin, une nouvelle observa- tion de Roubaud (6) lui montre la présence constante de très nombreux Phlebotomus minutus var. africanus sur un Python (de l'espèce regius) gardé en captivité au Sénégal; il admet par suite que ce Phlébotome doit être considéré comme un parasite particulier des Reptiles. En conclusion, des observations qui remontent à Rondani (1840) nous indiquent que les Phlébotomes du groupe papa- tasii semblent piquer surtout l'Homme, tandis que ceux qui appartiennent au groupe minutus parasitent les Reptiles, et surtout les Tarentes. Howlett (7) publie une carte montrant que dans le monde entier les limites de la distribution des Phledo- tomus minutus sont contenues dans celles des Gechonide. On peut en dire autant de la carte du bouton d'Orient qui ne dépasse pas la carte de la répartition des Phlehotomus minutus et des Gechonide. Dans l'hypothèse de la propagation du bouton d'Orient par les Phlébotomes, il faut done penser aux Reptiles, et en particu- lier aux Tarentes, comme réservoir de virus. Or, à Biskra, notre principal lieu d’études, « la Tarente est très commune dans toutes les maisons » (8). Il restait à déterminer les espèces de Phlébotomes vivant à Biskra. (1) Mem. Inst. Osw. Cruz, t. IV, p. 86, f. I, 1912. (2) Bull. Soc. Path. exot., t. VI, p. 126, 12 février 1913. (3) Indian Journ. of. med. Research, t. I, p. 34, n° 4, juillet 1913. (4) Science, t. XXXVIII, p. 194-195, 8 août 1913. (5) Proceed. Entom. Soc. Washington, t. XV, p. 165-167, n° 4, décembre 1913. (6) Bull. Soc. Path. exot., t. VII, p. 83, 14 janvier 1914. (1) Loc. cit. (8) SErizrar, dans son excellente monographie E/udes sur l'Oasis de Biskra, p. 188, Challamel, 1875. 344 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR li. — Espèces DE PHLEBOTOMES DE BisKra. Nous avons signalé, en 1905, que Phlebotomus papatasii Scop. était répandu en Algérie de la mer au Sahara. A Beni-Ounif Sahara Oranais) où Foley l’a signalé en 1908, puis étudié en 1912 avec Ledue, il est très abondant dans les maisons du prin- temps à l'automne (1). A Biskra, nous avons trouvé 3 espèces de Phlébotomes : 1° Phlebotomus papatasti, Scop., fort nom- breux, ayant tous les caractères classiques de cet Insecte ; 2° Phlebotomus perniciosus, Newstead; 3° Un Phlébotome, plus petit, et un peu plus sombre, extrémement commun. Ce petit Phlébotome, très actif, fait sur les murs de petits vols rebon- dissants qui ressemblent aux sauts d'une Puce. Les caractères suivants, vérifiés sur 12 exemplaires, 5 males et 7 femelles, permettent de Vassimiler à Ph/ebotomus minutus Rondani var. africanus Newstead, 1912. Longueur du corps 1™"5. Couleur sombre. Les poils sont couchés sur l'abdomen. Antennes. — Le 3° article est un peu plus long que les suivants, mais fort peu. Palpes. — Les 2e, 3° et 4 articles sont à peu près de la même longueur. Le 3e est un peu plus long et plus fort que les autres. Le 5° est le plus long de tous. Ailes. — Etroites, à extrémité pointue. La 3e nervure longitudinale les par- tage en deux parties à peu près égales. La branche supérieure ou antérieure de la 1re fourche de la 2% nervure longitudinale est plus courte que la dis- tance entre les 2 fourches de la même nervure. Pattes postérieures. — 2™™25 de longueur au maximum: elles mesurent 3 [fois la longueur de l'abdomen. Le tarse a à peu près la longueur du tibia. Armature génitale du mdle. — Sur le crochet supérieur, 4 épines : 2 apicales. el 2 subapicales. III. — Exposé DE L'HYPOTHÈSE. Le fait que les parties découvertes du corps sont le siège le plus ordinaire des clous de Biskra indique que l’Insecte inocu- lateur doit ètre un Insecte ailé. La prédominance des Phlébotomes par rapport aux autres 1) Loc. cit. HYPOTHESE SUR LE PHLEBOTOME ET LA TARENTE 345 Insectes ailés, dans les localités où nous avons observé des clous de Biskra, nous a fait incriminer ces Psychodide. Le fait que certains Phlebotominæ, ceux du groupe manutus, se nourrissent de préférence sur des Reptiles, nous a fait penser que ceux-ci jouent peut-être le rôle de réservoir de virus. Un grand nombre des Phlebotominæ capturés à Biskra appar- tiennent précisément à l'espèce Phlebotomus minutus, var. africanus, qui semble se nourrir normalement sur les Reptiles. Les Tarentes (Tarentola mauritanica L. où une de ses variétés), très fréquentes à Biskra (1), sont les plus domesti- ques de tous les Reptiles dans ce pays. D'autre part, si elles sont très nombreuses en été, elles « sont très rares en hiver », dit F. Doumergue, dans son livre classique sur les Reptiles d'Algérie (2). Par conséquent les Phlébotomes doivent avoir, suivant les saisons, une facilité plus grande de piquer, soit la Tarente, soit l'Homme. Howlett (3) pense qu'aux Indes c'est pendant la saison froide que les Phlébotomes se nourrissent sur les Tarentes en hibernation. Pendant cette saison, ils n’attaquent pas l'Homme comme ils l’attaquent pendant la saison chaude et pluvieuse, et pourtant ils sont toujours gorgés de sang frais, On les voit entrer dans les crevasses des murs oti ils vont cher- cher & piquer les Tarentes endormies. Nous sayons qu’a Biskra le bouton d'Orient est, comme à Bagdad, à Alep, une maladie saisonnière; on le voit en automne et en hiver, de septembre à mars compris (4). Les données climatologiques indiquent qu'à Biskra la température diminue beaucoup en septembre, c'est aussi le mois où les pluies recommencent et un de ceux où elles sont le plus abondantes de l’année. Pluies en juin, 7"*7; en juillet, 2™™9 ; en août, 3""4 ; en septembre, 20"™4 (sur une tran- che annuelle de 170""65) (5). Il y a donc coincidence entre l'abaissement de la température, la chute des premières pluies, (1) SÉRizraT, loc. cil. (2) Hajoute: « elles hibernent sous les toits, dans les tuyaux de gouttière d'où les fortes pluies les chassent ». Essai sur la faune erpétologique de l'Oranie, avec des tableaux analytiques et des nolions pour la délerminalion de tous les Reptiles et Batraciens du Maroc, de l'Algérie et de la Tunisie, p. 81, Oran, 1901. (3) Loc. cit. (4) D'après le Calendrier nosologique de Biskra, de Seriziat, loc. cit., p. 108. (5) A. Tuévener, Essai de climatologie algérienne. Alger, 189%. 316 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR le début de l'hibernation des Tarentes et l'observation des cas cliniques. On ne peut pas en tirer des indications sur le moment où ceux-ci ont été contractés. On peut seulement rapprocher la prédominance saisonnière du clou de Biskra de la modification saisonnière des mœurs des Reptiles et des Insectes. Nous avons done cherché à vérifier l'hypothèse de la trans- mission du clou de Biskra par le Phlebotomus minutus afri- canus et celle du réservoir de virus constitué par T'arentola mauritanica. IV. — Erupr EXPÉRIMENTALE. 1° Nous avons voulu d’abord nous assurer que Phlebotomus minutus africanus pouvait piquer |’ Homme et piquer la Tarente, et chercher ensuite ses préférences en fait de nourriture san- guine. L'un de nous est attaqué et piqué le 22 octobre 1913, à 21 heures 45, par un Phlebotomus minutus africanus qui se gonfle en 3 ou 4 minutes; il ne se déta- che pas quand on agite la main piquée. La douleur est modérée et ne per- siste pas. Si l’on essaie de se faire piquer par des Phlebotomus minutus africanus mis en cage, on éprouve les plus grandes difficultés. Un lot de 40 Phlébotomes est mis à même de piquer sur le bras de l’un d’entre nous le 24 octobre, de 18 heures à 19 heures, puis de 21 heures à 22 heures, aucun ne pique. Au contraire, si l'on met les Ph/ehotomus minutus africanus dans la cage d'une Tarente, même très éveillée et très mobile, beaucoup la piquentau bout de quelques minutes, et se gorgent de sang. Il est exceptionnel que le lendemain matin on en trouve qui n'aient pas piqué. Un petit Lézard indéterminé a été piqué aussi très volontiers par les Phlebotomus minulus africanus. Dans une expérience nous avons offert sans succès notre bras à piquer à 3 Phlebotomus africanus. On les introduit ensuite dans un flacon avec une grosse Tarente très mobile. En quelques heures, tous trois s'étaient gorgés de sang. Nous avons donc pu confirmer que le Phlebotomus minutus HYPOTHESE SUR LE PHLEBOTOME ET LA TARENTE 317 africanus pique l'Homme et les Reptiles, en l'espèce la Tarente. Il semble préférer la Tarente à l'Homme (1). 2° Piqüres et inoculations de Phlébotomes. Les piqûres de Phlébotomes, l'inoculation sur la peau abrasée, ou sous la peau, du liquide obtenu par leur broyage, pratiquées sur nous-mêmes, sur 2 Singes (dont 1 mort trop tôt pour être utile), sur 6 Souris, sont restées sans résultats positifs. Ces essais, beaucoup trop restreints, seront repris. 3° Étude des Tarentes. Pour commencer, les recherches ont été purement morphologiques. Nous avons voulu faire l'inventaire des parasites des Tarentes de Biskra : 1° par l'examen microscopique direct de leur sang, de leur rate, de leur foie, de leur poumon, de leur moelle osseuse; 2° par l'ensemencement en milieu NNN de quelques gouttes de leur sang et de leur tissu hépatique. La recherche a porté sur 319 Tarentola mauritanica Li. (ou variétés), capturées à Biskra en octobre 1913. À. — L'examen direct du sang ou des organes (coloration au Giemsa) nous a montré les parasites suivants : 1° Très fré- quentes Hémogrégarines (44,82 p. 100 des Tarentes sont infec- tées) (2); 2° Trypanosomes (Tr. plactydactyli Catouillard, 1909) (2). Ce trypanosome est toujours rare chez l’'animai où on le trouve (5,01 p. 100 des Tarentes sont infectées); 3° Macrofi- (1) Nous n'avons jamais vu de Tarente essayer de se débarrasser des Phlé- botomes courant sur son corps ou en train de sucer son sang. Nous avons examiné l'estomac de plusieurs centaines de Tarentes à Biskra. Ces estomacs contenaient les restes d'Orthoptères, de Coléoptères, de Lépidoptéres: 3 fois des Araignées, 1 fois 15 Argas persicus, 2 fois des telsons de Scorpions, des peaux de Reptiles, des larves de Muscidés, 1 fois une petite pierre. Une fois une Tarente, de 12 centimètres, avait dans son estomac une autre Tarente de 5 centimétres de longueur. Jamais nous n’avons trouvé de Phlébotomes dans l'estomac. 2) Ces Hémogrégarines appartiennent pour la plupart à l'espèce Hæmo- gregarina plactydactyli Billet (Comptes rendus de la Soc. de Biologie, 9 juin 1900); mais un certain nombre (le quart environ) répondent 4 la description, par E. Chatton et G. Blane (Comptes rendus de la Soc. de Biologie, 25 juillet 1914), d'une grosse Hémogrégarine qui doit constituer sans doute une espèce nou- velle [Février 1915]. 3 Com tes rendus de la Soc. de Biolorie, t. LXVIT, p. 804, 1909. 318 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR laires rares (7,31 p. 100 des Tarentes sont infectées). On les rencontre surtout dans le poumon. On ne voit aucune forme rappelant les Leishmania (À). B. — L’ensemencement en NNN du sang et du suc hépatique de 229 Tarentes nous donne 61 fois des cultures (26,6 p. 100). 28 fois des Leplomonas, 26 fois des Trypanosomes, 7 fois une culture mixte de ces Leplomonas et de ces Trypanosomes. Toutes ces cultures repiquées en NNN, depuis novembre 1943, ont gardé leurs caractères respectifs typiques. Pour les étudier dans le détail, nous avons ensemencé trois séries de 10 tubes de NNN avec: a) un Leptomonas de Tarente ; 6) un Leptomonas de Leishinania isolé d'un clou de Biskra à la mème époque (octobre 1913); €) un Trypanosome de Tarente. Nous avons observé ces trois séries de tubes journellement jusqu'à la dis- parition complète d'éléments figurés reconnaissables dans leur milieu nutrilif. Cette disparition est survenue au bout de 2 mois (exactement 64 jours pour les dernières cultures). a) Examen des Leplomonas de Tarente obtenus en culture. Préparations à l'état frais. Les Leptomonas ont constamment la forme d'une flamme de bougie, le flagelle étant attaché à l'extrémité la moins pointue. Le corps est toujours rigide, jamais onduleux comme celui d'un Trypanosome. Cet aspect se retrouve même dans les formes de repos. Jamais de membrane ondulante. Dès le premier jour de culture, les mouvements sont très vifs, et les Lepto- monas de toule taille traversent vivement le champ du microscope. La divi+ sion longitudinale s'opère dès les premiers jours jusqu’au 18* environ. Des formes de repos rondes apparaissent dès la 2e semaine. Des formes granu- leuses se montrent au bout de 4 semaines. Au 40° jour, il y a encore un certain nombre de formes bien mobiles, mais la désintégration granuleuse s'accentue; le 64e jour il n'y a plus de formes mobiles. Préparalions colorées. — Le noyau est central, ovalaire. Le blépharoplaste, en batonnel, ou rond, est toujours séparé du noyau, et toujours situé entre celui-ci et l'extrémité antérieure du corps. Il est souvent un peu laléral. [n'est jamais accolé au noyau, même dans les formes de repos ovalaires ou rondes. Il ne s’en rapproche pas non plus au cours de la division longitudi- nale. Pas de membrane ondulante. Extrémilé postérieure du corps effilée. Longueur du corps : de 9 à 15 u. Le flagelle est plus court ou plus long que le corps. 1) Nous avons trouvé chez 3,44 p. 100 des Tarentes les formes décrites sous le nom de Pirhemocyton tarentole (Comptes rendus de la Soc. de Biologie, 17 octobre 1914), par E. Chatton et G. Blanc [Février 1915]. HYPOTHESE SUR LE PHLEBOTOME ET LA TARENTE 319 b) Examen de Leptomonas provenant de Leishmania tropica isolés a la méme époque (octobre 1913) d'un clou de Biskra. Evolution classique des Leptomonas de Leishmania. D'autre part, cette évo- lution sous toules ses formes ne diffère en rien de l'évolution contemporaine, dans des tubes du méme milieu, des Leplomonas de Tarentes : méme forme, même structure, mêmes dimensions, même mobilité, même période de divi- sion pendant les deux premières semaines, même apparition de formes rondes de repos dans la deuxième semaine, même début de dégénérescence granu- leuse au bout de trois semaines. Au 60e jour, il n’y a plus d'éléments recon- naissables. C.— M. Wenyon a décrit un Herpetomonas (nous dirions Leptomonas) chez le Phlebotumus à Alep (1). La longueur du corps de ce Leptomonas est de 15 à 25 pv, tandis que dans nos cultures le corps des Leptomonas, soit de Tarente, soit de clou de Biskra, a de 9 à 15 » de longueur. Les individus qui dépassent cette taille sont rares. c) Examen de Trypanosomes obtenus dans les cultures de sang de Tarentes. Préparations à l'élal frais. Les Trypanosomes ont des formes de repos piriformes, très eflilées d'un bout, pleinement arrondies de l’autre bout. Celui-ci, lors d'un repiquage, s'étire en flagelle, une forte membrane ondulante se dessine, les mouvements du flagelle deviennent de plus en plus vifs les jours qui suivent, mais n'arrivent pas à déplacer le corps du Trypanosome. Celui-ci ne devient mobile qu'après une semaine environ. Le corps du Trypanosome est toujours incurvé. Au bout d'une dizaine de jours apparaissent de très petits Trypa- nosomes, fort mobiles ainsi que des formes intermédiaires. Les petites formes seules sortent du champ, les moyennes et les grosses agitent seule- ment leur flagelle, et leur corps ondule sans se déplacer. Au bout de semaines, les formes de repos piriformes ou rondes apparaissent. Au bout de 5 semaines, les flagelles disparaissent peu à peu. Au 50° jour, il n’y a plus que les membranes ondulantes qui soient mobiles. Les Flagellés se désin- tègrent en masses granuleuses. Le 64 jour, il n’y a plus une forme intacte. Préparations colorées. — Les formes de repos ont teutes la structure de Crithidia, le blépharoplaste accolé au noyau. Les formes qui deviennent flagellées continuent à avoir la structure de Crithidia, puis le blépharoplaste émigre vers l'extrémité postérieure du corps et l'aspect du Trypanosome vrai se dessine. La longueur du corps des Trypanosomes varie beaucoup, entre 6 et 25 p. En résumé, il y a ressemblance parfaite entre les Lepto- monas de Tarente et les Leptomonas de clou de Biskra. Aucun de ces Leptomonas ne prend à aucun moment de sa vie en cul- ture lun des aspects du Trypanosome de Tarente, et d'autre (1) Journ. of the Lond. Sch. of Trop. med., t, I, p. 2. 320 ANNALES DE L°INSTITUT PASTEUR part ce Trypanosome ne passe à aucun moment de son évolu- tion cullurale par une forme ressemblant à un Leptomonas. Donc les Leptomonas de Tarente, semblables aux Leptomonas du clou de Biskra, n'ont rien à faire avec les Trypanosomes de culture des Tarentes. Ces Trypanosomes sont sans doute la forme de culture de Trypanosoma platydactyli Catouillard. Les Leptomonas de Tarente correspondent donc à autre chose. Représentent-ils la forme de culture du virus Leishmania tro- pica chez la Tarente ? Les recherches expérimentales répondront à cette question. Elles sont en cours d'exécution : Inoculation à trois hommes, par scarification, de cultures de Leptomonas de Tarente. Inoculation à des Singes, par scarifications de la peau, ou sous la peau, des mêmes cultures. Inoculation à des souris dans les veines de la queue, ou dans les sinus caverneux, suivant le procédé de Pettit (1), de facon à lâcher de reproduire les lésions obtenues par Gonder par inoculation intraveineuse ou intrapéritonéale à la Souris de culture de Leptomonas de Leishmania (2). Des Souris témoins ont été inoculées en même temps avec des cultures de notre Leptomonas de clou de Biskra (3). 4° Témoins. Des recherches de comparaison ont été commencées égale- mentsur des Tarentes et des Phlébotomes provenant de régions où le bouton d'Orient n'est pas endémique. On ne peut pas affirmer qu'il en est absent, puisque des cas sporadiques ont (1) Comptes rendus de la Soc. de Biologie, t. LXXIV, p. 11, 4 janvier 1913. (2) Arch. f. Sch. u Trop., t. XVII, p. 397, 1913. (3) Souris sacrifiées 4 mois plus tard : pas de lésions extérieures. Quel- ques-unes ont la rate grosse. — Sur 27 Souris inoculées avec des Leptomonas de Tarentes, 2 montrent à l'examen direct du foie ou de la rate des formes pouvant ressembler à des Leishmania. Les ensemencements de la rate et du foie ne donnent pas de culture. — Sur 6 Souris /émoins inoculées dans les veines ou dans le péritoine avec des Leptomonas de clou de Biskra, 5 mon- trent une infection généralisée à l'autopsie pratiquée 4 mois après l’inocula- tion : 3 fois la rate et le foie contenaient des parasites, 2 fois la rate seule Juillet 1914]. HYPOTHESE SUR LE PHLEBOTOME ET LA TARENTE 321 été trouvés en pays réputés indemnes quand on s’est mis à les chercher. A Beni-Ounif-de-Figuig, le bouton d'Orient est inconnu. Les Phlébotomes y sont extrêmement abondants (1). Sur 203 exem- plaires étudiés, 202 appartiennent à l'espèce Phlebotomus papa- lasii, on n'y à capturé qu'un seul Phlebotomus minutus afri- canus (mâle). Sur 6 Tarentes examinées en hiver 1913, 2 ont donné, après ensemencement de leur sang sur NNN, des Lep- fomonas analogues à ceux des Tarentes de Biskra. Un programme de recherches comparatives est établi pour Beni-Ounif, localité indemne de Leishmania tropica, et pour Bou-Anane, centre endémique de bouton d'Orient, dans un pays analogue à la région de Figuig, sous la mème latitude et à une altitude équivalente. RESUME. Nous avons réuni un certain nombre de faits qui plaident en faveur du rôle de Phlebotumus minutus africanus dans la trans- mission du clou de Biskra, et n’en relevons aucun qui le con- tredise. Nous avons émis l'hypothèse qu’étant données les mœurs de ce Phlébotome, on pouvait supposer que les Vertébrés dont il est le parasite normal, c’est-à-dire les Reptiles, et, plus particulièrement, les Tarentes ou Geckos, Tarentola maurita- nica L., constituent le réservoir de virus du clou de Biskra. C'est dans cette voie que nous continuerons l'étude expérimen- tale commencée. A l'heure actuelle, celle-ci nous a permis de constater que l’ensemencement des organes de Tarentes de Biskra donnait des cultures pures d’un Leplomonas semblable aux Leptomonas des cultures du bouton d'Orient. L'intérêt du fait vient de ce que les cultures de Leptomonas obtenues jusqu'iei d'organes de Vertébrés provenaient toujours de Lezshmania parasitant ces Vertébrés. Février 1914. P.-S. — Peu après la communication de notre note prélimi- naire, qui résumait le 8 juillet 1914 les pages ci-dessus (2), 1) H. Fozey et H. Lepuc, loc. cit. 2) Bull. Soc. path. exot., t. VII, p. 577-519. 322 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR E. Chatlon et G. Blanc ont signalé le 25 juillet (1) des para- sites qu'ils ont trouvés chez un Gecko (Tarentola mauritanica) sur 8 examinés à Metlaoui (Tunisie). Ce sont « des corps leishmaniformes qui n'existent que dans les hématoblastes ». Cette constatation vient appuyer notre hypothèse et l’on pour- rait penser que les cultures de Leptomonas que nous avons obtenues proviennent de ces corps leishmaniformes. Les mêmes auteurs ont décrit encore un autre nouveau para- site chez Tarentola mauritanica (2). Ce parasite (Pirhemocyton tarentolæ n. g., n. sp.), qui présente des analogies avec les Piroplasmes, a été trouvé chez un Gecko sur 3 de Matmata, et chez 2 sur 40 de Metlaoui. Nous n'avons pas vu les corps leishmaniformes chez les 319 Tarentola de Biskra dont nous avons examiné les princi- paux organes, Nous avons trouvé onze fois chez elles des formes répondant à la description de Pirhemocyton tarentole. Les cultures de Leptomonas obtenues du sang des Tarentes, l'existence des corps leishmaniformes de Chatton et Blane dans les hématoblastes de Tarentes seraient en faveur de notre hypo- thèse : Phlébotome : propagateur et Tarente : réservoir de virus du clou de Biskra. Ces recherches arrétées par la guerre paraissent mériter d’étre poursuivies quand les événements le permettront. Février 1915. 1) Comptes rendus de la Soc. de Biologie, p. 430-433. (2) Comptes rendus de la Soc. de Biologie, p. 496-498, 17 octobre 1914. RECHERCHES BIOLOGIQUES SUR L'ÉOSINOPHILE DEUXIEME PARTIE PROPRIETES PHAGOCYTAIRES ET ABSORPTION DE PRODUITS VERMINEUX par M. WEINBERG et P. SEGUIN. (Avec les planches VI et VII.) Dans notre précédent mémoire (1), nous avons essayé d'éta- blir les lois de la chimiotaxie de l’éosinophile. Ces premières recherches nous ont permis d'élaborer une technique pour provoquer à coup sûr une éosinophilie locale considérable dans un point quelconque de l'organisme. C’est grâce à ce procédé que nous avons été à même d'étudier en détail les propriétés phagocytaires du leucocyte qui nous intéresse. Les propriétés phagocytaires de l’éosinophile ont été notées pour la première fois en 1895 par Mesnil (2), qui a observé que les éosinophiles des vertébrés inférieurs (lézard, grenouille) sont capables d’englober la bactéridie charbonneuse et le B. de la septicémie des souris. Les bacilles charbonneux subissent mème, dans les éosinophiles du lézard, un début de digestion et se transforment en batonnets acidophiles. Nattan-Larrier et Parvu (3) (1909) ont étudié in vitro les propriélés phagocytaires des éosinophiles vis-a-vis du bacille typhique et du staphylocoque, en utilisant le sang de trois malades atleints de filariose, et qui renfermait un fort pourcen- tage d’éosinophiles (31, 46, 43 et 46,60 p. 100). Dans leurs expé- (1) Ces Annales, t. XXVIII, p. 470, mai 1914. (2) Mesxiz, Sur le mode de résistance des vertébrés inférieurs, ete... Annales de l'Institut Pasteur, t. IX, n° 5. Mai 1895, p. 301-347, pl. V. (3) NaTran-LarRiEr et Parvo, Recherches sur le pouvoir phagocytaire des polynucléaires éosinophiles. Comptes rendus de la Soc. de Biologie, 3 avril 1909, p. 574. 324 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR riences, les éosinophiles englobaient les microbes, mais moins énergiquement que les neutrophiles. Achard, Ramond et Foix (1), en 1909, ont constaté que, dans le sang normal, les éosinophiles phagocytent très faiblement les spores de Monilia albicans. Les myélocytes éosinophiles du sang, chez un malade atteint de leucémie myéloïde, se sont montrés dépourvus de propriétés phagocytaires. Par contre, dans un épanchement pleural riche en éosinophiles (41 p. 100 d'éosinophiles contre 7 p. 100 de neutrophiles) l'activité phago- cylaire des éosinophiles était supérieure à celle des neutro- philes. Il faut encore citer Pascheff (2) (1911) qui a signalé. dans des frottis de pus de conjonctivite, quelques staphylocoques englobés par les éosinophiles. Cet auteur a fait cette consta- lation intéressante que l’on rencontrait des microbes phago- cylés aussi bien par les éosinophiles mononucléaires que par ceux à noyau segmenté. Ces fails isolés ne donnaient cependant pas une notion suffi- sament précise sur l’importance des propriétés phagocytaires de l'éosinophile, ni sur les conditions exactes dans lesquelles elles se manifestent. Nous avons essayé de combler cette lacune. |. — PROPRIETES PHAGOCYTAIRES DE L’EOSINOPHILE « IN VITRO » Nous avons d’abord étudié in vitro les propriétés phagocy- taires des éosinophiles du cobaye vis-à-vis de : 1° Substances inertes, 2° Microbes divers, 3° Prolozoaires, 4° Globules rouges. Voici exactement la technique suivie : Pour pratiquer nos expériences, nous avons choisi des cobayes neufs à éosinophilie péritonéale spontanée aussi impor- lante que possible. Nous savons que, dans les exsudats de tels 1, Acuarp, Ramonp et Forx, Sur l’activité des cellules éosinophiles. Comptes rendus de la Soc. de Biologie, 24 avril 1909, p.011: Pascnerr, Recherches sur l'éosinophilie locale oculaire. Folia. Hæmat., 1911, t, XI, p. 430, pl. X. RECHERCHES BIOLOGIQUES SUR L’EOSINOPHILE 325 animaux, on rencontre fréquemment une grande abondance d’éosinophiles (de 20 à 60 p. 100) à noyau, en général, bilobé ou segmenté, quelquefois mononucléés ou à noyau incisé, associés à des cellules lymphoides (monocytes, lymphoidocytes) à l'exclusion le plus souvent de toute autre forme de leucocytes granuleux. On prélève quelques gouttes d’exsudat, en ponctionnant aseptiquement le péritoine d'un cobaye avec une pipette effilée. On mélange dans un verre stérile 3 gouttes d’exsudat et une goulte d'une émulsion préparée en diluant dans de l’eau phy- siologique stérilisée les corps phagocytables (poussières, microbes, cellules végétales et animales, etc...); on reprend le mélange dans une pipette capillaire que l’on ferme à la veil- leuse d’un bec de Bunsen, et que l’on porte dans une étuve réglée à 38-39 degrés. Après une heure, on fait des frottis que l'on colore par la méthode de Pappenheim, avec les modifications que nous avons déjà indiquées dans notre précédent mémoire. Les éosinophiles englobent les poussières inertes (noir animal finement pulvérisé). Ces poussières sont tantôt com- prises entre les granulations (pl. VI, fig. 1), tantôt renfermées dans des vacuoles (pl. VI, fig. 2). La planche VI montre trés nettement que tous les microbes - que nous avons ulilisés dans nos expériences : staphylocoque (fig. 3, 4 et 5), sarcine jaune (fig. 6), streptocoque (fig. 7), gonocoque (fig. 8 et 9), méningocoque (fig. 10 et 11), B. subrilis, B. anthracis (fig. 12), B. coli, B. typhique (fig. 13 et 14), B. diphtérique (fig. 15 et 16), B. tuberculeux (fig. 17, 18, 19, 20), Spirochæta gallinarum (fig. 25 et 26) sont phagocytés par les éosinophiles, aussi bien mononucléaires que polynucléaires ; c'est-à-dire aussi bien par les éosinophiles de l’exsudat périto- néal venus du sang que par les éosinophiles mononucléaires d’origine locale. Les meilleurs résultats ont été obtenus avec le staphylo- coque, la sarcine, le gonocoque, le B. typhique, le B. coli et le B. tuberculeux (1). (1) Pour colorer les cellules contenant le B. tuberculeux nous avons uti- lisé la technique suivante : Les frottis de cellules, rapidement desséchés par agitation, sont fixés par l'alcool méthylique (10 minutes). On colore les microbes par le Ziehl à chaud; on fait agir le chlorhydrate d’aniline, on déco- lore par l'alcool absolu, on lave à l'eau distillée. Les granulations des 29 326 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Les microbes englobés sont tantôt disséminés dans le proto- plasme, tantôt renfermés dans des vacuoles digestives (pl. VI, fig. 13, 14, 16). Nous avons pu suivre pour certaines espèces microbiennes les différentes étapes de la digestion intracellulaire (B. sebtilis, B. col). C'est ainsi que le B. subtilis englobé perd très rapi- dement la propriété de prendre le Gram. Il devient granuleux ; les grains chromatiques se localisent surtout aux deux extré- mités du bâtonnet. Puis, le protoplasme du microbe, qu'il s'agisse du B. subtilis ou du B. coli, prend une teinte bleu clair, passe au bleu très pâle et finalement devient acidophile. A partir de ce stade, les microbes sont difficilement observables et disparaissent au milieu des granulations éosinophiles. Les éosinophiles phagocytent très facilement les spores du muguet (Monilia albicans) (pl. VI, fig. 21 et 22) (1) et avec plus d'intensité encore celles de Sporotrichum Beurmanni (pl. VI, fig. 23 et 2%). Ils en sont quelquefois bourrés à en éclater. Les noyaux des phagocytes sont comprimés et déformés par les spores, et les granulations sont tassées dans les espaces protoplas- miques réduits, laissés libres par les cellules englobées. Les éosinophiles phagocytent également les protozoaires. En diluant dans de l'eau physiologique une parcelle de matières : fécales provenant du cæcum d’un cobaye, et dans lesquelles pullulait un petit flagellé piriforme à deux cils antérieurs (Hete- romila caviæ) et en ajoutant une goutte de cette dilution à quelques gouttes d’exsudat péritonéal riche en éosinophiles, nous avons pu observer quelques figures de phagocytose. Nous en avons figuré trois exemples (pl. VI, fig. 27, 28 et 29). On voit que le protozoaire est non seulement englobé, mais encore par- leucocytes sont colorées par le May-Griinwald dilué de moitié dans l’eau dis- tillée (1 minute) et les noyaux prudemment renforcés dans un bain de Giemsa (15 gouttes pour 10 cent. cubes d’eau distillée) pendant 1 minute. Les granulations des éosinophiles viennent en rose très pale et laissent très facilement apercevoir entre elles les bacilles acido-résistants. (1) Scuaerer-[rerer (Ueber Phagocytose bei akuten Infektions-Krankheiten. Deutsch. Arch. f. klin. Med., 1913, p. 24) a étudié in vilro dans trois cas le pouvoir phagocytaire comparé des différentes variétés leucocytaires du sang vis-à-vis des spores de Monilia albicans. Dans l'un des cas, les éosinophiles n'ont pas phagocyté. Dans un second cas, une seule spore, sur 100 englo- bées, a été phagocytée par un éosinophile. Dans le troisième cas, deux spores sur 100 ont élé trouvées dans l'intérieur d’éosinophiles. RECHERCHES BIOLOGIQUES SUR L'ÉOSINOPHILE 327 tiellement digéré par l'éosinophile. Son protoplasma est devenu globuleux el son noyau se colore difficilement. Nous avons répété ces expériences avec des trypanosomes (Trypanosoma Evansi) du surra pris sur souris infestée (pl. VI, fig. 31 et 32). Les trypanosomes très altérés se reconnaissent encore à leur noyau au voisinage duquel on aperçoit le blépha- roblaste. Il faut ajouter qu'il est nécessaire pour réussir cette expé- rience d’avoir un exsudat très riche en éosinophiles et de cher- cher avec soin les figures de phagocytose qui sont toujours rares. Les éosinophiles englobent également les globules rouges (cobaye, souris, mouton, poule). Les figures de phagocytose, bien que peu communes, ne laissent aucun doute à cet égard. Les globules rouges englobés par les éosinophiles changent de teinte. Leur protoplasma, de rouge brique (pl. VE fig. 33), devient jaune pâle (fig. 34) et petit à petit disparait dans une grande vacuole claire (fig. 30). Les érythrocytes de poule sont égale- ment digérés par les éosinophiles ; leur noyau perd rapidement ses propriétés timctorrales. I] passe du bleu foncé au jaune vert (fig. 35) et finit par disparaitre. Nous n'avons jamais observé, au cours de cette digestion, une - désagrégation des globules rouges en granulations éosinophiles. Il. — PROPRIETES PHAGOCYTAIRES DE L’EOSINOPHILE « IN VIVO » Les propriétés phagocytaires de l’éosinophile se manifestent non seulement in vitro, mais aussi im vivo; et cela aussi bien dans les cavités séreuses que dans le tissu conjonctif sous- cutané et le sang circulant. A. — PHAGOCYTOSE DANS LA CAVITE PERITONEALE DU COBAYE. Pour observer la phagocytose dans la cavité péritonéale, on choisit des cobayes neufs dont l’exsudat est riche en éosino- philes. On peut également provoquer artificiellement une éosi- nophilie péritonéale considérable chez des animaux préparés par un produit parasitaire quelconque ou par des injections répétées de sérum, en suivant la technique indiquée dans notre premier mémoire. 328 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Ayant choisi un cobaye convenable pour l’expérience, on lui injecte dans la cavité péritonéale 1 à 2 cent. cubes d’une émul- sion en eau physiologique d'une culture sur gélose de B. sub- tilis ou de B. colt. L'étude des frottis d’exsudat montre que, dans ces condi- tions, les éosinophiles ont englobé déjà au bout de 15 minutes un grand nombre de microbes. A ce moment, on ne rencontre qu'un pourcentage relativement peu élevé de polynucléaires pseudo-éosinophiles, atlirés par l'injection de culture micro- bienne : ces cellules ne manifestent alors que de faibles pro- priétés phagocytaires. Les polynucléaires pseudo-éosinophiles qui viennent d’émigrer dans le liquide péritonéal se trouvent d'abord mal à l’aise dans ce nouveau milieu; il leur faut un certain temps pour s’y adapter et recouvrer leur pouvoir pha- gocylaire normal. La figure 1 de la planche VIT est un exemple de phagocytose in vivo de B. subtilis par les éosinophiles dans la cavité péri- tonéale du cobaye. Ces leucocytes, bourrés de microbes, qui sont pour la plupart contenus dans des vacuoles et se présen- tent à tous les stades de la digestion intracellulaire décrite précédemment, sont accompagnés d'un nombre a peu près égal de polynucléaires pseudo-éosinophiles qui viennent d’ar- river dans la cavité péritonéale; aucun des polynucléaires figurés dans le dessin n’a englobé de microbes. Si donc on injecte dans un péritoine riche en éosinophiles une quantité de microbes (non virulents) qui ne soit pas excessive, tous les microbes seront englobés et digérés avant l'intervention des polynucléaires. Ce fait montre que, lorsqu'il existe une éosinophilie préétablie dans une cavité séreuse, les éosinophiles peuvent jouer un rôle efficace dans la protection de l'organisme contre l'infection microbienne. Nous avons également observé in vivo la phagocytose des globules rouges par les éosinophiles dans la cavité péritonéale du cobaye. Le plus bel exemple que nous ayons constaté a été réalisé dans les conditions suivantes : voulant provoquer dans le péritoine du cobaye une éosinophilie locale par des injections répétées et espacées de sérum de cheval, nous avons eu l’occa- sion d’éludier l'exsudat de quelques cobayes dans le cours de RECHERCHES BIOLOGIQUES SUR L’EOSINOPHILE 329 la première heure qui suivait la dernière injection préparante. Un de nos cobayes, chez lequel nous avions provoqué une légère hémorragie locale lors de Vinjection de sérum, présen- tait, une heure après cette injection, une forte éosinophilie. Les éosinophiles, dans ces conditions, se sont montrés parti- culièrement aptes à englober et à digérer les globules rouges de cobaye. La figure 2 de la planche VIT représente un champ microscopique d’une préparation qui se rapporte à ce cas, et où l’on ne compte pas moins de 6 éosinophiles phagocytant des globules rouges. Un éosinophile renferme même deux hématies. On observe de plus tous les stades de la digestion intraleucocytaire du globule rouge, telle que nous l'avons décrite à propos de la phagocytose des hématies 7m vitro. Nous pensons que, dans ce cas particulier, le sérum de cheval a favorisé la phagocytose des globules rouges par les éosino- philes, car ces leucocytes ont manifesté des propriétés érythro- phagiques beaucoup moins intenses, lorsque nous avons injecté directement dans la cavité péritonéale de cobayes à forte éosi- nophilie locale des globules rouges de cobayes ou des globules rouges d'espèce étrangère. Maneeaux (1) a eu l'occasion d'observer chez l'homme, dans un cas de pleurésie hémorragique, des images indiscutables de phagocytose de globules rouges par les éosinophiles. Ces faits nous permettent d'expliquer comment quelques auteurs ont pu supposer que les globules rouges pouvaient prendre naissance dans le protoplasma des éosinophiles. Cette hypothèse a été soutenue par Banwart (2) (1892), Hoyer (3) (1894), Pschewasky (d'après Hoyer), Semmler (4) (1894). Il n’est pas douteux que ces auteurs ont observé des images de phago- cytose qu'ils ont méconnues. Ajoutons enfin que Noorden !5) a décelé, dans le cytoplasme de cellules éosinophiles provenant (1) Manceaux, Comptes rendus de la Soc. de Biologie, 18 octobre 1913, p. 240. (2) Baxwarr, Untersuchungen über die Regenerationen der Blütkürperchen, Inaug. Dissert. Dorpat, 1892. (3) Hoyer, Sitzungsberichte der russichen med. Gesellschaft an der Univer- sität Warschau, 5 nov. 1894, n° 48. (4) Seuuzer, Ueber die Faserstoffbildung in Amphibien und Vogelblut. Inaug. Dissert. Dorpat, 1894. (5) Noorpen, Beiträge zur Pathologie der Asthma bronchiale. Zeitschrift f. klinische Medicin, Bd XX, 1892, p. 98 à 106. 330 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR de crachats d’asthmatiques, de Vhémosidérine. Ce fait n’est pas pour surprendre, puisque nous avons indiqué plus haut que les globules rouges se dissolvent complètement dans le protoplasma des éosinophiles. B. — PHAGOCYTOSE DANS LE TISSU CONJONCTIF SOUS-CUTANÉ DU COBAYE. Nous avons choisi, pour étudier la phagocytose des microbes par les éosinophiles dans le tissu cellulaire sous-cutané, des cobayes à forte éosinophilie sanguine. On injecte sous la peau de l’abdomen de ces animaux, en plusieurs points différents, 2 cent. cubes d'extrait aqueux de Tenia per folrata. Le lendemain, on injecte exactement aux mêmes endroits 1 cent. cube d'une émulsion en eau physiologique de B. subtilis. Les biopsies praliquées un quart d'heure, une demi-heure, une heure après l'inoculation ont montré que les éosinophiles attirés dans le tissu cellulaire à la suite de l'injection de produit parasitaire pratiquée la veille, commencent à phagocyter les microbes avant que les polynucléaires pseudo-éosinophiles, que ceux-ci font affluer en masse, ne soient sortis des vaisseaux. Les poly- nucléaires semblent par contre beaucoup plus actifs dans le tissu conjonetif qu'à leur arrivée dans lexsudat péritonéal. Us commencent à englober les microbes dès leur sortie des vais- seaux. Nous n'avons pas nolé le stade d inhibition temporaire indiqué plus haut dans le cas de la phagocyiose intrapéritonéale. Nous avons expérimenté également avec le B. col chez un cobaye préparé par une série d'injections d'extrait de Tenia perfoliata et qui présentait une forte éosinophilie sanguine. Nous avons déterminé une éosinophilie sous-culanée considé- rable chez ce cobaye et 24 heures après nous lui avons injecté du B. coli sous la peau. Cette expérience nous a donné les mêmes résultats que la précédente. C. — PuacocytTosk DANS LE SANG CIRCULANT DU COBAXE. Lorsqu'on injecte des microbes (B. coli) dans la veine d'un cobaye, les phénomènes observés diffèrent suivant que l'éosi- nophilie sanguine est légère ou très intense. Si les éosinophiles RECHERCHES BIOLOGIQUES SUR L’EOSINOPHILE 331 sont peu nombreux dans le sang, peu de microbes sont englo- bés par ces cellules; par contre, la phagocytose éosinophilique est très intense, lorsque l'éosinophilie sanguine atteint un très fort pourcentage. Chez un cobaye dont l’éosinophilie sanguine était montée exceplionnellement à 80 p. 100 à la suite d’une série d'injec- tions de produit parasitaire, six minutes après l'injection de 1 cent. cube d'une émulsion de B. coli dans la veine, nous n'avons trouvé que fort peu de polynucléaires pseudo-éosino- philes ayant englobé des microbes, alors que les éosinophiles contenaient presque tous des bacilles phagocytlés, présentant les différents stades de la digestion intracellulaire. Les microbes libres dans le sang étaient exceptionnellement rares. Les trois sériés d'expériences que nous venons d’exposer montrent que les éosinophiles peuvent dans l'organisme se substituer aux polynucléaires et jouer dans certaines conditions le rôle de véritables phagocytes. Leur intervention est parti- culiérement active lorsqu'ils préexistent seuls ou en majorité au point de pénétration du microbe. Leur action est continuée par les polynucléaires attirés en masse par l'injection micro- bienne. Ill. — INHIBITION DE LA PHAGOCYTOSE PAR LE LIQUIDE HYDATIQUE Nous avons essayé d'utiliser dans des expériences de phago- cytose l’exsudat éosinophilique d'un cobaye qui avait reçu 4 heures auparavant 10 cent. cubes de liquide hydatique dans le péritoine. Dans ces conditions, les éosinophiles se sont mon- trés incapables de phagocyter im vitro les spores de Sporotri- chum Beurmanni, alors que les autres variétés de leucocytes avaient conservé toute leur activilé phagocytaire. Nous nous sommes demandés si, dans ce cas, les propriétés phagocytaires de l’éosinophile n’avaient pas été inhibées par l’action directe et spécifique du liquide parasitaire sur celte variété de leuco- cyte. Nous avons entrepris une série d’expériences pour vérifier celte hypothèse. Nous avons observé tout d'abord que les microbes dilués dans du liquide hydatique étaient phagocytés 332 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR in vitro par les éosinophiles aussi facilement que les microbes dilués dans de l’eau physiologique. Voici les résultats dune expérience qui se rapporte aux spores de Sporotrichum Beurmanni : Une goutte d’émulsion de spores en eau physiologique est ajoutée d'une part à IIL gouttes d’exsudat et à I goutte d’eau physiologique et d'autre part à III gouttes d’exsudat et à I goutte de liquide hydatique de mouton. Les deux mélanges sont recueillis chacun dans 1 pipette capillaire qui est fermée à la veilleuse et portée à l’étuve a 38 degrés, pour 1 heure. Au bout de ce temps, l'étude des frottis donne les résultats suivants : ÉOSINOPHILES| ÉOSINOPHILES NOMBRE DE SPORES englobées par les 100 premiers éosinophiles comptés. MÉLANGES contenant ne contenant des spores. |pas de spores. I. Mélange : Spores, exsudat, 21 79 25 eau physiologique. _ IT. Mélange : Spores, exsudat, 20 SO 26 liquide hydatique. Le résultat de l'expérience est tout différent, lorsqu'on a soin de laisser les cellules au contact du liquide hydatique à 37 degrés pendant une heure, avant d'ajouter les spores. Voici à titre d'exemple une expérience de ce type : f= - 2 5 |ÉOSINOPHILES| EOSINOPHILES| NOMBRE DE SPORES 5 S35 oe Se snelobés r MELANGES D Sa 2 5 contenant |ne contenant eae ones Las des spores. |pas de spores.| éosinophiles comptés. 2 ce M Le) > oO — Om nn ee ee S&S 2 I. Mélange : HS ZO 3 gouttes d’exsudat,|= 3°) go 1 goutte wo OH 20 80 22 d'eau = © E physiologique. he Qi : - Sov ood ; Deaeasu, [l. Mélange : SEC 9 7 5 -_ (=| — > 3 gouttes d’exsudat, Dee 1 goutte ee 2 98 2 f de liquide OS ii hydatique. SO © RECHERCHES BIOLOGIQUES SUR L’EOSINOPHILE 333 Les éosinophiles qui sont restés en contact pendant une heure à 37 degrés avec le liquide hydatique perdent done presque com- plètement leurs propriétés phagocytaires. Les éosinophiles sont d'autant plus sensibles à l'action du liquide hydatique que celui-ci est plus riche en antigène. Le liquide hydatique dilué à 1/20 dans l’eau physiologique n’empéche plus que très fai- blement la phagocytose. L'expérience suivante, où l’on a pris comme test le staphy- locoque blanc, est tout à fait démonstrative. ÉOSINOPHILES| ÉOSINOPHILES| RE: : n a ST: 0 S MÉLANGES SE contenant i englobés par Le) Sie. ee ee les 100 premiers ARS des microbes | de microbes éosinophiles comptés no . DD | | Se " n SES I. Mélange : aS es 3 gouttes d’exsudat, |s— 3S _ 81 19 540 1 g. d’eau physiol. | = = sd Il. Mélange : Sees os 3 gouttes d’exsudat, 5224 20 80 75 4 g. de liq. hydat. pur.|, 5 5 2 SR rs Ill. Mélange : Seen 3 gouttes d’exsudat, =, 19 84 61 4 g. de lig. hydat. |Sn2o dilué à 1/5. SSEz BAO IV. Mélange : Doro 3 gouttes d'exsudat, | =" © . > 3 : 4 g. de liq. hydat |» &£0 32 68 50 TRES VU n © dilué à 1/10. ozs V. Mélange : 25 | 3 gouttes d’exsudat 53 E > à , 2, a 9() 1 g. de liq. hydat. = és EL zal dilué à 1/20. IV. — ABSORPTION DE L’ANTIGENE HYDATIQUE PAR LES ÉOSINOPHILES Ayant ainsi démontré que le liquide hydatique agit spécifi- quement sur les éosinophiles dont il paralyse les fonctions phagocytaires, nous avons voulu rechercher si cette inhibition ne pouvait pas s'expliquer par une absorption élective de l’an- tigène hydatique par l'éosinophile, ce leucocyte saturé d’anti- gene devenant incapable d’englober des microbes. Cette nouvelle hypothèse s’est trouvée vérifiée à la suite d’un 334 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR très grand nombre d’expériences, dans lesquelles nous avons utilisé la réaction de fixalion, pour démontrer la disparition des propriélés antigéniques du liquide hydatique, mis en con- tact avec les éosinophiles de l’exsudat péritonéal du cobaye. Pour démontrer que les éosinophiles peuvent absorber l’an- tigène hydatique, nous avons employé la technique suivante : Nous avons fait deux séries d'expériences. Dans la première, nous avons utilisé l’exsudat péritonéal de cobayes neufs, dont un certain nombre présentaient une éosinophilie locale consi- dérable. Dans la deuxième série d'expériences, nous nous sommes servis de cobayes préparés par des injections répétées de liquide hydatique sous la peau et dans le péritoine. Chez beaucoup d’entre eux, nous avons provoqué une éosinophilie locale aussi intense que possible dans la cavité péritonéale. Pour ce faire, nous ayons choisi de préférence des cobayes à éosinophilie san- guine élevée (au moins 10 p. 100) que nous avons préparés par des injections sous-cutanées répétées tous les 8 jours de 10 cent. cubes de liquide hydatique. Huit jours après la dernière injection préparante, nous injec- tons dans la cavité péritonéale du cobaye de 5 à 10 cent. cubes de liquide hydatique. Cette injection provoque, comme on le sait, une forte éosi- nophilie locale. Pour renforcer encore cette éosinophilie locale, nous avons le plus souvent pratiqué une seconde injection intrapéritonéale 48 heures après la première, avec la mème dose de liquide hydatique Nous avons, en effet, établi que, chez les cobayes sensibilisés, chaque injection locale de sub- stance éosinotactique détermine une baisse presque immédiate de Véosinophilie sanguine, laquelle se relève rapidement et dépasse en général au bout de 2% à 48 heures le taux qu'elle alteignait avant l'injection. Une seconde injection pratiquée 48 heures après la première, dans le périloine des cobayes préparés, est donc faite chez des animaux accusant le plus sou- vent une très forte éosinophilie sanguine. Elle provoque de ce fait un renforcement considérable de l’éosinophilie locale survenue lors de la première injection de liquide hydatique dans la séreuse. Nous avons ainsi noté des pourcentages de 45, 50, 55 et jus- RECHERCHES BIOLOGIQUES SUR L'ÉOSINOPHILE 335 qua 65 et 70 p. 100 d’éosinophiles dans l’exsudat, et ceci encore 2, 3 et 4 jours après la dernière injection locale. Les cobayes sont sacrifiés de préférence 2, 3, 4 et 5 jours après la dernière injection éosinolactique. Les cobayes sacrifiés le lendemain de l'injection ont des exsu- dats extrêmement riches en cellules, mais où l’on rencontre encore un plus ou moins grand nombre de polynucléaires pseudo-éosinophiles. Ces éléments, comme nous le savons déjà, diminuent très fortement de nombre le 2° jour, et l’on n'en ren- contre qu’exceptionnellement ie 3° et le 4° jour qui suivent l'injection. Pour avoir un exsudat où les éosinophiles soient les seuls éléments granuleux, il y a donc intérêt à sacrifier les cobayes dans les limites indiquées. Hl ne faut pas non plus attendre un temps trop long, ies éosinophiles diminuant, eux aussi, quoique plus lentement, de nombre dans lexsudat, a mesure que l’on s'éloigne de la date de l'injection locale. Pour recueillir les cellules de lexsudat des cobayes neufs ou préparés, on opère comme il suit : Le cobaye est saigné à blane par section des carotides. Immédiatement après la mort, on dissèque la peau de l'abdomen et l’on injecte 10 cent. cubes d’eau physiologique stérile dans la cavité péritonéale. Le péritoine est ouvert. Le liquide, aspiré dans une pipette à boule, est jaugé et distribué à parties égales dans deux tubes à centrifuge stériles. Nous avons ainsi deux lots d’exsudat péritonéal, ce qui nous permet de faire chaque expérience en double, un tube contrôlant l’autre. Connaissant le volume de liquide contenu dans chacun des deux tubes à centrifuge, on délermine avec l'hématimètre de Thomas-Zeiss le nombre de leucocytes en suspension dans 1 millim. cube de liquide péritonéal dilué. On peut ainsi déter- miner le nombre total de leucocytes contenus dans le volume connu de liquide péritonéal recueilli dans chaque tube. Le mélangeur de Thomas-Zeiss une fois rempli, il faut avoir soin de centrifuger rapidement l’exsudat dilué pour éviter la coagu- lation (avec une centrifuge à la main, pendant 3 minutes). Après avoir centrifugé à fond et décanté, on lave une seconde fois le culot leucocytaire dans 10 cent. cubes d'eau physiolo- gique ; puis on centrifuge de nouveau et on décante. Les leu- cocytes contenus dans chacun des deux tubes sont alors mis en 326 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR contact avec 2/10 d’eau physiologique et 1/10 de liquide hydatique pur ou dilué suivant les conditions de l'expérience. On agite et l’on porte les deux tubes au bain-marie à 37 degrés pendant 1 heure et demie. Au bout de ce temps, on centrifuge et le liquide décanté avec soin est chauffé une demi-heure à 56 degrés pour détruire toute trace d’alexine, et éprouvé sur sa teneur en antigène avec un sérum échinococcique de prove- nance humaine. Les expériences de contrôle sont faites avec les mémes doses d’antigène hydatique, auxquelles on fait subir les mêmes chauffages (1 h. 1/2 à 37 degrés, une demi- heure à 56 degrés). Avec les cellules qui ont été en contact avec Vanti- scène, on fait des frottis colorés et l'on détermine la formule leucocytaire de chaque exsudat. La réaction de fixation est pratiquée en utilisant les pro- priétés hémolytiques d’un sérum hydatique connu, non chauffé, vis-à-vis des globules rouges de mouton. C'est le procédé rapide de la technique rationnelle de Weinberg. I] faut avoir soin, avant d'entreprendre l’expérience, de titrer exactement l’antigène vis-à-vis du sérum, certains sérums, surtout ceux riches en anticorps et pauvres en alexine, pouvant donner une réaction de fixation positive avec des doses minimes de liquide hydatique. Pour titrer l’antigène, on met 1/10 de sérum hydatique en présence de doses variables d’antigène : 1/10 d'antigène pur, 1/10 d’antigène dilué à 1/2, 1/10 d’antigéne dilué à 1/5, 1/40 d'antigène dilué à 4/10,1/10 d’antigéne dilué à 1/15, 1/10 d’an- tigène dilué à 1/20. La dose la plus faible d’antigène qui donne encore une réaction de fixation posilive est la dose limite. Nous mettons les leucocytes en contact avec une dose d'antigène juste supé- rieure à la dose limite. C'est-à-dire que si la dose limite est de 1/10 de cent. cube d’antigène dilué a 1/10, nous employons dans notre expérience la dose de 1/10 cent. cube d’antigéne dilué a 1/5, etc. En prenant ces précautions, nous avons obtenu pour les cobayes neufs et pour les cobayes préparés les résultats consi- onés dans les tableaux ci-dessous. Le tableau I résume les expériences effectuées avec les leu- cocytes provenant de la cavité péritonéale de 20 cobayes neufs. RECHERCHES BIOLOGIQUES SUR L’EOSINOPHILE Jol Tasteau I. — Expériences d'absorption pratiquées avec les cellules péritonéales de cobayes neufs. à ET EES ETS PER D RE RE SRE DAME FN ES GOSSES EE SERA NET FRE AF ARE nos des Cobayes FORMULE LEUCOCYTAIRE de l’exsudat Mon.