EL] [e 4 rr | AU > de 4 " JE «1 ANNALES SCIENCES NATURELLES LOOLOGIE PARIS. — Imprimerie de L. MARTINET , rue Mignon 2. Z-D. ANNALES SCIENCES NATURELLES LA ZOOLOGIE, LA BOTANIQUE, L'ANATOMIE ET LA PHYSIOLOGIE COMPARÉE DES DEUX RÈGNES ET L'HISTOIRE DES CORPS ORGANISÉS FOSSILES REDIGÉES POUR LA ZOOLOGIE PAR M. MILNE EDWARDS POUR LA BOTANIQUE PAR MM. AD. BRONGNIART ET J. DECAISNE QUATRIÈME SÉRIE LOOLOGIE LIBRAIRIE DE VICTOR MASSON PLACE DE L’ÉCOLE-DE-MÉDECINE 1854 OIOOX Xl OM Ron a ar iuo OHÉEM AN AIMOT AY OLeON ARIAAONO 20 2 MARMITE Ayo! & ame * MATRA À TA T1 MOAE LUN g Wars sv ua 4x ANNALES SCIENCES NATURELLES PARTIE ZOOLOGIQUE RAPPORT - SUR LE CONCOURS POUR LE GRAND PRIX DES SCIENCES PHYSIQUES POUR 1853. Par M. A. de QUATREFAGES. Commissaires : MM. Miixe Enwanps, FLourexs, DumériL, SERRES, ET DE QUATREFAGES, rapporteur. Dans sa séance du 22 mars 1859, l’Académie avait mis au con- cours, pour le grand prix des sciences physiques à décerner en 1853, la question suivante : « Faire connaître, par des observations directes et des eæpé- » riences , le mode de développement des V'ers intestinaux et celui » de leur transmission d’un animal à un autre : appliquer à la dé- » termination de leurs affinités naturelles les faits anatomiques et » physiologiques ainsi constatés. » L'Académie demandait aux concurrents de traiter la question d'une manière comparative pour les genres principaux. Prenant d'ailleurs en considération l'étendue et la difficulté du problème, elle se déclarait prête à couronner des recherches portant sur les Tré- 6 DE QUATREFAGES, VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER. matodes et les Cestoïdes seulement, c'est-à-dire sur les deux groupes qui renferment, l’un la Douve du foie et les Vers qui s’en rappro- chent, l’autre les Ténias et les genres voisins. Les Nématoïdes et les Acanthocéphales se trouvaient ainsi pour ainsi dire écartés. Cette restriction était plus apparente que réelle. Nous ne savons, en effet, à peu près rien sur le mode de développement des Acantho- céphales ; mais ce défaut de notions sur un groupe formé jusqu'à présent du seul genre Échynorhynque ne saurait infirmer des con clusions générales portant sur l'ensemble des intestinaux. Quant aux Nématoïdes, les travaux de Nitsch, qui remontent à 1829 ; ceux de MM. Siebold, Bagge, Mayer, Vogt, Kælliker, Dujardin, ont presque entièrement fait connaître leur embryogénie, et celle-ci ne paraît offrir aucun phénomène bien exceptionnel. Sans doute, il reste encore quelques points à échircir, MM. Siebold, Creplin, Dujardin, ont justement appelé l'attention sur les Nématoïdes sans organes sexuels apparents qui se rencontrent, soit dans les’ cavités eloses, soit jusque dans l'épaisseur des muscles des animaux vertébrés. M. R. Owen, en découvrant la Trichina spiralis, à montré jusque chez l'Hommeun exemple de ee fait curieux. Très probablement les Intestinaux dont nous parlons ne sont autre chose que les jeunes de quelques espèces qu'il faudra déterminer, et ne doivent acquérir leurs caractères définitifs qu'après être passés dans le corps d’un nouvel animal ; mais, ces métamorphoses et ces migrations fussent- elles plus complètes où plus nombreuses qu’on ne peut le supposer en ce moment, elles seraient encore loin de présenter la complica- tion et l'intérêt que nous offrent les mêmes phénomènes étudiés chez les Trématodes et les Cestoïdes. Même en se bornant à l'étude de ces deux groupes, les concurrents avaient à traiter la question presque entière, avec toute son importance et toutes ses difficultés. L'importance du sujet mis au eoncours par l'Académie résulte et de sa nature propre, etde ses rapports aveequelques unes des ques- tions les plus élevées de la physiologie générale. De toutes les branches de la zoologie, l’helminthologie s’est peut-être constituée la dernière. Le premier ouvrage général sur l’histoire des Intesti- naux, l’histoire naturelle de Gæse, parut en 4793, et fut complétée en 4800 par les additions de Zéder. Le grand Traité de Rudolphi en SUR L’HELMINTHOLOGIE, / n’est que de 4808, l'Atlas de Bremser de 1823. Jusque vers cette époque, par la nature même des choses, l'helminthologie était restée à peu près uniquement descriptive. Bojanus, le premier, donna le signal des études anatomiques sérieuses sur ce groupe d’Invertébrés. Ses mémoires, publiés de 1817 à 1821, furent suivis à divers inter- valles par ceux de Mehlis(1825), Laurer (1830), Nordmann (1832), qui presque tous portèrent sur les Trématodes. A partir de cette époque, les travaux se multiplièrent et embrassèrent des points né- gligés jusqu'alors. Nous citerons entre autres ceux de MM. Owen (1839); Eschricht, sur les Bothryocéphales (1841); Van Beneden, sur les Cestoïdes(1851 ); et surtout les belles recherches publiées par M. Blanchard sur l'ensemble des Intestinaux de 1847 à 1850. En ième temps, l'attention se porta sur les groupes voisins de la classe dontil s'agit et certains rapports pressentis par Linné et 0. F. Müller furent ainsi démontrés et généralement reconnus. Cette phase anatomique, au plus fort de laquelle lhelminthologie se trouve encore aujourd'hui, a rendu à la science de nombreux et sérieux services. Toutefois, parmi les problèmes les plus importants que soulève cette branche de la zoologie, il en est que l'anatomie seule est impuissante à résoudre ; il en est d’autres qu'elle ne peut même pas aborder. Dans les groupes à #ype variable, il arrive par- fois qu'un animal se déforme, dans le cours de son existence, au point que les caractères fondamentaux disparaissent ou sont comme masqués par l’exagération de quelques caractères secondaires. Dès lors, les affinités et les analogies deviennent fort difficiles ou impos- sibles à reconnaitre, et, pour les retrouver, il faut suivre l'animal dès les premiers temps de sa vie. La différence des opinions professées par les plus grands maitres de la science sur la nature des rapports qui relient les Intestinaux entre eux et aux autres Invertébrés, suffi- rait à elle seule pour montrer combien il était nécessaire de recourir ici aux études embryogéniques. La puissance créatrice qui a donné naissance aux êtres vivants at-elle cessé de s'exercer à la surface de notre globe, ou bien agit- elle encore aujourd’hui ? En d’autres termes, le phénomène appelé génération équivoque ou spontanée est-il une réalité ? On sait com ment les anciens répondaient à cette question. Pour eux, tont corps 8 pE QUATREFAGES, VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER, en putréfaction engendrait de nouveaux organismes , et ces idées universellement adoptées se propagèrent jusqu’à nos jours. Ce n’est que vers la fin du xvn' sièele et au commencement du xvin* que Rédi et Vallisnieri démontrèrent la véritable nature des larves d'insectes vivant dans les animaux et dans les végétaux. Dès lors, des idées plus justes commencèrent à se répandre. Mais, tout en perdant du terrain, les partisans de la génération spontanée ne se tinrent pas pour battus ; ils restreignirent seulement le champ des applications de leurs doc- trines. Or, à mesure que la science faisait des progrès, ce champ se rétrécissait de plus en plus ; alors les partisans de la génération spon- tanée se divisèrent. Les uns, parmi lesquels je citerai Lamarck, Bur- dach, Dugès, continuèrent à regarder les agents physiques, chaleur, lumière, électricité, comme suffisant à organiser et à animer la ma- tière brute, de manière à la transformer en êtres vivants. Les autres, au nombre desquels on compte Redi lui-même, Rudolphi, Morren, Oken, Nordmann, admirent que, dansles êtres déjà organisés et vi- vants, les forces plastiques pouvaient éprouver une sorte de dévia- tion, d’où résultaient de nouveaux êtres très différents des premiers, mais en émanant directement. De ces deux opinions, la première s'appuie surtout sur des faits empruntés à l'étude des Infusoires et des Intestinaux ; la seconde s’applique aux Intestinaux seulement. Or les expériences de Schwan ont montré, contrairement à ce qu'avait cru voir Spallanzani, qu'il ne se développe jamais d’animal- cule dans les infusions entourées d’une atmosphère d’air parfaite- ment débarrassé de toute matière organique. Ce résultat, dû au per- fectionnement des procédés d’expérimentation, sape par la base la moitié des arguments invoqués de nos jours en faveur de la généra- tion équivoque. Restent ceux que l’on emprunte à l'histoire des In- testinaux, et surtout ceux qui s’appuientsur l'isolementde certaines espèces, sur l’absence chez elles d'appareil reproducteur, sur leur existence dans des cavités closes ou dans l'intimité même des tissus. L’embryogénie peut seule nous donner l'explication de ces faits ; on voit combien il importe de rechercher le mode de production et de développement de ces êtres qui, au premier abord, semblent consti- tuer dans le règne animal une exception aujourd’huiunique. L'influence du milieu ambiant peut-elle aller jusqu’à modifier les SUR L'HELMINTHOLOGIE. 9 caractères fondamentaux d’une espèce animale, jusqu’à la transfor- ner en une espèce nouvelle, appartenant parfois àun type fortdiffé- rent du premier ? C’est à encore une de ces questions de haute phy- siologie que l'examen seulement descriptif ou anatomique des intestinaux soulève sans pouvoir les résoudre. Parmi les Cestoïdes, on trouve des Vers presque entièrement semblables par-devant, mais dont les uns se prolongent en un long chapelet formé d'articles pleins extrèmement nombreux (Ténias, Bothriocéphales), dont les autres se terminent brusquement par une grosse ampoule remplie de liquide (Cysticerques, Cœnures). Les premiers ha- bitent le tube digestif, les seconds se rencontrent dans la cavité péritonéale, dans le tissu cellulaire et jusque dans le cerveau. Faut- il ne voir dans ces deux formes que les modifications d’une même espèce, modifications commandées en quelque sorte par la différence des habitats ? Quelques helminthologistes, et des plus distingués, ont cru pouvoir répondre aflirmativement, et ont regardé les Vers à vessie comme des Ténias monstrueux. Orune monstruosité en quel- que sorte normale, et se reproduisant avec des caractères constants, eût été un fait que son étrangeté même ne devait faire accepter qu'après une démonstration poussée jusqu'à l'évidence. Mais ici encore l’embryogénie seule pouvait nous conduire à la vérité. Malheureusement ce genre d'étude n’était rien moins qu’aisé. Quelques chiffres feront comprendre ce que la simple recherche des Intestinaux présente de difficultés de tout genre. Rudolphi, qui con- sacra sa vie entière à ce travail, n’observa par lui-même que 350 espèces sur environ 1,100 qui se trouvent mentionnées dans ses ouvrages. Pour former la belle collection helminthologique du Muséum de Vienne, et recueillir 368 espèces, on a, dans l’espace de quinze ans, ouvert 45,000 animaux vertébrés. Il à fallu vingt ans el toutes les'ressources offertes par la Ménagerie pour que la collection du Muséum de Paris, commencée avec les envois'venus de Vienne, atteignit le chiffre de 728 espèces (4). Enfin, pour ramas- (1) La collection helminthologique du Jardin des Plantes de Paris est aujour- d'hui une des pius riches. Le chiffre que nous donnons ici indique le nombre des espèces cataloguées en 4850 : depuis cette époque il s'est encore accru. Une circonstance particulière ajoute à l'intérêt de cette collection: M. Valenciennes , 40 nE QUATREFAGES, VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER. ser les matériaux de son histoire naturelle des Helminthes et étudier à l'état vivant un peu plus de 250 espèces, M. Dujardin à, dans vinot ans, exploré 300 Invertébrés et 2,400 Vertébrés. Lorsqu'il s’agit non plus seulement d'examiner les individus qu'on rencontre, mais de suivre une espèce dans son développement, la fiche du na- furaliste devient bien autrement difficile. Pour en donner une idée, nous dirons fout de suite que les Intestinaux les plus importants à examiner subissent des métamorphoses plus nombreuses et plus complètes que celles des Insectes ; que ces métamorphoses sont accompagnées de phénomènes dont la découverte est toute récente ; enfin qu'elles se compliquent de migrations nécessaires à leur accomplissement ; de telle sorte qu'après avoir trouvé un Intestinal à son premier âge dans une espèce animale, c’est dans une autre espèce qu'il faut aller le chercher pour constater ses transformations SUCCeSSIves. E ne faut done pas être surpris que l’histoire du développement des Intestinaux soit longtemps restée en arrière, et que M. de Siébold ait pu dire encore en 1835, que traiter de ce sujet, C'était se hasarder sur une terre inconnue. Sans doute, bien des tentatives avaient été faites pour sortir de cet état d’ignorance à peu près complète ; mais les faits recueillis étaient restés isolés, et présentaient souvent un caractère d’étran- qui en a été le fondateur, a fait conserver en place le plus possible d’Intestinaux dans les viscères qu'ils habitent, et ces préparations, exposées aux yeux des visiteurs , leur racontent, pour ainsi dire à elles seules, l'histoire des espèces qu'ils ont sous les yeux. M. Valenciennes est, croyons-nous, le premier qui ait réalisé cette disposition, dont il reconnaît d’ailleurs avoir puisé l'idée dans ses conversations avec Rudolphi. — La collection du Muséum s’est formée et s'est accrue rapidement par le concours de trois éléments distincts, 1° un fonds deVers non déterminés, conservés depuis fort longtemps, et qui s'était formé en grande partie sous Cuvier ; 2° un envoi venu de Vienne; 3° les autopsies qui se font à la ménagerie, et les Vers rendus par les animaux vivants, surtout par les Serpents. M. Valenciennes s'est, en outre, procuré plusieurs espèces intéressantes, par suite de ses relations avec divers médecins et vétérinaires. Il a étudié et disséqué avec soin un très grand nombre d'espèces, et M. Dujardin, dans son Histoire des Intestinaux, a rendu pleinement justice à la libéralité avec laquelle tous les ma- tériaux recueillis ainsi avaient été mis à sa disposition. (Note ajoutée.) SUR L'HELMINTHOLOGIE« 11 geté tel, qu'il était impossible de les rattacher à aucune des notions existant déjà dans la science, Ainsi, dès 1818, Bojanus, en exami- nant les prétendus Infusoires désignés par O. F. Müller sous le nom de Cercaires, reconnaissait en eux des parasites vivant aux dépens des Planorbes et des Lymnées. Il découvrait en même temps leurs sporocystes, que Baër étudiait en 1828 avec son incontestable supé- riorité. Wagner en 1834, Sicbold en 1837, ajoutaient encore aux recherches de leurs prédécesseurs, et pourtant la patience et la sa- gacité de ces observateurs si habiles semblent n'avoir servi qu'à les égarer de plus en plus. Voici, en effet, comment on peut résumer les conclusions auxquelles ils étaient arrivés. Dans les viscères des Mollusques d’eau douce se produisent, sans qu’on sache comment, des sporocystes, espèces d’enveloppes vivantes présentant à des degrés divers les caractères de l’animalité, mais toujours dépourvues d'appareil sexuel. Ces sporoeystes produisent à la fois de nouveaux corps semblables à eux et de véritables spores qui se développent en Cercaires. Celles-ci sont les parasites nécessaires des sporo- cysles, et manquent également d'organes génitaux. Après s'être développées dans l’intérieur des sporocystes, les Cercaires en rom- pent les parois, s’enkystent, et très probablement terminent leur courte existence dans la nouvelle prison dont elles se sont elles- mêmes entourées. On voit que, d’après cette manière d'interpréter les faits observés, un animal sans sexe, venu on ne sait d’où, pour- rait produire, par gemmation, à la fois des êtres semblables à lui, et des êtres d’une nature toute différente, lesquels ne se propageraient jamais directement. L'exemple que nous venons de citer suffira pour montrer combien étaient encore confuses, il y à quinze ou seize ans, les notions acquises sur la question qui nous occupe. Cependant, vers cette époque même, on enregistrait des faits importants. Mehlis, dès 4831, Dujardin, Nordmann, Creplin, Siebold, en 1837, observaient des embryons de Trematodes très différents des adultes, et portant surtout des cils vibratiles, organes de locomotion qu’on ne retrouve dans aucun individu arrivé à l’état parfait. En même temps, Dujardin, Siebold, Kælliker, trouvaient les embryons de Ténias, encore renfermés dans la coque de l'œuf, pourvus de crochets céphaliques, alors même qu'ils appartenaient à 12 DE QUATREFAGES, VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER. des espèces inermes. Dans les espèces armées, ces crochets diffé- raient de ce qu'on observe chez les animaux adultes, par leur forme et leur disposition. Dujardin, en particulier, insiste avec raison sur ce fait. À partir de ce moment, la croyance aux métamorphoses de certains Intestinaux fut nettement professée par les helmintholo- gistes les plus distingués. Cette présomption, que l'expérience a justifiée, aurait pu pour- tant entrainer dans des voies fausses et empêcher de reconnaitre la vérité, si des découvertes récentes , faites dans des groupes très éloignés des Intestinaux, n'étaient venues éclairer les naturalistes. En effet, jusqu’à ce jour , les métamorphoses, même chez les In- sectes, pouvaient se rattacher aisément au mode de développement observé chez les animaux les plus élevés. Dans ces derniers , les organes n'apparaissent pas d'emblée avec la forme et les rapports qu'ils auront plus tard. Dans l'Homme même on observe des or- ganes transitoires qui, après avoir acquis des dimensions propor- tionnellement considérables, s'atrophient et disparaissent plus ou moins complétement. Jusque chez lui, on peut dire qu'il existe des métamorphoses. Pour être plus complètes, et surtout plus appa- rentes, celles que nous présentent les Insectes n’en sont pas moins de même nature. Un fait fondamental se retrouve entre autres dans les unes et les autres. Tout germe, tout œuf, donne ici naissance à un individu unique ; et cette unité, cette imdividualité, persistent sans interruption à travers tous les changements de structure et de forme que peut subir l'organisme. Pour être passé par les états de Chenille et de chrysalide, le Papillon n’en est pas moins le produit direct du germe que renfermait l'œuf ; il n’en est pas moins le fÎls immédiat de ses père et mère, et cela au même titre que l'enfant. Les choses ne se passent pas d'une manière aussi simple chez certains Invertébrés inférieurs. Sans remonter jusqu'à Chamisso, dont les observations relatives aux Biphores ont été si longtemps traitées de fables, rappelons en quelques mots ce que MM. Saars, Dujardin, Siebold, Van Beneden.…...…., nous ont appris du dévelop- pement des Méduses. Lei, on voit sortir de l'œuf pondu par la mère une larve ciliée semblable à un Infusoire des plus simples. Au bout de quelque temps, cette larve se fixe et se transforme tantôt en un SUR L'HELMINTHOLOGIE. 13 polypier rameux, tantôt en un animal assez semblable à nos Hydres d’eau douce. Dans le premier cas, le polypier rameux produit un certain nombre de bourgeons, dont la plupart deviennent autant de Polypes fixés sur le trone ou les branches, et vivant à la facon de tous les animaux de cet ordre ; mais quelques uns de ces bourgeons prennent en se développant une forme bien différente et une struc- ture beaucoup plus compliquée. Ils reproduisent bientôt tous les ’aractères de la Méduse mère, s’isolent de plus en plus, acquièrent des organes génitaux , se détachent enfin , et vont semer au loin les germes de colonies nouvelles. Dansle second cas, le Polype hydraire sorti d’un œuf de Méduse se partage spontanément en anneaux transversaux, dont chacun acquiert successivement les organes d'une Méduse adulte, puis se sépare du trone commun et jouit d’une vie indépendante. Dans les deux cas d’un œuf unique est sorti un animal dépourvu d'appareil générateur, mais pouvant produire par gemmation un grand nombre d'individus, qui, eux, se propageront par les procédés ordinaires. ei donc l'unité, l'individualité du germe, ont été brisées ou, si l’on veut, multipliées par le fait du dé- veloppement. Les Méduses, la plupart des Acalèphes peut-être , sont le produit indirect de l'œuf primitif, les fils médiats de leurs parents. En 1842, un naturaliste danois, M. Steenstrup , tenta de coor- donner tous les faits de cette nature alors connus, et fut ainsi conduit à sa théorie de la génération alternante. Ce phénomène consiste, en effet, en une sorted’alternative. Une mère sexuée engendre des filles sans sexe qui ne lui ressemblent pas, et qui, à leur tour, produisent directement des petites-filles semblables à leur grand’mère et à sexe caractérisé. Dans l'ouvrage de Steenstrup, les individus agames qui donnent naissance aux individus sexués sont désignés sous le nom de nourrices (Amimen). Bien que Steenstrup eût fait une part trop large aux formes exté- rieures, etque ses idées manquassent de généralité à certains égards, la publication de son ouvrage n’en rendit pas moins de très grands services : l’histoire du développement des Intestinaux se trouva entre autres éclairée d’un nouveau jour. Aussi, lorsque Siebold, en 1848, publia son Manuel d'anatomie comparée, il n’hésita pas à Î1{ DE QUATREFAGES. VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER. adopter les idées du naturaliste danois. Les Sporocystes , les Ger- caires et plusieurs autres genres de Vers, disparurent de lanomen- clature. Les premiers ne furent plus des animaux adultes ; les se- conds ne furent plus des parasites nécessaires d’un autre Intestinal. Lesuns et les autres furent considérés soit comme des nourrices, soit comme des états transitoires que devaient traverser pour arriver à l’état parfait certains Intestinaux qu’on reconnut bientôt être des Trématodes. Cet ordre, l’un des plus nombreux etdes plus intéres- sants de la classe, se trouva ainsi débarrassé de toutes les espèces agames admises jusque-là, et dont l'existence avait si longtemps été invoquée comme un argument sans réplique par les partisans de la génération spontanée. Toutefois nous devons dire qu'aucun natura- listé n'avait encore suivi un Trématode quelconque dans toutes ses évolutions, etque l'opinion de Siebold, manquant de la sanction que peut seule donner une constatation directe, pouvait laisser des doutes chez quelques esprits. L'ordre des Cestoïdes présentait des problèmes fort analogues à eeux que soulève l'étude des Trématodes. Là aussi on rencontrait des genres, des groupes entiers composés d'espèces agames. Là aussi on avait cru voir des parasites nécessaires habitant l'intérieur d'un Ver dont l’origine était inconnue. L'étude des Anthocéphales avait même conduit à faire croire à une espèce d'œuf vivant de sa vie propre, tandis que le germe qu’il renfermait se développait de son côté. Sans doute les progrès accomplis ailleurs faisaient abandonner chaque jour quelqu’une des anciennes croyances, mais on ne mettait rien à la place. En 1848, Siebold, résumant nos connais- sances sur le sujet dont il s’agit, accordait aux Cœnures et aux Echi- nocoques, considérés comme espèces proprement dites, la généra- tion gemmipare ; déclarait ne connaître de l’histoire des Ténias que ce qui se passe dans l'œuf même, et se taisait entièrement sur les Cysticerques, les Anthocéphales et les Télrarhynques. Depuis cette époque, la science a marché, et par cela même a soulevé des ques- tions, des difficultés nouvelles. Les Ténias, les Bothriocéphales et les autres Cestoïdes vrais , sont-ils des animaux simples ou des agrégations d'animaux com- parables, jusqu’à un certain point, à celles qu'on trouve chez les SUR L'HELMINTHOLOGIE. 15 Zoophytes et les Mollusques ? La première de ces opinions ést géné- ralement adoptée, surtout depuis les travaux des helminthologistes classificateurs. Toutefois , de tout temps , quelques naturalistes ont professé l'opinion contraire, et parmi eux nous citerons Vallisnieri, Lamarck, Duméril, Duvernoy, Eschricht, Steenstrup. En 1850, M. Van Beneden, dans un travail très remarquable à plusieurs titres, émit une troisième opinion. Comme les auteurs que nous venons de citer, il admit la nature polyzoïque des Cestoïdes, mais en même temps il regarda ces êtres comme des formes transitoires, comme une simple phase de développement de certains Vers. Nous revien- drons d’ailleurs, tout à l’heure, sur ce sujet. Nous devons mentionner iei une opinion émise par M. Dujardin en 1843, et qui pourrait, à certains égards, être considérée comme intermédiaire entre les idées que nous venons de rappeler. Sans vouloir, comme il le dit lui-même, revenir aux doctrines de Val- lisnieri sur la nature polyzoïque des Cestoïdes , cet habile helmin- thologiste admet que dans certaines circonstances, les derniers articles d’un Ténia peuvent s’isoler et vivre d’une vie indépendante ; qu'ils peuvent acquérir une taille plus considérable , des formes mieux déterminées, et même des organes qu'ils ne possèdent pas tant qu'ils restent fixés. M. Dujardin a donné le nom de Proglottis à ces espèces d'animaux adventifs, et dans son Histoire des Hel- minthes, il en a formé un genre spécial. Quels rapports unissent entre eux les Cestoïdes ou Vers ruba- naires, et les Cystiques ou Vers à vessie? Ces Vers, si semblables par leur extrémité antérieure, si différents à tout autre égard, doivent-ils être réunis ? doivent-ils former deux ordres distinets ? lei encore, les anciens helminthologistes avaient admis l'existence d’affinités que rejetèrent Gæze, Zéder, Rudolphi et leurs continua- teurs. Cependant, dès 1820 , Nitzch faisait remarquer qu'entre un Anthocéphale et un Tétrarhynque , qu'entre un Cysticerque et un Ténia, il n'existait d'autre différence que la présence dans les pre- miers d’une vésicule caudale qui manquait chez les seconds. Cette observation importante fut longtemps négligée ; mais enfin les rap- ports aperçus par Redi et Vallisnieri devinrent de plus en plus sen- sibles, à mesure que l’organisation de ces animaux fut mieux connue, 16 DE QUATREFAGES, VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER, En 4844 et 1845, à peu près en même lemps, MM. Dujardin et Siebold émirent nettement l'opinion que les Cysticerques ne sont que des Ténias déformés, et M. Blanchard, dans son beau travail sur l'organisation des Vers, adopta cette opinion. Pour ces natura- listes d’ailleurs, la transformation des Cestoïdes en Cystiques est toujours un phénomène tératologique. Au lieu de se développer normalement commeil l’eût fait dans le tube digestif, un Ténia égaré au milieu des tissus devient monstrueux et passe à l’état de Cysti- cerque. C’est ici le moment d'exposer l’ensemble des idées émises par M. Van Beneden dans le mémoire cité plus haut. Aux yeux de ce naturaliste, il n'existe aucune différence fondamentale entre les Trématodes et les Cestoïdes arrivés à l’état parfait ; mais ces der- niers n’atteignent à leur forme définitive qu’en passant par divers états, et en particulier par l'état de Cystique ou de Ver à vessie et de Cestoïde ou de Ver rubanaire. Dans cette manière de voir, le Cysti- cerque, loin d’être un Ténia déformé et devenu monstrueux, estun jeune Ténia possédant ses formes normales ; mais, à son tour, le Ténia développé qui en provient n’est qu'une forme transitoire. En outre, de monozoïque qu'il était jusque-là, il estdevenu polyzoïque. Chacune des articulations doit se séparer à son tour, acquérir seule- ment alors tous ses caractères, et vivre d’une vie indépendante. Ce dernier état, dans lequel le Ver complétement adulte a retrouvé l’in- dividualité et ressemble à un Trématode, est désigné par M. Van Beneden par le terme général de Proglottis, emprunté à M. Dujar- din. L'état de Ver rubanaire est appelé Strobila, nom sous lequel Saars avait désigné un de ces Polypes hydraires qui semblent se fractionner en Méduses. L'état de Z’er à vessie est nommé Scoleæ, terme générique employé jusqu'ici pour des Intestinaux agames assez mal caractérisés . Enfin, sous le nom de Proscoleæ, M. Van Beneden désigne les larves armées de crochet qu'on observe dans les œufs mêmes des Ténias. On voit que le naturaliste belge fait à l’histoire des Cestoïdes une large application des notions acquises par l'étude du développement des Acalèphes. Dans les idées de M. Van Beneden, le Cysticerque, scolex d’un Ténia, persiste dans son état de Ver simple et agame aussi longtemps SUR L'HELMINTHOLOGIE. 17 qu'il reste dans les tissus où il s’est développé. Pour devenir Stro- bila, il faut qu'il passe dans un tube digestif, et cette migration a lieu lorsque l'animal où s’est développé le Cysticerque est dévoré par un autre animal. Cette espèce de migration peut être provoquée et sui- vie. Déjà, en 1844, M. de Siebold avait vu le Cysticerque des Rats perdre sa vésicule dans l'estomac du Chat, et se transformer dans l'intestin grêle en Ténia à cou épais. Cette observation venait sans doute à l'appui de faits recueillis depuis longtemps chezles Poissons et chez les Oiseaux de mer. Mais on n’en avait tiré aucune consé- quence nouvelle, et le silence gardé, en 1848, par M. Siebold nous semble prouver qu'il n'y avait pas attaché une très grande impor- tance. En 1851, M. Kuechenmeister, médecin à Zittau, publia le pre- nier le résultat d'expériences régulières, instituées pour recon- naître si la transformation des Cysticerques en Ténias était un fait constant. I fit avaler à des Chiens le Cysticerque pisiforme des Lièvres et des Lapins ; il vit constamment ce Cysticerque se trans- former en Tœnia serrata, une des espèces les plus communes chez le Chien. Ces expériences répétées par Léwald sous les veux de Siebold , et plus tard par Van Beneden , furent pleinement con- firmées. Quelque net que puisse paraître ce résultat, il prêtait encore à la controverse. Le Ténia doit-il passer nécessairement par l’état de Cysticerque ? Ne peut-on pas croire qu'après avoir été seulement déformé par suite du séjour dans un milieu impropre à son déve- loppement , ilse guérit pour ainsi dire, se débarrasse des parties accidentellement monstrueuses, et reprend le cours normal de son évolution aussitôt qu'il se trouve dans un milieu convenable ? Cette dernière opinion a été vivement soutenue par M. de Siebold et combattue par M. Van Beneden (4); mais ni l’un ni l’autre de ces (4) Quelques expressions de M. Van Beneden peuvent faire supposer qu'il ad- mettrait dans quelques cas la transformation tératologique : mais par le titre général de scolex donné aux Cestoïdes agames, il semble pourtant indiquer que cet élat est pour lui un état normal. (Je me suis d'ailleurs assuré, depuis la lec- ture de ce rapport, en causant avec M. Van Beneden, que je ne m'étais pas trompé sur les opinions de ce naturaliste. A. de Q.) 4° série. Zooc. T, F. (Cahier n° 1.) ? 9 A8 DE QUATREFAGES, VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER. habiles naturalistes ne nous semble avoir apporté de fait nouveau important à l'appui de sa manière de voir. L'ensemble des travaux anatomiques et embryogéniques, dont les Intestinaux avaient été l'objet depuis quelques années, devait avoir pour résultat d'éclairer les naturalistes sur les véritables affi- nités de ce groupe. Depuis longtemps, la plupart d'entre eux avaient abandonné les idées de Cuvier, qui plaçait ces animaux dans les Rayonnés. De plus, en même temps qu'avec M. de Blainville on les rangeait parmi les Annelés, on reconnaissait avec O.-F. Müller et Linné que, malgré leur genre de vie si exceptionnel, les Intesti- naux n’en sont pas moins très voisins d’autres groupes, formés d'espèces à vie tout extérieure. Dès 1841, M. Edwards, en établis- sant le sous-embranchement des Vers, faisait des Planariées une famille de la classe des Intestinaux, et ce rapprochement était presque universellement adopté. Enfin, en 1849 , un autre de vos commissaires émettait, au sujet des affinités collatérales où analo- gies de ce groupe, des idées que M. Van Beneden reproduisait l'année suivante, et qui ont été généralement admises, De tout ce qui précède, il résulte que l’histoire des Intestinaux avait fait de grands progrès depuis quelques années. Au point de vue de la physiologie générale, le terrain était pour ainsi dire dé- blayé. Chez les Gestoïdes aussi bien que chez les Trématodes, les prétendues espèces agames avaient presque entièrement disparu, et n'étaient plus regardées généralement que comme des formes soit transitoires, soit accidentelles des espèces sexuées. Dès lors il n'y avait plus à invoquer la génération équivoque pour expli- quer leur existence ; car là où sont remplies toutes les conditions anatomiques nécessaires pour obtenir un résultat physiologique par les procédés ordinaires, il serait peu rationnel d'admettre l’inter- vention d’un procédé tout à part. Mais si les Intestinaux ne se pro- duisent pas sur place et spontanément , ces êtres restent-ils excep- tionnels à un autre titre ? Jouissent-ils à la fois d’une force de résistance vitale telle qu'ils puissent se développer et exister dans des milieux totalement différents, et d’une variabilité de structure telle qu'ils puissent changer d'organisation en mème temps que de milieu ? La question ainsi transformée devenait plus simple sans SUR L'HELMINTHOLOGIE 19 doute, mais sa solution présentait encore de fort grandes diffi- cultés. A un point de vue plus spécial, les principaux points à traiter pour répondre à la question posée par l’Académie étaient les sui- vanls : 1° Pour les Trématodes, il y avait surtout à suivre les larves ciliées dans leur transformation en sporocystes, et les Cercaires dans leur transformation en Distomes. ® Il fallait reconnaître si tous les Trématodes passent nécessare= ment par ces diverses phases embryogéniques. 3° I fallait rapprocher terme à terme les faits recueillis chez ces Intestinaux des faits observés dans d’autres groupes, afin de substi- tuer à des comparaisons jusqu’à ce jour trop vagues des notions précises sur les différences et les ressemblances du mode de déve- loppement. 4° En ce qui touche aux Cestoïdes , il fallait surtout rechercher comment la larve trouvée dans les œufs de Ténia se change en Ver cystique. 5° Il y avait à déterminer si la forme de Ver cystique est une phase normale du développement, ou un accident tératologique. 6° Il fallait décider si les Vers rubanaires à articles distincts sont des êtres simples ou des êtres composés. 7° Dans cette dernière hypothèse, il y avait à reconnaitre si les articles de ces Vers sont des individus parfaits, où bien s'ils doivent s'isoler et vivre d’une vie indépendante pour atteindre le dernier degré de leur développement. 8° Certaines affinités zoologiques admises jusqu'à ce jour dispa- raissant par le fait de cette transformation des articles de Cestoïdes en animaux disünets, il fallait rechercher les affinités naturelles qui en résultent. 9° T1 fallait rattacher les phénomènes du développement des Cestoïdes aux phénomènes du même genre observés soit chez les Trématodes, soit chez d’autres animaux. 40° Enfin il fallait confirmer ou infirmer les vues nouvelles émises depuis peu sur les rapports généraux des Intestinaux avee les autres groupes du règne animal, 20 DE QUATREFAGES, VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER. On voit combien était considérable la masse des problèmes par- ticuliers dont la solution devait précéder la réponse à chacune de ces questions, et à la question d'ensemble posée par l’Académie. En présence de ces difficultés, et du peu de temps accordé pour les vaincre, l’absence de tout concurrent aurait dû paraître chose assez naturelle. IL en eût été ainsi très probablement, s’il ne s’était ren- contré des naturalistes préparés de longue main, et qui n’ont eu, pour répondre à notre appel, qu’à compléter et à coordonner des recherches entreprises depuis plusieurs années. Votre Commission a eu à examiner deux travaux, tous deux en- voyés par des naturalistes étrangers. Le n°1 porte pour épigraphe : « Les lois de la nature sont l’application constante des idées éter- nelles de la sagesse divine à la conservation et au développement des étres qu’elle a créés. » (Sibour). Le n° 2 a pour devise : « Omne vivum ex 0v0; generalio æquivoca nulla.» À elles seules, ces inscriptions montrent que les concurrents ont compris toute la por- tée philosophique du sujet qu'ils avaient à traiter, et que le résultat de leurs études a été de ramener aux règles communes l’histoire des êtres que l’on croyait s’en écarter le plus. Telle est, en effet, la con- elusion générale qui ressort de cet ensemble de recherches. Le travail inserit sous le n° 2 est moins un mémoire qu'un 6u- vrage très considérable sur la matière qui nous occupe. Il se com- pose d’un texte de 575 pages in-folio, et d’un atlas de 92 planches renfermant près de 1000 figures. L'Académie comprendra que nous nepouvons donner d’un pareil travail une analyse même som- maire. Nous nous bornerons done à indiquer la suite des idées pré- sentées par l’auteur, et les principales conclusions auxquelles il est arrivé. Disons d’abord que l’auteur a embrassé la question dans toute son étendue. Un chapitre particulier, placé sous le titre modeste d’Appendice, est mème consacré à l’histoire des Nématoïdes et des Échinorhynques. Quoique moins développée que les autres, cette partie du mémoire n’en renferme pas moins quelques détails inté- ressants et nouveaux. Toutefois l'ouvrage est bien plus spéciale- ment consacré à l'étude des Trématodes et des Cestoïdes. L'auteur partage son travail en six parties. La première et la se- SUR. L'HELMINTHOLOGIE. 21 conde comprennent l'exposé des faits relatifs aux deux groupes nommés plus haut, et que l’auteur examine successivement au point de vue de l'anatomie, du développement et de la distribution systé- matique. La troisième partie est consacrée à comparer entre eux, appareil par appareil et fonction par fonction, les Trématodes et les Cestoïdes. Dans la quatrième, l’auteur traite de la génération alter- nante, et la considère comme un cas particulier d’un ordre de phé- nomènes plus généraux qu'il désigne par l'expression de digénèse. Il fait l’application de ses idées aux principaux groupes d’Inverté- brés, chez lesquels on a signalé déjà soit la génération alternante, soit un mode de reproduction analogue. La cinquième partie com- prend l’histoire des migrations des divers groupes d’Intestinaux, examinés l’un après l’autre. Enfin la sixième partie traite de la sys- tématisation ou de l'application des notions précédentes à la zoolo- gie. Dans tout son travail, l’auteur emploie les mots de Scoleæ, de Strobila et de Proglottis, avec les significations que nous avons in- diquées plus haut. Pour traiter d’une manière convenable la question proposée par l’Académie, des recherches anatomiques étendues, loin d’être un hors-d’œuvre, comme on pourrait le croire, étaient presque abso- lument nécessaires, car il s'agissait d'étudier les métamorphoses embryogéniques non seulement sous le rapport des formes exté- rieures , mais encore et surtout au point de vue de l’organisation interne. Or, malgré les progrès accomplis dans cette direction, il reste encore beaucoup à faire. Chez les Intestinaux, comme dans tous les groupes à type variable, deux espèces très semblables exte- rieurement peuvent présenter à l’intérieur de fort grandes diffé- rences. Il faut donc tenir grand compte à l’auteur de ne pas avoir reculé devant l'énorme surcroît de travail qu'entraînaient des re- cherches de celte nature, Mais nous ne saurions le suivre dans ces détails. Disons seulement que, dans les chapitres consacrés à l’ana- tomie des Cestoïdes aussi bien que des Trématodes, on trouve un très grand nombre de détails nouveaux. Notons aussi que l’auteur, en désaccord sur ce point avec la plupart des helminthologistes, re- fuse aux premiers tout appareil digestif et circulatoire, aux seconds tout organe de circulation. A ses yeux, les canaux auxquels on à 922 DE QUATREFAGES, VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER. attribué ces diverses fonctions appartiennent à un même appareil qui se retrouverait dans les deux groupes et qui serait un appareil excréteur, De nouvelles recherches pourront seules éclaircir ce point important; mais il est à remarquer que déjà, et après avoir reconnu vrais des faits publiés antérieurement par l’auteur, M. de Siebold a modifié son ancienne manière de voir. L'étude des organes génitaux avait depuis longtemps révélé à l'auteur un fait fort curieux, soupconné seulement par Sicbold, savoir que la production de l'œuf est le résultat du concours de plusieurs organes distincts. Chez les Cestoïdes, comme chez les Trématodes, une glande spéciale sécrète les vésicules germinatives, une autre les granulations vitellines , et les premières ont à accom- plir un certain trajet, dans un canal spécial, avant d'arriver à l'em- branchement des deux organes et d’être enveloppées par les se- condes. Lorsque l'appareil femelle acquiert tout son développement, on y trouve , en outre, un oofype, organe destiné à façonner l'œuf avec les éléments tout préparés que lui envoient le germigène et le vitellogène ; un organe sécréteur de la coque ; une matrice, ou magasin à œufs; une vésicule copulative, où magasin à spermato- zoïdes ; un vagin et une vulve. On voit que la complication orga- nique est ici portée bien plus loin que chez les animaux supérieurs. C'est là un des mille exemples qui prouvent, contrairement à des croyances professées encore par bien des naturalistes, que la dé- gradation est loin d'être toujours uniforme dans les diverses parties de l'organisme , et que les divers appareils sont, sous ce rapport, très indépendants les uns des autres. L'appareil mâle montre des faits de même genre. Chez lui, aussi bien que chez l'appareil femelle, on trouve d’ailleurs, d’une espèce à l’autre, des variations parfois très grandes. Sur ce point, l’auteur confirme done une des conclusions générales qui ressortaient déjà des travaux de ses prédécesseurs, et entre autres de ceux de M. Blanchard. Mais il ajoute un grand nombre de faits nouveaux, parmi lesquels plusieurs ont une importance réelle. L'auteur a étudié avec grand soin tout ce qui est relatif au mode de formation, de développement et de fécondation des œufs. I n’a pu vérifier par lui-même ce que d’autres helminthologistes ont dit SUR L'HELMINTHOLOGIE. 23 sur l’accouplement réciproque des Trématodes ; mais, en revanche, il avait publié déjà un fait relatif à la fécondation, ou mieux à la co- pulation solitaire des Cestoïdes, fait observé chez le Phyllobothrium lactuca. I annonce avoir constaté depuis le même phénomène dans d’autres Cestoïdes. Sous le rapport du développement , les Trématodes doivent être partagés en deux sections. Dans la première, qui comprend les Trématodes les plus élevés en organisation , les œufs sont gros et peu nombreux. Ici, l'embryogénie est des plus simples. Le vitellus se contracte et se couvre très rapidement d'un blastoderme déve- loppé en même temps sur toute sa surface. Dès ce moment, il existe un véritable embryon , et les organes commencent à paraître. Le premier de tous est le testicule, c’est-à-dire la partie essentielle de l'appareil fécondateur ; puis viennent les ventouses, la bouche, ete. L'embryon acquiert sa forme définitive dans l'œuf, et n’a pas à su- bir de métamorphoses. Ces observations ont été recueillies sur l'Udonella caligorum, et nous devons faire remarquer que l’auteur a le premier suivi un Trématode dans le cours entier de son déve- loppement. Sans doute , il est à regretter que cette espèce ne pré- sente pas les phénomènes compliqués dont nous avons parlé plus haut ; mais cette absence même est un fait nouveau et important : elle nous apprend que chez les Trématodes, aussi bien que chez les Insectes et les Mollusques acéphales, il existe des espèces à méta- morphoses incomplètes où même nulles. Il ouvre par conséquent un champ nouveau de recherches, et doit nous mettre en garde contre des généralisations prématurées. Disons tout de suite que, pas plus chez l'Udonella que chez les autres Vers, l’auteur n’a observé le singulier fractionnement du vi- tellus, découvert, chez les Batraciens, par MM. Dumas et Prévost, D'après les travaux les plusrécents, ce phénomène semblerait pour- tant être général et se manifester dans toutes les espèces animales, M. Desor, entre autres, l’a constaté chez les Némertiens, c’est-à- dire dans un groupe peu éloigné des Intestinaux. Il nous parait pro- bable que le fractionnement du vitellus existe également chez ces derniers, mais qu'ila échappé aux recherches de l’auteur, * Les Trématodes à organisation plus simple forment la seconde 24 DE QUATREFAGES, VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER. section. Quelques uns sont ovovipares; la plupart pondent des œufs qui se développent au dehors, et qui sont toujours très petits et très nombreux. Toutes les espèces appartenant à cette section parais- sent soumises aux métamorphoses dont nous avons parlé plus haut. En abordant cette étude difficile, l'auteur à repris d’abord les observations faites par Siebold sur le Monostomum mutabile , dès 1835. Il les à complétées, étendues, et leur a donné une signi- fication toute nouvelle. Comme l’habile naturaliste allemand, notre auteur a vu le vitellus se changer en embryon cilié dans la matrice même de la mère ; il l’a vu sortir de ce réservoir et nager en tour- billonnant , puis bientôt s'arrêter, se décomposer en laissant à sa place un corps vivant, que Siebold avait considéré comme un para- site nécessaire, pouvant peut-être se transformer en sporocyste, el que M. Dujardin à regardé comme un simple organe. Pour l’auteur que nous analysons, la larve ciliée sortant de l'œuf estun proscoleæ, et le corps énigmatique de Siebold et de Dujardin est le véritable scoleæ ; celui-ci pousse par gemmation interne dans l'intérieur du proscolex. L'auteur décrit avec soin son développement et la forme singulière qu'il affecte. 11 a cherché, mais vainement, à le suivre dans ses transformations subséquentes en l’inoculant d’une manière directe ou indirecte à des Mollusques, à des larves d’Insectes, ete. Cet insuecès nous surprend peu. Le Monostomum mutabile n’a en- core été trouvé, croyons-nous, que chez des Oiseaux aquatiques, et l'auteur eût été peut-être plus heureux en expérimentant avec ces aNiNAUX, : Quoi qu'il en soit, la chaine des observations se trouvait ainsi interrompue. Heureusement, parmi les Mollusques examinés par l'auteur, il s'en est trouvé qui portaient des parasites très sem- blables par leur forme et tous leurs autres caractères aux Scolex de Monostome ; ceux-ci ont pu être suivis jusqu'à leur transformation en Distomes. L'auteur a done parcouru le cercle embryogénique tout entier, cerele dont ses prédécesseurs n'avaient exploré que des segments. Prenons pour exemple ce qui se passe dans le Distoma militare. A l'état de scolex (sporocyste des auteurs), ce Ver habite les or- ganes de la Paludine vivipare; c’est alors une sorte de gaine arron-, SUR L'HELMINTHOLOGIE. 25 die, portant en arrière deux courts appendices latéraux, ne possédant d’autre organe qu'un tube alimentaire terminé en cœcum et logé dans la cavité générale du corps. A mesure que cette gaine prend de l'accroissement, on voit des espèces de vésicules germer sur les parois internes de celle cavité, se détacher, et tomber dans le liquide qui la remplit. Là ces vésicules se développent comme de véritables spores. Mais iei se présente une circonstance bien curieuse : tantôt ces spores se transforment directement en proglottis (Cercaires des anciens observateurs) ; tantôt elles deviennent des scolex semblables à celui qui leur a donné naissance, et qui produiront plus tard des Cercaires; tantôt enfin on trouve à la fois dans la même cavité des scolex et des proglottis croissant simultanément. Ces faits, annoncés pour la première fois par Siebold, ont été confirmés par Steenstrup et par l’auteur du travail que nous analysons. Aïnsi, dans ces sin- guliers êtres, non seulement la forme embryonnaire est séparée de la forme définitive par de véritables générations, mais encore le nombre même de ces générations peut varier dans certaines limites. L'organisation des proglottis (Cercaires) qui se développent dans le corps des scolex (sporocystes) est bien plus compliquée que celle de ces derniers, et varie d’ailleurs d’une espèce à l’autre. Ceux qui doivent donner naissance au Distoma militare acquièrent succes- sivement leur queue caractéristique , un appareil digestif bifurqué pourvu d'un très fort bulbe œsophagien, un appareil sécréteur destiné à se compléter plus tard, enfin les crochets en couronne de la Cercaria echinata. Alors les parois du scolex, distendues par l'accroissement d’une génération trop nombreuse , se rompent , et les proglottis deviennent libres. Ts nagent d’abord avec beaucoup de rapidité, non plus à l’aide de cils vibratiles, mais en se servant de leur queue à peu près comme des tétards de Grenouilles. Puis, s'ils viennent à rencontrer une larve où un Mollusque dont lestissus con- viennent à leur développement ultérieur, ils se fixent, et alors com- mence pour eux une nouvelle période embryogénique. Ces proglottis perdent d’abord leur queue devenue désormais inutile; puis ils exsudent par {ous les points du corps un liquide visqueux qui se durcit et les enveloppe entièrement. Ainsi enkystés, ils deviennent le siége de phénomènes comparables à ceux qu'on a 26 DE QUATREFAGES, VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER.. observés depuis longtemps chez les Mouches. Les organes déjà existants se complètent et prennent leurs formes et leurs propor- tions définitives. En même temps on en voit paraître de nouveaux, et entre autres les organes génitaux, représentés jusque-là seule- ment par une masse granuleuse et amorphe. Dès lors , la Cercaire s’est transformée en Distome ; le proglottis est devenu un individu adulte et complet. Indépendamment de la Cercaria echinata et du Distomamilitare, l’auteur a rattaché l’un à l’autre, à titre de scolex et de proglottis d'une même espèce, le Bucephalus polymorphus de Baer et le Distoma duplieatum ; il a de plus fait connaitre le scolex du Distoma retusum (Duj.). Mais nous ne pouvons le suivre dans ces détails, non plus que dans l'exposé des faits relatifs à la conjugaison de cer- tains Hehninthes ; nous préferons passer de suite au développement des Cestoïdes. Chez ceux-ci, comme chez les Trématodes, ilexiste des espèces à développement simple et direct. Telle est du moins la conséquence qui ressort pour nous de ce que l’auteur rapporte lui-même sur l’embryogénie du Caryophylleus mutabilis, bien que, entrainé peut-être par ses idées générales , il paraisse avoir embrassé une autre opinion. Les Caryophyllées sont une exception peut-être unique parmi les Cestoïdes. Toutesles autres espèces paraissent, en effet, destinées à subir des métamorphoses plus ou moins semblables à celles des Trématodes, avant d'atteindre à leur forme définitive. Afin de don- ner une idée de ces phénomènes, nous prendrons pour exemple ce qui se passe chez les Ténias, En acceptant comme exacte une observation récente de Stein, rapportée par l’auteur, mais qu'il n’a pu vérifier, la larve à six cro- chets résultant de l’organisation du vitellus sortirait de l'œuf, et vi- vrait quelque temps sous cette forme, considérée par notre auteur comme un proscoleæ. Dans son intérieur se développerait, par gemmation, le scolex proprement dit, qui porterait la couronne de erochets caractéristiques de certaines espèces de Ténia. L'observa- tion de Stein, unique jusqu'à ce jour, peut laisser du doute sur ces premières phases du développement des Ténias; mais il n’en est SUR L'HELMINTHOLOGIE. 27 pas de même des suivantes. Le scoleæ de ces Intestinaux est connu depuis bien longtemps sous le nom de Cysticerque. I peut être considéré comme le type des Vers à vessie, et les expériences de Kuechenmeister nous ont appris que, placés dans des conditions convenables, ces scolex se transforment en Vers rubanaires. Mais là ne s'arrêtent pas pour notre auteur les transformations du Cestoïde ; selon lui, chaque article de ce long chapelet est un indi- vidu qui doit se compléter successivement, et, dans la plupart des espèces, mais non dans toutes, se détacher et vivre d’une vie indé- pendante. L'auteur à présenté un grand nombre de faits à l’appui de son opinion. En répétant les expériences de Kuechenmeister, il a suivi avec soin les transformations des Cysticerques donnés en pâture à des Chiens que l’on tuait à divers intervalles de temps. I a vu ainsi les Cysticerques perdre leur vessie, puis germer en arrière en pré- sentant une extrémité postérieure bien caractérisée par sa forme, sa mobilité et l'existence d’une vésicule pulsatile , dépendante de l'appareil excréteur et s'ouvrant au dehors par un orifice distinct. A mesure que le corps s’accroit, on voit se former des plis transver- saux qui indiquent la séparation des articles. Ceux-ci mürissent suc- cessivement en commencant par la partie postérieure du Ver, et quand le moment est venu, l'extrémité qui portait la vésicule con- tractile se détache et n’est pas remplacée ; puis chaque article à son tour se sépare du chapelet, en procédant toujours d’arrière en avant. L'ensemble des articles est pour notre auteur un strobila, et chaque article est un proglottis. Si ces proglottis, isolés comme nous venons de le dire, acqué- raient toujours des organes nouveaux, leur individualité eût été bien difficile à mettre en doute, et l'opinion de Vallisnieri n’eût pas été aussi facilement écartée par celle de Zéder et de Rudolphi. Mais il n'en est pas ainsi. Nous ne connaissons même qu'un fait bien pré- cis de ce genre, fait qui paraît avoir échappé à notre auteur, et qui doit d'autant moins être révoqué en doute, qu'il a été recueilli par un naturaliste formellement partisan des croyances généralement re- çues. M. Dujardin a décrit et figuré, dans les proglottis du Tœnia pistillum, une espèce de ventouse qui s’est formée seulement après 28 DE QUATREFAGES, VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER. la séparation de l’article. Souvent il arrive, au contraire, que le proglottis isolé semble se déformer et que les organes internes de- viennent moins distincts. Mais leur atrophie réelle ou apparente résulte seulement du développement des œufs et de la matrice qui les renferme, laquelle envoie des prolongements en tout sens, jus- qu'au moment où, par suite de l'accroissement des germes, ses parois et celles du proglottis lui-même se trouvent rompues. Dans l’état où la science se trouvait il y a peu de temps, regarder les Cestoïdes comme des agrégations d'individus, devait paraître une hypothèse bien hasardée. Plus tard, quoique pouvant s'appuyer sur un certain nombre de faits, cette doctrine heurtait des opinions trop fortement enracinées pour ne pas être d'abord repoussée avec vivacité. Aujourd’hui encore on ne peut l’accueillir qu'avec quelque réserve ; toutefois nous ne eraignons pas de dire qu’elle est pleine- ment d'accord avec les résultats que les recherches les plus récentes nous ont acquis sur l’histoire de divers groupes d’Invertebrés et des Intestinaux eux-mêmes. Cette manière de comprendre la nature des Cestoïdes peut seule entre autres, selon nous, expliquer les phénomènes d’accroissement et de modifications organiques obser- vés dans les articles isolés des Ténias. Si ces articles isolés continuaient seulement à se mouvoir, S'ils changeaient seulement quelque peu de forme extérieure , ce serait là de très faibles arguments en faveur de la polyzoïcité. Les frag- ments de plusieurs animaux inférieurs bien évidemment monozoï- ques présentent des faits de ce genre , et l'un de vos commissaires a souvent insisté sur ces phénomènes ; mais il n’en est pas de même d’une augmentation de volume telle que, dans certains cas, un ar- ticle ainsi isolé atteint des dimensions égales à celles du strobila entier. Jamais de simples fragments ne se conduisent ainsi, à moins qu'ils ne soient chargés de reproduire l'animal primitif. La dégradation que subissent les proglottis par suite des progrès de l’âge, leur transformation, chez certaines espèces, en une sorte de gaine presque exclusivement envahie par les œufs, sont encore des faits très importants. Si un certain nombre d'organes s’atro- phient pendant cette période de leur existence, on voit que d'au- tres, au contraire , ne prennent qu'à cette époque tout leur déve- SUR L’HELMINTHOLOGIE. 29 loppement. Or, ceux-ci sont précisément ceux qui doivent acquérir alors leur maximum d'énergie pour assurer la propagation de l’es- pèce. Il se passe done ici un de ces phénomènes de balancement si communs dans les êtres vivants, qui ne s’observent que À, et dont surtout rien ne donne une idée dans un véritable fragment d'animal. Peut-être répugne-t-il à quelques esprits d'admettre qu'après avoir vécu longtemps sous des formes transitoires, un animal ne passe que fort peu de temps sous sa forme définitive ? Mais, jusque chez des animaux relativement très supérieurs , nous connaissons des faits de même nature. Nous n'avons qu'à nommer la classe des Insectes en général, et les Éphémères en particulier. Sans doute il peut paraître étrange qu'un animal adulte se dé- grade au point de ne devenir qu'une espèce de sac à œufs , et de ne jouer le rôle que d'une machine à dissémination. Mais encore ici , nous trouvons des faits presque identiques chez des animaux beau- coup plus élevés. Personne n'ignore aujourd’hui l’histoire des Ler- nées femelles, et les étranges déformations qui avaient conduit Cuvier à placer ces Crustacés parmi les Vers intestinaux. D'autre part, un de vos commissaires a montré, dès 1843, que chez les Syllis il y avait production d’un animal différent de son parent , et produit tout exprès pour servir de magasin aux éléments mâle ou femelle de la reproduction, et d’instrument pour la fécondation et la dispersion des germes. Quoique jouissant d’une vie plus longue et plus com- plète dans ses manifestations , les Méduses issues des Polypes hy- draires ou rameux doivent surtout remplir cette fonction. Le fait attribué aux proglottis dans les idées de notre auteur n'aurait done rien d’exceptionnel. La continuité de certains organes ou appareils qui passent , sans interruption, d'un article à l’autre, chez les Cestoïdes, ne saurait davantage être un argumentcontre l’individualisation de ces articles. Dans les Mirianes , dans les Syllis, étudiées par M. Edwards et un autrede vos commissaires, le tube digestif, le système nerveux, se prolongent bien manifestement jusqu'à l'extrémité de l'agrégation formée par l'animal primitif et les individus adventifs. On voit qu'il est facile de défendre la doctrine des naturalistes qui regardent les Cestoïdes comme des êtres polyzoïques. Loin d'en 30 DE QUATREFAGES, VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER, faire des êtres à part , cette manière d'envisager les faits permet de classer les phénomènes que présente leur histoire à côté de phéno- mènes semblables qui se montrent chaque jour plus nombreux. Toutefois , nous le répétons, votre commission n’a pas cru devoir regarder le problème comme définitivement résolu. A l'appui de ses idées sur le développement et la nature des Ces- toïdes , l’auteur rapporte un grand nombre de faits recueillis dans d’autres groupes que les Ténias , et en particulier dans la famille des Tétrarhynques ; mais, de quelque intérêt que soit cette partie du travail, nous devons nous borner à la mentionner. Après avoir étudié séparément les Trématodes et les Cestoïdes , l’auteur compare soigneusement ces deux groupes, appareil par appareil et fonction par fonction. Il signale, sans doute , des diffé- rences ; mais les ressemblances lui paraissent l'emporter , et il est ainsi conduit à voir dans les Cestoïdes adultes , c’est-à-dire arrivés à l'état de proglottis , des Trématodes inférieurs , dans les Vers ruba- naires (Ténia, Bothriocéphale, Tétrarhynque, ete.), de simples agré- gations de Trématodes en voie de développement. Quelque hardies que puissent paraître ces conclusions, nous ne pouvons méconnaitre qu’elles semblent être la conséquence logique des faits énoncés par l’auteur ; mais peut-être ces conséquences sont-elles un peu forcées. Sans entrer ici dans une discussion que le temps ne nous permet pas, nous nous bornerons à dire que les raisons employées par l’auteur pour faire rentrer le Caryophyllœus dans sa formule générale nous semblent plus ingénieuses que fondées , et que ce Cestoïde , à tête caractéristique, mais à corps lisse et qui ne se segmente jamais, doit peut-être fournir le vrai point de départ dans l'appréciation des affinités existantes entre les Cestoïdes et les Trématodes. La quatrième partie de ce travail est consacrée, avons-nous dit, à l'étude de la génération alternante et des phénomènes qui s'y rat- tachent. Ce chapitre est extrémement intéressant par le nombre des faits que l’auteur réunit, groupe et compare ; mais nous ne pouvons le suivre dans le développement de sa pensée. Nous nous bornerons à dire que l’auteur trouve, chez les animaux, deux modes généraux de reproduction. Dans l’un, les sexes interviennent; dans l'autre, ils n'interviennent pas. Tout animal qui n’emploie pour se propa- SUR L'HELMINTHOLOGIE. 31 ger qu'un seul de ces modes est dit monogénèse ; tout animal qui emploie les deux modes est appelé digénèse. La génération alter- nante de Steensturp n’est qu'un cas particulier de la génération digénèse. Dans la cinquième partie , l’auteur, réunissant les faits observés par lui-même à ceux qu'avaient recueillis ses prédécesseurs , exa- mine d’une manière à la fois générale et détaillée la répartition des diverses espèces d'Helminthes dans le corps des animaux ou en de- hors des organismes vivants ; leurs migrations d’un milieu dans un autre, et d’un animal dans un autre animal. Il est conduit ainsi à quelques résultats importants par leur généralité. Ainsi il résulte de cette espèce de statistique, que les Cysticerques ou scolex de Ténias se trouvent presque exclusivement chez des animaux aériens herbivores ; les Ténias, à l’état de strobila on de proglottis, habitent presque tous des carnassiers , respirant également l'air en nature. Les exceptions à cette règle pourraient d’ailleurs s'expliquer aisé- ment. Chez les Poissons, les Tétrarhynques agames, c’est-à-dire à l'état de scolex, et les Tétrarhynques sexués, c'est-à-dire les indi- vidus passés à l’état de strobila, présentent des faits analogues. Ces résultats viennent à l'appui des idées exposées plus haut sur les transformations de ces Vers, et, en outre, ils nous montrent que le type Tétrarhynque représente , chez certains animaux aquatiques , le type Ténia des animaux aériens. Dans la sixième et dernière partie , l’auteur présente un histo- rique complet des Intestinaux au point de vue de la systématisation. Il expose ensuite ses propres idées, tant sur ce groupe et les groupes voisins, que sur le Règne animal considéré dans son ensemble. Du sous-embranchement des Vers proposé par M. Edwards, il ne fait qu'une seule classe, partagée en onze ordres. Quant à la réparti- tion de ceux-ci, il adopte, en les modifiant sur quelques points, les idées émises 1ly a quelques années par un de vos commissaires, et admet l'existence de deux séries caractérisées par la séparation des sexes ou par leur réunion sur les mêmes individus. L'auteur propose de partager le Règne animal en trois groupes fondamentaux , qu'il désigne par les noms d'Hypocotylédones ou Vertébrés, d'Épicotylédones où Articulés, et d’Allocotylédones 32 DE QUATREFAGES, VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER. comprenant les Vers, les Mollusques et les Zoophytes. On voit que, dans cette classification, l’embranchement des Rayonnés de Cuvier se trouve supprimé. Votre commission croit devoir déclarer qu’elle n'accepte pas cette conclusion. À part toute autre considération , elle pense que l’auteur s’est laissé guider ici par des préoccupa- tions trop exclusivement empruntées à l’histoire encore trop in- complète du développement des êtres. Sans doute , l'embryogénie est destinée à jeter un jour tout nouveau sur bien des questions encore obscures ; mais il ne faut pas rejeter pour cela, comme étant sans valeur, les résultats fournis par l'examen des formes défini- tives. A leur début, tous les germes se ressemblent; les animaux auxquels ils donnent naissance ne se caractérisent que progressi- vement : s'ils ont à subir des métamorphoses multipliées et com- plexes, il est tout simple que leurs premières formes soient presque identiques. Mais de ce que la larve d’un Distome ou d’une Anné- lide, et celle d’une Astérie ou d’une Méduse, ne sauraient peut-être se distinguer l'une de l’autre, les animaux adultes, on le sait, ne se ressemblent pas davantage pour cela. Au point de vue embryogé- nique , ils peuvent être les analogues les uns des autres ; mais ces analogies physiologiques n'engendrent pas de véritables afinités zoologiques. Or, c’est de celles-ci qu'il s’agit en ce moment, et pour en juger, il faut tenir compte de tout. Ce n’est pas trop de l'histoire entière d’un animal pour arriver à connaître ces dix et vingtrayons (Cuvier) qui l’unissent au reste de la création vivante. Les réserves que nous avons exprimées, celles que nous croyons avoir à faire encore au sujet de quelques détails , ne doivent dimi- nuer en rien aux yeux de l’Académie la valeur très grande du Mé- moire n° 4. L'étendue de ce rapport, la franchise même de nos observations, sontune preuve de la haute estime que mérite ce tra- vail. L'auteur a abordé de front toutes les questions , n’a reculé devant aucune difficulté. Pour les résoudre , il apporte une multi- tude de faits nouveaux et importants, et une théorie qui les em- brasse tous, en les reliant à d’autres phénomènes qu’on croyait en être fort éloignés. Si l’on adopte ses idées, la question est compléte- ment résolue dans sa généralité. En présence d’un pareil résultat , la commission n'a pas cru devoir ajourner la récompense promise, SUR L'HELMINTHOLOGIE, 1 39 et à l'unanimité, elle a décerné le prix au Mémoire n° 4. De plus, et également à l'unanimité, elle demande à l’Académie de faire impri- mer à ses frais ce beau travail. L'auteur du mémoire n° 2 s’est placé à un point de vue infini- ment plus restreint : il ne s'est occupé que des Cestoïdes, et princi- palement de la nature des Vers à vessie et de leur transformation en Vers rubanaires. Acceptant, d’ailleurs, les idées généralement re- ques, il considère ces derniers comme arrivés à l’état parfait. Il re- garde aussi, comme prouvé par les observations de Stein et de Wagener, que les embryons à six crochets engendrent les Vers cysliques; mais il n'a fait, à cet égard, aucune observation directe. Ce travail renferme néanmoins une partie extrèmement impor- tante. L'auteur annonce avoir été le premier à faire des expériences directes pour observer la transformation des Cysticerques en Ténias, et les avoir continuées sans interrupüon depuis 1850 jusqu’au mo- ment de l'envoi du mémoire. Il a expérimenté avec succès sur des Chiens, des Chats, des Lapins de tout âge, en employant plusieurs sortes de Cysticerques. Nous allons résumer rapidement les prinei- paux résultats de ces observations. Lorsqu'on a donné à des Chiens de la chair de Lapins AS de Cysticerques, et qu'on les ouvre peu d'heures après le repas,’ on lrouve d'ordinaire les kystes rompus et les Vers parvenus dans l’in- testin grêle. Leur invagination a cessé ; la tête se montre, et s’est fixée à l’aide de ses crochets contre la membrane intestinale. Peu après, la vessie caudale s’affaisse comme par exosmose, et présente l'aspect d’un funicule aplati. En même temps, les corpuscules cal- caires, qu'on trouve dans les téguments des Cysticerques , com- mencent à se dissoudre, et ne tardent pas à disparaître. Le Ver en- tier, la tête surtout, devient plus transparent. : Au bout de plusieurs heures, le corps se sépare du cou, de telle sorte que l’on voit le Cysticerque traîner son corps par un filament très fin-qui se rompt bientôt..Il reste alors un Cestoïde de taille’in- finiment moins grande que ne l'était le Cysticerque. Le jeune Ver grandit rapidement , puisque de 4-5 millimètres de long qu'il a au 4° série, Zoor, T. I. (Cahier n° 4.) 5 - 3 3/1 DE QUATREFAGES, VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER, bout de trente heures, il arrive à 390 millimètres après vingt-quatre jours. On voit que l'accroissement est d'environ 42 millimètres par jour. Du cinquantième au cinquante-cmquième jour des proglottis se détachent spontanément. Les premières expériences de l’auteur avaient été répétées et trouvées exactes par Siebold et Lewald , sauf quelques différences dans la durée de l'évolution. Mais ces naturalistes avaient considéré les Cysticerques comme des Ténias devenus accidentellement mon- strueux par leur séjour au milieu de tissus impropres à leur déve- loppement normal. Lewald, entre autres, avait attribué la formation de la vessie caudale à une action toute physique. Selon lui, les li- quides, au milieu desquels arrive le jeune Cestoïde égaré , étant moins denses que le chyle et le mucus intestinal, il se produit un phénomène d’endosmose, d'où résultent la distension des téguments et leur déformation. A l'appui de son opinion, Lewald rappelait ce qui arrive lorsqu'on place un Échinorhynque dans de l’eau pure. L'auteur a placé des Cestoïdes et des Nématoïdes dans de l'eau pure, etles a vus également s’endosmoser, résultat qui était déjà connu. Il les a mis ensuite dans de l’albumine pure, et il n’y a pas eu d’endosmose. Enfin il les a plongés dans le liquide même extrait de la vessie du Cysticerqueténuicolle, et n’a vu se produire presque aucune action jusqu'au moment de la mort des animaux mis en ex- périence. Ces résultats pouvaient, il est vrai, faire naître des doutes sur l'exactitude de l'explication de Lewald; mais ils étaient loin de dé- montrer l'opinion soutenue par l’auteur, savoir : que les Cysti- cerques sont une phase normale de l’évolution des Ténias , et que ceux-ci ne se transforment jamais en Cysticerques. Les expériences suivantes nous paraissent, au contraire, coneluantes. En faisant avaler à des chiens des Cysticerques pris dans des Lapins, l’auteur s’estprocuré des Ténias aussi jeunes qu'il l'a voulu. I a alors reporté ces Ténias dans la cavité péritonéale , et sur les autres points du corps des Lapins où se trouvent naturellement les Cysticerques. Ces jeunes Vers rubanaires se trouvaient ainsi placés SUR L'HELMINTHOLOGIE. 35 dans les conditions qu’on supposait déterminer leur transformation en Vers à vessie. L'expérience, recommencée à diverses reprises et en variant les procédés, a toujours donné des résultats négatifs. Jamais les Ténias ne se sont dispersés , jamais ils n'ont acquis de vésicule caudale. Bien au contraire, le plus souvent ils n’ont pas acquis leur diamètre transversal ordinaire, else sont allongés en forme de fil. Les expériences de l'auteur sur le Cœnure cérébral présentent un intérêttout particulier. Frès semblable aux Cysticerques, ce Ver, qui habite l'encéphale des Moutons, présente l'aspect d’une vessie por- lant extérieurement plusieurs têtes de Ténia. Guidé par l’analogie, Pauteur a d'abord cherché si le Cœnure se transformait en Ténia. L'expérience a confirmé cette présomption. On a obtenu ainsi un Ver rubanaire, que l’auteur regarde comme une espèce nouvelle, voisine peut-être du T'œnia marginala, trouvé par Rudolphi dans l'intestin des Loups. Nous regrettons d'ailleurs que l’auteur n’ait pas donné ici quelques détails précis sur les circonstances qui accompagnent celte transformation. Entre autres choses , il ne dit pas si chaque tête du Cœnure donne naissance à un Ver rubanaire distinct. C'était pourtant un fait important à constater (1). La présence du Cœnure dans le cerveau des Moutons détermine, on le sait, la maladie du tournis. Contrairement à ce qui arrive pour les autres Vers, on pouvait done ici être prévenu du moment où les parasites arriveraient dans l’organe qui doit leur servir de retraite, et l'auteur a eu l'idée très heureuse de mettre cette circonstance à profit. Après avoir infecté les Chiens de Ténias en leur faisant avaler des Cœnures, il a tenté l'expérience inverse et a également réussi. Ha fait avaler à une Brebis, jeune et bien portante, des progloltis ou articles détachés de son Ténia. Ces articles portaient des œufs mürs, à l'intérieur desquels on distinguait les embryons à six cro- chets que nous avons vus être le premier âge de ces Vers. La Brebis inise en expérience fut prise du lournis vers le quinzième jour; on (1) M. Van Beneden, depuis la rédaction de ce rapport, m'a dit avoir con- staté que chaque tête de Cœnure donnait naissance à un Ténia. 36 DE QUATREFAGES, VAN BENEDEN ET KUECHENMEISTER. la tua le dix-septième, et l’auteur trouva en divers points de l’encé- phale quinze petites vésicules qu'il considéra comme de jeunes Cœnures en voie de développement. Pour vérifier cette conjecture, l'auteur se procura un grand nombre de Moutons affectés de la même maladie, et en les suivant pendant plusieurs mois, en exami- nant des têtes de huit en huit jours, il parvint à faire l’embryogénie de ces singulières larves de Ténias. Il vit la vésicule se montrer d’abord isolée et sans têtes ; puis il vit celles-ci germer à la surface de cette espèce de cellule-mère et se caractériser progressivement. On comprend d’ailleurs que nous ne pouvons entrer dans les détails que renferme le mémoire. Le travail dont il s’agit est accompagné de planches et de plu- sieurs préparations. Les premières sont exécutées avec soin, mais évidemment incomplètes au point de vue anatomique. Quant aux préparations , un grand nombre ont souffert et n’ont rien pu nous apprendre. Heureusement, parmi celles qui ont résisté, il en était de fort importantes, entre autres celles qui montrent la transformation des Cysticerques en Ténias, les premiers développements du Ver rubanaire, etsurtout la déformation qu'il éprouve lorsqu'on le trans- porte dans la cavité péritonéale. Aussi tous ces faits paraissent-ils à votre commission avoir été nettement établis. En revanche , vos commissaires croient devoir laisser à l’auteur toute la responsabilité des hypothèses plus ou moins probables par lesquelles il cherche à expliquer la dissémination des Helminthes. Ils croient encore devoir faire toutes réserves au sujet de quelques opinions émises par l’au- teur , entre autres au sujet du polymorphisme et de la nature des transformations subies par les Intestinaux. En employant, dans les expériences analogues à celles dont nous venons de parler, l'Échinocoque des vétérinaires, M. de Siebold a également obtenu un Ténia. Ces expériences, publiées en 1859, ont été répétées par notre auteur, qui a trouvé le même résultat. L'histoire des Vers eystiques, histoire qui pouvait être regardée, il y a deux ou trois ans à peine, comme un des plus obscurs mystères de la zoologie ; est done aujourd’hui à peu près connue. Tous ces Vers ne sont que des espèces de larves, ou mieux des nourrices, se- SUR L'HELMINTHOLOGIE. 37 lon l'expression de Steenstrup. Parmi elles , il en est qui restent toujours simples comme les embryons à six crochets qui leur ont donné naissance; les Cysticerques sont dans ce cas. D’autres se multiplient par gemmation interne ou externe , comme le font les Échinocoques et les Cænures. Toutes doivent en définitive donner naissance à des Ténias. L'auteur du mémoire n° 2 a contribué pour une part considérable à l'acquisition de ce résultat, naguère bien difficile à prévoir, Le premier, il a fait usage de l'expérimentation directe pour résoudre ces difficiles problèmes. Seul , il a parcouru expérimentalement le cercle complet de l'évolution d'un Cestoïde. Aussi, malgré les laz cunes que présente son travail, votre commission l'a-t-elle jugé très digne d'une récompense, La commission, à l'unanimité, accorde : 4° Le prix à l’auteur du mémoire inscrit sous le n° 4, dont l'au- teur est M. G.-J. Van BENEDEN, professeur à l'Université de Lou- Vain ; 2% Une mention honorable à M. Frédéric Kurcaexmeister, À Zittau (Saxe), auteur du mémoire inscrit sous le n° 2. Elle propose à l'Académie de joindre à cette mention une médaille de 4,500 fr., à prendre sur les reliquats des prix Montyon ; 3 Votre Commission demande, en outre, et à l’unanimité, que Je mémoire n° 4 soit imprimé aux frais de l’Académie. PUBLICATIONS NOUVELLES. Études physiologiques sur les animalcules des Infusions végétales, comparés aux organes élémentaires des végétaux, par M. Paul Launenr, professeur à l’École forestière de Nancy, tome I‘, in-4. Naney, 1854. L'auteur annonce que par l'introduction de matières azotées dans les liquides où il élevait ses Infusoires , il est parvenu à déterminer chez ces animalcules une croissance extraordinaire , et à leur faire acquérir des dimensions telles qu'il lui était souvent possible de les apercevoir à l'œil nu, et facile de les étudier avec un microscope dont le pouvoir amplifiant ne dépassait pas 400. L'espace nous manquerait pour examiner iei les opinions de M. Laurent touchant l'origine de ces petits êtres et leur physiologie, mais la tendance générale de ses conclusions est indiquée par l'épigraphe de son livre : Æ stercore margarila. United States Exploring Expedition. Crustacea, by J. Dana, 2 vol. in-h. Philadelphia, 1852. Le texte de ce bel ouvrage vient d’être publié, mais l'atlas qui doit l'accom- pagner, el qui se composera de 96 planches in-folio, n'a pas encore paru, et par conséquent nous croyons préférable de nous réserver d'en parler avec plus de détail par la suite; cependant l'importance de ce nouveau travail de M. Dana est si considérable, que c'est pour nous un devoir d'en annoncer la publication aux carcinologistes. Monograph of the British Fossils Corals, by H. Mine Epwarps and J. HAIME , in-/. La quatrième livraison de cêtte Monographie vient d'être publiée par la Société paléontographique de Londres. Elle est consacrée aux Polypiers dévoniens et accompagnée de 10 planches. Histoire naturelle générale des rèqnes organiques, par M. Isidore GEorFRoy SAINT-HiLAIRE, tome fe. Cet ouvrage, écrit d’une manière élégante et lucide, sera lu avec plaisir et profit par les philosophes aussi bien que par les naturalistes. Dans le premier volume, l'auteur présente d'abord un tableau rapide des progrès et des tendances des études zoologiques et botaniques, depuis les temps les plus anciens jusqu’à l'époque actuelle ; puis il traite de la mathésiologie, ou des rapports et de la clas- sification des sciences en général. Le second livre de ce volume est consacré à la méthode dans son application aux sciences naturelles. (Grenera des Coléoptères ou exposé méthodique et critique de tous les genres proposés jusqu'ici dans cet ordre d'insectes, par M. Lacor- DAIRE, tome Îer, in-8. Cet ouvrage forme partie de la collection des Traités d'histoire naturelle que M. Roret publie sous le titre de Suites à Buffon. Le volume que nous annonçons contient les Cicindélètes, les Carabiques, les Dytisques, les Gyrinides et les Pal- picornes. Species général des Lépidoptères, par MM. BorspuvaL et GUENÉE, in-8 (Suites à Buffon, publiées par Roret). Le huitième volume de cet ouvrage, contenant l'histoire des Deltoïdes et des Pyrolites, par M. Guenée, vient de paraître, et est accompagné de huit planches. MONOGRAPHIE DES BALISTIDES, Par M. HOLLARD. DEUXIÈME PARTIE (1). ÉTUDE DES GENRES ET DES ESPÈCES. Division de la famille des Balistides en groupes génériques; coordination .de ces groupes. G. Cuvier, quime semble avoir donné le premier une division ra- tionnelle du grand genre Bausres de Linné, y reconnail quatre groupes distincts, dont il faisait quatre sous-genres sous les noms de Balistes proprement dits , de Monacanthes, d'Alutères et de Tria- canthes. Cette division repose sur la considération des différences de l'écaillure, du nombre des rayons de la dorsale épineuse, et des pièces qui représentent le membre abdominal. Les Balistes proprement dits sont couverts de grandes écailles tubereuleuses, et ont trois rayons à leur première dorsale Les Monacanthes ont une écaillure à petits éléments désordonnés, spinoïdes , deux rayons dorsaux épineux , dont le second rudimen- taire etl’extrémité du bassin en saillie. Les Alutères, avec le même type d’écaillure et les mêmes rayons dorsaux que les précédents, ont le bassin complétement caché. Les Triacanthes , avec une écaillure qui leur est propre, ont, outre le grand rayon de la dorsale épineuse, deux rayons très forts articulés avec le bassin, et qui représentent une paire de nageoires ventrales. Les Balistes, les Monacanthes et les Triacanthes, constituent des genres bien caractérises ; mais les Alutères ne sont évidemment que des Monacanthes à bassin caché, Quelques espèces de ce groupe (1) Voir, pour la première partie, Aanales des sciences naturelles, 3° série, tomé XX , p. 71. 10 HOLLARD. joignent à ce caractère quelques particularités qui peuvent autoriser à en faire un sous-genre ; mais ce serait aller trop loin que de les ériger en coupe générique, d'autant plus qu'on n'arrive à ces espèces que par des fransilions très nuancées. Le gerire Balistapus, proposé par Tilesius, repose sur l’omission de la saillie pelvienne dans un dessin de Krusenstern, qui évidem- ment se rapporte au Balistes lineatus, Schn., espèce pourvue de cetle saillie. Quant au genre Xenodon, institué par M. Ruppel pour le Baliste noir de Lacépède, nous ne saurions non plus l’admettre, vu le peu d'importance du caractère qui le motive, savoir la longueur et la forme insolite des deux dents qui suivent de côté et d'autre les moyennes supérieures. Ainsi la famille des Balistides ne comprend réellement, dans l’état actuel de nos connaissances, que trois genres bien nettement carac- térisés, les genres Balise, Monacanthe et Triacanthe. Dans quel ordre relatif se disposent ces trois groupes? C’est ce que vont nous dire les plus importants des caractères qui les distin- guent, ceux que fournissent, d’une part, les rayons de la dorsale épineuse, de l’autre, l’écaillure. Les Triacanthes, avec leur grand rayon dorsal, suivi de quatre autres rayons épineux, avec leurs rayons abdominaux, avec leur écaillure nacrée que parcourt une ligne latérale continue, prennent ici le premier rang, comme se rapprochant plus que les deux autres genres du type normal des Poissons ordinaires. Les Balistes viennent en seconde ligne, en raison de leur dorsale épineuse composée encore de trois rayons, du développement et de la régularité de leur écaillure, de la fréquence de laligne latérale. Les Monacanthes, réduits à deux rayons épineux dorsaux, dont un seul évident, et revêtus d’une écaillure qui semble une dégéné- rescence de celle des Balistes, sont le troisième termé de cette série. S'il fallait justifier cette coordination par de nouveaux faits, je pourrais encore citer la réduction graduée du nombre des dents, et la simplification des rayons de la dorsale molle, de l’anale et de la caudale. Mais il est inutile d'anticiper davantage sur la caracté- MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. nul ristique des groupes qui vont nous occuper, et il est temps d’abor- der l'étude particulière de ceux-ci. I. — Genre TRIACANTHUS Cuv. Caractères. — Dorsale épineuse de cinq rayons, dont le premier au moins très prédominant. — Ventrales représentées par une paire de rayons épineux très robustes. — Deux rangées de dents à chaque mächoire.— Mächoire supérieure protractile. — Écaillure nacrée, à très petits éléments irréguliers et désordonnés, surmontés d’une ou deux arêtes entières ou denticulées. — Ligne latérale continue et constante. Détails descriptifs. Les Triacanthes ont une physionomie générale qui les sépare déjà très nettement des autres Balistides. Leurs formes sont longues, et médiocrement élevées en avant, très basses en arrière. La région céphalique est proportionnellement courte ; elle continue à s'élever bien au delà de l'œil, lequel se trouve ainsi plus loin du sommet de la tête, et plus près de la bouche que dans les genres suivants. La dorsale épineuse , placée, par cette même raison, à une cer- taine distance au-dessus eten arrière de l'œil, se compose de cinq rayons. Le premier de ceux-ci est très long et très robuste, de forme conique, aigu, creusé en arrière, articulé à charnière et d’une ma- nière très simple sur sa pièce de support, comme nous l'avons dit et montré en traitant de l’ostéologie des Balistides (4). L’écaillure, en se prolongeant sur les faces antérieure et latérale de cette épine, rend sa surface rugueuse. La deuxième épine est ordinairement courte, et, quoique rapprochée de la première, ne remplit pas à son égard, vu la simplicité de son articulation, le rôle qu’elle joue chez les Balistes. Les rayons suivants forment une série décroissante, et n’offrent aucune particularité digne d’être remarquée. Il n'existe aucune trace du sillon qui reçoit, dans les autres genres, les épines de la première dorsale lorsqu'elles s'abaissent, et on se souvient que (4) Première partie, 3° série, tome XX, page 402. 1 HOLLARD. la pièce qui les supporte n'offre pas la moindre dépression médiane chez les Triacanthes. La dorsale molle, séparée de la précédente par un espace consi- dérable, a, remarquons-le bien, ses rayons divisés par une double bifurcation. Il en est de même de l’anale, qui, beaucoup plus courte que la précédente, ne répond qu'à la moitié postérieure de celle-ci. La caudale est largement bilobée, et se compose de douze rayons très inégaux, Les deux extrêmes sontcourts etindivis , les médians plus courts encore et très divisés ; à partir de ceux-ci, de côté et d'autre, la croissance est rapide jusqu'aux pénultièmes. Les pectorales sont médiocres et de quatorze rayons à double bifurcation. Les ventrales sont représentées chez les Triacanthes par une paire de gros rayons épineux, qui rappellent par leur développe- ment le grand rayon de la première dorsale, et composent avee ce dernier la triple armure dont a été tiré lé nom du genre qui nous occupe. J’aidit, en traitant du squeletté, comment, une fois écartées du corps, ces épines ventrales se trouvent solidement assujetties dans cette position au moyen d’une apophyse qui vient s'appuyer sur l'os du bassin et s'engager dans une rainure latérale ; puis com ment cette apophyse se dégage de celle-ci par un mouvenient de rotation du rayon sur son àxe, lorsque le Poisson veut ramerier ses ventrales à leur position primitive. Le bassin des Triacanthes, quoique très eintement couvert par la peau sur la ligne médiane, ne forme pas de pointes saillañtés par son extrémité ; le tégument qui le sépare de l'anus ne consti- tue pas un pli en réserve, et n'offre aucun caractère particulier. Le système dentaire est plus complet ici que dans les genres sui- rants; car non seulemeñt le nombre des dents de la rangée anté- rieure est plus considérable que dans ceux-ci, étant de dix à chaque mâchoire , mais il existe, en outre, un second rang en bas comme en haut; seulement ce deuxième rang inférieur ne se compose que de deux dents. Les dents de la première rangée sont en forme d’inci- sives, à couronne droite et tranchante ; celles de la seconde ressem blent à des pavés inégaux. Rappellerai-je que la mâchoire supérieure est protractile, le prémaxillaire, prolongé supérieurement en une MONOGRAPHIE DES BALISTIDES, us tige très libre et très mobile, glissant dé haut én bas dans une cou- lisse, qui à pour plancher la face supérieure de l’éthmoïde et du vomer, ét pour voûte uné languette de tissu fibreux ? L'écaillure des Triacanthes se compose de très petites squames oblongues, disposées sans régularité, et Surmontées d’une arête qui oceupe leur grand diamètre, augmentant de hauteur en approchant du centre, et souvent croisée ou seulement rejointe par une arête transversale. La plupart de ces saillies ont leur bord libre decoupé en petites dents plutôt tubereuleuses que spinoïdes, et visibles seu- lement à l’aide de la loupe. Un des caractères de l’écaillure de ces Balistides est la teinte nacrée qu'elle présente sur une grande partie du corps et même sur les rayons épineux. Enfin on voit s’y dessi- ner très nettement une ligne latérale qui, divisée en plusieurs bran- ches sur la tête, se montre simple et continue sur le trone, et ne subit qu'une légère flexion en atteignant la région caudale. En parlantde la teinte nacrée des Triacanthes j'ai anticipé sur ce qui concerne leur système de coloration, j'en ai même signalé la circonstance la plus frappante : en effet, n’y a pas ici de dessin pro- prement dit, etles couleurs se distribuent par teintes générales, plus ou moins foncées vers le dos, claires vers les régions inférieures. La base de la grande épine dorsale est presque toujours tachée de brun ou de noir. Les Triaganthes, si je ne me trompe, n’ont été rencontrés et si- gnalés que dans la mer des Indes et dans les taux voisines. Ceux du Muséum proviennent exclusivement des mêmés régions maritimes. Synonymie. — Jusqu'au moment où George Cuviér à institué le genre qui fous occupe, les Poissons qui le composent figuraient au nombre des Balistes sous le nom de Balistes biaculeatus ; is étaient äinsitous confondus dans un même groupe spécifique. En coinparant entre eux, avec soin, les Triacanthes de la collec- tion du Muséum, j'ai constaté qu'ils se rapportent à trois espèces bien distinctes, et j'ai reconnu deux de celles-ci, l’une dans les dessins dé Bloch, l’autre dans ceux de Russel (1). Les différences qui nous les ! (1) Voyez ses Poissons de la côte de Coromandel, 2 volumes in-folio. Dans l'exemplaire de cet ouvrage que possède la bibliothèque du Jardin des plantes, une note écrite au crayon de la main de M. Valenciennes m'a appris que j'avais 4 HOLLARD, designent comme autant d'espèces sont fournies par les formes et les proportions de la tête, par les dimensions des épines de la première dorsale, par la hauteur et la longueur de la dorsale molle et de l'anale. Ces différences nous donnent un ordre sérial très évident, comme on s’en convainera par les descriptions suivantes. A. TRIACANTHUS BREVIROSTRIS, Val. PI. I, fig. de. Caractères. — Profil rapide, de 45 degrés; museau très court ; front large. — Premier rayon de la dorsale épineuse robuste, suivi de quatre rayons courts en décroissance rapide , et dont le dernier est presque caché. — Dorsale molle, trois fois plus haute en avant qu'à sa terminaison ; anale très haute antérieurement , et formant du troisième au cinquième rayon une pointe très prononcée : D. 5 + 25. À. 18. La hauteur relative du corps, la rapidité du profil, le peu d'espace qui se trouve entre l'œil et la bouche, séparent bien cette espèce des deux suivantes, et la largeur dela tête la distingue encore de la se- conde. C'est ici que la dorsale molle et l’anale ont leur maximum de hauteur et le plus grand nombre de rayons. Le système de coloration ne se fait remarquer que par l'étendue et l'éclat des teintes nacrées, et par une tache noire à la base et en avant du grand rayon de la dorsale épineuse. Voici les proportions du corps : La hauteur, mesurée à la région pectorale et en descendant ver- ticalement du grand rayon dorsal, est à la longueur, mesurée des lèvres à la naissance de la caudale, dans le rapport de 2 à 5. La ligne de profil, qui descend de ce même rayon à l'extrémité de la bouche, est à peu près dans le même rapport avec la longueur ; et ce qu'il faut surtout remarquer ici, c'est que la portion de cette ligne eu l'honneur de rencontrer la pensée de ce célèbre ichthyologiste, et dans la dé- termination de l’espèce représentée par Russel , et jusque dans le nom caracté- ristique que je lui avais déjà donné dans mes premières descriptions. MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. L5 qui est au-dessous de l'œil, n’est guère plus longue que celle qui est au-dessus. Des trois espèces que possède le Muséum, celle-ci semble être la moins rare à en juger par le nombre des exemplaires qui la repré- sentent. C’est celle que Russel a décrite et figurée. Le T'riacanthus brevirostris habite la mer des Indes. 