Annares DES SCIENCES NMATORELLES. Looscoc e. eT PALEONTOLÔGE. G ser. 0.9 —1879/80 RE MTETE ANNALES SCIENCES NATURELLES ZOOLOGIE PALEONTOLOGIE da. : 1 COMPRENANT L'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION ET L'HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE MM. H. et ALPH. MILNE EDWARDS , Fun | TOME | PARIS G. MASSON, ÉDITEUR LIBRAIRE DE L'ACADÉMIE LE MÉDECINE DE PARIS Boulevard Saint-Germain et rue de l’Éperon EN FACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE Le BE, 3É ANNALES DES SCIENCES NATURELLES SIXIÈME SÉRIE ZLOOLOGIE PALÉONTOLOGIE Nr RATÉ LS CRE DEEE TN F. PARIS. — IMPRIMERIE ÉMILE MARTINET, em TL | MIOOIOTAOMIAT ANNALES DES SCIENCES NATURELLES ZOOLOGIE PALÉONTOLOGIE COMPRENANT L’'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION ET L’HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE MM. H. ET ALPH. MILNE EDWARDS TOME IX. PARIS G. MASSON, ÉDITEUR LIBRAIRE DE L'ACADEMIE DE MÉDECINE DE PARIS Boulevard. Saint-Germain et rue de V'Éperon En face de l’École de médecine. 1879-80. HDOOTAOKTAN + PRE 4 AA ATAOS AU HosTadnid at ads CERTA 0 éGHAWON HAN HAN va A. GA oh. AUMTION AO22AH 4 HITASITE ÉLIPELET HQ AIMAGASA #4 dAtaRITE 1 où. Lu te an à Nes 4 0 5» tee nain fe 1, sp NS too hiin sb slot af 5h ua. " ia \ | 08-0F8h. PRET NN CUS XECHERCHES ANATOMIQUES SUR LES MOLLUSQUES DE LA FAMILLE DES BULLIDÉS Par M. VAYSSIÈRE, Préparateur à la Faculté des sciences de Marseille. La famille des Bullidés, considérée comme le fait Woodward dans son Manuel de conchyliologie, se trouve composée de types assez différents les uns des autres par leur forme exté- rieure. Quoique peut-être un peu négligés par l’ensemble des naturalistes, ces animaux, par la bizarrerie de leurs formes, avaient attiré de bonne heure l'attention des conchyliologistes. Mais ceux-ci avaient complètement laissé de côté un certain nombre de types qu’ils croyaient dépourvus de coquille, parce que cet organe était non-seulement enfoncé dans les tégu- ments, mais encore peu développé et très peu apparent, Que leur coquille soit extérieure ou intérieure, ces Mollus- ques sont cependant toujours très reconnaissables par la divi- sion en quatre parues de la face dorsale du corps et par l'absence complète de tentacules dorsaux ou labiaux. … Pourtant ces caractères ne sont pas aussi nettement accusés dans tous les types de la famulle. Un d’entre eux, le Gastero- pleron, présente des différences assez importantes pour que certains naturalistes se soient trompés sur sa position systé- matique. Aussi ai-je cru devoir m'en occuper d’une manière toute spéciale et en faire en quelque sorte une monographie parti- culière. Pour les autres genres de Bullidés que j'ai pu me pro- curer (Bulla, Doridium, Philine et Scaphander), je me conten- terai de décrire les principaux organes sans entrer dans beaucoup de détails. | ANN. SC. NAT., JANVIER 1819-80, IX. À. — ART. N° 1, 2) VAYSSIÈRE. CHAPITRE PREMIER. HISTORIQUE. En présentant rapidement la bibliographie de cette famille des Bullidés, bien que je compte m'occuper en général de tous les travaux qui ont été publiés sur les différents genres qui la composent, j'ai l'intention d’insister sur ceux dont le Gasteropteron à été plus spécialement l’objet. Je me contenterai de faire ressortir ce qui a été fait et ce qui restait à faire, sans avoir la prétention de combler toutes les lacunes avec mes recherches personnelles. D'une manière générale, nous pouvons dire en commençant que, sur aucun des types dont nous aurons à nous occuper dans ce travail, il n’a été fait d’études exemptes d’erreurs assez graves. Nous laisserons de côté tous les travaux antérieurs à ceux de G. Guvier, bien que Kosse (1), qui le premier a étudié le type principal de notre mémoire, méritât peut-être une mention. spéciale. Mais ces travaux ayant été magistralement résumés par Guvier, nous ne nous en occuperons pas 101. Le grand naturaliste français, dans ses Mémoires pour servir à l'histoire et à l’anatomie des Mollusques (2), consacre un chapitre à l'étude de cette fanulle, qu'il désigne sous le nom de famille des Acères. Il donne d’abord quelques renseignements bibliographiques montrant combien ces Mollusques étaient peu connus à cette époque, soit sous le rapport systématique, soit sous le rapport anatomique. Nous ne résumerons pas ici le mémoire de Cuvier, et nous renvoyons au livre lui-même les lecteurs qui désireraient con- naître l’état de la science avant le grand anatomiste. (1) Kosse, De Pteropodum ordine et novo ipsius genere (thèse in-4°, sou- tenue à Halle en 1813). (2) G. Guvier, Mémoires pour servir à l'histoire et à l'anatomie des Mol- lusques. Paris, 1817. ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 5 Pour Cuvier, les Acères forment un genre subdivisé en trois sous-genres : « Les unes, dit-il, ont une coquille ample, » solide et visible au dehors, ce sont les Bulles de M. de La- » marck. Les autres ont une coquille cachée dans l’épaisseur » charnue du manteau, ce sont les Bullées du même auteur. » Les troisièmes enfin, que nous croyons avoir découvertes le » premier, n’ont point de coquille du tout, bien que leur man- » teau en ait la forme extérieure : nous leur réservons plus » particulièrement le nom d’Acères. » Après avoir décrit l’aspect externe des Bullées, Cuvier s’oc- cupe des diverses Bulles qu’il a pu se procurer (B. lignaria, ampulla et Hydatis), et termine la partie zoologique de son mé- noire par les Acères proprement dites, qui ne sont autre chose que des Doridium. Il n’a pas vu la coquille rudimentaire de ces derniers Mollusques. À la suite de la zoologie descriptive, Cuvier donne des dé- tails anatomiques. Non-seulement cette partie du livre est très incomplète, mais on y trouve encore des erreurs assez graves sur les organes de la génération, sur le système nerveux, etc. En 1819, Lamarck (1), dans la première édition de son Histoire naturelle des animaux sans vertèbres, ne fait qu’établir la famille des Bulléens d’après ce qu’en a dit Cuvier. Delle Chiaje, qui vient ensuite, est un des auteurs dans les travaux duquel nous trouvons le plus de renseignements. D’abord en 1823, dans son ouvrage sur l'Histoire et l'anatomie des animaux sans vertèbres (®), il est le premier à faire d’une manière sérieuse l’anatomie du Gasteropteron. I commence son mémoire par des considérations historiques sur cet animal. D’après lui, c’est un chirurgien hambourgeois, F. Martens, qui le premier attira l’attention des zoologistes sur ce Mollusque qu’il nomma Clio. Quelque temps après, Pallas le décrivit de nouveau sous la dénomination de Clione borealis. (1) Lamarck, Histoire naturelle des animauæ sans vertèbres, t. VI, 2° partie, p. 27 à 36. (2) Delle Chiaje, Memorie sulla storia e notomia degli animali senza ver- tebre (Mémoire II, p. 53 du volume Ie", 1823). 4 VASSSIÈRIE Delle Ghiaje, qui en fait un Clio véritable, réunit le Gastero- pleron aux deux Glio connus alors, C{. boreuhis de Linné et CL. australis de Bruguière, et il crée une troisième espèce qu'il désigne sous le nom de Clio Amati, en l'honneur d’un mé- decin de ee nom. Après cet historique, Delle Ghiaje aborde la description de réa pal et divise son mémoire en deux parties. Dans la première partie de son travail, il ne s'occupe que de la forme générale du corps du Gasieropteron, de sa coloration et de sa pêche. Tous les détails qu’il donne nous ont paru assez exacts. Dans la seconde partie, il fait connaître l’anatomie. Les tégu- ments sont assez bien décrits, sauf la membrane coquillière et la petite coquille, qu’il n’a point vue. Passant à l'étude du tube digestif, il prend lextrémité de l’œsophage pour l’estomae, tandis qu’il considère la partie dilatée où viennent aboutir les conduits hépatiques comme, étant le commencement de lin- testin : « le duodénum s'enfonce dans la masse du foie, et se dilate un peu pour recevoir les conduits hépatiques ». Delle Chiaje commet d’autres erreurs sur la glande rouge, sur les organes de la génération et le système nerveux. La description du peu qu’il a vu de l'appareil circulatoire est assez exacte. Constatant la présence de l’eau de mer dans la cavité du corps de l'animal, il croit qu’elle y pénètre à travers la substance musculaire des ailes, et le premier il entrevoit chez les Mollusques lintroduction de l’eau dans l'organisme, sans pouvoir toutefois se l'expliquer complètement. Cette anatomie, bien que très incomplète, est généralement assez exacte, surtout si l’on songe que Delle Chiaje a donné cette description d’après trois individus seulement. Peu de temps après (1), ce même naturaliste faisait paraître un second mémoire sur un Mollusque de la famille des Bulli- dés, le Doridium. Il commence par rétablir le véritable nom de cet animal, nom générique que Meckel de Hall lui avait donné, -(4) Delle Chiaje, loc. cet. (Memoria leita nella sessione accademica de 8 giugno, 1823, p. 117-123). ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 5 et que Cuvier n'avait pas connu, puisqu'il désignait le même Mollusque sous la dénomination d’Akera et croyait être le pre- mier à en parler. | Delle Chiaje constate la présence d’uné coquillé rage taire chez le Doridium, et place ce genre entre les Bulles, les Aplysies et les Dolabelles. Après avoir dédié à Meckel l’espèce qui fait l’objet de son mémoire, il en donne une bonné des- cription extérieure; mais la description anatomique laissé à désirer. Ainsi il prend le bulbe buccal pour lestémac, et là partie du tube digestif qui remplit cette fonction n’est pour lui qu’une partie dilatée de lintestin. Toutefois la présence des glandes salivaires le long ‘de cet organe l’amène à établir un rapprochement assez singulier entre l’estomac du Doridium et celui de l’Aphrodite squamata : les glandes salivaires qui ont la forme de cæéum sont pour lui les PO nItateS des appendices cæcaux de l’Aphrodite. | La description des organes de la génération ‘et de la bireulas tion, ainsi que celle du système nerveux, sont inexactes en bien des points. 98 9IY0I00R DEV Deux ans après, Delle Chiaje (1) nous donné un nouveau mé- moire pour servir de complément au précédent. Dans ce tra- vail il établit une nouvelle espèce du genre Doridium, le Dor. aplysiforme ; après en avoir donné les caractères extérieurs, 1l touche à peine à la partie anatomique. Nous retrouvons dans cette seconde étude les erreurs que nous avons is signalées ryn la première. Blainville, dans son Manuel de big et de vache yho- logie (2), qui parut cette même année, place la famille ‘des Bullidés, sous la dénomination d'Acères, dans son troisième ordre de la classe des Paracéphalophores; il la met après les Patelloïdes. D’après Blainville, la famille des Acères comprend, outre les genres Bulla, Bullæa, Lobaria et Gasteropteron, d’autres types de Mollusques qui ne doivent point en faire partie (Bellerophus, Sormetus et Atlas). La description qu'il (1) Delie Chiaje, loc. cit. (Memoria letta à gennajo, p. 185-190): (2) Blainville, Manuel de malacologie et de conchyliologie, 1825. G VAYSSIÈRE. donne du genre Gasteropteron est exacte ; la figure de l’animal (pl. 45, fig. 5) laisse cependant à désirer. Dans le Règne animal de Cuvier, publié après sa mort, en 1836 (1), nous remarquons que la famille des Bullidés est placée dans le quatrième ordre des Gastéropodes, G. Tecti- branches, après les Bursatellidés, et nous trouvons tout de suite après, mais séparément, le genre Gasteropteron. Guvier se contente dans cet ouvrage de nous donner les diagnoses géné- riques et spécifiques de ces Mollusques et nous renvoie, pour ce qui concerne leur anatomie, aux travaux de Delle Chiaje et aux siens propres. La même année parut la deuxième édition des Animaux sans vertèbres de Lamarck. Dans la partie consacrée aux Mollus- ques et revue par Deshayes et M. H. Milne Edwards, nous ob- servons que ces naturalistes ont retranché de la famille des Acères tous les Lypes qui ne leur paraissaient pas avec juste raison devoir en faire partie. [ls n’admettent que les Bullines, Bulles, Acères, Bullées et le genre Gasteropteron. Dans cet ouvrage de zoologie générale, nous ne trouvons rien sur l’ana- tomie de ces animaux. En 1840, Cantraine, dans sa WMalacologie méditerranéenne et littorale (2), s'étend longuement sur la famille des Acères. Dans la caractéristique de cette famille, il dit que ces êtres n’ont point d’yeux, erreur qu'il commet avec plusieurs autres natu- ralistes; 1l ne voit pas non plus que le disque céphalique provient des tentacules, et conclut de cette absence des organes des sens que les ganglions cérébroïdes font défaut, car pour lui les véritables ganglions cérébroïdes sont des ganglions secon- daires, et la commissure intercérébroïdale représenterait les premiers ganglions atrophiés. Cantraine étudie ensuite les trois genres qu'il admet : Akera ou Doridium, Bulla et Gasteropteron. Chez l’Akera, il relève l'erreur de Delle Chiaje au sujet de l’estomac, et donne à la (1) G. Cuvier, Règne animal, 3° édit., 1836. (2) Cantraine, Malacologie méditerranéenne et littorale, extrait du t. XIII, des Mémoires de l’Académie de Bruxelles, 1840. ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 7 cavité musculaire qui se trouve au commencement du tube digestif sa véritable dénomination en rapport avec sa fonction. Il passe ensuite au genre Bulla, auquel il adjoint les Bullæa, et il étudie enfin le Gasteropteron. Chez ce dernier type, il n’a pas constaté la présence de la petite coquille et de la cuticule coquillière. Bien qu'il ait observé la présence de deux points noirs dans l’épaisseur des téguments du disque tentaculaire, il refuse de croire à l’existence des yeux, parce que, d’après lui, il n’y a pas de muscles et de nerfs qui s’y rendent. La description ex- térieure du corps du Gasteropleron est très exacte. Cantraine en donne aussi l'anatomie, mais dans cette dernière partie nous trouvons plusieurs erreurs : ainsi l’auteur parle d’un petit ap- pendice en cæcum qui dépendrait de l'estomac, appendice que nous n'avons jamais vu ; il prend la glande senenrrante pour l'ovaire, etc. Philippi, en 1844 H), parle des divergences de la famille des Bullæacea (c’est ainsi qu'il désigne les Acères) dans son ou- vrage sur les Mollusques de Sicile, et ne donne que de courtes diagnoses génériques et spécifiques sur chacun des types qu’il a pu se procurer (Acera, Bullæa, Bulla et Gasteropteron.) Six ans après, un naturaliste anglais, W. Clark (2), publiait dans les Annals and Magazine of Natural History un travail sur les Bullidés. C’est surtout sur le Bulla Hydatis que: cet obser- vateur s'étend assez longuement. Il est regrettable que les des- criptions anatomiques qu’il donne sur ce Mollusque ne soient pas accompagnées de figures. Cette anatomie, bien qu'assez détaillée, offre encore de nombreuses lacunes et contient diverses erreurs que nous signalerons plus loin en parlant du même type. Le commencement du mémoire anglais est con- sacré à des considérations générales sur la famille, et particu- lièrement sur les types dont il est question ensuite (Bullu, Cylichna, Philine.) (4) Philippi, Enumeratio Molluscorum Siciliæ cum viventium, tum in tel Lure tertiaria fossilium (1844), p. 93-97. @) W. Clark, Mémoire sur les Bullidés (the Ann. and Magaz. of Natural History, 2° série, 1850, vol. VI, p. 98). 8 _ VAYSSIÈRE. Dans la même revue, Hancock (1) donnait deux ans après une noté sur les organes olfactifs des Bullidés. Il établit dans cé travail un rapprochement comme fonction entre ces organes et les tentacules des Æolis…. Le lobe céphalique représente bien les tentacules dorsaux et labiaux des précédents Nudi- branches. Les nerfs tentaculaires viennent en effet se ramifier dans ce lobe, et les renflements ganglionnaires dont ils sortent sont parfois très volumineux (Gasteropteron). Le naturaliste anglais montre dans son mémoire que les fonctions olfactives peuvent être remplies par le lobe cépha- lique tout entier (Gasteropteron), ou commencer à se localiser dans une partie (partie latéro-mférieure), comme chez le Ph- line aperta. Chez l’Acera, la localisation est plus accentuée, mais elle arrive à Son apogée dans le Bulla Hydatis, où l’appa- reil ne constitue plus une simple et légère différenciation de l’épiderme, mais des feuillets transverses prenant leur origine dés deux côtés d’un axe longitudinal assez saillant. Ces organes sont toujours pairs. Ce travail n’est malheureusement pas accompagné de figures. C'est à cette époque que parut la seconde partie zoologique du Voyage de la Boxire (2), rédigée par Soulevet. Elle contient uñe anatomie générale du Gasteropteron, travail un peu plus complet que celui de Delle Chiaje, mais dans lequel nous trou- vons encore de nombreuses lacunes et des erreurs assez graves. Ce naturaliste s’occupe aussi de deux espèces de Bullidés (Bulla Pullastra et B. jasciata), seulement au point de vue déscriptif, mais ne dit pas un mot de leur anatomie. Mais revenons à son travail sur le Gasteropteron. Get au- teur, après l'historique du genre, commence son étude anato- mique par l’examen des appareils respiratoire et circulatoire. Il décrit ensuite le tube digestif et les organes de la généra- (1) Hancock, On the Olfactory apparatus in the Bullidæ (Annals and Magaz. of Natural History, 2° série, 1852, t. XI, p. 188). (2) Souleyet, Voyage autour du monde de la Bonrre (1836-37), Zoologie, t. II, p. 462-470, avec une planche in-folio, 1852. ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 9 tion; cette première partie de sa monographie est assez exacte, mais très incomplète. Nous arrivons ensuite à la description de la glande rouge, que Souleyet prend pour l'organe de Bojanus, puis au véritable organe urinaire, dont il n’a pas su reconnaitre la fonction. Enfin Souleyet termine son étude sur le Gasteropteron en s’occupant du système nerveux qu'il décrit un peu plus minu- tieusement que Le reste, mais encore d’une manière très incom- plète; les figures qu'il en donne sont même imexactes en bien des ponts. En 1860, nous trouvons dans une revue allemande, un mé- moire de Krohn intitulé : Ueber die Schale und die Larven der € Gasteropteron Meckeln » (1). Ge travail, assez court, est ac- compagné de deux figures donnant au trait.la forme de la petite coquille de ce Mollusque. Krohn n’entre pas dans de grands détails, mais fait connaître seulement, ce que personne n’avail jamais observé avant lui, que la pellicule qui recouvre les vis- cères sé termine par une toute petite coquille hyaline et très fragile. Nous ne nous arrêterons pas sur ce que dit Krohn à propos des larves du Gasteropteron, attendu que nous n'avons pu nous en procurer et vérifier ses descriptions. Meyer et Mobius, dans le premier volume de la Faune de la baie de Kiel (2), s'occupent bien des Bullidés, mais sans donner aucune anatomie; nous devons toutefois dire un mot de l’étude très consciencieuse que ces auteurs ont faite des radula et des pièces stomacales des trois types qu'ils ont recueillis. Ils ont décrit et figuré les variations que l’on observe dans les formes des dents de la raduia suivant le rang que ces pièces occupent; &’est la seule partie qui puisse réellement nous inté- resser, car elle nous montre que souvent (et peut-être tou- jours?) les divisions adoptées pour désigner les dents latérales n’ont pas de raison d'être. (1) Aug. Krohn, Ueber die Schale und die Larven des Gasteropteron Meckeli (Archiv für Naturgeschichte, 26° ennée, 1860, t. [, p. 64-68). (2) A. Meyer und K. Mobius, Fauna der Kieler Bucht : Die Hinterkiemer oder Opistobranchiata der Kieler Bucht, vol. I, 1865. - 10 VAYSSIÈRE. John Jeffreys (1), dans son ouvrage intitulé British Concho- logy, volume IV, place en tête de son ordre des Pleurobran- chiata la famille des Bullidés. Après quelques généralités sur l’ensemble de cette famille, il étudie les divers genres ayant des représentants dans la faune des îles Britanniques, mais sans en faire d'anatomie. Les planches (pl. 8, 95, 96 et 97) ne donnent que la coquille et quelquefois le facies des animaux. Nous arrivons enfin à un ouvrage important (2), qui, bien que consacré spécialement à l'étude des centres nerveux des Mollusques en général, n’en est pas moins fort utile à connaître pour tout ce qui à rapport au système nerveux des Bullidés. Cet ouvrage, qui a été fait à un point de vue théorique, laisse souvent à désirer dans ses représentations des centres nerveux. Son auteur, M. le docteur Jhering, s’est efforcé, en se basant sur cet appareil organique des Mollusques, d'établir une elas- sification nouvelle. Nous ne le suivrons pas dans cette voie. Nous nous contenterons, dans le chapitre re atif au système nerveux du Gasteropteron, a si que dans le chapitre consacré aux centres nerveux des autres Bullidés, de compléter, au point de vue purement descriptif, ce que le savant naturaliste alle- mand a fait sur les centres nerveux des Mollusques de cette famille. I. — Monographie du GASTEROPTERON MECKELII. CHAPITRE IT. ESPÈCES, MŒURS, HABITAT. Le genre Gasteropteron, qui, comme nous l’avons déjà dit plus haut, a été créé en 1813 par Meckel, ne comprenait jusqu’à ces derniers temps qu’une seule espèce, le G. Meckelii de Kosse. Il n’a été augmenté depuis, à ma connaissance, que par la (1) J. Jeffreys, British Conchology : Marine Shells, vol. IV, 1877. (2) Herm. Jhering, Vergleichende Anatomie des Nervensystemes und Phylo- genie der Mollusken. Leipzig, 1877. ARTICLE N° {. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 41 découverte du Gasteropteron sinense, que À. Adams a décrit en 1861, dans son Mémoire sur les nouvelles espèces de Mol- lusques du nord de la Chine et du Japon (1). Nous ne nous occuperons que de l’espèce méditerra- néenne, attendu qu'il nous a été impossible de nous pro- eurer des exemplaires du type exotique. Adams n’a eu lui- même ensa possession que trois individus avec lesquels il s’est contenté d'établir les caractères spécifiques. Avant de parler des mœurs et de l’habitat du G. Meckeli, 1l me semble indispensable de reproduire ici ses diagnoses géné- rique et spécifique. Genre GASTEROPTERON. Syn. : CLIO, Kosse, Cuvier, Delle Chiaje. — SarcoPprÈRE, Rafinesque. Animal ovale, à lobes latéraux développés en expansions ali- formes se rencontrant et se soudant en arrière. Disque cépha- lique triangulaire, obtus en avant, pointu en arrière, Dents lin- guales, 5, 1,0, 1,5. Manteau peu développé ; plume branchiale visible sur le côté droit. Orifice reproducteur en avant de la branchie, l’ouverture anale étant située en arrière du même appareil. GASTEROPTERON MEckezir, Kosse. Syn. : Clio Amati, Delle Chiaje. G. corpore puniceo; alis connatis semicircularibus, plerumque gutlis albis, raris, inferne aspersis, cœruleque marginats; pede pallidiori (2). (1) A. Adams, Onsome new Species of Mollusca fromthe northof China and Japan, in the Ann. and Magaz. of Natur. Hist., 3 série, vol. VIIL, p. 199. — Voici la diagnose spécifique : « G. animali carneo colore, ubique carmineo punctatim et reticulatim picto, corpore pallidiore, integumento subpellucido visceribus conspicuis ; pedis lobis magnis, liberis, marginibus integris, rotun- datis ; superficie rubro-punctata ac reticulata. » — D’après ses caractères spécifiques, l'espèce qui a été pêchée à Hulu-shan bay (Chine), sur des fonds vaseux, à 9 ou 6 mètres de profondeur, diftère peu du G. Meckelii. (2) J'ai pris la diagnose générique dans le Manuel de conchyliologie de Wood- 49 VAYSSIÈRE. Les pêcheurs napolitains désignent le Gasteropteron sous le nom de Palommella. Cet animal n’est guère connu que dans diverses parties de la Méditerranée ; son extension géographique est cependant favo- risée non-seulement par le transport des larves au moyen des courants marins, mais encore par sa vie demi-pélagique. Je dis demi-pélagique, parce que, grâce à sa conformation, le Gasteropteron peut lutter contre certains courants marins, ou tout au moins les éviter et se diriger un peu en nageant. Son habitat ordinaire est dans les fonds sablonneux, par 60 à 80 mètres de profondeur, mais on trouve aussi ce Mollusque moins profondément, et dans ee dernier cas, sur les limites des fonds coralligènes ou de Zostères. Dans les fonds sablonneux, il trouve toujours en abondance une nourriture appropriée à son organisation, c’est-à-dire des Foraminifères et des larves de divers Invertébrés. Ce Mollusque ne peut pas cheminer avec la partie médiane de son pied, mais c’est au moyen des expansions latérales de ce même organe, les parapodies, qu’il se déplace; pour cela il les agite latéralement, s’en servant absolument comme un Oiseau de ses ailes : suivant l’inflexion qu’il leur donne et la rapidité avec laquelle il les fait mouvoir, on le voit faire de véritables évolutions. Le Gasteropteron doit venir rarement à fleur d’eau, bien que Delle Chiaje dise que « dans les temps chauds et sereins, on le voit même flotter à la surface quand la mer est très calme ». Il ne m a jamais été donné de constater la chose; lorsque j'ai eu à ma disposition des individus bien vivants, ils ne venaient pas se reposer à la surface de Peau, le pied tourné en haut, comme on le remarque si fréquemment pour la plupart des Nudibranches. Cependant un organe glan- dulaire spécial que l’on observe à la partie postérieure du pied et s’ouvrant en ce point, pourrait, grâce aux mucosités qu’il pro- duit, former une espèce de radeau au moyen duquel animal ward, en ayant le soin de rectifier les quelques erreurs qui s’y trouvent; disant que c’est à l'ouvrage de Gantraine que j’emprunte la diagnose spécifique, telle qu’il la donne, sans y rien changer. ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 43 se laisserait emporter par les courants marins. En décrivant dans la suite cet organe glandulare, nous reviendrons sur sa fonction probable. Les dimensions du Gasteropteron Meckelii sont assez va- riables. D’ordinaire l’animal n’a pas plus de 20 à 24 milli- mètres de longueur sur 25 à 30 millimètres de largeur. Son corps proprement dit, c’est-à-dire la partie où sont contenus les organes, est loin d’avoir ces dimensions ; il a tout au plus les deux üers de la longueur sur un üers de la largeur. Les dimensions données par les divers naturalistes qui se sont oc- cupés de cet animal se rapportent donc au pied et à ses para- podies. Par suite de son séjour dans des fonds aussi considérables, on ne peut Jamais le conserver bien longtemps en vie dans de petits aquariums. | Il ma éié impossible de voir l’accouplement et même la ponte chez les individus que j'ai pu conserver quelques jours en captivité. ; CHAPITRE II. ASPECT EXTÉRIEUR, TÉGUMENTS, COQUILLE. — ASPECT INTÉRIEUR. L'animal rappelle par sa conformation générale l'aspect de certains Piéropodes ; e’est même cette particularité qui avait décidé les premiers naturalistes qui s’en sont occupés à-le pla- cer dans cet ordre. Delle Chraje lui-même, après en avoir fait l'anatomie, n’a pu se soustraire à cette idée préconçue. Le Gasteropleron, vu par sa face ventrale, n’offre presque qu'une membrane continue sans proéminence bien marquée de la région médiane du pied ; à peme si l’on peut distinguer ce qui constitue le pied proprement dit des expansions laté- rales ou parapodies : la coloration. moins. prononcée de cette partie médiane en indiquerait bien mieux les limites. La face dorsale consiste en une surface elliptique, dont le grand diamètre est transversal; dans le sens du petit diamètre, 14 i VAYSSIÈRE. se trouve le corps proprement dit, dont l’étendue égale environ le quart de la face dorsale tout entière. Ce corps présente à l’extérieur deux grandes divisions : l’une antérieure, pentagonale et légèrement bombée; l’autre posté- rieure, de forme ovoïde et de dimensions plus grandes. La partie antérieure de forme pentagonale, ainsi que nous l'avons dit, ressemble, pour employer la comparaison de Krohn, à un écu d’armoiries ; la partie supérieure de cet écu est située en avant, tandis que la pointe s'appuie sur le sac viscéral sans y adhérer. Ce pentagone légèrement bombé, que l’on désigne sous le nom de disque céphalique (1), consiste en une membrane assez charnue, débordant tout autour les parties qu’elle recouvre et auxquelles cependant elle adhère presque complètement. Elle est séparée des parapodies par deux sillons assez larges. C’est à l’extrémité antérieure de celui de droite, dans le voisinage de l'ouverture buccale, que nous trouvons l’orifice de la verge. Ce disque céphalique, qu’on nomme aussi disque tentacu- laire, parce qu'on le considère comme le représentant des ten- tacules, n’offre extérieurement aucune trace d'organes des sens. La partie postérieure, qui est près de deux fois plus volumi- neuse que la précédente, adhère par son extrémité antérieure à la surface elliptique sus-mentionnée, ainsi qu’au-dessous du disque céphalique; le reste forme une espèce de sac non adhérent. Le manteau est, chez le Gasteropteron, très rudimentaire en épaisseur comme en étendue ; 1l ne se trouve en réalité nette- ment représenté que sur le côté droit par un rebord assez charnu quise termine postérieurement par une sorte de flagel- lum (2). Ce flagellum était pris par divers auteurs (3) pour (1) Désigné dans la figure 1 par les lettres D.c. (2) Même figure, F1. (3) Delle Chiaje dit, en effet, page 57 de son Mémoire sur cette espèce de Mollusque : « Je suis convaincu qu’elle (la fglande rouge) a une issue par le petit canal qui pend à l’extérieur. » ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 15 un conduit excréteur mettant en communication un organe interne avec l'extérieur. Toutefois on peut considérer comme manteau tout l’ensemble des téguments qui enveloppent exté- rieurement le sac viscéral. Un rebord (1) signalé plus haut sert à protéger le point d'attache de la branchie, et à constituer cette grande cavité où nous trouvons l’anus, l’orifice externe de l’organe de Boja- nus (2), l'ouverture génitale (3), et très probablement aussi, bien qu'il m’ait été impossible de l’apercevoir, l’orifice qui met en communication l’appareil circulatoire avec l'extérieur. La branchie, de forme triangulaire, semi-pennée, dirigée d'avant en arrière et de haut en bas, s’insère suivant une large base immédiatement après l’ouverture des organes de la géné- ration. L’axe sur lequel se trouvent implantés les feuillets qui constituent cet organe décrit une courbe dont la convexité est tournée vers la région pédieuse, de telle sorte que les extré- mités des lamelles branchiales viennent s’appliquer contre le corps cachant ainsi les ouvertures anale et urinaire. En avant de la branchie, dans le sillon formé par le point de jonction du corps avec la membrane pédieuse, on observe une rainure (4) assez profonde, sorte de canal incomplètement fermé, allant de l’ouverture génitale à l’orifice de la verge, et qui est destiné au transport des éléments mâles de la vulve à l'organe copulateur. Ï nous reste à dire un mot sur la partie supérieure des para- podies pour terminer la description de la face dorsale du Gas- teropteron. Aucun organe ne se trouvant dans l'épaisseur des issus de ces expansions, si ce n’est la glande à mucus située suivant l’axe longitudinal de l’animal et dont l’ouverture se montre à la face ventrale, dans cette partie un peu en pointe qui constitue l'extrémité du pied rudimentaire, nous n’avons rien à signaler : nous nous trouvons en présence d’une sur- (1) Fig. 1 et 6, M.r (2) Fig. 6, 0.B. (3) Fig. 6, 0.V. (4) Fig. 6, r.s. 16 VAYSSIÈRE. face plane dont le contour est un .peu sinueux sans montrer toutefois d’'échancrures, parce que ces sinuosités sont dues aux contractions continuelles des muscles des parapodies; mais lorsque l’animal est mort, on peut, en étendant ces parties laté- rales, avoir un contour aussirégulier et aussi continu que celui qu’on observe dans les figures un peu raides des divers auteurs qui se sont occupés de ce Mollusque. La coloration du Gasteropleron est tantôt rouge pourpre, tantôt rouge orangé sale; parfois même la temte est à peine rosée. Ges variations correspondent à l’habitat de ces animaux. Ceux qui ont séjourné longtemps dans des fonds vaseux revêtent la teinte orangée pâle, tandis que ceux qui habitent les fonds coralligènes sont colorés d’une manière très intense. De toutes les parties du corps, ce sont les parapodies qui nous présentent la coloration la plus accentuée sur leurs deux faces; viennent ensuite le disque céphalique et le rebord charnu du côté droit du corps, tandis que le reste de l’enveloppe du sac viscéral et le pied n’offrent qu’une teinte très pâle. Gette coloration rouge n’est Jamais la seule que l’on observe ; le bord des parapodies, ainsi que le contour libre du disque céphalique, présente un liséré blanc avec reflets bleuûtres ; l'extrémité du flagellum est presque toujours de cette dernière couleur. En dehors de cette temte bien localisée, on remarque aussi un plus où moins grand nombre de taches blanches, de forme irrégulière, répandues sur toutes les parties du corps, mais principalement abondantes sur les deux faces des parapo- dies. Toute la région cireumbuccale est d’un jaune orangé. Passons maintenant à la description des téguments de ce Mollusque. Si l’on regarde au microscope, avec un faible gros- sisseinent, un débris de la peau, on observe qu'à lextérieur il existe une membrane finement granuleuse. Gette mem- brane, de nature cellulaire, constitue l'épiderme de l’animal; elle n'offre aucune particularité digne d’être signalée. | Immédiatement au-dessous, dans l’épaisseur: d’une couche fibreuse, nous voyons les cellules pigmentaires se grouper de distance en distance, et former ainsi une multitude de petites ARTICLE N° 1, ANATOMIE DES BULLIDÉS. 17 taches rouges qui, vues à la loupe, ont Pair d’un fin pointillé ; suivant que ces taches pigmentaires sont plus où moins abon- dantes, nous avons une coloration intense ou très pâle. Les cellules pigmentaires sont assez grosses, elles présentent Loujours un nucléus très visible ; les granulations rouges ne sont pas sphéroïdales, mais polymorphes. À côté de ces groupes de cellules à contenu rougeàtre, nous trouvons chez certains individus, chez ceux qui habitent les fonds vaseux, une multitude de groupes analogues de cellules dont la substance pigmentaire est jaune orangé : c’est à ce mé- lange de taches rouges et jaunes que cette variété de Gastero- pteron doit sa teinte orangée sale. Dans cette même couche fibreuse on observe aussi en cer- tains points des granulations calcaires isolées les unes des autres, mais alors nullement visibles à l'extérieur; en d’autres points ces mêmes concrétions forment de petits amas qui con- stituent les taches blanches dont nous avons déjà parlé. Ces granulations calcaires sont proportionnellement beaucoup plus grosses que celles des cellules pigmentaires ; elles n’affectent aucune forme géométrique régulière. C'est au-dessous de cette couche fibreuse que nous trouvons la région musculaire des téguments, formée par un entrelace- ment de bandelettes des plus compliqués ; c’est un véritable réseau. Cette couche est plus ou moins développée, suivant les parties du corps que l’on examine. Tandis que lesparois du sac viscéral n’en présentent qu'une d’une épaisseur très faible, dans les parapodies, ainsi que dans les téguments de la région antérieure du corps, cette couche est fort épaisse. Nous trouvons au-dessous de la faible couche musculaire des téguments du sac viscéral une très grande cavité entou- rant les deux tiers de cette région du corps; cette cavité est séparée de celle où se trouvent les viscères par une seconde membrane musculaire d’une faible épaisseur. Dans cette vaste poche se trouve la coquille. Cet organe protecteur est très peu développé chez le Gastero- pteron; il se compose d’une très fine pellicule qui se termine ANN. SC. NAT., JANVIER 1879-80. IX. DU=VART. N° 1: 18 VAYSSIÈRE. postérieurement par une petite coquille nautihforme ayant à peine un demi-millimètre de diamètre. La coquille proprement dite a été vue pour la première fois par Krobn, en 4860 : avant lui, divers naturalistes avaient ob- servé la membrane qui oceupe toute l'étendue de la poche, mais aueun ne l’avait décrite avec exactitude et ne s’était rendu compte de sa signification anatomique ; bien souvent on n’en faisait même pas mention, et l’on considérait ce genre d'Opisthobranche comme totalement dépourvu d’organe pro- tecteur des viscères. La coquille a environ de 4 à 5 dixièmes de millimètre ; elle est nautliforme, hyaline et très translucide. Son test rappelle tout à fait celui de la coquille de la Carinaire ! Elle déerit de un tour et demi à deux tours de spire, mais elle n’est en réalité constituée que par Île dernier tour, tant il est développé. Si on l’observe sous un très fort grossissement, on remarque de fines stries transversales qui correspondent aux stries d’accroisse- ment. Cette coquille se trouve sous la masse hépatique, qui forme un petit prolongement spiral pénétrant dans sa cavité; elle est située un peu à droite, assez près de Pants, mais en ar- rière de cette ouverture; sa convexité est tournée vers le pied. Du bord de l’ouverture de la coquille et adhérant à ce bord, part la membrane coquilhère, qui, en s’élargissant, recouvre toute la face dorsale et une partie des côtés de la masse viscérale ; elle se prolonge en avant jusqu’à extrémité anté- rieure de la poche, atteignant presque la pointe du disque céphalique. Je considère cette membrane comme n’étant que le prolon- sement de la cuticule externe de la coquille, cuticule sous la- quelle aucun dépôt calcaire ne s’est formé. Nous trouvons chez divers Mollusques à coquille interne, le Doridium par exemple, un prolongement membraneux analogue, plus ou moins dé- pourvu de concrétions calcaires. Maintenant que nous avons décrit na extérieur du Gus- teropleron, la constitution de ses téguments et l’organe pro- tecteur du sac viscéral, 1l nous parait bon, avant d’entrer dans ARTICLE N° f{. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 19 les descriptions des divers systèmes organiques de cet animal, d'indiquer rapidement le mode de distribution de ces systèmes, et les rapports qui existent entre eux. Lorsqu'on ouvre ce Mollusque par la face dorsale et suivant la ligne médiane, on se trouve quelque peu arrêté en arrière du disque céphalique par un épaississement musculaire trans- versal ; cet épaississement, se continuant sur les côtés et en des- sous, forme un anneau musculaire qui donne naissance à une membrane de la même nature, mais d’une finesse telle que lorsqu'elle est bien tendue et appliquée contre un organe, il est difficile de apercevoir tout de suite, même avec le secours d’une bonne loupe. Gette membrane, qui constitue une espèce de dia- phragme, divise la cavité du corps en deux régions. Dans la plus vaste cavité, celle qui se trouve en arrière du diaphragme, nous observons : la partie terminale de l’intestin, avec le foie et la glande hermaphrodite, formant un tout compacte qui re- couvre les autres organes de la génération, en contractant même une certaine adhérence avec eux; puis, surle côté droit de la masse hépatico-hermaphrodite, la glande de Bojanus, qui adhère non à cette masse, mais au plancher de la poche coquil- lière; en avant du foie, entre cet organe et le diaphragme, se trouve enfin le péricarde, avec cette glande rouge (1) dont je n'ai pu reconnaitre les fonctions et qui s'étend sur une partie de l'intestin. Dans la cavité antérieure, on ne trouve que le commencement du tube digestif (bulbe, æsophage), l’organe copulateur et les centres nerveux. Cette division intérieure du corps en deux cavités correspond exactement à celle de la face dorsale de l'animal; en effet, la cavité antérieure occupe tout l’espace caché par le disque cépha- lique, tandis que la cavité postérieure est complètement recou- verte par le manteau rudimentaire. Chez tous les Bullidés, nousretrouverons cette division intérieure correspondant à celle de l'extérieur, mais cette dermère sera même plus accusée par suite du développement du lobe postérieur ou manteau. (1) Fig. 8, gl. ind. 20 VAYSSHENE. Le diaphragme présente en son milieu et un peu inférieure- ment une grande ouverture par laquelle passent le tubs digestif et les connectifs qui se rendent aux ganglions génitaux; c’est aussi par cette ouverture que laorte antérieure pénètre dans la première cavité du corps. Nous ne nous occuperons pas séparément du système mus- culaire, attendu qu'il n'offre qu’un intérêt bien secondaire dans la monographie du Gasteropteron. Je me propose enfin, en dé- crivant chaque appareil, de signaler les muscles principaux qui remplissent un rôle dans le fonctionnement des divers organes. CHAPITRE IV. ORGANES DE LA VIE NUTRITIVE. Ce chapitre contient la descripuon de tous les appareils orga- niques qui plus ou moins directement concourent à la nutri- lion de l'animal, ainsi que leurs annexes. Le tube digestif et ses dépendances feront l’objet du premier paragraphe ; dans le second, je m'occuperai des organes glandu- laires indépendants; le dernier sera consacré aux organes de la respiration et de la circulation. I. — ORGANES DE LA DIGESTION. La description de l'appareil de la digestion sera divisée en deux parties : l’une consacrée à l'étude du tube digestif propre- ment dit, l’autre à celle des glandes annexes de cet appareil. 1° Tube digestif. Nous ne trouverons pas chez le Gasteropteron un tube diges- Uf aussi compliqué que celui de la plupart des Bullidés ; il est même, après celui du Doridium, le plus simple de tous les types de cette famille. Ouverture buccale (1).-— Pour observer la conformation de l’ouvsrure buccale et voir ses rapports avec les parties avoisi- (1) Fig, 2, 0. buc. ARTICIE N° À. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 21 nantes, il faut renverser l’animal sur le dos et le fixer dans cette position ; relever ensuite un peu la tête en l’amenant en avant, tandis que l’on fait subir une légère traction en arrière au pied ; on peut même ramener de dessous le corps la pointe du disque céphalique et la fixer. — Dans cette position, toute la région antérieure du Gasteropteron se trouve tournée en haut vers l'observateur. On aperçoit, au milieu d’un petit enfoncement, la bouche, qui présente en avant le rebord antérieur du disque cépha- lique ; ce rebord, très légèrement incurvé en son milieu, sert de voile buccal. En arrière, se trouve la partie antérieure du pied, dont léchancrure médiane estun peu plus prononcée que celle du voile; latéralement, on distingue deux mamelons, un de chaque côté. De ces mamelons prennent naissance les para- podies, et ils servent à compléter l’entonnoir faisant office de vestibule pour la bouche. Comme nous lé verrons en parlant des annexes du tube digestif, c’est dans cette partie de l'appareil qu’une multitude de glandes unicellulaires versent leurs produits. L'ouverture buccale est elle-même arrondie ; elle offre une coloration jaune légèrement rosée, et tous les replis qui la circonscrivent sont assez hyalins. Immédiatement après, nous trouvons une trompe (1) assez courte, d'un diamètre constant, organe que l'animal peut pro- jeter à l’extérieur pour s'emparer de sa proie. Cette trompe est tapissée intérieurement par une membrane grisâtre assez dé- licate, qui n’est que la continuation des téguments externes; au-dessous de cette membrane est une couche de tissu mus- culaire assez développée, reliant louverture buccale au bulbe buccal. | PBulbe buccal (2). — Cet organe n’a pas une forme assez bien définie pour être caractérisée en peu de mots; le dessin de l’ensemble du tube digestif, où le bulbe est vu par dessus, et la figure 10, où j'ai seulement représenté sa face inférieure, (1) Fig. 9, T. / (2) Fig. 9 et 10, Bu. 929 VAVYSSENRE. pourront, avec une courte description, en donner une idée assez exacte. Le bulbe, dans son ensemble, estovoïde, un peu aplati à sa face inférieure, assez allongé, et il présente deux renflements successifs; au-dessous du renflement postérieur nous trouvons un grand mamelon trapézoïde très musculaire, qui offre, un peu en arrière et suivant la ligne médiane, un prolongement cylindrique (1) assez proéminent et d’une teinte blanche lai- teuse. C’est dans cette région que prend naissance la radula. La coloration générale de l’extérieur du bulbe est blanche, quelquefois très légèrement jaunâtre, à l’exception d’une mem- brane triangulaire placée à la face inférieure de cet organe et en avant du mamelon trapézoide, dont la teinte bleuâtre est très apparente, malgré une mince couche de muscles longitu- dinaux qui la recouvre. = Lesmuscles, parsuite de l’absence detoutsquelette chitineux, ont pris un développement assez considérable pour constituer une véritable charpente au bulbe. Ils se trouvent disposés en une série de bandelettes transversales, très distinctes les unes des autres, prenant naissance au-dessous de l’organe, soit sur les côtés du mamelon trapézoïde, soit sur ceux de la membrane bleuâtre. à Les museles du mamelon trapézoïde sont disposés longitudi- nalement; quelques-uns d’entre eux, en se prolongeant jusqu’à la trompe, forment le plancher de la partie antérieure de la cavité buccale: ce plancher, comme on peut le voir figure 11, offre en son milieu un sillon qui correspond à celui de la mem- brane triangulaire que nous avons déjà décrite. En dessus et un peu en arrière, on observe une inter- ruption assez brusque des couches musculaires, laissant un espace assez grand, de forme circulaire, complètement dé- pourvu de muscles argentins, mais recouvert par des tégu- ments assez minces permettant d’apercevoir un peu par trans- parence la radula : c’est de cette partie des enveloppes du bulbe que l’œsophage prend naissance. (1) Fig. 40, f. r. ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 93 Si nous ouvrons maintenant cet organe par la face supé- rieure, de manière à mettre complètement à découvert toutes les parties de la cavité, nous observons la disposition suivante, qui à été fidèlement reproduite dans la figure 41. Dans la région postérieure (4), on distingue le mamelon radulaire, qui a la forme d’un tront de cône dont la base supé- rieure est légèrement tournée vers l’ouverture buccale; au milieu de cette base est un sillon dirigé suivant l’axe du bulbe et dans lequel se trouve logée la radula. En avant de la masse linguale, nous distinguons une éminence musculaire recou- vrant toute la partie colorée en bleu que nous avons décrite en parlant de l’aspect externe du bulbe; d’abord peu large, cette éminence occupe bientôt tout le plancher de la cavité, et pré- sente un sillon qui s’avance en s’élargissant jusqu’à la naissance de la trompe. Cette partie oftre une coloration jaune de chitine quitranche assez sur la teinte générale gris de fer des parois du com- mencement de la bouche, teinte due à la coloration de l’épithélium qui tapisse cette cavité. Les cellules épithéliales de toute cette région antérieure sont plus ou moins chitinisées, et forment par suite des taches assez visibles, suivant l’abon- dance de la chitine. Ainsi nous apercevons d’abord celle qui recouvre en partie léminence musculaire sus-désignée ; puis une seconde tache à la voûte de la cavité buccale, exactement au-dessus de Ja précédente, enfin, à l’entrée du bulbe, nous trouvons un anneau coloré à peu près complet. Mais c’est surtout latéralement, vers la partie supérieure de la voûte, que la couche chitineuse devient épaisse au point qu’elle forme deux plaques (2) assez résistantes, très petites, sorte de mâ- choires rudimentaires. Ces mâächoires, disposées une de chaque côté de la lgn: médiane et un peu obliquement, sont formées par une multi- tude de petits bâtonnets chitineux (3), irrégulièrement cylin- (1) Dans la figure 11, la partie postérieure est dirigée en avant. (2) Fig. 11, m., m. (3) Fig. 16 et 15. 24 VAYSSIÈRE. driques, pressés les uns contre les autres et tous légèrement inclinés vers un point central situé au milieu des plaques. Ces organes, de forme presque rectangulaire, sont à peu près trois fois plus larges que longs; leur coloration est ambrée, très foncée en arrière de chacune d'elles, la teinte jaune se continue, mais en s’effaçant peu à peu, pour bientôt disparaitre. Lorsque j'ai constaté lexistence de ces plaques, je me suis demandé s'il fallait réellement les considérer comme des mâchoires. En examinant la cavité buccale des types de la famille des Bullidés que javais à ma disposition, je n’en ai vu qu'un, le genre Bulla, possédant des organessemblables, mais plus développés. Poursuivant alors mes recherches dans les familles voisines, j'ai acquis la conviction que ces organes étaient bien des mâchoires rudimentaires, malgré l’assertron de Cantraine et de Souleyet sur la non-existence de semblables pièces chez le Gasteropteron. Chez les Aplysies, par exemple, nous rencontrons au commencement du bulbe un anneau chiti- neux ayant la même constitution que nos plaques et correspon- dant fort bien avec l’anneau coloré que nous avons signalé ei- dessus chez notre Mollusque. L’anneau des Aplysies, bien qu'il soit complet, offre supérieurement et inférieurement une rainure qui indique sa séparation primitive en deux parties, une droite et une gauche. Outre ces mâchoires rudimentaires, nous trouvons chez le Gasteropteron, en avant de l’anneau, au point de jonction de la trompe avec le bulbe, c’est-à-dire à l’entrée de la véritable ouverture buccale, de petites papilles ehitineuses (1) qui sem- blent en défendre l'entrée. Leur forme est assez irrégulière; quart à leur coloration, elle est plus pâle que celle des mâchoires. Le mamelon sur lequel se trouve la radula occupe le fond de la cavité buceale. Il est revêtu, ainsi que les parois de toute cette partie pharyngienne, par la continuation de lPépithélium, qui, en se prolongeant, pénètre ensuite dans l’œsophage. Les (1) Fig. 17. ARTICLE N° Î. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 95 cellules qui constituent ce revêtement épithélial sont dépour- vues de dépôts chitineux, à l’exception de celles qui tapissent la voûte, immédiatement au-dessus de la langue ; ces dernières offrent une couche de chitine assez épaisse pour protéger suffi- samment cette partie de l’épithélium contre les pointes très acérées des dents linguales. À part cette tache jaune, le reste de la membrane épithéliale offre une teinte grise très pâle. La radula du Gasteropteron repose, avons-nous dit, sur un mamelon très musculaire, volumineux, situé au fond du pharynx, ayant presque au-dessus de lui l'entrée de l’œæsophage. Ce mamelon a pour base la partie musculaire tra- pézoïde qui termine la face mférieure du bulbe; il présente sur sa face supérieure un sillon assez large, quin’est que la conti- nuation d’un canal prenant naissance au fond du prolongement cylindrique. Ce canal constitue le fourreau de la radula. C’est au fond du tube (terminé en cæcum) que se trouve la ma- trice des dents. Celles-ci ne parviennent à la surface du mame- lonradulaire que lorsque, arrivées à leur entier développement, elles ont acquis assez de dureté pour accomplir leurs fonctions dans Pacte de la mastication. Le Mollusque peut, dans les mouvements qu’il fait exécuter aux muscles de la masse radulaire, écarter ou rapprocher les parois latérales du sillon, et amener ainsi la tension de la langue qui y est contenue, ou la plier en deux; c'est grâce à ces divers mouvements qu'il lui est possible, lorsqu'il projette tout le mamelon radulaire à l’entrée de la bouche, de saisir sa prole. | La radula elle-même forme une bande longitudinale deux fois plus longue que large, déroulée seulement dans sa moitié antérieure, tandis que l’autre partie est contenue dans le four- reau. Le rachis de cet organe est inerme et ne présente que quelques granulations ou concrétions chitineuses toujours très petites. Sur chaque côté de ce rachis on observe d’abord une rangée longitudinale de dents assez fortes, ce sont les dents (à) Fig. 12. 26 VAYSSIÈRE. intermédiaires (1); puis cinq autres rangées parallèles de dents beaucoup plus petites que l’on nomme dents latérales (9) ou uncini. La formule dentaire de la radula du Gasteropteron s’énoncera ainsi : 9, À, 0, 4, 5. Chezce Mollusque, les dents intermédiaires sont notablement différentes des wneine par leur forme et par leur grosseur; il n’en est pas de même chez tous les types de Bullidés possédant plusieurs rangées longitudinales de dents, chez le Bulla par exemple. Dans la seconde partie de notre travail nous revien- drons sur ce sujet. Au-dessus de la masse linguale, un peu sur les côtés, on ob- serve les deux ouvertures par lesquelles les glandes salivaires versent leurs produits dans la cavité buccale. : Œsophage. — On peut presque considérer le point de départ de l’œsophage comme se trouvant sur les limites des bandes musculaires transverses du, bulbe; les téguments qui en forment la voûte au-dessus de la radula dépendraient donc de la troisième région du tube digestif. Les parois de l’œsophage sont constituées, en allant de lex- térieur à l’intérieur, par une membrane conjonctive, puis par une couche très faible de muscles longitudinaux, par une se- conde couche un peu plus forte de muscles transverses, et enfin par l’épithélium. La coloration des parois est d’un blanc hyalin légèrement jaunâtre. De la partie supérieure du bulbe, lœsophage se dirige en arrière un peu vers la gauche et cache presque complètement les ganglions buccaux, ainsi qu’une partie du tube contourné dépendant de l’organe copulateur; il ne poursuit pas sa course dans le même plan, mais il va aussitôt après de haut en bas et pénètre dans la seconde cavité du corps par la grande ouver- ture que présente le diaphragme. Les glandes salivaires Pac- compagnent dans tout son parcours sans contracter d’adhé- (1) Fig. 19, d. à; fig. 13. (@) Fig. 12, d. L.; fig. 14. ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 97 rence avec ses parois, si ce n'est par leur extrémité seulement, presque à la fin de cette région de appareil digestif. L’œsophage peut, lorsqu'il est rempli d'aliments, se dilater, surtout dans sa partie postérieure, et acquérir alors un diamètre double (4) de celui qu'il a près du bulbe buccal ; sa longueur west pas très considérable. À l’intérieur, cette partie du tube digestif nous offre des replis longitudinaux assez accentués et peu nombreux, recouverts par lé épithélium; les cellules qui forment cette dernière membrane sont toutes vibratiles. Estomac (2). — Ilest assez difficile de préciser le point où commence cette région de lappareil digestif, surtout lorsque l’œæsophage est dilaté. Toutefois on peut la faire partir de l’en- trée du tube dans la seconde cavité et la faire aller jusqu’après les ouvertures hépatiques. L’analogue du gésier des autres Bullidés ferait complète- ment défaut chez le Gasteropteron, et l'estomac occuperait tout l’espace compris entre la masse hépatico-hermaphrodite et les téguments du pied. Il est vrai que l’on pourrait, à l'exemple de Delle Chiaje, regarder la partie inférieure de notre œæsophage comme étant l'estomac, tandis que la dilatation que nous considérons comme telle ne serait qu’un simple renflement du commencement de l’intestin. Je ne partage nullement les vues du savant naturaliste napo- litain, et je préfère, avec Souleyet, considérer comme estomac cette portion du tube digestif (3). La poche stomacale se trouve enveloppée par la masse hépa- tico-hermaphrodite ; aussi est-il difficile de bien la voir, si l’on n’a pas eu Le soin de la dégager un peu. C’est à la translucidité assez grande de ses parois que lesto- (1) Voy. la fig. 8, @. (2) Fig. 9, E, et fig. 20. (3) Cantraine, en faisant la description de l’estomac, qui pour lui est formé par la base de l’œsophage, dit, page 84 : « Et l’on voit que ce dernier (l’estomac) a un volume beaucoup plus considérable que ne l’a figuré M. Delle Chiaje; il porte un petit appendice semblable à un cæcum. » Je n’ai jamais apercu cet appendice, et je crois que Cantraine a pris pour tel un fragment d’une des glandes salivaires. 98 VAYSSIÈRE. mac doit sa coloration brune, qui provient du mélange du liquide biliaire avec les aliments ; l'épaisseur de ses léguments n’est pas plus forte que celle des enveloppes de lœsophage. Le tissu musculaire y est peu développé, et ce sont les nombreux replis de sa cavité qui lui donnent une certaine consistance. Ges replis sont même un peu cartilagineux à la partie inférieure de l’organe, et c’est grâce à cette particu- larité que cette région de l’estomac conserve sa forme lors- qu’elle est vide, et offre une certaine résistance lorsqu'on la touche avec la pointe d’un scalpel. Faudrait-1l considérer ce pomt comme l’homologue dus gé- sier des autres Bullhidés? Je ne le pense pas. Les replis de l’estomac sont un peu moins forts que ceux de l’'œsophage; mais, au lieu de présenter une disposition longitu- dinale, ils forment une série de replis qui ont l’atr de circon- serire d’abord chacune des ouvertures par lesquelles les lobes du foie versent leurs produits, puis de se diriger vers l’intestin. Autour de chaque ouverture on remarque en outre un rebord assez prononcé qui forme une espèce de bourrelet. L’épithélium qui tapisse tout l’intérieur de la cavité stoma- cale est formé de cellules vibratiles (1) de forme assez irrégu- lière. Leurs cils sont nombreux et courts, comme on en peut juger par la figure 21. Le nombre des ouvertures hépatiques est d'ordinaire de dix, cependant 1l est parfois moindre par suite de la Jonction de deux conduits à leur arrivée dans lestomac. Passons maintenant à l'étude de la région intestinale. Intestin (2). — Gette dernière partie du tube digestif est à elle seule plus longue que le reste de l'appareil; elle en con- stitue environ les cinq neuvièmes. Les parois de l'intestin sont très ténues, et même plus délicates que celles de l'estomac ; elles n’ont pas de coloration propre et elles empruntent la teinte des substances qu elles contiennent. (1) Fig. 21. (2) Fig. 8, 2., et fig. 9, même lettre. ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 29 Le calibre de cette parte de Pappareil digestif est à peu près le même que celui de Pœsophage, seulement cette région n’est pas aussi susceptible de se dilater pendant l’acte de la diges- tion. L’intestin décrit dans l’intérieur de la masse hépatico-her- maphrodite les circonvolutions suivantes : de l’extrémité de l'estomac il se dirige postérieurement, monte ensuite sur l'amas glandulaire en se rapprochant du bord gauche, forme un petit contour sur la face antérieure de ces glandes, remonte au-dessus, et suivant le bord interne de l’organe de Bojanus, vase Lerminer sur le côté droit du corps, dans un petit enfonce- ment en arrière dé l'appareil respiratoire. La partie terminale de l’intestin est libre sur une longueur d'environ 2 millimètres; aussi les parois de cette région sont- elles beaucoup plus fortes. La couche musculaire, insignifiante dans tout le parcours du canal intestinal, est constituée ici par deux couches, une de fibres longitudinales, l'autre de fibres transverses, toutes deux assez épaisses, la dernière surtout, qui forme à l’extrémité même un anneau musculaire, sorte de sphincter. L’enveloppe externe est de nature conjonctive ; la mem- brane épithéhale de lestomac se prolonge jusqu’à l’anus, et les cellules vibratiles qui la constituent prennent même un déve- loppement plus fort dans la partie hbre de lintestin. Voici quels sont les débris alimentaires que j'ai trouvés le plus souvent dans l'estomac et dans l'intestin, mélangés à une grande quantité de sable assez fin : des Foramini- fères, des Radiolaires et des Diatomées, qui semblent former la base de l'alimentation du Gasteropteron; j'y ai vu aussi des débris de spicules ayant appar lenu à diverses espèces d’Éponges. Avant de parler des glandes annexes du tube digestif, je crois devoir dire un mot des principaux muscles qu se rattachent à cet appareil, ou plus exactement à une partie de cet appareil, car 1l ny a guère que la trompe et le bulbe qui en présentent quelques-uns d'assez développés. Nous trouvons d’abord une 30 VAYSSIÈRE. série de muscles s’insérant, d’une part tout autour du commen- cement du bulbe, d'autre part à la face Interne des téguments voisins de la bouche ou sur les parois de la trompe : ces muscles sont destinés à porter en avant le bulbe, et par suite à faire saillir la trompe. On aperçoit ensuite une paire de muscles dont les points d'insertion antérieure se trouvent autour de la bouche près des précédents, mais un peu plus latéralement, et dont Pin- sertion postérieure sur le côté droit (ou gauche) du bulbe a lieu au point où prend naissance le second renflement de cet organe. Enfin on remarque deux bandes musculaires assez grêles qui s'insérent à la face inférieure de la masse buccale et qui ont leur second point d'insertion en arrière sur les téguments pé-. dieux: ce sont les muscles rétracteurs du bulbe. 2 Glandes annexes du tube digestif. Les glandes annexes de l'organe de nutrition sont de deux ordres, les glandes salivaires et le foie. On pourrait aussi ajouter à celles-ci les glandes unicellulaires qui entourent l'ouverture buccale et qui sécrètent constamment du mucus; mais je préfère en parler dans le chapitre suivant, en m’occu- pant de l'organe glandulaire de extrémité du pied, organe qui produit aussi du mucus en abondance. Glandes salivaires (1).— Chez le Gasteropteron, les glandes salivaires forment deux longs sacs, blanc hyalin, sans rami- fications, mais présentant de simples mamelons peu prononcés, qui me paraissent être dus aux contractions de ces organes et n'avoir aucun rapport avec la constitution des glandes. Nous avons déjà dit que ces annexes du tube digestif sont placées une de chaque côté de l’œsophage, et qu’elles le suivent dans toute sa longueur sans contracter aucune adhérence avec lui, si ce n’est tout à fait à leur extrémité, sur une partie que l'on peut considérer comme étant le commencement de lesto- mac. Ces deux glandes viennent s'ouvrir dans la cavité buccale Ne les ie), 10l. set lis. .18. ARTICLE N° 1, ANATOMIE DES BULLIDÉS. 31 A par un conduit assez étroit, au-dessus de la radula, sur les côtés du point d’origine de l’'œsophage. Chaque glande est à peu près cylindrique, elle conserve le même diamètre sur toute sa longueur, sauf à ses deux extré- mités : l'extrémité postérieure diminue et s’aplalit un peu pour que sa surface d’adhérence soit plus grande ; l’extrémité anté- rieure ne change pas de forme, mais ne présente, lorsqu'elle s'appuie sur le bulbe, qu’un simple conduit très étroit. Les parois de ces organes glandulaires offrent, à la face interne de leur énveloppe générale de nature conjonctive, une couche musculaire très faible, dont on ne peut guère aper- cevoir sous un fort grossissement que les fibres longitudinales. La couche glandulaire qui vient ensuite tapisse tout l’intérieur du sac, ne laissant au milieu qu’un canal assez grand, destiné au transport vers la bouche du liquide sécrété. Cette couche est formée de deux rangées superposées de cellules (1), hyalines, irrégulières, assez grosses, présentant chacune dans leur intérieur un nucléus très visible au milieu d’un liquide incolore tenant en suspension de nombreuses granulations. Je n'ai pas à entrer dans des détails sur le fonctionnement de ces organes et sur leur utilité physiologique, car ils rem- plissent chez le Gasteropteron le mème rèle que leurs homo- logues chez les autres Mollusques. Foie (2).— Cet organe ne forme pas chez notre animal une clande compacte, ni très volumineuse, débouchant en un seul pomt de lestomac, comme on peut l’observer dans la majorité des Opisthobranches ; mais 1l se trouve constitué par un certain nombre de glandes complètement séparées, ayant chacune un conduit particulier s’ouvrant directement dans l'estomac et dont les ramifications s’enchevêtrent les unes dans les autres. Par lenchevêtrement de leurs lobes, ces glandules secondaires forment cependant une seule masse compacte, qui, de prime abord, ne laisse pas deviner cette subdivision de l’or- (Aie 49 (2) Fig. 9, F., et fig, 8, même lettre, de 19 VAYSSEIRRE. oane hépatique (1). Un peu en arrière et au-dessus du foie, on aperçoit la glande hermaphrodite, dont les ramifications pénè- trent dans les vides laissés par celles des tubes hépatiques, produisant alors avec ces organes une masse splanchnique qui occupe la majeure partie de La cavité postérieure du corps. Dans cette masse se trouvent logés PIE ou moins profondément l'estomac et l’intestin. La coloration du foie est un peu variable suivant les mdividus que l’on examine: tantôt elle offre une teinte jaune mélan- gée à du gris verdâtre, ou bien elle est brune dans son ensemble, ou enfin elle présente la réunion des teintes géné- rales jaune et brune, et avec cela de nombreuses ponetuations rouge orangé, disséminées sur toute la face extérieure seulement; car, dans les parties des lobes qui sont en contact les unes avec les autres, nous ne voyons plus qu’une coloration jaune brunâtre dominant et masquant toutes les autres. Quant à la constitution du foie, nous observons dans cha- cune des glandules hépatiques, au nombre de dix ordinaire- ment, les subdivisions adoptées en lobes, lobules et acim, dénominations qui indiquent seulement des parties plus ou moins étendues de la glande sans leur attribuer des fonctions différentes. Les acini qui forment les dernières ramifications des glandes hépatiques sont de petites poches, sortes de cæcums dont la fine membrane externe, de nature conjonctive, est lapissée par un parenchyme à éléments cellulaires assez gros. Ge sont ces cellules qui constituent les véritables élé- ments du foie. Au centre de chaque acinus se trouve une petite cavité où s'accumulent les produits de désagrégation du parenchyme, lesquels, par une série de conduits excréteurs dont les dimen- sions augmentent en se rapprochant de l'estomac, arrivent en dernier lieu dans cet organe par un canal commun à toute la glande. Par suite de la position de l’estomac sur les téguments (1) Fig. 22. Dans cette figure, j'ai donné la coloration de ces éléments vus par transparence. ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 33 pédieux, les derniers conduits récepteurs de ces glandes viennent s’aboucher sur les côtés et sur la face dorsale de cette région du tube digestif. Dans la figure générale que nous don- nons de cet appareil, nous avons représenté la face dorsale de l'estomac, tandis que la figure 20 nous offre le côté ventral ouvert, pour montrer la disposition des orifices hépatiques. Dans ce dernier dessin, on peut voir la soudure des parties terminales de deux et même trois conduits à leur arrivée dans la cavité stomacale. Si l’on transporte sous le microscope quelques débris du foie, arrachés surtout près de sa face externe, on aperçoit des éléments cellulaires polymorphes (1) et diversement colorés. Toutes ces cellules hépatiques contiennent de petites vésicules de dimensions diverses et dont l'intensité de la teinte jaune est très variable : tantôt elles sont d’un jaune très pâle, tantôt d’un jaune d’or assez foncé. Ces vésicules peuvent être répandues dans toute la cellule ou former un petit amas au centre : d’or- dinaire, dans la même cellule, elles sont toutes de la même grosseur; parfois au milieu des petites on en voit de beaucoup plus grandes. Quelques-uns de ces éléments cellulaires du foie sont gris sombre. IT. — GLANDES INDÉPENDANTES. Je désigne sous cette dénomination tous les organes glandu- aires qui ne sont pas directement r és à un appareil I q t directement rattachés à un appareil quelconque : ce sont les glandes à mucus de louverture buccale, ainsi que la glande postérieure du pied, l'organe de Bojanus, et la glande rouge ou glande indéterminée du Gasteropteron. 1° Glandes circumbuccales et glande postérieure du pied. Glandes circeumbuccales. — Je n’ai pas cru devoir représenter séparément quelques-unes de ces glandes, vu qu'elles ont la mème constitution que les éléments de la glande postérieure ANN. SC. NAT., JANVIER 1880. IX. 3. — ART. N° f. 34 VAYSSIÈRE. du pied, et que, chez le Doridium, elles se trouvent beaucoup plus développées que dans le type qui nous occupe. Ces glandes sont disposées dans les téguments qui entourent l'ouverture de la trompe, et aussi en grande partie à l’intérieur même de la première cavité du corps, où elles forment des amas légèrement blanchâtres, hyalins et plus ou moins consi- dérables ; celui qui repose sur la face inférieure de la cavité est assez volumineux, il s’étend jusqu'au commencement du bulbe (fig. 10, g/.c.). La forme de ces glandes est assez variable : les unes sont sphériques, d’autres sont ovoides ou piriformes; toutes se ter- minent par un Conduit excréteur qui vient s'ouvrir à l'entrée de l’orifice de la trompe, dans cette espèce de vestibule du tube digestif dont nous avons parlé plus haut. Les parois externes de ce vestibule, vues au microscope, offrent une multitude de pores qui sont les orifices excréteurs des glandes. Le conduit peut être plus ou moins long, suivant que l’organe se trouve dans les téguments ou à l’intérieur de la cavité du COTps. Si l’on porte sous le microscope quelques-unes de ces glandes, on observe que leur contenu, très hyalin, se compose de quelques vésicules offrant chacune un nucléus, un nueléole et des granulations en suspension dans un liquide incolore. J'avais été tenté tout d'abord de prendre ces organes pour des glandes unicellulaires; mais, après une série d'observations, J'ai été amené à modifier ma première manière de voir. L’enveloppe externe de la glande doit être à l’origine celle d’un élément cellulaire ; mais bientôt son contenu se condense, et alors nous avons au milieu de sa cavité une vésicule nucléée et nucléolée, à contenu granuleux. Cette vésicule donne nais- sance par scissiparité à deux nouvelles vésicules qui se seg- mentent à leur tour... Si toutes ces vésicules demeuraient dans l'enveloppe commune, bien que celle-ei acquière des di- mensions un peu plus considérables, cette enveloppe ne pour- rait bientôt plus les contenir; mais certaines de ces glandes ARTICLE N° Î. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 39 se désagrègent, et leur substance granuleuse provenant des vésicules s'écoule et forme la mucosité qui entoure toujours la trompe du Gasteropteron. Ces glandes n’en demeurent pas moins d’une très grande simplicité, sans être de véritables organes unicellulaires, comme on pourrait être porté à le croire, si les vésicules de celles que l’on observe s'étaient toutes erevées : ce qui arrive assez fréquemment. Il resterait à se rendre compte de leur fonction. Possèdent- elles un rôle physiologique, ou bien plutôt sont-elles utiles dans la préhension des êtres microscopiques qui forment la base de l'alimentation de ce Mollusque? Je crois que l’on doit sans hésitation adopter cette seconde opinion. Glande postérieure du pied. — Cet organe, pas plus que les glandes cireumbuccales, n’a été décrit ni vu par aucun natu- raliste; il n'aurait pas dû cependant échapper au scalpel d'anatomistes tels que Delle Chiaje et Soulevet, puisqu'on peut presque l’apercevoir à l'œil nu, par transparence à travers les téguments pédieux. _ Les éléments de cet organe présentent la même constitution que les glandes cireumbuccales. Ge sont des corps sphériques, ovoides ou piriformes, offrant à leur intérieur des vésicules à contenu granuleux toujours munies d’un nucléus et d’un nucléole. De chacun de ces éléments part un conduit excréteur qui aboutit à un canal plus fort, augmentant de volume à mesure qu’il reçoit un plus grand nombre de ces canalicules et qu’il se rapproche de l’ouverture externe. La glande est formée dans son ensemble par deux amas de ces éléments, indépendants l’un de l’autre, si ce n’est à leur extrémité antérieure, où ilscontractent une certaineadhérence. Les deux conduits excréteurs généraux viennent déboucher dans une cavité allongée qui s'ouvre à la face ventrale du pied par une fissure placée tout à fait à lPextrémité de cette face. La glande, par sa constitution intime, entre dans la catégorie des glandes en grappe. | Autour de l’ouverture externe de cet organe bilobé, on 30 VAYSSIÈRE. observe toujours une grande quantité de mucus, qui se reforme rapidement à mesure qu’on l’enlève. J'ai émis plus haut l’idée que cette glande pourrait bien servir au Gasteropteron à faire une espèce de radeau au moyen duquel il flotterait à la surface de la mer par les temps très calmes et se laisserait entrainer ainsi par les courants. L’opi- nion de Delle Chiaje se trouverait être exacte, lorsqu'il dit « que le Gasteropteron vient flotter à la surface par les temps chauds et sereins, lorsque la mer est très calme ». 2° Organe de Bojanus. Cette glande volumineuse, dont Souleyet n’avait pu recon- naître les fonctions (car il attribuait à la glande rouge le rôle d’organe de la dépuration urinaire), se trouve située sur le côté droit et en avant de la masse splanchnique, qu’elle cache en partie. Elle adhère fortement à la paroi abdominale qui forme le plancher de la cavité coquillière ; elle en fait même parte puisqu'il est impossible de l’en séparer et de lisoler; elle se trouve prise entre les fibres musculaires de cette membrane. L’organe de Bojanus offre une teinte ocre jaune très claire et possède une certaine translucidité, qui est due à son peu d'épaisseur. Vu avec un faible grossissement, on dirait que son contenu est disposé suivant des rayons qui partiraient du milieu de la partie médiane de droite et se dirigeraient vers les bords. J’ai dans la figure 8 représenté cet aspect de la glande, ainsi que dans la figure 26, où cet organe se trouve isolé. Sous un plus fort grossissement et toujours par transpa- rence, on voit une disposition granuleuse (fig. 27), accentuée seulement sur les bords de la glande; vers le centre, nous apercevons au contraire une série de replis auxquels cet organe doit son aspect rayonnant. Si l’on vient maintenant à déchirer le corps de Bojanus, son contenu présente alors une constitu- tion très spongieuse, ne rappelant en rien ce que l’on voit par transparence. | Les éléments cellulaires de cette glande sont sphériques; ils offrent des trainées protoplasmatiques qui circonscrivent des ARTICLE N° {. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 3 yl vésicules complètement hyalines; entre ces vésicules et dans les traînées, on voit des granulations jaune verdâtre, très petites et de forme irrégulière. Ces granulations sont rapide- ment dissoutes par les acides. Nous n’avons jamais vu dans le corps de Bojanus de cristaux d’acide urique comme en pré- sente souvent le même organe chez le Phuline. Il nous reste à parler du point de sortie des produits de la glande, ouverture que nous avons recherchée pendant long- temps. Sur les parois externes de l’organe de Bojanus, on remarque en avant de l’anus un point noir dont la présence est con- stante; plusieurs fois Je lai observé sous un fort grossisse- ment. Je me suis ässuré de sa position dans les téguments de la glande, mais il m'a été longtemps impossible d’apercevoir une ouverture quelconque. Je fis macérer pendant un ou deux jours une partie de la glande, celle où se trouvait le point noir, pour arriver à détacher plus facilement la membrane d’enveloppe sans trop la tirailler. Je réussis ainsi, après quelques essais, à voir au milleu du point noir cinq ou six petites ouvertures qui mettent en communication l’intérieur de la glande avec l'extérieur. Ce point, de forme ovale, à contours un peu irréguliers, est formé par un amas de fines granulations pigmentaires ana- logues à celles que l’on observe dans l’œil et ayant ia même coloration violet noir. Cette glande urinaire offre un riche réseau veineux, ou plutôt un système veineux lacunaire très développé, qui est dû à l’afflux du sang dans cet organe. Chez le Gasteropteron comme chez beaucoup de Mollusques, tout le sang vemeux, en se rendant à la branchie, traverse l'organe de Bojanus pour se débarrasser de tous les principes non assimilables (acide urique, urates). | 3° Glande rouge, ou glande indéterminée. Cette glande a attiré, par sa belle couleur rouge, l’attention de tous les naturalistes qui ont fait l’anatomie du Gasteropteron ; 38 VAYSSIÈRE. la vivacité de sa teinte permet de l’apercevoir, même par trans- parence, à travers le manteau. … Delle Chiaje, qui en a parlé le premier, dit : « Sur le même (le foie), se trouve une petite poche longue etramifiée, contenant une substance rougeâtre ; je suis convaineu qu’elle a une issue par le petit canal (le flagellum) qui pend au-dessus du corps ». Souleyet, sans commettre la même erreur que le naturaliste napolitain, prenait cependant cette glande pour l’organe de Bojanus. Malgré toutes les recherches que j'ai faites pour parvenir à connaître ses fonctions, il m'a été impossible d’arriver à une opinion bien arrêtée. Cette glande me parait, d’après sa con- stitution, être l’analogue de la glande indéterminée que M. Lacaze-Duthiers a décrite chez le Pleurobranche. Nous retrouverons cette même glande chez plusieurs autres types de Bullidés. | Je vais donc me contenter d’en donner maintenant une simple description, en attendant de pouvoir en déterminer le rôle au cours des recherches que je continuerai sur les autres genres de Tectibranches. Cette glande s'étend, d’une part sur la portion de l'intestin qui monte au-dessus de la masse splanchnique et un peu à droite, d'autre part sur les parois de la poche copulatrice. La veine branchiale, en se rendant au cœur, passe sous la déli- cate membrane d’enveloppe de cette glande et y adhère. Les bords en sont très finement découpés, et les petites ramifications ainsi formées atteignent quelquefois des dimensions assez fortes. Vue sous un grossissement moyen, laglande a un aspect oranuleux à peine sensible. Si lon observe avec un très fort objectif un de ses débris, on voit qu'elle est formée par une multitude d'éléments cel- lulaires, sphériques comme ceux de l’organe de Bojanus, mais beaucoup moins gros, offrant dans leur intérieur des granula- tions grisätres, et d'autres granulations d’une belle couleur rouge carmin : ces dernières sont souvent assez grosses. Elles ARTICLE N° À. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 39 consistent quelquefois en de petites ponctuations à peine visibles sous ce grossissement. Si l’on traite les éléments de cette glandé bar un acide quel- conqué, on voit les granulations disparaitre instantanément. Cétte glandé paraît avoir son point dé sortie dans le voisi- nage des organes de la génération. Seräit-ce même dans la ma- trice ? ou dans une partie voisine ? C’est ce que jé ne pourrais affirmer. Son point de sortie, une fois bien connu, pourra faci- lement mettre sur la voie de sa fonction physiologique. TT. -— APPAREILS RESPIRATOIRE ET CIRCULATOIBE. 4° Organes de la respiration. Branchie. — L'appareil réspiraloire consiste en une plume branchiale, formée par une série de lamelles gaufrées, plus ou moins libres à leur extrémité. C’est par extension que j’em- ploie l'expression de plume branchialé ; ét réalité, cet organe ne représente que la moitié lonigitudiñale d’une plume; ce qui a amené Souleyet à dire qu’elle est semi-pennée. Les lamellés branchiales $’'insèrent par leur base à l’axe dela plume, etelles adhèrent par leur bord interne à un prolohgement métnbraneux des téguments, assez large aü point d'insertion de la branchie, mais diminuant rapidement en se dirigeant vers la pointe de celle-ci. Pour apercevoir Ce prolongeïent, il faut ou renverser l’orgañe respiratoire sur le dos, où séparer la branchie du corps et observer sa face interne : ce dernier moyen est bien préférable au précédent, et doit toujours être employé lorsque aucune raison n'empêche de faire cette section. On observe alors que les premières lamelles branchiales, à partir du corps, ne dépassent pas le bord postérieur de la mem- brane (le bord antérieur se confond avec l’axe de la plume), tandis qu’à partir de la septième ou de la huitième lamelle, jusqu'à l’extrémité, elles dépassent plus ou moins ce bord sui- vant le rang qu’elles occupent; les dernières même n’adhèrent qu'à l'axe de la branchie. L’organe respiratoire est assez nettement visible à l'extérieur ; 40 VAYSSIÈRE. le rebord rudimentaire du manteau que nous avons décrit en parlant de l’aspeet externe de l’animal en cache à peine une partie : sa directionest d'avant en arrière et de haut en bas, sa pointe vient s’appuyer sur les téguments de la parapodie de droite. La branchie cache et ferme en quelque sorte la cavité du corps où viennent s'ouvrir l’anus et leconduit excréteur de l’or- gane de Bojanus ; immédiatement en avant de son point d’in- sertion, se trouve l’orifice génital, et très probablement aussi l'ouverture qui met en communication l'appareil circulatoire avec l’extérieur. : Le nombre des lamelles varie entre 20 et 26. Chacune d’elles présente l'aspect que j'ai essayé de rendre dans la figure 37; la lamelle représentée a été prise sur le milieu de l’organe. Nous voyons en « le prolongement membraneux auquel adhère le côté interne de la lamelle; en f se trouve l’axe de la plume branchiale. D’après cette disposition, il est facile de se rendre compte du rôle de ces deux parties, la membrane et l’axe. Près du bord postérieur de la membrane (inférieur dans la fig. 37), dans l’épaisseur des tissus, setrouve le vaisseau sanguin (V.v.) con- tenant le sang veineux, et le distribuant dans chaque lamelle au moyen d’une veine qui monte vers l’axe en envoyant le sang dans les parties gaufrées de celle-cr. Un vaisseau artériel longe le bord externe de la lamelle, reçoit le sang vivifié, et le porte dans le vaisseau artériel (V. 4.) qui occupe l’axe et qui se dirige vers le cœur. ‘ Les lamelles sont recouvertes par un tissu qui devient exces- sivement fin et délicat sur les parties gaufrées, de façon à per- mettre l'échange des gaz. Ces parties gaufrées ou replis fusiformes, que l’on dirait tout d’abord indépendants les uns des autres et permettant à l’eau de circuler entre eux, sont tous en rapport avec leurs voisins, sans laisser la moindre ouverture; ils présentent de nombreux plis destinés à augmenter l'étendue de leur surface respiratoire. Ces replis fusiformes sont au nombre d’une vingtaine sur chacune des deux faces de chaque lamelle. ARTICLE N° Î. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 41 La coloration de la plume branchiale est orangé très clair ; sur son axe, ainsi que sur les bords externes des lamelles, on observe des ponctuations rouges plus ou moins abondantes, 29 — Organes de la circulation. N'ayant pu que rarement me procurer des individus bien vivants, j’ai dû injecter avec beaucoup de soin mes animaux; dans certains cas c’est avec peine que J'ai pu suivre divers vaisseaux, aussi il à pu m'arriver de faire quelques erreurs. Toutefois mes descriptions et mes dessins s'accordent assez avec les figures que Souleyet a données de l'appareil circula- toire. Parmi les lacunes que présente cette partie de ma mono- graphie, je signalerai celle ayant rapport à la connaissance du vaisseau sanguin qui fait communiquer l'appareil circulatoire avec le milieu ambiant. [l m'a été impossible de voir ce système que M. Lacaze-Duthiers a si bien décrit dans sa monographie du Pleurobranche. Je crois cependant que l’orifice externe du sys- tème aquifère du Gasteropteron se trouve un peu au-dessus de l'ouverture génitale, dans une partie des téguments qui n’offre jamais de points rouges. À. Système artériel. — Cœur.— L’organe central de la circu- lation se trouve enfermé dans un péricarde dont les parois sont formées en avant par le diaphragme, au-dessus par le plancher de la cavité coquillière, et en arrière par la membrane qui recouvre la masse splanchnique. Cette poche protectrice du cœur, placée tout à fait à la partie antérieure de la seconde ca- vité du corps, est nécessairement très vaste pour permettre à l'organe central dela circulation de ne pas être gêné dans ses mouvements. Le cœur est disposé suivant le grand axe du péri- carde et transversalement par rapport au corps; le ventricule serait un peu dirigé vers les téguments dorsaux, et par suite un peu plus haut que l’orallette. Ces deux cavités du cœur se reconnaissent facilement à la constitution de leurs parois. La faiblesse de celles de l’oreil- lette est en rapport avec son rôle de pompe aspirante, puisqu'il consiste surtout à se dilater pour produire un appel au sang 49 VAYSSIÈRE. artérialisé venant de la branchie ; tandis que le ventricule, qui lance le liquide sanguin dans toutes les parties du corps, a be- soin d'être muni de muscles puissants pour remplir ses fonc- tions de pompe foulante. L’oreillette est un peu plus longue que le ventricule, mais elle offre un diamètre bien moindre, et semble être la continuation du canal qui lui amène le sang de l'organe respiratoire. Ce n’est que par l'observation au micros- cope qu’il est possible d’en bien distinguer les limites du côté de la branchie. Le vaisseau sanguin n'offre presque pas de fibres musculaires avec un grossissement moyen, tandis que les parois de l’oreillètte présentent un véritable réseau musculaire très fin, qui s’accentue en se rapprochant du ventricule. Cette seconde partie du cœur, le ventricule, que J'ai désignée dans toutes mes figures par la lettre c, attire immédiatement l'attention par sa teinte blanc jaunâtre et sa forme presque cir- culaire; ses parois sont beaucoup plus épaisses que celles de l'oreillette. Il possède des muscles assez forts, partant de ses deux extrémités et formant dans l'épaisseur mème des parois un réseau très complexe que l’on peut fort bien apercevoir sous un faible grossissement. Au point de jonction des deux parties de l'organe central, se trouvent des valvules formées par des prolongements muscu- laires et destinées à empêcher le retour du sang dans Poreil- lette, lorsque le ventricule se contracte. Aorte. — C’est dans un tronc assez volumineux, l'aorte, que le ventricule projette le liquide sanguin. Ce tronc se bifurque à une très faible distance du cœur : l’une de ses branches, pas: sant sous le péricarde, se dirige en avant, c’est l’aorte anté- rieure; l’autre monte au-dessus de la masse ph ae c’est l'aorte postérieure. L’aorte antérieure se dirige immédiatement vers l'ouverture que présente le diaphragme, pour pénétrer dans la prémière cavité du corps où elle produit un grand nombre de rameaux destinés à porter le sang dans presque tout l’organisme; car l’autre trone aortique ne se ramifie que dans les organes con- tenus dans la seconde cavité. ARTICLE N° À. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 45 Une fois dans l’intérieur de la cavité, elle suit le côté droit de l’œæsophage, passe sous le bulbe buccal, et va se terminer en se bifurquant dans les téguments qui entourent l’orifice de la trompe. Dans ce parcours l'aorte antérieure donne naissance à plusieurs artères importantes que nous allons décrire. 4° L’artère de l’organe copulateur (4. v.), qui part de l'aorte presque à son entrée dans la cavité antérieure, se dirige vers le fond de la gaine péniale, et donne en ce point deux ramifica- lions principales allant, l’une sur le tube plusieurs fois replié qui constitue la glande prostatique; l’autre suit la gaine pé- niale jusqu'aux téguments du corps, en donnant aux enveloppes de la gaîne quelques ramifications secondaires. 2° Les orandes artères pédieuses prennent naissancé, une de chaque côté de l’aorte, un peu au-dessus de l'artère précé- dente : ce sont les vaisseaux sanguins les plus forts de l’orga- nisme. Comme chacune se bifurque à peu de distance de son point de sortie, nous allons étudier les deux branches sépa- rément. L'artère antérieure (&. P.) est la plus forte des deux, et elle distribue le sang dans la parapodie qui se trouve de son côté ; elle se dirige un peu obliquement, puis elle s’incurve en s’ap- puyant sur le plancher de la première cavité, et pénètre dans les téguments. Elle produit quatre troncs secondaires principaux. Le pre- mier (1) prend naissance vers le milieu de la courbure, du côté convexe, se dirige latéralement, mais en avant, et se ramifie dans les tissus de la parapodie qui sont voisins de la tête. Un second (2), plus fort que le précédent, donne de nom- breuses ramifications dans toute la partie latéro-antérieure de la membrane aliforme. Le troisième tronc (3) va irriguer la partie latérale moyenne de la parapodie, tandis que le quatrième, qui n’est que la conti- nuation du tronc prineipal, envoie toutes ses ramifications dans l'épaisseur des tissus de la région postérieure de ce même organe. 44 VAYSSIÈRE. L’artère (a. p.) qui forme la seconde branche produite par la bifurcation de la grande artère pédieuse de ce côté, se dirige, presque parallèlement à la ligne médiane du corps, vers l'extrémité du pied, en donnant latéralement de nombreuses ramifications dans les tissus du pied, et elle complète ainsi la vascularisation artérielle de la moitié de cette région du Corps. 3° L’aorte antérieure donne un peu plus haut deux troncs symétr iquement placés : ce sont les artères du disque cépha- lique, qui se ramifient dans toutes les parties de cet organe protecteur de la tête. 4° A côté des précédentes artères, 1l en sort deux nouvelles qui se répandent sur le bulbe buccal et se prolongent sur les parois de l’œsophage. L’extrémité de l'aorte antérieure (qui, comme nous l’avons déjà dit, se bifurque) complète le système artériel de la région céphalique en se ramifiant dans les tissus voisins de l’ori- fice buccal, au milieu des glandes que nous avons décrites. L’aorte postérieure est moins volumineuse que l'aorte anté- rieure et ne donne pas de branches aussi fortes. En sortant du tronc commun aortique, elle se dirige un peu à gauche; puis en se rapprochant un peu de la ligne médiane, elle passe sur la massehépatique entre les deux replis intestinaux qui y sont engagés, puis elle descend, et contourne la partie postérieure de la masse splanchnique. Les principaux vaisseaux qu’elle produit sont : 4° L’artère stomacale, qui prend naissance un peu en arrière de la bifurcation, descend le long de la masse dés en se dirigeant à gauche; puis, arrivée sur l’estomac, elle s s’y ramifie etenvoie des prolongements à l'intestin. % L’'artère hépatique principale naît sur le côté gauche de l'aorte et se bifurque en passant sous cette partie de l’intestin ; une de ses branches pénètre dans la masse du foie, l’autre se ramifie sur le côté gauche de cette glande. 3° La première artère génitale se forme sur le côté droit de l'aorte, à la hauteur dela branchie, et se dirige vers les organes ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 45 de la génération (utérus, glandes annexes), en passant sous l'organe de Bojanus. 4 La seconde artère génitale ne donne en réalité qu’une partie de ses ramifications aux organes génitaux (conduit effé- rent) ; les autres vont se perdre dans le corps de Bojanus et au milieu des lobes hépatiques du côté droit. Les autres artères ah, ak', et ah", ainsi que les prolon- gements de l'aorte, se ramifient dans la partie terminale de la masse hépatico-hermaphrodite, les unes davantage dans la glande génitale, les autres surtout dans le foie. Quelques rami- fications des divers troncs de l'aorte vont aussi vasculariser les téguments de cette partie du corps. Cette partie de l’appareil circulatoire est très facile à étudier dans certaines régions du corps, parce que les injections réus- sissent ordinairement : ainsi les parapodies, le pied et l’enve- loppe tégumentaire de la seconde cavité du corps nous offrent toujours un réseau des plus complexes. Autour des organes internes nous avons un système lacunaire aussi développé que celui que M. H. Milne Edwards a figuré chez l’Aplysie; presque toute la première cavité du corps forme un grand sinus veineux qui enveloppe principalement le bulbe; dans la cavité postérieure nous trouvons aussi un second grand sinus. Toute la moité droite de la figure #1 est consacrée au système veineux des téguments céphaliques et pédieux. Cette partie du disque céphalique nous offre une multitude de ramifications qui s’anastomosent les unes avec les autres, et aboutissent à trois troncs veineux principaux, dont le médian (sc), commun aux deux moitiés du disque, possède un diamètre plus considé- rable que les deux autres qui sont latéraux. Ces trois troncs se rendent au grand sinus qui entoure le bulbe. Dans la région pédieuse et suivant l’axe du corps, nous trou- vons une veine énorme qui reçoit le sang provenant du réseau des parties postérieure et moyenne des parapodies et du pied ; un tronc collecteur principal (n° 1) aboutit à la partie anté- rieure de cette veine. 46 VAYSSIÈRE. Deux troncs parallèles, que nous avons désignés par les n° 2 et 3, reçoivent le sang de toute la portion antérieure de la parapodie, et l’amènent directement au grand sinus péri- buccal (gs). Le liquide sanguin veineux de toute la cavité antérieure du corps et de la face ventrale de l’animal passe au moyen d’un vaisseau assez gros, mais très court, dans la seconde cavité, et se dirige vers la base de l'organe de Bojanus, dans lequel il se répand. Les téguments du sac viscéral offrent aussi un réseau vei- neux très développé : la veme vx, produite par la jonction des deux troncs v' et #”, reçoit le sang de toute la partie dor- sale et latérale gauche du manteau, tandis que la veine v/ reçoit celui de la partie latérale droite et inférieure de ces mêmes téguments. Ces deux troncs veineux se dirigent vers le sinus de la seconde cavité du corps, où aboutissent aussi les veines de tout le reste du sac viscéral; du sinus, le sang se rend dans l’organe de Bojanus. Nous voyons donc que dans cette glande passe tout le liquide sanguin venant de diverses parties du corps; là il se débarrasse des principes non assimilables dont il s’est chargé dans son parcours, moins l'acide carbonique. Du corps de Bojanus, qui joue le rôle d’un organe rénal, le sang se rend directement au vaisseau inférieur de la branchie. B. Circulation branchiale. — Dans la description de l’or- gane respiratoire nous avons déjà parlé de la disposition des deux troncs vasculaires qui reçoivent, l’un le sang veineux venant du corps, l’autre le sang artérialisé ; aussi nous ne les décrirons que très brièvement ere ce paragraphe. Le premier occupe le bord postérieur de la membrane qui fait partie de l’organe respiratoire, et donne naissance dans le côté interne de ee lamelle à une veine, d’où le sang se répand ensuite dans les replis fusiformes; après s’être débar- rassé de son acide carbonique et s'être chargé d'oxygène, le liquide sanguin se rend au second tronc (V.@.) par une veine qui suit le bord externe de la même lamelle. ARTICLE N° {. ANATOMIE DES. BULLIDÉS. 