| Pol.| Éos. vag le) | Ga 53 0 | 47 40 0 | 60 74 0)! 26 60 | 0 | 40 50 0 | 50 60 0 | 40 65: fe OF 35 Gu? 00°35 60 0 | 40 90 | 0 | 10 SON OF). 20 85 | O0 | 45 90 | O0 | 40 100 0 0 100 0 0 100 0 0 55 | 45 0 100 5 0 NOMBRE de CELLULES dans chaque bo bo tube » -400.000/10. 000. 000 NOMBRE D’ EOSINO- PHILES 6. 000 000 . 000 .000 .000 .000 .000 .000 .000 .000 .000 ).000 .000 NOMBRE de POLYNU- CLÉAIRES DOSE D'ANTIGÈNE mise au contact des cellules AAO) Gsee dil. à 1/10 AYAO!C:c: dil. à 1/10 1/10 C.C. dil. à 1/10 1/10 c.c. dil. à 1/10 HALON GSC: dil. a 1/2 DANUMEXES pur. TOP CC: pur. AAO CECE pur. LTO ec: dil. à 1/5 ALOLC:C: dil. à 1/5 40) "ee. pur. 1/10) c.c: RÉSULTATS Hém. totale : en 30 min. Hém. totale : en 15 min. Hém. totale : en 10 min. Hémol. part : en 30 min. Hém. pr. tol.: en 30 min. Hémol. part. : en 30 min. Hémol. part. : en 30 min. Hémol. part.: en 1 heure. Hémol. part. : en 1 heure. Hémol. part.: en 30 min. Fixation. Fixation. Fixation. Fixation. Fixation. Fixation. Fixation. Fixation. Fixation. Fixation. Trois fois, l’antigéne a été complètement absorbé par les leucocytes ; 7 fois, l’antigéne n’a été absorbé que partiellement; enfin, dans 10 cas, le liquide hydatique n’a rien perdu de ses propriétés antigéniques, puisqu'il a fixé Valexine d’un sérum échinococcique humain. Il faut remarquer que ces résultats sont rigoureusement parallèles au nombre d’éosinophiles pré- 338 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR sents dans chaque expérience. Ainsi, le liquide hydatique a été complètement privé de ses propriétés antigéniques, après un contact d’une heure et demie au bain-marie à 37 degrés avec un culot leucocytaire dans lequel il a été compté de 10.300.000 à 6.000.000 d’éosinophiles. Les résultats partiels ont été obtenus avec des exsudats contenant de 5.000.000 à 2.400.000 éosinophiles. Enfin, dans le cas où le nombre des éosimophiles ne dépassait pas 1.600.000, le liquide hydatique est resté suffi- samment riche en antigène pour donner encore une réaction de fixation positive avec un sérum échinocoecique. Notons, dans un de ces cas, la présence de 3.375.000 polynucléaires pseudo- éosinophiles qui n’ont pu absorber une quantité appréciable d’antigéne. Il était logique de penser que les leucocytes provenant d'un organisme immunisé absorbaient encore plus facilement l’an- tigène hydatique que les éosinophiles des cobayes neufs. Nous avons réuni dans le tableau Il quelques expériences effectuées avec les celiules de l’exsudat péritonéal de cobayes préparés par trois injections sous-cutanées de 10 cent. cubes de liquide hydatique, espacées à huit jours d'intervalle. Tarrrau Il. — Expériences d'absorption pratiquées avec les cel- lules péritonéales de cobayes préparés par 3 injections sous- cutanées (sacrifiés 8-10 jours après la dernière) | FORMULE NOMBRE DOSE NOS | LEUCOCYTAIRE dé NOMBRE | D'ANTIGÈNE de l'exsudal mise : des CELLULES oe . RESULTATS | D ÉOSINO- | au Contact AE dans chaque! PHILES des 7 Mon. Pol. | Eos. tube cellules. = eS 80-F.| 70 | 0 29 |10.000.000/2.900.000/1/10 dilué|Hémol. totale : | | à4p.10.| en 25 min. 62-F.| 60 | 0 40 6.000.000}2.520.000)1/10 pur. |[Hémol. totale : | | en 35 min. 54-F.| 75 | 0 25 |12.000.000/3.000.000}1/10 pur. |Hémol. partielle : | en 30 min. A5-I..) 80 | 0 20 9.000.000!1.800.000|1/10 pur. |Hémol. partielle : | | en 1 heure. 38-F.| 70 0 30 | 5.600.000/1.650.000|1/40 pur. | Fixation. 17-1.| 98 0 2 3.000.000! 60.000)1/10 pur. |Fixation. Les résultats obtenus en utilisant ces animaux sont déjà plus RECHERCHES BIOLOGIQUES SUR L'ÉOSINOPHILE 339 favorables que ceux notés avec les cobayes neufs. Deux fois “nous avons obtenu une absorption totale de l’antigène hyda- tique en nous servant d’exsudats contenant moins de 3.000.000 d'éosinophiles, c'est-à-dire dans des conditions où dans l’expé- rience précédente nous n’obtenions qu'une absorption partielle de l’antigène. Mais la différence entre les résultats obtenus en utilisant comparativement les cobayes neufs et les cobayes préparés s accentue encore, lorsqu'on emploie l’exsudat d'animaux sen- sibilisés, ayant recu une ou plusieurs injections de liquide hydatique dans la cavité péritonéale. Nous avons dit que, dans ces conditions, on peut produire de fortes éosinophilies locales, lorsqu'on dispose d'animaux ayant des éosinophiles dans le sang. Nous avons ainsi obtenu 15 fois (sur 39 expériences) des exsudats contenant de 3.200.000 à 20.090.000 d’éosinophiles. Les écarts entre les nombres de leucocytes présents dans les tubes d'expérience s'expliquent, comme nous l'avons déjà indiqué, par l'intervalle qu'on laisse s'écouler entre la dernière injection intrapéritonéale et le moment où l’on sacrifie l'animal. Le tableau HI résume 39 expériences pratiquées en employant lexsudat de cobayes préparés, ayant reçu du liquide hydatique dans le péritoine. Sur ce nombre, nous avons obtenu 25 absor- plions totales d’antigène, 3 absorptions partielles. Dans 11 cas Vantigéne n'a pas été neutralisé. Dans les 25 expériences positives, le nombre d éosinophiles présents dans les tubes oscillait entre 20 millions et 1 million. Notons deux expériences (cobayes 1 C et 19 K) où nous avons mis en contact avec les cellules, dans un des tubes d’expé- rience la dose normale d’antigéne (dose juste supérieure à la dose limite), et dans le second tube une dose double de la premiére. Les éosinophiles ont neutralisé non seulement la dose normale mais encore la dose double d’antigène. Notons encore 6 cas positifs, où le nombre d’éosinophiles était compris entre 1 et 2 millions. Nous savons que, lorsqu'on utilise des exsudats neufs, cette quantité d’éosinophiles est tout a fait insuffisante pour appauvrir, d’une façon appréciable, le liquide hydatique en anligéne. ‘udep eT ‘de sanof y gytaoes ‘sayeguoqupdeajur suoroofur ÿ{-ui ge We “yoy “qns"ugy|* * "°° tt ts sand 07/7 0 000°006°€ }000°000°S8 | 07 | 0 | 09 |'M-86 ‘up ey ‘de sunol ¢ gytwoes “qagdeaqyul 3 “yno-snos ‘fur y|-urur gp we ‘307 wgpf" * * ttt and ot/t 0 000°006°% [000 ‘0007! of | 0 | OL lH-ç9 ‘utep ef ‘de sanol ¢ gytioes ‘quigdequr 4 “yno-snos ‘fur lui gy Wo ‘307 gpl © 7 7 Tt © * and op/t 0 000°008°% }000°000°ZI| ov | 0 | 09 |‘O-4 ‘ulop ef ‘de sanol ¢ ggitoes ‘sopequoygdeaqui suotjoelur g] Uru gy Uo 07 ‘wopl © °° G/T @ ODTIP OF/T 0 000°000°9 |000°000°0T| 09 | O | OF |'ix-G ‘udop ey ‘de sanol ¢ oytioes ‘qugdeajut g ‘yno-snos “fur 7]-ulUL gy US 307 ‘ol © * 7 * * * * and 0f/J 0 000°008°9 }000°000°ST| Ge | oO | G9 |-T-s¥ ‘ulop vp “de sanof g gytuoes ‘yaedequr y ‘yno-snos ‘ful 7]“UIU O7 UO ‘107 “WIHT” © 7 /y @ 9nqtp or/ tl À 2 0 000°000°ST] & | 0 | gg |--7r ‘udop ey ‘de sunol ¢ gyttoes (‘y y Us “JOJGNS “WIgT{(9qNy oZ ef Suep “G/F & 9UTIP OF/Z ie Re | ; ed be y ‘yno-snos ‘fut Es 0£ Ue ‘J0} adm al a] SuLp “G/F & onip DE û 000°09G"L [000006 "€! SE | O | LO |°M-61 ‘ulop vey “de sanol ¢ ayrtoes ‘quigdeaqur 3 “yno-snos ‘fur 7] "ue OF Us 218307 ‘Wolf * "© G/F & NTP 01/1 0 000°00S°L |000°000°0€] Gz | 0 SE Ss ‘udop ef ‘de sanol ¢ gros ‘qrgdeajur p “yno-snos ‘fur y}‘urm oF us esdyougy |" * * * * * * * * G/7 & up 01/7 0 000°006°L 10000008 0€ | 0 OL ‘urop ey ‘de sanof ¢ 9ytoes ‘-qragdeaqui g ‘yno-snos ‘fur #l'urur gp Us “yO, “UIgyT]: 7 ttt “and oy/T 0 000°06S°L }000°000° Fz] ge | 0 9 ‘ulep ey de sanof g gytioes ‘quodeajur 3 “yno-snos ‘fur z{'utu gy ue 07 moppl © G/P & 9NIp OT/T 0 000°089°L [000 006141 gy | 0 | 6e |M-6E ‘udop ey ‘de sanol ¢ oyrioes | quodemqur 7 ‘yno-snos ‘fur el'uru gg Ue “yoy “wap * * * * * * C/7 R 9NTIP 01/7 0 090°009°6 |000°000°F2| oF | 0 09 |M-% ‘up ey ‘de sanof ç 9gytdoes | ‘yragdequr 3 ‘qno-sn0s ‘fur 4|-utu og} Ua “yo, WYH| © * * * * * G/T R on OT/T 0 000060" 7700000091! go | o | ge |'M-0z ‘ulop ef ‘de ‘U 7% yes eae EET S0S-En0E ‘fur eur gf us “yoo ‘m9 7 7 ae Se eat! 01/1 000° 008"4 000°000°44)000°000° 84] 06 | OF | 09 | "T-96 ‘ulep ey ‘de ‘4 ya gyuoes VU 06 Us “4O] “U9TT COGN] 08 of SUBP G/F R TIP 99 07/8 ted ne ea ReRGiaee eae . dun ai el UT QT ud ah on) set of suep G/F B “pp “2-0 07/14000°000 371000 000 081000 "00008! Se | SS | 08 | 9°! SR) *SOÿf | [OT 'UOIN uoyexy op onbeus LS SHTATTHD sad Baca eae so Leo: NOLLOVH es LS suep SNOILVAWASAO qoeyuoo ne ost op goNISO7.¢ ‘JepnsxX9,[ op Lee ANHOILNV 4 asSod AMG ON cae AMY LAVODAAT N LVLTINSAU | ; auaNoNn op = ATOWHTOA AUINON Pn PP D UN DRM TL SASS 9 IE PATES à ‘aulojytied of suep enbrjepAu opmbry np n5sx que{e ‘soredoad so£eqoo ep sopeeuoriod sopnrroo say 04e soonbrierxd uorydiosqep soousrtodx ‘T]] AVaTaV L PE I I LE APN 2 EE LL ee | “Udo BI ‘de sanol ¢ 9ytioes : de ian dans une DANS LE LAIT acide la er AGLI UO solution MNT Q -d SSUS oe culture “ PATES de PEPTONE La He CASEINE apparue en 13 en milli- p- carbonate |__| COAGULATION | acide lactique solubilisée ana ; ans p. 100 jours gr. 100 : ais était-elle milligr. ; MENBT: VEGETATION 224 te — normale ? : ; Après 5 à 7 jours a) A la température de 30 degrés. 5 2.970| 74 — M aL = pi 8 3.910) 97 891 M + 2.108: 9 10 2.445) 33 891 M + — = 45 3.675] 91 — M + 2.345 10 19 4.027/100 198 M _ 1.890 6 24 4.027100 198 M a 2.221 8 29 a _ — M - 4.020 5 92 4.0271100 81 M M M M 140 | 4.027100 — M M M M b) A la température de 40 degrés. 2 | 3.064! 74 a M oo — = 3 | 3.946] 98 = M fa os, 9 5 #.027|100 — M a 2.440 6 30 40271100 — M + 1.440 5 90 4.027}100 — M _ M M | Dans aucun cas, ni avec le glucose (voir les tableaux VII et VIH’, ni avec le galactose (voir le tableau IX) ou le mannose (voir le tableau X), il n’y a eu de transformation d’un ferment dans PRETENDUE VARIATION BIOCHIMIQUE DU FERMENT BULGARE 355 l’autre; même dans les cultures vieilles du ferment Bertrand, complètement dépourvues de sucre, on n'a pas observé la forma- tion de voiles ni de spores et si le ferment n’a pas encore perdu la faculté de coaguler le lait, il n’a solubilisé que 10 p. 100 de caséine au maximum, c'est-à-dire qu'il n’a jamais échangé ses propriétés avec celles qui correspondent à un travail protéoly- tique. La solution de peptone n'a jamais été favorable à la cul- ture de ce ferment. Pareillement, les propriétés du microbe Effront, même après vingt semaines, n'ont pas changé du tout; la culture sur la peptone seule a toujours été florissante ; il y a eu formation de spores et de voile à la surface des liquides et la coagulation du lait a été suivie en quelques heures d’une rapide disparition de la caséine. Tasceau VIII. — Action du ferment Effront sur le milieu glucosé. (Pour 100 grammes de liquide. g q DISPARU 2 dans une DANS LE LAIT d £ saa lactique solution la EL TS au- Fe Ta ACIDITÉ apparue en COAGULATION | acide lactique de PEPTONE CASEINE solubilisée culture i en NE milli . 100 de calcium milligr, P milligr. jours lag 100 était-elle VEGETATION a normale? DES Après 5 à 7 jours RÉSULTAT D’ENSEMENCEMENT DE LA CULTURE GLUCOSE AGE AciDIte | OOOO eee A la température de 30 degrés. 3 594). 15 = ae + 620 69 7 | 1.055} 26 270 =o 45 = 7 12 | 4.875} 47 270 + , oe = — 16 | 2.570] 64 498 = a Ss = 40 | 4.027/100 ** | a 504 63 143 | 4.027100 = ie Ae 542 65 ** L’acidité apparue, calculée en acide lactique, a été de 2.871 milli- grammes, c'est-à-dire que le rendement en acide lactique était 71 p. 100. 356 ANNALES DE WINSTITUT PASTEUR Tasreau IX. — Action du ferment bulgare sur le liquide galactosé. Pour 100 grammes de liquide ) jours RÉSULTAT D *ENSEMENG EMENT DE LA CULTURE anemia ‘ dans une DANS LE LAIT A — " — À solution 1 GALACTOSE DISPARU de PEPTONE La amen CASEINE apparue en COAGULATION acide lactique solubilisée milli- 400 Se . 10 était-elle milligr. : gr. 3 ; VÉGÉTATION © Après 5 à 7 jours normale ? A la température de 40 degrés. M M M M M M M =I =] =) 1 D we ND ND bo HN I D IN -~J € 1) TaBLeau X. — Action du ferment bulgare sur le liquide contenant du mannose. (Pour 100 grammes de liquide.) culture en jours RÉSULTAT D ENSEMENCEMENT DE LA CULTURE OOOO © MANNOSE DISPARU dans une DANS LE LAIT ae solution a ie : de PEPTONE La Re CASÉINE apparue en AE ER lie p COAGULATION acide lactique solubilisée ee ». 100 Hay 100 était-elle milligr. I hg TÉCÉMATION | ES VEGETATION wommale? OT Apres 5 à 7 jours A la température de 40 degreés. 2.150] 56 M re — | — 806] 21 M + — — 3.840}100 M oh 2.020 7 3.840/100 M oo 2.243 6 >. 840/100 M M M M 3.840/100 M M M M 3.840/100 M M M M Le Gérant : G. Masson. Paris — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 29° ANNEE AOÛT 1915 N° 8 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR JUBILÉ DU PROFESSEUR ÉLIE METCHNIKOFF Le 16 mai dernier, le soixante-dixième anniversaire d'Élie Metchnikoff a été célébré d'une facon toute intime, à l'Institut >asteur. A 10 h. 1/2 du matin, les amis, les collègues, les élèves du Maitre, présents à Paris, se sont réunis à la biblio- thèque, sous la présidence de M. Gaston Darboux. Des membres du Conseil d'administration et de l’Assemblée de l'Institut Pasteur, des membres de l'Académie des Sciences, de lAca- démie de Médecine et des représentants de la Colonie russe de Paris s'étaient joints au personnel de l'Institut Pasteur pour offrir leurs compliments au professeur Metchnikoff. M. Darboux a rendu hommage à Metchnikoff au nom de l'Académie des Sciences et du Conseil d'administration de l'Institut Pasteur. Puis il a lu une lettre du D' Roux que la maladie tenait éloigné de la cérémonie. M. Mesnil a donné connaissance d’un grand nombre de lettres et de télégrammes de félicitations adressés par les dis- ciples de Metchnikoff et par diverses Sociétés savantes. S’hono- rant d'être le plus ancien des élèves présents de M. Metchnikoff, M. Mesnil lui a exprimé la reconnaissance de tous ceux qui ont travaillé sous son inspiration. M. Metchnikoff a remercié pour les vœux qui lui étaient adressés en ce jour, et, dans une causerie, il a exposé ses idées sur la vieillesse prématurée et les moyens de l’éviter. 24 358 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR LETTRE DE M. É. ROUX F Paris, 15 mai 1915. Cher Elie Metchnikoff, Je maudis Vindisposition qui me retient à la chambre, puis- qu'elle m'empèche de vous dire, à l'occasion de votre 70° anni- versaire, en présence de nos amis, au nom de vos collègues et de vos élèves, notre admiration pour votre œuvre scientifique et notre atlection pour votre personne. Si, comme le prétend le proverbe, le temps bien employé parait court, combien ont dû vous sembler brèves les soixante- dix années que vous avez vécues! Dès votre enfance, vous avez manifesté le goût le plus vif pour la science de Ja nature, et, à dix ans, vous étiez déjà un sagace observateur des plantes et des insectes. La vivacité de Metchnikoff écolier, son avidité pour apprendre, son aptitude à tout comprendre, nous les imaginons facilement, nous, qui sommes, tous les jours, témoins de lentrain que vous apportez dans la recherche et de l'émotion que vous éprouvez devant une belle expérience. C'est, je crois, à dix-huit ans que vous avez publié votre pre- mier travail, non pas travail d'étudiant qui promet, mais tra- vail de maître, contenant une belle et bonne découverte et en faisant prévoir d'autres. Puis, les mémoires succèdent aux mémoires et bientôt vous êtes agrégé à l'Université de Petro- grad et chef d'école; car, vous orientez l’embryologie dans la voie où elle s'est heureusement développée. Je me garderai bien de m’étendre sur votre œuvre zoologique dont je ne pourrais parler qu'en profane. Je ne dirai de votre carrière de professeur à Petrograd et à Odessa que ce que J'ai entendu de la bouche de vos anciens élèves. Non seulement, vous les intruisiez, mais encore vous leur inspiriez l’enthou- siasme scientifique. Qui assistait à vos leçons voulait devenir naturaliste. A Pautorité d’un mailre sachant communiquer sa science, vous joigniez celle d’un caractère prèt à céder la place, plutôt que de s'associer à une mesure injuste. Tel qu'on vous 2 dépeint à moi, vous étiez professeur plein de feu, prodigue JUBILE DU PROFESSEUR ELIE METCHNIKOFF 359 d'idées neuves, faisant naitre les bons travaux, éclore les jeunes talents et de plus champion du bon droit contre la faveur. Aussi, quel ascendant vous aviez pris sur les étudiants et de combien de regrets ont-ils accompagné votre départ! Au moment où vous quittiez Odessa, Pasteur et ses collabo- rateurs venaient de publier l’étonnante série des travaux sur Patténuation des virus et les vaccinations préventives. La question de l’immunité, posée depuis si longtemps, pouvait enfin étre étudiée commodément, puisqu’il était possible de rendre réfractaires les animaux de laboratoire. Vous aussi, vous y pensiez à cette question de l’immunité, et vous y pensiez en naturaliste et en philosophe. Vous. y aviez été conduit par vos observations sur la digestion chez les êtres inférieurs. Il est donc tout naturel que vous ayez pris le chemin du laboratoire de Pasteur et il est tout naturel aussi que Pasteur vous ail accueilli avec empressement, car vous ne Jui apportiez rien moins qu'une doctrine de Vimmunité. Jusqu'à vous, ceux qui avaient abordé le sujet l'avaient pris par le mauvais bout, en l'étudiant chez les animaux supérieurs. Comment, en effet, suivre un virus et les changements qu'il détermine dans un être aussi compliqué qu’un lapim ou même qu'une grenouille? Comment débrouiller le rôle de l'appareil circulatoire, du système nerveux, celui des cellules et des humeurs ? Avec quelle admirable ingéniosité vous avez tourné la diffi- culté ! Vous placez sous Vobjectif du microscope un de ces êtres transparents composé seulement de quelques cellules s’offrant à l'œil de l'observateur, et, au moyen d’une piqûre délicate, vous y introduisez quelques microbes. Si l’animalcule inoculé est sensible, vous assistez au développement du virus et à l’en- vahissement des tissus ; s’il est naturellement réfractaire vous voyez par quel procédé il se débarrasse du parasite. Rien de ce qui se passe entre Vorganisme et le microbe ne vous échappe; le cas est si simple que l'interprétation des faits se présente d’elle-méme. Sur le porte-objet du microscope, vous faites passer succes- sivement des organismes de plus en plus compliqués et vous les infectez tour à lour; puis, vous étendez vos études aux 360 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR étres supérieurs. De toutes ces observations, il résulle avec évidence que chez les êtres naturellement réfractaires, les microbes sont la proie de cellules douées de mouvement capables de les englober et de les digérer. Les choses se passent de la même facon chez les animaux qui ont acquis l'immunité, les inoculations préventives ayant accoutumé graduellement les phagocytes aux microbes et à leurs produits. Voici de grands résultats obtenus avec des moyens bien simples, et c'est la le propre du génie. Aujourd'hui, mon cher ami, vous considérez celte doctrine de la phagocytose avec la tranquille satisfaction d’un père dont l'enfant a fait un beau chemin dans le monde. Mais que de tracas elle vous a causés! Son apparition a provoqué des pro- testations et des résistances et pendant vingt ans vous avez combattu pour elle. Il faut avoir vécu dans votre intimité, pendant cette période de lutte, pour comprendre combien la recherche scientifique peut procurer de joies et aussi de tour- ments à celui qui est passionné pour elle. Vous n'éviliez aucune occasion de vous expliquer; je vous vois toujours, au Congrès de Budapest, en 189%, discutant avec vos contra- dicteurs, le visage enflammé, l'œil brillant, les cheveux embrouillés, vous aviez l’air du démon de la science; mais votre parole et vos arguments irrésistibles soulevaient les applaudissements de l'auditoire. Les faits nouveaux, qui semblaient tout d'abord contraires à la théorie phagocytaire (Phénomène de Pfeiffer, immunité antitoxique, production des anticorps), entraient bientôt en harmonie avec elle. Elle s’est trouvée assez compréhensive pour concilier les tenants de la théorie humorale et les parti- sans de la théorie cellulaire. La doctrine de la phagocytose est certainement une des plus fécondes de la biologie; elle rattache les phénomènes de l’im- munité à ceux de la digestion intracellulaire, elle nous explique le mécanisme de l'inflammation et celui des atrophies. Elle a vivifié l'anatomie pathologique qui, dans son impuis- sance à fournir des interprétations acceptables, élait restée purement deseriptive. L'observation du role des macrophages dans la disparition JUBILE DU PROFESSEUR ELIE METCHNIKOFF 364 des éléments nobles des organes altérés vous a conduit à vous occuper des dégénérescences. Beaucoup d’entre elles sont la conséquence des maladies infectieuses et partant évitables; quant à celles, attribuées communément à la vieillesse, elles sont, d'après vous, presque toujours prématurées. Elles relèvent d'une intoxication chronique ayant son origine dans la fermen- tation des matières dans le gros intestin. Vous nous avertissez que c'est manquer de prévoyance que d'abandonner à elle-même notre flore intestinale. Nous devons peupler notre tube digestif de microbes bienfaisants et en éliminer les microbes nuisibles. Une grande partie de nos misères physiques et de nos misères morales sont dues à cette végétation sauvage de l'intestin. Sans elle, nous atteindrions l’âge de la vieillesse normale qui ne connait ‘pas lappréhension de la mort. Vous avez développé le sujet dans vos essais de philosophie optimiste, qui sont bien l'œuvre la plus originale et la plus suggestive que je connaisse. Vous nen étes pas resté aux spéculations, et, avec votre acti- vité coutumiére, vous avez entrepris l'étude de la flore intes- tinale, étude compliquée s’il en fût, que nous avons tous intérêt à voir pousser à bien, puisque son but est la prolongation de l'existence humaine. En attendant d’avoir accompli ce grand œuvre, vous trouvez le microbe du choléra infantile et vous essayez de conserver la vie aux nourrissons que ce fléau fauche par milliers, surtout durant la saison chaude. Dans vos travaux de bactériologie on devine toujours le naturaliste; que vous avez bien fait de vous souvenir de vos origines! C'est le zoologiste que vous êtes, qui a écrit cet excellent chapitre de physiologie générale, sur le moment où apparait, dans l'échelle des êtres, la sensibilité aux poisons microbiens et la propriété d'élaborer des antitoxines. C'est encore le zoologue qui a choisi les singes anthropomorphes pour l'étude expérimentale de certaines maladies propres à l'homme. Vos recherches sur la syphilis du Chimpanzé ont donné l'im- pulsion à la série de travaux qui ont tant fait progresser nos connaissances sur cette grave affection. Quand, il y a vingt-sept ans, vous étes entré dans cet Institut qui venait d'être construit, vous désiriez seulement deux 262 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR petites pièces où vous puissiez travailler en paix. Vous vous étiez installé au rez-de-chaussée, au fond du couloir de gauche, avec M™ Metchnikoff comme préparateur. Ces deux chambres où vous vouliez vous isoler ont été bientôt envahies par les travailleurs en quête d’un guide et d'un sujet de recherches. Vous deviez monter au second étage, dans un local plus waste où vos disciples pourraient trouver place. A Paris, comme à Petrograd, comme à Odessa, vous deveniez chef d'école, et vous avez allumé, dans cet Institut, un foyer scientifique qui a rayonné au loin. Votre laboratoire est le plus vivant de la maison, les tra- vailleurs s’y pressent à l’envi. C’est là qu’on discute l’événe- ment bactériologique du jour, que l’on examine la préparation intéressante, qu'on vient chercher l’idée qui sortira l’expéri- mentateur des difficultés où il est empétré. C’est à vous qu'on demande le contrôle d'un fait récemment observé, qu'on dévoile la découverte qui souvent ne survit pas à votre eritique. Et puis, comme vous lisez tout, que vous savez tout, chacun puise en vous le renseignement dont il a besoin, la substance d'un mémoire qui vient de paraître et qu il ne lira pas. Cela est bien plus commode que de chercher à la bibliothèque et aussi plus sûr, car on évite ainsi les erreurs de traduction et d'interprélation. Votre érudition est si vaste et si certaine qu'elle sert à toute la maison. Pour ma part, que de fois je vous ai mis à contribution! On ne craint pas d’abuser de vous, parce qu'aucune question scientifique ne vous trouve indiffé- rent. Votre ardeur réchauffe Vindolent et donne confiance au sceptique. . Vous étes un collaborateur incomparable, j'en sais quelque chose, puisque J'ai eu la bonne fortune d’être associé plu- sieurs fois à vos recherches. En vérité, vous faisiez toute la besogne. Plus encore que votre science, votre bonté attire; qui de nous ne l’a ressentie! J'en ai eu la preuve touchante lorsque, à diverses reprises, vous m'avez soigné comme votre enfant. Vous êtes si heureux d'obliger que vous avez de la reconnais- sance pour ceux à qui vous rendez service. Pas plus que vous, Me Metchnikoff ne sait refuser à qui sollicite, et, selon l'expres- sion populaire, votre maison est une maison du bon Dieu. = dal is. 2 JUBILÉ DU PROFESSEUR ELIE METCHNIKOFF 363 + L'intimité de cette réunion permettant d’y parler à cœur ouvert, je dirai que ne pas donner vous est si pénible que vous aimez mieux être exploité que de fermer la main. L'Institut Pasteur vous doit beaucoup, vous lui avez apporté le prestige de votre renommée et par vos travaux et ceux de vos élèves, vous avez largement contribué à sa gloire. Vous y avez donné l'exemple “ désintéressement en refusant tout traitement pendant les années où le budget s’équilibrait diffici- lement, et en préférant aux situations glorieuses et lucratives qui vous étaient offertes la vie modeste de cette maison. Resté Russe de nationalité, vous êtes devenu Francais par votre choix et vous avez contracté avec l'Institut Pasteur une alliance franco-russe, longtemps avant que les diplomates en aient eu l'idée. Si nous vivions dans des temps ordinaires, cette salle serait trop petite pour contenir les fils spirituels, les amis, les admi- rateurs accourus de tous les pays pour fêter vos soixante-dix ans. Dans les circonstances tragiques où nous sommes, quelques amis seulement se pressent autour de vous. Ceux de vos élèves qui font leur devoir à l’armée m'ont expressément chargé d'être l’interprète de leurs sentiments d'affectueuse vénération. D'autres certainement pensent à vous en ce jour, ils ne peuvent le manifester puisqu'ils sont sous le joug de l'ennemi. Je veux parler de Calmette, enfermé dans Lille, et de Bordet et de Massart, retenus à Bruxelles. Je connais assez leur cœur pour prendre sur moi de vous offrir les hommages qu'ils ne peuvent vous adresser eux-mêmes. Mon cher Élie Metchnikoff, à soixante-dix ans, après un labeur qui suffirait à illustrer plusieurs savants, vous êtes en belle santé, plein d'activité et d'idées, aussi, nous ne vous souhaitons pas un repos incompatible avec votre tempérament, mais une nouvelle période de glorieux travaux. Excusez, mon cher ami, ces lignes écrites en hâte, dans une chambre de malade, elles exposent votre œuvre d’une facon bien indigne d'elle; cependant, elles auront atteint leur but si us y sentez l'affection et la reconnaissance de tous ceux qui, absents ou présents, m'ont prié de parler en leur nom. D' Roux. 364 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR CAUSERIE DE M. E. METCHNIKOFF Monsieur le Président, Mesdames, Messieurs, Je suis vraiment confus de ce qu'en ce moment, lorsque toute l'attention est absorbée par une lutte gigantesque, vous vous soyez rappelé un événement aussi minuscule que mon soixante- dixième anniversaire. Je vous remercie tous bien sincèrement. Je remercie tout particulièrement notre honoré Président, M. Gaston Darboux, de son discours si bienveillant à mon égard. Je remercie, non moins, notre cher Directeur, M. Roux, qui ma comblé de bonnes paroles capables d'illusionner l'homme le plus sceptique sur sa valeur. Puisque nous nous trouvons réunis ici, Je saisis cette occa- sion pour remercier l'Institut Pasteur du si bon accueil qu'il m'a fait durant les vingt-sept ans écoulés depuis sa fondation. C'est ici, dans le calme du laboratoire, en dehors de toute fonction étrangère au travail rigoureusement scientifique, que j'ai pu développer mes idées et arriver tranquillement à la fin de ma carrière. Car, il faut bien s'y résigner, soixante-dix ans constituent le terme de la vie active, dans les conditions pré- sentes. Et c'est pour celte raison qu'on le célèbre d’une facon toute particulière. Depuis les temps les plus reculés il a été proclamé par le roi David que « la vie des hommes est de soixante-dix années. Chez les plus forts elle va jusqu'à quatre-vingts ans; au delà, il n'y a plus que labeur et douleur ». Depuis, cet âge de soixante-dix ans a été désigné comme la limite naturelle de la vie normale. Ila été bien établi et souvent confirmé que c’est vers l’âge de soixante-dix, soixante et onze ans qu'il se produit le plus de décés (abstraction faite des premiéres années de l'enfance). Voici le tableau du statisticien italien Bodio qui en fournit la preuve. Je dois me considérer comme particulièrement heu- reux d’avoir atteint le sommet de cette montagne, ce qui n'est 10-11 JUBILE DU PROFESSEUR ELIE METCHNIKOFF 365 pas toujours facile. On pense souvent que la longévité est une qualité héréditaire. C'est ainsi que le célèbre inventeur de lantisepsie, Lister, a pu atteindre Page de quatre-vingt-cing ans, appartenant & une famille dont les membres viyaient longtemps. Son père est mort à quatre-vingt-trois ans, et son grand-père à quatre-vingt-lreize ans. Tel n’est pas mon cas. Mortalité aux différents âges, rapportée pour chaque pays à 100.000 naissances. Mes grands-parents, mes parents, mes frères et ma sœur, tous ont disparu avant d’avoir atteint mon age (les petites croix marquées sur le tableau indiquent lage de la mort de mes parents, de mes frères et de ma sœur). Je suis tenté d’expli- quer ma longévité par le régime hygiénique auquel je me suis soumis depuis un cerlain nombre d'années, régime basé sur la conviction de la grande nocivité de notre flore intes- tinale. Une idée répandue prétend que les microbes de notre tube digestif se trouveraient en symbiose avec l'organisme = a a 5 8 = 2 D 2 5 8 = 2 3 2 = = 8 Lo = 2 & 2 2 2 8 3 e 2 8 2 3 | | | 1 = — — 2000 | | | | llalie (1881-82-83 — Paracorissorce Cll? dacille mobile produisant de Tindol, ne liquéfiant pas la gélatine, inactif vis-à-vis du rouge neutre, provoquant la fer- mentation du lactose et non celle du saccharose. Ce germe a été isolé des eaux, des feces, de lurine; dans aucun cas nous n'avons constaté d’agglutination ni par le sérum antityphique ni par le sérum de bœuf normal. Nous n'avons pas non plus constaté de cils dans les divers échan- tillons de ce genre a notre disposition. VI. — ParacoLIBACILLE CRLS. Il s’agit d’un germe différent de tous les précédents par la non-production de l'indol. Il est assez voisin du paratype B qui, lui, ne fait pas fermenter le saecharose. Nous avons rencontré cetle espèce dans les eaux, mais aussi dans le sang d’un malade présentant un état typhique, d'ailleurs terminé par la guérison. Il y a des différences entre ce germe suivant ses origines hydrique ou sanguine, comme l'indique le tableau suivant. CONTRIBUTION A L'ETUDE BACTERIOLOGIQUE DES EAUX 469 AGGLUTINATION SERUM par sérum normal CILS antityphique | de bœuf Germe des eaux. | Négalive. Négative. Absents. Germe du sang. Positive. Négative. Cils asseznombreux. Le pouvoir d’agglutination de ce germe par le sérum anti- typhique est moins intense que celui du paralyphique B pour lequel Ja coagelutination se fait à 1/100. Wilks = Paracormacmer CLS: Il s'agit encore d'un germe ne produisant pas Vindol, inactif sur le rouge neutre, mais faisant fermenter les sucres. Les échantillons de notre collection proviennent soit des matières fécales, soit des purins. Le germe d’origine fécale nous a paru très agglutinable, tant par le sérum antityphique que par le sérum de bœuf; celui émanant des purins, au contraire, n’est pas agglutiné. Vill = Paraconmaciunn G- Nous arrivons maintenant au germe des eaux qui se rap- proche le plus de l'Eberth. Le tableau suivant établit le paral- lèle de ces deux germes. | es | 2 | = | | EUR RE D us: el Noes ae SERUM | SERUM — = is A = = æÆ n | = = =| GELATINE a aie as = | normal = Zz = Z Sa oS |. anti | a = EN SZ | | typhique| bœuf) _ = ye © | | | À Las | | | | | : Mo- Jeet ENON | a Nh gotae | Haible- ,Dertn. : ler, re | be sise Eberth bile. |à 4 p.| |liquéfiée. LT PAL a es tine. ment : | aggluliné. | | | | | aran 1_ | | | # | Inc 7 = Foie Mo- a2 | ale Non hg gil 9 ie poe | Non 3 «#1 : wo Es = bile. |à 4 u.| | liquéfiée. : ES «lage 5 Cz if a | I | cils.. tiné. |agglutiné. CE EE PP I TLE IE AEN IEE AE PE TET ED 31 +70 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR LES BACILLES COLIFORMES DES EAUX I. — ConcuRRENCE VITALE DE L EBERTH ET DU COLI. Lorsque le bacille typhique et le colibacille se trouvent mélangés, il est pour ainsi dire impossible au bactériologiste d'isoler le premier. Cela tient aux raisons suivantes : ces deux germes ont les mêmes conditions de culture; ils poussent faci- lement l’un et l’autre mème en présence de l'acide phénique, même à 41°5. D'autre part, les diverses substances que l’on peut ajouter au milieu pour sélectionner les germes ne laissent subsister que le germe le plus viable, le plus résistant: le coli- bacille. Cela nous parait un contresens de mettre en concur- rence vitale le colibacille et l'Eberth sur des milieux dysgé- niques. Il est évident que le colibacille l'emportera toujours. La méthode basée sur la séparation des deux bacilles par Pagelutination est simple en théorie, mais elle ne tient pas compte des coagglutinations intéressant aussi le coli; aussi ne peut-elle donner de résultat que si le bacille typhique est notablement plus abondant. Toutes les méthodes employées jusqu'à ce jour ont donné quelques résultats positifs, mais toutes sont inconstantes. On est donc réduit à la recherche et au dosage des colibacilles considérés comme des témoins de la présence possible de lEberth. Mais Padaptation au milieu ambiant, si différent du milieu organique au point de vue thermique et nutrilil, déforme le colibacille, en modifie les caractères; d’où lutilité pratique de la notion des coliformes, d'autant plus grande que toute la série pathogène, ne produisant pas d'indol, nest pas adaptable en dehors de l'organisme humain et que les coli- formes qui s'en rapprochent sont le plus souvent ineffensifs et d'origine animale. IT. — Ls COLIFORMES DÉS EAUX DE SURFACE. Dans les eaux de surface, source, rivière, fleuve, on trouve le plus souvent les colibacilles vrais, communis et commu- 7207. { ~ 4 ISSOUDUN EAUX S QUE DE Cc ACTERIOLOGI > J ce germe est incontestablement le ONTRIBUTION A L'ÉTUDE I = 4 C La cause de l'apparition de gpraiquendas| gIGr MeV | astwune | e161 une | e161 ‘en | IG Ay | 161 Sn | gré 49189, | £T6I sours | diet 2squ999q| aig) aaqusaanyy| ETUI ziel aquiandag] -0-|-0O-——-=—o + | -0--O---— lo FO ais oy | ace] Zier une | aie. en | Blel Tsay | GISI Se | i GIGI taurag | 2IBI Jouuep | iter axquaaag| \ | | | &- od ee — ep nee IG suqueao | 1161 9499990 | 1109 | 2000/1000 2000|4000 1500 | 100 Saut) | ; eau. CHATELLERAULT dans les cours d S r a 4 € d'Issoudun et Chatellerault. s eaux pluviales souill a Courbes des examens bactériologiques des eaux brutes des garnisons versement de r e d 472 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Enoncer ce fait, c’est dire que la constatation du colibacille SAINT-MAIXENT [Décembretol | Janvier 1912 | Fevrier 1912 | Mars 1912 | Avril 1912 | Septembre 1912 | Octobre 1912 | Juin 1912 INovernbre 912 | Juillet 1912 | Août 1912 [Décembre 912 | Janvier 1913 | Fevrier 1913 | Mars 1913 Avril 1913 | Mai 1913 | Juin 1913 | Juillet 1913 | Août 1913 | Octobre 1913 E 2000/1000 1500 | "LE BLANC Courbes des examens bactériclogiques des eaux brutes des garnisons de Saint-Maixent et Le Blanc. répondra aux périodes de pluie et d’eaux troubles. La courbe CONTRIBUTION A L'ÉTUDE BACTÉRIOLOGIQUE DES EAUX 473 de ce germe sera donc saisonnière. En même temps, le nombre des autres germes s’élévera d'une facon massive. D'autre part, la souillure étant due aux lavages des surfaces, il n'y aura que fort peu d’anaérobies. Pour se rendre comple de ces faits, il suffit de comparer les tableaux ci-dessus (p. 47! ct 472) des principales garnisons de notre corps d'armée alimentées en eau de rivière. [(La numération des colibacilles a été faite selon la méthode de notre maitre, M. le professeur Vincent (1)|. Nous pourrions fournir à Vappui de notre démonstration d'autres graphiques, mais ils n'apporteraient aucun fait nou- veau. Tous nous permettent de constater : 1° Que, dans les eaux de surface, toute élévation dans le taux du coli répond à une élévation parallèle et proportionnelle du germe total des germes aérobies; 2° Qua un degré léger d'infection, le nombre des germes peut s'élever sans que le colibacille apparaisse: 3° Que la présence du colibacille est intermittente et répond à des circonstances soit saisonnières, soit météorologiques (orages et crues par exemple). Ill. — LES cOLIFORMES DANS LES EAUX SOUTERRAINES. Dans les eaux de surface nous avons constaté le parallé- lisme du taux du colibacille avec celui des germes aérobies en général. Dans les eaux des puits ce rapport est souvent en défaut : mais, par contre, il ya un rapport élroit entre la teneur d'une eau en bacilles coliformes et la teneur de celte même eau en bacilles anaérobies. C'est que, dans les fosses, loin de l'air atmosphérique, se constitue une symbiose bactérienne entre les anaérobies, ouvriers de la première heure dans la dis- location de la molécule organique, et les bacilles anaérobies facultatifs qui utilisent les produits du premier élevage. Notre attention s’est surtout portée sur l'eau de puits voisins de fosses d’aisance. Pour faire comprendre toute la portée de ces recherches, nous allons citer deux cas concrets, concer- nant des casernes de gendarmerie en campagne. 1) Annales d'Hygiène générale el appliquée, février 1909. 47% ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Premier exemple. — Une petite épidémie typhique éclate au mois de juillet 1913, à la caserne de gendarmerie de Clan dans la banlieue de Poitiers. 3 cas se produisent chez les enfants. Nous étant rendus sur les lieux pour procéder à la vaccination ef à une enquête épidémiologique, nous n'avons pas tardé à nous rendre compte que le puits de la gendar- meric se trouvait à moins de 5 mètres d'une fosse d'aisance non élanche appartenant à une maison voisine. Un cas de fièvre typhoide s'était produit dans la maison en question en 1912. Les malades avaient bu de Peau du puits : l'origine de cette pelite épidémie était manifestement hydrique. L'examen bacté- riologique a mis en évidence, au taux de 1.000 germes par litre, un bacille mobile, ne prenant pas le Gram, produisant de Vindol, faisant virer le rouge neutre et fermenter les sucres, mais liquéfiant la gélatine, répondant par conséquent à notre formule PIRLS; aucune trace de coli vrai. Mais par contre de très nombreux anaérobies stricts (une vingtaine par centimètre cube), odeur putride des cultures. La désinfection du puits est restée sans effet, le puits recevant des infillrations de la fosse selon toute probabilité. Deuxième exemple. — Nous avons été appelés à expertiser l'eau du puits de la gendarmerie de Neuilli-Pont-Pierre, dans les environs de Tours. Mise en évidence du même germe PIRLS en compagnie de nombreux anaérobies. Le curage et la désinfection du puits n'ayant pas modifié la valeur de l’eau, nous procédons sur place à une enquête méticuleuse. Nous apprenons que la fosse d’aisance, située à 25 mètres, pré- sente, quoique cimentée, des variations de niveau suivant les saisons. L'épreuve de la fluorescéine, que nous pratiquons alors en introduisant dans celte fosse 5 grammes de cette substance, nous démontre que Ja fosse contamine l’eau du puits, car dès le lendemain soir celle-ci présente la teinte verte fluorescente. Cest le deuxième exemple d'eau de puits contaminée par une fosse d'aisance ne contenant pas de coli vrai, mais un coliforme liquéfiant la gélatine et de nombreux anaérobies. Ces constalalions vont nous permettre à lavenir de consi- dérer comme souillée toute eau contenant l'association de coli- formes liquéfiants et @anaérobies, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE BACTERIOLOGIQUE DES EAUX 475 IMPORTANCE PRATIQUE DE LA NOTION DU COLIFORME Il ressort des considérations précédentes que la constalation de la présence ou de l'absence du colibacille, pour si impor- tante quelle soit dans l'appréciation bactériologique d’une eau, ne doit pas faire oublier les autres facteurs, notamment la présence de tous les bacilles produisant de Pindol, mème liqué- fiant la gélatine, et celle des anaérobies. S'il nous faut renoncer au fallacieux espoir de trouver dans Peau des espèces pathogènes, nous devons au moins nous altacher à y déceler Ja flore fécale humaine dont le coli ne pré- sente qu'une seule espèce, flore comprenant tout un groupe de germes ayant comme caractères communs de produire l'indol, de faire virer le rouge neutre, se comportant d'une facon variable vis-à-vis de ta gélatine et des sucres, alors que les espèces voisines d’origine animale ne produisent pas d'indol, ne virent pas le rouge neutre et sont souvent agglutinables par les sérums normaux de bœuf ou de cheval. Le Gérant : G. Masson. Paris — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 29° ANNEE OCTOBRE 1915 N° 40 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR LA MORT DU PAPILLON DU MURIER UN CHAPITRE DE THANATOLOGIE par Et. METCHNIKOFF. (Avec les planches X et XI. Le fait que la mort est souvent redoulée, comme un épou- vantail que l’on n'ose pas regarder en face, est sans doute une des causes de l'ignorance de la science sur tout ce qui la con- cerne. Lorsqu'on est en présence d'un moribond, ce n'est pas un homme de science ni un médecin, mais un serviteur de l'Église que l'on appelle. | Ce n'est que dans ces dernières années que l’on a commencé à étudier les phénomènes de la mort au point de vue scienti- fique. Marinesco (4) dit très justement « que l’évolution de nos connaissances relatives au problème de la mort naturelle a suivi la fameuse loi des trois états d’Auguste Comte; l'âge théologique, puis l’âge métaphysique et enfin l’âge de la science posilive ». Seulement je ne partage pas son opinion lorsqu'il pense que les travaux récents de plusieurs auteurs et les siens entre autres, rentrent dans la troisième catégorie. En effet, dans son article sur « le problème de la mort naturelle », de même que dans une brochure de Ribbert (2) sur « la mort par D (4) Revue scientifique, 30 mat 1914, p. 673. (2) Der Tod aus Allersschwiche. Bonn, 1968. 478 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR la débilité sénile » et dans plusieurs autres publications ana- logues, on cherche vainement la base scientifique de leurs déductions. Quels sont les cas de mort naturelle qu’ils ont pu soumettre à leurs investigations? Il est question dans tous ces travaux d’altérations que l’on observe chez de vieux hommes ou de vieux animaux supérieurs (mammitères et oiseaux), examinés après leur mort. Mais s’agissait-il dans ces cas ' d'exemples de véritable mort naturelle? Rien ne le prouve dans l'exposé des auteurs en question, ce qui fait supposer qu'ils avaient affaire aux cadavres, dont les altérations étaient dues aux maladies chroniques ou aiguës qui tuent les vieillards (pneumonie, tuberculose, tumeurs malignes, maladies du cœur et des vaisseaux). Les idées basées sur de pareils faits rentrent dans le domaine de spéculations plutôt métaphysiques que vraiment scientifiques. Dans cette catégorie doit être rangée la théorie de Marinesco d'après laquelle la vieillesse et la mort seraient dues à la déshydratation des colloïdes. Bien que, au bout du compte, tous les phénomènes organiques doivent un jour se réduire à des processus physico-chimiques, pour le moment il est impossible de préciser leur mécanisme. Lorsque Marinesco, en faveur de sa thèse, cite la déshydratation de cerveau de l’homme adulte par rapport à celui du fœtus, il oublie que le premier est infiniment supérieur au second au point de vue fonctionnel. La déshydratation très considérable du cerveau de l'adulte ne l'empêche pas de remplir un rôle qui ne peut être comparé mème de loin à l’affaiblissement intellectuel de la sénilité. M'élant proposé d'étudier la mort naturelle chez des animaux supérieurs, je me suis adressé aux rats el souris domestiques, dont le cycle vital est notoirement très bref : on leur attribue une longévité de trois à cing ans. Or on ne réussit que très rarement à les garder aussi longtemps. Au bout d'un an a dix- huil mois les rats manifestant des signes visibles de vieillesse, mouraient avant d'atteindre leur fin naturelle. Dans immense majorité des cas leur mort était occasionnée par des abcès pulmonaires, provoqués par des diplocoques. Il m'est arrivé récemment de garder une souris vivante pendant trois années. Elle est morte d'une infection généralisée par plusieurs espèces bactériennes. LA MORT DU PAPILLON DU MURIER 479 Je me range à l'opinion de Oscar Bloch (1) qui met en doute l'existence de la mort naturelle dans l'espèce humaine Lorsqu'on pense que l’homme qui a vécu le plus longtemps, Thomas Parr, mort âgé de 152 ans et 9 mois (2), succomba à une maladie intestinale, occasionnée par un repas très copieux, on se décidera difficilement à accepter comme « mort natu- relle » les exemples de longévité beaucoup moindre. Par la mort naturelle il ne faut pas, bien entendu, com- prendre les cas considérés comme tels par la médecine légale qui les distingue des cas de mort violente. Tous les exemples de mort accasionnés par les maladies rentreraient dans la caté- gorie de mort naturelle. Autrefois les maladies paraissaient comme quelque chose de tellement inévitable qu'on n'hésitait pas à les prendre pour ‘un phénomène normal. Claude Ber- nard (3) citait parmi « les caractères généraux des êtres vivants : l’organisation, la génération, la nutrition, l’évolu- tion, la caducité, la mort et la maladie ». Étant donné qu'un assez grand nombre de maladies sont devenues beaucoup plus rares et tendent même à disparaître dans certains pays (lèpre, peste humaine, fièvre récurrente, typhus exanthématique), il n’est pas téméraire de supposer qu'avec les progrès de la méde- cine, progrès incontestables bien que lents, les maladies dans l'avenir ne présenteront plus l'extension que nous voyons actuellement. Dans ces conditions, le problème de la mort vraiment naturelle, comme terme de la vie normale, prendra une réelle importance. Il est donc intéressant de poser d’abord cette question : la mort naturelle existe-t-elle dans la nature? Sans parler des plantes, - il est indéniable que dans le monde animal des exemples d'une pareille fin du eyele normal de la vie existent réellement. Comme mort naturelle, nous entendons, avant tout, la mort des êtres dont l’organisation est incompatible avec une vie tant soit peu prolongée. Nous ne pouvons donc pas nous ranger à l’opi- nion des savants qui prétendent trouver des exemples de mort naturelle chez des animaux aptes à vivre longtemps. C e-t ainsi (1) O. Bcocn, Vom Tode, t. I, p. 200-202. (2) Lesoncourt, Galerie des centenaires anciens el modernes. Paris, 442, p. 100. (3) Lecons sur les phénomènes de la vie, 1878, p. 32. 480 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR que Harms (1) considère la mort de Hydroïdes pectinata, un annélide muni d'organes digestifs complets, qui meurt souvent dans les aquariums, comme un cas de véritable mort nalurelle. D'abord on ne concoit pas pourquoi un animal capable de se nourrir mourrait en peu de temps. L’auteur a bien conslaté que ces animaux ne contenaient pas de « parasites », c'est-à-dire quelques entozoaires appartenant au groupe de vers ou de crus- tacés, mais lout son récit fait supposer qu'il s’agit dans son exemple de quelque infection microbienne, favorisée par le traumatisme occasionné par le détachement de parties lors de l « autotomie ». La plaie qui se produit pendant cet acte est bien capable de s’infecter, surtout dans les conditions artifi- cielles de vie dans un aquarium. Le délabrement d'une grande partie des tissus de Vanimal (épithélium intestinal et rénal, cellules nerveuses), comme on n’en voit jamais chez des animaux qui meurent de leur mort naturelle (Éphémères, Rotateurs, Papillons), sauf chez ceux qui succombent à la suite d’un trau- matisme (Rhabilitis, Pilidium), corroborent notre supposition que la mort d'Hydroïdes est due à une infection microbienne. Les phénomènes de régénération des organes qui se produisent à côté de l’autotomie, parlent également contre la thèse de la mort naturelle des annélides de Harms. Par contre, on a bien le droit d'admettre la mort naturelle des males de Rotateurs qui naissent avec des spermatozoides prêts à féconder et qui sont dépourvus d’organes de digestion et de préhension de la nourriture. Organisés de facon à ne pas pouvoir vivre longtemps, ils meurent peu de jours après leur éclosion. Un autre exemple de mort naturelle nous est fourni par les Ephémères qui, bien que vivant longtemps pendant leur état larvaire, ont une durée très brève dans leur stade ailé. Quelques-uns parmi eux ont à peine le temps de s'accoupler et meurent peu d'heures après leur sortie de l'eau. Leur tube digestif peu développé et les organes mandibulaires atrophiés indiquent bien qu'ils sont organisés pour une existence très courte. L'étude que nous avons faite de ces deux exemples de mort naturelle ne nous a pas permis de bien préciser le méca- 1) Zoologischer Anzeiger, 1912, t. XL, p.417. LA MORT DU PAPILLON DU MURIER 481 nisme de ce phénomène. Les mâles des Rotateurs, très com- modes pour une étude morphologique à cause de leur trans- parence, sont trop petits pour des recherches physiologiques et histologiques détaillées. Les Éphémères sont plus grands, mais leur vie est trop courte pour permettre une étude approfondie. Les plus grandes espèces font leur apparition seulement pen- dant quelques jours de l’année, ce qui présente un grave inconvénient pour les recherches. Autant que nous avons pu analyser le processus de la mort naturelle des males des Rota- teurs et des Éphémères, nous sommes arrivé au résultat que ce phénomène ne dépend pas de quelque maladie infectieuse subite. Se manifestant d’abord sous forme de dérèglement des mouvements du corps, la mort naturelle dans nos deux exemples doit être attribuée à quelque altération du fonction- nement des centres nerveux. Dans l'intention de continuer nos recherches sur la mort naturelle avec plus de précision, nous avons choisi dans le monde des Insectes un exemple qui nous paraît de beaucoup le meilleur de toute la série animale. Nous nous sommes adressé aux papillons du mürier (Bombyx morr). Dépourvus d'une trompe capable de prendre quelque aliment, ces insectes ont une organisation qui ne leur permet de vivre qu'un temps limité. Hs sont donc certainement voués à une mort naturelle. Elevés dans les magnaneries en très grande quantité, ces papillons peuvent être observés pendant plusieurs mois consé- cutifs. Assez grands pour la dissection et pour certaines recher- ches physiologiques, ils se prêtent bien à un minutieux examen histologique. Toutes ces raisons justifient pleinement notre choix (1). Dans sa monographie du ver à soie, Malpighi (2) insiste sur l'influence de la température sur la longévité des papillons. Pendant la saison chaude ils meurent dans l’espace de 5 à 12 jours, tandis qu'au commencement de l'hiver leur vie peut se prolonger Jusqu'à un mois. (4) Notre travail a pu être exécuté dans le courant des deux dernières années (1914-4915), grace au concours très dévoué de M. F. Lambert, direc- teur de la Station séricicole de Montpellier. Nous lui adressons ici nos plus vifs et plus sincères remerciements. Nous remercions aussi M™e P. Bastien qui nous a fourni un grand nombre de cocons. (2) Trailé du ver à soie. Traduit par Maillot, 1878, p. 124. 