2. TRIACANTHUS ANGUSTIFRONS , Nob. PI. II, fig. 2. Caractères. — Profil de 40 degrés; museau médiocrement allongé ; front très comprimé. — Premier rayon de la dorsale épi- neuse, un peu fléchi en arrière, étroit, suivide quatre rayons courts tous apparents. — Dorsale molle, peu haute, s’abaissant de plus de moitié dans son trajet ; anale formant encore un peu la pointe du troisième au cinquième rayon : D. 5 + 24. A. 46. Cette espèce a déjà le profil plus prolongé que la précédente, et la ligne faciale subit, avant d'atteindre la bouche, une inflexion qui la rapproche de l'horizontale et projette le museau. L'étroitesse du front est ici tout à fait caractéristique. Le premier et grand rayon de la dorsale épineuse est lui-même assez comprimé. Le deuxième commence brusquement la décroissance de cette nageoire qui s’abaisse à peine avec les rayons suivants, tous à peu près également courts. La dorsale molle perd notablement de sa hauteur dans ce Triacanthe, et la différence entre ses deux extrémités n’est plus que dans le rapport de 4 à 2 1/2. L’anale, quoique haute, ne forme en avant qu'une pointe médiocre. Le système de coloration est celui du brevirostris. La hauteur du corps est à la longueur dans la proportion de 3 à 8. La ligne de pro- fil, depuis la base du grand rayon dorsal, atteint les 2/5°* dela lon- gueur. Cette fois la partie de cette ligne qui se trouve au-dessous de l'œil est beaucoup plus considérable que celle qui est au-dessus et derrière cet organe. Le T. angustifrons est l'espèce figurée par Bloch dans sa grande l6 HOLLARD, Ichthyologie. Les exemplaires en sont moins nombreux que ceux du brevirostris ; cependant, j'ai pu en comparer plusieurs. Ce Poisson habite la mer des Indes, 3. TRiACANTHUS LONGIROSTRIS , Nob. PI. Il, fig, 3. Caractères. — Profil de 30 degrés ; museau très avancé; formes allongées ; le front de largeur médiocre. — Deux rayons prédomi- nants à la dorsale épineuse : le premier égalant la hauteur du corps, le second les 3/5°, les trois autres courts, en décroissance rapide. — Dorsale molle très basse, déclinant de moitié du commencement à la fin ; anale conservant de la hauteur en avant, mais à décroissance moins rapide que dans les précédents : D. 5 + 22, À. 17. La projection et l’abaissement de la région céphalique, puis la longueur extraordinaire des deux premiers rayons de la dorsale épineuse, caractérisent parfaitement cette espèce. L'abaissement de la dorsale molle est notable ; celui de l’anale est sensible, sa ligne de déclinaison étant modérément infléchie. Le nombre des rayons de ces deux nageoires molles a encore subi uneréduction. Je n’ai plus retrouvé dans le système de coloration la tache noire qui existe dans les deux espèces précédentes à la base de la dorsale épineuse, sur le premier rayon. Les teintes générales m'ont aussi paru plus ternes et plus grisâtres. Quant aux proportions, celle de la hauteur à la longueur est dans le rapport de À à 3. La ligne de profil qui part de la grande épine est encore ici des 2/5° de la longueur, en sorte que la distance de la dorsale épineuse à l'extrémité du museau, quoiqu’elle augmente dans un sens absolu du premier au troisième terme de la série des Tria- canthes, reste dans les mêmes rapports avec la longueur; ce qui change, c’est la proportion de la longueur à la hauteur, le corps s’abaissant graduellement du T'. brevirostris au T°. longirostris, ou mieux sa longueur proportionnelle augmentant d’une manière très sensible. Cette élongation modifie du côté de la tête la position de l'œil qui MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 17 remonte successivement dans l'angustifrons et dans le longirostris, ce qui le rapproche de sa position la plus ordinaire dans les Balistides, La fente branchiale, à son tour, de verticale qu'elle est d'abord, de- vient assez oblique dans cette dernière espèce. Enfin, quand , de l'extrême bord de la lèvre supérieure, on tire une droite, qui aboutit à la naissance de la caudale à égale distance de ses rayons extrêmes, on trouve que celte ligne arrive au tiers inférieur de la fente bran- chiale dans le brevrrostris ; qu’elle la laisse un peu au-dessus d’elle dans l'angustifrons, et qu'elle l'entame à peine dans le longirostris, malgré l'allongement que cette fente présente chez ce dernier Tria- canthe. Ces différences sont dues à la projection du museau dansles deux dernières espèces ; car la limite inférieure de la fente bran- chiale se confond dans les trois espèces avec celle du tiers inférieur de la hauteur pectorale. Ces considérations , minutieuses en appa- rence, ont pour but d'établir que les modifications des formes et des proportions du corpsdans les Triacanthes sont le résultat d’une aug- mentation de la longueur proportionnelle du corps, fait qui ressort d’ailleurs très évidemment de la comparaison, dans les trois espèces, de la distance croissante des ventrales à l’anale. Or l’élongation est en zoologie un caractère de dégradation, qui se rattache à d'importantes considérations de physiologie et d'anatomie com- parée. Le Triacanthus longrrostris n’est représenté dans nos collections que par un très petit nombre d'exemplaires. [habite les mêmes régions maritimes qus les précédents. IL. — Genre BALISTES, Cuv. Caractères. — Dorsale épineuse de trois rayons, dont le premier prédominant et plus ou moins robuste, le troisième écarté des deux autres. — Bassin dépourvu de rayons etde tout vestige de ventrales, mais formant à son extrémité postérieure une saillie hérissée d’aspé- rités et séparée de l'anus par une sorte de fanon épineux. — Bouche non protractile, garnie de grosses lèvres, armée de huit dents mar- ginales à chaque mâchoire , et d’un second rang de six dents en haut, — Écaillure assez régulièrement ordonnée, et composée de 18 HOLLARD, squames subosseuses que surmontent des tubercules ou‘des épines. —— Ligne latérale irrégulière, interrompue et non constante. Détails descriptfs. Ce genre, composé d’un assez grand nombre d'espèces , nous offrira, dans la plupart de ses caractères, des variantes nombreuses. ILest néanmoins très naturellement limité par ses traits principaux, et je citerai avant tout sa dorsale à trois rayons, et ses grandes squames tuberculées, disposées avec ordre. Les formes des Balistes sont généralement un peu ramassées, et prennent souvent une hauteur proportionnelle assez considérable ; mais en même temps elles demeurent toujours comprimées. La ligne supérieure du corps, après être montée en dessinant le profil de la tête jusqu’à la naissance de la dorsale épineuse, ne s'élève pas plus haut, et court horizontalement jusqu’à la dorsale molle , avec laquelle elle descend très rapidement. La ligne inférieure descend du menton jusqu'à la pointe du bassin ; et quand cette pointe est tres saillante, quand elle est soutenue en arrière par un fanon extensible, l'obliquité de la ligne ventrale s'éloigne beaucoup de l'horizontale ; au delà de la pointe pelvienne, elle remonte avec le fanon jusqu’à l'anus, et avec l’anale jusqu’à la fin de celle-ci ; dans ce dernier tra- jet qui est ordinairement rapide, elle se rapproche de la ligne supé- rieure, dont elle n’est plus séparée que par un petit espace. Avec ee rapprochement, et à cette limite postérieure de la dorsale molle etde l'anale , commence l'étranglement caudal, qui précède l’épatement ou lobule où s’insèrent les rayons de la nageoire terminale (cau- dale). Cette petite région, plus ou moins bicône, qui est si allongée chez les Triacanthes, est presque toujours courte dans les Balistes ; mais elle esten général robuste, et souvent bien armée, comme nous le verrons. La projection de la face varie beaucoup dans ce genre ; mais ce qui ne se voit jamais, quelque raccourcie et rapide que soit la ligne de profil, c’est que l'œil soit presque’ aussi près de la bouche que du sommet de la tête, comme nous l'avons observé chez le Tria- canthe brévirostre. . On remarque au-devant de l’œil une fossette allongée et plus ou MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 19 moins profonde , espèce de larmier dont il est difficile de dire la destination. Les narines sont en dehors et au-dessus de cette dépres- sion, occupant elles-mêmes une petite place nue et déprimée. LesBalistes atteignent des dimensions qui varient beaucoup, mais dont le maximum va bien au delà de celui que nous offre le genre précédent ; certaines espèces m'ont offert jusqu'à 60 centimètres de longueur, et quelques observateurs parlent de mesures encore plus considérables. La dorsale épineuse, quoiqu'elle n'offre ici que trois rayons, occupe en général une étendue plus considérable que celle des Tria- canthes, et sa membrane, prolongée au delà du dernier rayon, atteint souvent le commencement de la dorsale molle. La grande épine varie beaucoup en longueur, en épaisseur, et, quant à sa forme , elle est plus souvent courte que longue. Elle s'appuie sur une deuxième épine qui conserve une certaine longueur relative. Quant à la troi- sième, elle esttrès écartée des deux autres, et demeure souvent assez courte pour que sa pointe sorte seule du sillon qui loge la nageoire ; quelquefois même, elle n’en atteint pas le bord. La dorsale molle et l’anale se correspondent assez exactement ; la première commence un peu plus en avant, mais finit au même niveau que la seconde. Ces deux nageoires, composées d’un nombre de rayons qui s'élève souvent au-dessus de trente, et de rayons toujours divisés, sont en général assez hautes, et plus en avant qu’en arrière. La caudale varie quant à sa forme, qui est ou fourchue, ou si- nueuse, ou droite, ou enfin arrondie à son extrémité. Ces différences entrent dans la caractéristique des espèces aussi bien que celles des nageoires précédentes ; elles comptent surtout parmi les caractères qui servent à la coordination en séries. La pectorale est médiocre dans toutes les espèces, toutefois avec des différences assez notables. Le nombre de ses rayons varie de treize à seize. Cette nageoire, appliquée sur les flanes, indique par son premier rayon , plus où moins incliné , la limite postérieure de ce que nous nommerons l'espace scapulaire, petite place anguleuse bornée en avant par la fente branchiale. Là se dessine, au-devant de cette fente et sous la peau, une saillie postérieure de l'os scapulaire, tantôt large et étalée, tantôt plus étroite et comme entamée supérieu- 4° série, Zoo, T. I, (Cahier n° 4.) # 4 50 HOLLARD, rement, différence que nous verrons être en rapport avec des dispo- sitions spéciales de l’écaillure. Le bassin des Balistes a été décrit, commele squelette en général, dans la première partie de ce travail, et j'ai déjà parlé de la pointe pelvienne, c'est-à-dire de la saillie que fait cette pièce osseuse par son extrémité postérieure, À mesure qu’elle approche de cette ter- minaison, elle devient plus immédiatement sous-cutanée ; la peau adhère intimement à l’os etsemble même se réduire iei à une couche de granulations calcaires rudes, souvent épineuses. En même temps on dirait que la peau a été comme entraînée au delà de sa limite na- turelle par l’abaissement du bassin ; car cette membrane, abandon- née à elle-même au delà de la saillie pelvienne, se trouve éloignée de la couche charnue du ventre, et, s'appliquant contre elle-même, forme ce pli ou fanon, dont il a déjà été question. Chez les Balistes, ce fanon, sans parler des particularités de son écaillure, est ordinai- rement soutenu par une double série de petites aiguilles qui ne mon- tent que leur pointe en dehors. Il y a, du reste, d'importantes diffé- rences entre les Balistes sous le rapport du développement de cette disposition cutanée, mal à propos comparée par quelques ichthyolo- gistes à une nageoire médiane. Les Balistes ont huit dents marginales à chaque machoire, et six dents en seconde rangée à la supérieure. Les marginales sont ordi- nairement très proclives, surtout dans l’âge adulte ; les antérieures, plus longues, tiennent à la fois, et plus ou moins, des formes des in- cisives et de celles des canines ; tandis que les postérieures, plus ou moins courtes, ressemblent assez à de fausses molaires. L'âge, en émoussant les pointes et les tranchants des unes et des autres, con- tribue beaucoup à leur donner ces dernières formes. Cependant nous voyons chez un petit nombre d'espèces prédominer la forme des incisives (B. ringens), tandis que d’autres fois les premières laté- rales, dépassant les médianes, peuvent devenir de véritables dents en crochets , rappelant les canines des Carnassiers (B. niger ). Quant aux dents de la seconde rangée, elles se distinguent par leurs couronnes larges, aplaties, coupées carrément, et appliquées sur les intervalles des dents marginales. Les squames des Balistes sont non seulement toujours très MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 51 distinctes, mais ordinairement grandes, de formes plus régulières que celles des Triacanthes et des Monacanthes, et arrangées avec beaucoup plus d'ordre que dans ces deux genres. L'ossification de la couche squamoïde du derme est ici très pro- noncée ; elle paraît avoir lieu sur plusieurs points à la fois ou succes- sivement pour chaque squame, et à ces points correspondent les tu- bereules mousses ou épineux qui surmontent celles-ci, du moins sur une grande partie de sa surface. En effet, le microscope nous permet de reconnaitre dans la texture de la couche superficielle de ces plaques écailleuses des espèces de trajets saillants qui partent de la base des tubercules, et forment autour d'elle comme une aire de fibres rayonnantes qui vont en se divisant et s’effaçant de plus en plus jusqu'à ce qu’elles rencontrent les aires voisines. Cette dispo- sition appartient, jele répète, à la couche superficielle des squames ; elle ne s'étend même pas toujours à toute cette couche, car le pour- tour et souvent une moitié de la plaque sont dépourvus de tuber- cules, et présentent tout au plus un aspect finement granuleux, où les lignes d’ossification se rapportent à un point commun. Quoi qu'il en soit, ilrègne un ordre plus ou moins évident dans la disposition des tubercules ; ceux-ci forment ordinairement des séries qui partent du premier centre d’ossification de l’écaille, et se dirigent à droite, à gauche et en arrière de ce point. Celui-ci formera done Ja partie la plus avancée, en même temps que la plus saillante d’une première série de tubercules. Or cette première série sera très près du bord antérieur de la squame, s'il n’y à pas imbrication ; mais si ce même bord, avec une partie plus ou moins considérable de la surface qu'il limite, passe sous l’écaille précédente, le tubercule prédominant et la série antérieure prendront une position plus reculée, comme on le voit sur les squames des flanes. Ainsi il y aura un tubereule prédo- minant, toujours antérieur par rapport aux autres ; et ceux-e1 for- meront des séries divergentes à partir de lui. Ce sera ce tubercule qui prendra le premier la forme d’épines, lorsque celle-ci se pro- noncera plus ou moins ; ceux qui l’avoisineront le plus, étantles plus développés après lui , la prendront ensuite, et quelquefois toute la ligne, qui, partant du grand tubercule et se dirigeant en arrière, partage l'écaille transversalement en deux parties symétriques , 52 HOLLARD. pourra se relever en une sorte de crête, comme nous le voyons dans les B. ringens et stellaris, ete. Ces considérations, qui pourront sembler d'abord un peu minutieuses , se justifieront aux yeux des zoologistes comme ramenant à une règle assez précise des faits qui appartiennent à la caractéristique des Balistes, et qui, jusqu'à pré- sent, se présentaient comme de simples accidents. On saura mainte- nant que les épines caudales de certaines espèces ne sont que le développement partiel et extraordinaire d’un tubereule, qui existe plus ou moins prédominant sur toutes les écailles voisines, et que ce tubereule représente un centre principal d’ossification, commun à la généralité des squames des Poissons qui nous occupent. On n’a pas assez remarqué et pris en considération les diffé - rences caractéristiques qu'offre l’écaillure des Balistes selon les régions du corps , d’abord quant à l’arrangement des squames , puis quant à leur grandeur relative et à leurs formes ; enfin, sous le rapport de leur surface et des tubercules qui les couvrent. Les faits de ce genre, qui ont été signalés et utilisés par Cuvier, et mieux encore par les ichthyologistes anglais et américains , demandent à être précisés et complétés. Je vais essayer d’en donner l’ensemble d’après mes propres observations. Les squames des différentes parties du corps forment plusieurs systèmes locaux assez bien caractérisés. Je distingue comme tels le système des joues, le système abdominal, le système scapu- laire, et le système des flancs et de la queue ou latéral. Le pas- sage d’un système à un autre n’a pas lieu brusquement, mais par des transitions où l’ordre des squames est plus ou moins dérangé. Il y a aussi de l'irrégularité au voisinage des lignes médio-dorsale et médio-ventrale. Les squames de ces deux régions reprennent un peu plus de régularité à la base de la dorsale molle et de l’a- nale, où elles forment plusieurs rangées de petites plaques allon- gées et étroites, qui se confondent peu à peu avec celles du voisi- nage. Îl suffira de jeter les yeux sur l’une des planches de nos deux sections pour saisir ces dispositions de l’écaillure et constater les différences de toutes les régions ; en comparant l’une des sec- tions à l’autre, on verra les deux modes principaux du système scapulaire ; en rapprochant les figures du B. capriscus et du B. MONOGRAPHIE DES BALISTIDES, 93 frenatus, on aura une idée des principales différences du système des joues , et ainsi des autres. Les squames des joues se disposent tantôt en rangées horizon- tales, ou subhorizontales rapprochées ou disjointes , tantôt en séries subverticales. Le système ventral nous offre des plaques plus lon- gues d'avant en arrière, que hautes, et qui forment, ainsi couchées, des séries presque horizontales. Cette région écailleuse commence au-dessous et un peu en avant de la racine de la nageoïire pecto- rale , et remonte plus ou moins , selon les espèces, derrière cette nageoire , ou s’arrète à sa limite inférieure. La région scapulaire correspond au petit espace angulaire laissé entre la pectorale et la fente branchiale ; nous rencontrons ici, ou bien des squames sem- blables à celles des côtés du corps, ou bien un petit système de trois plaques principales, bordées en avant et en haut de quelques rangs d'écailles, dont les plus extérieures se confondent avec celles du voisinage: c’est ce que j'appellerai le cadre. Les trois plaques principales ou seutelles de l'épaule remplissent l’évidement laissé chez le plus grand nombre des Balistes, dans la partie large et avancée de l’os scapulaire, laquelle se réduit par là à une apophyse dont le bord supérieur forme un angle à peu près droit avec le corps de l'os. Dans cet angle se place une scutelle plus grande que les autres, de forme plus ou moins régulièrement ovalaire , et que j'appellerai la plaque antérieure ; derrière elle est la plaque ou scu- telle postérieure , un peu moindre que la précédente, et placée de manière à ne toucher celle-ci que par une partie très limitée de son bord antérieur. La troisième scutelle, qui est la plus petite , vient s’intercaler inférieurement , à la manière d’un coin, dont elle a la forme , entre les deux plaques précédentes : je nomme cette seutelle l'intercalaire inférieure. Quant à l’espace beaucoup moins prononcé que laissent supérieurement entre elles les deux grandes plaques , ilest occupé, plus où moins exactement, par une squame du cadre, qui pourrait être distinguée des autres sous le nom d’in- tercalaire supérieure ; du reste, le cadre lui-même varie beaucoup. Ces scutelles de la région scapulaire sont plus épaisses que les squames des autres régions, et que celles du cadre. D'un point plus ou moins saillant partent des stries qui rayonnent vers'la circon- 54 , HOLLARD, férence , et qui se montrent hérissées de petites aspérités ou de granulations ; la scutelle antérieure présente en bas et en avant une sorte d'élargissement qui, joint à ses stries partant d’un renfle- ment très inférieur, font ressembler cette plaque à une coquille du genre Pecten. Enfin, la région latérale du trone , au-dessus et en arrière de la région ventrale , se compose d’écailles plus où moins régulière- ment lozangiques , presque toujours imbriquées, disposées sur des lignes assez régulières, obliques et un peu sinueuses; plus grandes sur les flancs, ces squames diminuent en arrière, et deviennent très petites sur le lobule qui porte le caudale. Leur partie découverte offre des tubercules assez régulièrement disposés en séries, dans la plupart des cas : la série antérieure se distingue, par la grosseur relative de ses tubercules , et surtout du médian qui est en même temps le plus avancé ; dans les autres séries qui se succèdent d’a- vant en arrière, le tubercule qui occupe le milieu de la ligne est souvent aussi d’un volume supérieur aux autres , et forme parfois avec le premier une arête médiane. J'ai déjà dit que ce sont ces tubercules qui, en s’exagérant, forment les épines qui hérissent sou- vent le corps des Balistes , et que le tubercule moyen de la série antérieure joue ici le premier rôle. Je n’ajouterai que deux courtes remarques ; la première, c’est que les épines sont d'autant plus prononcées, qu’elles se montrent sur un plus petit nombre d’é- cailles ; c’est ce dont on peut se faire une idée en comparant le Balistes armatus, ou le Bal. bursa avec le Bal. lineatus. En second lieu , les épines qui acquièrent le plus de développement ont leur pointe dirigée en avant, ce qui ne se voit que sur la queue. La ligne latérale n’est pas toujours apparente dans le genre Ba- liste; elle est irrégulière, interrompue , côtoie de près le dos, et subit tout à coup une inflexion considérable pour gagner le milieu de la région caudale; elle forme sur les squames de petits sillons bordés de très petits tubercules. Nombre et distribution des espèces. J'ai déterminé dans la collection du Muséum vingt-neuf espèces de Balistes bien caractérisées ; elles se distribuent en deux sections MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 55 principales , différenciées par les squames de l'épaule. Dans la pre- mière , ces squames ressemblent plus ou moins à celles du voisi- nage; dans la seconde, elles constituent ce petit système de seu- telles que j'ai décrit plus haut, en faisant remarquer que son existence coïncide avec une échancrure du scapulum qu’il semble destiné à couvrir. Comme nous le verrons, les Balistes de cette dernière catégorie portent Souvent sur la région caudale quelques épines à pointe antérieure qui se retrouvent avec une analogie très prononcée chez quelques Monacanthes. Ce rapprochement nous indique les espèces à plaques scutellaires comme venant après celles qui n’ont pas ces plaques à l'épaule. PREMIÈRE SECTION. Je rencontre ici neuf espèces. Si mes recherches bibliographiques ne me trompent pas, plusieurs d'entre elles n’ont été ni nommées, ni décrites, et de graves erreurs de synonymie ont été commises à l'égard des autres. Outre le caractère tiré des squames de l'épaule, toutes les es- pèces de cette section nous offrent les écailles des joues distribuées sur des lignes plus ou moins horizontales ; aucune d’elles ne porte sur la partie supérieure du corps des rangées spéciales d'épines à pointe dirigée en avant; quand l’écaillure est épineuse, elle l’est au moins sur toute la région latérale du tronc, et la direction des pointes est toujours plus ou moins postérieure. Lesneul Balistes que nous allons décrire formentune série simple, commençant par les espèces les plus hautes de forme et les plus hérissées, pour finir par les plus longues et les plus lisses. Toute- fois un intervalle assez prononcé sépare les quatre premières es- pèces des cinq autres; de là deux petits types assez bien earacté- risés. A. Le premier de ces types nous offre les trois rayons de Ja dorsale épineuse dans leurs proportions normales, le troisième dépassant d’une manière notable le bord du sillon au fond duquel il s'implante. La dorsale molle et l'anale sont très élevées, au moins en avant; quant à l’écaillure, elle se fait remarquer par le 56 HOLLARD. petit nombre des saillies qui surmontent les squames, et par le ca- ractère épineux de ces saillies, surtout aux flancs et à la queue ; sur ces deux régions, le tubereule médian antérieur offre une pré- dominance très marquée, mais il va s’abaissant et s’émoussant aussi bien que ceux qui l'entourent de la première à la dernière des quatre espèces que nous allons décrire. A. Bauisres Brevissqus, Nob. PI. II, fig. 1. Caractères. Formes hautes et courtes, profil facial de 60 de- grés, — Dorsale molle, anale et caudale arrondies. —- Écaillure latérale épineuse. — Coloration mouchetée de clair sur fond brun. DM. 24. A. 22. P. 15. La longueur du corps équivaut, dans ce Baliste , à deux fois la hauteur pectorale ; la ligne de profil est remarquablement courte et rapide ; le front, large et court, forme au-dessus de l'œil une sorte de crête sourcilière ; la fosse préoculaire est superficielle et peu prolongée. La dorsale épineuse, placée au sommet d’une surface fronto- dorsale assez rapide et passablement étalée, offre un premier rayon de force médiocre, un peu fléchi, couvert d’asperités en avant, et armé de quelques pointes épineuses latérales. La membrane in- terradiale , prolongée au delà du troisième rayon épineux , atteint le niveau du dos à une petite distance de la dorsale molle. Cette dernière nageoire et l’anale sont très élevées ; elles gran- dissent et décroissent en décrivant une courbe presque parabolique ; la caudale est courte et arrondie. La pointe pelvienne , saillante et épineuse , est separée de l'anus par un pli abdominal assez extensible , portant à sa marge une sé- rie de petites épines. L'écaillure est relevée de simples aspérités sur la tête, de petites épines sur les côtés du corps et de la queue. Les squames des joues, quadrilatères et en séries subhorizontales un peu fléchies, portent un MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 57 groupe central de tubercules mousses offrantune disposition rayon- nante. Les épines qui couvrent les squames latérales sont compri- mées, crochues, à pointe dirigée en arrière, et très peu nombreuses sur chaque squame ; la plus avancée est très prédominante, et celles qui la suivent décroissent à mesure qu’elles s’éloignent d'elle. Quant au système de coloration , il se caractérise par un semis irrégulier de taches laiteuses sur un fond brun. Non seulement il se présente ainsi sur tous nos exemplaires, mais jele retrouve tel sur un croquis fait en mer sur la nature fraîche, et queje dois à l’obligeance de M. Souleyet. Je saisirai cette occasion pour payer à la mémoire de ce jeune naturaliste si distingué et si modeste le tribut d’un souve- nir plein de regrets bien vifs. Si j'en juge par le même croquis et par les sujets que possède le Muséum, le Balistes brevissimus s'arrête à de très petites dimen- sions ; voici celles d'un de nos plus grands exemplaires : Longueur totale. . . . 0,095 Hauteur pectorale . . . 0,045 Hauteur pelvienne . . . 0,053 La caudale entre dans la longueur pour. 0,015 La région céphalique pour. . . . . 0,027 Tous les individus de nos collections proviennent des eaux de la Nouvelle-Guinée et de l'Australie, ce qui permet de croire que l'espèce n’est pas très répandue. Bien que ce baliste soit d’ailleurs assez largement représenté, il est très probable que c’est cette cir- constance d'une patrie lointaine et circonscrite, jointe à sa ressem- blance avec l'espèce suivante, qui peut expliquer comment il se fait quele Balistes brevissimus soit resté inédit jusqu’à ce jour. 2. Bauisres ANGuLoSuS , Étiq. du Mus. Caractères. Corps médiocrement élevé ; profil rapide de l'œil à la bouche. — Dorsale molle et anale triangulaires.— Écaillure des flancs épineuse. — Coloration nuagée de bandes horizontales plus sombres que le fond : DM: 25. A. 22. P. 16. 58 HOLLARD. Le profil de cette espèce est plus long et moins rapide que celui de la précédente ; ses formes se sont déjà abaissées. La région sus- oculaire, bien qu’assez large, déborde moins sensiblement l'œil. La fossette qui part de celui-ci est plus creusée. La dorsale épineuse offre un premier rayon droit, assez robuste, couvert de petites pointes en avant ; lamembrane interradiale prend fin à quelque distance de la dorsale molle. Celle-ci est presque aussi haute que longue, anguleuse, quoique arrondie'antérieurement, en décroissance rapide et uniforme de son sommet à son dernier rayon. La caudale se termine par une ligne arquée. La pointe pelvienne rugueuse , assez saillante , est suivie d’un pli tégumentaire peu extensible et qui monte obliquement vers l'anus. L'écaillure du Balistes angulosus ressemble tout à fait à celle du brevissimus. En échange, le système de coloration se caractérise ici, non plus par des taches plus pâles que Je fond, mais par des lignes horizon- fales et interrompues d’une nuance plus foncée que la teinte géné- rale. La dorsale molle, l’anale et la caudale, sont tachées de brun. Le Muséum ne possède qu'un petit nombre d'exemplaires de ce Baliste ; ils proviennent tous de l’océan Pacifique. Voici les dimensions du plus grand de ces individus, qui tous sont supérieurs sous ce rapport à ceux de l’espèce précédente : Longueur totale. . . . (0,445 Hauteur pectorale . . . 0,055 Hauteur pelvienne. . . 0,060 La caudale entre dans la longueur pour, 0,020 La région céphalique mesure, . . . 0,040 3, BALISTES MACULATUS. Caractères. Formes longues et médiocrement comprimées ; ligne faciale courte, inclinée à 45 degrés. — Dorsale molle et anale triangulaires ettrès hautes. — Extrémités de la caudale en forme de cornes courtes et obtuses. — Tubercule principal des squames la- MONOGRAPAIE DES BALISTIDES. 59 térales à pointes courtes et couchées. — Coloration violacée semée de taches laiteuses ou bleuâtres : DM: 24. A. 24° P. 47. Ce Baliste se distingue des précédents par une élongation très sensible du tronc et par l’abaissement de la ligne de profil. Le sillon préoculaire est profond et atteint le tiers de la distance qui sépare l'œil de la bouche. Le premier rayon de la dorsale épineuse est robuste, mais court et obtus, et couverten avant derugosités épineuses. La distance qui sépare les deux dorsales est ici un peu augmentée par suite du sur- croît de la longueur générale du corps. La dorsale molle s'élève rapidement à une hauteur qui égale au moins sa longueur , et son point culminant forme un angle à peine arrondi, tant la décroissance est ensuite rapide jusqu'au milieu de cette nageoïre ; arrivée là, la pente s'éloigne un peu plus de la ver- ticale (pl. HI, fig. 2). L’anale, qui commence et finit plus en ar- rière que la dorsale molle, offre, avec une base moins étendue, au- tant de hauteur , et par conséquent une décroissance plus également rapide que celle-ci, La caudale se termine par une ligne sinueuse qui met en saillie les extrémités, et conserve un peu de convexité au centre de cette nageoire (pl. I, fig. 2). La pointe pelvienne est robuste, épineuse, suivie d’une peau ru- gueuse très peu extensible, et qui gagne l’anus dans une direction presque horizontale. Les squames sont couvertes de tubercules proportionnellement peu nombreux et peu développés. Sur les joues, ces tubercules sont mousses ; sur les flancs, le médian antérieur prend seul le caractère épineux, et encore sa base l'emporte-t-elle beaucoup sur sa pointe qui est courte et couchée. Le système de coloration estassez constant. Le fond de la teinte est d’un brun violacé , et le dessin consiste en un semis général de grosses taches bleues qui blanchissent dans la liqueur. Le Muséum a recu ce Poisson de l'océan Pacifique et de la mer 60 HOLLARD. des Indes. Plusieurs exemplaires figurent dans la collection, Les dimensions du plus grand sont les suivantes : Longueur totale. . . . 0,295 Hauteur pectorale . =. 0090 Hauteur pelvienne. . . 0",100 La caudale n’a que 4 centimètres, et la région céphalique en mesure 7. Outre plusieurs exemplaires bien authentiques du Balistes ma- culatus, tous très semblables, je rencontre un individu qui, avee les mêmes caractères de formes et de nageoires, se distingue par sa couleur uniformément brunâtre, sans aucune tache, et par lef- facement considérable des tubereules épineux des squames laté- rales. Il est difficile de voir là autre chose qu'une variété. Synonymie.— C'est Bloch qui le premier a nettement déterminé et décrit ce Baliste, auquel il a donné le nom de B. tacheté. (Voyez son grand ouvrage, pl. 154, etdans le Syst. icth. ed Schn., p. 464, n° 3. B. maculatus.) Gmelin, et plus tard Lacépède et Bonnatère (Encyclopédie), ont adopté et la détermination de l’espèce et le nom proposé par Bloch. Mais les synonymes qu'ils y ont rattachés se rapportent tous à d’autres espèces : le Guaperva longa de Willughby à notre longissi- mus , le Maan visch de Renard à l’Americanus, ete. Quant aux phrases caractéristiques citées par ces mêmes auteurs, elles ne dé- terminent pas plus une espèce de Baliste qu'une autre. Mais com- ment M. Cuvier a-t-il pu, écrivant après Bloch et Lacépède, soup- conner l'identité du Balistes maculatus et du Balistes capriscus ? N a peut-être suffi de cette méprise pour que M. Lesson se crût le pre- mier éditeur de l'espèce qui nous occupe, et lui donnät en consé- quence le nom de Balistes azureus. (Voyage de la Coq.) h. BALISTES LONGISsIMUS , Nob. PI. III, fig. 3. Caractères, Formes basses et longues ; ligne de profil abaissée à 35 degrés. — Dorsale molle et anale hautes et pointues en avant, MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 61 très abaissées dans leur moitié postérieure , caudale terminée par deux cornes aiguës et une ligne sinueuse, — Écaillure latérale à grandes squames, portant un tubercule principal long et déprimé. — Coloration uniforme sur le corps , nuagée de brun sur les na- geoires : DM. 27. A. 24. P. 15. L'abaissement de toute la ligne qui s'étend de la bouche à la dor- sale épineuse, puis l'élongation de la région caudale, donnent à cette espèce la forme qui la distingue. Le sillon préoculaire est profond, ets’étend jusqu’à moitié chemin de l'œil à la bouche. Le premier rayon de la dorsale épineuse est plus élevé que celui du B. maculatus ; il est robuste, mousse, tuberculeux en avant ; le sui- vant est encore très long ; le troisième dépasse notablement le sillon dorsal, etlamembraneinterradiale se prolonge jusqu'au voisinage de la dorsale molle. Celle-ci s'élève rapidement à toute sa hauteur, laquelle égale sa longueur ; là elle offre un sommet anguleux , s’abaisse d’abord ver- ticalement, puis descend, dans sa dernière moitié, d’une pente très peu inclinée. L’anale reproduitles mêmes formes sur une longueur un peu moindre. Quant àla caudale, ses rayons extrêmes forment des cornes aiguës, d’où la ligne terminale s'abaisse pour reprendre encore un peu de convexité dans larégion moyenne de la nageoire. La pointe pelvienne est peu saillante, épineuse, subhorizontale, et suivie d’un tégument préanal très peu extensible. L'écaillure du Balistes longissimus est bien caractérisée. Aux joues, les squames sont d’une grandeur médiocre ; celles des ran- gées horizontales perdent leur forme quadrilatère, en s’arrondissant sur leur angle inférieur et postérieur. Leurs tubercules se groupent en petit nombre au centre de la petite plaque. Les squames ventrales sont grandes, allongées, et tuberculeuses seulement à leur centre. Elles laissent entreelles des intervalles linéaires où la peau se montre à nu, particularité que nous retrouvons sur les régions latérales du tronc. [ei les squames sont plus tuberculeuses que sur les régions précédentes , quoique une partie de leurs bords demeure lisse. Le 62 HOLLARD. tubercule médian antérieur est très prédominant, allongé, ét repré- sente la base d’une épine comprimée, dont la pointe serait effacée. La couleur générale du corps est d'un fauve rougeûtre nuancé de brun sur le dos. La dorsale molle, l’anale et la caudale offrent une teinte plus ple, irrégulièrement nuagée de traînées brunâtres. Ce Baliste nous vient de l'océan Pacifique ; il est représenté dans la collection du Muséum par trois individus, dont le plus grand et le mieux conservé offreles dimensions suivantes : Longueur totale. , . . 0",395 Hauteur pectorale . . . 0",110 Hauteur pelvienne . . . 0,126 Longueur de la caudale, . . . 0®,055 Longueur de la région céphalique. 0®,090 E Synonymie. — Si le Balistes longissimus ne figure pas encore dans les catalogues des zoologistes, ce n’est pas qu'il soit resté in- connu et complétement inédit jusqu'à ce jour. Le nom que je lui donne nem'appartient même pas complétement ; en effet, Willaghby a publié, d’après Grew, une figure et quelques traits de la caracté- ristique de cette espèce, que le dernier auteur cité nomme Capriscus longissimus seu spinosus(Grew, Mss. de la Soc, roy.; et Willughby, p. 154, pl. 3,20) Onreconnait, en outre, ce même Poisson dans la figure etla description que Parra donne de son Sobaco, p.17, pl. 10. Je ne prétends done pas au titre de premier éditeur du Balistes lon- gissimus ; mais je puis espérer qu'avec la description et la figure que j'en donne on ne le confondra plus, comme on paraît l'avoir fait, soit avec le Balistes maculatus qui en est voisin, soit même avee le B. capriscus, qui appartient àune autre section du genre. B. Dans les quatre dernières espèces de cette première section, en même temps que la dorsale molle et l'anale subissent un abais- sement notable, nous voyons se dessiner un type assez distinct ou mieux se modifier à plusieurs égards le type précédent. Le troisième rayon de la dorsale épineuse s'atrophie et ne s’aper çoit plus; les dents médianes, tant supérieures qu'inférieures, sont plus courtes que celles qui les suivent immédiatement; lécaillure MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 63 des joues présente plusieurs séries, plus ou moins disjointes, de squames carrées, plus hautes que larges. Celle de la région scapu- laire offre quelques squames orbiculaires, qui se distinguent de leurs voisins; enfin , les squames latérales sont un peu carénées , et leurs tubercules sont à la fois plus nombreux et moins gros que dans les espèces que nous avons déjà décrites; du reste, comme on va le voir, les éléments de ce petit type se coordonnent très naturellement en séries. 5. BALISTES GUTTUROSUS, Nob. Caractères. Corps élevé et comme tuméfié à la partie inférieure de la gorge et du ventre, profil déprimé. — Dorsale molle et anales hautes en avant de plus de leur demi-longueur et décrois- sant d’une manière graduelle. — Un groupe de squames subcircu- laires au-dessous des pectorales ; les séries des joues nombreuses , très inclinées , n’atteignant pas la fente branchiale. DM. 27. A. 24. P. 43. Je place cette espèce en tête de la petite série à laquelle elle ap- partient, en raison de l'élévation proportionnelle du corps et de celle des nageoires dorsale molle et anale. La ligne faciale n’est pas inclinée dans son ensemble au delà de 25 degrés ; près de la bouche, elle descend vers celle-ci d’une pente plus rapide. La ligne infé- rieure ventrale décrit, à partir de la bouche, et jusqu’à la pointe pelvienne , une courbe très arquée , qui donne aux parties du corps qu'elle limite une proéminence considérable ; c’est dans ce sens que le corps prend son surcroît de hauteur. Le sillon préoculaire est allongé, les deux mâchoires, sensible- ment égales , laissent à l'ouverture de la bouche sa direction hori- zontale. La dorsale épineuse présente un premier rayon robuste, dont la face antérieure est sensiblement arquée et la pointe seulement émoussée. Le second rayon est presque caché sous le premier : le sillon s’étend à peu près jusqu’à la dorsale molle. 64 HOLLARD. La deuxième dorsale s’élève rapidement à une hauteur qui équi- vaut à plus de sa demi-longueur ; depuis le sommet anguleux, la décroissance des rayons se fait sur une ligne d’abord plus rapide, puis bientôt d’une inclinaison plus graduée : l’anale présente les mêmes caractères. La caudale se termine, comme dans les espèces suivantes, en forme de croissant, dont la courbe se redresse encore un peu au milieu de la nageoire. La pointe pelvienne est robuste et saillante; mais le tégument abdominal qui la suit ne présente ni rugosités, ni spinules, ni au- eun des caractères d’un pli en réserve (1); il gagne l’anus en sui- vant une ligne droite, oblique et peu prolongée. L'écaillure de ce Baliste se distingue d’abord par les dimensions générales de ses squames, qui sont proportionnellement plus pe- tites que celles des espèces suivantes. Celles des joues forment cinq séries principales , un peu obliques, séparées par des lignes cuta- nées, et qui s'arrêtent à la région operculaire, où leurs formes et leurs dispositions ne sont plus reconnaissables. Au-dessus et au-dessous de ces cinq séries on en pourrait compter quelques autres, mais plus courtes, et passant par dégradation à d’autres caractères. Sous les pectorales nous rencontrons un groupe de squames polygonales , tendant à la forme circulaire, plus petites que celles qui les entourent, ayant enfin leur tubercule principal à leur centre. Nous retrouvons le même caractère avec une disposition rayon- nante des tubercules sur une douzaine de squames de la région sca- pulaire. Les séries abdominales, déjà entamées par le groupe sous-pe co- ral, sont composées de squames médiocres, dont la forme et l’arran- gement n’ont pas toute leur régularité ordinaire. Enfin l’écaillure des régions latérales du tronc et de la queue se compose de squames en forme de lozanges allongées, couverts de très petits tubercules, et qui, plus larges et plus également couvertes (1) Il en est de même, disons-le une fois pour toutes, dans toutes les espèces de ce petit type. Chez toutes, les squames de cette région ressemblent à celles qui les avoisinent. MONOGRAPHIE DES. BALISTIDES. 65 de ces granulations en avant, se rétrécissent à mesure qu’on avance vers la région étroite de la queue, relèvent leur partie moyenne en forme d’arète mousse, et présentent en tête de leur partie saillante et tuberculeuse un tubereule prédominant, mais jamais épineux. Cette disposition prendra bien plus de développement dans les espèces suivantes. La couleur semble être ici d’un gris jaune uniforme ; déjà, cepen- dant, nous voyons le centre de beaucoup de squames offrir une teinte claire, qui fait l'effet de taches blanchâtres semées sur un fond plus fortement nuancé. Je décris le Baliste goitreux d’après un exemplaire unique, bourré , mais en très bon état. Il nous vient de l’île Bourbon, et presente les dimensions suivantes : Longueur totale. . . . 0,220 Hauteur pectorale . . . 0,090 Hauteur pelvienne . . . 0®,095 La caudale mesure plus de. . . 0”,020 La région céphalique atteint . . 0,050 G. BALISTES LINEO-PUNCTATUS , Nob. Caractères. Corps médiocrement élevé; profil déprimé. Dor- sale molle et anale hautes de plus de leur demi-longueur, et à dé- croissance graduelle. — Aux joues, trois séries disjointes de très grandes squames quadrilatères, partant de la fente branchiale. — Coloration à fond jaunâtre, variée sur le tronc de lignes noires lon- gitudinales, traversant le petit diamètre des squames, et dégénérant en arrière et sur le ventre en séries de taches punctiformes : DM. 28. A. 25. P. 43. Ce Baliste rappelle, par son profil et un peu par le contour de la gorge et du ventre, l'espèce qui précède. Mais, sous ce dernier rap- port, la différence des deux espèces est cependant considérable. Le sillon préoculaire ne descend pas jusqu'au milieu de la distance qui sépare l'œil de la bouche. &° série, Zooz, T. I. (Cahier n° 2.) 1 5 66 HOLLARD. Le grand rayon de la dorsale épneuse est arqué, très comprimé, subaigu. Le sillon dorsal de cette nageoire s'arrête à distance de la dorsale molle. Celle-ci et l’anale atteignent rapidement une hauteur supérieure à leur demi-longueur , puis elles diminuent en suivant une ligne d'abord très inclinée et bientôt rapprochée de l'horizon- tale. La pointe pelvienne est bien dégagée , oblongue, plus rugueuse qu'épineuse, comme dans toute cette petite série. Au delà, la ligne qui monte vers l'anus est droite et passablement inclinée. L’écaillure présente ici quelques caractères qui séparent bien cette espèce de la précédente. Aux joues, je trouve de bas en haut trois sé- ries en gradation de longueur, dontla supérieure s'arrête à la région sous-pectorale ; plus haut viennent trois autres séries composées de grandes squames disjointes, et qui descendent de la fente branchiale vers la bouche et le menton, s’arrètant, comme (toujours, avant d’y atteindre, et faisant place à un système irrégulier de petites squames ; au-dessus encore de ces trois séries, on en retrouve encore deux et même trois autres plus courtes et serrées, et dont les éléments di- minuent graduellement, surtout en hauteur. Les squames sous-pectorales n’offrent pas de caractère particu- lier, et conservent plus ou moins les formes de l’écaillure de la région abdominale, à laquelle elles appartiennent. A la région scapulaire, nous ne trouvons plus que trois où quatre squames orbiculaires , relevées à leur centre , en un mot un peu distinctes de celles du voisinage mais cette diminution de nombre a porté sur les squames qui étaient les moins modifiées, et qui for- maient une transition à celles de la région latérale; en sorte que celles qui conservent ici une forme particulière sont les squames, qui, par leur position et leurs caractères spéciaux, semblent s'ache- miner au petit système de scutelles qui distingue essentiellement la seconde section des Balistes. L’écaillure des régions latérales est couverte de tubercules un peu plus allongés d'avant en arrière que ceux qui leur correspondent dans le Balistes quiturosus. Sur les flancs proprement dits, les squames n'offrent pas de ligne relevée dans le sens de leur petit dia- mètre, ef est à peine si l’on y découvre un tubercule prédominant, MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. C7 Mais bientôt, et plus on approche de la région caudale, à plus forte raison sur celle-ci, le tubercule médian antérieur de chaque squame prend un développement prédominant; en même temps, on voit aussi se relever le diamètre antéro-postérieur de la squame. Le système de coloration nous offre sur tout le trone, depuis la limite que représente la fente branchiale, une suite de lignes brunes ou noires dirigées d'avant en arrière , les unes prolongées sur toute la partie latérale des flanes et de la queue, les autres plus courtes inférieurement. Ces lignes font place à de petites taches, d’abord allongées et en séries, puis punctiformes , et plus irrégulièrement distribuées. Ajoutons que la caudale présente dans sa moitié fermi- nale une zone brune en forme de croissant. Le Balistes lineo-punctatus n'est représenté jusqu'ici, dans la collection du Muséum, que par un seul individu, bourré et en bon état de conservation ; il vient des eaux de l'ile Bourbon. Ses dimen- Sions sont les suivantes : Longueur totale. . . . 0,195 Hauteur pectorale . . . 0",080 Hauteur pelvienne . . . 0",084 La caudale mesure, . . . . 0,017 La région céphalique . . . . 0",050 7. BALISTES cALOLEPIS , Nob, PI. LI, fig. 5. Caractères. Corps près de trois fois aussi long que haut; profil dépassant un peu 30 degrés. — Dorsale molle, haute en avant de plus de sa demi-longueur , à décroissance d’abord rapide , puis in- sensible. — Aux joues, quatre séries principales de squames qua- drilatères, remontant jusqu'à la fente branchiale. — Couleur uni- formément jaunâtre et un peu métallique, avec une tache plus claire sur chaque squame : DM227- A 020 RTS Le profil se relève de quelques degrés dans cette espèce ; mais en même temps, la ligne de la gorge et du ventre descendant moins que 68 HOLLARD. dans les espèces précédentes, le corps perd de sa hauteur, et pré- sente aussi des formes moins massives. Le sillon préoculaire atteint guère que le tiers de l’espace qui sépare l'œil de la bouche. Le premier rayon épineux est très comprimé, un peu arqué, tron- qué à son extrémité. Le sillon dorsal s'arrête à peu près à demi- distance des rayons épineux à la dorsale molle. Celle-ci et l’anale atteignent rapidement une hauteur qui dépasse leur demi-longueur ; puis ees nageoires subissent une décroissance considérable qui se ralentit bientôt, et devient à peu près insensible pour la dernière moitié de leurs rayons. La pointe pelvienne est dégagée, oblongue, épineuse en avant. Un espace peu considérable le sépare de l'anus, et le tégument abdo- minal remonte vers celui-ci d’une pente peu rapide. Le revêtement squamoïde de ce Baliste offre les particularités sui- vantes : Aux joues, il n’y a qu'une série de squames quadrilatères au-dessous des principales ; encore ne diffère-t-elle de celles-ci que par la grandeur de ses squames , car elle remonte comme elles vers la fente branchiale, arrivant, vu sa position relative, un peu au-des- sous du point terminal de cette fente. Les squames sous-peclorales rentrent complétement par leurs formes et leur disposition dans les séries abdominale et latérale. La région scapulaire porte un petit groupe de squames circulaires relevées à leur centre, assez distinctes de celles qui les entourent. Les squames latérales sont largement imbriquées, et leur partie découverte représente un losange plus étroit que la partie couverte. Le petit diamètre de ce losange est un peu relevé, et formeune sorte d’arête mousse. Quant aux saillies que portent ces squames, elles diffèrent par leur forme allongée des tubercules qui sarmontent le reste de l’écaillure. Ce sont cette fois, et à un plus haut degré que dans l'espèce précédente, des lignes saillantes, interrompues , et anastomosées entre elles, courant d'avant en arrière. Leur plus grand développement est à l'angle antérieur, où se trouve ainsi re- présenté et modifié tout à la fois le premier tubercule médian. La couleur de cette Jolie espèce est un jaune métallique, dont la nuance et l'éclat ont été probablement ternis par l'action de l'alcool, mais qui justifient encore assez bien le nom de Calolepis. A cette MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 69 teinte de fond s'ajoutent des taches plus pâles, une seule sur chaque squame, et toujours vers l'angle le plus voisin de sa partie couverte. Au premier abord, ilsemble que ces petites places blanches se rattachent aux particularités de structure qu'offre l’écaille à leur endroit , c’est-à-dire à une augmentation d'épaisseur de la lame ou à la plus grande saillie des tubereules ; mais , sans nier absolument ce rapport, je ferai remarquer que je retrouve des taches blanches sur les squames des joues sans modification bien apparente, ni dans l'épaisseur de la lame, ni dans la forme des tubercules. La caudale se termine par une zone en croissant, d’une autre nuance que l’origine de cette nageoire. Le Muséum possède deux exemplaires du Balistes Calolepis : l'un provenant de l'ile Bourbon, l’autre de l’ile de France. Le plus grand nous offre les dimensions suivantes : Longueur totale. . . . 0,180 Hauteur pectorale . . . 0,062 Hauteur pelvienne . . . 0",067 La caudale n’a que. . . . . 0,048 La céphalique mesure , . . . 0",048 Synonymie. — Je crois reconnaître cette espèce dans celle que Parra a décrite et figurée sous le nom de Cueuyo, p.19, pl. A4, f. 2. 8. BALISTES ELONGATUS , Nob. Caractères. Corps trois fois aussi long que haut; profil au-des- sous de 30 degrés; dorsale molle élevée de sa demi-longueur en avant, et à décroissance d’abord rapide, puis lente ; aux joues quatre rangs principaux, et un peu disjoints, de squames quadrilatères, descendant de la fente branchiale, et augmentant beaucoup de hau- teur en s’éloignant de celle-ci, puis diminuant vers la bouche. — Coloration uniforme et jaunâtre : DM. 32. A. 28. P. 43. Ce Baliste contraste, par la longueur et le peu d'élévation de son corps, avec les deux premières espèces de son type; ici, en même 70 MOLLARD, temps que le profil est aussi abaissé que dans ces espèces, la ligne ventrale, après être descendue d'abord assez rapidement, prend bientôt une direction subhorizontale, qui met une distance médiocre entre elle et la nageoire pectorale. Le sillon préoculaire se prolonge jusqu'à la moitié de la distance qui sépare l'œil de la bouche. Le premier rayon de la dorsale épineuse est plus long que dans les espèces précédentes, très comprimé, à peu près droit, tronqué à son extrémité. Le sillon dorsal occupe près des trois quarts de l’in- tervalle de ce rayon au premier de la dorsale molle. La dorsale molle et l’anale participent au sureroît de longueur du corps; elles s'élèvent d’abord rapidement jusqu’à une hauteur qui égale leur demi-longueur ; puis, après un premier temps de décrois- sance presque verticale, ces nageoires diminuent très graduellement Jusqu'à leur extrémité, c'est-à-dire dans plus des deux tiers de leur longueur. La pointe pelvienne manque sur l'exemplaire qui sert à cette description ; mais il est peu probable qu'elle diffère de celle des autres espèces, non plus que le tégument abdominal qui la suit, et qui présente d’ailleurs l’écaillure des parties voisines. Le Balistes elongatus est remarquable entre tous les autres par la largeur de ses squames. Celles des joues sont allongées dans le. sens vertical au milieu des séries ; celles-ci sont au nombre de quatre principales, atteignant la fente branchiale d’une part, le menton de l’autre, et laissant entre elles des joints très apparents. Les squames sous-pectorales ne se distinguent pas de celles de Ja région ventrale, Les scapulaires offrent un petit groupe de sept ou huit petites écailles rondes et relevées en bosse. Les squames latérales laissent à découvert une large surface en lo- sange, couverte de tubercules nombreux, etrenfermés dans un cadre de saillies un peu allongées. Sur le trone proprement dit, on ne voit pas de tubercule antérieur médian qui prédomine ; ce caractère nese montre que sur la queue, c’est-à-dire sur toute la région que l'anus limite en bas. Là chaque squame offre à son angle antérieur un long tubereule saillant, au delà duquel l’écaille elle-même paraît un peu relevée sur laligne de son petit diamètre. MONOGRAPHIE DES BALISTIDES, 71 La couleurdu Balistes elongatus semble, si l’on peuts’en rappor- ter à un individu desséché, uniformément fauve et plus grisâtre que celle du Calolepis. Les taches blanches manquent. La queue pré- sente un eroissant terminal très évident, composé d'une bande étroite, brune, que suitune zone plus claire. Ce poisson nous vient des Açores ; c’est le seul de son type que nous ayons de l'Atlantique. Les dimensions du seul exemplaire que possède la collection sont les suivantes : Longueur totale. . . . 0®,240 Hauteur pectorale . . . 0,075 Hauteur pelvienne . . . ? La caudale mesure. , . . . 0",020 La région céphalique . . . . 0,060 La collection du Muséum possède deux petits exemplaires d’un Baliste sans plaques scapulaires, et qui se rapporte par la nullité de la troisième épine dorsale et toute son écaillure, à la petite série typique qui vient de nous occuper. Ces exemplaires sont évidem- ment de très jeunes individus, comme le prouve l’indivision des rayons de la dorsale molle et de l’anale, la simple bifurcation de ceux de la caudale, les spinules encore très acérées du grand rayon dorsal, et d’autres indices fournis par l’écaillure. Aussi ne saurais- je dire. s'il s’agit ici d’une espèce nouvelle, ou tout simplement, comme je le soupconne, d’après la forme, du jeune âge du B. calo- lepis, dont un de ces individus offre les teintes dorées, et même d'une manière plus prononcée que les sujets adultes de cette espèce. L'étiquette du bocal donne à ce même sujet le nom de B. thuni, en indiquant qu'il a été trouvé, par M. L. Rousseau, dans l'estomac d’un Thon au voisinage de Port-natal. L'autre exemplaire provient de la collection de Banks, est d’une teinte noirâtre , mal conservé , et porte sur son étiquette le nom de B. corniger. Je crois enfin que le Balises aureolus de M. Richardson (Voyage du Sulfur) n'est encore qu'un troisième exemplaire du jeune âge de lamême espèce. 72 HOLLARD. MONOGRAPHIE DES BALISTIDES, Je remarque seulement que le nombre des rayons de la dorsale molle et de l’anale est celui que j'ai donné pour le B. lineo-qutta- tus, et quele grand rayon épineux du dos est aigu comme dans ee dernier. Si le B. aureolus doit être conservé comme espèce distinete, il prendra place entre le lineo-guttatus et le Calolepis. EXPLICATION DES FIGURES. PLANCHE 9. Fig. 1. Le Triacanraus BRevrrosrnis, Val, Fig. Aa. La tête du même vue en dessus. Fig. 2. Le Triacanraus AnGusTIFORMIS, Nob. Fig. 2%. La tête du même vue en dessus. Fig. 3. Le Triacanraus LoxGirosrris, Nob. PLANCHE 9. Fig. 1. Le Bauisres previssmus, Nob. Fig. 14, Une de ses écailles latérales. Fig. 2. Forme de la dorsale molle du Bal. maculatus, BI. Fig. 3. Forme de la caudale du même. Fig. 4. Le Bauisres Loncissimus, Nob. Fig. 4%, Une de ses écailles latérales. Fig. 5. Le Bauisres Carozeris, Nob. Fig. 5%. Une de ses écailles latérales. Fig. 5b, La bouche du même. DEUXIÈME MÉMOIRE SUR LES CIRCONVOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFÈRES, Présenté à l’Académie des sciences, le 12 septembre 1853, Par M. Camille DARESTE. J'ai présenté à l’Académie, en janvier 1852, un Mémoire sur les circonvolutions du cerveau chez les Mammifères (A). Je m'étais proposé, dans ce travail, de démontrer, à l’aide de tous les faits qui m'étaient alors connus , la règle suivante : Dans tous les groupes naturels de la classe des Mammifères, le développement des circon- volutions est en rapport avec le développement de la taille. Je ne connaissais alors la disposition des circonvolutions céré- brales que dans un nombre d’espèces assez restreint ( 80 environ ), et je n'avais pu, par suite de mon séjour loin de Paris, mettre à profit, pour mes études, les riches collections de la galerie d’anato- mie comparée du Muséum. Aussi, en faisant connaitre aux physio- logistes les premiers résultats de mes recherches, je ne m'abusais point sur leur signification , et je comprenais parfaitement qu'ils ne pourraient entrer dans la science d’une manière définitive qu'autant qu'on les aurait étendus à un nombre d'espèces beaucoup plus considérable. J'ai pu , dans ces derniers temps , reprendre ce travail, que le défaut de matériaux m'avait contraint d'interrompre. M. Duver- noy, et je saisis cetle occasion de lui témoigner publiquement ma reconnaissance, à bien voulu mettre à ma disposition les cerveaux de Mammifères qui appartiennent à la galerie d'anatomie du (1) Voyez Annales des sciences naturelles , 3° série, t. XVIL, p. 30, 7 C. DARESTE. — MÉMOIRE Muséum. Cette collection , commencée sous l'administration de G. Cuvier, et accrue par les soins de ses deux successeurs dans la chaire d'anatomie comparée, est probablement aujourd’hui le plus riche dépôt qui existe en ce genre, et m'a, par conséquent , fourni pour mon travail les éléments les plus précieux. Leur étude m'a pleinement confirmé dans les idées que j'avais émises l’année dernière, mais avec doute, et en provoquant à leur sujet de nou- velles recherches. Ce sont les résultats de mes nouvelles étudesqui forment le sujet du Mémoire que je présente actuellement à l'Académie. Mais, avant d'aller plus loin, il est nécessaire, pour prévenir des objections que l’on pourrait me faire, et pour répondre à des objec- tions qui m'ont été faites, de rappeler certains faits de l'histoire des circonvolutions cérébrales. L'anatomie nous apprend que les circonvolutions du cerveau présentent, dans les divers individus de l'espèce humaine, des de- grés très inégaux de développement. Que l'on mesure la profondeur des sillons qui les séparent, ou que l’on examine le nombre plus où moins grand des dépressions et des anfractuosités que leur surface présente, on trouve que ces détails de conformation sont soumis à de nombreuses variations individuelles. Bien plus, de semblables ariations peuvent être constatées, quand on compare l'hémi- sphère cérébral gauche et l'hémisphère cérébral droit chez un même individu. Voici comment s'exprime à ce sujet M. Cruveilhier, dont le Traité d'anatomie descriptive est l'un des plus complets qui aient été publiés récemment sur cette branche des sciences de l'orga- nisation : « Le volume des cireonvolutions est variable dans les divers individus, sous le point de vue de la hauteur et sous celui de l'épaisseur, et toujours en raison directe du volume de l'hémisphère cérébral : sous ce double rapport , il y a de très grandes différences individuelles. » ( Tome IV, p. 241 , 3° édit. ) Et ailleurs (p. 236 ): « La différence que les cireonvolutions présentent dans leurs dimen- sions, et plus particulièrement dans leur hauteur chez les divers individus, doit déterminer des différences correspondantes dans SUR LES CIRCONYOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFÈRES, 79 l'étendue de la surface générale que présente le cerveau, et ces différences méritent d'autant plus d'être notées qu'on a fait jouer un rôle très important à l'étendue de cette surface dans le dévelop- pement relatif des facultés intellectuelles... Chez l'homme, la profondeur des anfractuosités , et, par conséquent , la hauteur des circonvolutions, m'ont toujours paru en rapport direet avee le volume et le poids du cerveau. » J'ai donc dû tout d’abord, au début de mes recherches, me demander si, en dehors de l'espèce humaine , les circonvolutions pourraient présenter dans leur développement de semblables différences individuelles. Ici, je me suis trouvé en présence de difficultés assez grandes; en effet, les collections anatomiques ne nous présentent le plus ordinairement qu'un seul cerveau pour chaque espèce ; et d’ailleurs on comprend que ces variations indi- viduelles ne pourront se montrer qu'autant queles cerveaux seront pourvus de circonvolutions, et que les circonvolutions elles-mêmes seront nombreuses et compliquées. La collection du Muséum m'a permis toutefois de m'assurer que ces variations individuelles existent, en présentant à mon observation, dans le genre des Cerfs, un certain nombre de cerveaux appartenant aux mêmes espèces. Aiïnsi il y a d'assez grandes différences, sous le rapport du déve- loppement des circonvolutions , entre le cerveau d’une Daine morte à la Ménagerie le 3 janvier 1845, celui d’une autre Daine morle le 21 novembre 1851, et celui d’un Daim mort le 15 novembre 4851 ; entre le cerveau d’une Biche de Cerf-Cochon morte en décembre 1841 ; et un autre cerveau d’une Biche de la même espèce, morte le 4 novembre 1850 ; entre le cerveau d'une femelle d'Axis née à la Ménagerie le 2 juillet 1831, et morte le 27 mai 1847, et celui d’un Axis mort-né le 5 août 1844 ; entre le cerveau d’un Cerf de Virginie mort le 40 mars 1846, et celui d’une Biche de Virginie morte le 48 novembre 1843. J'ai voulu me renseigner d’une manière plus complète sur les animaux auxquels ces cerveaux ont appartenu, pour savoir sil serait possible de rattacher les différences qu'ils présentent à cer- taines circonstances appréciables ; et, dans ee but, je me suis adressé 76 C. DARESTE. — MÉMOIRE à M. Geoffroy Saint-Hilaire. Voici ce qui résulte des recherches que ce savant a bien voulu faire à ma prière sur les registres de la Ménagerie : La Daine morte à la Ménagerie le 3 janvier 1845 y était née le 25 juin 1844; celle qui est morte le 21 novembre 1851, etle Daim mortle 15 octobre de la même année, avaient été donnés par le roi, le 4 octobre 1842. Ce dernier avait déjà plusieurs années. La Biche de Cerf-Cochon morte en décembre A84A était née à la Ménagerie le 21 août de la même année; celle qui est morte le 4 novembre 1850 était née à la Ménagerie le 6 oc- tobre 1840. Enfin le Cerf de Virginie mort le 40 mars 1846 avait été donné le 4 avril 1843 ; et la Biche de Virginie morte le 18 novembre 1843 était née à la Ménagerie le 2 août de la même année. En comparant entre elles toutes ces dates, j'ai pu m'’assurer que le développement des circonvolutions était, comme on pouvait faci- lement le prévoir, dans une relation évidente avec l’âge des ani- maux. Il m’asemblé également quele sexe pouvait avoir sur ce dé- veloppement une certaine influence, et que les circonvolutions étaient généralement moins développées dans les femelles que dans les mâles. Mais quelle que soit la cause de ces différences individuelles , cause qui ne pourrait être déterminée d’une manière précise que par des recherches étendues sur un bien plus grand nombre de cer- veaux, il n’en est pas moins vrai que ces différences individuelles existent chez les animaux, comme dans l’espèce humaine, bien qu'elles y existent peut-être d’une manière moins tranchée. J'avais besoin , au début de mes recherches, d'établir ces faits d'une manière certaine, pour qu'il ne püt y avoir d'incertitude sur mon point de départ. Que s’agit-il, en effet, dans tout mon Mémoire ? De constater le degré de développement des circonvolutions céré- brales. Or il importe de ne pas oublier que , si les circonvolutions sont variables individuellement, et si, dans le même individu, leur degré de développement est en rapport avec l'âge et avec d’autres conditions encore peu appréciées, nous ne pourrons connaître SUR LES CIRCONVOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFÈRES. 77 complétement ee degré de développement d'après le cerveau d’un seul individu , Surtout si les renseignements que nous possédons sur ce cerveau se bornent à l'indication pure et simple de l’es- pèce à laquelle il appartient. Malheureusement , tel est l’état de presque {ous les cerveaux conservés dans les collections anato- miques. Tant que nous ne saurons pas d’une manière positive que le cer- veau que nous examinons appartient à un individu mâle, et ayant atteint son développement complet, nous ne pourrons évidemment pas connaître avec précision le degré de développement que les circonvolutions peuvent atteindre dans une espèce. Il résulte de tout ce qui précède que, dans l'étude comparative du degré de développement des circonvolutions cérébrales, nous ne pouvons, le plus souvent, connaître ce degré de développement qu'avec un degré plus ou moins grand d’approximation , et que , par conséquent, si quelques faits de détail se trouvaient en contra- diction avec une tendance bien manifeste observée dans la généra- lité des cas, ces exceptions ne pourraient être une raison suffisante pour infirmer la règle générale. Ces considérations étaient nécessaires pour bien établir la nature des résultats que je cherche à faire connaître dans mon Mé- moire. J'entre maintenant dans l’examen des faits particuliers. Tei , comme dans mon premier Mémoire , je me bornerai à constater ces faits et à indiquer leur tendance générale, sans m'occuper de l'étude complète et approfondie des circonvolutions dans chaque espèce, étude qui n'aurait en définitive qu'un assez médiocre intérêt au point de vue de la physiologie, et qui d’ailleurs n’entre pas dans le plan de mon travail. Ces principes élant posés, tous les faits nouveaux que j'ai obser- vés m'ont confirmé dans les idées que j'avais émises dans mon pre- mier Mémoire. L'ordre des Primates m'a présenté les cerveaux d’un très grand nombre d'espèces appartenant à presque tous les genres, et aussi d’un très grand nombre d'individus appartenant à chaque espèce, 78 C. DARESTE. — MÉMOIRE Tous les faits nouveaux que j'ai observés m'ont fourni de nou- velles confirmations de la règle établie. La tribu des Simiens est celle qui comprend les plus grandes espèces ; aussi les circonvolutions y sont beaucoup plus dé- veloppées que dans les autres tribus. J'ai constaté ce fait pour l'Orang-Outang et le Chimpanzé. Le cerveau du Gorille n’a pas encore été observé ni décrit ; espérons que cette lacune de Ja science ne lardera pas à être comblée par les soins des naturalistes qui visiteront les côtes du Gabon, et qui, je n’en doute point, s’effor- ceront de réunir tous les documents relatifs à l’histoire d’un animal si intéressant à tant d'égards. Les circonvolutions sont beaucoup moins développées dans la tribu des Cynopithéciens, dont la taille est généralement moindre que celle des Simiens. Elles présentent, du reste, assez peu de diffé- rences dans les divers genres de cette tribu ; ce que l’on pouvait également prévoir, puisque tous ces groupes ne présentent pas de grandes variations pour la taille. Toutefois, la règle générale est ici encore bien manifeste. Les grandes espèces, comme les Cynocé- phales et les Macaques, ont les circonvolutions beaucoup plus dé- veloppées que les petites espèces, celles du genre Cercopithèque, par exemple. Cette inégalité dans le développement des circonvolutions peut d’ailleurs s'accomplir de deux manières différentes. Ou bien les circonvolutions sont moins développées sur toute la surface du cerveau ; ce qui arrive, par exemple, quand on compare les Cerco- pithèques aux Macaques ou aux Cynocéphales. Ou bien, tout en étant également développées sur certains points, elles le sont beau- coup moins sur d’autres; c’est ce qui rend fort intéressante l'étude du cerveau du Cynopithèque. On sait que cette espèce, placée d’abord dans le genre Cynocéphale sous le nom de Cynocéphale nègre (Cynocephalus niger), est devenue, dans la classification de M. Is. Geoffroy Saint-Hilaire, le type d’un genre particulier , distinet des véritables Cynocéphales non seulement par ses carac- ières, mais aussi par sa patrie et par sa petite taille. Le cerveau du Cynopithèque nous présente, dans la région antérieure, des cireon- volutions aussi nombreuses et aussi compliquées que celui des SUR LES CIRCONYOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFÈRES. 79 Cynocéphales ; mais les circonvolutions de la région oceipitale ont, au contraire , un développement beaucoup moindre (4). Le cer- veau d’une autre petite espèce de celte tribu, le Talapoin, dont M. Is. Geoffroy-Saint-Hilaire à fait récemment un genre à part sous le nom de Miopithèque, aurait iei un grand intérêt. Je ne puis que signaler cette étude aux anatomistes. Quant aux Singes de la troisième tribu, les Cébiens, et à eeux dé la quatrième, les Hapaliens, je n'ai rien à ajouter à ce que j'en disais dans mon premier Mémoire. Je dois toutefois faire une rectification : j'ai dit par erreur que les circonvolutions manquent sur le lobe occipital dans tous les Singes qui n’appartiennent pas à la première tribu ; cela n'est vrai que pour les petites espèces. Dans les grandes, les circonvolutions existent sur le lobe occipital, mais beaucoup moins développées que sur les lobes antérieurs du cer- veau. Ainsi, dans la tribu des Cynopithéciens, ces circonvolutions existent dans les Cynocéphales ; et dans la tribu des Cébiens, elles existent chez les Lagotriches et les Atèles (2). (1) Je n'ai point cité dans le cours de ce Mémoire la liste des espèces dont j'ai étudié le cerveau; ce serait une lecture fastidieuse et sans intérêt: mais je crois nécessaire de l’établir en note, au sujet de chaque famille. Dans la tribu des Cynopithéciens, j'ai étudié les cerveaux des espèces sui- vantes : Semnopithèque entelle, — Cercopithèques blanc-nez, moustac, monoïde, mone, malbrouc, grivet, callitriche, patas. — Cercocèbe mangabey (Cer- cocebus æthiops), enfumé (C. fuliginosus). — Macaque bonnet chinois, ordinaire, ouanderon, Rhésus, maimon. — Magot. — Cynopithèque nègre. — Cynocé- phale hamadryas, papion, mandrille, (2) Espèces dont j'ai étudié le cerveau : 1° Tribu des Cébiens. — Saimiri sciurin. — Nyctipithèque sélin. — Sajou ordinaire, capucin, à gorge blanche. — Atèle Belzébuth, aux mains noires. — Plus, deux cerveaux désignés dans la collection sous les noms d’A£. griseus et d’At. Brissonü, dont je n’ai pu retrouver la synonymie dans le Catalogue des Primates du Muséum , publié par M. Geoffroy Saint-Hilaire. Enfin, le cerveau du Callitriche molock, qui a été décrit par M. Gra- tiolet dans son Mémoire sur les plis cérébraux des Primates (ce Mémoire est inédit, mais il est analysé dans le rapport que M. Duvernoy en a fait à l'Acadé- mie). 2° Tribu des Hapaliens, — Ouistiti ordinaire. — Tamarins marikina, pinche. — M. Owen a décrit et figuré le cerveau du Tamarin aux mains rousses (Phil, trans., 1837, pl. V, fig. 87). 80 C. DARESTE. — MÉMOIRE L'absence des circonvolutions dans les Singes de la tribu des Hapaliens est un fait qui à déjà été constaté depuis longtemps par les observations de M. Is. Geoffroy Saint-Hilaire , et par celles de M. R. Owen. Dans la famille des Lémuridés, les mêmes faits se retrou- vent. Les Makis, les plus grandes espèces de cette famille, ont les circonvolutions assez développées. Elles existent, mais beau- coup moins développées, dans le Nycticèbe et dans le Chéiro- gale. Elles manquent complétement dans les Galagos et les Micro- cèbes (1). Je n'ai rien à ajouter à ce que j'ai dit dans mon premier Mémoire ni sur la famille des Tarsies, ni sur l’ordre des Chéiroptères. Je rappelle seulement que dans cet ordre, les faits connus , si peu nombreux qu'il soient encore, confirment tous la règle, puisque Ja Roussette, l’une des plus grandes espèces, possède déjà des eir- convolutions, tandis que nos Chauves-Souris ordinaires en sont dépourvues. Jai pu, au contraire, multiplier considérablement mes observa- tions sur les Mammifères de l’ordre des Carnassiers, et, en parti- culier, sur ceux de la famille des Viverridés de M. Is. Geoffroy Saint-Hilaire, famille qui correspond assez exactement à celle des Carnivores de Cuvier ; tandis que, dans mon premier Mémoire, cette famille me présentait encore de très nombreuses lacunes. Dans la famille des Ursiens, les cerveaux des deux espèces de Ratons (Procyon lotor et Procyon cancrivorus) et des deux espèces de Coatis (Nasua fusca et Nasua rufa) sont bien manifestement plus pauvres en circonvolutions que ceux des diverses espèces du genre Ours, qui se trouvent en assez grand nombre dans la (1) Espèces dont j'ai pu étudier moi-même le cerveau: Le Maki roux ( Lemur fulvus). — Le Vari (L. macaco). — Le Chéirogale de Milius (Cheirogaleus Mit). — Le cerveau du Mongous (Lemur Mungos) a été décrit par Leuret ; celui du Ga- lago du Sénégal (Galago senegalensis), par Laurillard et M. Fr. Cuvier fils (dans la 2° édition du Traité d'anatomie comparée de Cuvier ; celui du Microcèbe par M. Is. Geoffroy Saint-Hilaire. Enfin, je dois la connaissance du cerveau du Nycti- cèbe à une bienveillante communication que m'a faite ce dernier savant. SUR LES CIRCONVOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFÈRES. 81 collection du Muséum, et qui présentent tous un développement très notable des circonvolutions. Maintenant la règle est-elle vraie pour les différentes espèces de ce genre? Cette question serait d’un très grand intérêt pour mon travail, d'autant plus que c’estun point sur lequel un habile physio- logiste, M. Gratiolet, qui a contredit les idées que j'ai émises dans mon premier Mémoire, s’est appuyé pour élayer les objections qu'il m'a faites. Malheureusement il y a ici une lacune dans la science. Jusqu'à présent on n’a point déterminé d’une manière précise et définitive les diverses espèces du genre des Ours ; et l'on comprend facilement que la solution du problème anatomique que j'indique ne pourra être obtenue que lorsque le problème z0olo- gique aura lui-même été résolu. De plus, je ferai remarquer que les cerveaux d’Ours de la collection du Muséum ne sont point désignés d’une manière précise; qu'un certain nombre d’entre eux sont simplement désignés par le lieu de leur provenance, et que les indications qui pourraient faire reconnaitre l'espèce , le sexe, l’âge, sont très incomplètes : de telle sorte qu'il ne m'est guère possible de faire usage de ces matériaux pour la thèse que je défends ici. Il y a toutefois un fait que je dois signaler, bien qu'il soit con- traire à mes doctrines. Comme l’a indiqué M. Gratiolet, le cer- veau de l’'Ours euryspyle , l’une des plus petites espèces du genre, est plus riche en circonvolutions que celui de l’Ours blane, l’une des plus grandes. Le fait est exact, je me plais à le reconnaître ; c’est d’ailleurs la seule exception que je connaisse à la règle géné- rale. Ne peut-on pas toutefois se demander si cette exception ne tiendrait pas à une différence d'âge? Les Ours dont les cerveaux sont dans la collection du Muséum ont vécu à la Ménagerie. Les Ours blancs qui sont morts à la Ménagerie n’étaient-ils point de jeunes individus chez lesquels les circonvolutions n'avaient point acquis leur complet développement? Je me contente de poser cette question, à laquelle il ne m'est pas possible de répondre. Mais si l'on se reporte à ce que j'ai dit précédemment sur les variations que l’âge peut introduire dans les divers degrés du développement %° série, ZooL. T. I. (Cahier n° 2.) ? 6 89 C. DARESTE. — MÉMOIRE .) des circonvolutions , et aux exemples que j'ai indiqués dans le genre des Cerfs, on verra que celle remarque n’est peut-être pas inutile. Dans la tribu des Mustéliens, je n'ai point de fait nouveau à ajouter à ceux que j'ai fait connaître dans mon premier Mémoire. J'ai observé dans la tribu des Viverriens les cerveaux des espèces suivantes : le Suricate (Suricata capensis) ; l'Ichneumon de Pharaon ({chn. Pharaonis); le Nems (Ichneumon cafer); le Paradoxure (Paradoæurus typus); la Civette (Viveira Civetta) et le Zibeth (W. Zibetha). Toutes ces espèces ont à peu près le même cerveau , à l'exception toutefois des deux dernières, qui, ainsi que je l'ai fait remarquer pour la Civette, dans mon premier Mémoire , ont une taille plus considérable et un cerveau un peu plus compliqué. Dans la tribu des Caniens, la règle trouve également son appli- cation dans les espèces sauvages. Les circonvolutions sont plus développées dans le Loup que dans le Chacal et le Renard , et dans ces deux espèces que dans l'Isatis et le Fennec, dont le cerveau vient d'être placé tout récemment dans la collection du Muséum. Je laisse ici de côté tout ce qui se rattache aux variétés du Chien domes- tique. J'ai quelques motifs de croire que l'influence de la domesticité a modifié, relativement à ees animaux, l'application de la règle gé- nérale. Malheureusement, l'insuffisance des matériaux m'empêche pour le moment de suivre cette étude aussi complétement qu'elle le mérite : je compte m'en occuper sitôt que j'aurai pu recueillir un nombre suffisant de faits authentiques et bien observés (4). Dans la tribu des Féliens, en outre des cerveaux de l'Hyène rayée et de l'Hyène tachetée, j'ai étudié les cerveaux d'un grand nombre d'espèces du genre Chat. Ce sont : le Lion , le Tigre , le Jaguar, la Panthère, le Cougouar, le Guépard, le Lynx, l'Ocelot, le Caracal, le Chaus, le Serval, le Chat ordinaire et le Chat de Sumatra. La règle me paraît parfaitement applicable à toutes ces espèces. (1) Cette remarque sur l'influence de la domesticité, influence que j'ai déjà indiquée dans un appendice de mon premier Mémoire, est également applicable aux autres Mammifères domestiques; aussi les ai-je laissés en dehors des obser- vations qui font le sujet de ce travail, SUR LES CIRCONVOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFÈRES. 33 Je dois entrer ici dans quelques détails ; car , dans les objections qu'il m'a faites, M. Gratiolet a cité le cerveau de l’Ocelot comme ayant des circonvolutions plus développées que celles du Cougouar et du Guépard. Cette objection m'imposait le devoir de comparer ces cer- veaux avec le plus grand soin. Leur étude très aftentive m'a conduit à des conclusions toutes contraires à celles de M. Gra- tiolet. Si nous examinons comparativement le cerveau du Cougouar et celui de l'Ocelot, nous trouvons les résultats suivants : La cireonvo- lution supérieure, celle qui longe la grande scissure supérieure du cerveau, est beaucoup plus compliquée dans le Cougouar que dans l'Ocelot, et elle présente, à sa partie postérieure, un sillon assez profond qui la partage d’arrière en avant. Rien de pareil ne se voit dans le cerveau de l'Ocelot où cette même circonvolution ne pré- sente que quelques dépressions de peu d'importance. La deuxième circonvolution, celle qui borde extérieurement la première, est à peu près lisse dans l'Ocelot, tandis que dans le Cougouar, elle présente sur son bord externe des replis assez nombreux. Enfin elle présente , dans le Cougouar, un repli qui forme un passage à l’une des circonvolutions latérales qui se dirigent perpendiculairement sur les premières, tandis qu'elle est parfaitement libre dans l'Ocelot. Quant aux autres cireonvolutions, elles présentent à peu près la même disposition et le même degré de développement sur le cer- veau du Cougouar et sur celui de l'Ocelot, et il n'y a rien en elles qui indique une supériorité quelconque en faveur du cerveau de l'Ocelot. Le cerveau du Guépard ressemble beaucoup à celui du Cou- gouar ; il en diffère seulement en ce que les dépressions qui exis- tent sur les circonvolutions sont un peu moins marquées, ainsi que lé sillon qui existe d’arrière en avant sur la circonvolution supé- rieure ; mais il possède encore un pli de passage, tandis que le cer- veau de l'Ocelot n’en présente point. Dans les observations qu'il m'adresse, M. Gratiolet paraît atta- cher une grande importance à la profondeur relative des sillons qui 8 €. DARESTE, — MÉMOIRE séparent les circonvolutions ; je me suis expliqué sur ce sujet au commencement de ce Mémoire, et je n'y reviendrai point ici. Ainsi done, à l'exception du genre des Ours, tous les cerveaux que j'ai étudiés dans la famille des Viverridés nous présentent dans leur disposition une confirmation très manifeste de la règle. J'ai étudié également celui du Kinkajou et celui du Phoque (Phoca vitu- lina ); mais ces cerveaux appartenant le premier à une famille composée d’une seule espèce, le second à une famille plus nom- breuse, mais dont les cerveaux sont encore assez rares dans les collections, avaient un moins grand intérêt pour moi , puisqu'ils ne pouvaient se prêter que plus difficilement à des études compara- tives. Toutefois, si nous comparons le cerveau de ces animaux à celui des Viverridés, nous verrons que ces cerveaux ont un degré de développement assez semblable à celui des animaux de même taille; que les circonvolutions sont très simples dans le Kinka- jou; qu'elles ont, au contraire, dans le Phoque, un haut degré de développement. Je n'ai rien à ajouter à ce que j'ai dit dans mon premier Mémoire au sujet des Insectivores et des Rongeurs ; ces animaux, étant de petite taille, ont le cerveau lisse, et les espèces que j'ai étudiées de- puis la rédaction de mon premier Mémoire ne m'ont présenté aucune exceplion à la règle. Je dois toutefois rappeler iei le fait si curieux de l’existence des circonvolutions dans le cerveau du Cabiai, le plus grand de tous les Rongeurs, fait qui nous présente l'une des preuves les plus remarquables des idées que je cherche à introduire dans la science (4). (1) Espèces de l’ordre des Insectivores dont j'ai pu observer le cerveau : le Desman, la Musaraigne, la Taupe, le RU le Macroscélide. Le cerveau du Tanrec a été décrit par Leuret. Espèces de l'ordre des Rongeurs : Écureuil ordinaire, Écureuil palmiste, Po- latouche, Rat, Souris, Loir, Lérot, Muscardin , Campagnol , Gerboa , Surmulot, Rat d'eau, Rat-Taupe, Marmotte, Castor, Porc-Épic, Coendou, Capromys, Lièvre, Lapin, Cobaye, Agouti, Paca. Le cerveau du Cabiai a été décrit par M. Duvernoy ; les cerveaux de l'Hydromys, de l'Échimys, du Souslic, de l'Orye- tère, de l’Alagtaga, de l'Otomys, du Chinchilla, de l'Ondatra et de l'Hélamys, ont été décrits par Leuret, SUR LES CIRCONVOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFÈRES, 59 Dans l'ordre des Pachydermes , j'ai pu étudier les cerveaux des Damans du Cap et de Syrie, du Sanglier, du Pécari ordinaire et du Pécari à collier, du Tapir d'Amérique, de la plupart des espèces du genre Cheval et de l'Hippopotame. Je connaissais d’ailleurs le cer- veau de l'Éléphant par la description qu'en à donnée Leuret. La règle est ici d’une application évidente depuis les Damans, où les circonvolutions sont d’une simplicité extrême, jusqu'à l'Hippopo- tame et à l'Éléphant, dont le cerveau serait même , d'après Leuret, supérieur au cerveau de l'Homme ,-en ce qui concerne le développe- ment des circonvolutions. Ces observations sont d'autant plus re- marquables que cet ordre des Pachydermes est un ordre peu natu- rel, et qui, dans les classifications, doit être divisé en plusieurs familles très distinctes. Je dois ajouter à cette liste un fait qui, bien qu'il n’aitpas, au point de vue de la zoologie, une bien grande importance, acquiert un cer- tain intérêt, par suite des conditions toutes spéciales dans lesquelles ila été observé : il s’agit, en effet, du cerveau d’un animal fossile, le Palæotherium medium. Dans un crâne de cet animal, Cuvier a trouvé une masse de gypse qui, s'étant moulée dans la cavité crà- nienne, peut nous donner une certaine idée du cerveau qui y était contenu. Or ce cerveau ne présente rien qui soit contraire à la règle. Cette observation est trop curieuse pour que je ne doive pas citer ici les paroles mêmes de Cuvier : « J'ai eu jusqu'à l'empreinte du cerveau lui-même, et toute sa forme moulée en plâtre dans le creux du crâne... Ce cerveau est ovale, assez large, un peu aplati ; les circonvolutions sont assez nombreuses. Il tient de celui du Mouton et de celui du Cochon (longueur d’un hémisphère du cerveau, 0",078; sa largeur, 0®,036) (1). » Il ne faut pas oublier que la taille du Palæotherium medium était celle du Cochon. Lors de la rédaction de mon premier Mémoire, je ne connaissais, (4) Cuvier, Recherches sur les ossements fossiles, 4° édition, in-8, t. V, p. 64. Il y a dans le même ouvrage deux autres observations de cerveaux d'animaux fossiles, qui pourraient, au premier abord , paraître contredire la règle ; mais je ne crois pas qu'en tenant compte des conditions dans lesquelles elles ont été 86 C. BARESTÉ, — MÉMOIRE dans l’ordre des Ruminants, qu'un très petit nombre de cerveaux. La collection du Muséum m'a permis d'étendre mes études sur un très grand nombre d'espèces ; et ces études m'ont conduit à des faites, elles puissent devenir pour des anatomistes le point de départ d'objec- tions sérieuses. Tel est d'abord le Palæotherium crassum (ibid., p. 64). Mais cette observation est tout à fait incomplète ; Cuvier dit seulement : « On reconnaît dans cette pièce l'empreinte de la convexité latérale du cerveau et de quelques-unes de ses anfrac- tuosités qui ne paraissent pas avoir été fort multipliées. » La seconde observation est plus explicite; c'est celle du cerveau de l'Anoplo - therium commune, animal de la taille de l'âne. « Un hasard heureux, dit Cuvier, m'a procuré quelque idée de la forme du cerveau dans l'Anoplotherium. La tête dont je viens de parler était tout environnée d'un mélange de glaise et de gypse; et c'est précisément ce qui l'avait rendue si friable, car les os contenus dans la marne se brisent généralement quand on veut les en tirer, sans doute parce que cette terre ne les a pas préservés comme le gypse. Mais dans ce cas-ci sa présence a été heureuse , elle s'est moulée dans la cavité du crâne ; et comme cette cavité elle- même dans l'animal vivant s'était moulée sur le cerveau, la glaise nous représente nécessairement la vraie forme de celui-ci. Il était peu volumineux à proportion, aplati horizontalement ; les hémisphères ne montraient pas de circonvolutions, mais on voyait seulement un enfoncement longitudinal sur chacun. Toutes les lois de l’analogie nous autorisent à conclure que notre animal était dépourvu d'in- telligence. » (Jbid., p. 76.) Si nous avions ici la représentation exacte du cerveau de l'Anoplotherium, ce cerveau présenterait une exception flagrante non seulement à la règle que je cherche à établir, mais même aux idées les plus généralement admises par les zootomistes sur la constitution du cerveau. En effet, dans une famille naturelle la disposition générale du cerveau est très sensiblement la même pour toutes les espèces ; et l'ordre des Pachydermes ne nous présente aucun cerveau qui puisse être comparé à celui de l’Anoplotherium. Mais je ferai remarquer qu'en exami- nant avec soin la figure que Cuvier a donnée de cette pièce, on y voit non seule- ment l'enfoncement longitudinal indiqué dans le texte, mais aussi un certain nombre d'éminences et de sillons , il est vrai, très peu marqués. Il semble que l'on ait sous les yeux l'image d'un cerveau encore revêtu de ses membranes: con- dition qui rend, comme le savent tous les anatomistes, les circonvolutions beau- coup moins apparentes ; s’il en était ainsi, le cerveau de l'Anoplotherium pourrait rentrer dans la règle. Mais quelle que soit la valeur de cette interprétation, il ne faut point oublier qu'il ne s’agit ici que d'un moulage, et que rien ne prouve que l'empreinte soit fidèle et qu’elle reproduise exactement le cerveau de l'animal. L'empreinte du à « SUR LES CIRCONVOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFERES. 