| ANNALES. NCES NATURELLES NAN ER L vas À urine EE û pe * LOOIOGIE D a ANNALES DIE'S SCIENCES NATURELLES ZOOLOGIE as LS$ Droits de traduction et de reproduction réservés. ANNALES DES SUIENCES NATURELLES ZOOLOGIE COMPRENANT L'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION ET L’'HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE M. EDMOND PERRIER TOME I PARIS MASSON ET C*, ÉDITEURS LIBRAIRES DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE 120, Boulevard Saint-Germain 1905 79° ANNÉE. — 1X° SÉRIE TI: No de ANNALES DES SUIENCES NATURELLES ZOOLOGIE PALÉONTOLOGIE COMPRENANT L'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION ET L’HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE M. EDMOND PERRIER TOME I. — 1 PARIS MASSON ET C*, ÉDITEURS LIBRAIRES DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE 120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN (Vic) 1905 PAR LÈ ‘ NN Paris, 30 FR. — DÉPARTEMENTS ET ÉTRANGER, 322HR° Ce cahier a été publié en mai 1905. “Sn Les Annales des Sciences naturelles paraissent par cahiers mensuels. Conditions de la publication des Annales des sciences naturelles HUITIÈME SÉRIE BOTANIQUE Publiée sous la direction de M. Px. VAN TIEGHEM. L'abonnement est fait pour 2 volumes gr. in-8°, chacun d'environ 400 pages, avec les planches correspondant aux mémoires. Ces volumes paraissent en plusieurs fascicules dans l'intervalle d’une année. ZOOLOGIE Publiée sous la direction de M. EpmMonp PERRIER. L'abonnement est fait pour 2 volumes gr. in-8°, chacun d'environ 400 pages, avec les planches correspondant aux mémoires. Ces volumes paraissent en plusieurs fascicules dans l'intervalle d'une année. Prix de l’abonnement annuel à chacune des parties, zoologie ou botanique Paris : 30 francs. — Départements et Union postale : 32 francs. ANNALES DES SCIENCES GÉOLOGIQUES Dirigées, pour la partie géologique, par M. Hégerr, et pour la partie paléontologique, par M. A. Micxe-Epwanps. TomEs I à XXII (1879 à 1891). Chaque volimentv rer AE NERS 15 fr. Cette publication est désormais confondue avec celle des Annales des Sciences naturelles. Prix des collections : PREMIÈRE SÉRIE (Zoologie et Botanique réunies), 30 vol. (Aare). DEUXIÈME SÉRIE (1834-1843). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. TROISIÈME SÉRIE (1844-1853). Chaque partie, 20 vol. 9250 fr. QUATRIÈME SÉRIE (1854-1863). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. CINQUIÈME SÉRIE (1864-1873). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. SIXIÈME SÉRIE (1874 à 1885). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. SEPTIÈME SERIE (1885 à 1894. Chaque partie, 20 vol. 9250 fr. GÉOLOGIE 2 AV ONMÉS 2 VER s DER 330 fr. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES DU MUSÉUM D'HISTOIRE NATURELLE DE PARIS Par RÉMY PERRIER CHARGÉ DE COURS A LA FACULTÉ DES SCIENCES DE L'UNIVERSITÉ DE PARIS Le présent mémoire devait à l’origine n'avoir pour objet que l'étude des Holothuries recueillies par les missions chargées, en 1882-1883, d'explorer l'Amérique Australe. Il n’est pas inutile de rappeler brièvement quelles étaient ces missions, afin de bien définir l’origine des animaux dont nous allons faire la description. L'une de ces missions, placée sous la direction du comman- dant Fleuriais, avait pour but l'observation du passage de Vénus dans les environs de Santa-Cruz (côte orientale de la Patagonie). M. Lebrun, préparateur au Muséum d'histoire naturelle (1), lui avait été rattaché comme naturaliste, afin de recueillir des échantillons de la faune de cette région, alors fort peu connue. Il était d’ailleurs seul chargé de ce service. La mission, partie, le 20 juillet 1882, de Bordeaux, s'embarqua à Montevideo sur le navire le « Volage » qui avait pour chef le commandant Ingouffe et pour second le lieute- nant Pradier, et alla s'installer à Santa-Cruz. L'autre mission, beaucoup plus importante au point de vue de l’histoire naturelle, avait pour objet l'étude hydrogra- phique et l'établissement de la carte de la région du Cap Horn. Elle était dirigée par le commandant Martial, comman- (1) C’est à M. Lebrun que nous devons les quelques détails historiques que nous résumons ici. ANN. SC. NAT. ZOOL. 1. ? RÉMY PERRIER dant de la « Romanche », et se divisa tout de suite en deux groupes. La #mssion à terre, sous la direction du lieute- nant de vaisseau Courcelles-Seneuil, s'installa dans la baie Orange; le D' Hyades y était chargé de l’histoire naturelle et avait pour adjoint M Sauvinet. La pussion à bord restait sur la « Romanche », chargée de relever l’hydrographie des îles; elle possédait comme naturaliste M. le D' Hahn. M. Lebrun, qui accompagnait au début la mission du pas- sage de Vénus, ne resta que peu de temps avec elle à Santa- Cruz. Il Ja quitta le 12 décembre 1882, et gagna à cheval Punta-Arenas. Là, il fit sa Jonction avec la mission du Cap Horn et partit le 20 février 1883 sur la « Romanche », avec la mission à bord. Le 20 mai, il débarqua de nouveau et resta dans les mêmes parages jusqu'au 1* septembre suivant. De nombreuses Holothuries ont été recueillies par ce naturaliste dans les séjours successifs qu'il fit seul sur les côtes de cette région. Quelques autres ont été récoltées par MM. Willems et Rousson, chargés, en 1891, d’une mission zoologique à [a Hérretdenteus J'ai été amené par la suite à étudier d’autres Holothuries, provenant de la Nouvelle-Zélande, et se rattachant par consé- quent à la Faune antarctique. Toutes proviennent d’envois faits par Filhol, qui avait été adjoint à une autre mission chargée d'observer, en 1874, le passage de Vénus à la Nou- velle-Zélande. À la suite d’une communication préliminaire relative à ces dernières Holothuries, je reçus du professeur Emile von Marenzeller, l'offre très obligeante de m'envoyer, à titre de comparaison, quelques spécimens du Musée de Vienne. J'acceptai avec empressement, et comme j'avais exposé à mon très aimable correspondant quelles étaient mes intentions au sujet du travail que je publie aujourd’hui, il voulut bien m'envoyer, à plusieurs reprises, d’autres Holothuries antarc- tiques du Musée qu'il dirige, pour en faire l’'étude.J’y trouvai un certain nombre de formes intéressantes, les unes nou- velles, les autres fort utiles pour la comparaison avec les spécimens déjà étudiés par moi. Je lui exprime ici tous mes HOLOTHURIES ANTARCTIQUES J remerciements. J'ai pu, grâce à lui, examiner le plus grand nombre des espèces antarctiques, et donner à ce travail une extension qu'il ne devait pas avoir dans le principe. La faune antarctique a déjà fait l’objet d’un certain nombre de travaux, et, dans un mémoire assez récent, LunwiG (98) a donné, pour le groupe des Holothuries, une synthèse com- plète et précise des résultats obtenus jusqu’à lui, et auxquels il a lui-même pu beaucoup ajouter. Je n'aurai le plus sou- vent qu'à renvoyer à ce travail de LupwiG, pour ce qui a rapport à la bibliographie. Depuis, il n'y a guère à signaler que la note préliminaire qu'HérouarD (01) à consacrée aux Holothuries de l’'Expédition antarctique belge. Ces études successives antérieures expliquent pourquoi on ne trouvera ici qu'un nombre assez restreint d'espèces nou- velles; mais, grâce à l'excellent état de conservation de la plupart des individus du Muséum, grâce au nombre relative- ment grand de spécimens par lesquels beaucoup d'espèces sont représentées, J'ai pu préciser beaucoup de points inté- ressants, et] espère que ce petit mémoire aura quelque utilité pour l'étendue de nos connaissances de la faune antarctique. En particulier, pour la plupart des espèces, les sclérites seuls _ont été Jusqu ici figurés ; Les animaux eux-mêmes n'avaient ja- mais été représentés et cependant, pour beaucoup d’entre eux, l'aspect extérieur est assez caractéristique. J'ai jugé utile en conséquence de figurer toutes les espèces dont les individus étaient assez bien conservés pour fournir des renseignements intéressants. J'étudierai successivement : 1° Les espèces patagoniennes ; 2° Les espèces de la Nouvelle-Zélande. Je suivrai, pour chacune de ces parties, l’ordre systéma- tique que j'ai indiqué dans mon mémoire sur les Holothuries du « Travailleur » et du « Talisman » (02, p. 288-298). J'ai réuni dans cette étude les Holothuries du Muséum de Paris et celles du Musée de Vienne; j'ai placé simplement entre crochets | | ce qui a rapport à ces dernières. RÉMY PERRIER LL Voici la liste systématique des espèces dont l'étude figure dans ce travail : EL. — HOLOTHURIES DE PATAGONIE SOUS-CLASSE I. — PEDATA ORDRE |. — Aspidochirota. Famille : SyNaLLACTIDE. ue 1. Synallactes Moseleyi. (Théel) Rémy Perrier................... 6 Famille : Hororaurnn#. 2. Stichopus (? Holothuria) patagonicus. Rémy Perrier........... il ORDRE Il. — Dendrochirota. Famille : Cucumarnpx. JHCucumans tablier MAR EMMNPEeNTIEREMPERPE ARRETE 17 4. — Levisatas Ve Brie AE NES OR EEE 22 D: — léonine. (Seniper taie ee er En e neee 25 6. _ parvas LUI MENU R RReEn e AS 29 1NPhvonerspectabits PETMIE RC ERRREEERRER 32 Sn nrEechler Lanmiperti mere persA IR Eee NEA EAERe 35 9. Psolidium convergens. (Hérouard) Rémy Perrier. ............ 38 10. — dorsipes LudwiS TRE, ORNE SEM EE 48 1HMPSolus antarcticus-MPbhIiDDI PAPE AIO EN ES RRERRERENN AT ERReS 55 42. — squamatus, var. segregatus. Rémy Perrier............ 59 SOUS-CLASSE II. — APODA ORDRE Ï. — Anactinopoda. Famille : Morpannpx. 13-Trochostomamiolaceum:/\Studer)Mhéel "A" mPeRCRUE PAPERS 65 14%Caudina rugosa-3RéMYIPeLTIeR EME RENE EN nReRERerRe 66 15 UCaudinaltpigmentosa Rémy Pere RATE ERe 69 ORDRE II. — Paractinopoda. Famille : Syxapripx. 16/Mfrochodotapurpures (Besson) uw Ip eee ee PC CPECECTRE 76 1 \0mrdotacontorta Audi ER EC AUORRRe REERECE EE qi 18. — Pisanii.) Ludwie: AMIE ENNEMI ERREURS 79 107 — Marenzeller-1RémyPerries inerte Er Lee re Ho 11. — HOLOTHURIES DE LA NOUVELLE-ZÉLANDE. SOUS-CLASSE I. — PEDATA ORDRE 1. — Aspidochirota. Famille : Hocoraurunx. 1 Stchopustmolis EU TtOns AMAR EEE NACRE RENNES 83 HOLOTHURIES ANTARCTIQUES J OnDRE Il. — Dendrochirota. Famille : Cucumarune. Passé 2 Cucumanaabar(@uttion) Ludwig... ..".....1,. Lure 85 D. _ anoRemn Perrier. /...4,. 4 Je 88 4. — HotomPeDeEne PL A nn ie LL er 93 De _ cenodest(Dendy) Ludwig... ru 96 6. — brevidentis- (Hutton) R. Perrier. ................. 110 7. Pseudopsolus macquariensis. (Dendy) Ludwig................ 111 SARENonhous anatinus. RémyPerriers 15%: .2%7.1 :........:0 112 SOUS-CLASSE II. — APODA OnDRE |. — Anactinopoda. Famille : Morrannpx. LE LOTO DAC Ole MONET CT RE MR CARPE 117 10. — coriacea. Hutton, var. brevicauda, nov. var. ......... 121 ORDRE IL — Paractinopoda. Famille : SyxaPprinE. 41. Trochodota dunedinensis. (Parker) Ludwig................... 123 I. — HOLOTHURIES DE LA RÉGION PATAGONIENNE. Synallactes Moseleyi (Théel, 1886) R. Perrier, 1902. SYNONYMIE. — 1886. Stichopus Moseleyi. TaéeL (86, p. 165-167. PI. X, fig. 19 et 20). 1896. Bathyplotes Moseleyi. ÜsTERGREN (96, p. 11). 1901. Bathyplotes Moseleyi. Szuiter (04, p. 32)° 1902. Synallactes (?) Moseleyi. R. PERRIER (02, p. 339). 1904. Synallactes Moseleyi. R. PERRIER (041, p. 13). Mission du Cap Horn. — St. n° 177. — Entre l'ile Navarin et l'ile Hoste. — Deux individus. J'ai déjà indiqué (02, p. 339 et p. 349 [en note|) les raisons qui me font rattacher cette espèce au genre Synallactes et non pas au genre Bathyplotes, comme le font ÜSrERGREn et SLUITER. Ces auteurs n'ont d’ailleurs pas vu cette espèce, et ne se déter- minent que d’après la description de Taéez. L'examen des échantillons du Cap Horn me confirme pleinement dans mon opinion et lève pour moi tous les doutes que j'avais eru devoir conserver encore par prudence, avant d'avoir vu moi- même l'animal, qui n'a Jusqu'ici été étudié que par Tuéec sur plusieurs individus provenant de la côte ouest de l'Amérique du Sud. Le facies général est tout à fait celui des Synallactes et ne rappelle pas les Bathyplotes typiques, qui sont beaucoup plus spécialisés. Les deux individus du Cap Horn sont en assez mauvais état de conservation, surtout l’un d'eux, qui est fortement macéré, et qui à agglutiné à sa surface une foule de corps étrangers, débris de polypiers, de Bryozoaires, grains de sable; une ophiure même s’est fortement attachée à sa surface et a profondément imprimé ses bras dans le tégument. L'autre individu, mieux conservé, m'a permis une étude plus précise, dont les résultats concordent sensiblement avec les données de TuéeL, et les complètent sur plus d’un point. Le corps, iong de 70 millimètres, subcylindrique, à une face ventrale aplatie, bien distincte de la face dorsale, mais eile ne constitue nullement une sole de reptation caractérisée, comparable à ce qu’on trouve chez les Bathyplotes; aucun HOBOTHURIES ANTARCTIQUES 7 rebord marginal différencié ne la limite extérieurement, et cette face ventrale se continue avec la dorsale, sans aucune démarcalion nette. Les appendices ambulacraires sont de {rois sortes : 1° des pédicelles ventraux, de forme ordinaire ; 2° des papilles dor- sales, eylindriques, allongées: 3° puis d’autres appendices, de forme spéciale, que TaéeL signaie comme des tubercules blanchâtres, peu élevés, « low whitish warts », et qui exis- tent aussi bien sur la face dorsale que sur la face ventrale. Taéez n'a décrit que fort brièvement ces organes ; il ne se prononce même pas sur leur valeur morphologique; cette valeur n'est pas douteuse ; ils correspondent manifestement à des appendices ambulacraires, et on voit nettement par trans- parence l'orifice qui conduit dans leur cavité; mais au lieu de faire saillie au dehors sous la forme d'une mince tige cylin- drique, comme Îles pédicelles normaux, ils se présentent comme de petites protubérances très basses, à contour régu- lièrement cireulaire, ne paraissant pas rétractiles, mais se ter- minant par une forte ventouse musculeuse, ayant en moyenne 1 millimètre de diamètre, plus large que la ventouse termi- nale des pédicelles. Ainsi constitués, ces appendices sont presque identiques à ceux que LünwiG (94, p. 28) a décrits dans son Synallactes ænigma, sous le nom de pieds adhésifs (« Saugfüsschen »). Leur ventouse, très développée, laisse en effet supposer que ces organes servent à assurer plus efficace- ment la fixation de l'animal aux pierres et aux objets voisins. Ces « pieds adhésifs » n’ont été jusqu'ici signalés que dans des cas très rares. LupwiG, qui les à décrits pour la pre- micre fois, dans le Synallactes ænigma, rappelle que Tuéez à décrit des appendices semblables dans son Sfchopus Pour- talesi, du « Blake », espèce mal connue, qui est très certai- nement une Synallactidée et sans doute même un Synal- lactes. Le Synallactes Moseleyi vient s'ajouter aux deux précé- dents et clôt la liste des Holothuries à pieds adhésifs. Ces trois cas sont, jusqu'ici, Les seuls connus ; peut-être vaudrait- il la peine de mettre en évidence un caractère aussi net et aussi remarquable, en réunissant ces trois espèces dans un genre spécial. 8 RÉMY PERRIER Toujours est-il que l'existence des pieds adhésifs chez le Synallactes Moseleyi rapproche étroitement cette espèce du Synallactes ænigma, Vune des deux espèces qui ont conduit Lupwig à constituer le genre Synallactes. Aïnsi se trouve encore confirmée l'exactitude de la place générique que j'ai assignée à cette espèce. La face ventrale présente, comme nous l'avons dit, des pédicelles normaux et des pieds adhésifs. Ces deux sortes d’ap- pendices sont localisées sur les radius, et leur ensemble forme, sur chacun des trois ambulacres ventraux, une large bande longitudinale : 1° Sur l’ambulacre impair il existe deux rangées de pieds complètement rétractés, et ne se distinguant que par leur petite ventouse terminale, plus foncée que le tégument voisin. Les deux rangées sont assez distantes l’une de l’autre (elles sont séparées, dans la région moyenne du corps, par un inter- valle de 4 millimètres) ; elles sont bien nettes en arrière et dans la région moyenne du corps, mais Je n'ai pas bien pu les suivre en avant, sans doute en raison du mauvais état de cette région, mais aussi parce que les pédicelles y sont plus clairsemés et se perdent au milieu des pieds adhésifs. Les pieds adhésifs qui accompagnent les pieds sont assez nombreux dans cet ambulacre, où les principaux d’entre eux forment aussi deux rangées longitudinales, placées chacune en dehors de la rangée de pieds correspondante. Ces deux rangées de pieds adhésifs sont distantes de 5"",5 dans la région moyenne du corps, et les ventouses, dans chacune d'elles, sont séparées de leurs voisines par un intervalle de 17,5 à 2 millimètres. En outre de ces pieds adhésifs sériés, s’en peuvent voir d’autres, irrégulièrement épars et d’ailleurs peu nombreux. 2 Sur les ambulacres laléraux, existent également dur rangées de pédicelles, maïs qui, en certains points, ne forment qu'une rangée en zigzag. Ces pieds occupent le bord de la -sole ventrale, ou sont insérés à peu de distance de celui-ci, -qui d’ailleurs, comme dans tous les Synallactes, n’est que fort vaguement marqué. Des pieds adhésifs nombreux, semblables à ceux de l’ambu- HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 9 lacre impair, accompagnent ces pédicelles, mais tous sont insérés extérieurement par rapport à la double rangée de pieds, c'est-à-dire du côté de l’interradius dorso-latéral correspon- dant, sur la paroi latérale du corps. Ils correspondent aux « Flankenfüsschen » du Synallactes ænigma. Ces pieds adhé- -sifs peuvent se retrouver d’ailleurs sur toute l'étendue de Fig. A. — Synallactes Moseleyi: —1, table à # rayons ; — 2, table à 8 rayons (4 rayons dédoublés); —3, stade initial de la formation d’un disque à 8 rayons, montrant son origine à partir d’un corpuscule cruciforme dont les bras se bifurquent ; — 4, table vue de profil; — à, 6, spicules arciformes des tentacules. Tinterambulacre dorso-latéral, quelques-uns arrivent même jusqu'aux radius dorsaux ; mais aucun ne se voit sur l’interambulacre impair. 3° Enfin les radius dorsaux portent, non plus des pieds, mais des papilles cylindriques courtes, d'environ 2 millimètres de long, et espacées dans une même rangée d’au moins 5 milli- mètres. Chaque radius en présente une rangée bien nette, avec seulement l'indication d’une seconde rangée, formée par quel- ques papilles éparses au côté externe de la rangée principale. L'un des individus présente nettement 20 tentacules ; ceux de l’autre exemplaire, étant complètement rétractés, 10 RÉMY PERRIER sont plus difficiles à compter d’une facon précise; j'en ai vu 17, mais je ne puis pas affirmer qu'il n’y en ait pas davantage. Les sclérites inclus dans le tégument y sont fort clairsemés. Ils se présentent sous la forme décrite par Tnéez: des tables (fig. A, 1-4), dont le disque est formé par de longues baguettes rayonnant autour du centre. Ces baguettes sont élar- gies et perforées à leurs extrémités qui s'unissent parfois à leurs voisines, de façon à former un disque annulaire plus ou moins incomplet. Le nombre des baguettes varie de 4 à 8: mais le Lype 4 domine ; quand il y a 8 baguettes, elles se dis- posent fréquemment par couples de 2 ; d’ailleurs l’origine du sclérite est toujours une croix, dont les branches peuvent par- fois se bifurquer tout près de la base (fig. A, 3), La colonne qui s'élève au centre du disque est très variable ; elle est générale- ment formée de 4 colonnettes (fig. A, 4), insérées chacune près de la base du bras correspondant, et unies entre elles de façon variable ; quelquefois même elles sont complètement soudées du côté de l’axe, sans perdre pour cela leur individualité. Les pieds adhésifs ne présentent pas de selérites spéciaux ; la plupart même n’en montrent aucun. Taéez dit ÿ avoir vu et figure un disque terminal rudimentaire, réduit à quelques trabécules réticulées. Dans lous ceux que j'ai examinés, j'ai trouvé la ventouse dépourvue de tout squelette. Les pieds ventraux offrent quelques sclérites, mais fort peu, à peu près identiques à ceux du tégument. La ventouse présente par contre un volumineux disque perforé, sans aucun bâtonnet arciforme de renforcement à sa périphérie. Les papilles dorsales sont les parties les plus riches en selérites, mais ceux-ci sont toujours de la même forme que ceux du tégument général. Dans les tentacules, n'existent que des sclérites areiformes épineux (fig. A, 5 et 6). Le squelette m'a paru, en résumé, beaucoup plus réduit et beaucoup plus uniforme que cela ne semble résulter de la description de Tu£ez. Simple variation individuelle sans doute, les grandes lignes de la description étant tout à fait concor- dantes. Au point de vue de l’organisation intérieure, je signalerai HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 11 l'existence de deux buissons de /ubes génitaux, divisés en deux paquets; les follicules, arrivés à maturité (l'individu examiné est une femelle), sont très longs : ils atteignent 42 millimètres, et ne présentent que de 2 à 5 branches, très longues elles-mêmes, partant tout près de la base. Je n'ai, pas plus que TnéeL, réussi à voir l'anneau calcaire. | existe une seule vésicule de Poli, en forme de long fuseau, brièvement pédonculé, dont la longueur totale est de 17 millimètres. Les rubans musculaires radiaux sont indivis. Enfin, il existe deux organes arborescents, partant d’un tronc commun; ils ont l’un et l’autre une longueur de 31 millimètres, et sont constitués par un large boyau allongé, portant latéralement de courtes vésicules, généralement disposées par groupes de 2 à », et surtout abondantes le long des deux génératrices opposées. Ces organes sont, l’un et l’autre, libres de toute connexion avec l'appareil circulatoire. Les vésicules tenta- culaires sont absentes. Stichopus (? Holothuria) patagonicus, Rémy Perrier. (PI. Eifig.4rà 3). 1904. Holothuria |?} patagonica. R. Perrier. Bull. Mus. d'Hist. Nat., p. 13. Mission du passage de Vénus, 1882 : M. Pradier, — Patagonie, Santa-Cruz. — Un seul individu. Étant donnée l'extrême rareté des représentants de la sous- famille des Hocorauriibx dans la région Antarctique, l’exis- tence de cet unique individu présente un très réel intérêt. Malheureusement, s’il me parait appartenir à une espèce nouvelle, il ne m'est pas possible de le déterminer rigou- reusement. L'animal a bien gardé son facies général et ses caractères extérieurs; il paraît au premier abord bien con- servé; mais il a énucléé la plus grande partie de ses viscères, et de plus les sclérites calcaires ont complètement disparu : je n'ai pu en trouver trace, ni dans le tégument, ni dans les appendices ambulacraires, ni dans les tentacules. Tout me fait croire, d'ailleurs, que cette absence n'est pas réelle, mais résulte d’une dissolution due à l’impureté de lalcool, car l'anneau calcaire qui, lui, n’a pas entièrement disparu, 19 RÉMY PERRIER paraît cependant avoir été partiellement corrodé : le calcaire qui le forme est extrêmement friable, et je n’ai pu en faire qu’une étude incomplète; en outre, j'ai pu observer, quoique en très petites quantités, les cristaux qui se forment toujours aux dépens des sclérites, quand ceux-ei ont été dissous, et qui restent fixés aux téguments, cristaux que Je connais bien, pour les avoir trop souvent observés sur les Holothuries du « Travailleur » et du « Talisman ». Je suis done convaincu que les sclériles existaient dans cette Holothurie, bien qu'ils y fussent peu abondants. Le corps est cylindrique, long de 53 millimètres, avec un diamètre moyen de 13 millimètres environ. L'animal porte l'indice d’une très forte contraction de la partie postérieure de son corps ; cette partie postérieure est en effet très rigide ; le tégument, très épais, y atteint 3"°,5, tandis qu'il est au contraire très mince dans la région anté- rieure, qui est apparemment à l’état d'extension maximum. La contraction à été si forte, que les muscles longitudinaux ont été détachés de l’anneau calcaire ; ils ne s'étendent que sur les deux tiers postérieurs du corps. La teinte générale de l'animal est d’un brun verdâtre très foncé ; les appendices ambulacraires ont au contraire une cou- leur verdâtre clair qui s'étend sur le tégument tout autour de leur base. Aussi la face ventrale, dont les appendices ambu- lacraires sont plus nombreux, paraît-elle, dans son ensemble, beaucoup plus claire que la face dorsale. Les appendices ambulacraires sont des pédicelles sur la face ventrale et des papilles sur la face dorsale. Pédicelles et papilles sont assez distinctement sériés. Les pédicelles ventraux (pl. 1, fig. 2), longs de 2 millimètres, larges d’un demi-millimètre, ont la forme ordinaire d’une petite tige cylindrique, terminée par une ventouse; ils sont tous à l'état de demi-extension. Ils se disposent suivant quatre bandes longitudinales bien séparées, mais couvrant dans leur en- semble la plus grande partie de la face ventrale : les deux bandes médianes appartiennent au radius impair; elles sont séparées l’une de l’autre par un petit intervalle dépourvu de pieds, qui devient indistinct dans les régions où la contraction HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 13 est très forte, mais se voit assez nettement ailleurs. En arrière, chaque bande de l’ambulacre impair comprend 2 ou 3 pieds de front ; mais, dans la région antérieure, qui est à l’état d’exten- sion, les pédicelles paraissent se disposer de facon à former seulement deux lignes presque régulières, une de chaque côté du radius. Cette différence de disposition parait due unique- ment à l’état variable de la contraction du tégument ; la con- traction diminue les distances longitudinales, mais exagère au contraire l’écartement transversal des pieds, et élargit la bande. qu'ils forment dans leur ensemble. Chaque bande latérale de pédicelles dépend de lambu- lacre latéral correspondant, auquel on doit également ral- tacher une rangée de papilles dorsales. Pour ne parler en ce moment que des pédicelles, ces pédicelles latéraux forment, sur chaque côté de la sole ventrale, une large bande qui en compte 5 ou 6 au moins de front (2 ou 3 seulement dans la région antérieure en extension). Tous les pédicelles ventraux sont, sauf la ventouse termi- nale, qui est d’un jaune un peu brun, colorés en verdâtre clair, et cette teinte s'étend en une tache basilaire sur le tégument qui entoure la base du pied ; d’autres taches se voient aussi sur le tégument dans l'intervalle des pieds d’une même bande ; cette nuance plus claire permet de distinguer assez nettement à première vue les bandes couvertes de pédicelles des inter- valles nus qui les séparent, intervalles colorés en brun foncé. Les papilles dorsales (pl. I, fig. 1) sont alignées suivant six rangées très nettes : quatre d’entre elles correspondent aux deux radius dorsaux, tandis que les deux rangées marginales dépendent, comme nous l'avons déjà dit, des radius latéraux. Les papilles de chaque rangée sont environ au nombre de 25. Elles sont coniques, terminées en pointe mousse, et prennent leur insertion sur des protubérances verruciformes, assez larges, mais peu élevées. Les papilles et leur tubercule basilaire sont d’un gris verdâtre, tranchant nettement sur le fond très sombre du tégument. A l'inverse des pédicelles, les papilles sont presque toutes rétractées, sauf aux extrémités antérieure et postérieure du corps. À l'état d'extension, elles ont les mêmes dimensions 14 RÉMY PERRIER que les pédicelles, leur forme seule est différente ; les tuber- cules basilaires n’ont pas moins de 2 millimètres de diamètre. Les tentacules, dévaginés, sont au nombre de 20; leur disque est très profondément découpé, en plusieurs secteurs, eux- mêmes très abondamment ramifiés (pl. [, fig. 3). Voici les quelques traits relatifs à l'anatomie interne que, malgré l’énucléation des viscères, j'ai pu observer. L'anneau calcaire est formé de pièces presque complètement soudées entre elles, de forme très simple, sans prolongements antérieurs n1 postérieurs. À son bord antérieur s’insèrent les vésicules tentaculaires, en forme de tubes cylindriques droits, longs de 3 millimètres à peu près, et formant par leur ensemble une sorte de frange très régulière. Un canal du sable, contourné en hélice, et terminé par un assez volumineux madréporite (décaleifié ici) méandriniforme, libre dans la cavité générale, s'insère sur la ligne médio-dorsale de l'anneau ambulacraire. IL existe deux vésicules de Poli, en forme d'assez longs tubes cylindriques étroits, un peu plus minces à la base, se termi- nant en pointe et enroulés en spirale à leur extrémité. L'une d'elles est placée dans l’interambulacre ventral gauche, l’autre dans le radius latéral droit. Chaque radius porte deux volumineuses colonnes musculaires charnues,. faisant fortement saillie dans la cavité générale, de part et d'autre du vaisseau radial correspondant. Comme je l’ai dit déjà, ces piliers charnus ne se voient que dans la région postérieure du corps, et se terminent en avant toutes au même niveau, à 13 millimètres environ de l’anneau calcaire, par une extrémité conique. Je ne puis interpréter cette disposition que par le fait qu'il ÿ a eu une rupture à l'insertion du muscle sur l'anneau calcaire, rupture due à la brusque contraction de l'animal capturé, et à la suite de laquelle la partie antérieure devenue libre s’est étendue à nouveau. Tous les viscères ont disparu, sauf la portion antérieure de l'appareil digestif et un très petit fragment du poumon gauche, resté adhérent encore au réseau vasculaire de l’anse récur- rente de l'intestin. Les organes génitaux ont été complètement éviscérés. Par contre. un paquet d'organes de Cuvier est resté adhérent à la paroi évaginée du eloaque. Ce sont des filaments HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 15 longs et minces, non ramifiés, mais s’unissant souvent entre eux à leur base sur une longueur plus-ou moins grande par une lame conjonclive. Quelle est la position zoologique de cette espèce ? La pré- sence des vésicules tentaculaires, les relations du poumon gauche avec l'appareil vasculaire ne laissent aucun doute sur le fait qu'elle appartient à la famille des Hocoratrnbx {s. stricto). L'éviscération complète des follicules génitaux rend au contraire très incertaine la position générique. D'une part, la différence très grande des papilles dorsales et des pédicelles ventraux, la répartition de ces derniers suivant trois bandes ambulacraires, paraîtraient devoir indiquer le rattachement de notre espèce au genre S/chopus. Mais, d'autre part, ces mêmes caractères peuvent exister dans le genre Holothuria ; de plus, la forme générale cylindrique, le peu de différenciation de la sole ventrale, et surtout l'existence d'organes de Cuvier, rares chez les Stichopus, très fréquents dans le genre ÆHolothuria, feraient pencher la balance de ce dernier côté. La question reste donc tout à fait douteuse, et ne pourra être tranchée que par l'examen de nouveaux individus, présentant leurs organes génitaux intacls. Le nombre des espèces de la famille des HoLoraurD (s. str.) qui ont été mentionnées dans les régions antarctiques est des plus restreints. Si nous mettons à part le Sfichopus mollis Hutton (— St. sordidus Théel) de la Nouvelle-Zélande, dont nous parlerons plus loin, on ne trouve dans la littéra- ture que les espèces suivantes : 1° Holothuria pardalis Selenka, signalé par LupwiG (87, HI, p. 26) aux îles Falkland. Mais il importe d'ajouter que cest une espèce subtropicale, dont l'existence à une station si méridionale paraît tout à fait exceptionnelle. D'ailleurs, Ludwig lui-même ineline aujourd’hui (98, p. 5, note) à: considérer cette provenance comme douteuse et résultant d’une erreur d’étiquelte. 2° Siichopus torvus Théel, a été dragué par le « Challenger » dans les parages de Valparaiso. Mais nous sommes loin là des 16 RÉMY PERRIER régions antarctiques et je ne mentionne cette espèce que pour mémoire. 3° Reste le SAchopus fuscus, que LunwiG signale comme une espèce antarctique. C'est lui qui l’a décrite en 1874 (74, p. 21-22) sur un exemplaire provenant des côtés de Patagonie, et sans doute de la côte ouest de Patagonie, ajoute-t-il dans un examen plus récent qu'il en a fait (98, p. 5). Deux autres individus, étudiés dans ce dernier mémoire, proviennent l’un de Mazatlan (côte ouest du Mexique), l’autre de Machalilla (Équa- teur). Ces deux stations paraissent confirmer la détermination d’un quatrième individu, dragué par le «Blake » à San Diego (Californie) et que THÉEL avait appelé avec doute Sachopus Juscus (86°, p. 5). Il résulte de cette énumération que tous les individus de Sichopus fuscus décrits jusqu'ici appar- tiennent au Pacifique, tandis que l'espèce qui nous occupe en ce moment vient de l'Atlantique (Santa-Cruz. En outre, le centre géographique du S#chopus fuscus parait bien plutôt subtropical; le seul individu méridional est l'individu type ; il est d’ailleurs à noter que l'indication d’ori- gine « Patagonie » est bien vague, si l’on considère que le plateau de Patagonie s'étend au nord jusqu’au 41° de lat. sud. Rien ne prouve par conséquent que cet individu appartienne à la région antarctique. Notre espèce patagonicus est donc à coup sûr beaucoup plus méridionale. Indépendamment de cette différence dans l’origine, notre espèce présente avec le Suchopus fuscus des différences anato- miques assez considérables. Si la face ventrale — bien que LupwiG n’en ait pas donné de figure — paraît présenter quelque analogie dans les deux espèces, la face dorsale est bien diffé- rente. Les papilles y sont, d’après la première description de LupwiG, dépourvues d’arrangement en rangées longitudi- nales (1); THéez décrit lui aussi les papilles dorsales comme éparses — « scattered over the dorsal ambulacra as well as interambulacra, so that they do not present an arrangement in rows, except along each side of the body, were they form a (4) Toutefois, dans son plus récent mémoire, il mentionne une indication d'alignement, — « Andeutung einer Anordnung in Längsreihen » — sur la région postérieure HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 17 simple row ». — Nous sommes, on le voit, bien loin de la sériation si régulière de ces mêmes papilles dans le S#chopus (? Holothuria) patagonicus. Il faudrait, pour être définitivement fixé, connaître les organes génitaux et les corpuscules calcaires. Mais, jusqu’à plus ample informé, nous ne pouvons que considérer notre espèce comme distincte de celles qui ont été Jusqu'ici décrites. Cucumaria tabulifera Rémy Perrier, 1904. (PI Lg. et! 54et pl, fig. 18 45.) R. PERRIER, Bull. Mus. d'Hist. nat., t. X, 1904, p. 14. Mission du Cap Horn. — Dr. 108. — Baie Franklin. — 1 individu. M. Lebrun, 1883. — Punta-Arenas. — 1 individu. Ces deux individus, appartenant très nettement à la même espèce, m'ont permis d'en faire une étude assez complète. Le corps est allongé, ovoiïde, s’amincissant peu à peu à l'extrémité postérieure, légèrement atténué en avant. L’exem- plaire provenant de Punta-Arenas est long de 20 millimètres, large de 6 millimètres. La plus grande partie de ses viscères internes ont été énucléés ; on ne trouve plus trace de la bouche, du pharynx, des tentacules, de l'anneau calcaire. Il ne persiste qu'un certain nombre de tubes génitaux et quelques fragments des organes arborescents. Par contre, l’autre individu (pl. 1, fig. #) est beaucoup plus complet. Sa longueur est de 23 millimètres, son diamètre transversal maximum de 9 millimètres. Le pharvnx est entièrement dévaginé sur une longueur de 10 millimètres, qui viennent s'ajouter aux 23 millimètres de la longueur du corps. Ce pharynx se termine par la couronne des 10 tentacules, petits, mais abondamment ramiliés, dont les deux ventraux sont beaucoup moins développés que les autres. Les pédicelles sont localisés exciusivement sur les radius, où ils forment des rangées très caractérisées; ceux des ambu- lacres ventraux sont notablement plus nombreux que ceux du bivium. Tandis que, sur cette dernière face, les pieds se pré- sentent, dans la largeur de l’ambulacre, sur 2-4 rangs, 1is se ANN. SC. NAT. ZOOL, Ie 2 18 RÉMY PERRIER disposent, sur la face ventrale, suivant 4-6 rangs dans chaque radius. Dans tous les radius, les pieds sont répartis en deux bandes placées de part et d'autre du vaisseau radial corres- pondant, et ces deux bandes sont séparées par un intervalle nu, qui est particulièrement net sur les ambulacres du bivium, mais qui se voit aussi assez bien, au moins par endroits, sur ceux du trivium. Il n’y a, dans le tégument général, qu'une seule espèce de sclérites (pl. HL, fig. 1 à 6) : ils consistent exclusivement en des tables bien caractérisées et très développées. Dans sa forme typique (pl. HE, fig. 1 et 2), la table est subrectangulaire, avec les angles arrondis: elle porte 8 trous, disposés en 3 rangées parallèles, à savoir : 2 plus gros placés symétrique- ment, de facon à former une rangée moyenne, et de part et d'autre de celle-ci, une rangée terminale de trois perforations plus petites. Dans quelques tables (pl. HI, fig. 3), d’autres petites perforations accessoires viennent se placer en dehors des deux grandes perforations principales, et tendent à former autour de celle-ci avec les 6 petites perforations normales un cercle complet; la table tend alors à prendre un contour circulaire, festonné. La tige (pl. IT, fig. 4 et 6) est formée de deux colonnettes qui s’implantent aux deux extrémités de la travée séparant les deux grosses perforations ; elles convergent l’une vers l’autre, limitant une ouverture triangulaire. La couronne enfin qui surmonte la tige est constiluée par un très grand nombre de pointes allongées formant un bouquet touffu, d’ailleurs inégalement développé ; dans le cas le plus simple, Les pointes se disposent en deux groupes, correspondant chacun à une colonnette et d'autant plus nettement séparés l’un de l’autre que ces pointes divergent vers l'extérieur (pl. HT: fig. 1 et 4). À un second stade de complication apparaissent d’autres pointes entre les deux groupes précédents, formant avec eux une couronne circulaire de 15 à 25 piquants (pl. HF, fig. 3). Enfin d’autres pointes peuvent apparaître dans lPinté- rieur de cette couronne, et l’ensemble de toutes ces pointes forme alors une touffe serrée (pl. IL, fig. 2 et 6). Les sclérites des pieds (pl. HE, fig. 7-9) dérivent de ceux que HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 19 nous venons de décrire, mais ils sont notablement modifiés et rappellent beaucoup ceux que l'on rencontre dans les pédi- celles de beaucoup de Thyone. Ce sont encore des tables, mais le disque en est très allongé dans le sens de l'axe déterminé par les deux colonnettes de la tige. La partie centrale du disque, de forme elliptique, est percée de 4 trous, deux plus grands de chaque côté de l'axe, deux plus petits en croix avec les précédents ; cette partie centrale se prolonge de part et d'autre en deux processus étroits et allongés, dont l'extrémité se dilate parfois et porte une ou plusieurs petites perforations. La table dans son ensemble est fortement recourbée, la conca- vité étant tournée, bien entendu, vers l’axe du pédicelle (pl. HE, fig. 9). La disposition de ces tables par rapport au pédicelle qui les porte est toujours transversale. Au côlé convexe s’in- sère la tige, formée, comme celle des selérites cutanés, par deux colonnettes convergeant l’une vers l’autre. Ces colonnettes sont moins massives que celles des sclérites du tégument et l’ouver- ture du triangle qu’elles limitent est notablement plus large. La couronne qui termine la tige est formée d’un certain nombre de pointes longues et mousses, mais moins nombreuses que dans les tables du tégument; de plus, cette couronne, au lieu d'être circulaire, est allongée, comme tout Le reste du sclérite, dans le sens de l'axe. Au sommet du pédicelle, les tables cessent d'exister et sont remplacées par des plaques perforées assez irrégulières se disposant en cercle autour du disque terminal treillissé qui soutient la ventouse terminale. Celui-ci est bien développé. La membrane tégumentaire qui revêt le pharynx est dénuée de tout corpuscule calcaire sur la plus grande partie de son étendue. Ce n’est qu'à la base des tentacules qu'on trouve quelques rares sclérites (pl. IT, fig. 10 et 11), rappelant les sclérites des tentacules, en forme de larges plaques perforées irrégulières, portant les quatre mailles primaires accompa- gnées d’autres irrégulièrement distribuées. Tout le pourtour est orné de petits processus très courts, se renflant presque immédiatement en une sorte de bouton peu rentlé. D'autres tubercules perliformes analogues se voient épars sur la surface extérieure, le long des travées qui forment le sclérite. 20 RÉMY PERRIER La tige des tentacules est soutenue par de longs spicules (pl. HN, fig. 15), perforés de mailles irrégulières et présentant sur leur pourtour des processus pointus ou à peine élargis à leur extrémité. Au contraire les ramifications ultimes des ten- tacules présentent des plaques plus ou moins larges, perfo- rées et entièrement bordées de processus courts et renflés en perle à leur extrémité (pl. IL, fig. 12-14). L’anneau calcaire (pl. [, fig. 5) est formé de dix pièces, qui ne s’articulent que sur une très petite étendue, ou peut-être même sont tout à fait séparées ; les interradiales (7) sont lan- céolées, pointues en avant, légèrement élargies et tronquées en arrière; les radiales (À) sont également terminées en pointe en avant, mais elles sont triangulaires, et se ter- minent en arrière par deux longs prolongements, qui se disposent de part et d'autre du canal radial correspondant. Les radiales ont 6"*,5 de largeur, les interradiales 2°°,5 seulement. Les muscles rétracteurs du pharvax (pl. IE, fig. 5, #2) ont une longueur de 15 millimètres; leur partie antérieure est renflée en massue aplatie, longue de 6 millimètres, large de 2 millimètres, tandis que leur partie postérieure s’amineit en forme de filament très allongé. Ils viennent s’insérer sur les parois du corps à 15 millimètres de l’extrémité antérieure (abstraction faite bien entendu du pharynx,. Un seul canal du sable, terminé par un madréporite libre dans la cavité générale et assez volumineux. Une seule vésicule de Poli, en forme de long bovyau légère- ment renflé en son milieu; elle a 5 millimètres de long et se trouve logée dans l'interradius ventral gauche. L'appareil génital est formé de deux buissons de tubes géni- taux, placés à droite et à gauche du mésentère dorsal. Ils aboutissent à ce mésentère à erviron 12*°,5 en arrière de l'anneau ambulacraire. Les tubes sontsimples, rarement bifur- qués, longs en moyenne de 14 millimètres. Les deux organes arborescents partent d’une base com- mune; ils sont l’un et l’autre très allongés et présentent de très nombreux rameaux très fins, eux-mêmes très ramifiés en branches linéaires, à peine renflées à leur extrémité. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 21 La forme des sclérites calcaires qui a fourni le nom de Cucumaria tabulifera, forme qui rappelle beaucoup ce que l'on voit chez les Æolothuria, est fort rare dans le genre C'ucu- maria, mais se retrouve cependant dans quelques espèces. Ces sclérites ressemblent plus particulièrement à ceux du C. falcata Sluiter (04), et du C. chiloensis Ludwig. C’est avec cette dernière que la ressemblance est le plus frappante; LupwiG (86) l’a fondée sur un spécimen incomplet provenant de l’île Chiloé, sur la côte ouest de l'Amérique du Sud, c’est- à-dire non loin du détroit de Magellan. C'est done avec le C. chiloensis qu'il convient de comparer notre espèce. Les différences sont les suivantes : l'individu de Ludwig, beaucoup plus petit, n'a que 9 millimètres. Les deux extrémités du corps sont relevées vers Le haut, c'est-à-dire que l’Holothurie est recourbée en U:; chaque ambulacre ne porte qu'une double rangée de pieds — « Die .… Füsschen sind in fünf wohl ausgeprägten Doppelreihen angeordnet », — dis- position très différente de celle que représente notre figure. Les corpuscules calcaires sont très semblables dans les deux cas; cependant, dans C. chiloensis, les tables n’ont que quatre trous (rarement huit); tandis que dans C. /abulifera, elles ont presque toutes huit trous, ou davantage, dont deux beaucoup plus grands que les autres ; de plus, si j'en juge par les figures de Ludwig, les épines de la couronne sont moins nombreuses et moins fortes. Mais, en somme, c'est dans la disposition et le nombre des pieds ambulacraires que réside le caractère différentiel le plus important. A la rigueur, il ne serait pas impossible, étant donnés la petite taille de l'animal décrit par Ludwig et le peu de déve- loppement de son appareil génital, que le C. chiloensis ne soit qu'un jeune immature, dont C. /abulifera représenterait la forme adulte, complètement développée. 19 19 RÉMY PERRIER Cucumaria lævigata Verrill, 1876. SYNONYMIE : Cucumaria serrata Tu£ec (86), p. 73-75. LrTTÉRATURE : Lupwic (98, p. 32) [Donne la littérature antérieure|. Hérouarp (04, p. XLIV). Mission du Cap Horn. — Station 4. — 50052" $.; 66045 O. — 1 individu. — Stalion 29 b. — Baie Orange. — 8 individus. — Station 104. — [les Falkland. — 3 individus. —- Station 140. — Baie Bourchier, 149 mètres. — 1 indiv. —— Slation 176. — Rade de Gorée. — 11 individus. M. Lebrun (1883). — Punta-Arenas. — 5 individus. Soit en tout vingt-neuf individus. Tous sont de petite taille. Ils ont de 7 à 18 millimètres de long; un seul atteint 25 mil- limètres, encore paraît-il à l’état d'extension forcée. Son aspect grêle contraste en effet avec la forme renflée ou ovoide des autres échantillons. Dans tous les cas, nous sommes loin de la dimension moyenne de 115 à 120 millimètres, donnée par Ludwig. Aucun d'eux ne présente de vestiges de poches inecu- batrices, sans doute à cause de leur jeune âge. L'arrangement des pieds est très constant. Ils sont toujours localisés sur les radius, où ils se disposent sur deux rangs. Is sont en général notablement plus serrés dans les ambulacres ventraux que sur les radius dorsaux et paraissent alterner dans les uns et dans les autres d’une rangée à l’autre du même radius. Mais en raison de leur plus grande densité sur les ambulacres ventraux, l'alternance s’observe plus difficilement sur ces derniers que sur ceux de la face dorsale, où on peut les décrire comme insérés sur un seul rang en zigzag. Sur un individu même, dans une région où l’extension est particulière- ment grande, les ambulacres dorsaux paraissent s’insérer vrai- ment sur un seul rang. Mais c’est exceptionnel, au moins pour les animaux conservés en alcool. Hérouarp (01) désigne sous le nom de C. lævigala un indi- vidu de 7 millimètres de long, n’avant qu'un rang de pieds dans tous les radius, et où Les pieds dorsaux sont si clairsemés qu'il n’y en a que 8 ou 9 sur chaque ambulacre. Je n'ai sur aucun de mes individus, dont beaucoup ont une taille compa- rable, une semblable disposition. Toujours, sur la plus grande HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 23 longueur au moins des ambulacres, j'ai trouvé deux rangs de pieds, et leur nombre, même dans les ambulacres dor- saux, est considérablement plus grand. Voici d’ailleurs les nombres moyens que Jai complés sur divers individus ; dans chaque formule, le premier nombre est le nombre moyen des pieds dans les ambulacres ventraux, le second correspond au nombre moyen des pieds dans les ambulacres dorsaux : + Individu de 16 millimètres............ LR 39=— 28 — 11 INA Er nets 60 -- 56 — 18 UE POUR TE AO SE 32 — 27 = 12 TR IA SES à US C0 RS Encore faut-il remarquer que ces nombres même sont des nombres minimumes, parce que certains pieds, cachés dans les plis dus à la contraction, passent facilement ina- perçus. Les corpuscules calcaires, tous semblables, ou du moins de même type, sont conformes à la deseripuon de Ludwig: des plaques perforées en forme de losange allongé, avec des per- forations plus ou moins nombreu;es, et de volumineux tuber- cules dans les intervalles de celles-ci. L'une des extrémités se prolonge en un processus épineux de forme assez variable. Ces corpuseules ont environ de 150 à 200 ; ils présentent une disposition un peu plus compliquée que celle que Ludwig a décrite dans les individus typiques; tous mes individus sont en effet des jeunes, comme l’attestent leur petite taille, et Ludwig a montré que les selérites étaient, chez les jeunes, fort différents de ceux des adultes et notablement plus com- pliqués. La chose est vraiment fort nette, et de semblables modi fications se représentent fréquemment dans nombre d'espèces d'Holothuries; mais malgré les différences signalées, il n’en reste pas moins que les sclérites d’un même individu aux divers âges, iel comme dans tous les cas observés, se rattachent toujours au même type de structure. Ces varialions n'infirment aucunement, Je ne saurais trop insister à ce sujet, la valeur considérable qu'ont les sclérites au point de vue systématique pour la définition des espèces. Sans doute, il ne faut pas leur prêter une attention exclusive; mais il serait plus grave de [89] 9 | RÉMY PERRIER tomber dans l’excès contraire, et de négliger trop la considé- ration des corpuscules calcaires. Au point de vue de la répartition géographique, Ludwig déclare que « l'aire de distribution de l’espèce [Cuc. lævigata| s'étend depuis 9° au nord des îles Falkland, et depuis la Géorgie du Sud dans la direction de l'Est, à travers la région antarctique de l'Atlantique et de l'Océan Indien ; elle est fré- quente aux îles Marion, Croset, Kerguelen et Heard... Son aire géographique est par conséquent fort différente de celle de C. leonina.. Elle manque en effet aux Falkland et à la pointe sud de l'Amérique, tandis que C. leonina n'existe ni à la Géorgie méridionale, ni dans les îles antarctiques de l'Océan Indien. La limite entre les zones de distribution des deux espèces passe à peu près entre les îles Falkland et la Géorgie méridionale ». Cette opposition des deux zones n’est nullement exacte, comme le montre l’'énumération des stations donnée en tête de cet article; le Cucumaria lxvigata non seulement se trouve aux Falkland et sur la pointe sud de l'Amérique, mais cette espèce s’y rencontre même assez communément, puisqu'elle a été rapportée de six stations assez éloignées. les unes des autres, et qu’elle y était représentée parfois par cinq, huit, onze individus. Les aires de distribution des C. leonina et læviyala ont donc une partie commune assez étendue (1). [Un individu du Musée de Vienne. qui était réuni, sous le nom de C. dubiosa, avec un échantillon véritable de C. leonina, appartient réellement à C. lævigata. W provient aussi du détroit de Magellan, sans autre détermination plus précise du lieu d’origine.] (1) D'ailleurs Surrn (79, p. 271) mentionne déjà le Cucumaria lævigata sur les côtes de Patagonie, sans toutefois préciser davantage la localité. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 25 Cucumaria leonina Semper, 1868. (PI. L, fig. 6 et 8.) SYNONYMIE : Cucumaria dubiosa SemPer (68), p.237 et 271. — Salmini Lunwic (74), p. 10. Ocnus vicarius BELL (83), p. 59. Semperia dubiosa Lampert (85), p. 151. — Salmini Laurent (85), p. 151. Cucumuria mendur TuéeL (86), p. 65. — vicaria TuéeL (86), p.102. LirréRATURE : Lunwi6 (98, p. 36). | Donne toute la littérature antérieure.] Herouarb (64, p. XLI). R. Perrier, Bull. Mus. d'Hist. nat. de Paris, t. X, 190%, p. 1#. Mission du Cap Horn : Station 13. — 4 petits individus. — Station 29 bis. — Baie Orange, Terre-de-Feu, — 3 indi- vidus. — Station 32. — 53013" S.; 68031 O0. — 1 individu tris déformé. — Station 37. — Baie Orange.— 30 individus diversement contractés, quelques-uns complètement épanouis. — Station 61. — Baie de Nassau. — 1 individu. — Station 85. — Baie Orange. — 32 individus. — Station 104. — Iles Falkland. — 2 individus à pieds ser- rés el épars comme des Thyones. — Station 103. — Punta-Arenas. — 1 individu très con- tracté. — Station 108. — Baie Franklin. — 1 individu. — Station 160. — Baie Elisa. — 1 individu. _ Station 165. — N.-0. de Veresland. — 1 individu con- tracté, à pieds non visibles. — Station 168. — Au S. du canal Washington. — Station 176. — Rade de Gorée. — 1 individu. == Station 591. — Baie Orange. — 1 individu très con- tracté. Mission du passage de Vénus et du Cap Horn : M. Lebrun (1883). — Punta- Arenas. — 14 individus (dont 2 très allongés, d'autres à pieds épars). Le Cucumaria leonina est certainement l’une des espèces les. plus communes de la pointe méridionale de l'Amérique du Sud. La collection rapportée par les expéditions du Cap Horn n'en renferme pas moins de quatre-vingt-quatorze individus. Cette Holothurie abonde nolamment dans la Baie Orange, où deux dragages seulement en ont rapporté trente et trente- deux exemplaires. La même fréquence a été constatée dans l'exploration du détroit de Magellan par MicHaELsEN, qui en à rapporté 26 RÉMY PERRIER soixante-cinq individus, dont quarante-quatre des îles Falk- land (Lupwic [98], p. 37). Cette espèce est d’ailleurs aujourd'hui bien connue, après les deux descriptions qu’en a données Lupwi@, d'abord sous le nom de C. dubiosa \86, p. 1%: \pl. [, fig: 1), puis sous le nom de C. leonina (98, p. 36). Dans ce dernier mémoire, LupwiG donne la synonymie complète de cette espèce, qui à été décrite sous cinq noms différents : C. /eonina, Sem- per, 1868; C. dubiosa, Semper, 1868; C. Salmini, Ludwig, 1874; Ocnus vicarius, Bell, 1883 ; C. mendax, Théel, 1886. Suivant LauperT (89) et Lupwic, tous ces termes sont synonymes et cette conclusion me paraît devoir être pleinement acceptée. HÉROUARD, qui signale cette espèce parmi les Holothuries rapportées par la « Belgica », la désigne sous Le nom de Théel, C. mendax; mais la description succincte qu’il donne ne fournit aucun argument pour en revenir à la distinction des deux noms. Il est à croire simplement qu’il n’a pas eu connais- sance de l’identification faite par Lamperr. La disposition en . zigzag des pieds sur les ambulacres dorsaux, qui laisse une petite hésitation à Hérouard sur sa détermination, n'a rien d'étonnant, puisque certains individus de notre espèce ont élé décrits sous le nom d’'Ocnus. En fait, le point important que je veux ici mettre en lumière est précisément l'extrême variabilité de la disposition des pieds ambulacraires, variabilité dont j'ai pu me convaincre grâce aux nombreux échantillons que j'ai examinés. Tous les passages existent entre les individus présentant deux rangs de pieds régulièrement disposés sur les ambu- lacres, et d’autres spécimens où les pieds, épars sur le corps, ont une disposition qui rappelle, non point même celle des Semperia de Lampert, mais bien celle des Thyone. J'ai représenté (pl. I, fig. 6 et 7-8) deux individus appartenant à ces deux types extrêmes et la comparaison de ces figures fait voir, mieux que toute description, l'étendue de la variation individuelle de cette espèce. Dans le plus grand nombre des cas, la disposition est la suivante (fig. 7 et 8) : Ambulacres dorsaux avec deux rangs de pieds, le plus souvent alternant en zigzag ; ambulacres HOLOTHURIES ANTARCTIQUES AI ventraux avec chacun deux, trois ou même quatre rangs de pieds, les rangées latérales étant plus ou moins incomplètes; les pieds ventraux plus serrés et plus gros que les pieds dor- saux. En outre, à peu près toujours, des pieds dans les inter- adius, mais sporadiques, irrégulièérement placés, et souvent plus petits que les pieds des radius. Très souvent ils sont beaucoup plus nombreux à la partie postérieure, qui apparaît ainsi comme uniformément couverte de pieds épars. Il n’y a pas de relation rigoureuse entre les dimensions des individus et la disposition de leurs pieds. La variété de celle- ei paraît être réellement due à une variation individuelle et non point à une modilication survenant dans le développe- ment. De deux individus provenant de la même station, et parais- sant par leur taille assez âgés, l’un, long de 6 centimètres, a les pieds épars, sans sérialion évidente; l’autre, long de 5°%,4, a au contraire des pieds peu nombreux, presque rigou- reusement alignés sur les seuls ambulacres. À côté d'eux la même station a fourni des individus beaucoup plus petits, à disposition des pieds presque thyoniforme. La considération des corpuscules calcaires est, particulière- ment ici, très précieuse pour la définition de l'espèce. Tandis que les caractères extérieurs ne fournissent pour cela aucune donnée précise, les sclérites montrent au contraire une cons- tance absolue. Ils ont été à plusieurs reprises exactement figurés. Ils comprennent toujours : 1° des plaques perlorées, allongées, épaisses, couvertes de forts tubercules dans les intervalles des mailles, et se terminant à l’une de leurs extré- mités par un processus mince et atténué, dépourvu de tuber- cules, à bords épineux, et légèrement relevé vers l'extérieur de facon à faire une très faible saillie. Bien que, sur certaines plages, ces sclérites soient assez nettement orientés, et s'im- briquent plus ou moins régulièrement, cette régularité n'est pas absolue, et on ne peut faire entrer en ligne de comple, pour définir l'espèce, le fait d’une orientation véritable de ces corpuscules calcaires. 2° Des boucles presque toujours très régulières, présentant quatre orifices et dix volumineux tubercules perliformes ; ces 28 RÉMY PERRIER boucles sont placées dans la couche profonde du tégumert, au-dessous des sclérites précédents. 3° À ces deux formes de sclérites, constamment présentes, il faut ajouter encore une autre forme de corpuscules cal- caires : des p/aques robustes, percées de larges trous, et com- prises entre les deux couches de sclérites ci-dessus décrites. Pour ma part, J'ai constamment trouvé ces sclérites, quoique très clairsemés, au milieu du revêtement presque continu formé par les autres. Ludwig dit qu'ils n'existent pas toujours, et Hérouard ne les mentionne pas. Ils peuvent en effet passer facilement inaperçus, surtout quand on ne prend pas la pré- caution de faire des préparations du tégument 2x {oto. Les pédicelles sont soutenus par des baguettes de soutien perforées, recourbées en forme d’arc et disposées transversa- lement par rapport à la longueur du pédicelle; l’un des côtés, celui qui est tourné vers la ventouse, présente en général un prolongement à bords épineux, rappelant les processus des sclérites ordinaires, quis’insère en un point variable de ce côté; ce prolongement peut s'élargir parfois jusqu’à prendre son insertion sur tout le bord correspondant, qui apparaît alors comme épineux sur toute sa longueur. Les bâtonnets arei- formes de l'extrémité du pied sont lisses et dépourvus d’épines. La ventouse est soutenue par un disque terminal très bien développé. L'anneau calcaire, de dix pièces, est conforme à la descrip- tion de LupwiG. Les vésicules de Poli sont en nombre variable. J'en ai compté de une à quatre. Il est curieux de signaler ici la ressemblance très grande du C. leonina avec le C. Kælhkeri Semper, de la Méditer- ranée. C'est la même disposition des pédicelles, la même forme de sclérites; la seule différence signalée est la pré- sence d'un estomac maslicateur, qui manque à C. leonina. Mais il est permis de se demander si cette différence est bien une différence vraiment spécifique. Certainement, n’était la différence des localités, on aurait depuis longtemps réuni ces deux formes, qui sont, dans tous les cas, extrêmement voisines. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 29 Cucumaria parva Ludwig, 1874. (PI. IL, fig. 1 et pl. I, fig. 16-19.) SYNONYMIE : Semperia parva Lamperr (85), p. 152 et (89), p. 833. (?] Cucumaria kergquelensis Tuéer (86), p. 69. LrirréraTure : LunwiG (98), p. 25 [Donne la littérature antérieure complète]. R. Perrier, Bull. Mus. d'Hist. nat., t. X, 1904, p. 14. Mission du Cap Horn (1883) : Station 4. — 50052" $S.; 60045 O0. — 3 individus. _ Station 31.— 53015" S.: 68034 0. — 2 individus. _ Station 104. — Iles Falkland. — 1 individu. —- Station 170. — Canal Franklin. — 1 individu — Station 176. — Rade de Gorée. — 1 individu. Ces neuf individus se rattachent sans conteste à l'espèce décrite par LupwiG en 1874. Leurs dimensions s’'échelonnent entre 19 et 31 millimètres et leur taille se rapproche par conséquent de celle des divers spécimens'étudiés par Lupwia (74. 86, 98) et par Lauperr (89). Les individus décrits par Taéez (86) sous le nom de C. ferquelensis, et que Lauperr et LupwiG ont rattachés à C. parva, restent toujours notable- ment isolés des C. parva Lypiques par leur grande taille, qui atteint 75 millimètres. Le corps est allongé, un peu aminei en avant, atténué et terminé en pointe en arriere. [l'est beaucoup moins ramassé que le C. lerquelensis dessiné par Théel. Chez tous les individus, il existe une flexion dorsale, qui donne au corps la forme d’un U (pl. IL, fig. 1). Cette courbure est très accentuée, sauf chez l'individu du dragage 170, long de 21 millimètres, où elle est peu développée, quoique cependant encore fort sensible. Chez tous les individus, on peut très nettement distinguer sur chaque radius, deux séries de pieds ambulacraires, et cela aussi bien pour les ambulacres dorsaux que pour les ambulacres ventraux, les pédicelles étant seulement un peu plus serrés et plus réguliers sur les ambulacres ventraux que sur les dor- saux. Sur un échantillon, j'ai compté 53 pieds sériés sur un ambulacre latéral, et 40 pieds sur un ambulacre dorsal. Mais en outre, tandis que les interambulacres ventraux sont complètement nus, les dorsaux présentent {oujours un nombre plus ou moins grand de pédicelles, tant sur linterradius impair 30 RÉMY PERRIER que sur les parties des interambulacres latéraux qui avoisinent les ambulacres dorsaux. Ces pieds ne masquent Jamais les rangées radiales; souventils se disposent comme pour former une troisième ou une quatrième rangée de part et d'autre des pieds radiaux ; d’autres fois ils n'existent que dans le voisinage des extrémités; le plus souvent ils sont plus petits que les pieds radiaux. Lupwia a remarqué que, chez les jeunes individus, les pieds étaient localisés sur les radius; mais dans tous mes échantil- lors, quelle que soit leur taille, j'ai constaté cette localisation au moins relative des pieds dorsaux. En tout cas, ce n’est que très rarement que J'ai trouvé les pieds dorsaux épars, comme le décrivent LamPerr (89) et LupwiG (74), qui comparent leur disposition à celle qu'on voit dans le genre Thyone. [Cette disposition thyoniforme, je ne l’ai même guère ren- contrée que dans un individu du Musée de Vienne, communiqué par von Marenzeller, qui concorde d’ailleurs pleinement pour tout le reste avec les individus du Muséum de Paris, pour le corps courbé en V, long de 21 millimètres, comme pour les ambulacres ventraux nettement bisériés; les pieds dorsaux sont ici presque tout à fait épars; encore peut-on discerner un alignement sur l’ambulacre dorsal droit; la sériation réapparaît bien nette aux deux extrémités sur tous les radius.| Il existe 10 tentacules, les deux ventraux plus petits. Les sclérites calcaires sont de deux sortes : 1° des plaques perforées; 2° des petites coupes perforées superficielles. 1° Les plaques per forées (pl. HE fig. 16) sont très nombreuses, au point qu'elles forment en général une véritable carapace, ne laissant aucun vide entre les sclérites, qui se recouvrent même plus ou moins par leurs bords. Ces plaques sont un peu plus fortes et un peu plus étendues sur la face dorsale, comme l'ont déjà signalé LupwiG (86) et Tnéez (86). Mais la différence n'est pas bien considérable. J’ai toujours vu les plaques lisses et dépourvues de tubercules, tant sur leur face externe que sur leur face interne. Ces plaques sont fort irré- gulières, le plus souvent allongées, mais parfois ovales ou même triangulaires. Leur bord est sinueux, présentant parfois des encoches correspondant à des mailles en voie de forma- HOLOTHURIES ANTARCTIQUES J1 ton. Les perforations qu'elles portent sont en nombre tout à fait variable, et leur ordre n'a rien de régulier. 2° Les coupes treillissées (pl. HE, fig. 17 et 18), qui existent d'une façon à peu près constante dans mes échantillons, correspondent aux corpuscules en X de Ludwig, de Lampert et de Théel. Les premiers de ces auteurs indiquent bien que ces corpuscules, par soudure des extrémités de leurs bras, se déve- loppent souvent en petites plaques circulaires perforées; mais dans mes échantillons, ce dernier cas est la règle à peu près générale ; on y trouve quelques corpuscules en X, qui ne sont que des coupes incomplètes : mais presque tous Les corpus- cules superficiels ont la forme de petites coupes, circulaires ou plus souvent elliptiques, #rès peu profondes, presque planes : leur fond est percé de quatre perforations, exceptionnelle- ment trois ou plus de quatre, dont deux un peu plus grandes que les autres. Le bord externe porte de petits processus courts et renflés à leur extrémité; leur nombre est variable : il ven a en moyenne quatorze, soit quatre en face de chaque grande maille, trois en face de chaque petite maille. Ces pro- cessus sont en général fort réguliers, mais quelques-uns peuventse bifurquer soit dès leur extrémité, soit dès leur base. Je n'ai pu, malgré tout le soin que J'Y ai apporté, apercevoir de dents anales. J’ai en vain coupé l'extrémité postérieure, et, après l'avoir éclairer, je l'ai examiné de face par l’orifice anal: je n'ai rien vu qui puisse représenter d'une façon nette ces dents anales, qui ont été signalées cependant à la fois par Ludwig et par Lampert. Est-ce variété individuelle ? Est-ce observation incomplète de ma part? Je ne puis le dire. Les pieds sont soutenus par des selérites identiques à ceux des téguments. Mais vers l'extrémité, les plaques perforées se transforment en bâtonnets irréguliers, courbés en arc ou en V, parfois avec des processus latéraux contournés et anastomosés, et s’élargissant légèrement à chacune de leurs extrémités en une plaque amineie et perforée. La ventouse est soutenue par une plaque terminale bien développée, tant pour les pieds dorsaux que pour les ventraux. La description que je viens de donner s'écarte sur plus d'un point des descriptions données par les auteurs qui n'ont m0) RÉMY PERRIER précédé. Néanmoins, je ne crois pas qu'il puisse y avoir de doute sur l'identité des individus que j'ai étudiés. Quelques- uns des détails que rapportent les auteurs, Je les ai retrouvés sur une autre espèce, que je décris plus bas sous le nom de Psolidium convergens. Peut-être y a-t-il eu jusqu'ici confusion entre les deux formes, qui coexistent dans les mêmes parages. Je ne puis pour mon compte que décrire ce que j'ai observé. Thyone spectabilis Ludwig, 1882. (PI. IL, fig. 20-23, et fig. B et C, dans le texte.) SYNOxYMIE : Thyone meridionalis, BELL (83), p. 59. Thyone Cunninghami, Bec (83), p. 60. Lirrérarure : LunwiG (98, p. 42). [Donne la littérature antérieure complète.] R. Perrier, Bull. Mus. d'Hist. nat., t. X, 1904, p. 15. Je rattache à cette espèce onze individus de la collection du Muséum, provenant tous des côtes de Patagonie. Sept d’entre eux ont été rapportés de Santa-Cruz, en 1883, par M. Lebrun, attaché à la Mission du passage de Vénus; les autres, au nombre de quatre, recueillis par M. le commandant Ingouffe, appartenant à la même Mission, ne portent pas d'indication précise de localité ; mais, d’après les renseignements oraux qu'a bien voulu me donner M. Lebrun, ils proviennent aussi de Santa-Cruz. Ils concordent de tous points avec les descrip- tions données par les auteurs. Le corps, très contracté, est presque constamment renflé et plus ou moins ovoïde. La peau est tantôt d’un gris jaunâtre. tantôt plus ou moins colorée en brun, tantôt d’un brun foncé uniforme. Le tégument est tantôt mince, tantôt plus ou moins épais, ou même coriace. Il n’y a donc pas lieu de faire entrer les caracttres du tégument dans la définition de l’espèce. Les pieds sont épars sur tout le corps, mais, comme cela a été observé par les auteurs, ils sont beaucoup plus nombreux sur le trivium que sur le bivium. Les tentacules, courts, mais très ramifiés, sont à peu près égaux, et de la même couleur que le tégument général. Les sclérites sont très pelits, tous de même nature, mais très variés. Ils consistent en des spicules en forme de bâton- nets droits, ou bifurqués à leurs deux extrémités, ou arqués HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 39 par suite de la régression d’une des branches de la bifurcation, ou en forme d’X, les branches de l’X étant elles-mêmes simples, ou bifurquées, ou même un peu ramifiées. Les plus compli- qués se présentent sous la forme d'un bâtonnet aplati, dont chaque extrémité est élargie et percée d’un large orifice : leur forme est alors comparable à celle d’une paire de lunettes ; Fig. B. — Th. spectabilis Ludwig. — Une portion du tégument pauvre en sclérites. le bord des anneaux lerminaux porte des dents tronquées régulières, qui leur donnent l'aspect de pignons d’engrenage. Ces sclérites sont très diversement serrés suivant les régions du corps d’un même individu, ou suivant les individus. J’ai cru intéressant de représenter deux plages (fig. Bet C), l’une très pauvre, l’autre très riche en spicules. LupwiG les a vus même disparaître sur certains points, et c’est une des raisons qui lui font rejeter, à juste titre, Je crois, l'espèce nommée par BELL Thyone meridionalis, qui, d’après cet auteur, ne possède de sclérites que dans les pieds; elle est sans doute fondée sur des Thyone speclabilis particulièrement pauvres en sclérites ; J'avoue cependant n’avoir jamais observé, pour ma part, une disparition aussi complète. ANN. SC NAT. ZOOL. ES: 34 RÉMY PERRIER L'anneau calcaire à la forme décrite par LupwiG : dix pièces sans prolongements postérieurs, mais possédant chacune un prolongement impair antérieur, plus développé sur les radiales que sur les interradiales; leur longueur totale est ainsi de 7 millimètres pour les radiales, 6 millimètres pour les inter- LE radiales ; mais on ne trouve plus que 2°",5 entre les bords Fig. C. — Th. speclabilis. — Une portion du tégument riche en selérites. antérieur et postérieur dans l'intervalle de deux prolongements. Mais ces pièces, qui ont jusqu'ici été décrites comme formées d’un seul tenant, ont en réalité une structure tout autre : chacune d'elles est formée par la juxtaposition de trois pièces calcaires, placées les unes derrière les autres, en file longi- tudinale (pl. I, fig. 20) et unies par de très étroites sutures. Cette disposition est particulièvement nette et visible sur un des individus, qui m'avait frappé tout d’abord par la structure anormale de son anneau calcaire (pl. IH, fig. 21). Des pièces intercalaires viennent s’v interposer cà et là entre les pièces normales de l’anneau et déterminent déjà une cer- taine irrégularité. Mais le caractère anormal de cet anneau monstrueux est surtout déterminé par le fait que deux pièces HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 3) voisines, la radiale et l’interradiale dorsales droites, sont sou- dées l’ane à l’autre en une large pièce unique (Add + Id), bifurquée à son extrémité, et formée par la réunion de plusieurs articles assemblés en mosaïque. J'ai cru d’abord que ce morcellement était lui aussi anormal ; mais il s'étend à toutes les autres pièces de l'anneau calcaire ; eton le retrouve avec un peu d'attention chez tous les indi- vidus; les pièces de l'anneau calcaire sont partout, sans exception, formées de plaques jurlaposées. C'est donc vrai- ment bien un caractère spécifique. Il existe une seule vésicule de Pol, longue et volumineuse, mais, dans l'individu anormal, j'en ai vu une seconde, toute petite, à peine indiquée, dans l'interradius dorsal droit. Les muscles rétracteurs du pharynx sont particulièrement larges. Sur les individus dont le pharynx est rétracté, ils sont ovales-allongés, presque cordiformes (pl. IE, fig. 22), présen- tant à leur base deux oreilles, de partet d'autre de leur insertion au tégument, etse terminant en pointe d'autre part pour s’insérer à l'extrémité du-prolongement des radiales. Ces muscles ont 5°%,5 de longueur et 5 millimètres de largeur. Sur les indi- vidus à pharynx dévaginé, l'extrémité inférieure s’allonge en s’atténuant; l'extrémité supérieure s’amineit sans changer de forme (pl. IF, fig. 23). Thyone Lechleri Lampert, 1885. SYNONVMIE : Th. Hassleri, TakeL (86), p. 11. LirréraTURE : LupwiG (98), p. #4 (Donne toute la littérature antérieure). R. Perrier, Bull. Mus. d'Hist. Nat., t. X, 190%, p. 15. Mission du Cap Horn. — St. n° 76. Baie Orange. — { individu. L'étude de cet individu unique confirme l'identification du Thyone Lechleri Lampert et du Thyone Hassleri Théel, qu'a proposée Lupwic. On sait que cette espèce présente dans ses téguments deux sortes de sclérites calcaires : 1° des disques ronds ou ovales, de petite taille, imperforés ou présentant de petits orttices; 2° de petites coupes treillissées superficielles. LampErT n'avait 36 RÉMY PERRIER vu que les premiers, et THÉEL, rencontrant en plus dans ses exemplaires du « Blake » les coupes superficielles, avait été amené à créer une nouvelle espèce. Lupwie a reconnu l'identité des deux formes : selon lui, LAMPERT n’a pas mentionné les petites coupes treillissées, parce que « la couche superfi- cielle de la peau de son exemplaire était enlevée ». En fait, cette lacune dans la description de Lampert reconnait une autre cause, que met en lumière l'individu du Muséum de Paris. Cet individu, bien que présentant un état de macération assez fâcheux, a conservé toutefois son tégument dans toute son intégrité : or on y observe une très inégale répartition et une variation assez grande des sclérites, suivant qu’on examine la région moyenne du corps où au contraire les deux extrémités. Dans le tégument de la région moyenne, il n'existe, & peu près exclusivement, que des sclérites discoïdes, très serrés les uns contre les autres, et se disposant en plusieurs couches super- posées. Ces sclérites sont généralement cireulaires ou ellip- tiques, #mperforés pour la plupart, quelques-uns portant de très petites perforations. Ludwig les à décrits avec assez de détail (98, p. 45 et pl. Il, fig. 26 4-9 et fig. 28 a-f) pour qu'il n y ait rien à ajouter à leur sujet. Quant aux coupes superficielles, elles sont, dans la région moyenne du corps, excessivement rares, et ce n'est qu'à la condition de les rechercher avec soin et tout spécialement dans les préparations, qu'on peut çà et là en découvrir une tout à fait isolée. Elles peuvent parfaitement passer inaperçues pour un observateur non prévenu, et c’est sans doute ce qui est arrivé à LAMPERT. Dans le tégument des extrémités du corps, tant en avant qu’en arrière, les choses changent tout à fait. En premier lieu, on y rencontre en grand nombre des sc/érites superficiels pareils à ceux décrits par THéEL et par LupwiG. Beaucoup sont encore à l’état primitif, en forme d'étoile à quatre, quelque- fois cinq branches, très fortement concaves extérieurement, chaque branche se terminant par un groupe de deux à quatre épines irrégulièrement disposées. Secondairement, les extré- mités de ces branches s'unissent par des anastomoses allant HOLOTHURIES ANTARCTIQUES n)/ de l’une à l’autre, et on aboutit ainsi à la formation d’une coupe treillissée, mais toujours assez irrégulière. D'autre part, les sclérites profonds sont encore des disques elliptiques, mais ici presque tous portent des perforations et des perforations assez larges ; il en résulte que l'aspect géné- ral des préparations diffère très notablement de celles de la région moyenne, où dominent les disques imperforés. Mais ce sont les mêmes formations, arrêtées à un état de dévelop- pement différent. Les disques perforés représentent une forme moins évoluée que les disques imperforés, car ceux-ci sont, au début, des plaques minces, percées de larges perforations, qui, par apposition de nouvelles quantités de calcaire, s’épais- sissent et voient leurs orifices se fermer progressivement. Au milieu de ces sclérites discoïdes, qui sont complètement dépourvus de tubercules, se voient d'autres sclérites, un peu plus grands, à perforations plus marquées, portant sur leur face externe des tubercules très développés, qui souvent s'unissent par des anastomoses de façon à former un réseau superficiel de trabécules, au-dessus de la plaque proprement dite. Ces plaques sont notablement plus nombreuses à l’extré- mité antérieure, où THÉEL les à d’ailleurs signalées, mais elles existent aussi en arrière. Elles sont d’ailleurs à peine plus grandes que les disques ordinaires. Ces différences dans les sclérites des diverses régions du corps sont importantes à noter. Elles expliquent les divergences que présentent les descriptions des auteurs. Les pédicelles sont soutenus par des sclérites en forme de bâtonnets perforés, présentant sur l’un de leurs bords des prolongements irréguliers qui manquent au bord opposé. Un disque treillissé, très développé, soutient la ventouse terminale. Le corps de l’exemplaire que j'ai étudié est allongé, tron- qué en avant, atténué longuement en arrière. Il a 9 centimètres de long ; sa couleur est d’un brun foncé, grisàâtre par endroits. Les pieds ambulacraires, complètement rétractés, ne se dis- tinguent du tégument par aucune différence de coloration. Ils sont épars sur tout le corps, peut-être un peu moins nombreux sur la face dorsale ; les radius sont marqués par des sillons à peine indiqués, mais je n’ai pu discerner nulle 38 RÉMY PERRIER part un véritable alignement des pieds sur les radius, pas plus sur la région moyenne du corps qu’en avant ou qu'en arrière. L'anatomie ayant été assez complètement faite par Lupwie, je n'ai pas voulu ouvrir l'unique échantillon de la collection du Muséum et ne donnerai pas de renseignement nouveau à ce sujet. Psolidium convergens Hérouard, 1901 (Rémy Perrier, 1904). (PI. IL, fig. 2-4; fig. D, E, EF, dans le texte.) 1901. Cucumaria convergens. HErouarD. Arch. Zool. Exp. (3), &. IX; p. XXX. 1904. Psolidium convergens. R. Perrier. Bull. Mus. Hist. Nat., t. X, p. 15. Mission du Cap Horn. Station 29 bis. — Terre de Feu : Baie Orange. — 1 individu. — Station 85. — Baie Orange. — 1 individu. Punta-Arenas (M. Lebrun, 1883). — 5 individus. Je crois pouvoir identifier ces individus avec celui qui a été décrit par HérouaRrD sous le nom de Cucumaria convergens, individu qui provient de l’île Navarin, c'est-à-dire des mêmes parages que ceux du Muséum; mais cette espèce se rattache, selon moi, comme Je le montrerai plus loin, en raison de sa sole ventrale différenciée, au genre Psolidium de Lupwia. pe La longueur du corps varie entre 8°*,5 et 27 millimètres : elle est en moyenne de 15°",5. Le corps (pl. IL, fig. 2-4) est allongé, atténué en pointe à l’extrémité postérieure ; l’extré- mité antérieure est au contraire cylindrique, et, sur deux individus longs de 11°°,5 et de 14°°,5, dont la couronne tenta- culaire est dévaginée, il se différencie, à cette extrémité, une sorte de cou cylindrique, portant la couronne tentaculaire, et plus mince que la région moyenne du corps (fig. 3) ; tandis que celle-e1 à 5 millimètres de diamètre transversal, la largeur s’amincit brusquement, au niveau de ce cou, jusqu'à n'avoir que 3"",5. Cette partie étranglée n'existe plus sur les individus dont la couronne tentaculaire est plus ou moins rétractée. L'extrémité antérieure et l'extrémité postérieure viennent se placer à peu près suivant l’axe du tronc, mais avec une ten- dance à se relever du côté dorsal. La face ventrale (fig. 2) présente une sole de reptation très HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 39 nettement caractérisée et telle qu'on ne la rencontre dans aucune autre espèce de Cucumaria. Par son tégument beau- coup plus mince et beaucoup moins calcifié que celui qui recouvre le reste du corps, par la forme différente de ses pédicelles, par ses sclérites, plus réduits et de forme tout autre que les sclérites dorsaux, cette sole pédieuse se diffé- rencie franchement du reste du tégument. Toutefois, la limite de cette sole pédieuse est beaucoup moins tranchée que dans le Ps. dorsipes ; elle n’est pas limitée par un rebord marginal comme dans l'espèce de Lunwie et, à ce point de vue, notre espèce se rapprocherait davantage du Ps. panamense (1). La sole pédieuse n'occupe pas toute l'étendue de la face ventrale ; elle reste localisée dans la région moyenne; sur un individu de 19°",5 de long, la sole n'occupe qu’une longueur de 10%%,5: sur un autre de 8"",5, elle a 6"",5. En arrière de la sole, le corps se termine par une sorte de queue conique, dont tout le tégument, aussi bien sur la face ventrale que sur la face dorsale, a des caractères identiques et rappelant ceux de la région moyenne du dos. La sole pédieuse est de la sorte aussi nettement arrêtée en arrière que sur les côtés. En avant, elle ne se continue pas non plus jusqu'à l'extrémité: mais la ligne de démarcation entre la sole différenciée et la portion non différenciée y est beaucoup moins nette qu’à Ia partie postérieure. Le trivium porte, sur chacun de ses ambulacres, une double rangée de pieds ambulacraires. Sur la sole, ces pieds sont très développés, longs de 1"",5 à 2 millimètres, et terminés par une très forte ventouse ; nulle part ils ne sont complètement invaginés, et, à leur maximum de rétraction, la ventouse est encore visible, en saillie au-dessus du tégument général. Le radius impair montre très nettement ses deux rangées (4) Dans le Georisia ornata Edm. Perrier (93), de Mozambique, qui, confor- mément à la remarque de Ludwig (94, p. 136), se rattache au genre Psoli- dium, il n'existe pas non plus de rebord marginal. Ces trois formes, Ps. conver- gens, panamense et ornatum, réalisent un stade inférieur de la différencialion de la sole pédieuse ; la sole s'affirme bien autrement dans les autres espèces de Psolidium, et atteint son maximum de spécialisation chez les Psolus. Il y aurait peut-être intérêt à séparer génériquement les trois formes inférieures, ou au moins à les réunir en un sous-genre spécial. 10 RÉMY PERRIER de pieds, disposés par paires à la partie postérieure de la:sole pédieuse, alternant en avant. Les deux radius latéraux portent également deux rangées de pieds : la rangée externe, placée sur le bord même de la sole pédieuse, est formée par des pieds identiques à ceux du radius médian; les pieds de la rangée externe, au contraire, sont placés en dehors de la sole pédieuse, et s'insèrent sur les faces latérales convexes, continues avec la face dorsale. Ces pieds extra-marginaux sont toujours plus petits que ceux de la sole ventrale: quelques-uns même présentent la régression que nous allons constater pour les pieds dorsaux. Mais pour la plupart ils sont encore bien développés et ressemblent, en plus petit, aux pieds de la sole. Les trois rangées de pieds du trivium ne se limitent pas à la sole pédieuse; 1ls se continuent de la bouche à l'anus en conser- vant leur alignement; mais en dehors de la sole, ils changent de caractère et deviennent beaucoup plus petits et plus étroits ; ils présentent ainsi beaucoup de ressemblance avec les pieds dorsaux. La face dorsale porte également des pédicelles, mais des pédicelles très réduits, qui, au maximum d'extension, peuvent faire saillie sous la forme de larges et courtes verrues cylin- driques, d’ailleurs de dimensions assez inégales. Toutefois ils présentent une plaque terminale; ce sont donc des pédicelles et non pas des papilles. C’est d’ailleurs là un des caractères du genre Psolidium. Les pieds dorsaux sont épars, en général sans ordre, sur la surface dorsale ; mais toutefois ils se réunissent souvent en plus grand nombre sur les deux radius dorsaux, pour y former une rangée plus ou moins nette, qu'on peut suivre parfois complètement de la bouche à l’anus. Ces rangées deviennent toujours beaucoup plus distinctes à l'extrémité postérieure du corps, où chaque radius porte 2 rangs de pédi- celles rudimentaires. Le pharynx porte 10 tentacules ramifiés, dont les deux ven- traux, les plus rapprochés de la ligne médiane, sont beaucoup plus petits que les autres. Sclérites. — La forme des sclérites est assez différente suivant qu'on les considère sur la face dorsale ou sur la sole ventrale. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 41 Les selériles de la face dorsale (fig. D) sont de deux espèces : 1° des plaques perforées tuberculées ; 2° des sclérites super- ficiels de petite taille, en forme d'X ou de coupes treillis- sées. Les plaques perforées (fig. D, 1 et 2) sont plus ou moins nom- breuses ; chez quelques individus, elles paraissent écartées l’une de l’autre, ou du moins ne se recouvrent pas par leurs bords; mais la plupart du temps, les plaques sont beaucoup plus abondantes et s’imbriquent nettement les unes les autres: cette différence n’est d’ailleurs qu'apparente, et provient seu- lement, comme nous le verrons, de la distension plus ou moins grande du tégument. Ces plaques ont un contour irrégulier et sont percées de multiples perforations arrondies ; sur leur face externe, elles portent, groupés autour des perforations, de gros tubercules arrondis, plus ou moins volumineux, à base obscurément triangulaire. Il est rare que ces tubercules soient également développés sur toute la surface de la plaque; le plus sou- vent ils manquent sur l’un des bords de celle-ci, et prennent un développement et une individualité d'autant plus grande qu'on s'approche davantage de l’autre bord. Quand les sclérites s'imbriquent entre eux, c’est bien entendu le bord inerme qui est recouvert par les plaques voisines ; mais ce bord inerme existe aussi dans les exemplaires où les plaques sont espacées, ce qui prouve que, dans ces exemplaires aussi, les plaques doivent s’imbriquer, et que l’écartement qu’elles présentent tient uniquement à une distension plus grande du tégument. Je n'ai que très rarement vu des anastomoses réunir les tuber- cules entre eux; il n’y a donc pas de réseau secondaire au- dessus de la plaque basilaire. La plaque a sur toute son étendue une assez grande épaisseur, mais c’est une plaque analogue par sa simplicité à celles des Cucumaria, et non pas une écaille réticulée comme celles qui caractérisent les Psolus et la plupart des Psolidium. Des selérites tuberculés analogues, mais plus petits (fig. F, 2 et 3), soutiennent le tégument de la portion invaginable qui porte la couronne de tentacules. Il n’y a pas d’autres plaques que celles que je viens de 49 RÉMY PERRIER x décrire ; quelques selérites à perforations moins nombreuses et plus larges, dépourvus de tubercules, toujours plus petits que les précédents (fig. D, 3) existent bien çà et là entre les plaques principales ; mais ce sont simplement de jeunes plaques en voie de formation. 2° Les sclérites superficiels (fig. D, 4-8) ont typiquement la forme d’un petit disque percé de quatre perforations, et limité Fig. D. — Psolidium convergens (Hérouard) R. Perrier. — Sclérites dorsaux : l, plaque tuberculée normale du tégument dorsal; à gauche, la portion cachée sous une autre plaque; à droite, la portion libre, seule garnie de tubercules : 2, plaque à surface entièrement tuberculée : 3, plaque sans tubercules, placée sous les autres; 4-8, petits sclérites superficiels ; 4, forme primitive en X ; 5, 6, stades intermédiaires du développement; 7, forme la plus ordinaire en assiette perforée (face interne convexe); 8, assiette à cinq perforations. par un anneau circulaire ou elliptique, présentant sur son bord externe de courts prolongements en forme de dents arrondies (fig. D, 7). Les quatre perforations sont séparées les unes des autres par la partie centrale du sclérite (croix primaire), en forme de >—<, formée de travées un peu plus épaisses que l'anneau marginal et placée à un niveau un peu différent, de sorte que le selérite est très légèrement conçcave sur sa face externe. Il a ainsi la forme non pas d’une coupe, mais d’une assiette treillissée. Tous les intermédiaires (fig. D, 5 et 6) existent entre la forme en X (fig. D, 4) qui est la forme primi- HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 49 tive et la forme en assiette qui est la forme définitive (fig. D, 7). Quelques sclérites présentent plus de quatre perforations (fig. D, 8). Selérites des pieds dorsaur. — Ce sont des plaques analogues à celles du tégument dorsal, mais plus petites, à tubercules moins nombreux et allongées transversalement par rapport au pied. À l'extrémité du pied, se trouve une plaque terminale Fig. E. — Psolidium convergens. — 1, plaque terminale bien développée d'un pied ventral; 2, 3, 4, plaques terminales plus ou moins réduites des pieds dorsaux : >, 6, 7, sclérites d’un pied ventral. peu développée, mais le plus souvent très nette (fig. E, 2-4). Elle se réduit parfois au point de n'avoir que sept ou huit mailles ou même jusqu’à n'être composée que d’un ensemble de trabécules irrégulièrement ramifiées (fig. E, 4). Cet état variable est en rapport avec l'inégalité que nous avons signalée dans le développement des pieds dorsaux. Les sclérites de la sole ventrale sont exclusivement des plaques perforées, beaucoup plus simples que celles de la face dorsale. Elles sont relativement minces, peu étendues, toujours espa- cées les unes des autres, comme le montre la figure F,1, repré- sentant une petite partie du tégument de la sole avec ses 44 | RÉMY PERRIER sclérites ex place. Leur forme est absolument quelconque et le nombre de trous quelles présentent est très variable; parfois il ÿ en a deux seulement. Ces trous sont plus larges que ceux des plaques dorsales, Les travées qui les séparent plus étroites. Ces plaques sont pour la plupart inermes, les plus grandes seules portent parfois quelques tubercules isolés. Ce sont là les seuls sclérites de la sole ventrale. Les petits sclérites superficiels qui se trouvent sur le reste du corps paraissent manquer totalement dans cette région du tégu- ment. Les pieds ventraux sont soutenus par des spicules (fig. E, 5-7) allongés, irréguliers, présentant sur leur partie moyenne Fig. F. — Psolidium convergens. — 1, une petite partie du tégument ventral, mon- trant les sclérites en place; 2 et 3, plaques perforées tuberculées de la partie anté- rieure invaginable ; 7-10, sclérites des tentacules. 3 ou 4 grandes perforalions et, sur leurs extrémités un peu élargies, des perforations plus petites. La ventouse terminale est soutenue par un disque treillissé très développé (fig. E, 1), parfois divisé en deux ou plusieurs parties juxtaposées. La figure E montre l'opposition marquée des plaques terminales des pieds dorsaux et des pieds ventraux; elles y sont dessinées à une même échelle. Quant aux tentacules, ils sont soutenus par des plaques perforées dépourvues de toute régularité (fig. F, 4-11). L'organisation intérieure ne présente rien de très particulier. Elle se rapproche de ce que LupwiG (74) a décrit pour le Cucumaria parva. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 45 L'anneau calcaire est formé de 10 pièces simples en A dont la forme peut se comparer à un accent circonflexe ; toutes présentent une encoche postérieure médiane, correspondant à une pointe antérieure. La pointe antérieure des interradiales est simple, mince, et un peu plus courte que celle des radiales, qui est plus large et légèrement échancrée en avant; ces dernières n ont pas de prolongements postérieurs. Il existe une seule vésicule de Poli et un seul canal du sable, inclus dans le mé- sentère dorsal et terminé par un madréporite bien développé. Les /ollicules génitaux sont peu nombreux, non ramifiés, de longueur moyenne, et fixés au mésentère un peu en avant de l'insertion des muscles rétracteurs du pharynx sur la paroi du corps, insertion qui se fait un peu en avant du milieu du corps. Les deux organes arborescents sont égaux, ramifiés dès la base, mais ils ne portent qu’un assez petit nombre de rameaux, linéaires, ainsi que leurs subdivisions. Le Ps. convergens présente un intérêt tout particulier, parce qu'il constitue une forme de passage très caractérisée entre le genre Cucumaria d'une part, et les formes à sole pédieuse, distribuées dans les genres Psolidium, Theelia, Pseudopsolus et Psolus. On y trouve réunis des caractères qui définissent plu- sieurs genres distincts; le nom de convergens à été choisi par Hérouarp pour exprimer cette réunion ; mais en fait, il ne s'agit point ici d’une convergence, car l'espèce en question est bien manifestement une forme intermédiaire. I y a lieu de discuter maintenant la position générique de cette espèce, puisque je propose de la rattacher au genre Pso/- dium et non pas au genre Cucumaria, rattachement que J'avais d’ailleurs jugé nécessaire bien avant de connaître le travail d'HÉROUARD. L'existence d’une sole ventrale ferait penser aux Psolus, mais il est bien évident que notre espèce n'appartient pas à ce genre puisque : 1° la sole pédieuse n’est pas nettement limi- tée; 2° qu'il existe des pieds dorsaux; 3° que la bouche est dirigée en avant et non en haut; 4° que les sclérites dorsaux n’ont pas la forme d’écailles caractéristique des Psolus. 16 RÉMY PERRIER La forme de ces selérites rappelle plutôt ce qu’on voit dans les Cucumaria et dans les Colochirus. Mais : l° La présence de pieds et non de papilles sur la face dorsale, l'absence des 5 écailles péribuccales, la différencia- tion plus grande de la face ventrale, la forme différente des sclérites dorsaux et ventraux excluent le genre Colochirus. 2° D'autre part, aucune espèce de Cucumaria ne présente une pareille réduction des pieds dorsaux, ni une semblable différenciation de la face ventrale. Restent les genres Pseudopsolus, Psolidium et Theelia. Theclia, qui possède quinze tentacules, doit être éliminé tout de suite, notre espèce n’en ayant que dix. Pseudopsolus ne renferme qu’une espèce de la Nouvelle- Zélande, Pseudopsolus macquariensis, et a été défini par Lun- wW1G (98), de la manière suivante : dix tentacules ; tégument dépourvu où presque dépourvu de sclérites ; face ventrale aplatie en forme de sole de reptation indistinete ; face dorsale avec des pieds rès peu nombreux, également localisés sur les radius; bouche obhiquement dirigée vers le bas; anus subdorsal. Le fort développement du squelette calcaire sur la face dorsale, la disposition irrégulière des pieds dorsaux, la direc- tion antérieure ou même dorsale de la bouche, et la position terminale de l'anus éloignent notre espèce du genre Pseudo- psolus. Quant au genre Psohidium, LunwiG en donne la diagnose rec- tifiée suivante (94, p. 135), qui s’applique entièrement à notre espèce, à la condition d’y faire l’insignifiante modification que nous mettons ci-dessous en italique: « Dix tentacules (les deux ventraux plus petits que les autres); partie moyenne du irivium aplatie en une sole ventrale distinctement limitée, et munie de pieds bien développés, localisés sur les ambulacres ; sur tout le reste de la surface du corps, des pédicelles très petits, ou réduits à l’état de papilles, qui peuvent être ou bien épars sur toute la surface, ou bien localisés sur les radius, soit aux deux extrémités du corps, soit à l'extrémité postérieure seulement ». | Il ne saurait rester un doute sur la position générique de l'espèce que nous étudions. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 41 Elle présente toutefois une spécialisation notablement moins avancée que les autres Psolidium : ses plaques dor- sales ne sont pas épaissies en écailles ; sa bouche est dirigée en avant; sa sole ventrale est beaucoup moins différenciée que dans le Ps. dorsipes, et rappelle celle des Ps. panamense et ornatum. Mais, tandis que, chez le Ps. panamense, les pieds dorsaux traversent par des orifices les écailles dorsales pour arriver à l'extérieur, chez les Ps. convergens et ornatum, c'est seulement dans l'intervalle des plaques dorsales, beaucoup moins développées d’ailleurs, qu'émergent les pieds réduits de la face dorsale. Ces deux dernières espèces, d’ailleurs ma- nifestement distinet:s, présentent donc un stade de moindre spécialisation analogue. Toutefois, le Ps. ornatum est moins primitif, car on voit déjà apparaître chez lui, quoiqu’encore incomplètement développé, le réseau superficiel des trabé- cules, qui tend à transformer la plaque perforée primitive en une écaille de Pso/us. Ce réseau n’est qu'annoncé chez le P%. convergens, par les tubercules arrondis que portent, sur leur face externe, les sclérites dorsaux, restés à l’état de plaques simples. En résumé, le Psolidium convergens doit donc se placer à la base de la tribu des Psoliniens. De même que le genre Psolidium fait le passage des Cucumaria aux Psolus, le Ps. convergens fait le passage des Cucumaria aux Psolidium typiques. On peut d'ailleurs préciser davantage son point de contact avec les Cucumaria. West en effet très voisin du €. parra, qui vit dans les mêmes localités. Ce sont les mêmes formes de selérites, tant pour les sclérites profonds que pour les sclé- rites superficiels ; il n’y a que des différences de détail ; la dis- position des pieds ambulacraires dans C. parva, sériée sur la face ventrale, toujours plus irrégulière sur la face dorsale, rapproche encore les deux espèces ; ilen est de même de la forme des tentacules et aussi de l’organisation intérieure. Je ne serais même pas surpris, comme je l'ai dit précédemment, que les auteurs aient confondu sous le même nom des repré- sentants des deux types, ce qui expliquerait les divergences de mes observations et de certaines observations antérieures 48 RÉMY PERRIER sur le C. parva. Les deux espèces en tout cas sont proches pa- rentes : le Ps. convergens n’est qu'un C. parva en train de devenir un Psolidium. Psolidium dorsipes Ludwig, 1886. (PL. I, fig. 5-15, et fig. G et H dans le texte.) LrrréraTure : LupwiG (98), p. 51. [Donne toute la littérature antérieure. | R. Perrier. Bull. Mus. d'Hist. Nat., t. X, 1904, p. 15. Mission du Cap Horn. Station 104. — Iles Falkland. — 1 individu. == Station 108. — Baie Franklin. — 3 individus. — Station 108 (?). — Iles Falkland (?). — 1 individu. Bien qu’il existe quelques différences entre les caractères que présentent les individus ci-dessus et ceux qu'a donnés Ludwig, je crois qu'il ne saurait y avoir de doute sur leur détermination ; la diagnose de l’espèce devra simplement être un peu élargie pour les recevoir. Cette espèce a été établie par Lupwic d'après quatre exem- plaires provenant de la partie orientale du détroit de Magel- lan, entre Punta-Arenas et Fortscue, par 30 à 50 mètres de profondeur. C'est pour la recevoir que Ludwig a créé le genre Psolidium. Jusqu'à ce jour, on n'avait revu aucun individu pouvant lui être rattaché. Le corps, assez fortement surélevé, présente inférieurement une sole ventrale {ès nettement différenciée, caractérisée par la minceur de son tégument, qui 5 oppose à l'épaisseur du tégument dorsal, très fortement calcifié, dur et rigide. Les bords de la sole sont marqués par un rebord saillant cons- titué par le tégument dorsal, qui forme une sorte de repli tout autour de la sole. La forme générale n'est pas tout à fait la même dans l’indi- vidu des îles Falkland et dans ceux de la baie Franklin; la différence d’ailleurs me paraît secondaire et résulter d’une variation individuelle; peut-être mème n'est-ce que le ré- sultat d’une déformation artificielle. Dans les derniers, qui ont respectivement 11 millimètres, 18°*,5 et 24 millimètres, la bouche et l'anus sônt placés sur la face dorsale, l’un et l’autre au sommet de protubérances HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 49 coniques peu élevées, la buccale un peu plus haute que l’anale. Au contraire, dans lindividu des Falkland {figuré pl. IE, fig. » et 6), Le corps est subcylindrique, la face ventrale étant aplatie pour former la sole; l'extrémité antérieure se prolonge en avant sous la forme d’une région cylindrique, dépassant de beaucoup le bord antérieur de la sole ventrale; elle est presque située dans le prolongement du corps, seulement un peu relevée vers le haut. La longueur de cet individu est de 13"",5, sa largeur au milieu de 5"",75, l'épaisseur verticale de 4"",25. La sole ventrale a seulement 9 millimètres de long et 3°", de large; la région cylindrique antérieure s'étend de 4"°,5 en avant du bord de la sole. L’anus est situé à l'extrémité postérieure de la voûte dorsale, au sommet d’une très légère proéminence conique, qui donne à l'extrémité du corps une forme tronquée. La face dorsale est couverte d’écailles nombreuses, bien visibles à l'œil nu, larges, très nettement imbriquées les unes sur les autres ; celles du pourtour de la bouche et de l'anus forment des rangées concentriques peu régulières, celles de la région moyenne, des rangées longitudinales, chacune re- couvrant de son bord interne les plaques voisines plus rap- prochées de la ligne médiane. Le rebord qui limite la face ventrale porte deux ou ou trois rangs de plaques très petites, d'environ un demi-mil- limètre ; mais presque immédiatement après commencent les larges plaques qui n’ont pas moins de 2 à 3 millimètres de lar- geur dans leur partie visible. La sole ventrale présente trois séries complètes de pieds marquant les trois radius ventraux (pl. Il, fig. 6). Chaque série est formée de deux rangs de pieds : sur le radius impair, les deux rangs de pédicelles sont très complets et assez serrés dans toute la longueur de la sole, chez les deux plus grands individus : on en compte environ soixante-dix en tout. Pour les deux plus petits exemplaires, les pédicelles sont un peu moins nombreux et notablement plus écartés (pl. Il, fig. 6); ils alternent irrégulièrement d’un rang à l’autre, de façon qu'on pourrait les décrire comme formant une seule rangée en zigzag, d’ailleurs assez irrégulière. ANNà SC. NAT. ZOOL. 1, & 30 RÉMY PERRIER Chacun des ambulacres latéraux porte à son tour deux rangs de pieds très serrés, insérés l’un et l’autre sur la paroi amincie de la sole ventrale, le rang externe très près de son bord marginal, mais nettement en dedans de celui-ci. Ces deux rangées se poursuivent sans interruption sur tout le pourtour de la sole ventrale, se continuant, en avant et en arrière le long’ du bord arrondi de celle-ci, jusqu à la ligne médiane, qu'elles atteignent le plus souvent. Tous les pieds ventraux se terminent par une ventouse très nette et Lrès dé- veloppée. La face dorsale porte de petits pédicelles très réduits, mais encore assez développés puisqu'ils peuvent atteindre 0°°,75 ONEUL Fig. G. — Psolidium dorsipes. — 1, plaque terminale d'un pied ventral; 2, plaque terminale d'un pied dorsal. de long. Ils sont bien nettement formés, avec une tige flexible et se terminent par une petite ventouse soutenue par une plaque treillissée terminale, petite, mais parfaitement consti- tuée. La figure G fait bien voir la différence de développe- ment des ventouses dans les pieds dorsaux et les pieds ven- traux. Ces pédicelles sont épars, assez nombreux, disposés sans ordre et assez irrégulièrement sur toute la surface dorsale. Je n'ai pu discerner aucune espèce de sériation radiale, n2 en avant ni en arrière, contrairement à ce que décrit LupwiG. Ce sa- vant paraissait attacher une grande importance à cette dispo- sition spéciale, qu’il avait même primilivement admise comme caractéristique dans la diagnose du genre Pso!idium, mais HÔLOTHURIES ANTARCTIQUES D! qu'il à dû rayer, ayant depuis trouvé lui-même des espèces à pieds épars sur toute la surface dorsale. En somme, cette localisation n’a aucune importance; comme il arrive souvent dans les espèces à pédicelles épars, un reste de sériation radiale peut se retrouver plus ou moins indiqué suivant les individus. Voici un autre point important. D'après Lupwic, les pieds feraient uniquement saillie dans l'intervalle des plaques dor- sales. Cela est vrai en effet pour quelques pédicelles, et la chose est particulièrement fréquente dans l'individu desîles Falkland; mais, même sur celui-ci, quelques pédicelles s'insèrent au beau milieu d’une plaque dorsale et cela devient presque la règle générale pour les deux plus grands individus, dont les plaques dorsales présentent presque toutes de un à trois trous, servant de passage chacun à un pédicelle dorsal (pl. IE, fig. 7). Cette relation des pieds et des écailles ne peut donc nullement être considérée comme un caractère spécifique. Il existe dix tentacules ramifiés, dont les deux ventraux (ou les deux antérieurs, correspondant au radius ventral) sont beaucoup plus petits que les autres. SCLÉRITES. — À. Les sclérites de la face dorsale sont de trois sortes. 