47 Ce tronc vasculaire V.a. pénètre dans la cavité du corps jusqu'au péricarde , où se trouve l'oreillette à laquelle il aboutit. Telle est la no générale de l'appareil circulatoire du Gasteropteron ; je regrette de n'avoir pu la donner aussi com- plète que je l’aurais désirée, mais d’une part la rareté des imdi- vidus bien vivants, d'autre part la petitesse de ces animaux m'ont rendu ces recherches très difficiles. CHAPITRE V. ORGANES DE LA REPRODUCTION. L'hermaphroditisme est aussi complet que possible chez le Gasteropteron. Non-seulement nous trouvons chez cet animal une glande dans laquelle le même acinus donne naissance à des éléments mâles et femelles, mais encore c’est un canal unique qui porte ces produits vers l'ouverture génitale (4). Arrivés en ce point, tandis que les ovules, une fois fécondés, sont directe- ment expulsés au dehors, les spermatozoïdes, pour se rendre dans l’organe copulateur qui est placé près de la bouche, sont obligés de suivre une gouttière ciliée située sur le côté droit de l’animal. Le professeur Gegenbaur, dans le paragraphe consacré à l'étude des organes de la génération des Céphalophores possé- dant une glande hermaphrodite, établit (p. 581) (4) pour ces organes trois divisions basées sur les différences qu’offrent les canaux excréteurs. C’est à la première de ces divisions que se rapportent ceux du Gasteropteron. Ces dispositions des organes annexes de la génération se retrouvent dans tous les Bullidés, ainsi que chez les Aplysiadés. On observe que les organes génitaux proprement dits sont contenus chez notre Mollusque dans la cavité postérieure du corps, tandis que l'organe copulateur se trouve dans la cavité antérieure. Nous ne EEE de çe dernier organe qu'après avoir fait la description des premiers. (1) Gegenbaur, Manuel d'anatomie comparée, trad. franc. de Carl Vogt. 48 VAYSSIÈRE. I. — ORGANES GÉNITAUX PROPREMENT DITS (1). Ces organes comprennent la glande hermaphrodite, le con- duit efférent ou excréteur, et le cloaque sexuel. Comme annexes de la partie femelle de l’appareil, nous trouvons les glandes de lPalbumine et de la glaire, auxquelles on peut ajouter la poche copulatrice, qui est à peu près indépendante. Nous décrirons ces divers organes en suivant l’ordre dans lequel nous venons de les nommer, sauf pour la glande de la glaire, dont nous parlerons avant celle de l'albumine. 1° Glande hermaphrodite. Cette glande est située à la partie postérieure et supé- rieure de la masse splanchnique, dont elle fait partie ; sa colo- ration gris rougeâtre, lorsque l'organe est en pleine activité, la fait reconnaitre très facilement dès que l’on a enlevé les téguments dorsaux. Pendant l'été, elle est très peu visible, sa substance blanche hyaline laissant alors apercevoir par trans- parence la masse hépatique avec laquelle elle se confond. La forme de cette glande est assez variable et dépend aussi de son activité fonctionnelle : réduite pendantla saison chaude à une espèce de croix dont les branches vont se perdre dans les rainures que les lobes du foie laissent entre eux, elle constitue en hiver au contraire une masse compacte ayant la forme d’un segment de sphère à contour irrégulier ; son volume est alors égal au quart de la masse splanchnique. Dans la figure 8, on pourra voir sa disposition lorsqu'elle est en place, et ses rapports avec les organes voisins; dans la figure où j'ai représenté les organes génitaux séparément (fig. 43), la glande n'offre plus la même forme parce que les lobes se sont écartés les uns des autres en s'étendant un peu dans tous les sens. (1) Ces organes n'étant pas également développés en toutes saisons, il vaut mieux, pour les étudier, attendre la fin de l'automne et l'hiver, parce que pen- dant cette période de l’année, la glande hermaphrodite fonctionnant, toutes les anrexes se trouvent alors bien conformées; pendant l’été, la glande demeurant à l'état de repos, les annexes sont atrophiées, ce qui rend leur étude fort difficile. ARTICLE N° {. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 49 L’enveloppe de cette glande étant très mince, le moindre tiraillement la déchire. L'aspect granuleux que présente cet organe est dû aux acini, qui, bien que pressés les uns contre les autres, laissent entre eux des espaces vides représentés par de petites lignes. En dehors de ces lignes, presque imperceptibles à l'œil nu, on en distingue de plus prononcées, séparant les grandes subdivi- sions de la glande. Ici comme pour le foie, les termes de lobes et lobules n’impliquent aucune fonction spéciale; ilsne servent qu’à indiquer des parties plus ou moins volumineuses de l’or- gane hermaphrodite. Passons maintenant à l’examen microscopique d’un de ces éléments ou acini. Il forme un petit cæcum ofirant intérieure- ment, à sa partie périphérique, d'assez grosses sphères consti- tuées par des granulations vitellines jaunâtres, qui sont des ovules assez avancés, rappelant un peu laspect framboisé qu'ils prennent plus tard dans leurs premières phases em- bryonnaires. Au centre de ce cæcum nous trouvons, au milleu de quelques granulations et vésicules hyalines, des faisceaux de spermatozoïdes à divers états de développement. L’acinus se continue à l’intérieur de la glande par un petit conduit, se réunissant avec un ou plusieurs conduits voisins pour aboutir au conduit du lobe; celui-ci se Jette dans un plus grand quiforme le conduit général du lobule. Ce canalà sontour débouche dans un dernier conduit volumineux, superficiel, allant de la périphérie de la glande vers le centre, situé du côté droit ou du côté gauche, suivant la position du lobe, et qui, en se réunis- sant à celui du côté opposé, forme le commencement du canal efférent ou excréteur. Ces divers canaux de l'organe herma- phrodite, surtout les derniers, sont tapissés intérieurement par un épithélium vibratile dont les cellules, à cils assez longs, sont proportionnellement très grosses : c’est grâce au mouve- ment des cils vibratiles, agissant de l’intérieur vers l'extérieur, que les éléments sexuels sont amenés au conduit excréteur. ANN. SC. NAT., JANVIER 1879-80. IX. 4, — ART. N° 1. 50 VAYSSIÈRE. 2° Conduit efférent et cloaque sexuel. Conduit efférent on excréteur.—CGe conduit, qui sert à porter au dehors les produits sexuels, est formé par la réunion des deux canaux récepteurs de la glande génitale. Il est d’abord d’un diamètre assez minime sur une petite étendue (c ef), alors qu'il demeure appliqué contre la face interne dela glande en formant quelques replis. Cette première partie du canal se renfle tout à coup et donne naissance à la région intermédiaire (c/ ef) qui présente un diamètre double. Cette région se continue depuis l’organe hermaphrodite jusqu'aux glandes annexes de l'appareil Lai en passant d’abord entre les lobes du foie, puis sous le côté droit de la masse splanchnique : dans ce par- cours elle décrit plusieurs sinuosités. | Au moment (d'arriver aux organes glandulaires, le conduit efférent reprend brusquement son premier diamètre (c/ ef), adhère à la face supérieure des glandes, de l’albumine et de la glaire en formant plusieurs replis (fig. 42), et vient aboutir de nouveau à un canal très renflé qui constitue la partieinférieure du canal excréteur. Cette dernière partie de appareil se dirige vérs le cloaque sexuel en contractant une adhérence as$ez intime avec la face dorsale de la glande de la glaire; son volume, considérable à l'origine, diminue un peu à mesure que l’on se rapproche du cloaque. La constitution des parois du conduit efférent est la même dans toute son étendue ; nous trouvons dans ses diverses régions, en allant de l’intérieur à l'extérieur: 1° un épithélium vibra- tile qui est la continuation de celui des canaux récepteurs de l'organe hermaphrodite; 2 une couche musculaire formée d’abord de muscles longitudinaux, et au-dessus de muscles circulaires; et 3° une enveloppe conjonctive très lisse, qui de- vient un peu granuleuse dans la derniète partie du conduit. Suivant l'épaisseur de la couche musculaire, le conduit efférent offre plus ou moins de rigidité; dans les deux régions renfées (c'ef et c''ef), où la couche musculaire devient très ARTICLE N° 1, ANATOMIE DES BULLIDÉS. 51 épaisse, nous remarquons une certaine résistance : lorsque l’on tend un peu ces parties, elles reviennent rapidement sur elles-mêmes comme une substance élastique ; au contraire, les régions qui ont un faible diamètre (cef et d'ef) se laissent assez facilement distendre lorsqu'elles sont repliées. La coloration du conduit est d’un blanc nacré ayec une teinte jaune rosé très légère; ce brillant nacréest dû à la couche musculaire : aussi on observe qu’il est beaucoup plus intense dans les parties où celle-ci est plus épaisse. Cloaque sexuel. — C’est dans cette cavité, qui n’est en quelque sorte qu'un dernier renflement du conduit excréteur, que se rendent les ovules et les spermatozoïdes. Ces derniers ne font que la traverser et sont dirigés vers la verge au moyen . d’un mécanisme que nous décrirons en étudiant l’organe copu- lateur; les ovules séjournent un peu dans le cloaque pour subir l’acte de la fécondation et s’envelopper ensuite de couches protectrices albuminoïde et glaireuse. La cavité cloacale est piriforme et un peu aplatie; elle reçoit, outre le conduit efférent, deux autres canaux, l’un venant de la poche copulatrice, l’autre des glandes de l’albumine et de la glaire. Les parois de cette cavité offrent la même constitution que celles du conduit efférent : elles sont cependant un peu plus fortes. L’orifice externe du cloaque sexuel se trouve en avant du point d'insertion de la branchie. 3° Glandes annexes. Passons maintenant à la description des glandes annexes. Glande de la glaire. — Chez le Gasteropteron, cette glande volumineuse, d’une coloration jaune pâle très hyaline, occupe le côté droit et antérieur de la seconde cavité du corps. Elle est recouverte par l'organe de Bojanus et un peu par le foie; cette disposition fait qu'on n’aperçoit pas cet organe si l’on se con- tente d'enlever le manteau. Cette glande est globuleuse; elle est séulement un peu aplatie à sa face dorsale et à sa face ven- trale. 02 VAYSSIÈRE. Elle est constituée par un grand nombre de replis qui lui donnent un peu l'aspect d’une Méandrine. L'intérieur de cet organe présente de nombreuses lacunes communiquant les unes avecles autres, et remplies d’une substance mucilagi- neuse destinée à former le ruban ou sac nidamentaire qui doit protéger les œufs jusqu’au moment de la sortie des embryons contre les actions diverses qui pourraient leur être nuisibles. Les cellules qui forment le tissu de la glande sont prisma tiques et très longues; c’est avec peine que l’on en peut bien distinguer les parois, même sous un fort grossissement. J’ai été obligé dans mon dessin (fig. 44) d'en exagérer un peu les contours, afin d’en bien faire ressortir les caractères. Mises dans l’eau ou dans la glycérine, les cellules de cette glande se gonflent démesurément par l'absorption du liquide. ambiant, et amènent ainsi quelquefois larupture des téguments de l'animal ; l'alcool Door au contraire une légère con- traction de la glande, et c’est à ce liquide qu’il faut s ‘adresser pour conserver cet organe en bon état. Glande de l’albumine. — Cette glande se trouve enchâssée dans la région supérieure de la précédente, avec laquelle elle Fait corps. Sa coloration d’un blanc laiteux et son aspect granuleux permettent d’en bien distinguer le contour. Sa forme est trian- gulaire (triangle isocèle dont la base est tournée vers le cloaque sexuel) ; elle est bien moins grosse que la glande de la glaire. Son tissu est peu résistant et semble s’émietter lorsqu'on le déchire; elle est formée par une quantité de petits corpuscules arrondis, blancs, presque opaques, dont le contenu est granu- leux. Comme dans toutes les glandes en grappe, ces corpus- cules, qui en sont les éléments, versent leur produit dans une série de canaux qui viennent s’ouvrir avec celui de la glande de la glaire dans un conduit très court, qui forme presque un petit prolongement du cloaque. Ces deux glandes ne sont bien développées que lorsque l’or- gane hermaphrodite est en pleine activité de production d’élé- ments mâles et femelles; mais dès qu’il cesse de fonctionner, elles s’atrophient avec toutes les annexes qui les entourent. ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 53 4° Poche copulatrice. La poche copulatrice est formée chez le Gasteropteron par une vésicule assez grosse, d’un aspect plus où moins brunâtre, placée en avant des autres annexes, entre la glande de la glaire et le diaphragme; elle communique avec le cloaque sexuel par un conduit assez court. Les parois de la poche copulatrice, ainsi que celles de son conduit excréteur, sont constituées par une enveloppe externe conjonctive, puis par une couche faiblement musculaire, et à l’intérieur par un épithélium vibratile en communication avec celui qui tapisse le cloaque. Ces parois n’ont pas une couleur bien marquée; car à cause de leur peu d’épaisseur et de leur demi-transparence, elles prennent la teinte du contenu de la poche. S1 l’on ouvre cet organe, on observe une sorte de bouillie brunâtre formée par des mucosités, au milieu desquelles se trouvent des amas de spermatozoïdes, des globules vitellins (1) et des granulations colorées en brun. Ge sont ces derniers corps qui donnent au contenu de la poche sa teinte particulière, dont l'intensité est en raison directe de leur nombre. Quant au rôle joué par cet organe, il a été trop bien élucidé par Baudelot (2), pour que nous ayons à nous en occuper ici. Les spermatozoïdes que l’on trouve dans la poche d’un de ces Mollusques sont indubitablement apportés par l'organe copu- lateur de l’individu avec lequel il s’est accouplé. Il nous reste maintenant à parler de l’organe copulateur. (1) Ces globules vitellins proviennent d’un reflux de débris d’ovules (car des ovules entiers ne pourraient pas y pénétrer) dans la poche copulatrice et de leur * complète destruction dans cet organe. Ces faits ont été déjà signalés chez les Doris par Baudelof, dans son travail sur l’appareil générateur des Mollusques. Chez le Gasteropteron, la disposition de l'appareil génital n’étant pas la même, et ce type n'ayant pas de canal mettant en communication le conduit efférent avec la poche en question, nous ne pouvons admettre l'introduction de ces globules que pendant l’acte de la copulation; ils sont sans doute entraînés avecle sperme. (2) Baudelot, Recherches sur l'appareil générateur des Mollusques gastero- podes, 1863. 54 VAYSSIÈRE. IT. — ORGANE COPULATEUR. Nous avons à nous occuper dans ce paragraphe de l’organe qui introduit dans la poche copulatrice les corps spermatiques, ainsi que des annexes de cet organe. L’orifice vulvaire ne me paraît présenter aucune disposition spéciale concourant à l’acte de l’accouplement : les deux petites languettes que pré- sentent les bords antérieurs de l’orifice, au commencement du sillon séminal, ne doivent jouer qu’un rôle insignifiant lorsque l'animal remplit les fonctions d’individu femelle ; mais 1l n’en est pas de même lorsqu'il devient individu fécondateur. Dans ce cas, ces languettes se superposent plus qu’elles ne le font dans la figure 7, entraînent dans leur mouvement lé reste du contour de l’orifice génital, et ferment ainsi cette ouverture pour empêcher les spermatozoïdes de se disperser dans l’eau am- biante. Les éléments mäles, descendant du conduit efférent, remplissent le cloaque sexuel dont les autres ouvertures doivent être plus ou moins oblitérées, et 1ls sont forcés de s'engager dans la rainure séminale. Dans cette rainure, les mouvements des cils vibratiles poussent les spermatozoïdes toujours en avant et les font arriver à l'organe copulateur. La rainure séminale (rs) représente chez les Gasteropteron, de même que chez tous les Mollusques qui en possèdént une semblable, le conduit déférent ; seulement chez ces animaux le canal est incomplet. [l pourrait se faire que dés types de Bullidés ou d’Aplysiadés, ainsi que d’autres Mollusques voisins de ces familles, présentassent un conduit déférent enfoncé com- plètement dans les téguments; ce conduit serait en quelque sorte une rainure séminale dont les bords se séraient soudés. Notre Bullidé offre un sillon d’une longueur moyenne, l’ori- fice génital étant à peu près vers le milieu du flanc droit de l’animal. Il est dirigé un peu obliquement d’arrière én avant et de haut en bas, et il se trouve caché par le rebord rüdimen- taire du manteau et par le côté droit du disque céphalique. Le fond est tapissé par un épithélium vibratile à cils assez longs ; ses bords ne se touchent pas ordinairement. ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. is) L'organe copulateur est situé dans l’intérieur de la première cavité du corps, appuyé sur le côté droit du bulbe buccal ; son ouverture externe se trouve à l'extrémité de la rainure pres- que au point de jonction des téguments céphaliques et des pédieux. On peut diviser l'organe copulateur en deux parties que nous décrirons séparément : le pénis, avec la gaîne dans laquelle il vient se replier, et la prostate. La prostate (1) est formée chez le Gasteropteron par un tube grêle, assez long et terminé en cæcum, dont les replis re- posentsur les téguments du pied près du côté gauche de l’œso- phage. Ce dernier organe les cache un peu, aussi faut-il l’enle- ver pour suivre la partie qui, passant au-dessous de lui, vient aboutir à la base du sac pénial. La coloration de ce tube est d’un blanc nacré avec une légère nuance jaune; sa consistance est assez rigide, et son diamètre reste à peu près le même dans toute son étendue, sauf postérieurement, où 1l s’élargit un peu. Si nous en observons un fragment par transparence, nous voyons (fig. 36 bis), en allant de l’extérieur à l’intérieur : 1° une membrane conjonctive très fine; 2° une couche mus- culaire composée de muscles longitudinaux et transverses ; 3° une région glandulaire; et 4° une seconde couche muscu- laire composée exclusivement de fibres circulaires. Cette dernière couche forme les parois d’un canal central qui se pro- longe dans le pénis, et qui est destiné à porter au dehors les produits mucilagineux de l’amas glandulaire. La couche glandulaire, qui forme une espèce de manchon, est constituée par plusieurs rangées superposées de petites glandes unicellulaires s’ouvrant séparément dans le canal, Ce canal est-il tapissé à son intérieur par un épithélium vibratile ? C’est ce que je n’ai pu constater de visu, même avec de très forts grossissements. Le canal excréteur se continue dans l’intérieur de la verge, perd ici son manchon glandulaire, et ne laisse aucun vide entre (1) Fig. 33, pr. 56 VAYSSIÈRE. ses deux couches musculaires concentriques ; il diminue peu à peu de volume dans ce dernier parcours, si ce n’est tout à fait à l’extrémité, où il forme un renflement (fig. 35). Pénis et sa gaîne (1). — Le pénis, formé à l’intérieur par la continuation de la prostate, comme nous venons dele dire, pré- sente une couche musculaire externe assez forte, séparée de celle qui sert de parois au canal par un vide Die ou moins large, suivant le point que l’on considère. Ge vide n’est occupé que par des trabécules fibnillaires mettant en communication les deux enveloppes de la verge, et entre lesquelles le liquide sanguin se répand pour mettre en érection cette dernière. Le dessin 36 montre précisément l'aspect d’une coupe transver- sale faite vers le milieu du pénis. Extérieurement, la verge est recouverte d’un épithélium offrant de nombreuses villosités (fig. 35) ; ce parenchyme se continue inférieurement avec celui qui tapisse les parois internes de la gaine. Celle-ci est un simple refoulement des téguments. D'abord peu large vers son orifice, elle se renfle inférieurement pour pouvoir donner asile dans le fond à la verge, qui d'ordinaire est repliée une ou deux fois sur elle-même, comme le représente la figure 33, p. Les parois de la gaine sont très peu musculaires, mais elles offrent, surtout en avant et en dessus, de nombreuses taches pigmentaires rouges, analogues à celles qui couvrent le corps de l’animal ; sa face inférieure en est presque complètement dépourvue. À la base du sac pémial, nous voyons un muscle volumineux se dirigeant en arrière vers les tissus pédieux, au milieu desquels il a son second point d'insertion : c’est le muscle rétracteur (mr) de la verge. Lorsque celle-ci, sous l’action du liquide sanguin qui la pousse au dehors, est sortie par désinvagina- tion, c’est le muscle rétracteur qui la ramène dans sa gaîne. Si Jai un peu insisté sur l'organe copulateur du Gastero- (1) Fig. 33 et 34, p. ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 07 pteron, c’est que tous les naturalistes qui se sont occupés des Mollusques gastéropodes décrivent en général très brièvement cet appareil ; cependant les variations remarquables qu’il pré- sente suivant les types que l’on étudie, variations de forme en rapport avec la disposition de l’ouverture vulvaire, méritent certainement une description complète. Dans la seconde partie de ce travail, au cours du chapitre consacré à l'étude de cet organe chez divers types de Bullidés, on verra combien ces différences sont grandes, même chez des animaux faisant partie d’une même famille. CHAPITRE VE. SYSTÈME NERVEUX. De tous les appareils organiques, le système nerveux est celui qu'il m'a été possible d'étudier le plus complètement. Il est vrai que l’on peut souvent l’observer plus aisément que certains organes glandulaires, même chez des Mollusques assez petits, comme c’est ici le cas ; toutefois ce n’est point cette raison seule qui m'a poussé à décrire le Système nerveux dans ses moindres détails. Cette partie de l’organisme du Gas- teropteron ayant été l’objet d'observations plus complètes de la part de Souleyet et d’une étude spéciale de M. Thering, il me fallait nécessairement, après deux anatomistes aussi distingués, ne laisser aucun point de douteux dans mes descriptions ; c’est du moins ce que j'ai tâché de faire. _ de diviserai l’étude de cet appareil en trois parties : l’une consacrée au système nerveux de la vie animale, la seconde au système nerveux de la vie organique, la dernière à la description des organes des sens. | Ï. — SYSTÈME NERVEUX DE LA VIE ANIMALE. Pour étudier le système nerveux de la vie animale, on pourrait décrire les ganglions du collier œsophagien séparément, et im- médiatement après chacun d’eux les nerfs qui en sortent. À ce genre de description je préfère celui qui consiste à parler 58 VAYSSIÈRE. d’abord de l’ensemble des centres constituant le collier, des commissures qui les relient, des rapports qui existent entre eux et les organes voisins. Je prendrai ensuite les nerfs qui par- tent de chaque centre, et je les suivrai jusqu’à leurs dernières ramifications. pen. Cette méthode me paraît avoir l’avantage sur la précédente d'éviter les répétitions, et de donner dès le commencementune idée générale de l’ensemble de l’appareil. 4 Collier œsophagien (1). Le collier œæsophagien est formé, chez le Gasteropteron, par trois paires de ganglions ou groupes de ganglions nerveux, réu- nis entre eux par plusieurs commissures (2) et connectifs de longueur et de grosseur différentes. Ces paires de ganglions sont : les ganglions cérébroïdes, les pédieux et les viscéraux ; ces derniers forment, d’un côté un groupe de trois ganglions distincts, de l’autre une seule masse où les trois divisions pri- mitives sont plus ou moins visibles, suivant les individus. Ils sont tous placés sur les parties latérales du collier, excepté les cérébroïdes, qui sont un peu plus dorsaux. L’ensemble du collier disposé en avant de la première cavité du corps entoure, sans y adhérer, le bulbe buecal vers sa partie médiane ; lorsque l’animal projette ce dernier organe pour saisir une proie, l'anneau nerveux est bien alors œsophagien. Il est maintenu en place par les nombreux trones qui sortent des ganglions, et aussi par un amas protecteur de cellules hya- lines en rapport avec les téguments. Ces cellules entourent les diverses parties du collier en formant même des couches assez épaisses en certains points; leur aspect et leur forme rappel- lent les glandes hypodermiques (glandes circumbuccales) que (1) Fig. 8 et 47-55. (2) Bien que les significations étymologiques de commissures et de connectifs soient équivalentes, j'emploierai le terme de commissure pour désigner le tronc nerveux reliant deux ganglions de même nom : commissure des gangl. cérébroïdes par exemple ; tandis que je réserverai le mot de connectif pour indiquer les nerfs qui reliént deux ganglions différents : ainsi le connectif cérébr'o-pédieux, le connectif cérébro-viscéral. ARTICLE N° {. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 59 nous avons décrites dans le chapitre IV. Elles me semblent devoir verser un liquide plus ou mois mucilagineux, destiné à amortir les moindres chocs que pourraient éprouver les centres nerveux. Lorsque le collier æsophagien est bien en place, voici quelle est la disposition des centres et des connectifs : Les ganglions cérébroïdes sont en avant; les bords, qui sont externes dans la figure 48, dirigés vers l’ouverture buccale. Au contraire les bords internes se trouvent être tournés en arrière et un peu en dedans ; les connectifs cérébro-pédieux sont antérieurs, et ceux au milieu desquels se trouvent les ganglions viscéraux vont en arrière et bien en dedans. Les ganglions pédieux suivent la direction de leurs connectifs. Dans nos descriptions, pour éviter les complications, nous nous reporterons à la figure 48, qui donne le collier œso- phagien vu sur un seul plan et par la face postérieure, face qui se présente à l’œil de l’observateur lorsque celui-ci, ouvrant l'animal par le dos, rejette en avant le disque céphalique. Les ganglions cérébroïdes, cérébraux, ou sus-æsophagiens, forment des ellipsoides dont le grand axe est obliquement dirigé de haut en bas; ils offrent une couleur blanche un peu hyaline avec une légère teinte jaunâtre. La coloration des centres nerveux étant due au contenu des cellules qui les constituent, il existe pour les ganglions cérébroïdes deux causes qui les rendent blanchâtres : d’abord la présence de très peu de substance pigmentaire dans l’intérieur des cellules; en second lieu, la grande quantité de fibres nerveuses, toujours blanches, disposées entre les cellules et le névrilème des gan- glions. Les cellules de ces centres sont aussi plus petites que dans Les autres. Le névrilème qui les limite est assez résistant, il se continue autour des troncs nerveux. La commissure sus-æsophiagienne qui relie ces deux gan- glions est la plus forte de‘tout le collier : on peut difficilement en assigner les limites, attendu qu’elle est formée en partie par les prolongements des centres eux-mêmes; en réalité, elle n’est pas très longue. 60 VAYSSIÈRE. Nous avons reconnu une seconde commissure intercérébrot- dale qu'aucun naturaliste n’a signalée jusqu'ici, et que nous retrouverons chez les autres types de Bullidés. Cette commis- sure est sous-æsophagienne ; elle accompagne la grosse com- missure interpédieuse et les connectifs cérébro-pédieux, et y adhère presque. Elle est excessivement ténue, et il est très difficile de l’isoler, parce qu’elle est engagée dans les tissus glan- dulaires qui entourent le collier œsophagien. Elle prend nais- sance sur le bord interne inférieur des ganglions cérébroïdes, entre les connectifs cérébro-buccaux et cérébro-pédieux ; elle donne naissance des deux côtés, en sortant des ganglions céré- broïdes, à un nerf quise rend à la trompe. Dans notre figure 47, ne représentant que la moitié droite du collier, on pourra bien en voir les rapports, le groupe des ganglions viscéraux ayant été rejeté complètement en dehors du collier. Les ganglions pédieux ou sous-æsophagiens, placés sur les côtés de l’anneau et inférieurement, reposent sur les téguments du pied ; ils sont presque sphériques, légèrement ovoides. Leur volume est supérieur à celui des ganglions pédieux; leur teinte orangée est beaucoup plus prononcée que chez des précédents, et les cellules nerveuses dont ils sont formés présentent des dimensions plus considérables. Comme 1l ne se trouve presque pas de fibres nerveuses entre leur névrilème et les cellules, ces dernières sont très visibles par transparence. Ces ganglions sont reliés entre eux par deux commissures sous-æsophagiennes de longueur différente. La grande com- missure pédieuse (GC. P.) prend naissance sur les côtés anté- rieurs externes des ganglions, et suit le même trajet que la délicate commissure sous-æsophagienne dont nous avons parlé ; elle est la plus grosse après celle qui relie les ganglions cérébroïdes au-dessus du bulbe, mais elle est six à sept fois plus longue. La seconde (ce. p.), très grêle mais plus grande, a ses points d'insertion sur les parties inférieures et médianes des ganglions pédieux; elle se dirige immédiatement vers les téguments du pied, y pénètre, et demeure ainsi cachée sur la moitié de sa longueur. Du milieu de cette commissure part un ARTICLE N° {. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 61 nerf quise perd dans ces mêmes téguments. Les deux connectifs qui relient les pédieux aux autres ganglions sont : Le connectif cérébro-pédieux, qui met en rapport, comme l’indique son nom, les ganglions pédieux avec le ganglion cérébroïde. I est assez gros, mais pas très long ; il s’insère, d’une part sur le bord su- périeur externe du ganglion pédieux, d'autre part sur le bord inférieur du cérébroïde. Le second connectif met en rapport le ganglion pédieux avec le premier ganglion du groupe viscéral; il est de la même force que le précédent, mais encore il s’insère sur le bord supérieur interne du ganglion pédieux. Les ganglions viscéraux sont constitués, comme nous l’avons dit précédemment, par un groupe de trois ganglions distincts età peu près indépendants à gauche, tandis qu’à droite ils sont enfermés dans un même névrilème. Étudions d’abord le groupe de gauche. Il se compose d’un ganglion basilaire qui semble n'être qu’un renflement du con- nectif cérébro-pédieux interne ; il est fusiforme, sa partie supérieure se rattachant au bord inférieur interne du ganglion cérébroïide par un très court connectif, tandis qu’en dessous il est en rapport avec le ganglion pédieux par le connectif pédieux viscéral. Sur ce premier ganglion naît un second centre à peu près sphérique, presque aussi gros que le premier, dirigé en arrière, et à la suite duquel se trouve le troisième et dernier ganglion, qui est piriforme et qui donne naissance à deux troncs nerveux dont l’un constitue la commissure interviscérale. Nous revien- drons sur cette dernière commissure, qui passe au-dessous de l’œæsophage, en parlant du système nerveux dela vie organique. Le groupe de droite (1) se trouve enveloppé par un même névrilème, et les ganglions, étant pressés les uns contre les autres, ont perdu leur forme respective. Le ganglion basilaire seul est bien reconnaissable; il est situé sur le prolongement du connectif pédieux viscéral, et semble adhérer presque direc- (1) Voyez, pour bien comprendre les dispositions de ces divers ganglions, la figure 47. 62 VAYSSI BE. tement au cérébroïde. Si le connectif cérébro-viscéral a perdu de ce côté en longueur, il prend par contre une largeur consi- dérable. Le second ganglion du groupe est en avant, tandis que le troisième occupe toute la partie postérieure de la masse. Les cellules nerveuses de ces derniers ganglions (ganglions viscéraux) sont très colorées en orangé, ce qui rend ces centres nerveux très visibles, malgré leurs moindres dimensions; ces cellules peuvent devenir très grosses, comme on peut le voir par la figure 50, qui en représente quelques-unes. Il nous reste à parler maintenant d’un tronc nerveux qui naît sur la face postérieure de chaque ganglion pédieux, très près de leur sommet, entre les deux connectifs. Ge tronc, assez étroit, se dirige vers le ganglion cérébroïde en passant au-dessus du connectüf cérébro-pédieux. 1 suit le bord externe du gan- glion et se bifurque bientôt. L’une de ses branches se rend au nerf 5, près de sa base, et se soude avec lui; l’autre va former de même une anastomose avec le nerf 3. Cette double anasto- mose n’a été vue qu’en partie par M. lhering, qui dit, à la page 214 de son ouvrage sur les centres nerveux des Mollusques : « Le nerf 5 est en connexion par une anastomose avec un nerf pédieux. » L'auteur allemand ne parle pas de la seconde ana- stomose et ne figure pas le nerf pédieux en question. Cette par- ticularité assez remarquable se retrouve chez tous les Bullidés que j'ai étudiés. Telle est la disposition des divers centres nerveux du collier æsophagien (1). Nous allons, avant de commencer la descrip- tion des nerfs qui en sortent, indiquer les relations quiexistent (1) Voici quelles sont les dimensions moyennes des centres, des commissures ét des connectifs du système nerveux du Gasleropteron. longueur. 0mm,60 Gangl. cérébroïdes een Omm 43 Conn. cérébro-pédieux.. 1m 9 Gangl. pédieux, diamètre... 02,56 Comm. des g. buccaux.. 8mm,7 Commissure intercérébrale.... 02,45 Comm. interbuccale.... 02,6 Grande commissure pédieuse... 9rm,2 Long. d’un gangl. buccal. 0,45 P, commissure pédieuse ...... 4m, 3 Comm. du g. branchial. 2n5 ( de droite au nerf génital... 5rn,2 Commissure viscérale........ gun 7 | k ? (de gauche à ce même nerf.. 38,5 ARTICLE N° 4. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 63 entre ces centres et les ganglions dispersés dans les diverses parties du corps. Les ganglions cérébroïdes sont en rapport avec les deux gan- glions fl où sortent les nerfs du tube digestif (ganglions buc- caux), par deux longs connectifs prenant naissance sur les bords internes des centres sus-æsophagiens. Le dernier ganglion viscéral du groupe de droite fournit un nerf qui rele le ganglion branchial du collier œsophagien. Enfin la commissure interviscérale produit vers son mi- lieu, un peu à gauche, un tronc qui la met en rapport avec le centre nerveux génital qui se trouve à côté de la glande de la glaire, entre elle et la poche copulatrice, Ces quatre centres forment avec les nerfs qui en dépendent le système nerveux de la vie organique. Etudions maintenant les troncs nerveux (1) qui sortent des divers centres du collier œsophagien. Pour en faciliter la des- cription, nous adopterons le numérotage que M. Ihering a inauguré dans son ouvrage, bien que cette manière de désigner les nerfs soit peu conforme à la position de ceux-ci sur les gan- glions, et semble indiquer une succession très régulière dans leur mode d'insertion, ce qui n'est pas dans la nature. En effet, les nerfs prennent naissance, les uns à la face antérieure, d’autres à la face postérieure, quelques-uns sur leurs flancs, mais jamais tous sur les bords, comme le naturaliste allemand l’a représenté dans sa figure des centres du Gasteropteron. Les ganglions cérébroïdes fournissent les troncs suivants : Le nerf 4 de M. Thering, que nous ne considérons pas comme un tronc proprement dit, puisqu'il sert de connectif reliant le cerveau aux ganglions buccaux, sera déerit plus loin dans la partie consacrée à l'étude du système nerveux de la vie organique. Le nerf 2, ou nerf optique, ne prend pas directement nais- sance sur le ganglion cérébroïde, mais sur le milieu du bord interne du renflement ganglionnaire que l’on observe à La base (1) Cest sur la figure 43, donnant en extier le collier œsophagien, qu'il faut Suivre les descriptions des troncs nerveux, pour bien en apercevoir les rapports. 64 VAYSSIÈRE. du nerf 4. Le nerf optique, grêle et assez court, vient aboutir à l’organe visuel, qui se trouve dans l’épaisseur des tissus du disque céphalique. Le nerf 3 sort du bord supérieur du ganglion. Il se dirige en droite ligne parallèlement à la ligne médiane du corps, et se prolonge jusqu’à l'extrémité du disque en se ramifiant à la face inférieure de cet organe. Toutes les ramifications qu'il donne sortent de son bord externe ; au point d’émergence de la première, qui est la plus forte, on observe la soudure de ce trone nerveux avec la seconde branche du tronc pédieux que nous avons décrit ci-dessus : c’est cette anastomose qui n’a pas été signalée par M. Ihering. Le tronc suivant, nerf #, forme dès son origine un gros ren- flement fusiforme que nous nommerons ganglion tentaculaire, parce que c’est de ce ganglion que sortent les nerfs qui, en se ramifiant à l'infini, innervent presque tout le disque cépha- lique, lequel est le représentant des tentacules. Sur le milieu de son bord interne, ce ganglion donne nais- sance au nerf optique; en dessus ce même renflement gan- glionnaire fournit deux troncs qui se ramifient surtout dans les téguments latéraux du disque. L’un suit parallèlement le nerf 3 en donnant quelques fortes branches qui partent de son bord externe ; l’autre décrit une courbe, et va se terminer au point de jonction du disque et des téguments des parapodies, toujours en fournissant plusieurs branches secondaires dans la région basilaire de cet organe. Le nerf 5 se trouve relié au ganglion pédieux par une des branches du nerf qui sort entre les connectifs pédieux céré- broide et pédieux viscéral ; cette anastomose est la seule qui ait été vue par M. Ihering. Le tronc lui-même innerve au moyen de ses trois branches toute la région immédiatement cireumbuccale. Le nerf 5 naît sur la face antérieure du ganglion cérébroïde, à côté et un peu au-dessous du précédent ; il innerve aussi la région circumbuceale de l'animal, mais inférieurement, tandis que le tronc 5 se ramifie dans la partie dorso-latérale. ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 69 Le nerf 6 est le tronc le plus volumineux de l'organisme ; il prend naissance à la face antérieure latérale externe du gan- ghion cérébroïde, et forme une série de renflements au point de départ de chacune de ses principales branches. Il donne sa première branche après un trajet à peme égal au diamètre du ganglion cérébroïde; ce tronc secondaire innerve tous les tissus des parties latéro-dorsales de l’ouverture buc- cale. La seconde branche distribue ses ramifications nerveuses dans la région latérale de l’orifice de la bouche. Les deux dernières branches du tronc 6,celles qui terminent le nerf de droite dans notre figure 48, fournissent une multi- tude de branches secondaires à tous les tissus situés au-dessous de l’ouverture buccale, de telle sorte qu’elles complètent, avec les deux premières ramifications de 6, jointes aux troncs 5 et 5’, l’innervation de toute la partie antérieure du Gastero- pteron. Toutes les branches de ce nerf 6 se ramifient au moyen de bifurcations successives. Les ganglions viscéraux fournissent les troncs nerveux suivants : | Le nerf 7 sort du second ganglion du groupe viscéral de gauche ; il se dirige et se perd dans les téguments latéraux du corps, entrele disque.et le pied. Bien souvent j'ai observé à côté de ce nerf, et sortant du même ganglion, un petit tronc encore plus grêle qui suivait la même marche. Le dernier des trois ganglions de gauche se termine par deux troncs : l’un contribuant à former la commissure viscérale (c’est de cette commissure que sort le nerf génital) ; l’autre, le nerf 8, prend d’abord la même direction que la commissure, passe le long du bulbe, ensuite sous lœsophage, et semble envoyer en ce point une ramification aux téguments voisins. Il va ensuite aboutir à la base de l'organe de Bojanus en passant sous la masse viscérale. Arrivé au contact avec cet organe, le nerf 8 pénètre un peu dans son intérieur et se bifurque : l’une de ses deux branches innerve l'anus et les tissus voisins; l’autre se dirige plus en arrière, et va se ramifier dans les téguments latéro-inférieurs du sac viscéral, ainsi que dans l’organe flagelli- ANN . AT., FÉVRIER 1879-80. IX. D. — ART. N° |. 66 VAYSSIÈRE. forme. Chez les Bullidés, où la région postérieure du manteau est plus développée, ce dernier nerf(n° 8) prend une importance plus considérable. Le nerf 9 sort du dernier ganglion du groupé viscéral de droite (peut-être du second ganglion, et dans ce Cas on pour- rait le considérer comme Flhomologue plus développé du nerf 7). Ce tronc se rend à un ganglion situé à la partie laté- rale du corps près de la rainure séminale. Nous désignerons ce ganglion sous le nom de ganglion branchial; car le tronc ner- veux qui en sort, envoie sa branche principale à l’organe respi- ratoire. Une autre branche et deux petits nerfs très grèles prennent aussi naissance à ce ganglion ; ils vont se ramifier dans les parois de la raimure séminale. Nous nous occuperons du tronc 40, ou nerf génital, dans le chapitre relatif au système nerveux de la vie organique. Les troncs nerveux suivants sortent des ganglions pédieux. Le nerf 11 prend naissance à la face postérieure du gan- glion pédieux, près de l’otocyste, et va se ramifier dans les tissus qui relient la région antérieure des parapodies aux téguments de la première cavité du corps. Le nerf 12, ou grand nerf des parapodies, sort un peu au- dessous du précédent ; c’est le plus volumineux de tous les troncs fournis par le ganglion pédieux. FF mnerve à lui seul presque toute la parapodie. À peu de distance de son point de sortie, 1l se divise en deux fortes branches. L’antérieure se dirige tout à fait latéralement et se trifurque bientôt, après avoir donné quelques nerfs secon- daires ; les branches provenant de cette ramification vont, en se ramifiant à l’infini, imnerver toute la partie latéro- antérieure de la membrane alaire. L'autre branche principale, . qui est un peu plus forte, se bifurque après un très court trajet, et les deux troncs ainsi produits se ramufient dans toute la partie latérale et postérieure dela parapodie. | Entre les deux fortes branches que nous venons de décrire, le nerf 42 en produit une toute petite dont les courtes ramifi- cations innervent la partie superficielle de cette région du corps. ARTICLE N° f. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 67 À côté du nerf 12 nous en trouvons un nouveau presque aussi gros, c’est legrand nerf pédieux (nerf 13), qui, chez le Gustero- pleron, par suite de l’atrophie du pied, n’offre pas un aussi grand développement que chez d’autres Mollusques. El innerve toute la partie du pied comprise entre le collier œsophagien et extrémité du corps de l'animal. On observe fréquemment des anomalies dans le nombre des principales ramifications de ce tronc et dans leur point de sortie. Le nérf {4 prend naïssance presque au milieu de la face postérieure dù ganglion et se bifurque dès son origine; une de ses branches, [à postérieure, innervant la région médiane du pied, peut être regardée comme un nerf pédieux ; l’autre envoie toutes ses ramifications dans la ja tie antérieure de la parapodie. Le nerf 15, où nerf pédieux antériéur, à sa sortie du gan- glon, se dirige vers le plancher de la première cavité du corps, dans les tissus duquel il se ramifie, innervant ainsi toute la révion antérieure du pied. Le nerf 16 vient compléter linnervation de cette région en se ramifiant surtout vers le point de jonction du pied et de la parapodie. | De la face antéricure du ganglion pédieux de droite sort un nerf assez gros (nerf 17), que nous nommerons le nerf pénial. Il se dirige vers la prostate en envoyant quelques ramifications à cet organe glandulaire, tandis que la branche principale pénètre darts la gaine et se ratnifie, soit dans la verge, Soit sur les parois de [x gaine. IT. — SYSTÈME NERVEUX DE LA VIE ORGANIQUE. Nous allons décrire les deux principaux centres nerveux de la vie organique : 6 stomato-oastrique et le ganglion génital: 1° Stomato-gastrique. Les deux ganglions buccaux, qui sont les centres nerveux de ce système secondaire, sont reliés, avons-nous dit, par les 68 VAYSSIÈRE. nerfs de la première paire. Ces ganglions sont situés chez le Gasteropteron même au-dessous du point où l’œsophage prend naissance, et ils sont accolés à la partie postérieure du bulbe buccal. Leur coloration est orangé très pâle; leur forme est ovoide, l'extrémité la plus bombée se trouvant du côté de la ligne médiane. Ils sont réunis lun à l'autre par une com- missure assez courte, égalant à peine le grand diamètre de l’un d'eux. Les nerfs qui relient ces ganglions aux ganglions cérébroïdes ne sont pas de simples connectifs, car ils fournissent chacun dans leur parcours trois troncs secondaires qui se ramifient dans les téguments dorsaux et latéraux du bulbe buccal; mais ces trones ne prennent naissance que dans la dernière partie du nerf À, celle qui se trouve appliquée contre le bulbe, le reste étant libre entre ce dernier organe et le collier œso- phagien. Le tronc « est le plus volumineux des trois ; il s’enfonce immédiatement dans les tissus musculaires de la partie dorsale du bulbe ; le tronc B suivrait la bandelette musculaire qui porte en avant le bulbe (cette bandelette s’insère, d’une part sur le bulbe, ses fibres englobant le connectif sur une certaine longueur, d'autre part sur les téguments qui entourent l’ouver- ture buccale) ; le troisième rameau, le tronc 8, imnerve le bulbe latéralement et en dessous. Près du point d'insertion du connectif, 1l naît du ganglion buc- cal un tronc nerveux assez fort, qui se bifurque aussitôt: c’est la branche e dont les ramifications imnervent, soit la glande saliz vaire, soit les téguments postérieurs du bulbe. La branche 0, beaucoup plus forte que e, longe latéralement l’œsophage et l’estomae, en donnant de ob Gtaes ramifications à ces deux parties du tube digestif. Enfin, du milieu de la commissure des ganglions buccaux sort le nerf buccal de M. Ihering, auquel on pourrait, me sem- ble-t-il, donner avec plus de raison le nom de nerf radulaire, attendu que e’est lui qui se rend dans le fourreau de la langue et dans les museles voisins. ARTICLE N° di. = ANATOMIE DES BULLIDÉS. 69 2° Ganglion génital. Le nerf génital (nerf 10) met en rapport la commissure interviscérale avec le ganglion génital. À son point de départ, qui est voisin des ganglions viscéraux de gauche, on n’observe aucune cellule nerveuse. Le nerf se dirige obliquement vers la droite, passe sous l’œsophage et le commencement de l'estomac, pénètre avec l'appareil digestif dans la cavité postérieure du corps, et se dirige vers les organes annexes de Ja génération. Il forme en ce point un renflement ganglionnaire piriforme, d’une colora- tion orangée : c’est le ganglion génital. De celui-ci sortent quatre nerfs. Le nerf 10’ se bifurque après un court trajet: l’une de ses branches va innerver l'utérus, tandis que l’autre suit le conduit de la poche copulatrice et va se perdre dans les parois de cette dernière. Le nerf 10” innerve la seconde partie du conduit excréteur et la masse glandulaire (glandes de la glaire et de l’albumine). Le trone 10"/ concourt aussi à l’innervation de la masse glandulaire. Enfin le nerf le plus fort du ganglion génital, le nerf 40”, se rend à la glande hermaphrodite en suivant la première moitié du conduit efférent et en donnant aux parois de ce conduit plusieurs ramifications. Je ne reviendrai pas ici sur le nerf et le ganglion branchial dont nous avons parlé en décrivant les troncs qui sortent des centres du collier œsophagien (nerf 9), ni sur le nerf 17, quise rend à l'organe copulateur. ITL. — ORGANES DES SENS. Chez tous les Bullidés, les tentacules dorsaux font complète- ment défaut et sont en partie remplacés par le disque cépha- lique; mais ce dernier organe ne peut être considéré que comme un organe de tact atrophié, l’olfaction exercée par l’extrémité des tentacules s’accomplissant d'ordinaire au moyen d'une différenciation plus ou moins marquée de la 70 | VAYSSIÈRE. région tégumentaire Fours entre le disque céphalique et © le pied. Chez le Gasteropteron, ce dernier sens semble faire com- plètement défaut; mais si l’on n’observe aucune trace d'or ganes olfactifs dans la rainure du corps comprise entre le disque ei les parapodies, par contre l'organe du tact me parait être plus développé que chez les autres Bullidés, vu la richesse de son innervation et sa demi-indépendance. Organes de la vision. Les yeux ne sont en rapport avec les ganglions cérébroïides que par Pintermédiaire des deux renflements ganglionnaires que nous avons nommés ganglions tentaculaires. Le nerf qui sort du bord interne de chacun de ces ganglions est grêle et très court. Cette dernière particularité ne permet pas à l'or- gane visuel d'arriver jusqu’à la surface des téguments, de telle sorte que ses fonetions doivent être bien peu impor- tantes. Le névrilème du nerf optique protègeun faisceau fibres assez blanches venant s'épanouir à la base du globe oculaire. L'œil est ellipsoïde, son grand diamètre étant dirigé suivant le prolongement du nerf optique ; il est complètement enfoncé dans les tissus du disque, sous la couche pigmentaire, un peu latéralement. : L’organe visuel nous offre trois régions bien distinetes. La base de l’œil, où se forme l'épanouissement du nerf et consti- tuant une première cavité où se trouvent les cellules généra- trices du pigment : cette partie a une légère teinte rosée qui appartient certainement, comme chez tous les animaux, à la couche rétinienne. Puis vient la région pigmentaire, formant une zone noirâtre irrégulière, dont la largeur est variable. Enfin la partie supérieure, qui contient le cristallin enchâssé à moitié dans la zone pigmentaire. Le reste de la cavité de cette dernière région est occupé par un liquide très transparent que l’on peut comparer à l'humeur aqueuse de l'œil des Céphalo- podes. Le cristallin offre une forme correspondant à celle de ARTICLE N° {. | ANATOMIE DES BULLIDÉS. 71 l’œil; ilse laisse comprimer sans se briser, ses couches externes ayant une certaine mollesse ; 1l est très translucide et possède une coloration ambrée elaire. Les trois régions de l’œil sont entourées par une membrane conjonctive assez épaisse, sur laquelle viennent s’insérer qu 1- ques muscles très petits destinés sans doute à l’origine à faire mouvoir l'organe, mais qui se sont atrophiés comme lui par la suite, Organe auditif. Cet organe consiste, comme chez tous les Mollusques, en ne vésieule ou otocyste d'aspect blanchâtre, Il est assez déve- loppé chez notre animal, ce qui permet de l’apercevoir assez facilement, lorsqu'on a mis à nu le collier œsophagien. Adhérant à la face postérieure du ganglion pédieux, près du point d'insertion du connectf pédieux viscéral, lPoto- cyste se trouve tellement engagé dans l’épaisseur du névrilème du ganglion, qu’il est impossible de l'en séparer. Cet organe est à peu près rond, son diamètre longitudinal] étant légèrement plus grand que son diamètre transversal : ainsi, avec l'objectif 2 du microscope de Nachet (tirage com- plet), le diamètre longitudinal comprend 18 divisions micro- métriques, et son diamètre transversal 16, Les parois de la poche sont assez épaisses, comme on en peut juger par transparence ; elles sont tapissées intérieurement par un épithélium vibratile qui agite continuellement les otolithes. Il m'a été cependant impossible, même avec de très forts gros- sissements, de distinguer les cellules vibratiles et les cils, bien que ces derniers me paraissent être assez longs, les otolithes formant toujours un amas central assez éloigné des parois. Les otolithes, au nombre d’environ une centaine, sont de forme plus ou moins ovoïde ou en grains de mullet; leurs dimensions sont variables : les plus gros ne dépassent pas en longueur trois divisions du micromètre oculaire de Nachet avec 79 VAYSSIERE. l'objectif ? et le tirage; quelques otolithes sont presque ronds, d’autres offrent une ou deux ouvertures. Le nerf auditif, qui s’insère à l’extrémité antérieure du grand diamètre de l’otocyste et dont les fibres s’épanouissent en ce point, ne me paraît pas creux, car jamais je n'ai vu d’otolithes sortir de l’otocysteet remonter à l’intérieur du nerf, comme on l’observe chez un grand nombre de Mollusques. Ge nerf va s’insérer en avant à la face postérieure du ganglion cérébroïde, dans la région comprise entre les deux connectifs cérébro-pédieux et cérébro-viscéral. Pour se rendre en ce point, le nerf auditif, en quittant l’otocyste, passe au-dessus du con- nectif pédieux viscéral (si l’on observe la face postérieure du collier, fig. 48), puis il s’engage entre les deux connectifs en les suivant parallèlement jusqu’à son arrivée au ganglion céré- broide. Je terminerai cette monographie anatomique du Gastero- pteron Meckelii par la description de quelques gros muscles qui n’ont pas de rapports directs avec les organes. Lorsque, après avoir mis l’animal sur le ventre, on rejette en avant le disque céphalique et l’on enlève les téguments dorsaux, on peut observer dans la cavité antérieure du corps trois grosses bandes musculaires de chaque côté de la ligne médiane. La paire la plus interne s’insère, d’une part sur les téguments placés même au-dessous de la bouche, d'autre part sur les téguments des parties latérales du corps, au point où le sac viscéral devient indépendant. Les deux autres paires de muscles ont toujours leur insertion antérieure près de l’ouverture buccale, mais sur les côtés de celle-ci; postérieurement, ils se terminent en éventail dans l'épaisseur des tissus des parapodies. Quant aux muscles du pied proprement dit, ils sont bien peu développés chez ce Mollusque, ce qui tient à l’atrophie de cette région du corps. ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 73 IL MÉMOIRE. ÉTUDE ANATOMIQUE SUR DIVERS GENRES DE BULLIDÉS (Doridium, Philine, Scaphander et Bulla). Je consacre cette seconde partie de mon travail à la descrip- tionrapide des organesdes divers types de Bullidés que j’aipu me procurer et qui se rapportent aux genres Doridium, Bulla (1), Philine et Scaphander ; ces descriptions anatomiques feront ressortir les rapports et les différences qui existent entre ces Mollusques et le Gasteropteron. Je regrette seulement de n'avoir pu, faute de matériaux, étudier les deux genres Akera et Cylichne, et, pour la même raison, de n’avoir pu poursuivre mes recherches chez les principaux types exotiques. CHAPITRE PREMIER. FORME EXTÉRIEURE. Tous ces animaux sont à peu près construits sur le même plan ; mais des quatre genres que nous avons à examiner ici, c’est le Doridium qui se rapprocherait le plus du Gastero- pteron par l’ensemble de ses caractères. Cependant, chez lui comme chez le Bulla, le Philine et le Scaphander, la face dor- sale du corps est bien nettement divisée en quatre parties. Chez le Doridium (2), le disque céphalique (ou tentaculaire de Cuvier) forme un trapèze un peu allongé, dont la base anté- rieure décrit une légère courbe et dont la base postérieure vient se terminer en pointe sur le manteau. Celui-ci constitue presque (1) Cette Bulle appartient au sous-genre Haminea. (2) C’est surtout le Doridium Meckelii que j'ai pu étudier. J'en ai pris deux - exemplaires, un à Marseille et un à Nice; puis, grâce à l’obligeance de M. le mar- quis de Monterosato, j’ai pu examiner quelques exemplaires de la même es- pèce conservés dans l'alcool et provenant des côtes de la Sicile, plus un individu de l'espèce Doridium aplysiforme. Toutes les figures que je donne de ce genre ont été faites d’après les dissections du D. Meckelü ; il n’y a que le dessin de la coquille qui représente celle du D. aplysiforme. 7% VAYSSEÈRE. la moitié de toute la face dorsale du Dorédium : il est très bombé en son milieu et donne naissance à deux expansions membraneuses, séparées l’une “de l'autre par une échanerure peu large, mais très profonde. Sur le bord postérieur interne de l'expansion de gauche, on observe un prolongement flagelli- forme pas très long, en forme de fer de lance, et que l’on peut considérer comme l’homologue de celui du Gasteropteron, Pour compléter la description de cette face du Doridium, à nous reste à parler des parties latérales, qui ne sont que des parapodies atrophiées ; toutefois, dans ce genre, elles le sont beaucoup moins que chez le Phuline, par exemple, car elles recouvrent un peu les côtés du manteau et du disque cépha- lique. Elles ne peuvent pas, comme celles du Gasteropteron, s'étendre complètement sur le même plan que celui des tégu- ments pédieux. La face ventrale nous présente un pied bien reconnaissable et qui est latéralement en continuation avec les parapodies, dont rien nele sépare. Cette partie ne s’étend pas jusqu'à l'extré- mité du corps; il laisse à découvert, comme on peut le voir par lafig. 57, la partie postérieure du corps où se trouve la branchie. L’organe respiratoire cache presque l’ouverture du cloaque, dans lequel s'ouvrent l'anus et les organes de la génération. Le conduit séminal, par suite de l'éloignement de l’orifice génital, se trouve avoir une longueur égale à celle du corps. Les téguments du Doridium sont épais dans presque toutes les régions des deux faces, à l'exception du manteau, qui est assez mince, sans atteindre toutefois la délicatesse de celui du Gasteroplteron. C’est dans l'épaisseur de cette dernière région que se trouve la coquille. Celle-ci, qui est assez rudimentaire, se trouve placée à la partie postérieure du corps de l'animal ; elle se prolonge en avant dans une cavité coquillière analogue à celle du Gasteropteron, en prenant la forme d’une membrane ou pellicule jaunâtre qui n’est que la continuation des cuticules interne et externe de la coquille. Dans la figure 58, j’airepré- senté la face interne de la coquille, pour montrer le petit tour de spire qui vient s'appliquer contre la masse hépatico-herma- ARTICLE N° {. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 79 phrodite, immédiatement sous l'expansion charnue de gauche, et duquel sort cette grande lame calcaire, en forme de crois- sant, qui constitue en réalité Le commencement du second tour de spire. C’est du bord externe de la coquille que part la pel- licule qui recouvre toute la masse viscérale, dont elle est séparée par le plancher de la cavité. Dans les rainures comprises entre les parapodies et les bords du disque céphalique, se trouvent deux corps allongés que l’on désigne sous le nom d'organes olfactifs ; ces corps, qui pro- viennent d’une différenciation des téguments externes, font complètement défaut chez le Gasteropteron. Nous reviendrons sur leur constitution intime dans le chapitre relatif au système nerveux. Le Phaline peut servir de type dans la famille des Bullidés, pour la netteté des divisions du corps. À la face dorsale, elle nous montre un disque céphalique très grand et dont la forme varie suivant que lanimal projette sa trompe ou qu'il se trouve contracté. Gomme J'ai représenté ce Mollusque dans ce dernier état, le disque offre l’aspect d’un corps trapézoïde irrégulier dont la grande base se trouve en avant : c’est l’inverse de ce qui se présente chez le Doridium. La région postérieure du corps constitue le manteau; c’est dans l’épaisseur de celui-ci qu’estlogée la coquille, organe très fragile bien connu de tous les naturalistes, et dont 1l est inutile de donner ici la description. Les téguments de cette partie du corps s’amineissent postérieurement, et forment de chaque côté de la ligne médiane deux expansions que l’on peut considérer comme étant les homologues de celles du Doridium, mais considérablement atrophiées et sans trace de flagellum. Les parties latérales du pied sont très réduites chez le P#i- line, et forment deux masses charnues allongées, venant en quelque sorte combler le vide laissé de chaque côté du corps entre le disque et la région postérieure de l’animal. Les deux tiers antérieurs de la face ventrale sont occupés par le pied. Get organe a la forme d’une ellipse dont on aurait opéré une section en avant, assez près de l’extrémité, et en 76 VAYSSIRRE. arrière, plus près du grand diamètre transversal. Le bord anté- rieur est un peu arrondi; le bord postérieur est au contraire légèrement échancré, de telle sorte qu'on à une pointe de chaque côté ; latéralement, les bords du pied remontent en s’épaississant pour former les parapodies. Il n’y a pas chez le Philine, près de la ligne médiane, de région que l’on puisse considérer comme servant spécialement à la locomotion. La partie postérieure de la face ventrale est occupée par la conti- nuation des téguments dorsaux de la coquille ; ils ne couvrent pas toute cette partie, mais environ les trois cnquièmes; lereste de cette face forme une cavité qui sert de cloaque en même temps que de cavité branchiale. C’est dans ce creux qu’on trouve en avant la branchie, et sur le côté interne de la base de cet organe, l’orifice génital, et plus en arrière l'anus, qui est assez proéminent et qui offre sur son côté droit un mamelon charnu contenant le premier tour de spire de la coquille. Dans notre figure 73, nous avons coupé une partie du pied et écarté les téguments qui enveloppent la coquille, pour bien montrer la disposition de chaque organe dans cette cavité. Dans la rainure du côté droit de l’animal, entre la para- podie et le corps, on observe le conduit séminal, qui apporte à l'organe copulateur les spermatozoïdes. | Chez le Scaphander, toute la partie antérieure de la face dorsale du corps présente une disposition à peu près semblable à celle du Philine; le disque céphalique est seulement qua- drangulaire et offreen avant, au-dessus de l’ouverture buccale, une échancrure assez marquée; il en est de même à la face ventrale pour toute la région pédieuse. Mais toute la partie postérieure de l’animal étant protégée par une coquille assez vaste pour contenir une grande partie du corps, les téguments de cette région ont presque disparu. Nous croyons qu’à l’origine cette coquille devait être moins développée et contenue dans l'épaisseur du manteau; mais bientôt celui-ci s’est amine considérablement, puis il a disparu, laissant à nu le test calcaire, capable de protéger à lui seul les organes qu'il entoure. Aussi ne serions-nous pas étonné si, ARTICLE N° {. ANATOMIE DES BULLIDÉS. pr pendant une partie des dernières phases du développement, la coquille de l'animal se trouvait recouverte par une membrane représentant le manteau du Phline et du Doridium. Par suite de la forme de la coquille, la masse viscérale a pris un aspect turbiné qu’on peut voir sur notre figure 85, où nous avons représenté le Scaphander dépourvu de son organe protecteur. Dans ce dessin, nous avons fait ressortir la disposi- tion des divers organes, qu'on peut apercevoir par transpa- rence à travers les tissus très fins qui constituent l’analogue du plancher de la cavité coquillière du Gasteropteron, Philine… La cavité cloaco-branchiale est plus latérale que chez les deux senres précédents ; le conduit séminal est par suite moins long. Enfin, chez le genre Bulla, nous rencontrons une disposition intermédiaire entre le Scaphander et le Doridium, et qui, sous certains rapports, se rapproche davantage de celle de ce der- nier Mollusque,. Le disque céphalique est presque triangulaire (triangle isocèle), le sommet reposant sur le manteau ; les parapodies sont ici plus développées que chez le Doridium, elles recouvrent un peu les côtés du disque céphalique. La parapodie de droite est un peu plus grande que celle de gauche. Le manteau est très rudimentaire à la face dorsale et dans toute sa région postérieure, par suite de la présence d’une coquille indépendante ; mais à la face ventrale nous observons une partie très charnue, enveloppant la partie inférieure du sac viscéral et venant déborder sur les côtés de la coquille. Cette masse charnue n’est qu’une portion du manteau; elle peut être plus ou moins développée, suivant les dimensions de la coquille. Le pied n’est pas plus distinct chez le Bullu que chez le Doridium ; 1 n’est pas très long. Sur les parties latérales du disque céphalique, on observe deux petites fossettes, une de chaque côté ; ces fossettes, creu- sées dans les téguments, permettent aux yeux d’arriver à la surface. L'animal du Bulla peut se retirer en entier dans sa coquille. 78 VAYSSENRIE. La cavité générale du corps de tous ces Mollusques est divi- sée, comme chez le Gastéroptéron, en deux parties au moyen d’une cloison transversale, sorte de diaphragme plus où moins musculaire, suivant les genres que l’on étudie. Nous désigne- rons toujours la première cavité sous la dénomination de cavité antérieure, et nous nommerons l’autre, cavité postérieure où viscérale. CHAPITRE IL. ORGANES DE LA DIGESTION. Ces organes présentent des différences assez importantes suivant les genres, soit dans la constitution des diverses régions du tube digestif, soit dans le plus ou moins grand développe- ment des organes glandulaires annexes. Nous étudierons en premier lieu le tube digestif de ces Mol- lusques, puis les glandes annexes, comme nous l’avons fait pour le Gasteropteron. | Tube digestif. De tous les Bullidés, c’est le Doridüim qui a le tube digestif le plus simple: on ne trouve chez lui aucune trace de mâchoires ni de radula : estomac est inerme. La trompe n’est pas très longué; ses parois sont peu épaisses et présentent imtérieurement des replis longitudinaux. Le bulbe buccal est volumineux, d’un blanc d'argent et très musculaire; il est rattaché aux parois du corps par divérs muscles que nous retrouvons chez tous les Bullidés et que nous déerirons en parlant du tube digestif du Scaphander, parce que chez cet animal ce système musculaire est un peu plus déve- loppé et que chaque bande se montre bien isolée des voisines. Le bulbe a un peu la forme d’un coin ou d’un prisme trian- gulaire dont une des faces serait plus petite ét un peu bombée. L’arête 6pposée à cette face forme la partie dorsale de lor- gane. C’est par une superposition de muscles transverses et longitudinaux que les fortes parois de ce bulbe sont constituées. ARTICLE N° {. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 79 Les muscles longitudimäux prédominent à l'intérieur et y forment deux mamelons réniformes correspondant aux faces latérales du prisme, tandis que la petite face ou face inférieure présente un amas musculaire très fort, divisé incomplètement en deux parties latérales et dont les bandelettes musculaires longitudinales sont peu marquées. Ge dernier mamelonre pré- sente la masse radulaire atrophiée. Toute la cavité du bulbe est tapissée par un épithélium très délicat d’une teinte légère- ment grisàtre. Au bulbe fait suite un œsophage excessivement court, à parois peu épaisses, offrant des replis internes qui forment un réseau que nous avons représenté dans la figure 63. L’œsophage est séparé de la cavité buécale ainsi que de l'es- tomac par des prolongements membraneux qui semblent rem- phr le rôle de valvules. L’estomac forme une grande poche très allongée, contenue en majeure partie dans la première cavité du corps: sa colora- tion, ainsi que celle de l’'œsophage, est jaune-citron pâle avec une légère teinte verdâtre;ses parois, assez délicates, présentent de Pextérieur à l’intérieur une membrane conjonctive, une couche assez faible de muscles longitudinaux, des muscles transverses, puis des replis internes formant un réseau à mailles très petites et que recouvre un épithélium vibratile d’une teinte jaune très pâle. L’intestin nous offre en son commencement trois ouver tures par lesquelles le foie verse ses produits dans Pappareil digestif; il est assez long, et, après avoir décrit plusieurs circonvolu- ons, ilvients’ouvrir dans la cavité cloaco-branchiale. Les parois de l'intestin sont plus minces que celles de lestomac; on n’y observe que des replis longitudimaux peu nombreux. D’après ce que j'ai trouvé dans le tube digestif de plusieurs Doridium, voici quelle serait leur nourriture : des Annélides (Aphrodites aculeata), des Mollusques (Philine aperta…), des écailles de Poissons et des débris de substances végétales. Chez le Philine, le tube digestif commence par une trompe assez longue, suivie par le bulbe buccal; celui-ci est un peu 80 VAYSSENRE. piriforme, très musculaire, surtout latéralement et inférieu- rement ; sa teinte est d’un blanc jaunâtre. Si l’on ouvre ce bulbe, on n’observe dans sa cavité aucune trace de mâchoires, mais en arrière se trouve le mamelonradu- laire, assez gros, affectant la même forme que celui du Gas- teropteron et ayant en son milieu une rainure dans laquelle est logée la radula. C’est à l’intérieur de cette masse musculaire que se trouve le fourreau de la radula, dans lequel celle-e1 se forme et acquiert une certaine consistance avant de venir s'épanouir sur l'avant du mamelon. La radula est plus simple que celle du Gasteropteron ; nous ne trouvons chez le Philine qu'une seule sorte de dents, les dents intermédiaires ; les latérales et les rachidiennes faisant complètement défaut. Ces dents intermédiaires sont implan- tées sur une membrane un peu chitineuse, et elles sont mues par un système de muscles que nous avons représenté figure 75; ces muscles sont destinés à des mouvements latéraux. Les dents sont disposées suivant deux rangées longitudinales de vingt-cinq chacune ; entre ces deux rangées se trouve un vide correspondant à la place qu open les dents rachi- diennes, si elles existaient. . Les dit du Philine sont en forme de crochets; très fortes à leur base, elles diminuent rapidement vers leur som- met-en s’incurvant; tout leur bord concave est très finement dentelé. Dans un seul exemplaire, qui ne se rapportait peut- être pas au Philine aperta, J'ai observé et figuré une disposi- tion un peu particulière des dentelures. Le bord interne ffre six ou sept festons arrondis, et c’est sur eux que sont nn les petites dents. À la face postérieure et dorsale du bulbe commence l’œso- phage. Cette région du tube digestif est ordinairement d’un blanc jaune un peu grisâtre ; ses parois, grâce au développement des couches musculaires, sont assez épaisses. Elle présente intérieurement un épithéllum gris recouvrant quelques replis longitudinaux. Après un trajet égal à la longueur du bulbe, l’œæsophage vient aboutir à l'estomac. ARTICLE N° 1. - ANATOMIE DES BULLIDÉS, 81 Cette partie du tube digestif, que nous nommerons aussi gésier, à cause de son armature de pièces calcaires, occupe plus de la moitié de la cavité antérieure du corps; elle affecte la forme d’un prisme triangulaire aux arêtes mousses. Dans chacune des faces de celui-ci, se trouve une plaque calcaire destinée à la trituration des aliments. Ces plaques sont reliées extérieurement par des bandelettes musculaires transverses, présentant une grande épaisseur. Cest au moyen de ce tissumus- culaire fort développé que sont mues les pièces masticatrices. La forme de celles-ci varie un peu suivant les espèces. Chez le Philine aperta, les deux plaques dorso-latérales, qui, comme chez tous les Philine, sont identiques l’une à l’autre, présentent l’aspect d’un triangle isocèle dont l'angle du som- met serait fortement arrondi; les bords ou côtés du triangle sont un peu incurvés. La face externe de chacune d'elles est lisse, luisante comme l'émail d’une dent, et offre en son nulieu un creux plus ou moins grand de la même forme que la plaque. On observe au milieu deux ouvertures auxquelles viennent aboutir les vaisseaux sanguins destinés à nourrir et accroître ces organes tant que l'animal n’a pas atteint son complet dévelop- pement. La face interne présente dans la partie correspondant au creux une surface blanche rugueuse, bordée d’un liséré jaune de chitine : c’est cette partie qui sert à la mastication. La troisième plaque, ou plaque ventrale, est en forme de losange ; elle est beaucoup plus petite que les deux latérales. Sa face externe, plus incurvée que celle des deux autres, offre la même teinte et possède les deux ouvertures servant de pas- sage aux vaisseaux nourriciers de la plaque; sa face interne est très rugueuse en son milieu. Grâce à cette armature du gésier, les Philine peuvent se nourrir d'animaux protégés par des coquilles assez résis- tantes ou contenant dans leurs tissus des spicules : ainsi j'ai trouvé souvent dans leur tube digestif de jeunes Bivalves, des débris de baguettes d’Oursins, des spicules de Zoanthaires, ete. L'intestin, d’une coloration jaune hyaline, à ses parois déli- cates. Il décrit plusieurs circonvolutions; ilesten partie enfoncé - ANN. SG. NAT. — FÉVRIER 1879-80. DOROMERPAITTEENCENT 82 VAYSSIÈRE. dans la masse hépatique, puis il vient s'ouvrir sur le côté droit de l’animal, dans la cavité cloacale que nous avons déjà décrite. . Si l’on ouvre la cavité antérieure du corps du Scaphander lignarius et si lon rejette latéralement les diverses parties des téguments, on aperçoit d’abord une grande plaque ceal- caire lisse, de forme un peu triangulaire, occupant presque toute la cavité. Cette plaque fait partie de larmature de l’esto- mac; sa coloration est blanche sur le bord, café au lait foncé au centre. La zone intermédiaire, châtain clair, qui forme les deux tiers de sa surface, présente des marbrures blanchâtres. Dans la région gauche, un peu au-dessous d’une échancrure de la plaque, se trouve un renflement œsophagien que l’on peut considérer comme un premier estomac; les parois de cette région sont assez délicates, et offrent une teinte café au lait clair, dont la nuance peut varier suivant les aliments qui y sont contenus. Get estomac se dirige en avant et forme la région œsophagienne d’où l’on arrive au bulbe buceal. Le bulbe possède une belle coloration rose chair donnant un peu sur le jaune; c’est à son tissu musculaire qu'il doit cette couleur. Sa forme est à peu près la même que celle du bulbe du Philine; seulement à la face inférieure la couche museulaire forme un renflement qui se prolonge en pointe. La radula offre la même disposition que celle du Philine; les dents des deux rangées sont un peu différentes. Chacune d'elles a bien une base assez large, mais sa partie crochue, au lieu de présenter du côté concave un bord unique, offre un sillon sur les côtés duquel se trouvent une série de denticules crochus dirigés vers le milieu du sillon. | Chez un individu pris sur les côtes de Nice, j'ai observé des dents d’une forme toute particulière, organes que j'ai figurés (fig. 99). Chacune de ces dents offre, au point où se termine la concavité du crochet, un prolongement en forme de languette possédant sur sa face interne des denticules analogues à ceux de la dent elle-même. Cette particularité doit certainement indi- quer un élal primitif qui se retrouve peut-être encore d’une ARTICI E N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 83 manière permanente chez des types non décrits; mais chez eux la languette doit avoir une épaisseur plus forte pour résister aux efforts produits par l’aete de la mastication. Souvent J'ai observé, sur les parties latérales externes des dents intermédiaires, de petits dépôts chitineux, et même des dents latérales rudimentaires (fig. 93 et 94). Revenons à l’estomac. Get organe, très volumineux, pré- sente deux grandes plaques calcaires semblables, l’une dor- sale, l’autre ventrale, reliées entre elles par une multitude de bandelettes musculaires presque toutes transversales, allant directement d'un bord de l’une au bord correspondant de l’autre ; ces muscles sont d’un rose chair analogue à la teinte des muscles du bulbe. Il existe en outre une troisième plaque beaucoup plus petite, enchâssée dans le tissu musculaire, dans la région postérieure de l'estomac, et représentant la plaque en forme de losange du Philine. Ces trois pièces calcaires, dont la face interne est très rugueuse, servent à briser les coquilles qui protègent les ani- maux dont le Scaphander fait sa nourriture habituelle. Je dis « qui protègent », car toutes les coquilles de Turritella que j'ai trouvées dans le tube digesuf de ce Bullidé ne contenaient jamais le Mollusque gastéropode qui l’habite, mais un Géphy- rien du genre Phascolosomu, qui en fait son gite. Le Scaphan- der me parait savoir fort bien choisir, car dans les fonds où on le trouve, il existe des Turritella en abondance, et jamais il n’avale les coquilles qu’oceupent ces animaux vivants, mais seulement celles qui servent d’abri au Phascolosomu. L'intestin, qui est assez long, présente comme toujours des parois peu résistantes, translucides et d’une coloration orangée pâle. Il pénètre de la première cavité du corps dans la cavité viscérale, s'enfonce dans la masse hépatique, et reçoit les produits de cet organe glandulaire par deux conduits qui viennent s'ouvrir sur les côtés d’un renflement que forme l’in- testin en ce point. Cette dernière partie du tube digestif décrit ensuite plusieurs sinuosités dans le foie, et vient déboucher sur le côté droit de l'animal, en arrière de la branchie. 84 VAYSSIÈRE. Tout l’intérieur de cette portion du tube digestif présente, comme celui de l’œæsophage et de l'estomac, des replis longi- tudinaux qui sont recouverts par un épithélium vibratile. Avant de terminer l'étude de l'appareil digestif du Scaphan- der, nous décrirons les muscles qui font mouvoir le bulbe buccal, parce que c’est le type de Bullidé qui présente cette partie du système musculaire de là façon la plus complète. Nous trouvons en avant et s’insérant à la face dorsale du bulbe, trois paires de bandes musculaires bien distinctes, à la face veutrale trois autres paires en partie soudées entre elles; toutes ces bandes ont leur point d'insertion antérieure sur les téguments qui entourent l'ouverture buccale. En arrière du bulbe, sur les côtés de l'œsophage, il existe deux paires de mus- cles,une dorsale,s’insérant à côté des conduits salivaires l’autre ventrale, dans une position à peu près identique. Ces quatre museles s’insèrent en avant sur les parois voisines de la trompe. Enfin nous trouvons encore deux grosses bandes muscu- laires s’insérant chacune près des glandes salivaires, à la face dorso-latérale du bulbe, puis elles se dirigent en arrière et ont leur second point d'insertion dans les téguments pédieux. Passons à la description de l'appareil digestif du genre Bull. La trompe est courte chez ce Mollusque, et ses parois sont assez épaisses. Le bulbe, de forme ovoïde, présente des enve- 1oppes musculaires très fortes où les muscles transverses pré- dominent; cet organe est couleur de chair plus ou moins pâle, suivant les individus, avec quelques ponetuations noires. L’in- térieur de la cavité est tapissé par un épithélium d’un noir violacé, qui est la continuation de celui de la trompe. Il existe en avant de la cavité deux mâchoires en forme de croissant, dans une position analogue à celle de l'organe du Gasteropleron, mais elles paraissent plus latérales. Ces pièces offrent la même constitution que celles du type dont nous avons donné plus haut la monographie; mais elles semblent offrir par leurs dimensions plus grandes un acheminement vers les mâchoires de l'Aplysie, qui forment un anneau complet en commencement de la cavité buccale. ARTICLE N° Î. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 89 La radula est complète chez le Bulla, et elle offre par cela mème une largeur assez considérable ; mais si les dents sont plus nombreuses, elles sont aussi proportionnellement beaucoup plus petites. Nous avons figuré un fragment d’une des rangées transversales de la radula, puis une dent rachidienne, la pre- mière dent intermédiaire et une des dernières latérales. Les différences qui paraissent si tranchées dans ces repré- sentations des dents intermédiaires et latérales, et qui empè- cheraient toute confusion entre elles, sont loin d’être aussi grandes, et disparaissent même lorsque l’on considère ces dents les unes après les autres en partant du rachis. Ges organes se modifient insensiblement, et àun moment donné on ne sait pas si l’on a affaire à une dent intermédiaire ou à une dent latérale. L’arbitraire de cette subdivision des dents latérales a été déjà bien démontré pour l’Afera par les naturalistes H. Meyer et K. Mobius, en 1865, dans le premier volume de leur grand ouvrage sur la faune de Kiel. Un peu au-dessus, la partie postérieure du bulbe buceal présente des parois peu musculaires qui, se continuant en arrière, forment l’æsophage. Celui-ci est assez long ; il égale environ trois fois le grand diamètre du bulbe, et il offre à sa partie inférieure un renflement analogue à celui que nous avons déjà constaté chez le Scaphander. Ge renflement forme un premier estomac, sorte de panse, dans lequel les aliments à demi déchirés viennent s’accumuler, pour passer ensuite dans le gésier, où ils sont broyés. Le gésier est cylindrique; sa forme rappelle tout à fait celle des bourses dont on se sert dans les quêtes (les aumônières) ; la partie antérieure est un peu évasée et offre trois bosselures dues à la présence des trois plaques. Les parois externes du oésier sont constituées par une très forte couche de muscles transverses, d’une couleur de chair et d’un aspect nacré. À l’intérieur, cette région du tube digestif offre trois plaques chitineuses à peu près d’égales dimensions, et entre les- quelles se trouve une forte bandelette de muscles longitudi- naux qui forment en avant un mamelon où sont implantées 86 VAYSSIERE. deux petites plaques ou dents également chitineuses. Ces or- ganes n'avaient pas encore été signalés. L’armature de l’esto- mac se compose donc de trois grandes plaques et de six petites. Chacune de ces dernières est environ deux fois plus longue que large ; leur couleur jaune ambrée est assez claire ; elles présentent sur les deux faces des rainures bien marquées. C’est par une de leurs extrémités qu’elles sont implantées, tandis que l’autre offre un bord irrégulier (fig. 113). Les grandes plaques sont d’une teinte jaune d’ambre très foncée. Leur forme, passant au noir vers le centre, rappelle, comme le dit Cuvier, un écusson d’armoiries. Sur leur face interne, qui est convexe, on observe une arête longitudinale de chaque côté de laquelle partent des arêles secondaires, toutes recouvertes de rugosités papilleuses très serrées. Les arêtes du côté droit alternent avec celles du côté gauche. Leur face externe (celle qui est enfoncée dans le tissu muscu- laire) décrit une courbe correspondant à la convexité de l’autre face ; elle est d’abord unie supérieurement, puis con- stitue une partie renflée qui se prolonge inférieurement en prenant une forme cylindrique. Toute cette facé est d’une coloration ambrée plus claire et d’une consistance moindre : on dirait presque du cartilage. Les dimensions moyennes (grandeur naturelle) de ces srandés plaques sont les suivantes : longueur, 3 millimètres ; largeur, 2,1. L’intestin qui fait suite présente un volume un peu inférièur à celui de l’œsophage; ils’enfonce immédiatement, après avoir traversé le diaphragme, dans la masse hépatique, où il reçoit les canaux du foie. Après avoir décrit quelques circonvolutions à l’intérieur et autour de cet organe glandulaire, il sé dirige vers les téguments latéraux de droite, et débouche un peu en arrière et au-dessous de la branchie. J'ai trouvé dans cette dernière région du tube digestif, des Foraminifères, des Diatomées, des spicules tricuspides d'Éponges, des débris de Bryozoaires et d’Hydraires, ainsi que quelques fragments d’Algues. ARTICLE N° {. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 87 Organes glandulaires annexes. 8 S Glandes salivaires. — Les glandes salivaires affectent des formes assez différentes chez les Bullidés, mais elles sont tou- jours situées sur les côtés de l’œsophage et viennent s'ouvrir dans la cavité buccale au-dessus du mamelon radulaire. Chez le Doridium, cès organes sont allongés, de forme ruba- née, Comme ceux du Gasteropteron, leur extrémité postérieure contractant une légère adhérence avéc les parois de l’ésto- mac. Léur constitution ést semblable à celle des glandes sali- vaires du type que nous avons déjà décrit; aussi nous n’yrevien- drons pas dans ce paragraphe. Chez le Bulla, ces organes glandulaires, tout en présentant la même constitution intime que ceux du Doridiun et du Gasteropteron, prennent en arrière un développement con- sidérable : ce qui leur permet d'atteindre le gésier, qui est cependant assez éloigné du bulbe, et de former un empatement glandulaire qui enveloppe en partie le premier estomac. Souvent ces deux régions élargies des organes salivaires se soudent à la face dorsale sur une certaine lon- gueur. Nous trouvons chez le Philine et chez le Scaphander des landes salivaires d’une forme toute particulière : ce sont des corps cylindriques, courts, libres postérieurement, plus ou moins granuleux à l'extérieur, et se terminant en massue. Leur diamètre diminue très sensiblement, surtout chez le Scaphander, en se rapprochant de leur point d'insertion. Les cellules glandulaires tapissent les parois de cette espèce de sac et versent leurs produits dans un canal central aboutissant à la cavité buccale. Tandis que chez les genres Gasteropteron, Doridium et Bulla les glandes salivaires sont d’un blanc laiteux un veu nyalin, chez les genres Phline et Scaphander ces organes sont vive- ment colorés en jaune orangé, surtout chez ce dermer. La constitution intime de cette glande étant à peu près la mème chez tous les Bullidés, je n’y insisterai pas ic, er Je 88 VAYSSIERE. renverrai le lecteur à ce que j'en ai déjà dit dans la mono- oraphie du Gasteropteron, au paragraphe consacré à cet organe. Foie. — La coloration de cet organe est toujours plus ou moins brunâtre, avec des teintes un peu différentes. Chez. le Philine, le foie est presque ocre jaune, légèrement verdâtre chez le Doridiun, et brun très foncé chez le Bulla. Il forme avec la glande hermaphrodite une masse plus ou moins compacte. D’ordinaire la glande de la génération con- stitue toute la partie postérieure de cet amas hépatico-herma- phrodite; cependant, chez le Scaphander, l'union des deux glandes est telle, qu'il est impossible de les séparer, et tandis que la partie principale de l'organe hermaphrodite se trouve à la face inférieure de l’amas, ses lobules viennent émerger dans toutes les régions du foie (fig. 86, 4, k!, h",h"). Les produits de cette glande sont toujours versés, dans un petit renflement de l'intestin, par plusieurs conduits hépa- tiques : nous en voyons trois chez le Doridium et chez le Sca- phander; le Philine et le Bulla ne me paraissent en avoir que deux. La présence de conduits excréteurs séparés indique aussi une subdivision du foie en deux ou trois lobes impor- tants, lesquels peuvent être isolés assez facilement chez le Doridium. Dans ce dernier cas, comme chez le Gasteropteron, la membrane d’enveloppe des divers lobes et lobules du foie est plus résistante que celle des autres genres de Bullidés. CHAPITRE HIT. GLANDES INDÉPENDANTES. Nous trouvons enez tous les Bullidés les mêmes glandes indépendantes; elles varient seulement en grosseur et en colo- ration d’un genre à l’autre. | Glandes circumbuccales. — Elles sont très nombreuses autour de la trompe du Doridium, constituant surtout au- dessous du bulbe buccal un amas plus considérable que chez ARTICLE N° f. ANATOMIE DES BULLIDÉS. : 89 le Gasteropteron, et qui se voit d'autant mieux, que les tissus environnants sont d’une couleur sombre. Après le Doridium, c’est le Bullu qui présente le plus grand nombre de ces glandes, tandis que le Scaphander et le Phi- line en offrent peu; ces deux derniers ne sécrètent, par suite, du mucus qu’en moindre quantité. Nous avons représenté (fig. 62) trois formes les plus habi- tuelles de ces glandes, d’après celles du; Doridium. Gertames d’entre elles nous offrent un conduit excréteur assez long pour pouvoir, de l’intérieur de la première cavité du corps, atteindre, en traversant les téguments, la surface externe cireumbuc- cale, car elles débouchent toujours dans le creux au fond duquel se trouve l’orifice ae la bouche. Je n'ai observé chez aucun de ces quatre genres des glandes à mucus isolées ou réunies en grappes dans la partie pos- térieure du pied; le Gasteropteron paraît jusqu'ici le seul à posséder cet organe. Organe de Bojanus.— La constitution histologique de cette glande est à peu de chose près la même chez tous les Mol- lusques ; elle est toujours formée par des cellules à contenu hyalin, avec des trainées albuminoïdes emprisonnant dés granu- lations jaune-palle où un peu verdâtres : on dirait souvent que ces cellules sont remplies de vésicules, parfois elles le sont en réalité. Dans ce dernier cas, on a alors affaire à une grosse cellule, cellule mère, dont les parois vont se déchirer pour laisser en liberté les cellules filles. On trouve entre les éléments glandulaires de cet organe des granulations et des cristaux d'acide urique; le Philine en offre même de très gros souvent réunis ensemble et ne constituant qu'une seule masse sphérique, comme celle que j'ai représentée figure 80. | Cette glande occupe chez tous ces animaux le côté droit de la masse viscérale, et elle dépend toujours des tégumenis qui se trouvent au-dessous de la coquille et qui forment la voûte de la cavité postérieure du corps. Glande indéterminée. — J'ai retrouvé cet organe chez le 90 VAYSSIÈRE., Philine et chez le Doridium; elle est toujours près de la poche copulatrice et du cœur, mais il m'a été impossible d’arriver à en connaître les fonctions. Chezle Scaphander, nous voyons aussi plusieurs organes glan- dulaires : l’un d’eux, très développé et d’une coloration jaune d'œuf, occupe le bord antérieur et latéral (de droite) du inän- teau, Si l’on vient à mettre dans l’eau un fragment de cette glande, on voit aussitôt s'échapper une espèce de trainée flocon- neuse d’une teinte jaune-soulfre. Un second organe glandulaire est constitué par un corps brun rougeâtre, presque sphérique, situé en avant du péricarde. Enfin, sur le côté droit, un orgañe blanc, avec une légère teinte jaunâtre, oecupe toute la partie latérale et postérieure dé cette région du corps ét se prolonge en arrière pour accompagner le foie jusqu’au fond du defhier tour de spire. Ges diverses glandes du Scaphander nécessite- raient une étude Spéciale, non-seulement histologique, mais aussi chimique, pour bien en reconnaitre les fonctions. CHAPITRE IV. ORGANES DE LA RESPIRATION ET DE LA CIRGULATION. Branchie. — La forme de cet organe varie avec celle du Mollusque que l’on observe; il en est de même de sa position, qui, quoique toujours située sur le côté droit de l’animal, est tantôt vers le milieu de ce côté, tantôt en arrière, presque infé- rieurement. ERA Chez le Scaphander et chez le Bulla, la branchie est sur le milieu du côté droit, protégée par le bord de là coquille; chez le Philine et le Doridiun, nous la trouvons bien encore un peu sur le côté droit, mais plus en arrière et en partie contenue dans la cavité cloacale. La branchie est semi-pennée chez le Doridium; mais les renflements qui semblent former des lames ne sont pas libres inférieurement, comme ceux du Gasteropteron. Ges lames sont loin d’être aussi nombreuses que chez ce dernier, et, par leur partie médiane très renflée, elles montrent bien qu’elles ne sont ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 91 que des replis de la membrane branchiale venant former alter- nativement des saillies sur les deux faces de l'organe. Chez le Philine, la branchie ést moins indépendante que dans le genre précédent et les boursouflures semblent moins marquées. Si l’on vient à détacher cette branchié avec soi et à l'étendre sur une de ces faces, elle présente alors la forme d'un losange peu allongé. La branchie est insérée chez le Scaphander au-dessous des téguments de droite ; elle a la forme d’un cône comprimé laté- ralement, et elle offre la même constitution que celle du Phi- line ; Sa pointe ést dirigée en arrière et de haut en bas. Chez le Bulla, la branchie est semi-pennéé comme celle du Doridium; sa pointé est proportionnellement plus longue ét conserve une plus grande indépendance que celle du Sca- phander. | Le tronc veineux qui apporte le sang du corps à l’organe respiratoire occupe toujours le bord infériéur de la branchie, tandis que c'est dans le bord supérieur que se trouve la veine branchiale chargée de conduire au cœur le sang arté- rialisé. Cœur et appareil circulatoire. —- Nous ne comptons nulle- ment décrire d’une manière complète l'appareil circulatoire de ces quatre Bullidés, attendu que ce serait répéter en grande partie ce que nous avons dit déjà sur l'appareil du Gastero- pteron.Nous rencontrons toujours un tronc veineux recevant le sang de l'organe de Bojanus et le portant à la branchie. De là le liquide sanguin arrive au cœur par la veine branchiale et est poussé par lorgane central de la cireulation dans Je réseau artériel. Il passe ainsi dans le tronc aortique, léquel se bifurque aussitôt en une aorte antérieure qui se répand dans toute la première cavité, dans les organes qui y sont contenus et dans le pied; l’autre aorte, l'aorte postérieure, porte le sang dans tous les viscères et aux téguments de cette région du COrpS. Le sang de la artie antérieure de l’animal revient à l’état veineux par une multitude de lacunes et par quelques veines. II 92 VAYSSIÈRE. débouche en avant dans le grand sinus qui entoure presque le bulbe buccal; de là il va au’ sinus viscéral, lequel reçoit en outre le sang de la partie postérie re du corps ; de ce dernier réservoir le sang veineux va aboutir à l'organe de Bojanus, dans lequel il se répand pour se débarrasser de l’acide urique dont 1l peut être chargé, C’est decette glande que paris veine qui porte le sang à la branchie. Le cœur, composé d’une oreillette et d’un ventricule, est toujours placé dans une cavité, le péricarde, où il peut exé- cuter tous ses mouvements de contraction et de dilatation, sans être gèné par les organes voisins. Lorsqu'on enlève avec soin la coquille d’un Scaphander vivant, on peut observer pendant longtemps les battements du cœur, si l’animal est en- core dans de l’eau de mer. Les parois de l’oreillette sont toujours très peu musculaires, tandis que celles du ventricule nous offrent au contraire des muscles très puissants. J'ai pu observer dans le liquide sanguin du Seaphander des corps amiboïdes en assez grande quantité (fig. 99), corps que je crois être les corpuseules sanguins. CHAPITRE V. ORGANES DE LA GÉNÉRATION. Si les différences qui existent dans les organes génitaux pro- prement dits de ces quatre genres de Mollusques sont peu sensibles, il n’en est pas de même pour celles offertes par les organes copulateurs. Cette partie de l’appareil génital se mo- difie toujours considérablement d’un type à un autre. Les modifications que présentent les diverses parties de ces organes sont moins grandes chez les types de Bullidés dont nous nous occupons qu'entre eux et le Gasteropleron. Ainsi chez ce dernier, les glandes de l’albumine et de la glaire for- ment une masse sphérique occupant toujours la partie anté- rieure et latérale droite de la cavité viscéralesdu corps, tandis que chez les autres (Scaphander, Doridium), ces mêmes ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 93 landes composent une bande assez longue, repliée sur elle- même, s’étalant sur la partie antérieure du plancher de cette cavité sur toute sa largeur et au-dessous de la masse hépa- tique. Chez le Doridium, la glande hermaphrodite, d’une coloration jaune légèrement rosée, occupe la partie postérieure de la masse hépatico-hermaphrodite et en forme d'ordinaire le tiers ; elle est assez compacte et peut être séparée assez facile- ment du foie. Sa forme est très variable et dépend de son degré de développement; dans la figure des organes génitaux je lui ai donné celle qui est la plus habituelle (fig 68). Le conduit efférent, d’une couleur violacée rouge et d’une consistance élastique due à ses parois très musculaires, forme plusieurs circonvolutions qui demeurent appliquées contre l'organe hermaphrodite. Puis il se dirige sous la masse viscé- rale : là son calibre diminue considérablement sur une cer- taine longueur. À l'extrémité de cette région, le canal s'agrandit et ses parois deviennent glandulaires. En ce point débouche une glande, sorte de tube terminé en cæcum, d’un rouge bru- nâtre, aux parois épaisses, et dans la cavité de laquellé je n’ai trouvé qu’un amas de spermatozoïdes. Get organe, qui fait dé- faut chez le Gasteropteron, nous le retrouverons chez les trois autres genres. Le conduit efférent prend ensuite un calibre plus fort; il a une teinte blane jaunâtre et va déboucher à la base de l'utérus, près d’un renflement piriforme. Les parois de l’utérus sont très musculaires et d’une coloration rose chair assez vive. Cette poche, qui est grande, vient s'ouvrir à l'extérieur dans la cavité cloacale, à côté de la base de l’organe respiratoire. Les deux glandes annexes de l'appareil sont volumineuses, surtout celle qui fournit la substance glaireuse. Cette dernière, d'une coloration jaune pâle, est très hyaline. Elle constitue un corps cylindrique enroulé dont les bords de chaque tour s’accolent avec les précédents pour former ainsi une grande masse aplaue et elliptique qui s'étend sur les téguments pé- dieux. La glande de l’albumine, d’une teinte blanchâtre et d’un D. 94 . . VAYSSIÈRE. aspect grenu, se trouve enchâssée dans la région basilaire de la glande de la glaire. Ces deux organes versent directement leurs produits au fond de l'utérus. Un peu en avant des glandes annexes de l’ appareil génital et un peu au-dessus de celle de la glaire, se trouve un corps sphérique volumineux, aux parois assez minces et constituant la poche copulatrice ; J'y ai toujours trouvé un amas de sper- matozoïides agglutinés par une substance brunâtre. Cette poche est en rapport avec l'utérus au moyen d’un conduit étroit, mais assez long. Chez le Philine, la glande RNA forme aussi une masse assez compacte, située à la partie postérieure du foie ; la coloration orangée est plus ou moins vive. J'ai figuré un de ses follicules dans lequel on peut apercevoir des ovules peu développés à la périphérie, tandis qu’au centre on distingue des spermatozoïdes presque formés et disposés en faisceaux. Le conduit efférent ou excréteur, produit par la réunion des deux derniers canaux récepteurs des produits sexuels, offreune couleur rosée ; il décrit, pendant un certain trajet qui consti- tue la première partie du conduit, plusieurs cireonvolutions ; il a dans cé parcours un calibre assez fort et des parois épaisses. La région médiane qui lui fait suite est très grêle; elle s’ap- puie contre la glande de la glaire en décrivant des sinuosités et vient aboutir à la troisième région ou partie inférieure du canal excréteur. Cette dernière région, d’abord très renflée, diminue un peu de diamètre en se rapprochant de l'utérus; ses parois Sont aussi musculaires que celles de la région supé- rieure du conduit et elles possèdent la même couleur. Vers son milieu, elle reçoit un organe un peu réniforme, d’une. teimte brunâtre claire, analogue à celui dont nous avons parlé en décrivant l rate à cénital du Doridium. La glande de la glaire, de forme assez semblable à celle dt Prénédent NE est jaune hyaline, et ne décrit qu'un tour de spire; à sa base nous trouvons la glande de lalbu- mine, d'aspect laiteux, offrant à l’extérieur de petites gra- nulations. Ces deux organes glandulaires viennent débou- ARTICLE N° . d Pi] ANATOMIE DES BULLIDÉS. 