87 résultats parfaitement semblables à ceux que j'avais observés dans les autres classes. Ainsi, eomme on pouvait le prévoir, les circonvolutions sont très développées dans la famille des Camélidés ; les cerveaux des ani- maux de cette famille que j'ai étudiés sont ceux du Chameau, du Dromadaire et du Lama ; elles sont également très développées dans la Girafe. Au contraire, la famille des Tragulidés, dans laquelle les circon- volutions cérébrales m'étaient inconnues, et n'avaient encore été décrites par aucun zootomiste, m'a fourni récemment un des exemples les plus remarquables de la règle queje cherche à établir. On sait que ces animaux sont les plus petits de l’ordre des Rumi- nants : il y avait donc, etje signalais cette lacune dans mon premier mémoire, à savoir si le cerveau de ces animaux présenterail des cir- convolutions nombreuses comme celui des autres Ruminants ; ou si, par l’absence ou le peu de développement des circonvolutions, il se rapprocherait de celui des Mammifères dont la taille est petite. Cette dernière prévision s’est réalisée à ma grande satis- faction. Comme ce cerveau est, du moins au point de vue de mes re- cherches, l’un des plus curieux que me présente la classe des Mam- mifères, je crois devoir donner sa description avec quelques détails. Hne faut point oublier que l'intérêt de cette description tient en grande partie à la taille même de cet animal, qui ne dépasse pas celle d’an Lièvre. L'encéphale du Chevrotain a, dans sa longueur, 0",049 ; la lon- gueur des hémisphères est de 0",03 ; leur épaisseur, de 0",03. Ce cerveau est, au premier aspect, très notablement différent de celui des autres Ruminants, Il ne nous présente pas de circonvolu- cerveau de Palæotherium est formée de gypse pur, celle du cerveau d'Anoplo- therium est formée de marne. Cette dernière circonstance n'est-elle pas pour quelque chose dans la différence de netteté des résultats? Cuvier lui-même ne paraissait pas attacher une bien grande importance à cette observation , puisqu'il dit seulement que cette pièce lui a donné quelque idée du cerveau de l'Anoplotherium. 58 €. DARESTE, — MÉMOIRE lions véritables; mais seulement quelques sillons peu nombreux, très peu profonds, et qui n'offrent ni replis ni ondulations. Voici la disposition de ces sillons : On voit, d’arrière en avant, le long de la scissure antéro-posté- rieure, deux sillons qui occupent un peu plus du tiers de la lon- gueur totale des hémisphères ; ces deux sillons cireonserivent des espaces que l’on pourrait, à quelques égards, comparer à des cir- convolutions ; espaces très étroits, et dont l'épaisseur n'est que de 0®,002 à 0",003. En dehors, on trouve deux autres sillons à une assez grande distance des premiers. Entre ces deux sillons et les deux premiers se trouve circonscrite une bande de matière cérébrale qui est fort large en arrière (0",012), et beaucoup plus étroite en avant (0",005). Ces deux bandes sont séparées l’une de l’autre, à la région postérieure des hémisphères , par les deux bandes que j'ai précé- demment décrites. A la région antérieure, elles se réunissent et s’accolent l’une à l’autre, de manière à former les deux bords de la grande scissure antéro-postérieure; ces bandes présentent deux dépressions à leur partie postérieure. Enfin on trouve sur les parties latérales des hémisphères deux autres bandes de matière cérébrale, séparées des deux précédentes, par le sillon que je viens de décrire, dans toute leur partie moyenne, et qui se confondent au contraire avec elles par leurs extrémités antérieure et postérieure. Ces bandes ont une épaisseur qui est à peu près la même partout (0°,005) ; elles présentent à leur milieu un sillon vertical, qui est comme une ébauche dela scissure de Sylvius. Le cervelet ne présente que onze lamelles au lobe médian etneuf lamelles aux lobes externes. Ces lamelles sont elles-mêmes très simples, et ne présentent point les nombreux replis que l’on observe sur le cervelet des autres Ruminants. Comme on le voit, l’encéphale de cet animal est parfaitement con- forme à ce qu'indique la règle ; puisque sa surface est à peine sillon- née, etne présente rien de comparable aux anfractuosités si nom- breuses et si ondulées que nous offrent les cerveaux des autres Ruminants. SUR LES CIRCONVOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFÈRES. 89 La dernière famille, celle des Antilopidés, m'a présenté un très grand nombre de cerveaux appartenant à des espèces très di- verses, et particulièrement aux Cerfs et aux Antilopes. Iei les résul- tats que j'ai obtenusne sont point d’une parfaite netteté, par suite de deux circonstances sur lesquelles je me suis expliqué déjà, mais que je dois rappeler ici. Ainsi la domeslicité pouvant exercer une in- fluence sur le développement des circonvolutions, je n’ai pas attaché une grande importance aux cerveaux de Bœufs, de Moutons et de Chèvres , que j'ai trouvés dans la collection : ces cerveaux ne sont pas d’ailleurs assez nombreux pour que j'aie pu chercher à détermi- ner la loi de cette variation. D'un autre côté, les différentes condi- tions d'âge etde sexe peuvent faire varier considérablement l’état de développement des circonvolutions dans une même espèce, surtout lorsque cette espèce est de grande taille, et que les circonvolutions atteignent à l’âge adulte un haut degré de développement. Aussi, pour bien faire ce travail, serait-il nécessaire de ne considérer que le cerveau des mâles adultes ; mais c’est là une condition que je n’ai pu remplir : ear les indications qui accompagnent ces cerveaux sont très incomplètes, et je n’ai pu recueillir, à leur égard, que des documents insuffisants. Toutefois, en tenant compte de ces difficul- tés inhérentes aux conditions dans lesquelles je me suis trouvé pour cette étude, il m'a semblé qu'on ne pouvait méconnaître l'application de la règle générale, simon comme complétement démontrée ,au moins cornme extrèmement probable. Ainsi dans le genre Cervus de Linné ou, comme on l'appelle aujourd’hui, dans la tribu des Cer- viens, le développement des circonvolutions marche parallèlement à la taille du Muntjac et du Cerfrouge, au Chevreuil, au Cerf-Cochon, à l’Axis, au Daim, au Cerf de Virginie, au Cerf de Malabar, au Cerf ordinaire, au Renne, au Cerf du Canada et à l'Élan. De même, dans l’ancien genre des Antilopes de Linné, on observe également une série ascendante depuis les plus petites espèces , celles dont les cir- convolutions cérébrales sont les plus simples, jusqu'aux espèces les plus grandes, chez lesquelles les circonvolutions ont atteint leur plus complet développement. Ainsi les circonvolutions sont plus simples chez la Gazelle, le Kevel, la Corinne, le Chamoïis, l'Anti- 90 €. DARESTE, — MÉMOIRE lope des Indes (4. cervicapra); un peu plus compliquées chez le Nanguer, le Guib et l'Addax ; plus compliquées encore chez le Nylgau ; enfin, c'est dans le Canna que leur développement est le plus complet (1). Je laisse de côté dans cette étude les genres Bœuf, Mouton et Chèvre : les cerveaux de ces animaux que j'ai observés ne contre- disent pas la tendance générale ; mais il y a là, comme je l'ai déjà indiqué, des conditions nouvelles qui pourraient modifier l'appli- cation de la règle. Cette question formera peut-être le sujet d’un nouveau mémoire, si je puis réunir un nombre suffisant de maté- riaux, L'ancien ordre des Édentés de Cuvier pourrait, au premier abord, paraître contredire la règle. Ici , en effet, rien n’est plus variable que la configuration du cerveau. Il est lisse chez les Paresseux (Bradypus tridactylus), les Tatous cachicame (Dasypus novem- cinclus) et encoubert (Dasypus seæcinctus), lOrnithorhynque. Les circonvolutions existent, au contraire, dans les Pangolins (Manis pentadactyla et Manis Temnincki), ainsi que dans l'Échidné. Le petit Fourmilier (genre Dionyæ de M. Is. Geoffroy Saint-Hilaire ou Cyclothura de M. Gray) a le cerveau lisse d'après Tiedemann ; les circonvolulions existent, d'après Leuret, dans le cerveau de l'Orye- térope. Mais il ne faut point oublier que cet ordre de Cuvier est fort peu naturel; et que maintenant, dans les classifications les plus or- dinairement adoptées, onena séparé, d’une part, les Bradypes, pour former l’ordre des Tardigrades ; de l’autre, l'Échidné et l'Ornitho- rhynque, pourformer l'ordre des Monotrèmes, qui, par les conditions toutes spécialesde leur organisation, se distinguent si nettement non seulement des Édentés, mais même de tous les autres Mammifères. Il ne reste donc dans l'ordre des vrais Édentés que les Tatous, les Pangolins , les Fourmiliers et l'Oryctérope. Or ces animaux eux- mêmes sont très différents les uns des autres, et doivent former dans la classification des familles bien distinetes. I en est de même (1) I existe encore dans la collection du Muséum un cerveau de Tchicara et un cerveau de Bubale; mais ils sont trop mal conservés pour que j'aie pu les étudier. SUR LES CIRVONVOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFÈRES, 94 dans les Monotrèmes pour l'Échidné et l’Ornithorhynque. Nous ne devons done pas nous étonner si ces animaux ne peuvent être com- parés entre eux sous le rapport de leur cerveau. Je ferai d’ailleurs remarquer que le petit Fourmilier et l'Oryetérope, qui, bien qu'assez différents lun de l’autre, ont cependant assez de traits communs pour avoir été classés dans une même famille, celle des Myrméco- phagidés de M. Is. Geoffroy, nous présentent une remarquable application de la règle, puisque le Dionyx, dont la taille est très petite, n’a point de circonvolutions , tandis qu'elles existent chez l’Oryetérope, dont la taille est beaucoup plus grande. Jindiquais dans mon premier mémoire , comme très curieuse à étudier , la série des Marsupiaux , dans laquelle je ne connaissais alors que les cerveaux de trois espèces : la Marmose, le Kangourou géant et le Wombat. J'ai pu ajouter à ces faits ceux que m'ont pré- sentés la Sarigue ordinaire (Didelphis virginiana) , le Dasyure de Maugé, le Phalanger ursin, le Potorou, le Kangourou élégant. Le cerveau du Dasyure ursin a été décrit par M. Owen (Philos. trans., 1837, pl. V, p. 87) Cette liste est encore peu nombreuse. Si d'ailleurs on se souvient que celte série de Marsupiaux est formée d'un certain nombre de petites familles, on verra que les résultats de leur étude ne peuvent pas être encore très rigoureux. Toutefois nous avons {rois espèces appartenant à une famille assez naturelle : le Potorou , le Kangourou élégant et le Kangourou géant. Ces trois espèces, très distinctes par la taille, sont également distinetes par la disposition du cerveau, lisse chez le premier, peu sillonné chez le se- cond, et présentant des circonvolutions chezle troisième. Le Wom- bat, qui forme à lui seul une famille particulière, et qui est un des plus grands de la série des Marsupiaux, a des circonvolutions. Tous les autres, dont la taille est petite, ont, au contraire, le cerveau lisse. Ces faits sont d’ailleurs fort remarquables ä un autre point de vue. Les naturalistes modernes, et particulièrement M. Is. Geoffroy Saint-Hilaire, ont fait ressortir , en diverses circonstances , les analogies que peuvent présenter des animaux appartenant à des divisions différentes. Or on sait que les Mammifères ordinaires et 92 C. DARESTE, — MÉMOIRE les Marsupiaux nous offrent un des exemples les plus remarquables de ces suites de termes correspondants, qui forment, suivant l'expression de M. Is. Geoffroy, des séries parallèles. Il est très curieux que , si l’on compare le cerveau des Marsupiaux à celui des ordres correspondants de la série des Mammifères ordinaires, nous retrouvons encore l'application de la règle. Les Dasyures, les Sa- rigues, les Phalangers, tous animaux de petite taille et comparables aux Insectivores,ont le cerveau lisse. Les Kangourous etle Wombat sont, au contraire, comparables aux Rongeurs ; or le Wombat et le Kangourou géant ont une taille bien supérieure à la taille moyenne des Rongeurs ; nous venons précisément de voir que ces deux ani- maux ont des circonvolutions. Jen’ai rien à ajouter à mon premier mémoire en ce qui concerne l'ordre des Cétacés, les cerveaux de ces animaux étant encore fort rares dans les collections (2). Après avoir ainsi achevé cette revue de la classe des Mammifères, je dois faire ressortir les conséquences générales qui en découlent. Toute loi en physique ou en histoire naturelle repose sur l’induc- tion. Il est évident que, pour que l'induction soit légitime, elle doit reposer sur un très grand nombre de faits ; et que, plus les faits seront nombreux, plus seront inattaquables les règles générales qui résulteront de leur étude. Dans mon premier Mémoire , je ne eonnaissais guére que soixante-dix espèces , tandis que pour la rédaction du Mémoire actuel, j'ai réuni des observations appartenant à près de deux cents espèces. D'ailleurs, il y avait beaucoup de familles que je ne con- naissais point; d’autres, dans lesquelles je ne connaissais qu'un très petit nombre de cerveaux. C’est pourquoi je ne me prononçais qu'avec doute, et en sollicitant de nouvelles recherches. Maintenant que j'ai plus que doublé le nombre de mes observations , que j'ai pu les étendre à un nombre plus considérable de familles, et que les résultats de mon travail sont venus sur tous les points confirmer la (1) Je vois dans le Lehrbuch von vergleichenden Anatomic, de M. Stannius, que le cerveau de l'Hyperoodon a été décrit par M. Eschchricht ; mais je n’ai pu, jus- qu'à présent, trouver le Mémoire qui contient cette description. SUR LES CIRCONVOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFÈRES. 93 règle, il y a là une présomption assez grande en faveur de la réalité des faits que j'annoncais il y a un an. Mais cette présomption deviendra beaucoup plus forte, et la probabilité se rapprochera beaucoup plus encore de la certi- tude, si nous examinons de plus près la nature des résultats obtenus. Les cerveaux que j'ai étudiés cette année dans la collection du Muséum sont très inégalement répartis dans la classe des Mammi- fères. Certaines familles ne m'ont présenté que très peu d’es- pèces, tandis que d’autres familles m'en ont présenté un nombre considérable : tels sont les Primates, les Viverridés et les Rumi- nants. Cette inégalité m'a été profitable. En effet, si l'ignorance où nous sommes encore de l’état du cerveau dans un certain nombre de types importants de la classe des Mammifères pouvait retarder l'admission de la règle en tant qu’elle serait applicable à la classe entière , cette objection ne serait valable pour aucune de ces trois familles. Là, en effet, l’organisation du cerveau nous est connue dans tous les types génériques de quelque importance . J'ai voulu d’ailleurs évaluer d’une manière plus précise l’exacti- tude des résultats que j'ai obtenus. Pour cela, j'ai cherché à établir le rapport qui existe entre le nombre des observations que j'ai faites et le nombre de celles qui resteraient à faire, pour que, dans lune de ces divisions de la classe des Mammifères , toutes les espèces fussent observées. Un pareil calcul ne peut être fait que d’une ma- nière approximative ; car il y a encore, même dans la classe des Mammifères, un assez grand nombre d'espèces qui nous sont in- connues. Mais, en tenant compte de cette particularité , voici quels sont les résultats qui ressortent de ce calcul. Je me suis servi, pour cette évaluation, du Catalogue des Pri- mates du Muséum d'histoire naturelle, publié, au commencement de l’année dernière, par M. Is. Geoffroy. A cette époque, la collection du Muséum, qui est probablement la plus riche de toutes, contenait cent quatre-vingt-sept espèces , réparties en quatre familles, neuf tribus et quatre-vingt-huit genres. 9l €. DARESTE, — MÉMOIRE En ajoutant à ces chiffres deux espèces formant chacune le type d'un genre particulier, le Gorille et le Pérodictique , espèces qui n'appartenaient point alors à la collection du Muséum, on ob- tient un total de cent quatre -vingt-neuf espèces et quarante genres (1). Ce chiffre de 489 espèces n’est d’ailleurs qu'approximatif, puis- qu'il n’exprime que le nombre des espèces conservées au Muséum, et non le nombre total des espèces de Primates. Il est clair qu'il ne nous est point possible de donner ce nombre d’une manière pré- eise ; mais on peut, jusqu'à un certain point, le considérer comme égal aux 19/20% du nombre total, ce qui porterait ce nombre Lotal, d'une manière approximative , à 200. En divisant 200 par 46, nombre des espèces de Primates dont j'ai étudié le cerveau , on obtient pour quotient le nombre 4 #; ce qui veut dire, en d’autres termes , que je connais la disposition du cerveau pour plus d’un quart des espèces , où que sur quatre Primates il en est au moins un dont les circonvolutions cérébrales ont fait le sujet de mes études. I ya, dans ces chiffres, une base évidemment très suffisante pour une induction légitime; mais nous pouvons, en examinant de plus près la nature des observations que j'ai faites, arriver à des résultats encore beaucoup plus précis. En effet, si les 46 espèces que j'ai étudiées n'étaient point également réparties dans l'ordre des Primates, s'il y avait dans cet ordre des types nombreux et im- portants qui fussent restés en dehors de mes études, le résultat géné - ral pourrait laisser des doutes dans l'esprit des zootomistes. Or ces 16 espèces appartiennent à 8 familles, 7 tribus et 26 genres. Nous avons donc des observations faites, dans à familles sur 4,7 tribus sur 9 , 26 genres sur 40, Maintenant, si nous examinons la répar- tition des genres observés, nous verrons que nous connaissons 2 genres sur 4 dans la tribu des Simiens , 7 sur 44 dans la tribu des (1) Ce chifire ne peut être d'ailleurs considéré que comme une approxima- tion ; car on sait que la détermination précise des espèces est l'un des plus dif- ficiles problèmes de la zoologie, et qu'il est souvent impossible, dans la pratique, d'établir nettement les différences qui séparent l'espèce de la variété. SUR LES CIRCONVOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFÈRES, 95 Cynopithéciens, 8 sur 40 dans la tribu des Cébiens, 2 sur 2 dans la tribu des Hapaliens, 3 sur 7 dans la tribu des Lémuriens , 2 sur 2 dans la tribu des Galagiens , 2 sur À dans la famille des Tarsidés. Ainsi done , à l'exception de la tribu des Indrisiens et de la famille des Chéiromydés , divisions qui ne comprennent actuellement que l espèces, etdont la seconde se distingue de tous lesautres Primates par son organisation exceptionnelle, nous connaissons la disposition générale du cerveau dans tous les types génériques un peu impor- tants de l'ordre des Primates. Cette conclusion serait encore beau- coup plus nette si , au lieu de considérer l’ordre entier, nous nous étions borné à la famille des Singes. La conséquence qui me parait ressortir le plus naturellement et le plus légitimement de toute cette discussion , c’est que la loi qui forme le sujet de ce Mémoire doit être considérée comme démontrée à l'égard du premier ordre de la classe, l'ordre des Primates. S'il en était autrement, il faudrait renoncer à toutes les applications de l'induction, et, par suite, à l'établissement des lois générales, non seulement dans les sciences naturelles, mais dans toutes les sciences d'observation. Quand on a constaté l'existence d’une loi pour un certain ordre de faits, on peut et l’on doit se demander si l'extension de la loi à d’autres ordres de faits analogues n’est point quelque chose d’ex- trèmement probable. C'est à une notion capitale dans l'emploi de l'induction, et l’une des méthodes les plus fécondes que nous pos- sédions pour arriver à des découvertes. En histoire naturelle parti- culièrement , cette méthode prend une importance nouvelle par suile des idées qui tendent à se répandre de plus en plus (4) sur le parallélisme des séries , et sur l'existence , dans chaque série, de termes correspondants caractérisés par des modifications or- ganiques analogues. Or ces analogies qui existent entre les termes correspondants des deux séries seront d'autant plus multipliées que ces deux séries elles-mêmes seront plus voisines de leur (1) Ces idées ne sont pas d’ailleurs bornées à l'histoire naturelle; elles sont également applicables à la chimie, et en particulier à la chimie organique : ce que prouvent les travaux les plus récents dont s'est enrichie cette science. 96 C. DARESTE. — MÉMOIRE organisation, comme cela arrive pour deux familles ou deux ordres d’une même elasse. IL estdone à priori très probable qu'une loi générale, démontrée pour une famille ou pour un ordre de la classe des Mammifères, devra être également applicable aux autres familles ou aux autres ordres ; etnous pourrions le supposer déjà en l'absence même de toute obser- vation. Mais telle n’est point la question. La famille des Viverridés , l’ordre des Ruminants, nous fournissent un nombre assez considé- rable d'observations , qui toutes ou presque toutes confirment la règle. Quant aux autres familles, si le nombre des observations est encore assez restreint, cependant toutes celles que nous possédons confirment la règle au lieu de la contredire. Ainsi done, les faits observés et toutes les données de l'induction doivent nous faire admettre comme tres probable l'application de la règle à toute la classe des Mammifères. Et ici je dois encore faire remarquer que quand bien même il y aurait quelques exceptions à la règle , quand bien même des faits déjà connus ou des faits à connaître ne se soumettraient pas aussi facilement à la loi, ce ne serait pas cependant un motif suffisant pour la méconnaitre. Je dois insister sur ce point, parce que les résultats que j'avais déjà indiqués dans mon premier Mémoire ont été contredits par un habile physiologiste, M. Gratiolet. J'ai déjà répondu à ses observa- tions, et j'ose espérer que les personnes qui auront pris la peine de lire l'attaque et la défense reconnaîtront que notre débat provient, en grande partie, d’un malentendu, et de l’idée très inexacte que M. Gratiolet s'était faite de mon premier travail. Pour faire cesser toute incertitude à cet égard, et pour ne pas prolonger une discus- sion où l’on m'attribuait des idées assez différentes de celles que je soutenais, j'ai pris le parti, dès l’année dernière, de publier mon Mémoire sans attendre le jugement de l'Académie. En fait, les opinions de M. Gratiolet et les miennes ne diffèrent que très peu. De son aveu, la règle que j'ai établie est d’une appli - cation habituelle ; elle est vraie généralement dans les détails des genres, mais elle peut subir des exceptions frappantes. Tout notre SUR LES CIRCONVOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFÈRES. 97 débat porte uniquement sur ce point : La règle est-elle ou n'est-elle pas sans exception ? Les exceptions mentionnées par M. Gratiolet portent uniquement sur les Ours et sur les Chats. Jai cherché à démontrer, dans le cours de ce Mémoire, que l'objection tirée de la comparaison des cerveaux du Guépard et de l'Ocelot n’est point fondée : du moins, en comparant très attentivement ces cerveaux l’un à l'autre , ilne n'a pas été possible de reconnaitre la justesse des observations qui n'étaient faites. Quant aux Ours , j'ai reconnu dans mon Mémoire qu'effectivement la loi ne se vérifie pas d’une manière satisfaisante à leur égard. J'ai montré d’ailleurs, au commencement de ce tra- vail, que les circonvolutions, comme, du reste, tous les autres or- ganes , sont soumises dans leur développement à des causes de va- riations nombreuses; que ces variations individuelles peuvent tenir en partie à des causes appréciables, comme l’âge et le sexe; el que ces exceptions, que je suis loin du reste de méconnaitre, auraient besoin de s'appuyer sur des observations faites chez des individus complétement développés et parvenus à l’âge adulte. Je me suis suffisamment expliqué sur ce sujet au début de ce travail. Mais il ne faut point se méprendre sur la nature de ces excep- tions ; car les objections auxquelles elles donnent lieu ne peuvent, en aucune façon, empêcher de reconnaitre le caractère de généra- lité de la loi. Si l'on se rappelle tous les faits sur lesquels la loi est établie, on verra que, dans la classe des Mammifères , toutes les espèces à cerveau lisse ont une petite taille ; que toutes les espèces à circonvolulions nombreuses et compliquées sont, au contraire, de grande taille. Ce fait est très général ; du moins, dans toutes les espèces que j'ai eu occasion d'étudier, je n’y connais point d’ex- ceplion. Les seules difficultés qui se présentent ne se retrouvent que chez des espèces très voisines et peu différentes par la taille, et portent uniquement sur quelques inégalités dans la complication plus ou moins grande des circonvolutions. Elles ne peuvent done être un motif suffisant pour méconnaitre la règle, du moins dans ce qu’elle a de plus général. 4° série. Zooc. T, I, ( Cahier n° 2. ) 5 7 98 ©. DARESTÉ. — MÉMOIRE Mais, quand bien même de nouveaux faits viendratient à augmen- ter le nombre de ces exceptions , il me paraîtrait peu conforme aux méthodes des sciences naturelles d'y voir un motif pour mé- connaitre l’existence de la loi générale. Dans les sciences physiques, la détermination des lois se pré- sente dans des conditions extrêmement favorables , celles de l’ex- périmentation. La méthode expérimentale permet de dégager plus ou moins complétement le phénomène principal que l’on étudie de tous les phénomènes accessoires qui peuvent le compliquer. fl en résulte qu'en éliminant successivement toutes les causes d’er- reur, nous pouvons donner à l'observation le plus haut degré de précision dont elle est susceptible ; et que, sinous ne pouvons pas toujours atteindre le but, nous pouvons cependant nous en rappro- cher sans cesse de plus en plus. En histoire naturelle, il n’en est point ainsi ; car, le plus sou- vent, nous ne pouvons employer la méthode expérimentale, et nous sommes réduits à l’observation pure et simple. L'observation est d’ailleurs beaucoup plus difficile en histoire naturelle qu'en phy- sique ; car, par suite de la grande complication des êtres organi- sés, nous n'avons jamais devant les yeux des faits simples et net- tementdéfinis. Ainsi, dans de pareilles conditions, nous ne pouvons obtenir des résultats d’une parfaite exactitude : tout ce que nous pouvons espérer, c’est de constater par de nombreuses observa- tions l'existence de faits généraux qui seront comme l'expression commune d’un grand nombre de faits de détails. Les lois, en his- toire naturelle, ne peuvent done avoir la valeur absolue qu’elles ont en physique et en mécanique ; leur véritable nature est heureuse- ment exprimée par le terme de tendances , sous lequel elles sont désignées par M. Milne Edwards. Maintenant, devons-nous méconnaitre l'existence d’une fendance ou d’une loi, parce que, de quelque manière qu’on la désigne , elle ne s’appliquerait qu'à la pluralité et non à la totalité des faits obser- vés ? Il en pourrait être ainsi , si les êtres ou les phénomènes que nous observons étaient parfaitement simples , et s'ils n'étaient sou- mis qu'à desactions également très simples. En physique même, où SUR LES CIRCONYOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFÈRES. 99 nous pouvons expérimenter, et, par suite, observer les faits dans des conditions aussi simples que possible, il existe aussi des exceptions ; mais ces exceptions, qui tiennent à l'influence partielle de causes secondaires, ne prouvent rien en réalité contre la règle générale, quelle que soit d’ailleurs la nature de ces causes secon- daires, et qu'elle ait été ou non appréciée par les physiciens. Ainsi done, je me crois plus que jamais en mesure d'établir, comme une loi ou comme une tendance générale, cette règle : que, dans tous les groupes naturels de la classe des Mammifères , le dé- veloppement des circonvolutions est en rapport avec le développe- ment de la taille. Si, dans mon premier Mémoire , je m'expri- mais avec quelque hésitation , et si le peu de faits qui étaient alors à ma connaissance ne me permettaient point une parfaite assurance ; aujourd'hui les nouvelles études que je viens de faire m'ont fourni la démonstration la plus complète de la thèse que je voulais soutenir ; tellement que la taille et la famille d’un Mammifère étant connues , nous pouvons infailliblement déterminer le degré de perfectionne- ment de son cerveau. Qu'il me suffise de rappeler ici un fait, l’un des plus curieux que mes études m’aient fait connaitre. Dans mon premier Mémoire, en m'oceupant de l’ordre des Ruminants, j'in- diquai le cerveau du Chevrotain comme étant, à mon point de vue, l’un des cerveaux les plus curieux à étudier. La théorie indiquait qu'il devait présenter fort peu de circonvolutions : le fait s’est trouvé conforme aux prévisions de la théorie. Maintenant, quelle peut être la nature de cette relation que nous avons constatée entre la taille des animaux et le développement de leurs circonvolutions cérébrales? On m'a dit : Ce que vous avez pris pour une relation paraît étre seulement une sorte de coïncidence habi- tuelle qui n’a rien de nécessaire (À). En d’autres termes, devons- nous voir ici seulement un simple effet du hasard, ou bien cette coïncidence est-elle produite par les conditions mêmes du dévelop- pement des Mammifères ? Jai cherché, dans mon premier Mémoire , à rendre compte de (1) Observations de M. Gratiolet publiées dans la Revue xoologique de M. Gué- rin-Méneville (mars 18527. 100 C. DARESTE. — MÉMOIRE cette coïncidence, à montrer qu'elle se lie à d’autres faits du développement du système nerveux ; je n’y reviendrai point ici. Je ne sais jusqu'à quel point les considérations que j'ai présen- tées sur ce sujet pourront être admises par les physiologistes ; mais, quelle que soit leur valeur réelle, et quand bien même elles ne seraient point admissibles , il n’y à point toutefois de motif légitime pour méconnaitre cette coïncidence. Nous avons établi que deux ordres de faits, très dissemblables au premier abord, sont partout et toujours en relation ; tellement que la taille d’un Mammifére étant connue, nous pouvons en conclure nécessaire- nent le degré de développement de son cerveau, et réciproque- ment. S'il en est ainsi, la règle existe; elle doit entrer dans la science quand bien même nous ne pourrions en donner l’explica- tion. De ces deux faits qui s’accompagnent toujours, lequel est cause, lequel est effet ? Ou bien, n’y a-t-il pas R deux effets dissem blables d’une cause unique et encore inappréciée ? Ces questions restent encore presque entièrement à résoudre ; mais quelle que doive être leur solution , rien ne peut nous empêcher de mécon- naître le fait en lui-même. Autrement il faudrait méconnaître la plupart des règles générales qui ont été établies en histoire natu- relle ; car, si l’on y fait attention, on verra que toutes ces règles générales ne sont, en réalité, le plus ordinairement du moins, que des coïncidences dont l'explication nous échappe (E). En terminant ce travail, il me reste à dire quelques mots sur une question qui s’y rattache intimement; celle de Ra relation que l'on a établie entre le développement des circonvolutions et celui de l'intelligence. Pour que cette vieille idée , rajeunie de nos jours par les doctrines phrénologiques , de l'influence du développement des circonvolutions sur le développement de l'intelligence fût exacte , il faudrait évidemment, d'après tout ce qui précède , que les petites espèces fussent peu intelligentes, et que les grandes espèces , au contraire, fussent les mieux douées sous ce rapport. Je doute qu'aucun naturaliste voulüt admettre une pareille asser- (1) Je citerai, par exemple, les observations de M, Is, Geoffroy Saint-Hilaire, sur la taille des animaux. Voyez les Essais de zoologie générale, SUR LES CIRCONVOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFÈRES. 104 tion. Je ne puis ici traiter cette question dans tout son ensemble ; elle exigerait un Mémoire spécial et détaillé. Je me bornerai seule- ment à quelques observations. La famille des Singes nous présente des espèces très petites à cerveau lisse, et des espèces de grande faille à cerveau plissé. Ces petites espèces sont-elles moins intelligentes que les grandes , comme on a paru le croire dansles objections qui m'ont été faites (2). Je me bornerai ici à citer quelques faits qui me paraissent dans cette discussion avoir une importance d'autant plus grande , qu'ils ont été observés par des naturalistes qui ne s'éfaient point préoc- cupés de la question en litige. M. de Humboldt, qui a observé le Saimiris en Amérique, s’ex- prime ainsi : « La sagacité de ce petit Singe est si grande, qu'un de ceux que nous conduisions à San-Toma de la Nueva-Guyana dis- tinguait , parmi les différentes planches annexées au Tableau élé- mentaire de l'Histoire naturelle de M. Cuvier, celle qui présente les formes extérieures des Insectes. Les gravures de cet ouvrage ne sont pas coloriées, et pourtant le Titi avançait rapidement sa petite main dans l'espoir de prendre une Sauterelle , une Guêpe ou une Demoiselle , chaque fois que nous lui présentions la onzième planche. I restait, au contraire , dans la plus grande indifférence lorsqu'on élalait devant ses yeux les gravures qui renferment les têtes des Mammifères ou les squelettes des Oiseaux (Obs. de x0olo- ge, t. I, p. 334). » Les observations de M. Audouin sur les Ouistitis sont également nettes. Voici comment elles sont rapportées dans les Éléments de zoologie de M. Milne Edwards (4° édit., p. 280): « D'après des observations faites par M. Audouin sur ces animaux en captivité, il paraitrait qu'ils ont assez d'intelligence pour profiter des leçons de l’expérience, etun instinet qui leur fait reconnaitre , au premier abord , les Insectes dont ils ont à redouter la piqüre.… M. Audouin remarqua que lun de ces animaux, ayant un jour lancé du jus de raisin dans son œil pendant qu'il mangeait un grain de ce fruit , ne (1) « La prétendue intelligence de certains Mammifères à cerveau lisse est- elle autre chose que de l'instinct? » Observations de M. Gratiolet. 102 €. DARESTE, — MÉMOIRE manqua plus de fermer les veux toutes les fois qu’il lui arriva d’en manger de nouveau. » Je me borne à ces deux citations dues à des observateurs très exacts ; elles me paraissent parfaitement coneluantes. Si cependant il pouvait encore rester des doutes dans l'esprit des naturalistes, j'espère qu'ils se dissiperaient par la connaissance d'un fait très curieux qui m’a été communiqué récemment par notre cé- lèbre physiologiste, M. Claude Bernard. Ce fait est l'existence de circonvolutions cérébrales dans les Poissons du genre Mormyre : elle à été constatée récemment par M. Mareusen, de Saint-Péters- bourg. L'extrème intérêt de ce fait m'engage à transmettre ici quelques passages d’une note manuscrite de M. Marcusen, note dont je dois la communication à M. Claude Bernard (1). « Cette famille a un cerveau plus développé que celui des Pois- sons en général, des Amphibies, des Oiseaux, et même de quelques Mammifères. M. Erdl et M. Rod. Wagner en ont parlé , sans pour- tant en donner la description. L'encéphale de ces Poissons est volu- mineux ; il remplit toute la cavité osseuse , et il a une grande res- semblance avec celui des Rongeurs. Il présente un grand cerveau formé de trois lobes, un lobe antérieur, un lobe médian et un lobe postérieur. Le lobe postérieur présente à la surface des circonvolu- tions très prononcées ; les autres lobes en présentent aussi : seule- ment il faut, pour les voir, enlever une couche superficielle de matière grise. Ces trois lobes couvrent tellement les autres parties de l’encéphale qu'ils la cachent. Pourtant on rencontre des diffé- rences dans les différentes espèces. Dans le Mormyre bané, par exemple, les lobes antérieur et médian ne forment qu’un seul lobe , dans l’épaisseur duquel se trouve un enfoncement profond , indi- quant en quelque sorte la division en deux lobes. En outre, le cer- veau ne couvre pas tout à fait les parties sous-jacentes, et ne va pas (1) J'ai pu, grâce également à la bienveillance de M. Claude Bernard, véri- fier plusieurs des détails qui suivent sur un cerveau de Mormyre oxyrhynque. La note de M. Marcusen est d'ailleurs intéressante à un autre point de vue, en ce qu'elle signale chez les Mormyres l'existence d'un appareil électrique. SUR LES CIRCONVOLUTIONS DU CERVEAU CHEZ LES MAMMIFÈRES. 103 aussi loin en arrière ; tellement que l’on voit sur la ligne médiane les tubercules quadrijumeaux et le cervelet. Les lobes du cerveau sont creux; mais ils ne contiennent point de corps ganglionnaires comme les corps striés, etils ne se trouvent point en communication avec le troisième ventricule. Le cervelet est très grand ; il a un lobe médian, » Je ne crois pas qu'aucun naturaliste puisse prendre l'existence de ces circonvolutions chez les Mormyres pour l'indice d’une supé- riorité intellectuelle. Ici se présente une question fort intéressante d'anatomie patho- logique, mais que l'absence presque complète de matériaux em- pêche d'étudier. L'idiotie est-elle nécessairement liée à un dé- faut de développement dans les circonvolutions , à un état d’imper- fection du cerveau matériellement appréciable? Ou bien ne peut- elle pas coïncider avec un cerveau complétement développé? le n'ai pu malheureusement trouver, sur ce point si important pour la physiologie , l’état du cerveau chez les idiots, que quelques observations rapportées dans l'ouvrage de M. Parchappe ( Traité théorique et pratique de la folie, A8A1). Ces observations , au nombre de six, ne peuvent évidemment pas avoir une bien grande importance dans la question qui nous occupe: il en faudrait un bien plus grand nombre. Toutefois la dernière de ces observations, celle du n° 327, nous montre la nullité de l'intelligence existant avec un cerveau bien développé. Il n’est pas nécessaire d’insister ici sur l'intérêt que présenteraient de pareilles recherches, qui ne peuvent être d’ailleurs multipliées avec fruit que par un médecin attaché à un grand établissement d’aliénés. Les questions que j'ai étudiées dans ce Mémoire me conduisent naturellement à une autre question, la détermination des carac- tères typiques du cerveau dans chaque famille naturelle de la classe des Mammifères. J'ai déjà réuni quelques observations sur ce sujet; mais les résultats que je possède ne sont pas suffisam- ment complets pour pouvoir être actuellement publiés. Ils feront probablement l’objet d’un troisième Mémoire. NOTE SUR DES EXPÉRIENCES RELATIVES AU DÉVELOPPEMENT DES CYSTICERQUES, Extraites d'une Lettre, en date du 19 mars 1854, adressée à M. MILNE EDWARDS, Par M. VAN BENEDEN, .….… Je vous ai fait part, dans ma dernière lettre, de quelques expériences que j'étais en train de faire sur Je développement de certains Cestoïdes (1). Voici le résultat d'une de ces expériences : Le Cochon, qui a pris, à la fin d'octobre dernier, des œufs de Tenia solium rendus par une femme de la ville, a été tué cette semaine, et j'ai trouvé dans ses muscles, surtout dans les muscles intercostaux, un grand nombre de Cysti- cerques complétement développés, c'est-à-dire des Scolex. Il est inutile de vous entretenir encore une fois de l'éclosion des œufs de Tæ- nia crassicollis dans les Souris et les Rats, ces expériences ayant complétement réussi déja à MM. Küchenmeister et Leuckart. En disant, le 13 janvier 1749 : Les Vers vésiculaires ou Cystiques (Cysti- cerques, elc.) sont des Ténioïdes incomplets (2), je ne croyais pas que nous aurions été sitôt en possession de la démonstration complète de ce phénomène. (4) Annales des sciences naturelles, 3° série, t. XX, p. 318. (2) Bull. acad. royale de Belgique , t. XVI, p. 50. NOTE SUR LES MŒURS DU GORILLE ET DU CHIMPANZÉ, Extraites d'une Lettre adressée aux Professeurs-Administrateurs du Muséum, Par M. AUBRY. Les Chimpanzés vivent généralement dans le voisinage des Gorilles, et proba- blement en assez bonne intelligence avec eux, car aucun habitant du pays ne peut citer un combat entre ces animaux ; cependant ils ne se mêlent pas entre eux. Les premiers habitent les arbres, sur une plate-forme de branches entrelacées en manière de nid recouvert d'un toit de feuilles imperméables à l'eau ; les seconds n'ont pas d'habitation fixe, et en temps de pluie ils se contentent de courber la tête et de rester immobiles. À l'approche du Tigre, le Gorille commence par mettre en lieu de sûreté sa progéniture, et vient présenter le combat, dont il sort presque toujours vainqueur ; il attaque également l'homme, et, s’il n’est pas tué roide, il tord les canons de fusil comme de la paille, et broie son ennemi entre les dents. La disposition de ses membres le rend cependant moins redoutable que le Tchigo (Chimpanzé) qui fuit ordinairement devant l'homme, mais qui devient irrésistible lorsqu'il est forcé dans ses derniers retranchements. Le Gorille marche comme les animaux ; le Chimpanzé adulle marche droit, et ce n'est qu'à la ren- contre de l'homme, disent les noirs, qu'il se met à quatre pattes. Je n'ai jamais entendu parler d'enlèvement de femmes du pays par ces deux espèces ; je con- sidère donc comme une fable ce fait dont on s’est tant occupé. CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ Caroli Luciani BONAPARTE. 1854, Les perfectionnements dans les classifications naturelles sont nécessairement des changements. Il ne faut done pas s'étonner des variations qui s'y produisent, mais bien au contraire s'y complaire, lorsqu'elles sont basées sur de nouvelles études, sur des déductions plus justes, sur de meilleures appréciations, et surtout sur la décou- verte de faits nouveaux. L'application de la doctrine des séries parallèles acquiert tous les jours de nouveaux développements, et entraîne par conséquent des modifications correspondantes. Classes, ordres, familles, genres, et dansles genres la distribution elle-même des espèces, tout semble se résoudre de plus en plus en séries, à peu près comme il arrive dans un cristal qui, par le clivage, se fractionne en parties , dans les- quelles le type primitif se reproduit indéfiniment. Bien que trop simple pour correspondre exactement à l’ordon- nance réelle de la nature, le système des séries parallèles s’en rap- proche cependant assez pour donner à l'esprit qui cherche les rap- ports naturels des êtres les plus utiles ressources, et mériter par conséquent tous les efforts des naturalistes par le progrès qu'il con- stitue à l'égard de la série linéaire. En 1896, je pressentis la grande subdivision des Oiseaux dans les deux sous-classes que je nomme maintenant, d'après Owen, Aurrices et Præcoces, quoique le radical du premier nom se rap- porte aux mœurs des parents, le second à celles de leur progéniture. 106 C.-L. BONAPARTE, Mais ce ne fut que bien des années après que, poursuivant le prin- cipe dans ses dernières conséquences, je m'affranchis, quant aux détails, du préjugé des classifications généralement reçues, en insti- tuant, el transportant de la seconde à la première sous-elasse, mes ordres des Heromiones et des Gavie, qui sont les analogues des Grazæ et des Axseres, absolument comme les Cozuwex le sont des GaLLiNæ. Quelques semaines se sont à peine écoulées depuis la publication de ma dernière classification ornithologique dans les Comptes rendus de l Académie ; et je puis déjà, grâce à de nou- velles études, etaux nombreuses observations que j'ai reçues de tous côtés, apporter certaines améliorations de détail à mes séries paral- lèles. C’est surtout dans l’arrangement des Gallinacés, et dans la lanslation d'une sous-classe à l’autre des Uriarores et des Pri- Loprert Où Manchots, qui ne sont pas plus des Pazmipènes que les Phoques ne sont des Céracés, que le lecteur trouvera des change- ments ; et c’est principalement aux remarques de M. O. des Murs, de M. Jules Verreaux, et surtout de M. Martin de Londres, que la science et moi en sommes redevables. Bien loin de détruire mon système, les critiques bienveillantes et confidentielles de ce dernier, qui justifie si bien son prénom de Linnœus, n'ont servi qu'à l'établir sur des bases plus solides, comme M. Martin le reconnaîtra lui-même, quand il verra l'usage que j’en ai fait. Nous y puisons effectivement un nouveau parallélisme, et le plus éclatant de tous. Les Zmpennes du professeur Geoffroy Saint- Hilaire (les Ptiloptères ou Manchots), ces Phoques des oiseaux auxquels on ne saurait plus disputer le rang d'ordre à part, ter- minent la grande série des Azrrices, comme ses Rudipennes (les Ratites où Autruches) leur correspondent à la fin de celle des Præcoces. CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ. 107 EPITOME. AVES. ALTRICES. PRÆCOCES. 1, PSITTACI. 2. ACCIPITRES. 3. PASSERES. 1. Oscines. 2. Volucres. 4. Zygogactyli. 2. Anisodactyli. £, INEPTI. 3. COLUMBE. 9. GALLINÆ. 1. Pleioli. A. Passeraceæ. 2. Gyrantes. 2. Grallaceæ. À. Craces. 2. Galli. 3. Perdices. 6. HERODIONES. 10. GRALLÆ. 1. Grues. 4. Cursores. 2. Ciconiæ. 2. Alectorides 1. GAVIÆ. 11. ANSERES. 4. Totipalmi. 2. Longipennes. 3. Urinatores. 8. PTILOPTERI. 12. STRUTHIONES. En assignant aux Srruriones la place qu'ils occupent dans le tableau ci-dessus, j'ai été guidé en partie par une propriété très frappante qui semble appartenir à la classe des Oiseaux. C’est que, dans cette classe si normale, les espèces aberrantes tendent à s’éle- ver vers les Mammifères, au contraire de ce quiadvient dans ceux- ei où les espèces aberrantes tendent à s’abaisser vers les Reptiles, qui eux-mêmes passent aux Poissons, comme les Poissons de leur côté sedégradent tout à fait par leur transition si connue aux Inver- tébrés. Je donne donc une nouvelle édition de ma classification, et j'en profite pour y ajouter l’énumération de tous les genres sous chaque sous-division de sous-famille ou série subordonnée. Au be- 108 C.-L. BONAPARTE, soin, à cette énumération se trouveront jointes des notes explica- tives. Czassis IT. AVES. Suncrassis 1. ALTRICES (Insessores). Ordo 1. PSITTACI (Prehensores). À. PSITTACIDÆ. a, Americans. A. MAcROCERCINÆ. : . . . + * Amer. merid. Genera. 1. RE Spi. — 2. Macrocercus, Vieill. (Ara, Br.). — a. Cyanopsitta, Bp. — b. Ararauna, Bp. —c, Ara- canga, Bp. — 3. Rhynchopsitta, Bp. — 4. Sittace, Wagl. — 5. Psittacara, Spix. — 6. Cyanolyseus, Bp. — 7. Enicogna- thus, Gr. — 8, Nandayus, Bp. — 9. Heliopsitta, Bp. 2. CoNURINE. . . 0 er 57 ANETITAS 10. Conurus, Æuhl. ut tn Spix, —12, Microsittace, Bp. —13. Eupsittula, Bp.—1#%. Brotogeris, Vig.— 15. Myiopsitta, Bp. — 16. Tirica, Bp. 3. PSITTACULINE. . . . . |. Amer. merid. 17. Psittacula, Br. — 18. Évépafs, Bp. — 19. Pyrrhulopsis, Reich. — 20. Triclaria, Wagl. — 21. Pionopsitta, Bp. — 22. Pionus, Wagl. — 23. Caica, Less. — 24. Chrysotis, Sw. — 25. OEnochrus, Bp. — 26. Derotypus, Wagl. b. Orbis antiqui. 4. PALÆORNITHINÆ, . ln © Mrs mOLeatE 27. Palæornis, Vig. — 28. Lclrée Bp. — 29. Prioniturus, Wagl. — 30. Tanygnathus, Wagl.— 31. Psittinus, Blyth. D'APEZOEDMNE et De 2 ls ds Ce CR A UPUIOIe 32. Pezoporus, JU. 6. PLATYCERCINX. . . st tuiret tof Ocean, 33. Melopsittacus, Gould. — M Eupibue, Wagl.— 35. Nymphi- eus, Wagl.— 36. Psephotus, Gould.— 37. Barrabandius, Bp.— 38. Platycercus, Vig. — 39. Barnardius, Bp.— 40. Cyanoram- phus, Bp. — 41. Purpureicephalus, Bp. — 42. Aprosmictus, Gould. 30 35 50 il 40 CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ. 109 7. PSITTACINÆ. . . . 4 AB EMMASIATAIOC 40 a. Eclecteæ. — 43. TRE Bp. — k4. Geoffroyus, Less. — 45. Psittacodis, Wagl.— 46. Eclectus, Wagl.— 47. Loriculus, Blyth. b. Psittaceæ. — 48. Mascarinus, Less, — 49. Psittacus, L. — 50. Poiocephalus, Sw. — 51. Agapornis, Selby. — 52. Polio- psitta, Bp.— 53. Cyclopsitta, A. et Jacq. 8. DasyPrininæ. . , . À s .. Ocean Madagt” 6 54. Coracopsis, Wagl. — 35. Stavorinius, Bp, — 56. Dasyptilus, Wagl. 9 NEdronxe ie 2 (il: Moon T2 I dieaiOteanse 3 57. Nestor, Wagl. A0. PLYCTOLOPHINE. . TT Em Ocean» 416 58. Eolophus Bp. — 50. ue Br —60. Plyctolophus, Il. — 61. Licmetis, ZIL 2, MICROGLOSSIDÆ. AA. CALYPTORHYNCHINE. . . : ... Ocean. 8 62. Callocephalon, Less. — 63. ee Vig. AAMMTÉROELOSON A. NE. Me Nes er, Cost or, PMU ces, 2 64. Microglossus, Geoffr. Nassim. (6... mit MolmOcean.. 4 65. Nasiterna, Wagl. 3. TRICHOGLOSSIDÆ. 14. TRICHOGLOSSINXE. , . Re ra Ocean. 40 66. Lathamus, Less. —_ 67. ichcioests, Vig.— 68. Chalcopsitta, Bp.— 69. Eos, Wagl. — 70. Lorius, Br, — 71, Charmosina, Wagl. — 72. Coriphilus, Wagl. 4. STRIGOPIDÆ. ADASTRIEONRE = unie ee eus clte noù «0 et s,0C0An. (À 73. Strigops, Gr. A0 ©.-L, BONAPARTE, Ordo 3. ACCIPITRES (Rapaces). 5. VULTURIDÆ, 16. CATHARTINÆ. . . . . «+ « . America 74. Sarcoramphus, Pa — 75. Grrphèe, Geoffr. — 76. Ca- thartes, I. — 77. Coragyps, Geoffr. A7. VucruniNæ. . . ss te à “EUVVAR LATE 78. Gyps, Sav.— 79. es L. 80. Otogyps, Gr. — 81. Neo- phron, Sav. 6. GYPAETIDÆ,. ASE CS PA ETES mt AU EU FA SAITe 82. Gypaetus, Storr. 7. GYPOHIERACIDÆ. 19. GYPOHIERACINÆ.L- NO … «1. . + + ‘Helen iron 83. Gypohierax, Rupp. 8. FALCONIDÆ, 20. AQUILINÆE . . dal er . « . . Cosmopolit. a. Aquileæ.— 84, Au Br.—a. Loti Kp.— b. Urætus, Kp. — c. Pterætus, Kp. — 85. Entolmætus, Blyth. — 86. Ony- chætus, Kaup. — 87. Helotarsus, Smith. Halistesæ, — 88. Halictus, Sav. — a. Haliætus, Kp. — b. Thalassætus, Kp. — S9. Pontætus, Kaup. — 90. Haliastur, Selb. — 91. Heterætus, Xaup. SE e Pandioneæ, — 92. Pandion, Sav, — 93. Polioætus, Xaup. d, Cireæteæ. — 94. Circætus, Vieill. — 95. Spilornis, Gr. — 96. Herpetotheres, Vieill. 24. BUTEONINE. . . der + + « . Cosmopolit. a. Buteoneæ. — 97. iten Béahins — 98. Buteo, Cuv. — a. Buleo, Kp. — b. Pæcilopternis, Kp. — 99. TEE chis, Kp.— 100. Buteogallus, Less.— 104. Ichthyoborus, Kp. — 102. Poliornis, Kp. — a. Poliornis, Kp. — b. Pernopsis, Dubus.— 103. Kaupifalco, Bp. b. Asturinesæ.—104, Asturina, Vieill.-— 105, Leucopternis, Xp. 22, Muvinx, . . . . Cosmopolit. a. Milveæ. — 106. Milvus, Br. 107, Lopbichie Kp. — 108. Gypoictinia, Kp. m7 13 38 40 33 CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ, b. Perneæ. — 109, Perñis, Cuv. — 410. Avicida, Sw. — 444. Lophastur, Blyth. — 112, Macheiramphus , Schleg. — 113. Rosthramus, Less. — 114. Odontriorchis, Xp. — 115. Re- gerhinus, Ap. ©. Elaneæ. — 116. Nauclerus, 4g. — 117. Chelidopteryx , Kp. — 448. Elanus, Sav. — 119. Gampsonyx, Vig. — 120. Icti- nia, Vieill. — a. Ictinia. Kp. — b. Pœcilopteryx, Kp. 23. Farconnz. . . den Le ent 1 0 COSITOPOUL: a. Falconeæ. — 121. Jeracidea, Gould. — 122. Falco, L. — 123. Hierofalco, Cuv. — 124. Gennaja, Ép. — 125. Chiquera, Bp. — 126. Hypotriorchis, Boie. — 127, Æsalon, Kp. . Harpagezæ. — 128. Harpagus, Vig. — 129. Spiziopteryx, Kp. . Tinnuneuleæ. — 130. Tinnunculus, Vieill.— a. Tinnunculus, Kp.— b. Tichornis, Kp.— c. Pæœcilornis, Kp.— 131. Erytbhro- pus, Brehm. — 132. Polioierax, Kaup. — 133. Jerax, Vig. œ [e] SEtAcornues al M MEL, Rp OM Cosmopolit. a. Spizæteæ. — 134. Lophætus, Kp. — 135. Piernura, Æp. — 136. Spizætus, Vieill. — 137. Jerætus, Kp. — 138. Limnæ- tus, Vig. — 139. Spizastur, Less. b. Morphneæ. — 140. Thrasætus, Gr. — 141. Harpyhaliætus, Lafr. — 142. Morphnus, Cuv. — 143. Hypomorphnus, Cab. —1%44%. Urubitinga, Less. — 145. Craxirex, Gould, — 146. Dæ- dalion , Bp. | . Aceipitreæ.—{ #7. Rhynchomegus, Bp.—148. Micrastur, Gr. — 149. Lophospizia, Kp. — 150. Leucospizia, Kp.— 151. As- tur, Bechst. — 152. Cooperastur, Bp. 153. Geranospiza, Kp. — 154. Melierax, Gr. — 155. Sparvius, Vieill.— a. Sparvius, Bp. — b. Tachyspiziu, Kp. — c. Scelo- spizia, Kp—156. Nisus, Bp.— 157. Urospizia, Kp.— 158. Mi- cronisus, Gr.—159. Accipiter, Br. —160. Jeraspizia, Kp. [ec] 25. Cncns. . . A D. LC pt l00EmOnONt. 164. Circus, A — 162. Spiziacireus, Kp. — 463. Strigi- ceps, Bp. — a. Spilocircus, Kp. — b. Pterocircus, Kp.—c. Stri- giceps, Kp. 26. Pouxsonnz. . . 1.0 Amer. m. Madag. a. Hhictereæ, — 164. Ætotriorchis, Kp.—165. Daptrius, Vieill. — 166. Ibicter, Vieill. — 167. Milvago, Spix. -168. Phalco- bænus, Lafr. b, Polyhoreæ. — 169. Polyborus, Vieill. €. Polyhoroïidesæ, — 170, Polyboroides, Smith, a 60 70 16 112 C.-L. BONAPARTE, 9. GYPOGERANIDÆ. 273 GYPOGERANN EME UOTE AN RE MER UNE, FATrIicA. 171. Gypogeranus, JL. 10. STRIGIDÆ. 28. STRIGINE, +, , rat . . Cosmopolit. 172. Strix, L. — à. purée, FE UN Ductyalifte, Kp. — c. Strix, Kp. — d. Scelostrix, Kp. — 173. Phodilus, Geoffr. PO PAUTRENS AE sie de Ne ee « ne tea MN DOSIMOPOIC. a. Ululeæ., — 174. Ulula, Cuv. — 175. Ptynx, Blyth. — 176. Nyctale, Brehm. D. Syrniezæ. — 177. Syrnium, Sav. — 178. Macabra, Bp. — on 179. Myrtha, Bp. — 180. Bulaca, Hodgs.— 181. Cicaba, Wagl. — 182. Pulsatrix, Xp. — 183. Gisella, Bp. Otexe. — 184. Otus, Cuv. — a. Otus, Kp. — b. Rhinoptinx, Kp. — 185. Nyctalops, Wagl. — 186. Brachyotus, Boie. — 187. Phasmatoptynx, Ap. d. Buboneæ. — 188. Bubo, uv. — 4189. Nisuella, Bp. — 190, Nyctætus, Geoffr. — 191, Urrua, Hodgs. — 192. Megap- tynx, Bp.— 193, Ascalaphia, Geoffr.—19%. Pseudoptynx, Æp. 30. SURNINE. . . = . . . . Cosmopolit. a. Scopeæ. — 195. he Don — 196. Lophostrix, Less. — 197. Ephialtes, Bp. — 198. Acnemis, AKaup. — 199. Asio, Schleg.—200. Lempijius, Bp.— 201. Scops, Sav.— 202. Piso- rhina, Xp. b. Atheneæ. — 203, Scotopelia, Bp. — 204. Ctenoglaux, Ap.— 205. Pholeoptynx, Xp. — 206. Athene, Boie, — 207. Gymna- sio, Bp. C, Ieroglauceæ. — 208. Ieroglaux, Xp. — 209. Rabdoglaux, Bp. — 210. Spiloglaux, Kp. — 211. Sceloglaux, Kp. — 212. Tænioglaux, Kp.— 213. Tænioptynx, Kp.— 214. Phalæ- nopsis, Bp. — 215. Microglaux, Æp. d. Surnieæ. — 216. Nyctea, Steph. — 247. Surnia, Dumér. — 218. Glaucidium, Bot. 15 60 74 440 CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ, Ordo 3. PASSERES. Tribus 1. OSCINES. Sürps 1. CULTRIROSTRES. A1. CORVIDE. 34. Convinx. . . - DORE ET AT M EOSMOpol. a. Corveæ. — 219. Cor cest. Less. — 9220. Corvus, L. — a Corvus, Kp. — b. Corone, Kp.— c. Trypanocorax, Bp. — d. Amblycorax, Bp. — 221. Lycocorax, Bp. — 222. Physoco- rax, Bp. — 223. Gazzola, Bp. — 224. Monedula, Brehm. b. Gymnocorveszæ. — 225. (Gymnocorvus, Less, — 226. Pica- thartes, Less. SA NUMERIGINE Eur AS: /ANM:.S. 227.Nucifraga, Br.—228.Picicorvus, Bp.—229. Podoces, Fischer. 33. BARITINÆ. . . DÉS. em OCbanIa. 230. Sirepera, LD est Barita, Cuv. — 9232. Cracticus, Vieill. — 233. Bulestes, Caban. — 234. Pityriasis, Less. 34. FREGILINÆ, , . : AEUrT- AS 235. Pyrrhocorax, V'eill, _ 236. ane me 12. GARRULIDÆ. 32 Giant Ur dut eue . . . . Cosmopol. a. Pieaceæ.—237. Pica, Br.—238. Slreptocitta, Bp.—239. Cya- nopica, Bp. — 240. Psilorhinus, Rupp. — 241, Biophorus, Schlegel. — 242. Calocitta, Bp. — 243. Cyanurus, Bp. b. Garrulete. — 244. Xanthoura, Bp. — 245. Uroleuca, Bp. — 246. Cyanocorax, Boie, — 247. Cissilopha, Bp. — 248. Cyano- citla, Strickl. — 249. Garrulina, Bp.— 250. Aphelocoma, Cab. — 251. Gymnokitta, Wied. — 252. Cyanogarrulus, Bp. — 253. Garrulus, Br, — 254, Perisoreus, Bp,. 20. PTYLORHYNCHINZ, . + ve 1800 . As. m. Ocean, 255. Kitia, a — 256. Ptüilorhynchus, PTT 257. Alluroedus, Cab. — 258. Chlamydera, Gould, 37. MYylOPHONINE. . . ANA MIOCEAN, 259. Myiophonus, Temm. __ 360. Arrenga, Less, ÿe série. Zoo. T. F. (Cahier n°. 2) 8 113 40 16 © 10 4 til C.-L. BONAPARTE. 38. CRYPSIRHININÆ. . . D'ANÉURS * AÏT: 43 261. Crypsirhina, Vieill, — 262. Chu. Cab. — + ne nurus, Less. — 264. Dendrocitta, Gould. — 265. Ptilostomus, Sw. — 266. Struthidea, Gould. 13. STURNIDÆ. A6. 39. LAMPROTORNITHINÆ. . . MES MAÏT 58 a. Onychognathezæ.— 267. Snaies, H. et Jacq. Ne ss procorax, Bp.— 269. Onychognathus, Hartl.— 270. Amydrus, Cab. — 271. Pilorhinus, Cab. — 272. Naburupus, Zp. — 273. Cinnamopterus, Bp. b. Lamprotornithezæ, — 274. Spreo, Less. — 275. Nolauges Cab.—276. Calornis, Bp. — 277. Lamprocolius, Sundev. — 278. Urauges , Cab. — 279. Juida, Less. — 280. Lamprotor- nis, Temm. — 281. Enodes, Temm.— 282. Aplonis, Gould. — 283. Saraglossa, Hodgs. — 284. Hartlaubius, Bp. 40. STURNINE. . . . : _"4-Pur AS Ar. OC 40 285. Sturnus, L. 986. HA Pen — 287. Gracupite, Less. — 288. Sturnopastor, Hodgs. — 289. Heterornis, Gr. — 290. Sturnia, Less. — 291. Temenuchus, Cab. — 292. Acri- dotheres, Vieill. — 293. Dilophus, Vüeill. 41. GRACULINÆ. . . . + N° 47181000 RS - 294. Gymnops, Cuv. —_ 295. Mine, a — 296. Gracula, L.— 297. Ampeliceps, Blyth.— 298. Basilornis, Temm. — 299. Me. lanopyrrhus, Bp. #2. Burnacinx. . . ue 2 Ne AT AUS 300. Scissirostrum, États 301. "Héhige: L ICTERIDÆ. A3. Quiscaune. = : F .. + America, 24 302. Scolecophagus, Su. — 303. Ouiséatss, Vieil. — 304. Sca- phidurus, Sw. — 305. Hypopyrrhus, Bp. — 306, Lampropsar, Cab.—307. Aphobus, Cab.— 308. Molothrus, Sw.— 309. Cyr- totes, Reich. 44. ICTERINE. . . . . - America. 112 a. Cassiceæ. 310. rer Bp— 31. Ocyalus, Waterh. — 312. Ostinops, Cab.— 313. Cassicus, JU, — 314. Cassicu- lus, Sw.— 315. Archiplanus, Cab. b. Icterezæ. — 316. Icterus, Br. — 317, Xanthornus, Cuv. — 318. Gymnomyslax,. Reich. — 319. Xanthosomus, Cab, — 320. Hyphantes, Vieill, — 321, Pendulinus, Vieill. CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGLIÆ. 115 C. Agelæiese. — 322, Trupialis, Bp. — 323. Pedotribes, Cab. — 324. Amblycercus, Cab.— 325. Amblyramphus, Leach. — 326. Leistes, Vig. — 327. Xanthocephalus, Bp. — 328. Age- læius, Vieill. — 329. Thilius, Ap.— 320. Dolichonyx, Sw, Stirps 2. CONTROSTRES. 15. PLOCEIDÆ. 45. Procexx. . . DER Ne. Africa; As. Oc. 70 331. Alecto, Less. — 332. Srcnnes Vieill. — 333. Svcobrotus, Caban.— 334. Nelicurvius, Bp. — 335. Hyphanturgus , Cab. — 336. Hyphantornis, Gr.— 337. Textor, Bp. — 338. Plo- ceus, Cuv. — 339. Sitagra, Reich. — 340. Quelea, Reich. — 341. Foudia, Reich.— 342. Ploceipasser, Smith. — 343. Nigrita, Strickl 46. Vinuinx. . . D Africa. 27 344. Pre Bp. 345. Eupleités, Sw — 346. Coliipasser, Rupp.— 347. Urobrachya, Bp.—348. Chera, Gr. — 349. Ste- ganura, Reich. — 350. Vidua. Cuv. — a. Tetrænura, Reich. — b. Videstrelda, Lafr. — 351. Hypochera, Bp. 47. EsrRELDiNE. . . d 4e: - A6 AfT Ocean. 80 a. Pyrenestezæ. —_ 352. Rene AS Gr.— 353. Pyrenestes, Sw. — 354, Coryphegnathus, Reich. — 355. Sporopipes , Cab. b. Amadinezæ.— — 356. Padda, Reich. — 357. Munia , Hodgs. — 358. Uroloncha, Cab. — 359. Spermestes, Sw.— 360, Ama- dina, Sw.—361. Donacola, Gould.— 362. Sporothlastes, Reich. — 363. Stagonopleura, Reich. — 364. Pœphila, Gould. — 365. Erythrura, Sw.— 366. Neochmia, A. et Jacg.—367. Oty- gospiza, Sundev.— 368. Pytelia, Sm.— 369. Emblema, Gould. — 370. Habropyga, Cab. c. Estreldeæ, — 371. Lagonoslicta, Cab. — 372. Uræginthus, Cab.— 373. Zonæginthus, Cab. — 374. Ægintha, Cab. — 375. Sporæginthus, Cab, — 376. Estrelda, Sw. — a, Estrelda, Bp., 1850, — b. Neisna, Bp., 4850. 416. FRINGILLIDÆ, de Re de blu n nes co ae SPORE 40 377. Philæterus, Sw. — 378. Passer, Br, — 379. Pyrgita, Cuv, —380. Pyrgitopsis, Bp. = 381. Corospiza, Bp. 116 C.-L, BONAPARTE, PR O0 nEur:#As wAîfr "Am a. Fringillezæ. — 382. MES Cab. —-383. Hesperiphona , Bp.-— 38%. Eophonia, Gould. — 385. Coccothraustes, Br. — 386. Callacanthis, Reich. — 387. Fringilla, L. — 388. Petro- nia, Ap. — 389. Gymnoris, Hodgs.-— 390. Xanthodina, Sund. b. Cardueleæ.—391. Hypoxanthus, Cab. — 392. Chrysomitris, Boie. — 393. Astragalinus, Cab. — 394. Pyrrhomitris, Bp. — 395. Carduelis, Br. ©. Serinezæ. — 396. Crithagra, Sw. — 397. Poliospiza, Schiff. — 398. Citrinella, Bp.— 399. Serinus, Aoch. — 400. Metopo- 49. FRixGiLLINÆ. . . EL nia, Bp. d. Pyrrhulezæ. — 401, Pyrrhula, Br. — 402. Pyrrhoplectes, Hodgs 50. Loxunx. SRE D PR TIENTAS AMIE a. Loxiezæ. — 403, Cannon Bp. — 404. Hematospiza, Blyth. — 405. Loxia, Br. — 406. Corvthus. Cuv.— 407. Sper- mopipes, Cab. — 408. Uragus, Keys. et BI. b. Carpodaceæ. — 409. Pyrrha, Cab. — 410. Pyrrhospiza, Hodgs. — 411. Propasser. Hodgs. — 412. Carpodacus, Bp. — 413. Pyrrhulinota, Hodgs. — 414. Erythrospiza, Bp — a. Rho- dopechys, Cab. — b. Buchanetes, Cab. . Montifringilleæ. — 415. Leucosticte, Sw.— 416, Montifrin- gilla, Brehm. — 417. Fringalauda, Hodgs. d. Linoteæ. — 418. Linota, Bp. — 419. Acanthis, Keys. a . PsiTTIROSTRINE, , , AA IL Érds, er rt hemdOCEan: es Psittirostra, géinti — 421. Hypoloxia, Licht. 82. GEOSPIZINE. . Re L0S GALOpAES 422. Geospiza, Gould. — ‘42 3. Camarhynchus, Gould. — 424. Pie- zorhina, Lafr. — 425. Cactornis, Gould. — 426. Certhidia, Gould. B3. EMBERIZINE.. + +. + . a EUT AE AIT AIME 427. Cynchramus, Bp. — 428. PR RE Mey. — 129. Cen- trophanes, Æp.-—430. Onychospina, Bp.— 431. Emberiza, L, — 432. Buscarla, Bp. — 433. Schænicola, Bp. — 43%. Hortu- lanus, 2p.— 435. Fringillaria, Sw.— 436, Hypocentor, Cab. b£, Spizinm. « ns SU. ADENCH . Zonotrichiésæ. — 137. Granativora, Bp. — 438. Orilura, Bp. — 439. Hæmophila, Sw. — 440. Chondestes, Sw. — 441. Zo- notrichia, Sw, — 142, Chrysopoga , Bp, — 443. Euspiza. Bp. 2 100 16 #0 170 CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGLE, 117 — 444. Spizella, Bp. — 445. Passerculus, Bp.— 146. Peucæa, Aud.— 447. Coturniculus, Bp.— 448. Ammodromus, Sw. — 449. Emberizoides, Temm. — 450. Sycalis, Boie, — 451. Me- lanodera, Bp.— 452. Gubernatrix, Less. b. Strutheze. — 453. Calamospiza, Bp.— 454. Diuca, Reich. — 455. Phrygilus, Cab. — 456. Rhosdospina, Cab.— 157. Passe- rella, Sw. — 458. Struthus, Bp. — 459. Junco, Wagl. — 460. Poospiza, Cab. — 461. Cocopsis, Reich. — 462. Paroaria, Bp. — 463. Lophospiza, Bp. -- 464. Tiaris, Sw. — 465. Me- lophus, Sw. . Spizeæ.— 466. Spiza, Bp.— 467. Hoplospiza, Cab. —-168: Vo- latinia, Reich. d. Pipiloneæ. — 469. Pipilo, Vieill.— 470. Pyrgisoma, Puche- ran. — 471. Arremon, Vieill. — 472. Phænicophilus, Strickl. — 473. Buarremon, Bp.— #74. Embernagra, Less.— 475. Do- nacospiza, Cab. — 476, Pipilopsis, Bp.— 477. Thlypopsis, Cab. —478. Atlapetes, Wagl.—479.Chlorospingus, Cab.— 480. He- n mispingus, Cab. — 481. Pyrrhocoma, Cab. — 482. Cypsna- gra, Less, 65. PrrYLINx. . . DR A MErICd. 1100 a. Pityleæ, — 183. Ps Ca. — 484. Caryothraustes, Reich. — 485. Periporphyrus, Reich. — 486. Pitylus, Cuv. — a. Pitylus, Reich.— b. Cissurus, Reich.— 487. Cyanoloxia, Bp. — 488. Guiraca, Sw.— 489. Cardinalis, Bp. — 490, Pyrrhu- loxia. Bp. b. Spermophilezæ. — 491. Oryzoborus, Cab. — 492, Melopyr- rha, Bp. — 493. Pyrrhulagra, Schiff. — 49%. Catamblyrhyn- chus, Less. — 495. Catamenia, Bp. — 496. Phonipara, Bp. — 497. Spermophila, Sw.— a. Leucomelanæ, Bp.— b. Pyrrhome- lanæ, Bp. — 498. Sporophila, Cab. — 499. Callirhynchus, Less. . Saltatoreæ.— 500. Psitiospiza, Bp.— 501. Lamprospiza, Bp. — 502. Diucopsis. Zp.—503. Orchesticus, Cab, — 504. Bethy- lus, Cuv. — 505. Saltator, Vieill. Le] Stirps 3. SUBULIROSTRES. 17. TURDIDÆ. 56. Tonnixx. . . . . Cosmopol. 100 506. Zoothera, Vig. _ 307. PRET ré — 508. Oreocin- cla; Gould. — 509. Cichlherminia, Bp. — 510, Turdus, L. — 118 C1, BONAPARTE, 511, Planesticus, Bp. — 512. Cichloselys, Bp.— 513. Myioci- chla, Schiff. — 514. Merula, Ray. —515.Geocichla, Kuhl, — 516, Dulus, Vieill, — 517. Catharus, Bp. 57. SAXICOLINÆE. , 40.0: ylCosmopal: a. Monticolezæ. — 518. Mona, Boie. — 519. Petrocossyphus, Boie. — 520. Orocetes, Gr. — 521, Grandala, Hodgs. — 522, Kittacincla, Gould. — 523. Copsychus, Wagl.— 524. Ger- vaisia, Bp.— 525. Pœæoptera, Bp.— 526. Bessonornis, Smith. — 527. Thamnolæa, Cab. — 528. Dromolæa, Cab. b,Saxicolesæ, — 529, Parisoma, Sw. — 530. Bradornis, Smith. — 531. Sigelus, Caban.—532. Agricola, Verr.—533. Myrme- cocichla, Cab.— 534. Campicola, Sw.— 535. Saxicola, Bechst. — 536. Pralincola, Koch. — 537. Oreicola, Bp. C. Luscinieæ. — 538. Hodgsonius, Bp.— 539. Ajax, Less. — 540.Myiomela, Hodgs.— 541. Pogonocichla, Cab.— 542 Sia- lia, Sw. — 543. Niltava, Hodgs. — 54%. Petroica, Sw. — 545. Erythrodryas, Gould. — 546. Drymodes, Gould. — 547. Miro, Less. — 548. Janthia, Blyth. — 549. Larvivora, Hodgs. — 550. Adelura, Bp. — 551. Chæmorrhous, Hodgs. — 552. Ruticilla, Ray. — 553. Cyanecula, Br. — 554. Rubecula, Br.— 555. Calliope, Gould, — 556. Philomela, Br. 58. SYLVINX. . . Os : HUT: AB: AIfe a. Sylvieæ. — 597. sont Haah, — 558. Curruca, Br. — 559, Sylvia, Bp.— 560. Sterparola, Bp.— 561. Pyrophthalma, Bp. — 562. Melizophilus, Leach. b, Phyllopseustezæ.— 563. Phyllopseuste, Meyer.—564. Abror- nis, Hodgs.—565, Horornis, Hodys.—566. Geobasileus, Caban, 59. CALAMOHERPINE. . . ue . Eur. As. Afr. a. Sphenureæ. — 567. Lratomeonss, Gould.— 568. Hete- rurus, Hodgs. — 569. Eurycercus, Blyth. — 570. Megalurus, Horsf. — 571. Sphenæacus, Strickl. — 572. Poodytes, Cab. — 573. Sphenura, Licht. — 574. Chætornis, Sw. b. Calamoherpeæ. — 575. Tatare, Less. — 576, Rernieria, Bp. — 577. Phyllastrophus, Sw. — 578. Calamoherpe, Meyer. — 579. Calamodyta, Meyer.— 580, Lusciniola, Gr.— 581, Lusci- niopsis, Hp. — 582. Bradypterus, Sw. — 583. Cettia, Bp. — 584. Tribura, Hodgs. —- 585. Neornis, Hodgs. — 586. Chloro- peta, Smith. — 587. Hypolais, Brehm, — 588. Iduna, Keys. ©. Loeustelleæ, — 589. Locustella, Gould. — 590. Calamanthus, Gould, — 591. Hylacola, Gould, — 592. Chthonicola, Gould, 50 CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ,. d. Ædones. — 593. Chætops, Sw.— 594, Cercotrichas, Boie.— 595. Pentholæa, Cab, — 596. Thamnobia, Sw. — 597. Ædon, Boie. e. Drimoiees. — 598. Orthotomus, Horsf. — 599, Arundinax, Blyth. — 600. Horictes, Hodgs. — 601. Daseocharis, Cab. — 602. Prinia, Horsf.—603. Dumetia, Blyth.—604. Suva. Hodgs. — 605. Cisticola, Less. — 606. Catriscus, Cab, — 607. Apalis, Sw.— 608. Drymoica, Sw.— 609. Drymoipus, Bp.— 610. He- mipteryx, Sw.— 611. Tesia, Hodgs. — 612. Pnoepyga, Hodgs. — 613. Comaroptera, Sundev. — 614. Sylvietta, Latr. — 615. Syncopta, Cab. 60. AGGENTORINÆ. . . FC Fur AS Air. (OC. 4. Accentoreæ. — 616. FR TRE Gould. — 617. Accentor, Bechst. — 618. Prunella, Vieill. — 619. Origma, Gould. b. Acanthizeæ. — 620. Sericornis, Gould. — 621. Gerigone, Gould. —622. Pyrrhokemus, Gould.— 623. Acanthiza, Vig. — 624. Picnospbrys, Strickl. — 625. Culicipeta, Biyth, 18. MALURIDE. . MALURNE. . . 000 MOGtAN: * ie. Malurus, Veil, — 627. Sites Less. — 628. Amvtis, Less. 19. TIMALIIDÆ. 62. GARRULACINE. . . + . ASIA Ocean. 629. Lophocitta, Gr. — 630. re Less. — 631. Jantho- cincla, Gould. — 632. Leucodioptron, Schiff. — 633. Trocha- Jopteron, Hodgs. — 634. Plerocyclus, Gr. — 635. Actinodura, Gould. — 636. Otagon, Mus. Lugd. — 637. Keropia, Gr. — 638. Cutia, Hodgs. — 639. Alcopus, Hodgs. — 640, Malacias, Cab. 63. Psormonisx. . . - 409 As. Ocean. 641. Psophodes, Hors. — 642. Oiébicé. Gould. — 643: Sphe- nostoma, Gould .—6%4%, Xerophila, Gould.— 645. Melanochlora, Less. 64. CRATEROPODINE. . . :, be, Asnär OC: 646. Phyllanthus, Less. — | 647. D Sw. — 648. Argya, Less, — 649. Malacocercus, Sw, — 650, Gampsorhynchus, Blyth.—651. Pomatostomus, Cab,—62. Pomatorhinus, Horsf. — 653. Xiphoramphns, #lyth. 119 40 40 190 C.=-L. BONAPAREIE. 65. Mine. . . ess asmAMeNCa. 654. Mimus, Boie. — 655. Dufiobss Sw.— 656. Melanotis, Zp. — 657. Galeoscoptes, Cab.— 658. Felivox, Bp. — 659. Dona- cobius, Sw.—660. Buglodytes, Bp.—661. Harporhynchus, Bp. 66. Bnacayponinæ. 67. a. Leiotrichezæ. — 687. Lioptiue, Cab. — 688. Leiothrix, Sw. 68. a. Timalieæ. — 698. Timala, Ha) — 699. Chrysomma, 20. a. Frachipodinsæ. 662. crue Kuhl.- — 663. Ixos. Temm. — 664. Brachypus, Sw.—665. Otocampsa, Cab.—666. Lædo- rusa, Cab. — 667. Apalopteron, Schiff. — 668. Trachycomus, Cab. — 669. Alcurus, Hodgs. — 670. Prosecusa , Reich. — 674. Ixidia, Hodgs. — 672. Meropixus, Bp.—673. Ixocherus, Bp. — 674. Sphagias, Cab. b. Mypsipeteæ. — 675. Hypsipetes, Vig. — 676. Ixocincla, Hodgs. — 677. Hemixus, Hodgs. — 678. Galgulus, Kitllitz.— 679. Microscelis, Gr. c. Crinigereæ.— 680. Ixonotus, Verr.—681. Andropodus, Sw. — 682. Criniger, Temm.— 683. lole, Blyth. — 684. Tricho- phoropsis, Bp. — 685. Setornis, Less. — 686. Trichixos, Less. LEIOTRICHINÆ. . . A . . . As. centr. et m. — 689. Fringilliparus, Hodgs. — 690. Hemiparus, Hodgs. — 694. Minla, Hodgs. — 692. Proparus, Hodgs. — 693. Sylvipa- rus, Burton. —— 694. Suthora, Hodgs. — 695. Conostoma, Gr. — 696. Heteromorpha, Hodgs. — 697. Paradoxornis, Gould, TIMALINE. . Le ne PS ASTAIT OC: Hodgs. — 700. Mixornis, Horsf. — 701. Macronus, Jard. — 702. Myiolestes, Müll. — 703.Napothera, Boie. — 704. Laniel- lus, Sw. b. Cacopitteæ. — 705. Turdinus, Blyth. —706. Cacopitta, Bp. — 707. Turdirostris, Hey.— 708. Pellorneum, Sw.—709.Cin- clidium, Blylh. — 710. Drymocataphus, 81.— 711. Brachypte- ryx, Horsf. — 712. Alcippe, Blyth. — 713. Stachyris, Hodgs. — 714. Trichostoma, BI. — 715. Erpornis, Hodgs. — 716. Malacopteron, Eyton. c. Certhiparese, — 717. Clitonyx, Reich. — 718. Certhiparus, Less. TROGLODYTIDÆ. 69. THOGLODYTINE: 20 NE MERE Es M OTSMOpPol. 719. Campylorhynchus, Spix, — 720. Heleodytes, Cab. — 36 100 20 50 60 CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGLE. 194 724. Presbys, Cab. — 722. Pheugopodius, Cab. — 723. Cy- phorinus , Cab. — 724. Thryothorus, Vieil. — 725. Telmato- dytes, Cab.— 726, Troglodytes, Vieill.—727. Cistothorus, Cab. 21. CERTHIIDÆ. 70. CERTHNNÆE. , . - . . Cosmopol. 20 a. Certhieæ. _728. Certhia, L. __ 72, mr Gr. b. Tichodromerse. — 730. Salpornis, Gr, — 731, Tichodroma, Ill. — 732. Climacteris, Temm. 71. SITTINE. . . - . . (Cosmopol. 25 733. Callisitta, Bp. rss. Doddephile, Su. — 735, Sitta, L.— 736. Sittella, Sw. — 737. Acanthisitta, Laÿr. 22. PARIDÆ. 72. PARINE. . . . . Cosmopol. 60 a. Pareæ. — 738. TER Cab. _ 739. Lots Kaup. — 740. Machlolophus, Cab.— 741. Melanoparus, Bp.—742. Pa- rus, L.— 743. Cyanistes, Kaup. — 744. Penthestes, Reich. — 745. Pæcila, Kaup. — 746. Ægithaliscus, Cab.— 747. Psaltri- parus, Bp.— 748. Psaltria, Temm. — 749. Mecistura, Leach. — 750. Oritiscus, Bp. b. Ægithalesæ. — 751. Panurus, Kaup.—752. Ægithalus, Vig. — 753. Anthoscopus, Cab. 73. PARDALOTINZ. . . . Ur NO HASMOcean. 90 754. Pardalotus, Vieill. 35. Triglyphidia , Reich. — 756. Pi- prisoma, Blylh. — 757. Smicrornis, Gould, 74. ReGuLINZ. . . . Eur. As. Afr. Am. 140 758. Regulus, Vieill _ 759. Messie Blyth.— 760. Cephalo- pyrus, Bp. 23. CINCLIDÆ. 75 CMCUNE. . . . . Eur. As. Amer. 140 761. Cinclus, Bochst. _ 762, RE Llue, Lafr. — 763. Cin- clops, Bp. 76. Eurerixx. . . . . As. Ocean. 15 764. Eupetes, Toi 765. Grallns, Viitt, — 766. Henicurus, Temm,— 767, Ephthianura, Gould, 192 CL. BONAPARTE, 24. MOTACILLIDÆ. 77. MoracuiNZ. . + . . Eur. As. Afr. Ocean. 768. Motacilla, L. — 769. Nemoributé, Blyth. — "770. Pallenura, Pall. — 771. Budytes, Cuv. 78. ANTHINE. . . . . . Cosmopol. 772. Macronyx, Si. — 773. Coridia, Vig. — 774. Agrodroma, Sw, — 775. Anthus, Bechst. — 776. Pipasles, Kaup. — 776%. Cynædium, Sund. 25. ALAUDIDÆ, 79. PyRRHULAUDINE, . Re 4 ! CR ON NAT ET 777. Pyrrhulauda, Smith. 80. ALAUDINE. . . + . Cosmopol. a. Calandrelleæ. 778. bise À _77. Calandrella, Kaup. b. Alaudeæ, — 780. Rhamphocorys, Bp.— 781, Melanocorypha, Boie. — 782. Mirafra, Horsf. — 783. Megalophonus, Gr. — 784. Annomanes, Cab. — 785. Alauda, L. — 786. Lululla, Kaup.— 787. Galerida, Boie. — 788. Certhilauda, Sw. — 789, Alæmon, Keys. et Bl. Stirps #4. CURVIROSTRES. 26. EPIMACHIDÆ. . ErmMACUINE. . M7: pes Dceania. ns Epimachus, G. —— 791. Ptilochys, Sw.— 792. Craspedo- phora, Gr. — 793. Seleucides, Less. 27. PARADISEIDÆ. 82. PARADISEINÆ. . . 1:00, DOREATIS 794. Cicinnurus, Vieill. — | 705. Raraises, L.— 796. Xanthe- melus, Bp. — 797. Diphyllodes, Less. — 798. Lophorina, Vieill. — 799. Parotia, Vieill. 83. ASTRAPIINE.. à AUD cEANA. 800. Astrapia, Vicill —_ 801. FRE Le B£. CPRPRIGARNE AU te 2 0 ENT ONCE, 802. Phonygama, Less. 28. GLAUCOPIDÆ. 85. GLAUCOPINE. . . . +01 +: Ole, 803. Corcorax, Less. — goë, be Gn. — 805. Neomorpha, Gould, — 806. Creadion, Vieill. 25 40 60 CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIX, 125; 99, MELIPHAGIDÆ, 86. MELIPHAGINÆ. . rya) SE — AS EME mi ADc. 75 807. D opiorigichue Vig. — 808. Leptornis, Hombr. — 809. Xanthotis, Less. — 810. Moho, Less. — 811. Entomyza, Sw. — 812. Acanthogenys, Gould. — 813. Prosthemadera, Gr. — 814. Anthochæra, Vig.—815. Anellobia, Caban.— 816. Ma- norhina, Vig. — 817. Foulehajo, Reich. — S18. Sericulus, Sw. — 819. Meliphaga, Lewin. — 820. Hypergerus, Reich. — 821. Lichenostomus, Cab. — 822. Pogonornis, Gr. — 823. An- thornis, Gr. — 824. Ptilotis, Sw. — 825. Lichmera, Cab. — 826. Meliornis, Gr. — 827. Glyciphila ; Sw.— 828. Entomo- phila, Gr. — 829. Conopophila, Reich. SAUMELITEREPTINE, =. : te. 4.1 OCeanids 12 830. Plectrorhyncha, Gould. — 831. Melithreptus, Vüeill. — 832.Hæmalops, Bp.— 833. Eidopsarus, Sw. 88. MyzoMELINE. . EME 4€ . . Oceania. 15 834. A erquotns, Goutd. —835. Myoniel, Vig.—836. Cis- somela, Bp. — 837. Certhionyx, Less. 30. ARACHNOTHERIDÆ. SJ ANACHNOTHERINE LC 0. Oran. 5 838. Arachnothera, Term. . PHYLLORNITHIDÆ. 90. PHyLLORNITHINE. . 2e SAS me (OE 390 839. Philopitta, Js. Goofir. _g0. ACTU Boie.—8%1. Yuhina, Hodgs. — 842. Mizoruis, Hodgs. — 843. Ixulus, Hodgs. — 84%. Jora, Hors. - LosTEROPIXÆ. . un. . AIT. AS. UC. 20 dr Zosterops, Vig. — 846. Free Bp.— 847. Cyclopte- rops, Hp. — 848. Orosterops, Bp. 32. NECTARINIIDEÆ, 08 Pnau; ce, PEU, me MAS: AMEN. FER Ar ICaT 1 849. Püloturus, Suw. 93. NECTARININE. . . “IAE MAT "Oc. 90 850. Nectarinia, JL. — 85. ‘Atatttiéihre, Cub. — 852. Cinnyris, Cuv. — 853. Adelinus, Bp. — 854. Anthodiæta, Cab. — 855. Mangusia, Bp. — 856. Anthobaphes, Cab. — 857. Pa- næola, Cab. — 858. Hedidypna, Cab. — 859. Leptocoma, Cab. — 860. Æthopyga, Cab.—861. Chalcoparia, Cab.— 862. Chal- costetha, Cab, — 863.Cyrlostomus, Cab. 42/ C.-L. RONAPARTE, 9%, ANTHREPTINE. . . . . « As. Ocean. 864, Anthreptes, ee 865. Er Less 33. DREPANIDÆ. 95. DREPANINE. . . EE. NE As Ocean. 866. Drepanis, Temm, — | 867. Himatiôné: Caban. — 868. Hemi- gnathus, Lich. 34. DICÆIDÆ. 96, Dicænz, . . . ; . . As, Ocean. 869. Dicæum, Cuv. __ 870. rte Strickt, — 871. Pachy- glossa, Hodgs. — 872. Myzanthe, Hodgs. 35. CÆREBIDÆ. 97. CÆREBINE. , . SPORE A MENICA: 873. Cæreba, Vieill, 7 es Wagl. 98. DacniDiNx. . . DOM AMETICA. 875. Certhiola, Sur! — 876. Dati; Cuv. — 877. Coniros- trum, Orb. Sürps 5. DENTIROSTRES. 36. LANIIDÆ. 99. Maracoxorix. . RL ET PR ATIC AE a. Vangeæ. — 878. FAT Vieill. — 879. Xenopirostris, Bp. — 880. Arltamia, Lafr. — 881. Archolestes, Cab. b. Malaconotezæ. — 882. Chlorophoneus , Cab. — 883. Pelici- nius, Boie. — 884. Laniarius, Boie. — 885. Telephonus, Sw. — 886. Harpolestes, Cab. — 887. Malaconotus, Sw. — 888. Chaunonotus, Gr.— 889. Hapalophus, Gr.— 890. Rhyn- chastatus, Bp. — 891. Dryoscopus, Boie. — 892. Nilaus, Sw — 893. Calicalicus, Bp. 100. PrRiONorINX. . COCO AÎTIC. UCEAN. 894. Eurocephalus, Smith. 895. Sent Temm.— 896. Prio- nops, Vieill. — 897. Fraseria, Bp.— 898. Tephrodornis, Sw. — 899. Cabanisia, Bp. … LANUNÆ. : . of. 0-2 COSMONe a. Corvinellese.— 900. Une Cab. — 901. Corvinella, Less. b. Lanieæ. — 902. Lanius, L. — 903. Fiscus, Bp. — 904. Col- 20 12 15 60 15 CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ, lurio, Bp. — 905. Otomela, Bp. — 906. Phoneus, Zp. — 907. Leucometopon, Bp. — 908. Enneoctonus, Baie. 402. PacayCEPHALINÆ. . . As. Oceania. 909. Colluricincla, Vig. En RaAet Reich. — 911. Falcuncu- lus, Vieill. — 942. Pteruthius, Sw. — 913. Allothrius, Temm. — 91%. Pucherania, Bp. — 915. Pachycephala, Sw. — 916. Timixos, Blyth.—917. Psaltricephus, Zp.— 918. Eopsal- tria, Sw. — 919, Hyloterpe, Cab. 103. ViREONINE. . . UT CE Tr UrATMercd. 920. Cyclorrhis, Sw. — _ 921. Vireolanius, Dubus. — 922, Vireo, Vieill. — 923. Vireosylvia, Bp. — 924. Hylophilus, Temm. 37. ARTAMIDÆ. 104. ARTAMINÆ. . . nu CAsidime Air 925. Artamus, Veil. —_ 926. ra Cuv. — 927. ue toplerus, Bp. — 928. Cyanolanius, Bp. — 929. Tephrola- nius, Bp. 105. ANALCIPODINE. « :« + . Asiam, Oc.Madag. 930. Analcipus, Su. | — 931. Anais, Less. — 932. Psaropholus, Jard. — 933. Oriolia, Zs. Geoffr. 38. ORIOLIDÆ. 106. OnIOLINÆE.. . . « -. Eur, As. Afr, Oc. 934. Oriolus, L. — 935. Galbulus, Bp. — 936. Broderipus, Bp. — 937. Baruffius, Zp.— 938. Xanthonotus, Bp. — 939. Mi- meta, Pig. — 940. Sphecotheres, Vieill. 39. EDOLIIDÆ. 12 Er 510 . 7. As vAtr: OC: . Chibia, Hodgs. — 942. faute, Bp. — 943. Dicrano- ee Reich. — 944. Edolius, Cuv.— 945. Bhringa, Hodgs. —946.Chaptia, Hodgs.—947. Dicrourus, Vieill.—9%8. Drongo, Less. — 939. Musicus, Reich. — 950. Buchanga, Hodgs. —- — 951.1rena, Horsf, — 952. Prosorinia, Hodgs. — 953. Edo- lisoma, Pucheran, A08. CEBLEPYRINE. , , Sie MAS AT 954. Pteropodocys, Gould. — _ 953, telle. Cuv.— 956. Ph pephaga, Vieill. — 957. Oxynotus, Sw, — 958. Ptiladela, Pucheran. — 959.Ceblepyris, Cuv. — 960. Volvocivora, Hodgs. — 961. Lanicterus, Less. —962.Lobotos, Reich.—963.Symmor- phus, Gould.— 964. Lalage, Boie.— 965. Pericrocotus, Boie. 195 40 ce 30 50 60 126 C.-L. BONAPARTE. 40. AMPELIDÆ. 109. Auexcite. nenuel ZE m6 ut sort Eur: As. :Afr. Am. 40 966. Ampelis, L. — 967. Hypocolius, Bp. — 968. Lepturus, Less. — 969. Ptilogonys, Stw. — 970. Cichlopsis, Cab. — 971. Myiadestes, So. 41, MUSCICAPIDÆ. 110. MOnARCHINÆ . . . M aosiEstAfr. Oc. 20 972. Xenogenys, Cab. — 973. metmnoiid Gr.— 974. Melano- pepla, Cab.— 975. Chasiempsis, Cab.— 976. Metabolus, Bp.— 977. Pomarea, Bp.— 978. Piezorhynchus, Gould.—979. Sym- posiachrus, Bp. — 980. Monarcha, Pig. — 981. Arses, Less. — 982. Philentoma, Æylon. — 983. Anthipes, Blyth. — 984. Dimorpha, Hodgs. — 985. Ochromela, Blyth. AAA. MuüscicariNz. . +. 2.7 Eux As Aïe Oc 250 986. Glaucomyias, Cab. __ 987. Cyanoptyla, Blyth. — 988. Eu- myias, Cab. — 989. Cyornis, Blyth. — 990. Hemipus, Blyth. _—— 991. Hemichelidon, Boie. — 992. Muscicapula, Blyth. — 993. Muscicapa, L. — 99%. Butalis,, Boie. — 995. Micræca, Gould. — 996. Alseonax, Cab. — 997. Charidhylas, Bp. — 998. Erythrosterna, Bp. — 999. Xanthopygia, Blyth. 112. MyraGRiNE. . . : atats « Afr. AS O0 M0 1000. Terpsiphone, Gtoger. 001. Tschitrea, ‘Less. —1002.Masci- peta, Cuv.— 1003. Trochocercus, Cab. — 100%. Elminia, Bp. —1005. Rhipidura, Vib.—1006. Leucocerca, Sw.-—1007. Sau- loprocta, Cab.— 1008. Seisura, Vig.— 1009. Cryptolopha, Sw. — 1010. Chelydorynx, Hodgs. — 1011. Myiagra, Vig. — 1042. Bias, Less. — 1013. Hypothymis, Boie. — 1014. Hy- liota, Suw. — 4015. Platystira, Jard. — 1016. Muscisylvia, Less.— 1017. Todopsis, Bp. — 1018. Stenostira, Bp. — 4049. Culicivora, Sw. 42. TANAGRIDÆ. 113. TACHYPHONINE. » . OO MERE AMEN. MOD a. Ramphoceleæ., — 1020. Sc Less. — 1021. Lam- protes, BI. — 1022. Ramphocelus, Desmar, — 1023. Jacapa, Bp. — 1024. Ramphopis, Vieill. b. Tachyphoneæ. — 1025. Pyranga, Vieill, — 1026. Phænico- thraupis, Caban. — 1027. Tachyphonus, Vieill. — 1028. Tri- chothraupis, Cab. — 1029, Lanio, Vieill, — 1030, Comaropha- gus, Bl. — 1034. Icteria, Vieill. — 1032, Orthogonys, Strickl, — 1033. Cyanicterus, Bp. CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGLE. 127 AAA. TANAGRINE. . . . . : America. 100 C. Tanagresæ.—103#. | Bathryis, Cab. 1035. Dubusia, Bp. — 1036. Tanagra, L.—1037. Spindalis, Jard.—1038. Anisogna- thus, Reich. — 1039. Stephanophorus, Strickl. —- 1040. Iridor- nis, Less, d. Callistese. — 1041. Callispiza, Bp. — 1042. Chalcothraupis, Bp. — 1043. Tatao, Bp.—10#4. Thraupis, Bp.— 1045. Cal- liparæa, Bp. — 1046. Chrysothraupis, Bp. — 1047. Calliste, Boie. — 1048. Ixothraupis, Bp. — 1049. Gyrola, Reich. — 1050. Tanagrella, So. 145. Eupuoxixx. . . De DAIMENCA 30 e. Euphoneæ.— 1051. To. V'ieill — 1052. Pipreola, Sw. — 1053. Procnopis, Cab. — 1054. Cyanophonia, Bp. — 1055. Chlorophonia, Bp.— 1056. Ypophæa, Bp. —1057. Pyr- rhuphonia, Bp.— 1058. Acroleptes, Schiff. —-1059. Euphona, Desm. — 1060. Iliolopha, Zp. 116. SyLvicouixx. . ; . . America. 100 f. Nemosiezæ. 1061 2 ? Ægithina, Vieitt. _1062. Nemosia, Vieill. — 1063. Hemithraupis, Cab. — 1064. Granatellus, Bp. — 1065. Cardellina, Bp. £. Helmithereæ.— 1066. Helminthophaga, Cab. — 1067. Hel- mintheros, Raf. h. Setophageæ.— 1068. Basileuterus, Cab.— 1069. Setophaga, Sw.— 1070. Myiodioctes, Aud. — 1071. Euthlypis, Cub. i. Sylvicoleæ. — 1072. Seiurus, Sw.—1073. Sylvicola, Sw. — 1074. Pachysylvia, Bp. — 1075. Thaumasioptera, Schif. — 1076. Mniotilta, Vieill. — 1077. Rhimamphus, Rafin. — 1078. Myiothlypis, Cab. — 1079. Parula, Bp. — 1080. Tri- chas, Sw. Stirps 6. FISSIROSTRES. 43. HIRUNDINIDÆ, 147. HiruxniniNÆ. . . . « . Cosmop. 70 a. Hirundineæ. — 1081. an, 4 4082. Cecropis, Boie. — 1083. Uromitus, Bp. — 1084. Atticora, Boie. b. Prognete. — 1085. Progne, Boie. — 1086. Petrochelidon, Cab.—1087. Tachycineta, Cab.—1088. Psalidoprocne, Cab.— 4089. Ptyonoprogne, Reich. — 1090. Cheramoeca, Cab. — 1091. Cotyle, Boïe, — 1092, Chelidon, Boie, ——— 3,500 198 C.-L. BONAPARTE, Tribus IF. VOLUCRES. Cohors 1. ZYGODACTILI. Sürps. 7. AMPHIBOLI. 44. RHAMPHASTIDÆ. AUS. RHAMPHASTINE. , , , + . « … Amer.calid. 50 1093. Rhamphastos, L. — 1094. us Ill. — 1095. An- digena, Gould. — 1096. Selenidera, Gould. — 1097. Aulaco- rampbus, Gr. — 1098. Beauharnesius, Bp. 45. CUCULIDÆ. AO ENDEROPINR nur UCERT A 1099. Scythrops, Lath. 420. PHæÆNICOPHÆINÆ. . , , , . . . Amer., Afr., Ocean. 20 4100, Carpococcyx, Gr. — 1101, Rhinortha, Vig. — 1102. Dasy- lophus, Sw. — 1103, Lepidogrammus, Reich. — 1104. Phæni- cophæus, Vieill, — 1105, Melias, Glog. — 1106. Zanclosto- mus, Sw. 171: CROTOPHACINE OO RES CURE, OO ANT MON: A6 1107, Crotophaga, L. 422. CENTROPODINÆ 4 , d AA: LU AS Afrs, (OC: 225 1108. Taccocua, Less. — 1 109. oops, LU, — 1110, Coua, Cuv. — 1111. Serisomus, Sw, 423. SAUROTHERINÆ. . . . SM 000 à - AE CAO, D 11149, Saurothera, Vieill. — 1113. el Wagl. RACONTER rs nt à: RON AlIPIICA MOS 1144. Cultrides, Pucheran. — 1115, Diplopterus, Boie. — 1146. Ptiloleptis, Sw, — 1117. Guira, Less. — 1118. Piaya, Less. — 1119. Coccyzus, Vieill, — 1120. Dromococcvx, Wagl. 126.-Cüeconinxs C0 ce À Ut ZT > Eumiestäfr OC. 50 1121. Eudynamis, Vig. — 1122. Oxylophus, St. — 1123. Cu- culus, L. — 1124. Cacomantis, Müll, — 1125. Hierococcyx, Müll,— 1126. Surniculus, Less, — 1127, Lampromorpha, Vig. 1128. Chrysococcyx, Boie. — 1129, Chalcites, Less. A6 TNDICATORNINE Ne EN TURC MR ANAS: AT OC, MR 1130, Indicator, Vieill, CONSPECTUS SYSTÉMATIS ORNITHOLOGIÆ. 199 Stirps 8. SCANSORES. 46. PICIDÆ. 427: Picnæ. ... , . , . . Eur. As. Afr. Am. Malaias. 243 a. Piceæ. — 1131. Dryotomus, Sw. — a. Megapicus, Malh. — b. Dryolomus, Sw. — c. Campephilus, Gr. —*1132. Rein- wardlüpicus, Bp.— 1133. Hemilophus, Sw. —*a. Mulleripicus, Bp. — *b. Lichtensteinipicus, Bp. — c. Hemilophus. Bp. — 1134. Dryocopus , Boie. — 1135. Dryopicus, Malherbe. — “1436. Pilumnus, Bp. — 1137. Picus, L. — *a. Dyctiopicus, Bp. — *b. Phrenopicus, Bp. — *c. Trichopicus, Bp.— *d. Pipri- picus, Bp.—e. Picus, Bp. — *f. Hypopicus, Bp. — *g. Leiopi- cus, Bp. — “h. Yungipicus, Bp. — 1138. Picoides, Lacép. — a. Apternus Sw. — b. Tridactylia, Stephens. b, Celeæ.— 1139. Celeus, Boie.— *1140. Cerchneipicus, Bp. — “4141. Blythipicus, Bp. — 1142. Micropternus, Blyth. — 1143. Meiglyptes, Sw. — 1144. Hemicercus, Sw. c. Chrysoptileæ. — + African. — 1145. Dendropicus, Malh. — 1146. Campethera, Licht. — 1147. Mesopicus, Malh. — 1148. Dendromus, Sw. — *1149. Pardipicus, Bp. ++ Americanæ. — 1150. Chrysoptilus, Sw,— 1151. Chryso- pieus, Malh. — 1152. Chloronerpes, Sw, — 1153. Veniliornis, Bp. — *1154. Capnopicus, Bp. d. Tigeæ. — 1155. Chrysocolaptes, Blyth. — 1156. Brachypter- nus, Strikl. — 1157. Tiga, Kaup. — 1158. Chrysonotus, Sw. — 1459. Gecinulus, Sw. e. Gecineæ. — 1160. Gecinus, Boie. — 1161. Chrysophlegma, Gould. — 1162. Brachylophus, Strickl.— *1163, Callipicus, Bp. f. Centureæ. — 1164. Leuconerpes, Sw. — 1165. Melanerpes, Sw. — 1166. Tripsurus, Sw. —*1167. Xiphidiopicus, Bp. — 1468. Centurus, Sw.—*1169. Zebripicus, Malh.— 1170. Lin- næipicus, Malh. £. Colapteæ. — 1171. Colaptes, Sw, —”*1172. Pituipicus, Bp. — 1173. Geocolaptes, Burch. — *1174, Hypoxanthus, Bp. — “1475. Malherbipicus, Bp. APS AO" © eu de ce oO + +: Eur AswAr DE 4176. Yunx, L. 129. PICUMNINE. . . + + + As. m. Oc. Am. m. 15 4177. Picumnus, Tonus —- 178. Piculus, /s. Geoffr.— 1179. Mi- crocolaptes, Gr. — 1180. Asthenurus, Sw, — 41181. Vivia, Hodgs. — 1182. Sasia, Hodgs. 4° série, Zoou. T. I. (Cahier n° 3.) ! 9 130 €.-L. BONAPARTE, Stirps 9. BARBATI. 47. BUCCONIDÆ. 130. BuccoNNE. . . LOC o-uAs: Aïr. Oc. Ami HO 1183. Pogonias, ZI. —-1184, Læmodon, Gr. —1185. Gymno- bucco, Bp.— 1186. Xylobucco, Bp. — “1187. Tricholæma, Verr.—1188. Trachvphonus, Ransani.—1189.Barbatula, Less. — 1190. Psilopogon, Mull. (Buccotrogon, Reich) — 1191. Psilo- pus, Temm.—1192. Bucco, L.—1193, Megalæma, Gr.—a. Cho- torea, Bp.— b. Megalæma, Bp. — c. Cyanops, Bp.— d. Xantho- læma, Bp.— 119%. Micropogon, Temm,.— 1195. Eubucco, Bp. 48. CAPITONIDÆ. 131. CaplTONINX. . . Se AIG. mi: 30 1196. Capito, Temm. — Ho7. Gand" Gr. — 1198. Ta- matias, Cuv. — 1199. Nyctastes, Strickl. — 1200. Malacop- tila, Gr.— 1201, Scotocharis, Gloger.-— 1202. Monasa, Vieill. — 1203. Chelidoptera, Gould 49. LEPTOSOMIDÆ. LS TE MDERLOSOMINR PRE 2 sue er irs + Ce fONAUIPASCAT. CA 120%. Leptosoma, Suw. 50. GALBULIDEÆ. ASS EAEEUNNES 0 - D à LG 1205. Jacamerops, Cuv. -— 1206. Galbula, L, — *1207. Uro- galba, Bp. — “1208. Brachygalba, Hp. — 1209. Gabalcyrhyn- chus, ©. des Murs. — 1210. Jacamaralcyon, Cuv. Stirps 10 HETERODACTYLI. 51. TROGONIDÆ. 434. TnoGONINæ. . -. . . 1.1 Amer. valid. As. Afr. Oc. 48 1211. Calurus, Sw.—a. Pharomachrus, De la Llave.— b. Cosmu- vus, Reich.— 1212. Trogon, L— a. Trogon, L.— b. Curucujus, Bp. — c. Trogonurus, Bp.— d. Temnotrogon, Bp.—1213. Prio- telus, Gr.— 1214. Apaloderma, Sw. — 1215. Harpactes, Sw. — à Harpactes, Bp. —*h. Duvaucelius, Bp. — *€, Pyrotrogon, Bp. — #*d. Oreskios, Bp. — *e. Apalharpactes, Bp. 625 Cohors 2. ANISODACTYLI. Sürps. 11. FRUGIVORI. 52, BUCEROTIDÆ. 135. BucerorINx. : .: PRET ARS APPART EN. AS a. Bucorvetæ. — 1216. Suérbbe Bp. b. Buceroteæ. — *1217. Ceratogymna, Bp.—1218. Tmetoce- ros, Cab, — 1219. Berenicornis, Bp, — 1220. Buceroturus, 54. 55. 56. 57. CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ. Bp. (Cranocerus, Reich.) —1221, Buceros, L.— *1222. Homraius, Bp. — 1223. Hydrocorax, Briss, — 1224. Hydrocissa, Bp. — a. Anthracoceros, Reich. — D, Anorrhinus, Reich. — 1225. Rhyticeros, Reich. — a, Aceros, Hodgs. — b. Cassidiæ, Bp. — c. Rhyticeros, Bp. e. Tockeæ. — 1226. Calao, Bp. — 1227. Penelopides, Reich. — — 1228. Meniceros, Glog. — 4229. Rhinoplax, Gloger. — 1230. Grammicus, Reich, — 41231. Rhynchoceros, Glog. — 1232. Tockus, Less. 136. EunyceronNæ, . . . . . . . . . . Madagascar. 1233. Euryceros, Less . MUSOPHAGID Æ. 137. MusoPnaAGINE. . . crise Affica. 1234. Musophaga, Isert.— 1235. Gallirex, ue — 1236. Tura- eus, Cuv. — 1237. Opæthus, Vieill. — 1238. Corythaix, Il. — 1239. Coliphimus, Smith. — 1240. Schizorhis, Wagl. OPISTHOCOMIDEÆ. 438. OPISTHOCOMNÆ. . . rm me as < NAm/Mmorid, 1241. Opisthocomus, Veil. COLIDÆ. 139. Couxx. . . : ee M AITICAS *1242. Urocolius, Bp. — 1243. Colius, Br. — *1244, Rhabdo- colius, Bp. PHYTOTOMIDE, 140. PuyTOTOMINE. . . AN pm le a te AINON NOT: 1245. Phytotoma, Molina, Stirps 12. FORMICIVORI. MENURIDÆ. Al Menoante MN nou, UC, md G0b} 4Australdsia. 1246. Menura, Davis. ABONNEMENT 008 ee RU MENT (OCEAN IA. 1247. Orthonyx, Temm. . MYIOTHERIDÆ. 