482 ANNALES DE- LINSTITUT PASTEUR D'après Maillot et Lambert (1), la durée de la vie du papillon « en moyenue est de 12 jours; elle peut tomber & moins de 24 heures et dépasser d’autres fois 25 et mème 30 jours ». Il nest point douteux que les papillons qui meurent le lendemain de leur éclosion ou très peu de jours après, ne peuvent pas être considérés comme morts de leur mort naturelle. Aussi dans nos observations, faites dans le courant de l'été, nous avons exclu tous les papillons morts avant 9 jours. Du reste, sur 116 papil- lons, nous n'avons observé qu'une seule femelle morte dans ce délai. Le plus grand nombre de morts (13 cas) s’est produit le 13° jour, après quoi la mortalité a diminué jusqu’à la 24° journée, époque la plus reculée de la durée de la vie de nos papillons. Le plus âgé de nos males est mort le 23° jour après l'éclosion, pendant que 3 femelles vécurent 24 jours. La durée moyenne de la vie de nos 115 papillons des deux sexes a été de 16,25 jours. Les femelles ont vécu un peu plus longtemps que les mâles. Tandis que la durée moyenne de ces derniers a été de 15,6 jours, celle des femelles s'est élevée à 16,6 jours. Les femelles ont donc survéeu les mâles d’une journée. Ce résultat se trouve en contradiction avec Loiseleur-Deslongchamp (2) qui a vu les mâles vivre plus longtemps que les femelles. Nous ne sommes pas nou plus en accord avec cet auteur sur la durée comparalive de la vie des femelles vierges et accouplées. D'après nos observations, la vie moyenne de 15 vierges a été de 17,4 jours, tandis que celle des 8 femelles accouplées n’a duré que 17 jours (3). Toutes ces différences dans la longévité ne se sont pas mon- trées assez grandes pour qu'on leur attribue quelque influence considérable. Cet exemple de mort, survenant après une période de vie courte, peut-il être attribué à la mort naturelle véritable? L'or- ganisation du papillon du müûrier nous fournit ici des indica- tions précieuses. Contrairement à la règle générale d’après laquelle les Lépidoptéres sont munis d'un appareil de succion (1) Trailé sur le ver à soie du mürier, 1906, p. 305. (2) Nouvelles considérations sur les vers à soie. Paris, 1838. (3) Ce résultat concorde avec les observations de P. et N. Rau (Journal of experimental Zoology, t. XII, 1912, p. 199) sur les Saturnides, chez lesquelles les femelles non fécondées vivaient un peu plus longtemps que les fécondées. LA MORT DU PAPILLON DU MURIER 483 constitué par une trompe, les organes de préhension chez lé papillon du mürier sont atrophiés. Au lieu de la trompe il ne possède que deux ampoules, représentant les rudiments de mâchoire. La lèvre supérieure (labre) ne se trouve qu’à l'état de vestige. On conçoit que, dans ces conditions, le papillon du mûrier soit incapable de prendre de la nourriture. Aussi, tous les auteurs sont d'accord en affirmant qu'il reste à jeun pendant tout son cycle vital. Cette conclusion se trouve en parfait accord avec le genre de vie que mène notre lépidoptère. Incapable, à quelques exceptions près, de voler, il vit dans les conditions naturelles sur les branches du mûrier n’y trouvant aucun ali- ment à sa portée. L’éclosion du papillon se fait pendant la saison lorsque les fleurs sont déjà passées et les mûres pas encore prèles. Bien que l’ensemble des faits signalés démontre suffisam- ment que l’organisation de notre papillon est incompatible avec une vie prolongée, nous avons voulu néanmoins nous en assurer d'une façon plus directe. Il ne faut pas perdre de vue que, bien que dépourvu d'organes de succion, linsecte possède un tube digestif complet. Un tout petit orifice buccal conduit dans un œsophage, suivi d'un sac aérien, de l'estomac et de l'intestin proprement dit. Au moment de l’éclosion, le papillon rejette par sa bouche une gouttelette de liquide transparent alcalin qui sert pour le ramollissement du cocon. Seulement capable d’éructation, la bouche est impropre à l’avalement. A maintes reprises, avec des papillons à peine éclos aussi bien qu'avec ceux déjà prêts à mourir, Je faisais l'expérience sui- vante: je leur mettais sur la bouche une goutte de sirop additionné de carmin en poudre ou une goutte du contenu rouge des mures. Jamais je n'ai pu constater le moindre essai de déglulition ni de passage de ces liquides colorés dans le tube digestif. Le papillon du mèrier ne s’alimentant pas, il est incapable de vivre longtemps, ce qui confirme la supposition que sa mort doit être réellement naturelle. Cetle supposition peut-elle être appuyée par d’autres arguments? Nous avons cité plus haut l'exemple des Rotateurs males et des Éphémères qui meurent sans être envahis par des microbes. En est-il de même pour 484 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR nos papillons? Le fait est bien connu que les papillons du mürier sont quelquefois atteints de plusieurs maladies infec- tieuses, parmi lesquelles la pébrine, qui a fait le sujet des recherches classiques de Pasteur. La muscardine et la flacherie ont également été observées chez ce lépidoptère. En présence de ces faits il a fallu avant tout se rendre compte du rôle des nicrobes dans sa vie et dans sa mort. Ge sont surtout les vers à soie qui sont capables de s’infecter par leur nourriture. Il est toutefois remarquable que leur tube digestif ne contient à l’état normal qu'une quantité infime de microbes. Contrairement à la règle générale, les vers à soie n'ont pas de flore intestinale. En parcourant les préparations microscopiques faites avec le contenu de leur tube digestif, on est frappé par l'absence de toutes sortes de microbes. Même l'ensemencement de ce contenu sur les divers milieux nutritifs, ne fournit que de rares colonies de bactéries, de torulas et de moisissures. Parmi les bactéries de l'intestin des vers à soie se rencontre quelquefois le petit diplo- et streptocoque dévrit par Pasteur (1) comme « témoin » de la flacherie. Ce même microbe a été retrouvé par lui dans la poche stomacale des chrysalides, dans certains cas même en grande quantilé. J'ai aussi constaté sa présence chez beaucoup de papillons au moment de la mort. En examinant les frottis du contenu de ces papillons colorés par le bleu de méthylène, je rencontrais des petits diplocoques en plus ou moins grand nombre, qui rappelaient par leur aspect les coccobacilles paralactiques. Dans quelques cas, ces microbes se trouvaient autour des tissus, tandis que dans la plupart, on n’en rencontrait que dans le contenu de l'estomac. On ne peut admettre l'infec- lion que dans les exemples où les diplocoques étaient géné- ralisés dans l'organisme entier, tandis que dans ceux où ils ne se trouvaient que dans le contenu stomacal, il ne pouvait ètre question que des microbes intestinaux de la période larvaire. La grande majorité de nos papillons morts dans l'espace entre 9 et 24 jours après l'éclosion, ne présentaient de microbes ni dans les lissus ni dans l'estomac. Sur 115 papillons éludiés sous ce rapport, nous avons rencontré 14 infectés, c’est- (1) Etudes sur la maladie des vers à soie. Paris, 1810, t. I, p. 226. LA MORT DU PAPILLON DU MURIER 485 à-dire renfermant des diplocoques dans leurs tissus et 15 n'en renfermant que dans la poche stomacale. Si on les ajoute aux infectés, il n’en résultera que 25 pour cent des papillons dont la mort pourrait être attribuée à une intervention micro- bienne. Dans ce nombre ont été rangés quelques papillons dont l'estomac contenait une moisissure verte (Penicillium glaucum) parfois réunie en une sorte de plastron. H est probable que les diplocoques et les moisissures s'étaient développés pendant la dernière période de la vie des papillons aux dépens des microbes et des spores avalés par les chenilles. En excluant le quart des papillons morts, suspects d’avoir été infectés, il n’en reste pas moins de 75 p. 100, chez lesquels nous n'avons trouvé ni bactéries, ni moisissures. Si les pre- miers peuvent être considérés comme morts de leur « mort naturelle » au point de vue de la médecine légale, c'est-à-dire moris sans avoir subi aucun acte de violence grossière, la mort des/seconds (les trois quarts) doit être attribuée à la vérilable mort naturelle au point de vue que nous avons précisé plus haut, comme résultant de l'organisation même. Nous ne voyons aucune raison pour admetire l'intervention de quelque microbe filtrant ou « invisible » dans les cas où on ne trouve aucun microbe capable d'être décelé par les méthodes en notre possession. L’élude expérimentale de cette question est actuellement impossible, étant donnée l'absence de moyens pour isoler et cultiver presque tous les microbes filtrants. | Le processus de la mort des papillons, soit infectés par le diplocoque, soit morts de leur mort naturelle, est le même. La vie si courte de ces lépidoptères est orientée autour de la fonc- tion sexuelle. Aussitôt après l’éclosion, les males se mettent à rechercher les femelles pour l’accouplement, qui dure des heures et quelquefois même des jours. De temps en temps, les mâles manifestent leur émotion par le tourbillonnement des ailes, mouvement qui se communique parfois aux femelles, quoique à un degré beaucoup moindre. Malgré leur ardeur sexuelle, je n’ai jamais observé de lutte entre plusieurs mâles mis en présence d'une femelle, Le plus proche ne tarde pas à s'accoupler, tandis que les autres ont lair d'attendre patiemment leur sort. Jamais je n'ai pu saisir la moindre tentative d’accouplement entre 486 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR mâles, comme cela s’observe chez d'autres insectes, notamment chez les hannetons. Le besoin sexuel se manifeste chez les males jusqu’aux der- niers moments de leur vie. Même ceux d’entre eux qui vivent le plus longtemps, 29 jours et davantage, se montrent encore capables de s’accoupler à la dernière période de leur existence. Pour citer un exemple, je mentionnerai un mâle à la veille de sa mort et visiblement affaibli dans sa mobilité. A l’approche dune femelle vierge, il s’est mis à battre des ailes et à tenter l'accouplement ; il lui a fallu dix minutes d'essais pour arriver à celte fin. Cet acte l'avait très fatigué. Le jour de sa mort (le 14° après l’éclosion) il se contenta de battre les ailes au voisinage d’une femelle, mais ne manisfesta aucun mouvement de l'abdomen et ne fit aucune tentative pour s’accoupler. Tombé dans un état de grande faiblesse, il réagissait à l’attouchement de ses antennes et de ses ailes et pouvait encore se fixer avec les ventouses de ses tarses. Peu d'heures après, ces mouvements cessèrent. Le papillon, ne pouvant plus se tenir sur ses pattes, n'était capable d'exécuter que quelques faibles mouvements de ses tarses qui ne tardérent pas à s'arrêter pour toujours. La mort naturelle de nos papillons évolue petit à petit, abou- lissant à une fin apparemment {rès calme. Ce n’est que dans des cas exceptionnels que nous avons observé quelques mou- vements convulsifs des ailes et des pattes, précédant la mort. La sensation de la douleur persiste jusqu’à la fin, car les papil- lons réagissent aux piqüres el aux brulûres par des mouve- ments de défense. Mais ils ne font pas d’effort pour prendre la fuite. L’affaiblissement des papillons avant la mort est considéré comme conséquence de Vinanition 4 laquelle ils sont sujets dans l’impossibilité de s’alimenter. En effet, leur poids diminue progressivement pendant la courte durée de leur vie. Un male, mort le 12° jour après l’éclosion, a perdu pendant ce laps de temps presque la moitié de son poids initial. De 0,549 gramme qu'il pesait au début, il a été réduib au moment de sa mort à 0,0179 gramme. Et cependant ce n'est pas à la dessiccation des tissus qu’il faut attribuer cette mort, car même plusieurs Jours après celle-ci les organes conservent suffisamment leur degré d'humidité. Ce n’est pas non plus la faim qui fait mourir LA MORT DU PAPILLON DU MURIER 487 le papillon du mürier, bien qu'il soit généralement admis qu'exhalant de l’acide carbonique et de la vapeur d’eau et éva- cuant des excréments riches en acide urique, « celte consom- mation de ses tissus le conduit fatalement à une mort rapide » (Maillot et Lambert, p. 304). Le corps adipeux, très développé chez nos papillons, reste au moment de la mort en parlie inu- tilisé, surtout chez les mâles. Méme ceux qui ont atleint leur longévité maximale de 20 à 23 jours, ont présenté cet organe bien conservé. Chez les femelles, le corps gras sert au dévelop- pement des œufs et, partant, il est beaucoup plus épuisé que chez les mâles, ce qui ne les empèche pas de vivre encore un peu plus longtemps que ces derniers. Les organes génitaux au moment de leur mort accusent le plus souvent une quantité de réserves qui pourraient bien fournir des matériaux nutritifs pour l'entretien vital des papillons. La cause de leur mort natu- relle doit donc être cherchée ailleurs que dans l'absence de ces malériaux. L'approche de la mort se manifestant surtout par une grande faiblesse musculaire, on a le droit de se demander si elle ne serail pas liée à quelque altération des muscles, capable d’être révélée par le microscope. On sait que chez les vieillards les fibres striées accusent une prolifération abondante des noyaux musculaires et du sarcoplasma aux dépens du myoplasma, phé- nomène que nous rangeons dans la catégorie de la phagocytose. Or, chez le papillon du mürier rien de pareil ne se produit, car son lissu musculaire conserve jusqu'à la fin sa structure nor- male (pl. X, fig. 1, 2). Et cependant ni les phagocytes ni la phagocytose des muscles ne font défaut chez notre lépidoptère. Dans tous les stades de sa vie les globules blancs abondent dans le sang. On en trouve quelquefois qui sont remplis de granu- lations graisseuses d'origine exogène. Chez des vers à soie et des chrysalides infectés il n’est pas rare de rencontrer des leu- cocytes renfermant des diplocoques. Quant à la phagocytose musculaire, elle s’observe régulièrement pendant la méta- morphose. Le sang des chrysalides pendant ce stade contient des globules blancs remplis de granulations diverses et autour de cerlains groupes musculaires on reconnait des amas de phagocytes dont l’origine n'a pas été établie d'une facon pré- cise. Mais chez le papillon du mirier la fonte des tissus larvaires 488 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR est loin d'être aussi profonde que chez tant d’autres insectes à mélamorphose complète, notamment chez les mouches. A côté du tissu musculaire ce sont les cellules nerveuses qui accusent, dans Ja vicillesse de l’homme et des animaux supé- rieurs, un envahissement par les phagocytes. Malgré les objec- tions formulées par certains auteurs, les faits rior bee que nous avons constalés nous obligent de maintenir l’opinion sur Pabondance des neuronophages autour des cellules du cerveau et des ganglions nerveux de ces vertébrés. Rien de semblable n'existe chez le papillon du müûrier. Les globules blancs, malgré leur tendance à s'insinuer dans certains organes (comme les plaques glandulaires de la vessie urinaire), n'arrivent jamais au voisinage des cellules nerveuses. Celles-ci subissent plutôt l’en- tourage des cellules pigmentaires ou de leurs prolongements. Voici de quoi il s’agit. Aussitôt différenciés, les centres ner- veux du ver à soie accusent deux sortes de cellules. D'abord et surtout des éléments nerveux proprement dits (fig. 3,4, pl. X), avec leur gros noyau vésiculaire riche en suc nucléaire et en masses chromaliques. A la périphérie de ces cellules on trouve en abondance de tout petits grains de pigment brun foncé que l'on pourrait croire logés dans leur protoplasma. Il n’en est rien cependant. Le pigment qui ne fait qu’entourer les cellules nerveuses (fig. 3, 4) appartient à des cellules particulières munies d'un noyau rempli de granulations chromatiques etde prolongements protopiasmiques. La richesse en pigments des centres nerveux des jeunes vers à soie est telle que ces organes frappent l'œil par leur colora- lion foncée (fig. 5, pl. X). Lorsqu'on ouvre une chenille à cette période de développement, on trouve de suite la chaîne gan- glionnaire pigmentée, cette pigmentation facilitant beaucoup la recherche. oe cel état se modifie au fur et & mesure de Pévolation, car les ganglions et les cellules qui les constituent augmentent de volume, tandis que la quantité de pigment reste toujours la même. il en résulte une distribution beaucoup plus éparse des grains colorés autour des cellules nerveuses, ce qui fait que Ja distinction de la chaîne ganglionnaire, chez les vers adultes, est beaucoup plus difficile que chez les vers plus Jeunes. La même situation que chez les premiers persiste chez les chrysalides et chez le papillon. Les ganglions chez ces LA MORT DU PAPILLON DU MURIER 489 derniers renferment des cellules nerveuses de gros volume, à lentourage desquelles on ne trouve que relativement peu de grains pigmentaires. Les papillons les plus âgés n'accusent aucune augmentation de pigment des centres nerveux (lig. 6, pl. X),nous présentant un fait sur lequel je dois insister tout parti- culiérement. Plusieurs auteurs ayant remarqué que les cellules nerveuses des vieillards se distinguent par une richesse en grains pigmentaires, ont émis l’idée que cette accumulation des « scories » provoquerait la dégénérescence sénile du cer- veau. C’est surtout Mühlmann (1). qui insiste sur celte théorie. Il veut même généraliser pour tout le règne animal le fait établi pour l’homme et quelques mammifères, et si certains des animaux naccusent pas de grains pigmentaires dans leurs cellules nerveuses, Mühlmann se contente de la pré- sence des granulations lipoïdiques ou graisseuses pour sauver la théorie. Aussi, il demande que, pour constater le pigment, on se serve d'acide osmique, qui colore les graisses en noir et qui, à cause de cela, empêche la reconnaissance du vrai pigment. Mais, même par cette méthode, avec Mesnil et Wein- berg (2), nous n'avons pu trouver de grains colorés dans les cellules cérébrales d'un très vieux perroquet. Chez des souris blanches et des rats blancs, les plus vieux que nous avons pu nous procurer, nous n'avons observé que des granulations incolores dans les centres nerveux. Des préparations de cer- veau, faites par la même méthode qui avait facilement révélé de vrais grains de pigment chez le vieillard, le vieux cheval et le vieux chien, ne nous ont montré aucune pigmentation des cellules nerveuses de vieilles souris et de vieux rats blancs. Cette théorie d’accumulation des grains pigmentaires comme règle générale dans la vieillesse doit donc être abandonnée. Pour ce qui concerne le papillon du mürier, ses cellules ner- veuses, à lage le plus avancé, n'accusent même pas de granu- lations incolores. Examinés à l’état vivant, ces éléments pré- sentent un contenu homogène incolore et dépourvu de grains d'aucune espèce. Ce n’est que sur des coupes colorées (3) que l'on (1) Archives de Virchow, 1913, t. CCXII, p. 235 et t. CCXIV, p. 412. (2) Annales de l'Institut Pasteur, 1512, p. 912. (3) Je dois mes meilleures coupes à M. Wollman, assistant de mon ser- vice ainsi qu'à M. Remy. 490 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR perçoit la structure interne de ces cellules, dont le protoplasma contient des vacuoles plus ou moins distinctes (fig. 7, pl. X). Au début de nos recherches, il nous a semblé que cette struc- ture vacuolaire était plus accusée chez les vieux papillons que chez les jeunes. Mais, dans la suile, nous nous sommes apercu que, non seulement chez les papillons a peine éclos, mais méme chez le ver à soie, les cellules des ganglions nerveux présen- tent les mêmes vacuoles protoplasmiques. Dans l'impossibilité de constater quelque différence histolo- gique entre les éléments nerveux des jeunes et des vieux papillons, nous avons eu recours à la méthode de A. Kossel qui se sert d'un mélange de fuchsine acide et de vert de méthyle en solution alcoolique. D’après Marinesco, la dégé- nérescence sénite et la mort naturelle des cellules nerveuses se distingueraient par l'aptitude de leurs nucléoles à fixer la cou- leur rouge. Examinons comment se comportent, à ce point de vue, les éléments nerveux des vers à soie et des papillons du müûrier. Chez la chenille, peu de jours après la naissance, nous voyons la capsule des ganglions nerveux ainsi que la masse des fibrilles nerveuses colorées légèrement en rose par la fuchsine acide, tandis que le protoplasma et les nucléoles des cellules nerveuses, petites et grandes, se colorent d'une facon uniforme en bleu violet pale (fig. 8, pl. X). Il n’y a que les noyaux des cellules pigmentaires que l'on pourrait ranger dans la catégorie des éléments conjonctifs ou d’une sorte de névroglie qui présentent une coloration fortement bleue (fig. 8). Le ver à soie adulte accuse les mêmes particularités qui se maintiennent aussi dans la suite. Chez le papillon fixé, aussitôt après son éclosion, ce ne sont que les fibrilles et la capsule qui prennent la coloration rose (fig. 9, pl. XI). Le protoplasma et les nucléoles des cellules nerveuses se colorent en bleu pale, les noyaux des cellules pigmentaires, conjonclives et musculaires en bleu plus foncé. Les mêmes particularités ont été consta- tées chez un papillon mort le dixième jour après l’éclosion, sans avoir présenté de microbes quelconques, c'est-à-dire mort de sa mort naturelle (fig. 7, pl. X). Pour obtenir une plus forte différenciation colorante, nous avons dû garder les coupes beaucoup plus longtemps dans la solution de fuchsine. Dans ces conditions, il a été possible LA MORT DU PAPILLON. DU MURIER 491 d'obtenir la coloration rose des nucléoles des cellules ner- veuses, mais en même temps le protoplasma de ces éléments se colorait en rose violet ou en rose france (fig. 10, ne, pl. XI). Les granulations nucléaires des cellules pigmentaires (fig. 10, np), ainsi que les fibrilles nerveuses et conjonctives prenaient la coloration rose prononcée (fig. 10, fr, fc), de sorte qu'il ne restait que quelques noyaux conjonctifs, qui résistaient à la surcoloration et paraissaient d’un bleu nettementglair (fig. 10, p). Somme toute, la méthode de Kossel ne nous a pas révélé de changements considérables dans l’état des éléments nerveux, pendant le développement de nos papillons Jusqu'au moment de leur mort naturelle. Et cependant, il est indéniable que celle-ci a dt toucher les cellules nerveuses au premier chef. Il faut remarquer qu'en général, les dernières phases de la vie et le processus de la mort de ces lépidoptéres ne s’accompagnent pas de modifications histologiques appréciables, ainsi que nous l'avons mentionné plus haut, au sujet des fibres musculaires. En cherchant dans les divers tissus, voici ce que j'ai pu constater au sujet des granulations particulières, Sur l’enve- loppe des ganglions nerveux des papillons à peine éclos, aussi bien que de ceux qui viennent de mourir, j'ai observé de grosses cellules contenant de petites granulations incolores, groupées autour des vacuoles volumineuses. Mais ce sont surtout les granulations très fines sur le parcours des muscles suspenseurs de la chaine ganglionnaire abdominale qui ont attiré mon attention. Toutefois ces granulations n’empéchent guère la mobilité des fibres musculaires, qui est très active, méme au moment de la mort naturelle de nos papillons. En général, il est à remarquer que beaucoup d'éléments con- servent leur vitalité pendant un certain temps apres la mort de ces insectes. Ainsi, nous avons vu le cœur isolé se contracter très activement. Les spermatozoïdes ont conservé leur mobilité vingt-cinq heures après la mort d’un male qui a vécu dix- neuf jours. En cherchant & pénétrer le mécanisme de la mort naturelle de nos papillons, nous avons été frappé par certains côtés de leurs fonctions excrétoires. Il est bien connu que, presque aussitôt après l’éclosion, les papillons rejettent une urine com- 492 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR posée d’un liquide brun rouge et d'un dépôt grisâtre de granu- lations, constituées surtout par l'urale d’ammoniaque. Cetle urine est émise avec force à une, deux ou plusieurs reprises quise suivent à brève échéance. Nous avons observé dans quel- ques cas, Jusqu'à quatre émissions d'urine en une Journée. Quelquefois, le lendemain après l'éclosion, les papillons urinent encore une ou deux fois; mais, dans les jours suivants, l’émis- sion était de plus en plus rare ; une fois nous l’avons surprise au sixième et une autre fois même au douzième jour après l'éclo- sion. En règle générale, Ja suppression urinaire persiste jusqu'à la mort et peut durer même pendant vingt jours con- séculifs. Quelquefois, pendant la période anurique, l’accouple- ment ou la saisie du papillon, c'est-à-dire quelque forte excita- tion, aménent une forte émission urinaire. Eh bien, Panurie des papillons ne dépend pas de l'absence @excrétion urinaire. Tout au contraire. A l’autopsie des papil- lons qui n'avaient pas uriné pendant de longs jours, leur vessie présente des dimensions énormes et contient une quantité d'urine avec un abondant dépôt d’urates. Dans ces conditions, on peut se demander si la rétention si prolongée d'excreta a‘amènerait pas une sorte d' intoxication urinaire et si la mort naturelle du papillon du mürier ne se réduirait pas à une mort par urémie. I] est à remarquer que l'urine, à la fin de la vie de cet insecte, devient plus dense que pendant les stades anté- rieurs, Ce qui indiquerail que ce sont les parties liquides, résorbées par l'organisme, qui amèneraient l'empoisonnement final. Pour éclaircir le problème, jetons un coup d'œil sur la fone- lion urinaire de notre lépidoptère. Pendant l’état larvaire, la plus longue période de sa vie, le ver & soie se nourrit de feuilles du mürier et produit dans ses reins ou tubes de Mal- pighi une quantité d'oxalates. A Vexamen microscopique de ces organes, on reconnail des octaèdres caractéristiques d’oxa- late de chaux à côté d'une quantité de plaquettes quadrangu- laires (fig. 11, pl. XI.) Avant de se transformer en chrysalide, les résidus végétaux de l'intestin, ainsi que le contenu des tubes de Malpighi, sont rejetés au dehors. La chrysalide, ne prenant plus de nourrilure végétale, devient autophage. Elle se nourrit aux dépens de son liquide sanguin. Très abondant chez le ver, LAS need 5 LA MORT DU PAPILLON DU MURIER 493 ce liquide s'use au fur et à mesure du développement, de sorte que le papillon éclos est presque complètement exsangue. En plus, certains tissus quis’atrophient pendant la métamorphose, tels que quelques muscles et l’épithélium intestinal larvaire, fournissent de leur côté le matériel nutritif pour les organes qui se développent — organes génitaux, la tête et le thorax du papillon. Pendant cette phase, la fonction urinaire accuse un changement notable. Les cristaux oxaliques cèdent leur place à des cristaux sous forme d’aiguilles à deux pointes (fig. 12, pl. XI) de couleur jaune, ce qui indique leur provenance du sang de même couleur. En même temps, les cellules épithéliales des tubes rénaux se remplissent de granulations plus grosses à la périphérie, toutes petites à la profondeur. Cette première période de la métamorphose se caractérise par l’excrétion des granulations urinaires dans la lumière des tubes de Malpighi, sans qu'elles passent dans la vessie, qui reste vide. Ce n'est que dans la dérnière phase de la chrysalide, lorsqu'elle est munie de pigment oculaire noir, que la vessie commence à se remplir de liquide brun rouge et d’une quantité de granulations compo- sées d’urates. Cette période coincide avec le développement définitif du corps gras. Ce dernier organe est constitué chez le ver à soie par des amas de cellules adipeuses réunies en lobes dépourvus de trachées (fig. 13, pl. XI). Cest la période de la for- mation des dépôts de graisse. Dans la première partie de la mé- tamorphose, le corps gras se désagrége en lobes de différentes grandeurs. Un certain nombre de cellules adipeuses nagent librement dans le liquide sanguin encore trés abondant. Plus tard, les cellules forment des amas compacts dans lesquels on ne trouve pas encore de tubes trachéens, qui n'apparaissent qu’à la dernière période de la vie de la chrysalide (fig. 14, pl. XI). Le papillon sort de son enveloppe avec les tubes de Malpighi définitifs, remplis de granulations uratiques (fig. 15, pl. XI) etune vessie pleine d'urine. Le male emporte son corps gras presque intact, tandis que la femelle n’en garde qu'une partie, l'autre étant utilisée au développement des œufs. Le passage de la graisse des cellules adipeuses dans le vitellus doit se faire sans difficulté. Il se produit à un stade où les lobes adipeux ne sont pas encore munis de trachées. Il faut penser que la pénétration de ces tubes aériens dans l'intérieur des lobes, 33 494 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR qui caractérise la dernière phase de la métamorphose, constitue une adaptation pour les besoins respiratoires du papillon. Aussi, nous voyons la fonte de la graisse s’accomplir pendant la vie de ce dernier. Chez le male, avec son corps adipeux peu réduit au moment de l’éclosion, une partie suffit pour l'entretien pendant la vie si brève (fig. 16, pl. XT). Chez la femelle, dont une grande quantité de graisse a été absorbée par la formation des œufs, le restant du corps gras suffit pour les besoins nutrilifs jusqu'au moment de la mort. Il est tout à fait légitime de supposer que c'est la fonte du corps gras qui produit la ou les substances toxiques qui passent dans l'urine et qui occasionnent l'empoisonnement fatal de nos papillons. Devant cette hypothèse, il nous a paru intéressant d'étudier la toxicité de l'urine de ces lépidoptères prise aux différents stades de leur existence. Ayant éprouvé son action sur les vers à soie, les papillons du mitrier et les petites souris blanches, encore à la mamelle, nous pouvons aflirmer que l'urine des chrysalides avancées dans leur développement ainsi que celle des papillons jeunes ou prèts à terminer leur cycle vital, est incontestablement toxique. L'inconvénient, pour les expériences avec les insectes, consiste dans ceci que leur orga- nisme se protège contre les influences nuisibles surtout par l'enveloppe chitineuse de la peau et que partant, toute blessure, restant béante, est sujette à la contamination par les microbes. Il arrive donc souvent que les vers à soie et les papillons, injectés avec Purine, meurent au bout d'un certain temps, avec une quantité de bactéries dans leur sang. Malgré cette diffi- culté, il m'est arrivé, à plusieurs reprises, de constater l’in- fluence toxique de lurine, sans qu'il se produise la moindre infection microbienne. Seulement cet effet ne se traduit pas par une mort rapide, mais aboutit à cette fin après une période plus ou moins longue. Dans une expérience sur trois vers à soie pris quelques jours après la quatrième mue, un ver qui à reeu environ 0,5 cent. cubes d'urine de chrysalides avancées dans leur développement, tomba aussitôt après l'injection dans un état comateux. Cet état persista pendant quelques heures, après quoi le ver s'est mis à bouger, mais refusa toute nourri- ture jusqu’à la mort, survenue au bout de six jours. Malgré une agonie très longue, le sang de l’insecte se montra indemne LA MORT DU PAPILLON DU MURIER 495 de tout microbe. Deux autres vers de mème âge, qui recurent environ 0,25 et 0,12 cent. cube de la même urine, éprouvèrent une intoxication passagère, ce qui ne les empécha pas de se transformer en chrysalides et de sortir sous forme de papillons apparemment normaux. Dans une autre expérience, un papillon male fraichement éclos tomba dans l’agonie le lendemain, après une injection d'urine, prélevée à quatre chrysalides. L’agonie dura trois jours et ce n'est qu'au moment de la mort que le sang de l'animal accusa des coccus nombreux. Plusieurs préparations de ce liquide prélevé pendant l’agonie se montrèrent parfaite- ment stériles. Les papillons se montrèrent dans plusieurs expériences plus sensibles à l’action toxique de l'urine des chrysalides et des papillons que les vers à soie. Comme liquides de contrôle, j'injectai aux vers et aux papil- lons de la/solution physiologique de chlorure de sodium, du sang de chrysalides, du lait stérilisé et de l'urine d'homme. De tous ces liquides, c’est l'urine humaine qui se révéla comme le * plus toxique et cependant, un ver injecté avec 0,5 cent. cube d'urine acide de densité 1021, fila bien son cocon et se trans- forma en papillon normal. Chez les toutes petites souris, l'effet toxique de l'urine des chrysalides et des papillons est encore plus marqué que chez les vers à soie et les papillons, car chez les premières, la mort survient plus rapidement que chez les seconds. Quelquefois les souris meurent même dans l’espace de moins d’une heure. Mais ce fait ne s’observe que chez les souris aveugles, ne pesant que 2 à 3 grammes. Chez les souris plus âgées, recou- vertes de poils et ayant les yeux ouverts, l’intoxication est pas- sagère, et cependant bien manifeste. Même chez les souris adultes, l'injection de l'urine des papillons exerce une action nettement toxique. Les résultats de nos expériences ne laissent pas de doute sur la toxicité de l'urine des chrysalides et des papillons. En ouvrant les petites souris mortes intoxiquées, on relrouve intact le dépôt grisatre de cette urine, ce qui indique que ce ne sont pas les granulations uratiques, mais bien la partie liquide de Purine qui produit Vintoxication. Ce fait concorde bien avec la 496 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR faible solubilité et le très faible pouvoir toxique de Vurate d’ammoniaque. Pour l'étude plus détaillée et plus approfondie de Ja toxicité urinaire, il est indispensable de posséder une quantité très grande d'urine, ce qui ne peut être réalisé que dans les magnaneries. On peut espérer que dans ces condi- tions on réalisera de nouveaux progrès dans l'étude du si inté- ressant problème de la mort naturelle, ce qui facilitera son entrée dans la phase positive des connaissances. Lorsque, dans l'avenir, on apprendra à cultiver les microbes filtrants avec la même facilité avec laquelle on fait actuellement les cultures du microbe de la péripneumonie des bovidés, on établira avec certitude si, dans la mort du papillon du mürier, il peut être question d'un rôle quelconque de microbes filtrants. On voit, d'après l'étude qui précède, que je ne peux guère me vanter d'avoir réduit la vieillesse et la mort du papillon du müûrier aux phénomènes moléculaires des colloïdes. Ce n’est que dans l'avenir, lorsqu'on connaîtra suffisamment les phéno- mènes moins délicats, mais capables d'être étudiés par nos méthodes actuelles de recherches positives, que l’on pourra se risquer à approfondir le problème sur le terrain de la physico- chimie. Tout ce que nous avons appris sur la mort nalurelle nous autorise à admetire que le lépidoptère que nous avons choisi pour nos études présente un type achevé de cycle complet et naturel d'une existence normale. Bien que les papillons réa- gissent jusqu'au dernier moment à la douleur, il faut penser qu'ils meurent, empoisonnés par les produits de leur propre organisme, sans souffrance et sans appréhension de la mort. Il faut espérer que cetle fin à laquelle nos papillons aboutissent simplement par la voie naturelle, sera alteinte dans l’avenir par les hommes, qui n'auront pas besoin des soutiens que nous avons mentionnés au début de cet article. On représente le papillon comme symbole de l’immortalité. Il serait plus indiqué de le représenter comme symbole d’une vie heureuse, de lorthobiose. LA MORT DU PAPILLON DU MURIER 497 EXPLICATION DES FIGURES PLANCHE X Fic. 1. — Une fibre musculaire du thorax d’un papillon mort le seizième jour après l'éclosion. Coloration avec le bleu de méthylène aqueux. Fic. 2. — Une fibre musculaire du cœur d'un papillon mort le vingtième jour. Préparation fraiche d'un muscle en pleine contraction. Fic. 3. — Coupe d'un ganglion ventral d'un ver à soie de troisième age (bientôt après la deuxième mue). Vert de méthyle et fuchsine acide. Fic. 4. — Une partie d'une autre coupe du même animal: Fic. 5. — Ganglion ventral d'un tout petit ver à soie âgé de six jours. Fic. 6. — Ganglion ventral d'un papillon © mort le dix-huitième jour après l'éclosion. Fic. 7. — Coupe d’un ganglion ventral d'un papillon mort le dixième jour après l’éclosion. — v, vacuoles des cellules nerveuses ; p, noyau d'une cellule pigmentaire. Vert de méthyle et fuchsine acide. Fic. 8. — Coupe de cerveau d'un tout petit ver à soie du sixième jour. Cinq heures dans du vert de méthyle et peu de minutes dans la fuchsine. — p, cellules pigmentaires. PLANCHE XI Fic. 9. — Coupe d'un ganglion ventral d'un papillon, aussitôt après son éclosion. — p, cellule pigmentaire avec son noyau bleu intense. Cinq heures dans le vert de méthyle et peu de minutes dans la fuchsine acide. Fic. 10. — Coupe d’un ganglion ventral d'un papillon de race japonaise, mort le troisième jour après l'éclosion. — Liqueur de Bouin. Cinq heures dans le vert de méthyle. Fuchsine acide. — nc, nucléoles des cellules nerveuses ; np, noyau d'une cellule pigmentaire ; p, noyau des cellules conjonctives ; fe, fibrilles conjonctives ; /x, fibrilles ner- veuses. Fic. 11. — Une partie d'un tube de Malpighi d'un ver à soie. Fic. 12. — Granulations et cristaux en aiguilles, d'un tube de Malpighi d'une chrysalide. Fic. 13. — Deux lobes du corps gras d'un ver à soie, lobes ne renfermant pas encore de tubes trachéens. Fia. 144. — Lobe du corps gras d’une chrysalide avancée dans son déve- loppement avec un tube trachéen dans l'intérieur. Fic. 45. — Une partie d'un tube de Malpighi d'un papillon femelle, mort le seizième jour. — g, granulations uratiques. Fic. 16. — Une partie du corps gras d'un papillon male mort le onzième jour. LA DYSENTERIE DE L’ARGONNE ETUDE BACTERIOLOGIQUE par P. REMLINGER Médecin-major de ire classe, Chef du Laboratoire Central de Bactériologie de l'Armée, et J. DUMAS Médecin aide-major, attaché au Laboratoire. Nous avons été chargés, au mois de décembre 1914, de nous rendre dans l’Argonne afin d'étudier des cas de diarrhée épi- démique qui sévissaient sur les troupes cantonnées dans la région. Un doute existait au sujet de la nature de cette affec- tion dont les uns faisaient une dysenterie soit bacillaire, soit amibienne et d’autres une forme particulière de para- typhoide. Durant notre séjour à Sainte-Menehould, du 25 décembre 1914 au 15 février 1915, et à Condé-en-Barrois (Hôpital de Contagicux), du 16 février au 22 mars, nos examens ont porté sur plusieurs centaines de malades. Nous n'avons guère eu de peine à établir que si tous les cas de diarrhée de l’Argonne ne relevaient pas d’une cause univoque (1), la plu- part devaient être rattachés à la dysenterie dont il existait — à côté des formes diarrhéiques — des cas des plus typiques, et qu'en somme, l'épidémie qui sévissait sur nos troupes était une épidémie de dysenterie bacillaire. A l'encontre de la grande majorité des épidémies causées par le bacille de Shiga ou le bacille de Flexner, l'épidémie de l Argonne s'est montrée produite par un bacille possédant tous les caractères — caractères de fermentation et d’agglutination en particulier — du bacille de Hiss. Dans quelques cas présentant une gravité plus grande, il a, au contraire, été isolé un bacille doué — si l’on en excepte (1) P. Rewtincer et J. Dumas, La diarrhée dite des tranchées. Revue d'Hy- giene et de Police sanitaire, t. XXXVIII, n° 5, mai 1915, p. 490-498. LA DYSENTERIE DE L’ARGONNE 499 les caractères d’agglutination — des principaux attributs du bacille de Shiga. Les unes et les autres de ces dysenteries résistaient de façon presque absolue au sérum anti-dysentérique, soit anti-Shiga, soit polyvalent (anti-Shiga, anti-Flexner et anti-Hiss). Ces par- ticularités nous ont engagés à donner, avec quelque détail, la relation de cet épisode épidémiologique, en insistant sur les caractères des microbes isolés. CARACTÈRES CLINIQUES ET ANATOMO-PATHOLOGIQUES Physionomie clinique. — A ce que la dysenterie de ! Argonne se soit, chez un grand nombre de malades, exclusivement tra- duite par une diarrhée dysentériforme, voire par de la diarrhée vulgaire, il ne doit point y avoir matière à surprise. L'épi- démiologie et la bactériologie nous ont appris de longue date à connaître la coexistence avec des formes typiques de dysen- terie ou de fièvre typhoïde, de cas de diarrhée à bacille de Shiga ou à bacille d’Eberth. De ces cas de diarrhée vulgaire, nous n'avons rien à dire au point de vue clinique. Tous les intermédiaires existaient entre eux et la dysenterie classique qui, elle, ne différait en rien de la dysenterie bacillaire la plus typique. Le petit nombre des selles (une trentaine par jour au maximum), la prédominance des émissions nocturnes, l’apyrexie, la conservation d’un bon état général, l’absence de complications (hépatiques et articu- laires en particulier), la tendance naturelle de Ja maladie à la guérison, sauf le cas d'apparition d’un syndrome eapsulaire rapidement mortel, sont, avec l'inefficacité déjà signalée du sérum anti-dysentérique les seules particularités que nous avons à relever. La formule leucocytaire s'est toujours montrée banale. C'est une polynucléose vulgaire et peu intense (80 à 90 p. 100), qui s'atténue un peu pendant la convalescence. Anatomo-pathologie macroscopique. — Les lésions anatomo- pathologiques nous retiendront davantage. Nous avons eu l’occasion de pratiquer 6 autopsies. La mort avait été déter- minée cinq fois par une surrénalite aiguë et une fois par une péritonite par propagation. Les lésions observées ne différaient 500 ANNALES DE L°INSTITUT PASTEUR en rien de celles décrites dans les dysenteries bacillaires les plus typiques et les plus graves des pays chauds. L’ouverture de l'intestin montrait des lésions localisées aux côlons avec prédominance au niveau du rectum et souvent aussi du cecum. La muqueuse était épaissie, œdémateuse, de couleur rouge violacé, semée d’ulcérations qui donnaient parfois à l'intestin l'aspect classique du vieux bois vermoulu. L'intestin grèle était sain ou présentait, au niveau de ses dernières portions, des lésions analogues à celles du côlon, mais moins étendues, plus superficielles et siégeant loujours en dehors des plaques de Peyer. Dans un cas seulement, l’es- tomac montrait par endroits une teinte ecchymotique et aussi 2 à 3 petites ulcérations en coup d’ongle à fond hémorragique qui paraissaient avoir été le point de départ d’une hématé- mèse observée pendant la vie. Toujours, les ganglions mésentériques étaient augmentés de volume, hyperémiés, nullement ramollis au centre. Leurs dimensions variaient de celles d'une lentille à celles d’un gros haricot. La rate petite, dure, contractée, exeluait toute association à la dysenterie d’une infection à bacilles d'Eberth ou à bacilles paratyphiques. Le foie, les reins, étaient congestionnés. Le pancréas ne présentait à noter aucune particularité. Chez les malades porteurs du syndrome capsulaire, les surrénales apparaissaient environ doublées de volume. Le parenchyme était plus dur, plus ferme qu'à l’état normal, ou congestionné, hémorragique. Chez ces mêmes malades, le cœur droit apparaissait d’ordi- naire flasque, dilaté, avec un myocarde légèrement décoloré. Poumons sains ou présentant une congestion banale des bases. Dans un cas, il a été observé une péritonite adhésive sous- méso colique par propagation au péritoine de linflammation intestinale. Pas de perforation. En somme, dysenterie classique el pure de toute association, de tout mélange. Notons de suite — en concordance avec les résultats tou- jours négatifs de l'hémoculture — que même lorsque l'autopsie était pratiquée un très petit nombre d'heures après la mort, —— tait té LA DYSENTERIE DE L’ARGONNE 50f les ensemencements du sang du cœur et des pulpes d’organes demeuraient invariablement stériles ou ne donnaient que du Coli-bacille. Mème dans les dernières heures de la vie, le bacille dysentérique ne parait pas susceptible de généralisation. Lésions histologiques. — L’autopsie de nos 6 malades a pu être faite dans des conditions très favorables, permettant l'étude histologique des organes et particulièrement celle des capsules surrénales. Nous avons pris toutes les précautions nécessaires contre les altéralions cadavériques et les artifices de préparation. Les fragments d'organes ont élé fixés dans le liquide de Bouin, le seul fixateur que nous ayons eu & notre disposition, et les coupes colorées à l’aide des trois méthodes suivantes : hématoxyline au fer, éosine orange ; hématoxyline, Van Gieson ; bleu de toluidine, éosine orange. Rien de particulier n'a été noté dans l'étude anatomo-patho- logique des coupes du gros intestin, du péritoine, du mésen- tère, des ganglions mésentériques. De même le foie, ia rate, le cœur, le pancréas ne présentent aucune particularité à signaler. Chez # malades, ayant présenté un syndrome de surrénalite aigu, les lésions capsulaires et rénales ont, par contre, attiré notre attention. CAPSULES SURRÉNALES. Dans la zone glomérulaire, les capillaires sont congestionnés et gorgés de globules roages. Les éléments cellulaires sont normaux; entre les cordons, on remarque la présence de foyers leucocytaires (6 à 8 dans toute la coupe) formés de dix à vingt lymphocytes et leucocytes à noyaux polymorphes. Au niveau des zones fasciculée (zone interne et externe) et réti- culée, les lésions anatomo-pathologiques sont plus marquées. Les cellules des cordons glandulaires présentent un aspect granuleux du protoplasme, leur contour est mal limité, et les granulations ergastoplasmiques sont invisibles, Les noyaux sont altérés, ils ont conservé leurs affinités tinctoriales, mais certains ont un aspect pycknolique. Au niveau de la zone interne de la fasciculée, on constate la présence de vacuoles 502 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR intracellulaires. La quantité de pigment est normale, les capillaires sont congestionnés. On retrouve dans la médul- laire ces mêmes phénomènes de nécrose, de coagulation proto- plasmique et nucléaire et une congestion interne des capillaires avec présence de leucocytes et de lymphocytes à noyaux poly- morphes. A un stade plus avancé de l'infection dysentérique (syndrome capsulaire ayant duré 4 jours), les lésions intéres- sent les 3 couches de la corticale. Les cordons glandulaires de la gloméralaire sont disloqués, bouleversés et présentent une légère nécrose de coagulation du protoplasme avec pycknose des noyaux. Au niveau des couches fasciculée et réticulée, la fonte cellulaire est plus marquée et la structure histologique de la glande n’est plus respectée. Le protoplasme des spongio- cytes a un aspect vitreux, amorphe, et les granulations ergaslo- plasmiques ont disparu. Ces phénomènes de nécrose de coagu- lation retentissent sur le noyau, qui a un aspect pycknotique et une réaction acidophile. Les capillaires de ces différentes cou- ches sont congestionnés. Mémes phénomènes de nécrose au niveau de la médullaire. Dans un cas d’hémorragie capsulaire bilatérale, la suffusion sanguine, qui avait vraisemblablement pris naissance au niveau de la veine centrale de l'organe, avait détruit une grande partie de la médullaire et de la réticulée. A côté des lésions mécaniques (compression des cordons glandu- laires par la suffusion hémorragique) il existait des altérations cellulaires de la fasciculée et de la glomérulaire (nécrose de coagulation du protoplasme et du noyau) relevant d’une action directe du poison dysentérique. Ces lésions sont à rap- procher des altérations capsulaires décrites par Auguste Petut, après injection de toxine diphtérique. Il est vraisemblable d'admettre qu'en déterminant des lésions cellulaires et vascu- laires aussi importantes, le poison dysentérique a di grave- ment modifier et troubler la sécrétion surrénale. REINS. Les lésions de néphrite hémorragique se sont montrées constantes. Outre la congestion intense des capillaires, outre les hémorragies diffuses comprimant les cellules des tubes contournés et détruisant la substance rénale, nous avons relevé LA DYSENTERIE DE L’ARGONNE 503 des lésions cellulaires de l’épithélium des tubes contournés, caractérisées par la disparition de la bordure en brosse et des phénomènes de nécrose de coagulation du protoplasme (con- tours cellulaires mal délimités — aspect vitreux) et du noyau (aspect pycknotique). Dans de nombreux tubes contournés, on constatait la présence de cylindres hyalins. CARACTERES EPIDEMIOLOGIQUES, ETIOLOGIE Au point de vue épidémiologique et étiologique, il nous suf- fira de dire que, depuis ses débuts, la maladie a toujours affecté une allure lente et trainante, qu’elle a procédé par cas spora- diques beaucoup plus que par poussées successives ou par pelits paquets dans un régiment, une compagnie,... etc., et, d'autre part, que tous les corps de troupe cantonnés dans l’Argonne ont payé à l'affection un tribut très sensiblement égal. Cette uniformité dans le temps el dans l’espace cadre mal avec une étiologie hydrique ou alimentaire. Plusieurs de nos malades nous ont affirmé, du reste, n'avoir bu les uns que du vin et du café, les autres que de l’eau dûment stérilisée. La mortadelle et différents produits de charcuterie avaient un instant, au début de nos recherches, attiré notre attention. Nous n'avons pas lardé à exclure complètement l'hypothèse de leur rôle étiologique. Avec une unanimilé des plus complètes, les malades incriminaient la fatigue, le froid, l'alimentation froide et trop exclusivement carnée. 