95 cher, ainsi que le conduit efférent, au fond de l'utérus. Celui-ci forme une cavité assez grande, aux parois épaisses et très musculaires, offrant à lextérieur un orifice un peu particu- lier que nous avons figuré séparément. La poche copulatrice est allongée, d’une couleur brune avec une tache presque rouge-brique à son sommet; son conduit excréteur est très large, mais court ; il débouche sur le côté de l'utérus, après avoir formé un petit diverticulum sphérique. Les organes génitaux du Scaphander présentent les mêmes dispositions que ceux du Philine, sauf les deux particularités suivantes : 4° La glande hermaphrodite est contenue ici en grande partie dans la masse hépatique; on n’aperçoit à l’ex- térieur (à la face ventrale) qu’une bande de l’organe généra- teur avec quelques prolongements lobulaires disséminés par-ci par-là. Il se produit presque chez le Scaphander l'inverse de ce que l’on observe chez les Doridés et chez quelques autres Nudibranches, chez lesquels c’est la glande hermaphrodite qui enveloppe le foie. 2° La glande de la glaire, qui est très grosse, ne forme pas un cylndre replié sur lui-même, mais un prolongement très large, aplati et légèrement recourbé à son extrémité. Les organes génitaux du Bulla sont à peu près semblables à ceux du Doridium, aussi croyons-nous inutile d’en faire la description. Organes copulateurs. Les différences qui existent entre les organes copulateurs de nos divers Bullidés tiennent surtout à la position de l’ori- fice génital et au plus ou moins de facilité que peut présenter l'acte de la copulation. La partie principale de l’organe copulateur est la prostate. Sa forme peut varier à linfini, suivant les genres que l’on observe, mais sa présence est constante. Elle verse par un con- duit excréteur, terminé le plus souvent par un pénis, une sorte de liquide mucilagineux destiné probabiement à faciliter l'introduction des spermatozoïdes dans la poche copulatrice 96 VAYSSIÈRE. de l’autre individu. Toutefois je me demande ier, comme pour le Gasteropteron, de quelle manière la semence, qui arrive par la rainure séminale, peut pénétrer dans l’utérus de l’autre individu, lorsque la verge du premier y est déjà, et de quelle utilité alors se trouve être celle-ci? Sert-elle seulement à rem- plir la poche copulatrice avec le liquide sécrété par la prostate, et n’est-ce qu'après que les spermatozoïdes pénètrent direc- tement de la rainure séminale dans la vulve? C’est ce que je n'ai pu constater de visu. Avant de passer à la description de chacun des organes co- pulateurs de nos Bullidés, disons un mot sur la rainure sémi- nale. Elle est toujours représentée par un canal incomplet formé par un repli de la peau; ce canal est tapissé à l’intérieur par un revêtement de cils dont les mouvements vibratiles poussent les spermatozoïdes d’arrière en avant. La rainure s’étend de l’ouverture génitale à l’orifice de l'organe copulateur; à son commencement on remarque toujours une disposition par- ticulière des bords de louverture vulvaire, laquelle disposi- tion est destinée à faciliter l'introduction de spermatozoides dans la rainure. Nous avons représenté déjà l'ouverture géni- tale du Gasteropleron, nous donnons plus loin celle du Philine. La longueur de ce sillon, ainsi que la courbe qu'il décrit sur le côté droit de lanimal, est en rapport avec la position plus ou moins postérieure et inférieure de l'ouverture de la génération, l’orifice de la verge étant toujours placé sur le côté droit de la bouche. Si l’on ouvre la cavité antérieure d’un Doridium, on aper- çoit, à droite du bulbe buccal, un corps cylindrique d’une coloration analogue à celle des téguments externes, mais plus claire : c’est la gaine du péuis, suivie de la prostate (fig. 65). De tous les Bullidés dont j'ai fait l'anatomie, le Doridium est le seul genre qui présente une prostate à téguments très:minces, laissant voir à l’extérieur sa constitution glandulaire ; elle est presque toujours bilobée. Cependant, chez deux de mes indi- vidus, l’un des lobes s'était atrophié au profit de l’autre, dont la longueur et la largeur se trouvaient être par suite plus consi- ARTICLE N° Î. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 97 dérables. Cet organe glandulaire offre un aspect framboisé et une coloration laiteuse. Si l’on observe sous un fort grossisse- ment un débris de la glande, on voit qu’elle est formée par de petites cellules nucléées remplies de granulations. Les produits de cette glande sont versés dans un canal excréteur très long, offrant des parois peu résistantes et venant, après avoir décrit de nombreuses circonvolutions, aboutir à la base du pénis, dans lequel il se prolonge. Toutes les cir- convolutions de ce conduit excréteur sont enfermées dans un prolongement de l’enveloppe conjonctive de la gaine. Le pénis forme un véritable cylindre charnu, légèrement renflé à son extrémité ; sa longueur égale en moyenne 3 à 4 mil- limètres sur 0"",8 à 1 millimètre de diamètre. On observe à la surface de cet organe une rainure longitudinale terminée anté- rieurement par un petit orifice : cette structure remarquable est due à ce que le pénis, au lieu de former un tube à parois épaisses, comme chez la plupart des Mollusques, constitue chez le Doridium un canal incomplètement fermé; sur les quatre cimquièmes de sa longueur le bord gauche du canal chevauche sur celui de droite; ce n’est qu'à l'extrémité supérieure de la rainure que se trouve une sorte d’échancrure pour permettre la sortie du liquide sécrété par la prostate. Cet orifice n’est pas tout à fait terminal, on l’observe sur la partie ventrale du pénis. Les parois de cet organe sont très épaisses, elles offrent de l’intérieur à l’extérieur un épithélium vibratile, des muscles longitudinaux et une forte couche de muscles transverses. La gaine présente intérieurement des plis longitudinaux plus ou moins forts, reposant sur une couche musculaire qui est elle-même protégée par une membrane conjonctive. Chez le Philine, l'organe copulateur (fig. 2) se compose : en avant, d’un sac piriforme avec un petit cæcum; en arrière, de deux tubes d’une teinte jaunâtre avec reflets nacrés : l’un de ces tubes est très long et forme de nombreux replis qui re- posent sur lestéguments pédieux au-dessous du gésier, un peu vers la gauche; l’autre, au contraire, très court, se termine par ANN. SC. NAT., FÉVRIER 1879-80. IX. 7. — ART. N°4. 98 VAYSSIRRE. un renflement qui adhère à une des sinuosités du tube précé- dent. La première partie est la gaine, tandis que les tubes con- stituent la prostate. Cette prostate, que nous avons déjà décrite chez le Gastero- pleron, présente toujours la même constitution : c’est un tube aux parois externes très musculaires, tapissées intérieurement par une couche de glandes unicellulaires versant leurs pro- duits dans le canal médian de l’organe. Seulement nous trou- vons ici une particularité assez importante. Un tube court vient s'ouvrir au fond de la gaine, mais un peu latéralement, et sou extrémité renflée ne me parail pas communiquer avec la glande; ses parois offrant une constitution semblable à celle de la prostate, je le considère comme étant un second tube prostatique atrophié. La gaine, d’une couleur presque blanche, a des parois assez épaisses, c’est au fond de cette gaine que se trouve un mamelon musculaire qui constitue la base du pénis. Celui-ci présente la forme d’un marteau à deux pointes dont la plus longue et la plus effilée est terminée par l’orifice pémial ; à l’état de repos, cette pointe doit être contenue dans le petit cæcum de la gaine. Si l’on comprime un peu cet organe, on peut suivre alors par transparence la marche du conduit extérieur à travers la masse musculaire qui le forme; c’est sous cet aspect que je l’ai représenté dans ma figure 3. L’organe copulateur chez le Scaphander peut se diviser en trois régions bien distinctes : 1° Un renflement postérieur, cylindrique, à parois très épaisses, ayant environ 8 millimètres de longueur sur 3 milli- mètres de diamètre : c’est la prostate. Intérieurement, cet organe nous offre de très forts plis longitudinaux peu nom- breux,entre lesquels on en reconnait d’autres bien moins forts; ils sont tous reliés entre eux par de nombreux plis transverses, ce qui forme un véritable réseau. 2° Un conduit assez court, avec des parois presque aussi fortes que celles de la prostate; nous trouvons dans l’intérieur de cette seconde partie des plis longitudinaux qui ne sont que la continuation de ceux de la première région. ARVICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 99 3 Une partie assez renflée, dont la cavité communique avec l’extérieur par une ouverture placée dans la rainure du corps à droite de l’orifice buceal. Cette dernière région est plus longue .que le renflement postérieur, mais possède des enve- loppes moins résistantes; elle offre au fond de sa cavité une espèce de mamelon charnu, entourant presque l’orifice du canal excréteur, et couvert, ainsi que les parties voisines, de saillies papiliformes. Ces papilles ont environ 0"",2 de lon- cueur.et offrent une consistance presque cartilagineuse ; nous en avons représenté quelques-unes dans nos planches avec un avossissement moyen pour montrer la forme générale, puis nous avons donné l’extrémité de l’une d’elles pour faire res- sortir ses stries d’accroissement. | Avant de terminer la description de l'organe copulateur du Scaphander, signalons une particularité de la constitution olandulaire de la prostate. Lorsqu'on ouvre cet organe, on trouve sa cavité plus ou moins remplie d’une substance muci- lagineuse, d’une couleur jaunâtre, matière qui est produite, non par les glandes unicellulaires des parois de cet organe, mais par deux corps très bruns enfermés dans les téguments inférieurs de la prostate. Les glandes unicellulaires des parois latérales fourniraient un liquide presque incolore, peu mucila- sineux, qui se mélangerait avec les produits des corps bru- nâtres. Tandis que la prostate du Scaphander est complètement cylindrique, celle du Bulla, qui lui ressemble beaucoup, pré- sente en avant un étranglement circulaire qui lui donne l’aspect d’un gland contenu dans sa cupule. Get organe a, comme celui du Mollusque précédent, des parois fort épaisses dans les- quelles se trouvent une multitude de glandes qui versent leurs produits dans un canal central. La région médiane de l’organe copulateur est faiblement développée ici, elle se confond presque avec la gaine. À peu de distance de la prostate, le canal excréteur, avec ses parois musculaires très épaisses, se dirige vers un diaphragme qui divise en deux cavités toute cette région fusiforme, La verge 100 VAYSSIÈRE. proprement dite est contenue presque en entier dans la cavité inférieure; iln’ya que son extrémité qui, traversant le dia- phragme en son milieu, vient former, au fond même de la chambre antérieure, un petit mamelon au sommet duquel se trouve l’orifice du canal excréteur de la prostate. Au moment du coit, la gaine se retourne comme un doigt de gant et forme un pénis ayant en longueur environ les deux tiers de celle de la cavité postérieure de la région fusiforme. L’érection du pénis est toujours produite chez le Bulla, comme chez les autres genres, par l’afflux du sang autour du conduit excréteur, entre les parois externes de ce conduit et les enveloppes de l'organe pénial. CHAPITRE VI. SYSTÈME NERVEUX. L'étude du système nerveux de ces quatre genres de Bul- lhdés montre qu’il n'existe pas de différences bien importantes entre eux; mais si l’on compare sous ce rapport ces Mollusques au Gasteropteron, 1l est facile de constater des différences ayant une assez grande valeur au point de vue systématique. Ainsi, chez ce dernier, on remarque, d’une part l’absence complète de centres nerveux de la génération sur le trajet de la com- missure viscérale ; d'autre part, la présence de trois ganglions viscéraux distincts du côté gauche, tandis que chez nos quatre autres types de Bullidés, un unique ganglion se trouve de ce côté, et deux seulement forment le groupe viscéral de droite. Nous ne décrirons pas en détail le système nerveux de chacun de ces Bullidés ; nous nous contenterons d'étudier leurs centres nerveux de la vie de relation, ainsi que ceux de la vie orga- nique, de faire l’énumération des nerfs qui sortent de ces gan- glions ; puis nous nous occuperons des modifications que pré- sentent les organes des sens, et particulièrement les organes olfactifs chez ces divers Mollusques. ARTICLE N° 4. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 401 Centres nerveux. Nous n’adopterons pas complètement dans la description de ces organes l’ordre que nous avons suivi pour le Gustero- pleron; nous réunirons dans ce paragraphe les centres de la vie organique à ceux de la vie de relation. Tous les nerfs (1) seront désignés par des numéros, afin d'établir autant que possible quelque homologie avec ceux du précédent Mollusque. Comme nous venons de le dire, il y a une différence assez grande entre le collier œsophagien de nos quatre Bullidés et celui du Gasteropteron. D'abord les ganglions viscéraux, dis- tincts des premiers, sont du côté droit au lieu d’être du côté gauche; puis ils se composent de deux ganglions au lieu de trois; enfin l’unique ganglion de gauche ne présente aucune trace de soudure. L'aspect général diffère aussi : les connectifs qui relient les divers ganglions entre eux sont très courts, tan- dis que les commissures sus- et sous-æsophagiennes sont très longues; c’est même cette particularité qui avait amené les premiers naturalistes à ne considérer qu'un centre nerveux de chaque côté du collier. Les centres du Doridium offrent une coloration orangée assez vive; leurs cellules nerveuses, de grosseur moyenne, sont presque toutes unipolaires. Le névrilème qui entoure les ganglions n’est pas très résistant; on ne trouve pas dans son épaisseur de concrétions calcaires, comme nous en obser- verons chez le Scaphander. Les ganglions cérébroïdes sont oviformes, proportionnellement moins gros que ceux du Gas- teropteron; ils sont reliés entre eux par une commissure sus- æsophagienne assez forte, entourée d’un épais névrilème. Ces ganglions sont rattachés aux ganglions pédieux et aux gan- (1) Lorsqu'un tronc nerveux commissural est interrompu, puis repris à peu de distance, j'indique entre les deux parties la longueur en millimètres qu’il fau- drait ajouter pour donner au tronc sa longueur totale avec le grossissement de la figure. Je n’ai usé de ce moyen que pour les commissures viscérales du Doridium, du Scaphander et du-Philine ; celles du Bulla sont représentées en entier. 102 VAYSSIÈRE. glions viscéraux par de très courts connectifs, de telle sorte qu’on voitentre ces divers centres un tout petit espace vide triangulaire, au milieu duquel passent le nerf audiüf et le tronc nerveux qui s’anastomose avec deux des nerfs du gan- olion cérébroïde. Les ganglions pédieux sont sphériques, un peu moins gros que les cérébroïdes, mais plus colorés; ils sont reliés entre eux par deux commissures sous-æsophagiennes inégales : l’une, qui est la plus courte, mais la plus forte, est près de deux fois plus longue que la commissure cérébroïdale ; l’autre (qui forme la commissure parapédieuse de M. fhering) accomplit une parte de son parcours dans l'épaisseur des muscles du pied, en don- nant naissance presque en son milieu à un nerf très grêle. Celui-ci va se perdre un peu en arrière, au milieu des tissus de cette partie du corps. gti Les ganglions viscéraux sont au nombre de trois, un seul à gauche et do à droite. Celui de gauche.est sphérique, un peu lenticulare ; son diamètre égale la moitié de celui des gan- glions pédieux; sa coloration orangée est très accentuée. On ne distingue aucune trace de soudure dans sa masse gan- glionnaire, Les centres viscéraux de drôite se composent d’un ganglion Date presque aussi fort que celui de gauche, ayant à sa partie mférieure un petit g ganglion piriforme, qui est le point de départ des nerfs viscéraux. Du ganglion pédieux, entre les commissures pédio-viscér ale et pédio- eo. sort un tronc nerveux qui, après avoir donné latéralement un petit nerf, se bifurque en passant sur le ganglion eérébroïde; une de ses branches se soude avec le are 3, l'autre avec le. nerf ». Ce tronc nerveux, dont nous avons éônstaté la présence chez le Gasteropteron, se retrouve chez tous les types de Bullidés dont nous avons étudié les centres nerveux, | Les nerfs qui sortent des ganglions cérébroïdes nécessitent quelques détails. | Le nerf 1, ou connectif cérébro-buccal, est très long; il met ARTICLE N° f, ANATOMIE DES BULLIDÉS. … 405 en rapport les centres du stomato-gastrique (ou ganglions buccaux) avec le cerveau. Dans son trajet, il donne trois nerfs (x, 6 ety) qui se perdent dans les tissus musculaires du bulbe. Les ganglions buccaux, qui sont bien plutôt les centres ner- veux de l’œsophage et de l’estomac que ceux du bulbe buccal, sont placés immédiatement au-dessous du point de naissance de lœsophage ; ils sont ovoides et reliés entre eux par une courte commissure au milieu de laquelle sort le nerf (Ô) radu- laire. Sur le bord externe de chaque ganglion nait un tronc assez fort, le nerf (0) œsophagien, dont l'extrémité se ramifie sur les parois de lestomac; puis un grand nombre de petits nerfs qui se rendent, soit aux glandes salivaires, soit dans les tissus de la région postérieure du bulbe. Le nerf 2, ou nerf optique, est très long chez le Doridium; ce- pendant l’œil demeure toujours dans l'épaisseur des téguments dorsaux. | Le nerf 3 (formé probablement par la soudure des nerfs 3 et 4) devient ici l'unique nerf du disque céphalique; il sort du bord antérieur du ganglion cérébroïde et se bifurque presque aussitôt : l’une des branches innerve la partie médiane de cette région du corps, l’autre la partie latérale. Le nerf 5 se rend dans les parties latérales du corps, celles qui sont comprises entre le disque céphalique et le renflement parapodique; ses premières branches doivent surtout innerver l'organe olfactif. Le nerf 6 naît sur le bord externe du ganglion cérébroïde : c’est le plus volumineux de tous les troncs; il envoie ses nom- breuses ramifications dans la partie antérieure du corps de P’animal. | En dehors de ces troncs principaux, nous rencontrons quelques nerfs assez grèles qui vont compléter l’innervation de la région dorsale de l’animal. Les nerfs 7 et 8, qui chez le Gasteropteron sortent du oroupe viscéral de gauche, font complètement défaut ici. Le nerf 9 sort du petit ganglion du groupe viscéral de droite, et après un parcours assez long va se bifurquer près de la bran- 404 VAYSSERRE. chie : l’une de ses ramifications forme un tout petit ganglion piriforme, le ganglion branchial ; l’autre innerve les téguments Voisins. Les nerfs 10 constituent la commissure viscérale; celle-ci est excessivement longue et donne naissance presque en son milieu à deux ganglions sphériques, d’inégale grosseur, acco- lés lun à l’autre. Ces deux ganglions constituent les centres nerveux de la génération. Les ganglions pédieux fournissent les troncs suivants : Près du connectif pédieux viscéral naît le nerf 11, de moyenne grosseur ; ce tronc se rend dans les téguments laté- raux du pied. ; Le nerf 12 représente le nerf de la parapodie du Gastero- pleron; mais 1l est moins volumineux ici, par suite du peu de développement des expansions latérales du pied chez le Dori- dium . Le nerf 15, ou grand nerf pédieux, sort presque de la partie postérieure du ganglion ; il se ramifie dans toute la région mé- diane et postérieure du pied. Le nerf 14 est rudimentaire chez le Dor idium ; il n’innerve que les téguments pédieux situés au-dessous du collier æso- phagien. Les troncs 15 et 16 vont se perdre dans toute la partie anté- rieure du pied, et compléter ainsi l’innervation de la face ven- trale de l’animal. | Le nerf 17 se rend dans les différentes parties de l’organe copulateur. On ne constate la présence de ce nerf qu’au gan- glion pédieux de droite, à moins que l’on ne puisse considérer comme son homologue certain petit nerf très grêle qui sort du ganglion pédieux de gauche, avec plusieurs autres nerfs qui nous semblent pouvoir être négligés, vu leur excessive petitesse. Les systèmes nerveux du Philine et du Scaphander pré- sentent une si grande analogie, que nous ne croyons pas devoir les décrire séparément. Les centres forment chez ces deux genres deux groupes assez compactes, reliés entre eux par de longues commissures, ce qui leur donne un aspect particulier. ARTICLE N° {. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 105 Le névrilème qui entoure les divers ganglions ainsi que les fortes commissures, est très épais, et offre presque toujours de nombreuses concrétions calcaires qui cachent plus ou moins leur coloration : cette particularité est très accentuée chez le Scaphander. Les centres nerveux de ce dernier genre sont rouges ou d’une très belle coloration orangée ; ceux % Philine sont d’une teinte orangée moins vive. Le collier œsophagien se compose des centres nerveux sui- vants : une paire de ganglions cérébroïdes piriformes; un seul ganglion viscéral à gauche et deux à droite; enfin une paire de ganglions pédieux. Ces derniers sont presque sphé- riques. Ces divers ganglions sont reliés supérieurement par la grosse commissure cérébroïdale; inférieurement, par la forte commissure pédieuse, la faible commissure pédieuse et notre commissure intercérébroïdale sous-æsophagienne. Cette dernière, qui est très ténue, envoie de chaque côté, comme chez le Gusteropteron, un petit nerf se rendant à la trompe. Les ganglions constituant les deux groupes sont reliés entre eux par des connectifs excessivement courts {connectif céré- bro-viscéral, viscéro-pédieux et cérébro-pédieux). Voici quels sont les troncs nerveux fournis par les ganglions cérébroïdes : Les nerfs 1, ou connectifs cérébro-buccaux, ver le sto- se tone au cerveau. Ils donnent dans lu parcours les nerfs « et6, quise ramifient dans les muselesde la région dorso- latérale du bulbe. La commissure interbuccale fournit le nerf radulaire, tandis que les ganglions eux-mêmes donnent chacun naissance à un tronc nerveux assez fort qui envoie tout de suite un nerf (e) à la glande salivaire de son côté, et qui se dirige (à) vers le gésier en innervant les parois de l’œsophage. Arrivé à l’estomac masticateur, ce nerf forme avec celui du côté opposé un an- neau contenant quelques cellules nerveuses. Cet anneau envoie plusieurs ramifications au milieu des muscles du gésier, ainsi 406 VAYSSIÈRE. que deux ou trois trones qui viennent aboutir à un second anneau nerveux entourant le commencement de l'intestin. Chez le Scaphander, les nerfs qui relient l’anneau antérieur avec l’autre anneau sont au nombre de deux seulement; chez le Philine, on en trouve trois. Ges nerfs passent au-dessus des bandes musculaires qui unissent les plaques entre elles. Les nerfs optiques (nerfs 2) sont très courts; ils prennent directement naissance sur les ganglions cérébroïdes. Les nerfs 8, ou nerfs tentaculaires, sont formés en réalité chez le Scaphander par la soudure intime des nerfs 3 et # du Gaste- ropieron; chez le Philine, cette soudure estencore incomplète, la base du nerf 3 étant indépendante. Les nerfs 5, 5'°et 6 innervent, ainsi que quelques filets de moindre importance, toute la région antérieure du corps de ces Mollusques. Les troncs nerveux 11, 19, 13,14%4 et 15, qui sortent des gan- glions pédieux, serendent, chez le Philine etchezle Scaphander, aux mêmes parties du corps qué leurs homologues du genre Doridium. L’organe copulateur est innervé chez ces deux types de Mollusques par une ramification du tronc nerveux 15 de droite. | Les nerfs qui s’anastomosent avec deux des troncs des gan- elions cérébroides sortent chacun de la partie antérieure des ganglions pédieux entre les connectifs viscéro-pédieux et céré- bro-pédieux ; ils envoient une petite ramificalion latéralement, puis se bifurquent ; une de leurs branches va se souder avec la base renflée du nerf 5, l’autre avec le tronc nerveux tentacu- laire (voy. la fig. 18 de cette partie du Scaphander). Les ganglions viscéraux sont reliés entre eux par une très longue commissure, vers la partie médiane de laquelle nous irouvons deux ganglions génitaux accolés l’un à l’autre, Chez le Phailine, la partie de la commissure qui relie le gan- glion viscéral gauche au premier ganglion génital envoie un petit nerf aux téguments de la région postéro-inférieure du corps. Cette partie de la commissure aurait dans notre figure environ 400 millimètres en plus, si nous l’avions représentée ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 107 en entier. Le second ganglion génital (7), qui est beaucoup plus gros que le précédent, envoie d’abord : un tronc ner- veux (#i), qui va se perdre au milieu des tissus musculaires enveloppant la partie inférieure de là coquille ; puis un second tronc se bifurquant, pour former, d'une part le nerf géni- tal (gen.), dont on peut suivre toutes les ramifications dans la figure d'ensemble des organes de la génération (fig. 14), et d'autre part la continuation de la commissure viscérale. Jai aussi retranché une longueur de 90 millimètres à cette seconde partie de la commissure, pour ne pas trop compliquer la figure 12. C’est de la commissure, et non d’un des ganglions viscéraux, que sort le nerf branchial 9. Le Scaphander présente üne disposition analogue, si ce n’est pour le point de sortie du nerf branchial ; là commissure offre entre lés ganglions génitaux et les ganglions viscéraux un renflement nerveux assez fort qui constitue le premier ganghon branchial (Br), et c’ést de ce renflement que naît le nerf 9. Après un court trajet, ce nerf produit un tout petit ganglion piiiforme qui se trouve même à Ja base de la branchie. Nous remarquerons cette même disposition dans le genre Bull. FL est intéressant d'observer les variations du point d’inser- tion du nérf branchial. Chez le Gasteropteron, nous voyons ce nerf prendre naissance du sofimét du troisième ganglion du groupe viscéral de droite (fig. #7), et peut-être même du second sanglion ; chez le Doridium, le nerf sort à côté de la commis- sure sans contracter d’adhérence avec elle; le point de sortie du nerf branchial se trouve chez le Philine sur la commissure en quelque sorte, et n’est qu’une ramification de celle-ci; enfin chez le Scaphander et chez le Bulla, &’est un ganglion spécial, situé sur le trajet de la partie droite de la commissure, qui donne naissance au nerf branchial. Le nerf M présente aussi quelque chose d’analogue, mais de moins complexe. Chez le Gasteropteron, il sort directement du dernier ganglion viscéral de gauche, à côté du nerf commis- sural, tandis que chez tous nos autres Bullidés nous le voyons naître du gros ganglion génital (G). 108 VAYSSIÈRE. Les centres nerveux sont proportionnellement beaucoup plus gros chez le Bulla; les fortes commissures sus- et sous- œsophagiennes sont aussi plus fortes et plus courtes; il°en est de même pour la petite commissure pédieuse. Ces particu- larités donnent à l’ensemble du système nerveux du Pulla un aspect un peu difiérent, qui l’éloigne. des trois précé- dents. Les ganglions de son collier œsophagien (fig. 12) possèdent une teinte orangée assez faible; ils sont enveloppés par un névrilème épais, mais très hyalin et ne présentant pas de con- crétions calcaires. Les ganglions cérébroïdes, de forme un peu triangulaire, donnent naissance aux nerfs habituels. | Les nerfs 1, ou connectifs cérébro-buccaux, offrent la même disposition que ceux du Scaphander; les ganglions buceaux sontseulement plus volumineux etmoins fusiformes. Les nerfs à forment en avant du gésier un anneau nerveux, analogue à ceux du Scaphander et du Philine, et rattaché à un second anneau (anneau postérieur) par trois nerfs assez forts passant à la surface de l’estomac masticateur dans les sillons qui limitent les trois grandes plaques. Les nerfs 2, ou nerfs optiques, sont très longs et vont aboutir à la base des yeux; nous décrirons ces organes dans le chapitre suivant. Les nerfs 3 et 4, bien que sortant isolément des bords anté- rieurs des ganglions cérébroïdes, ne forment bientôt plus qu’un seul tronc dont les ramifications innervent le disque cépha- lique. Les nerfs 5 vont se ramifier dans les tissus latéro-antérieurs de ce Mollusque, tandis que les troncs 5/, ici très volumineux, innervent les organes olfactifs. Les troncs G envoient leurs fortes et nombreuses ramifi- cations dans les tissus de la région antérieure du corps de l'animal. | Les ganglions pédieux sont reliés aux cérébroïdes et aux vis- céraux par de courts connectifs. Ces centres nerveux sont ARTICLE N° 1, ANATOMIE DES BULLIDÉS. 109 presque ovoïdes et moins gros que les ganglions cérébroïdes ; ils fournissent les troncs nerveux suivants : Les nerfs 11, 19, 13 et 14, qui se ramifient dans les tissus des parapodies et du pied du Bulla. Les nerfs 15 et 16, innervant la région antérieure du pied. Le nerf de l'organe copulateur me parait, comme chez le Philine et chez le Scaphander, n'être qu'une ramification du tronc 16 de droite. ( Le Bulla présente le même nombre de ganglions viscéraux que les trois genres Doridium, Philine et Scaphander, et ces centres sont disposés de la même manière, c’est-à-dire qu’on trouve un seul ganglion à gauche et deux à droite. Ils sont reliés aux autres centres par de très courts connectifs. La commissure viscérale est fort longue et présente dans son parcours quatre centres ganglionnaires de grosseurs diffé- rentes. Nous voyons à droite le ganglion branchial (br), de forme sphérique, fournissant un nerf assez gros (9), dont une des ramifications vient aboutir à la base de l’organe respira- toire, où elle se renfle pour former le petit ganglion bran- chial (br). À gauche, nous observons les {rois centres nerveux de la génération, disposés de la même manière que ceux du Sca- phander ; le nerf génital (gex.) sort du troisième ganglion (g), qui se trouve ici presque accolé au ganglion G. Nous n’avons pu arriver à découvrir chez le Bulla la délicate commissure cérébroïdale sous-æsophagienne ; nous croyons toutefois qu’elle ne fait point défaut ici, et que de nouvelles recherches pourront nous la montrer. Il nous a été possible de voir avec beaucoup de netteté la disposition du tronc pédieux, dont les branches s’anastomosent avec les nerfs 3 et 5. Ce tronc nerveux prend naissance, comme chez les autres Bullidés, entre les connectifs pédieux viscéral et pédieux-cérébroïde ; 1l donne, en passant devant le triangle de M. Lacaze-Duthiers (espace libre formé par les ganglions de chaque côté du collier œsophagien), un nerf assez grêle qui se T10 VAYSSIÈRE. perd dans les téguments voisins ; il arrive enfin à la base du ganglion cérébroide, où il se bifurque : sa branche externe se rend au nerf 5 et s’anastomose avec lui, tandis que sa branche interne continue sa marche jusqu’au bord antérieur du cerveau, pour venir se souder avec le tronc formé par les nerfs 8 et 4. [lest certain que les trones nerveux 5 et 4 du Gasteropteron sont représentés tous les deux chez nos quatre Bulhidés; seule- ment, chez deux d’entre eux (Doridium et Scaphander), il est impossible de les séparer, la soudure ayant lieu dès leur partie basilaire. Organes des sens. Tous les organes des sens ne sont pas également différenciés chez les quatre genres de Bullidés que nous étudions ici; cer- tains d’entre eux sont même très rudimentaires. : Organes olfactifs. — Siles organes du tact ne sont DS Re lisés par suite de l’absence complète de tentacules, 1l n’en est pas toujours de même pour les organes olfactifs. Ceux-ci, qui font défaut au Gasteropteron, ne paraissent pas exister davantage chez le Phuline; mais sur les parties latérales du Scaphander, entre le disque céphalique et le pied, on ob- serve déjà un commencement de différenciation des téguments. La membrane externe prend en ces points une coloration oran- gée assez vive et une consistance un peu spongieuse. Chez le Doridium, ces organes, placés aux mêmes endroits, sont beaucoup plus visibles ; ils prennent une coloration noire assez intense et un aspect velouté. Si l’on observe sous un faible grossissement (fig. 5) ces parties latérales du corps, on aperçoit une rainure médiane, de laquelle semblent partir de nom - breuses petites rainures transversales. Ces organes nous mon- trent sous un plus fort grossissement qu’ils sout formés par une multitude de mamelons irréguliers, laissant des vides entre eux (fig. 6). Chez le Bulla, il existe des organes s olfactifs très ee ciés: ce ne sont plus de sinnlés modifications n’intéressant que la partie superficielle des téguments, mais une série de ARTICLE N° Î. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 111 amelles disposées sur les cûtés d’un axe auquel elles sont rat- t achées. La présence de ces organes penniformes est accusée, à l'intérieur de la première cavité du corps, par la teinte bleuâtre de cette région et par des séries de petits creux correspondant aux lamelles. M. Hancock a donné en 1859, dansles Annals and Magaz. of Natural History, un mémoire spécial sur les organes olfactifs des Mollusques de cette famille. Dans ce travail, l'auteur: an- olais-récuse avec juste raison les idées émises par M. Clarck dans son anatomie du Bulla Hydatis; en effet, ce dernier na- turaliste considérait ces organes comme étant des glandes salivaires. — Îl est à regretter que le mémoire de M. Hancock ne soit pas accompagné de figures. Les organes olfaculs du Bulla Hydatis sont toujours innervés par les troncs 5’. | Organes de la vision. — Les yeux sont presque complète- ment atrophiés chez le Phaline et chez le Scaphander, et leur position est tout à fait interne. Nous avons déjà fait observer que les nerfs optiques de ces deux Mollusques sont très courts et ne permettent pas aux yeux d'atteindre même les téguments dorsaux, Chez le Doridium, les organes visuels, sans venir à la surface du disque céphalique, arrivent cependant, grâce à la longueur de leurs nerfs optiques, sous la couche superficielle des tégu- ments. Les veux présentent chez ce Mollusque la forme de corps ovoides, moins allongés que ceux du Gasteropteron; leur cristallin est presque sphérique. C’est encore le genre Bulla qui offre les organes visuels les plus différenciés. Si chez les Bullidés précédents les veux ne sont pas visibles à l'extérieur, 1l n’en est pas de même ici. En observant un animal vivant, on aperçoit sur la partie antérièure du disque céphalique deux petites cavités placées une de chaque côté, à une certaine distance de la ligne médiane. Au fond de ces cavités, on disungue les globes oculaires bien visibles, grâce à leur substance pigmentaire noire qui tranche sur la coloration blanche des tissus qui les environnent, 119 VAYSSIÈRE. Les yeux, comme on le voit, n’émergent pas ; ils sont séparés du milieu ambiant par une fine membrane incolore et très translucide, qui n’est en quelque sorte que la continuation de l’épiderme. Ces organes visuels sont presque comblée sphériques ; leur partie antérieure offre seule une région plus bombée, cor- respondant au cristallin (fig. 15). La substance pigmentaire est 1ci très abondante; elle envahit non-seulement toute la région médiane et inférieure de l’œil, mais encore une moitié du nerf optique. Le cristallin est sphérique. Ces organes sont rattachés aux ganglions cérébroïdes par de très longs nerfs. Par suite de la différenciation des organes de la vision du Bulla, nous voyons quelques muscles venir adhérer, d’une part aux enveloppes externes des globes oculaires, d'autre part aux tissus voisins; ces muscles sont destinés à faire mouvoir les yeux dans l” act de leurs petites cavités. Organes auditifs. — Ces organes présentent chez {ous nos Mollusques la même disposition. Ce sont toujours de petites vésicules enchâssées dans le névrilème des ganglions pédieux, sur les bords externes de ceux-ci, à côté du point de sortie des troncs nerveux 11. Ces vésicules ou otocystes sont plus ou moins sphériques, parfois un peu lenticulaires, comme chez le Bulla ; leurs parois sont assez épaisses, et elles offrent à leur intérieur un revêtement de cel- lules vibratiles qui agitent continuellement les otolithes. Ges corps calcaires ovoïdes, ou en forme de grains de millet, sont très petits, et par suite toujours très nombreux: ainsi le Bulla et le Doridium nous offrent bien cent cinquante à deux cents otolithes dans chacun de leurs otocystes. Chaque vésicule auditive est reliée au ganglion cérébroïde correspondant par un nerf très grêle; celui-ci, traversant l’espace triangulaire compris entre les ganglions, vient s’in- sérer entre les connectifs cérébro-viscéral et cérébro-pé- dieux. Je n’ai jamais aperçu d’otolithes dans l’intérieur des nerfs ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 113 auditifs de nos quatre Bullidés; cette particularité se voit au contraire assez fréquemment dans d’autres Opisthobranches. Nous ne voulons pas terminer ce mémoire sans rappeler et préciser les résultats de nos recherches sur l’anatomie des Mol- lusques qui en sont l’objet. Nousallons résumer d’abord tout ce qui concerne le Gasteropteron, puis nous nous occuperons des autres genres de Bullidés qu’il nous a été possible d'étudier ; enfin nous terminerons en proposant pour ce groupe d’Opistho- branches une nouvelle classification des genres qui le com- posent. Dans la monographie du Gasteropteron, nous avons insisté sur l'existence d’une petite coquille nautiliforme attenante par ses bords à la fine membrane qui recouvre toute la masse vis- cérale; nous avons cru devoir décrire cette coquille avec soin parce que, malgré le mémoire publié par Krohn en 1860, on regarde généralement encore ce Mollusque comme en étant dépourvu. Nous avons comblé, autant que possible, les nombreuses lacunes laissées par Delle Chiaje et Souleyet dans leurs des- criptions du tube digestif ét de ses annexes. Nous avons rendu au véritable organe de Bojanus son rôle d'appareil excréteur, que Souleyet attribuait à tort à une glande rouge placée un peu plus avant. Il nous à été impossible de reconnaître les fonctions de cette glande rouge. D’après sa structure intime et ses rapports, on peut lui attribuer un rôle probablement analogue à celui de la glande indéter- minée décrite par M. de Lacaze-Duthiers dans sa monographie du Pleurobranchus. Nous avons constaté la présence de deux autres organes glandulaires qui n'avaient pas encore été signalés : l’un forme une glande en grappe bilobée, contenue dans l’épaisseur des tissus de la région postérieure du pied; l’autre constitue un amas de glandes en bouteille, venant toutes s'ouvrir sépa- rément autour de l’orifice buccal. Ces deux organes, qui ont la ANN. SC. NAT. — FÉVRIER 1879-80. IX. 8. — ART. N° Î. 114 VAYSSIÈRE. même consütution histologique, sécrètent un liquide muci- lagineux. Nous avons aussi complété les descriptions de Souleyet sur les appareils de la circulation et de la respiration. Souleyet, en parlant des organes de la génération, ne faisait pas mention de leurs glandes annexes; il semble avoir pris la glande de la glaire pour la partie inférieure du conduit effé- rent, et il ne parle pas de la glande de lalbumine. Nous avons décrit en détail les diverses parties de cet appareil sans oublier la poche copulatrice dont le naturaliste français a méconnu les fonctions. La prostate tubiforme qui se trouve sur le prolongement du pénis n’était pour Souleyet qu’un simple appendice interne de ce dernier organe. Enfin, il nous a été possible, malgré la récente étude du système nerveux du Gasteropteron faite par M. Ihering, de si- gnaler de nouvelles particularités d’une certaine importance et qui avaient échappé au savant naturaliste allemand. Cest ainsi que nous avons constaté l’existence d’une commissure inter- cérébroïdale, sous-æsophagienne, et que nous avons trouvé une double anastomose du tronc pédieux se détachant entre les deux connectifs (connectif pédieux-cérébroide et pédieux vis- céral), avec les nerfs 3 et 5 du cerveau. M. fhering n’avait vu qu'imparfaitement cette particularité anatomique, puis- qu'il mentionne seulement l’anastomose de ce tronc avec le nerf 9. Nous avons aussi décrit et figuré dans ses moindres détails. toutes les parties du système nerveux, en insistant surtout sur les organes des sens. Dans nos recherches sur l'anatomie des quatre autres genres de Bullidés (Doridium, Philine, Scaphander et Bulla), si nous nous somines contenté souvent d'étudier l’ensemble de l’or- ganisation, en faisant ressortir les analogies ou les différences qui existent entre eux et le Gasteropteron, nous ne sommes pas moins arrivé à des résultats d’un certain intérêt au point de vue systématique. ARTICLE N° À, ANATOMIE DES BULLIDÉS. 115 Chez le Doridium, après avoir décrit l’aspect externe des diverses régions du corps, nous avons tâché de donner une bonne anatomie du tube digestif et de ses annexes, des organes de la génération, et en particulier de l'organe copulateur, qui est assez différent de celui du Gasteropteron. Nous avons fait une description détaillée des glandes circumbuccales de ce Mollusque, qui sont ici très nombreuses. Enfin, dans notre étude du système nerveux, nous faisons observer qu'il existe déjà chez le Doridium une différence dans le nombre et la dis- position des ganglions, et un certain développement dans les organes olfactifs. Le plan général de l’organisation du Phaline et du Scaphander étant sensiblement le même, nous avons décril en même temps les appareils de ces deux genres. Nous faisons remarquer que chez ces deux Bullidés les diverses parties du tube digestif sont plus distinctes, plus nette- ment séparées ; leurs glandes salivaires, au lieu d’être allon- gées comme dans les deux genres précédents et surtout comme dans le type ordinaire de la famille, le Bulla, sont au contraire très courtes et cylindriques ; leur foie ne verse jamais ses pro- duits de sécrétion dans la partie antérieure de l'intestin par plus de deux ouvertures ; leurs glandes cireumbuccales sont fort peu développées. Nous avons constaté entre le système nerveux de chacun de ces deux genres des différences peu importantes ; leurs organes visuels et olfactifs sont très rudimentaires. Quant à leur appareil de la génération, il rappelle dans ses moindres détails celui du Doridium; il n’en est point de même pour leur organe copulateur. Celui du Philine possède une prostate analogue à celle du Gasteropteron, mais le pénis en diffère par sa forme en marteau; l’organe copulateur du Scaphander se compose d’une prostate cylindrique, volumineuse, mais très courte, rattachée à la gaine péniale par un petit pédoncule. Le pénis est complètement absent chez ce Mollusque. Nous avons décrit avec soin les diverses parties du tube digestif du Bulla, surtout le bulbe buccal, à propos duquel nous avons insisté sur la division souvent peu naturelle des 116 VAYSSIÈRE. dents latérales de la radula en dents intermédiaires et en dents latérales proprement dites, et en cela nous sommes complète- ment de l'avis des naturalistes Meyer et Mobius, qui les premiers ont décrit et figuré les modifications insensibles par lesquelles passent ces organes. Nous avons fait connaître l'existence, dans l’estomac du Bulla, de six petites plaques de nature cornées situées deux par deux en avant des intervalles que laissent entre elles les trois grandes plaques en écusson. Nous avons ensuite montré les ressemblances qui existent entre l'organe copulateur de ce genre et celui du Scaphander, ainsi que celles que présentent les organes de la génération. En étudiant le système nerveux, notre attention a été particulière- ment attirée par le développement des organes des sens. Les veux, arrivant jusqu'à la surface des téguments, ne sont nulle- ment atrophiés chez le Bulla; quant aux organes olfactifs, ils arrivent à un haut degré de différenciation qui avait été déjà signalé par M. A. Hancock dans son mémoire sur les organes olfactifs des Bullidés. Nous avons figuré l’un d’eux, afin de com- bler ainsi la seule lacune que présente le travail du savant natu- raliste anglais. L'ensemble de ces recherches nous conduit à proposer pour la famille des Bullidés une classification différente de celle de M. Iherimg. Le naturaliste allemand avait cru devoir, dans son savant ouvrage sur la phylogénie du système nerveux des Mollusques, retrancher des Bullidés les genres Gasteropteron, Philine et Scaphander, pour en former une nouvelle famille qu'il place immédiatement avant, sous la dénomination de Philinidæ. Nous croyons pouvoir conserver momentanément la famille des Bullidés telle que la comprenait Woodward, en la subdivisant seulement en deux sous-familles qui compren- . nent, l’une le seul genre Gasteropteron, l’autre tous les autres types connus. La première de ces subdivisions est caractérisée : 1° Par le grand développement des expansions latérales du pied (les parapodies) ; 2° Par la présence dans le manteau d’une petite coquille ARTICLE N° f. ANATOMIE DES BULEIDÉS. 147 nautiloïde, qui pourrait provenir de la persistance à l’état adulte de la coquille embryonnaire ; Et 3° par la constitution du collier œsophagien. Celui-ci est formé par une paire de ganglions cérébroïdes, une paire de ganglions pédieux et six ganglions viscéraux, réunis entre eux par des commissures. Les ganglions viscéraux sont toujours disposés de la manière suivante : trois à gauche, accolés les uns aux autres, tout en conservant une certaine indépendance, et trois à droite, réunis dans un même névrilème et paraissant ne former qu'un seul ganglion. Jei le nerf génital sort directement de la commissure viscé- rale sans former de renflement ganglionnaire à son point de départ. Le nerf branchial prend toujours naissance des centres viscéraux de droite. La deuxième subdivision présente les caractères suivants : 1° Les parapodies sont toujours rudimentaires. 2° La coquille n’est pointnautiliforme, maisdéerit un enroule- ment plus ou moins complet ; elle est toujours bien distincte, et elle atteint dans certains genres un assez fort développe- ment : dans ce dernier cas elle est extérieure. 3° Le collier œsophagien n'offre, outre les deux ganglions cérébroides et les deux ganglions pédieux, que trois ganglions viscéraux, un à gauche et deux à droite. Le nerf génital sort toujours du plus fort des deux ganglions de la partie gauche de la commissure viscérale. Le point de sortie du nerf branchial ne présente pas dans cette subdivi- sion la même fixité que celui du nerf génital : tantôt le nerf branchial prend naissance du dernier ganglion viscéral de droite (Doridium), tantôt de la partie droite de la commissure viscérale (Philine), ou bien encore d’un ganglion situé près du milieu de cette commissure, entre les ganglions génitaux et les ganglions viscéraux (Scaphander et Bulla). 1148 _. VAWSSIÈRE. EXPLICATION DES FIGURES. Planches 1 à 12. Gasteropteron Meckelii (pl. 1 à 6). Fig. 4. Animal vu par la face dorsale (grossissement en diamètre Ÿ) (1).— D. cç. disque céphalique ; f., flagellum. Fig. 2. Animal vu par la face ventrale (?). — 0. buc., ouverture buccale ; 0. m"m., ouverture de la glande postérieure du pied. Fig. 3. La petite coquille (°? Fig. 4. Fragment de la peau pour montrer la disposition des muscles et des taches pigmentaires. Fig. 5. a, cellules pigmentaires (152); b., concrétions calcaires (299). Fig. 6. Partie postérieure du côté droit de Gasteropteron pour montrer la dis- position de la branchie (%).— An.,anus ; M. r., rebord charnu du manteau; ft, flagellum ; 0. B., orifice excréteur de l’organe de Bojanus; 0. v., ouverture vulvaire; #. s., rainure séminale. Fig. 7. Dre avec la rainure (plus grossies, 13), Fig. 8. Aspect que présentent les divers organes, lorsqu'on a enlevé les tégu- ments dorsaux (5). — T., trompe; Bu., bulbe buccal; g. s., glande salivaire ; CE., œsophage ; F., foie; I., intestin; H., glande hermaphrodite; an., anus; Boj., organe de Bojanus; gl. ind., glande indéterminée; C., cœur; V., gaîne péniale. Fig. 9. Tube digestif (face dorsale) (4). — T., trompe; Bu., bulbe buccal; . gl.s., glande salivaire; Œ., œsophage; E., estomac; 0. h., 0. h., orifices hé- patiques ; F., foie; Î., intestin; an., anus. Fig. 10. Bulbe buccal vu du côté ventral (41). — 91. c., amas des glandes cireum- buccales ; f. r., fourreau de la radula. Fig. 11. Bulbe buccal ouvert pour montrer la position du mamelon radulaire et des petites mâchoires (m. m.) (#°). Fig. 12. Fragment de la radula (2°). —d &., dents intermédiaires ; d.L., dents latérales. Fig. 13. Dent intermédiaire (5°). Fig. 14. Dent latérale (5 Fig. 15. Une des mâchoires (#).—m.,mâchoire proprement dite; c. ep., cellules épithéliales recouvertes d’une couche chitineuse. Fig. 16. Bâtonnets de chitine qui constituent la mâchoire (122). Fig. 17. Papilles chitineuses qui adhèrent aux parois de la trompe (15° Fig. 18. Glande salivaire (4). Fig. 19. Cellules glandulaires de l’organe précédent (422). (1) Tous les grossissements exprimés près de chaque dessin sont des grossissements en diamètre. ARTICLE N® 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 119 Fig. 20. Estomac ouvert pour montrer les orifices hépatiques (je n'ai repré- senté ni les replis qui tapissent les parois de cet organe, ni l’épithélium (12). Fig. 21. Cellules à cils vibratiles de l’épithélium . l'estomac. Fig. 22. Cellules du foie (122). Fig. 23. Glande postérieure du pied : 0. m.,son ouverture ($). Fig. 24. Idem, partie supérieure (52 Fig. 25. Idem, fragment très grossi (15°). Fig. 26. Organe de Bojanus. —p. n., le point noir; an., anus (1). Fig. 27. Idem, fragment grossi. Fig. 28. Éléments cellulaires de l’organe de Bojanus (15°) et quelques concré- tions d'acide urique (29°). Fig. 29. Point noir de ane de Bojanus pour montrer les petits orifices qui mettent en communication la glande avec l'extérieur (222). Fig. 30. Glande indéterminée (%°). — C., cœur; p. c., poche copulatrice. Fig. 31. Fragment grossi de la glande précédente (#?). Fig. 32. Eléments cellulaires de la même glande. Fig. 33. Organe copulateur (#).—p., pénis ;m.r., muscle rétracteur dela gaine : pr., prostate. Fig. 34. Pénis déroulé (?). Fig. 35. Extrémité du pénis (°°). (Nous avons enlevé une partie de l’épithé- lium pour montrer les muscles sous-jacents.) Fig. 36. Coupe transversale faite vers le milieu du pénis (52). Fig. 36 bis. Fragment de la prostate vue par transparence (+2). Fig. 37. Une lamelle de la branchie (#2). — V. 4., veine à sang artériel; V. v., veine à sang veineux ; «, bord interne ; 6, bord externe. Fig. 38. Cœur (2°). — Or., oreillette ; c., ventricule. Fig. 39. Ensemble de Re circulatoire ($).— Or..,oreiliette; c., ventricule A. p., aorte postérieure; À. a., aorte antérieure; V. v., veine à sang vei- neux; V.4@., veine à sang artériel. Fig. 40. Système veineux du manteau ($). Fig. 41. Appareil circulatoire des parapodies, du pied et du disque cépha- lique (#). — À gauche, système artériel : À. &., aorte antérieure; &. c., aorte céphalique; a. P., artère de Ja parapodie; 4. p., artère pédieuse. A droite, système veineux : G. s., grand sinus veineux de la cavité antérieure du corps; S. c., sinus céphalique; S. »., sinus médian. Fig. 42. Disposition présentée par les organes annexes de la génération lors- qu’on a enlevé l’organe de Bojanus et la masse hépatico-hermaphrodite (5). — c. ef., conduit efférent, wt., utérus; gl., glande de la glaire; A{b., glande de l’albumine; 10, nerf génital avec le ganglion génital g; p. c., la poche copulatrice. Fig. 43. Ensemble des organes de lagénération(4t).—H., glandehermaphrodite. Fig. 44. Débris de la glande de la glaire (4). Fig. 45. Un acinus de la glande hermaphrodite (1#2), Fig. 46. Spermatozoïdes très fortement grossis. 190 VAYSSIÈRE. Fig. 47. Moitié gauche du collier œsophagien (#°). — Com. c., commissure cé- rébroïdale ; c.br., connectif du ganglion branchial ; com. visc., commissure vis- cérale; Anast., tronc nerveux qui s’anastomose avec deux nerfs du cerveau; aud., nerfauditif ; o£., otocyste ; com. p., petite commissure pédieuse; com. P., forte commissure pédieuse; com. c., petite commissure cérébroïdale (ou commissure cérébroïdale sous-æsophagienne) ; c. b., connectif buccal, prob. nerf se rendant à latrompe; c. €. p., connectif cérébro-pédieux ; €. v. p., con- neclif viscéro-pédieux ; €. c. v., connectif cérébro-viscéral. Fig. 48. Collier œsophagien (face postérieure) (1). — C., ganglion cérébroïde; P., ganglion pédieux ; V., groupe des ganglions viscéraux de droite; V., groupe des ganglions viscéraux de gauche; Br., ganglion branchial. (Pour la signi- fication des autres lettres, voyez l'explication des figures 47 et 55.) Fig. 49. Système nerveux du disque céphalique, des parapodies et du pied (5). — 3, nerfs céphaliques médians; 4,4, nerfs céphaliques latéraux; 12,12, grands nerfs des parapodies; 13,13, grands nerfs pédieux ; 14,14, nerfs qui se ramifient en partie dans le pied, en partie dans les régions antérieures. Fig. 50. Quelques cellules nerveuses (4°). Fig. 51. Œil (20). Fig. 52. Otocyste (152). Fig. 53. Quelques otolithes très grossis (°92). Fig. 54. Cellules protectrices du collier œsophagien (17°). Fig. 55. Un des ganglions buccaux (*%°). — Con., counectif cérébro-bucca!; «, nerf des muscles du bulbe; 6, idem; y, idem; à, nerf œsophagien; «, groupe de nerfs se rendant, les uns aux glandes, salivaires, les autres aux , téguments postérieurs du bulbe ; », nerf du mamelon radulaire. S Doridium Meckelii. Fig. 56. Animal vu de la face dorsale (4). Fig. 57. Partie postérieure de la face ventrale (4). Fig. 58. Coquille du Doridium aplysiforme (+). Fig. 59. Tube digestif (4). Fig. 60. Un des organes olfactifs (4). Fig. 61. Fragment très grossi de l'organe précédent (15°). Fig. 62. Glandes cireumbuccales isolées (102). Fig. 63. Pharynx ouvert pour montrer la disposition des masses musculaires (4). Fig. 64. La branchie et le cœur ($). Fig. 65. La gaîne péniale et la prostate bilobée (#).— a, éléments cellulaires de la prostate (150). Fig. 66. Le pénis (1). Fig. 67. Spermatozoïdes complètement développés (2>). Fig. 68. Organes de la génération (?). Fig. 69. Le collier œsophagien et les principaux nerfs qui en sortent. — Com. c., commissure cérébroïdale ; com., P., commissure pédieuse principale; com. p., petite commissure pédieusé; B. B', ganglions buccaux ; G., ganglion ARTICLE N° 4: ANATOMIE DES BULLIDÉS. 491 genital principal; Br., ganglion branchial. — N. 1, ou connectif buccal; N. 2, ou nerf optique (voyez le texte pour les autres numéros) ; of., otocyste (4). Philine aperta (pl. 8, 9 et 10). Fig. 70. Ce Mollusque vu par la face dorsale (1). Fig. 71. Organe copulateur (+). Fig. 72. Le pénis montrant par transparence le conduit qui verse au dehors leliquide mucilagineux sécrété par la prostate (1). Fig. 73. Partie postérieure de la face ventrale du Philine pour montrer le point d'insertion dela branchie, l'orifice génital (or.) et l'anus; en arrière de l’ouverture anale, on aperçoit la région musculaire qui protège le premier tour de spire de la coquille de ce Mollusque (#). Fig. 74. Ensemble du tube digestif et de ses annexes. —gl., glandes salivaires; F., foie; an., anus. — Nous avons représenté avec la masse hépatique, la glande hermaphrodite (H.), l'organe de Bojanus (Boj.), une partie de la glande de laglaire(GL.). etle cœur (C.). (Grossissement, $. Fig. 76. Une dent dont le bord dentelé est aussi festonné (4°). Fig. 77. Dent de la radula d’une variété assez petite du Philine aperta (#).— a, dentelures très grossies (172). Fig. 78. Plaques stomacales du Philine. —a, une des deux plaques latérales vue par sa face externe ; b, plaque ventrale vue latéralement (). Fig. 79. Éléments du corps de Bojanus (12°). Fig. 80. Amas globuleux de cristaux d’acide urique (15); quelques-uns de ces cristaux très grossis (50). Fig. 81. Centres nerveux. Fig. 82. Acini de la glande hermaphrodite montrant la formation des ovules à la périphérie et des corps spermatiquesaucentre (12°). Fig. 83. Organes dela génération avec les ganglions génitaux dont le principal (G.) fournit : à gauche, le nerf ., qui vase perdre dans les muscles de la par- tie postérieure des téguments abdominaux du Philine; à droite, un autre tronc qui se renfle presque aussitôt et forme sur son prolongement le nerf génital (gén.). Près de la poché copulatrice se trouve la glande indéterminée (gl. ind.) avec le cœur (C.).— (4°). Fig. 84. Orifice externe des organes génitaux (12). Scaphander lignarius. Fig. 85. Individu complètement dépourvu de sa coquille pour montrer les divi- sions de la face dorsale. — Grandeur naturelle. Fig. 86. Ensemble de l'appareil digestif vu en place. Dans la masse hépatique on distingue des émergences de l'organe hermaphrodite (4, k', h'', h'!'); sur le côté droit du bulbe buccal, se trouve l’organe de la copulation (1). 199 VAYSSIÈRE. Fig. 87. Bulbe buccal vu par sa face dorsale. Cette figure est surtout destinée à montrer la disposition des bandes musculaires qui font mouvoir cette partie de l'appareil digestif (?). Fig. 88. Une des deux glandes salivaires (7). Fig. 89. Cellules de cette glande salivaire (+%°); quelques granulations très gros- sies de ces cellules (292). ; Fig. 90. Moitié gauche de la radula (5). Fig. 91. Une de ses dents ()- Fig. 92. Dents anormales d’un individu pris à Nice (#2). Fig. 93. Dents latérales rudimentaires d’une radula de Scaphander for Fig. 94. Concrétion trouvée à côté des dents rudimentaires, représentant peut- être la base de l’une d’elles (5° Fig, 95. Figure de la région stomacale d’un Scaphander pour montrer le sys- tème nerveux stomato-gastrique qui l’mnerve (2), Fig. 96. Gaine péniale ouverte montrant inférieurement, près de l’ouverture du conduit de la prostate, les mamelons papilleux qui remplacent le pénis (2). Fig. 97. Trois papilles isolées (%°). Fig. 98. Extrémité très grossie d’une de ces papilles (1°). Fig. 99. Région ventriculaire du cœur (). Fig. 100. Corpuscules amiboïdes trouvés dans le liquide sanguin du Scaphan- der (222). Fig. 101. Collier æsophagien du Scaphander lignarius (Ÿ). (Voyez pour lasignifi- cation des lettres et des chiffres, l’explication des figures précédentes du collier œsophagien.) Fig. 102. Moitié droite de la figure 17 pour montrer surtout le tronc nerveux pé- dieux qui va s’anastomoser avec les troncs 3 et 5 ; Le point de sortie de la com- missure cérébroïdale sous-œæsophagienne (com. c.) est aussi plus visible dans ce dessin (22 Bulla (Haminea) Hydatis. Fig. 103. Individu vu par sa face dorsale et muni de sa coquille. (Grandeur na- turelle.) Fig. 10%. Partie antérieure de l'appareil digestif montrant : le bulbe buccal avec _les principaux muscles qui le font mouvoir; l’ œsophage, sur les côtés duquel on observe les glandes salivaires qui vont se terminer sur les parois du gésier en prenant un fort développement; enfin la cavité stomacale suivie du gésier (+). Fig. 105. Fragment d’une rangée de la radula (52 Fig. 106. Dent rachidienne très grossie (152), Fig. 107. Première dent latérale (#2) ou dent intermédiaire. Fig. 108. Une des dernières dents latérales (122). Fig. 109. Plaque chitineuse de la cavité buccale, qui n’est autre chose qu'une mâchoire rudimentaire (4?). ARTICLE N° 1. ANATOMIE DES BULLIDÉS. 193 Fig. 110. Fragment très grossi de la précédente plaque pour montrer la forme des bâtonnets chitineux qui la constituent (15°). Fig. 111. Gésier ouvert montrant les trois grandes plaqués stomacales, ainsi que les six petites qui constituent l’armature de cette région de j’appareil digestif (5). Fig. 112. Grandes plaques stomacales. — à, l’une d'elles, vue par sa face in- terne ; b, la même, vue de profil ($). Fig. 113. Une des petites plaques stomacales (2°). Fig. 114. Collier œsophagien (14). (Voyez, pour l’explication des lettres et des numéros, le texte ou l'explication de la figure du collier œsophagien du Gasteropteron.) Fig. 115. Fragment du collier œsophagien pour montrer les rapports et les points de soudure du nerf pédieux An. avec les trones du ganglion cérébroïde. Dans cette figure, on observe aussi la séparation des nerfs 3 et 4 à leur sortie du centre nerveux quiles produit et leur réunion à une très faible distance (%°). Fig. 116. Organe olfactif vu presque de profil, avec le tronc nerveux qui lui fournit ses ramifications (42). Fig. 117. L’œil avec ses enveloppes musculaires (25). Fig. 118. Organe copulateur formé par une gaine péniale fusiforme, reliée pos- térieurement par un très court conduit à la prostate ($). Fig. 119. Pénis (!$). NOTE SUR UNE NOUVELLE ESPÈCE DE CRUSTACÉ AVEUGLE PROVENANT DES GRANDES PROFONDEURS DE LA MER ‘Par M. Alph. MEILNE EDWARDS. Les Crustacés qui habitent les grandes profondeurs des mers ne sont encore que très imparfaitement étudiés, et tous les faits qui peuvent contribuer à nous les faire connaître méritent d’être enregistrés. Aussi je signalerai un Macroure aveugle vivant dans le détroit de la Floride, à 1500 mètres de profon- deur. Je dois ce Crustacé à l’obligeance de M. À. Agassiz. J'ai été surpris de trouver chez cette espèce les caractères distinctifs du genre Nephropsis, dont on ne connaissait jusqu’à présent qu'un seul représentant décrit par M. Wood Mason et dragué à 600 mètres environ de profondeur, au voisinage des iles Andaman (1). L’étendue de l'aire de distribution géogra- phique de ce genre est fort remarquable. Chez ces deux Nephropsis, les yeux sont rudimentaires et ils ressemblent à de petits tubercules dépourvus de cornéules et situés directement au-dessus des antennes internes; les an- tennes externes sont dépourvues de l’appendice squamiforme qui existe chez les Nephrops et chez tous les Astaciens connus. L'espèce américaine, à laquelle j'ai donné le nom de Nephr- opsis Agassizi, se distingue facilement de l’espèce asiatique (Nephropsis Stewarti) par son rostre plus développé et armé de deux paires d’épines latérales, par les nombreux tubercules qui couvrent sa carapace, et par la forme des anneaux de l’ab- domen dont les cinq premiers se terminent latéralement par une pointe aiguë. Les pattes antérieures sont égales et revêtues de quelques poils; les doigts, préhensiles, sont très grèles, dé- pourvus de denticulations et terminés par une extrémité fort pointue ; ils se croisent à leur extrémité. Les pattes suivantes sont longues, très faibles et disposées comme celles du Nephropsis Stewarti. Cette espèce mesure, de l'extrémité du rostre au bout de la queue, 0,055. Ses téguments sont complètement incolores. (1) Voy. Annales des sciences naturelles, Zoor.., 5° série, 2-19, pl. 20. ANN. SC. NAT. — ART. N° 2. ÉTUDE SUR LES MŒURS ET LA PARTHÉNOGENÈSE DES HALICTES Par DS. J. EX, l'ABRE. Par leurs instincts et leurs mœurs, non-seulement les Hyménoptères occupent le premier rang dans la série ento- mologique, mais encore dépassent, et de beaucoup, une foule d'animaux que leur organisation fait inscrire dans les classes supérieures, motif s’ajoutant à bien d’autres pour faire douter que la perfection de l’intellect, caractéristique la plus élevée de l’animal, soit subordonnée à ce que nous appelons la per- fection des organes. Néanmoins leur histoire est encore si peu connue, que l'espèce la plus vulgaire ménage à l'observateur les plus intéressantes surprises. Qu’attendre des Halicies, qui ne se retrouve dans la triviale histoire des Hyménoptères collecteurs de miel! Creuser des terriers avec cellules au fond des couloirs; butiner sur les fleurs, poudrer de pollen les pinceaux de leurs pattes posté- rieures ; emmagasiner la récolte, pondre un œuf sur les vivres et clore la demeure, n’est-ce pas là l’exact résumé de leur vie? Sans doute; mais la sèche notice n’est pas la biographie déve- loppée, riche de détails piquants, si variables d’un genre à l’autre, souvent d’une espèce à l’autre, et parfois ouvrant à la science entomologique des horizons non encore soupçonnés. J'espère donc montrer que les Halictes, si vulgaires qu'ils soient, méritent, eux aussi, sérieuse attention. Deux espèces principalement m'ont fourni les matériaux pour rédiger ce travail : l’Halicte cylindrique (Halictus cylindricus, Fab.) et l’Halicte à six bandes (Halictus sexcinctus, Latr.). Mes études sur le premier ont été faites dans les conditions les plus favorables : j'avais sous les yeux, tous les jours, à tel instant ANN. SC. NAT: — ART, N° 4 9 JS. HI. FABRE. que je voulais, et d’un bout à l’autre de l’année, l’objet de mes recherches en sa naturelle manière d’être. Le lieu d'observation est devant ma porte, en pleine campagne, au milleu des prairies. | Au pied du mur d'enceinte de la cour, à l’exposition du midi, est un étroit sentier gazonné de Ghiendent. Le soleil y donne en plein, et ses rayons, répercutés par le crépi du mur, en font un petit coin sénégalien, exempt des brutales bouffées du mistral, l’âpre vent qui souffle 1er près du tiers de l’année. Là viennent faire la sieste les chats, la paupière à demi elose ; là viennent jouer les enfants en compagnie de Bull, le chien de la maison ; là s'installent les faucheurs à l’heure la plus chaude de la journée pour prendre leur repas et repiquer leurs faux sous l’ombre des platanes ; là passent et repassent les rà- teleuses qui viennent, après la fenaison, glaner sur l’avare tapis de la prairie tondue. C’est donc un passage très fréquenté, ne serait-ce que par le va-et-vient de la maisonnée : passage peu propre, ce semble, aux paisibles travaux d’un Hyménoptère; et néanmoins l’exposition y est si chaude, Pair si calme, le sol si favorable, que depuis longues années des générations d'Halicte cylindrique se transmettent de l’une à l’autre cet emplacement pour leur domicile. Ilest vrai qu’un travail très matinal et même nocturne épargne à l’insecte la majeure partie des inconvénients d’un sol trop piétiné. Les terriers y occupent une étendue d’une dizaine de mètres carrés ; e£ leurs orifices, rapprochés souvent jusqu’à presque se toucher, sont en moyenne distants l’un de l’autre d’un décimètre au plus. Le nombre en est donc environ d’un millier, ce qui suppose une population très nombreuse, d'autant plus que chaque orifice sert de vestibule commun aux galeries de plusieurs Halictes. Le terrain y est fort grossier, mélange de débris de maçonnerie et d’un peu de terre végétale, que con- solide un épais réseau de racines de Chiendent; mais par le fait de sa nature, 1l est soumis à un drainage énergique, condi- tion toujours recherchée par les Hyménoptères à cellules souterraines. ARTICLE N° 4. LETTRE relative À LA PLACENTATION DU DASYPUS NOVEMCINCTUS ADRESSÉE À M. ALPH. MILNE EDWARDS Par M. le Docteur Alfred DUGKES. J’allais publier dans la ÂNaturalezan, journal d'histoire naturelle de Mexico, les observations suivantes, lorsque j'ai reçu le quatrième cahier du tome VIII des Annales des sciences naturelles, où se trouve votre très intéressant article sur les en- veloppes fœtales du Dasypus novemcinctus. J’espère que cette lettre vous fournira une petite addition dans les Annales, car elle vient presque en tous points confirmer vos idées. Me trouvant au mois de mars à l’hacienda de Tupataro (Etat de Guanajuato, municipalité de Pénjarno), on m’apporta une grande femelle de Dasypus novemcinctus. Lorsque nous la tuà- mes pour la manger, ei la chair en est délicieuse, je m’aperçus qu’elle ‘était pleine : cette trouvaille inespérée me suggéra l’idée de publier le fait; mais, après avoir lu votre article, qui a devancé le mien par suite des lenteurs apportées à l’impres- sion, je vis que je n’avais guère qu'à le compléter. L’utérus était encore petit, piriforme, et contenait quatre petits, dont un moitié moins grand que les autres. En ouvrant les viscères, je trouvai une muqueuse utérine épaisse, très congestionnée, boursouflée, commençant à se détacher des parois, et je fus très étonné de voir qu'il n’y avait qu'une seule enveloppe pour les quatre fœtus : c'était la caduque réfléchie. Au fond de la matrice était un placenta discoïdal qui me parut comme vaguement divisé en quatre. En continuant ma dissection, je m’aperçus que les autres membranes étaient distinctes, chaque fœtus ayant son allan- toide séparée et son amnios bien distinct aussi; les cor- ANN. SC. NAT. — ART. N° 3. 2 A. DUGÈS. dons ombilicaux, assez courts et non tordus, s’inséraient chacun à un point différent du placenta commun, juste au point où commençait l’allantoïde. Il suivait de cet examen que je voyais une caduque commune, mais que chaque fœtus avait son allantoïde et son amnios propres, avec un seul placenta pour tous; mais il me sembla que les allantoïdes ne com- muniquaient pas du tout entre elles. Comme ma pièce est très rare et très curieuse, je vous avouerai franchement que j'ai hésité à la morceler, et de là viennent mes légères hési- tations. Les embryons, entièrement nus, sans écailles ni poils, n’ont qu’un repli longitudinal à pee marqué, partant de l’aisselle, indice de la future cuirasse. J’ai bien recommandé à mon frère, qui habite Tupataro, de m'envoyer des utérus gravides de Tatou, s’i/ en trouve : dans le cas où je ferais de nouvelles observations à ce sujet, je vous les communiquerai volontiers. Excusez, monsieur, la brièveté de cette observation; mais, tout incomplète qu’elle est, je pense qu’elle pourra jeter quel- que lumière sur le point en litige. ALF. DUGÉS. Guanajuato (Mexique), le 9 décembre 1879. ———— ARTICLE N° à. ÉTUDE SUR LES HALICTES, a C'est dans les oseraies des alluvions de l’Aygues, torrent au nord d'Orange, que j'ai observé la seconde espèce, l’Haliete à six bandes, en colonie assez populeuse pour se prêter à des observations suivies. L'emplacement choisi est un sol à terre fine, argilo-calcaire, en entier composé des antiques limons dn torrent. En dessous, une épaisse couche de galets et de gra- vier donne le drainage nécessaire. D'ailleurs le point est assez éloigné du cours d’eau actuel pour être à labri de toute inon- dation. Une centaine de terriers à peu près composent la bourgade. Trois à quatre kilomètres me séparent dece domicile d'Halictes. C’est dire que je n’ai pu donner à cette seconde espèce l'attention quotidienne que je dunnais à l’Halicte eylin- drique établi devant ma porte ; néanmoins j'ai assez multiplié mes visites avec l'instrument de fouille, la bêche du paysan sur l'épaule, pour n’avoir, je crois, rien laissé échapper desaillant. Du reste, l’'Halicte mon proche voisin me renseignait sur l’op- portunité d’une course nouvelle ; lorsque je voyais chez lui quelque chose d’insolite se passer, j’accourais aux oseraies de l’'Aygues pour voir se répéter le fait chez son congénère. La concordance des actes ne s’est jamais démentie, abstraction faite de légers écarts d'époque. Ge que je dirai de Pun s’ap- plque done à lPautre. Assistons d’abord au travail du terrier. Les ui sociales écartées, telles que Guêpes, Bourdons, Fourmis et Abeilles, il est de règle générale que chaque Hyménoptère, approvision- nant ses nids, soit de miel, soit de proie, travaille seul au do- micile de ses larves. Fréquemment il ya voisinage entre pareils, mais l’œuvre est individuelle et non le résultat du concours de plusieurs. Établis en bourgade au pied d’une falaise de grès tendre, les Sphex à ailes jaunes, par exemple, creusent chacun leur clapier sans se préoccuper des voisins, et ne supporte- raient pas qu'un autre vint collaborer au percement de la galerie, devenue ainsi propriété commune. Les Anthophores, exploitant en innombrables essaims le revers ensoleillé d’un escarpement de terre, forent chacune leur couloir de la pointe des mandibules, et excluent de leur trou de sonde, avec une ANN. SC. NAT., MARS 1879-80. IX. 9. — ART. N° 4. 4 SJ. H. MABRE. jalouse ardeur, quiconque oserait s’y présenter. L’Osmie dorée, quand elle pratique dans la moelle d’une vieille tige de Ronce le puits profond où elle doit empiler ses cellules, accueillerait par de chaudes bourrades une autre Osmie qui viendrait seule- ment prendre pied sur le bout de tige, sa propriété. Qu’aucune des Eucères ayant fait élection de domicile sur la chaude berge d’un sentier ne se trompe de porte en entrant chez elle et ne pénètre chez sa voisine, elle y serait très mal reçue ; qu'aucune Mégachile, revenant avec sa rondelle de feuille entre les pattes, ne fasse erreur de souterrain, elle en serait bien vite délogée. Et ainsi des autres. Chacun pour soi, chacun chez soi, telle est larègle, même entre Hyménoptères de même espèce établis en populeuse colonie sur un emplacement commun. L’étroit voisinage n’'entraine pas la moindre colla- boration. | Bien différemment se comportent les Halictes. Il n’y a pas chez eux société dans le sens entomologique du mot ;. la famille n’y est pas commune, et les soins de tous n’ont pas en vue l’in- térêt de tous : chaque mère ne se préoccupe que de sa ponte, ne construit des cellules et ne récolte du pollen que pour ses larves, sans intervenir en rien dans léducation des larves d'autrui; mais il y a entre elles collaboration pour un travail général, dont plusieurs peuvent tirer profit sans se gêner mu- tuellement dans leur ménage. Cette œuvre commune est la salerie plus ou moins profonde qui se ramifie dans l'épaisseur du sol, et donne accès dans divers groupes de cellules, groupes dont chacun est la propriété d’un seul Halicte. Une seule porte d'entrée et un seul couloir correspondent ainsi à plu- sieurs domiciles distincts; de même que, dans nos habita- tions des villes, une seule porte, un seul vestibule, un seul escalier, conduisent à divers étages, à diverses parties d'étage, où chaque famille rentre dans son isolement et son indé- pendance. Cette communauté de passage est des plus faciles à constater lors de l’approvisionnement des nids. Portons quelque temps notre attention sur le même orifice d'entrée , s’ouvrant au som- ARTICLE N° 4. ÉTUDE SUR LES HALICTES. 6) met d’un monticule de terre fraîchement remué, pareil à celui qu'amoncellent les Fourmis dans leurs travaux. Tôt ou tard nous verrons arriver les Halictes, avec leur charge de pollen récoltée sur les Chicoracées du voisinage. Habituelle- ment ils surviennent un à un; mais il n’est pas rare d’en voir trois, quatre et davantage qui se présentent à la fois à la même porte d’entrée. ls se posent au sommet du monticule, et sans aucune hâte pour se devancer mutuellement, sans aucun signe de rivalité jalouse, ils plongent dans le couloir, chacun à son tour. Ïl suffit d'assister à leur paisible attente et à leurs tranquilles plongeons, pour reconnaitre que c’est bien ici passage commun, où chacun a droit aux mêmes ütres que les autres. Des divers faits inscrits dans nos notes, je me borne à relever le suivant, très caractéristique. Un couloir est obstrué par des déblais que rejette un travailleur attardé aux fouilles intérieures. Trois Halictes surviennent chargés de récolte, trouvent l'entrée bouchée, et se mettent tous les trois à déblayer le passage. Fantôt l’un, tantôt l’autre, ils partent, lassés d’attendre, pour une tournée aux environs, puis reviennent. Enfin le travailleur de Pintérieur suspend son apport de déblais, et les trois récol- teurs entrent. D’après le relevé des groupes de cellules des- servies par une même galerie, et d’après ma statistique des entrants simultanés, j'évalue à cinq ou six en moyenne le nombre des Halictes copropriétaires. Lorsque le sol est exploité pour la première fois, et que le passage lentement se creuse de l'extérieur à l’intérieur, plu- sieurs Halictes, se relayant l’un à l'autre, prennent-ïis part au travail dont ils doivent tous profiter ? C’est pour moi très douteux; du moins je n’ai jamais assisté à pareille colla- boration. Je croirais volontiers, au contraire, d’après le peu que j'ai vu dans de telles conditions, que chaque Halicte se livre solitaire à son ouvrage, et se creuse un couloir qui sera son exclusive propriété. La communauté du vestibule vient plus tard, lorsque l'emplacement, éprouvé par lexpérience, se transmet d’une génération à l’autre. G $. Hi. MABRE, Un premier groupe de cellules est établi, supposons, au fond d’une galerie creusée dans un sol vierge; le tout, cellules et galerie, est le travail d’un seul. Quand viendra le moment de quitter la demeure souterraine, les Hyménoptères issus de ce nid trouveront devant eux un chemin tout ouvert, ou du moins comblé avec des matériaux pulvérulents, de moindre résistance que les matériaux voisins non encore remués. La voie de sortie sera donc la voie pont pratiquée par la mère lors de la construction du nid; tous s’y engageront sans hési- tation aucune, car Îles Ce. y a directement. Tous aussi, allant et revenant des cellules à la base du puits, et du puits aux cellules, prendront part au déblaï, sous le sti- mulant d'une prochaine délivrance. Supposer chez ces prisonniers sous terre un concours d ef. forts pour se libérer plus aisément au moyen d’un travail d’en- semble, est ici parfaitement inutile: chacun ne se préoccupe que de lui-même, et revient invariablement, après repos, tra- vailler à la voie qui s’impose d'elle-même, à la voie de moindre résistance, enfin au passage autrefois creusé par la mère et aujourd’hui comblé. En quittant leurs cocons empilés l’un sur l’autre, dans un cylindre étroit, les Osmies, les Mégachiles, les Anthidies et autres ne s’y prennent pas autrement : leur chemin de sortie est la galerie creusée par la mère, galerie quil suffit de MR ae ouvrage bien nl facile que le percement d’un couloir nouveau. Mais la superposition des cellules dans un canal où il ne peut y avoir à la fois passage que pour unseul, exige impérieuse- ment une sortie coordonnée sur le rang de l’étage occupé. Le plus rapproché de Porifice se délivre d’abord, le suivant lui succède, vient après le troisième, el ainsi de suite jusqu’à celui de l'étage le plus reculé, qui sort le dernier. Chez les Halictes, ordre pareil n’est plus nécessaire : sort qui veut et quand il veut, parce que les cellules, tantôt groupées en amas au même niveau, tantôt distribuées une à une à des profondeurs différentes, ont toutes leur issue spéciale, € débouchant à part dans la galerie commune. ARTICLE N° 4. ÉTUDE SUR LES HALICTES. 7 De cette disposition, il résulte que tous les habitants d’un même terrier peuvent concourir, chacun pour sa part et à son heure, au déblai du puits de sortie. Si la fatigue vient, le pre- mier se retire dans sa cellule intacte, et un autre lui succède pour l'ouvrage, impatient de sortir et non de venir en aide. Finalement la voie est libre et les Halictes sortent. Ils se dis- persent sur les fleurs du voisinage, où ils séjournent tant quele soleil est vif, mais dès que la température fraîchit, ils rentrent aux terriers pour y passer la nuit, Peu de jours s'écoulent, et déjà les soins de la ponte les préoccupent. Jugé favorable, lemplacement qui les a vus naitre sera aussi l'emplacement de la nidification. Les galeries n’ont jamais été abandonnées ; les Hyménoptères sont venus s'y réfugier pendant les journées pluvieuses ou de vent trop fort; pour la plupart, simon tous, ils y sont rentrés chaque jour au déclin du soleil, chacun regagnant sans doute la cel- lule natale, toujours intacte, et dont il est gardé peut-être sou- venir précis. En un mot, l’'Halicte ne mène pas vie errante: il est domicilié. Une conséquence forcée résulte de ces habitudes casanières: pour sa ponte, l’'Hyménoptère adoptera le terrier même où il est né. La galerie d'entrée est ainsi toute prête, ou ne demande que de simples retouches. S'il faut la conduire plus profondément, ou la diriger dans des couches nouvelles, il suffira de la prolonger au gré du constructeur. Les vieilles cellules, lécèrement restaurées, peuvent même servir. Reprenant ainsi possession du terrier natal en vue de sa descendance, l’'Hyménopière, malgré ses instincts d'ouvrage individuel, réalise une ébauche de société, puisqu’ily a porte d'entrée unique et unique vestibule général, à l’usage de tou- tes les mères qui reviennent au domicile originel. Sans colla- boration aucune, sans un but d'utilité commune, s'établit de la sorte une apparence de communauté. Tout se réduit à un héritage de famille à parts égales entre les ayants droit. Le nombre des copartageants doit avoir bientôt des limites, car une circulation trop populeuse dans la galerie commune serait grave obstacle à la rapidité du travail. Alors de nouvelles voies 8 3. H. FARMRE. sont ouvertes à l’extéricur, très-fréquemment en communica- tion avec les profondeurs déjà fouillées, de manière que le sol se trouve à la fin perforé dans tous les sens de couloirs étroits et sinueux, formant inextricable labyrinthe. C’est de nuit surtout que se font les travaux de fouille pour l'excavation des cellules et le percement de nouvelles gale- ries. Un cône de terre fraîche élevé sur le seuil de l’orifice du couloir atteste chaque matin FPactivité nocturne, ét. par son volume démontre que plusieurs Hyménoptères ont parti- cipé à l'ouvrage, car il serait impossible à un seul Halicte d'extraire du sol, d’amener à Îa surface et d’amonceler en aussi peu de temps un pareil tas de déblais. Dans le mois de juillet, dès le soleil levé, entre quatre et cinq heures, alors que les prairies voisines sont encore humides de rosée, l’'Ha- licte cylindrique quitte ses souterrains et travaille à Papprovi- : sionnement des cellules. Cela se fait sans animation, peut-être à cause de la fraîcheur matinale. Nul joyeux entrain, nul bour- donnement au-dessus des terriers. D’un vol mou, bas et silen- cieux, les Halictes arrivent, les jambes postérieures jaunies de pollen ; ils prennent pied sur le cône de déblais et plongent tout aussitôt dans la cheminée verticale. D’autres remontent le conduit et partent pour la récolte. Ce va-et-vient pour les provisions se continue jusque vers les huit à neuf heures du matin. Alors la chaleur commence à devenir forte, réfléchie par le mur au pied duquel sont les terriers ; alors aussi reprend la fréquentation du sentier, dont la bordure gazonnée est le rendez-vous pour les longues mé- ditations des chats, et pour les ébats entre les enfants et le chien. A tout instant des passants surviennent, de la maison ou étrangers. Sur ce sol trop foulé, les monticules de déblais sur- montant chaque couloir ne tardent donc pas à disparaître, dispersés sous les pieds, et l'emplacement perd toute trace d'habitations souterraines. De tout le jour les Halictes ne se montrent plus. Retirés au fond de leurs galeries, ils s’y tien- nent oisifs ou bien occupés à la confection et au polissage des cellules. Le lendemain, de nouveaux cônes de déblais se mon- ARTICLE N° 4, ÉTUDE SUR LES HALICTES. 9 trent, résultat du travail de la nuit, et la récolte du pollen re- prend pour quelques heures; puis tout cesse encore. Ainsi se poursuit l’ouvrage, suspendu de jour, repris de nuit et aux heures les plus matinales, jusqu’à complet achèvement. Serait-ce pour éviter les inconvénients d’un passage trop fré- quenté que l’Halicte cylindrique établi devant ma porte tra- vaille de nuit et de grand matin, alors que les lieux sont libres, et cesse son ouvrage dès que l’animation reprend autour de la maison? Je surprends d’autres espèces, par exemple l'Halictus fodiens et l'Halictus sexcinctus, butinant sur les fleurs dans l'après-midi, ce que je ne puis réussir à voir pour l’Halictus cylindricus. Y aurait-il donc en ce dernier accommodation aux circonstances ? L’ouvrier diurne, ami du plein soleil comme le sont les Hyménoptères, se serait-il fait ouvrier très matinal ou même nocturne pour travailler tranquille en un lieu sans tran- quillité de jour? Rien ne m’autorise à pareille conséquence, car Je reconnais dans tous les autres Halictes que je peux ob- server une activité plus grande dans la matmée. Gelui d’entre eux dont les mœurs me sont le mieux connues, l’Halictus sex- cinctus, a choisi pour emplacement de ses terriers une solitude des plus paisibles, les oseraies désertes de l’Aygues, où certes rien ne le troublerait en dehors de mon indiserète curiosité. Et néanmoins si matinale que soit ma visite, vers six heures tout au plus en juillet, je le trouve rentrant chez lui chargé de pollen. Le fort du travail est donc pour lui aussi la matinée Lepelletier de Saint-Fargeau, de son côté, témoigne des habi- tudes matinales des Halictes. Les couloirs de l’Halicte cylindrique descendent à une paire de décimètres de profondeur, et se ramifient en corridors secon- daires, donnant chacun accès dans un groupe de cellules. Celles- ci, au nombre de six où huit pour chaque groupe, sont rangées à côté l’une de l’autre, parallèlement à leur grand axe, dont la direction est à peu près celle de la verticale. Elles sont ovalaires à la base et rétrécies en goulot à la partie supérieure. Leur longueur mesure près de 20 miliimètres, et leur plus grande largeur 8. Elles ne consistent pas simplement en une cavité 10 F. I. MABEM, dans le sol; elles ont au contraire leur paroi propre, de ma- nière que le groupe s’enlève tout d’une pièce avec un peu de précaution, èt se détache assez nettement de la terre qui Pen= veloppe. La paroi en est formée de matériaux assez fins, qui doivent avoir été choisis dans la masse grossière environnante et pétris avec de la salive. Néanmoins la construction’ ainsi obtenue est de faible consistance, et tombe en miettes sous une légère pression des doigts. D’après cette disposition, on voit que toutes les cellules d’un même groupe ont leurs entrées au fond d’un .corridor unique, aboutissant lui-même au couloir principal, voie commune pour tous les habitants d’un même terrier. Chaque mère creuse ap- paremment son corridor particulier, à telle profondeur et dans telle direction qui lui conviennent, puis confectionne au bout son amas de cellules. C’est là sa propriété exclusive, son étage, où elle trouve lisolement et la tranquillité du chez soi. Nulle autre qu'elle n’y pénètre. L | 4 L'Halicte à six bandes construit sur un autre plan. Les cel- lules, de même forme que les précédentes, mais plus grandes, au lieu d’être assemblées par groupes, sont isolées, avec courte ruelle donnant dans une ramification de la galerie principale. Chacune de ces ramifications me paraît être l’ouvrage d’une seule mère, qui d'ici, puis de là, sans ordre, à des niveaux chan- seants, établit une à une ses cellules, les approvisionne, les clôture et fore son corridor plus avant. Cette manière de con- struire, donnant à chaque loge vestibule spécial, rend inutile l’orientation commune qui fait converger vers un même point les ouvertures d’un groupe de cellules de PHalieté cylindrique ; aussi le grand axe des loges ési-il horizontal ou oblique, et rarement vertical. Une autre différence architecturale est celle-ci : les cellules de l’Halicte cylindrique ont une paroi propre, qui permet de détacher et d'enlever le groupe tout d’une pièce ; celles de l’Ha- licte à six bandes n’en possèdent pas et ne peuvent s’extraire du milieu environnant, car elles consistent en une simple cavité creusée dans la terre. L'état bien différent du sol où ARTICLE N° 4. ÉTUDE SUR LES HALICTES. A1 s’établissent les deux Halictes est apparemment la causé de ces variations dans l’art d’édifier. L’Halicte cyhudrique fouille un terrain aride, sans plasticité, où dominent les décombres de maconnerie. Au sein de pareils matériaux, un choix est indis- pensable, excluanttoute particule grossière et n’admettant que les débris les plus fins. Ce triage ne fournit qu'une sorte de poussière, qu'il faut réduire en pâte avec de la salive pour en faire un mortier propre à bâtir. De [à résulte une enceinte de crépi sans adhérence avec ce qui entoure, si ce n’est avec les autres loges du groupe, maçonnées l’une contre l’autre. L’extraction et l'isolement du tout sont ainsi chose très facile. L'Haliete à six bandes, au contraire, travaille dans un sol très plastique, dans une fine terre argilo-caleaire, où nulle précau- tion n’est à prendre pour éliminer des matériaux grossiers et pour prévenir des éboulements au moyen d’une enceinte de maçonnerie. Il suffit donc à l’'Hyménoptère de creuser dans la masse pour obtenir une cellule à paroi solide et homogène. Dans de pareilles conditions, l’extraction de la loge n’est plus possible. Ce qui frappe surtout dans les élégantes cellules de l’Halicte à six bandes et à un moindre degré dans celles de l’Halicte cylindrique, c’est le fini minutieux de la surface à l’intérieur : on dirait le poli du stuc. Même avec la loupe, le regard n’y recon- naît qu'un glacis de terre, chef-d'œuvre de délicatesse; néan- moins la perfection de l’ouvrage fait naître l’idée d’un vernis particulier. L'expérience confirme le soupçon. En effet, la terre au sein de laquelle la cellule est creusée boit l’eau avec la plus grande facilité et s’en imbibe aussitôt que je la touche avec un pinceau mouillé. Au contraire, les godets que j'obtiens avec des fonds de cellule conservent l’eau sans permettre Pimbibition. en ai gardé qui, remplis de liquide, n'avaient, au bout de vingt-quatre heures, laissé pénétrer la moindre trace d'humidité dans l'épaisseur de la paroi. Un enduit hydrofuge peut seul expliquer pareille imperméabilité. La pointe d’une aiguille ne parvient pas à le détacher par écailles, tant 1l adhère et se confond avec la paroi; enfin, à 12 S. BI. M'ARRE. cause de sa transparence et de son extrême finesse, le regard le soupçonne plutôt qu’il ne le voit. On peut néanmoins l’isoler en mettant détremper dans de l’eau une cellule de l’Halicte à six bandes. La terre rapidement se réduit en fine bouillie, que je balaye à mesure avec un pinceau, et l’enduit reste seul, non en sac continu, mais en larges fragments, quelque soin que je mette à la manipulation. Il est si délicat, que le simple attou- chement du pinceau le déchire. Dans ces fragments, le microscope montre une pellicule dia- phane, homogène, pareille à une très mince couche de collo- dion. Qu'elle consiste en une simple cavité creusée dans un sol à terre fine, ou bien qu’elle possède une muraille propre, la cellule d'Halicte est donc d’abord soumise intérieurement à un polissage minutieux, puis elle est enduite d’un vernis hy- drofuge, qui augmente la douceur du poli et repousse toute humidité venue de l'extérieur. La haute utilité de ce vernis est évidente. Les larves d'Halicte ne se tissent pas de cocon; la nymphe repose done à nu sur la paroi de sa loge, à une paire de décimètres de profondeur, dans un sol horizontal, sans abri, très perméable, qu’une seule pluie détrempe. À la première ondée, la cellule s’imbiberait ou même tomberait en bouillie; et la nymphe, non protégée par un eocon, périrait dans sa loge boueuse si enduit de la paroi ne résistait à l'invasion de l'eau. L'industrie de la mère supplée ainsi au défaut d’indus- trie de la larve, qui, non apte à tapisser sa demeure de soie, a pour logement une cellule où le cocon est inutile. Le cocon, en effet, m’a toujours paru chez les divers insectes qui savent en construire, bien plus un moyen de protection contre l’humi- dité que contre le froid. On sait depuis Réaumur, à qui nous devons une description développée de leurs nids, que les Collètes (Colletes hirta, Col- leies succincta) tapissent leur couloir d’une matière blanche, mince etluisante, semblable à la trace que laisse un Colimacon après lui; on sait, en outre, que ces Hyménoptères, pour em- magasiner le miel destiné aux larves, font usage de cellules ou sacs formés de cette même substance blanche, et empilés l’un ARTICLE N° 4. ÉTUDE SUR LES HALICTES. 