143. MYIOTHERNÆ. . . Amer. merid. a. Hylaeteæ, — 1248, ay King. _yao. Pteroptochus, Kiuti. — 1250. Rhinocrypta, Gr. — 1251. Triptorhinus, Caban. — 1252. Sarochalinus, Caban. — 1253. Scytalopus, Gould. — 1254. Sylviaxis, Less. b. Myiotherezæ. — 1255. Grallaria, Vieill, — 1256. Colobathris, Bp,exCab.— 14257. Hipsybemon, Cab. 1258. Chamæza, Vig. 131 14 90 132 C.-L. BONAPARTE. 1259. Holocnemis, Strickl. — 1260. Hypocnemis, Cuban, — 1261. Myiothera, JU. — 1262. Drymophila, Sw.— 1263. Pi- thys, Vieill 1264. Gymnopithys, Schif.—1265. Corythopsis, Sundev. — 1266. Conopophaga, Vieill. — 1267. Pyriglena, Ca- ban. — 1268. Chamæa, Gambel. 144. THAMNOPHILINE. . . HR Tr MAmier/fmerid. a. Thamnophileæ.— 1969. Tone Eine Vieill.—1270. Cym- bilaimus, Gr,— 1271. Diallastus, Reich —1272. Nisius, Reich. — 1273. Batara, Less. — 1274. Taraba, Less. b. Dasycephaleæ. — 1275. Agriornis, Gould. — 1276. Dasy- cephala, Sw.— 1277. Altila, Less.— 1278. Dysithamnus, Cab. —1279. Thamnolanius, Less. C. Formicivorezæ. — 1280. Formicivora, Sw. — 1281. Rhopo- terpe, Caban. — 1282, Herpsilochmus, Cab. — 1283. Ellipura, Cab. — 1284. Tænidiura, Reich. — 1285. Thamnomanes, Cab. 1286. Rhamphocænus, Vieill. {Acontistes, Sundeu.) 59. ANABATIDÆ. 145. ANABATINÆ. . . , : : . . Amer. merid. 1287. Anabates, mme. — 1288. ren Reich. — 1289. Automolus, Reich. — 1290. Homorus, Reich. — 1291. Pseudoseisura, Reich. — 1292. Siptornis, Reich. — 1293. Leptoxyura, Reich. 446. SYNALLACINÆ. . . Die ar nrAm im: 1294. ta tas à Reich. — 1295. des, Reich. — 1296. Cranioleuca, Reich.—1297. Oxyurus, Sw. — 1298. Me- lanopareia, Reich.—1299. Bathmidura, Cab.—1300. Anumbius, Less. — 1301. Leptostenura, Reich. — 1302. Synallaxis, Vieill. — 1303. Sylviorthorhynchus, ©. des Murs. 447. FURNARINE. . . . -MOTATAENE 1304. Philydor, Less. — = 1305. Heliobletus, Reich. — 1306. Rho- dinocycla, Harll. —1307. Furnarius, Vieill. — 1308. Ocheto- rhynchus, Meyen.—1309. Henicornis, Gr.— 1310. Limnornis, Gould.— 1314. Thelydrias, Reich. — 1312. Tartarea, Reich. — 1313. Cinclodes, Gr. — 1314. Opetiorrhynchus, Temm. — 4315. Cillurus, Reich.—1316. Upucerthia, Geoffr.—1317. Cin- clocerthia, Gr.—1318. Geobates, Sw.— 1319. Geositta, Sw. 188. XENorINæ. | 7. … à 1-09}. Aer. m} 1320. Xenops, Jllig.— 1321. Aehofs, Lafr.— 1322. Thri- pophaga, Caban. —1323. Pseudocolaptes, Reich. —1324 Mar- garornis, Reich. — 1325. Sclerurus, Sw. —1326. Lochmia, Sw. — 1327. Pygarrhicus, Licht. (Dendrodromus, Gould. — Dromo- dendron, 6r.)— 1328. Oxyramphus ! Sw. 70 75 100 100 16 CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ. 133 60. DENDROCOLAPTIDÆ, ARS DEDEOCOADENNE. Le AOL 0 deu Amers cal. 80 a. Dendrocolapteæ. — 1329. Dendrocolaptes, Herm. — b. Xiphocolaptes, Less. — 1330. Cladoscopus, Reich. — 4331. Lepidocolaptes, Reich. — 1322. Picolaptes, Less. — *#1333. Dacryophorus, Bp. — 1334. Xiphorhynchus, Sw. — 1335. Drymornis, Less.— 1336. Nasica, Less. — 1337. Den- drornis, Eyt.—1338. Dendroplex, Sw. — 1339. Neops. Vieill, (Glyphorhynchus, Wied.) — 1340. Sittasomus, Sw. b. Dendrocopeæ. — 1341. Dendrocops, Sw. — 1342. Dendro- cincla, Gr. — 1343. Dendroxetastes, Eyt. Stürps 13. MUSCIVORI. 61. TODIDÆ. 150. TÆNIOPTERINE. , , . « =: =: Amer. mer. et centr, 100 4. Alectorureæ. — ET Alectorurus, Vieill. — 1345. Guber- netes, Such. b. Tænioptereæ, — “1346. Ixoreus, Bp. — 1347. Tænioptera, Bp. — 1348. Pepoaza, Asara. — 1349. Ochthæca, Cab. — 1350. Machetornis, Gr. — 1354. Suiriria, Reich. — 1352, Flu- vicola, Sw. —1353.Myiophila, Reich. — 1354. Muscisaxicola, Lafr. (Piyonura, Gould.) — 1355. Cnipolegus, Boie.— 1356. Ada, Less. — *1357. Hydrozetetes, Schiff. — 1358. Lichenops, Commerson. — 1359. Muscigralla, Lafr. (Ochthites, Caban.) — 1360. Euscarthmus, Wied. — 1361. Colopterus, Cab. — 1362. Centrites, Cab. — 1363. Hapalicercus, Caban. — 1364. Myiosympotes, Reich. — 1365. Cyanotis, Sw. — 1366. Anairetes, Caban. c. Platyrhyncheæ. — 1367. Todirostrum, Less. — 1368. Ser- pophaga, Gould. — 1369. Phoneuticus, Cab. — 1370. Platy- rhynchus, Desmar. 454. TYRANNINE. . . : s … .…. America 250 a. Milvuleæ. — 1371. tt, Str ickl. -- 1372. Milvulus, Sw. — 1373. Despotes, Reich. — 1374. Muscipipra, Less. bp. Tyrannez. — 1375. Scaphorhynchus, Wied. — 1376. Sau- rophagus, Sw. —1377. Dioctes, Reich.—1378. Satellus, Reich. — 1379. Tyrannus, Vieill. — 41380. Lophyctes, Cab. — 1381. Onychopterus, Reich. — *1382. Myiodynastes, Bp. — 1383. Arundinicola, Lafr.— *1384. Syrichta, Bp. —1385. Ty- rannula, Sw. — *1386, Capnixus, Bp. — *1387.Sayornis, Bp. — "1388. Kaupornis, Zp. — 1389. Myiarchus, Bp. — 1390. Mviacleptes, Caban. — 1391, Pyrocephalus, Gould. — 134 C.-L. BONAPARTE. 62. 63. “1392. Myiozeta, Schif. — *1393. Sericoptila, Schif: -= 1394: Ekenia, Sundeval. — 1395. Leptopogon, Cabhn. — 1396. Hirundinea, Orb. — 1397. Myionectes, Céban. — 1398. Hapälura, Cabañ, — 1399. Tyrannülus, Vieill. c. Cychlorhyncheæ. — *1400. Pipromorpha , Schiff. — *1404: Myiocapla, Schiff. — 1402. Myiobius, Gr.— 1403. Me- galophus, Sw. — 140%, Onychorynchus, Fisch. — 1405. Cy- chlorhynchus, Sundev. 452. Tonnx. . . UE Et, A CUT ANET: Calid: 106. Todus, 4 153. Psannx. . NRA Mer CAlId. 4407. Tityra, V'ieill,—#1408, | RÉRLAEtEES Bp.— 1409. Erator, Kaup. — 1410. Pachyramphus, Gr. — *1411, Platypsaris; Bp. — 1412. Psaris, Cuv., — 1413, Chloropsaris , Kaup. — *1414. Callopsaris, Bp. COTINGIDÆ. 154. LiPAUGINE. . . : + + Amer: fnerid. 1415. Lipaugus, Boie. — 416. Labo Siw. — *1417. Aulea, Schiff.— *1418. Schiffornis, Bp. 155. Queruuinx. . . . . Amëf. merid. 1419. Pyroderus, Gr. 1420, Gsraté, Vieil, — #1421. Hæma- toderus, Bp. 156. GYMNODERINE. . . D Pr ATIET MOI TE 1422. Gymnocephalus, Geofr. — 138. Ce phalopterus, Geoffr. — 142%, Gymnoderus, Geoffr. — 1425. Chasmorhynchus, Temm. — 1426. Arapunga, Less. 157. COTINGINE. . . . . Amer, merid. a. Cotingeæ. — 14 2. PEN Dr —1428. Euchlor- nis, De Filippi.—1429, Pülochloris, Sw.—1430. Tijuca, Less. —1431. Ampelion, Caban. (Carpornis, Gr) — 1432. Heliochera, De Filippi. — 1433. Phibalura , Vieull. — 1434. Xipholena, Gloger. — 1435. Cotinga, Br. —*| 436. Porphÿrolætia, Ep. b. Iodopleurezæ, — 1437. lodopleura, Less. PIPRIDÆ. 158. RuPICOLINE. : . + ANT - ATAMÉT: eMEr: 1438. Rupicola, Br. — 1439. A Sw, 169. 2Pirhinz all OMshren. AMG FX, L choméaurA mers icalid. 1&40. Antilophia, Reich. (Metopia, Sw.) — 1441. Masius, Bp. — 14%2. Manacus, Br, (Chiromachæris, Caban.) — *1443, Hetero- pelma, Schif.— 1444. Xenopipo, Caban.— * 1445. Chiroprion, L-] 30 10 CONSPECTES SYSTEMATIS GHNITHOLOGIÆ, Schiff. — 1446. Chiroxiphia, Cdban. — 1447. Hicuraà, Reich. = #i348. Cercophæna, Schiff. — 1449. Cirrhipipra, Bp. {Teleonema, Reich.) — *1450. Lepidothrix, Schiff.—#1 451. Pipra, L. — 1452. Dixiphia, Reich. — *1#53. Ceratopipra;, Bp. — *1454. Corapipo, Schiff. — *1455. Dasyncetopa , Schif. — #1456. Machæropterus, Schiff. — 1457. Hemipipo, Caban, — 1458. Piprites, Caban. —— 1459. Calyplurus, Sw. 64. EURYLAIMIDÆ. 160. CaLyPTOMENINE. . den QU À, Net FR IMalgjasia. 1460. Calyptomena, Rafftes. 161. EcnyLeuxEe. : . EL meAti fi Ov. 1461. Peltops, Wugl. — iu62. bärioiios, Siw. — 1463. Serilo- plus, Sw. — 1464. Cymbirhynchus, Vig.— 1465. Eurylæmus, Hofs[. — 1466. Corydon, Less. . 162:2BurAOaMTUINR + 2 , + 0 … .. —. (mm Africa 1467. Smitbornis, Bp. Stirps 14. CALLOCORACES (Callichromi). 65. PITTIDÆ. 163. Pine. . D RTS Ile UC, 1468. LS LA Th. (Pilta, he #a. Giganlipilla, Bp. — b. Brachyurus, Bp.—*c: Érythropitta, Bp.—*d. /ridipitta, Bp. —*e. Melanopitta, Bp.—1#%69. Pitta, Vieill. (Encycla, Reich.) 66. CORACHDEÆ. 164 Conacuns. . . . ., -. . + ŒEur. Afr.%481lnOetan. “1470. Coraciura, Bp. — 4471. Coracias, L. — 1472. Colaris, Cuv. — 1473. Eurystomus, VeilL. 165. AtELORNITINE. : . - . : Madagascar. 1#75. Brachypteracias, 28 — 1475. Ate lornis, Pucheran, 67. PRIONITIDÆE 166. Soins, 4 a LE PR NET calid. 1376. Crypticus, Su: — (477. Bioniss, [. — 1478. Barypho- nus, Vieill. — 1479. Hylomanes, Licht. | Sürps 15. GRESSORIT (Synductyli). 68. MEROPIDE. 167: Menoñixe. . . ct EMEA Mr: Oc. 1. Meropeze. — | 180. Métôps que a. Merops, Reich. —b. Ble- pharomerops , Reich. — c. Ærops, Then d. Urica, Bp. — e. Melillophas, Reich. — 1481. Phlothrus, Reich; 1 482: Me- litotheres, Reich. — 1483. Tephrærops , Reich, — 148%. Me- littophagus, Boie. — 1185. Sphecobus, Aeich, 139 30 30 136 C.-L, BONAPARTE, b. Nyctiornitheæ, — 1486. Coccolarynx, Reich. — 1487. Mero- piscus, Sund.—1488. Meropogon, Bp.—1489. Nyctiornis, Sw. — a. Nyctiornis, Reich. — b. Bucia, Hodgs. 69. ALCEDINIDÆ. 168. DAGELONINE. . . AE Ts tm AfryOcean. 1490. Dacelo, Leach. — 1491. Choucalcyon, Bp. — 1492. Me- lidora, Less, — 1493. Syma, Less. — 1494. Paralcyon, Bp. — 1495. Lacedo, Reich. — 1496. Actenoides, Hombr, et J. — 1497. Ciltura, Kaup. — 1498. Chelicutia, Reich. 469. HarcyonINÆ. . . . . . Eur. As. m. Afr. Ocean. 1499. Callialcyon, Be 1500. Cancrophaga, Bp.— 1501. Todi- ramphus, Less.—1502. Ispidina, Kp.—1503. Tanysiptera, Vig. —150%. Halcyon, Sw.— 1505. Ramphaleyon, Bp. — a. Ram- _phalcyon, Reich. — b. Hylcuon, Reich. — 4506. Ceix, Lacép. 170. ALGEDININE, . . . . + « Eur.As.Afr. Am. Oc. a. Ceryleæ. — 1507. MR CDIE, Kp. — *1508. Streptoceryle, Bp. — 1509. Ceryle, Boie. — 1510. Chloroceryle, Kp. — 4511. Amazonis, Reich. b. Alcedineæ. — 1512. Alcedo, L. — 15413. Corythornis, Kp. — 151%, Alcyone, Sw. (Therosa, Muil.) Stirps 16. TENUIROSTRES (Epopides). 70. UPUPIDÆ. ATASAURDERE M7 2 0e M 5 ue ee EU AENAIT 1515. Upupa, L. 71. PROMEROPIDÆ. 172. FALCULuNE. . . . . . . Madagascar, Ins. Borb. 1516. Falculia, Js. Geoffr. — 1517. Fregilupus, Less. 173. PROMEROPINÆE. . . sq 0er A tAfriCa. 4518. Promerops, Br. — ust0. Fa Lait — 1520. Rhinopo- mastes, Smith. Stirps 17. SUSPENSI (Trochili). 72. TROCHILIDÆ, 174. GryrINx. . . Ru de sec AIDET. Merid: 1521. Grypus, Spi. neue Less.) — 1522, Myiaëtina, Bp. (Eutoxeres, Reich.) — 1523. Glaucis, Boie. — 1524. Threnetes, Gould. — 1525, Doleromyia, Bp. (Leucippus.) 475. PHÆTORNITHINX. . . . . Amer. trop. 1526. Phætornis, Sw. __ 15970 Mnoiréisfis, Reich. —1528. Or- thornis, Bp. — 1529. Guyornis, Bp. — 1530. Pygmornis, Bp (Eremita, Reich.) 60 40 20 CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ. 476. LamPORNITHINX. . . . . Amer. mer. et centr. 4531. Topaza, Gr. — 1532. Oieotréiilue! Gould. — 1533. Eu- lampis, Boie. — b. Sericotis, Reich. — 1534. Lampornis, Sw. — a. Anthracothorax, Boie. — b. Hypophania, Reich. — c. Floresia, Reich. — 1535. Campylopterus, Sw. — a. Pampa, Reich. — b. Platystopterus, Reich. — c. Sæpiopterus, Reich. — d. Jonolæma, Reich. — 1536. Aphantochroa, Gould. — 1537. Petasophora, Gr. — a. Anais, Reich. — b. Delphinella, Reich. — 1538. Schistes, Gould. — 1539. Heliothrix, Boie. — 1540.Leadbeatera, Bp. (Heliodoxa, Gould.) 1: CYNARTAINR: . . . Amer. mer. et centr. a. Patagoneæ. — ET ans Gr. — 1542. Plerophanes, Gould. — 1543. Docimastes, Gould. b. Dorifereæ. — 1544. Heliomastes, Bp. — 1545. Ornithomyia, Bp. (Callopistria, Reich.) — 1546. Dorifera, Gould. (Hemistephania, Reich) — 1547. Helianthea, Gould. — b. Hypochrysia, Reich. — 1548. Bourcieria, Bp. — a. Conradinia, Reich.— b. Lam- propygia, Reich. — 1549. Cœligena, Bp. (Homophania, Reich.) — 1550. Lafresnaya, Bonap. — 1551. Chrysobronchus, Bonap. (Smaragdites, Reich. nec Boie) — 1552. Heliangelus, Gould. — 1553. Heliotryppha, Gould. (Parzudakia, Reich.) — 1554. Erioc- nemys, Reich. — a. Eriocnemys, Reich. — b. Aline, Reich. — c. Mosqueria, Reich. — d, Luciania! Reich. — *1555. Derbyo- miya, Bp. c. Cynanthezæ. — 1556. Lesbia, Less. (Cometes, Gould. — Sappho, Reich.) — 1557. Cynanthus, Sw. (Lesbia, Reich.) d. Metallureæ. — 1558. Oxypogon, Gould. — 1559. Lampro- pogon, Gould. (Chalcostigma, Reich.) — 1560. Aglæactis, Gould. — 1561. Ramphomicron, Bp. — 1562. Metallura, Gould. — 4563. Myiabeillia, Bp. (Guimetia, Reich) — 1564. Urosticte, Gould. — 1565. Augastes, Gould. — b. Lumachellus, Reich. — 1566. Adelomyia, Bp. 178. TrocHLINE. . . : he te MOT ICA. a. Florisugezæ. —_ 1567. ou Bp. — 1568. Delattria, Bp. (Lamprolæma, Reich) — 1569. Clytolæma, Gould. — a. Phæo- læma, Reich. — b. Boissonneaua, Reich. — 1570. Thalurania, Gould. (Glaucoypis, Boie, nec Gm.) — 1571. Eupetomena, Gould. (Prognoruis, Reich. b. Polytmezæ. — 1572, Polytmus, Br. C. Amaziliezæ. — 1573. Cyanomyia, Bp. (Uranomitra, Reich.) — 1574 Amazilius, Bp.— 1575. Chrysuronia, Bp. — 1576. Sau- 137 45 85 138 74. C.“L. BONAPARTE, cerottia; Bp. — 1577. Sporadinus, Bp. (Ricordia, Heiéh.) == 1578. Hylocharis, Boie. (chalybura, p. Reich) -— 4879. Chlo- rostilbon, Gould, — 1580. Thaumantias, Bp. — a. Thaüman- lias, Reich. — b. Leucochloris, Reich, — c. Margarochrysis, Reich. — 1581. Juliamyia; Bp. — 1582, Sapphironia, Bp. — a. Basilinna, Reich. ex Boie. — b: Cyanochloris, Reich. d. Avocettulezæ. — 1583. Avocettula, Reich. —1584. Avocetti- nus, Bp. €. Trochileæ. — 1585. Sephanoides ; Less. — a. Eustephanus, Reich. — b. Stokoesiella, Reich. — 1586. Chrysolämpis, Boie. —1587. Orthorhynchus, Lacép. (Smaragdites, p. Boie.)— 1588. Ce- phalepis, Loddiges. — 1589. Heliactin, Boie. — 1590. Loddi- giornis, Bp. (Loddigesia, Gould. — Muisantia, Reich.) — 1391. Spa- thura, Gould. (Steganura, Reich.) —1593. Discura, Bp.—1 593. Se- lasphorus, Sw. (Calliphlox, Reich. ex Boie.) — 1594. Trochilus , L. f. Mellisugeæ. — 1595. Thaumastura, Bp. (Tilmatura, Reich.) — 1596. Lucifer, Less. — a. Cyanopogon, Reich. — b. Cora, Reich. — c. Elisa, Reich. — 1597. Tryphæna, Gould. (Calliphlos, Boie.) — 1598. Callothorax, Gr. (Lucifer, Reich.) — 1599. Bellatrix, Boïe. — 1600. Lophornis, Less. — 1604. Gouldomyia, Bp.— b. Popelairia, Reich. — 1602. Mellisuga, Br. Stirps 48. HIANTES (Cypseli). . CYPSELIDÆ. 179. CYPSELINÆ. . . : - + . Cosmop. a. Dcattéentiaéarse. —- 1603. Défütochclidous Boie, b. Cypselezæ, — 1604. Pallene, Lesson. — 1605. Achanthylis, Boie. — 1606. Cypselus, /lliger. — 1607, Tachornis; Gosse. — 1608. Panyptila, Cab. 180 0BHoeAREN CE Le OU chaman 1148: 2m Oc. 1609. Collocalia, Gr. Sürps 49. INSIDENTES (Nocturhi). STEATORNITHIDÆ. ASA. STEATORNITHINE. . . ina apres PARAIT 1610. Sleatornis, Hubotdi. 75. CAPRIMULGIDÆ, 182. PopanciNÆ. . . ul s . . . Malaiasia, Oceania. 1611. Podargus , Casier. — i612. Batrachostomus, Gould. — 1613. Bombycisloma, Bp. ex Hay. 183, MECOTRENNESS 48 00: dis RE An Ed Mn 2 RTS DnAl. 1614, Ægotheles, Vig. 30 rs CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ. 1359 484. NyonBunx. . . : . : America. 50 a. Nyctibieæ. 1615. Pétlager , Wagt. 4616. Nyetibius ; V. b. Chordeileæ. — 1617. Chordeiles, Sw. — 1618. Lurocalis, Cass. — *1619, Nycliphrynus, Bp.— 1620, Antrostombs, G. c. Nyctidromeæ.,— 1621. Nyctidromus, Gould. — 1622. Ste- nopsis, Cassin. — 1623. Hydropsalis, Wagl. — 1624. Eleo- threptus, Gr. 185: CAPRIMULGINÆE. : . ÿ tint As. Afr. Oc. 40 1625. Scotornis, Siv:— 1626. lee: ne (Selochusa! Gr.) — 1627. Lyncornis, Gould, — 1628. Eurostopodus. Gould, — *1629. Nyctiprogne, Bp. — 1630. Caprimulgus, L. 1775 Ordo 4. INEPTI (/nertes). 76. DIDIDÆ. 186. EPxORNITHINE . . . . Extinct. Madagascar 3 1631. Epyornis, Jsidore Geoffr. _si6i2, Ornithaptera , Bp.— *1633. nue à Bp. 187. Dininx. . . 7" EXUNCE 2 1634. Didus, L. — 1635. Ptzobliaps, Strickland. É Ordo 5. COLUMBÆ (Gemitores). Tribus 4. PLEIODI. 77. DIDUNCULIDÆ. 188: DmuncuuinÆæ. . + . a ONeN:, cmenEerrÆftarEtic. 4 1636. Didunculus, Peale (Guathodon, Jard.—Pleiodus, Reich.) Tribus 2. GYRANTES. 78. TRERONIDÆ. 189. TRERONINE . . . ; . . As. Afr. Ocean. 30 “1637. Butreron, Fr — 1638 Sphdin, Bp.— 1639. Tre- ron, Vieill. — a. Toria, nus — b. Treron, Vieil — 1640. Vinago, Bp. ex Cuvier. 190. PriloroniNE. . . RARES UC: 20 *1641. Leucotreron, Bp. 632. Mantie 1 Bp.— 1643. Pü lopus, Sw. — 164%. Kurutreron, Bp.—*1645. Chrysæna, Bp. 191. ALECTRÆNADINE. . . . : . Madagascar, Sechelles 5 *1646. Chlamydæna, fs — 1647. Alectrænas, Gr. 79. COLUMBIDÆ. 92 NRHOLEURE 1. > à . + + esse AUSSI. À 1648. Lopholæmus, Gr. 140 80. 81. C,-L, BONAPARTE, 1693. Phænicopterus, L. 193. CARPOPHAGINÆ . . . . . As, Ocean. 30 1649. Carpophaga , Selby. _— 1650. A ere Reich. #1651, Hemiphaga, Bp. — 1652. Alsecomus, reel — 4653. Janthænas, Reich. — 1654. Zonænas, Reich. — *1655. Leucomelæna, Bp. — 1656. Myristicivora, Reich. 19%. CoLUMBINÆ . . . 0 CosMmop. 50 a. Columbeæ. — 1657. bibess ip: (Tæniænas, Reich.) — 1658. Dendrotreron, Hodgs.—1659. Columba, L. (Verrutia! Flem. — Craspedænas ! Reich.) — a. Lithœnas, Reich. — b. Chlorænas, Reich.— 1660. Stictænas, Reich. — 1661. Patagiænas, Reich. — 1662. Lepidænas, Reich.— *1663. Crossophthalmus, Bp. b. Macropygieæ. — 1664. Macropygia, Sw. — 1665. Tomo- peleia, Reich. — 1666. Reinwardtænas, Bp. — 1667. Ectopis- tes, Sw. 495. TuRTURINÆ. . . NE Enr: AS AVANT. OC. ©3930 1668. Turtur, Br. 1669. Peer Boie. — 1670. Geopeleia, Sw. — 1671. Tympanistria, Reich. — 1672. Sliclopeleia, Reich. — 1673. OEna, Selby. 496. ZENAIDINE. . , nor AMEN 2 1674. Chamæpelia, Su. +678. PAT UE Bp. — 1676. Ze- naida , Bp. — 1677. Columbina, Spiæ. — 1678. Starnænas , Bp.— 1679. Leptoptila, Sw. — 1680. Geotrygon , Gosse, — 1684. Oropeleia, Reich. 497. PHAPINÆ. . . Ho BALIMOCEANTRL ,524 1682. Trugon, Grosite, et Jacq. __ 1683. Phlegænas, Reich. — *1684. Pampusana , Bp. — 4685. Petrophassa, Gould, — 1686. Phaps, Selby.—1687. Leucosarcia, Gould. — 1688. Chal- cophaps, Gould. — 1689. Ocyphas, G. — 1690. Geophaps, G. CALLIÆNADIDÆ. TOR CAEDEENADINE Le 2 à 2e. ee ee OCR 1691. Calliænas, Gr. GOURIDÆ. ADO AUR EME LEr en ever + 1e ces lOMEICOANT 1692. Goura, Flem. 220 Ordo 6. HERODIONES. Tribus 1. GRUES. 2, PHÆNICOPTERIDÆ. 200! PHENICOPTERINÆE M. Le 2. M, 0000 MEur., AS, Afr.. AM 0 6 CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ, 83. M . GRUINE . . . tes MGM pol. en Grus, AE 1695. adtEoÉe! Reich.—*1696, Geranus, Bp. — 1697. Laomedontia, Reich. — 1698. Anthropoides, Vieill. — 1699. Balearica, Br. AOPMENNIENEN EM Po donnes joie . Amer. m. 1700. Euripyga, Jll. AURT ARAIUNE Le 20 ele ee 4 6 1e 4 see , ARE AMEN A704. Aramus, Vieill. 84. PSOPHIIDÆ, 204. PsOP&IINXE. . . ne de à dou RS A MET-qm 1702. Psophia, Marne. 85. CARIAMIDÆ. 205: Canuunx. : . . Hs le ee a AE». 1703. Cariama, Harar.C (Microdactylus, Geoffr.) 86. PALAMEDEIDÆ, 206. PALAMEDEINÆ. . . ; 4 « sheet tt AMEr. M. 1704. Palamedea, L. 1705. État, mu. — à. Chauna, Reich. — b. Ischyornis, Reich. — Hitchcockia, Reich. Foss. Tribus 2. CICONIÆ. 87. DROMADIDÆ. 207. DROMADINE. . . AUS ed Sa Air: 1706. Dromas, Paykull. 88. CICONIIDÆ. 208. Cicoxuxz. . . - -. - COSMONOL 4707. Argala, Leach. VX RE Temm.) — 1708. Ciconia, L. — a. Ciconia, Reich.—b. Melanopelargus, Reïich.— 1709. Spheno- rhynchus, Ehrenb.— 1710. Mycteria, L.— Pelarganazx, Reich. Foss. — Pelargides, Reich. Foss. 209. ANASTOMATINÆ . « | . Fee AS StAÎT. 4711. Anastomus, Bonnat. _ ya. Hiator, Reich. 89. ARDEIDÆ. DUO: AHDEINE. . . 2 . - + < + + 4f)G0SmMOpol 4. Ardeezæ. — *1713. Ardeomega, Bp. — 1714. Typhon, Reichenb. — 1715. Ardea, L. — 1716. Herodias, Bp. ex Boie. — 1717. Egretta, Bp.—1718. Agamia, Reich. —*1749. Bubul- eus, Pucheran. — 1720. Buphus, Boie. — 1721. Ardetta, Gr. — 1722. Ardeola, Bp. ex Boie. b. Botaurezæ., — 1723. Botaurus, Br. — 1724. Butorides, Hartl, — 1725. Tigrisoma, Sw. — *1726, Gorsakius, Bp. 141 1% 45 19 80 1h12 C.-L. BONAPARTE. c. Nycticoraceæ. — 1727. Pilherodius, Reich. — 1728, Nyc+ therodius , Reich. — 1729. Nycticorax , Br. aHstBoones las Non dabatrit A AU en entr dArica. 1 1730. Scopus, Br. 90. CANCROMIDÆ. AAATCRNCROMNZE à à à où à où np + 4 « + NoAmerm 1! 1731. Cancroma, L. 913. BALÆNICEPINÆ . . . Afr. 1 1732. Balæniceps, Gould. esta ‘Rojet T7 91. PLATALEIDÆ. QA£: PLATALEINA . . . . Eur.,'As., Afr., Amer., Oc. 8 4733. Platalea, L. — a. Platalea, Reich. —b. Spatherodia, Reich. c. Ajaia, Reich. — d. Leucerodia, Reich. 92. TANTALIDÆ. 245, TANTALINÆ . . Re Comme RAS, AMD AIT AE 1734. Tantalus, L. — a. tt, Reich. — b. Tantalides, Reich. — Tantaleus; Reich. Foss, — Talantatos, Reich. Foss. 2TD. INE, ie AT, C0 AG ANT AM OC A0 1735. Ibis, Cul TC (Threskiornis, Wagl.) — 1736. Nipponia, Reich. — 1737. Carphibis, Reich. — 1738. Inocotis, Reich. — 1739. Phimosus, Wagl. — 1740. Geronticus, Wagl, (Comatibis, Reich.) — 1741. Theristicus, Wagl. — 1742, Lopho- tibis, Reich. — 1743. Molybdophanes, Reich. — 174%. Bostry- chia, Wagl. — 1745. Harpiprion, Wagl. — 1746. Cercibis, Wagl. 217. Eunocun#. . . Met ee: UD, ASP A SU 1747. Eudocimus, Wagl. (Paribis, FR) ) — a. Leucibis, Reich. — b.Guara,Reich.—1748.Plegadis, Kaup. (Falcinellus, Bechst. nec Cuv.) 165 Ordo 7. GAVIÆ (Pelagici). Tribus 4. FOTIPALME (Steyanopodes). 93. PELECANIDÆ. 218. PELECANINÆ . … . 0) 1749. Pelecanus, L. — a. Oronawéilsl Reich. — b. aétigéirone licanus, R.— c. Leptopelicanus, R.—1750. Cyrtopelicanus, R. 219. PHALACROCORACINÆ. . . : . 30 1751. Phalacrocorax, Br. 1762. GaulS Atür, — 4758. a poleucus, Reich. — 1754. Haliæus, JL. CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ. 220. Suuxe. CR loi 1755. Sula, Br. — a. Plancus, Reich. ex Klein. —b, Sula, Reich, — 6, Piscatriz, Reich. — d. Dysporus, Reich. ex II. 9£. TACHYPETIDÆ. 221. Tacayrerixx DT EE 1756. Tachypetes, II. — Praneh rares: Reich. Foss. 95. PLOTIDÆ. ARR APIORRS mnt Qonlionel JAGE 2 A am AAC à 1757, Plotus, L, 223. HELIORNITHINE . . . : : 1758. Heliornis, Bonnat, — _ 1739, Podo, tu. —_ 1760. Podica , Less. — Deanea, Reich. Foss. 96. PHAETONIDÆ. 224. PHagtroxWnæ, . . ii ,# - 1761. Phaeton, L. — a. Me a het robin Moeh- ring.— €, Tropicophilus, Leach, Tribus. 2. LONGIPENNES. 97. PROCELLARIIDÆ. 225. DioMEDEINÆ. . . . . TR CRLTOSMOn: 1762. Diomedea, L. — a. ne, “Reich. —. b. Thalassarche, Reich. — c. Phæbelria, Reich. — d. Phæbastria, Reich. 226. PROCELLARIINE. . . 7... Cosrn0p. 4. Paffineæ. — 1763. Puffinus, Br. _—- 1764. Priofinus, Hombr. et J. — 1765. Thyellus, Gloger, — 1766. Ardenna, Reich. — 1767. Majaqueus, Reich. b. Procellarieæ. — 1768. Bulweria, Æp. — 1769. Thalassi- droma, Vig.— a. Thalassidroma, Bp. — b. Oceanodroma, Reich. 1770. Procellaria, L. — a. Oceanitis, Keiïs. et Blas. — b, Pe- lagodroma, Reich, — c, Procellaria, Bp. c. Fulmarezæ.—1771. Ossifraga, Hombr. et Jacq,—1772. Ful- marus, Leach. — 1773. Priocella, Hombr, — 1774. Daption, Stephens. — 1775, Prion, Lacép. (Pachyptila? 11.) d. Wagelleæ. —- 1776. Wagellus, Ray. — 1777 Rhantistes, Kaup. — 1778. Thalassoica, Reich. 227, Haronnomnx. . . FO y À ‘ . Mar. antarct. 4779. Halodroma, Jllig. ( Pelecanoïdes, Lacép. — Puffinuria, Less.) LUE) 7 10 50 ihh C.si, BONAPARTE. 98. LARIDÆ. 228. LESTRIGINÆZ. . . . = et eue UDEMOPr 0 1780. Lestris, JUL. yen. ÉoafEots Reich. — 1782. Sterco- rarius, Bp. ex Br. — 1783. Cataracta, Brunn. — Cimoliornis, Owen, Foss. RAI MERRINEN MEME marnelel 2-41 2h CNsmEp. 160 a. Larezæ.— “1784. Procellarus, Bp. — *1785. Leucophæus, Bp. — “1786. Blasipus, Bonap. — *1787. Gabianus, Bp. — 1788. Larus, L. — 1789. Laroides, Brehm.— *1790. Gavina, Bp. -— *1791. Gelastes, Bp.— 1792. Pagophila, Xaup. — 4793. Rissa, Brunn. — 1794. Rhodostetia, Macgill. b., Xemes.—*1795. Adelarus, Bp. — 1796. Ichthiætus, Kaup. — *1797. Atricilla, Bp. — 1798. Gavia, Br.— 1799. Chroico- cephalus, Eyton.—*1800. Creagrus, Bp..— 1801. Xema, Leach. 230. SrERNINÆ. . . 2 . . Cosmop. 70 a. Sterneæ. — 1802. ee Wagt. — 1803. Pelecanopus, Wagl. — 1804. Onychoprion, Wagl.—1805. Haliplana, Wagl. 1806. Hydroprogne, Kaup. — 1807. Thalasseus, Boie. — 1808. Gelochelidon, Brehm.— 1809. Sterna, L.—1810.Seena, Blyth. — AS11. Sternula, Boie. — 1812. Gygis, Wagl. — 1813. Hydrochelidon, Boie. b. Anoeæ. 1814. Anous, Leach, — b. Megalopterus, Boie, — 4815. Larosterna, Blyth. — 1816. Procelsterna, Lafr. 221. REYNCHOPINE. 444 lait sh. 2 suheiMariqantertr. -k 1817. Rhynchops, L 99, CHIONIDÆ. SR UCEIORUE LS eue CARTE 2071 enter me 2 1818. Chionis, ZUL, Tribus 3. URINATORES (Brachypteri). 100. ALCIDÆ. 233, ALCINÆ. © 7. à TETE AC Oil 1819. Alca, L. _ 1820. Vanne, pal 234. PHALERIDINÆ. . . . ab 0 ct ARS RES CAD ASE 1821. Mormon, Z{L. (Fratercula, Br.) —a. Lunda, Pall. — b. Gymno- blepharum, Brandt, — c. Ceratoblepharum, Brandt. — 4822. Sagmatorhina, Bp. — 4823. Ceratorhyncha, Bp. {Chimerina, Eschsch.)— 1824. Ciceronia, Reich. — 4825. Ombria, Eschscholtz.— 1826. Phaleris, Temm.— a. Phaleris, Brandt.— b, Tyloramphus, Brandt, — 4827, Piychoramphus, Brandt, CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ. 145 235. Ununæ. : ….. .olenæ'ancts 45 1828. Uria, Br. — à. à Hoi, Brandt. — b. Cepphus, Pall. (Grylle, Brandt.) — 1829. Apobapton, Brandt. — a. Brachyramphus, Brandt. — b. Synthliboramphus, Brandt. — 1830. Mergulus, Vieill. (Cephus, Cuv.) 101. COLYMBIDÆ, 236. Cocvusine. x 1831. Colymbus, L,. CRE 102. PODICIPIDÆ. 237. Ponicirixz, Terræ arctic. 4 «+ . . (Cosmopolit. 24 1832. Podiceps, Lath. (Colymbus, Br.)— a. Podiceps, Kaup. (Golymbus, Reich.) — b. Pedaithyia, Kaup. — c. Dytes, Kaup. — d. Oto- dytes, Reich. — e. Tachybaptus, Beich.. — f. Dasyptilus, Sw. — 1833. Sylbeocycelus, Bp. (Podilymbus, Less. — Podiceps, Reich.) 325 Ordo 8. PTILOPTERI. (Impennes.) 103. SPHENISCIDÆ. 238. SPHENISCINE. . - Terræ antarct. 145 1834. Aptenodytes, Fa. — 1835. Spheniscus, Br. — 1836. Eudyptes, Vieill.—1837. Catarrhactes, Br.— 1838, Py- goscelys, Wagl. — 1839. Dasyramphus, Hombron et Jacq. = Cr Sugczassis 2. PRÆCOCES. (Grallatores.) Ordo 9. GALLINÆ. (Rasores.) Tribus 1. PASSERACEÆ. 104. MESITIDÆ. 239. MEsminz. 3 1840. Mesites, Geofr. 105. MEGAPODIIDÆ. 240. Mecaronuxe. Madagascar. 2 Gen à 1 so) CARMMOUOCEANS 8 1841. Megapodius, Quoy et Gnord: 241. TALEGALLINE. Ocean. 3 1842. Leipoa, Gould. — 1843. ‘Talegalla, So. (Catheturus, Su.) — 1844. Megacephalon, Temm. 106. ROLLULIDÆ. 242. RorLuLixE. . . . Malaias. 3 1845. Rollulus, Vieill. — 1846. nes AU. 107. NUMIDIDÆ,. _. PÉTER 2. à, don pese das LU DTTICA 1 1847. Agelastes, Temm. 4° série. Zoo. T. I, (Cahier n° 3.) 10 F6 C.-L. BONAPARTE, 244, NUMDINE . . . INA ÎTICRS 1848. Numida, L. — à. | Mur (Reich! — ÿ, Querelea, Reich. — 1849. Guttera, Wagl. — 1850. Acryllium, Gr. Tribus 2. GALLINACEÆ. Cohors 4. CRACES. (Longicaudæ americanæ.) 108. MELEAGRIDÆ. 245: MELEAGENZ . …. : . : Later . À UT IAMEPS S: 1851. Meleagris, L. 109. CRACIDÆ. 'LPMICRACIN ER. not er aar-ten ct din tam A TR ET MC AIIC - 1852. Crax, Barr. — 1853. Pauxi, Temmm. — 1854. Urax, Cuv. 410, PENELOPIDÆ. 247. PENELOPINÆ: + , . . : Amer. calid. 1855. Salpiza, Wagl. 1856. Penélbpe, Mar — 1857. Abur- ria, Aeich. (Chamæpetes ? Wagl.) — 1858. Penelops, Reich. — 1859. Ortalida, Merr. DÉSMOREEEUNL Menu. © 0 ot MATINS 1860. Oreophasis, Gr. Cohors 2. GALLI. ( Longicaude asiaticæ. ) "AAA. PAVONIDÆ, 249. ARGINE, . M PENARMESE GrsAs# m. Ocean. 1861. Argus, Tan, 250. PAYONINE . . . AC: “As: M Ocean. a. Pavoneæ. — 1862. pe 4 — à. Pavo. — b. Spicifer. b. Polyplectroneæ. — 1863. Polyprectron, Temm. — a. Em- phania, Reich.—b. Polyplectron, Reich.—*1864.Chaleurus, Bp. 112. PHASIANIDÆ. DS: PHASIANINE . . : se + 215100) EGr. à. Satyreæ. — 1865. Etes L. en Cuv.) — 1866. Pucra- sia, Gr. b, Phasianezæ. — 1867. Thaumalea, Wagl. — 1868. Pha- sianus, L. — 1869. Graphephasianus , Reich. — 1870. Syrma- ticeus, Wagl. — 1871. Nycthemerus, Sw. — 1872. Lophopha- sianus , Reich. — 1873. Euplocomus, Temm. iGennæus, Wagl.) c. Gaiïleæ. — 1874. Gallus, L 959. L'OPHOPROURE Te UN EL AM LEON ARE ne QE 1875. Lophophorus, Temm. — 1876. Alectrophasis, Gr. (Galloyhesis, Hodgs.)— 1877. Crossoptilon , Hodgs. — 1878. Aco- mus , Reich. — 1879. Grammatoptilus, Reich. = 19 12 24 19 25 10 CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIE, Cohors 3. PERDICES. | Brevicaude, } 113. THINOCORIDÆ. 253. Tumoconnz. . . . Am. m. 1880. Altagis, Js. Geoffr. —_ 1884, Tino, Arébschs 114. PTEROCLIDÆ. 254. PrEROCLINÆE. . . 00% 0% houvEur: ASTAÎr: 1882. Pterocles, Temm. (Ænas, Vieill.) — *1883. Pteroclurus, Bp. — 1884. Psammænas, Blylh. 255. SYRRHAPTINZE . . ITA. 2,27 KS-) cEnÉr: 1835. Syrrhaptes, ZI. (Heteroclitus, ieilL. 115. TETRAONINÆ 256. Télé - eo EU A6 AM. 1886. Tetrao, L. — 1887. LyHUbis, Sw. — 1888. Cr CUS Sw. — 1889. Canace, Reich. — 1890. Cupidonia, Reich. — 1891. Bonasia, Bp. — 1892. Lagopus, Br.—à. Oreias, Kaup. — b. Attagen, Kaup. — c. Lagopus, Kaup. 116. PERDICIDÆ. ; ADR ERRINR au -1t HU: /AS# AE DC. a. Tetraogalleæ.— 1893. Tetraogallus, J.Gr.— 189%. Lerwa, Hodgs. — 1895. Galloperdix, Blyth. — 1896. Plectrophora, Gr. —- 1897. Ithaginis, Wagl. b. Franceolineæ.—1898. Francolinus, Gesn.—1 899 .Ortygornis, Reich. — 1900. Didymacis, Reich. — 1901, Pternistes, Wagl. €. Perdiceæ. — 1902. Caccabis, Kaup. — 1903. Perdix, L. — 190%. Ammoperdix, Gould. d. Starnete. — 1905. Starna, Bp. — 1906. Margaroperdix, Reich. — 1907. Ptilopachys , Sio. — 1908. Hepburnia, Reich. — 1909. Arboricola, Hodgs. 258. ORTYGINÆ : . D Rntelautt 52 1 ur AMErIC, 1910. BR Me Vieill. — 1914. Dendrortyx, Gould. — 1912. Ortyx, Steph. — 1913. Cyrtonyx, Gould. — 1914. Eu- psychortyx, Gould, — 1915. Callipepla, Wagl, — 1916. Lo- phortyx, Bp. 259. CorurxiciNZ . . . A 2. PUY AR AIT UC. 1917. Perdicula, Hodgs. its. Synoicus, Gould, —*1919, Orty- gion, Bp.ex Keys. — 1920. Coturnix, Gesner. 260 ÆoamCE. 0 « 2e oh LEUTAAS, AUTUCS 1924. Turnix, Bonnat. — 1922. Ortygis , I. — 1923. Oxyteles, Vivill. — 192%. Pedionomus, Gould. 147 16 15 55 35 30 148 C.-I. BONAPARTE, 117. CRYPTURIDÆ. 261. CnYPTURINÆ. . . ; 0. EUr. AS AID IOUCS 25 a. Tinamotideæ. — 1925. Tinamotis, Vig. b. Criptureæ. — 1926. Tinamus. Lath. — 1927. Crypturus, IL. — 1928. Nothura, Wagl. — 1929. Rhynchotis. Spix. 262. EuprouunÆ . . . RM en er eV ITIOT IT 1930. Eudromia, Zs. Geofr. 320 Ordo 10. GRALLÆ. Tribus 1. CURSORES. 118. OTIDÆ. 263-MOTMINE. :. 0. . Le. 1..." Eur. Ab:/Afr Ocean 222 4931. Otis, L. — 1932. Houbara, Bp. (Chlamydotis, Less.) — 1933. Trachelotis, Reichenbach. — 1934. Tetrax, Bonaparte. — *1935. Afrolis, Bp.— 1936. Lophotis, Reich.— 1937. Sy- pheotis, Less. (Comatotis, Reich.) — 1938. Lissotis, Reich. — 1939. Eupodotis, Less.—*1940. Choriotis, Bp. 149, CHARADRIIDÆ,. 264. ÆDICNEMINE. +. . ; . . Cosmopol. 8 1941. Burhinus, Jllig. 1949. Anetus, Re — 1943. Esa- cus, Less. — 19%%. Carvanaca, Hodgs. 265. CHARADRINÆE. . . ts ts Cosmopol. 84 a. Charadrieæ. — 1945. Pluvialis, Br. — 1946. Squatarola, Cuv.—1947.Morinellus, Ray. (Eudromias, Boie.)— 1948, Oreo- philus, Jard. — 1949. Oxyechus, Reich. — 1950. Chara- drius, L. — 1951. Ægialus, Reich, — 1952. Ochthodromus, Reich. — 1953. Thinornis, Gr.— 1954. Pipis, Licht. b. Vanellezæ, — 1955. Vanellus, Br. — 1956, Chettusia. Bp. — 1957. Zonibyx, Reich. — 1958, Erythrogonys, Gould. — 1959. Hoplopterus, Bp. — a. Stephanibyx, Reich. — b. Be!o- nopterus, Reich. — c. Hoplopterus, Reich. — d. Sarcogrammus, Reich. — 1960. Sarciophorus, Strickl.— 1961. Lobivanellus, Strickl. — a. Tylibyx, Reich. —b. Xiphidiopterus, Reich. — c. Lobivanellus, Gould, — 1962, Pluvianus, Vieill. 266. CursoRnNÆ . . DE Se MEUr AR AIT OT NT! 1963. Tachydromus, Veil, (Macrotarsius, Blyth.)— 1964. Cursorius, Lath.— 1965, Chalcopterus, Reich. 120. GLAREOLIDÆ, 267. GLAREOLINÆ . . AL Lo Eur. As.vAfr #0 8 *1966. Stiltia, Bp. —_ 1967. Gb L, — *1968, Galachry- sia, Bp. CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ. 149 . HÆMATOPODIDÆ, 268. STREPSILINÆ. . . . Cosmop. 5 1969. Pluvianellus, ne et f: — 1970, re, Aud. — 1971. Strepsilas, L. 269. HæmarToPoniNx. . . . . ., + 0 Cosmop. 40 1972. Hæmatopus, L. — a. AL Reich. — b. Ostralegus, Reich. — c. Melanibyx, Reich. — Argoides, Hithcock, Foss. 122. RECURVIROSTRIDÆ. 270. RECURVIROSTRINE . . . . . Cosmop. 12 a. Himantopodeæ. — 1973. DE Br. b. Recurvirostreæ. — 1974. Cladorhynchus, Gray. (Leptorbyn- chus, Dubus.) — 1975. Recurvirostra, L. 123. PHALAROPODIDEÆ. 271. PHALAROPODINE. . . NN TE Arct: 3 1976. Phalaropus, Br, — 1977. Lots, GE — 1978. Holopo- dius, Bp. 124. SCOLOPACIDÆ. AUPMEROSOPONUN ES ON EE ORNE Ocean, 4 1979. Prosobonia, Bp. 273. ScoLoracnz. . COS Mep 40 1980. Rhynchæa, où. — 1981. ee L. — 1982. Rusti- cola, Bp. (Philohela, Vieill.) —1983. Xylocota, Bp. — 1984. Gal- linago, Bp. — a. Peborychus, Kaup. — b. Gallinago , Ray. — ©. Limnocryples, Kaup. — 1985. Macroramphus, Leach. 274. TRiNcne . hr: Su: a COSINNE 80 a. Tringeæ. — 1986. ie ee Nills. — 1987. Hetero- poda, Bp. — 1988. Hemipalama, Bp.— 1989. Calidris, ZI. — 1990. Pelidna, Cuv. (Erolia ! Vieill. — Falcinellus ! Cuv.)— 1991. Li- micola, Koch. — 1992. Tringa, L. — 1993. Machetes, Cuv. (Philomachus, Moehr. — Payoncella! Leach.) — 14994. Phegornis, Gr. b. Totaneæ. —1995. Actitis, ZIL. (Tringoides, Gr.) — 1996. Acti- turus, ZI. (Bartramia, Less. — Euliga, Nuti.) — 1997. Totanus, Bechst. — a. Ilyornis, Kaup. — b. Gambetta, Kaup. — c. Ery- throscelus, Kaup. — d. Rhyocophilus, Kaup. — e. Helodromus, Kaup. — 1998. Catoptrophorus, Bp. (Symphemia, Rafin. — Hodi- tes, Kaup.) — 1999, Glottis, Nülss. (Limicula. Leach.) ©. Limoseæ. — 2000. Anarhynchus, Quoy et Gaim.— 2001. Te- rekia, Bp. (Xenus, Kaup. — Simorhynchus, Keys. et BL.) — 2002. Li- mosa , Br. (Fedos, Steph.) — 2003. Numenius , Moehr. (Phœopus, Cuv.) — 200%, Jbidor hyncha, Vig 150 C.-L. BONAPARTE. Tribus 2. ALECTORIDES. 425. PARRIDÆ. 275. PARRINE. . . . As. Afr. Am. Oc. 15 2005. Parra, L. — 9006. Metopidius , Wagl, — 2007, Hydro- phasianus, Wagl. — 2008. Hydralector, Wagl. 126. RALLIDÆ. 276: RALLNE. + - . Cosmopol. 00 a. Ralleæ,.— 2009. rade Poe (Rallina, Reichenbach.) — 2010. Biensis, Pucher, — 2011, Rallus, L. — 2012, Hypotæ- nidia, Reich. — a. Hypotænidia, Reich. — b. Euryzona, Reich. c. Lewiniu, Reich. — *d. Laterallus, Bp. — 2013. Hypno- des, Reich. — 2014. Porzana, Vieill. — 2015. Ortygometra, Barrère. — 2016. Zapornia, Leach. (Phalaridion, Kaup.) — *2017. Coturnicops, Bp. — 2018. Crex, Bechst. — 2019, Co- rethrura, Reich. D. Gallinuleæ. — 2020. Notornis, Owen. — 2021. Porphyrio, Br. — à. Porphyrio, Reich. — b. Cæsarornis, Reich, — 2022. Porphyrula, Blyth. (Jonornis, Reich.) — 2023. Tribonyx, Dubus. — 2024. Gallinula, Br.— *2025. Gallinulopha, Bp. — 2026. Amaurornis, Reich. — *2027. Porphyriops, Puch. — 2028. Erythra, Reich. — 2029. Hydrocicca, Cuban, — 2030. Glaucestes, Reich. ©. Fuliceæ. — 2031. Fulica, L. — a, Fulica, Reich. — b. Pha- laria, Reich, — b. Lysca, Reich. — 2032. Lupha, Reich. — *2033. Licornis, Bp. 277. OcypromNxx. . . Per + MAATOCEAN, 5 2034. Ocydromus, Strigh. {Gallirallus, Lafr.) — 2035, Eulabeornis, Gould. — *2)36. Himanthornis, Temm. 400 Ordo 11. ANSERES, (Natatores. ) . ANATIDÆ. SURACENRE TR Eh te GaSnop 0 a. Cygneæ. — 2037. Olor, Wagl. — 2038. Cygnus, L. — 2039. Chenopsis, Wagl. — 2040, Coscoroba, Bp. 279. ANSERINÆ .N Re ee ste eV USIDDA ES b. Anserezæ. — 2041. \Tyéionéé Brandt. — 2042. Anser, Bar- rvère. — a. Anser, Reich, — b, Marilochen , Reichenbach. — 2043. Chen, Brehm. (Ghionochen, Reich\-— 20%4, Eulabeia, Reich. — 2045, Neltapus, Brandt. CONSPECTUS SYSTEMATIS ORNITHOLOGIÆ,. c. Bernieleæ. — 2046. Bernicla, Aldr. — a. Bernicla, Reich. — b. Leucopareia, Reich.—2047. Tænidiestes, Reichenbach. — 2048. Chlamidochen, Bp. | d. Cereopseæ. — 2049. Cereopsis, Temm. e. Plectroptereæ.— 2050. Sarkidiornis, Eyton.— 2051. Che- nalopex , Steph. — 2052. Plectropterus, Leach. — 2053. Anse- ranas, Less. 280. ANATINÆ . . se 074 ANT ECUSMOp: f. Tadorne-. — 2054, Gas Bp. — 2055. Radjah, Reich. 2056. Tadorna, Leach. — Todarna, Reich. Foss. — 2057. Den- drocygna, Stw. (Leptotarsis, Eyr.) £. Anateæ.—2058. Cairina, Flem.—2059. Anas, L.—2060. Rho- donessa, Reich. — 2061. Chaulelasmus, Gr. — 2062. Ma- lacorhynchos, Sw. — 2063. Spatula, Boie. (Rhynchaspis, Leach.) — 206%. Plerocyanea, Bp. — 2065. Querquedula, Steph. — 2066. Aix, Sw. (Cosmonessa, Kaup.) — 2067. Mareca, Steph. — 2068. Stictonetta, Reich. — 2069. Marmaronetta, Reich. — 2070. Dafla, Flem. — 2071. Pæcilonetta, Eyton. SRI EMIGENE AE D. COSUOD: h. Erismatureæ. — 2072. Biziura . Leach. — 2073. Thalas- sornis, Eyton. — 207%. Erismatura, Bp. (Undina, Gould.) — 2075. Nesonetta, Gr. 1. Clanguleæ. — 2076. Micropterus, Less. — 2077. Harelda, Leach. — 2078. Clangula, Flem. — 2079. Camptolæmus, Gr. (Camptorhynchus, Eylon.) k. Somaterieæ. — 2080. Somateria, Leach. — 2081. Stelleria, Bp. (Eviconetta, Gr.) — 2082. Lampronetta, Brandt. l. Oidemieæ. — 2083. Polionetta, Xaup. — 2084, Melanetia, Brehm. — 2085. Oidemia, Flemm. m. Fuliguleæ. — 2086. Fuligula, ay. (Fulix, Sund. ex Cicerone.) —2087. Marila, Reich. — 2088. N yroca, Flemm. —D. Æthyia, Boie. — 2089. Branta, Boie. — 2090. Hymenolæmus, Gr. {Malacorhynchus, p. WagL.) 128. MERGIDÆ. 282. MEncixz. . . . 27e ; + . Cosmop. 2091. Merganser, Br. — 2092. DL. — 2093. Lophodytes, Reich. — 2094. Mergellus, Selby. 283. MerGANETTINE. . 2095. Merganetta, Gould. . Austr. 151 90 50 200 152 C.-L. BONAPARTE, Ordo 12. STRUTHIONES. (Rudipennes.) 129. STRUTHIONIDÆ. 284, SIROTAIONNE. AL UE RRQ : por ira fritar | 2 2096. Struthio, L. 285. Ruenx. . . ORNE O 5 2097. Rhea, Me — à. ir Reich. Foss, — b. Berecyn- thia, Reich. Foss. — c. Cybele, Reich. Foss. —— 2098. Dromaius, Vieill. — 2099. Casuarius, Frisch. 130. DINORNITHIDÆ. 286. DivorniTHinx. . . : Var 0. ON, Zelandi-Foss Dinornis, Owen. Foss. — TA Reich, Foss. — Movia, Reich, 287. EMEINE, . . . AUS se 0. MSN Zeland:" FO: Emeus, Reich. Foss. Gé, Reich. Foss.— Syornis, Reich. 288. PALAPTERYGINE. Palapteryx, Owen. — Aptornis, Mantell. Foss. — Anomalopte- ryx, Reich. Foss. . APTERYGIDÆ,. 289. APTERYGINE. . . nt. deb: 4 NOVA-ZE ANS 2100. Apteryx, San Specierum Avium numerus. #21 8300 ADDENDA. 2104. (13) Psittovius, Bp. — 2102. (22°) Graydidascalus, Bp. — 2103. (42) Prosopeia, Bp.— 2104. (70°) Glossopsitta, Bp.—2105. (71°) Psitteuteles, Bp. — *2106. (212%) Smithiglaux, Bp.—2107.(255*) Cissa, Bp.— 2108. 308) Hypobletes, Glog. — 2109. (510*) Hodoiporus Bp. ex Reich.— 2110. (585*) Atrichia, Gould. — 2441. (586*) Pycnoptilus, Gould, 1850.— 2112. (884°). Meristes, Bp. ex Reich. — 2113. (706%) Polystictus, Reich. — 2114. (1000*) Xeocephus, Bp. — 2115 (1012) Megabias, Verb. — 2116. (1045*) Diopho- rophyia, Bp. —*2117. (1093*) Tucaius, Bp.—2118. (1094) Ramphomelus, Bp. — 21149 1095°) Piperivorus, Bp.— 2420. (1096*) Ramphoxanthus, Bp. MÉMOIRE SUR LE PLAN GÉNÉRAL DU DÉVELOPPEMENT DES ÉCHINODERMES, Par M. J. MULLER. ! Analyse par M. Camizce DARESTE (1). Le mémoire qui fait l'objet de cette analyse est consacré à relater les nouvelles observations que M. Müller a faites à Trieste, en juil- let 1852 , sur le développement des Échinodermes , et à établir les faits généraux qui résultent de la comparaison de ces observations avec celles des années précédentes. « L'embryogénie des Échinodermes a, principalement, un intérêt morphologique , tandis que leur histogénie ne paraît pas s’écarter essentiellement de ce qui a été observé chez les animaux supé- rieurs. Les éléments des tissus sont, comme chez ces derniers, des cellules très évidentes à des grossissements progressivement croissants, surtout sur la frange ciliée, dans la couche interne de l'estomac, et sur le corps des jeunes larves d’Oursins et d’Holo- fhuries, particulièrement dans le voisinage des sécrétions calcaires. Sans l'intervention des réactifs, le contenu de ces cellules est tellement transparent et homogène , qu’elles paraissent privées de noyaux. Dans ma dernière série d'observations, la similitude par- faite de ces cellules avec celles des animaux supérieurs est de- venue encore pour moi vraisemblable en ce point. Par l'interven- tion de l’acide acétique, il arrive souvent, sinon toujours, que l'on peut se convaincre de l'existence d’un noyau pâle. Cela se voit encore sur les cellules garnies de prolongements et ramifiées que l’on trouve dans le corps des larves d'Oursins et d'Holo- (4) Voir les autres mémoires de M. J. Müller sur le même sujet, dans la 3° série des Annales 154 3. MULLER, — MÉMOIRE thuries, et que l’on ne peut considérer comme des noyaux ramifiés. Dans le périsome des chrysalides d'Holothuries, à l’époque de leur métamorphose, ces cellules montrent même, d’une manière évi- dente, un contenu granuleux. » Les états embryonnaires qui précèdent la forme radiaire de l'Échinoderme sont très différents entre eux ; mais ils ont ce carac- tèré commun que leurs formes sont purement bilatérales, et qu'ils ne montrent encore rien du type radiaire. Ici se rangent : 4° la plus jeune forme embryonnaire , avec un développement précoce de l'Échinoderme se faisant dans l'embryon lui-même ; 2 les larves fixées, ayant la peau recouverte entièrement de cils vibratiles et sans franges ciliées, chez lesquelles les organes digestifs ne sont pas encore complétement formés, mais plutôt se montrent à l’état d'ébauche, quoiqu'ils se formentégalement d’après le type de l'Échi- noderme ; 3° les larves errantes ayant la forme de Pluteus, avec une frange ciliée bilatérale et des organes digestifs complétement déve- loppés, et divisés, d’après un plan particulier à tous ces Pluteus, en bouche, œsophage, estomac, intestin el anus. La bouche et l'æso- phage de la larve disparaissent par l'effet du développement ; et chez quelques Astérides, il en est de même de l'intestin et de l'anus ; L° les larves vermiformes avec des segments annelés et des cou- ronnes ciliées; plusieurs larves prennent celte forme pendant les derniers temps de leur vie errante, et avant leur passage dans la forme de l'Échinoderme. » L'animal peut, dans chacun de ces états, se transformer en Échinoderme. Quelques-unes de ces larves traversent plusieurs de ces états; un grand nombre possède d’abord la couverture ciliée sénérale , et revêt ensuite la forme de Pluteus, comme les Oursins, les Ophiures, les Bipinnaria ; d'autres passent de la forme simple avec une couverture eiliée générale à la forme de Vers, comme les Comatules; d’autres enfin présentent encore plusieurs autres degrés de développement, puisqu'elles nagent d’abord à l’aide de leur couverture eiliée générale, qu’elles revêtent ensuite la forme de Pluteus , et enfin la forme de Vers, comme les deux larves d’Holo- thuries déjà décrites. » SUR LE DÉVELOPPEMENT DES ÉCHINODERMES. 455 4° Embryons des Échinodermes qui naissent vivants, et chez lesquels le développement de la forme radiaire est le plus précoce. A ce chapitre se rattachent les observations de MM. Krohn (1) et Max Sebultz (2) sur le développement de l'Ophiolepis squamata dans l’intérieur de la mère. Toutefois, dans cette espèce, on trouve encore quelque indice du type bilatéral ; e’est l'existence , dans l'œuf en voie de développement, d’un squelette calcaire bilatéral provisoire qui ne sert point à produire le squelette calcaire définitif. Le développement de la forme radiaire est très précoce, et se fait immédiatement après le premier état embryonnaire. Un pareil fait a été également observé chez la Synaptula vivipara des Indes occidentales par M. OErsted (3). 2° Larves ciliées sans franges ciliées, garnies d’appendices en massues qui leur servent pour se fixer sur les corps solides. Ce mode de développement à été observé par M. Sars chez l'Echinaster Sarsii et Y'Asteracanthion Mulleri ; par MM. Agassiz et Desor, sur un Echinaster de l Amérique du nord ; par M. Busch, sur une larve observée à Trieste (4). (Voir le Mémoire sur le déve- loppement des Astéries, 3° série des Annales.) M. Müller rappelle ici toutes les observations qui ont été faites par ces naturalistes, observations que nous avons déjà mentionnées ailleurs, et sur lesquelles, par conséquent, il est inutile de revenir. Nous parlerons seulement des observations nouvelles qu'il à faites sur la larve observée à Trieste par le docteur Busch, et sur des individus de l'£chinaster Sarsiüi et de l'Asteracanthion Mulleri que M. Sars lui a envoyés dans l'esprit-de-vin. (1) Archiv für Anat. und Physiol., 1854, p. 338. (2) Zhid., 1852, p. 37 (3) Videnskabelige Meddelelser fra den naturhistoriske Forening i Kjobenhavn for 1846 og 4850, p. vu. (4) Sars, Wiegman's Archiv, X, p. 169; et Fauna lit Norwegq., 1846, p. 47. — Desor, Proceedings of the Boston Soc. of. nat. hist., 15 févr. 1848 : et Müller's Archiv, 4851, p. 122. — Agassiz, Amer. traveller., déc. 22, 188 ; et Müller's Archiv, 1851, p. 122.— Busch, Beobachtungen über Anatomie und Entwickeluny siniger wirbellosen Seethiere, 4851, p. 77. 156 J. MULLER, -— MÉMOIRE Pour les larves du docteur Busch, la seule observation de M. Müller consiste en ce qu'il a constaté que ces larves, qui s’atta- chentaux corps solides à l’aide des appendices enmassue, se fixentpar une espèce de succion , et non en employant une matière visqueuse. En effet, ces larves se détachent lorsqu'on aspire l'eau à l’aide d’un tube de verre. Les observations sur les larves envoyées par M. Sars sont beau- coup plus importantes. « Je me suis convaineu depuis longtemps, dit M. Müller, que les appendices en massue contiennent une cavité dans leur intérieur ; tandis que j'étais beaucoup moins certain de l'existence d’une ou- verture sur lapapille médiane située entre les quatre appendices. J'ai reçu récemment de M. Sars un grand nombre dejeunes de ces deux Étoiles de mer à différents degrés de développement, et je me suis vu ainsi en mesure de reprendre ces recherches. Dans tous, la cavité des appendices est aussi évidente que leur base commune. Elle occupe le milieu des petites massues, et s'étend jusqu'au renfle- ment de leurs extrémités, sans s’y élargir elle-même. On peut déta- cher avec des aiguilles la peau extérieure molle qui revêt un tégu- ment beaucoup plus résistant, tégument qui délimite la cavité interne.…. A l’époque où le corps de la larve n’est pas encore penta- gonal, mais simplement ovoïde et plat, on y voit toujours une cavité spacieuse qui pénètre dans celle des appendices. Dans la région opposée aux appendices se trouve dans la cavité générale un corps mou et rond, qui contient une cavité dans sa partie supérieure : c’est l'estomac définitif. Supérieurement , c’est-à-dire en face du point de départ des appendices, et sur les côtés, cet organe s'attache sur la paroi de la cavité du corps ; inférieurement, au contraire, ilest libre, et n’a de rapports qu'avec la cavité ; on n’aperçoit encore rien de la bouche, de l’æsophage et de l'intestin ; et ces larves , contrairement à mon attente, s'éloignent complétement de la forme des Pluteus. Il n'yarien dans la cavité du corps et dans celle des appendices qui ressemble à un contenu granuleux ou vitellin ; il est plus probable que, dans l’état frais, le contenu de cette cavité est simplement liquide. Sur les larves qui sont devenues pentagonales , et qui pos- sédent déjà les premiers tentacules, la cavité des corps est partagée SUR LE DÉVELOPPEMENT DES ÉCHINODERMES. 157 en deux chambres, division déjà indiquée dans les jeunes larves par un étranglement de la-cavité du corps. Les degrés intermédiaires me manquent pour indiquer le mode de transformation d’un état dans l'autre. Maintenant il existe deux cavités séparées l’une de l’autre par une épaisse cloison intermédiaire. L'une contient l'estomac, plat et arrondi, qui s’est développé sur l’une des faces aplaties du corps, c’est-à-dire sur le périsome ventral ; le reste du contour de l'estomac est libre, à l'exception de deux bandelettes qui attachent la face dorsale de l'estomac en dessus et en dessous à la paroi dor- sale. La deuxième cavité du corps est l’espace commun de la tige des quatre appendices, espace qui se prolonge dans la cavité des appendices ; les deux cavités du corps ont des parois inflexibles et solides. La cavité du corps qui est au-dessus des appendices paraît toujours se rétrécir de plus en plus pendant la série des métamor- phoses. On ne peut apercevoir de relation entre cette cavité et les appendices , et même une pareille relation n’est pas très vraisem- blable , tandis que dans les jeunes larves la cavité des appendices communique largement avec la cavité générale où est situé l’esto- mac. Ce point ne pourra être éclairei que par l'étude de celles de ces larves qui sont transparentes, comme les larves d'Echinaster d'Agas- sizet de Desor. Je n'ai pu me convaincre de l'existence d’une ouver- ture sur la papille qui occupe le milieu des quatre appendices. La peau extérieure est excavée à cette place, et cela se voyail très mani- festement aussi sur la larve de Trieste ; ce qui donne la pensée de l'existence en ce point d'une ouverture buccale. Mais j'ai pu sur l'une des larves norwégiennes détacher la peau de la papille, étudier sa composition , et reconnaître qu'elle ne présente aucune perfora- tion. I faut encore remarquer ici que, sur une des larves à quatre appendices, je n'ai pu voir cette papille. Si, d’ailleurs, il y avait ici une ouverture, elle devrait conduire non dans l'organe digestif, mais dans la cavité du corps, ou plus tard dans la cavité particulière destinée aux appendices. » Que devient cette cavité qui persiste dansles appendices pendant leur diminution de volume? D’après les faits que nous avons con- statés, nous ne sommes point en mesure d'y chercher l'explication de la formation du canal pierreux, et d'établir que la papille située 158 3. MULLER, — MÉMOIRE entre les appendices est une plaque madréporique définitive, Nous pouvons cependant penser à celle cavité, séparée de la cavité abdo- minale, qui se trouve chez les Astéries adultes entre la paroi du corps et le canal pierreux qui l'avoisine. Cet espace est enfermé par des parois membraneuses, qui unissent le périsome de l'Étoile aux piliers du canal pierreux. » Sur les jeunes Étoiles de l’Asteracanthion Mulleri, telles qu’on les trouve encore dans la eavité d’incubation de la mère, la dernière trace des appendices formait encore une proéminence sur la face ventrale de l'Étoile, interradiale près du disque buccal. » Il résulte de l'étude de ces larves fixées que les larves à appen- dices ne possèdent ni la bouche ni l’œæsophage des Bipinnaria et des autres larves à forme de Pluteus. Leur organe digestif apparait comme un estomac fermé, qui, par un développement plus complet, s'ouvre pour former la bouche permanente de l’Astérie ; l'intestin doit se former directement pour l'Étoile pendant l’état embryon- naire, et il doit en être de même pour les canaux ambulacraires. Le développement parait, jusqu’au moment de l'ouverture de la bouche définitive, se produire moins par l'appropriation de maté- raux organiques que par l'emploi d'un capital existant avee l'œuf, et provenant de la mère. Chez les jeunes larves fixées, l’état d’em- bryon se prolonge ainsi au delà de la vie de l'œuf, Sur les exem- plaires des jeunes de l'£chinaster Sarsii et de 'Asteracanthion Mulleri, devenus pentagonaux, qui possédaient encore les quatre appendices, qui présentaient déjà deux paires de tentacules dans chacune des cinq séries , et dont la surface était encore plate, et. sans aucun indice de piquants , la bouche de l'Étoile était encore complétement fermée, En les iraitant avee une solution de potasse caustique, on ne voyait trace de dépôt calcaire en aucune partie du corps. Sur des individus plus âgés, ayant de cinq à six paires de tentacules sur chacun des rayons, et de petits piquants déjà déve- loppés , on voyait dans le milieu du disque buceal une très petite ouverture. La solution de potasse montrait que ces Étoiles, qui avaient encore la même grandeur que celles dont il vient d'être question, présentaient déjà quelques dépôts calcaires réticulés, en petit nombre, et très éloignés l’un de l'autre, aussi bien que le SUR LE DÉVELOPPEMENT DES ÉCHINODERMES. 159 commencement du dépôt calcaire des piquants. Au contraire, chez tous les Pluteus nageant librement, les appareils digestifs propres de la larve sont déjà complétement, et dès les plus jeunes états de Ia larve, en communication avec le monde extérieur. En cet état, ces deux sortes de larves ne présentent aucun point de comparaison, particulièrement en ce qui concerne la forme extérieure. Dans la Bipinnaria , la matière calcaire se développe déjà dans le premier indice du périsome destiné à l’Astérie, et la larve lui enlève l’eau à l’aide de ses organes digestifs. » M. Müller fait observer que ces larves ont une très grande res- semblance avec les larves d'Oursins dans leur plus jeune âge, lors- que la pyramide présente trois appendices. est vrai que cette ana- logie est fort amoindrie par le fait de l’Echinaster de l'Amérique du Nord qui ne possède qu'une massue ; mais cette difficulté s’éva- nouit, quand on compare les massues des larves fixées avec les trois bras de l’extrémité des Brachiolaria, bras dont la cavité com- munique toujours avec la cavité générale de la larve, et qui coexistent avec les appendices bilatéraux ordinaires des Bipinnaria et des autres Pluteus. Les larves dont il est question dans ce chapitre, et qui se fixent pendant leur métamorphose , ont la surface entière de leur corps recouverte de cils vibratils ; les larves errantes ont, au lieu de ces cils, des organes ciliés particuliers qui leur sont nécessaires pour la natation. Il y a encore une autre différence dans la nature des appendices , qui forment dans les larves fixées des massues sans franges ciliées, inutiles pour la nage, et servant seulement à fixer l'animal, et qui, chez les larves errantes, supportent des franges ciliées servant à la nage et au mouvement cireulaire, et paraissant destinées à agrandir le parcours et le déploiement des organes ciliés. Cette différence rend parfaitement compte de l'absence des franges ciliées chez les larves fixées. Quand un accident vient à les détacher, elles se servent dumouvement vibratil de la surface entière de leur corps pour atteindre d’autres corps solides auxquels elles s’attachent de nouveau. M. Müller a observé ce fait sur la larve de Trieste. Mais en tenant compte de ces différences, le plan général de ces 160 3. MULLER. — MÉMOIRE larves fixées est tout à fait comparable à celui des Pluteus à franges ciliées, si l'on prend pour point de départ, dans la détermination des extrémités antérieure et postérieure , la direction des appen- dices et la direction du corps pendant la nage. L’extrémité garnie de massues de l'£chinaster correspond ainsi à l'extrémité à trois bras de la Brachiolaria , à l'extrémité garnie de nageoires de la Bipinnaria, à l'extrémité opposée à la pointe terminale de l'Our- sin et des Ophiures , à l'extrémité garnie d’yeux de la Tornaria, et à l'extrémité amineie de l’Holothurie. L’extrémité opposée est dans toutes ces larves le lieu du développement de l'Échinoderme. 3. Pluteus à franges ciliées. Toutes ces larves vivent librement, et pendant longtemps, dans la mer, ne présentant encore aucune trace du type radiaire , et étant simplement bilatérales , avec une extrémité antérieure et une extré- mité postérieure, une région dorsale etune région ventrale, un côté droit et un côté gauche. Ce n’est que par l'effet de la métamorphose qu'il y a substitution du type radiaire au type bilatéral ; mais ces deux types sont tellement différents, que cette substitution ne se produit pas par la transition d'un type à l’autre, mais par la formation de l'Échinoderme , qui s’approprie seulement l'estomac et l'intestin de la larve. Pour caractériser le type de ces larves d'Echinoderme, M. Müller établit une terminologie qui puisse s'appliquer à toutes et se rappro- cher, autant que possible, de la nature. Les régions dorsale et ventrale sont nettement séparées chez les Auricularia , les Bipinnaria , les Brachiolaria et les Tornaria , par les sillons latéraux qui séparent le bord cilié dorsal du bord cilié ventral ; chez les Bipinnaria , par les nageoires ventrales et dor- sales ; chez les Bipinnaria , les Brachiolaria etles Tornaria , par la frange ciliée qui occupe l’une des extrémités. On peut dans toutes ces larves faire passer un plan sécant entre Ja face dorsale et la face ventrale, par les sillons latéraux qui séparent la frange ciliée dorsale et la frange ciliée ventrale , ainsi que les deux nageoires. La face où est située la bouche, lantôt plus près de l’une des ex- trémités (larves d'Oursins et d’Ophiures), tantôt plus près de l’autre SUR LE DÉVELOPPEMENT DES ÉCHINODERMES. 161 Bipinnaria asterigera), tantôt au milieu (Auricularia), est la face ventrale; la face opposée, où est toujours le pore dorsal, est la face dorsale. Quant aux dénominations d’extrémités antérieure et posté- rieure, elles sont appliquées aux extrémités de l'axe longitudinal. La détermination de cet axe longitudinal est tirée du mouvement de rotation des larves autour de cet axe; mouvement observé chez les Auricularia , les Bipinnaria , les larves d'Oursins, et chez les petites larves d'Ophiures. L'extrémité antérieure est celle qui se dirige en avant pendant la nage ; l'extrémité postérieure , celle qui se dirige en arrière. C’est à l'extrémité antérieure que se trouvent les deux taches oculaires , en demi-lune , de la Tornaria , ainsi que les trois bras de la Brachiolaria. L'anus de la Tornaria est exacte- ment à l'extrémité postérieure ; chez toutes les autres larves il se trouve sur la partie postérieure de la face ventrale. « On doit chercher le type idéal de ces larves, dit M. Müller, en prenant une sorte de moyenne entre les formes les plus jeunes des larves d'Ophiures , d'Oursins et d’Holothuries , à l’époque où elles possèdent la frange ciliée, mais où elles n’ont point encore leurs appendices. » « Du type idéal qui est représenté, pour toutes les formes de larves, par des figures schématiques , se laissent déduire, avec peu de changement , les formes de développement même les plus éloignées. Ce type peut être représenté par une figure ovoïde piri- forme , sur laquelle on distingue une face dorsale et une face ven- trale , une partie antérieure plus effilée , et une partie postérieure plus large et renflée en massue , et une impression médiane sur la face ventrale, occupant toute la largeur de cette face. La larve a deux pores, la bouche et l’anus ; et bientôt se produit un troisième pore, celui du système des vaisseaux aquifères. La bouche e (pl. 4) se trouve dans la dépression transverse de la face abdominale. La bouche , l’æsophage , l’estomac, l'intestin et l'anus 0, occupent un plan médian vertical et longitudinal , ou le plan sécant qui sépare le côté droit et le côté gauche. Le passage de l'estomac dans l'intestin forme le plus ordinairement une sorte de coude ; l'estomac et l’in- testin occupent la moitié postérieure du corps. L'intestin s'ouvre dans l'anus, près de l'extrémité postérieure , vers la partie posté- $" série. Zooc. T. I. ( Cahier n° 2. ) 5 11 162 J. MULLER, — MÉMOIRE rieure de la face ventrale. L’extrémité du corps située en avant de la bouche se dirige en avant quand l'animal nage à l’aide du mou- vement vibratile ; la région où sont situés l’estomae et l'intestin se dirige en arrière. Le pore du sac des vaisseaux aquifères est dorsal. Sur les bords de la dépression et sur les bords latéraux ; la frange ou bandelette ciliée se forme de bonne heure, le plus ordinairement avant le pore dorsal. C’est, dans la plupart des larves ; un organe cilié unique , revenant sur lui-même , formé par deux bandelettes latérales et deux bandelettes transverses a,b. Ces bandelettes appat- tiennent au même cercle, dont on peut se représenter les parties antérieure et postérieure comme recourbées depuis le plan dorsal auquel appartiennent les portions latérales de la frange jusqu’au plan ventral. En effet, sur la partie antérieure et la partie postérieure du corps, la frange s'étend, en passant de la face dorsale à la face ventrale, depuis le bord latéral jusque sur les bords de la portion ventrale antérieure et postérieure de la peau, et passe ainsi au-dessus et au-dessous de la dépression. Nous distingnons ainsi deux portions bilatérales et deux portions ventrales transverses dans le cercle de la frange ciliée. J'ai donné à ce cercle le nom de frange ciliée bila- térale, pour le distinguer des autres franges ciliées qui forment des cercles transverses ou les organes rotateurs. Chez les Bipinnaria , elle se modifie en ce qu'il y à deux franges ciliées. » Cette frange ciliée est done différente des organes rotateurs des larves d'Annélides décrites par MM. Lowen, Milne Edwards , Sars et Busch; des larves de Turbellariés décrites par M. Müller (Arch, 4850, p. 185); des larves de Sipontles décrites par MM. Max Müller (4850, Archiv., p. 439), et Krohn (tbid., 1854, p. 88); des larves d'Échiurides décrites par M. Busch (4850, Archiv., taf. x, fig. 9-10). Elle diffère également de celles de cer- taines larves de Mollusques, et particulièrement des Ptéropodes nus, telles que la larve du Pneumodermon mediterraneum de M. Van Be- neden , décrite par M. Müller (Bulletin mensuel de l Académie de Berlin, octobre 1852, p. 595). M. Müller rappelle ici que M. Thomas Huxley à donné de la frange bilatérale une description différente de la sienne (Annals of natural history, vol. VII, 18514, p. 1). Ce naturaliste considère SUR LE DÉVELOPPEMENT DES ÉCHINODERMES. 163 celte frange comme un cerele transversal qui partage l'animal en deux parties : une région prætrochale, dans laquelle estsituée la bouche ; une région péritrochale, dans laquelle est situé l'anus ; explication ingénieuse, mais qui esten désaccord avec la disposition des cercles ciliés transverses des larves vermiformes d'Échinodermes. D'après M. Huxley, les Pluteus seraient des larves d’Annélides dénaturées par le développementexeessif de la partie dorsale de la ré- gion post-trochale, etil cherche à les ramener au type des Annélides, en rétablissant leur forme cylindrique. Mais il faut observer, d'une part, que les larves cylindriques de Siponeles qui sont garnies de cercles ciliés, et qui paraissent être le point de départ des idées de M. Huxley, n'appartiennent point à la classe des Échinodermes ; et que, d'une autre part, il existe des larves d'Échinodermes qui ont la forme d'Ahnélides (les larves d'Holothuries dans leur second âge, el celles des Comatules), et que, dans cés larves, il existe des bandes ciliées transverses qui se croisent avec le cerele eilié bilatéral. « Dansles modifications du type quinous a servi de point de départ, modifications qui correspondent aux formes particulières des larves, tantôt la bouche occupe le milieu même de la face ventrale (comme dans les Auricularia, les Tornaria et quelques Bipinnaria), tantôt elle se rapproche de Pextrémité qui se dirige en avant pendant la nage, se trouvant non sur l'extrémité même, mais, encore dans ce dernier cas, sur la face ventrale, comme chez les larves d'Oursins et d'Ophiures. Quelquefois la bouche est beaucoup plus éloignée de l'extrémité antérieure qué de l'extrémité postérieure, comme dans la Bipinnaria asterigera. » Dans les larves d'Oursins ; la partie qui, pendant la nage , se dirige en arrière est, au delà de la dépression, voûtée en forme de coupole ou de tour ; elle est dans les lirves d’Ophiures en forme d'ombrelle aplatie sur les faces ventrale et dorsale, comme la partie antérieure d'une pantoufle ou comme une ombrelle aplatie ; dans les deux cas, elle est plus grande et plus large que la partie opposée du corps située en deeà de la dépression qui couvre la bouche. Cette dernière partie du corps, qui, pendant la nage, se dirige én avant, est extrêmement courte, et, au lieu d'être voütée, elle est aplatie exactement comme l'extrémité postérieure aplatie d’une pantoufle. » 164 J. MULLER. — MÉMOIRE «……… Leslarves des Astéries (Bipinnaria, Brachiolaria, T'orna- ria) se distinguent de toutes les autres larves d'Échinodermes en ce que la frange ciliée bilatérale ne possède point de replis antérieurs dorso-ventraux, et qu'à l’extrémité antérieure du corps elle se dirige simplement du côté droit au côté gauche. La partie transverse de la frange ciliée en avant de la bouche appartient à une seconde frange ciliée particulière, qui est propre à la face ventrale de la partie antérieure du corps, court sur les bords de cette face, et qui, à son extrémité, se recourbe de gauche àdroite, et revient sur elle-même, sans avoir de relations avec l’autre frange ciliée qui est plus grande. » Les formes de larves, plus complètes et plus développées, s'éloi- enent du type idéal, principalement en ce que, sur les bords du corps que revêt la frange ciliée, se développent des appendices, qui tantôt contiennent des tiges calcaires, comme chez les larves d’Our- sins et d'Ophiures, et tantôt sont mous comme chez les larves d’Holothuries et d’Astéries, et qui, de plus, chez ces dernières, sont mobiles. La frange ciliée s'étend sur tous ces appendices. D’après les places où naissent ces appendices, on peut distinguer les catégo- ries suivan{es : » 4° Appendices situés sur les circonvolutions dorso-ventrales postérieures de la frange ciliée, d’. On pourrait les nommer appen- dices auriculaires. Is manquent complétement chez les larves d'Oursins, et sont plus ou moins développés chez les larves d'O- phiures, d'Holothuries et d’Astéries. Ce sont les plus longs de tous les appendices chez les larves d'Ophiures , ceux qui ont été appelés appendices latéraux, et qui sont munis de tiges calcaires. Il n'y en à point du tout chez les larves d’Oursins, et le voile de la larve présente à leur place une simple incision. » 2 Appendices situés sur la circonvolution dorso-ventrale an- térieure du bord et de la frange ciliée, d. Is manquent chez les larves d'Holothuries , et sont au contraire très développés chez les larves d'Oursins et d’Ophiures. » & Appendices du bord latéral dorsal, g. Ils existent chez toutes les larves, uniques comme les appendices latéraux dorsaux des larves d'Oursins et d’Ophiures, ou nombreux comme chez les Auwrr- eularia et les Bipinnaria. SUR LE DÉVELOPPEMENT DES ÉCHINODERMES. 165 » 4° Appendices occupant le bord du couvercle ventral postérieur ou le voile, e’. Ils sont constants chez les larves d’Oursins et d’O- phiures, plus ou moins développés chez les Auricularia et les Bipinnaria. » 5° Appendices occupant le bord du couvercle ventral anté- rieur, e. Ils manquent complétement dans les larves d'Ophiures ; c’est à eux qu'appartient, chez les larves d'Oursins, la deuxième paire d’appendices de l'appareil buccal, paire qui se développe plus tard. Chez les Auricularia et les Bipinnaria, ces appendices sont plus ou moins développés. » $ 3. Larves vermiformes garnies de cercles ciliés (Holothuries, Tornaria, Comatules, larves vermiformes d’Astéries). Ces larves, avant la formation de lÉchinoderme, parcourent une seconde phase de développement, pendant laquelle l'animal prend une forme cylindrique ou vermiforme, et possède des franges ciliées annulaires où circulaires. Avant de comparer entre elles les différentes larves qui appartien- nent à ce type, M. Müller rend compte de quelques observations qu'il a faites, dans un nouveau séjour à Trieste, sur la larve d’Holothurie garnie de sphères. Ces observations portent sur la transformation de la frange ciliée bilatérale en cercles ciliés, et sur le développe- ment des ambulacres. « L'observation directe nous montre la transformation partielle de la frange ciliée bilatérale dans les cercles ciliés transverses, et son oblitération partielle par des taches de pigment. Les circonvo- lutions en zigzag de la bande dorsale bilatérale de la frange ciliée de la larve s'étendent considérablement vers l’époque où elle va entrer dans l’état de chrysalide, sur la face dorsale du corps qui devient cylindrique , de telle sorte que les angles des deux côtés se rappro- chent l’un de l'autre. L'un des côtés de ces angles prend alors une direction transverse, l’autre conserve sa direction oblique. Les côtés transverses se réunissent vers le milieu du corps, et se complètent pour former les bandes transverses du dos, à l'aide d’une forma- tion nouvelle, pendant que les côtés obliques perdent leurs eils et même, en partie ou en totalité, leur pigment, de telle sorte que 166 3. MULLER. — MÉMOIRE leur parcours primitif n'est plus reconnaissable que par ee qui reste des taches de pigment. Lemême fait se reproduit surles replis en zigzag de la partie ventrale bilatérale de la frange ciliée.. Les côtés transverses dorsaux et ven{raux qui se correspondent s'unis- sent sur les côtés du corps pour former des cercles complets. Sur la face ventrale de la larve, les portions ventrales des trois cercles postérieurs se forment aux dépens du repli ventral postérieur de la frange ciliée bilatérale, qui s'étend jusqu'au sillon transverse primi- tif de la larve, de telle sorte que la partie transverse de ce repli est contenue dans le troisième et dernier de ces cercles. Aux dépens des circonvolutions en zigzag de ce repli se forment les parties ven- trales des quatrième et cinquième cercles. La partie latérale du ein- quième cerele se forme d’ailleurs aux dépens du repli dorso-ventral de la frange ciliée bilatérale. La portion ventrale du deuxième cercle se forme aux dépens de la partie moyenne transverse de la circonvolution ventrale antérieure de la frange ciiée bilatérale, et de son union avee les portions opposées de la frange ciliée dorsale. Quant aux portions de la frange ciliée bilatérale de la face ventrale qui sont devenues inutiles, elles disparaissenf peu à peu. Pendant longtemps l'aspect primitif se conserve sur la partie antérieure de la larve et de la chrysalide. Le développement complet des cercles ciliés antérieurs était très difficile à concevoir, mais il est maintenant complétement éelairei. Les franges, ciliées bilatérales, droite et gauche, s’avancent graduellement, sur la face dorsale de l’extrémité antérieure de la larve, près de l'extrémité antérieure, à la rencontre l'une de l’autre, jusqu'au moment où elles forment une commissure dorsale en forme d'arc ; vers la même époque, les deux sommets et les prolongements ventraux de la frange eiliée bilatérale s'écartent toujours de plus en plus l'un de l’autre à l'extrémité antérieure, de telle sorte que la larve devient plus large sur la face ventrale de l'extrémité antérieure. Au contraire, le champ ventral, en avant du sillon transverse, se rétrécit toujours de plus en plus, en même temps que la frange ciliée bilatérale s'infléchit en se coudant. Il en résulte que le cercle cilié antérieur de la chrysalide se forme ainsi qu'il suit : Les bandes dorsales se réunissent sur la face dorsale en formant une commissure, et le prolongement longitudinal dispa- RE SUR LE DÉVELOPPEMENT DES ÉCHINODERMES. 167 rait; quant à la partie ventrale de ce cercle, elle est formée par les coudes de la partie ventrale de la frange ciliée bilatérale, et par leur rencontre. Les portions latérales du cercle antérieur sont formées par des replis dorso-ventraux de la frange ciliée bilatérale ou par leurs sommets. Le cercle cilié antérieur se distingue maintenant de tous les autres en ce qu'il n’est point situé dans un plan transversal , mais que, par suile de la part que prennent à sa formation les deux sommets latéraux de la frange ciliée bilatérale, le plan de ce cercle est incliné aussi bien sur la face dorsale que sur la face ventrale ; inclinaison beaucoup plus grande sur la face ventrale que sur la face dorsale. En d’autres termes, les portions latérales du cercle antérieur descendent pendant plus longtemps avant qu'elles ne viennent à se réunir sur le ventre, tandis qu'elles sont plus promp- tement unies sur le dos par une commissure. Il reste ainsi pendant longtemps sur la face abdominale un reste du champ ventral pri- mitif, et la partie ventrale du cercle antérieur est très rapprochée du second cercle : plus tard tout cela disparait. Les cercles ciliés trans- verses ainsi formés présentent un mouvement ciliaire beaucoup plus vif que la frange bilatérale primitive. Le mouvement ciliaire a pris maintenant l'aspect d'un mouvement de roue, pendant lequel la chrysalide se meut rapidement et tourne vivement autour de son axe. Les cercles ciliés sont devenus plus larges, et le pigment jaune y est toujours plus abondamment sécrété. Plus tard, ce pigment se répand d’une manière générale dans la peau de la jeune Holothurie. » …. Lorsque l'Holothurie est complétement formée et que les tentacules sont entièrement sortis, ils paraissent unis à leur base par une membrane située au-dessus de l'anneau calcaire, membrane qui est en rapport avec la face interne du périsome. » M. Müller a eu également occasion de faire quelques observa- tions sur l'apparition des ambulacres chez les Holothuries qui avaient déjà perdu leurs cercles ciliés. « …. Le premier pied se présente sous l'aspect d’une éminence située dans le même segment que l'anus, et pouvant sortir au dehors en même temps que la partie du périsome qui entoure cette ouverture ; et l’on y voit aboutir un canal assez large qui pro- vient de la région antérieure du corps. Ce canal n’est autre que le 168 J. MULLER. —— MÉMOIRE canal ambulacraire. Avant son insertion dans le pied, le canal parait fréquemment garni d’un prolongement que l’on doit considérer comme une ampoule. La peau du pied est transparente comme l'eau; elle contient déjà le premier indice des sécrétions eal- ‘aires sous la forme d’une croix. La jeune Holothurie , tantôt ré- tracte entièrement son pied, et tantôt le fait sortir largement pour s’en servir comme d’une ventouse, else fixer ainsiavec force. Pour saisir les objets, elle emploie tantôt ses tentacules buccaux, avec les- quels elle s'attache au verre, et tantôt son pied. Elle peut s'attacher avee une si grande force à l’aide de ce dernier qu'il est difficile de la détacher sans la déchirer. La première apparition du pied dans notre Holothurie se rapporte ainsi parfaitement aux observations faites par Krohn sur les jeunes d’une autre espèce (Arch. für Anat. und Physiol., 1851, p. 34h). » Pour ce qui concerne la situation du pied, il est situé le plus souvent entre le dernier et l’avant-dernier cerele de pigment, c’est-à-dire entre les cercles ciliés primitifs. Le plus ordinairement cette position est latérale : droite, quand on observe la jeune Holo- thurie par la face dorsale; gauche, quand on l’observe par la face ventrale entre la dernière et l’avant-dernière sphère latérale ; une seule fois, je l'ai vu occuper une position médiane entre les sphères des deux côtés. Quand on considère l'anus comme ventral , et les deux séries de sphères comme étant à droite et à gauche, le sac calcaire, comme auparavant le pore dorsal , est situé constamment au côté gauche du dos, quand on observe l’animal par le dos et qu'il est redressé de lelle sorte que la région buccale soit dirigée en avant; dans cette position le pied est le plus ordinairement à droite , entre la dernière et l’avant-dernière sphère du côté droit. Quand on voit le sac calcaire à gauche, c’est alors la face ventrale que l’on aperçoit, et le pied occupe le côté gauche... Il parait ré- sulter de ces observations que le premier pied appartient ordinai- rement à l'ambulacre ventral droit, mais aussi qu'il pourrait appar- tenir à l’ambulacre ventral médian. Au contraire , le nombre des tentacules qui paraissent les premiers chez les Holothuries parait être toujours de cinq. Ce fait a été constaté aussi bien dans les deux jeunes Holothuries que j'ai décrites que dans celle qui a été déerite SUR LE DÉVELOPPEMENT DES ÉCHINODERMES. 169 par Krobn, et dans une quatrième espèce que j'ai récemment obser- vée à Trieste (4).» M. Müller fait observer que la plupart des cercles eiliés des larves d’Annélides, telles que les Térébelles, les Mesotrocha, les Saccone- reis, ressemblent complétement aux cercles ciliés des larves d’'Ho- lothuries, mais qu'ils ont un autre mode de formation, et qu'ils for- ment également dans le début des anneaux transverses. Les cercles ciliés des larves des Ptéropodes nus sont dans le même cas : tels sont ceux que présente la larve du Pneumodermon mediterraneum (Bul- letin mensuel de l'Académie de Berlin , octobre 1852). Cette larve ne porte aucune trace du voile céphalique qui appartient aux Pté- ropodes à coquilles (Cleodora), et qui les rapproche des larves des Gastéropodes; elle présente un corps vermiforme revêtu de trois cercles ciliés, dont le premier occupe la tête, en avant de la bouche et des organes en forme d'ailes ; le second est postérieur à la région médiane du corps et aussi à l'anus ; le troisième précède l'extrémité postérieure du corps. La larve du Pneumodermon à, comme les chrysalides d’Holothuries, Fanus non entouré par le der- nier cercle cilié, et elle ressemble encore plus aux larves d’Holothu- ries que les larves d’Annélides elles-mêmes. Le cercle cilié antérieur est chez le Pneumodermon derrière la bouche qui est terminale, et, chez les jeunes Holothuries, près du bord antérieur du corps ; tan- dis que chez les larves d’Annélides, le cercle cilié de la tête est en avant de la bouche qui est ventrale. Cependant ce qu’il y a de plus im- portant ici, c’est la disposition générale des cercles ciliés dans toutes {1} « Ce très petit animalcule rampant, à corps de forme conique, a été pêché avec un filet très fin sur la surface de la mer. Il portait cinq tentacules complétement développés, unis à leur base par une membrane, et ne présen- tant plus de traces des restes de la larve ni de cercles ciliés. Sa longueur n'était que de 1/10° de ligne, trois fois plus petite que celle de la jeune Holothurie à petites roues calcaires, et de la jeune Holothurie à sphères , ainsi que celles de leurs larves. Les extrémités arrondies des tentacules étaient couronnées par des petites papilles en forme de ventouses. Il y avait dans la peau un petit nombre de figures calcaires ramifées et disséminées, présentant la forme de celles qui paraissent d'abord dans l'anneau calcaire , occupant particulièrement l'extrémité postérieure du corps, et d'une grosseur inaccoutumée, supérieure à celle des figures calcaires de l'anneau buccal. » 170 J. MULLER. — MÉMOIRE ces larves ; car leurs relations avec les ouvertures du corps, et avee les franges ciliées, présentent des différences chez les diverses espèces d'Echinodermes, comme on le voit chez les Tornaria etles Comatules. Le cercle cilié, qui se forme le dernier chez les For- naria el qui présente l’anus dans son milieu, ne se forme pas d’ailleurs aux dépens de la frange ciliée bilatérale, mais seulement dans son voisinage. Les Tornaria, les larves vermiformes d’Astéries et les larves de Comatules , sont encore trop peu connues pour pouvoir être com- parées complétement aux larves vermiformes d’Holothuries. I faut ici se borner à quelques indications. Les larves vermiformes d’Astéries et celles des Comatules ne perdent aucune de leurs parties; elles se métamorphosent com- plétement en Échinoderme, que l'Échinoderme ait ou non la forme d'un Ver ou celle d’une Étoile. « Les segments annulaires et les cercles eiliés ne sont jamais disposés de telle sorte qu'une ligne unissant la bouche et Fanus formerait l’axe autour duquel sont placés les segments annulaires et les cercles ciliés ; mais tantôt la bouche, tantôt l'anus de l'Échi- noderme définitif sont situés en dehors du premier et du dernier anneau ou cercle ciié. Chez la Tornaria, l'anus est dans le milieu du cercle cihé. Dans les larves vermiformes d’Astéries, l'excavation de l’anneau postérieur n’est pas facile à déterminer, et il est douteux qu'elle corresponde à l'anus de la Tornaria. Mais la bouche de l'Astérie n’occupe pas le centre du premier segment ; sa position est ventrale; et la face ventrale de l’Astérie se développe aux dépens de la face ventrale de la larve vermiforme, au moins d’une très grande partie de cette face, de telle sorte que la région posté- rieure du Ver persiste comme un appendice du dos de l'Étoile. Le sillon intermédiaire au premier et au second segment de la larve se prolonge sur la face ventrale de l'Étoile dans les angles rentrants qui séparent le bras antérieur et les bras latéraux antérieurs de l'Étoile ; le sillon intermédiaire aux second et troisième segments se prolonge dansles angles rentrants qui séparent les bras latéraux antérieurs et postérieurs de l'Étoile. » Dans les Holothuries cylindriques, c’est tout le contraire : l’ou- SUR LE DÉVELOPPEMENT DES ÉCHINODERMES. 171 verture antérieure du corps est au milieu du premier anneau et du premier cercle cilié; mais l'anus ne se trouve point au milieu du dernier anneau et du dernier cercle cilié ; il occupe la face ventrale entre l’avant-dernier et le dernier cerele cilié. » Chez les Comatules, d’aprèsles observations de Busch, la cavité, qui doit être considérée comme la bouche, se forme comme une interruption du deuxième cercle cilié de la larve cylindrique. La face ventrale de l'Étoile se forme entre l'extrémité antérieure et l'extrémité postérieure, sur laquelle Busch a déjà observé les griffes ‘krallen). Le champ où apparaissent les tentacules est ventral et non terminal. Un exemplaire avec des ambulacres développés avait encore le plus antérieur des cereles ciliés primitifs ; sur un autre, ce cercle cilié avait disparu, et, à l'extrémité postérieure, la formation de la griffe , qui occupe chez les Comatules l'extrémité de chaque bras , avait déjà commencé ; plus loin, deux de ces griffes étaient réunies, à côté l’une de l’autre, à l'extrémité antérieure, sur la face ventrale. Comment se produit plus tard la forme d'étoile sur cette larve annelée ? On peut le concevoir en se rappelant ce que nous savons déjà sur les métamorphoses des larves vermiformes d'Asté- ries. » L'ignorance où nous sommes de la métamorphose de la Torna- ria, de la métamorphose de la Comatule et du premier âge de la larve vermiforme d’Astérie qui est peut-être une transformation de la Tornaria, ne permettent pas d'expliquer ces anomalies appa- rentes. M. Müller cherche à en rendre compte par des considéra- tions théoriques; mais ces considérations, étant nécessairement bypothétiques , ont besoin d'être confirmées par l'observation di- recle ; aussi croyons-nous pouvoir les supprimer. « Les Échinodermes , complétement développés lorsqu'ils ces- sent d'habiter la pleine mer pour se mouvoir en rampant, ne pré- senteñt plus rien que l'on puisse comparer aux franges ciliées des larves. On pourrait toutefois leur comparer les semitæ ou fascioles des Spalangoïdes bien qu'ayant une disposition différente, parce qu'ils forment des replis revenant sur eux-mêmes, et parce qu'ils présentent un mouvement vibratile à leur surface. Troschel a dé- montré que les pédicellaires ne peuvent naître sur ces fascioles ; au 172 J. MULLER. — MÉMOIRE contraire, ils sont garnis de très minces filets calcaires revêtus d’une peau molle, et qui se terminent à leur extrémité par une sorte de bouton également mou. Dans l’intérieur de ce bouton, la tige calcaire S'élargit en formant un paquet de bandelettes longitudinales. Déjà, par l'étude des semitæ sur des individus conservés dans l'alcool, j'avais eu la pensée qu’elles pourraient être destinées au mouvement vibratile, et devenir la cause de tourbillons dans l’eau. L'étude d’in- dividus vivants du Sehizaster canaliferus d'Agassiz m'a convaineu que la peau molle et épaisse qui recouvre les appendices des semitæ est recouverte d’un grand nombre de cils longs et très mobiles, qui manquent, au contraire, à l'extrémité terminée par un bouton. La longueur de ces appendices eiliés atteint 4 à 4,2 de ligne, leur largeur 4/10° ; la largeur de la tige calcaire de l’intérieur, 5 cen- times de ligne. Je sais d'ailleurs qu'Ehrenberg a observé depuis longtemps le mouvement vibratile sur les épines de l'£chinus saæahlis (E. lividus Lamarck) des eôtes de Norwége (Arch. für Anat.und. Phys. 183h, p.578). Je sais encore que ce mouvement, que Forbes et Valentin ont contesté sans motif, existe sur les épines d'individus à demi développés de l’Echinus pulchellus Agassiz ; on voit, du moins , facilement, de petits corpuscules se mouvoir dans l'eau qui entoure les épines. Dans des individus plus âgés de LE. lividus , ce mouvement paraissait avoir complétement disparu ; au contraire, j'ai vu toujours les épines ordinaires du Schizaster canaliferus aussi bien sur les jeunes que sur les vieux individus, sans aucune trace de ce phénomène, tandis que les appendices des semitæ étaient toujours revêtus de longs cils vibratiles. » Appendice. — Observations nouvelles faites à Trieste en 1852. 1° Nouvelle larve d'Opbiure dont les bras sont droits, ronds et plus épais à leur extrémité, et présentent à cette extrémité une coloration rouge comme ceux de la larve d'Ophiure d'Helgoland, mais qui se distingue de cette larve par ses bras latéraux fortement recourbés et aplatis sur leur courbure. Dans le milieu de l'Étoile et sur le dos se trouve une grande tache rouge. Ce qui caractérise ces larves, c'est l’incurvation des tiges calcaires latérales à la place où naissent les bras. Les bras latéraux atteignent # de ligne. Cette SUR LE DÉVELOPPEMENT DES ÉCHINODERMES. 178 larve a été observée jusqu'au développement complet de l'Étoile, de # de ligne, et qui ne présente rien de particulier. Il y aurait cependant à voir si l'Étoile de # de ligne figurée dans le einquième Mémoire (taf. V, fig. 11, 12) ne provient pas de cette larve. Est-ce l'Ophiolepis Sundevalli, dont le disque-dorsal, dans son état frais, est rougeàtre ? % Nouvelle espèce appartenant au genre Echinus. La coupole est surbaissée et arrondie , les tiges calcaires ne sont point renflées à leur extrémité dans la coupole, et sont simples ou bifurquées à leur extrémité. On trouve constamment dans la coupole une ou deux sphères calcaires. Pédicellaires sessiles. Dans les épaulettes ciliées, et à l'extrémité de tous les huit bras, se trouvent des masses de pigment jaune de soufre ; les taches de pigment de la frange ciliée sont rouges comme à l'ordinaire : les tiges calcaires simples et non réticulées. Ces larves ne peuvent appartenir qu'à l'Echinus brevispinosus et à l'Echinus melo. 3 Larves à tiges réticulées, et qui se présentaient beaucoup plus fréquemment. Deux espèces chez lesquelles les quatre tiges calcaires, qui mon- tent dans la coupole, forment un échafaudage carré, mais qui n’est pas complétement fermé en avant et en arrière, parce que les tiges calcaires garnies de dentelures sont seulement appliquées l’une en face de l’autre. Chez l’une, il y a une tige calcaire réticulée très élevée qui monte dans la coupole, ainsi que dans la larve d’Helgoland ; mais la base de cette tige, située sur le réseau à quatre côtés, se comporte d’une tout autre facon; elle se prolonge horizontalement en trois ra- meaux étroits, un en arrière, les deux autres dirigés vers les angles antérieurs du cadre. Dans l’autre (est-ce une espèce ?), il n'y a point de tige calcaire dans la coupole. Chez elle la coupole est plus mousse et beaucoup plus longue ; et certaines dimensions invariables des tiges calcaires, c'est-à-dire l'intervalle qui sépare les tiges transverses supérieure et inférieure, sont remarquablement plus grandes M. Müller considère conne encore énigmatiques des ammaux 474 3. MULLER, — MÉMOIRE dépourvus d'organes génitaux et garnis de cils vibratiles, quelque- fois aussi de cereles ciliés, et qui ont été décrits par lui sous les noms de Pilidium, Actinotrocha et Mitraria, et par M. Buseh sous les noms de Cyclopectina, Mitraria, Eurycercus. Il croit devoir considérer le Trizonius cæcus de M. Busch comme la larve du Pneumodermon mediterraneum. Un animal anciennement décrit par Lesueur, commie un Mol- lusque, sous le nom d’Atlas, et que Blainville à rangé parmi les Acères, lui paraît être une larve de Siponele. EXPLICATION DES FIGURES. PLANCHE 4. Homologies des larves d'Échinodermes (pl. 2 du mémoire de M. Müller). La série des figures I, 1-4, fait dériver la forme des larves d'Holothüries du Lype idéal commun aux larves d'Holothuries, d'Ophiures et d'Oursins. À , espace ventral antérieur en avant de la bouche, s'étendant depuis le bord antérieur jus- qu'au pli transverse antérieur de la frange ciliée. 8, espace ventral postérieur ou anäl s'étendant du repli transverse postérieur de la frange ciliée jusqu'à l'extrémité postérieure où se trouve l'anus ©. D, espace ventral moyen entre le repli trans- verse antérieur et le repli transverse postérieur de la frange ciliée où est la bouche C. a, repli transverse antérieur ; b, repli transverse postérieur de la frange ciliée: ce, circonvolutions bilatérales de la frange ciliée ; d, repli antérieur de la frange ciliée s'étendant du bord latéral dorsal au bord latéral ventral; d', repli postérieur de là frange ciliée s'étendant du bord latéral dorsal au bord latéral ventral, l'appendice auriculaire; e, lobes ou appendices situés au bord du champ veritral antérieur ; e', appendices situés aù bord du champ ventral postérieur : gg', lobes occupant le bord latéral dorsal. L'espace ventral antérieur est, chez les Auricularia , aussi long que le posté- rieur ; l'espace ventral moyen est, au contraire, petit : il se prolonge, chez les Auricularia, dans les sillons latéraux sous la forme d'un AH, ce qui sert à expliquer comment l'espace ventral antérieur et l’espace ventral postérieur se forment par un repli de la peau d'avant en arrière sur la face ventralé jusqu'au champ ventral moyen. La série des figures Il, 4-4, déduit la forme des larves d'Ophiures du même type idéal. AB CDO, abc, mêmes indicätions que précédemment; d, appendices de la circonvolution antérieure dorso-ventrale de la frange ciliée; d’, appendices de la circonvolution dorso-ventrale postérieure; e, appendice auriculaire; e/, ap- pendice du bord du champ ventral postérieur ; g’, appendices du bord latéral dorsal. L'espace ventral dorsal est très petit dans les larves d'Ophiures. SUR LE DÉVELOPPEMENT DES ÉCHINODERMES. 