11 va de soi que ces différents facteurs n’ont pu intervenir que comme des prédisposants ayant préparé le terrain au germe spécifique. Comment celui-ci s'est-il transmis? Il semble que ce soit presque exclusivement par contagion interhumaine. Celle-ci paraît, cet hiver, s’étre surtout effectuée par l'intermédiaire de la boue à laquelle, dans les tranchées, les matières fécales s’incorporent forcément et qui peut parvenir au tube digestif par bien des voies. Il va de soi qu'au cours d'une épidémie d'été, c'est par les poussières et les mouches que cette même contagion s’effectue- rait. Le mécanisme est à peu de chose près identique. Cependant, quelle a été la provenance des premiers germes dysentériques de l’Argonne? La dysenterie ne parait pas ètre née sur place, mais avoir été importée. A plusieurs reprises, 50% ANNALES DE. L'INSTITUT PASTEUR la prédominance de l'affection dans des régiments coloniaux ow dans des corps venus de Brelagne avait fait envisager la pos- sibilité d’une origine coloniale ou bretonne de la maladie. IH ne semble pas que ces hypothèses doivent ètre retenues. On sait que la dysenterie est loin d’étre rare en France, par- ticulièrement dans l'armée. Elle se manifeste, chaque été, par des cas plus ou moins nombreux, dans certaines garnisons, cer- tains camps, certains régiments. Pendant l'été de 1914, la maladie ne s'est pas comportée d'une façon différente des élés précédents, et Argonne s’est trouvée infectée tout naturellement. | Notons encore que si en temps de paix la dysenterie n'est pas rare en France, elle est fréquente en Allemagne et que, malheureusement et tout particulièrement dans l’Argonne, les deux armées se sont trouvées — au point de vue épidémiolo- gique — étroitement solidaires. ÉTUDE BACTÉRIOLOGIQUE DU BACILLE LE PLUS SOUVENT RENCONTRÉ Mode d'isolement. — L'examen des selles à l’état frais, pra- tiqué dans les conditions les plus favorables, aussitôt après l'émission, au ht même du malade, n'a jamais révélé la pré- sence d’amibes, non plus que de parasites animaux (Balanti- dium, Bilharzia...) ou d'œufs de parasites (ankylostomes,... ete.) Après coloration, l'examen mettait en évidence des lympho- cytes, des leucocyles à noyaux polymorphes, des globules rouges, des cellules épithéliales desquamées et, au milieu de ces éléments, des microorganismes peu nombreux qui, tous ou presque tous, se décoloraient par la méthode de Gram et parmi lesquels prédominait souvent un bacille court à bouts arrondis, parfois à espace clair central, manifestement coliforme. En dehors de cet aspect si caractéristique de la dysenterie bacil- laire, examen microscopique des matières alvines n'a permis de faire aucune constatation intéressante. Il n'a jamais été observé de formes spirillaires. L'hémoculture soit en ballon de bouillon, soit en tubes de bile ayant toujours fourni — ainsi du reste qu'il est habituel LA DYSENTERIE DE L’ARGONNE 505 dans la dysenterie — un résultat négatif, nous avons eu presque exclusivement recours pour le diagnostic, aux ensemencements de matières dysentériques ou diarrhéiques sur milieux d'Endo, de Drigalski et sur gélose lactosée tournesolée. Nous n'avons pas tardé à donner la préférence à ce dernier milieu. Des mucosités étaient lavées dans plusieurs tubes d’eau phy- siologique et, une fois débarrassées des impurelés, broyées au moyen d'une baguette de verre dans l'eau d’un dernier tube. Un agilateur coudé était trempé dans l’émulsion et passé — sans être rechargé — à la surface du milieu nutritif coulé dans trois boîtes de Petri. Après 24 heures d'étuve à 37 degrés, on découvrait au milieu des colonies rouges de Coli-bacille des colonies rondes, surélevées, franchement bleues, qu’il était aisé de prélever et, après un deuxième isolement, de repiquer en bouillon pour les reporter ensuite sur les milieux différen- tiels. De façon constante ou à peu près constante, ces colonies bleues se montraient d'autant plus nombreuses que le cas cli- nique présentait plus de gravité ou était plus près de son début. Elles se trouvaient parfois à l'état de culture pure. Très facile à isoler des selles « frai de grenouille », « crachat pneumo- nique », « crachat purulent », « raclure de boyaux »,... etc., le baciile dysentérique se rencontrait fréquemment encore dans les flocons muqueux que renfermaient les selles glaireuses, ver- dâtres ou jaunâtres. Il s’isolait avec plus de difficulté des matières fécaloides. Nous avons pu néanmoins, à différentes reprises, l'y mettre en évidence. Des ensemencements quotidiens nous ont montré qu'il dis- paraissait très rapidement au cours de la convalescence. Il va de soi que celte diflicuité à isoler le bacille dysentérique des matières fécaloides, ne veut pas dire que celles-ci ne le ren- ferment plus et ne saurait être fourni, comme argument contre la possibilité de la transmission de la maladie par les malades guéris et les porteurs de germes. Le bacille Coli remplit à l'égard du microbe de la dysenterie un rôle empêchant, ana- logue à celui qu'il joue vis-à-vis de bacilles voisins, du bacille d’Eberth en particulier. On remarque souvent sur les boites de gélose, où les ensemencements sont faits en stries au moyen d'un tube de verre coudé, que les colonies bleues ne se rencontrent pas au niveau des premières trainées. C'est seule- 506 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR ment au niveau des dernières, lorsque les colonies rouges sont très espacées, que le microbe apparait. Quoi qu'il en soit de ces particularités, les colonies de bacilles dysentériques, déjà très apparentes sur gélose lactosée au bout de 24 heures, ne tardent pas, si les boîtes sont laissées à l'étuve, à acquérir le diamètre d’une lentille, voire d’un pain à cacheter. Il est fréquent de voir leur centre prendre une teinte jaune, alors que la périphérie demeure {rès bleue. L'opposition entre les deux teintes est des plus nettes. S’élendant en surface beau- coup plus qu'en hauteur, les colonies de bacille dysentérique demeurent toujours très peu saillantes. MORPHOLOGIE Examiné sans coloration, le bacille de la « dysenterie de l'Argonne » est nettement, quoique faiblement, mobile. Il est animé d’un simple mouvement d’oscillation qui peut se com- parer a celui de laiguille d'une boussole. Il se colore très facilement à l’aide des couleurs basiques d'aniline. I apparait alors sous forme d’un bacille coliforme dont les dimensions sont identiques à celles des dysentériques de Shiga ou de Flexner, c’est-à-dire d’un batonnet court, trapu, de 1 à 3 y. de long, arrondi à ses extrémités. Il est fréquent qu'il présente en son centre un espace clair. Il se décolore par le Gram. Les formes d’involution sont rares. On observe parfois quelques filaments. Jamais de spores. CARACTÈRES DE CULTURE Repiqué de la gélose lactosée tournesolée en bouillon ordi- naire ou en bouillon Martin, le bacille de la dysenterie de Argonne donne un trouble uniforme avec production d’ondes moirées. Le développement commence à s’effectuer au bout de 3 ou 4 heures. Cette limite peut même ètre abaissée à 1 heure et demie si on ensemence un bouillon déjà porté à la tempéra- lure de l’étuve, c’est-à-dire à 37 degrés. Ce développement est sensiblement aussi rapide que celui des bacilles de Flexner et de fliss el un peu plus précoce que celui du bacille de Shiga. LA DYSENTERIE DE L’ARGONNE 307 Après 48 heures, un léger dépôt se forme au fond du tube. Il n'y a jamais formation de voile. En bouillon ascite, le trouble est plus marqué et on observe déjà au bout de 24 heures, un dépôt au fond du tube à essai. Pas de voile. Sur gélose peptone Martin, les colonies sont rondes, suréle- vées, grisatres. Elles ont un aspect gris bleuté sur gélose-ascile et gélose à l'œuf. Sur gélatine, les colonies sont formées par un enduit gris bleuté. Elles se développent en deux jours. L’ensemencement par piqûre en gélatine en culot donne naissance, après deux ou trois jours, à de petites colonies grises. Aucune liquéfaction. Sur pomme de terre, on observe un enduit peu abondant, incolore et légèrement visqueux. L'aspect est identique à celui que donne le bacille d'Eberth. Il est, du reste, susceptible de varier dans des limites assez étendues suivant la race de pomme de terre employée. Le lait nest pas coagulé, même après un séjour prolongé à l'étuve et un chauffage à 70 degrés. Le petit lait de Petruschki west pas viré ou ne l’est que très légèrement. En bile, on observe un trouble uniforme avec formation d'ondes. Les résultats de l’ensemencement en bouillon au rouge neutre varient un peu suivant la quantité d’indivateur ajoutée. Dans les tubes faiblement teintés (3 anses d’une solution à 10 p. 100 pour 8 cent. cubes de bouillon), on observe une fluores- cence différant légèrement d'intensité suivant les échantillons, mais toujours très nelte. Le bouillon additionné d'une plus grande quantité de rouge (un vingtième de centimètre cube de la même solution) prend une teinte simplement orangée ou n’est pas influencé. Le bouillon plus fortement coloré encore (2-3 gouttes, formule de Savage) conserve, même après un séjour prolongé à l'étuve, sa teinte initiale. Des faits analogues s'observent, du reste, avec plusieurs microbes du groupe Coli. Sur gélose en culot additionnée de sous-acétate de plomb, on n’observe aucune coloration noire. Anaérobie facultatif, le microbe dysentérique pousse en gélose Veillon sous forme de petites colonies rondes à bords 508 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR très nets. Le centre légèrement opaque présente une coloration grisâtre. CARACTÈRES BIOLOGIQUES Le bacille dysentérique est facultativement aérobie et anaé- robie. Suivant les échantillons, il ne forme pas ou ne forme que très peu d'indol. Ses cultures ne renferment pas d’hémo- lysine (1). Le bacille fait fermenter le glucose, la mannite, le lévulose, le galactose. H est sans action, au contraire, sur le lactose, le saccharose, le maltose et la dulcite. Ces caractères de fermen- tation sont absolument constants quel que soit l'échantillon considéré. Ainsi que l'indique le tableau suivant, ils sont de nature à distinguer le bacille isolé dans Argonne des bacilles de Shiga, de Flexner, de Strong et à le rapprocher, au contraire, du bacille Y de Hiss. SACCHAROSE MALTOSE MANNITE SAUG Derek NC NE es — — — IHR SR GE ala a Ale + + + DÉNONCENT — + Sn IBLOCK oo Io i EE CR -- -= + Bacille de l'Argonne . . . — — _. Le bacille dysentérique isolé dans l'Argonne est sensible à l’action de la température. Une culture de 25 heures en bouillon est tuée en 25 à 30 minutes dans un bain-marie à 58 degrés. Il ne se développe pas sur une gélose où il s'est développé une première fois et qui ensuite a élé grattée, non plus que sur des géloses où ont poussé d'autres dysentériques du groupe. Flexner (bacille de Flexner, bacille de Hiss). AGGLUTINATIONS SERUMS EXPÉRIMENTAUX. Méme à 1/50, des sérums expérimentaux doués du pouvoir agglutinant 1/4000 : anti-Eberth, antiparatyphique A ou B et (1) Des cultures en bouillon agées de cing jours sont mises en contact avec des globules de lapin lavées à raison de 1 cent. cube de culture pour 4 cente cube de globules. Pas d’hémolyse. LA DYSENTERIE DE L’ARGONNE 509 anti-Shiga, mexercent sur le microbe de Ja dysenterie de V Argonne aucune action agglutinante. Au contraire, un sérum anti-Hiss doué du même pouvoir ageluline les divers échantillons à un taux variant entre 1/500 et 1/4000 (13 échantillons à 1/2000, 7 à 1/1000, 3 à 1/500 ; 2 à 1/4000) et un sérum anti-Flexner (pouvoir agglutinant 1/2000) agglutine 9 échantillons à 1/2000, 5 à 1/1000, 3 à 1/500, 8 à 1/200). De même encore, le sérum d’un lapin immunisé contre l'un des échantillons du bacille de l'Argonne (microbe 7) sérum d'un pouvoir agglutinant égal à 1/1000 (nous n'avons pu atteindre un taux supérieur), aggluline les autres souches à des taux variant de 1/250 à 1/750 (2 échantillons à 1,750 ; 9 à 1/500; [3 à 1/250). Le sérum de ce mème lapin agglutine également a 1/3000 le bacille de Hiss et à 4/2000 le bacille de Flexner. Il est sans action sur le bacille de Shiga. SERUMS DE MALADES. Plus intéressante est l’action sur notre microbe dysentérique du sérum des malades. Le sérum des sujets atteints d'une affection autre que la dysenterie ou celui des sujets sains esi sans action sur lui. Trente personnes, saines ou atteintes des affections les plus diverses (fièvre typhoïde, congestion pulmo- maire, iclére catarrhal, oreillons, scarlatine, pneumonie, ménin- gite cérébro-spinale, rougeole, érysipéle..., etc.), nous ont donné des agglutinations négatives, égales à 1/10 ou excep- tionnellement (4 observations) à 1/25. Nul pendant les premiers jours de la dysenterie, le pouvoir agzlutinant se développe peu à peu; au 40°, au 15° jour de l'affection, ilatleint d'ordinaire 1/50, 1/75 et il est susceptible de s'élever à 1/100 ct davantage au cours de Ja convalescence. Ce pouvoir agglutinant s'étend à toutes les souches extraites des selles des différents malades. Il arrive, mais il n’est pas constant que le microbe du malade même soit agglutiné à un taux plus élevé que les autres échan- tillons. Oss. I. — Le sérum du malade D..., obtenu le jour même de Ventrée a l'hôpital, au 4° jour dune dysenterie moyennement intense (18 janvier) n’ag- glutine aucun des échantillons : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8. Le sérum recueilli le 34 510 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR jour de la sortie, le 31 janvier, agglutinait ces mêmes échantillons à 1/75. L'un d'eux était agglutiné à 1/100. Oss. Il. — Le 25 janvier, au moment de l’entrée à l'hôpital, le sérum du soldat Le G..., malade depuis 8 jours, n’exerce encore aucune action agglu- tinante sur Jes échantillons 5, 6, 7, 8, 13. Le 7 février, ces différents germes sont agglutinés à des taux variant de 1/25 à 1/75, ce dernier chiffre étant celui du microbe 13 extrait des selles mêmes de Le G.. Oss. III. — Le 5 janvier, l'échantillon 1, qui vient d'être isolé des selles du soldat G..., n'est même pas agglutiné à 1/18 par le sérum du malade, au début d’une dysenterie de moyenne intensité. Dix jours plus tard, le sérum de cet homme qui entre en convalescence agglutine l'échantillon 1 à 1/50. Il agglutine au même taux les échantillons 2, 4, 5, 7, retirés des selles d’autres patients. Bien que l’agglutination n'acquière qu'à titre exceptionnel dans la dysenterie une intensité analogue à celle qui s’observe dans d’autres affections, la fièvre typhoïde en particulier, elle est parfaitement capable d’être appliquée au diagnostic de la maladie. Elle nous a rendu en particulier de grands services pour le dépistage de dysenteries atypiques ou pour le diagnostic rétrospeclif. Toutes réserves faites au sujet de la possibilité d’aggluti- nations retardées, le pouvoir agglutinant est susceptible de faire défaut dans des cas bénins. Nous l’avons également vu manquer dans quelques cas très graves où les forces défen- sives de lorganisme paraissaient complètement annihilées. En même temps que pour le microbe de la dysenterie de l'Argonne, il apparaissait chez nos malades des propriétés agglutinantes pour le bacille de Hiss, auquel il semble que notre bacille dysentérique doive être rattaché, et pour le bacille de Flexner, microbe du même groupe. A l'égard du bacille de Shiga, ces mémes propriétés agglutinantes ont toujours fait défaut. A l'égard du bacille de Hiss les propriétés agglutinantes se sont, dans la grande majorité des cas, montrées plus éner- giques qu’à l'égard du microbe de Argonne lui-même. Cette différence d'agglutinabilité trouve vraisemblablement une expli- cation dans ce fait que le bacille de Hiss était un microbe de collection, entretenu depuis longtemps par repiquages à l'Ins- titut Pasteur, tandis que nos bacilles dysentériques provenaient directement de l'organisme. LA DYSENTERIE DE L’ARGONNE 511 Beaucoup plus exceptionnelle et beaucoup moins intense, s’est toujours montrée l’agglutination du bacille de Flexner. Nous ne l'avons jamais vu dépasser 1/50. On sait que ce micro- organisme est susceptible d'être agglutiné à ce taux par le sérum de certains sujets sains. Nous avons, en effet, souvent observé l’agglutination du bacille de Flexner par le sérum de non-dysentériques à des taux variant entre 1/10 et 1/50. Nous ne l'avons jamais notée au-dessus de ce chiffre. Nous ne rete- nons naturellement ici que les cas où cette cause d'erreur n'existait pas. Oss. I. — A leur entrée à l'hôpital le sérum des malades G... et C... n’exerce à l'égard du bacille de Flexner aucune action agglutinante. Le pouvoir agglutinant est recherché à nouveau la veille de leur départ en convales- cence. Il s'élève à 1/40. Oss. Il. — Le malade C... n'agglutine pas le bacille de Flexner à son entrée à l'hôpital. Au cours de la maladie (dysenterie de moyenne intensité), le pou- voir agglutinant s'élève à 1/50. Oss. III. — Le malade D... agglutine le bacille de Flexner à 1/10 à son entrée à l'hôpital. Il l'agglutine à 1/50 à sa sortie. Au cours de la maladie ou de la convalescence, nous n'avons ? jamais vu apparaître à l'égard du bacille de Shiga la moindre J PP 8 8 propriété agglutinante. Le malade D..., qui n’agglutinait pas ce bacille à l'entrée, ne l’agglutinait pas davantage à la sortie. Le sérum des malades G... et P..., qui à l'entrée exercait à l'égard du bacille de Shiga un pouvoir agglutinant égal à 1/10, exerçait à leur sortie une action agglutinante rigoureusement identique. SENSIBILISATRICE. Des résultats de l’agglutination, nous devons rapprocher ceux fournis par la recherche de la déviation du complément. Le sérum de nos malades contenait une sensibilisatrice vis-à- vis du bacille de la dysenterie de l’Argonne. L'action des ambo- cepteurs s’exercait également vis-a-vis des bacilles de Hiss, de Flexner et de Shiga. L'absence de déviation n’a été constatée que dans quelques cas de dysenterie très bénigne. ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR or — 19 INOCULATION AUX ANIMAUX. Le microbe de la dysenterie de l’Argonne s'est montré pour le cobaye et le lapin — les seuls animaux auxquels nous ayons pu Vinoculer — fort peu pathogène et fort peu toxique. 2 à 40 cent. cubes d’une culture jeune en bouillon inoculés sous la peau du cobaye déterminent au point d'inoculalion soit de l'œdème, soit une escarre. L'animal maigrit pendant quelque temps, puis ne tarde pas à se remettre. L'inoculation intrapéritonéale de 2 cent. cubes de la même cullure parait laisser le cobaye indifférent. Les doses massives seules provoquent une périlonite mortelle. Des essais de con- tamination de jeunes lapins par ingestion ont abouti à un résultat négatif. L'animal adulte qui a reçu sous la peau 10 cent. cubes de culture jeune en bouillon ne présente — tout comme le cobaye — qu'une lésion locale (cedéme ou escarre). Il maigrit pendant quelques jours, puis se remet. Aux doses de 10 et de 20 cent. cubes, les cultures tuées par la chaleur (une demi-heure à 58 degrés) ou centrifugées et traitées par quelques gouttes de chloroforme n'agissent pas de facon différente. Il se produit une simple lésion locale. Les phénomènes généraux sont réduits à fort peu de chose (éléva- tion de température, dyspnée) ou même font complètement défaut. En somme, le bacille de la dysenterie de l’Argonne parait se comporter à l'égard des animaux d'expériences comme le bacille de Flexner, mais nous n'avons pu, faute de matériel, pousser son étude expérimentale aussi loin que nous l’aurions voulu. DEUXIÈME VARIÉTÉ DE BACILLE DYSENTÉRIQUE DANS LA DYSENTERIE DE L'ARGONNE Du bacille dysentérique que nous venons de décrire, nous avons au total recueilli 25 échantillons. Ils ont été comparés entre eux au point de vue morphologique, biologique, cultu- ral... ete. Leurs attributs essentiels, leurs caractères de LA DYSENTERIE DE L’ARGONNE 513 fermentation des sucres en particulier, sont identiques. Les différentes souches ne se distinguent les unes des autres que par des nuances fort peu sensibles : cultures plus ou moins visibles sur pomme de terre, traces plus ou moins appréciables d'Indol en bouillon peptone Martin, fluorescence légèrement différente du bouillon au rouge neutre, teinte plus ou moins rouge du petit lait de Petruschki et surtout agglutination plus ou moins forte sous l'influence d'un sérum expérimental anti- Flexner ou anti-Argonne (échantillon n° 7). Tous ces germes doivent être tenus pour extrèmement voisins du bacille de Hiss, sinon pour complètement identiques à lui. Seule la résistance des cas cliniques à l'action thérapeutique d’un sérum polyvalent (anti-Hiss pour 1/4), pourrait être un argument contre ce rattachement. C'est un fait bien connu dans l’épidémiologie de la dysen- terie qu'au cours d'une épidémie sévissant sur une collectivité, on peut observer des cas causés par des bacilles distincts, par exemple par des bacilles de Shiga et de Flexner. Les deux germes peuvent mème coexister chez un même malade. En particulier, MM. Dopter et Sicre ont mis en lumière cette particularité qu'une épidémie globale de garnison peut être constituée en réalité par plusieurs épidémies isolées recon- naissant chacune une étiologie microbienne différente. Nous avons observé au cours de l'épidémie de VArgonne un fait de tous points comparable. Alors que la très grande majorité des cas était causée par le bacille de Hiss, nous avons recueilli deux observations qui, cliniquement, se distinguaient des autres par une gravité plus grande, et qui, bactériologique- ment, relevaient d’un microbe identique — aux caractères d'agglutination près — à celui de Shiga. Voici résumées ces deux observations : Oss. I. — Dysenterie grave à bacille para-Shiga. Forme longue et trainante. Guérison. H... (Léon), vingt-neuf ans, soldat de 2e classe, au 51° de ligne, tisserand avant l'incorporation. Entré à l'hôpital Valmy, à Sainte-Menehould, le 6 janvier 1915. Les antécédents ne présentent aucune particularité intéressante. H... a été exempté du service militaire pour « faiblesse de constitution ». Néanmoins, il n'avait jamais élé malade avant l'affection actuelle. Il a été mobilisé le 9 octobre et a passé tout d'abord deux mois à Lorient. . 51% ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Il ne se trouve dans l'Argonne que depuis trois semaines. Dans les tranchées, il a souffert du froid, ce qui est attesté par la coexistence de gelures du jer degré à la face dorsale et au bord interne des deux pieds. Les aliments ne lui parvenaient qu'une fois par jour et froids. Il n’a pas bu d’eau. Le vin et le café qu'il recevait lui suffisaient. Personne autour de lui ne sembie avoir contracté la dysenterie. fl... est tombé malade brusquement, sans cause connue, dans la nuit du 2 au 3 janvier. La diarrhée a revêtu d'emblée le caractère dysentérique. Les selles, précédées de coliques, suivies d’épreintes et de ténesme, étaient fort peu copieuses mais très nombreuses (une dizaine dans la nuit du 3 au 4, une trentaine dans la journée du 4). Elles n’ont pas tardé à se produire involontairement, à s'accompagner d'état saburral, d’anorexie, de nausées, d'amaigrissement et de perte de forces, en sorte que le malade a du, le 6 janvier, être dirigé sur l'hôpital. Le lendemain, on est frappé par l'atteinte profonde de l’état général. Le malade est très faible, très amaigri et son facies respire une vive souffrance. Apyrexie. La langue est saburrale. Vive sensation de soif. Anorexie absolue. Ni nausées, ni vomissements, coliques douloureuses péri-ombilicales. Une vingtaine de selles par jour, du volume d’une cuillerée à.soupe, de couleur jaune très clair et contenant en suspension du sang et du mucus. Epreintes, ténesme. Les faux besoins sont très fréquents. Les selles involontaires ont cessé depuis l'entrée à l'hôpital. Pas de gène de la miction. Le ventre est souple et légèrement rétracté en bateau. La palpation du creux épigastrique et de la fosse iliaque gauche est douloureuse. On sent l'S iliaque dur et contracté. Foie et rate normaux. Rien au cœur ni aux poumons. Céphalée frontale. Un peu de vertige et d’insomnie. Au microscope, l'examen des selles montre les cellules épithéliales, les globules rouges et la vive réaction leucocytaire habituelle à la dysenterie bacillaire : quelques bacilles coliformes, peu mobiles, à espace clair cen- tral. Les ensemencements sur gélose lactosée tournesolée et sur milieu de Conradi donnent en très grande abondance, au milieu de rares colonies de colibacille, un micro-organisme possédant les caractères généraux du bacille de Shiga et qui sera étudié en détail. Le sérum du malade n’exerce même à 1/10 aucune action agglutinante sur le bacille d'Eberth, les paratyphiques A et B, les dysentériques de Shiga et de Flexner. Trailement. — Bouillon, lait, potion à base de sulfate de soude. Les jours suivants, l'état demeure stationnaire. H... continue d’avoir dans les vingt-quatre heures une vingtaine de selles de caractère dysentérique. Particularité constatée chez la plupart des autres malades, le plus grand nombre de ces évacuations se produit la nuit. Le ventre rétracté en bateau est toujours douloureux au creux épigastrique et dans la fosse iliaque gauche où l'S iliaque donne la sensation d'une corde. Le sérum n’exerce, même à 1/10, d'action agglutinante ni sur le germe (du groupe du Flexner) isolé des matières fécales des autres dysenté- riques du service, ni sur le microbe du type Shiga isolé des selles de H... lui-méme. 12 janvier. — On note une légère amélioration. Le chiffre des selles descend à 15. Leur caractère dysentérique persiste. LA DYSENTERIE DE L’ARGONNE 545 Vers le 16 janvier, elles tombent à 8 et deviennent fécaloides; la langue se nettoie; le malade se sent un peu d’appétit. La douleur, à la pression du ventre, disparait. L'état général laisse toujours beaucoup à désirer. La faiblesse et lamaigrissement, qui s'est beaucoup accentué, sont extrêmes. L'alimentation est reprise petit à petit avec les précautions d'usage. Le sérum de H.. (2e saignée) continue à être complètement dépourvu de propriétés agglutinantes. 20 janvier. — Bien que le malade, très docile, ne commette d’imprudence d'aucune sorte, sa diarrhée persiste, elle prend une allure trainante et paraît devoir passer à l’état chronique. 5-6 selles par jour. Le 30 janvier, H... est évacué sur un hôpital de l'intérieur, diarrhéique encore et toujours très faible et très amaigri. Avant son départ, il avait été saigné une 3e fois et il avait été constaté que, pas plus que le jour de l'entrée à l'hôpital, ou au milieu de la période d'état, le sérum n’exerçait d'action agglutinante sur les divers bacilles dysentériques, en particulier sur le bacille extrait des selles mêmes du malade. Oss. II. — Dysenterie grave à bacille para-Shiga. 810 cent. cubes de sérum poly- valent. Aucune amélioralion des symplômes cliniques ou des constatations baclériologiques. Ultérieurement guérison. C... (Louis), trente-deux ans, soldat de 2° classe au 161¢ régiment d’infan- terie. Cultivateur avant l'incorporation. Entré à l'hôpital de contagieux de Condé-en-Barrois, le 26 février 1915. Antécédents sans intérêt. A été exempté du service militaire pour une adénite cervicale dont il ne reste plus trace. Mobilisé au mois de novembre, a joui d'une bonne santé jusqu'à il y a 5 jours. Attribue sa maladie au froid et à l'alimentation carnée. Cultivateur en Bretagne, il n'était pas habitué à manger de viande.? ig Le 27 /évrier au matin, C... se trouve dans un état très grave. Il est hébété et répond avec les plus grandes difficultés aux questions posées. Pouls mou, dépressible, fuyant, à 100 pulsations. Température : 37°4. Le malade se plaint d'une diarrhée très douloureuse, Les selles sont impossibles à compter et se produisent presque toujours malgré la volonté du sujet. Une d'elles que nous recueillons est très peu abondante (une cuillerée à café environ) et répond au type bien connu du « crachat pneumo- nique ». Au microscope on trouve du mucus, des cellules épithéliales, des globules rouges, des globules blancs, des micro-organismes très peu nom- breux, peu mobiles, coliformes, souvent à espace clair central, se déeclorant par le Gram. Le ventre, souple, creusé en bateau, est douloureux au niveau du creux épigastrique et de la fosse iliaque gauche. Dès l'entrée du malade, on lui injecte 100 cent. cubes de sérum antidysen- térique polyvalent. 28 février. — C... ne se trouve pas mieux. Il n’a pas dormi. Depuis la visite d'hier, il a eu 52 selles, précédées de coliques, suivies d’épreintes et de ténesme. Plusieurs selles involontaires. Langue saburrale, Vive sensation de soif. Ni vomissements, ni nausées. La douleur du creux épigastrique et de la fosse iliaque gauche persiste inchangée. La température décrit de grandes oscillations, entre 37 et 39 degrés. Le pouls se relève. ; Les ensemencements, pratiqués la veille sur gélose lactosée, ont donné 516 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR presque en cullure pure, un bacille, que son action à l'égard des sucres parait devoir rattacher au bacille de Shiga et qui sera étudié en détail. 120 cent. cubes de sérum anti-dysentérique, der mars. — 44 selles d'aspect toujours franchement dysentérique. Langue rôtie. Soif persistante. Apparition de hoquets et de nausées. Faux besoins. Selles involontaires. Un peu de dysurie. Le ventre est toujours douloureux, le long du côlon, que l’on sent tendu à la façon d'une corde. Perte de force. Amaigrissement. Le sérum du malade n’agglutine ni le bacille de Shiga, ni le bacille de Flexner, ni le bacille de la dysenterie extrait des selles des autres malades du service, ni le microbe isolé chez C... lui-même. L’hémoculture donne un résullat négatif. 420 cent. cubes de sérum. 2 mars. — 40 selles mousseuses et, à ce caractère près, ressemblant à un pus de vomique. Le hoquet: les nausées et tous les signes subjectifs et objectifs notés la veille, persistent. L’urine renferme des traces d'albumine. La seule amélioration constatée a trait à la température qui est descendue à la normale. 120 cent. cubes de sérum. 3 mars. — 39 selles à l'aspect de crachat purulent. La soif, l’anorexie, le hoquet, les nausées, les épreintes, le ténesme persistent. Le malade a encore eu des selles involontaires. 120 cent. cubes de sérum. 4 mars. — 35 selles identiques à celles des jours précédents. Le malade est très faible et très amaigri. Les nausées et les vomissements ont cessé. Le hoquet persiste. 120 cent. cubes de sérum. 5 mars. — 28 selles. Reprise des vomissements. 110 cent. cubes de sérum, ce qui porte à 810 cent. cubes la quantité totale injectée. 6 mars. — 28 selles, loujours à l'aspect de crachat purulent. L'examen microscopique dénote un aspect identique à celui constaté à l'entrée. De même les ensemencements sur gélose lactosée tournesolée, montrent comme au premier jour du bacille dysentérique, presque à l'état de purelé. Le malade a la même langue rôlie, la même soif, la même anorexie. Le hoquet se manifeste encore par intermiltences. Les épreintes, le ténesme, les faux besoins, les selles involontaires per- sistent inchangées. Suspension du sérum anti-dysentérique. Le sérum de C... continue à n'agglutiner aucun germe dysentérique, pas même celui isolé des selles du malade. 7 mars. — 25 selles. Quelques débris fécaloïdes sont mélangés au mucus purulent qui jusqu'à présent formait seul les matières. Le malade se sent un peu mieux. IJ n'a plus ni hoquet, ni nausées, et vomissements. Les selles sont moins douloureuses. Encore quelques faux besoins et quelques selles involontaires. 8 mars. — 15 selles seulement. Elles sont franchement fécaloides, mais semées encore de trainées muqueuses. C... se sent beaucoup mieux. 9 mars. — 13 selles. 10 mars. — 10 selles. L’amélicration continue. Les jours suivants elle LA DYSENTERIE DE L’ARGONNE ote s'accentue encore. Le malade a, par jour, 4 à 6 selles fécaloides et celles-ci ne renferment plus que très peu de mucus. Il parail être en bonne voie de guérison, lorsque nous quittons Condé, le 22 mars. La veille de notre départ, C... est saigné une dernière fois. Son sérum est toujours complètement dépourvu de propriélés agglutinantes. Chez ces deux malades, il a été isolé un microbe identique qui, à côté des attributs généraux des bacilles dysentériques, possédait les caractéristiques suivantes : sur gélatine inclinée, il donnait une couche légère, presque identique à celle que fournit le bacille typhique. Sur pomme de terre, c'était un enduit peu épais et légèrement jaunâtre. Le lait n’élait pas coagulé et la teinte du lait tournesolé n'était nullement modi- fiée. Il ne donnait en bouillon, additionné de rouge neutre, aucune fluorescence. Le petit lait de Petruschki, très faible- ment viré tout d'abord, redevenait ensuite légèrement bleu. En eau peptonée, il y avait production d'une quantité appréciable d'indol. Les bouillons glucosé, galaclosé, Iévulosé viraient au rouge, sans qu'il y eût de production de gaz. Au contraire, le microbe se montrait tout à fait sans action sur le lactose, le saccharose, la mannite, le maltose, la dulcite. A côlé de ces caractères, de nature à rapprocher ce germe du bacille de Shiga, nous devons noter une inaptilude absolue à se laisser agglutiner. Un sérum ey une anti-Shiga, agglu- tinant à 1/4.000, n'exerçait, même à 1/10, aucune action sur lui. Les sérums expérimentaux anti-Flexner, anti-ty- phique, anti-paratyphique se comportaient de facon iden- tique. Mème le sérum des deux malades H... et C..., qu'il eût été prélevé au cours de la maladie ou au début de la conva- lescence, demeurait inefficace (1). A plus forte raison, l’agelu- tination faisait-elle défaut à Pégard des bacilles de meee de Hiss et de nos 25 Anne du bacille de la dysenterie de l’Argonne. Le séro-diagnoslic n'est dene pas applicable au dia- (1) On sait qu'au cours de la dysenterie à bacille de Shiga, le pouvoir agglutinant est susceptible de s'élever à un taux considérable, qui peut se maintenir plusieurs années après la guérison. Au cours de nos recherches, un malade qui agglutinait le bacille de Shiga, à 1/75, avait, cinq ans aupara- vant, souffert dune dysenterie, en Chine. Chez un autre, une agglutination à un taux sensiblement identique se rapportait manifestement a une dysen- terie contractée il y a un an, en Chine également. re 518 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR gnostic de cette variété de dysenterie, comme il l’est au dia- gnostic de la dysenterie à bacille de Hiss. Si le sérum de ces malades ne renfermait pas d'agglutinines, il contenait, au contraire, une sensibilisatrice et la déviation du complément donnait un résultat positif quel que fût l’anti- gène employé : bacilles de Shiga, de Flexner, de Hiss, bacilles dysentériques des malades de H... et C..., ou bacilles de Hiss en provenance de l’Argonne. Comparé à ce dernier microbe, ce germe s’est montré beau- coup plus pathogène et plus toxique. A la dose de 2 cent. cubes sous la peau, de 1 cent. cube dans le péritoine, il tuait en deux jours un cobaye de 500 grammes. A l’autopsie, l’intestin appa- raissait vivement congestionné. Le microbe était retrouvé dans le sang et les organes. De méme, le produit de raclage de 2 cultures sur gélose, émulsionné dans 10 cent. cubes d’eau physiologique et tué par chauffage à 58 degrés, inoculé sous la peau d'un lapin, déter- mine une escarre volumineuse, de plusieurs centimètres de diamètre. Lorsqu'elle se détache, les muscles de la paroi n’exis- tent plus, le fond de la plaie suppurante est formé par Vaponé- vrose profonde qui recouvre le péritoine. L’inoculation d’une dose plus forte (20 cent. cubes) amène en 48 heures la mort de l'animal. L’inoculation sous-cutanée d’une émulsion centri- fugée, décantée, puis traitée par quelques gouttes de chloro- forme, produit des effets absolument identiques. On voitque, si le microbe retiré des selles de nos deux malades se rapproche du bacille de Shiga, par son action sur les sucres et les effets de son inoculation aux animaux, il en diffère, au contraire, par ses caractères d’agglutination et aussi par quelques-unes de ses propriétés biologiques (production d’une quantilé appréciable d'indol). Si nous ajoutons à ces faits qu'un sérum polyvalent (composé pour une moitié de sérum anti-Shiga) se soit dans un cas (le seul où il ait été essayé) montré totale- ment dépourvu d’effet thérapeutique, il apparaîtra sans doute que ce microbe mérite de garder une certaine individualité. L'étiquette de « bacille para-Shiga » est de nature à la sauve- garder. Dans une épidémie sévissant sur un asile d’aliénés, Krüse a trouvé un bacille qui se différenciait de celui de Shiga, en ce Ee : LA DYSENTERIE DE L’ARGONNE 519 que le sérum des malades n’agelutinait pas le bacille de Shiga, mais l’agglutinait lui. De ce bacille, le nôtre se distingue en ce que, même le sérum des malades ne l’agglutine pas (1). Sa présence, en très grande abondance (à l’état presque de culture pure dans une observation) dans les selles, sa persis- tance pendant toute la durée clinique de la maladie, sa dispari- tion, au contraire, dès que la convalescence s’établit, enfin les résultats positifs de la déviation du complément, sontcependant des arguments qui ne permettent pas de douter de son rôle pathogène. Au cours de l'épidémie de dysenterie qui a sévi, cet hiver, sur nos troupes de Argonne, il a été en résumé, isolé avec une fréquence très inégale, deux variétés de bacille dysenté- rique. Le germe de beaucoup le plus souvent rencontré, présentait — à cela près que la maladie qu'il occasionnait résistait à l'action du sérum anti-dysentérique — tous les caractères du bacille de Hiss. L'autre — dont nous n’avons recueilli que deux observations — possédait les principaux attribuls du bacille de Shiga, mais n était aggluliné ni par le sérum expérimental anli-Shiga, ni, semble-il, par le sérum des malades. Le sérum polyvalent était également sans action sur la dysenterie qu il provoquait. Cette inefficacité du sérum est peul-étre de nature — jointe à quelques autres caractères — à faire accorder à ces deux germes une certaine individualité. (1) Nous devons faire une réserve au sujet de la possibilité de ces agglu- tinations retardées qui — à titre, il est vrai, tout à fait exceptionnel — se manifestent seulement à une époque éloignée de la convalescence. Séparés de nos malades à ce moment, il nous a été impossible de leur prélever du sang. DEUXIÈME CAMPAGNE CONTRE LES SAUTERELLES STAURONOTUS MAROCCANUS THUN.) EN ALGÉRIE, AU MOYEN DU « COCCOBACILLUS ACRIDIORUM » D’HERELLE par le Dt M. BEGUET. (Travail de l'Institut Pasteur d'Algérie.) L'étude de l’action du Coccobacillus acridiorum d’Hérelle sur le Stauronote marocain, commencée en 1913 par l'Institut Pasteur d'Algérie, a élé continuée celte année, du 16 avril au 25 juin 1914, dans la même région que l’année dernière, sur 300 kilomètres carrés environ, à Tagremaret, dans le départe- ment d'Oran. k La campagne de 1913 (1) avait démontré nettement les faits suivants : 1° On peut acclimater le Coccobacille sur le Stauronote marocain de facon à lui donner une virulence maxima. 2° On peut obtenir une forte mortalité dans les taches de Stauronotes après pulvérisation de cultures virulentes de Coccobacille. Il s'agissait cette année, en partant d'emblée d'un virus déjà habitué au Stauronote par les expériences précédentes, de rechercher dans quelle proportion la contagion peut se pro- pager naturellement parmi les bandes infectées, quels sont les modes de contamination entre Acridiens et quels sont les résultats pratiques que l'on peut espérer de ce mode de destruc- tion, employé seul ou associé aux mesures mécaniques déjà connues. (4) EDmoxD SERGENT et Apert LHÉRirIER, Annales de l'Institut Pasteur, t. XXVIII, n° 4, avril 1914, p. 408. DEUXIEME CAMPAGNE CONTRE LES SAUTERELLES l oe i) BIOLOGIE DU STAURONOTE MAROCAIN ET MOYENS DE DESTRUCTION EMPLOYES D’ORDINAIRE CONTRE LES ACRIDIENS Le Stauronotus maroccanus Thünberg a des mœurs et des conditions d'existence très différentes de celles des Schistocerca qui ont servi aux premières expériences de d'Hérelle en Amé- rique. Nous avons remarqué que ces différences peuvent avoir une grosse influence sur l'application de la méthode biologique et sur ses résultats. l° Évolution. — Le Stauronote marocain ne quitte guère la région des Hauts-Plateaux pendant toute la durée de son évo- lution et reste de préférence dans le voisinage des collines pierreuses el sèches. Cette parlicularité, qui le différencie du Schistocerca, nettement migrateur, vient de ce fait que les œufs pondus en juin doivent attendre le mois davril de année suivante pour éclore. Tout œuf qui serait déposé dans un sol meuble et dans une région facilement inondée serait certainement condamné à pourrir. C'est pour cela que les pontes ont toujours lieu dans la terre extrêmement dure où la surface desséchée du sol forme une carapace protectrice pour l'œuf qui doit l’affleurer. Les éclosions débutent dans les derniers jours de mars pour atteindre leur maximum dans la première quinzaine d'avril et se continuent jusqu'en mai. L’évolution des jeunes criquets se fait par sauts brusques pendant les périodes de chaleur et de soleil, et le moment où ils prennent leurs ailes est assez variable pour cetle cause. Mais, généralement, ils commencent à voleter et &s accoupler vers le 15 mai, et se concentrent pour le grand vol en vue des pontes vers la fin de ce mois ou au commencement de juin. Les pontes enfin sont surtout effectuées dans la deuxième quinzaine de Juin et sont complètement ter- minées en juiilet. Nous avons cherché à déterminer ce que deviennent les Stauronotes après les pontes, car c’est cette période de leur 529 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR dé évolution qui est le moins connue. Nous avons pu nous assurer d'abord que ces pontes sont effectuées en plusieurs endroits par les mêmes bandes. Mais il devient très difficile de les suivre à partir de ce moment, car elles se dispersent par grands vols qui errent sur les Hauts-Plateaux, quelquefois à de trop grandes distances pour que l’on puisse savoir ce qu’elles sont devenues. Il est bien certain que les sauterelles ne meurent pas en masse après les pontes comme nous l’avons entendu dire quelquefois. Les unes restent sur place, ou tourbillonnent dans la même région; d'autres s’en vont brusquement très Join pour revenir quelques jours après. Beaucoup enfin, parvenues au terme de leur évolution, doivent mourir isolément dans les rochers et les déserts rocailleux, ou devenir une proie facile pour leurs ennemis. Leur nombre diminue de la sorte pendant tout l'été, et celles qui restent cherchent dans les plaines d’alfa les bribes de végétation résistante qu’elles peuvent y trouver. On nous a affirmé en avoir vu encore au commencement d’oc- tobre. Mais elles n’attirent plus l'attention, puisque les moissons sont finies, et il est inutile de lutter contre elles, puisqu'elles ont déjà pondu. 2° Orientation. — Le Stauronote n’a pas de direction fixe : il est erratique, c’est-à-dire qu'il se déplace toujours dans une même région, en nayant pour guide que les besoins du moment. Jeune, il dévale les pentes des collines où il vient d’éclore, sans se grouper autrement que par masses plus ou moins denses suivant le même versant ou la même vallée. A ce stade il suit les chemins faciles et se nourrit de la végétation natu- relle, évitant même quelquefois les champs de céréales. Sur le point de devenir sauterelle, il semble montrer une tendance à rechercher la verdure et à se former en véritables colonnes. A ce moment, pris d'une énergie nouvelle il franchit tous les obstacles, pour se jeter dans les champs cultivés et on assiste à une série de concentrations locales des bandes jusque là dispersées. Au moment de l’accouplement, le Stauronote commence à rechercher quelquefois les terrains pierreux et secs. Nous en avons vu une bande s’abattre près d'un champ d'orge dans un DEUXIÈME CAMPAGNE CONTRE LES SAUTERELLES 523 endroit inculte, et s'envoler quelques jours après sans avoir pénétré dans les cultures qui n'étaient éloignées que de quel- ques mètres. Quand la sauterelle va pondre, cette tendance semble devenir la règle. Toutes les. bandes de la région, après s’ètre réunies en un seul grand vol, effectuent une série d'étapes vers les collines arides et les terrains secs avec quelques hésitations et quelques changements dans la direction suivie, comme si elles recher- chaient l'endroit le plus favorable pour y grouper leurs pontes. Enfin, les lieux propices une fois trouvés, les Stauronotes restent à peu près à la même place, jusqu'à la fin des pontes, en tourbillonnant au-dessus de la région choisie. Done, contrairement à ce qui se passe pour le Schistocerca peregrina, on ne peut pas s’attendre à une marche en avant régulière. Une colonne de Stauronotes peut changer brusque- ment de direction et mème retourner en arrière, abandonnant un champ très fertile où la pâture était assurée pour longtemps. 3° Nourriture. — Le Stauronote n’est pas très vorace et choisit sa nourriture. Il prend les feuilles les plus tendres, laisse les tiges trop dures et continue son chemin. Il mange surtout ce qui est à sa portée et préfère une branche tombée à une plante encore debout. Il peut le faire d’ailleurs, car la densité des taches ne nécessite pas une utilisation plus complète des ressources qu'il rencontre; c'est pourquoi il laisse beaucoup derrière lui et fait surtout du mal parce que les céréales qu'il « grignotte » sont aussi bien perdues que si elles étaient dévorées en totalité. Ce fait nous a paru intéressant à signaler, car si l’on répand sur les pâtures un bouillon destiné à infecter les criquets, une assez forte proportion peut ne pas être utilisée et se perdre. Le Stauronote est peu cannibale, probablement parce qu'il n’a pas besoin de recourir à ce moyen pour se nourrir, élant données sa faible voracité et l'abondance relative des pâtures. Il ne le devient guère qu’en captivité, au bout de quelques jours. Néanmoins, nous avons constaté le fait en plein champ, à plusieurs reprises, au cours de la dernière mue. Il n'est pas impossible que cette pratique se généralise dans les taches très 524 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR denses, mais nous n'avons pas eu l’occasion de la voir devenir une règle. 1° Application au Stauronote marocain des moyens méca- niques employés pour la destruction des Acridiens. — Tous Îles procédés utilisés contre les Acridiens tendent à les refouler en masse vers un point où Von peut les détruire par un moyen physique ou chimique queiconque. Le Stauronote, beaucoup plus agile et plus indépendant que le Schistocerca, est plus difficile à combattre par de tels moyens. Il saute par-dessus les plaques de zinc de 33 centimètres de hauteur, employées contre les criquets pèlerins, et ses colonnes éparses et clairsemées échappent facilement aux barrages qui doivent les cerner. Il n'y a guère que le feu qui pourrait les empêcher de passer sur une grande étendue, mais il est dan- gereux en Algérie, à cause des broussailles, et demande trop de combustible. Le meilleur moyen consiste à s'attaquer séparément à de “pelites portions de terrain recouvertes par les criquets, et à détruire ceux-ci par un groupement local. Une cinquantaine d'hommes munis de feuillages légers forment des cercles de plus en plus petits, et chassent peu à peu les Stauronotes vers un fossé peu profond, creusé au moment même, où ils sont écrasés aussitôt. Dans les terrains durs el pierreux, on remplace avantageusement le fossé par une « melhafa », sorte de grand drap de couleur grisätre, où on peut emprisonner et écraser les Acridiens qui sont venus s'y réfugier. En répétant méthodi- quement cette destruction, daus toutes les parties de la tache, on peut arriver rapidement à un excellent résultat, mais il faut de nombreux chantiers travaillant constamment. Malheureuse- ment, ces moyens ne sont utilisables que tant que le criquet ne se sert pas de ses ailes; lorsqu'il vole, on ne peut plus rien contre lui. Ces moyens sont extrèmement coûteux. Un chantier ordi- naire nécessile une centaine d'hommes qui doivent travailler pendant près de deux mois, ce qui fait 6.000 journées de salaire. Si l’on considère qu'il faut souvent plusieurs chantiers r pour une seule région, on se rend compte facilement des dépenses nécessaires. DEUXIEME CAMPAGNE CONTRE LES SAUTERELLES 325 On peut, au lieu de payer les travailleurs à la Journée, leur acheter au poids les criquets ramassés par eux à raison d'une dizaine de francs le quintal. Mais c'est par milliers de quintaux que doivent se compter les chiffres définitifs à la fin d’une campagne. Aussi les moyens mécaniques sont-ils peu ou mal employés dans les pays pauvres, où les cultivateurs préfèrent laisser dévorer leurs récoltes par les Stauronotes que de dépenser en main-d'œuvre une somme quelquefois supérieure à leur béné- lice définitif. I] EXPÉRIENCES I. — EXALTATION DE LA VIRULENCE DU COCCOBACILLE. Comme l’année dernière, il nous a fallu procéder à des pas- sages successifs de virus par une série de Stauronotes pour relever la virulence du Coccobacille, forcément atténuée par la vie hivernale an vitro. Nous avons d’abord essayé, avant les éclosions normales, de préparer notre virus en utilisant des criquets éclos à l’étuve à 25 degrés, un mois avant leur apparition naturelle dans la région où devaient se faire les expériences; mais la viru- lence ainsi obtenue sur des criquets « forcés » n'a pas été durable; elle est tout de suite retombée dès qu'on a pu expérimenter sur des criquets normaux, nés à terme. Nous avons donc été obligés de recommencer nos passages sur place aussitôt que les Acridiens ont présenté une taille permettant de les manipuler. Ces passages ont été faits du 24 avril au 9 mai, soit par le procédé direct de la goutte fécale, soit par le procédé de la goutte fémorale avec isole- ment sur gélose. Les Coccobacilles qui ont été utilisés provenaient de plusieurs origines : 1° Race ayant servi aux expériences de 1913 et ayant subi 170 passages au laboratoire après la campagne. 20 Race ayant de même servi aux expériences de 1913, mais provenant d'une sauterelle morte dans les champs pendant cette campagne en mai, et 39 526 ANNALES DE L°INSTITUT. PASTEUR onservée en culot de gélose avec 2 repiquages seulement jusqu'en avril 1914. 3° Race rapportée d'Amérique par d'Hérelle et ayant subi des passages par Dicroplus arrogans. 