13 sur l’autre en un cylindre dans le couloir commun. Plusieurs membranes superposées entrent dans la confection de chaque cellule. Elles sont si délicates, que Réaumur trouve grossière, en comparaison, la plus fine baudruche. L’insecte doit les pro- duire en dégorgeant un liquide gommeux qui, appliqué comme au pinceau avec la langue, se dessèche aussitôt en mince pellicule. Il est indubitable que le vernis hydrofuge dont les Halictes enduisent l’intérieur de leurs cellules est de même nature que la matière servant aux Collètes pour tapisser leurs galeries et confectionner leurs sachets à miel. Dans les deux cas, les carac- tères extérieurs sont les mêmes. C’est de part et d’autre une subtile baudruche transparente, mattaquable par l’eau, homo- oène même sous les verres du microscope. Je ne vois différer les deux produits que par le degré d’abondance. Les Collètes sont assez riches en humeur gommeuse pour l’employer à la construction de leurs godets à miel, et remplacer ainsi Les décou- pures de feuilles que les Mégachiles font servir aux mêmes usages. Les Halictes n’en possèdent que très peu et la mettent en œuvre uniquement pour vernir leurs cellules d’un enduit imperméable. ù Ainsi qu’on l’a généralement fait jusqu'ici, faut-il voir dans cette curieuse matière une préparation obtenue avec des sub- stances végétales triturées entre les mandibules et modifiées par la salive, comme le sont, sous une forme relativement très grossière, les pâtes à carton des Guëpes et des Polistes? Je ne le pense pas; car alors, sous les verres du microscope, de- vraient apparaître quelques traces de fibres végétales, tandis que la membrane se montre homogène et pareille à une couche de dissolution gommeuse desséchée. Volontiers j’admettrais au contraire que l’enduit des Halictes et labaudruche des Collètes sont simplement un produit de sécrétion fourni par les organes salivaires. N’a-t-on pas d’ailleurs des exemples d’Oiseaux con- struisant en partie ou même en totalité leurs nids avec de la salive. C’est avec de la viscosité salivaire que le vulgaire Martinet agolutine les pailles de son nid; c’est avec la même viscosité et 14 3. H. FABRE. sans l'intervention d’autres matériaux que la Salangane des îles de la Sonde confectionne les siens, si estimés des gourmets chinois. Sous le rapport de l’art de bâtir, l'Halicte est, parmi les Hyménopières, le Martinet de nos vieilles murailles : l’un et l’autre badigeonnent leurs nids de mueus salivaire; la Collète en est la Salangane : toutes les deux bâtissent avec cette seule mucosité. Laissons le domicile pour le constructeur, et arrivons au trait le plus saillant de l’histoire des Halictes. Il s’agit d’un cas très remarquable de parthénogenèse, propre à ouvrir la voie dans un recoin entomologique encore inexploré. Bèsles premiers jours du mois de mai, l'Halicte à six bandeset l'Halicte cylindrique travaillent aux terriers et à l’approvisionne- ment des cellules. Il est de règle chez les Hyménoptères que les mâles ne prennent jamais part aux fatigues de la nidification. Construire des cellules, amasser des vivres, leur sont occupa- tions totalement étrangères. Cette loi ne parait pas avoir d’ex- cepton, etles Halictes s’y conforment comme les autres Hymé- noptères, Il est alors tout naturel dene pas voir des mâles pous- sant hors des galeries les déblais souterrains, et encore moins arriver avec une charge de poussière pollinique. Ge ne sont pas là leurs affaires. Mais ce qui ne manque pas de surprendre, dès que Patten- tion est portée sur ce point, c’est l'absence absolue de tout mâle dans le voisinage des terriers. Si la règle est que les mâles restent oisifs, la règle est aussi que ces désæuvrés se tiennent à proximité des galeries en construction, allant et venant d’une porte à lPautre, voltigeant deçà et delà au-dessus des chantiers, pour saisir l'instant où les femelles non fécondées cèdent enfin à leurs désirs. Que les larves soient approvisionnées de proie paralysée ou bien de pâtée de pollen, leurs évolutions empres- sées ne font jamais défaut dans l’étroit voisinage d’un empla- cement exploité par une nombreuse colonie. Or ici, malgré une population nombreuse, malgré un examen que l’Halicte cylin- drique établi devant ma porte me permet de renouveler aussi sou- vent que je veux, découvrir un mâle, un seul, m'est impossible. N° 4. ÉTUDE SUR LES HALICTES. 15 La distinction des deux sexes est cependant des plus faciles. Même à distance, sans être saisi, le mâle se reconnait à sa forme plus fluette, à son abdomen étroit et allongé. Avec l’Halicte cylindrique, la différence est plus frappante encore, la colora- tion aidant : la femelle est d’un roux pâle ; le mâle estnoir, avec. quelques anneaux du ventre rouges. On dirait deux genres dis- tincts, ou du moins deux espèces différentes, si bien que des classificateurs s’y sont mépris. Il me suffit donc d’assister aux travaux des Halictes, mes voisins, pour reconnaitre à pre- mière vue, sans troubler en rien le travail, la présence de tout mâle qui serait survenu. Eh bien, Je le répète, pendant les tra- vaux du mois de mai, en dépit de mes examens répétés tous les jours et plusieurs fois par jour, n’a paru aucun Hyméno- ptère à costume noir, à ventre fluet annelé de rouge, enfin aucun mâle. Je n’en ai pas vu davantage, à la même époque, au voisinage des terriers de l’'Halicte à six bandes, dans les oseraies de l’Aygues. Mes observations, pour cette seconde espèce, ont été, on le comprend, bien moins fréquentes à cause de la distance, et Je n’oserais en donner les résultats comme décisifs sans le témoignage de l’espèce congénère, non perdue de vue pour ainsi dire un seul instant. Si l'accord est complet pour le peu que j'ai vu, l’analogie la plus pressante le veut complet en tout. Done, pour lés deux espèces, aucun mâle dans le voisinage des terriers lors des travaux du mois de mai. S'ils ne viennent pas, comme cela se fait chez les autres Hyménoptères, visiter les alentours desterriers, lesmäles pour- raient être ailleurs, notamment sur les fleurs où vont butiner les femelles. Très désireux de posséder les deux sexes pour obtenir exacte détermination de mes sujets d'étude, je n’ai pas manqué d'explorer les champs, le filet à insectes à la main. Mes recherches n’ont pas abouti : je n’ai pu capturer un seul mâle d’Halicte quelconque. Plus tard, au contraire, en sep- tembre surtout, ces mâles, maintenant introuvables, abon- dent aux bords des sentiers sur les capitules du Panicaut. De l’ensemble de mes recherches infructueuses, je conclurai qu’à 16 J. HE. FAŒRE. l’époque des travaux printamiers, les mâles font défaut non- seulement chez l’Halicte cylindrique et PHalicte à six bandes, mais peut-être encore chez beaucoup d’autres espèces. Cette singulière colonie exclusivement réduite à des mères me fit soupçonner plusieurs générations par an, dont lune au moins devait posséder l’autre sexe. Les travaux finis, je conti- nuai donc l'inspection quotidienne de l'emplacement de l'Ha- licte cylindrique, afin de saisir l'instant favorable pour vérifier mes soupçons. Pendantsix semaines, la solitude se fit au-dessus des terriers, aucun Halicte ne parut, et le sentier foulé par les passants perdit ses monticules de déblais, seuls indices des profondeurs fouillées. Au dehors, rien n’eût dit que les tiédeurs du sous-sol couvaient populeux essaim. Juillet arrive, et déjà quelques faibles taupinées de terre fraiche dénotent des travaux intérieurs pour une prochaine sortie. Comme les mâles chez les Hyménoptères sont en géné- ral plus précoces que les femelles et les devancent dans l’aban- don des cellules natales, il importait d'assister aux premières sorties, afin de dissiper jusqu’à l'ombre d’un doute. L’exhuma- tion violente avait sur la sortie naturelle un très grand avan- tage : elle me mettait immédiatement sous les veux la popula- tion des terriers avant le départ de l’un comme de l’autre sexe. Ainsi rien ne m’échappait, et je m’exemptais d’une surveil- lance dont je n’aurais pu toujours répondre, si attentive qu’elle füt. Une reconnaissance avec la bêche est donc résolue. De larges mottes de terre sont extraites jusqu’à la profon- deur extrême où conduisent les galeries ; je les brise avec soin entre les mains pour en explorer toutes les parties où peuvent se trouver des cellules. Les Halictes à l’état parfait dominent en nombre, pour la plupart encore renfermés dans leurs loges intactes. Les nymphes abondent aussi, quoique un peu moins nombreuses. Jen recueille à tous les degrés de colora- tion, depuis le blänc mat, indice d’une transformation récente, jusqu’au brun enfumé, signe d’une prochaine métamorphose. Les larves, en petite quantité, complètent la récolte. Elles sont dans cet état de torpeur qui précède l'apparition de la ARTICLE N° 4, ÉTUDE SUR LES HALICTES. 47 nymphe. Des boîtes, avec lit de terre fine et fraiche, reçoivent les larves ainsi que les nymphes, que je loge chacune dans une sorte de demi-cellule formée par l’empreinte du doigt. J'at- tendrai leur transformation pour décider à quel sexe elles ap- partiennent. Quant aux insectes parfaits, ils sont reconnus, dénombrés et aussitôt relàchés. | | Dans la supposition, bien peu probable, où la répartition des sexes pourrait varier d’un point à l’autre de la colonie, une seconde fouille est faite, distante de quelques mètres de la pre- mière, et me fournit une autre série tant d'insectes parfaits que de larves et de nymphes. La métamorphose des retarda- taires accomplie, ce qui demande peu de jours, je procède au recensement général, qui me fourmit 250 Halictes. Or, sur ce nombre d'Hyménoptères recueillis dans les terriers avant tout départ, qui pourrait maintenant expliquer l'absence d’un sexe, je ne constate absolument que des femelles, ou, pour rester dans la rigueur mathématique, je ne trouve qu'un mâle, un seul; et encore est-il si petit, si faible, qu’il périt sans parvenir à dépouiller en entier ses langes de nymphe. Ce mâle unique est certainement accidentel, Une population féminine de 249 Halictes suppose d’autres mâles que ce débile avorton, ou pour mieux dire n’en suppose pas du tout. Qu’'aurait-il fait, l’impotent, au milieu de ce harem, lorsque la fécondation d’une seule femelle est fatale pour un robuste Hyménoptère ? de l’élimine donc comme accident sans valeur, et je conclus que chez l’'Halicte cylindrique, la génération de juillet ne se com- pose que de femelles. S'il y a des exceptions, elles sont si rares et se composent de sujets si faibles, qu'autant vaut ne pas en paler. | Vers la même époque, le commencement de juillet, je visite avec la bêche les nids de l'Halicte à six bandes, dans les ose- raies de l'Aygues. Tous les insectes parfaits que j’exhume sont des femelles; toutes les nymphes et toutes les larves que j’élève ne me donnent que des femelles. Absolument aucun mâle dans les terriers, absolumentaucun voletant dansle voisinage: Je ne pouvais désirer confirmation plus décisive des résultats 18 ÿ. fi. FABRE. fournis par l'Halicte cylindrique. Ainsi les deux espèces, lors de la génération du milieu de l’année, sont l’une et l’autre dépour- vues de mâles ; et très probabIeEnE pareille loi doit s'étendre à d’autres Halictes. Les travaux recommencent dans la première semaine de juillet pour l’Halicte à six bandes, dans la seconde semaine pour l’'Halicte cylindrique. Les galeries sont restaurées et prolon- gées; de nouvelles cellules sont creusées, les anciennes sont remises en état. Suivent lPapprovisionnement, la ponte, la clôture des loges; et le mois n'est pas fini que, pour la seconde fois, la solitude se fait. Ajoutons que pendant toute la durée des travaux, aucun mâle n'apparaît; ce qui ajoute une surabondance de preuves à celle que m'ont donnée les fouilles. Avec la haute température de cette époque de l’année, l’évo- lution des larves rapidement progresse : un mois suffit aux diverses étapes de la métamorphose. Dès le 24 août, lanima- tion renait au-dessus des terriers de l’'Halicte cylindrique, mais dans des conditions bien différentes. Pour {a première fois, les deux sexes sont présents. Des mâles, si reconnaissables à leur livrée noire, à leur forme fluette, à leur abdomen orné d’un. anneau rouge, voltigent en assez grand nombre, et d'un essor oscillaut, presque à fleur de terre, vont et viennent, affairés, d’un couloir à l’autre. Quelques rares femelles sortent un moment des terriers, puis y rentrent. Je procède à une fouille avec la bêche, et recueille indistine- tement tout ce qui me tombe sous la main. Les larves sont très rares, les nymphes abondent, ainsi que les insectes par- faits. Le relevé de mes captures se résume en 80 mâles et 98 femelles. Ainsi les mâles, jusqu'à ce moment impossibles à trouver, tant sur les fleurs du voisinage que dans les terriers, se récolteraient aujourd’hui par centaines si je le désirais. [ls sont plus nombreux que les femelles, à peu près dans le rap- port de 4 à 8. Ils sont aussi plus précoces, suivant la loi géné- rale, car la majeure partie des nymphes en retard ne me donnent que des femelles. ARTICLE N° 4. ÉTUDE SUR LES HALICTES. 19 Vers la même époque, une exhumation pareille est faite dans les alluvions de lAygues, pour reconnaître la popu- lation des terriers de l’Halicte à six bandes. Le résultat est conforme au précédent. Les mâles, dont je n’avais en- core pu trouver un seul, abondent maintenant, renfermés dans leurs cellules intactes. Leur nombre dépasse celui des femelles, dans un rapport que Je n'ai pas cherché à déterminer, crainte de ruiner la colonie trop peu popu- leuse. | Cette apparition et cette abondance des Halictes mâles, quand vient le mois de septembre, me paraissent devoir se généraliser et s'appliquer à d’autres espèces. J’en ai la preuve dans le résultat de mes chasses entomologiques, spécialement dirigées en vue des Halictes, dont l’histoire se dévoilait de jour en jour plus digne d'intérêt. Si Je n'ai pu, faute de trouver des sociétés exploitant un emplacement commun et assez nom- breuses pour se prêter à des observations multipliées ; si je n’ai pu, dis-je, étudier d’une manière suivie que l’Halicte cylindrique et l’Halicte à six bandes, je n’ai pas moins porté mon attention sur les autres espèces que le hasard amenait dans mon filet. Or mes notes des chasses printanières, à très peu d’exceptions près, ne font mention que de femelles ; dans mes boîtes à col- lections, lé sexe féminin attend dépareillé. Mais dès le mois d'août, et principalement de septembre, je capture les mâles complétant les couples. Sur les fleurs du Panicaut et de la Scabieuse maritime, ce sont des mâles surtout que je prends, notamment les mâles de lHalictus fodiens, de l’'Halictus nidulans. La conclusion de mes coups de filet est que, pour la majeure partie des Halictes, sinon tous, c’est aux approches de l’automne qu'a lieu l'apparition des mâles. - Si l’on parcourt la série des Halictes que décrit Lepeletier de Saint-Fargeau dans son Histoire des Hyménoptères, on est frappé des nombreuses lacunes que présente le groupement des sexes. Rarement, pour une même espèce, les couples sont complets : c’est tantôt le mâle seul qui est décrit, et tan- ANN. SC. NAT., MARS 1879-80. IX. 40. — ART. N° 4. 20 _ S. EH. FABRE. tôt La femelle. On voit que l’auteur est très embarrassé pour reconnaître ce qui constitue la paire. De [à résulte une multi- plicité spécifique purement nominale ; chaque sexe, à cause des relations ignorées, devenant parfois un type distinct. C’est ainsi que l’Halictus nigripes, d’après la deseripton qu’en donne l’auteur, pourrait bien être le mâle de l’Halictus cylin- dricus. Il est vrai que, sous le rapport de la coloration, la différence est des plus nettes; si bien que, à moins de voir les deux Halictes provenir d’un même terrier, 1l n’est pas possible de reconnaitre, sous des aspects aussi divers, les deux formes sexuelles d’une même espèce. La confusion-que ce genre pré- sente au point de vue de la délimitation des couples pourrait bien provenir du mode de vie que Je viens de faire connaître. Toute la belle saison, les femelles abondent, mais seules au moins pour certaines espèces ; et l’entomologiste les capture sans rencontrer l’autre sexe, dont l'apparition est tardive. Les mâles ne se montrent que peu de temps, au déclin de l’année. D'ailleurs l’accouplement reste inaperçu, car il sé fait sous terre, ainsi que je vais l’établir. Si l’on n’est servi par des cir- constances particulières, 4l est done fort difficile de savoir à quelle femelle un mâle se rapporte, surtout lorsque le elassifi- cateur est dérouté par des différenees profondes de forme et de coloration. Je reviens à mon voisin, l’Halicte cylindrique. Une fois les deux sexes parus, je m'attendais à une troisième génération qui passerait l'hiver à l’état de larve, et recommencerait au mois de mai suivant le cycle annuel que je viéns d'exposer. Ma pré- vision s’esttrouvée en défaut. Pendanttout le mois de septembre, lorsque le soleil donne sur les terriers,'je vois les mâles voltiger fort nombreux, presque à fleur de terre, d’un puits à l'autre, Parfois quelque femelle survient, revenant des champs, mais sans pollen aux pattes. Elle cherche sa galerie, la trouve, y plonge et disparait. Les mâles, comme indifférents à sa venue, ne lui font pas accuerl, ne la harcèlent pas de leurs poursuites amou- reuses ; ils continuent à visiter, d’un vol oscillant et sinueux, les portes des couloirs l’une après l’autre: Entre eux tulle rivVa- ARTICLE N°0 45 ÉTUDE SUR LES HALICTES. 91 lité, nulles rixes jalouses, comme il en éclate d'habitude entre mâles convoitant la même femelle. Vainement, pendant deux mois, j'ai suivi leurs évolutions au-dessus des terriers, je n’ai jamais assisté à 14 moindre querelle entré rivaux. S'ils mettent pied à terre, c’est pour descendre à l'instant dans quelque ga- lerie:à leur convenance. Il n’est pas rare d’en voir deux, trois ét davantage sur le seuil de la même porte. Alors chacun at- teñd son tour pour entrerÿ aussi pacifiques dans leurs relations . que lesont les femelles propriétaires d’une même galerie. D’autres fois l’un veut rentrer tandis qu’un autre sort, et ce subit tête-à-tête n’amène aucun démélé. Le sortant se range un peu.de côté pour faire place à deux; l’autre s’insinue de son mieux. Ces paisibles rencontres sont des plus frappantes, si l’on considère LATE rivalité entre dus . la PANE espète. LE di passs | di | ‘Aucun monticule de déblais ne s'élève sur l'embouchure des puits, signe de là non-reprise des travaux pour le creusement dé nouvelles galeries et de nouvelles cellules; tout au plus quelqués pincées detérre Sont amenées au ds par les mâles afin de rendre la circulation libre dansles couloirs. Pour la première fois, et non'sans Surprise, je vois le sexe oisif faire travail de terrassier, ‘travail peu pénible il ést vrai ét se bornant à l'apport derares grains de poussière, qui géneraient ses con- tinuélles entrées et ses continuelles sorties; pour la prémière fois enfin, trait de mœurs que ne m'avait encore montré aucun Hyménoptère, je Vos les’ malés fréquenter l’intérieur des terriérs avec une assiduité comme n’en déploient pas de plus grande les mères occupées ? à la nidification. La cause dé ces man Œuvres insolites ne tarde pas à se révéler. Les femelles qüé. l'on voit voler au-dessus des terriers sont très rares et la majorité dé la population féminine reste recluse sous ‘ferré, sans Sortir peut-être une seule fois de toute l’ar- riëre=saison. Celles qui s’aventurent au dehors rentrent bien- tôt, toujours sans récolte de pollen et toujours sans agaceries amoureuses de la part des mâles, dont un grand nombre vol- tigent au- dessus dés terriers. D'autre part toute mon attention 22 J. H. FABRE. n’a pu surprendre un seul accouplement à l'extérieur du domi- cile. Les amours sont donc clandestines et se passent sous terre. Ainsi s'expliquent le va-et-vient affairé des mâles aux portes des galeries pendant les heures les plus chaudes de la journée, leurs continuelles descentes dans les profondeurs du logis et leurs continuelles réapparitions. Ils sont à la recherche des femelles, recluses dans le secret de leurs loges. Quelques coups de bêche ont bientôt de soupçon fait certitude. J’exhüume des couples assez nombreux pour me prouver que c’est sous terre que se passe ce que vainement Je m'attendais à observer en plein air. Que doit-il se passer.dans le sous-sol? Aisément cela se devine, mais ne peut être directement constaté. La cellule, ai-je dit, est une niche ovalaire, supérieurement terminée par un goulot étroit. Ge goulot est fermé par un bouchon de terre pulvérulente, sans consistance, où n’entre pas la couche de vernis qui revêt les parois. C’est. cloison peu solide, facile à détruire et tout aussi facile à restaurer. Je me figure done l’amant qui gratte à la porte de sa belle ; de l’autre côté de la cloison, 1l lui est aidé sans doute. Voilà le couple dans la même loge, ou plutôt dans le local plus vaste du corridor ou du vestibule. Vient le moment de se quitter. L'amant gagne la porte pour aller misérablement périr au dehors du terrier, après avoir trainé d’une fleur à l’autre le peu de vie qui lui reste. L'autre, avec quelques grains de terre, refait sa cloison et s’en- ferme chez elle jusqu’au retour du mois de mai. Septembre est pour l’'Halicte le mois desamours uniquement. Toutes les fois que le ciel est beau, J'assiste aux évolutions des mâles au-dessus des terriers, à leurs entrées et à leurs sorties continuelles. Si Le soleil est voilé, 1ls se réfugient au fond des. couloirs ; les plus impatients, à demi plongés dans les puits, montrent au dehors leur petite tête noire, comme pour épier la première éclaircie qui leur permette d’aller un peu sur les fleurs du voisinage. C’est enfin dans les galeries qu’ils passent la nuit, car le matin je suis témoin de leur petit lever: je les vois mettre la tête à la lucarne, s’informer du temps, et puis rentrer jusqu’à ce que le soleil donne sur l'emplacement. Pen-. ARTICLE N° 4, ÉTUDE SUR LES HALICTES. 93 dant tout le mois d’octobre, le même genre de vie se poursuit, mais les mâles deviennent de plus en plus rares à mesure que la mauvaise saison s'approche et qu’il reste moins de femelles à féconder. Quand arrivent les premiers froids de novembre, la solitude est complète au-dessus des terriers. Encore une fois, j'ai recours alors à la bêche. Les fouilles me montrent unique- ment des femelles adultes encloses dans leurs cellules. Il n’y a plus un seul mâle. Tous ont disparu, victimes soit de leurs amours, soit des intempéries. Ainsi se termine le cycle de l’année pour les Halictes. Au mois de février, après une saison rigoureuse, la neige venant de couvrir le sol pendant une quinzaine de jours, je désirai m'informer encore une fois de mes Halictes. J’étais alors cloué au lit par une maladie mortelle, et sur le point de tré- passer, d’après toutesles apparences. Je voulus faire mes adieux à l’'Hyménoptère, mes plus douces joies en ce monde. Mon fils Émile, mon fervent collaborateur dans les recherches précé- dentes, prit la bêche et alla fouiller le sol glacé. Aucun mâle ne fut rencontré, bien entendu; mais les femelles abondaiïent, en- gourdies de froid dans leurs cellules. Quelques-unes me furent apportées. Dans les chambrettes aucune efflorescence de givre, dont la terre enveloppante était tout imprégnée. Le vernis hy- drofuge avait été d’une efficacité admirable. Quant aux recluses, tirées de leur torpeur par la douce température de l’apparte- ment, elles se mirent à errer sur le lit, où les suivait mon vague regard de moribond. Vint le mois î: mai, attendu aussi impatiemment du malade que des Halictes. Je quittai Orange pour venir habiter un pauvre village, d’où j'espère bien ne plus sortir. Pendant que je déménageais, les Halictes, mes voisins, recommençaient leurs travaux. Un coup d’œil leur fut donné; coup d'œil de regret, car j'avais encore beaucoup à apprendre sur leur compte, en particulier sur leurs parasites. - Auxdéveloppements exposés suivant leur ordre d’observation faisons maintenant succéder une vue d'ensemble. Les femelles que j’observe à partir de novembre sont évidemment fécondées, commé le prouve la longue présence des mâles, à cette époque 94 2 A FABRE; | disparus; eomme Paffirment de la mañière la plus férmellesles couples observés dans nies fouilles: Ges femelles passentla mau- vaise-saison dans leurs cellules, ainsi.quele font du réste beau coup. d'Hyménoptères: à: évolution : précoee; Anthoplnres: :et Chalicodomes; qui, nidifiant au printemps; parviennént'én#té à, l’état parfait et restent néânmoins clôturés daïis leurs: loges jusqu’ au mois de mai suivant. Mais il ya pour lés-Halietés cette différence profonde; qu’en automne les fémelles ouvrent: tem: porairement des cellules pour recevoir: les mâles sous: terre. L’accouplement a lieu, les mâles périssent;at les femellésres: tentseules;-encloses hier loges; dontélles refermentl’en- brée: Un bouchon de terre très simple, détruit.et puis refait, permel eette sortie provisoire. eteette rentrée; sañis: nie 18 demeure éprouve le moindre dommiagés:s #4 ner dit qe Great Vers le mois de mai, les femelles: lécontéesdepuis l'automne: sor tent de Jeurs souterrains et travaillent aux nids en labsétité de tout mâle, ainsi que le font: d’ailleurs less Guêpes et. les Polistes, dont toute la rate. a péri, à l’exeéption dé: quelques mères fécondées également en automne. Dans l’un comme dans l’autre cas, le concours des mâles n’en;bst:pas moins réeli:seu- lement. il a, devancé la ponte d'à peu près six mois. Jusque-là rien de bien nouveau dans la vie des: Halictes; mais voici où l’inattendu apparaît. " HO dé dt En juillet, une seconde génér io . ets sans qe Cette fois-ci; Je défaut de concours, de. l’un des sexes n’est plus une apparence provenant d'une fécondation précoce, mais bien-une réalité mise hors de doute par la continuité deimes .observa- tions. On pourrait dire, 1l est vrai, que cette seconde généra- tion est due aux mères qui ont connu les mâles en automne, et seraient aptes à nidifier deux fois dans l’année. Mais d’abord il n’est guère admissible qu’une même femelle Halicte puisse avoir deux pontes dans l'an, lorsqu'il est de règle que l’insecte. périt après avoir sauvegardé l’avenir de sa race. Et puis fau- drait-1l encorese demander à quel rôle sont destinées les innom- brables femelles issues des œufs pondusen mai, Elles aussi font lignée, aucun doute ne peut s'élever à cet égard; elles sont ARTICLE N° 4. ÉTUDE SUR LES HALICTES. 25 mères et mères fécondes, sans avoir jamais connu de mâle. Il est même très probable, disons mieux, 1l est certain qu’à elles seules inéombe, à cette époque de l’année, l'avenir de l'espèce, car celles qui les ont précédées en mai abandonnent les nids après la ponte, ainsi que le prouvent les fouilles faites en temps 6pportun, et doivent toutes péri, ainsi que le veut la règle générale, La génération des Halictes en juillet ést donc un cas très remarquable de parthénogenèse. De cette génération par un seul sexe proviénnent, deux mois plus tard, des mâles et des femelles, les premiers plus nom- breux que les secondes. Une fécondation a lieu sous terre et le même ordre de choses recommence. En résumé, d’après les deux espèces observées, les Halictes ont deux générations par an : l’une printanière et sexuée, provenant de mères qui, fécondées en automne, ont passé l'hiver dans leurs cellules; l’autre estivale et due à la parthénogenèse. Du concours des deux sexes naissent uniquement des femelles ; de Ja parthéno- sénèse proviennent à la fois des femelles et ds mâles. Abstraction faite des Aphidiens, si curieux par Teur doublé mode de genèse, les Halictes sont, à ma connaissance, le premier ékéinble d’un genre d’'Insectes alternant la généra- tion séxuée et la reproduction sans le concours des mâles. On connait, il est vrai, d'assez nombreux Lépidoptères dont les femelles donnent parfois des œufs fertiles sans fécondation préalable ; mais ce sont là des cas accidentels, sporadiques, auxquels n’est assujetti nullement l'avenir de la race. Chez les Halictés, au contraire, la parthénogenèse est condition nor- male äinsi que chez les Pucerons; élle revient régulièrement toutès les années, et remplit, pour sauvegarder l’espèce, un rôle tout aussi important que là propagation sexuée. Que pré- séntent donc de particulier ces Hyménoptères pour se propager ainsi à la manière des Aphidiens? Rien, que ‘je sache, si ce n’ést leur double nidification par an. Un soupçon vient alors à l'esprit : on se demande si d’autres Hyménoptères, si d’autres Insectes, quels qu’ils soient, donnant chaque année deux ou plusieurs pontes, ne répéteraient pas la double genèse des 26 J. H. FABRE. Halictes. C’est assez probable. Mais ces Insectes à pontes annuelles multiples, y en a-t-il, et quels sont-1ls? C'est ce que je me repropose de chercher, persuadé d'avance qu’il y a là moisson intéressante à recueillir. J’appelle sur ce point toute l'attention de mes confrères en physiologie entomologique. Il me reste à faire connaître un parasite qui réserve apparem- ment aux recherches futures de curieux détails de mœurs. Le 9% août, en fouillant avec la bêche les nids de l’Halictus seæcinctus, dans les alluvions de l’Aygues, j’exhume quelques cellules parfaitement intactes, sans trace aucune d’effraction, et qui néanmoins présentent chacune deux habitants, l’un dévorant et l’autre dévoré. Le dévoré est la larve de l’Halicte, ayant achevé sa ration de pâtée et parvenue à sa pleine crois- sance. Le dévorant est une larve étrangère, qui mesure en ce moment de 2? à 3 millimètres. Celle-ci est fixée à la face abdo- minale de sa victime, vers la partie antérieure, dans la région qui deviendra le thorax de l’Halicte. L'éducation de mes trouvailles s’accomplit sans difficulté dans des tubes d veerre. En son état le plus avancé, la larve parasite mesure de 19 à 45 millimètres. Elle est apode, d’un blanc un peu hyalin, et remarquable par les tubercules qu’elle porte sur le dos. Elle est un peu courbée en arc et figure assez bien une larve d'Hy- ménoptère. La tête est hyaline comme le reste du corps. Les | trois premiers segments ont chacun en dessus deux tubercules pointus, et latéralement un mamelon que termine un bouton arrondi. Ces mamelons sont les rudiments des futures pattes. Les autres segments ont en dessus quatre tubercules coniques, qui diminuent graduellement de saillie de l'avant à l’arrière. Le dernier segment n’en porte que deux. Vers la fin d'août, j'obtiens les premières nymphes, dont voici la description sommaire. Deux tubercules coniques, spini- formes, assez longs, sur le prothorax; deux autres pareils sur le métathorax; le mésothorax en porte aussi deux, mais beau- coup plus courts. Quatre tubercules spiniformes sur chacun des cinq premiers segments de l’abdomen; deux tubercules ARTICLE N° 4. ÉTUDE SUR LES HALICTES. 27 seulement sur le sixième et le septième. La tête, les antennes, les élytres rudimentaires, les ailes et les pattes, rappellent assez bien l’insecte parfait, qui apparaît vers le milieu de septembre, et se trouve être le Myiodytes subdipterus. Ainsi l’Halicte à six bandes a pour parasite le Myiodytes sub- dipterus, ce bizarre Coléoptère qui, avec ses ailes étalées et ses élytres réduits à de petites écailles, a les apparences d’une Mouche, ainsi que le rappelle son nom. La larve de ce Coléo- ptère dévorelalarve de ’Halicte, lorsque celle-ci a consommé sa provision de muel. Il reste à apprendre comment ce Vermisseau apode, incapable de progression, se trouve inclus dans la cellule de l'Halicte, côte à côte avec la larve dont il doit se nourrir. Le Myiodyte déposérait-1l ses œufs un à un dans les loges de l’'Hymé- noptère ? Rien ne nous le dit. Je le rencontre très fréquemment, en août et en septembre, sur les capitules fleuris du Panicaut, mais je ne l'ai jamais vu adulte dans les terriers de l’Halicte. Ou bien encore la larve, récemment éclose, aurait-elle une forme apte aux pérégrinations, et s’introduirait-elle par sa propre activité dans la cellule, pour en dévorer l'habitant après s'être transfigurée et adaptée aux conditions d’une vie main- tenant sédentaire ? Y aurait-il ic1 des mœurs et des change- ments de forme plus ou moins analogues à ceux des Méloïdes ? C'est à chercher. - DESCRIPTION D'UNE ESPÈCE NOUVELLE DE PARADISIER (DREPANORNIS BRULINIT) Par M. E. OUSTALET. Dans une collection d’ ‘Oiseaux dé la Nouvelle- Guinée acquise récemment. de M. L. Laglaize par lé Muséum d'histoire naturelle de Paris, $e trouve un Pata= disier qui n’a pas énicore revêtu la livrée d’adulté, mais que jé n'hésite pas néanmoins à considérer comme le type d’uñe espèce inédité. Au premier coup d'œil, il est facile de reconnaître en effet que ce Paradisier, tout en se rappor- tant par ses formes générales au genre Drepanornis, ne peut être attribué à la seulé espôce décrite de ce groupe, au Drepanornis Albertisii (Sclat), des Monts Arfak (1); car : 1011 a le bec beaucoup plus fort, les deux mandibules réunies mesurant 0m,012 de hauteur en arrière des narines et 0",006 dans la portion moyenne, au lieu de 0,009 et 0,004. — 2 La longueur totale du corps étant à très peu près Ta même que chez lé Drepanornis Albertisi, les ailes sont relativement plus longues et atteignent 0,175 au lieu de 0,160, tandis qué la queue est au contraire moins développée et n’a que 0,120 au lieu de 0",140,— 3° L'espace dénudé sur le côté de la tête est plus étendu, et ne se ré= trécit pas en arrière de l'œil, mais conserve une hauteur uniforme de 0,009 environ. — 4° [és plumes du dessus de la tête, qui affectent déjà une forme écailleuse, sont d'un brun foncé, et non pas jaunâtres comme chez le Drep: Albertisii. — 5° L'espace dénudé est limité en dessous par une bandelette de plumes courtes et soyeuses d’un brun velouté qui passe au-dessus de l’oreille, et une bandeletté analogue descend de chaque côté du menton, à partir des branches de la mandibule inférieure. — 6° Les raies transversales de la poi- trine et de Pabdomen sont d’un brun sombre. Cette nouvelle espèce, que je proposerai d'appeler Drepanornis Bruinit, doit vivre un peu plus à l’est que le Drep. Albertisii, car l'individu mâle qui a servi de type à ma description a été obtenu par M. À. A. Bruijn (de Ternate) sur la côte septentrionale de la Nouvelle-Guinée, entre 136° 30’ et 137° de long. E, C’est peut-être l’espèce qui, suivant M. le comte Salvadori (2), aurait été pré- eédemment rencontrée par des chasseurs dans le fond de la baie Geelwink, et dont les individus adultes porteraient les mêmes parures que le Drep. Albertisüi, Mais auraient la tête, le dos et la poitrine noirs. M. Salvadori dit cependant que dans ce Drepanornis les proportions du corps et les dimensions du bec seraient les mêmes que dans l’espèce déjà connue, ce qui ne s applique pas à l’oiseau que j'ai sous les yeux. (1) Voyez Sclater, Nature 1873, p. 192 et 305, et Proceed. Zool. Soc. 1873, p. 560, pl. 47. — Elliot, Monogr. Parad., pl. 21. — Sharpe, Cat. British. Mus. 1877, t. TK, p. 160. (2) Annali del Museo civico di Genova, 1876-77, t. IX, pp. 3 et 4, note. ARTICLE N° 5. OBSERVATIONS SUR LA CLASSIFICATION MÉTHODIQUE ET LA STRUCTURE DES CHIROPTÈRES Par M. DOBSON (Traduction par A. ROBIN) (1). PREMIÈRE PARTIE. ANATOMIE. De tous les ordres qui composent la classe des Mammifères, aucun n'est aussi bien caractérisé que celui des Chiroptères. La présence d’ailes véritables les fait reconnaitre à première vue, el cette particularité est accompagnée d’autres modifica- tions de l'organisation qui toutes tendent à favoriser la loco- motion aérienne. Aussi, contrairement à ce qui a lieu chez les Mammifères ordinaires, où les membres postérieurs jouent le principal rôle dans la locomotion et sont généralement beau- coup plus développés que les antérieurs, chez les Chiroptères ce sont les membres antérieurs seuls qui, Ru le vol, soutien- nent l'animal, et leur taille est Coniparaliyanent énONe, tandis que les extrémités postérieures restent courtes et faibles. La cemture scapulaire présente elle-même une force considérable comparativement au bassin. Le thorax, qui donne insertion aux muscles du vol et renferme le cœur et des poumons relati- vement très grands, est d’une capacité remarquable. Les côtes sont aplaties et serrées les unes contre les autres. À cela viennent s'ajouter d’autres particularités anatomiques corres- pondantes dans le squelette, le système tégumentaire et les (1) Le travail dont nous donnons ici un extrait est tiré d'un ouvrage anglais intitulé : Catalogue of the GniroPtERA in the Collection of the British Museum, 1 vol. in-8 d'environ 600 pages, 1878. ANN. SC. NAT. — ART. N° 6. 2 DOBSON. autres parties de l’organisme; nous allons les passer successi- vement en revue. $ 1°. — Squelette. Les os qui entrent dans la composition du squelette des Chiroptères sont caractérisés par leur légèreté et le grand dé- veloppement du canal médullaire dans ceux des membres. La colonne vertébrale est courte; le nombre et la forme des vertè- bres diffèrent peu dans les différentes espèces. Les vertèbres dorso-lombaires sont en général au nombre de dix-sept, douze dorsales et cinq lombaires; mais parfois les espèces d’une même famille diffèrent plus entre elles sous ce rapport que celles de familles très éloignées. Ainsi le Phyllostoma hasta- tum a treize vertèbres dorsales, tandis que l’Artibeus perspicil- latus, n’en a que douze. Les vertèbres cervicales sont très larges, mais comprimées d'avant en arrière. L'absence d’apo- physes épineuses à toutes les vertèbres cervicales et dorsales, à l'exception de l’axis, est un caractère important de l’ostéo- logie des Chiroptères(1). De la première vertèbre dorsale à la dernière lombaire, la colonne vertébrale décrit une seule courbe à convexité postérieure, prononcée surtout dans la ré- oion lombaire. Les corps des vertèbres sont très peu mobiles les uns sur les autres et semblent ankylosés chez beaucoup de vieux individus. Les vertèbres caudales sont réduites à de sim- ples os cylindriques dépourvus d’apophyses; leur nombre et leur longueur sont extrèmement variables dans les espèces les plus voisines : les premières sont en général soudées aux tubé- rosités des schions. Chez toutes les espèces de Mégachiro- ptères, excepté la forme aberrante Notopteris Macdonald, la queue est très courte ou manque complètement : dans les genres Pieropus et Melanycteris, les vertèbres caudales ne dépassent pas les tubérosités ischiatiques. Parmi les Microchiroptères, la queue atteint son plus grand développement dans l'alliance des (4) Les dernières vertébres dorsales des Pteropus portent des apophyses épineuses bien développées. (Trad.) ARTICLE N° 6. Am SUR LES CHIROPTÈRES. 3 Vespertilionines ; dans quelques genres de Vespertilionides, tels que les Xerivoula, les Natalus, les Miniopterus, sa longueur dé- passe même celle de la tête et du corps réunis, mais elle compte rarement plus de neuf vertèbres. Dans la famille des Nycté- rides, les vertèbres caudales sont très longues dans le genre Mots très courtes au contraire, et cachées à l’origine de la membrane interfémorale, dans le genre Megaderma. Dans l'alliance des Emballonurines, la queue n’est bien développée que chez les Molosses, les Rhinopomes et quelques-unes des espèces insectivores de Phyllostomes. Elle est invisible à l’exté- rieur, ou manque complètement ‘dans la plupart des genres de Glossophages et chez les Sténodermes frugivores et sanguivores. Le développement de [a queue est par conséquent en corréla- tion avec les habitudes des différentes espèces. Chez tous les Chiroptères, le présternum porte une carène proéminente sur laquelle s’insère la portion antérieure du muscle grand pectoral. Le mésosternum présente également chez la plupart des espèces de Microchiroptères une carène 16- gèrement saillante, qui atteint son plus grand développement dans les Rhinolophides, et spécialement dans le genre Trienops où elle est presque aussi développée que celle du présternum. Le xiphisternum est assez étroit et se termine par un large appendice cartilagineux. Chez les Mégachiroptères, les seg- ments du mésosternum sont distincts; ils se soudent à l’état adulte dans la plupart des espèces de Microchiroptères. Les côtes sont au nombre de douze ou treize paires; elles sont géuéralement aplaties et presque contiguës, surtout chez les Rhinolophides, où elles peuvent même se souder en partie dans quelques espèces. De toutes les parties du système osseux, le squelette cépha- lique est celle qui varie le plus. En effet, les différences de ré-. gime des diverses espèces nécessitent des adaptations spéciales de l’appareil masticateur, dont les changements de forme amènent des variations considérables dans la forme du crâne. Aussi nous devons nous attendre à rencontrer les plus grandes variations dans la famille des Phyllostomides, dont certains 4 | DOBSON. représentants sont frugivores, tandis que d’autres encore sucent le sang des animaux supérieurs. C’est en effet ce qui arrive : deux espèces de cette famille, le Chæronycteris meæi- canus et le Centurio senex nous présentent les modifications extrêmes du crâne des Chiroptères; le rapport dela longueur à la largeur de la tête osseuse est de 30 à 11 chez la première, de 48 à 12 chez la seconde. Les variations du crâne sont beaucoup moindres dans les familles vraiment insectivores, comme les Rhinolophides et les Vespertilionides, et dans'quel- ques’ genres de cés. lines les différences entre Qu sont très légères. NOS ST OTMEN L’élévation du crâne proprérhent dit au- ee de. la face varie beaucoup, surtout dans les diverses espèces de Vesperti- honides, d'Emballonurides et de Phyllostomides. Dans: quel- ques genres, tels que les Furia, les :Amorphochihis et les Mormops, le sommet de la tête parait très élevé, les os de la face étant dirigés de telle sorte que l'axe de la face fait presque un angle droit avec celui du crâne; mais chez les Miniopterus, les Natalus et les Thyroptera, le crâne proprement dit'est très bombé et trèsélevé au-dessus de la fie bien que: l'axe cr anio- facial soit presque droit: | fo Les apophyses postorbitaires du at dant dans la plupart des espèces de Microchiroptères; chez les Rhinolo- phides et les Vespertilionidés, elles sont ou ohtuses'et très courtes, .où non développées ;-dans quelques espèces de Ves- pertilionides: (Vésperugo pachypus), elles sont réduites à de petites éminences arrondies. Les os frontaux de la plupart des espèceside Nyctérides sont très étalés latéralementiet forment des apophyses triangulaires dont la base est percée d’un trou chez les Mégadermes comme chez les Ptéropodides.-Parmiles Emballonurides, on ne trouve guère d’apophyses ‘postorbi- taires que dans le groupe des Emballonures, owelles sont gé- néralement très longues et circonserivent presque complète- ment l'orbite. Presque toutes les espèces de Mégachiroptères présentent de grandes apophyses postorbitaires dont la base est percée d'un trou; leur développement atteint son maximum ARTICLE N° 6. Hs SUR LES CHIROPTÈRES. 5 dans Je genre Pferopus, qui renferme lui-même les plus grandes espèces du groupé: Dans plusieurs espèces, les arcades zygo- matiques portent des apophyses correspondantes, mais le Pieropus leucopterus est la seule espèce où l'orbite soit en— tièrement circonscrite. | “Les os nasaux varient beaucoup en longueur et en forme. Chez les Mégachiroptères, ils atteignent leur plus grande lon- eueuret s'étendent si loin, que l’orifice des narines est petit et dirigé en avant. Au contraire, chez presque tous les Micro- chiroptères, à l'exception du groupe des Glossophages, les os nasaux sont courts : ce caractère ést surtout prononcé chez les Vespertilionines pourvues d’une feuille nasale, où les narines s'ouvrent au-dessus du museau ; dans la famille des Rhinolo- phides, ils s'élèvent verticalement pour supporter les replis cu- tanés qui constituent l'énorme feuille nasale. Leur forme varie beaucoup parmi les Phyllostomides ; longs et étroits chez les Vampyres et les Glossophages, ils sont courts et larges dans les Sténodérmes, et manquent dans les Chdroderma, où un profond sillon s étend en arrière entre les orbites: Enfin dans le genre Pygoderma, ils sont très élevés et augmentent d'épaisseur du useau à son extrémité. ca *La forme des os intermaxillaires et leur taille sont sujettes aux! plus grandes variations jusque dans les espèces de même genre, Chez les Ptéropodides, ils sont minces, mais généra- lement soudés sur la ligne médiane; chez les Rhiolophides, au contraire, ils sont tout à fait D et consis- tent en deux petites lamellès osseuses appendues aux car- tilages nasaux. Dans la famille des Nyctérides, ils sont très réduits chez les Nycteris et cartilagineux chez les Mega- derma. Dans tous les genres de Vespértiliunides ils con- sistent en des o$ minces soutenus par les maxillaires supé- rieurs et lärgement séparés en ävant Ils sont également fort peu développés dans les genres d’ Hbalonurtqus. qui sont les plus voisins des Véspértlioninés, et sont même carlilagineux chez les Taphozous Comme chèz les Mégadèrmes, mais ils sont moins largement séparés en avant, et sous ce rapport font le 6 :_ DOBSON. passage aux genres MNocéilio, Cheiromeles, Molossus, Mysta- cina, où les intermaxillaires sont unis sur la ligne médiane comme dans la famille voisine des Phyllostomides. Tous les genres de cette famille en effet, à l'exception des Monophyllus, des {schnoglossa, des Phyllonycteris, des Lonchoglossa et des Glossonycteris du groupe des Glossophages, ont des inter- maxillaires soudés et bien développés; mais nulle part leur développement n’est porté aussi loin que dans le groupe san- guivore des Desmodontes, où ils portent une paire d’enormes incisives tranchantes. Les arcades zygomatiques sont bien développées chez les Ptéropodides et les Rhinolophides ; elles atteignent leur plus grande taille dans les Rhinolophides du genre Triænops. Au contraire, chez les Emballonurides et les Phyllostomides, elles sont grèles et peuventmême manquer dans plusieurs genres de cette dernière famille (Carollia, Phyllonycteris, Glossonycteris et Chœronycteris). La saillie des crêtes sagittales et occipi- tales varie beaucoup dans les différentes espèces, jusque ‘dans le même genre. Elle dépend évidemment du développement des muscles de la mâchoire inférieure, développement qui est lui-même en rapport avec la forme et la puissance des dents, et par conséquent avec le régime de l’animal. Aïnsi chez le Des- modus rufus, qui vit du sang des animaux et dont les molaires sont rudimentaires, le crâne est complètement lisse, sans trace de crêtes occipitales ou sagittales. Chez les Mégachiroptères, le palais osseux atteint son maxi- mum de largeur au niveau des dernières molaires; au delà il se rétrécit légèrement et peu à peu. Chez les Microchiroptères, au contraire, le palais se rétrécit subitement à ce niveau pour former le plancher des arrière-narines; dans quelques genres de Phyllostomides, le lames horizontales des palatins sont. très réduites ou font même complètement défaut, de sorte que dans quelques espèces le palais s'arrête à une ligne tirée entre les premières molaires supérieures. C’est surtout à cause de la différence d’étendue des lames horizontales des palatins qu’on a placé dans des genres différents les deux espèces du ARTICLE N° 6. SUR LES CHIROPTÈRES. 7 groupe des Furia, bien qu’elles soient si semblables sous les autres rapports, qu’il est permis de mettre en doute la valeur générique de ce caractère. Le volume des bulles osseuses présente des variations consi- dérables qui semblent être en général en corrélation avec celles de l’oreille externe. Cette règle n’est pourtant pas sans exceptions ; car chez les Chalinolobus et les Miniopterus, par exemple, avec une conque auditive très réduite on rencontre des bulles osseuses remarquablement développées. L’os tym- panique est grèle et peu adhérent avec les os voisins; 1l ne forme pas de conduit auditif externe. Les parois minces de la capsule permettent d’apercevoir les tours de spire du limaçon, au nombre de quatre dans quelques espèces. Les bulles osseuses atteignent leur plus grande taille chez les Rhinolo- phides, où elles se rencontrent presque sur la ligne médiane, le basi-occipital qui les sépare étant réduit à un isthme étroit; il est à remarquer que dans ces Ghauves-Souris le tragus n’est pas développé. Les apophyses paroccipitales existent dans la plupart des senres : elles atteignent leur plus grand développement chez les Mégachiroptères où elles sont longues et étroites; elles sont comparativement beaucoup plus petites chez les Microchiro- ptères, surtout dans la famille des Vespertilionides. La ceinture scapulaire varie très peu dans les différentes familles, son rôle étant partout le même. La clavicule est tou- jours très forte, longue et recourbée, l’omoplate large et de forme ovalo-triangulaire. La fosse postérieure est beaucoup plus développée que la fosse sous-scapulaire et profondément excavée pour faire place aux muscles qui s’y insèrent. L’épine de l’omoplate est bien développéeetse termine en un acromion très saillant; l’apophyse coracoïde est longue et recourbée. L’humérus est long, mais d’un tiers plus court que le radius. Son extrémité proximale varie peu ; les tubérosités interne et externe sont saillantes, la première surtout ; une crête pec- torale extrèmement développée donne insertion au muscle grand pectoral ; à sa base, du côté interne, le tendon du del- ANN. SC. NAT., MARS 1879-80. IX. 11. — ART. N° 6. 8 DOBSON. toïde glisse dans une gouttière. Le corps de l’humérus est lisse et cylindrique. L’extrémité distale présente toujours une tubé- rosité ectocondyloïde, très developpée dans quelques espèces, sürtout parmi les Rhinolophides, et qui, dans le genre Triæ- nops, porte une longue apophyse styhforme. La surface arti- culaire est creusée d’une gorge profonde ; il n’y a mi fosse anconée, ni trou supracondylien. Le eubitus est rudimentaire ; son extrémité proximale, arti= culée en dehors et en arrière avec une très faible partie de l’humérus, s’ankylose avec le radius ; il redevient bientôt libre et est réduit à une tige osseuse grèle plus où moins courbée en arrière, qui va de nouveau se souder au Yadius vers le mi- lieu de sa lonéteut, Dans toutes les espèces, il se développe dans le tendon du triceps un os sésamoïde qui se retrouve généralement dans les squelettes, Le radius forme avec l’humérus presque toute l'articulation du coude ; il est très long, et dans quelques espèces (PAyllo- rhina GCommersonu, Ph. tr icuspilata) Sa jose égale celle de la tête et du corps réunis. La rangée proximale du carpe est représentée par un seul os résultant de l’union du scaphoïde, du semi-lunaire et du cunéi- forme (pyramidal), qui forme avec le radius l'articulation radio-carpienne. Dans la seconde rangée, le trapèze, le trapé- zoïde et le grand os varient beaucoup en taille dans les diffé- rentes familles ; l’unciforme parait être le plus constant, quant au pisiforme, il est extrêmement réduit. Les variations extrêmes dans la forme des os du carpe et leurs articulations s’observent, d’un côté chez ceux des Mégachiroptères chez les- quels le pouce et l’index sont bien développés, lindex portant en général un ongle distinct; de l’autre chez les Microchiro- ptères, où ces doigts sont comparativement beaucoup plus petits, surtout l'index, qui est réduit à une phalange rudimen- taire et dépourvue dongle. Dans le premier cas, lé trapèze est de beaucoup los le plus grand de la seconde rangée; sa face externe est profondément creusée pour recevoir la poulie ter- ARTICLE N° 6: SUR LES CHIROPTÈRES. 9 minale du métacarpien du pouce; son extrémité distale pénètre entre les métacarpiens du pouce et du second doigt avec lesquels elle s'articule, tandis que son extrémité proximale, en forme de tête arrondie, est reçue dans une profonde dépression de l’os de la première rangée, trace de la séparation primitive du sca- phoide et du semui-lunare. Le trapézoide est très petit et de forme carrée; 11 s'articule seulement avec la partie externe du second métacarpien. Le grand os vient en taille après le tra- pézoïde , et l’uneiforme n’est pas beaucoup plus petit que lui ; lepisiforme est très réduit, sa face supérieure cireulaire. Chez les Microchiroptères, même dans les espèces frugivores de Phyllostomes, le trapèze est beaucoup plus petit que le grand osetlunciforme, et ne dépasse guère les dimensions du trapé- zoïde; son articulation avec l'extrémité concave du métacarpien du pouce est très simple et son extrémité proximale n’est pas reçue dans une profonde cavité de l'os scapho-lunaire. Le trapézoïde porte une longue apophyse en forme de coin qui pénètre avec l'extrémité du trapèze entre les extrémités du premier et du second métacarpien et forme presque toute l’articulation du dernier. L'unciforme est aussi gros que le grand os, et le pisiforme est beaucoup plus grand que chez les Mégachiroptères. A la face dorsale du carpe, dans le Phyllo- soma hastatum, on trouve trois os sésamoides : l’un, du côté radial, protège en dedans l'articulation radio-carpienne; l’autre l'articulation du carpe et du métacarpien du pouce ; le troi- sième et le plus grand couvre l'articulation du grand os avec le second et le troisième métacarpien. Lamain est, dans toutes les espèces, formée de cinq doigts, le premier, le quatrième et le cmquième comprenant un méta- carpien et deux phalanges, tandis que le nombre des pha- langes du second et du troisième varie avec les familles. Le premier doigt (le pouce) se termine toujours par un ongle, qui, de même que la phalange proximale, est surtout déve- loppé chez les Mégachiroptères (1) et les espèces frugivores de Phyllostomes. (4) Les animaux de ce sous-ordre saisissent les fruits dont ils font leur nouwr- 10 DOBSON. Le second doigt atteint son plus grand développement chez les Mégachiroptères, où il est formé par un métacarpien et trois phalanges, la phalange terminale portant un ongle, excepté chez les Eonycteris, les Notopteris et les Cephalotes. Dans ces trois genres, qui ne renferment que chacun une espèce, la troisième phalange est courte, mais parfaitement distincte et renfermée dans la membrane alaire. Chez presque tous les Microchiroptères, au contraire, le second doigt n’a qu’une seule phalange rudimentaire ; le Rhinopoma micro- phyllum est la seule espèce dans laquelle il en ait deux : de sorte que l'existence de trois phalanges à l’imdex est absolu- ment caractéristique des Mégachiroptères. Chez les Rhinolo- phides, il n’y a pas de phalange distincte au second doigt; un léger épaississement, semblable à une articulation, termine le métacarpien, mais je n’ai pu y distinguer de facette articu- laire. Dans les familles des Nyctérides, des Vespertilionides (le genre Thyroptera excepté) et des Phyllostomides, 1ly a une phalange courte, mais généralement distincte; dans le genre Thyroptera, aberrant sous d’autres rapports, l’index n'est représenté que par les rudiments d’un mélacarpien. Chez les Emballonurides, et en particulier dans les genres où la pre- mière phalange du troisième doigt se replie au repos au-dessus du métacarpien, le second doigt ne comprend pas autre chose qu’un métacarpien. Dans le genre Noctilio, qui par l’intermé- diaire des Chilonycteris présente tant d’affinités avec les Phyl- lostomides, il y à une articulation très imparfaite entre le métacarpien et une mince phalange osseuse longue d’environ 3 millimètres. Le Rhinopoma, comme nous l’avons déjà vu, a deux phalanges à l'index. Enfin, dans le curieux genre Cœlops, le métacarpien de ce doigt est plus allongé que celui du troisième doigt, ce que l’on n’observe nulle part ailleurs. Le troisième doigt ou médius est de beaucoup le plus long, et, excepté chez les Phyllostomides, est formé de deux pha- riture entre les ongles du pouce et de l'index, ces doigts étant jusqu'à un certain point opposables, grâce à la forme et au mode d’articulation du trapèze et du trapézoïde. ARTICLE N° 6. SUR LES CHIROPTÈRES. 41 langes comme le quatrième etle cmquième. Ghez les Phyllosto- mides et dans les genres anormaux Thyroptera et Mystacina, il y a une troisième phalange qui correspond évidemment à l'extrémité cartilagimeuse de la seconde phalange des autres familles de Microchiroptères, car dans les plus grandes espèces de Molosses la partie osseuse de la seconde phalange se ter- mine par une articulation imparfaite; j'ai même observé chez le Molossus perotis, la plus grande espèce du groupe, une arti- culation distincte divisant la phalange en deux parties. Gom- paré avec le cinquième doigt, le médius atteint sa plus grande longueur dans les familles des Emballonurides et des Phyllo- stomides. Dans les genres T'aphozous et Diclidurus, le métacar- pien seul égale ou surpasse légèrement la longueur totale du cinquième doigt ; en général il est plus long que le cinquième métacarpien, plus court cependant dans les genres Péeropus et Rhunolophus, dans les Nyctérides et dans beaucoup de genres de Phyllostomides. Tandis que les métacarpiens des quatrième et cinquième doigts sont en général à peine plus courts que celui du troi- sième, quelquefois même un peu plus longs, les phalanges des mêmes doigts varient beaucoup en longueur dans les différentes familles et dans les diverses espèces d’une même famille. De même que dans les autres doigts, elles atteignent leur plus grand développement chez les Mégachiroptères et égalent ou surpassent même en longueur la phalange proximale. Parmi les Microchiroptères, elles sont bien développées chez les Rhi- nolophides et les Nyctérides, beaucoup plus petites relative- ment à la longueur des métacarpiens chez les Phyllostomides. C’est chez les Emballonurides, et en particulier dans le groupe des Molosses et dans les genres Taphozous et Diclidurus, qu’elles sont le plus réduites; la phalange terminale du cein- quième doigt est alors très courte et cartilagineuse dans son dernier tiers. Comme le diamètre antéro-postérieur de Paile dépend de la longueur des quatrième et emquième doigts et son extension latérale de celle du troisième, cette famille est caractérisée par des ailes longues et étroites qui rendent le 12 DOBSON. vol très rapide ; contraste frappant avec le vol ramé, relative- ment lent, qu’exécutent les larges ailes des Ptéropodides. Dans le senre Triænops, l'extrémité proximale de la dernière phalange du quatrième doigt porte du côté externe une courte apophyse osseuse qui ne se rencontre dans aucun aûtre genre. Comme le mode aérien de locomotion pouvait aisément le faire prévoir, le bassin des Chiroptères est très faible. Les ilium sont longs et étroits ; les pubis, dans la plupart des espèces, lächément unis en avant chez le mâle, largement séparés chez la femelle, ne forment une véritable symphyse que dans la famille des Rhinolophides. Partout l’éminence ilio- pectinée donne naissance à une longue apophyse pectinée qui, dans la sous-famille des Phyllorhinines, se soudé x une apo- physe correspondante naissant de l’extrémité antérieure de lihum pour circonscrire l’espace intermédiaire, et constituer ainsi un trou préacétabulaire plus grand que le trou obtura- teur et situé en avant et un peu au-dessus de lur. Cette parti- cularité du bassin semble être umque chez les Mammifères et ne se retrouve même dans aucune autre espèce de Ghiro- ptères. La cavité cotyloïde est petite et ouverte en dehors et un peu en haut, ce qui détermine une position de la jambe telle que quand l'animal est au repos, par terre, le genou est relevé au-dessus du corps comme chez les Sauterelles. Le peu de développement des membres postérieurs et leur faiblesse contrastent vivement avec là grande étendue des extrémités antérieures ; la longueur de la cuisse, de la jambe et du pied réunis égale rarement celle de l’avant-bras seul. Gomme l’humérus, le fémur est long et cylindrique. Sa forme varie un peu avec les espèces : là tête est petite, le col très court, les trochanters saillants et presque de même volume. Les os de la jambe et du pied sont plus variables : dans la sous-famille des Molossines, la seule où les jambes soient courtes et fortes, le péroné est bien développé; partout ailleurs cet os est très mince et cartilagineux, où bien liga- ARTICLE N° 6. SUR LES CHIROPTÈRES. 43 menteux dans son tiers supérieur, ou représenté par une apophyse osseuse située au-dessus du talon, comme chez les Mégadermes; il manque complètement dans le genre Nycteris. Le pied comprend un tarse très court et des doigts longs, grèles, comprimés latéralement et terminés par des ongles recourbés, Le calcanéum porte généralement un long appen- dice eartilagineux, l’éperon sur lequel s'attache le bord interne de la membrane interfémorale, et qui est très développé dans les espèces dont la membrane interfémorale est large, tandis que la queue est rudimentaire et perfore la membrane pour faire saillie à sa face supérieure, comme chez la plupart des Emballonurides et dans les groupes des Mormops, des Vam- pires et des Phyllostomides. Le premier doigt est composé d'un métacarpien et de deux phalanges ; il est un peu plus court que les quatre autres doigts, qui, excepté dans la sous-famille des Phillorhinines et dans le genre Thyroptera, ont une phalange de plus. Chez les Molosses, le premier et le cinquième orteil sont beaucoup plus oros que les doigts intermédiaires, Enfin, dans le curieux genre Cheiromeles, le premier doigt est séparé des autres et con- stitue un véritable pouce. $ 2, -— Système musculaire. Lesystème musculaire des Chiroptères présente peu de modi- fications importantes, et, comme le remarque le prof. Maca- lister, bien qu’on rencontre souvent des particularités de dé- tail intéressantes, on trouve partout un air de famille qui ne laisse place qu’à des variations très légères. Comme les quel- ques particularités connues sont de peu d'importance au point de vue de l’arrangement systématique des espèces, nous renverrons au principal mémoire écrit sur ce sujet (1). (1) A. Macalister, (ke Myology of the Chiroptera (Phil. Trans. Roy. Soc., 1872). 44 DOBSON. $ 3. — Système nerveux, etc, Je n’entrerai pas dans une description générale du système nerveux; je me propose seulement, sous ce titre, de décrire les principales modifications des organes du toucher et de l’au- dition, qui fournissent des caractères si importants au point de vue de la classification des espèces, et qui ne sont aussi nombreuses ni aussi variées dans aucun autre groupe de Mammifères. Chez les Rhinolophides, les Nyctérides et les Phyllostomides, autour des narines et en arrière, s'étendent des expansions cu- tanées de forme très curieuse. Rien d’analogue n’a été observé chez aucun autre Mammifère, et les fonctions de ces organes, comme leurs homologies, semblent être très imparfaitement connues. Un examen attentif de leur structure, de leurs rap- ports et de l’origine des rameaux nerveux qui s'y distribuent, me fait croire que ce sont les organes d’un toucher exquis jouant un rôle analogue à celui des vibrisses des autres Mam- mifères, mais probablement plus efficace. Ils suppléent, chez les espèces où ils sont développés, à l’imperfection des rensei- gnements que peuvent fournir des yeux très réduits sur les objets dont l'animal approche dans son vol rapide au milieu de lobseurité (1). Ghez toutes les Ghauves-Souris dépourvues d’appendices nasaux, on peut trouver des proéminences glan- dulaires plus ou moins développées sur les côtés de la face, entre les yeux et l’extrémité du museau. Dans quelques genres, comme les Vespertilio et les Kerivoula, ce sont de petites élé- vations cachées au milieu des poils; dans d’autres (Vesperugo, Plecotus, Synotus), elles forment de grosses éminences arron- dies et presque nues; mais partout elles donnent naissance à (1) Les Chauves-Souris dépourvues d’appendices nasaux sont plutôt crépus- culaires ou matinales que nocturnes. Celles qui possèdent une feuille nasale volent au contraire beaucoup plus tard, et ce fait explique pourquoi on en tue rarement au vol. M. Tomes, en faisant voler ensemble dans un espace clos une Chauve-Souris de chacun de ces deux groupes, s’est assuré que le toucher est beaucoup pus fin chez celles qui sont pourvues d’une feuille nasale que chez celles qui n’en ont pas. ARTICLE N° 6. SUR LES CHIROPTÈRES. 45 de longs poils raides qui correspondent évidemment morpho- logiquement et physiologiquement aux vibrisses des Félidés et des autres Mammifères. Chez quelques individus du Plecotus aurilus, ces proéminences glandulaires sont d’une grosseur extraordinaire et font légèrement saillie au-dessus d’une dé- pression en forme de croissant située derrière les narines. Chez les Plecotus (Gorinorhinus) macrots, elles sont plus développées encore dans le sens vertical et constituent deux longues papilles coniques qui se rencontrent sur la ligne médiane au-dessus et en arrière des narines, cachant les gouttières nasales situées au-dessous d'elles; en avant, les narines sont bordées d’un repli cutané annulaire étroit et aplati. Dans le genre Nycto- plalus, qui présente des affinités intimes avec les Plecotus et les Synotus, les deux papilles glandulaires se sont soudées en une proéminence unique dont la duplicité primitive est attestée par la présence d’un sillon médian; en même temps les anneaux cutanés qui bordent les narines du Plecotus macrotis se réunis- sent pour former en arrière de ces orifices une petite feuille nasale soutenue par une papille glandulaire unique. Il est facile de reconnaître dans les appendices nasaux plus différen- ciés des Mégadermes les homologues de la papille glandulaire et de la feuille nasale rudimentaire des Nyctophilus. Telle est évidemment aussi l’origine des appendices nasaux très com- pliqués des Rhinolophes et des autres genres. Ges organes sont donc formés en partie par le tégument du bord des narines, en partie par des formations glandulaires très différenciées ; l'examen de leur structure intime confirme du reste cette déduction (1). Dans toutes les espèces de Chauves-Souris pourvues de feuilles nasales, et en particulier chez les Rhinolophides, où ces (1) La structure histologique des téguments, des muscles et des glandes qui entrent dans la constitution des appendices nasaux du Rhinolophus hipposideros a été très bien décrite par M.le D' Redtel, qui distingue les glandes en sébacées (Talgdrüsen) et sudoripares (Schweissdrüsen), sans hasarder cependant aucune opinion quant à leur origine et à leurs fonctions. (Zeitschr. für wiss. Zool., 1873, p. 254-288, pl. XIV.) 16 DOBSON. appendices sont le plus développés, la branche maxillaire supé- . rieure du nerf de la cinquième paire est remarquablement grosse, Comme on peut le constater même sur le squelette par le diamètre considérable du trou sous-orbitaire. La branche nasale de ce nerf qui naît immédiatement après sa sortie du trou sous-orbitaire est de beaucoup la plus grosse, les branches labiale et palpébrale étant grêles et formées seulement de quel- tues fibres nerveuses. Gette branche se dirige en avant et en haut sur le côté du maxillaire supérieur, mais se résout bien- tôt en nombreuses fibrilles qui se distribuent aux muscles et aux téguments voisins ét pénètrent dans la feuille nasale; celle-ci reçoit en outre de nombreux filets de la branche nasale du rameau ophthalmique du nerf de la cinquième paire (4). Tandis que les foliations, les plis et Les dépressions qui varient la forme de la feuille nasale augmentent considérablement la surface sensible si richement imnervée par le nerf de la cin- quième paire et donnent plus d'intensité aux vibrations qui la frappent pendant le vol, les nombreuses glandes sébacées et sudoripares qui entrent dans sa constitution jouent, par rap- port à elle, le même rôle que les glandes du cérumen par rapport à la membrane du tympan, en maintenant sa surface dans des conditions d'humidité très favorables à Ia PEMAUR des sensations. Les appendices nasaux des Chiroptères peuvent donc être considérés comme remplissant les fonctions d’un organe de toucher exquis, jouant le même rôle, par rapportaux branches nasales des rameaux sensitifs du nerf trijumeau, que lappa- reil de l’oreille externe par rapport au nerf auditif. En effet, de même que ce dernier organe concentre les vibrations (1) Chez les Rhinolophides et les Nyctérides, les orifices nasaux s’ouvrent à la face supérieure du museau, au fond d’une dépression en forme de coupe correspondant évidemtnent au vestibule des fosses nasales qui, chez les autres Mammifères, est divisé par une cloison médiane cartilagineuse recouverte par le tégument et innervée par la branche nasale du rameau ophthalmique du nerf de la cinquième pairé; cette partie éminemment sensible est ici exposée librement à l'air, et constitue, en outre des appendices nasaux, un organe de toucher extrêmement délicat. ARTICLE N° 6. SUR LES CHIROPTÈRES. 17 sonores, de même le premier recueille les vibrations imprimées à Pair par les objets voisins. Mais, bien que les appendices nasaux accroissent singuliè- rement la finesse du toucher chez les Chauves-Souris qui en sont pourvues, il ne faut pas oublier que ce sens est encore extrêmement délicat chez celles qui n’en possèdent pas. Dans les fameuses expériences de Spallanzani, les Ghauves-Souris qui, après avoir été privées de la vue, de l’ouie et de l’odorat, réussirent à éviter des fils tendus au travers de l'appartement où se faisaient les expériences, appartenaient à des espèces dépourvues d’appendices nasaux, ét toutle mondesait combien le vol de ces espèces est assuré, même dans les lieux les plus obscurs. Il nous faut done chercher d’autres organes senso- riels capables de suppléer à la vision. Nous les trouverons évidemment dans les immenses expansions du tégument qui constituent la membrane alaire (1) et la conque auditive. Dans beaucoup d'espèces de Vespertilionides, la large et délicate surface concave de l'oreille externe est comme poin- tillée de nombreuses élévations glandulaires, d’où naissent des poils courts et raides qui jouent évidemment le même rôle que les vibrisses du museau. Dans aucun ordre de Mammifères, la conque auditive n’est aussi développée ni de forme aussi variable. Chez quelques espèces du groupe des Plecoti, la longueur des oreilles est presque égale à celle de la tête et du corps réunis. Chez la plupart des Mégachiroptères, elles sont aussi longues ou pres- que aussi longues que la tête, et dans beaucoup d’espèces elles se soudent à leur base sur la ligne médiane. Leur forme est Caractéristique des différentes familles : chez les Nyeté- rides, les Vespertilionides, les Emballonurides et les Phyllo- stomides, le tragus est très développé et atteint quelquefois presque le bord externe de la conque; sa forme fournit des caractères pour la détermination des espèces. Son rôle semble (1) Voyez, sur lhistologie de la membrane alaire, l'excellent mémoire de M. Schôbl, qui décrit avec soin les couches du tégument, les poils, les glandes, les terminaisons nerveuses, etc. (Arch. für mier Anat., VIE, 1871, p. 1-31). 18 DOBSON. être d'augmenter l'intensité des vibrations sonores et d’en pro- longer la durée. Il est à remarquer que chez les Rhinolophides vraiment insectivores, où le tragus n’est pas développé, les bulles osseuses atteignent leur plus grande taille et les appen- dices sensitifs du nez leur plus grande complication. Dans le groupe des Molosses, la conque est traversée par un bourrelet saillant, et l’antitragus est remarquablement grand dans les espèces où le tragus est réduit. Chez les Mégachiroptères fru- givores, comme on pouvait s’y attendre, la forme de l’oreille est très simple et varie peu, le tragus n’est pas développé. Chez les espèces frugivores et sanguivores de Phyllostomides, 1l existe un tragus, mais le tragus et la conque sont très petits et d’une grande uniformité de forme, même dans les espèces dont l’or- ganisation diffère beaucoup sous d’autres rapports, contraste frappant avec le développement des mêmes parties dans les espèces insectivores. Cependant, quelle que soit la différence de forme de la conque auditive dans ces groupes, leur com- munauté d’origine est prouvée par la similitude générale d’or- ganisation du tragus et par l'existence d’un bourrelet tégu- mentaire particulier qui naît de son bord interne pour se diriger obliquement en haut et en avant sur les côtés de la tête, et qui est également bien développé chez les Glosso- phages, à la tête allongée, et chez les Sténodermes, au crâne raccourc1. ( Chez tous les Chiroptères les oreilles sont extrêmement mo- biles et susceptibles de se mouvoir indépendamment lune de l’autre, à la volonté de l’animal. J'ai observé ce fait, même chez les Ptéropodides frugivores, où J'ai également constaté, quand lanimal est effrayé, les mouvements vibratoires décrits par M. Osburn chez l’Artibeus perspicillatus. $ 4 — Système dentaire. On trouvera les différentes formules dentaires des Chiro- ptères avec les caractères généraux des familles et des genres et la description des espèces, les caractères de la dentition ARTICLE N° 6. SUR LES CHIROPTÈRES. 19 étant généralement le guide le plus sûr pour la recherche des affinités naturelles et leur appréciation. Des quatre cents espèces décrites dans ce catalogue, plus de trois cents se nourrissent d'insectes; aussi leurs molaires ap- partiennent au type insectivore, c’est-à-dire sont hérissées de tubercules aigus et de pointes acérées qui peuvent se ramener à des plis en forme de W. I n'ya AE De de trente-huit dents ainsi réparties : 1.20. — Pm. M. =; maisil yen a souvent un moins grand nombres les Desmodontes sanguivores n’en présentent même que vingt : 1. CO. Pm. = M. 2. Les variations dans le nombre des dents portent surtout, dans les espèces insectivores sur les incisives et les prémolaires, dans les espèces frugivores sur les molaires vraies. Parmi les Microchiroptères, L: Poule des Phyllostomides seule, et dans cette famille les groupes limités des Sténodermes et des Desmodontes, s’écartent d’une façon marquée du type de dentition insectivore. Chez les Mégachiroptères, qui sont tous frugivores, la forme des dents est remarquablement uni- forme dans les différentes espèces, bien que leur nombre soit très variable. Partout, excepté chez le Cynopterus lati- dens, les molaires sont plus longues que larges et leur cou- ronne est marquée d’une dépression longitudinale qui ne se retrouve chez aucun Microchiroptère, si ce n’est peut-être chez le Surmia lilium. La dentition de lait est partout la même. Les dents sont peu épaisses, recourbées et très aiguës, disposition qui leur per- met de retenir sûrement le mamelon de la mère pendant le vol. Elles tombent de bonne heure, mais coexistent souvent quelque temps avec les dents permanentes, celles-ci naissant plus haut qu’elles sur la gencive. $ 5. — Appareil digestif. La bouche s'ouvre généralement à l'extrémité du museau ; cependant, dans beaucoup d'espèces d’Emballonurines, l’ex- trémité du nez s’avance plus loin que la lèvre inférieure, reje- 90 DOERSON. tant ainsi la bouche au-dessous du museau, comme chez les Insectivores : cette particularité n’est pas moins accusée chez le Rhynchonycteris Naso que chez la Musaraigne. Au contraire, dans la famille des Nyctérides et dans les groupes des Mor- inops et des Desmodontes, la lèvre inférieure dépasse légère- ment la supérieure. Dans toutes les espèces insectivores, la bouche s’ouvre lar- sement; les lèvres sont bordées d’une frange de poils raides et extrèmement mobiles, surtout chez les Molossesoù, dans beau- coup d'espèces, de profondes rides verticales témoignent leur expansibilité. Dans le genre Chalinolobus, la lèvre supérieure porte en dehors un peüt lobe horizontal qui en augmente beaucoup la largeur. La lèvre inférieure des Mormops s'étend en avant et est bordée d’appendices ‘fohacés qui remplissent évidemment les mêmes fonctions que la feuille nasale. Dans les autres espèces de la famille des Phyllostomides et chez les Nyctérides, ces appendices sont remplacés par des bourrelets rugueux et des rides. Chez les Glossophages, un sillon mé- dian de la lèvre mférieure, dans lequel ghsse la longue langue caractéristique de ce groupe, permet à l’animal de projeter cet organe entre les canines inférieures sans ouvrir la bouche. Dans le sous-ordre des Mégachiroptères, la forme des lèvres est beaucoup moins variable; cependant, chez les Æpomo- phorus, qui vivent de fruits mous et succulents, elles sont très extensibles et forment des replis profonds, surtout chez les mâles adultes : VÆ. (Hypsignathus) monstrosus leur doit la sin- gularité d'aspect de sa face. La nudité des lèvres et l’absence complète d’une bordure de poils est un caractère absolu de toutes les Ghauves-Souris frugivores, et les distingue proba- blement toujours des espèces insectivores, dont elles peuvent se rapprocher sous d’autres rapports et mème sous celuu de la dentition. | Dans presque toutes les espèces qui se nourrissent de fruits, qu’elles appartiennent aux Mégachiroptères ou aux Microchi- roptères, la face interne des lèvres est couverte de papilles longues et nombreuses. ARTICLE N° 6. SUR LES CHIROPTÈRES. 91 Les plis du palais sont plus ou moins bien définis chez tous les Chiroptères; mais c’est surtout chez les Mégachiro- ptères qu’ils sont accusés, et en particulier dans le genre Epomophorus, où leur forme et leur disposition servent à ca- ractériser les espèces. L'œsophage est étroit partout, et surtout chez les Desmo- dontes sanguivores. La conformation de l'estomac répond à deux types princi- paux, suivant qu'on s'adresse à l’une ou à l’autre des deux grandes divisions de l’ordre. Ghez les Mégachiropières, la région pylorique est allongée et souvent rephiée sur elle- même ; elle est au contraire très courte chez les Micro- chiroptères et le pylore très rapproché du cardia, tandis que la portion cardiaque constitue une poche tantôt globulaire ou ovoide, tantôt allongée en un cæcum intestiniforme, comme chez les Desmodontes. L’estomac complexe des Megachiro= ptères frugivores est jusqu'à un certain point comparable à celui des Ruminants, tandis que la simplicité de forme de celui des Microchiroptères insectivores rappelle celui des Carnassiers. | [à Ghez les Pteropus, l’œsophage s'ouvre dans un sac piri- forme, à gauche duquel la portion cardiaque s’étend longitu- dinalement ; en arrière, un étranglement opposé au cardia in- dique à l'extérieur la portion pylorique, qui est très allongée, semblable à un large côlon et repliée à gauche sur elle-même, de sorte que son extrémité pylorique est ramenée dans le voi- sinage de lœsophage. Immédiatement avant le pylore, qui est très accusé, l'estomac forme uw Cul-de-sae dont l’extré- mité arrondie est rejetée à sa face inférieure. Dans les genres voisins Cynopterus et Cynonycteris, lestomiac ressemble beaucoup à celui des Péeropus, avec cette différence que la portion cardiaque n’est pas hmitée à l'extérieur par un étran- glement et que la portion pylorique ne forme pas de cæcum avant de se terminer au pylore. Chez les Gephalotes, l'estomac est aussi assez semblable à celui des Pieropus; la portion car- diaque est limitée de la même manière, mais la région pylo- “E) DOBSON. rique est extrêmement allongée, deux fois repliée sur elle- même, et ne forme pas de cul-de-sac près de son extrémité. Dans le genre Æpomophorus, dont les espèces vivent de fruits mous, et dans le genre Harpyia, la forme de lPestomac est beaucoup plus simple : la portion pylorique est réduite et n’est pas repliée sur elle-même comme dans les Péeropus; la portion cardiaque présente un étranglement du côté gauche. Dans le groupe des Macroglosses, l'estomac est très va- riabie. Chez les Eonycteris, la région pylorique est beaucoup plus courte et moins contournée que chez les Pteropus, et res- semble à celle des Cynonycteris. La forme de l'estomac est toute différente chez les Nofopterus et paraît n'avoir aucun analogue ailleurs. A l'extérieur, on peut le diviser en trois portions : une centrale, une cardiaque et une pylorique. La portion centrale, située en arrière et au-dessous des deux autres, est de forme presque globulaire, communique en avant avec l’œsophage, à gauche avec le sac cardiaque, à droite avec la portion pylorique; celle-ci adhère d’abord au côté droit de l’œsophage, vis-à-vis de la portion cardiaque, et se recourbe sur elle-même; le canal cholédoque débouche dans le duodénum immédiatement au-dessous du pylore. Chez les Microchiroptères, à l'exception du groupe des Desmodontes, la forme de l’estomac est simple et peu variable. Souvent il semble être une simple expansion du côté de l’œso- phage,. tant le cardia et le pylore sont rapprochés. Chez les Artibeus frugivores, cependant, son organisation se rapproche de celle des Hoi les plus Le des Mégachiroptères, comme les Harpyia; 1l est également tapissé par une mu- queuse profondément réticulée, mais la différence est encore très frappante. Dans le groupe sanguivore des Desmodontes, l'œsophage, dont le calibre dépasse à peine celui d’un gros vaisseau san- euin, débouche à angle droit dans un estomac intestiniforme, qui, du côté droit, se continue presque immédiatement avec le duodénum sans pylore marqué, tandis qu’à gauche, au con- traire, il constitue un cæcum allongé et replié sur lui-même. ARTICLE N° 6. SUR LES CHIROPTÈRES. 23 Ce diverticulum, qui ne se distingue pas à première vue du pa- quet intestinal, est très étroit à son origine, près de l'œso- phage, mais son diamètre s'accroît peu à peu jusqu’à être, près de l'extrémité, trois fois plus grand que celui de la région pylorique; sa longueur varie entre 5 et 15 centimètres. La longueur de l'intestin est généralement trois ou quatre fois plus grande que celle de la tête et du corps réunis; eile varie, du reste, dans des proportions considérables. Son calibre est uniforme du pylore au rectum, et 1! n’y à ni cæcum, ni valvule iléo-cæcale (4). On a signalé existence d’un petit cæcum chez les Rhinopoma, mais je n'ai réussi à le trouver chez aucun individu de la seule espèce de ce genre que J'ai observée. Chez les Megaderma spasma, on trouve, à environ 2 centimètres de l’anus, un petit appendice, long de 3 millunètres, qui res- semble à un cæcum, mais 1l ne présente aucun orifice commu- niquant avec l’intestin. Chez tous les Chiroptères, le foie est remarquablement gros ; le lobe latéral gauche est toujours bien développé, et, chez les Microchiroptères, constitue parfois la moitié de l’organe. Ex- cepté chez les Desmodontes, les sillons droit et gauche sont très distincts et s'étendent jusqu’au bord de l’organe. Le foie des Mégachiroptères est facile à reconnaître au peu de délimitation ou à l'absence du lobe de Spigel, et, dans quelques genres, au volume considérable du lobe caudé; car, chez les Microchiroptères, le lobe de Spigel est très grand et occupe l’espace triangulaire situé entre l’œsophage et l’extré- mité pylorique de l'estomac, tandis que le lobe caudé est petit et, la plupart du temps, réduit à un simple bourrelet. Dans le genre Pteropus, les lobes centraux gauche et droit sont presque égaux et sont séparés en arrière par un sillon; la vésicule biliaire est située dans une fossette à la face concave du lobe central droit; les sillons latéraux droit et gauche s’é- tendent presque jusqu’au bord adhérent du foie; le lobe latéral _ (1) Ce fait explique la rapidité avec laquelle les aliments traversent le tube digestif chez les espèces frugivores, et fait comprendre comment ces animaux peuvent se livrer impunément à leur étonnante voracité. ANN. SC. NAT., MARS 1879-80. ix. 12 — ART. N° G. 9 DOBSON. gauche est aussi gros que les lobes centraux réunis, et dé- passe en surface le lobe latéral droit, sa face externe étant creusée d’une concavité où pénètre le rem; le lobe de Spigek est mal délimité. Le foie des Cynopterus ressemble à celui des Pteropus, mais le lobe caudé est encore plus grand et s'étend de beaucoup en arrière du lobe latéral droit; une partie de son bord libre se. moule sur la face postérieure. du rein. Chez les Cephalotes, le lobe caudé est également très développé, mais la fossette de la vésicule biliaire est située entre le lobe central droit et le lobe latéral gauche. Dans le genre Cynonycteris, le lobe central droit est beaucoup plus développé que le gauche et la vésieule: bihaire est située dans le sillon latéral gauche; le lobe caudé. n'a pas le quart du volume de celui des Cynoplerus, et couvre. à peine un tiers de la surface interne des reins. Dans le genre. Harpyia, qui à l'extérieur semble très voisin des Cynopierus, le (oie diffère de celui des autres genres de Mégachiroptères par la faible profondeur de ses sillons; les sillons droit et gauche ne s'étendent, pas, à moitié près, jusqu’au bord de l'organe, et surpassent à peine en profondeur celui. qui sé- pare les bords des lobes centraux ; la vésicule bilaire est située dans une fossette creusée dans la paror dusiflon latéral droit, et son extrémité. est visible, au centre de ce sillon, à la face supé- rieure du foie. Le lobe caudé est représenté par un bourrelet, et le lobe latéral droit beaucoup plus grand que le gauche. Son. bord Hbre postéro-Imférieur se continue en un appendice en forme de triangle très aigu. Chez les Epomophorus (E. mon- strosus, £. macrocephalus), les lobes centraux ne sont pas sépa- rés par une échancrure postérieure; le lobe caudé est court et obtus, et la vésicule biliaire est située à la face concave du lobe. central droit, Dans le genre Æonycteris, le lobe central droit est beaucoupplus grand:que le gauche, et lavésicule biliaire est logée dans une lossette de, son côté externe, et fait saillie dans le sillon latéral droit; le lobe caudé est réduit à un bourrelet ;: le lobe latéral droit est très grand et enveloppe la moitié du rein. Chez les Notoplerus , dont estomac est si remarquable, le ARTICLE N° 6. SUR LES CHIROPTÈRES. 25 foie ressemble à celui des Eonycteris, mais la vésicule biliaire est hhrement suspendue en arrière. La forme du foie varie beaucoup moins parmi les Michro- chiroptères, et il suffira de le décrire dans un où deux genres caractéristiques appartenant à cette famille. Chez le Phyllorhina Commersomi, le lobe latéral gauche forme la moitié de tout l'organe; le lobe central gauche est très petit et entouré en arrière et à droite par le lobe central droit, à gauche par le lobe latéral gauche ; la vésicule biliaire, très développée, est située dans le sillon qui le sépare de ce dermer ; le lobe de Spigel ést distinct, libre et de forme carrée, mais de petite taille; le lobe caudé est très court. Chez les MNyctenis, le lobe de Spigel, allongé et inguworme, oceupe l’es- pace situé entre l'œæsophage et l'extrémité pylorique de l’esto- mac. Dans le genre Nyctophilus, 11 est aussi très développé et à peu nrès de même forme; le lobe caudé est très court, la vésicule biliaire située entre le lobe central droit et Le lobe latéral du mème côté: Le foie des Hiniopterus est très profon- dément divisé, et les bords postérieur et droit du lobe central droit se continuent en arrière avec un long appendice atté- nué; le lobe de Spigel est petit et acuminé; le lobe caudé s'étend presque jusqu'au milieu des reins. Dans le genre Vesperugo, le lobe de: Spigel est large et foliacé. Chez le Ta- phozous nudiventris, le lobe latéral gauche est aussi très grand, mais le lobe caudé n’est pas distinct. Chez les Molosses, le foie est généralement semblable à celui des genres précédents, mais le lobe caudé est mieux défini. * Dans là famille des Phyllostomides, la forme générale du foie diffère peu de ce qu'elle est chez les Emballonurides, excepté dans. le groupe sanguivoreé des Désmodontes, dans lequel, comme la remarqué le premier le professeur Flower, le foie ne diffère pas seulement de celui de tous les autres Chiroptères, mais (4) « de celui de tous les Mammifères insec- tivores el carnivores, en ce qu'ilest très peu lobé. Le siilon (1) Medical Times and Gazette, 1872, 1, p. 60. 26 DOBSON. ombilical est distinct, mais les sillons latéraux sont de simples échancrures du bord de l'organe limitant deux lobes centraux presque égaux. Le lobe latéral gauche est large et en forme de croissant, le droit épais et arrondi; mais ni le lobe de Spigel, ni le lobe caudé ne sont distincts : 1ls sont seulement indiqués par un bourrelet très accusé à la face inférieure du lobe latéral droit. » Chez les Carollia, le lobe latéral gauche forme à lui seul plus de la moitié du foie; son bord droit est largement recou- vert par le lobe central gauche; la vésicule bilaire est située dans une fossette du côté droit du lobe central droit ; le lobe de Spigel est bien développé et linguiforme, le lobe caudé très court. Dans le genre frugivore Arfibeus, le lobe de Spigel est remarquablement petit et le lobe caudé n’est pas distinct. $ Ü. — Système tégumentaire. Par son étendue, par les différenciations qu’il présente, par l’exquise sensibilité dont il est le siège, le système tégumentaire atteint dans l’ordre des Chiroptères un perfectionnement que l'on ne retrouve nulle part ailleurs. Gomme organe de sensa- ton, les principales modifications qu’il subit en rapport, soit avec l'oreille externe, soit avec les appendices du nez ou des lèvres, ont été passées en revue à propos du système nerveux. Il reste par conséquent à examiner d’abord son développe- ment comme organe du vol, puis la situation et la structure des organes glandulaires qu'il concourt à former. L’étendue et la forme des membranes du vol dépendent prin- cipalement de la forme des os des membres antérieurs, et de la présence ou de lPabsence de la queue ; quelques modifications cependant n’ont aucun rapport avec le squelette et tiennent aux mœurs des espèces et à la manière dont l’aile est rephiée pendant le repos. La membrane du vol comprend einq parties : 1° Les membranes antébrachiales, qui depuis l'épaule s'éten- dent le long de l'humérus et de l’avant-bras jusqu’à la base du ARTICLE N° 6. SUR LES CHIROPTÈRES. 27 pouce, dont le métacarpien est plus ou moins eñveloppé par elles. | 2 Les membranes alares proprement dites, soutenues par les doigts démesurément allongés, qui s'insèrent sur les flanes et sur les membres postérieurs, qu’elles suivent généralement jusqu'aux pieds. 3° La membrane interfémorale, la plus variable en forme, qui est tendue entre l'extrémité du corps et les membres pos- térieurs jusqu'au calcanéum. Les membranes antébrachiales et alaires atteignent leurs plus grandes dimensions dans les espèces organisées exelusive- ment pour le vol, qui, au repos, se tiennent suspendues par les ongles des pieds, la tête en bas, enveloppées dans leurs ailes. Nous les trouverons par conséquent bien développées chez les Ptéropodides, plus encore chez les Nyctérides, chez la plupart des Vespertilionides et chez presque toutesles Phyllostomides, le groupe des Desmodontes excepté. Chez les Emballonurides au contraire, et surtout dans la sous-famille de Molossines, dont les espèces sont de toutes les Ghauves-Souris les mieux organisées pour la locomotionterrestre, la membrane antébra- chiale, réduite à ses plus petites dimensions, n’est pas dévelop- pée le long de lavant-bras et laisse le pouce entièrement libre ; la membrane alaire est très étroite, et au reposse replie entière- ment sous l’avant-bras. Ce mode de reploiement, particulier à l’aile des Emballonurides, fait que la membrane est profondé- ment échancrée entre le quatrième et le cinquième doigt et ne s'étend pas jusqu’à l'extrémité de la phalange terminale du dernier. Chez tous les Mégachiroptères, la membrane alaire s’insère sur la face dorsale des pieds et, dans quelques cas, des pre- mières phalanges des orteils, tandis que chez les Microchiro- ptères, à l'exception des genres Vampirus et Lophostoma, elle s'attache sur le côté des jambes et des pieds, rarement à la base des calcanéums. Dans la plupart des espèces cette membrane a son origine sur les flancs, plus ou moins loin de l’épine dorsale ; mais chez les Notopterus et les Cephalotes, et dans l’espèce 28 DORSON. Chilonycteris (Pteronotus) Davyr, elle nait de la hgne médio- dorsale même, à laquelle elle est reliée par une membrane très mince et nue, tandis que le tégument dorsal sous-jacent est très velu. La membrane naît dans le voisinage de la ligne médiane chez le Pleropus melanopogon et les espèces voisines, chez le Vespertilio macrotarsus et le V. pulosus. Le développement de la membrane interfémorale est évi- demment en rapport avec le régime des différentes espèces : «en effet, elle est très développée dans les espèces insectivores, tandis que dans les espèces frugivores ou sanguivores elle est profondément échancrée en arrière et réduite à une bande assez étroite tendue entre les jambes. Elle est par conséquent grande chez les Rhinolophides, les Nyctérides, lés Vespertilionides, les Emballonurides (à lPexcepuion des Æhinopoma, que l’on considère comme accidentellement, sinon toujours frugivores) et chez les espèces insectivores de Phyllostomides ; elle est au contraire rudimentaire dans les espèces frugivores ou sangui- vores de la même famille et chez les Mégachiroptères. Chezles espèces msectivoreselle n’agit pas seulement comme un gouvernail pour permettre les rapides détours que Panimal fait en volant à la poursuite de sa proie ; mais quand la queue se replie en avant le long du corps, elle forme un piège très efficace pour retenir les gros insectes, tels que les Coléoptères, sur le corps lisse desquels les griffes auraient peu de prise. Son peu de développement est facile à comprendre dans les espèces sanguivores, qui n’ont besoin d'aucun de ses services, auxquelles même elle serait gênante, quand elles cherchent leur nourriture ou quand elles se reposent suspendues par les pieds. Des glandes et des poches glandulaires odorantes, ouvertes à la surface de la peau, se rencontrent dans beaucoup d’es- pèces, surtout parmi les formes très perfectionnées, telles que les grandes espèces dé Mégachiroptères, la sous-famille des Phyllorhmines (Rhinolophides), ies groupes des Vampires et des Sténodermes (Phyllostomides), el la famille des Embal- lonurides. La plupart du temps elles sont beaucoup plus ARTICLE N° 0. SUR LES CHIROPTÈRES. 99 développées chez le mâle que chez la femélle, où elles man- quent souvent, et fournissent ainsi un Caractère sexuel inté- réssant. On peut lès diviser d’après leur position en : 4° Poches frontales (Phyllorhina). 2 Glandes et poches buccales (Taphozous, Cheiromeles, Molossus, Phyllostoma). 3 (landes et poches scapulaires (Æpomophorus, Pteropus, Cyho- nycteris). | 4° Glandes thoraciques (Ametridt). 9° Glandes et follicules du pubiset de l'anus (Rhinolophus, Megaderma, Noctilio, Eonycteris). 6° Glandes alaires (Saccopteryx). L'étude de la forme et de la disposition relative de ces - organes dans les deux sexes a $a place dans la déscription spéciale des espèces. Chez les Microchiroptères, le rôle des sécrétions odorantes de es glandes sémblé être surtout de réunir les sexes dans les sothbres retraités où ces animaux $e cachent et où on les trouvé toujours en abondance dans 14 saison du rut. Mais dans les grandes espèces de Mégachiroptères, comtné les Péeropus, qui vivent sur les arbres exposées à toutes sortes d’entiéinis, ét où ces glandes sont bien développées chez là férnelle, quoique à un Ho udue degré que chez le mâle, la forte édeli de inusc qu’elles exhalent et qui pénètre l’air autour de leurs téträites esi certainement ui moyen de protection. | $ 7. — Organes génitaux. Cliez tous lés Chiroptères, le pénis est pendañt et sou- vent pourvu d’un os bien développé. Sa forme est extrê- mément Variable jusque dans les éspètes dü même géhre. Ainsi, chez le Rhinolophus!' luttis, le gland est gros et cylindrique, et l’urèthre s'oûvré sur sa face supérieure à plus de 5 millihètres de son extrémité, jusqu’à läquélle il se con- tinuë en une goutlièré ouvérfte, Chez la plupart des autres 30 DOBRSON. espèces du genre au contraire, l’orifice de l’urèthre est à l’ex- trémité du gland, ou du moins en est très voisin. Parmi les Vesperugo, les espèces qui appartiennent au sous-genre Hesperopterus se distinguent également par la forme de leur pénis. Chez le Vesperugo Noctula et le Scotophilus pallidus, on trouve un os pénien long et grêle; chez le Noctlio, le gland est conique et allongé, et l’urèthre s'ouvre à sa face supérieure, à près de 3 millimètres de l’extrémité ; son orifice est protégé : par un petit appendice charnu, de la base duquelune gouttière s'étend jusqu'à l’origine du prépuce. Chez la plupart des Microchiroptères, le prépuce dépasse de beaucoup la longueur du gland, et son grand développe- ment chez le Vesper Ce Abramus est caractéristique de cette LCSDÈCE: Le gland dans presque toutes les espèces de Mégachiroptères renferme un os élargi en forme de spatule, qui dans le genre Pteropus en constitue la plus grande partie. Bien que le gland paraisse charnu chez les Eonycteris, il renferme un os ana- logue, et l'orifice de l’urèêthre est triangulaire. Au contraire, dans le genre Harpyia, Vos pénien est grêle et ressemble davantage à celui de quelques Microchiroptères. Chez un certain nombre de Chiroptères, les testicules des- cendent périodiquement dans un serotum temporaire formé par la peau du périnée. Le prépuce du clitoris est long dans l'alliance des Emballo- nurines, et semble atteindre son plus grand développement dans le genre Noctilio, où il est presque aussi long que le pénis des mâles; l’orifice vulvaire est longitudinal. Au con- traire, dans l'alliance des Vespertilionmes et chez les Méga- chiroptères, la vulve est transversale et le prépuce du elitoris court. Chez le Cheiromeles torquatus et le Noctilio es le cli- _toris est perforé par l’urèthre. La forme de l’utérus varie beaucoup avec les genres et même avec les espèces. Chez les Mégachiroptères, il est pro- fondément divisé, et les deux cornes restent distinctes presque ARTICLE N° 6. SUR LES CHIROPTÈRES. 