175 La série LIT, 1-4, déduit la forme des larves d'Oursins du même type idéal. ABCDO, abc, comme précédemment ; d, appendices de la circonvolution dorso- ventrale antérieure de la frange ciliée , comme dans la série précédente; d/, cir- convolution postérieure de la frange ciliée s'étendant du bord latéral dorsal au bord latéral ventral (sans appendice auriculaire). L'espace ventral antérieur est extré- mement petit ; toutefois, dans les larves plus âgées, il est facilement reconnais- sable. Dans les jeunes larves, la bandelette transverse de la frange ciliée n'est pas entièrement dans le voisinage du bord antérieur. II, 5. La larve d'Oursin avec des tiges calcaires réticulées et sans épaulettes ciliées , après le développement complet de tous les appendices. La désignation des appendices est la même qu'auparavant : gg’, doubles appendices du bord dor- sal; æxæ, appendices situés en dehors de l’espace de la frange ciliée sur la cou- pole de la partie du corps postérieur. La série des figures IV, 1-3, déduit la forme des Bipinnaria du type commun des Bipinnaria, Tornaria et Brathidlarta. À, Champ ventral antérieur entouré de la frange ciliée qui lui est propre; B, champ ventral postérieur où est silué l'anus 0; D, champ ventral moyen , où est situé la bouche C; M, petite frange ciliée ventrale; N, grande frange ciliée; a, partie transverse de la première frange en avant de la bouche ; b, partie transverse de la deuxième derrière la bouche; cc, repli bilatéral de la seconde; d’, auricules; e, appendices sur les côtés du champ ventral antérieur ; é, appendices naissant sur les côtés du champ ventral postérieur ; gg’, appendices sur le bord dorsal comparables aux appen- dices de même nom des autres larves. IV; a. Tornaria. M N, grande et petite frange ciliée ; c, comme précédemment ; d, auricules peu développées dans beaucoup d'individus. IV, b. Brachiolaria. Mêmes lettres que le Bipinnaria ; yyy, bras antérieurs situés à l'extrémité entre la grande et la petite frange ciliée, comparables aux bras postérieurs ææx des larves d'Oursins avec des tiges calcaires réticulées. RECHERCHES EXPÉRIMENTALES SUR LE GRAND SYMPATHIQUE, ET SPÉCIALEMENT SUR L'INFLUENCE QUE LA SECTION DE CE NERF EXERCE SUR LA CHALEUR ANIMALE, Par M. CI. BERNARD. (exTRaïT..) Aperçu historique. «Je n'ai pas l'intention de rapporter ici toutes les hypothèses qu'on à pu faire sur les fonctions du grand sympathique ; je désire seulement rappeler dans leur ordre chronologique les principales expériences qu'on a tentées sur ce nerf à diverses époques. Cette indication historique montrera , mieux que toute autre discussion , la part et la succession des efforts de chacun dans l'étude expéri- mentale, si difficile, de cette partie du système nerveux. » La première expérience sur la portion cervicale du nerf grand sympathique appartient à Pourfour du Petit. Dans un Mémoire très remarquable publié dans les Mémoires de l’Académie des sciences, pour 4727 (1), cet auteur soutient déjà que la portion cervicale du grand sympathique ne naît pas dans la tête (de la cinquième et sixième paire) pour descendre vers le thorax comme l'avaient cru Vieussens et Willis, mais qu'elle monte au contraire de la partie pos- térieure du corps (chez les animaux) vers la tête, pour se terminer dans les yeux, avec les deux nerfs précités. La preuve que Petit en donne, c’est que, quand on coupe le nerf sympathique dans le cou , (1) Mémoire dans lequel il est démontré que les nerfs intercostaux fournissent des rameaux qui portent des esprits dans les yeux, p.1. C. BERNARD. — RECHERCHES EXPÉRIMENTALES , ETC. 177 chez les animaux (Chiens) (D), les effets de sa paralysie se manifestent au-dessus de la section vers les yeux , qui offrent alors un rétrécis- sement de la pupille, un affaissement de la cornée , une reugeur et une injection de la conjonctive ; de plus , la troisième paupière est saillante et s'avance au-devant de l'œil. Petit ajoute que le sympa- thique influence les glandes et les vaisseaux de Fœil, qui, après la section du nerf, perdent leur ressort et s’emplissent de sang; il explique très bien aussi le rétrécissement de la pupille par la para lysie des fibres du sympathique, qui , après s'être unies aux filets ciliaires, Goivent aller dilater la pupille. Enfin il signale encore un rapetissement du globe oculaire quand les animaux vivent un cer- fain temps. » Tous les phénomènes signalés précédemment se produisent lorsqu'au lieu de couper le filet sympathique au cou, on extirpe le ganglion cervical supérieur ou l’inférieur. » Dupuy en 1816(2), Brachet en 1837(3), John Reid en 1838 (4), n’ajoutérent rien de bien essentiel à l'expérience de Pourfour du Petit. Is signalèrent tous comme conséquence de la section du filet sympathique au cou, ou comme résultat de l'exlirpation des gan- glions cervicaux de ce nerf, le rétrécissement de la pupille, la rou- geur de la conjonctive, l'enfoncement du globe oculaire dans l’or- bite et la projection du cartilage de la troisième paupière au-devant de l'œil. » Quoi qu'il en soit, c'est ce phénomène du rétrécissement de la pupille qui avait attiré plus spécialement l'attention des expérimen- iateurs , dans ces derniers temps; c’est à ce fait surtout que se sont adressées toutes les explications proposées et toutes les expériences nouvelles qui firent faire quelque progrès à cette question. (1) Chez les Chiens , le cordon sympathique au cou est uni avec le vague, qu'il est impossible par conséquent de ménager. Petit, qui n'ignore pas celte disposition , distingue très bien dans cette section complexe les effets qui dé- pendent de la section du pneumogastrique de ceux qui appartiennent au sympa- thique. ê (2) Mémoire sur l'extirpalion des ganglions gutturaux chez le cheval (Journal de médecine de Leroux , t. XXXVII). (3) Système ganglionnaire. Paris, in-8, p. 414, (4) Physiological, pathological and anatomical researches, p. 96. #° série. Zoor. T. IL. (Cahier n° 3.) 4 12 178 C. BERNARD. — RECHERCHES EXPÉRIMENTALES » En 1846, M. Biffi (de Milan) (4) observa cet autre fait nouveau que, lorsque la pupille est rétrécie par suite de la section du nerf sympathique , on peut lui rendre son élargissement en galvanisant le bout céphalique du nerf sympathique coupé. » À peu près à la même époque , le docteur Ruete (de Vienne) (2) ayant remarqué que dans la paralysie de la troisième paire de nerfs, la pupille dilatée et immobile peut encore s’agrandir sous l'influence de la belladone, en conclut que l'iris reçoit deux espèces de nerfs moteurs correspondant à ses deux ordres de fibres musculaires , et que le grand sympathique, en animant les fibres musculaires ra- diées, produit le mouvement de dilatation, tandis que le nerf moteur oculaire commun, en animant les fibres cireulaires, détermine au contraire le mouvement de contraction de l'iris. » En 1851, MM. Budge et Waller (3) reconnurent que, dans son action sur la pupille, le filet cervical du grand sympathique n’agit que comme un conducteur qui transmet une influence dont le point de départ est dans une région de la moelle épinière que précisèrent ces expérimentateurs, et à laquelle ils donnèrent le nom de région cilio-spinale. Cette région est comprise entre la dernière vertèbre cervicale et la sixième vertèbre pectorale inclusivement. » Toutefois ces auteurs, en signalant ce résultat, s'attachèrent uniquement à l'explication du rétrécissement de la pupille. Is ad- mettent aussi qu'après la section du sympathique, les fibres radiées de l'iris (muscle dilatateur) sont paralysées, d’où il suit que l’action des fibres cireulaires (muscle constricteur) prédomine et rétrécit l'ouverture pupillaire. Si, quand on galvanise la région de la moelle à laquelle le sympathique prend naissance, on voit la pupille se dilater, cela vient encore, suivant eux, de ce que, sous l'influence galvanique, le nerf sympathique moteur excite l’action des fibres radiées; leur contraction énergique surpasse alors temporairement l'action des fibres circulaires et détermine la dilatation de la pupille. » Depuis plusieurs années , en montrant dans mes cours publies (1) Zntorna all influenza che hanno sull' occhio i due nervi grande simpatico e vago ; dissert. inaug. del D° Serafino Biffi Milanese. Pavia, 1846. (2) Ruete, Klinische Beitraege, etc. (3) Compte rendu de l'Académie des sciences, p, 378. ! SUR LE GRAND SYMPATHIQUE. 179 les effets de la section de la portion céphalique du grand sympa- thique, j'ai insisté sur ce point qu'au lieu de poursuivre une expli- cation exelusive pour rendre compte des modifications de la pupille, il faudrait en chercher une pour tous les autres phénomènes qui surviennent et disparaissent simultanément de telle façon qu'ils semblent naître sous l'influence d’une cause commune. Tous ces phénomènes simultanés et connexes sont, ainsi que nous l'avons vu : » 4° Le rétrécissement de la pupille et la rougeur de la con- jonctive ; » ® La rétraction du globe oculaire dans le fond de l'orbite, ce qui fait saillir le cartilage de la troisième paupière, et le porte à venir se placer au-devant de l'œil ; » æ Le resserrement de l'ouverture palpébrale , et en même temps une déformation de cette ouverture qui devient plus elliptique et plus oblongue transversalement ; » 4° L'aplatissement de la cornée et le rapetissement consécutif du globe oculaire, » Outre les phénomènes précédents, j'ai encore signalé le rétré- cissement plus ou moins marqué de la narine et de la bouche du côté correspondant; mais j'ai surtout indiqué une modi- fication toute spéciale de la circulation, coïncidant avec une grande augmentation de caloricité et même de sensibilité dans les parties, » J'étudiai ces faits, qui n'avaient été signalés par personne avant moi, comme résultat de la destruction du grand nerf sympa- thique (4), et le 29 mars 1852, je lus à l’Académie des sciences une (1) Bien que ce phénomène de calorification et d'augmentation de sensibilité eût dû se manifester entre les mains de tous les expérimentateurs, personne ne l'avait cependant remarqué, et ne lui avait donné sa signification : c'est à peine g'il avait été noté, Dupuy parle dans deux de ses expériences sur des chevaux de chaleur passagère et de sueurs même survenues dans quelques parties de la face ou de la nuque. Mais cet observateur ne pense pas le moins du monde à carac- tériser le phénomène, qu'il confond, du reste, dans la description des symptômes d'une carie de l'occipital qui existait coïncidemment dans un cas, et d'une carie de l'os maxillaire qui existait dans l'autre. 1] le signale, au reste, chez d'autres animaux qui n'avaient pas eu les ganglions extirpés, mais qui ‘présentaient des 180 €. BERNARD. — RECHERCHES EXPÉRIMENTALES note sur l'influence du nerf grand sympathique sur la chaleur animale. » Dans cette note à l’Académie des sciences, je me bornaï à dé- crire les phénomènes, et à signaler leur condition de production sans vouloir entrer aucunement dans leur explication. Cependant, au maladies des fosses nasales ou des os maxillaires (voyez l'ouvrage du même au- teur sur l'Affection tuberculeuse, Paris, A847). Il reste donc évident que Dupuy n’a pas distingué ni compris le phénomène comme résultat physiologique de l’extirpation des ganglions sympathiques, ainsi que nous le démontrent les conclusions de son mémoire, que je transcris littéra- lement et complétement (*) : « Des expériences que nous avons rapportées, il résulte : » 1° Que la situation profonde des ganglions supérieurs des nerfs grands sym= » pathiques ne s'oppose point à leur excision sur l'animal vivant: » 2° Que l'opération nécessaire pour enlever ces ganglions est simple, peu dou- » loureuse, et n’est accompagnée ni suivie d'événements fâcheux ; » 3° Que les phénomènes qui se manifestent, et qui sont indépendants de l'o- » pération, sont le resserrement de la pupille, la rougeur de la conjonctive, l'amai- » grissement général accompagné de l'infiltration des membres, et de l'éruption » d’une espèce de gale qui finit par affecter toute la surface cutanée ; » 4° Enfin, quon esten droit de conclure que ces nerfs exercent une grande » influence sur les fonctions nutritives. » En lisant le mémoire de Dupuy avant la publication de mon travail, aucun des nombreux auteurs qui l'ont cité n’a pu y voir et n'y a vu que la calorification des parties füt la conséquence de l'extirpation des ganglions cervicaux ; car cela n'y est pas dit. Mais qu'aujourd'hui que j'ai caractérisé le phénomène, on trouve, en lisant rétrospectivement les expériences du professeur d'Alfort, ou même celles d'autres auteurs, qu'il y a dans les descriptions des mots, des phrases, des pas- sages qui doivent se rapporter à ce que j'ai décrit, ce n'est pas la question que j'examine; car il est clair, ainsi que je l'ai déjà dit, que les expériences ont dû donner les mêmes résultats entre les mains de tous les expérimentateurs qui ont dû, par conséquent, avoir tous le phénomène en question sous les yeux. Mais il est si facile d'avoir un phénomène sous les yeux et de ne pas le voir, tant qu'une circonstance quelconque ne vient diriger l'esprit de ce côté! En 1842, j'ai fait un grand nombre de sections du sympathique et d'ablation des ganglions cervicaux de ce nerf sans me douter que cette opération produisit le réchauffement des par- ties, bien que je connusse cependant les expériences de Dupuy. Si, dix ans après, c'est-à-dire en 4852, j'ai découvert le fait, cela tient à ce que je m'étais placé à un point de vue différent pour observer les résultats de l'expérience, (*) Loc. cit SUR LE GRAND SYMPATHIQUE. 181 premier abord, il était diflicile de ne pas croire que cette augmen- tation de caloricité et de sensibilité ne füt pas consécutive à une plus grande activité circulatoire. Mais comme j'avais observé des cas dans lesquels l'activité circulatoire semblait être le phenomène se- condaire au lieu d’être le fait primitif, je me bornai à mdiquer la possibilité des deux hypothèses, en disant que la ealoricité n’était pas toujours en raison directe de la vaseularisation des parties. » Depuis lors je continuai mes recherches , et je signalai la même année, dans mon cours, que le galvanisme appliqué sur le bout su- périeur du sympathique au cou , faisait disparaitre les troubles pro- duits par la section du nerf. Ces résultats furent publiés plus tard dans les Comptes rendus de la Société de biologie (octobre et no vembre 1852). » Mais pendant que je poursuivais mes expériences en France, M. Budge en Allemagne, M. Waller en Angleterre, et M. Brown- Séquard en Amérique , chacun , de leur côté, étaient à la recherche de l'explication du phénomène que j'avais découvert. » M. Budge (4) rattacha cette calorification à la région cilio-spi- nale de la moelle, ce qui pouvait confirmer, sans doute, que la partie cervicale du sympathique nait en ce point, mais ce qui n’ajou- tait en réalité rien au phénomène lui-même. » M. Waller (2) fit pour les artères le même raisonnement que pour la pupille. I admit que la section du filet cervical du sympa- thique qui est moteur , amène une paralysie des artères de la face , qui se relichent, se dilatent et se remplissent d’une plus grande quantité de sang. Ainsi s'explique pour lui la calorification des par- ties. Si l'on galvanise le sympathique, on fait contracter les artères, le sang en est expulsé et le refroidissement survient. » A son retour en France, M. Brown-Séquard réclama pour lui la théorie de la stase du sang par la paralysie des artères, et il annonça avoir vu le premier en Amérique que la galvanisation du sympa- thique amène le refroidissement des parties et la contraction des artères. Je n’entrerai pas dans des discussions de priorité relative- ment à des faits qui datent tous de la même année, et qui se sont (1) Comptes rendus de l'Académie des sciences, 1853. (2) Idem. 182 C. BERNARD. — RECHERCHES EXPÉRIMENTALES développés immédiatement comme corollaires tout naturels de ma première expérience. Je me félicite seulement de l’empressement que les expérimentateurs cités plus haut ont mis à me suivre dans l'étude de ces phénomènes de calorification. Cela me prouve qu'ils les ont trouvés importants et dignes d'intérêt. » M. R. Wagner (de Gætlingue) s’est encore livré dans ces der- niers temps à des expériences très intéressantes sur le grand sym- pathique, mais qui ne se rapportent point directement à la question d'augmentation de caloricité et de sensibilité que nous exami- nous ici. » DE L'INFLUENCE DU NERF GRAND SYMPATHIQUE SUR LA CALORIFICATION. « Depuis longtemps j'avais été frappé du grand nombre de faits contradictoires qui existent dans la science relativement à l'in- fluence des lésions nerveuses sur la colorification des parties para- lysées. On a observé, en effet, dans ces circonstances, tantôt la diminution, tantôt l'augmentation de caloricité. Il y avait done à re- chercher la raison de ces dissidences dans une spécialité des diverses espèces de nerfs; car, quand en physiologie un phénomène s'offre avec des apparences contradictoires, on peut être assuré que ses éléments sont encore complexes et que ses conditions d'existence n'ont pas été suffisamment analysées. Il fallait ainsi examiner sue- cessivement l'influence sur la calorification des nerfs de mouve- ment, des nerfs de sentiment et de ceux du grand sympathique. Je commençai par ces derniers, et je dois dire qu'étant sous l'influence de l'idée très ancienne que le grand sympathique qui accompagne spécialement les vaisseaux sanguins artériels doit être le nerf qui préside aux phénomènes des mutations organiques s’accomplissant dans les tissus vivants, j’eus la pensée que sa section , en amenant une atonie des vaisseaux et un ralentissement où une abolition dans les phénomènes cireulatoires et nutritifs, serait probablement en rapport avec le refroidissement des parties. Je fis done l’expérience, et je choisis le Lapin, parce que chez cet animal le filet cervical sympathique, qui monte à la tête en allant d’un ganglion à l’autre , se trouve facile à atteindre et très nettement distinct du nerf pneumo- SUR LE GRAND SYMPATHIQUE. 183 gastrique. Le résultat fut loin d'être d'accord avec ma prévi- sion, et, au lieu du refroidissement que j'attendais , je constatai une grande élévation de température dans tout le côté correspondant de la tête. Mon hypothèse s'évanouit aussitôt devant la réalité ; mais elle m'avait mis sur la trace d’un fait nouveau qui devait rester acquis à la science : il s'agissait de l'étudier, de l'isoler et de lui donner une signification parmi les phénomènes qui se rapportent à l'histoire du système nerveux sympathique. » S Er, — Le nerf grand sympathique est-il le seul dont la section produise de la calorification ? «Comme c'était sur le nerf sympathique de la face que j'avais d’abord expérimenté, je pensai qu'il valait mieux agir sur les nerfs de sentiment et de mouvement de cette même partie du corps, afin d’avoir des phénomènes plus facilement comparables. » 1° Expériences sur le nerf de la cinquième paire. — Le 21 dé- cembre 4851, M. Bernard fit la section de ce nerf dans le crâne du côté gauche sur un Lapin. Avant l'opération on n’apercevait aucune différence de température entre la température du pavillon auricu- laire des deux côtés. Environ une demi-heure après , celui du côté opéré élait notablement plus froid. Le lendemain le thermomètre y marquait 3/4 degrés à droite et seulement 31 degrés à gauche. A cette période de l'expérience, les symptômes inflammatoires de l'œil , décrits par M. Magendie comme une conséquence de la sec- tion de ces nerfs, se manifestèrent, mais sans élévation de la tempé- rature. L'auteur fitalors la résection du filet sympathique du même côté, et, quelques instants après , il vit la température de l'oreille de ce côté non seulement se rétablir comme du côté opposé , mais s’y élever à 37 degrés ; tandis que du coté laissé dans l'état normal, le thermomètre ne marquait que 31 degrés. Cette différence per- sista les jours suivants. L'auteur ajoute qu'il a souvent répété la section du nerf de Ja cinquième paire, et qu'il a toujours vu cette opération être suivie d’un abaissement de température dans la partie correspondante de la tête, Mais si alors on fait la section du sympathique, les phéno- 18/4 C. BERNARD. — RECHERCHES EXPÉRIMENTALES mènes de calorification surviennent de même , et indépendamment des lésions que produit la paralysie de la cinquième paire ; et géné- ralement on peut même dire que chacun de ces phénomènes atteint son maximum d'intensité dans des conditions vitales opposées , c’est-à-dire que les altérations dues à la section de la cinquième paire se manifestent avec d'autant plus de rapidité et d'intensité que les animaux sont plus faibles et languissants ; au contraire, le phénomène de calorification se produit avee d'autant plus de force et d'instantanéité, que les animaux sont plus vigoureux et mieux portants. 2 Eirpériences sur le nerf facial. — Ta section de ce nerf du côté gauche, près du crâne, chez un Lapin, fut suivie des phéno- mènes ordinaires de paralysie, et bientôt après d’une augmentation notable de la température de l'oreille du côté opéré. Le lendemain le thermomètre marquait du côté sain 30 degrés, et du côté para- lysé 33 degrés. M. Bernard fit alors la section du sympathique du même eôté, et vit la température s’y élever à 36 degrés, tandis que dans l'oreille du côté sain elle ne marquait que 31°,5. Dans une autre expérience , la section du nerf facial a été suivie d'une augmentation de température de2 degrés ; le lendemain l'oreille paralysée faisait encore monter le thermomètre à 32,5, tandis que, dans l'oreille du côté sain, cet instrument ne marquait que 31°,5; enfin la différence diminua les jours suivants, et le sixième jour la température était de 31 degrés à gauche comme à droite. Lorsque, dans d’autres expériences de M. Bernard, ce nerf a été lésé dans l’intérieur du crâne, l'oreille paralysée n’est jamais deve- nue plus chaude que l’autre, et souvent même le thermomètre y marquait À degré ou 1°,5 au-dessous de la température du côté sain. «Ilse manifeste done , ajoute l’auteur, des effets calorifiques dif- férents, suivant que le nerf facial est coupé dans son trajet extra- originel, ou suivant que ses fibres originaires sont coupées dans la substance même de la moelle allongée. Dans ce dernier cas, la pa- ralysie du facial amène, au point de vue de la calorification, des effets qui ne diffèrent pas notablement de ceux que produit la sec- tion de la cinquième paire; et si, pour ce dernier nerf, l'abaisse- SUR LE GRAND SYMPATHIQUE. 185 ment de température est ordinairement plus considérable, on pour- rait l’attribuer aux lésions de nutrition qui surviennent après la section du trijumeau, lésions qui ne se manifestent pas après la section du facial. » Quand, au contraire, on coupe le facial après qu'il s’est engagé dans le canal spiroïde du temporal, et surtout après qu'il en est sorti , les effets de sa section se rapprochent beaucoup de ceux que produit le sympathique , en ce sens qu'il y a toujours une élévation marquée de température. » Cette opposition entre les expériences précédemment citées me fit penser qu'en agissant sur la moelle allongée on paralysait uni- quement les origines spéciales ou motrices musculaires du facial , car on avait une paralysie complète des muscles de la face sans augmentation de température ; qu'en coupant, au contraire, le facial dans le canal spiroïde , on agissait non seulement sur les origines motrices musculaires, mais encore sur les fibres sympathiques qui s’y trouvaient adjointes, puisqu'on observait l'augmentation de température. J'étais , du reste, porté à cette interprétation des phé- -nomènes par d’autres expériences. En effet , s’il est incontestable , en S'appuyant sur l'anatomie comparée et la physiologie , que le sympathique , en prenant naissance dans les centres nerveux céré- bro-spinaux , a des rapports de contact avec les nerfs moteurs , il faut néanmoins admettre une origine spéciale dans la substance ner- veuse pour les nerfs sympathiques à raison d’une spécialité très nette de leurs propriétés. J'ai vu en particulier que le curare , qui agit d’une manière si remarquable sur le système nerveux, éteint distinctement les propriétés nerveuses , d'abord celles des nerfs de sentiment, puis celles des nerfs de mouvement , et celles des nerfs sympathiques, dont l'extinction se manifeste la dernière. J'aurai, du reste, occasion de développer ailleurs ces faits intéressants ; je veux seulement insister iei sur ce fait que l'influence sur la calori- fication appartient spécialement au nerf sympathique, quand on agit sur lui isolément. Les nerfs de sentiment, comme la cinquième paire, ne peuvent être, sous ce rapport, confondus avec lui, puis- qu'ils produisent un refroidissement ; et si maintenant on trouve que le facial, coupé dans son trajet extra-crânien, donne lieu à des 186 €. BERNARD, — RECHERCHES EXPÉRIMENTALES effets complexes, il est beaucoup plus naturel et plus logique de conclure que ce nerf, qui contracte, comme on sait, tant d’anasto- moses dans le canal spiroïde , est déjà compliqué dans sa composi- tion. Pour obtenir une solution directe de la question, et pour savoir silesnerfs moteurs purs agissent sur la calorification, je pensai qu’il était plus convenable d’agir sur les racines rachidiennes qu’on peut atteindre avant qu’elles aient subi aucun mélange. » 3° Expériences sur les nerfs rachidiens. — M. Bernard ayant mis à nu sur un Chien les racines de nerfs rachidiens des membres postérieurs, et ayant constaté que dans les cuisses des deux côtés, ainsi que dans le rectum, la température était de 35°,5, il fit, du côté droit, la section des racines antérieures des quatre derniers nerfs lombaires etdes deux sacrés. Deux heures après , le (hermomètre , plongé sous la peau, marquait 36 degrés du côté sain et 34 degrés du côté paralysé. La section des racines postérieures des mêmes nerfs du côté opposé fut alors pratiquée sur cet animal; une demi-heure après, on trouva que la température de la cuisse était de 34 degrés du côté paralysé du sentiment, etde 35 degrés du côté paralysé du mouve- ment; une heure après elle était descendue à 34 degrés du côté gauche, et à 32 degrés du côté droit. « En résumé , dit l’auteur, il me semble résulter clairement des expériences contenues dans ce paragraphe les propositions qui suivent : » 1° La section des nerfs du sentiment, outre l'abolition du senti- ment, produit la diminution de température des parties ; » 2 Celle des nerfs de mouvement, outre l'abolition du mouve- ment, a donné lieu également à un refroidissement des parties para- lysées ; » 3° La destruction du nerf sympathique, qui ne produit ni l’im- mobilité des muscles ni la perte de sensibilité, amène une augmen- tation de température constante et très considérable ; » {° Maintenant, si l’on coupe un tronc nerveux mixte qui ren- ferme à la fois des nerfs de sentiment , de mouvement, et des filets sympathiques, onales trois effets réunis, savoir : paralysie de mou- vement, paralysie de sentiment et exaltation de caloricité, C’est ce SUR LE GRAND SYMPATHIQUE. 187 que l’on peut obtenir par la section du nerf sciatique, par exemple : toutefois, on comprendra que la calorification doive être , dans ce dernier cas, un peu moins prononcée, parce qu'elle estalors contre- balancée par l’abaissement que détermine simultanément la para- lysie des nerfs de mouvement et de sentiment ; » 5° D'après cela, je crois donc avoir établi avec raison que cette augmentation de caloricité appartient spécialement au nerf sympa- thique : c’est cet effet isolé qu'il s'agira d'étudier dans les para- graphes suivants. » $ IT. — Description des phénomènes de calorification qui accompagnent la section de la partie cervicale du grand sympathique. «J'ai observé que, lorsque sur un animal mammifère, sur un Chien, sur un Chat, sur un Cheval, sur un Lapin ou sur un Cochon d'Inde, par exemple, on coupe ou on lie, dans la région moyenne du cou , le filet de communication (1) qui existe entre le ganglion cervical inférieur et le ganglion cervical supérieur, on constate aussitôt que la caloricité augmente dans tout le côté correspondant de la tête de l'animal. Cette élévation de température débute d’une manière instantanée, et elle se développe si vite qu'en quelques minutes, dans certaines circonstances, on trouve entre les deux côtés de la tête une différence de température qui peut s'élever quelquefois jusqu’à 4 ou 5 degrés centigrades. Cette différence de chaleur s’ap- précie parfaitement à l’aide de la main; mais on la détermine plus convenablement en introduisant comparativement , et avec les pré- cautions convenables, un petit thermomètre dans la narine ou dans le conduit auditif de animal. » J'ai souvent extirpéles ganglions cervicaux supérieurs du grand sympathique chez le Chien et chez le Lapin ; chez ce dernier animal, je les ai trouvés insensibles à la pression d’une pince , ainsi que (1) Chez le Lapin, le Cochon d'Inde, le Cheval, ce filet est isolé du pneumo- gastrique, et se trouve placé entre ce nerf et l'artère carotide. Chez le Chien, le Chat, le filet sympathique est confondu avec le vague, et il devient impossible de couper isolément ces deux nerfs. Le ganglion cervical moyen manque généra- lement chez ces animaux, excepté chez le Cochon d'Inde, où je l'ai à peu près toujours rencontré. 188 C. BERNARD. — RECHERCHES EXPÉRIMENTALES l'avait déjà constaté M. Flourens; seulement leur arrachement semble toujours accompagné d'une douleur plus où moins vive. Chez le Chien , cette sensibilité parait un peu plus grande. L’ablation du ganglion cervical supérieur est suivie des mêmes effets calorifi- ques que la section du filet cervical ; seulement ces effets sont tou- jours plus rapides, plus intenses et plus durables. Il'est inutile de citer toutes les expériences excessivement nombreuses que j'ai pra- tiquées ; je dirai seulement qu'après la section du filet sympathique chez les Lapins, les phénomènes de l'excès de calorification et de sensibilité ne sont guère évidents au delà de quinze à dix-huit jours , tandis que chez les Chiens cela peut durer six semaines à deux mois. Après l’ablation des ganglions chez ces animaux, la persistance de la lésion peut être considérée comme indéfinie; car, sur un Chien à qui j'avais fait l'extirpation du ganglion cervical supérieur à gauche, tous les phénomènes d’excès de caloricité et de sensibilité dus à cette extirpation étaient encore très intenses un an et demi après l’extir- pation du ganglion , lorsque l'animal fut sacrifié pour d’autres expériences. » Cette différence de 4 à 5 degrés est remarquable comme diffé- rence de calorification relative entre les deux côtés de la face. Mais si l'on compare la chaleur de Poreille et de la narine (ainsi échauffée par suite de la section du nerf) à la chaleur du rectum ou des parties centrales du corps, le thorax ou l'abdomen, on voit qu'elle est à peu près la même. Toutefois, j'ai constaté assez souvent que l'extirpa- tion du nerf sympathique élevait dans l'oreille correspondante la chaleur jusqu'à 40 degrés, tandis que la température normale dans le rectum , chez cet animal , ne dépasse pas généralement 38 à 39 degrés centigrades. » Toute la partie de la tête qui s’échauffe après la section du nerf devient le siége d’une circulation sanguine plus active. Cela se voit très distinetement sur les vaisseaux de l'oreille chez le Lapin. Mais les jours suivants, et quelquefois même dès le lendemain , eette turgescence vasculaire a considérablement diminué ou même dis- paru, bien que la chaleur de la face, de ce côté, continue à être très développée. » On peut constater, en faisant pénétrer le thermomètre à l’aide a SUR LE GRAND SYMPATHIQUE. 189 d'incisions préalables, que cette élévation de température qu'on apprécie superficiellement s'étend également aux parties profondes, et même dans la cavité cränienne et dans la substance cérébrale. Cela se remarque mieux après l'extirpation des ganglions sympa- thiques. Le sang lui-même , qui revient des parties ainsi échauf- fées, possède une température plus élevée, ainsi que je l'ai constaté plusieurs fois sur des Chiens, en introduisant un petit thermomètre dans la veine jugulaire à la région moyenne du cou. Il est bien entendu que la cuvette du thermomètre doit être dirigée en haut, de manière à être baignée par le sang veineux qui descend de la tête. » J'ai voulu rechercher comment le côté de la tête, échauffé par la section du nerfsympathique, se comporterait comparativement avee les autres parties du corps, si l'on venait soumettre les animaux à de grandes variations de température ambiante. Je plaçai done un animal (un Lapin auquel j'avais pratiqué la section du nerf) dans une étuve, dans un milieu dont la température était au-dessus de celle de son corps. Le côté de la tête qui était déjà chaud ne le de- vint pas sensiblement davantage, tandis que la moitié opposée de la face s’échauffa ; et bientôt il ne fut plus possible de distinguer le côté de la tête où le nerf sympathique avait été coupé, parce que toutes les parties du corps, en acquérant leur summum de caloricité, s'étaient mises en harmonie de température. » Les choses se passent tout autrement quand on refroïdit l'animal en le plaçant dans un milieu ambiant dont la température est beau- coup au-dessous de celle de son corps. On voit alors que la partie de la tête correspondant au nerf sympathique coupé résiste beau- coup plus au froid que celle du côté opposé; c'est-à-dire que le côté normal de la tête se refroïdit et perd son calorique beaucoup plus vite que celui du côté opposé. De telle sorte qu'alors la désharmonie de température entre les deux moitiés de la tête devient de plus en plus évidente, et c’est dans cette circonstance que l’on constate une différence de température qui peut s'élever quelquefois, ainsi que je l'ai dit, jusqu'à 6 ou 7 degrés centigrades. » J'avais eu l'idée de faire la section du nerf sympathique sur des animaux hiberpants, pour savoir si cela les rendrait moins sensibles 190 C. BERNARD. — RECHERCHES EXPÉRIMENTALES à l’action engourdissante que le froid leur fait éprouver. Je n'ai pas encore eu l’occasion de réaliser cette expérience. » Ce phénomène singulier d'une plus grande résistance au froid s'accompagne aussi d'une sorte d’exaltation de la vitalité des par- ties, qui devient surtout très manifeste quand on fait mourir les ani- maux d'une manière lente , soit en les empoisonnant d’une certaine façon, soit en leur reséquant les nerfs pneumo-gastriques. À mesure que l'animal approche de l’agonie , la température baisse progressi- vement dans toutes les partiesextérieures de son corps ; mais on con- state toujours que le côté de la tête où le nerf sympathique a été coupé offre une température relativement plus élevée ; et au mo- ment où la mort survient, c’est ce côté de la face qui conserve le dernier les caractères de la vie, Si bien qu’au moment où l'animal cesse de vivre, il peut arriver un instant où le côté normal de la tête présente déjà le froid et l’immobilité de la mort, tandis que l’autre moitié de la face, du côté où le nerf sympathique a été coupé, est sen- siblement plus chaude, et offre encore ces espèces de mouvements involontaires qui dépendent d’une sensibilité sans conscience , et auxquels on a donné le nom de mouvements réflexes. » En observant pendant longtemps les animaux auxquels j'avais fait la section de la partie céphalique du grand sympathique , j'ai pu suivre les phénomènes de calorification ainsi que je l'ai dit plus haut. Si les animaux restaient bien portants, je n’ai jamais vu, après cette expérience, survenir dans les parties plus chaudes aucun œdème ni aucun trouble morbide qu’on puisse rattacher à ce qu'on appelle de l'inflammation. J'ai dit : siles animaux étaient bien portants; car, en effet, lorsqu'ils deviennent malades, soit spontanément, soit à la suite d’autres opérations qu'on leur fait subir, on voit les membranes muqueuses oculaire et nasale, seulement du côté où le nerf sympa- thique a été coupé, devenir très rouges, gonflées , e produire du pus en grande abondance. Les paupières restent habituellement collées par du mueus purulent, et la narine en est fréquemment obstruée. Si l'animal guérit, ces phénomènes morbides disparaissent avec le retour à la santé, » D'après cela , je n’admets pas l’inflammation de la conjonctive signalée par Dupuy, John Reid, etc., comme une conséquence nor- SUR LE GRAND SYMPATHIQUE. 191 male de la lésion du nerf sympathique : je considère ce phénomène comme accidentel et comme ne survenant qu’à la suite d’un état d’affaiblissement consécutif de l'animal. Je signale, du reste, le fait comme je l'ai observé, sans vouloir essayer d'expliquer pour le mo- ment comment il se fait que cette augmentation de caloricité et de sensibilité des parties arrive à se changer subitement, sous certaines influences, en ce qu'on appelle une inflammation violente avec for- mation purulente excessivement intense. » Les faits de calorification de la tête que j'ai précédemment signa- lés, après la section, la ligature , la contusion ou la destruction de la partie cervicale du grand sympathique, sont faciles à reproduire et à vérifier. Toutefois , comme toujours en physiologie expérimen- tale , il est nécessaire de prendre quelques précautions pour obtenir des résultats constants et bien tranchés. Voici les conditions qui me paraissent les meilleures : » 4° Il est préférable de faire l'expérience lorsque la température ambiante est un peu basse, parce qu'alors la différence de chaleur entre les deux côtés de la face est d'autant plus facile à saisir qu’elle est plus considérable. »2° [1 faut choisir des animaux vigoureux et plutôt en digestion, l'observation m’ayant appris que les phénomènes de calorification se manifestent d'autant plus faiblement et plus tardivement que les ani- maux sont préalablement affaiblis ou languissants. » 8° Il faut éviter les grandes douleurs et l'agitation de l'animal pendant l'opération. Il arrive en effet, si celle-ci est laborieuse, que l'émotion et l'excitation générale que l'animal éprouve en se débat- tant masquent complétement le résultat immédiat. Bien qu’on n'ait coupé le nerf sympathique que d’un seul côté, on pourrait trouver les deux oreilles, par exemple, aussi chaudes l’une que l’autre im- médiatement après la section. Mais bientôt, si on laisse l'animal en liberté, les choses reprennent leur équilibre, et le côté correspon- dant au nerf coupé reste seul avec une température plus élevée. » 4° Ainsi qu'il a été dit, les phénomènes sont toujours plus mar- qués et plus durables, quand, au lieu de couper le filet d'union du sympathique au cou, on extirpe le ganglion cervical supérieur. »5° Dureste, en revenant ailleurs sur les phénomènes de calorifi- 192 C. BERNARD, — RECHERCHES EXPÉPRIMENTALES cation produits par la section du sympathique, nous verrons qu'ils paraissent suivre les variations physiologiques de la chaleur ani- male. Ils sont plus marqués généralement pendant la période di- geslive, et plus faibles pendant l’abstinence (4). » S IT. — Effets de la galvanisation du bout céphalique du nerf grand sympathique sur les phénomènes de calorification dans la tête. «Lorsqu'on galvanise avec une forte machine électro-magnétique le bout céphalique du nerf sympathique coupé , chez un Chien, par exemple, ce n’est pas seulement la pupille qui reprend son élargis- sement, mais tous les autres phénomènes qui avaient suivi la sec- tion du nerf disparaissent également et même s’exagérent en sens inverse : c'est-à-dire que, sous cette influence galvanique, la pupille rétrécie devient plus large que celle du eôté opposé, l'œil enfoncé devient saillant hors de l'orbite, la vaseularisation des parties s’el- face, et leur température baisse au-dessous de l’état normal. C’est en me fondant sur ces faits que j'ai insisté depuis longtemps sur la connexion évidente de tous ces désordres , et sur la possibilité de les ramener tous, malgré leur variété , à une explication unique , puisqu'ils apparaissent et disparaissent constamment tous sous l’in- fluence des mêmes causes. » J'ai fait connaitre ces résultats dans mon cours de l’année 1859, et ils ont été imprimés aux mois d'octobre et de novembre de la mème année, dans les Comptes rendus de la Société de biologie. Voici une partie de l’extrait qui s’y trouve : « Si l'on galvanise le » bout supérieur du grand sympathique divisé, tous les phénomènes » qu'on avait vus se produire par la destruction de l'influence du » grand sympathique changent de face et sont opposés. La pupille » s'élargit, l'ouverture palpébrale s'agrandit ; l'œil fait saillie hors » de l'orbite. D'active qu'elle était, la circulation devient faible ; la (1) J'ai pratiqué encore l'extirpation des ganglions et la section des filets du sympathique dans le thorax et dans l'abdomen. Je ne décrirai point ici ces expériences, parce qu'elles ont été faites à d'autres points de vue. Je dirai seu- lement qu'elles sont suivies des mêmes effets vasculaires et calorifiques qu'à la tête. SUR LE GRAND SYMPATHIQUE. 193 » conjonctive, les narines, les oreilles, qui étaient rouges, pâlissent. » Si l’on cesse le galvanisme , tous les phénomènes primitivement » produits par la section du grand sympathique reparaissent peu à » peu pour disparaître de nouveau à une seconde application du » galvanisme. On peut continuer à volonté cette expérience, la ré- » péter autant de fois que l’on voudra, toujours les résultats sont les » mêmes. Si l'on applique une goutte d’ammoniaque sur la con- » jonctive d'un Chien du côté où le nerf a été coupé, la douleur dé- » termine l'animal à tenir son œil obstinément et constamment » fermé. Mais, à ce moment, si l'on galvanise le bout supé- » rieur du sympathique coupé, malgré la douleur qu'il éprouve, le » Chien ne peut maintenir son œil fermé ; les paupières s'ouvrent » largement, en même temps que la rougeur produite par le » caustique diminue et disparaît presque entièrement. » Les expériences que M. Bernard décrit ici à l'appui des conclu- sions ont été faites avec un thermomètre mélostatique de M. Wal- ferdin, dont 56 divisions correspondaient à environ 4 degré eenti- grade. Le grand sympathique ayant été coupé du côté droit chez un Chien, et le bout supérieur galvanisé, on vit la température de l'oreille, du même côté, s’abaisser de 47 divisions en 16 minutes (environ 5/6° de degré centigrade). Après 25 minutes de repos, la température s'était relevée presque au point initial. Il est aussi à noter que, pendant la galvanisation , la température du côté sain , au lieu de s’abaisser comme du côté opéré, s'élevait un peu. $ IV. — Effets de la chloroformisation sur la calorification. « Les inspirations d’éther ou de chloroforme, qui ont la propriété d’éteindre la sensibilité, produisent ce même effet quand le sym- pathique a été détruit; seulement, si Pon fait agir le chloroforme lentement, on voit que ce résultat arrive ordinairement un peu plus tard à cause de l'excès de sensibilité qui existe toujours dans les parties. Mais c’est la calorification qui nous offre le plus d'intérêt, en ce qu’elle se comporte comme s’il s'agissait de l'électricité. » Une Chienne de petite taille et encore jeune avait subi la section du filet sympathique dans le cou, du côté droit ; elle avait également 4* série. Zoo. T. I. (Cahier n° 4.) 13 4194 C. BERNARD. RECHERCHES EXPÉRIMENTALES eté soumise à la galvanisation du bout périphérique de ce nerf, et avait fourni les résultats qui ont été consignés dans le paragraphe précédent. » Le quatorzième jour après l'opération, la plaie du cou était de- puis longtemps cicatrisée; mais les phénomènes de calorification persistaient toujours très évidemment : l'oreille droite était plus injectée et plus chaude que celle du eôté opposé. On chloroformisa alors l'animal à l’aide d’un masque de caoutchouc serré autour du museau, et communiquant avec de l'air chargé de vapeur de chloro- forme : bientôt l’insensibilité se manifesta, et au moment où elle était devenue complète, au point que l’attouchement des conjone- tives ne produisait plus de elignement , l'oreille droite baissa rapi- dement de température, devint froide et pâle, tandis que celle du côté sain, à gauche, devint plus injectée et plus chaude. On introduisit un thermomètre dans les oreilles, et l’on trouva : Oreille droite correspondant au nerf sympathique coupé pendant la chloroformisation et l’insensibilité complète. 36°,8 centigr. Oreille gauche saine, au même moment, . . . . . 27,2 » On cessa alors les inmspirations du chloroforme; peu à peu l'animal revint, et une heure et demie après, lorsqu'il était à peu près sorti de son ivresse chloroformique, on trouva : Oreille droite, côté de l'opération . . . . . . . 37°,8 centier. Oreille "FAURE; "CUISINE MA en PA MS MNIO AT » On soumit de nouveau l'animal à l’action du echloroforme; et au moment où l'insensibilité devint complète , la température des oreilles était : Oreille droite , côté de l'opération , . . . . . . 37,3 centigr. Oreille gauche, côté sain. . . . . . . . . . 37,8 » Ces expériences démontrent que le chloroforme n’agit pas de même sur les parties saines et sur celles où le sympathique a été coupé. Plus tard ces faits seront repris à un autre point de vue. » SUR LE GRAND SYMPATHIQUE. 195 Des rapports qui existent entre la vascularisation et la calorification des parties après la section du grand sympathique. « Ainsi que je l'ai indiqué dans ma note lue à l’Académie en mars 1852, la section du filet cervical du grand sympathique, et surtout l’extirpation du ganglion cervical supérieur, amènent immédiate- ment et en même temps que l’augmentation de chaleur, une très forte turgescence vasculaire dans l'oreille et dans tout le côté cor- respondant de la tête. Les artères, plus pleines, semblent battre avec plus de force ; la circulation est activée, et l'absorption des substances toxiques ou autres déposées à quantité égale dans le tissu cellulaire sous - cutané de la face ou à la base de l'oreille à toujours lieu plus vite du côté où a été opérée la section du sym- pathique. » Il ya, sans aucun doute, des rapports intimesque personne ne peut méconnaitre entre les phénomènes de calorification et de vas- cularisation des parties du corps; mais est-ce à dire pour cela que dans le cas qui nous occupe, on devra attribuer l'augmentation de chaleur de l'oreille ou de la face purement et simplement à ce que la masse de sang qui y circule, devenue plusconsidérable, se refroi- dit moins facilement et fait apparaitre les parties plus chaudes ? Cette interprétation toute mécanique, qui devait se présenter à l’es- prit, serait insuffisante pour expliquer ces différences de 5 à 7 de- grés centigrades de température qui existent quelquefois entre les deux côtés de la face. J'ai été encore porté à repousser cette expli- cation, parce que l'on voit très souvent la vaseularisation diminuer considérablement dès le lendemain de l'opération, bien que l'oreille ne varie pas sensiblement de température, Parmi un très grand nombre d'expériences de cette nature que j'a pu observer, j'en cite- rai une seule pour donner une idée plus exacte du fait. » Sur un gros Lapin, vigoureux et bien nourri, j'ai fait l’extirpa- lion du ganglion cervical supérieur du côté droit. L'opération fut faite au mois de décembre, et la température ambiante était basse; avant l'opération, la température prise dans les deux oreilles était . Pour l'oreille droite. , , . . 33° centier. Pour l'oreille gauche, , . , . 33° 196 C. BERNARD. — RECHERCHES EXPÉRIMENTALES » Aussitôt après l’extirpation du ganglion, l'oreille droite devint très vascularisée et très chaude , tandis que celle du côté opposé n'avait pas sensiblement changé d'aspect. Un quart d’heure après l'enlèvement du ganglion, on reprend la température des deux oreilles, et l’on trouve : Pour l'oreille droite. . . . . 39°centigr. Pour l’oreille gauche. . . . . 33° &_» Ainsi en un quart d'heure, la chaleur de l'oreille etde la face avait monté de 6 degrés centigrades. Le phénomène n’était pas encore arrivé à son summum, car une heure après on trouva 40 degrés centigrades dans l'oreille droite. » L'animal fut laissé jusqu’au lendemain, où il fut de nouveau sou- mis à l'observation. L’oreille droite était alors beaucoup moins tur- gescente que la veille ; les artères étaient considérablement dimi- nuées de calibre, et il fallait une grande attention pour voir une différence entre les deux oreilles au premier abord. C'étaient seule- ment les très petites ramifications vasculaires ou les capillaires qui étaient restés plus visibles et plus nombreux dans l'oreille droite ; mais la main percevait toujours très manifestementune grande dif- férence de température entre les deux côtés de la tête. Le thermo- mètre, plongé dans les deux oreilles, donna : Pour l'oreille droite. . . . 37° centigr. Pour l'oreille gauche. . . . 30°,5 » On voit ainsi que l'énorme turgescence vasculaire et l’accumu- lation d’une grande quantité de sang qui suivent immédiatement l'opération, peuvent diminuer considérablement, sans entraîner un abaissement de température notable. Cependant, comme je l’a dit, la cireulation capillaire reste toujours plus visible dans l'oreille plus chaude. » Toutefois il ne faudrait pas encore conclure de là que la tempé- rature sera toujours plus élevée quand les vaisseaux capillaires se- ront plus visibles. A la suite de la section de la cinquième paire , comme on sait, la conjonctive devient très rouge , et les vaisseaux capillaires y sont très visibles, ainsi que dans d’autres parties de la SUR LE GRAND SYMPATHIQUE. 197 face, et cependant il y a dans ces cas un abaissement de tempéra- ture. Si à cela on objectait qu'il y a après la section de la cinquième paire une obstruction des vaisseaux qui enraye la circulation et pro- duit le refroidissement, je répondrais par l'expérience que j'ai citée ailleurs, à savoir, que, dans ces cas, la section du sympathique fait apparaître aussitôt la calorification dans les tissus où la turgescence vasculaire existait déjà cependant, mais avec refroidissement. Cette influence calorifiante du sympathique , même sur les parties où le cours du sang se trouve gêné et diminué, sera encore rendue plus évidente par l’expérience suivante : » Sur un Lapin adulte et bien portant j'ai fait la ligature des deux troncs vasculaires veineux de chaque oreille. Après cette opération les veines se dilatèrent , devinrent gorgées par le sang qui stagnait. Après trois quarts d'heure, les deux oreilles s'étaient manifestement refroidies par suite de cette stase du sang. Alors je fis la section du filet sympathique cervical du côté droit, et aussitôt l'oreille corres- pondante devint plus chaude ; il était cependant impossible d’expli- quer cette calorification par l'accumulation du sang, qui préce- demment produisait un phénomène inverse, le refroidissement, qui s’observait toujours sur l'oreille du côté opposé. Alors je fis la liga- ture de l'artère de facon à emprisonner le sang dans l’oreille ; la température diminua un peu, mais elle resta toujours plus élevée que dans l'oreille opposée. » Quand, au lieu de la higature primitive des veines , on pratique celle des artères, les parties se refroidissent aussi, mais par un mé- canisme inverse. Dans le premier cas, le refroidissement est la con- séquence de l'impossibilité du renouvellement du sang, et dans le second, le résultat de son absence. Nous avons vu qu’en reséquant le sympathique après la ligature des veines, la calorification peut se produire, ce qui n’a pas lieu quand on fait la section de ce nerf après la ligature exacte des artères seules ; mais tout cela prouve simplement que si le phénomène de calorilication ne peut pas se produire dans des parties dont les vaisseaux sont complétement vides de sang, il peut, au contraire, avoir lieu dans des parties où le sang stagne et indépendamment de son renouvellement. Ce qui prouve encore cette proposition, c’est que si chez les Chiens et les Lapins , 198 C. BERNARM. — RECHERCHES EXPÉRIMENTALES où la ealorification d’un des côtés de la tête se trouve bien dévelop- pée sous l'influence de l’extirpation du sympathique, on vient à diminuer l’afflux ou le renouvellement du sang par la ligature de l'artère carotide du côté correspondant, on voit néanmoins la chaleur des parties rester toujours plus élevée que celle du côté opposé. » D'après ces expériences, il n’est donc pas possible d'expliquer le réchauffement des parties par une prétendue paralysie des artères, qui, àraison d'un élargissement passif, laisseraient cireuler une plus grande quantité de sang. J'ai dit prétendue paralysie, parce qu’en effet, elle est plutôt à l'état de théorie qu’à l’état de fait démontré. Si la section du sympathique paralysait les fibres contractiles des artères, on devrait voir à l'instant de l'opération un élargissement subit de l’artère, et c’est toujours le contraire qu’on observe. En effet, en faisant sur des Lapins la section du filet cervical du sympa thique qui avoisine Ja carotide, j'ai toujours vu cette artère se res- serrer considérablement au moment même de la section où du déchirement du filet, Si, quelque temps après, cette artère et ses divisions deviennent plus grosses , c’est qu’elles sont distendues par un afflux de sang qui se fait dans les parties correspondantes ; mais loin d’être la cause de la circulation plus active , l’élargisse- ment des artères n’en est au contraire que l'effet. De même quand en galvanisant avec une forte machine électro-magnétique le bout périphérique du nerf sympathique coupé, on amène dans les par- ties où il se distribue une série de troubles profonds sur lesquels je n'ai pas à m'expliquer ici, mais avec lesquels coïncide un arrêt de la cireulation, Si alors les artères, comme les veines, se resserrent etreviennent sur elles-mêmes, cela tient à ce qu'il n’y a plus de sang pour les distendre, mais ce n’est pas du tout l'effet d’un resserrement actif des vaisseaux. Et, du reste, si cette paralysie des artères exis- tait réellement, leur dilatation, sous l'influence de l'impulsion du cœur, ne devait-elle pas aller toujours en augmentant à partir du moment de lopération, et finir même par amener des dilatations artérielles anévrysmatiques. Il n'arrive rien de semblable, puisque nous avons vu, au contraire, que le lendemain de la section du sym- pathique la vascularisation a ordinairement beaucoup diminué , les SUR LE GRAND SYMPATHIQUE. 199 artères sont revenues sur elles-mêmes, bien que la chaleur soit tou- jours très notablement augmentée. » En un mot, le phénomène circulatoire qui succède à la section du nerf sympathique est actif et non passif ; il est de la même nature que la turgescence sanguine qui, ainsi que je l'ai démontré ailleurs, survient dans un organe sécréteur qui, d’un état de repos ou de fonc- tionnement faible, passe à un état de fonctionnement très actif; il serapproche encore de l’afflux de sang et de l'augmentation de sen- sibilité qui surviennent autour d’une plaie récente ou aux environs d’un corps étranger qui séjourne dans les tissus vivants. Je n’ai pas à me préoccuper ici de l’explication de ces phénomènes sur lesquels j'aurai bientôt l’occasion de revenir. Il me suffira de dire que, bien que dans tous ces cas on voie les vaisseaux plus gorgés de sang et les artères battre avec plus de force , il ne peut venir à l’idée de personne de penser à les rapporter à une paralysie pure et simple des artères. » Conclusion. « Je n'ai voulu, dans ce travail, établir qu'un seul point de l'his- toire si complexe du grand sympathique, à savoir, que la section de filets ou de ganglions appartenant à ce nerf a constamment le pri- vilége d'augmenter la calorification des parties dans lésquelles il se distribue. » Ces phénomènes de caloricité qu'on produit en agissant sur le sympathique ne sont, en réalité, que l’exagération de ce qui se passe dans la production de la chaleur animale. » En donnant les moyens d’accroitre les actes calorifiques et de les localiser dans des parties extérieures faciles à observer, j'ai eu la pensée de rendre plus accessible à nos moyens d'investigation l'étude de cette importante fonction encore si peu connue, mais qui ne saurait toutefois être recherchée ailleurs que dans la plus ou moins grande activité des métamorphoses chimiques que le sang éprouve dans les tissus vivants, sous des influences spéciales du système nerveux. » PUBLICATIONS NOUVELLES. Description des Poissons fossiles provenant des gisements coralliens du Jura, dans le Bugey, par M. Tæozuière. 1" livraison in-fol. Lyon, 1854. Après avoir établi l'identité des schistes lithographiques de la Bavière et de la formation des calcaires lithographiques de Cérin (situé vers le haut du massif qui domine le Dauphiné, et qui, au pied, est baigné par le Rhône), l’auteur traite de la faune ichthyologique de ce dernier gisement. Il y trouve cinquante espèces de Poissons qui appartiennent à vingt-neuf genres distincts. Seize de ces genres existent également en Allemagne, et ce sont précisément ceux qui sont les plus nombreux en espèces, et qui forment, pour ainsi dire, le fond de la population ichthyologique de ces bassins: treize genres paraissent être particuliers au Bugey. M. Thiollière fait remarquer aussi que dans ce dépôt on trouve des Poissons qui appartiennent à la famille des Squales ainsi qu’à celle des Raies, et que d’autres es- pèces se rapportent au type de ces Malacoptérygiens abdominaux ordinaires plutôt qu'au groupe des Sauroïdes : résultat qui est contraire aux opinions émises par M. Agassiz relativement à l'époque d'apparition de ces formes zoologiques. Mais si la faune jurassique du Bugey se rapproche ainsi, plus qu'on ne le pensait, de la faune crétacée et de celle de l'époque actuelle, il est à noter que jusqu'ici on n'y a découvert aucun indice de l'existence de Poissons acanthoptérygiens. Les espèces décrites et figurées dans la première livraison de l'ouvrage de M. Thiollière sont les Spathobates Bugesiacus et Belemnobates Sismonde, de la famille des Raïes ; le Phorcynis colulina, de la famille des Squales ; l’Undina cire- nensis, de la famille des Célacanthes, Ag., et cinq espèces nouvelles du genre Pycnodus ; quelques autres espèces y sont figurées et seront décrites dans la pro- chaine livraison. Nous ajouterons que les planches sont très belles, et paraissent avoir été faites avec beaucoup de soin dans les détails. Mémoire sur les plis cérébraux de l'Homme et des Primates, par M. GRATIOLET. In-4, avec atlas in-fol. Paris, 1854. Ayant déjà inséré un extrait de ce travail dans nos Annales (3e série, t. XIV, p. 484), nous nous bornerons à ajouter ici que les belles planches dont M. Gra- tiolet a accompagné son Mémoire sont une acquisition précieuse pour l'anatomie zoologique. Erpétologie générale ou Histoire naturelle des Reptiles, par MM. Dv- MÉRIL et BIBRON (Suites à Buffon, édition Roret). La publication de ce grand ouvrage, suspendu depuis la mort de Bibron, vient d'être reprise par M. Duméril, aidé de son fils, M. Auguste Duméril, dont les tra- vaux zoologiques sont connus des lecteurs des Annales, Deux volumes, formant le tome VII, viennent de paraître, et contiennent l'histoire des Serpents. Pour compléter ce grand travail, il ne reste à publier que le neuvième volume, qui contiendra la fin de l'histoire des Batraciens, et qui est déjà sous presse. — RS Es RECHERCHES ANATOMIQUES SUR LES HYMÉNOPTÈRES DE LA FAMILLE DES UROCERATES, Par M. Léon DUFOUR. Inest sua gratia parvis. Les pelites choses ont leur mérite, Plus j'avance dans l'étude anatomique des Insectes , à laquelle j'ai déjà consacré près d’un demi-siècle d’ardues investigations, plus je me convaines de l’immensité de ce qui reste à faire. Malgré un millier d'espèces de tous les ordres soumis à mon scalpel, je n'hésite point à déclarer que j'ai à peine défriché quelques coins de ce vaste champ hérissé de ronces. Je n’ai pas cessé de le dire bien haut, mes travaux en ce genre sont inévitablement incomplets ; aussi les ai-je toujours présentés sous le titre de Recherches. Dans mon esprit comme dans mon amour-propre d'auteur , ils ne sont qu'un point de départ, une occasion de contrôle pour de plus habiles ou de plus heureux que moi. Mes amis le savent, mon culte passionné pour la science a su s'affranchir de cette manie d'innovations et de cette ambition de lucre qui dévorent tant d’empressés de l’époque. J'ai toujours trouvé et je trouve encore dans l’attrait d’une instructive occupation ma plus douce, ma seule récompense. L'anatomie et la physiologie de ces admirables organismes à respiration trachéenne sont, et le complément de leur histoire, et la pierre de touche de leur classification. Considérée de cette hauteur, on comprend facilement l’importante valeur de l’entomologie et l'étendue de son horizon... Mais venons à mon sujet. Dans mon Anatomie des Hyménoptères, présentée en 1834 à l'Académie des sciences, et publiée en 4841, sous ses auspices, dans ses Mémoires, je n’avais eu occasion de disséquer qu’un seul indi- vidu de la famille des Urocérates de Latreille : c'était un mâle du 202 LÉON DUFOUR. Sirex Juvencus. Je ne me dissimulai point alors l’imperfection de ce travail ; je provoqua le scalpel des entomotomistes, afin de jeter une nouvelle lumière sur cette anatomie, et de combler les grandes lacunes que j'y reconnaissais. J'étais loin de m'attendre que vingt ans plus tard je serais appelé moi-même, sinon à compléter, du moins à reviser, à avancer mes recherches sur ce point. Une circonstance fortuite a mis sous ma main, en septembre 1853, plusieurs J'uvencus vivants, et cette heureuse rencontre m'a fait aiguiser et mes ciseaux et mon scalpel. Un parquet de salon récem- ment fait avec des planches de Pins maritimes, venus dans la loca- lité fut, à l’époque précitée, perforé en dix endroits par la sortie de ces beaux Hyménoptères , dont les larves avaient vécu, jusqu'à leur définitive transformation, dans l’intérieur de ces planches. Tout fait présumer que les œufs, ou les larves très jeunes de ce Sirex, existaient dans ce bois de Pin avant qu'il eût été ouvré en planchettes pour le parquet. Pour ce qui concerne, et les métamorphoses du Juvencus, et le genre de vie de sa larve, et la description ainsi que l'iconographie de ses divers états, la science n’a plus rien à acquérir. Les figures si fidèles de Ratzeburg (Forts. Ins., 3, tab. {) ont illustré les di- verses phases dela viede cet Hyménoptère; et tout récemment mon ami Perris , à l'œil et à l'esprit duquel rien n'échappe , est venu, dans son important travail sur les Insectes parasites du Pin mari- time, confirmer et compléter les observations du savant entomolo - giste prussien. Il demeure aujourd’hui constaté que les larves des Sireæ, loin d’être parasites d’autres larves d’insectés , comme le soupçonnait M. de Spinola, sont positivement lignivores. La pro- venance des sujets de mes dissections actuelles en fournit une nou- velle preuve. Pour l'exposition anatomique , je suivrai la marche déjà adoptée dans mes autres recherches de ce genre. La famille des Urocérates, fondée par Latreille, a reçu depuis lui les noms si puérilement modifiés d'Urocérides , de Siricides, de Siriciens, etc. RECHERCHES SUR LES UROCÉRATES. 9208 CHAPITRE PREMIER. APPAREIL RESPIRATOIRE. Il présente sans doute, soit dans le nombre et la nature des stig- mates, soit dans les trachées, peu de traits qui ne se rencontrent pointdans les Hyménoptères en général, dont j'ai publié l'anatomie; mais il y existe néanmoins quelques modifications, quelques textures mieux saisies, qui ne me permettent point de les passer sous silence. $ 1”. Stigmates. Quand une fois on a étudié ces orifices respiratoires sur les indi- vidus vivants ou frais de quelque espèce principale, on peut, sans crainte de s’égarer, au moins quant au nombre et à la position, en faire l'application aux autres types desséchés de la série. Ainsi je ne me suis point borné à la description des stigmates du Juvencus (1) ; j'ai consulté aussi ceux du Gigas, du Spectrum, du Fuscicornis, et même des genres Xiphydria et Oryssus. 1° Stigmates thoraciques. Je m'empresse de déclarer que, dans mon Anatomie des Hymé- noplères , j'ai eu tort d'avancer , quoique d’une manière générale et avec des réserves , que les Insectes de cet ordre n'avaient qu’une seule paire de stigmates thoraciques, la paire métathoracique. Le fait positif est que les Urocérates en ont deux paires très distinctes, et je pense qu'ils ne font pas une exception dans l'ordre. Toutefois nous verrons bientôt que l’une d'elles, quoique très apparente, n’a pas des fonctions respiratoires. À. Sligmates mésoprothoraciques. On les trouve dans l'intervalle de la rainure plus ou moins béante qui sépare latéralement le prothorax du mésothorax. Il n'est pas toujours facile de les mettre en évidence , à cause de l’étroitesse et (1) PL &, fig. 4. 204 LÉON DUFOUR. de la profondeur de cette rainure qui, surtout dans les insectes dessé- chés, n'offre que la trace superficielle et linéaire de son existence. Dans le Juvencus, ils sont habituellement visibles à l'extérieur. Dans d’autres espèces, au moins à l’état de dessiccation, il faut écar- ter violemment ces deux segments du thorax pour les rendre appa- rents. Placés sur une membrane fibro-coriacée commune aux segments, dont ils empruntent le double nom, ils se présentent sous la forme d’un bouton oblong, bivalve, transversal, c’est-à-dire dont l'entr'ouverture est à peu près perpendiculaire à l’axe du corps (4). Quand on parvient à les placer convenablement sous une loupe bien éclairée, les deux valves rappellent en miniature celles d’une Moule. Elles sont noires, à peu près égales entre elles, et amincies à leurs bords libres en une membrane blanchâtre, qui m’a paru taillée en biseau pour s'adapter et se recouvrir mutuellement dans le cas d'une occlusion complète. Leur texture est coriaceo-cornée, et elles sont parfaitement glabres. Les poils du prothorax et du mésothorax qui se croisent sur la rainure garantissent le stigmate contre l’abord des atomes hétérogènes de l’atmosphère. Ces valves sont mobiles sur leur base d'insertion, et les muscles qui les meuvent sont soumis à l'acte volontaire de l'animal. Lorsque dans les individus desséchés on cherche à constater ces stigmates par l’arrachement plus facile du prothorax, tantôt le stig- mate suit la membrane fixée à ce dernier segment, et tantôt il demeure à celle du mésothorax. Dans tous les cas, l’anatomiste praticien peut constater, à la paroi interne ou splanchnique corres- pondante au siége de ces stigmates, les grandes souches tra- chéennes qui viennent s’y aboucher. 3 Le stigmate mésoprothoracique n’est que peu ou point apparent à l’extérieur dans le Gigas. Il est un peu plus distinct dans le Fusci- cornis, et les valves y sont roussâtres et non noires; il a, dans le Spectrum, la configuration et la couleur de celui du J'uvencus. Dans le Xiphydria Camelus, il faut le dénicher dans le fond d'une anfrac- tuosité recouverte par une avance voûtée du bord postérieur béant du prothorax ; en sorte que ce stigmate ne saurait être mis en évi- (1) PL, 4, fig. 2. RECHERCHES SUR LES UROCÉRATES. 205 dence, si l’on n’enlève point ce bord voüté ; du reste, il a ses valves noires, et sa structure est identique avec celle du J'uvencus. Il a une situation tout à fait semblable dans les Xiphydria annulata et fasciata. L'avance voûtée du prothorax est moins prononcée dans le X. Dromedarius que dans les trois espèces précédentes. Dans l’Oryssus coronatus , genre en dehors de la famille des Urocérates , le bord précité du prothorax forme une épaulette jaune, qui recouvre de sa configuration conchoïde l'entrée de la rainure mésoprothora- cique, au fond de laquelle le stigmate qui nous occupe demeure invisible. B. Stigmales métathoraciques. Disons-le tout d’abord, et nous le prouverons bientôt, ce ne sont là que de faux stigmates. Leur forme, leur texture, inobservées jusqu’à ce jour dans les Hyménoptères, méritent une étude toute particulière. Dans tous les Urocérates , ainsi que dans les autres genres dé- nommés plus haut, on voit très distinctement sous le relief de l’écusson, et siégeant au dos du métathorax, une paire de disques ovalaires jaunâtres, glabres, tout à fait à découvert, immobiles, im- perforés, rapprochés de la ligne médiane du corps. Cette description sommaire s'adapte à toutes les espèces. Ces taches jaunes ont pourtant été fidèlement représentées par l’habile pinceau de Ratzeburg sur les Gigas , J'uvencus et Spectrum ; mais son texte est muet sur leur structure et leur fonction, et per- sonne, que je sache, n’en a parlé. Sans nous préoccuper pour le moment des attributions physiologiques, exposons d’abord ces faux stigmates dans le Juvencus, pour nous servir de type (1). Placés sur une saillie aplatie, une sorte de console du métathorax, ils sont ovales, mais un peu atténués au bout qui regarde la ligne médiane du corps. Au lieu d’un bouton à valves mobiles, ils n'offrent, je le répète, qu’un disque à nu, affleurant le tégument où il est finement enchatonné et d’une parfaite immobilité. Ce disque jaune a une consistance solide, sèche, plus que membraneuse, moins (1) PL 4, fig. 3. 206 LÉON DUFOUR. que coriacée, à peu près parcheminée, partout unie et comme ten- due. Le microscope y révèle une réticulation à mailles arrondies , sans fente ni ouverture quelconque ; ils sont donc fermés. Ce disque est plus -ovale dans le Gigas, et ses mailles rondes semblent affecter une disposition sériale dans le sens du grand dia- mètre. Ilest encore plus arrondi à ses deux bouts dans le Fuscicor- nis, et il est plus difficile à distinguer à cause de la couleur jaunâtre du support. IL est semblable dans le Spectrum à celui du Fuscicor- nis, mais plus apparent. Il a cette même configuration dans le X. Camelus; plus petit, pectiniforme, saillant , et comme rudi- mentaire dans les X. annulata, fasciata et Dromedarius. Celui de l'O. coronatus est plus allongé, et enclavé dans les reliefs plus pro- noncés du métathorax. Il est à peine sensible dans l'O. unicolor, et n’est plus que vesligiaire. Recherchons maintenant les usages de ces singuliers disques jaunes. Et d’abord comment leur supposer rationnellement une fonction respiratoire ? Par quel mécanisme une membrane sèche , consistante, unie, immobile, sans abri, sans ouverture, réticulée, mais non criblée , pourrait-elle servir à l’inspiration et à l’expira- tion de l'air? Je ne balance pas à le dire très positivement , ce sont de faux stigmates, des stigmates postiches, déchus de toute fonction, et n’existant que comme vestiges, comme des jalons qui se ratta- chent à des modifications organiques de famille ou de genre, dont la connaissance n’est pas encore acquise à la science. Mais ce qui légitime sans réplique ma négation d’une fonction respiratoire dans ces faux stigmates; ce qui lève jusqu'au moindre soupçon du doute, c’est l'absence, à la paroi interne des disques, de ces souches trachéennes quine manquent jamais de se rencontrer dans les stig- mates bien conditionnés, Quelques auteurs, Réaumur ({. Il, p.76), de Geer (4. 1e, p, 37), Moldenhawers, Curtius Sprengel et leurs compilateurs, parlent, mais vaguement, de stigmates fermés ou oblitérés. Aucun d'eux, pas même Sprengel dans sa monographie de ces organes, n’a donné une figure de stigmates véritablement clos, et leurs descrip- tions hésitantes sont loin de satisfaire les anatomistes tant soit peu exigeants. RECHERCHES SUR LES UROCÉRATES. 207 Si je ne me trompe, je suis le seul qui ait décrit et-figuré de vé- ritables faux stigmates ou pseudo-trèmes. C'est dans la Nepe el dans la Ranâtre, deux Hémiptères aquatiques, que j'en fis connaître l'existence, d’abord en 1821, dans les Annales des sciences physio- logiques de Bruxelles, puis plus complétement en 1833, dans mon Anatomie des Hémiptères. J'ai prouvé que les grands stigmates abdominaux de ces Insectes étaient fermés, révoqués de toute fone- tion respiratoire; celle-ci s’exécutant exclusivement par des stig- mates bien conditionnés placés à la base du siphon caudal. , Ainsi la respiration thoracique et céphalique dans les Urocérates s'exécute toute à l’aide d’une seule paire de stigmates , les méso- prothoraciques. Et voyez comme ces stigmates bivalvulaires réunis- sent toutes les conditions anatomiques favorables à l'exercice éner- gique de leur haute mission physiologique ; voyez aussi la puissante souche trachéenne qui vient s'aboucher intérieurement ; voyez ces innombrables vaisseaux de circulation aérienne irradiant de ces stigmates pour aller infiltrer dans tous les tissus de ces deux impor- tantes cavités splanchniques le bénéfice nutritif de la respiration. 2° Stigmates abdominaux. Au nombre de huit paires symétriques et transversales, ils sont placés aux huit premiers segments dorsaux de l'abdomen, sur leur déclivité latérale et près de leur angle antérieur. Le neuvième seg- ment en est seul privé. Dans le J'uvencus et le Spectrum vivants ou récemment morts, il n’y a que les deux premières paires et la hui- tième qui soient en évidence; les autres se trouvant cachées par l’'emboitement , l’imbrication latérale des segments qui en sont le siége, en sorte qu'il faut désemboïter ceux-ci pour les constater. Mais dans ces mêmes individus où la dessiccation a amené une contractilité de tissu qui change un peu les rapports respectifs des segments, il n’est pas rare de trouver ces stigmates visibles à l’ex- térieur, comme ils le sont toujours dans le Gigas et le Fuscicornis. On les voit alors logés dans une dépression du tégument infiniment plus prononcée que durant la vie. Ces stigmates, étudiés dans l’Insecte vivant ou récemment mort, 208 LÉON DUFOUR. se composent d'un cerceau corné brun qui en limite le pourtour, et, dans l'aire de ce cerceau, d’un diaphragme membraneux, fin, uni, partagé dans son grand diamètre par une fente linéaire, servant à l'entrée et à la sortie de l'air pendant l'acte de la respiration (4). La même lentille amplifiante, qui fait paraître réticulé le disque jaune du faux stigmate métathoracique, ne décèle pas la moindre appa- rence de texture aréolaire dans le diaphragme des stigmates abdo- minaux. Le cerceau corné est régulièrement ovale-oblong dans la première paire des stigmates ; il a dans les suivantes une légère échancrure en avant et en arrière. Curt. Sprengel a décrit et figure des stigmates d’une semblable organisation dans le Bombyæ vinula (loc. cit., tab. 3, fig. 30). Cette même contractilité de tissu dont j'ai parlé plus haut donne par la dessiccation, à ces ostioles respiratoires, un aspect très diffé- rent de celui de l’état vivant. On les prendrait alors pour des bou- tons bilabiés, souvent inéquilabiés, avec une entr'ouverture linéaire profonde, dans laquelle une lentille exercée peut constater des lambeaux ralatinés du diaphragme membraneux qui existe pen- dant la vie. $ 2. Trachées. 1 y a dans les Urocérates les deux ordres de trachées qui se voient dans la généralité des Hyménoptères (2). Les trachées tubu- laires ou élastiques sont destinées à la simple circulation de l'air dans tous les tissus pour le complément de la nutrition. Les tra- chées utriculaires où membraneuses sont de véritables aérostats ou vessies volatoires, servant exelusivement à rendre le corps plus léger pour la locomotion aérienne. Les trachées tubulaires ne présentent rien de particulier dans leur nombre etleur composition organique. Quant aux utriculaires, elles ont des configurations un peu variables pour leur volume. Ainsi, à la base comme à l'extrémité de la cavité abdominale, elles sont plus grandes, plus où moins elliptiques. Entre celles-là il y a (1) PL. 4, fig. 7. (2) PL. 4, fig. 8. RECHERCHES SUR LES UROCÉRATES,. 209 d'innombrables petites bulles subglobuleuses qui pénètrent dans le thorax, etmème dans l’intérieur du crâne, où elles forment au cer- veau de moelleux coussinets. CHAPITRE II. APPAREIL SENSITIF. Il se compose, comme dans les Insectes en général, du cerveau, de la chaîne ganglionnaire et des paires de nerfs qui naissent de ces centres nerveux. J’avoueque mes recherches ont échoué pour constater le système nerveux stomato-gastrique désigné sous ce nom par Brandt, et dont je suis loin de nier l'existence. 1° Cerveau. Après avoir vainement cherché à isoler le cerveau dans le Juven- cus, j'ai été enfin assez heureux pour le reconnaitre bien nettement dans le Gigas. Des difficultés, des méprises, des illusions, accom- pagnent cette dissection. Indépendamment de la dureté du crâne qu'il faut enlever par éclats , il y a dans sa cavité une disposition anatomique qui ne se rencontre point dans le crâne des grands ani- maux : c’est l'existence de masses musculaires considérables desti- nées aux mouvements puissants, soit des mandibules et autres pièces buccales, soit de l’ensemble de la tête sur le prothorax. Outre cela, des couches de trachées ou tubulaires, ou utriculaires, remplissent tous les vides, et protégent le cerveau en dessus comme en dessous par de véritables édredons. Cet organe, étroitement logé durant la vie dans sa boîte der- nique, doit alors être rond comme celle-ci ou hémisphérique ; mais aussitôtqu'ilen est dégagé, il se livre à son expansibilité, et apparaît sous la forme d'une masse cérébrale transversalement oblongue , subbilobée , aboutissant de chaque côté aux grands veux à réseau. Lorsque le pigment de ceux-ci s’est détaché de la cornée vitrée extérieure, on voit un disque ovalaire pointillé de brun ; chacun de ces pelits points n’est que l’indice choroïdien d'un nerf optique 4" série. ZooL. T. I. (Cahier n° 4.) ? 14 210 LÉON DUFOUR. propre correspondant à chaque maille du réseau vitré. L'ensemble de ces imperceptibles nerfs optiques confondus par une pression mutuelle s’unit au cerveau par un col d’une brièveté extrême , ébauche, rudiment d’un nerf optique commun. Chaque lobe du cerveau donne naissance en avant à un nerf antennaire simple et à un nerf buccal, qui ne tarde point à se diviser, se ramifier, pour animer les divers organes de la bouche. Entre les deux lobes, sur ce même bord antérieur, s’aperçoiventisolés les trois nerfs optiques ocellaires , surmontés des choroïdes des yeux lisses ou ocelles. En arrière, le cerveau se prolonge au milieu en un pé- doneule, que sa brièveté rend fort difficile à constater, Ce pédon- eule ou plutôt ee col, quoique fourni par les deux lobes cérébraux, est simple ; il offre tout aussitôt un renflement à peine sensible, une sorte de bulbe rachidien qui n’émet aucun nerf, et en arrière du- quel est l’origine du double cordon nerveux de la chaîne ganglion- naire. La pulpe du cerveau a une consistance qui lui permet de conser - ver sa forme, alors même que cet organe est isolé des tissus accés- soires, mais il n’a pas la fermeté des ganglions. Cette différence s'explique par l'inclusion exacte du cerveau dans une boîte solide cornée, qui le garantit contre les choes et les secousses. La pulpe én est blanche, fine, homogène, unie extérieurement, c'est-à-dire sans la moindre trace d'inégalités quipuissent rappeler des cireon- volutions cerébrales. S'il existé à ce sensorium commune une méninge ou arachnoïde, comme il est permis de le croire, elle est d'une ténuité qui la rend inconstatable. T'en est bien autrement pour le névrilème des ganglions. 20 Chaîne ganglionnaire et nerfs. Cette chaine se compose de dix ganglions unis entre eux par un double filet nerveux, et émettant des paires de nerfs symétriques. Ces ganglions se divisent naturellement en thoraciques et en abdo- minaux . RECHERCHES SUR LES UROCÉRATES. 2411 A. Ganglions thoraciques. Aunombre de trois, un pour chaque segment du thorax dont ils empruntent le nom , ils sont étroitement enclavés entre des apo- physes plus où moins inelinées, qui s'élèvent du plancher inférieur du thorax. Leur énucléation de ces irrégulières et profondes anfrac- tuosités est un véritable travail d'Hereule, et il faut être tourmenté du besoin impérieux de les mettre en évidence pour surmonter les obstacles qui s'opposent à cette exhumation. Enfin, à force de cette patience cent fois éprouvée qui doit être la grande vertu du micro- tomiste, je suis parvenu à bien voir ces {rois ganglions. Le prothora- cique, plus petit, plus arrondi, que les suivants, est précédé de ce qu'on appelle l'anneau œæsophagien ; c'est-à-dire que tout près du bulbe rachidien l'œæsophage s'engage entre lés deux filets nerveux qui en naissent pour se rendre à la bouche. Ce ganglion fournit deux paires de nerfs: l’une, en avant, musculaire ou cervicale ; l’autre, vers le milieu , la crurale des pattes antérieures. Entre ce ganglion et le suivant, le cordon rachidien fournit une petite paire de nerfs, sans doute musculaire. Le ganglion mésothoracique, ovale-elliptique, émet trois paires de nerfs : l’antérieure, ou alaire ; la moyenne , plus petite, musculaire ; la postérieure, ou crurale des pattes inter- médiaires. Le ganglion métathoracique, plus rapproché du pre- mier abdominal que du mésothoracique, a la grandeur de celui-ci, et donne origine à un pareil nombre de paires de nerfs destinées à des parties analogues. B. Ganglions abdominaux. Hs sont au noinbre de sept bien distinets. Ainsi il ÿ en a un de plus que dans la plupart des autres Hyménoptères, ce qui semble- rait assurer aux Urocérates une prédominance organique. Les quatré premiers sont séparés les uns des autres par un long inter- valle: les trois derniers sont, au contraire, fort rapprochés entre eux, et reposent dans la femelle sur les cols des ovaires , de sorte que , vu la position de ceux-ci , ils ne dépassent pas le milieu de l'abdomen , tandis que ceux du mâle approchent de l'extrémité de celui-ci. 212 LÉON DUFOUR. Les ganglions abdominaux sont en général ovales-elliptiques ; ils fournissent chacun, sauf le dernier, une seule paire latérale de nerfs , lesquels se distribuent soit aux muscles des parois abdomi- nales, soit aux viscères contenus. Le premier se trouve justement sur la limite thoraco-abdominale ; le dernier, plus grand, plus arrondi que les autres, émet quatre paires de nerfs, dont les posté- rieurs, toujours plus forts, sont les nerfs génitaux. Dans les deux avant-derniers ganglions, l’origine des nerfs latéraux est bien plus antérieure que dans les quatre qui les précèdent. La figure du système nerveux dira le reste (4). CHAPITRE III. APPAREIL DIGESTIF. Il ne se compose que du canal alimentaire et des vaisseaux hépatiques. Quelle qu’ait été la persévérance de mes investigations tant à l'issue de la tête que dans le thorax, je n’ai jamais pu saisir le moindre vestige de glandes salivaires. Le scalpel m'avait pourtant appris que ces glandes existaient dans les T'enthrédines, famille qui, dans le cadre entomologique , est contiguë à celle des Urocérates. Le tube digestif (2) n’a que la longueur du corps de l’insecte ; il va directement de la bouche à l’anus sans la moindre inflexion. Il est très simple, c'est-à-dire qu'il n'y a ni jabot ni gésier. Il se fait re- marquer par une finesse, une fragilité, une pellucidité de ses parois fort disproportionnées avec la grandeur et la force de l’insecte. L'œsophage, délié comme un cheveu , traverse le thorax. Le ventricule chylifique qui lui succède n’en est distinct ni par une contracture, ni par l'indice d’aueune valvule. Il a seulement un diamètre plus grand que l’æsophage, et il le conserve dans son tra- jet de l'abdomen jusqu’à l'origine de l'intestin stercoral. Mais à sa terminaison , ce ventricule présente dans le Juvencus une disposi- tion anatomique exceptionnelle qui mérite de nous arrêter. es fig. 8. (2) PL 4, fig. 9. RECHERCHES SUR LES UROCÉRATES. 213 Dans tous les Hyménoptères que j'ai disséqués, etils sont déjà bien nombreux, le ventricule chylifique se termine en arrière par un bourrelet, indice d’une valvule intérieure qui sépare l'organe élaborateur du chyle de celui qui ne doit recevoir que les excré- ments. Cette valvule, ainsi que je l’ai répété partout, répond à l’iléo- cæcale des animaux supérieurs. C’est immédiatement avant ce bourrelet que s’insère le verticille des vaisseaux biliaires. La bile est ainsi versée directement dans le ventricule chylifique, mais à sa terminaison et non , comme dans les Mammifères, à son origine, Tels sont et la situation et le rôle des vaisseaux hépatiques dans tous les Insectes en général. Dans le Juvencus, le bout postérieur du ventricule chylifique se perd dans un godet représenté à l'extérieur tantôt sous la forme d’un bourrelet saillant , tantôt sous celle d’une vésicule. Les vais- seaux biliaires, au nombre de plus de trente, et verticillés comme dans tous les Hyménoptères , sont implantés non pas en avant du bourrelet, mais sur le bourrelet lui-même ou sur la vésicule. Dans cette dernière forme, qui n’est que l’évolution, le déploiement du bourrelet, les vaisseaux ont leurs points d'insertion plus distants entre eux, mais nullement placés sur une série annulaire. J'ai exprimé ces deux états par des figures (1). La délicatesse, l’exiguité des tissus n’ont point permis à mon scalpel de me rendre témoin oculaire du mode de connexion intime de ce bourrelet avec l'orifice des tubes sécréteurs de la bile. Ma longue pratique de ces autopsies et la loi de l’analogie , que j’in- voque {toujours avec une grande sobriété, m'autorisent à penser que dans le fond de ce godetexiste une valvule ventriculo-intestinale, et que le bourrelet ou la vésicule ne sont que des réservoirs, à confor- mation différente ou à état variable , destinés à épancher directe- ment dans le ventricule chylifique, et non dans l'intestin, le liquide sécrété. Et ce qui prouve l’exceptionnalité de ce fait, c'est que , dans le Gigas dont j'ai disséqué une femelle encore vivante , il n'existe au- eune trace ni de bourrelet, ni de godet, ni de vésicule. Les vais- (4) PI. 4, fig. 10 et 44. 244 LÉON DUFOUR. seaux hépatiques y sont, comme dans le commun des Hyméno- ptères, implantés en verticille autour de la terminaison du ventricule chylifique, ainsi que le démontre la figure qui accompagne mon texte. Du reste, ces sortes de vésicules biliaires ne sont pas nouvelles dans la splanchnologie des Insectes. Dans mes publications, j'en ai décrit et figuré avec des configurations diverses dans les £pheppi- ger, Crioceris, Pyrrhocoris, Pantatoma, Lygœus, Gerris, ete. Quel est le régime alimentaire des Urocérates ? Personne ne nous l'a encore dit, et je doute qu'on les ait jamais surpris sur les fleurs comme les Ichneumons et les Tenthrèdes, leurs voisins dans le cadre. Il était réservé au scalpel de nous fixer sur ee point, et de révéler un fait qui a bien son intérêt physiologique. Le ventricule chylifique, tant du Juvencus que du Gigas, du mâle comme de la femelle , est constamment rempli d'une pulpe d'un blanc amidonné et homogène, Dans les J'uvencus saisis cette année au moment de leur éclosion, ou du moins dès leur sortie des gale- ries ligneuses, on pouvait supposer qu'ils n'avaient encore rien mangé, et alors il était permis d’avoir l'idée assez rationnelle que cette pulpe était un produit de la vie embryonnaire de la nymphe, une sorte de méconium. Je ferai remarquer : 4° que le Juvencus dis- séqué il y a vingt ans , et chez lequel j'ai signalé, dans mon Ana- tomie des Iyménoptères , cette même pulpe blanche , était un indi- vidu pris libre dans la campagne ; qu'il en est de même du Gigas récemment anatomisé vivant, et apporté des forêts de Sapins de nos Pyrénées; 2 que j'ai conservé dans des bocaux pendant quinze Jours, el sans nourriture, des Juvencus vivants dont j'ai successive- ment fait l’autopsie ; 3° que l'existence , dans le rectum, d’une ma- tière fécale bien élaborée annonçait le complément de la fonction digestive. Tout cela , il faut bien en convenir, n’est pas favorable à l'idée d'un méconium ordinaire, et ne nous éclaire pas davantage sur la nature de l'aliment de ces Hyménoptères. C’est encore À une lacune à léguer à mes successeurs. Je me permettrai à celte occasion les réflexions suivantes, Faut- il croire que les Sirex, qui rongent avec leurs mandibules le bois pour leur grande galerie de sortie, mangent les déblais de cette ga- RECHERCHES SUR. LES UROCÉRATES. 