1° Les principaux sclérites dorsaux sont les écailles, dont nous avons déjà indiqué la disposition, visible à l'œil nu. Ces plaques (pl. IL, fig. 7) sont constituées par un réseau calcaire formé de mailles disposées suivant plusieurs étages. Le centre présente sur la face externe de gros tubereules arrondis, réu- nis les uns aux autres par de petits tractus calcaires plus étroits. En général, six de ces trabécules calcaires rayon- nent assez régulièrement autour de chaque tubercule. Chaque plaque porte en général un, deux ou trois volumineux ori- fices (p), percés plus ou moins obliquement dans son épaisseur et servant, comme je l'ai dit plus haut, au passage des pédi- celles dorsaux. 2° Dans la profondeur et aussi entre les écailles, se trouvent des plaques perforées (fig. H, 1-3), à peu près complètement lisses. Ces plaques, souvent gauches, portent sur une partie de leur bord externe des protubérances perliformes et quelques DD RÉMY PERRIER tubercules semblables peuvent parfois s’observer aussi sur la face interne de ces plaques (fig. H, 3). Nous trouverons des P O ) tubercules perliformes semblables dans les selérites princi- paux de la face ventrale. 3° Enfin, à la périphérie se trouvent de petits sclérites Fig. H. — Psolidium dorsipes. — 1-3, sclérites secondaires du tégument dorsal, montrant les tubereules perliformes ; 4-7, sclérites avoisinant la base des pieds ambulacraires. hémisphériques tout à fait semblables à ceux que nous allons retrouver dans le tégument ventral. Les pédicelles dorsaux sont soutenus par des plaques per- forées irrégulières et par des boucles plus ou moins déformées. B. La sole ventrale est dépourvue d’écailles réticulées ; mais elle renferme, elle aussi, comme l’a indiqué Ludwig, trois espèces de selérites : 1° Les plus nombreux de beaucoup sont des plaques perfo- rées (pl. Il, fig. 11 et 12), généralement elliptiques, plus ou moins régulières, présentant le plus souvent quatre perfora- tions, et portant sur leur pourtour de huit à douze tubercules arrondis, épais, perliformes ; quelquefois aussi, un ou deux tubereules semblables s’observent sur les trabécules centrales, entre les perforations. Ces plaques diffèrent assez notablement de celles que Ludwig a décrites, bien qu'elles rentrent cepen- HOÔLOTHURIES ANTARCTIQUES DJ dant dans le même plan; mais je les ai très régulièrement trou- vées telles que je viens de les décrire dans tous les individus. 2° Interposées aux précédentes, se trouvent d’autres plaques plus volumineuses, larges, à perforations plus grandes, plus nombreuses, d’ailleurs en nombre variable, à travées cal- caires plus fortes aussi; leur pourtour est irrégulier et fes- tonné par suite de la présence de perforations incomplètes, mais il ne porte pas de tubercules perliformes, ce qui diffé- rencie ces sclérites des précédents. Ces plaques sont très clairsemées et peuvent très bien passer inaperçues quand on . a examiné les sclérites d’une partie restreinte de cette portion du tégument. Elles manquent notamment dans le voisinage des pieds, c’est-à-dire sur les radius, ou, plus exactement, les sclérites des deux premières espèces s'y confondent, en se modifiant notablement (pl. Il, fig. 13). Tout autour de la base des pédicelles, Le tégument général présente des sclérites plus allongés (fig. H, 4-7), en forme de bâtonnets aplatis, portant en général en leur milieu quatre perforations assez grandes, et vers leurs extrémités d’autres mailles plus petites : les uns sont droits, placés pour la plupart, mais non tous, dans une direction tangentielle au cercle de base du pied ; les autres sont recourbés et embrassent ce cercle. Les sclérites des pédicelles ont aussi la forme de bâton- nets, semblables aux précédents, mais plus petits, et avec moins de perforations. 3° Enfin, dans la zone la plus superficielle du tégument, se trouvent des sclérites en forme de coupes treillissées (pl. IF, fig. 8-10), constituées par un anneau circulaire, portant sur son bord externe de huit à douze tubercules non pédiculés, perliformes, assez peu régulièrement disposés. Le fond de la coupe est constitué par quatre bâtonnets disposés en croix, laissant entre eux et le bord annulaire quatre perforations ; chacun d'eux se termine au point où il vient s'attacher au bord annulaire, par une tête renflée sphérique. Parfois il n'existe que trois bâtonnets, d’autres fois au contraire plus de quatre, disposés irrégulièrement, mais ce sont là des exceptions. L'anneau calcaire est formé de dix pièces en forme d’accent circonflexe, présentant une pointe antérieure; toutes sont 04 RÉMY PERRIER dépourvues de prolongements postérieurs. Une vésicule de Pob, un canal du sable. Follicules génitaux nombreux, très allongés, non ramifiés. Les deux organes arborescents peu ramifiés, mais larges et très spacieux. D'après l'examen de ces nouveaux individus, la diagnose du Ps. dorsipes doit être étendue de la façon suivante : Corps semblable à celui des Psolus, à face dorsale très calcifiée, à sole ventrale différenciée, présentant un tégu- ment très mince; cheminée buccale pouvant se rabattre presque horizontalement, mais le plus souvent verticale, de façon que la bouche est dorsale; anus toujours dorsal. Pieds de la sole ventrale disposés en trois ambulacres plus ou moins fournis, ceux correspondant aux radius latéraux placés sur le bord même de la sole, qu’ils entourent complètement. Pédi- celles dorsaux beaucoup plus petits que les ventraux, assez nombreux, épars sans ordre, mais pouvant affecter une dispo- sition radiale aux deux extrémités, et faisant saillie soit entre les écailles, soit à travers des perforations percées au milieu des écailles. Sole ventrale présentant trois sortes de sclérites : des coupes treillissées, des boucles à quatre mailles, tubercu- lées sur leur bord externe, et des plaques perforées, larges, non tuberculées, beaucoup plus rares. Actuellement le genre Psolidium renferme les sept espèces suivantes : Ps. dorsipes Ludwig, 1886; Ps. | Psolus] braziliense (Théel, 1886), Ludwig, 1892; Ps. [Georisia] ornatum (Edm. Perrier, 1893), Ludwig, 1894; Ps. gracile et Ps. panamense Ludwig, 1894; Ps. disjunctum Sluiter, 1901 ; Ps. [Cucumaria] convergens (Hérouard, 1902), R. Perrier, 1904. Il faut probablement y ajouter l'espèce décrite par CLark en 1901 sous le nom de Thyonepsolus nutriens et provenant de Californie. Quant au Psolidium sphæricum décrit par Sluiter ([01/, p. 106), il est très douteux qu'il appartienne à ce genre, puisqu'il n’a pas de sole ventrale différenciée, et qu'il reste à cet égard beaucoup au-dessous même du Ps. convergens. Voici le tableau synoptique des espèces certaines de Psoh- HOLOTHURIES ANTARCTIQUES D) dium ; il modifie et CoIEte celui donné précédemment par Lupwic (198), p. 135) Tableau synoptique des espèces du genre « Psolidium ». Sole ventrale peu différenciée, non limitée par un rebord marginal, présen- tant une seule espèce de sclérites ; pieds marginaux toujours disposés sur deux rangs, le rang externe pouvant s'insérer sur la portion épaissie du tégument, c'est-à- LE en dehors de la sole. | Sclérites dorsaux en forme de plaques simples, tuberculées, perforées, ne formant pas d’écailles épaisses, accompagnées de sclérites superficiels en forme de coupe ; pieds dorsaux émergeant entre les plaques ; bouche et anus terminaux. Ps.convergens. Sclérites dorsaux comprenant : 1° des plaques perforées portant sur leur face externe quelques trabécules consti- tuant la première indication d'un réseau superficiel ; 2° des boucles avec tubercules perliformes; 3° des coupes treillissées superficielles. Pieds dorsaux émer- geant entre les plaques ; bouche et anus terminaux... Ps. ornatum. Sclérites dorsaux exclusivement en forme d’écailles réticu- lées, épaisses, perforées pour livrer passage aux pieds dorsaux ; bouche et anus dorsaux..................... Ps. panamense. | Sole ventrale bien différenciée, limitée par un rebord plus ou | moins saillant, presque toujours avec trois espèces de \ sclérites. Fin de la sole indiqué seulement par un faible pli; pieds marginaux disposés sur une seule rangée........ Ps. gracile. er de la sole très saillant, terminé par un bord tran- chant. ( Pieds marginaux de la sole ventrale disposés par 4 de LS PRE NAT SE PET RL ELE RRRES CASE PERTE FEES REP RRS Ps. braziliense. on dorsaux épars, au moins sur la région moyenne; trois espèces de sclérites ventraux. ............1.... Ps. dorsipes. LS dorsaux localisés sur les radius, en une double série; une seule espèce de sclérites ventraux....... Ps.disjunctum. Psolus antarcticus (Philippi, 1857) Dujardin et Hupé, 1862. Lrrrérarure : Lupwie (98), p. 53. [Donne la littérature antérieure complète.] Mission du Cap Horn. — Drag. 177. Entre l’île Navarin et l'ile Hoste. — 8 individus. A cette espèce, soigneusement décrite par BELL (81 et 82) et Tuéez (86), se rattachent huit individus qui présentent tous les caractères indiqués par ce dernier auteur. Les uns ont un contour presque circulaire, les autres un contour elliptique allongé. Les plus grands individus ont 43 X 39 millimètres (forme circulaire) ou bien 50 x 22 millimètres (forme allongée). 56 RÉMY PERRIER La hauteur de l’animal est également fort variable et quelque- fois aussi accentuée que dans l’espèce suivante. Aussi ne faut-il pas trop tenir compte de ce caractère différentiel donné par Bez. Les écailles du tégument dorsal sont tout à fait lisses, ou ne présentent que des granulations très fines, rendant le tégument à peine rugueux. Les granulations deviennent en général plus nombreuses et plus fortes sur les plaques orales; mais, sur certains individus, ces dernières sont aussi lisses que les plaques voisines. Au sujet des relations des écailles dorsales les unes avec les autres, Tréez dit que, dans le Psolus antarcticus, ces écailles ne s'imbriquent pas. En fait, il faut préciser; les écailles s’im- briquent parfaitement, en ce sens que le bord interne de cha- cune recouvre le bord externe de la plaque immédiatement voisine et plus rapprochée qu'elle de la ligne médiane. Mais, en se recouvrant, leurs bords s’amincissent en biseau, si bien que le bord recouvrant ne forme sur la plaque recouverte qu'une très légère saillie, à peine perceptible extérieurement. Même chose s’observe sur la surface interne (du tégument. Je n'ai pas constaté que les écailles qui entourent directement le cercle des plaques orales soient, comme le rapporte Tuéez, particulièrement volumineuses. Les plaques orales sont bien nettement différenciées, triangulaires, et leur ensemble est limité par un contour cireu- laire des plus nets et des plus caractérisés, si bien que cette sorte d’opercule buccal se distingue à première vue au milieu des plaques tégumentaires proprement dites. Un individu montre deux petites plaques, allongées en forme de dents, interposées entre les plaques principales; mais c'est là une exception; partout ailleurs, les cinq plaques triangulaires se voient seules quand là couronne tentaculaire est rétractée, ce qui est le cas de tous les individus. Exceptionnellement, une de ces plaques peut se subdiviser en deux pièces conti- guës ; mais l’ensemble de ces deux pièces reste triangulaire, et cette variation n'influe que fort peu sur la régularité d'aspect du groupe périoral. Les plaques anales sont également différenciées, de la même façon que les orales, mais beaucoup plus petites. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 57 La face ventrale ne montre de pieds ambulacraires que sur le bord de la sole ; le radiusimpair porte bien quelques pieds en avant et en arrière; mais ces pieds ne dépassent pas le niveau des pieds latéraux, et ne font que compléter la ceinture for- mée par ceux-ci tout autour de la sole ventrale. Fort rare- ment, du côté antérieur, un, deux ou trois pieds dépassent le niveau de la bordure circulaire ; tout le reste du radius est nu. Les ambulacres latéraux comprennent: 1° une série de pieds marginaux, très petits, placés sur la marge même de la sole; 2° à une certaine distance du bord, une bande de pieds, dis- posés assez régulièrement sur deux rangs, quelquefois, au moins en certaines parties, sur un rang. Ces ambulacres latéraux occupent tout le côté de la sole, mais ils s'arrêtent à une petite distance des pieds antérieurs et postérieurs appartenant à l’ambulacre médian, si bien qu’on peut toujours reconnaître le groupe formé par ceux-ci, tou- Jours nettement isolé. Les dépôts de la sole ventrale ont tous la forme de plaques régulièrement arrondies, et légèrement excavées en forme de verre de montre. Elles sont percées d’un certain nombre de trous, de quatre à dix, parfois seulement deux ou trois. Les bords de la plaque portent des processus peu allongés, rayon- nant tout autour. Ce sont ces processus qui s'unissent par leurs extrémités pour déterminer la formation de nouvelles mailles à la périphérie de la plaque. Sur les deux faces de la plaque se voient de petits tubercules arrondis très nets ; ils sont irré- gulièrement disséminés sur les diverses travées de la plaque, mais ils abondent surtout à la périphérie et notamment sur les processus marginaux. Un certain nombre d’autres individus, mais de bien plus petite taille, présentent aussi les caractères essentiels de l’es- pèce de Philippi. Voici leur origine : Mission du Cap Horn. — Station 52. — Maxwell. — 1 individu. = — Station 100. — Détroit de Magellan. — 1 individu. — — Station 140.— Baie Bouchier. — 5individus. — Station 167. — Rade de Gorée. — 2 individus. — — Station 177. — Entre l'ile Navarin et l'île Hoste. —21ind. _ — Station 570. — Baie Orange. — 2 individus. 58 RÉMY PERRIER Le plus grand de ces treize individus na que 16 X 12 milli- mètres, le plus petit 8,5 X 7,5 millimètres. Tous sont très aplatis, avec des plaques périorales et périanales régulière- ment disposées en un groupe circulaire, comme il a été dit plus haut. Aucune granulation n’est visible sur la face dorsale, qui est tout à fait lisse. Sur la face ventrale, la position des pieds est également celle qui a été indiquée pour les Psolus antarcticus. L’ambu- lacre impair est nu, sauf en avant et en arrière, où il porte en général deux pieds placés côte à côte. Sur un seul échan- tillon, on voit cinq pieds à chaque bout, disposés deux, deux et un, les derniers s’avançant plus ou moins sur le radius impair. Par contre, sur deux individus, il n’y a pas du tout de pieds sur le radius médian. Les ambulacres latéraux, en dehors de la rangée de pieds marginaux très petits, qui existent toujours, portent seulement une rangée très régulière de pieds bien développés, allant sans interruption de l'extrémité antérieure à l'extrémité pos- térieure. À chacune de ces extrémités, les deux rangées se rejoignent par l’adjonction des deux pieds antérieurs et pos- térieurs, appartenant au radius impair ; de sorte que la sole est bordée sur tout son pourtour par une rangée continue de pédicelles. La concordance de tous ces caractères semble bien mon- trer qu’on a affaire là à de jeunes Psolus antarcticus. La seule chose qui me laisse un doute, c’est que je ne trouve aucun individu de dimensions intermédiaires entre ceux-ci, dont le plus grand à 16 millimètres de long sur 12 de large, et les individus adultes, dont le plus petit n’a pas moins de 38 mulli- mètres de long sur 28 de large. Il est remarquable que le même hiatus existe dans les individus du Musée de Hambourg étudiés par LupwiG, qui mentionne deux grands individus de 43 millimètres de long, et un grand nombre de petits et moyens individus ayant de 3°°,5 à 13 millimètres de long. Or, ces petits individus sont déjà adultes, puisque deux d’entre eux, longs de 12°°,5 et de 10 millimètres, possédaient des jeunes en incubation sur la face ventrale. J'ai cru intéressant de signaler cet écart assez considérable, HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 59 écart qui pourrait faire penser à la possibilité de deux es- pèces. Néanmoins tous les autres caractères sont si semblables que je ne puis faire autrement que de ranger, comme mes de- vanciers, {ous ces individus sous le même nom. Les écailles dorsales des petits individus sont construites de la même façon que celles des grands ; mais elles sont beau- coup moins épaisses. La sole ventrale est soutenue par de petites plaques perforées presque planes, n'ayant en général que les quatre mailles primaires et dont le bord est simple- ment sinueux; elles portent, comme celles des grands indi- vidus, de petits tubercules. Psolus squamatus. var. segregatus nov. SYNONYME : Psolus squamatus Düben et Koren, var. (?) Théel (86), p. 89-90. Psolus antarcticus pars. Ludwig (98), p. 54 (en note). Mission du Cap Horn. — Station 41. — Baie Orange. — 7 individus. _ — Station 128. — New Year-Sound. — 79 individus. -— — Station 142. — Baie FKleuriais. — 1 individu. — — Station 177. — Entre l'ile Navarin et l'ile Hoste.— 23 ind. Tuéez (Challenger s Reports, 1886, p. 89) a décrit comme appartenant à une variété du Psolus squamatus Düben et Koren, plusieurs individus de grande taille provenant de la côte occidentale de la pointe sud de l'Amérique, au sujet desquels il ajoute: « S'ils ne sont pas identiques à la forme septentrionale, ils ne peuvent être considérés tout au plus que comme une variété. Ils paraissent réunir cette forme avec Psolus antarclicus. » LupwiG (98, p. 54 [en note|) croit qu’il faut au contraire rap- porter ces individus à Pso/us antarcticus. I considère comme très improbable qu'on retrouve l’espèce arctique dans ces régions méridionales, d'autant plus qu’on n'a mentionné aucun représentant de cette espèce dans toute l'étendue de côtes qui sépare ces deux habitats si éloignés. Les individus dont j'ai défini l’origine au début de cet article sont très manifestement identiques à ceux qui font l’objet du litige. Ils sont parfaitement distincts des Psolus antarcticus et ne leur sont reliés par aucun intermédiaire. Ws constituent 60 RÉMY PERRIER donc une seconde espèce antarctique bien caractérisée, et même cette seconde espèce est-elle notablement plus commune dans ces parages que le Psolus antarcticus. Le « Challenger » en a recueilli plusieurs spécimens en trois stations, et on a vu plus haut que la « Romanche » n’en avait pas rapporté moins de cent dix individus. La description générale concorde de tous points avec celle de Taéez. La couleur est — au moins pour l'animal dans l'alcool — d’un gris brun très foncé, sauf pour les individus du New- Year Sound, qui sont gris blanchâtre. Les dimensions atteignent fréquemment celles indiquées par Tuéez (de 50 à 60 millimètres). L'un des individus a même 67 millimètres de long et 35 de large; en tout cas, ceux qui dépassent 50 millimètres ne sont pas rares. Les individus du New-Year Sound sont notablement plus petits, et quelques-uns arrivent à n'avoir que 16 millimètres sur 10. Les écailles dorsales sont nettement imbriquées sur les côtés du corps, les plus externes recouvrant les internes. Celles des deux rangées médianes sont beaucoup plus irré- gulières, tant dans leur alignement que dans leur situation respective. Partout il existe, au-dessus des écailles, des tubercules cal- caires nombreux, inclus dans le derme, mais indépendants des écailles elles-mêmes ; ils s’en détachent spontanément quand on dissout les tissus mous dans la potasse ou les hypochlo- rites. Ces tubercules rendent la peau extrêmement rugueuse. Cette peau est d’ailleurs fort épaisse, et cette grande épaisseur, jointe à l'abondance des granules calcaires, rend parfois moins distinctes les limites de séparation des écailles, notamment chez les gros individus, où la peau est plus épaissie et les granules plus nombreux et plus gros. Les plaques périorales sont différenciées, mais leur groupe n’est pas nettement séparé des autres plaques tégumentaires, par une ligne franchement circulaire, comme chez les Psolus antarcticus. Elles sont elles-mêmes assez peu régulières et ce n'est qu'en schématisant légèrement que Théel a pu les décrire comme formant « cinq grandes écailles triangulaires, HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 61 alternant avec cinq (ou plus) écailles plus petites, étroites, en forme de dents qu’elles recouvrent partiellement ». La figure qu'il donne ([86|, pl. XV, fig. 1) est à cet égard plus exacte que là description du texte. Chez le jeune, la disposition est un peu plus régulière, et les cinq grosses plaques orales se détachent bien nettement; mais on voit aussi, alternant avec elles, les plaques allongées et étroites en forme de dents, dont nous venons de parler et qui ne sont pas visibles dans le Psolus antarcticus. De même encore, chez les jeunes, le groupe des plaques orales présente un contour extérieur bien plus régulièrement circulaire, mais sans l'être cependant à beaucoup près autant que dans l'espèce précédente. Les valves périanales n'ont aucune disposition régulière : elles sont petites, allongées, disposées en rayonnant sur plusieurs cercles, mais se recouvrant les unes les autres, de façon à ne laisser voir que leur extrémité sous la forme d’un tubercule arrondi. L'ensemble rappelle un peu l'aspect d’un bourgeon entr'ouvert. Le tégument de la face ventrale est épais, nullement trans- parent. Tout le bord de la sole est muni de pieds disposés sur plusieurs rangées : on trouve d’abord tout à fait sur la marge une rangée continue de pieds, très petits, toujours complè- tement rétractés, tout à fait semblables à ceux du Psolus antarcticus. THÉEL qui à figuré ces pieds très exactement dans cette dernière espèce, en faisant bien ressortir la différence de taille qui existe entre eux et les autres pieds, les dessine au contraire dans le Psolus squamalus comme semblables à ces derniers. Il n’en est rien : ils sont dans les deux espèces égale- ment différents et cette différence se retrouve dans les indi- vidus arctiques. En dedans de cette rangée marginale, Le bord de la sole porte d’autres pieds à ventouse large, bien développée, atteignant quelquefois jusqu’à 2 millimètres de diamètre, mais pouvant se rétracter au point de n'être plus visible. Ces pieds submar- ginaux sont plus nombreux que dans le Psolus antarcticus, et sont en général disposés sur deux ou trois, parfois même quatre rangs alterncs et assez irréguliers, 62 RÉMY PERRIER Les pieds latéraux n'arrivent ni en avant ni en arrière jus- qu’à la ligne médiane, où on trouve, à chaque extrémité du corps, un groupe de pieds faisant partie du radius impair, groupe qui est toujours isolé des véritables pieds latéraux. THéeL considère comme exceptionnel un individu qui porte des pieds sur l’ambulacre impair. En réalité, ce fait est très fréquent sur les individus nombreux que J'ai examinés. Il y a d'abord toujours, comme nous venons de le dire, en avant et en arrière, des pieds en groupe serré, complétant la rangée des pieds latéraux et formant un petit triangle, dont la pointe s’'avance plus ou moins loin sur l’ambulacre médian. Ils sont toujours plus nombreux et forment un groupe plus étendu en avant qu'en arrière. En outre, chez de nombreux individus, mais surtout chez les plus grands, il y a d’autres pieds dissé- minés sur toute la longueur du radius impair. Tantôt ils forment une rangée continue plus ou moins régulière, en zigzag, les pieds étant alternativement à droite et à gauche du radius; parfois sur une étendue plus ou moins grande, on distingue nettement deux rangs de pieds. Tantôt ils forment une rangée discontinue. Tantôt enfin ils sont sporadiquement placés ou même sont plus ou moins réduits. Il n'y a donc aucune règle à ce sujet, et c’est là une simple variation individuelle. Mais toujours les pieds du radius médian sont plus nombreux que dans le Psolus antarcticus. Les sclérites de la face ventrale sont beaucoup plus variés et beaucoup moins réguliers que dans le Psolus antarcticus. Ce sont des plaques perforées presque planes, présentant un nombre très variable de mailles, presque toutes de mêmes dimensions dans le même sclérite. Leur bord porte aussi des prolongements saillants qui se dilatent à leur extrémité et se rejoignent pour former de nouvelles mailles. Les deux faces de ces sclérites ventraux peuvent porter des tubercules, en beaucoup moins grand nombre que dans le Ps. antarcticus, mais plus proéminents : ils se présentent plutôt sous la forme d’épines, parfois bifurquées à leur extré- mité et quelquefois même s’unissant entre elles de façon à former l'indication d’un second réseau superficiel. Sur le bord de -la sole ventrale, les plaques deviennent HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 63 plus grandes, leurs perforations plus petites, leurs travées plus fortes au contraire et plus épaisses. Entre ces plaques se trouvent, sur quelques individus, d’autres sclérites constituées seulement par un corpuscule épais, faiblement ramifié, et ne formant jamais qu'un petit nombre de très petites mailles; par contre, la surface extérieure porte de longues pointes nor- males à la surface du tégument, plus grandes et plus ramifiées que les tubercules des plaques perforées ordinaires. Ces sclé- rites ne sont en réalité que des plaques incomplètes, et leur présence constitue un simple caractère individuel. Il importe d’ailleurs de dire que les sclérites de la sole ventrale sont assez variables d’un individu à un autre; cette variabilité se voit chez presque tous les Psolus, et il serait par conséquent téméraire de faire grand cas des sclérites ventraux pour la définition des espèces, qui, du reste, sont, dans ce genre, très difficiles à délimiter. La même variété règne pour l'abondance des sclérites : ils sont plus ou moins serrés suivant les in- dividus; mais rarement ils abondent au point de se toucher ou de former plusieurs couches; du moins ne l’ai-je constaté dans aucun des individus que J'ai examinés à ce point de vue. De la description qui précède, il résulte manifestement que les individus dont il est ici question ont une ressemblance frappante avec le Psolus squamatus des régions arctiques, et on s'explique que Taéez ait réuni sous le même nom ces deux formes. Dans ma note préliminaire (94°), j'ai hésité à me pronon- cer sur cette identification. Les remarques de LupwiG (voir plus haut) sur l'éloignement des aires géographiques des deux formes et sur l'absence de stations intermédiaires, s'imposent en effet à l'esprit. On sait cependant qu'il existe un certain nombre, restreint à la vérité, d'espèces qui sont indubitable- ment « bipolaires » et la question de la « bipolarité » est l'une des questions actuellement les plus controversées de la géographie zoologique. Le cas en présence duquel nous nous trouvons ici mérite donc toute notre attention, et c’est avec le plus grand soin que j'ai comparé les Psolus du Cap Horn avec les individus de Psolus squamatus que j'ai pu me procurer. Le Muséum d'Histoire naturelle en possède deux exem- plaires, déjà fort anciens, qui ont été examinés par SELENKA à 64 RÉMY PERRIER l’occasion de son mémoire de 1868. La ressemblance est mani- feste, et les différences sont d'ordre tout à fait secondaires. Le corps de ces deux individus est complètement blanc, peut- être par suite d'une décoloration due au séjour prolongé dans l'alcool, peut-être aussi parce qu'ils ont dû subir une prépa- ration spéciale, car leurs tentacules sont complètement épa- nouis, à la différence de ce qui se passe d'ordinaire pour les Psolus conservés ; les écailles y sont très apparentes, et beau- coup plus saillantes et distinctes que dans les Psolus antarc- tiques ; tout cela est sans importance. La seule différence un peu valable réside dans ce fait que les écailles périorales m'ont paru moins différenciées dans les Psolus squamatus ypiques que dans les individus antarctiques. À vrai dire, les deux indi- vidus qui mont servi de termes de comparaison ont, comme je l'ai dit, la couronne tentaculaire et le pharynx complète- ment dévaginés, ce qui rend un peu aléatoire la comparaison avec les individus antarctiques, qui tous ont ces parties ré- tractées. Mais la différence n’en est pas moins bien visible. En face des radius, chez les Psolus arctiques, se trouvent des plaques étroites et allongées, qui, sur le pharynx épa- noui, se disposent latéralement, de façon à sertir pour ainsi dire la base de ce pharynx; elles forment ainsi cinq dents qui dépassent nolablement le niveau des autres plaques. Ces plaques radiales étroites existent aussi chez les Psolus an- tarctiques, mais elles ne dépassent pas les plaques voisines; de plus, elles alternent assez régulièrement avec cinq larges plaques interradiales qui contrastent par leur grandeur et leur forme triangulaire avec les écailles communes du tégument; ces mêmes intervalles sont occupés dans les Pso/us squama- tus arctiques par des écailles en nombre variable qui ne se distinguent des autres écailles du tégument que par ce fait qu'elles se terminent en pointe vers l’orifice buccal; d’ail- leurs ce même mode de terminaison se fait sentir déjà sur les écailles un peu éloignées de la bouche, de sorte qu’il n'y à en somme pas de différenciation sensible pour. ces plaques in- terradiales du pourtour immédiat de la bouche. C'est là, en définitive, la seule différence qui mérite d’être retenue. Elle est, on le voit, assez faible et ne permettrait HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 6 même peut-être pas toujours, en raison de la variation indivi- duelle possible, de distinguer les deux formes. Elle ne prend une importance réelle qu'en raison de leur patrie très diffé- rente. Pour conclure, je me rattache entièrement à l'opinion de Take ; il n’est pas possible de séparer les deux formes. Les individus antarctiques ne constituent qu'une variété du Psolus squamalus. En fait on se trouve vraisemblablement en présence d’un cas de ségrégation typique ; ilest probable que les deux variétés représentent les descendants d’une même forme primitive, descendants aujourd'hui profondément séparés, — soit que ces descendants de cette forme primitive, répandue autrefois sur une aire de distribution très vaste, ne soient arrivés à se maintenir que dans les régions subpolaires, ayant disparu dans les régions intermédiaires, — soit que les représentants antarctiques dérivent d’une émigration venue des régions septentrionales.— Ainsi séparés, ils ont évolué en se modifiant légèrement, de facon à donner deux variétés distinctes. Je donnerai à la forme antarctique le nom de Psolus squamatus segreqalus. Du reste la question systématique est secondaire. Le fait de savoir si les deux formes sont deux variétés de la même espèce ou deux espèces voisinesest affaire de sentiment ou d’apprécia- tion personnelle. L'important c'est d’avoir constaté deux formes très voisines, se retrouvant aux deux pôles, et n'existant pas dans les régions intermédiaires. Nous sommes bien ici en pré- sence d'une forme bipolaire, qui est à compter dans la liste des espèces déjà connues comimne telles. C'est le seul cas de bipo- larité connu jusqu’à ce jour dans le groupe des Holothuries. [Trochostoma violaceum (Studer, 1876) Théel, 1886. LiTrÉRATURE. — LupwiG (98), p. 64. [Donne toute la littérature antérieure.! Un individu du Musée de Vienne, provenant de l'ile Kerguelen, long de 8 centimètres, avec en plus un appendice eaudal très court, d'environ { centimètre. D'après LupwiG, le rapport de ANN. SC. NAT. ZOOL. Ne) 66 RÉMY PERRIER la longueur de la queue à celle du corps proprement dit est 1: 4,6; mais il a trouvé des individus où ce rapport devenait 1 : 7,2. La queue est donc ici encore plus petite (1 : 8). THéeL a remarqué que les tables à disque réticulé sont très rares et peuvent passer inaperçues. J’ai examiné en effet un lambeau de tégument de 5 millimètres sur 9 sans en rencontrer, et n’y ai observé que des corpuseules concentriques rouge-brique et des sclérites en navette, à partie centrale perforée, quelquefois à trois prolongements, semblables à ceux qu'a figurés THÉEL|. Caudina rugosa, Rémy Perrier, 1904. (PISCINES He 41049) R. PERRIER, Bull. Mus. d'Hist. Nat., 190%. €. X, p. 16. Mission du Cap Horn, 1883. — St. n° 111. — Ile Picton. — 1 individu. Cette espèce nouvelle est voisine du C. coriacea, qu’elle rappelle notamment par l'aspect extérieur de son tégument, épais, opaque, fortement rugueux, et d'un gris blanchâtre. Le corps, beaucoup plus court que dans l'espèce de la Nouvelle-Zélande, est ovoïde, très fortement renflé, et se ter- mine en arrière par un appendice caudal, comme chez tous les Caudina, mais cet appendice est ici relativement beaucoup plus réduit que chez les C. coriacea (1). En effet, la longueur totale est de 72 millimètres, dont 43 pour le tronc et 29 seule- ment pour la queue. Le tégument présente le même aspeet sur le tronc et sur la queue ; partout il est fortement ridé et plissé. et présente une épaisseur notable, sauf en certains points tou- tefois, où, par suite d'une extension forcée, la peau est deve- nue assez mince. Le mauvais état de la couronne tentaculaire ne me permet pas d’être tout à fait affirmatif sur le nombre des tentacules. Il ma semblé en voir 15, nombre le plus fréquent chez les Caudina caudata, mais je ne puis pas l’affirmer. Cette lacune n’a d’ailleurs pas une grande importance, puisque dans beau- (1) On verra plus loin cependant qu'il existe dans celte espèce une variété brevicauda, où l’appendice caudal est tout à fait réduit. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 67 coup d'espèces le nombre des tentacules n’est pas absolument constant et peut varier de 12 à 15. Par contre, la forme des tentacules m'a paru spéciale : c’est une tige courte, se terminant par un disque dont la surface porte trois ou quatre plis, séparés par des sillons profonds et formant comme des feuillets verticaux juxtaposés. Ces feuillets, de consistance assez faible, représentent peut-être Les digi- lations qu’on voit dans la plupart des autres espèces, mais qu'on ne retrouve pas ici, du moins sous la forme habituelle. Je n'ai pas pu constater la présence de papilles anales, mais comme l'extrémité postérieure est nettement invaginée à l'intérieur par une contraction accidentelle de l'animal, je ne puis pas dire si elles manquent vraiment. Les corpuscules calcaires (pl. IV, fig. 11 et 12), fort nom- breux, sont tout à fait semblables à ceux qu’a figurés Maren- zeller (84) pour Le Caudina Ransonnetii; is portent sur leur bord de fortes dents très saillantes, plus développées encore que dans le C. Ransonnetü ; mais pour le reste, c’est la même disposition. L'anneau calcaire (pl. IV, fig. 10) est, suivant la règle ordi- naire, formé de dix pièces, soudées ensemble, les radiales (/?) présentant deux prolongements postérieurs disposés en fourche, et séparés par une échancrure profonde. Ces prolon- gements sont larges, et chacun d’eux se termine par une petite pièce, qui est fortement recourbée vers l’intérieur, c’est-à-dire vers le tube digestif, qui occupe le centre de l'anneau calcaire. La longueur des interradiales est de 3 millimètres, celle des radiales avec leurs prolongements est de 7 millimètres. Tandis que chaque interradiale (7) porte une forte dent saillante sur le milieu de son bord antérieur, les radiales présentent chacune en avant deux prolongements : l’un petit en forme de dent aiguë, l’autre large (#2), arrondi sur son bord antérieur et creusé d’une fossette pour recevoir les deux moi- tiés du muscle radial correspondant. En réalité, cette apophyse myophore est formée par la soudure de deux dents; il faut considérer réellement chaque radiale comme portant sur son bord antérieur trois dents : une dent médiane et deux dents latérales ; les deux dents laté- rales se recourbent vers le milieu de la pièce, tandis que la 68 : RÉMY PERRIER dent médiane s'incline, elle aussi, vers l’une des dents laté- rales, tantôt vers celle de droite, tantôt vers celle de gauche, et se fusionne partiellement avec elle pour former le large prolon- sement creusé en cuiller destiné à recevoir le muscle radial. Vox MARENZELLER (81, p.127), à propos du Caudina Ranson- neli, insiste sur ce fait que, dans cette espèce, l’apophyse mus- culaire est à droite de la dent sur la pièce radiale vue de l'intérieur, tandis que c’est l'inverse dans le Caudina arenata. J'ai constaté que dans le Caudina rugosa, 11 n°v à pas de règle à cet égard, et que, comme le montre la figure, la disposition peut être inverse dans deux radius voisins. Il est probable que la même variation doit se produire dans les autres espèces. Les muscles radiaur sont divisés chacun en deux rubans : bien séparés, et je n'ai pas vu trace de muscles rétracteurs du pharvynx. Les vésicules tentaculaires sont très longues, elles atteignent jusqu’à 13 millimètres. Ce sont de longs tubes grêles, presque fililformes, longuement atténués en pointe, et passant entre les dents antérieures des pièces de l’anneau calcaire. Un seul canal du sable est fixé au mésentère dorsal et se termine par une petite plaque madréporique libre. Il y a une seule vésicule de Poli, un peu plus forte, mais notablement plus courte que les. vésicules tentaculaires, auxquelles elle ressemble par sa forme ; elle ne dépasse pas 7 millimètres de long. Les /ollicules génitaux sont divisés en deux buissons, insérés de part et d'autre du mésentère dorsal; ils sont nombreux et seulement une ou deux fois dichotomisés. Les deux organrs arborescents sont très développés l’un et l’autre, le gauche en relation avec le réseau admirable para- intestinal; ils portent de nombreuses mais courtes ramifica- tions arborescentes. En résumé, cette espèce se rapproche du Caudina coriacea et du C. Ransonnetu; elle diffère de ce dernier, dont elle a les sclérites dentés, par son tégument épais et rugueux, la forme de ses tentacules et la disposition de son anneau cal- caire, où les prolongements postérieurs des pièces radiales sont appendiculés à leur extrémité. Elle est beaucoup plus voisine du Caudina coriacea, dont elle n’est peut-être qu'une HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 69 variété. Quoi qu'il en soit, on ne connaissait actuellement aucun Caudina appartenant à cette région. Seul le Mo/padia chilensis Y représentait les Mocrannupx. L'existence de cette espèce et de la suivante présente donc un certain intérêt. Caudina pigmentosa Rémy Perrier, 1904. (PI. IV, fig. 1-9 et fig. J et K dans le texte.) Rémy Perrier, Bull. Mus. d'Hist. Nat., t. X, 1904, p. 16. Un individu provenant de la Terre de Feu, et recueilli par MM. Willems et Rousson en 1891, est Le Lype de cette très intéressante espèce nouvelle. La présence d’un appendice caudal bien différencié rattache cette espèce au genre Caudina, mais elle présente, avec les Molpadia déjà connues, des ressemblances curieuses, qui res- serrent singulièrement les rapports des deux genres, et sur lesquelles nous insisterons plus loin. Le corps (pl. IV, fig. 1) a une longueur totale de 125 milli- mètres et se divise en deux régions : une région antérieure allongée, subeylindrique, avant à peu près 70 millimètres de long et 23 millimètres de diamètre dans sa portion moyenne, et une région caudale très forte, cylindrique, longue de 55 millimètres et de 6 millimètres de diamètre. Cette queue, qui, sur l’exemplaire étudié, est fortement enroulée, est assez nettement séparée du tronc, sans qu'il y ait cependant passage brusque de l’un à l’autre. La peau est couleur lie de vin, un peu grisâtre; elle est rugueuse, ridée transversalement, laissant voir très distinete- ment la place des vaisseaux radiaux qui se continuent Jus- qu'à l'anus et Le long desquels court une ligne plus foncée. Il existe quinze tentacules (?) présentant quatre digitations : deux grandes, terminales, et deux plus petites, latérales, pla- cées extérieurement par rapport à la tige principale. Autour de l'anus, cinq groupes de petites papilles. Les sc/érites, inclus en assez grand nombre et sur plusieurs épaisseurs dans le tégument, présentent quelque intérêt. Ils dérivent tous, à ce qu’il semble, du même type de structure. 10 RÉMY PERRIER Le plus grand nombre se présentent sous la forme de disques (pl. IV, fig. 2 à 5) à contour subcirculaire, le plus souvent plus ou moins irrégulier, et présentant toujours sur leur bord des saillies plus ou moins développées ; ces saillies ont la forme tantôt de dents aiguës, tantôt de pointes sail- lantes mais émoussées ; tantôt enfin elles se projettent à peine à l'extérieur, de façon à laisser au contour une forme polygonale. Le disque lui-même présente de quatre à huit perforations placées excentriquement. Mais de plus, la partie centrale du disque montre, sur sa face externe, des saillies en général fort irrégulières, qui paraissent constituées essentiellement par trois ou quatre travées convergeant au centre du selérite, très peu élevées au-dessus du disque lui-même; ces travées pa- raissent avoir oblitéré une perforation centrale, dont on voit parfois des restes plus ou moins nets. Enfin sur les deux faces du selérite se trouvent en général de petits tubercules saillants, dont les principaux sont placés en face des dents marginales. Ainsi constitués, ces sclérites ne sont pas sans analogie avec ceux des Molpadia et particulièrement avec les sclérites si irréguliers que LamPerT à dessinés chez le Molpadia australs. En examinant attentivement les préparations, on arrive à se convaincre — et c’est peut-être aussi le cas pour les sclérites de Molpadia, — que ces corpuscules calcaires dérivent par dé- formation d’une forme semblable à celle que présentent les cor- puscules calcaires des Caudina Ransonnet, coriacea et rugosa. Épars entre les autres sclérites, mais assez rares, s’en trouvent en effet quelques-uns qui ont encore cette forme originelle (pl. IV, fig. 6). Ils n’ont que 49,5 & de diamètre, et ont un contour nettement étoilé; ils laissent parfaitement reconnaître le carré ajouré que porte la face supérieure du scelérite, et la croix qui en forme la partie inférieure. Les autres sclérites, infiniment plus nombreux, dérivent de ceux-ci : 1° par un épaississement exagéré des travées calcaires, et en particulier de l'anneau marginal, qui fait que le sclérite augmente de diamètre et atteint 69 à 85 w ; 2° par le fait que la croix pri- maire s’épaissit et se déforme, au point de devenir mécon- naissable. Ce sont les restes des travées qui formaient cette HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 7h croix qui constituent les processus irréguliers saillants que nous avons décrits et qui masquent la perforation centrale. Dans certains selérites (fig. 4), les quatre travées sont encore visibles; dans d’autres au contraire (pl. IV, fig. 5) elles ré- gressent plus ou moins et, dans certains cas même, cessent d'être visibles ; la face supérieure du sclérite ne présente plus d’autres saillies que les tubercules arrondis. Mais ce n'est pas tout : Ces selérites sont enfermés dans une sorte de capsule transparente épaisse, qui suit tous Îles accidents de la surface du selérite et où s'aperçoit très netle- ment une structure concentrique. Cette capsule existe aussi bien sur les sclérites à structure primitive que sur les autres: on la retrouve même autour de quelques selérites très pro- fondément dégénérés et se réduisant à quelques trabécules irrégulièrement réticulés. Cette capsule est colorée par une teinte rougeâtre plus ou moins foncée, qui donne au tégument sa coloration caractéris- tique ; sans doute le derme présente lui aussi une teinte rosée, mais les capsules des selérites sont toujours plus fortement colorées. Elles Le sont d’ailleurs inégalement, et d'autant plus que le sclérite qu’elles entourent est placé plus profondément. Dans les sclérites superficiels, la coloration est à peine sensible et la capsule peut facilement passer inaperçue; au contraire, quelques sclérites occupant la couche la plus profonde du derme paraissent presque noirs ou du moins d’un brun tres foncé. Le degré de développement de la capsule varie aussiavee la forme du sclérite; à peine indiquée autour des selérites étoilés à structure primitive, elle devient d'autant plus dis- ünete, d'autant plus colorée et d’autant mieux organisée que le selérite est lui-même plus déformé. Cette observation présente un grand intérêt, si on considère que, dans cette même famille des Mocrannpx, les deux genres Trochostoma et Ankyroderma sont caractérisés par la présence de corpuscules rouges vineux, formés de couches concen- triques. Plusieurs auteurs, LunwiG (91; et (94), Tukez (86, p. 42) et Lamperr (89, ont montré que ces corpuscules se formaient autour d’autres sclérites, qu'ils englobaient com- x plètement et qui se résorbaient peu à peu à leur intérieur 19 RÉMY PERRIER (Voy. Lupwic (94, pl. XVI, fig. 21). Le Caudina piymentosa nous montre un passage au cas précédent et rattache ces divers genres plus étroitement entre eux. L'anneau calcaire (fig. J) est formé de dix pièces; les radiales (lè) se terminent en arrière, conformément à la règle générale pour les MoLpaDDÆ, par un prolongement fourchu; mais ici les prolongements sont beaucoup plus longs et beaucoup plus grêles que dans les autres espèces du genre, et, encore à ce point de vue, notre espèce se rapproche d’une façon curieuse des Molpadia. La longueur des radiales, y compris leur prolonge- ment, atteint 19 millimètres; celle des interradiales est presque moité moin- dre. Toutes ces pièces sont complète- ment soudées l’une à l’autre. Chaque radiale porte à sa partie antérieure un processus court et élargi, qui reçoit l'insertion du muscle radial corres- Fig. J. — Caudina pigmen Pondant. En outre, le bord antérieur ee de l'anneau calcaire porte d’autres dents ques interradiales. courtes et pointues, correspondant à peu près aux interradius; ces dents sont en tout au nombre de dix, soit deux pour chaque interradius. La comparaison avec les autres espèces nous montre que, de ces deux dents, une seule en réalité appartient à la pièce interradiale correspondante, l’autre dent dépendant de la radiale voisine. Ici, la soudure complète des pièces cal- caires ne laissant persister aucune trace visible de la suture, il est difficile de définir les relations exactes des dents avec les pièces; mais la comparaison avec les espèces voisines (notamment avec le C. rugosa), et en même temps la disposi- tion un peu dissymétrique des dents interradiales par rapport aux pièces, indique que ce sont bien les mêmes homologies. Les muscles sont très développés, à reflets nacrés, et cha- cun d'eux est, suivant la règle, divisé en deux rubans parallè- les, courant de part et d'autre du vaisseau correspondant. La disposition qu'ils présentent à la partie antérieure pour venir s’altacher à l'anneau calcaire, mérite d'ètre signalée. Arrivé à RP RAT HOLOTHURIES ANTARCTIQUES JS: peu près au niveau de l'anneau ambulacraire, chaque demi- muscle, qui était resté jusque-là aplati en un large ruban appliqué contre la paroi, s’amincit brusquement et se continue par une lame membraneuse, perpendiculaire à la paroi du corps, qui s'étend de cette paroi jusqu'à l’anneau calcaire. Cette lame, en forme de faux, s'attache par un de ses bords au tégument, tandis que son autre bord est libre dans la cavité générale. Les dix lames sont ainsi disposées tout autour du pharynx, à la facon des septa des Coralliaires autour du tube œsophagien. Les bords extrêmes de chaque septum membraneux, tant le bord libre que celui qui est appliqué contre la paroi, sont plus épais que le champ même de la mem- brane. C'est sur ces bords que se sont localisées les fibres mus- culaires. L'’épaississement du bord libre constitue une sorte de musele rétracteur du pharynx, tandis que celui du bord extérieur paraît être la continuation du muscle lui-même ; mais il n’y à pas de muscles rétracteurs individualisés comme cela à lieu chez les Cucumaride. Il est à noter que c’est sans doute une disposition semblable que Semper (68) a observée sur le Molpadia australis, lorsqu'il décritles muscles rétracteurs comme reliés à la paroï du corps par un septum conjonctif. Par contre, J. MüLLer (50), dans son Molpadia chilensis, et Scuirer (04), chez le Mo/padia demissa, dé- crivent des muscles rétracteurs nettement individualisés, et ce dernier auteur est particulièrement affirmatif. Il n’en résulte pas moins que ce caractère, invoqué comme un caractère distinctif des deux genres Caudina et Mo/padia, n’est nullement formel, puisqu'on retrouve une disposition identique dans des espèces appartenant à l’un et à l’autre. Comme d'autre part le Caudina pigmentosa réunit des selérites semblables à ceux qu’on trouve dans les deux genres, il ne reste plus comme caractère différentiel que la présence d’un appendice caudal dans le genre Caudina, et son absence dans les HMo/padia. L'appareil génital, très développé, est formé, comme dans les autres espèces, de deux buissons de follicules très fournis, mais ces follicules sont simples, ou au plus deux ou trois fois dichotomisés (fig. K); par contre, ils peuvent atteindre une grande fongueur ; j'en ai mesuré dépassant 11 centimètres, 714 RÉMY PERRIER c’est-à-dire ayant presque deux fois la longueur du tronc où ils sont logés. Un canal du sable, complètement soudé au mésentère dorsal ; une vésicule de Poli, d'un gris ardoisé foncé, longue de 10 millimètres. Il existe deux organes arborescents principaux très dévelop- pés : le gauche en connexion étroite avec le réseau admirable de la branche récurrente de l'intestin, le droit à peu près libre; tous deux s’éten- dent jusqu’à l'extrémité antérieure et vont se terminer tout contre l'anneau calcaire. Un troisième organe arborescent, tout petit, long seulement de 9 millimètres, prend naissance à droite du tronc basi- laire commun aux deux premiers; ce tronc basilaire s’insère sur le rectum à la naissance de la région caudale. Ces pou- mons ont tous la même structure : leur tronc axial, très large, porte sur toute sa longueur de petites branches ramifiées, dont les rameaux se terminent par des ampoules irrégulièrement bossuées. Il existe deux organes de Cuvier appar- ©œ Fio. K. — Caudina pig- 1 ; “ J AT Æ mentosa. — Un des tu- tenant au type « En STappe », décrit pat bes génitaux :0, orifice J. MüLLer (60), et qui n’était connu Jus- RTS ici que chezle Molpadia chilensis. Je me propose de faire plus tard une étude plus complète de cet organe peu connu; je me contenterai de signaler les points qui peuvent présenter quelque intérêt pour la définition de l'espèce. L'organe de Cuvier gauche est tout à fait rudimentaire : il se réduit à quelques sphérules pédiculées émanant d’un filament axial. Autant que J'ai pu en juger sur l'individu unique que j'ai eu à ma disposition, ce filament axial ne se termine pas librement ; il se continue par un prolongement épais et d'apparence musculaire (?) jusqu'à la paroi du corps, où il va s'attacher à l’interradius dorsal gauche. L'autre organe de Cuvier est plus développé ; il atteint 6 millimètres de long et se présente sous la forme d'un HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 19 panache allongé ; son extrémité flotte librement dans la cavité générale. L'organe est constitué par un grand nombre de petites masses sphéroïdales, mais dont la forme est beau- coup moins régulière que ne l'indique la figure de J. MüLLer. Ces petits acini s'insèrent par un petit tractus transparent et très grêle sur l’axe médian du panache. Les acini sont complè- tement libres, et flottent librement sur les deux tiers inférieurs de l'organe, où ils présentent une couleur fauve ; dans le tiers supérieur ils sont au contraire agglutinés et d’un brun foncé. La description qui précède montre le grand intérêt que présente le Caudina pigmentosa. Outre qu’elle constitue une seconde espèce magellanienne du genre Cawdina, genre qui n'avait pas Jusqu'ici été signalé dans cette région, cette espèce montre les rapports les plus étroits avec les HMo/padia et en particulier avec le Mo/padia australis. Mème forme de sclérites, ou à peu près; même disposition des muscles; l'organe de Cuvier, en grappe, rappelle aussi celui des Ho/- padia. Mais la présence d’un appendice caudal bien carac- térisé en fait à coup sûr une Caudina, et on retrouve d’ailleurs, parmi les selérites, et comme forme fondamentale, des cor- puscules tout à fait semblables à ceux qu’on rencontre dans d'autres Caudina de l'hémisphère austral. La position géné- rique de notre espèce est donc nettement fixée, mais on voit qu'elle resserre singulièrement les liens qui unissent les deux genres, jusqu'ici profondément séparés. D'un autre côté, l’'enrobement des selérites dans une capsule colorée,qui, sansdoute, sesclérifie secondairement, annonce les sclérites rouge-brique des 7rochostoma etdes Ankyroderma ; no- tre espèce est ainsi une sorte de trait d'union et de forme de pas- sage entre les genres les plus divers de la famille des Ho/padia. J'incline à penser qu'elle représente une forme terminale du groupe des Caudina, forme voisine d’une part de la souche commune qui a donné naissance aux Molpadia, et d'autre part apparentée à la forme ancestrale d’où sont dérivés les 7rocho- stoma et les Ankyroderma. Les Molpadia d’une part, les Tro- chostoma et Ankyroderma de l’autre, apparaissent ainsi comme des formes plus récentes et plus évoluées que les Caudina. 76 RÉMY PERRIER Trochodota purpurea (Lesson, 1830) Ludwig, 1898. SYNONYMIE : 1830. Chiridota purpurea. Lessox (30), p. 155. 1876. Sigmodotu purpurea. SrupEr (76), p. 454. 1886. Chirodota australiana. Tu£er (86), p. 161. 1889. Chirodota Studeri. Lampertr (89), p. 849. LiTrÉRATURE : Lupwi6 (98), p. 83. [Donne toute la littérature antérieure.] M. Lebrun, 1883. — Punta-Arenas. — 7 individus entiers ou fragmentaires. Tous sont de couleur grise, avec le corps mince et allongé. La longueur atteint au maximum 25 millimètres, le diamètre transversal ne dépassant pas 3 millimètres. Il ÿ a toujours 10 tentacules, portant latéralement trois ou quatre branches digitiformes. Les sclérites calcaires concordent avec les données de Lam- PERT (89) et de Lunwia (98). Il en existe, comme on sait, deux espèces : des roues à six rayons et des bdtonnets recourbés en | Les roues ont été décrites avec grand détail par LampErT et je n’y reviendrai point. Les dimensions que j'ai mesurées varient de 109 à 141 v de diamètre, elles restent par conséquent un peu au-dessous de ce qu'indiquent Lampert (154 ») et surtout LupwiG (165-182 ). Leur distribution présente des particu- larités qui n’ont pas été signalées : elles sont exfrémement rares sur le trivium et se localisent en très grande partie sur les trois interambulacres dorsaux, où elles sont un peu confu- sément alignées, suivant deux rangées sur chaque interam- bulacre. Une localisation semblable a été signalée par Dexpy (97) et par LupwiG (98) pour Trochodota dunedinensis Parker, et ce dernier auteur la considère comme un caractère différentiel de cette dernière espèce. L'observation ci-dessus montre que cette localisation ne lui est pas exclusive, et qu'elle se retrouve chez Trochodota purpurea, au moins chez certains exemplaires; elle ne peut par conséquent pas être considérée une comme diffé- rence spécifique. Les bâtonnets crochus sont enroulés en spirale par l’une de leurs extrémités, recourbés en crochet par l’autre, le plan de la spirale étant à peu près à 90° du plan formé par le HOLOTHURIES ANTARCTIQUES ph crochet. Je dis à peu près, comme Lamrerr, parce qu'il y a, contrairement à ce que dit Lupwic, quelque irrégularité à cet égard. De même, la spirale ne se termine pas, comme le décril LubwiG, par deux pointes, mais bien par une pointe mousse, un peu déjetée en dehors. LüupwiG est de même beaucoup trop rigoureux quand il déclare que ces bâtonnels sont toujours disposés transversalement par rapport à l’axe du corps. Un grand nombre présente bien en effet cette direction; mais beaucoup sont orientés autrement, et il y a des plages où les bâtonnets ne présentent dans leur orientation aucun ordre. Les tentacules sont dépourvus totalement de spicules calcaires. Chiridota contorta Ludwig, 1874. SYNONYMIE : 1876. Sigmodota purpurea. SruvEr (76), p. #54. 1886. Chirodota Studerii. TukeL (86), p. 33. 1886. Chirodota contorta. TureL (86), p. 16 et 33. 1889. Chirodota contorta. Lamperr (89), p. 851 et 853. 1901. Chiridota Studeri. HEérouarD (04), p. XLVI. LirrératTurE : LunwiG (98, p. 73). [Donne toute la littérature antérieure.] HérouarD (04, p. XLVI) sous Le nom de CA. Studeri. Mission du Cap Horn, 1883. — Station 168, au sud du canal de Washington. — À individu La longueur est de 30 centimètres; la couleur, dans l'alcool, d'un gris rosé. Les douze tentacules pennés sont épanouis et faciles à voir. Toute l’organisation concorde avec les données déjà connues par les travaux de LamPEerT, de THÉEL et de LupwiG. Les corpuscules calcaires comprennent : 1° des roues, réunies en grand nombre dans des papilles spéciales (papilles rotigères), où elles sont exclusivement localisées : 2° des bälonnets dont une extrémité est enroulée en spirale, et l’autre recourbée en crochet. Comme lindiquent LupwiG et LAMPERT, contrairement à OÜsrerGrEN, le plan du crochet n’est pas tou- jours à 90° du plan de l'extrémité spiralée; 11 y a de nombreux bâtonnets où ces deux plans sont loin d'être perpendiculaires. Cette extrémité enroulée est quelquefoissimplementrecourbée ; elle se termine par une ou deux dents très petites, si petites qu’elles sont à peine sensibles et ne font que dilater un peu cette extrémité qui paraît alors comme tronquée. 718 RÉMY PERRIER L'organisation intérieure étant bien connue par le travail de LupwiG, je n'ai pas ouvert l'individu unique que j'avais à ma disposition, et qui d’ailleurs était en trop mauvais état pour me fournir d’utiles indications. Ludwig (98, p. 68-70) a très judicieusement démêlé la syno- nymie fort embrouillée de cette espèce et des autres Synaptidés antarctiques. Je renvoie à son mémoire pour ce qui à trait à cette question. Je rappellerai simplement que cette espèce avait été étudiée en 1876 par Sruper, parmi les individus rapportés par la « Gazelle » et qu'il avait cru y reconnaître le Chiridota purpurea, la première Synaptidée australe connue, décrite en 1830 par Lessox, d’après des individus trouvés aux îles Falkland. En 1886, TnéeL trouve, dans les Holothuries du «Challenger, » des individus provenant aussi des Falkland et différant de l’espèce de Studer. En raison de l'identité d’origine, 1l estime à son tour que ce sont ces individus nou- veaux qui appartiennent à l'espèce de Lesson: it leur restitue le nom de Chiridota purpurea, et appelle l'espèce de Studer Chiridota Studeri. Lupwic à montré qu'il se trompait à son tour; car son espèce, aussi bien que celle de Studer, a douze tentacules tandis que celle de Lesson n’en à que dix. Lesson aurait pu mal compter les tentacules et c'est ce qu'avaient peusé Studer et Théel. Mais Ludwig à retrouvé une espèce à dix tentacules, qui habite aussi les Falkland ; c’est à cette espèce, dont j'ai pu étudier, moi aussi, plusieurs exemplaires (Voir plus haut), que l’on doit réserver le nom de Lesson, CHi- ridota (aujourd'hui Trochodota) purpurea. L'espèce à laquelle Théel avait donné ce nom est en réalité le Ciridota Pisanu. Quant à celle de Studer, elle appartient à l'espèce décrite par Ludwig en 1874, Chiridola contorta. C’est aussi à cette espèce qu'il faut très certainement ratta- cher les individus de la « Belgica » appelés par Hérouard Chiridota Studeri Théel, puisqu'ils ont onze |?| ou douze tenta- cules, et des sigmas [les bâtonnets crochus à manche spiralé|. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 13 Chiridota Pisanii Ludwig, 1874. SYNONYMIE : 1886. Tuéec. Chiridota purpurea (86), p. 15 et 35. LirréRatTuRE : Ludwig (98, p. 71). Donne toute la littérature antérieure. Mission du Cap Horn. — Station n° 13. — Baie Orange, à marée basse, 29 septembre 1882. — 8 individus. M. Lebrun (1883). — Punta-Arenas. — Plusieurs individus. Les huit individus de la Baie Orange sont colorés en violet lie de vin plus ou moins foncé. Le mieux conservé est à l'état de demi-extension ; le corps est dilaté dans le sens trans- versal, mais notablement raccourci par la contraction, comme en témoignent les plis transversaux, nombreux surtout dans la région moyenne du corps. Il à 45 millimètres de long et 15 millimètres de largeur moyenne. Les autres sont beaucoup plus allongés et fortement contractés transver- salement. Les individus de Punta-Arenas ont un aspect bien différent des précédents : leur corps, tout à fait décoloré et se présen- tant avec une teinte gris Jaunâtre, est plus ou moins contracté ; dans certains, 1l est ovoïde ; dans d’autres, il est allongé et translucide, rappelant nos Synaptes indigènes. Les dimensions de ces individus sont très différentes, variant de 9 millimètres à 5 millimètres. Ces variations ont déjà été signalées par Ludwig et par Théel. Je n’ai rien à ajouter à la description de LunwiG; les variations individuelles qu'il à signalées relativement à la forme des roues calcaires du tégument, à la présence ou à l'absence de corpuscules bacilliformes dans les muscles, se retrouvent sur les individus assez nombreux que j'ai pu exa- miner. {(Chiridota Marenzelleri Rémy Perrier, 1904. (PL. IV, fig. 13-22.) Rémy Perrier, Bull. Mus. d'Hist. Nat., t. X, 1904, p. 370. Je dédie au Professeur von MarenzELLER cette nouvelle espèce, très intéressante, du genre Chirodota. C'est lui qui a bien voulu me communiquer les deux spécimens du Muséum 80 RÉMY PERRIER de Vienne, sur lesquels elle est fondée. Je le prie d'accepter cet hommage de gratitude et de haute estime pour ses beaux travaux sur le groupe des Holothuries. Ces deux individus viennent du détroit de Magellan (sans autre indication de localité). Le corps (pl. IV, fig. 13) est cylindrique, gros etcourt. L'un des spécimens a 26 millimètres de long et 10 millimètres de diamètre ; l'autre à 33 millimètres de long (non compris les tentacules) et 11 millimètres de large en son milieu; l'extrémité antérieure est presque tronquée, l'extrémité postérieure est légèrement atténuée et assez brus- quement terminée. Le tégument, assez épais, nullement transparent, est forte- ment marqué de plis transversaux, qui s'alténuent et s’effacent à demi au niveau des radius. La couleur, d'un blanc jaunâtre en dessous, est d’un rouge vineux sur la face dorsale ; cette teinte est particulièrement accusée sur l'interambulacre dorsal et notamment dans la région moyenne du corps. Elle s’estompe par degrés en avant, en arrière et aussi sur les côtés. La teinte rouge vineux, qui s'étend uniformément sur les régions colorées du tégument, s’'accentue par la présence de lignes plus fortement colorées, dessinant une sorte de craquelure assezrégulière (pl. IV, fig. 14), qui cesse d'être visible sur les régions incolores. Les papilles rotigères caractéristiques du genre Chiridota sont très peu nombreuses et localisées d’une facon très particulière : on les rencontre exclusivement sur les deux interambulacres latéro-dorsaux. dans chacun desquels elles se disposent sui- vant une ligne longitudinale à peu près régulière. Sur chaque ligne, le nombre de ces papilles est très restreint; sur le grand individu, qui est très bien conservé, on en compte neuf sur le côté droit, et six sur le côté gauche ; leur disposition est presque symétrique d’un côté à l’autre du corps. En effet, à chaque papille de gauche correspond, sur le côté droit, une papille placée au même niveau; seulement la première et la qua- trième sont dédoublées sur ce côté, et remplacées chacune par deux petites papilles juxtaposées. Il y a ainsi cinq papilles se succédant régulièrement sur le côté gauche, dans la moitié _antérieure du corps ; le côté droit montre aussi cinq papilles MASSON ET C"', ÉDITEURS LIBRAIRES DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE — 120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, PARIS (VI®), VIENT _DE_PARAITRE LA MONTAGNE PE et ses Eruptions PAR A. LACROIX Membre de l'Institut, professeur au Muséum d'Histoire naturelle Chef de la Mission scientifique de la Martinique. Ouvrage publié par l’Académie des Sciences, sous les auspices des Ministères de l’Instruction publique et des Colonies. Un volume grand in-# de xxn-66% pages avec 238 figures dans le texte et 31 planches hors texte, en héliogravure et photocollographie................... 60 francs. L'ouvrage est divisé en trois parties. La première, et la plus importante, traite de toutes les questions qui se rattachent à la Physique du globe. L'histoire des éruptions volcaniques antérieurement constatées dans les Antilles sert d'introduction à l'étude des éruptions récentes de la Martinique et de Saint-Vincent. Deux phénomènes essentiels ont caractérisé celle de la Montagne Pelée, l'accumulation d'une masse énorme de lave andésitique et la production des nuées ardentes. Pour la première fois, il à été donné à des géologues d'assister à toutes les phases de l'édification de ce genre de montagne volcanique si fréquent cependant dans les volcans éteints, et que l’on appelle un dôme. Son histoire est faite jour par jour par l’auteur; ses principales étapes sont illustrées par de nombreuses figures (croquis et photographies) qui montrent en particulier les incessantes vicissitudes de l'aiguille qui en couronnait le faite. Les nuées ardentes, qui ont été l'agent destructeur des éruptions, constituent un phéno- mène jusqu'alors inconnu des géologues. Les planches donnent une idée saisissante de la grandeur de cette terrifiante manifestation volcanique. M. A. Lacroix a pu fixer par la photographie plusieurs nuées en marche, masse énorme de gaz, de vapeur et de matériaux solides à haute température, constituant un mur mouvant qui atteint rapidement plusieurs milliers de mètres de hauteur, en descendant les pentes de la montagne et en s’avançant à la surface de la mer avec une vitesse qui, dans les grandes éruptions, était de beaucoup supérieure à 50 mètres à la seconde. L'étude de ces nuées a permis de reconstituer ce qui s’est passé lors des grands paroxysmes et en particulier le sombre drame du 8 mai. Les phénomènes secondaires, nombreux et variés, enfin les phénomènes électriques, magnétiques, météorologiques consécutifs sont successivement passés en revue dans autant de chapitres où abondent les illustrations. La seconde partie est consacrée à l’étude détaillée des produits rejetés par le volcan. Enfin, la dernière partie est consacrée à un sujet d’un tout autre ordre : Saint-Pierre n'a pas été seulement renversée, elle a été en outre incendiée par le souffle brûlant de la nuée du 8 mai. Les matériaux de tout genre recueillis dans les ruines ont fourni des documents scientifiques d'un puissant intérêt à de nombreux égards. en ee de TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER Holothuries antarctiques du Museum d'histoire naturelle de Paris, par RÉMY PERRIER. CoreeiL. — Imprimerie En. CréTé. Qu S0$S.u 19° ANNÉE. — IX° SÉRIE PRIS INN2S 6. ANNALES DES SCIENCES NATURELLES ZOOLOGIE COMPRENANT L'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION ET L'HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE M. EDMOND PERRIER TOME L — Nes 2 à 6 PARIS MASSON ET C*, ÉDITEURS. AS 12 LIBRAIRES DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE 120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN (Vi) 1905 PARIS, 30 FR. — DÉPARTEMENTS ET ÉTRANGER, 32 FR. Ce cahier a été publié en juillet 1905. Les Annales des Sciences naturelles paraissent par cahiers mensuels. rire. Conditions de la publication des Annales des sciences naturelles HUITIÈME SÉRIE BOTANIQUE Publiée sous la direction de M. PH. VAN TIEGHEM. L'abonnement est fait pour 2 volumes gr. in-8°, chacun d'environ 400 pages, avec les planches correspondant aux mémoires. Ces volumes paraissent en plusieurs fascicules dans l'intervalle d'une année. ZOOLOGIE Publiée sous la direction de M. EpMonp PERRIER. L'abonnement est fait pour 2 volumes gr. in-8°, chacun d'environ 400 pages, avec les planches correspondant aux mémoires. Ces volumes paraissent en plusieurs fascicules dans l'intervalle d'une année. Prix de l'abonnement annuel à chacune des parties, zoologie ou botanique Paris : 30 francs. — Départements et Union postale : 32 francs. ANNALES DES SCIENCES GÉOLOGIQUES Dirigées, pour la partie géologique, par M. HÉBerT, et pour la partie paléontologique, par M. A. MizNE-EbpwaRps. Tomes I à XXII (1879 à 1891). Chaque volume ere ere Eee 15 fr. Cette publication est désormais confondue avec celle des Annales des Sciences naturelles. Prix des collections : PREMIÈRE SÉRIE (Zoologie et Botanique réunies), 30 vol. (Aare). DEUXIÈME SÉRIE (1834-1843). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. TROISIÈME SÉRIE (1844-1853). Chaque partie, 20 vol. 950 fr. QUATRIÈME SÉRIE (1854-1863). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. CINQUIÈME SÉRIE (1864-1873). Chaque partie, 20 vol. 9250 fr. SIXIÈME SÉRIE (1874 à 1885). Chaque partie, 20 vol. 250 fr. SEPTIÈME SERIE (1885 à 1894. Chaque partie, 20 vol. 250 fr. GhoOLOGIE 2 VON ES MERE TE Er Eee 6: 5 CR 330 fr. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES SI (ou doubles-papilles), placées à peu près symétriquement, et en outre, une dernière, qui n’a pas de symétrique à gauche. Enfin, à la partie postérieure du corps, à 5 millimètres de l'extrémité, se voit, sur chaque interradius latéral, une der- nière papille. On peut schématiser de Ia façon suivante la disposition des papilles sur les deux interradius latéro-dorsaux : CIDRE CRE D ME EEE ER EE OP RE LT SE ARR PE RES 1—9 papilles. ART RD ONE ES AUNé 20NÈRE TIOPRE PACRRONRE CORRE GP | NÉPERe e 1— 6 papilles. Une répartition analogue se voit sur l’autre individu, mais elle est moins facile à constater sûrement, parce que plusieurs papilles se sont vidées de leurs roues, et se confondent avec des boursouflures de la couche externe, qui sont sans rapport avec les papilles ; il est difficile par suite de discerner ce qui correspond vraiment aux papilles rotigères ; mais il est tout à fait net que les papilles Les plus fortes sont localisées dans la région antérieure du corps, et sensiblement symétriques. Il existe douze fentacules, portant chacun trois rameaux digitiformes sur chaque côté de la tige, ceux de la derniere paire insérés au sommet même de celle-ci (pl. IV, fig. 15). Les sclérites calcaires comprennent : 1° des roues localisées dans les papilles rotigères; 2° des sclérites en forme d'éloiles épars dans tout le tégument. Les roues (pl. IV, fig. 17; sont semblables à celles qu'on ren- contre dans tout le genre CAiwridota : elles ont six rayons, élargis à leur bord externe, largement unis au centre; sur le tiers central, chaque rayon porte un bourrelet médian, qui s’unit au centre avec les autres bourrelets homologues, pour former une étoile à six ravons. L’anneau marginal est denté à son bord interne. Les sclérites éloilés (pl IV, fig. 18-22) ont la forme d’un disque percé d’une perforation centrale, et portant sur son pourtour de six à huit courtes mais fortes dents coniques, qui lui donnent l'aspect d’une petite étoile; les dents sont peu régulières, tant en ce qui concerne leur direction qu’en ce qui regarde leurs dimensions relatives. Quelques-unes même sont courtement bifurquées à leur extrémité. Les deux faces, ANN. SC. NAT. ZOOL. 1; 6 82 RÉMY PERRIER extérne et interne, présentent en outre de petits tubercules coniques irrégulièrement répartis autour de l’orifice central. Les tentacules n’ont d’autres sclérites que de courts bâton- nets recourbés en forme de C (pl. IV, fig. 23) à corps peu courbé, dont les extrémités portent deux ou trois petites dents. L'anneau calcaire (pl. IV, fig. 16) a dix pièces, solidement soudées l’une à l’autre; les radiales sont un plus petites que les interradiales, avec une encoche postérieure et une petite fossette antérieure, servant à recevoir le muscle rétracteur. Les interradiales sont, elles aussi, faiblement échancrées à leur bord postérieur ; elles portent sur le milieu de leur face externe une saillie en forme d’épine couchée, à pointe anté- rieure, comme on en voit fréquemment chez les SYNAPrIDÆ ; leur bord antérieur est presque droit, très légèrement sinueux. La longueur de l'anneau calcaire (entre le bord antérieur et le bord postérieur) est d'environ 2 millimètres. Les muscles radiauxsontvolumineux, largesde3"*,5, simples, mais avec un léger sillon longitudinal sur leur milieu. Ils pré- entent en avant un court mais volumineux muscle rétrac- teur, qui n’a pas plus de 3 millimètres de longueur, mais qui est très nettement individualisé ; seulement, ilestunià la partie antérieure du muscle radial correspondant par une membrane assez mince, formant un septum radial (1). Les vésicules de Poli sont, comme il arrive souvent chez les SyxapTiDÆ, fort nombreuses. J'en ai compté onze, qui sont localisées, contrairement à la règle formulée par Ludwig (92, p. 116), dans la moitié droite du corps, et en particulier dans l'interambulacre ventral droit. Elles sont très inégales, les unes mesurant 4"*,5 de long sur 1 millimètre de large, les autres ayant à peine { millimètre de longueur. Plusieurs d’entre elles peuvent se réunir par leur base, pour s’insérer sur l’anneau ambulacraire par une base commune. C'est ainsi que l’interambulacre ventral droit contient à lui seul six ou sept de ces vésicules, partant d’une même dilatation ampulliforme; elles ne sont pas placées au même niveau, les extérieures étant assez longues, les intérieures beaucoup (1) Cette disposition rappelle celle que j’ai décrite plus haut dans le Caudina | piymentosa. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 83 plus petites; sur linterradius latéral, elles sont au contraire isolées. Le fube digestif présente de nombreuses circonvolutions, formant dans leur ensemble cinq anses principales. Bien entendu, il n'existe pas trace d'organes arborescents. Les tubes génitaux, peu nombreux et non ramifiés, sont ré- partis en deux buissons, de partet d'autre du mésentère dorsal. IL — HOLOTHURIES DE LA NOUVELLE-ZÉLANDE. Stichopus mollis, Hutton, 1872. SyYxoxYMIE : 1872. Holothuria mollis. Hurrox (72), p. 15. 1879. Holothuria Robsoni. Hurrox (79), p. 308. 1886. Stichopus sordidus. TnkeL (86), p. 167. LirréRaTuRE : LupwiG (98), p. 7. [Donne toute la littérature antérieure. ! Cette espèce est représentée dans la collection du Muséum par six individus, recueillis par Filhol en 1875, au détroit de Cook (Nouvelle-Zélande). Elle est bien connue par les descriptions de THéez (86) — qui lui avait donné le nom de Stichopus sordidus, très mérité par son aspect repoussant, — de Dexpy (97) qui l’a identifiée avec l'espèce très incomple- tement décrite par Hurron en 1872, et enfin de Lupwic (98). Les six individus sont d'un noir brun quelquefois presqueuni- formément foncé, d’autres fois plus ou moins marbré de blanc, surtout sur la face ventrale ; l’un d'eux même est très clair, la face ventrale entièrement blanc sale, avecles pieds jaunâtres, la face dorsale tigrée de brun sur fond blanchâtre. Les pieds ven- traux paraissentabsolument épars, aussibien surles ambulacres que sur les interambulacres; le plus souvent, rien ne distingue les radius et les interradius ; quelquefois cependant Les pieds sont un peu plus serrés sur le milieu et les côtés de la face ven- trale, c’est-à-dire au niveau des ambulacres. Dans un seul individu, on distingue trois bandes de pieds bien séparées, la bande médiane étant plus large que les latérales et elle-même divisée en deux demi-bandes, où les pieds sont multiples, dis- posés à plusieurs sur un même rang ; la sériation est ici d'au- 84 RÉMY PERRIER tant plus accentuée que les intervalles nus qui séparent les bandes des pieds sont blancs et tranchent sur la couleur géné- rale noirâtre de la face ventrale. Les papilles dorsales sont énormes, pouvant dépasser 6 mil- limetres de diamètre basilaire (longueur de l’animai : 14 centi- mètres). Le plissement de la paroi du corps est tel qu'on ne peut que difficilement se rendre compte de leur disposition : on. en voit bien une rangée alignée sur chacun des côtés du corps, mais, sur le reste de la face dorsale, elles paraissent disséminées. sans ordre; toutefois le plus grand individu (à peau tigrée) laisse deviner une sériation véritable, à raison de deux rangs de papilles sur chaque ambulacre dorsal. Ces papilles sont très espacées les unes des autres, sur la face dorsale même ; elles. sont un peu plus serrées sur les rangées latérales. Autour de la bouche, qui est nettementventrale, se trouvent disséminées quelques papilles, mais elles ne forment pas une couronne régulière péribuccale, commeil sembleraitrésulter des descrip- tions des auteurs ; en outre elles sont beaucoup plus petites que les autres papilles, n'ayant pas plus de 1**,5. Elles passent insensiblement d'une part aux pieds ventraux, d'autre part aux grosses papilles dorsales. Il n'y a pas d'autre espèce de selérites que les tables qui ont été décrites par Théel et Dendy. Je n'ai pas trouvé trace de corpuscules en C; l'espèce de la Nouvelle-Zélande n’est donc pas identique au Stichopus fuscus, comme LupwiG inelinait à le croire. Elle en diffère aussi par le nombre moindre des dents qui forment la couronne des tables; leur nombre esl assez variable en réalité, mais 1l est toujours voisin de 15-17 (au lieu de 20-24, dans le S£. fuscus). Les papilles ne contiennent, elles non plus, aucun autre sclérite que les tables du tégument ; seuls les pieds présentent les énormes plaques perforées à symétrie bilatérale, caracté- ristiques de l'espèce. Ces plaques ont en moyenne 65 » de longueur sur 165 » de large, tandis que les disques des tables n'ont que 55 » de diamètre. Le disque terminal qui soutient la ventouse est décomposé en plusieurs plaques perforées séparées, juxtaposées ou même se recouvrant par leurs bords. Les papilles péribuccales, que nous avons dit se relier aux HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 85 pieds de la face ventrale, du moins les postérieures (ou infé- rieures), s’en rapprochent de même par la présence d’un disque terminal rudimentaire formé de petites plaques éparses : mais elles en diffèrent par la présence de bâtonnets arciformes, ‘disposés transversalement dans la parei de leur tige, bâtonnets qui rappellent ceux des tentacules et manquent dans les pieds. Ces papilles péribuccales tiennent ainsi des diverses formes des appendices ambulacraires entre lesquels elles sont interposées. [Cucumaria alba (Hutton, 1872), Ludwig, 1898. SYNONYMIE. Echinocucumis alba. Hurrox (79), p. 307. Colochirus alba. Dexpy (97), p. 35. LirrÉRATURE : Lupwic (98), p. 29. [Donne la littérature antérieure complète.| Cette espèce, qui habite exclusivement la Nouvelle-Zélande, d’abord brièvement et incomplètement définie par Hurron, est aujourd'hui assez bien connue par les descriptions de Dexpy (97) et de Lunwi (98). Je l'ai étudiée à mon tour d'a- bord sur trois spécimens du Musée de Vienne, communiqués par le professeur vox MARENZELLER. Ces trois spécimens sont les frères de ceux qu'a décrits Ludwig (98). Ils ont été acquis en effet comme eux à M. Suter, à Christchurch, et comme eux proviennent du port d'Akaroa, côte orientale de l'ile Sud de la Nouvelle-Zélande. J'ai depuis reeu, également du Musée de Vienne, trois autres spécimens, provenant aussi de la Nouvelle-Zélande, mais sans indication plus précise de localité. Jai donc pu faire une étude détaillée de l'espèce, surtout au point de vue de sa comparaison avec le Cucumaria Filholi (Voy. plus loin). Tous ces individus ont des caractères parfaitement concor- dants : chez tous, le corps est cylindrique dans toutes ses parties; il est long de 13 à 23 millimètres et faiblement recourbé ou plutôt arqué du côté dorsal; l’un d'eux même est presque droit, et, dans celui où la courbure est le plus accentuée, elle n’atteint pas 90°. La région antérieure est cylindrique, de diamètre égal ou un peu inférieur à celui de 86 RÉMY PERRIER la région moyenne du corps; la partie postérieure est conique, s’amincissant peu à peu pour se terminer en pointe, mais sans se prolonger en forme de queue véritable. Un seul indi- vidu porte l'indication d’un très court appendice eaudal, n'ayant pas plus de 2 millimètres de longueur et nullement comparable au long appendice que nous trouverons dans le Cucumaria Fulholi. Les pédicelles, nettement rétractiles, sont, au moins dans la région moyenne du corps, terminés par une ventouse des plus nettes, mais dépourvue cependant du disque calcaire terminal qui soutient d'habitude la ventouse des pédicelles. Les pédicelles insérés sur les régions antérieure el postérieure du corps et sur toute la face dorsale sont plus rétractiles et se terminent en pointe mousse ; leur ventouse, quoique existant toujours, est plus petite et moins visible. Les pieds ventraux de la région moyenne du corps sont donc un peu différents des autres ; ils sont plus gros, plus serrés aussi, moins rétractiles et leur ventouse est plus nette. C’estsans doute cette légère diffé- renciation qui avait conduit Denpy à ranger l'espèce de Hutton dans le genre Colochirus. Elle s’observe incontestablement, avec plus ou moins de netteté, chez tous Les individus. Mais elle est en somme peu accentuée : tous les appendices ambulacraires sont construits sur le même type; ce sont des pieds aussi bien sur la face dorsale que sur la face ventrale, et c’est très juste- ment à mon avis que LupwiG à rattaché ladite espèce au genre Cucumaria. La région qui porte ces pédicelles diffé- renciés à d’ailleurs les mêmes caractères que le reste du tégument et ne saurait être comparée à la sole ventrale aplatie qui caractérise le genre Colochirus. Pour ce qui à trait à la disposition des pieds ambulacraires, les descriptions de Dexpy et de LupwiG different sensiblement l'une de l'autre. Dexpy décrit « 5 bandes ambulacraires… s'étendant d’une extrémité à l’autre du corps, et formant approximativement une simple rangée dans les portions anté- rieure et postérieure, mais plus fournies dans le milieu, où on voit aussi un petit nombre |de pieds] sur les interambu- lacres ». LupwiG, de son côté, note « que les ambulacres ven- traux possèdent deux rangées longitudinales nombreuses de HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 87 pédicelles, tandis que les ambulacres dorsaux n’en ont qu'une rangée irrégulière et moins fournie. Les interambulacres sont par contre complètement libres [de pieds} ». D'après mes observations, chaque radius porte bien en effet une série de pieds ambulacraires, mais les 5 bandes ainsi constituées ne sont ni bien régulières, ni bien nettement visibles. Dans la région moyenne du corps, ïes pieds diffé- renciés que nous avons signalés plus haut se disposent très évidemment de façon à former sur chacun des trois radius ventraux une double rangée. Quant aux deux radius dor- saux, ils présentent aussi en général, toujours dans la région moyenne, deux rangs de pieds chacun, mais les pieds y sont moins nombreux et moins réguliers que dans le trivium, et leur sériation est rendue plus indistincte encore par la pré- sence de pieds épars dans les interradius latéraux. Les autres interradius sont tout à fait nus. Aux deux extrémités du corps on voit nettement les cinq ambulacres bien isolés et bien sériés; tandis qu’à l'extrémité postérieure ces ambulacres paraissent porter toujours un seul rang de pieds, très petits et difficiles à voir, à l'extrémité antérieure il y à tantôt deux rangs, tantôt un seul, aussi bien dans les ambulacres ventraux que dans les ambulacres dorsaux. Les corpuscules calcaires sont à peu près conformes à la description de Deby et ressemblent beaucoup à ceux que je décris plus loin à propos du Cucumaria Filholi. Ce sont : 1° Des écailles épaisses, semblables à celles des Pso/us, treillissées, formées de plusieurs épaisseurs de mailles ; ces plaques sont imbriquées les unes sur les autres; elles sont assez petites et à peu près régulièrement arrondies. 2° Des plaques perforées, de dimensions très inégales, placées dans la profondeur et se reliant aux précédentes par tous les intermédiaires. 3° Enfin, dans la couche superficielle du tégument, de très nombreux petits sclérites apparlenant au type des coupes réticulées, mais de forme assez particulière : ce sont en réalité des cloches profondes, de 18 » de diamètre environ, ressemblant à certaines petites Méduses craspédotes, et portant sur leur ombrelle les quatre perforations ordinaires. 88 RÉMY PERRIER Le bord libre est couvert d’un très grand nombre de digita- tions constituant une frange très serrée et dirigée vers l’exté- rieur, dans le prolongement des parois mêmes de la cloche. Cucumaria Filholi R. Perrier, 1903. (PI. V, fig. 10 à 12.) 1903. Cucumaria Filholi R. Perrier. Bull. Mus. d'Hist. Nat., &. IX, p. 144. 1904. Cucumaria alba, var Fitholi R. Perrier. Bull. Mus. d'Hist. Nat., t. X, p: 367. Dans une note préliminaire communiquée le 3 mars 1903 à la « Réunion des Naturalistes du Muséum d'Histoire naturelle de Paris » J'ai décrit, sous le nom de Cucumaria Filholi, 4 individus de la collection du Muséum, recueillis en 1875 par Filhol à Wellington (Nouvelle-Zélande). Je terminai la courte description donnée dans cette note par la remarque suivante : « Cette espèce est très voisine du Cucumuria alba, décrit par Dexpy (97) et revu depuis par Lupwi@ (98)... Mais la forme générale, avec son aplatissement caractéristique, et la disposition des pieds ambulacraires, qui diffère à la fois des descriptions données par Dexpy et par LunwiG, m'empêchent de l'identifier avec l'espèce de Hutton, dont je n'ai pu me procurer des spécimens authentiques, en vue d’une compa- raison plus approfondie. » A la suite de l'envoi de ma note, que j'avais accompagnée d’une photographie directe de l’un de mes spécimens, afin de permettre une comparaison plus précise, le professeur von MARENzELLER à bien voulu me communiquer les trois spéei- mens de Cucumaria alba dont il est question à l’article précédent. L'examen de ces individus vint entièrement confirmer ma première opinion : « J’ai pu constater, disais-je dans une communication faite le 28 juin 1904 à la Réunion des Natu- ralistes, que le Cucumaria Filhoh présente de très grandes analogies avec le Cucumaria alba, comme je lPavais conclu, dans ma première note, des descriptions de Dendy et de Ludwig. Toutefois quelques différences séparent les deux formes, notamment la forme générale et surtout l’aplatisse- HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 59 ment du corps, la forme des appendices ambulacraires, etc. Peut-être ne faut-il pas les séparer spécifiquement; mais j’es- time que le nom de C. Fiholi doit rester, au moins comme désignant une variété du C. alba. » L'examen des trois échantillons nouveaux de C. alba que j'ai reçus depuis, échantillons qui, par leurs caractères, con- cordent pleinement avec les premiers, me conduit à maintenir le C. Filholi à Vétat d'espèce distincte, car ses caractères restent bien distincts de ceux du Cucumaria alba, et je n'ai trouvé aucun intermédiaire venant les relier. Le corps, notablement plus grand que dans le Cucumaria alba a une forme très caractéristique. Il est fortement recourhé, en forme de V, de façon que les branches anale et buccale forment un angle très aigu, ou même deviennent parallèles, comme les deux branches d’un U. La branche anale est notablement plus longue que la branche buccale ; elle s’amincit rapidement et se prolonge ensuite en une longue portion grêle et cylindrique, en forme de queue. Dexpy mentionne que trois de ses individus présentaient une courbure très prononcée, et avaient une portion caudale atteignant le quart ou même le tiers de la longueur du corps. Or précisément trois des spécimens qu'il à étudiés viennent du port de Wellington, c’est-à-dire de la localité même qui a fourni mes individus. Il est possible que ces trois exem- plaires appartiennent à la présente espèce. Voici les dimensions que m'ont fournies trois individus que j'ai mesurés : A B ( Longueur de l'animal supposé redressé, et mesurée de la bouche à l'anus, en suivant la ligne xxx be LI ONE OR ENS 54 37 33 Epaisseur, d’une face latérale à l’autre. ........... 3 4 4 Largeur dorso-ventrale dans la région moyenne (ab). 9,5 8 6 — _- antérieure (cd). 325 4,5 3,5 — — caudale (ef)... 10 45 Une autre caractéristique très nette du Cucumaria Filholi est l’aplatissement latéral très accentué que présentent tous les individus, aplatissement qui réduit les faces dorsale et ventrale à l’état de simples crêtes, n'ayant pas plus de 1 milli- mètre de largeur. Cet aplatissement ne parait être nullement 90 RÉMY PERRIER le résultat d’une déformation accidentelle. Il est très accentué sur trois des quatre individus, qui n’ont manifestement subi aucune compression artificielle ; le quatrième, qui d’ailleurs n'en est lui-même pas exempt, paraît au contraire à l'état d'extension forcée, et semble assez déformé. L'aplatissement est surtout marqué dans la région moyenne du corps : il s’atténue quand b Fig. L. — Cucumaria Filholi Rémy Perrier (schéma). on avance vers les extrémités, surtout vers l extrémité caudale, où le corps est sensiblement cylindrique. Le tégument, d’un blanc uniforme, est plus rigide encore que dans Cucumaria alba. Les larges écailles qui le soutien- nent forment à sa surface une mosaïque des plus nettes, bien visible à l'œil nu. Les appendices ambulacraires, tous en forme de pieds, sont tous semblables; aucune différence n'existe entre les pieds ventraux et les pieds dorsaux et rien ici n’éveille, même de loin, l’idée qu'on peut avoir affaire à une espèce du genre Colochirus. La réduction de la face ventrale à l’état d'une mince crête est au contraire en opposition formelle avec l'élar- gissement de cette même face à l’état de sole de reptation chez les Colochirus. Soutenus par de solides plaques calcaires, les appendices ne sont pas rétractiles ; ils s’attachent au sommet d’un petit tubercule basilaire ; ils ont, sur les individus conservés dans l'alcool, une longueur de 1 millimètre à 2°°,5, et leur extré- mité se recourbe légèrement en crochet. Cette extrémité, jau- nâtre et légèrement renflée, porte une petite ventouse à peine indiquée, aussi bien sur les pieds ventraux que sur les dor- saux. [l n’y a aucune trace de disque calcaire terminal. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES o1 La répartition des pieds diffère notablement aussi de ce que montre Cucumaria alba. Au premier abord, ils semblent disposés sans ordre et en assez grand nombre sur la région moyenne du corps, sauf seulement dans la région dorsale où ils manquent. Ce n’est qu'avec un peu d'attention qu'on distingue, par endroits, des marques de sériation. L'ambulacre impair porte, sur la crête ventrale, deux ran- gées de pieds insérées côte à côte, et séparées par une étroite bande nue des pieds latéraux. Ceux-ci occupent la plus grande partie des deux faces latérales; ils sont assez serrés et sensible- ment alignés près du bord ventral, où ils dessinent une double rangée correspondant à l’ambulacre ventro-latéral ; ailleurs, ils sont disséminés sans ordre, et deviennent de plus en plus espacés à mesure qu'on approche du bord dorsal; on n’en trouve plus sur les radius dorsaux, ni, bien entendu, sur lin- terradius impair. Sur la cheminée buccale, les pieds sont, au contraire, ré- gulièrement alignés; tous les radius en portent une seule rangée, sauf immédiatement au voisinage immédiat de la bouche, où on voit réapparaître sur une très faible longueur deux rangs. La bouche, à l’état de rétraction, se trouve ainsi entourée par un grand nombre de pieds serrés les uns contre les autres, mais où on distingue toutefois assez facilement les cinq groupes correspondant aux cinq ambulacres. Dans la région caudale, les pieds sont également sériés en cinq lignes radiales; mais, en raison du rapprochement des ambulacres dû à l’amincissement de cette région, en raison aussi du petit nombre des pédicelles et de leur écartement, la sériation est difficile à voir. Il existe dix tentacules très ramifiés, les deux ventraux plus petits notablement. Les sclérites sont très analogues à ceux du Cucumaria alba. Ils se présentent sous trois formes : 1° Des plaques épaisses, dites écailles, visibles à l'œil nu, et dessinant à la surface du corps une mosaïque assez régu- lière : elles sont juxtaposées les unes aux autres, ou légère- ment imbriquées par leurs bords ; elles rappellent les écailles 92 PRÉMY PERRIER des Psolus et sont formées comme elles d’un réseau de trabé- cules anastomosées formant plusieurs étages superposés ; 2° Des plaques disposées au-dessous des précédentes, mais minces et simplement percées de trous juxtaposés; 3° De tout petits sclérites superficiels (pl. V, fig 11 et 12), en forme de cloches profondes, moins cependant que dans le C. alba ; leur surface convexe est percée de quatre orifices et leur bord libre porte de nombreux prolongements, qui sont bien moins serrés, bien moins longs et plus diver- gents que dans le C. a/ba; quelques-uns sont placés :sur le bord externe de la cloche et se projettent vers le dehors de celles-ci; d’autres peuvent s’insérer au contraire en dedans, et parfois l'ouverture de la cloche est plus ou moins obturée par des trabécules allant d’un bord à l’autre et portant eux-mêmes aussi des prolongements digités ; dans certains sclérites même, lorifice de la cloche est à peu près complètement fermé par une lame pleine, entièrement recouverte par un buisson de prolongements digitiformes. | Les pieds, dépourvus de disque terminal, présentent à leur base d’épaisses plaques, rappelant celles du tégument, mais n'ayant qu'un seul étage de trabécules réticulées. Sur la plus grande partie du pédicelle, se trouvent des plaques allongées perpendiculairement à l’axe, avec de nombreuses perfora- tions, et, vers l'extrémité, de minces bâtonnets irréguliers, portant sur toute leur longueur des mailles irrégulières; en outre, superficiellement, des selérites en cloche, semblables à ceux du tégument, mais plus clairsemés. Dans les tentacules, il n’y a plus que des plaques perforées très irrégulières, mais allongées transversalement par rapport à l’axe de la tige du tentacule, à laquelle elles forment un revêtement continu. Elles deviennent de plus en plus petites et grêles à mesure qu'on s'approche de l’extrémité. Les rami- fications ultimes des tentacules sont complètement dépour- vues de squelette. L’anneau calcaire est un peu différent de ce qu'a décrit Dexpy pour Le C. alba : chacune des dix pièces qui le forment se prolonge en avant en un processus, qui est non pas simple, comme le figure Dexpy, mais bifide. Les radiales, longues de HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 93 2 millimètres, ont en outre un prolongement postérieur, échan- cré en arrière, mais de forme un peu différente de celle que donne Dexpy. Les interradiales, dépourvues de prolongements postérieurs et par suite beaucoup plus courtes, présentent seulement à leur bord postérieur une échancrure en forme d’accent circonflexe. |[Cucumaria Huttoni Dendy, 1897. LirréRATURE. 1897. DExDy (97), p. 32-34; pl. LIL, fig. 19-20. 