49 Race isolée par d’Hérelle sur une sauterelle (Stauronote) morte en Grèce, au cours d’une épizootie naturelle (que d'Hérelle suppose peut-être en relation avec des expériences qui auraient été faites en Roumanie à la mème époque). Tous ces Coccobacilles avaient les mêmes caractères en bouillon et en gélose. Chaque série de passages portait sur 16 criquets semblables prélevés le mème jour dans une bande non infectée. Chaque origine a été étudiée en plusieurs séries par des techniques diffé- rentes, et, pour chaque série, il a été fait une trentaine de passages. Au début, ces Coccobacilles tuaient un Stauronote par inoculation dans la cavité générale en trente ou quarante heures; mais leur virulence se releva assez vite après quelques passages. Les séries faites avec des Coccobacilles provenant de saute- relles mortes dans les champs et ayant été conservés sans subir de passages au laboratoire ont été nettement les meil- leures. La virulence de ces Coccobacilles s’est relevée de facon à tuer un Stauronote par inoculation dans la cavité générale, en trois heures, après 6 passages seulement. Cette virulence s'est ensuite maintenue pendant toute la durée des expé- riences. Les autres séries, faites avec des Coccobacilles ayant subi des passages au laboratoire, que ce soit par Stauronote ou par Dicroplus, ont présenté une virulence à marche plus longue et moins régulière. I] a fallu 12 à 13 passages pour tuer par inoculation un Stauronote en trois heures, et au cours de ces passages nous avons constaté des changements brusques dans la mortalité. Ces expériences ont donc montré que l'adaptation du virus au Stauronote marocain, réalisée par la campagne de 1943, a persisté malgré Vaffaiblissement de la virulence pendant la vie hivernale in vitro, et qu'on peut obtenir rapidement un virus exalté au maximum, au début de l'évolution des Acridiens. fade. DEUXIÈME CAMPAGNE CONTRE LES SAUTERELLES 5 bo I If. — CONTAMINATION DIRECTE, PAR PULVERISATION DES TACHES D ACRIDIENS. Toutes les pulvérisations ont été effectuées avec des Cocco- bacilles d’égale virulence et tuant au laboratoire un Stauro- note en trois ou quatre heures, environ. Grace à cette fixilé des virus employés, nous avons pu obtenir des résultats comparables en expérimentant sur des criquets d'âge différent et dans des lieux différents. Nous avons essayé de déterminer l’âge de moindre résistance et les condi- tions d'existence du Stauronote susceptibles d’influencer les résultats. Technique. — Nous avons toujours utilisé un pulvérisateur Vermorel ordinaire, de 12 litres environ. Le bouillon avait voyagé dans des bouteilles de verre munies d'un obturateur à anneau de caoutchouc. Après avoir été nettoyés soigneusement, le goulot et le bouchon étaient flambés fortement avec une lampe à souder, et après l'ensemencement au fil de platine porteur d’une colonie isolée de Coccobacille virulent, l’orifice et l'extérieur du bou- chon étaient de nouveau flambés. Les bouteilles étaient ensuite laissées à la température ordinaire, à l'abri toutefois du soleil et de la chaleur, trente- quatre ou trente-six heures et même quarante-huit heures. Le jour de la pulvérisation, elles étaient transportées sur les lieux, munies de paillons et entassées, soit dans des sacs à dos d'homme, soit dans des « chouaris ». a dos de mulet. Dans une expérience, elles ont du ainsi à une vingtaine de kilomètres du laboratoire. La pulvérisation était toujours effectuée au crépuscule, dès que le soleil avait disparu derrière les montagnes. A ce moment, le bouillon était versé sans aucune précaution dans le Vermorel simplement rincé à l’eau froide et on le pulvérisait immédiate. ment, à raison de 1 litre par hectare de terrain infesté en moyenne. Nous pulvérisions le bouillon en gouttes très fines, sur toute l'étendue de la tache, un peu sur chaque buisson, pour créer beaucoup de centres de contagion. Quand les buissons naturels étaient insuffisants, dans les champs de maigre culture, nous les remplacions par des buissons artificiels, en dépo- sant seulement de loin en loin de petits tas de Ferula communis ou d’Arte- misia herba alba. être transportées a) La première expérience a porté sur une tache de criquets jeunes, siluée dans un champ d'orge, au voisinage de la route de Mascara à Frenda, vers le kilomètre 58. Cette bande, qu couvrait une superficie de 4 à 5 hectares, assez dense, a été atta- quée le 4 et le 7 mai, en pulvérisant chaque fois 3 litres de bouillon. Le 10 mai, les criquets qui s’avancaient dans la direc, 528 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR tion de Mascara s’arrétérent au niveau du kilomètre 57,6. Nous commençâmes à cons'ater la présence de nombreux morts dans le fossé bordant la route et sous les buissons avoi- sinants. On pouvait évaluer le coefficient de mortalité à 20 ou 25 morts par mètre carré tous les jours. Cette mortalité con- tinua tout le mois de mai et la bande ne dépassa jamais le kilomètre 57,3. Le nombre des Acridiens qui la composaient diminuait de plus en plus, et le 29 mai, la tache avait littéra- lement fondu sur place, et pouvait élre considérée comme anéantie. Or, pendant ce temps, une bande témoin, évoluant au sud de la roule, n'avait présenté aucune mortalité et s’était avancée de 4 kilomètres. b) Au moment de la dernière mue, alors que les eriquets pre- naient leurs ailes, nous avons fait une deuxième expérience en pulvérisaut 19 litres de bouillon, sur deux taches très voi- sines lune de l’autre, le 8 et le 11 mai. Les deux taches réu- nies couvraient une quinzaine d'hectares ct étaient éloignées de 4 ou 5 kilomètres du lieu de la première expérience. Le même pourcentage de mortalité fut observé au bout de trois jours, et le même état morbide les immobilisa jusqu au 19 mai, à 100 mètres à peine d’un champ d'orge superbe. Puis les sauterelles entrérent brusquement dans le champ, au moment où elles commencaient à se servir de leurs ailes. D'autres bandes laissées indemnes vinrent malheureusement se mêler à elles le 22, pour un commencement de concentra- tion locale. Cetle adjonction de sauterelles saines rendit dès lors tres difficile l'appréciation du pourcentage de mortalité. Nous constatames loutefois, tous les jours, de nombreux morts sur toute l'étendue de ce champ d'orge. Le 24, toutes les saute- relles qui étaient ainsi concentrées prirent leur vol dans la direction de Bou-Noual, vers le Nord-Est, mais une bande très nombreuse resta sur place. Or l'importance de cetle bande fortement infectée el qui fut décimée par Vépizootie, régulièrement, jusqu'au 2% juin, était à peu près la mème que celle de la bande constituée par les survivants des deux taches pulvérisées le 8 et le 11 mai. On peut supposer que les sauterelles infectées à cette date sont restées dans le champ d'orge et que bien peu ont dû partir avec DEUXIEME CAMPAGNE CONTRE LES SAUTERELLES 529 le grand vol; à la fin de juin, ces survivantes avaient elles- mémes presque toutes disparu. Pendant ce temps, les bandes laissées indemnes avaient gagné Bou-Noual et s'étaient éloignées de 14 kilomètres. c) La troisième expérience de pulvérisalion fut faite le 6 juin, sur un vol de Sauterelles en pleine force, saccouplant déjà depuis une quinzaine de jours et s'étant abattues au nord de la route de Frenda à Mascara, vers le kilomètre 72, au lieu dit « les trois marabouts ». Ces sauterelles provenaient de la tache importante de Bou-Noual, et couvraient une superficie totale d’une centaine d'hectares. Aucune de celles que nous avons examinées avant la pulvérisation ne présentait la goutte fécale caractéristique de l’épizootie provoquée par le Coccoba- cillus acridiorum. Douze litres de bouillon furent pulvérisés sur un champ de blé dune dizaine d'hectares, contenant une bande très dense de saulerelles, assez isolée du reste du vol. Le lendemain, ces sauterelles étaient parties et pendant quelques jours, il nous fut impossible de les retrouver parmi les autres. Mais, le 10 juin, nous pouvions déjà recueillir à 1.500 mètres du lieu de pulvérisation, des mortes et des mou- rantes avec la goutte fécale caractéristique et dont linfection était vérifiée au microscope. A partir de ce jour, d’autres foyers apparurent, de plus en plus éloignés du lieu de contaminalion primitif, et signalés spontanément par les indigènes eux- mêmes. Le 18 juin, c'est-à-dire douze jours après la pulvérisation en un point unique, on trouvait de nombreux pelits foyers dis- séminés sur une superficie d’une centaine d'hectares jusqu'à 13 kilomètres du lieu primitif, et dans ces foyers les saute- relles volaient mal. Malheureusement, il fat impossible d’apprécier la destinée de la première bande infectée, qui s'était mélangée intimement à toutes les autres sur une très grande étendue. Après les pontes, vers le 25 juin, les sauterelles commen- cérent leur dispersion par grands vols s’éloignant souvent de 40 kilomètres, et il devint impossible de suivre les foyers trop disséminés et qui n'avaient pas eu le temps de devenir importants. 330 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR d) Une expérience complémentaire pour étudier la propaga- tion naturelle de Vépizootie a été faite le 12' mai, dans une bande laissée indemne. 100 criquets, prélevés dans la partie la plus infectée d’une tache en expérience, furent transportés, dans un sac en toile dont les parois étaient maintenues écartées par des batons dis- posés en croix, au milieu de criquets indemnes éloignés de 2 kilométres des autres taches. En sortant du sac, ouvert prés d’un buisson repéré, les cri- quets recommencèrent à sauter, montrant qu ils avaient peu souffert du transport. Trois jours après, on put constater des morts et des mourants en nombre relativement faible, mais certainement plus grand que celui des criquets transportés. Peu à peu, la mortalité s étendit à quelques centaines de mètres du buisson repéré, et la tache jusque-là vivace et indemne présenta de nombreux relardataires, des morts et des paresseux. Malheureusement, l'expérience avait été faite une dizaine de jours avant l’envol, et il restait trop peu de temps pour que l'extension prit une importance suffisante et de nombreuses sauterelles purent s’en- voler au moment du départ en masse. Il resta, dix-sept jours après le départ des valides, une bande clairsemée de malades qui présentaient la goutte caracté- ristique. L'expérience a donc montré la propagation réelle, quoique lente, de criquet à criquet. III RÉSULTATS 1° Pathologie de l'épizootie. — Le premier symptôme qui attire attention sur les malades est une diminution de l'agi- lité. On peut les attraper facilement avec la main. Ils pré- sentent alors généralement, quand on presse leur abdomen, une goutte fécale caractéristique, dont la couleur va d’un jaune clair légèrement louche au noir d'encre sirupeux comme du jus de pruneaux. Mae DEUXIÈME CAMPAGNE CONTRE LES SAUTERELLES 331 x Au lieu de marcher à petits coups, les pattes repliées, ils rampent les pattes postérieures allongées, et la paire posté- rieure finit par être agitée de tremblements convulsifs. C'est à cette période que les criquets sont le plus facilement capturés et détruits par leurs ennemis les Oiseaux, les Mammi- fères et même les Fourmis. La mort survient enfin, le criquet étant sur le flanc. C'est dans cette position que l’on retrouve les cadavres, dans les bandes contaminées. Mais ces cadavres ne restent pas long- temps sur place, et l'évaluation du coefficient de mortalité est très difficile. Les restes sont rapidement desséchés, et ceux qui ne sont pas désorganisés complètement en quelques heures par les Fourmis, ou dévorés par les Oiseaux et les Acridiens eux-mêmes, sont vile emportés par le vent et réduits en poussière. Quand l'épizootie suit régulièrement sa marche dans une tache d'Acridiens, cette tache semble fondre sans qu'on puisse voir des amas de cadavres proportionnels au nombre des morts. L'effet sur l'instinct et les facultés de reproduction semble être nul, et nous n'avons pas pu constater de castration parasi- taire : les pontes ont été abondantes même dans les lieux où on trouvait des malades, et les mourantes seules n'ont pas pondu. 2° Mode de propagation. — Le Coccobacille de d'Hérelle se trouve constamment dans les déjections liquides des Acridiens atteints par l'épizootie. Cette diarrhée noirâlre souille les feuilles et les débris de végétaux que le Stauronote laisse der- rière lui et que dévoreront ceux qui viendront tont de suite après. C'est Vingestion de ces patures souillées fraîchement qui propage l'épizootie, et qui détermine la dispersion du virus. Dans les cultures ou dans les plaines 4 végétation assez abondante, ces risques de propagation sont donc plus élevés que dans les zones désertiques. Nous avons même pu observer une sorte de stérilisation dans une bande de Stauronotes qui avait séjourné quelque temps dans des collines pierreuses et sèches. Cette bande, infectée, il est vrai, très partiellement par un contact de quelques jours avec une bande malade, laissa le long de sa route des porteurs de germes de moins en 532 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR moins nombreux jusqu'au moment où il fut impossible d’en trouver un seul; le fait ne peut pas étre expliqué par une immunité acquise, car lorsque cette bande revint dans des régions cultivées, elle subit une pulvérisation qui détermina chez elle les symptOmes ordinaires de l’épizootie. Mais nous avons remarqué, lors de son passage à travers les régions arides, que les malades mouraient isolés, et leurs déjections aussitôt rôlies par la sécheresse ne risquaient guère de conta- miner les Acridiens indemnes. Il peut donc exister, en Algérie, pour le Stauronote maro- cain, des conditions qui peuvent géner, à certains moments, la propagation de l’épizoolie. 3° Conditions climatériques. — Nous avons recherché la sen- sibilité du Stauronote aux trois phases principales de son exis- tence, quand il est jeune criquet, quand il prend ses ailes, quand il est adulte. Le meilleur moment est vers la fin du premier mois de son évolution. Trop jeune, il semble résister d'une façon particulière; d'autre part, plus on tarde et moins l'épizootie aura le temps de se propager avant le départ des sauterelles et le commencement des pontes. C'est à cette époque aussi que la maladie a le plus de chance de s'étendre, puisque les criquets vivent en masses serrées et se déplacent lentement. A la fin de la dernière mue, l'effet du virus se fait aussi sentir, mais les Acridiens semblent avoir alors un renouveau de vigueur en vue de l’accouplement et de la ponte. Nous en avons vu de très vigoureuses accouplées et présentant la goutte fécale caractéristique. Enfin, lorsqu'elles ont pris leur vol, l’épizoolie a moins de prise sur elles à cause de leur genre nouveau d'existence. Elles ne sont plus en masses serrées, elles se déplacent souvent et loin, et les risques de contamination sont diminués d'autant. Par contre laire de dispersion est beaucoup plus étendue dans les épizooties provoquées à cette époque : alors que dans les bandes de criquets la contagion ne s'étend guère qu'à quelques centaines de mètres du lieu de pulvérisation, dans les bandes en plein vol, elle peut atteindre une centaine d'hectares au bout de quelques jours. On peut donc tenter de créer une épizootie pendant toute DEUXIEME CAMPAGNE CONTRE LES SAUTERELLES 333 l'évolution du Stauronote, mais le moment favorable est celui où le Stauronole est encore criquet, deux ou lrois semaines après sa naissance. 4° Conditions météorologiques. — Les modifications atmo- sphériques qui se produisent aussitôt après la pulvérisation semblent agir peu sur les effets du virus. La pulvérisation n'est en effet qu'un « ensemencement » du Coccobacille dans l'organisme du criquet, où sa virulence utile doit s'exalter au cours des passages naturels. Les Acridiens s’infectant tout de suite en dévorant les palures sur lesquelles on vient de répandre le bouillon, on peut s'expliquer que ni la pluie, ni la séche- resse survenant à ce moment ne puissent influencer sensible- ment les résultats. Le temps humide et chaud est évidemment le meilleur parce que le bouillon reste bien sur les feuilles et que les criquets montrent plus d'activité. Une fois l'épizootie bien établie dans une tache, les varia- tions atmosphériques semblent agir d'une facon à peu près nulle sur sa propagation. 5° Immunité acquise. — Nous n'avons pas constaté que les expériences de l’année dernière aient développé chez des Stau- ronotes une immunilé vis-à-vis du Coccobacillus acridiorum. Néanmoins, celte courte expérience de deux années ne nous permet pas encore d’écarter cette hypothèse. Il est à craindre qu'au bout de quelques années les générations d’Acridiens ayant pu guérir de l'épizootie deviennent réfractaires au Coc- cobacille. Les campagnes prochaines pourront seules répondre à celte question. 6° Observations de bandes indemnes lémoins. à chaque expérience, considéré en même temps une bande témoin, vierge de toute contamination. De plus nous avons étudié une autre région infestée par les Stauronoles à une tren- taine de kilomètres de nos expériences, sur la commune de Saïda. Dans cette zone manifestement indemne nous n'avons trouvé aucun cadavre sur loute l'étendue de la tache Sur 500 criquels ramassés au hasard nous n'avons obtenu que chez deux seulement une goutte fécale d'un jaune légèrement louche dans laquelle nous n'avons pas trouvé le Coccobacillus acri- diorum d'Hérelle. Enfin, aucun ne présentait cet état morbide Nous avons, 534 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR spécial que nous avons signalé dans chacune de nos expé- riences. Les caractéres que nous avons pu constater dans les taches en expérience étaient donc bien la conséquence de l'épizootie que nous y avions provoquée. CONCLUSIONS Les expériences de 1915 et de 1914 montrent que l’on peut, en pulvérisant des cultures de Coccobacillus acridiorum d'Hérelle surune tache de Stauronotes marocains, provoquer une épizootie durable parmi ces Acridiens. Cette épizootie se propage /ente- ment de criquet à criquet en s’éloignant de plus en plus du foyer primitif, mais elle peut sévir dans les bandes infectées jusqu’à la fin de leur évolution. Elie se manifeste d’abord par un état morbide qui amène une diminution de l’agilité du criquet. Enfin des morts apparaissent au bout de quelques jours dans les bandes infectées. Cette mortalité est plus remarquable par sa durée et sa constance que par son importance journalière, mais il est arrivé qu'une tache de deux ou trois hectares a été décimée en trois semaines. Comment donc utiliser les propriétés du Coccobacillus acri- diorum d'Hérelle dans une application de la méthode biologique à la destruction des Stauronotes, en Algérie ? 1° Il faut considérer cette méthode de destruction comme un procédé de longue haleine qui peut donner régulièrement des résultats partiels pendant des campagnes successives. Ce n'est pas un moyen immédiat de préservation des récoltes, et une bande que l’on puivérise sur la lisière d’un champ n’en dévorera pas moins toutes les cultures. Les sauterelles ne seront détruites que peu à peu, mais cette destruction étant continue, on peut espérer que bien peu de survivantes pourront pondre cette année-là. L'année suivante, la campagne devra reprendre énergiquement, et les chances de succès seront d'autant plus grandes que le nombre inilial des Acridiens à détruire sera plus diminué. Ainsi en plusieurs campagnes, on peut espérer arriver à réduire d'une facon sensible les foyers d’où partent les inva- DEUXIEME CAMPAGNE CONTRE LES SAUTERELLES 535 sions. On doit pourtant émettre une réserve, basée sur la lon- gueur de cette action: on peut craindre qu'une immunité de certaines races de Stauronote vis-à-vis du Coccobacillus acri- diorum ne s’établisse au cours de cette épizootie prolongée ; 2° Ce procédé nécessitant une main-d’ceuvre minime et ne demandant aucune surveillance, on pourra l'utiliser dans les régions éloignées des centres, où l'installation de chantiers et surtout leur fonctionnement prolongé sont rendus presque impossibles par les difficultés de ravitaillement. Les taches de criquets éclos dans ces régions désertes arrivent généralement à leur complet développement sans qu'on puisse les détruire d'une façon pratique, et deviennent des foyers qui, par leur multiplication, annihilent les efforts mis en œuvre dans d’autres régions. Une infection méthodique de ces bandes, qui sera toujours possible à peu de frais, atténuera sans doute ce danger. 3° En provoquant chez les Acridiens un état morbide qui les rend paresseux, la méthode biologique sera un excellent adju- vant des mesures mécaniques qui seront employées. Dans les taches immobilisées ou retardées par l'infection coccobacillaire, le travail des chantiers utilisant les moyens mécaniques sera facilité par le fait qu’il pourra être exécuté toujours au même endroit et avec le même matériel. Les cultures voisines pour- ront être protégées facilement et le rayon de destruction se trouvera diminué notablement. Enfin, on peut espérer que la méthode biologique permettra de continuer les moyens mécaniques au moment où ceux-ci deviennent impraticables, c'est-à-dire lorsque les sauterelles prennent leur vol. Les expériences n'ont pas encore été faites sur une assez grande échelle pour que l’on puisse se prononcer sur ce point, mais, d’après de nombreuses observations, nous sommes en droit de compter sur un résultat favorable. Il est probable que lorsqu'une région aura été infectée systématique- ment, il y aura une grande proportion de sauterelles ailées, affaiblies par la maladie, qui pourront être détruites par les procédés ordinaires. Dans ce cas, la campagne de destruction serait prolongée de plus d’un mois, c’est-à-dire de la moitié de sa durée actuelle. On pourrait mème lutter contre les Stauronotes au moment de la ponte. 536 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR En résumé, il y a un réel intérèt économique à ajouter en Algérie Vinfection par les cultures de Coccobacillus acridiorum d'Hérelle aux moyens de lutte déjà employés contre les Stau- ronotes marocains. Ce procédé biologique n'est pas destiné à remplacer les moyens mécaniques classiques qui peuvent seuls être efficaces quand les Acridiens abordent les récoltes. Dans les régions éloignées des lieux habités, où les moyens mécaniques sont peu praticables, les pulvérisations préventives sur les taches de jeunes criquets seront peu coùleuses et pour- ront diminuer l'étendue des invasions. Enfin, partout où les moyens mécaniques seront employés, la méthode biologique constituera un utile adjuvant. En terminant cette note, nous tenons à remercier vivement M. d'Hérelle de ses bons avis, à assurer de notre gratitude notre collaborateur M. l’administrateur-adjoint A. Ivara, et à pré- senter nos remerciements à M. l'administrateur Alaux, à MM. Porthé, du Syndicat de défense contre les Sauterelles de Frenda, et à M. l'administrateur-adjoint Galy. Le Gérant : G. Masson. ee Paris — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Cassette. 29° ANNEE NOVEMBRE 1915 Net ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Mémoire publié à l'occasion du jubilé de E. METCHNIKOFF. REMARKS ON THE NATURE AND SIGNIFICANCE OF THE SC-CALLED “ INFECTIVE GRANULES ” OF PROTOZOA by E. A. MINCHIN (1). During the past few years several investigators have observed the extrusion of minute corpuscles from the bodies of various Protozoa parasitic in the blood of Vertebrates. The first obser- vation of this kind appears to have been made by Major W. B Fry in 1911, who communicated his results to the Royal Society in June 1911. He regarded these socalled granules as true de- velopmental stages of the parasite which, after extrusion from the body of the trypanosome, were capable of developing into the adult form again. Similar observations were made on the spirochetes of fowls by Dr. Andrew Balfour, in whose labora- tory at Khartoum the observation of Fry were made, and who proposed for these bodies the term « infective granules », At the time when the discoveries of Fry and Balfour were published, I was engaged in writing my text-book on the Pro- (1) E. A. Mincury, professeur de protozoologie à l'Université de Londres, membre de la Société Royale, a succombé en octobre dernier à une longue maladie. La rédaction des Annales s'associe aux regrets causés par la mort prématurée de cet éminent zoologiste. 338 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR tozoa, which went to press early in 1912 and was published in September of that year. In that work I wrole (p. 306) : — « That a trypanosome or any other living cell might excrete erains which, when set free, could exhibit movements due to molecular or other causes, is highly probable; but that such grains represent a stage in the life-history of a trypanosome is far from being so. » At the time I wrote these words the only figure of the « infective granules » that had been published, so far as | am aware, was the diagrammatic and scarcely convin- cing figure given by Fry, and in my criticism LE was misled by assuming that the word « granule » was used by Balfour and Fry in the ordinary cytological sense of the word. Subse- quently the formation of « infective eranules » in Hæmogre- garines was described in detail by Dr. Herbert Henry in 1913, and in the same year a full account of these bodies was published by Fry and Ranken. Both these memoirs were accompanied by numerous illustrations, from which (and spe- cially from these given by Fry and Ranken) it seems to me quite clear that the term « granule » applied to these bodies is a complete misnomer; they are not cell-granules in the ordi- nary sense of the term, but endogenous buds, the formation of which begins by a concentration of chromidia, and each bud, when complete, has the morphological and cytological value of a true cell, very minute in size and reduced almost entirely to its chromatin-elements; the cytoplasm so small in amount as to be practically invisible, or perhaps absent altogether. In order to establish this interpretation, 1 may first draw attention to the many known examples of endogenous budding in other Protozoa, and specially in the Amœbæa. There are, in fact, so many examples of this process of reproduction known to occur in Amœbæa that in a short note it is impos- sible to refer to them all; I must content myself here by men- tioning a few typical instances, such as the life-history of Arcel/a (summarized in my book, pp. 177-181 and fig. 80) and that of Amba minuta, recently published by Popoff, and I will deal presently in more detail with the very typical imstance described by Liston and Martin. In Flagellata, instances of this method of reproduction are less common, but typical examples ; ] « INFECTIVES GRANULES » OF PROTOZOA 539 are seen in the life histories of the Mastigamæbæ so fully de- scribed by Goldschmidt (see also pp. 265-267 and fig. 112 of my book). I select for special notice the reproduction of the amæba described in detail by Liston and Martin, not only because it offers a very typical example of the process of internal bud- formation, but because the observations were madein my labo- Fic. 1. — Formation of endogenous chromidial buds in an amæbu. A, specimen with one large and one small bud; B, smaller specimen with one bud; C, a small specimen with one full-sized bud and two small ones: D, a specimen with a full-sized bud in process of liberation from the parent; E, a bud recently liberated, with its nucleus not fully formed; F, a small amæba containing a large bud. All the amœæbæ contain numerous chro- midia and ingested bacteria scattered in their cytoplasm; N, principal nu- cleus, which takes no share in the bud-formation; 4, buds in various stages of formation. After Liston and Martin. ratory and [am able to vouch for theiraccuracy. In the living condition the amoeba was seen somelimes to divide as a whole into two by binary fission, after apparent disappearance of the nucleus. More frequently the amæba, while moving about and feeding actively, was seen to extrude tiny buds from its cyto- plasm, and these buds moved off as small amæbulæ which grew to the size of their parent and produced other buds in their turn. By both these methods of reproduction, but especially by 540 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR formation and extrusion of buds the amæœbæ multiplied rapidly in the cultures. In preserved specimens the body of the amceba was seen to contain a conspicuous principal nucleus (N, fig. 1), visible in the living condition, and very numerous chromidial grains in the cytoplasm. In the process of binary fission, the apparent disappearance of the principal nucleus was due to its dividing by mitosis, after which the cytoplasmic body divided also. In the process of bud-formation the principal nucleus took no part; the process began by a small portion of the cytoplasm, contain- ing chromidia, becoming surrounded by a clear space with fluid conients and thus cut off from the rest of the body (fig. 4, A, 6). The corpuscle thus defined grew in size, its chromidial grains increased in number, and some of them became clumped together at one spot (fig. 1, F, 6). The entire corpuscle was extruded finally from the bocy of the amæba (fig. 1, C, D, E) as an amæbula wich contained a nucleus formed from the clump of chromidia. In some cases the nucleus was compleiely formed before the bud was extruded (fig. 1, D, 6); in other cases the bud might be set free with its nucleus scarcely advanced beyond the condilion of a clump of chromiudia (fig. 1, E, N). Several of these endogenous buds could be observed frequently in process of formation in one and the same amoeba, If we now compare the process described by Fry and Ranken in trypanosomes with that described in amæbæ by Liston and Martin, I think no one can fail to be struck by their essential similarity. The bud-formation in trypanosomes begtis with extrusion of small chromatin-grains from the trophonucleus ‘fig. 2, A, chr.), grains which are proved, both by their origin and destiny, to be true chromidia. The chromidial masses can be seen in many cases to be cut olf from the cytopiasm of the parent by a clear space; they travel to the surface of ihe body and are cast off from it as a free bud, which grows in size and develops into a trypanosome (fig. 2, E-L). In the process of development the bud grows in size by increase of the chro- matin-grains (E) and formation of a cytoplasmic body (F) while at the same time the differentiation of the chroimatin- elements into trophonucleus and kinetonucleus becomes appa- 6 « INFECTIVES GRANULES » OF PROTOZOA 541 rent. The bud continues to grow in size and at such a stage as that figured in fig. 2, H, it only differs from the newly- extruded amæba-bud (fig. 1, E) in possessing a kinetonucleus in addition to the principal nucleus. In later stages a flagellum grows out from the vicinity of the kinetonucleus and the small flagellate may divide, but grows finally into a trypanosome. ) Fic. 2. — Formation of endogenous buds (« infective granules »), in Trypanosoma rhodesiense. A, a trypanosome containing chromidial grains, one of which (chr.) is seen coming off from the nucleus; B, a trypanosome containing chromidial grains, two of which are coming off from the surface of the body as a bud (6); C and D, trypanosomes with chromidial grains and buds (b) in process of liberation, or liberated, from the body; E-L, development of the buds after liberation from the parent; E-H, growth of the bud with formation of the kinetonucleus; I shows the flagellum formed; J, division of small crithidial forms; K and L, small trypanosomes; K, still almost crithidial in structure. After Fry and Ranken. From the comparison of the budding in the two cases, it is seen that the bud produced by the trypanosome differs only from that produced by the ameeba : 1° in being very minute and containing very few chromidia, perhaps but a single grain (which, however, is of larger size in most cases than the grains 542 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR in the cytoplasm, and may be produced by a clumping and fusion of smaller chromidial granules); 2° in the apparent absence of cytoplasm. The second of these two features is by no means uncommon in particular stages of some Protozoa, especially when stained by the Romanowsky stain, which, as [ have pointed out elsewhere (1909), tends to make the chromatin-elements appear larger than thev really are. since the red-staining substance of the combination deposits round the parts witch it selects as well as in them. In the micro- gameles of Coccidium, for example, the cytoplasmic substance appears to he represented only by the flagella, and in the microgametes of the malarial parasites, when stained by the Romanowsky method, no cytoplasm can be discerned. I feel justified, therefoe, in asserting that the bud-formation in trypanosomes, as described by Fry and Ranken, differs only in devree, and not in kind, from that already well-known to take place in many amæbæ and other Protozoa; as compared with the process as described by Liston and Martin, the buds of the trypanosomes give the impression of being set free in an earlier and more incomplete stage of differentiation than those of amæbæ. It is not necessary for me to deal in detail with the « gra- nule-shedding » described by Henry in Hemogrrgarina simondi, since this author has fully recognized the chromidial nature of these formations, and the opinion I have expressed above with regard to trypanosomes applies also, mutatis mutandis, to the case described by Henry. I may content myself by referring briefly to the suggestions put forward by Henry to the affect that the « granules » are to be interpreted as recapitulating an older phylogenetic condition in the evolution of the Pro- tista. T have always been of the opinion that the condition in which the chromatin-elements of the Protist body are in the form of scattered chromidial granules was antecedent phylo- genetically to the condition in which the chromatin-grains are concentrated and organized into a definite nucleus. 1 imagine to myself the more remote ancestor of the Protozaa as a form with well-developed cytoplasm containing scaitered chromidial grains, and that from such a form the definitely cellular cha- « INFECTIVES GRANULES » OF PROTOZOA 543 racler of the body seen in Protozoa {and in unicellular plants) arose by formation of a definite cell-nucleus from the whole or a part of the scattered chromidial grains. Consequently the chromidial buds, or any other stages of Protozoa in which the chromatin is found only in the form of scattered chromidial grains, might very well be regarded as of phylogenetic and recapitulative significance. I doubt, however, whether the minute buds of trypanosomes and hæmogregarines can be interpreted as recapitulating a still older phylogenetic stage, similar to that perhaps representel by the Chlamydozoa at the present day, a stage in which the body consists of a single chromatin-grain. It seems to me much more likely that the minute buds of trypanosomes and hemogregarines have arisen by a secondary reduction in size and structure of chromidial buds such as those formed in amæbæ and other Protozoa, probably as an adaptation to parasitism in blood; and that consequently their minute size and simple structure must not be regarded as characters which are capable of a phylogenetic interpretation. | would like to point out, finally, that the discoveries of Fry and Ranken and of Henry constilule, in my opinion, a very important advance in our knowledge. They show that repro- duction by formation of endogenous chromidial buds occurs in the Hæmoflagellates and Hæmosporidia, groups in which tt had not been suspected hitherto to take place (1). It may well be, therefore, that this method of reproduction is of much wider occurrence among Protozoa than has been supposed up to the present, and that in many forms, such as Lamblia, for example, where division is not often found, it may be on method of the reproduction of the organism. Light is also thrown by it on the nature of the « chromatoid grains » of trypanosomes, which have heen asserted to be, in most cases, grains of the nature of volutin; but the proof that they can give rise to « secondary » nuclei puts it beyond all doubt that (1) I do not refer here specially to the observations of Balfour on spiro- cheetes, because I am unable to regard these organisms as true Protozoa, and I think it possible that the « infective granules » or « coccoid bodies » of spirochetes may require a different cytological (and phylogenetic) interpre- tation from those of trypanosomes, in spite of their similarity in appearance and function. 544 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR in some cases at least , they are true chromidia. I may men- tion here that 1 drew attention to extrusion of grains from the nucleus in my memoir (1909, p. 795 and p. 802) on Trypanosoma lewist. Summary and Conclusions. — This brief note does not a bring forward any facts hitherto unknown, but attempts to compare and coordinate certain known facts with a view to demonstrate their essential similarity and homology. The conclusion reached is thal the phrase « infective granule » is misleading and erroneous, since the bodies so termed are true endogenous chromidial buds. Consequently the term « granule-formation » should be replaced by « endogenous bud-formation » and the term « granule shedding » by extru- sion of buds or some similar phrase. Lister Institute, April, 1914. REFERENCES Batrour, A. (1911). — The Infective Granule in certain Protozoal Infections, as illustrated by the Spirochætosis of Sudanese Fowls. British Medical Journal, 1911 (1), p. 752 (April 1st). \ Fry, W. B. (1911). — A Preliminary Note on the Extrusion of Granules by Trypanosomes. Proc. Roy. Soc. (B) Lxxx1v, p. 79, 80, 1 text-fig. Fry, W. B. and Ranken, H. S. (1913). — Further Researches on the Extrusion of Granules by Trypanosomes and their Further Development. Proc. Roy. Soc. (B) Lxxxvi, p. 377-393, pls. 1x-x1. Henny, H. (1913). — The Granule Shedding of Hemogregarina simondi. A con- sideration of the Infective Granule in the Life-history of Protist Orga- nisms. Journ. Pathol. Bacteriol., xvii, p. 240-258, pls. xx-xx11. Liston, W. G. and Martin, C. H. (1911). — Contributions to the Study of Pathogenic Amœbæ from Bombay. Quart. Journ. Micr. Sci, Lv, p. 107-128, pls. xvi-xvu. Micun, E. A. (1909). — The Structure of Tryponosoma lewisi in Relation to Microscopical Technique. Quart. Journ. Micr. Sci., uit, p. 755-808, pls. XxXI-xxIU. — (4912). — An Introduction to the Study of the Protozoa. London (Edward Arnold). Pororr, M. (1911). — Ueber den Entwicklungscyclus von Amæba minuta. Arch. Protistenkunde, xxi, p. 197-223, pls. xm, x1v, 7 text-fig. Er A Mémoire publié à l'occasion du jubilé de E. METCHNIKOFF. LE ROLE ANTIPUTRIDE DE LA BILE par H. ROGER. Les bactéries de l'intestin, s’altaquant aux débris alimen- taires, élaborent des substances dont le rôle pathogène est indiscutable. Bouchard avait insisté sur l'importance des putré- factions inleslinales. Metchnikoff a repris et élargi la question, il a montré que les troubles fonctionnels les plus variés, les lésions viscérales les plus diverses, les dégénérescences cellu- laires les plus profondes, que certaines manifeslations de la décrépitude sénile doivent être rattachés à l'action des poisons putrides. L'importance des putréfactions intestinales donne un intérèt- considérable à la recherche des procédés que Vorganisme met en œuvre pour en restreindre le développement et en alténuer les effets. Depuis longtemps, physiologistes et médecins attribuent à la bile un pouvoir antiputride. Quand ce liquide n'est plus déversé dans l'intestin, les putréfactions augmentent : les matières exhalent une odeur forte et nauséabonde; des gaz fétides sont expulsés par l'anus : l'haleine acquiert une sen- teur désagréable, Ces constatations bien simples ont conduit à supposer que dans les conditions normales la bile entrave la pullulation des microbes. L'expérience ne confirme pas cette déduction. La bile, exception faite du pneumocoque, ne trouble pas la végétation des bactéries, et, dans bien des cas, la favorise. Il ya entre ces deux constatations une contradiction flagrante, un vérilable paradoxe, dont il m'a semblé utile de poursuivre l'étude. Avant semé des cultures polymicrobiennes d'origine intes- ünale, comparativement dans du bouillon pur et dans du 546 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR "3 bouillon additionné de bile, j'ai constaté que la pullulation des microbes est aussi abondante dans les deux milieux; mais la flore est loin d’être identique. La bile favorise le développe- ment du colibacille au détriment des anaérobies, c’est ainsi que le Bacillus perfringens, le Bacillus butyricus, quand ils sont en culture pure, ne sont nullement génés par la bile. mais dans une culture mixte avec le Bacillus coli, ils sont étouffés par leur associé. En favorisant la pullulation du colibacille aux dépens des anaérobies, qui sont les principaux agents des putréfactions, la bile exerce indirectement une action antiputride. En modifiant la flore, elle modifie les fermentations. Mais son rôle ne se borne pas à aider la concurrence vitale de certains microbes, elle exerce sur ceux qui se développent une action fort curieuse : elle trouble leur fonctionnement et diminue leur pouvoir fer- mentalif. C'est ce qu'on démontre facilement en étudiant les transformations des hydrates de carbone. Dans une première série de recherches, j'ai utilisé de l'eau peptonée ou du bouillon contenant de lamidon et additionné de carbonate de calcium, ce sel étant indispensable pour neu- traliser les acides de fermentation dont l'accumulation ne tar- derait pas à arrèter la végélation des microbes. Les milieux ainsi préparés sont distribués dans des tubes, dont les uns sont gardés comme témoins, dont les autres sont additionnés d'une quantité variable de bile. Tous soutensemencés avec des cultures polymicrobiennes d'origine intestinale. Chaque jour on prélève une petite quantité de ces divers liquiles et, par le réactif iodo-ioduré, on suit la marche du processus. La couleur primitivement bleue devient, à mesure que l’amidon est rem- placé par les dextrines, violette, puis lilas et rose; quand il ne reste plus que des achrodextrines, du sucre et des acides de fermentation, le liquide est simplement coloré en jaune par le réactif. On constale ainsi que, dans les tubes témoins, l’hydrolyse est achevée en trois ou quatre jours; dans les tubes contenant de 2 à 15 p. 100 de bile, on trouve encore, au bout de quinze jours, des quantités appréciables de dextrine et même d’amidon. Ce qui complique le problème, c'est qu'en augmentant la teneur en bile, on obtient un effet diamétralement opposé. es Li LE ROLE ANTIPUTRIDE DE LA BILE 547 Quand la proportion atteint de 33 à 66 p. 100, l'attaque de l’amidon est plus énergique et plus rapide que dans les tubes témoins. On peut remplacer la bile tolale par des solutions de sels biliaires : les résultats sont analogues; les fortes doses favo- risent la fermentation, les doses moyennes Ventrayent. Mémes résultats en utilisant au lieu d’amidon du glycogène, c’est-a- dire des décoctions de foie de lapin addilionnées de peptone, ou en employant des solutions de glycose. Avec ce sucre, les recherches gagnent en précision, des dosages quotidiens per- meltant de suivre exactement la marche du processus. Les résultats obtenus avec les cultures polymicrobiennes, s'ils ont l'avantage de nous renseigner sur ce qui doit se passer dans l'intestin, ont l'inconvénient d'être assez complexes; il faut les compléter par une étude analytique faite en choisis- sant certains microbes intestinaux et en recherchant les varia- tions de leur pouvoir fermentatif. Il était tout indiqué de commencer par le microbe le plus répandu, le colibacille, qui se prête d'autant mieux à l’expé- rience qu'il allaque fortement le glycose. Le milieu utilisé contenait 1,25 p. 100 de ce sucre; après vingt-quatre heures de culture, on trouvait les chiffres suivants : RUDESTéMOINSM care Lee sch Se hc lee ce we eis 0,33 Tubesicontenant 5a 40 sp. 100 de bile 2... . . 0,6 à 0,62 Tubes contenant 18/p-100/debile . 