215 lerie? Je ferai observer que je n'ai pas découvert dans le canal digestif la moindre parcelle de ces déblais. L'absence des glandes salivaires est certainement favorable à l'idée d’un défaut de mastication ou de digestion buecale. La lon- gueur et l'extrême finesse du ventrieule chylifique, lequel n'est pré- cédé nide gésier ni de jabot, ni de valvule pylorique, le parfait déve- loppement des vaisseaux biliaires, témoignent assez hautement et de la faible contractilité des parois ventriculaires, et de Ja nature ehy- leuse de l'émulsion blanche contenue. De plus , l'existence dans le rectum d'exeréments bien conditionnés prouve, à mon avis, que ceux-ci ont été éliminés de cette émulsion ; que, par conséquent, l'acte digestif et la nutrition ont pu se compléter. C'est là un fait piquant d'une alimentation tout organique commençant dès la naissance de l’animal, et se continuant toute la vie sans le besoin d’une ingestion par la bouche. Il donne lieu à des considérations d'un ordre nouveau, qui auront, sans doute, plus tard d’autres applications. La nature, dansses prévoyantes sollicitudes, dans ses mystérieuses inspirations, n'a-t-elle pas pourvu les Sirex, dès leur vie embryon- naire, de la quantité d'aliment suflisante pour maintenir leur exis- tence pendant tout le temps nécessaire à la propagation de l'espèce, but principal de leur création? Dans mon Anatomie des Hyméno- ptères, j'avais déjà signalé l’analogie de texture délicate du canal digestif des Urocérates avec ce même canal dans les frèêles Névro- ptères appelés Éphémères à cause de leur passagère existence. Je crois encore aujourd'hui que celle comparaison n’est pas dénuée de justesse. Mais cet épisode nous à fait perdre de vue la composition du canal digestif, Revenons-Y. La première portion de l'intestin stercoral , celle qui correspond äu cæcum, OÙ mieux au côlon des animaux supérieurs, est ou sim- plement filiforme, ou parfois renflée à son origine. La seconde, ou le rectum, d'une teinte jaune-paille, est oblongue ou conoïde, sui- vant son degré de réplétion, et j'y ai souvent trouvé des excréments moulés, des crottes oblongues. Il s'engage en partie entre les deux tables de la dernière plaque dorsale de l'abdomen de la femelle , 216 LÉON DUFOUR. plaque atténuée en arrière en une pointe couverte d’aspérités. L'anus s'ouvre à la table inférieure de cette plaque. I y à à une légère dépression arrondie. Ainsi, dans le Sirex femelle, l'anus est fort loin de la vulve. Dans le mäle, ce même segment terminal n'offre en dessous aucune trace d’anus ni de dépression. Le bord postérieur du seg- ment ventral qui le précède est échancré au milieu, et cette échan- crure est destinée à faciliter, soit l'expulsion des exeréments, l'anus étant profondément situé, soit l'exsertion de l'armure copulatrice. Appendice. Le tissu adipeux splanchnique, dont les attributions fonction- nelles rentrent en définitive dans la nutrition, est assez abondant, surtout dans la cavité abdominale des individus récemment méta- morphosés. Il l'était moins dans ceux que j'avais conservés vivants dans des bocaux. Cette différence prouve assez l'usage nutritif du tissu adipeux. Ces animaux se nourrissent de leur propre substance. Il est formé de sachets globuleux d’un blanc mat, libres ou re- tenus par des trachéoles ou d’imperceptibles filets nerveux qui les tiennent suspendus en agglomérations ou en grappes. Ces sachets, fort pelits, varient à peine dans leur grosseur. CHAPITRE IV. APPAREIL GÉNITAL. ART. [*, — Appareil génital mâle (4). Les males des Urocérales sont fort rares et petits proportionnel - lement aux femelles; aussi l'occasion de les disséquer se fait-elle encore désirer. Déjà, dans mon Anatomie des Iyménoptères , je m'étais plaint que la dissection d’un seul mâle du J'uvencus ne m'eût pas mis à même de constater ses testicules. Aujourd'hui encore n'ayant eu à ma disposition qu’un sujet unique de ce sexe, mort déjà depuis quinze jours, et que je cherchaï à ramollir par une ma- (1) PI 4, fig. 13. RECHERCHES SUR LES UROCÉRATES. 917 cération dans l'alcool , je n'ai pas été plus heureux pour découvrir ces glandes spermogènes. Je suis done réduit à déplorer cette importante lacune. Les organes génitaux mâles des Urocérates sont situés non pas , comme ceux de la femelle , vers le milieu de l'abdomen , ainsi que je le dirai bientôt, mais au bout de cette cavité, comme dans la plupart des Insectes. 1° T'esticules. — En attendant le témoignage direct des sens, il me faut recourir à l’anatomie comparative de la famille qui suit immédiatement les Urocérates, celle des Tenthrédines, et procéder par voie d’analogie. Mes inductions sur ce point sont puissamment étayées par la conformité des organes accessoires de l’appareil. Ces testicules doivent être fort petits, et consistent vraisemblablement en un faisceau de capsules spermifiques peu nombreuses. % Conduits déférents. — Si l’exiguité des testicules les a déro- bés à mon scalpel, il n’en a pas été ainsi des conduits déférents qui en naissent. Malgré leur capillarité , j'ai pu les suivre dans l’un et l'autre sujet jusqu’à leur insertion à la vésicule séminale corres- pondante. J'ai constaté que, tout près de cette insertion, ils se reploient chacun en un peloton assez gros, ovalaire ou subglobu- leux, formant un véritable épididyme , qu'avec un peu de patience on peut dérouler. 3 Vésicules séminales. — Il n’y en à qu'une seule paire. Elles sont très développées comme dans les Tenthrèdes, ovoïdes-oblon- gues, mais non courbées en crosse, blanchâtres , un peu atténuées en col en arrière. C’est vers le milieu de leur bord interne qu’elles reçoivent les conduits déférents. L° Canal éjaculateur. —C'est le tronc commun de l'appareil génital. Il est fort court. 5° Armure copulatrice. — Cet instrument de préhension si in- génieux est destiné à faire saillie hors du corps lors de l’accouple- ment, et, vu la position de la vulve dans la femelle, il doit être fort curieux. Cette armure se compose d’une pièce basilaire cornée, fixée au corps de l’insecte par de puissants muscles ; d’un forceps court , solide, robuste, noir, dont les branches , susceptibles d’un grand 218 LÉON DUFOUR. écartement , ont vers leur milieu une articulation transversale , et dont l’article terminal est un mors triangulaire velu ayant au-des- sous de sa pointe comme une petite ventouse submembraneuse que Je sens le besoin d'étudier encore ; enfin d’un fourreau de la verge plus court que le forceps, grêle, d’un brun pâle, formé de deux fines baguettes adossées. Je n'ai pas vu la verge. ART. Il.— Appareil génital femelle (1). Ce n’est point, comme dans la généralité des Insectes, à l’extré- mité postérieure qu'il faut chercher les organes fant externes qu'internes de cet appareil des Urocérates. Ils n'occupent que la courte limite de la moitié antérieure de la cavité abdominale, Cette situation exceptionnelle se justifie par celle d’un long oviscapte, dont la base se trouve à ce point mitoyen de la région ventrale, La nature déroge moins qu'on ne le croirait au premier coup d'œil à son plan général , et ici comme ailleurs, elle témoigne de la prodi- gieuse variété de ses moyens pour atteindre un même but, Nous ver: rons bientôt que le dernier segment ventral de l'abdomen de ces Insectes, par son développement démesuré et par sa structure par- ticulière, égale à lui seul la longueur des autres segments réunis. Nous avons à examiner : 1° lesovaires avec leurs organes acces- soires ; 2° la vulve; 3° l'oviscaple, $ 1%. Ovaires. Si, par des incisions latérales circonspectes , vous enlevez tout d’une pièce la paroi tégumentaire dorsale de l’abdomen sans déran- ger la position normale des organes splanchniques, les ovaires appa- raissent sous la forme de deux faisceaux rapprochés, conoïdes- oblongs, composés chacun d'une trentaine au moins de gaînes ovigères serrées, grêles, allongées, à parois pellucides, renfermant cinq ou six œufs à la file les uns des autres (2). En avant, ces gaines se terminent par un insaisissable filet, et tous les filets aboutissent à (1) PL 4, fig. 14. (2) PL 4, fig. 15. RECHERCHES SUR LES UROCÉRATES. 219 un ligament suspenseur commun qui, de mème que dans tous les autres Insectes, va se fixer dans l’intérieur du thorax. En arrière, les gaines ovigères confluent à droite et à gauche en un col ovarien disüinet, que j'ai souvent trouvé farci d'œufs. Il n'existe pas ici de véritable calice. Les deux cols s'unissent pour former un oviducte d’une extrème brièveté. Les œufs renfermés dans leurs gaines ou dans les cols, par con- séquent infécondés, et cela devait être ainsi chez de jeunes vierges saeriliées à la science dès leur naissance, les œufs sont allongés, grèles, cylindroïdes, blancs, atténués aux deux bouts dans le Juvencus, obtus, arrondis à l’un de ceux-ci dans le Gigas. Les organes accessoires de l’oviducte, conduit qui est aussi le vagin, deviennent, surtout dans la condition virginale des sujets, d’une dissection des plus difficultueuses. Ils sont si tendres, si fra- giles, si compliqués, si agglomérés, qu'ils défient le scalpel le plus habile pour les isoler et mettre en évidence leurs connexions. Aussi est-on fort embarrassé pour leur assigner une attribution physio- logique et une nomenclature qui puissent se justifier avee quelque rigueur, C'est dans le J'uvencus et le Gigas frais que mon scalpel s’est exercé. Immédiatement à la base des ovaires, et presque sous les cols ovariens , on trouve deux vésicules assez grandes, globuleuses, d’une légère teinte jaunâtre dans le premier de ces Sirex, roussâtre dans le second , si étroitement contiguës à la ligne médiane, que, avant d’avoir acquis la certitude de leur existence binaire, je croyais que leur ensemble n'était qu'une seule vésicule bilobée. Lenr mol- lesse et la finesse de l'enveloppe les rendent insaisissables par la pince. Mon ignorance complète du point positif de leur insertion, soit à l’oviducte, soit dans les tissus voisins, ne m'a pas permis dé donner à ces vésicules un nom d'une signification déterminée. Dans le voisinage et en arrière de celles-ci, on découvre dans le Gigas un assez long boyau cylindrique, flexueux, et offrant, près du point de son insertion, un boyau supplémentaire fort court, mais de même nature, Dans le J'uvencus, il y a encore en arrière de ces mêmes vésicules non pas un long boyau, mais une bourse ovalaire, plate et ridée, sans doute parce qu'elle était vide. D'après ma 220 LÉON DUFOUR. pratique de semblables dissections, ce boyau et cette bourse appartiennent à la poche copulatrice d'Audouin. Cette poche, qui, dans les Insectes en général, a sur l’oviducte une insertion facile à constater, est, au contraire, dans les Sirex, très difficile à mettre en évidence, à cause de l’excessive brièveté de l’oviducte et de l’inser- tion sessile des organes accessoires. On sait que la poche copulatrice reçoit, lors de l’union des sexes, le pénis du mâle, quelquefois même son armure, et qu'à la suite de cet acte elle devient le récep- tacle, le réservoir de la liqueur séminale destinée à féconder les œufs, à leur descente des ovaires, à l’époque de la ponte. Dans nos Sirex femelles toutes vierges, ces poches copulatrices, étant restées inactives ou sans fonction, n'avaient pas pu prendre un grand déve- loppement, et ne renfermaient pas conséquemment de liquide sper- matique. En travers de la base des ovaires se voit une grande vessie oblongue, à peine légèrement contractée au milieu, cucurbitiforme, sessile, remplie d’une humeur transparente. Chacun des bouts de cette vessie est comme coiffé d’une agglomération d'innombrables petites vésicules ovales-oblongues, subdiaphanes, peut-être un peu plus allongées dans le Gigas. Si une pince patiente et adroite par- vient à désenlacer ces vésicules des ramifications trachéennes et nerveuses qui les maintiennent en un petit paquet informe, on voit celui-ci se dérouler en une grappe allongée, ramuleuse, dont les pédicules et les pédicelles confluent en un tronc commun, inséré un peu au-dessous des bouts de la vessie. C’est ainsi que je suis parvenu à mettre cette grappe en parfaite évidence (2), et elle a, dans le Juvencus comme dans le Gigas, une conformité des plus satisfai- santes pour l’entomotomiste qui s'attache à la recherche des ana- logies organiques. Nous voyons lune glande parfaitement caractérisée. Les petites vésicules sont les organes sécréteurs; les pédicules et les pédicelles, les conduits éducateurs ; la vessie centrale, un réservoir. Celui-ci, que j'ai trouvé énorme dans le Gigas, est rempli d’une matière limpide comme le cristal, mais non liquide, et d’une telle consistance (1) PL 4, Bg. 16. RECHERCHES SUR LES : UROCÉRATES. 291 que la pince qui la saisit l’entraîne comme une petite Limace glai- reuse ou gommeuse. C'est certainement là une glande sébifique, organe destiné à sécré- ter une humeur spéciale propre à enduire les œufs au moment de la ponte, afin de les préserver contre l'influence des agents extérieurs. J'ai décrit et figuré des glandes analogues dans les Tenthrédines , qui suivent les Urocérates dans le cadre de la classification. Cette conformité viscérale prouve que les Urocérates ont bien plus d'affi- nités avec les Tenthrédines qu'avec les Zchneumonides. Mais, je le répète, il m'a été impossible de saisir, eæ visu, le mode de connexion de la glande sébifique avec le court oviducte , à la paroi supérieure duquel elle parait sessile. $ 2. Vulve. Le sixième segment ventral de l'abdomen, ou celui qui est immé- diat à la bosse génitale extérieure de la femelle, se dilate à son milieu en un lobe demi-circulaire de texture tégumentaire avec une légère bordure blanchâtre , et une fine villosité bien sensible à la loupe ; c’est là un opercule de la vulve, une sorte de tablier qui fait l'office des grandes lèvres des animaux de l’ordre supérieur. Il est ainsi dans le Juvencus et le Gigas. J'avoue que je n’ai point distinctement aperçu la vulve propre- ment dite, et j'ai regret de n'avoir pas constaté cet orifice extérieur du vagin ou oviducte , qui, dans l'acte copulatif , donne entrée à l'armure génitale du mâle, et qui, à l’époque de la ponte, est destiné à la sortie des œufs. Je suppose que la vulve s’ouvre entre la base de la grande gouttiére médiane de l'oviscapte et celle de la tarière. $ 3. Oviscapte et ses accessoires. Ce titre fait pressentir la division du sujet en deux paragraphes. Je consacrerai le premier à la composition segmentaire de l'abdo- men, qui se lie anatomiquement avec le second, ou l'oviscapte. $ £. Composition segmentaire de l'abdomen. L’abdomen des Urocérates a, dans le mâle comme dans la femelle, neufsegments abdominaux, dont huit, semi-annulaires, sont stig- 299 LÉON DUFOUR. matifères. Le dernier seul, privé de cesorifices respiratoires, appar - tient aux deux régions dorsale et ventrale, et se termine par une pointe bien plus grande dans la femelle, où elle a des aspérités spi- nuleuses. Comme il y a à sa base dorsale une demi-articulation, on le prendrait pour un dixième segment; c’est au-dessous d'elle que s'ouvre l'anus dans ce sexe. Ce dernier trait avait déjà été signalé par notre Réaumur, le premier auteur qui ait décrit et figuré le Gigas. Le premier de ces segments dorsaux , ou le segment basilaire , offre une fente médiane complète, qui se divise en deux panneanx égaux , faciles à écarter lun de l'autre. Ce caractère , commun à toute la famille des véritables Sirex, est demeuré inaperçu à presque tous mes devanciers ; cependant le serupuleux pinceau de Ratze- burg n'a pas manqué de le faire sentir dans les trois espèces de Sirex qu'il à si fidèlement représentées. Les espèces du genre Xiphydria, placé par Latreille à la fin des Tenthrédines , par Leach dans une famille particulière, les Xiphy- driides , et par M. Blanchard dans les Urocérates | a aussi cette division médiane du premier segment dorsal de l'abdomen, tandis qu'il n’en existe aucune trace dans le genre Oryssus, conservé par le Jussieu de l’entomologie dans ses Urocérates, et que Westwood , mieux inspiré, a séparé de ceux-ci pour en constituer un petite fa- iille Sous le nom d'Oryssides. Quel est le but physiologique, car il y en à un, de cette fente médiane, qui semble favorable à une expansion du segment? Je l'ignore encore , surtout en la voyant commune aux deux sexes. Mais je ne la crois pas étrangère à un acte copulatif dont personne n’a été témoin oculaire, et qui, vu la forme et la situation des or- ganes respectifs, doit s'accompagner d’ébats fort curieux, fort sin- guliers. La région inférieure ou ventrale de l'abdomen se compose de sept segments distincts, par conséquent deux de moins qu'à là région dorsale. Ils n'ont rien de particulier dans le mâle, ni pour leur grandeur, ni pour leurs connexions : ee sont des demi- cintres . Dans la femelle, le septième a des dimensions, une structure et RECHERCHES SUR LES UROCÉRATES, 293 une importance physiologiques qui méritent de nous arrêter un instant. Je décrirai d'abord celui du Juvencus comme type. J'ai déjà dit qu'il formait la moitié au moins de toute la région ventrale. Sa face extérieure est d’une texture tégumentaire ana- logue à celle des autres parties du squelette dermique. Sa moitié antérieure, qui forme une bosse à son origine , est enchâssée laté- ralement sous les bords imbriqués des septième et huitième seg- ments dorsaux , tandis qu'en approchant de son extrémité posté- rieure, elle se réfléchit sur le dos pour devenir commune au dernier segment dorsal. Son trait extérieur le plus caractéristique, le plus éminemment fonctionnel, est l'existence dans toute la ligne médiane d’une profonde gouttière , qui loge et embrasse de son bord taillé en biseau l’oviscapte. Le fond de cette gouttière, étudié sur l’ani- mal fraichement mort, est membraneux et souple, de manière à pouvoir se prêter aux dilatations exigées par le jeu de ce dernier instrument. Pour mettre én évidence sa face interne ou splanchnique, il faut, par une dissection ménagée, enlever sa paroi dorsale tégumen- taire, puis débarrasser son intérieur des viscères et des divers tis- sus qui l'encombrent. Ici, après le scalpel et la pince, il faut que la brosse ou le pinceau mettent à nu sa structure spéciale. Alors on constate que tout le fond de ce grand segment est un plancher mus- culeux continu qui dérobe entièrement à la vue la paroi tégumen- taire sous-jacente. Ce n'est pas tout : afin de bien juger celle-ci, il convient d’inciser, de déchiqueter, d’élaguer autant que possible cette masse musculaire. Celte préparation une fois achevée, ce grand segment ventral apparait concave. La ligne médiane est devenue un canal membra- neux, qui correspond à la gouttière externe de l’oviscapte, Chacun des bords de ce canal est relevé par une baguette cornée, blonde ou roussätre, qui correspond aux flanes cornés de la gouttière précitée. Une baguette toute semblable s’observe, de chaque coté, sur l'aire même de la concavité du segment, et se trouve ainsi parallèle à celle du milieu ; à la base interne de cette seconde paire de baguettes se voit une lame appendiculaire pointue, de mème texture cornée , mais courte. Ces baguettes, ces lames, servent d'attache aux milliers 224 LÉON DUFOUR. de fibres musculaires qui garnissent cette concavité , et qui sont les agents des mouvements si variés imprimés à l’oviscapte. Et qui nous dévoilera le nombre, les attributions de tous ces muscles , soumis pourtant à l'empire de la volonté de ce petit ani- mal ? Il faudrait plus qu'un Lyonet pour nous initier à ces merveil- Jeux secrets. Si nous embrassons dans nos investigations anatomiques les six segments qui précèdent celui qui vient de nous occuper, on se con- vainera des soins ingénieux que la nature à pris pour seconder les mouvements tant généraux que partiels de tout l’abdomen. Chacun de ces six segments offre , à droite et à gauche du bord antérieur, un lobe redressé, une apophyse où s’attachent des muscles dont l'action se combine avec ceux du grand segment ventral. Ce dernier est d’une parfaite identité dans le Spectrum. Quoique organisé sur le même plan, il est proportionnellement moins grand dans le Gigas, et les baguettes de sa surface interne , surtout les latérales, y sont moins prononcées. Le Fuscicornis n'offre pas non plus, sous ce rapport, de différence notable. Les apophyses des six segments dont je viens de parler s’observent aussi dans ces espèces. $ 5. Oviscapte. L'étude de cet admirable instrument, spécialement destiné à implanter les œufs dans du bois mort et dur, va nous révéler, dans de petits riens inaperçus ou inappréciés, des attributions physiolo- giques du plus saisissant intérêt. Et combien de faits curieux n’au- rions-nous pas à apprendre encore, s’il nous était donné d’assister dans des conditions opportunes aux étonnantes manœuvres de cet insecte vivant ! Dans nos Urocérates, comme dans tous les Hyménoptères téré- brants , l’oviscapte se compose de la gaîne (1) et de la tarière (2). Examinons-les séparément, et prenons encore pour type des- criptif celles du J'uvencus, que nous avons étudié vivant. 1° Gaine. —- Elle a la longueur de tout l'abdomen de l’insecte , (1) Fig. 49. (2) Fig.124. RECHERCHES SUR LES UROCÉRATES. 295 el consiste en deux lames ou valves coriacées , longues , linéaires , entières et obtuses à leur bout libre, qui est même un peu calleux. Ces valves sont en demi-cylindre creux. Une fine membrane mar- ainale déborde Ja lame coriacée. Le recouvrement mutuel de cette fine bordure membraneuse, l’union et la coaptation des deux valves, complètent un étui destiné à loger la tarière et à donner passage aux œufs à l’époque de la ponte. La face concave a un poli des plus fins, une sorte de vernis grisâtre parfaitement adapté au double but fonctionnel dont je viens de parler. Mais cet étui n'offre pas, dans toute son étendue, une organisa- tion identique ; et pour le bien étudier, le bien comprendre, il faut le diviser en deux parties à peu près égales en longueur, séparées l'une de l’autre par une articulation transversale étroite, demeurée incomprise , parce que jusqu’à ce jour les iconographes n’en ont pas bien saisi l’existence. L'une de ces parties, un peu plus large que l’autre, est antérieure et logée dans la gouttière sous-ventrale : elle mérite le nom d'inva- ginale. L'autre, dont la moitié au moins fait, même dans son inac- tion, une saillie au delà du bout de l'abdomen, s’appellera évaginale. L’articulation séparative ne saurait être bien jugée si on ne l’étu- die pas sur des individus frais. Son fond est fibro-membraneux, et parfois d’une teinte roussâtre. Dans l’état de dessiccation, c’est une empreinte linéaire des plus fines. Elle témoigne du jeu isolé de la gaine évaginale , sans infirmer l'impulsion que celle-ei peut rece- voir de la portion invaginale. La gaine évaginale présente de curieux détails de texture super- ficielle. Sa face externe est guillochée par de légers reliefs plus où moins {ransversaux, simulant à certain jour d’imperceptibles arti- eulations. Ce guillochage , fort difficile à rendre par le dessin, en approchant de la pointe de la valve, se présente sous la forme de traits linéaires, simples, obliques, puis il disparait entièrement. Tant qu'il dure, une lentille bien éclairée y constate souvent, pas toujours pourtant , une rainure médiane. La pointe non guillochée offre un trait qui jusqu'ici parait avoir éludé l'attention de tous les auteurs : c’est l'existence, tout près du bord supérieur ou dorsal de chaque valve, d’une série de six piquants où crochets courts, à it série. Zoo T. 1. (Cahier n° 4.) 15 226 LÉON DUFOUR. base robuste, mégalement distants les uns des autres , et regardant le bout de la valve. Il est essentiel de savoir que non seulement ce bout n’est pas percé pour livrer passage à la tarière ; mais qu'un peu avant l'ex- trémité, la valve, vue par sa face concave, présente là un léger sinus demi-cireulaire contre lequel doit nécessairement s'appuyer, s'arrêter le renflement terminal de la tarière. Après ce sinus il y a un petit espace plan et uni qui rend très immédiate la contiguité interne des bouts des deux valves ; en sorte que, quand elles sont fermées , les deux sinus forment un demi-cercle contre lequel butte, comme je viens de le dire, la pointe de la farière. Quoique formées sur le même plan que dans le Juvencus , les valves de la gaine du Gigas, scrupuleusement étudiées , ont quel- ques traits différentiels spécifiques (1). D'abord le guillochage y à ses reliefs moins prononcés et un peu modifiés. Quant aux piquants subterminaux, ils ont bien le même nombre , la même disposition , mais leur configuration est distinete. Ce sont de véritables apophyses du bord coriace simulant des dents ou des crénelures auxquelles s'implante une pointe particulière styloïde inelinée vers le bout de la valve. La figure que j'en donne me dispense d’autres détails. De plus, j'observe au bord inférieur de la valve deux apophyses sem- blables dont je ne découvre pas la moindre trace dans le Juvencus. Dans le Fuscicornis, le guillochage est formé de lignes obliques plus simples et plus serrées, et les piquants ou crochets sont au nombre de sept, conoïdes, simples, sans pointe styloïde. Je ne dé- couvre au Spectrum, dont la conliguration générale ressemble tant à celle du Juvenceus, que trois ou au plus quatre crochets, beaucoup moins saillants, simples et tous rapprochés de l'extrémité. Le guil- lochage ressemble d’ailleurs à celui du Juvencus. Dans les Xiphydria, la gaine évaginale courte , comprimée et mutique, s'éloigne beaucoup de celle des Sirex, dont elle conserve pourtant encore un guillochage effacé. Ces traits semblent justifier Leach d’en avoir constitué une famille particulière. % Tarière ou vrille (2). — C'est un stylet corné, brun, aussi fin (1) Fig. 20. (2 Fig. 21. RECHERCHES SUR LES UROCÉRATES. 297 qu'une soie de Pore, solide, mais éminemment élastique, terminé (dans le J'uvencus frais) par un renflement ovale-oblong , sorte de goupillon garni d’aspérités ou d’arêtes tranchantes. Il est tant soit peu moins long que la gaine, dans laquelle il esttrès libre, indépen- dant, et dont il peut facilement s'affranchir jusqu’à sa racine, qui nait de la saillie ou bosse sous-ventrale, Cette racine tient au corps par une bifurcation cornéo-tendineuse, dont les filets roussâtres et divergents donnent attache aux muscles qui en règlent les manœuvres. Toute fine qu'elle est, la tige ou manche du goupillon, étudié non pas au microscope , mais à une forte loupe, présente une tex- ture superficielle dont nous aurons à interpréter la valeur physiolo- gique. Et d’abord, de la connivence des filets basilaires cornéo- tendineux dont je viens de parler , il résulte à la face inférieure de ce manche un canalicule linéaire d'une finesse extrême, toutefois bien constatable, se continuant jusqu'à l’origine du goupillon. Mais, remarquez-le bien, la face supérieure de ce manche n'offre pas la moindre apparence de ce canalicule. On y aperçoit ensuite de subtiles empreintes linéaires, transversales, simulant des articula- tions, et marquant de chaque côté, à leur terminaison au canalicule médian, une très petite fossette arrondie. Les bords de ces fos- settes semblent à peine saillants, et je crains même que ce soit là une illusion d'optique. Les arêtes du goupillon se rapprochent à angle aigu ou en accent circonflexe à la ligne médiane , et les bords ont des dentelures bien prononcées. Je le déclare encore, le canalicule du manche ne se continue point à la ligne médiane du goupillon ; on peut même se convaincre que le bout de celui-ci, qui, dans quelques individus bien conservés du Juvencus, forme une pointe détachée , n'offre pas le moindre vestige d’une rainure. La tarière du Gigas et du Fuscicornis présente sous le manche le canalicule médian et les petites fossettes latérales du Juvencus ; mais son goupillon est beaucoup moins gros proportionnellement au manche que dans ce dernier. Il est bon de se rappeler aussi que j'ai étudié celui du Juvencus dans une condition où il n'avait pas fonctionné, et où, par conséquent, ce goupillon était neuf. Et quoi- 228 LÉON DUFOUR. qu'il existe, en quelque point de la face inférieure de ce dernier, une rainure médiane , celle-ci n’est que le résultat du rapproche- ment moins connivent de quelques-unes des arêtes obliques. Dans aucun des individus du Gigas et du Fuscicornis de ma collection, je n'ai aperçu au bout du goupillon la pointe isolée que j'ai trouvée et représentée dans le Juvencus. Ce bout est ordinairement entier , où obus ou pointu, et dans un cas je l’ai vu brièvement bifide. Ratzeburg (loc. cit., tab. 4, fig. 2 #) a vu comme moi cette structure du goupillon dans le Gigas, et le bout y est représenté entier. Fonctions de loviscapte. Après cet exposé anatomique de l’oviscapte et du grand segment ventral, avec lequel il a de sinombreuses connexions tant externes qu’internes, essayons, en interrogeant les organes dans leur forme et leur texture, d’en donner sinon la physiologie, du moins une explication rationnelle des fonctions. Les archives de la science sont à peu près muettes sur ce point. Dans mes excursions aux Pyrénées, et notamment lors de mon ascension au pic d’Ossau en 1819, ascension que j'ai publiée dans les Actes de la Société linnéenne de Bordeaux, j'eus l’occasion de surprendre sur des pièces de sapin équarries des femelles duGigas, dont l’oviscapte était enfoncé dans le bois jusqu’à la garde, comme on dit, de manière que leur abdomen appuyait, presque sessile, sur le plan du support. Alors ces femelles ne pouvant pas se dégager à mon approche, je m'en saisissais facilement. Sur celles que je ne troublais point dans leurs manœuvres, j'observais des mouvements soit à l'abdomen, soit à la base même de l’oviscapte , de manière que j'interprétais les premiers comme favorisant le travail de la ponte, et les seconds comme propres à l'opération du forage. Jurine, dans son beau livre sur les Hyménoptères , rapporte aussi des faits analogues. Mais je reconnais aujourd’hui que ni Jurine, ni moi, n'étions pas préparés alors à cette appréciation par de suffi- santes études anatomiques. Pour se rendre compte du rôle que doit jouer l’oviscapte dans les deux actes physiologiques qu'il a à remplir, à savoir, la ponte et ES RECHERCHES SUR LES UROCÉRATES. 229 le forage, il faut bien se rappeler et la position de la valve et la forme allongée des œufs, et surtout la composition ainsi que la texture de l'instrument lui-même. Et d'abord établissons l'incom- patibilité de la présence simultanée de l'œuf et de la tarière dans la gaine de l’oviscapte. Lorsque, par cet instinct merveilleux que nous ne savons qu'admirer, et qui est tout organique, tout vital, tout providentiel , la mère Sirex en gestation est averlie que les œuf sont à terme, elle cherche, elle choisit la surface du bois mort convenable à sa double mission maternelle. J1 va sans dire que le forage précède la ponte. L'étude attentive de l'appareil me donne la conviction intime que, pour commencer son opération , le goupillon rugueux ne doit point sortir par l’en- tr'ouverture du bout de la gaine. Le petit sinus ou arrêt dont j'ai parlé, et la surface plane qui le suit, me confirment dans cette idée. Je crois done que ce goupillon, pour entrer en fonction, doit se dégager du bout de la gaine par la partie inférieure de celui-ci, tandis que son manche estretenu, pressé peut-être, entre les valves de la gaine. Les fines empreintes superficielles, ou semi-articula- tions du manche semblent destinées à favoriser et cette inflexion et ce mouvement de vrille. L’imperceptible canalieule de sa face infé- rieure, dont l’origine touche de si près à la vulve, a peut-être été créé pour conduire , instiller , pendant la première opération du forage, un liquide, une humeur quelconque propre à rendre plus facile l’action du goupillon, soit en l’enduisant , soit en ramollissant le bois. Qui nous dit que ce liquide n’est point sécrété par un des organes, mal définis encore, situés au voisinage de l’oviducte ? Ne serait-ce pas là la fonction de ces deux vésicules assez grandes, et remplies d'un produit sécrété, auxquelles je n’ai su assigner ni un nom ni une attribution? J'en appelle à de nouvelles autopsies. Quand la tarière a achevé son œuvre de forage, ou bien elle se retire complétement, ou bien, ce qui est plus probable, plus ration- nel, elle demeure dans la gaine pour lui prêter de la résistance, de la solidité. Alors les valves conniventes, en étui subeylindrique, s’en- gagent dans le réduit ligneux, et, à l’aide des reliefs de leur guillo- chage, râpent encore l'intérieur du réduit pour en agrandir le dia- mètre, et le rendre plus accessible à l'œuf ou aux œufs. 230 LÉON DUFOUR. : Quand vient à sonner l'heure de la ponte, l'animal retire entière- ment de la gaine la tarière jusqu’à sa racine. La vulve expulse alors un ou plusieurs œufs, qui s'engagent et glissent dans la gaine. Les efforts combinés des muscles expulsifs de l’abdomen, ceux sur- tout du grand segment ventral, viennent hâter la marche progres- sive des œufs jusqu’au réduit ligneux. C’est là le premier acte de la ponte ; voici le second. Les bouts des deux valves retenant l'œuf, comme entre les mors d’une tenette, l’introduisent dans une bonne partie du conduit ligneux. Là il s’agit de lâcher prise ; c'est alors que les piquants subterminaux des valves sont appelés, je crois , à fonctionner. Ils s’accrochent au bois pour y prendre un point d'appui, tandis que les bords inférieurs des valves, s’entr'ouvrant et demeurant béants, donnent issue à l'œuf. La gaine se retire alors, et l'industrieuse mère, obéissant à une impérieuse mission, va renou- veler sur d’autres points de la pièce de bois, et un grand nombre de fois, cet étonnant mécanisme de ponte, du moins sl en faut juger par la quantité d’œufs que le scalpel constate dans les ovaires. Cette dernière circonstance fait penser que l'opération du forage est beaucoup plus prompte qu'on ne pourraitle croire. Mais quelle est done la modification de cette manœuvre que doit entrainer dans le Gigas la forme originale de ces piquants armés de leur pointe styloïde couchée, et quel rôle joue la paire de ces pi- quants insérée au bord inférieur de la valve ? Admirer et se taire, voilà où nous en sommes réduits. Ces explications, toutes théoriques , j'en conviens, toutes en dehors du témoignage direct des sens, mais inspirées par les traits anatomiques sévèrement étudiés, n’ont, je crois, rien de forcé. M. Lacaze-Duthiers, dans un travail ayant pour titre : Re- cherches sur l’armure génitale des Insectes (Ann. des sc. nat., décembre 1849), est loin d’avoir envisagé du même œil que moi la composition segmentaire de l'abdomen et l’oviscapte des Sirex. Cet auteur à pris pour type de ses démonstrations le Sireæ gigas ; je l'ai étudié aussi, et j'ai de plus étendu mes recherches sur d’autres espèces du groupe ou de la famille des Urocérates. Qu'il me soit permis d'examiner ses idées parallèlement à ce que je viens d’expo- ser sur la double question pendante. Je me réserve aussi de sou- RECHERCHES SUR LES UROCGÉRATES. 231 mettre à un contrôle sommaire quelques-unes des généralités de cet auteur. Un vétéran de la science a des droits à sauvegarder celle-ci, lorsqu'elle lui semble blessée, d’où que vienne la lésion. D'aileurs, c’est ici comme une justification personnelle que j'entre- prends. M. Lacaze-Duthiers ne donne que huit segments dorsaux à l'abdomen du Gigas ; orily en a très évidemment neuf dans l’un et l’autre sexe , ainsi que dans tous les Sireæ, comme je l'ai déjà avancé. Huit de ces segments sont stigmatifères, ce qui établit leur essentialité. Le neuvième ou dernier réceptacle, dans la femelle, de l'anus et de la portion afférente de l'intestin, est, par cela même,un segment essentiel, quoique privé d'orifices respiratoires. Ce der- nier trait négatif s’observe généralement dans le segment terminal de l'abdomen de tousles Insectes. Ce même auteur ne comple que cinq segments (1) à la région ventrale , tandis que positivement il y en existe sept. J'en appelle, sur ce point et le précédent, aux yeux non prévenus de tous les en- tomologistes, aux figures tant anciennes que récentes, tant natio- nales qu'étrangères, de ce bel Hyménoptère. I paraît tout d'abord assez étrange de se trouver en dissidence sur le nombre de pièces dont les dimensions doivent sauter aux yeux de tous. Je vais expli- quer cette dissidence, ces singuliers quiproquo. M. Lacaze-Duthiers a de son autorité privée déshérité l'abdomen des Sirex femelles d’une grande partie de son enveloppe tégumen- taire pour la léguer à l'oviscapte ; ses habiles ciseaux ont pourfendu dans la ligne médiane le neuvième segment dorsal , qu'il nomme arbitrairement le huitième. Mais A ne s’est point bornée la faculté créatrice de son instrument tranchant ; il a hardiment pénétré dans les profondeurs du grand segment ventral, conceptacle de l’appa- reil locomoteur de l’oviscapte , appareil qu'il n’a pas pu constater (1) M. Lacaze-Duthiers substitue au mot segment, dès longtemps consacré et très significatif, même d'une manière générale, celui de soonite. D'abord, éty- mologiquement parlant, il faudrait dire, je crois, zonite et non zoonite. Ce nouveau lerme est certainement défectueux, car les segments du corps des Insectes ne sont point des ceintures, des zona, mais des demi-anneaux, des cintres. 232 LÉON DUFOUR. dans ses autopsies sur le sec, et il a complétement divisé le fond mémbraneux , inaperçu par lui, de sa gouttière médiane. Alors entainé par ses inspirations incisives , il a partagé de comble en fond cette immense portion du squelette dermique de l’abdomen en deux moiliés égales, dont il a constitué la dot illégitime de l'oviscapte en les étalant et les représentant de chaque côté de celui-ci sous la forme d’élégantes ailes symétriques. Pour justifier son œuvre de création, l’auteur vient nous parler des grandes difficultés à découvrir des soudures , trouvées par lui seul. Quelle soudure , par exemple, a-t-il pu constater à cette grande pointe chargée d’aspérités qui termine le dernier segment dorsal ? Voilà pour les segments constitutifs de l'abdomen , si anormale- ment, si bizarrement interprétés par l’auteur. Venons au véritable oviscapte dégagé de ses emprunts ou de ses héritages. Non, non, les valves de la gaine du Gigas ne sont point échan- erées à leur bout spical ; celui-ci est arrondi dans tous les Sirex. Et puisque M. Lacaze-Duthiers soupçonnait de mutilation cette partie de l’oviscapte qu'il avait sous les veux, pourquoi a-{-il dé- daigné de consulter à ce sujet l’iconographie de ses devanciers de diverses époques ? Il aurait trouvé dans Réaumur , le premier en date, et dans Ratzeburg, qui est, je crois, le dernier, des figures qui l’auraient pleinement converti. Croit-on done que le cristallin des Swammerdam, des Réaumur, des de Geer, des Lyonet, des Bonnet, des Latreille, nos maîtres en observation, n’était pas aussi limpide que celui de nos novateurs actuels , et que la plume de ces vénérables savants n'était pas aussi bien taillée que la leur ? Mais ce qui a lieu de m'étonner, c'est que le même œil, habitué à saisir d’imperceptibles soudures, n'ait pas aperçu ces aspérités, ces piquants du bout des valves de la gaine, que la plus faible loupe rend évidents dans le Gigas, le Juvencus, ete. Ces aspérités, ces piquants, se trouvaient-ils usés, nuls, dans les individus SOUMIS au ciseau de l’auteur ? Cela n’est pas impossible. Les figures 5, 6et 7 deM. Lacaze-Duthiers ne sont, à mon avis, je n'hésite pas à le dire, que des dessins schématiques. Dans l'idée de l'auteur, la tarière serait divisée dans sa ligne médiane en deux RECHERCHES SUR LES UROCÉRATES. 253 moitiés semblables ; l’une de ces moiliés pourrait jouer, glisser sur l’autre, ainsi que l'exprime manifestement la figure 6. Je l'ai déjà dit, je le déclare encore dans toute la sincérité demes convictions microtomiques , la tarière des Sirex a bien à sa face inférieure , mais à sa face inférieure seulement, une fine coulisse médiane, un canalicule, qui même ne se continue pas au bout renflé que j'ai appelé goupillon. Celui-ci se termine dans le Juvencus par un prolongement ecylindroïde, uni, sans la moindre trace, ni de rainure, ni de division. Qu’on me permette de redire ici que Ratze- burg, certes bien étranger à notre débat, a représenté entière l'extrémité grossie de la tarière du Gigas. Je borne là pour le moment mes observations relatives aux spé- cialités ; j'ai hâte d'aborder des généralités, au contrôle desquelles je me trouve plus directement intéressé. M. Lacaze-Duthiers, dans ses recherches squelettologiques, est parti de l’idée malheureuse qu’il y a identité de composition orga- nique entre l’aiguillon d’une Guêpe et l'oviscapte d’un Hyméno- ptère térébrant. Puis il pose littéralement la question suivante : Esxiste-t-il'un plan unique dans la composition des oviscaptes et des verges des Insectes ? Au nom de ces conformités organiques invo- quées par l’auteur, je l’adjure de ne point consommer cet acte d’hétérogénéité. Où irait la science dans une semblable direction ? Hélas ! tout droit au chaos où la poussent déjà quelques empressés du jour. J'en demande bien pardon à M. Lacaze-Duthiers, mais en me faisant l'honneur de m'emprunter le nom d'armure , il a fort mal saisi ou mal interprété ma dénomination d'armure copulatrice ; je n'ai jamais employé ce nom que pour les seuls mâles. Elle a dans ce cas une acception rigoureuse, une valeur très significative. Ce curieux instrument préhensif, ce singulier forceps, recéleur du pénis, auquel il sert de conducteur, peut bien, par sa configuration variée, donner la garantie de la légitimité des types, devenir la clef d’une serrure ; mais, soyons de bon compte, serait-ce servir la science que de l’exhiber comme caractère spécifique? Non, sans doute. I n°y faudrait recourir que dans les cas extrêmes où les traits extérieurs seraient insuffisants. Laissons done encore cet organe 2311 LÉON DUFOUR. dans le domaine de l'anatomie intérieure. Ne compliquons pas la marche pour arriver à la connaissance positive de l’espèce, but de toutes les méthodes. Surtout qu'on ne confonde point l’armure copulatrice avec la verge, que M. Lacaze-Duthiers aura sans doute eu peu d'occasions de constater , et qu’on ne recherche point ses analogies avec l’oviscapte ! Jamais, je le répète, je n'ai étendu à la femelle la dénomination d’armure copulatrice, et j'avais de bonnes raisons qui subsistent encore. Toutefois, dans la description de l'appareil génital femelle des Insectes de tous les ordres, j'ai, à l'exemple d’Audouin, donné le nom de poche copulatrice à une bourse particulière, placée sur le trajet de l'oviducte, destinée à recevoir, et le pénis avec son armure, et la liqueur séminale pour la fécondation des œufs. Dans ma façon de voir, le nom d’oviscapte doit être exclusive- ment réservé à un instrument destiné à insérer les œufs dans un milieu plus ou moins résistant. Beaucoup d’Insectes pondent leurs œufs simplement par la vulve, et les laissent ou à nu sur le plan de support, ou enveloppés par un produit sécrété quelconque. Sui- vant moi, les femelles de ces derniers Insectes n’ont pas d’ovi- scaptes ; elles pondent comme les Oiseaux. Les oviscaptes modèles sont, sans contredit, ceux des Hyménoptères térébrants, des Locustaires, ete. Mais il existe aussi dans beaucoup de Diptères des oviscaptes rétractiles qui, malgré leur mollesse, ne laissent pas que de mériter ce nom. En m'empruntant l'appellation de gorgeret, je prie encore M. Lacaze-Duthiersde se rappeler queje l’ai exelusivementréservée à l'appareil vénénifique. Or je n’établis aucune parité, aucune unité de composition entre cet appareil et celui de la génération. Dans les Apiaires sociales, les ouvrières ont certainement un appareil véné- nifique fort développé, un dard très vif, et pourtant leurs organes génitaux sont rudimentaires et infonctionnels. RECHERCHES SUR LES UROCÉRATES. 239 EXPLICATION DES FIGURES, TOUTES GROSSIES. PLANCHE /. Fig. 4. Abdomen et métathorax du Sirez Juvencus vu par la région dor- sale, pour mettre en évidence et la composition segmentaire et la position des stigmates. — aa, faux stigmates métathoraciques. — b, stigmates abdo- minaux. Fig. 2. Stigmate mésoprothoracique isolé. — aa, lisière de la membrane fibro- coriacée qui le supporte. Fig. 3. Faux stigmate métathoracique isolé, où l'on voit son support en console et la texture aréolaire de la membrane qui le forme. Fig. 4. Stigmate abdominal isolé, pris sur un individu vivant. Fig. 5. Stigmate abdominal isolé, pris sur un individu desséché. Fig. 6. Portion de la base dorsale de l'abdomen , où l'on voit aux angles les stig- mates, puis la division du premier segment en deux panneaux égaux. Fig. 7. Une trachée isolée, pour mettre en évidence et les trachées tubulaires et les utriculaires grandes et petites. Fig. 8. Cerveau et système nerveux ganglionnaire du Gigas. — a a, cerveau avec ses choroïdes oculaires. — bb, nerfs antennaires. — cc, nerfs buccaux. — d, les trois optiques ocellaires. — e, bulbe rachidien. — f, æsophage engagé dans l'anneau œsophagien. — q, ganglions thoraciques avec leurs paires de nerfs. — h, ganglions abdominaux avec leurs paires de nerfs. Fig. 9. Appareil digestif du Juvencus femelle. — a, tête. — b, œsophage. — c, ventricule chylifique. — dd, vaisseaux hépatiques. — e, intestin stercoral. — f, rectum. — ÿg, bout de l'abdomen ouvert au milieu pour mettre en évi- dence le point où le rectum s'ouvre à l'anus. Fig. 10. Autre mode d'insertion des vaisseaux hépatiques de ce Juvencus dans une vésicule biliaire assez développée. Fig. 14. Autre mode d'insertion du Juvencus dans un godet. Fig. 12. Autre insertion hépatique simplement verticillée dans le Gigas. Fig. 13. Appareil génital mâle du Juvencus. — aa, conduits déférents des tes- ticules. — bb, épididymes. — cc, vésicules séminales. — d, armure copula- trice. Fig. 1#. Abdomen du Juvencus, privé de ses segments dorsaux pour mettre en évidence et l'appareil génital femelle et l'intérieur du grand segment ventral. — a, ovaires et leurs gaînes ovigères serrées. — b, ligament suspenseur commun des ovaires. — cc, cols ovariens. — d, les deux grosses vésicules sphériques. — e, bourse copulatrice. — ff, glandes sébifiques. — gg, grand segment ventral vu par sa face concave et dépouillé des muscles. — À, grande gouttière médiane, — ii, les deux baguettes marginales de la gouttière. —Kkk, baguettes 236 LÉON DUFOUR. — RECHERCHES SUR LES UROCÉRATES. discoïdales avec leurs appendices. — !, extrémité du dernier segment dorsal. — m, portion évaginale de l'oviducte. Fig. 15. Gaine ovigère isolée, avec ses œufs. Fig. 16. Portion de la glande sébifique isolée. — a, grappe déroulée des cap- sules sécrétrices. — b, conduits excréteurs. — c, réservoir. Fig. 17. Bourse copulatrice isolée du Juvencus. Fig. 18. Portion de l'appareil génital femelle du Gigas. — a, grosses vésicules sphériques. — bb, oviductes avec les œufs. — c, bourse copulatrice avec son appendice. Fig. 19. Portion évaginale de l'oviscapte du Juvencus considérablement grossie. — aa, valves entr'ouvertes. — b, les six crochets de leur bord supérieur. — c, valve vue par sa face interne. — d, surface guillochée de la valve. —e, ar- ticulation qui sépare la portion évaginale de l’invaginale. Fig. 20. Portion d'une valve de l’oviscapte du Gigas avec ses crochets des deux bords. Fig 21. Portion de la tarière du Juvencus. — a, goupillon. — b, son manche. Fig. 22. Portion plus grossie de ce manche, avec les petites fossettes et les demi- articulations. RÉSUMÉ ,. D'UN TRAVAIL D'EMBRYOLOGIE COMPAREE SUR LE DÉVELOPPEMENT DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE, Par M. LEREBOULLET, L'Académie des sciences avait mis au concours, pour 4849, l’étude du développement de l'embryon dans trois espèces prises, l’une dans les Vertébrés, l’autre dans les Mollusques, la troisième dans les Articulés, afin d'établir, par cette étude , des bases pour l'embryologie comparée. Aucun Mémoire n'ayant été présenté, l’Académie proposa la même question pour le concours de 1853 , mais en la restreignant à l'étude de deux types. Voici les termes de la nouvelle question, telle qu’elle fut alors posée par la commission de l’Académie : « Etablir, par l'étude du développement de l'embryon dans veux espèces prises, l’une dans l’embranchement des V ertébrés, et l'autre, soit dans l’embranchement des Mollusques, soit dans celui des Arti- culés, des bases pour l’embryologie comparée. » « Le grand objet, ajoute le programme , que , par le choix de cette question, l’Académie propose aux efforts des naturalistes et des anatomistes, est la détermination positive de ce qu’il peut y avoir de semblable ou de dissemblable dans le développement comparé des Vertébrés et des Invertébrés. » J'ai entrepris de répondre à cette question, et j'ai adressé à l’Aca- démie deux monographies , l’une sur le développement du Brochet et de la Perche, l’autre sur le développement de l'Écrevisse. « La commission , dit le rapport, satisfaite de la manière dont le développement particulier de chacune de ces espèces a été traité 238 LEREBOULLET. — EMBRYOLOGIE COMPARÉE dans ces monographies, n’aurait pas hésité à décerner le prix à leur auteur, si, aux termes du programme, il eût fait ressortir avec plus de détail ce qu'il peut y avoir de semblable ou de dissemblable dans le développement comparé des Vertébrés et des Invertébrés. » L'Académie, sur le rapport de la commission, a bien voulu m’accorder une récompense de 2,000 fr. etelle a voté l'impression de mon travail dans les Mémoires des savants étrangers. Les recherches auxquelles j'ai dû me livrer m'ayant conduit à des résultats nouveaux, surtout dans les premières périodes du développement, j'ai pensé devoir publier un résumé de mes obser- vations, afin de mettre les embryologistes à même de contrôler les résultats obtenus et les conséquences que j'ai eru pouvoir déduire de leur comparaison. Mon Mémoire original se divise en trois parties, dont les deux premières sont consacrées à l'exposé des faits, l'une sur le dévelop- pement du Brochet et de la Perche , l’autre sur celui de l’Écrevisse. La première partie comprend cinq chapitres , qui traitent : 1° de la composition de l'œuf avant la fécondation ; 2 des changements qui surviennent dans l'œuf jusqu'à la formation de la bandelette embryonnaire ; 3° de l'apparition de l'embryon et de son dévelop- pement jusqu'à la formation du cœur; 4° du développement de l'embryon depuis la formation du cœur jusqu’à l’éclosion ; 5° du développement du poisson depuis l’éclosion jusqu'après la dispari- tion de la vessie vitellaire. Chaque chapitre comprend deux articles consacrés, l'un au développement du Brochet , l’autre au dévelop- pement de la Perche. Chaeun de ces articles est suivi d'un résumé des faits observés ; puis, dans un article spécial, j’expose le résumé comparatif des ressemblances et des différences que m'a présen- tées, dans son évolution, l'œuf de ces deux Poissons. La deuxième partie , consacrée à l'embryologie de l'Écrevisse , comprend quatre chapitres, qui traitent : 4° de l'œuf avant la fécon- dation ; 2 de l'œuf depuis la fécondation jusqu'à la formation de la tache embryonnaire ; 3° du développement de l'embryon depuis son origine jusqu'à la formation du cœur ; et 4° depuis la formation du cœur jusqu'à l'éclosion. Chaque chapitre est terminé par un résumé des obsérvations, DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 239 La troisième partie comprend le résumé général des faits obser- vés et exposés dans les deux parties précédentes ; elle traite des ressemblances et des différences qui existent entre le développement du Brochet et de la Perche pris pour types des animaux vertébrés, et celui de l'Écrevisse prise pour type des Articulés. En attendant l'impression de mon travail dans les Mémoires des savants étrangers, avec les figures nécessaires à l’intelligence des faits, je réunis, dans le résumé qu'on va lire, (ous mes résumés partiels dans l’ordre de leur succession. PREMIÈRE PARTIE. EMBRYOLOGIE DU BROCHET ET DE LA PERCHE. CHAPITRE I. DE L'OEUF AVANT LA FÉCONDATION. Anr. 4°, — Dans le Brochet. 4. L'œuf commence par une vésicule simple, qui se produit dans les parois du sac ovarien. 2. Peu de temps après son apparition, l’œuf se compose de deux sphères emboitées l’une dans l’autre, et dont les parois sont très rapprochées. 3. La sphère externe ou vitelline s’écarte rapidement de la sphère interne ou germinative, soulève la membrane ovarienne, et s’en entoure comme d’une capsule dont la surface interne se revêt d’un épithélium. 4. Sa vésicule germinative ne contient d’abord que des granules presque imperceptibles suspendus dans un liquide. 5. Quand celte vésicule commence à s’isoler au milieu de l'œuf, elle se remplit peu à peu de globules transparents (les taches germi- natives), qui sont d’abord peu nombreux et périphériques. 6. Les taches germinatives grossissent et se multiplient de la sur- face au centre de la petite sphère. 7. Le contenu de la sphère vitelline est d’abord une matière gra- nuleuse, tenue en suspension dans un liquide, et qu’on ne distingue qu'à l’aide de la coagulation. 210 LÉREROULLET. —- EMBRYOLOGIE COMPARÉE 8. Plus tard il se forme de petites vésicules graisseuses.qui se réunissent en groupes irréguliers dispersés sur la surface de l'œuf , ou qui s'accumulent autour de la vésicule germinative. 9. La vésicule germinative cesse de très bonne heure d’être cen- trale ; elle se porte vers la surface de l'œuf, et ne tarde pas à devenir tout à fait périphérique. 10. Pendant qu'elle chemine ainsi peu à peu du centre vers la surface, elle augmente de volume et atteint des dimensions consi- dérables, jusqu'à 0°" ,50 ou 0"",55. A1. En mème temps ces globules transparents ou taches germi- natives se transforment en cellules granuleuses. 42. Les globules vitellins se forment et remplissent bientôt la sphère vitelline ; ils se multiplient par génération endogène. 13. La vésicule germinative cesse d'exister comme vésicule longtemps avant la maturité de l'œuf. 44. Avant sa disparition elle est remplie de corpuscules de na- ture diverse (cellules granuleuses, globules transparents, granules et vésicules graisseuses. 15. Elle est remplacée par des amas granuleux , jaunâtres , qui se composent des mêmes éléments que la vésicule, et sont le résultat de sa déchirure. 16. Les amas jaunâtres, qui occupaient d'abord la place occupée auparavant par la vésicule germinative, se dispersent dans l'œuf sous la forme de flocons jaunâtre pâle. 17. Ces flocons ne renferment plus de cellules granuleuses ; mais ils se composent de très petits corpuscules brillants, dispersés au milieu d’une matière granuleuse amorphe. 18. Cette dernière, avec les corpuscules brillants, constitue la substance plastique de l’œuf. 19. L'œuf mür non encore détaché de l'ovaire se compose de globules vitellins encore en voie de multiplication endogène, de vésicules graisseuses simples ou agrégées , de corpuscules brillants et de granules plastiques. 20. L'œuf mür est entouré de deux membranes : l’extérieure est percée de tubes microscopiques qui servent à l'absorption de l’eau, et, par conséquent, à la respiration de l'œuf; l’intérieure, appliquée DU BROCHNET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 21 contre le vitellus, estune simple enveloppe protectrice extrêmement mince et amorphe. 21. Quand l'œuf a atteint sa maturité complète, 1l se détache de l'ovaire et tombe dans le sac ovarien ; il est alors muni d’une tache jaune formée par la réunion de tous les éléments plastiques et nu- tritifs qui se trouvaient dispersés dans l'œuf, 22. Le reste du vitellus est limpide et ne se compose plus que d'un liquide albumineux , au milieu duquel se voient encore quel- ques globules vitellins et des vésicules graisseuses. Ant. 2. — Dans la Perche. Quoique je n’aie pas suivi toutes les phases du développement de l'œuf de la Perche avant la fécondation, je puis cependant noter les résultats suivants comme ayant élé constatés chez ce poisson. 4. Les ovules de la Perche naissent, comme ceux du Brochet, dans le parenchyme de l’ovaire , et se développent dans ce paren- chyme en soulevant la membrane ovarienne et en s’en entourant comme d'une capsule. 2. Les très petits ovules ont déjà une vésicule germinative rem- plie de taches germinatives qui brillent comme des perles. 3. Le contenu de la vésicule germinative se développe avant celui de la sphère vitelline. Ce contenu est d'abord granuleux ; ce n’est que plus tard qu'il se transforme en globules vitellins. k. La vésicule germinative grossit à mesure que l'œuf se déve- loppe. 5. Elle est soumise à un mouvement centrifuge qui la porte, dès les premiers temps, vers la surface de l'œuf. 6. La vésicule disparait avant la fécondation, car elle n'existe plus dans les œufs qui n’ont pas même encore atteint toute leur maturité, et qui tiennent encore à l'ovaire. 7. L'œuf mûr est composé de globules vitellins, de globules graisseux, d'une grosse goutte huileuse et de petites masses gri- sâtres dispersées dans toute son étendue. 8. Ces petites masses ont la même composition que les masses analogues de couleur jaunätre trouvées dans le Brochet. 4° série, Zoor, T. [, (Cahier n° 4.) 4 16 242 LEREBOULLET, — EMBRYOLOGIE COMPARÉE 9. On rencontre quelquefois dans la cavité de l'œuf des vésieules transparentes, qui flottent à la surface de la sphère vitelline en dehors de cette sphère. 10. Cette observation semble indiquer que la membrane vitelline n'existe pas encore à celle époque. 41. Les œufs de la Perche se disünguent de ceux des autres pois- sons par la manière dont ils sont agglutinés les uns aux autres pour former d’élégants réseaux. 12. Ils doivent cet arrangement à l'existence d’appendices pili- formes dont la coque de l'œuf est couverte, qui sont étroitement engrenés les uns dans les autres. 13. Ces appendices piliformes sont creux, et traversent toute l'épaisseur de la coque. 14. Outre ces espèces de poils creux , la coque est traversée par des tubes beaucoup plus petits qui sont les véritables organes d’ab- sorption de l'œuf. 45. Cette disposition rend l'œuf de la Perche très hygrosco- pique ; quand il est dans l'eau, il se gonfle rapidement par absorp- tion de ce liquide, et acquiert un volume à peu près double de celui qu'il avait dans l'ovaire. Anr. 3. — Résumé comparatif des ressemblances et des différences que pré- sentent l'œuf du Brochet et celui de la Perche, dans le développement avant la fécondation. À. Ressemblances. $ 4. L'œuf commence par n'être qu'une simple vésicule qui apparait dans le tissu propre de lovaire et se développe , entourée d'une capsule immédiatement appliquée autour d'elle. On a peut- être attaché trop d'importance à la question de savoir si cette vési- cule primitive représente la vésicule germinative, ou si elle est déjà l'œuf lui-même. La tendance générale de la nature à produire de nouveaux éléments dans les sphères qui se sont formées, tendance qu'on voit surtout dans les générations endogènes , doit nous faire pencher vers la seconde hypothèse , quoique la première soit plus généralement admise , d'autant plus que celte manière de voir est conforme à ee qu’on observe dans le règne végétal. DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCRENISSE. 213 $ 2. Peu de temps après son apparition, l’ovule se compose de deux vésieules emboîitées l’une dans l’autre. Ces deux sphères con- slituent deux organes dont les usages sont différents : l’une d'elles, la vésieule germinative, fournit les éléments plastiques destinés à former l'embryon ; l’autre, la sphère vitelline, produit les éléments destinés à le nourrir et à le développer. $ 3. Pendant toute la durée de son séjour dans l'ovaire , l'œuf reçoit sa nourriture de l'ovaire lui-même par l'entremise de la capsule qui l'entoure, capsule dont la paroi interne est couverte de cellules épithéliales. $ 4. Chacune des deux spheres dont lovule se compose à un contenu différent. D'un côté sont des vésicules destinées à subir des transformations cellulaires, dans le but de produire des granules formateurs ou plastiques : ce sont les taches germinatives. De l’autre on a des granules , qui se changeront plus tard en globules vitellins, et des vésicules graisseuses. $ 5. Les éléments de la vésicule germinative et ceux de l’ovule sont doués d’un mouvement périphérique ou centrifuge. Ainsi les taches germinatives, dès qu’elles sont formées, se portent à la sur- face de la vésiceule; les granules vitellins , qui prennent naissance autour de la vésicule, se multiplient de dedans au dehors ; enfin la graisse aussi se répand à la surface de l'œuf. Ce mouvement périphérique a lieu pour la vésieule germina- tive elle-même, qui gagne aussi la surface de l'œuf. Ce n'est pas au poids spécifique qu'il faut attribuer la position superficielle de la vésiceule, comme le veut établir M. Vogt (Æmbryologie des Sal- mones, p. à); elle n'arrive que peu à peu à la surface, ee qui n’au- rait pas lieu si elle était plus légère , car alors elle devrait, dès son apparition, se porter du centre à la circonférence. $ 6. La vésicule germinative prend part à l'accroissement gé- néral de l'œuf. A la vérité elle grossit dans des proportions moins fortes que ce dernier, mais son augmentation de volume ne saurait plus aujourd'hui faire l’objet d’un doute ; les mesures que j'ai don- nées établissent ce fait dans toute son évidence. L'accroissement de la vésicule provient de la multiplication des éléments qu'elle renferme et du développement de ces éléments. 9h LEREBOULLET. — EMBRYOLOGIE COMPARÉE $ 7. Pendant cet accroissement de la vésicule et de l'œuf tout entier, les éléments de l’une et de l’autre sphère se modifient et se différencient de plus en plus. Les taches germinatives se chan- gent en cellules, tandis que les granules vitellins se constituent en globules, et ceux-ci tendent à se multiplier par génération endogène. $ 8. Vers les derniers temps de son existence , la vésicule ger- minative renferme des corpuseules de nature diverse (cellules , granules, vésicules graisseuses ). La présence de ces divers maté- riaux annonce une transformation qui aura bientôt pour résultat la production des corpuscules plastiques destinés à constituer l’em- bryon futur. La graisse intervient d’une manière évidente dans la formation de ces éléments nouveaux. $ 9. C’est lorsqu'elle a préparé ces éléments embryonnaires que la vésieule se rompt etles répand à la surface de l'œuf sous la forme de corpuscules microscopiques , qui n’altendent plus , pour subir de nouvelles modifications, que l'impulsion vitale qu'ils doivent recevoir du fluide fécondant. $ 10. La fécondation ne prend done aucune part à celte rupture de la vésicule germinative, ni à la dissémination de ses éléments. Je crois avoir établi d’une manière positive, pour le Brochet et pour la Perche, ce fait important qu'on vient aussi de constater dans la femme, et qui s’appliquera sans doute à tous les Vertébrés, probablement même à tous les animaux. $ AL. D'abord réunis en petites masses , ét occupant encore la place qu'oceupait la vésicule germinative, les corpuseules plasti- ques produits par cette vésicule se répandent peu à peu dans Pœuf tout entier, et se mêlent aux éléments vitellins. $ 12. Le dernier acte de la vie de l'œuf dans l'ovaire est la con- centration , vers un de ses pôles, de tous les éléments dont il se compose, c'est-à-dire des corpuscules plastiques, des globules vitellins nutritifs, et de la graisse, pour former une tache jaunâtre ou grisàtre, tandis que le reste du vitellus est d’une limpidité parfaite. J'ai aussi observé cette réunion des éléments vitellins en un seul amas dans le Rotengle (Lenciscus erythrophthalmus), tandis que DU BROCHET , DE LA PERCHE ET DE, L'ÉCREVISSE. 245 M. Vogt l'a vue dans la Palée (Coregonus palæa). Ce phénomène parait donc ètre général chez les Poissons. $ 13. Appelé à vivre dans l’eau , l'œuf est entouré d’une mem- brane très perméable, traversée par une infinité de petits tubes qui facilitent l'absorption de ce liquide, et servent ainsi à sa respiration. S 14. Je ne pense pas qu'on doive assiniler soit l'œuf en entier, soit seulement la vésicule germinative , à une véritable cellule. Si c’est l'œuf tout entier que l’on compare à une cellule , la vé- sieule en sera le noyau; mais cette comparaison ne saurait être admise , puisque la vésicule ne cesse de croître depuis sa naissance jusqu'à sa disparition , en même temps que ses éléments inclus se mulliplient. La deuxième hypothèse , qui compare la vésicule à une cellule , n'est guère plus satisfaisante, à cause de son contenu , les taches germinalives, qu'il faut alors regarder comme des noyaux multiples, assimilation qui ne s'accorde pas avec leurs changements de forme et de volume, et avec leurs transformations. Si l’on veut ranger l'œuf dans la classe des cellules endogènes , on rencontre d’autres difficultés. Les cellules endogènes ont pour caractère principal et essentiel la similitude des éléments reproduits dans des cellules incluses et qui dérivent les unes des autres. Ici , au contraire , nous trouvons des éléments hétérogènes dans l'œuf et dans sa vésicule, et nous voyons ces éléments se modifier en outre avec l’âge de l'œuf. Nous pensons done qu'il faut renoncer à ces comparaisons, et se borner à regarder l'œuf comme un petit organisme dont les deux parties essentielles ont chacune un rôle particulier à remplir. B. Différences. $ 15. D'après ce qui précède, les différences qui existent entre l'œuf du Brochet et celui de la Perche sont peu nombreuses, et relativement peu importantes. Elles consistent dans l’arrangement des œufs, leur couleur, l'aspect de leur surface , la disposition des éléments qui les constituent. Ainsi les œufs du Brochet sont libres, eeux de la Perche sont 216 LEREBOULLET. — EMBRYOLOGIE COMPARÉE agglutinés les uns aux autres. Dans le Brochet , ils ont une couleur jaunâtre ; ils sont verdâtres et beaucoup plus transparents dans la Perche. Leur surface est lisse dans le Brochet ; elle est, au contraire, dans la Perche, couverte de filaments roides et recourbés qui servent à les attacher les uns aux autres. Enfin, dans l'œuf du Brochet, la graisse est disséminée en petits amas vésiculeux ; tandis que, dans celui de la Perche; presque toute la graisse est concentrée en une grosse goutte huileuse. Ces différences sont, comme on voit, d’un ordre secondäire. Elles constituent des caractères qui permettent de reconnaître faci- lement les œufs de ces deux Poissons, et qui sont, par conséquent, spécifiques, peut-être même génériques, mais qui sont étrangers au développement. La composition de l'œuf, ainsi que l’évolution ét la transforma- üon de ses éléments, sont essentiellement les mêmes dans le Brochet et dans la Perche. CHAPITRE IL. DE L'ŒUF FÉCONDÉ ET DES CHANGEMENTS QU'IL PRÉSENTE JUSQU À LA FORMATION DE LA BANDELETTE EMBRYONNAIRE. Ant. 4, — Dans le Brochet. À. Quand l'œuf est pondu, le vitellus se sépare de la coque ; l'in- tervalle qui résulte de cette séparation se remplit d’eau , et donne lieu à la production de la zone transparente. 2. Les groupes de vésicules huileuses qui étaient dispersés se dirigent vers le pôle occupé par le germe, et se concentrent en un disque situé sous ce germe : le disque huileux. 3. Le germe renferme tous les globules vitellins, mêlés aux élé- ments plastiques dont il est d’ailleurs composé. h. Le germe se soulève, et forme une ampoule de même teinte que lui. 5. La séparation du vitellus et de la coque par l’eau absorbée ; la concentration des vésicules graisseuses sous le germe; le mélange des éléments dont se compose ce dernier, et le soulèvement de ce DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L ÉCGREVISSE. 2/7 germe en ampoule, sont des faits indépendants de la fécondation, et qu'il faut regarder comme préparatoires. 6. La colline du germe qui s’est soulevée devient transparente , effet qui est produit par la séparation de ses éléments ; les cor- puseules plastiques restent dans l’ampoule transparente ; les glo- bules vitellins descendent au-dessous de cette ampoule. Cette sépa- ration des éléments du germe en deux groupes est le premier effet de la fécondation. 7. Le premier de ces deux groupes, composé d'éléments plasti- ques, produira les cellules organiques dé la vie animale : c’est le vitellus de formation. 8. Le deuxième groupe donnera naissance aux cellules qui pré- sideront à la formation des organes de la vie végétative : il constitue le vitellus nutritif. 9. La segmentation n'intéresse que le vitellus formateur ; les globules vitellins n’y prénnent aucune part. 10. Les premières divisions du vitellus sont régulières ; elles se font par des lignes qui se croisent à angles droits, ét partagent le germe en lobes égaux. Les divisions subséquentes n'offrent plus la même régularité. 11. Pendant toute la durée de la segmentation et de la formation du blastoderme, le vitellus exerce un mouvement de rotation sur son axe et un mouvement de translation autour de la coque. Ce double mouvement se fait de la droite vers la gauche. 12. On ne distingue ni cils , ni mouvement vibratile qui puisse expliquer cette rotation du vitellus. 13. L'ampoule germinative, avant de se segmenter, renferme un nombre variable de vésicules transparentes. 14. Chaque lobe de segmentation contient une cellule nucléée ; quelquéfois la cellule renferme deux noyaux. 15. Chaque lobe de segmentation est entouré d’une membrane propre. 16. A la fin de la segmentation, le germe, redevenu lisse, est entièrement composé de grosses cellules globuleuses à noyau, qui proviennent des derniers globules de fractionnement, 17. Le germe ainsi modifié est une sphère creuse (la vésicule 218 LEREBOULLET. EMBRYOLOGIE COMPARÉE blastodermique), aplatie, qui se déprime de plus en plus, et finit par s'appliquer sur le vitellus à la manière d’une membrane séreuse, pour former le blastoderme. 48. Dès que le blastoderme commence às’étaler , il s’amineit à son centre, et se renfle en un bourrelet marginal dans toute sa cir- conférence. 19. Au commencement de sa formation, le blastoderme se com- pose de grosses sphères transparentes, semblables à des gouttes d'huile, et de cellules à noyau mat, un peu plus petites que les glo- bules mentionnés au n° 16. 20. En même temps, les globules vitellins se modifient en pre- nant un noyau. 21. Plusieurs cellules ont un noyau double. 22. Le vilellus continue à rester transparent ; il ne contient au- cune sorte de globules. 23. Pendant que le blastoderme s'étend sur le vitellus, il se pro- duit au pôle de l'œuf, sur lequel était appliqué le germe, une petite vésicule hyaline. 24. L'apparition de cette vésicule est due à une dépression du blastoderme qui se fait en cet endroit, et qui laisse à découvert la membrane vitelline. Cette dépression est elle-même occasionnée par la dissémination des vésieules du disque huileux. 25. Quand le blastoderme a envahi les trois quarts du vitellus, il se compose de cellules épidermoïdales cohérentes , qui forment à sa surface une membrane continue, et de cellules embryonnaires qui constituent ses deux feuillets. 26. Plusieurs des cellules du feuillet supérieur ont déjà une forme allongée, ou sont disposées en séries linéaires. 27. ILexiste sous le blastoderme une membrane particulière qui s'en détache facilement, et qui se compose de cellules distinctes des cellules blastodermiques. 28. On ne trouve plus de globules vitellins libres ; ces globules se sont changés en cellules pour constituer la membrane précé- dlente. 29. Le liquide vitellin se coagule en longues baguettes albumi- HETISCS. DU BROCHET , DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 249 30. La rotation du vitellus, qui avait commencé à se ralentir pen- dant que le blastoderme s’étendait sur l'œuf, cesse tout à fait lors- que cette membrane en a envahi les trois quarts. 31. A la fin de cette période, lorsque la bandelette embryonnaire va se produire, le blastoderme enveloppe le vitellus tout entier, à l'exception d’un petit espace cireulaire qui fait saillie au dehors, espace entouré d'un bourrelet quelquefois très épais. Anr. 2. —— Dans la Perche. 1. Les éléments organiques de l'œuf fécondé sont, dans la Perche comme dans le Brochet, des globules vitellins, des globules huileux , et une substance plastique composée de granules et de corpuseules brillants. 2, Ces éléments sont accumulés vers un des pôles de l'œuf, où ils forment une éminence arrondie et saillante (le germe). 3. Le vitellus proprement dit reste liquide ettransparent comme l'humeur vitrée de l'œil ; la grosse goutte huileuse occupe à la surface le milieu de l'œuf. L. Le bord de la colline germinative s’éclaireit; de plus , il se produit çà et là dans son intérieur des espaces clairs qui ne per- sistent pas , phénomène qui indique un mouvement des molécules du germe. 5. On voit assez souvent une ou plusieurs petites gouttelettes albumineuses sur le germe lui-même, en dehors de l'œuf. 6. L'expulsion de ces goultelettes est, sans doute, l'effet des mouvements de la substance du germe. Leur présence en dehors du vitellus montre qu'à cette époque la membrane vitelline n'existe pas. 7. Ce fait vient à lappui de l'opinion qui regarde le chorion comme produit par la membrane vitelline primitive qui s’est sépa- rée du vitellus. 8. Plus tard, il se forme une nouvelle membrane autour du vitellus. 9. L'éclaireissement du germe est produit par le retrait des glo- bules vitellins qui se portent vers sa base , et se séparent des élé- ments plastiques. 250 LEREBOULLET. — EMBRYOLOGIE COMPARÉE 10. La segmentation commence dès que le germe est devenu transparent. AL. La première division en deux lobes parait être constamment régulière. [n’en est pas de même des fractionnements qui suivent ; ceux-ci divisent les germes en lobes, qui sont le plus souvent iné- gaux. 12. Pendant la segmentation, l'œuf de la Perche n’exerce aucun mouvement de rotation. 13. Le fractionnement vitellin n'intéresse que la portion du germe soulevée en colline, et devenue transparente; sa basé ne participe jamais à ce fractionnement. 14. Dans l’œuf de la Perche, la vésicule centrale des lobes de segmentation n’est pas distincte. 15. Les lobules de segmentation ont une membrane propre. 16. Les derniers globules qui résultent du fractionnement se changent en cellules nucléé es. 17. Quand le fractionnement est terminé , le germe represente une vessie creuse : la vésicule blastodermique. 18. Les parois de cette vessie se rapprochent promptement l’une de l’autre pour former une calotte double, c’est-à-dire composée de deux feuillets contigus. 19. Lorsque le blastoderme a atteint la ceinture moyenne de l'œuf, il est déjà très avancé dans son organisation. 20. Il se compose, en effet, d’un épithélium en pavé, formant une pellicule épidermique, et de cellules embryonnäaires dont plu- sieurs ont déjà une forme très allongée. 94. Il existe sous le blastoderme une membrane particulière, distincte, composée de grandes cellules très pâles ; c’est d'elle que se formeront les organes abdominaux. 22. Quand le blastoderme est parvenu aux trois quarts de la sur- face de l'œuf, il forme une bourse dont l'ouverture a ses bords très épais ; la partie non recouverte du vitellus fait saillie par cetté ou- verture. 23. Avant l'apparition de la bandelette embryonnaire, le blasto- derme parait envelopper le vitellus tout entier ; on ne voit plus ce dernier faire saillie nulle part. DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DË L'ÉCREVISSE. 951 Anr. 3. — Résumé comparatif des ressemblances et des différences que pré- sentent l'œuf du Brochet et celui de la Perche, depuis la fécondation jusqu'à la formation de la bandelette embryonnaire. A. Ressemblances. Jene rappellerai, dans ce résumé, que les faits les plus essentiels, et qui me paraissent suffisamment établis d'après mes descriptions ; j'en écarterai tout ce qui pourrait être l’objet de contestations. $ 4. Nous avons vu, vers la fin du développement de l'œuf et avant la fécondation , tous les éléments solides dont l'œuf se com- pose se réunir vers un de ses pôles, et constituer un amas qui est le germe. Ces éléments organiques, les mêmes dans nos deux types, sont des globules vitellins , dés vésicules graisseuses et des cor- puscules plastiques. Le germe, une fois formé, se soulève en une ampoule dans la- quelle les éléments sont encore entremêlés. $ 2. Peu de temps après qu’elle s’est produite, la colline du germe devient transparente. Cet effet remarquable, mentionné déjà par les auteurs, mais sans qu'on ait cherché à l'expliquer, reconnait pour cause la séparation des éléments du germe en deux groupes : les corpuscules plastiques, qui occupent seuls l’ampoule, et les globules vitellins avec les vési- cules graisseuses, qui sont refoulés vers la base de cette ampoule. Cette séparation est un faittrès important : elle isole, dès l’origine du développement du germe, les éléments qui doiventles premiers se constituer en cellules, etformer à eux seuls les premiers organes embryonnaires, les autres éléments ne se modifiant que plus tard ; elle sépare la partie du germe qui doit se fractionner ; enfin elle est le premier effet appréciable de la fécondation, et ne précède que de peu d'instants la segmentation. C'est celle portion transparente du germe que nous appelons, d’après la nomenclature de Reichert, vitellus formateur, réservant le nom de vitellus nutrilif aux autres éléments vitellins. $3. La segmentation vitelline se fait de la même manière dansle Brochet et dans la Perche. 252 LEREBOULLET, — EMBRYOLOGIE COMPARÉE Elle n’est régulière que pour les premiers lobules qui se for- ment, c'est-à-dire que, pour ceux-là seuls, les lignes de division se font en eroix, et partagent le germe en lobes égaux. Ce fractionne- ment n'intéresse que le vitellus formateur : les globules vitellins situés au-dessus de lui, à Ja base du germe, n°y prennent aucune part. Sh. Les lobules de segmentation contiennent une où plusieurs vésicules transparentes semblables à des cellules. $ 5. Les derniers lobules de segmentation sont des sphères com- posées d’une matière granuleuse , et dans l’intérieur desquelles se trouve un noyau avec nucléole. D'où il suit que la segmentation partage le vitellus formateur en une multitude de petites masses globuleuses qui se transforment directement ou indirectement en cellules, si déjà ces masses ne sont pas des cellules elles-mêmes. Ce résultat, que je crois avoir suffi- samment établi, fait ressortir l’importance du vitellus formateur comme substance plastique, et jette un nouveau jour sur le rôle de la vésicule germinative, d'où nous avons vu dériver cette matière plastique vitelline. $ 6. Les petits globules qui résultent du fractionnement vitellin s’arrangent de manière à former une vésicule creuse, la vésicule blastodermique , reposant comme une sphère sur le sommet du vitellus transparent. Cette vésieule s’aplatit et se change en une calotte composée de deux feuillets contigus, et disposés autour du vitellus comme une membrane séreuse : cette calotte est le blastoderme. J'ai cherché en vain, dans les auteurs qui se sont occupés du de- veloppement des Poissons (Baër, Rathke, Vogt el d’autres), quel- ques indications au sujet de cette disposition remarquable de la calotte blastodermique ; je n'ai rien trouvé qui s’y rapporte. Nous verrons dans l'histoire du développement de l'Écrevisse une dispo- sition analogue non pour le blastoderme, mais pour le sae vitellin. $7. Les globules vitellins ne prennent aucune part à la formation du blastoderme, qui est exclusivement composé de cellules dérivées du vitellus formateur. S8. Cependant ces globules vitellins se modifient et se changent ER. DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 253 en cellules ; celles-ci se soudent les unes aux autres par une sub- sfance intermédiaire qui les réunit , et il résulte de ee travail une membrane très délicate qui se place sous la calotte blastodermique, et la sépare du vitellus albumineux sous-jacent. Cette nouvelle membrane, que je regarde comme le véritable feuillet muqueux ou feuillet végétatif, n'a, dans l’origine, aucune espèce de connexion avec le blastoderme. Ce feuillet ne doit pas être considéré comme en faisant essentiellement partie, puisqu'il dérive d'une autre origine, et qu'il ne se soude à ce blastoderme que plus tard. $ 9. Dès que le feuillet végétatif est formé, on ne trouve plus de globules vitellins libres au-dessous du blastoderme ; ils paraissent avoir tous subi la transformation cellulaire, et avoir été employés à la formation de la membrane en question. $ 10. Les cellules du blastoderme se différencient de très bonne heure, Les plus superficielles, qui sont aussi les plus grandes, con- stituent les cellules épidermoïdlales ; les autres, beaucoup plus nom- breuses et composant les deux feuillets du blastoderme, sont les cellules embryonnaires. Parmi ces dernières, il en existe un assez grand nombre qui, dès les premiers témps de leur formation, sont déjà très allongées. S 11. Le blastoderme, après être resté quelque temps à l’état de calotte , envahit le vitellus albumineux , et le couvre tout entier, à l'exception d’une petite portion qui fait saillie à travers l'ouverture circulaire de cette espèce de bourse. Le feuillet végétatif s'étale aussi sur l'œuf en même temps que le blastoderme, et double intérieure- ment ce dernier dans toute son étendue. B. Différences. Les phénomènes que je viens de rappeler d’une manière som- maire s’observent dans la Perche et dans le Brochet. Les diffé- rences que j'aurai à signaler sont peu nombreuses ; voici les prin- cipales. $ 12. Pendant toute la durée du fractionnement vitellin , et pen- dant l'extension du blastoderme , l'œuf du Brochet tourne dans sa 254 LEREBOULLET, — EMBRYOLOGIE COMPARÉE coque d’une manière régulière ; aucun mouvement de rotation n’a lieu pour l'œuf de la Perche. Le vilellus de ce Poisson conserve, pendant toute la durée du premier développement, une immobilité complète. $ 13. On ne distingue pas clairement dans la Perche les vésicules celluliformes qui occupent le centre des lobules de segmentation, et qu'on voit assez bien dans le Brochet. Celle différence bent peut-être uniquement à la grande transparence de l'œuf de la Perche. $ 14. Quand le blastoderme se dispose comme une calotte à la surface du vitellus et commence à s’étaler, le disque huileux, qui s'était concentré sous le germe dans le Brochet, s'étale en même temps. La Perche n’a pas de disque huileux proprement dit : la graisse, comme nous l'avons vu, est réunie en une grosse goutte ; il n'existe au-dessous du germe que quelques vésicules graisseuses en petit nombre. $ 15. La dispersion des vésicules huileuses, dans le Brochet, détermine la formation d’une petite vésicule hyaline que je n’ai pas vue dans la Perche. $ 16. Dans la Perche, le blastoderme paraît recevoir le vitellus tout entier ; du moins n’ai-je jamais pu découvrir la saillie trans- parente produite par le vitellus hors de la bourse du blastoderme. $ 17. On voit que, parmi ces différences, la première, celle qui concerne la rotation de l'œuf, est la seule qui ait quelque impor- tance, d'autant plus que ce phénomène de rotation de l'œuf a été observé sur beaucoup d'animaux ; du reste, le Brochet est, à ma connaissance , le seul Poisson sur lequel on l’ait signalé. Je ne l’ai pas vu dans les Poissons blancs dont j'ai observé plusieurs espèces, et M. Vogt ne l’a pas rencontré dans la Palée. Ainsi les principaux phénomènes d'évolution de l'œuf, dans la période que nous venons d'étudier, se font de la même manière dans la Perche et dans le Brochet. DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 255 CHAPITRE III, APPARITION DE L'EMERYON ET SON DÉVELOPPEMENT JUSQU'À LA FORMATION DU CŒUR. Ant. 4°, — Dans le Brochet. À. La bandelette embryonnaire (bande primitive de Baer) com- mence au bourrelet blastodermique par une accumulation de eel- lules qui s'avance rapidement vers le pôle de l'œuf. 2, À son origine, elle a la forme d'un triangle, dont la base se continue directement avec le bourrelet. 3. Elle se rétrécit en s’allongeant, et prend alors la forme d’une bande étendue d’un pôle à l’autre, et plus épaisse dans son milieu que sur ses bords. &. Ainsi la bandelette embryonnaire se forme successivement et non pas {out d’une pièce. 5, Cette bande n'est pas plate, comme son nom semble l’indi- quer. Sa région moyenne, longitudinale, plus épaisse que ses bords, fait sur le vitellus une saillie en forme de carène mousse, qui parait creuse dans toute son étendue. 5 bis. Il est probable que cette carène dorsale médiane est due au soulèvement du feuillet supérieur du blastoderme qui se sépare du feuillet inférieur. 6. Le travail organique qui la produit commence dès que le blastoderme a dépassé la région équatoriale de l'œuf. 7. Peu de temps après sa formation , la bandelette s’élargit en avant, et forme la région eéphalique. 8. L'embryon est alors constitué, et comprend trois régions : la tête, le corps et la queue. 9. L'embryon se déprime le long de la ligne médiane; il se forme une rigole qui règne dans toute sa longueur et qui s’élargit en avant ; cette rigole est le sillon dorsal. 10. Ce sillon commence vers le milieu du corps, et se porte de là en avant et en arrière en diminuant de profondeur. A1. Outre les grandes cellules épidermoïdales et les cellules embryonnares, il existe à celte époque d’autres cellules de la gran- deur des premières, dont le noyau homogène a une teinte rosée. 256 LEREBOULLET, — EMBRYOLOGIE COMPARÉE 42. La dépression céphalique existe très peu de temps; elle est bientôt convertie en vésicule, soit par l'élévation de ses carènes qui se rejoindraient en haut, soit par une substance nouvelle qui se for- merait au-dessus d'elle. 13. La vésicule céphalique qui en résulte est d’abord entière- ment vide. 44. Le sillon dorsal ne divise pas l'embryon dans toute son épaisseur ; il s'arrête à une couche assez épaisse de cellules embryon- naires qui en font la base. 15. Du côté du vitellus, l'embryon est muni d’une carène mousse qui déprime ce dernier. De chaque côté de cette carène sont atta- chés deux feuillets qui sont d'abord distincts, el séparés l’un de l’autre par leurs bords libres. 16. Le feuillet supérieur appliqué contre le blastoderme se dé- double en avant sous la région eéphalique. 17. L'inférieur est moins étendu en largeur; il s'attache en arrière autour de l'anneau caudal. 18. Plus tard, ces deux grands feuillets se soudent l’un à l’autre, quand ils sont arrivés à une certaine distance du corps de l’em- bryon, 19. Pendant que l'embryon se développe, les cellules embryon- naires et épidermoïdales deviennent plus petites; celles-ci forment un réseau à la surface du corps. 20. Le feuillet le plus inférieur, celui qui s'attache à l'anneau caudal, est composé de cellules intermédiaires entre les cellules embryonnaires et les cellules épidermoïdales. 21. Les divisions verlébrales commencent à se montrer peu de temps après la formation du sillon dorsal. 22. Ces divisions entament les carènes dorsales jusqu'à leur base, et les partagent en pièces rectangulaires inelinées vers le sillon ; ces pièces sont les lamelles vertébrales. ] 23. Les premières apparaissent vers le milieu du corps, à l’en- droit où le sillon était le plus profond ; puis elles se produisent en avant et en arrière de leur point de départ. 2h. Les divisions vertébrales s'arrêtent, en avant, à l'extrémité postérieure de la vessie céphalique, en arrière à l'anneau caudal. DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 257 25. Pendant cette segmentation transversale du corps, la partie céphalique de l'embryon se divise en trois vessies : une antérieure, la plus petite des trois ; une moyenne, la plus grosse, renflée sur les côtés ; et une postérieure allongée. 26. Chacune de ces trois vessies correspond à un appareil sen- sitif et à un renflement cérébral particulier. 27. La vessie céphalique moyenne se partage intérieurement en trois régions distinctes par des cloisons longitudinales. Les deux vessies latérales qui résultent de cette séparation se détachent de la vessie moyenne et se renflent en ampoules : ce sont les vessies ocu- laires. 28. Les vessies oculaires sont donc produites par exsertion ou évolvure, c'est-à-dire par refoulement de dedans en dehors des parois latérales de la vessie cérébrale moyenne, puis par séparation de l’ampoule qui s’est ainsi produite. 29. Dès que les vésicules oculaires sont produites, les vessies céphaliques se remplissent peu à peu de cellules nerveuses qui ta- pissent d’abord leur face interne, et se multiplient ensuite de dehors en dedans. 30. Quand elles apparaissent, ces nouvelles cellules sont plus petites que celles qui forment les vessies elles-mêmes : elles s’en distinguent aussi par leur couleur jaunâtre. La graisse joue un rôle important dans ce travail cellulaire. 91. Plus tard, quand les vessies sont remplies de substance ner- veuse, les cellules des parois et celles qui composent cette substance ont la même grosseur et le même aspect. 32. En même temps, le sillon dorsal se remplit d'une matière semblable à celle qui est contenue dans les vessies céphaliques. Cette matière nerveuse forme deux tubes parallèles juxtaposés : c’est la première forme de la moelle épinière. 39. Le contenu de ces tubes est le même que celui des vésieules céphaliques. 3h. Les carènes dorsales ne sont done pas les cordons primitifs de la moelle. 35. Ces carènes sont les organes précurseurs de l'appareil mus- culaire du rachis. 4" série, Zoor, T. 1. ( Cahier n° 5. } ! 17 258 LEREBOULLET. — EMBRYOLOGIE COMPARÉE Elles se rejoignent sur la ligne médiane, au-dessus des cordons nerveux, et forment un tube qui contient ces cordons. 36. Les lamelles vertébrales sont des portions de ces carènes dont les cellules embryonnaires se différencient de très bonne heure pour produire des éléments musculaires. 37. Le système nerveux central présente done, dès son origine, un caractère de dualité ou de symétrie latérale bien manifeste, de même que le système musculaire et les appareils sensitifs. Seulement il n’est pas possible de constater si les deux tubes nerveux se sont formés séparément, ou s'ils résultent de la division d’un cylindre primitif, comme cela a lieu pour les carènes dorsales. 38. La corde dorsale est un organe impair, très élastique, occu- pant exactement l'axe du corps. 39. Elle apparait de très bonne heure lorsque les divisions ver- tébrales commencent à se montrer, mais après les deux tubes ner- veux rachidiens. L0. Pendant les premiers temps de son existence, elle est striée en travers. LA. Ces stries sont dues à des organes vésiculeux particuliers très aplatis, dont les parois sont , dans l’origine , très rapprochées l’une de l’autre, et presque contiguës. 