1898. Lupwic (98), p. 39-40. J'ai étudié deux individus appartenant à cette espèce, qui n'est connue jusqu ici que par les descriptions de Dexpy et de Luowic. Ces deux individus, appartenant au Musée de Vienne, ont respectivement une longueur de 82 et de 89 millimètres. Le dernier, qui est le mieux conservé, a 19 millimètres de diamètre dans sa région moyenne. Il s’amineit peu à peu en avant, et se termine par une portion cynlindrique qui a 12 millimètres de large sur une longueur d'environ 10 milli- mètres. En arrière, le corps s’amincit assez brusquement pour se terminer par une sorte de queue subeylindrique, ayant 28 millimètres de long et 10 millimètres de diamètre moyen. Sur l’autre individu, ces trois régions existent aussi, mais _ beaucoup moins nettement marquées. Le tégument est tout à fait rigide, par suite de la présence des écailles caractéristiques de l’espèce. Les parties libres de ces écailles forment une légère saillie à la surface du tégument, qui paraît ainsi semé d’un grand nombre de minuscules grains de riz disposés sans ordre. Les cinq radius sont marqués, comme le mentionne Ludwig, par de très légers sillons, assez larges mais peu profonds ; mais, contrairement à ce qu'il a vu surses individus, ils sont beaucoup mieux visibles sur la portion caudale, du moins à la base de celle-ci, et encore davantage sur la région antérieure du corps, où ils forment des gouttières longitudinales assez fortement accentuées. Les pieds ambulacraires, malgré leur petite laille, sont assez 9% RÉMY PERRIER nettement visibles sur les grands individus pour qu’on puisse distinguer assez facilement leur disposition, qui est, à peu de chose près, conforme à la description qu’en a donnée Lupwrc. Chacun des ambulacres ventraux porte, du moins dans la région moyenne du corps, deux rangées de pieds ambulacraires ; ces rangées ne sont pas absolument régulières, les pieds étant en certains points disposés en zigzag, tandis qu’en d’autreson peut en voir deux côte à côte. Les deux rangées de chaque ambulacre sont assez éloignées l’une de l’autre, séparées qu’elles sont par un intervalle de 3"”,5. Les pieds sont extrêmement petits et grêles, et forment, quand ils sont com- plètement épanouis, une saillie à peine sensible au-dessus du tégument; mais ils ont une ventouse très nette, même lorsqu'ils sont à l’état de rétraction. D'après Ludwig, les pieds sont « entièrement rétractiles dans le tégument et de plus ils sont cachés sous et entre les écailles voisines ». Dans les spé- cimens que j'ai examinés, les ventouses restent au contraire toujours en dehors du tégument; à la vérité, elles se perdent un peu au milieu des écailles voisines, mais leur forme régu- lièrement circulaire les différencie, avec un peu d'attention, des saillies allongées que forment les écailles, saillies qui sont d’ailleurs un peu moins proéminentes. J'ai constaté en outre quelques-unes de ces ventouses éparses, mais clairsemées, dans les interambulacres latéraux. Comme l'ont dit Dendy et Ludwig, les pieds paraissent manquer complètement sur les ambulacres dorsaux et sur l'interambu- lacre dorsal. Mais on voit cependant qu'il n’est pas tout à fait exact de dire que les pieds sont rigoureusement localisés sur les radius, et qu'ils manquent complètement sur la face dor- sale, tout au moins en trouve-t-on sur les régions latérales de cette face. Par contre, ils manquent complètement sur tous les ambulacres dans les régions antérieure et postérieure. Cette répartition des pieds, qui est conforme, sauf un point de détail, aux descriptions déjà données, peut être considérée comme acquise, réserve toutefois étant faite de la possibilité que l'examen de l'animal vivant pourra révéler l'existence d’au- tres pieds très petits (ou de papilles), devenus invisibles sur les animaux conservés. Mais même dans le cas où la répartition HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 95 des pieds serait telle que je l’ai décrite, je ne crois pas que cela entraine, comme le suggère Lunwi6, l'exclusion de l'espèce de Dendy du genre Cucumaria et la formation pour elle d’un nouveau genre. La disposition qu’elle présente n’est pas sans analogie avec celle que présente le Cucumaria alba. Dans ce dernier, en effet, les pieds ventraux de la région moyenne du corps sont de même plus développés que ceux de la face dorsale et que ceux des régions extrêmes du corps, au point que Dendy avait cru devoir rapporter cette espèce au genre Colochirus. La ressemblance est plus grande encore avec le Cucumaria Filholi, où les pieds manquent sur les ambulacres et l’interam- bulacre dorsaux, tandis que quelques-uns sont épars sur les interambulacres latéraux; en somme, dans cette dernière espèce, la disposition des pieds dorsaux dans la région moyenne du corps est exactement semblable à ce que nous venons de voir dans le C. Huttoni. Dans ce dernier, la régression s’est seulement accentuée davantage en faisant disparaître les pieds antérieurs et les pieds postérieurs. Néanmoins je ne crois pas possible de séparer ces deux espèces très distinctes, mais voi- sines cependant, et je n'hésite pas à maintenir le nom de Cuwcu- maria Huttont. Les plaques qui forment les seuls sclérites contenus dans le tégument, ont été inexactement décrites par DExpy et Lupwi& comme des écailles réticulées, formées de plusieurs couches de trabécules anastomosées ; d’après cette description, on pourrait croire qu'elles sont constituées comme les écailles des Psolus et comme celles des Cucumaria alba et Filholi. Tel n'est pas le cas. En réalité, ce sont des plaques exactement semblables à celles que je vais décrire tout à l'heure dans le Cucumaria ocnoides, c'est-à-dire des plaques épaisses, parcou- rues dans toute leur épaisseur par des canalicules anastomosés, creusés dans le calcaire. Ces canalicules, en raison de la forte épaisseur des écailles, se disposent suivant plusieurs plans su- perposés, parallèles aux deux faces, et communiquant ensemble par d’autres canalicules allant d'un plan à l’autre. Ce réseau de canalicules vient s'ouvrir à la surface de la plaque par de petits orifices très nets, particulièrement nombreux sur la face ex- terne ou supérieure, mais dont quelques-uns aussi se voient sur 96 RÉMY PERRIER la face interne. À un examen rapide, on peut, en raison de la complication de tout ce système de canaux, confondre cette structure avec celle des écailles de Psolus, mais laspect est cependant bien différent, et la dissemblance est frappante surtout sur les sclérites brisés, vus par la tranche, comme sur une coupe transversale. Je n'ai rien à ajouter au sujet de l'anatomie interne de cette espèce|. [Cucumaria ocnoides (Dendy, 1897), Ludwig, 1898. (PL. 1, fig. 9 à 13, et PL. V, fig. 13.) LiTrÉRATURE. 1897. Colochirus ocnoides. Dexpy (97), p. 36-38. PI. ILE, fig. 33 à 43. 1898. Cucumaria osnoides. LunwiG (98), p. 29-30. 1901. Ludwigia ocnoides. RetrrEx (014), p. 598-621. PI. XLV. 190%. Cucumaria ocnoides. R. PERRIER (04), p. 367-370, fig. 1. C'est Denpy, en 1897, qui à fait connaître cette espèce, appartenant exclusivement à la faune de la Nouvelle-Zélande ; il l’a décrite, assez brièvement d’ailleurs, d’après quatre exemplaires, provenant de New-Brighton, sur la côte est de l'île méridionale. LupwiG (98), dans son mémoire sur les Holothuries du détroit de Magellan, croit pouvoir la rattacher au genre Cucumaria; mais il n'a pas vu l'animal, et c’est uniquement à cause de sa ressemblance avec le Cucumaria alba, aussi considéré par Dexpy comme un Co/ochirus, qu'il propose ce changement générique. Depuis, Retrren (01) a repris l'étude de la même espèce d'après douze individus, de la même provenance que ceux de Dexpy, et qui lui avaient été communiqués par LupwiG. La description de REIFFEN s’écarte tellement de celle de DENDpY, notamment en ce qui concerne la nature et la disposition des appendices ambu- lacraires, qu’il semble d’abord qu’on soit en présence de deux espèces distinctes; j'aurais voulu pouvoir examiner quelques- uns des spécimens de Reiffen, mais la lettre que je lui ai écrite à ce sujet est restée sans réponse. J'ai étudié moi-même d'abord deux individus d’assez grandes dimensions, appartenant à la collection du Muséum de Vienne et qui ont fait l’objet d’une communication à la Réunion des Naturalistes du Muséum de Paris, Le 28 juin 1904. L'un d'eux IHOLOTHURIES ANTARCTIQUES 97 paraît se rapporter tout à fait au type décrit par Rerrrex. L'autre, au contraire, reproduit les caractères des individus étudiés par Dex, et même les exagère, en s’écartant plus encore que ces derniers de la description donnée par REIFFEN. J'étais convaincu néanmoins qu'il n'y avait là qu’une seule et même forme présentant des variations assez étendues. J'ai reçu depuis, du Musée de Vienne, trois nouveaux individus qui confirment pleinement ces prévisions. Mais je suis conduit, en raison de la contradiction des des- criptions antérieures, à donner à l'étude de cette espèce une extension que les travaux précédents m'avaient paru d’abord devoir rendre inutile. L'un des individus, long de 120 millimètres, a ses tenta- cules rétractés ; mais ses appendices ambulacraires sont à l’état d'extension parfaite, et la face dorsale montre avec la plus grande netteté les papilles éparses, que Dendy à décrites et dont Reiffen a nié l'existence. C’est cet individu qui à été représenté dans les figures 9 et 10 de la planche [. Les autres individus, tous plus petits, leur longueur variant entre 70 et 95 millimètres, ont aussi des papilles dorsales, mais elles sont plus ou moins rétractées, d’ailleurs beaucoup moins nombreuses, et ces individus se rattachent davantage à la description de Reïffen, mais avec les importantes correc- tions que nous y indiquons plus bas. Le corps, dans son aspect extérieur, à la forme générale que nous à déjà présentée le Cucumaria Huttoni. I est très allongé, régulièrement cylindrique, c’est-à-dire présentant partout une section à peu près circulaire et cette forme cylin- drique est à peine altérée par la présence, dans la région moyenne de la face ventrale, de la sole adhésive différenciée où sont localisés les pieds ambulacraires. Les divers exem- plaires sont assez irrégulièrement contournés, déformation due aux contractions de l’animal et fixée par l'alcool. Dexpy et Reirrex décrivent tous les deux une flexion dorsale, qui existe en effet chez quelques-uns de mes échantillons, mais paraît n'être nullement morphologique, comme c'est le cas pour le Cucumaria parva, pour le Cucumaria alba, plus encore pour le Cucumaria Filholi, et pour nombre d’autres espèces. Le ANN. SC. NAT, ZOOL. EU 98 RÉMY PERRIER. grand individu figuré est presque droit et les flexions qu’on pourrait y reconnaitre sont peu régulières et ne sont pas en tout cas à direction dorsale ; un autre a le corps recourbé dans le plan horizontal (comme un bras d'Ophiure); quant à ceux qui ont une flexion dorsale, elle est plus ou moins indiquée. Il est probable que, l’animal étant fixé par sa sole adhésive, les régions antérieure et postérieure du corps gardent une assez grande mobilité et peuvent se diriger de façon variable, mais toutefois plus souvent vers le haut, comme il est naturel. Tous les individus présentent d’une façon très nette les trois régions décrites par REIFrEN et que nous a déjà montrées le Cucumaria Hutloni. La région moyenne, correspondant à la sole adhésive, est renflée légèrement : c’est là que le diamètre atteint son maximum, 13 millimètres environ pour le grand individu; en avant de cette région moyenne, le diamètre diminue peu à peu jusqu’à atteindre 7 millimètres, largeur qui reste constante sur toute l'étendue de la région antérieure ; cette région est donc régulièrement cylindrique — sur une longueur de 23 millimètres à peu près, — et se termine par une extrémité arrondie. La région postérieure est plus étroite encore : elle est séparée de la région moyenne par un amincissement assez brusque, de façon à apparaître comme une véritable région caudale. Cette sorte de queue s’amincit graduellement au fur et à mesure qu'on approche de l'extrémité postérieure. Le diamètre, qui est de 6 millimètres à la base de la queue, n'est plus que de 3 millimètres à l'extrémité, qui se termine en pointe arrondie. La couleur de l'animal dans l'alcool est uniformément d'un blanc jaunâtre, sauf Les pieds qui ont une teinte ochracée assez faible. Le tégument est dur et rigide et laisse voir sans prépa- ration les nombreuses écailles qui lui donnent cette consis- tance. Ces écailles sont très petites dans la région moyenne du corps et n’y sont guère visibles qu’à la loupe; elles y sont peu saillantes et disposées sans ordre apparent. Sur les deux régions extrêmes au contraire, elles sont beaucoup plus nettes, plus grandes, facilement visibles à l'œil nu, et, comme l'ont indiqué les deux auteurs précédents, nettement imbriquées. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 99 Là disposition des appendices ambulacraires demande à être soigneusement étudiée. Un point est hors de doute : on à vu que, dans la région moyenne de la face ventrale, se différencie une plage, de dimensions assez réduites, que J'ai déjà désignée plus haut sous le nom de so/e adhésive. Le tégument qui forme cette sole adhésive est plus souple et plus mince que sur Le reste du corps; les écailles y sont plus petites, bien que construites de même, de sorte que cette région est légèrement différenciée. Elle se distingue d’ailleurs à première vue parce qu'elle porte de nom- breux pédicelles très petits, n'ayant pas même un demi-milli- mètre de diamètre, et terminés par une ventouse très nette, mais tout à fait dépourvue de disque de soutien. Ces pédicelles forment trois ambulacres assez réguliers, correspondant aux radius ventraux, ambulacres assez larges, puisqu'ils ont à peu près 3 millimètres de largeur ; tous les trois sont assez nette- ment formés de deux moitiés placées respectivement à droite et à gauche du vaisseau ambulacraire correspondant, et séparées par un petit espace nu. Les ambulacres latéraux sont plus larges que l’ambulacre impair : ce dernier ne porte que deux ou trois pieds de front, tandis que les ambulacres latéraux en ont de trois à cinq. La disposition des pieds dans les ambu- lacres ne présente pas une grande régularité, sauf en avant et en arrière, où, dans tous les ambulacres, ils s’alignent en général sur deux rangs seulement. Ces deux rangs se conti- nuent même quelque temps en dehors de la plage adhésive, mais les pieds ambulacraires y deviennent alors des papilles. Dans la plupart des individus, les interambulacres sont nus, permettant de distinguer les trois rangées ambulacraires ; mais, dans le grand individu, cette séparation des ambulacres n'est réalisée que sur une étendue très restreinte, 11 milli- mètres seulement, tandis que la longueur totale de la soie adhésive est de 18 millimètres; en avant et en arrière de cette sole, d’autres pédicelles apparaissent sur les interradius, et les ambulacres cessent d’être séparés ; Les pieds forment ainsi sur tout le pourtour de la région différenciée une large cou- ronne continue (pl. I, fig. 9); mais, Je le répète, cette disposi- tion parait exceptionnelle, 100 RÉMY PERRIER La sole adhésive ainsi constituée est très incomplètement différenciée; ses limites ne sont pas tranchées, et ses carac- tères passent insensiblement à ceux de tégument non diffé- rencié. Son étendue est d'ailleurs très faible, elle arrive quelquefois à n’occuper que le septième, ou même le dixième de la longeur totale du corps, proportion beaucoup plus faible que ne l'indique Dendy et que ne Le représente Reiffen, dont la figure paraît quelque peu schématisée. Voyons maintenant la nature et la disposition des appen- dices sur le reste du corps. Il y a à cet égard une profonde divergence entre les descriptions de Denpy et de Retrren. Le premier décrit des papilles éparses sur la face dorsale, ou plus ‘exactement sur la portion de cette face dorsale qui correspond à la région moyenne du corps. REIFFEN, au contraire, déclare que « les appendices ambulacraires de la face dorsale consi- dérés par DExpy comme des papilles se présentent comme des pédicelles complètement développés, avecventouses et ampou- les », et il figure en effet la face dorsale comme portant deux rangées de pédicelles fort peu nombreux (de quinze à vingt, dit-il, dans le texte), localisés sur les ambulacres. La contradiction ne peut pas être plus complète. En premier lieu, en ce qui concerne /« nature des appen- dices ambulacraires placés en dehors de la sole adhésive, mes observations donnent pleinement raison, contre REIFFEN, à l'interprétation de Denpy. Ces appendices sont tous des papilles, dont la structure est très différente de celle des pédi- celles. Ce sont de petits mamelons arrondis, en forme de pustules, plus ou moins saillants suivant leur état de rétrac- ion äu-dessus du tégument. Ils n’ont aucune trace de ventouse terminale, et manquent totalement des spicules arciformes qui existent dans les pédicelles. Ce sont donc bien de simples papilles, fort différentes des pieds, et la même constitution se retrouve chez tous les individus, quelle que soit la répartition de ces appendices, et, chez un même individu, pour les papilles de toutes les régions du corps. Secondement, en ce qui concerne le mode de répartition des papilles, le plus grand des individus que j'ai eus entre les mains vérifie de la façon la plus évidente la description de HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 10f Dexpy. La face dorsale {pl. L, fig. 9), dans la région moyenne du corps, est couverte de papilles éparses, assez larges, puis- qu'elles ont 2 millimètres de diamètre à la base, mais peu élevées. Elles sont particulièrement nombreuses sur les côtés. du corps, jusqu'aux radius dorsaux, et s’espacent de plus en plus quand on va vers le milieu de la face dorsale. Elles ne m'ont pas paru plus serrées sur les radius, comme le veut Dexpy, mais, par contre, elles ÿ manifestent en certains points un alignement un peu confus. Les papilles ne sont pas, chez l'individu en question, exelu-. sivement localisées sur la face dorsale; on les rencontre aussi, assez nombreuses, sur la face ventrale, en dehors de la sole qui porte les pédicelles (pl. L, fig. 10). Les deux espèces d’appendices paraissent d’ailleurs, sur les bords de cette sole, passer de l’une à l’autre, mais avec un peu d'attention on peut toujours les distinguer plus ou moins facilement. D'ailleurs, l'examen de leur squelette lèverait toute hésitation. En dehors de la région moyenne, toujours chez l'individu figuré, les papilles se continuent quelque temps à la base de Ia région caudale; mais elles deviennent rapidement plus espa- cées et plus petites, et ne dépassent pas le premier centimètre à partir de la base de cette région. Au contraire, sur toute la région antérieure, les papilles, tout en devenant, là aussi, plus petites et plus espacées, se continuent jusqu’à l'extrémité buc- cale elle-même, contrairement à ce que décrit Denpy (1). Elles s'y disposent suivant cinq rangées simples, correspondant aux radius, et assez difficiles à suivre, d’abord parce qu’elles pré- sentent quelque irrégularité, et aussi en raison de l’étroitesse de cette portion cylindrique et de l’espacement des papilles le long d’une même rangée, espacement qui est environ de 5 millimètres. Tout à côté de l’orifice antérieur, les papilles, prenant la forme de très petites digitations, deviennent plus nombreuses, et on en compte de deux à trois par radius, sans grande régularité; elles correspondent sans doute aux « rückgebildeten ambulacralfüsschen » que Reirrex décrit comme élant en relation avec les « Pseudo-oralklappen » dont (1) Both tube-feet and papillæ die away towards the extremities, leaving the terminal portions of the body smooth but scaly. (Deby, loc, cit., p. 37.) 102 RÉMY PERRIER il a donné une description: détaillée basée sur des coupes sériées. Ces papilles sont si nettes, si nombreuses, si caractérisées, leur disposition — sauf leur extension en avant — est si semblable à celle donnée par DExpY, si différente de celle que décrit REIFFEN, que j'ai pensé d’abord qu'il y avait à deux espèces différentes, et que les Holothuries de Reiffen devaient prendre un nom nouveau. Mais les autres échantillons exa- minés par moi montrent qu'il n’en est rien. Le nombre des papilles dorsales y est beaucoup plus réduit, et le plus souvent on ne les observe que le long des radius dorsaux, et même localisées exclusivement dans la partie moyenne de ces ambulacres; elles forment ainsi sur chacun d'eux deux courtes rangées assez régulières, et la disposition reproduit alors très manifestement la figure donnée par Reiffen. Mais, comme dans le premier individu, ce sont bien manifes- tement des papilles et non des pédicelles, car elles n'ont ni la forme, ni la spiculation des pédicelles adhésifs. Sur d’autres individus, il existe, en dehors des papilles sériées que nous venons de voir, quelques autres papilles éparses sur les inter- radius, ce qui établit le passage avec le type décrit en pre- mier lieu. Sur la face ventrale, il existe aussi quelques papilles; comme nous l'avons dit plus haut, en effet, Les ambulacres du trivium se prolongent en avant et en arrière de la sole adhésive, chacun en une double rangée de papilles qui conti- nuent les rangées de pieds; mais ces papilles sont peu nombreuses, 4 ou 5 paires au plus. Les appendices ambulacraires sont donc, dans ces indivi- dus, localisés dans la région moyenne du corps, comme l'ont décrit également REIFFEN et Dexpy; les papilles antérieures et postérieures de chaque série radiale deviennent d’ailleurs: de plus en plus petites, quand on s'éloigne du milieu du corps, et les dernières sont difficiles à discerner. La différence assez grande qui existe entre les deux modes de répartition des papilles que nous venons de décrire est-elle réelle, ou résulte-t-elle seulement de la rétraction des autres papilles, qui cesseraient dès lors d'être visibles? Maïs, dans HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 103 ce dernier cas, on retrouverait, même après la rétraction, une disposition particulière des selérites à la place occupée par ces papilles. Or j'ai étudié à cet égard des préparations ÿ# toto du tégument dorsal des petits exemplaires, et, même sur des préparations un peu étendues, je n'ai rien vu de semblable. D'ailleurs, dans l'individu à papilles nombreuses, ces papilles ne présentent pas dans la région moyenne des ambulacres dorsaux, l’alignement très net qu’elles montrent sur les autres spécimens. Tout porte donc à croire que les papilles dorsales peuvent être plus ou moins nombreuses, et que leur réparti- lion peut présenter des varialions assez étendues, qu'elles peuvent même disparaitre plus ou moins complètement; ce qui explique alors les divergences des descriptions. Les dix tentacules sont ramifiés abondamment, les deux ventraux beaucoup plus petits que les autres. Il n'existe que deux sortes de sclérites, qu’on retrouve dans toutes les parties du corps, y compris la sole adhésive 1° des plaques plus ou moins épaisses; 2° de petits sclérites superficiels, en forme de coupe. 1° Les plaques principales sont assez inégalement dévelop- pées, tant en épaisseur qu'en surface ; les plus grandes, dans la région moyenne du corps et sur la face dorsale, atteignent un diamètre d'environ 1 millimètre. Les plus petites, sur la plage adhésive, n'ont guère que 0°"*,60. Retrrex les à inexactement décrites et figurées comme des écailles semblables à celles des Psolus, « formées de deux ou plusieurs plaques réticulées, superposées et réunies entre elles par des trabécules ». Il n’en est rien : ce sont, comme dans le Cucumaria Huttoni, des plaques solides, creusées de canalicules anastomosés, lesquels se disposent en une ou plu- sieurs assises, et viennent s'ouvrir à la surface du sclérite, soit directement par un orifice en biseau près du bord de la plaque, soit par de petits orilices circulaires visibles sur la face externe du sclérite, et aussi, mais en nombre bien plus restreint, sur sa face interne. La figure 2 de Reïffen est done mal interpré- tée : les anastomoses qu'il figure sont des canaux et non des trabécules, et les petites taches foncées qu'il représente et dont il ne parle pas dans le texte sont évidemment les orifices 104 RÉMY PERRIER superficiels. La figure 13 de notre planche V (1) reproduit une des plus petites de ces plaques, telles qu'on les rencontre notamment sur la sole adhésive; elle ne possède qu'un étage de canaux anastomosés et démontre, sans aucune hésitation possible d'interprétation, l'exactitude de la description que je viens de donner. Il suffit de comparer cette figure avec la figure 7 de notre planche Il, qui représente une plaque de Ps0- lidium dorsipes, et dont l’organisation est la même que pour les plaques de Psolus, pour bien comprendre l'opposition des deux types de structure. 2° Les sclériles superficiels appartiennent au type des coupes treillissées, mais elles sont très peu profondes, et ont plutôt la forme de lentilles plan-convexe (pl. 1, fig. 11-13). La face convexe, qui, sur le vivant, est tournée vers l’intérieur, est percée de quatre orifices peu réguliers (exceptionnellement trois), assez larges; la face plane est représentée Le plus sou- vent par un simple anneau marginal; mais souvent aussi elle est constituée par une lame continue percée seulement de deux ou trois orifices arrondis, irrégulièrement placés. Le développement de ces sclérites est le même que dans tous les cas analogues; c'est d’abord le milieu de la face con- vexe qui se constitue sous la forme d’un X, puis, les quatre branches de l’X s'unissent par des trabécules dont l’ensemble forme l'anneau marginal. Ce n’est qu'en dernier lieu que celui-ci émet des prolongements, qui se dirigent vers le centre du sclérite pour former la lame plane perforée. Dexpy et REIFFEN s'accordent à donner à ces sclérites un diamètre de 0"%,05; Dexpy donne 54 v, et Reirrex de 50 à 59 pv. D’après mes mesures fréquemment répétées, je leur trouve seulement 38 & de diamètre. En outre, point important à noter dont ne parle aucun des deux auteurs, ces sclérites superficiels sont relativement rares, surtout sur la face dorsale, et, en raison de leur petit nombre et de leurs faibles dimensions, ils pourraient passer inaperçus. Les papilles dorsales sont soutenues exclusivement par des plaques semblables à celles du tégument, mais un peu excavées (1) Cette figure est inexactement rapportée, dans la légende du bas de la planche, au Cucumaria Filholi. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 105 vers le centre de [a papille et disposées en couronne, tout autour de la base l’de appendice. Il n'y a pas trace de spicules arciformes, ni, bien entendu, de disque terminal; l'extrémité même de la papille est dépourvue de tout squelette. Les pédicelles sont soutenus tout le long de leur tige par des baguettes arciformes perforées. Dexpy les à signalées et fisgurées, mais n'a pas indiqué leur véritable position, que Rerrren a exactement fixée. Comme il a déjà été dit, il n'y a pas non plus, dans les pédicelles, de disque terminal soute- nant la ventouse. Je renvoie pour l'anatomie interne au travail de REIFFEN, où elle est décrite avec détail. Aussi bien cette anatomie interne ne donne pas beaucoup de renseignements utiles à la défini- tion systématique de l'espèce et à sa position taxonomique. La position générique de cette forme est assez embarras- sante ; elle a été d’ailleurs, comme je J'ai dit au début de cet article, fort controversée, puisque l'espèce a été attribuée suc- cessivement aux genres Colochirus, Cucumaria, puis considérée comme le type d'un genre spécial, Ludiwiqia. Sans doute il serait commode d'adopter cette dernière solu- tion proposée par REIFFEN, mais le nouveau genre est surtout caractérisé, d’après cet auteur, par l'absence d’appendices ambulacraires sur les régions antérieure et postérieure du corps. J'ai montré qu'il ÿ avait en réalité, au moins chez certains individus, des appendices ambulacraires tout le long de la région antérieure, et même sur une partie de la région postérieure. Le genre Ludwigia ne repose donc pas sur des caractères suffisamment constants et ne saurait être maintenu. La création de ce genre nouveau ne s'impose d'ailleurs en aucune façon et l'espèce que nous étudions peut se rattacher sans peine aux genres déjà anciens Colochirus où Cucumarix. Mais auquel des deux? Si je suis tout à fait de l'avis de LüubwiG quand il transfère le Colochirus alba sic] de Dendy au genre Cucumaria, je ne saurais être aussi affirmatif que lui pour le Colochirus ocnoides, qu'il n'a pas étudié d’ailleurs. Cette espèce possède en effet, à n'en pas douter, la plupart 106 RÉMY PERRIER des caractères du genre Colochirus : différenciation des appen- dices dorsaux et ventraux respectivement en papilles et en pédi- celles; — localisation des pieds ventraux en séries radiales mul- tiples; — ordre dispersé des papilles dorsales; — disposition pentaradiée de la région péribuccale, indiquée par les cinq « Pseudo-oralklappen », de Reiffen ; — développement assez con- sidérable du squelette calcaire cutané; — imbrication des écailles sur la région postérieure. Mais d’autre part : 1° L'habitus général ne rappelle pas du tout ce que montrent la plupart des espèces de Colochirus les radius latéraux ne sont pas saillants et le corps n'a pas une forme tétragonale ; il est vrai que ce caractère n’est pas général à toutes les espèces de Colochirus; — 2° le point le plus particulier à signaler est l'étendue fort réduite de la « sole ventrale », qui n'occupe qu'une très petite partie du tri- vium. On pourrait dire encore qu'il n'ya là qu’une question de degré, puisque, chez tous les Colochirus (d’après la diagnose de Marenzeller |81, p. 130|), « les pieds manquent sur là face ventrale de l'extrémité postérieure et de l'extrémité anté- rieure,.… où se tiennent... des papilles ambulacraires », comme sur la face dorsale; mais la différence n’en est pas moins très grande avec les Colochirus vrais, où la sole ventrale de repta- üon est bien plus étendue. Enfin, 3° la disposition des appen- dices ambulacraires, variable suivant les individus, ne réalise pas toujours celle qu'on voit constamment chez les Colochirus. La sériation des appendices ventraux, l’ordre dispersé des dorsaux, se trouvent réalisés chez quelques individus, mais non chez tous. En résumé, l’ensemble des caractères de notre espèce ne concorde pas pleinement avec la définition du genre Col/o- chirus, sans qu'il v ait cependant d'opposition absolue. Mais voici d’autres considérations : on ne saurait perdre de vue les relations étroites qui relient l'espèce ocnoides au Cucumaria Hutloni. C'est le même habitus général, le même grand développement du squelette cutané, sensiblement la même nature de selérites, notamment en ce qui concerne la structure des écailles, la même raréfaction des appendices sur la région antérieure du corps et sur la face dorsale. Il est HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 107 impossible de séparer ces deux espèces, et la seconde n'a, cette fois, rien qui puisse rappeler Les Colochirus. Elles offrent, en outre, avec le Cucumaria alba et avec le Cucumaria Filho!i des affinités non douteuses. Dexpy exagère sans doute, et même beaucoup, quand il déclare qu'il est dif- ficile de distinguer d’une façon précise les Cucumaria alba et ocnoides. Mais on ne saurait méconnaître leur réelle parenté. Nous avons même vu que le Cucumaria alba présentait lui aussi une légère différenciation des pieds ventraux dans la région moyenne du corps, qui expliquait la place donnée par Dendy à cette espèce dans le genre Colochirus. On ne peut en résumé éliminer l’une de ces espèces du genre Cucumaria sans éliminer aussi les autres, et je ne vois pas alors de caractère net permettant de définir ce nouveau groupement et de le distinguer du genre Cucumaria. Ces considérations me portent à maintenir toutes ces formes dans le genre Cucumaria, et j'adopterai comme Lupwic le nom de Cucumaria ocnoides. Mais on voit quelles difficultés présente cette détermina- tion générique ; la question est d’ailleurs plus large et l'étude critique approfondie que nous venons de faire tend à élever des doutes sur la légitimité même du genre Colochirus tout entier, ou du moins sur sa définition actuelle. Voilà en effet une espèce, dont certains individus ont tous les caractères des Colochirus, tout en étant voisins des Cucumaria, tandis que d’autres n’ont guère d’affinité qu'avec les Cucumaria. Cette question n'est pas nouvelle, et le genre Colochirus à déjà été l’objet de nombreuses discussions, de la part de presque tous Les spécialistes. Pédicelles ventrauxr, papilles dor- sales : voilà quelle est en principe la définition du genre, et dans certains cas (Co/. quadranqularis Lesson, Col. luteus Sluiter, etc.) il n’y a aucun doute. Mais la distinction précise des papilles et des pédicelles n’est pas toujours facile à don- ner; tous les passages existent des uns aux autres. La diffé- renciation des pédicelles dorsaux en papilles se retrouve déjà, fort nettement accentuée, dans certains Cucumnaria vrais. On sait que l'espèce commune des côtes de la Manche que von MARENZELLER (93, p. 15) a définitivement désignée sous le 108 RÉMY PERRIER nom de Cucumaria Montagqui avait été appelée par HÉroUARD (90) Colochirus Lacazu, et qu'en effet ses pédicelles dorsaux, tout en conservant un disque terminal petit, mais bien déve- loppé, et une très petite ventouse, ressemblent à des papilles, et sont en tout cas fort différents des pédicelles ventraux. On a donc cherché d’autres critériums et MARENZELLER (81, p. 100) a essayé de préciser et de compléter la définition, en l’élargissant notablement. Mais les difficultés n'ont pas dis- paru pour cela. Le Colochirus Challengeri de Théel, le Co/. Gazellæ de Lampert, considérés exactement à mon avis par LupwiG (92) comme des Thyone, sont de nouveau ramenés par SLUITER (01) dans le genre primitif. Ils présentent en effet un mélange de caractères qui laisse subsister le doute. La question vient se compliquer encore par les relations à préciser avec le genre Psol/idium, qui, lui aussi, possède une sole ventrale et des pédicelles dorsaux différents des ventraux, et dont les formes inférieures se confondent avec les formes peu spécialisées de Colochirus. À mon avis, Le genre Colochirus doit être, contrairement aux tendances de certains auteurs, ramené à ses limites étroites primitives, et réduit strictement aux espèces présentant des papilles dorsales bien nettement différenciées comme telles, éparses ou sériées, des pieds ventraux répartis en trois ambulacres séparés, la bouche pentaradiée, les pièces de l'anneau calcau'e non prolon- gées en pointes en arrière, les sclérites calcaires sensiblement de même forme sur la sole ventrale et sur le téqument dorsal. Quant au genre Pso/idium, il faut faire entrer en ligne de compte dans sa définition, non seulement /a réduction constante des pieds dorsaux, qui conservent en général leurs ventouses et leurs disques terminaux, mais encore /a différencianon des sclé- rites de la sole ventrale, plus simple que les sclérites dorsaux ; le grand développement de ces derniers, à l'état de larges plaques à gros tubercules, ou d'écailles réticulées comme celles des Psolus. Toutes les autres espèces rentreraient dans le genre très polymorphe Cucumaria. En fait, le groupe des Cucumaria présente une homogénéité qui s'affirme toujours de plus en plus. Les variations sy font par degrés insensibles. Toutes les tentatives faites jusqu'ici HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 109 pour dissocier ce bloc ont été reconnues vaines et on a dû successivement abandonner les genres Ocnus, Semperia, etc. : le genre Thyone n’est pas lui-même inattaquable, et si la for- mation d’une sole pédieuse oblige évidemment à séparer gé- nériquement certaines espèces qui présentent cette différen- ciation d’une façon manifeste, d’autres établissent des passages qui les relient si étroitement au groupe très polymorphe des Cucumaria typiques, qu'il est difficile de préciser les limites des divers genres. Ajoutons en terminant que les vues de REIFFEN, considé- rant le Cucumarin ocnoides comme un passage aux Morpa- DiDÆ, ne me semblent pas reposer sur des fondements accep- tables. « Le genre Ludiwigia, dit-il, a, en commun avec les Molpadiidés, le manque de pédicelles dans les portions anté- rieure et postérieure du corps. Si la régression des pieds s'était étendue jusqu'à la région moyenne, on ne saurait si cette forme doit être rattachée aux Dendrochirotes ou aux Molpadiidés. » Ces raisons ne sont guère probantes ; la régres- sion des pieds dans la région postérieure du corps (nous avons vu qu'ils persistent parfois dans la région antérieure) se retrouve dans d’autres HoLoraurnpz, sans qu'on puisse voir en elles des formes de passage avec les MocrapubÆ. Je ne citerai comme exemple que le PhAyllophorus anatinus étudié plus loin. Les papilles cloacales ne me paraissent pas non plus constituer un argument très probant, parce qu'on les rencontre aussi dans d’autres formes non apparentées aux MocPpApnpe, et qu'elles n'existent pas d'autre part chez tous les représen- tants de cette famille. La conclusion de RrIFFEN est excessive, car, même si les pieds moyens disparaissaient — supposition elle-même un peu gratuite — l'animal conserverait encore un ensemble de caractères — forme des tentacules, nature des selérites calcaires, ete. — qui ne laisseraient pas de doute sur sa parenté avec les CucumarnDz, et ne permettraient guère son rattachement aux MozpaprbÆ|. 110 RÉMY PERRIER |Cucumaria brevidentis (Hutton, 1872) Rémy Perrier, 1905. SYNONYMIE : 1872. Thyonebrevidentis Hurron (72), p. 16. 1897. Colochirus calcarea Denpy (97), p. 38. 1897. Colochirus brevidentis DExny (97), p. 40. 1898. Colochirus calcareus LupwiG (98), p. 30, en note. 1898. Colochirus brevidentis Lupwie (98), id. 1898. Colochirus brevidentis Luowic (98?), p. 442. Cette espèce, décrite très brièvement et très incomplètement par Hurrox, à été réétudiée en 1897 par Denpy, qui, à côté de l'espèce de Hutton, à eru pouvoir établir une seconde espèce, propre comme la première à la Nouvelle-Zélande et définie par des caractères différentiels assez fragiles. Depuis, LupwiG a décrit à nouveau avec plus de détails sept individus provenant de l’île Juan Fernandez, et a montré à juste titre que le nom proposé par Denpy devait tomber dans la synonymie et que seul le nom de C. érevidentis Hutton devait persister. J'ai reçu à mon tour du Musée Zoologique de Vienne deux spécimens et une partie d’un troisième, originaires de la Nouvelle-Zélande. L'identité de ces derniers individus avec les précédents n’est pas douteuse, mais l'attribution de cette espèce au genre Colochirus ne me parait pas du tout justifiée. En effet, les deux spécimens complets que j'ai examinés montrent de la façon la plus manifeste que les appendices ambulacraires dorsaux sont des pédicelles, au même titre que les ventraux et non pas des papilles. Ils possèdent en effet des ventouses parfaitement netles, soutenues par un disque cal- caire treillissé bien développé. L'un des échantillons, à l’état de demi-extension, long de 11 millimètres et large de 4°°,5, présente bien une différence dans les appendices ambu- lacraires des deux faces : ceux de la face ventrale sont à l’état d'extension et ont la forme ordinaire, tandis que les dor- saux sont complètement rétractés ; mais ces appendices dorsaux montrent encore netlement la pelite ventouse qui les termine; Vun d'eux même est pleinement épanoui et on voit alors qu'il ne diffère guère des pédicelles ventraux. L'autre individu est complètement rétracté; 1l a à cet état 7 millimètres de long et 5 millimètres de large; ses appendices sont tous rétractés e HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 111 aussi, et on ne voit dans ces conditions aucune différence sen- sible entre ceux du bivium et ceux du trivium. La plupart ont rétracté leur ventouse, qui n’est plus visible extérieurement ; mais quelques-uns, aussi bien sur la face ventrale que sur la face dorsale, restés à un état de rétraction moindre, laissent encore voir la ventouse terminale. DEexpy signale d’ailleurs déjà lexistence des ventouses dans les appendices ambula- craires dorsaux et ventraux. D'ailleurs la forme du corps n'est pas celle des Colochirus typiques; le trivium est très légèrement aplati, et même, dans l'individu rétracté, cet aplatissement est à peine sensible, le corps ayant la forme d’un ovoide renflé. On ne retrouve pas davantage la forme tétragonale des Colochirus ordinaires, pas plus que les 5 écailles péribuccales ; enfin, si les corpuscules calcaires sont semblables à ceux de quelques espèces de Co/o- chirus, on en rencontre aussi d'identiques chez certains Cucu- maria. Danscesconditions, le rattachementde l'espèce au genre Cucu- maria ne saurait faire de doute. Le genre Colochirus disparait du même coup de la liste des Holothuries antaretiques. C’est un genre tropical ou sublropical et à peu près exclusivement indo- pacifique. La disposition des pieds est assez irrégulière, mais on distingue cependant un alignement radial, chaque ambu- lacre comprenant au moins deux rangs de pédicelles ; en outre, d’autres pédicelles se voient très manifestement çà et là dans les interambulacres et viennent masquer davantage encore la sérialion des pédicelles. DENDY assure que cette sériation est beaucoup plus évidente sur le vivant. Je n'ai rien à ajouter de nouveau sur les corpuscules calcaires ni sur l'anatomie de l'espèce. [Pseudopsolus macquariensis (Dendy) Ludwig. LirrÉRATURE. 1897. Psolus macquariensis Dexpy (97), p. #1. 1898. Pseudopsolus macquariensis Lunwic (98), p. 49. J'ai eu la bonne fortune d'étudier deux individus de cette espèce, appartenant au Musée de Vienne, et venant, comme 112 RÉMY PERRIER tous les spécimens jusqu'ici étudiés, de l’île Macquarie (au Sud de la Nouvelle-Zélande). Ces deux spécimens, longs respec- tivement de 15 et 20 millimètres, ont la forme d’outres renflées, sans la moindre indication d’une sole ventrale différenciée. Rien dans l’habitus ne rappelle les Psolus. | La face ventrale porte les trois rangées continues de pieds décrites par Denpy et LupwiG. La face dorsale paraît au premier abord tout à fait nue; mais un examen attentif montre, non sans difficulté, quelques pieds répartis, comme le dit Lupwr&, sur les ambulacres du bivium. Je ne crois pas cependant que la disposition des pieds dorsaux soit aussi définie que paraît le dire cet auteur ; malgré toute mon attention, je n’ai pu arriver à voir sur l’un des individus, permettant une exploration plus facile, que trois pieds sur l’ambulacre droit, et un seul sur l'ambulacre gauche ! Il est très probable que, comme cela arrive fréquemment pour les organes en voie de régression, il y a là une grande variabilité individuelle. Il n'est pas im- possible que, chez quelques individus, ils ne disparaissent réellement tout à fait. Pour le reste, mes observations ne peuvent que confirmer les données fournies par Lupwi@, après DexpY|. Phyllophorus anatinus Rémy Perrier, 1903. (PLV ES M0) Syx. Thyonidium anatinum. Rémy Perrier. Bull. Mus. d'Hist. Nat., t. IX, 1903, p. 142. Un très intéressant individu, en parfait état, recueilli en 1875 par Fiznoz à la Nouvelle-Zélande, à Wellington, à servi de base à cette espèce que j'ai décrite dans une note pré- liminaire (Bull. Mus. d'Hist. nat., 1903, p. 142) sous le nomde Thyonidium anatinum. Lupwic ayant montré avec raison, je crois, qu'il n’y avait pas lieu de conserver le genre Thyoni- dium, et qu'il fallait le réunir au genre Phyllophorus, je rectifie de la sorte la dénomination de l'espèce : Phyllophorus anatinus. La position générique de l'animal est d’ailleurs un peu incertaine. En effet, n'ayant à ma disposition qu’un seul indi- HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 115 vidu parfaitement conservé, mais dont les tentacules sont complètement rétractés, j'ai tenu à le laisser aussi intact que possible, et je n'ai pu, par suite, étudier ces tentacules, ni compter leur nombre. Mais l'espèce en question présente des relations très étroites avec une auire espèce de la Nouvelle- Zélande, rencontrée dans les mêmes parages, le Phyllophorus longidentis Mutton (79), que Dexoy (97) a identifiée avec TAyo- nidium caudatum Hutton, et avec Thyonidium rugosum Théel. Aussi, bien que les deux espèces présentent des différences spécifiques très caractérisées, je crois qu'il ne saurait y avoir de doute sur leur rattachement au même genre. La forme générale du corps est assez caractéristique : le corps, renflé en son milieu, a son axe fortement recourbé en U (pl. V, fig. 2), les deux extrémités étant tournées vers l’inter- radius dorsal. L’extrémité antérieure à la forme d'un cône assez régulier, légèrement tronqué à son extrémité. L'extré- mité postérieure s’atténue au contraire rapidement en un append'ce caudal nettement caractérisé, qui, dans lindividu étudié, est fortement recourbé en une sorte de bec à concavité inférieure. Dans son ensemble, la silhouette de l'animal rappelle un peu celle d’un fourneau de pipe, ou d’un canard dépourvu de pattes, d’une merlette héraldique, d’où le nom spécifique que je lui ai imposé. Voici les dimensions de l'individu unique que j'ai étudié : Epaisseur (diamètre transversal} de la région movenne du } j \ M Re me edibe ne ess SOS Neo à 9 millimètres Longueur (plus grande longueur horizontale du contour appa- OO RTS RP NI TERRE 14 millimètres Epaisseur du cône buccal à sa base (ef)..................... ques Honsuenrduebnebuccal(gh)itais0: 2 URL . 4 millimètres homer de poteteraisa base (ÿ)..2:1..7 4042 2e vaut. DU Diamètre de la queue dans sa région moyenne (kl).......... EC Longueur de l'appendice caudal, mesurée suivant son axe REBOUEDES SM Eden. hereis sircrssemébiatt 84 TA Les appendices ambulacraires sont tous des pédicelles incomplètement rétractiles, se présentant sous la forme de forts tubercules cylindriques, gros et courts, saillant à peu près de ! millimètre au-dessus du tégument (pl. V, fig. 1 à 3). ANN. SC. NAT. ZOOL. Ne 114 RÉMY PERRIER Leur extrémité tronquée, très petite, porte une ventouse, légè- rement saillante, bien visible sur quelques-uns des pédicelles, et soutenue par un disque terminal rudimentaire. Sur le cône buccal, les pédicelles sont alignés sur les ambu- lacres en deur rangées très nettes, assez espacées l’une de l’autre, de facon que l'orifice buccal, vu de face (pl. V, fig. 1), se trouve entouré de dix lignes de pieds disposées en rayons, et formant entre elles des angles sensiblement égaux; mais, à Fig. M. — Phyllophorus anatinus Rémy Perrier (schéma). partir d’une certaine distance, la sériation disparaît complète- ment, et, sur toute la portion renflée du corps, les pieds sont épars et à peu près également répartis aussi bien sur les ambu- lacres que sur les interambulacres. L'alignement des pédicelles redevient distinet quand on s'approche de la base de la queue, eton y retrouve, très nette- ment indiquées, les cinq doubles rangées radiales de pédicelles ; mais elles ne se continuent pas longtemps sur l’appendice caudal lui-même, qui est absolument nu sur presque toute sa longueur. Sur la surface ventrale du corps, les pieds sont beaucoup plus nombreux et beaucoup plus serrés que sur la surface dorsale ; mais, bien que plus rares, on les retrouve Jusqu'au milieu, creusé en forme de selle, de cette dernière. La longueur de la ligne suivant laquelle les pieds sont sériés dans la région antérieure du corps, est elle-même notablement plus grande pour l’'ambulaere impair que pour les ambulacres dorsaux. On compte douze paires de pieds alignés dans le pre- mier, six seulement sur les seconds. De même, en arrière, les pieds ventraux sont sériés sur une HOLOTHURIES ANTARCTIQUES DES longueur bien plus grande que les pieds dorsaux : ils s’avancent aussi sur l’appendice caudal plus loin que les seconds, qui s'arrêtent presque immédiatement au point où commence : l’appendice. Le tégument, blanc, légèrement jaunâtre, est mince, et il ap- parait, même à l'œil nu, ou au moins à la loupe, hérissé de très nombreuses et longues épines, assez régulièrement disposées au milieu des pédicelles. Ce sont les piquants centraux des sclérites ; on les voit aussisurla surface latérale des pédicelles, s’insérant perpendiculairement à l’axe du pied et assez inégale- ment répartis sur la longueur de l’appendice ambulacraire. Les sclérites sont de deux espèces : les plus nombreux sont des tables (pl. V, fig. 4-6) à disque en général cruciforme, formé de quatre bras allongés et assez épais, présentant sur toute leur surface de nombreuses perforations très petites. La croix ainsi formée est plus ou moins irrégulière, les bras pouvant en être inégaux ou diversement recourbés ; quelque- fois même, le disque devient triradié ou fusiforme, par dis- parition d’un ou de deux bras ; mais le type à quatre rayons domine d’une façon très nette. Au centre du disque s'élève un long piquant, qui fait fortement saillie à la surface externe du tégument ; ce sont ces piquants qui hérissent toute la peau et qu'on peut voir même à l'œil nu; car ils atteignent parfois une longueur de 0"",35 à 0°°,38, tandis que le diamètre du disque (d’un bout à l’autre de deux bras opposés) ne dépasse guère 0"*,40 ou 0°",50. La seconde espèce de sclérites (pl. V, fig. 7 et8) présente aussi la forme de tables, à aiguillon central, mais avec une struc- ture assez différente pour qu'on puisse les distinguer du pre- mier coup d'œil. Le disque de ces tables, circulaire ou plus ou moins triangulaire, toujours dépourvu de prolongement en forme de bras, est percé de perforations plus larges et plus régulièrement arrondies, séparées par des travées plus déli- cates. Leur aiguillon central est aussi beaucoup plus petit et plus grêle, et disparaît même parfois tout à fait. Ces sclé- rites sont entremêlés avec les précédents, mais leur nombre est environ moitié moindre. Les sclérites du tégument général sont d’ailleurs assez peu 116 RÉMY PERRIER serrés : ils ne forment qu’une couche, et se touchent à peine par leurs bords; aussi estil facile de les étudier directement en place dans le tégument, après lavoir éclairei dans le xylène ou l'huile de cèdre. Les appendices ambulacraires contiennent des sclérites analogues à ceux du tégument général, mais les sclérites à disque mince y sont beaucoup plus rares, et le plus souvent même tout à fait absents. En outre, les sclérites à disque épais ne sont plus cruciformes; leur contour est irrégulier ou subcirculaire, surélevé au niveau du piquant, de façon à pré- senter l’aspect d’un cône surbaissé (fig. 6"), au sommet duquel se dresse le piquant, ici comme sur le tégument général, très fort et très long. La partie terminale du pied est dépourvue de sclérites, sur une certaine longueur, d’ailleurs assez faible. Cette partie sans squelette est seule complètement rétractile; la ventouse terminale est soutenue par un disque treillissé rudimentaire, se réduisant àquelques mailles séparées par de très fines trabé- cules (pl. Vi fig. 9). N'ayant pas ouvert l'animal, je ne puis donner de rensei- gnements sur l'anatomie interne; j'ai pu seulement constater, en examinant l’animal par transparence après éclaircissement. dans l'huile de cèdre, que l'anneau calcaire avait une structure compliquée, très analogue à celle du PAyllophorus longidentis. L'espèce que je viens de décrire est évidemment apparentée à cette dernière espèce, dont nous possédons deux et même trois descriptions détaillées, puisque, d’après DEexpy, qui a décrit en détail le Thyonidium longidentis Mutton, les deux descriptions données par Théel sous les noms de T’yonidium caudatum Hutton et Thyonidium rugosum Théel, se rapportent aussi à cette espèce. Jai observé moi-même un individu qui m'aété communiqué par le Musée de Vienne, sous le nom de Thyonidium longidentis. Malheureusement, il ne possède pas de sclérites et je n'ai pu dès lors vérifier sa détermination d’une facon précise. Néanmoins, la plupart des caractères concordent avec les descriptions des auteurs précédents, et ces caractères sont foncièrement différents de ceux de notre individu; la forme est celle d'un concombre légèrement recourbé à extrémité pos- HOLOTHURIES ANTARCTIQUES EP térieure conique, sans prolongement caudal ; les pieds, très nombreux, épars sur tout le corps, sont très petits et tout à fait rétractiles ; ils présentent une sériation seulement à l’ex- trémité postérieure ; le tégument est très épais. Je crois donc être suffisamment renseigné sur l'espèce de Hutton, pour pouvoir bien préciser les caractères qui la séparent du PAyl- lophorus anatinus. 1° La forme générale, si caractéristique, de notre espèce ne se retrouve pas dans sa congénère, au moins autant que je peux le conclure et de l'individu que j'ai vu, et des descrip- tions des auteurs, dont aucun n'a figuré l’animal ; 2° Le tégument est beaucoup plus mince qu'il ne l’est dans l'espèce de Hutton. 3° En ce qui concerne la disposition des pieds, aucun auteur ne mentionne une sériation quelconque dans la partie anté- rieure du Ph. longidentis, sériation si accentuée dans le Ph. anatinus. Ws indiquent au contraire l'existence de deux rangées de pieds sur chaque ambulacre dans l’appendice caudal; or dans le PA. anatinus, l’'appendice caudal est complètement nu, et la sériation est seulement indiquée à la base de la queue. Les pieds sont, dans le PA. anatinus, beau- coup moins nombreux que dans l’autre espèce ; leur structure paraît fort différente ; 4° Aucun auteur ne signale l'existence, chez le PA. longidentis, des deux espèces de sclérites que nous avons vues nettement distinctes dans le PA. anatinus. Les spicules y sont d’ailleurs moins serrés que dans l'espèce de Hutton, et leur piquant central est beaucoup plus développé (à peu près le double de ce qu'indique DENnY). Ces divers caractères nous amènent done à conclure que les deux espèces, bien que parentes, et bien que de même patrie originelle, doivent être réellement distinguées l’une de l’autre. (Caudina pulchella nov. sp. (PI. V, fig. 14à 17.) J'ai examiné deux spécimens du Musée de Vienne, provenant de la Nouvelle-Zélande, et qui avaient été étiquetés Caudina 118 RÉMY PERRIER coriacea. L'examen des corpuscules calcaires et divers autres caractères m'a montré qu'ils appartiennent en réalité à une espèce différente, qui me paraît nouvelle. La ressemblance de certains sclérites avec ceux du Caudina Bansonnetù Marenzeller (81, p. 126) m'avait paru suggérer un rattachement de ces individus à cette espèce du Japon; mais j'ai pu les comparer depuis à un type de C. Ransonnetü, qui m'a été communiqué par von Marenzeller el me con- vaincre que les deux espèces sont différentes. J’appellerai l'espèce nouvelle Caudina pulchella. L'animal à ia forme ordinaire aux Caudina et son corps comprend une partie antérieure renflée en forme de tonnelet, et un appendice caudal long et grèle. En voiei les dimen- sions principales : longueur du tronc : 32°°; diamètre au milieu : 16*°; longueur de la queue : 31"*; diamètre de la queue vers son milieu : 2°",5. La queue est ainsi plus longue et surtout beaucoup plus grêle que dans les autres espèces de Caudina. La couleur est blanchâtre, légèrement carnée. Le tégument, mince, flexible, lisse, nullement rugueux, ayant à peu près la consistance d’une feuille de papier, laisse voir par transpa- rence les faisceaux musculaires. Les sclérites, assez nombreux, sont #rès régulièrement disposés sur une seule couche dans le tégument. Ils sont simplement jJuxtaposés ou placés à quelque distance les uns des autres. Ils sont construits sur le Lype fréquent dans le genre Caudina, c'est-à-dire (pl. V, fig 14-17) sous la forme de petits disques lenticulaires, dont le bord est constitué par un anneau circu- laire ; la face externe du disque est percée d'un trou central carré, et de 4 perforations latérales ; la face profonde est représentée par 4 travées calcaires disposées en croix (croix primaire) et prenant leur insertion sur l'anneau marginal au milieu de chacune des quatre perforations latérales. Ces sclérites se présentent sous deux formes un peu diffé- rentes, qui existent côte à côte dans le tégument et paraissent correspondre à deux stades de développement. Certains d’entre eux (pl. V, fig 14 et 15) ont une structure délicate; l’anneau marginal et la croix primaire sont relativement grêles, et les HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 119 perforations qu'ils limitent, larges et nettes; sur son bord, l'anneau présente 8 dents allongées et légèrement saillantes, analogues à ce qu'on voit dans le C. Æansonnetii, mais moins proéminentes toutefois. Dans les autres sclérites (fig, 16 et 17), qui sont notablement plus nombreux, du moins dans la région du tronc, l'anneau marginal est beaucoup plus épais: les perforations du selérite sont beaucoup plus petites, plus ou moins oblitérées, sauf la perforation centrale subcarrée, qui persiste à peu près intégralement; de plus, les dents marginales sont beaucoup moins saillantes, et le selérite paraît presque octogonal, Vespace qui séparait les dents ayant été comblé par l’'épaississement de l'anneau marginal. Il est possible que cette forme de sclérites soit la forme définitive, dont la première représente l’état plus jeune. Dans la région caudale, tous les sclérites réalisent, au con- traire, la première forme, à bords franchement dentés; mais ils sont plus robustes et les dents marginales sont plus épais- ses que dans les disques dentés du tronc. Les tentacules ont la même couleur que le tégument : ils sont très #néqgauxr, les dorsaux étant notablement plus grands — presque deux fois plus — que ceux de la face ventrale. Tous cependant ont la même forme ; l’un des exemplaires les montre à l’état d'extension : ils sont renversés en dehors, surtout les dorsaux, et portent quatre digitations : deux digi- tations terminales, grandes et divergentes, et deux autres plus petites, insérées près de la base du tentacule et à son côté externe, si bien que, dans Le tentacule complètement épa- nou et renversé au dehors, ils se trouvent cachés en dessous. Dans les tentacules ventraux, les deux digitations inférieures sont moins éloignées des premières et moins différentes de taille, de sorte que le tentacule paraît se terminer par quatre digitations placées presque côte à côte. Il existe une petite payille génitale très peu proéminente, placée sur l’interambulacre dorsal, à 1 millimètre environ en dehors du cercle tentaculaire. Les papilles anales sont bien visibles sur l’un des échantillons, beaucoup moins nettes sur l’autre, où elles peuvent facilement passer inaperçues. 120 RÉMY PERRIER Voici les quelques points qui me paraissent intéressants à noter pour l'anatomie interne. L'anneau calcaire est d'assez petite nes. on peut lui appliquer la description et la figure que done Dendy pour le Caudina coriacea. Les vésicules tentaculaires sont filiformes, terminées en une longue pointe et très allongées. Les muscles radiauxr sont larges, mais très minces, séparés, dans le milieu du radius, par un espace étroit où court le vaisseau radial. À la partie antérieure. ils deviennent plus étroits, mais par contre font saillie sous la forme d’une petite lame normale à la paroi, qui, sans abandonner celle-ci, vient se fixer sur la pièce radiale correspondante de l’anneau caleaire. C'est une disposition très analogue à celle que nous avons trouvée. beaucoup plus accentuée, dans le Caudina pigmentosa (voir page 73). Je n'ai vu aucun filament musculaire s'isolant pour aller directement à la pièce radiale correspondante. C'est sans doute à la disposition que je viens de décrire que Dendy fait allusion, quand il parle de « slips » de muscles, représentant les rétracteurs absents. Les follicules génitaux sont des tubes très grêles, mais peu ramifiés, contrairement à ce que montre C. coriacea. Us ne sont guère que deux ou trois fois dichotomisés et seulement tout à fait à leur extrémité. Cette espèce appartient au groupe des Caudina coriacea Ransonneth et rugosa, formes très voisinesles unes des autres, et qui ne sont peut-être que des variétés géographiques. Déjà TaéeLz (86, p. 47 el 54) doute que les deux premières soient réellement distinctes. J'ai pu les voir toutes deux ; en réalité, si elles offrent de nombreux points de rapprochement, elles présentent aussi quelques différences, tant dans la spiculation, que dans l'épaisseur, la couleur et la consistance du tégument, et doivent, jusqu'à plus ample informé, être maintenues dis- tinctes, tant qu’on n’aura pas trouvé d’intermédiaires lesreliant. Quant à notre Caudina pulchella, elle nous paraît bien se distinguer des unes et des autres, par la forme grêle de son appendice caudal, par la minceur extrême et la délicatesse de son tégument, et aussi par la forme de ses sclérites calcaires}. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 121 (Caudina coriacea Ilutton, var. brevicauda var. nov. (Fig..N, dans le texte.) Lrrrérarure : Lunwi6 (98), p. 63. [Donne toute la littérature antérieure. | Deux exemplaires du Musée de Vienne, indéterminés, et provenant de la Nouvelle-Zélande, me paraissent, malgré quelques différences de détail, être rapportés à Caudina coriacea, au moins à titre de variété. Ce qui les distingue plus particulièrement du type de l'espèce, c’est la brièveté de l’appendice caudal. Dans lun des individus notamment, où la portion antérieure du corps, le tronc, a la forme d’un ovoïde allongé, long de 50 millimètres, la queue, très nettement distincte du tronc, ne dépasse pas 6 millimètres. L'autre individu, plus grand, a une longueur totale de 85 millimètres ; son appendice caudal se raccorde avec le tronc, sans transition brusque ; aussi ne peut-on que donner approximativement sa longueur ; mais elle à environ 26 millimètres, c’est-à-dire qu'elle est beaucoup plus courte que le tronc, pour lequel il reste 59 millimètres. Nous sommes loin, on le voit, des proportions relatives des deux parties du corps dans les Caudina coriacea typiques. Trois individus du Musée de Vienne que j'ai pu examiner pré- sentaient respectivement pour les longueurs du tronc et de la queue, les nombres suivants : 32; 44 — 36 ; 51 — 38; 46, c’est-à-dire que la longueur de la queue dépasse toujours, et parfois notablement, celle du corps. La peau, grisâtre, est coriace, fortement ridée sur toute sa surface, rêche et rugueuse ou plutôt happant au toucher, grâce aux nombreux selérites qu’elle renferme. Elle est tout à fait semblable à celle des Caudina coriacea iypiques. Les tentacules ont la forme ordinaire, mais ils sont très petits et en partie rétractés dans l’atrium. A quelque distance en dehors du cercle qu'ils forment, est la papille génitale, très peu proéminente. Autour de l'anus, on voit, avec une grande netteté, les cinq groupes de papilles signalés par TaéeLz et Lupwic. Ces groupes, bien séparés les uns des autres, 199 RÉMY PERRIER comprennent chacun environ six papilles, les médianes un peu plus longues que les autres. Les sclérites (fig. N) sont tout à fait conformes aux descrip- tions des auteurs pour le C. coriacea. Leur bord est seulement festonné et présente des épaississements marginaux sur chaque feston saillant. Les trabécules qui forment la croix primaire sont tantôt assez minces, laissant voir les orifices de la face infé- rieure, tantôt plus développés, et alors les oblitérant plus ou moins complètement. GT L’anneau calcaire présente la D NU Gand dacorocen Nariler ee AMLOITINE ordinaire, mais l’encoche cauda. — Sclérites du tégument, vus qui sépare les deux branches de par la face interne (à gauche) et par ne la face externe (à droite), la fourche postérieure des ra- , diales est étroite et peu profonde. Les ampoules tentaculaires sont longues et fines, comme l'a décrit BELL (83). Un canal du sable et une vésicule de Pol très allongée. Les /ollicules génitaux, divisés en deux buissons très fournis, sont plusieurs fois ramifiés, et très fins, presque fili- formes surtout vers leur extrémité. Les muscles ont, dans leur connexion avec le pharynx, la disposition que j'ai décrite plus haut pour les Caudina pigmen- tosa et pulchella. Cette disposition paraît assez générale dans le genre Caudina. Les organes arborescents présentent un développement tout à fait remarquable ; il en existe, comme toujours, deux princi- paux : le droit, sans connexions avec l'appareil circulatoire, monte jusqu'au voisinage de l’anneau calcaire; le gauche, à quelque distance de sa base, se divise en deux branches : l’une d'elles, très allongée, s'étend dans presque tout la longueur du corps; sa partie inférieure est en relation étroite avec le réseau vasculaire de la branche récurrente de l’intestin ; l'extrémité antérieure, au contraire, à partir du tiers antérieur du corps, est à peu près libre d'attache. L'autre branche du poumon gauche passe dans l’interambulacre dorsal gauche, où elle est aussi à peu près libre, mais elle est beaucoup moinslongue que les précédentes. HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 125 Enfin à côté des deux troncs principaux, on voit partir du cloaque d’autres petits troncs peu développés et peu ramifiés|. (Trochodota dunedinensis (Parker) Ludwig. SYNONYME : Chirodota dunedinensis ParkEr (84), p. #18. LirrérarurE : Lunwi6 (98) [Donne toute la littérature antérieure.] Horsr (R.), 1901, Oon Chiridota dunedinensis Parker. Tijdschr. Nederl. Dierk. Vereen. (2). Deel vr. Versl., p. LxxH-Lxxu. J'ai étudié trois individus de cette espèce, appartenant au Musée de Vienne et originaires du port de Dunedin (Nouvelle- Zélande). Le corps est uniformément de couleur rose-chair, sans aucune tache. (D'après Parker, le corps de l'animal vivant est couvert de taches rouges qui disparaissent dans l'alcool.) Dix tentacules, les ventraux un peu plus petits que Les dorsaux, portant chacun latéralement cinq processus digitiformes, les trois inférieurs petits et allant en diminuant de bas en haut, les deux supérieurs, brusquement, notablement plus forts. Ils ont la même couleur que le reste du corps, et je n'ai pas vu la tache persistante que signale Parker à leur base sur la face interne. Tégument opaque dans l'alcool, laissant voir à peine les muscles longitudinaux. Je n’ai rien à ajouter à la description des sclérites donnée par Denpy et par LupwiG ; comme ils l’ont indiqué, 1l y a des roues échelonnées irrégulièrement dans toute l'étendue des trois interambulacres dorsaux, tandis que ces selérites manquent dans les deux interambulacres du trivium. Mais cette localisation se retrouve aussi, nous l'avons vu précédem- ment dans d’autres espèces, notamment dans le 77. purpurea (Voy. p. 76); on ne peut donc pas l'indiquer comme un véri- table caractère différentiel. Par contre, tous les interambu- lacres contiennent des bâtonnets en S recourbés à leurs deux pointes, semblables à ceux qu'on montre dans toutes les espèces du genre ; leur direction générale est transversale, mais sans que ce soit une règle bien rigoureuse|. APPENDICE SUR LA « BIPOLARITÉ » Entre autres résultats auxquels m'a conduit l'étude des Holothuriesantarctiques, j'aimontré définitivement l'existence, dans le groupe des Holothuries, d’une espèce réellement 4ipo- laire, c’est-à-dire représentée à la fois dans les régions areti- que et antarctique, alors qu'elle manque dans toutes les régions intermédiaires. THéez (86) avait déjà indiqué la présence, sur la côte occidentale de la pointe Sud de l’'Amé- rique, de quelques individus appartenant au genre Psolus et qu'il n'avait pas pu séparer spécifiquement des Pso/us squamatus des régions septentrionales ; mais il semble n'avoir pas attaché d'importance à cette constatation, au point que quand il men- tionne (86, p. 260) les points de ressemblance des deux faunes subpolaires, il ne fait pas état de cette forme commune dans son énuméralion des espèces qui se correspondent dans l’une et dans l’autre; LunwiG (98, p. 54) met formellement en doute la détermination de Taéez, et suppose qu'ils’agit d'individus ap- partenant réellement au Psolus antarcticus, la seule espèce quil ait rencontrée dans la collection rapportée par MicHAELSsEen (Hamburger Magalhaensische Sammelreise). Les nombreux spécimens que j'ai eu l’occasion d'étudier m'ont permis au contraire de confirmer la détermination de THéez. L'existence du Psolus squamatus dans la région arctique et dans la région antaretique me paraît un fait défi- nitivement acquis. Comment peut-on expliquer l'existence de ces espèces bipo- laires? Quelle importance faut-il ajouter à la constatation de semblables faits? Nous voilà ainsi conduits à parler encore une fois de cette question de la « bipolarité » qui a été si controversée, et qui a donné lieu, depuis plusieurs années, à tant de notes ou mémoires, où les opinions opposées ont été HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 125 exposées parfois avec une vivacité vraiment hors de propor- ton, comme on va le voir, avec l'importance du débat. On attribue généralement à Tuf£ec (86) la première mention d’une ressemblance curieuse entre la faune arctique et la faune antarctique. En réalité, c'est bien antérieurement, en 1847, que Ross note pour la première fois la présence de plusieurs espèces septentrionales dans les eaux antarctiques. TuéeL, beaucoup moins affirmatif, déclare au contraire qu'iln’v a pas une seule espèce d'Holothuries commune aux deux ré- gions, et « je ne puis concevoir, ajoute-t-il, comment il serait possible qu'il y ait des animaux entièrement semblables dans des régions aussi éloignées... Néanmoins, c’est un fait que les deux faunes en question se ressemblent étroitement, et que, en ce qui concerne les Holothuries, plusieurs formes arctiques sont étroitement alliées à celles de la région antarctique ». En 1891, Pr£FFER généralise cette notion et lui attribue une importance si grande, que c’est son nom qui est le plus étroite- ment lié à l'affirmation de la ressemblance des faunes des hautes latitudes. C'est lui qui crée Les expressions de « bipo- larité » et d’« espèces bipolaires ». « La ressemblance des faunes arctique et antarctique..., dit-il, est si extraordinaire qu'elle a fait depuis longtemps déjà l’'étonnement justifié des zoologistes; seulement, tandis qu'on considère cette ressem- blance comme purement superficielle, et due à une adapta- tion semblable à de semblables conditions de vie, nous devons la tenir pour réelle et intime, et fondée sur une parenté généalogique. Non seulement un grand nombre de familles sont localisées entièrement sur les zones polaires, mais encore les mêmes genres y sont représentés par des espèces vica- riennes ne différant que par des caractères secondaires; mais même un nombre non négligeable d'espèces identiques, appartenant notamment aux Amphipodes, aux Mollusques, aux Géphyriens, aux Bryozoaires et aux Hydraires, existent à l’un et à l’autre pôle, tandis qu’on les chercherait en vain dans les zones intermédiaires. Murray, en 1896, apporte à l'appui de la théorie les résultats statistiques de la publication du « Challenger », qui vient d’être achevée. Il énumère jusqu'à 150 espèces aretiques, qui se 126 RÉMY PERRIER retrouvent identiques dans la région avoisinant l’île Kerguelen, et à cette liste il faut ajouter une centaine d’autres espèces qui y sont représentées par des formes étroitement apparentées, alors qu'aucune des unes ni des autres n’a été rencontrée dans les régions tropicales interposées | Une analogie aussi profonde ne peut évidemment s’expli- quer que par des raisons d'ordre général, et de là est sortie la « théorie de la bipolarité » esquissée par TaéeLz, admise par Murray, et surtout développée par Prerrer (91 et 99). La voici dans ses traits essentiels. La division de la terre en zones climatériques ne s’est établie que pendant la durée de l’époque tertiaire, par suite du refroidissement progressif de la planète; à une époque plus reculée, les conditions de température ont dû être beaucoup plus uniformes, et, sur toute la surface du globe, elles se rapprochaient de ce que nous montre actuellement la zone intertropicale. Sous l'influence de cette uniformité de climat, la faune prétertiaire a dû présenter aussi une uniformité presque absolue, que révèle dans une certaine mesure la paléontologie. (est de cette faune prétertiaire cosmopolite que sont dérivées les diverses faunes actuelles à répartition zonaire. Les représentants des espèces préter- tiaires à répartition universelle ont évolué différemment dans les diverses zones terrestres, en raison des conditions clima- tériques différentes auxquelles elles ont été soumises, de façon à donner de nouvelles espèces à répartition loca- lisée. Or, tandis que, dans les régions chaudes du globe, sous l'influence d’une vie plus active, d’une lutte pour l'existence particulièrement intense et multiforme, la variation des espèces à été accélérée, elle à été au contraire fortement ralentie dans les régions polaires, où le refroidissement n'a laissé subsister qu'un certain nombre de formes capables de s'adapter au nouveau régime. Ces formes polaires sont done les représentants attardés des espèces prétertiaires, repré- sentants à peine modifiés. On les retrouve dès lors à peu près identiques dans les hautes latitudes des deux hémisphères, tandis que, dans toute la région intermédiaire, elles ont HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 1271 disparu pour faire place à d’autres formes nées des mêmes ancêtres, mais considérablement modifiées. Les deux faunes polaires apparaissent ainsi comme deux reliquats de la faune prétertiaire cosmopolite, aujourd'hui séparés par toute l'étendue des zones tropicales et tempérées, où règnent des faunes considérablement évoluées et devenues très différentes. Nous verrons plus loin quelles objections ont été faites à cette théorie. Non seulement elle fut de bonne heure très vivement attaquée, mais le fait même de la bipolarité fut l'objet d’une contestation formelle. OrrMaxs, en 1896, puis de nouveau en 1899, s'élève avec force contre les résultats si catégoriquement affirmés par Pfeffer et par Murray. D’Arcy Taompsox (1898) revise la liste de Murray. Des nombreuses espèces que celui-ci énumère comme bipolaires, un bon tiers repose sur une identification des espèces déjà douteuse pour les auteurs originaux, ou bien niée et contestée par les auteurs qui ont eu à vérifier après eux la détermination première. Un peu plus d’un second tiers est éliminé par d'Arcy Taompsox parce que l'identité ne lui semble pas concluante. Parmi les espèces restantes, une douzaine ont leurs représentants septentrionaux dansles mers du Japon, dont la faune a des affinités toutes méridionales, de sorte qu’on doit considérer ces espèces comme provenant d'une simple émigration et non pas comme ayant deux centres de distribu- tion distincts. Ces éliminations faites, il né reste plus, en fait d'animaux bipolaires, que 12 espèces abyssales, 2 espèces pélagiques (un Mollusque, Janthina rotundata, et un Crustacé, Calanus finnmarchicus) et une Annélide littorale (Terebellides Stræmi). OrTuanx est plus radical encore. Pour lui, le problème de la bipolarité ne doit pas s'appliquer aux espèces abyssales, et je crois, comme lui, que les données que nous possédons actuellement sur cette faune sont tout à fait insuffisantes, si on considère le petit nombre de dragages effectués, comparé à l'immensité des abimes océaniques, et qu'elles ne nous per- mettent pas de donner sur la répartition des espèces abyssales des conclusions vraiment autorisées. Il semble bien d’ailleurs, 128 RÉMY PERRIER malgré qu'en ait dit Murray, que les espèces abyssales aient pour la plupart une aire de distribution très étendue, en rap- port avec l’uniformité des conditions d'existence dans les srandes profondeurs de toutes les régions des Océans, et les espèces abyssales qui nous semblent actuellement bipolaires sont sans doute des espèces à distribution quasi-universelle, dont les représentants dans les régions intertropicales n'ont pas été trouvés Jusqu'ici. Mais si on exclut les formes abyssales, il ne reste plus, dit OrruaANx, qu’un nombre minime d'espèces bipolaires. Il en accorde en tout deux : Terebellides Stræmii et Janthina rotun- data. W consent à y ajouter deux genres, qui n’ont de représen- tants que sur les côtes polaires ou subpolaires, à l'exclusion des côtes intertropicales : le genre Carinoma (Némerte), repré- senté en Angleterre par Carinoma Armand et dans le détroit de Magellan par Carinoma patagonica, et le genre Crangon, qui a de nombreuses espèces dans l'hémisphère nord et une espèce, Cr. antarcticus, à la Géorgie du Sud. Ainsi voilà l'étendue de la divergence des résultats auxquels aboutissent les partisans des deux opinions adverses. D'un côté 250 cas de bipolarité, de l’autre, en comptant largement, 4 cas ! Divergence incompréhensible, semble-t-1l, puisqu'il s'agit, en apparence du moins, de faits positifs. En fait, la question est au contraire des plus délicates. Il ne s'agit pas seulement de compulser les listes qui ont été dressées par les spécialistes, tant pour les espèces de chaque région polaire que pour les espèces tropicales, et de constater dans ces listes la présence ou l'absence de noms communs. Si la faune septentrionale est aujourd’hui bien connue, la faune subantarctique n'a encore donné lieu qu’à peu de travaux ; les espèces de cette région sont en général basées sur un assez petit nombre d'individus observés, quelque- fois sur un seul, et la valeur de semblables espèces est sou- vent discutable, car on risque de considérer comme un caractère spécifique ce qui n’est que variation individuelle. Il faut encore tenir compte de la mentalité diverse des zoologistes descripteurs, dont les uns ont une tendance à multiplier les espèces et les noms spécifiques, tandis que d'autres négligent HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 129 les variations secondaires pour établir des espèces à vaste extension. Les statistiques établies par une simple compa- raison des listes d'espèces sont donc tout à fait insuffisantes. D'autre part, pour qu’une forme soit effectivement bipolaire, il n'est pas nécessaire que ses représentants arctiques et antarc- tiques soient rigoureusement identiques. Ce serait trop exiger, car des individus aussi complètement isolés, soumis à des conditions, très analogues sans doute, mais non tout à fait pareilles, ne peuvent avoir échappé à une certaine variation. Ils devront alors être classés sous des noms spécifiques distincts; mais, lant que la varialion sera peu importante, les deux espèces ainsi formées devront toujours être considérées comme des espèces vicariennes d’une même forme, qui n’en sera pas moins une forme bipolaire, du moment qu'on ne ren- contrera pas sous les tropiques d'espèces s’y rattachant étroi- tement. I ne suffit donc pas, on le voit, de constater que, dans un groupe déterminé il n’y à aucune espèce commune à la faune antarctique et à la faune arctique pour affirmer que ce groupe ne renferme pas de forme bipolaire. Il résulte de cette remarque que la revision critique de la liste de Murray faite par d’ArcY THompson ne pourrait être acceptée qu'après une discussion approfondie des résultats ; a priori, les éliminations qu'il propose ne sont pas toutes légi- times; car, même dans le cas où l'identification d’une espèce du Sud avec une espèce du Nord est douteuse ou contestée, il n'en résulte pas moins, du fait qu'elle à été proposée, que les deux espèces sont prochement alliées. Mais, d’un autre côté, il peut aussi se faire que des formes qui ont été considérées comme bipolaires, parce que les listes des espèces tropicales ne les contiennent pas, soient effective- ment représentées, dans les régions interposées, par des espèces voisines, mais décrites sous des noms différents. S'il en est ainsi, ce n’est pas à une forme vraiment bipolaire qu’on a affaire, mais à une forme à large distribution, à une forme cosmopolite, qui à pu s'adapter à des conditions d'existence fort différentes. C’est encore ce que ne peut révéler le seul examen des listes d'espèces. Le problème, on le voit, est donc fort difficile à résoudre. ANN. SC. NAT. ZOOL. 1.9 130 RÉMY PERRIER Il ne peut être élucidé que par les spécialistes qui auront fait une comparaison soigneuse, non seulement des espèces boréales et des espèces australes, mais encore de ces espèces avec les espèces des régions interposées. Une pareille consultation a été essayée de trois côtés diffé- rents : 1° A l’occasion de l'étude de la riche collection d'animaux antarctiques du Musée de Hambourg, — collection due à plus de 20 voyages du capitaine Pæssler dans les régions australes, à la croisière de MicaaeLssen dans le détroit de Magellan, et aux récoltes de la station allemande de la Géorgie méridionale (Prerrer, 97), — le D' Neumayr à demandé aux spécialistes d'étudier le problème de la bipolarité dans toute son ampleur. 2° Même demande a été faite par Rômer et ScHauDinn (00-04-... à propos de la publication, sous le titre « Fauna arctica », des résultats d’une exploration arctique au Spitzherg. Les auteurs devaient s'occuper et du problème de la bipolarité et de celui de la circumpolarité des espèces arctiques. 3° Plus récemment, l'étude des matériaux rapportés par l'expédition antarctique belge a permis de comparer les formes arctiques, non seulement avec les formes subantarctiques (Magellan, Falkland, Géorgie méridionale, Kerguelen, Nouvelle- Zélande) mais avec la faune de la véritable région antarctique, jusqu'ici restée inconnue. Les résultats de ces études comparatives n’ont pas donné tout à fait l'unanimité attendue. A vrai dire, le plus grand nombre des spécialistes se sont prononcés d’une façon formelle contre la réalité de l'existence même d'espèces bipolaires. C’est Brerreuss (98) pour les Éponges calcaires; Lunwia (99?) pour les Crinoïdes; KœuLer (01) et MortEexsEN (03) pour les Echi- nides; Lupwic (00) et (03) pour les Stellérides; Lupwic (99°), KœuLer (01) et Grixe (00) pour les Ophiurides; Lupwie (98) pour les Holothurides : c’est enfin HERDMAnNx (98) pour les Tu- niciers, qui tous déclarent qu n'y a pas d'espèces communes aux deux zones, où que, s’2{ y a des espèces semblables, elles sont cosmopolites et par conséquent nullement bipolaires. JHERING (97) trouve 9 espèces de Mollusques communes à la région de Magellan, et aux régions boréales; mais elles lui HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 131 paraissent aussi plutôt des espèces à grande extension que des espèces nettement bipolaires. Par contre, pour certains groupes, on trouve soit des espèces bipolaires isolées, soit une ressemblance notable entre les deux faunes. Epmoxp PERRIER (91) s'étend sur la discussion du problème, et, à l'encontre de LupwiG, dresse une liste de 12 espèces arctiques dont on retrouve les équivalentes dans les régions méridionales, équivalentes tellement voisines pour 5 d’entre elles «qu’il n’est pas bien certain qu'on puisse toujours les distinguer ». Pour les Copépodes, Gresssrecar montre la bipolarité réelle du Calanus hyperboreus, qui diffère du C. finnmarchirus des ré- gions chaudes avec lequel on l'avait confondu. De même I. C. THompson (98) signale trois autres Copépodes pélagiques bipo- laires (Metridia longa, Oithona spinifrons, Ectinosoma atlanticum. Pour les Géphyriens, W. Fiscxer (96) et Sarpzey (99) trouvent deux espèces communes (Phascolosoma marqgaritaceum et Pria- pulus caudatus), et deux autres très voisines(Æchiurus unicinctus et chilensis, Priapuloides typicus et australis). SeLenkA (83) ct De GuERNE (88) avaient mentionné déjà des relations sem- blables entre les représentants subpolaires de ce groupe. BuErGER (99) note la bipolarité du genre de Némertiens Carinoma, mais sans espèces bipolaires (03). WELTNER (00), pour les Cirripèdes, signale une espèce bipo- laire (Balanus porcatus) et une autre vicarienne (2. corolli- formis de Kerguelen et /trsutus des Nouvelles-Hébrides). Zimmer (04), pour les Schizopodes, signale de son côté une ressemblance étonnante entre les espèces arctiques et antarc- tiques; si beaucoup de genres arctiques ne se retrouvent point dans le Sud (peut-être par insuffisance de nos connaissances de la faune antarctique), il n’y a que deux genres méridionaux qu'on ne retrouve pas au Nord, et encore cela est douteux; les formes pélagiques sont généralement cosmopolites, mais, pour les Schizopodes marcheurs, sur 25 genres cités par Zimmer, il y en a 5 qui sont bipolaires. Caux (97) constate une remarquable concordance entre le plankton des deux régions polaires. Des genres, des espèces 192 RÉMY PERRIER même (Sugilta hamata, Frilillaria borealis, ete.) s'y rencontrent identiques, alors qu’ils font défaut dans les eaux superficielles tropicales. Enira M. Prarr (01') signale quatre espèces de Polychètes bipolaires communes aux îles Falkland et aux régions arctiques (Gomiada norvegica, Arenicola Claparedi, Polydora polybranchia, Bispira Mariæ), tandis qu'Exzers (96) mentionne trois espèces du même groupe communes au détroit de Magellan et aux régions arctiques (Nephthys longisetosa, Notomastus latericeus, Scolecolepis vulgaris). Enfin Eprra Pratt (01°), dans un mémoire où se trouve un historique assez complet de la question, donne une liste où se trouvent résumés ses travaux et ceux de ses devanciers, et où sont énumérés 2% cas d'espèces Attorales bipolaires, plus 8 cas de genres bipolaires, représentés dans les deux faunes polaires par des espèces différentes, mais inconnus sous les tropiques. Soit en tout 32 cas. Il faut ajouter à cette liste, un certain nombre d’autres cas signalés depuis, et, entre autres, le Psolus squamatus, dont j'ai montré définitivement la bipolarité. Voilà l’état actuel de la question. Malgré la diversité des résultats et des opinions que nous venons de résumer rapidement, il semble cependant qu'une conclusion puisse se dégager de ce fouillis apparent. Un point semble désormais acquis : il n'existe réellement pas entre les deux faunes la ressemblance étroite qu’avaient cru constater Prgrrer et Murray. En dehors de certaines analogies générales, qui s'expliquent facilement par la similitude des mi- lieux et par une adaptation parallèle à des conditions d'existence très semblables, il semble aujourd'hui impossible de soutenir que la faune arctique et la faune antarctique se correspondent au point qu'on puisse les considérer comme deux reliquats actuellement séparés d’une seule et même faune primitive. En présence de cette constatation, basée, non plus sur un examen superficiel, mais sur une étude approfondie des deux faunes, il n’est plus besoin de faire intervenir une théorie générale explicative. D'ailleurs la « théorie de la bipolarité » HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 133 soulève des objections formelles, dont quelques-unes ont été développées avec force par OrTManx (96). Les principales sont les suivantes : 1° Même en admettant l’uniformité de climat des temps prétertiaires, il n’en résulte pas nécessairement l'existence à cette époque d’une faune universelle. Il n’est pas admissible qu'il n’y eût déjà des faunes locales parfaitement différentes et que des régions aussi distantes que les régions polaires aient pu être peuplées par des faunes identiques, alors surtout qu’elles étaient séparées par des masses continentales énormes, que la géologie nous montre avoir été vraisemblablement dirigées zonairement, de façon à former entre les deux pôles de longues barrières infranchissables aux animaux marins. 2° Même en admettant une faune prétertiaire cosmopolite, développée sous l'influence d’un climat tropical universel, il n'est guère possible de concevoir que ce soient précisément les faunes polaires, c'est-à-dire celles qui ont été soumises aux variations de climat les plus étendues, qui soient restées le plus inaltérées, tandis que la faune intertropicale, demeurée à peu près dans les conditions primitives, aurait au contraire été profondément modifiée. On invoque, il est vrai, l’activité vitale plus intense sous les tropiques, la lutte pour la vie plus âpre et plus variée d’aspects, causes qui auraient favorisé la variation des espèces dans les régions chaudes; mais c'est donner une importance bien grande à l’action modificatrice de la sélection naturelle. L'influence toute-puissante du milieu à dû peser d'un bien autre poids dans la variation des espèces, el les formes polaires qui ont traversé successivement toutes les phases du refroidissement de climat, ont dû subir une série de modifications autrement longue que les formes tropicales, restées dans des conditions identiques, ou du moins très ana- logues à celles de la période prétertiaire. 3° D'ailleurs, les faunes arctique et antarctique portent l'empreinte de cette évolution plus prolongée et plus pro- fonde. Pour les Holothuries en particulier, les formes primi- tives sont fort mal représentées dans les hautes latitudes, où dominent au contraire les formes hautement spécialisées (Ps0- dus, MoLPADIDÆ, SYNAPTIDÆ, etc.). 197% RÉMY PERRIER Mais, si les deux faunes polaires ne montrent pas le paral- lélisme qu’on avait cru entrevoir, on ne peut, d'un autre côte, méconnaître l'existence réelle de formes vraiment bipolaires, représentées aux deux pôles, absentes sous Les régions tropi- cales. Même en se limitant, comme il a été dit précédemment, aux formes littorales et pélagiques, le nombre des espèces bipolaires n’est nullement négligeable, quoi qu’en aient dit quelques aüteurs, trop absolus dans leurs affirmations. S'iln'y a pas de faune bipolaire, il y a donc incontestablement des es- pèces bipolaires, dont la répartition singulière demande une explication. Mais ces espèces bipolaires sont des formes 1s0- lées, exceptionnelles. Leur nombre est d’ailleurs très variable suivant les groupes zoologiques : les Schizopodes, les Poly- chètes, d’autres encore en présentent d'assez nombreuses; dans d’autres groupes, il n'y en a qu’une ou deux; ailleurs encore, il n’y en a pas du tout. Dès lors il n’y a plus à faire appel, pour expliquer les espèces bipolaires, à une théorie générale, car les causes de la bipolarité ne sont sûrement pas d’ordre général ; les espèces bipolaires sont des cas isolés, et leur bipolarité tient à des causes qui peuvent varier suivant les cas, causes intrinsèques, dépendant des moyens de dissémination propres à l'animal lui-même, ou causes extrinsèques, c’est-à-dire inhérentes non pas à l'animal, mais aux causes extérieures (courants, etc.). Et tout d’abord, Les causes de la bipolarité doivent être des causes actuelles et non pas des causes géologiques. Si des in- dividus de même espèce ont été complètement séparés aux deux pôles, depuis le commencement de l’époque tertiaire, comment admettre que, pendant une si longue période de temps, ces individus ne se soient pas plus ou moins complète- ment modifiés, sous l'empire de conditions d'existence si nou- velles pour eux? Et comment admettre dès lors que ces deux évolutions indépendantes aient pu suivre une marche si rigou- reusement parallèle, que les représentants actuels de ce double phylum à l’un et à l’autre pôle aient gardé une similitude qui permet de les ranger aujourd’hui encore dans la même espèce ou dans des espèces vicariennes très voisines? La séparation des deux aires géographiques des espèces bipolaires est très HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 135 certainement d'époque beaucoup plus récente. Cela admis, pour expliquer cette répartition géographique dissociée, trois hypothèses peuvent être invoquées : 1° Le point de départ de l'espèce bipolaire est une espèce primitivement tropicale, dont des représentants auraient émigré en sens inverse vers l’un et l’autre pôle. Ces repré- sentants émigrés, soumis dans leur nouvel habitat à des conditions semblables, auraient évolué parallèlement et isolément pour s'adapter à des conditions nouvelles, se différenciant ainsi de leurs congénères restés sous les tro- piques, et affectés aujourd’hui encore de la plupart des carac- tères primitifs ; ils seraient arrivés de la sorte à constituer deux nouvelles espèces, qui, grâce à leur commune adaptation, sont identiques l’une à l’autre, ou du moins très voisines. Est-il nécessaire de faire remarquer qu’une semblable conver- gence est, pour les raisons invoquées tout à l'heure, très im- probable ; l'évolution de deux phylums aussi complètement séparés géographiquement aurait pu aboutir à la production de formes analogues, mais non identiques, d'autant plus que, quoi qu'on en ait, les conditions sont loin d’être les mêmes dans les régions arctiques et dans les régions antarctiques, en raison de la répartition bien différente des masses conti- nentales et des océans, de l’uniformité des conditions aus- trales, opposée à la grande variété des conditions boréales. 2° Dans une deuxième hypothèse, l'espèce se serait formée à l’un des pôles, et l’autre pôle se serait peuplé par une mi- gration de certains de ses représentants. Une semblable migra- tion nest possible que si les émigrants rencontrent une voie où se trouvent réalisées des conditions sensiblement pareilles à celles de leur milieu primitif. Un certain nombre d'auteurs ont admis que les eaux profondes tropicales pouvaient établir entre les eaux super- ficielles des deux régions polaires la communication voulue. Ces eaux profondes constituent en effet une masse ininter- rompue, dont la basse température se rapproche de celle des eaux superficielles des hautes latitudes. Les animaux qui peuplent ces dernières peuvent donc émigrer par cette voie, et on sait que l'opinion a été soutenue par de nombreux 136 RÉMY PERRIER naturalistes, à la suite de Gwyx JEFFREYS, que les profondeurs des océans auraient été exclusivement peuplées par des émi- grations venues des eaux superficielles des régions polaires. Bien que cette origine exclusivement polaire de la faune abyssale ne puisse plus être soutenue, on peut cependant ad- mellre que certaines formes animales, vivant à la surface dans les régions polaires, peuvent émigrer dans la profondeur. CHUN considère que c’est le cas pour les animaux pélagiques, qui peuvent émigrer non pas à la vérité par les régions vraiment abyssales, mais par la zone infrasuperficielle : cette zone en effet présente dans la région tropicale des formes péla- giques communes avec les eaux de surface des régions po- laires, et Caux estime que ces formes à large extension sont plus fréquentes qu'on ne le pense. « Bien que jusqu’à pré- sent, dit-il, on ne puisse citer qu'un exemple certain [Sa- gutu hamata] d'espèce bipolaire [habitant les eaux superfi- cielles des deux pôles] peuplant les régions profondes et froides à travers tout l'Océan, on ne peut s'empêcher cependant d'en reconuaitre la force démonstrative, et d'accorder qu’'au- jourd'hui encore une communication existe par là entre les deux faunes. Je suis convaincu qu'une utilisation persévérante du filet fin dans les expéditions futures donnera non seule- ment de nouveaux exemples de connexions entre les orga- nismes pélagiques propres aux régions froides, mais encore de nouveaux cas d'extension générale. » Cette voie des eaux infrasuperficielles peut être suivie non seulement par les animaux pélagiques proprement dits, mais aussi par les larves pélagiques de beaucoup d'animaux benthiques. De son côté, JueriNG (97) pense que c’est par une migra- tion sur les fonds abyssaux qu'on peut expliquer la répartition des quelques Mollusques cités comme bipolaires, et ORrMANN (96) explique de même la bipolarité de certains Crustacés (Pandalus, Pontophilus). Par contre, cette voie semble fermée à beaucoup d'orga- nismes : les conditions de la vie sont en effet très spéciales dans les grandes profondeurs. Tout ne se résume pas dans la température, et, en particulier le régime alimentaire des ani- maux abyssaux est forcément très différent de celui des ani- HOLOTHURIES ANTARCTIQUES 57 maux de la zone littorale, en raison notamment de l'absence des végétaux, qui ne peuvent exister dans les eaux profondes dé- pourvues de lumière. Seuls des carnassiers ou des « mangeurs de vase » peuvent émigrer dans les eaux profondes, sans mo- difier profondément leur régime. Encore, même chez ceux-là, cette faculté de migration est-elle fort limitée. Voici, par exemple, les Holothuries : elles semblent « priori, mieux qu'au- cun autre groupe du Règne animal, pouvoir s'adapter aux con- ditions abyssales, et l'abondance des espèces de ce groupe dans les grandes profondeurs le démontre surabondamment. Les Holothuries des régions polaires devraient donc émigrer avec la plus grande facilité dans les zones abyssales, et passer par là facilement d’un pôle à l’autre. Il n'en est rien cependant. La faune profonde des Holothuries, formée en majeure partie d'espèces très spécialisées, s'oppose de la facon la plus absolue à la faune polaire et subpolaire. lei prédominance des Cucuma- RuDÆ et des SyNaPTiDÆ, absence presque complète des HoLo THURIHDÆ ; là proportion exactement renversée, et si quelques SYNALLACTINÆ et quelques ELASIPODES se retrouvent dans les faunes arctique ou antaretique, elles résultent, j'en suis convaincu, d'une migration inverse; ce sont des Holothuries abyssales qui sont, dans les régions froides, devenues littorales ou sublittorales. La même conclusion paraît devoir être émise pour les représentants de la famille des Mocpapupæ qu’on retrouve dans les deux régions. 3° Reste une troisième hypothèse qui est vraisemblable- ment le plus fréquemment réalisée, celle de formes à très large distribulion, capables par conséquent de s'adapter aux conditions de milieu les plus différentes, et pouvant par suite se montrer dans les hautes latitudes aussi bien que dans les régions plus chaudes interposées, soit en restant réellement identiques, soit en se modifiant légèrement sous l’action du climat. Dans le premier cas, l’espèce est tout à fait cosmopo- lite. Dans le second cas, l'espèce primitive peut se morceler en une série d'espèces vicariennes formant une chaîne ininter- rompue, les unes boréales, les autres tropicales, les autres australes, et il n'est pas impossible, dans ce cas, que sous l'action de facteurs identiques, les premières et les dernières 138 RÉMY PERRIER ne se ressemblent plus entre elles qu’elles ne ressemblent aux espèces tropicales. C’est là un premier acheminement vers la bipolarité. C'est ainsi que PRATT à pu constater que le genre _d'Annélides Polychètes Goniarda, qui est cosmopolite, est repré- senté en Europe par (roniada norvegica et aux îles Falkland par une forme si voisine que cet auteur en a fait une simple va- riété, Gonada norvegica falklandica; sous les tropiques, au contraire, existent d’autres espèces voisines, mais distinctes. Mais on peut aller plus loin : il peut se faire que les repré- sentants tropicaux de cette forme, primitivement cosmopolite, viennent à diminuer considérablement en nombre ou même à disparaître, sous l’action de la concurrence vitale, beaucoup plus active sous les tropiques, où la vie est particulièrement intense, qué partout ailleurs ; alors les espèces extra-tropi- cales, qui, soumises à une lutte pour la vie moins acharnée, auront pu échapper aux causes extérieures de destruction, se trouveront séparées par une large étendue de côtes où manque désormais complètement la forme considérée; elles seront devenues des formes réellement bipolaires. C'est sans doute de la sorte qu’il faut expliquer la bipola- rité du Psolus squamutus. I n’est pas sans intérêt de remar- quer que les dragages de « l’Albatros » ont recueilli sur la côte occidentale de l'Amérique deux espèces de Pso/us : Psolus pauper, par 21° de lat. N {temp. : 3°,3 C.; prof. : 676 brasses) et Psolus digiütatus, par 7° de latitude N (temp. : 3°,9; prof. : 6975 brasses) que Ludwig a décrites comme espèces nouvelles, mais dont il signale la ressemblance avec les espèces septen- trionales, notamment avec les Psolus squamatus et Fabricu: Il serait intéressant de faire l'étude comparative de toutes ces espèces, tant au point de vue anatomique qu’au point de vue zoogéographique. Ce sont très vraisemblablement des formes représentatives d’une espèce autrefois uniformément répandue sur tout le littoral américain du Pacifique, et dont seules les es- pèces boréales et australes ont atteint ou gardé leur plein épa- nouissement, les espèces des régions intermédiaires ayant plus ou moins disparu ou émigré dans Les profondeurs voisines. Cette longue côte ouest-américaine est d’ailleurs privilégiée au point de vue des relations entre les régions arctiques et HÔLOTHURIES ANTARCTIQUES 139 antarctiques. OrrTManx est le premier, à ma connaissance, à avoir insisté à juste titre sur les conditions particulières à cette côte (1), presque uniformément baignée par des eaux froides ou tempérées, conditions qui en font une sorte de trait d'union entre les deux régions polaires. Les représentants d’une espèce polaire pourraient, suivant lui, cheminer par cette voie d’un pôle à l’autre. C'est de la sorte qu'il explique la bipolarité du genre Crangon, dont l'espèce australe, Cr. an- tarcticus, de la Géorgie du Sud, est voisine d’une espèce cali- fornienne, Cr. franciscorum. C’est aller un peu loin, semble-t-il. En fait, on ne connaît jusqu'ici aucune espèce représentée sur toute cette côte, sans aucune lacune géographique ; les courants chauds qui vien- nent frapper la côte de Panama, forment une barrière entre les deux faunes Nord et Sud, et je ne crois pas, comme le veut ORTMANN, qu'il y ait actuellement une communication sur la côte ouest-américaine entre les régions extrêmes; mais on peut admettre, à titre d'hypothèse fort vraisemblable, que cette communication à dû exister et n'a été interrompue qu'à une époque relativement récente, sans doute par létablisse- ment de courants chauds nouveaux. Nous avons, dans les pages qui précèdent, cherché à résu- mer l’état actuel de la question de la bipolarité. Cette ques- tion parait aujourd'hui bien définitivement close, et nous pouvons, semble-t-il, lui donner la conclusion suivante : Il n’y a pas de faune bipolaire : 11 n’y a done pas lieu de rechercher une théorie générale de la bipolarité. Il y à au contraire des espèces bipolaires, isolées dans les divers groupes zoologiques ; mais l'explication de feur bipolarité doit être recherchée indépendamment dans chaque cas particu- lier. Il semble que, dans la plupart des cas, les espèces bipo- laires sont le reliquat d'espèces à vaste extension, dont les représentants intertropicaux auraient disparu sous l’action d'une sélection naturelle particulièrement active sous les tropiques, ou sous l’action de conditions climatériques nou- velles, récemment établies. (4) Il donne la même importance zoogéographique, mais avec moins de raison, semble-t-il, à la côte orientale (européo-africaine; de l'Atlantique. 