2. .2. sa: 1,08 hubes; contenants3: pa400) dey bilere Ten aes 0,39 Ainsi les doses moyennes empêchent presque complètement la fermentation du glycose; les doses élevées la diminuent légèrement. Pour donner un caractère plus général à mes résultats. j'ai étudié l’action du Bacillus mesentericus vulgatus sur Vamidon. Ce microbe est un hôte constant du tube digestif, qui attaque si énergiquement les matières amylacées que, dans les tubes témoins, le réactif iodo-ioduré ne décèle, au bout de quarante- huit heures, que des traces de dextrine; après quatre jours, il ne provoque plus de coloration appréciable. L'adjonction de la bile, quelle qu'en soit la proportion, entrave notablement la fermentation. Après douze ou quinze Jours, le processus nest pas terminé: le réactif iodo-ioduré provoque encore une belle 548 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR coloration violette. Gest du moins ce qu’on observe avec les doses moyennes oscillant entre 15 et 20 p. 100, elles agissent mieux que les doses élevées atteignant 30 et 40 p. 100. Le Bacillus mesentericus vulgatus hydrolysant Pamidon au moyen d’un ferment soluble, j'ai été conduit à rechercher l’ac- tion de la bile sur ce ferment. Les résultats ont été identiques à ceux que J'avais obtenus avec les cultures vivantes; la bile a géné l'amylolyse. En cultivant comparativement le B. mesentericus dans de l'eau peptonée amidonnée, pure ou additionnée de bile, j'ai constaté encore que la bile entrave la production du ferment microbien. Il suffit de prélever chaque jour une certaine quan- tité des diverses cultures et, après stérilisation par un mélange de chloroforme et d'essence de cannelle, de les faire agir sur de l'eau amidonnée. On constate ainsi que l’amylase est moins abondante dans les tubes additionnés de bile que dans les tubes temoins. La bile agit done en entravant la production du ferment et en réduisant l’action du ferment produit. En répétant toutes ces expériences avec des solutions de sels biliaires, j'ai obtenu des résultats identiques. L'étude des hydrates de carbone et des transformations qu'ils subissent est relativement simple. Mais elle est moins impor- tante que l'étude des matières protéiques, puisque c’est aux dépens de celles-ci que se développent les poisons putrides. J'ai continué mes recherches en me servant de cultures poly- microbiennes d’origine inteslinale, que j'ai semées dans plu- sieurs séries de tubes contenant de l’eau peptonée. De ces tubes, les uns étaient gardés comme témoins, les autres étaient additionnés de bile. La réaction du biuret permet de suivre la marche de la fer- mentation. Aprés 48 heures, la quantité de peptone a considérablement diminué dans les tubes témoins; à partir du 4° jour, il n’en reste que des traces; puis le processus se ralentit et c'est seulement vers le 15° ou le 20° jour que la réaction est négative. Dans les tubes contenant de la bile, après 48 heures de cul- wey a | LE ROLE ANTIPUTRIDE DE LA BILE 549 ture, les peptones sont intactes; elles n'ont pas complètement disparu après 40 et 45 jours. C'est quand la bile se trouve à la dose de 10 & 20 p. 160 que son action antifermentescible est le plus marquée. Les proportions plus élevées, tout en entravant le processus, agissent moins énergiquement. Si l’on remplace la bile par une solution de sels biliaires, on obtient des résultats analogues; on constate également la per- sistance de la réaction du biuret, qui est surtout intense quand la proportion des sels biliaires oscille entre 1 et 2 p. 100. Elle est moins marquée quand la dose est plus forte, elle est encore manifeste, quoique atténuée, quand la teneur est de 0,25 à 0 p: 100: On arrive à des résultats plus précis en faisant des cultures dans des milieux contenant des matières azotées et en déter- minant au bout de quelques jours le résidu sec. L’intensité de la putréfaction est indiquée par la perte de poids qui représente la quantité évaporée. Si le milieu est riche en albumine, si, par exemple, il contient du blanc d'œuf, la diminution des matières solides, après 12 jours, est de 47 p. 100; sous lin- fluence de la bile, elle n’est que de 39. La différence est appré- ciable, mais légère. Au contraire, dans l’eau peptonée, les écarts sont énormes : 58 p. 100 dans le ballon témoin, 27 dans le ballon contenant de la bile Cette dernière constatation est d'autant plus intéressante qu'à l’élat normal les matières pro- téiques qui cheminent dans l'intestin sont à l'état de peptones. L'étude des putréfactions que subissent les matières azotées comporte quelques déductions applicables à la pathologie. Gest à leurs dépens que les bactéries intestinales élaborent des substances toxiques. Or, l'expérience démontre que la bile est l'antidote des poisons intestinaux. Il suffit, pour s'en con- vaincre, de semer comparativement des microbes d'origine intestinale dans deux ballons renfermant l’un du bouillon pep- toné, l’autre du bouillon peptoné additionné de 25 p. 100 de bile de bœuf. Après 3 ou 4 jours de culture, on reprend les liquides, on les filtre et on les injecte à des lapins par la voie intraveineuse. Les accidents produits par les deux liquides sont semblables; ce sont des secousses spasmodiques, puis de violentes convulsions. Mais les doses mortelles sont bien diffé- rentes. Les cultures additionnées de bile, alors même que les 550 ANNALES DE LINSTITUT PASTEUR x injections sont poussées plus rapidement, sont de trois à sept fois moins toxiques que les cultures développées en bouillon pur. Les faits que je viens d'exposer permettent d'expliquer ce qu’on peut appeler le paradoxe de l’acholie intestinale. Jusqu'ici, on ne concevail pas par quel mécanisme des fer- mentations intenses, accompagnées de gaz extrèmement fétides, se développent dans l'intestin, quand l'écoulement de la bile est suspendu. Pourquoi ce syndrome putride, puisque le fluide biliaire n’entrave pas le développement des bactéries? La réponse est devenue extrèmement simple : si les putré- factions s’exagérent, ce n'est pas parce qu'un liquide antisep- tique fait défaut, c’est parce que des substances empêchant l’action des ferments microbiens, soit qu’elles en entravent la production, soit qu'elles en neutralisent les effets, cessent d’être déversées dans l'intestin. La bile agit encore en modifiant la flore intestinale, en favo- risant le développement de certaines bactéries telles que le colibacille, au détriment de certains autres, notamment des germes anaérobies, les agents les plus importants de la putré- faction et de la toxicité. Pour intéressante qu'elle soit, cette influence ne doit ètre placée qu'au second plan. C’est en dimi- nuant la production et l’action des ferments microbiens, et en neutralisant les poisons intestinaux, que la bile exerce un rôle antiputride. sR CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE CERTAINES MYCOSES DE BLESSURES DE GUERRE ET DE LEURS TRAITEMENTS par le Dr E. ROUYER, J. PELLISSIER, Médecin-major de 1r° classe, ' Ingénieur-agronome, Chef du Service sanitaire Professeur d’agriculture de la place de Belley (Ain). à Belley. I. — Nore MÉDICALE. Chargé d’un service de blessés venant directement du champ de bataille, nous avons éié frappé, à plusieurs reprises, de la difficulté avec laquelle certaines plaies, se présentant sous formes d’érosions cutanées superficielles, se cicatrisent, malgré tous les soins apportés à la pratique des pansements. Vers la mi-novembre, noire attention avait même été attirée sur un caractère assez particulier de ces plaies : tandis que leur partie centrale montrait de vrais bourgeons charnus qu'il fallait cautériser assez souvent au nitrate d'argent pour éviter une prolifération trop intense, la périphérie était cou- verte d'un voile blanc-grisâtre de pellicules adhérentes au tissu cellulaire sous-culané et s'étendant chaque jour davantage vers les parties saines. La plaie prenait volontiers l’aspect d’un ulcère en voie d'extension continue. La teinture diode, l’eau oxygénée, voire mème les vulgaires pansements à la gaze sèche stérilisée n’empéchaient nullement cette ulcération de la plaie de surface. Ous. I. — Le soldat Cort... avait été atteint le 9 août d’un éclat d'obus qui avait pénétré assez profondément dans la fesse gauche, d'où il fut extrait vers le milieu d'octobre. Un autre éclat avait frappé la partie supérieure du bras gauche, déchirant les vêtements et provoquant une érosion superficielle de la dimension d’une pièce de 2 francs; la lésion intéressailt seulement la peau et le tissu cellulaire sous-cutané. Or, tandis que la plaie de la fesse gauche se cicatrisait rapidement, après l'extraction du fragment d'obus, l'érosion du bras n'avait aucune tendance à se fermer; et, à partir du 552 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR 15 novembre, elle gagnait chaque jour en étendue, au point d’atteindre à peu près les dimensions d'une pièce de 5 francs. Les antiseptiques habituels ayant échoué, nous avons eu l'idée de toucher les bords de la plaie ayec un crayon de sul/ate de cuirre, el nous avons vu lulcération s'arrêter. en même temps que des bourgeons charnus apparaissaient au bord de la plaie, dont la cicatrisation devenait normale, Oss. IT. — Le soldat Mich.., blessé de trois éclats d’obus aux environs de Toul, le 20 août, est porteur de trois plaies anfractueuses, l’une à la région lombaire, la seconde à la face interne de la cuisse gauche et la troisième à la face externe de cette même cuisse. La deuxième plaie est, à deux reprises différentes, le siège d'hémorragies abondantes, qui cessent définitivement après l'ablation d’un éclat de fusée d’obus et de débris vestimentaires ; sa cicatrisation s'opère ensuite rapidement. Au contraire, la plaie de la région externe de la cuisse est pendant long- temps couverte d'une sérosilé visqueuse louche, sans que le blessé ait de la fièvre. Soupçonnant qu'un corps étranger peut se trouver au fond de cette plaie, nous pratiquons, le 21 novembre, une incision qui donne issue à une petite cuillerée de liquide sanieux, non purulent. Une application de teinture diode a pour facheux effet de macérer les bords de la plaie, qui se couvre ensuite de fausses membranes grisatres et prend un aspect diphtéroïde. L'emploi du formol en solution faible, puis des lavages avec une solution de sulfate de cuivre à 10 p. 100, ou de la liqueur de Villatte étendue provoquent immédiatement le bourgeonnement et une cicatrisation rapide de cette lésion, depuis si longtemps inerte. Os. III. — Fauy... tombe le 9 septembre dans le bois de Mandray, près Saint-Dié, et constate que des aiguilles de sapin ont pénétré assez profondé- ment dans les tissus mous de la paume de la main droite. Un œdème se produil assez rapidement el le blessé est évacué sur Belley, où trois incisions dorsales sont pratiquées sur ia main tuméfiée; elles livrent du pus mal lié. Malgré ces incisions, el bien qu'aucune fièvre ne se produise, le blessé garde un cedéme douloureux de la main. Les douleurs sont surtout vives la nuit et s’exaspérent manifestement sous Vinfluence de la chaleur du lit. Le 26 novembre, on retire de l’incision médiane un pelit grain grisâätre, qui a été soumis à l'observation microscopique, ensuite de laquelle un traitement interne ioduré a été inslilué et est actuellement continué avec un certain succès, — (Dr E. Rouyer.) II. — NoTE MICROBIOLOGIQUE. L'exploration microscopique des pellicules détachées, par le frottis, des plaies décrites aux observalions n° 1 et 2, accuse, au sein des hématies et débris cellulaires, des filaments mycéliens interrompus, qui se colorent parfaitement par le bleu lartique. Ces filaments rameux séparent un grand nombre de cellules, franchement ellipliques, ayant 5 à 6 g environ dans le sens de leur plus granle dimension, el rappelant l'asp ct de la mycolevure, étudiée par Duclaux. Hi s'agit bien, au reste, MYCOSES DE BLESSURES DE GUERRE ET LEURS TRAITEMENTS 553 d’un saccharomycète, car les colorants de choix de ce groupe de champignons : le blew polychrome de Unna et Vhématoxryline ferrique-éosine fournissent de beaux résultats positifs ; la del- tapurpurine donne des résultats incertains sur la forme fila- mentaire, qui provient vraisemblablement d’une déformation cellulaire des cellules elliptiques. Ce micro-organisme cultive très bien sur fragment de carotte stérile, où il produit des touffes de colonies blanches s'étendant rapidement en devenant confluentes, à la température de 35°. Vues au microscope, ces colonies se résolvent en cellules rarement ovales, mais déformées par allongements filamentaires et articulées en paquels arborescents. L'ensemble de ces caractères, malgré les lacunes d’expéri- mentation imposées par la précarité de nos ressources maté- rielles d'étude, nous autorise cependant à affirmer l'identifica- tion de ce Saccharomyces avec celui que Curtis a fait connaître en 1895. et décrit sous le nom de Saccharomyces rumefaciens, en lextrayant de tumeurs et abcès sous-cutanés. C’est une levure sporulante, par conséquent appartenant au genre véri- table Saccharomyces, que Meyen a opposé au genre Crypto- coccus de Kutzing. On sait, d'ailleurs, que ces deux genres renferment plusieurs espèces pathogènes : parasites véritables ou parasites occasionnels d’effractions épidermiques préalables. Ces parasites sont responsables « chez l'Homme, d affections nommeées blaslomycoses, mais qu'il serait préférable de dénommer Saccharomycoses, le terme blastomyces, préconisé par Frank, prêlant à confusion, par son extension à certaines urédinées et à une forme conidienne de gymnoascée. Presque toutes ces affections consistent en tumeurs du tissu conjonctit sous-cutané. » (F. Guéguen, Les Champignons parasites de l'espèce humaine.) Les Saccharomyces élant des agents très actifs de combustion peuvent résister fort bien aux pansements à base d’eau oxy- génée. D'autre part, les travaux de Effront établissant que l'acide fluorhydrique fournit un excellent moyen de sélection des levures alcooliques, il est à supposer que l'échec, affirmé plus haut, des traitements à l’eau iodée et à la teinture diode se ratiache à un ordre de phénomènes analogues, en raison de la parenté chimique de Viode et du fluor. Par contre, dans ses 37 554 ; ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR recherches sur la fermentation lactique, le professeur Richet a démontré la grande toxicité des sels de cuivre pour cette aclion : le cuivre est, en effet, placé dans le premier groupe du classement par ordre de puissance des nombreux antisepliques étudiés par lui. En fait, l'emploi combiné du formol dilué et du sulfate de cuivre, ou mème de ce dernier corps seul en solution de faible concentration, ou sous forme de liqueur de Villatte étendue, a immédiatement provoqué la disparition du voile observé dans nos cas de mycoses et leurs guérisons consécu- tives. L’acide salicylique, étant aussi un très bon antiseptique des fermentations alcooliques, pourrait également être employé pour éliminer les réactions très douloureuses des plaies dues à usage du formol ou du sulfate de cuivre. Quant à l’origine probable des infections constatées, nous croyons qu'il faut la rapporter au voisinage des vignobles importants qui entourent l'hôpital de. Belley, sur le coteau de Brailles, au pied duquel s’abrile la ville. Les immortels tra- vaux de Pasteur ont depuis longtemps signalé la richesse de la flore de levures sauvages, Vivant sur la pellicule des raisins et des fruits approchant de la maturilé. A deux époques de l'année : au printemps (le vocable bien connu de bière de mars, pour désigner la qualité de celte boisson fabriquée pen- dant ce mois, répond à cette première conjecture) el au moment des vendanges, la diffusion atmosphérique de ces micro-organismes est extrèmement abondante. L’évacuation des blessés sur l'hôpital de Belley ayant coincide ici avec l’époque des vendanges, il est fort possible que cette circonstance explique l’origine de nos mycoses de blessures. Dans le grain provenant de l'observation n° 3, le microscope a décelé une forme cryptogamique du groupe des fungi 1mper- fecti, très voisine du genre Oospora et des caractères du genre Oidium, mais qui, très vraisemblablement, appartient au genre Monilia, par l'existence d’un disjunctor entre les conidies. Il ne nous a pas d'ailleurs été possible d’en identifier l'espèce avec certitude. Ce champignon prend le Gram. Il cultive sur grain de blé, papier jaune de paille et divers débris de feuilles sèches, à la condition que l'atmosphère ambiante soit main- tenue suffisamment humide pendant la culture. La résolution MYCOSES DE BLESSURES DE GUERRE ET LEURS TRAITEMENTS 555 des ædèmes, déterminés par ce contage, paraît être Justiciable du traitement ioduré interne, surtout lorsque cette intervention est précoce et si elle est favorisée par le maintien d'une active irrigation sanguine locale (massages); ces conditions, on le sait, assurent également l'efficacité de la thérapeutique analogue dans les cas d’actinomycoses. Ce traitement ioduré est actuelle- ment en cours dans l'espèce observée ici. La radioscopie n'a révélé aucune lésion osseuse causée par cette forme moni- lienne. — J. PEctissier. CONCLUSIONS. Ces trois cas nous ont paru intéressants à rapporter, en ce sens qu'ils révèlent l'existence de mycoses venant compliquer, d'une facon très inattendue, les plaies de guerre, au point d'apporter un retard prolongé à leur complète cicatrisation. La bonne foi des blessés pourrait, à cette occasion, èlre parfois mise en doute et, volontiers, on serait porté à les soupconner d’en- tretenir leurs plaies pour en éloigner volontairement la gué- rison. Nos observations montrent combien il faut être prudent avant d'émettre pareille appréciation. Elles indiquent égale- ment que la thérapeutique usuelle à l’eau oxygénée et à la teinture d’iode est tout à fait contre-indiquée en pareils cas; on doit lui substituer l'emploi du formol ou du sulfate de cuivre, qui, dans ces circonstances, s'opposent au développement de champignons. Enfin, il est permis de se demander si ces cryptogames, for- tement aérobies, ne favorisent pas l’évolution de certains microbes très virulents, parce que leur vie anaérobie est ainsi favorisée par cette symbiose; et, en particulier, si on ne trou- verait pas ces mycoses à l’origine de septicémies qu'on a vu se développer d'une facon tardive, quinze à vingt Jours après l'entrée à l'hôpital et alors qu'une antisepsie très rigoureuse paraissait avoir tari toute cause de suppuration. LA TUBERCULOSE DU PORC EPIDEMIOLOGIE, PATHOGENIE ET EVOLUTION COMPAREES par P. CHAUSSE. Faute de documents précis et d’études anatomo-patholo- giques, on ne saurait se faire une idée nette de la tuberculose porcine en France. Par contre, certains pays étrangers, qui nous ont devancés dans l'organisation méthodique de l’inspec- tion des viandes et dans la technique de cette inspection, nous fournissent de nombreuses statistiques intéressantes à consulter et à comparer à celles que nous commençons à réunir. De 1880 à 1891, Rieck (cité par Ostertag, in Handbuch der Fleischbeschau, 1902, page 646) fit l’autopsie de 430 pores ? ’ 5 / | tuberculeux généralisés et il trouva que, pour 100 cas, les D ) lésions présentaient la topographie suivante : 5 Poumons........ 1400 » p. 100 | Viande(c’est-a-dire gan- OCR ee pena veer grt tC ONE glions?). «=. .s.0. 49; J pee IntestinSsseee ost ea Oy Va Rate... 45. 6a 5 che oo ORO Séreusesen cua chen COMPORTER Mamelle. CORNE OURS Reins: ME PR 2 OS EE RE SRE En 1886, c’est-à-dire vers la même époque, la tuberculose porcine était fort peu connue en France; cela était di surtout à sa moindre fréquence qu'en Allemagne. Villain et Bascou mentionnaient, comme observations rares, 4 cas de cette maladie recueillis aux abattoirs de Grenelle, sur un effectif important d'animaux abattus. De même à Rouen, en quatre années, Veyssière (eilé par Strauss dans La tuberculose et son bacille, 1895, page 342) ne trouvait que 15 pores tuberculeux sur 38.164 abattus, soit 1 pour 2.544, chiffre qui représente également aujourd’hui la morbidité reconnue dans le plus grand nombre des abattoirs français, mais non la morbidité réelle. nae LA TUBERCULOSE DU PORC 597 En 1889, Nocard (Bulletin de la Société centrale de méde- cine vétérinaire, page 456) rapportait avoir observé six cas de tuberculose porcine; il ajoutait que la maladie évolue rapide- ment dans cette espèce, que l'examen microscopique des lésions montre de nombreuses cellules géantes, mais rarement des bacilles, et, enfin, que l'inoculation du virus au lapin, en série, donne une {tuberculose qui évolue de plus en plus vite, fait qui s’observe aussi avec la scrofulose; de cette dernière affection, il rapprochait la tuberculose porcine. La même année, Moulé signale un cas de tuberculose mus- culaire découvert dans un jambon d'origine française, envoyé aux Halles de Paris. Dès cette époque, on pouvait se rendre compte que la tuber- culose porcine était bien plus fréquente à l'étranger qu'en France. En 1892, Vülkel (Zeitschrift für Fleisch- und Milchhygiene, 1892-1893, page 199) trouvait 91 porcs tuberculeux sur 2.315 abattus à Elbing (Prusse occidentale), soit 3,9 p. 100, et il insistait avec raison sur l'importance de l’examen des gan- glions sous-maxillaires pour le diagnostic de la maladie après abatage. Ces 91 animaux, sans exception, avaient des lésions de ces ganglions, d'où l’auteur concluait que ces ganglions doivent être considérés comme le lieu de prédilection de la tuberculose porcine. Pour reconnaître la maladie, il suffit, dit Volkel, d'examiner les ganglions sous-maxillaires, pulmonaires et hépatiques. Stubbe (Annales de médecine vétérinaire, 1893) montre pareillement que la maladie est fréquente sur les porcs belges et qu'elle intéresse particulièrement le système lymphatique ; il confirme l'opinion d’après laquelle il s’agit d’une tuberculose d'ingestion et il attribue l'infection à ce qu'une grande partie des pores prennent, à l'état cru, des viandes saisies provenant des ateliers d’équarrissage. Simultanément Ostertag (Zeitschrift für Fleisch- und Milch- hygiene, 1893, page 1), croyait devoir attirer l'attention sur l'accroissement de cette affection contagieuse dans la région du nord de l'Empire et en Danemark: il attribuait cette recrudes- cence à l'emploi du lait centrifugé comme aliment principal du porc. À cetle époque, la proportion moyenne des pores tuber- 558 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR culeux était, en Allemagne, selon cet auleur, de 3 à 4 p. 100, ainsi que le constatait Vülkel; en Danemark, cette proportion atteignait 10 à 14 p. 100; mais, si l'on considérait parliculiére- ment le nord de l’Allemagne, on trouvait que la tuberculose porcine y sévissait dans la proportion de 0,53 p. 100 en 1883- 1884, pour passer à celle de 2,72 p. 100 en 1891-1892. Ostertag affirmait aussi que la tuberculose porcine est une tuberculose d'ingestion typique. Son augmentation de fréquence tient, dit-il, à ce que les pores boivent cru le dépôt ou limon (Centrifugenschlamm) résultant de la centrifugation des laits mélangés, car ce dépôt contient les bacilles qui peuv nt se trouver occasionnellement dans le lait. La quantité de limon varie entre 0,04 et 0,125 p. 100 du poids du lait. Au point de vue nutritif, la composition du petit-lait est de : Ha"... (67,318 p. 400 | Lactose et divers 1-27 0800 Matières grasses... 1,118 — Gendres. +: UN OCR Matières protéiques. . 25,89 — Il s’agit donc d’une alimentalion presque exclusivement azotée. Quant aux caractères anatomo-pathologiques, dans la géné- ralisation, Ostertag considère que la participation de la rate est la même que chez le bœuf (Handbuch der Fleischbeschau, 1902, page 646); toutefois la tuberculose osseuse, particuliè- rement celle des vertèbres, est plus fréquente que chez les bovidés. Wilbrandt (Zeitschrift für Fleisch- und Milchhygiene, 1893- 1894, page 48) proteste contre l'opinion de Vélkel de se limiter, pour le diagnostic, à l'examen des ganglions maxillaires, car, selon lui, il y ade nombreux cas où ces ganglions ne sont pas lésés, bien que l’affection soit généralisée. En 1895, Niel (Recueil de médecine vétérinaire, 15 février, page 98) signalait 2 cas de tuberculose porcine généralisée, à Yabattoir de Draguignan; c'étaient les deux seuls cas observés par ce pralicien pendant une période de quinze années. Zchokke (Zeitschrift fiir Fleisch- und Milchhygiene, 1896- 1897, page 34) fait connaitre quelques observations rares tuberculose de l’ethmoïde, de la muqueuse nasale, du conduit auditif. LA TUBERCULOSE DU PORC 359 Lunewitz(Zettschrift für Fleisch-und Milchhygiene, 1896-1897, page 217) publie une statistique portant sur 178.139 pores abattus à Leipzig, de 1893 à 1895; sur ce nombre il y avait seulement 141 tuberculeux, soit 0,08 p. 100. Borgeaud, vétérinaire directeur des abattoirs de: Lausanne (Progrès vétérinaire, 1897, n° 4, p. 19) déclare avoir observé un grand nombre de cas de tuberculose osseuse; il attribue l'infection à Vusage de lait tuberculeux pour la nourriture du porc, car il constale en même temps la fréquence de la pom- melière sur les vaches sacrifiées à l'abattoir. En Amérique, More et Dawson (Bureau of Animal Industry, 1897) reconnaissent l'existence de la scrofulose porcine. Mais c’est Strése qui, en 1897 (Deutsche tierärzt. Wochenschr., p. 239), publie, selon nous, le meilleur travail sur eette alfec- tion, si l’on considère seulement son stade initial. Sur 50 pores examinés avec soin, atteints de tuberculose limitée aux gan- glions cervicaux, aucun ne présentait la lésion initiale ailleurs que dans les amygdales staphylines. Strése coupe et examine les lésions amygdaliennes : « Les bacilles tuberculeux arrivent dans les foramina ceca des amygdales et provoquent l'inflam- mation dans les follicules lymphatiques; dans la règle, la tuberculose reste limilée au s/ratum proprium; les tubercules sont petits et contiennent un nombre proportionnel de cellules géantes, puis, de bonne heure, ils dégénèrent au centre; les noyaux cellulaires disparaissent et il se forme des masses « en mottes » (schüllige Massen). Régulièrement, le tubercule est entouré d'une enveloppe conjonctive infiltrée de cellules rondes. » Strése admei la progression du virus des ganglions cervicaux à ceux du poumon, et, de ces derniers, au poumon lui-même, ce qui, à notre avis, ne peut être accepté; et il termine par quelques considérations sur les autres étapes observées pendant l'extension de la maladie. Dans le cas de tuberculose localisée à la région cervicale, l'auteur pense quil suffit d'enlever les amygdales et les ganglions correspondants, conduite qué nous ne saurions également approuver, mais il n'indique pas ce qu'il convient de faire dans les nombreux autres cas. Strése avait précédemment relaté une observation de tuber- 560 ANNALES DE L°INSTITUT PASTEUR culose musculaire d’origine embolique (Zeitschrift für Fleisch- und Milchhyqiene, 1894-1895, page 52) qui nous semble d'une autre nature puisque des lapins inoculés dans le péritoine, avec le suc des muscles atteints, ne devinrent pas tuberculeux. Cela nous montre qu'il y a eu vraisemblablement des erreurs _ dans les diverses observations relatives à la tuberculose por- cine, surtout en ce qui concerne les localisations rares. Dans des travaux plus récents, au contraire, la pénétration habituelle par les amygdales est mise en doute. En effet, Kunibert Müller (Zeitschrift für Fleisch- und Wilchhy- gene, mai 1903) examine à Guben (Brandebourg) 1.328 pores; il trouve 119 fois de la luberculose des ganglions mésenté- riques, 25 fois de la tuberculose des ganglions sous-maxillaires, 19 fois des lésions hépatiques, 15 fois des lésions pulmonaires, et 2 fois des tubercules spléniques. Dans 50 p. 100 des cas, la tuberculose de l'intestin était bien visible à l’œil nu, sans faire de coupes. Sur le total des animaux sacrifiés 8,96 p. 100 sont atteints de la maladie. Au VIII Congrès international de médecine vétérinaire, tenu à Buda-Pesth en 1905, la question des voies de pénétra- tion du virus étant à l’ordre du jour, comme elle l’a été depuis dans de nombreuses réunions, l’un des vétérinaires allemands les plus qualifiés, Bongert, conclut dans son rapport que l'infection par voie intestinale se produit surtout chez les veaux et les pores, les carnivores et les volailles. La pathogénie de la tuberculose porcine est restée incer- taine et incomplèlement connue malgré la publication de ces diverses opinions, car celles-ci ont été succinctement expri- mées, el n'ont pas reçu l'appui de documents suffisamment démonstratifs. Depuis les communications ci-dessus, la maladie est constatée un peu partout et donne lieu à des indications statistiques n'ayant qu'une valeur relative. Mendoza (Revue génrale de médecine vétérinaire, 1906, tome VIII, page 280; extrait de la Revista de la Facultad de agronoma y veterinaria, février 1906, page 366) montre l'augmentation de la tuberculose porcine dans Ja République Argentine, d’après les abatages effectués à l’abattoir de Liniers (Buenos-Aires). Celte morbidité est de 6,50 p. 100 en 1899, de 10,86 p. 100 en 1903, de 10,23 p. 100 en 1904, et de 8,98 p. 100 neg ps Mt ep EES. LA TUBERCULOSE DU PORC 564 en 1905. Tantôt on se trouve en présence de lésions générali- sées ef tanlot en présence de lésions localisées; la pénétration par les amygdales et les ganglions maxillaires, sous-glossiens et rétro-pharyngiens est la plus fréquente. En France, Morot (Journal de médecine vétérinaire, 1909), inspecteur honoraire de la ville de Troyes, découvre en 1907 23 pores tuberculeux sur 7.192 abattus, soit 0,32 p. 100; en 1908, 14 tuberculeux sur 6.995, soit 0,20 p. 100. Ce sont 1a les chiffres qui nous paraissent se rapprocher le plus de la vérité pour la morbidité porcine dans notre pays. Sur ces 37 pores tuberculeux, 25 sont saisis totalement et 12 partiellement. La maladie est généralement reconnue par l'examen de la langue et de la « fressure » [poumons foie, rate}. En Belgique, Mullie (Annales de médecine vétérinaire, 1907, page 358), conclut d'une étude statistique locale que la tuber- culose porcine varie, dans sa fréquence, parallèlement à la tuberculose bovine, constatation qu'il faut attribuer sans doute au défaut de pasteurisation du lait. Junack (cité par Linnenbrink; I. D. Berne, 1909; ou bien Junack, in Zerfschrift für Fleisch- und Milchhygiene, 1906-1907, page 164) croit découvrir chez le pore une forme de tuberculose sans caséification et sans calcification; mais il se base sur un seul fait qui, au surplus, n’est pas probant : sur un porc tuber- culeux généralisé un gangliou crural, non lésé macroscopique- ment ni histologiquement, est reconnu virulent par inoculation au lapin et au cobaye; d’où l'en doit conclure, selon nous, que ce ganglion était bacillaire et que vraisemblablement, dans le délai normal, il fût devenu caséeux. Il est toujours possible, surtout chez des animaux tuberculeux généralisés, de sur- prendre des lésions en incubation et la conclusion de Junack est une hypothése qui ne peut étre retenue. Parmi les travaux récents il faut encore citer ceux de Haffner, Langrand, Mohler et Wasburn et de Petersen. Hatiner (Zeutschrift für Fleisch- und Milchhygiene, 1907-1908, page 7) examine 10.000 pores et trouve 580 tuberculeux, soit 3,80 p. 100. Dans 48 cas en tout il y avait des lésions osseuses ; 22 fois les vertèbres seules étaient atteintes ; 22 fois elles étaient lésées en même temps que d'autres os ; 4 fois des os autres que ceux du rachis élaient tuberculeux. La proportion des tuber- 562 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR ~ culoses osseuses est de 8,2 p. 100 des animaux tuberculeux. En outre Haffner constale que parfois les ganglions correspon- dant à des foyers bacillaires osseux ne sont pas lésés en apparence; d'où il résulte que, pour le diagnostic, l'examen des ganglions ne suffit pas. Notre confrère Langrand (Hygiène de la viande et du lait, 1908, page 537) étudie en particulier les lésions tuberculeuses pulmonaires du pore d'après l'examen à l'œil nu, ainsi que la répartition générale des altérations. Sur 100 cas sont lésés : Ganglions sous-maxillaires. 68 fois. | Rate. . . . . . . . . . . . 34 fois. — pharyngiens. . . 62 — Ganglions mésentériques . 60 — — parotidiens . . . 42 — Amygdalés COTE TRS — préscapulaires . 44 : — GINS? tr ees Le — POUMONS PER ER moO Ganglions poplice: Pease re ile, Ganglions pulmonaires .. 8 — — INSUINAUX.N. SARA URSS IRE oe bolo oon ce . 40 — — CTUTAUX . aoe ROC ETS RO VIETIEDIES SERRE eee Ganglions pee ... + 58, — Cette répartition ne met pas en évidence le rôle des lésions amygdaliennes admis par de précédents auteurs ni celui des ganglions maxillaires, et, par cela même, elle le contredit. Mohler et Wasburn (The Veterinary Journal, janvier 1908, page 14) disent au contraire que 93 p. 400 des pores tubereu- Jeux ont des lésions des amygdales; ils attribuent l'infection au lait et aux matières fécales des ruminants. Ryder (cité par ces auteurs) trouve 1,50 p. 100 de pores tuberculeux dans l'Amérique du Nord, à or City. Entin Petersen, à Axel (Zeitschrift für Fleisch- und Milchhy- giene, avril 1909, page 254), trouve 109 pores tuberculeux ur 1.441, soit 9,55 p. 100; 30 fois les ganglions maxillaires seuls sont lésés ; 37 fois ils sont tuberculeux en même temps que d’autres ganglions ; les ganglions mésentériques sont seuls atteints 33 fois. Cela semble indiquer qu'il y a lieu de consi- dérer au moins deux points de pénétration dont l'importance respective n’est pas connue : la région cervicale et l'intestin. Tels sont les principaux travaux publiés sur la tuberculose porcine. Cette maladie a certes donné lieu à un très grand nombre d'autres observalions qu'il n’est pas possible de citer. Malgré celte abondance de documents, presque tous puisés à LA TUBERCULOSE DU PORC 563 l'étranger, il nous paraît cependant utile de publier les résul- tats de nos recherches poursuivies en France (abattoir de Versailles) depuis neuf ans; de ces recherches nous espérons pouvoir dégager les notions pathogéniques générales, vérita- blement intéressantes au point de vue scientifique pur et prati- quement indispensables à l'inspection des viandes, qui carac- térisent la maladie dans cette espèce. I]. — MorBIDITÉ TUBERCULEUSE BOVINE ET PORCINE. Pour avoir une idée aussi exacte que possible de la morbidité de ces deux espèces, il faut prendre les statistiques les plus récentes. Disons tout de suile que les augmentations signalées par Ostertag, Mendoza et quelques autres auteurs sont trés vrai- semblablement des apparences, du moins dans les pays où le pore ingère depuis des siècles les résidus de laiterie. Depuis que les maladies sont mieux connues, les méthodes d'examen se sont perfectionnées et les augmentations tiennent en réalité à un diagnostic plus précis el à une attention mise en éveil pour les cas peu apparents; en Allemagne et en Danemark, avant la centrifugation des laits, les pores ingéraient les mémes liquides, bacillaires parfois; mais il y a trente ou quarante ans, la tuberculose porcine était souvent méconnue, comme elle l'est encore aujourd'hui, dans maints abattoirs. Le tableau I, ci-contre, montre quelles sont les constatations failes au sujet de la fréquence de cette maladie dans un certain nombre des abattoirs français. Tandis que la morbidité tuber- culeuse des vaches y est de 2 à 21 p. 100 environ, celle du porc est de 0 à 0,63 p. 100. Aux abattoirs de la Villette, la tubercu- lose porcine, exceptionnelle il y a trente ans, exisle dans la proportion de 0,20 p. 100 des animaux, mais celte augmen- tation est attribuée en grande partie à l'importation des pores hollandais qui sont plus fréquemment atteints. A Nancy et à Reims, cette proportion est de 0,30 p. 106, mais il faut tenir compte également de ce fait qu’une partie des pores abattus proviennent de Hollande. 564 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR TABLEAU I. Morbidité tuberculeuse animale dans quelques abattoirs frangais. BOEUFS VILLES et VACHES VEAUX PORCS TAUREAUX pour cent. | pour cent. | pour cent. | pour cent. Paris Ait) EN ee 2,18 0,02 0,20 LYON AA) EEE RE 0,88 0,022 0,012 Bordeaux (94 EP 1,50 GEO 0,018 » Marseilles (19110) eee 0,57 2,67 0,01 0,07 Nancy (1911) 0,79 5,24 0,03 0,35 Reims (1911) 2,5 1516 0,20 0,36 Macon (1911) 0,18 1,9 0,02 0,05 Grenoble (1911). 2,47 5,85 0,04 0,016 Chambéry (1911 3,47 8,72 0,0% 0,40 Gap (1914) 1,50 5,79 0,06 0,04 Dijon (1911). 0,5 1,87 0,014 0,027 Toulouse (1911). 0,49 4,32 0,02 » Avignon (1911) 0,66 4,24 0,93 0,57 Rennes (1911) . 4,57 20,94 0,037 0,14 Epinal (1911) 1,84 6,32 0,03 » HrOve Sa(d(9 01) Er ee Re 2 » » 0,32 — (1908) RTE set ews 2) » ; » 0,20 = ARS N ES Re Te 3,02 5,08 0,13 0,02 Toulon (19h) 2.202 a1m2710 11,76 » 0,19 Versailles (1910). . . . . . . .| 2,88 12,21 0,40 0,635 — (OTT) cake ei ete IS 9 94 0194 0,56 — (Cit be) ogra ir nea EC 7,87 0,22 0,58 = (ROIS) ARR A NE 50 8,86 0,149 0,439 A Versailles, il n’est abattu que des porcs d’origine fran- caise; ces animaux proviennent de Normandie et surtout de. Bretagne (Sarthe, Mayenue, Ille-et-Vilaine, Côtes-du-Nord). Sachant que ces départements sont des plus éprouvés par la tuberculose bovine, on doit estimer que les chiffres trouvés a Versailles pour la tuberculose porcine sont un peu trop forts ston les applique à l’ensemble de la France. Dans les quatre années consécutives, 1910, 1911, 1912 et 1913, sur 30.000 ani- maux examinés, la it porcine a été de 0,44 à 0,63 p. 100. Ajoutons que la perte réelle de viande porcine, pour ce motit de saisie, est notablement plus faible, puisque les cas peu LA TUBERCULOSE DU PORG 565 avancés n’entrainent que la saisie des viscéres. Pour 100 kilo- grammes de porc abattu, la perte pour cause de tuberculose est de 0,20 à 0,25 à l’abattoir de Versailles, soit un animal pour 400 à 500 abattus; cette perte cst de 0,40 p. 100 à Nantes, soit un animal pour 250 abattus, mais elle est beaucoup moindre dans la généralité des abattoirs francais et lon peut dire que pour la France entiére, la tuberculose porcine ne motive cerlainement pas la saisie d’un animal pour 1.000 abattus (tableau IT). TaBLEau Hf. Proportions de viande de porc saisie pour tuberculose dans quelques abattoirs français (pour 100 kilogrammes abattus). Binayes (94MM). 7 nn 0,08 AUChOUIL) EL SRE CRE 0,07 Resanconm AUOT) CN COTES IN TroYeS RAS) EEE 0,01 BG EN TITRE ARE 0.05... #OrlCans (AUS) PME ER 0,068 NantesMAI os es sia 0,40 Marsenlle ton) ee 0,08 IL@ AP; (GED FR ise one 0,08 Versailles (AA) 0,24 Evreux (1911)/........ 0,03 = (£999) ice ne 0,23 UT OH taal te esp LR ee te 0,16 — (Ia a gol gn 0,20 Dans la plupart des autres pays d'Europe et d'Amérique la tuberculose porcine est beaucoup plus fréquente qu’en France. En Belgique, la situation es! sensiblement la même qu'en France : 12,27 p. 100 des vaches, 0,157 p. 100 des veaux et 0,29 p. 100 des pores; chiffres recueillis aux abattoirs de Bruxeiles par M. Fally, vétérinaire, pendant l’année 1912. Au Luxembourg, Spartz a fait connaîire pour 1912 les proportions plus élevées de 22,9 p. 100 des vaches et de 0,97 p. 100 pour les pores. En Hollande, la morbidité est, en 1904 : à Amsterdam, de 14,1 p. 100 des bovins adultes. 0,11 p. 100 des veaux et 3,2 p.100 des pores; à Leyde, de 33,4 p. 100 des vaches, 0,54 p. 100 des veaux et 8,2 p. 100 des pores; à Rotterdam, de 11 p. 100 des bovins adultes, 0,2 p. 100 des veaux et 2,15 p. 100 des porcs; à Nimègue, de 12,9 p. 100 des bovins et 6,82 p. 100 des pores. Mais dans de nombreuses autres villes de moindre importance la morbidité est plus faible, probablement parce que l'examen est moins sévère; au total pour les abattoirs hollandais, d'après les chiffres publiés par le ministère de l'Agriculture pour l'année 1904, sur 368.184 pores 1,49 p. 100 ont été trouvés 566 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR tuberculeux, proportion beaucoup plus forte que celle enregis- trée en France. Enfin, sur les pores exportés par la Hollande, en 1906, 3,76 p. 100 sont tuberculeux; pour les mémes animaux exportés la proportion locale est en 1906, de 5.05 p. 100 à la Frize, 5,83 p. 100 dans la province d’Utrecht, 6,65 p.100 dans le sud de la Hollande, et 6,76 p. 100 dans le nord de la Hollande. D'après Eastwood et Griffith, la maladie scrofuleuse porcine est également très répandue en Angleterre (The Lancet, 2mai 1914, p. 1968); sur 24.144 pores examinés par ces auteurs à Vabattoir de Brighton, 2,73 p. 100 sont tuberculeux, dont 1,50 p. 100 environ ont des lésions généralisées. En Baviére, en 1903, 16,1 p. 100 des vaches, 0,19 p. 100 des veaux et 1,4 p. 100 des pores sont infectés; en Saxe (1906) 67,01 p. 100 des vaches, 1,12 p. 100 des veaux et 7,58 p. 100 des pores; à Leipzig (1908) 46,8 p. 100 des vaches, 0,10 p. 100 des veaux et 2,70 p. 100 des pores; à Berlin (1907-1908) 56,94 p. 100 des vaches, 0,87 p. 100 des veaux et 4,43 p. 100 des pores sont reconnus tuberculeux. IL a été maintes fois parlé de la fréquence de la tubercu- lose porcine en Danemark. En 1907, les tueries coopératives pour exportation y ont sacrifié 4.307.120 animaux dont 3,62 p. 100 étaient tuberculeux et 0,16 p. 100 ont élé saisis totale- ment; en 1914, dans les tueries industrielles danoises, la fré- quence de la tuberculose porcine est de 4,48 p. 100 (Hyg. de la viande et du lait, 1913, p. 108). Ces chiffres nous semblent beaucoup trop faibles, et peut-être ne correspondent-ils pas à la réalité, car sur les animaux abattus à l’abattoir de Copen- hague les proportions sont de trois à six fois plus fortes et cela d'une facon régulière de 1897 à 1910; dans cette ville les pores sacrifiés aux abattoirs et provenant de la banlieue sont tuber- culeux dans la proportion de 18 p. 100 en 1897, 14,95 p. 100 en 1904, 30,37 p. 100 en 1907, 21,35 p. 100 en 1909-1910; tous ces animaux ne sont pas saisis mais, dans ces mêmes années, 9,53 p. 100 sont estampillés de 2° classe et 1,51 p. 100 sont saisis totalement (en 1897); en 1904, 4,93 p. 100 sont estam- pillés de 2° classe et 0,63 p. 100 sont saisis totalement; en 1907, bien que 30,37 p. 100 soient tuberculeux, 4,23 p. 100 sont estampillés de 2° classe et 0,49 p. 100 sont saisis totale- ment; enfin, en 1909-1910, 7,49 p. 100 sont estampillés de LA TUBERCULOSE DU PORC 367 2° classe el 0,78 p.100 sont saisis totalement. Il est difficile de dire si la diminution dans le chiffre des saisies correspond à une diminution réelle de la maladie, mais il est plus vraisemblable d'admettre qu'elle est due à une tolérance plus grande puisqu’en 1907, par exemple, sur 30,37 p. 100 de tuberculeux, 0,49 p. 100 seulement sont frappés de saisie totale. TaBLeau III. Morbidité tuberculeuse animale dans quelques pays d Europe. JEUNES BOEUFS TAUREAUX VACHE PORCS u S ANIMAUX Ge. pour cent. pour cent. pour cent. pour cent. pour cent. 12,21 » 16,1 4,05 67,01 1592 56,94 3,61 22,9 » 68,54 13,56 oo PS] = ~ = =i ms aot “ D D © © © à co oo 1, 1 ) Tuberculose à l’abattoir de Bruxelles, en 1912 (vétérinaire Fally). en Bavière, en 1903 (vétérinaire Preusse). en Saxe, en 1906, à Freiberg (vétérinaire Mielach). à Vabattoir de Berlin, en 1907-1908 (vétérinaire Hens- chel). de Luxembourg, en 1912 (vétérinaire Spartz). de Malmoë (Suède), en 1907 (vétérinaire Berg- mann). de Copenhague, en 1911 (vétérinaire Ras- mussen). de Leyde (Hollande), en 1904. de Buda-Pesth, en 1912 (vétérinaire Brenn), de Novare (Italie), en 1911 (vétérinaire Gi- notti). En Suède (abattoirs de Malmoé en 1907), il y a 68,54 p. 100 des vaches, 0,87 à 1.88 p. 100 des veaux et 4,51 p. 100 des pores qui sont atteints. A Stockholm (1903), 5,6 p. 100 des porcs sont tuberculeux. Les chiffres statistiques nous manquent pour apprécier la 568 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR fréquence de la tuberculose porcine dans de nombreux pays. Il semble que la Russie soit touchée au même point que l’Alle- magne el la Suède, si l’on en juge par la proportion relevée sur les animaux originaires de Russie, importés en Allemagne et sacrifiés à l’abatioir frontière de Künigshütte en 1906, laquelle proportion est de 6,56 p. 100. En Italie la morbidité porcine indiquée est très variable; à Novare (1911) : 14 p. 100 des vaches, 0,3 p. 100 des veaux et | p. 190 des porcs; à Modane (1912; : 20,06 p. 100 des vaches, 1,91 p. 100 des veaux el 11,2 p. 100 des porcs. On sait qu'en Algérie la tuberculose bovine et porcine est des plus rares. En Amérique du Nord, la morbidité porcine paraît assez rapprochée de celle enregistrée en France; Moore et Dawson rapportent qu'en 1905, sur plus de 25 millions de porcs abattus, 0,81 p. 400 étaient tuberculeux, dans l’ensemble des États- Unis; par contre Mohler et Wasburn indiquaient la proportion de 4,5 p. 100 à Kansas- City en 1906. Dans l'Amérique du Sud la tuberculose porcine semble prendre les mêmes proportions que dans la Hollande, l’Alle- magne, le Danemark, la Suède et la Norvège: elle est de 5 p. 100 environ à Santiago-du-Chili, 8,98 p. 100 aux abat- toirs de Buenos-Aires (République Argentine), 2 à 3 p. 100 à Montevideo et Santa-Lucia (Uruguay); parallèlement la tuber- culose des vaches laitières est de 14,51 p. 100 dans ces deux derniéres villes. Si nous comparons maintenant la France à ces divers pays, sous le rapport de la tuberculose animale, nous constatons que cette affection contagieuse sévit chez nous avec une intensité moindre le plus souvent, aussi bien chez le bœuf que chez le porc. Par contre, nous savons que la tubercu- lose humaine est généralement plus fréquente ou aussi fré- quente en France qu’a l’étranger; en d’autres termes il n'y a aucun parallélisme entre la morbidité humaine et celle des animaux et ce fait contribue à démontrer que les deux affec- lions n’ont pas la méme origine. Une autre indication doit être tirée de ces statistiques : la tuberculose des vaches est toujours la plus fréquente; celle du 7 cA 4 &¢ LA TUBERCULOSE DU PORC 604 veau est de 30 à 100 fois plus rare; celle du porc tient le milieu entre ces deux extrèmes, étant de quatre à vingt fois environ moins fréquente que celle de la vache. La différence entre les tuberculoses du veau et du pore, au point de vue statistique, nous paraît due à ce que ce dernier animal boit des laits mélangés, par conséquent plus souvent bacillaires que des laits séparés, et en outre, à une réceptivité spéciale de l'espèce por- cine pour le virus bovin. Le jeune bovin, au contraire, n’ingére en général que le lait maternel: enfin le porc recoit parfois divers déchets organiques qui peuvent être tuberculigènes à un degré difficile à apprécier. Il. — Voies D'INFECTION CHEZ LE PORC. Il faut considérer quatre voies d'infection dans la tubercu- lose porcine; par association des deux premières voies nous avons en réalité cinq types morbides. Ce sont, par ordre de fréquence : 1° La voie amygdalienne et lymphatique cervicale, laquelle est en cause dans plus de 80 p. 100 des observations; 2° La voie intestinale qui emprunte les chylifères et le canal thoracique, et peut comprendre environ 1/10 des cas; 3° La voie mixte, c'est-à-dire amygdalienne et intestinale à la fois; ce cas est fréquent, mais il existe surtout avec prépon- dérance du premier mode d'infection; c’est pourquoi le plus grand nombre des cas mixles sont classés par nous dans la première catégorie ; 4° La voie aérienne directe ow inhalation, qui n'est guère à considérer que dans 2 ou 3 p. 100 des observations; 5° La voie génitale à laquelle se rattachent un petit nombre de cas dans lesquels la maladie est inoculée par la plaie de castralion. Nous n’envisagerons pas ici les cas exceptionnels d'inocula- tion par un autre point du corps; nous n’en avons observé aucun. On peut encore mentionner la possibilité de l'infection simul- 38 570 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR tanée par inhalation et par l’une des premiers voies : amygda- lienne ou intestinale. Lo” Ill. — Vote AMYGDALIENNE ET LYMPHATIQUE CERVICALE. 1. Adénopathies. caséeuses cervicales. — Tous les vétérinaires ayant fait de l'inspection des viandes connaissent ces adéno- pathies caséeuses du cou chez le porc, lesquelles ont fait donner le nom de scrofulose (de scrofa : truie) aux mêmes adénopathies cervicales dans l'espèce humaine; ce terme très anciennement employé prouve que la connaissance de la tuberculose porcine est de date fort ancienne; peut-être même cetle maladie a-t-elle été autrefois plus fréquente qu'au- jourd hui. Ainsi que nous allons le constater d’une façon parti- ticulièrement nette, ces lésions ganglionnaires cervicales témoignent de la pénétration de l'agent pathogène par la région bucco-pharyngicnne. Ce sont presque toujours les ganglions maxillaires qui sont hypertrophiés et caséeux (fig. 1); leur volume peut atleindre et même dépasser celui du poing tandis qu'ils sont normalement de la grosseur d’une petite noix. Infectés depuis un certain temps la consistance de ces ganglions devient dure à la palpation; plus tard la matière caséeuse subit une sorte de fonte progressive et on observe de la fluctuation; à un dernier stade la substance ramollie est évacuée à travers le tégument et il persiste une ou plusieurs fistules. Le plus souvent. chez les animaux sacrifiés pour l'alimentation, le ramollissement et la fistulisation n’ont pas eu le temps de se produire et on observe seulement le stade fibro-caséeux. Les ganglions parotidiens et réiro-pharyngiens ne sont tou- chés que secondairement; leurs altérations sont en consé- quence moins avancées que celles des ganglions maxillaires. Sur la coupe ladénopathie caséeuse du porc a un aspect variable; en général, elle doit être rapprochée soit de la tuber- culose hypertrophiante caséeuse homogène, soit de la tuber- culose hypertrophiante demi-caséeuse, types des adénopathies tuberculeuses bovines que nous avons décrites avec le pro- fesseur Hl. Vallée (Bull. de la Soc. d'études scientifiques sur la o71 LA TUBERCULOSE DU PORC ‘aurauod asojn a u laqn) ap spa un supp ‘saqesodiodns solploul xnap Sa] dnquout ony ey] 19 9SIOUT JS0 uorsurs 99 ! xnogseo-oAqy jo giydowjaoddy oarey[IxXeut-snos uorsurs ‘WS a LID] ULDWUW tajur aanisa ‘ 1 ap aa © 179 L onbun) vn) ap aiydnaibojoyz — ‘1 6 “Or + c ‘ XUAAUT “7 l 972 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR tuberculose, février 1909; Revue générale de médecine vétéri- naire, 15 février 1909); c’est-à-dire que, sur la coupe, le tissu ganglionnaire hypertrophié est uniformément caséifié, de cou - leur mastic, ou incomplétement mortifié; dans ce dernier cas les stries caséeuses irrégulières sont séparées par du tissu ganglionnaire enflammé d’apparence sarcomateuse. Le plus souvent c'est ce dernier aspect que l’on rencontre. Parfois l’adénopathie ne s’accompagne que d'une très faible hypertrophie; la matière caséeuse se concrète et s’enkyste; elle est constituée par une ou plusieurs masses isolées ou con- fluentes, caséo-calcaires, mastic, de forme irrégulière, ne des- sinant jamais, comme chez le bœuf, des tubercules réguliére- ment sphériques. Il faut savoir qu'il existe chez le pore une adénopathie caséeuse nodulaire siégeant précisément dans les ganglions maxillaires ou mésentériques, qui n’est pas due au bacille de Koch ainsi que nous l’avons établi en pratiquant des inoculations au cobaye; dans cette lésion non tuberculeuse les nodules sont assez fortement calcifiés, plus nettement des- sinés que dans la tuberculose, et enchâssés dans un tissu gan- glionnaire peu altéré; la glande est de volume normal ou à peine hypertrophiée. Très exceptionnellement on rencontre une adénopathie bacillaire à peine caséeuse, appartenant au type hypertro- phique ou sarcomateux, et qui doit être assimilée à la tuber- culose hypertrophiante très peu caséeuse du bœuf (H. Vallée et P. Chaussé) laquelle est également rare. Mais ce sont surtout les adénopathies secondaires qui peuvent présenter cet aspect non caséeux : on voit alors des ganglions modérément hyper- trophiés et dont le tissu normal est remplacé par un tissu gris rappelant celui du sarcome; il ne s'agit évidemment pas d'une tuberculose occulte puisqu'il y a des lésions visibles, mais bien d’un type particulier. Lorsque les lésions ganglionnaires tuberculeuses sont an- ciennes, la fonte par ramollissement entre la substance caséeuse et le tissu vivant peut y être observée; il se constitue de véri- tables abcès froids contenant des concrétions caséeuses primi- tives et une sorte de suppuration bacillaire; ces abcès finissent par s'ouvrir à l'extérieur en laissant des trajets fistuleux plus ju moins persistants. ha LA TUBERCULOSE DU PORC 573 Le tissu ganglionnaire est de bonne heure totalement détruit par la fonte purulente et on voit que les tubercules se développent dans le tissu conjonctif voisin devenu fibreux et même dans les tissus glandulaire et musculaire envahis par continuité. Quel que soit le cas, la matière caséeuse du pore et le pus des adénites sont de couleur blanc grisätre ou verdatre. Histo- logiquement nous avons constaté que toujours, chez le porc comme chez les autres animaux, cette substance contient des granulations graisseuses émulsionnées auxquelles elle doit son opacité. De plus, nous savons que le tissu caséeux, de même que le pus, rappelle la couleur de la graisse physiologique de l’es- pèce ou de l'individu considéré; c’est ainsi que, chez le pore et le veau, dont la graisse est blanche, la substance caséeuse est blanche, un peu grisätre, tandis que, chez le bœuf et sur- tout chez la vache, elle est plus ou moins jaune. D'autre part, la substance caséeuse du porc, comme celle du veau et du bœuf dans les tuberculoses hypertrophiantes, est souvent piquetée de points hémorragiques dus à des obstructions vasculaires, avec zones congestives, réalisées au moment de la mortification. L'adénopathie primitive, avons-nous dit, intéresse presque toujours exclusivement les ganglions maxillaires; très excep- tionnellement elle débute par les ganglions rétro-pharyngiens. Lorsque l'affection est déjà ancienne, c’est-à-dire lorsqu'elle date de trois à quatre mois au moins, les premières lésions se sont propagées plus ou moins aux ganglions parotidiens, rétro-pharyngiens et trachéaux. Presque toujours, du moins chez les pores de huit mois environ, qui ne présentent pas de lésions massives, les ganglions prépectoraux et préscapulaires sont indemnes; on sait que ces derniers ganglions correspon- dent au groupe sus-claviculaire de l’homme, ce qui offre un certain intérêt pour la discussion de la pathogénie. Mais la généralisation est faite, à un degré variable, quelques mois après l'infection ; nous en décrirons l'aspect et en déduirons le mécanisme après avoir recherché plus exactement quelle est la porte d'entrée du virus. IT. Lésions amygdaliennes. — Si Von accepte avee nous que 574 ANNALES DE LINSTITLUT PASTEUR l'infection tuberculeuse obéit à des règles précises et simples, l'adénopathie des ganglions sous-maxillaires indique que le point de pénétration du contage se trouve dans la bouche, le nez ou le pharynx; elle indique même que ce point de pénétra- tion est plutôt buccal que nasal ou pharyngien. Il est aisé de se convaincre qu'il en est bien ainsi; ce point de pénétration se trouve à la partie inférieure et postérieure de la voûte pala- tine, dans les amygdales staphylines, constatation qui a déjà été faite par divers auteurs, notamment par Strése (1897), Mendoza (1906), Mohler et Wasbura (1908). Lorsqu'un seul ganglion sous-maxillaire est caséeux on peut se rendre compte également que la lésion amygdalienne correspond à ce ganglion malade. Cependant il faut ajouter ici un correclif : les lésions de l'amygdale ne sont pas toujours évidentes, surtout si la maladie est implantée depuis peu; leur reconnaissance peut être diffi- cile et exiger au besoin l'examen microscopique d'un point suspect si l’on veut être rigoureux. Voici les caractères qui per- mettent de reconnaître les localisations des amygdales (1). A la surface de l’amygdale on remarque tantôt des élevures (fig. 2) larges de 2 à 3 millimètres, en forme de segment de sphère dont le sommet est percé d’un orifice souvent dilaté; cet orifice est simplement une crypte de l'organe lymphatique. Tantôt on note l’existence de cryptes fortement dilatées (fig. 3) coïncidant avec une tuméfaction plus ou moins diffuse des follicules lymphatiques sous-jacents ; dans ces cryptes on découvre communément des débris de graminées (glumelles et glumellules) qui blessent les tissus et favorisent à coup sûr la pénétration du bacille tuberculeux ou de tout autre germe (1) Qu'on nous permette de remarquer ici que les amygdales gutturales (Renaut), appelées par quelques auteurs (Poirier, Jonnesco et Charpy) pala- tines, chez l'homme, ne sont pas réellement palatines, puisqu'elles ne sont pas situées au palais mais entre les piliers du voile du palais; elles ne sont pas non plus gulturales (de gultur : gosier, pharynx); elles sont en réa- lité isthmiques puisqu'elles sont au niveau de l'isthme, entre la bouche et le pharynx. Les amygdales du pore méritent au contraire le nom de palatines ou de slaphylines, car elles occupent la partie postérieure de la voüle buccale; les amas folliculaires sont séparés en deux moitiés symétriques. par une sorte de raphé médian facile à reconnaitre sur la fig. 2, et ils se prolongent sur la face antérieure du voile du palais lequel est très développé dans cette espèce. 1 1- ' i Vv Fic. 2. — Pholographie des amygdales palatines, duns un cas de luberculose du pore. Ces amygdales sont vues par leur face buccale. V, voile du palais; R, raphe médian séparant les deux amygdales; T, tubercule intra-amygdalien pro- duisant un petit soulèvement hémisphérique. Les cryptes amygdaliennes se montrent sous l’aspect de points noirs assez régulièrement espacés. ae ee ne 5 à 7%. | Fic. 3. — Pholographie dz deux amyzdales tuberculcuses du porc. I, amygdale droite montrant, en C, des cryptes normales, en D, une crypte fortement dilatée sur une lésion tuberculeuse, en E, une crypte contenant une tige noire qui est une glumelle de graminée. II, deux amygdales dont la gauche présente, en U, un ulcère caséeux par tiellement cicatrisé. 