42. L'œil se forme par involucre , c’est-à-dire par refoulement sur elle-même de la vésicule oculaire. L3. Le trou qui résulte de ce refoulement est fermé par une lamelle épidermique , à la surface interne de laquelle se développe le cristallin. Celui-ci est done une production épidermique. kh. Le cristallin, d’abord superficiel , s'enfonce peu à peu dans la cavité de l'œil. 45. L'oreille est d’abord une sphère solide , qui se produit, in- dépendamment de la troisième vessie céphalique , sur les côtés de cette vessie, Elle se creuse plus tard d'une cavité, et se constitue en vésicule auditive. 46. C'est à la suite de ces diverses formations que se produit la chambre cardiaque, premier indice de l'apparition du cœur. h7. La poche cardiaque se forme par une dépression du vitellus, DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 259 au-dessous de la région céphalique, et par dédoublement de l’un des deux feuillets embryonnaires. 48. La première forme appréciable de l'appareil digestif est celle d’une gouttière qui occupe la ligne médiane inférieure du corps. 9. Cette gouttière apparaît à peu près en même temps que le cœur, 50. L'appareil digestif, ou du moins le tube alimentaire, est done formé primitivement de deux moitiés symétriques, preuve de la généralité de la loi de symétrie qui s'applique même à des organes {ubuleux et entièrement asymétriques, quand ils sont dé- veloppés. 51. Le cœur est un cône solide, plein, produit par une végéta- tion de cellules à la partie inférieure de la tête. 52. Le cœur n'offre pas de symétrie dans son mode d'apparition. 53. Le renflement cardiaque se détache de la base de la tête , et descend dans la poche qui est préparée pour le recevoir. 54. Quand le cœur s’est placé dans la chambre cardiaque , le vitellus a une forme oblongue, transversale. Cette forme duvitellus annonce toujours l'existence du cœur et ses battements. 55. Le système nerveux cérébral, qui paraissait simple, est maintenant séparé par une ligne en deux portions contiguës. 56. Les deux cordons nerveux se replient sur eux-mêmes suivant leur longueur, et forment en arrière du cerveau une saillie verticale assez prononcée. 57, Il résulte de ce reploiement des deux cylindres nerveux un raccourcissement de la masse encéphalique , et un rapprochement des vésicules auditives. 58. Puis les deux cylindresencéphaliques commencent à s’écarter l'un de l’autre pour produire la grande cavité cérébrale. 59. Les premiers mouvements de l'embryon coïncident avec l'apparition du cœur. 60, Le premier rudiment du foie consiste dans une végétation de cellules, qui se fait contre la paroi externe de l'intestin. 61. Le foie n’est donc pas produit par une évolvure de l'intestin, mais bien par un travail cellulaire , qui a pour résultat la production de cellules particulières, distinctes de celles qui constituent l'intestin. 9260 LEREBOULLET. — EMBRYOLOGIE COMPARÉE Art. 2, — Dans la Perche. 4. La bandelette embryonnaire est produite par un épaississe- ment du blastoderme qui se fait suivant une direction linéaire. La saillie qu’elle forme est très prononcée. 9. Le blastoderme recouvre de bonne heure la saillie vitelline, qui existait à travers son anneau. Il en résulte qu'on ne voit pas, dans la Perche, d’anneau embryonnaire proprement dit. 3. L'embryon, dès qu'il est constitué, se compose d’un épiderme distinct formé de cellules épidermoïdales cohérentes , et d’un corps résultant de l'accumulation des cellules embryonnaires, et se con- tinuant avec le feuillet blastodermique. h. I existe sous l'embryon une membrane particulière, fixée le long de la ligne médiane inférieure, et composée de cellules inter- médiaires, pour leur grosseur, entre les cellules embryonnaires et les cellules épidermoïdales. 5. L'embryon se partage en deux moitiés latérales symétriques par une dépression longitudinale qui s’élargit en avant , le sillon dorsal. G. Ce sillon est plus profond dans sa région moyenne qu'à ses extrémités. 7. I ne divise pas la totalité de la masse embryonnaire ; mais il s'arrête à une couche de cellules qui forment la base de l'embryon. 8. Les ampoules oculaires saillantes apparaissent aussitôt après la fermeture de la dépression céphalique. 9. L'embryon forme sur le vitellus un cylindre creux , dans l'intérieur duquel se trouvent les carènes dorsales. 10. Ce cylindre s’est produit par le soulèvement de l’épiderme du sillon. 11. Les cellules de cet épiderme sont réunies par une substance intercalaire coulée dans leurs interstices. 12. La partie inférieure du corps embryonnaire présente une saillie longitudinale en forme de carène mousse, qui s'enfonce dans le vitellus. 13. Le feuillet embryonnaire inférieur (feuillet muqueux) se dé- tache de cette carène, et, après un court trajet, se soude au feuillet blastodermique. DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 261 44. Les cellules embryonnaires diminuent de volume pendant que l'embryon se developpe. 15. La vessie céphalique renferme des cellules particulières (cellules nerveuses), qui diffèrent des cellules embryonnaires par leur couleur jaunâtre et par leur moindre volume. Ces cellules se produisent contre la paroi interne de la vessie. 16. Les cellules qui composent les carènes dorsales ont déjà une forme allongée avant la segmentation de ces carènes. 17. La division des carènes en lamelles vertébrales parait se faire rapidement. 18. Les lignes de division (divisions vertébrales) commencent au sommet des carènes et se continuent jusqu’à leur base, mais sans entamer celles-ci. 19. Le sillon dorsal est occupé par deux cordons cylindriques parallèles et symétriques. 20. Ces cordons sont tubuleux, et renferment des cellules sem- blables à celles de la cavité céphalique. 21. Ils constituent des productions distinctes des lamelles ver- tébrales , et, par conséquent, des carènes. 22, Quand le sillon est fermé, les deux tubes nerveux peuvent être séparés l’un de l’autre jusqu’à l'extrémité antérieure de Ja cavité céphalique. 23. Ils se replient sur eux-mêmes en arrière de celte cavité , pour former la lamelle cérébelleuse verticale. 24. Dans la cavité même, ils forment chacun un renflement ovalaire. 25. Au-devant de ces deux renflements , les cylindres nerveux sont unis par une bandelette de substance nerveuse qui forme l’en- tonnoir. 26. Ainsi le système nerveux céphalique est double et binaire , comme le système nerveux rachidien dont il est la continuation. 27. La corde dorsale est striée cireulairement dans les premiers temps de sa formation. 28. Cet aspect strié paraît être du à des disques aplatis , rangés à la suite les uns des autres, perpendiculairement à l’axe de l'embryon. 29. A une époque plus avancée , la corde n'est plus striée ; elle 262 LEREBOULLET, — EMBRYOLOGIE COMPARÉE a un aspect vésiculeux produit par l'élargissement des disques changés en vésicules gélatineuses. 30. Quand ces vésicules existent, la corde a augmenté de dia-" mètre. 31. La corde dorsale est entourée d’une gaine membraneuse, qui renferme un grand nombre de corpuseules nucléaires. 32. Les lameiles vertébrales, en se rapprochant les unes des autres vers la ligne médiane , finissent pas se souder au-dessus des deux tubes nerveux. 33. La région caudale de l'embryon de la Perche grandit très vite. 34. La queue commence déjà à se détacher du vitellus et à de- venir libre, lorsque l'œil se déprime pour former la bourse oculaire. 35. Les vésicules auditives sont situées très en arrière. 36. Les fossettes olfactives se produisent en même temps que l'œil se déprime. 37. Le tube intestinal se forme au-dessous de la carène embryon- naire inférieure par un dépôt de cellules qui s'accumulent le long de cette carène. 38. Ce dépôt donne naissance à une gouttière dont les bords sont assez rapprochés l’un de l’autre. 39. L’embryon de la Perche exerce des mouvements avant l’ap- parition du cœur. 40. Ces premiers mouvements sont produits par des contractions de la masse entière du corps, sans déplacement de celui-ci. HA. Quand ces mouvements ont lieu, il n'existe pas encore de cylindres musculaires ; les lamelles vertébrales ne se composent alors que de cellules allongées et disposées en chaïnettes. h2. Le cœur est produit par une végétation de cellules qui se fait à la base de la tête. L3. 1 a primitivement la forme d’un cône. Ce cône est entière- ment composé de cellules ; il est plein, sans aucune trace de cavité. kh. Le cœur oscille avant que sa cavité se soit formée. L5. La masse entière est contractile, mais les cellules qui la composent ne se contractent pas. 46. Ainsi des tissus qui ne sont composés que de cellules peu- vent jouir, dans l'embryon, de propriétés contractiles ; c’e stun DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 263 phénomène qu'on observe sur une grande échelle dans les animaux inférieurs. k7. La chambre cardiaque se forme après le cœur, par le sou- lèvement de la tête et son détachement du vitellus, en même temps que par le retrait de celui-ci. 48. Le cœur se détache d'avant en arrière par le retrait du vitellus. 49. C'est alors qu'il se creuse d’une cavité linéaire dans toute sa longueur. 50. En même temps que la cavité du cœur se produit, il se forme à la base du corps une ouverture circulaire à laquelle cette cavité aboutit. 51. Le cœur, descendu dans la chambre cardiaque , prend une position perpendiculaire au corps de l'embryon ; sa forme est alors celle d’un cylindre. 52. La chambre cardiaque acquiert quelquefois un développe- ment considérable ; c’est par erreur qu'on a regardé cette anomalie comme un second vitellus. Ant. 3. — Résumé comparatif des ressemblances et des différences que pré- sentent le développement de l'embryon depuis l'apparition de la bandelette embryonnaire jusqu'à la formation du cœur. A. Ressemblances. $ 1. Quand le blastoderme a recouvert tout le vitellus, il s'épaissit suivant une direction longitudinale, et forme ce qu'on a nommé bande primitive. Cet épaississement longitudinal constitue en réa- lité la première forme de l'embryon; nous l'appelons pour cette raison bandelette embryonnaire. | Le mode de formation de cette bandelette n’est pas aussi facile à constater dans la Perche que dans le Brochet , et surtout il est dif- ficile de s'assurer si elle naît aussi du bourrelet embryonnaire, comme on peut le voir dans le Brochet; mais le fait de son existence comme première forme embryonnaire ne saurait être contesté. $ 2. La bandelette embryonnaire est plus épaisse dans sa partie moyenne que sur les côtés. Elle forme une véritable carène longi- 964 LEREBOULLET. — EMBRYOLOGIE COMPARÉE tudinale mousse. Cette carène primitive est creuse dans toute son étendue, ce qui provient, sans doute, de ce que le feuillet supérieur du blastoderme s’est séparé de l’inférieur en se soulevant. $ 5. La carène dorsale primitive se partage en deux moitiés latérales symétriques par une dépression longitudinale connue sous le nom de sillon dorsal. Ce sillon s’élargit peu à peu en avant , de manière à embrasser toute la largeur de la région céphalique ; de telle sorte que les bords du sillon contournent les bords de cette région. Il résulte de cette disposition que la région céphalique n’est pas divisée en deux moitiés latérales, comme le reste de la carène dor- sale primitive ; ou du moins cette division, qui s’observe dans l’ori- sine, n'est que passagère. $ 4. Le sillon dorsal n'intéresse pas la couche inférieure de l'embryon ; celle-ci reste intacte, et forme le fond du sillon qu'elle sépare du vitellus. S'il se confirme que la formation de la carène dorsale prinilive est due au soulèvement du feuillet blastodermique supérieur, comme nous le pensons, on comprendra pourquoi le sillonnement longitudinal de cette carène n’entame que sa portion superficielle. I y aurait ici un curieux rapprochement à faire entre cette opé- ralion physiologique et le fractionnement du germe ( segmentation vitelline ). En effet, dans l’un et dans l’autre cas , le travail physiologique a pour but de fractionner la matière organique. Dans la segmentation du vitellus, le fractionnement tend à former les cellules qui doivent constituer le corps du nouvel être; ce fractionnement est alors multiple , afin que la masse du germe soit divisée en groupes assez petits. Lors de la formation du sillon dorsal , les cellules embryon- naires sont déjà formées et en voie de transformation ; le fraction- nement se borne à une division bilatérale, afin de partager la masse embryonnaire en deux moitiés symétriques , qui, elles-mêmes, se- ront bientôt partagées en groupes nombreux par des divisions trans- versales. Le travail vital, s’il était permis de se servir du langage des mathématiciens, serait ici élevé d’une puissance ; car, tandis que dans le germe il s'exercçait sur des molécules organiques pour DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 265 les constituer en cellules, il s'exerce maintenant sur des cellules pour les constituer en organes plus relevés. D'un autre côté , on se rappelle que le fractionnement du germe ne s'exerce que sur sa porlion soulevée en ampoule , et n’intéresse pas sa base. De même ici le sillon dorsal n’affecte que la portion de l'embryon qui s’est soulevée en carène mousse. $ 5. Le sillon dorsal se forme de très bonne heure dans la région céphalique. Ilen résulte une vessie ovalaire allongée, la vessie céphalique, qui est creuse et vide dans toute son étendue. $ 6. L’épiderme qui tapisse le fond du sillon en soulève et re- couvre les carènes dorsales. Cette disposition produit un tube qui se continue avec la vessie céphalique, et dans l’intérieur duquel sont logées les carènes dorsales. $ 7. Tandis que la région supérieure du corps embryonnaire est composée, dans presque toute son étendue, de deux moitiés symétriques qui se dressent verticalement, s'inclinent l’une vers l’autre, et tendent à se rapprocher pour se souder plus tard sur la ligne médiane, la région embryonnaire inférieure présente , au contraire, des organes lamelleux qui tendent à s’incliner vers le bas, dans une direction opposée à celle des carènes dorsales. Ce sont des feuillets qui se détachent , au nombre de deux , de chaque côté, des parties latérales de la carène embryonnaire inférieure, se portent en dehors et en bas, se soudent bientôt entre eux et avee le blasto- derme , et entourent plus tard le vitellus tout entier, pour former, dans la suite, les parois de l'abdomen. Il y a, de cette manière, opposition complète entre les premiers organes embryonnaires formés au-dessus et au-dessous du plan blastodermique primitif, Les parties supérieures sont des cylindres aplatis et symétriques ( carènes dorsales ), qui tendent à se souder par en haut; les parties inférieures sont des lamelles qui tendent à se réunir par en bas. $ 8. Le travail organique qui s'établit après la formation du sillon dorsal , c’est-à-dire après la division de la région embryonnaire supérieure en deux moitiés symétriques, produit presque simultané- ment les organes précurseurs de l'appareil moteur rachidien de l'axe vertébral , de l'axe nerveux et des principaux organes sensitifs. 266 LEREBOULLET, — EMBRYOLOGIE COMPARÉE $ 9. En effet : 1° Les divisions vertébrales commencent presque aussitôt après l'apparition du sillon dorsal. Elles partagent chacune des deux ea- rènes par des lignes transversales en groupes similaires, composés de cellules allongées qui se disposent en séries , et se préparent à se transformer en cylindres musculaires. 2 Un long fuseau composé d'éléments gélatineux rudimentaires d'abord, mais qui, plus tard, se développent en vésicules , la corde dorsale , apparaît au centre du corps embryonnaire , de manière à en former exactement l’axe. Elle se distingue par sa position centrale, par sa structure, et par la longue durée de son existence et le peu de changements qu’elle éprouve. Elle semble d’abord ne pas être symétrique, et faire exception, à cause de sa position centrale, à la grande loi de symétrie qui carac- térise les parties supérieures de l'embryon ; et cependant , si l’on examine sa structure, surtout dans les premiers temps de sa for- mation, on est frappé de voir qu’elle se compose de deux séries par- faitement symétriques d'éléments primordiaux ( voyez nos figures ). 3° Dès que la grande vessie céphalique est formée, des éléments nerveux se déposent sur ses parois intérieures , et la remplissent peu à peu en se multipliant de dehors en dedans. La même matière nerveuse se dépose dans le sillon dorsal, même avant sa fermeture, pour former l’axe nerveux rachidien. Cet axe est double et symétrique dès les premiers temps de sa formation. Il est composé de deux tubes juxtaposés qui se rem- plissent de cellules nerveuses. La vessie céphalique, à son origine, n’est pas encore un organe nerveux, pas plus que les carènes dorsales où même les lamelles vertébrales ne sont des organes musculeux. Ces parties sont com- posées, dans le principe, des mêmes cellules embryonnaires qui se différencient plus tard, pour former, les unes, des cellules ner- veuses, les autres des cylindres contractiles. L° Pendant que les divisions vertébrales s’opèrent , c'est-à-dire pendant que le travail vital détermine la division des carènes dor- sales en un certain nombre de pièces semblables entre elles, la DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 267 vessie céphalique , obéissant en quelque sorte à cette tendance , se partage transversalement en trois vessies secondaires placées l'une au-devant de l'autre, et de grandeur très inégale. Ces trois vessies correspondent à trois divisions de la masse ner- veuse encéphalique et à trois appareils sensitifs. Cependant, de ces trois appareils, celui qui se montre le premier est l’appareil de la vision qui se détache, sous la forme d’une am- poule, de la vessie céphalique moyenne, la plus volumineuse destrois. L'appareil auditif ne se montre que plus tard, et celui de lol faction plus tard encore. $ 10. Quand cette première série d'organes préparatoires ( ca- rènes dorsales et lamelles vertébrales , corde dorsale, axe nerveux rachidien, vessies céphaliques et vessies oculaires) est formée, ces organes , qui constituent en quelque sorte les bases de l’embryon animal , se complètent par l'apparition des vésicules auditives , des fossettes olfactives, et par la dépression des ampoules oculaires. L'oreille est d’abord une petite sphère solide, formée par une accumulation de cellules sur les côtés de la vessie postérieure , et qui ne tarde pas à se changer en vésicules. Sa formation est indé- pendante du renflement nerveux qui l’avoisine. La vessie oculaire se déprime pour constituer une sorte de bourse. Les fossettes olfactives sont des dépressions cutanées. D'où il suit que les appareils des trois sens supérieurs ont des modes de production différents. $ 12. Jusqu'ici la puissance formatrice s’élait concentrée , pour ainsi dire, vers la région supérieure de l'embryon, pour former les rudiments des appareils qui président aux fonctions de l’animalité. Maintenant nous allons la voir se porter vers la région opposée , et provoquer l'apparition et le développement de deux appareils qui président aux fonctions de la vie végétative ; nous voulons parler du cœur et de l'appareil digestif qui se montrent presque en même temps. $ 12. La formation des vésicules auditives et la dépression des ampoules oculaires peuvent être regardées comme les avant-cou- reurs de l'apparition de l'organe cireulatoire. C'est alors que les parties antérieures du corps se soulêvent en 268 LEREBOULLET, — EMBRYOLOGIE COMPARÉE se détachant du vitellus, que celui-ci se déprime dans la partie correspondante à la région céphalique, et que la chambre cardiaque se produit. Des cellules embryonnaires s'accumulent sous la tête, contre le plafond de cette chambre, etil se forme un organe eylin- drique, solide, sans cavité, qui est le cœur. Cet organe entre en mouvement pour ainsi dire dès qu'il est formé, avant même qu'il soit devenu creux, conséquemment longtemps avant qu'il contienne du sang et des globules, montrant ainsi, dès l’origine, la force con- tractile propre dont il est doué, et qui fait son principal caractere. $ 13. En même temps, il se forme le long de la carène médiane inférieure du corps, par conséquent le long de la ligne médiane in- férieure , une gouttière qui deviendra l'intestin , par le rapproche- ment et la soudure des deux bords symétriques qui la composent. Cette gouttière inférieure , quoique produite d'une manière diffé- rente, est le pendant de la gouttière supérieure qui s'était formée par l'établissement du sillon dorsal. Seulement celle-ci s'est formée par en haut, el s’est constituée en tube rachidien contenant l’axe nerveux , tandis que la gouttière intestinale se forme par en bas, longtemps après, et ne se constitue que très tard en tube intestinal. $ 14. L'apparition des premiers rudiments du foie appartient encore à cette période qui se termine à la formation du cœur. Cette glande n'est pas produite par une évolvure de l'intestin, mais bien | par une végélation cellulaire péri-intestinale , c’est-à-dire par la production de cellules particulières contre les parois de l'intestin. $ 15. Enfin, pendant que le cœur se forme, le système nerveux cérébral, qui jusque-là se composait d’une masse unique, se divise en deux moitiés longitudinales égales et symétriques, par la conti- nuation de la scissure qui séparait en deux moitiés semblables l'axe rachidien. Le système nerveux céphalique devient alors la continua- tion directe du système rachidien, et l'axe nerveux tout entier est formé de deux cylindres parallèles et contigus qui règnent dans toute la longueur du corps. C’est alors que ces deux moitiés s'écar- tent l’une de l’autre dans la région céphalique, puis se rapprochent de nouveau, mais seulementsur quelques points, de manière à lais- ser entre eux des intervalles vides qui constitueront les diverses cavités cérébrales, DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 269 6 16. La fin de cette période est encore caractérisée par les premiers mouvements de l'embryon , mouvements d'abord très obscurs , et produits par des contractions de la masse entière du COrps. B. Différences. $ 47. Quoique les phénomènes embryologiques que nous venons de résumer n'aient pas été suivis dans tous leurs détails, sur les deux espèces de Poissons dont nous avons étudié le développement, cependant nous pouvons dire, d’après ce que nous en avons vu, que ces phénomènes sont les mêmes dans le Brochet et dans la Perche. Ce n’est que vers la fin de cette période , un peu avant la formation du cœur, que les premières différences entre ces deux Poissons commencent à se montrer. $ 18. Le corps de l'embryon s'élève davantage au-dessus du vitellus dans la Perche que dans le Brochet. Le détachement est surtout plus marqué pour la région caudale , qui prend de bonne heure une forme cylindrique , et commence déjà à se détacher du vitellus, quand les vessies oculaires se dépriment, Cette queue, chez Ja Perche, s’allonge rapidement, ce qui annonce un plus grand développement des appareils moteurs. Aussi les mouvements de l'embryon se font remarquer plus tôt dans ce Poisson ; ils ont lieu avant la formation du cœur, ou tout au moins avant qu'on aperçoive ses battements ; ces mouvements sont plus forts, plus rapprochés, et déterminent un déplacement du corps, ce qui n’a pas lieu dans le Brochet. Ces phénomènes de contraction sont d'autant plus remarquables qu'il n'existe pas encore, à celte époque, de véritables fibres muscu- laires, mais seulement des cellules allongées ou des chaînettes de cellules soudées bout à bout. CHAPITRE IV. DÉVELOPPEMENT DE L'EMBRYON DEPUIS LA FORMATION DU CŒUR JUSQU'A L'ÉCLOSION. Arr, 4'r, — Dans le Brochet. 4. Quand le cœur s’est détaché de la base de la tête pour des- cendre dans la chambre cardiaque, il prend la forme d’un boyau 270 LEREBOULLET, — EMBRYOLOGIE COMPARÉE cylindrique droit ou faiblement coudé, et disposé perpendiculaire ment à l'embryon. 2. Lorsque ce cylindre s’est creusé une cavité, on ne voit d'abord aucun globule sanguin dans son intérieur ; les globules n’apparais- sent que plus tard. 3. Les premiers corpuscules sanguins sont petits, peu nombreux. et de forme irrégulière. L. Ils grossissent par la suite et deviennent elliptiques, en même temps que leur nombre augmente rapidement. 5. Les vaisseaux, comme le cœur, se forment avant les globules sanguins. 6. Ils sont d’abord sans parois propres, et doivent être regardés comme des canaux ou des espèces de lacunes creusées dans le parenchyme des organes. 7. La préexistence des vaisseaux sanguins, la petitesse et l'irré- gularité des premiers globules, leur multiplication rapide, dès que la circulation est complétement établie, sont des faits qui empêchent de regarder ces globules comme des cellules détachées des organes, et charriées par le mouvement du sang. 8. La première circulation forme deux ellipses ou deux anses symétriques peu allongées. 9. Les anses s'allongent rapidement, en même temps que le boyau cardiaque se replie sur lui-même, et forme deux renflements placés l’un au-devant de l’autre. La limite de la deuxième anse vasculaire est le bord postérieur du vitellus. 10. Il se forme ainsi des anses successives qui se portent de plus en plus en arrière vers l'extrémité caudale du Poisson, jusqu’à ce que la dernière anse atteigne l’extrémité du corps. AL. Pendant la formation des premières anses cireulatoires, la queue s’allonge considérablement, et fait bientôtle tour du vitellus ; elle se garnit de la nageoïre embryonnaire ; la nageoire pectorale se montre. 12. Le système nerveux cérébral éprouve des changements re- marquables, qui consistent dans l’écartement d’abord, puis dans le rapprochement des deux cylindres dont il se compose. Mais le rapprochement n’a pas lieu dans toute l’étendue des cylindres ; DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 274 ceux-ci restent écartés dans trois régions placées l’une au-devant de l'autre, d’où résultent trois cavités qui seront autant de ventricules cérébraux. 13. L'œil, qui avait d'abord la forme d'une bourse, se ferme par le développement d'une lamelle épidermique au-devant de son ou- verture. Le cristallin se développe à l'entrée de cette bourse , aux dépens de l’épiderme ; puis il s'enfonce peu à peu jusqu’au centre de l'œil. En même temps l'appareil choroïdal se développe sous la forme d’un cylindre recourbé, dontles extrémités s'appliquent l'une contre l’autre, de manière à ne plus être séparées que par une fente linéaire (la fente choroïdale). 14. Les otolithes se déposent sous la forme de granules calcaires, qui s’agelomèrent pour constituer ces concrétions. 15. La corde dorsale grossit ; ses éléments deviennent vésicu- Jeux, et chevauchent les uns sur les autres. 16. La gouttière intestinale se ferme d'avant en arrière. La por- tion de l'intestin constituée en tube devient libre, et se montre derrière le vitellus ; celui-ci diminue de volume. 47. La cavité de l'intestin est alors linéaire, et l’anus ne s'ouvre pas encore à l’extérieur. 18. A celle époque du développement , les lamelles vertébrales sont composées de fibres fusiformes et de cellules placées bout à bout, et disposées en chaïnettes. 19. La circulation vitelline ne s'établit, en général, que peu de temps avant l'éclosion. 20. Elle est d’abord diffuse, etne se voit que du côté gauche. 21. Le chorion s’amincit beaucoup. L'embryon augmente de volume, et remplit toute la cavité de l'œuf, au point que le chorion est, pour ainsi dire, collé contre lui. Cependant il exerce, de temps à autre, quelques mouvements cireulaires. 22. L'éclosion a lieu, vers le dixième jour, après la fécondation ; mais celte époque est avancée ou retardée par la température. 23. Dans les derniers jours qui précèdent l’éclosion, le pigment se dépose en grande abondance, principalement sur le vitellus, sur la tête et sur les parties latérales du corps. Ce pigment gêne beau- coup, ou empêche tout à fait l'observation. 972 LEREROULLET, — EMBR\YOLOGIE COMPARÉE Aur. 2, — Dans la Perche. 4. La cavité du cœur se forme avant les globules sanguins. 2. Le cœur bat régulièrement et avec force, quoique ne renfer- mant aucun 2lobule. 3. Chez les embryons élevés dans des assiettes, les corpuscules sanguins apparaissent généralement plus tard que chez ceux qui se développent dans la rivière. h. Cependant le cœur et les gros vaisseaux existent dans ces embryons. 5. Il en résulte que les vaisseaux, comme le cœur, peuvent se former sans la présence des corpuscules sanguins. 6. L'époque à laquelle se montrent les corpuscules sanguins dépend de l’activité vitale. 7. C'est aussi de cette même cause que dépend le nombre de ces globules ; ils sont abondants chez les embryons vigoureux, rares au contraire chez les faibles (1). 8. Pendant que le cœur se redresse , la corde dorsale augmente de volume , et ses éléments deviennent vésiculeux ; la queue s’al- longe, lanageoire embryonnaire se forme , les nageoires pectorales se montrent , l'embryon commence à se mouvoir; on peut, dès ce moment, l’extraire de l’œuf, et le conserver vivant. 9. La formation du cœur et l'établissement de la circulation sont ainsi le signal du développement des appareils locomoteurs et de leur mise en action. 10. En même temps, la fente choroïdale se prépare par le rapprochement du cylindre choroïdien. Les otolithes commencent à se déposer dans les vésicules auditives. A1. Les cavités cérébrales se montrent; elles sont formées par l’écartement des deux cylindres nerveux primitifs. 12. La gouttière intestinale commence à se fermer. Cette ferme- ture s'opère suivant une direction centripète. 13. Les parois très épaissies du tube qui résulte de cette sou- (1) Ce rapport entre le nombre des globules et le degré d'activité vitale existe, comme on sait, dans les animaux supérieurs et chez l bomme. DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 9273 dure sont contiguës , au point que la cavité de ce tube est linéaire ou même tout à fait nulle. 14. Les éléments de l'intestin sont encore des cellules homogènes. 15. L'intestin forme, en avant, une ampoule due à une plus grande épaisseur de ses parois, et qui annonce la production du foie. 16. Un peu plus tard , lorsque le cœur se dispose en deux loges , on voit deux ampoules placées l’une au-devant de l'autre. 17. Le renflement antérieur est constitué par le foie qui est déjà bilobé. 48. Les premières cellules qui composent le foie sont grandes, et ont une vésicule graisseuse à leur centre. 49. Plus tard les cellules du foie diminuent de volume, et leur noyau devient granuleux et opaque. 20. Les corpuscules sanguins paraissent se former directement! aux dépens du sang ; ils ne proviennent pas de cellules préformées. 21. Les premiers corpuscules se montrent dans l'intérieur du cœur, où ils sont ballottés pendant quelque temps. 22. Les cellules des parois internes du cœur sont maintenant polygonales. 23. Les globules sanguins qui oscillent dans le cœur sont plus petits que ces cellules. 24. Les globules, quoique formés dans le cœur, ne sont done pas des cellules détachées des parois du cœur. 25. La première anse cireulatoire que l’on distingue forme une ellipse qui s'étend jusqu'à la limite postérieure du vitellus. 26. La circulation vitelline s'établit immédiatement après l’ap- parition de la première anse vasculaire générale. 27. Le réseau vitellin se forme par des canaux lacunaires. 28. Les lignes du contour des vaisseaux se dessinent plus tard. 29. Quand le réseau vitellin est terminé, les corpuscules san- guins ont leur forme elliptique normale. 30. Le réseau vitellin est le premier appareil respiratoire spé- cial du poisson. 31. La formation de ce réseau est en rapport avec la multi- plication des globules , et la nécessité où ils se trouvent de se par- tager en colonnes très étroites, pour recevoir l’action de l’eau aérée. 4° série. Zoou, T. I. (Cahier n° 5.) 2 18 27h LEREBOULLET. — EMBRYOLOGIE COMPARÉE 32. Avant la formation du réseau vitellin, la respiration était générale. 33. Il n'existe d’abord qu'un réseau, celui du côté gauche ; plus tard il s’en forme un aussi du côté droit. 34. L'organe primordial de la sécrétion urinaire est un tube enroulé sur lui-même, et formant une petite pelote. 35. Le tube, avec sa dilatation terminale en forme de vessie, existe longtemps avant la pelote granduleuse; cependant cette glande se continue directement avee le tube, puisque c’est l’enrou- lement de celui-ci qui la constitue. 36. Le dépôt du pigment est un phénomène général qui caractérise les dernières périodes du développement embryon- naire. 37. Ce dépôt se fait en même temps dans la choroïde, sur quél- ques points de la tête et des côtés du corps et sur le vitellus. 38. Les cellules pigmentaires du vitellus sont déjà développées quand le pigment grenu les remplit peu à peu, en suivant les rami- fications de ces cellules à mesure qu'elles se produisent. 39. Le cristallin est formé de couches concentriques dont on distingue les stries. A0. Ces couches sont elles-mêmes composées de fibrilles fusi- formes, transparentes, très fines et entrelacées. hA. La vésicule auditive renferme deux otolithes , et des formes qui indiquent l’origine des tubes demi-cireulaires. A2. La partie caudale de la nageoïre embryonnaire se remplit de corpuscules irréguliers, qui sont peut-être des matériaux pour une formation nouvelle. h3. L'embryon se meut par secousses régulières et tourne dans son œuf, mais non encore d’une manière continue. hh. Cependant les muscles ne sont pas encore striés en travers ; ils sont formés de fibres fusiformes nueléées où de cylindres striés en long. 45. Lesdivisions vertébrales sontdevenuesdes cloisons fibreuses, qui partagent les masses musculaires latérales en groupes distincts. hG. L'intestin commence à exercer quelques mouvements de contraction et de dilatation. DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 275 47. La plus grande dilatation située au-devant du foie envoie un prolongement tubuleux dans l’intérieur de ceforgane. 48. Ce prolongement parait être le canal cholédoque. L9. La bouche est inférieure comme dans les Sélaciens ; elle n’est pas encore perforée. 50. Les arcs branchiaux apparaissent sous la forme de bande- lettes gélatineuses transparentes, situées sous la tête, des deux côtés. 51. Dès que l'intestin commence à se contracter, on le trouve composé de cellules allongées qui sont disposées sur deux couches, les unes longitudinalement, les autres transversalement. 52. Les cellules du foie sont devenues plus petites ; et leur noyau, qui était vésiculeux, est maintenant granuleux et opaque. 53. La cavité de l'intestin , qui disparaissait complétement pen- dant les mouvements de contraction , s’est agrandie de manière à rester permanente. 54. En même temps sa surface interne devient sinueuse, aspect qui indique la formation de la muqueuse et de l’épithéliumn. 55. Pendant que l’intestin se développe en largeur, et que ses éléments contractiles entrent en fonction , il reçoit un appareil vasculaire particulier qui lui est fourni par l'aorte. 56. Cet appareil se compose de deux rameaux artériels qui vont former un nombre considérable d’anses vasculaires autour de l'in- testin, puis se réunissent à la veine sous-intestinale. 57. Cette dernière se jette dans le vitellus , et forme alors à elle seule le réseau vitellin. 58. Cette disposition diminue la quantité de sang veineux qui se rend au vilellus, parce que le sang de la veine-cave se rend direc- tement au cœur, et cesse d'alimenter le réseau vitellin. 59. Il existe alors dans l'embryon trois sortes de sang : du sang artériel pur dans le réseau vitellin ; du sang veineux pur dans les veines qui reviennent au cœur sans passer par le vitellus, et dnr sang mélangé dans le cœur et dans l'aorte. 60. Les arcs vasculaires branchiaux commencent à se former vers la fin de cette période. 61. Le sang prend alors une teinte jaunâtre ou jaune-rougeâtre, par l'accumulation des corpuscules sanguins. 276 LEREBOULLET. — EMBRYOLOGIE COMPARÉE 62. L'éclosion a lieu, en moyenne, vers le douzième jour. 63. Les petites Perches écloses ne nagent pas toujours ; elles se laissent tomber au fond de l’eau, et ne viennent à la surface que lorsqu'elles éprouvent le besoin de respirer. Anr. 3. — Résumé comparatif du développement de l'embryon, depuis la formation du cœur jusqu'à l'éclosion, dans le Brochet et dans la Perche, À. Ressemblances. $ L. Tandis que la période précédente avait principalement pour objet la formation et le développement des organes préposés aux fonctions de relation, la période qui vient de nous occuper se dis- tingue par l'établissement de la circulation et par des phases qu'elle subit, ainsi que par l'achèvement des organes de la vie végétative. Nous avons vu, en effet, se former successivement le cœur, les vaisseaux, le sang; la cireulation, d’abord générale, se loca- lise dans le vitellus pour constituer un appareil de respiration embryonnaire ; les ares vasculaires branchiaux vont se former pour préparer l'établissement d'un appareil respiratoire définitif, les branchies ; puis l'achèvement du tube intestinal et du foie, les pre- miers signes de vitalité de cet intestin consistant dans ses mouve- ments péristaltiques; la formation du principal appareil excréteur, l'appareil urinaire. Nous allons grouper, en suivant cette marche de la nature, les principaux faits relatifs à cette période, et dont nous avons donné le résumé dans les pages qui précèdent. $ 2. Nous avons vu, à la fin de la période précédente, le cœur apparaître sous la forme d’un cylindre ou d’un cône allongé, solide, c’est-à-dire sans cavité, couché horizontalement sous la tête, et ce cœur plein osciller régulièrement comme s'il était déjà chargé de remplir ses fonctions mécaniques. Un autre phénomène non moins remarquable, c’est que, lorsque la cavité du cœur s’est formée, elle ne renferme d’abord aucun cor- puseule sanguin, ce qui montre que ces pelits organes ne se déve- loppent que plus tard. Le cœur change de position et de forme ; il se détache de la base DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 9277 du corps , descend dans la chambre cardiaque , s’allonge en boyau cylindrique, puis se coude par son milieu et se renfle en deux cavités distinctes, l'oreillette et le ventricule. Les vaisseaux sanguins se forment comme le cœur, et à peu près en même temps que lui, par des cavités linéaires. Ces cavités sont des lacunes ou des canaux creusés dans les organes ; leur paroi propre se développe ultérieurement. B Le liquide nourricier remplit nécessairement ces cavités, et c’est dans ce liquide plastique que se forment les globules sanguins. Ceux-ci sont d'abord petits, de forme irrégulière et en petit nombre ; ils augmentent peu à peu de volume, en même temps qu'ils se multiplient. Plus tard ils deviennent elliptiques , et se chargent de la matière colorante du sang. Leurs dimensions primitives , leur accroissement , leur aspect, leur production postérieure à celle du cœur et des vaisseaux, sont des faits incompatibles avec la théorie qui les fait dériver mécani- quement des organes du corps. $ 3. La circulation générale s'établit par des anses qui se pro- duisent successivement, en s’allongeant de plus en plus. Le vais- seau centrifuge, arrivé à une certaine distance du cœur, revient sur lui-même sans changer sensiblement de diamètre , et retourne au cœur. Quelquefois les anciennes anses persistent encore, quand les nouvelles sont établies ; le plus souvent cependant, elles dispa- raissent à mesure que la boucle terminale s'éloigne davantage. $ 4. Pendant les premiers temps de la cireulation générale , les corpuscules sanguins sont rares, et répandus également dans toute la largeur du vaisseau. A mesure qu'ils se multiplient, le plus grand nombre d’entre eux courent alors dans l’axe du réservoir qui les renferme. Bientôt leur nombre s’accroît, au point qu'ils sont obli- gés de se serrer, de se tasser en quelque sorte les uns sur les autres. Ils ne peuvent plus recevoir individuellement , comme lorsqu'ils étaient dispersés, l’action de l'air que l’eau tient en dissolution ; c’est alors que s'établit la circulation vitelline. $ 5. Le courant sanguin qui retourne au cœur pénètre dans le vitellus, et s’y divise en un grand nombre de courants plus petits, disposés en réseaux comme des capillaires, de manière à disperser 278 LEREBOULLET. — EMBRYOLOGIE COMPARÉE sur la vessie vitellaire la masse des globules. Ce réseau vitellin est done un véritable appareil respiratoire, qui fonctionne jusqu'à l’époque de l'apparition des branehies, Cependant la masse entière du sang qui retourne au cœur ne se rend pas dans le vitellus ; ainsi les veines caves antérieures vont droit au cœur sans se capillariser. La veine cave postérieure elle-même, qui d'abord passait tout entière par le vitellus, n’envoie plus tard qu’une branche dans cet organe. Il existe done une époque de la vie du Poisson où le corps contient du sang artériel pur, du sang veineux pur et du sang mé- langé. $ 6. Les franges branchiales ne se montrent que plusieurs jours après l’éclosion ; mais la formation de ces organes se prépare déjà vers la fin de la période actuelle par l'apparition de nouveaux vais- seaux provenant de l'artère branchiale, et qui se portent le long des ares branchiaux. $ 7. Pendant que le travail physiologique se divise de plus en plus par l'établissement de ces deux fonctions nouvelles, la cireu- lation et la respiration , l’intestin continue à se fermer d'avant en arrière el d’arrière en avant. Ses parois sont alors très épaisses , tandis que sa cavité est linéaire; son tissu se compose encore de -cellules homogènes. Cet intestin n’est plus ouvert que dans sa ré- gion moyenne inférieure, par laquelle il recoit la substance vitel- line, qui est alors la seule nourriture de embryon. Ses deux ou- vertures n'existent pas encore ; la bouche a la forme d'une fente, ou plutôt d'une dépression transversale située sous la tête; l'anus est un cul-de-sac imperforé, placé non loin du bord de la nageoïre embryonnaire. $8. Vers le milieu de cette période, l'intestin commence à exer- cer des mouvements de dilatation et de contraction, qui élargissent momentanément sa cavité. Il est alors composé de cellules allongées , disposées sur deux couches. Sa cavité s'élargit, et sa surface interne devient sinueuse, par suite de la présence de sa couche muqueuse qui commence à se développer. S 9. Le foie, qui n’était d'abord qu'un amas de cellules appliquées contre là paroi extérieure de l'intestin, augmente rapidement de DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L ÉCREVISSE. 279 volume. Sa forme bilobée se montre de très bonne heure. Ses cellules, d'abord grandes, avec une vésicule graisseuse à leur centre, deviennent plus petites, et acquièrent un noyau granuleux. Un prolongement tubuleux qui part de l'intestin et pénètre dans la masse du foie, le canal cholédoque, met cette glande en communi- cation avec la cavité intestinale; mais on ne voit pas encore de vésicule biliaire. Il suit de là que les canaux excréteurs ont une ori- gine différente de celle du foie lui-même; ils résultent d’un pro= longement tubuleux de l'intestin, tandis que le foie est le produit d’une végétation celluleuse qui se fait à la surface de ce dernier. $ 10. Pendant la durée des modifications précédentes, qui diffé- rencient les parois de l'intestin en couches contractiles eten couches sécrétoires, ce tube reçoit un appareil vasculaire particulier, com- posé d’anses artérielles nombreuses qui l'entourent d'un lacis de vaisseaux. La veine qui recoit le sang de tous ces vaisseaux (veine sous-intestinale), et que l’on peut déjà regarder comme une veine porte, se jette maintenant seule dans le vitellus ; la veine cave con- tinue directement son chemin vers le cœur. L'établissement de la circulation intestinale, en même temps qu'elle fournit au tube digestif le sang dont il a besoin pour sa nutrition, à done pour ré- sultat de diminuer la quantité de ce liquide qui se rendait au vitel- lus. Le cœur en reçoit une plus grande quantité et emploie cet excès de sang à la formation des ares vasculaires branchiaux ; substitution aussi simple qu'admirable, qui montre une fois de plus le rôle important que joue la circulation dans la formation des par- ties nouvelles comme dans le développement de ces parties. $ 11. Une formation parallèle à celle de l'intestin et à l’établisse- ment de la circulation est celle de l'appareil sécréteur et exéréteur de l'urine. Cet appareil, situé au-dessus du tube digestif, commence avec l'intestin; mais alors , c’est-à-dire à une époque rapprochée de son origine, on ne dislingue que son tube excréteur (luretère) avec sa dilatation terminale, qui a la forme et la position d’une vessie urinaire. Ce n’est que plustard, lorsque la circulation existe, qu’on aperçoit aussi l'organe sécréleur proprement dit, ou corps de Wolff, formé par un enroulement sur lui-même du tube excréteur. Cette apparition tardive de la glande, en comparaison de la for- 280 LEREBOULLET, EMBRYOLOGIE COMPARÉE mation en quelque sorte prématurée de son tube excréteur, nous montre l'étroite corrélation qui existe entre les sécrétions, la cireu- lation du sang et la respiration. Cette dernière fonction surtout fai- sant intervenir d'une manière plus active l'oxygène de l'air comme condition essentielle du travail nutritif, on comprend la nécessité d’un travail éliminatoire particulier, et l'existence d'organes de sécrétion excrémentitielle. $ 12. Pendant la durée de la période dont nous résumons les principaux traits, les appareils embryonnaires de Ja vie de relation continuent à se développer. Les appareils locomoteurs surtout prennent un grand développe- ment : la queue s’allonge rapidement; la nageoire embryonnaire entoure presque tout le corps ; les nageoires pectorales grandissent. Les éléments contractiles se perfectionnent de leur côté en prenant la forme de fibres ; cependant les stries transversales, qui les carac- térisent plus tard, ne se voient pas encore. Enfin la corde dorsale augmente de volume, et les éléments qui la composent deviennent vésiculeux. Les cylindres nerveux cérebraux , après s’être écartés , se rap- vrochent incomplétement, de manière à laisser entre eux trois cavi- tés placées l’une au-devant de l’autre. L'œil se complète par la formation du cristallin et de l'appareil choroïdal. Le cristallin présente plus tard des stries concentriques formées par des couches de fibres. Les otolithes se déposent et grossissent. Vers les derniers jours , le pigment se dépose dans la choroïde et dans diverses régions du corps. Ce dépôt se fait dans des cellules particulières préexistantes. Enfin le petit Poisson éclot et nage avec agilité, mais non d’une manière continue ; quand il a fait quelques tours, il se laisse tomber, et reste quelque tempsimmobile, puis revient nager à la surface de l'eau pour se rapprocher de la couche d'air. + DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L ÉCREVISSE, 281 CHAPITRE V. DÉVELOPPEMENT DU POISSON DEPUIS L'ÉCLOSION JUSQU'APRÈS LA DISPARITION DE LA VESSIE VITELLAIRE. Ant. 1%, — Dans le Brochet. 1. Ce n’est qu'après l’éclosion qu'on distingue bien la circulation latérale produite par les anses vertébrales. Cette circulation se fait par des ramuscules artériels et veineux, qui montent et descendent le long des divisions vertébrales. 2. On voit encore un assez grand nombre de petites anses aorti- ques successives. 3. Quelques jours après la naissance, les vaisseaux vitellins cessent de former un réseau et tendent à devenir parallèles. h. Le canal intestinal s’élargit peu à peu ; mais l’anus ne s’ouvre au dehors que le quatrieme jour, après la sortie de l'œuf, 5. Le corps de Wolff se montre comme une pelote formée par un tube enroulé sur lui-même, et qui est la continuation du tube formé antérieurement. 6. La vessie natatoire se voit au-dessus du canal intestinal, au- quel elle tient par un court pédicule. 7. Le cœur est encore celluleux. 8. Les branchies apparaissent sous la forme de tubercules com- posés de cellules granuleuses. 9. On observe des mouvements réguliers de déglutition, qui annoncent l'établissement de la respiration branchiale. 10. Le sang a une couleur jaunâtre. Les corpuscules sanguins ont pris une forme elliptique. 11. La vessie vitellaire diminue lentement; ses vaisseaux de- viennent de plus en plus parallèles, et se dirigent vers le foie. 12. Cette vessie disparaît du douzième au quinzième jour ; le petit Poisson a sa forme définitive, et nage sans se reposer, c’est- à-dire sans se laisser tomber au fond de l’eau. Ant. 2. — Dans la Perche. 1. Les différences que présente l'organisation des Poissons dans les jours qui précèdent où qui suivent immédiatement Féelosion ne 822 LEREBOULLET, — EMBRYOLOGIE COMPARÉE sont pas assez caractéristiques, pour que cette époque puisse être prise pour point de départ d'une période. 2. Voici cependant les principaux caractères du Poisson à sa naissance, du moins généralement : Nageoires pectorales très dé- veloppées ; vessie vitellaire très grosse ; œil noir, fente choroïdale encore apparente ; capsules auditives de forme elliptique; deux otolithes granuleux ; origine des canaux demi-cireulaires ; ares branchiaux , munis de cavités cartilagineuses oblongues ; un seul courant sanguin de chaque côté, le long des arcs postérieurs ; cir- culation comme à la fin de la période précédente. Intestin recourbé vers le bas ; son extrémité rapprochée du bord de la nageoïre, mais pas d'ouverture anale. Corps de Wolff formé par un tube enroulé ; l'uretère, continuation de ce tube, renflé en une vessie oblongue. Mouvements péristaltiques de l'intestin ; celui-ci est encore ouvert dans une petite étendue, derrière le foie. 3. Les conduits hépatiques et la vésicule biliaire naissent directe- ment de l'intestin ; leur origine est indépendante de celle du foie. k. Le foie est une production celluleuse ; les conduits excréteurs sont des évolvures de l’intestin. 5. La vessie natatoire se produit contre les parois de l'intestin à la manière des glandes cutanées ; c’est d’abord un tubereule formé par une accumulation de cellules intestinales ; ce tubercule se creuse plus tard d'une cavité. La vessie nalatoire se détache ensuite de l'intestin, et s’allonge de plus en plus. 6. Elle est parcourue par des vaisseaux sanguins qui forment plusieurs anses dans ses parois. Ces vaisseaux dérivent de l'artère intestinale. 7. Les principaux changements qui surviennent après l’éclosion consistent dans la diminution et la disparition de la vessie vitellaire, ainsi que dans la formation des branchies. 8. Le vitellus diminue de bas en haut, puis d’arrière en avant. 9. La goutte d'huile existe longtemps encore après la disparition du vitellus, puis elle est peu à peu consommée. 10. À mesure que le vitellus diminue, son réseau vasculaire se rétrécit et s’efface. 11. La veine intestinale , qui alimentait le réseau vitellin , passe DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 283 dans le foie, et forme dans cette glande un autre réseau ; elle de- vient ainsi veine porte. 12. La circulation générale est alors plus apparente; on voit distinctement les anses vertébrales etune partie de la cireulation de la tête. 13. Une circulation très active existe derrière l'œil, pour former probablement l'appareil vasculaire choroïdal. 44. Les ares vasculaires branchiaux s’établissent successivement d’arrière en avant. 15. Quand on fait périr le Poisson par asphyxie, on voit que les battements de l'oreillette persistent plus longtemps que ceux du ventricule. 16. Dans les premiers jours de la naissance , les globules san- guins d’un Poisson bien portant sortis des vaisseaux se déforment aussitôt, et prennent la forme et l'aspect de globules graisseux. 17. Cette déformation des globules et cet aspect graisseux ont lieu dans les vaisseaux eux-mêmes, quand la circulation se ralentit par suite de la diminution de la force vitale. 18. Cette déformation n’a plus lieu sur des Poissons plus avancés. 19. Chez ces derniers , les globules sanguins s’agelutinent les uns aux autres, quand la vie est près de s’éteindre, et forment des amas qui s'arrêtent bientôt. 20. Les globules sanguins normaux des Poissons , âgés de dix jours, sont beaucoup plus gros que lors de leur première appari- tion ; ils ont une forme elliptique, et sont pourvus d’un noyau. 21. Vers le huitième jour, la surface interne de l'intestin est bosselée; cet aspect annonce la formation de la muqueuse intesti- nale. 22. Celle-ci se compose de cylindres juxtaposés, renfermant un grand nombre d’utricules placés perpendiculairement à la surface intestinale. 23. L’anus et la bouche paraissent s'ouvrir en même temps ; le Poisson exerce des mouvements de déglutition , qui permettent de voir aussi les fentes branchiales. 24. La coloration en jaune de l'intestin et de la vésieule biliaire annonce que la bile est sécrétée. 281, LEREBOULLET. — EMBRYOLOGIE COMPARÉE 25. Les cellules biliaires ont aussi une teinte jaunâtre ; le noyau graisseux de ces cellules est remplacé par un noyau granuleux ; ces cellules sont moins grosses que précédemment. 26. Le travail, qui a pour but la formation des branchies, com- mence lorsque la circulation vitelline se prépare à passer au foie. 27. Les cartilages branchiaux se remplissent de cavités , et la couche celluleuse qui les entoure augmente d’épaisseur , surtout par le bas. 28. Cette couche celluleuse pousse des tubereules par son bord inférieur. 29. Les tubercules branchiaux sont d’abord pleins; puis il se forme dans leur intérieur deux petits canaux longitudinaux séparés par une cloison, mais communiquant l’un avec l’autre par une ou- verture située près de l'extrémité libre du tubercule. 30. Ces tubercules commencentaux ares branchiaux postérieurs. 31. Le sang parcourt les canaux creusés dans les tubereules, et se rend vers l'aorte par un vaisseau efférent placé le long de l’are, comme le vaisseau afférent. 32. En même temps que les branchies , il se développe , vers l'angle des mâchoires, un organe lamelleux très vasculaire, qui parait constituer les fausses branchies. 93. La formation des nageoires verticales permanentes com- mence quelque temps après l'établissement de la circulation bran- chiale. 3h. Cette formation est précédée de l'accumulation de corpus- cules irréguliers qui paraissent être de nature graisseuse. 39. Après la disparition de ces corpuscules, lanageoire embryon- naire devient striée ; puis elle s’échancre sur plusieurs points, et les rayons cartilagineux apparaissent dans les régions qui seront occu- pées par les trois nagcoires verticales. 36. Ces rayons cartilagineux se développent sur place sans l’in- tervention de cellules particulières, et sans doute par le dépôt d’un cytoblastème cartilagineux. 37. Pendant ce travail , les vésicules de la corde se remplissent d'une matière gélatineuse. 58. Les cartilages de a tête continuent à se garuir de cavités, DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE, 285 dont la forme varie avec celle des pièces cartilagineuses. Ces cavités renferment des cellules avec noyau graisseux. 39. L’extrémité antérieure de la corde, qui pénètre entre les pièces cartilagineuses de la base du crâne, ne se détache pas du reste du cylindre, et ne parait pas concourir, du moins à cette époque, à la formation des os. 40. L'iris se garnit de son pigment argenté. LA. Les capsules auditives deviennent triangulaires , et les oto- lithes grossissent inégalement. 42. Ces otolithes sont formés de couches concentriques de sub- stance calcaire ; ils se dissolvent dans les acides, sans laisser de résidu membraneux appréciable. L3. Pendant que les rayons des nageoires se déposent, l’extré- mité postérieure de la corde se redresse. hh. Les rayons se rapprochent de plus en plus du corps du Poisson. 45. L’aorte envoie des anses inférieures, qui se portent de plus en plus en arrière vers la queue, contournent cette partie , et se présentent plus tard vers son bord supérieur. Ces anses précèdent l'apparilion des rayons cartilagineux, qui se produisent successive- ment de bas en haut. 46. Des pièces cartilagineuses se montrent entre les extrémités des rayons de la queue et le corps du Poisson (pièces inter-épi- neuses). 7. Ces pièces ont un accroissement centrifuge ; elles se déve- loppent aussi de bas en haut comme les rayons. 48. La colonne vertébrale commence à se solidifier vers le troi- sième mois seulement, dans le Rotengle. 9. Cette solidification se fait par Ja gaîne de la corde. 50. C’est alors que les vésicules de la corde cessent d'être distinctes, et que le cylindre se partage en vertèbres. 51. Les lignes de séparation des vertèbres correspondent aux intervalles des divisions vertébrales primitives. 52. Les apophyses épineuses sont des pièces distinctes, et sépa- rées de la colonne vertébrale. 53. L'extrémité redressée de la corde se raccourcit de plus en plus, “ 286 LEREBOULLET. — EMBRYOLOGIE COMPARÉE 5h. Les rayons cartilagineux de la nageoire caudale se divisent en articles d’égale grandeur. 55. Ces rayons restent transparents, et ne reçoivent pas de cavi- tés cartilagineuses. 56. Pendant que leur division s'opère, l'aorte forme à la base de la queue deux anses très étendues, qui envoient des artérioles à chacun des rayons. Arr. 3. — Résumé comparatif des modifications que le Poisson éprouve après l'éclosion. A. Ressemblances. $ 1. Les deux faits qui dominent tous les autres, dans cette der- nière période, par les conséquences qu'ils entraînent, sont la dispa- rition de la vessie vitellaire et la formation des branchies. $ 2. On sait que le jeune poisson récemment éclos porte encore pendant quelques jours sa vessie vitellaire. Celle-ci donne à son corps une forme particulière par la saillie plus ou moins considé- rable qu'elle produit. Mais à mesure que le poisson grandit, celte vessie diminue; son contenu est employé pour la nutrition : il est peu à peu absorbé par l'intestin. Enfin il disparaît totalement ; l'abdomen ne fait plus de saillie, le poisson a pris sa forme définitive, $ 3. Pendant que le vitellus diminue de volume, le réseau vas- culaire, qui élait étalé à sa surface, se modifie complétement; les rameaux d’anastomoses se rétrécissent el disparaissent ; les bran- ches se disposent parallèlement les unes aux autres, en se dirigeant vers le foie. Quand le vitellus est résorbé, la veine sous-intestinale qui, auparavant, se capillarisait dans ce vitellus, se capillarise main- tenant dans le foie. La circulation hépatique a remplacé la cireu- lation vitelline devenue inutile et impossible ; l'appareil respiratoire embryonnaire ou transitoire a disparu. $ 4. Mais un nouvel appareil respiratoire sefo rme et commence à fonctionner. Les ares branchiaux cartilagineux sont creusés de petites cavités, et ont pris le caractère des vrais cartilages. Une abondante végétation de cellules s’est produite autour d'eux, et a DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 287 donné naissance à des tubercules disposés en double série, le long du bord inférieur de ces ares. Ces tubercules, d’abord pleins , se sont creusés presque aussitôt, de manière à contenir un double canal dans lequel le sang cireule. Chaque globule sanguin vient tour à tour, en passant par cet étroit canal, recevoir l’action de l’eau aérée. L'oxygénation des corpuscules du sang est donc complète, du moins pour ceux qui se dirigent vers les tubercules branchiaux. Peu à peu le nombre de ces appendices augmente d’arrière en avant, c’est-à-dire que les arcs antérieurs les plus éloignés du cœur, et qui ont été les derniers à recevoir des vaisseaux sanguins, sont aussi les derniers qui se gar- uissent de tubercules branchiaux. Bientôt les tubercules primitifs s’allongent, poussent latérale- ment des tubercules nouveaux qui fonctionnent comme les précé- dents; de sorte que les appendices ne tardent pas à prendre la forme de franges élégantes suspendues aux arcs cartilagineux. Cette disposition permet à la masse sanguine de se diviser sur une plus large surface ; l’oxygénation des globules se fait plus prompte- ment : la respiration devient done de plus en plus active. $ 5. Les corpuscules sanguins ont grossi, et ont pris leur forme elliptique définitive. La circulation générale est devenue plus dis- tincle, et se fait maintenant dans tous les organes. $ 6. Le tube digestif achève de se constituer. 1 se ferme der- rière le foie quand le vitellus est entièrement consommé. La bouche et l'anus s'ouvrent au dehors. La première exerce des mouvements réguliers de déglutition qui déterminent le jeu rhythmique de l'ap- pareil respiratoire : l'intestin s’élargit dans la région qui deviendra l'estomac; la muqueuse se garnit de ses utricules sécréleurs ; la vésicule biliaire se montre comme un appendice intestinal. Cette vésicule, ainsi que le foie et tout l'intestin, se colore en jaune, ce qui indique que la sécrétion biliaire est établie. $ 7. Un appendice particulier se montre sur les côtés de l’œso- phage; c'est la vessie nataloire qui n’est d'abord qu'un simple tubercule formé des mêmes éléments que les parois du tube dont il fait partie. Ce tubercule se creuse, grandit , s'étrangle à son ori- gine, se détache peu à peu de l'æsophage , etse différencie bientôt 288 LEREBOULLET. — EMBRYOLOGIE COMPARÉE complétement par l'établissement d’une circulation extrèmement riche qui se fait dans son intérieur. $ 8. Les appareils sensitifs éprouvent peu de changements. L'œil perd sa fente choroïdale : l'iris devient argenté par le dépôt d’un pigment particulier. ; Les capsules auditives prennent une forme triangulaire. Les oto- lithes grossissent inégalement par de nouvelles couches calcaires qui viennent s'appliquer autour de celles qui existaient déjà. $ 9. Les appareils locomoteurs sont ceux qui se modifient les derniers, à une époque très éloignée de la naissance. Ces modifica- tions consistent dans la formation des nageoires permanentes ver- ticales, dans les changements qu’éprouve la corde dorsale et dans la formation de la colonne vertébrale. $ 10. Les nageoires permanentes verticales (1) se forment par le dépôt d’un blastème cartilagineux qui se fait sur place, dans trois régions de la nageoire embryonnaire : sur le dos, à la queue et derrière l’anus. Les parties de la nageoïire embryonnaire situées entre ces régions s’atrophient. Les rayons cartilagineux sont d’abord à une certaine distance du corps , mais ils s’allongent par leur extrémité centrale et s’en rapprochent peu à peu : mode de développement conforme à la loi de formation centripète établie par M. Serres (2). Plus tard il se produit, du moins à la nageoïre caudale , d’autres pièces cartilagineuses qui s’interposent entre le corps et les rayons; le développement de ces pièces est centrifuge. Bientôt les rayons atteignent ces dernières pièces que j'ai nommées interépineuses, et s'appliquent contre elles. Enfin les rayons se segmentent et se divisent transversalement en un certain nombre de pièces ou d'articles, pour revêtir le carac- tère des rayons articulés. $ 11. Cette formation de la nageoire caudale est précédée et accompagnée d’une modification remarquable dans les vaisseaux sanguins. L’aorte fournit des anses vasculaires qui précèdent l’ap- (1) C'est sur le Rotengle que j'ai étudié la formation des nageoires verticales, particulièrement de la nageoire caudale. « (2) Principes d'organogénie, Paris, 1842, in-8, p. 212. DU BROCHET, DE LA PERCHE ET DE L'ÉCREVISSE. 289 parition des rayons cartilagineux , et se portent successivement de la région inférieure du corps à son côté supérieur, en faisant le tour de la base de la queue. Une anse particulière très étendue occupe la largeur de cette dernière un peu avant la segmentation des rayons. $ 12. Pendant la formation des nageoires permanentes, l’extré- mité caudale de la corde dorsale s’infléchit vers le haut, ses vési- cules se remplissent de substance gélatineuse, puis les parois de ces vésicules s’effacent et cessent d’être distinctes ; le cylindre que for- mait la corde acquiert une transparence homogène. $ 13. C’est alors que ce cylindre se divise transversalement en pièces semblables entre elles (les corps des vertèbres ), tandis que les apophyses épineuses naissent dans les intervalles de ces divi- sions, et consistent en pièces distinctes et séparées du cylindre lui- même. C’est alors aussi que commence l’ossification de la gaine de l’ancienne corde dorsale. En même temps toutes les pièces du crâne sont remplies de cel- lules cartilagineuses, dont la présence indique aussi une ossification prochaine. B. Différences. $ 14. La durée de la vessie vitellaire est plus longue dans le Bro- chet que dans la Perche, ce qui tient moins, peut-être, à son plus grand volume proportionnel qu’à ce que, dans la Perche, la circu- lation vitelline a lieu beaucoup plus tôt avant la sortie de l'œuf. $ 15. On à pu remarquer la longue persistance de la goutte d'huile dans la jeune Perche. Elle survit à la disparition complète du vitellus , et se trouve comme enchâssée dans le bord antérieur du foie. Elle n’est résorbée que lentement. Il est probable que cette graisse sert d’aliment à la respiration très active de ce petit Poisson, dont la vivacité contraste avec les allures beaucoup plus calmes du jeune Brocbet. $ 16. Les autres différences tiennent à la forme et aux propor- lions des deux Poissons , et surtout à la forme de la tête beaucoup plus allongée et plus aplatie dans le Brochet. 4° série, Zoou T. 1. (Cahier n° 5.) % 419 NOTE SUR LA GÉNÉRATION DU PÉLODYTE PONCTUÉ, AVEC QUELQUES OBSERVATIONS SUR LES BATRACIENS ANOURES EN GÉNÉRAL, Par M. A. THOMAS. La génération du Pélodyte ponctué n'étant pas connue des natu- ralistes, je vais essayer de la décrire, en faisant connaître , dans cette note, le résultat des longues observations que j'ai faites sur ce Batracien. Le petit Reptile qui fait le sujet de ce mémoire s’accouple deux fois par an : d’abord, depuis la fin de février jusque vers le commen cement d'avril; et ensuite, à partir des derniers jours de septembre, jusqu'aux quinze premiers d'octobre environ. Le mâle, comme chez tous les autres Batraciens qui ont la pupille verticale ou triangulaire, saisit sa femelle au défaut des lombes ; tandis que, dans les genres qui ont la pupille horizontale, les mâles, dans l'accouplement, passent leurs bras sous les aisselles des fe- melles, de manière que leurs doigts viennent se joindre sur le thorax de celles-ci. Les Grenouilles , la Rainette verte et les Cra- pauds , S'accouplent de cette dernière manière. Les Pélobates , le Pélodyte ponctué, \ Alytes et le Bombinator, s'accouplent, au con- traire, de la première manière. Mais ce qu'il y a de curieux dans la ponte du Pélodyte ponctué, outre les deux époques fixes de ses amours, c’est la manière inva- riable dont il dépose ses œufs. Ces œufs sortent en une petite grappe de la longueur de 6 à 8 centimètres, et de la largeur de 1 à 2 centimètres. Cette petite grappe d'œufs est toujours déposée en long sur un brin d’herbe ou sur une petite branche d'arbre flottant sur l’eau ou A. THOMAS. — GÉNÉRATION DU PÉLODYTE PONCTUÉ. 291 un peu enfoncée sous celle-ci. La glu et les œufs entourent com- plétement le corps auquel ils sont attachés , de manière à flotter ou à rester submergés avec lui. Dans cet état, ce petit paquet d'œufs affecte assez la forme d’une grappe de raisin. Les naturalistes savent que la ponte des Grenouilles s’effectue en un seul peloton , et ne se renouvelle pas; que celle des Crapauds consiste en deux cordons qui sortent parallèlement et en même temps , pour ne recommencer que l'année suivante et à la même époque. Celle du Pélodyte ponctué a lieu quelquefois à trois reprises, et de la manière suivante. Le 4 avril 4849, je trouvai deux Pélo- dytes ponctués accouplés. Je les apportai chez moi , et les déposai dans un vase plein d'eau, dans lequel je mis avec intention quelques brins d'herbe , pour qu'ils pussent y placer leurs œufs. En effet , vers trois heures après midi, je trouvai étendue sur un des brins d'herbe une grappe d'œufs nouvellement pondue ; mes Pélodytes étaient toujours accouplés , et nageaient en tous sens dans le vaste vase où je les tenais prisonniers. Le lendemain matin, j'aperçus deux autres grappes collées chacune sur un brin d'herbe. Le mâle s'était séparé de sa femelle, la ponte étant terminée. J'ai eu souvent des Pélodytes qui n'ont pondu qu'une seule grappe d'œufs; mais, comme j'avais trouvé ces Batraciens déjà accouplés, il est très probable qu'ils avaient déjà pondu un peu avant que je les prisse. Le Bombinator effectue également sa ponte à plusieurs reprises. Le mucus qui enveloppe les œufs du Pélodyte ponctué est très clair, très mince et moins solide que celui des Grenouilles. On y distingue très bien, comme dans ce dernier, chaque sphère qui contient et protége un Têtard. Ce Têtard, quand il vient d’être pondu, est très petit; mais, par la suite, il devient fort gros, et l’on est étonné qu'un Batracien aussi petit que le Pélodyte ponctué ait un Têtard aussi volumineux. Du reste, tous les Batraciens à pupille verticale produisent des Tétards très gros ; ceux des Pélobates deviennent les plus volumi- neux. I faut pourtant avouer que les Tétards de la Grenouille verte deviennent presque aussi gros que ceux des Pélobates, et qu'il serait facile à des yeux peu exercés de confondre les uns avec les 292 A. 'THOMAS. — GÉNÉRATION autres, quand ces différents Tétards se trouvent mêlés ensemble dans les mêmes eaux. Il n’en est pas de même des Têtards de la Grenouille rousse de Roësel et d’une autre espèce, quine me paraît pas avoir été clairement distinguée, et que je me propose de décrire dans un autre mémoire. Les Têtards de ces deux Grenouilles sont petits; ceux des Crapauds le sont encore davantage, et celui de la Rainette verte est de moyenne grandeur. Les Têtards des Batraciens à pupille verticale mettent encore plus de temps à se développer que ceux des Batraciens à puprlle horizontale. En voici la preuve. Les Têtards du Pélodyte ponctué pondus dans le courant du mois d'octobre n'arrivent à l’état parfait qu'environ sept ou huit mois après, c’est-à-dire à la fin d'avril et dans le courant de mai; et ceux pondus dans les premiers jours de mars ne quittent leur état de Têtard que vers le milieu et même à la fin de l'été. Ceux du Pélobate cultripède, qui naissent dans les der- niers jours de mars, perdent leur queue seulement à la fin du mois d'août, et même en septembre. Il en est autrement pour les Têtards des Batraciens à pupille horizontale, pour lesquels il ne faut guère que trois mois environ pour qu'ils subissent leur entière métamor- phose. J'ai dit plus haut que le Pélodyte ponctué s’accouple deux fois par an ; particularité qui n'existe chez aucun Batracien à pupille horizontale, et qui, jusqu'à présent, n’avait été remarquée par aucun naturaliste. Eh bien ! un autre Batracien à pupille verticale, ettrès voisin du genre Pélodyte, l’Alytes, partage la même faculté. J'ai plusieurs fois trouvé dans la dernière moitié d'avril et dans les premiers jours de mai le Têtard de ce Batracien sur le point de subir sa métamorphose, et j'ai rencontré fortsouvent aux mêmes époques des Alytes mâles, ayant autour des cuisses des chapelets d'œufs. J'ai également vu, dans le courant du mois d’août, de gros Tétards de ce Batracien sur le point de passer à l’état parfait. Il est donc bien certain que l’A4lytes aussi fait deux pontes par an, et à des époques fixes. Mais je ne pourrais pas préciser , comme je l'ai fait pour le Pélodyte ponctué, l'époque à laquelle a lieu le second accouplement chez l’Alytes, ne l'ayant pas pris surle fait, comme j'ai eu souvent l’occasion de le faire pour le Pélodyte ; mais tout me porte à penser DU PÉLODYTE PONCTUÉ. 295 que ce doit être vers la fin de l'été ou le commencement de l'au- tomne. Il ne faut pas supposer que les Tétards qui naissent en automne restent engourdis pendant les froids de l'hiver ; ils conservent , au contraire, toute leur vivacité, mais ils eroissent un peu plus lente- ment. J'ai vu fréquemment, à travers de la glace de 2 centimètres d'épaisseur , des Têtards de Pélodyte ponctué se jouer au fond de l’eau. D’après ce qu’on vient de lire, on voit clairement que les Batra- ciens anoures dont la pupille est identique ont entre eux des rapports fort intimes, et j'ajouterai que, chez ceux qui ontla pupille verticale ou triangulaire , les apophyses transverses de la vertèbre sacrée ont une grande analogie : c’est du moins ce que j'ai pu obser- ver sur les espèces que produit la France. Je pense done, d'après cela, que l’on devrait, dans la classification de ces animaux, établir deux principales divisions , dont l’une comprendrait les Batraciens anoures qui ont la pupille horizontale, et l’autre ceux dont la pupille est verticale. = Le Pélodyte ponctué est très commun dans les environs de Nantes et dans plusieurs parties du département de la Loire-Infé- rieure ; il est très abondant dans les dunes du bourg de Batz, où se trouve aussi le Pélobate cultripède , Batracien rare et très curieux , que M. Millet, naturaliste aussi consciencieux qu'éclairé, et auteur de la faune de Maine-et-Loire, m'a fait connaître. Je suis heureux d’avoir l’occasion de lui offrir mes remerciments et l'expression de ma reconnaissance. Notre Pélodyte se trouve aussi à Saint-Nazaire. Je l’ai rencontré dans le Morbihan et jusque dans l'ile de Noirmoutier (Vendée). Depuis que j’ai lu cette Note à l’Académie de Nantes, le 6 fé- vrier 1854, j'ai vu de nouveau, le 4 mai, l’accouplement du Pélo- dyle ponctué s'accomplir avec les particularités que j'ai signalées plus haut. MÉMOIRE SUR LE BUCÉPHALE HAIME (BUCEPHALUS HAIMEANUS), HELMINTHE PARASITE DES HUITRES ET DES BUCARDES, Par le D' LACAZE-DUTHIERS. L'histoire des Helminthes est entrée, depuis quelques années , dans une voie nouvelle par la connaissance des formes larvées. A quelques périodes de leur développement les Vers parasites se présentent à notre observation avec des apparences tellement variées et différentes, que, dans bien des cas, les zoologistes pure- ment classificateurs ont fait du même individu, à divers états, plu- sieurs espèces et même des genres distincts. Les formes varient , en effet, avec les stations, et l'alternance des générations en augmente encore le nombre (4). Aussi, maintenant que l'attention est éveillée sur ces transfor- mations, doit-on être plus réservé quand il s’agit d'établir des senres et des espèces nouvelles. C’est donc en faisant toutes nos réserves que nous donnons la description d’une espèce qui ne nous a pas paru décrite ; en lui imposant un nom, nous n'avons cherché qu'à la désigner, en attendant que son histoire fût plus complète. Baer (2) avait trouvé dans les Anodontes un Helminthe à forme (4) D'après Siebold, Anat. comp. (Manuels Roret, t. [, p. 158, noe 6, l'Am- phistomum rhopaloides n'est qu'un Tetrarhynchus, et les genres Cercaria, Histrionella, Bucephalus, doivent disparaître, etc. (2) Baer, Nova Act. nat. cur., t. XUIT, 2° part., 570-589, tab, xxx (1-10), Sporocystis (11-17) animale in vario gradu evolutionis. LACAZE-DUTHIERS, — MÉMOIRE SUR LE BUCÉPHALE HAIME. 295 bizarre , auquel il donna le nom de Bucéphale (A). Jacobson (2) l’observa de nouveau, et en donna une nouvelle figure moins dé- taillée que celle de Baer. Garner (3), Siebold (4) et Dujardin (5) en ont aussi successivement parlé, et ont reproduit ce qui avait été dit avant eux. Toutefois Siebold, en ayant fait une étude plus suivie , a été conduit (6) à penser que le Bucephalus devait être la larve d’un Gasterostomum. Dans un ouvrage moderne, où sont recueillis avec grand soin tous les documents connus sur la science, Diesing (7) a conservé le Bucéphale au nombre des genres. On voit, d’après cela, que les auteurs ne sont pas d'accord, et qu'il est encore per- mis d'employer le nom imposé par Baer, en attendant que la lumière soit plus complète sur les transformations de cet être. En faisant des recherches anatomiques sur quelques points de l'organisation des Acéphales lamellibranches, j'ai eu l’occasion d'observer aux iles Baléares, à Mahon et à Cette, un parasite de l'Huitre (8) et de la Bucarde (9), qui parait se rapprocher beaucoup du Bucéphale de Baer, D'après l’ensemble des caractères, on peut le faire rentrer dans ce genre ; mais des différences qui paraissent spécifiques m'engagent, avec cette circonstance qu'il n’avait pas été signalé dans les Acéphales de mer, à en donner la description comme espèce nouvelle, Les glandes renfermées dans l'abdomen des Huîtres et de la Bucarde étaient complétement envahies par ce parasite, dont là forme singulière, la taille, varient beaucoup. Enlevé des organes, il se déroulait en longs filaments blancs, d’une très grande fragi- lité ; aussi était-il très difficile, je dirai presque impossible , de l'obtenir entier, et de pouvoir examiner ses extrémités. Sa longueur (1) Bucephalus polymorphus. (2) Jacobson, in Kongel Dauske vidensk. selskab. nat. og mathem. afhandl., vol. ILE, p. 304, tab. vur (1-3). (3) Garner, Isis, 1838, p. 830, (4) Siebold, Wiegmann's Arch., 1839, t. IL, p, 165. (5) Dujardin, Hist. nat. des Helminthes, p. 478, Suites à Buffon, édit, Roret. (6) Siebold, Anat. comp., t. I, note 6, p. 430. (7) Diesing (Carolo-Mauritio), Systema Helminthum. Vindebonæ, 1850. (8) Ostrea edulis. (9) Cardiumrusticum, Brug., Encycl.méth.,t. (Vers mollusques), p. 222, n°45. 296 LACAZE-DUTHIERS. — MÉMOIRE était considérable, et j'ai pu en obtenir qui égalaient plusieurs een- tinètres. Ces longs filaments (4), primitivement cylindriques, sont tubuleux ; ils deviennent plus ou moins moniliformes, en chapelels, par les contractions dont ils sont animés. Dans tous, on rencontre des individus jeunes en nombre très considérable et à des états très différents. Ces tubes ont été nommés par Siebold (2) larves cylindriformes ; mais ils avaient déjà reçu le nom de tubes germinatifs ou sporo- cystes de Baer (3), et de nourrices (Anemen) de Steentrup (4). L'animal le plus parfait, le plus développé , observé dans ces Sporocystes, se présente (5), quand il est médiocrement carac- térisé, sous la forme d’un cône aplati; on voit à son sommet la bouche (6) entourée d’une ventouse cupuliforme, et à sa base des replis et des filaments de longueur variables (7). Le corps paraît finement strié perpendiculairement à son axe. En faisant varier convenablement le foyer du microscope, toutes les stries paraissent circulaires au corps de l'animal, et correspondent à des annelures ; de loin en loin des lignes plus accusées indiquent des divisions plus considérables. La masse paraît plus transparente vers le milieu ; on y remarque une cavité générale, que l’on peut considérer comme une eavité digestive simple non ramifiée, terminée en cul-de-sac du côté de la base, et communiquant avec la bouche du côté du sommet. Je n'ai jamais rien observé dans son intérieur. La bouche est simple, et n’est entourée d'aucun crochet. Au- dessous d’elle, un conduit, rétréci comme un œsophage, la fait com- muniquer avec la cavité centrale; en avant elle est entourée par un disque épanoui, quand l'animal est allongé, et par une cupule (8), quand les contractions ne sont pas très fortes. Cette (4) PL V, fig. 5. (2) Anat. comp., t. I, p. 158. (3) Nov. Act. nat. cur., t. XIIE, p. 2,. (4) Steentrup, Ueber den Generation wechsel., etc., 1842. (5) PL V, fig. 1. (6) PI. V, fig. 4 a. (7) PL V, fig. 4 c, d, e. (8) PL. V, fig. 3 a. SUR LE BUCÉPHALE HAINE. 297 dépression représente une véritable ventouse, qui disparait lorsque l'animal est fortement revenu sur lui-même (4). Les parois du corps de l'extérieur à l'intérieur sont formées de trois couches : la plus externe est lisse et ne parait pas striée ; la se- conde ou moyenne est celle qui, sous les contractions, devient annelée ; enfin la plus interne, celle que l’on peut nommer paren- chymateuse, est la plus épaisse. On y distingue cà et là des globules, des granulations en forme de noyaux, et même des vésicules dontil n’a pas été possible de suivre le développement, et sur la nature desquels il faut rester dans le doute. C’est au milieu de cette couche, dans son épaisseur même, que l’on voit creusée la cavité générale. Vers le milieu de la longueur du corps on distingue une émi- nence saillante, au sommet de laquelle s'ouvre un autre orifice en forme de boutonnière, et dirigée transversalement (2). Jen’ai jamais pu constater, bien que toute mon attention füt portée vers ce point, si cette fente avait une communication avec la cavité centrale ; je ne puis donc pas dire si l’on doit la considérer comme un anus. Elle existe dans le Bucephalus polymorphus, et, dans presque tous les Trématodes , Siebold la regarde comme l’orifice des organes spéciaux de la sécrétion. Quoi qu'il en soit, dans l'animal qui nous occupe ici, on voit sous le tubercule qui la porte , et dans l'épaisseur du parenchyme qui lui correspond, quelques vésicules et des granulations peu limitées et peu distinctes. On comprend, du reste, qu'avec les raccourcissements et les allongements qui suivent les mouvements de contraction, des chan- gements doivent se produire dans la forme et la disposition des choses. L’extrémité du corps qui correspond à la base du cône porte un appendice lamellaire et deux longs filaments. Le premier (3) est formé par une lame assez épaisse dont les bords sont courbes, arrondis ; il présente deux lobes latéraux (4) (1) PL V, fig. 2. (2) PL V, fig. 4-3 b. (3) PL V, fig. 4, 2, 3 d,c. (8) PL V, fig. 1,2, 3 d. 296 * LACAZE-DUTHIERS. — MÉMOIRE et un médian (1) : ce dernier est relevé du côté opposé à celui où s’insérent les filaments, eta la forme d’un mamelon. Le tissu de ces appendices est un peu différent de celui du corps; il est plus dense, plus épais, moins contractile, Sa teinte est plus foncée, et de nom - breuses lignes polygonales, très légères et peu distinctes, semble- raient indiquer une structure cellulaire : l'union de ces parties avec le corps se fait par un étranglement marqué. Les lilaments (2) naissent sur la face des appendices lamelli- formes, à l'opposé du lobule médian et du même côté que l’orifice latéral du corps. Ils sont tantôt d’une longueur extrême, et tantôt fort courts; ils paraissent finement striés transversalement. Telest l'animal le plus développé et le plus complet que j'aie pu trouver. Quand on l’observe assez longtemps, on peut suivre ses contractions et ses dilatations qui ressemblent à des mouvements péristaltiques, et qui changent à chaque instant sa forme. On le voit s’allonger et se raccourcir, fermer, déployer sa ventouse, et déve- lopper avec une étonnante rapidité ses filaments terminaux ; ceux-ci ont, en effet, une surprenante contractilité. Après avoir égalé plu- sieurs fois en longueur le diamètre du champ du microscope, on lés voit se raccourcir à ce point qu'ils n’en ont guère plus que la moitié, et même beaucoup moins. Durant ces contractions ils se contournent et se portent dans un sens, puis dans un autre, en s’enlaçant de leurs nœuds réciproques comme le feraient des ser- pents. Ils se mêlent, se brouillent, et séparent leurs replis flexueux avec une rapidité qui étonne toujours l'observateur, Si la forme de cet être est singulière, son développement, qu'on peut suivre pas à pas sur un même Acéphale attéint par le parasite, ne le paraîtra pas moins. Il est rare même que l’un des tubes germinatifs ne soit pas rempli de germes plus ou moins allongés, et à des périodes différentes. Le premier état (3) est représenté par un globe sphérique parfai- tement transparent, etne présentant à son intérieur aucune trace de vésicule, de tache germinative ou de granulations vitellines. Le JNPleV, Gp; 306 (4 (2) PL V, fig. 1,2, 3e. (3) PL V, fig. 6. SUR LE BUCÉPHALE HAIME. 299 volume en est très variable; il m'a semblé en trouver même qui se rapprochaient des granulations mieroscopiques. Quand l'évolu- lion commence (4), on voit la petite vésicule s’allonger et devenir ovale ; bientôt, à l’une de ses extrémités, paraissent deux mamelons qui s’allongent aussi, se courbent et se croisent. Entre eux naît un tubercule en même temps que leur base se renfle : c’est là le com- mencement des appendices lamelliformes. Peu à peu, par les progrès du développement, ces parties pren- nent la forme et les proportions décrites plus haut. Le corps de l'animal , d’abord cylindrique, devient ensuite conique et plat. En voyant ce mode de développement, il est impossible de ne pas reconnaitre qu'il ne représente pas l’évolution ordinaire d'un œuf ; que ces transformations successives sont le résultat d’une augmen- lation de volume , sans qu'il y ait rien qui ressemble à la multipli- cation des parties, telle qu'on la voit se faire dans l'embryon. I n’est donc pas douteux que les jeunes, dont il vient d’être ques- tion, ne soient des embryons nés de femelles qui réunissaient en elles toutes les conditions nécessaires à la reproduction ; mais il est vrai dedire que ces embryons sont à l’étatle plus rudimentaire qui puisse être observé, à l'état de vésicule simple et très petite. On le voit, on est en face d’un exemple de génération alternante , mode de re- production qui, du reste, était admis pour les Helminthes (2). Les animaux bien développés, tels qu'ils ont servi de type pour la description, sont-ils des êtres parfaits, ou bien sont-ils encore à l'état de larves ? L'opinion de Siebold est, onl’a vu, quele Bucephalus polymorphus est une larve. Iei nos observations n’ont pas été assez longtemps prolongées pour pouvoir juger la question. Toutelois l'absence complète des organes génitaux, dans des êtres nés de mères fécondes , et qui auront plus tard des sexes, donnerait forte- ment à penser que le développement n’est pas complet, et par conséquent qu'on à affaire à des larves. Alors à quoi se réduiraient les observations ? Elles ne porteraient que sur les individus se re- produisant sans le concours des sexes , et sur les larves nées de (1) PL V, Gg. 6,7, 8,9, 40. {2} Voyez Siebold, Loc. cit., p. 156, t. TL; et Steentrup, Uber den Generation wechsel., 1842, etc., etc. 900 LACAZE-DUTMIERS., — MÉMOIRE ceux-ci. On voit que pour avoir le cerele complet des métamor- phoses il y a encore bien des recherches à poursuivre. Quelle idée fant-il avoir des Sporocystes ? Il semble naturel de les regarder comme les mères des nombreuses larves qu’elles ren- ferment ; leur corps tout entier serait transformé en véritable ma- trice, en une chambre d’incubation. Mais ces mères, nées fé- condes , n'arrivent pas à la forme qui termine ou commence la série des alternances ; elles sont elles-mêmes des larves. D'après les observations de Siebold, elles ne seraient qu'une partie d’un embryon, et Steentrup a observé dans les Moules des larves ressemblant beaucoup à des Paramacies , qui, après s'être dé- pouillées de leur épithélium ciliaire, se transformaient en tube germinatif. Ce serait done une autre forme à ajouter à celles déjà si nombreuses d’un même Helminthe. Les observations sur le parasite dont il s’agit ici n’ont pas été assez multipliées pour pouvoir décider absolument la question. Mais les contractions du Sporocyste étaient trop évidentes pour ne pas faire naître dans l'esprit autre chose que l’idée d’une poche, d’une partie détachée de la larve, ne servant que de réceptacle aux jeunes qui se développent dans son inté- rieur. Les contractions étaient simarquées, qu'il est arrivé de voir, des larves assez longues prises par le milieu du corps, et être en partie dans un renflement, en partie dans un autre (1). D’après Baer et Siebold, le Sporocyste du Bucephalus polhymorphus serait rigide dans toute son étendue. C’est une différence avec celui que nous décrivons ici. Un autre fait digne de remarque est celui du bourgeonnement. J'ai rencontré , en effet , des cœcums plus où moins longs renfermant deslarves plus ou moins développées. Lorsque le bourgeon était peu marqué, il ne renfermait qu'une matière un peu brunâtre et granu- leuse (2). Du reste, dans toute son étendue, ce Sporocysle avait une épaisseur autre que celle d'une membrane ; les larves occupaient une cavité centrale creusée au milieu d’une sorte de parenchyme. Quelle est la place zoologique de cet être singulier ? Il ne semble (1) PL V, fig. 5x. (2) PL V, fig. 5 z. SUR LE BUCÉPHALE HAIME. 301 pas douteux que par l’ensemble de ses caractères il ne doive être rapproché de l'animal décrit par Baër. Siebold , admettant que celui-ci n’est que la larve d’un Gasterostomum, le place dans les Trématodes. Diesing, au contraire, conservant le genre, le place dans les Cercaires (A). Sile genre paraît le même, l'espèce est différente. Sans reprendre tous les caractères qui légitiment cette manière de voir, il est nécessaire de montrer les différences qui paraissent caractériser l'espèce. L'habitation est déjà un fait important , car on ne voit guère les animaux d’eau douce vivre dans l’eau de mer, surtout quand il s’agit des animaux inférieurs. La forme des filaments de la base est différente : beaucoup plus longs que ne les a représentés Baer , jamais je ne les ai rencontrés moniliformes, et renfermant des séries de petites masses sphériques noirâtres. Dans le Polymorphus, le point d'insertion de ces filets est développé en une véritable boule, tandis que nous n'avons signalé cette forme (2) que secondairement dansune période du développe- ment ; à la place de ces deux masses, nous avons vu des appendices en forme de lamelles. D’après les dessins du Polymorphus la bouche serait subterminale, comme l'indique aussi Diesing ; tandis qu'ici elle est terminale et placée au fond d’une cupule d’une ventouse. Pour ces raisons, on peut en faire une espèce distincte ; je lui donnerai le nom de mon excellent ami J. Haime , en souvenir de notre voyage dans les Baléares. Il est un fait qu'il est intéressant de signaler en terminant. Les Huitres de Mahon, et les Bucardes de l’étang de Thau, près de Cette, atteintes par le Bucephalus Haïmeanus, offraient ceci de particulier qu'elles étaient infécondes ; l’Helminthe occupait principalement les conduits des glandes génitales et même les espaces interlobu- laires. Il avait arrêté le développement des germes. On comprend que sa présence est un empêchement à la multiplication et à la re- production de ces Mollusques. Quand on a vu une première fois les (1) Diesing, Systema helminthum, vol. 1, p. 285-294. Ordo III, sub-ordo I, Cercariæ ; tribus 1, Dicranocoela ; subtribus II, Cotyleu ; gen. 3," Bucephalus. (2) PL V, fg. 4. 