81. 82. 83. 97. 62. 90. 01. 72. 79. 85. 89. 74. 82. 86. 87. 92. 94. 98. INDEX BIBLIOGRAPHIQUE À.— Holothuries antarctiques. BELz (F. JErFREY), Account of the zoological Collections made during the Survey of H. M. S. « Alert » in the Strait of Magellan and on the Coast of Patagonia : Echinodermata. Proc. Zool. Soc. 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Fig. 5. — 14. — Un fragment de l'anneau calcaire : R, R, pièces radiales ; 1, in- terradiale; m, musele rétracteur du pharynx. Grossi. Fig. 6. — Cucumaria leonina Semper. — Un individu allongé, à pieds épars. Fig. 7. — 1d. — Un autre individu à pieds sériés, vu par la face ventrale. Grossi 2 fois. Fig. 8. — Id. — Le mème individu, vu par la face dorsale. Fig. 9. — Cucumaria ocnoïdes (Dendy) Ludwig. — Un individu à papilles nom- breuses, vu par la face ventrale, de grandeur naturelle. Fig. 40. — 14. — Le même individu, esquisse de la face dorsale. Fig. 11-13. — Id. — Sclérites superficiels du tégument. Grossis 320 fois. Fig. 11. — Un sclérite à anneau régulier, vu par la face interne (convexe). Fig. 12. — Un autre sclérite, dont l'anneau basilaire {s’est compliqué de pro- longements internes, fusionnés en une lame plane qui obture en partie son ouverture; vu par la face interne. Fig.13.— Lemêème,vu par sa face externe, montrant la lame plane obturatrice. PLANCHE II Fig. 4. — Cucumaria parva Ludwig. — Un individu, vu de profil, grossi 3 fois. Fig. 2. — Psolilium convergens (Hérouard) R. Perrier. — Un individu, vu par la face ventrale, grossi 4 fois. Fig. 3. — Id. — Le mêmeindividu, vu de profil. Fig. 4. — Psolidium convergens. — Un autre individu, vu par la face dorsale, avec la couronne tentaculaire invaginée. Mème grossissement. Fig. 5. — Psolidium dorsipes Ludwig. — Un individu, vu de profil, grossi 3 fois. Fig. 6. — Id. — Le même individu, vu par la face ventrale. Fig. 7. — Id. — Fragment d’une écaille dorsale, montrant la constitution du réseau calcaire, et percé de trois larges orifices (p) servant au passage des pédicelles. Gr. 100. Fig. 8-10. — Id. — Petits sclérites superficiels du tégument ventral (ceux du tégument dorsal sont identiques). Gr. 350. Fig. 11-12. — 1d. — Sclérites principaux de la face ventrale. Gr. 350. Fig. 13. — Id. — Forme intermédiaire entre les sclérites normaux de la face ventrale, et les sclérites sans tubercules qui avoisinent la face des pieds. Gr. 350. EXPLICATION DES PLANCHES l es Qt PLANCHE III Fig. 1-3. — Cucumaria tibulifera R. Perrier. — Tables des téguments vues par la face externe : — 1 et 2, tables ordinaires à huit trous; 3, table dont le disque présente, outre les huit trous normaux, d’autres mailles extérieures. Gr:;,235; Fig. 4-6. — Id. — Tables vues de profil. Gr. : 235. Fig. 7-8. — Id. — Tables prises dans les pédicelles, vues par leur face externe. Cr; Fig. 9. — Id. — Une semblable table, vue de profil. Gr. : 235. Fig. 10-11. — Id. — Sclérites de la paroi dévaginée du pharynx. Gr.: 350. Fig. 12-15. — Id. — Sclérites des tentacules. Gr.: 350. Fig. 16. — Cucumaria parva Ludwig. — Une petite plaque profonde du tégu- ment dorsal, interposée aux écailles. Gr. : 235. Fig. 17-148. — Id. — Petites coupes superficielles du tégument dorsal. Gr. : 235. Fig. 19. — Id. — Un autre sclérite superficiel pris sur un individu à caractères un peu aberrants. Tous les sclérites superficiels avaient ici cette forme. GE: : 235: Fig. 20. — Thyone spectabilis. — Une partie de l'anneau calcaire grossie 3 fois : R, pièce radiale; 1, pièce interradiale. Fig. 24. — Jd. — Partie de l'anneau calcaire anormal d'un autre individu: Rdg, pièce radiale dorsale gauche ; li, interradiale impaire ; Rdd + Ild, ra- diale dorsale droite, soudée à l'interradiale latérale droite ; Rld, radiale latéro- dorsale droite ; Ivd, interradiale ventrale droite ; Ri, radiale impaire. Fig. 22. — Id. — Un des muscles rétracteurs du pharynx, à l’état de contrac- tion, grossi 2 fois et demi. Fig. 23. — Id. — Un autre à l’état d'extension. PLANCHE IV Fig. 4. — Caudina pigmentosa Rémy Perrier. — L'animal, grandeur naturelle. Fig. 2-3. — 14. — Sclérites ordinaires du tégument, vus de profil. Gr. : 330. Fig. 4-5. — Id. — Sclérites analogues vus par la face interne et par la face externe. Gr. : 330. Fig. 6 — Id. — Un autre sclérite (forme plus rare) semblable à ceux du Caudina rugosa, sans doute forme primitive des précédents. Gr. : 330. Fig. 7-9. — Id. — Sclérites enfermés dans leur capsule colorée. Gr. : 330. Fig. 10. — Caudina rugosa Rémy Perrier. — Une partie de l'anneau calcaire : R, pièces radiales ; 1, interradiale ; m, fossettes des pièces radiales où vien- nent s’insérer les muscles rétracteurs du pharynx. Gr. : 330. Fig. 11-12. — Id. — Deux sclérites vus par la face interne et par la face externe. Gr-1330. Fig. 13. — Chiridota Marenzelleri. — L'animal vu par la face dorsale. Grossi 2 fois. Fig. 14. — Id. — Portion moyenne du corps, grossie # fois, montrant, sur chaque côté, deux papilles rotigères. Fig. 15. — Id. — Un tentacule grossi 8 fois. Fig. 16. — 1d. — Un fragment de l'anneau calcaire : I, interradiales; R, ra- diale. Fig. 17. — Id. — Une roue extraite des papilles latérales. Gr. : 330. Fig. 18-22. — Id. — Sclérites étoilés du tégument. Gr. : 330. Fig. 23. — Id. — Sclérites des tentacules. Gr. : 370. ANN. SC. NAT. ZOOL. 410 146 RÉMY PERRIER PLANCHE V Fig. 1. — Phyllophorus anatinus Rémy Perrier. — L'animal, vu par la face dorsale. Fig. 2. — Id. — L'animal, vu de profil. Fig. 3. — Id. — Un pédicelle, vu in toto, grossi, montrant la disposition des sclérites et la réduction de la plaque terminale. Gr. : 100. Fig. 4-6. — Id. — Sclérites principaux du tégument. Gr. : 100. Fig. 4. — Sclérite cruciforme (forme la plus fréquente). Gr. : 100. Fig. 5. — Sclérite triradié. Gr. : 100. Fig. 6. — Sclérite vu de profil. Gr. : 100. Fig. 6°. — Id. — Sclérite d'un pédicelle, vu de profil. Gr. : 100. Fig. 7-8. — Id. — Plaques secondaires du tégument. Gr. : 100. Fig. 9. — Id. — Disque terminal rudimentaire du pédicelle. Gr. : 100. Fig. 10. — Cucumaria Filholi Rémy Perrier. — L'animal vu de profil. Grossi. Fig. 11. — Id. — Cloche réticulée superficielle, vue par la face concave (externe). Gr. : 500. Fig. 12. — Id. — Une semblable, vue de profil. Gr. : 500. Fig. 43. — Cucumaria ocnoides (Dendy) Ludwig. — Plaque canaliculée du tégu- ment, vue par sa face externe, montrant les canaux creusés dans son épais- seur et les orifices superficiels. Gr. : 280. Fig. 14-15. — Caudina pulchella, nov. sp. — Sclérites étoilés. Gr. : 360. Fig. 46-17. — 1d. — Sclérites octogones (forme la plus fréquente). Gr. : 360. RECHERCHES ANATOMIQUES, HISTOLOGIQUES ET PHYSIOLOGIQUES SUR LEN GLANDEN VENIMEUNES OÙ GLANDES DEN CHÉLICÈRES DES MALMIGNATTES (Latrodectus 13-quttatus (1) Rossi) Par M. L. BORDAS, DOCTEUR ES SCIENCES NATURELLES, DOCTEUR EN MÉDECINE, MAÎTRE DE CONFÉRENCES A LA FACULTÉ DES SCIENCES DE RENNES. Les Latrodectes sont rangées par M. Edmond Perrier dans l'ordre des Araneæ, sous-ordre des Araneæ veræ et famille des Therididæ (Voy. Traité de Zoologie, p. 1111). Ce sont des Arachnides caractérisées par la présence de treize taches d’un rouge plus ou moins foncé, placées sur l'abdomen, par des yeux disposés sur deux lignes parallèles, par un céphalothorax séparé de l'abdomen et des chélicères terminés par un crochet simple, perforé à son sommet. Elles possèdent des glandes à venin (gl. des chélicères) très volumineuses, situées de chaque côté et à la face dorsale du céphalothorax et qui vont aboutir à l'extrémité des chélicères. La piqûre de ces animaux est considérée, dans certains pays, la Corse entre autres, comme très dangereuse et parfois même mortelle. Pourtant, d'après de nombreuses observations que (4) Nous devons la détermination de cette espèce à l'extrême obligeance de M. E. Simon, à qui nous nous empressons d'adresser ici nos bien sincères remerciements. 148 L. BORDAS nous avons pu faire sur nous-mème et sur différents Insectes, il résulte que : 1° Ces piqûres ne sont nullement mortelles pour l'homme et les gros animaux, comme on le croit communément ; 2 Quelles produisent sur certains Insectes (Mouches, Coléoptères, Orthoptères, etc.) une sorte de paralysie suivie d'une mort très rapide ; Et 3° que des piqûres, faites au poignet et au bras, par les Malmignattes, n'amènent qu'une légère inflammation, suivie de fortes démangeaisons, le tout n’offrant jamais aucun caractère de gravité. HISTORIQUE Les glandes venimeuses, où glandes des chélicères, n'ont été, chez les Latrodectus, objet d'aucune recherche anatomique. Pourtant, les premiers entomologistes, Meckel, Siebold, Ley- dig, etc., qui se sont occupés des Araignées, ont reconnu, chez ces animaux, l'existence d'organes glandulaires composés d’une partie sécrétante et d'un canal excréteur. Dugès et E. Blanchard ont décrit, chez la Mygale et la Séges- trie, des glandes sacciformes, fixées à la région dorsale du céphalothorax par un mince filament de tissu conjonctif. Chez le Latrodectus 13-quttatus Rossi, un pareil filament n existe pas, et l'extrémité distale de la glande se termine, d'après nos recherches, en forme de cæcum conique ou arrondi. D’après Bertkau, la glande venimeuse présente la forme d'un sac allongé, qui s'étend, à son extrémité antérieure, vers le canal excréteur. Ce dernier peut naître du point central du bout antérieur de la glande (Drossus) ou du côté de ce bout (Helio- phanas) ; 1l peut être droit ou tortueux. Il s'ouvre ordinaire- ment du côté convexe et plus rarement du côté concave du crochet. E. Blanchard, ainsi que nous l'avons dit, représente le bout postérieur de la glande de la Ségestrie perfide comme pourvu d'un suspensorium qui s'attache, par son autre extré- mité, au tégument du céphalothorax. Meckel décrit la glande à venin comme formée d’un épithé- LES GLANDES VENIMEUSES OU GLANDES DES CHÉLICÈRESs 149 lium sécréteur, d'une membrane propre et, à l'extérieur, d'un muscle roulé en spirale. Pour Siebold, la musculature de lor- gane est formée de fibres striées chez Lyrosa, Drossus el T'egena- ria, tandis qu'elles sont lisses chez l'£peura, Thomisus et Mygqale. Leydig, au contraire, constate que les muscles sont striés chez toutes les Aranéides. Schimkewitsch, dans son anatomie de l'£peura, consacre un chapitre tout entier à l'étude du système glandulaire de cette Araignée. Il étudie les glandes salivaires, les glandes pigmen- tées du tube digestif, les glandes séricigènes et les glandes à venin (Voy.les Annales des Sriences naturelles. — Zoologie, 1884, 6° série, p. 44). « Les glandes venimeuses de l'Epeire, dit-1l, ressemblent beaucoup à celles du Drossus. Leur forme est très variable. Chez quelques individus, la glande surpasse le bord postérieur du ganglion sus-æsophagien ; chez d'autres, elle n'atteint qu'à son bord antérieur. Chez le Pholcus, la glande d'un côté est souvent plus courte que celle du côté opposé. Il n'ya point de suspensorium et le bout postérieur de l'organe est incliné vers le bas. Le conduit, avant son ouverture, forme un renflement et ne s'ouvre pas par une fente, comme Le décrit Bertkau, mais bien par un orifice rond, sur le côté postéro- extérieur du crochet ». Chez la Disdera, le conduit est dépourvu de rentlement terminal. D'après Mac-Leod et Schimkewitsch, les glandes à venin comprennent : {Une mince couche de issu conjonctif externe : 2° une assise de fibres musculaires ; 3° une couche basilaire ; et enfin, 4° un épithélium sécréteur reposant sur cette dernière. Les deux membranes conjonctives sont réunies entre elles par des prolongements de même nature, séparant ainsi les faisceaux de fibres musculaires. Il résulte de celte disposition, que la musculature tout entière est enveloppée par du tissu con- Jonctif. C. Vogt et Yung, dans leur Traité d'Anatomie comparée pratique, L. If, p. 220, décrivent également les glandes reni- meuses de l'Epeira diadema Li. — Le canal débouche près de la pointe du crochet, par un pore rond etétroit. Ise continue, en s’élargissant, dans le corps de la glande située à la face dorsale 150 L. BORDAS du céphalothorax et près de la ligne médiane. L’extrémité postérieure de ce sac fusiforme touche le tégument dorsal. Le sac glandulaire est entouré extérieurement par une mem- brane conjonctive très mince, à noyaux rares, qui envoie, vers l'intérieur, de fines lamelles, séparant les fibres musculaires et se reliant, en dedans de la couche musculaire, à une expansion qui sert de soutien à l’endothélium sécréteu.r Etude anatomique des Glandes venimeuses de Latrodectus 13-quttatus (1) Rossr. Nous n'étudierons, dans notre travail actuel, que les glandes venimeuses qui viennent déboucher à l'extrémité des chélicères (glandes des chélicères), très importantes par leur sécrétion et leur volume, et laisserons, pour une étude ultérieure, les petits groupes glan- dulaires que nous avons rencontrés dans le rostre. Les glandes venimeuses des Latrodectes sont très volumineuses et présentent la forme de sacs cylindriques, de couleur blanchâtre, parfois droits ou légèrement inclinés vers la face dorsale du céphalo- thorax ou parfois, au contraire, à peine recourbés en forme de S. Leur volume etleur coloration permettentdelesrecon- naître facilement et deles distinguer des organes environnants. Ces glandes, beaucoup plus étendues que celles des autres Araignées, atteignent près de 3*°,9 de longueur, depuis leur extrémité postérieure jusqu'à leur pénétration à la base des chélicères. Elles s'étendent au- Fig. 1. — Face dorsale de La- trodectus 13-quttatus, mon- trant, en pointillé, la place occupée par les glandes venimeuses. — €, chéli- cères ; p, palpes ; m, pattes ; cl, céphalothorax; ab, par- tie antérieure de l'abdomen ; G, glandes venimeuses. dessus des cæcums stomacaux et se terminent par une pointe légèrement conique. Latéralement, elles sont limitées par de gros faisceaux mus- culaires qui vont se fixer à la face dorso-antérieure du céphalo- thorax (Voy. PI. VI, fig. 1). Elles sont également séparées par un espace médian, dans lequel se trouvent logés des muscles, (4) Les divers échantillons qui nous ont servi pour cette étude, nous ont été fournis par M. A. Giacomaggi, maire de Vero, près Ajaccio et par nos amis J.-B. Orsoni et J. Sampiéri, à qui nous sommes heureux d'adresser nos meilleurs remerciements. 152 L. BORDAS des filets nerveux oculaires et l'artère céphalique antérieure dont un certain nombre de ramifications terminales irriguent les parois de la glande. La forme extérieure de lorgane est parfois assez variable d'un individu à l’autre. Souvent, les deux glandes sont de mème longueur; quelquefois aussi, l'une d'elles est plus courte que sa voisine et ne mesure que les deux tiers de la longueur de cette dernière. Elles sont souvent légèrement sinueuses et recourbées à leur extrémité postérieure qui est arrondie ou terminée par une pointe tronconique, laquellen’estjamais prolongée par un filament de tissu con- Jonctif, ainsi que Dugès et E. Blanchard l'ont décrit chez les glandes venimeuses des Mygales et des Ségestries. La coloration des glandes des chéli- Fig. 2 — Ensemble des glan- Côres (glandes venimeuses) est d’un blanc des venimeuses du Latro- / dectus. — e, chélicères ; », mat. Leursparoismusculairessonttrans- faisceaux musculaires; &l, PAL UT z = aies codant parentes, épaisses et formées de fibres à direction presque longitudinale ou légèrement oblique et spiralée. L'enroulement en spirale est 1e1 beaucoup moins accusé que chez certaines Araignées, les £peires entre autres (Voy. PI. VI, fig. 1). Les deux glandes cheminent parallèlement et ne sont sépa- rées que par un étroit espace rempli par des faisceaux museu- laires aplatis, des fibres nerveuses et un vaisseau sanguin. Au fur et à mesure qu'elles se rapprochent de la base des chélicères, l’espace diminue de plus en plus. Le diamètre de chaque organe est à peu près uniforme et mesure de 0,4 à 0%%,6.ILest difficile de constater l'existence d'un véritable réser- voir à venin, comparable à celui qu'on rencontre, par exemple, dans les glandes salivaires des Gryllidæ, et la cavité interne de l'organe doit, sans doute, tenir lieu de réceptacle glandulaire. Pourtant, vers la partie antérieure, en avant des chélicères, le diamètre s’élargit un peu, et la glande forme une sorte de dilatation fusiforme dont la structure histologique ne présente rien de particulier. Il est possible néanmoins que cette dilata- tion constitue une sorte de réservoir rudimentaire. LES GLANDES VENIMEUSES OU GLANDES DES CHÉLICÈRES 193 La forme extérieure de la glande change presque brusque- ment d'aspect au momen de sa pénétration dans lPintérieur des chélicères. Son diamètre diminue à peu près du quart de ce qu'il était primitivement et ses parois deviennent très minces. C'est cette seconde partie qu'on peut désigner sous le nom de canal excréteur. H Y à ici, au point de vue morphologique, une différence notable dans la conformation de la glande de Latrodectus et les par-- üicularités, dues à la présence d'un crochet, signalées par C. Vogt et Yung chez l'£peua diadema. Le conduit ercréteur traverse l'article basilaire un peu excentriquement et se trouve plus rapproché du bord inféro- €/- externe que de linterne. Il est entouré de nombreux faisceaux musculaires qui s'insèrent, d'une part, à l'extrémité antérieure du céphalothorax et, de Fig. 3. — Coupe longitudinale ; À 5 VERT Er Je d'une glande venimeuse de Mouire-sunypeuren arnèresde lartious :icaccrus(te, demi-séhema lation de’ la’ pince. Le canal devient tique). — €, canal excréteur : de Es ce glandulaire, à parois minces; ensuite de plus en plus filiforme, pénè- &. léger renflement de la partie à if Pre SV Re , terminale de la glande, simu- tre dans L crhochétretines'arréte que un racereor LH des vers son tiers antérieur. Le venin suit des chélicères:; 7», faisceaux PRE : : : musculaires ; G{, glandes avec ensuite un étroit canalicule creusé dans parois épaisses p. l'axe recourbé de la pince et sort, à l'extérieur, par un petit orifice terminal de forme ovale (Voy. pl. VL fig. 3). CHÉLICÈRES. — Les Chélirères Sont remarquables par leur forme et leur structure. Hs comprennent deux parties articulées: l'article basilaire et le crochet où pince. Le premier est long, chitineux, jaunâtre et présente la forme d'un tronc de pyra- mide quadrangulaire. Sa face supérieure est légèrement con- vexe; les deux faces internes (supérieure et inférieure) sont inclinées et se réunissent à angle aigu. Le bord externe est sgalement courbe {Voy. PL VI, fig. 2 et 3). Le côté articulé avec la partie antérieure du céphalothorax est beaucoup plus large que celui qui porte la pince. Enfin, les deux bords latéraux 154 L. BORDAS {interne et externe) sont pourvus de soies chitineuses qui augmentent de longueur d’arrière en avant. Les plus antérieures sont fort longues et entourent la base du crochet; leur di- mension atteint presque la taille de ce dernier (Voy. PI. VI, fig. 2). La pince ou crochet est arquée et présente la forme d’un bec de perroquet. Quand les deux chélicères sont au repos, les extrémités des pinces viennent en contact et décrivent un demi- cercle. La base de chaque crochet est large, épaisse et chiti- neuse. Son bord externe est régulier et recourbé, tandis que l'interne porte, sur ses deux tiers postérieurs, une série de den- ticulations (de 16 à 18), courtes et arrondies, qui disparaissent complètement vers le tiers antérieur de l'article (Voy. PI. VE, fig. 2 et 3). Le crochet est creusé d’un canicule axial. Il est mobile, sur l’article basal, suivant un plan horizontal et présente, à son extrémité, un petit orifice ovale par où s'échappe la sécré- üon venimeuse. Les mouvements horizontaux du crochet ont surtout lieu en dedans et leur déplacement extérieur est très limitée. Leur limite extrême ne dépasse guère une tangente à la face externe du segment basal des chélicères {Voy. PL VI, fig. 2). Structure histologique des glandes venimeuses. Au point de vue histologique, les glandes venimeuses de la Malmignatte présentent une structure assez caractéristique. Cette structure est à peu près uniforme dans la région glandu- laire proprement dite, mais varie d’une facon très sensible dans la portion du canal excréteur située dans le segment basal des chéleères (Nov PLANS 22005 6e) STRUCTURE DU SAC GLANDULAIRE. — Une section, faite perpen- diculairement à l'axe, dans la région moyenne du sac glandu- laire, nous présente à considérer quatre assises qui sont, de dehors en dedans : une mince membrane péritonéale ou mem- brane enveloppante, de nalure conjonctive ; une puissante couche musculaire formée par de gros faisceaux à direction oblique ou légèrement spiralée ; une membrane basilaire ou LES GLANDES VEÉNIMEUSES OU GLANDES DES CHÉLICÈRES 155 membrane de support, et enfin, une puissante assise épithéliale, parfois sinueuse, formée de hautes cellules cylindriques glan- dulaires, Le canal excréteur comprend les mêmes assises, avec cette différence que la musculature est circulaire et que l’épithélium est aplati et constitué par des cellules cubiques à gros noyau. SAC GLANDULAIRE. — Nous avous dit que la glande venimeuse ne présente pas de réservoir collecteur proprement dit et que le produit de sécrétion se rassemble dans la cavité de l'organe, d'où il est expulsé au dehors par les brusques contractions de la puissante musculature de la glande. Cette dernière est entourée extérieurement par une très mince membrane recouvrante où membrane péritonéale, de nature eonjonctive, qui envoie de fins prolongements ou lamelles entre les faisceaux musculaires. Ces prolongements lamelleux leur servent de cloisons séparatrices. Les prolongements externes vont se réunir à la membrane basale qui sert de support à l'épithélium glandulaire. De fins noyaux, ovales ou allongés transversalement, sont disposés sur cette membrane et sont surtout localisés dans l'espace compris entre les bords latéro- externes de deux faisceaux musculaires. Les prolongements interfasciculaires possèdent aussi quelques noyaux rectangu- laires ou en forme de baguettes (Voy. PE VE, fig. 4 et 5). La mnusculature de la glande est tout à fait caractéristique. Elle est constituée par des faisceaux à fibres striées transversa- lement etlongitudinalemer..; de distance en distanceexistentdes noyaux ovales. Les muscles sont généralement disposés dans le sens longitudinal ou ne présentent qu'un enroulement légère- ment spiralé. Les divers faisceaux sont étroitement unis entre eux et ne sont séparés que par les fines lamelles, déjà décrites, provenant de la membrane péritonéale externe. En fixant la glande à la liqueur de Flemming, les divers fais- ceaux ne forment qu'un manchon compact, avec des lignes de séparalion peu apparentes ; mais, par l'action de Falcool à 90”, ces faisceaux s'écartent les uns des autres et sont séparés par des espaces égalant à peu près le tiers, où parfois même la moitié du diamètre des masses musculaires (Voy. PE VE fig. 5). Chaque 156 L. BORDAS section fasciculaire apparaît alors sous l'aspect d’un massif ovale ou rectangulaire, à axe intéro-externe à peu près double du diamètre transversal. Le tout est finement strié et présente un certain nombre de noyaux (3 à 6) rectangulaires ou allongés en bâtonnets. Les noyaux sphériques sont rares. Quand les coupes sont faites perpendiculairement à l'axe de la glande, les diverses sections des faisceaux musculaires sont à peu près sem- blables : ce qui prouve que leur direction est sensiblement rectiligne ou légèrement spiralée. On compte, sur une section transversale, de 40 à 50 de ces faisceaux. La couche musculaire, présentant les caractères que nous venons de décrire, s'arrête vers l'extrémité antérieure de la glande, un peu en arrière de l’origine du canal excréteur (Voy. PL VI, fig. 6). En dedans de la puissante musculature se trouve la membrane basale, mince, de couleur blanchâtre et servant de support à l'endothélium. Elle présente, en certains points, de fines stria- tions circulaires et est pourvue, de distance en distance, de pelits noyaux sphériques à nombreuses granulations chroma- tiques. Elle est unie à la membrane péritonéale externe par des lamelles conjonctives, servant de cloisons séparatrices aux divers faisceaux museulaires (Vov. PI. VE, fig. 4 et 5). Les cellules de l'épithélium qglandulaire, contrairement à ce qui existe dans les glandes de l'Epeire, sont hautes, cylindriques et forment une assise à contour interne irrégulier. L'irrégularité du contour est parfois tell: qu'il dessine des sortes de replis papilliformes séparés par des sillons plus ou moins profonds Moy PLAN fie. 4) Dans certaines régions, les cellules sont rectangulaires, très allongées et leur hauteur égale environ six fois leur diamètre. Elles sont pourvues de novaux sphériques, localisés vers leur base; cette dernière est granuleuse, tandis que leur moitié interne est pourvue d’un protoplasme clair et transparent (Nov ENT ens 25) Du côté externe de l’épithélium (région basilare), se trouvent, de distance en distance, des groupes de noyaux, qui sont, sans doute, les éléments nucléés des cellules de rempla- cement, car la sécrétion s'effectue par fonte cellulaire. En cer- LES GLANDES VENIMEUSES OU GLANDES DES CHÉLICÈRES 157 tains points, en effet, il n'est pas rare de voir de grandes cellules ouvertes vers la cavité de la glande et entourées, à leur base, d’un groupe de cellules plus petites destinées à remplacer les premières. Dans d’autres régions, on rencontre une portion d'épithélium détruit en partie, pourvu, du côté externe, vers la membrane basale, de nom- breux noyaux régulièrement espacés, qui sont les éléments nucléés des futures cellules épi- théliales. Ces divers noyaux, ovales où sphé- riques, apparaissent nettement, avec leurs L divers détails de structure, par une bonne Fig- # — Coagulum provenant du con- fixation à la liqueur de Flemming et la colora- tenu de la glande venimeuse de la thon à l'hémalun. ne Le contenu du sac glandulaire est une masse gluante, hvaline, transparente, qui, par l'action de l'alcool, se contracte et forme un tout parfois compact, parfois granuleux et d'apparence aréolaire. CANAL EXCRÉTEUR. — La partie antérieure de la glande, légè- rement élargie, qu'on peut considérer comme une sorte de réservoir collecteur rudimentaire, présente à peu près la même structure histologique que le sac glandulaire (Vox. PE VE fig. 6). Le canal excréteur prend naissance à peu près au niveau de la ligne d'insertion du segment basal des chélicères à la partie antérieure du céphalothorax. C'est un tube mince, dont le diamètre va progressivement en diminuant à mesure qu'on se rapproche de l’orifice externe. Il comprend les mêmes parties que la glande, avec celte différence que la musculature est formée de fibres circulaires. La membrane basale qui sert de support à lendothélium est très mince. L'épithélium comprend une bordure de cellules rectangulaires, plates, à base parfois élargie, limitant un étroit lumen. Leur contenu protoplasmique est clair et leurs noyaux, assez volumineux, sont surtout localisés vers la région exté- rieure de l’assise (Voy. PI. VI, fig. 6 et 7). 158 L. BORDAS OBSERVATIONS PHYSIOLOGIQUES Le venin est sécrété en abondance par la glande et présente une coloration d'un blane mat. La sécrétion s'effectue par intermittences et se produit surtout abondamment quand on saisit ou excite l'animal. Si on plonge brusquement un Latro- dectus dans l’eau ou dans l’alcool à 70°, on voit le venin s’échap- per par l’orifice de l'extrémité des chélicères et former, vers la région antérieure du céphalothorax, un massif gluant et blan- châtre. C’est ce produit de sécrétion qui est considéré, dans certains pays, comme occasionnant des accidents très dangereux et quelquefois même mortels. C’est ainsi que beaucoup d'auteurs ont constaté, après certaines piqûres, une sorte d’engourdis- sement du membre piqué, un tremblement général, des nau- sées, des vomissements, parfois même des mouvements con- vulsifs et du délire. Des cas de mort ont même été signalés; mais alors, les observateurs en question attribuaient ces cas, très rares du reste, au traitement intensif plutôt qu'à la morsure. Passons maintenant très rapidement en revue les opinions de divers entomologistes concernant les effets physiologiques des piqûres de la Malmignatte. Cette espèce (Latrodectus) est très commune en Corse, en Sardaigne, en Italie, en Espagne, en Algérie, en Crète, etc., où ses morsures sont, dit-on, très redoutées. Boccone, Keisler, Rossi, etc. assurent qu’elle cause, par ses piqüres, des fièvres, de vives douleurs et amène même parfois une sorte d'état léthargique. Rotti (de Volterra) a confirmé tous les méfaits dont on accuse les Malmignattes et Abbot assure que les espèces amé- ricaines sont très redoutées et fort venimeuses. Cauro, Graells, Lambotte, etc. ont rapporté de nombreuses observations d'hommes et d'animaux rendus gravement ma- lades par suite des piqûres des Latrodectes. À. Cauro, dans sa thèse de doctorat en médecine (1833), rap- LES GLANDES VENIMEUSES OU GLANDES DES CHÉLICÈRES 159 porte quelques observations sur les Malmignattes de Corse. II assure que les piqüres de cette Araignée présentent à peu près les mêmes caractères que les morsures des Vipères, avec cepen- dant beaucoup moins d'intensité dans leur action. Dans cer- tains cas, la partie piquée présente peu de changements et la phlegmasie est à peine apparente; pas de gangrène. Parfois cependant, les phénomènes généraux s'accentuent et l’on con- state un engourdissement du membre piqué, un tremblement général, des syncopes, des nausées, des vomissements, des sueurs froides et, finalement, des mouvements convulsifs, le délire et la mort. Quand les secours sont immédiats et éner- giques, le malade, d'après Cauro, recouvre lentement la santé et conserve, pendant plusieurs années, des douleurs articu- laires qui s’exaspèrent au moindre mouvement et le tiennent, pendant un temps plus ou moins long, dans l'impossibilité de se livrer à aucun travail. Le traitement préconisé par l’auteur consiste en pilules d’opium, en bains tièdes généraux et en applications d’émol- lients sur les articulations douloureuses. Dans les campagnes, les paysans se contentent de mettre les malades dans des fours chauffés ou de leur administrer de fortes doses d'alcool ou de vin. Ajoutons que ces médications barbares amènent souvent la mort des malheureux patients. Cependant, des naturalistes dignes de foi, L. Dufour entre autres, n'ont pas cru à l’action nocive pour l'homme et les grands animaux, du venin de la Malmignatte. H. Lucas, qui à observé cette espèce en Algérie et qui a été piqué plusieurs fois, n'en a éprouvé aucun inconvénient. Eug. Simon a maintes fois rencontré les Latrodectes, en Espagne, et n'a Jamais constaté aucun mauvais effet produit par leurs piqüres. [la seulement observé, dans maintes circon- stances, l'effroi éprouvé par les paysans à l'approche de cette Arachnide. Laboulbène assure que le venin des Malmignattes est peu dangereux pour l’homme et n’a d'effets mortels que pour les petits insectes qui servent de proie à l’Araignée. D'autre part, Dugès (Annales des Sciences naturelles, 1836) a constaté que la piqûre de la Ségestrie est tout à fait inoffen- 160 L. BORDAS sive et produit une sensation tout d’abord vive et douloureuse, qui se prolonge pendant quelques minutes, mais qui disparaît ensuite au bout de deux ou trois heures, ne laissant après elle qu'un petit point rosé, à peine perceptible. Nous avons eu l'occasion maintes fois, dans le courant desmois d'août et septembre 1901, de constater, sw7 nous-même, les effets pathologiques et physiologiques produits par les piqûres de Lat0- dectus 13-quitatus. Ces piqûres furent faites à l’éminence thénar et à la face inférieure du poignet. Voici ce que nous avons ob- servé: rougeur et légère tuméfaction surune étendue de2 à 3 cen- timètres. Le sommet de latuméfaction présentait un petit point dur, violacé ou rougeâtre, marquant l'endroit où avait été faite la piqûre. Nous constations, en outre : gêne dans les mouve- ments des doigts, engourdissement de la face palmaire, rai- deur dans l'articulation du poignet, démangeaisons très vives autour des points tuméfiés, douleurs lancinantes au début, mais diminuant peu à peu et disparaissant au bout de quelques heures pour reparaître ensuite par intervalles, etc. Cet état, sans aucune gravité, durait à chaque épreuve trois Jours environ, au bout desquels tous les phénomènes disparaissaient à peu près complètement ; la température elle-même diminuait rapidement, et ilne restait, en définitive, qu'une petite dépres- sion ponctiforme entourée d’un mince liséré rougeûtre. Toute trace d'inflammation disparaissait au bout d’une semaine sans laisser la moindre trace. Nous avons renouvelé les piqûres plusieurs fois dans un mois, et 1l nous est même arrivé de nous faire piquer simulta- nément à la main et au poignet par des Malmignattes conser- vées en captivité, sans avoir Jamais constaté des phénomènes terminaux de la gravité de ceux décrits par les auteurs qui ont rapporté des accidents mortels. Tout s’est borné à des phleg- masies légères, purement locales et sans importance. Les effets produits sur les Insectes par les piqûres des Latrodectus sont toujours graves et généralement mortels. Nous avons expérimenté sur des Mouches, des Grillons, des Locustes, sur certains Coléoptères (Staphylins) et nous avons toujours constaté que chaque piqüre était inévitablement suivie d’immo- bilté, d'insensibilité et finalement de mort. LES GLANDES VENIMEUSES OU GLANDES DES CHÉLICÈRES 161! CONCLUSIONS En rÉsuMÉ, les observations que nous avons faites sur nous-même et sur divers animaux nous amènent à formuler les conclusions suivantes : 1° Les piqûres du Latrodectus 13-quttatus ne sont nullement mortelles pour l'homme et les gros animaux. 2° Effectuées sur des Insectes: Mouches, Staphylins, Ca- rabes, Grillons, Dectiques, Locustes, etc... elles occasionnent une sorte de paralysie, suivie de mort à bref délaï. 3° Des piqüres produites sur nous-même, par des Malmi- gnattes, sur l'éminence thénar et à la face inférieure du poi- gnet, n'ont déterminé qu'une légère zone inflammatoire, suivie d'un petit gonflement rougeàtre accompagné d’une forte dé- mangeaison et de phénomènes locaux sans caractère de gra- vité. Le tout à complètement disparu, sans traitement, au bout de quelques jours. ANN. SC. NAT. ZOOL. ee 2: INDEX BIBLIOGRAPHIQUE Berrkau, Ueber den Bau un die Function der Oberkiefer’s bei den Spinnen. In Arch. f. naturg., 36 Jahrg., 1 Hft, p. 92-126, 1870. E. 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GRAELLS, Notice sur divers faits qui confirment la propriété venimeuse du Latrodectus malmignatus. Ann. Soc. entom. de France, p. 205, 1842. A. Horx, Untersuchungen über die Giftdrüsen. Ber. ob. Ges. Giessen, Bd XXIV, p. 25. Keiscer, Neuester Reisen, p. 762, 1751. Levnic, Lehrbuch d. Histologie, 1857. A. LaBouLeÈNE, Dictionnaire Dechambre, 2° série, t. Il, p. 15, article LaTro- DECTE. Mac-Leon, Appareil venimeux des Aranéides. Arch. Bicogu, vol. 1, p. 573-87, 1880. H. Mecxer, Mikrographie einiger Drüsen apparat der Niederen Thiere. Muller’'s Archiv, p. 35, 1846. Ep. PERRIER, Traité de zoologie, p. 1111, 1894. F. Prareau, Sur les phénomènes de la digestion et sur la structure de l’appa- reil digestif chez les Phalangides, 1876. L. Durour, Anatomie, physiologie et histoire naturelle des Galéodes. C. R. Acad. des Sc., t. XLVTI, 1858. Rossi, Fauna etrusca, t. LE, p. 136, 1790. SCHIMKEWITSCH, Anatomie de l'Epeire. Zoo. Anzeiger, 4° Jahrg., 4884. — Sur l’Anatomie de l'Epeire. 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Fig. 2. — Partie de glande venimeuse et chélicère de Latrodectus. — c, cro- chet ou segment terminal; b, article basilaire des chélicères; Fm, gros fais- ceaux musculaires ; Gl, glandes venimeuse ; o, orifice. Grossissement : 24. Fig. 3. — Extrémité du crochet des chélicères du Latrodectus. — 0, orifice glandulaire; ci, canalicule interne (en pointillé); cg, extrémité du canal excréteur de la glande venimeuse, se continuant en { par le canalicule (ci) creusé dans le tiers supérieur du crochet; d, petites denticulations internes (de 16 à 18) du crochet. Gross. : 50. Fig. 4. — Coupe de la glande venimeuse (région moyenne). -- Mp, membrane recouvrante externe ou membrane péritonéale qui envoie des lamelles transversales T jusqu'à la basale; Mb, membrane basale; Fm, section des gros faisceaux musculaires séparés par les brides transverses T; Mb, mem- brane basale qui envoie des tractus entre les muscles. On voit, cà et là, des noyaux sur les membranes basale et péritonéale ; Ep, épithélium glandu- laire formé par de hautes cellules cylindriques, à noyaux basilaires, n. Gross. : 130. Fig. 5. — Portion de coupe de la glande venimeuse du Latrodectus. Mp, membrane recouvrante externe ou membrane péritonéale, avec noyaux épars, n; cl, prolongements lamelleux de la membrane externe séparant les gros faisceaux musculaires, Fm; Mb, membrane basale servant de support, à l’endothélium; Ep, couche épithéliale, formée par de hautes cellules cylindriques à noyaux (N) localisés vers la base de l’assise; c, cavité cen- trale de la glande. Gross. : 600. Fig. 6. — Section transversale du canal excréteur, vers son origine. — am, as- sise musculaire circulaire ; mb, membrane basilaire, très mince; Ep, assise épithéliale formée par des cellules presque cubiques, à gros noyaux, N; ce, cavité du canal excréteur. Fig. 7. — Coupe de la partie terminale du conduit excréteur — am, assise musculaire annulaire; Ep, épithélium à cellules cubiques. INFLUENCE DE LA FIXATION PLEUROTHÉTIQUE SUR LA MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES ACÉPHALES DIMYAIRES Par R. ANTHONY. INTRODUCTION Sans doute la Morphologie (avec ses subdivisions, Morpho- logie externe, Anatomie, Histologie), l'Embryogénie et la Physiologie ont par elles-mêmes un grand intérêt: toutefois, l'étude des formes, des processus de développement et des fonctions ne fournit en somme que des matériaux dont la synthèse permet l'explication des formes animales et l’établisse- ment des lois qui les régissent. On supposait déjà depuis Lamarck, et de nombreux travaux ont contribué après lui à l'établir d’une facon qui semble définitive, que ce sont les causes matérielles, mécaniques, physiques où chimiques qui, agissant sur les organismes et les organes au cours de leur développement, déterminent la forme adulte. La Morphogénie est précisément cette science qui s'occupe de rechercher les causes matérielles des dispositions morphologiques. Ses movens d'investigation sont, comme pour les autres sciences, la méthode d'observation et la méthode expéri- mentale. | En observant simplement les faits de développement, on peut en effet arriver à surprendre les causes morphogéniques sur le 166 R. ANTHONY fait pour ainsi dire, parvenir, comme je l'ai montré pour les Tridacnes, à suivre la progression des changements de forme sous l’action continue de la pesanteur, par exemple, sur un orga- nisme en voie de croissance : c’est le mode d'investigation qui à été Jusqu'à ce Jour le plus employé par les morphogénistes ; 1l le sera souvent au cours de ce travail. Lorsque la succession des faits embryogéniques ne peut être constatée, on peut encore par l'observation simple des faits mor- phologiques chez l'adulte, arriver, dans une certaine mesure, à découvrir les causes morphogéniques. Soit par exemple une série d'animaux qui, appartenant à des phylums très différents, vivent et se développent dans des conditions analogues ; s'ils possèdent un certain nombre de caractères communs, on pourra induire que ces caractères sont en relation avec ces conditions d'existence communes et saisir ainsi la nature de ces rapports, c’est-à-dire les causes déterminantes de ces caractères. Jaurai souvent recours à cette méthode comparative, surtout pour les cas où il m'aura été difficile de suivre le développement. On conçoit d’ailleurs, sans qu'il soit besoin d'y insister, combien l'observation des faits morphologiques seule est inférieure à l'étude du développement au point de vue de la valeur des hypo- thèses formulées. En Morphogénie, comme partout ailleurs, la méthode d'ob- servation ne peut suffire; elle a besoin du contrôle de la méthode expérimentale. On change au cours du développement les conditions d'existence d’un organisme et, l’âge adulte une fois atteint, on recherche quelles ont été les modifications morphologiques corrélatives aux changements provoqués dans la marche du développement. Rappellerai-je que la voie morphogénique n’est pas nouvelle, et que nombreux sont les auteurs qui S'y sont déjà engagés? Sans remonter à Lamarck, qui l'un des premiers a tenté d'ex- pliquer rationnellement les formes vivantes, il est indispensable de citer dans cet ordre d'idées et plus près de nous, l'École néo- lamarckienne d'Amérique avec Cope, Osborn et tant d'autres. l'École allemande de Roux dont les travaux sont connus de tous. En France, les recherches morphogéniques retrouvent actuellement, auprès de nombreux savants, l'accueil favorable MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 167 qui, depuis plusieurs années, n’a cessé de leur être réservé à l'étranger. Au point de vue plus spécial de l'application de la méthode expérimentale à la Morphogénie, on ne peut passer sous silence les travaux de Fick, un véritable précurseur qui, dès 1857, étudiait expérimentalement à l'Université de Marburg, la genèse de la forme du crâne et plus généralement des os. Quant aux travaux de mon regretté maître E.-J. Marey, ils sont aujour- d'hui devenus classiques. J'omets volontairement bien des noms que, dans une étude bibliographique de la question, on ne pourrait se dispenser de citer. Je veux montrer simplement que ce genre de recher- ches est loin d'être nouveau, que les meilleurs esprits, ceux qui se sont montrés le plus positifs et le plus ennemis des spécu- lations métaphysiques, n'ont pas craint de S'y adonner. Les auteurs de l'École de Roux semblent s'être bornés dans la plupart des cas à l'étude morphogénique de la différenciation et de la tectologie des blastomères. On ne saurait nier cependant, et les morphogénistes américains l'ont bien compris, que l'évo- lution ontogénique de l'individu et de ses organes ait aussi son intérêt à ce point de vue. Mais il importe alors d'en faire une étude vraiment cinématique, en y comprenant toute la succes- sion des changements qui se produisent dans l'organisme pen- dant son existence, aussi bien pendant sa croissance que pen- dant sa décrépitude. Ainsi définie, l’ontogénie est, on le conçoit, plus variée suivant les différents animaux ; elle sort des limites trop restreintes qu'on lui assignait naguère et embrasse les différents stades morphologiques par lesquels un individu passe depuis la fécondation de l'œuf jusqu'à la mort par sénilité. Ce qui à plus spécialement attiré mon attention au point de vue morphogénique, ce sont précisément les stades de déve- loppement qui se succèdent depuis Pétablissement de la vie libre, ceux pendant lesquels l'animal est soumis aux causes extérieures les plus nombreuses et les plus variées, ceux pendant lesquels 1l acquiert véritablement ses caractères particuliers. J'ai voulu que dans ce mémoire les descriptions des disposi- tions morphologiques soient autant que possible suivies de leurs explications rationnelles. Cet essai d'interprétations à été l'idée 168 R. ANTHONY directrice de ce travail, et, Les faits ne doivent-ils pas être consi- dérés surtout en vue de l'explication qui peut en ressortir et des généralisations auxquelles 1ls conduisent? | J'aurais tout naturellement voulu employer pour ces recher- ches de Morphogénie, comme je l'ai d’ailleurs fait déjà à l’occa- sion d’autres études analogues sur les Mammifères (1), non seulement la méthode d'observation mais aussi la méthode expé- rimentale. Mais les expériences de Morphogénie sont malheu- reusement à très longue échéance, en raison de l'obligation où l'on est d'attendre l’âge adulte pour constater les résultats obte- nus d’une expérience faite sur l'animal jeune {et l'on sait com- bien lente est la croissance des Acéphales). Celles que j'ai entre- prises sur ces animaux sont done encore actuellement en cours : des mémoires ultérieurs seront consacrés à l'exposé de leurs résultats. Bref, ce mémoire contiendra trois sortes de résultats : d’abord des faits positifs qui n'avaient pas encore été mis en lumière concernant la Morphologie, l'Embryogénie et la Physiologie des animaux dont Je me suis occupé; ils ont leur importance en eux-mêmes. En second lieu, au point de vue morphogénique, des tentatives d'explications rationnelles. En troisième lieu, enfin, les indications qui en découlent au point de vue des affinités. Certains naturalistes purement descripteurs ne voudront peut-être retenir parmi mes résultats que les faits positifs, sous le prétexte que l’on ne peut savoir comment et sous l'influence de quelles causes se sont constituées les formes animales, et que l'on ne peut faire à ce sujet que des hypothèses. Il serait superflu de défendre ici la valeur et l'importance de l'hypothèse comme moyen de recherche et d'insister sur les différences fondamentales qui existent entre les vues & priori et les hypo- thèses destinées à relier les faits d’une facon d’ailleurs toujours provisoire. Celles-e1, même fausses, ont souvent conduit à des recherches intéressantes, à l'établissement de données positives (4) Je fais ici allusion à mes travaux sur la Morphogénie du crâne et l'origine des tendons, parus en 1902-1903-1904, dans les Comptes rendus de l’Académie des Sciences, les Comptes rendus de la Société de Biologie, le Journal de Physiologie et de Pathologie générales, le Bulletin de la Société d'Anthropo- logie, etc. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 169 que la connaissance des faits seuls n'aurait jamais pu permettre de découvrir. Dans le cas spécial de la Morphogénie en suivant les stades de développement et en appliquant la méthode expéri- mentale, on peut d’ailleurs donner aux hypothèses le maximum de probabilité. Néanmoins, probabilité n’est pas certitude, et, c’est sous ces réserves expresses que se présentent les conclusions formulées ici relativement à la Morphogénie et aux affinités naturelles. Avant d'aborder le sujet de ce mémoire, il est de mon devoir de témoigner 1e1 de toute ma reconnaissance à l'égard de mes maîtres, MM. les professeurs Marey et Edm. Perrier, sous les auspices desquels J'ai accompli mes derniers travaux. Je dois également exprimer à M. le professeur Giard, ma plus vive gratitude pour les conseils et les encouragements qu'il ne m'a point ménagés au cours de mes recherches. PREMIÈRE PARTIE CHAPITRE PREMIER But de ce mémoire. Je me suis proposé dans ce mémoire de faire une étude aussi complète que possible, étant donnés les matériaux que J'avais à ma disposition, des caractères d'adaptation et de convergence des Mollusques Acéphales dimyaires actuels fixés en position pleurothétique. Leur connaissance, restée Jusqu'ici très imparfaite, pourra peut-être aider à mieux comprendre les formes fossiles, les Rudistes par exemple, sur lesquels les paléontologistes ont tant discuté et discutent encore. Dans la catégorie des Dimyaires pleurothétiques fixés peuvent être grou- pées un certain nombre de formes à affinités familiales diffé- rentes et dont l'énumération sera donnée plus loin. Mon intention eût été de traiter en même temps et d’une facon également complète, de leur morphologie, de leur embryo- génie et de leur physiologie, mais je n'ai malheureusement pu me procurer pour la troisième partie de cette étude qu'une quantité bien restreinte de documents. J'ai fait en sorte que ce mémoire contienne dans leurs grandes lignes les monographies des types dont je me suis occupé; mais désirant conserver l'orientation générale que J'ai essayé de donner à mes travaux antérieurs, je n'ai pas voulu me borner aux simples constatations de faits morphologiques, embryolo- MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 171 giques où physiologiques, ni donner une trop grande place à ceux de ces faits qui, n'étant pas particuliers aux animaux dont Je m'occupe, ne pouvaient avoir en raison de leur généralité que peu d'intérêt au point de vue de l'explication possible de leurs formes, et me paraissaient au contraire de nature à compliquer l'idée d'ensemble que l'on peut s'en faire. J'ai voulu, en un mot, leur appliquer les méthodes de recherches de la morphogénie, c’est-à-dire, par les procédés ci-dessus indiqués, essayer de me rendre compte des facteurs déterminants possibles de leurs formes et, de par le fait que J'étudiais l'influence des causes mécaniques sur la morphologie, j'ai naturellement été amené à saisir un grand nombre de ces faits de convergence sur lesquels A. Giard (04) a été l'un des premiers à atürer l'attention. À ce propos il m'a semblé plus naturel et plus logique d'étu- dier l'effet d’un ensemble de causes connexes, c'est-à-dire dun mode de vie déterminé sur des organismes d’affinités diffé- rentes, que d'examiner l’action de causes variées sur des orga- nismes de même souche. Par cette méthode, j'ai pu mettre en évidence ces nombreux faits de convergence, qui prouveraient déjà par eux-mêmes, l'efficacité réelle des causes matérielles en morphogénie. Les résultats que m'aurait donnés Pautre méthode eussent été moins intéressants et surtout moins j'aie choisi comme groupe spécial d'étude les Dimvaires fixés en position pleurothétique, de préférence aux Cardiüdæ où aux Cyrenidiæ par exemple, qui constituent des familles natu- relles, dont les divers éléments sont adaptés suivant différents frappants. C'est cette considération qui explique que sens. Dans le deuxième chapitre de ce mémoire, je donnerai un certain groupement des Mollusques Acéphales dont la signification exacte à besoin d'être nettement précisée. L'on à souvent dit, et avec raison, que lidéal pour toute classification systématique serait d'être un arbre généalogique parfait. Inutile d'ajouter qu'il est vraisemblable que cet idéal ne sera Jamais atteint, en raison de insuffisance des docu- ments embrvologiques et surtout paléontologiques qui sont à notre disposition ; néanmoins ilest entendu que tous nos efforts 172 R. ANTHONY doivent y tendre. Pour se rapprocher autant que possible de ce but, il est évident qu'une classification doit être basée sur ceux des caractères morphologiques qui mettent le mieux en relief les rapports de parenté ou phylogéniques. Or, quels sont les caractères qui mettent le mieux en relief les rapports phylogé- niques, si ce ne sont ceux qui ont le moins varié au cours des générations, ceux qui, par conséquent, ont le moins subi l’action modificatrice des causes morphogéniques? Chez les animaux, d’une façon générale, les organes de mouvement ou de soutien, les muscles et les différentes pièces squelettiques sont, on le sait, ceux qui possèdent la plus grande plasticité ; leurs caractères ne doivent donc pas être choisis pour servir de base aux classifications systématiques. Pour le cas particulier des Moïlusques Acéphales, de toutes les nombreuses classifications proposées, celle qui découle des recherches de Pelseneer et de Ménégaux (1), basée sur la struc- ture de la branchie, paraît être de beaucoup la préférable, en ce sens que c'est elle qui semble rendre le mieux compte des affinités familiales des diverses formes. Je l’admettrar donc d’une façon générale dans ce travail : je reconnais d’ailleurs qu'il convient toujours, pour l'établissement d’une classification phylogénique, de tenir compte, si possible, de tous les carac- tères sans exception, tout en attribuant à chacun d'eux une valeur d'autant plus grande qu'il est moins vartable. De ceci il résulte, qu'il n’est pas juste de croire que les elas- sifications doivent être basées sur les caractères les ‘plus impor- tants au point de vue vital : des organes ou des systèmes essen- üels au fonctionnement de la vie, peuvent être très plastiques, très profondément modifiables par les causes extérieures, et, on arriverait ainsi à rapprocher par le fait de leurs conver- gences des animaux très éloignés au point de vue de leur origine. À côté de ces classifications à signification phylogénique et en dehors d'elles, ne peut-on admettre sans tomber pour cela (1) Il est évident que le principe de toutes les classifications des Acéphales basées sur les caractères des dents de la charnière ou des impressions muscu- laires, et qui sont si commodes pour les paléontologistes, ne peut être admis au point de vue zoologique. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 1173 dans l'erreur de d'Orbigny (52) qui divisa les Acéphales en Orthoconques el en Pleuroconques, qu'il est intéressant de constituer des groupements animaux pour l'établissement desquels on se basera non plus sur les caractères les moins variables, mais tout au contraire sur ceux qui possèdent la plus grande variabilité. De par le fait même de leur origine, les groupements ainsi obtenus n'auront en eux aucune signification phylogénique etaucune valeur au pointde vue de la systématique rationnelle. Bien plus, ils en seront exactement Fantipode (1). En effet, à l'encontre des classifications vraies qui placent au premier plan les caractères familiaux, ils mettront en relief les caractères de convergence, el, alors que les premières réunissent des individus de même souche et à adaptations différentes, les deuxièmes rapprocheront des individus de diffé- rentes souches présentant, par le fait de l'action des mêmes causes extérieures, .des caractères identiques. C'est un groupement du genre de ces derniers que J'ai essayé de faire, bien loin de vouloir par conséquent présenter une nouvelle classification systématique des Acéphales. Prenant les choses à un point de vue fout autre que mes prédécesseurs dans l'étude de ces animaux, je n'ai pas cherché à mettre en relief les caractères de parenté, mais surtout ceux de conver- gence; jai essavé de montrer comment des tvpes de souches très différentes pouvaient, placés dans les mêmes conditions, soumis aux mêmes agents morphogéniques, arriver à se res- sembler, el, pour un groupe de ces tvpes convergents, les Dimyaires, fixés en position pleurothétique, Jar poussé dans ses détails l'étude de ces analogies. 11 Division du sujet. Le plan de ce mémoire sera le suivant : D'abord j'ai cru devoir, ainsi qu'on Fa vu, le faire précéder (4) Néanmoins, comme on le verra par la suite, ils permettent souvent d'arriver indirectement à des notions importantes sur les affinités. 174 R. ANTHONY d'une introduction, dans laquelle m'a paru nécessaire d'exposer l'idée générale directrice de mes travaux, ce qu'il faut entendre par la Morphogénie, son objet, ses méthodes. Après avoir précisé le but que je me proposais de remplir, j'indique ensuite la provenance des matériaux que j'ai uti- lisés et les méthodes, tant générales que spéciales, que j'ai employées, aussi bien pour mes recherches de Morphologie, d'Embryogénie et de Physiologie, que pour celles de Morpho- génie. | Ces préliminaires posés, je passe en revue dans le cinquième chapitre les différents {vpes de constitution des Mollusques Acéphales, en rapport avec leurs conditions d'existence et leurs attitudes. J'ai donné à ce chapitre le nom d'Zxtroduction à l'étude générale de la morphogénie des Mollusques Aréphales. Im'a paru très important et à nécessité beaucoup de travail, de recherche de tout ordre (anatomie proprement dite, histologie, physiologie, embryogénie, examen #2 situ des animaux). C’est dans ce chapitre qu'est exposé le groupement des formes convergentes dont il vient d’être question. Une fois ce travail, que l'on peut appeler en quelque sorte un travail de mise au point, accompli, il ne me restera qu'à choisir parmi tous les types énumérés un groupe de formes convergentes me parais- sant plus intéressantes que d'autres à étudier en détails; je me réserve dalleurs ultérieurement de faire la même étude sur les autres groupes, dans lespoir, un peu trop ambitieux peut-être, d'arriver à constituer ainsi un essai de morpho- logie et de morphogénie générale et rationnelle de tous les Acéphales. Mon choix s'est fixé sur les Pimyaires fixés en position pleurothétique, pour des raisons qui seront expliquées ulté- rieurement. Leur étude fait Pobjet de la deuxième partie de ce travail que j'ai divisée en autant de chapitres, inégaux dail- leurs, que le groupe comprend de familles naturelles. Dans un dernier chapitre, jindiquerat les déductions qu'on peut tirer de ces études relativement à l'explication des Dimvaires fossiles fixés en position pleurothétique. Ce dernier chapitre sera suivi des conclusions qui seront relatives aux Dimyaires fixés en position pleurothétique seule- MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 119 ment; le chapitre IT de la F* partie ne comporte pas en effet de conclusions spéciales, par Le fait qu'il est lui-même un résumé des résultats obtenus dans les recherches que je poursuis depuis cinq années sur les Mollusques Acéphales en général. III Matériaux utilisés. Les matériaux que J'ai utilisés pour cette étude, entreprise au début de l'année 1899, proviennent des établissements sui- vants : 1° Muséum d'histoire naturelle de Paris (laboratoire d'Anatomie comparée et de Malacologie, où Je me suis procuré les formes actuelles, coquilles sèches et parties molles: labo- ratoire de Paléontologie dont la collection m'a servi pour l'étude de quelques formes fossiles); 2° École Nationale des Mines (laboratoire de Paléontologie où se trouve, je crois, une des plus belles collections de Rudistes du monde que j'ai lar- gement mise à contribution); 3° Faculté des sciences de Paris (laboratoire de Géologie) ; 4° Faculté des sciences de Grenoble (laboratoire de Géologie où j'ai spécialement étudié les formes enroulées de la fin du Jurassique et du Crétacé inférieur telles que Diceras, Requienia, Toucasia, ete). Toutes mes recherches de Physiologie ont été accomplies à la Station physiologique du Collège de France à Boulogne- sur-Seine, où, depuis 1899, j'ai été le collaborateur de mon regretté maitre le professeur E.-J. Marey. Plusieurs laboratoires maritimes de Zoologie ont mis soit leurs matériaux, soit même leurs locaux à ma disposition ; ce sont ceux de Saint-Waast-la-Hougue (chaire d'Anatomie comparée du Muséum d'histoire naturelle de Paris) où j'ai fait quelques expériences de physiologie qui ne pouvaient être faites à la Station physiologique du Collège de France; du Portel (chaire de Zoologie de la Faculté des sciences de Lille), de Banvuls (chaire d'Anatomie comparée de la Faculté des sciences ., de Paris). Dans les deux premiers de ces Jaboratoires, j'ai 176 R. ANTHONY rassemblé moi-même de nombreux matériaux et fait de nom- breuses observations éthologiques. En dehors de ces laboratoires, j'ai aussi recueilli d’im- portants objets d'étude en Bretagne (Finistère), sur les côtes de la baie de Douarnenez, depuis Douarnenez jusqu'à Morgat (e"est là où j'ai fait toutes mes observations sur les Moules dites de roches) et à l'embouchure de l'Aulne et de la rivière du Faou. Enfin, J'ai utilisé plusieurs collections particulières que MM. Dautzenberg et Bonnet ont aimablement mis à ma dis- position. J'exprime ici toute ma gratitude aux directeurs des différents laboratoires dont je viens de citer les noms, pour l'amabilité avec laquelle ils ont bien voulu mettre leurs matériaux d'étude et leurs collections à ma disposition ;, je dois une reconnaissance toute particulière à M. le professeur Douvillé, de l'École Natio- nale des Mines, dont la compétence est si connue relative- ment aux Rudistes, pour toutes les facilités de travail et les précieux conseils qu'il m'a donnés. J'adresse également mes remerciements les plus vifs à M. Ch. Gravier, qui m'a procuré et a même récolté exprès pour moi, au cours de sa mission dans le golfe de Tadjourah, les nombreux exemplaires de Tridacnes et de Chames qui m'ont permis de mener à bien mon travail, et à MM. Chevalier et Decorse auxquels je dois de nombreux exemplaires d’Æthéries provenant de leur mission dans l'Afrique équatoriale. C'est de ces mêmes explorateurs que je tiens aussi en grande partie les renseignements précis que Je donnerai ultérieurement sur le mode de vie des Tridacnes, des Chames et des Æthéries. IV Exposé des procédés de recherches. Les recherches que J'ai accomplies peuvent être divisées en quatre catégories : 2. Des recherches morphologiques ; MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES #1 8. Des recherches embrvogéniques ; y. Des recherches physiologiques ; d. Des recherches morphogéniques. Je vais indiquer ici les procédés que j'ai employés dans ces divers ordres de recherches, pour ne point avoir à y revenir lorsqu'il sera question des résultats. 2. Procédés de recherches morphologiques. — Sous le nom de recherches morphologiques, je comprends évidemment non seulement les recherches de morphologie extérieure, mais aussi celles d'anatomie et d'histologie que j'ai dù faire. Pour la morphologie extérieure, il m'a suffi le plus souvent d'observer les formes soit de la coquille, soit des différents organes visibles sans dissection préalable. Toutefois dans bien des cas l'observation pure et simple à été insuffisante à me ren- seigner. Certains détails, comme, par exemple, ceux de la sur- face interne de la coquille, m'apparaissaient d'une façon insuffi- samment nette et il m'était difficile de me rendre compte de leur valeur. Pour les mettre en évidence et les comprendre, J'ai dû confectionner soit en plâtre, soit en cire ou en gélatine, des moules internes; pour les formes fossiles je me suis servi des moules internes naturels, lorsque j'ai pu m'en procurer. Sur ces moules internes, arüficiels ou naturels, J'ai pu, comme sur la coquille elle-même, et plus facilement, prendre des mesures, faire des sections souvent très instructives au point de vue des conséquences morphogéniques à tirer (Voyez Tridacnes et Hippopus). De mème, pour étudier la cavité palléale dont la forme change dans une si grande mesure avec les différentes adaptations, et ses nombreux replis, jai dù employer encore la méthode des moulages soit au plâtre, à la cire ou à la gélatine. J'ai appliqué plus spécialement cette méthode à l'étude de la cavité palléale, si compliquée chez les Tridacnidæ, et c'est grâce à elle que j'ai pu aussi étudier en détail la forme de la même cavité palléale chez les Moules et les Modioles, par exemple, ainsi que chez les Mytilimorphes des différents phylums. Tous ces moulages peuvent s'accomplir suivant les procédés ordinaires connus de tous; toutefois, il me semble intéressant ANN. SC. NAT, ZOOL, 1,12 178 R. ANTHONY d'indiquer ici la facon dont je m y suis pris pour obtenir le moulage de la cavité palléale des Mytilus et des formes voisines, pération qui nécessite Pemploi d'une technique un peu spé- ciale. Je commence par choisir un animal bien vivant ; à l’aide d’une vrille d’ouvrier en métaux, je perfore de deux trous l’une des valves de la coquille en avant soin de pratiquer les perfora- tions à une certaine distance de la masse viscérale ou du musele adducteur postérieur; puis | après avoir déchiré le manteau au fond des orifices à laide d'un instrument quelconque, une aiguille lancéolée par exemple, je plonge animal dans un li- quide fixateur où Je le laisse seulement quelques minutes, dans le seul but de Le faire mou- Fig. 1. — Schéma destiné à montrer la rir en contraction ; après un façon dont on peut mouler la cavité Ê HU palléale d’un Acéphale. Les grisailles lavage rapide à l’eau courante, Re due jO lui lie solidement ds VAN nues coaptées à l’aide d'un fil. La flèche à l'aide d'un fil afin de les main- indique l’orifice par lequel on verse le 4 A A EL Es ah aile EE cat calais tenir coaptées (Voy. fig. 1). Cela fait, J'entoure de plâtre la co- quille en ayant soin de laisser libre les deux orifices précités. À l'aide d'un petit cornet de papier jouant le rôle d’enton- noir, Je verse très lentement — en ayant soin, afin d'éviter la formation de bulles, d'imprimer dé lemps en temps à la coquille de petites secousses, — du plâtre très liquide, de la cire fondue ou de la gélatine par l'un des orifices, et, je conti- nue celle opération Jusqu'à ce que la masse du moulage appa- raisse par l’autre ; je bouche alors ce dernier avee de la cire à modeler el je verse par le trou d'entrée un léger excès de masse. Après une attente de quelques heures, je brise la chape entourant la coquille et détruis cette dernière ainsi que les parties molles de lanimal à l'acide :azotique fumant, par exemple sil s'agit de plâtre; il ne me reste plus alors que le moulage interne de la cavité palléale. Les quelques détails que je donne sur la technique de cette opération un peu délicate m'ont paru utiles à consigner:; pour d’autres cas spé- MORPHOLOGIE DES M8LLUSQUES 179 claux je me suis inspiré des circonstances et1l pourrait paraître superflu d'insister davantage sur cette question. Dans beaucoup de cas et aussi souvent que je l'ai pu, à propos des T'apes notamment, j'ai suppléé à l'insuffisance de lobserva- tion visuelle pure et simple qui ne donne souvent que des à peu près, par des mensurations précises et exactes faites sui- vant les règles ordinaires de la biométrie. Pour l'utilisation de mes chiffres, je me suis naturellement conformé aux méthodes rationnelles employées en statistique, faisant tantôt des moyennes, tantôt des sériations. Au point de vue anatomique, j'ai employé les deux méthodes connues: la dissection que pour les petits sujets je pratiquais à la loupe binoculaire de Zeiss, et la méthode des coupes que je faisais tantôt sans inclusion préalable sur des animaux dureis à l'alcool formolé. (Gros animaux comme les Tridacnidés et les Pinna) (1),tantôt après inclusion à la paraffine où au collodion pour les animaux de plus petite taille. Les coupes d'animaux durcis à l'alcool for- molé étaient effectuées comme de juste ä maïn levée; celles après inclusion étaient faites les premières de préférence au micro- tome parallèle de Minot, les secondes à un microtome à glisse- ment quelconque. Les coupes après durcissement à l'alcool for- molé pouvaient être, en raison de leur grande taille et de leur épaisseur, examinées à l'œil nu ; l'examen decelles au collodion et à la paraffine nécessitait toujours lemploi d’un microscope à faible grossissement ou d'une loupe très forte. . Le collodion m'a paru pour l'étude de l'anatomie microsco- pique topographique, souvent préférable à la paraffine parce qu'il permet l'inclusion d'animaux plus considérables que cette dernière et modifie peut-être moins les formes et Les rapports des parties. Le fait qu'il ne permet pas de faire des coupes aussi (1) J'ai conservé, pour les collections d'Anatomie comparée du Muséum, un certain nombre de ces coupes. De très grandes Pinna m'ont été très aimable- ment procurées dans ce but par mon ami M. Boutin, pharmacien-major à l'hôpital militaire de Bizerte. 180 R. ANTHONY minces que la paraffine ne constituait pas pour mon cas particu- lier un gros inconvénient. Avant l'inclusion Je pratiquais le plus souvent la coloration en masse au carmin boracique ; lorsque je colorais les coupes une fois faites et que j'avais affaire à de très petits animaux, j'em- ployais presque constamment l'hématoxvline ou le bleu de mé- thylène comme colorants nucléaires, l'éosine comme colorant plasmatique, vieux procédés extrèmement simples, insuffisam- ment précis peut-être pour qui veut faire de la fine eytologie, mais qui, de tous ceux que j'ai expérimentés, m'ont semblé donner encore le meilleur résultat pour le but auquel je visais. L'emploi des coupes m'a donné de très bons résultats et elle complète très utilement, à mon sens, #6me pour les très gros animaux, les renseignements que la dissection donne, en ce sens, qu'à l'encontre de cette dernière, elle ne change pas les rapports des organes les uns avec les autres, rapports utiles à connaître d’une façon très exacte, en raison des conclusions que l’on peut en tirer au point de vue morphogénique. Pel- seneer (91) et Kellog (92) avant moi ont d’ailleurs employé avec succès et préconisé cette méthode pour létude des mêmes animaux. Parmi les coupes que j'ai effectuées, il en est une, la coupe sagittale passant entre les deux valves, qui m'a paru particuliè- rement instructive, je la donnerai souvent au cours de ce travail, et, c'est par elle que je schématiserai, en quelque sorte, l'ensemble de l'organisation d’un Acéphale. J'ai fait pour les galeries d'Anatomie comparée du Muséum un grand nombre de coupes sagittales d'Acéphales qui, rappro- chéesles unes des autres, permettent de saisir d'un rapide coup d'œil les principaux caractères morphologiques du groupe. J'en ai représenté quelques-unes dans ce travail. En raison du genre d’études que je poursuivis, les recherches histologiques proprement dites ne devaient dans mon travail tenir que peu de place. Il est heureux, d’ailleurs, qu'il en ait été ainsi, car, n'ayant eu le plus souvent à ma disposition que des matériaux non fixés et conservés depuis longtemps dans l'alcool souvent trop faible, il m'eût été très difficile d'obtenir, au point de vue Iustolegique, des bons résultats satisfaisant. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 181 Comme pour l’anatomie microscopique, J'ai généralement employé pour mes recherches histologiques les méthodes des coupes à la paraffine et au collodion. Cette dernière surtout m'a, pour les cas où j'opérais sur des matériaux mal fixés, comme ceux que l’on trouve le plus souvent dans les collections lorsque l’on s'adresse à des animaux rares, rendu de réels services. Au point de vue histologique J'ai plus particulièrement exa- miné la structure des muscles adducteurs, sur laquelle j'ai fait paraître, en 1903, une note générale dans le Bulletin de la Soriété Philomathique, et pour étude que j'ai faite de ces muscles sur les Chames et Æthéries, J'ai utilisé les matériaux recueillis et fixés par MM. Ch. Gravier, Chevalier et Decorse au cours de leurs missions. Je n'ai pas tardé à m'apercevoir que, pour cette étude spéciale, la dissociation simple me donnait des résul- tats supérieurs à ceux obtenus par la méthode des coupes : celles à la paraffine notamment nécessitent l'emploi d'un réactif qui, éclaireissant toutes les parties d'une façon égale, empêche de distinguer nettement, même après coloration, les parties claires des parties sombres des fibres striées. Le chloroforme employé comme éclaircissant à la place du xylol, du toluène ou de l'essence de cèdre, quoique donnant un résultat supérieur pour le but que Je me proposais d'atteindre, laissait cependant encore beaucoup à désirer. J'ai donc été amené, pour cette étude des fibres musculaires, à employer presque uniquement les dissociations. Pour ces dernières J'utili- sais l’action de l'acide azotique fumant à 20 p. 100 dans l'eau distillée et agissant 12 à 2% heures. J’examinais ensuite sans colorant, dans l'eau distllée légèrement additionnée d’al- déhyde formique, cette dernière substance étant destinée à rendre possible la conservation des préparations. | Pour mon étude générale de la structure des muscles adduc- teurs des Acéphales, j'ai toujours opéré lorsqu'il s'agissait d'ani- maux de nos contrées sur des portions de muscles frais, prises sur l'animal vivant et plongées directement sans fixation préa- lable dans lacide azotique dilué. Pour les Dimyaires fixés en position pleurothétique (Chames et Æthéries), n'ayant eu à ma disposition que des pièces conservées dans l'alcool, après 182 -__ R. ANTHONY ou sans fixation préalable, les dissociations à l'acide azotique dilué ont semblé me donner des résultats moins bons, mais j'ai toujours pu néanmoins me rendre suffisamment compte de la striation et de sa forme. Pour conserver mes préparations Je lutais à la benzine ou le sulfure de carbone caoutchouté (solution très épaisse). Je recom- mande en passant ce dernier procédé pour la conservation des préparations dans l’eau ou la glycérine antiseptisée : la benzine caoutchoutée est très solide, imperméable, plus propre et plus facilement maniable que la paraffine ou la cire. Elle ne fond pas aux températures extérieures et peut être employée en couche mince. | Les préparations de muscle strié d'Acéphale, et, cela est sur- tout important pour les muscles à striations obliques, doivent être examinées à un très fort grossissement en diaphragmant le plus possible. Jai eu souvent recours aussi, pour les observations de ces striations musculaires, à l'emploi des objectifs à immer- sion; la lumière polarisée m'a rendu également des services réels. Tout dernièrement, M. Marceau, de Besançon, à qui J'avais signalé l'intérêt que pouvait présenter l'étude détaillée, à la fois histologique et physiologique, de la striation chez les Mollusques Acéphales et qui, après moi, s'est occupé également de cette même question, m'a dit que les striations lui étaient apparues avec une grande netteté sur des coupes colorées à l’hématoxyline au fer. Bien que reconnaissant la qualité de ses résultats, il ne m'a pas semblé qu'ils soient supérieurs à ceux que Jai obtenus par la simple dissociation. Cette der- nière méthode est plus rapide, plus simple, moins artificielle et a l'avantage de permettre de voir une fibre entière avec son relief. B. Procédés de recherches embryogéniques. — Les premiers stades embrvyologiques ne sont pas de ceux qui m'intéressent pour le but que je me suis proposé de remplir; je me suis borné à l'étude des stades avancés et plus spécialement des prodissoconques et des coquilles définitives à l’état très jeune. Dans la plupart des cas, Je n’ai pu me procurer que des coquilles vides et il n'y a guère que chez les Jeunes Mytilus edulis Linn., MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 183 et les Glochidium d'Anodontes que j'ai pu observer les animaux eux-mêmes. Pour les autres, j'ai dû me contenter des coquilles provenant des sables de dragage de Saint-Waast-la-Hougue que M. Malard, chef des travaux au laboratoire maritime du Muséum, m'aprocurées. Pour l'étude spéciale des formes Jeunes de Chames et d’Æthéries, je me suis servi des matériaux rapportés pour moi par M. Ch. Gravier (Chames) et par MM. Chevalier et Decorse (Æthéries). De plus, sur de nombreuses coquilles de Chames et d’Æthéries appartenant aux collections de Malacologie du Museum et provenant les premières de lOcéan Indien, les secondes des fleuves d'Afrique (missions diverses), j'ai rencontré certaines formes jeunes mais déjà fixées qui m'ont permis de contrôler mes résultats déjà obtenus. Enfin M. le professeur Joubin a eu lobligeance de mettre à ma disposition un certain nombre des Jeunes coquilles recueillies par F. Bernard el qu'une mort prématurée à empêché ce dernier d'étudier. Parmi ces coquilles j'ai trouvé une valve d’une jeune Chame vraisemblablement actuelle, ce qui m'a permis encore de con- trôler une fois de plus mes diagnoses. M. le professeur Douvillé enfin à bien voulu me communiquer une forme jeune très intéressante semblant être une Dirnyu. La difficulté de pouvoir mettre un nom sur une forme jeune d'Acéphale recueillie dans des sables de dragages ou à la sur- face d'un polvpiern échappe à personne. Comme F. Bernard, jy suis à peu près. toujours arrivé d'une facon certaine en me basant à La fois sur l'habitat, les ressemblances avec les formes adultes et surtout, lorsque je possédais une série, sur les transitions insensibles. Enfin, sur certains exemplaires adultes bien conservés on peut apercevoir Le contour et la forme des coquilles jeunes Jusqu'à la prodissoconque même parfois. Il est alors facile de se baser sur ces formes et ces contours pour déterminer les jeunes exemplaires. Lorsque j'ai pu avoir de Jeunes animaux munis de leurs parties molles, je les ai étudiés soit par la méthode des dissections à la loupe stéréoscopique, soit par celle des coupes après décaleification à l'acide azotique à 20 p. 100, coloration en masse au carmin boracique et inclu- sion au collodion où à la paraffine ; dans d'autres cas, J'ai rem- placé la coloration en masse par des colorations sur les coupes 184 R ANTHONY toujours à l’hématoxyline ou au bleu de méthylène et à l'éosine. Ces deux méthodes (dissections et coupes) combinées m'ont donné de très bons résultats se complétant les uns les autres. Pour l'étude des coquilles sèches, j'ai beaucoup emprunté à la technique de Félix Bernard, c’est-à-dire que, comme lui, je faisais à la loupe le triage des jeunes coquilles que Je recueil- lais, à l’aide d'un fin pinceau de blaireau humecté, dans les sables ou sur les polypiers pour les jeunes Chames. Mais, pour ce travail J'ai remplacé la loupe ordinaire dont se servait F. Ber- nard par la loupe stéréoscopique de Zeiss qui n'existait pas au moment où il fit ses recherches et dont je ne saurais faire trop d'éloges. Je nettoyais à l’eau de Javel très diluée (1) les jeunes coquilles recueillies, puis je les examinais toujours à l’aide de ce même instrument qui m'a rendu de grands services, aussi bien pour le triage que pour l'étude, en me permettant de voir des détails qui sans son secours m'auraient peut-être échappé. y. Procédés de recherches physiologiques. — HS ont consisté au premier chef en observations éthologiques que j'ai pratiquées comme Je l'ai dit pour les animaux marins sur différents points de nos côtes françaises. Pendant mes nombreux séjours au bord de la mer, j'ai pris de nombreuses photographies d’ani- maux en place et l’une d’entre elles sera reproduite dans ce travail. Malheureusement il m'a été impossible d'observer vivants et in situ les animaux qui précisément m'intéressaient de la façon la plus spéciale, à savoir les Dimvaires fixés en position pleuro- thétique. J'Y ai suppléé par les renseignements très précis qui m'ont été fournis, ainsi que je l'ai dit, pourles Chames par M. Ch. Gravier, pour les Æthéries par MM. Chevalier et Decorse surtout. Avant son départ pour la mer Rouge, j'avais mis complètement M. Ch. Gravier au courant de mon travail et des recherches que Je poursuivais, de telle sorte que les renseignements qu'il ma fournis mont rendu presque autant de services que si Je les avais recueillis moi-même. Bien plus, 1l ma (1) I faut prendre soin de diluer extrêmement l’eau de Javel. Trop concen- trée elle dissoudrait les jeunes coquilles ; lorsqu'elle est extrêmement diluée, le nettoyage est plus long mais offre toute sécurité. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 185 rapporté, aussi souvent qu'il Fa pu, les animaux dans leur position naturelle les uns par rapport aux autres, des blocs de Chames, des bouquets de Vulselles où de Malleus, ete. Ces matériaux et les photographies qu'il m'a communiquées ont été pour moi de la plus grande utilité au point de vue des études éthologiques. Outre ces observations sur le mode général de vie, j'ai dû faire des recherches de physiologie spéciale. A ce sujet se posait une question éminemment intéressante en raison des conséquences qu'elle peut avoir au point de vue mor- phogénique : celle du mode et plus particulièrement de la direction de l'ouverture et de la fermeture des valves chez les Acéphales. I s'agissait en un mot de savoir si, l’une des valves étant supposée immobile, l'autre valve S'abaissait sous l'influence de la contraction d'un ou des deux adducteurs dans le même plan que celui dans lequel elle s'était élevée sous l'influence du ligament,. ou, au contraire, st au moment de la fermeture elle ne s'inchnait pas, soit en avant, soit en arrière, basculant en quelque sorte autour d'un axe dorso-ventral. Lorsque ce mouvement de bascule est lent et très accusé on peut sen rendre compte de visu comme cela a lieu pour les Myes, les Lutraires et plus encore les Pholades. Mais l'inspection seule est insuffisante quand le {mouvement de bascule est “apide et peu accentué. Pour pouvoir le saisir et l'analyser J'avais d'abord pensé à employer la chronophotographie. Pour cela sur un bloc de cire molle ou de glu marine, Je dis- posais l'Acéphale que je voulais étudier de façon que son plan sagittal, c’est-à-dire le plan passant entre les deux valves, soit parfaitement horizontal. Souvent même sur la valve supérieure Je fixais à a cire horizontalement encore et parallèlement à la charnière une petite tigelle métallique suffisamment légère pour ne pas gêner par son poids les mouvements, mais d’un dia- mètre suffisant cependant pour ne pas vibrer au moment de la fermeture. D'un côté, soit à l'avant, soit à l'arrière, je fixais à la valve inférieure près du bord libre immédiatement en dessous et parallèlement à la première ügelle une autre tigelle sem- blable. Toutes deux dépassaient la coquille de longueurs égales 186 R. ANTHONY (Voy. fig. 2). J’immergeais l'animal ainsi préparé dans un aquarium dont les parois strictement planes et verticales étaient faites de glaces polies ; l'animal était placé de facon que le bord libre de ses valves soit en avant. Devant cet aquarium je braquais un chronophotographe à pellicule (modèle de Marey ou de Lumière), et, dès l'ouverture spontanée de l'animal je commencçais à prendre des images successives Jusqu'à l’ou- verture complète. Puis priant un aide d'exciter le sujet en Fig. 2. — Représentation schématique du dispositif employé pour l'inscription © chronophotographique des mouvements des valves chez un Acéphale. expérience, Je continuais à prendre des images successives pen- dant la fermeture de ses valves, en ayant soin de tourner cette fois plus rapidement la manivelle de l'appareil, la fermeture surtout lorsqu'elle est provoquée étant toujours plus rapide que l'ouverture (1). Je développais et fixais ensuite la pellicule ainsi obtenue suivant les procédés photographiques ordinaires ; puis Je projetais successivement toutes les images sur une feuille de papier blanc fixée au mur en avant soin que les contours du bloc-support, de la valve immobile et de sa tigelle, soient toujours superposés; pendant les projections des différentes images, je marquais les différentes positions de la valve mobile et de la tigelle qu'elle supportait. Sur le graphique ainsi obtenu 1l m'était facile de voir si pendant la fermeture la uigelle de la valve mobile cessait à un moment quelconque d’être parallèle à celle de la valve fixée, et si par conséquent il v avait eu ou non rotation autour d'un axe dorso-ventral et quelle (4) Le fait de tourner à la main la manivelle de l'appareil ne pouvait avoir aucun inconvénient, puisque, pour ce que je recherchais,‘la notion de temps m était indifférente. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 187 avait été la valeur de cette rotation. Plus simplement on peut remplacer ces graphiques obtenus par projection des images par de simples mesures au compas d'une tigelle à l'autre en différents points symétriques sur les images elles-mêmes. Pour les cas où Fig. 3. — Représentation schématique du dispositif employé pour l'inscription graphique des mouvements des valves chez un Acéphale. la rotation était très faible, ce procédé chronophotographique ne ma pas donné — et cela en raison des difficultés de placer l'appareil exactement en face de lanimal en expérience, de prendre des mesures exactes et de superposer exactement les images pendantles projections, —les résultats que j'en attendais, et je lui ai préférédans la plupart des casl'inscription graphique à l'aide d'un stylet. Ce procédé n'a pas l'exactitude nécessaire et la précision de la méthode chronophotographique dans laquelle aucun orga- nisme mécanique n'est interposé entre l'image représenta- üve obtenue et l'objet qui la donne, mais il à l'avantage d'am- phfier considérablement le mouvement et de rendre la rotation, lorsqu'elle est faible, plus appréciable. Fopérai de la façon 188 R. ANTHONY suivante : Sur un bloc de plomb, par l'intermédiaire de cire molle ou de glu marine, Je fixais un Acéphale par une de ses valves. Sur la valve libre après l'avoir soigneusement desséchée je fixais à l’aide d'une goutte de glu marine une petite tigelle de cinq à dix centimètres de long (suivant la taille du sujet en étude) sans poids appréciable par conséquent et se terminant par une petite plume à double plicature de la forme indiquée sur la figure 3. Cette plume, qui était introduite dans une fente du bambou, était soiten celluloïde, taillée dans une pellicule chrono- photographique hors d'usage, soit mieux encore en métal, taillée dans une mince feuille d'acier très légèrement trempé. Jorien- tais cette plume sur la valve de l'animalde façon que sa direction soit parallèle à la charnière. La position de la tigelle de bambou sur la valve n’est pas imdifférente. Il ne faut pas en effet quelle soit placée sur l'axe de rotation possible dorso-ventral de la valve, mais nettement en dehors. Pour la Lutraire, par exemple, où la rotation est très considérable, on placera la tigelle à une cer- taine distance de Faxe 7 y au point marqué d’un x (Voy. fig. 13). On conçoit de plus que si j'avais orienté la plume de façon que sa direction soit perpendiculaire à la charnière, il + aurait eu des accrocs et des ressauts sur le plan où l'inscription devait se faire chaque fois que la plume aurait progressé dans un certain sens la pointe en avant. Au-dessus de la plume je disposais une plaque de verre enduite de noir de fumée que je maintenais à l'aide d'une pince de bois soit horizontalement, soit légèrement oblique lorsque amplitude du mouvement d'ouverture était consi- dérable. Pour pouvoir plus commodément conserver mes tracés, j'ai remplacé souvent la plaque de verre par une petite plaquette de bois bien plane et bien polie sur laquelle, à l’aide de punaises nombreuses, je tendais aussi bien que possible une feuille de papier spécial pour inscriptions ; graphiques, préalablement noircie à la fumée ; cette feuille de papier offrait l'avantage de pouvoir être noircie au cylindre, ce qui assure, comme l’on sait, la régularité de la répartition du noir de fumée. Une fois prise dans la pince Je descendais la plaque de verre ou la plaquette de bois parallèlement à elle-même jusqu'à ce qu'elle soit arrivée au contact de la plume, l'animal étant au repos; MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 189 lorsqu'il écartait ses valves, la plume se déplaçait en se rappro- chant du support: lorsqu'il les rapprochait, elle faisait le même chemin en sens inverse, revenant au point de départ. Le tracé une fois obtenu, je le fixais suivant le procédé habituel par le passage dans du vernis blanc à clichés. La double plica- ture de la plume avait pour but de lui permettre de décrire dans son déplacement une ligne droite et non un arc de cercle qu'elle aurait infaillement tracé si elle n'avait été coudée qu'une seule fois. De cette facon dans les différentes positions de la plume, lune des deux courbures compensait l’autre et la ligne élait une droite. Mais je ne (ardais pas à m'apercevoir qu'une plume ainsi faite, quoique donnant des indications acceptables, avait à mon sens des défauts qui diminuaient dans une certaine mesure la valeur des renseignements fournis. D'abord il était impossible qu'elle n’eût un certain jeu au point où elle se reliait à la üigelle, etce jeu, quelque léger qu'il fût, déformait nécessairement quel- que peu le tracé, ce qui ne laissait pas d'avoir des inconvénients, l'appareil étant destiné à mettre en évidence des déviations souvent extrêmement peu considérables. De plus, lorsque les mouvements d'ouverture étaient très amples, comme cela a lieu chez les Pectens par exemple, l'angle de la plicature de la plume pouvait venir toueñer la plaque de verre où le papier enduit de noir de fumée, salir ou effacer même complètement le tracé obtenu quelques moments aupa- ravant. Pour parer à ces inconvénients j'étais obligé d'incliner la plaque destinée à recevoir l'inscription et de caleuler son incli- naison de telle sorte que l'extrémité seule de Ta plume la touchât et la touchàt toujours dans quelque position que ce fût. Cela n'était pas toujours facile à réaliser. Pour mes dernières expériences j'ai trouvé plus simple et plus avantageux de me faire construire par lun des mécaniciens du laboratoire du professeur Marey une plume spéciale dans laquelle tout jeu était supprimé et grâce à laquelle on pouvait inserire sur un plan toujours horizontalles mouvements de la plus grande am- plitude. Cette plume avait de plus avantage de pouvoir inscrire aussi bien, si on le désirait, sur un plan vertical. Toutefois, bien 190 R. ANTHONY que l'inscription verticale donnât des résultats aussi précis et aussi exacts que l'inscription horizontale, j'évitais en général de l'em- plover, ce procédé n’offrant aucun avantage sur celui que j'em- ploie habituellement, et présentant au contraire de nombreux inconvénients, dont les principaux sont les suivants : d’abord la nécessité de l'emploi d’une tige doublement coudée, à angle droit, ce qui est le seul moyen de pouvoir prendre des tracés tout en laissant l'animal dans l’eau, ce qui est indispensable: ensuite la fatigue plus grande pour l'animal qui n'ouvrait que difficilement ses valves en raison de la longueur du bras de levier au bout duquel se trouvait l objet ne à être soulevé. L'idée de cette plume dont je me suis servi pour mes dernières expériences n’est pas neuve. Plusieurs fois en raison des nom- breux avantages qu'elle présente, je l'ai vu employer comme instrument d'usage courant à l'Institut Marey, où l’on exige dans lesrecherches qui y sont faites, en raison même de leur nature et de leur but, la précision la plus absolue. Il me semble toutefois utile d'indiquer brièvement ici sa construction, pour pouvoir donner une idée exacte de la précision à laquelle je me suis astreint, et pour montrer les légères modifications que J'ai dû faire subir à l'instrument en usage à l'Institut Marey pour pouvoir l’approprier au but spécial que je voulais atteindre. L'instrument que j'ai fait construire est composé de deux parties métalliques, l'une supérieure, l'autre inférieure (Voy. PL [, fig. 1), réunies par une légère tigelle faite de bambou ou constituée de préférence par une paille. La partie métallique supérieure se compose d’une petite pièce métallique formée de trois branches dont une horizontale et deux verticales se réunissant à angles droits. La branche horizontale porte en son milieu une petite douille destinée à recevoir la paille et les branches horizontales présentent sur leurs faces internes deux godets symétriques destinés à recevoir une petite goupille qui y tourne librement. Au milieu de cette goupille est soudée à angle droit une aiguille dont l'extrémité inseriptrice est rectiligne et terminée en pointe fine, alors que l'extrémité opposée est courbe, un peu déviée latéralement pour pouvoir se replier le long de la paille. Elle est destinée à Jouer le rôle d’un contrepoids. La partie métallique inférieure est composée d’une petite MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 191 douille dans laquelle s'enfonce la tigelle. Elle se termine infé- rieurement par un certain nombre de branches divergentes et malléables qui, engluées de cire à modeler, où mieux de glu marine, servent à maintenir l'appareil fixé sur la valve de l'Acéphale que l’on étudie. Le fonctionnement de cet appareil est aisé à concevoir et les avantages qu'il présente sont évidents : tout jeu y est sup- primé et de plus la longueur, que l’on peut rendre aussi consi- dérable que Ton veut, de la tige inseriptrice, fait que l’on est toujours assuré d'avoir un tracé complet même sur un plan hôrizontal'et quel que soit l'amplitude des mouvements d’ou- verture de Fanimal étudié. De plus, Fappareil peut être, malgré sa complication relative, d'une légèreté extrème. La figure 1 (Planche 1) montre, appareil fixé sur une valve opereulaire de Pecten marinus Linn. et prèt à fonctionner. Mentionnerai-je enfin que séduit un instant par la précision, l'exactitude et je dirai même Félégance des méthodes d’inscrip- lion optique qui comme là chronophotographie offrent l'avan- tage de la non interposition d'un organisme mécanique entre l'image obtenue et l'objet qui la donne, j'avais songé à Les uti- liser pour cette étude. Mais daris mon cas particulier leur appli- cation pratique soulevait de telles difficultés que j'ai dù y renon- cer; Je l'ai fait avec d'autant moins de regrets que j'étais très satisfait des résultats obtenus par l'inscription graphique. À propos des méthodes physiologiques, je dois citer aussi les mulilations que j'ait pratiquées dans le but de rendre des Isomyaires fonctionnellement Anisomyaires ou Monomyaires, pour pouvoir étudier ensuite sur ces animaux ainsi transformés les modifications survenues dans le fonctionnement des valves. J'ai expérimenté uniquement dans ce cas sur des Anodonta cyghèt Lainn. ét des Cardin norwegicum Speng. Jar choisi les premiérs en raison de la facilité que l'on.a à se les procurer et à les faire vivre dans les aquariums d’eau douce, et aussi en raison de la facilité d'exécution de Fopération, les fibres du muscle adducteur antérieur (celui que je supprimais le plus souvent et de préférence totalement ou en partie pour me rap- procher des conditions naturelles des Anisomyaires et des Mo- nomyaires) s'insérant toujours très près du bord libre sur une 192 R. ANTHONY surface plane et non pas, comme chez les Unios, au fond d'une cavité. Le Cardium Norwegicum Speng. présente également ce dernier avantage. Comme l'Anodonte, 1l est facile à se pro- curer en hiver et est assez robuste; le laboratoire de Saint- Waast-la-Hougue m'en à fourni en assez grand nombre. En rasant au scalpel et intérieurement l'une ou l'autre valve d'un de ces animaux maintenu ouvert à l'aide d’un petit com de bois, je pratiquais le décollement du muscle adduecteur d’une de ses insertions. L'animal, en général, se remettait assez vite et vivait quelques jours pendant lesquels je pouvais étudier le mode d'ouverture et de fermeture de ses valves, que Je com- parais à ce que l’on constate d’une part chez les Isomyares nor- maux, d'autre part chez les Anisomyaires et les Monomyaires. d. Procédés de recherches morphogéniques. — Comme 1} a été dit dans l’Introduction de ce travail, jar voulu mettre, pour mes recherches morphogéniques, à contribution l'observation et l'ex- périmentation. L'observation consiste simplement, on le sait, en la mise en œuvre des matériaux fournis par l'étude des faits morpholo- giques, embryogéniques et physiologiques : elle n'offre rien de spécial dans son application ici et je n°y insisterai pas. J'ai tenté aussi des expériences morphogéniques, mais comme ces expériences, ainsi que Je lai dit, sont par essence même des expériences à très longue échéance, il ne me sera pas possible, à mon grand regret, d'en relater ei les résultats, qui feront l'objet de mémoires ultérieurs. Je me bornerai à les signaler. Dans une première série d'expériences, J'ai essayé de faire vivre dans des conditions anormales, c’est-à-dire éloignées les unes des autres sur des plaques de verre de très jeunes Myti- lus edulis Linn. provenant de la zone supérieure des rochers de la baie de Douarnenez et habituées à vivre réunies en bouquet. Jemployais pour cela le procédé qui consiste à tapisser de plaques de verre le fond d'un cristalloir contenant ces Jeunes animaux. Ils se fixaient d'eux-mêmes sur les plaques de verre qu'on recueillait ensuite et qu'on disposait dans des aquarium à eau de mer. Dans une autre série d'expériences, et pour tenter de réaliser dans une certaine mesure les conditions d'existence des Acé- MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 193 LE] phales fixés en position pleurotéthique, j'ai fixé à l'aide de ciment par une de leurs valves à la facon des Huitres ou des Æthéries, sur de grosses pierres de très Jeunes Anodontes, de très jeunes Unios et même de très jeunes Dreyssensies, que je conserve dans des bassins el des aquariums au laboratoire d'Analomie comparée du Muséum et à la Station phystolo- gique, me réservant d'étudier dans quelques années seulement peut-être les modifications consécutives à ce changement de position. Ce dernier ne va pas sans entrainer une certaine sône chez les animaux soumis à lexpérience : sur dix sujets, il en meurt environ huit et même souvent davantage, et, j'ai remarqué que la résistance était d'autant plus grande que la taille du sujet était momdre. J'ai essavé aussi de faire vivre des Cardium noriregicum Speng, chez lesquels j'avais, comme il à été dit plus haut, détaché le muscle adducteur antérieur lune de ses insertiens, afin de pouvoir voir après plusieurs années les modifications résultant de cette mutilation. Enfin au laboratoire maritime de Saint-Waast-la-Hougue J'ai inclus dans des blocs de plâtre des Tapes decussatus Linn. laissant un simple passage aussi étroit que possible pour les siphons. Ces animaux ont, on le verra plus loin, les siphons séparés, et, J'ai voulu reproduire pour eux les conditions d’exis- tence des T'apes pullastra Mig var. perforans et même des Pho- lades. Le bloc d'inclusion est fait en deux, parties, deux valves réunies par une petite quantité de plâtre étendue sur la ligne de Jonction; on peut les séparer à volonté e{ constater de temps en temps les modifications extérieures subies. La même expé- rience à été répétée à la Station physiologique du Collège de France sur des Anodontes. $ Dans toutes ces expériences où l'on emploie le ciment ou le plâtre, 1l est bon de mettre, les premiers jours du moins, dans l’eau courante les animaux et Le bloc qui les supporte ou les contient. Tels sont les principaux procédés de recherches que ÿai employés au cours de ce travail. J'ai cru devoir, pour ne point 2 ANN. SC. NAT. ZOOL. 1, 13 19% R. ANTHONY encombrer les résultats de détails qui leur soient étrangers, en indiquer du moins le principe et traiter dans ee chapitre spécial la partie purement technique de la question. Peut-être aura-je à reprendre, au moment d'indiquer les résultats, quelques petits points de détails de ces techniques qui, si j'en avais parlé maintenant, n'auraient pu être saisis avant que les questions anatomiques et physiologiques fussent traitées. CHAPITRE IT INTRODUCTION A L'ÉTUDE GÉNÉRALE DES CARACTÈRES DE CONVERGENCE ET DE LA MORPHOGENIE ‘ DES MOLLUSQUES ACÉPHALES. Puisque létude des causes ([morphogénie) ne doit ration- nellement venir qu'après celle des faits, 1l est naturel de se demander d'abord si la morphologie, lembryogénie et la phy- siologie des Acéphales sont actuellement assez avancées pour justifier l'étude de leur morphogénie. Si l'on consulte un récent traité d'Anatomie comparée ou de Zoologie, on peut croire qu'actuellement l’organisation, c’est-à-dire la morphologie des Acéphales est suffisamment connue dans ses grandes lignes. Les études générales de mor- phologie extérieure, d'anatomie, d'histologie dans lesquelles on s'est occupé de ces mollusques, les monographies com- plètes ou partielles dont ils ont été l’objet sont nombreuses et la plupart du temps d’une grande exactitude; les plus petits détails y ont été le plus souvent, particulièrement dans les tra- vaux récents, mentionnés et sininutieusement décrits qu'il sem- blerait même que les zoologistes aient pu croire depuis quelques années que rien plus n’était à faire sut ces animaux tant leur étude paraît avoir été délaissée d’un accord presque com- mun. Toutefois, ce dédain de la plupart des zoologistes MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 195 contemporains à l'égard des Acéphales me semble loin d’être jusüfié et, en entreprenant ce travail, je n'ai pas tardé à m'a- percevoir que si d'une part certaines questions générales avaient été insuffisamment creusées, d'autre part, certains groupes par- ticuliers (Ætherudæ, Chamidæ, Tridacnidæ, par exemple, pour n'en citer que quelques-uns) étaient très insuffisamment connus au point de vue même morphologique. J'ai dû, de mon mieux, combler ces lacunes par des recherclies per- sonnelles ; seules celles qui se rapportent aux Mollusques Acéphales Dimyaires fixés en position pleurothétique, trouve- ront place ici dans la deuxième partie de ce travail. En compulsant la bibliographie de la morphologie des Acéphales durant ces dernières années, on rencontre à peu près toujours les mêmes noms, ceux de Lacaze-Duthiers, de Pelseneer, de F. Bernard, de Dall, de Drew, de Ménégaux, etc., qui sont les auteurs des travaux anatomiques les plus récents avant trait à ces animaux. Pour l'indication de leurs mémoires, ainsi que de ceux des autres auteurs, on se reportera à lindice bibliographique placé à la fin de celte étude. Comme leur morphologie, lembrvogénie des Acéphales à été l'objet de nombreuses recherches dans lesquelles on constate le même souci d'exactitude que dans les travaux de morphologie. Toutefois on est obligé de reconnaitre que les faits embrvogé- niques, touchant les Mollusques Acéphales, sont encore moins complètement connus que les faits de morphologie et que les lacunes à combler sont là plus nombreuses encore. Comme pour tous les groupes animaux, d’ailleurs, Fembrvo- génie des premiers stades, qui en somme ne varie entre deux groupes voisins que d'une façon relativement peu importante, a été faite d'une facon suffisante. Celle des stades finaux, au contraire, des formes dites jeunes, qui intéresse surtout le mor- phogéniste et le phylogéniste, semble avoirétésystématiquement laissée dans l'ombre. Les remarquables travaux, de Jackson, de Munier-Chalmas et de F. Bernard surle développement de la coquille en général, ainsique quelques mémoires se rapportant à des types particuliers, tel celui de Jackson (88) pour l'Huitre, 196 R. ANTHONY viennent à peu près seuls éclairer l’histoire des derniers stades de leur développement. Il y a donc beaucoup à faire encore dans cette voie, et un certain nombre des résultats que J'ai déjà obtenus, pour diffé- rents types, se trouveront brièvement indiqués au cours de ce chapitre. Quant à leur mode de vie, à leurs mœurs, au fonctionnement de leurs organes, à leur physiologie, en un mot, elle est à peu près inconnue; bien plus, les zoologistes semblent, à part de trop rares exceptions, laisser dans l'ombre, d’une façon presque systématique, toutes ces questions pourtant si intéressantes : on ne se rend guère compte de la façon dont vit et se meut un animal dont beaucoup de naturalistes ont disséqué ou examiné les organes par les procédés de lanatomie microscopique et de l'histologie. Il v a toutefois à signaler plus particulièrement dans cet ordre d'idées le remarquable travail de Coutance sur la physiologie des Acéphales, dans lequel 11 s'occupe plus spécialement du Pecten marumus Linn., et les recherches de Jolvet et Sellier sur les contractions des muscles adducteurs. Quant au mémoire de Piéri sur les T'apes? 1 renferme, à côté de faits intéressants, la relation d'expériences sansgrande portée, à mon sens du moins, et tendant à établir l’action des différentes substances de la ma- tière médicale sur l'organisme des ‘animaux étudiés par cet auteur. Les autres travaux se rapportant à la physiologie des Acéphales seront énumérés à l'index bibliographique. En résumé, 1l semble, et à un examen superficiel, que les Mollusques Acéphales soient actuellement bien connus; mais lorsqu'on considère les choses de plus près, avec l’idée de vouloir comprendre leur organisation, de saisir, en un mot, leur morphogénie, ons aperçoit, d’une part, qu'il y a dans le domaine des faits aussi bien morphologiques qu’'embryogéniques et phy- siologiques, beaucoup de lacunes, ce qui rend toute explication souvent difficile; d'autre part, que certains autres faits, dont l'étude a été poussée très loin, n'ont, au point de vue &es expli- cations morphogéniques, qu'une importance minime. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 197 Cette insuffisance réelle de documents, opposée à son abon- dance apparente, tient en grande partie à ce défaut d'idées générales qui fuit que certains naturalistes, restant complète- ment et volontrement étrangers à tout ce qui peut mener à une explication possible des formes, pensent qu’actuellement rien plus n’est à faire en morphologie en dehors de la cytologie la plus fine. IIS s'occupent uniquement à des constatations de points de détails, alors qu'ils passent souvent à côté de faits importants sans les soupçonner. Avant de commencer cette étude générale des caractères de convergence et de la morphogénie des Mollusques Acéphales, il ne me semble pas superflu d'indiquer la façon dont je com- prends l'orientation de ces animaux. Cette façon me semble si rationnelle et si simple que J'aurais même jugé superflu d'en parler si Je n'avais rencontré dans des mémoires même très récents et postérieurs au travail de Nœætling (02) sur ce sujet, des opinions qui m'ont paru vraiment extraordinaires. Il m'a semblé utile, en raison de cet état de choses et pour éviter toute confusion, de bien dire une fois pour toutes ce que j'entends par région antérieure, postérieure, ventrale et dorsale d'un Mollusque Acéphale. Pour déterminer l'orientation des Acéphales, les conchylio- logistes s’en tenant à l'examen de la coquille seule, procèdent généralement de la façon suivante. Supposons que l'animal ait comme l’Anodonte ou la Tridacne une forme sensiblement allongée : ils mènent le grand axe et toute la région qui con- tenant la charrière se trouve d’un côté de cette ligne est pour eux la région dorsale, toute celle qui se trouve de lautre côté, le bord libre, est la région ventrale. Cette facon de procéder, dans laquelle on ne tient aucun compte des organes les seuls importants au point de vue de lembryogénie et de la mor- phogénie, me parait devoir être abandonnée par les anato- mistes. C'est elle qui à conduit à dire que la Fridacne et l'Hip- popus étaient retournés dans leur coquille, et j'espère facile- ment montrer qu'il n'en est rien. En réalité, lorsqu'il s'agit d'orienter un Acéphale, il faut uniquement tenir compte, comme on le fait d'ailleurs pour tous les autres animaux, de la 198 R. ANTHONY position de sa bouche (stomodeum) et de celle de son anus (proctodeum) pour déterminer son axe longitudinal. Les organes internes doivent seuls entrer en ligne de compte, comme l’a très bien fait remarquer Lacaze-Duthiers dans son mémoire sur les Tridacnes, à l’exclusion de la coquille avec ses diverses parties, crochets, corselet, lunule et bords libres. Cette dernière n’est en somme, en effet, que le produit de sécrétion du manteau et son crochet, qui semblerait devoir en être consi- dérée comme la partie la plus importante puisqu'elle est le centre véritable de la calcification, n'affecte pas de rapports constants avec les organes internes : chez le Cardium edule Linn., par exemple, en face du crochet sont l'estomac et le foie; chez les Tridacnidés, c’est la bouche. Quel que soit l'Acé- phale auquel je m'adresse, Je me sers, suivant en cela l'exemple de Lacaze-Duthiers (03) et de Næœtling (02), de la position de sa bouche et de celle de son anus pour déterminer son axe longi- tudinal : la bouche marque la région antérieure, anus la région postérieure. Fappelle bord dorsal celui qui va de la bouche à l'anus en passant par le cœur, bord ventral celui qui va de la bouche à l’anus en passant par la cavité palléale. Les côtés droit et gauche se définissent d'eux-mêmes et répondent aux valves. En appliquant aux Tridacnidés cette méthode très simple d'o- rientalion, je crois être arrivé, comme Je le montrerai au cours de ce chapitre, à rendre plus simple et plus intelligible la mor- phologie de ces animaux et à préciser les raisons de leur appa- rence parfois paradoxale. Comme on le voit, je ne lens nullement compte, pour l'orientation, du crochet. Je définirai la lunule, la région située entre le crochet et la bouche; chez les Tridacnidés, elle est nulle puisque la bouche est au crochet. J'appliquerai à tous les Acéphales cette méthode d'orientation 2Y que j'ai cru indispensable d'indiquer ici une fois pour toutes. Au point de vue du sens général de leurs adaptations, on peut diviser les Mollusques Acéphales en un certain nombre de catégories renfermant chacune des types convergents mais à affinités familiales très différentes. On peut considérer comme les deux principales de ces catégories : Les DimyarREs qui ont deux muscles adducteurs ; MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 199 Les MoxomYaIRES qui ont un seul muscle adducteur, les seconds dérivant très certainement des premiers. Si cette division à au point de vue qui est envisagé 1c1, et qui est celui des adaptations, un grand intérêt, elle n’a, ne crai- gnons pas de le répéter, au point de vue systématique général aucune valeur, et, c’est à tort que dans les traités de Zoologie les auteurs se basent encore quelquefois sur les caractères ürés du nombre et du développement relatif des muscles adducteurs pour établir la classification des Acéphales. Les organes de la vie de relation, et Les muscles plus que tous autres, sont d’une façon générale en effet trop malléables pour servir de base à une classification zoologique; on doit leur préférer les organes les plus fixes, les moins changeants, ceux sur qui les causes mor- phologiques ont eu le moins de prise, ceux qui par conséquent ayant le moins varié dans le cours des générations nous appren- nent le plus sur la phylogénie des êtres, toute classification, on le sait, devant se rapprocher dans la mesure du possible d'un arbre généalogique. Bref, les termes dimynires et monomyaires ne doivent indi- quer que des types généraux d'organisation en rapport avec des conditions d'existence déterminées, {vpes convergents que l'on peut rencontrer dans tous les groupes, dans toutes les familles d'Acéphales par le fait de causes identiques agissant sur des êtres appartenant à des phylums différents. C'est ainsi que les Arches parmi les Filibranches, les Cardiums et les Cyrènes parmi les Eulamellibranches sont des Dimyaires. D'autre part, les Placunes sont des Monomyaires filibranches, tandis que les Mulleries tout aussi monomyaires ont des bran- chies treillagées d'Unionidés. Dimyaires. Les Dymiaires peuvent être répartis en deux sous-catégories : Les HomomyaIREs où IsomYAIRES, dans lesquels les deux mus- cles sont égaux ou à peu près. 200 R. ANTHONY Les HÉTÉROMYAIRES où ANISOMYAIRES, dans lesquels les deux muscles sont franchement inégaux, chacun de ces trois types d'organisation, Dimyaires isomyaires, Dimyaires anisomvyaires et Monomyaires répondant à des conditions d'existence déter- minées. 1. ISOMYAIRES. La forme Dimyaire isomyaire, que, par abréviation, J'appel- lerai au cours de ce travail Diisomyaire, et dont il va être question d'abord, est la forme la plus primitive des Acéphales. Les Diisomyaires comprennent eux-mêmes, au point de vue du sens général de leurs adaptations, deux grands types : Le TYPE EUTHÉTIQUE OU NORMAL ; Le TYPE PLEUROTHÉTIQUE. 1° DrISOMYAIRES EUTHÉTIQUES. J'appelle normal Le premier type pour plusieurs raisons. D'abord, la plupart des animaux sont d’une façon générale euthétiques, ce qui constitue par conséquent la règle. De plus, en tenant compte des formes fossiles, aussi bien que des formes actuelles, on voit que le plus grand nombre des Acéphales diisomyaires le sont également. C'est aussi le cas parmi les Acéphales actuels de ceux dont l’organisation est la plus primitive, et, 1l en devait être de même incon- testablement des formes ancestrales, les Mollusques les plus primitifs connus étant nettement euthétiques. Enfin les Acé- phales qui sont pleurothétiques à l’âge adulte présentent à un moment donné de leur évolution ontogénique les caractères anatomiques des animaux euthétiques ; cela sera démontré au cours de ce travail pour les Disomyaires fixés en pleurothé- üisme. Les formes pleurothétiques sont toujours, en somme, chez les Acéphales, des formes euthétiques modifiées. Le mot euthétique vient de deux mots grecs : eo — bien, et rinu: — position, animaux en bonne position, c’est-à-dire en position normale, habituelle. Les euthétiques peuvent être définis : ceux qui dans les con- ditions normales de leur existence se trouvent constamment placés de telle facon que leur plan sagittal (bueco-ventro- ano-dorsal) soit perpendiculaire au plan sur lequel ils reposent ou progressent; les lois de la pesanteur faisant que les animaux MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 201 ne peuvent, à part exceptions, reposer ou progresser que sur un plan sensiblement horizontal ou légèrement incliné, on peut être amené à dire que les euthétiques sont ceux dont le plan sagittal est vertical dans les conditions ordinaires de la vie. L'ancètre hypothétique qui aurait donné naissance aux Acé- phales d'une part et aux Gastéropodes diotocardes de l'autre, de- vait vraisemblablement posséder, comme l'ont encore aujour- d’hui les Mollusques les plus primitifs (Chitonides, par exemple), un pied rampant à la facon de celui des Chitons et des Gasté- ropodes. Cet animal devait done progresser à la manière de ces derniers, c’est-à-dire le ventre sur le sol, et dirigeant en avant son extrémité antérieure, comme sont naturellement amenés à le faire pour chercher leur nourriture les animaux qui se dé- placent parallèlement à un plan. De ce mode de locomotion, sagittal par conséquent, 1l à dû résulter deux choses : d'abord l'allongement antéro-postérieur dans le sens de la progression, ensuite la symétrie par rapport au plan sagittal: ce dernier ca- ractère se rencontre également chez les Chitonides et Les Gasté- ropodes diotocardes les plus anciens, tels que le Bellérophon, par exemple, le rejet latéral de la masse viscérale étant une modi- fication secondaire qui se produit chez les Gastéropodes plus évolués et dont on n'a pas à s'occuper ici. Cette symétrie par rapport au plan sagittal s'établit parce que Panimal, placé dans un milieu homogène else tenant posé sur sa sole ventrale, les deux régions de son corps situées de chaque côté de cette base de sustentation sont soumises aux mêmes influences méca- niques; la pesanteur, ainsi d'ailleurs que toutes les autres forces physiques pouvant s'exercer dans un milieu homogène, s’exercent de la même facon en c qu'en «4, en d qu'en 4, de telle sorte que le plan sagittal, dont la trace sur le papier est repré- sentée par 7 (fig. #) est le lieu géométrique des points tel que a, b, ce, d. Wen résulte que de chaque côté du plan sagittal les deux moitiés du corps sont symétriques, e’est-à-dire de même surface et sensiblement de même poids; la charge se répartit en quelque sorte d'elle-même; on appelle ces deux moitiés du corps droile et qauche. Les Acéphales dinryaires euthéliques sont donc obligatowement symétriques par rapport à leur plan sagittal (Voy. fig. 4). Ils le sont, pour les mêmes raisons que le tas que 202 R. ANTHONY l'on obtiendrait en faisant tomber verticalement, avec une vitesse toujours égale et sur un plan parfaitement horizontal, du sable fin strictement homogène par une ouverture située exactement au-dessus d'une cloison verticale, le serait par rapport à cette cloison. La pesanteur semble done jouer, comme on le voit, le plus grand rôle dans la morphogénie gé- nérale des Dimyaires euthétiques vivant sur des plans horizontaux. Un Acéphale diisomyaire euthétique est done essentiellement caractérisé par un contour. sagittal sensiblement circulaire ou du moins ovalaire à grand axe antéro- postérieur et la similitude et l'égalité des deux moitiés droite et gauche de son Corps. Y- NÉE EQIANNEE EE Les Disomyaires euthétiques peuvent expliquer la symétrie par ù rapport au plan sagitl tre abdominothétiques ou céphalothé- chez les Dimvaires euthé- Ë ; L tiques abdominothétiques. LIŒUES ; les premiers sont ceux qui dans les conditions ordinaires de la vie repo- sent sur le bord ventral de leur plan sagittal (Nucules); les seconds sont ceux qui reposent sur le bord céphalique ou buccal de ce même plan sagittal (Tapes). Les uns et les autres sont, comme on l’a vu el pour les mêmes raisons, symétriques par rapport à ce plan. | a. Düsomyaires euthéliques abdominothétiques. — Les Duso- myaires euthéliques abdominothétiques sont libres comme la Nucule ou fixés d’une facon relative et ils le sont alors comme les Arches à laide d’un organe filamenteux spécial appelé byssus. Abdoninothétiques libres. — Les abdominothétiques libres sont en général considérés comme des animaux marcheurs el quelque peu fouisseurs. Dans les traités généraux de Zoologie et d'Anatomie com- parée, ilest même dit que la Nuculu, qui peut être considérée comme le type de ce groupe, possède une véritable sole pé- dieuse analogue à celle des Gastéropodes que son mode de vie lui aurait probablement permis de conserver, souvenir de ses. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 203 ancêtres les plus immédiats. En réalité, les recherches récentes prouvent qu'il n'en est rien. Les Nuculidæ ne possèdent pas de sole pédieuse analogue à celle des Gastéropodes, et il en est de même des Pectunculus. Quant au pied des Trigonüdeæ, qui semblent être également, au point de vue de attitude, des ab- dominothétiques, il a subi des modifications léloignant davan- age du pied reptateur. Le pied des Nuculidés diffère par des caractères morpho- logiques très importants de celui des Mollusques rampants (Gastéropodes) et leur locomotion, quoique s'effectuant dans une position analogue à celle qui caractérise ces derniers, en diffère par des caractères physiologiques essentiels. Cette locomotion, qui à été étudiée ces temps derniers, d'abord par Drew, ensuite par un jeune naturaliste, F. Vles et enfin par moi-même, dont les observations corroborent absolument celles des précédents auteurs, est une sorte de fouissage, l'animal restant en position abdominothétique et progressant en avant. Quand on le trouve en place, il est en général enfoncé dans le sable, ne laissant paraitre que ses deux cro- chets à l'extrémité d'un sillon tracé qu'il vient de parcourir. II est inutile d'insister ici davantage sur le mode précis de loco- motion de la Nucule, étant donné qu'il importe peu pour Île point de vue auquel je me place, qu'il soit fouissement ou replation, puisqu'en tous cas, ilest toujours abdominothétique. Pour de plus amples détails sur ce point, le lecteur peut d'ailleurs se reporter à la récente note de F. Vles sur la locomotion de la Nucule (Voy. Bibliographie). Ilest probable que le Pectunculus, sinon les Trigoniidæ, ont un mode de locomotion absolument comparable à celui des Nucules et qu'il faut dès maintenant renoncer à l'attribution à ces Acéphales qui se trouvent être en fait les plus primitifs, d'un pied reptateur de Gastéropode. Les abdominothétiques sont dépourvus de siphons, ils ont une seule ouverture palléale et, pendant la fermeture, leurs valves sont absolument coaptées. Tous sont des animaux à organisation très primitive sem- blant dans notre faune actuelle comme des survivants des âges passés. Leur aspect primitif n'a rien qui doive surprendre : en effet, bien que le pied de ces animaux ne soit pas à propre- 20% R. ANTHONY ment parler reptateur, que l’on se place au point de vue de la forme aussi bien qu'à celui de la fonction, il n’en est pas moins vrai qu'il se rapproche plus que celui de tous les autres Acé- phales de celui des Chitonides. La forme spéciale qu'il affecte semble n'être, en somme, qu'une assez légère modification du pied reptateur des ancêtres directs des Acéphales en vue d'un mode de locomotion tout spécial qui ne peut être comparé au Fig. 5. — Coupe sagittale de Peclunculus glycimeris (Linn.). — 1, bouche : 2, anus: 3, pied; 4, muscle adducteur antérieur ; 5, muscle adducteur postérieur; 6, cœur contenu dans le péricarde et traversé par le rectum. fouissement des Céphalothétiques, mais que, par certains points, l'attitude dans laquelle il s'effectue à pu être rapprochée de la reptation des Acéphales primitifs descendants directs sans doute des Mollusques plus primitifs encore dont les Chitonides actuels peuvent nous donner une idée. Ils devaient être euthéti- ques, abdominothétiques et rampants. Des deux lignées auxquel- les ils ont donné naissance, celle des Gastéropodes et celle des Acéphales, la première est restée euthétique (en faisant abstrac- üon de la torsion) et abdominothétique. L'autre a modifié plus tard dansdiverssens son attitude, mais les plus primitifs des Acé- phales actuels tout en modifiant légèrement la forme de leur pied par l'usage spécial qu'ils ont dû en faire, sont restés comme leurs ancêtres euthétiques et abdominothétiques ; tout d’ail- leurs dans leur organisation, les branchies foliacées particu- MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 205 lièrement s'accordent pour faire des Nueules des animaux voisins, malgré leurs modifications secondaires, du (type ancestral. Quant aux Pectunculus et aux Trigonies, qui me semblent aussi devoir rentrer dans ce même groupe, ils possèdent des branchies filamenteuses, c’est-à-dire des fe. organes respiratoires arrêtés au premier ANS stade de la modification partant des bran- | | chies foliacées du {ype nucule, pour aboutir aux branchies lamelleuses et fenê- trées des Cardiums et même par régression aux cloisons musculaires des Septibran- ches. Les Diisomyaires abdominothétiques libres représentent en somme le type d'or- PAM Tune Soi UALTe ganisation le plus primitif des Acéphales du moule interne d’Arca tetragona Poli destinée actuels. à montrer l'aplatissement Abdominothétiques firés. SONT peut dorso-ventral sous l'in- flueñce de la pesanteur encore les appeler byssifères, parce que x y. Trace du plan sa- chez eux la fixation se fait à l'aide d'un AS EE NET organe filamenteux spécial, le byssus, qui ne semble être autre chose que le produit de sécrétion durci et aggloméré des glandes du pied, la glande à byssus semblant être l'analogue de l'ensemble des glandes du pied des Gastéro- podes. Ce groupe est personnifié par la famille des Arcidæ, à l'excep- tion d'une part des Pectuneulinæ, lesquels semblent en somme être des Arcidæ qui, par le fait de conditions d'existence par- ticulières, seraient redevenus libres et chez lesquels le pied aurait pris une forme et une constitution se rapprochant de celle qu'il possède chez les Nucules, d'autre part des Dimyidæ qui seraient des Arcidæ secondairement fixés en pleurothétisme comme nous le verrons. Les Arches sont des animaux qui habitent, en général, la zone du balancement des marées ou les régions immédiatement suivantes. Elles sont fixées généralement soit sur le sol, soit sur des rochers ou des débris de coquille, à une certaine distance les unes des autres, et on les prend à la drague. L'abondance de nourriture au lieu où eiles vivent semble 206 R. ANTHONY pouvoir être considérée vraisemblablement comme une des causes de leur immobilité, à la suite de laquelle le pied semble devoir avoir diminué de volume, réduit la surface de sa sole ; ses glandes distantes et séparées vraisemblablement chez les formes hypothétiques primitives se seraient rapprochées et agelomérées, et leur sécrétion ayant pris, pour une raison qui nous échappe, un caractère spécial de dureté en aurait fait ce qu'on appelle le byssus. Les Arches ont été considérablement modifiées dans leur forme par ce genre de vie, et pour citer un seul exemple, une Fig. 7. — Coupe sagittale d'Arca barbala Linn. — 1, bouche ; 2, anus: 3, pied: 4, muscle adducteur antérieur; 5, muscle adducteur postérieur; au milieu le byssus compact surmonté de ses rétracteurs antérieur et postérieur. La coupe n’a pas passé par le cœur. espèce méditerranéenne, lArra tetragona Voli, que le labo- ratoire de Banvyuls m'a fournie en assez grand nombre, affecte la forme représentée dans la figure 6. Elle est affaissée en quelque sorte sous son propre poids. On trouvera une modifi- cation analogue dans la morphogénie des Tridarnidiæ. Les Arcide Sont à tous points de vue des formes très primi- tives. A leur sujet, la question suivante peut se poser : Dérivent-elles d'animaux analogues aux Nucules? Je ne le crois pas el il me paraît plutôt que leur descendance puisse être élablie de la facon suivante : au début de la série des Acéphales, il semble que lon doive placer, ainsi qu'il a déjà été dit, an groupe d'animaux primitifs à branchies foliacées et ‘à cœur dorsalement placé par rapport au tube digestif. comme les Nucules, mais chez qui le pied n'ayant pas subi les mo- difications qui caractérisent celui de ces derniers animaux posséderait encore les caractères du pied vraiment reptateur des Gastéropodes. On peut désigner sous le nom de Pronu- MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 207 culidæ ce groupe hypothétique. Les Pronuculidæ auraient donné naissance à deux séries divergentes, des abdominothétiques libres et des abdominothétiques fixés. Les premiers com- prennent, comme on l'a vu, d'abord les WNuculide. Les se- conds, adonnés à la vie sédentaire, auraient vu leurs glandes pédieuses s'agglomérer et le produit de sécrétion de ces glandes se solidifier. Ainsi se serait constitué le groupe des Protarcidæ, qui auront donné d'une part des formes anisomyaires, les 1 yti- lidæ, et par une complication de là circulation branchiale (Vov. Ménégaux) des formes isomyaires les A7cidæ. De ces dernières, une branche divergente, les Pectunculinæ, aurait fait retour à la vie libre, tandis qu'une autre branche encore aurait constitué, par l'intermédiaire de formes analogues à nos Limopsis actuels, les Dimyidiée (À), fixés en position pleuro- thétique (Voy. le tableau de Ta fin de ce chapitre). Outre les Arcidæ, dont les affinités probables viennent d'être brièvement indiquées, le groupe des abdominothétiques byssi- fères comprend un certain nombre de formes moins impor- tantes, qui sont incontestablement des Céphalothétiques reve- nus à l’abdominothétisme et chez lesquelles Le byssus aurait réapparu. B. Düsomyaires euthétiques céphalothétiques. — Dans cette catégorie des Céphalothétiques, qui comprend le plus grand nombre des Acéphales, je puis ranger les animaux fouisseurs à quelque degré que ce soit, aussi bien les Anodontes et les Unios, qu'on trouve tantôt et par exception posés sur une de leurs valves, tantôt et le plus souvent, enfoncés lorifice buc- cal en bas, dans le sable ou la vase, que les Pholades et les Tarets qui passent toute leur vie dans les galeries qu'ils se sont creusées, l'élargissant à mesure qu'eux-mêmes grandissent et n'en sortant jamais. Suivant le degré de leurs modifications, sous l'influence de l'enfouissement céphalothétique, on peut diviser pour la com- modité de Ja description ces animaux en trois groupes. 1) Le premier groupe comprendra un certain nombre d'Acé- phales, que l’on range parfois parmi les Asiphoniens ou Inté- (1) Les Dimyidæ semblent être très anciens puisqu'on en trouve déjà dans le Bathonien. 208 R. ANTHONY gripalliés, ce qui pourrait tendre à les faire passer à tort pour de vrais abdominothétiques. En réalité, 1ls font incontestablement partie intégrante des Céphalothétiques et forment la transition aussi bien au point de vue morphologique qu'au point de vue éthologique et fonc- tüonnel, entre le premier de ces groupes et le second. Dans ce groupe de transition, 1l semble que l’on puisse placer les Unio- md, les Carditidæ, les Astarlidæ, les Crassatellidæ, les Cyre- nie, les Cyprinidie, ete, qui constituent aussi ce que beau- coup d'auteurs appellent les Submytilaren. Pour se rendre compte de ce qu'est exactement le mode de vie céphalothétique le plus simple est de s'adresser aux Unionidés qui de tous les animaux faisant partie de cette pre- mière catégorie de (ransition sont ceux dont il est le plus aisé d'observer Le mode de vie; un grand nombre d'Unionidés vivent dans beaucoup de rivières et de cours d’eau de notre pays. Si l’on regarde avec soin le fond vaseux ou sablonneux d’une rivière habitée par des Unios ou des Anodontes, on peut v voir deux choses, d’abord de larges sillons tortueux et peu profonds qui sont la trace de la progression de ces animaux, à laide de leur pied; ensuite, çà et là de petits groupes de papilles courtes et peu mobiles, émergeant au fond de l’eau de la surface libre de la vase et la dépassant à peine de quelques millimètres. Les sillons y aboutissent. De plus près on voit que ces papilles sont disposées sur deux rangs, séparés par une fente qui paraît profonde. Au delà des papilles, la fente se continue de l’autre côté d’une mince cloison. On voit donc, en résumé, deux orifices dont l'un, le plus considérable, est entouré de papilles. Par ce dernier s'établit un courant d'entrée; par le second, un courant de sortie qui fait tourbillonner les particules solides contenues dans l’eau aux alentours. Une telle disposition à la surface de la vase, au fond de l’eau, indique à coup sûr la présence d’un Unionidé enfoui verticalement la région buccale en bas et ne laissant dépasser qu'une toute petite partie du bord postérieur des lobes de son manteau. Cette région postérieure est d’ailleurs la seule où normalement les bords libres du manteau ne soient pas rapprochés et coaptés, la seule par conséquent qui permette à l'eau d’entrer et de sortir, MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 209 Si on suit le bord palléal d'un Unionidé, on voit qu'en dehors de la région cardinale, les deux lobes du manteau sont libres. Is ne sont réunis l'un à l'autre que par deux commissures, l’une assez forte, qui se trouve au point où les branchies se ter- minent en arrière, l’autre d'importance secondaire et située dorsalement par rapport à la précédente. Ces trois commissures déterminent trois orifices: l’un très considérable, antéro-ventral et même légèrement postérieur, qui sert à la fois à la sortie du pied et à l'entrée de l'eau dans Ta cavité palléale ; l'autre postérieur, qui sert à la sortie de Peau de la cavité palléale : Le troisième orifice est un orifice supplémen- aire dépendant de lorifice expirateur. Le premier de ces trois orifices tend chez les Unionidés à se diviser en deux : un orifice antéro-ventral considérable servant exclusivement à la sortie du pied et un orifice postérieur servant à l'entrée de l’eau. Anato- miquement, ces deux orifices sont confondus, mais au point de vue physiologique 1ls sont séparés, puisque quand le second, l'orifice inspirateur, est largement ouvert, le premier, lorifice pédieux, est fermé par le rapprochement et laccolement des deux bords du manteau. De plus, là partie du bord palléal qui dépend de la région qu'on peut en somme appeler inspiratrice, est garnie de papilles, alors que les bords de lorifice pédieux en sont totalement dépourvus. Les Unionidés ne possèdent done pas de siphons morpholo- giquement parlant, mais ils vivent néanmoins enfouis en cépha- lothétisme, laissant émerger les papilles postérieures de leur manteau, rudiment d'appareil siphonien en voie d'apparition et vers lequel ils tendent incontestablement. Cette disposition des orifices palléaux (confusion de lorifice pédieux avec lorifice inspirateur), caractérise les céphalothétiques de la 1° catégorie. Comment les Acéphales ont-ils pu être amenés à passer de l'abdominothétisme au céphalothétisme? Comme il à été dit, la Nucule, lorsqu'on la rencontre en position normale, est enfoncée dans le sable de telle sorte que les bords libres de sa coquille sont inférieurs, le plan sagittal étant perpendicu- laure à la couche de sable (abdominothétisme) ; ses crochets sont visibles à l'extérieur. Supposons que, pour une raison quel- conque,'un animal plus ou moins analogue à la Nucule s'enfonce ANN. SC. NAT. ZOOI. 1, 14 210 R. ANTHONY davantage en profondeur dans le sable. De par ce fait que le pied sort toujours de là coquille par la région antérieure de cette dernière, et que c’est par lui que s’accomplit l’enfouisse- ment, la région antérieure de Fanimal se portera obligatoire- ment en bas, et la région postérieure restera en haut. À partir de ce moment, le céphalothétisme aura remplacé labdomino- thétisme. C’est probablement quelque chose d’analogue qui à dû se passer en réalité. Pour des raisons que nous ignorons, tenant probablement à la nature des substratums, des Acéphales abdominothétiques, vraisemblablement des byssifères, ont fait de leur pied un usage qui en à amené à nouveau le développe- ment, le byssus est disparu, et ces animaux avant dù avoir à S'enfoncer davantage en profondeur, leur région antérieure s’est par ce seul fait portée en bas, ils ont en quelque sorte baseulé en avant et sont devenus céphalothétiques (1). Voyons maintenant comment l’organisation caractéristique des céphalothétiques à pu prendre naissance. Pour cela prenons l'animal abdominothétique dont les deux lobes du manteau sont séparés sur toute leur longueur. Au point de vue de ses bran- chies comme à celui de beaucoup d'autres de ses organes cet Acéphale présente des caractères primitifs indiscutables. Ses branchies sont filamenteuses (Pectunculus) où même foliacées (Nucule) et flottent librement dans la cavité palléale unique. Par le fait de l’enfouissement céphalothétique, les orifices d’en- trée et de sortie de Peau se trouvent rapprochés et limités à la région postérieure située en haut. Pour que l'eau, arrivant par l'orifice d'entrée puisse aller jusqu'à la bouche située en bas, il est de toute nécessité que le courant d'entrée et le courant de sortie se canalisent en quelque sorte : une cloison se forme entre les deux. C’est à cela que se rattache la complication de la bran- chie filamenteuse qui ne tarde pas à devenir fenestrée. Les filaments se réunissant par des anastomoses et les bran- chies devenues ainsi lamelleuses adhèrent par leurs bords au manteau d’une part, à la masse viscérale de l'autre, divisant la (4) Certaines formes fossiles de Trigonies présentent dans la région posté- rieure de leur coquille des traces incontestables de siphons, disposition cadrant parfaitement avec les modifications du pied de ces animaux qui rappelle celui des Céphalothétiques |[Voy. Pelseneer (91)]. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 211 cavité unique en deux cavités, l'une antébranchiale ou palléale proprement dite, l'autre rétrobranchiale. La première reçoit l'eau chargée d'oxygène et de matières alimentaires; ces der- nières sont recueillies par les palpes buccaux et l'eau traverse alors les lames branchiales par les fenêtres dont elles sont per- cées; c'est là que que se fait l'hématose. Une fois dans la cavité rétrobranchiale, l'eau impropre à la respiration se charge des produits d'exsécrétion et des déjections qu'elle déverse à lex- térieur. Cette division en deux parties de la cavité palléale qui produit un réel perfectionnement de l'organe respiratoire est le premier stade dans là différenciation des siphons. La division de la cavité primitivement unique se poursuit Jusqu'au bord palléal en arrière et détermine ainsi la production de deux ori- fices, l'un inspirateur et pédieux, l'autre expirateur. Lorsque l'animal est enfoui ne laissant émerger du sable ou de la vase qu'une petite partie du bord postérieur de son man- teau, cette petite partie plus que toute autre se trouve exposée aux contacts étrangers, ce qui peut y déterminer la production de petites papilles probablement sensitives, analogues à celles qui viennent d'être signalées chez les Unionidés et qui chez les Céphalothétiques plus évolués atteignent des dimensions consi- dérables. On les rencontre chez les Unios et les Anodontes à l'orifice inspirateur seulement, l'orifice expirateur en étant dépourvu. On peut donc dire que la complication de la branchie et la première apparition des siphons semblent être liées à l'existence céphalothétique. À cette apparition d'ébauche siphonale s'ajoutent chez les Céphalothétiques de la 1" catégorie d'autres modifications en rapport encore avec le céphalothétisme qui sont, par exemple : la transformation du pied qui perd sa forme élargie et son byssus pour prendre l'aspect spécial en fer de hache, en soc de charrue qui à fait donner aux Acéphales la dénomination générale de Pelécypode ; l'allongement antéro-postérieur de la coquille, son raccourcissement dorso-ventral qui amène le cœur au contact du tube digestif qui le traverse, ce qui n'existe pas, comme on le sait, chez les Nucules dont le cœur est dorsal par rapport au tube digestif comme chez les Gastéropodes, et son élargissement bilatéral. Chez les Céphalothétiques de ce premier 212 R. ANTHONY groupe, les valves sont encore au moment de la fermeture parfaitement coaptées comme chez les Abdominothétiques et le ligament très développé allongé d'avant en arrière. On voit donc combien il est facile de passer des Abdomino- thétiques aux Céphalothétiques par l'intermédiaire des Unio- nidés et plus exactement de tout ce groupe qu'on appelle les Submytilacea. Le retour à la vie libre qui a comme conséquence Fig. 8. — Coupe sagittale d'Unio pictorum Linn. — 1, bouche; 2, anus; 3, pied; 4, muscle adducteur antérieur; 5, muscle adducteur postérieur; 6, cœur. la perte du byssus et la nécessité consécutive de l’enfouisse- ment, semble pouvoir expliquer ce passage. L'Anodonte qui présente déjà tous les caractères des Céphalothétiques est un type de transition vers les formes nettement siphonées. La tendance manifeste qui s’'accentue davantage dans les groupes suivants semble donc être le calibrage dans un tube; l'animal tend à devenir un corps allongé parcouru par deux courants d'eau parallèles et de sens inverse. 2) Le deuxième groupe de Céphalothétiques comprendra les formes vraiment siphonées en tout analogues aux précédentes, avec celte seule différence que les siphons existent réellement. De plus, le siphon inspirateur qui chez les Unios communiquait largement avec l’orifice du pied, est ie fermé ventralement. Les Cardüdæ, les Donacidæ, les Veneridæ (sauf certains comme les Tapes pullastra Ulg. var. perforans, les Mactridæ (sauf Lutra- ra), les Tellinidæ peuvent être rangés dans ce groupe tout artifi- clel, d’ailleurs, puisque d'une part les Cardidæ confinent au pre- mier groupe et les Tellinidæ au troisième. Ces animaux vivent enfouis dans le sable ou la vase et présentent tous une organisa- ton générale très voisine de celle des types du groupe précé- dent. Comme il a été dit, leurs siphons sont complets; de plus ils sont parfois très développés, longs, ayant la forme de deux MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES CAE) tubes musculeux, l'un d'entrée, l'autre de sortie, terminés par des couronnes de papilles sensitives, parfois même d'organes de sensibilité spéciale. Comment peut-on expliquer rationnellement cet allongement des siphons qui caractérise les Céphalothétiques de ce deuxième groupe. Ne peut-on admettre qu'il puisse arriver qu'au cours de son développement, l'animal vivant dans un sable vaseux très liquide soit entrainé par son propre poids par exemple et sv enfonce davantage. Il faudra toujours, en {ous cas, pour que l'entrée et la sortie de l’eau puisse se faire, qu'une petite partie de son individu reste à la surface de la couche vaseuse; dans ces conditions, les siphons s’allongent, s'étirent, et les efforts que fait l'animal ne peuvent-ils être considérés comme favorisant le développement de la musculature? Nous arrivons ainsi au type du Cardium edule Linn. par exemple, où les siphons sont déjà constitués quoique encore assez réduits. À mesure que les siphons s’allongent, leurs muscles rétrac- teurs se développent davantage, leur surface d'insertion s’élar- git; elle s'enfonce de plus en plus à l'intérieur de la coquille par le fait des mouvements répétés de rentrée et de sortie que l'animal fait effectuer à ses siphons. C'est le sinus palléal qui se constitue, et, sil est à peine ébauché encore chez le Cardium edule Linn., il sera très marqué chez les types suivants plus évolués, auxquels on donne parfois le nom de Sinupalliés. A partir de ce moment où les siphons sont constitués, deux directions peuvent être suivies: certains animaux se développent dans une vase très hétérogène mêlée de gros graviers ou de débris de coquilles, d'autres, au contraire, dans une substance très homogène, vase molle, sable fin, ou roche. Chez les pre- miers les siphons habitués à serpenter en quelque sorte entre les pierres, à chercher leur route, si Je puis m'exprimer ainsi, acquerront une plus grande liberté, l'un par rapport à l'autre, ne se soudant pas, restant même divergents, comme c'est le cas des T'apes decussatus Linn.; chez ceux, au contraire, qui se développent dans une substance plus homogène, l'adaptation à la vie en galeries, est plus avancée que chez les précédents, les siphons sont rectilignes et parallèles, allant par le plus 214 R. ANTHONY court chemin à la surface libre. Ils s'accolent comme les canons d'un fusil de chasse, chez les Tapes pullaster Mtg. par exemple, et l'animal tout entier, en quelque sorte, tend à se calibrer, s'allongeant d'avant en arrière, diminuant au contraire Fig. 9. — Coupe sagittale de Tapes decussatus Linn. — 1, bouche ; 2, anus; 3, pied; 4, muscle adducteur antérieur; >, musele adducteur postérieur ; 6, cœur. Les deux siphons sont séparés. C’est le type de vase hétérogène. sa longueur dorso-ventrale, augmentant son diamètre trans- versal. J'ai étudié biométriquement la forme de la coquille chez Tapes decussatus Linn. et chez Tapes pullaster Mtg., l'un vivant dans le gravier grossier, l’autre dans le sable fin homo- Fig. 10. — Coupe sagittale de Tapes pullastra Mtg. — 1, bouche: 2, anus: 3, pied; 4, muscle adducteur antérieur; 5, muscle adducteur postérieur ; 6, cœur. Les deux siphons sont réunis. C’est le type de vase homogène. gène. Malgré le caractère général que je compte conserver à ce chapitre, 1l m'a paru intéressant de résumer ici les résultats de cette étude. J'ai pris deux lots de ces animaux, l'un de 100 Fupes decussatus Linn., provenant des pierrailles du vieux port de Saint-Waast-la-Hougue, lauire de 100 Tapes pullastra Mte., provenant des sables fins d'Aumeville-Crasville près Saint- N & LD 8 n x Le 3 X À Le) MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 245 Waast-la-Hougue. Sur la valve gauche de chacun de ces ani- maux J'ai mesuré avec beaucoup de soin, à l’aide d'un pied à coulisse, la distance dorso-ventrale maximum (en prenant comme point de repère dorsal le point le plus proéminent du crochet), et la distance antéro-postérieure maximum. J’obte- d } , , Û , : 4 RER RENNES PONT IE A JOIE LOVE ss Ez Fig. 11. — Le trait plein indique le Tapes pullastra Mtg.; le trait pointillé indique le.Tapes decussalus Linn. nais ainsi la hauteur et la longueur maximum de mes animaux, que je désignais par Het L. En divisant par L, la quantité H préalablement multipliée par 100 afin d'éviter l'introduction de décimales gênantes pour les calculs, j’obtenais une certaine quantité 1, un indice comparable à celui que Nætling (99) caleula sur les arches. Calculé sur 100 Tapes decussatus Linn., cet indice m'a donné une valeur moyenne de 76.82, et sur 100 T'apes pullaster Me. une valeur moyenne de 65.92. Ce qui revient à dire que les T'apes pullastra Mig. sont par rapport à leur hauteur plus longs que Les T'apes decussatus Liun., ce qui parait d'ailleurs 216 R. ANTHONY avec une grande évidence au seul examen du profil sagittal des coquilles. Si, au lieu de faire la moyenne brute des indices, on recherche quel est l'indice qui existe le plus souvent chez Tapes decussatus Linn. ou chez Tapes pullastra Mte., c'est-à-dire la fréquence, on voit que pour le premier de ces animaux l'indice 75 à été rencontré 22 fois sur 100 et pour le second lindice 64 à été rencontré 14 fois sur 100. Le tableau de la figure 11 repré- sentant la courbe des variations de cet indice dispense d’ailleurs de plus amples explications. Le Tapes pullastra Mig. marque done par la forme de sa coquille, comme par celle de ses siphons, un stade plus avancé que le Tapes decussatus Linn. dans l'adaptation à la vie en galerie. Il commence déjà à prendre la forme du trou dans lequel il vit et l’on conçoit que creusé dans une substance molle et homogène ce trou doive avoir une section géométriquement arrondie, à l'encontre de celui creusé dans le sable mêlé de graviers, et dont un obstacle peut déranger à tout instant la régularité. Ilse calibre en quelque sorte, sa coquille s’allonge d'avant en arrière, se raccourcit dorso-ventralement, augmente son diamètre bilatéral et ses siphons s'accolent. Il tend, en un mot, à prendre la forme d'un cylindre dont le périmètre serait partout égal. Dans le second groupe de Céphalothétiques, ainsi que dans le premier, lorsque l'animal rapproche ses valves, 1l les coapte d'une façon parfaite et le ligament est toujours très développé, allongé d'avant en arrière et externe. Ce n’est que dans certaines formes (Mactridæ) plus évoluées et tendant au troisième groupe, que la parte élastique du ligament tend à devenir interne, à se réduire, à prendre en un mot la forme que nous verrons chez Lutraria. On attribue parfois aux Abdominothétiques, aux Céphalothétiques du premier groupe et à quelques-uns de ceux du second, la dénomination d’intégripalliés, venant de ce que leur impression palléale est dépourvue de sinus, opposée à celle de sinupalliés S'appliquant aux Céphalothétiques de la troisième catégorie et à quelques-uns de ceux de la seconde, venant de ce que leur impression palléale présente un sinus plus ou moins profond. Ces deux expressions sont extrêmement défectueuses et doivent être évitées. Elles tendent en effet à impliquer l'ab- MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 271 sence ou la présence de siphons, alors qu'en réalité l'absence de sinus n'est pas toujours liée à celle des siphons. Ces derniers peuvent exister très nettement sans qu'il y ait de sinus palléal. C'est le cas de la plupart des Cardiüdæ, tels Cardium edule Linn. Cardium norwegicum Speng., Cardium tuberculatuminn., pour n'en citer que quelques-uns. En réalité, le sinus palléal, qui n'est autre chose que la limite d'insertion des muscles rétrac- teurs des siphons, n'existe que lorsque ces derniers sont suffi- samment allongés. Les dénominations d'asiphoniens et de siphoniens ne sont guère préférables aux précédentes; l’on peut dire que les Siphoniens commencent avec la deuxième catégorie des Céphalothétiques. Ces expressions ne peuvent, sous aucun prétexte, entrer dans aucune classification systématique rationnelle : elles expriment des caractères vraiment trop variables avec les conditions d'existence, puisqu'on voit dans la même famille naturelle des Cardidæ, par exemple, des animaux à siphons très courts comme le Cardium edule Linn., et des animaux à siphons très longs comme l’'Adacna de la mer Caspienne. De même parmi les Unionidæ (Céphalothétiques de la première catégorie), dont l'Anodonte peut être considéré comme le type, se trouvent de véritables Siphoniens, les Muteles. 3) Le troisième groupe comprendra les formes chez lesquelles le céphalothétisme, l'enfouissement et la vie en galeries ont amené les modifications les plus profondes. On peut v ranger, par exemple, le Tapes pullastra Mig. var. perforans de la famille des Veneridæ, les Psammobüdæ, qui ne sont, eux, que des T'ellinidæ plus évolués dans le sens de l'adaptation à l'en- fouissement et au céphalothétisme, les Myidæ, à l'exception de Corbula qui est devenue secondairement pleurothétique, les Solenidæ, les Anatinidæ, les Gastrorchænideæ, les Pholadidæ, les Teredinidæ et aussi les Septibranches. Au point de vue éthologique, ces animaux diffèrent grandement par la nature des substances dans lesquelles ils s’enfouissent : les uns, comme Mya, se trouvent dans l'argile ou la vase molle des estuatres:; d’autres, comme ZLutraria, se rencontrent dans le sable fin avec les So/en. Les Psammobia se trouvent souvent dans le sable grossier mêlé de débris de coquilles avec le 218 R. ANTHONY T'apes decussatus Linn., vers lequelils convergent d’ailleurs par l'indépendance de leurs tubes siphonaux:; le Tapes pullastra Mte., var. perforans est fréquemment rencontré dans les roches cal- caires molles ; les Gastrochæna dans les roches plus dures ou dans des galeries creusées dans l'épaisseur même des coquilles vides d’autres Lamellibranches, d'Huîtres, par exemple, ou de Gastéropodes. Quant aux Pholades, elles habitent généralement des roches dures ou de largile compacte; les Tarets enfin creusent, on le sait, leurs galeries dans le bois. De ces différents modes de vie paraissent avoir résulté des différences d'organisation secondaires. Toutefois ces animaux ont un certain nombre de caractères communs : c’est d’abord la longueur remarquable des siphons chez tous, sauf chez les plus évolués des Solenidæ, le genre Solen, par exemple, où la longueur démesurée de la coquille et par conséquent du corps tout entier en compense la brièveté ; leur accolement en canons de fusil, qu'on à déjà vu chez le T'apes pullastra Mig., sauf chez certains groupes, comme les Psammobudæ et les Soleno- curtus, par exemple parmi les So/enidæ où ils sont très diver- gents par le fait d'un mécanisme analogue à celui qui en produit la divergence chez le Tapes decussatus Linn. qui a, d'ailleurs, le même mode d'existence ; leur tendance à égaliser leur diamètre avee le diamètre du corps, tendance qui atteint son maximum chez le Taret; la nature des valves qui ne restent épaisses chez la Pholade que dans la région antérieure et leur transparence ; leur réduction qui s’aceuse déjà chez les Pho- lades et qui atteint son maximum chez le Taret où elles sont réduites à leur extrémité antérieure seule, leur bâillance qui, nulle chez les T'apes pullastra Mig. par exemple, devient appréciable quoique modérée chez les Psammobia et atteint son maximum chez les Pholades, les Gastrochænes et les Tarets ; la position interne (sauf chez quelques-uns, les Psammobia) et la réduction du ligament qui, déjà très réduit chez les Lutraires, disparait complètement {du moins sa partie élastique) chez les Pholades ; la régression du pied et sa transformation en une ventouse dont l’'ébauche peut être nettement vue chez le T'apes pullastra Mig. var. perforans el qui atteint son maximum chez les Pholades ; et enfin la canalisation des courants d’eau d'entrée MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 219 et de sortie qui, chez les Septibranches où la branchie est trans- formée en une sorte de cloison musculaire, devient parfaite. Par quel mécanisme ces différentes modifications qui carac- térisent les Céphalothétiques du troisième groupe ont-elles pu se produire? L'allongement des siphons, leur accolement en canons de fusil, a déjà été expliqué et ces caractères existant déjà dans le groupe précédent ne font que s'affirmer ici. Mais, à partir du moment où l'on atteint ce troisième groupe, les siphons augmentent de volume. En même temps le volume du corps de l'animal lui-même diminue; le processus de calibrage en un mot s'accentue, NS > 72 NPA è > ee = =. Fig. 12. — Coupe sagittale de Pholas daclylus Linn. — 1, bouche : 2, anus; 3, pied transformé en ventouse: #4, muscle adducteur antérieur; 5, muscle adducteur postérieur ; 6, cœur. l'animal tendant à remplir complètement la galerie dans laquelle 11 vit. Les valves déjà allongées du T'apes pullastra Mtg. s'allongent davantage chez la Lutraire, leur courbure latérale augmente et il arrive à un certain moment que l'animal complètement calibré arrive à prendre cet aspect allongé et vermiforme qui caractérise Les animaux vivant dans des galeries, à quelque groupe, à quelque phylum qu'ils appartiennent, les Vers en général, les Cécilies et même les Tarets. En même temps les valves qui, au moment de la fermeture étaient parfaitement coaptées chez Tapes pullastra Mig. et chez tous les Céphalo- thétiques. précédents, restent constamment bâillantes. Cette bâillance, qui était encore modérée chez les Psammobies, s'ac- centue chez les Lutraires et devient considérable chez les Pho- lades. Elle tient sans aucun doute à ce fait que les siphons ayant augmenté de volume par le fait du calibrage dont il a été parlé plus haut, écartent davantage postérieurement au moment de leur sortie les bords de la coquille, qui au con- traire se rapprochent antérieurement. C'est à cette bâtllance 290 R. ANTHONY continuelle que doit être rattachée la régression du ligament encore très étendu et allongé dorsalement chez le Tapes pullastra Mtg. En effet, par le fait de leurs dimensions consi- dérables, les siphons lorsqu'ils sont étalés, écartent posté- rieurement les valves, ce qui distend le ligament dans toute sa région postérieure ; bientôt 1l finit par disparaître, ou mieux il ne se forme pas dans toute la région distendue. Les siphons étant d’ailleurs le plus souvent hors de la coquille, cette dernière reste toujours bâillante, et les nouvelles couches calcaires qui se forment pendant son accroissement se dis- posent de telle facon que les deux bords postérieurs des valves ne peuvent plus se coapter même lorsque Les siphons sont rétractés, ils prennent cet aspect de bords évasés très nettement caractérisé chez les Myes et les Anatines. D'autre part, lorsque Le pied etfec- tue sa sortie par la région antérieure de la coquille, il se produit une bâillance antérieure pendant laquelle les bords postérieurs de la coquille tendent au contraire à se rapprocher, exerçant une certaine pression sur les siphons. Il résulte en somme de tout ceci, que chacune des valves dans les différents mouve- ments qu'elle accomplit, tourne autour d'un axe 77, passant par le crochet (Voy. fig. 13), et que le ligament sans cesse distendu dans sa région postérieure se réduit en quelque sorte (ligament fibreux) à un point, à un pivot situé exactement en face des crochets. C’est ce que l’on observe chez les Lutraires où par la chronophotographie et l'inscription graphique, et suvant les procédés énoncés au chapitre [, j'ai mis en évidence cette rota- tion autour de l'axe zy pendant les mouvements des valves. Chez ces animaux, le ligament élastique est, comme l’on sait, interne et extrêmement réduit. La bâûtllance étant surtout postérieure, c'est-à-dire se produisant d'une facon plus étendue et plus con- ünue en arrière qu'en avant, les deux valves de la coquille sont le plus souvent au contact en avant qu'en arrière. C'est ce qui explique la présence de dents exclusivement dans la région cardi- nale et dans la région latérale antérieure; les dents postérieures disparaissent toujours {Voy. Lutraria elliptica Lmck.). On pour- rait croire que le ligament doive être complètement détruit par le fait de cette bâillance exagérée, alternativement postérieure et antérieure. Il n’en est rien ; chez les Lutraires, il se conserve MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 131 par le fait de la fonction qu'il possède encore, et qui est celle de l’écartement passif des valves. Mais par sa distension déme- surée il S'est en quelque sorte rompu au point que chez Lutraria elliptica Lmck. par exemple, sa partie élastique est formée de deux troncs de cône s'insérant aux deux valves par leur plus grande base et S'opposant par leur base plus petite. Ces deux Y- Fig. 13. — Vue intérieure d'une valve gauche de Lulraria elliplica Lmck. — A, muscle adducteur antérieur; P, muscle adducteur postérieur; æy, axe de rotation dorso-ventrale. La petite croix indique l'endroit où doit être placée la tige inscriptrice. trones de cône sont simplement disposés l’un en face de l'autre séparés par une fente. Si l'on se rapporte à l'explication qu'a donnée F. Bernard de la rotation des crochets, on conçoit facilement pourquoi le crochet des Céphalothétiques de la troisième série, dont le liga- ment interne tend à être symétrique par rapport au plan coro- nal, est très réduit, et absolument droit. Du fait que chez les animaux comme la Lutraire chacune des valves bascule autour de Paxe zy, le ligament fonctionne de moins en moins; en effet, la bâillance postérieure étant conti- nuelle, les valves sont en quelque sorte continuellement entr'ou- vertes, elles ne se rapprochent que sous l'effort de la contraction du muscle adducteur postérieur; mais pendant ce rapproche- ment les valves tournant autour de axe 7 S'écartent en avant. Si à ce moment le muscle adducteur antérieur se contracte, elles S'écarteront à nouveau en arrière. En somme, lorsqu'elles sont bâillantes en arrière elles sont rapprochées en avant et inver- sement; la bâllance alternativement antérieure et postérieure s'effectue par l'effet de la contraction alternative des muscles 299 R. ANTHONY = = adducteurs qui suffisent ainsi à écarter les valves, et le ligament élastique ne fonctionne plus pour amsi dire. Si on considère la figure 13 représentant une valve de Lutraire, on s'aperçoit que les muscles adducteurs sont disposés suivant le type des animaux de la catégorie précédente, c'est-à-dire ne sont pas situés sur la mème ligne que le ligament, le point de pivotement. Cette condition est, on le conçoit, défavorable au mouvement de rotation; aussi lorsque le mouvement s’accom- plit sont-ce les fibres les plus ventrales de l'adducteur postérieur et les plus dorsales de l’'adducteur antérieur qui fonctionnent le plus. Par ce fait, elles se développent alors que les autres tendent à disparaitre; 1l en résulte que les muscles tendent en somme à se déplacer, de facon à se mettre en droite ligne avec le point de pivotement, est ce qui se produit chez la Pholade où le musele adducteur antérieur est devenu tout à fait dorsal. Les conditions sont à ce moment les plus favorables pour le mouvement de bascule. Mais pendant que ce mouvement s'ef- fectue le ligament élastique est sans cesse distendu d'un côté et écrasé de Pautre; de plus, comme il a été dit, son rôle est nul, les muscles suffisant à écarter les valves; dans ces conditions, il ne peut se développer, c'est ce qui existe chez les Pholades où la partie fibreuse du ligament seule existe. C'est le type qu'on peut appeler Pholadoïde. À ce caractère de première impor- lance s'ajoute la diminution d'épaisseur de la coquille, sa colo- ration blanchâtre et sa transparence qui caractérisent d’une facon générale les animaux enfouis. Une seule région de la coquille, l’antérieure, devient rugueuse et reste plus épaisse; quant à la postérieure, S'amineissant progressivement, elle finit par disparaître et l'animal à alors aspect complètement vermi- forme qu'atteint le Taret qui semble le terme ultime de l'adap- tation à l’enfouissement céphalothétique et à la vie en galerie. Chez tous ces animaux céphalothétiques, et par le fait des excitations extérieures, la sensibilité se porte, comme il a été dit, sur l'extrémité des siphons et ce sont les Pholades qui attei- gnent le maximum de spécialisation dans ce sens. L'extrémité de leur siphon s'arrondit, prenant un aspect de symétrie radiaire qui les font ressembler à une Actinie, par exemple lorsqu'on n'y regarde pas de très près. Le pied enfin, déjà réduit chez les MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES PL Lutraires, disparait faute d'usage, ou se transforme en ventouse comme chez les Pholades, les Gastrochænes elles Tapes pullastra Mtg. var. per forans. Chez d'autres limmobilité semble avoir provoqué la réappa- “tion du byssus qui chez les Céphalothétiques n'existe plus Fig. 14. — Vuc intérieure d'une valve gauche de Pholas dactylus Linn. — 4, muscle adducteur postérieur; 5, musele adducteur antérieur. d'ordinaire qu'à l'état de vestige, les Sariraridæe en sont un exemple. En résumé, 1l semble que l'on puisse établir le tableau suivant qui rend compte des modifications graduelles des Acéphales. sous l'influence de lPenfouissement céphalothétique. Naturelle- ment les {vpes énumérés 1er ont été choisis dans différents phy- lums et il ne faut nullement donner à cette sériation la valeur d'une filiation naturelle possible. \Valves coaptées au moment de la fermeture. ! Un seul orifice palléal. Pied byssifère. Valves coaptéesau moment de la fermeture. Céphalothétique, 1'°catég. : Ano- Deux orifices palléaux (1) (1 pédio-inspira- LOT ORAN SP | teur, 1 expirateur). Pied adapté au fouis- sage. Ligament externe. Valves coaptées au moment de la fermeture. Céphalothétique, 2e catég. : Tapes \ Trois orilices palléaux. Siphons de dia- 1 TE NU TRES } mètre réduit. Pied adapté au fouissage. Ligament externe. ob sys PAR DNRES {(Valves bâillantes. Siphons de diamètre très ‘phalothétique, 3° catég.: Lutra- \ fort. Pi RU AN ARS E EMRSS PRE D AE à : ort. Pied encore adapté au fouissage. Li- Ur To LECTURE ( gament élastique réduit et interne. Valves bâillantes. Siphons de même dia- mètre que la coquille. Pied transformé en Céphalothétique, 3° catég.: lholas. © ventouse. Partie élastique du ligament disparue. Muscles sur la même ligne que le ligament fibreux. Valves bäillantes, très réduites. Siphons Céphalothétique, 3° catég.: Teredo. : très longs et très gros. Pied nul. Liga- ment disparu. Corps vermilorme. Abdominothétique : Arca........ (4) I est fait abstraction ici de l’orifice postérieur supplémentaire. DD R. ANTHONY Enfin il est utile de dire que l’adaption au fouissage n’atteint pas seulement les Diisomyaires. Le Lihodomus par exemple, est un Dianisomyaire voisin des Mytilus adapté secondairement à l’enfouissement céphalothétique ; il converge ainsi vers les Disomyaires dont il vient d'être question, par une tendance manifeste au développement des siphons, ainsi que le montre la figure 15. 9° DrISOMYAIRES PLEUROTHÉTIQUES. Le mot pleurothétique vient de deux mots grecs : rhevoiv — côté, flanc, et ribnu — je place. Animaux reposant sur le côté, sur le flanc. Les Pleurothétiques peuventen effet ètre définis ceux qui, dans les conditions normales de leur existence, se trouvent constamment placés de telle facon que leur plan sagittal (bucco-ventro-ano-dor- sal) soit parallèle au plan sur lequel ils reposentou progressent. Les lois de la pesanteur faisant que les animaux nepeuventfacilementen général, Fig. 15. — Coupe sagittale ,, k Ê Ê ET de Lithodomus lithophagus ta partdesexceptions qui ne nous intéres- Linn.—1, bouche; 2,anus: Sent pas, reposer que sur un plan sensible- 3, pied: #, muscle adduc- ï ; : teur antérieur; 5, muscle Mmenthorizontaloutrèslégèrementineliné, ; D on peut être amené à dire que les Pleuro- thétiques sont ceux dont Le plan sagittales sensiblement horizontal dans les conditions ordinaires de la vie. Les Mollusques Acéphales dimvaires ne sont pas Les seuls ani- maux qui présentent parmi eux des formes pleurothétiques; les monomyaires d'abord le sont presque tous. En outre, on sait qu'il existe des formes pleurothétiques de Poissons téléostéens ; ce sont tous ceux que l’on désigne sous le nom de Pleuronectes, la Sole, la Limande, le Turbot, la Flondre, ete. Tous les Échi- nodermes enfin seraient, d’après l'hypothèse d'Edmond Perrier, des Vers adaptés à l'existence pleurothétique et les Vertébrés eux-mêmes devraient, d’après le même auteur, avoir à leur origine des ancêtres pleurothétiques (1). (1) Voir au sujet de la Pleurostose chez les Poissons téléostéens et les Tuni- ciers À. Giord [04), page 171. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 295 Quoi qu'il en soit et quel que soit le groupe dans lequel on l'envisage, le pleurothétisme semble toujours secondaire, les pleurothétiques provenant tous d’ancêtres euthétiques. Quelles sont les causes qui ont pu amener des animaux euthétiques, à mener une existence pleurothétique? Elles sont variables suivant les groupes, mais pour les Mollusques dimyaires, il semble que les choses puissent être expliquées très simplement de la ma- nière suivante : On doit remarquer tout d'abord que si on prend un Diisomyaire euthétique quelconque, soit un abdominothé- tique, soit un Céphalothétique de la première ou de la deuxième catégorie et qu'on l’abandonne à lui-même, il reposera tout naturellement et de par le fait de sa forme seule, sur une de ses faces latérales, une de ses valves. Si done un animal primi- tivement euthétique se trouve placé sur un substratum dur, comme par exemple un rocher situé dans la zone de balancement des marées où dans un rapide d’un grand fleuve, il sera dans l'impossibilité absolue, étant donnée la dureté du substratum, de s’enfouir, et, par le fait de sa forme même, il prendra la position pleurothétique. La cause possible du pleurothétisme étant connue, reste à décrire les modifications anatomiques que ce mode d'existence peut amener dans un organisme d’Acéphale dimvaire. IF suf- fira ici de les indiquer par anticipation, en quelque sorte, leur étude détaillée devant faire l'objet de la deuxième partie de ce travail. | En première ligne de ces modifications 11 faut mettre la subtitution d’une symétrie coronale à la symétrie sagittale des autres Acéphales. Il à été expliqué un peu plus haut, comment il se faisait que les animaux euthétiques aient obligatoirement une symétrie sagittale. Pourles mêmes raisons, les Pleurothé- tiques tendent à avoir une symétrie coronale : la bouche est toujours antérieure, l'anus postérieur et la ligne qui les rejoint détermine avec sa projection sur le sol un plan de part et d'autre duquel, l'animal étant supposé placé dans un milieu homogène, les influences mécaniques extérieures s'exercentidentiquement ; la pesanteur entre autres s'exerce encore ici de la même facon en € qu'en 4, en d qu'en b et le plan coronal devient le lieu géométrique des points tels que «, b,cet d. Il en résulte que ANN. SC. NAT. ZOOL. 1, 19 296 R. ANTHONY de part et d'autre de ce plan, les deux moitiés du corps doivent être symétriques et que le côté ventral et le côté dorsal doivent tendre à se ressembler et à figurer des côtés latéraux; les anciens côtés latéraux d'autre part, soumis à des influences différentes, deviennent dissemblables, lun, tantôt le droit, tantôt le gauche, devient supérieur, l’autre prend les caractères d'une face inférieure, et la symétrie ancienne tend à s’effacer. Ce processus de substitution de symétrie due au pleurothétisme peut être aussi nettement suivi chez tous les Poissons pleuro- nectes que chez les Acéphales dimyaires. Chez les Acéphales pleurothétiques les principales manifes- tations de la disparition de la symétrie sagittale et de son rem- placement par une symétrie coronale, sont la régression des muscles rétracteurs du pied toujours plus avancée du côté corres- pondant à la valve devenue inférieure et le plus grand déve- loppement du lobe du manteau correspondant à cette même valve. Les Acéphales dimyaires pleurothétiques peuvent être divisés en deux catégories : Les formes libres, Les formes fixées. Toutes deux accusent la tendance plus ou moins marquée à la symétrie coronale, mais la fixation à amené chez les secondes l'apparition de caractères spéciaux. 1° Düsomyaires pleurothétiques et libres. — Ts sont peu nom- breux et on peut citer parmi eux les quelques types isolés suivants : Quelques espèces d’'Arca (fam. des Arcidæ). Corbula (fam. des Myidæ). Myodora Pandora (fam. des Anatinidæ) . Gresslya (1) \ Outre le caractère de la symétrie coronale commune à tous les Pleurothétiques, les Diisomyaires pleurothétiques libres présentent, lorsqu'ils proviennent de formes siphonées, une réduction de l'appareil siphonien et au moment de [a ferme- (1) La Gresslya devrait peut-être plutôt ètre rapprochée des Pholadomyidæ. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES AA | ture, leurs valves ne restent plus bâillantes ; 1ls perdent en somme les caractères des Céphalothétiques, dont ils ne font plus partie etacquièrent par contre un aplalissement de la valve supé- rieure qui tend à prendre la forme d'un opercule, un creusement de la valve inférieure. Ces modifications se voient très nettement chez les Corbules qui ne sont en somme que des Céphalothé- liques adaptées à l'existence pleurothétique et qui, ainsi que l'a dit Douvillé, retournant à l’enfouissement et au céphalothé- tisme auraient donné les Mves. Les modifications qui caracté- risent ces animaux se retrouveront chez le Pecten marimus Linn., monomyaire pleurothétique. 2 Dusomyares pleurothétiques el firés. — Les Diisomyaires pleurothétiques et fixés peuvent être répartis de la façon sui- vante : Dimyidæ (se rattachent à la fam. des Arcidæ et plus spé- _cialement peut-être aux Pectuneulinæ). Chondrodontidæ (se rattachent aux Pinnidie d'après Douvillé), aux Dianisomvyaires par conséquent. Myochamidæ (se rattachent à la fam. des Anatinidæ) . Chamostreidæ (se rattachent à la fam. des Anatinidæ). Channdaæ (se rattachent probablement à la fam. des Cardiüdæ). Ætlerudæ (se rattachent à la fam. des Urionidæ). Rudislæ. Par quel concours de circonstances des Diisomyaires ont-ils pu aboutir à la fixation ? IL est d’abord à remarquer que toutes ces formes ont des con- ditions d'existence à peu près identiques, qui se résument à ceci : une température élevée et des eaux très agitées et peu profondes. En effet, d’une part, on trouve ensemble sur toute la côte sud d'Australie Les Myorhanidæ el les Chamostreideæ, animaux exclusivement actuels. D'autre part, parmi les Cha- midæ, les Chama acluelles se rencontrent surtout dans la mer Rouge, l'Océan Indien, la mer des Antilles, les côtes du Paci- fique etde l'Atlantique, suivant une large zone s'étendant assez loin de part et d'autre de Équateur, où avec les Polypiers elles contribuent à la formation de récifs. Quant aux Diceras, Requie- nia, Toucasia et autres formes fossiles analogues qui semblent, Jusqu'à plus ample informé, devoir être rattachées à ce groupe, 298 R. ANTHONY ils vivaient à la fin du Jurassique et au début du Crétacé sur des récifs analogues aux récifs actuels et où les conditions d’exis- tence étaient apparemment les mêmes. Les Dimyidæ du Bathonien et de l'Eocène supérieur aecom- pagnent toujours la faune des mers chaudes et la seule Dimya actuelle a été draguée dans la mer des Antilles. | Quoique fluviatiles les Æthéries vivent dans des conditions absolument comparables à celles des animaux précédents, leur aire de répartition est, au point de vue de la latitude, à peu près la même; on les trouve dans la zone équatoriale africaine et son voisinage, dans les rapides des grands fleuves, le Nil, le le Sénégal, etc.., où les eaux sont violemment agitées. Quant aux Rudistes du Crétacé supérieur, ils étaient également comme les Chamidæ des animaux de mer chaude, de récifs. Il est facile de concevoir comment cette condition d'existence, une haute température, à pu amener la fixation des Acéphales dimyaires. Une température élevée favorise, comme l’on sait, la surproduction de calcaire dont la fixation semble être une consé- quence naturelle, les animaux ne pouvant, en raison du poids qu'acquiert ainsi leur coquille, se déplacer que difficilement et se trouvant condamnés à passer leur existence placés au même endroit. Il paraît naturel de penser que le contact prolongé avec le substratum doive par un processus que nous ignorons, d'ail- leurs, amener la fixation, laquelle est toujours pleurothétique, puisque l’Acéphale, en raison de la forme même de sa coquille, qui est généralement aplatie d’un côté latéral à l’autre, tran- chante sur les bords, ne peut être posée, comme 1l à déjà été dit, que sur l’une de ses valves. Le choc des vagues brise et détruit bientôt les formes les moins solidement fixées ; les plus solidement fixées se sélec- üonnent ainsi naturellement et c’est de cette façon que sem- blent avoir dû se constituer les types pleurothétiques fixés. Nous avons vu quelles ont été les conséquences du pleuro- thétisme sur la morphologie de l'animal (substitution de la symétrie coronale à la symétrie sagittale). Voyons maintenant quelles sont celles de la fixation. C’est d’abord la tendance à l'acquisition de la forme arrondie. Il est à remarquer, en effet, que comme toutes les formes animales fixées, d’une façon géné- MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 299 rale (Balanes, Anthozoaires, Ascidiens, par exemple) les Dimyaires fixés et pleurothétiques tendent d'une facon générale à arrondir leur base (Voy. à ce sujet Jackson (91) et Hæckel). Comment peut-on expliquer cet arrondissement? Supposons le cas, qui est d’ailleurs le plus fréquent, où le plan sur lequel repose d'animal est horizontal : l'arrondissement peut être expliqué par l’homogénéité des conditions ambiantes; par le fait qu'il est fixé, l'animal n’a aucune raison de s’allonger ou de se raccourcir dans un sens plutôt que dans l’autre, antéro- postérieur où dorso-ventral, comme l'animal qui se déplace: l'action de la pesanteur qui seule peut agir sur lui est préer- sément dirigée perpendiculairement au plan horizontal sur lequel il repose et ne peut, par conséquent pas modifier la forme de son périmètre. Le Dimvaire pleurothétique fixé sur un plan horizontal, ettout animal d'une façon plus générale, s’arron- dit pour les mêmes raisons qu'une goutte de cire chaude tom- bant sur une table de marbre. Si le plan sur lequel repose l'animal est légèrement incliné sur l'horizontale, les conditions seront les mêmes, sauf en ce qui concerne l’action de la pesanteur, et la base de l’animal au lieu d'être une circonférence sera une figure voisine de lellipse, ellipse dont l’excentricité croîtra avec l'angle d'inclinaison du plan sur l'horizontale. Outre l’inchnaison du plan de fixation, différentes autres causes peuvent intervenir encore pour altérer la forme du péri- mètre de base : des obstacles existant dans le voisinage de l'animal au moment de son développement, ainsi qu'on voit le fait se produire souvent chez les Æthéries qui, très nombreuses sur un espace restreint, se gènent mutuellement dans leur déve- loppement, peuvent aussi en effet être des causes d’altération de la forme circulaire. Il sera montré en détail, dans la deuxième partie de ce travail, comment la forme circulaire s'établit chez les Dimyaires fixés en position pleurothétique. L'acquisition de la forme arrondie n’est pas la seule consé- quence de la fixation pour les Dimvaires pleurothétiques, 1l faut y ajouter la disparition progressive du pied faute d'usage, et les d modifications des valves dont Fune, l'inférieure, tend à prendre 230 R. ANTHONY la forme d’un cornet contenant l'animal ; l’autre, la supérieure, tendant à s’aplatir, à devenir operculaire. Il semble qu'il faille admettre que ces modifications sont dues à l’action de la pesan- teur qu'Edm. Perrier (04) explique de la façon suivante : « Le Mollusque suspendu à cette valve (operculaire) devient de plus en plus convexe du côté de la valve appliquée sur le sol, valve qui se moule sur lui et devient ainsi extérieurement de plus en plus convexe par une action indirecte de la pesanteur. » Telles sont les modifications morphologiques principales qu’entraîne le pleurothétisme d’abord, la fixation ensuite chez les Dimyaires ; je n’y insisterai pas davantage ici; l’étude des Dimyaires fixés pleurothétiques devant faire l’objet exclusif de toute la deuxième partie de ce mémoire, les questions de détail y seront traitées. Je me bornerai tout simplement à faire remarquer, pour le moment, que le plissement des branchies des Æthéries, comparable à celui des fraises et des collerettes du xvi° siècle, peut être rapporté, comme pour les formes monomyaires d’ailleurs, à l'arrondissement. A l’arrondisse- ment semble se rattacher aussi le passage du cœur ventrale- ment par rapport au tube digestif. 9. ANISOMYAIRES. Les Dianisomyaires sont, comme leur nom l'indique, des Acéphales dont les deux muscles adducteurs sont inégaux, l’adducteur postérieur étant considérable, l’adducteur antérieur, au contraire, très réduit. Parmi eux, on ne peut guère distinguer, au point de vue du mode d'existence, comme parmi les Isomyaires, les deux caté- gories des euthétiques et des pleurothétiques. Tous les Acé- phales franchement anisomyaires connus sont euthétiques, et, en outre, ils semblent vivre le plus souvent en position céphalothétique. IL semble toutefois qu'il y aït à cette règle quelques exceptions ; c’est d’abord celle constituée par le genre Bartlettia, d’une adaptation toute spéciale, et dont la morpho- logie et la morphogénie probable seront exposées en appendice à la fin de ce chapitre. C’est ensuite celle du genre Chon- drodonta qui, d’après Douvillé, serait une Pinna fixée. Enfin, MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 231 les Chames elles-mêmes sembleraient, au cours de leur déve- loppement, passer par un stade rappelant les Lithocardium, qui sont des formes franchement anisomyaires. Par le fait qu'ils sont euthétiques, les Dianisomyaires sont, pour les mêmes raisons que les Driisomvaires, euthétiques symétriques par rapport à leur * an sagittal. En effet, leurs valves sont égales et semblables, & Len est de même de toutes les parties droites et gauches de leur corps. Outre ces deux caractères, inégalité des deux muscles adduc- teurs et symétrie sagittale, 11 convient de citer comme leur appartenant, d'abord ce fait, conséquence directe de Pinégalité des deux adducteurs, que chez eux l'extrémité antérieure de la coquille, celle où se trouve placé, chez les Isomyaires, l'adduc- teur antérieur, tend à se rapprocher du crochet et même à se confondre avec lui, ce qui fait que chez les Anisomyaires très évolués le muscle adducteur antérieur réduit et la bouche se trouvent placés au niveau du crochet ; puis la présence d’un byssus que l’on constate chez toutes les formes anisomyaires actuelles et qui existait aussi, vraisemblablement, chez les fos- siles ; la régression du pied enfin, en rapport avec la présence du byssus. Il semble évident que les Anisomyaires proviennent des Isomyaires et qu'ils tendent aux Monomyaires. Is se rattachent aux premiers par les animaux de forme #odiole et aux seconds par ceux de forme aricule. La forme anisomvaire est très répandue chez les Acéphales, et beaucoup d’entre eux convergent vers ce genre d'organisa- üon. Il est superflu, il me semble, d'insister sur ce fait que toutes ces formes anisomvaires sont simplement convergentes et n'ont entre elles aucun lien de parenté comme semblent encore trop souvent le croire ceux qui mettent les Dreyssensia, par exemple, parmi les Mytilus. Les mêmes causes ont sim- plement produit les mêmes effets dans des groupes différents. Certains Anisomyaires, comme les Dreyssensia, qui pourraient bien provenir des C'yrènes, les Byssocardium et les Tridacnes qui très certainement dérivent des Cardium, possèdent un byssus, bien que les animaux desquels ils paraissent provenir aient perdu depuis longtemps cet organe par le fait de l'adapta- Do R. ANTHONY tion à l'enfouissement céphalothétique. Il est possible que, pour des raisons que nous ignorons, le byssus se soit développé à nouveau, comme cela d’ailleurs se produit pour les Saricavidæ qui restent céphalothétiques, chez certaines Cyrènes et certains Cardium, et que ces animaux s'étant trouvés soumis aux mêmes causes aient subi les même: modifications que celles qui, dans le phylum de Protarcidæ, ont fait les Mytilus. Ci-joint un tableau des principales formes convergentes anisomyaires. Phylum Phylum Phylum Phylum Phylum des FT des des des Protarcidæ. des Carditidæ. | Cyprinidæ (?). | Cyrenidæ (?). Cardiidæ. Modiolimor-| Arca obli- | Mytilicar- | Hippopo- Lithocar- phes. qua (Gray). dia. dium. dium. Modiola. Mytilimor- | Mytilus Myoconcha.| Dreyssen- | Byssocar- phes. Septifer (?). sia (1). dium. Congeria. | Tridacna Hippopus. (1) Une raison qui pourrait faire éloigner les Dreyssensia des Cyrènes estlasui- vante : chez les Dreyssensia les siphons sont complètement développés alors qu'ils sont encore à leur premier stade d'évolution chez les Cyrènes. Pour faire descendre les Dreyssensia des Cyrènes, il faudrait pour le moins admettre, ce qui n’est pas impossible, le développement secondaire des siphons chez ces formes anisomyaires. On va d’abord examiner cette première question de l’origine probable des Anisomyaires pour pouvoir examiner ensuite la facon dont les modifications qui les caractérisent ont pu se produire. Il semble en effet de toute évidence, comme il a été dit plus haut, que les anciens Acéphales aient été des Diisomyaires d’un type différent et plus primitif que celui des Nucules qui se trou- valent être, de tous les Acéphales actuels, ceux qui possèdent le plus de caractères communs avec les Gastéropodes diotocardes. J'ai appelé Pronuculidæ ces formes Acéphales hypothétiques MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 233 et on pourrait leur attribuer comme caractères, ainsi que Je Pat dit, les branchies foliacées, le cœur dorsal au tube digestif des Gastéropodes, avec peut-être un pied vraiment reptateur n'ayant pas encore subi les modifications spéciales qui ont fait le pied des Nucules. En se plaçant au point de vue de la répartilion géologique on s'aperçoit, de plus, que les plus anciens Acéphales semblent avoir été des Diisomyaires. L'anatomie comparée et la paléontologie ne sont pas les seules qui s'accordent à nous donner toutes les raisons de croire que les formes diisomyaires aient été les plus anciennes. L’embryogénie vient encore apporter à celte opinion sa part d'arguments. En effet, tous les Anisomyaires sont, à un certain moment de leur existence, des Isomyaires plus ou moins parfaits et chez une forme donnée, telle que Witylus edulis Linn. ou Dreyssensiu polymorpha Bened. par exemple, il est facile de suivre la série des stades de développement qui nous conduisent d'une prodissoconque, et même d’une jeune coquille définitive à peu près équilatérale, à la forme si caractéristique et si nette- ment inéquilatérale de l'adulte en passant par une forme ana- logue à la Modiole. J'ai constaté ces faits sur les Hytilus edulis Linn. qui vivent à la baie de Douarnenez (Finistère) dans la zone du balancement des marées, et que dans le pays on appelle moules de roches par opposition avec les moules dites de vase qui vivent à l'embouchure des rivières et présentent une forme moins irrégulière. Les résultats de ces recherches seront exposés brièvement plus loin. En résumé done, l'anatomie comparée, la paléontologie et l'embryogénie s'accordent pour faire des Anisomyaires des types de formation secondaire. Comment peut-on expliquer la transformation d'une forme isomyaire en une forme anisomyaire? Quels sont, autrement dit, les facteurs mécaniques qui ont pu déterminer cette trans- formation qui artificiellement peut être considérée comme se faisant en deux stades, l'un, le premier, que l'on peut appeler la modiolisation, l'autre plus avancé auquel on peut donner le nom de #2ytilisation? Avant d'entreprendre l'étude de la marche et l'explication 234 R. ANTHONY des processus de modiolisation et de mytilisation, il est indis- pensable de définir ce que J'ai appelé l angle de modiolisation et l'angle de mytilisation des Anisomyaires. Si on trace, en le suivant exactement, le contour extérieur de C. 774. P ZT. Fig. 16. — Angles de modiolisation et de my- ülisation. — I, Arca barbata Linn.; II, Mo- diola gallica Dautz.; IN, Mytilus edulis Linn.; cpa, angle de modiolisation ; »,angle de mytilisation. la coquille d'un Acéphale di- myaire quelconque, en ayant soin de marquer les points culminants de lumbo et des extrémités antérieures et postérieures on obtient trois points, tels que r, 4, p. En réunissant € à p et p à « on obtient un angle pa dont la valeur, très appréciable chez un Isomy- aire, devient chez un Ani- somyaire de plus en plus pe- tite par le fait de la diminu- tion de volume et du refou- lement du muscle adducteur antérieur. C’est l'angle de modiolisation. Quand il est réduit à 0 c'est que le muscle adducteur antérieur est situé à peu près sur le crochet et que l'extrémité antérieure et le crochet se confondent. La coquille à alors acquis la forme en coin, ou en poire, qui caractérise la moule. J'appelle alors angle de mytilisation l'angle que fait la direction de la charnière avec celle du bord ventral. Le sommet de cet angle est représenté par le crochet et l'extrémité antérieure de la coquille réunis. Douvillé s’est occupé de l’origine de ce qui vient d’être appelé la modiolisation et il donne de ce fait l'explication suivante : II suppose un Isomyaire muni d’un byssus, comme le sont ençore MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 239 les arches, comme semblent l'avoir été les Protarcidæ descen- dants directs des Pronuculidie et ancètres communs vraisem- blablement de tous les Acéphales à exception de la Nucula et peut-être aussi des Trigonies. Il le suppose fixé dans une région littorale où les eaux sont très tourmentées. De ce fait pendant son développement, sa croissance, cet animal sera sans cesse secoué à l'extrémité de son byssus. Or ce dernier, par le fait même de la position de la glande byssale qui est plus rapprochée de l'extrémité antérieure du corps que de son extrémité postérieure, exercera une pression continuelle sur le muscle adducteur antérieur dont il détermi- nera l'atrophie ou pour mieux dire empêchera le développement, l'obligeant à se rapprocher de plus en plus du crochet. Comme conséquence le manteau diminuera d’étendue dans cette région antérieure et la coquille prendra alors naturellement, puisqu'elle se moule sur le manteau qui la sécrète, la forme caractéristique des Anisomyaires. Cette ingénieuse hypothèse me parait très soutenable, et, elle est d’ailleurs parfaitement d'accord avec les faits. En effet, d’abord tous les Dianisomyaires actuels, e’est-à- dire les seuls dontil soit possible de connaître l'anatomie, sont, à part les cas particuliers, des Bartleltia et des Chondrodontu, byssogènes; de plus, la plupart des Anisomyaires marins sont des animaux vivant dans la zone du balancement des marées: de plus encore, chez les Anisomyaires il semble que la partie disparue du muscle adducteur antérieur soit précisément celle qui se trouve le plus près de la région byssale; enfin au point de vue particulier, les Mytilidæ, qui constituent un groupe important parmi les Anisomyaires, semblent bien évidem- ment avoir avec les isomyaires byssogènes des carac- tères communs. À cette action invoquée par Douvillé, qui me paraît infiniment probable, il me semble que l'on pourrait en ajouter une autre secondaire, c'est celle de la force centrifuge : lorsqu'un Acéphale est suspendu par son byssus et secoué par les flots de la mer, il est évident que la masse viscérale tend à se porter de plus en plus à la périphérie et cette action peut servir Jusqu'à un certain point à expliquer la forme élargie en arrière des Modioles et des Moules. Outre cela, même si l'animal est suspendu au-dessous d'un plan horizontal, ce qui dans la pratique 236 R. ANTHONY arrive rarement 1l est vrai, la pesanteur peutaussi jouer un rôle et contribuer également à donner à ces animaux leur forme spéciale. Cette succussion continuelle de lanimal au bout de son byssus peut avoir aussi pour conséquence la dissocration de ce dernier, dont les filaments sont très écartés chez les Moules, les Modioles, les Dreyssensia, alors qu'ils sont coalescents, forment un corps en quelque sorte compact chez les Diisomyaires bysso- gènes comme les Arches. Nous retrouverons le byssus compact chezles Tridarnes quicomme les Arches et en raison deleur poids sont à l'abri de toute succussion. Le type modiohmorphe est donc caractérisé par la présence d’un byssus, le rapprochement de l'extrémité antérieure et ducrochet et la diminution du musele adducteur antérieur. Pourprendre des exemples concrets, je dirai les résultats que J'ai obtenus en mesurant sur quelques Acéphales d’affinités voisines, l'angle de modiolisation. C'est d'abord sur l'Arca bar- bata Linn. qui est un Diisomvaire à peu près parfait, où il atteint une moyenne de 34° sur cent individus. C’est ensuite sur la Modiola adriatira Lmck. quiest une Modiole dépourvue de drap marin et qui fait passage aux formes équilatérales. Je me suis procuré cent exemplaires adultes de cette espèce dans les collections du Muséum. En moyenne brute, la valeur de l'angle de modiolisation chez cet animal est de 7°,5. D'autre part, la valeur de cet angle que j'ai rencontrée le plus fréquemment est aussi 7°,5 (vingt-cinq fois sur cent). Si au lieu de prendre la Modiola adriatica Linck. on s'adresse à la Modiola barbata Yann. qui existe à Saint-Waast-la-Hougue et, qui, pourvue d'un drap marin très développé, s'éloigne davantage par sa forme des Isomyaires, on trouve que là moyenne de l'angle de modioli- sation calculée sur cent individus adultes est de 6°,5 alors que l'angle le plus fréquemment rencontré est celui de 5° qui à été trouvé vingt-huit fois sur cent cas. De l'Arca barbata Linn. à la HModiola adriatira Lmcek et de la Modiola adriatica Lmek. à la Modiola barbata Linn. l'angle de modiolisation s'abaisse donc. 1 tombe à zéro dans cent pour cent des cas chez toutes les espèces de J/ytilus et son abaissement à zéro peut même être considéré comme la définition de la forme mytlimorphe (Voy. fig. 16). MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 237 Le tableau suivantmontre, sans impliquer aucune opinion sur la filation réelle, l'abaissement graduel de l'angle de modioli- sation etle passage de la forme isomyaire à la forme anisomyaire. | ANGLE DE MODIOLISATION. | = | ! , Moyenne. Fré juence. | | | | . r - Il Arearbarbatu; Bin: bris aix 340 340 | Modiolavadriahicalmek en DONS 10,5 Modiola"barbata Linn:. 35. 50000 60,5 | 50 Munius edulis/DBmnr LS TTACAAET. 0° | (0 La mesure de l'angle de modiolisation permet donc de mettre en évidence un rapprochement graduel de Pextrémité anté- rieure de la coquille et du crochet, depuis les formes isomyaires jusqu'à la Modiole et même la Moule. La modiolisation s'étant ainsi produite, fa réduction graduelle du muscle adducteur antérieur et la confusion du crochet avec la partie antérieure de la coquille peut transformer ce type modiolimorphe en type mytilimorphe. Ce dernier, dans un cas particuher, et par Le fait d’un genre de vie tout spécial, aboutit à la forme Tridacne. L'explication des phénomènes par lesquels à pu se pro- duire le passage des formes isomyaires aux Modioles, vient d'être donnée ; il n'y sera pas revenu. Mais quelles sont les causes mécaniques qui ont pu produire la transformation du type modiolhimorphe en type mytilimorphe, qui ont pu amener le bord antérieur de la coquille et le crochet à se confondre ? Pour pouvoir répondre à cette question, que J'examinerai plus spécialement pour le phylum des Wytilidæ, West indispen- sable d'attirer l'attention sur les conditions habituelles d’exis- tence des Mytilus edulis Linn. 238 R. ANTHONY Au point de vue éthologique, les Mytilus edulis Linn. de nos côtes océaniques, et plus particulièrement celles que j'ai étudiées sur les côtes du Finistère, comprennent deux types principaux bien distincts : les unes vivent soit fixées aux bouées flottantes, soit agglomérées à l’aide de leur byssus, en paquets, qu'on rencontre le plus souvent aux embouchures des rivières : ces agglomérations sont constituées de telle façon que les cro- chets de tous les individus qui les composent sont dirigés vers le centre; les autres vivent fixées à des rochers à l'aide de leur byssus, le crochet dirigé vers le substratum et serrées les unes auprès des autres. Les Moules de la première catégorie, qui vivent dans des eaux tranquilles, sont en général lisses, de forme régulière et de grande taille, avec un angle de mytilisation assez élevé. On les appelle souvent, dans le pays, Moules de vase et ainsi que l’a justement fait remarquer Pelseneer (93) elles rappellent la Mytilus gallo-provinciolis Lmck. de là Méditer- ranée. Celles de la deuxième catégorie sont plus petites, irrégulières, de surface souvent rugueuse ; leur angle de myti- lisation est plus réduit et leur crochet, non seulement est aigu, mais encore est souvent recourbé en avant (Voy. PI. I). Ce sont ces dernières qu'en Bretagne on désigne sous le nom de Moules de roches, par opposition aux premières. Malgré ces différences de forme toutes deux font incontesta- blement partie de Pespèce Mytilus edulis Linn. qui a si souvent été subdivisée à tort par les conchylologistes (voy. à ce sujet Pelseneer (93). J'ai étudié d’une facon plus particulière, sur les côtes de la baie de Douarnenez (Finistère), les conditions d'existence de ces Moules, dites de roches. Si l'on parcourt une des plages de la région nord-est de cette baie, où les rochers, constitués de schistes siliceux très durs, forment des pointes déchiquetées qui, à marée haute, s’avancent dans la mer et sont complète- ment découverts à marée basse, on s'aperçoit que ces rochers sont recouverts de petites Moules de forme irrégulière, et dont la coquille est tapissée parfois d’incrustations d'algues calcaires ou de Balanes. Leur disposition sur les rochers est la suivante : Supposons la coupe schématique faite d'un rocher à marée MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 239 basse, depuis le sommet de la falaise, où la flore et la faune terrestres commencent, jusqu’au sable de la plage. Supposons que le niveau des plus hautes mers soit à mi-che- min de la paroi verticale. Au point de vue des algues et des ani- maux qui vivent sur ce rocher, son profil peut être divisé en deux régions : d’abord une région inférieure, sans cesse découverte Fig. 17. — Coupe schématique d’un rocher de Pentrez (Finistère) à marée basse. Les parties indiquées par un trait plein sont celles que recouvrent les Moules. el recouverte chaque jour par la mer, qui est surtout caracté- risée par la présence des ÆFucus resiculosus Linn. et serratus Linn.; ensuite une région supérieure, arrosée chaque jour par les embruns à marée haute, et recouverte seulement aux très grandes marées, qui est caractérisée par Fa présence de Pelretia canahculata Vec. et Thur., algue brune sensiblement moins vigoureuse que la précédente: parfois même, et dans les régions les plusélevées, cette deuxième zone estdépourvue de toute algue. Dans l’une et l’autre de ces régions, on peut signaler la présence de Mytilus edulis Linn., accompagnant d'autres nombreux animaux, dont l'énumération n'a pas d'intérêt au point de vue spécial auquel nous nous placçons ici. Dans ces deux régions, les Moules sont réparties de façons très différentes. Dans toute la région inférieure, là où les Fucus sont nombreux, très vigou- 240 R. ANTHONY reux et très développés, recouvrant complètement le substratum comme une sorte de chevelure (1), on peut apercevoir, en les écartant, une couche continue, une nappe pour ainsi dire de Moules, s’étalant sur tout le rocher, aussi bien sur ses parties saillantes que dans ses anfractuosités. Dépassons la zone des Fucus : à seulement où 11 y à une région en retrait, une anfractuosité, une fissure (Il), on est sùr de rencontrer des Moules. Plus on monte, plus elles deviennent rares et petites, et bientôt on ne les trouve qu’en regardant avec som et minutie dans les fentes les plus profondes. À partir d’un certain point même, on n'en rencontre plus. Ce qui est figuré sur cette coupe, qui est celle d’un rocher de Pentrez, peut également se constater en un point quelconque du littoral, depuis Douarnenez jusqu'à Crozon (lieux dits Lestrevet, Pentrez, Cameros, Kerrie, Porz-Lous, Rostegotf, Lecaon, etc.). De l'observation de ces faits, deux conclusions sont à TRE 1° Que la variété de Mytilus edulis Linn., qui vit sur les rochers de la baie de Douarnenez est adaptée à des conditions d'existence spéciales consistant en une immersion et une émer- sion alternatives. En effet, tous ces individus passent une partie de leur existence (d'autant plus grande qu'ils habitent une région plus élevée du rocher), au moment des marées basses, complètement hors de l'eau; on n'en trouve aucun dans les flaques où l’eau est d'ailleurs à une salure très variable par le fait des évaporations et des pluies, et pourrait peut-être, par ce simple fait, ne pas convenir à leur existence. Quoi qu'ilen soit de importance de cette variabilité de salure, pour l'explica- tion de la non-existence de Moules dans les-flaques, 1l est un fait certain, et que j'ai souvent expérimenté par moi-même, c'est qu'une Moule prise en un point quelconque de la surface du rocher et mise brusquement au fond de l’eau, même renouvelée, ne tarde pas, dans la plupart des cas, à périr au bout de quelques jours. Les formes de Mytilus, au contraire, qui, comme le Mytilus galloprovincialis Lmek., de la Méditerranée, vivent toujours sous une certaine couche d’eau, se sont adaptées à d'autres conditions d'existence et ne pourraient vraisemblable MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 241 ment supporter celles qui sont indispensables à la vie des imdi- vidus dont il vient d'être question. 