576 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR morbide. Tantôt il existe des ulcérations véritables (fig. 3), parfois en voie de cicatrisalion; il est manifeste que, dans ce dernier cas, la destruction de l'organe à ce niveau en témoigne, une partie du tissu tuberculeux a élé expulsée et qu'une ébauche de réparation se poursuit. Ce processus cicatriciel est plus apparent sur la figure 4 qui montre des amygdales à surface déchiquetée, vasculaire, mais non ulcérées, l'épithélium buccal ayant recouvert imparfaitement les lésions premières. Enfin, ce que l’on voit le plus souvent an début, lorsque dd ts aN tn, Fic. 4. — Autres pholoyraphies d'amygdales anciennement tuberculeuses. La surface de ces organes est complèlement labourée par l'élimination de parties caséeuses; la réparation cicatricielle est imparfaite; sur la figure de droite chaque amygdale porte les vestiges d’une large ulcération irrégulière, maintenant cicatrisée en partie. l'infection est de faible intensilé, c'est une simple rougeur d’une partie de la muqueuse amygdalienne quiest normalement blanche sur le cadavre; dans cette seule zone colorée, tuméfiée ou non, transparaissent des filets vasculaires superficiels qui indiquent l'existence d’un foyer inflammatoire localisé. Si Vin- fection est intense, ce qui est rare, l’'amygdale est toujours congestionnée et vascularisée dans tout ou partie de son étendue; on y aperçoit par transparence des tubercules caséeux et d’autres ulcérés,et le toucher en fait reconnaître également quelques-uns à la face profonde de l'organe lymphatique. LA TUBERCULOSE DU PORC 571 L'amygdale doit, en effet, ètre examinée aussi par sa face profonde ; pour cela on Ja détache au couteau, en rasant la voûte palatine et le voile du palais; on la palpe des deux côtés. On y trouve en général, au début, un point épaissi correspondant à la région vascularisée et saillant à la surface; plus tard, il est de règle d'y découvrir, accolés intimement à sa face profonde el faisant corps avec elle, des tubercules caséeux gros comme des grains de millet, ou comme des grains de chènevis; dans ce cas la nature tuberculeuse des lésions amygdaliennes ne fait plus aucan doute. Nous avons fait l'étude microscopique des lésions amygda- liennes. Elant donné l'intérêt pathogénique qu’elles présentent nous les décrirons un peu longuement; qu'on nous permette d’abord de schématiser en quelques mots la structure de l'amygdale du pore. Cette amygdale est une sorte de ganglion lymphatique com- posé par lassociation de parties semblables, plus petites, que nous appellerons ganylions élémentaires. Ces derniers sont au nombre de 200 environ de chaque côté de la ligne médiane, soit 400 pour les deux amygdales staphylines. Ces organes sont recouverts par la muqueuse buccale qui s'invagine per- pendiculairement à la surface et au centre de chaque ganglion élémentaire ; l'épithélium invaginé constitue un conduit ramific latéralement dans la substance du ganglion élémentaire; les orifices buccaux de ces conduits sont les cryptes visibles à l'œil nu sur les figures 2, 3 et 4 (Voir le schéma, fig. 5). Chaque ganglion élémentaire a une forme en doigt de gant et se trouve disposé perpendiculairement à la muqueuse; le centre, avons-nous dit, est occupé par le conduit épithélial ramifié; le LE rence chaque ganglion élémentaire est de 1,5 millim. à # millimètres environ. Le pourtour est occupé par de nombreux follicules lymphatiques larges de 150 à 400 mi- crons, selon leur plan de section, et donton aperçoit ies centres clairs sur le schéma el sur les coupes (fig. 5, 6, 7, 9, 10 et 11) les follicules sont rangés en une couche Et à une ne distance de la paroi ou enveloppe ganglionnaire. Tous les espaces compris entre la limite externe du ganglion élémen- taire et les tubes épithéliaux, déduction faite des follicules, sont occupés par du tissu réticulé dont les mailles sont bourrées de 578 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR cellules blanches; les follicules ont eux-mémes la structure de ceux des autres ganglions de l’économie. Les canaux épithéliaux ont un épiihélium stratifié pavimen- teux semblable à celui de la cavité buccale mais moins épais. Le ganglion élémentaire est entouré par du tissu fibro-vas- culaire en continuité avec le lissu sous-amygdalien dans lequel on trouve, à la périphérie de lamygdale surtout, des glandes acineuses mixtes. jE: ON * Fig. 5. — Schéma de Vamygdale palaline du porc. E, épithélium buccal du type stratifié pavimenteux ; Cr, invagination de cet épithélium, ou crypie, au centre de chaque ganglion élémentaire; sur la figure il y a deux de ces ganzlions; te, prolongements épithéliaux ramifiés, en continuité avec lépithélium buccal de même type; F, follicule à centre clair; fe, tissu caverneux renfermant dans ses mailles des cellules lympha- tiques ; {v, tissu conjonctivo-vasculaire. Il faut mentionner enfin que certains ganglions élémen- aires voisins sont fusionnés entre eux; leur structure rentre néanmoins dans le schéma précédent. Le rôle physiologique des amygdales n'est pas entièrement connu; il est admis que les leucocytes du tissu lymphatique émigrent à travers l'épithélium et sont rejetés dans la cavité buccale où ils se mélangent au mucus; il est vraisemblable que ces cellules et ces organes ont un rôle de défense à remplir continueilement à l'égard des divers germes des voies diges- lives el c'est pourquoi sans doute de nombreuses infections se LA TUBERCULOSE DU PORC 019 localisent à leur niveau. Par suite de leur desquamation les cellules épithéliales des digitations internes constituent, avec les leucocytes et les microbes, une sorte de détritus d'aspect caséeux à l'œil nu. er Fic. 6. — Coupe d’une amygdale tuberculeuse perpendiculairement à la surface. ep, épithélium stratifié pavimenteux; Cr, cryple ; e, invaginations épithé- liales; f, follicule; E, tissu épithélioide; cr, centre de chromatolyse; T, tuber- cule. Grossissement : environ 10 diamétres. Dans les cryptes el conduits, des germes pathogènes, tels que le bacille de Koch, peuvent étre apportés avec des aliments et ) I peuvent probablement cultiver. Par suite de son pouvoir toxique ou nécrosant, ou à la faveur d'un traumatisme qui se 1 580 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR trouve ici fréquemment réalisé, le bacille tuberculeux pénètre dans le tissu lymphatique et, à partir de ce moment, l'infection est réalisée. Tandis que le microbe se multiplie le tissu envi- ronnant, touché par les poisons bacillaires, subit la transfor- mation épithélioïde; à un faible grossissement cette dernière modification, qui n’est pas à proprement parler une méla- plasie (1), est reconnaissable en ce que la teinte du tissu devient plus claire, parce que les noyaux vésiculeux des cel- lulos épithélioides sont plus transparents que ceux des cellules lymphatiques normales, et, d'autre part, le corps cellulaire est plus développé (fig. 6). Des centres de chromatolyse, Cr et T, apparaissent ensuite dans le tissu épithélioide, indiquant le début de la dégénérescence caséeuse. Les tubercules superfi- ciels T, T, soulèvent l'épithélium buccal; plus tard ils se désagrègent et déversent leur contenu bacillaire et caséeux dans la cavité digestive, ce qui est le processus habituel de défense contre Jes lésions bactériennes diverses des muqueuses et des féguments. Une coupe parallèle à la surface d’une amygdale récemment infectée (fig. 7) montre des ganglions élémentaires normaux, N, et d’autres qui renferment des tubercules à divers stades. L'un de ces tubercules, T1, est compris entre la surface épithéliale interne et ja cloison conjonctivo-vasculaire; le second, T2, est plus profondément situé : il commence à envahir le tissu conjonctivo-vasculaire; enfin un troisième tubercule, T3, est complètement développé dans le tissu conjonctivo-vasculaire jui constitue la charpente de lamygdale. C'est ainsi que se ‘orment, par transport de quelques uuités bacillaires dans les espaces conjonctifs, les tubercules sous-amygdaliens (fig. 8). Comme dans toutes les lésions tuberculeuses superficielles, on observe dans les amygdales de pore tuberculeux des phéno- mènes de régression et de cicatrisation. L'examen à l'œil nu des amygdales représentées sur la figure 4 nous donnait à penser qu'elles étaient le siège de lésions tuberculeuses impar- laitement guéries, mais il pouvait rester quelque doute sur la nature de ces allérations; l'étude histologique nous a permis 1) La cellule épithélioïde n'est, en effet, qu'une cellule conjonctive intermé- liaire entre le lymphocyte, ou cellule embryonnaire, et la cellule conjonctive étoilée. pee LA TUBERCULOSE DU PORC 581 de comprendre exactement de quelle manière se réalise cette réparation imparfaite. Les tubercules développés dans les amygdales sont éliminés dans le tube digestif; il y a trois étapes : 1° formation du HT Fig. 7. — Coupe d'une amygdale récemment infectée, parallèlement à la surface. N, ganglion élémentaire normal; e, invagination épithéliale; 7, follicuie; c, tissu conjonctivo-vasculaire; v, vaisseau sanguin; T1, tubercule développé dans un ganglion élémentaire; T2, tubercule analogue sortant d’un autre ganglion; T3, tubercule développé dans le tissu conjonctivo-vasculaire. Gros- sissement : 10 D. tubercule et progression vers la surface; 2° élimination; 3° cicatrisation. Ceci est surtout exact pour les lésions qui on! un siège superficiel dès le début. L’élimination des tubercules profonds est évidemment plus difficile; elle ne peut avoir lieu 582 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR qu'après la chute d'une partie des tissus qui les recouvrent. La figure 9 montre deux tubercules développés dans le tissu conjonctivo-vasculaire ; lun d’eux, T1, comprimé, d’une part, entre les ganglions élémentaires, d'autre part, par le tissu fibreux sous-amygdalien, lequel est en continuité avec le périoste palatin, se déplace visiblement vers la surface ; le déve- Fic. 8. — Microphotoyraphie de quelques tubercules sous-amygdaliens. A, amygdale; T1, gros tubercule caséo-calcaire, composé lui-même de plusieurs petits tubercules, ¢, très nettement dessinés; T2 et T3, autres tubercules à un stade moins avancé. Grossissement : environ 10 D. loppement mème de cette lésion la rapproche de l'épithélium, mais, en outre, on remarque l'aplatissement latéral de sa cir- conférence et la faible épaisseur de son enveloppe fibreuse du côlé de la moindre résistance. L’évulsion des tubercules est prise sur le fait, sur la figure 10, où l’un d'eux, Tl, a rompu le revêtement épithélial et montre son tissu en contact avec la cavité digestive. Par suite du développement des tubercules et de leur élimi- ee à, . 66 Fie. 9. — Microphotographie montrant un lubercule intra-amygdalien T1, en progression vers la surface épilhéliale E. Cr, crypte amygdalienne; F, follicule lymphatique, Méme grossissement que la figure 8. Fic. 10. — Micropholographie montrant un tubercule T1, qui se déverse dans la cavité digestive. E, épithélium; B, bourgeon charnu cicatriciel; F, follicule lymphatique ; Tf, tubercule fibreux. Méme grossissement. 534 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR nation la structure des amygdales est profondément altérée ; le tissu lymphatique est rejeté en partie, avec les iésions, et il ne se reconstilue pas. L’épithélium et la couche lymphatique superficielle se réparent irrégulièrement en donnant maints bourgeons, parfois pédiculés, visibles au simple examen macro- scopique (fig. 4) et que montrentaussi les microphotographies fig. 10 et fig. 11); cependant l’épithélium prolifère et arrive à hic. 11. — Micropholographie montrant le remaniement de la struclure de Vamygdale par le développement et l'élimination des lubercules. La surface épithéliale est hosselée ; les follicules lymphatiques sont épars et séparés par des travées fibreuses, au lieu d’être régulièrement groupés ; E, épithélium; F, follicule; Tf, tubercule fibreux. Méme grossissement, recouvrir les surfaces primitivement ulcérées. Les ganglions élémentaires sont remaniés par le développement et l’évulsion des tubercules ; des travées fibreuses persistent là où les lésions spécifiques ont existé et elles écartent les follicules lympha- tiques. Enfin, on note Ja persistance de tubercules fibreux ou fibro-caséeux à évolution extrémement lente. Il serait superflu de multiplier davantage les dessins pour montrer d'autres aspects des lésions amygdaliennes ; chaque dessin ——— rT =) LA TUBERCULOSE DU PORC 585 nouveau se rattacherait à l’un ou l’autre de ceux qui pré- cèdent. Ce sont là, incontestablement, des phénomènes régressifs qu'il faut rapprocher de la cicatrisation des ulcères tubercu- leux de l'intestin étudiée par nous dans l'espèce bovine (Annales de [Institut Pasteur, septembre-octobre 1909). Étant donnée l'épaisseur de l’amygdale la cicatrisation parfaite ne semble pas possible ; l'organe est éliminé en grande partie avec les tubercules qu'il contient ; son épaisseur se réduit au tiers en certaines régions, mais il reste des vestiges de l'infection sous la forme de quelques tubercules fibreux épars dans le tissu lymphatique, ou de tubercules sous-amygdaliens plus ou moins caséifiés. L’élimination de ces derniers apparaît impossible à cause de leur situation profonde. L’intestin nous a montré, il est vrai, une cicatrisation parfaite en apparence, à l'œil nu, mais, sous la cicatrice, nous découvrimes au microscope des cellules géantes et des bacilles; cependant l'intestin, plus friable, plus souple, plus mince, moins fibreux que les amyg- dales, est dans de meilleures conditions pour réparer ses lésions bacillaires. Les bacilles sont extrémement rares dans les lésions tuber- culeuses du porc; il faut faire des examens prolongés pour en découvrir quelques unités; les cellules géantes sont elles- mémes souvent peu nombreuses, surtout dans les tubercules fibro-caséeux anciens. De ces lésions amygdaliennes, ce qu il importe avant tout de retenir c'est leur signification pathogénique : elles sont la pre- mière étape de l'infection, mais non la plus apparente. Afin de simplifier il faut rattacher à cette première étape la localisation ganglionnaire qui lui correspond directement et qui est plus visible. L’hypertrophie ganglionnaire habituelle tient à ce que le tissu lymphatique est plus apte à la culture, ce qui s’observe également pour les autres régions de l'organisme et pour la plupart des cas de tuberculose bovine. Les lésions amygda- liennes et ganglionnaires évoluent à peu près simultanément. La seconde étape est celle de la généralisation dont nous allons essayer de comprendre le mécanisme. 586 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Il. Généralisation. — L'examen attentif de nombreux sujets nous à donné la certitude qu'entre les ganglions maxillaires et le confluent veineux aucun filtre n’est interposé; nous ne sau- rions donc accepter l'opinion exprimée par Strése et divers auteurs, qui supposent que le virus va des ganglions cervicaux aux ganglions pulmonaires, et de ces derniers aux poumons, opinion qui, au surplus, est contraire à la physiologie ! En effet la généralisation s’observe tandis que, seuls, les gan- elions maxillaires sont hypertrophiés et caséeux, les ganglions parotidiens, rétro-pharyngiens, trachéaux, prépectoraux, pré- scapulaires et pulmonaires étant indemnes; ce sont seulement les lésions prononcées des amygdales et des ganglions maxil- laires correspondants qui retentissent sur les ganglions voisins du cou, avec lesquels il existe sans doute des rapports de sup- pléance lors de la destruction des premiers. Il y a donc des vaisseaux lymphatiques qui vont directement des ganglions maxillaires dans les troncs antérieurs et, par la, dans la cir- culation veineuse. Les altérations des ganglions pulmonaires se montrent, elles-mêmes, absolument subordonnées à celles du poumon et se produisent avec un léger retard sur celles-ci, ce qu'il est possible d'apprécier lorsque l'infection est récente. Outre les faits d'observation, nous pourrions faire valoir de nombreux faits expérimentaux pour démontrer que l’hyrothèse de la relation des ganglions cervicaux et pulmonaires est erronée, non seulement chez le porc mais dans toutes les espèces; cette discussion nous écarterait trop de notre sujet actuel. La connaissance des signes de la généralisation doit être la base de l'inspection en matière ue tuberculose porcine ou bovine. Malheureusement, c'est surtout dans la tuberculose, et pour le point particulier qui nous occupe, que l’on peut dire « la nature ne fait pas de bonds » : dans la pratique, le moment où la généralisation existe ne peut ètre apprécié rigoureuse- ment; toutefois on peut arriver, à notre avis, à une approxi- mation salisfaisante. Chez le porc, la généralisation est plus facile à définir et à reconnaître que chez le bœuf, parce que le premier animal, étant plus réceptif, réagit mieux à l'égard de l'infection san- cuine; mais elle se présente a lous les degrés possibles. Nous allons tenter d'en faire connaître les caractères, en commen- LA TUBERCULOSE DU PORC 587 cant par les formes qui résultent de la bacillémie la plus dis- crèle et la plus récente. Dans la généralisation récente et à un très faible degré (nous conviendrons qu'il s'agit la du premier degré de la bacillémie), outre les lésions cervicales ci-dessus décrites, la palpation du poumon permet de déceler un nombre variable, mais générale- ment faible, de tubercules disséminés ayant environ 1 à 2 milli métres de diamètre et qui donnent au toucher la sensation de grains de plomb ou de millet enchassés dans le parenchyme respiratoire. Ces tubercules présentent une petite zone conges- live périphérique, tandis qu’au centre ils sont gris ou caséeux selon leur âge. Par rapport au poumon et au lobule leur siège est indifférent, c'est-à-dire qu'il est intrapulmonaire ou sous- pleural, intralobulaire ou périlobulaire; il n’y a aucune pré- dilection pour l'un ou l'autre des lobes pulmonaires. L'infection sanguine étant ici récente (30 à 40 jours environ), les ganglions pulmonaires sont parfois indemnes parce que le parenchyme est touché en premier lieu; si les ganglions sont lésés, leurs altérations consistent en une légère induration avec hyper- trophie et caséification peu marquées. Le foie, la rate, et les autres organes ou tissus, ainsi que les ganglions hépatiques, sont généralement sains. Dans la rate les tubercules sont toujours moins nombreux que dans le poumon et on a peu de chances d'en rencontrer, sinon parfois quelques unités à prine visibles, cet organe élant granuleux et ponctué par la présence des corpuscules de Malpighi. Dans le foie, un très faible nombre de tubercules récents seront diflicilement découverts, et les ganglions de l'organe, parce que l'infection est récente, ne seront pas encore caséiliés. Enfin dans les autres tissus de l’économie, il est encore plus malaisé, et il est même impossible de reconnaitre des lésions correspondant à une bacillémie aussi légère et récente. L'observation et l'étude expérimentale démontrent que, lorsque la bacillémie se réalise, le poumon ne retient qu'une partie des bacilles; une autre partie le traverse et se répand dans la circulation générale ; tous les tissus sont donc simulta- nément touchés et, si des lésions n'y sont pas visibles, ces tissus sont tout au moins suspects. Chez le porc, en dehors des rares cas d'infection par inhalation, la généralisalion existe donc 588 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR dès que l'on trouve des lubercules pulmonaires, quel qu’en soit le nombre, et même en l’absence de lésions du foie, de la rate et des autres tissus : telle est la définition rigoureuse de la généra- lisation. Mais encore, avant que des tubercules pulmonaires soient apparents à l'œil nu,on peut toujours penser qu'ils sonten formation, la bacillémie pouvant dater de moins de vingt jours, délai minimum approximatif pour que les tubercules soient visibles. A un second degré nous considérons que la généralisation est un peu plus ancienne (50 à 60 jours environ), les tubercules pulmonaires un peu plus avancés dans leur développement et les adénopathies caséeuses correspondantes constituées. Les tubercules pulmonaires, toujours en nombre variable, mais eénéralement restreint, auront de 2 à 3 millimètres environ; ils présenteront une zone congestive périphérique et un point caséeux central; leur siège est nécessairement le même. Les ganglions pulmonaires sont légèrement indurés, hypertrophiés, el ils se montrent partiellement caséeux sur la coupe. Tantôt la rate et le foie sont indemnes, tantôt ils sont lésés, mais les tubercules qu'ils présentent sont toujours plus rares que ceux du poumon. En examinant la rate sur toutes les faces, on décou- vrira parfois un, deux, dix, vingt tubercules au mème stade que ceux du poumon. Le foie contiendra alors quelques granu- lalions blanchâtres de mêmes dimensions et ses ganglions seront également caséeux, le plus souvent au même degré que ceux du poumon. Comme les bacillémies sont des phénomènes à répétition, à intervalles et à doses extrêmement variables, la généralisation au second degré pourra ètre associée à celle que nous avons appelée généralisation au premier degré, c'est-à-dire que lon trouvera alors dans les trois organes, poumon, foie et rate, des tubercules plus jeunes appartenant au premier stade ou mixtes. Les tissus périphériques et les ganglions intramusculaires ne présentent ordinairement aucune lésion visible et les reins sont indemnes. Si l’on fait pratiquer la fente de la colonne verté- brale, pour en examiner le lissu spongieux, on ne découvre ordinairement aucun tubercule. L'existence ou l'absence des lésions spléniques et hépatiques, ainsi que le nombre de ces lésions, sont commandés par lin- LA TUBERCULOSE DU PORC 589 tensité de la bacillémie ou des bacillémies successives : si l’in- fection a été faible, le poumon seul sera généralement atteint: dans les autres cas, la rate et le foie auront un nombre de tubercules d’autant plus fort que le poumon sera plus abon- damment ensemencé. Une partie des tubercules sont visibles immédiatement, parce Fic. 12. — Photographie de la surface pleurale, grandeur naturelle, dans un cas de généralisation intense au second degré. Sur ce dessin, une trentaine de tubercules sont visibles pour une faible étendue du poumon, ce qui correspond à environ 2.000 à 3.000 tubercules pour tout l'organe. Il convient de remarquer l'inégalité de ces tubercules laquelle indique que les lésions sont dues à plusieurs inondations sanguines. T, tuber- cule. qu'ils siègent sous la plèvre pulmonaire. La figure 12 montre bien quel est l'aspect du poumon dans un cas de généralisation prononcée. Le foie et la rate présentent des tubercules approximativement au même stade (fig. 13). Il suffira de regarder les figures 12 et 13 pour se rendre compte de ce que nous entendons par généralisation tuberculeuseau second degré. À un ¢troisiéme degré nous admetirons que les lésions tuber- culeuses métastatiques sont encore notablement plus anciennes 590 ANNALES DE L'INSIITUT PASTEUR (trois à quatre mois environ) et plus nombreuses que précé- demment; outre ces lésions anciennes, il y en aura parfois de Fic. 13. — Photographie d'un fragment de foie et d'un fragment de rule dans un cas de géneralisation inlense au second degré. Il s'agit du même sujet que sur la fig. 12; dans chacun de ces trois organes (poumon, foie, rate), les tubercules sont sensiblement au même état de développement. T, tubercule. plus récentes. Pour fixer les idées, nous dirons que les tuber- cules les plus anciens auront de 5 à 10 millimètres et présente- ront une caséification centrale marquée. Toutes les lésions plus ae) EE LA TUBERCULOSE DU PORC 591 récentes sont identiques à celles que nous venons de décrire pour la luberculose au deuxième degré. Les tubercules pul- monaires sont, comme toujours, assez régulièrement dissé- minés, et, parmi eux, les plus gros tendent à prendre le type broncho-pneumonique par suite de extension périphérique de l'infection aux alvéoles et bronchioles. On remarquera d'autre part des tubercules lymphatiques interlobulaires et sous-pleu- raux, de forme sphérique. Les ganglions pulmonaires seront assez fortement hypertrophiés et caséeux. Le foie contiendra toujours un nombre analogue de tuber- cules de divers ages, uniformément disséminés dans tout le parenchyme, faciles à distinguer parce qu'ils sont blancs sur fond marron. Les ganglions hépatiques seront dans un état semblable à celui des ganglions pulmonaires. Cc La rate contiendra également toujours une quantité variable de tubercules à peu près au mème état de développement que ceux des organes ci-dessus. Les reins seront le pius souvent indemnes. Chez le pore ces organes se montrent particulièrement résistants à l'égard de l'infection tuberculeuse. L'examen de la moel/e osseuse,sur une coupe sagittale de la colonne vertébrale, montre assez fréquemment des îlots tuber- culeux formés d'un tissu grisàtre, sarcomateux ; ces ilots, larges de 3 à 10 millimètres, se rencontrent soit dans les corps vertébraux, soit dans les apophyses épineuses. Enfin une partie des ganglions sous-lombaires et des gan- glions dits musculaires pourront contenir des foyers caséeux d'âge correspondant aux lésions pulmonaires. On doit ici se demander si les tubercules ganglionnaires périphériques sont en rapport avec des localisations muscu- laires ou osseuses; nous avons recherché maintes fois les lésions musculaires supposées sans les découvrir. D'autre part, un auteur allemand déjà cité, Haffner (Zeitschrift für Fleisch- und Milchhygiene, 1907-1908, page 7), a constaté que la tuberculose osseuse des membres se rencontre en l'absence d’altérations correspondantes des ganglions; il faut com- prendre, pensons-nous, que le retentissement des lésions osseuses sur les ganglions n'est pas immédiat. Il est possible aussi qu'une infection musculaire ne se traduise pas par des 592 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR lésions visibles de ce tissu très résistant, bien que cependant les voies lymphatiques conduisant aux ganglions aient reçu des bacilles. Enfin les ganglions peuvent être atteints direc- tement, par voie sanguine, au moment de la bacillémie. Il convient donc de donner aux localisations ganglionnaires périphériques la même signification qu'aux tubereules pulmo- naires hépatiques ou spléniques; elles traduisent la généra- lisation, quelle que soit l'étape intermédiaire entre le sang et le ganglion, et elles contribuent à en indiquer l'intensité et l'ancienneté. Nous distinguerons enfin un quatrième degré de la généra- lisation, lequel peut correspondre à une bacillémie initiale datant de six mois ou même davantage, et à des bacillémies répétées, plus récentes, en nombre variable. La progression des tubercules résultant de ces diverses infections sanguines est continue. Les premiers ont donné de gros nodules de type hypertrophiant ou sarcomateux, le plus souvent caséeux au centre, larges de 15 à 30 millimètres environ; les altérations ganglionnaires qui sont la conséquence de ces derniers luber- cules sont volumineuses en général, sans tubercules distincts. Sur la coupe du poumon (fig. 14) on voit de nombreux tuber- cules sphériques, avec une enveloppe fibreuse; ils sont tantôt sous-pleuraux, tantôt intraparenchymateux, tantôt au voisi- nage immédiat et au contact des bronches les plus importantes. Il existe parfois aussi quelques lésions broncho-pneumo- niques, pyramidales, souvent à base pleurale; toutefois la majorité des lésions pulmonaires, en raison de leur origine sanguine, conserve la forme sphérique. Les premiers tubercules de généralisation et les adéno- athies secondaires qui leur correspondent peuvent eux- mêmes donner lieu à de nouvelles émissions bacillaires dans la circulation; le nombre et le développement de ces divers tubercules métastatiques sont en relation avec Vintensité et l'ancienneté des inondations sanguines qui en ont été la cause. La répartition générale de tous ces tubercules est évidem- ment la mème que celle indiquée pour la généralisation récente, puisque l'aboutissant de toutes les voies lympha- tiques est le confluent veineux. Le poumon est atteint au LA TUBERCULOSE DU PORC 593 | 4 | Fie. 14. — Photographie de 3 coupes du lobe basal du poumon dans la tuberculose porcine au 4° degré (grandeur 1/2). > T, tubercules caséeux disséminés, sphériques, parfois bourgeonnants dont on aperçoit l'enveloppe fibreuse; Br, bronche principale. 594 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR maximum; le foie est & peu prés dans le méme état; il pré- sente souvent un nombre considérable de tubercules sarcoma- Fie, 15. — Foie de pore dans la tuberculose généralisée ancienne, vu sur la surface et sur la coupe (réduction 1/2). teux de 5 à 15 millimètres de largeur, confluents en de nom- breux points, et entre lesquels on distingue, en outre, des nodules plus petits, de 1 à 2 millimètres. Eutre ces lésions innombrables le parenchyme hépatique est ordinairement un LA TUBERCULOSE DU PORC epee tte Fic. 16. — Rate du porc dans la luberculose généralisée ancienne. L'organe a été coupé transversalement en deux fragments. On voit de nombreux tubercules inégaux, de lype sarcomateux. (Grandeur réelle.) ot co oe 596 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR peu décoloré, par suite de dégénérescence graisseuse (fig.15). Les ganglions hépatiques sont fortement hypertrophiés et caséeux. La rate contient des tubercules inégaux dont quel- ques-uns ont le volume d’une noisette ou d’une noix (fig. 16). Pic. 17, — Foyer tuberculeux siégeant vers le milieu d'une céle (grandeur 1/2). La pleurésie et la périlonite tuberculeuses ne s’observent guère avant cette période; c'est pourquoi il n’en a pas été question jusqu'ici. Les allérations des séreuses consistent en des granu- lations caséeuses disséminées entre les anses intestinales et les viscéres qui, souvent, sont réunis par des adhérences, ou LA TUBERCULOSE BU PORC 597 en des placards de tubercules conglomérés, disposés parfois en stries dans les espaces intercostaux. C'est à ce stade que l'on trouve à peu près constamment de la tuberculose osseuse siégeant surtout dans le rachis ou dans les vertèbres sternales et les côtes, plus rarement dans les os de la tête et des membres. Les lésions osseuses sont toujours grises, non caséeuses ou peu caséeuses, et tranchent sur la substance médullaire qui est rouge; elles se composent d'un issu mou, complètement dépourvu de sels calcaires. Ceux-ci sont en effet résorbés à mesure que les lésions tuderculeuses s'étendent circulairement. Les ganglions inguinaux, cruraux, poplités, sous-lombaires, présentent fréquemment des lésions caséeuses. Fait remar- quable, même à celte période, les reins ne montrent en général aucun tubercule visible à l'œil nu. IV. — VOIE INTESTINALE. La voie intestinale est beaucoup plus rarement utilisée que la voie amygdalienne; ce fail est surprenant car la muqueuse de l'intestin est apparemment de beaucoup la plus fragile, son épithélium étant simple. En outre, les autres conditions étant supposées semblables, l'étendue de cette muqueuse par rapport à celle de l'amygdale semblerait devoir multiplier les chances de pénétration des bacilles'ingérés. Cette constatation nous démontre qu'#/ n'y a aucune relation entre l'absorption diges- tive et l'infection tuberculeuse par la méme voie. Dans la détermination de l'infection par l’amygdale il y a donc une condition favorisante spéciale qui pourrait bien résider dans la multiplicité des traumalismes, pendant la mastication et la déglutition; nous avons déjà dit qu'il est presque constant de trouver des débris de graminées implantés dans les amygdales; inoculation buccale serait donc dans ce cas une inoculation véritable. Au contraire, l'intestin, par suite de sa souplesse, est difficilement lésé par les corps ingérés, car il se dérobe à toute pression interne; il n'y a pas de plan résistant sous-jacent à sa muqueuse. 598 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Quoi qu'il en soit, on trouve cing à dix fois plus de tubercu- lose d'origine amygdalienne que de tuberculose d'origine intestinale. Lors d'infection par voie intestinale, chez le porc, nous avons recherché à diverses reprises les lésions de la muqueuse, mais nous n'avons Jamais pu les découvrir; l'intestin du pore ne crée pas de lésions visibles, semble-t-il, pour des infections légères. ou bien il cicatrise rapidement celles qu'il a pu pré- senter. Evidemment, l'absence de lésions visibles n'autorise pas à dire qu'il n'en existe pas; le microscope lui-même serait impuissant à nous renseigner d'une manière certaine, car on ne peut débiter en coupes un intestin entier. Cependant, il y a de bonnes raisons de croire que le bacille ne peut pénétrer qu'à la faveur daltérations épithéliales minimes et en laissant des traces plus ou moins neltes et persistantes. Ce qui nous importe le plus, c’est qu'il existe constamment, dans cette forme de la maladie, une ou plusieurs adénopathies siégeant en des points variables de la double chaîne ganglion- naire mésentérique et le plus souvent vers Viléon. Il ne faut pas prendre pour des adénopathies dues à linfection intesti- nale celles du groupe hépato-pancréatique, lesquelles sont en rappori avec la tuberculose du foie et s'observent après la géné- ralisation d'origine quelconque. Les adénopathies mésentériques ne présentent aucun carac- tere particulier. Dans les cas récents, l'hypertrophie est légère, bien que la caséification existe; puis les ganglions augmentent de volume jusqu'au triple ou au quadruple de leur grosseur normale. On ne confondra pas Vadénopathie tuberculeuse du mésentère avec divers reliquats caséeux que l’on rencontre assez souvent dans les mêmes ganglions et qui sont dus, sans doute, à des entérites antérieures dont la cause est inconnue ; ces reli- quats sont gris verdatre, netlement délimités et ne s’accom- . pagnent généralement pas d’hypertrophie ganglionnaire; l’adénite tuberculeuse est plus diffuse, caséeuse seulement dans les parties centrales; la région caséeuse est mal délimitée et se continue avec un tissu gris, non dégénéré, de nature tuberculeuse, et il y a toujours une hypertrophie marquée, sauf au début; mais alors les caractéres précédents suffisent pour la distinction. I] peut arriver enfin que ces deux sortes de LA TUBERCULOSE DU PORC 599 lésions coexistent, ce qui rend le diagnostic immédiat très dif- ficile; l’inoculation au cobaye serait l'unique moyen de diffé- renciation. Le nombre et importance des lésions mésentériques varient avec chaque cas particulier. La généralisalion se fait par la voie du canal thoracique. Interposés sur les voies lymphatiques qui conduisent de l'in- testin à ce canal, les ganglions altérés profondément laissent échapper quelques germes pathogènes. L’aboutissant est le cœur droit, tout comme dans la généralisation d’origine cervi- cale ; aussi les bacillémies en provenance de l'intestin créent- elles dans les divers organes, poumon, foie, rate, lissu osseux, ganglions périphériques, exactement les mêmes lésions que celles réalisées par la voie cervicale; nous ne décrirons pas à nouveau les divers aspects de ces généralisations. Dans la présente modalité Vinondation sanguine ne parait ètre ni plus précoce ni plus grave que précédemment. Un point qu'il est utile de mettre en lumière, c’est que le foie n’est pas atteint directement au moment de l'absorption intestinale du virus; s’il en était ainsi, la généralisation existerait dès le début et se manifesterait en mème temps que ja caséification mésen- térique, fait qui ne s’observe pas. Les bacilles tombent donc dans les voies lymphatiques de l'intestin et se dirigent vers les ganglions, organes de protection interposés entre l'intestin et la circulation sanguine et qui arrêtent momentanément les germes pathogènes. Ici, comme dans les autres régions de l'organisme, le virus tuberculeux semble emprunter exclusi- vement la voie lymphatique pour sa première étape, c'est-à- dire jusqu'au confluent veineux. Aussi le foie n'est-il atteint qu'au moment de la généralisation et en mème temps que le poumon, la rate et les autres tissus. Ces règles pathogéniques se vérifient dans la tuberculose expérimentale du cobaye et des autres animaux, quel que soit le mode de l'infection périphérique. 600 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR V. — VOoIE MIXTE : AMYGDALIENNE ET INTESTINALE. Lors de tuberculose amygdalienne et des ganglions maxil- laires, il est fréquent de constater la présence simultanée de tubercules dans les ganglions mésentériques. Le plus souvent, l'importance des lésions cervicales l'emporte sur celle des gan- elions intestinaux, mais le contraire est également possible quoique très rare; enfin, il peut y avoir égalité approximative dans la valeur de chacun de ces modes d'infection chez le même sujet. Dans tous ces cas, il est évident que les lésions de générali- sation pourront avoir une double origine si le sujet survit un temps suffisant. ‘A suivre.) Le Gérant : G. Masson. Paris. — L. MARETHEUX. Imprimeur. 1 rue Casselle. 29° ANNEE DÉCEMBRE 1915 No ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR RECHERCHES SUR LE MECANISME DES ECHANGES ENTRE LES RACINES ET LE SOL. ECHANGES ENTRE LES DIVERS TISSUS DE LA PLANTE par P. MAZE. J'ai établi au cours de recherches antérieures (1), que les racines tendent à puiser, dans le milieu qu’elles envahissent, une solution de composition définie, dont l’afflux vers les divers organes de la plante est réglé par le travail chimique qui s'y accomplit. Les échanges entre la plante et son milieu nutritif ne sont donc pas livrés au libre jeu des lois physiques. Lorsqu'on s'est avisé de transporter intégralement les lois de losmose dans le domaine de la physiologie, on a donné au raisonnement le pas sur les fails. Il est arrivé que les faits ne cadrent plus avec les théories issues de raisonnements par analogie. Ce sont donc les théories qui sont en défaut. Il convient de les reviser ou de leur substituer une con- ception mieux en harmonie avec les renseignements fournis par l'expérience. J'ai déjà assimilé le mécanisme de l'absorption à une filtra- (1) P. Mazé, Rôle de l’eau dans la végétation. Ces Annales, t. XXVII. décembre 1913, p. 1093. 40 602 ANNALES DE LINSTITUT PASTEUR tion à travers un réseau à maillés rétractiles, essentiellement réglable, capable de laisser passer les substances colloïdales ou de s'opposer même à l'infiltration de l’eau (/oc. cüt.). Cette interprétation qui découle directement des faits n'exclut pas, a priori, l'intervention des phénomènes osmoti- ques. Je m’attacherai donc tout d’abord à faire la part de ces derniers. Je pourrais déjà la fixer par la discussion des faits relatifs à l'absorption : C’est ainsi, par exemple, que le rôle de l’osmose apparaît tout de suite comme très effacé, quand on constate qu'une solution nutritive étendue est rapidement privée de ses éléments solubles par les racines, et qu’une solution concentrée s'enrichit, au contraire, tout en fournissant à la plante toutes les substances qui lui sont nécessaires. Dans le premier cas, les racines absorbent plus de sels que d'eau; dans le second, c’est l’eau qu'elles empruntent en plus grande quantité que les sels. Mais malgré la valeur probante de ces faits, j'ai tenu a revenir sur la question. L’absorplion est en effet l’acte qui amorce la circulation de la sève; si on parvient à en connaître tous les rouages, il est vraisemblable que Von réussira aussi à fournir une interprétation ralionnelle des échanges entre les divers tissus de la plante. $ Parlout où les actions osmoliques peuvent se manifester, elles tendent à établir l'identité de composition de deux solu- lions séparées par une membrane perméable. C'est ce critérium que j'ai adopté pour éludier le rôle de losmose dans le phénomène de l'absorption. Il conserve en effet toute sa valeur, puisque les racines, qui sont aussi des organes d’excrétion, laissent passer dans les deux sens les substances minérales et organiques dans les conditions normales de la végétation. Je dois faire remarquer, du reste, que j'ai déjà abordé indi- rectement la question, et que les conclusions qui la concernent peuvent être tirées des chiffres relatifs à la richesse en cendres des plantes cultivées dans des solutions de concentration variable. Ces conclusions sont naturellement défavorables à Vinter- vention des phénomènes osmotiques dans les échanges entre les racines et la solution nutritive. MECANISME DES ECHANGES ENTRE LES RACINES ET LE SOL 603 Elles ne font que traduire sous une forme particuliére, au mème titre que les résultats fournis par l'étude de l'absorption des solutions de concentration variable, les conséquences de la loi que j'ai énoncée en tête de la page précédente. Mais comme elles portent sur l’ensemble des éléments miné- raux qui constituent les cendres, elles ne possèdent pas la force probante qu'il est facile d'atteindre dans cet ordre de faits. Au lieu d'envisager la totalité des substances minérales qui restent après la calcination au rouge, il est en effet plus simple de considérer un seul corps et de déterminer sa concentration dans la liqueur nutritive et dans les divers sucs dela plante a un moment quelconque, au cours de la végétation. Il y a en outre un avantage évident à choisir une substance que la plante tolère à haute dose, afin que les écarts constatés fassent res- sortir le sens de la conclusion avec une grande netteté. Dans les expériences que je vais décrire, j'ai donné la préfé- rence au saccharose, parce qu'il répond à toutes ces conditions et aussi parce qu'il constitue une substance de réserve dont l’accumulalion dans certaines plantes a été expliquée de di- verses facons. J'ai tenu pourtant à refaire la démonstration sur les éléments des cendres. Mais au lieu de laisser à la plante le soin d'enrichir ou d’appauvrir graduellement la solution nourriciére sous l’in- fluence de la végétation, j'ai augmenté brusquement la teneur du liquide nutritif en matières minérales à un moment où le végétal avait déjà atteint un assez grand développement. Les conséquences de ce traitement sur l'absorption des substances minérales sont intéressantes à noler. Les conclusions concernant le rôle de l’osmose étant acquises, il était tout indiqué de poursuivre l'étude du mécanisme de l'absorption. Sur ce terrain, ce sont les propriétés du sac pro- toplasmique qui se révèlent dès l’abord et au premier rang la motilité du protoplasme. L'examen du phénomène de la plasmolyse, de la poussée des racines, de la pression ou de la dépression qui se manifestent dans la plante suivant l'état de la végétation, se présentent ensuite comme les conséquences logiques d'une conception basée sur l'observation et l'expérience. Voila les divers points que j’aborderai dans ce mémoire. 604 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR ll ROLE DE L’OSMOSE. Les solutions nutritives additionnées de 5, 2 et même 1 p. 100 de saccharose s’enrichissent progressivement en sucres sous l'influence de la végétation. Quand les plantes ont atteint un certain développement, la richesse saccharine de la solution devient suffisante pour gêner la transpiration diurne. Les racines n’absorbent plus assez de liquide pour subvenir aux besoins de la végétation. Les feuilles perdent leur turges- cence au soleil; mais elles la reprennent pendant la nuit (V. Rôle de l’eau dans la végétation, loc. cit.). Quand ces symptômes sont fortement accusés on arrète les cultures et on détermine la richesse saccharine des solutions nutritives ainsi que des sucs des divers organes de la plante. Les chiffres du tableau I ont été obtenus dans ces conditions : le sucre est calculé en saccharose pour 100 cent. cubes de liquide. Tableau I. SUCRE SUCRE NOS DANS LA SOLUTION NUTRITIVE DANS LES ORGANES DE LA PLANTE des (p. 100) (p. 100) > TT MAIS au début à la fin Racines Tige Feuilles 1 5 Sucre réducteur. 1,896 » 3 ame ; Sucre total. 6,395 » 3,66 3,00 | à 9 Sucre réducteur. 0,417 ,66 1,56 1,41 = = Sucre total. 2012 1,86 1,60 4,45 | À A 9 Sucre réducteur. 0,260 2595 2 DEN iy Sucre total. 515 3,125 2,81 DATA | Remarquons d’abord que la variété de mais jaune gros, Vilmorin, que j'utilise dans mes recherches, ne renferme guère que des sucres réducteurs. Parmi eux, il y a vraisemblable- ment du maltose, dans les feuilles tout au moins; je n’en ai pas MECANISME DES ECHANGES ENTRE LES RACINES ET LE SOL 605 déterminé la proportion pour la raison bien simple que sa connaissance n'aurait apporté aucune contribution à la conclu- sion qui se dégage de ce tableau. Il en résulte, en effet, que le suc des racines, séparé de la solution nutritive par une membrane cellulosique et le sac protoplasmique, présente une composition saccharine nette- ment différente, en quantité et en qualité, du liquide ambiant. Les écarts sont si marqués qu'on ne peut songer à faire une part même minime aux actions osmotiques dans l’absorption des sucres par les racines. L'augmentation rapide de la richesse saccharine de la solu- tion nutritive prouve, ainsi que je l'ai déja montré à plusieurs reprises, que les racines n’absorbent pas la solution en nature ; elles lui empruntent relativement beaucoup plus d’eau que de sucres et il arrive un moment où l'absorption de l’eau elle- même devient impossible. La plante n° 1 est parvenue à cet état où ses cellules .ne peuvent supporter un nouvel apport de sucre. Exposée au soleil, elle perd sa turgescence à vue d'œil (1). Ce phénomène est moins prononcé chez les n° 2 et 3; la richesse saccharine de leurs sucs cellulaires est, en effet, sen- siblement inférieure à celle des organes correspondants de la plante n° 1; elles continuent d’ailleurs à gagner du poids, pen- dant que la végétation du n° 1 peut être considérée comme arrêtée (2). Tous ces fails cadrent bien avec l'interprétation que j'ai donnée du mécanisme de l’absorption (/oc. cit.). Si on réduit le travail chimique de la plante de facon à (1) Ces Annales, 3° mémoire, t. XXVII, p. 1093. (2) Je n’ai pas pu évaluer le poids frais de ces plantes à cause de limpos- sibilité d’essorer convenablement les racines; mais les pertes de poids des flacons dues à la transpiration permettent de calculer leur poids sec avec une approximation suffisante en utilisant les données établies, dans le 3° mé- moire, t. XXVII, p. 1093 de ces Annales. En admellant par conséquent que la formation d'un gramme de matière végétale sèche entraine par évaporation une perle d’eau de 75 grammes environ, on obtient comme poids approximatifs des plantes, au moment où Yon a arrèté l'expérience, les chiffres suivants : EAU ÉVAPORÉE POIDS SEC DES PLANTES en grammes. en grammes. N° 1. 357 4,76 No 2. 576 7,68 No 3. 843 11,24 606 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR diminuer l’afflux de la solution vers les organes aériens, il est vraisemblable que l'équilibre de la composition saccharine de la solution nutritive el des sucs cellulaires se réalisera plus facilement. Pour vérifier cette présomplion, deux plantes de la même série que les précédentes ont été exposées à la lumière diffuse, dans le laboratoire, pendant onze jours. Soumises au même traitement que celles du tableau I, en vue des mêmes détermi- nations, elles ont donné les résultats suivants : Tableau II. SUCRE SUCRE DANS LA SOLUTION NUTRITIVE DANS LES ORGANES DE LA PLANTE (p. 100) (p. 100) | NUMÉROS DES PLANTES au début à la fin Racines Tige Feuilles : Sucre réducteur. 5 Sucre total. | { Sucre réducteur. | Sucre total. Contrairement à ce que l'on pouvait présumer, les plantes se sont appauvries en sucre ; elles ont vécu sur leurs réserves ; le sac protoplasmique est resté imperméable au sucre. Les phénomènes osmotiques n'interviennent donc pas dans les échanges entre les racines et le milieu nutritif qu'elles enva- hissent (1). J'avais admis que, dans ces conditions de nutrition ralentie, l'intervention des phénomènes osmotiques était vraisemblable ; mais même cette concession n'est pas confirmée par l'expé- rience (doc. cit.). La conclusion qui se dégage de l’étude des échanges dans les milieux purement minéraux a la mème netteté, comme on va le voir; sa signification est identique. On a mis en culture, le 27 avril 1914, dans des flacons de (1) Les poids de solution évaporés et les poids secs calculés des plantes ne 4 et 2 sont respectivement 335 et 893 grammes, 4,46 el 11,0 grammes. i 3 | MÉCANISME DES ÉCHANGES ENTRE LES RACINES ET LE SOL 607 4 à 5 litres de capacité, une série de 7 maïs alimentés par la solu- tion minérale suivante, préalablement stérilisée à 120 degrés : Nitrate de sodium . .- Bae 0,5 gr Phosphate de potassium (1) . 0,5 Sulfate de magnésium . . . 0,1 Sulfate ferreux. . Re 0,05 Chlorure de manganèse . 0,02 Chlorure(de/zinc "1... 0,02 Silicate de potassium. . . 0,02 Carbonate de calcium 2,00 Eau de source . 1000 Je rappelle que les flacons de culture sont munis de deux tubulures. L’une centrale est réservée à la plante, l’autre laté- rale porte un tube qui passe dans un tampon de coton forte- ment serré et descend jusqu'au fond du flacon. Ce tube permet d'introduire dans le récipient des solutions d'entretien au cours de l'expérience, dans des conditions d’asepsie rigoureuse. Le 2 juin, on prélève sur les 7 mais qui composent la série, un groupe de 4 plantes destinées à la démonstration projetée ; on évalue les poids de solution qu'elles ont déjà évaporés, et on déduit de ces chiffres leurs poids secs approximatifs en admet- tant que l'élaboration d’un gramme de matière végétale exige 140 grammes d’eau. On obtient ainsi, à titre d'indication concernant le dévelop- pement des plantes, les résultats suivants : Tableau III. EAU EVAPOREE POIDS SEC DES PLANTES en grammes. en grammes. Nor 613 4,37 No 2 450 3,21 N° 3 150 4,64 NOR EEE 532 3,80 Le 3 juin, on fournit aux plantes n° 1 et 2 la solution d’entre- tien suivante, solution E : Nitraterde sodium Glens G5 6 Golo oo 6 6 0 Wc 0,5 gr. Phosphatelde potassium RER TNT 0,5 Sulfate de magnésium . . . . . . M ONCE 0,1 Faurdei source lo oa CC ic UD (1) Mélange des phosphates mono et bipotassique donnant dans la solu- tion stérilisée une réaction acide à la phénolphtaléine correspondant à 80-100 milligrammes de NaOH par litre. 