31 jusqu’au col, mais leurs faces Internes se soudent en partie pour former une cloison médiane; de sorte qu'à lextérieur le corps de l’utérus paraît aussi long que les cornes. Les cornes sont aussi très longues chez beaucoup de Micro- chiroptères, comme le Megaderma spasma et le Phillorhina speoris, et l’utérus ressemble à celui des Mégachiroptères ; mais le corps est plus allongé, et je n’ai rencontré nulle part la cloison médiane que nous venons de décrire. Dans d’autres espèces (Scotophilus Temminchi, Miniopterus Schreibersu, Taphozous nudiventris, Molossus abrasus), le corps de l’utérus est encore plus allongé et presque aussi long que les cornes. Il est en forme de massue, avec des cornes larges et courtes, dans le Corinorhinus macrotis. SECONDE PARTIE. CLASSIFICATION. Sous-ordre des MÉGACHIROPTERES,. Couronne des molaires lisse, marquée d’un sillon longitu- dinal. Palais osseux rétréci graduellement au delà des der- nières molaires. Index terminé généralement par un ongle. Base de la conque auditive formant un anneau complet. Extré- mité pylorique de l'estomac très allongée. Régime frugivore. Habitat. — Parties tropicales ou subtropicales de l’hémi- sphère oriental. - Ce sous-ordre ne se compose que d’une seule famille, celle des Ptéropodides. #uo19 °SNSSOOLIDI *S14979h004 *SN1914070N °s27070ydon Didi *snta1douñ7 “suuopoliuouñ *Sndo4234 -sn1oydouodr -O _ 5 5 nt ONE LE op TE ua y 8. 86 6-6 406) Ge EE ny Pl De Be ge pr 5! G 8 Ce CT Oui Fe v = y CRE Ce Co Ty cr A teen ete mi Et Cet lit, roc pig GG y EE cu VT Pno À :; ere ER 9 faursquowu ‘ojano9 ononŸ somnedo sop 79 no9 np ‘onbnu [er op o$eçod ‘oypnu ononû) np onbnu erropesupeg |2219S01 VONT OUMIAUEIN #rsmsres-ee:110]10 OUOISION np 98Eq EJ ® 9919SUI Ole “OUPIPPUTAUSIL EI ANS | aueiquour ‘ojqnu ononf *SJUENSOPROS SOMPILXEU | pe) ( So1 Ans So94ÿSt ‘SOHÿ }-IOJUI ‘JOUNSIp ao Ua sop ttessesse+e]10740 owWorjenb Mun,p -namod xopu] SIGNES) np oseq vy v 0940sut oxrepe |" *OA10U9SG 8] op snssop-ne sojueles oulod : ‘S0J10479 S91} SONE[ON 9SU0TLE ‘110179 : | nvasaut ‘998u00/[e S01 onSUuET II sesnessteet* 97n09 NN) ‘SOUC SO[ANS SODYSUL SO fIY ‘JUvAC " ua sodeds5s Saute] =JIXRUHIOQUI ‘[$U0,p Auamodop Xapur “an$uor ononÛ) ‘2]PS10p-01pP9UL QUBIT PLANS SOMIOSUL SOTTY renterseseseeesesee ete: JUUAR UO SOP9S SOLPIIIXELIOQUE { 9J01HSIP ononb sop, UP AUPIPOU QUÊIL EJ ANS OPIISUT AUUJE ONBIQUOIU É9[SUO,p NAMOdIP X9PUL | | | | {neosnu np JUEAB U9 9IJIES JUESIEJ SOHIPNQU) SOUTIEN —— “A[PIOTU9Y -IOJUI AUPIQUOU OUBIPOUU QUSIT E[ ANS \ E[ SUBP ‘9JSIXO 9[19 sppnos Soxtefpixeu / puenb ‘oouropuox *sop np In[99 e a[qejques sapnedo nesressesseseseseseseeseeresesees eee e0fOU]SID ‘| ‘IdOUALd $9 sop J9 009 np ‘onbnu re] —I9Jut {jourSIp o[8u0 | ‘opqnu no 9oJ1n09 MESA P op o$eçod ‘ojoursip onon) un,p naImod x9puy S941] onon() < “jueae-uo 9Joford pnos 1Adoçeaop uo1q SOUTIEU -S0P OUIOJUL pAIO SOI1[O "04901 **:S0p np Inf99 0p anossiedal " : [ EYE, PACE OATELOIN 9 -Out on8utT ‘] u9 79 ana ; | | | / "OURIPOU QUSFI, L[ ANS SHpnoS SOTIE[[IXEU -JOJUI {JOUIJSIP 2[8u0 un,p naanod Xopu] 109 9 JUPIIP\. | Î *2[101U919} UT QUBIUOU ET op ojuepuodoput ‘a[quu no 974009 sou} anont) l apqerquos sopnedo sop J9 no SALENASSTELE "SHGIGOdOURLA 22 07709) 1sSDI) SUR LES CHHROPTÈRES, 33 Sous-ordre des MICROCHIROPTERES, Couronne des molaires hérissée de tubereules aigus, séparés par des sillons transversaux. Palais osseux subitement rétrécr au delà des dernières molaires. Index dépourvu d’ongle. Côtés interne et externe de la conque auditive distincts jusqu’à la base, Estomac simple ou à extrémité cardiaque plus ou moins allongée. Régime carnivore et surtout insectivore, exceptionnellément frugivore. Habh. — Régions tropicales et tempérées ,des deux hémi- sphères. Ge sous-ordre se compose de 5 familles, savoir: les Rhino- lophides, les Nyctérides, les Vespertilionides, les Enballonu- rides et les A ES Famille des RHINOLOPTHIIDES. Orifices des narines situés dans une dépression de la face supérieure du museau et entourés d’appendices cutanés foliacés. Oreilles grandes, généralement non soudées ; pas de tragus. Doigt médian formé de deux phalanges ; index repré- senté seulement par un métacarpien. Intermaxillaires rudi- mentaires suspendus au cartilage nasal. Formule dentaire ne dépassant pas : si 2 I. : C. = PM Se M. — —. 32 dents. Prémolaires variant entre : ==, = et == ; incisives su- périeures tout à fait rudimentaires à l'extrémité des intermaxil- laires, séparées entre elles et séparées des canines ; première prémolaire très petite ; molaires bien développées, présentant des plis en W. - Les appendices compliqués qui entourent les narines com- prennent trois parties dont il est généralement facile d'établir les homologies dans tous les genres et toutes les espèces : 1° la feuille horizontale, ARE | en forme de fer à cheval, qui couvre plus où moins les côtés et l'extrémité du 34 DOBSONX. museau et entoure les orifices des narimes ; ® un appendice central ou une saillie verticale, la se/la ; 3° la feuille posté- rieure ou partie terminale des appendices nasaux, qui s'élève verticalement entre les oreilles. Le crâne est grand; les os nasaux destinés à porterles appen- dices cutanés, très développés verticalement et étalés sur les côtés. Le tibia est long et droit, le péroné rudimentaire. La queue se continue jusqu’au bord postérieur de la membrane interfémorale. La femelle porte en avant du pubis deux petits appendices en forme de mamelon. Les Rhinolophides se reconnaissent facilement à leurs ap- pendices nasaux compliqués, et à leurs intermaxillaires rudi- mentaires supportant deux petites incisives généralement bilo- bées ; leurs molaires, hérissées de tubercules aigus, leur per- mettent d’écraser facilement les téguments des insectes et en particulier la carapace des Coléoptères, qui, d’après les débris trouvés dans leur estomac, semblent former la plus grande partie de leur nourriture. À quelque point de vue qu’on se place pour considérer leur organisation, ce sont évidemment les mieux organisés des Chiroptères insectivores ; le squelette et le système cutané atteignent chez eux leur forme la plus perfectionnée. Comparés avec ceux des Rhinolophides, les os des membres et les membranes alaires des autres Chauves- Souris paraissent grossièrement façonnés; les dents mêmes semblent beaucoup moins bien disposées pour écraser la cara- pace des Insectes. Les appendices nasaux compliqués, siège de perceptions spéciales analogues à celles du toucher, ne sont aussi développés chez aucun autre Ghiroptère ; ils fournissent d'excellents caractères pour la distinction des espèces, qui souvent ne diffèrent, ni par la dentition, ni par la forme ou la longueur relative des os des mémbres, n1 par la couleur ou la distribution du pelage. Les habitudes des Rhinolophides semblent différer de celles des autres Ghiroptères insectivores qui habitent les mêmes pays, en ce qu'ils sortent plus tard et seulement quand le soleil a complètement disparu de l'horizon. Ce fait s'explique ARTICLE N° 6. SUR LES CHIROPTÈRES. 939 facilement par le rôle, comme organes du tact, des appendices nasaux, des conques auditives et des membranes alaires, qui leur permettent de continuer leur chasse aux Insectes, alors que les autres Chauves-Souris sont rentrées dans leurs retraites nocturnes. Hab.— Régions tempérées et tropicales de l'hémisphère oriental, de l'Irlande à la Nouvelle-frlande. Jusqu'ici on n’en a signalé avec certitude dans aucune partie de la sous-région polynésienne. Cette famillese divise en Rhinolophines eten Phyllorhinines. Sous-famille des RHINOLOPHINES. Premier orteil présentant deux articulations, les autres trois. Apophyse ilio-pectinée sans connexion osseuse avec le bord antéro-inférieur de l’ilium. ÉNRS HMQMCo cc socbocaoocoosccocdbloobedesbonasenne tente soon e R'inolophus. Sous-famille des PHYLLORHININES. Orteils formés tous de deux phalanges. Apophyse ilio-pec- linée réunie par une traverse osseuse avec une apophyse du bord antéro-mférieur de l’ilium, de facon à limiter un large trou préacétabulaire. Bord exlerne de l'oreille in- : us | ntre du fer à ch Han Dantérienre Ce che- | séré près de la commissure des s < t "i De en Cr val portant une crête paupicres DB 700000 TBE Triænops. cheval. Métacarpien de ton Félend, cie les l'index égal E peu orifices des narines et Bord externe de l'oreille à eRÈRE. ï supérieur ge rentre NE arrière see loin et au-dessous de Ps ons ÉTAT Eruiete ne os onbos ob Bac ELeeUEe hinonycleris. doigt. Fer à cheval lisse; pas de crête entre les orifices des , narines ni au- US SR Ce Pa a oi Phyllorhina. Feuille antéricure horizontale lobée. Métacarpien de l'index très long, s'éten- dant jusqu’à l'extrémité de la première phalange du troisième doigt............. Cœlopse Famille des NYCTÉRIDES. Orifices des narines situés à la face supérieure du museau ct bordés d’appendices cutanés. Oreilles grandes, soudées entre elles; tragus bien développé. Mamelies pectorales et non axillures. Troisième doigt formé de deux phalanges, dont la 36 BOBSON. première, au repos, est étendue en ligne droite avec le méta- carpien ; index avec ou sans une courte phalange. Tibia long; péroné rudimentaire ou absent. Intermaxillaires cartilagi- neux où très réduits; incisives supérieures très petites où absentes, séparées des canines quand elles existen Le molaires très développées avec plis aigus en W. Hab.. — Régions epoque et orientale. Cette famille se divise en Wégadermines et en Nyctérines. { Sous-fauille des MÉGADERMINES. Orifices des narines situés dans une dépression près de l'extrémité du museau et cachés par la base d’un appendice vertical. Queue très courte à la base d’une membrane inter- fémorale, quiest au contraire très développée. Intermaxillaires 1 cartilagineux. Formule dentaire : 126. == pm = = HR Genre unique, Megaderma. Sous-famillé des NYCTÉRINES. Orifices des narines situés à l’extrémité d’une profonde: gout- üère longitudinale qui sillonne la face. Queue longue, atter- onant le bord de la membrane imterfémorale. Formule dentaire : EC = pm. tm. Si & Genfo uniques pe Perret CDS CU een Er EEC CET Nycteris. Famille des VESPERTILIONIDES. 4 Orifices des narines circulaires ou en croissant, situés à l'extrémité du museau et non entourés d’appendices foliacés distincts. Oreilles médiocrement développées, généralement séparées entre elles; tragus relativement grand. Froisième doigt de deux phalanges, dont la première, au repos, est étendue en ligne droite avec le métacarpien. Jambes assez courtes: péroné rudimentaire. Queue longue (quelquefois plus longue que la tête et le corps réunis), renfermée dans la membrane interfémorale, dont elle atteint ie bord postérieur. Crâne de volume médiocre. Os frontaux et nasaux peu développés, soit ARTICLE N° 6. SUR LES CHIROPTÈRES. 37 verticalement, soit latéralement, ne présentant pas de dépres- sion ni de souttière comme chez les Nyctérides. Incisives variant de = à ——, et dans le genre Anfrozous seulement, 6 4 = 11 3 mn pémolanres que Qu sr EareMient +; incl sives supérieures petites, situées tout à côté des canines et largement séparées entre. elles sur la ligne médiane. Lorsqu'il y à plusieurs prémolaires de chaque côté, la première est gé- uéralement petite et rejetée plus où moins en dedans de la Hgne dentaire. Molaures bien développées, avec plis en W. Les Vespertülionides se reconnaissent facilement à leurs parines simples situées à lextrémité d’un museau conique et médiocrement allongé ; à leur longue queue qui atteint le bord postérieur de la membrane interfémorale; à leurs incisives supérieures accolées aux canines et largement séparées entre: elles en avant. Les veux sont peüts, et le bord interne des oreilles s’insère sur les côtés de la tête, et non: sur lefront. Hab. — Toutes les parties tropicales et tempérées des deux hémisphères. opens orsssnsssssresesssosssso tests eve Pot tt tt sysogpe sonbsip op sonaanod spard sop auequerd 22e7 39 soonod sop oseg 'itttreerersessreeeee---saqduns spord sop ourequerd 097 jo soonod sop oseg ‘SnuaJdouurx °° "DA9ILOURUL ** *SNIDION ‘* £—E “ur Sn s outod boo < : : ‘SOJUETTIC us OWQIS1017 Cv] onb sayrjod snjd dnoonvoq sounorodns e soduis Soutien Ÿ DINOUEM np nee vrppor see nes sde AURISTONEr à S0jeS9 onbsoid saanonadns Saltéjourpad awoIXnop 38 algnuoud {Sale SourIEU S0p S29/11Q ‘ouv4124824 ..... Sartepouaad awarxnop j9 oonuard JUESS1019 u9 sourreu Sap S39y1Q -sn10ydoo0dung 2 ‘uy “nvosnu np PIW9AXO,[ OP JUEAR U9 OIIIES JUOUWIOJIOY JUESIEF SelieNqny SAULEN *Dyd010]V ER EMEREEEREEESTIOG 0p 9JI9AN0991 SULOUL no snjd oçexomaproqui OUBIQUAUL :9SE ES E PSn998 9[$UE UN JueU *SOOUIUI SOUEfe | SOUBIQUOIY ‘SOUISIOA -JOF8U19X9 pIOQ ‘SUEP ) SIU9P SOL OIJUO SEEPAp -0puo pqanoosn$eiz |uo ogjofox uou outre G} 14 men -OWg1d . o4eltuar4 TI I : "SNLOOHORN +*:----*-onu onbsoad ; O[ULOLWOJIOQUL OUI WA ÉOX9AUO9 AULIYX9 paoq ‘jloxp snSgeul, [ XNE S99[099b ‘Sopyiq uou Samorrodns S9AIST9 *snq1ud0109S ss. sesele ele eee eseee..çonu | / UT *SJ101)9 U91{ J9 SoJuru SouelIXEUrToqU] onbsoid ‘sosstedo soateje soueiquait ‘oitejou =24d ,G EI 39 aULUE9 e[ a1jU9 suepop ua o9jfox ‘ojuod ounormoqut ouejomoid ouortuorg -SNQO1OU210y7 DIRE RE RER EC EEE ELEC ER ERNST COTOT SeIq} {SOTAQT Sop ounssrumoo ep op sourd } 9 or OANONQJUE IA E[ 0P Arepnqor onpuoddy (T—F GG "ODn4odsag +... inon suiqt ( ‘SOPUIQ SOWOQUI soanompdns SaAIstoUr ‘sautue9 *SOIAQ[ SOP 91NSSIUWUO9 EL 0p Said oanort sal odëdos mb 92eds9,] op ontour ej juedn900 “OJUL OTAQ E[ 0P ourepnqo a91puodde,p seq- S’ddotospp quowowotpout souerxemmoquy *s14979hU010 Sonor sssosoeee soso... *sopaedos sa]rroo LI 9 juawoxet ‘I 'SOUTUUO sap sogaedos *‘‘ouonoq er op ajéue, ap said g19sut oAtrpne onbuoo e[ op auxuyxo paoq ee SOIE[OWIIX 8. SOAISIOUT *8109294 "trees DODOOOOOODOE "oyonoq v] op o[$ue Li F op Saad 949$ut oAnTpue onbu09 ef op auto7%e pioq QE SOJE[OWOIX *S09pnOS SII010 ISRIOURS RE idee Fesses ieo Op UFAP 9 40 ON Oo out U[ 0p SnSSop-ne pIÿSUL 2[[I910, 2p AULJXO p10q EE SERA QUERE Éd SHNYAODN ere. D So][I10 * SOUHEU S0p 21Q1HE U9 39 SNSSOp-NE 9[PSEU ojjina 01194 sax ‘2, soaistour JTE IS RM Ets ie STE oS SAIfL940 Ÿ er HAUT OEEEEEEEEEEEEEEEEEEEEECECEEEE EEE *Snssop-nt opnj1s oubstp j1od un oo4v suurmuoo sourvu sop spuoq ‘ SOAISIOU } ‘IN4LdOINIK sop ednox “AUIPOUI QUI EI ANS SOJ[O 9AjUO 091 re —% Ep -vdos ja sourueo sop sopaedas sounorod Te Md (-ns soaistoux — ‘o0ey ef ep snssap-ne 8 6 9AO[9 S91} 919) EI 2P J8WWOS II *29ddoçoaop uoiq oaarur oud ef ‘g—e 1ou98 19 =NS SOIIP[OWOI ‘JULAU U9 N[9A neosnJ{ *Sioy -2p U9 9qun09 10 JI01p ‘10439 39 Suor sn$er *SOOUTU 79 $9]10.19 ‘9791 ef onb son$uor snçd no Sonsuog Issue ‘19098 SO[[t1Q ‘sn$exy np AUIIUE pIOG NP 9987 u9 onbsaid gupsut ‘onbuo9 E[ 9P 9u497X9 piog ‘SANOITILMAdSAÀA S9p oadnox9 “ourmdop uou JUOXF * SYIIOIPAUL JUOUX ‘ajquasqu no: 91n0d —2IPIDU9Ë SOI[OIQ 2IWoId | 3—8% "NEASNUENP 9JIU9AXO,] Sa9nJls ‘JUESSIONI nonadns SAUEOWHIA | no no axrepnouro 99110 XN0 Ssop queav u9 vu soçduirs SOUTIEN SOUEMpUETÉS soouou ù =ItU9;p J49AN09 J9 nu onbsoid neosuyy -suep —9P U9 9qun09 no Jr01p : sngviy ‘ojeproquoux xne Se no AUE[NSULII} OULLOJ Ë tre 9p ‘9791 eç onb sojanoo j Su[d -perauos$ se[rreïg ne AU ‘eponoq ë[ op ojéue,] EE [SES 9p soud o4osur onbuoo | es ee U[ 9p 9ux9/xo piog 19) “ Es JouuoS ‘J sed juessedop ou e ‘LLODATA S9p VUEIS Sa SOI[la10 ‘NU9SNUT NP 9inort aduoxr) -gdns 997 e| ap soan -outridop In0$ 9p ounonpque quouy ‘sopuuaÿ juour PTUPAIXOT € SAUMEU DS hprouoS sale | *2LUSEU 99] 9P SEq *NU9SUU up danorod -1S 9987 E[ AP S94914700$ sop 4ed no ‘soarequow IPN Sa[eSEU Sof[inog sep ded orme uo | SO9JUUL SAULIEN | no Ross “AUJUATLpRA no 271ad O[USEU afp ouf SOAISTOUT LUE ] SACINOTIILUSIAISHA Sep SI SUR LES CHIROPTÈRES. 39 Famille des EMBALLONURIDES. Orifices des narines simples ou valvulaires, situés à l’extré- mité du museau et non entourés d’appendices foliacés dis- lüincts. Oreilles généralement grandes, souvent soudées sur la ligne médiane, insérées par leur bord interne sur les côtés du front; tragus court, quelquefois très petit. Troisième doigt de deux phalanges, dont la première se replie au repos au-dessus du métacarpien. Queue en partie libre ou perforant la mem- brane interfémorale pour faire sallie à sa face supérieure, ou dépassant beaucoup un bord postérieur. Dents en nombre tellement variable, qu'on ne peut donner aucune formule dentaire générale. Incisives supérieures généralement grandes, séparées des canines et séparées entre elles sur la ligne mé- diane, dirigées légèrement en avant et en dedans; molaires bien développées, avec plis en W. Les Emballonurines se reconnaissent, en général, facilement à la forme du museau, qui est obliquement tronqué, les narines faisant plus ou moins saillie au-dessus de Ja lèvre inférieure ; à la manière dont la première phalange du doigt médian se replie au repos; à la queue, qui perfore la membrane interfé- morale ou la dépasse de beaucoup ; à la disposition des inci- sives inférieures généralement au nombre d’une seule paire, séparées entre elles et séparées des canines. Hab. — Régions tropicales et subtropicales des deux hémi- sphères; dépassent rarement au nord ou au sud le 30° degré de latitude. Cette famille se divise en £mballonurines et Molossines. Sous-famille des EMBALLONURINES. Queue grêle perforant la membrane interfémorale pour faire saillie à sa face supérieure, ou terminée dans un intérieur. Jambes longues; péroné grèle, Incisives supérieures faibles, ANN: SC, NAT., AVRIL 1879-80, IX. 13, — ART. N° Ü, EG «wg Ÿ- 8 “xopULT re ; 2 ere M : = = saguereqd xno0q ‘DUOdOUUH - : VIYHOdONIHY S0p_oduo11) = en / 6 JS vd *SOMLR[NAIEA SOUHIEU SI QUI opeseu ap artad { apquiosuo s09pnos Soo1Q-"STOHOP ya JURPÉIOALR SOIN FA ‘sood ANS en ed ne -lout *So]quey so S9MISIOU] ‘spaedos-soureiTIXBUT TOUT “uarduvaeout np shssap-ne*sodas ne, ooud AuoIHP FAI IE snxpotu np 9 Suejeqd ‘w91q il 2IOTU< J9JUI AULIQUAU *SHNOIILLOON sp oduo19 : . er eonb onéuot Pr 06 “ug @ :T- SOSIOASUPI] SODUEMNI SAPLT Op QUIO LOJUOUL £S9JI0N9 SQ1 SO[IOID ‘SOUTUEA S0P Sop4edps J0 FOIUNQI ‘SOUEIPOUT SAMOU | end eu COLE OS EST pe Se =» : Len de enont) ‘If =pdns soAISTOUt {S9JI0} ‘apdns SRAISUT "SHPUOS ‘[IXEUMOUT “uordieoejaur 2j 2848 9}101p QuSrt ua sodoi ne onpuo1 SDIPAU up qd ‘worq ce à Pat” .C—G DTA É9: i ; é *SNANPUI10 A ANNGT(SSER odno;s) re Re St : SOAISIOUT “OAPOI09 Juomppuooad quosj ‘omonpqut AA ET.Skd JuEsSkdop, eu negsauL np JUL |, -o1ixo {janoo sai} 22004 ‘99} CL 9P SNSSOPANE JUEIITES JUAMOAQSI[ 0I91 EL OP JSUUUOS OUELqUOU 91109 2p o4ju99. ne ognjis oy20d oun,p puO} of JUEJOJMAË HJULAXO UOS “OMOUWOJIONT UE : =UIQUL EL 2P OUUISEG PTJIOUL EL 0P AAMOUOJUE 098 EJ AP L[dOX UN SUEP 99 1HOJUOT OH U9 ouonf) 4 = -SNOYOYADL *‘2AB9U09 S91) TO er ‘sanbnpeo sa de uordiv9e} PT À d : xnou Anal sur or «ed quout *OANAHIQQUE OMAQL EL À Sommortodns | 2 MPONS SOAISIOUE * XI ; -odns ot} See d sedyusssedop au nves | Souroug ) PAU SOAEITOMNNOANE es e oIjILeS n-- cARPEr =NUL np 9} JIN A Ft À ÉSQANOrIQRUI SOAISEUT 7 ; ou} anod É. Hi s *æh421d0999S ‘°°° ""yed quouy ‘a[1q9 | D OUAHE) { -dofoA9p S2 ns ‘ DA: " -erqoque - QE mb ‘o[PAOW9J40} QUNOHHJUE PAAO EI 9P FT go - , —UL OUVIq ‘ (US Snssop-ne OJUPI[IES saanonadns OUBIqUAU “&UNNOTIVAL SET el -UI RE suiou no sud nas | SaAISIUT € EI 2p 919 TR | ap-o1u99 9 el AUTRE UND PAUSE pois re LENS “juouoqdurs À jue10j1od SAR ENOel “SPONUOqouRYY *°*""""""pe[d juouy FPOLAMOS GC ny Josmod ogoxbl eno1ÿ ) ÉOIMOIIOQUE OLA EL 24004 SUR 6—G D BOUDÔUE “uord op SNSSOp-De aJUETIS se *s$uoy jou | onprquou ej op : -ABOVJOUL np SNssap-ne Say ‘911049 nv9$ = cpous © a r94901pOUL SUP | ojiepiseq 91JlOur ‘sodoi ne ‘food suipou -NU Up 9JU9IJXA "V= à FOERNOSEO ui np osuereud | 7 suep dou up oS$uepeyd orueIq *DUNA10D ‘°°’ "’9AuI ) SAIUMEANS SAUET ouaunoid 149 À ouou ouaed =UO9UOI OINOLIOQUL | SOAISTOUT = [IXRUHIOQUI o0n0q - 98] 2[0p a ES à 3 Se ü CRE Q à 1 OIA9[ U[ 9P SUSS9P 2J8r9 | -SoAno out snssop-nt 9A9J9 ue oMUI[ES juout “eaqoauetsaasoug Eomorasat 2107 -019$9[ ‘964P[ vos OULIQUALU EL ap JouuOS NU NP AALUOUXA U € oy20d *DANUONDQUAE °°°" """ye[d quo op sed *OANOLI QUI OA] EI 9P ‘6 —& snssap-ne 9jUe[IIeS » soanoradns SuIOur no sud nvas | soarstour | È -NU NP 2JHUOUX A Es. *SNNIUYIOYALOWV * Lie *’sonbyeuosfz sapeoie sop nor up IUNA sop odno19 ngoaiu nenubsnf juowemeonosod juenuruoo os Xnosso sreçed E —P 9 1 a Re n ! : È “UT —2— “j'Sh A} SAIPOUr ‘souvdos quouoSier ‘sourefuSuer SOULIEU S0p S09]U0 3-6 wud TE S}1009 SQ41} SUTPOUI NP asuejeqd oxoumuoid 39 22004 ‘99; E[ 9P SNSSOP Prier ter #OURJOUt QIerMOp ef sed quessedop ou xnosso | -ne 94919 soi] 9]9] L( Op JLUWOS “OT LOUP IOUI siejed ‘jurae no Sp[090P ‘So[PAO Soutieu Sop So2yuQ /‘iquiour e[ap anossiédo,] SUEP ,pULULO} non) | “SANTHANOTIVENT . DU SUR LES CHIROPTÈRES. 41 Sous-famille des MOLOSSINES. Queue forte, dépassant le bord postérieur de la membrane interfémorale, qui est mobile sur elle. Membrane antébran- chiale très petite. Jambes courtes et fortes ; péroné bien déve- loppé. Pieds larges ; le premier et souvent le cinquième doigt beaucoup plus élargis que les autres. Incisives supérieures fortes. Gallosités à la base du pouce. À la mâchoire supérieure une seule paire de grandes incisives séparées des canines. Dans toutes les espèces, la membrane alaire, qui n’embrasse pas les pieds, peut se replier très complètement sous l’avant- bras et les jambes ; la membrane antébrachiale, étroite, quel- quefois rudimentaire, ne dépasse pas la première moitié de lavant-bras ; la membrane interfémorale est rétractile, mobile en avant et en arrière, le long de la queue, ou, dans le genre Mystucina, susceptible de se replier complètement et de se cacher comme les ailes. La forme des deux paires de membres, d'higiéate dbléito- sités aux pouces: la largeur des pieds et FONPEURE des doigts interne et externe ; l'indépendance des avant-bras, des pouces ‘et des pieds par rapport aux membranes du vol ; la faculté que “possèdent celles-ci de se replier complètement, montrent que les éspèces de cette sous-famille sont, de tous les Chiroptères, les mieux organisés pour la locomotion terrestre : induction ‘Qui est du reste confirmée par tous ceux qui ont observé leurs habitudes. Hab. — Le groupe des Molosses est répandu dans toutes les ‘parties tropicales ou subtropicales des deux DD aue le ‘genre Mystacin«, au contraire, ne se rencontre qu'à la Nou- velle-Zélande. 49 DOBRSON. Is HORS por que ? incisives supérieures très A QUIRSS, CONTES ÉD fortes, accolées en avant.... Cheiromeles. Paomor dpi CT Den Intermaxillaires soudés ; Groupe des MoLossr. oreilles distinctes. I. Oreilles grandes, gé- |. Intermaxillaires soudés; in- | cisives supérieures accolées néralement soudées; tragus : Premier et cinquième | en avant... Molossus. pet Orifices des narines doigts du pied plus forts CRGMERUSS que es autres; oreilles soudées ou très rappro- 2 réunis seulement par un car- chées par leur bord interne. par un car Intermaxillaires séparés ou tilage ; incisives supérieures séparées en avant.......... Nyctinomus. Groupe des MYSTAGINx. IL. Oreilles séparées; tra- gus long et aigu. Orifices ; des narines allongés dansNMGenrelunlque EEE Eee eece-bercene Eee Mystacina. le sens vertical. Trois pha- langes au doigt médian. Famille des PHYLLOSTOMIDES. Appendices cutanés autour ou auprès des narines. Oreilles médiocres; tragus bien développé. Trois phalanges au médius et une seule à l'index. Intermaxillaires soudés et généralement bien développés; imcisives supérieures généra- lement bien développées; vraies molaires en nombre très variable, suivant les genres (la forme et le nombre de dents varient considérablement dans les différents groupes de cette famille, depuis 36 dans le genre Glossonycteris jusquà 20 chez les Demodus). Membrane antébrachiale bien développée, excepté dans les Desmodontes, s'étendant le long de l’avant- bras jusqu’à la base du pouce. Tibia long et droit ; péroné grêle ou rudimentaire. Queue très variable, quelquefois bien déve- loppée, généralement courte, rudimentaire ou manquant même complètement. Les espèces de cette famille se reconnaissent facilement à la présence d’une troisième phalange au médius, en même temps que d’appendices nasaux distincts ou d’incisives supé- rieures accolées sur la ligne médiane. La grandeur des yeux, le développement du tragus, qui garde à peu près la même forme danstoutesles espèces, les distinguent des Rhinolophides. Le pelage est en général de couleur sombre; la face et le dos, surtout chez les Sténodermates, sont souvent marqués de raies blanches comme chez les Ptérovodides, qu'ils représentent dans l'hémisphère occidental. ARTICLE N° (. SUR LES CHIROPTÈRES. 43 Quelques espèces, probablement toutes celles dont la queue et la membrane interfémorale sont bien développées, se nour- rissent principalement d'insectes. Le plus grand nombre des espèces du groupe des Vampires et des Glossophages sem- blent avoir un régime mixte, en partie inseclivore, en partie frugivore. Les Sténodermes sont entièrement insectivores. Les Desmodontes seuls, dont on ne connaît que deux espèces, sontréellement sanguivores ; leurs dents et leur appareil digestif présentent des modifications en rapport avec ce régime. Le grand développement de la membrane antébrachiale prouve que les Phyllostomides ne sont pas organisées pour mar- cher sur une surface horizontale, et tous les observateurs s’ac- cordent à dire que leurs habitudes contrastent directement, sous ce rapport, avec celles des Molossines. Les espèces insec- tivores saisissent leur proie au vol, tandis que les frugivores se pendent à une branche au-dessus des fruits dont ils veu.ent se nourrir; cette position permettant le libre mouvement des bras et des pouces, avec lesquels l'animal porte sa nourriture à sa bouche. Les Desmodontes, qui se fixent avec leurs griffes à l’animal dont ils sucent le sang, ont la membrane antébra- chiale étroite et peu développée le long de l’avant-bras. Hab. — Région néo-tropicale. Les Phyllostomides sont -limitées aux parties couvertes des forêts des contrées tropicales ou subtropicales de cette région, et ne s'étendent probable- -ment guère au delà du 30° degré de latitude $. Les Phyllostomides se rangent naturellement en deux sous- familles, selon que les narines s'ouvrent à l’extrémité du museau ou à sa face supérieure; les espèces de la première étant toutes insectivores, tandis que celles de la seconde ont en général un régime mixte. Les sous-familles peuvent elles- mêmes se subdiviser en groupes renfermant des genres rap- prochés par la forme du crâne et des dents. 4% DOBSON. Synopsis des LS et dés groupes dé PYLLOSTOMIDES. Sous-famille des LOBOSTOMINES. Groupe Orilices des narines simples, situés à l'extrémité du museau et en avant, non des bordés par une feuille nasale. Menton orné d’appendices foliacés. Mormors. Langue médiocrement | longue, “obtuse à l’ extrémité; bord de la lèvre supérieur M Le Museau, long Enon échäncré par un sillon | v Fe Sous-famille à et étroit; côté | profond. ANOESE des externe des PHYLLOSTOMINES. } Molaireg | aies molaires Langue + très longue, aité- , bien dévélop= avec plisen W. f nuée à ie extrémité: bord de Groupe Orifices des narines Aa) Ja lèvre inférieure pro- ? des situés à la face supé- Décor inci | fondément échancré par un GLOSSOPHAGEÆ. rieure du. museat et Fijes È sue \ sillon central. plus ou moins entourés | "EUrES: par des appendices cu- / Museat éourt, large et obus ; vraïes mo- W° Grone tanés qui forment une laires larges et plates, avec le bord externe des” feuille nasale distincte. \échancré et tranchant: JSrenoneraar Menton ornéseulement de verrues. Pas de vraies molaires, ou, si elles existent, leur cou- \. Groupe ronne est réduite à un bord étroit et tranchant ; deux inci- des - ” \ sives supérieures larges et tranchantes. DESMODONTES. D’après leurs affinités naturelles, les Vampires devraient être placés entre les Glossophages et les Sténodermes. Sous-famille des LOBOSTOMINES. Sommet de la tête médiocrement élevé au-dessus de la: face, l'axe de la base du crâne étant presque en ligne droite fronne avec: celuride lélface. rer. . go lee ep mem { do usce ee Chilonycteris. : Sommet de la tête très idlevé au-dessus de Ii face, l'axe ! y Moruops, de la base du crâne faisant presque un 2pgle droit avec celui “de la Tabee ee se MARNE RER, DL RAOS ARE CEE EU Moriops. Sous- famille des PHYLLOSTOMINES. Les quatre groupes dans lesquels à é1é divisée cette sous- famille correspondent aux sous-familes dés mêmes noms dans la classification du professeur Peters. Gepeñndant, dans la plu- part des cas, lés genres d’un même groupe sont tellement liés entre eux, que lPon devrait peut-être les considérer seulement comme des sous-genrés formant un seul genre par leur réunion. -Ge fait est surtout remarquable dans le groupe des Vampires, “qui renferme des formes aussi différentes en apparence que le - Vampirus Spectrum et le Phyllostoma hastatum, entre lesquelles on trouve cependant tant d'espèces intermédiures, qu'il faut, ou les réunir en un même genre, ou former des genres intermédiaires. Nous nous sommes arrêté à ce dernier parti, parce qu’il change moins la nomenclature et qu’il facilite la détermination des espèces. ARTICLE N° 6. SUR LES CHIROPTÈRES. 45 Groupe des VAMPIRI. . Museau long et étroit en. avant, Distance entre les yeux. généralement inférieure, rarement égale à celle des yeux à l'extrémité du museau. Feuille nasale bien développée, en fer: à cheval en avant, lancéolée en arrière, entourant Les orifices des narines. Membrane interfémorale bien développée. Queue généralement distincte, rarement absente. Bord interne des lèvres lisse. | Dentition : ..#ou2 @ = Ph. où << M. + Molaires avée plis en W, cénéralonent bien développées ;: prémolaires très variables en volume ét en nonibre. Presque toutesles espèces de Vampires semblent être insee- tivôres, de sorte que leurs habitudes ne justifient pas le sens què l’on donne généralement à leur nom. Quelques-unes cepen- dant, sinon toutes, mangent des fruits en même temps que des insectes, et le Vampirus Spectrum passe pour être uniquement frugivore. Le Macrotus Waterhousii, d'après M. Osburn, dévo- rerait quelquefois les petites espèces de Chauves-Souris, comme le fait, dans l'hémisphère oriental, le Megaderma La gra, auquel 1l reSemble sous beaucoup de rapports: Les espèces de ce groupe peuvent se ranger en deux sections, suivant que la queue atteint le bord postérieur de la mem- brane interfémorale, ou la perfore pour faire saillie à fa face supérieuré. Les premières forment naturellement trois genres très distinéts en apparence; mais celles de la seconde section, quoique rangées dans plusieurs genrés, d’après la forme du crâne et là présence ou l'absence de la seconde prémolaire inférieure, présentent cependant dans leur conformation géné- rale des nice telles, que, comme nous l'avons dit, elles ne devraient former qu'un seul genre. “nhydouyy ‘DI11041D:) “UOUL *DW0}SOThI ‘DW07S07 hu d ‘DU42P0TYd *SdofYODUL D ULOSOYU9S -"DW0}S0yd0T °SNALUDA “unnhydotovx *SnJOlLIDI *DUULLOYIU0T titrrtetttstoqmu onoub ‘jueae ua nb sopuiodwuoy sossoz soj oxjue o$4et suçd ouexo sjoutstp Std sues ‘so10.19 sou] Soitepout “D1]04Dz) SUEP 2LUUO2 UOjUOU Rp SonHeA 9 9jESEU 9[INOM y oujuo o$Je] snjd our ‘AA uo sniqo snd so1esolono sourejow ‘sapod snjdopooanoquo ojex =U99 ONIIOA 9SS019 QU JUEJUOSQIÉ uojuaUt {DULOJSOZI9S SOI SUEP OUILUOD 9[PSEU 9][IM9,] ' $ EX Sa D nn ‘I "SOIT A9U9-xXne SO9I9SUI SAIIE]E SOUPIQUOU URIpotu uo]TIS un Jed 9STAIP nu o9edso oSxe] un juejuosgad uoquow ‘oortie ua on$uof sou ‘jueae uo 910199 9[ESEIL [NO : ‘1 Soutueo Sop adore uo,nb Soçetodiua} sossoy Sej o4ju9 310179 sud dnoonvoq ougro fsjraqio sop oseq eg enbsnf onpuao ouIeje eueaquour {Sonia S0]10d 0p 9p410q ‘A 9P AU} LO nu [etpnyISuot 29edso un juejuos —94d uoquotu ‘oxentue uo on£uor snjd ‘wo hu d Sap 21189 e jueav u9 o[qequuos oeseu of|imoy] - [ “sonbyewoS$fz sopeoe,p sed ‘souiuvo soj oqjue,nb sojexoduwo} so$soy so] < a, OO CECI EG É ‘I ‘SAUIUU9 Sop aleIIIe U9 juawoyeiporutur nb sapetodu9 S9SSOF SA, 91Ju9 loup snjd ouvao ‘sojpraouo xne nbsnf sonpuage soute soueiquou ‘sondioA soj1jod op pp10q “A U9 uo]riS puoyoad un juejuosoad uoqueu ‘jueae uo o4qi 19 29 ddoçoa9p uo1q ojeseu ofmoy boosoaoofooveodedonoe _ “LH & ( o4U0 9811 snjd dnoonvoq ouvio ‘osqejeou nenbsnf enpuoo ourepe ouvaquour ‘sonatoa sojnod op «ed 9p4oq ‘A ep owtoy uo nu aovdso un juequosoad uojuout {71019 opeseu ÉJLUER | Y So[eoduoy sossoy say oxjue Jroujo snjd ouvxo £osioq nenbsnf onpua9 alert ouviquau *SOU9A S9od sosnoiquou 9p 9paoq ‘A uo uojjis SOL un juejuospid uoquout {sonroA dnortgque arjaed ounone suep onb soçeaodtuo sossoy sor *I SoUTUE9 Sop oxoriure uo nb | nu np AMONSUO] E[ € imonpdns nod E—% He) >? ‘UWg ‘nvos| Led | un no oje89 xno So] o1jue aouejsip ‘oëaer snjd 70 j4n09 snjd neosnyy *spoid sop ojea -9Je onued ej ans S9919SUI SOHEIE sapod Ssosnoiquou ep ‘neosnut np. 9Jloumxo,| onb 1sue ‘out ‘971049 2[ESUU 9 SUCER -neos 3 Ë j “À ‘I ‘Soutueo so[ omquo nb sojesodwoy sossoy so otquo 98e snjdouexo fojourpsrp ononb {spoid NL Anonsuo] ù 3 e 21pulout S9p 9199 NE nO EIGIJ NP 9JILUPAXO,] & SOMIPSUL SOEIE SOUAQUIOU {SaNU SOQUOUWPOA 9p 9paoq xn9 So oquo A U9 uoyyis un juejuosord uoquou fneosnu ne oquotoupe sœur ‘o9ddo[oa9p uotq opeseu appmoy oouesip {o$uoje % ‘ojourisip ononb * ou497x0 J$10p np uarsaeejou ne Jo ose} nenbsnf anpu919 211e]e aueIquont *SonieA Sojtjod op 9pioq ‘nu jetqueo 99edso un juejuasoid uoquout *0]10479 9JESEU [Mes y I ‘SoulUE9 Soj oxquonb sojetoduoy sossoy so oxquo Jloxo snjd ouvao & -U9 JUoWapeIpouunnb sopexoduey sossoy saj oauo J1o1J9 snjd ouvao ‘opnu no o7anoo so4 ononb ‘sprojaio xne nbsnf onpuoyo outeje oueaquoui ‘sonu Soauoulupord sep red 2pioq jeurpn} =ISUOI UOITIS un juejuosaud uojuaut © S9J09 SO[ Ans 79 jueae uo ouf ‘SI oçeseu a[pino COCO ECC SOON ENCEINTE srretssor ess oosvese ses ous sajnod op panoquo’ jexjuoo nu ooedso un juejuosoud uoquout 49 2AnoJUt 91A9 {oçdur sors nets n os ere sos soso ‘Sonu SaJUoUIWPOIl ep 9pioq ‘A uo uomis puojosd un juejuosoid aWaIxNnap * _. axrepououd Cl **" opddofoaop uorq omougqui oxrejowoid swarxnop {— À uoquotu ‘ojduis ojeseu oo RARES 0e à 0070 CREER GREC TRE ECS Cr s94} 2UNOTIOJUI SOUE[OWAIL *‘SANU JUOWOEÉD SOIUOUNUY Xnop Ed PPAOG UOIS un snossop-ne ‘spord sop ano1197s0d 9987 EI ‘I ‘SOUIURO Sap ajoute ) & S99J9SUI SAUETE 1 un oovdso un juejuosoid uoqjuoru ‘soumeu sop juvae uo Sossoip Soorpuodde sep juejtod ojeseu ÉTAUER | | 39 110179 ne9snX Sautiquo 38 Ud *SONI119À *spold sop 39 e1{l} np aud97x9 es 1 QUE S o[8Seu ojIIMo 9109 ne opus EE 91TE[E QUPIQUUOI 6€ ‘elqu np 2ANTIQJUI 998} EI e 19 WNPUEOIE, np 2SE4 EL] R 9949SUI 211818 QUCIQUEO FU “ajqnu no ‘oamormodns 998j es B OIIIES OI} inod of[u1ow971 =Ut OUPIQUUOUL EI queloyaod ‘ojinoo onont) ‘II ‘JUOu919$9f jues -sed9p of no anott -gjsod pioq uos jueuñra7}e ‘oeiouwu -9J19JUI QUPIQUOU e[ Suep onuszuoo onont) '] "IMIdWVA 52P Uuornoyissn)n SUR LES CHIROPTÈRES. 47 Groupe des GLOSSOPHAGÆ. . Museau long et étroit ; langue remarquablement longue et extensible, très atténuée à l'extrémité, hérissée en dessus et sur les côtés de longues papilles filiformes recourbées ; lèvre inférieure présentant une large échancrure bordée de petites verrues. Feuille nasale petite, la portion horizontale à peine développée en avant des orifices des narines, qui s'ouvrent au-dessus du museau et pi de son extrémité. Queue courte ou nulle. — Dentition : [. + ou —. Prémolaires et re es très étroites, leur diamètre antéro- postérieur surpassant beaucoup leur diamètre transversal; mo- laires avec plis en W peu saillants, quelquefois mal distincts ou absents ; incisives inférieures très petites ou caduques. Hab. — Parties tropicales de la région néo-tropicale. Arcades zygomatiques com- plètes ; membranes interfémorales w bien QU RE D DES Glossophaga. Incisives supé- 3—3 rieures formant _ canines. Pis de très étroite. Phyllonycteris 5—S M une rangée con- tinue entre ss Pas d’arcades zygomatiques ; de FE Incisives su- périeures inter- ) rcades zygomatiques complè- nes plus gran-\ Arcades zysomatiq A à d ones | Les. Queue dépassant la membrane 0 e interfémorale, qui est étroite... Monophyllus. externes. 9 9 à Incisives Pm. == M. ;—; supérieures en 3 — 5 3—3 paires séparées Molaires par un petit es- ae de gomatiques RE avec plis enW pacersumlatligue) |) PSS R2SI 08 AQUEue s MCeMOraNE plus ou moins médiane. interfémorale très étroite. ...... Ichnoglossa. distincts. ù Pn. 22 M. ==<° 3—3 ‘2—2 Arcades foie com- — 3 lètes. Pm. x SM. TR ueue Incisives P Q Incisives su- supérieures en jet tr ee aone très périeures inter- )paires large- ÉUITES Seobaccodocoboodoondec Lonchoglossa, nes plus petites } ment séparées que les externes. [ sur la ligne mé- Pas d'arcades 2ygomatiques... Glossonycteris. diane, p 3—3 M 3— 3, M. es M5 Rs Încisives Fa qe zygomatiques. : ncisives sü- | supérieures en — 9. on Molaires fe DAS pe _ remière trés étroites, ) PÉTIEUTES iuter- ! partie largement =: P Rsos ) IE plus petites | séparées sur la ni Pa caduque. ? que les externes. | ligne médiane, / Queue courte; membrane inter- à fémorale bien développée........ Gh@ronycteris. 48 -: DOBSON. Groupe des STENODERMATA. Museau très court et généraiement large en avant; distance entre les yeux presque toujours supérieure, rarement égale à ceHe des yeux à l’extrémité du museau. Feuille nasale généra- lement courte, en fer à cheval en avant, lancéolée en arrière (excepté chez les Brachyphytla et les Centurio), La partie hori- zontale entourant les orifices des narines. Membrane inter- fémorale concave en arrière. Queue nulle. Bord interne des lèvres frangé de pupilles Coniques. r Dentition : Pm. — Sr, 9 —19 & T. + ou to [us Prémolaires et molaires très ie a. dans le genre Siurnira, les dernières à couronnes larges, concaves ou plates et à bord externe échancré, tranchant; pas de races de plis en W. ARTICLE N° G. *DLUNUIT “onhydhyonag "DAVULUS “uu2poLR : *DUUIDOUVY) "DPUAUY. “DULIDOU2IS "sdoundu] "SNIQUAF OR TOI IDDN CT OIOILION OIOIC LC AOIDIONC ONDIC AT VC ÉCICNL 7 + CIO ©: DUMIPOUIIS SOL ZOO olUWO9 SJUAG *SOIPSAIASUBA} SOPULT 9018 08408 !snu souemno sl op ooura 29e} fjuear u9 QJAb[ SAI} 49 14h09 hvoshn ‘apuljsIp A[ESEU O[[EN9} op Std ‘nHrosntu hp AJUUYUIXO | ap UOSS91d9p aun SUEP SOJIOANO SOULIEN II *[eurpnyts opus ground) \ =u0f ouaurip ne ananpdns JESIASURA 2HOUEP £oS4e[ SOHEJOUT Sp AUUOINO0!) l £oqunoo Kay ofpeseu off | “onbru -09 nrosn] nesteeseeee--soquuel St 108p410Q \ “9HOM9 S91] 2[BIOWAMOUE OUPLT l *[EuIPNJISUOL oAjaueIp NE [RÉ9 [USIOASUEI OAJOUUBIP UNE SN2QiHKU-SOI OU AUULKOO \ fapeutpuruor 101maë ounp opnbaetu ‘2}10179 SOnaHQJUE SOITEIOUL Sap AUUOANO!) ‘aoddofoa9p ua 9[ES8u opuio r ho ED bo000 000 00 TO abc DD d0 rt 000.0 0000000 000.000 tosseseseescssesesssessee “01108 sou | SAIIOHIEUT XP SAP KIEQU 05 < SOJOA Sonbiu09 sounotpdns SpAISIOU] ‘JUEAU U9 094019 S94) 0984 "TEUIPUES UOL 24J9UEIP ne anormodns “orqruoad ej onb e8aex sud SAUOUOUE XN9P SAP OLP[OU 67% enspeeeee:equeat 910449 sad ouvro Fsdo.qdunA uj SoHo sol ouuo opeurpuité S0[ 499 oOUWO9 SAONE SHMOMOANS SOAISTOUT . À Got oquoy oun ed osnosso 9797 u LS AASUBA THLGAUS Jns sasuajoid sçeseu sooyuQ À ÉRVELUU) _ sun 8 à . foszes So * L se PA seeterseetee:*60)101J4 S0jd SIRIN } ‘200940 9SICI NE9S An | TAOI sap nvssnn DUMIIPOUIIS SOL SUPP AUIUO9 Ô-Nu unp SNSsop E *S9HE[OUU u9 094019 auu CIN") sourejou ‘sayoip ‘sanbiuo9 | -ne 94019 Soi} 9797 f S91 9HUa 91 luou ‘o$iet 19 SOuI9qUI sounoriodns SaAISIOUf / EL 9P JAUIW0S -u299 JUouwop “oIuaid EI bou (asuos “avez ep op( -uooad ‘ojorde |onb o1jed snyd Al nou SNIQUAV SOI SURP ouquoa soutep | sUSSOpzne 9A9[9 | U9 npuojg uou SOATOYOPL XN9pP ) J =ou ‘soqroxp ‘sanbruoa no s084ef { JUOUIAI9SIT 9197 | XNOSSO SIEIEd sp OlP[OW 3% ET ‘osnosso 9197 EI Ans I Ib U9 SpSUOI -04d uou ‘syrod S[PSEU S991JI4() SOUIJUI soinomodns SOAISHUT 15 op Jeuuos serrer. SNAQUAUV SAI SUEP nb 8911019 Snjd Ssalm[our ‘979N11SIp get ‘oyod aano1odn$ 241re[ou € fqjuowronbtpqo so9$rarp 39 sonbruo9 SOUISJUI S9inotiodns SAAISEQUT *SOXIE[OUL SOIQIUIOP SAT AIJUA 9196 U9 Nnpu979 Xn9ss0 SIeJEd *""SOSIPT Sa} SOIE[OU { 19548 É no 91IE}UOLUIPE aiu2nedns , AATRT OUI AUU9ISI01} {S0JI01P 79 SOS SOUHIOUI Soinopdns SPAISWUT BUT AIO a[eSEU 9[[In0F aun,p 294} Ans VI R S07104 -N0 SOUTIEN °] 50 DOBSON. Groupe des DESMODONTES. Museau court et conique; feuille nasale distincte; narines ouvertes sur la partie horizontale de la feuille. Membrane inter- fémorale très réduite. Queue nulle. Dentition : | I. 5 C. — Pm . = M. = ou ;. Incisives supérieures très grandes, tranchantes, en forme de canines, occupant tout l’espace qui sépare les canines; pré- molaires très étroites, à couronne longitudinale tranchante ; molaires rudimentaires. | Hab. — Région néo-tropicale tout entière, à l’exception de a sous-région des Antilles. | I. Pas de calcanéum. Membrane interfémorale entière. Pas de vraies molaires ; incisives inférieures petites, séparées sur la ligne médiane................... . Diphylla. à : : . ’ SERA —A ; IT. Calcanéum très court. Membrane interfémorale échancrée. Molaires An rudimen- taires; incisives inférieures en série continue entre les canines...........,,..,. Desmodus. ARTICLE N° 6. MÉMOIRE SUR LA MÉTAMORPHOSE DES BRYOZOAIRES Par le D' J. BARROIS. PREMIÈRE PARTIE, — MÉTAMORPHOSE DES ESCHARINES. Mes précédentes recherches sur les Bryozoaires ont eu pour put l'étude de leurs formes larvaires : on n’avait que des con- naissances partielles fort incomplètes sur ce sujet, et l’on ignorait le plan général de structure qu’on doit attribuer aux larves de ce groupe. Le résultat de mon premier mémoire (1) fut de reconnaitre les grands traits de structure formant le fond de l’organisation des larves de Bryozoares, et d'indiquer en outre leurs varia- tions dans les différentes familles de cette classe. Les deux formes essentelles de lorganisme Bryozoaire (larve adulte) sont depuis cette époque également connues ; il restait à les raccorder l’une à l’autre, et à retracer organe par organe les relations complètes de la larve à l'adulte. L’impor- tance capitale de cette question m’a décidé à reprendre mes études sur les Bryozoaires; et malgré la période de dégénéres- cence presque totale qui trace entre les deux formes (larve et adulte) une barrière que les vues théoriques seules avaient pu franchir jusqu'ici, comme on le verra dans l’historique suivant, je me suis elforcé, en m’appuyant sur les nouveaux moyens d'investigation dont nous disposons aujourd’hui, de recon- (1) Jules Barrois, Recherches sur l’'embryogénie des Bryozoaires, in-4°, avec {6 planches, publié aux frais de l’auteur, chez Six Horemans, libraire-éditeur, à Lille, 1877. ANN. SC. NAT. — ART. N° 7. 9 J. BARROIS. naître et de suivre toutes les modifications des larves pendant leur métamorphose. C’est le résultat de ces recherches qui formera la deuxième partie de mon mémoire sur le développe- ment des Bryozoaires. Je commence ici par la description de la métamorphose des Escharines, choisies comme type; Je l’étudierai successivement dans les autres familles (1). Toutes mes préparations ont été conservées. Historique. Toute métamorphose se ramène au passage pur et simple d’un stade de développement à un stade plus avancé de l’échelle embryonnaire. Entre le développement direct et continu et le développement par métamorphoses, il n’y à pas en somme de différence essentielle; le second est le produit de causes per- turbatrices qui sont venues modifier et obscurcir plus ou moins la suite régulière du développement, Ainsi donc, chaque fois que l’on aura affaire à une méta- morphose, on devra chercher à ramener les faits au passage direct des deux formes l’une à l’autre, en tàchant à retrouver entre eux concordance complète, comme si ces deux formes étaient deux stades successifs d’un seul Aérelopperment régu- lier et continu. Lorsque nous rencontrons, comme chez les Bryozoaires, des cas où ce passage se trouve difficilement, où de Jour en jour se découvrent de nouveaux faits, qui, loin de rapprocher les deux états l’un de l’autre, ne font au contraire qu’en augmenter la distance, 1l faut considérer comme acquisitions positives tout ce qui tend à atténuer la distance qui les sépare, et négatives tout ce qui tend au contraire à l’accentuer. Chez les Bryozoaires, nous rencontrons ces deux tendances. Des auteurs, plus dominés par l’esprit philosophique, ont fait leur possible pour chercher à confirmer l’idée d’un passage réel entre l’organisme larvaire et l’organisme adulte : ce sont (1) Le résumé de mes recherches sur les autres grandes familles a déjà paru dans les Comptes rendus de | Académie des sciences. ARTICLE N° 7, MÉTAMORPHOSES- DES BRYOZOAIRES. 3 les champions de la solution positive. D’autres, plus scrupuleux, ont mieux aimé s’en tenir à la simple expression des faits observés, et en restent à l’idée de développement rétrograde, suivi d’une période de néoformation. Ces derniers représen- tent la solution négative. Nous allons maintenant retracer brièvement l'historique de la question, en nous plaçant surtout au point de vue expliqué dans les lignes qui précèdent. I. — Du passage réel de la larve à l’adulte, $ 4er. a. En 1827, dans son remarquable mémoire sur la généra- tion des Flustres, Grant faisait connaître un cycle de dévelop- pement de Bryozoaires auquel les travaux suivants, même les plus modernes, n’ont encore pu apporter de changements notables. Grant vit une larve ciliée infusoriforme se fixer et se trans- former en un simple sac contenant dansson intérieur unemasse opaque; le rudiment de polypide apparaissait ensuite dans l’intérieur de ce sac, sous forme d’une petite masse de forme ovale. | Tous les auteurs suivants n’adoptèrent pas cette description : b. Nordmann (1840); Hincks et Redfern (1851). — Leurs travaux ne portent guère l’indication que d’une différenciation des tissus de la larve conduisant à la formation des tissus de l'adulte ; leur description ne-comporte rien d'autre, ni en plus ni en MOINS. c. Van Beneden (1845) et Smitt (1865) considèrent l'adulte comme issu directement d'une transformation de la larve. D’après le premier, la larve se fixe par la face orale, tandis que la face aborale développe des tentacules. D’après le second, la peau de la larve prend la forme de lobe, tandis que son sac interne devient le rudiment de polypide. Malgré ces quelques voix discordantes, le plus grand nombre se rallie à l’assertion de Grant. 4 ù | s. BARROIS. . Farré (1837) révoit les mêmes faits, mais en les complé- tant. I donne une bonne description de la larve d'Halodaetylus, qu'il décrit et figure déjà comme un organisme d’une grande complexité. C’est dans son travail Qu'on trouve pour la pre- mière fois le fait de la complexité de l'organisme larvaire rapproché de la simplicité du premier état qui suit la fixation ; de ce rapprochement dévait sortir lidée de l'existence d’une période de développement rétrograde, Dalyell (1847) reconnaît les mêmes phénomènes, mais sans rien ajouter aux idées de Grant. Gosse (1853) figure bien la larve de Lepralia coccinea, ainsi que les stades de sac renfermant une masse interne de gra- nules opaques. La description de Grant, de même que celle de Farre, nous conduit à l’idée d’un développement rétro- grade, Ce ne fut cependant qu'à partir du travail classique de Schneider (1863) sur la métamorphose du Cyphonautes, que cette idée prit définitivement racine dans la science. Depuis longtemps on connaissait cette larve si complexe. Schneïder démontra qu’elle n’était qu'une larve de Bryozoaire, qu’elle perdait toute son organisation pour se réduire à une masse sans structure, d’où se’ formait l’adulte par développement ultérieur. ç 2. Le travail de Schneider avait immense mérite d'établir nettement Pétat de la question : il y définissait clairement le cycle embryonnaire, tel qu'il résultait des découvertes de Grant, Farre, Dalyell, Gosse; mais il était fort loin d’avancer Ja question capitale des rapporis de la larve avec la forme adulte. È Tout en reconnaissant que la larve se réduit à un sac rempli de globules graisseux, on refusa d'admettre sa destruction complète. Quelques auteurs se laissèrent même aller à la ten- dance déjà représentée par Van Beneden et Smitt; ils cher- chèrent à rapprocher les deux formes successives. ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 5) Nütsche (1869) considère la larve comme formée d’une couche périphérique avec une masse interne; la seconde reste au centre, tandis que la première perd ses divisions et se r'enfle en un Sac. Le polypide est d'apparition ultérieure et se forme aux dé- pens de la peau du sac. Claparède (1871) reproduit une description analogue ; pour lui, comme pour l’auteur qui précède, toute la dégéné- rescence se réduit en somme à la perte des cils etdes différentes divisions de la peau. Salensky (1874) considère la larve comme formée : 1° de la peau; 2° d’une couche de globules graisseux; 3° d’un sac intérieur qui serait le rudiment de polypide. Après la fixation, la peau perd ses cils et se réduit à un sac, mais la couche grais- seuse et le sac interne demeurent à leur place, où lon peut les retrouver. Sa description n’est pas sans analogie avec celle de Smitt. Ces essais constituaient de très louables tentatives de ten- dance excellente et d’une grande portée. Ils étaient d’ailleurs bien mieux adaptés aux faits que les premiers essais tentés dans la même voie par Van Beneden et Smitt. Malheureuse- ment, ils ne reposaient pas sur des données suffisantes; ils furent, comme la première fois, également détrônés par les observations plus exactes et plus précises. S 9. Au nombre des auteurs qui avaient combattu la destruction complète de l'organisme larvaire, il en est un, Merschnikoff (1869-71), qui avait suiviune toutautre voie. Toutenserefusant à admettre l’histolyse et la généralité des rétrogradations, il re chercha cependant pas à en réduire l’étendue; il admit sans répugnance que la dégénérescence affectait aussi les organes internes, et que €’était aux dépens de la destruction de ces der- niers que se formait la masse de globules opaques visibles dans e stade simple qui suit la fixation. ANN. SC. NAT., ZOOL., AVRIL 1879-80. IX. L£ MARTIN Te be 3. BARROIS. Son élève Repiachoff soutint les mêmes idées. Dans deux travaux importants sur ce sujet (1875-1876), 1l admet que la larve se réduit à un sac rempli d’une masse de globules grais- seux, le premier issu de la peau de la larve, le second prove- uant de ses organes internes : la peau de la larve perd toutes ses divisions pour se réduire aun simple sa, tandis que les organes internes entrent en dégénérescence. Repiachoff reste muet sur l’origine du polypide, mais il fait connaitre le fait intéressant que la masse graisséuse peut venir s’y souder et concourir dans une certaine part à son achèvement. Enfin, dans mon travail de 1877, j'avais été conduit aux mêmes opinions, et celte Solution me paraissait définitive (1). Aussi n’hésitai-je pas, de guerre lasse, à déclarer que le cycle de développement rétrograde suivi d’une période de néo-forma- tion pouvait constituer la dernière expression des phénomènes qu'il fût donné d'observer; qu'il était dù à une abréviation de la métamorphose, et que par conséquent il était inutile de s’acharner davantage à chercher un passage qui, selon toute vraisemblance, ne devait pas exister. Je me mis donc à l’œuvre pour chercher à établir la concor- dance entre les deux formes par une autre voie; je tächai de déterminer toutes les homologies entre la larve et l'adulte, de façon à établir un passage supposé qui püt suppléer à l’absence du passage réel. Les travaux de Hatscheck sur le Pedicellina doivent être placés dans le même genre d’essais. Ces tentatives conscientes avaient été précédées d’une autre tentative plus prématurée, connue sous le nom de théorie du cystide. | (1) Tous mes efforts dans le but de trouver un passage plus graduel n'avaient en effet, jusque-là, réussi qu'à fhe confirmer dans cette opinion. On peut encore voir figuré dans mon travail un stade de fixation de l'A {cyonidium (pl. 6, fig. 34) qui montre la peau déjà renflée en sac, mais laissant entrevoir des restes d'organes internes : ce stade était bien de nature à confirmer dans l'idée qu'il ne pouvait réellenient y avoir d'autre phénomène qu'un renflement de la peau'en un sac uniforme, avec dégénérescence des organes internes. ARTICLE N° Ÿ. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 7 IL. — Tentatives pour trouver un passage supposé. 4%: Nüsche (théorie du cystide). — Au milieu de la diver- sité qui règne dans l’embryogénie de ce groupe d’animaux, on remarque qu'il y à une forme très constante : celle d’un simple sac. Get état se produit d’une manière directe (Alcyonelle) ou à la suite du développement rétrograde. Nitsche admet que c’est la forme fondamentale dont dérivent toutes les formes du groupe, L’embryogénie normale consisterait dans la formation di- recte d’un cystide qui éclôt et devient une larve ciliée; puis ce eystide se fixe et développe en dedans un bourgeon qui devient le futur polypide. Mais cette larve primitive, en forme de cystide, peut se diffé- rencier pendant sa vie larvaire, et acquérir ainsi, par simple adaptation, une organisation plus ou moins compliquée. Ce sont là seulement des perturbations dues à un développement adaptatif intercalé dans le cycle normal de l’embryogénie ; toute cette organisation est destinée à disparaitre lors de la reprise du développement régulier, héréditaire, et c’est ce qui explique la période embarrassante du développement rétrograde qui ra- mène toutes les larves à l’état de cystide, à partir duquelrecom- mence la marche normale des phénomènes (bourgeonnement du polypide dans l’intérieur). 2° : Théorie de l'évolution directe. — Nitsche s'était appuyé, pour opérer la distinction entre les caractères adaptatifs et héréditaires, sur l'existence d’un stade général, commun au eroupe entier des Bryozoaires. On pouvait aussi, pour arriver à atteindre le but, prendre une autre voie plus longue, mais plus sûre, celle de la comparaison de toutes les formes lar- vaires, en acceptant comme adaptatifs les caractères variables, et comme héréditaires les caractères constants qu’on retrouve chez toutes les larves de ce groupe. Cette étude, tentée par moi en 1877, a conduit à des résul- tats complètement opposés à ceux auxquels était arrivé mon (à JS. BARROIS. prédécesseur, et m'a fait obtenir comme forme primitive un organisme déjà aussi compliqué que ladulte, composé comme lui de trois feuillets embryonnaires et à exoderme séparé par une couronne en deux parties distinctes : la face orale, suscep- tible de se rétracter en vestibule (Entoproctes, A/cyonidium, Cyphonautes) ; la face aborale, susceptible de se refermer au- dessus, de manière à former une enveloppe générale (1). C'est la forme théorique obtenue de cette façon que j'ai essayé de comparer à l’adulte, en cherchant à retrouver les grandes homologies. Le retrait de la face orale en forme de vestibuleet l’ocelusion de Paborale en une enveloppe générale m'ont paru, plus que tous les autres faits, être propres à fournir une base assez solide pour la comparaison, et j'ai conclu en indiquant d’une manière générale l’homologie entre la face aborale et la peau de la loge, entre la face orale et la gaine tentaculaire ; entre l'intestin et les muscles de la larve, et l’intestin et les muscles de ladulte. ; 3°. Hatscheck a profité de la ressemblance toute spéciale que présentent la larve et l'adulte du Pedicellina pour pousser plus loim les homologies. Voiei sa manière d'envisager ces apports : 1° La fixation se fait par l'extrémité de la face aborale, dont l'organe terminal est une glande pédieuse. 2° Toute la partie postérieure de cette même face, jusqu’à l'organe tactile antérieur inclusivement, s’amincit pour se transformer en pédoncule; sa portion antérieure se trouve distendue par les organes internes refoulés à son intérieur, et forme le calice. 9° Les différentes parties de l'animal adulte sont, d'après Hatscheck, respectivement homologues des parties suivantes de l'organisme larvaire. (1) C’est surtout la propriété des larves de Chilostomes, de pouvoir rétracter toute leur face orale (voyez mes Recherches sur l’embryogénie des Bryozoaires, pl. 6, lig. 23), qui m'avait semblé instructive sous ce rapport, en permettant d'étendre au groupe tout entier ce qui n’est ordinairement visible que chez les Entoproctes. L ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. ‘9 Espace intra-tentaculaire... ...... Véstibule. Sa saillie médiane.............. Orge hilebé. Cloaque et poche incubatrice.. . ... Fente interlobaire. Canal cilié débouchant dans le cloatque. 144 MONS DANREMIRANL Canal cilié débouchant dans la fente. 4 C’est surtout dans le rôle de l'organe tactile antérieur que les vues de Hatscheck sont dignes de remarque : cet or- gane représente un bourgeon endodermique dérivé en droite ligne de lendoderme primitif et destiné à fournir la partie endodermique de tous les bourgeons; lPaceroissement de la colonie se ramenant ainsi, comme pour les Hydraires, à un accroissement simultané des deux feuillets primitifs. On con- state de plus de frappantes ressemblances entre l’évolution du bourgeon à deux feuillets et celui qui dérive du premier stade gastrula : chez l’un comme chez l’autre, l'endoderme ne fournit que l'estomac, avec la division ciliée de l’intestin; le vesti- bule, l’æsophage et le rectum dérivent d’invaginations ulté- rieures de l’exoderme. Chez la larve, comme dans le bourgeon, le mésoderme ne consiste dans le début qu’en deux cellules situées au devant de l’endoderme. Un fait ressort, au point de vue théorique, du travail de Hatscheck : e’est la conception entièrement nouvelle des larves de Bryozoaires comme organismes doubles, contenant, outre l'animal de première génération, Îe germe d’un animal de seconde génération. C’est ce qui ressort de l’interprétation de Porgane tactile antérieur de la larve de Pedicellina comme bourgeon endodermique, ainsi que de l’homologie qu’on a voulu trouver entre ce bourgeon et la masse cellulaire qui cor- respond à la fente ciliée des Cyphonautes et des autres larves. Cette masse, bien qu'appartenant en réalité à une face de la larve tout à fait différente, occupe à peu près la même place dans le corps que le bourgeon endodermique du Pedicel- lina. Repiachoff a dernièrement adopté cette opinion, et à même été jusqu’à comparer la partie antérieure d’une larve de Chilostome à un second individu en voie de formation (1). (1) La masse cellulaire représenterait le bourgeon endodermique, et la fente ciliée même une ventouse rudimentaire ?. (Repiachoff.) ’ = 10 3. BARROIS. L'auteur russe fait pourtant de prudentes réserves, et va mème jusqu’à dire, dans Son dernier travail, qu’on ne peut re- connaître après la fixation rien qui autorise à regarder le cys- tide comme composéde deux êtres distinets; à un certain stade, on ne trouve même plus dans son intérieur qu'une masse grais- seuse qui remplit le tout, sans seulement montrer de traces du bourgeon endodermique, LE IT. — Nouvelle tentative vers le passage réel. Dans le courant de l’année 1878, je résolus de faire une der- nière tentative dans le but de chercher le passage réel. Mes observations se sont faites en Bretagne, au laboratoire de Con- carneau, et furent poursuivies de mai jusqu’en septembre ; elles eurent lieu sur une espèce de Lepralia très abondante aux environs du vivier, ensuite sur le Serialaria lendigera, qu’on récolte en quantité à l’embouchüre de la rivière. Cette fois le succès dépassa mes espérances ; au bout de quelques mois d’un travail assidu, j’eus la satisfaction de me voir arriver à une solution qui me parut satisfaisante. Nous avons vu, et cela à deux reprises différentes, le fait brutal aux prises avec la tendance philosophique, et celle-ci, représentée par l’hypothèse du passage, être terrassée deux fois successives par la raison majeure apportée par lob- sérvation : la première fois, dans les personnes de Van Be- neden et Smitt, battus par Grant, Farre, Dalyell, Gosse et Schneider; la seconde, dans celles de Nitsche, Claparède, Salensky, battus par Metschnikoff et par Repiachoff. Jusqu'ici c’est toujours la solution négative qui à constam- ment réuni l’assentiment des faits ; c’est là ce qui explique ses nombreux triomphes. J'espère démontrer dans ce qui va suivre que cet accord n’était lui-même dû qu’à l’état incomplet des observations; que celles-ci, reprises avec plus de détail, dé- truisent au contraire la solution négative et viennent confirmer la solution positive, en nousrévélant le passage direct de toute l’organisation larvaire à l'adulte. C’est donc cette fois au nom 2 f ARTICLE N° {/. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 11 du fait observé que je viens soutenir la solution positive, et condamner au contraire la solution négative, à laquelle nous pourrons renvoyer à notre tour le reproche mérité d’inexacti- tude. Mon travail ne constitue qu'une première contribution à la somme des recherches qui seront nécessaires pour déterminer à l’aide de cette méthode le mode de passage de toutes les formes larvaires, recherches destinées à venir, dans un temps donné, se substituer d’une manière complète aux résultats théoriques mentionnés plus haut. Avant d'aborder directement notre sujet, il est nécessaire de revenir un peu sur le développement de la larve des Escharines. Î. — Développement de la larve. Quelques-unes des dénominations que j'avais, dans mon tra- vail de 1877, cru pouvoir donner aux parties de la larve, en me basant surtout sur les ressemblances qui existent à cet état entre les différents types, ne peuvent se conserver sans incon- vénients dans une étude du genre de celle que nous allons entreprendre. De ce nombre sont celles de pharynxæ et esto- mac (ventouse de Repiachoff) que je remplacerai par des noms sans portée, tels que ceux d’organe piriforme et sac interne, ou encore l'organe que Nitsche appelle ventouse, et que je dé- signerai désormais sous le nom de calotte, me ralliant ainsi au nom de Repiachoff (Kappe), En revanche, je maïntiens les noms de faces orale et aborale déjà employés dans mes travaux précédents et que je trouve préférables à ceux de ventrale et de dorsale, adoptés de pré- férence par Repiachoff : les larves de Bryozoaires sont con- struites suivant un type qui nécessite plutôt l'emploi des pre- miers mots, h. L'espèce sur laquelle ont porté mes observations se rapporte surtout au Lepralia unicornis, déjà rencontré par moi à Saint- Waast la Hougue en 4876. Sa larve porte, comme celle que J'ai décrite à cette époque, deux taches d’un rouge carmin situées à la partie postérieure de la calotte et appartenant au bord des 12 J. BARROIS. cellules de la couronne. Elles sont d’une couleur un peu plus orangée que celles obtenues à Saint-Waast la Hougue. Les jeunes loges primitives sont complètement lisses et semblables à celles figurées dans mon mémoire (pl. 8, fig. 37); elles possèdent quatre paires d’épines allongées, et de plus une courte et large épine impaire située en avant de la plaque operculaire. Le bour- seonnement est apical et ne produit d’abord qu’une seule loge (et non trois, comme je l'avais cru d’après des états mal déve- loppés), comme dans le bourgeonnement du Lepralia Palla- siana. Gette loge ne ressemble en rien à la primitive, mais est dépourvue d’épines et possède de grosses ponctuations irrégu- lières, absolument comme dans la forme n° 2 (sans épines et fortement ponctuée) du Lepralia spinifera de Busk. Moyen d'étude. — J'ai pu me procurer aisément des em- bryons de tous les stades, en faisant sauter avec la pointe d’une aiguille la paroi de l’ovicelle à différents états : on arrive sans peine, au bout de peu de temps, à acquérir une habileté suffi- samment grande dans cet exercice, auquel se prêtent très bien les gros ovicelles sessiles bien fixés sur la pierre qui porte les colonies du Lepralia unicornis. I est ainsi facile d'obtenir de nombreux œufs bien intacts, et c’est ce qui m’a permis d’étu- dier avec soin une embryogénie du type des Escharines, que je n'avais pu jusqu'ici tenter avec méthode. Je me suis surtout servi, dans cette étude, de la méthode de coloration à l'acide osmique et au carmin, suivie d’un traite- ment par l'essence de girofle pour obtenir la transparence. Les œufs recueillis au sortir de l’ovicelle étaient d'abord plongés dans un mélange à proportions égales d'acide acétique et azotique avec un peu de carmin : ce mélauge produit une trans- parence immédiate qui permet déjà une première étude ; mais cette transparence n’est que passagère. Au sortir du mélange, l'embryon est placé pendant quelques secondes dans le bichro- mate de potasse, auquel j’ajoutais un peu d’acide osmique, puis laissé dans le carmin pendant einq ou six minutes, puis placé dans l'alcool pendant quelques secondes, et enfin éclairei par l’essence de girofle. Les embryons traités par ce procédé ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 13 sont bons non seulement à étudier par transparence, mais peuvent parfaitement être coupés en fines tranches. Dans ces dernières, on voit les parties cellulaires formées par lexoderme colorées en rouge, et les parties formées par la masse endo- dermique colorées en noir brun par lacide osmique. Le même moyen m'a servi pour l'étude des larves et les méta- morphoses. J'ai aussi essayé divers autres réactifs : l’éosine, substituée à l'acide osmique et au carmin, peut également donner de bons résultats ; jai également obtenu des imprégnations au nitrate d'argent. Ges dernières réussissent très bien et presque à coup sûr pour certains éléments : par exemple les grandes cellules allongées de la couronne des larves libres de Ste) Elles éHoten au contraire pour d’autres éléments : il ne m’a, par exemple, que rarement été possible d’imprégner la couronne de la larve de Lepralia. 1 STADE : BLASTULA. — J’ai déjà, dans mes Recherches sur Pembryogénie des Bri "ozouires , donné la description des principaux phénomènes de la segmentation chez les Chilo- stomes : « Les deux premiers plans de segmentation sont des plans méridiens qui produisent un stade formé de quatre cellules égales (pl. 12, fig, 1), ce qui montre que les deux pôles primi- tifs de l’œuf répondent aux milieux des faces orale et aborale. » Ensuite apparaît un plan équatorial qui donne naissance à un stade 8 (pl. 12, fig. 2) formé de deux moitiés de 4 super- posées. » Dans chacune de ces moitiés de quatre cellules apparais- sent ensuite deux plans de segmentation parallèles au premier plan méridien ; c’est ce qui donne naissance au stade 16 (pl. 19, fig. 3). » Le stade 32 se produit à son tour par l'apparition de deux plans analogues parallèles au second plan méridien. » L’œuf se compose alors de deux moitiés superposées, formées chacune de seize cellules ayant à peu près toutes la forme quadrangulaire. Dans la partie aborale, il n’y à rien de 44 J. BARROIS. remarquable; dans la partie orale, on peut remarquer que les quatre cellules centrales sont plus grosses que celles du tour. » Depuis, Repiachoff a confirmé tous ces faits : la description qu'il retrace dans son travail sur le développement du Tendra zostericola est d'accord avec celle que j'en avais donnée ; mais il y ajoute une découverte importante. | D’après lui, les quatre grosses cellules du centre de la face orale s’enfoncent graduellement pour former l’endoderme, et sont recouvertes, comme dans l’épibolie, par le rapprochement des cellules environnantes : c’est un fait qui concorde avec mes nouvelles recherches et dont j'ai pu vérifier maintes fois l'exactitude sur l’espèce qui nous occupe. Mais il est un autre fait également important dans la struc- ture de ce stade et dont on ne trouve mention ni dans mon travail, ni dans celui de l’auteur russe : c’est une légère diffé- rence qui existe entre l’arrangement des cellules dans les deux hémisphères. Si nous nous représentons l'embryon constitué par huit rangées de quatre cellules disposées toutes les huit dans le sens du grand axe pp (fig. 1), nous remarquerons que dans l'hémisphère oral les quatre rangées aboutissent jusqu'aux pôles p,p, tandis qu’au contraire dans l’hémisphère aboral les deux inférieures seules se prolongent jusqu'aux pôles ; là elles se rejoignent, passant ainsi au-dessus de deux rangées centrales qu'elles séparent du pôle. On trouvera dans mes re- cherches de 1877, ainsi que dans le travail de Repiachoff, de bonnes figures de l'hémisphère oral. L’aboral n’a jamais été aussi exactement représenté ; c’est pourquoi j'en ai donné une représentation dans la figure 1 À : la figure 1 montre la dispo- sition de l’ensemble dans une vue de profil. | i Cette différence, en apparence de peu de valeur, à une grande importance dans la suite du développement. Le rejoi- gnement précoce des deux rangées inférieures de l'hémisphère aboral constitue le premier indice de formation de la couronne : dans le stade représenté dans la figure 1, on peut déjà regarder Ld ARTICLE N° à. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 45 la rangée de cellules e comme représentant la couronne ci- liaire; les huit cellules qui les surmontent représentent la face aborale ; les seize qui viennent au-dessous, l'hémisphère oral, dont les quatre grosses cellules du centre vont rentrer à l’inté- rieur pour former l’endoderme, tandis que le cercle des douze cellules périphériques va se segmenter pour former la face orale. Ainsi, dès le stade 32, 1l est déjà possible de dis- tinguer très nettement toutes les principales divisions de la larve. 2 STADE : GASTRULA. — Repiachoff a suivi d’une manière très détaillée l’enfoncement graduel des quatre cellules cen- trales pour constituer l’endoderme de l’embryon; mais il ne nous fournit que fort peu d'éléments en ce qui concerne la marche ultérieure de la segmentation ; il se borne à étudier sur des coupes optiques l'accroissement graduel de la portion de l’exoderme qui s’mcurve au-dessus des cellules centrales, et qu’il paraît attribuer à l’apparition d’une nouvelle cellule entre la centrale et la polaire et née probablement aux dépens de la polaire. J'avais cru aussi, lors de mes premières recherches, que la segmentation ne pouvait plus se suivre avec régularité au delà du stade 32; 1l n’est cependant pas autrement difficile de pro- longer les observations jusqu’au stade 60. On voit les cellules de la couronne éprouver une segmentation dans le sens rà- diaire, ce qui porte à seize le nombre de ses éléments; tandis qu’au contraire les huit cellules de la face aborale et les douze cellules de la face orale se segmentent toutes dans le sens tangentiel el concentriquement au centre de la face. Les figures 2, 2 À, 2 B, représentent le stade qui résulte de cette nouvelle segmentation. On remarquera que dans la face orale, les huit cellules polaires et latérales sont surtout celles qui ont contribué par leur allongement à produire le recouvrement des cellules endodermiques ; après la fermeture de l'ouverture d’invagination, elles constituent huit cellules très longues, qui viennent se rencontrer au centre de la face orale en formant une figure en croix caractéristique (fig. 2 et 2 A). Les cellules 46 J. BARROIS. intercalaires demeurent, comme précédemment, situées entre les bras de cette espèce de croix, mais se sont maintenant éle- vées au nombre de deux. La face aborale se montre constituée de deux rangées concentriques de huit cellules. ÿ J’ai pu suivre d’une manière excessivement graduelle tous les états de passage du stade 4 au stade 2. Je n’ai représenté ce dernier qu'à son terme, pour économiser le nombre de figures : à cet état, la fermeture du blastopore est complète; cependant le nombre des cellules endodermiques n’est encore que de quatre. Je dois déélarer n'avoir pu reconnaitre leur scission régulière en un nombre double, comme le représente Repiachoff. 3° STADE : FORME ARRONDIE (fig. 3 et 4). — La forme géné- rale de l’embryon est variable. Dans les premiers états qui suivent la gastrula, elle conserve dans les vues de profil un aspect plus ou moins régulièrement arrondi, mais fort allongé dans le sens de la largeur (fig. 4 À, 2 À et 2 B). La forme ovale produite par cet allongement n’est du reste pas spéciale au groupe des Escharines; elle existe aussi chez les Cyphonautes, les Gténostomes et les Cyclostomes. Les divers phénomènes de cette période ont surtout rapport à l’arrangement des feuillets, et sont par conséquent dela plus grande importance. Dans son travail déjà eité sur les premiers phénomènes de développement du Tendra zostericola, Repiachoff a donné sur les premiers phénomènes qui suivent la gastrula une des- cription très circonstanciée qui diffère beaucoup, en plu- sieurs points importants, des faits que j'ai constatés chez le Lepralia. On peut ramener à trois stades principaux les différents états distingués par l’auteur russe : Gastrula épibolique fermée. — On se rappelle que les quatre cellules endodermiques ont éprouvé, même avant d’être entiè- rement pénétrées à l’intérieur, une division régulière en huit cellules superposées. Ces dernières se | nm et fihiéeetit à l’époque de la fer- ARTICLE N° 7 MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 17 meture du blastopore, par circonserire une cavité digestive qui ne communique plus avec l'extérieur ; à cet état, les cel- lules des deux feuillets primitifs adhèrent les unes aux autres au milieu de la face orale par des extrémités amincies en forme de com. | Fausse archigastrula. — Get état, qui correspond suivant Repiachoff à mon stade à masse aborale et face évasée, dérive directement du stade précédent par une soudure plus intime des cellules vers le point où les deux feuillets primitifs adhèrent l’un à l’autre ; tous deux s’épaississent en ce point de passage, etil se reforme (vraisemblablement au même point où se trou- vait naguère l'ouverture primitive) une ouverture secondaire qui établit la communication de la cavité digestive avec l’exté rieur et donne naissance à un stade qui ne diffère en rien d’une archigastrula, sauf en ce quise rapporte au mode de for. mation. Archigastrula fermée. — Quoi qu'il en soit, la saillie de la face aborale ne possède 1c1 qu’une fable durée; elle s’efface en même temps que la bouche secondaire se rétrécit de nouveau pour se réduire à un canal étroit qui bientôt dis- parait ; l'embryon se trouve alors bientôt réduit à un sac uni- forme et contenant dans son intérieur une masse qui parait isolée de l’exoderme. Bien qu'il faille se garder d'ajouter trop d'importance à des divergences qui peut-être ne sont dues qu'à la différence de l'espèce observée, je n’en ai cependant pas moins cru indis- pensable de caractériser avec précision les points de dissidence entre les deux descriptions. Les lignes qui suivent montrent jusqu'à quel point le développement du Lepralia me parait différent de celui du Tendra; pour faciliter la comparaison, j'ai réduit les divers phénomènes à trois stades qu’on pourra comparer avec ceux du Tendra. Endoderme morulaire adhérent à l’exoderme. — Dans les stades qui, parmi mes nombreuses préparations, m'ont paru succéder au stade gastrula de la manière la plus générale et la plus régulière, les cellules endodermiques, au nombre de 18 J. BARROIS. neuf ou dix, formaient une masse en forme de pyramide dans laquelle on pouvait déjà distinguer une partie centrale end formée de trois ou quatre cellules et plus élevée, entourée à sa base par une partie périphérique représentée figure 3 par les lettres mes. À ce stade, cette masse de cellules endodermiques est encore adhérente à la face orale, où se voient toujours les cellules en croix qui indiquent le lieu de fermeture du blastopore. Endoderme et mésoderme libres et séparés. — Au stade sui- vant, toute trace d’adhérence ou de blastopore a disparu; la partie centrale end a augmenté en volume, et les parties latérales #es se sont séparées : elles figurent maintenant (voy, fig. 4 B) deux cordons cellulaires qui se rejoignent l’un l'autre du côté postérieur et entourent en partie la masse end; l’endoderme primitif s’est donc séparé en une parle centrale, lendoderme proprement dit, et en bandes péri- phériques qui figurent le mésoderme et qui sans aucun doute correspondent au Keimstreifen. Les figures 4-4 et 4B nous représentent ce stade très caractéristique et dont j'ai conservé plusieurs préparations. Endoderme et mésoderme réunis en une masse unique. — Ges bandes germinatives sont peu de temps visibles et n’existent que pendant le stade de la figure 4; peu après, à mesure que l’endoderme central augmente en volume, on ne Îes distingue que beaucoup plus difficilement, et bientôt il n’est plus possible d’en apercevoir que les deux extrémités antérieures (lig. 5A), qui semblent sortir de la masse endodermique et se rejoignent presque du côté antérieur, Je crois qu’elles s’éta- lent sur la masse endodermiqneet se soudent avec elle, comme le montrent du reste mes dessins des figures 5 et 5 À : l’aspect de la figure 5 À se présente souvent. Ainsi s'effectue une es- pèce de réumion des bandes germinatives avec la masse endo- dermique; bientôt les deux parties antérieures de ces bandes se soudent à leur tour (fig. 5 A) avec la masse centrale, et ainsi prend naissance une masse volumineuse libre dans la cavité générale de l'embryon, qu’elle remplit bientôt d’une manière ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES (DES BRYOZOAIRES. 19 complète (fig. 6), et qui représente, suivant moi, un vitel- lus nutritif issu de la fusion du mésoderme et de l’endo- derme. En effet, les cellules de cette masse vitelline de- viennent graduellement de moins en moins nettes; leurs limites disparaissent d’une manière complète, et la masse se résout en un amas de globules qui remplit, chez la larve, la cavité générale. 4° STADE : EMBRYON CYLINDRIQUE. — 1. Forme générale, — À l’époque du développement où nous voici arrivés, s’effec- tuerait, s’il faut en croire la description que J'ai donnée dans lembryogénie de l'Alcyonidium, un changement important dans la forme générale. L’embryon perdrait sa forme arron- die, séparée par la couronne en deux faces opposées, pour passer à un état plus où moins aplati, divisé par un sillon en deux parties distinctes : une face évasée qui comprend la face orale bordée par la couronne, et une face aborale fortement renflée et plus ou moins enfoncée en dedans de la première. Cet état, ainsi que je l’avais très bien expliqué dans mon pré- cédent mémoire, avant que Repiachoff en fit l’observation (1), ne représente pas un stade général s'étendant au groupe entier des Chilostomes, mais appartient en propre à la forme dérivée quicomprend l’Alcyonidium et le Gyphonantes. Les larves d'Es- charines, que j'ai considérées comme constituant une forme ancestrale, ne présentent pas cette forme aplatie; leur caractère spécial étant tout au contraire de conserver sans altération la division primitive. Le stade que je désigne sous le nom de cylindrique est ce qui se produit dans ce dernier cas, c’est-à-dire lorsque aucun phé- (1) Repiachoff a cherché quel stade du développement pouvait bien cotres< pondre chez le Tendrd au stade aplati de l'Alcyonidium il désigné comme repré: sentant ce stade son état de pseudo-archigastrula ; mais lés traces plus ou moins distinctés de sillon qu’on rencontré à la base de la fice ahoralé ne sont pas suffisantes, si je comprends bien cet auteur, pour faire de la chose un carac- tère général. Ces idées s’accordent très bien avec les faits publiés un peu aupa- ravant dans mon mémoire complet. Repiachoff a été trompé sur ma manière de voir par l’extrême concision imposée par les Comptes rendus dans la publication de ma note préliminaire, 20 __ 3. RARROIS. nomène nouveau bien essentiel ne modifie la marche de l’em- bryogénie. | Nous avons vu plus haut que dès la blastula, 1l était aisé de reconnaitre la couronne; mais cela ne peut encore se faire pendant cette époque qu’à l’aide d’une analyse détaillée de la disposition de l’ensemble des cellules. Dans le stade gastrula, la chose devient plus visible à cause de la disposition radiaire qui commence déjà à se manifester; néanmoins ses cellules ne différent pas encore sensiblement de celles qui constituent les deux faces de l'embryon. Ce n’est guère qu’à partir du stade (fig. 3) quelles commencent à montrer des caractères plus tranchés ; mais alors elles le font d’une manière rapide, qui ne tarde pas à changer du tout au tout laspect et la structure de l'embryon tout entier. Tandis que la multiplication des cellules des deux faces commence à s'établir d’une manière rapide (fig. 3 et 4), qui ne tarde pas à donner à ces faces les véritables caractères d’un épithélum, celle de la couronne s’arrête tout à coup, où du moins se ralentit d’une manière très frappante ; en même temps ses cellules commencent à s’accroitre et se changent rapidement (fig. 3, 4,5) en de longues côtes qui occupent presque toute la surface de l’embryon (fig. 6). Ce dernier a alors perdu la forme plus ou moins arrondie qu'il possédait d'abord, pour en prendre une presque exactement cylindrique, dans laquelle la couronne constitue une espèce de manchon bouché de chaque côté par les lames épithé- liales légèrement convexes qui forment les deux faces orale et aborale (1). Ce grand accroissement des cellules de la couronne ne se fait pas partout d’une manière uniforme, mais a lieu prinei- palement dans la partie inférieure, orale, de ces cellules; aussi (4) Par suite de la largeur plus grande de l’embryon par devant et par derrière que sur les faces latérales, les vues de profil que je donne dans mes figures 3, 4, 5 pourront paraître d’une hauteur un peu trop grande, surtout si on les compare aux dessins de Repiachoff. Il n’en sera plus de même si l’on examine une vue de côté, comme la figure 6 A : la largeur de l’embryon étant plus grande de ce côté, sa forme tout entière paraît plus aplatie. ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 91 le renflement de leur partie médiane, de même que le noyau qui accompagne ce renflement, ne tarde-t-1l pas à être refoulé vers le haut, près de l'extrémité aborale des cellules (fig. 3). À peine le noyau a-t-il atteint cette place qu’on le voit éprou- ver une division transverse; cette division donne bientôt nais- sance à une petite cellule qui vient couronner chacune des longues côtes qui constituent la couronne. Telle est l’origine du cercle de cellules visible surtout chez les Cellularines, et qui termine vers le haut les cellules de la couronne. Ces cellules, omises à dessein sur mes figures pour ne pas obscurcir les phénomènes de la fixation, s'appliquent directement contre le bord de la calotte et bordent l’entrée de la cavité palléale. Cetaccroissement des cellules de la couronne, qui détermine le changement de forme de l'embryon et le fait passer de l'aspect arrondi des figures 3, 4 à l’aspect cylindrique des figures 5, 6, est accompagné d’un changement correspondant dans sa forme examinée dans les vues de face. Cette dernière, allongée dans le sens transversal (fig. 2 B), comme cela existe aussi chez les Cyphonautes, l’Alcyonidium, les Cténostomes et même les Cyclostomes, passe graduellement à la forme arrondie (fig. 4 B, 5 À, 6 B), qu'elle possède tout à fait à l’époque où l’aspect cylindrique de lembryon se trouve arrivé à sa plus haute expression. 2. Changement des faces. — Pendant que s'effectue ce pas- sage important de la forme arrondie à la forme cylindrique, les deux faces de l’embryon éprouvent, outre la multiplication cellulaire, des changements notables et d’une grande impor- tance. À. Face aborale. — Les changements qui se produisent sur la face aborale sont intimement liés à l’apparition de l’organe signalé d’abord par Nitsche sous le nom de ventouse, et que Repiachoff a désigné depuis par un terme plus vague (Kappe), que je traduis ici sous le nom de calotte. Aucun observateur n’a fourni de données sur la formation de cet organe important. Repiachoff signale bien dans son ANN. SC. NAT:, ZOOL., AVRIL 1879-80. IX. 15. — ART. N° 7. 2a J. BAREŒOIS. stade de pseudo-archigastrula fermée un aplatissement de la face aborale, mais ce fait, qu’il paraît ne citer qu'avec réserve, ne peut pour le moment servir d'indication. | Les premières notions qu’on possède sur ce sujet remontent à mon travail de 1877. À cette époque, j'ai décrit l’ensemble des phénomènes comme dépendant de la production d’un mince sillon (si, fig. 6) bien distinct de celui de lAlcyoni- dium, et qui produit une division de la face aborale en deux parties distinctes : l’une, centrale, qui n’est autre que la ven- touse; l’autre, périphérique, qui se rétracte pour tapisser en dedans la cavité palléale. Aujourd'hui Je considère cette division en deux parties comme liée à un autre phénomène plus important. Au nombre des traits de structure les plus énigmatiques que nous présentent les larves, se trouvent certainement les longues cellules radiaires qui entourent la cavité en fer à che- val, au centre de la calotte, et que J'ai si souvent décrites et figurées chez divers types du groupe des Chilostomes. Repia- choff est le seul qui ait jamais tenté de donner une explication de ces singuliers éléments. Il admét que chacun d’eux se trouve formé par un rang de cellules épithéliales disposées en ligne, mais je n’ai jamais pu, pour ma part, découvrir d'imdice d’une semblable structure composée, et je persiste à croire comme en 4877 que chacune de ces cellules représente un élément unique. D'après les nouvelles recherches que j'ai faites sur ce sujet, le cerele complet des cellules radiaires n’est point situé à la surface de l'embryon, mais se trouve recouvert par lépithélium de la face aborale. On réussit très bien par le nitrate d'argent à faire apparaître chez différentes larves, tan- tôt le cercle des cellules radiaires, tantôt l’épiderme qui les recouvre en dessus, D'ailleurs chez les larves de Cellularines traitées à l'acide osmique et au picrocarminate, on voit dis- tinctement les cellules radiaires recouvertes par la peau de la face aborale. Le cercle complet des cellules radiaires ne représente donc pas une simple disposition des cellules de la peau de la face ARTICLE N° 7 MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. bo 3 aborale, mais est au contraire un apparail interne qui con- stitue pour moi la partie essentielle de l'organe désigné sous le nom de calotte. Yu dé Le point capital du développement en ce qui concerne la face aborale consiste dans la formation de eet appareil à cel- lules radiaires. Je n’ai malheureusement que de faibles don- nées sur ce point important de l’embryogénie; peut-être y a-t-il à une invagination? Dans tous les cas, notons que c’est au stade figure 5, avant la formation du mince sillon si, que l'on voit apparaitre pour la première fois les cellules radiaires au centre de la face; c’est done de ce stade que date, d’après moi, l'existence réelle de la calotte et qu’on peut distinguer dans la face aborale une portion centrale indiquée par la rosette v, et une périphérique: la première munie des cellules radiaires et qui mérite déjà le nom de calotte; la seconde formée par Pépithélium et qui sera le revêtement de:la cavité palléale. Le reste du développement se trouve lumité à l’invagmation de cette portion périphérique pour constituer la cavité palléale. Cette invagination commence sur le pourtour des cellules radiaires qui forment la calotie, et s'étend ensuite dans le sens centrifuge jusqu'au bord supérieur des cellules de la couronne (fig. 5-8). Cest à la première apparition decet affaissement de la portion périphérique sur tout le pourtour des cellules ra- diaires qu'est due la formation du sillon si; en réalité, on voit que cesillon n’est lui-même que la suite d’un processus plus im- portant : celui de la formation del’appareilà cellules radiaires, qui seul constitue la véritable-origine de la division de la face aborale en calotte et en revêtement de la cavité palléale. B. Face orale. — Tandis que s'effectue sur la face aborale cette division en deux parties distinctes, on voit apparaître sur la face orale deux organes qui préludent à une division du même genve, mais qui se manifeste seulement dans la suite. 4° Du sac. — Malgré les changements qui viennent d’être décrits, la face aborale conserve une épaisseur à peu près uui- forme sur toute son étendue, et qui, bien que plus faible que dans les premiers stades, ne ciminue jamais d’une manière 94 $. BARROIS. trop sensible; chez la larve libre, elle est encore formée de longues cellules cylindriques étroitement pressées. Tout au contraire on voit, à partir des stades 5, 6, la face orale éprouver dans toute son étendue des changements d'épaisseur; elle s’amimeit en avant et en arrière, surtout en avant, tandis qu'il se forme un peu derrière son milieu un point d'épaisseur maximum; bientôt ce point plus épais prend la forme d’une dépression qui s’accentue à mesure que ses cellules deviennent plus hautes, Cette dépression se change en une poche en forme de cuvette comme dans la figure 6; c’est le premier indice de l’organe que j'avais désigné sous le nom d'estomac, et que j'appelle ici simplement le sac. Le fait de la naissance du sac aux dépens de l’exoderme a été annoncé pour la première fois dans la communication préli- minaire qui a précédé ce travail; depuis, Repiachoff a reconnu le même fait dans le développement du Tendra zostericola : c'est donc là un point solidement établi. 2° De l'organe glandulaire. — Tandis que la peau se renfle vers la partie postérieure, on voit apparaître dans la portion antérieure au-dessous de la peau amincie de l’exoderme un organe solide, de forme arrondie, qui tranche par sa couleur plus pâle sur le fond obscur de la masse vitelline. Get organe, qu'on retrouve chez la larve libre sous forme d’une masse à longues cellules radiaires qui débouche au milieu de la fente ciliée, est destiné plus tard à faire partie de l’organe que j'ai désigné sous le nom de pharynx. Je n’ai pu malheureusement en suivre la naissance; mais 1l ne se forme pas, d’après mot, de l’exoderme; on le voit apparaître à l'intérieur de lembryon, entre les deux stades figures 5 et 6, et il ne vient qu’ensuite se souder avec la peau. Ces idées sont d'accord avec celles de Repiachoff, d’après lequel cette masse qu'il tente de rap- procher du bourgeon endodermique du Pedicellina (Hatscheck) dériverait de la masse vitelline (1). (1) Malgré les nombreuses différences qui existent dans les trois premiers stades de nos deux descriptions, toutes deux s'accordent à reconnaître que l'embryon se réduit après les premiers phénomènes à un sac de structure assez ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 95 5° EMBRYON oBLiQuE. — 1. Forme générale. — Le caractère essentiel de la forme cylindrique est la conservation des rap- ports anciens; il y a dans l'aspect un changement important, mais ce changement n’est que la suite naturelle, que le déve- loppement normal et régulier des processus déjà en œuvre dans les différents stades qui ont précédé. Pour produire le stade oblique, on voit intervenir un pro- cessus nouveau d’une importance capitale et qui amène bien- tôt un changement important dans la symétrie radiaire de l'embryon tout entier; c’est le déplacement du pôle oral dû à un mouvement apparent de translation de la face tout entière en avant et vers le haut. Dans ce mouvement, une partie abandonne la position hori- zontale, c’est-à-dire parallèle à la face aborale qu’elle possé- dait jusqu'alors pour prendre une position tout à fait verticale (Sérialaire, Bugula), où tout au moins oblique (Lepralia, fig. 7 et 8). Cette portion coïncide avec celle au niveau de laquelle uniforme, contenant dans son intérieur une masse unique : ma masse vitelline ; mais à partir de cet état recommence le désaccord. Tandis que je regarde la masse vitelline comme se résolvant en une masse de globules qui remplit chez la larve la cavité générale, Repiachoff laconsidère dans l’embryogénie du Tendra comme devant former le tube digestif: d'après lui, elle commence, à mesure que le sac se forme par une invagination de l’exoderme, à s’infléchir peu à peu autour de cet organe jusqu’à ce qu’elle ait pris la forme d’un fer à cheval; les deux extrémités de ce fer à cheval contractent ensuite soudure avec la peau de l’endoderme pour donner naissance à la bouche et à l’anus. Quant à la partie que j'appelle organe glandulaire, et qui, d’après Repiachoff, serait peut-être homologue du bourgeon endodermique du Pedicellina (Hatscheck), il provient simplement de la portion prébuccale de la même masse qui se détache, tandis que la portion postérieure se façonne pour former le tube digestif. Je n’ai rien à dire contre cette description, sinon que j'hésite fort à admettre la présence d’un tube digestif chez la larve de Tendra. Ge fait se trouverait en désaccord complet avec mes conclusions basées sur l’étude de plus de quarante types larvaires de tous les groupes, et qui m’ont amené à conclure à l'absence de tube digestif chez toutes les larves d’Ectoproctes. Il est certes difficile d'admettre que le Tendra fasse ainsi exception à la règle générale; tout au moins faudrait-il de nouvelles observations plus com- plètes que celles fournies jusqu’à ce jour : les figures publiées jusqu'ici par Repiachoff sont certainement loin d’être suflisantes pour décider d'un fait d’une aussi grande portée et en contradiction avec le reste du groupe. 96 F. BARROIS. nous avons vu apparaître lPorgane glandulaire; elle modifie sa structure, se déprime et se rétrécit à mesure qu'elle se porte en avant et vers le haut. En même temps les cellules de la couronne ciliaire, auxquelles en réalité est dû ce mouvement, subissent, sans changer leur direction primitive, un allongement qui, à partir du point g», où commence à cesser la position horizontale, décroit régulièrement d’arrière en avant, causant ainsi dans les côtes antérieures de la couronne une inégalité de longueur exprimée par les figures (fig. 6, 7, 8). Les fig. 6, 7,8 —6B,7 À,8 À, montrent en même temps les changements qui s'effectuent sur cette portion de la face orale et sur la dis- position de la couronne ciliane. À la fin, la première, aplatie (lg. 8), rétrécie (fig. 8 À), et placée obliquement par rapportaux côtes de la couronne (fig.8), paraît comme enclavée à intérieur de cette dernière, qui fait en un point (gi) un léger coude qu’on peut considérer comme servant de limite entre la portion oblique (enclavée) et la portion postérieure (horizontale). La portion de face orale restée horizontale et qui porte l’or- gane que j'appelle le sac, continue ñelle seule à servir de centre à toutes les cellules de la couronne ciliaire, et mérite pour cette raison d’être appelée centrale, tandis que la portion oblique, enclavée pour ainsi dire en dedans de la couronne, serait justement nommée portion périphérique. La portion centrale de la face orale joue le rôle d’antagoniste de la face aborale; son milieu répond au nouveau pôle oral; elle continue à faire une épaisse saillie en dessous du bord inférieur de la couronne. Quant à sa structure, elle s’est aussi modifiée , mais dans un sens tout autre de ce qui s’est Prod pour la portion périphérique. À mesure que la portion périphérique se porte de plus en plus en avant et vers le haut, on voit la forme arrondie que possédait l'embryon (fig. 6 B) passer graduellement à la forme allongée (fig. 7 À et 8 A): L’embryon passe donc successivement par jé formes élargie (fig. 4 À), arrondie (6 B) et allongée (fig.8 A), qui correspondent aux formes désignées dans les vues de profil par les noms d’arrondie, eylindrique et oblique. ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES PBRYOZOAIRES. 97 2, Changements des faces. — À. Face aborale. — La face aborale ne présente d'autre Changement que celui de l’invagi- nation de la cavité palléale, qui, apparue d’abord, comme nous l'avons vu, sous forme d’un mince sillon (sé, fig. 6), au bord de la calotte, s'étend graduellement (fig. 7, 8) jusqu’au bord de la couronne, Chez la larve libre représentée figure 8, toute la portion périphérique de la face aborale se trouve ainsi inva- ginée à l'intérieur, concourant de la sorte pour une certaine part à l’aplatissement général de lembryon (1), tandis que Les cellules du bord de la couronne viennent se juxtaposer au bord de la calotte. B. Face orale. — Reprenons maintenant les modifications qui sopérent dans chacune des deux divisions, centrale et périphérique, de la face orale, tandis que s’effectue le passage si complexe de la forme cylindrique à la forme oblique. Dans la partie centrale, il y a peu dé changements : le sac s’approfondit, Ses parois s’épaississent; enfin on constate dans les vues de face que sa cavité devient triangulaire (fig. 7 À et 8 A), d’arrondie qu’elle était dans le commencement (6 B). Ce changement est dù à la formation de chaque côté de la ligne médiane d’un repli rs qui comble en partie la cavité du sac. Quant à l'ouverture d’invagination, elle ne se ferme pas d’une manière complète et ne fait que subir un rétréeissement ; on la retrouve encore chez la larve libre un peu en avant du centre de cette portion de la face orale. Ainsi la cavité intérieure du sac ne cesse jamais de communiquer avec l'extérieur, Quant aux cellules qui forment le revêtement externe de la portion centrale de la face orale, on les voit s’étaler de manière à former des cellules de grande taille très larges et aplaties; ces cellules, qui s’imprègnent très bien chez la larve par le nitrate d'argent, adoptent Souvent, au pourtour de l'ouverture du sac à l’extérieur, une disposition radiaire régulière, ainsi (1) Notons que le passage à la forme oblique concourt également à cet apla- tissement, de sorte que la forme discoïde de la larve est en somme un produit de ces deux facteurs. 98 JF. BARROIS. qu’on le voit dans la figure 8 A. J'avais déjà signalé dans mon premier mémoire (1) cette apparence radiaire sur la face orale, mais sans pouvoir me rendre comple de sa nature; aujour- d’hui je peux dire d’une manière positive qu’elle est due aux cellules qui recouvrent cette portion. Tout au contraire de ce qui se passe pour la région centrale, les cellules de la région périphérique ne cessent, à partir du stade figure 5, de se multiplier d’une manière rapide; à la fin, elles forment un épithélium à petits éléments pressés et cylin- driques, qui, tout à l'opposé des grandes cellules plates de la partie centrale, ne s’imprègnent jamais par le nitrate d'argent : c’est cette différence dans la structure intime qui seule rend apparente dans les vues de face (fig. 8 À) la distinction tran- chée des deux divisions centrale et périphérique de la face orale. | En même temps qu’on voit la région périphérique éprouver tout l’ensemble des modifications longuement énumérées plus haut, on voit la masse arrondie que j'ai désignée précédem- ment sous le nom d’organe glandulaire prendre une forme concave dans sa partie inférieure et se rapprocher de plus en plus de l’exoderme. Ce dernier se déprime sur la ligne mé- diane et se porte à la rencontre de l’organe glandulaire, consti- tuant ainsi un sillon allongé connu sous le nom de fente ciliée (Mundyürche des Allemands), et au fond de laquelle vient bientôt s'ouvrir l'organe glandulaire qui s’est porté à sa ren- contre. Cette fente ciliée, qui occupe le milieu de toute la région périphérique de la face orale, se trouve constituée comme le reste de la face par un épithélium à cellules cylindriques; mais les cellules qui la composent sont ici plus élevées et vont en décroissant régulièrement jusqu'aux bords. En même temps que se [orme cette fente ciliée, on voit l’exoderme de la région périphérique s’épaissir dans la portion tout à fait antérieure; cet épaississement se creuse d’une ca- vité en forme de fer à cheval, renflée aux deux bouts, comme 1) Voyez mes Recherches sur l'embryologie des Bryozoaires (pl. 8, fig. 33). ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 29 je l’ai figuré dans la figure 8 À,r, et autour de laquelle on voit apparaître une rangée de longues cellules radiaires qui vien- nent toutes converger en un point unique pl, qui est le point d'attache du plumet vibratile. Cet épaississement à cellules radiaires vient remplir le vide compris en avant entre l'organe glandulaire et la fente ciliée (fig. 7, 8), et il se forme ainsi par la réunion de ces trois parties une masse allongée de nature énigmatique et que je désigne sous le nom d’organe piriforme. Ce n’est autre chose que le pharynx de mon premier mé- moire; mais 1l ne présente, ainsi que Salensky l’a le premier reconnu chez le Bugula, aucune trace de communication avec le sac s. | Enfin, 1l me reste, pour terminer cette étude, à faire men- tion d’un petit organe pair qui termine en dessous la région périphérique et qui a échappé jusqu'ici à l'attention. La fente cillée ne se prolonge pas, comme on pourrait le croire, jusqu’à l'extrémité inférieure de cette région; mais, très peu avant d’y parvenir, on la voit s’étaler et se perdre sur le pourtour de la portion centrale qu’elle parait embrasser. La figure 8 À donnera une idée de ce mode de terminaison de la fente ciliée. En s’étalant ainsi, la fente ciliée isole du reste de la région périphérique deux petits lobes pm, qui, sont aussi formés d’une rangée de longues cellules cylindriques. Ces deux lobes, qui peuvent être considérés comme les extrémités de la région périphérique légèrement épaissies, représentent en réalité deux organes importants qui jouent un grand rôle dans la suite du développement, etsont destinés à fournir le feuillet externe, musculaire, du futur polypide. IX. Métamorphose. Nous arrivons maintenant à la partie essentielle de notre travail, qui est l’étude des phénomènes de la métamorphose. Moyen d'obtenir les stades. — La grande difficulté consiste essentiellement à obtenir les stades qui suivent la fixation. Les changements éprouvés par la larve à cette époque sont telle- 30 F. BARROIS. ment rapides, qu'on n'arrive le plus souvent à recueillir l’em- bryon qu’à l’époque où tous les stades intéressants sont déjà passés d’une manière complète, C’est ce qui était toujours arrivé jusqu’à ce jour, et c’est ce qui explique l’insuccès des auteurs à trouver un mode de passage graduel. J'ai d’abord employé dans mes observations les moyens le plus généralement en usage : j'ai essayé, soit d’isolèr des em- bryons dans des verres de montre, soit de placer dans des vases pleins d’embryons des lamelles de verre, des plaques de mica, ou de minces paillettes de mica en poudre; aucun de ces moyens ne m'a donné de résultats. Jai dù reconnaitre, après de nombreux essais, que la présence de corps étrangers pour permettre la fixation était inutile et même nuisible. Les larves qui se fixent à la surface du liquide sans point d'appui, ou sur le premier grain de poussière venu, se développeñt en général d’une manière très normale, et l’on ne peut mieux faire que de recourir à elles; il est du reste presque toujours possible de détacher sans trop de dégâts avec une fine pipette les larves qui se ixent aux parois du vase. Il importe d’ailleurs, pour létude de ces stades, de pouvoir retourner l'embryon en tous sens où de le préparer afin de faire des coupes; ée qui ne peut se faire, s’il adhère à un objet. | Laissant done de côté cette difficulté purement imaginaire de se mettre en quête d’un point de fixation, nous nous préoc- cuperons d’une difficulté bien autrement sérieuse, c’est celle qu'on éprouve à recueillir les larves presque immédiatement après la fixation. Voici quelle était ma façon de procéder : La première chose à faire est de S’occuper d'obtenir une production régulière de larves en grande quantité. Souvent, lorsqu'on place au milieu d’un liquide des colonies qui vien- nent d’être pèchées, on obtient tout d’abord une grande pro- duction dé larves; mais cette production se ralentit aussitôt, et dès le lendemain les larves deviennent rares. On obtient un résultat beaucoup plus satisfaisant en triant avec soin les colonies les plus saines, les mieux pourvues d’ovicelles à matu- rité, et en les plaçant en quantité convenable dans un volume ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 31 approprié d’eau de mer : il s'écoule alors assez souvent quel- ques jours pendant lesquels on n'obtient pas ou peu de larves; mais à la suite de ce temps d’acclimatation, leur éclosion com- mence d’une manière régulière, et continue sans interruption pendant plusieurs semaines. Ce n’est que lorsqu'on est arrivé à obtenir la production régulière d’un nombreux essaim de larves se rassemblant chaque matin à la surface de l’eau, que peuvent commencer les observations. La cuvette transparente, à parois bien nettes, soi- gneusement débarrassées, ainsi qué la surface du liquide, de toute poussière ou de tout corpuscule étranger, est placée dans un endroit bien éclairé et sur un fond approprié à la couleur des larves; puis examinée à intervalles inégaux. Souvent, dans les cas mêmes les plus favorables, on doit attendre une partie de la journée avant d'assister à une seule fixation; mais dès que la première s’est effectuée, il importe de redoubler d’atten- tion et ne plus quitter la cuvette des yeux. Presque toujours, en effet, la première fixation indique le moment où toutes les larves vont se fixer en masse; aussi suffit-1l d'observer à ce mo- ment le bocal toutes les cinq minutes, pour remarquer chaque fois quelques points immobiles qu’on recueille avée soin. Il arrive presque toujours que lé moment de la fixation se reproduise à la même heure plusieurs jours de suite; aussi ne doit-on jamais manquer, une fois cette heure déterminée par une première observation, de revenir à la même heure le lende- main et les jours qui suivent, Il importe avant tout, si l’on veut réussir, d'entretenir les bords dans une exacte propreté, de façon à permettre d’apercevoir tout de suite les nouvelles larves fixées qui viennent s'y déposer. Il faut chaque soir énlever avec soin les jeunes loges trop âgées qui se seraient formées, Moyen d’'étude.— Avant mème d'étudier les nouveaux stades obtenus, 1l est nécessaire, dans une période dont les change- ments sont si rapides, d’entraver immédiatement le développe- ment. [l faut fixer aussitôt embryon à l’état où 1l est au mo- ment précis où l’on vient de le recueillir ; le mélange d’acides 32 J. BARROIS. acétique et azotique en proportions égales remplit très bien ce but, et tue les embryons instantanément sans les déformer et sans altérer en rien la structure de leurs éléments histologiques. On obtient ainsi des embryons très aptes à être traités par les réactifs et à être coupés en tranches fines, excellents en un mot pour les études ultérieures; et il est facile, avant d’en faire l'étude, d'en obtenir une série à tous les stades successifs : ils se conservent très bien dans le mélange acide. Mon principal moyen d'observation a été, comme pour les stades antérieurs, la coloration à l’acide osmique et au carmin, suivie d’un trai- tement par l’alcool et par l'essence de girofle. Conditions de la fixation. — Je n’ai pas fixé mon attention d’une manière spéciale sur l’étude des conditions de la fixa- tion; néanmoins, comme les observations même les plus frag- mentaires peuvent à un moment donné être mises à profit, Je donnerai ici, malgré leur état incomplet, les Al remar- ques que j'ai pu Pit sur ce sujet. Les larves libres nagent, comme on sait, le plus générale- ment à la surface de l’eau et du côté de la lumière, néanmoins la chose est loin d’être absolue; les larves demeurent aussi souvent au fond du vase, où elles nagent séparément sur toute l'étendue, ou se groupent en essaims du côté opposé à la lumière. Ces essaims de larves peuvent du reste plusieurs fois par Jour changer de place et se transporter de la surface au fond, ou du côté de la lumière au côté opposé. L’irrégularité ordinaire de l'éclairage rend d’ailleurs assez difficile l’inter- prétation de ces faits. J’aitrouvé, en ce quiconcerne lemode de fixation, un manque de régularité tout aussi évident. Ces larves peuvent se fixer à la surface ou au fond, en avant et du côté de la lumière, tout aussi bien que du côté opposé et même sur les faces latérales du vase. Quelquefois la fixation a lieu d’une manière dissé- minée, c'est-à-dire qu’elle paraît se faire indifféremment sur toute l’étendue du vase; d’autres fois les larves se fixent en masse sur certains points. La même espèce peut à différentes époques présenter les variations les plus diverses, mais différents ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 33 bocaux préparés en même temps et placés dans les mêmes con- ditions présentent, autant que me le rappellent mes souvenirs, des phénomènes identiques. Le fait le plus étrange que l’on ait à enregistrer consiste dans Pimpossibilité quelquefois absolue, et qui peut se pro- longer pendant plusieurs semaines, d'obtenir dans certains types une seule fixation, alors même que l'espèce est en pleine reproduction, que les larves abondent et que les conditions sont aussi favorables que possible en apparence; tandis qu’au contraire, dans d’autres circonstances qui ne paraissent pas différentes des premières, on obtient des fixations en grande quantité. On rencontre des exemples de cet étrange phéno- mène chez toutes les espèces: mais il n’en est point où 1l se présente d’une manière plus frappante que chez la Pédicelline. La larve, dont la fixation était restée inconnue, et que personne n'avait Jusqu'ici pu observer, se fixe cependant parfois avec la plus grande abondance, comme j'ai pu l’observer cette année même, en septembre. Les Cyphonautes peuvent aussi être cités comme constituant un exemple du même fait. J'ai gardé à Roscoff pendant plusieurs semaines, un bocal de Flustrella hspida dontles larves, bien qu’abondantes, n’ontjamais réussi à se fixer une seule fois; d’autre part Allmann, étudiant le Cyphonautes compressus, a rencontré le même fait d’une ma- nière si frappante, qu’il en est arrivé à émettre des doutes sur le fait, pourtant bien établi, de lanature attribuée à ces larves remarquables. Cette incapacité des larves à se fixer peut rester persistante, ou cesser plus où moins vite : peut-être les changements dans l’état de l’atmosphère influent-ils directement sur ce phéno- mène; mais je ne possède pas d'observations bien précises qui puissent porter la lumière dans cesujet délicat. Un autre fait également intéressant à mentionner consiste dans la constance de l'heure à laquelle les larves se fixent. Cette heure m’a paru indépendante de la situation que le vase qui renferme les embryons occupe dans l'appartement : elle est très variable et peut se présenter la nuit comme le jour; 34 _ d. BARROIS. mais elle se maintient en général constante pendant une durée de temps plus ou moins longue. fci encore on peut noter lin- fluence des conditions extérieures sur ce phénomène ; car deux bocaux préparés en même temps présentent la fixation à la mème heure. | xé Quant aux variations qu'éprouve cette heure, on les observe souvent et sans grande difficulté, mais mes études ne sont mal- heureusement pas suffisantes pour dire si elles paraissent coincider quelquefois avec un changement quelconque dans l'atmosphère. Une fois, néanmoins, j'ai tenté une expérience dans le but de m'assurer si un abaissement dans la tempéra- ture n'aurait pas pour résultat de retarder la fixation. Cette expérience fut faite avec M. Pouchet au laboratoire de Gon- carneau et par une température extérieure élevée. Une cuvette pleine d’embryons de Sérialaires, qui: se fixaient invariable= ment pendant la nuit depuis plusieurs jours, fut placée un soir dans la glace et maintenue toute la nuit à une tempéra- ture voisine de zéro. Malgré cela, la fixation se fit comme d'habitude; le résultat fut donc entièrement négatif. Difficultés du sujet. — Deux points principaux devront sur- tout nous occuper dans l'étude que nous allons faire ci-des- sous du passage des organes de la larve aux différents organes de la forme adulte. Le premier qui d’abord attire toute lattention consiste à supprimer toute espèce de lacune entre la larve libre et Pétat de cystide si souvent décrit; il s’agit de relier ces deux formes l’une à l’autre par une série d'états jusqu'ici inconnus. Gelte première parlie, bien que la plus décisive, ne présente pas néanmoins les plus grandes difficultés. il est un second point qui attire moins l'attention, mais dont la solution exige cependant bien plus de temps et de peines : il s’agit de franchir, sans perdre de vue les organes de la larve, le stade difficile de la dégénérescence, celui pendant lequel la structure se réduit, d’après les dernières études sur ce sujet, à un sac rempli par une masse de globules. Bien que je n’aie pas encore résolu cette question pour tous les cas dont ARTICLE N° 1. MÉTAMORPHOSES DES RRYOZOAIRES. 99 J'ai entrepris l'étude, j’ai cependant poussé mes observations assez loin pour lever tous les doutes sur la persistance des organes larvaires à travers ce stade de dégénérescence. Le stade théorique composé d’un simple sac contenant dans son intérieur une masse de globules est une simple fiction; il n'existe nulle part. Toujours 1l est possible d’y retrouver les principaux organes de lorganisme larvaire; le tout est de savoir les retrouver au milieu de la masse de globules opaques qui les cache quelquefois d’une manière complète. Pour la commodité de la description, nous diviserons ce qui va suivre en trois parties : la première a rapport aux transfor- mations de la larve, la seconde à la période de dégénérescence, la troisième aux changements qu'éprouve la jeune loge. 4 PÉRIODE. — 1% STADE : LARVE LIBRE, — À l’époque du développement où nous voici arrivés, l’ancienne division du corps de l'embryon vient de disparaitre pour faire place à une nouvelle qui caractérise l’état de larve libre. À ces trois parties : 4° couronne, ?: face orale, 3° face aborale, se sont substituées : 4° une zone moyenne formée par la couronne, plus la partie périphérique de la face orale; 2° la partie centrale de la face orale qui remplace maintenant la face orale entière; 3° la face aborale, chez laquelle les anciennes relations n’ont pas été changées. | Ïl me reste à résumer, avant d'aller plus loin, les caractères histologiques de ce stade important. Toute la face aborale, aussi bien la partie qui revêt la calotte que celle qui tapisse la cavité palléale, est formée d’un épithé- lium à longues cellules radiaires étroitement pressées, d’une grande épaisseur et qui peuvent présenter deux ou trois noyaux superposés. Sous les cellules qui revêtent la partie centrale se trouvent les grandes cellules radiaires de la calotte. Les cel- lules de la couronne, dont on retrouve toujours le noyau rejeté vers la partie supérieure, ont éprouvé pendant la durée du dé- veloppement un certain nombre de différenciations histolo- giques qu’il est bon de signaler. Chez la larve, elles se com- posent d’une mineezone périphérique anhiste qui sert d'attache 36 J. BARROIS. aux cils, et d’une zone interne beaucoup plus épaisse, dans la- quelle le protoplasme se trouve divisé en nombreux petits éléments cylindriques en forme de bâtonnets disposés lés uns à côté des autres. C’est la réunion et la fusion de ces petits éléments les uns avec les autres qui donne naissance aux glo- bules de dégénérescence qui rempliront plus tard la cavité de la jeune loge. La par tie périphérique de la face orale possède une struc- ture qui se rapproche un peu de celle de la face aborale : elle se compose de même de petites cellules cylindriques étroite- ment serrées; mais ces cellules sont beaucoup moins hautes et ne contiennent jamais qu'une seule rangée de noyaux; elles vont en décroissant vers la périphérie et augmentent en hauteur à mesure qu’on s'approche de la fente cihiée dont elles forment la paroi. Les deux organes internes qui correspondent à cette partie, c’est-à-dire l'organe glandulaire et les cellules radiaires, se montrent composés de longues cellules rayon- nantes qui ne m'ont présenté comme caractère particulier que de se colorer moins fortement au carmin que les cellules environnantes. Le petit organe pair placé sous cetce région est comme elle formé de cellules cylindriques, mais plus petites et plus élevées que sur le reste de la face. La parte centrale de la face orale possède une structure absolument différente : elle se trouve formée de très grandes cellules extrêmement aplaties, qui s’imprègnent très bien au nitrate d'argent; ces cellules sont disposées avec une régula- rité qui, très grande autour de l’ouverture du sac, diminue généralement jusqu’au bord de la couronne. Ge sont elles qui consütuent les éléments radiaires que j’ai déjà figurés chez la même espèce, mais sans m'en rendre compte, dans la planche 8, fig. 33, de mon premier mémoire. Enfin le sac se compose de longues cellules cylindriques encore plus élevées que sur la face aborale et qui présentent toujours plusieurs rangées de noyaux. Quant aux globules qui proviennent de la masse vitelline et ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 37 qui remplissent ivrégulièrement la cavité générale, il est dou- teux qu’on puisse les envisager comme possédant la significa- tion de cellules ; cependant le carmin permet d’apercevoir les noyaux disséminés au milieu de la masse. 2 STADE : LARVE ENTR OUVERTE (fig. 9). — Le premier phé- nomène que produit la fixation est la dévagination du sac à travers l’ouverture de la face orale; ce dernier se retourne d’une manière complète et se change en une plaque de forme quadrangulaire, formée de deux feuillets, et par laquelle s’ef- fectue la fixation de la larve. Les deux replis saillants rs de l’intérieur du sac sont les derniers à se dévaginer, et ils con- stituent, comme onle voit dans les figures 9, 10 et 11, les deux extrémités de la plaque quadrangulaire. En même temps que cette dévagination du sac, la partie périphérique de la face orale, qui déjà de convexe (fig. 6, 7) était devenue aplatie (fig. 8), continue de plus en plus à se déprimer vers l’intérieur, et finit, à l’époque où commence la fixation, par s’enfoncer complètement en dedans de la cou- ronne dont les deux extrémités latérales viennent se rejoindre et se referment au-dessus, ne laissant plus subsister qu’une fente allongée (fig. 10 À, op) à la place précédemment occupée par cette portion. Ainsi se trouve complétée de la manière la plus frappante la nouvelle disposition déjà bien exprimée chez la larve d’une zone moyenne, qui, outre la couronne, comprend toute une portion de la face orale. Tout ce qui appartient à la portion périphérique est alors recouvert par les cellules de la couronne, qui viennent ainsi former autour de la portion centrale une limite bien tranchée, qui est ke bord inférieur de la nouvelle couronne. Les deux organes pin, font exception à la règle; ils ne sont pas recou- verts par les cellules de la couronne, et demeurent, ainsi que la région centrale, situés en dedans de la limite formée par le bord inférieur de la nouvelle couronne (fig 9 et 10 A). Ces deux premiers processus sont aussi accompagnés par l'ouverture de la cavité palléale (fig. 9) et par l'extension de la nouvelle couronne; cette dernière s’étale dans sa partie supé- ANN. SC. NAT., ZOOL., AVRIL 1879-80. IX. 16.— ART. N° 7. 30 S. BARRGIS. rieure, agrancissant ainsi de la mamière à plus rapide la fente circulaire qui constituait louverture. em dehors de la cavité palléale ; en même temps toute la peaw de la face aborale augmente en étendue pour suivre là couronne, mais elle s’amncit dans. lx même proportion, comme on: le: voit du reste en comparant les figures & et 9. Seule, la partie qui cor- respond à la calotte paraît conserver la même épaisseur, à cause du cercle de: cellules: radiaires qui occupe cette région. 3° STADE : ÉTALÉ (fig. 40). — Dans ce stade, il y à simple: continuation des différents processus commentés pendant l’état qui précède. La dévagimation du sac se termine, et là portion centrale de: la face orale, n’étant plus distendue par aucun organe interne, commence à $affaisser sur elle-même ; en même temps la couronne, continuant à étaler. finit par se retourner d’une: mamière complète en prenant pour point. fixe le bord: inférieur de la nouvelle: couronne. Dans ce retournement, la couronne: ciliaire continue à entraîner toute la face aborale. La cavité palléale: qui, d'une fente: profonde: (fig. 8), était devenne une cavité largement. ouverte (fig. 9). disparaît alors d’une: manière complète, et: toute la portion: de la peau: qui la tapissait arrive maintenant à faire saillie à l'extérieur (fig. 10) ; les cellules que lt composent ont continué à s'étaler en largeur en: se multipliant, de sorte que la peau. de la face aborale se trouve deplusen:plus étaléeet. amincie. À cette époque, l'embryon à à peu près laforme d’un: parapluie qui serait constitué: par la face aborale: et doublé à l'intérieur par les cellules de la couronne... 48 STADE : LOSANGE (fig. D). — Dans ce stade, la couronne, déjà complètement retournée au stade précédent, commente àserecourber du côté opposéeniconvergeantvers le pôle oral,.de manière à venir se refermer peu: à peuitout autour de la plaque: formée par le:sac dévaginé ; lorsque cette fermeture se trouve effectuée, toute lapartiecentrale de la face-oraleestaffuissée au point de ne plus constituer qu'un court boyaw tubulaire qui réunit le bord'oralde la nouvelle couronne à la face supérieure de la plaque quadrangulare. Quant à la: peauqui forme léface: ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSÉS DES BRYOZOAIRES. 39 aboralé, elle atteint ses dernières limités d’exténsion et d’amin- éissément; elle se trouve alors constituer un épithélium régu- hér à cellulès polygonalés arrondies, étroitément pressées les unes éontré les atitres. Le stade obtenu à la suite dé cés changements avait déja été ms tva pr _. Mas. nes bits RE ee AA Ha de mémoire se 7; “fig 15) une figure dns Léllé il est possible dé reéénnaîtré le stade qué jé dédie aujourd hüt plus éñ détail: Les léttrés s, 6, vf, y indiquent la placé de la’ éalôtté, dé la face: aboralé et de la plaqué quadrangulairé : cétte dérnièré, que j'ai même vue se dévaginer sous le microscope, y est repré se’ téé d’uné manière assez Corrécté avec les globulés épaques qui la rémplissént. Malheuréusémént, je n’avais pas, à cette époque, imtérprété la siucture d’une manière correété, ét l’organisation intérné m'était méconnue. Je n’accordais du resté qu’uné démi-con- fiance à ce stade obtenu une seule fois par la fixatiôn aéciden- telle d’une’ larve’ sous le microscope et au mômént même où je l’obsérvais. Tôtité Mon attention était alors ééncéntréé sur un stade de l embryogénie de l'Aléjonidium, 6btenw dans dés conditions propres à inspirer plus de confiance (fig. 2%; pl. 6 dé’ mes Recherélies) et qui me paraissent être tout à l'appui du éyelé hypothétique admis par lés autéurs, d'une disparition immédiate dés divisions de la péau avéé dec ee snté des organés intérnes. ‘Anjotrd’ hui, nous voyons que é’est cé dernier stadé qui doit être esrdé comme étant anormal, tandis qué lé prérniér (Dre 45), obtenu par l'étude du Lepralit ciliate ét qui sémiblait indiquer dés phénomènes plüs complexés, se trouve au contraire être très normal ét absolument daccord avec més nouvelles rechérches. En résumé, pendant éetté première période, la larve n’a encore éprouvé de modifications qu'en cé qui à rapport à la disposition des différentes partiés qui édiñposent son orga- nisme. Rien west encore changé d’esséntiel dans sa structure 40 $ BARROIS. Néanmoins son aspect diffère du tout au tout de ce qu'il était quelque temps auparavant : la couronne est passée en dedans de l’embryon et ne constitue plus qu’un organe interne, tan- dis qu’au contraire la face aborale s’est étalée de manière à former la peau de l'embryon tout entier. Dans son ensemble, l'embryon figure une espèce de sac formé en entier par la face aborale, dans laquelle on distingue encore très bien la calotte. Ge sac est bouché par la plaque quadran- gulaire el tapissé en dedans par la couronne ciliaire, dont le bord supérieur, c’est-à-dire oral, donne naissance au boyau qui vient aboutir au feuillet supérieur de la plaque a gulaire. L'appareil de cellules rayonnantes de la calotte n’a pas encore subi de changement apparent; les cils locomoteurs mêmes se retrouvent aisément, ainsi que l'organe pair pm situé au devant du point d'implantation du boyau tubulaire; tous deux font saillie à l’intérieur de la cavité circonscrite par la couronne. Enfin, la structure de la plaque quadrangulaire ne s’est pas encore sensiblement modifiée, et consiste toujours, comme anciennement le sac, en longues cellules cylindriques étroite- ment serrées. Quant à la forme générale de l’embryon vu de face, elle représente plus ou moins exactement la forme d’un losange (fig. 11 À) dont les deux extrémités proviennent directement de l’ancien repli rs du sac dévaginé; on remarque en avant, parfois même en arrière, une légère échancrure, mais celle de l'avant est la seule constante, comme je l’ ai indiqué dans les figures 10 et 11 A. 2° PÉRIODE. — STADES PENTAGONAL-ARRONDI (fig. 2), OVALE- RECTANGLE (fig. 13), CARRÉ (fig. 14). — À partir du stade de la figure 11, les modifications deviennent plus profondes et com- mencent à porter atteinte à l’organisalion. Nous décrirons d’abord les changements de forme; puis viendront les princi- paux changements internes et l’évolution des différents organes. Changements de forme. — La première période est occupée ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 41 tout entière par les transformations de la larve en une espèce de sac qui renferme les organes internes de l'embryon (fig. 11). Maintenant nous allons voir ce sac prendre peu à peu une forme qui se rapproche de celle de Ra loge. La première chose à noter est le changement de direction que l’on constate à cette époque. La partie appelée postérieure chez la larve deviént la partie antérieure de l'adulte, et réci- proquement. Nous avons déjà dit (fig 10 À) que le sac dévaginé présen- tait en arrière une profonde échanerure ; dans le stade suivant (fig. 11), toute la portion correspondante du sac (postérieure de la larve, antérieure de l’adulte) se trouve échancrée de la même façon. À cette époque, qui marque la fin de la pre- mière période, l'embryon, qui déjà représente la jeune loge, porte donc une échancrure à sa partie antérieure (fig. 11 A). Sa forme générale est celle d’un losange dont les deux extré- mités sont formées par les deux lobes r,s, du sac dévaginé. Bientôt après, la forme générale s’égalise; les deux extrémités r,s du losange paraissent s’atténuer en remontant vers Le haut, et l’on obtient un stade plus ou moins pentagonal, dont les angles, s’émoussant d’une manière rapide, dounent bientôt naissance à un stade pentagonal arrondi très caractéristique, et que j'ai représenté dans la figure 12 À. À son tour, ce stade pentagonal arrondi ne tarde pas à s’allonger dans le sens trans- versal, de manière à adopterune forme régulièrement ovale qui ne tarde pas, en prononçant ces quatre angles, à passer à une forme plus ou moins rectangulaire. Cette forme ovale passant au rectangle (fig. 13 À) est également une des plus caracté- ristiques; elle constitue le dernier état qui rappelle celui de l’embryon produit (fig. 11) par la transformation directe de la larve. Bientôt, en effet, on voit la peau de l'embryon s’écarter forte- ment des organes internes, en même temps que les angles du stade rectangulaire se prononcent rapidement d’une manière considérable. On obtient ainsi un stade tout différent, de forme carrée, renflée vers le bas, et dans lequel les cellules de la face 42 3. BARROIS. aboralecommencentàs’écarter rapidement les unes des autres, en même temps qu'elles sécrètent l'enveloppe cuticulaire (ectocyste). | Les différents changements dans le sens de la hauteur son non moins importants que ceux que nous venons de voir se passer dans les autres dimensions. L’embryon s'amincit sur toute son étendue ; sa région antérieure devient aplatie, tandis que la postérieure demeure encore bombée ; enfin, sa forme générale, examinée de profil, subit des changements d'aspect correspondant aux différents stades que nous venons de signaler (voy. fig. 12, 43 et 14). La base de l'embryon de la figure 44 s’arrondit, comme on le voit dans la figure 42, de manière à ne plus présenter la saillie »s que d'une manière indistincte; cet aspect arrondi disparait ensuite par la formation de nouvelles parties saillantes qui apparaissent graduellement, comme on le voit dans la figure 43, pour donner naissance aux deux angles antérieur et postérieur de la figure 44. Les autres modi- fications différentes de celles que nous montrent les vues de face, et dont nous venons de parler, sont intimement liées avec les phénomènes de formation du pelypide; nous renverrons pour les plus amples détails à ce qui sera dit sur ce dernier sujet. | Changements internes. — Pendant que s'effectue le pas- sage de l'embryon de la forme losange (fig. 44) à la forme pentagonale arrondie (fig. 42), les parties de la larve que nous avons vues rentrer graduellement à l'intérieur de l'embryon éprouvent des changements d’une très grande importance. Nous avons vu l'extrémité de la face aborale, au point où elle s'unit avec la couronne, venir s'appliquer (stade fig. 11) à la périphérie de la plaque quadrangulaire ; bientôt elle y contracte une soudure intime ; puis une scission se fait, à la suite de laquelle la face inférieure de la plaque quadrangulaire se trauve réunie à la face aborale, tandis que la supérieure demeure adhérente au bord de la couronne (fig. 19). La première vient compléter la paroi de la loge déjà formée en majeure partie par la face ahorale; la seconde constitue, réunie ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 43 à la couronne et aux diverses parties de la face orale, un anneau creux, un tore, sur la paroi duquel on peut encore distinguer en dehors un organe en voie de régression (fig. 12, 6), qui n’est autre que l'organe piriforme, et en dedans un organe en woie d’accroissement, p#, qui est l’organe pair dont nous avons parlé. Toutes les cavités comprises entre l’anneau creux et la peau de l'embryon dérivent directement de la cavité géné- rale; elles sont toujours remplies par les globules disséminés, issus de la dégénérescence de la masse vitelline. Déjà, dans le stade de la figure 42, toute la partie interne de l’anneau creux formée par le boyau tubulaire réuni au feuillet supérieur de la plaque quadrangulaire, présente de nombreux plissements irréguliers : c’est cette partie que l’on voit entrer la première en dégénérescence, Dès le stade fig. 43, elle se désagrège, de sorte que l’anneau creux ne consiste bientôt plus qu’en sa partie externe; cette dernière, formée par les cellules de la couronne, résiste un peu plus longtemps à la destruction. On la voit d'abord s’amincir et se couper au niveau de l’échancrure de la partie antérieure, ee qui lui donne la forme d’un fer à cheval (fig, 12 À, 43 À). Un peu plus tard (fig. 43), on y voit apparaître des caractères non douteux de dégénérescence : les limites des cellules s’ef- facent de plus en plus; en même temps les éléments en forme de bâtonnets que nous avons décrits comme formant ces cel- lules viennent se réunir les uns aux autres de manière à former des masses plus volumineuses, qui ne sont autre chose que les globules opaques qui bientôt rempliront les cellules de la couronne. La figure 43 nous montre le début de ce processus, qui ne se trouve exprimé d’une manière définitive que dans la figure 14, où il est presque achevé. Ainsi, dans le stade de la figure 44, il ne subsiste plus de l’ancien anneau creux qu’une lame recourbée en forme de fer à cheval, déjà en voie complète de dégénérescence. Le feuillet inférieur de la plaque quadrangulaire, dont les éléments avaient d'abord conservé une hauteur plus grande que dans la face aborale, s'est graduellement aminci (fig. 13), de manière 44 | __ J. BARROIS. à présenter dans la figure 44 la même épaisseur que dans le reste de la peau. C’est, comme nous l'avons vu, l’époque où cette dernière, qui possède enfin une structure uni- forme, commence à se renfler de manière à prendre un aspect qui rappelle celui de la loge, tandis que ses cellules s’écartent les unes des autres en sécrétant l'enveloppe chiti- neuse générale. Polypide. — La formation du polypide est intimement liée avec la destinée future de la calotte, et c’est à cette dernière que nous devons remonter pour trouver l’origine de cet organe important. [l m'a semblé d’abord que les cellules radiaires avaient une part à prendre dans sa formation. On les voit persister jusqu’au stade fig. 11; puis elles se détachent de la peau superficielle, et viennent former au milieu de l'embryon (fig. 11, 12 A) un cercle mieux circonserit de cel- lules bien apparentes. L'époque où ce cercle de cellules radiairés parait se détacher de la peau superficielle coïncide à peu près avec le moment où l’on voit toute la face supérieure de la calotte s’épaissir et s’enfoncer à l’intérieur (fig. 12), pour former une dépression de forme circulaire qui n’est peut-être due qu'à une hypertrophie des ne radiaires précédem- ment mentionnées. Quelle que soit du resle son origine exacte, soit indépen- dante, soit intimement liée au cercle de cellules rayonnantes de la calotte, 1l est de fait que cet épaississement occupe au stade fig. 12, 12 À, toute la face supérieure de cet organe. C'est l’époque où 1l commence à se déprimer et à pénétrer à l’intérieur; on le voit revêtir la forme d’une cuvette qui s’enfonce en dedans, d'avant en arrière, de manière à venir rapidement se placer au milieu de l’espace laissé libre par l'anneau creux (fig. 12 À et 13 À). En s’enfonçant ainsi à l’in- térieur de l’embryon, cetépaississement s’enroule sur lui-même de manière à passer graduellement de la forme hémisphérique à la forme de vésicule; en même temps il entraîne à sa suite une portion de la peau, qui constitue bientôt une espèce de pédoncule par lequel il se trouve suspendu à l’intérieur (fig. 13 ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 45 el 13 A), tandis que l'ouverture d’invagination, d’abord large- ment ouverte, se rétrécit de plus en plus. Cette invagination de la calotte entraine immédiatement d'importantes différences dans la forme générale de l'embryon tout entier. La peau, jusqu'ici divisée en deux parties (fig. 14 et 12), commence à présenter un aspect uniforme (fig. 13) ; de plus, l’enfoncement de cet organe en dedans amène une dépression extrêmement rapide de toute la région antérieure (fig. 19, et 13). Cette dernière devient très aplatie, tandis que la postérieure demeure fortement bombée. Les figures 41 à 14 montrent combien ces deux processus aident à faire passer l'embryon de l’aspect d’un simple sac arrondi (fig. 11) à une forme voisine de celle de la jeune loge. Un dernier processus qu’il nous reste à mentionner consiste dans la rencontre qui ne tarde pas à se produire entre l’échan- crure déjà signalée dans la partie antérieure de Pembryon et l’ouverture d’invagination du rudiment du polypide. D’abord absolument distinctes l’une de l’autre, ces deux dépressions se rapprochent ensuite d’une manière rapide, à la suite du processus général d’aplatissement et de retrait en dedans de toute la région antérieure. Dès le stade fig. 13, on les voit se rapprocher; au stade fig. 14, ils se trouvent réunis, et l’ouver- ture d’invagination du polypide paraît n’être plus que la conti- nuation du sillon qui occupe l'extrémité antérieure. Ainsi se produit la forme spéciale que la jeune loge possède au début de sa formation (fig. 14, 15 et 16), et dans laquelle sa portion antérieure se trouve divisée en deux lobes bien distincts dont les sommets correspondent aux deux angles antérieurs et qui se trouvent séparés l’un de l’autre par l’échancrure médiane au fond de laquelle se trouve l’ouverture du polypide au dehors. | De l'organe piriforme et de l'organe pair. — Nous avons déja dit que l'organe piriforme n’était pas exempt du pro- cessus général de dégénérescence qui affecte la couronne et la face orale. Jusqu'au stade fig. 10, on le voit persister sans subir de notables modifications ; mais au stade fig. 11 1l se 46 JS. BARROIS. rétracte en boule, et bientôt après (fig. 42) ne consiste plus que dans une masse oblongue assez mal délimitée. Enfin, à l’époque où l’on voit apparaitre les amas granuleux dans les cellules de la couronne, il est presque entièrement Lomhé en dégénérescence. On n’en retrouve plus de traces dans les stades qui suivent, | l'organe pair pm est beaucoup plus important; 1l con- stitue la seule partie de la face orale qui échappe au processus de dégénérescence, et cette exception au milieu d’une période de destruction si générale constitue certainement un des traits les plus saillants et les plus instructifs que nous ayons à enregistrer. Les deux organes en question sont, comme nous l'avons dit, à partir du stade fig. 9, situés à la limite extrême de la portion centrale de la force orale, immédiatement en arrière du bord de la couronne refermée au-dessus de l’organe piriforme ; aux stades 10 et 41, ils demeurent situés à l'angle qui sépare le boyau tubulaire de la partie antérieure de la couronne ciliaire; ils font partie intégrante de la paroi de l'anneau creux, mais appartiennent alors d’une manière com- plète à sa paroi inférieure, interne, faisant ainsi saillie dans l’intérieur de la cayité circulaire circonscrite par eet anneau. À partir du stade fig. 44, on voit les choses changer : les organes augmentent rapidement en volume et se mettent à s’accroître vers la partie supérieure, de manière à passer gra- duellement tout entiers de la face inférieure de la paroi vers la face supérieure, où ils viennent se rencontrer en passant au- dessus de l’ancien organe piriforme. La figure 11 nous montre le début de ce processus ; les figures 19, 49 À, représentent le moment où les deux organes, passés sur la paroi supérieure, sont venus se rejoindre sur la ligne médiane. Il se forme ainsi au- dessus de l’anneau creux un épaississement impair formé par la soudure des deux organes pa, et qui s'accroît ensuite rapide- ment en volume, augmenté par la jonction des deux parties laté- rales pm, qui viennent peu à peu se rétracter en lui. Cet épais- sissement, qui dès le stade fig. 43 À peut se constater même sans aucun réactif, apparaît dans l'embryon vivant sous forme ARTICIE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 47 d’une tache rose, placée juste au-dessous de Pespace clair formé par le rudiment du feuillet intérieur du polypide pe, à la formation duquel nous avons assisté, Gette masse pur, qui demeure située assez longtemps au fond et au milieu du fer à cheval granuleux formé par l’anneau creux en dégénérescence (Gg. 48 À, 44 A), est destinée à former le feuillet externe musculaire du futur polypide; nous la voyons en effet, dès le stade fig. 14, commencer à atteindre le rudiment ge, qu'elle va bientôt envelopper d’une manière complète, 3° PÉRIODE, — Les trois stades principaux de cette pé- riode, qui n’a rapport qu'aux phénomènes moins importants d'achèvement de Ja jeune loge, se distinguent par les modifi- cations que subit le premier rudiment de polypide. Dans le premier stade (fig. 19), le rudiment postérieur pm a com- plètement recouvert dans son accroissement le rudiment pe; tous deux ne figurent plus maintenant qu'une seule partie, de forme triangulaire, composée de deux feuillets concentriques et qui s'étend depuis l’onverture d’invagination, où elle adhère encore par son feuillet interne, jusqu'au fer à cheval constitué par la couronne, oùelle adhère encore par son feuillet externe. En somme, le polypide constitue à cette époque une masse formée de deux feuillets concentriques, qui demeure encore suspendue à la peau de la loge par une portion plus grêle qui est le pédoneule dont nous avons décrit plus haut la forma- tion. Au stade suivant (fig. 16), ce pédoncule primitif a dis- paru, le polypide s’est concentré tout entier en une masse arrandie de forme triangulaire dans les vues de profil, formée par les deux feuillets dans toute son étendue et directement Baute à la peau de la loge, au point où se trouvait l'ou- verture d’invagination, qui s’esl pen d’une manière complète. L'ancienne adhérence du feuillet externe au for à cheval à globules opaques a enfin disparu d’une manière complète ; de sorte que le rudiment arrondi du polypide est librement suspendu dans la caviié générale, constituant ainsi le rudiment de polypide décrit par les auteurs, rudiment dont la cavité 48 J. BARROIS. interne se trouve exclue de toute communication avec l’exté- rieur. Enfin, dans le troisième stade qui termine la série des grandes transformations de l’organisme larvaire, ce rudiment commence de nouveau à s’allonger de manière à se diviser en deux parties distinctes : une première, gé, qui constitue un pédoncule d'apparition secondaire, le pédoncule définitifou gaine tentaculaire, et une portion renflée dans laquelle com- mencent déjà les modifications qui formeront le polypide. Le pédoneule définitif ne correspond en rien au pédoneule pri- mitil : le premier n’est qu’une portion de linvagination qui a donné naissance au feuillet interne; le second n’est peut-être qu'une simple hypertrophie du feuillet externe pm, accru au- dessus du premier. A ces trois états (polypide à Dédoutule primitif, ge sans pédoncule, et polypide à pédoncule définitif) correspon- dent différentes modifications à l'étude desquelles nous allons passer. 8° STADE : A PÉDONCULE PRIMITIF (fig. 15). — Les princi- paux caractères qui transforment la peau des anciens embryons (fig. 11, 12, 13) en un sac qui rappelle l’aspeet de la loge ont lieu principalement pendant le stade fig. 14 : ce sont l’écar- tement des cellules épidermiques avec sécrétion d’une couche cuticulaire, et le renflement général de la peau, dont les angles se prononcent pour donner naissance à la forme carrée de la figure 14 A. La forme définitive se trouve complétée par l’allongement de la loge en arrière entre les deux angles de l’extrémité postérieure, et l’on passe ainsi de la forme14A à la forme 15 A, qui représente déjà d’une manière complète la forme défini- tive. À ce stade, l’écartement des cellules de la peau a con- tinué d’une manière rapide, ainsi que la sécrétion de l’enveloppe cuticulaire. Cette dernière est d’abord simplement chitineuse; ce n’est guère qu'à partir du stade figure 17, qu’on y voit apparaitre des particules calcaires. Pendant que s’effectue ce changement de forme dans la partie postérieure de la jeune loge, on voit l’échancrure de sa partie antérieure se séparer ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 49 de nouveau de l'ouverture d’invagination, phénomène qui prélude au commencement de la formation de la plaque operculaire. 9° STADE : SANS PÉDONCULE (fig. 16). — Dans cestade, nous voyons la division de la loge en face inférieure et face supé- rieure, jusqu'ici seulement vaguement indiquée, devenir très distincte et se prononcer par une ligne de séparation fortement saillante (fig. 16). La forme générale reste à peu près la même : seulement l’échancrure de la partie antérieure est devenue peu distincte ; les deux lobes auxquels elle donnait naissance n’ap- paraissent plus que d’une manière plus confuse, et l’on con- state l’apparition sur chacun d’eux de quatre petits mamelons qui figurent les épines. Ge n’est guère qu’à ce stade que l’on voit le fer à cheval, en dégénérescence déclarée dès le stade 14 et entièrement composé de globules au stade 15, se résoudre enfin en globules indépendants qui ne se distinguent plus de ceux qui dérivent de la masse vitelline. Le stade fig. 16 repré- sente donc l’état si souvent décrit par les observateurs comme le premier stade qui suit la fixation, et formé, suivant l’expres- sion ordinaire : « d’un sac rempli d’une masse de globules » opaques, et ne renfermant comme partie organisée qu’une » masseovoïide claire, munie d’une cavité et composée de deux » feuillets. » Nous voyons maintenant que malgré cet état d'extrême sim- plicité par lequel passe l'embryon, il n’en est pas moins pos- sible, sinon facile, de retrouver les différentes parties dont se compose la larve, parties qu’il devient alors possible de suivre sans interruption jusqu’à la forme adulte. 10° STADE : A PÉDONCULE DÉFINITIF (fig. 17). — A partir de ce stade, nous commençons à retomber dans des phénomènes plus souvent étudiés, mais encore, malgré tout, très imparfai- tement connus. Notre intention n’est pas d’aborder cette étude, qui sort trop complètement du sujet entrepris; nous nous bor- nerons donc à quelques petites remarques destinées à com- pléter la description qui précède. La partie antérieure dans laquelle nous avons vu l’échan- 50 |. BARROIS. érure s’éffacér d’une manière graduellé (fig. 16 À, #7 A) prend bientôt une forme régulièrement arrondie, x l'intérieur dé la= quelle les deux groupes de mamelons que nous avons vüsnañtre) sé disposent en ün cerclé continu de huit épimés. Fouté la région éomprisé étre cés huit épinés demcuré dépourvué d im prégrätiont éaleaïre, ét son révêténiént orné déviént plus épais, de manièré # forniér uné éspècé de plaque: qui ñé tadé pas à sé Souléver par les bords, donnant. ainsi naissaréé à 14 plaque éperculairé 4 somnrét de liquellé viént déboucher ké pédoncule définitif dént nous avons parlé. Gé pédonculé pré sénté, dû nivéd dé louvertiré én fer & cheval de là plaqué épevetilie un épaiSsissément de mêmé forme déstiné à sé éreusér pour former lenñtrée dé la gaîne téntaéulaire. La masse én fer à cheval dé globulés épaques mainténant disposés au hasard ét sans ordrésuit dans son enséiblé une destinée identique à celle qué’lui a'attribuéé Repiachoff éhéz lé second type étudié par lui (Lépralia Pallasiana), é’'est-à-diré qu'elle se réduit de plus én plus, de mañière à sé‘trouvér con centrée, à la fin du développément, én une masse sphérique. Cette masse se met én relation avéc l’éxtrémité éétale’ dé l’estorrac pour êtré; é fini dé compté, englobée par éét'organé el préndré pirt das urié cérlainé mesuré à RS ES dé sa parol. Cétté participation des globules Opaquis à x Pachévemént de l'intestin du polypide constitue’ certainémént le cas lé plus général, ét je puis ajouter aux éxémiplés qu’en donne Répiachoff ceux de lespèce présénté et dés Sériälañes (Serialarin lendie gera), chez lesquelles tout se passé d’une manièré: identique” au Léprali& Pallasiana étudié par l’auteur russe. Faut-il dire pour cela que tous les globules sont uniformément désti- nés à rentrer dans l'intestin ? C'éstice Fi re parait plus diff cile à admettre. Indépendamment des globules issus de la couronne et assent- blés én forme dé fer à cheval chez le Lépralie unicornis, ou'dé plaque carrée chez le Lepralin Pallasiana, et qui sont destinés à sé réduire peu à peu en une masse arrondie qui se soude ARTICLE N° 7. MÉTAMORPIIOSES DES BRYOZOAIRES. s2: à l’estomac, ces deux espèces présentent des globules disséminés provenant sans doute de l& masse vitelline et appliqués par places à la paroi de la loge. Ces globules ne sont pas destinés comme les autrés à se réunir à lPintestin du polypide ; on les voit diminuer d'une: mamière: graduelle sans qu’ils aient quitté leur position primntive, et. je ne serais pas le moins du monde éloigné de leur attribuer une partimportante dans la formation: des cellules étoilées dités du système nerveux colonial. Ges cel- lules apparaissent, vers le stade fig. 47,sur la paroi de là face inférieure: de: la loge et dans l’espace compris entre les deux branches de l’amas de globules enfer à cheval. Je mai pu suivre encore la manière dont elles se forment ; mais ce quitce= pendant mérite: d’être noté, c’est qu’elles contiennent encore, au stade fig. 17; de nombreux globules, comme lindiqué la figure: 47 B. Leur apparition et leur multiplication: coineident. x peu près avec la disparition des globules disséminés: appli qués contre: l’endocyste ; il est naturel de supposer qu’elles se forment où au moims:se nourrissent à leurs dépens. Hfaut.se rappeler d'ailleurs qu'il est aussi des types (4) chez lesquels les globules ne se concentrent pas:en: une masse com pacte avant de disparaitre, maïs restent disséminés ét se résorbent sur place; concourant ainsi: à lat nutrition des par- tes environnantes, eb:em particulier des tissus du mésodere. Ce cas n’est guère, en somme; qu'une extension généralé du: mode: de régression qur existe seulement en partie chez les Lepralio umicornis et Pallasian«:, et 1 est bien probable que les cellules étoilées ne sont pas sans jouer dans leur dispa- rition le même rôle prépondérant. Enfin, même dans le cas où: nous voyons les globules se: concentrer d’abord en une masse compacte, certains faits peuvent encore être cités à l'appui de: ces liaisons entre les globules opaques et les cellules étoilées. Nitsche, dans son: (1), Chez l’Alcyonidium et le Flustrella hispida, les globules viennent se ranger sur toute la paroi interne de la loge de manière à former une bande opaque dans le genre de celle du Lepralia unicornis. (Voyez mes Recherches sur les Bryozoaires.) 52 J. BARROIS. étude du développement de la jeune loge de Bugula, donne du mode de disparition de cette masse compacte une description toute spéciale, absolument différente de celle de Repiachoff et qu’on a, d’après moi, trop laissée dans l’oubli : la masse de glo- bules contracte des relations non avec l'extrémité inférieure cæcale de l’intestin, mais avec le cordon funiculaire, de nature sarcodique, qui relie ce cæcum au fond de la loge, et c’est à l’intérieur de ce cordon sarcodique qu’on les voit diminuer et se résorber graduellement. Personne n’a jusqu'ici reparlé que je sache du fait signalé par l’auteur allemand; c’est qu'en effet, dans les trois quarts des cas, on voit les choses se passer d’une façon qui, du moins à la première vue, rappelle davan- tage la description donnée par Repiachoff : la masse de globules vient se placer en contact immédiat avec le bout du cæcum:; assez souvent cependant elle en reste séparée, et l’on constate alors qu’elle se trouve comprise dans un cordon fumiculaire composé d’une série de cellules étoilées irrégulièrement as- semblées. Ainsi, dans ce cas, la masse de-globules n’est point, quoi qu’il puisse en sembler parfois, enveloppée par l'estomac du polypide, mais se trouve employée au développement des cellules étoilées qui forment le funicule. Ces faits nous autorisent à tirer la conclusion que les glo- bules opaques peuvent, en outre du rôle assigné par Repia- choff, posséder une autre signification d’une importance non moins grande, et prendre une part, variable suivant les cas, à la formation des cellules. étoilées. Peut-être ces dernières ne dérivent-elles souvent que d’une espèce de rajeunissement des globules opaques, dont la partie protoplasmique, d’abord en- vahie par la substance graisseuse, se répare ensuite aux dépens de cette dermière. Je n'ai pour le moment rien qui puisse con- firmer ce mode de formation des cellules étoilées pour le roupe des Escharines, car 1l ne m’a jusqu'ici pas encore été possible de trouver de noyaux dans l'intérieur des globules à l’époque du stade de dégénérescence. Mais d’autres groupes, tels que les Entoproctes, nous présentent ce phénomène de la manière la plus nette. Chez le Pedicellina, nous voyons eneffet, ARTICLE N° 1. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 53 aussi bien dans le bourgeonnement que dans la métamor- phose, que l’intérieur du pédoncule se trouve d’abord rempli par des globules opaques provenant de dégénérescence des or- ganes larvaires (1), dont la transformation directe en cellules étoilées se montre avec une netteté qui exclut toute possibilité de doute. Il nous reste à parler, pour terminer notre étude, des modi- fications qu’éprouve le polypide, du stade fig. 16 au stade fig. 17. Ge sujet, qui présente de sérieuses difficultés, me parait trop étendu pour être traité 1c1; je serai donc fort bref, réser- vant ma description pour un mémoire spéelal que je prépare sur ce sujet. Je me bornerai à fournir pour le moment une simple explication de la figure que je donne. La figure 17 À représente un aspect familier à tous ceux qui ont abordé le sujet, et que je crois dù à la formation de deux épaississements bd à la partie supérieure du feuillet interne et à l’apparition d’une fente entre ces deux épaississements. La figure 147 représente l’as- pect que le polypide présente de profil à la même époque ; on y voit l’un de ces deux épaississements bd précédemment men- tionnés, ainsi que le commencement de l’'échancrure ec, qui est le premier imdice de la formation du rectum. Je ne puis en effet continuer à admettre, sur le développement du polypide, la manière de voir de Nitsche (2) n1 les idées approchantes émises à ce sujet dans mon premier mémoire. Disons aussi en passant, avant de laisser le sujet, que la disposition entoprocte ne dure pas si longtemps que je l’avais pensé à l’époque de mes pre- mières recherches. Elle est déjà passée depuis très longtemps à l’époque où apparaissent les premiers tentacules ; l’ouver- ture que javais prise alors pour l’anus (et qui se déplace vers la périphérie) est l’ouverture d’invagination du ganglion nerveux. ù = Nous ferons remarquer, avant de terminer, la singulière ori- (1) Ces faits sont tirés de mes recherches, non encore publiées, sur la méta- morphose du Pedicellina, qui sera étudiée dans la suite de ce mémoire. (2) Le pincement d’une sphère creuse dans sa partie moyenne, de manière à former une sorte d’anneau creux qui représente le tube digestif incurvé. ANN. SC. NAT., ZOOL., MAI 1879-80. IX. 17. — ART. N° 7. 54 J. BARROIS. gine du rudiment de polypide. Jusqu'ici les opinions étaient très divisées sur le mode de formation de cette importante partie (4). Pour plusieurs, tels que Grant, Nitsche, Claparède, le polypide prend naissance aux dépens de la peau. Pour d’au- tres, tels que Nordmann, Dalyell, Hincks, Schneider, le poly- pide dérive de la masse de globules et ne se met qu’ensuite en relation avec la peau. Au fond, la vérité n’est dans aucun de ces deux sens, mais réside plutôt dans la combinaison des deux opinions ; Chacune des deux parties précédemment men- tionnées peut être regardée comme entrant pour une part dans la formation du rudiment de polypide. Les différents dessins qu'on trouvera dans mes planches expliqueront du reste les différents aspects trouvés en temps divers par les observateurs. La figure 15 À et même 17 À représentent les aspects qui ont surtout fait croire à l’origine du rudiment aux dépens de la masse de globules ; au contraire, les auteurs qui ont plutôt ob- servé la disposition de la figure 16 À ont toujours conclu sans hésitation à une origine aux dépens de la peau. RÉSUMÉ. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE. 4% STADE : BLASTULA (fig. À et 1 A). — La blastula se com- pose de trente-deux cellules disposées comme je lai précé- demment indiqué dans mes recherches sur les formes larvaires. Ces trente-deux cellules peuvent être considérées comme dispo- séesen huit rangées de quatre cellules disposées suivant le érand axe pp. On voit de celte façon que sur la face orale les quatre rangées vont toutes jusqu'aux pôles pp, tandis qu'au contraire dans la face aborale, les deux latérales seules atte1- gnent ces pôles, où elles se rejoignent, constituant ainsi un cercle continu composé de huit cellules et qui n’est autrechose que la couronne ciliaire (fig, 1 A). Les deux rangées comprises (1) Voyez pour l’historique mes récherches sur les Bryosoaires (page 101). | ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 99 en dedans du cercle, et qui n’atteignent pas les pôles pp, sont destinées à former toute la face aborale. 9° STADE : GASTRULA (fig. 2, 2 A, 2B). — La gastrula se produit, comme l’a découvert Repiachoff, par l’invagination des quatre grosses cellules qui occupent le cenire de la face orale. En même temps les huit cellules de la face aborale se segmentent dans le sens transversal, et les huit cellules de la couronne dans le sens longitudinal; ce qui nous fait passer de la disposition de la figure 4 À à la disposition de la figure 2 B. Les douze cellules périphériques de la face orale se segmentent aussi dans le sens transversal, et les cellules qui occupent le milieu de chaque côté (cellules polaires et laté- rales de Repiachoff) s’allongent excessivement de manière à produire une figure en eroix caractéristique (fig. 2 A). 3° STADE : EMBRYON ARRONDI (fig. 3, 4, 4 A, 4B). — Pen- dant tout ce stade, l’embryon retient encore la forme géné- rale qu’il possédait d’abord, c’est-à-dire qu’il conserve un as- pect arrondi (fig. 3 et 4) et élargi sur les vues de face (fig. 2 A, 2 B, 4B). 1. Endoderme morulaire adhérent à l'exoderme (fig. 3). — Les quatre cellules endodermiques se segmentent d’abord en une masse de huit ou neuf grosses cellules disposées sans arran- sement régulier, mais dans laquelle on peut peut-être recon- vaitre un groupe plus élevé occupant le milieu (fig. 3, end et mes). 19 9. Endoderme et mésoderme libres et séparés (fig. 4). — Ge groupe ne tarde pas à devenir bien distinct et à former une masse erd, à cellules moins distinctes, libre dans la cavité générale et dont se séparent bientôt deux bandes cellulaires mes adhérentes l’une à l’autre d’un côté de l'embryon, et qui représentent des espèces de Keimstreifen (fig. 4A, 4B.) 3. Endoderme et mésoderme réunis en une masse vitelline libre (Gg. 5). — Bientôt ces Keëmstreifen paraissent s’étaler à la surface de la masse endodermique end, et il se produit ainsi par fusion des deux parties une masse unique #, qui remplit l'intérieur de l’embryon et qui joue le rèle de vitellus nutritif. 96 _ J. BARROIS. 4° STADE : EMBRYON CYLINDRIQUE (fig. 5, 5A ; 6, 6 À,6B). — Dans ce stade, les cellules de la couronne accrues en hau- teur forment une espèce de manchon cylindrique, bouché de chaque côté par les lames épithéliales que forment les faces orale et aborale. La forme allongée dans lé sens transversal a fait place à une forme arrondie (fig. 6 B). Les changements se rapportent à chacune des deux faces : 4. Face aborale. — I\ apparaît, au stade fig. 5, un groupe de cellules radiaires formé suivant moi aux dépens de l’exo- derme et sous-jacent aux cellules épidermiques. Ce groupe, qui constitue la partie essentielle de la calotte, divise la face abo- -rale en deux parties distinctes : l’une, centrale, revêtant les cel- lules radiaires et destinée à former la peau de la calotte; l’autre, périphérique, destinée à s’invaginer pour former Île revêtement de la cavité palléale. LATE 2. Face orale. — Nous voyons pendant ce temps se former dans la face orale deux organes qui nous présagent une divi- sion en deux parties distinctes : 4° En arrière se produit, aux dépens de l’exoderme, une in- vaginalion $ qui s’épaissit peu à peu et s'enfonce à l’intérieur pour former un organe très volumineux et que j'appelle le sac : c’est ce que J'ai appelé Pestomac dans mon premier mémoire. % En avant, apparaît un .crgane arrondi g, de provenance douteuse, d’abord libre à l’intérieur et visible à travers la peau de l’exoderme, et que je désigne sous le nom d’organe glandu- lire. | 9° STADE : EMPBRYON OBLIQUE (fig. 7, 7 A ; 8, 8 À). — Pen- dant cette période, lembryon passe de la forme arrondie (fig. 6B) à la forme allongée (fig. 7 À, SA), et cette moditica- tion se trouve accompagnée de changements généraux de la plus grande importance. Les cellules de la couronne éprouvent un accroissement égal et maximum dans la région postérieure, inégal et dé- croissant d’arrière en avant dans la région antérieure. Comme conséquence de ce processus, on voit cette dernière se déplacer peu à peu et quitter la position horizontale (parallèle et anta- ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 57 goniste de la face aborale) qu’elle possédait jusqu'alors, pour prendre une position plus ou moins oblique, qui peut même aller jusqu’à la verticale. La région postérieure reste seule pour remplir le rôle joué jusqu'ici par toute la face orale et pour servir d’antagoniste à la face aborale; son centre arrive à coincider avec le pôle oral précédemment situé à la partie centrale de la face tout entière. Ainsi s'effectue ce changement général dans la symétrie de l'embryon tout entier, le passage de la forme régulière et cylin- drique à la forme oblique des figures 7 et 8. Il y a eu : 1° ac- croissement inégal des cellules de la couronne; 2° déplace- ment du pôle oral; 3° enfin, division de la face orale en une partie centrale (postérieure) qui porte le sac, et une partie pé- riphérique (antérieure) qui porte l’organe glandulaire : la pre- mière continuant à rester parallèle et à servir d’antagoniste à la face aborale; la seconde passée à une position quelquefois verticale ou “oi au moins oblique, et qui devra dès maintenant être considérée comme faisant partie de la couronne ciliaire. Ce changement important se trouve accompagné de diffé- rentes autres modifications de détail. 1° Dans la face aborale, on voit se produire linvagination de la partie périphérique, de manière à former la cavité pal- léale. Cette invagmation commence dansle pourtour du groupe central des cellules radiaires, et produit ainsi le sillon si que, j'avais d’abord cru devoir re sous le nom significatif de formateur de la ventouse; 1 s'étend ensuite dans la direction centrifuge jusqu’à la rencontre du bord de la couronne. 2 Dans la face orale, le sac s’approfondit et son ouverture d’invagination se rétrécit, mais sans se fermer; on la retrouve encore chez la larve libre à la partie antérieure de la région centrale; cette dernière, restée saillante, se ne à cette époque de larges cellules plates. La portion périphérique composée au contraire chez la larve libre de petites cellules cylindriques s’est déprimée et rétrécie ; sa partie moyenne s’est enfoncée à l’intérieur pour former la fente ciliée; sa partie antérieure s’est hypertrophiée pour 58 3. BARROIS. former le groupe de cellules radiaires qui porte le plumet; enfin la masse glandulaire est venue se souder entre les cel- lules radiaires et la fente ciliée. La réunion de ces trois par= ties forme une masse oblonque (fig. 7, 8 b), que je désigne sous le nom d’organe piriforme. | Enfin la fente ciliée paraît, en s’étalant dans sa partie imfé- rieure, séparer du reste de la région périphérique deux petits lobes pm, formés également de nombreuses cellules cylin- driques et qui constituent des organes importants situês à la limite, entre les deux divisions de la face orale. Quant à la masse compaete # qui rempht jusqu'ici tout l'intérieur de l'embryon, on la voit tomber en dégénérescence pour former une masse de globules épars qui restent dissé- minés dans la cavité générale. MÉTAMORPHOSE. 1° — Premières transformations (fig. 9, 10 et 11). 1% STADE : LARVE ENTR'OUVERTE (fig. 9). — Le premier phénomène qui détermine la fixation est la dévaginalion du sac interne à travers l’ouverture d’invagination; il se transforme en une plaque quadrangulaire par laquelle s'opère la fixation. En même temps la portion périphérique déjà aplatie de la face orale s'enfonce à l’intérieur et en dedans de la couronne, qui vient se refermer complètement au-dessus (fig. 9 et 10 A), les deux petits lobes pm étant exceptés. Enfin, on voit tout l’ensemble composé par la couronne, comprenant la portion périphérique de face orale, s’étaler comme l’indique la figure 9, en entraînant toute la face abo- rale. Cette dernière, composée chez la larve libre de très longues cellules à plusieurs noyaux, s'étale à mesure que s’entr'ouvre de plus en plus la cavité palléale, et s’amincit par aplatissement et multiplication rapide de ses cellules. 9° STADE : PARAPLUIE (fig. 10, 10 A). — La couronne s’est retournée d’une manière complète en prenant pour point fixe le bord de la portion centrale de la face orale; la cavité palléale ARTICLE N0 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 59 est ainsi disparue, et la peau de la face aborale, de plus en plus amineie, est venue tout entière faire saillie à Pextérieur, formant à cette époque une espèce d’ombrelle doublée à l'intérieur pe les cellules de la couronne. Cette espèce d’ombrelle s’incurve vers le bas, de manière à venir mettre ses bords en contact avec la périphérie de la plaque quadrangulaire. L’embryon adopte ainsi la forme d’un sac constitué en entier par la face aborale et bouché en dessous par la plaque quadrangulaire; la couronne, devenue un organe interne, tapisse le dedans, et larégion centrale de la face orale, affaissée sur elle-même après la sortie du sac interne qui la dstendait, s’est réduite à un court boyau tubulaire qui réunit le bord inférieur de la couronne au feuillet supérieur de la plaque quadrangulaire (fig. 14). 2 Période des cystides (fig. 11, 12 et 13). Dès ce stade l'embryon possède un aspect qui n’appartient pas plus à Ha larve qu’à la jeune loge, et qui ne correspond à rien de ce qué l’on connait. 3° STADE : LOSANGE (fig. 44, 11 A). — Le premier stade déjà cité de ces espèces de eystides à une forme qui dépend de celle dé Porgane que j'ai appelé le sac. Ce dernier possède chez le Lepralia deux replis rs qui forment après la dévagination les deux angles d’une plaque en forme de losange (fig. 12 A); le premier état rappelle donc la forme d’un losange. On voit en général que la partie postérieure de l’émbryon à ce stade présente une échancrure ; cette échancrure mdique la partie antérieure de la loge future dont l'orientation ést par conséquent inverse de la larve. 4° STADE : PENTAGONAL ARRONDI (fig. 14, 19 A). — On voit bientôt les deux angles de la forme losange s’atténuer de plus en plus en se portant vers le haut, de manière à donner nais- sance à une forme pentagonale plus ou moins arrondie (fig. 19 A). di Pendant ce temps, le bord de Ia face aborale contracte une soudure avec la plaque quadrangulaire; puis s'opère üne GO | J. BARROIS. scission à la suite de laquelle le bord inférieur de cette plaque demeure adhérent à la face aborale pour achever avec elle la formation de la peau, qui n’est autre que la loge future. Le feuillet supérieur de la même plaque demeure au contraire adhérent à la couronne pour former avec elle et le boyau tubu- laire un anneau creux, un tore, qui occupe tout l’intérieur de l'embryon. Enfin, toute la partie antérieure de l'embryon s’aplatit, et il se forme au niveau de la calotte un épaississement issu peut- être de l'appareil de cellules radiaires et qui est l’origine de tout le feuillet interne épithélial du futur polypide. Les deux organes pin qui jusqu'ici étaient tout entiers situés à l'intérieur de la cavité du tore commencent à s’accroître vers sa paroi supérieure, et viennent se rejoindre au-dessus de l’or- gane piriforme (fig. 12, 12 A), de manière à former en ce point un épaississement qui est l’origine du feuillet externe musculaire du rudiment de polypide. | 5° STADE : OVALE RECTANGLE (fig. 13,13 A). — Le stade arrondi s’allonge dans le sens de la largeur et prononce ses angles de manière à passer à la forme allongée rectangulaire de la figure 13 A. En même temps toute la calotte, portant l'épaississement précédemment signalé, s’invagine à l’intérieur de l'embryon, tandis que l’épaississement impair qui forme le second rudiment de polypide gagne en volume. On voit de plus que le tore commence à présenter les pre- miers signes de dégénérescence; sa partie interne (composée du boyau tubulaire et du feuillet supérieur de la plaque) et l’organe piriforme tombent dès maintenant en dégénérescence. La partie externe formée par la couronne est divisée en deux par l’accroissement de l’échanerure antérieure se portant vers l'ouverture d’invagination du polvpide; elle prend la forme d’un fer à cheval, et son protoplasme se charge d'éléments plus fortement cranuleux. A Tel est l’état qui précède d’une manière directe l’apparition des caractères de la jeune loge ; bientôt, en effet, les parties in- ternes se réduisent à un fer à cheval en dégénérescence déjà ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 6 déclarée, mais montrant encore lestraces des cellules de la cou- ronne, et contenant entre ses deux branches les deux rudi- ments formateurs du polypide, qui, s'accroissant, l’un vers le haut, l’autre vers le bas, sont venus se mettre en contact immédiat (fig. 14 et 14 A). 3 Période des jeunes loges. G° STADE : STADE CARRÉ (fig. 14, 14 A). — Lorsque l’em- bryon est arrivé à ce point, les cellules de la peau commencent à s’écarter et sécrètent au-dessus l'enveloppe cuticulaire ; toute la peause renîle ets’écarte fortement des parties internes ; ses quatre angles se prononcent ; l’échancrure rejoignant lPou- verture d’invagination divise sa partie antérieure en deux lobes, et l’on obtient une véritable jeune loge de forme carrée qui passera bientôt par l'allongement de sa partie PARATEE à un état (fig. 15) très voisin de sa forme définitive. 7° STADE : POLYPIDE A PÉDONCULE PRIMITIF (fig. 15et45A). — La masse pm s’est accrue de manière à envelopper tout à fait la vésicule pe. Le rudiment de polypide s'étend mainte- nant de l’ouverture d’invagination à la base du fer à cheval. Ce dernier est devenu complètement globuleux ; mais les glo- bules adhèrent encore entre eux; enfin l’échancrure médiane commence à disparaitre et la partie antérieure à s’arrondir. 8° STADE : STADE DE DÉGÉNÉRESCENCE COMPLÈTE (fig. 16, 16 A).— Le rudiment allongé du stade précédent a perdu tonte adhérence avec le fer à cheval et s’est concentré en une masse arrondie, directement suspendue à la paroi, au niveau de l'ouverture d’invagination complètement. fermée. Les globules du fer à cheval se sont disséminés ; enfin la séparation des faces supérieure et inférieure de la loge est devenue mieux marquée. CONCLUSIONS. Avant tout, remarquons comme conclusion générale qu’il nous faut renoncer d’une manière définitive au cycle de déve- loppement rétrograde, découvert par Grant et accepté depuis 69 J. BARROIS. par tous ses successeurs. À sa place, on admettra un dévelop- pement direct et continu sans aucune lacune de l'œuf jusqu’à l'adulte, et dans lequel on voit les organes de la larve passer graduellement aux organes définitifs. La régularité est simple- ment troublée par la perte d’organes appartenant à la larve, et qui n’entrent pas dans la structure de ladulte; mais ces perturbations n’obseurcissent en rien la suite régulière de l’embryogénie. Arrivons maintenant aux Conclusions par tielles sur le déve- loppement et la métamorphose. 1. — Des caractères méroblastiques du développement. Une remarque est nécessaire pour bien se rendre compte du genre de développement embryonnaire de la larve. Tout le monde connaît la vieille division, trop négligée au- jourd’hui, en deux grands modes de développement : le mode hdlobiutiihenn à feuillets bien distinets, dont chacun joue son rôle dans le développement; et le de méroblastique, qui est: le résultat d’une condensation de l’embryogénie, et dans lequel on trouve à la place des feuillets une masse centrale de vitellus nutritif imactive et revêtue d’une membrane blastodermique qui donnera naissance à l'embryon tout entier. La première période de formation des feuillets est, chez les Escharines, franchement holoblastique; mais le stade essentiel de l’embryogénie, celui qui met fin à cette pre- mière période et sert de point de départ à tout ce qui va suivre, me paraît appartenir au mode méroblastique; du moins il se compose, comme dans ce dernier cas, d’une masse ceritrale à cellules peu distinctes (vitellus nutritif), et d’une couche externe formée par l’exoderme (couche blastodermique); la première jouant un rôle à peu près nul, la seconde destinée à donner naissance à tous ou presque tous les organes de la larve. On doit done considérer le développement comme apparte- nant, dans ses grands traits, au mode méroblastique, bien que les premiers stades n’y puissent être rangés. ee ARTICLE N° 4. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 63 IT, — De l'absence d’intestin chez les larves d’Ectopractes. Ïlne faut plus songer, étant donné le rôle qu’on voit jouer au sac pendant la fixation, à comparer cet organe à une poche stomacale. Les globules qui remplissent la cavité générale et dérivent directement de la masse vitelliné, sont les seules parties qui représentent l’intestin. Chez les Cyclostomes, il en est de même; enfin, chez les Lophopodes, les derniers restes de Pintestin tombé en dégéné- rescence ont eux-mêmes disparu sans laisser aucune trace. Les trois grandes divisions du groupe des Ectoproctes pré- sentent donc, en même temps qu’une condensation de l’em- bryogénie (développement méroblastique), une absence com- plète de tube digestif. Ce caractère, ainsi que l’existence d’un manteau, constituent les deux traits caractéristiques qui diffé- rencient ces larves de celles des Entoproctes. IT. — Du manteau chez les larves de Bryozoaires, Les différents phénomènes de lembryogénie exposés tout au lorg dans ce qui précède, ont prouvé que la peau qui tapisse ce que j'ai appelé la cavité palléale devait réellement être considérée comme représentant un véritable manteau. Cet organe n’est donc pas uniquement restreint au groupe des Cyclostomes, où je l'ai signalé en 1877 (1), mais existe aussi chez les Chilostomes. Les mêmes faits, rapprochés de ceux que Nitsche a fait connaître chez l’Alcyonelle (2), nous permettent aussi de reconnaître d’une manière certaine et définitive les homologies des larves de Lophopodes. La peau de la larve est sa face orale; sa saillie antérieure, qui porte les polypides, représente au con- traire la face aborale. Le vestibule correspond à la cavité palléale, et le repli annulaire qui est venu le former n’est autre chose que le manteau. | (1) Voyez Recherches sur l’embryogénie des Bryozoaires. (2) Zeitschrift [ür wiss. Zoologie, XXV, 1876. (007 J. BARROIS. L'existence du manteau est donc un fait commun aux trois grandes divisions du groupe des Ectoproctes. Au contraire, les Entoproctes n’en présentent aucune trace ; je crois qu'on doit le regarder comme un caractère secondaire produit dans le groupe des Ectoproctes par l’allongement de la couronne vers le pôle aboral. IV. — Du trait fondamental de la métamorphose. . Le trait le plus saillant du développement consiste, suivant moi, en ce que la fixation, au lieu de se faire comme on le sup- posait, suivant toutes vraisemblances, par l'extrémité aborale de la larve, se fait au contraire par le pôle oral. II y, a done renversement complet de l’organisme, quelque chose de com- parable à ce quise ferait, si une larve de Brachiopodes se fixait par la tête (1). À ce premier fait se Joint, comme car actère re le retournement complet du manteau. Par suite du sens de la fixation, le retournement se fait ici de haut en bas, ten- dant à s'incurver vers le point de fixation, à l'inverse de ce qui a lieu chez les Brachiopodes, et de ce qui se produit dans le plus grand nombre des cas. V.— Destinée des principaux organes de la larve. Voici ce que deviennent les trois parties essentielles dont se compose le type ancestral de la larve : 1° La face aborale forme la peau de la loge, sinon entière, du moins en très grande parte; elle donne aussi naissance Te invagination au feuillet épithélial du polypide. | 2 [a couronne ciliaire se détruit en entier. 3° La face orale se détruit en très grande partie ; elle fournit cependant une portion à la peau, ainsi qu’un rudiment d’une très grande importance, destiné à former le feuillet interne musculaire du rudiment de polypide. QE 1) Voyez mes schémas sur le plan général d’organisation des larves de y P 5 8 Bryozoaires. ARTICLE N° 7. MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 6 EXPLICATION DES FIGURES: Désignation générale des parties. an, anus. b, Organe pyriforme. bd, bandes épaissies du jeune polypide. bl, blastopore. C, couronne. e, échancrure antérieure de la jeune loge. end, endoderme proprement dit. ech, échancrure du rectum (jeune polypide). ex, endocyste de la jeune loge. f, fente ciliée. [', épaississement de [a peau autour de ï fente ciliée. 9, organe glandulaire. gn, coude de la couronne. gt, gaine tentaculaire définitive. ( Deuture d’invaginalion du rudiment épithélial du polypide. rN 4 ls, limite de séparation entre les deux faces de la jeune loge. mes, mésoderme. n, masse vitelline. oc, partie centrale de la face orale. 0p, partie périphérique (id.). pe, rudiment du feuillet interne du polypide. pm, rudiment du feuillet externe at polypide. pol, polypide. pp, grand axe de la blastula. r, cellules radiaires du plumet. rs, repli du sac. $, Sac interne. si, cavité palléale. v, roselte radiaire et dépression centrale de la De. Explication spéciale des figures. (PME HG), Presque toutes les figures sont grossies, Dore vues de face, de 180, et pour les vues de profil, de 220. 4. Blastula de profil montrant la division en trois parties distinctes déjà opérée par la couronne c. 1 A. La même, vue par la face aborale, montrant la disposition des deux rangées extrêmes se rencontrant aux pôles pour former la couronne. 2. Gastrula de profil montrant la segmentation des 32 cellules du stade précédent en 60 cellules. 66 PTT J. BARROIS. - 2 A. La même, vue par le pôle oral pour montrer la disposition en croix des cel- lules latérales et polaires. 2 B. La même, vue par le pôle aboral. 3. Embryon arrondi (de profil) montrant la division des cellules de l'endoderme en une masse irrégulière encore adhérente à l’exoderme. 4. Stade plus avancé (de profil), montrant la division de la masse en endodermie proprement dite end. et bandes germinatives mes tous deux libres dans la cavité générale. 4 À. Le même, vu par devant. 4 B. Le même, vu de face. 5. Embryon cylindrique jeune.— Les bandes germinatives commencent à se con- fondre avec l’endoderme pour former une masse unique libre dans la cavité générale, la masse vitelliñe. Apparition de la rosette radiaire de la calotte et de l’épaississement du sac interne. 5 À. Mème stade de face. Lac SaA Rte 6. Embryon cylindrique âgé. — Formation du sillon palléal 5, du sac 5, et de l'organe glandulaire g. 6 À. Même stade vu de devant. 6B. Même stade vu par le pôle oral. 7. Embryon oblique (de profil), division de la face orale en deux LECLEE, for- mation de la l’organe pyriforme. | 1 A. Même stade vu par le pôle oral. à 8. Larve libre. — La masse vitelline n des stades per s est résolue en globules qui ne sont pas indiqués dans la figure. ù 8 A. Larve libre vue par le pôle oral. — os, ouverture du sac interne à l'extérieur; 1, limite externe de la portion médiane (composée uniqueiént de céllules radiaires) de la face orale. Cette portion correspond peut-être au point où le sac interne vient s’insérer à l’exoderme. — pl, point d'insertion du plumet. 9. Premier stade de la métamorphose. — Le sac est en voie de dévagination ; da portion périphérique de la face orale est rentrée dans la couronne : celle-ci commence à s’étaler vers le haut, entraînant avec elle toute la peau du revé- tement de la cavité palléale. — op, cavité de la face orale (partie périphérique) invaginée. 10, La couronne s’est retournée d'une manière complète et toute la face aborale est revenue faire saillie à l’extérieur : elle forme maintenant le revêtement entier de l'embryon, qui a pris dans son ensemble la forme d’un parapluie. 10 A. Même stade vu par le pôle oral. 11. Le parapluie du stade précédent s’est resserré autour de la plaque qua- drangulaire et l'embryon a pris la forme d'un sac fermé. La couronne est devenue un orgare interne et la por tion centrale de la face orale s’est affais- sée en un boyau tubulaire, APR 11 A. Même stade vu par le pôle aboral, de manière à montrer la. forme en ‘losange que possède l'embryon à cette époque. Les angles rs correspondent au repli rs (fig. 8) du sac interne. L ‘embryon a été renversé dans cette figure et dans celles qui suivent, pour permettre la comparaison ave£ la forme adulte. — Gross. 210. 12. Stade pentagonalarrondi.— La plaque quadrangulaire se dédouble en et ARTICLE N° 7: MÉTAMORPHOSES DES BRYOZOAIRES. 67 inférieur, qui se joint à la face aborale pour former la peau, et feuillet supé- rieur, qui reste adhérent à la couronne pour former un anneau creux, un tore. Formation du polypide issu de la rosette de cellules radiaires? et réu- nion des deux lobes pm en un épaississement impair. — Gross. 210. 12 A. Même stade vu par le pôle aboral. — Gross. 210. 13. Stade ovale, rectangle. — Dégénérescence de la partie interne du tore et de _ Ja masse oblongue. Apparition des granules sur la couronne (les rosettes figurées sont schématiques). Invagination de la calotte et accroissement de l’épaississement pm. — Gross. 200. 15 À. Même stade vu par le pôle aboral. 14. Stade carré. — La peau s’écarte des organes internes; elle commence à sé- créter l’enveloppe chitineuse et à prendre les caractères de la loge. Les deux rudiments du polypide se sont mis en contact. La couronne divisée en un fer à cheval par l'échancrure antérieure qui s'est accrue, est en dégénérescence déclarée, mais présente encore les traces des cellules. — Gross. 180. 14 A. Mème stade vu de face (pôle aboral). 15: Jeune loge. — La couronne est composée uniquement de globules encore adhérents les uns aux autres. Le rudiment du feuillet externe s’est accru tout autour du rudiment pe. Tous deux sont confondus eu une partie unique, qui s'étend de l’ouverture d’invagination au fond du fer à cheval. Le rudiment de polypide déjà constitué possède un pédoncule : le pédoncule primitif. — Gross. 180. 15 A. Même stade vu de face (pôle aboral). — Gross. 155. 16. Stade de dégénérescence. — Les globules de la couronne sont disséminés et le rudiment de. polypide concentré en une masse sans pédoncule, directe- ment suspendue à la peau et complètement détachée du fer à cheval. L’ou- verture d'invagination est fermée; l’échancrure disparait; l'extrémité anté : rieure commence à s’arrondir et à présenter des rudiments d'épines. — Gross. 180, 416 À. Même stade vu de face. — Gross. 155. 17. Le rudiment de polypide s’est de nouveau allongé de manière à présenter un pédoncule nouveau : le pédoncule définitif ou gaine tentaculaire, De plus il commence à se différencier; la masse que bte se réduit. — sp, épine impaire, — Gross. 180. 17 A. Mème stade vu de face. Gross. 155. 17 B. Cellules étoilées vues à ce stade. NOTE SUR UN CROCODILIEN NOUVEAU DE CHINE L'ALLIGATOR SINENSIS, Fawel. | Par F1. Léon VAILLANT. _ La distribution géographique des Crocodiliens, dont on ne connaît dans la période actuelle qu’un nombre assez restreint d'espèces très voisines les unes des autres, paraissait, jusqu’à ces derniers temps, des plus nettes. Parmi les trois ou quatre genres qu'on y admet généralement, celui des Crocodiles se trouve répandu dans toutes les régions tropicales ou subtropicales, soit dans l’ancien et le nouveau continent, soit même en Australie et dans les îles de l’archipel malais. Les Gavials, remarquables par l’élongation de leur museau, leurs dents nombreuses et égales, leurs habitudes plus aquatiques, sont propres à la région indo-archipélagique. Enfin on n’avait rencontré jusqu'ici que dans le nouveau monde les Caïmans, reconnaissables à leur museau plus ou moins large cachant la quatrième dent inférieure; ainsi que les Jacare, souvent confondus avec les précédents, et qui s’en distinguent surtout par leur ventre cuirassé comme la partie dorsale. Tout récemment M.A.-A. Fauvel, directeur honoraire du musée de Shang-haï, a fait don au Muséum d'histoire naturelle &än Crocodilien de Chine qui ne permet plus de regarder comme absolue la répartition de ces différents genres à la surface du globe. C’est en effet par tous ses caractères un véritable Caïman, assez voisin même de l’Alligator mississipensis, Daud., ou Caïman à museau de -Brochet, de l'Amérique du Nord. M. Fauvel donne le nom d’Alligator sinensis à celte nouvelle espèce, dont il à pu recueillir un certain nombre d'exem- plaires. Ce Crocodilien ne parait pas atteindre une taille supérieure à 1,45 ou {",74. La tête, dans l'individu donné au Muséum, est longue de 0",180, large de 0,115, plus triangulaire que chez lAlligator mussissipensis Les trous pariétaux, de forme ovalaire, ont les axes longitudinaux presque parallèies, tandis que dans l'espèce à laquelle nous comparons le Crocodilien de Chine ces axes divergent notablement. La surface des os crâniens paraît aussi plus rugueuse. Le bouclier cervical est bien nettement séparé du bouclier dorsal, et se compose d’une série de quatre paires d’écailles fortes, épaisses, à crête obliquement saillante sur le côté. La crête caudale est plus développée que chez la plupart des Crocodiliens, soit dans les parties divergentes antérieures, composées chacune d’environ dix ‘écailles, soit surtout dans la portion simple terminale formée de lamelles au nombre de vingtet une. Par contre, les jambes ne présentent pas de crêtes ni de dentelures sensibles. Malgré la taille de l’individu (1",35), l’ossilication des écailles ventrales est très incomplète, plus sensible sans doute que chez les Alli- gator de même taille, mais beaucoup moins cependant que chez des Jacare plus petits, tels que les Jacare punctulatus, Spix, ou J. sclerops, Schneïid. Suivant M. Fauvel, on trouve dans la paupière supérieure de l’Alligator sinensis une plaquette osseuse comme chez le Jacare palpebrosus, Cuv. De toutes les espèces auxquelles nous avons pu le comparer, c’est au Jacare jure Spix, que le Crocodilien de Chine parait se rapprocher davantage par ’ensemble de ses formes; toutefois le premier a la tête proportionnellement plus large, et sur les côtés du bouclier cervical, entre les deux premières paires d’écussons, on en trouve deux plus petits, latéraux, qui manquent chez le second. L’Alligator sinensis se distingue donc nettement des espèces analogues jus- qu'ici décrites, et la découverte de M. Fauvel peut être regardée comme des plus intéressantes. Cet auteur a joint à l’étude zoologique de cet animal des con- sidérations étendues sur les connaissances des Chinois relativement aux Croco- diliens qu’on rencontre dans ces régions. Sousle rapport philologique, historique ou même légendaire, on trouvera dans ce travail de nombreux renseignements ; ces détails, malgré leur intérêt, s’écartent trop du but de cette note pour que nous cherchions à en donner un aperçu, renvoyant le lecteur désireux d’appro- fondir ces questions au mémoire original publié dans le recueil de la North- China branch of the Royal Asiatic Society pour 1879. ARTICLE N° 8. RECHERCHES SUR LA FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES Par M. Alph. MELNE EDWARDS. EXTRAITS INTRODUCTION. NE LE La distribution géographique des animaux à l’époque actuelle intéresse la paléontologie non moins que la zoologie, et ce fut sans doute pour cette raison qu'en 1868 l’Académie des sciences, à l’instigation d’un géologueillustre, M. Élie de Beau- mont, appela sur cesujet l'attention des naturalistes. Jai voulu répondre à l’appel de cette Compagnie savante, et en 1873 j'ai soumis à son jugement un long travail accompagné d’une série de grandes cartes sur lesquelles se trouvait indiquée la répar- ttion à la surface du globe de chacune des espèces zoolo- giques dont j'avais à m'occuper. L'Académie vota l'impression de cet ouvrage (1); mais l'importance des dépenses que devait entrainer la gravure de l’atlas explicatif empècha l'exécution de cette décision, et depuis cette époque mon manuscrit est resté dans les bureaux de l’Institut à la disposition des naturalistes. Les résultats auxquels je suis arrivé sont connus de beaucoup de personnes par l’exposé que j'en ai fait dans mes cours annuels du Muséum ; néanmoins je crois devoir ne pas tarder davantage à communiquer au public d’une mamière (1) Voyez le Rapport de M. Roulin, inséré dans le Comple rendu des séances de l’Académie, 1874, t. LXXIX, p. 1643 etsuiv. ANN. SC. NAT., ZOOL., MAI 1879-80. IX. 18. — ART. N° 9. 2 AILPH. MIELNE ÆEIDVVANREDS. moins incomplète quelques parties de mon livre, et je me pro- pose d’en insérer des extraits dans ce recueil périodique. Effec- tivement les recherches faites dans les régions australes par les zoologistes adjoints à l'expédition astronomique chargée d’ob- server le passage de Vénns devant le disque du soleil ont ajouté à l’intérêt des questions dont je me suis occupé. Quelques-unes des considérations que j'aurai à présenter me semblent pouvoir contribuer à mettre en évidence la portée de divers faits épars constatés récemment à l’île Campbell par M. H. Kilhol, à l’île Saint-Paul par M. Vélain, M. de l'Isle et M. Lantz, et à l'ile Kerguelen par plusieurs voyageurs anglais, américains et allemands (1). Pour me conformer au programme tracé par l’Académie en 1868, j'ai dû m'occuper suecessivement de la faune de plu- sieurs régions de l'hémisphère austral, dont je ne parlerai pas en ce moment, etdans ce mémoire il ne sera aujourd’hui question que de la faune antarctique; mais je ne me bornerai pas, dans cette étude, à dresser un catalogue des animaux qui en font parie : je les comparerai à ceux que l’on rencontre ailleurs, ei je chercherai quels sont les faits physiques ou les autres circonstances qui peuvent expliquer leur présence ou ieur absence sur tel ou tel point du globe (2). | Cette étude portera principalement sur les animaux supé- rieurs, Car ce sont eux dont la répartition géographique est la mieux connue et La plus propre à aider les géologues dans Pap- préciation des hypothèses paléontologiques ; mais je ne négli- gerai aucune des grandes divisions du Règne animal, et je tien- drai compile des animaux marins aussi bien que des animaux terrestres, car tous les êtres animés peuvent nous fournir des données utiles pour Ja solution des questions proposées par l'Académie, et à mesure que J'enregistrerai les résultats fournis (1) Voyez le Compte rendu des recherches sur la faune de Kergquelen inséré dans le tome VIT, 6° série des Annales des sciences naturelles (Zoologie). (2) Les additions ou modifications de quelque importance que je puis être con- duit à faire au manuscrit présenté à l’Académie en 1873 seront indiquées dans les notes placées au bas des pages. ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 3 par l'observation, je m’appliquerai à en apprécier la portée. Ce ne sont pas des vues théoriques relatives à l’origine des espèces que je me propose d'exposer dans ce mémoire, je crois plus utile de m’en tenir à la constatation des faits, à leur com- paraison, à l'examen de leur valeur et à la discussion des résultats qu’on en peut obtenir touchant les lois qui régissent le mode de distribution des types zoologiques à la surface de la terre. Je demeurerai sobre de conclusions ; mais 1l me suffira, je pense, d'apprécier rigoureusement les faits fournis par la zoologie géographique, pour montrer combien, dans la plupart des cas, sont insuffisantes les hypothèses présentées récemment comme pouvant expliquer la diversité des organismes par l’action modificatrice des climats et des autres conditions biologiques combinées avec la lutte pour l’existence, et ame- nant ainsi par sélection naturelle la transmutation des types animaux. Les parties extratropicales de l'hémisphère sud sont parti- culièrement favorables aux recherches de cet ordre, à raison de l'isolement des unes et des relations des autres avec diverses régions dont les faunes respectives, composées de types orga- niques à la fois très variés et fortement caractérisés, sont bien connues. J’ajouterai que l’aire d'habitation de beaucoup d’ani- maux yestnettement circonscrite, et que les mélanges d'espèces exotiques aux espèces indigènes dans certaines contrées sont non moins faciles à expliquer qu’à constater. Le sujet que je vais aborder n’est pas nouveau. Buffon, guidé par les conceptions de son génie plutôt que par l'observation d’un vaste ensemble de faits, posa les premières lois relatives à la distribution géographique des animaux, et à des époques plus rapprochées de nous diverses parties de cette branche de l’his- toire naturelle ont fixé l'attention de plusieurs savants, parmi lesquels je citerai: Fabricius, Latreille, Desmoulins, H. Milne Edwards, [sidore Geoffroy Saint-Hilaire, Swainson, Lyell, Agas- siz, Forbes, Hartlaub, Pucheran, Sclater, Murray, Pelzeln. Wallace et Huxley. Cependant il y reste encore bien des points obseurs, et les découvertes paléontologiques faites depuis % ALPH. MILNE LD\VARDS. quelques années dans l’hémisphère austral, particulièrement celles de M. Richard Owen, et celles relatives à la faune éteinte des îles africaines dont je me suis particulièrement occupé à plusieurs reprises (1), me semblent pouvoir y porter de nou- velles lumières. ç 2. Je crois devoir, en commençant, indiquer brièvement quelques vues générales qui m'ont été suggérées par l'étude du mode de distribution des animaux à la surface du globe, et qui me serviront plus d’une fois à elasser les faits dont j'aurai à parler et à en faire ressortir la signification. Il importe égale- ment de bien fixer Le sens que J’attache à certaines expressions dont les naturalistes sont obligés de faire un fréquent usage, mais dont la portée n’est pas la même aux yeux de tous : les mots espèce, variété et race, par exemple. | Les caractères d’une race sont déterminés par la résultante de deux forces dont les directions peuvent être parallèles et semblables, ou divergentes et même opposées. L'une de ces forces est l’atavisme, ou tendance de l’être en voie de dévelop- pement à réaliser les formes organiques de ses ancêtres, à en devenir l’image fidèle (2). L’autre est la faculté d'adaptation biologique, c’est-à-dire la tendance de l'être vivant à se modi- fier lorsque les conditions auxquelles il est soumis viennent à changer. La transmissibilité héréditaire de certaines particularités de structure ainsi que de certaines facultés, dépendant proba- blement du mode de conformation des instruments physiolo- giques qui en sont les organes, est un fait incontestable et si (1) Voyez la série des mémoires réunis en un volume sous le titre de Recher- ches sur la faune ornithologique éteinte des iles Mascareignes et de Mada- gascar, 1 vol. in-4°. G. Masson, 1866-1873. , (2) Quelques auteurs donnent à ce mot une acception plus restreinte et ne l’appliquent qu’à la réapparition du type primordial après une interruption plus ou moins prolongée ; mais dans tous les cas la tendance est la même, et ici je n'ai pas à me préoccuper des causes qui peuvent la contrebalancer ou en sus- pendre temporairement les effets. ARTICLE N° 9. Qt FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. généralement admis par les observateurs, qu’il serait superflu d’en apporter ici les preuves. La possibilité de dissemblances considérables chez les des- cendants d’ancêtres communs, et la production de ces varia- tions sous l'influence des différences dans les climats où ces êtres vivent, dans le régime alimentaire auquel ils sont soumis, et d’autres circonstances extérieures, sont également démon- trées par des faits nombreux tirés de l’histoire naturelle de nos animaux domestiques. L’agronome nous montre que des races nettement caractérisées peuvent être obtenues ainsi presque à volonté par les soins de l'Homme; que ces races diverses, issues d’une même souche, peuvent être très nom- breuses, et qu’elles sont d'autant plus fixes, c’est-à-dire moins faciles à modifier, qu’elles sont plus anciennes. L’atavisme est une force physiologique dont l'influence croit avec le nombre des générations qui se succèdent dans les mêmes conditions d'existence. La faculté d'adaptation de l'organisme n’augmente pas de la même manière, elle est même très limitée pour les individus considérés isolément; mais lorsque les changements déterminés par les conditions biologiques coïncident avec les effets dépendants de l’atavisme, ainsi que cela a lieu quand ces conditions modificatrices agissent d’une manière continue sur une longue suite de générations, les effets produits s'ajoutent successivement et les caractères zoologiques qui en dépendent se marquent de plus en plus. Les variations déterminées de la sorte ne changent pas le type de l'être. Le Cheval, par exemple, conserve partout ses caractères essentiels; mais les particula- rités qu'il a acquises par une longue résidence dans les plaines chaudes et sèches de l'Arabie d’une part, dans les pâturages gras ethumides de la Hollande d’autre part, et en troisième lieu sur les rochers arides des Shetlands ou de l'Islande, sont si importantes, qu'aux yeux de la plupart des zoologistes elles motiveraient des distinctions spécifiques si on les rencontrait chez des animaux sauvages dont on ne connaïitrait pas l’origme commune. Elles doivent rendre les mélanges très difficiles ou même impossibles entre les individus appartenant à certaines 6 ALPH. MILNE ED\WARDS. races : ainsi les juments des Shetlands ne seraient probable: ment jamais fécondées si elles étaient abandonnées au milieu d’une troupe de Chevaux hollandais, et les étalons shetlandais ne pourraient saillir les juments de la grande race de Frise. Ces deux races d’une même espèce ne se croiseraient donc pas entre elles si elles venaient à vivre dans une même contrée; ët si elles étaient assez anciennes pour que l’influence de l’ata: visme fût très grand comparativement à l’influente modifica- trice du milieu ambiant, elles persisteraient côte à côte, où l’une d'elles s’éteindrait, Ainsi le Cheval hollandais abandonné à lui-même aux îles Shetlands dépérirait et ne se perpétuerait pas, Car il n'y trouverait pas dans les vingt-quatre heures la quantité de nourriture nécessaire à sa consommation quo- tidienne, et il faudrait probablement une longue suite d'arinées pour que le Poney des Shetlands, vivant en liberté au milieu des herbages de la Hollande, püt grandir assez pour se croiser avec les Chevaux indigènes. Or, les animaux domestiques ne sont pas d’uné autre nature que les animaux sauvages, et les physiologistés ne sauraient admettre que ce qui est possible chez les uns soit imipogs sible chez les autres. On conçoit donc que des êtres issus d’une souche commune puissent constituer deux races où variétés faciles à distinguer entre elles et offrant tous les caractères assignés d’ordinaire en zoologie à des espèces voisines dans ün mêmegroupe générique. Lénaturaliste pourrait donc considérer comme étant distinctes spécifiquement certaines races qui sé perpétuent de la sorte en conservant les mêmes particularités de conformation et qui ne se mêlent pas entre elles, Par con- séquent, on est autorisé à penser, ce me semble, que parmi les groupes z0ologiques auxquels on donñe communément le nom d'espèce, il peut y avoir uné distinction importante à établir. Îl y a des espèces primordiales, c’est-à-dire des espèces dont l’origine ne peut tré attribuée, par analogie, à des ancêtres d’une autre forme organique et dont le type n’a pas d’autres représentants dans l’état actuel des choses ; mais il peut exis- ter aussi des espèces dérivées, où espèces secondaires, c’ést-à- ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 7 dire des lignées d'individus qui restent distinctes entre elles et qui sont caractérisées par des particularités organiques inva- riables, mais qui différent si peu entre elles, qu’on esten droit de lès regarder comme issues d’une mème souche primitive. Ainsi l'Homme, la Girafe parmi les Mammifères, le Secrétaire parmi les Oistaux, sont des êtres tellement différents de tous les autres animaux, qu'on né saurait légitimement leur attribuer pour ancêtre aucun des êtres vivant encore aujour- d’hui ou dont nous connaissons les restes à l’état fossile; tandis que dans le genre Chien et dans 16 genre Pigeon, par exemple, il ya une multitude de variétés réputées spécifiques qui ne me semblent pas avoir plus de valeur zoologique que ne l’auraiént des races locales maintenues fort longtemps sous les mêmes influences et cantonnées dans les stations isolées. C’est peut-être faute d’avoir suffisamment insisté sur cette distinction entre les races pérmanentes ou espèces secon- daires, et les espèces primordiales ou espèces réalisant un type spécial bien caractérisé et nettement délimité, que les zoolo- gistes Sont si partagés d'opinions au sujet de la fixité ou de la variabilité de ce qu’ils appellent une espèce. Les uns, ne pre- nant en considération que la perpétuation incontestable de certaines formes organiques par voie de génération pendant une longue série de sièeles, appliquent les règles ainsi établies à tous les animaux qui, à l’état de liberté, présentent des par- ticularités à raison desquelles ceux-cise distinguett des autres animaux. Ils sont conduits de la sorte à multiplier les divi- sions spécifiques d'une manière qui, à mon avis, est inadmis= sible, ét à supposer chez tous ces groupes réputés spécifiques une égale invariabilité dans les caractères organiques. Ils donnent ainsi prise à des critiques que les partisans de la va- riabilité illimitée des formes organiques font valoir, et ces der- niers naturalistes, exagérant à leur tour les conséquences à tirer des faits fournis par l'observation des changements sur- venus parmi les descendants d’une souche commune, suppo- sent ailleurs des filiations que rien, dans l’état actuel de nos connaissances, ne les autorise à admettre. Leurs adversaires, 8 ALPH. MILNE EDWARDS. remarquant les points faibles de lhypothèse. génésique, qu’à l’exemple de M. Darwin ils ont été peu à peu conduits à formuler, ont repoussé en bloc les idées de transformation, et n’ont tenu aucun compte de tout un ordre de faits dont la signification me semble évidente. De part et d’autre on est tombé dans l'erreur de raisonnement signalée à plusieurs reprises par M. Chevreul ; on a pris pour le tout une partie de la question, et les naturalistes qui ont défendu ces opinions extrêmes n’ont examiné qu’un côté des choses et ont négligé des données importantes. Toujours dans les opinions extrêmes il y a du vrai et du faux. La part de l'erreur est des plus difficiles à faire; souvent même les lumières manquent pour guider l'esprit et lui per- mettre de porter un jugement : aussi dans les études dont je m'occupe 1ci, il me semble surtout nécessaire de se tenir en garde contre toute idée préconçue et toute généralisation pré- maturée, et de ne s’appuyer que sur des observations précises. Un fait bien constaté en zootechnie et dont le naturaliste doit tenir grand compte, c’est que les caractères d’une race sont, ainsi que je l'ai déjà dit, d'autant plus stables, plus diffi- ciles à modifier par les moyens dont l’agronome dispose, que cette race est plus ancienne, qu’elle est plus pure de tout mélange avec des races étrangères, et qu’elle a subi moins de déplacements. Le raisonnement aurait suffi pour faire penser qu’il devait en être ainsi, puisque, d’une part, l'ancienneté de la race sup- pose une longue succession d’influences dépendantes de l’ata- visme ets’ajoutant de génération en génération, et que, d’autre part, la persistance des conditions de climat dans lesquelles cette race s’est constituée ne peut qu’accroître les effets dus à ces mêmes conditions. Mais, dans les sciences naturelles, un raisonnement à priori ne vaut Jamais un résultat constaté par l'observation et contrôlé par l’expérimentation. Or, les espèces, de même que les races, n’ont pas existé de toute éter- nité; c’est à un certain moment que chacune d'elles est apparue ou s'est constituée : chacune d’elles a donc une ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 9 période de jeunesse et un âge mûr, peut-être aussi une vieillesse inévitable. L'analogie doit nous porter à croire qu'elle n’est pas toujours également modifiable; que, dans les premiers temps de son existence, elle sera susceptible de subir, sous l’influence de conditions biologiques dissem- blables, des variations qui ne se produiraient pas sous l’in- fluence des mêmes causes lorsque le type se sera multiplié un très grand nombre de fois, ou, en d’autres termes, que l’espèce sera plus vieille. On conçoit donc qu’une espèce ancienne et res- tée toujours placée dans les mêmes conditions biologiques soit devenue tellement invariable jusque dans les moindres détails de son organisation, qu’elle périsse plutôt que de se modifier pour s'adapter à d’autres circonstancesextérieures. Au contraire une espèce qui, dans son Jeune âge, aura été disséminée sur des points du globe où ces conditions différaient beaucoup, aura pu acquérir dans chacun de ces lieux des particularités caractéristiques dont la fixité augmentera avec le nombre des générations qui se succèdent sous l'influence des mêmes con- ditions. Un type spécifique dont les représentants resteront toujours semblables entre eux dans leur patrie primitive pourra donc, dans son jeune âge, par l'effet de sa dissémination dans des lieux variés, donner naissance à un nombre plus ou moins considérable de races particulières ou d'espèces dérivées, qui, avec le temps, deviendront fixes à leur tour et pourront même, quand elles seront anciennes, résister à l’action d'agents modi- ficateurs du même ordre que ceux qui ont présidé à leur for- mation. Lorsque, par suite de leur extension sur la surface du globe, ces espèces primordiales ou ces espèces dérivées viennent à se rencontrer dans un même lieu, elles pourront donc con- tinuer à y vivre côte à côte et à se perpétuer en conservant cha- cune ses caractères distinctifs. Les différences de taille ne sont pas les seules particularités de race qui semblent être susceptibles de maintenir la sépara- tion entre deux ou plusieurs races issues de parents communs et ayant acquis les caractères d'espèces dérivées. Chez beau- coup d'animaux la fécondité est périodique, et, quelle que soit 10 ALPH. MILNE EDWARDS. la similitude de l’organisation chez des êtres qui vivent côte à côte, ceux-ci ne se mêleront pas, si la saison d'activité géné- sique n’est pas pour eux la même. Or les climats paraissent avoir une grande action sur ce phénomène, et l’on conçoit que si l'influence de l’atavisme très longtemps prolongée a donné une certaine fixité à cette particularité, elle puisse établir une bar- rière physiologique entre ces espèces secondaires. On sait aussi que les sécrétions odorantes sont pour beaucoup d'animaux supérieurs les principaux excitants au rapprochement sexuel, et par conséquent une modification profonde dans les fonctions des glandes accessoires de l'appareil reproducteur peut deve- nir une cause de séparation entre les individus appartenant à deux races fortement caractérisées, ie descendues d’une souche commune. Du reste, les particularités détérminées par l'adaptation des organismes à des conditions d'existence dissemblables ne pas raissént avoir que peu d'importance, et l’on peut en général lés reconnaître à leur existence chez des animaux dont les types organiques diffèrent beaucoup, mais dont le genre de vie est añalogue. Elles consistent principalement dans le mode de coloration du système tégumentaire et dans les proportions de certaines parties du corps, choses qui varient avec l’âge chéz le même individu, et ne peuvent avoir par conséquent une impor= tance zoologique considérable, mais qui fournissent les princi- pales bases pour les distinctions spécifiques adoptées par un grand nombre de naturalistes. On conçoit aussi que la multiplis cité des races locales constituées de la sorte, ou des espèces déris vées, doit être d'autant plus grande que le type primitif, à l’époque où il ést encore facilement modifiable, s’est étendu Sur une partie plus considérable de la surface du globe et a peuplé des contrées plus diverses; car alors les actions modificatrices amenées par les conditions extérieures ont beaucoup varié. On voit donc que dans les recherches relatives à la zoologie géographique, il ne suffit pas de faire le dénombrement des animaux qui vivent sur Chacun des points de la surface du globe; il faut peser attentivement la valeur des différences ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 11 où des ressemblancés qui existent entre les espèces de la contrée dont on étudie la faune et celles qui habitent d’autres régions; valeur qui, du reste, peut varier beaucoup, suivant les groupes naturels que l’on preñd en considération. En ce moment je ne m'étendrai pas davantage sur ces vues La générales, mais, en terminant ce travail, j'aurai à y revenir. MÉMOIRE SUR LA FAUNE DE LA RÉGION ANTARCTIQUE. PREMIÈRE PARTIE. CONSIDÉRATIONS PRÉLIMINAIRES: & 47: La faune antarctique est peu variée, mais elle est fortement caractérisée. On peut en juger par les récits des marins et par les collections zoologiques déposées par les voyageurs dans les grands musées de Paris, de Londres et de Leyde. Les données que l’on possède sur l’histoire naturelle des régions polaires australes sont même beaucoup moins incomplètes qu’on ne le supposerait au premier abord. Indépendamment des résul- tals importants acquis à la science par les voyages d’explo: ration accomplis par Cook et ses compagnons, au nombre desquels il faut citer en première ligne Forster (l); par Baudin, qui avait à son bord deux naturalistes habiles, Péron et (1) G. Forster, A Voyage round the World in his B. Ms Ship RESOLUTION, Com- mandéd by Capt. TJ. Cook, during the years 1719, 1773, 1174 and 1115. 2 vol. n-40,1777. P. À. | Forsteri descriptionés añimalium tn ttinere ad maris Australis terras per annos 1772-74 suscepto observatorum, edidit H. Lichtenstein. In-8°, 1844. 12 ALPH. MILNE EDWARDS. Lesueur (1); par Dumont d'Urville (2), par Wilkes (3), et par James Clark Ross (4), nous possédons de nombreux renseigne- ments précieux recueillis par les chasseurs de Phoques. Plusieurs de ces hardis marins, guidés par des intérêts commer- ciaux, ont fouillé ces parages dans toutes les directions et ont consigné dans leurs narrations une multitude de faits très-1m- portants pour l’étude de la zoologie géographique. La plupart de ces observations sont dues à des navigateurs américains. Vers la fin du siècle dernier, Amasa Delano entra dans cette voie de découvertes (5), et il y fut bientôt suivi par Edmond Fanning (6) et par Benjamin Morrell (7). La marine anglaise a fourni aussi son contingent, grâce à James Weddell (8), et à cette liste on aurait dû probablement ajouter un nom français, celui de Kerguelen, si les persécutions injustes dont cet explo- rateur fut l’objet à son retour en Europe n'étaient venues dé- tourner son attention des résultats scientifiques obtenus par la découverte des terres auxquelles son nom est resté attaché. La mer, comme chacun sait, occupe la presque totalité de (1) Voyage et découvertes aux terres australes, rédigé en partie par Péron et continué par Freycinet. 2 vol. in-4°, 1816. (2) Voyage au pôle sud sur les corvettes L'ASTROLABE et LA ZÉLÉE, pendant les annees 1837, 1838, 1839, 1810, sous le commandement de Dumont d'Urville. (3) Narrative of the United States exploring Expedilion during the years 1838, 1839, 1840, 1841 and 1842, by Charles Wilkes, Commander of the expe dition. 5 vol. in-4° (t. IT, 1844). (4) À Voyage of discovery and research in the Southern and Antarctic regions during the years 1833-43, by Captain sir James Clark Ross. 2 vol. in-8°, 1847. (5) A. Delano, À Narrative of voyages andtravels in the Northern and Sou- thern hemispheres, containing three voyages round the World, together with a Voyage of survey and discovery in the Pacific Ocean and oriental Islands. Je cite cet ouvrage d’après la seconde édition publiée à Boston, en 1818. (6) Voyages round the World, with selected sketches of voyages to the South seas, North and South Pacific Ocean, China, etc., performed under the com- mand and agency of the author, ete., by E. Fanning. In-8°, London, 1834. (7) A Narrative of four voyages in the South sea, North and South Pacific Ocean, Chincese sea, Ethiopic, and Southern Atlantic Ocean, Indian and Ant- arctic Ocean, from the years 182% to 1831, by B. Morrell. In-8°, New-York, 1832. (8) À Voyage towards the South pole performed in the years 1822-24, con- laining an Examination of the Antarctic sea to the 14th degree of latitude, by J. Weddell. In-8&, London, 1825. ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 13 l'immense zone comprise entre les régions tropicales etle cercle glacial antarctique; versle nord elle est divisée en trois parties par l'Amérique, l'Afrique et l'Australie, et dans les points inter- médiaires elle se continue dans l’océan Atlantique, dans la mer des Indes et dans l’océan Pacifique ; de loin en loin elle est jalonnée par quelques ilots, et au sud elle s’'avance beaucoup. Des glaces infranchissables ont rendu l’exploration impossible dans la plus grande partie de la région qui avoisine immédiate- ment le pôle austral, mais sur quelques points on à pu la tra- verser et atteindre des terres dont l'étendue est considérable et dont la connaissance est importante pour l’étude de la zoologie géographique. Fort loin au sud de l’Australie, par delà le 66° parallèle, ces terres constituent un continent ou un groupe d'îles qui s’éten- dent de l’est à l’ouest sur une grande longueur. L'une d’elles est la terre Adélie, découverte en 1840 par Dumont d’'Urville. Au couchant, elle se relie au continent de Wilkes, qui, à son tour, pourrait bien être en connexion avec la terre d'Enderby, située à peu près sous le méridien de Madagascar. A lorient, la terre Adélie est contiguë à la terre Victoria, dont la découverte est due à James Clark Ross. La côte de cette dermière contrée, si- tuée sous le méridien de la Nouvelle-Zélande, remonte d’abord versle pôle, puis se dirige à l’est, et parait se prolonger fort loin dans cette direction sous le 78° degré de latitude. Il est pro- bable que, de ce côté, le continent ou archipel antarctique s'étend jusque dans le voisinage d’autres terres qui, placées sous le méridien du cap Horn, descendent beaucoup plus bas et semblent conduire de la région polaire à l'archipel feu- gien ou magellanique et aux îles Falkland. Ce sont la terre d'Alexandre, la terre de Graham, la terre de Palmer, la terre Louis-Philippe, les îles Shetlands australes ou Nouvelles- Shetlands du Sud, les Orkneys du Sud. J'aurai souvent à parler d’une manière collective de ces petits archipels qui, au point de vue géographique, semblent être des annexes de l'extrémité australe du continent améri- 14 ALPH. MILNE MDWARDS. cain, et afin d’éviter les circonlocutions, je les appellerai les terres atlantiques du Sud ou terres antarctiques américaines. Plus loin, à l’est, la mer a été trouvée navigable jusqu’à la hauteur du 75° parallèle; mais il importe de noter que, plus au nord, la route entre les îles Falkland et la Nouvelle-Zélande, par l'Océan, est pour ainsi dire jalonnée par la Géorgie australe, le groupe des îles Sandwich, l’île Bouvet, lile de Tristan- d’Acunha, le cap de Bonne-Espérance, l'ile du Prince-Édouard, la terre de Kerguelen, les îles Crozet, les îles de Saint-Paul et d'Amsterdam, la Tasmanie, situées à de grandes distances les unes des autres, tandis qu'entre la Nouvelle-Zélande et le cap Horn, on ne rencontre à peine que quelques îlots au milieu d’un vaste Océan qui remonte bien au sud du cercle polaire. Enfin, au sud de la Nouvelle-Zélande, dont l’île Stewart forme l'extré- mité australe, on rencontre successivement l’île Auckland, l'ile Campbell, l'ile Macquarie, l'ile Émeraude, qui semblent relier la première de ces terres au continent antarctique dont j'ai fait choix comme point de départ dans l’énumération queJe viens de faire. J’insiste sur ces faits géographiques, parce que j'aurai à les invoquer plus d’une fois dans l’examen des causes auxquelles on peut attribuer le mode actuel de distribution des espèces. ç 2. Le chimat, sous ces latitudes élevées, est extrêmement rigou- reux dansles îles dont je viens'de parler. Le froid, tout en s’éten- dant plus vers la zone équatoriale que dans le voisinage du cercle glacial boréal, est cependant moins intense, circonstance qui s'explique facilement par la prédominance des mers et la grande division des terres dans toute la partie extratropicale de l'hémisphère austral. Les brouillards épais et fréquents dimi= nuent le rayonnement nocturne, et en été les courants froids venant des glaces circompolaires rafraichissent l'air aussi bien que la mer. La température y est donc très égale aux différentes saisons, et elle ne varie même que peu du nord au sud dans la plus grande partie de la zone dont l'étude nous occupe ici. ARTICLE N° 9, FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 45 Dans le voisinage des glaces, la végétation terrestre y est très faible, et plus loin, vers le sud, elle paraît manquer complète- ment; mais, dans les parties tempérées de cette région, elle de- vient remarquablement abondante, tout en restant peu variée. Un botaniste éminent qui avait accompagné le capitaine Ross dans son voyage d'exploration vers le pôle sud, M. le doc- teur Hooker, en a fait une étude approfondie (4). Il me pa- raîtrait superflu de rappeler ici les faits enregistrés par ce savant; mais dans plus d’une eirconstance j'aurai à signaler l'accord qui se manifeste entre les résultats auxquels il est arrivé et ceux qui se déduisent de l'étude de la faune antare- tique. La végétation sous-marine est des plus abondantes dans presque toutes les parties de la zone comprise entre Le 44° degré de latitude $. et les glaces qui entourent le pôle austral. Dans la portion sud-est de l'océan Pacifique, où la profondeur de la mer est énorme, cette végétation paraît manquer; mais dans les parties correspondantes à l'océan Atlantique et à l'océan Indien austral, elle est plus vigoureuse que sur tout autre point du globe, et elle constitue un des traits les plus caracté- ristiques de cette région essentiellement pélagienne. Cette circonstance nous permettra de comprendre comment il se fait que la région antarctique, inhabitable pour les ani- maux constitués de façon à se nourrir des produits du sol, puisse être peuplée non-seulement d’une multitude d’Inverté- brés marins, mais aussi de beaucoup de Vertébrés nageurs ou d’Oiseaux grands voiliers, qui vivent des produits de leur pêche. _ En effet, nous savons que les végétaux possèdent seuls la fa- culté de former de toutes pièces les matières organisables dont la substance de tout être vivant est constituée, et de se nourrir avee de l’eau, de l’acide carbonique, des sels ammoniacaux et d’autres corps appartenant au Règne minéral. Ce sont les plantes qui fournissent directement aux animaux les ali- (1) Flora antarctica (the Botany of the Antarctic voyage of discovery H. M. Ships EREBUS and TERROR èn the years 1839:1843), 2 vol: in-4°. 16 ALPEE. RMIILNI EDVWVARDS. ments plastiques et combustibles dont ces êtres ont besoin pour le développement de leurs organes, ainsi que pour l’en- tretien de la combustion respiratoire. Par conséquent, dans une grande région où la terre est stérile, comme c’est Le cas dans le voisinage du pôle austral, l'existence d'animaux terres- tres ou amphibies doit dépendre de celle d’aninaux marins, et l’existence de ces derniers est subordonnée à celle de plantes marines. On comprendra donc que tout en voulant borner mes études à la faune de l'hémisphère austral, je suis obligé de tenir grand compte de la végétation sous-marine de cette partie du globe, et pour cette raison il me semble nécessaire d’entrer dans quelques détails relatifs à la flore pélagienne de l'océan Antarctique. On sait par les observations de beaucoup de voyageurs, et surtout par les importantes recherches de M. Hooker, que dans diverses parties de la région australe le fond de la mer estcom- parable à un imimense champ de pâturage, ou plutôt à une vaste forêt submergée. Les Algues, après s'être élevées à de grandes hauteurs, se détachent du sol et vont flotter à la surface de la mer, sans cesser de vivre, et forment ainsi des amas com- parables à ces banes de Surgasse constitués par le Fucus na- tans, et qui recouvrent certaines parties tropicales de océan Atlantique, mais dont l’étendue est beaucoup moindre. Les marins désignent ces, plantes marines australes sous le nom de Kelp; elles consistent essentiellement en deux espèces voisines des Laminaires de nos mers, le Macrocystis et le Durvillea. | | Le Macrocystis est le plus long des végétaux connus; quel- ques navigateurs assurent en avoir trouvé qui mesuraient plus de 300 mètres. Il y a peut-être dans cette évaluation une cer- taine exagération; mais M. Hooker, dont le témoignage ne sau- rait être révoqué en doute, nous apprend qu'aux environs des iles Crozet, ses compagnons de voyage purent se procurer un échanullon de cette singulière plante dont la longueur était d'environ 700 pieds, c’est-à-dire plus de 230 mètres. Elle adhère au sol sous-marin par sa base et ne croit que dans des ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 47 eaux médiocrement profondes. Les frondes ne se multiplient que vers sa partie inférieure ; mais celles-ci, sans grossir beau- coup, s’allongent presque indéfiniment, et après être arrivées à la surface de la mer, elles flottent sur l’eau sans se détacher du fond, jusqu’à ce que la traction déterminée par les vagues, ou par la différence de densité entre la substance végétale et le liquide ambiant, détermine leur rupture. Alors elles vont à la dérive, tout en continuant à croître par leur extrémité, s’entremêlent et constituent des banes flottants d’une immense étendue. Cette Algue gigantesque peut être transportée très loin, et elle occupe de la sorte tout le tour du globe entre les glaces circompolaires australes, le cap de Bonne-Espérance, l'Australie et la partie sud de l'Amérique méridionale. Mais ses principales stations de reproduction sont situées dans les mers peu profondes qui avoisinent d’une part Kerguelen et les Crozet; d'autre part le cap Horn et les îles adjacentes, les iles Falkland et les autres îles américaines australes. Aux îles Feugiennes, à Kerguelen et sur quelques autres points, les baies sont tellement encombrées par les débris de ces Fueus entremêlés et roulés par les vagues, que les embarcations ont peine à aborder, et dans les parties de l’océan Austrai où les courants forment de grands remous ou circonscrivent des ré- gions calmes, les bancs de Fucus charriés par ces courants s'accumulent sur des espaces d’une étendue parfois immense. Ainsi, depuis le cap de Bonne-Espérance jusque sous le méri- dien de l’extrémité ouest de l'Australie, entre le 40° degré de latitudeS. et les glaces eircompolaires, les Fucus flottanis sont si abondants, que les marins donnent à cette partie de Pocéan Austral le nom de mer de Kelp. On rencontre des bancs analo- gues un peu à l’est de la Nouvelle-Zélande; mais entre ce point et le méridien du cap Horn, l’océan Pacifique paraît être sté- rile, et c’est depuis le cap Horn jusqu'aux Nouvelles-Shetlands australes que le Kelp se montre de nouveau en abondance. Dans la portion atlantique de l'océan Austral, la limite nord : de la région occupée par le Kelp ne dépasse guère le parallèle du cap de Bonne-Espérance. Mais le long de la côte occidentale 19. 48 ALPH. NMEILNE EDWARRPS. de l'Amérique, là où le courant de de Humboldt longe le Chili, le Pérou, baigne les Galapagos et s’avance presque à la rencontre du courant en sens contraire qui va du pôle arctique vers l’équateur, le Macrocystis est entraîné plus Join, et il s'étend même du cercle glacial austral à la région circom- polaire boréale. _ Jusqu'à ce que M. Hooker eût fait de ces Fucus nageurs une étude approfondie, les botanistes avaient cru devoir les consi- dérer comme constituant plusieurs espèces différentes (1); mais les recherches de ce savant tendent à démontrer que ces distinctions ne sont pas fondées, et ne reposent que sur des particularités de formes offertes par des variétés d’une espèce unique. Le Durvillea, qui contribue aussi à la formation des banes de Kelp, estun Fucus qui ne s’allonge pas comme le Macrocystis, mais dont les frondes atteignent une grosseur énorme et sont parfois tellement pesantes, qu'un homme vigoureux peut à peine les soulever. Il accompagne partout le Macrocystis, et il abonde sur les côtes du Chili ainsi qu'aux îles Feugiennes, aux îles Falkland, aux îles Crozet, à Kerguelen, et aux environs de l’extrémité sud de la Nouvelle-Zélande; les courants le portent jusqu'au cap de Bonne-Espérance, mais 1l ne parait pas habiter les côtes du continent africain. | D’autres Algues égalèment très remarquables vivent autour des îles dont je viens de citer les noms et sérvent aussi de re- fuge aux Mollusques, aux Crustacés et à une multitude d’au- tres animaux marins. Tels sont les Lessonia, Fucus arbores- cents dont le tronc, qui a souvent la grosseur de la cuisse d’un homme, atteint plus de 3 mêtres de haut et se couvre de branches terminées par des frondes comparables à des feuilles. Le nombre des espèces différentes qui appartiennent en propre à la région antarctique est très considérable, et je dois faire observer que parmi ces plantes marines, on rencontre (1) On en comptait jusqu’à dix espèces nominales. ARTICLE N° Ÿ. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 19 des Laminaires qui paraissent ne différer en rien du Lami- naria fascia des mers de l’Europe (1). Tous ces Fucus ne vivent pas dans les eaux profondes; pour prospérer, il leur faut un fond rocheux recouvert d’une couche d’eau dont l’épaisseur ne dépasse guère 24 mètres, et, ainsi que nous le verrons dans une autre partie de ce travail, il existe des relations remarquables entre la distribution géogra- phique de ces plantes marines et celle des divers animaux pélagiens dont nous allons nous occuper. $ 3. La faune des parties froides de l’hémisphère sud présente tout autour du globe une grande uniformité. Riche en individus, elle est pauvre en espèces ; mais elle est pourvue d’un nombre considérable de types organiques qu’on ne rencontre pas ailleurs, si ce n’est dans quelques régions adjacentes où ils paraissent s’être étendus. Plusieurs de ces formes zoologiques spéciales sont des plus remarquables; aussi la faune antarctique est-elle, comme je l’ai déjà dit, bien carac- térisée, car elle se distingue par l’absence de certains types im- portants, aussi bien que par la possession exclusive de ceux dont je viens de parler. Partout où cette faune est restée pure, les Vertébrés essen- tiellement terrestres paraissent manquer complètement, ou n’exister qu'en très petitnombre. Ainsi les Mammifères, qui ne sont organisés ni pour la natation, ni pour la locomotion aérienne, font défaut dans presque toutes les parties de cette région où l'Homme ne les a pas introduits, et leur absence ne saurait être attribuée, ni au climat, ni au défaut de moyens d'existence. En effet, les Quadrupèdes domestiques qui ont été abandonnés sur divers points de la région antarctique par les navigateurs y sont redevenus sauvages et y ont prospéré d’une manière remarquable. Ainsi, aux îles Falkland, où les marins de Saint-Malo fondèrent en 1769 une petite colonie, mais ne (1) Hooker, op. cit., t. IE, p. 466. 20 ALP. RSILNE EDVVARDS. purent se maintenir que peu d'années, par suite de la jalousie inintelligente du gouvernement espagnol, les animaux domes- tiques abandonnés par nos compatriotes 1l y a un siècle ont beaucoup prospéré, grâce à l'absence de l'Homme, et sont devenus assez nombreux pour constituer une ressource alimen- taire fort prisée des navigateurs. La petite île de Tristan-d’Acunha, isolée au milieu de l'océan Atlantique austral, à mi-chemin entre l'Amérique et le cap de Bonne-Espérance, nourrit des Chèvres que nos navires y ont transportées ; ces animaux y sont retournés à l’état sauvage et sont devenus assez nombreux pour être un Fi ordinaire de chasse. Les îles Crozet nous offrent un exemple encore plus remar- quable de cette acclimatation facile des Mammifères sur les terres australes, qui primitivement n'étaient habitées par aucun animal de cette classe. En 1834, un marin anglais nommé Dacres déposa sur un de ces îlots déserts, appelé aujourd’hui Pig island, quelques Cochons, et en moins de six ans ces animaux s’y étaient multipliés d’une manière si étonnante, que les chasseurs de Phoques les abattaient non seulement pour leur nourriture quotidienne, mais pour la confection de salai- sons destinées à l’approvisionnement de leursnavires. En 1840, les Cochons étaient devenus si nombreux dans cette île, qu'au dire des matelots, ils y rendaient le débarquement difficile (1). Je citerai également à ce sujet ce qui s’est passé à l’île Auckland ; mais c’est surtout à la Nouvelle-Zélande que l’in- troduction des Mammifères a profondément modifié le carac- ière de la faune, et J'aurai l’occasion de revenir sur ce sujet dans une autre partie de ce travail. Nous verrons aussi que les RTE pélagiens abondent jusque dans les parties les plus reculées de cette région; mais ce sont principalement les Oiseaux qui caractérisent la faune dont l'étude nous occupe ici, et par conséquent j’exposerai d'abord les remarques que suggère la distribution géogra- phique de ces animaux. (1) Voy. Ross, op. cit.,t. I, p. 53 et 54. ARTICLE N° 9, FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 91 SECONDE PARTIE. FAUNE AVIENNE DE LA RÉGION ANTARCTIQUE. CHAPITRE PREMIER. NOTIONS GÉNÉRALES. Les Oiseaux aquatiques abondent non seulement dans les parties tempérées de la région australe, où les marins les voient sans cesse tournoyant autour de leurs navires, mais aussi dans la zone glaciale, jusque dans le voisinage du pôle; et pour donner une idée de leur abondance sous ces hautes latitudes, il me suffira de citer un fait enregistré par Le capitaine Ross, si justement célèbre par ses découvertes dans les mers antarcti- ques. Naviguant au sud de l'océan Pacifique, au delà du 57° pa- rallèle, loin de toute terre et près des glaces circompolaires, Ross vit un jour des troupes nombreuses d’Oiseaux pélagiens qui passaient au-dessus de sa tête, se dirigeant vers le nordi; ils étaient si serrés entre eux, que la lumière du soleil en était obscurcie : une de ces bandes avait environ 4 kilomètres de large, et sa longueur était si grande, qu’on ne pouvaitla me- surer des yeux; mais en calculant d’après la rapidité du vol et la durée du défilé, on l’évalua à 10 ou 15 kilom., peut-être même davantage (1).Cela suppose des centaines de milliers d’in- dividus; car ces émigrants, que l’on considère comme étant de jeunes Pétrels, n'étaient guère plus gros que nos Pigeons. L'étude des Oiseaux des régions australes jette beaucoup de lumière sur plus d’une question de zoologie géographique. Au premier abord, on aurait pu croire que des animaux doués de moyens de locomotion si puissants, aptes le plus souvent à franchir au vol de grandes distances et capables de supporter sans inconvénient des variations de température très consi- (1) Ross, Voyage of discovery and research in the Southern Antartic regions, t. I, p. 135 (1874). ANN. 8C. NAT., ZOOL., MAI 1819-80. 1x. 19: —'aRr N°9 22 ALPH. MILNE EDWARDS. dérables, seraient peu propres à nous éclairer sur la position et les limites des foyers zoologiques ou centres de création Mais il en est tout autrement : les Oiseaux contribuent plus que les animaux d’aucune autre classe à marquer les diffé- rences profondes qui existent entre l’ensemble des faunes de l'hémisphère sud et les faunes qui Forme spéciale- ment à l’hémisphère boréal. Le domaine de certains types ornithologiques est nettement délimité; et, chose non moins importante à mettre enévidence, l'existence de plusieurs de ces formes organiques spéciales dans une région déterminée coïncide avec celle de représen- tants d’autres types appartenant, soit à la même classe, soit à d’autres grandes divisions du Règne animal. Ainsi, pour carac- iériser en peu de mots la faune qui appartient essentiellement aux régions antaretiques, ilsuffirait de dire qu’elle se compose prinei hot des Apténodytiens ou Manchots (1) et des autres Vertébrés qui semblent former le cortège ordinaire de ces singu- liers Oiseaux. Je citerai parmi ceux-ci les Albatros et quelques genres où espèces du même groupe naturel, divers Procella- riens et certains grands Mammifères aquatiques de la famille des. Phoques, tels que le gigantesque animal désigné par les navigateurs anglais sous le aom d’ Éléphant marin (Leptonyx de Weddell ou idea marin), Otarie à crinière des matelots, et l’Otarie de Falkland, si recherchée pour le commerce de la pelleterie; enfin des Cachalots et des Baleines d’espèces particu- lières. Cette faune antarctique ne se présente pas sans mélanges avec les produits d’autres foyers zoologiques dans toute l'étendue de la zone froide ou tempérée de l’hémisphère austral ; mais, dans la plus erande partie de cette région, elle existe seule. Ge que je vais en dire s’appliquera done particulièrement à la por- tion de la surface du globe où elle domine. Mais, afin d’en rendre l'examen plus fructueux, je crois devoir la suivre partout où elle semble s'être étendue, et négliger pour le moment les dis- (4) Cela est si vrai, qu'il a suffi de ce fait pour porter M. Pelzeln à admettre rexistence d’une faune antarctique spéciale, dont la limite au nord serait le tro- pique du Capricorne. ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 23 tinctions géographiques qu’il est cependant nécessaire d’établir dans ces régions, lorsqu'on prend en considération l’ensemble de leur population zoologique. Ainsi la Nouvelle-Zélande pos- sède une faune terrestre spéciale, mais elle est fréquentée aussi par des représentants de divers types pélagiens qui ap- partiennent essentiellement à la faune antarctique, et par con- séquent il me faudra en tenir grand compte ici. Aux îles Falkland il y a aussi des mélanges dus à la proximité de la faune américaine ; cependant lestraits principaux de la création antarctique n’y sont pas affaiblis, et, lorsque je traiterai des relations qui, dans cette partie du globe, ont dû s’établir entre les produits naturels de deux foyers zoologiques voisins, il me sera facile de fournir les preuves d'échanges de cet ordre. Pour simplifier l'examen des questions très complexes dont je cherche la solution, je laisserai provisoirement de côté ces détails. Pour linstant, je ne m’occuperai que des caractères généraux de la faune antarctique, et dans cette vue j’exami- nerai successivement le mode de distribution géographique des représentants de chacun des principaux types organiques qu'elle nous offre. CHAPITRE IT FAMILLE DES MANCHOTS. : $ 4. La famille des Manchots ou Apténodytiens, appelés Pin- gouins (4) par les navigateurs, constitue le groupe lé plus sin- gulier de la classe des Oiseaux; je dirai même le plus anormal, s’il était permis d'appeler ainsi une forme zoologique qui n’est pas en désaccord avec les lois générales de la nature, bien qu’elle diffère beaucoup de tout ce que nous sommes accou- (1) Ge nom, appliqué d’abord aux Manchots par les navigateurs espagnols et motivé par la quantité de graisse dont ces Oiseaux sont chargés (Penguigo), a été ensuite étendu à tous les Oiseaux pélagiens à ailes très courtes, et enfin ré- servé parles zoologistes aux Alca et aux autres Brachyptères du même groupe qui habitent les mers du Nord. 9 ALP. MELNE EDWARIES. tumés à voir (41). En effet, ce sont des animaux pour lesquels le vol est complètement impossible. Leurs ailes, dépourvues de pennes et garnies seulement de petites plumes analogues à des écailles, constituent de larges palettes pendantes et res- semblent d’une manière frappante aux nageoires des Dauphins. La marche leur est difficile; ils sont plantigrades, et lors- qu'ils cherchent à courir, ils s’aident parfois de leurs moignons d’ailes comme d’une seconde paire de jambes (2); leurs pattes diffèrent de celles des Oiseaux ordinaires par la structure de leur charpente osseuse; enfin leurs mœurs sont non moins remarquables que leur conformation. Ils vivent presque tou- jours en mer; ils y nagent avec une facilité extrème, et les na- vigateurs nous disent qu’au premier abord, en les voyant filer entre deux eaux, par bandes nombreuses, on croirait avoir sous les yeux une troupe de petits Phoques. Ils se nourrissent de poissons ou d’autres animaux marins, et à l’époque de la ponte ils s’établissent à terre en nombre incalculable, pour y couver leurs œufs et y élever leurs petits. Ordinairement ils nichent sur le sol, dans des excavations peu profondes ou dans de petits terriers, et leurs habitations agglomérées, mais alignées avec régularité et séparées entre elles par des allées soigneusement nivelées, couvrent souvent plusieurs hec- tares. Les voyageurs désignent sous le nom de rookeries (3) ces . (1) Pour donner une idée de l’aspect singulier de ces animaux, Quoy et Gai- mard les appellent des « Oiseaux-poissons » (Remarques sur les Oiseaux péla- giens, dans Ann. des sc. nat.,1825,t. V,p. 148). Et un voyageur du dix-septième siècle les dépeint dans les termes suivants : « Ils sont un mélange de la bête, de l’Oiseau et du Poisson, mais c’est de l’Oiseau qu’ils se rapprochent le plus. » (Ch. Roe, Journal, etc., in Churchills Collection of voyages, vol. I, p. 196.) (2) Buffon signale ce genre de locomotion d’après le voyageur Pages (Hist. nat., OISEAUX, t. IX, p. 407, édit. de Lamouroux et de Desmarest), et plus récemment Ross eut l’occasion de constater un mode de progression analogue en voyant des matelots faire la chasse du Manchot de Forster sur des glaces couvertes de neige (Ross, 0p. cit., t. IE, p. 159). Cunningham l’a observé aussi sur la côte sud de la Patagonie (Notes on the Natural History of the strait of Magellan, 1871, p. 271). (3) Cette expression, d'origine anglaise, signifiait seulement dans l’origine un ensemble de nids construits par les Freux (ou Rooks); mais depuis longtemps les navigateurs des mers australes l’appliquent aux lieux de campement où non ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 95 lieux de reproduction et les comparent au campement d’une armée. Enfin, sous tous les rapports, les Manchots difièrent tant desautres Oiseaux, qu’un zoologiste éminent, Isidore Geof- froy Saint-Hilaire, a cru devoir les considérer comme formant non seulement-une famille particulière, mais même une sous- classe dans laquelle aucun autre représentant du type avien ne prendrait place (1). L’une des principales stations occupées par les Manchots est le groupe des îles Falkland, ou îles Malouines (2). Ce fut dans le voisinage de ce petit archipel, sur un îlot de la côte est de la Patagonie, que les navigateurs les remarquèrent pour la première fois. Les Hollandais les y signalèrent à l’attention des naturalistes dès 1598 (3), et aujourd’hui encore on trouve réunies à Falkland près de la moitié des espèces ou races par- ticulières dont l’existence a été constatée dans l’ensemble des régions habitées par ces Oiseaux (4). Ils ont établi là, pour l’in- cubation de leurs œufs et l’élevage de leurs petits, plusieurs de ces grandes agglomérations de nids grossiers dont je viens de faire mention. Les Manchots habitent aussi divers points de Parchipel feugien ou magellanique (5), ainsi que la côte du continent seulement les Manchots, mais aussi les Phoques, se réunissent en grandes bandes pour l’élevage des jeunes. (1) Voyez Lemaout, Hist. nat. de Oiseaux suivant la classification de M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire, 1855, p. 40. (2) Voyez la carte ci-jointe, n° 1. (3) Clusius, Exoticorum libri, 1605, p. 101. (4) Bougainville, Voyage autour du monde de la frégate LA BOUDEUSE, 1765, p. 69. — Garnot, Remarques sur la zoologie des îles Malouines (Annales des sciences naturelles, 1826, t. VIL,:p. 50). — Fanning, Voyages round the World, 1834, p. 87. — Gould, Exhibition of a series of Pinguins (Proceedings of the Zoological Society of London, 1860, p. 418). — Abbott, On the Birds of the Falkland islands (Ibis, 1861, t. INT, p. 149). — Sclater, Report on Lecomte’s expedition to Falkland islands (Proceedings of the Zoological Society of Lon- don, 1868, p. 527). (5) Forster, Voyage round the World, 1871, t. IE, p. 519.— Morell, op. cit, p. #5. — Cunningham, op. cit.— L’amiral Serres, Notes manuscrites accompa- gnant une collection ornithologique envoyée récemment au Muséum d'histoire naturelle. 26 AËLPE, MILNE KDWARDS. adjacent, les terres de Palmer (1) et de Louis-Philippe (2), la Géorgie australe (3) le petit archipel de Sandwich austral (4), l'ile de Tristan-d’Acunha (5), quelques roches isolées situées près de la côte du cap de Bonne-Espérance (6). Ils abondent à Pile du Prince-Édouard (7), aux îles Crozet (8), aux îles de Kerguelen (9), de Saint-Paul (10) et d'Amsterdam (44). On en voit également sur les côtes de lPAusiralie et de la Fasma- nie (42), à la Nouvelle-Zélande (13), à Pile Auckland (44), à l'ile Campbell (15), à l'ile Macquarie, (46) à la terre Adélie (47) (1) Fanning, op. cit., p. 439. (2) Dumont d'Urville, Voyage au pôle sud, t. I, p. 153, — Ross, op. cil., t. If, p. 42. (3) Cook, Voyages dans l'hémisphère austral et autour du monde, t:1V; p: 86. (4) Notamment à l’île du Prince, située par 55° 55" latit: S. et 27° 53 longit. O. du méridien de Greenwich (Fanning, op. cit., p. 443). (5) Carmichael, Some Account of the isiand of Tristan-d'Acunha (Trans. Linn: Soc.; 1887, t. IX, p. 497). — Earle, Narrative of a residence in the island of Tr istan-d'Acunha. da don, 1832, in-8°. (Imprimé dans l'ouvrage intitulé : À Narrative of nine months residence in New-Zealand, ». 336 et 557.) (6) Layard, Birds-of South Africa, p. 376. (7) Ross, en;passant près de cet îlot, a vu la côte occupée par un nombre im- mense de ces Oiseaux réunis par groupes, dont chacun comprenait plusieurs milliers d'individus, op. cit., édit. in-8°, t. I, p. 46). (8) Ross, op. cil., t. I, p. 49. — À. Verreaux, Observations sur les mœurs d’un grand nombre d’ Oiseaux (Magasin de zoologie de Guérin,51847, p.241). (9) Ross, op. cit., t.[, p. #8. — Mac Cornick, Remarks on the Birds of Kerguelen’s Land (Proceed. of the Royal Society, 1841, t. IV, p.98). | -— Kidder, op. cit. (Bull. ofthe United States National Museum, n° 2, p. 39). — Sharpe, op. cit. (Philos. Trans., 1879, t. CLXVIN, p. 153). (10) Pelzeln, Novara Expedition, Zoologischer Theil, Bd. 1, Vôgel, p. 140. — Velain, Recherches sur la faune des îles Sarnt- PA ei ASS 1878, p. 56. (11) Péron, Voyage aux terres australes. (12) Gould, Birds of Australia, t. VII. (13) Dieffenbach, Travels in New-Zealand, t. I, p. 199. (14) Hombron et Jacquinot, Ann. des sc. nat., 2° série, 1841, t. XVE, P- 320. (45) Collections données au Muséum par M. H. Filhol. * Bennett, Proceed. Zool. Soc., 1834. “lkes, Exploring Exped. of he United States (Narrative, t. ul, p. 305). hron et Jacquinot, Voyage au pôle sud, Zoor., t. LE, p. 156. WHEN 97 FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 97 et à celle de Wilkes (1); mais c’est surtout plus au sud qu’ils se trouvent en nombre incalculable. Ross en a vu des troupes immenses sur les glaces qui bordent la terre Victoria, jus- qu’au delà du 76° degré de latitude australe, où l’on ne ren- contrait plus aucune trace de végétation, Sur une des îles dé- pendantes du continent antarctique les Manchots, serrés les uns contre les autres, couvraient toutes les rampes des rochers aussi bien que les montagnes de glace. La fiente qu'ils y avaient accumulée constituait un riche dépôt de guano dont l’exploi- tation, ajoute ce navigateur, pourrait être profitable aux agri- culteurs de PAustralie. Les récits du capitaine Ross, toujours scientifiques et exempts d’exagération, inspirent au lecteur une confiance entière ; or c’est par myriades qu’il évalue les légions réunies ainsi sur un seul point auquel il donne le nom de Possession island (2). Ainsi partout où les explorateurs ont pu pénétrer en s’avan- cant vers le pôle austral, on arencontré ces oiseaux singuliers, et c’est mème dans les parties les plus froides de la région antaretique qu'ils semblent pulluler le plus. Ils s'étendent sur la zone tempérée de l’hémisphère sud, tout autour du globe, mais ils ne pénètrent qu'accidentellement dans les régions chaudes adjacentes (3). Leur extension vers le nord semble être (1) Wilkes, op. cit. (Narrative, t. IT, p. 345, 865 et 369). — Gray, Voyage of the EreBus and Terror, Birds, p. 17. (2) Ross, op. cit., t. E, p. 189. Une représentation de cet immense campement a été donnée par Ross, en tête du chapitre vit de son récit (op. cit., t. I, p. 165). (3) Quelques ornithologistes font mention de l'ile de l’Ascension comme étant une des stations-fréquentées par les Manchots ; mais cette indication me paraît résulter d’une singulière erreur de traduction commise par le rédacteur d’un recueil scientifique de Allemagne intitulé Notizen aus der gebieder Natur und Heildkunde et publié par Froriep. Effectivement, en rendant compte des observa- tions d’Earle sur les Albatros et les Manchots ou Pingouins (t. XXXIV, p. 177, août 4832), on les dit avoir été faites à l'ile de l’Ascension, tandis que c’est à l'ile de Tristan-d’Acunha que ce voyageur a séjourné, et ce sont les rookeries de cette localité qu’il décrit. Froriep n'indique pas d’où il a tiré la relation qu’il sou- met à ses lecteurs, mais il suffit de la comparer à celle donnée par Karle dans son voyage intitulé : A Narrative of nine months residence in New-Zealand in 1827, together with a Journal of residence in Tristan-d'Acunha, London, 1842, p. 357, pour en reconnaitre l’origine. D'ailleurs Earle ne visita pas l’ile de lAs- 28 ALPEE. MELNE KDPUWARDS. limitée par des conditions de température, car la seule partie du monde où ces Oiseaux nageurs atteignent l’équateur est le petit archipel des îles Galapagos (4); or, dans cette région de l’océan Pacifique, les courants froids qui viennent du ie sud et qui baignent les côtes du Chili font encore sentir leur influence d’une manière très-notable, et la mer est beau- coup moins chaude que dans le reste de la zone intertro- picale. Pour s’en convaincre, 1l suffit de jeter les yeux sur unecarte où les diverses stations occupées par les Manchots se trouvent indiquées (2), et de tenir compte des lignes isothermales ma- rines. Mais il est évident que ce n’est pas le climat seulement qui règle la distribution générale de ces Oiseaux à la surface du globe, car on ne les rencontre nulle part dans l'hémisphère nord. Il existe bien dans la région circompolaire boréale un nombre considérable d’autres Palmipèdes qui ont à peu près cension, tandis qu'au contraire il JEU na longtemps à Tristan-d’Acunha. Cette erreur Séographique est grave et n’a pas encore été relevée. Il est moins facile de s’expliquer comment Sonnerat a pu attribuer à la Nou- vélle-Guinée lestrois espèces de Manchots dont ce voyageur a donné la descrip- tions et les figures (Voyage à la Nouvelle-Guinée, 1776). Il est bien avéré aujourd’hui qu'aucun Oiseau de cette famille n’habite cette île, où Sonnerat place également le Secrétaire, type fort remarquable dont les représentants ne se trouvent de nos jours qu’en Afrique. Il est probable que, dans les collections for- mées ou achetées par ce voyageur, il y a eu diverses transpositions d'étiquettes. J’ajouterai que ces trois Manchots indiqués par Sonnerat comme provenant de la Nouvelle-Guinée habitent les îles Crozet et la terre de Kerguelen, ainsi qu’on peut s’en assurer par les descriptions des Oiseaux de cette station données dans la relation du voyageur Cook (Voyage to the Pacific Ocean in 1776-1780, t. I, p. 87), et par les collections formées dans cette localité par les naturalistes des expéditions astronomiques de 1874. M. Schlegel a insisté avec raison sur les erreurs géographiques comnises par cet auteur qui n’est pas allé à la Nouvelle-Guinée et n’a pas dépassé les îles Philippines (Schlegel, Hush d'histoire naturelle des Pays-Bas, Urinatores, p. 2). (1) L’existence de Manchots sur l’une des îles Galapagos (l’île James) a 2 contestée en 1852 par l’expédition suédoise de la frégate EUGÉNIE, commandée par le capitaine Virgin (Sundeval, On Birds from Galapagos islands, in Pro- ceedings of the Zoolog. Society of London, 1871, p. 124).— Voyez aussi O. Sal- vin, On the Avifauna of the Galapagos Archipelago Transactions of the Zoo- logical Society, t. IX, p. 508). (2) Voyez la carte ci-jointe, n° 1. ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 99 les mêmes formes extérieures et des mœurs analogues : ce sont es Alcidæ, qui, dans le langage ordinaire, sont désignés aussi sous le nom de Pingouins; mais la structure de ces Brachy- ptères n’est pas la même que celle des Apténodytiens, ils con- stituent une autre forme ornithologique, et ils ne sauraient être classés dans la même famille. Le type organique dont déri- vent les Manchots appartient donc essentiellement à la faune antarctique, et il en forme un des caractères les plus remar- quables. Il importe également de rappeler ici que l’apparition de la famille des Manchots dans la région antarctique n’est pas de date récente, et que c’est dans cette partie du globe seulement qu’on a découvert des preuves de lexistence de ces Oiseaux à des époques antérieures à la période actuelle. Quelques ossements fossiles trouvés à la Nouvelle-Zélande (1), dans le terrain calcaire de Kakaunui, qui date de l’époque pliocène ou qui est peut-être plus ancien, proviennent indubita- blement d’Oiseaux de ce groupe naturel. M. Huxley a reconnu que ces Manchots ressemblent aux Eudyptes plus qu’à tout autre type actuellement existant (2), mais qu'ils en diffèrent cependant assez pour motiver l’établissement d’une division générique particulière à laquelle ce savant a donné le nom de Palæeudyptes. À raison de la grande dispersion des Mandhets sur Îles terres antarctiques et de l’absence presque complète de colonies formées par ces Oiseaux dans les régions chaudes du globe, on peut considérer, ainsi que je l’ai déjà dit, la température comme étant la principale cause déterminante de la délimita- tion de l’aire géographique qu’ils occupent; cependant nous ne (1) Mantell, On the Remains of Birds from New-Zealand (Journ. of the Geol. Soc., 1879). @ Huxley, On a fossil Bird and a fossil Cetacea from New-Zealand (Proc. of the Geol. Soc., 1859, p. 670). — Hector, Ibis, 1872, p. 435, et On the Remains of a gigantic Pinguin (Palæeudytes antarcticus, Huxley) from the Tertiary rocks on the West coast of Nelson (Transactions and Proceedings of the New-Zealand Institute for 1871, t. IV, p. 341, pl. 17 et 18). 30 ALPH, MARNE RD\WVARDS. voyons en eux aucune particularité anatomique ou physiolo- gique qui nous explique pourquoi la chaleur est incompatible avec leur propagation. On comprend mieux le choix des sta tions où ils se sont établis. En effet, si l’on tient compte du mode d'organisation des Manchots et des nécessités biologiques auxquelles ces Oiseaux sont soumis, on comprend facilement pourquoi ils se trouvent dans certains lieux de campement et pas ailleurs. Pour pros- pérer, 1l leur faut à la fois une abondante nourriture et une grande sécurité ; vivant de pêche et ne pouvant ni voler ni faire à terre de longues courses, ils doivent nécessairement recher- cher la proximité de la mer et nicher, non sur des cornicheside falaises abruptes, comme le font beaucoup d’autres Palmipèdes pélagiens, mais dans des localités dont l’accès leur soit facile. D'autre part, leurs principaux ennemis sont les Phoques, qui abondent aussi dans les mêmes parages; par conséquent illeur est utile que leurs campements soient hors de la portée de ces amphibiens; et comme ceux-ci ne progressent que difficilement àterre, cette condition se trouve remplie lorsque la rookery est située à une certaine distance de la côte, sur quelque terre élevée. C’est effectivement de la sorte queles colonies formées par les Manchots sont toujours placées, et l’on conçoit que le voisinage de l'Homme ou de Quadrupèdes agiles.et cannassiers soit incompatible avec l'existence de ces réunions d'Oiseaux. Ainsi leur extension géographique, de même que celle de beau- coup d’autres animaux, n’est pas réglée seulement par leicli- mat, la configuration de la surface du globe et les ressources alimentaires offertes par les lieux accessibles; elle est sub- ordonnée aussi à la nature de la faune circonvoisine, et l’ab- sence de Mammifères terrestres dans la région antarctique nous explique comment les Manchôts ont pu s’y maintenir et s'y multiplier. La nature de la faune préexistante en Afrique et en Amé- rique, ainsi que dans les autres parties continentales du globe, a done été incompatible avec l'établissement de ces Oiseaux, à moins que ce ne füt sur quelques rochers déseris et assez éloi- ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 31 gnés de la côte pour les mettre à l'abri des AS des ani- maux terrestres qui cherchaient à les dévorer ou à s emparer de leurs œufs. Pour eux, la présence de l'Homme était aussi une cause d'extinction, et 1l est probable que peu à peu ils recu- leront vers le pôle, à mesure que nos marins s’étendront dans les régions antarctiques et que nos animaux 1 s à seront multipliés. Partout une certaine harmonie zoologique est nécessaire à la prospérité des êtres qui vivent réunis, et, quand cette harmonie vient à être troublée, certaines espèces peuvent ‘disparaître sans qu'aucun changement soit survenu dans le elimat ou la configuration du globe. C’est une circonstance dont les pa- léontologistes doivent tenir compte ; mais je n’y insisterai pas ici, Car je n'ai à m'occuper que de l’état actuel des choses. Presque toutes les terres habitées par les Manchots sont en effet complètement désertes. Les stations qui se trouvent dans le voisinage des lieux habités soit par l'Homme, soit par des Car- nassiers, ne consistent guère que dans desilots rocheuxisolés et d’un accès difficile (1) : ainsi dans l'archipel Falkland, resté désert jusque dans ces derniers temps (2), mais habité par un (1) Tristan-d’Acunha semble au premier abord faire exception à cette règle, et il existe sur l’ile principale une rookery très considérable de Manchots, quoique depuis un siècle et demi environ les Anglais y aient formé un petit établissement et que quelques animaux domestiques, notamment des Chêvres et Cochonsintro- duits anciennement par des navigateurs, y vivent en liberté et y aient pullulé. Mais la configuration de ces îles d’origine volcanique est telle que la séparation est complète entre la partie colonisée et la partie déserte où se trouvent ces oiseaux apténiens. Une barrière de rochers abrupts cerne du côté de l'intérieur la languette de terre cultivable occupée par les émigrants, et la partie de l’île réservée aux Manchots n’est accessible que du côté de la mer. Ces Oiseaux y vivent donc tranquilles, car la chasse n’en est pas assez rémunératrice pour que les colons s’y livrent. Le voyageur Earle, qui a résidé pendant plusieurs mois à Tristan-d’Acunha, a donné au sujet du campement des Manchots dans celte sla- tion des détails circonstanciés (op. ci.). (2) Les Malouins ne sont restés à Falkland que trois ou quatre ans, et les Es- pagnols qui leur ont succédé n’y ont pas fait d'établissement plus durable. Récemment les Anglais ont formé au fond de l’une des baies de l'ile orientale une petite colonie appelée Stanley, et-le bétail s’est beaucoup multiplié dans les herbages de l’intérieur. Mais la presque totalité du littoral habité par les Manchots est restée complètement déserte. D ALPH. MELNE EDWARDS. Chacal venu sans doute du continent voisin (1), les Manchots ne sont pas établis sur les grandes îles et ne nichent que sur quelques ilots écartés (2). | é Dans l’archipel feugien, la rareté des Oiseaux sur quelques points, notamment à li le Pam est attribuée par les naviga- teurs à l’avidité avec laquelle les indigènes recherchent les œufs (3). Il me paraît probable que dans un court espace de temps ces animaux disparaîtront de la plupart des îles de la zone tempérée de l'hémisphère sud, si l’on continue à les pour- chasser comme on le fait depuis quelques années pour obtenir l'huile ou la graisse liquide accumulée sous leur peau (4). Toutes les espèces dont cette famille se compose ont entre elles une grande ressemblance ; leurs formes varient à peine, et leur système général de coloration est toujours à peu près le même : noirâtre en dessus, blanc en dessous. Elles se distin- guent les unes des autres par de légères différences dans la forme et la longueur du bec, par l'existence ou l’absence. de quelques plumes jaunes sur les côtés de la tête, par quelques variations dans le mode de répartition des parties blanches et noires autour de la tête et du cou ; enfin, par la taille. Lorsqu’on n’en connaissait que fort peu, les naturalistes les répartirent (1) Bougainville, Voyage autour du monde en 1766-1769, p. 64. Ce Chacal est le Canis antarcticus. ; (2) Quoy et Gaimard, op. cit. (Ann. des sc. nat., 1825, t. V, p. 148). (3) Ross, Voyage inthe Southern and Antarctic Regions, t. IL, p. 418. (4) Pour montrer combien la destruction des Manchots se pratique sur une grande échelle depuis quelques années, je citerai le passage suivant extrait d’un travail récent sur l’ornithologie de l’Afrique australe par un zoologiste rési- dant au cap de Bonne-Espérance, M. Layard : « Un navire qui arrive en ce mo- ment des îles Crozet apporte 37 tonneaux d'huile tirée des peaux de Manchots . Macaronis (Eudyptes chrysocoma). On me dit qu’il faut 1400 de ces peaux pour obtenir une tonne d'huile; cela suppose que par ce seul chargement, 51 500 de ces Oiseaux ont été détruits. Chaque matelot peut tuer ou écorcher 359 à 360 Manchots par jour. » (South African Ornithology, i in Zbis, 1869, t. V die 378.) . J’ajouterai que les arrivages de ce genre ne sont pasrares. À Port-Stanley (aux Falkland), en 1867, quatre navires affectés à la chasse des Manchots ont recueilli plus de 50 000 gallons d'huile. Or, il faut environ huit Manchots pour un gallon ; d’où 1l résulte que ce chargement avait coûté la vie à 400 000 de ces Oiseaux. (Praceed. Zool. Soc., 1868, p. 528.) ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 33 en deux, puis en trois genres, sous les noms de Spheniseus, de Cataractes et d’Aptenodytes; mais aujourd’hui qu’on a décou- vert plusieurs formes intermédiaires, la plupart des ornitholo- oistes ont cru nécessaire de multiplier beaucoup ces divisions systématiques, tandis que d’autres ont préféré les abandonner et n’employer, pour désigner tous ces Oiseaux, qu’un même nom générique. Ainsi le prince Gh. Bonaparte, par exemple, a cru devoir porter à six le nombre de ces groupes réputés géné- riques (1); tandis que M. Schlegel, dont l'autorité scientifique est non moins grande, a jugé préférable de réunir tous les Manchots en un seul genre, ainsi que l'avait fait précédemment le voyageur Forster (2); seulement, pour désigner ce genre, il emploie le nom de Spheniscus, au lieu du nom d’Apteno- dytes (3). Les ornithologistes sont également en désaccord relative- (1) Voy. le Conspectus Ptilopterorum systematum inséré dans les Comptes rendus des séances de l’Acad. des sciences, 1856, t. XXXXII, p. 775. (2) En 1760, Brisson répartit les Manchots en deux genres sous les noms de Spheniscus et de Cataractes (Ornithologie, t. VI, p. 96 et 102) ; mais le second de ces noms, ayant été employé frécédemment par Gesner pour désigner des Alcidæ, n'a pas été conservé. En 1780, Forster réunit tous ces Oiseaux, ainsi que des espèces nouvellement découvertes, en un seul genre auquel il donna le nom d'Aptenodytes (Historia Aptenodyie, Commentationes Societatis scientiarum gottingensis per annum 1780, vol. IE, p. 151). En 1798, Cuvier adopta ce nom générique pour la totalité des Manchots (Tableau méthodique, p. 279). Mais en 1817 il divisa ce groupe en trois sous-genres, pour l’un desquels il réserva plus spécialement le nom d’Aptenodytes, tandis que pour les deux autres il em- ploya les désignations introduites dans la science par Brisson (Règne ani- mal, 1817). (3) M. Schlegel, en adoptant le groupe générique des Manchots établi par lorster, a substitué au nom d’Aptenodyles celui de Spheniscus, à raison de l’an- tériorité que l’on peut attribuer en apparence à Brisson (voy. l'ouvrage intitulé : Muséum d'histoire naturelle des Pays-Bas par Schlegel, fase. 1x, 1862). Mais il est à remarquer que le genre Spheniscus de Brisson ne correspondait qu’à une petite portion du genre Aplenodytes de Forster, tandis que cette dernière divi- sion est identique à celle adoptée par M. Schlegel et désignée par lui sous le nom partiel de Spheniscus. Il me semble que la loi de priorité ne devrait pas être interprétée de la sorte, et que le groupe formé par Forster, étant admis in- tégralement, devrait conserver le nom sous lequel ce naturaliste l’avait établi. C’est pour cette raison que j'y reviens ici. ANN. SC. NAT., ZOOL., MAI 4879-S0. 1x. 20: ARE RE 34 AELPE, MHLNH HIDUARES. ment au nombre des espèces dont ce groupe naturel se tone (1). Je n'ai pas à discuter ici ces questions de nomenclature pour la solution desquelles nous ne possédons pas toutes les données anatomiques dont il faudrait tenir compte, mais je crois nécessaire de faire remarquer que les divergences d'opinion touchant les distinctions génériques ou les distinctions spéci- fiques ont en réalité moins d'importance qu’elles ne semblent en présenter au premier abord. En effet, elles sont souvent plus apparentes que réelles, car elles dépendent surtout du point de vue où se placent les classificateurs et de la valeur qu'ils attachent aux mots espèce et genre, sus sur lequel ils s'expliquent rarement. Pour le physiologiste, le mot espèce implique l’idée d’un groupe d'animaux qui, sans être identiques, ne présentent que des différences de l’ordre de celles reconnues compatibles avec une origine commune, et attribuables par conséquent aux influences modificatrices actuellement existantes; mais pour les auteurs systématiques modernes, ce mot a une accep- tion moins large : ils l’appliquent d'ordinaire à tout groupe d'individus non domestiqués, susceptibles d’être distingués du reste du Règne animal par des caractères héréditaires constants ou peu variables. Pour ces dérniers naturalistes, l’idée attachée au mot espèce est donc la même que celle expri- mée par le mot race, quand le physiologiste parle des ani- maux domestiques. Chez les animaux qui ne sont pas sou- mis à l’empire de l'Homme et qui vivent en liberté, on a pu (1) Le mode de groupement des différentes espèces ou races de Manchots a été récemment l’objet d’études spéciales dues principalement à deux ornitho- logistes américains, M. Hyatt et M. Elliott Coues, dont la manière de voir a été confirmée par les observations de M. Bowdler Sharpe sur les collections for- mées à Kerguelen par l'expédition astronomique anglaise. — Voy. : 1° A. Hyatt, Catalogue of the ornithological Collection of the Boston Society of Natural History (Proceedings of the Boston Natural History Society, vol. XIV, 1870- 1871, p. 238). — 2° Elliott Coues, Material for a Monograph of the Spheni- scidæ (Proceed. of the Academy of natural Sciences of Philadelphia, p. 170). — 3° Bowdler Sharpe, op. cit. (Philosophical Transactions, vol. GLXVIHT, p. 152 et suiv., publ. en 1879). ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 39 constater fort souvent des variations du même ordre que chez des êtres dont la souche primitive était, suivant toute probabi- lité, unique et dont l'habitation était différente, et en zoologie physiologique on devrait appeler ces races des variétés locales; mais dans la pratique il est souvent très difficile de distinguer entre elles une espèce proprement dite et une varidié devenue constante dans une contrée déterminée. Cette difficulté est même presque insurmontable pour les animaux dont on ne possède pas dans les collections zoologiques de nombreux re- présentants, à l’aide desquels il devient possible d'établir l'exis- tence ou la non-existence de formes intermédiaires aux types réputés spécifiques. Gela a conduit la plupart des classi- ficateurs à admettre au rang d'espèces toutes les races ou va- riétés locales qui, dans l’état actuel de nos connaissances, ne peuvent être ramenées avec certitude à un type spécifique commun, et il en résulte que beaucoup de petits groupes z00- logiques méritent à leurs yeux le rang de genre, bien que le physiologiste, en jugeant par analogie, soit disposé à ne voir dans chacun d’eux qu’une seule espèce primordiale modifiée de diverses manières par l'influence de conditions d'existence différentes. , Dans les études dezoologie géographique, comme je l'ai déjà dit, 1l est indispensable de tenir grand compte de ces appré- ciations diverses, et de ne pas attribuer la même valeur à toutes les distinctions réputées spécifiques ou même génériques. Ainsi, pour la famille des Manchots, par exemple, il est né- cessaire de ne pas confondre une espèce physiologique avec ce qui est seulement une race ou une variété locale; et en pro- cédant de la sorte on arrive d’ordinaire à attacher l’idée de l’espèce proprement dite, ou espèce primordiule, à chacun des groupes secondaires Institués sous le nom de genre par les ornithologistes modernes, plutôt qu’à la plupart des subdivi- sions établies dans chacune de ces sections et désignées dans les systèmes de classification sous autant de noms spécifiques particuliers. J’emploierai donc dans plus d’une occasion les distinctions génériques proposées par les ornithologistes essen- 36 ALPHA. MILNKE EDWARDS. tiellement descripteurs, mais en n’y attribuant pas autant de valeur zoologique que ceux-ci le font, et en y attachant plutôt l’idée de l’espèce physiologique. Pour le moment, je me bor- nerai à rappeler ici que l’on désigne communément ces diverses sortes de Manchots sous les noms de: Aptenodyles, Eudyptes ou Chrysocoma, Pygoscelis, Spheniscus, Eudyptila, Dasyramphus. J’ajouterai seulement que ces divisions réputées génériques n’ont été, dans la plupart des cas, ni délimitées, ni caractéri- sées autrement que par l'indication d’une espèce choisie comme représentant le type des Manchots que l’on entend ranger dans tel ou tel groupe. Enfin, il existe aussi dans cette partie de nos classifications une confusion regrettable etrésultant de ce que lenom de ces sections a été souvent changé, de l’emploi d’une même désignation dans des acceptions très différentes, et de ce que la plupart des Oiseaux répartis de la sorte ont été trans- portés successivement dans plusieurs de ces prétendus genres, et portent par conséquent, chacun, plusieurs noms. 8 2. Un des représentants les plus remarquables de la famille des Manchots est le grand et bel Oiseau désigné par les naviga- teurs sous le nom de rot des Pingouins. Il est de grande taille ; sa tête n’est pas empanachée comme chez quelques autres espèces du même groupe; son bec est allongé, grêle et atté- nué graduellement vers le bout; sa queue est très courte, et son plumage est orné de jaune sur les côtés du cou. Un individu provenant des îles Falkland fut décrit et figuré par Pennant en 1763 (1). Quelques années plus tard, Forster (1) Patagonian Pinguin, Pennant, An Account of the different Species of the Birds called Pinguins (Philosophical Transactions, 1768, t. LIIE, p. 91, pl. 5). ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. a trouva dans l’archipel magellanique et dans d’autres parties de la région antarctique un Oiseau du même genre, qui ne diffère que très peu du précédent et qui fut considéré par ce voyageur, ainsi que par les contemporains de cet auteur, comme appar- tenant à la même espèce ornithologique (1). Forster les réunit donc sous un même nom spécifique, et les appela Aptenodytes patachonica (2). Plus récemment, la plupart des auteurs sys- tématiques ont cru devoir les distinguer et leur donner des noms différents : la première de ces espèces, races ou variétés, peu importe en ce moment le rang qu’on leur assigne, a été appelée tantôt Apéenodytes patachonica, Aptenodytes Pen- nanti, où Aptenodytes longirostris, tandis que la seconde a été appelée d’abord Aptenodytes patagonica, puis Aptenodytes Forsteri(3). D'ailleurs, quelle que soit la valeur qu’on attribue aux différences qui existent entre ces Manchots, on s’accorde généralement à les séparer des autres membres de la même famille et à leur réserver le nom générique d’Aptenodytes (4). (1) Cook, Voyage dans l'hémisphère austral et autour du monde (2: voyage), 18 UN p.66. (2) J. R. Forster, Historia Aptenodytæ (Commentationes Societatis scien- tiarum gottingensis, 1780, t. IL, p.137, pl. 2). . (3) Ce fut à la suite de l'étude des collections rapportées des mers antarc- tiques, par l’expédition de Ross, que G. R. Gray établit celte distinction entre les Aptenodytes proprement dits (voy. Annals and Magazine of Natural His- tory, 1844, t. XIIL, p. 315). Aujourd'hui la plupart des auteurs, en adoptant cette distinction, désignent sous le nom d’Aptenodytes longirostris l'espèce décrite par Pennant, se fondant sur ce que Scopoli, dans un ouvrage intitulé : Deliciæ faune et Flore insubricæ, avait en 1786 désigné de la sorte l'Apténo- dyte figuré par Sonnerat sous le nom de Manchot de la Nouvelle-Guinée (Voyage, pl. 113); mais ce changement ne me parait pas justifié, car ce dernier Oiseau diffère notablement du premier par l'étendue du plastron noir pectoral qui s'étend très bas, et il pourrait constituer | une troisième variété du même type sous-générique. (4) Dans la classification ornithologique de M. Schlegel, ces Manchots for- ment la première section du genre Spheniscus, laquelle est caractérisée de la manière suivante : «Taille très for te, surpassant celle du Cygne. Bec grêle, allongé, aux plumes du front s’avançant jusque sur les narines; dans les adultes, plus long que la tête, noir, à parties basales de la mandibule inférieure rouge orange. Plumage des due : dessus noirâtre, avec une tache d’un blanc gris bleuâtre sur chaque plume, tete complètement dominante sur les côtés 38 ALPH. MILNE EDWARDS. Presque toutes les terres australes que j’ai énumérées précé- demment comme étant fréquentées par les Manchots comp- tent au nombre de leurs habitants des Apienodytes proprement dits. En effet, l’existence de ces Oiseaux a été constatée dans une multitude de stations éparses tout autour du globe, entre les glaces circompolaires antarctiques et le 45° degré de lati- tude S., ainsi que sur quelques points situés un peu plus au nord (1). Divers marins les ont trouvés, comme je l’ai déjà dit, aux îles Falkland (2) et dans l'archipel feugien (3); d’autres navigateurs les ont rencontrés à la Nouvelle-Géorgie du Sud ou Géorgie australe (4), etsur la terre de Palmer quiest située plus au sud, entre lesiles Sandwich et la terre de Graham (5). Au loin vers l’est, les Apfenodytes nichent aussi aux îles Crozet (6), à Kerguelen (7), à lile RARE qui forme FRÈRE sud de la Nouvelle-Zélande, à lile Auckland (8) et à l’ile Camp- du cou et le dessus des ailes ; face etgorge noires ; dessous de l’oiseau d’un blanc passant, vers la gorge, au jaune intense, teinte qui monte, en formant une raie terminée en massue, derrière la gorge et la région des grailles, » (Muséum d'histoire naturelle des Pays-Bas, % livr., Urinatores, p. 3, 1867.) Parmi les auteurs qui considèrent ces Manchots comme devant former un genre particulier et qui réservent à cette division le nom d’Aptenodytes, je citerai G. BR. Gray, le prince Charles Bonaparte, M. Elliott Coues et M. Sharpe. (4) Voyez la carte n° 1. (2) Pernetty, Histoire d’un voyage aux îles Malouines, fait en 1765, CATA p. 17, pl. 7. — Bougainville, Voyage autour du monde, t. I, p. 120. — Pen- nant, 0p. cit., pl. 15 (Philosophical Transactions, 1768, p. 91). — Fanning, ODRCUL DAC: 3) Notamment, à l’île Tyssen, dans le détroit de Magellan, voyez Sclater and Salvin, List of Birds collected during the Survey of the Strait of Magellan, by D' Cunningham (he Ibis, 1869, t. V, p. 284). (4) Forster, Historia Aptenodytæ (Gommentationes Societatis gotiingensis, 1780, t. IE, p. 138). (5) Fanning, Voyage round the World, p. 439. (6) Ha Observations sur les mœurs d'un grand nombre d’Oiseaux (Revue zoologique de la Société cuviérienne de Guérin-Méneville, 1847, p. 241). (7) Elliott Coues, 0p. cit. (Proceedings of the Academy of Naiur al Sciences of Philadelphia, 1872, p. 193). (8) G. R. Gray, Handlist of Birds, t. U, p. 99. — Elliott Coues op. cit. (Proceed. ofthe Acad. of Nat. Scienc. of Philadelphia, 1872, p. 193). ARTICLE N° 9, FAUNE. DES RÉGIONS AUSTRALES. 39 bell (4). Un des champs de reproduction les plus remarquables de ces Manchots se trouve au sud-ouest de Campbell, sur Pile Macquarie (2). Enfin les naturalistes de l'expédition améri- caine les ont rencontrés sur les glaces, vers le 66° degré de latitude S., près du contient antarctique, et ce fut même par linsy ection des pierres contenues dans l’estomac d’un de ces Oiseaux, qu’ils eurent les premiers indices de lexistence de terres dans ces parages (3). L’Aptenodytes de Forster (4) et l’Aptenodytes de Pennant (5) ne diffèrent que fort peu l’un de l’autre. Le premier atteint une taille plus élevée que le second, et il est mieux protégé contre le froid, caf ses plumes s'étendent sur la majeure partie de la mandibule inférieure, ainsi que sur les tarses et même sur la base des doigts; tandis que chez l’Apfenodytes de Pennant ces parties sont presque entièrement nues. Les bandes jaunes qui occupent les côtés du cou de ce dernier sont plus dévelop- pées et d’une teinte plus foncée : mais ces variations dans la coloration ne me paraissent avoir que peu d'importance; et lorsque les ornithologistes auront sous les yeux des séries d’in- dividus plus nombreuses que celles que renferment nos musées, je suis persuadé que l’on verra ces variations se multiplier, et qu’à raison des intermédiaires, il deviendra impossible de tracer entre ces deux prétendues espèces une ligne de démareation qui ne serait pas arbitraire (6). En effet, les différences de cet ordre (1) M. H. Filhol a trouvé quelques représentants de cette espèce à l’île Camp- bell, et l’un d’eux, grâce aux soins de ce voyageur, figure aujourd’hui dans les galeries du Muséum. (2) G. Bennett évalue à 30 000 ou 40000 le nombre des Manchots qu'il vit réunis dans une rookery de cette terre isolée (On the Habits of the king Pinguin, iu Proceedings of the Zoological Society of London, 1834,p. 34). (5) Cassin, United States exploring Expedition : Mammalogy and Ornitho- logy, p. 549. — Elliott Coues, op. cit. (Proceedings of the Academy of Natu- ral Sciences of Philadelphia, 1872, p. 192). (4) Aptenodytes Forsteri, G. R. Gray, ou Aptenodytes longirostris, Secpoli, ou Aptenodytes patachonica, Forster (loc. cit., 1780, tab. 2). (5) The Patagonian Pinguin, Pennant, op. cit. (Philosophical Transac- tions, 1768, pl. 5). (6) M. Elliott Coues, qui a fait une étude comparative et minutieuse des 40 ALPH. MILNE EDVVARDS. qui ont été signalées comme constituant des caractères propres à faire distinguer entre eux ces grands Manchots sont moins considérables que celles offertes par des Aptenodytes de Pen- nant appartenant au Muséum de Paris (1); et lorsque l’on compare entre elles les diverses figures que les auteurs en ont données, on constate aussi l’existence d’autres particularités individuelles très notables (2). On ne connaît pas assez bien la distribution géographique de ces deux Aptenodytes pour que je puisse entrer ici dans des détails à ce sujet; mais il importe de noter qu'ils ne paraissent coexister dans aucune des localités où leur présence a été si- gnalée, et que l’Apténodyte de Pennant, ou Aptenodytes longi- rostris, fréquente trois stations de la portion subtempérée de la zone australe, savoir, les îles Falkland (3), Kerguelen (4), Aptenodytes appartenant au musée de l’Institution Smithsonienne, et qui adopte la distinction spécifique proposée par G. R. Gray entre l’Aptenodytes Forsteri et l'Aptenodytes Pennanti, ajoute cependant que les différences qui existent entre ces Oiseaux n’ont peut-être pas la valeur zoologique qu’on leur attribue communément et pourraient bien dépendre des différences du climat des stations habitées par eux (loc. cit., p. 194). (1) Le Muséum d'histoire naturelle possède un individu de cette espèce, presque complètement blanc, venant des îles Crozet, et un autre dont le plu- mage soyeux est entièrement brun. Ce dernier, quoique de taille aussi élevée que les adultes, paraît jeune et ressemble en tout à celui figuré par Laon sous le nom d’Albatros laineux (Latham, op. cit., t. X, p. 194). (2) Ainsi chez l’Aptenodytes Pennanti, figuré par Sonnerat (pl. 113), les plumes noires de la face inférieure du cou descendent jusque vers le milieu de la poitrine, tandis que chez l'individu représenté par Pennant, cette partie noire s'arrête à la moitié supérieure du cou (op. cit., pl. 5), et que chez un de ceux dont G. R. Gray a donné des figures, elle se prolonge encore moins (Zoology ofthe Voyage of the EreBus and Terror, Birds, pl. 32). Quelques auteurs attribuent ces différences à des erreurs commises par les dessinateurs, mais des fautes de cegenre seraient trop grossières pour être probables. Il est également à noter que l’Aptenodytes Forsteri figuré par Forster (loc. cit., pl. 2) a la tache parotidienne jaune, séparée inférieurement de la bande jaune pectorale par un prolongement noir en forme de collier, tandis que chez les individus figurés par Gray et Sharpe, ce collier manque (Voy. of the EReBus and TErRoOR, Birds, pl. 31). (3) Voyez ci-dessus, page 38. (4) Gray, Handlist of Birds, part IT, p. 156. — Elliott Coues, op. cit. (Proceedings ofthe Academy of Nalural Sciences of Philadelphia, 1872, p.193). —Sharpe, Birds of Kerguclen(Philosophical Transactions, t. CLXVIII, p. 2591. ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 41 les îles Crozet (1) et l’île Stewart (2); tandis que l’Apténodyte de Forster, ou Aptenodytespatachonica proprementdit, setrouve plus au sud, à la Nouvelle-Géorgie (3) et sur les terres antarc- tiques les plus rapprochées du pôle austral (4). En ce moment je n’insisterai pas davantage sur ce sujet, car j'aurai bientôt à y revenir. 8 3. Divers Manchots moins grands que les précédents et faciles à distinguer de toutes les autres espèces de la même famille naturelle, ont la tète empanachée. Le voyageur Bou- gainville, qui visita les terres magellaniques en 1766, nomma lun de ces Oiseaux Pingouin sauteur, à raison de la manière dont il avance sur les rochers par sauts et par bonds (5), et Buffon en donna une figure sous le nom de Wanchot huppé (6). Les marins anglais les appellent d’une manière générale, des Macarons, à cause des plumes d’un beau jaune dont leur tête est ornée (7); et Forster forma une section particulière de ces Apténodytiens, qu’il appela le groupe des Aptenodytes cris- tatæ (8). Enfin Vieillot établit le genre Ewdyptes pour l’un de (1) J. Verreaux, Annotations manuscrites de l'ouvrage de G. Gray, intitulé Handlist of Birds, part IH, p. 156 (Bibliothèque M. E.), et Revue zoologique, 1847, p. 241. — Sharpe, loc. cit., p. 154. — G. Gray, loc. cit, p. 99. (2) Elliott Coues, op. cüit., p. 193. (3) Forster, op.cit. (4) Peale, op. cit. (United States exploring Expedition, p. 958 et te — Cassin, United States expl. Exped. : Lot and Ornitholog YhPe 390. Elliott Coues, op. cit., p. 192. (5) Bougainville, Voyage autour du monde par la fr “te LA BOUDEUSE, 1765- 67-69, p. 69, édit. in-4°, 1771. (6) Planches Him n des. n° 984. (7) L'expression populaire de Macaroni correspond à peu près à l'expression française de petit-maître, et a été appliquée à cet Oiseau à raison des plumes brillantes dont sa tête est ornée. Il paraît qu'aujourd'hui les colons des îles Falkland réservent cette désignation aux Eudyptes chrysolophes, et appellent Pingouins sauteurs, ou Rockhoppers, les Eudyptes chrysocomiens. (Abbott, the Pinguins of the Falkland islands, in Ibis, 1860, t. 11, p. 398.) (8) Forster désigne tous les Manchots à crête sous le nom spécifique d’Apte- nodytes chrysocomes. L’individa dont il donne la figure provenait de la Géorgie australe (op. cit., in Commentationes Societatis gottingensis, vol. IL, pl. 1). 49 APE. RIEENE HIDVVAMRIRS. ces Manchots à panaches, ainsi que pour le Gorfou de Brisson qui est dépourvu de crête, mais qui a également le bec un peu bombé ou crochu au bout (1). Plus récemment, le prince Charles Bonaparte, appliquant à l’ensemble des espèces à aigrettes le nom propre à l’une d’elles, les appela tous « les Chrysocomes ». | Ces Manchots empanachés, de même que les Apténodytes, sont répartis tout autour du globe, mais ils s’avancent moins loin vers le pôle antarctique, et ils s'étendent davantage vers l'équateur. Ils ont des camps de reproduction à l'île Saint-. Paul (2) età l'ile Tristan-d’Acunbha, située au milieu de Pocéan Atlantique, vers le 38° degré de latitude S. (3). Ils se montrent sur le littoral de la Tasmanie (4) et sur la côte sud de l’Aus- tralie (5), ainsi qu’à la Nouvellé-Zélande (6); mais ils ne s’y reproduisent pas et paraissent y avoir été poussés par le vent ou les flots, car dans cette partie du globe c’est seulement sur les îles situées plus près du pôle qu'ils-nichent, prin- cipalement à lile Campbell et à lile Macquarie (7). On en voit aussi parfois au cap de Bonne-Espérance (8) et au (1) Vieillot ne caractérise ce genre que par la forme du bee, et il y établit deux sections, l’une pour le Manchot des Hottentots, qui est rangé aujourd’hui dans le groupe des Sphénisques proprement dits, et l’autre pour le Manchot sauteur sus-mentionné. (Voyez L. P. Vieillot, Analyse d’une nouvelle ornitho- logie élémentaire, Paris, 1816, p. 67.) (2) Pelzeln, Reise der Fregate Novara, Vôgel, p. 440. — Velain, Remarques sur la faune des Îles St-Paul et Amster dam, p. 56, et coll. du Muséum de Paris. (3) Earle, Narrative of a residence in New-Zealand, together with a Journal of a residence in Tristan-d’'Acunha (op. cil., 1832, p. 336 et 357). (4) Musée de l’Institution Smithsonienne. — Elliott Coues, op. cit. (Procee- dings of the Academy of Natural Sciences of Philadelphia, 1872, p.208). (5) Gould, Birds of Australia, t. VIX. (6) Musée de l’Académie de Philadelphie. — Elliot Coues, op. cit., p. 205. (1) Le Muséum de Paris possède plusieurs exemplaires de Chrysocomes pro- venant de l’île Macquarie, et les officiers de l’expédition américaine commandée par le capitaine Wilkes ont rapporté à cette espèce des Oiseaux dont ils avaient observé les r'ookeries dans la même localité (voy. Wilkes, United States ex- ploring Eæpedition, Narrative, t. I, p. 305). M. H. Filhol a rapharté de l’île Campbell une série nombreuse de ces Eudyptes empanachés. (8) Collection du Musée Britannique. — Vov. “he op. cit. (Philosophical Transactions, t. CLXVII). ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES, 43 sud-est de cette terre; ils abondent aux îles Crozet (1), à Ker- guelen (2). Enfin les iles Falkland font aussi partie de leur domaine (3). Les Eudyptes proprement dits (4), ou Manchots ornés, soit de panaches, soit de grandes aigrettes jaunes, présentent entre eux certaines différences, à raison desquelles la plupart des ornithologistes les plus modernes s’accordent à les consi- dérer comme appartenant à plusieurs espèces distinctes. [ls les désignent en conséquence sous autant de noms spécifiques particuliers, et ils les appellent : Eudyptes chrysocoma (5), Eudyptes saltator (6), Eudyptes nigrivestis (1), Eudyptes pachyrhyncha (8), Eudyptes chrysolopha (9), Eudyptes diademata (10). (1) J. Verreaux, op. cit. (Revue zoologique, 1847, p. 241). (2) Sharpe, op. cit. (Philosophical Transactions, t. CEXVITI). (3) Jadis ce Manchot était très commun aux îles Falkland, ainsi qu’on peut en juger par les narrations des navigateurs; aujourd'hui il paraît y être plus rare (Sclater, Birds of Falkland islands, in Proceed. of the Zool. Soc., 1861, p.47). Cependant il niche encore dans idiote parties de cet archipel (Abbott, Notes on the Birds of the Falkland islands (Ibis, 1861, t. II, p. 163). — Lecomte, Proceed. of the Zool. Soc., 1868, p. 378. (4) Jinsiste sur le sens ere dans lequel j’emploie ici le mot Æudyptes, parce que plusieurs ornithologistes appliquent ce nom non seulement aux Man- chots empanachés, dont le prince Charles Bonaparte a composé son genre Chry- socoma, mais aussi à plusieurs espèces dont les plumes frontales ou sourci- lières ne sont guère plus longues que celles de l’occiput, ou dont la tête est même complètement alophienne : par exemple le Pygoscelis papua et le Dasy- rhamphus Adeliæ. (5) Forster, Historia Aptenodytæ (op. cit., pl. 1). (6) Le Manchot huppé de Sibérie, Buffon ue enluminées, pl. 984). — Chrysocoma saltator, Stephens, OISEAUX, dans General Zoolog y de Shaw, 1826, t. XII, p. 58, pl. 8. (7) Gould, On two new Species of crested Pinguins (Proceedings of the Zoolo- gical Society of London, 1860, p. 118). (8) Gray, Zoology of the Voyage of EreBus and Terror, Birds, 1846, p. 17. (9) Brandt, Note sur une nouvelle espèce du genre CartarActES de Brisson (Bulletin de l’Acad. sciences de Saint-Pétersbourg, 1837, t. IH, p. 314). (10) Gould, Loc. cit., p. 119. 