2° Que, quoique n'étant pas continuellement immergées, les Moules doivent, pour vivre, être constamment maintenues à l'humidité. Voyons si toutes celles que nous avons rencontrées sur notre profil remplissent ces conditions. D'abord, celles qui vivent dans les régions inférieures, uniformément répandues à la surface du rocher, ne sont hors de Peau qu'un temps très court, puisque lorsque la mer monte, celle région est recouverte la première, et qu'au moment où là mer descend, elle est décou- verte en dernier leu. Pendant le courtintervalle où elles se trou- vent à découvert, les Moules n'ont done pas le temps de se dessé- cher à l'air, ni même au soleil, d'autant plus que les Fucus, très touffus, les recouvrent complètement, empêchant encore ainsi l'humidité de disparaitre et les rayons du soleil de les atteindre. A mesure que l’on monte, le rocher se trouve être découvert chaque jour pendant un temps de plus en plus long, les algues deviennent de moins en moins touffues et vigoureuses, et à parbir d’un certain niveau même, disparaissent complètement. Les Moules ne se voient plus alors à la surface des rochers, on ne les rencontre plus guère que dans les fentes et les anfrac- tuosités, où le soleil ne pénètre pas et où l'humidité à quelques chances de se conserver, ILest évident que les jeunes Moules, dont les facultés de dépla- cementsont, comme je lai observé, très considérables, beaucoup plus que celles des Moules adultes, se rendent d’elles-mêômes pour v effectuer leur développement dans ces anfractuosités où les conditions sont plus propices à leur existence, et, que celles qui, par hasard, sont restées sur les parties convexes des rochers meurent rapidement par dessiccalion. En résumé, outre l'im- mersion et Pémersion alternatives, l'humidité continuelle est nécessaire aux Jeunes Moules de roche pour leur développe- ment et leur existence, et, comme cette humidité ne peut exister que dans des anfractuosités, c’est là que les Moules viennent d'elles-mêmes se fixer, se pressant les unes contre les autres. Il a été dit plus haut quelle était l'attitude des Moules fixées au substratum. Cette fixation se fait toujours de telle sorte que la ANN. SC. NAT. ZOOL. Fi 16 249 R. ANTHONY région antérieure et le crochet confondus soient du côté de ce substratum, tandis que la région postérieure du corps, celle par laquelle se font l'entrée et la sortie de l’eau, soit dirigée du côté opposé, c'est-à-dire en haut. C’est en somme le céphalothétisme. Il en résulte que les Moules agglomérées dans des espaces res- treints, se pressent les unes contre les autres; leurs extré- mités antérieures se resserrent de plus en plus, tandis que leurs extrémités postérieures, celles qui forment la périphérie, s’élar- gissent, s'épanouissent comme des fleurs dans un bouquet. Ce mode d'existence caractérisé, en somme, par la compression de l'extrémité antérieure, est particulièrement marqué chez les Moules de roches des régions supérieures. Existant chez des animaux du type modiole, il a pu, en déter- minant le resserrement de l'extrémité antérieure, amener [la confusion des points & etc, et ipso facto la transformation du type Modiole en type Moule, c’est-à-dire faire descendre Jusqu'à 0 la valeur de langle de modiolisation. Ce premier résultat acquis, les conditions d'existence restant constantes, 's'accusant même davantage, un autre résultat a pu être obtenu, c’est celui de la diminution de valeur de Fangle de mytilisation. Égal chez les Moules de vase recueillies à l'embouchure de la rivière du Faou à 45°, il tombe chez les Moules de roches de la zone infé- rieure, dont il vient d’être question plus haut, à 38° en moyenne. (Ces moyennes ont été faites sur 100 individus de chaque caté- gorie pris au hasard). Parmi ces dernières, celles de la zone supérieure qui se trouvent être les plus comprimées arrivent même à avoir une extrémité antérieure contournée, c’est le Mytilus incurvatus Pen. Pelseneer (93; a montré comment ces différentes espèces ne sont que des variétés dues à des habitats différents. Si l’on s'adresse à un autre phvlum qui comprend lui aussi des formes mytiliformes, les Dreyssensiüidæ, on voit que les choses se passent tout à fait de même facon. En effet, chez les Dreyssensia polymorpha Bened. vivant distantes les unes des autres, le long des parois verticales des bassins d’eau de Seine de Gentilly, l'angle de mytilisation calculé sur 100 individus est égal à 58°,28 en moyenne. L'ayant mesuré par contre sur quelques spécimens faisant partie d’un groupe formé d'indivi- MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 243 dus fixés en bouquet sur un caillou et appartenant aux collec- tions de Malacologie du Muséum d'Histoire naturelle, j'ai trouvé qu'il était au contraire en moyenne de ##° environ. Les pre- mières de ces Dreyssensia rappellent par leur forme les Moules de vase de Bretagne, ou, mieux encore, les Mytilus galloprovin- cialis Lmck. de la Méditerranée; les secondes sont analogues aux Moules de roches de la baie de Douarnenez. En résumé, le type mytülimorphe semble devoir sa consti- tution même (réduction à 0 de l’angle de modiolisation) à la vie en groupes, l’agglomération, laquelle amènerait encore en plus, lorsque le resserrement des individus les uns contre les autres devient, par le fait de circonstances extérieures, extrêmement considérable, la réduction progressive de l'angle de mytilisation qui est d'autant plus fermé que l’agglomération est plus serrée. La vie agglomérée aurait été l’origine de la formation du type myülimorphe. Le type une fois constitué, les conditions extérieures ont pu imposer un autre genre de vie aux Mytilimorphes, dont la forme s’est modifiée en conséquence (Voy. Dreyssensia du bassin de Gentilly). Outre ces deux modifications principales, l'agglomération peut en produire encore d’autres secondaires. Au nombre de ces dernières, 1l convient de citer : l'élargissement de la partie pos- térieure de la coquille corrélatif du rétrécissement de sa partie antérieure, l'allongement postéro-umbonal de l'animal, qui est l'analogue de l'allongement antéro-postérieur des Duiso- myaires céphalothétiques, la disparition du drap marin res- semblant à un revêtement pileux qui existe chez la Modiola barbata Linn., et qui se retrouve chez la variété dite de roches de Mytilus edulis Linn. à un certain stade de développement, comme 1l sera montré plus loin. Ce drap marin disparaît dans la région antérieure de la coquille par le fait de la pression réciproque des individus et dans la région postérieure par l'action balayante et polissante en quelque sorte des vagues de la mer. Cela est si vrai que l'on peut voir que les individus qui se sont développés dans des positions et dans des régions telles que les vagues se brisent avant de les atteindre, derrière un rocher ou une touffe d'algues qui les abrite par exemple, ont conservé souvent ce drap marin Jusqu'à un âge auquel leurs congénères 244 R. ANTHONY l'ont en général perdu depuis longtemps. La chose est si remar- quablement nette qu'il ne semble pas que l’on puisse attribuer à une autre cause qu'à l’action de la vague, la disparition du drap marin sur la partie postérieure de la coquille des Mytilideæ. Sans cesse balayées par les flots, les Moules littorales s’usent de la même facon que les Chames se roulent sur les récifs des mers tropicales. Les Moules de vase n'ont pas plus que les Moules de roches de drap marin, quoique vivant dans un milieu extérieur moins agité. Cette particularité tendrait à faire admettre qu'elles l'ont perdu jadis, à une période de leur développement phylogénique où elles vivaient fixées sur les rochers, dans la zone de balan- cement des marées. De plus, l’action continue d’un courant, comme celui existant à l'embouchure des fleuves, exerce aussi, comme l’on sait, une action doucement polissante (Voy. Æthe- ra Petretinni Bet.). Dans tout cet exposé, j'ai cherché à montrer comment la forme Moule à pu provenir d'une forme Modiole, provenant elle-même d’une forme Isomyaire ; j'ai cherché de plus à expli- quer les causes de cette transformation. Mais outre ces argu- ments rés de l'anatomie comparée, il en existe d’autres à l'appui de cette manière de voir, que lembryogénie peut nous fournir et grâce auxquels le processus d’anisomyairie (modioli- sation et mytlisation) peut, en quelque sorte, être pris sur le fait. C’est encore sur les Moules de roches de la baie de Douar- nenez que J'ai effectué cette étude d’embryogénie dont les ré- sultats vont maintenant être très brièvement résumés. Je ne m'y occuperai naturellement que de l'établissement de la forme générale à l'étude de laquelle seule ce chapitre est consacré, et, je n'aurai en vue que la coquille. Tous les matériaux dont je me suis servi pour cette étude ont été recueillis par moi-même sur les roches de Pentrez où de Cameros (baie de Douarnenez). Chez le Mytilus edulis Linn. la prodissoconque est subsymé- trique, possédant un provinculum garni de dents transversales et divisé en deux parties par une fossette primitive légère- ment plus rapprochée de l'extrémité postérieure que de lextré- mité antérieure. J'ai souvent observé cette prodissoconque MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 245 | | qu ayant des dimensions comprises entre Loi = de millimètre. Je n'y insisterai pas davantage, mes observations coïncidant avec celles des auteurs, notamment celles de F. Bernard (98). Au stade prodissoconque fait suite ce que certains auteurs ap- pellent le stade népionique, suivi lui-même du stade néologique. La distinction de ces deux stades me semble quelque peu artificielle ; leur limite est difficile à concevoir, et même à saisir chez les Acéphales d'une facon générale. Chez le Hytilus edulis Linn. en particulier la délimitation semble impossible, aussi n'emploierai-je pas ces dénominations et me contenterai-je de parler seulement de la coquille définitive faisant immédiate- ment suite à la prodissoconque. Les plus petites coquilles définitives qu'il m'a été donné d'ob- FOIE I Ne server ont été des individus de — de millimètre de longueur 4 dans leur plus grande dimension. Ces coquilles n'ont pas préci- sément l'aspect de Diisomyaires parfaits com- plètement équilatéraux; elles forment, en quel- que sorte, au point de vue morphologique, la transition entre les Diisomyaires et les Diani- . ee somyaires. La coquille est lisse, le pied long et très agile: lanimal se déplace sans cesse, F2. brusquement, et ne semble pas faire un usage We (8 June My. important de son byssus. lus edulis Linn. sh DRE ie, N'a À : (valve droite, vue L'angle de modiolisation que J'ai réussi à intérieure) de 1/4de mesurer, grâce à la chambre claire, chez quel- millimètre environ: k A D : ; — apc, angle de ques individus m'a paru égal à 29° en moyenne modiolisation. etenviron (Voy. fig. 18). Il 2 à A — de millimètre, la forme est à peu près la même, mais le point wetle point « se rapprochant, l'angle de modiolisation tombe à 25°. | . . LU # A = millimètre, la forme a encore peu changé, mas la ten- dance à l’'anisomyairie s'est encore accentuée. 9 A 5 de millimètre, à peu près, on voit apparaitre un drap £ 246 R. ANTHONY marin analogue à celui dont on a constaté la présence chez Modiola barbata Linn. Comme chez ce dernier animal, il se développe surtout ‘sur les régions dorsales et postérieures. En mêmertemps, les points « et « se rapprochent de plus en plus. Sur deux ‘individus où je l'ai mesuré, l’angle de modiolisation était égal à 12 et à 14°. À ce stade, la forme générale de l’ani- mal rappelle à s'y méprendre la Modiola barbata Linn. adulte avec la seule différence que chez cette dernière l'angle de modiolisation est plus réduit encore (Voy. fig. 19). À partir de ce stade, à me- sure que les individus grandis- sent el sont, par conséquent, par le fait qu'ils ne disposent Fig. 49. — Genre Mytilus edulis Linn. que d'un espace restreint, obli- (valve droite, vue extérieure) de 1 mie Wa limètre, — cpa, angle de modiolisation. &eS de se serrer de plus en plus On aperçoit le drap marin etle byssus. [hs uns contre les autres, l'angle de modiolisation diminue pour atteindre 0, lorsque la longueur totale de l'animal est de il ne ù À 7 centimètre environ. Un peu avant ce stade, la jeune Moule, à moins, comme il à été dit plus haut, qu'un accident du rocher ne l'ait protégée contre la vague, à perdu son drap marin par le fait probablement de l’action polissante des vagues. Lorsque l'angle de modiolisation à atteint 0, l'angle de myti- lisation qui chez les individus de = centimètre atteint en moyenne 50°, diminue de plus en plus à mesure que l'animal augmente de taille pour s’abaisser sur les formes adultes de 3 à 4 centimètres Jusqu'à 38° environ et en moyenne. Cette étude trop résumée ici du développement ontogénique de la forme Mytilus edulis Linn. montre bien que cette espèce dérive sans aucun doute d’une forme isomyaire et qu'avant de devenir Moule, elle passe successivement par les stades isomyaire et modiole (#odiola adriatica et modiola barbata) ; elle permet, en outre, de saisir sur le fait pour ainsi dire MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 247 les causes morphogéniques et de Ss'imaginer comment réelle- ment les choses ont pu et ont dû se passer, comment la forme moule à pu se cons- ütuer. Ce processus de mytilisa- lion n'a pas dù être spécial aux Mytilhimorphes du phylum des Protarcidiæ. J'ai fait sur de jeunes Dreyssensiu provenant de sa- bles de la Saône, recueillis à Saint-Jean-de-Losne, une étu- de analogue à celle que j'ai faite sur les Moules de roches de Pentrez: elle m'a conduit au même. résultat. La forme myülimorphe Dreyssensin est précédée dune forme mo- diolimorphe à angle de modio- lisation évaluable. Dans la famille des Myti- lidæ, 1 convient de citer le ; s Fig. 20. — Coupe sagittale de Mylilus edulis genre Zithodomus dont 1l à Linn. — 1, bouche: 2, anus: 3, pied: Gé question déja el qui est fie lueteur antérieur: à mo une forme secondairement expirateur (position physiologique). adaptée à l'enfouissement céphalothétique et à la vie en galerie. Le Lithodome possède comme les Diisomyaires un corps allongé, cylindrique calibré, des ébauches de siphons, et son bord abdominal, au lieu de rester rectiligne au voisinage du crochet, comme ilest chez la Moule, se courbe faisant ressembler le profil sagittal de cet animal à celui d'un Diisomyaire dont le crochet est séparé de l'extrémité antérieure. Sous l'influence de conditions d'existence spéciales, certains types myllimorphes peuvent prendre des caractères spéciaux. C'est le cas des Tridacnes. La Tridacene n'est, en réalité, autre chose qu'une Moule, au 248 R. ANTHONY même litre que les Mytilus, les Septifer et les Dreyssensin. Chez la Tridacne comme chez tous ces animaux, la partie antérieure du corps est, en effet, confondue avec le crochet et le muscle adducteur antérieur, au heu d’être simplement diminué comme chez le Mytilus edulis Linn., est complètement absent comme d'ailleurs chez certains Mytilus. La forme Tridacne est donc une forme anisomyaire ou myt- limorphe, mais une forme mytlhimorphe qui, au point de vue morphologique, se distingue des autres, par la réduction de son diamètre postéro-umbonal où antéro-postérieur, l’aug- mentation de ses diamètres transversal et dorso-ventral, enfin l'augmentation considérable de son angle de mytilisation, qui chez les plus grandes formes de Tridacnes et les Hippopus peut atteimdre jusqu à deux angles droits. La forme Tridacne n’est réalisée que dans deux genres, le genre Tridacna etle genre Hippopus, très voisins l'un de l'autre, et, tous les deux constituant la famille des Tridacnidæ. Certains naturalistes pourront s'étonner de me voir placer les Tridacnes et les Hippopus parmi les formes anisomyaires et en faire les analogues des Moules. Il me semble indispensable de me justifier à ce point de vue. De tous temps, les Tridacnes ont frappé les zoologistes non seulement par leur grande taille, mais encore par la disposition spéciale de leurs organes. Le premier auteur qui se soit sérieusement occupé de l’organisation de ces animaux est Mac-Donald, qui, en 1857, en donna une bonne quoique incomplète description. En 1865, L. Vaillant, dans un mé- moire qui reste encore aujourd'hui l'ouvrage le plus complet au point de vue descriptif, parmi ceux qui traitent de ce sujet, . étudia en grand détail leur anatomie. Un fait l'avait frappé, c'est que lorsqu'on écarte les valves d'une Tridacne, laquelle, -par sa forme générale et à première vue, rappelle grossièrement un Diisomyaire équilatéral quel- conque, on constate que l'orifice buccal est au niveau de la région cardinale ou plus exactement du crochet et que le cœur se trouve être du côté du bord libre des valves, l'inverse par conséquent de ee qui existe chez les autres Acéphales auxquels une Tridacne paraît ressembler. Considérant donc la région MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 249 droite de la figure 21 comme l'avant, la région gauche comme l'arrière, le bord inférieur comme le dos et le bord supérieur comme le ventre, 1l conclut, étant donnée la disposition des organes, que l'animal était absolument retourné dans sa co- quille. Cette conception devenue elassique depuis lors, fut adoptée encore en 1898, par Grobben, qui, dans un bon mémoire Fig. 21. — Coupe sagittale de la Tridacna elongala Linck. L'animal est en position physiologique, le crochet en bas. — 1, bouche: 2, anus; 3, pied; 5, musele adducteur postérieur; 6, cœur; 7, orifice inspirateur; 8, orifice expirateur; 9, orifice byssal ; 10, ganglion nerveux viscéral ; 41, foie ; 12, organe de Bojanus. donne des détails anatomiques complémentaires sur lorgani- sation de ces animaux. Enfin tout récemment, M. Boutan et la Direction des Ar- chives de Zoologie expérimentale ont publié un mémoire pos- thume de M. de Lacaze-Duthiers (04), où le savant zoologiste prend à tâche d'éclaireir la question si obscure et st embrouillée de la morphologie des Tridacnes. Guidé par le principe de Funité de plan de composition des êtres vivants et par cette idée st émi- nemment vraie que les organes e{ non la coquille doivent servir de base pour l'orientation d'un Acéphale, 1l'arrive à établir que la Tridacne, considérée jusqu'ici comme un type aberrant, n'est pas, en somme, plus aberrante que l'Huitre et la Chame, par exemple, et que son organisation rentre bien dans le plan général de celle des autres Acéphales. Mais de Lacaze-Duthiers ne va pas plus loin, 1 montre que la Tridacne n'est pas le type si particulier qu'on avait voulu en 250 R. ANTHONY faire, qu'il n'est nullement re/ourné, mais il ne donne pas la véritable signification de son organisation. Plusieurs années avant de Lacaze-Duthiers, un géologue, M. Tournouer, semble avoir entrevu la solution de la question, en montrant le passage des Lithocardinum aux Tridacnes par l'intermédiaire des Bysso- cardiunr. L'an dernier enfin, dans une note à l'Académie des Sciences sur la morphologie et la morphogénie des Tridaenidés, j'expo- sais la facon dont je comprends l'organisation de ces animaux. J'ai appliqué pour leur orientation les notions exposées au début de ce chapitre. La région de la bouche à été ainsi dénommée tout naturellement région antérieure, celle de l'anus et du siphon expiraleur région postérieure. Le nom de bord dorsal à été donné à celui qui va de la bouche à l'anus en pas- sant par le cœur (ancienne région postérieure), celui de bord ventral à celui qui va de la bouche à l'anus en passant par la cavité palléale {ancienne région antérieure). Les régions qui répondent aux valves ont été désignées comme droite et gauche. Dans cette orientation, il n'est nullement tenu compte, comme on le voit, de la coquille, de ses différentes parties et de leurs rapports avec les organes. Cette mise en place des Tridacnes, application particulière de la règle générale émise plus haut, pour l'orientation de ces animaux, diffère sensiblement de celle proposée par M. Vaillant, de celle aussi proposée par M. de Lacaze-Duthiers, comme un simple coup d'œil jeté sur la figure que je publie et sur celle contenue dans le mémoire de cet auteur, permet de s'en rendre compte. Considérons maintenant quels sont les rapports que la coquille affecte chez ces Acéphales, avec les différentes parties du corps qui ont servi de base à la mise en place de l'animal. D'abord en face de la bouche est le crochet, et en arrière d'elle est immédiatement placé le pied, puis le byssus. A l'opposé de la bouche est le muscle adducteur postérieur et le rectum qui affecte avee lui les rapports habituels. Il résulte de ceci que chez les Tridacnes la coquille affecte avec les organes internes exactement les mêmes rapports que chez le Mytilus edulis Linn. La forme Tridacne est donc de MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 251 toute évidence une forme mytilimorphe (Rapprocher la figure 21 de la figure 20), mais un myüilimorphe d'aspect spécial dans lequel les diamètres verticaux ont diminué alors que les dia- mètres horizontaux (dorso-ventral et transversal) ont aug- menté. Il résulte de ceci qu'il n'existe pas de lunule chez les Tridar- nidæ. La plupart des auteurs, se fiant à une vague ressemblance, appellent lunule de la Tridacne la région par où sort le byssus et de Lacaze-Duthiers, tout en semblant cependant entrevoir l'er- reur, a malheureusement encore employé ce terme dans son mé- moire précité pour l'appliquer à la même chose. Qu'est-ce en effet qu'une lunule, sinon la région de la coquille comprise entre le crochet et l'impression du musele adducteur antériéur, c'est-à-dire la bouche qui dans la plupart des cas affecte avec ce muscleles rapports constants que l'on connaît. Chezla Tridacna parconséquentlalunuleserait la région comprise entre le crochet et la bouche. Or, chez cet animal cette région est réduite à néant, tout comme chez la Moule d'ailleurs, et, ce qu'on appelle à tort la lunule de la Fridacne correspondrait chez les Cardium, par exemple, à une partie du bord libre des valves partant de l'extrémité ventrale du musele adducteur antérieur et se dirigeant vers le siphon inspirateur. Au point de vue de leurs affinités les Tridarnidæ doivent être “attachées, ainsi que je l'ai dit plus haut, à la famille des Car- düdæ; ce sont des Mytilimorphes de Cardin. I n'entre pas dans le cadrede cette étude, qui n’est en somme qu'une introduction, d'énumérer les nombreux caractères de parenté qui unissent les Tridacna aux Cardium :; je me réserve de le faire dans un mémoire futur qui traiteraien détail la morpho- logie et la morphogénie de ces animaux. Toujours est-1l que depuis le Cardium jusqu'à l'Hippopus 1 existe toutes les formes de passage que l’on peut sérier de la façon suivante : Cardium. Lithocardium. Byssocardium. Tridacna. Hippopus 289 R. ANTHONY Le Cardin estla forme isomyaire de la série. Le Zithocardium (Anisomyaire) y représente la forme modiohmorphe; c’est un type exclusivement fossile qui, tout porte à le croire, ne possé- dait pas encore de byssus ou en possédait du moins un très ré- duit qui n’a pas laissé de traces sur la coquille. Quant au Pyssocardium également fossile, c’est une forme à byssus comme son nom l'indique etcomme le prouve la forme de sa coquille, mytilimorphe typique n'avant pas subi les modifi- cationssecondaires qui caractérisent la Tridacne. L'angle de myti- lisation plus petit que chez la Tridacne est, chez le Byssocardium, de 90° environ. Il semble évident que le PByssocardium soit l'ancêtre direct des Tridacnes. | Quant à l'ÆHippopus, e’'estune forme de Tridacnidé plus évoluée encore que la Tridacna et dépourvue de byssus. En résumé, donc les Tridacnidés sont des Cardudæ myül- morphes qui présentent, par le fait de l'action de conditions d'existence spéciales que nous allons exposer maintenant, une morphologie toute particulière. Les renseignements que j'ai eus sur les conditions d'existence de ces animaux proviennent surtout de deux sources. D'abord, J'ai mis à contribution le savant ouvrage de Saville-Kent (93) sur la grande barrière récifale d'Australie ; ensuite j'ai utilisé les renseignements si complets et si précis que M. Ch. Gra- vier avait recueillis à mon intention au cours de sa mis- sion dans le golfe de Tadjourah. De ces documents ainsi que des autres renseignements que j'ai pu me procurer, il résulte les faits suivants absolument imdiscutables : les Tri- dacnes se rencontrent fixées parmi les Polvpiers, à laide de leur byssus, en céphalothétisme ; fait capital, elles sont isolées, à l'encontre de ce qui se passe chez les Mylilus edulis Linn. par exemple qui vivent toujours agrégés, chaque exemplaire élant toujours distant d'un autre individu. Les Polvpiers les entourent de telle sorte que, de tout l'animal le bord libre des valves parait souvent seul avec ses sinuosités, et, les valves entr'ouvertes laissent quelquefois paraître retournés en dehors les bords du manteau dont on connait les couleurs éclatantes qui se mêlent à celles non moins vives des /Polypiers et empêchent souvent de reconnaitre à première vue la présence MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 253 de la Tridacne. Ces animaux sont exclusivement littoraux, vivant, soit dans la zone de balancement des marées, soit dans celle qui la suit immédiatement, n'étant recouverts en tous cas d'une façon permanente que par une mince épaisseur d'eau. Au point de vue morphogénique il est parmi ces conditions d'existence un fait capital à retenir, c'est qu'au lieu de vivre agelomérées en bouquets comme les Hytilus el souvent les Dreyssensia, les Tridacnes vivent isolées. Cette circonstance, à laquelle vient s'ajouter le grand poids de l'animal, permet; ilme semble, d'expliquer la forme particulière des Fridacnes qui sont en somme des formes myülimorphes étalées, écrasées sous leur propre masse. En effet, comme il à déjà été dit plus haut, si on compare une Tridacna à un Mytilus, on voitque le premier de ces mylilimorphes diffère du second, par l'accroissement de ses diamètres dorso-ventraux et latéraux et la réduction de son diamètre antéro-postérieur. Autrement dit, les dimensions horizontales de l'animal ont augmenté par rapport à ses dimen- sions verticales qui, elles, ont diminué. Quant à l'angle de mvtili- sation, il s’est ouvert de plus en plus et atteint en moyenne chez la Tridacna elongata Lmek. adulte par exemple la valeur de 150°. Ce processus d’étalement peut être suivi très facilement sur un seul et même individu par là seule inspection des stries d'accroissement de la coquille. La jeune Tridarna elongata, Lmeck. de deux centimètres de long par exemple dans ses plusgrandes dimensions (diamètre dorso-ventral), esttrès aplatie d'un côté à l’autre par rapport à sa dimension antéro-posté- rieure, elle est également plus courte dorso-ventralement et son angle de myüilisation très voisin de celui du Byssocardium (90°) ne dépasse pas 100° où 105°. À mesure que l'animal grandit les diamètres horizontaux augmentent de plus en plus par rapport aux diamètres verticaux et l'angle de mytilisation atteint 150° chez un animal de 15 centimètres (dimension dorso-ventrale). Chez Les formes de plus grande taille, Tridacna gigas Linn. par exemple (voir les exemplaires de Saint-Sulpice du Muséum et de l'École des Mines), le poids augmentant, l'étale- ment augmente dans un même rapport, l'angle de mytilisation atteint deux droits et le byssus devenu inutile disparait. 254 R. ANTHONY A cet étalement doit encore être rattaché l’écartement des deux branchies, et leur forme spéciale en bourrelets. Enfin 1l reste à citer le fait que comme les Arches, les Tridacnes ont un byssus compact qui semble prendre cet aspect par le fait de l'immobilité de l'animal maintenu en place par sa forme, son propre poids et les Polvpiers qui lentourent. Il est également facile de passer de la Tridaene à l'Hippopus. Fig. 22. — Coupes coronales médianes de moules internes atificiels. — T, de Tridacna elongata Lmck.:; H, d'Hippopus maculalus Lmck. adultes. L'Hippopus est en effet un Tridacnidé dans lequel les dimen- sionshorizontales ontaugmentéencore plus quechez les Tridacna par rapport aux dimensions verticales. En effet, si on appelle L'indice bilatéral, le rapport de Pépais- seur bilatérale maximum à la longueur antéro-postérieure maximum (dimension verticale), cn épaisseur x 100 longueur antéro-postérieure on voit que cet indice est de 79 chez la Tridacna elon- gala Lmek. et de 88 chez l'Hippopus maculatus Emck. De même si l’on désigne sous le nom d'indice dorso-ventral, le Rs Re MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 299 rapport de la dimension dorso-ventrale à la même longueur antéro-postérieure, dimension dorso-ventrale x 100 = longueur antéro-postérieure on voit que cet indice est de 207,52 chez la Tridacna elon- gata Lmck. en moyenne, alors qu'il est de 157,38 chez l'Hip- popus maculatus Lmek. Les Hippopus diffèrent encore des Tridacnes par l'étendue de leur angle de mytilisation qui, chez l'Hippopus maculatus Lmck. adulte, atteint en moyenne 160°. Enfin, une dernière différence entre les Æippopus et les Tri- dacnes est, qu'alors que les seconds ont un byssus, les premiers n'en n'ont plus. Ilest aisé de déduire de l'ensemble de ces carac- tères que les Hippopus sont en somme des Tridacnidés chez les- quels l'étalement, dont on peut suivre par les stries d'accroisse- ment les différents stades sur la coquille, est plus accentué encore que chez les Tridacnes: chez ces animaux à base si élar- gie, le byssus n'ayant plus raison d'être comme organe de fixa- üon à disparu. Les Æippopus sont done actuellement le terme ultime de la série des Cardüdiæe anisomvyaires. Avant de clore la question des Anisomyaires, il convient de s'arrêter un instant sur un type tout à fait spécial et peu connu, qui me semble devoir être classé parmi eux; je veux dire le genre Bartlettix. Cet animal, que l’on rencontre uniquement dans les rivières d'Amérique du Sud, semble indubitablement appartenir au groupe des Unrionidæ ainsi d'ailleurs que les Æthéries africaines dont il à été question un peu plus haut. Comme les Æthéries, 1 est fixé, mais la zone de fixation, au lieu d'occuper toute la surface de lune des valves, est limitée à la région qui répond à l'insertion du muscle adducteur antérieur. L'impression de ce muscle sur la valve est d'ailleurs infiniment plus réduite que celle du muscle adducteur postérieur, e’estce qui me fait ranger la Bartlettia parmi les Anisomyaires. Il semblerait que la partie libre du corps de l'animal se soit épanouie en quelque sorte au-dessus de la zone de fixation très limitée, qui par le fait de a fixation même, s’est arrondie. Peu à peu, il semble que lépa- nouissement augmente, que la zone de fixation se rétrécit, la 256 R. ANTHONY partie qui relie animal au substratum faisant de même, de telle sorte que l’on arrive à une forme monomvaire, la Mulleria qui parait fixée au bout d'un grêle pédoncule, répondant à la région antérieure de lanimal. Les PBartlettin sont done amsi des formes anisomyaires particulières donnant, elles aussi, comme les autres Anisomyaires, naissance à des Monomyaires égale- ment spéciaux, et par un processus tout différent du proces- sus ordinaire qui fera l’objet du paragraphe suivant. Quantaux Chondrodonta que Douvillé vient de nous faire connaître, elles semblent être également des Anisomyaires, peut-être des Praudæ Hxés en position pleurothétique. Il Monemyaires. On doit considérer les Anisomvyaires comme des types de transition faisant en quelque sorte le passage insensible des Dusomyaires aux Monomyaires (1). En effet, siles uns, comme certaines Cardites, Cardita calyqulata Linn. par exemple, comme les Æippopodium etles Modiola, tendent manifestement vers les Diisomyatres, d'autres, comme les Mytilus, tendent, par la perte deleur muscle adducteur antérieur, à se rapprocher de plus en plus des Monomvaures. La forme Avicule dont les types les plus anciens (Voy. Bernard, Traité de paléontologie) possé- daient encore un muscle adducteur antérieur, peut être considé- rée comme étantpréeisément à la imite de Pun et Pautre groupe. Le groupe des Monomyaires comprend entre autresles familles et genre suivants : Aviculidæ (2) et ses subdivisions. Limidæ. Pectinidæ. Ostreidæ. Anomiidæ. Mulleria (famille des Ætheriidæ). (1) I semble en effet que les Monomyaires, à part certaines formes spéciales comme la Mullerie, dont l'évolution probable vient d’être indiquée, dérivent de formes Anisomyaires mytilimorphes. (2) Il semble que les différentes tribus (Vulsellinæ, Inoceraminæ, Ambony- chinæ, etc.) que l’on rattache en général aux Avicules, doivent en être éloi- gnées. Dans un mémoire ultérieur je compte revenir sur cette question. MORPTHOLOSIE DES MOLLUSQUES Do Comme on le voit, dans le groupe des Monomyaires plusieurs phylums se trouvent représentés tout comme dans le groupe des Dimyaires. Les Mulleries, en effet, ne sont que des Unionidæ à un seul muscle, et, sans qu'on puisse déterminer actuellement d'une facon certaine le phylum auquel doivent être rattachées les Avicules etles Huiîtres, 1 semble qu'il ne faille pas, en rai- son de la constitution spéciale de leur branchie, leur attribuer la même origine qu'aux Pectens, aux Spondyles, aux Anomies et aux Placunes qui semblent plutôt devoir comme les Moules, et, en raison de la constitution très simple de leurs organes res- piratoires, être rapprochées des Acéphales fihbranches, par conséquent plus primitifs. Ainsi que l'a déjà fait remarquer Pelseneer !91}, les Monomvaires sont donc incontestable- ment polvphylétiques. Les caractères communs des Monomyvaires sont les suivants : d’abord, comme leur nom lPindique, ils ne possèdent plus qu'un seul muscle adducteur qui est toujours ladducteur postérieur, lequel tend constamment à se rapprocher du centre de figure de la coquille. Il en est encore loin chez l'Avicule, S'en rapproche chez l'Huître et latteint tout à fait chez la Placune. De plus, chez les Monomyaires, la forme générale tend à devenir plus ou moins arrondie, le profil coronal à s'aplatir, l'intestin à s'éloigner du cœur et à passer dorsalement par rapport à lui, comme chez l'Huitre par exemple; le ligament à se réduire et à limiter sa présence à la région médiane de la charnière; les branchies se trouvent être généralement plissées, qu'elles soient filamen- teuses ou treillagées. Jamais 11 n°+ a de siphons (1), et l'im- pression palléale est dépourvue de sinus. Les Monomyvaires les moins évolués, c'est-à-dire ceux qui se rapprochent le plus de la forme anisomvyaire. possèdent encore un byssus, organe caractéristique de ce groupe (Avicules et certains Pertinidiæ tels que le Pecten vurius Linn. et le Pecten opercularis Linn.). Hs le perdent bientôt et deviennent alors les uns libres (Pecten marunus Lainn.), les autres fixés (Huitres). LesDusomyaires, on l’a vu, sontlesunseuthétiques, les autres (4) S'il existait des Monomyaires dérivant de formes dimyaires céphalo- thétiques de la 3° catégorie, ils posséderaient évidemment des siphons rudi- mentaires etle fait n'aurait rien qui doive étonner. ANN. SC. NAT. ZOOI.. , 14 258 R. ANTHONY pleurothétiques; les Dianisomyaires sonttous euthétiques ; quant aux Monomyaires, ils sont tous pleurothétiques. Chez la plupart d’entre eux, le pleurothétisme est franc et continuel (Ostreideæ) : chez d'autres, comme les Avieules et les Pectinidæ à byssus, le pleurothétisme terd seulement à s'établir. On peut dire qu'il est intermittent. Il est intéressant de voir, comment les {ypes monomyaires, possédant les caractères convergents qui viennent d'être signa- lés, ont pu s'établir et comment ces types une fois constitués ont pu acquérir leurs caractères fondamentaux. Il suffit de jeter un coup d'œil sur une coupe sagittale de Mytilus edulis Linn., pour voir immédiatement la disposition du ligament et des museles adducteurs : d'une part, la partie fibreuse dorsale du ligament qui commence au même point en avant que la partie élastique s'étend beaucoup plus loin en arrière ; d'autre part, des deux muscles, l’un, le plus considé- rable, le muscle postérieur, se trouve situé en dehors des limites de la charnière en p; l'autre, l’'antérieur, très réduit est en 4. La fermeture s'opère, comme l’on sait, par la contraction des muscles, et lPouverture par laction, quelle qu'elle soit d'ailleurs, du ligament. Supposons, pour la commodité de l'explication, Fanimal maintenu immobile et fixé par une de ses valves. La valve supérieure peut être considérée comme un bras de levier dans lequel le point d'appui est au milieu du ligament fibreux, la résistance au milieu du ligament élastique, et la puissance quelque part entre p et en un point très voisin de p, puisque 4 est pour ainsi dire négligeable par rapport à p en raison de sa petite taille et de son rapprochement du point d'appui. La fermeture, ou rapprochement des valves, se produit donc sous l'influence d'une force F, dirigée de haut en bas et repré- sentant la somme des deux muscles, à laquelle s'oppose la force R (force expansive du ligament) dirigée de bas en haut. Si on remarque la disposition respective des trois points, (point d'appui, résistance et puissance), on voit qu'ils ne sont pas sur la même ligne, le point marquant la résistance étant rejeté en avant de ry. | Il résulte de cette disposition des museles et du ligament qu'il MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 259 doit se passer au moment du rapprochement des valves chez le Mytilus edulis Linn., ainsi que chez tout autre Anisomyaire mylilimorphe, puisque le ligament élastique se termine toujours moins loin en arrière que le ligament fibreux, un mouvement de bascule (très peu accen- tué ilest vrai mais cepen- dant suffisant pour avoir un effet morphogénique) de chacune des valves suivant lequel Les extré- mités postérieures s'abais- sent, c'est-à-dire se pressent 21. l'une contre l'autre, pen- “ lant tinfee rentes Fig. 23. — Schéma destiné à expliquer les dan que ES CXLTEMMILES iuvements des valves chez le Mytilus edulis antérieures s'élèvent, c'est- Linn. — «, muscle adducteur antérieur; AE ax “ De p, muscle adducteur postérieur: æy, ligne à-dire s'écartent. Pour qu Il indiquant la direction du bras de levier. n y ait pas de mouvement de bascule 11 faudrait que les trois points soient en ligne droite suivant zy. Voyons si l'expérience directe confirme les don- nées de la théorie. A l’aide du dispositif décrit au chapitre IE, J'ai pu inscrire les mouvements d'ouverture et de fermeture des valves chez le Mytilus edulis Linn., en ayant soin naturellement de placer la üige inscriptrice Le plus loin possible du lieu où je supposais passer l'axe dorso-ventral de ce mouvement de bascule. Au début de l'expérience, les valves sont coaptées, puis l'animal, ne se sentant plus inquiété, relâche peu à peu ses muscles, les valves s'écartent et le stylet décrit une ligne. Si, lorsqu'il est arrivé en un certain point, on touche le bord du manteau en quelque région que ce soit, où même si l'animal rapproche spontanément ses valves, le stylet décrit une autre ligne qui ne coïncide pas avec la ligne d'ouverture, mais se trouve toujours, si Panimal est sain et vigoureux, située postérieurement par rapport à elle (Voy. IT et IV, fig. 31). Au moment de la fermeture, chacune des valves accomplit done un mouvement de rotation (si léger, qu'imperceplible à Foilil n'en existe pas moins), et, l'expérience confirme la théorie. Suivant les cas, la boucle est plus ou moins ouverte, mais elle existe toujours 260 R. ANTHONY pourvu que là tige inscriptrice n'ait pas été posée sur le passage de l'axe même de rotation. Le résultat de ce mouvement de rotation si léger est aisé à se figurer : les parties Les plus anté- rieures de la coquille tendent sans cesse à s’écarter l'une de l’autre, de telle sorte que le ligament tend de moins en moins à exister dans sa région antérieure, sa partie élastique s’'amin- cissant de plus en plus en avant, s’épaississant au contraire de plus en plus en arrière, ce qui a pour effet de rapprocher la résistance de la ligne zy. D'autre part, le développement du muscle antérieur devient de plus en plus difficile, et, Pani- mal passe donc en un mot insensiblement de la forme mytlimorphe à la forme aviculimorphe, perdant ainsi tout son prolongement antérieur et tendant déjà, et par ce seul fait, à s’arrondir. Ainsi donc, on le voit, le mode de rapprochement des valves peut dans une large mesure contribuer à expliquer le passage de la forme anisomvyaire à la forme monomyaire. D'autres causes encore, d’ailleurs, peuvent être invoquées comme con- courant aux mêmes effets : c'est d'abord ce fait, sur lequel, Jackson (91) et Sharp (88) ont attiré déjà l'attention, que par sa position même et la brièveté de son bras de levier, le muscle adducteur antérieur joue un rôle à peu près insigni- fiant dans l'acte de rapprochement des valves et le maintien de leur coaptation ; son peu d'importance fonctionnelle est donc encore pour lui un motif de disparition. Enfin, la pres- sion réciproque des Mytilimorphes suivant leur région anté- rieure, conséquence de leur genre de vie, peut aussi dans une certaine mesure. être invoquée comme facteur déterminant de leur transformation en Monomyaires. Le type Monomyaire, une fois constitué ainsi, acquiert un certain nombre de caractères secondaires. C'est d'abord le rapprochement du musele adducteur postérieur devenu unique du centre de figure de la coquille. Cette situation du musele unique est, on le conçoit, éminemment favorable au fonction- nement des valves, puisque dans le levier formé par une des valves, mobile sur l’autre, elle met en ligne droite le point d'appui, la résistance et la puissance. Mais le fait qu'une dispo- sition est favorable à l'existence ne peut servir à expliquer son MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 261 apparition; quels sont donc les facteurs mécaniques qui l'ont produite. Si, par le procédé qui m'a servi à étudier le mode de rappro- chement des valves chez le Mytilus edulis Linn., on l'étudie chez un Monomyaire tel que l'Oxtrea edulis Linn. ou le Pecten mari- nus Linn. par exemple, on s'aperçoit que Les choses se passent sensiblement de la même façon que chez les Anisomyaires. Reprenons, en effet, en l’'appliquant aux Mono- myaires, la démonstration de tout à l'heure. Chez le Pecten marimus Linn., par exemple, la fermeture des valves et leur maintien en coaptation s'effectuent par la contrac- ton du muscle unique situé légèrement en dehors du re de Heure de lac Fig. 24. — Coupe sagittale d’Avicula radiata centre «dt ISure ut a CO- Desh. — 1, bou che; 2, anus; 3, pied en quille - l'ouverture se pro- dessous duquel est le byssus; 5, muscle ad- : Sen DrC 9 ei. re ducteur postérieur; 6, cœur. duit par le fait de la résis- tance à l'écrasement du ligament élastique, lorsque la partie lisse du musele adducteur à relâché sa contraction. Or, chez cet animal le ligament est constitué de la façon suivante : d'abord, s'étendant tout le long du bord droit de la charnière, est un ligament fibreux qui relie les deux valves : dans le levier constitué par la valve mobile, c’est lui qui con- stitue le point fixe. Outre le ligament fibreux, existe le ligament élastique qui, par sa force expansive, soulève la valve opercu- laire chaque fois que par sa contraction le muscle adducteur ne S'y oppose pas. Au moment de la fermeture, la valve libre du Pecten mari- mus Linn. est donc sollicitée à s'abaisser par une force M représentant le muscle adducteur unique. Là encore le point E (résistance) est en avant de FM et il doit en résulter une légère rotation autour de l'axe dorso-ventral (1) (Voy. fig. 25). (1) Pour la simplicité de la démonstration, il n’est pas tenu compte du poids de la valve. 262 R. ANTHONY Comme pour le Mytilus edulis Linn. l'expérience directe con- firme la conception théorique (Voy. fig. 31. VI). Chez l'Ostrea edulis Linn. les choses se passent de la même facon quoique la rotation soit moins accusée (Voy. fig. 31. V),et, bien que je n'en aie pas fait l'expérience pour tous les Monomyaires, il paraît évident que tous ceux qui sont construits sur le type du Pecten doivent présenter la même parüeularité physiolo- gique. En supposant done un Monomyaire quelconque fixé par une de ses valves, l’autre valve sera seule mobile et constituera au moment de la fermeture un levier dont le point fixe sera au milieu du ligament fibreux, la résistance au milieu du ligament élastique et la force en M (muscle). Par le fait de l'existence du mouvement de rotation se produisant au moment de la fer- meture, le ligament élastique tendra de plus en plus à ne pas se développer dans sa partie antérieure, où les valves ten- dent toujours à s écarter et, au contraire, à se développer uni- quement dans les régions où cet écartement est le moindre ou même n'existe pas, c'est-à-dire à se rapprocher de laxe de rotation ; 1l résulte de tout ceci une tendance manifeste des trois points F,E,M à se mettre en ligne droite. Cet idéal une fois réalisé, 1l ne peut plus y avoir de mouvement de rotation, par conséquent plus d'écartement latéral des valves S'opposant au développement du ligament. La boucle tracée par le stylet inscripteur, dans mon expérience, est d'autant moins ouverte que l'alignement est plus près d'être réalisé : chez l'Huiître elle est plus fermée encore que chez le Pecten marimus Linn.…. Ce ne semble done pas être en réalité — et je ne saurais trop insister là-dessus — le muscle qui se déplace pour s'aligner avec les deux parties du ligament, mais le ligament élastique qui se déplace pour s’aligner avec le muscle et le Higament fibreux. Cette tendance est très manifeste chez le Pecten marimus Linn. chez lequel, comme pour réaliser cet alignement, le ligament prend souvent une position oblique en arrière. De plus, au cours de la monomvairisation, les parties anté- rieures de l'animal ont été peu à peu et en quelque sorte chas- sées en arrière, etle muscle s'est, de par ce fait, trouvé entouré et paraît être finalement sensiblement au centre de la coquille. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 263 Même lorsqu'ils vivent agglomérés comme les Vulselles, Les Monomyaires ne peuvent, en raison de leur forme déjà tant soit peu arrondie, former des bouquets analogues à ceux que con- süituent les Mytilus et certaines Dreyssensin: en résulte qu'ils ne peuvent, comme ces animaux qui se soutiennent en quelque sorte les uns les autres, vivre en céphalothétisme et qu'ils tombent de toute nécessité sur une de leurs valves affectant Ja Fig. 25. — Schéma destiné à montrer la marche de la monomyairisation (Peclen maximus Linn.) — F, ligament fibreux; E, ligament élastique; M, muscle adducteur postérieur. position pleurothétique. De cet habitus pleurothétique résulte l'apparition d'un certain nombre de caractères. D'abord, par le fait de la position pleurothétique, le byssus qui, lui, reste atta- ché au substratum horizontal, creuse en quelque sorte son sillon, sa trace, son passage sur la valve devenue inférieure, sur laquelle on peut voir, chez les Ariculidiæ et les Pectinidiæ à byssus, une encoche très nette et très caractéristique qui n'existe pas sur l’autre valve. Puis, sur les Monomyaires plus évolués, le byssus devenu inutile, disparait et, avec lui, le dernier vestige de l'adaptation anisomvyaire. 264 R. ANTHONY De plus, comme chez les Diisomyaires pleurothétiques, la symétrie coronale tend, pour les mêmes raisons, à remplacer la symétrie sagittale: les deux valves s'éloignent morpholo- giquement l'une de l’autre ; chez l'Avicula radiata Desh., lune, la supérieure, la gauche est toujours plus bombée que linfé- rieure. La même particularité peut être constatée, plus accen- tuée même, chez le Pecten opercularis Linn. etle Pecten varius Linn. qui présentent aussi un aplatissement d'une des valves, l'inférieure, c'est-à-dire celle qui porte l'échancrure byssale. Tout en réalité se passe comme si l'animal, sans cesse secoué par les vagues au bout de son hyssus, retombait au moment du calme sur une de ses valves, laquelle prendrait, au cours de son développement, par le fait de la pression sur le sol, une forme aplatie. Avec l’aplatissement de la valve droite se produit natu- rellement, chez l'Avicule et les autres Monomyaires les moims évolués, l'aplatissement de toute la partie droite du corps, laquelle se traduit par la réduction progressive de tout l'appareil muscu- laire de ce côté. Ce processus de réduction de l'appareil muscu- laire peut être aisément suivi dans la série des Monomyaires. Prenons comme point de départ un Anisomyaire typique, bien symétrique par rapport à son plan sagittal, le Mytilus edulis Linn. par exemple. Si l'on ne tient pas compte des muscles du manteau, on peut voir qu'il existe chez ces animaux les muscles suivants : 1 adducteur antérieur. 1 — postérieur. 2 rétracteurs antérieurs du pied. 2 — postérieurs du pied. 2 — du byssus. Ces muscles sont, comme tous les autres organes de l'animal d'ailleurs,symétriques parrapportau plan sagittal{Voy. fig. 26, 1). Chez l’Avicula radiata Desh (fig. 26, Il) la disposition est sen- siblement la même, avec cette différence que l'adducteur anté- rieur est absent (passage à la monomyairie), que les rétracteurs du byssus sont réduits et plus ou moins confondus avec les rétracteurs postérieurs du pied (disparition progressive du byssus en rapport avec le pleurothétisme des Monomyaires) et enfin que le rétracteur antérieur du pied du côté de la valve la MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 269 plus aplatie est complètement atrophié, transformé en tissu fibreux (Voy. fig. 26). Chez le Pecten opercularis Linn. (fig. 26, IT) la régres- sion est encore plus marquée; avec le byssus, les rétracteurs Fig. 26. — Régression de l'appareil musculaire chez les Monomyaires sous l'influence du pleurothétisme. — 1, Myltilus edulis Linn.; II, Avicula radiata Desh. III, Pecten opercularis Linn.; IV, Ostrea edulis Linn.: p, pied; m, muscle adducteur postérieur; s, rétracteur supérieur; ?, rétracteur inférieur. du byssus et les rétracteurs du pied ont complètement dis- paru. Des rétracteurs postérieurs, celui-là seul correspondant à la valve supérieure existe encore; c'est, nous dit Jack- son (90), parce qu'il se trouve être dans le plan de traction (Voy. fig. 26). Chez l'Ostrea edulis Linn. (fig. 26, IV) enfin, où le pleu- rothétisme a atteint son maximum de caractérisation, et où la fixation existe, Le pied et le byssus ont complètement 266 R. ANTHONY disparu et avec eux toute leur musculature; le muscle adducteur postérieur reste seul. I à été dit un peu plus haut comment, par le fait seul de la monomyairisation, la forme arrondie tend déjà à s'établir. Une autre circonstance peut amener l'arrondissement à un état de Fig. 27. — Coupe sagittale de Pecten opercularïis Linn. — 1, bouche: 2, anus: 3, pied (la coupe n'a pas passé par le byssus): 5, muscle adducteur postérieur ; 6, cœur. perfection plus grande, et continuer ainsi, en quelque sorte, l'œuvre morphogénique de la monomyairisation, c’est la fixation qui se produit pour certaines formes, comme les Huitres et Les Spondyles par exemple. Chez les Monomyaires la fixation pleu- rothétique tend à amener lParrondissement pour les mêmes causes que chez les Dymiaires, et cet arrondissement, poussé dans ses dernières limites, entraîne aussi les mêmes modifica- tions organiques : c'est ainsi que la branchie se plisse, quelle que soit d'ailleurs sa structure (Huître, Mullérie), que le cœur se projette ventralement par rapport à l'intestin qui ne le traverse plus. Comme chez les Dymiaires aussi, outre l'arrondissement, la fixation pleurothétique entraine l’aplatissement de la valve deve- nue supérieure, qu on appelle pour ce fait operculaire, etle creu- sement de la valve devenue inférieure (Voy. Edm. Perrier (04). MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 267 . En résumé, donc, les Monomyaires sont tous pleurothétiques et possèdent de ce fait une symétrie coronale. Au point de vue de leur adaptation ils peuvent être divisés en trois catégories : Les byssifères (semblant être les formes primitives et de passage avec les anisomyaires). Les libres Les fixés semblant dériver des premiers. Les byssifères possèdent, comme leur nom lindique, un byssus qu'ils tiennent de leurs ancêtres dianisomyaires, et chez Fig. 28. — Coupe sagittale d’'Osfrea edulis Linn.. — 1, bouche; 2, anus : 5, muscle adducteur postérieur : 6, cœur. eux c’est la valve inférieure qui est aplalie par la pression sur le sol auquel le byssus l'accole. Le musele est encore éloigné du centre de figure de la coquille. Chez les libres et les férés, e'est la valve supérieure qui est aplatie: la valve inférieure se creuse, au contraire, Le byssus n étant plus là pour lPaccoler au sol et en maintenir rapproché le bord libre. Comme chez les Dimvyaires fixés en pleurothé- üsme, cette modification est vraisemblablement, comme Fa expliqué Edm. Perrier (04) sous la dépendance de l'action indi- recte de la pesanteur agissant sur la masse desorganes.Le muscle unique est sensiblement rapproché du centre de figure de Ta coquille. Les formes libres et les formes fixées dérivent vraisembla- blement de formes byssifères ayant perdu leur byssus. 268 R. ANTHONY IL est, parmi les Monomyaires, un phylum éminemment inté- ressant, dont l'évolution semble avoir été toute différente de celle des autres Acéphales du groupe et qui mérite, de ce fait, une mention toute particulière, c'est celui des Anomiideæ. Les Anomüdæ sont, comme on le sait, des Monomyaires fiibranches qui présentent une structure de branchie extré- mement primitive. Ils possèdent un byssus, devenu souvent pierreux, extrêmement solidé, ef qui, passant par un orifice de la valve inférieure, s'attache sur des coquilles d'autres Acéphales, très souvent sur nos côtes sur celles du Pecten mariunus Linn.. Leur valve aplatie est la valve inférieure, comme chez les Monomvares byssifères d'ailleurs, les Avicules et les Pectens à byssus. On comprend aisément comment l'application de l'animal au substratum, par son byssus, peut amener cet aplatissement au cours du développement. L'organi- sation étrange des Anomies semblait une énigme à tousles zoolo- gistes, lorsque M. de Lacaze-Duthiers (54) fit paraître son remarquable mémoire dans lequel il explique si nettement leur morphologie. En se développant, la coquille entoure peu à peu de ses couches calcaires successives le byssus qui, à un certain moment, semble sortir par un orifice percé dans la valve. Comment se fait-il que les Anomies n'aient pas perdu leur byssus pour les mêmes raisons que les autres Monomyaires? La chose semble pouvoir s'expliquer par ce fait, que les Anomies S'attachent, comme on le sait, lrès souvent sur les valves oper- culaires de Pecten marinus Linn.. Ces derniers exécutent des mouvements {rès violents; dans ces conditions, la persistance du byssus était utile, pour ne pas dire indispensable, et on peut concevoir que, afin de ne pas être détachée et lancée au loin, à chaque mouvement de son hôte, l'Anomie ait augmenté peu à peu sa sécrétion byssale dont le produit aurait pris une consis- tance particulière. En se développant, la coquille ayant, comme chez tous les animaux fixés, la tendance à prendre la forme arrondie que l’on sait, aurait contourné et entouré le byssus de ses zones calcaires, et ainsi se serait établie la disposition que de Lacaze-Duthiers à si bien mise en lumière. Mais, supposons que certaines Anomidæ aient cessé de vivre sur le Perten mavimus Linn. et autres animaux analogues, et MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 269 se soient fixés à un autre substratum, un rocher, par exemple. Dans ces conditions le byssus devenait inutile, l'animal reposant suffi- samment par lune deses valves, et ne devait pas tarder à entrer en ré- gression. C'est ce que l'on constate d'ailleurs très bien chez les Carolia fossiles, chez lesquels on peut suivre l’oblitération progressive de Porifice byssal de Ta valve infé- rieure el la régression des muscles rélracteurs du byssus. La régression de l'appareil byssal est complète chez la Pla- cuna où les deux valves sont devenues sembla- bles, la valve supérieure avant perdu la convexité qui caractérise les AnG- made. On peut done établir, au point de vue de lori- fice byssal seul, la série suivante : Forme Anomia. Forme Carolia. Forme Placuna (1). En même temps que la régression de l'appareil byssal se produit, le mus- Fig. 29. — Figure destinée à montrerla progres- sion du muscleadducteur versle centre de figure de la coquille. — À, Anomie; C, Carolic: P, Pla- cune. Le ligament fibreux est marqué par un trait plein, le ligament élastique par des hachures, le muscle par un grisé. (4) Voy. particulièrement à ce sujet le travail de Fischer (80). 270 R. ANTHONY cle addueteur unique semble, comme dans toutes les autres séries de Monomyaires, se rapprocher de plus en plus du cen- tre de figure de la coquille, et le phylum des Anomüdæ pré- sente ceci de très particulier qu'il est le seul où, dans le genre Placuna, le centre de figure de Ia coquille est mathématique- ment atteint par le muscle adducteur unique. Chez les Placuna, Fig. 30. — Coupe sagittale de Placuna sella Linck. — 1, bouche; 2, anus; 3, pied >, muscle adducteur postérieur; 6, cœur. les trois points (appui, résistance, puissance) sont en ligne droite et il esteurieux de suivre les modifications subies parle ligament par le fait de l'établissement de cet état de choses particulier. Chez l'Anomie, le muscle adducteur est encore loin du centre de figure de la coquille, et le Higament à une forme ällongée et très légèrement courbe. Chez la Carolie le muscle adducteur s'est rapproché du centre de figure de la coquille, et le ligament prend la forme très nette d'un croissant à concavité ventrale. Enfin, chez la Placune, le muscle adducteur à atteint le centre de figure et le ligament est nettement divisé en deux parties situées chacune de part et d'autre du muscle (Vo. fig. 29). Cette disposition me semble facile à expliquer par l’écrasement s’exercant loujours au même endroit que doit produire la contraction du muscle unique. C'est un exemple MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 271 *, de l'adaptation à la compression, analogue à ceux que J'ai PÉ AS B— = — VD——,à Co: F7 ZT. Are Fig. 31. — Tracés des mouvements d'ouverture et de fermeture des Acéphales suivants. — I, Psanmamobia:; I, Lulraria elliptica Limck.: III et IV, Mylilus edulis Linn; V, Ostrea edulis Linn.; VI, Peclen mazximus Linn.. La flèche qui monte indique l'ouverture et celle qui descend la fermeture; agrandis du double. mis en lumière à propos de la morphogénie des muscles des Vertébrés. PAIE R. ANTHONY La Placune, par sa forme parfaitement arrondie, son muscle exactement central, son double ligament, est donc la forme la plus évoluée des Monomyaires, celle qui, en quelque sorte, clôt la série. C’est Le type schématique, parfait en quelque sorte, des Monomyaires, comme le Pectunculus que nous avons trouvé au début de la série des Acéphales est le type parfait et schéma- tique des Dimyaires, et 1l est curieux de comparer lun à lautre ces deux types simples, tous deux de forme arrondie, Fun qui ouvre la série et autre qui la ferme. Chez le Pertuneulus, les deux muscles adducteurs sont égaux et la résultante (F) des deux forces qu'ils représentent se trouve ètre exactement sur là ligne passant par l'appui et la résistance. Là aussi les trois points sont donc en ligne ; l'inscription du mouvement de fermeture est un simple trait, le tylet passant, au retour, par le même chemin qu'à laller. n° à pas de rota- tion des valves. Chez le second, la Placune, 1 n°4 à qu'un seul muscle adduc- teur, mais, par contre, 1l y à deux ligaments dont la résultante tomberait également sur la ligne déjà nommée, et les trois points sont encore ici en higne droite. Il semble évident que si j'avais pu étudier le mode de fermeture de Ta Placune, je n'y aurais pas plus trouvé de rotation des valves que chez le Pectunculus. Enfin, comme type éminemment spécial dans le groupe des Monomyaires, il convient de citer encore les Mulleries. Ce semble être des Monomyaires qui, par une exception qui m'a paru unique, dériveraient de formes anisomyaires qui le seraient devenues, non par le fait de la présence d’un byssus, comme c’est le cas général, mais par le fait d'une fixation pleurothé- tique étroitement limitée à la région antérieure, Leur mor- phogénie possible à été exposée au paragraphe des Dianiso- myaires, je n'y reviendrai pas. En terminant cette trop longue introduction à l'étude de la morphogénie des Mollusques Acéphales, il me semble incdispen- sable de bien mettre, une fois pour toutes, Le lecteur en garde contre une erreur d'interprétation possible et qui consisterait à regarder comme des faits acquis toutes les hypothèses qui ont été émises 11 pour essayer de donner une idée de la facon dont ces formes diverses ont pu se constituer. Je crois MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 2793 aussi devoirle prévenir que cette étude générale que je viens de tenter de faire est encore loin d'être complète et ne doit point ètre considérée comme telle; bien des points de détail ont été laissés à dessein dans l'ombre, afin qu'en soient plus nettes les grandes lignes de l'évolution du groupe telle que je la com- prends, et bien des animaux, bien des types d'organisation spéciaux, ou n'ont pu, faute de documents, être examinés, ou, en raison de leurs particularités mêmes, ont été négligés. Cette imtroduction n'a donc pas la prétention d'être un exposé complet, c'est simplement un ensemble d'indications qui m'ont semblé importantes. Enfin, jai cru bien faire en résumant dans un tableau synoptique qui n'a, comme je l'ai déjà dit, rien de commun avee une classification systématique, les différents types d'or- ganisation dAcéphales envisagés indépendamment de leurs affinités. Abdomino- \ tunculus. Libres : Nucula, Pec- | thétiques. } | | a : Byssifères : Arca. Eu- E 1re Catég. : Unio, Curdi- thétiques. la. | Céphalo- | 2° Catég. : Cardium, AREA Venus. 3° Catég. : Lutruria, Pholas, Teredo. | / Libres : Corbulu, Pan- Diiso- ; : myaires. Dimyaires. Y° dora. ACÉPHALES. Pleurothétiques . ...... Fixés : Chama, Æthe- ria, Hippurites, Myo- chama, Chamostrea, | Dimya. | | Dianisomyaires : Mytilus, Dreyssensia, Tridacna. ! Byssifères: Avicula, Anomia, Pecten opercularis Linn. Monomyaires... : Libres : Pecten maximus Linn. Fixés : Spondylus, Ostrea. J'ai, de plus, essayé d'appliquer à la connaissance de la phy- logénie les notions morphogéniques précédemment acquises. d'esquisser la marche de l'évolution possible du groupe des ANN. SC. NAT. ZOOL. PIS 274 R. ANTHONY Acéphales, du moins des formes principales de ce groupe, de celles que j'ai pu étudier au point de vue spécial auquel je me suis placé. Les animaux primitifs abdominothétiques qui paraissent avoir été les ancêtres de tous les Acéphales et qu'on peut se figurer comme des sortes de Nucules à pied vraiment reptateur, semblent s'être différenciés dans deux directions, celle des Nucules qui, tout en avant conservé un grand nombre de carac- tères primitifs se sont adaptés à un mode de locomotion tout particulier dont il à été question plus haut, et celle des Protar- cidæ qui, par la perte de leurs facultés de locomotion, ont vu leur pied diminuer de volume, leurs glandes pédieuses s'ag- elomérer et le produit de sécrétion de ces dernières se solidi- fier. Ces abdominothétiques devenus bvssogènes semblent avoir évolué aussi dans deux sens différents, en faisant abstrac- ton du phylum particulier des Anomidæ, les Anisomvaires (Mytilidæ) et les Céplialothétiques chez lesquels le byssus est entré en régression. Toutefois l'on doit dire qu'entre ces Pro- larcidæ abdominothétiques et filibranches et les Submylilacea 1 y à un fossé profond. On ne connait pas, en effet, ainsi que Pelseneer l'a, d'ailleurs, constaté pour la branchie, la forme de passage d'un groupe à l’autre : de la forme abdominothétique on passe immédiatement aux Céphalothétiques franes, des Fili- branches les plus primitifs aux Eulamellibranches parfaits. Certains types de ces Céphalothétiques ont donné naissance, soit à d'autres Anisomyaires chez lesquels le byssus s'est déve- loppé à nouveau (Tridacnes qui proviennent des Cardium), soit à des Pleurothétiques (Chames). Les Anisomyaires prove- nant directement des Euthétiques byssaux ont donné toute la série des Monomyaires, sauf un seul type, les Wuwllerix qui semblent, par une exception curieuse, provenir directement de formes fixées en pleurothétisme. Ces hypothèses concor- dent en grande partie avec celles que Pelseneer à émises au cours de ses remarquables travaux et auxquelles d'ailleurs 1l'est arrivé par une voie toute différente. DEUXIÈME PARTIE Dans le précédent chapitre J'ai essayé d’esquisser les grandes lignes de la morphogénie probable des principaux types d’Acé- phales. On à vu, brièvement exposé, comment sous l’action des causes extérieures où du fonctionnement particulier de leurs organes, des animaux appartenant à des groupes naturels très différents ont pu converger vers des types d'organisation ana- logues. Reste maintenant pour chacun des différents groupes énumérés, à reprendre les choses avec plus de détails, en étu- diant dans ce qu'elles peuvent avoir d'inédit et d’important pour le point de vue spécial auquel nous nous plaçons, la morphologie, lembryvogénie et la physiologie de chaque type, afin de pouvoir établir ainsi pour chacun d'eux, d'une façon précise et aussi complète que possible, les caractères de conver- gence et, autant que faire se pourra, les causes morphogéniques qui ont déterminé l'analogie de leurs formes. J'ai choisi pour le moment le groupe des Acéphales diiso- myaires actuels fixés en position pleurothétique. On peut se demander pourquoi J'ai choisi pour cette étude ce groupe de préférence à tout autre. Les raisons déterminantes de ce choix ont été les suivantes : d'abord ces animaux sont, au point de vue morphologique (morphologie extérieure, ana- tomie, histologie), très peu connus, comme on le verra plus loin; de plus, les conditions d'existence étant à peu de chose près identiques pour tous, on se trouve sans cesse en présence de faits de convergence remarquablement nets et abso- lument probants ; les causes morphogéniques sont également en ce qui les concerne relativement simples et faciles à mettre: en évidence ; le fait que le groupe est très nettement circonserit faisait encore qu'il se prêtait bien à une étude d'ensemble; enfin 276 R. ANTHONY j'ai pensé que l'étude comparée de ces formes actuelles pouvait présenter un intérêt spécial pour les géologues et les paléonto- logistes, en leur fournissant des documents pour l'interpréta- tion de l’organisation et la détermination des affinités des Rudistes qui ont tant d'importance pour eux. J'avais d'abord songé à étudier le groupe des Dianisomyaires sur lesquels j'ai recueilli de très nombreux et très intéressants documents; mais la tâche eût été trop longue pour faire l'objet d’un seul mémoire, et, J'ai dû y renoncer pour l'instant, me réservant de reprendre cette étude plus tard ; les faits de con- vergence en outre sont moins nets, et, le groupe est moins net- tement limité présentant des transitions insensibles vers les Isomyaires par les Modioles, vers les Monomyaires par les Avicules et autres formes voisines. Les types d’Acéphales dimyaires fixés en position pleurothétique constituent six familles, dont voici les principaux genres (1) : À DIMVIDE Le PEER AE ET NE Dimya. A M UT CUS PA re Dimyodon. DO CHAMEDÆ. eee NE A PACNOENRER Chama. SNS EE A LUE AP Diceras. NRA Rate 2e Ain A CE de Heterodiceras. ARE D EI Ré En Requiena. RE EP ENR AA PAR EE Toucasia. EN FER EN LE ARS ENT pere Gyropleura. PTE AE PAT A AE AR Bayleia. RO een Le LD NE Plagioptychus (?). Etc... 30 MNOGHAMID AE EM RP RER Myochuma. LOUCHAMOSTREIDE CE EN Chamostrea. DO ATHERIDE (2) APR EN RRRRENe Ætheria. COR UDIS TES) PRE LA CEE UE Hippuriles. SORTE SRE Ales Sauvagesia. SE LARME CI UE qe AA Radiolites. PA AE ENT SET Biradiolites. Elc. 7° CHONDRODONTIDEÆ (4)............ Chondrodonta. (1) Les noms de genre en italique se rapportent à ceux existant encore à l’époque actuelle. (2) Le genre Mulleria qui est Monomyaire, et le genre Bartlettia qui est Dia- nisomyaire peuvent être rattachés en raison de leurs caractères anatomiques à la famille des Ætherüdæ. (3) Le principe de la répartition des genres dans les deux familles des Chamidæ et des Rudistæ sera expliquée et commentée plus loin. (4) Les Chondrodontidæ semblent être, d’après les recherches de Douvillé, des Dianisomyaires voisins des Pinnidæ fixés en position pleurothétique. CHAPITRE PREMIER DIMYIDÆ Historique. — La première fois qu'il est question de Dinyide, c'est dans un travail de Rouault (50), datant de 1850, sur les fossiles de l'Éocène des environs de Pau. Il y est décrit l'espèce Dinya Deshayesiana (Rouault). Depuis, en 1886, Munier Chalmas décrivit une autre forme de Dimyidæ du Bathonien, dont 1l fit le genre Dimyodon. Tout dernièrement enfin, Cossman (92) décrivit une Dimya provenant de l'Éocène supérieur des environs de Paris, la Dimya Bonneti [Coss- man) (1). L'Anonnaintustriata (Rouault), décrite dans le même mémoire que la Dimya Deshayesiana (R), paraît également être une Dimya quoiqu'il me semble que lon doive faire toutes réserves à ce sujet (en tous cas, ce n'est point une Anomie), l'Acéphale en question pouvant fort bien au surplus être une Plicatule. En plus de ces formes fossiles Dimya et Dimyodon, il existe aussi une Dimya actuelle qui a été draguée dans la mer des Antilles, par le « Blake », et à laquelle Dall (82) en 1882 a donné le nom spécifique de Dinya argentea (Dall). Cet auteur fournit au sujet de cet animal d'ailleurs un certain nombre de renseignements anatomiques qui seront énumérés plus loin. Morphologie. Pour là description morphologique des Dinyidiæ, À convient de se reporter aux figures qu'en ont données Rouault (50), Munier-Chalmas (86), Cossman (92) et Dall (82). Pour l'étude personnelle que j'ai voulu en faire, J'ai dû me contenter, en premier lieu de Pexamen de quelques exemplaires semblant se “apporter à l'espèce Anomia intustriata de Rouault et provenant de l'Éocène supérieur des localités suivantes : Pont du Louër, (4) L'exemplaire d’après lequel Cossman a fait sa description appartient à M. Bonnet qui me l’a aimablement confié. C’est d'ailleurs le seul exemplaire certain de Dimya que j'aie eu à ma disposition. 278 R. ANTHONY Bos d’Aros, villa Marbella, qui ont été aimablement mis par M. Douvillé à ma disposition. Sur la plupart de ces exemplaires la région cardinale extrê- mement mince a été brisée; 1l'en résulte une apparence d'échan- crure située dans la région cardinale de la coquille; par la pré- sence de cette échancrure et l’ensemble des autres caractères, les individus de Bos d'Aros et du Pont du Louër sont abso- lument semblables aux animaux auxquels Rouault, prenant vraisemblablement, ainsi qu'on peut s’en rendre compte par l'examen de la figure qu'il donne, cette cassure cardinale pour l'échancrure byssale des Anomies, à donné le nom d'Anomia intustriata (R). Toutefois un certain nombre de valves intactes que J'ai eu la chance d’avoir, m'ont permis de voir bien nette- ment que ces animaux n'étaient en rien des Anomies et de redresser ainsi l'erreur de Rouault. Par leur aspect général les formes de Bos d’Aros et du Pont du Louër semblent bien être, soit des Dimya, soit peut-être des Pli- catules, l'impossibilité de voir les impressions musculaires empè- chant detranchercatégoriquement cette question. Les exemplaires de Villa Marbella ne présentaient pas davantage d'impressions musculaires visibles, de telle sorte que dans l'incertitude, je ne décrirai aucune des formes provenant de ces trois localités. Outre ces exemplaires imparfaits et douteux, et pour lesquels en l'absence d'impressions musculaires nettement visible, on pourrait en somme hésiter entre Dimya et Phcatula, Jai pu examiner une superbe valve de Dynna Bonneti (Cossm.) indu- bitable celle-là, provenant du Lutétien des environs de Paris, que M. Bonnet à mise à ma disposition. C'est Justement celle qui a déjà été décrite et nommée par Cossman. N'ayant pu étudier l'exemplaire de Dinyodon Schlumbergeri (Mun.) provenant du Bathonien d'Hérouvilette, nila Dimya Deshayesiana de Rouault, ni la Dynia argentea (Dall) actuelle, draguée parle « Blake » dans la mer des Antilles, c'est à cela seul que se réduisent mes documents personnels sur les Dinyidæ. Coquille. — La Dimya Bonneti (Cossm.) est représentée par une valve gauche complète et un fragment de valve négligeable. Cette valve gauche était une valve libre. En effet, d’après les exemplaires décrits et figurés par les auteurs, ainsi que d'après MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 279 ceux moins certains qui m'ont été confiés par M. Douvillé et dont il vient d'être question plus haut, les Dimyidæ (Dimya et Dimyodon) sont toujours fixées par leur valve droite et la zone de fixation très considérable s'étend aussi bien en avant qu'en arrière (Voy. fig. 57). Chez la Dimya Bonneti (Cossm.) la valve qu'on possède est à peu près arrondie, quoique, comme tous les autres Diniydæ, légèrement allongée en arrière suivant un axe oblique. Sa face extérieure présente à considérer un crochet peu marqué situé à peu près dans le milieu de son bord dorsal, et possède aussi des stries d'accroissement très visibles. Sa face antérieure très légèrement creuse (lFanimal avait comme toutes les Dimya une forme aplatie de droite à gauche) présente des côtes rayonnantes qui ne sont pas visibles sur la face extérieure. Ce caractère semble d'ailleurs commun à toutes les: Dinya connues, Ÿ compris les fausses Anonmna intustriata de Rouault. D'après Munier-Chalmas (86), le Dimyodon ne pré- senterait pas ces côtes radiales internes. Sur la Dimya Bonneti (Cossm.) les deux impressions musculaires sont très visibles ; l'une l’antérieure est plus étroite et plus rapprochée de la région cardinale que la postérieure. Ces caractères se retrouvent d'ailleurschezle Dimyodon Schlumbergeri (Mun.-Chalm) et chez les Dimya Deshayesiant (Rouault) et argentea (Dall). Toutefois ces deux derniers animaux présentent en dedans de limpres- sion de l’adducteur postérieur une autre impression musculaire décrite à part par les auteurs et que n'ai pas retrouvée chez Dünya Bonneti (Cossman).1l semble évident que l'interprétation de ces dernières impressions doit être la suivante : ou la plus postérieure correspond à la partie lisse du muscle adducteur, et l'autre à sa partie striée; ou la plus postérieure correspond au muscle adducteur, alors que l'autre correspondrait à un rétracteur postérieur du pied. Cette dernière opinion semble peu probable, les Dimya devant avoir en raison de leur fixation un pied très réduit. L'impression palléale, très nette, est dépourvue de sinus. La région cardinale est très intéressante; d'abord Le bord mar- ginal de la coquille est assez fortement épaissi et présente au voisinage de la région cardinale, en avant et en arrière, de très fines dents transversales souvent peu visibles. Au milieu de la région dorsale à peu près, ces deux bords se rejoignent, 280 R. ANTHONY. laissant entre eux une petite fossette triangulaire, dans laquelle, malgré la fossilisation, à persisté un reste de ligament. Cette disposition de la région cardinale de la Dimya Bonneti Cossm. se retrouve chez mes types incertains ainsi que chez les autres Dimya représentées par les auteurs. Seul, le Dimyodon Schlum- bergeri (Mun.-Chalm.) présente de chaque côté de la fossette ligamentaire une grande dent cardinale garnie elle-mème de petites denticulations transversales. Ce détail a son importance, comme on le verra plus loin. Parties molles. — Je serai bref sur la description des parties molles de la Dimya argentea Dall. Tout ce que nous en con- naissons à été dit par Dall (82) et est d’ailleurs, semble-t-1l, un peu insuffisant. Qu'il suffise de rappeler que d’après cet auteur, le muscle adducteur postérieur semblerait formé de deux parties nettement distinctes. Les deux lobes du manteau sont séparés, le pied est absent et les branchies, filamenteuses, comme celles des Arches, seraient réduites à une seule lame de chaque côté, chose remarquable et qui aurait besoin, dit Pelse- neer (88), d'être contrôlée à nouveau. Les autres détails de l'organisation, ne semblent pas impor- tants au point de vue des affinités où de la morphogénie. Embryogénie. Les formes jeunes des Dimyidie sonteomplètement inconnues. La forme la plus petite de Danya que je connaisse est ce spée- men provenant du Pont du Louër, de détermination incertaine. C'est une valve fixée sur un gros Foraminifère qui présente à peu près 3 millimètres de long (diamètre antéro-postérieur). Cet animal à dû se fixer à un âge très jeune. Il présente les caractères des formes adultes, avec cette particularité qu'on semble y voir, fait qui serait très intéressant, un reste des deux dents garnies de denticulations, caractéristiques des Dimyodon. Les formes adultes recueillies au même endroit ne présentent plus trace de ces dents. Physiologe. Tout ce que l’on peut dire au sujet des Dimyüdæ, cest qu’elles ont été et sont encore des formes de mers chaudes. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 281 Les Dinyodon etles Dinya fossiles les uns dans le Bathonien, les autres dans FÉocène, ont toujours été rencontrés avec les formes ordinaires des mers chaudes. La Donya argentea Dall a été draguée, comme lon sait, dans la mer des Antilles, dans la zone équatoriale par conséquent. Ces animaux vivent fixés sur des roches ou des débris de coquilles, par une de leurs valves, par conséquent en pleuro- thétisme. La zone de fixation est toujours très considérable, s'étendant également en avant et en arrière. De plus, les couches calcaires sont toutes adhérentes au substratum. La valve par la- quelle se fait la fixation est toujours, comme on la dit, Fa valve droite. L'étendue de la zone fixée fait supposer que là fixation doit être très précoce (Voy. fig. 57). Affinités. D'assez nombreuses opinions ont été émises sur la place qu'il convient de donner aux Daonyidiæe dans là classification. Rouault (50), le créateur du genre, les considère comme des formes anormales de Monomvaires, et, se basant sur la disposition de leur région cardinale ainsi que sur les or- nements extérieurs de leur coquille, 11 les place auprès des Pecten, des Spondyles et des Plicatules. Dans son traité de conchylhologie, Woodward (56) adopte cette opinion. Un peu plus tard, Fischer (83), Zittel (87) et Bernard (95) font de mème, Pelseneer (88) semble suivre la même tendance, et, tout der- mèrement enfin, Cossman (92) reprit avec beaucoup plus de ümidité, ilest vrai, opinion de Rouault. Stoliczka d'autre part, attachant avec raison une plus grande importance à la pré- sence des deux muscles adducteurs, avait voulu rapprocher les Dimya des Myochamnw. De tous les auteurs qui se sont occupés des Dinyidæ, le plus apte à donner son avis sur leur position systématique est imcontestablement Dall (82), qui seul à pu étudier anatomique- ment la Dinya argentea Dall draguée par le «Blake » et dont la coquille est absolument semblable à celle de la Dinya Deshayesiana (Rouault). Il semble par conséquent raisonnable de supposer que les caractères dont 1} à constaté la présence chez la première de 282 R. ANTHONY ces espèces aient aussi appartenu à la seconde. Or, Dall, après avoir énuméré les caractères anatomiques de la Dimya argentea, S’abstient de donner catégoriquement son avis sur ses affinités. Que convient-il, en résumé, de penser de la position systé- matique à donner aux Dinyidæ? Il est d’abord un fait important de leur organisation à re- marquer, c'est que ce sont des Filibranches. Ce simple fait suffit à infirmer l'opinion de Stoliczka et à les éloigner des Myochamidæ qui se rattachent, ainsi que nous le verrons plus loin, aux Analinidæ et sont par conséquent des Eulamelli- branches très évolués. Quant à la présence de deux muscles adducteurs, elle me semble avoir une bien plus grande importance que celle que Rouault paraît lui attribuer. Les Acéphales monomyaires provenant indubitablement d’'Acéphales diisomyaires par l'intermédiaire d'Acéphales dianisomyaires, on ne peut admettre que dans un seul groupe de Monomyaires, et, par le fait d’une anomalie dont on ne pour- rait d'ailleurs expliquer l'origine, et se transmettant hérédi- tairement, les deux muscles aient réapparu. Il ne me semble pas non plus qu'on doive avec Pelseneer (88) les considérer comme des ancêtres des Pectinidés, ces derniers ayant dû passer comme tous les Monomyaires par une forme aniso- myaire à laquelle ne parait pas conduire la fixation pleurothé- que. C’est done, à mon sens, parmi les Filibranches dimyaires que les proches parents des Dinya doivent être recherchés. I n'existe que deux familles de Filibranches dimyaires : les Trigonudæ etles Arridæ. La première, en raison de ses caractères tout particuliers, me semble devoir, jusqu'à plus ample informé, être éliminée, bien que toutefois les dents de la charnière des Dimyodon ne soient pas sans rapports avec celles des Trigonies. Reste la famille des Arcidæ. C'est d'elle, en effet, que les Dimyidæ doivent, à mon avis être rapprochées. Comme elles, les Dimyidæ sont dimvaires et filibranches, et le fait, s'il est confirmé, qu’elles ne possèdent qu'une seule lame branchiale de chaque côté alors que les Arcidæ en ont deux, ne doit pas les faire écarter de ces dernières surtout lorsqu'on sait combien MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 283 peu d'importance peut avoir ce fait au point de vue systé- matique : chez certains Lucinidiæ n°4 à qu'une seule lame branchiale alors que chez d'autres la lame branchiale externe est, comme on sait, complète. Au point de vue des dents de la charnière, on pourrait objecter que chez les Dimyidæ: on ne peut distinguer nette- ment les dents en séries caractéristiques des Acid. W peut fort bien se faire qu'elles aient disparu. D'ailleurs sur Fexem- plure de jeune Dimya (?) du Pont de Louër dont j'ai parlé, il existe un reste de plateau cardinal portant une série de petites dents, peu accentuées il est vrai, de chaque côté. Le Donyodon, d'ailleurs plus ancien que la Dimya, possède de chaque côté de son ligament une grande dent portant de petites dents transversales un peu analogues, on la dit, à celles que lon trouve chez les Trigonies. Quant au ligament qui semble formé, d'aprèsles exemplaires fossiles que J'ai eus sous les veux et d'après la figure de Dal, d’une petite portion triangulaire logée au fond de Ta fossette cardinale, ilne semble pas impossible de Le rattacher, en sup- posant l'intervention d'une réduction, à celui des Pectunculus et des Limopsis. Parmi les Arcidæ, l'animal qui se rapproche le plus des Dimya est le Limopsis, dont il existe au Muséum d'Histoire naturelle un certain nombre d'exemplaires provenant des dragages du « Talisman ». Comme les Dinmya, les Limopsis sont aplatis latéralement, quoique d’une facon moindre; leur contour sagittal est arrondi, tout en présentant une légère obliquité en arrière; l'impression de ladducteur antérieur est plus petite et plus rapprochée du ligament que celle de lFadduc- teur postérieur. Les seules différences à signaler tiendraient aux branchies dont les deux lames existent chez les Limopsis, ainsi que J'ai pu le constater après Pelseneer (88), à la pré- sence du pied et à la forme différente du ligament, toutes différences pouvant être expliquées par la fixation et ses consé- quences. En résumé, les Dimyidiæ semblent être des Arcideæ fixées par une de leurs valves, en position pleurothétique. Les Dimyo- don peuvent être au point de vue anatomique, comme au 284 R. ANTHONY point de vue géologique d’ailleurs, considérés comme les formes primitives de la famille. Morphogénie. Les Dimyidæ semblent pouvoir s'expliquer de la façon sui- vante: lArcidé qui s’est fixé en pleurothétisme parait avoir déjà possédé une forme arrondie et aplatie analogue à celle du Pectunculus où du Limopsis. La fixation par l’ensemble de la valve à eu pour effet de parfaire en quelque sorte cet arron- dissement. Chez les Arcidæ du tvpe Limopsis, les crochets étant droits et Le Higament étant disposé d'une facon à peu près symé- trique de partet d'autre, Parrondissement à pu s’acquérir très simplement par la répartition égale suivant les rayons partant de l’umbo des zones concentriques de substance calcaire. I n°v a pas 101 d’enroulement ni de pseudo-plicature comme chez les animaux qui seront étudiés plus loin. Lorsque l'arrondissement du bord cardinal est complet, on conçoit qu'au moment de lécartement des valves {surtout si cet écartement est considérable), ces dernières ne peuvent se toucher que par un point et que le ligament doit tendre à se réduire à ce point. Cette tendance se manifeste déjà chez les Pectunculus et les Lunopsis, elle s'accuse davantage chez les Dimya. Le pied devenu sans usage chez un animal fixé ne tarde pas à disparaitre. Ainsi, la fixation explique à la fois la disparition du pied et la forme arrondie, cette dernière expliquant en outre la ré- duction du ligament. Des conditions d'existence spéciale, des courants lents et con- ünus (1) par exemple, peuvent dans une certaine mesure expli- quer ce fait que les zones calcaires successives restent toujours adhérentes au substratum au lieu de se relever comme dans lÆtheria Caillaudi (Feruss) ; la forme aplatie de laquelle dé- pendrait la disparition de la lame branchiale externe dont par le (4) C'est de la même facon qu'il semble que l'on puisse expliquer, ainsi qu'on le verra plus loin, la forme spéciale de l'Ætheria Pettretinii Bet. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 289 Dall et peut-être aussi celle des dents de la charnière pourrait également être expliquée de la même facon. En résumé, il semble qu'on puisse dire que les Dinryidæ sont des Arcidæ probablement voisins des Limopsis qui ont acquis par le fait de la fixation pleurothétique leurs caractères Spéciaux. CHAPITRE Il CHAMIDÆ Je réunis sous le nom de Chamidiæ un certain nombre de genres dont les principaux ont été énumérés un peu plus haut. Peut-être ce groupement est1l complètement artificiel et doit- on plutôt au point de vue des affinités naturelles mettre dans une famille les Chama seules, et dans une autre famille toutes les autres formes plus anciennes telles que les Dicerus, Heterodiceras, Toucasia, Requiena, ele... ete... C'est l'opinion de quelques auteurs. La question, en tous cas, est assez difficile à juger d’une facon définitive, par ce fait que toutes Les formes que l’on réunirait dans ce deuxième groupe sont des formes exclusivement fossiles et que leur organisation ne peut, faute d'éléments de comparaison, être rapprochée de celle des Chames. On est obligé de S'en tenir à la comparaison seule des ornements de la coquille, du higament et des dents de la charnière. Or, précisément, le ligament et les dents de la charnière sont de même {vpe dans les deux groupes. Il n°v à que les ornements de la coquille qui diffèrent, et encore, sont-ils rares les cas où, chez les formes fossiles, on peutles voir. Mais Je ne crois pas qu'on doive attacher à ces ornements une trop grande importance : les animaux réunis sous le nom de Vénéri- dæ, par exemple, ont des ornementations bien différentes et on ne peut cependant les séparer en raison de la forme des dents de leur charnière. Ces différentes raisons m'ont fait grouper dans la même famille les Chames et les Diceras sous 286 R. ANTHONY le nom de Chanmidæ. On peut leur attribuer les caractères communs Suivants : Mollusques acéphales, dimyaires, fixés en position pleurothé- tique, tantôt par l’ensemble d’une de leurs valves, tantôt par le côté antérieur seulement; suivant les cas leur plan sagittal est par conséquent parallèle ou oblique au plan de fixation. Dans les cas où leur plan sagittal est horizontal, ils sont fixés dans des polypiers à la facon d'un nid d'oiseau dans des branches (Chama brassicaReeve). Ce sont des Acéphales marins, de forme arrondie, l'arrondissement étant obtenu par une sorte d'enrou- lement en hélice plus ou moins serrée. La charnière présente deux dents cardinales à une valve avec une fossette intermé- diaire, une seule où deux dents cardinales à l’autre valve. Les dents latérales antérieures ont toujours disparu ; les dents laté- rales postérieures existent. On peut diviser cette famille en deux tribus : les Chamineæe, les Diceralineæ. Cette réunion des Chaminæ et des Diceratinæ dans une seule et même famille une fois admise, une autre question se pose, c'est à savoir si les Chames et les Diceras font partie d'une seule et même lignée. La plupart des auteurs résolvent cette question par la négative, et je crois qu'ils ont raison. À ce point de vue, en effet, la question de l’ornementation peut entrer en ligne de compte, et, elle est très différente chez les Chames et les Diceras: de plus enfin, argument capital, les Chames tout en élant au point de vue de l'adaptation à la fixation pleu- rothétique moins évoluées que les Diceras et surtout les Re- quiena, ont au point de vue géologique fait leur apparition beaucoup plus tardivement qu'eux. En effet, les premières Chames on fait leur apparition à la fin du Crétacé et existent encore aujourd'hui, tandis que les Dicératinés constituent un phylum bien distinct qui à débuté à la fin du Jurassique et n'a pas dépassé le Crétacé inférieur. Les Chames peuvent en somme être considérées, et c'est l'opinion la plus généralement admise, comme les formes de début d’une nouvelle série de Dimyaires fixés en position pleurothétique et arrondis par enroulement, qui est en train de se constituer. Elles semblent MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 287 provenir de la même souche que celle qui à donné, à la fin du Jurassique, la série dont les Diceras ont marqué lorigine. Dans ce chapitre, j'étudierai, aussi complètement que je le pourrai et que cela sera nécessaire pour le point de vue auquel Je me place, les Chaminæ actuelles (Chama). Historique. — Les Chama ne sont guère connues que par leur coquille ; leur anatomie n'a été que très peu étudiée, leur embrvo- génie et leur physiologie sont presque entièrement à faire. Au point de vue anatomique on doit signaler Le livre de Poli (91) sur les Mollusques des Deux Siciles, et qui contient quelques indications sur lanatomie des Chames. Signalons aussi les quelques renseignements anatomiques trop suecincts que don- nent à leur sujet les traités de malacologie : le moins bref à ce point de vue est celui de Woodward (56). Différents auteurs enfin fournissent sur elles quelques renseignements de détails, tels T. Barrois (85), à propos de l'appareil byssal, Grobben, à propos des glandes péricardiques, Lacaze-Duthiers, à propos de lappareil génital, Ménégaux (90), à propos de l'appareil err- culatoire. Au point de vue embrvogénique les seuls renseignements que Je connaisse viennent de Jackson (90) et de F. Bernard (97). Sur leur mode de vie et sur leur physiologie spéciale enfin, on n'a que peu de détails, et les seuls renseignements précis que j'aie pu trouver à ce sujet (sur leur mode de vie exclusi- vement) émanent de Saville-Kent (93) et de François (89). Étant donné que je n'ai point l'intention de me placer dans ce travail au point de vue de la nomenclature, je ne décrirai pas ici, je n'énumérerai même pas les nombreuses espèces actuelles du G. Chama, renvoyant pour cela aux traités spéciaux de détermination, comme Reeve où Martin et Chemnitz, par exemple. A ce propos toutefois, je me vois dans l'obligation de signaler, ayant malheureusement eu à en faire l'expérience, l'insuffisance des monographies de ce genre contenues dans les traités pré- cités et l'intérêt qu'il y aurait à faire actuellement une revision complète du G. Chama, au point de vue systématique. Les espèces sur lesquelles ont plus spécialement porté mes recherches sont les suivantes : 288 R. ANTHONY Chama lazarus Lmck. Chama brassica Reeve. Chama 1ostoma Conr. La première existe en grand nombre dans les collections du Muséum (provenant de la Guadeloupe) ; les deux autres ont été rapportées en assez grand nombre aussi par M. Ch. Gravier, de sa mission dans le golfe de Tadjourah. Les collections du Muséum en possèdent également un certain nombre d'exemplaires pro- venant des voyages de MM. Jousseaume et Coutière, dans les mêmes l'ÉLIONS. Morphologie. Coquille. — Chez les Chames, la fixation se fait tantôt par une valve, tantôt par l’autre. Dans la plupart des espèces, la valve fixée est la valve gauche, mais dans quelques autres, la fixation se fait par la valve droite. En tous cas, dans la même espèce, c'est toujours la même valve qui est fixée et il n°v à pas de variations mdividuelles sur ce point (1); de plus, quelle que soit la valve qui est fixée, droite ou gauche, elle possède toujours des caractères déterminés qui ne sont donc pas propres à la valve droite ou à la valve gauche, mais à la valve libre ou à la valve fixée. Il sera revenu, à propos des dents, sur ce caractère extrêmement important. La fixation peut se faire suivant deux modes, soit par la région antérieure de la coquille seulement, comme chez les Chama Ruppellü Reeve., et les Chama iostoma (conr.), par exemple, et alors le plan sagittal est obliquement incliné sur le plan de fixation; soit par toute la surface de la valve comme chez les Chana bras- sica Reeve, par exemple, et alors le plan sagittal est parallèle au plan de fixation. Dans ce dernier cas, toutefois, la fixation n’est pas aussi intime que dans le premier, et la CAama, au lieu d'être appliquée et collée pour ainsi dire au substratum plan, est fixée à d’autres coquilles, à des branches de polypiers morts, S'y tenant un peu à la facon d’un nid d'oiseau dans un 4) D'après Woodward (56) dans certaines espèces de Chames la valve fixée serait indifféremment la droite ou la gauche ; je n’ai jamais rien con- staté de semblable. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 289 buisson. Dans ce dernier cas, et lorsque Le plan sagittal est à peu près horizontal, le contour valvaire est arrondi. Dans le premier cas, au contraire, c’est la surface antérieure fixée seule qui tend à s'arrondir et le bord qui la sépare de la zone postérieure non fixée (qui est plus ou moins perpendicu- laire à la zone fixée) décrit une spirale telle que celle qui est représentée sur la figure. Dans ces conditions, le contour valvaire, au lieu d’être arrondi, présente une forme allongée dorso-ventrale avec pointe ventrale correspondant au sommet de l'angle dièdre constitué par les régions antérieure et postérieure. L'uneet l’autre valves sont généralement Fig. 32. — Région anté- ALORS ns - rieure fixée de Chama épaisses comme dans la Chama brassica ;ostoma Conr.: 1e bord Reeve, par exemple ; mais dans les cas es où la fixation se fait par la région anté- rieure et de la région rieure seule, la zone fixée est en général PoStérieute verticale. amincie. Les ornements consistent en stries d'accroissement très con- sidérables portant le plus souvent des épines très irrégulières, aplaties, tuberculeuses ou feuilletées; sur les individus qui attei- onent une taille considérable, les ornements extérieurs de la coquille sont souvent, soit usés par l'action polissante des flots de la mer (Chama Ruppelli Reeve), soit cachés par des polypiers, des tubes d'Annélides, des fragments d'Éponges vivant avec les Chames sur les récifs, et qui rendent souvent la détermination spécifique de ces animaux extrêmement difficile. Les stries ra- diales visibles sur les formes jeunes, comme il sera dit plus loin, ne le sont pas le plus souvent sur l'adulte. Le mécanisme de leur disparition sera expliqué au paragraphe de lembrvyo- génie. Extérieurement comme intérieurement, les Chames pré- sentent des couleurs variées souvent très vives qui changent d’une espèce à l'autre. Des accidents du substratum, la pression réciproque des indi- vidus les uns contre les autres, l'inclinaison du plan de fixation peuvent, dans certains cas, altérer la pureté de la forme arrondie que prennent les Chames, suivant leur surface de fixation. ANN. SC. NAT. ZOOL. At 6 Le) 290 R. ANTHONY Des deux valves des Chames, celle qui est fixée est générale- ment plus profonde, surtout dans la région du crochet, que la valve libre, qui est plus aplatie, tendant en quelque sorte à prendre la forme operculaire. Si on considère par sa face extérieure une valve fixée de Chama brassica Reeve, par exemple, après l'avoir soigneu- sement débarrassée de toute la gangue qui la recouvre, on s'aperçoit que son crochet est fortement enroulé en avant et en hélice, c’est-à-dire nettement prosogyre. Cet enroulement en hélice du crochet est absolument comparable à celui des Isocardia où mieux encore des Diceras, avec cette différence que le pas de lhélice est chez les Chama beaucoup moins considérable que chez ces derniers. Si, toujours par sa face extérieure, on considère une valve libre du même animal, on s'aperçoit que son crochet est exactement enroulé comme celui de la valve fixée; mais l'hélice suivant laquelle se fait cet enroulement, est extrèmement surbaissée, tellement surbaissée même qu'elle tend à la spire. Si maintenant, enfin, on regarde en vue postérieure les deux valves coaptées du même animal {Voy. fig. 33) et qu'on suive l'interligne valvaire depuis le point de terminaison postérieure du ligament /, on s'aperçoit que les bords des valves, suivant lesquels s'insère ce dernier, d'abord au contact l’un de l'autre, s'écartent à partir d'un certain point /', pour suivre les lignes d’enroulement hélicoïdal du crochet. En suivant ces lignes, on aboutit aux points » et m', c'est-à-dire aux crochets eux-mêmes. A l’intérieur de l'angle #21 /' m° les bords antérieurs des valves droites et gauches arrivent au contact. Si au lieu de s'adresser à la Chama brassica Reeve on s'adresse à Ta Chama iostoma Conr., c’est-à-dire à une Chame chez qui la fixation se fait par la région antérieure seule, la disposition est absolument la même, avec cette différence que le crochet de la valve fixée s’enroule à plat sur le substratum. La charnière des Chames est très particulière : la valve fixée, qu'elle soit droite ou gauche, présente toujours deux dents cardinales séparées par une fossette assez profonde. Pour se conformer aux notations de F. Bernard et de Munier- Chalmas, on doit désigner ces dents par les chiffres 2 et 4. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 291 La dent 4 est peu marquée et se trouve immédiatement en avant de La nymphe ligamentaire ; la dent 2, au contraire, est très puissante et sa face dorsale, qui forme la paroi ventrale de la fossette, est creusée de sillons assez nets dirigés ventro-dorsa- lement d’une valve à l’autre avec une légère obliquité d'arrière en avant. Félix Bernard désigne cette dent # des Chames par * le signe # #4. Celte désignation me semble pour le cas parti- Fig. 33. — Schéma destiné à montrer l'enroulement des crochets et la division liga- mentaire chez la Chama brassica Reeve.— 1, valve libre; 2, valve fixée; 3, ligament ; 4, strie d’accroissement. culier d'une précision trop grande, étant donné qu'il est difficile de savoir quelle partie de la lamelle # lui donne naissance. Ces dents sont supportées par un plateau cardinal assez bien développé. Outre cet appareil cardinal, il existe une dent latérale posté- rieure (L P 2) qui, sur certains individus, est parfois très peu marquée. Il n’y a pas de dent latérale antérieure, bien que F. Bernard (97) en signale une existant parfois à la valve libre. L'étude de lembryogénie des Chames, ainsi que celle de la morphologie des Dicératinés ne semblent pas corroborer celte opinion ; ce qu'il a pris pour une dent latérale antérieure est, sans aucun doute, la dent cardinale { dont un léger vestige existe parfois chez certains exemplaires de Chames. La valve libre présente une seule dent cardinale, la dent 3, qui se loge dans la fossette précitée. 292 R. ANTHONY Cette dent est très forte, parfois recourbée dorsalement et présente sur sa face ventrale des saillies et des sillons qui épou- sent leurs homologues de la face dorsale de la dent 4 à la valve fixée. F. Bernard reconnaît dans cette dent 3 deux subdivisions 34 et 30. Pour la même raison que précédemment, nous ne croyons pas devoir imiter cette précision trop grande. Il existe une dent latérale postérieure L P 1, qui semble sou- vent être dans la continuation de la dent cardinale. La formule dentaire du G. Chama serait donc la suivante : LA ce LP V. fibre. OMIS : V. fixée. OR ANIME Cette formule ne comporte pas, comme on le voit, de dent latérale antérieure, et celle que F. Bernard désigne ainsi ne peut être, à mon avis, qu'une dent cardinale. La question de sa signification sera d’ailleurs de nouveau agitée au cours de ce chapitre. Les impressions des muscles adducteurs sont grandes, ovales, régulières, légèrement déchiquetées, persillées sur leur bord interne; celle du muscle antérieur se prolonge sur la face ventrale de la dent 2. L'impression palléale est entière, ne présentant qu'un très léger vestige de sinus. Ligament. — Le ligament des Chames est externe à la façon de celui des Cardium quoique présentant néanmoins une très. légère tendance à devenir interne. Il ressemble en cela à celui des Tridacnes. Si l'on considère à nouveau la figure 33 qui représente une coquille fermée de Chama brassica Reeve en vue postérieure et qu'on suive le ligament en remontant en quelque sorte son cours depuis sa terminaison /, on s'aperçoit qu'en /'ilse divise et que ses deux branches divergentes, suivant les deux bords antérieurs des crochets enroulés en hélices, abou- üissent respectivement aux points #7 et m' terminaisons des ero- chets. IT est inutile de dire, je pense, que la partie du ligament seule fonctionnelle est la partie ///; les parties ml! et m'T° sont les reliquats du Higament aux différents âges, comme on le verra plus loin. Elles ont d’ailleurs très souvent disparu, soit empor- tées par l’action corrodante des flots, soit recouvertes par les MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 293 différentes productions calcaires qui enrobent la coquille chez un très grand nombre d'espèces. En coupe transversale, le ligament à la forme d'un arc dont les deux extrémités reposent sur les valves. Ces extrémités s'étendent surtout dans la région postérieure, où la surface d'insertion du ligament prend une forme élargie avec une légère pointe ventrale (Voy. fig. 34). En coupe sagittale, le ligament parait formé des deux parties constituant tous les ligaments d'Acéphales : une partie fibreuse Fig. 34. — Région cardinale de Chama brassica Reeve, valve gauche. — 2, dent cardinale 2; 4, dent cardinale 4; p, dent latérale postérieure ; /, ligament en coupe sagittale. dorsale de couleur brune, constituant le point fixe dans les mouvements de la valve operculaire, et une partie élastique ventrale, incrustée de calcaire, de couleur nacrée, et présentant la structure connue des ligaments élastiques d'Acéphales ; c'est cette deuxième partie qui constitue l'organe actif de louver- ture des valves. Cette partie élastique s'arrête moins loin en arrière que la partie fibreuse, au point où l'élargissement de la surface d'insertion commence. La composition du ligament est donc constante de / en / (Voy. fig. 33). Au delà, c'est-à-dire dans les régions #/° et nl où il est dédoublé, sa constitution est difficile à étudier. Fait important à signaler, il n'y a pas de partie fibreuse ventrale antérieure comme chez la plupart des autres Acéphales. Sr cette partie existe, elle ne peut être que dans le voisinage du crochet, par conséquent là où le higament est divisé. Manteau. — Les deux lobes du manteau des Chames sont réunis sur tout leur pourtour, ressemblant en cela à celui des Cardium et mieux encore des Tridacnes par exemple. Sur la 294 R. ANTHONY zone de soudure répondant aux bords libres des valves, on rencontre trois ouvertures. La première en partant de l'extré- mité antérieure de l'animal se trouve située immédiatement en dessous du muscle adducteur antérieur qui la limite en haut; cest l'ouverture dite pédieuse, quoique vraisemblablement elle ne doive guère servir chez les Chamidés au passage du pied, cet organe élant très réduit et fonctionnant probablement très peu; sur les animaux adultes de 4 à 5 centimètres de diamètre, elle mesure environ un centimètre de longueur. Après elle, mais située à mi-chemin à peu près de la distance séparant le milieu de l'animal du bord inférieur du muscle postérieur, se trouve l'orifice inspirateur qui se présente sous la forme d'une fente à peu près arrondie de 5 à 8 millimètres de long et dont les bords, sur les animaux ayant séjourné dans les liquides conservateurs, sont invaginés en dedans. Vient enfin l’orifice expirateur qui possède une forme plus réguliè- rement circulaire et dont le diamètre est encore inférieur à celui de l'orifice précédent ; 1l est limité supérieurement par le bord inférieur du muscle postérieur et ses bords étaient égale- ment invaginés en dedans sur les exemplaires que j'ai étudiés. Ces deux derniers orifices représentent les deux siphons réduits à leur plus simple expression (Voy. fig. 35). La lame qui réunit les deux lobes du manteau et qui est interrompue par les orifices ci-dessus décrits, la commissure en un mot, est recouverte de courts tentacules tuberculiformes. Elle est limitée par deux bords saillants qui se réunissent et se confondent au niveau des adducteurs. Les deux orifices inspirateur et expirateur ont leurs bords garnis de denticulations plus fines pour le premier que pour le second. Leur face externe, celle qu était imva- ginée sur mes exemplaires, est lisse ; leur face interne égale- ment; toutefois leur base est intérieurement garnie de ten- tacules tuberculiformes disposés pour l'orifice inspirateur suivant une seule série, un peu épars pour lorifice expi- raleur. Par son pourtour ventral et suivant une ligne qui suit inté- rieurement le bord saillant précité, le manteau s’insère sur la coquille par l'intermédiaire de fibres musculaires lisses; c’est MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 295 l'impression palléale qui présente en arrière, comme il a été dit, un très léger sinus. Du manteau dépend souvent une double lame dorsale très mince, s'insinuant entre les dents cardinales de la charnière, el, qui comprend quelquefois une cavité close entre ses feuillets. C'est la lame intercardinale dont la présence semble inconstante et la disposition très variable. Des deux lobes du manteau, celui qui correspond à la valve fixée est toujours plus développé que celui qui répond à la valve libre. La chose est naturelle, puisque le manteau suit, comme l'on sait, les inflexions de la coquille qu'il sécrète. La musculature du manteau et plus particulièrement de sa commissure, est très compliquée. Je l'ai étudiée sur un exem- plaire de Chama iostoma Conr. En faisant abstraction des muscles adducteurs qui, en raison de leur importance, feront l'objet d'un paragraphe spécial; les muscles propres du man- teau localisés dans la commissure peuvent être répartis en trois catégories : a. Muscles radiaux. 