608 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Le n° 1, qui avait perdu par évaporation 719 grammes de solution, a reçu 947 grammes de solution E; le n° 2, dont la perte était de 530 grammes, en a recu 691. Le 4 juin, les n°3 et 4 recoivent une solution d'entretien de mème composition, mais de concentration dix fois plus grande, solution K,,. Le n° 3, qui avait évaporé à ce moment 867 gra m- mes de la solution primitive, a reçu 1.021 grammes de solu- lion K,,; le n° # en a reçu 1.02% grammes pour compenser une perte de 682 grammes. On avait ainsi deux lots de deux plantes : le premier lot constitué par les n* 1 et 2 allait évoluer dans les conditions ordinaires et servir de témoin au deuxième lot, dont le déve- loppement devait se poursuivre aux dépens d’une solution concentrée. La concentration théorique des solutions nutritives des n* 3 et 4 était, en effet, portée respectivement à 3,396 et 3,418 p. 1.000. La concentration vraie est légèrement inférieure à ce chiffre, car la plante prélève sur la solution E une solu- tion physiologique un peu plus riche en éléments solubles. Dans un tel milieu, les graines de maïs ne germent pas; les plantules développées en tubes sur de l’eau distillée pendant 10-15 jours, et placées dans une liqueur nutritive aussi con- centrée, n’évoluent pas non plus. Mais les plants de mais pourvus de plusieurs feuilles normales, et d’un système radi- culaire déjà important, continuent d’assimiler et de gagner du poids. Le 24 juin, on nobserve pas encore de différence appréciable entre le n° 3 et les deux témoins ; mais le n° 4 souffre visible- ment de l’excès de richesse de la solution nutritive. Les poids de solution évaporés respectivement par les 4 plantes en quarante-huit heures, du 22 au 24 juin, sont les suivants : Re 4 255 grammes. moins : 2 : Témoins } 9 93% 9 240 or : 3 240 grammes. Plantes traitées : ; 165 2 Le 24 juin, on introduit dans les flacons des n®* 3 et 4 un volume suffisant de solution E,, pour compenser les pertes dues à l'évaporation depuis le 4 juin. J'ai réuni dans le tableau TV toutes les données concernant le bilan de l'opération. MÉCANISME DES ÉCHANGES ENTRE LES RACINES ET LE SOL 609 Tableau IV. | CONCENTRATION EAU SOLUTION E,, | CONCENTRATION | THÉORIQUE ÉVAPORÉE THÉORIQUE Q RE NIE i des solutions du 4 juin FOURNTE des solutions au 4 juin au 24 juin le 24 juin au 24 juin en er. p. 1,000 1.683 6,621 1.203 5,800 A partir de ce moment, les progrès des témoins sont beau- coup plus rapides que ceux des plantes traitées. Le 30 juin, le n° 4 présente des symptômes très nets de chlorose : des gouttes de solution d’azotate de fer à 1/5.000 déposées sur les feuilles décolorées produisent, au bout de vingt-quatre heures des taches visibles dues à la formation de pigment chloro- phyllien dans les cellules qui ont absorbé le fer de la solution. Le n° 3 perd également sa couleur vert foncé, el prend une teinte vert clair, exactement comme les plantes qui ont épuisé leur solution nutritive. L'évaluation des pertes de poids des flacons dues à la trans- piration diurne T. D. et à la transpiration nocturne T. N. permet de suivre très exactement la marche de la végétation des 4 plantes (tableau V). Les chiffres correspondant à T. D. ont été obtenus en calculant la différence des pesées faites à 9 heures et à 19 heures; ceux des colonnes T. N. représentent la différence des pesées effectuées à 19 heures et à 9 heures le lendemain. > Tableau V. PLANTE N° 1 * PLANTE N° 2 PLANTE N0 3 PLANTE N° 4 ne ag Or FN NM. NS | (ai. = NS TS TIN: TD: 25 juin . 26 juin . 27 juin! 28 juin . 29 juin . JO UI ee Ler juillet . Juillet Totaux . 610 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Ces évaluations, qui portent seulement sur une période de huit jours, montrent l'avance énorme que prennent les témoins sur les plantes traitées. Chez les témoins, l'activité de la transpiration augmente graduellement; elle est plus sensible chez le n° 2 parce que cette plante n'avait pas encore atteint l'état de développement où la transpiration semble rester stationnaire (III° mémoire). Chez les plantes traitées, la transpiration tend à diminuer malgré l'augmentation de poids; mais il est visible que le ralentissement brusque, correspondant à l'augmentation de la richesse minérale de la solution, traduit des conditions défavo- rables auxquelles les plantes adultes résistent encore pendant quelque temps. Le 10 juillet, on met fin à l'expérience; elle avait duré soixante-quatorze jours ; les plantes trailées étaient encore bien vivantes, condition sans laquelle les renseignements cherchés auraient été sans valeur. J'ai réuni dans le tableau VI les résultats relatifs aux poids des plantes, aux poids de solutions évaporées, eta l’état final des solutions résiduelles. Tableaux VI et VII. POIDS SEC |EAU ÉVAPORÉE|EAU EVAPOREE| VOLUME EN C. C. EXTRAIT SOLUBLE par kilogr. ST: . dela de poids sec dere solution résiduelle engrammes| grammes en kilogr. |solulion résiduelle] a 100° ». 1.000 des plantes en 5.841 55 2. 1,169 : 0,950 9,040 6,960 PLANTE N° 1 PLANTE N° 2 PLANTE N° 3 PLANTE N° 4 ORGANES Re. ON OR CR. "0 {us CO SP ee CENDRES ALCALINITE CENDRES | ALCALINITÉ | CENDRES ALCALINITÉ CENDRES | ALCALINITÉ de la des Arh des = des des 12e 100 cendres Pe 100 cendres P 100 cendres ye 100 cendres lente de en de en de en de : en planté. | poids | NaOH | poids | NaOH | poids | NaOH | poids | NaOH sec p- 100 sec p. 100 sec p.100 sec p. 100 Racines.| 17,77 14.44 18-23) 57 19,07| 28,04 22), 55)|) aide Tiges. .| 9,05) 24,51 11,84 18,50 | 20,45| 37,93 | 22,55} 27 Feuilles.| 13,06) 16,41 13,06| 12,50 16,27) 16,08 20,02 8,42 aE A ES DER EN PTE LE LEE LP ECS CRE PRE BRE SY EME UE EEE CRIE CO SN OST LS EE MÉCANISME DES ÉCHANGES ENTRE LES RACINES ET LE SOL 611 Le tableau VII contient les renseignements utiles sur la richesse des organes en cendres et leur alcalinité exprimée en soude NaOH p. 100 du poids des cendres. Dans ces deux tableaux, les chiffres qui nous intéressent le plus sont ceux des extraits solubles des solutions résiduelles, et ceux qui expriment la teneur en cendres des organes végétaux. Ils nous montrent qu’a des solutions nutritives dont les concentrations sont 1 et 9 p. 1.000, correspondent des taux de cendres de 9 et 20 p. 100 dans les tiges et de 13,06 et 16,27 p. 100 dans les feuilles. Ces résultats sont bien de méme ordre que ceux qui décou- lent de étude des solutions sucrées (1). lll ROLE DU PROTOPLASME. On s'accorde à attribuer au protoplasme un rôle prépon- dérant, sinon exclusif, dans les échanges nutritifs de cellule à cellule et dans l’absorplion des substances alimentaires du sol par les racines. On sait cependant que la structure de la membrane cellulo- sique des cellules végétales peut exercer une certaine influence sur le passage des aliments minéraux ou organiques; mais cette membrane n'est qu'une enveloppe inerte que le proto- plasme modifie suivant ses besoins. C'est donc l’action de ce dernier qu'il faut suivre attenti- vement si l'on veut découvrir parmi ses nombreuses propriétés (1) Les résultats fournis par cette expérience ne se bornent pas à cette conclusion. Ils m'ont permis, en effet, d'envisager Je rôle de la chlorophylle dans la végétation. (Comptes rendus, t. CLX, p. 739). Je dois faire remarquer, en outre, que la richesse minérale des feuilles des numéros 3 et 4 dépasse sensiblement les limites extrêmes qui ont été observées dans toutes mes expériences antérieures touchant la répartition des cendres dans les organes du maïs. L'’enrichissement brusque d'une solution minérale, dans laquelle plongent les racines d'une plante développée et vigoureuse, a pour conséquence une accumulation anormale de substances minérales dans les divers organes de la plante. On n'observe rien de semblable chez celles qui sont cultivées dans une solution riche à l'origine où la concentration se produit graduellement sous l'influence de la végétation. 612 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR chimiques ou physiques, celles qui président au réglage des échanges avec le milieu ambiant. Pour éviter les complications résultant de la présence de l'enveloppe cellulosique, on est conduit à provoquer expéri- mentalement des variations dans l’activité de Pabsorption, par des moyens manifestement incapables de modifier la structure physique ou la constitution chimique de la membrane. J'ai réalisé ces conditions en mettant en œuvre la chaleur et les anesthésiques. Action de la chaleur sur l'absorption des solutions nutritives par les racines. Des flacons de 2 litres de capacité, portant des maïs déjà pour- vus de plusieurs feuilles, sont placés au bain-marie ou dans la glace fondante ; les organes aériens des plantes sont exposés à des conditions atmosphériques semblables à celles qui ont présidé jusque-là à leur développement. Les variations de température n'affectent done que les racines ; leurs effets sur l'absorption peuvent être mesurés faci- lement par les pertes de poids des flacons dues à la transpi- ration, comparées à celles que produisent des plantes de mème développement à peu près, placées à côté du bain-marie et du récipient à glace fondante. Une première expérience a été faile sur des plantes cultivées dans la solution minérale dont j'ai donné la composition à la page 607 additionnée ou non de saccharose. Cette expérience portait sur 3 lots de 3 plantes placées respec- tivement dans les milieux suivants à l'abri des microbes. N° 1 : Solution minérale + 2 p. 100 de saccharose, No 2 : Solution minérale + 5 p. 100 de saccharose. N° 3 : Solution minérale, sans saccharose. Un lot est mis au bain-marie à 52-54 degrés. Un deuxième dans la glace fondante. Un troisième sert de témoin. Les poids approximatifs des plantes, calculés d'après les poids perdus par les solutions nutritives (voir page 605, note (2), sont consignés au tableau VIII. MECANISME DES ECHANGES ENTRE LES RACINES ET LE SOL 613 Tableau VIII. No: (1) 2) POIDS PERDU POIDS SECS des SOLUTIONS NUTRITIVES en grammes des plantes plantes par les calculés solutions nutritives en grammes Lot I Ne 4 |Saccharose 2 p. 100 312 4,16 Bain- No 2 Id. 5 p. 100 153 2,04 marie : No 3 0 290 2,07 | Lot I]. \ No 1 |Saccharose 2 p. 100 375 5,00 Glace No 2 Id. 5 p. 100 186 2,48 fondante : EN 3 0 512 2,94 Loc i: 1 |Saccharcse 2 p. 100 470 6,26 TEE No 2 Id. 5 p. 100 242 3,22 | iNeed 0 150 3,21 | L'expérience a duré trois jours; les conditions atmosphé- riques ont été favorables à l'assimilation carbonique pendant le premier jour et défavorables pendant les deux autres où le ciel est resté couvert. Les plantes placées dans le bain-marie ont conservé leur aspect normal pendant toute la durée de l’expérience, bien que la température du bain ait atteint 57 degrés le premier jour, de 1% à 17 heures, sous l'influence des radiations solaires. Elle est tombée à 54-55 degrés à 19 heures et s'est maintenue à 52-53 degrés pendant la nuit. Elle n’a pas dépassé 54 degrés, pendant les deux jours suivants. Les mais dont les flacons étaient entourés de glace fondante ont perdu graduellement leur turgescence au soleil au bout de deux heures. Les feuilles de la base de la tige se sont fanées définitivement ; les feuilles terminales enroulées et pendantes reprenaient en partie leur turgescence la nuit, pour la perdre le jour dès que l'assimilation devenait sensible; mais il n'y avait aucune différence appréciable entre les plantes qui végé- taient dans les solutions sucrées et celle qui poussait en solu- lion purement minérale. L'influence du sucre dont la concentration était supérieure à 6 p. 100 dans les solutions qui avaient reçu à l'origine 5 p. 100 de saccharose est donc négligeable. Ce résultat pouvait se prévoir d’après les chiffres des ta- bleaux I et IT, pages 604 et 606, qui montrent que le suc cellu- 614 ANNALES DE L°INSTITUT PASTEUR laire est beaucoup plus pauvre en sucres que la liqueur nutri- tive; mais il était bon de le confirmer par l'expérience. Voici maintenant, exposés dans le tableau IX, les poids de solution que les plantes ont évaporés pendant toute la durée de l'expérience. J'ai calculé en outre les rapports de ces poids aux chiffres correspondants consignés dans la colonne (1) du tableau VIII. C'est le seul moyen de rendre comparables les résultats observés sur chaque lot considéré isolément, puisque les plantes sont alimentées par des solutions différentes. Tableau IX. POIDS RAPPORT de solution de l'eau évaporée N°$ DES PLANTES évaporé pendant, pendant l’expérience| à l'eau évaporée en grammes avant l'expérience 0,26 0.96 0,21 Lot I. Bain-marie : il 2 3 0,058 0,07 0,072 | Bot Ul Glace fondante : Oh 0,22 0,10 (1) 0,19 Lot Ill. Témoin : — 0 CRUE 1) Cette plante, qui avait un peu d'avance sur les deux autres de la série à 5 p. 100 de sucre, perdait déjà sa turgescence au soleil. Les chiffres du tableau IX prouvent, comme on le voit, qu'une température élevée, mais non mortelle pour les cellules des racines, ne change pas les conditions de l'absorption; c'est une action favorisante qu'on serait tenté de lui attribuer. Par contre, la température de 0 degré diminue fortement l'activité des racines. Conservées pendant plusieurs jours après ce traitement, les plantes des lots I et IT ont continué de végéter ; celles du lot If ont repris peu à peu leur aspect nor- mal, mais elles n ont conservé que leurs feuilles terminales. Les mêmes conclusions découlent d’une seconde expérience effectuée sur des plantes cullivées dans des solutions purement minérales de concentration double de ceile de la page 607 : MECANISME DES ECHANGES ENTRE LES RACINES ET LE SOL 615 Pour éludier Vinfluence d'une température élevée sur l'ab- sorption, J'ai utilisé un lot de quatre plantes dont deux étaient placées au bain-marie et deux conservées comme témoins. Ces plantes avaient déjà consommé les poids suivants de solution nutritive : No 1 1.162 grammes. No 2 1.461 _ No 3 1.100 — No 4 746 — Leurs poids secs étaient compris entre 5 et 8 grammes environ. Pour déterminer comparativement leur puissance d’assimi- lation, on a évalué les poids de solutions qu'elles ont évaporés pendant les deux jours qui ont précédé l'expérience. Voici les chiffres qu'on a obtenus : No 56 grammes. No 2 65 — NOTE 62 — No % . 50 — Les plantes n° 1 et 2 ont été placées au bain-marie, réglé à 55 degrés, les n° 3 et 4, servant de témoins, étaient exposées à côté du bain-marie aux mêmes conditions atmosphériques. L'expérience a duré six jours; la température du bain-marie a atteint au soleil des maxima de 58-59 degrés et mème 60°. On a évalué les pertes dues à l’évaporation et par conséquent l’activité de l'absorption à trois reprises différentes : 1° Au bout de trente heures; 2° A la fin des deux jours suivants: 3° A la fin d’un troisième laps de temps de trois jours. J'ai réuni dans le tableau X les résultats de ces évaluations. Tableau X. POIDS DE SOLUTION ÉVAPORÉ EN GRAMMES NN. . pendant pendant les pendant les 30 heures 2 jours suivants 3 jours suivants No 4. Bain-marie … - « 50 58 75 Ne 2. Id. Ÿ CS HE D 4 28 24 NS ARS OAS G5 C A 58 75 202 No 4, Id. eee 5] 52 178 616 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR On peut constater d'après ces chiffres que l'activité de l'absorption n'a pas fléchi beaucoup pendant les 30 premières heures chez les plantes dont les racines étaient exposées à la température de 58-59 degrés; mais, par la suite, le n° 2 a perdu sa turgescence et ses feuilles se sont fanées ; la perte de poids constatée pendant les trois derniers jours est due en partie à la dessiccation de la plante. Le n° 1 a résisté plus longtemps, mais il perdait sa turges- cence au soleil pendant l'expérience. On peut donc admettre que les racines des plantes exposées à une température élevée ont fonctionné normalement pendant vingt-quatre heures et absorbé autant de liquide que celles des plantes témoins. Mais l'action prolongée d'une température qui s'élevait progressivement au soleil jusqu'à 60 degrés a tué les cellules des racines; l'absorption n'élant plus réglée, la plante tout entière n'a pas tardé à périr. L'étude de l'influence de la température de 0 degré sur l'absorption a été faite sur un lot de cing plantes, celles-ci élaient plus développées que celles qui ont servi à Vessai pré- cédent. Elles avaient évaporé Les poids de solution suivants au moment où on les a soumises à l'expérience : NOR, CRE ee ale) Prammies NOR io, eee ees = INOES See le 00 -- IN Er AI alo D — Ne 5 1 — La capacité des flacons de culture étant égale à 2 litres, on voit que les plantes avaient à peu près consommé leur solution nutritive; on a donc pris la précaution de remplir les flacons, puis on a déterminé l'activité assimilatrice des plantes en éva- luant les pertes produites par la transpiration pendant quatre jours. Voici les chiffres qui ont été relevés : IND Aly 5% RITES 468 grammes. RPE APTE CEE 303 — NORD RE 456 — NOR EE 402 — No 5 255 = Les trois premières plantes du lot ont été placées, immédia- —————<— MECANISME DES ECHANGES ENTRE LES RACINES ET LE SOL 617 tement après cette détermination, dans la glace fondante, les deux dernières remplissaient le rôle de témoins. Au bout d'une heure d'exposition au soleil, les plantes dont les racines élaient maintenues à 0 degré perdaient leur tur- gescence et présentaient exactement le même aspect que celui qu'on avait déjà observé au cours de la première expérience. L'activité de absorption, mesurée par la perte de poids des flacons, a élé évaluée chez les témoins et le n°2 placé dans la glace fondante, d'abord à la fin des deux premiers jours d’expé- rience, puis au boutde vingt-quatre heures suivantes | tableau XI ci-dessous, colonnes (1) et (2)] ; la colonne 3 donne la somme des poids perdus pendant toute la durée de l'expérience, c’est-à-dire quatre jours. On n’a pas fait d’autres déterminations sur les n° 1 et 3 afin d'éviter Pémiettement du bloc de glace où les trois flacons étaient encastrés. Tableau XI. POIDS DE SOLUTION EVAPORE EN GRAMMES rl — Pendant Pendant Pendant 30 2 toute la durée heures jours de l'expérience : 4 jours (1) (2) (3 N° 4 Glace fondante . . . . » » 210 NORD A RL Ce de 35 35 123 NOR ee tn » » 118 NOES Teen 85 6 CoG ene OH 114 400 NOR RE A tr 109 95 300 Ces chiffres indiquent une diminution très nette de l’absorp- tion à 0 degré. La température des solutions dans les flacons témoins, directement exposés au soleil et simplement protégés par un papier fort, gris à l'extérieur, noir sur la face interne, est constamment variable et suit les oscillations de la tempé- rature de la véranda; les maxima varient de 35 à 40 degrés, à l'abri du soleil, par les belles journées de juillet et les minima de 48 à 25. (Voir 3° mémoire, loc. cit.) Un écart de température supérieur à 20 degrés, entre les organes aériens et les racines de la plante, détruit l'équilibre qui existe ordinairement entre l'entrée de l’eau par les racines et sa sortie par les feuilles à l’état de vapeur. I est vrai que la température de 0 degré est incompatible 41 618 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR avec la vie active de la plante; mais les racines ne sont pas mortes. J'ai conservé, en effet, ce lot de plantes pendant quelques jours dans les conditions ordinaires, afin de suivre la reprise de la végétation ; elle a élé un peu lente parce que les feuilles inférieures se sont complètement desséchées; mais les racines ont produit des ramifications et se sont allongées réguliè- rement. J'ai réuni dans le tableau XII les pertes de poids des flacons dues à la transpiration pendant quelques jours. Les différences observées entre les plantes traitées et les témoins doivent être attribuées à la réduction des organes assimilateurs et non à un mauvais fonctionnement des organes d'absorption. Tableau XII. POIDS DE SOLUTION ÉVAPORÉ EN GRAMMES eee le 16 juillet le 17 juillet du 17 au 28 juillet Parle sneer ome: 72 135 623 Parslemnon2iee oe eee ens 38 48 238 Rarklernoes ra ien ae 39 69 334 Par le n° 4 86 156 584 Par lem? 5... 75 135 495 On est conduit à se demander, en présence des résultats de ces diverses expériences, quelle est, parmi les multiples pro- priétés du protoplasme, celle qui règle l'alimentation du végétal en eau et en malières minérales. Le réglage se fait sans difficulté aux températures les plus élevées que les racines peuvent supporter; mais il n'en va plus de mème à 0 degré. Cependant l’activité des racines n'est que ralentie aux basses températures. Il n’est pas nécessaire du reste d’abaisser la température à 0 degré, pour observer un ralentissement de l'absorption, et une perte correspondante de la turgescence chez les organes aériens (1). De pareils accidents sont fréquents dans la nature, et leur apparition dans des conditions déterminées est si régulière (1) La circulation de la sève à diverses températures a été étudiée par de nombreux expérimentateurs. MECANISME DES ECHANGES ENTRE LES RACINES ET LE SOL 619 qu'ils doivent ètre considérés comme des phénomènes nor- maux. On peut les observer en été sur le chou, la betterave, le blé, le trèfle violet, etc. Les feuilles perdent leur turgescence sous un soleil ardent, de 12 à 17 heures ; elles pendent le long de la tige ou se penchent vers le sol comme si elles dépérissaient tout à coup. Mais si l'ombre d'un édifice ou d’un arbre se pro- jette sur la culture, les feuilles des plantes, qu'elle abrite momentanément du soleil, se redressent vigoureusement et font avec celles de leurs voisines un contraste étonnant. Chez les plantes insolées le travail chimique est si intense que les racines ne parviennent pas à remplacer l’eau que la transpiration enlève aux feuilles. Ce n’est pourtant pas l’eau qui fait défaut dans le sol puisque les plantes mises à l'abri des rayons du soleil reprennent aussitôt leur turgescence; c’est l'écart qui est trop grand entre la température des racines et celle des organes aériens. Cette influence si nette de la température sur la vitesse de l'absorption m'oblige à faire un relour en arrière et à examiner une fois de plus si cette influence ne dénote pas l'intervention des phénomènes osmotiques. La loi de Gay-Lussac, relative à la pression des gaz, s'applique aussi aux substances dissoutes et, par conséquent, aux phénomènes osmotiques. En appelant V, et V, les volumes qui passent à / degrés et à zéro pendant le même temps à travers les racines de deux plantes identiques végétant dans des solutions de même com- position, on peut poser: J Ve dat a V3 Veo Se a eee ER (0 si l'absorption est régie par les lois de losmose. En admettant que l'écart de température entre les racines placées à 0 degré et celles des plantes témoins se soit main- tenu à 40 degrés pendant toute la durée de l'expérience, la relation précédente donne : V, et V, sont fournis directement par la balance. En se 620 ANNALES DE L’INSTITUT PASTEUR reportant maintenant aux tableaux IX, p. 614 et XI, p. 617, on 7 peut constater que le rapport = déduit de l’expérience est com- 0 pris entre 2 et 4; cela prouve une fois de plus que les phéno- mènes osmoliques n’interviennent pas dans les échanges entre les racines et les milieux qu’elles envahissent. L’absorption est donc régie par des forces physiques et méca- niques que la plante gouverne facilement dans les conditions normales, et la propriété du protoplasme qui joue le principal rôle dans ce travail, c'est sa motilité (1). Les mouvements protoplasmiques expliquent d’abord l’adap- tation rapide et presque instantanée du phénomène de l’absorp- tion aux sollicitations de la plante, et comme on sait d'autre part que ces mouvements augmentent ou diminuent avec la température, on conçoit que l’activité de absorption se règle facilement sur les besoins de la transpiration si la température des racines s'élève en même temps que celle des organes aériens. Mais on comprend également que l'absorption soit inca- pable de faire face aux dépenses de la vaporisation, si l'écart entre la température du sol et celle des organes aériens est trop grand; les feuilles s’appauvrissent alors en eau et perdent leur turgescence. Influence des anesthésiques. Les anesthésiques sont capables, comme la chaleur, d’exalter ou d’atténuer les mouvements protoplasmiques. J'ai étudié l’action du chloroforme et celle de l’éther. C’est le chloroforme qui m'a fourni les résultats les plus réguliers, en même temps que les plus probants. L’éther s'est montré moins actif dans les conditions où je me suis placé. J'envisagerai d’abord l’action du chloroforme. Pour la mettre en évidence j'ai placé dans de l’eau distillée renfermant des traces de chloroforme de petits cylindres de pulpe de betterave dite demi-sucriére, et j'ai évalué à des inter- valles définis la quantité de sucres excrétés par comparaison avec celle qui estémise dans les mémes conditions dans l’eau pure. Les échanges se font donc entre la cellule et le milieu (1) Opinion déjà ancienne (pe Vriès. Bot. Zeit., 1885, p. 1). i MÉCANISME DES ÉCHANGES ENTRE LES RACINES ET LE SOL 621 ambiant ; c’est, d'ailleurs, le sens de la circulation des réserves lorsqu'elles sont mises en œuvre par le végétal. L'eau distillée chloroformée est préparée de la façon sui- vante : On introduit quelques gouttes de chloroforme dans 500 cent. cubes d’eau distillée stérilisée et on émulsionne par agitation. On laisse déposer quelques minutes et on prélève l’eau privée de gouttelettes de chloroforme pour la répartir dans des tubes d’eau distillée stérilisée, à rai- son de 1, 2, 5, 10, 25 cent. cubes par tube. Le volume d'eau stérilisée préalablement répartie dans les tubes, ajouté au volume d’eau chloroformée, donne un volume constant de 25 cent. cubes. Dans chaque tube on introduit un cylindre de pulpe de bette- rave prélevé à l’emporte-pièce sur un gâteau taillé dans une racine. Ces petits cylindres de pulpe ont 1 centimètre de dia- mètre et, environ, 5 centimètres de long; leur poids est voisin de 5 grammes. Ils sont préparés et répartis dans les tubes avec toutes les précautions nécessaires pour éviter la contamination, car il importe essentiellement que l’expérience se fasse à l’abri des microbes ; les traces de chloroforme que l’eau renferme ne suffisent pas à assurer l’asepsie; le chloroforme n’est pas soluble dans l'eau. On prépare ainsi 5 ou 6 tubes renfermant les mêmes doses infinitésimales de chloroforme, ce qui porte, avec un chiffre égal de témoins, le nombre des tubes à 30 environ pour une seule expérience. Les tubes sont placés dans une étuve réglée à 30 degrés. Jai réuni dans le tableau XIII les résultats dune expé- rience. Tableau XIII. NOMBRE DE C. C. SUCRE TOTAL EXCRETE, A 30°, EN MILLIGR. d'eau chloroformée a ESS dans au bout de au bout de 25 c. c. de liquide 48 heures 4 jours On(témom) = 955 « . « ee 71,8 181,2 0e ET MSA CRC AIO ; 127,8 193,7 De eee ner relie le ode eas 155,6 270,8 Pre cts le ses (en Cok Mesh 302,5 288,3 DORSALE NEIL CE 404,1 304,1 1S) GS i 38 ON Glog UO 4 we y in, atid Si ey Fig. 22. — Tubercules développés dans le tissu périvasculaire du !lobule. T1, tubercule caséeux avec blocs hématéinophiles; T2, tubercule au début de la caséification ; T, tissu pulmonaire tuberculeux; Ar, artère: B, bronche, A, alvéoles pulmonaires sains. Grossissement environ 20 D. spéciaux au point de vue histologique; les lésions débutent par la substance corticale pour envahir ensuite tout l'organe. La plèvre est inoculée surtout par les lésions pulmonaires superficielles, quelquefois par les lésions ganglionnaires. Le péritoine est inoculé par les tubercules du foie, de la rate, des ganglions mésentériques ou des ganglions iliaques dans le cas de tuberculose de castration, ou encore par continuité avec LA TUBERCULOSE DU PORC 643 la gaine vaginale dans ce dernier cas; dans les cavités séreuses les altérations se propagent par continuité. X. — COMPARAISON DE LA TUBERCULOSE PORCINE AVEC CELLE DES AUTRES ESPÈCES, SPÉCIALEMENT AU POINT DE VUE PATHOGENIQUE ; CONCLUSIONS. Nous avons indiqué, à propos des lésions pulmonaires, les principales différences histologiques qui existent entre la tuber- culose porcine et celle du bœuf; nous avons dit également, à propos des lésions des ganglions maxillaires, que la tubercu- lose porcine ne revêt pas, dans le système lymphatique, le type nodulaire si net dans le plus grand nombre des cas de tubercu- lose bovine; dans les organes principaux (poumon, foie, rate), les lésions constituent, au contraire, et pendant longtemps, de pelites tumeurs sphériques qui sont de véritables tuber- cules (fig. 14). Dans la participation des organes et tissus, il existe quelques particularités intéressantes que nous devons signaler. C’est le poumon, le foie et la rate qui traduisent le mieux la générali- sation porcine et qui la traduisent simultanément dès que l'infection est quelque peu intense. Il faut noter la rareté des lésions rénales; ces lésions sont également assez rares chez l'homme, le bœuf, le chien, le cobaye, tandis que chez le lapin, au contraire, la généralisation paraît avoir son maximum d'action sur les organes de la dépuration urinaire; c’est chez le porc et le cobaye que le virus tuberculeux a le moins d’affinité pour le rein. La réceptivité de l'organisme du porc pour le virus tuber- culeux nous paraît être la plus grande qui existe : toutes les tuberculoses évoluent dans cette espèce ; on n’y trouve pas de lésions enkystées, comme le cas est fréquent chez l'homme et le bœuf; pas de lésions latentes. Relativement rare chez l’homme, rare chez le bœuf, ou tout au moins tardive d’après l'examen macroscopique, la généralisation est la règle chez le porc quelques mois au plus après l'infection. Cette générali- sation qui, chez l'homme et le bœuf, donne le plus souvent un 644 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR petit nombre de tubercules hépatiques mal développés, qui épargne la plupart des ganglions périphériques, et souvent la rale, les reins et même le foie, frappe simultanément et à un haut degré, dans l'espèce porcine, le poumon, le foie et la rale. Les lésions ganglionnaires périphériques et les tubercules osseux sont particulièrement fréquents chez les suidés; si la survie était suffisante, la plupart, sinon la totalité de ces der- niers, seraient atteints de fortes et de mulliples lésions des corps vertébraux {mal de Pott). Il faut noter encore ce fait que les ganglions régionaux, pour les principaux organes, répondent constamment à l'infection parenchymateuse ; on ne peut compter pour des faits négatifs ceux dans lesquels les lésions ganglionnaires n'ont pas eu le temps de se former, parce que l'infection parenchymateuse est récente. Chez le porc il n’y a pas de formes de régression, pas de transformation fibreuse ; or on observe ces formes même chez le cobaye infecté par inhalation de virus humain; il semble que pour le porc la maladie marche toujours de l'avant. La caséification est {trés précoce en général; autour des tuber- cules pulmonaires on trouve une zone congestive qui témoigne de l'intensité du travail inflammatoire. Lorsqu'il existe de la tuberculose pleurale ou péritonéale, on a l'impression d’une éruplion rapide de tubercules caséeux. Chez le porc, les divers tissus sont plus aptes à la culture du virus que chez les autres animaux, exception faite pour les reins. L'extension des lésions par continuité est parfois remar- quable en ce sens, qu'à partir d’un ganglion, par exemple, le tissu conjonctif, puis les tissus glandulaires, musculaire, osseux, sont envahis et deviennent le siège de tubercules nombreux. Ces diverses constatations concourent à nous démontrer que la sensibilité du porc est la plus grande en face de l'infection; comme ses tissus {réagissent aisément par des altérations visibles, nous dirons aussi que c'est un organisme peu apte à créer des lésions occultes avec des bacilles de virulence nor- male. Nous croyons même que cette sensibilité spéciale des tissus explique seule les différences qui précèdent : en d’autres LA TUBERCULOSE DU PORC 645 termes que, pour une bacillémie d'intensité donnée, réalisée chez le pore, le chien, le bœuf tuberculeux, le premier répondra par des lésions nombreuses du poumon, du foie et de la rate; les autres résorberont la plus grande partie, sinon la totalité du virus, et ne traduiront l'infection sanguine que par un petit nombre de lésions viscérales. Des expériences sur le cobaye, le lapin et le chien, par injection intraveineuse de bacilles, nous ont montré, en effet, que la plus grande partie des microbes sont détruits chez ces animaux et que c’est le petit nombre qui donne lieu à la formation de tubercules viscéraux; avec de faibles doses, tout est phagocyté chez le lapin et le chien. (Revue de la tuberculose, février 1913.) Que faut-il penser, enfin, du mode d'infection observé chez le pore? Tandis que l’homme, le bœuf, le chien sont habituelle- ment infectés par inhalation, le pore est tuberculisé à peu près exclusivement par la voie amygdalienne et lymphatique cervi- cale. C’est que les conditions d’apport de la matière infectante, soit avec les aliments, soit avec l'air atmosphérique, sont abso- lument différentes; dans ’appartement et dans l’étable, il existe une grande quantité de poussières en suspension aérienne qui sont partiellement virulentes lorsqu'un ou plusieurs sujets tuberculeux y séjournent; les porcheries sont, au contraire, des locaux humides, peu poussiéreux, et les animaux sacrifiés jeunes n’ont pas le temps de présenter des tuberculoses pulmo- naires susceptibles de contaminer le milieu. Sauf pendant les premiers mois de la vie, la nourriture du bœuf est entièrement végétale, par conséquent non bacillaire; pour l'espèce humaine, cette nourriture est choisie et stérilisée en cas de doute; le pore ingère, au contraire, pendant loute son existence, des laits mélangés, donc plus souvent bacillaires et non stérilisés. Tandis que pour l'homme et le bœuf toutes les conditions sont favorables à l'infection par inhalation, pour le porc elles con- courent à la transmission par ingestion; dans l'espèce porcine, la contagion d’un animal à l’autre doit avoir, d'autre part, un rôle à peu près négligeable. Le porc n’est pas à proprement parler infecté par le tube digestif, car la pénétration a lieu le plus souvent par les amyg- dales, et vraisemblablement le traumatisme a un grand role dans la réussite de l'inoculation ; aussi, ne nous semble-t-il pas 646 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR possible de donner cet exemple pour prouver Vaptitude de la voie digestive à absorption du virus tuberculeux. Pour que cet argument fût valable, il faudrait encore que les lésions initiales chez l'homme, le bœuf et le porc fussent super- posables. Or, tandis que chez les deux premières espèces nous trouvons au début un tubercule pulmonaire caséeux broncho- pheumonique, avec un ganglion caséeux correspondant, nous avons chez le porc une lésion amygdalienne avec un ganglion maxillaire caséeux, et rien au poumon. Nulle identification et nulle conclusion par assimilation ne sont donc possibles : dans la règle, /es poumons humain et bovin sont initialement lésés, le poumon du porc est atteint, au contraire, au moment de la géné- ralisation. Mais, au point de vue pathogénique général, une conclusion intéressante doit cependant être tirée de cette comparaison; dans l’un et l’autre cas, nous enregistrons la lésion de péné- tration par la surface épithéliale et Vadénopathie régionale corrélative ; il en est de même lors de tuberculose porcine ino- culée par la plaie de castration ; d’où il suil que la wberculose du pore est bien Cun des meilleurs exemples que l’on puisse donner à l'appui de la loi des réactions locales et lymphatiques que nous défendons depuis plusieurs années; mais, loin de nous conlirmer l'origine digestive habituelle des tuberculoses humaine el bovine, elle linfirme en ce sens que des tubercu- loses anatomiquement différentes au début ne peuvent avoir été contractées par la même voie. De plus, la tuberculose porcine ne montre pas que l'intestin est spécialement apte à se laisser pénétrer par le virus, puisque, dans une espèce aussi réceptive el lors d’ingestion virulente, ce sont les amygdales qui sont iésées le plus fréquemment et au maximum, et non pas l’in- testin ; la susceptibilité de celui-ci est donc toute relative. Remarquons, enfin, car nous en avons ici un nouvel et mer- veilleux exemple, combien les tuberculoses, quel qu'en soit le point de pénétration, sont superposables dans leurs étapes ; à la vérité, la tuberculose par voie bucco-pharyngienne (pore) est pathogéniquement identique à la tuberculose intestinale primitive; celte dernière ne pénètre-t-elle pas, probablement d'une manière exclusive selon nous, par les plaques de Peyer el les follicules clos isolés, véritables amygdales inteslinales? LA TUBERCULOSE DU PORC 647 A notre avis, la raison en est que les mémes conditions étio- logiques passives se trouvent réunies dans le pharynx et l’in- teslin : cette cause est la stase bacillaire accidentelle dans les cryptes conduisant aux follicules lymphatiques. Un grand nombre de cas de tuberculose gastrique sont eux-mémes ainsi réalisés, c'est-à-dire qu'ils débutent par les follicules clos de la muqueuse stomacale. En résumé, /a tuberculose porcine est le type de la tuberculose d'origine bucco-pharyngienne ; par comparaison, nous dirons que les tuberculoses humaine el bovine sont généralement des types de tuberculose d'inhalation. Dans chacune de ces espèces, la proportionnalité des modes d'infection varie avec les condi- tions d'apport de la matière infectante. INDEX BIBLIOGRAPHIQUE Boncert. — Rapport au VIII Congrès international de médecine vétérinaire. Buda-Pesth, 1905. BorGEAUD. — Progrès vélérinaire, 1897, n° 4, p. 49. P. Caaussé. -— La tuberculose de castration chez le porc (avec bibliographie) ; Recueil de médecine vélérinaire, 15 oclobre us — Revue pratique des abat- loirs, du 25 février 1912. Easrwoop et Grirrita, — The Lancet, 2 mai 1914. Harener. — Zeitschrift für Fleisch- und ha ten A 1907-1908, p. 7. Junack. — Zeitschrift fiir Fleisch- und Milchhygiene, 1906-1907, p. 164. Lancranno. — Hygiène de la viande et du lait, 1908, p. 537. Lunewirz. — Zeitschrift für Fleisch- und Milchhygiene, 1896-1897, p. 211. Menpoza. — Revue générale de médecine vétérinaire, 1906, t. VIII, p. 280. Mouter et Wassurn. — The velerinary Journal, janvier 1908, p. 14. Moone et Dawson. — Bureau of animal Industry, 1897. Morot. — Journal de médecine vétérinaire, 1909. Mout®. — Bulletin de la Société centrale de médecine vélérinaire, 1889. Muzzie. — Annales de médecine vélérinaire, 1907, p. 358. MüLLer. — Zeitschrift für Fleisch- und Milchhygiene, mai 1903. Niet. — Recueil de médecine vétérinaire, 15 février 1895. Nocarp. — Bulletin de la Sociélé centrale de médecine vétérinaire, 1889. p. 456. Ostertac. — Zeitschrift für Fleisch- und Milchhygiene, 1893, p. 1; — Handbuch der Fleischbeschau, Berlin, 1902. Perersen. — Zetlschrift fiir Fleisch- und Milchhygiene, avril 1909, p. 254 Rick. — Cité par Ostertag, in Handbuch der Fleischbeschau, 1902, p. 646. STRÔSE. — Deulsche lierürz aie Woch., 1897, p. 239. StugBe. — Annales de médecine SER. 1893. H. Vatrée et P. Cnaussi. — Bulletin de la Société d'études scientifiques sur la tuberculose, février 1909; — Revue générale de médecine vétérinaire, 15 février 1909. VEYSSIÈRE. — Cité par Strauss dans La fuberculose et son bacille, 1893, p. 342. Vittain eb Bascou. — Manuel de l'inspecteur des viandes, Paris, 1888. VOLKEL. — Zeitschrift für Fleisch- und Milchhygiene, 1892-1893, p. 199. WiLBRanDr. — Zeitschrift für Fleisch- und Milchhygiene, 1893-1894, p. 48. Zcnokke. — Zeitschrift für Fleisch- und Milchhygiene, 1896-1897, p. 34. TABLE DES MATIERES Les leishmanioses chez les animaux, par A. Laveran (suite) . A . Ke Adaptation des es ral lactique) au ie par Charles Ricuer . : Si ER Essais dimmunisation des ane rongeurs contre les paratyphiques naturellement ho sente pour ces animaux, par J. Danysz et Z. Skrzynskt. Do x Les leishmanioses chez les animaux, par A. LAvERAN (suite et fin, avec les planches | et IT). ool Deux épidémies de fiévre typhoide. Vaccinations antity- phiques au virus sensibilisé vivant de Besredka, par J. Batteanc, M. Cruca et D. Compiescv. ‘ Troisième note sur la conservation des « toxines ire », par Morax. La prétendue dé on des oc ale Koch tans de péritoine des cobayes tuberculeux, par Et. Buryer. L’acide butyrique et la sclérose, par George E. Coceman (avec la planche IT). L'influence des acides sur l'a ee ité de te relies Lisle: sée par W. Kopaczewski Études sur le Vibrion septique et ie ne a par M. Nicoze, E. César: et M'e A. RApHAEL. Sur l’action favorable exercée par le manganèse sur la fermentation acétique, par Gabriel Berrranp et Robert Sazerac ne Re Sur le séro-diagnostic de la pihereulgees par E, Werte et F. Dore Recherches sur la fixation Ace tes par miles fees ocy dic par KOBZARENKO. Sur la résistance des ponies: à Dies par A Spine cheta gallinarum après thyroïdectomie ou splénec- tomie, par L. Launoy et M. Livy-Brout. 115 119 139 213 650 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR Sur la virulence des bacilles tuberculeux, par Et. Burner. Etudes sur la ricine. — V. Sur le sort de la ricine (toxine et agglutinine) pendant la aie des graines de ricin, par H. AcuLHon. Études épidémiologiques et D Dee Man vale disme. Onzième et douzième campagnes en Algérie en 1912 et 1913, par Edmond Sercenr et Étienne SERGENT... . Vaccinations A à lene Pas en “1913, par Jules ViaLa. D D Le : Contribution à l'étude de l’action du radium et de son émanation sur la germination des végétaux supé- rieurs, par Henri Aëucnox et Thérèse Roserr (avec les planches IV et V). Quand et comment jae la bite à ta cn line? par Et. Burner. : ; AE Sur une prétendue variation biochimique Pc bulgare, par F. Ducuacen (première partie) . Les vaccinations antirabiques à l’Institut Pasteur en 1914 par Jules Viata. PR, - - Hypothèse sur le Phlé Batons « transmelteur » et la Tarente « réservoir de virus » du bouton d’Orient, par Edm. SERGENT, Et. Sereent, G. Lemarre et G. Se- NEVET ae ais he erate oc kel Gelato? A NT Recherches biologiques sur l'Éosinophile (2° partie). Propriétés phagocytaires et absorption de produits vermineux, par M. WenserG et P. Stevi (avec les planches VI et VIT). A stare Sur une prétendue variation saalittiniges ah our bulgare, par F. Ducuacer (suite el fin). Jubilé professeur Elie Mercuxikorr. “tae Sur quelques cas de tétanos localisé à la région blesse tétanos médullaire, par le D' Moxrais ‘ae Lilas) Contribution à l'étude de la flore microbienne habituelle dela bouche normale (nouveau-nés, enfants, adultes), par M™? Z. A. Braitovsxy-Louxkevitcu. Jubilé de M. le professeur A. Laveran. : Comment le bouton d'Orient se propage-t- il? par kh tae VERAN 224 237 309 TABLE DES MATIERES Recherches cytologiques dans le tétanos humain, par Y. Maxouérrax (avec les planches VIII et IX). Bacilles tuberculeux et arsenic, par CHARPENTIER . ee à l'étude bactériologique des eaux, par . Maxoouz et E. Gruat La ae du papillon du mürier. Un dig elie de Doi logie, parE. Mercunixorr (avec les planches X et XI). La dysenterie de | Argonne, étude bactériologique, par P. Remuncer et J. Dumas. Deuxième campagne contre les snitemallies Done maroccanus Thun.) en Algérie, au moyen du « Cocco- bacillus acridiorum » d’Hérelle, par le D' M. Beever. Jubilé Metchnikoff. — Remarks on the nature and signi- ficance of the so-called « Infective Granules » of Pro- tozoa, par E.-A. Mincuin Jubilé Manon — Le rôle antiputride de iA bile: par H. Rocer. ie Contribution à l'étude ie mnermee 67 coses de losers de guerre et de leurs traitements, par FE. Rouyer et J. Pieccseren . La tuberculose du pore, cident bee cate ae évO- lulion comparées (première partie), par P. Craussé. Recherches sur le mécanisme des échanges entre les racines et le sol. Échange entre les divers tissus de RD SDAmREMETE 2 rs en, La tuberculose du porc, épidémiologie, pathogénie et évolution comparées, par P. Cuaussé (suite et fin). 651 633 TABLE ALPHABÉTIQUE PAR NOMS D'AUTEURS AGULHON (H.). — et Ropert (Mie Thé- resey, . BALLEANU (J.), Cruca (M.) et ComBrescu (D.). BÉGUET (M.). . BERTRAND (G.) etSazerac(R.). BRAILOVSKY - LOUNKEVITCH (Meee) Burnet (Et.) . Césari (E.), Nicozze (M.) et RaAPpHAEL (Mile A.), CHARPENTIER. CHAUSSE (P.) . Études sur la ricine. — V. Sur le sort de la ricine (toxine et agglutinine) pendant la germination des graines de ricin . Contribution à l'étude de l'action du radium et de son émanation sur la germination des végétaux supérieurs (avec les p'anches IV et V) . Deux épidémies de fièvre typhoïde. Vac- cinations antilyphiques au virus sen- sibilisé vivant de Besredka . Deuxième campagne contre les saute- relies (Stauronotus maroccanus Thun.) en Algérie, au moyen du « Coecoba- cillus acridiorum » d'Hérelle. . Sur l’action favorable exercée par le manganése sur Ja fermentation acé- tique Contribution à l'étude de la flore micro- bienne habituelle de la bouche nor- male (nouveau-nés, enfants, adultes). La prétendue destruction des bacilles de Koch dans le péritoine des cobayes tubercuieux . ee Sur la virulence des bacilles tubercu- leux. RE Quand et comment apparaît la sensibilité à la tuberculine ?. Études sur le vibrion septique et le Bacterium Chauvæi . NS Bacilles tuberculeux et arsenic . La tuberculose du porc, épidémiologie, pathogénie et évolution comparées. 556, 237 405 178 319 633 sind.) TABLE DES AUTEURS Cruca (M.), Comprescu (D.) et BALLEANU (J.). . CoLEMaAN (George E.). . Compiescu (D.), Ciuca (M.) et BALLEANU ‘J.) . Danysz(J.)et Skrzynsxi (Z.). Depains (E.) et Jupizze (F.). Ducnacex (F.). . Dumas (J.)et REuLINGER (P.). Gruat (E.) et Manpout (A.). Jupitus (F.) et DeBains (E.). KOBZARENKO. . Kopaczewski (W.). Launoy (L.) et Levy-Bruxt (M.) . LAVERAN (A.) . Lemaire (G.), SENEVET (G.) et SERGENT (Edm. et Et.). Lévy-BruxL (M.) et Launoy (ES Manpout (A.) et GRUAT (E.). Deux épidémies de fièvre typhoide. Vac- cinations antityphiques au virus sen- sibilisé vivant de Besredka . : L’acide butyrique et la sclérose (avec la planche III) Deux épidémies de fièvre typhoide. Vac- cinations antityphiques au virus sen- sibilisé vivant de Besredka . Essais d’immunisation des petits ron- geurs, contre les paratyphiques natu- rellement pathogènes pour ces ani- maux . : Sur le séro- diagnostic de la tuberculose: Sur une prétendue variation du ferment bulgares: ob La dysenterie de l'Ar gonne, étude bac- tériclogique . Contribution à l'étude actes des eaux. Les bacilles coliformes. Sur le séro-diagnostic de la tuberculose. Recherches sur la fixation des toxines par les leucocytes . L'influence des acides sur I’ ne ae À maltase dialysée . Sur la résistance des poules à l'infec- tion par le Spirochæta gallinarum après thyroïdectomie ou splénectomie. Les leishmanioses chez les animaux (suite et fin) [avec les planches I CEEURS ws 5. oa. Se Réponse au discours de M. Roux, le jour de son jubilé. : Commentle bouton d’ Orient se panne t-il ?. Hypothèse sur le Phlébotome « trans- metteur » et la Tarente « réservoir de virus » du bouton d'Orient , Sur la résistance des poules à l’infec- tion par le Spirocheta gallinarum après thyroidectomie ou splénectomie, Contribution à l'étude bactériologique des eaux. Les bacilles coliformes. 653 213 309 213 459 654 ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR MANOUELIAN (Y.) Mazé (P.). METCHNIKOFF (E.) . MiINncHIN (E.-A.). Monrais (des Lilas). Morax (V.). Nicoze (M.), César (E.) et RAPHAEL (Mle A.), Péuissier (J.) et Rouyer (E.). RaPHAEL (Mlle A.), NicoLLE (M.) et CÉsart(E.). REMLINGER (P.)et Dumas (J.). Ricuet (Charles) Rosert (M'e Thérèse) et AGULHON (H.). Rocer (H.). Roux (E.). Rouyer (E.) et P&xissrer(J.). SAZERAC(R.) et BERTRAND (G.). Recherches cytologiques dans le tétanos humain (avec les planches VIII et IX). Recherches sur le mécanisme des échanges entre les racines et le sol. Échange entre les divers tissus de la plante. Causerie à l'occasion dé son qubace La mort du papillon du mürier. Un cha- pitre de thanatologie (avec les pie Xtet XI): : Jubilé Metchnikoff. — emails on the nature and significance of the so-cal- led « Infective Granules » of Protozoa. Sur quelques cas de tétanos localisé à la région blessée, tétanos médullaire. . Troisième note sur la conservation des « toxines solubles », Études sur le vibrion septique et le Bacterium Chauvæi . 2 Contribution à l'étude de cotes mycoses de blessures de guerre et de Jeurs traitements . Études sur le vibrion septique et le Bacterium Chauvæi . La dysenterie de l’Argonne, étude bac- tériologique . Adaptation des microbes (femme lac- tique) au milieu . Contribution à l'étude de l’action du radium et de son émanation sur la germination des végétaux supérieurs (avec les planches IV et V). Jubilé Metchnikoff. — Le rôle antipueeitle de la bile . Ss ee) Se Lettre à M. E. Metchnikoff à l'occasion de son Jubilé. Discours prononcé au jubilé de M. 4 ie veran . 2 eet on . Contribution à l'étude de certaines mycoses de blessures de guerre et de leurs traitements, Sur l’action favorable exercée! par le manganése sur la fermentation acé- tique 440 364 445 165 498 178 TABLE DES AUTEURS SÉGUIN (P.) et WEINBERG (M.) . SENEVET (G.), SERGENT (Edm. et Et.) et Lemaire (G.). SERGENT (Edm. et Et.). — Lemaire (G.)et SENEVET (Gay SERZYNSKI (Z.) et Danysz (J.). Vista (Jules). WEINBERG (M.) et SÉGUIN (BE Recherches biologiques sur l'Éosino- phile (2° partie). Propriétés phagocy- taires et absorption de produits ver- mineux (avec les planches VI et VII). Hypothèse sur le Phlébotome « trans- metteur » et la Tarente « réservoir de virus » du bouton d'Orient. Études épidémiologiques et prophylac- tiques du paludisme. Onzième et dou- zième campagnes en Algérie en 1912 etal0ASEr Hypothèse sur le Phlébotome « trans- metteur » et la Tarente « réservoir de virus » du bouton d'Orient . Ë Essais d’immunisation des petits ron- geurs contre les paratyphiques natu- rellement pathogènes pour ces ani- maux . sitar,» tte Ne ace eee NE Vaccinations antirabiques a l’Institut Pasteur en 1913. intra CPR Re Vaccinations antirabiques à l’Institut Pasteur en 1914 . Recherches biologiques sur l'Éosino- phile (2° partie). Propriétés phagocy- taires el absorption de produits ver- mineux (avec les planches VI et VII). 309 309 323 TABLE DES PLANCHES Prat etl eae Mémoire de M. A. LAVERAN. Dee ute 2 — MM: (G.cE. (COLEMAN: +. “se eee Pr. IV et ¥ — M. H. AcuLznon et Mie THÉRÈSE ROBERT. . 618 eee Pie WA Ole WANS Vee ¢ — MM. M. WeiNBerG et P. SÉGUIN. PrseVilligetelxe — M. MANOUELIAN . Pim Noet xe — M. METCHNIKOFF. . Le Gérant : G. Masson. Paris. — L. MARETHEUX, imprimeur, 1, rue Casseue. Annales de l’Institut Pasteur Vol. XXIX, PL ff. \iém. A. Laveran): L. Maretheux, imp. ) sie Ss ek te Tha lk SR ER a : : a a Le " tite 7) Pers . ‘Annales de l'Institut Pasteur. Vol. XXIXPLIL Mém.ALaveran) Boisgontier hth. i} = bE pa sé Oe > 4 Annales de l'institut Pasteu Fig.3. Fig. 2. Fig 6. D 0600200200 0 8 © o® A Oe, oo CF 900 «| a PE DE, 90 ® © © Imp.L.Lafontaine, Paris. Ch Constantin del. etlith. À i À H Annales de l’Institut Pasteur Vol. XXIX, PEINE (Mém. Agulhon et Robert). Plantes soumises à l’émanation LUPIN BLANC Plantes témoins Annales de l’Institut Pasteur Viol. XXX, PVE (Mém. Agulhon et Robert). Plantes soumises à l’émanation POIS Plantes témoins \} : im y - more a Fa a 2 — = HA iE _ i i : ve 2 | . 5 = « - - ; . i ' DE Te nr ét ANNALES DE LINSTITUT PASTEUR. VOL. XXIX. PL&6. i Mem.Wainberg et. Seguin} P Seguin, dei. Constantin. lith. Imp.dArt LLafontarne, Parts. ANNALES DE LINSTITUT PASTEUR. P. Séguin, del. VOL.XXIX.PL.7. (Mém.Weimberg, et Ségum.} Constantin, lith. ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR . VOL-XXIX. PL NI “érm. Manouelian. | (? = ea pee eee Saar ANNALES DE LINSTITUT PASTEUR. VOL.XXIX- PLAX. (Mem. Manouehan.) Budin del. Constantin lith. Imp.L. Lafontaine. VOL.XXIX.PLX. (Mém.Metchnikoff) It; or ANSE we we “ ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR. IT { \ Bi 2 res LE 5 ’ pan ‘ ue ct ere QUES ie be prttbewenaee atout £°, “yy ss Aue ee ARE 4. a de G co api. . e ee ® Le = e e ae ° tes { 0 e i } } bd . e e e e . Constantin lith i rn -EL Metchnikoff del. ANNALES DE L'INSTITUT PASTEUR. VOLXXIX PL XI. (Mem Metchnikoff.) EL. Metchnikoff del. C. Constantin lith. ANNALES DE L INSTITUT PASTEUR FONDÉES SOUS LE PATRONAGE DE M. ae PAR : E. DUCLAUX COMITÉ DE REDACTION D: CALMETTE, directeur de l'Institut Pasteur de Lille; D: CHANTEMESSE, professeur à la Faculté de Médecine ; D: LAVERAN, membre de l'Institut de France ; D: L. MARTIN, directeur du service de Sérothérapie ; Pr METCHNIKOFF, sous-directeur de l'Institut Pasteur ; Dr ROUX, directeur de l’Institut Pasteur ; Dr VAILLARD, membre de l'Académie de Médecine. TOME VINGT-NEUVIÈME 1915 AVEC 11 PLANCHES PARIS MASSON ET Ci, EDITEURS LIBRAIRES DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE 120, Boulevard Saint-Germain (6e). Siete As Ww iu s DE = A} Il | | MBL | WH |