44 ALPH. MILNE EDWARDS. Lorsqu'on veut étudier d’une manière approfondie la dis tribution géographique de ces Oiseaux et tirer de cette étude des conséquences d’un intérêt général, 1l est tout d’abord nécessaire d'examiner quelle peut être en réalité la valeur de ces distinctions nominatives. [Il faut chercher si les caractères sur lesquels on les fonde indiquent l’existence d’autant d’es- pèces primordiales, ou correspondent seulement à des variétés locales où races issues probablement d’une souche commune. Je ne pourrai discuter cette question sans entrer dans beau- coup de détails essentiellement zoologiques qui, au premier abord, vont peut-être sembler déplacés 1e1 (1). Forster, à qui l’on doit la première monographie de la famille des Manchots, désigne sous le nom d’Aptenodytes chry- socomes tous les Aplénodytiens dont la tête est ornée de longues plumes jaunes. Mais dans la description détaillée qu’il donné, il fait remarquer que, chez les uns, les panaches sourciliers ainsi colorés se rejoignent au milieu du front, tandis que chez d’autres ces ornements sont séparés dès leur origine (2). (1) Il existe dans cette partie de la nomenclature ornithologique une grande confusion, et, lorsque je commençai l'étude de la distribution géographique des animaux pour répondre aux questions posées par l’Académie, je n’avais pas à ma disposition tous les matériaux de travail que j'ai aujourd’hui. Il me man- quait un grand nombre de pièces nécessaires pour fixer mon opinion sur la valeur des distinctions spécifiques établies parmi les Manchots, et, en ce qui concerne les Eudyptes, j’ai dû me borner à certaines considérations d’en- semble. Mais depuis cette époque, grâce aux collections formées à l’île St-Paul, à l’île Campbell et à la Nouvelle-Zélande, par les naturalistes français attachés aux expéditions astronomiques, grâce aux publications récentes faites sur la faune avienne de Kerguelen, j'ai pu traiter plus complètement ce sujet. Les remarques de M. Sharpe sur la classification des Manchots ont jeté beaucoup de lumières sur plusieurs questions obscures, et ce sont ces circonstances qui m'ont permis de remplir la lacune qui existait dans mon premier travail, et toute cette partie relative aux Eudyptes a été ajoutée au mémoire manuscrit déposé dans les archives de l’Académie en 1873. (2) « Crista atra mtens, occupans frontem et supercilia usque ad aures (sed non pileum), ex pennis angustissimis, laxe pennatis, atronitentibus, suberectis; alia sulphurea (in aliisindividuis in fronte unita, in aliis divisa) supercilia cingens, usque ad aures decurrens, deflexæa, e pennis longioribus, angustissimis flava-sulphureis nitentibus, apicibus hinc inde atris.» (Forster, loc. cit., p. 136.) ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 45 Cette différence dans la disposition des aigrettes (1) constitue le principal caractère employé plus récemment par Brandt pour motiver l’établissement des deux espèces de ces Manchots empanachés. Il conserva le nom de chrysocomus à l'espèce à front noir, et donna celui de chrysolophus à celle dont la région frontale est jaune comme les bandes et les panaches sus-oculaires (2). Lorsque l’on compare deux de ces Oiseaux, ils semblent faciles à distinguer; cependant la plupart des auteurs qui ont écrit récemment sur ce sujet paraissent ne pas avoir connu le véritable chrysolophe de Brandt, et, ainsi que l’a fait remarquer M. Sharpe (3), presque tous l’ont désigné sous le nom de chrysocoma ou de diademata. Le plus ordinairement ils ont donné le nom de chrysocoma au Manchot sauteur, bien que celui-ci présente toutes les particularités caractéristiques du chrysolophe de Brandt. Il en est résulté une confusion extrème dans la nomenclature de ces Manchots. Le même Oiseau porte, suivant les auteurs, tantôt le nom de ckry- socome, tantôt celui de chrysolophe (4). L’incertitude des déterminations est devenue encore plus grande lorsque, tenant compte des particularités de détails dans la forme du bec et dans la coloration du plumage, plusieurs ornithologistes ont (1) Voyez fig. 1 et fig. 4. (2) Jde reproduis ici la diagnose que Brandt donne de ces deux espèces de Manchots à aigrettes. — « CATARACTES CHRYSOLOPHUS, Brandt: Crista in media fronte incipiens,maxima ex parte e pennis vitellinis composita; color niger in gula l'iangularis ; tectricum caudæ superiorum mediæ albido-flavicantes. — CATARACTES CHRISOCOMUS, Forster : Crista intus nigra extrinsecus sulphurea, anguste in rostri basi incipiens, postice dependens; color nigra in gula truncatus, lectrices caudæ superiores omnes dorso concolores. » (Brandt, op. cit., p. 315.) (3) Sharpe, Birds of Kerquelen (op. cit., p. 159). (4) Ainsi, les Manchots appelés par M. Schlegel Spheniscus chrysolophus, appartiennent au groupe des Chrysocomes proprement dits, car ils ont le front noir (Schlegel, op. cit., Urinatores, p. 7). Récemment, M. Oustalet a adopté les déterminations spécifiques du savant directeur du musée d'histoire naturelle de Leyde, et il a désigné les Manchots des îles Saint-Paul et Amsterdam sous le nom d’Eudyptes chrysolopha, tandis qu’ils constituent seulement une variété ou race particulière de l’Eudyptes chrysocoma, comme l’avait pensé M. Pelzeln. (Oustalet, Sur différents Oiseaux de l'ile Saint-Paul, dans Bulletin de la Société philomatique de Paris pour 1875, t. XI, p. 74.) A6 ALES. NILNE HDVWWARDS. cru devoir multiplier davantage les distinctions réputées spé- cifiques. Tout cela a rendu fort difficile l’utilisation des ren- seignements que les différents auteurs nous ournissent sur le mode de distribution géographique des Eudyptes. Aussi suis-je obligé non seulement d'entrer dans beaucoup de détails descriptifs, mais encore d'éviter autant que possible l’emploi des dénominations dont je viens de parler. Tous les Euwdyptes proprement dits me paraissent se rappor- ter à l’une ou à l’autre des deux espèces distinguées par Brandt, savoir : lEudyptes chrysocoma et VEudyptes chrysolopha. Mais les représentants de ces deux types présentent, sous le rapport de la taille, du mode de coloration des plumes de la tête et du cou, de la longueur des aigrettes et de la forme du bec, de nombreuses différences d’une importance secondaire. Ces particularités, qui paraissent être parfois individuelles, peuvent être aussi prédominantes ou même constantes, et caractériser des races locales, dont le mode de distribution géographique n’est pas sans intérêt à connaître. Les EuDyPTES cHRysocouEs, ou Eudyptes à front noir (fig. 4), ont été figurés d’une mamière très reconnaissable par plusieurs naturalistes du siècle dernier. Ainsi le Manchot représenté par Forster sous le nom d’Apéenodytes chrysocoma (1) appar- tient à cette catégorie, mais 1} présente dans la disposition de ses couleurs des particularités qui ne se remarquent pas d’or- dinaire chez les Manchots du groupe dont il fait partie, et l'Eudyptes dont Buffon, vers la même époque, donna une figure sous le nom de Manchot huppé de la Sibérie, est un meilleur exemple à citer comme type des Chrysocomes pro- prement dits (2). Le grand naturaliste que je viens de citer ayant reconnu ultérieurement que lhabitat indiqué d’abord par lui ne pouvait être véritable, changea la désignation de celte espèce, et il l’appela simplement le Manchot huppé (3), tout en y rapportant les Eudyptes des îles Malouines ou (1) Forster, Historia Aplenodytæ (op. cit., pl. 1). (2). Voyez les Planches enluminées de Buffon, n° 984, (3) Buffon, Histoire des Oiseaux, t. XX. ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 47 Falkland, désignés par Bougainville et par d’autres voya- seurs sous le nom de Manchots sauteurs (1). Chez cet Eudyptes, de même que chez certains Manchots chrysocomes observés par Forster, la poitrme est d’un blanc immaculé, disposition qui est ordinaire chez toutes les autres espèces à panaches; mais chez l'individu figuré par Forster sous le nom d’Aptenodytes chrysocoma, 11 en est autrement : on remarque vers le milieu de la poitrine de grandes taches noires irrégulières, et 1l est également à noter que les panaches céphaliques sont Hautone moins fournis que chez le Manchot huppé de Buffon. Le même Ghrysocome maculé a été ensuite figuré dans l’ou- vrage de Shaw et Miller sous le nom de Pinguinaria cir- rata (2), puis représenté de nouveau par le premier de ces auteurs sous le nom de crested Pinguin (3). Mais toutes ces images paraissent avoir été faites d’après le même individu. Or, il résulte de quelques détails donnés par Forster que cet Oiseau provenait de la Nouvelle-Géorgie du Sud, petite terre située à une distance considérable des îles Falkland vers le sud- est (4), et dans la description que ce naturaliste trace d’une manière générale de ses Aptenodytes chrysocomes, il a eu soin (1) Bouganville, op. cit., p. 69. (2) Dans cet ouvrage iconographique, dont les gravures sont dues à Miller et le texte à Shaw, ce dernier naturaliste appelle ce Manchot le Pinguinaria cirrata, tandis que la planche correspondante porte comme légende Apteno- dytes cristata. Shaw ajoute que les matelots l’appellent le Pingouin sauteur, et qu'il habite principalement le voisinage des îles Falkland, mais qu'il se trouve aussi à la Nouvelle-Hollande et sur diverses îles de l’océan Pacifique austral. (Cimelia physica. Figures of rare and curious Quadrupedes, Birds, engraved and coloured from the specimens themselves by J. H. Miller, with Descriptions by G. Shaw, in-folio, 1796, pl. 99.) (3) La figure donnée par Shaw dans ses Mélanges est une réduction de la précédente, et l’auteur cite en synonymie le Manchot huppé des Planches enlu- minées de Buffon. Mais il ne dit rien de précis au sujet de l’habitat de cet oiseau. (Shaw et Nodder, Vivarium naturæ, or the Naturalists Miscellany, 1880, t. XI, pl. 137.) (4) En effet Forster nous dit que la figure peinte par Miller a été faite d'aprés un individu provenant de cette île de l'archipel américain antarctique (op. cit, 196). 45 ALP. MILNE ED\WARES. de noter que parmi ces Oiseaux les uns ont la poitrine blanche, les autres la poitrine maculée de noir (1); par conséquent, ce mélanisme partiel ne peut être attribué à une erreur du peintre, et il faut en conclure qu’à la Géorgie australe il existe une variété, soit individuelle, soit locale, qui n’a été rencontrée ni auxiles Falkland, ni ailleurs. Ce fait, s’ilétaitisolé, n'aurait à mes yeux aucune importance, mais 1] me paraît mériter d’être noté, car nous allons voir que les Chrysocomes présentent, sui- vant les stations qu'ils habitent, plusieurs autres particularités dont l'étude ne manque pas d'intérêt, même lorsqu'elles ne sont qu'individuelles. Des modifications de cet ordre, par cela seul qu’elles surviennent chez des individus nés de parents similaires, ayant toujours vécu dans un même lieu et placés dans des conditions qui paraissent être identiques, pourraient, suivant toutes probabilités, se généraliser dans certaines sta- tions, et amener ainsi la formation d’une race distincte de celles qui existent ailleurs. La même espèce d’Eudyptes est représentée à Saint-Paul età Amsterdam par un Manchot qui ressemble davantage au Man- chot huppé de Buffon et qui se fait remarquer par le grand dé- veloppement des panaches dont sa tête est armée. M. Pelzeln, qui visita Saint-Paul en 1857, en a donné de bonnes figures et l’a appelé Eudyptes chrysocoma (2); mais la plupart des autres ornithologistes l’ont rapporté par erreur à l’Eudyptes chry- solopha, et, pour faire cesser la confusion résultant de cette fausse détermination, M. Sharpe a jugé préférable d'y appli- quer le nom de saltator, employé jadis par Shaw, puis par quel- ques auteurs, pour désigner le Manchot huppé de Buffon. Ces Oiseaux nichent sur l'ile d'Amsterdam ainsi que sur l’île Saint-Paul. Ils s’y établissent en nombre immense pour couver et pour élever leurspetits, et ils y restent pendant l’épo- (1) Voici comment Forster s'exprime à ce sujet : « Corpustotum supra cœruleo- migrum, sublus albo-sericeum. In quibusdam individuis in pectore macula nigro-fusca informis. » (Op. cit., p. 137.) (2) Pelzeln, Novara Expedilion, Zoologischer Theil, Bd. 1, Vôgel, p. 140, pi. ©. ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 49 que de la mue, qui commence en décembre (1). Mais pendant les cinq mois d'hiver compris entre mars et juillet, ils aban- donnent complètement ces terres et ne se montrent même pas au large, et les pêcheurs de Baleines et de Phoques, qui visitent fréquemment ces parages, pensent que pendant cette saison ils restent constamment à la mer. Plus loin, vers le sud, la même variété niche aussi à l’ile Kerguelen (2) et aux Crozet (3). Ces Chrysocomes (ou uné autre variété de la même espèce, qui n’en diffère pas notablement) sont parfois jetés par les tem- pêtes non seulement sur le littoral du cap de Bonne-Espérance, ainsi que Je l’ai dit précédemment (4), mais aussi sur la côte sud de l'Australie et sur la partie adjacente de la Tasmanie, mais n’y résident pas (5). Les Eudyptes qui habitent en nombre considérable Pile Campbell, et qui ont été observés par M. H. Filhol, sont aussi des Manchots à front noir, comme ceux de Saint-Paul et de Kerguelen, mais leurs panaches temporaux sont moins fournis, moins longs et retombent à peine en arrière de la tête; enfin leurs joues sont d’une nuance plus foncée. Cependant il est impossible de les séparer spécifiquement des précédents, et ils ne constituent qu’une race ou variété locale particulière; les uns et les autres sont des Eudyptes chrysocoma (6). Certains Manchots empanachés et à frontnoir quise trouvent dans les îles situées sous le méridien de la Nouvelle-Zélande, notamment Stewart (7), quise montrent parfois sur cette der- nière terre et qui habitent aussi les îles Falkland, se font re- (1) Velain, Remarques générales au sujet de la faune des îles Saint-Paul et Amsterdam, 18178, thèse présentée à la Faculté des sciences de Paris, p. 61. Ce naturaliste a donné beaucoup de détails intéressants sur ces Manchots. (2) Sharpe, op. cit.(Philosophical Transactions, t. CLXVIIE, p. 160). (3) J. Verreaux, op. cit. (Revue de zoologie, 1847, p. 242). (4) Voyez ci-dessus, page 42. (5) Gould, Birds of Australia, t. VIL, pl. 83. (6) M. Hutton a cependant cru devoir les considérer comme appartenant à une espèce distincte, et il leur a donné le nom d'Eudyptes Füholi (Proceedings of the Linnean Society of New South, Wales, t. IV, p. 334). (7) Voyez fig. 5; d’après un individu appartenant au Muséum d'histoire na- turelle et rapporté de l’île Stewart par M. H. Filhol. ‘ ANN. SC. NAT., ZOL., JUIN 1379-80. IX. 21. — ART. N° 9. 50 ALP. MILNE EDWARDS,. . marquer par la grosseur de leur bec. G. R. Gray a cru devoir les séparer spécifiquement des Eudyptes chrysocomes, et illeur donne le nom d’Ewdyptes pachyrhyncha (4); mais aujourd’hui la plupart des ornithologistes qui se sont occupés spéciale- ment de l’étude des Oiseaux de cette famille, les considèrent comme étant en réalité des Chrysocomes, et je partage com- plètement cette opinion : car en étudiant les Chrysocomes de Campbell dont j'ai parlé plus haut, j'ai constaté que les pro- portions du bec sont loin d’avoir la fixité que l’on y attribue d'ordinaire, et je suis porté à croire que l’âge des individus exerce une grande influence sur les particularités de cetordre. À mon avis, les Eudyptes pachyrhynques ne constituent donc qu’une forme particulière de l’espèce à laquelle s'applique le (1) G. R. Gray fit connaître cette variété ou espèce prétendue, dans son ouvrage sur la partie ornithologique des collections formées dans les mers an- tarctiques par l’expédition de « l’EREBUS » et du « TERROR » sous le comman- dement de Ross, et 1l la caractérise de la manière suivante : « Eudyptes pachyrhyncha. — La partie médiane de chaque plume d’un bleu foncé et luisant bordé latéralement de noir, base blanche. Côtés de la tête et gorge d’un noir obscur; partie antérieure du cou et face ventrale du corps d’un blanc jaunâtre. Unelarge ligne d’un jaune pâle partant de chaque narine, pas- sant au-dessus des yeux et s'étendant un peu au delà. Ailes d’un bleu pâle à leur face supérieure et eu majeure partie blanches en dessous. Bec et pieds rouges. Longueur, 1 pied 8 pouces. Longueur du bec, depuis la commissure; 2 pouces 1/2. Ailes, 7 pouces 1/2; tarse, 1 pouce 1/2. Le spécimen décrit diffère des autres en ce que le bec est plus court et plus élevé ; les crêtes sourcilières commencent aux narines et ne se prolongent pas beaucoup en arrière des yeux, comme chez VE. chrysocoma. Get Oiseau est rare à Waikowaiti et y est connu sous le nom de Tanake. » (The Zoology of the Voyage of H. M. S. EreBus and TERROR, Birds, p. 17.) Plus tard G.R. Gray fit représenter cet Oiseau dans son Genera of Birds. M. Sharpe, qui a donné récemment un Appendice au travail de G. R. Gray sur les Oiseaux du Voyage de l'ERÈBE, n'accepte pas cette espèce, et il considère l’Oiseau en question comme un Eudyptes chrysocoma. M. Elliott Coues le regarde aussi comme étant identique au Chrysocome proprement dit. M. Finsch, au contraire, maintient la distinction spécifique faite par G. R. Gray. Voyez à ce sujet: Sharpe, Appendix to Gray's Zoology of the Voyage of H. M. S. ErEpus and Terror, Birds, 1875. Elliott Coues, op. cèt. (Proceed. Philadelphia Acad. of Sc., 1872, p. 202). Finsch, Revision der Vôgel Nouseelands (Journal für Grnithotogie, 1872, p. 261, et 1874, p. 217). ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 91 nom d’Æudyptes chrysocoma, mais son mode de distribution géographique mérite d’être étudié. Effectivement ces Chrysocomes à gros bec n’ont été trouvés que dans les parties de l'Océan antarctique comprises entre le 60° et le 173° degré de longitude O. du méridien de Paris, c’est-à-dire dans la partie de la zone australe correspondant au continent antarctique, et ils constituent deux variétés appartenant à des stations différentes. L'une de ces variétés (1) a été observée sur les côtes de la Nouvelle-Zélande, où elle est connue des Maoris sous le nom de Tawaki, mais on ignore où elle niche. La bande sourcilière est, chez cet Oiseau, très large en avant de l’œil, tandis que les aigrettes auriculaires sont au contraire très grêles et fort courtes. Enfin elle se fait remarquer par là teinte bleu pâle de la face externe des aïles (2). Je n’ai pas eu l’occasion de voir le Manchot de la Nonvelle- Zélande décrit récemment par M. Finsch sous le nom d’Eu- dyptes vittata (83), mais je suis disposé à croire que eet Oiseau, (1) Voy. fig. 2 et fig. 5. (2) Le Muséum d'histoire naturelle possède un exemplaire de cette variété de Chrysocome à gros bec, rapporté en 1846, de la Nouvelle-Zélande, par M. Arnoux, chirurgien de la corvette le Rhin, que commandait le capitaine Bérard. La description que G. R. Gray donne de son Eudyptes pachyrhyncha s’y applique parfaitement; mais il n’en est pas de même pour la figure que cet auteur à jointe à son Genera of Birds, sous le même nom spécifique (t. IE, p: 176), ni pour la figure donnée plus récemment par M. Buller (A History of the Birds of New-Zealand, planche correspondante à la page 345). Sur l’une et ’autre de ces représentations, les crètes auriculaires se prolongent beaucoup plus loin vers la nuque et sont plus retombantes, ce qui dépend probablement d’une erreur du dessinateur. l Le Muséum a reçu de M. H. Filhol un autre exemplaire de Tawaki qui pro- vient de l’île Stewart et dont le bec est beaucoup plus robuste que chez aucun autre Manchot connu (fig. 5). La tête de cet Oiseau se fait aussi remarquer par sa coloration noire, et les plumes grêles et raides de ses aigrettes auriculaires sont moins courtes. Mais ces particularités ne me semblent pas avoir assez d’impor- tance pour caractériser une race spéciale. Peut-être sont-elles dues à l’âge. (3) O. Finsch, On two apparently new Species of Pinguins from New-Zea- land (Ibis, 3° série, 1875, t. V, p. 112). La courte description donnée par M. Finsch lui a été communiquée par M. le capitaine Hutton, directeur du musée de Dunedin; elle n’est pas accompagnée de figure ; et si cet ornithologiste a cru devoir distinguer spécifiquement cet Oiseau. 02 ALPEH. MILNE EDWARDS. dont un seul exemplaire a été trouvé à Dunedin, ne diffère pas notablement du Chrysocome précédent. Les aigrettes auricu- laires sont peut-être un peu plus courtes, mais la large bande sourcillière qui, d’après cet auteur, le distinguerait de tous les autres Chrysocomiens, existe aussi chez l’exemplaire du Tawaki conservé dans notre galerie ornithologique. J’ajouterai que les Chrysocomes à gros bec visitent aussi l’île Chatham, qui est située vers l’est, à environ 450 milles de a Nouvelle-Zélande ; mais l’imdividu unique qui y a été capturé était jeune eten mue, de sorte qu'on ne le connait qu’impar- faitement (1). M. Hutton a donné le nom d’Eudyptes atrata à un Chryso- come également pachyrhynchien dont tout le corps est noir en dessous aussi bien qu’en dessus, mais 1l n’a observé cette coloration anormale que sur un seul individu pris sur la côte de la Nouvelle-Zélande, et il me paraît probable qu’elle était due à un cas de mélanisme exceptionnel (2). Le musée de Leyde possède un Chrysocome de l’île Beauchèêne (3), qui est entièrement blanc; mais M. Schlegel a jugé avec raison que cet individu ne devait pas recevoir un nom spécifique particulier, et n’était qu’une variété albine de l'espèce ordinaire (4). Enfin on trouve à l’île Tristan-d’Acunha une autre variété de l’'Eudyptes chrysocoma qui ressemble beaucoup à celle de Kerguelen désignée par M. Sharpe sous le nom de saltator, c’est probablement parce qu’il l’a comparé aux figures de l’Eudyptes pachy- rhyncha, données par Gray, et non à la description due à cet auteur et citée plus haut. S'appuyant sur l'autorité de M. Hutton et de M. Finsch, M. Sharpe admet l’Eu- dyptes vittata comme une espèce particulière, mais il ne l’a pas vue et n’a rien ajouté au sujet de ses caractères distinctifs (EREBuS and TERRoR, Birds, Appendix, p. 95). (1) Travers, On the Birds of Chatham nn of the New-Zea- land Institute for 1872, t. V, p. 221). (2) La description succincte de ce Chrysocome nouveau a été publiée par M.Finsch dans le journal Ibis, 1875, p. 114. (3) L’une des îles Falkland. (4) Je rappellerai que M. Schlegel désigne à tort ces Manchots à front noir, de même que les autres Eudyptes chrysocomiens, sous le nom de Spheniscus chrysolophus (Musée des Pays-Bas, Ürinatores, p. 7). ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 55 mais dont le plumage est beaucoup plus clair. Je n’ai pas eu l’occasion de voir cet Oiseau; mais M. Pelzeln en a parlé d’après un individu conservé dans la collection impériale de Vienne, et cet auteur ajoute qu’au lieu d’être noir au dessus, il est d’une teinte isabelle (1). La seconde variété de Chrysocome à gros bec, dont le Muséum de Paris possède un exemplaire provenant des îles Falkland (2), correspond très bien à la description du Manchot de cette localité, que M. Gould a décrit sous le nom d’Ew- dyptes nigrivestis (3). Cet Oiseau est un peu moins grand que le précédent. La portion antérieure de la bande soureilière est moins développée que chez celui-ci; son plumage est beau- coup plus noir, la face externe des ailes est d’un ton presque aussi foncé que le dessus de la tête. Ce me paraît être l’une des variétés ou espèces secondaires des Manchots appelés. jadis Manchots sauteurs, mais il est probable que les naturalistes du dix-huitième siècle ne distinguaient pas cet Eudypte à frontnoir d’un Eudypte chrysolophe qui fréquente le même archipel, quoique maintenant les habitants de Falkland appliquent à ce dernier le nom de Macaroni, tandis qu’ils appellent les Chrysocomiens des Rockhoppers, ou sauteurs de rochers (4). En résumé, il paraît y avoir parmi les Eudyptes chrysocomes presque autant de variétés qu’il y a de stations dans lesquelles ces Oiseaux se reproduisent; mais les particularités qui les caractérisent n’ont ni assez d'importance, ni assez de con- stance pour motiver des distinctions spécifiques. Elles n’im- pliquent entre ces Manchots aucune différence primordiale, et elles peuvent être attribuées aux modifications que ceux-ci semblent susceptibles d’éprouver sous l'influence de condi- tions biologiques diverses. Les EUDYPTES CHRYSOLOPHES de Brandt, c’est-à-dire les (1) Pelzeln, Novarra, Vôgel, p. 141, note n° 2. (2) Voy. fig. 6. (3) Gould, Exhibition of a series of P'nguins, and Description of two new Species (Proceed. of the Zool. Soc., 1860, p. 418). (4) Abbott, the Pinguins of the Falkland islands (Ibis, 1860, t. Il, p. 338). 54 ALP. MILNE EDWARDS. Manchots empanachés à front jaune (1), sont beaucoup moins répandus que les Eudyptes chrysocomes; on n’en trouve ni à l’île Saint-Paul, ni à Kerguelen, et leur existence n’a été con statée d’une manière. certaine que sur des iles appartenant d’une part au groupe atlantique austral, d'autre part à la région océanienne antarctique, mais ils ne sont pas complète- ment semblables entre eux dans les diverses localités où on les rencontre. Les Ghrysolophes des îles Falkland ont les côtés de la face, ainsi que la gorge, d’un brun noirâtre (2), et c’est d’après un bel exemplaire de cette variété que M. Gould a cru reconnaitre une espèce nouvelle qu’il a désignée sous le nom d'Eudyptes diademata (3), désignation que quelques auteurs ont appliquée récemment à tous les Manchots empa- nachés à front jaune (4). À l’île Macquarie, située vers le 59° degré de latitude S., un peu à l’est du méridien de la Nouvelle-Zélande, on trouve des Eudyptes chrysolopha qui ont le tour des yeux, les joues et la gorge d’un blanc grisâtre et presque semblable au reste de la partie inférieure du cou, Cette variété paraît ne pas y être rare, car le Muséum d'histoire naturelle de Paris en possède un exemplaire (5); un autre individu se trouve dans le musée de Leyde (6); enfin un troi- sième individu exactement semblable est conservé dans le (1) Voy. fig. 1. (2) Le an de Paris possède de beaux exemplaires de l’Eudyptes chrysa- lopha des Falkland. (3) M. Gould a décrit son Euwdyptes diademata d’après un Manchot prove- nant de la collection formée à Falkland par M. Abbott, et ce voyageur nous dit que l’Oiseau en question était un exemplaire unique choisi par lui au milieu de toute une troupe d’Eudyptes sauteurs dans la rookery d'Eagle-point; il ajoute qu’il n’en a jamais vu de semblables. D’après des renseignements qu'il a recueillis de la bouche d’un marin de Falkland, il y en aurait au contraire beaucoup à la Nouvelle-Géorgie, où les matelots les désignent sous le nom de tufted Pinguins, © cute de Manchots à touffes. (Abbott, On the Birds of the Falkland islands, dans Ibis, 1861 , t. IT, p. 163.) (4) Schlegel, op. cit., Urinatores, p. 8. — Elliott Coues, op. cit. (Proceed. Philadelphia Acad., 187, p. 206). (5) Voy. fig. 8. (6) Spheniscus diadematus, n° 3 (Schlegel, Urinatores, p. 8). ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 55 musée de l’Académie de Philadelphie (1). Jene connais aucun Chrysolophe de Macquarie qui n’ait pas la gorge noirâtre comme les représentants falklandiens de cette espèce, et pour mieux appeler l’attention des ornithologistes sur cette particularité, j'ai inscrit ces Oiseaux sur les catalogues du Muséum sous le nom d'Eudyptes albigularis. Dans cette révision de la distribution géographique des Eudyptes, je n’ai pas parlé de l'Eudyptes Cataractes, parce que cette espèce nominale établie en 1760 par Brisson, d’après une figure donnée précédemment par George Edwards (2) (1) Elliott Coues, op. cit. (Procecdings of the Acad. of Philadelphia, 1879, p. 207). (2) Le Pinguin, G. Edwards, Histoire naturelle de divers Oiseaux, t. I, pl. 49. Brisson considère cette figure comme étant très exacte, et c'est d’après elle qu'il établit son genre Gorfou ou Gataractes (Ornithologie, t. VI, p. 102). Pennant adopta sans examen ce que Brisson avait dit de ce Manchot; seule- ment il le désigna sous le nom de Pingouin à pieds rouges (Pennant, Philo- sophical Transactions, 1878 ,t. LVIIE, p. 98). Puis Forster, tout en déelarant qu'il n’a pas vu ce Manchot, l’inscrivit dans sa monographie sous le nom d’Ap- tenodytes Cataracta (Commentationes Societatis scientiarum gotiingensis, t. II, p. 145). Gmelin et Bonnaterre se bornèrent aussi à copier leurs prédé- cesseurs (Bonnaterre, ORNITHOLOGIE, dans l'Encyclopédie méthodique, t. I, partie 2, p. 558). Plus récemment M. Schlegel appliqua le nom spécifique de Cataractes à l’Oiseau figuré par Buffon sous le nom de Manchol huppé de Sibérie et décrit par le même auteur sous le nom de Manchot sauteur. Il le distingua de son Spheniscus chrysocomus et de son Spheniscus chrysalophus par la brièveté de sa queue (qui, dit-il, est passablement courte), et par sa taille beaucoup moins forte (0p. cit., Urinatores, p. 8). Pour G. R. Gray et pour le prince Ch. Bonaparte, l’£Eudyptes Calaractes est synonyme à la fois de l’'Aptenodytes cataractes de Forster et de l’Aptenodyles chrysocama du même auteur (Gray, Handlist, t. IT, p. 98, et Ch. Bonaparte, Conspectus, dans Comptes rendus Acad. des sciences, 1856, t. XLIE, p. 775). M: Elliott Coues, au contraire, tout en admettant que l'Eudyptes Cataractes est une bonne espèce, le sépare spécifiquement de lEudyptes chrysocoma, qui, pour lui, ne diffère pas de l'Eudyptes pachyrhyncha de Gray (Elliott Coues, op. cit., Pro- ceed. ofthe Acad. of Sc. of Philadelphia, 1872, p. 201). Enfin M. Sharpe pensé avec raison que la dénomination d’Eudyptes Cataractes doit être rayée de nos catalogues ornithologiques (Birds of Kerguelen, in Philosoph. Transact., vol. CLXVIIE, p. 161). Cette divergence d’opinions entre des ornithologistes tous très habiles indique assez quelle était la confusion des distinctions spécifiques de ce groupe de Manchots. 56 AILPEF. MELNE HINVARDS, et représentant un jeune Manchot indéterminable et d’ori- gine inconnue, n'appartient pas au groupe des Manchots à panaches. S 4. Plusieurs auteurs récents rangent dans le groupe naturel des Eudyptes un Manchot qui a été trouvé d’abord par Hom- bron et Jacquinot sur l’île Auckland, et qui a reçu de ces voyageurs lenom de Catarrhactes antipodes (1) ; mais cet Oiseau n’a pas la tête empanachée (2), et par la forme de son bec il se rapproche des Pygoscelis, parmi lesquels d’autres ornitho- logisies le classent. On peut conclure de cette divergence d’opi- nions que le Manchot antipode n’est en réalité n1 un Eudyptes, ni un Pygoscelis (3); et pour faciliter l’examen des questions relatives à la distribution géographique de tous ces Oiseaux, il m'a paru utile de le considérer comme appartenant à un sous- genre particulier, que je désignerai sous le nom de Wegadyptes. Ce Manchot est de grande taille et se fait remarquer prin- (1) Hombron et Jacquinot, Description de plusieurs Oiseaux nouveaux et peu connus, provenant de l'expédition autour du monde faite Sur les corveites L'ASTROLABE et LA ZÉLÉE (Annales des sciences naturelles, série 2, 1841, t. XVI, p. 320). — Pygoscelis antipodes, Jacquinot et Pucheran, Voyage au pôle sud, sous le commandement de Dumont d’Urville (Z00LoG1E, Oiseaux, t. III, p. 156, pl. 33, fig. 2 ; 1855). (2) D’après la figure donnée par Hombron et Jacquinot (op. cit.), on pourrait croire à l’existence de petits panaches auriculaires chez cet Oiseau; mais l’in- dividu qui à servi de modèle pour ce dessin existe dans la collection ornitho- logique du Muséum, et montre que la bande sourcilière jaune, au lieu de se prolonger postérieurement en forme d'aigrette, ne se compose que de plumes courtes et remonte sur le vertex. (3) Le Manchot antipode est un Cataractes ou un Eudyptes pour Hombron 4 Jacquinot (Annales des sc. naturelles, t. 1, et Atlas du Voyage au pôle sud, pl. 35, fig. 2); — un Aptenodytes (Aptenodyta flavilarvata) pour Peale (United States exploring Expedition, t. VIIL, ORNITHOLOGY, p. 260) ; — un Pygoscelis pour G. R. Gray (Voyage of the EreBus and TERROR, Birds, p.17, pl. 27), pour Cassin (United States exploring Expedition, MAmm. and ORNITHOLOGY, p. 351), pour M. Elliott Coues (op. cit., Proceed. of the Acad. of Sc. of Philadelphia, 1879, p. 199), pour le prince Ch. Bonaparte (Conspectus, Comptes rendus de l'Aca- démie des sciences, 1856, t. XLIT, p. 775), et pour M. Pucheran (Jacquinot et Pucheran, Voyage au pôle sud, Z00L1., t. IL, p. 156). ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 57 cipalement par l’existence d’une large bande claire d’une teinte jaune sale, qui naît vers le bord postérieur de l'œil, se dirige en arrière, et remonte sur l’occiput de manière à rejoindre son congénère sur le dessus de la tête et à circon- serire postérieurement le sinciput. Mais cette zone est com- posée de petites plumes subpiliformes à peine plus longues que celles des régions temporales et occipitale. Les plumes du front et du sinciput sont au contraire notablement plus longues, et constituent une sorte de houppe courte, touffue et en brosse. Elles sont, les unes noirâtres, les autres jaunâtres, ainsi que celles des joues et de la partie antérieure de la gorge; enfin elles garnissent sur une étendue assez considérable la Hate de la mandibule supérieure. Le bec est long, très comprimé laté- ralement et beaucoup moins robuste que celui des Eudyptes. Le dessus du corps est d’une couleur brunâtre tiquetée de noir et de gris pâle; le ventre et la gorge sont d’un blanc Jjaunâtre ; enfin la queue est courte. Le Megadyptes antipodes est donc, à beaucoup d’égards, in- termédiaire à l’Eudypte chrysolophe, au Pygoscèle papou et aux Apténodytes. J’ajouterai que son sternum est beaucoup plus développé que chez aucun des autres Apténodytiens dont j'ai eu l’occasion d’étudier le squelette. Jusqu'ici ce Manchot n’a été trouvé que sur les îles Auckland et Campbell (1). $ 5. Un petit Manchot décrit récemment par M. Oustalet sous le nom d'Eudyptula Serresiana (2) établit un passage entre les Eudyptes proprement dits et les Eudyptula. Il a, comme les premiers, un pinceau de plumes jaunes qui fait saillie de M Si de la tête en arrière des sourcils; mais cette bande (1) Le Muséum d'histoire naturelle possède plusieurs de ces Manchots, qui ont été pris à l’île Campbell par M. H. Filhol. (2) Oustalet, Description d’une nouvelle espèce de Manchot (Annales des sciences naturelles, 6° série, 1878, t. VIIL, art. n° 4). 58 ALP. MILNE KEDWARDS. est très courte, etles plumes du front, comme celles du sinciput, sont notablement plus longues et constituent une touffe sub- cristiforme (4). Chez les Eudyptules, il n’y a rien de semblable, etje crois utile de distinguer ce Manchot sous un nom générique spécial. Je l’appelleraile Microdyptes Serresiana. M a été trouvé par l'amiral Serres, près du cap Horn, à Charruca, localité située dans le groupe des îles feugiennes. 8 6. Les Manchots alophiens (ou non empanachés), quise dis- tinguent des Apténodytes par la conformation de leur bec et par leur taille moins forte, sont rangés en trois sections ou sous- genres sous les noms de Pygoscelis, d'Eudyptules, de Sphé- nisques et de Dasyramphes. Les Pygoscelis proprement dits (2), par leur taille et leur conformation, ressemblent beaucoup aux Eudyptes dont je viens de parler; mais ils n’ont ni huppe ni panache, et ils se fontremarquer par l'allongement considérable de leurs pennes caudales, qui constituent non-seulement un gouvernail quand ils nagent, mais aussi un point d'appui solide quand ils sont à terre. Ils habitent presque toutes les localités où se trouvent les Apténodytes, si ce n’est sur la terre Victoria, où leur présence n’a pas été signalée; et ils s’étendent depuis la terre de. Graham jusqu'aux îles atlantiques australes, puis vers l’est jusqu’à Kerguelen et à l’ile Campbell, mais ils n’at- teignent ni l’île Saint-Paul, ni l'Australie ou FE Nouvelle- ZEoie. | Ce petit groupe se compose de deux espèces faciles : à dis- (1) Voy. fig. 9. (2) Le genre Pygoscelis a été établi en 1832 par Wagner pour recevoir le Manchot papou de Sonnerat (op. cit., pl. 115), qui se distingue de toutes les autres espèces du même groupe par l’existence d’une grande tache blarché sur le sinciput (Wagner, Neue Sippen und Gattungen der Vôgel, in Isis, 1832, t. XI, p. 463). Les ornithologistes américains désignent cet Oiseau sous le nom de Pygoscelis tæniata (Elliott Coues, op. cit., p. 195), et ce changement a été adopté par M. Sharpe dans son travail sur la faune avienne de Kergnsiss (ap. cit., Philosophical Transactions, t. CLXVIIT, p. 154). ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 59 tinguer entre elles. La plus répandue est le Pygoscelis papua (1), dont la gorge et la tête sont d’un brun noirâtre, avec une grande tache blanche s'étendant du bord orbitaire supérieur sur le sinciput. Celte espèce se trouve aux îles Falkland (2) et s’y reproduit (3). Elle niche aussi à Kerguelen (4), et on la ren- contre également sur d’autres points de la région australe, notamment aux îles Crozet (5), à Macquarie (6) et à l’ile Stewart (7). La seconde espèce est le Pygoscelis antarctica, qui a les joues et la gorge, de même que là poitrine et le ventre, d’un blanc pur, à l'exception d’un collier transversal noir très étroit, qui descend de la région occipitale sous la portion hyoïdienne de la gorge. On rencontre ce Manchot aux îles Falkland (8), aux Orkneys australes (9), à la Nouvelle-Géorgie du Sud (10),où (1) Manchot papou (Sonnerat, op. cit., p.181, pl. 115).—Aptenodytes papua, Forster (loc. cit., p.140, pl. 3). — Eudyptes papua, Cassin (United States explo- ring Expedition, Binps, p. 264). — Pygoscelis Wagleri, Sclater (Birds of Falkland, in Proceedings of the Zool. Soc., 1880, p. 590). — Catarrhactes papuensis, Van der Hœven (Handbook of Zoologyÿ, t. I, p. 379). Les marins anglais désignent ce Manchot sous le nom de Johnnie. (2) Collection ornithologique du Muséum, n° 14961.— Schlegel, op. cit., Uri- natores, p.5.—(Gould, Proceedings of the Zoological Socrety, 1859, p. 98, — Sclater, op. cit. — Lichtenstein, Forsteri descriptiones Animalium, p.356. (3) Lecomte évalue à environ 40 000 le nombre de ces Oiseaux qu'il a vus réunis dans une seule rookery à Eagle-point, et des campements analogues se trouvaient sur d’autres points du même groupe d'îles. (Proceed. ofthe Zool. Soc. of London, 1868, p. 527.) (4) G. R. Gray, Handlist, t. TI, p. 98; EREBUS and TERROR, Birds, pl, 29. — Elliott Coues, op. cit., in Procced. Philadelphia Acad., 1872. RATE. Birds of Kerguelen (Bull. of the United States Nat. Museum, n° 2, p. 41. — Sharpe, Birds of Kerguelen (Philosoph. Transactions, t. CLXVIIL, p. 154). (5) Collections ornithologiques du Muséum, n° 14966. (6) Collection ornithologique du Muséum, n°° 14959 et 14960. — A ptenodytes tæniata, Peale, op. cit., p. 264. (7) Elliott Coues, Proceed. Philadelphia Acad., 1872, p.196. (8) Collection ornithologique du Muséum d'histoire naturelle, n° 14963, et Sclater, Additions and Corrections to the List of the Birds of Falkland islands (Proceed. of the Zool. Soc.,1861, p. 47). (9) Le musée de Leyde possède un de ces Manchots provenant de l’île Weddell, qui fait partie de l’archipel des îles Orkneys australes. (Schlegel, Urinatores, p. 6. (10) Ross, Voyage in the Southern and Antarctic Regions, t. Il, p. 422. 60 ALPH. MILNE EDWARDS. il parait attemdre une grande taille (1). Forster l’a observé fréquemment en mer, dans le voisinage des glaces circom- polaires (2). ST: Plus loin, au sud-est, ces Manchots alophiens sont repré- sentés par les Dasyramphus (3), que plusieurs auteurs ont cru devoir ranger dans le groupe des Pygoscelis (4), mais qui s’en distinguent par la disposition du bec. Ils n’ont encore été rencontrés que dans l’extrême sud, sur la terre Adélie (5), dans le voisinage de la terre Victoria (6) et près de la terre Louis- Philippe (7). Ges grands Manchots sont caractérisés principa- lement par la brièveté du bec, dont la plus grande partie de la mandibule supérieure est garnie de plumes. Les ornitho- logistes les plus modernes ont donné à cette espèce plusieurs noms différents (8). (1) Le capitaine Ross constata que l’un de ces Manchots pesait 75 livres anglaises, c’est-à-dire environ 34 kilogr. (2) Forster, op. cit. (Commentationes gottingensis, 1780, t. III, p. 141). (3) Cataractes Adeliæ, Hombron et Jacquinot (Annales des sciences natu- relles, 1841, t. XVI, p. 320). — Dasyramphus Adeliæ, Hombron et Jacquinot, (Voyage au pôle sud, Oiseaux, pl. 33, fig. 1); Ch. Bonaparte, loc. cit., p. 29. (4) G. R. Gray, Voyage of the EreBus and Terror, Birds, pl. 28. — Hyatt, op. cit. (Proceed. Boston Soc. of Nat. Hist., 1871, p. 250). — Elliott Coues, op. cit. (Proceed. of the Acad. of Nat. Sc. of Philadelphia, 1872, p. 196). (5) Hombron et Jacquinot, op. cit. (6) G. R. Gray, List of Birds in the collection of the British Museum, 1844, p. 154. (7) Elliott Coues, op. cit. (Proceed. Philadelph. Acad., 1872, p. 197). (8) Ainsiil a été appelé : Pygoscelis brevirostris par Gray, Genera of Birds, Spheniscinæ, et List of the specimens of Birds in the British Museum, 1844, p. 154. — Aptenodytes longicauda, par Peale, op. cit. (United States exploring Expedition, p. 261). M. Finsch a décrit, sous la dénomination de Dasyramphus Hercules, une variété de cette espèce de Manchot qui se fait remarquer par sa gorge entiè- rement blanche, tandis que chez le Dasyramphus Adeliæ cette partie est d’un brun noirâtre, comme la tête. G. R. Gray a onsidéré cet Oiseau comme étant un jeune individu de D. Adeliæ, mais M. Finsch assure qu’il est adulte. Malheureu- sement on ne sait pas exactement de quelle localité il provient. (Finsch, Descrip- tion of a new Species of Pinguin, in Proceed. of the Zoolog. Soc., 1870, p. 322, pl. 25). ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 61 Brisson a donné le nom générique de Spheniscus au Man- chot tacheté (1) que- Linné a appelé le Diomedea demersa (2), et que Buffon a figuré sous le nom de Manchot du cap de Bonne-Espérance (3). M. Elliott Coues a constaté récemment que cet Oiseau diffère des Aptenodytes et des Eudyptes par le grand développement des fosses temporales (4), particularité ostéologique qui est en rapport avec la puissance du bec ; et aujourd’hui la plupart des ornithologistes rangent dans la même division plusieurs autres espèces ou variétés de Manchots dont le bec est très robuste et dont la taille est médiocre. Beaucoup d'auteurs placent dans la même ide géné- rique les petits Manchots qui ne diffèrent que fort peu des Sphénisques proprement dits, mais en ont été séparés par le prince Charles Bonaparte, et constituent, dans le système de ce naturaliste, le genre Eudyptula (5). Ces deux irsine dela famille des Manchots sontloin d’être aussi répandues que le sont les Aptenodytes, les Eudyptes et les Pigoscelis. Je ferai aussi remarquer que ni lesSphénisques, n1 les Eudyptules, ne s’étendent beaucoup vers le continent antarctique, mais qu'ils s’avancent davantage vers l'équateur. Les Sphénisques fréquentent les îles atlantiques australes et se montrent dans les mers qui baignent à l’est et à l’ouest la partie antarctique de l’Amérique méridionale, jusque dans le voisinage de l’équateur ; ils se multiplient aussi à l'extrémité sud de l’Afrique, mais sans s’étendre jusqu’à Kerguelen, ni aux îles de l’océan Pacifique austral. Dans ces dernières stations, ils sont représentés par les Eudyptules, qui sont confinés dans la région occupée par la Nouvelle-Zélande et dans la partie de (1) Ornithologie, t. VI, p. 97, pl. 9. (2) Systema nature, edit, xu, t. 1, p. 214. (3) Planches enluminées, n° 382 (ou 972). (4) Elliott Coues, op. cit. (Proceedings of the Academy of Natural Sciences of Philadelphia, 1872, p. 183, pl. 1, fig. 3 et 4). (5) Ch. Bonaparte, Conspectus Ptilopterorum systematicus (Comptes rendus de l’Acad. des sciences, 1856, t. XLIL, p. 779). 62 ALPH. MILNE EDWARDS. l’océan Pacifique qui baigne les côtes occidentales de l ne rique du Sud. Les Sphénisques se font remarquer par heu haaé de diffé- rences sexuelles très prononcées. Ghez les mâles, on voitisur la poitrine et sur les côtés du ventre une bande noire continue qui correspond à la ligne de flottaison de ces Oiseaux nageurs, et qui, en dessus, est séparée des parties foncées de la face supé- rieure du corps par uné bande blanche, disposition dont on ne connait pas d'exemples dans les autres familles de Man- chots (1). Ils ne constituent probablement qu'une seule espèce primordiale, mais celle-ci forme diverses races caractérisées par des particularités secondaires. L'une de ces variétés locales est reconnaissable à l’existence d’une seule tache noirâtre située sur le devant de la gorge ét entourée de blanc en avant et en dessus, ainsi qu’en arrière. C'est le Spheniscus demersus, dont une colonie est établie au voisinage du cap de Bonne-Espérance. De tous les représen- tants de la famille qui nous occupe, il est le seul qui niche sur le littoral de l’ancien continent, et il ne descend pas plus loin vers la région tropicale, mais il se retrouve avec les mêmes caractères sur les terres atlantiques australes, non loin du cap Horn, notamment aux îles Falkland (2). Le Muséum d'histoire naturelle possède des exemplaires venant de ces deux localités si éloignées l’une de l’autre, et j'ai pu m'assurer de leur identité spécifique (3). Ce fait avait d’ail- leurs été déjà constaté par plusieurs ornithologistes (4). (1) Chez les femelles, les parties noirâtres de la région dorsale et les parties blanches de la région ventrale se rencontrent sur les côtés du corps, et il » ne pas de ruban noirâtre le long de la ligne de flottaison. C’est une de ces femelles que Buffon a fait représenter dans ses planches enluminées, sous le nom de Manchots des Hottentots (pl. 1005 ou 973). - (2) Lecomte, Proceedings of the Zoological Society, 1868, p. 527. (3) Un de ces Spheniscus demersus, rapporté du cap de Bonne-Espérance par le voyageur naturaliste Delalande, a été très bien figuré par d’Orhbigny dans l’atlas de la grandé édition du Règne animal de Cuvier (Orseaux, pl. 90, fig. 3). La figure donnée par Buffon est également très exacte (Planches enluminées, n° 972 ou 382). (4) M. Elliott Coues, qui a très bien distingué le Spheniscus demersus du Cap ARTICLE N°. \ FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 63 Il y a cependant dans ces régions américaines australes une autre variété locale ou race dont Forster a donné une figure exacte sous le nom d’Aptenodytes magellanica (1). Ge dernier Sphénisque est caractérisé par l'existence d’un large collier noirâtre qui entoure la partie inférieure du cou et qui est séparé de la tache gulaire foncée, ainsi que du ruban pectoral de la même teinte, par deux bandes blanches, dont l’une est un pro- longement de la bande temporo-sourcilière, et l’autre se con- tinue postérieurement avec les bandes blanches des flancs comprises entre le noir du dos et le ruban pectoro-ventral ; par conséquent, au lieu d’avoir un seul collier comme le Sphe- niscus demersus, 1l en a deux. Plus au nord, sur la côte ouest du continent américain, se trouvent des Manchots qui ne diffèrent du Spheniscus demersus du cap de Bonne-Espérance et des terres magellaniques que par la teinte moins foncée de la partie supérieure du corps et de la tête. Le naturaliste voyageur Mayen a appelé cette variété le Spheniscus Humboldtii (2), et probablement c’est elle qui avait été désignée précédemment sous les noms de Diomedea chlensis et de Diomedea chiloensis (3). et le S. magellanicus comme deux variétés d’une même espèce, a constaié l'existence du premier au cap de Bonne-Espérance, et celle du second à la Terre de Feu. Le même auteur rapporte à cette dernière variété le Manchot appelé Aptenodytes magnirostris par Peale (United States exploring Exped., Birds, p. 263), et j'ajouterai que l’Oiseau en question, n'ayant pas de ruban pectoral noirâtre, est probablement une femelle. (Elliott Coues, Proceed. of the Acad. of Philadelphia, 1872, p. 211.) (1) Forster, op. cit. (Gommentationes Sacietatis gottingensis, 1780, t. HI, l 5). ; a" Mayen, Beiträge zur Zoologie gesammelt auf einer Reise um die Erde, VoceL, p. 110, pl. 21. Cassin pense que le Spheniscus Hurbolitis estle mâle du Sph. magella- nicus (United States exploring Expedition, MAumaLoGy and ORNITHOLOGY, p. 304). (3) Un naturaliste espagnol du siècle dernier, Molina, parle de deux autres Oiseaux apténiens qui seraient particuliers au littoral chilien (3). L'un, appelé par cet auteur Diomedea chilensis (4), ressemble beaucoup aux Manchots dont Je viens de parler ; mais, au dire de Molina, il serait tridactyle, tandis que tous les Manchots sont pourvus de quatre doigts. Aucun zoologiste moderne n’a vu, ni au Chili ni ailleurs, de Manchot ayant ces caractères ; je pense donc qu'il 64 ALPH. MILNE EDWARDS,. Elle a été capturée sur la côte du Pérou, et elle parait ne différer en rien de plusieurs Manchots que le Muséum d’his- toire naturelle a reçus des côtes du Chili, où la présence de ces Oiseaux a été signalée aussi par Claude Gay (1). On trouve également ces Oiseaux à l’île Ghiloe (2) et dans diverses parties de l’archipel feugien (3). Enfin le Sphénisque magellanique est représenté aux îles Galapagos par le Sphemiscus mendicatus, qui porte sur le cou trois colliers superposés, par suite du développement de la tache blanche située sous le cou, à la base de la mandibule inférieure, et du rétrécissement de la tache jugulaire noire. On y distingue aussi de chaque côté du front une petite tache blanche qui est séparée de la portion antérieure de la bande sourcilière par un liséré grisätre (4). Au cap de Bonne-Espérance, ce n’est pas sur la terre ferme que les Sphénisques habitent; ils nichent en grand nombre sur une petite île rocheuse située vers le milieu de False bay y a là une erreur d'observation (Molina, Saggio sulla storia naturale de Chili, in-8°. Bologna, 1782, p. 258 et 259). C’est l’Oiseau désigné par Latham sous le nom d’Aptenodytes Molinæ (Index ornithol., t. II, p. 881). On ne possède aucune figure de cet Oiseau. Bibra y rapporte les Manchots qu’il a trouvés sur les côtes du Chili et du Pérou, lesquels étaient probablement le Spheniscus Humboldtii (Beiträge zur Naturgeschichte von Chile, dans Mém. de l'Académie de Vienne, 1873, t. V, 2 partie, p. 152). — La seconde espèce, que Molina désigne sous le nom d’Albatros ou Diomedea chiloensis, et que les habitants des îles Chiloe recherchaient pour son duvet, me paraît être un Manchot pris dans le jeune âge. Il n’y a donc, au sujet de ces Oiseaux, rien qui doive m’arrêter ici. (1) Gay, Historia fisica’e politica de Chite, Zo0LoGIA, t. I, p. 467. (2) J. von Tschudi, Beiträge zur geographischen Verbreitung der Meer's Vôgel (Journal für Ornithologie, 1856, t. IV, p. 181). (3) Ils sont très communs à la baie Orange et autour du cap Horn (Cassin, op. cit., p. 364). Ils se trouvent aussi dans le détroit de Magellan (Sclater and Salwin, op. cit., in Ibis, 1867, 1. V, p. 284). (4) Le Manchot décrit par Sundeval sous ce nom a été trouvé par les natu- ralistes de l’expédition suédoise de la frégate Eugénie, à l’île James, située vers le milieu du petit archipel des îles Galapagos (Sundeval, On Birds from the Galapagos islands, in Proceedings of the Zoological Society, 1871, p. 126). M. O. Salvin a donné une figure de cet Oiseau (On the Avifauna of the Gala- pagos Archipelago, in Transactions of the Zoolog. Society of London, 1876, t. IX, p. 508, pl. 89). ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 65 et appelée Sea island (1); et là, de même qu'à Falkland, ces Manchots n’ont pas les mêmes instincts que les autres membres de leur famille qui vivent sur les îles désertes et isolées de l'océan Austral, où 1ls n’ont pas à redouter le voi- sinage de l'Homme et des animaux carnassiers. Au lieu de couver à découvert comme les Eudyptes et les Pygoscelis, dans les espèces de campements dont j'ai parlé précédemment, ils s’établissent dans des galeries souterraines. Aux Falkland où, comme on le sait, les Manchots ont souvent pour voisins des Chacals venus de la Patagonie continentale, ils déposent leurs œufs et élèvent leurs petits dans de véritables terriers qu'ils creusent au bord de la mer, et ils donnent souvent à ces réduits une longueur de 6 mètres ou même davantage. Au cap de Bonne-Espérance, leur Instinct est moins parfait à cet égard et, au lieu de fouir eux-mêmes, ils s’établissent dans les ter- riers délaissés par les Lapins. Doit-on voir dans ces particu- larités de mœurs des habitudes, fruits de l'expérience, trans- mises des parents aux jeunes et devenues ainsi, par hérédité, un instinct inné mais acquis ? Je ne saurais l’affirmer, mais je suis disposé à le croire, et, s’il en était ainsi, on pourrait en conclure que les Sphénisques d'Amérique étant, sous ce rapport, plus perfectionnés que les Sphénisques d’Afrique, ont probablement subi pendant une plus longue suite de géné- rations l'influence modificatrice à laquelle leur instinct est dû, etavoir colonisé la première de ces régions avant la seconde ; ce qui serait en accord avec l'hypothèse de leur émigration de l’ouest vers l’est, que je me propose de présenter dans une autre partie de ce mémoire. 8 8. Les petits Manchots que la plupart des naturalistes désignent sous le nom spécifique de Spheniscus minor (2), mais que (1) Layard, the Birds of South Africa, 1867, p. 371. (2) Aptenodytes minor, Forster, op. cit. (Commentationes Soc, gotlingensis, t. IE, p. 147). — Latham, À general Synopsis of Birds, t. VI, p. 572, pl. 103. — Spheniscus minor, Gould, Birds of Australia, t. VII, p. 84. — Eudyptulus ANN. SC. NAT., ZOOL., JUIN 1879-&0. IX. 22. — ART. N°9. 66 ALP, MEILNH EDWARDS. quelques auteurs considèrent comme appartenant à plusieurs espèces distinctes, forment un groupe particulier auquel, ainsi que je l’ai déjà dit, on a donné le nom d'Eudyptula. Hs se distinguent des Sphénisques proprement dits par Pabsence du ruban pectoral chez le mâle, aussi bien que chez la femelle, par la petitesse de leur taille et par la temte grise _elun peu bleuâtre de leurs parties dorsales. L'Eudyptula minor est le type de ce groupe. Il: a le bec noir, les pieds blanchâtres et tout le dessus du corps, ainsi que les ailes, d’un ton bleuâtre; celles-c1 sont lisérées de blanc sur leur bord postérieur. M. Gould a cru devoir séparer de cette espèce certains Eudyptules qui sont beaucoup plus petits que ceux anciennement connus et qui ont les ailes plus courtes et d’une nuance plus bleuâtre en dessus; il leur a donné le nom de Spheniscus undina (1). Mais M. Elliott Coues, qui a examiné attentivement les mdividus observés et décrits par cet auteur, pense qu’ils ne doivent être considérés que comme une simple variété de l’£. minor (2). Enfin M. Finsch a appelé Eudyptula albosignata une troisième race ou variété qui se distingue des deux précédentes par l'existence d’un large liséré blanc sur le bord antérieur et sur le bord postérieur des ailes et d’une tache blanche sur les couvertures supérieures de la queue (8). Le bec de ce petit Manchot est plus robuste et plus profondément sillonné que celui de l'Eudyptula minor. Tous cés Eudyptules fréquentent les côtes de la Nouvelle- Hollande. L'Eudyptula minor niche aussi sur les iles situées dans le détroit de Bass et visite les côtes sud et est de l’Aus- minor, Ch. Bonaparte (Comptes rendus de l’Académie des sciences, 1856, t. XLII, p. 779), et Icones ineditæ Mus. Britann., pl. 84, 85. — Buller, His- tory of the Birds of New-Zealand, p. 347, pl. 33, fig. 2 (1) Aptenodutes undina, Gould, Proceedings of the Zoological Society of London. — Spheniscus undina, Gould, Birds of Australia, t. VIE, pl: 85. — Eudyptula undina ? Ch. Bonaparte, Conspectus (Comptes rendus de l'Aca- démie des sciences, t. XUIL, p. 597). (2) Elliott Coues, op. cit. (Proceed. of Philadelphia Acad., 1872, p. 209). (3) Finsch, Descriplion of a new Species of Pinguins from New-Zealand (Proccedings of the Zoological Society, 1874, p. 207). ARTICLE N° 9, | FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 67 tralie, la Nouvelle-Zélande êt Pile Ghatham. On n’a pas signalé ailleurs l’existence de ces Oiseaux. En enregistrant, comme je viens de le faire, les divers points de la surface du globe où la présence des Manchots a été con- statée, il importe de distinguer entre elles les stations de repro- düction de différentes espèces et les stations de repos de ces mêmes Oiseaux. Les premières constituent leur véritable patrie, et c’est là seulement qu'ils sont soumis pendant le jeune âge aux conditions biologiques particulières à ces divers heux. Dans les autres, ce ne sont que des visiteurs temporaires: ils y sont seulement des hôtes de passage, et ils ne sauraient y former des races spéciales. 6 9. Nous venons de constater que chacun des principaux types secondaires de la famille des Manchots se trouve représenté sur plusieurs terres antarcüques très éloignées lés unes des autres et séparées entre elles, ainsi que de tout le reste de la surface du globe, par des mers d’une grande étendue. Pour nous rendre compte de l’existence d’une même espèce d’animaux däris plusieurs stations isolées, il faut supposer, où que la même espèce zoologique s’est constituée primiivement dans éhacüne de ces localités et s’y est perpétuée, ou bien que, née dans une région particulière, elle s’est ensuite répandue au loin ét a formé en divers lieux des colonies prospères. Au prenuer abord, tout passage de l’une de ces stations à l’aütre né semble être possible que pour des Oiseaux grands voiliers, les niieux organisés pour exécuter de longs voyages à travers les airs. Or, les Manchots ne pouvant voler même à la distance de quelques pas, on doit se demander si la distribu- tion géographique de ces Oiseaux apténiens ne fournirait pas de nouveaux arguments à l appui de l'opinion des naturalistes qui ; répudiant l’idée d’une origine commune pour tous les représentants d’un mêmé type spécifique, pensent que, sous l'influence de circonstances similaires, des animaux identiques ont pu se consütuer sur plusieurs points du globe, sans avoir. 68 ALPH. MILNE EDWARDS. entre eux aucun lien de parenté. Mais lorsqu'on examine de plus près les mœurs des Manchots et les conditions biologiques dans lesquelles ils se trouvent, on voit que l’hypothèse des origines multiples, pour les individus de même espèce, n’est nullement nécessaire pour l'explication du mode de distribu- tion géographique de ces animaux. On peut se rendre compte de leur dissémination tout aussi facilement, en supposant tous les représentants d’un même type spécifique issus primi- tivement d’une souche unique, idée qui s'accorde bien mieux avec la tendance générale des faits fournis par la zoologie. En effet, non seulement les Manchots sont d'excellents na- geurs, mais ils aiment à se poser sur les glaces flottantes, au milieu desquelles 1ls vivent dans les parties froides de l'océan Antarctique, et ces vastes radeaux naturels constituent pour eux des moyens de transport parfaitement appropriés à de Jongs'voyages (1). Les navigateurs rencontrent souvent dans les mers australes de ces îles errantes et temporaires, sur les- quelles les Manchots se montrent en grand nombre, et quel- ques observateurs assurent que, parfois même, ces Oiseaux y établissent leurs nids (2). Or, les glaces flottantes envahissent annuellement toute la portion australe de la zone habitée par les Manchots, et souvent elles descendent jusque dans le voi sinage des stations les plus septentrionales occupées par ces Oiseaux. Ainsi on a vu la mer charrier de ces icebergs, ou mon- tagnes de glace, depuis le cercle antarctique jusque dans le voisinage du cap de Bonne-Espérance et fort au delà des îles Falkland, en face de l'embouchure de la Plata. Il en résulte que les Manchots, en partant des terres antarctiques, peuvent, malgré l’immensité des distances à franchir, être transportés d’ile en île et émigrer très loin de leur patrie primitive. Tant (1) La plupart des marins pensent que la rencontre d’Oiseaux en mer est un indice du voisinage de la terre ; mais Cook, tout en admettant que-cela peut être vrai là où il n’y a pas de glace, fait remarquer que dans l’océan Antarctique les Oiseaux se montrent à une distance immense de toute terre. (Voyage towards the South pole, t. 1, p. 33.) (2) Weddell a vu des Manchots établis de la sorte sur des glaces flottantes, par 74 de latit.'S. (Op. cit., p. 37.) ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 69 que les glaces flottantes, en fondant peu à peu sous les rayons du soleil, ne manquent pas sous leurs pieds, ils peuvent y - trouver un lieu de repos et naviguer en sécurité ; mais lorsque la température, devenue plus douce, a fait disparaitre les masses de glace, il faut qu’ils aient recours à leurs organes de natation, et si la terre est trop éloignée du lieu de leur nau- frage, ils doivent périr, à moins que, favorisés par les vents et les courants, leurs forces soient suffisantes pour achever la tra- versée. Dans ce cas, si la station où ils abordent leur convient, ils peuvent s’y établir, soit temporairement, soit d’une manière permanente. Quelques instants de réflexion suffiraient, ce me semble, pour convaincre tout naturaliste de cette vérité, mais on a aussi plus d’une preuve directe de ces longs voyages, qui tantôt s’accomplissent périodiquement, tantôt sont acci- dentels. Ainsi Ross a rencontré deux de ces Oiseaux naviguant en haute mer, au sud-ouest du cap Horn, là où les courants portent au nord-est et à une distance d'environ 1800 kilomètres de toute terre (1). La petite île de Tristan-d’Acunha, isolée au milieu de l’océan Atlantique, à une distance immense des îles Falkland et de toutes les autres stations fréquentées d'ordinaire par les Man- chots chrysocomiens, nous en fournit une autre preuve. Chaque année, vers le mois de juillet, elle est visitée par des bandes innombrables de ces Manchots, qui viennent y nicher et y élever leurs petits. Ces Oiseaux y établissent des campements d’une grande étendue, qui restent déserts pen- dant une partie de l’année; mais, à l’époque de la ponte, ils logent une population des plus serrées (2). L’accomplissement de très grands voyages doit être d’ailleurs une chose habituelle pour un grand nombre de Manchots. Ceux qui habitent la terre Victoria, vers le 70° degré de latitude (1) Vers 58° 36/ latit.. S. et 104° 40’ O. du méridien de Greenwich. (Ross, Voyage in the Southern and Antarctic Regions, t. I, p. 227.) (2) Earle, Narrative of a residence on the island of Tristan-d'Acunha, faisant partie de l'ouvrage du mème auteur, intitulé : Narrative ofnine months residence New-Zealand (in-8°, London, 1832). 70 ALPH,. MILNE EDNVVARDS, australe, ytrouvent à vivre pendant l'été lorsque les glaces, - devenues flottantes, ne les empêchent pas de chercher au sein de Océan les Mollusques et les autres animaux dont ils ont besoin pour leur nourriture; mais pendant le long hiver de cettetriste région, la pêche devient impossible, car une glace compacte et épaisse recouvre toute la surface de la mer, aussi bien que les terres adjacentes. Cette partie du globe devient donc périodiquement inhabitable pour tout animal à respira- tion aérienne, et les Manchots doivent nécessairement émigrer vers des parages où le froid étant moins vif, la mer reste ou- verte. Or, les distances à franchir dans ce but sont immenses et dépassent celles qui existent entre les diverses stations des mers tempérées habitées par ces Oiseaux nageurs. Je citerai à ce sujet une observation due à M. Jules Verreaux. Pendant son long séjour au cap de Bonne-Espérance, cet orni- thologiste distingué a vu des bandes de Gorfous ou Eudyptes sauteurs (1) jetés à la côte par la tempête (2). Or, ces Oiseaux n'habitent pas le continent africain, et ceux qui abordaïent de la sorte ne pouvaient venir que de Tristan-d’Acunha, des iles Crozet, de Kerguelen ou de quelque autre station plus éloignée du Cap ; d’ailleurs l’état d’épuisement dans lequel ils se trou- vaient au moment de leur arrivée témoignait assez des fatigues qu'ils avaient dû éprouver en route : ils se rétablirent promp- tement, mais ne formèrent pas de colonies sur la côte qui leur avait servi de refuge. C’est sans doute par suite d'accidents analogues que quel- ques individus de la même espèce ont été rencontrés sur le littoral de la Tasmanie et près de la côte sud de l'Australie ; car ces terres ne sont pas au nombre des stations ordinaires des Eudyptes, et les rookeries les plus rapprochées se trou- vent aux iles Saint-Paul et Amsterdam, à File Campbell: et à l’île Macquarie. On conçoit donc facilement qu’à l’aide des glaces flottantes qui abondent dans les mers antarctiques, ces oiseaux nageurs aient pu se répandre beaucoup, et que les (1) Chrysocama Cataractes, Ch. Bonaparte, Euds rypies chrysocoma. (2) Communication verbale. ARTICLE N° 9, FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 71 représentants d'un même type spécifique, en partant primiti- vement d’un seul point, aient pu aller fort loin. Transportés de la sorte sur des terres nouvelles, ils ont péri ou ils ont émigré de nouveau lorsque les conditions d'existence qu’ils y rencontraient ne leur étaient pas favorables ; mais si la localité leur était propice, ils ont pu y prospérer et y établir des colo- aies florissantes. Les îles Falkland, l’île de Tristan-d’Acunha, les îles Crozet, ainsi que l’île de Kerguelen, l’île Saint-Paul, l’île Macquarie et les autres petites terres. isolées que j'ai énumérées précé- demment comme contenant des rookeries, sont donc, suivant toute probabilité, des stations où des colonies ornithologiques de ce genre, parties d’un point plus ou moins éloigné, sont venues se fixer. JU G: Le rôle présumable des glaces flottantes dans la distribu- tion géographique des Manchots me permettra même de pousser plus loin ces investigations, et de déterminer approxi- mativement la région que l’ on doit Fu comme e la patrie primitive de ces Oiseaux. Les blocs énormes de glaces qui constituent dans les mers australes des îles flottantes suivent dans leurs longs voyages une direction constante : détachées de la large ceinture de solace qui entoure les terres antarctiques et qui occupe toute la région éircompolaire, elles descendent plus ou moins directe- ment vers la zone tropicale. I est évident que si ces glaces flottantes ont servi au transport des Manchots, cé n’a pu être que pour les conduire du sud vers l’équateur, et par conséquent le point de départ des émigrants ne saurait être placé sous les basses latitudes où l’on réncontre aujourd’hui cette famille d'Oiseaux apténiens. Si elle était originaire de Tristan-d’A- cunha, de Falkland, de Kerguelen ou de la Nouveile-Zélande, où elle se multiplie aujourd’hui, on ne concevrait pas son extension jusque sur la terre de Palmer, la terre Adélie et la terre Victoria, qui sont situées au loin vers le sud ; mais sa dis- sémination actuelle serait au contraire facile si son berceau primitif était la terre Victoria ou quelque autre point voisin 12 ALPH. MILNE EDWARDS. du continent ou archipel circompolaire. Or nous savons, par les observations de Ross, que les Manchots abondent dans ces parages reculés. Nulle part on ne les voit réunis en bandes aussi nombreuses que sur les rivages de la terre Victoria, et c’est là aussi que ces Oiseaux atteignent la taille la plus élevée. Wilkes a trouvé, près de la côte qui porte son nom, un Manchot dont la hauteur dépassait un mètre (1), et Ross a constaté que le poids de ces Oiseaux était souvent de 30 kilogr., même davan- tage (2). Ce fait me parait avoir son importance pour l’étude des questions complexes dont je cherche ici la solution. En effet il est permis de supposer que la patrie originaire des Manchots devait être un lieu particulièrement favorable à leur dévelop- pement, el que si rien n’a été changé dans la configuration physique du globe depuis le moment de leur première appari- tion sur la surface de la terre, le berceau de leur race doit être encore aujourd’hui une des stations où ils prospèrent le plus. Des considérations tirées de la physiologie, aussi bien que celles fournies par la géographie, concourent donc à: établir que le centre de production d’où les Manchots ont rayonné doit être situé sur les terres antarctiques qui touchent pres- que au pôle sud et qui paraissent s'étendre du grand volcan en activité appelé le mont Erebus, très loin vers l'O., sous le 77° degré de latit, S. En effet, les Aptenodytes ne couvent pas leurs œufs à la manière des Oiseaux ordinaires, et les particularités de mœurs qu’ils offrent à cet égard, même dans des pays relativement chauds, sont en harmonie avec les conditions biologiques où ils se trouvent. Le sol qu'ils foulent est continuellement gelé, il est souvent dépourvu de broussailles et d'herbes ; par consé- quent ces Manchots ne peuvent y construire des nids ni creuser des terriers, et, pour couver leurs œufs, 1ls les portent souvent partout avec eux, serrés entre leurs cuisses, dans un simple (1) Wilkes, Exploring Expedition, Narrative, t. II, p. 316. (2) L’un de ces Manchots, un Aptenodytes Forsteri, pris sur les glaces par les matelots du navire the Terror, vers le 65° degré latit. S. et le 156° degré 0. de Greenwich, pesait 78 livres. (Ross, op. cit., t. 1I, p. 158.) ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 73 repli de la peau. Ils agissent de la même manière dans les sta- tions moins australes où rien ne semble motiver cette déroga- tion aux usages ordinaires, par exemple aux iles Crozet, qui sont habitées par d’autres Manchots dont la manière de couver n’a rien d’anormal (1). La découverte de ces grands Aptenodytes sur les bords du con- tinent antarctique me permet de former aussi quelques conjec- tures relatives à la route suivie par ces Oiseaux dans leurs migra- tions probables vers la zone subtempérée de l'hémisphère austral et aux modifications qu’ils ont subies en colonisant dela sorte. Les Aptenodytes de haute taille, désignés par quelques ornithologistes sous le nom de Manchots empereurs (2), et | appelés plus communément Apéenodytes Forsteri, paraissent avoir émigré de la terre Victoria vers l’océan Éardre Ross les a trouvés en nombre très considérable vers le 67° parallèle S., près de lextrémité australe du petit archipel des Shetlands antarctiques, et, ainsi que Je l’ai déjà dit, ce fut à la Géorgie du Sud, terre située un peu plus au nord-est, que Forster les rencontra pour la première fois, mais 11 ne vit dans cette loca- lité qu'une trentaine d'individus. L’Apténodyte de Forster n’a pas été rencontré ailleurs, mais, dans plusieurs stations moins rapprochées du pôle, notam- ment aux iles Falkland, il est représenté, comme nous l’avons vu, par l’Aptenodytes Pennanti, qui est moins grand ; et, ainsi que l’a fait remarquer M. Elliott Coues, les principales parti- cularités qui distinguent ces Manchots entre eux sont de l’ordre de celles que peuvent produire des différences dans la température des localités habitées par ces Oiseaux. On sait aussi que des différences dans les conditions biologiques (dans le régime,par exemple) sont susceptibles de déterminer, dans la taille des animaux, des variations beaucoup plus (1) Des observations très intéressantes faites sur les mœurs des Aptenodytes des îles Crozet par le D' Obeuf ont été publiées par J. Verreaux dans la Revue zoologique pour 1847, p. 241. (2) Gray, Aptenodytes imperator, Ch. Bonaparte, Coieéti (Comptes rendus de l’Acad. des sc., 1856, t. XLIT, p. 775). 74 ALPH. MILNE EDWARDS. grandes que celles que nous présentent ces Apténodytes, et, par conséquent, je suis disposé à croire que l’Aptenodytes Forsteri et l’Aptenodytes Pennanti ne sont que deux races locales issues d’une même souche, et non deux espèces primor- diales. [l me paraît également probable que la colonie falklan- dienne de ces Manchots est arrivée de la terre Victoria par la terre de Graham et les îles atlantiques les plus australes, puis s’est étendue vers l’est, de manière à gagner Crozet, Ker- guelen et les îles situées à peu près sous le méridien de la Nouvelle-Zélande. Il est fort probable que d’autres émigrants de la même famille, partant de la terre de Wilkes, sont allés coloniser l’île Macquevte et gagner ensuite l’île Campbell ; mais des faits d’un autre ordre me portent à _penser que c’est par la voie de l’archipel sud-américain que ces Oiseaux sont arrivés à Crozet et à Kerguelen. En effet, on sait que dans toute la partie froide de l’océan Austral comprise entre le cap Horn et la Nouvelle-Zélande, les courants marins portent de PO. à V’E., et que c'est principalement dans cette portion de la zone antarctique que les glaces flottantes descendent très bas, tandis qu’à l’est de la Nouvelle-Zélande un courant chaud venant des mers tropicales coule dans la direction du sud et se dirige vers la terre Victoria. Le passage direct entre cette terre et les autres stations des Apténodytes qui se trouvent plus à l’ouest, me paraîtrait donc être très difficile à admettre; la route par la terre de Graham me semble plus praticable, et cette circonstance paraît contribuer aussi à indiquer que cette espèce ou race spéciale est di il du continent antarctique. L'examen de la direction des principaux courants qui portent les glaces circompolaires australes situées dans la portion américaine de l’océan Pacifique, et qui se dirigent vers le nord, jette d’utiles lumières sur les émigrations probables non seulement des Aplenodytes, mais aussi des Manchots empa- nachés et des Sphénisques. | Ce grand courant alimenté par la fonte des glaces dont Je pôle sud est entouré prend son origine un peu à l’est du courant ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 75 en sens contraire de celui dontil a déjà été question comme for- mant une sorle de barrière entre la région néo-zélandaise et la région magellanique. Il sort de la portion de l'océan Antarctique que Cook trouva navigable jusqu’au delà du 70° degré de latit. S., vers le 120° degré de longit. 0. de Paris; il longe les terres antarctiques, qui, sous le méridien du cap Horn, s’avancent jusque dans le voisinage des îles Shet- lands australes, et, arrivé auprès de la Terre de Feu, ilse divise en deux branches dont la principale, connue sous le nom de courant de Humboldt, passe à lPouest de l’archipel feugien, longe la côte du Chili et ne cesse de se faire sentir qu’au delà du Callao, vers l'équateur. L’autre branche du même courant porte au N. E., et dévié de sa route primitive par sa ren- contre avec un courant littoral qui descend du N. au S$., depuis les côtes du Brésil jusque dans le canal situé entre les terres magellaniques et lesiles Falkland, il passe à l’est de ces dernières, traverse l'Atlantique austral au sud de Tristan- d’Acunha, gagne le cap de Bonne-Espérance, el va rejoindre un courant indien qui baigne les côtes des îles Crozet, de Ker- guelen, de Saint-Paul et Amsterdam ; enfin 1l se perd dans le voisinage de Campbell, de l’île Macquarie et de la terre de Wilkes, où 1l se confond avec le courant pacifique ascendant, dont j'ai parlé précédemment. Or, si nous nous représentons la famille des Manchots émi- srant du centre de production ornithologique que nous savons exister aux îles antarctiques dans le voisinage de la terre Vic- toria, nous verrons ces Oiseaux suivant ces courants, arriver successivement dans les eaux du cap Horn, des Falkland, de la Géorgie australe et de Ja série des stations dont le cap de Bonne-Espérance, les îles australes de l’océan Indien et les iles néo-zélandaises polaires font partie. En voyageant dans cette direction, les Manchots charriés par les glaces flottantes ou s’avançant à la nage ne feraient que suivre la route parcourue peu à peu par cette bouteille qui, jetée à la mer par Ross, près du cap Horn, pour déterminer la direction des courants, fut entraînée peu à peu vers l'est et ra- NS 76 ALPH. MILNE EDWARDS,. massée trois ans après sur la côte de l'Australie (1). Pour y arriver, elle avait dû passer non loin des îles Crozet et de Ker- guelen, où les Manchots ont formé de grands établissements pour là multiplication de leur espèce. Un autre détachement, favorisé dans ses voyages par le* cou- rant de Humboldt, passerait à l’ouest du cap Horn, descendrait le long de la côte du Chili, après avoir touché successivement à la terre de la Désolation et à l’île Chiloe; enfin il gagnerait la côte du Pérou et de là arriverait facilement aux Galapagos, points sur lesquels l’existence des colonies de Sphénisques a été con- statée, ainsi que nous l’avons vu précédemment. Il'est donc présumable que les Sphénisques dont on a si- gnalé la présence au cap de Bonne-Espérance, dans la région magellanique et aux Galapagos, n’ont eu pour premier berceau ni l’une ni l’autre de cesstations extrêmes, mais qu'originaires des terres atlantiques australes, ils se sont étendus de là aux environs du cap Horn ; puis qu’ils sont descendus d’un côté le long du littoral ouest du continent sud-américain, et d'autre part vers les îles Falkland et l’extrémité sud de l'Afrique (2), en se modifiant de façon à constituer sur ces points les races particulières appelées Spheniscus demersus, S. magellanicus, S. Humboldtii et S. mendicatus. Effectivement, si leur point d’origine avait été au nord, ces Oiseaux nageurs, pour arriver au cap Horn, auraient dû lutter contre le courant qui entraine du sud au nord les glaces flot- tantes. Au premier abord, on pourrait on L existence d’une même race, le nn demersus, par exemple, au eap de Bonne-Espérance et dans le voisinage du cap Horn, comme contraire à l’hypothèse des colonisations progressives et des modifications secondaires d’un mème type spécifique soumis : (1) Ross, op. cit., t. IT, p. 236. (2) L'examen de la faune avienne de l’ile Bouvet jetterait pEUtPEUE quelque lumière sur cette question de zoologie géographique, mais je n’ai pu trouver, dans les relations des voyageurs qui ont visité ces parages, aucun renseigne- ment à ce sujet. ARTICLE N° 9. FAUNE DES RÉGIONS AUSTRALES. 0 à des conditions biologiques variées. Effectivement les condi- tions doivent être fort différentes dans ces deux régions, et si c'est l’imfluence du climat antarctique américain qui a déter- miné la formation de la race dite magellanique, comment concevoir que par l’action de ces causes d’autres Manchots de même origine aient pu y acquérir les caractères propres à la race africaine? Cela trouverait son explication si ces races s'étaient constituées plus loin vers le sud, ou si, en arrivant sur les terres magellaniques, elles y avaient occupé des stations dif- férentes. Or, le nombre de ces stations colonisables est très grand, et les demersus américains, tout en fréquentant les mêmes mers que les Sphénisques magellaniques, peuvent bien ne pas s'être établis à demeure dans les mêmes lieux de reproduction (1). Les faits que je viens de passer en revue donnent lieu à d’autres considérations qui me paraissent être également dignes de quelque attention. Ainsi le mode de distribution des diverses espèces ou races locales de la famille des Manchots me semble susceptible d’aider les ornithologistes dans l’appré- clation de la valeur des distinctions établies par les auteurs parmi ces Oiseaux. Lorsque le même type avien se trouve représenté avec de légères variations dans plusieurs stations ou régions différentes, comme cela a lieu pour les Eudyptes chrysocomes, on peut en inférer que probablement les particularités en question sont (1) Les zoologistes, en parlant de la faune avienne des Falkland, considèrent cet archipel comme étant une wnité géographique, tandis qu’en réalité c’est un groupe d’environ deux cents îles ou îlots plus ou moins dissimilaires. Deux terres principales, appelées Falkland occidental et Falkland oriental, sont assez étendués. On ne possède que peu de renseignements relativement à l’empla- cement des divers lieux de reproduction habités par les différentes espèces de Manchots, mais on sait que ces colonies sont séparées. Ainsi M. Abbott, qui a séjourné dans l'établissement anglais de Stanley, situé sur le Falkland oriental, n’a aperçu les rookeries du Pygoscelis papua que sur la côte est, ainsi que sur la côte nord de cette île, etil nous apprend que les Sphénisques habitent engrand nombre le versant oriental, tandis que les Aptenodytes ne s’y montrent que rarement. (Abbott, he Pinguins of the Falkland Islands, in Ibis, 1860, t. 11, p. 336. 78 AE. RISENE HIBVVARRDS. dues à des influences locales, et caractérisent non pas autant d'espèces zoologiques, mais seulement des races appartenant à une seule et même espèce. Au contraire, lorsque dans une même station et vivant par conséquent dans des conditions biologiqües identiques, on trouve deux ou plusieurs groupes à _ peu près homogènes, mais différant notablément entre eüx, ne se mêlant pas et se perpétuant tels quels, il en faut conclure que les caractères distinctifs de ces groupes ont une valeur plus g grande et indiquent des espèces sinon primordiales, du moins secondaires, c’est-à-dire ayant déjà acquis un certain degré de fixité, quoique sorties d’une souche commune. Or, l’île de Kerguelen est une station dé reproduction pour trois de ces Oiseaux : l’Aptenodytes Penñnanti, V Eudyptes chry- socoma et le Pygoscelis papua; ces trois Manchots ont aussi pour patrie Commune les îles Falkland : par conséquent nous pouvons les considérer comme formant autant d'espèces bien séparées entre elles; et il est à noter qu’en effet, dans les elas- sifications ornithologiques moderries, ils ont été rangés dans autant de genres différents. La fixité des caractères zo0logiques transmis à ces diffé- rentes espèces de Manchots par voie d’hérédité est mise encore wiieux en évidence par certaines particularités de mœurs sou- vent constatées chez ces Oiseaux. Non seulement les Apièno: dytes, les Pygoscehs, les Eudyptes et les Sphénisques habitent souvent le même îlot et s’y nourrissent de là même manière, mais parfois ils couvent dans la même rookery, et il arrive aussi que, par suite de leur instinet de pillage, un mère s'empare des œufs pondus par une voisine d’ espèce différente, les couve avec les siens et élève de la même manière la petite famille hétérogène obtenue de la sorte (1). Tous ces jeunes (4) Ce mélange d'espèces; vivant dans un même campement ou rookery, a été remarqué non seülement par plusieurs navigateurs plus ou moins änciens; mais aussi tout récemment par un des agents de la Société zoologique de Londres, M. A. Lecomte, qui à élé ehargé de faire des collections aux îles Falkland. M; Lecomte trouva une vingtaine d’'Aptenodyes Pennanti couvant au milieu de beaucoup de Manchots papous (ou Pygoscelis Wagleri), et à Port Stanley il rencontra, réunis dans la même localité, le Spheniscus magellanicus, ARTICLE N° 9. FAUNE DES. RÉGIONS AUSTRALES. 79 vivent par conséquent dans des conditions à peu près iden- tiques, et cependant ils diffèrent entre eux et conservent les particularités caractéristiques de leurs espèces respectives d’une manière aussi tranchée que s'ils étaient nés dans des campements distincts. On ne saurait légitimement tirer la même conclusion dela coexistence de deux ou de plusieurs sortes de Manchots dans des stations où ces Oiseaux ne se reproduisent pas et où ils ne font que s’arrêter comme de simples visiteurs. Ainsi de ce que l'Eudyptes chrysolopha a été rencontré non seulement dans la partie de l’archipel des Falkland, habitée par l'Eudyptes chrysocoma, mais jusque dans les champs de reproduction de ce dernier, on ne doit pas conclure que ees Manchots appartiennent à des espèces primordiales différentes, car des individus appartenant à deux races distinetes peuvent se rencontrer ainsi sur le domaine originaire de l’une ou de l’autre de ces races; et, d’après les circonstances dans lesquelles le Chrysolophe a été observé à Falkland, à côté du Chryso- come, il est présumable que le premier de ces Oiseaux était un étranger venu-accidentellement d’une autre station. En effet, M. Abbott, à qui l’on doit la constatation de ce fait, dit qu'il n’avait aperçu dans la rookery de « North-camp » que quinze Manchots à front jaune au milieu de plus de vingt mille Chrysocomes (1). Lorsqu'on cherche à apprécier l'influence que des diffé- rences dans les conditions biologiques peuvent avoir exercée sur le mode de coloration des Manchots ou sur les autres ca- ractères de minime importance à raison desquels les auteurs modernes désignent ces Oiseaux sous des noms spécifiques différents, il importe de ne pas confondre les habitants origi- l’Eudyptes nigriveslis et l'Eudyptes chrysolopha. Ge dernier Manchot, ajoute M. Lecomte, m’établit pas de rookeries spéciales, mais niche en petit nombre dans quelques-unes des 00keries appartenant essentiellement à l’Eudyptes papua, lequel se trouve au contraire seul dans d’autres lieux, par exemple à Eagle-point. (Voy. Proceed. of the Zool. Soc., 1868, p. 527.) (1) Abbott, op. cit. (Ibis, 1860, t. Il, p. 338). 80 AEPEHE. MILNE EDWARDS. naires d’une station avec les visiteurs qui s’y montrent parfois sans s’y perpétuer. Les premiers, qui constituent en quelque sorte le fond de la population ornithologique de la localité, sont des indigènes; les seconds sont des étrangers de passage ou tout au plus des émigrants de fraîche date. Ainsi je ne considère pas le Pygoscelis antarctique comme appartenant réellement à la faune de Falkland, parce qu'un individu solitaire de cette espèce a été capturé sur cette terre par M. Abbott, et je présume que cet Oiseau y était venu acci- dentellement, soit de la Nouvelle-Géorgie australe, soit de la Terre des États où des représentants de la même espèce paraissent vivre en grand nombre (1). Les trois ou quatre espèces de Manchots qui se reproduisent côte à côte dans ces stations où elles sont soumises à des conditions biologiques similaires paraissent se trouver égale- ment dans des localités situées plus loin vers le sud, telles que la terre de Palmer, mais toutes n’ont pas progressé également vers la zone équatoriale, et, en s’avançant vers le nord, on les voil suivre des directions différentes. Les Eudyptes se sont étendus beaucoup plus loin que les Apténodytes, et se sont dirigés vers les régions dont les points extrêmes sont, d’une part les îles Saint-Paul et Amsterdam, d'autre part Tristan-d’Acunha, sans former aucune colonie dans la zone néo-zélandaise. De ce côté, au contraire, des races dérivées probablement des Pygoscelis se sont établies à l’est aussi bien qu’à l’ouest de l'océan Pacifique austral. Nous voyons aussi des formes analogues représentées dans la région australienne par les Eudyptules, tandis que sur les deux ver- sants opposés de l’Amérique méridionale, ainsi qu'au cap de Bonne-Espérance, elles sont remplacées parles Sphénisques. Il est également à noter que les Manchots établis dans les stations les plus éloignées de la région antarctique, dont cette famille naturelle me paraît être originaire, sont en général plus petits que ceux des terres australes. (4) Abbott, Notes on the Birds of Falkland (Ibis, 1861, t. IF, p. 164). ARTICLE N° 9. FAUNE ‘DES RÉGIONS AUSTRALES. 81 Parfois ils se font aussi remarquer par un certain luxe de plumage dont je ne connais pas d'exemple chez les habitants des stations antarctiques. Ainsi les Manchots à longs panaches n'existent que dans la partie subtempérée de la zone de ee tition de ces Oiseaux. La comparaison de certaines variétés locales et même de variétés individuelles plus ou moins fréquentes, observées chez des Manchots provenant, soit de stations voisines, soit de sta- tions éloignées, me conduit à me demander si les modifica- tions produites lentement sous des influences locales ne pour- raient pas, en s’accentuant de plus en plus, déterminer des différences de formes plus considérables que celles qui se rémarquent entre les divers Eudyptes. La couleur des plumes de la tête, leur longueur, la grosseur du bec, ne peuvent-elles pas se modifier ainsi que d’autres particularités d’une mi- nime importance physiologique. Le Wegadyptes antipodes, par exemple, en subissant des transformations de cet ordre, n’au - rait-1l ps donné naissance aux Eudyptes proprement dits, et ceux-ci, à leur tour, par l’action de causes différentes, n’au- raient-ils pas pu acquérir les formes propres aux Wicrodyptes. Ces questions d’un haut intérêt zoologique se posent naturelle- ment à l’esprit; mais dans l’état actuel de nos connaissances ormthologiques, les faits nous manquent pour les discuter utilement, et pour fixer nos idées relativement au degré de puissance des agents modificateurs de cet ordre, il me parait préférable de prendre maintenant comme terme de compa- raison des Oiseaux qui diffèrent davantage entre eux. C’est ce que Je me propose de faire dans le chapitre suivant. (La suite au prochain volume.) ANN. SC. NAT., ZOOL., JUIN 1879-80. IX. 23. — arr. N° 9, 82 ALPH. MILNE EDWARDS. EXPLICATION DES FIGURES. PLANCHES 17, 18 19 Er 20. Fig. 1 à 7. Têtes de différentes espèces ou races locales du genre Eudyptes. Fig. 4. Eudyptes chrysolopha (Eudyptes nigrivestis, Gould), vu en dessus. — D’après un individu des îles Falkland et appartenant à la collection du Muséum d'histoire naturelle. Fig. 2. Eudyptes chrysocoma, var. à gros bec (Eudyptes pachyrhyncha, sas — D’après un individu provenant de la Nouvelle-Zélande (même collection). Fig. 3. Eudyptes chrysocoma (E. Filholi, Hutton). — D’après un individu oué de lile Campbell par M. H. Filhol (même collection). Fig. 4. Eudyptes chrysocoma, à bec médiocre. — D’après un individu rapporté de LÉ Saint-Paul par M. Lentz. Fig. 5. Eudyptes chrysocoma, variété à gros bec (E. pachyr hyncha, Gray) — “rête vue de profil, d’après un individu rapporté de Pile Stewart LN M. H. KFilhol (même collection). Fig. 6. Eudyptes chrysocoma, var. E. pachyrhyncha. — Tête vue de profil, d’après un individu provenant des îles l'alkland (même collection). Fig. 7. Eudyptes chrysocoma. — Tête vue de profil, d'après un individu pro- venant de l'île Campbell et figuré ci-dessus, n° 3. Fig. 8. Eudyptes chrysolopha, var. Eudyptes albigularis, de la collection du Muséum. — D'après un individu provenant de l’ile Macquarie. Fig. 9. Microdyptes Serresiana (Eudyptula Serresiana, Oustalet). — D’après un individu rapporté du cap Horn (même collection). ; CARTE de. Ja faune des régions australes : N° 1, Distribution géographique des Manchots. FIN DU NEUVIÈME VOLUME. TABLE DES ARTICLES CONTENUS DANS LE TOME IX. Recherches anatomiques sur les Mollusques de la famille des Bullidés, par M: VAYSSIÈRE................ CAES RIRE LE Note sur une nouvelle espèce de Crustacé aveugle provénant des grandes profondeurs de la mer, par M. Alph. MILNE EDWARDS. Lettre relative à la placentation du Dasypus novemcinctus, Eire DEEE AO RRRRRE nn Études sur les mœurs et la parthénogenèse des Halictes, HAMMERPABRER Eee eu eue este à SR TA es en Description d’une nouvelle espèce de Paradisier, par: M. Ous- Observations sur la classification et la structure des Chiroptères, per L DORSONSRARRRRR Rene 2 Mémoire sur les métamorphoses des Bryozoaires, par M. J. BARRE 0... ....:.0. dde 00 60 dabontot able . Note sur un Crocodilien nouveau de Chine, par M. L. VAILLANT. Recherches sur la faune des régions australes, par M. Alph. Mine Epwarps ...... EU 20 na EE Ia de OO NO . ARTICLE ARTICLE ARTICLE ARTICLE ARTICLE ARTICLE ARTICLE ARTICLE ARTICLE N° N° N° N° N° N° N° N° 8 N° 1. TABLE DES ARTICLES PAR NOMS D'AUTEURS. BarRois (J.). — Mémoire sur les métamorphoses des Bryozoaires. DoBson. — Observations sur la classification et la structure des Cliroptéres + "re e0 ee DucÈs. — Lettre sur la placenta- tion du Dasypus novemcinctus. Epwarps (Alph. Milne). — Notes sur une nouvelle espèce de Crustacé aveugle provenant des grandes profondeurs de la mer. — Recherches sur la faune des ART. régions australes FABRE. — Études sur les mœurs et la parthénogenèse des Ha- lictes.. 57 Mes Peer OUSTALET. — Description d’une nouvelle espèce de Paradisier VAILLANT. — Note sur unCrocodi- lien nouveau de Chine........ VAYSSIÈRE. — Recherches anato- miques sur les Mollusques de la famille des Bullidés....... 90.0 0e TABLE DES PLANCHES CONTENUES DANS CE VOLUME. Planches 1, 2, 3, 4, 5 et 6. Gasteropteron Meckelii. re 2 74e 0 10. 11. 12. 13, 17. 18. 19. 20. Philine aperta. Bulla aperta. Doridium membranaceum. Doridium membranaceum ; Philine aperta. Philine aperta; Scaphander lignarius. Scaphander lignarius; Bulla hydatis. 14, 15 et 16. Métamorphoses des Bryozoaires Eudyptes chrysolophe et E. chrysocome. Eudyptes chrysocomes. Eudyptes chrysolopha var. albigularis. Microdypies Serresiana. CARTE n° 1. Faune des régions australes (Manchots). PARIS, — IMPRIMERIE DE E MARTINET, RUE MIGNON, 2. Ann.des Sc mat. 6° Serie. | Zoo À Vayssière delin. Ep Becquet, Paris. Gaster opteron Meckelii. Ann.des Sc.nat.6° Série. LOTIR MP SN 20 À. Vayssiere delin. di. Imp.Becquet, Bt. Gasteropteron Meckelu. OO PAS INRIES Andes oc ua 0 Si 24 Di 95 150 2 ; 2 5 F ji 22 J 9 26 10 28 + DA par See Imp.B ecquet, Paris | Î Î î à ÿ |} À. Vayssicre delin. 1 Gasteropter on Meckelii. Ann.des Sc.nat.6° Serie. (ep) KP) À Vays siere delin. asteropteron Meckel11. G 2 Ann. des Se.nat. 6° Série. Zoo NON, : Com. Visc. # # Ab Vavssière del. Imp Becquet. Nicolet lith. Gasteropteron Meckleir. Ann des Se.nat. 6° Série. Zoo IT, 9, De (Sri) 48 SF ERSS see SE SA A NEA rs ne SO Comp 1-10 Se mp Becquet. Nicolet Hth. ” ‘ Gasteropteron Meckelii. Zoo 1.5): PI Nicolet lith. Imp Becquet. Ab. Vays siere del. Doridium membranaceum Ann.des Sc nat 6° Serie. Zoo. S). PL.8. poser sien cum 2 “en à. \._} Ab. Vayssiere del. Imp Becquet. Nicolet hth. 68 70. Doridium membranaceum._71_75. Philine aperta. Zivoll 11/9). 211.5. Serie. Ann.des Sc.nat 6° & ci de pe] Lo} A Q 4 A A1b .Vayssière del. Philine cible nrae Ann. des Sc.nat. 6° Seéne., Zoo AMIS PIE TOR Ab Vayssière del. ; Imp.B ecquet. F Nicolet lith. 83_84. Philine aperta _ 85. Scaphander lignarius. Ann.des Se. nat 6° Série. Zoo MEN IE AU, 101 104 - Di o S E AS ARETS nn n Go .c/. Ab Vayssière del. 7 mp. Becquet. © Nicolet lit 101,102. Scaphander bénarius. 103. “Bulls hydatis. dl mA ARS mi Zoo, 10,9. PI, 12: Ann.des Sc.nat.6° Série. Nicolet lith. 114 Imp B ecquet. Bulls hydati &. Ab Vayssière del. FO pe PTE LR PE EE PR NET Re "7 Re Ann, der Secene. nat CL Sénte Zool. lome DL ONLS Melanorphoses des PryoroalTes . np. A. J'atmon,r. Melle Lirtrapade, 15 L'arvr Ann, der J'euene. Ê° Serre lool Tome 7, 7 72% TJ, Parroir dé£{nat. del. Motanorphorer des PryorOMTES., Zrp. A. Sabnon, r. Veule Lrtrapade, 15. Partir. Ann, des Jeswne. ral 6° S'erte. Zool., Jome DICO 7. Parroëir ad. rat. del. Hétanerphoses ds Dryoroattres., Lnp. À Salmon r Ville Lirtrapade, 15. Paris. w { RE (UE W Ann. des Setene. nat. 6° Serie. Zool. Jome 2 VUE, «7. PBarroir ad. rat. del. Melarieorrhoses des Dryoroutres. np. TE alronr Pedle Lrtrapade, 25 L'arur Na 7 a Zeol A PT 7 Ann. des Sc.nat. 6° Série. np .B ecquet, Paris. "1 MOUuVEAu lith. letes d'éudyptes. VAS An, des Sean es on Zoo NO PLIS Louveau lith. Inp NS ecquet, Paris. létes de l'Eudyptes chrysocoma. Zoe) Enp B ecquet, Paris . Fig. 8. © _ So C1 &.. O A2) Lee! F [®) æ) ua (o] me) ; [= # ne E + œ d > =) a on À R 5 ! Rs nr l à ZoQleT, OP 20) 2 CRIE” CA Cr CO = ë = @ () ta © = = = < Fig. 5). Imp B ecquet, Paris. Louveau lith. LEE. ypte SS CIRE Microd de F x ORDRE DE LA PUBLICATION ee BOTANIQUE prénitère série, par MM. AUDOUIN, Ad. BRONGNIART et Dumas. _ Zoologie et Botanique réunies. 30 volumes in-8°, 1824-1833. (Épuisée.) Deuxième série, par MM, Ad. BRONGNIART, GUILLEMIN et DECAISNE. — \ 90-volumes 189421840720: mt nt Nc: TR 250 fr. Troisième série, par MM. Ad. BRONGNIART et DECAISNE. = J0:volumes 824-1808. MMA ue seine OUR 250 fr. Quatrième série, par les mêmes. — 20 volumes, 1854-1863... ..... 250 fe. Cinquième série, par les mêmes. — 20 volumes, 1864-1874........ 950 fr. Sixième série, PL M. DECAISNE, en cours de publication. L'année. .« Rose : je ZOOLOGIE Première série, par MM. AUDOUIN, Ad. BRONGNIART et DUMAS. — Zoologie et Botanique réunies. 30 volumes in-8°, 1824-1833.(Épuisée.) Deuxième série, par MM. Aupouin et "H. Mine Epwarps. — 20 volumes: ABS LSA GES 2... 4 UN RSR Re 250 fr. Troisième série, par M. H. MILNE EpwaRps. — 20 vol. 1844-1853... 250 fr. Quatrième série, par M. H. MILNE Epwarps. -— 20 vol. 1854-1863. 250 fr. Cinquième série, par M. H. MILNE Epwarps. — 20 vol. 1860-1874.. 9250 fr, Sixième série, par MM. H. et Alph. MILNE EbWaRps, en cours a se publication. L'année... SR Se ne Ne ORAN 25. fr PARIS. — IMPRIMERIE EMILE MARTINET, RUE MIGNON, 2 4 10e) OL MALE NIAN INST ‘Wu 88 013 To 54 0778