6. Muscles longitudinaux (antéro-postérieurs). y. Muscles circulaires (entourant les orifices). 2. Ce sont les plus superficiels et ce sont eux qui par leurs insertions déterminent l'empreinte palléale de la coquille. Is sont disposés en série suivant une ligne courbe continue, depuis le bord ventral du muscle adducteur antérieur jusqu'au bord ventral du muscle adducteur postérieur, près duquel à ligne courbe subit, comme il à été dit, une légère inflexion, vestige du sinus palléal. Au niveau de cette inflexion qui se trouve située exactement en face de lorifice expirateur, les fibres musculaires radiales du manteau, plus nombreuses et plus longues, représentent un reste du musele rétracteur des siphons. Ces fibres radiales sont de deux sortes, les unes externes, peu nombreuses, se dirigent vers le bord proprement dit du manteau dans lequel elles se perdent, les autres internes gagnent la commissure palléale, S'intriquant parfois avec celles du côté opposé dans les ré- gions où 1l n'y à pas d’orifices. Dans la région des siphons, elles n'atteignent pas la ligne médiane. 296 R. ANTHONY B. Les muscles longitudinaux de la commissure palléale débutent en avant par deux faisceaux qui partent ensemble de la face antérieure du muscle adducteur antérieur et au voisi- nage de laquelle ils s’insèrent sur les valves: ils passent de part et d'autre de l'ouverture pédieuse. Arrivés en un certain point, à mi-chemin de l'ouverture pédieuse et de l'orifice Inspirateur, sur l'individu que j'ai observé, chacun des deux faisceaux se divise en deux parties, les parties internes s’entrecroisant et Les parties externes suivant leurs directions premières. Bientôt la partie interne du faisceau gauche se réunit à la partie externe du faisceau droit et inversement. Les deux faisceaux ainsi reconstitués longent les bords de l’orifice inspirateur au delà duquel ils se croisent à nouveau. Avant d'arriver à cet orifice ils reçoivent des faisceaux de renforcement dépendant des muscles radiaux, dont celui répondant à la valve operculaire est le plus développé sur l'animal que j'ai sous les yeux. Au delà de lorifice inspirateur, c'est-à-dire à partir du point où se fait le deuxième entrecroisement, la disposition est très compliquée, par suite de l'insertion de la membrane en lyre dont 1l sera parlé plus loin. Les deux faisceaux que nous avons suivis depuis leur origine en avant, semblent ne plus exister et être remplacés par un faisceau unique partant du point d’entrecroisement, et qui bientôt se divise en deux branches entourant l'orifice expirateur ; 1l passe ensuite en arrière du muscle adducteur postérieur et vient s'insérer sur les valves. y. Les muscles circulaires sont très réduits et constituent des sortes de sphincters superficiels entourant les orifices inspira- teurs et expirateurs. L’orifice pédieux m'a semblé en être dépourvu. Les muscles siphoniens des Chames sont done, comme on peut s'en rendre compte, réduits à leur plus simple expres- SION. À cet ensemble de faisceaux musculaires doivent être ajoutés ceux de la membrane en lyvre dont il sera parlé à propos des branchies. Toutes les fibres musculaires dépendant du manteau sont lisses. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 297 Muscles adducteurs. — Les muscles adduecteurs sont très con- sidérables, plus en général, que chez les autres Acéphales, par rapport à la taille de l'animal: leur section qui est très étendue a généralement la forme d'un ovoïde à grosse extrémité ven- trale et dont l'extrémité dorsale la plus effilée forme parfois pour le muscle antérieur un léger crochet dirigé en dedans. La section de ce muscle adducteur antérieur est, en général, sans que cela soit constant, plus étendue et de forme plus allongée que celle du postérieur. Les surfaces d’insertions de ces muscles sont très marquées sur la coquille ; elles sont à peu près planes, formant même par-- fois un relief légèrement convexe ; sur la valve fixée, la partie en crochet de l'impression antérieure empiète souvent sur la partie antéro-externe de la dent cardinale 2. Souvent du côté central l'impression musculaire parait plus où moins déchi- quetée, et, dans cette région du muscle, les faisceaux de fibres sont écartés, séparés par du tissu conjonctif; sur les coupes sagittales de l'animal qui sont transversales pour le muscle, cette disposition se traduit par un persillage très nettement visible que l’on retrouvera d'ailleurs plus accusé encore chez les Æthéries, où, sur l'impression coquillière, il simule une fine dentelle. Les deux muscles adducteurs sont souvent dorsalement très rapprochés l'un de l’autre, conséquence naturelle de la forme arrondie de l'animal {Voy. fig. 35). Comme chez les Æthéries et les autres formes arrondies telles que beaucoup de Lucines, l'adducteur antérieur est tout entier situé ventralement par rapport à la bouche (Voy. fig. 35). Comme tous les adducteurs d'Acéphales, chacun de ces muscles comprend deux parties, lune périphérique par rapport au centre de figure de l'animal, nacrée et qui peut être consi- dérée comme un épaississement des muscles radiaux du man- eau avec lesquels elle se continue, l'autre centrale, d'aspect opaque; ces deux parties macroscopiquement très distinctes ne sont cependant pas séparées par du tissu conjonctif, comme cela arrive pour quelques types, ceux notamment chez lesquels la différence de structure est considérable, comme le Pecten {Voy. à ce sujet: R. Anthony. Note sur la forme et la 298 R. ANTHONY structure des muscles adducteurs des Acéphales. Bull. Soc. Philom., 1904). Au point de vue de l'anatomie microscopique et de lhisto- logie, j'ai examiné avec beaucoup de soin à l’aide des procédés indiqués au chapitre I (plus spécialement dissociation à l'acide azolique à 20 p. 100), les muscles provenantdes Chama iostoma Conr., rapportés du golfe de Tadjourah par M. Ch. Gravier el fixées par lui au liquide de Perenyi. Lorsque j'en ai le loisir Fig. 35. — Coupe sagittale de Chama brassica Reeve. — 1, bouche; 2, anus ; 8, pied rudimentaire ; 4, muscle adducteur antérieur; 5, muscle adducteur postérieur; 6, cœur; 7, orifice inspirateur; 8, orifice expirateur. En avant du muscle adducteur postérieur est le ganglion viscéral ; à la base du pied est le ganglion pédieux. el pour des recherches générales, c'est, de préférence, sur des animaux frais que j'étudie la structure des fibres muscu- laires des adducteurs, évitant les fixations et plongeant direc- tement le tissu frais dans l'acide azotique à 20 p. 100. En dépit de la fixation préalable au Perennyi et du séjour prolongé dans l'alcool à 70°, J'ai, dans le cas particulier, pu nettement découvrir dans les fibres opaques la striation en mosaïque, si nette chez la plupart des autres Acéphales, et dont j'ai fait l'an dernier une étude raisonnée (Voy. Indic. bibl. précédente) qui a été ensuite poussée plus loin au point de vue des détails par Marceau; les fibres nacrées sont absolument lisses, et, au sur- plus, la structure des muscles des Chames est identique à celle que l’on trouve chez beaucoup d’autres Acéphales, notamment chez le Cardium edule Linn. I n'y à done pas lieu d'y insister. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 299 Quant aux autres parties de l'appareil musculaire constituées par les muscles moteurs du pied, elles vont être décrites à propos de ce dernier organe. Pied. — Le pied est très réduit chez les Chames, mais c'est dans cette réduction même que réside tout l'intérêt de son étude. Je l'ai étudié dans les trois espèces dont il à été question plus haut et où il diffère peu d’ailleurs. In'estreprésentéque parune petite languette musculaire située sur le bord antérieur de la masse viscérale qui présente exté- rieurement, sur mes échantillons, des plissements transversaux nombreux et assez profonds, dus vraisemblablement à la rétrac- lion sous l'influence de réactifs fixateurs ou conservateurs. A l'état vivant, cette languette doit être allongée et flexueuse, rappelant peut-être d'un peu loin, quoique plus courte, le pied des Lucines. Elle doit être considérée comme représentant le seul vrai reste fonctionnel du pied. À ce pied rudimentaire se ratta- chent un certain nombre de muscles, rudimentaires également, et qui représentent, sans aucun doute, les restes d'un appareil musculaire jadis plus développé. Suivant les individus, ïls sont plus ou moins réduits, et je vais les décrire dans les cas où ïls atteignent leur maximum de développement. «. Rétracteurs postérieurs du pied.— Sur la face antérieure du muscle adducteur postérieur, dans la région qui le séparerait en deux parties égales, l'une dorsale, l'autre ventrale, on voit un assez gros faisceau musculaire qui le rencontre suivant un angle presque droit (Vox. fig. 35). Les fibres de ce faisceau s'écar- tent lorsqu'elles s'approchent du muscle adducteur et se disposent suivant une sorte de cône très aplati, les plus péri- phériques se perdant à sa surface et les centrales, qui sont les plus nombreuses, s’'insinuant entre les faisceaux du muscle. À partir du moment où ces fibres musculaires entrent dans le muscle, elles s'écartent davantage les unes des autres, s’amin- cissent ; le faisceau est comme laminé, et, remarquable exemple d’une loi que j'ai émise ailleurs, elles sont, à partir de leur pénétration dans l’adducteur, complètement transformées en fibres conjonctives qui se perdent insensiblement par alté- nuation progressive avant d'avoir atteint la face postérieure du muscle adducteur. Après sa sortie de l'adducteur postérieur, le 300 R. ANTHONY faisceau musculaire décrit, qui n’est autre chose que les deux rétracteurs postérieurs droit et gauche du pied réunis, s'étend le long du bord postérieur de la masse viscérale, donnant à droite et à gauche des fibres rares et distantes qui, sur le bord antéro-inférieur de cette masse viscérale, en dessous du pied, s'entrecroisent et se confondent. Très espacées en arrière, elles se rapprochent et deviennent plus fournies à mesure que l'on se dirige vers le bord antérieur de la masse viscérale. De ce même muscle rétracteur pos- À térieur dépendent aussi quel- ques fibres qui viennent se terminer le long du bord Fig.36.— Musculature du pied chez la Chama Lazarus Lmck. — 1, branchie; 2, pied; 3, rétracteur antérieur ; 4, rétracteur pos- téricur ; >, rétracteur supérieur (Profil). 7. postérieur de la languette 5 (Voy. fig. 36). . Telle est, chez la Chame, la constitution rudimentaire du muscle rétracteur posté- rieur du pied, si développé chez les Acéphales euthéti- ques. Pour être complet, 1l est nécessaire d'ajouter que sur certains exemplaires on voit, sur la masse viscérale, quelques fibres dépendant, morphologique- ment, du rétracteur postérieur du pied et qui n’atteignent pas le muscle adducteur postérieur. Ce sont des fibres du musele postérieur qui ont perdu leur portion aborale, et elles se termi- nent sur les côtés de la masse viscérale par atténuation pro- gressive. Il y a de ces fibres de part et d'autre (dorsalement et ventralement) du rétracteur postérieur du pied proprement dit, c'est-à-dire de part et d'autre de celles qui vont jusqu'au muscle adducteur postérieur. 6. Rétracteur supérieur du pied. — Ce muscle est encore plus réduit que le précédent. Le long du bord postérieur de la masse viscérale, à la réunion de son tiers inférieur avec son tiers moyen à peu près, existe une petite languette, longue de 3 milli- mètres environ et large de 2, formée de fibres musculaires diri- gées dans le sens de sa longueur. Parmi les fibres qui prennent naissance dans cette languette, les unes, les plus postérieures, MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 301 comme on l'a vu, vont faire partie du muscle rétracteur posté- rieur, les autres plus nombreuses croisent en diagonale celles du muscle précédent et se dirigent du côté de la bouche. Parmi elles, un faisceau plus important que les autres se dirige vers la commissure buccale, mais ne semble pas, dans la plupart des cas, aller jusqu'à la coquille pour s'y insérer. Ces fibres sont les restes du musele rétracteur supérieur du pied et, comme on le verra plus loin, à propos des branchies, la languette 5 n’est que l’amorce sur la masse viscérale de la membrane interbranchiale. y. Rétracteur antérieur du pied. — C'est le plus réduit de tous les muscles du système pédieux. Sur la face antérieure de la masse viscérale on peut apercevoir quelques rares fibres qui, au niveau du pied, commencent à devenir plus denses et finissent par constituer un feutrage assez épais. La plupart de ces fibres, les plus centrales se déviant de leur direction, pénètrent dans le pied et y constituent les fibres longitudinales de cet organe, les autres continuent leur direction et forment ses premières fibres transversales. En coupe, le pied parait donc être consti- tué de fibres transversales et de fibres longitudinales, mais tel- lement enchevêtrées les unes avec les autres à l'extrémité de l'organe, qu'il est difficile d'établir leur disposition précise. L'appareil pédieux est donc, comme on le voit, très réduit chez les Chames, et son développement semble, en général, à peu près égal des deux côtés. Cette description se rapporte aux individus chez lesquels j'ai rencontré l'appareil pédieux le plus développé. Mais il peut x avoir tous les intermédiaires entre labsence absolue, d'une part, de fibres dépendant des muscles pédieux et recouvrant la masse viscérale, le pied rudimentaire et la languette 5 restant seules présentes, et, la disposition ci-dessus décrite d'autre part, C'est chez la Chama lazarus Lmcek. que j'ai d'ordinaire ren- contré l'appareil pédieux le plus développé. C'est chez la Cham iostoma Reeve que Je lai trouvé le plus réduit d'une façon presque constante. Toutes les fibres musculaires dépendant du pied sont lisses. Ainsi que T. Barrois (85), je n'ai pas rencontré de glande byssogène rudimentaire. 302 R. ANTHONY Appareil respiratoire. — L'appareil respiratoire est composé de deux branchies dont la direction générale est un peu différente de celles que ces organes affectent chez les Acéphales du type le plus commun, comme le Cardium, par exemple. En effet, l'ex- trémité antérieure de chaque branchie semble s'être éloignée du bord ventral du muscle adducteur antérieur pour se diriger du côté du crochet. Il en résulte que la branchie, au lieu d'avoir Fig. 37. — Organisation externe de Chama iostoma Receve. Une fenêtre a été pra- tiquée dans un des lobes palléaux pour montrer la direction dorso-ventrale de la branchie et le pied rudimentaire. — 3, pied; #, muscle adducteur antérieur ; 5, muscle adducteur postérieur; 13, palpes labiaux; 14, branchie. une direction antéro-postérieure, présente ici une direction sensiblement dorso-ventrale (Voy. fig. 37). Au lieu de débuter, comme c'est ordinaire chez les Acéphales, dans l’espace situé entre les deux palpes labiaux, elle débute en arrière d'eux, et si, la lame interne a encore une petite partie de son extrémité la plus antérieure logée entre les palpes, la lame externe n’a plus aucun rapport de contiguïté avec eux. Il sera, d’ailleurs, revenu un peu plus loin sur cette disposition. Les connexions des branchies avec les parties anatomiques avoisinantes sont les suivantes : d’abord l'axe des branchies est MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES +09 parcouru dans toute sa longueur par un gros faisceau qui suit dans la région dorsale le bord interne de sa lame externe et vient finalement s'insérer à la coquille auprès du muscle adduc- teur postérieur ; c'est le suspenseur de la branchie. Elle est rat- tachée en outre à la masse viscérale par un repli ou meso triangulaire analogue à celui qui existe chez tous les autres Acéphales et qui va de l'axe branchial à la paroi de la masse viscérale. Le bord postérieur libre de ce meso est occupé par le nerf branchial comme chez les autres Acéphales (Voy. fig. 39). Une chose remarquable à propos de l'appareil respiratoire des Chames est cette tendance qu'ont les branchies de ces animaux à rompre leurs connexions avec les parties avoisi- nantes, à devenir complètement libres et flotter dans la cavité paliéale, comme cela se produit d’ailleurs aussi dans un eroupe d'Acéphales à tous points de vuetrès différent, celui des Aviculidés. Cette disposition tend à s'établir chez l'Avicula radiata Desh. et, chez les Pinna elle atteint son maximum de netteté. Chez un Cardium edule Linn. au contraire, par exemple, chaque branchie est reliée en dedans à la masse viscé- rale en avant et à son homologue en arrière, en dehors à la face interne du lobe palléal. Lorsque la zone d'union de la branchie droite à la ranchie gauche est suffisamment étendue en lar- geur, elle peut prendre le nom de lame interbranchiale. Cette lame interbranchiale existe très développée en largeur chez les Tridacna et les Hippopus. L'ensemble de ces connexions forme avec la surface des branchies une sorte de cloison très comphi- quée qui sépare en deux parties la chambre palléale : la chambre palléale proprement dite (ventrale) et Ta chambre rétrobran- chiale (dorsale). Cette cloison se continue par la lame de sépa- ration des siphons. Si l’on considère une Chama appartenant à l’une des espèces que j'ai étudiées, on voit que la cloison formée par l’ensemble des branchies et de leurs connexions présente fréquemment des solutions de continuité. La plus importante est celle que présente souvent la lame d'union du feuillet réfléchi de la lame interne avec la bosse viscérale; la lame d'union du feuillet réfléchi de la lame externe avec le lobe palléal ou la face antérieure de lad- ducteur postérieur en présente également souvent une autre 204 R. ANTHONY interrompue dans certains cas par un ou deux petits ponts membraneux. Si ces deux solutions de continuité existent et se prolongent tout le long des bords latéraux des branchies, si en même temps la zone d'union interbranchiale, qui chez les Chames est très étroite, a disparu (Voy. fig. 39), il arrive que les branchies se trouvent absolument libres des parties avoisinantes et flottent dans la cavité palléale, n'étant plus reliées au reste du corps que par leurs extrémités antérieures et leur méso, comme cela existe chez les Pinna. La solution de continuité qui apparaît la première semble être l’interne, entre le feuillet interne et la bosse viscérale en avant; celle qui se produit ensuite est celle par le fait de laquelle la branchie rompt ses connexions avec le lobe palléal. À un troisième stade enfin la zone d'union interbranchiale disparaît et la branchie peut alors flotter librement dans la cavité du manteau. Au point de vue de la disposition de la branchie, il peut donc yavoir parmi les individus que J'ai étudiés trois formes : ) Celle dans laquelle les solutions de continuité antéro- internes existent seules. C'est celle qui se rencontre le plus souvent chez la Chama iostoma Reeve ; &) Celle dans laquelle les solutions de continuité internes et externes existent ensemble ; y) Celle dans laquelle enfin les branchies, retenues par leur seule extrémité antérieure, flottent librement dans la cavité palléale. C'est une disposition que l’on rencontre souvent chez la Chama lazarus Lmck. Dans aucun cas je n'ai trouvé sur la Chama iostoma Reeve, ni sur la Chama lazarus Lmcek. l'intégrité complète du septum de séparation de la cavité palléale. Lorsque la disposition y est réalisée, on peut apercevoir une sorte de membrane s'insérant perpendiculairement sur la com- missure palléale entre les deux orifices siphoniens et orientée suivant la direction de la lame interbranchiale. J'ai étudié plus spécialement la disposition de cette membrane chez la Chama lazarus Lmck. dans les sujets où les branchies sont com- plètement libérées de leurs connexions latérales et postérieures. Chez ces sujets cette membrane a la forme d’une sorte de Ivre étendue suivant sa longueur sur une surface cylindrique, et MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 305 dont les branches en forme de cornes très aiguës s'insèrent par leurs bords externes sur la face antérieure du muscle adduc- teur postérieur. Les bords externes du corps de la Ivre qui se continuent avec les bords externes des branches s’insèrent sur la commissure palléale parallèlement au bord libre des valves entre les deux orifices inspirateur et expirateur. Le bord infé- rieur enfin de la Ivre s'insère sur la commissure palléale entre les deux orifices précités. Quant aux bords internes des branches et au bord supérieur du corps qui présente un petit prolonge- ment médian, ils sont libres. Dans les cas où les connexions de la branchie ne sont pas rompues, le bord interne des branches de la Ivre se continue avec le feuillet réfléchi de la lame externe de la branchie et le prolongement médian du corps s'insinue postérieurement entre les deux branchies en arrière. La membrane en Ivre est done le reste de la membrane de séparation des deux cavités palléales de laquelle la surface branchiale s'est détachée. Cette membrane contient une musculature assez nette. En son centre est un entrecroisement de fibres musculaires duquel part d'abord un faisceau impair médian très nettement imdivi- dualisé (Chama lazarus Lmck., Chama iostoma Conr.) qui se dirige vers le prolongement médian. Chez la Chama iostoma Conr. où, comme je lai dit, la lame interbranchiale est géné- ralement sans solutions de continuité depuis la bosse viscérale jusqu'à la commissure palléale, J'ai vu que ce faisceau impair n'était autre chose que la continuation du petit prolongement postérieur de la masse viscérale dont il à été question à propos du pied (5). Viennent ensuite deux faisceaux latéraux à peu près égaux qui vont s'insérer avec les muscles radiaux sur la coquille en avant de ladducteur postérieur, et laissant en dehors d'eux la couche des muscles radiaux du manteau ; en troi- sième lieu, deux autres prolongements dirigés en sens inverse et qui par rapport aux muscles radiaux se comportent de la même facon ; enfin deux autres prolongements moins importants qui entourent l'orifice inspirateur de chaque côté duquel ils se perdent par atténuation progressive. Il reste en somme que les branchies ne sont plus dans les cas extrèmes reliées au corps que par le suspenseur, les mésos et par ANN« SC. NAT, ZOOL. #20 306 R. ANTHONY la continuité de tissu en haut et en avant avec les téguments de la masse viscérale. La figure #, PL. XXII de Poli, donne une excellente idée de la forme des branchies chez la Chama gryphoïdes Linn. Comme 1l à été dit au début de ce paragraphe, les branchies des Chames se divisent chacune en deux lames. La lame interne débute seule, on l’a vu, entre les palpes labiaux. Elle se dirige d’abord d'avant en arrière, puis, chan- 6 geant bientôt de direction, elle suit un trajet dorso-ventral; après avoir par- couru une certaine longueur, elle se recourbe à nouveau en arrière pour se driger du côté de lorifice expirateur, en avant duquel elle se termine en s'in- sérant, lorsque ses connexions ne sont pas rompues à la base de Ja lame en Ivre. La lame externe débute en arrière de la précédente, laissant même entre elle et celte dernière au niveau de son origine, un espace libre ayant la forme d’un Fig. 38. — Schéma montrant $ ; , We de là disposition des lames triangle isocèle à base supérieure, et branchiales chez les Clan, Gont la présence indique la Séparation dæ (coupe transversale). — RO mt 1, lame interne; 2, lame et l'éloignement des filaments bran- externe ; 3, nerf branchial: Le een OC aux internes teLNeNtenIeNeNMEEnNRENS vaisseaux afférents. Le bord (roit. Cette lame, qui part du lobe pal- libre de la lame interne ta VA présente le sillon décrit. A léal au voisinage du crochet, suit une ssonaler S Î S de co Si e : C = - f A 1 us résout direction dorso-ventrale d'abord, puis d'une part, et le lobe pal- antéro-postérieure ; elle épouse la forme léal et la masse viscérale BAT ou date nent de la lame interne dans sa deuxième et sa troisième partie et a la forme d’un J, par exemple que la lame interne à la forme d'un S (Vow. fig. 37). Au point de vue de leur longueur, ces deux lames sont donc inégales. Elles le sont aussi au point de vue de leur dimension transversale, comme le montre la coupe schéma- tique transversale (Voy. fig. 38) passant à peu près au milieu de l'organe. Les branchies des Chames sont plissées comme celles des Cardiums et aussi comme celles des Huîtres et des Æthéries : MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 307 mais les plis sont moins profonds aux deux extrémités de lor- gane et plus particulièrement à l'extrémité antérieure que dans la région moyenne. Au lieu d'être rectilignes, ces plissements sont eux-mêmes très légèrement sinueux, et dans beaucoup de cas contournés en S, comme cela peut se voir sur la figure 37. Sur un exemplaire de Chama iostoma Conr., j'ai compté pour la lame interne de la branchie gauche 97 plissements et 83 pour l'externe. Chaque pli du fond d'un sillon à celui du sillon suivant, comprend environ dans la région moyenne de l'organe 20 à 25 filaments,. Si nous considérons à nouveau la figure 38, nous voyons que le bord libre du feuillet branchial interne présente un sillon assez profond, divisant en deux moitiés les éléments; ce sillon n'existe pas au bord hbre du feuillet branchial externe, ce qui semblerait prouver que la lame interne seule possédat un véri- table feuillet réfléchi, suivant là signification précise que lon attribue à ce terme. On retrouve là même disposition chez les Cardudés et les Tridacnidés qui, par ensemble de leurs carac- tères anatomiques, semblent être très proches parents des Chames. Au voisinage du bord libre de la lame externe, les plis s'atté- nuent et disparaissent même tout à fait. Les Chames sont des Eulamellibranches : leurs branchies, formées de filaments Juxtaposés, sont treillagées, c'est-à-dire qu'elles présentent des Jonctions interfilamentaires qui forment des lignes parallèles à leur surface et, rencontrant perpendicu- lairement les filaments, déterminent la présence de fenêtres rec- tangulaires allongées suivant la longueur de la lame. En plus de ces Jonclions interfilamentaires, 1l existe des Jonctions inter- foliaires qui consistent en des lames s’insérant sur les fonds de deux plissements situés en face l’un de l'autre et divisant la parte intérieure de chaque feuillet branchial en loges. Pour fa branchie interne, ces cloisons interfoliaires existent dans la région moyenne de l'organe tous les cinq plis; dans sa région antérieure, c'est-à-dire à l'origine, elles sont plus fréquentes, el il en est de même dans la région postérieure, e'est-à-dire à la terminaison. Ces cloisons interfoliaires croissent d'épaisseur d'avant en arrière. 308 R. ANTHONY La branchie externe présente les mêmes cloisonsinterfoliaires ; toutefois, ces cloisons sont plus nombreuses et à chaque plisse- ment il en correspond une. Les cloisons interfoliaires de la branchie interne n’atteignent pas tout à fait Le bord libre du feuillet réfléchi, comme le montre la figure. En plus de ces connexions interfilamentaires et interfoliaires,, il existe d’autres connexions auxquelles on peut donner le nom de connexions interplicaturales. Ces connexions réunissent les. fonds de deux sillons consécutifs. Dans la lame externe, elles. sont peu développées; dans la lame interne, au contraire, elles. sont très considérables, et, dans les parties voisines de l'axe, elles sont très larges et forment une sorte de voile étendu sur toute la partie supérieure des gouttières. L'innervation et la circulation des branchies seront décrites. à propos des appareils nerveux et circulatoires. Tube digestif. — La bouche est située immédiatement au- dessus du muscle adducteur antérieur et dorsalement par rap- port à lui. Nous constaterons chez les Æthéries la présence du même caractère. | Elle est entourée des quatre palpes labiaux assez courts, dont les bords antérieurs ét dorsaux sont, sur presque tout leur par- cours, soudés au manteau, autre point de convergence avec les. Æthéries. Ces palpes présentent, sur leurs faces d'accolement et sur cette face seule, des plissements transversaux. On voit entre les deux palpes d’un même côté, l'origine de la lame bran- chiale interne. Chez la Chama iostoma Conr., où j'ai étudié le tube digestif en détail, à la bouche fait suite un court œsophage, après lequel on pénètre dans l'estomac, lequel présente un léger diverti- culum antérieur. L'intestin sort de la face ventrale de l'estomac et sa direction fait un angle à peu près droit avec celle de l’'œæso- phage. Il se rapproche de la face latérale gauche, c’est-à-dire de celle qui répond à la valve fixée ; arrivé à l'extrémité ven- {rale de la bosse viscérale, 1l se recourbe et remonte parallèle- ment à sa première direction, en se rapprochant de la face latérale droite; puis bientôt 1l regagne le plan sagittal, traverse le cœur, passe en arrière du muscle adducteur postérieur et se MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 309 termine enfin à l'anus situé légèrement au-dessus de lorifice expirateur. Foie. — Le foie est assez peu développé chez les Chames et ne présente rien de particulièrement intéressant pour le point de vue envisagé ici. Comme chez les autres Acéphales, c'est une glande acineuse dont les cæcums ne sont pas dans le cas parti- culier nettement séparés. Elle est noyée dans la glande génitale et débouche à l'intérieur de l'estomac par deux orifices assez symétriques. Organes génitaur. — Ainsi que l'a vu, en 1859, H. de Lacaze- Duthiers, les Chames sont des Acéphales monoïques. Exté- rieurement, il est difficile de distinguer les mâles des femelles, sice nest par l'aspect de la glande elle-même, dont il m'a semblé que les acini étaient plus visibles chez les femelles, Chez les mâles, la glande à une apparence unie et homogène qui ne trompe pas. Comme chez tous les autres Acéphales, les glandes génitales sont des glandes en grappe, et, je n'insisterai pas sur leur des- cription qui ne présente rien de particulier, ni d'intéressant, pour le point de vue auquel je me place. Ces glandes géni- lales occupent dans la bosse viscérale toute la place qui n est pas occupée par le tube digestif, le foie, l'organe de Bojanus et les organes de la circulation. Chez la Chama iostoma Conr., les organes génitaux s'ouvrent à l'extérieur par deux orifices, l'un droit, l'autre gauche, qui débouchent dans une petite papille située dans Ia cavité bran- chiale, à l'angle que forme la paroi de la bosse viscérale avec le méso suspenseur de la branchie. Dans cette papille s'ouvre également le conduit exsécréteur de lorgane de Bojanus. En dedans est le canal génital, en dehors le canal sécréteur (Voy. fig. 39). Péricarde où cavité générale. spacieux chez les Chames ; c’est une petite cavité allongée d'avant en arrière et qui se trouve située dans la région umbonale entre les extrémités dorsales des deux muscles adduc- teurs. Il est limité dorsalement par une partie cardinale du manteau sur laquelle s'insère la membrane intercardinale, Sa paroi ventrale repose sur la glande génitale et dans ses parois Le péricarde n’est pas très 310 R. ANTHONY latérales on aperçoit, par transparence, la couleur brune des organes de Bojanus. Dans la région antérieure du péricarde se trouvent les deux orifices bojano-péricardiques, très difficiles à voir d’ailleurs chez toutes les Chames. Grobben (86) à signalé la présence de glandes péricardiques. Organe de Bojanus. — L'organe de Bojanus a chez les Chames Fig. 39. — Branchies et régions avoisinantes chez la Chama lazarus Lmck. — 1, bran- chie (lame interne); 2, branchie (lame externe). On y voit très nettement les jonctions interfoliaires et interplicaturales; 3, ganglion viscéral d'où part le nerf branchial suivant le bord antérieur du méso ; 4, glande génitale, vue par transpa- rence; >, papille bojana-génitale ; 6 et 8, muscle rétracteur supérieur; 7, muscle rétracteur postérieur. une forme allongée dorso-ventralement, son extrémité dorsale étant plus grosse que son extrémité ventrale. On l’aperçoit par transparence dans la paroi latéro-ventrale du péricarde. L'organe de Bojanus s'ouvre d’une part, dans le péricarde (région antérieure) ; il débouche d'autre part à l'extérieur, au niveau de la papille déjà signalée en dehors du canal génital. Chez les Chames, les deux glandes bojaniennes droite et gauche sont nettement séparées l’une de l’autre. Appareil circulatoue. — L'appareil circulatoire des Chames ne présente rien de particulier. Il a été étudié chez la Chama Lupelli Reeve par Ménégaux (90). L'étude que j'en ai faite à porté surtout sur l'espèce Chama iostoma Conr. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES J11 Le cœur se compose, comme celui de tous les Acéphales bien évolués, d'un ventricule petit, arrondi, musculeux et épais, que traverse le tube digestif. Ce ventricule est relié à la paroi ven- trale du péricarde qui, se relevant en cette région, constitue une sorte de colonne à base très élargie, au centre de laquelle se trouve la portion ascendante du tube digestif. Ce dernier traverse le cœur, l'abordant donc par sa face inférieure ou ven- trale, et le quittant par la dorsale. Aussitôt sa sortie du cœur, l'intestin se dirige en arrière pour longer Le bord postérieur du muscle adducteur postérieur. Le ventricule communique laté- ralement avec deux oreillettes à parois très minces, sensible- ment égales, el qui ne se réunissent pas ventralement. Les orifices ventriculo-auriculaires sont munis d'un anneau muscu- leux très fort dépendant du ventricule et possédant des valvules. Le ventricule émet deux aortes, l'une antérieure, à l’origine de laquelle est une valvule, Pautre postérieure. Ménégaux a pu étudier d'une façon plus complète que je n'ai pu le faire ces artères et leurs branches, avant eu à sa disposition des matériaux en meilleur état que les miens et se prètant mieux aux injections. Sur les animaux que j'ai étudiés, l'aorte antérieure suit un peu à droite (du côté de la valve Hbre par conséquent), au-dessus du tube digesüf, la dépression cardinale. Sur la Chama Ruppelli Reeve qui est celle qu'a étudiée Ménégaux et où la fixation se fait par la valve droite, elle suit un peu à gauche la même dépression. Bientôt elle donne des artérioles destinées aux lobes palléaux et dont la plus considérable se rend au lobe palléal répondant à la valve fixée. De l'aorte antérieure partent aussi, près de sa naissance, des artérioles destinées à la membrane interbranchiale. Vient ensuite l'artère viscéro-pédieuse qui, passant du côté de la valve fixée par rapport au tube digestif, irrigue les palpes labiaux, le tube digestif, le foie, la partie antérieure de la glande génitale et le pied. A sa terminaison, l'aorte antérieure donne les deux cir- cumpalléales antérieures qui naissent au niveau de l'extrémité supérieure du musele adducteur antérieur qu'elles irriguent. Elles suivent la commissure palléale. 312 R. ANTHONY L'aorte postérieure est très courte; elle est située ventra- lement par rapport au tube digestif et donne bientôt les deux circumpalléales postérieures qui s'unissent le long de la com- missure palléale aux deux circumpalléales antérieures. Aupa- ravant, elle à émis une branche qui, passant en avant du musele adducteur postérieur, l'irrigue ainsi que le ganglion viscéral. De ces différentes artères, le sang passe dans les lacunes dont la plus importante estle sinus rénal situé en avant du muscle adducteur postérieur. Le sinus pédieux est extrêmement réduit. Du sinus rénal ou lacune médiane, le sang passe dans les vaisseaux afférents (artères branchiales), lesquels suivent le bord supérieur des feuillets réfléchis des branchies. IL y à quatre artères branchiales, deux droites et deux gauches. De ces quatre grandes artères, le sang se distribue dans le système capillaire des branchies suivant le mode déerit par Ménégaux et gagne enfin les vaisseaux efférents ou veines branchiales, au nombre de deux, l’une droite, l’autre gauche, situées à la base de la cténidie, dans le méso-branchial et qui communique largement avec l'oreillette. Le sang suit donc un trajet en tout analogue à celui qu'il par- court chez les autres Acéphales : parti du cœur, il passe par les artères, irrigue les organes, passe dans les lacunes, puis dans les branchies, où il s'hématose, et, de là, retourne au cœur. Système nerveur. — Le système nerveux des Chama ne pré- sente rien de spécial. Je l'ai particulièrement étudié chez la Chama iostoma Conr. Les ganglions cérébro-palléaux se trouvent situés de chaque côté de la bouche, au-dessus de laquelle passe la commissure antérieure. Chaque ganglion cérébro-palléal émet en avant un nerf qui longe la face postérieure du muscle adducteur antérieur et bientôt se divise en deux branches. C’est le nerf palléal anté- rieur. Du ganglion cérébro-palléal part également le grand connectif cérébro-viscéral qui, situé profondément, repose en avant sur le foie, passe en pleine glande génitale et rejoint le ganglion viscéral unique constitué par la réunion des deux ganglions droit et gauche. Ceganglion repose sur la face anté- rieure du muscle adducteur postérieur comme chez les autres Acéphales. En dehors des connectifs cérébro-viscéraux, ce gan- MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 13 glion émet plusieurs branches : le nerf palléal qui suit laface an- térieure du muscle adducteur postérieur etgagne bientôt, après s'être divisé en deux branches, sa face postérieure, et le nerf branchial qui suit le bord postérieur libre du méso-branchial. En plus du nerf palléal antérieur et du connectif cérébro- viscéral, chaque ganglion cérébro-palléal émet un connectif céré- bro-pédieux très mince. Les deux connectifs cérébro-pédieux aboutissent à un ganglion pédieux unique situé à la base du pied et duquel partent quelques filets nerveux destinés à l'innerva- üon de cet organe rudimentaire. L'état des pièces que j'avais à ma disposition ne m'a pas permis d'étudier les organes des sens. Embryogénie. En dépit du grand intérêt qu'elle semble devoir compor- ter en vue de l'explication possible des formes fossiles, lPem- bryogénie des Chames semble avoir été singulièrement né- gligée (Voy. Jackson (90) et F. Bernard (97). L'embryogénie des premiers stades paraît 4« priori devoir se rapprocher beau- coup de celle que l'on observe chez les autres Acéphales: nous ne nous en occuperons pas; celle des derniers stades au contraire nous intéressera, et, plus particulièrement l'histoire du développement de la coquille. Sur les polypiers et sur les coquilles des différents Lamelli- branches rapportés du golfe de Tadjourah par M. Ch. Gra- vier, j ai, à l’aide de Ja loupe binoculaire de Zeiss, pu décou- vrir des Chames de tout âge, depuis la prodissoconque, qui à envion — de millimètre de long, jusqu'à la forme avant 1 millimètre et plus (dimensions auxquelles on peut considérer que l'animal à à peu près acquis les caractères de l'adulte). Je ne veux point insister sur la difficulté de cette récolte, sur les accidents de toutes sortes, causes d’amères déceptions, qui peuvent survenir aux échantillons si petits et si fragiles que le moindre souffle peut les emporter, mais Je liens à répondre par avance à une question que beaucoup de lec- teurs se poseront peut-être et à laquelle j'ai déjà répondu, d'ail- 914 R. ANTHONY leurs, en partie dans la chapitre EL, à propos de l'exposé de mes méthodes de recherches. On pourrait se demander comment, lorsque lon à affaire à une forme jeune de Lamellibranche provenant de la mer Rouge, on peut reconnaitre qu'elle appar- lent à une espèce du genre Chama? D'abord, si l'animal est déjà fixé 11 n°v a pas de doute possible, les Chames étant les seuls Acéphales dimvaires fixés en position pleurothétique existant dans la mer Rouge et le golfe d'Aden et leurs formes Jeunes ne pouvant être confondues ne serait-ce qu'à cause de leur dentition, avec celles des Spondyles, des Huiîtres ou de Plicatules. Lorsque, par contre, l'on à affaire à un animal non encore fixé, la diagnose est plus délicate et, dans ce cas, on doit se fier aux ornements de la coquille qui sont précisément pour les Jeunes Chames très particuliers; de plus, par la mé- thode des comparaisons d'individus de dimensions crois- santes, on peut arriver à établir une série de formes qui se relient les unes aux autres et finissent par aboutir à une forme adulte connue; de plus, enfin, les différentes formes aux diffé- rents stades de développement peuvent bien se discerner sur les jeunes coquilles de 1 millimètre de diamètre, ce qui permet de reconnaitre et de déterminer les individus arrêtés à un stade ontogénique moins avancé. Ces procédés sont aussi, ainsi que je lai dit, ceux qui furent employés par F. Bernard, et on sait ce qu'ils lui ont donné. Enfin, ayant comparé les formes de jeunes Chames que J'avais recueillies à deux jeunes individus vraisemblablement fossiles recueillis jadis par Félix Bernard et qu'il n'a pas eu le temps d'étudier d’une façon complète, je me suis aperçu que j'étais complètement d'accord avec lui. Je crois par conséquent que l'identité de mes matériaux ne peut être mise en doute. Il m'a été impossible de mettre des noms spécifiques sur ces formes jeunes de Chames que j'ai étudiées. En effet, M. Ch. Gravier a recueilli des Chames appartenant à plusieurs espèces différentes dont je donnerai, d'ailleurs, ultérieurement la liste, et une forme jeune quelconque aurait pu être attribuée avec autant de raisons à l'une ou à l’autre de ces espèces. 1° Prodissoconque. — La prodissoconque de Chama sp. — jai pu en recueillir 6 exemplaires — est une petite coquille MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 319 équivalve et équilatérale de de nullimètre de long à peu pres, allongée d'avant en arrière. Elle est lisse, dépourvue de tout ornement el ne possède pas de dents, comme c'est la règle pour Loutes les prodissoconques d'Hétérodontes. A son sommet Je n'ai pu distinguer la limite du protostracum dont F. Bernard à signalé l'existence pour plusieurs espèces. D’après Jackson (90), p. 370, les crochets seraient dirigés en avant. Il ne m'a pas paru en être ainsi sur mes exemplaires. 2° Dissoronque. — Dansle développement de la dissoconque ou coquille définitive, il ne me semble pas nécessaire d'admettre pour le genre Chan, ni pour d'autres d'ailleurs.les deux stades népionique et néologique qu'a distingués Jackson (90). Ils seraient d’ailleurs, dans ce cas particulier, difficiles à séparer, et, il semble plus simple de considérer pour les Chames deux stades, Fun qui précède la fixation, l'autre, l'adulte, qui la suit. 2. Coquille définitive avant la firation.— Je n'ai pu en recueil- lir qu'un seul exemplaire heureusement complet et 4 valves isolées, 1 droite et 3 gauches, de même taille. C'est d'après l'exemplaire complet, qui est d'ailleurs représenté dans la figure 41,que je fais cette description. Pendantun certain temps, après le développement de la prodissoconque, la coquille défi- nilive conserve sa forme équilatérale. Mais bientôt, à partir à peu près du moment où elle atteint} millimètre de diamètre antéro-postérieur, les zones d'accroissement se développent davantage dans la région postéro-ventrale et de moins en moins 2 phare en avant, ilen résulte que lorsque la coquille à atteint = où de = Ce) nullimètre de diamètre, ce qui marque à peu près le stade à parüir duquel elle se fixe, elle affecte la forme inéquilatérale d'un Anisomyaire très voisin encore des Isomyaires, quelque chose rappelantun Lithocardium encore peu évolué. Les valves de cette petite coquille, que l'on peut désigner sous le nom de forme inéquilatérale où Lithocardioïide, sont à peu près égales et semblables, très bombées, rappelant même par leur profil coronal la forme d'un petit Cardium. Elles ne présentent pas l'arête dorso-ventrale, si aiguë, qui est la caractéristique des 316 R. ANTHONY Lithocarduun, mais une arrête sensiblement plus mousse : ventralement elles se terminent comme eux par une partie légèrement en pointe où même en cro- HN chet. À ce stade inéquilatéral les jeunes Chames ont encore la forme des Acéphales NME euthéliques, c'est-à-dire que leurs deux jalves sont se s, qu'elles - pi AE MRt se valves ont semblables, qu'elles sont symé versale de jeune Cha- lriques par rapport au plan sagittal. Leur ma sp. avant la fixa- à at AAPERS LS tion. Cette figure est OINeMentation est très spéciale et ne rap- destinée à montrer pelle en rien celle des Chames adultes; elle l'aréte mousse dorso- : x : ; - EE consiste en côtes radiales bien marquées, analogues à celles des Cardium en géné- ral: mais ces côtes au lieu d'être conti- nues sont croisées et même souvent interrompues par des stries d'accroissement très aceusées dont le relief est peut-être aussi marqué que le leur. Il en résulte un aspect d'ornementation Fig. 41. — Vue intérieure de deux valves (individus différents) de Chama sp. avant la fixation. — I, valve devant être fixée ; II, valve libre: 41, dent 1; 2, dent 2; 3, dent 3; 4, dent 4: p, dent latérale postérieure. A remarquer les limites de la prodissoconque et l’ornementation de la dissoconque, vue par transparence. extérieure qui rappelle un peu, quoique moins vigoureux, dans la famille des Veneridæ, celui des Venerupis, auxquels Jackson (91), F. Bernard (98) et moi sommes d'accord pour les comparer. Sur de jeunes Chames déjà fixées, représentées par Rouault dans son mémoire sur l'Éocène des environs de Pau, on retrouve figurées ces mêmes ornementations qui d’ailleurs chez les Échinochama adultes sont encore souvent visibles. Sur ces Jeunes coquilles il m'a été impossible de distinguer nettement les traces des impressions musculaires, mais il est possible, même probable, que, comme chez les Lithocardium MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES A7 adultes, le muscle adducteur antérieur soit chez les jeunes Chames moins développé que le postérieur. Les dents de la charnière rappellent celles de la Chame adulte, mais sont moins fortes et plus nettement individua- lhisées. La formule dentaire est la suivante : LA C. EP V'dr: NOIR BL CIRE Vp ONF 2% MIRE Comme on peut s'en rendre compte, cette formule très voi- sine, par l'absence de dents latérales antérieures, de celle des Lithocardium, est semblable à celle des Chames adultes, avec cette différence qu'à la valve droite il existe du moins sur les individus que j'ai observés une dent cardinale de plus, la dent 1. Chez les Chames adultes, en effet, cette dent 1 n'existe pas ; dans certains cas, Je lai vue ébauchée mais jamais elle ne présente la netteté de celles des formes jeunes avant la fixa- tion. Chez les Dicératinés, au contraire, cette dent existe et il est précisément intéressant de rapprocher à ce point de vue les formes jeunes des Chaminés des Dicératinés. F. Bernard (97) avait également constaté la présence de la dent cardinale 1 des Diceras sur les formes jeunes de Chames. Nos observations concordent donc. De plus, à ce stade, la dent cardinale # à paru à F. Bernard (97) comme à moi extrêmement réduite. Elle doit vraisemblablement prendre son complet développement plus tard (Voy. fig. 41). Les dents des jeunes Chames à ce stade ont un volume moins considérable que celle des Chames adultes par rapport aux dimensions de la coquille. La figure #1 dispense, d’ailleurs, de plus amples développements. Comme chez les autres Acéphales, et ainsi que l'ont montré Munier-Chalmas (95) et F. Bernard (95), le Tigament existe au début dans une petite fossette triangulaire située au niveau du crochet et légèrement dirigée d'avant en arrière. Peu à peuil se développera d'avant en arrière tout en tendant à devenir ext6- rieur. Rien de particulier n'offre, pendant ce stade antérieur à la fixation, le développement du higament chez les Chames. 8. Coquille définitive après la firalion. — Jai pu recueillir un 218 R. ANTHONY y grand nombre de jeunes Cham iostoma Conr. fixées, depuis les plus petites jusqu'aux formes adultes, avant atteint leur ; ï AS il 2 maximum. Lorsque la jeune Chame a attemt à peu près ou 2 «) de millimètre de diamètre antéro-postérieur, elle se fixe par une de ses valves; sur l’espèce que j'ai étudiée à ce propos (Chama iostoma), la valve par laquelle la fixation s'opère est la gauche, et cette fixation se fait toujours par la région antérieure exclusive- ment. Chez d’autres espèces, — Chama Brassica Reeve, par exemple, — la fixation se fait par toute la surface de la valve. Dans Fig. 42. — Jeune Chama sp. après la l'un et l’autre cas, aussitôt la fixa- a el muette lion produite, la région de la eo- la dissoconquez avant la fixation quille quiest fixée tend manifeste- RE ES ment. par la disposition tie zones d’accroissement succes- sives, à prendre la forme arrondie. J'ai eu la chance de pouvoir suivre le processus par lequel cet arrondissement s’accomplit. Comme il vient d'être dit, chez les Chames, comme d’ailleurs chez tous les autres Acéphales, le ligament qui débute au niveau du crochet s'étend peu à peu d'avant en arrière. Les zones d'accroissement de la coquille, ainsi que la reconnu pour l'ensemble des Acéphales F. Bernard (95), débutent, d'autre part, en arrière, au point où le ligament $Sest arrèté après chaque période d'aceroissement : le Tigament s'avance en même temps qu'une zone calcaire se forme ; le ligament avance à nouveau et 1l se forme en même {temps une nouvelle zone calcaire et ainsi de suite. Si le ligament et la coquille croissent avec une rapidité ou mieux une intensité à peu près égale, il est facile de concevoir que le premier s'étendra suivant une ligne à peu près droite d'avant en arrière, qui rencontrera per- pendiculairement les zones d’accroissement. C’est ce que l'on observe chez l'Anodonta cygnea Lmck, par exemple, dont le ligament est à peu près rectiligne. Mais, cet équilibre entre : ae Age tion spéciale / => mill. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 319 l'intensité de croissance du ligament et l'intensité de croissance de la coquille peut, dans certains cas, ne pas exister ; c'est ce qui se produit, par exemple, pour un certain nombre d'Acé- phales, comme l’/socardiu, par exemple. Chez les Chames les choses ont une tendance manifeste à se passer de la même facon. Lorsqu'elles se fixent, quoiqu'encore de petite taille G; ou Z de millimètre) elles sont, au point de vue ontogé- nique, déjà assez avancées et après la fixation, le Higament conti- nue à croitre avec une inten- 7 sité {elle que la coquille semble ne pas pouvoir le sui 2 .vre. Une couche calcaire se dépose eten même temps le ligament parcourt un grand P espace le long du bord posté- rieur de la coquille, avant que la couche calcaire suivante n'ait commencé à se dévelop- AE IL en résulte JUS le liga- Fig. #3. — Schéma destiné à indiquer le ment au lieu de suivre une mode d’enroulement des crochets chez ; : à les Chames. — A, côté antérieur: P, ligne droite, comme chez Pt AE NE PP UE l'Anodonta cygneu Lmck, calcaires concentriques. suit une ligne courbe le long du bord postérieur de la coquille et que chaque zone calcaire con- centrique de cette dernière commence toujours de plus en plus ventralement. Lorsque la coquille à en somme 1 millimètre de diamètre, son ligament s'étend suivant une ligne courbe depuis son crochet le long du bord postérieur de la coquille et les zones d'accroissement calcaire, au lieu de le rencontrer à peu près perpendiculairement, comme chez PAnodonta cyqnea Lmck, le rencontrent suivant un angle très aigu (Voy. fig. #3) (1). F. Bernard à montré que dans un Acéphale à ligament rectiligne, les choses se passaient absolument comme, si les valves tournant autour du lhigament comme autour d'une char- nière ets’écartant progressivement l’une de l'autre, la substance (4) I est important de ne pas oublier que des phénomènes de croissance de la coquille et du ligament sont absolument concomitants. 320 R. ANTHONY calcaire tendait à remplir continuellement l’espace laissé libre entre les bords. Chez la Chame, par le fait que le ligament au lieu de suivre dans son développement une marche rectiligne, suit une marche curviligne, l'axe autour duquel tournent les valves tend à se déplacer progressivement d'avant en arrière, restant toujours tangent au bord ligamentaire ; il s'ensuit que les valves tendent de plus en plus à s'écarter l’une de l’autre en avant et que le ligament se fend de plus en plus dans sa partie antérieure, c’est-à-dire la plus ancienne. En outre, comme chaque nouvelle couche calcaire tend à remplir constamment lespace laissé libre par l'entrebäillement des valves, ils s'ensuit que l'apport de calcaire s'étend de plus en plus en avant à mesure que le ligament se déplace vers l'arrière, empiétant toujours sur la partie antérieure divisée de ce dernier. Il est facile de se rendre compte qu'un enroulement dans le sens de la flèche est le résultat final de tout ceci et que le contour sagittal arrive à être complètement arrondi. En résumé done, la fixation semble provoquer une tendance à l'acquisition de la forme arrondie qui s'acquiert par enrou- lement, lequel est rendu possible par la rapidité et l'intensité de croissance du ligament, qui doit être un fait propre aux Chamidés comme aux /socardia par exemple. À mesure que l'animal vieillit, le point /' se déplace vers lar- rière et la partie / #2 "du ligament décrit une hélice (Voy. fig. 23). Lorsque la fixation s'est établie, d'autres caractères appa- raissent. Ce sont d'abord ceux des ornements extérieurs de la coquille : les couches calcaires concentriques se déposent avec une telle rapidité et sont tellement serrées que les stries fayonnantes ne sont plus visibles; de plus, elles deviennent irrégulières, se couvrent de productions diverses et l’on arrive ainsi à cet aspect extérieur si particulier qu'ont les Chama tostoma Conr. par exemple, caractérisé par l'absence de stries radiales, et la présence de stries concentriques irrégulières couvertes d’épines, de tubercules ou de lames. Outre cela, les dents de la charnière changent d'aspect; à la valve fixée la dent cardinale 2 prend des dimensions consi- dérables ; à la valve libre, la dent 1 disparaît, n’existant plus MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 21 chez l'adulte qu'à titre d'exception, et encore très réduite ; la dent 3 etla dent latérale postérieure tendent à,se confondre ;et,. ainsis’établit la formule dentaire connue du genre Chamnaadulte. Physiologie. N'ayant pu me procurer de Chames vivantes et n'ayant pu, à plus forte raison, les observer dans leur milieu, Jar. dû naturellement laisser de côté l'étude de leur physiologie spéciale qui, vraisemblablement, ne doit guère différer de celle des autres Acéphales, et me contenter au point de vue éthologique des observations des autres: C'est ainsi que je me suis rapporté aux descriptions de Saville-Kent (93) concernant les Chames qui vivent sur le grand récif-barrière d'Australie et à celleside François (89) qui, dans une correspondance qui fut publiée dans les Archives de Zoologie expérimentale, donne des détails sur le mode d'existence, des Chames d'Océamie. Mais c'est à M. Ch. Gravier surtout que je dois les plus nombreux -et les plus précis de mes renseignements éthologiques. M. Ch. Gravier, en effet, a accompli durant l'hiver 1903-190%, dans le golfe de Tadjourah, une mission du Ministère de Finstruction publique. Je lui avais indiqué avant son départ d'une façon tellement précise les renseignements qu'il m'était utile d'avoir, que les observations qu'il a recueillies ont à mes veux une valeur sensiblement égale à celle qu'elles auraient pu avoir si elles avaient été prises par moi-même. Les Chames sont des Mollusques marins qui ontune aire. de répartition assez étendue suivant une large zone disposée de part et d'autre de lÉquateur. Elles sont déjà presque rares dans la Méditerranée: et au delà, c'est-à-dire dans l'Océan Atlantique, elles sont rarissimes [Voy. Chama Nicolloni (Dautz) signalée par Dautzenberg (92)}. 11 semble qu'il leur faille une certaine température et ce sont d'ailleurs, comme les Diceras el les Rudistes de jadis, des Mollusques constructeurs de récifs. Elles sont fixées en position pleurothétique par lune de leurs valves, le plus souvent la gauche, quelquefois la droite. sui- vant les espèces (1). (1) Je n’ai jamais constaté que dans la même espèce il y ait des individus fixés les uns par une valve, les autres par l’autre. ANN. SC. NAT. ZOOL. AR | 299. R. ANTHONY La fixation se fait, pour un certain nombre d'espèces, par la région antérieure de la valve seulement, pour d’autres par l’en- semble de la surface valvaire. Chez les premières le plan sa- gittal est oblique par rapport à la surface de fixation ; chez les secondes, il est parallèle, c’est-à-dire le plus souvent hori- zontal. Les Chames sont des animaux essentiellement littoraux qu’on trouve, soit dans la zone de balancement des marées, c'est- à-dire recouverts d'eau à haute mer. découverts à mer basse, soit dans la zone qui suit celle du balancement des marées, c’est- à-dire constamment recouverts d’une certaine épaisseur d'eau même pendant les marées les plus basses. À basse mer cette épaisseur ne dépasserait jamais, d'après M. Ch. Gravier, trois ou quatre mètres. D'après ce même auteur, les Chames auraient dans le golfe de Tadjourah deux habitats principaux : 1° sur les parties mortes des polvpiers, et elles semblent rechercher les formes massives, ceux qui sont eux-mêmes le plus solidement fixés ; ce sont les formes fixées par l'ensemble de leur valve (Chama brassica Reeve) qu'on trouve fixées aux polypiers comme un nid aux branches d’un arbre. Elles ne découvrent Jamais complè- tement à mer basse. : 2° Sur des plateaux calcaires, et ce sontles formes fixées par la région antérieure seulement et qui découvrent à chaque marée. Lorsque les vagues ont dénudé un de ces plateaux cal- cares dont est formé le sous-sol de la région, on est à peu près sûr de trouver ce plateau recouvert d'un véritable champ de Chames fixées d’une facon si solide que l'intervention du ciseau et du marteau est presque toujours nécessaire pour les détacher. Celles qui se trouvent dans la partie haute du plateau, e'est-à- dire celles qui restent découvertes le plus longtemps à marée basse, sont le plus souvent logées dans de petites cuvettes où elles peuvent conserver leur humidité, fait à rapprocher des conditions ordinaires d'existence déjà signalées des Moules de roche dans la baie de Douarnenez. M. Ch. Gravier a observé de ces champs de Chames au plateau du Serpent et aux îles Musha. Les formes de cette deuxième catégorie sont lisses, semblant MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 33 roulées, alors que les premières, qui vivent toujours sous une certaine épaisseur d'eau, présentent des ornements qui seraient très nets sans là gangue calcaire qui les recouvre. La raison de cette différence d'aspect est aisée à comprendre et fait songer que peut-être bien des espèces créées en raison de l'absence de tout ornement à la surface de leur coquille ne devraient pas exister. D'après M. Ch. Gravier, les Chames vivant sur les plateaux calcaires se rencontreraientsouventgroupées par deux individus qui seraient de taille inégale. En somme, les Chames sont des animaux littoraux recherchant surtout les eaux chaudes et agitées et par conséquent claires et bien aérées. C'est l’éthologie habituelle des Dimyaires fixés en position pleurothétique. D'après les documents que j'ai consultés, 1l semble que pour les Chames les conditions d'existence soient à peu près les mêmes partout. A Î, finit és. La question des affinités des Chames constitue un grave pro- blème. La plupart des auteurs s'accordent à faire des Chames des Cardiüdæ. C'est à côté de ces derniers d’ailleurs qu'on les classe le plus souvent dans les traités de Zoologie et dans les galeries de collections. Voyons sur quoi l’on peut baser cette opinion. Lorsqu'on écarte les deux valves d'une Chame d'espèce quel- conque et que l'on dilacère l’un des lobes de son manteau, la première chose qui saute aux veux de l'observateur, c'est la branchie, grâce à laquelle on est immédiatement obligé de classer l'animal dans le groupe des Eulamellibranches, c'est- à-dire des Acéphales à branchies treillagées. On ne tarde pas à s'apercevoir ensuite que les deux lobes palléaux sont réunis, ne laissant que trois ouvertures, deux siphonales et une pé- dieuse, ce qui oblige immédiatement à penser que les Chames Acéphales fixées en position pleurothétique dérivent d’ani- maux primitivement céphalothétiques. La séparation très nette 324 R. ANTHONY entre l'orifice inspirateur et l'ouverture pédieuse, nous font éli- miner parmi ces derniers, tous ceux de la première catégorie (Submytilacea et surtout les Carditidæ dont on pourrait être tenté de les rapprocher (1); le ‘peu de longueur des'tubes siphonaux, la disposition du ligament, nous font ‘également éliminer ceux de la troisième, parmi lésquels, au ‘contraire, doit être recherchée l’origine des Myochamidæ et des Chamostreidæ dont il sera question plus loin. Les Chames semblent donc être des céphalothétiques de la deuxièrne catégorie adaptés à La ee üon pleurothétique. SEINE Examinons maintenant les différents organes et appareils de Chamidés en essayant dé les rapprocher de ‘céux'des ‘animaux de ce groupe avec lesquels 11 peuvent avoir quelque affinité. Coquille : Un caractère qui au point de vue de là rechérche des affinités peut avoir une grandé importancé, est celui qu'on üre de leur ornementation. Sur les Chames adultes, lornemen- tation est difficilement caractérisable. Outre que là coquille est le plus souvent recouverte de différentes productions qui en cachent les détails, les épines, les lames et tubercules des stries concentriques prennent une telle importance que beaucoup de détails des stries radiales deviennent méconnaäissablés. Ce n'est donc pas sur les coquilles de Chames adultes qu'il semble qu'il faille rechercher les caractères de parenté. Sur les formes jeunes au contraire non encore fixées, les ornements sont très spéciaux et se rapprochent infiniment'de ceux que l’on ren- contre à l’état adulte chez certains Vénéridés, comme s'accordent à l’affirmer Jackson (90), F. Bernard (97) et moi-mëme; ils n'ont aucun rapport avec l'ornementation des Cardidés ainsi que Douvillé en fait la juste remarque. Mais la déntition des jeunes Chames se rapproche absolument de celle des Cardiidæ adultes, et plus particulièrement de ‘celle du genre Zitho- cardium, chez lequél comme chez les Chames la dent Sera antérieure a disparu. Ligament : Chez les Chames, le ligament est comme chez les Tridacnes, un peu moins externe que chezles Cardium. (1) I ne serait pas admissible en effet que des Carditidæ aient pris par le fait de la fixation pleurothétique une disposition caractéristique des formes céphalothétiques déjà très évoluées. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 325 Manteau : Nous n'y reviendrons pas, ilrappelle absolument par la disposition de ses orifices, les Céphalothétiques de a deuxième catégorie, dans laquelle entrent les Cardium. Branchies : Chez les Chames, nous l'avons dit, les branchies sont treillagées, plissées et la lame interne possède à lexclu- sion. de, la lame externe le long de son bord libre une gouttière longitudinale. Chez les Cardium et chez les Tridacnes ces mêmes caractères. existent. (Voy. au sujet du plissement des bran- chies des Chames, Tridacnes et Cardium, Pelseneer (91). La branchie de la Chame est très semblable à celle d'un Cardium. Tube digestif : Le tube digestif des Chames est par rapport à celui du Cardium edule (ann) et du Cardium Norwegicum (Speng:) où nous l'avons étudié, extrêmement simple | Voyez à ce sujet, la figure de Johnstone (00)]. Mais cette considération ne, suffit pas pour éloigner les Chames des Cardüdæ, chez les- quels d’une espèce à l'autre les plus grandes variations existent dans la disposition du tube digestif. Organes excréteurs et génitaux : Les organes excréteurs el les organes génitaux n'offrent rien de particulier chez les Chames. Comme chez elles, 1ls débouchent chez le Cardium Norwegicum (Speng.) dans une papille unique semblablement placée. En résumé, par leurs caractèresles plus généraux, les Chames sont, sans qu'il y ait aucune espèce de doute possible à ce sujet, des, Dimyaires céphalothétiques de la deuxième catégorie fixés en position pleurothétique. La forme et la place de leur liga- ment, la disposition de leurs orifices palléaux le prouvent. À un, point de vué plus particulier, elles semblent être des descendants de Cardiüdæ et les arguments qui militent en faveur de cette. manière de voir peuvent être tirés surtout de la cons- üitution des branchies, de la disposition des dents, de la char- nière. Quant à la position du ligament, à lornementation de la coquille jeune qu'on ne retrouve pas identique chez les Car- ddæ:et chez les Chames et sur laquelle on s'appuie parfois pour séparer ces deux groupes, je ne crois pas qu'il faille leur attacher une trop grande importance. En ce qui concerne l'orne- 3926 R. ANTHONY mentation en particulier, n'en voit-on pas dans a seule famille des Vénéridés de très différentes (1). Il me semble, en somme, que les Chames actuelles peuvent ètre considérées comme provenant probablement de Cardiüd:æ analogues par leur forme aux Ziüthocardium, c'est-à-dire inéquilatéraux. Il est d’ailleurs à remarquer que les Tridacnes qui viventsensiblement dans les mêmes régions que les Chames proviennent aussi et avec plus de certitude de formes litho- cardioïdes. Leur apparition brusque avec tous leurs caractères dans les couches de Gosau (Crétacé supérieur) empêche de les consi- dérer comme des ancêtres des Dicératinés qui ont débuté à la fin du Jurassique, beaucoup plus tôt par conséquent. Les Chaminæ et les Diceratinæ semblent être deux branches sœurs provenant de la même souche, s’en étant détachés à deux époques différentes, mais ayant évolué à peu près dans le même sens. L'évolution du phylum des Chames est actuellement moins avancée que ne l'était celle du phylum des Diceras au moment de leur disparition. Morphogénte. Deux conditions d'existence ont pu contribuer à l’établisse- ment de la forme spéciale des Chames, e’est à savoir le pleuro- thétisme et la fixation. Le pleurothétisme, comme il à été dit plus haut, amène la substitution d'une symétrie coronale à la symétrie sagittale primilive. Les deux valves semblables chez les formes eu- thétiques, deviennent ici de plus en plus dissemblables, la supérieure tendant à s'aplatir et à prendre la forme opercu- lire et l'inférieure, par le fait de la pesanteur agissant sur les organes tendant à se creuser de plus en plus [Voy. Hyatt (80) et Edm. Perrier (04), à propos du rôle morphogénique de la pesanteur sur les formes fixées]. En même temps, les deux extrémités antérieures et postérieures tendent à se ressem- bler. C’est donc une tendance à l'établissement de cette symé- (1) Les jeunes Tridacna elongata Lmck. d'ailleurs ont une ornementation qui ressemble singulièrement à celle des jeunes Chames avant la fixation. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES AI trie radiaire qui parmi les Rudistes atteint la perfection pour ainsi dire chez les Pironæa et les Barretia. Quant à la fixation, elle peut, comme je lai dit plus haut, se faire chez les Chames suivant deux modes : 1° par l'ensemble d’une valve, et alors le plan sagittal est parallèle au plan de fixation ; 2° par la partie antérieure seulement d'une valve, ce qui, d'ailleurs, est le cas le plus fréquent, etalors Le plan sagittal est plus où moins incliné sur le plan de fixation. Suivant lun ou l'autre de ces cas, la morphologie de la Chame est modifiée d'une facon différente. En tous cas, 1l est certaines modifications qui sont constantes quel que soitle mode de fixation, c’est à savoir la régression des siphons caractéristiques des formes céphalothétiques ancestrales et celle du pied que nous avons suivie plus haut avec détails. Comment estl possible d'expliquer que certaines Chames se fixent les unes par l'ensemble d’une de leurs valves et les autres par la région antérieure seulement. Les premières, on se le rappelle, semblent, d'après Les obser- vations de M. Ch. Gravier, se trouver uniquement dans les polvpiers (Chama brassica), les autres au contraire sur des plateaux calcaires plans (Chama iostoma et Chama Ruppelli) . Les une et les autres affectent très vraisemblablement avant leur fixation une forme lithocardioïde. Si donc, une jeune Chame de forme lithocardioïde tombe sur un fond recouvert de branches de polypiers, on conçoit qu'elle sera arrêtée par ces branches sur lesquelles elle à toutes sortes de raisons de rester posée de telle facon que son plan sagittal soit à peu près hori- zontal à la facon d’un nid dans un buisson. Si, au contraire, elle tombe sur une surface plane, on conçoit que, de par le fait de sa forme même, elle ne pourra reposer que sur la partie antérieure ou la partie postérieure d’une de ses valves. Or, la fixation se fait toujours par la région antérieure. On pourrait se demander pourquoi. La raison en est extrêmement simple, semble-tAl : comme chez tous les Acéphales, chezles jeunes Chames, l'entrée et la sortie de l'eau se font exclusivement par la région posté- rieure. [est donc naturel que cette région soit dirigée en haut ; si elle était dirigée en bas, l'entrée et la sortie de l’eau ne pourraient facrlementse faire. Les efforts de la jeune Chame non 328 R. ANTHONY encore fixée, aont le pied doit d’ailleurs être plus développé que celui de l'animal adulte, doivent donc ‘tendre à lui faire occu- per la position qui lui est la plus favorable’ à l'entrée et à l'éva- cuation de léau. C’est'la réalisation de l'attitude avantageuse sur le rôle de laquelle, dans la constitution des formes ani- males, Edm. Perrier à tant insisté. Lorsque la fixation se fait par toute la valve entre les branches d'un polvpier, c'est le contour sagittal qui s’arrondit et l'arron- dissement se fait de la façon décrite au paragraphe de l'em- brYogénie ;’ chez la Chama brassita Reeve représentée dans la figure 8 de la planche IT il èst pour ainsi dire parfait. Lorsque la fixation se fait par la région antérieure de la valve, c'est cetté région seule 'qui tend'à s’arrondir. Dans ce cas, on se le rappelle, la région fixée fait avec la région postérieure qui ne l’est pas, un angle approchant souvent de 90°. L’arête de cet angle dièdre qui sépare les deux régions antérieure et posté- rieure, correspond à l’arête des Lithocardium. Seulement, au lieu d’être droite comme chez les derniers, elle est courbe, décrivant une spire ainsi que le montre la figure 32. C'est par cette direction spéciale de larète valvaire que se caractérise, dans le cas de fixation antérieure, la tendance à l’arrondisse- ment de la région fixée : voyons en effet comment dans ce cas l'arrondissement s’'accomplit. Aussitôt la fixation produite, la coquille commence à se développer suivant le mode naturel dont'il a été question et caractérisé par l'accroissement rapide du ligament qui s'étend d'avant en arrière, suivant une surface courbe, rencontrée par les couches calcaires successives sui- vant des angles aigus; les crochets commencent à s’enrouler en avant. Chaque nouvelle couche calcaire se dirige d'abord suivant le plan postérieur, c'est-à-dire vertical, puis, arrivée au point de rebroussement se réplie pour suivre la direction du plan dé fixation. Ces points suivant lesquels les couches caléaires se replient se disposent les uns à. la suite des autres, mais au lieu de se disposer en ligne droite, ils se disposent de telle façon que la surface de fixation tend à se rapprocher de plus en plus d'une surface circulaire. Chaque point de rebroussement est, en somme, sollicité d’une part par le fait de la fixation, à suivre la direction d'une circonférence, MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 329 d'autre part, il est sollicité à continuer la direction de la zone d’accroissement, il s'ensuit que la limite externe des deux zones, fixée et non fixée, serait en quelque sorte la composante de ces deux directions. Ainsi s'explique la forme spéciale des Chames fixées par leur région antérieure, leur pointe ventrale etlobliquité de leur plan sagittal. De plus, par le fait de la pesanteur et de l’action corrodante des eaux agités, la surélévation de la partie postérieure au-dessus du plan de fixation tend à diminuer, etle plan sagittal tend à devenir de plus en plus parallèle au plan de fixation. Le rapprochement des deux muscles adducteurs en arrière, la libération des. branchies, l'accolement des palpes labiaux aux lobes palléaux semblent en rapport avec l'arrondissement. Il ne semble pas que les plissements des branchies puissent être considérés comme une conséquence de l'arrondissement, puisque ces plissements existent déjà chez les Cardium. Les valves fixées des Chames ne présentent pas la structure cloisonnée qui est la caractéristique de celles de beaucoup d'Acéphales fixés, tels les Huîtres et les Æthéries. CHAPITRE IT MYOCHAMIDÆ Historique. — Ce sont des animaux rares et vivant sur une aire de répartition peu étendue. Ils ontété extrêmement peu étudiés. En faisant abstraction des mentions et des descrip- lions de coquille qui en sont faites dans les ouvrages de détermi- nation et de systématique pures, on ne peut trouver à leur sujet qu'un seul mémoire anatomique de Hancock (53), se rapportant à la Myochama, qui est le seul genre de la famille. Quoique peut- être insuffisant, ce mémoire constitue, surtout si l'on tient compte du temps où il a été écrit (1853), un document morpholo- gique précieux. 330 R. ANTHONY Inutile d'ajouter que l’embryogénie et la physiologie de ces animaux sont totalement inconnues. Il n'existe pas de Myochama fossiles. La Myochama à l'étude de laquelle je me suis attaché, est la Myochama anomioïdes Stutch. dont un certain nombre d'exemplaires (coquilles sèches seules) existent dans les collec- ions de Malacologie du Muséum et de Paléontologie de l'École des Mines. Morpholoqe. Coquille. — Les Myochama anomioïides Stutch. sont fixées par leur valve droite sur les coquilles d’autres Mollusques. La surface de fixation est large, s'étendant aussi bien sur la région posté- rleure que sur la région antérieure de la coquille. La valve fixée est généralement mince, et cette minceur atteint parfois un de- gré tel que les différents ornements de la coquille sur laquelle la Myochama vi fixée s'impriment sur la face intérieure dela valve de cet animal. Les ornements extérieurs de la valve libre con- sistent essentiellement en stries radiales souvent bifurquées sur lesquelles on peut apercevoir, les croisant perpendiculairement, les stries d’accroissement. De plus, comme on l’observe chez les Anomia, Vornementation de la coquille sur laquelle se fixe la Myochame influe sur lornementation de cette dernière. C’est ainsi qu'aux stries radiales propres de la Myochama viennent se superposer sur la valve libre d’autres stries qui sont la con- linuation de celles, radiales ou concentriques, de la coquille servant de substratum. Suivant la position et l'orientation de la Myochama, ces dernières croisent suivant un angle variable les stries radiales propres. Les Myochama sont légèrement nacrées sur leur face inté- rieure. Leur forme est irrégulière, mais présentant une ten- dance marquée à l'arrondissement. Toutefois, elle n’a pas encore complètement perdu sa forme allongée d’avant en arrière, caractéristique des formes céphalothétiques dont elle semble provenir. L'allongement porte tantôt sur la région anté- rieure, tantôt sur la région postérieure ; et, le polymorphisme de ces animaux atteint un degré tel, que je ne serais pas éloigné de croire que toutes les espèces décrites de Myochama se rap- MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES d91 portent à une seule et même espèce, diversement modifiée par la forme du substratum et des conditions de fixation multiples. Les crochets ne sont pas enroulés. La charnière des Myochana est simple. Elle ne comprend pas de dents à proprement parler. Souvent néanmoins, de chaque côté de la fossette ligamentaire, dont il sera question tout à l'heure, existent deux crêtes allongées mal Fig. 44. — Reconstitution d'après les données de Hancock de la coupe sagittale possible de la Myochama anomioïdes Stutch.— 1, bouche ; 2, anus ; #, muscle adduc- teur antérieur; 5, muscle adducteur postérieur; 7, orifice inspirateur; 8, orifice expirateur ; 9, orifice pédieux; x, quatrième orifice palléal. limitées sur la valve fixée et qui s'introduisent dans deux ca- vités semblables de la valve libre. Toutefois cette disposition ne semble pas constante. Le ligament, très réduit comme chez les Céphalothétiques les plus évolués, est logé dans une fossette triangulaire. N'ayant eu que des coquilles sèches à ma disposition, 1lm'a été impos- sible de faire de ce ligament une étude telle que j'aurais désiré la faire. Sur les bords de la fossette s'insère la partie fibreuse de ce ligament. Quant à sa portion élastique, elle s'insère au fond de la fossette sur l’une et l'autre valve. À son intérieur est un petit osselet de forme pyramidale, dont la pointe est dirigée dorsalement alors que la basé regarde le bord libre des valves. Les impressions des musclessur les valves sont étendues, sub- arrondies et l'impression palléale possède un sinus très marqué. Parties molles. — Je vais me borner à décrire 1e1 très briève- ment l'anatomie des Myochanidæ d'après Hancock (53). Chez ces animaux, les lobes du manteau très inégaux sont 392 R. ANTHONY minces et translucides: ils sont réunis, ne laissant entre eux que quatre orifices, deux siphoniens, un pédieux, et un qua- trième tout pelit situé entre l'orifice pédieux et l’orifice inspira teur. Les siphons n’ont pas encore complètement disparu et se présentent sous la forme de deux tubes séparés assez allongés, surtout l’expirateur. Des deux muscles adducteurs, l'antérieur est souvent plus allongé en coupe transversale que le postérieur. D'après les figures de Hancock (53), la bouche semblerait dorsalement disposée par rapport au musle adducteur antérieur. Elle est munie de quatre palpes dont les antérieurs ne semblent pas, comme chez les Chames, adhérents aux lobes palléaux. Les branchies seraient, chez les Myochama, assez compliquées; elles sont treillagées ; châque branchie se compose, comme d'ha- bitude, de deux lames ; la lame interne, semblable à celle des autres Acéphales, ne présente rien de parüculier, la lame ex- ierne, au conlraire, très peu développée, est réduite à son feuillet direct; la disposition est un peu analogue à celle des Chames, mais la réduction de la lame branchiale externe semble encore plus accentuée. La membrane interbranchiale est percée d’un orifice faisant communiquer les chambres rétro-branchiales et palléales. Les branchies présentent des plissements transversaux. Le pied est petit, triangulaire, rappelant un peu celui des Chames. L'auteur ne donne aucun détail sur les appareils digestifs, eir- culatoires et nérveux. Embryogénie. L'embryogénie des Myochama est complètement inconnue, et, les matériaux qui avaient été mis à notre disposition ne nous ont pas permis de combler cette lacune. Notre plus petit exem- plaire avait encore 7 millimètres de longueur maxima et ne pré- sentait aucune différence avec les adultes. Physiol qie. La Myochama anomioïdes Stutch. à une aire de répartition assez restreinte. On la trouve uniquement localisée en un point MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 3939 des côtes d'Australie. Elle vit fixée, toujours parisa valve droite, sur des coquilles de Gastéropodes où d’autres Acéphales telles que des Trigonies, des Pectunculus. Étant donnés les animaux sur lesquels elles se fixent, tout fait supposer que les Myochames vivent non loin des côtes dans la zone qui suit immédiatement celle du balancement des marées. Affinités. On conçoit combien il devait m'être difficile de traiter la question des affinités des Myochanadæ, n'ayant pu avoir à ma disposition d'animaux pourvus de leurs parties molles. J'ai donc dû pour cela me baser uniquement sur les carac- tères de la coquille, et, quant à ce qui concerne les parties molles, Jai dù tabler sur les seules descriptions de Hancock (53). 11 est d'abord un caractère qui semble peu se modifier suivant le genre de vie, puisque des Acéphales de toutes adaptationsle pos- sèdent : c’est celui de la présence de la nacre. De quels Acéphales dimyaires nacrés peut-on rapprocher la Nyochama? Les Trigo- nies, en raison de la structure primitive de leurs branchies et la forme spéciale de leurs dents, les Unionidæ, pour des raisons multiples (deux ouvertures seulement au manteau, existence fluviatile….…) doivent être éliminés. Il ne reste plus alors que le groupe des Anatinidæ. Un autre caractère extrêmement impor- tant vient encore affirmer la parenté des Myochames et des Ana- tines, la présence d’un lithodesme dans le Higament élastique. Or, de tous les Acéphales, les seuls qui possèdent ce caractère semblent être les Anatinidæ et les Tellinidæ avec leurs alliés. La parenté des Hyochama avec ces deux groupes très voisins est donc des plus probables. Elle s'affirmera bien davantage lorsque lon aura fait remarquer que, comme les Analinidæ et les Tellinidæ encore (à l'exception des Psammolhia), les Myochamidæ possèdent une lame branchiale externe dépourvue de feuillet réfléchi et dorsalement ascendante. Au point de vue du développement de la nacre, elles tiennent le milieu entre les Analines si admirablement nacrées et les Tellines à coquille porcelainée. Enfin, le sinus. palléal qu'elles possèdent encore vient avec la 334 R. ANTHONY longueur de leurs siphons fournir un nouvel argument à cette manière de voir, en indiquant bien nettement, ainsi que leur ligament externe, qu'elles proviennent de Céphalothétiques de la troisième catégorie. En résumé donc, les Myochames semblent être des Anati- nidæ modifiés par la fixation pleurothétique. Morphogénie. Quelles modifications la fixation pleurothétique a-t-elle fait subir à ces animaux qui semblent avoir été primitivement des Céphalothétiques de la troisième catégorie. Le pleurothétisme seul semble d’abord avoir amené, comme c'est le cas général, une substitution de la symétrie coronale à la symétrie sagittale. Cette substitution se manifeste par une dis- semblance des deux valves, dont l'inférieure, fixée par toute son étendue, épouse le substratum. De plus, le côté antérieur et le côté postérieur tendent à se ressembler. De même, le lithodesme symétrique, par rapport au plan sagittal et asymétrique par rapport au plan coronal des Anatines, tend à devenir symétrique par rapport à ce dernier plan en prenant la forme d'une pyramide presque régulière à base carrée et orientée comme il l'a été dit. La fixation, d'autre part, amène, elle aussi, un certain nombre de modifications. C’est d’abord l'arrondissement de la surface de fixation. Cet arrondissement s s accomplit d'une façon assez simple : par le fait que l'animal duquel dérive les Myochames semble avoir été un Céphalothétique de la troisième catégorie, son ligament devait être assez réduit dans le sens antéro-posté- rieur et situé exactement en face de crochets, comme cela existe chez les Anatines, par exemple. De cette disposition il résulte, comme l'on sait, que la croissance de la coquille doit se faire chez des animaux de ce type d'une façon symétrique, c’est-à-dire qu'elle croît à peu près autant en avant qu'en arrière et qu'il n'y à pas la moindre tendance à l'enroulement des crochets en avant. Lorsque des animaux de ce type se fixent comme le font les Myochames par toute la surface d’une de leurs valves, la forme MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 399 arrondie s'acquiert, par une simple disposition régulière des couches calcaires, lesquelles deviennent de plus en plus étroites en arrière eten avant, et, au contraire, de plus en plus larges dans la région ventrale. On conçoit que par ce processus, en tout analogue à celui par lequel s’accomplit l'arrondissement des Dimya, la coquille puisse arriver à prendre un aspect tout à fait arrondi sans qu'il Y ait enroulement ou pseudo-plicature ; les crochets restent droits et le ligament déjà réduit presque à un point, et pour des raisons tout autres expliquées précé- demment, chez les Céphalothétiques ancestraux, conserve à peu près sa forme. Enfin, toujours sous l'influence de la fixation, les siphons et le pied diminuent. La grandeur relative du pied, des siphons et l'arrondissement encore imparfait des Myochames montrent que ce sont, comme le prouve d’ailleurs la date de leur apparition, des formes éminemment récentes. CHAPITRE IV CHAMOSTREIDÆ Historique. — Comme les Myochamidæ, es Chamostreidæ sont des animaux rares et, comme eux, ont été extrêmement peu étudiés. | Le seul mémoire anatomique qui les concerne est encore de Hancock (53), et contient les principales indications morpho- logiques intéressantes ayant trait à ces animaux. Leur embryogénie et leur physiologie sont comme celles des Myochamidæ totalement inconnues. Il n'existe pas de formes de Chamostreidæ fossiles connues. La Chamostrea à l'étude de laquelle je me suis attaché est la Chamostrea alhida Limck dont quatre exemplaires (coquilles sèches seulement) existent dans les collections de Paléontologie de l'École des Mines. 3306 R. ANTHON Morphologie. Coquille. — Les coquilles de Chamostrea albida Lmck. pré- sentent extérieurement une teinte rosée et leur intérieur est généralement nacré. Tous les exemplaires qu'il m'a été donné d'observer étaient fixés par la valve droite, et Hancock (53) avait, d'ailleurs, fait la même constatation sur ceux qu'il avait eus à sa disposition. De plus, la fixation se fait toujours par la région antérieure, et, comme chez la Chama RuppelliReeve par exemple, la région postérieure fait un angle dièdre à peu près Fig. 45. — Coupe transversale de Chamostrea albida Lmck. en position fixée. Les hachures indiquent le substratum. — /, surface antérieure fixée ; 4, muscle adduc- teur antérieur ; 5, muscle adducteur postérieur. droit avee cette région antérieure fixée; il en résulte une sorte d'arête courbe parcourant la valve fixée depuis le crochet jusqu'au milieu de l'impression palléale ventrale, arête qui rappelle celles que nous avons vues chez beaucoup de Chames et qui, chez les T'oucasia et les Gyropleura atteint son maximum de netteté. Les ornements extérieurs de la coquille consistent en stries d'accroissement très nettes sans la moindre trace d’épines ou de stries rayonnantes. Dans la région antérieure de la, valve les striesd'aceroissement ontl'apparence plissée, froncée en quelque sorte. Les crochets sont très visibles et nettement prosogyres. Le contour sagittal, allongé dorso-ventralement, se termine dans la région ventrale, comme chez les Chames fixées par leur région antérieure, par une partie anguleuse correspondant à l'arète courbe dont il vient d'être question. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 5 1 La charnière de la Chamostrea albida Lmck. est très spéciale. À la valve libre elle présente une cardinale antérieure qui s'in- troduit dans une cavité correspondante de la valve fixée ; en arrière de la dent, est la surface d'attache du ligament élastique. A la valve fixée, en arrière de la cavité, est une autre cavité plus spacieuse sur la paroi supérieure de laquelle s’insère égale- ment le ligament. Étant donné l’état des matériaux que j'avais à ma disposition, je n'ai pu étudier ce ligament, d’ailleurs relativement réduit, comme Je l'aurais désiré. Tout ce que Je puis dire à son sujet, c'estque sa partie élastique est interne. Elle s'insère, d'une part, sur la surface signalée de la valve libre et sur la paroi supérieure de là cavité liga- mentaire de la valve fixée, d'autre part, sur la face supé- rieure d'un osselet réniforme P,d, — Moethutin apr dont la concavité est dirigée gittale possible de Chamostrea albida Lmck. — 1, bouche: 2, anus : 3, pied; en arrière et dont l'une des 4, muscle adducteur antérieur ; 5, mus- extrémités emplit la cavité cle adducteur postérieur : 7, orifice : OP CE expirateur:; 8, orifice inspirateur; 9, ori- lhigamentaire de la valve fixée. fice pédieux. Chez les Chamostrea alhida Lmck., les impressions musculaires sont très nettes. Celles des adducteurs sont grandes et celle de laddueteur antérieur est très allongée dorso-ventralement. L'impression palléale est dépourvue de sinus. Parties molles. — C'est encore uniquement d'après Han- cock (53) que je vais résumer l'anatomie des Chamostreidæ. Elle à, d’ailleurs, beaucoup de rapport avec celle des Myochamide. On y retrouve les quatre mêmes orifices du manteau, mais là, les tubes siphoniens sont beaucoup plus réduits que chez les Myochamu. La position de la bouche par rapport au muscle adducteur antérieur est la même. Les branchies aussi sont identiques à ce qu'elles sont chez 122 3 ANN. SC. NAT. ZOOL. 338 _ R. ANTHONY les Myochama, avec cette différence toutefois que le feuillet réduit est libre du côté externe, comme cela se passe souvent chez les Chames. On retrouve, en somme, chez les Chamostreidæ les mêmes caractères généraux que chez les Myochanide. J'ai cru bien faire en essayant de reconstituer la coupe sagit- tale de ces animaux en me servant des dessins publiés par Hancock (53) et des indications anatomiques qu'il donne. Embryogénie. On ne connaît rien de l'embrvogénie des Chamostreidæ, mais tout porte à croire que le développement de la forme générale de la coquille définitive doive se faire d’après un processus très analogue à celui qui se produit chez les Chames fixées égale- ment par la région antérieure de la valve. Physiologie. Il n’y à également que très peu de chose à dire sur l’éthologie des C’hamostrea, et la question semble épuisée lorsque l'on à noté que leur aire de répartition est à peu près la même que celle des Myochama, et qu'elles vivent fixées dans les condilions énoncées plus haut. Toutefois, la fixation, au lieu de se faire sur les valves d'autres Mollusques, se fait directement en général sur le rocher, etil ne serait pas étonnant que, ainsi que les Chames fixées par la région antérieure de leur coquille, elles soient des ani- maux de la zone du balancement des marées, alors que les Myochames seraient, comme les Chames, à zone de fixation totale des animaux ne découvrant jamais. Affinités. En dépit des hésitations de Hancock (53), qui fut, à mon avis, trompé par des caractères de convergence avec les Chames, je crois qu'il n’est pas possible d'hésiter à rapprocher les Chamostrea des Analinidæ. Leur parenté avec ce groupe nie semble appuyée par les mêmes raisons, que celles qui en ont MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 339 fait rapprocher les Myochama. Leur mode de fixation, et peut-être La forme possible des types ancestraux, comme nous allons le voir, peuvent expliquer les différences entre les Myochames et les Chamostrées, ces dernières étant de beau- coup les plus évoluées. Morplogénie. tant donné que les CAamostrea sont toujours, comme le sont un certain nombre de Chames, fixées par la région antérieure d'une de leurs valves, leurs caractères morphologiques peuvent s'expliquer d’une façon tout à fait analogue à celle dont on explique ceux des Chamidés fixés de la même façon. Toutefois, il est intéressant de faire remarquer qu'étant donné que les animaux, dont les Chamostreidie proviennent possèdent un ligament interne, on ne trouve pas chez ces Chamostreide Va spirale ligamentaire des Chames et des Dicerus. Ce fait du ligament interne n'empêche pas d'expliquer len- roulement de la coquille. D'ailleurs, n'y a-tal pas des formes voisines des Anatines, les Verircordüdæ, qui, par lenroule- ment très accentué de leurs crochets, rappellent les /socardia”? Les Chamostrea ne pourraient-elles provenir de formes ana- logues, et ne pourraient-elles, au cours de leur développement, avoir un stade précédant là fixation et se rapprochant plus ou moins du stade lithocardioïde des Chames, ce qui expli- querait la constance de leur fixation antérieure? CHAPITRE V ÆTHERIIDÆ La famille des Æ{heriidæ comprend les trois genres suivants : Ætheria (Diüsomyaire vivant dans les fleuves de l'Afrique équatoriale : Niger, Nil, Sénégal, etc.). Bartlettia (Dianisomyaire vivant dans les fleuves de la Sud- Amérique équatoriale). 340 R. ANTHONY Mulleria (Monomyaire vivant dans les fleuves de la Sud- Amérique équatoriale: Smith (98) et Woodward (98) en ont récemment cependant décrit une forme vivant en Asie, aux Indes anglaises. | Ces deux derniers genres s’éloignent du cadre de mes recherches. Leur morphogénie possible à d’ailleurs été briève- ment exposée dans la première partie de ce travail. Les conchyhologistes ont divisé le genre Æ{heria en nom- breuses espèces que Bourguignat (80) répartit en quatre sous- genres. [Il me semble qu'il y ait là une exagération considérable ; toujours est-il qu'après une revision soignée de ce genre, Je suis arrivé à penser que toutes les Æthéries pouvaient être considérées comme constituant une seule et même espèce, toutes les formes différentes que l'on observe étant des modi- fications dues à l'action mécanique des eaux et au genre de vie. Au surplus, on trouvera dans le travail de Bourguignat (80), cité dans la bibliographie, l'énumération de ces nombreuses espèces. J'ai groupé les formes différentes que peuvent présenter les Æthéries en trois catégories correspondant à trois genres de vie différents et bien déterminés, et, pour lesquelles je prendrai respectivement comme types les trois espèces suivantes des auteurs : Ætheria tubifera Sow. Ætheria plumbea Sow. Ætheria Petreétinn Bet. Dans le premier groupe Je comprends toutes les formes à épines tubuieuses vivant dans les eaux relativement tranquilles, comme par exemple lÆtheria lubifera Sow. Certaines de ces formes peuvent atteindre des dimensions considérables par l'allongement de -leur talon, comme FÆtheria Caillaudi Féruss. Dans le deuxième groupe je comprendrai les formes érodées, usées, roulées, vivant dans les courants violents et les rapides, comme l'Ætheria plumbea Sow. Le troisième groupe, enfin, comprendra la seule espèce Æthera Petretinu Bgt. qui possède l’'épiderme, que les formes du groupe précédent ont souvent perdu, mais n'a pas d’épines. - MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 341 Elle vit exclusivement fixée dans les conduites d’eau de Ramlé (Haute-Égypte). Les Æthéries sont des formes relativement récentes; elles ont fait leur apparition à l'époque quaternaire. Historique. — Ce sont des animaux très peu connus au point de vue anatomique, et je n'ai pu trouver à leur sujet qu'un seul mémoire anatomique, d'ensemble d’ailleurs insuffisant, contenant même quelques erreurs, celui de Rang et Caillaud datant de 183%. Pour être complet, ajoutons les détails que, dans un récent travail, Reis (02) donne sur le ligament des Ætheride. L'embryogénie et la physiologie de ces animaux m'ont paru totalement inconnues. L'étude anatomique plus complète, que je crois avoir faite de ces animaux, m'a été rendue possible par ce fait que le Muséum d'Histoire naturelle en possède un certain nombre d’exem- plaires bien conservés provenant de différentes missions et que M.Joubin à mis aimablement à ma disposition. En outre, les Æthéries étant très communes dans les fleuves de nos colonies africaines, il m'a été facile de m'en procurer en assez grand nombre, fixées et conservées d’après les procédés dont usent couramment les histologistes, grâce à l’amabilité de M. Chevalier et du D' Decorse, médecin de l'armée coloniale. Pour l'observation des coquillessèches, j'ai utilisé les collections du Muséum et de l'École des Mines. Morphologie. Coquille. — Les Æthéries sont des Acéphales fixés par une de leurs valves, qui est tantôt la droite, tantôt la gauche, avec une fréquence à peu près égale ; dans la même espèce certains individus sont même fixés par une valve alors que d’autres le sont par l’autre, contrairement à ce qui se passe chez les Chames où tous les individus de la même espèce m'ont semblé toujours fixés par la même valve. La fixation se fait par une région très étendue de la coquille, s'étendant autant en avant qu'en arrière. Cette dernière est subarrondie et, comme beaucoup de coquilles d'Acéphales fluviatiles, elle est extérieu- 342 R. ANTHONY rement verdâtre, et intérieurement toujours admirablement nacrée, comme celle des Unionidæ en général. Étudions séparément les caractères de cette coquille dans les trois formes : plumbea, tubifera et Petretinu. Bien que la forme fwhifera semble devoir être considérée comme la forme souche, nous commencerons, pour la com- modité de la description, par la forme plumbea. o. Forme plumbea. — Dans la forme plumbea la coquille est, extérieurement, d'un vert sombre, et sa nacre interne d’une couleur que l’on peut qualifier de plombée ; il semblerait qu'elle ait été frottée de mine de plomb; c’est vraisemblablement en raison de cette particularité, et peut-être aussi en raison de la densité de sa coquille, que le nom de plumbea lui a été donné par Sowerby. Lourde et compacte, peu boursouflée, cette coquille rappelle souvent à première vue, et avant qu'on ait écarté ses valves, par son aspect condensé en quelque sorte, l'Ostrea edulis Linn. ou la Gryphea anqulata Lmck. Sur cette forme on ne rencontre pas les épines tubulées caractéristiques de la forme {ubifera; le mécanisme deleur disparition sera expli- qué plus loin. Toutefois, il est certains cas dans lesquels on en trouve des vestiges, ce qui m'autorise à supposer, avec Rang et Caillaud (3%) d'ailleurs, que les épines tubulées sont carac- téristiques du genre Æ{heria et que, lorsque l’on n’en trouve pas, c’est qu'elles ont disparu mécaniquement. La valve libre tout entière, et les bords de la valve fixée, sont profondément érodés. roulés en quelque sorte. La forme du contour sagittal de la coquille qui est, comme il a été dit, subarrondie, est très variable, presque carrée dans certains cas, plus allongée dans d’autres, gauche et tourmenté, d’une forme indéfinissable dans quelques autres, semblant, en un mot, épouser la forme du substratum sur lequel elle repose. La valve fixée, qui est toujours plus épaisse que la valve libre, présente souvent, et surtout dans la région dorsale, un feuilletage très serré, un peu analogue à celui des Huitres et qui, comme l’a dit Jackson (90), est caractéristique de formes acéphales fixées. Si on considère postérieurement une Æ{heria de forme plumbea fermée et préalablement dépourvue de son ligament, on s'aperçoit d'abord que les crochets sont absolument introu- MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 34. vables, ayant disparu probablement par le fait des érosions: on peut deviner toutefois leur place en se guidant sur le sens et la direction des stries d'aceroissement. Un peu en arrière de cette place, où devraient exister les crochets, on voit que la valve fixée présente une sorte de sillon assez profond dont les bords sont arrondis etdont les parois ne tardent pas à s'accoler; ce sillon se dirige du substratum à l’espace interval- vaire et d'avant en arrière. La valve libre présente aussi un sillon dirigé de Ia même facon que celui de la valve fixée et aboutissant au même point de l'espace intervalvaire. Ce sillon est plus court en général que celui de la valve fixée et forme avec le plan intervalvaire un angle plus aigu. Il résulte de Fig. 47. — Ætheria plumbea Sow. (vue pos- : JE >: térieure). — I, le ligament a été enlevé cette “disposition qu'à leur pour laisser voir la pseudo-plicature : pois de DenConere les deux A en A et ce me sillons formentun angle ouvert inférieure. en avant (Voy. fig. 47). En suivant le bord cardinal de la valve fixée, lequel à une épaisseur appréciable, on rencontre immédiatement en avant du sillon une sorte de gouttière très peu profonde et dont le fond serait en coupe une portion de crrconférence de rayon très étendu. Cette gouttière est parallèle au sillon et existe aussi, quoique très courte et peu marquée, sur la valve libre. Enfin, en avant de cette goutlière, et parallèlement à elle, existe sur lune et l'autre valve une sorte de bourrelet très peu marqué, arrondi. Le contour du bord cardinal d’une valve d’Æthérie ou, ce qui revient au même, la coupe du talon chez la forme twhifera offre donc l'aspect représenté sur la figure 48 ; épaisseur déme- surée de la valve inférieure fait que ces différentes inflexions, sur lesquelles s'étend, ainsi qu'on le verra, le ligament, devien- nent un sillon, une gouttière et une crête. 344 R. ANTHONY Si on considère maintenant une valve hibre ou fixée d'Ætheriæ plumbea Sow. par sa face intérieure, on v remarque d’abord l'aspect nacré el les boursouflures qui ont déjà été signalées ; on y voit, en outre, les traces des insertions des muscles adduc- teurs antérieur et postérieur, déchiquetées sur leur bord intérieur, celle du muscle antérieur étant souvent, fait très important, divisée en deux parties, l’une ventrale, plus allongée, l’autre dorsale, plus courte. L’impression palléale est très nette, discontinue, et sans sinus. La charnière est nulle, en tant que l'on désigne par ce terme l’ensemble des dents de la région cardinale, et il n’y à que dans certains cas que l’on remarque la présence d’une sorte de crête allongée, postérieure, qui pourrait peut-être représenter la grande dent latérale posté- rieure des Unio, bien qu'il semble plutôt que cette crête, contingente d’ailleurs, soit un simple accident en rapport avec la forme tourmentée de l'animal. Enfin, le bord cardinal donnant insertion au ligament présente un aspect tout spécial en rapport avec le sillon, la goutüère et la crête décrits plus haut. C'est d’abord une sorte d’éperon (sillon), puis, plus avant, une ligne courbe convexe (gouttière), enfin une ligne courbe CONCAMNE CRC Le Mo nee MIS PAPAS) Je n'ai point eu la prétention de faire ici une description complète et détaillée pouvant servir à la systématisation des coquilles d'Æthéries. C'est simplement une vue d'ensemble que j'ai voulu donner, m occupant seulement des caractères qui, au point de vue de la compréhension de la forme Æthérie, peuvent avoir une certaine importance, et négligeant naturellement les multiples accidents que peuvent présenter les coquilles de ces animaux et qui sont en rapport avec la forme du substratum. Toutes les formes que J'ai groupées dans la même catégorie que lÆtheria plumbea Sow. ont, quant à leur coquille, la même forme générale que lÆ{heria plumbea Sow. elle-même. 6. Forme tubifera.— Dans cette forme, qui semble devoir être considérée comme la forme originelle, la coquille est plus légère que dans la forme précédente, feuilletée, très boursou- flée sur sa face intérieure, donnant souvent même la sensation d'une sorte d’écume qui semble avoir valu au genre son nom d'Ætheria. La valve libre est très mince, la valve fixée est au MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 349 contraire souvent plus épaisse, présentant parfois ce que les conchyliologistes appellent un talon et qui n’estautre chose qu'un accroissement en épaisseur de la zone de fixation. Ce talon, dont la production sera expliquée ultérieurement et qui peut parfois être très développé, est muni de cloisons transversales très nombreuses qui ne sont autre chose que des zones d'ac- croissement et que l'on peut comparer à celles de certains Rudistes et de certaines Huiîtres. La couleur extérieure des valves est d’un vert clair; à leur surface on distingue un épiderme toujours très bien conservé; elles sont recouvertes d’épines tubuleuses qui pour- raient peut-être Jouer un rôle dans la fixation de l'animal. Comme l'a fait remarquer Simroth (90), les épines tubuleuses qui garnissent le bord libre pourraient jouer le rèle de siphons et servir au passage de l’eau lorsque le poids des couches de limon empêche les valves de s’entr'ouvrir. Jamais ces coquilles ne sont roulées comme le sont celles des Æthéries de la forme plumbea; leurs plus petits ornements sont souvent même admi- rablement bien conservés. La nacre interne ne présente pas la teinte plombée de celle des animaux se rattachant à la forme précédente. Les impressions musculaires et la région cardinale n offrent rien de particulier. I n'y aurait plus rien à diresurles Æ{heria de forme tubhiferu, si une espèce, qui me semble devoirse rattacher à cette forme, ne présentait par le fait du développement considérable de son talon un intérêt tout particulier. I s'agit de FÆtheria Caillaudi Féruss. que je crois devoir décrire en détail, du moins au point de vue de sa coquille. La valve fixée de FÆtherin Cail- laudi Féruss. présente un talon considérable qui peut attemdre parfois jusqu'à 50 ou 60 centimètres de long, et la valve fixée prend alors l'aspect d'une colonnette au sommet de laquelle se trouve une loge contenant l'animal. Cette colonnette est en général plus étroite à sa base qu'à son sommet où elle s'élargit, prenant ainsi en quelque sorte l'aspect d'un cornet de papier ou d'un tronc de cône renversé. La concavité qui la surmonte est en général assez profonde ; son ouverture, qui répond naturel- lement au plan sagittal de l'animal, au lieu d’être orientée sut- vant un plan horizontal (en supposant l'animal fixé perpendi- 346 R. ANTHONY culairement à son substratum) comme chez les Rudistes, est orientée suivant un plan très oblique, se rapprochant même sensiblement de la verticale. Le contour de cette cavité est elliptique, et, les deux extrémités du grand axe de lellipse sont placées de telle facon qu'elles marquent le point le plus élevé et le point le moins élevé de ce contour. À lintérieur de cette cavité, on retrouve les mêmes détails (impressions musculaires, etc.) que ceux qui ont déjà été signalés à lin- térieur des valves des autres Æthéries. La pointe ligamentaire y est cependant beaucoup plus développée. Le bord supérieur de la cavité est souvent légèrement évasé en dehors et présente quelquefois de ces longues épines tubulées dont la cavité semble communiquer avec la cavité palléale et auxquelles Simroth (90) à attribué le rôle que lon sait. Si on fait une coupe longitudinale de cette valve pas- sant par le grand axe de lellipse, on s’apercoit que la colon- nelte comprend des cloisons transversales légèrement con- caves, tout à fait analogues à celles des Rudistes et de certames Huîtres (Voy. fig. 23, PL II). Sion fait maintenant une coupe transversale de la colonnette passant à peu près par son milieu, on s'aperçoit que cette coupe n'est pas circulaire, mais affecte à peu près la forme d'une circonférence aplatie sur une certaine longueur de son parcours; la ré- sion aplatie correspond à la partie la plus inférieure de l'ellipse figurant le contour sagittal. En un des points où la partie courbe rencontre la partie droite, il existe une inflexion en pointe suivie d'une cavité, puis d'une légère convexité. On reconnait à ces détails la place du ligament. Sur la colonnette ils se traduisent par un sillon suivi d'une gouttière et d’un léger bourrelet. On peut dire en résumé que la colonnette pré- sente deux faces : une face que l’on peut appeler /unulaire, puisqu'elle va du crochet (ou de la place qu'il devrait occuper) au muscle adducteur antérieur et qui est aplatie, et une face que l’on peut appeler dorso-ventrale et qui est arrondie. La première présente nettement les traces des cloisons transver- sales; la deuxième, couverte d’épines tubulées, présente des stries d'accroissement qui correspondent à ces cloisons transversales, les unes et les autres marquant les stades successifs du déve- MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 947 loppement de la coquille et les positions qu'elle occupait aux différents âges de l'animal. La valve libre est aplatie; elle recouvre l'ouverture de la loge comme un opereule (Voy. fig. 2%, PL IT). On y reconnait les mêmes détails que sur la valve fixée (impressions des muscles, pointe ligamentaire, etc.) ; sa région lunulaire se prolonge par une sorte de talon muni, comme celui de la valve fixée, de Fig. 48. — Coupe transversale du talon de l'Æfheria Caillaudi Féruss. — 1, 3, sub- stance fibreuse du ligament; 2, substance élastique ; 4, arète ligamentaire. cloisons transversales. Ce talon est très aplati et le contour de sa coupe transversale présenterait à cela près les mêmes détails que celui de la valve fixée. IE devrait théoriquement descendre plus bas qu'il ne descend en général, mais 1l à toujours été détruit par des érosions continues dans toute sa partie inférieure. En résumé, la valve libre est analogue à la valve fixée, avec cette différence qu'elle est beaucoup plus aplatie. y. Forme Petretinu (Voy. fig. 20 et 21, PI III). — Dans l_Ætheria Petretini Bet., la coquille est mince, assez régulière (c'est la moins irrégulière des Æthéries), et 1} semblerait même qu'elle tende à reprendre la forme allongée d'avant en arrière des Unionidie normaux. Elle n'est jamais roulée, et possède toujours, sur la valve libre du moins, un épiderme verdâtre qui laisse voir nettement les stries d’accroissement. La valve fixée présente toujours une large surface de fixation, est plane et relativement peu épaisse. L'intérieur des valves ne présente rien de particulier. Sur Ja valve libre le crochet est nettement visible et les pre- 348 R. ANTHONY miers stades de développement de la coquille peuvent même y être reconnus. Il est évident qu'à aucun moment de son développement lÆthema Petretini Bgt. n'a possédé d’épines tubulées. Ces épines, qui d’ailleurs semblent dues à des reploiements des zones d’accroissement postérieures! à la fixation, ne se produisent qu'assez tard; elles ne semblent pas avoir eu le temps de se développer en raison de l'action polissante des eaux que ces animaux ont eu à subir sans discontinuité depuis leur naissance. Enfin lÆ{heria Petretinii Bat. possède une légère inflexion antérieure que l’on retrouve souvent chez les formes Jeunes d'Ætheria Caillaudi Féruss. Ligament. — Si on considère en vue postérieure une coquille fermée d’Ætheria de forme plumbea, on y voit très nettement le ligament. La partie seule visible, c'est-à-dire dorsale, de ce dernier se présente sous la forme d'une sorte de triangle isocèle dont le sommet répond au point de l'interligne valvaire où se rencontrent les deux sillons des valves, et dont les côtés égaux répondent aux sillons eux-mêmes (Voy. fig. 47). Le Lroisième côté est dirigé en avant. Au lieu d’être plan, ce triangle est incurvé de telle sorte qu'il peut être comparé à une portion de cône (le cône ayant été sectionné par un plan pas- sant par son sommet et le diamètre, ou une corde de la circon- férence de base). Cette surface triangulaire conique présente de nombreuses lignes parallèles à son côté antérieur et, qui, se trouvent être dans le prolongement des stries d’accroisse- ment des valves considérées dans la région postérieure de [a coquille. Le long des sillons des valves, au delà du côté antérieur du triangle, on voit des débris de substance ligamentaire qui ne sont autre chose’ que les ‘restes du ligament, tel qu'il existait à un stade moins avancé du développement de la coquille. À l'intérieur de la concavité du triangle ligamentaire, 1l existe une autre partie du ligament qui n’est pas visible sur la coquille fermée et qui le sera très nettement sur une coupe sagittale de l'animal. En effet, en sectionnant le ligament entre les deux valves, on s'aperçoit qu'il est formé des trois parties suivantes: d'abord, postérieurement, une partie noire mince qui s'insère MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 349 jusqu'au fond du sillon ligamentaire, c'est le triangle déjà décrit; en deuxième lieu, une partie d'apparence argentée formée de lamelles disposées les unes à côté des autres, et dont chacune présente de petites stries transversales. Cette partie s'insère au fond de la gouttière à fond arrondi, qu'elle remplit, et ses lamelles sont disposées par rapport à la partie fibreuse comme le montre la figure 48. En troisième lieu, enfin, une parte noire lamelleuse qui s'insère sur la crête mousse disposée antérieurement par rapport à la gouthière précitée (Voy. fig. 48). Les deux parties (1 et 3) sont for- mées de substance non élastique; la partie (2) incrustée de calcaire est formée de substance élastique. C'est la partie (1) seule qui est visible sur l'animal lorsque les valves sont rap- prochées et qui constitue le triangle ligamentaire ci-dessus décrit; elle recouvre les deuxième et troisième parties. Aux paragraphes où seront traitées l'embrvogénie, les affinités et Ja morphogénie des Æthéries, 1l sera montré comment ces trois parties correspondent aux trois parties du ligament des Unio- nid, et comment elles ont pu prendre la forme spéciale qu'elles affectent 1er. Chez les Ætheria de forme {ubifera, le ligament offre le même aspect que chez les précédentes. Toutefois, chez PÆtheria Cail- laudi Féruss, qui n'est, en réalité, autre chose qu'une variété d'Ætheria tubifera Sow., le ligament prend, en raison du grand développement du talon, un aspect tout spécial. Lorsque la coquille est fermée, on voit toujours le triangle ligamentaire et ses débris le long de ses anciennes positions ; si l'on regarde séparément l'une des valves, on voit qu'elle est parcourue dans toute sa longueur par l'ancien ligament actuellement sans fonction. La valve fixée en effet présente, suivant une des gé- nératrices du cylindre auquel elle peut être assimilée et à la limite de la région aplatie avec la région bombée, une sorte de traînée ligamentaire composée, ainsi que la constaté Reis (02), des trois bandes {deux non élastiques extrèmes, dont l'une répond à l'arête ligamentaire, etune élastique médiane) qui ont déjà été mentionnées {Voy. fig. 23, PL IT). À Pintérieur de la valve, la première trainée se prolonge par léperon ligamentaire déjà décrit. Cette trainée représente les positions 390 R. ANTHONY successives que le ligament à occupées aux différents stades de développement de l'animal. La même disposition se répète sur la valve operculaire et les deux traînées ligamentaires se font face, réunies seulement dans la région la plus proche de l'animal, chaque partie avec son homologue. Il m'a semblé utile, en traitant de la coquille et du ligament, de distinguer trois formes principales d'Æthéries. Au point de vue de l'anatomie des organes internes, aucune différence n’exis- tant entre les Æthéries des différentes espèces, cette distinction n'a pas lieu d'être faite. Muscles adducteurs. — Les muscles adducteurs, surtout l'an- térieur, sont de section assez considérable (1). Cette section a généralement la forme d’un ovoïde à grosse extrémité ven- trale pour le muscle postérieur; elle à au contraire la forme d'une ellipse très allongée pour le muscle antérieur, ellipse dont, dans certains cas, le grand axe serait recourbé suivant une ligne qui affecte souvent l'aspect d’une branche d’hyperbole. Les surfaces d'insertion sont généralement planes: dans certains cas elles sont convexes. Du côté central, la coupe de ces muscles adducteurs présente, comme ceux des Chames d’ailleurs, un aspect déchiqueté per- sillé comme si le tissu conjoncetif s'était infiltré peu à peu entre les faisceaux de fibres, cette disposition étant encore plus accusée que chezles Chames. Il semblerait que ces muscles disparaissent peu à peu du côté central. Parfois même, on voit de véritables ilots de substance musculaire détachés, et, très souvent, la section transversale du muscle antérieur ou sa surface d’in- sertion, ce qui revient au même, semble divisée en deux, quel- quefois mème en plusieurs tronçons; la division en deux du muscle adducteur antérieur est extrèmement fréquente. On la retrouvera d’ailleurs plus accusée encore dans tout un groupe de Rudistes. (1) Cette assertion est en désaccord avec ce que dit P. Pelseneer aux pages 113 et 141 du fascicule Mollusques in Traité de Zoologie de Raph. Blan- chard; d'après cet auteur le muscle adducteur antérieur des Æthéries serait très réduit et même souvent nul. Il y a donc lieu de croire que les exem- plaires d’Æthéries que Pelseneer a eu entre les mains aient été exceptionnelle- ment déformés. Il se plaint d’ailleurs dans un autre mémoire (91) de n'avoir pu étudier, faute de matériaux, l'anatomie de ces animaux. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES AE Comme chez les Chames et comme chez les Acéphales de forme arrondie, d'une façon générale, le muscle adducteur antérieur est tout entier situé ventralement par rapport à la bouche. L'explication possible de cette disposition sera donnée au chapitre traitant de la morphogénie. Au point de vue de la structure, chacun de ces muscles com- Fig. 49. — Coupe sagittale d'Ætheria plumbea Sow. Dans la région dorsale est le ligament avec ses parties caractéristiques. — 1, bouche ; 2, anus; 4, muscle adducteur antérieur; 5, muscle adducteur postérieur; 6, cœur. prend encore, comme tous les adducteurs d’'Acéphales, deux parties : l'une périphérique, qui, sur les animaux frais, doit être nacrée, l'autre centrale qui, sur les mêmes animaux, doit pré- senter l'aspect opaque. Ces deux parties sont macroscopique- ment très distinctes, même sur les animaux mal fixés et avant séjourné longtemps dans l'alcool faible. La partie nacrée, beaucoup moins considérable que la partie opaque, n'en est pas séparée par du tissu conjonctif, et la ligne de démarcation de ces deux substances est une ligne courbe légèrement concave en dedans. J'ai examiné, après dissociation dans l'acide azotique à 20 p. 100, des fibres nacrées et des fibres opaques provenant des Æthéries rapportées par MM. Chevalier et Decorse de leur mis- sion au Chart: et fixées par eux suivant les procédés courants de l'histologie. Un séjour prolongé dans lalcoo! avait rendu les : détails de structure de ces fibres difficiles à constater. Toutefois j'ai pu me rendre compte des faits suivants : les fibres opaques présentent la structure en mosaïque habituelle de la zone 259 R. ANTHONY intérieure des muscles adducteurs d'Acéphales, et les fibres nacrées sont absolument lisses. Manteau. — Le manteau à lue la même forme que la surface intérieure de la coquille, puisqu'elle est le produit de la sécrétion de son bord. Il est constitué de deux lobes complè- tement séparés suivant leur pourtour, sauf en une toute petite région dorsale correspondant à la zone ligamentaire et au point de terminaison des branchies situé un peu ventralement par rapport au musele addueteur postérieur (disposition des céphalothétiques de la première catégorie (Submytilacea) . La cavité palléale comprend done en réalité deux grandes issues, l’une palléale ou d'entrée, antérieure et ventrale, l’autre branchiale ou de sortie, postérieure. Des deux lobes du man- teau, celui qui correspond à la valve fixée est généralement le plus développé. Cela est naturel puisque cette valve fixée est géné- ralement plus creuse que la valve libre. Dans la région cardi- nale où les deux lobes se rejoignent, on aperçoit le moulage en relief des éperons ligamentaires qui sont en creux sur la coquille. Le manteau s'insère sur la coquille, suivant une impression discontinue dépourvue de sinus. Son bord libre est formé de. deux lèvres, l’une extérieure, coupante et mince, l’autre inté- rieure, plus épaisse et garnie de petits tubercules disposés sur un seul rang. Cette disposition est tout le Tong du bord palléal identique à elle-même. La musculature du manteau est très simple; elle comprend, outre les deux muscles addueteurs qui ont été décrits à part, de petits faisceaux musculaires dont l'ensemble des impres- sions constitue l'impression palléale. Au lieu d’être, comme chez la plupart des Lamellibranches, accolés les uns aux autres, for- mant une impression palléale continue, ces petits faisceaux musculaires sont séparés, et l'impression palléale discontinue. Chacun des faisceaux musculaires est constitué de deux sortes de fibres, les unes allant à la lèvre extérieure, les autres à la lèvre intérieure du manteau. Les fibres musculaires du manteau sont lisses. Pied. — Chezles Æthéries, le pied à complètement disparu, il n’en existe pas la moindre trace, el ce que Rang et Caïllaud (34) décrivent comme tel dans leur mémoire est tout simple- MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 3. ment la bosse viscérale qui, chez ces animaux, est extrêmement proéminente, Chez la plupart des exemplaires, j'ai observé les rétracteurs postérieurs du pied existant encore avec une grande netteté. L'ensemble de ces deux muscles à pris la forme d'un petit fais- Fis. 50. — Ætheria plumbea Sow. extraite de ses valves. Une fenêtre a été pratiquée dans un lobe palléal pour montrer la cavité rétro-branchiale et le péricarde. — 4, muscle adducteur antérieur; 5, muscle adducteur postérieur ; 6, cœur (ventri- cule et oreillettes) ; b, branchies (on voit le mésobranchial et les jonctions inter- foliaires); p, impression palléale discontinue. ceau en 7, dont la branche solitaire dirigée en avant se perd, par de fines fibres en éventail, sur le bord postérieur de la bosse viscérale. Ses deux branches postérieures vont tantôt, rappe- lant ce que l’on observe chez les Chames, aborder à angle droit la face antérieure du muscle adducteur postérieur, et leurs fibres se perdent alors entre deux faisceaux, tantôt se terminer im- médiatement au-dessus de ce muscle adducteur postérieur et s'insérer sur les valves. Dans certains cas les deux branches, qui représentent, lune un rétracteur postérieur droit, l'autre un rétracteur postérieur gauche, sont égales et paraissent éga- lement musculaires. Dans d’autres cas, au contraire, celle de ces deux branches qui répond à la valve fixée est atrophiée et n'est plus représentée que par un tendon. Cette particularité m'a semblé se montrer surtout dans les gros spécimens. C’est tout ce qui reste chez les Æthéries de Pappareil muscu- laire du pied. Appareil digestif. — Xei encore, comme chez les Chames, la ANN. SC. NAT. ZOOL. 1.23 394 R. ANTHONY bouche est entièrement située dorsalement, ainsi qu'il a été dit, par rapport au muscle adducteur antérieur. Cette bouche à la forme d’une large fente transversale, en- tourée de palpes labiaux finement striés sur leurs faces d’acco- lement, lisses sur leurs faces externes. Leurs bords dorsaux sont sur tout leur trajet soudés au tégument, dans l’espace situé entre le manteau et la bosse viscérale. Après un court mais très large œsophage, on pénètre dans (G (@ Fig. 51. —T rajet du tube digestif d'Æfheria plumbea Sow. l’intérieur de la bosse viscérale. — 1, bouche; 2, anus ; 5, muscle adducteur postérieur. un estomac spacieux et de forme irrégulière, possédant à son intérieur un certain nombre de piliers entourés à leur base ven- trale d’un repli semi-lunaire. Dans cet estomac débouchent des conduits hépatiques, et, de sa face ventrale part lintestin, dont la direction fait à peu près un angle droit avec celle de l’'œsophage. Cet intestin, suivant à peu près le plan sagittal du corps, longe à une certaine distance le bord antérieur, puis la courbure ventrale et enfin le bord postérieur de la bosse viscé- rale. À parür d’un certain point, il se replie postérieurement et revient sur lui-même, s'insinuant entre son trajet précé- dent et le bord postérieur de la bosse viscérale ; lorsqu'il a attemt la base de cette dernière, 1l quitte brusquement le plan sagittal et s'infléchit nettement à gauche (du moins sur l'animal sur lequel je lai disséqué), contournant ainsi la première partie de son trajet. Après en avoir fait le demi-tour, 1l passe en dedans d'elle, formant une circonvo- lution qui lui est concentrique et toujours située dans le plan sagittal. Quelquefois, au lieu de présenter cette inflexion à gauche, il se porte directement à droite et passe en dedans MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 5DD de la première partie de son trajet. Quoi qu'il en soit, que la fixation se fasse par la valve droite ou la valve gauche, le sens de ce mouvement ne m'a jamais paru renversé. [m'a semblé toutefois que, lorsque la fixation se faisait par la valve gauche, la légère inflexion gauche n'existait pas aussi nettement accusée ; du point où nous l'avons quitté, lintestin se replie deux fois pour se relever enfin et, quittant la masse viscérale, se di- riger, par une ligne légèrement courbe, du côté de la région postérieure de l'animal. C’est le rectum, qui ne traverse pas le cœur, mais est placé dorsalement par rapport à lui; suivant la disposition normale chez les Acéphales, ce rectum contourne en arrière le muscle adducteur postérieur et se termine par un anus placé comme le montre la figure. L'intestin postérieur est parcouru par un typhlosolis très marqué comme chez les Unionidés (Voy. fig. 54). Il est à re- marquer aussi que tout le long de son trajet, l'intestin posté- rieur est dévié du côté de la valve fixée (Voy. fig. 5%). Il n'existe ni cæcum stomacal, ni tige cristalline. Foie. — Le foie des Æthéries est une glande en tube, comme d'ailleurs chez tous les autres Lamellibranches, mais les cæcums y sont remarquablement distincts les uns des autres. Cette glande est formée de lobes nettement séparés, entou- rant l'estomac et noyés dans la glande génitale. Elle m'a paru dans la plupart des cas un peu plus développée du côté répon- dant à la valve fixée. Les canaux exsécréteurs du foie débouchent dans la région antérieure del’estomac, comme chez la plupartdes autres Lamel- lhibranches. Appareil respiratoire. — Les deux branchies des Æthéries sont absolument semblables et égales. Elles sont divisées chacune en deux lames dont les externes sont toujours plus étroites que les internes. Comme celles des Chames, elles ont généralement la forme d'un S allongé dorso-ventralement, mais, comme les Æthéries sont beau- coup plus polymorphes que les Chames, PS qu'elles forment est tantôt très accusé, d'autres fois extrêmement allongé, si allongé qu'il peut arriver qu'il ne soit même plus reconnais- sable, la branchie prenant une direction à peu près antéro- DOG R. ANTHONY postérieure avec une légère incurvation à concavité dorsale. Alors que chez les Chames, les branchies tendent à rompre leurs connexions avec le manteau, la masse viscérale et elles- mêmes et à flotter librement comme cela se voit chez les Avi- cules ou les Pinnes dans la cavité viscérale, les branchies des Æthéries ont conservé toutes leurs connexions. Leurs lames externes (feuillet réfléchi) sont intimement unies avec Le lobe palléal ; leurs lames internes sont dans la région antérieure unies à la bosse viscérale et dans la région postérieure entre elles par l'intermédiaire d’une lame interbranchiale linéaire. Il résulte de ceci que chez les Æthéries le grand septum interpalléal cons- ütué par les branches et leurs connexions, est absolument sans autre solution de continuité que les fenêtres formées par l’'entrecroisement des filaments et des jonctions interfilamen- taires. Les branchies, au lieu de débuter, comme chez la plupart des Lamellibranches, entre les palpes labiaux, débutent, comme chez les Chames un peu en arrière, mais leur disposition se dif- férencie de celle qu'on observe chez ces dernières par ce fait que les deux lames de la même branchie débutent à peu près au même endroit et non l’externe sensiblement en arrière de l'interne. Les branchies se terminent en arrière, au-dessous du musele adducteur postérieur. Leur terminaison constitue la commis- sure palléale unique divisant l'ouverture du manteau en deux orifices, comme on l'a vu. Enfin les branchies sont reliées au corps, d’abord par les con- nexions dont il a été question plus haut, ensuite par un repli ou mésobranchial très développé ressemblant beaucoup à celui des Anodontes. | Les branchies des Æthéries sont plissées, et ce caractère, qui saute pour ainsi dire aux yeux dès qu'on entr'ouvre les valves d’une Æthérie, est peut-être pour quelque chose dans l'erreur que beaucoup semblent être tentés de faire et qui est de rap- procher les Æthéries des Huîtres, d'en faire des Huîtres à deux muscles, ainsi qu'on à fait souvent des Dimyidæ, des Perten à deux muscles. Ces plissements, très accentués dans la région postérieure de la branchie, le sont beaucoup moins dans la MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES BY région antérieure, c'est-à-dire au voisinage des palpes labiaux, où elles sont à peu près planes. Sur un exemplaire adulte d'Ætheria plumbea Sow., j'ai compté du côté droit, qui se trou- vait être celui répondant à la valve fixée, 133 plissements sur la lame externe et 158 sur la lame interne. Ces nombres, qui d’ailleurs sont approximatifs, doivent varier suivant les indi- vidus. Aux bords libres des branchies les plis- sements s'interrompent:; le bord libre de la \\\ . r \ lame interne seul est parcouru par une dépres- al) sion en gouttüière longitudinale. 1) ( \ Au point de vue de la structure, les bran- l | chies d’Æthéries sont sensiblement des bran- s I] chies d’Anodonte, mais des branchies d'Ano- OT donte plissées. J'ai compté sur ÆHerin nel plumbea Sow les filaments que comprenait \ si un pli du fond d’une gouttière au fond de la AOXNY suivante, et, j'aitrouvé quele nombre en variait \L de treize à dix-huit. Les tigelles chitineuses qui les soutiennent sont plus solides et plus épaisses Fig: 52. — Fragment + \ de surface bran- dans les filaments des gouttières que dans ceux chiale (près de l'ex- des crêtes. Comme chez tous les Eulamellibran- de ches, les filaments sont réunis les uns aux riaCaillaudiFéruss : ë - > - : montrant les fila- autres par des Jonctions interfilamentaires qui ments et les jonc- les croisent perpendieulairement, déterminant 1ons- Intertlamen- ainsi à la surface de l'organe des fenêtres rec- tangulaires à grand axe perpendiculaire au grand axe de la branchie. Ces jonctions interfilamentaires sont le plus souvent dans la continuation les unes des autres de telle sorte que leur succession forme des sortes de lignes paral- lèles à son bord libre. En plus de ces jonctions interfilamentaires, 1l existe des Jonctions interfoliaires, c'est-à-dire allant, dans chaque bran- chie, du feuillet direct au feuillet réfléchi. Elles se présentent sous l'aspect de’ cloisons longitudinales (Voy. fig. 50). Ces cloisons interfoliaires sont de deux sortes : les unes, les gran- des, qui parcourent toute la hauteur de l'espace interfoliaire commençant au niveau de l'axe branchial pour aller jusqu'au bord libre ; les autres, Les petites, qui commencent simplement 308 R. ANTHONY au milieu de l’espace interfoliaire. Les premières se rencontrent tous les deux plissements et les secondes s'intercalent entre elles, de telle sorte que, si l’on fait une coupe de la branchie près de son axe, on voit que chaque chambre interfoliaire comprend deux plissements, alors qu’elle n'en comprend qu'un seul, au Fig. 53. — Coupe très grossie de la lame interne d'une branchie d'Ælheria Bourqui- gnati Rchbr.. En bas, feuillet direct; en haut, feuillet réfléchi. — 1, filament branchial; ÿ.p, jonction interfilamentaire; f.v, jonction interfoliaire; c, cavité branchiale ; o, œuf. contraire, si la coupe passe près du bord libre. Les cloisons interfoliaires de la lame interne sont beaucoup plus larges que celles de la lame externe, de telle sorte qu'alors que les feuillets de la première restent considérablement distants ceux de la seconde paraissent presque accolés. Enfin, outre ces deux sortes de Jonctions qui viennent d’être décrites, il en existe encore une troisième catégorie que nous pourrons appeler, comme pour les Chames, jonctions interpli- caturales; ces jonctionsrejoignent les fonds de deux gouttières MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 3)9 voisines du même feuillet. Elles sont larges et assez près les unes des autres, laissant entre elles des fenêtres arrondies. Elles sont plus accusées sur la lame interne que sur la lame externe et sur le feuillet direct que sur le feuillet réfléchi. Les branchies droite et gauche paraissent semblables. La circulation branchiale sera étudiée à propos de l'appareil circulatoire. Cavité générale. — Le péricarde, seul reste chezles Acéphales de la cavité générale, est assez spacieux.Il n’est pas traversé par le rectum et les figures 49 et 50 renseignent suffisamment sur sa forme. Dans sa région antérieure se trouvent les orifices bojano-péricardiques. Système circulatoire. —1. Cœur. —Chezles Æthéries, comme chez tous les autres Acéphales, le cœur est dorsal, situé au voi- sinage de l'extrémité dorsale du muscle adducteur postérieur. II est logé dans un péricarde assez vaste et est formé d’un ventri- cule et de deux oreillettes. Le ventricule est dorsalement situé par rapport aux oreillettes qui sont situées en dessous de lui et de part et d'autre. La paroi du ventricule est épaisse, musculeuse, et, sur les animaux que j'ai eus à ma disposition, elle était, probablement par le fait de l'immersion brusque dans l'alcool, fortement con- tractée, ce qui donnait à cet organe une forme sensiblement arrondie ; celle des oreillettes est au contraire mince et la cavité de chacune de ces dernières est beaucoup plus vaste que ne l’est celle du ventricule. Les deux oreillettes sont sensiblement égales. Contrairement à ce qui se passe chez l'Anodonte et l'Unio, desquels, comme on le verra plus loin, il y a lieu de rapprocher les Æthéries, le cœur n’est pas traversé par le rec- tum, mais se trouve situé ventralement par rapport à lui. Le ventricule présente quatre ouvertures: deux supérieures dont l’une est antérieure et munie d'une valvule, l'autre posté- rieure, et qui conduisent dans les aortes antérieures el posté- rieures; deux latérales inférieures, l’une droite, l'autre gau- che, par lesquelles les oreillettes communiquent avee le ventricule. Les oreillettes présentent chacune deux orifices, l’un supé- rieur par lequel elles communiquent avec le ventricule, l’autre 360 R. ANTHONY inférieur par lequel elles communiquent largement avec le grand vaisseau branchial efférent. 2. Système artériel. — Comme il à été dit, partent du cœur deux gros troncs vasculaires, l'aorte antérieure, qui à son ori- gine possède une valvule et l'aorte postérieure. L'aorte antérieure, après sa sortie du cœur qui s'effectue dans le plan sagittal, se place au-dessus du tube digestif. Elle ne tarde pas à prendre bientôt, avant mème d’avoir dépassé les limites du péricarde, une direction latérale qui est tantôt droite, tantôt gauche. Puis elle donne une branche princi- pale, l'artère viscérale, qui irrigue la masse viscérale tout en- üère, et les palpes labiaux; elle donne aussi auparavant les deux circumpalléales antérieures très réduites. L'aorte postérieure sort également du cœur dans le plan sagittal, mais ne le quitte pas. Elle reste toujours et continuel- lement en dessous du rectum, c’est-à-dire ventralement située par rapport à lui. Arrivée au niveau du bord dorsal du muscle addueteur pos- térieur, l'aorte postérieure se divise en deux branches qui suivent les arêtes des angles dièdres que fait la face posté- rieure du muscle adducteur postérieur avec le bord du man- eau. Ces deux branches, qui sont les circumpalléales posté- rieures, irriguent en passant l'adducteur postérieur, le bord du manteau et, par des branches internes, le rectum ; elles se continuent en avant avec les circumpalléales antérieures. 3. Système veineux. — Des artères, le sang passe dans les lacunes dont la plus importante est le sinus rénal, situé en avant el en bas du muscle adducteur postérieur. L'absence du pied entraine celle du siñus pédieux. Des lacunes, le sang est ramené, par l'intermédiaire des artères branchiales, aux bran- chies où il s'hématose. Les artères branchiales suivent Îles bords des feuillets réfléchis. Des branchies, le sang est ramené au cœur par lintermé- diaire des vaisseaux efférents qui, suivant les mésobran- chiaux, vont finalement se jeter dans la veine branchiale en Communication avec l'oreillette. Organes excréteurs. — Les organes excréteurs, ont comme chez les Unionidés, la forme de deux sacs repliés et à deux MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 361 orifices. D'une part, ils s'ouvrent par deux ouvertures situées dans la région antérieure du péri- carde, seul reste de la cavité géné- rale des Mollusques Acéphales, d'au- tre part dans le prolongement antéro- externe de la chambre palléale, c’est- à-dire dans l'angle que fait le méso- branchial avec la paroï de la bosse viscérale. Cet orifice est très réduit et est situé notablement en dessous et un peu en dehors de lorifice de sortie de la glande génitale : et par rapport à la bosse viscérale, 11 se trouve situé à peu près à Punion de son quart antérieur avec ses {rois quarts postérieurs. Organes génilaur. — Les sexes semblent être séparés chez les Ætheridæ, bien que je ne puisse me déclarer d’une façon absolument po- sitive sur ce point, étant donné le peu de valeur de mes matériaux pour Les études histologiques. Comme chez les Unionidés, tous les interstices laissés entre les organes sont comblés par des ramifications de la glande géni- tale qui s'étend même jusque dans le manteau. La glande génitale S'ouvre dans la cavité branchiale par deux très petits orifices situés à un millimètre et demi Fig. 54. — transversale Coupe d'Ælheria plumbea Sow. pas- sant au niveau du cœur. — B, branchie: C, cœur; G, glande génitale: 1, intestin (l'intestin postérieur est muni d'un typhlo- solis ; M, manteau dont le lobe correspondant à la ‘valve fixe est le plus développé; N, con- nectif cérébro-viscéral; 0, oreil- lette: P, cavité péricardique ; R, organe de Bojanus; S, sinus. au-dessus et un peu en dedans des orifices bojaniens. Ces orifices ont la forme de fentes allongées d'avant en arrière. Les œufs que j'ai eu la chance de pouvoir observer seront décrits à propos de l'embryogénie. Système nerveux. — Le système nerveux comprend, comme toujours trois paires de ganglions : Les deux cérébro-palléaux qui sont petits ; les deux viscéraux, plus grands, sont plus développés 302 R. ANTHONY et tendent à se confondre; les deux pédieux qui sont extrème- ment réduits et très rapprochés de la bouche. De chaque ganglion cérébro-palléal partent : le nerf palléal antérieur longeant la face postérieure du muscle adducteur anté- rieur ; deux nerfs destinés aux palpes labiaux ; la commissure cérébrale qui passe au-dessus de la bouche ; le grand connectif cérébro-viscéral. Dans la région antérieure de l'animal, c'est-à- dire au niveau de la masse viscérale, les deux connectifs sont naturellement, et par le fait de la présence de la bosse viscérale, très distants l'un de l'autre; à partir du moment où la masse viscérale finit en arrière, ils se rapprochent et marchent parallè- lement l’un à l'autre jusqu'aux ganglions viscéraux. Le ganglion cérébro-palléal donne enfin le connectif cérébro-pédieux très fin et très court qui aboutit à un ganglion pédieux très réduit situé immédiatement en dessous de la bouche. Chaque ganglion viscéral donne, outre le connectf cérébro- viscéral déjà décrit, un nerf branchial qui suit le bord posté- rieur du mésobranchial et un nerf palléal qui, suivant la face antérieure du muscle adducteur postérieur, se divise en deux branches, l’une latérale, l'autre postérieure. L'état de mes matériaux ne m'a pas permis de pousser plus loin l'étude de ces différents filets nerveux. Embryogénte. Il m'a été impossible de faire, faute de matériaux, l'étude des premiers stades de développement des Æthéries. Il est facile de concevoir, en effet, qu'il ne doit pas être aisé de se procurer des larves d’Æthéries, voire même de formes jeunes non fixées, et, comme on le verra par la suite, d'ailleurs, il serait malaisé, même si on en rencontrait, de savoir si l’on à réellement affaire à des Æthéries. J'ai done dû me borner à l'étude des stades déjà fixés. Avant d'entreprendre cet exposé embryologique, Je ne dois pas toutefois passer sous silence l'heureux hasard qui m'a mis en présence d'œufs d’Æthéries. En effet, parmi les Mollusques rap- portés par la mission Chevalier, se trouvait un lot d’Æthéries Ætheria Bourguignati Rehbr. et d'Urmonidæ que compte MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 3069 déterminer M. le D'T. de Rochebrune), recueillis par le D’ Decorse, en janvier 1903, dans les Rapides du Bas-Gribingr. Les branchies de ces Æthéries et de ces Unionidæ étaient bour- rées d'œufs qui se trouvaient sensiblement au même point de leur développement, d’ailleurs très avancé. Les œufs des Æthé- ries étaient d'un diamètre environ six fois plus faible que ceux des Unionidæ et leur surface, au lieu d'être lisse, était recou- verte de rugosités assez régulières qui pourraient être com- parées à de courts piquants. Chez les Æthéries comme chez les Unionidæ la cavité branchiale joue donc le rôle de cavité incu- batrice, c'est là un pointimportant établi. Il est regrettable que la récolte du D° Decorse n'ait pas été faite quelques jours plus tard, au moment précis où les larves écloses ne sont pas encore sorties de la cavité branchiale de la mère. Cela nous aurait peut-être permis d'observer des glochi- dium d'Æthéries. Il serait intéressant, en effet, de savoir si les Æthéries présentent ou non comme les Unionidæ, le stade glo- cladium. Leurs affinités avec ces derniers, qui seront exposées plus loin, permet en tout cas de le supposer, et la présence dû- ment constatée de ce glochidium eût constitué un fort appoint à cette manière de voir déjà si probable et qui consiste à faire des Æthéries des Unrionideæ fixées. La figure 53 représente une coupe d'un feuillet branchial d'Ætheria Bourquignati Rechbr. dont L cavité contient des œufs. Les matériaux que j'ai utilisés pour mon étude embryo- génique des Æthéries sont constitués par de jeunes Æthéries que J'ai trouvées fixées sur des coquilles d'adultes appartenant au Muséum d'Histoire naturelle. J'ai pu me procurer tous les stades, depuis celui qui n'atteint que # où 5 millimètres en diamètre antéro-postérieur maximum jusqu'à la forme adulte la plus développée. Les espèces dont j'ai pu observer les formes jeunes sont les suivantes : Ætheria plumbea Sow. et Ætheria Caillaudi Féruss. Quoique n'ayant pas eu à ma disposition d'individus non encore fixés, il m'a été possible, grâce à la netteté des stries d'accroissement, de me rendre un compte exact de la forme que ces animaux affectent avant la fixation. 264 R. ANTHONY Quelle que soit l'espèce envisagée, lajeune Æthérie est avant la fixation absolument semblable à une Anodonte. Comme elle, elle est nacrée, de couleur verdâtre extérieurement, franche- ment allongée d'avant en arrière, parfaitement symétrique par rapport à son plan sagittal, et sa charnière est dépourvue de dents ou ne possède qu'une longue dent latérale postérieure très peu accentuée, dans laquelle on pourrait peut-être voir la lon- gue dent latérale postérieure des Unionidæ. Souvent à ce stade la jeune Æthérie présente une sorte de vallonnement dorso- ventral que l’on retrouve chezbeaucoup d'Unionidés adultes. C'est à peu près lorsque l'animal a 2 à 3 millimètres de long (longueur antéro-postérieure) que la fixation se produit. Au lieu d’être, comme souvent chez les Chames, uniquement anté- rieure, la fixation est chez les Æthéries toujours à la fois antérieure et postérieure. La figure schématique 57 permet de se rendre aisément compte de cette disposition et la figure 25 PI. TT, montrent très nettement sur une Jeune Æ1he- ria les limites de la zone fixée. À partir du moment où la fixation s’est produite, l'animal commence à s'arrondir et cet arrondissement s'accomplit par l'intermédiaire d’un processus auquel j'ai donné le nom de pseudo-plicature parce que, comme on l’a vu précédemment, Le bord dorsal de la coquille adulte semble s'être replié sur lui- même. Les zones d’accroissement de la coquille que le manteau sécrète, comme on sait, dans toute la région de la valve, ne donnant pas insertion au ligament, commencent peu à peu à remonter dorsalement par rapport à ce dernier. Lorsqu'un certain nombre de couches se sont produites, 1l existe en arrière du ligament un véritable pli en forme d’éperon au fond duquel se trouve l'extrémité postérieure ligamentaire. Ce ligament, qui se développe, on le sait, d'avant en arrière, est donc, par le fait de cette pseudo-plicature de la coquille, limité en quelque sorte par cet obstacle dans sa croissance antéro-postérieure. Toute- fois, comme il se forme toujours néanmoins de la substance ligamentaire nouvelle, il arrive que, dans quelques cas, l’extré- mité postérieure du ligament parvient à contourner la plicature, et, c'est pourquoi, chez les adultes, on voit parfois la substance MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 369 ligamentaire fibreuse s'étendre sur le bord postérieur du sillon ligamentaire et même le dépasser un peu. D'autre part, les couches de substance élastique augmentent également ; gênées dans leur développement antéro-postérieur, elles 4 AL. Fig. 55. — I, disposition du ligament chez l'Unio: 11, disposition da ligament chez une jeune Ætheria Caillaudi Féruss peu de temps après la fixation ; HI, dispo- sition du ligament chez une Æfheria Caillaudi Féruss adulte. repoussent d'une part en avant le bord cardinal de Ja coquille qui s'incurve, d'autre part en arrière le ligament fibreux dorsal qui se rompt, se détachant de son point d'origine au niveau du crochet, et on arrive ainsi à avoir la dispo- sition représentée dans la figure 55 de la coupe du ligament chez les Æthéries adultes. Cette figure donne en effet les diffé- rents stades de développement du ligament et la constitution de larête ligamentaire chez les Æthéries. Après la fixation, la coquille continue sa croissance, et, la plicature s’accentuant et se resserrant, chaque nouvelle couche tend à parfaire cette forme arrondie qu'elle n’atteint jamais complètement, en raison des obstacles nombreux qu'elle ren- contre. Chez certaines Æthéries, la croissance semble être très lente 366 R. ANTHONY el ne pas dépasser une certaine Himite. Chez d’autres, au contraire, les formes à long talon (Ætheria Caillaudi, Féruss.), les couches calcaires se succèdent rapidement et, lorsque l'animal a atteint une certaine taille, ces couches caleaires concentriques cessent d'adhérer au substratum et se relèvent ; il en résulte une forme en cornet, des couches calcaires venant à mesure, comme chez l’Huître, combler la partie imférieure de ce cornet ; la forme connue del Æ1heria CaillaudiFéruss. se constitue avec son long talon coupé de cloisons transversales, son arêteligamen- taire, son ligament longitudinal et sa valve operculaire dont la partie inférieurese détruit peu à peu (Voy. PL II fig. 22; 23 ; 24). Physiologie. Comme pour les Chames, 1l m'a été impossible pour les Æthéries de me procurer des spécimens vivants et d'observer par moi-même leurs conditions d'existence. Mais, là encore, j'ai pu avoir des renseignements précis. Is proviennent de MM. Chevalier et Decorse, qui ont pu les observer longuement au cours de leur mission en Afrique équatoriale. M. T. de Rochebrune, assistant au Muséum, et mon excellent ami le lieutenant de cavalerie Zerbini, m'ont aussi fourni des rensei- gnements précieux à ce sujet. Le genre Æ{heria est exclusivement africain. On le trouve uniquement dans les grands fleuves de l'Afrique équatoriale. Il en à été recueilli, par exemple, des exemplaires dans le Nil, en amont des cataractes, dans le Sénégal, le Niger, le Congo, etc. Les Æthéries vivent fixées par une de leurs valves, tantôt la droite, Lantôt la gauche avec une égale fréquence, et dans la même espèce on trouve des individus fixés par l'une et d’autres fixés par l’autre valve; leur surface de fixation très étendue s'étend, ainsi qu'il à été dit, aussi bien antérieurement que postérieurement, au contraire de ce quise passe chez les Cha- mostrea et la plupart des Chames fixées par leur région anté- rieure seulement. De la facon dont elles sont fixées résulte en grande partie, comme on le verra plus loin, la morphologie des Ælhéries. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 307 D'après ce que m'ont rapporté les différentes personnes ayant voyagé en Afrique, la forme roulée, aplatie el compacte est parliculière aux rapides, aux cataractes, en somme aux en- droits où les eaux sont très agitées. La forme, au contraire, épineuse, légère el souvent à long talon, rappelant les Hippu- rites, se trouve dans les eaux tranquilles et parfois même vaseuses ; ceci est d'ailleurs d'accord avec l'opinion de Simroth (90). Lorsqu'un fleuve à cours rapide fait une anse à un certain endroit, dans cette anse les eaux sont plus tranquilles et Ia vase S'y accumule; c'est là que l'on rencontre les Æthéries à long talon formant des sortes de bouquets dont la base est souvent attachée au substratum rocheux du fond. Lorsque les eaux sont basses, on voit alors ces Æthéries enfoncées dans la vase de telle sorte que la loge contenant l’animal émerge seule à peu près au-dessus de son niveau. Lorsque les pluies violentes arrivent, entraînant une quantité de limon plus considérable que d'habitude, les Æthéries sont subi- tement recouvertes et périssent. Simroth (90), dans une note intéressante sur les Æthéries des chutes du Congo dit que celles qui se trouvent fixées dans les endroits où les eaux sont tran- quilles, se trouvent parfois recouvertes d'une couche de limon qui empêche par son poids l'ouverture de la coquille. L'entrée et la sortie de l'eau se feraient alors, d’après cet auteur, par les épines tubulées du bord, dans lesquelles doivent pénétrer des prolongements du manteau. (Il est peut-être intéressant de rapprocher cette particularité des canaux des Rudistes). Enfin, ilest une forme d’Æthérie, lÆtheria Petretinu Bgt., dont les caractères morphologiques spéciaux ont été signalés et qui présente un mode de vie également spécial. L'ÆTheria Petretinit Bgt. a été exclusivement rencontrée dans les tuyaux de conduite en fonte de Ramlé, près le canal de Mahmoudieh, en Égypte. Sa forme spéciale est sans aucun doute en rapport avec son mode de vie tout particulier dans une eau peu agitée mais sans cesse animée d’un mouvement régulier et toujours dans le même sens. En résumé, il semble que deux conditions d'existence soient particulières aux Æthéries : 1° la chaleur des climats tropi- caux ; 2° les courants rapides et Les eaux tourmentées, pour la 308 R. ANTHONY forme plumbea ; les eaux tranquilles et vaseuses, pour les formes tubifera et sa variété Caillaudi; le cours régulier et con- tinu des conduites d'eau de Ramlé, pour lÆtheria Petre- lin Bgt. Affinités. L'opinion des personnes étrangères aux sciences naturelles et auxquelles on présente une coquille d’'Ætheria plumbea Sow., par exemple, est immédiatement que l’animal en présence du- quel on les met est une Huître. Or, comme on la vu d’après l'exposé des caractères des Æthéries, cette opinion ne peut être soutenue. En dehors de la disparition d’un des muscles adducteurs de l'Huître, ce qui pourrait n'être en somme qu'un “aractère d'adaptation, ilest à noter le mode de vie (aquatique pour les Æthéries), la forme et la structure de la coquille et de la branchie qui éloignent d’une facon complète les Æthéries des Huitres. Le seul caractère commun qu’aient ces animaux est la fixation pleurothétique qui, comme on le sait, peut se produire chez des animaux aussi différents que possible. Considérant la fixation pleurothétique et la présence des deux muscles, Lamarck en fit des Chamidés. Comme on a pu le voir au cours de ce travail, cette opinion ne peut être soutenue. Actuellement on s'accorde en général à faire des Æthéries des Unionidæ, et voier quels sont les arguments qui peuvent maintenant être fournis à l'appui de cette manière de voir. On peut les rer à la fois de leur morphologie, de leur embryo- génie et de leur physiologie; nous allons les examiner : 1° MorPHoLOGIE. — «. C'oquille. L'aspect général de la coquille est à peu près le même chezles Æthéries que chez les Unionidæ. On y trouve, chez les formes non roulées comme l'Æ#heria Petretini Bet. ou l'Æthera Caillaudi Féruss, le même épi- derme verdâtre. Comme les Anodontes, les Æthéries n’ont pas de dents à leur charnière. Enfin, comme les Unionidæ, elles ont la coquille superbement nacrée à l’intérieur. Cet argument üré de la présence de la nacre à une grande valeur. Les seuls Acéphales nacrés sont, en effet, avec les Unionidæ, qui sont des Eulamellibranches, et les Anatinidæ, autres Eulamelli- branches qui ne peuvent avoir avec les Æthéries aucun rapport MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 309 de parenté, des Filibranches comme les Trigonies, les Ano- mies, les Avicules et leurs alliés, auxquels on ne peut songer lorsqu'il s'agit d'établir les rapports de parenté des Æthéries. 5. Branchies. Les branchies des Æthéries présentent, ainsi que les figures permettent de S'en rendre compte, les mêmes caractères généraux que celles des Unionidés. Ce sont, comme celles de ces derniers, des branchies d'Eulamellibranches. Leurs caractères particuliers consistent uniquement dans leurs plissements, que larrondissement peut expliquer et les Jonctions interphcalurales qui en sont la conséquence. Les branchies des Æthéries, comme celles des Urionidæ, jouent le rôle de cavité incubatrice. y. Orqunes génitair. Au point de vue sexuel, les Æthéries paraissent être dioiques comme les Urionidæ ; elles sont très probablement vivipares et, en tout cas, leur branchie joue, comme il à été dit, pour les produits génitaux le rôle de cavité incubatrice, caractère très spécial aux Unrionide. 2° EmBRrYoGÉNIE. — Par leur embrvogfnie, les Æthéries sont absolument des Urionidæ. Sans revenir sur le fait très important et déjà signalé de lincubation branchiale commune aux Urionidie et aux Æthé- ries, Je me contenterai de rappeler que la jeune coquille des Æthéries est, avant la fixation, semblable à celle des Urionidæ. Ce n’est qu'à partir du moment où là fixation s'est pro- duite qu'elle perd ses caractères spéciaux (Voy. fig. 25 et 26, BEI). S 3° PHYsIOLOGIE. — Au point de vue du mode d'existence, enfin, les Æthéries se rapprochent encore des Urionidæ. Comme eux, elles habitent exclusivement les eaux douces. Or, parmi tous les Acéphales qui habitent les eaux douces, les Unionidæ sont les seuls auxquels on puisse comparer les Æthéries. w En résumé, la présence de Ja nacre, la constitution de la branchie, l'existence fluviatile et surtout le développement embryogénique ne permettent d'élever aucun doute sur les affi- nités réelles des Æthéries, qui ne sont en somme que des Unio- nidæ adaptés à un genre de vie spécial. # 10 > ANN. £C. NAT. ZOOL. ET 370 R. ANTHONY Morphogénie. Par la mise en action de quels facteurs cette transformation a-t-elle pu se produire, des Unionidæ ont-ils pu devenir des Æthéries? Supposons que, par un procédé quelconque, des Unionidæ semblables à ceux qui vivent dans la vase des grands lacs de l'Afrique équatoriale se soient trouvés transportés dans un des fleuves avec lesquels ils sont en relation, tels le Nil, le Niger, le Congo. Ces fleuves sont, on le sait, en certaines régions, parsemés de rapides, de chutes, de cataractes, où l'eau sans cesse renouvelée et oxygénée est particulièrement favorable à l’existence. Les Unionidæ qui s'arrêtent en ces régions ne tardent pas à pulluler, et comme, grâce au mouvement conti- nuel de Peau, la vase ne peut se déposer dans ces rapides, ils ne peuvent, comme leurs congénères des lacs, s’enfour et prendre la position céphalothétique ; fatalement, et de par le fait de leur forme même, ils tombent sur une de leurs valves. D'autre part, l'eau en ces régions est sans cesse chauffée par les rayons du soleil tropical, et, cette élévation de température provoque, pour les animaux qui nous occupent, une surpro- duction de calcaire qui semble devoir aboutir, l'animal étant en pleurothétisme, à la fixation. Par le fait de la sélection naturelle, les formes solidement fixées et celles qui se trouvent placées en des points d’où le flot ne peut les entrainer, seules se perpétuent, les autres sont arrachées et périssent. Chez les Unionidæ la fixation se fait par l'ensemble de la valve, simplement à cause de la forme aplatie de cette der- nière, de même que chez les Chames, par exemple, la forme lithocardioïde primitive entraîne la fixation antérieure. C'est la fixation pleurothétique qui est chez les Æthéries l’origine de toutes les modifications morphologiques. Ainsi qu'il a été dit plus haut. le pleurothétisme tend à faire disparaître la symétrie sagittale et à la remplacer par une symétrie coronale. Cette tendance s’accuse par ce fait, chez les Æthéries, que les deux valves qui, chez les Unionidés, sont sem- blables, deviennent iei dissemblables, l'une tendant, comme chez l'Ætheria Caillaudi Féruss, par exemple, à s’aplaür, à MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES at devenir en un mot operculaire, alors que l'autre s'allonge en forme de colonne, se creuse sous l'influence indirecte du poids des organes qu'elle contient {Voy. à ce sujet Hyatt (80) et Edm. Perrier (0%). En même temps le côté antérieur et le côté postérieur tendent manifestement à se ressembler, indice cer- tain de l'établissement de la symétrie coronale. Ces modifica- tions caractérisant la coquille se constatent aussi sur les parties molles : les deux lobes du manteau sont franchement inégaux (Voy. fig. 54). La fixation d'autre part tend, comme on sait depuis Jackson (90) et Hæckel, à faire prendre aux organismes la forme arrondie. Or, comme chez les Æthéries la fixation est à la fois antérieure et postérieure, c’est la surface totale de l'animal qui s’'arrondit et non pas seulement la région antérieure, comme chez certaines Chames et chez les Chamoxtreu. Ce mode de fixation, ainsi que le développement antéro- postérieur du ligament, Fabsence de tendance à l'enroulement que présentent tous les Urionidæ, déterminent le mode d'arrondissement qui est celui de la pseudo-plicature. Ia été indiqué plus haut comment se produisait cette pseudo- plicature, par l'extension postérieure et dorsale toujours erois- sante des zones calcaires. Il a été vu comment Ia formation d'une arôte ligamentaire pouvait en résulter : le Hgament esl arrêté en arrière dans sa croissance antéro-postérieure par le fait de cette pseudo-plicature; sa partie élastique repousse en avant le bord cardinal de la coquille qui s'incurve, en arrière la parle fibreuse dorsale qui se rompt, se détachant de son origine. Ainsi s'explique la constitution du bord cardinal des Æthéries qui, comme on sait, présente darrière en avant un profond sillon où s'insère l'extrémité postérieure de la partie fibreuse dorsale du ligament, une concavité où se loge le Higament élastique et une convexité légère sur laquelle s'in- sère la parie ventrale du lHigament fibreux. Ainsi s'explique également le triangle ligamentaire dorsal, qui n’est en réalité autre chose que la partie fibreuse dorsale du Higament détachée de son origine umbonale. À l'arrondissement se rattachent également un certain nom- bre de caractères particuliers aux Æthéries. C'est ainsi que 312 R. ANTHONY s'explique le passage du tube digestif dorsalement par rapport au cœur. Entrainé par le déplacement de l'extrémité posté- rieure, le tube digestif s’est peu à peu rapproché de la région cardinale tout en s’éloignant du cœur, comme cela se passe chez les Huîtres ; de même, par le fait de l'arrondissement, les branchies se sont plissées comme une collerette autour du cou, les palpes labiaux se sont accolés par leurs bords dorsaux aux parois palléales: les deux muscles adducteurs antérieur et postérieur se sont rapprochés par leurs extrémités dorsales, de telle sorte que, comme chez les Chames, le muscle rétrac- teur postérieur du pied se trouve souvent au niveau du milieu de l’adducteur postérieur au lieu de se trouver nettement en avant de lui. À la fixation, d'autre part, doit être rapportée la disparition du pied qui est entré en régression faute d'usage et l'absence totale de papilles siphonales qui figurent, chez les Unionidés céphalothétiques, une première ébauche de siphons. La pseudo-plicature est également la cause enfin du rappro- chement du musele postérieur du ligament, rapprochement qui a pour conséquence la diminution de volume et d'importance de ce muscle adducteur postérieur devenant ainsi de moins en moins efficace au moment de la fermeture. De même, dans l'adducteur antérieur et pour la même raison, toute la partie dorsale tendra à disparaître faute d'usage, alors que la partie ventrale au contraire, la plus active, tendra de plus en plus à se développer. Il en résulte en quelque sorte un déplacement dorso-ventral de ce muscle le long du bord des valves. Au lieu de se trouver situé dorsalement par rapport à la bouche comme chez les autres Acéphales, il se place de plus en plus ventralement par rapport à elle; son impression s'étend le plus possible vers la région ventrale, se divise même souvent en deux parties extrèmement nettes (Voy. fig. 56,1). L'origine des cloisons de la valve inférieure à été expliquée au chapitre de l’embryogénie par le relèvement des couches calcaires. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 19 CHAPITRE VI CONSIDÉRATIONS MORPHOGÉENIQUES SUR LES FORMES FOSSILES DIMYAIRES FIXÉES EN POSITION PLEUROTHÉTIQUE. Les notions que nous venons d'acquérir sur la morphologie et la morphogénie des formes dimyaires actuelles fixées en position pleurothétique semblent pouvoir, dans quelque me- sure, éclairer sur la signification probable de certaines parties des formes fossiles également dimyaires, pleurothétiques et fixées. | Ces formes se rapportent aux familles suivantes : Dimyidæ, Chamidæ, Rudistæ, Chondrodontide. Dimyidiæ. — Les Dimyideæ fossiles sont à tous points de vue semblables aux Dimyidæ actuels. [en a été question plus haut; il est donc inutile d'y revenir. Chamidæ. — Quant aux Chamidæ, je comprends dans cette famille toutes les formes enroulées dont les caractères ont été donnés plus haut, c'est-à-dire, outre les Chama, les formes exclusivement fossiles suivantes : Diceras, Helerodiceras, Re- quiernia, Toucasia, Apricardia, Valletin, Gyropleura, Bay- leix, etc., qui constituent, à côté des Chaminæ, la tribu des Diceratine. Je n'ai pas l'intention de faire une monographie de ces der- niers, mais d'insister seulement sur les détails que l'étude des Chaminæ m'a permis de mieux comprendre, renvoyant pour le reste aux travaux si complets et si remarquables de Douvillé et à ceux de Pâquier. Le caractère commun de toutes ces formes, caractère qu'elles partagent d'ailleurs, comme l’on sait avec les Chaminés, est l'enroulement, la division ligamentaire qu'il produit, et lab- sence de la dent latérale antérieure. Leurs caractères propres 274 R. ANTHONY. et qui permettent de distinguer les animaux de la tribu des Diceratinæ de celle des Chaminæ est, outre une ornemen- tation toute différente, la présence constante à l’âge adulte de la dent cardinale { qui, comme nous l'avons vu, disparait généralement après la fixation dans le genre Cama (Voy. em- bryogénie des Chama). Un autre caractère particulier de ces animaux est l'étendue du pas de leur hélice qui est généralement beaucoup moins aplatie que celle des Chames qui tend souvent à la spire. Cet enroulement beaucoup plus lâche fait que chacune des bran- ches provenant de la bifidité du ligament, au lieu de décrire une spire où une hélice à pas très court, décrit comme la coquille elle-même une hélice à pas très étendu. Il en résulte que l'angle formé par les deux branches divergentes du hgament est beau- D plus ouvert : il ne l'est gé Gralon chez les Chames Voy. PI. VIIL, fig. 13). Chez quelques no telles les Regiienia etles Toucasia, la valve supérieure reste aplatie et le ligament y marque sa place suivant une spire. Comme les Chames, ces animaux, au lieu d’être fixés par la région antérieure et postérieure de leur coquille, le sont seule- ment, ainsi que je lai vu d’une façon qui m'a semblé constante, par leur région antérieure. Mais, alors que chez les Chames et chez les Chamostrea d'ailleurs, les couches calcaires successives de la valve fixée restent d'ordinaire au contact du substratum auquel elles adhèrent, il n'en est pas toujours ainsi chez les Dicératinés. C'est ainsi que si, chez les Gyropleura, les choses se passent généralement de cette facon, chez les Dicerus, les Heterodiceras et les Requienia par exemple, les couches eal- cures s'écartent au bout d'un certain temps du substratum. Il en résulte qu'à partir d'un certain point la coquille s'élève en quelque sorte et la spire de la valve inférieure devient une hélice à pas très étendu; et au lieu d’être la partie fixée seu- lement, c'est le contour sagittal tout entier qui tend alors à s arrondir. Chez les T'oucasia, les couches successives, tout en ne restant pas fixées au substratum, y restent accolées, et c'est ce qui explique la carène et la région antérieure constamment aplatie MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 5 WA) de ces animaux qui, par leurs autres caractères, sont si près des Requienix. Chez les Diceras et les Heterodiceras, la dent 2 de la valve gauche, qui répond à la grande dent de la valve fixée des Chames, qui est, comme on sait, sur sa face postérieure creu- sée de petits sillons, est souvent creusée sur sa face ventrale d’un profond sillon. Elle est très longue et parfois même recour- bée dorsalement. Ce sillon qu'elle présente, ainsi que son grand développement, semble devoir être en rapport avec la fixa- üon de lanimal. Dans un autre groupe en effet, celui des Monomyaires, les Spondyles, qui par tous leurs caractères se rapprochent des Pectens et qui vivent, eux aussi, fixés en po- sition pleurothétique, présentent deux grandes dents recour- bées et munies chacune d’une encoche. Ces dents sont même tellement grandes et recourbées que souvent lon ne peut sé- parer les deux valves sans briser la coquille. Les Hinnites pré- sentent déjà une ébauche de la disposition caractéristique des Spondyles. Ce point de convergence des Diceras el des Spondy- lidæ élait intéressant à signaler. Au sujet de ces formes fossiles que j'ai rangées parmi les Chamidæ (Wvibu des Diceralinæ), 1 est un certain nombre de questions, dont je ne m'occuperai point, l'étude des formes actuelles ne m'avant fourni aucun renseignement à leur sujet, c'est à savoir : le mode d'insertion du muscle adducteur pos- térieur qui, chez les Diceras, les Requienia, les Toucasir. S'in- sère sur un plan situé en dessous du plateau cardinal et sur une légère apophyse mvyophore analogue par exemple à celle des Cucullæa parmi les Arcidæ et, qui, chez les ÆHeterodi- ceras remonte au contraire dans le plan du plateau cardinal: la fixation, qui est indifférente par lune ou l'autre valve chez les Diceras, la dentition étant caractéristique de la valve droite et de la valve gauche, l'une ou l'autre pouvant être fixée, caractère qui est parfaitement réglé, au contraire, chez les autres formes de ce groupe dans lesquelles la valve fixée a toujours la même dentition comme chez les Chama; les canaux de la coquille des Bayleia analogues à ceux des Ru- distes. Les seuls caractères sur lesquels étude que J'ai faite des 376 À R. ANTHONY Chaminæ m'a éclairé sont, en somme, le processus d’'arron- dissement et les modifications dentaires. En me plaçant done uniquement à ce double point de vue, il me parait qu'on puisse dire des Diceratinæ, comme on l’a dit des Chaminæ, qu'ils proviennent d'animaux chez lesquels les crochets avaient déjà une tendance manifeste à l’enroulement en avant, comme chez les /socardia par exemple, e’est-à-dire d'animaux chez lesquels le ligament se développait avec une grande rapidité et une grande intensité par rapport aux cou- ches calcaires successives de la coquille; chez eux comme chez les Chaminæ, cette tendance héréditaire à lenroulement est accentuée par le fait de la fixation antérieure. L'arrondisse- ment qu'elle entraine se fait tout naturellement par enroule- ment, puisque la tendance naturelle est déjà l’'enroulement. La fixation antérieure semble avoir été déterminée chez les Dicératinés comme chez les Chames par la forme même de leur coquille avant la fixation qui semble avoir été aussi aniso- myaire et lithocardioïde, ainsi que tend à le prouver l’absence de dent antérieure. L'allongement du pas de l'hélice qui caractérise certaines de ces formes semble en rapport avec une croissance plus rapide du ligament par rapport aux zones calcaires que chez les Chames, el avec ce fait que les différentes couches calcaires suc- cessives, au lieu de rester toujours adhérentes au substratum comme chez les Chama, les Gyropleura et le Chamostrea, se redressent de plus en plus. Bref, en résumé, les Dicératinés semblent, par tous les ca- ractères, être très proches parents des Chaminés, et 1l semble que l’on puisse admettre pour les deux tribus une origine com- mune. Rudistes. — Je comprends dans cette famille toutes les formes fossiles dimyaires fixées en position pleurothétique, chez lesquelles l'arrondissement semble s'être fait non par un enroulement, mais par pseudo-plicature (1). La plupart des auteurs les réunissent aux Chamidæ (Chaminæ et Diceratinæ) ; j'ai cru bien faire en les séparant provisoirement, et, les raisons de cette manière d'agir seront données plus loin. Elles com- prennent les principales formes suivantes, toutes fossiles MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 311 Monopleura, Caprotina, Polyconites, Hippurites, Spherulites, Sauvagesia, Bournonia, Radiolites, Biradiotites, Lapeirou- sie, ete., qui s'étendent dans toute la hauteur du Crétacé. Pas plus que pour les Diceratinæ, je n'ai l'intention de faire ici une monographie complète des Rudistes, qui contiendrait beaucoup de redites étant donnés les travaux de Douvillé aux- quels Je ne puis mieux faire que de renvoyer. Ce ne sont plus les Chames actuelles qui m'ont éclairé sur l'appréciation des caractères morphologiques des Rudistes, mais bien les Æthéries, Mollusques acéphales fluviatiles devant être incontestablement rattachés aux Urionidæ, qui sont par conséquent très loin des Rudistes au point de vue des affinités, mais qui présentent des caractères de convergence si remar- quables avec eux qu'on ne peut guère hésiter et par analogie à conclure des unes aux autres. Les caractères communs des Rudistes sont nombreux. Au premier chef est la présence d'une arète ligamentaire qui dispa- ait chez les formes les plus évolutes, de canaux plus où moins développés dans le test dans les formes les plus spécialisées, de deux dents cardinales à la valve libre et d'une seule à la valve fixée, etenfin d'une particularité sur laquelle on n'a pas insisté encore el dont l'importance est cependant considérable et qui est à savoir le fait que la fixation semble se faire, non comme chez là plupart des Chames, les Diceras et les Chamostrées, par la région antérieure d'une des valves, mais par l'ensemble de la valve comme chez les Æthéries : ajoutons-v encore cette forme spéciale de la coquille dont la valve supérieure est aplatie operculiforme et dont la valve inférieure très allongée, munie de cloisons transversales, prend la forme d'un evlindre droit. Les caractères de convergence que les Æthéries ont avec les Rudistes sont les suivants : d'abord larète ligamentaire que les Æthéries possèdent, quoique à un degré moindre, comme les Rudistes; la forme des valves dont la supérieure prend la (4) Chez certaines formes, comme le Plagioptychus, par exemple, il est par- fois difficile de se rendre compte si l'arrondissement s'est accompli par enrou- lement ou par pseudo-plicature. L'étude des Dimyaires fixés en pleurothétisme n'ayant pu me renseigner à leur sujet, je ne m'en occuperai pas ici. 310 R. ANTHONY forme aplatie d’un opercule et l'inférieure S'allongeant pré- sente de nombreuses cloisons transversales: la réduetion du muscle adducteur postérieur et l'allongement ainsr que là divi- sion en deux parties du musele adducteur antérieur ébauchée chez les Æthéries et qui atteint chez les Sphærulites une si grande netteté [Voy. fig. 56); enfin la fixation par la tota- lité de la surface d’une valve. Les Æthéries ne possédant ni canaux du test, ni dents à la charnière, 1l ne sera donc question à propos des Rudistes ni des uns m1 des autres (1). Le mode d'existence des Rudistes est très comparable à celui que nous constatons chez les Æthéries; si les uns vivaient jadis sur les récifs battus par les flots des mers chaudes erétacées, les autres vivent actuellement dans les rapides des fleuves de l'Afrique équatoriale. [n'est donc pas étonnant, étant donnée l'identité des conditions d'existence, que les uns et les autres aient pris des caractères communs. Les Æthéries proviennent incontestablement, ainsi qu'il à été prouvé au cours de ce travail, d'Unionidæ aplatis bilatéralement et de formes telles qu'abandonnés à eux-mêmes ils reposent loujours sur une de leurs valves et de telle facon que leur plan sagittal soit hort- zontal : c’est ce qui explique que pour elles la fixation se fasse par l'ensemble d'une des valves. Il est vraisemblable que les Rudistes, chez lesquels la fixation semble se faire également par l'ensemble d’une des valves, proviennent aussi de formes aplaties bilatéralement à crochets droits, à ligament al- longé rectiligne d'avant en arrière, et se raltachant peut- être aux Cardüdeæ. Cest ce mode spécial de fixation qui sem- ble avoir amené, par un processus qui a été déjà exposé, chez les uns comme chez les autres, la formation de larête liga- menlaire (conséquence de l'arrondissement) dont l'évolution a été étudiée chez les Æthéries. À son début chez les Capro- ünes, elle atteint son complet développement chez les Sphæru- lites, entre en régression chez les Radiolites et les Biradiolites où l'arrondissement est à peu près géométriquement parfait. La disparition de l'arête ligamentaire, due à l'arrondisse- ment de plus en plus parfait du contour sagittal, amène comme (1) I y aurait peut-être cependant lieu de rapprocher des canaux des Ru- distes la particularité signalée par Simroth (90) et dont il a dèjà ét question. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 319 » Fig. 56. — Evolution des muscles adducteurs chez les Æthéries et les Rudistes. — I, Ælheria plumbea Sow. : I, Sphæœrulites radiosus Desm.: II. Biradioliles cornupastaris d'Orb.; a, arèle ligamentaire ou sa place: 4, muscle adducteur antérieur ; 5, place du muscle adducteur postérieur. 380 R. ANTHONY conséquence nécessaire celle du ligament déjà réduit chez les Æthéries. La valve supérieure est alors un véritable opercule qui, au moment de l'ouverture, n’est plus mû d’un mouvement angulaire, mais bien d'un mouvement parallèle à lui-même. La formation de l’arête ligamentaire rapproche, chez les Ru- distes comme chez les Æthéries, le muscle adducteur postérieur du point de rotation de la valve et, à mesure que ce muscle s’en rapproche, son action tendant à devenir de moins en moins efficace, il entre en régression. Déjà légèrement réduit chez les Æthéries, 1l diminue encore chez les Sphærulites où il est souvent difficile de trouver une trace évidente de ses impressions, à quelque valve que ce soit. Il me semble donc, et je me permets d’insister tout spécialement sur cette opinion à laquelle l'étude dos Æthéries m'a conduit, qu'à partir des Spheruliles radiosus Desm. le muscle adducteur postérieur doit être extrêmement réduit. En même temps que, chez les Æthéries, le musele addue- teur postérieur, se rapprochant du point de rotation, tend, en raison de son inutilité croissante, à disparaître, le muscle adducteur antérieur, au contraire, tend, par un mécanisme déjà expliqué, à se répartir, en quelque sorte, de chaque côté de ce point de rotation et à remplacer fonctionnellement l'addueteur postérieur disparu. Déjà, chez l'Æthérie, on le voit allonger son impression, écarter en quelque sorte ses fibres, contourner le bord antérieur de la valve et, chez beaucoup d'individus, il est nettement divisé en deux parties. Chez le Sphoœrulites, la même division de ce muscle s'observe ; ses deux parties sont plus étendues que chez PÆthérie, et la partie la plus ventrale atteint et dépasse même souvent de son bord distal la ligne médiane dorso-ventrale. Chez l'Æippurites cornu vaccinunr Goldf., le muscle antérieur est déjà en face de l’arête ligamentaire. Chez les ÆRadiolites et les Biradioliles, ne peut-on admettre que sa partie la plus ventrale, s'écartant de sa congénère, ait atteint le bord postérieur de la coquille, de telle sorte que les deux parties du muscle adducteur anté- rieur se trouvent réparties de part et d'autre de larète. Suivant done cette conception naturellement explicable, à laquelle les faits observés chez les Æthéries semblent donner quelque fondement, les Sphærulites posséderaient un muscle MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 381 adducteur postérieur très réduit, etles deux muscles des Radio- lites et des Buadiolites seraient non un adducteur antérieur et un adducteur postérieur, comme le veulent les auteurs, mais un adducteur antérieur dédoublé. On concoit combien cette manière de voir, donnée sous toutes réserves, doit changer, si des faits ultérieurement cons- tatés la confirment, l’idée que lon doit se faire de lorien- tation du Rudiste à l’intérieur de sa coquille. Myochamaideæ et Chamostreidie. — Les familles des M yocha- midæ et des Chamostreidie ne présentent pas de formes fossiles ; il n'y à pas lieu d’y insister 1er. Chondrodontidæ.— Ces formes exclusivement fossiles n’avant rien d'analogue dans la nature actuelle, 1} n'en sera pas question. CONCLUSIONS GÉNÉRALES (Relatives à la deuxième partie) (4). 1° Les Mollusques Acéphales qui, dansles conditions ordinaires de leur existence, sont orientés de telle sorte que leur plan sagittal (bucco-ventro-ano-dorsal) soit parallèle au plan sur lequel ils reposent, sont dits pleurothétiques, par opposition avec ceux dont le même plan sagittal est perpendiculaire au plan sur lequel ils reposent et qui sont dits euthétiques. 2° Il peut exister des formes pleurothétiques dans tous les groupes, parmi les Dimvaires comme parmi les Monomyaires. 3° Les Acéphales pleurothétiques peuvent être libres comme la Pandora et le Pecten marimus Linn. ou fixés comme les Rudistes et les Huitres. 4° Les Acéphales dimvaires fixés en position pleurothétique sont les suivants : |. Dimyidæ ; 2. Chamidæ; 3. Myochamidæ; . Chamostreidæ; . Ætheriidæ {à l'exclusion de HMulleria, qui est une forme monomyaire) ; 6. Rudisteæ : 7. Chondrodontideæ. (Les groupes avant des représentants actuels sont en carac- tères gras.) ; 5° Les affinités de ces différents groupes sont les suivantes : 1) Dimyidæ. — Les Dimyidæ sont inmcontestablement des (4) Ainsi qu'il a été dit, la première partie ne comporte pas de conclusions spéciales, étant elle-même un ensemble de conclusions et un résumé. — De plus, désirant donner à ces conclusions un caractère exclusivement général, je n’y rappellerai pas les faits positifs morphologiques, embryogéniques ou physiologiques établis au cours de ce mémoire. MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 399 Arcidæ (dimyaires, filibranches, dents de la charnière rappe- lant chez les Dimyodon et les jeunes Dinya celles des Per- tunculus. Ligament rappelant probablement celui des Limopsis. Lobes du manteau libres comme chez tous les Arcidæ). 2) Chamidæ. — Les Chanmidæ (Chaminæ et Diceratinæ) sont très probablement des Cardüdiæ (Eulamellibranches, trois ou- vertures palléales dont deux courts siphons chez les Chames comme chez les Cardin. Dentiüion des jeunes Chames rappe- lant sensiblement celle de Cardium adultes, chez lesquels Ta dent latérale antérieure aurait disparu (Lithocardium) |. Une forme originelle lithocardioïde, semble :avoir donné deux branches divergentes : lune qui, à la fin du Jurassique, aurait donné le phylum des Diceralinæ par la conservation de la dent cardinale {, Fautre qui, à la fin du Crétacé, aurait donné, par la suppression de cette même dent cardinale 1, le phylum des Chamideæ. Var beaucoup de caractères fondamentaux, les Chamidæ se rapprochent des Tridacnidæ (branchies, dentition, ligament, ouverture palléale, ornement de la coquille) qui pro- viennent aussi vraisemblablement d'une forme Hithocardioïde. Je ne serais donc pas éloigné de croire que les Chamidæ et les Tridacnidæ, qui sont aussi voisines des Cardium, aient une origine commune : les uns se seraient adaptés à la fixation pleurothétique, les autres à la fixation euthétique et byssale. Le tableau suivant rend compte des relations familiales pos- sibles de ces différents groupes d'animaux. Forme dithocardioïde "originelle. . Diceratinx. Byssocardium. Tridacna. Hippopus. Chaminæ. R. ANTHONY 3 et 4) Myochamidæ et Chamostreudæ. — Ces deux familles sont incontestablement des Anatinidæ. (Persistance des siphons surtout chez les Myochama ; eulamellibranches avee forme spé- ciale de la branchie; quatre ouvertures palléales comme chez les Anatinidæ ; nacre; lithodesme.) 5) Ætherüdæ. — Les Ætheridæ sont incontestablement des Unionidæ. (Existence fluviatile; nacre; épiderme verdàtre ; constitution du higament:; structure de la branchie qui, comme chez les Urionidæ, joue le rôle de cavité incubatrice ; deux ou- vertures palléales seulement comme chez les Unionidæ ; forme des individus jeunes qui sonben tous points des Anodontes de taille réduite.) 6) Audistæ. — Semblent devoir être considérés comme des Cardüdæ (2?) avant avee les Chames et les Diceras des rapports de parenté simplement collatéraux ; ne dérivent très probable- ment pas, comme chez les Diceras, les Chames et les Tridacnes, d’une forme lithocardioïde, mais bien au contraire d’une forme nettement équilatérale et homomyaire à crôchets droits et à ligament rectligue. L'ignorance dans laquelle on est de l'orga- nisation anatomique et des formes jeunes de ces animaux ne permet pas de se prononcer calégoriquement sur leurs affinités. 1) Chondrodontidæ. — Les Chondrodontidæ se rattache- raient, d’après Douvillé, aux Pinnidæ. 6° Au point de vue éthologique, les conditions d'existence des formes Acéphales dimyaires fixées en position pleurothé- tique peuvent se résumer ainsi: eaux agitées et très chaudes. 7° La fixation pleurothétique peut en effet, chez eux, s'expliquer de la manière suivante : supposons ces animaux qui, tous, proviennent d'organismes euthétiques, se trouvant placés sur un fond dénudé par les flots et par conséquent dé- pourvu de vase ou de sable: 1ls ne pourront S'y enfoncer et, par le fait mème de leur forme, tomberont et reposeront sur une de leurs valves. C'est le pleurothétisme. Supposons en outre qu'ils se trouvent, ce qui est générale- ment le cas, dans des eaux très chaudes où la sécrétion du calcaire est abondante, ils ne larderont pas à se fixer, et, puis- qu'ils sont déjà en pleurothétisme, la fixation sera pleurothé- tique. Par le fait de la sélection naturelle, les formes les moins MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 38) solidement fixées disparaîtront, et se constitueront ainsi les formes pleurothétiques fixées. L'agitation et la haute température de l'eau semblent donc être les facteurs de la fixation pleurothétique. 8° La fixation pleurothétique peut se faire, tantôt par une valve, tantôt par l’autre. Dans certains genres, la fixation se fait toujours par la même valve ; dans d'autres, elle se fait in- différemment par l'une ou l'autre valve. C'est le cas des Æthé- Fig. 57. — Schéma indiquant le mode de fixation en pleurothétisme des différents types d'Acéphales dimyaires. — 1, Dimyidæ, fixation totale: I, Myochamidæ, fixation totale ; III, Chamidæ, fixation antérieure ; IV, Ætherüdæ, fixation totale. La zone fixée est indiquée par des hachures. ries où, dans la même espèce, certains individus sont fixés par une valve et d'autres par l'autre. En tout cas, sauf chez les Diceras, la valve fixée, qu'elle soit droite où gauche, à tou- Jours des caractères qui lui sont propres et ilen est de même de la valve libre. 9 La fixation se fait soit par l’ensemble d'une des valves (Myochama, Æthéries, Rudistes, certaines Chames, et dans ce dernier cas elle est tout à fait spéciale), soit par la région antérieure seulement d'une des valves (Diunya,Chamostrea, la plupart des Chanideæ). 10° Le mode de fixation totale ou antérieure est déterminé par la nature du substratum et la forme de la valve qui se fixe. Lorsque la valve est lithocardioïde et le substratum plan, la fixation est antérieure | CAama iostoma Conr. Chama Ruppelli ANN. SC. NAT. ZOOL. 122 380 R. ANTHONY Reeve, Chamostrea|. Lorsque, la valve étant lithocardioïde, le substratum est hérissé d'irrégularités (polypiers), la fixa- tion peut être totale Chama Brassira Reeve. Lorsque la valve est à peu près plane, quelle que soit le substratum, la fixation est toujours totale (Æthéries, Rudistes, Myochama, Dimya). 11° Les modifications dues au pleurothétisme {caractères de convergence) consistent surtout en la substitution d'une symétrie coronale à la symétrie sagittale. Les deux valves droite et gauche, ainsi que les lobes du manteau, tendent à devenir de plus en plus dissemblables, l'in- férieure prenant, par le fait de l’action indirecte du poids des organes, la forme d’une coupe creuse et la supérieure celle d'un opercule. En même temps, les côtés antérieurs et posté- rieurs de la coquille tendent à se ressembler. 12° Les modifications dues à la fixation (caractères de con- vergence) sont l’arrondissement, la perte du pied et la rétrogra- dation des siphons, vestiges de l'adaptation céphalothétique ancienne (Myochama et Chamostrea). 13° L'arrondissement peut s’accomplir suivant trois pro- cédés, directement (Dimyidæ, Myochamidæ), indirectement, et alors 11 peut se faire par enroulement (Chamidæ, Chamostreidæ) ou pseudo-plicature (Ætheriüdæ, Rudistes). 1% L'arrondissement direct semble être en rapport avec un ligament primitivement réduit, des crochets droits et une coquille sensiblement symétrique par rapport à une ligne dorso-ventrale partant du crochet. 15° L’arrondissement par enroulement semble en rapport avec une coquille ayant déjà une tendance marquée à l’enrou- lement en avant des crochets et par conséquent avec un liga- ment curviligne. 16° L'arrondissement par pseudo-plicature semble en rap- port avec une coquille à ligament longitudinal antéro-postérieur et droit. 17° De plus, la fixation totale semble favoriser l’arrondis- sement direct et l'arrondissement par pseudo-plicature, alors qu'au contraire la fixation antérieure semble favoriser l’arron- dissement par enroulement. | 18° L’arrondissement entraine les modifications suivantes MORPHOLOGIE DES MOLLUSQUES 387 (caractères de convergence): rapprochement des extrémités dorsales des deux muscles adducteurs; diminution, chez les formes à arête ligamentaire, du muscle adducteur postérieur, qui semble finir par disparaitre, et augmentation parallèle du muscle adducteur antérieur qui tend à s'éloigner de Farète ligamentaire (position ventrale par rapport au tube digestif chez l'ensemble des Dimyaires fixés et pleurothétiques), à faire en somme, en suivant le bord ventral, le tour de la coquille, à se répartir enfin de chaque côté de larête ligamentaire (Radio- lites) ; plissement de la branchie (Æthéries) et sa libération des parties avoisinantes (Chames):; accolement des palpes Tabiaux aux lobes palléaux ; éloignement du rectum du cœur ; (chez la forme très évoluée des Æthéries, le rectum passe dorsalement par rapport au cœur). 19° Dans le cas de pseudo-plicature chez les Æthéries, le liga- ment, arrêté dans sa croissance antéro-postérieure, augmente d'épaisseur dorso-ventralement, et, sous la pression de la sub- stance élastique, la couche fibreuse dorsale éclate. 20° Chez les Æthéries, l’arête ligamentaire est la conséquence de larrondissement par pseudo-plicature. Elle caractérise les formes chez lesquelles l'arrondissement s'obtient par ce pro- CessUs. 21° Chez les Æthéries, Parête ligamentaire estoccupée par lex- trémité postérieure de la substance fibreuse dorsale du higament. 22° Chez les Acéphales fixées en pleurothétisme, lorsqu'au bout d'un certain temps les zones calcaires cessent d’être adhé- rentes au substratum, la valve inférieure se développe en lon- gueur (Æthéries, Hippurites) et chaque zone calcaire y détermine une cloison transversale lcamerated structure de Jackson (90)|. 23° Dans la régression du pied et de sa musculature, ce sont les muscles adducteurs postérieurs qui persistent le plus long- temps (Chames, Æthéries). 24° En résumé, les caractères communs des formes Acéphales dimyaires, fixées en position pleurothétique sont les suivants : symétrie coronale substituée à la symétrie sagittale ancienne (pleurothétisme), forme arrondie (fixation), réduction des appa- reils siphoniens et pédieux. 380 R. ANTHONY 25° Les Diceratinæ fossiles, qui, au point de vue familial, semblenttrès près des Chaminæ, semblent également avoir une morphogénie semblable à la leur. 26° Les Rudistes, au contraire, qui ne semblent pas pouvoir provenir, directement du moins, des Dicératinés, mais consti- tuer plutôt une branche divergente avant avec ces derniers des ancêtres communs, paraissent avoir une morphogénie vraisem- blablement très analogue à celle des Ætherüdæ actuelles. Comme elles, ils se fixent le plus souvent par l'ensemble d'une de leurs valves, s'arrondissent par pseudo-plicature et semblent présenter la même régression du muscle adducteur posté- rieur, accompagnant le même développement progressif de l’'adducteur antérieur. CORRIGENDA Aux pages 214 et 215, au lieu de pullaster, lire pullastr«. A la page 232, au lieu d’Arca obliqua, lire Arca obliquat«. Aux pages 301, 302, 304, au lieu de Chama iostoma Reeve, lire Chama 1ostoma Conr. Aux pages 378, 3179, 380, au lieu de Sphærulites, lire Hippurites. A la Planche IX, intervertir les chiffres 25 et 26. 9 LISTE DES PRINCIPAUX OUVRAGES CITÉS ET CONSULTÉS . Apams, List of Land and Freshwater shells coll. by E. Bartlett in the Upper Amazons. Proc. Zool. Soc., 1866. . Apamsox, Hisloire naturelle du Sénégal, 1757. . Axrnoxy, Org. et morphogénie des Tridacnidés. C. A. Acad. Sc., 1903. 4. {n., Org. et morphogénie des Æthéridés.C.R. Acad. Sc., 1904. . In., L'acquis. de la forme arrondie chez les Moll. Acéph. Arch. de Zool. exp. et gén., 190%. 5. In., La constitution de l’arète ligamentaire. C. /?. Acad. des Sc., 1905. . In., Forme et struct. des muscles add. des Mol, acéph. Bull. Soc. phi- lomathique. . T. Barrors, Anatomie du pied des Lamellibranches. Bull. scient. du dép. du Nord, 1879. 5. In., Les glandes du pied et les pores aquifères des Lamellibranches. Th. doct. sc. 5. F. Berxarp, Première note sur le développement de la coquille chez les Lamellibranches. Bull. 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Fig. 3. — Dreyssensia polymorpha Bened. réunies en bouquet provenant de la Seine. (Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) Fig. 4. — Mytilus edulis Linn. type de vase. (Embouchure de la rivière du Faou.) Fig. 5. — Mytilus edulis Linn. type de roche, zone supérieure (Pentrez). Fig. 6. — Dreyssensia polymorpha Bened. type isolé. (Bassin de Gentilly.) Fig. 7. — Dreyssensia polymorpha Bened. type aggloméré provenant du bloc représenté dans la figure 3. PLANCHE VIIL Fig. 8. — Chama brassica Reeve valve fixée montrant les dents dela charnière. (Golfe de Tadjourah. — Mission Ch. Gravier. — Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) Fig. 9. — Chama brassica Reeve valve libre montrant les dents de la charnière. (Golfe de Tadjourah. — Mission Ch. Gravier. — Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) Fig. 10. — Diceras valve fixée montrant les dents de la charnière. (Collections de Paléontologie de l'École des Mines.) Fig. 11. — Diceras valve libre montrant les dents de la charnière. (Collections de Paléontologie de l'Ecole des Mines.) Fig. 12. — Heterodiceras fixé sur un polypier. (Collections de Paléontologie de l'Ecole des Mines.) Fig. 13. —- Diceras vue postérieure des deux valves montrant la division du ligament et l'enroulement des crochets. (Collections de Paléontologie de l'École des Mines). Fig. 14. — Myochama anomioides Stutch. fixée sur la valve d’un autre Acéphale. (Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) Fig. 15. — Vue intérieure d’une valve de Myocharna anomioides Stutch. (Collec- tions de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) Fig. 16. — Chamostrea albida Lmck. valve fixée montrant les dents de la charnière. (Collections de Paléontologie de l'École des Mines.) Fig. 17. — Chamostrea ulbida Lmck. valve libre montrant les dents de la charnière et le lithodesme. (Collections de Paléontologie de l'Ecole des Mines.) 396 R. ANTHONY Fig. 48. — Ætheria plumbea Sow. valve fixée, vue intérieure, montrant les impressions musculaires, le ligament et son arète. (Collections de Malaco- logie du Muséum d'Histoire Naturelle.) Fig. 19. — Ætheria plumbea Sow. valve libre, vue intérieure. (Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) PLANCHE IX Fig. 20. — Ætheria Petretinii Bgt. valve fixée, vue extérieure montrant la surface de fixation. (Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) Fig. 21. — Ætheria Petretinii Bgt. valve libre, vue extérieure montrant Ja régularilé de la forme générale. (Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) Fig. 22. — Ætheria Caillaudi Féruss. valve fixée, face ventrale montrant les stries d’accroissement. (Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) Fig. 23. — Ætheria Caillaudi Féruss. valve fixée, face lunulaire montrant les cloisons transversales, la loge terminale, le ligament longitudinal et ses trois bandes. {Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) Fig. 24. — Ætheria Caillauli Féruss. valve libre, face lunulaire montrant l’aplatissement de la valve, l’arête ligamentaire et la réduction du talon. (Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) Fig. 25. — Ætheria Caillaudi Féruss. Forme jeune peu de temps après la fixation. Valve fixée, vue extérieure destinée à montrer l’étendue et la disposition de la surface de fixation, les limites et la forme anodontoïde de la coquille non fixée. (Collections d'Anatomie comparée du Muséum d'Histoire Naturelle.) Fig. 26. — Ætheria Caillaudi Féruss. Forme jeune peu de temps après la fixation. Valve libre, vue extérieure. (Collections d’Anatomie comparée du Muséum d'Histoire Naturelle.) Fig. 27. — Bartlettia stefanensis Mor. valve fixée, vue intérieure destinée à montrer la forme du ligament et la réduction de la partie antérieure. (Collections de M. Ph. Dautzenberg.) Fig. 28. Mulleria lobuta Féruss.valve fixée, vue intérieure, destinée à montrer la forme du ligament et la réduction ad ultimum de la région antérieure. (Collections de Malacologie du Muséum d'Histoire Naturelle.) TABLE DES MATIÈRES DE CD CCRIO NE PRE Re Rs SA re Au. PREMIÈRE PARTIE Core, [Lies Me MER AU à en ee En en A EN TRE Abri ere 2100 éNTOIME RAA EME RER RTE En ere DAS O DIS UE RU RC de Lt rue MATRA ESP Ut een IN” Exposé des procédés de recherche «1f.1:.1%.. 71 CuapirREe Il. — Introduction à l'étude générale des caractères de conver- gence et de la morphogénie des Mollusques acéphales. ee RES RE PS A PR PE RER RE MERE A HE MONNINVAATES RER ES A LS D GR ere DEUXIÈME PARTIE CARE QUES DE ER RE PRE EE ER RS SU A RP PR pe nd rl tr Re eee 2 a ESS RTE ne 6 LORS PR ee RAM OS IEEE EL TR pe ee. de MRC — NP (Ne EEE RE A Set re UE RS PRE CU UE — VI. — Considérations morphologiques sur les formes fossiles Dimyaires fixées en position pleurothétique........... MONCLEUSIONSIGENERALES TER ARNAUD RE Pages 165 170 173 175 176 194 199 256 TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME Holothuries antarctiques du Muséum d'histoire naturelle de Paris, par de RENE RAR LE DRE E MERE PE PEN EEE Recherches anatomiques, histologiques et physiologiques sur les glandes venimeuses ou glandes des Chélicères des Malmignattes, par L. Borpas. Influence de la fixation pleurothétique sur la morphologie des Mol- lusques'acéphales dimyañîres, par R.. ANTHONY. :......:,.....::.....0 TABLE DES PLANCHES CONTENUES DANS CE CAHIER Planches L à V. — Holothuries antarctiques. Planche VI. — Glandes venimeuses des Chélicères. Planches VIT à IX. — Morphologie des Mollusques acéphales dimyaires. Corseic. Imprimerie En. Ukéré, 165 Arr. des Se. nat. 9° SerLe Ton LA EL. L Ê PLUIE, 2. 5 Remy Perrier & L.Devove, del. Masson et C*° Édieurs. À Bernard, lith. Holothuries du Cap Horn et de la N°Ÿ Zélande. 1.3, Holothuria / Shchopus?) palagoraca __46, Cacamarit labulira ES. Cacumaria leonina ; = 9 17, Cicumartæ ocnoudes {np.L Lafontaine, Paris. Ha ri J 15 S n Nr AUTEU : : CAL sr FUTOEL PS ; d MAR EI) : (er | k à HA HARrCER L ! n MRC ja 4 à qu fs “ (ONE PAR Zoo. 7 7_ PL. 2. Do: NC D gum 2 DER NN Re à <= 0 0 TIRE QT SE Q = AU} ES STE D SG min, 2 Se RS Dee) , 2 0 ee n \ Ann. des Se. nat 9° Serre. À. Benard, lith CAFE U. < û DRE RS ER RE à SSI Sé Î is ns È Cucumaria Par Remy Perrier & 1. Devove, del. FL Znp.l.Lafontarne, Paris. Ann. des Se.nat. 9° Serie. Pons LIL, 3 Ràg KE Rdd+ld pjg Ri Remy Perrier & L. Devove, del. Masson & C® Editeurs. À Bénard, lit. Holothurtes du Cap Horr 1-15, Cicumarra tabulfera;_ 16-19, Crcumarra parva et yar, DOS, Thajone”spectabils. Împ. L.Lafontarne. Zoo. TI. PL.H. Ann. des Se/nat. 9° Serre. ss. SN 1 A LT FE Y TUrr F4 OR Ee) 14 Tee ul O7 QS À —— Masson & C*° Editeurs. À. Bénard, lith. Remy Perrier & I. Devove, del. Aolothuries du Cap Aorr | 19, Caudinæ PigINErUOsA ; — 2012, Caudna PUGOSX 1322, Chiridota Marenellert Le Imp..Lafontame, Paris. Ann. des Sce.nat. 9° Serre Boot 1.1, PL, 5 Remy Perrier & L. Devove, del Masson & C* Editeurs. À Bénard, th Holothuries de la N'°%€ Zélande. 19, Phyllophorus anatinus; __— 10 22, Cucumaria’ F'ilholc . 1/1Z Caudina prlcbella Imp.L Lafontamne, Paris. Fe dl SN Ie VTEU [NX Rs es | à Ge Ë F es BU NN # Sa 4 N 4 5 Le : à & aq = F4 En £ guttatus Glandes venimeuses du Latrodectus 13 diteurs. Gr? 5e Masson et C*’ AT me. Se. F. 1° PL VIR Zool. 9e Série. Ann. des Sc. nal. Masson et Cie, Editeurs Phototypie Berthaud, Paris Ann. des Sc. nal. 9 Série. Zool. T. I. PI. VIII 18 19 Masson et Cie, Editeurs Phototypie Berthaud, Paris Ann. des Sc. nal. 9e Série. Z 0012 LT PIRE Masson et Cie, Editeurs MASSON ET C", ÉDITEURS LIBRAIRES DE L'ACADÉMIE DE MEDECINE — 1420, BOULEVARD SAINT-GERMAIN, PARIS (vi®). 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Boure..... 2 fr. 50 Anatomie et Physiologie végétales (Classes de philosophie et de mathéma- tiques À et B), par H. LECOMTE ........... DST NE Die Nr CA TOR ee ee 2 fr. 50 Anatomie et Physiologie animales (Classes de philosophie et de mathéma- tiques A et B), par E.-L. Bouvier ................................... HER S Conférences de Paléontologie (Classes de philosophie A et B et de mathé- ZT matiques À et B), par M. BouLE .......................... ........- TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE CAHIER Holothuries antarctiques du Muséum d'histoire naturelle de Paris, par RémY PERRIER (Suite et fin). Recherches anatomiques, histologiques et physiologiques sur les glandes venimeuses ou glandes des Chélicères des Malmignattes, par L. Borpas. Influence de la fixation pleurothétique sur la morphologie des mol- lusques acéphales dimyaires, par R. ANTHONY. TABLE DES PLANCHES CONTENUES DANS CE CAHIER PL. I à V. — Holothuries antarctiques. PI. VI. — Glandes venimeuses des Chélicères. PI. VIT à IX. — Morphologie des Mollusques acéphales dimyaires. PR PRE OT Er Conren.. — Imprimerie EÉv. Crete. Po “A LEA nttX PA TU NN TN AO NE Lise TU ni En nn À _ ar | 3 EE