302 LACAZE-DUTHIERS. — MÉMOIRE SUR LE BUCÉPHALE HAIME. Huîtres atteintes et devenues malades, on les reconnaît ensuite facilement ; la masse abdominale, qui habituellement est d’un blane jaunâtre opaque , devient comme transparente : elle a l'aspect des tissus œdématiés et infiltrés de liquide. On peut même quelquefois, mais c’est rare, distinguer au milieu de cette transparence et de ce gonflement œdémateux les trainées blanches qui correspondent aux Sporocystes. Ainsi le Bucephalus Haïmeanus est un ennemi de plus à ajouter à la liste de ceux qui attaquent l’Huître. Les auteurs ne l'avaient pas encore indiqué. 1 EXPLICATION DES FIGURES. PLANCHE D. Tous les dessins, pris à la chambre claire à une distance de 47,5 centimètres, sont vus à un grossissement de 410 à 120 diamètres. Fig. 1. Bucephalus Haimeanus vu de face, montrant les stries de son corps, l'orifice latéral b, sa ventouse a, ses appendices lamellaires d, avec le lobe médian c et les filaments etrès allongés. Fig. 2. Le même, contracté, devenu tout à fait conique. La différence de la lon- gueur des filaments ec est bien remarquable, quand on compare cette figure à la précédente. Fig. 3. Le même, allongé, la ventouse a est épanouie. Fig. 4. Jeune Bucéphale dans un état de développement intermédiaire à l'animal (fig. 4), et celui qui est dans le sporocyste (fig. 5 æ). Fig, 5, Sporocyste très long, présentant à l'intérieur (k,æ, y) des jeunes à des états divers de développement ; deux bourgeonnements (y, x) latérauxremplis, l'un d'embryons vésiculeux , l’autre d'une substance granuleuse, En æ, une larve a été saisie au milieu du corps par une contraction ; en k, une dilatation énorme. Fig. 6, 7, 8,9, 40. Divers états et transformations de la vésicule-embryon. MONOGRAPHIE DES BALISTIDES, Par M. H. HOLLARD. Genre BazistEs Cuv. DEUXIÈME SECTION (1). Les Balistes qui portent à l’épaule un système de scutelles dis- tinctes des squames ordinaires des régions voisines forment un ensemble de petits types en série les uns à l'égard des autres. Les premiers se font remarquer par des formes hautes , par une région céphalique relativement courte, par un profil rapide et arqué, et par le développement des nageoires médianes. La dorsale épineuse a ses trois rayons plus ou moins longs : le premier est aigu, le der- nier dépasse toujours le sillon dorsal ; la dorsale molle et l’anale ont plus ou moins de hauteur, surtout en avant, où quelques rayons se prolongent en pointe ou même en filaments isolés ; la caudale est fourchue, et quelquefois aussi filamenteuse. Dans les derniers types de cette série, nous voyons, au contraire, des formes plus longues que hautes , une région céphalique très projetée et à profil médio- crement incliné, des nageoires médianes peu développées et arron- dies. A ces premières différences , qui sont les plus significatives par leur rapport intime avec la locomotion, se rattachent quelques modifications de moindre valeur, et qui toutefois indiquent aussi une dégradation , par cela seul qu’elles font disparaître peu à peu les caractères qu'elles affectent. Ainsi, le sillon préoculaire et la ligne latérale , prononcés dans les premières espèces de cette sec- tion, s’effacent dans les dernières. Quant à l’écaillure , nous la voyons à peu près uniformément tuberculeuse et très faiblement spinoïde au commencement de la série, sans proéminence très (4) Voy. Ann. des sc. nat., 3° série, t. XX, p.74, et 4° série, t. I, p. 40.— Pour le genre Balistes, p, 47 ; et pour la première section, p. 55. 304 H. HOLLARD. marquée d'un ou de plusieurs tubercules, soit sur l’ensemble des squames , soit sur celles d’une région particulière ; tandis que bientôt le tubercule médian antérieur des squames caudales se développe et fournit une pointe épineuse dirigée en avant : ce fait se produit d'abord avec de petites proportions , mais sur un grand nombre de squames, puis d’une manière plus prononcée et en même temps sur un espace plus circonscrit ; en sorte que la lon- gueur des épines est en raison inverse de leur nombre. Ces der- nières différences, rapprochées de celles que nous offrent les formes du corps, nous montrent dans les espèces À formes hautes et à écaillure faiblement armée, des Poissons qui chassent en pleine eau , et c’est parmi ces espèces, en effet, que nous rencontrons les plus grands Balistes , ceux auxquels on attribue jusqu'à À mètre de longueur; tandis que les plus petits sont dans les types qui portent des épines caudales prononcées et à pointe antérieure , et ceux-ci vivent au milieu des rochers et des récifs madréporiques, occupés à brouter les jeunes Polypes. La série des Balistes à plaques scapulaires est plus nombreuse que la précédente. Les vingt espèces que j'ai étudiées dans la col- lection du Muséum se laissent assez facilement grouper en sept petits types : les uns très homogènes dans leur composition , les autres composés d'espèces assez différentes pour laisser soupçonner des lacunes dans nos catalogues. Comme on le verra, de toutes les espèces de cette section il en est à peine une qui n'ait été déjà décrite, nommée et figurée ; la plupart cependant réclamaient de nouvelles études , une nouvelle descrip- tion , une coordination rationnelle et des figures exactes, ce qui me fait regretter de ne pouvoir publier en ce moment les planches très fidèles que j'ai fait exécuter, et de devoir me borner à indiquer par un simple trait les quatre modifications les plus prononcées de la forme dans la série qui va maintenant nous occuper. A. Le premier de nos sept types est caractérisé par des formes très hautes, comprimées, la rapidité et la ligne arquée du profil fronto-nasal. La dorsale molle et l’anale, très hautes en avant, s’abaissent ensuite rapidement ; la caudale a ses rayons extrêmes très MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 305 longs ; la ligne latérale est très apparente ; l’écaillure est uniformé- ment couverte de très petites saillies un peu rudes, surtout chez les jeunes sujets ; les plaques scapulaires sont entourées d’un cadre à éléments disjoints. Jei se rangent les quatre espèces suivantes de la collection. A. BALISTES VETULA, Lin. Caractères. — Hauteur du corps surpassant le tiers de sa lon- gueur. — Dorsale molle et anale très hautes en avant, le cinquième rayon de la première prolongé en filament ; caudale en forme de croissant à cornes longues et effilées ; écaillure finement tuberculée sur toutes les régions. — Plusieurs traits bleus descendant du front sur les côtés de la tête, tandis que d’autres partent de la région de Ja bouche et se portent en arrière. D. M. 30. A. 28. P. 14. Le profil de ce Baliste est droit et incliné à 40 et 45 degrés. Le corps à plus d’élévation chez les jeunes sujets que chez les adultes. La fossette préoculaire a peu de profondeur. La fente branchiale ne dépasse pas inférieurement le bord supérieur de la pectorale. Le premier rayon de la dorsale épineuse est grand, robuste, couvert de fortes aspérités en avant; le (troisième est assez pro- longé au-dessus du sillon dorsal, et la membrane de cette nageoïre ne s'étend pas tout à fait jusqu'à la suivante. La seconde dorsale grandit rapidement jusqu'à son cinquième avon, lequel forme, en se prolongeant et se réduisant à une seule de ses divisions terminales, un filament très flexible et très long. Cette nageoire décroit ensuite d’abord rapidement , puis avec plus de lenteur ; d’où résulte pour la dorsale molle une forme anguleuse en avant , avec une ligne de décroissance concave. Dans les jeunes sujets on ne voit pas de rayon filamenteux. Quant à l’anale, elle offre moins de hauteur et une forme moins anguleuse que la dor- sale correspondante ; la caudale, creusée en croissant, a ses rayons extrêmes prolongés en cornes effilées. #* série. Zooz. T. I. (Cahier n° 5.) 4 20 306 H, HOLLARD. La saillie pelvienne du Baliste vieille est médiocre, suspendue, à un pli cutané préanal , peu extensible et garni d’aiguillons disposés par paires et saillants à la marge de ce petit fanon. L’écaillure se compose de squames assez grandes, couvertes de tubercules petits, nombreux , ordonnés en séries dont la première est un peu prédominante en longueur plutôt qu'en saillie; un peu rugueux chez les jeunes sujets, ces tubercules s’'émoussent avec l’âge. Les rangées des joues sont toutes obliques. Celles de l’abdomen, des flancs et de la queue n’offrent pas de particularités dignes d’être signalées. Quant aux plaques scapulaires, l’antérieure est très prédo- minante, semblable à une valve de coquille du genre Lima; la postérieure, beaucoup plus petite, est complétée par une grande intercalaire inférieure. Le cadre a ses éléments disjoints chez les jeunes sujets, plus rapprochés et disposés en deux séries chez les adultes, avec une intercalaire supérieure qui occupe le sinus supé- rieur formé par les grandes scutelles. Le système de coloration du Baliste vieille suffirait à sa caracté- ristique. Sur un fond brunâtre se montre un dessin de lignes bleues presque concentré sur la région céphalique. Plusieurs traits de cette nuance, à cheval sur le front, descendent en convergeant vers l'œil, s'arrêtent au bord supérieur de l'orbite, et se reforment sur le bord opposé pour gagner en s’écartant de nouveau la fente branchiale. Un trait plus voisin de la bouche et qui contourne aussi la ligne de profil, s'approche d’abord de la région sous-orbitaire pour redescendre et s'arrêter vers l'extrémité inférieure de la même fente. Un autre encore, placé sur le museau comme une moustache , et plus large que les précédents, descend jusqu’à l’origine de la pectorale ; un dernier enfin part de la commissure de la bouche , et va se termi- nér un peu en avant et au-dessous de cette nageoire. La dorsale molle et l’anale sont également traversées par des traits de la même nuance que les précédents, et sur la caudale se dessine un erois- sant bleu. Le Balistes vetula est une des espèces du genre les plus répan- dues dans les mers tropicales et les plus abondantes dans les collec- tions, On le reçoit à la fois de l'Atlantique, de lamer des Indes, et du MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 307 grand Océan. Il atteint d'assez grandes dimensions. L'un de nos plus grands exemplaires m'a fourni les mesures suivantes : Longueur totale. . . 0",520 Hauteur pectorale , . 0®,200 Hauteur pelvienne, . 0,220 La caudale offre à sa partie moyenne. 0,050 La région céphalique compte pour. . 0,140 Synonymie. — Le nom de Balistes vetula , donné par Linné d’après Osbeck (Zter., 294), a été généralement conservé dès lors dans tous les ouvrages ; Lacépède en a fait son Baliste vieille. Mais à des époques antérieures nous le trouvons dans Margrave, Bras. 164, sous le nom de Guaperva paire porco ; c'est le Guaperva maxime caudata de Willoughby (Zchthyol. app., p. 2, tab. #, fig. 23), le Cochino de Parra, le T'urdus oculo radiato de Catesby (Corol. 2, p. 22, t. 22). 2. BaLiSTes FORCIPATUS Lin. Caractères. — Hauteur du corps surpassant un peu le tiers de sa longueur. — Plusieurs rayons prolongés en filets au commence- ment de la dorsale molle ; caudale en croissant à rayons extrêmes très longs ; écaillure finement tuberculée sur toutes les régions. — Couleur fauve, semée de nombreuses petites taches brunes sur le corps et sur les nageoires dorsale molle et anale. DM. 28. À. 25. P. 13. Le corps estun peu moins haut dans cette espèce que dans la pré- cédente. La ligne de profil est droite et inclinée à 45 degrés. L'œil en 6st à quelque distance ; au-devant de lui se voit un sillon court, mais prononcé. La fente branchiale, remarquablement longue , descend presqu'au niveau du bord inférieurde la pectorale. Le premier rayon de la dorsale épineuse est robuste, très long , droit, oblus, très rugueux ; les autres sont proportionnellement courts ; la membrane se prolonge au delà du troisième jusqu’à une très pelite distance de la dorsale molle. 308 H. HOLLARD. Cette dorsale molle est non seulement haute en avant, mais ses troisième, quatrième, cinquième, sixième et seplième rayons sont développés en longs filets; les suivants dépassent un peu la mem- brane. Leur décroissance se ralentit bientôt, en sorte que cette nageoire conserve une certaine hauteur jusqu’à son extrémité. L'anale manque de rayons filamenteux, mais reproduit assez bien la forme générale de la dorsale molle. La caudale a sa ligne terminale convexe, et ses filets extrêmes prolongés en cornes médiocres. La saillie pelvienne est longue , suivie d’un pli abdominal ou préanal rugueux, épineux à sa marge, médiocrement extensible, qui gagne l'anus dans une direction rapide. L'écaillure se compose généralement de squames médiocres , mais couvertes de tubereules mousses serrés, dont les séries anté- rieures sont prédominantes, et plus régulièrement ordonnées que les postérieures. Le système des joues offre des séries obliques de squames oblongues et posées verticalement , disposition qui, assez irrégu- lière supérieurement, se régularise en approchant de la gorge. Le système ventral , partout bien distinct de celui des systèmes voisins, n'offre pas de particularités remarquables. Le système latéral présente en arrière, c’est-à-dire sur la queue et sur le diamètre antéro-postérieur de ses squames en losange, un ou plusieurs tubereules principaux qui, quoique plus gros que les autres, ne deviennent jamais très apparents , et restent mousses. Au-dessus d’une saillie scapulaire que le prolongement inférieur dela fente branchiale fait paraître très élevée, on voit les trois seu- telles de cette région entourées d’un cadre de très petites pièces , avec une intercalaire supérieure, qui demeure à distance de l’angle rentrant formé par la rencontre des deux grandes plaques. Celles- ei sont oblongues ; la postérieure beaucoup plus petite que l’anté- rieure, et complétée en bas par une intercalaire inférieure pro- portionnellement grande. La couleur générale est fauve ; son caractère le plus prononcé est le semis de petites {aches brunes qui couvrent le corps et les na- eeoires verticales. MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 309 Le Musée ne possède qu'un seul individu de cette grande espèce, Il provient du Sénégal, et présente les dimensions suivantes : Longueur totale, . . . . . 0®,330 Hauteur pectorale. . . . . , 0,144 Hauteur pelvienne . . . . . 0®,165 Longueur de la caudale, . . . 0,050 Longueur de la région céphalique, 0,142 Synonymie. — Le Balistes forcipatus d’Artedi et Linné est men- tionné et figuré par Willoughby sous le nom de Guaperva lata (App, p. 21, tab. 1, 22). Les auteurs, qui aftribuaient au capris- eus une caudale carrée ou ronde, ont rattaché au forcipatus les exemplaires du premier qui offraient une caudale fourchue, malgré les différences des deux espèces sous le rapport des rayons prolon- gés de la dorsale molle, de la longueur de la fente branchiale, de l'écaillure en général, du cadre des plaques scapulaires et du dessin. Il était plus facile et plus excusable de confondre le B. forcipatus et le vetula, quand les systèmes de coloration de ces espèces étaient effacés. Ces méprises, quoique accidentelles, ont eu pour effet de nuire à l'exactitude des caractéristiques, surtout en ce qui concerne le forcipatus et le capriscus. Si l’on n’eüt pas pris, pour appartenant à l'espèce qui nous occupe, les exemplaires à queue fourchue, c’est- à-dire adultes du capriscus, on n'aurait pas eu un seul instant l'idée de rapprocher ce dernier Baliste du maculatus , comme l’a fait M. Cuvier. 3. BALISTES capriscus Lin. Caractères. — Hauteur pectorale un peu moindre que la demi- longueur. Dorsale molle, très haute en avant, à décroissance, d'abord rapide, puis plus lente. Couleur uniforme sur le corps, mouchetée de blanc sur les nageoires verticales. DM. 28. A. 26. P. 14. La hauteur du corps est ici très notablement moindre que dans l'espèce précédente ; elle est plus près du tiers que de la moitié de 910 H, HOLLARD, la longueur, et le profil est incliné à près de 45 degrés de l'œil à a bouche. La fente branchiale dépasse à peine le niveau du bord supérieur de la pectorale. Le premier rayon de la dorsale épineuse est ro- buste , assez droit, aigu ; les deux autres sont proportionnellement grands ; la membrane s’arrête à une faible distance de la seconde dorsale. Le sillon préoculaire est prononcé et atteint le tiers de la longueur faciale. La dorsale molle et l’anale croissent rapidement, atteignent une hauteur égale aux trois quarts de leur longueur, puis décroissent sur une pente d’abord très inclinée, et bientôt plus lente. La caudale, prolongée par de très longues cornes dans les sujets adultes , conserve une ligne un peu saillante à sa partie moyenne. Dans les jeunes sujets, les rayons extrêmes de cette nageoire ne sont pas prolongés ; c’est ce qui a donné lieu de croire que le Balistes capriscus avait la caudale carrée ou arrondie , et c’est ainsi, en effet, que nousle représentent les anciennes figures, notamment celle de Salviani, copiée par Willoughby et par des auteurs plus modernes, La pointe pelvienne est bien saillante, mais suivie d’un très petit pli abdominal rugueux, et terminée par un double rang d’aiguillons. L'écaillure, partout composée de squames médiocres , est très couverte de petites saillies tubereuleuses plus on moins acuminées. Aux joues, les rangées sont obliques et composées de squames oblongues, qui, en bas et en arrière, passent presque insensible- ment au système abdominal. Celui-ci, à son tour, se confond presque en arrière avec le système latéral. Ce dernier ne présente rien de remarquable, si ce n’est que la rangée antérieure des tubercules est un peu prédominante ; mais ici ce sont les tubercules extrêmes, et non le tubercule médian de la série, qui offrent le plus de déve- loppement ; souvent aussi les postérieurs l’emportent sur les anté- rieurs de cette rangée. Le système scapulaire se fait remarquer , comme dans l'espèce précédente , par le développement incomplet et l'irrégularité des squames du cadre, et par la position de l’intercalaire supérieure , Ti MONOGRAPHIE DES BALISTIDES, S1l qui reste à distance des seutelles et en dehors de l'intervalle qu’elle doit occuper. Les scutelles elles-mêmes ont un développement médiocre ; les deux principales sont à peu près de la même dimen- sion ; l’antérieure assez régulièrement ovale, et l’intercalaire infé- rieure forme le complément de l’ovale de la postérieure. Il est étrange qu'on ait si longtemps passé sous silence la présence des seutelles scapulaires de ce Baliste, et que Cuvier lui-même le range au nombre de ceux qui manquent de cette particularité. Le Balistes capriscus est le seul de la famille entière qui se trouve dans la Méditerranée ; on le pêche dans l’Atlantique jusqu’à New-York, à Boston , et même, quoique très rarement, près des côtes d'Angleterre ; c’est l'espèce la plus généralement répandue , ear elle est de toutes les mers chaudes et tempérées. Le Muséum en possède un grand nombre d'exemplaires de régions très diverses. L'un des plus grands, rapporté d'Alger par M. Deshayes, présente les dimensions suivantes : Longueur totale. . . .. . . 0",437 Hauteur pectorale . . . . . 0,475 Hauteur pelvienne . . . . . 0",187 Longueur de la caudale, . . . 0",053 Longueur de la région céphalique. 0,144 Synonymie. — Connu de tous temps dans la Méditerranée , puisque Aristote en parle, etque lenom de Baliste procède du nom vulgaire de Pesce balestra, donné à cette espèce par les pêcheurs italiens , le Balistes capriseus a recu son nom actuel de Linné. Avant l’auteur du Systema naturæ et de la nomenclature binaire, ce poisson est désigné par des phrases caractéristiques insuffisantes ajoutées soit au nom générique de Balistes, soit même à celui de capriseus (Artedi). La figure qu'en a donnée Salviani , d’après un individu à caudale carrée, a été reproduite par Willoughby et par d’autres, et a pu concourir à le faire confondre avec d’autres espèces très différentes, et tout à fait étrangères à la Méditerranée où Salviani l'avait observé. M. de Kay décrit et figure, sous le nom de Z. fuliginosus, un poisson à plaques scapulaires, qui n’est autre que le capriscus (Zool. de New-York, p.339, pl. 57). 312 M. HMOLLARD. 4. Bauisres Rericucarus Nob.— BAL. cæRuLESCENS ? Ruppel Caractères. — Hauteur du corps au moins égale à la moitié de sa longueur. — Dorsale molle très haute en avant et rapidement abaissée. -- Écaillure des joues disposée en séries horizontales , dont cinq séparées par des espaces nus, et se terminant à quelque distance des lèvres. — Système de coloration réticulé. DM. 26. A. 23. P. 14. L'élévation du corps au niveau des pectorales égale et dépasse même quelque peu la longueur ; la ligne de profil est arquée, et s'incline à 45 et 50 degrés. Le peu de courbure transversale du front ramène l'œil presque au niveau de la ligne médiane ; le sillon préoculaire est court et superficiel. Le premier rayon de la dorsale épineuse est robuste, médioere- ment long, pointu, très hérissé en avant; les deux autres sont proportionnellement grands ; la membrane interradiale se prolonge presque jusqu’à la deuxième dorsale. La dorsale molle et l’anale croissent rapidement, puis s’abaissent sur une pente uniforme et très inclinée. La partie moyenne de la caudale est légèrement saillante; ses rayons extrêmes sont médiocrement prolongés en cornes. La pointe pelvienne, très forte, saillante, épineuse à son extré- mité, est suivie d’un pli tégumentaire extensible, garni d’aiguilles marginales, et qui s'élève assez rapidement vers l'anus. L'écaillure se compose de squames médiocres , couvertes de tubercules peu nombreux, plus ou moins mousses, jamais épineux. Le pourtour de la bouche est nu, et les joues sont incompléte- ment revêtues de quelques séries horizontales de squames qui dé- croissent d’arrière en avant, et ne sont plus à l’extrémité des séries que de petits îlots tuberculeux entourés d’une peau molle ; mais c’est à tort que Lacépède les compare à des verrues, ear ce sont de véri- tables squames. Le nombre des séries des joues, j'entends de celles que séparent des intervalles cutanés, est de cinq, dont trois se trou- vent assez distantes l’une de l’autre et de leurs voisines. MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 315 La région scapulaire porte une scutelle antérieure ovale et une postérieure de même forme, mais tronquée inférieurement et com- plétée par une grande intercalaire ; le cadre est composé de très pelites squames disjointes, dont une intercalaire supérieure qui reste à distance des grandes scutelles, et vis-à-vis de la place qu'elle devrait occuper entre celles-ci. Les régions ventrale et latérale , très distinctes en avant, se con- fondent un peu en arrière ; leurs squames et celles des côtés de la queue ne présentent pas de tubercule principal et sont peu cou- vertes. On aperçoit presque des indices d’une ligne latérale derrière l'œil et pendant un très court trajet. La couleur de nos exemplaires, l’un desséché, l’autre dans la liqueur, est un fauve plus ou moins intense sur lequel on distingue des bandes plus foncées, rameuses et obliques sur la face, très anastomosées, et formant une sorte de réseau sur les parties laté- rales du tronc. Sur les flancs, les mailles du réseau sont si serrées que les espaces qu'elles circonserivent font l'effet de taches claires sur un fond brun. Les nageoires portent aussi des taches claires circonscrites par les mailles d’un réseau brun. La dorsale molle et l’anale sont bordées d’une zone blanchätre. Le Muséum possède, comme je l’ai déjà indiqué, deux exem- plaires du Baliste réticulé. L'un d'eux a été rapporté de l’océan Pacifique, l’autre vient de l'ile Bourbon. Ils sont à peu près de même grandeur. Voici les dimensions de l’exemplaire conservé dans la liqueur : Longueur totale. . . . . 0,190 Hauteur pectorale . . . . 0®,100 Hauteur pelvienne. . . . 0",105 La caudale mesure. . . . 0",030 La région céphalique atteint. 0,060 Synonymie. — Je ne connais que trois espèces ou trois descrip- lions auxquelles puisse se rapporter notre Balistes reticulatus ; ce sont : le Balistes fuscus de Schneider , observé et caractérisé pour la première fois par Commerson, et dont Lacépède a fait son o14 M, MOLLARD. Baliste à grande tache ; le Balistes rivulatus de M. Ruppel, et le Balistes cærulescens du même voyageur. Mais de ces trois espèces, Ja dernière seule me semble offrir avee la nôtre une ressemblance assez complète pour laisser soupçonner l'identité : elle reproduit le même système de coloration, et n’a aussi que cinq rangs disjoints de squames aux joues : le fond de la couleur semble seul différer, et cela peut tenir à l’action de l'alcool. Nous ne proposons done qu'à titre provisoire le nom de Balistes reliculatus, bien qu'il ait l’avan- tage de rappeler un caractère plus constant ou plus persistant que l'épithète de cœrulescens qui a la priorité. 5. BALISTES RIVULATUS Ruppel. Caractères. — Proportions de l'espèce précédente. — Même forme des nageoires médianes. — Écaillure des joues offrant six rangées horizontales et disjointes de squames.—Un dessin de traits Jongitudinaux et rameux courant sur les côtés du tronc. DM. 26. À. 24. P. 15. Ce poisson, représenté au Muséum par deux exemplaires secs, rapportés de la mer Rouge par M. Botta, ne diffère du B.reticulatus que par ses six rangées disjointes de squames aux joues, et par son système de coloration arborisé plutôt que rétieulé, Ces caractères et la communauté de patrie me font penser que c’est ici l’espèce dé- crite et figurée par M, Ruppel sous le nom que je conserve en tête de cet article (1). Je serais assez tenté de croire que le Ba- listes rivulatus de ce voyageur n’est lui-même que le Balistes fuscus de Schneider (2), ou Baliste grande tache de Lacépède (3), que Commerson a fait connaitre et caractérisé en ces termes : Balistes fuseus, macula pectorali maxima, postremisque pinnarum marqi- nibus albis , cauda inermi, longe bifurca, genis sextuplici seria verrucarum rotalis (li). 1) Atlas zu der Reise im Nœrdlichen Africa, Fische, p. 32, et pl. 7, fig. 2. 2) Syst. ichth. de Bloch, éd. Schn., p. #7, esp. 46. Hist. des Poissons, 1, p. 378. 3) 4) Schn., loc. oit. ( ( ( MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 315 B. Dans le deuxième type de cette série , les formes ont déjà moins d’élévation ; la tête conserve la brièveté relative qu'elle a dans le type précédent ; le profil est arrondi comme dans celui-ci, mais abaissé ; la région caudale est longue et un peu effilée ; la dor- sale molle et l’anale perdent beaucoup de leur hauteur en avant, el la caudale a des cornes moins prolongées, quoique encore saillantes et pointues. L’écaillure est remarquable ici par la grandeur des squames du trone, et par la disposition de leurs tubercules à s’allon- ger d'avant en arrière, pour former des lignes saillantes et parfois caréniformes. Les pièces qui composent le cadre des plaques sca- pulaires participent au sureroit de proportion de celles de la région voisine, Enfin, on peut signaler chez deux espèces de ce type des anomalies dans les formes du système dentaire. Je rencontre ici quatre espèces qui se succèdent dans un ordre assez évident de décroissance de certains caractères et de dévelop- pement des quelques autres. 6. BALISTES NIGER Lacép. Caractères. — Mâchoire inférieure un peu plus avancée que la supérieure; les deux dents qui suivent les médianes d'en haut prolongées en forme de canines et sortant de la bouche ; dorsale molle anguleuse en avant; squames latérales grandes portant un tubereule médian antérieur subépineux ; coloration noirâtre uni- forme, les canines jaune-rouge. DM. 32 ou 33. A. 29. P. 14. Le corps de ce Baliste est médiocrement élevé en avant, très étroit à la queue; son profil est arqué, mais incliné seulement à 35 degrés, et sa physionomie se singularise par la direction un peu oblique que donne à l'ouverture de la bouche une légère projection de la mâchoire inférieure; les deux dents latérales supérieures prolongées complètent le caractère particulier de cette phy- sionomie. Le sillon préoculaire offre une profondeur médiocre et atteint le tiers de la longueur de la face, qui du reste est proportionnellement 316 M. HOLLAKRD. courte. La fente brachiale s'arrête au niveau supérieur de la pec- torale. Le premier rayon de la dorsale épmeuse est de longueur mé- diocre , tronqué carrément, comprimé. Les autres lui sont bien proportionnés. La membrane s’étend jusqu’à la deuxième dorsale. Celle-ci, un peu anguleuse en avant, haute de plus de sa demi- longueur, descend d’une pente à peu près égale. L'anale offre les mêmes caractères. La caudale est fourchue avec sa partie moyenne terminée en ligne droite. La pointe pelvienne fait peu de saillie, elle est suivie d’un pli abdominal peu extensible et d’ailleurs dans les conditions ordi- naires. L’écaillure se compose de squames médiocres sur toute la région céphalique, très grandes sur le tronc. Les tubercules qui les couvrent sont petits et serrés, par conséquent nombreux. Aux joues deux rangées sous-oculaires sont horizontales et toutes les autres obliques : les squames, en forme de losange , ont leur grand diamètre dirigé verticalement. Sous le menton on dis- tingue une petite place angulaire dont les squames ont une direc- tion plus couchée que celles du voisinage. Le système ventral est très bien limité et se compose de séries subhorizontales de squames plus où moins oblongues d’arrière en avant. Le système latéral offre de grandes squames losangiques, cou- vertes de tubercules inégaux mal ordonnés, si ce n’est que ceux du rang antérieur sont allongés ; ce rang présente un tubereule prédo- minant suivi quelquefois d’un ou deux autres ; de là , sur les côtés de la région caudale, des squames un peu relevées sur leur petit diamètre. Le système scapulaire se compose de scutelles médiocres en- tourées d’un cadre très divisé et à petits éléments, mais qui pré- sente une intercalaire supérieure en contact comme l’ensemble du cadre avec les plaques scutellaires. La couleur du Baliste noir est uniformément obscure, d’une nuance qui varie entre celle de la lie de vin foncée et un noir plus ou moins franc. Le bord des nageoires verticales offre du blanc. MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 317 La collection du Muséum possède un grand nombre d’exem- plaires de cette espèce. L'origine de plusieurs d’entre eux n’y est pas indiquée ; les autres proviennent surtout de la mer des Indes et de l'océan Pacifique. L'un des plus grands nous offre les dimensions suivantes : Longueur totale. . . . 0,340 Hauteur pectorale. . . . 0,125 Hauteur pelvienne. . . . 0",135 La caudale mesure . . . 0,025 La région céphalique. . . 0,090 Synonymie. — Le Baliste noir de Lacépède paraît avoir été con- fondu pendant très longtemps avec d’autres espèces mal déter- minées et surtout avec le Balistes ringens de Linné-Gm. (1469). C’est à ce dernier que Schneider, d’après Osbeck (Zter., 295), Re- nard (1, p. 26), a donné le nom de Balistes niger, que nous croyons devoir réserver, à l'exemple de Lacépède , pour l'espèce à dents latérales supérieures prolongées , qui fait le sujet de cet ar- ticle. M. Ruppel a proposé de faire de cette espèce , en raison de son anomalie dentaire , le type d’un genre distinct sous la dénomi- nation de Xexonox. Mais ce démembrement n’a pas été accepté et ne pouvait l'être qu'autant qu'on aurait consenti à oublier l’en- semble des caractères et des affinités du Baliste noir, pour ne tenir compte que d’une particularité isolée. 7. BALISTES RINGENS, BI. Caractères. — Profil facial rapide et très arqué ; dents taillées carrément; dorsale molle à décroissance uniformément graduée ; six à huit lignes saillantes sur les côtés de la région caudale, for- mées par les tubercules du petit axe des squames. Couleur noire avec un liséré blanc à la naissance de la dorsale molle. DM. 32. A. 30. P. 17. Le corps de ce Baliste est assez haut et comprimé; sa ligne de profil, inclinée à 50 degrés, est arquée. La ligne médiane du front 318 H. HOLLARD. s'élève à une assez grande distance de l’œil. Les dents et surtout les mitoyennes ont leur couronne droite où un peu arrondie comme nos incisives. Le sillon préoculaire est égal au tiers du museau et assez profond. Le premier rayon de la dorsale épineuse est robuste , tronqué , médiocrement long; le second a sa longueur ordinaire, mais le troisième ne dépasse pas le niveau du sillon dorsal, lequel s'arrête à quelque distance de la dorsale molle. Cette dernière, médiocrement haute , s’abaisse uniformément et d’une pente peu rapide d'avant en arrière. La caudale offre deux cornes peu prolongées, unies par une ligne terminale droite ou légèrement saillante. La pointe pelvienne, très peu dégagée et médiocre, est suivié d'un pli tégumentaire peu extensible. L'écaillure offre partout de grandes squamés couvertes de nombreux tubercules généralement petits et peu saillants. Sur les joues on rémarque supérieurement quatre rangées hori- zontales de squames subrectangulaires, auxquelles succèdent des rangs obliques dé grandes squames en losanges. Les rangées abdominales sont bien séparées de leurs voisines et très couchées. Celles du tronc, en losanges plus où moins régulières , portent des tubereules disposés en séries antéro-postérieures qui forment un dessin de stries, avec tendance à un développement prédominant des tubercules de la série médiane. Cette prédominance devient assez considérable sur la région caudalé du trone pour constituer une arête saillante sur le petit diamètre des squames de cette ré- gion, et la suite de ces arètes forme ici huit ou neuf lignes caréni- formes, dont les quatre intermédiaires plus prononcées que les autres. Quant à la région scapulaire, on y remarque un cadre régulier, composé de deux séries d’écailles qui croissent d'avant en arrière, et se terminent à une grande intercalaire supérieure. Les scutelles principales sont grandes, l’antérieure beaucoup plus que la posté- rieure ; l’intercalaire inférieure est petite. La couleur du Balistes ringens estuniformément foncée avec des MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 319 nuances plus obscures au dos. La dorsale molle et l’anale sont éga- lement d’une teinte obscure coupée d’une bande étroite blanche ou bleue à leur base. Vers l’extrémité de la caudale on voit une zone plus foncée que le reste de cette nageoire. Ce poisson nous vient de la mer des Indes, de l'océan Paci- fique et des Antilles, cé qui prouve qu'il ést répandu dans toutes les mers des tropiques. Les dimensions d’un des plus grands de Ja collection sont les suivantes : Longueur totale. . . . .: . 0,350 Hauteur pectorale. . . . . . 0,135 Longueur de la caudale. . . . 0.030 Longueur de la région céphalique. 0,080 Synonymie. — Bal. ringens Bloch., pl. 152, 2, B. niger Schn. — Bal. nigra (sie) Osb. it. 295.— B. silloné Lacép., I, pl. 48, f. 1; B. silloné Bonnat. Encycl. méth. ichth., p.19, pl. 42, f. 39. — Galafate, Parra, 18, pl. 41, 1. 8. BaLisTES vipua Richards. Caractères. — Formes et profil du précédent; dorsale molle subégale ; écaillure médiocre à peine relevée sur la queue de très légères saillies caréniformes; couleur générale foncée , la dorsale molle et l’anale blanches bordées de noir à leur marge. DM. 32. A. 30. P. 4? Cette espèce a beaucoup du facies général de la précédente. Ce- pendant elle s'en distingue bien, non seulement par quelques diffé- rences de proportions, mais surtout par l'effacement des lignes saillantes de la région de la queue, par l’abaissement des nageoires dorsale molle et anale, par la diminution des cornes de la caudale, par la coupe moins carrée des dents antérieures, enfin, par la distribution du blanc et du noir aux nageoires supérieure et infé- rieure, où cette dernière couleur ne forme plus qu’une bordure marginale. 320 H. HOLLARD. Je ne puis décrire ce poisson que d’après deux exemplaires mu- tilés, l’un de Borabora, l’autre de la collection de Banks et plus tard de Broussonet. Mais il est facile de reconnaître ici l’espèce dé- crite et désignée par M. Richardson, sous le nom de Bal. vidua. (Voyage du Sulfur.) BALISTES STELLARIS Schn. Caractères. — Hauteur pectorale équivalant au tiers de la lon- gueur totale. — Région caudale longue et effilée. — Dorsale molle partout peu élevée. — Écaillure composée de grandes squames couvertes de tubercules mousses; sur les côtés de la queue trois ou quatre lignes saillantes formées par le relief du petit diamètre des écailles.— De nombreuses petites taches blanches et quelques- unes plus grandes semées sur le corps, surtout à sa partie supé- rieure ; des bandes brunes sur les nageoires médianes et quelques ocelles de même nuance sur la caudale. DM. 27. À. 25. P. 14. Le profil de ce Baliste est arqué et peu rapide; le corps est mé- diocrement comprimé. Le sillon préoculaire est long et bien creusé. L'œil est grand et superficiel, le front plat. La fente branchiale descend presque jusqu’au niveau du bord inférieur de la nageoire pectorale. Les trois rayons de la dorsale épineuse sont dans leurs propor- tions relatives d’une longueur plus qu’ordinaire, et leur mem- brane s'étend au delà du troisième jusqu’à la dorsale molle. Cette dernière, aussi bien que l’anale, offre une hauteur médiocre et diminue très graduellement d'avant en arrière. La caudale est terminée en forme de croissant avec des cornes très aiguës, mais peu prolongées. Quant à la pointe pelvienne, elle est très saillante et suivie d’un pli abdominal armé de petits crochets latéraux et d’aiguilles margi- nales très prononcées. L'écaillure se compose de squames assez grandes, couvertes de tubercules nombreux , petits et mousses. Pr _—._ MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 321 Aux joues les rangées sont obliques et les squames sont moins régulières à la partie supérieure de cette région, où elles ont la forme de parallélogramme, que plus bas où elles prennent celle de losange. Le système des plaques scapulaires se fait remarquer par Ja largeur des scutelles principales, par la grandeur et le petit nombre des squames du cadre, parmi lesquelles figure une intercalaire supérieure lrès étalée. Les squames de la région latérale ont leurs tubereules bien ali- enés, surtout en avant. Le petit diamètre de ces plaques et les tu- bercules qui les couvrent forment sur la queue des crêtes caréni- formes dont la réunion constitue trois ou quatre-lignes saillantes et rugueuses. La couleur générale du Baliste étoilé est jaunâtre ; on voit quel- ques taches rondes plus ou moins claires sur les joues , deux ou trois plus grandes vers la ligne médio-dorsale ; la partie supérieure des flanes est semée d’une multitude de petits points blanchâtres, qu'on a comparés à des étoiles, en lirant de cette ressemblance très grossière le nom spécifique du poisson dont il s’agit. Outre cela sept à huit bandes brunes parcourent obliquement la dorsale et l'anale, et enfin la caudale se fait remarquer par plusieurs taches ocellées de la mème nuance. Le Muséum possède plusieurs exemplaires du Balistes stellaris. Is proviennent de la mer des Indes, des côtes de la Nouvelle-Irlande et de l'océan Pacifique, en un mot des mers situées au sud et à l’est de l'Asie. Le plus grand de ces exemplaires offre les dimensions et + Jes proportions suivantes : Longueur totale . . . . . . (0",380 Hauteur pectorale. . . . . . 0",125 Longueur de la caudale. . . . 0,030 Longueur de la région céphalique. 0,040 Synonymie. — Je ne connais pas le Balises stellaris sous un autre nom que celui que je lui donne ici d’après Schneider, et qui n'est que la traduction du mot étoilé proposé par Lacépède (4). (1) Histoire des Poissons, 1, p. 350, pl: 45. &° série, Zoou. T. 1. (Cahier n° G.) ! 21 322 Hi. HOLLARD. Cet auteur paraît avoir décrit celte espèce le premier et d’après Cornmerson. Russel l’a figuré dans ses Poissons de la côte de Coro- mandel (1, 22) , et le nomme en langue du pays Lama-Y ellaka. Annon, B. Vachelii Richards (Voyage du Sulfur). C. Dans notre troisième type, bien que le corps conserve assez de hauteur, la région céphalique commence à s’allonger sensible- ment, à projeter plus ou moins la bouche comme une sorte de grouin. La deuxième dorsale et l’anale, quelle que soit leur hau- teur, sont toujours arrondies en avant et ne décroissent que très graduellement; les cornes de la caudale s’émoussent, et le milieu de cette nageoire est en courbe saillante. Ajoutez à ces caractères de dégradation sériale cette particularité, que les joues offrent plu- sieurs rangs horizontaux de squames plus où moins rectangulaires, et que l'écaillure, partout très couverte de tubercules, offre, sur la queue, des épines plus ou moins prononcées à pointe antérieure. La collection du Muséum ne nous offre que deux espèces de ce type; mais il en renferme probablement un plus grand nombre, et notamment celle que M. Richardson a décrite et figurée sous les noms de B. hihpe. 9. BALISTES FRENATUS Lac, PI. 5, fig. 3. Caractères. — Hauteur pectorale presque égale à la demi -lon- eueur ; région céphalique dépassant le premier tiers.— Profil droit. Plusieurs rangées horizontales de squames rectangulaires sur les joues; tubercule médian antérieur de toutes les squames de la région caudale spinoïde, d’où un grand nombre de séries de très petites épines sur toute cette région. Couleur fauve uniforme , variée seulement d’un trait jaune qui va de la commissure des lèvres à la région pectorale, et d’un autre trait qui part du premier, passe sous le menton , et se confond avec celui du côté opposé en figu- rant la gourmette d'une bride. DM. 30. A, 27. P, 14. Ce Baliste, quoique d’une hauteur proportionnelle, qui le metau nombre des espèces les plus élevées du genre, nous annonce, par la MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 323 longueur de la région céphalique, son profil droit, et le peu de lon- gueur et de profondeur de son sillon préoculaire, les petites séries qui vont suivre. Il leur ressemble, comme l'espèce précédente, par l’aplatissement du front et la position superficielle de l'œil , lequel est d’un volume médiocre. La dorsale épineuse subit aussi, à partir de cette espèce, une diminution sensible de hauteur et de longueur ; le grand rayon est robuste, tronqué, un peu fléchi et proportionnellement plus court que chez le Bal. verdâtre. Le suivant ne dépasse pas beaucoup la moitié du premier , et le troisième s'élève de très peu au-dessus du sillon. La dorsale molle et l'anale, un peu plus hautes en avant qu’en arrière, sont arrondies à leurs extrémités et très médiocrement élevées. La caudale offre encore nn faible indice des cornes qui la ter- minent dans les espèces précédentes. La pointe pelvienne offre une certaine longueur ; mais le pli abdominal qui la suit, armé comme à l'ordinaire, a très peu de développement. L'écaillure rentre dans des proportions générales moyennes. Celle des joues se caractérise très bien par plusieurs séries horizon- tales de squames en forme de carré long; celles de la série infé- rieure dégénérent en losange par en bas pour s'adapter aux squames qui les suivent, et qui revêtent cette dernière forme. Le système seapulaire nous offre des scutelles antérieures élar- gies. Le cadre se compose de très petites squames ; la plus reculee représente une intercalaire supérieure. Le système abdominal est très nettement séparé de celui des flanes et de la queue. Sur toute cette dernière région , le tubercule médian antérieur prédomine , et s'élève au-dessus des autres sous la forme d’une petite épine dont la pointe se dirige en avant. De là des séries nombreuses de pointes caudales composant, vu leur briè- velé, une armure des plus médiocres. Quant au système de coloration , je n'ajouterai autre chose à ce que j'ai à dire dans la caractéristique de l’espèce en question , si ce n'est que le trait sous-mentonnier, d'où a été tiré le nom de Baliste bridé, manque assez souvent. 92/1 H. HOLLARD. Le Muséum possède une dizaine d'exemplaires de cette espèce. Sur ce nombre un seul provient de l'océan Atlantique ; les autres ont été recueillis depuis Madagascar jusqu'aux régions les plus orientales de la Polynésie. Voici les dimensions de l’un des plus grands : Longueur M O0, 325 Hauteur pectorale . . . 0",150 La caudale compte pour. . 0,140 La région céphalique pour. 0",100 Synonymie. — Baliste bridé Lacép., 1, XV, 3. — Annon, Ba- listes hihpe Richards (Sulfur)? AO. BALISTES VIRIDESCENS Lac. Schn. Caractères. — Formes médiocrement hautes et comprimées , la hauteur pectorale dépassant peu le tiers de la longueur ; un espace nu derrière la commissure des lèvres. — Ecaillure irrégulière très grande, et couverte de tubereules gros etnombreux ; trois ou quatre séries d’épines courtes et épaisses sur la queue.— Couleur générale verdâtre avec une tache plus foncee sur le milieu de chaque squame, et une bande obscure à l'extrémité des nageoires médianes. DM. 26. A. 24. P. 44 à 15. Ce Baliste appartient aussi, par ses formes et ses proportions, aux espèces dont la région céphalique s’allonge ; le profil est cependant un peu arqué; le sillon préoculaire a le tiers de la longueur du museau; le front, très voüté latéralement, ramène les yeux fort au-dessous de la ligne médiane; quoique très longue, la fente branchiale n'atteint pas l’extrémité inférieure de la base de la nagcoire peclorale. La dorsale épineuse offre un premier rayon très robuste ou peu fléchi, médiocrement apointi ; les deux suivants sont proportionnel- lement bien développés : la membrane qui dépasse le dernier s’ar- rète comme le sillon à distance de la nageoire suivante. La dorsale molle et Panale sont hautes partout, un peu plus cependant en avant qu'en arrière. La caudale se termine par une ligne sinueuse, dont les extrémités MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 325 ne donnent à cette nageoire que des cornes obtases et à peine indi- quées. La saillie pelvienne est prononcée , et suivie d’un pli abdo- minal peu caractérisé. L'écaillure est remarquable au contraire par la grandeur des squames, la grosseur et le nombre de leurs tubercules , et quelques particularités locales. Celle des côtés de la tête laisse à nu un espace qui se limite chez les sujets adultes au voisinage de la commissure labiale, et qui, chez les jeunes, si j'en juge par un petit individu, s'étend aux joues, où n'apparaissent alors que quelques séries transversales et espacées de squames verruqueuses ; disposition temporaire qui rappelle ce qui existe d’une manière permanente chez notre Baliste réticulé et chez le B. rivulatus de Ruppel. Chez l’adulte, les joues présentent encore quelques indices de ces séries horizontales ou plutôt si- nueuses. Ce système rejoint en avant les séries obliques du museau composées aussi de grandes squames , et en arrière les larges pla- ques des joues font place à des écailles longues et étroites, dont les rangées obliques sont séparées par des intervalles nus. La région scapulaire , au devant de laquelle est une longue fente branchiale, se montre couverte de plaques médiocres ; la principale de celle-ci ou l’antérieure est subcireulaire , et le rayonnement de ses siries part à peu près de son centre; les deux autres sont presque égales. Le cadre se compose d'un ensemble de squames irrégulières et petites, à tubercules disposés en séries rayonnantes ; aucune de ces squames n'est parfaitement intercalaire. Les régions latérale et ventrale sont bien distinctes, et présentent leurs dispositions les plus ordinaires. Toutes les squames des flancs offrent une large surface couverte de tubercules qui forment des séries rayonnantes à partir du tubercule le plus avancé ; les tuber- cules du premier rang, et les derniers de chacune des autres séries sont les plus forts. Sur la région caudale le tubercule médian anté- rieur d'un certain nombre de squames devient très prédominant , spinoïde, d'où résultent quatre où cinq rangées longitudinales de petites épines ; le rang supérieur est le moins nombreux, et le second s'avance plus que les autres. Le fond de la couleur est verdâtre , d’où le nom qu’on a donné à 326 H, MOLLARD. cette espèce; mais celte teinte est agréablement variée par les pe- tites taches obscures qui occupent le centre des squames. Sauf la zone foncée qui borde la dorsale molle et l’anale, le système de coloration du Balisteverdâtre, autant qu'il est permis d’en juger sur des individus desséchés, n'offre pas d'autre particularité digne d'être mentionnée. | Je décris ici ce Poisson d’après trois exemplaires montés , les seuls que possède le Muséum : l’un d'eux est de la mer Rouge, un autre de la Nouvelle-Guinée , l’origine du troisième est inconnue; le plus grand présente les dimensions suivantes : Longueur totale. . . . . ., 0",560 Hauteur pectorale. . * . ?, . 0,215 Longueur de la caudale. . . . 0,070 Longueur de la région céphalique. 0",150 Synonymie. — Je n'ai trouvé aucune trace de cette espèce dans les travaux antérieurs à Lacépède, qui parait l'avoir décrite d’après Commerson, et qui l’a nommée le premier Baliste verdâtre (1, p.392, pl. 16, f.3); dénomination adoptée et traduite par Schnei- der, telle que nous la donnons en titre de cet article (Syst. ichth, de BI. ). D. L'espèce suivante semble se placer assez naturellement par ses formes , son écaillure et ses épines caudales, à la suite du Balistes viridescens | sans qu'on puisse la rattacher complétement au type dont ce dernier semble faire partie, encore moins à celui qui suivra. Elle représente done à elle seule un type particulier, le quatrième de notre série. A1. BALISTES coNsPIciLLUM Schn. Caractères. — Formes allongées et peu comprimées ; profil un peu fléchi. — Premier rayon de la dorsale épineuse long , le dernier presque caché ; dorsale molle et anale peu élevées. — Écaillure grande et rugueuse ; plaques scapulaires principales, presque aussi larges que longues ; ligne latérale visible; trois rangs d’épines cau- dales courtes, redressées, — Couleur générale noirâtre, interrom- MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 327 pue par de grandes taches blanches , dont une en chevron sur le chanfrein , une en zone circulaire autour de la bouche , une très étendue sous la gorge, et plusieurs rondes ou ovales sur les flanes ; caudale de nuance claire terminée par une bande brune. DM. 25 à 22. P. 44. Les formes du Baliste américain sont un peu massives, en même temps proportionnellement allongées. La hauteur pectorale entre trois fois dans la longueur du corps. Les nageoires médianes sont moins développées que dans les espèces précédentes , et la caudale est arrondie ; la pointe pelvienne est plus saillante, mais étalée, et le pli qui la suit est peu extensible. L'écaillure, médiocre en losanges etenrangées obliques sur les joues, prend plus de développement sur le tronc, et offre ici d'assez gros tubercules disposés régulière- ment, et parmi lesquels le médian antérieur prédomine d’une manière notable. Les plaques scapulaires conservent la forme sub- circulaire qu'elles ont dans les espèces du type précédent, etle cadre, qui commence très bas, offre de grandes squames en haut; nous n'avons d’ailleurs rien à ajouter à ce que nous avons dit et de l'écaillure latérale du trone, et de la queue et du système de colo- ration. Le Balises conspicillum atteint de 30 à 40 centimètres de lon- gueur. Il abonde dans les collections, et nous vient de toutes les mers équaloriales. Synonymie. — Le nom que nous adoptons pour cette espèce est celui de Schneider (Syst. ichth. de Pol.), qui ne laisse aucun doute sur son application , et n'a été employé que pour elle. Lacépède (4. 375) lui donne, d'après Linné, l’épithète d’'Américain ; mais la phrase latine du Systema naturæ ne se rapporte pas très évidem- ment au poisson qui nous occupe. Sonneral le nommait fachelé (Journ. de phys., t. WE, p. 445); mais déjà une espèce de la pre- mière section a recu de Bloch la même désignation ; nous en dirons autant de celle que proposait Bonnetère pour éviter son double emploi ; son Baliste noir n'est que le conspicillum de Schneider (Encyclop., p. 19, pl. 85). 328 H. HOLLARD. E. Notre cinquième type se distingue du précédent par l’allon- gement notable des formes et surtout de la région céphalique, par l'abaissement de la dorsale molle , la caudale demeurant encore si- nueuse. Ici encore les squammes des joues ont toutes la forme de lozanges et sont disposées en rangées obliques. Le sillon préocu- laire est encore marqué, le troisième rayon de la dorsale épineuse apparent; les côtés de la queue sont couverts de petites épines à pointe antérieure. Je ne trouve ici que les deux espèces que je vais décrire. 12. Bauistes Bursa Schn. Caractères. — Formes médiocrement hautes et comprimées, la hauteur pectorale entrant plus de deux fois et demie dans lalongueur. Profil droit. — Premier rayon de la dorsale épineuse, long ct ro- buste, le troisième dépassant le sillon dorsal. — Dorsale molle ar- rondie et peu élevée ; caudale encore un peu sinueuse. Écaillure épineuse sur les côtés du corps avec plusieurs rangs de pointes dirigées en avant à la région caudale. Deux traits noirs descendant du dos à la base des pectorales et à la fente des branchies ; une ligne blanche allant de la commissure des lèvres à l'anus. DM. 27. À. 24. P. 44. Le Balistes bursa rappelle par ses formes et ses proportions le Balistes renatus ; il a le profil plus droit et plus abaissé, la région céphalique proportionnellement un peu plus longue que celui-ci. La dorsale épineuse conserve ici une certaine hauteur; mais la seconde dorsale est basse, ainsi que l’anale; quant à la caudale, ses rayons extrêmes font encore une légère saillie, mais aussitôt suivie d’une ligne de terminaison convexe. La pointe pelvienne ne manque pas de force, ni le tégument préanal d’un certain degré d’extensibilité. L'écaillure est partout composée de squames médiocres cou- vertes de petits tubercules ; elle varie du reste d’une région à l’autre. Aux joues les écailles sont en losanges, composent des ran- gées obliques et ne portent que de petits tubereules serrés et plus ou moins éMOUSsÉS. MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 329 A la région scapulaire je trouve deux plaques principales pro- portionnellement grandes, surmontées d’une seule série de petites squames en guise de cadre. Sur les flanes, le tubercule médian antérieur prend d'avant en arrière un développement prédominant et devient spinoïde. Enfin , sur la queue, ce même tubercule forme des épines à pointe anté- rieure et dont il existe un grand nombre de séries. Le système de coloration de cette espèce nous offre, sur un fond brun gris : 4° partant de la partie antérieure de la ligne médiane , deux traits foncés qui descendent en s’infléchissant, l'un vers le bord postérieur de l'orbite, d'où il revient gagner la base des pec- torales, et l’autre jusqu'à l'extrémité supérieure de la fente bran- chiale ; puis à peu près de l'angle des lèvres part une ligne blanche à bordure plus sombre que le fond , et qui se rend presque en ligne droite et dans une direction oblique jusqu’à la naissance de l’anale, où la rejoint une autre ligne de même couleur, qui va gagner la base de la pointe pelvienne. Ce poisson , très connu , abonde surtout dans les eaux de la mer des Indes, et près des iles Bourbon et Maurice, de Madagascar, etc. Sa taille est médiocre. Voici les dimensions d’un de nos plus grands exemplaires : Longueur totale . . . . 0",160 Hauteur pectorale. . . . 0",063 Hauteur pelvienne . . . 0,072 La caudale compte pour . 0,020 La région céphalique pour . 0,046 43. BALISTES ARMATUS. Caractères. — Formes et proportions du précédent. — Six ou sept rangées de petites pointes épineuses sur les côtés de la queue. — Couleur uniforme sur le corps; une zone blanchâtre en croissant à l'extrémité de la caudale. DM. 27. A. 24. P. 12. Ce Baliste ressemble tout à fait au précédent par les proportions du corps, par le profil et par les formes des nageoires médianes. 330 NH. HOLLARD. 1 se rapproche cependant du type qui suivra par l'effacement déjà marqué du sillon préoculaire et par la terminaison arrondie de la caudale. La dorsale épineuse est aussi un peu moins élevée que dans le Balistes bursa. Quant à l'écaillure, nous remarquons seulement que le dévelop- pement du tubereule médian antérieur des squames latérales est déjà moins considérable et surtout moins général que précédem- ment, et qu'il se réduit à peu près aux six ou sept rangs d’épines caudales , à pointe antérieure, que nous avons épris dans notre caractéristique. L'uniformité de la couleur et le petit croissant clair de l'extrémité dela caudale distinguent très nettement le Balistes armatus du bursa. Ce poisson paraît aussi appartenir plus spécialement à lamer des Indes qu’à toute autre. Ses dimensions sont peu codée: le plus grand de nos exemplaires mesure en longueur 0",160. Synonymie. — Baliste armé, Lacép., [, xvin, 2. Annon, B. chrysopterus, Schn. (p. 466, 9)? F. A la suite du type précédent, et assez près de lui pour le con- tinuer sous plus d’un rapport, se place un petit groupe parfaitement naturel et très nettement caractérisé. Il reproduit les formes basses et allongées du Baliste armé, il exagère encore la projection du museau par l’abaissement de la ligne de profil; il nous présente des nageoires médianes diminuées , la dorsale épineuse laissant à peine voir son troisième rayon , la caudale toujours simplement arrondie ; puis l’écaillure n’offre plus que trois ou au plus quatre petites séries d’épines sur la queue, mais saillantes et toutes à pointe antérieure; enfin, nous reconnaissons ici sur la tête un même système de coloration, consistant en un bandeau frontal composé de traits alternativement clairs et obscurs, ceux-ci intercalés dans les premiers; sur la région operculaire, de l’œil à la racine de la pectorale, ee bandeau dégénère en une bande brune ordinairement lizerée de lignes claires, avec une ligne analogue détachée en avant, et qui fait suite à la plus avancée des lignes du bandeau frontal. Ce système se modifie d’une espèce à l’autre, de manière à fournir de MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 331 bons caractères spécifiques et de série ; d’autres traits, mais moins typiques, viennent le compléter sur les autres parties du corps. Nous trouvons ici, dans la collection, cinq espèces, dont aucune ne dépasse de beaucoup une longueur de 20 centimètres ; quand nous aurons décrit la première il nous suffira de quelques lignes pour faire connaître les autres. 44. BausTes Assastr Forsk. Caractères. —- Epines caudales disposées sur trois rangs , dans le rapport numérique de 8 ou 10, 15 etL4.—Bandeau frontal com- posé de sept traits à peu près d’égale largeur, dont quatre clairs et trois obscurs intercalés ; de l'œil à la naissance de la pectorale trois lignes claires convergentes, dont les deux postérieures interceptent un espace brun ferminé en pointe ; de la lèvre supérieure à la pec- torale un trait brun qui, large d'abord, va en s’atténuant de plus en plus (4). Anus bordé de noir. DM. 27. À. 25. P. 14. Cette espèce prend la tête de cette nouvelle série , en raison du nombre de rayons de sa dorsale molle, de celui de ses épines cau- * dales, et du caractère complet du dessin de lignes alternantes qui ornent sa tête. Ses formes sont celles que nous avons indiquées pour le type enlier, allongées par le développement en ce sens de la région cé- phalique. Nous remarquons ici, derrière lacommissure des lèvres, un espace nu angulaire, peu étendu, et à la limite duquel l’écaillure est pelite et disjointe. Le cadre des plaques scapulaires n'offre pas de caractère bien déterminé , on n’y distingue un peu nettement que l’intercalaire supérieure ; quant aux plaques elles-mêmes elles sont très bien dessinées, les deux principales ont une forme oblon- gue et sont à peu près d’égale grandeur. (1) La nuance des bandelettes claires paraît être un bleu assez vif; je ne caractérise celles-ci que par leur contraste avec les bandelettes obscures, ce qui constitue le caractère le plus constant de ce système de coloration dans les cinq espèces qui nous occupent en ve moment, caractère qui demeure en dépit des allérations que le temps et la liqueur font subir à la couleur proprement dite, 332 H. HOLLARD. Des trois rangées d’écailles qui portent des épines, la première en offre de 8 à 10, selon que leur série est ou non interrompue. La couleur générale est d’un fauve uniforme passant à une teinte plus ou moins grisàtre ou rembrunie sur la moitié supérieure de la tête et du tronc. La dorsale épineuse est teinte de noir dans sa partie membraneuse. Les épines caudales sont cerclées de brun et les tu- bercules qui les entourent offrent une teinte semblable : quelque- fois aussi cette partie de l’écaillure offre une nuance bleuâtre ou nacrée. | Le Balste assasi nous vient de la mer Rouge et de celle des Indes. Sa longueur ne dépasse guère 0*,150, sur 0°,057 de hau- teur pectorale. La région céphalique entre pour 0*,045 dans la longueur d'un exemplaire de la dimension sus-indiquée. Synonymie. —C'est à Forskhael que nous devons , si jene me trompe, la première description de ce Balise, auquel nous con- servons avec lui et la plupart des auteurs son nom arabe (Fauna arab., p.75, n° 112). C’est sous ce même nom que Gmelin, et plus tard Lacépède , ont mentionné et caractérisé l'espèce qui vient de nous occuper. 15. BALISTES PRASLENSIS. Caractères. — Épines caudales disposées sur {rois rangs , dans le rapport numérique de 7,143 et 12. — Bandeau frontal de sept bandelettes dont les quatre claires plus étroites que les trois obseures interealées; de l'œil à la naissance de la pectorale, une large bande obscure bordée et partagée en long par trois lignes claires, d’abord parallèles, puis convergentes ; de la lèvre supé- rieure à la pectorale un trait brun linéaire; une grande tache brune allant en s’élargissant de l'anus jusqu'à mi-hauteur du tronc. DM. 25. A. 22. P. 43. Les formes sont celles de l'espèce précédente, dont le B. praslen- sis reproduit la physionomie. Nous retrouvons encore ici un espace nu derrière la commissure labiale, avec des squames disjointes comme transition à la partie couverte des joues. MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 233 Le cadre scapulaire est indistinct et les plaques proprement dites ressortent seules au milieu des squames de cette région. On aura remarqué une diminution dans le nombre des épines caudales. La couleur générale est aussi d’un fauve plus ou moins clair aux parties inférieures , et plus où moins rembruni aux parties supé- rieures du corps. Cette fois les lignes claires du bandeau frontal se sont sensiblement rétrécies, au profit des bandes obscures, et au- dessous de l'œil les intervalles des trois lignes claires sont occupés par une même teinte brune. La bordure noire de l'anus se prolonge et s'étale sur les flancs en une grande tache arrondie. On voit un peu de brun noir à la racine des épines caudales. Quant à la mem- brane de la dorsale épineuse, elle n'offre qu'une teinte jaunâtre. Le Baliste praslin nous vient de la mer des Indes et de la Po- lynésie. Un de nos grands exemplaires atteint une longueur de 0,200 sur une bauleur pectorale, d’un peu moins de 0",070, la région céphalique entrant dans la longueur pour 0,062. Synonymie. — Ce poisson, décrit pour la première fois, sem- ble-t-il, par Commerson et Lacépède, a reçu de ce dernier le nom de Baliste praslin, que nous lui conservons ici et qui rappelle un port de l’une des îles Salomon, d’où il a été rapporté. Lac. I, 365. Quoy et Gaymard, Uranie et Physicienne, pl. 46. — B. prasli- noïdes. Lesson (Cogquille , pl. 9, fig. 3). 16. BALISTES ACULEATUS Lin. Caractères. — Épines caudales disposées sur quatre rangs , dont le premier indiqué seulement par deux ou trois pointes sou- vent rudimentaires, antérieures, et le dernier réduit à quatre épines postérieures, tandis que les deux intermédiaires en offrent de 918. — Bandeau frontal de sept bandelettes dont quatre claires plus larges et quatre obscures plus étroites et intercalées ; de l'œil à Ja base de la pectorale trois lignes claires, dont les postérieures bor- dent une bande brune, et l'antérieure décrit une courbe et limite un espace de la couleur générale du corps; sur les côtes du tronc et partant de l'espace scapulaire une large zone brune qui se pro- longe obliquement en arrière en se divisant, et fournissant du Sol H. HOLLARD, côté abdominal des bandes étroites séparées par des espaces clairs. DM. 25. À. 22. P. 43. Les formes du Balistes aculeatus sont celles des espèces précé- dentes. Nous ne retrouvons plus ici d’espace nu derrière la commissure labiale. Le cadre scapulaire ne se distingue pas très nettement de l’écaillure environnante. Le nombre des épines cau- dales est encore moindre que dans le B. praslensis, bien que l’on voie des vestiges d’un quatrième rang au-dessus et en avant des deux principaux. Cette fois le rang inférieur est très court et réduit à sa partie postérieure. Mais en même temps que les épines ont diminué de nombre, elles ont sensiblement augmenté de volume. La couleur générale est celle des espèces précédentes, le dessin de la tête n'offre encore que des modifications peu notables. En revanche celui du tronc est très spécial : les flancs sont très joliment fasciés de bandes alternantes et inégales, brunes et blanches, dirigées obliquement de haut en bas et d’avant en ar- rière , en même temps que la grande zone brune qui part de l’es- pace scapulaire, et aux dépens de laquelle ces bandes sont formées, jette deux prolongements d'avant en arrière dans la direction de la deuxième dorsale. La dorsale épineuse est d’une teinte peu fon- cée. J'ai trouvé, du reste, un assez grand nombre d'exemplaires de ce Baliste chez lesquels le dessin caractéristique disparaissait plus où moins sous une nuance foncée tendant au mélanisme, Le Balistes aculeatus abonde dans la collection du Muséum. Il nous vient de la mer Rouge, de l’océan Indien et des eaux polyné- siennes. Quelques uns de nos exemplaires atteignent ou dépassent même un peu une longueur de 20 centimètres. Synonymie. — Désigné dans le Systema naturæ (ed. Gm., 1465, 6) sous le nom que nous lui conservons ici, le Balistes acu- leatus à reçu de Lacépède celui de Baliste épineuæ. Nous le retrou- vons dans le voyage de la Coquille sous celui de Baliste très orné (Balistes ornatissimus), Lesson (pl. 10, fig. 4). Il est probable que le Balistes verrucosus , décrit par Bonnatère et adopté par lui de Linné (4465, 5. — Encycel. B: tuberculeux, p. 18), est le même MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 239 que l'aculeatus, no nle praslensis comme le présumait Cuvier. (Voy. BL. 2, 19, tab. 149.) 17. BALISTES CINCTUS. Caractères. — Épines caudales disposées sur quatre rangs dans le rapport numérique de 7, 41, LL et 7. — Bandeau frontal de sept bandelettes peu distinctes par leur nuance et dont les plus obscures, intercalées, sont plus étroites que les plus claires; de l'œil à la région operculaire une zône obscure qui gagne, en s’élargissant, tout le bord de la fente branchiale, et au-devant de cette zône à tres petite distance une ligne de la même couleur correspondant à la plus avancée des bandelettes brunes du front; sur le tronc une large ceinture brune dirigée obliquement de l’espace scapulaire à la région de l’anus, puis un chevron formé par la rencontre angu- leuse de deux lignes claires, dont l’une borde la ceinture en arrière, et l’autre gagne la fin de la dorsale molle plus en arrière encore; enfin un deuxième chevron inscrit dans l’angle du premier, et li- mitant une {ache brune qui couvre la plus grande partie de l’espace épineux. DM. 24. A. 20 à 21. P. 43. La caractéristique précédente, qu'il serait bien difficile d’abré- ger, laisse peu de détails à ajouter aux traits dont elle se compose. La commissure labiale est suivie d’un espace nu semé plus en ar- rière de squames petites et disjointes. Les épines caudales, quoique sur quatre rangs, sont plus remarquables par leur grandeur et leur forme droite et aiguë que par leur nombre. Nous voyons ici le système de coloration de la tête tendre à s’effacer un peu, les nuances se confondent, la bande de la région operculaire s'étale et va rejoindre la grande et large zone oblique qui embrasse une partie considérable du tronc, zone dont nous avons vu les premiers indices dans la tache abdominale du B. praslensis, et mieux encore dans la ceinture fasciée du B. aculeatus. Enfin les deux chevrons qui se suivent et la tache caudale que limite le dernier sont des caractères nouveaux qui vont se retrouver dans espèce suivante. Le Balises cinchus est moins abondamment représenté dans la 99: H. HOLLARD. collection que les espèces précédentes. Il nous vient de l'océan Pacifique. L’exemplaire le plus grand atteint 20 centimètres de longueur. Synonymie. —- Ce poisson, nommé Baliste écharpe par La- cépède, 1, 352, pl. XVE, fig. 4, dénomination que nous avons trouvée toute traduite sur quelques étiquettes du Muséum, avait reçu de Schneider le nom de B. rectangulus. M. Lesson lui a donné celui de B, erythropteron ou B. à pectorale bordée de rouge (Coquille, pl. 10, 4), et MM. Quoy et Gaymard en ont fait leur B. medinilla (Uranie et Physicienne). 18. BALISTES CINEREUS Bonnat. Caractères. — Épines caudales disposées sur trois rangs dans le rapport numérique de 4, 41, 9.—Bandeau frontal réduit à lrois traits linéaires obscurs, très séparés par deux espaces de la couleur générale du corps; de l’œil à la fente branchiale une simple tache brune allongée; dessin du tronc réduit à une petite tache noire autour de l'anus, puis à un chevron demi-cireulaire sur la queue, et à une large zone noire qui cercle l’étranglement caudal et qui est lisérée de clair en avant et en arrière. DM. 25. A. 22. P. 44. C’est ici le dernier représentant de notre cinquième type; sa place est parfaitement indiquée à la suite du B. écharpe par le des- sin de la région caudale, qui reproduit sur une moindre échelle et avec quelques variantes celui de ce dernier poisson (4). La tête à son tour nous offre les dernières traces du bandeau frontal et de la bande brune qui descend jusqu'à la fente branchiale. Remarquez enfin que le système des épines caudales atteint les plus petites proportions. Les plaques seapulaires sont sensiblement moins développées dans cette espèce que dans les précédentes; mais le cadre offre (1) Le chevron qui orne ici la région de la queue est une bande claire en demi cercle, partagée dans sa longueur en deux parties égales par une ligne noire. MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 337 deux ou trois squames très distinctes, dont une intercalaire supé- rieure bien développée. Le très petit nombre d'exemplaires du Balistes cinereus que possède la collection du Muséum nous vient des mers de l'Inde et de Bourbon. Le plus grand atteint une longueur de 23 centimètres. Synonymie. — C’est à Sonnerat que nous devons la première bonne description de cette espèce, et le nom qu’elle porte lui a été donné pour la première fois par Bonnatère dans l'Encyclopédie méthodique, où elle est figurée d’après le travail de ce voyageur (Journal de physique, tome IV, p. 78; Encycl. Ichth., p. 20, pl. 86, p. 353). — B. arcuatus Schn. (Syst. icht., p. 166, n° 7). -— B. medillina Quoy et Gaim. (Uranie et Physicienne). L'épi- thète de cendré n’est pas d’une caractéristique rigoureuse, car la nuance de la couleur générale varie du gris au brun. G. Notre septième et dernier type se distingue du précédent par un système de coloration tout spécial et très différent de tout ce que nous avons vu chez celui-ci. Cette fois, le système des épines cau- dales atteint sa plus grande réduction comme nombre et sa plus grande force. Du reste, les formes du corps et celles des nageoires médianes conservent à peu près les caractères qu’elles avaient dans lestrois derniers types ; la région céphalique offre peut-être un peu moins de projection que dans le sixième. Une seule espèce authen- tique représente ce terme de la série des Balistes. C’est le : 19. BALISTES LINEATUS Schn. Caractères. — Épines caudales longues et acérées, au nombre de 3, 4, sur deux rangs. — Couleur brune , sillonnée d’un très grand nombredelignes claires, qui descendent obliquement d'avant en arrière ; une lache noire sur la région épineuse de la queue. DM. 26. A. 24. P. 13. Le corps de ce Poisson est un peu massif. Sa hauteur pectorale entre plus de deux fois et demie dans la longueur ; la ligne de profil s'élève un peu plus, et la tête est plus courte que dans le type pré- cédent. On ne voit point de sillon au devant de l'œil, lequel est 4° série. Zooz. T. I. (Cahier n° 6.) 2 22 338 I. HOLLARD. d'ailleurs très marginal. Le premier rayon de la dorsale épinéuse offre assez de longueur, etle troisième dépasse bien le sillon dorsal ; mais les autres nageoires médianes sont peu élevées, et la caudale est bien arrondie. La pointe pelvienne est médiocre, et le pli pré- anal très peu extensible. L'écaillure offre sur les joues des séries obliques de squames en losanges irréguliers, surmontés de très petits tubercules. Sur la ré- gion scapulaire, les scutelles sont médiocrement développées, et le cadre offre une intercalaire supérieure qui les égale presque. Sur les flancs, les tubercules des squames s’allongent, etles antérieures prennentune forme linéaire prononcée. Du reste, point de tubercule médian prédominant, si cen’esten arrière, où celui de trois ou quatre squames se développe, etse convertiten une longue épine droite et pointue, dirigée et couchée d’arrière en avant. Le système de coloration du B. lineatus est à la fois très spécial et très simple. Sur un fond brun rougeàtre se dessinent un grand nombre de traits d’une teinte claire, jaune, qui descendent oblique- ment de toute la ligne médiane supérieure, se confondant et s’anastomosant plus d’une fois dans leur trajet , et dégénérant quel- quefois en taches à leur extrémité. Tous ceux de la tête, à cheval sur le profil facial, vont aboutir à un trait horizontal qui passe sous la pectorale et se perd sur la région abdominale ; au-dessous de ce dernier trait, on en voit un autre qui lui ést parallèle, et qui résulte de la rencontre angulaire de deux traits sus- et sous-labiaux , limi- tant un petit espace commissural à peu près nu. Le Balistes lineatus est des mers de l'Inde, et abonde dans la col- lection du Muséum, en offrant des teintes variées. Ce Poisson ne paraît pas dépasser beaucoup unelongueur de 30 centimètres. Voici les mesures proportionnelles de l'un de nos exemplaires : Longueur totale. . . . . 0,140 Hauteur pectorale, . . , . 0,055 Hauteur pelvienne, . . . 0,058 Région céphalique, , . . 0,040 Nageoire caudale. , , . . 0,018 Synonymie. — Depuis que Schneider a donné à l'espèce qui vient de nous occuper le nom que nous lui conservons (p. 466, MONOGRAPHIE DES BALISTIDES. 339 n° 8, pl. 77), et que l’on a traduit en français par l'épithète de rayé, je ne connais que MM. Quoy et Gaymard qui aient changé cette dé- nomination ; leur B. Lamouroux n’est autre que le lineatus. On peut aussi regarder comme certain que le genre Balistapus de File- sius est établi d'après un exemplaire mutilé de ce même Poisson. EXPLICATION DES FIGURES. PLANCHE 9. Fig. 4. Bauistes carniscus Lin, Fig. 2. Bauistes sreccanis Schn., Lac. Fig. 3. Bausres rrexatus Bl., Schn,. Fig. 4. Bausres Assast Forskh. EXPÉRIENCES à SUR L'ABSORPTION DE L'AZOTE PAR LES ANIMALCULES ET LES ALGUES, Par M. MORREN. Doyen de la Faculté des sciences de Rennes, (Extrait d'une lettre adressée à l'Académie des sciences le 22 mai 4854.) Tous les Infusoires, verts, bruns ou rouges, que j'ai examinés jusqu'ici, ét qui appartiennent à des genres fort divers (Monadines, Crypto-Mona- dines, Astasiées, Enchéliens , ete. ), sont tous , sans exception, des êtrés fortement azotés. Chaque fois qu’on les rencontre en abondance, colorant en vert, en rouge ou en brun, les eaux où ils se développent, on peut être assuré que des substances d’origine animale sont dans le voisinage, et que l'eau de pluie ou l’eau courante leur à apporté les principes azotés dont ils ont besoin , et qui permettent leur développement facile , soit dans les fossés, soit dans les flaques, les étangs, et même les ornières des routes. Tant que l'azote leur est présenté en quantité suflisante, ces êtres con- gervent la motilité et tous les indices de la vie animale; si l'azote devient rare, ils se fixent immédiatement tous, et passent à leur période de vie tran- quille, de vie végétale; mais même à cette époque, l'azote leur est encore nécessaire, bien qu'à ce moment, plus que jamais, ils agissent sur l'acide carbonique dissous dans l’eau, à la façon de la partie verte des végétaux. Toutefois, lorsqu'ils sont libres et mobiles, ils ont un caractère spécial : c’est que, lorsque sous l'influence solaire ils dégagent de l'oxygène, celui-ci se présente dans un état qui permet à l’eau une oxygénation considérable. 310 MORREN. — ABSORPTION DE L’AZOTE PAR LES ANIMALCULES. Si, dans une eau qui reste parfaitement calme , dans un vase que rien n’agite , on place des débris d’Insectes, même des morceaux de chair très divisée, c’est auprès de ces débris que se développeront avec le plus d’abon- dance les Infusoires mis en petite quantité dans l’eau; ils absorberont à leur profit les principes azotés qui leur sont présentés. Ces êtres semblent jouer dans l’eau le rôle que certains animaux plus élevés jouent dans l'air, où les corps azotés atteints par la mort appellent promptement auprès d’eux des Insectes, des Oiseaux, des animaux carnassiers avides de ces débris. Quelques sels ammoniacaux peuvent remplacer avec succès les corps azotés précédents : je citerai l’azotate, et surtout le carbonate d’ammo- niaque. L'action des autres sels ammoniacaux est pour moi en ce moment à l'étude. De l’eau que l’on met en contact renouvelé avec l’air atmosphérique, en la faisant tomber goutte à goutte et sans cesse d’un vase dans un autre, permet le développement rapide de tous les nfusoires monadaires. Si, au contraire, l'air qui passe dans l’eau , même en grande quantité, a été préalablement lavé dans de l’acide sulfurique , la vie n’est pas pos- sible, et s'éteint complétement au bout de quelques jours. Il est bien en- tendu que l'acide sulfurique a été privé des gaz, tels que l’acide sulfureux, qu'il pourrait tenir en dissolution. Des appareils identiques de grandeur et de capacité ont donné des résultats totalement différents, lorsque l’un d’eux laissait passer dans l’eau, attiré par un aspirateur, de l'air ordinaire, et l’autre appareil de l'air lavé par de l’acide sulfurique. Si, avant que la vie füt totalement éteinte, on cessait de laver l'air à l'acide sulfurique, la vie, se ranimant, ramenait la couleur verte disparue. Cependant , pour les Monadaires de couleur verte , l’action réparatrice de l'air non lavé par l'acide sulfurique est considérablement amoindrie, si Pair est privé des corpuscules légers qu’il emporte avec lui dans l’eau soumise à l'expérience. Ce dernier but peut être atteint de plusieurs manières, par exemple en faisant passer l'air à travers des corps feutrés ou poreux, tels que du coton cardé, etc. Ces doubles faits, de l'absorption de l’azote et de l’émission d'oxygène sous l'influence solaire, donnent à ces êtres un double caractère qui, ajouté à leur état tantôt mobile et tantôt fixe, les range tour à tour auprès des animaux et auprès des végétaux. De plus, ils sont incapables d'emprunter directement l'azote à l’atmos- phère dans toutes les circonstances citées plus haut. Il faut que ce gaz leur soit apporté, soit par les sels ammoniacaux que l'air peut contenir, soit par les poussières organiques répandues et soulevées dans l’atmosphère, soit par les substances azotées qui arrivent dans les eaux. MEMOIRE SUR LE CÉRIANTHE (CERIANTHUS MEMBRANACEUS), Par M. JULES HAIME. Beaucoup de naturalistes ont déjà porté leur attention sur l’orga- nisalion des Zoanthaires mous ou malacodermés. Réaumur, Dicque- mare, MM. Rapp, Berthold, Leuckart, Hollard, ete., ont fait plu- sieurs observations importantes sur les Actinies de nos côtes ; Lesueur a donné de bonnes figures de la conformation intérieure des Mynias etdes Mamillifères ; on doit à M. de Quatrefages une très belle et très complète monographie du genre £dwardsia ; enfin d’autres auteurs, parmi lesquels je citeraj MM. Dana, R. Wagner, John Dalyell, Kælliker et Erdl, ont aussi contribué à la connais- sance anatomique de diverses Actinides. Grâce à tous ces travaux, on possède aujourd’hui des notions exactes et étendues sur la struc- ture générale des animaux de ce groupe. Mais parmi les Zoanthaires malacodermés , il est une grande quantité de formes vraisembla- blemient assez différentes entre elles, qu’on n’a encore examinées que d'une manière superficrelle, et dont l'étude approfondie fourni- rait certainement des résultats intéressants. J'ai observé , au mois de juin 1853, sur les côtes des îles Baléares, un de ces types les plus tranchés, et je me propose d’en faire connaitre ici la constitu- tion organique. Introduction historique. Aucun animal rayonné ne rappelle à un plus haut degré l'aspect d’une fleur, et notamment d’une fleur de Synanthérée, que le polype nommé Cerianthus par M. Delle Chiaje. Cette apparence remarquable n’a cependant attiré l'attention des naturalistes que 312 JULES WAIME. vers la fin du siècle dernier, et, depuis cette époque, un très petit nombre d’observateurs ont eu occasion de l’examiner. C'est dans une lettre sur diverses productions marines, adressée en 1784 à Charles Bonnet par Spallanzani, que l’on trouve la pre- mière description de ce zoophyte (4). Le célèbre physiologiste ita- lien, après avoir mentionné la forme générale et l'apparence lisse et visqueuse de la surface, remarque que les tentacules (qu'il préfère appeler cornes, à cause de leur analogie avec celles du Limaçon) sont de deux sortes : les plus grands formant un cerele extérieur , les plus petits un cercle interne ; mais que, du reste, ils ont tous la même structure ; qu'ils sont contractiles, remplis d’un liquide transparent ayant le goût de l’eau de mer, et qu'ils présentent à leur extrémité un orifice pouvant donner issue à ce liquide intérieur. Spallanzani a toujours trouvé ces fleurs de mer dans des lieux habituellement calmes, et à une très faible profondeur ; il a vu qu'elles se tenaient constamment dans une sorte de bourse protec- trice , longue d’un pied environ et fermée à son extrémité infé- rieure, qui adhère aux plantes marines. « Lorsque, dit-il, la mer est agitée, ou que la main s'approche pour cueillir cet animal, il se cache tout entier dans sa bourse ; mais il ne tarde pas à repa- raitre et à étendre ses tentacules, aussitôt que l'agitation a cessé ou que le danger s’est éloigné. Cette bourse, qui n’a avec l'animal aucune connexion intime, est tout à fait molle et membraneuse ; elle ne montre de sensibilité d'aucune sorte, quoiqu'elle ait toute l'apparence d’une substance animale. » En lerminant ces premières notions, Spallanzani place avec doute ce curieux zoophyte parmi les Tubulaires, et il fait observer qu'il diffère de toutes les espèces connues de ce genre par la na- ture de son tube ou bourse, et qu'il pourrait bien former une divi- sion particulière. Il annonce en même temps à son illustre corres- pondant, qu'il comple, faire l’anatomie sommaire de ce polype et décrire la structure de la bourse. Je ne pense pas qu'il ait donné (1) Lazaro Spallanzani, Memorie di matematica e fisica della Societa italiana di Verona, t. IT, 2 partie, p. 627. 1784. -— Observations sur lu physique, l'histoire naturelle et les arts, t. XXVITT, p. 201, 1786 (traduction française de Sen- nebier ). - SUR LE CÉRIANTHE. BI) suite à ce projet ; je n'ai trouvé les observations promises dans au- eune de ses publications ultérieures. Gmelin (4) ne tarda pas à appliquer un nom linnéen à l’espèce découverte par Spallanzani ; il l’appela T'ubularia membranacea, en lui consacrant la diagnose suivante : « T. tentaculorum fistulosorum ordine duplici concentrico, tubulo membranaceo contractili viscido cylindrico incolam superante ; utrum hujus, an distinceti generis ? » On voit que Gmelin à mal lu Spallanzani, puisque, contrairement à l’assertion de ce grand observateur, il attribue au tube membraneux là propriélé de se contracter. Un demi-siècle plus tard, le même animal fut étudié par Wilhelm Rapp (2), qui ajouta quelques faits nouveaux à ceux qu'avait signalés Spallanzani. Il reconnut la présence d’un orifice médian à l’extré- mité inférieure du corps, remarquala propriété qu'ont les tentacules d’adhérer aux objets qu'ils rencontrent, et donna même quelques détails anatomiques. Suivant lui, l'estomac constitue toute la cavité de l'animal, et est limité par un sac formé de trois membranes : la première, ou l’extérieure, sécrète le mucus plastique, et renferme la matière colorante ; la seconde, ou moyenne, est musculaire, et l'on y distingue aisément des fibres longitudinales ; la troisième , qui est très mince, sécrète le mucus de la cavité intérieure. Sur les parois de cette cavité, Rapp observa huit plis verticaux très ondulés, se terminant en haut au court canal sous-buceal, et qu'il appela des ovaires. « Au bord interne et libre de l'ovaire, dit-il, s'attache un oviduete sinueux et contourné.…. Les œufs ont l'apparence de très petites graines, et formententre les deux feuillets de l'ovaire, auquel ils adhèrent, une couche épaisse, comme chez les Actinies. » La petite taille de l'individu représenté par Rapp et le nombre relativement faible de ses tentacules ont porté cet auteur à le consi- dérer comme un animal voisin de celui que Spallanzani a décrit le premier, mais spécifiquement distinct, et il l’a nommé Tubularia solitaria. Nous verrons bientôt que cesdifférences peuvent dépendre (1) Dans Linné, Systema naturæ, édit. 43°, t, VI, p. 3836. 1789. (2) Nova acta Academiæ curiosorum naturæ, t. XIV, 2° part., p. 653, pl. 38, fig. 2. 4829.— Uober die Polypen im allgemeinen und die Actinien insbesondere , p. 49. 1829. 3kh JULES HAIME, uniquement de l’âge, et par conséquent cette séparation paraît être sans fondement. M. Delle Chiaje a depuis créé pour ce zoophyte le genre Cerian- thus (4), et réuni sous un même nom (Cerianthus Breræ) l'animal découvert par Spallanzani et celui figuré par Rapp; mais il a établi deux autres espèces (C. cornucopiæ et C. actinioides), d'après des caractères essentiellement variables. De nombreuses figures dans son grand ouvrage se rapportent à ces polypes; mais elles sont toutes si obscures et si incorrectes, qu'il est presque impossible en les consultant de se faire une juste idée de ce que l’auteur a réelle- mentobservé; et comme, d’un autre côté, la description anatomique de ces Cérianthes est fondue dans celle des Actinies, on peut à peine démêler ce qui leur appartient de ce qui convient à ces dernières. Toutefois, M. Delle Chiaje a vu et figuré le premier deux partieu- larités intéressantes de l’organisation de notre zoophyte, savoir : les deux fossettes inégales de l'estomac et la brièveté des lames ovi- gères; mais il ne parait pas avoir compris l'importance de ces dispositions, qui ne sont même pas mentionnées dans son texte, et les dessins qui seuls les font connaître sont à ce point inexacts, que la plupart des rapports naturels y sont complétement intervertis. Enfin le professeur Edward Forbes a trouvé, à son tour, dans la mer Égée le même polype ou une espèce très voisine (2). Il en a signalé les caractères zoologiques , et a vu le tube fortifié par du gravier et des fragments de coquilles. Il ne parle point de l’orifice postérieur ; il dit seulement que la structure intérieure est semblable à celle des autres espèces de la tribu des Actiniens, et qu'il y a huit ovaires jaunâtres se terminant en des fils contournés très longs. M. Forbes à d'abord décrit ce zoophyte sous le nom générique d'Actinia, et plus tardil l’a appelé Edwardsia vestita (3). (1) Stephano Delle Chiaje, Descrizione e nolomia degli animali invertebrati della Sicilia citeriore, &. IV, p. 124. 1841 .—Memorie sulla storia e notomia degli animali senza vert. del regno di Napoli, pl. 82, fig. 6, et pl. 103, fig, 8. 1829. (2) Annals and magazine of natural history, 47° sér., t. VIII, p. 244, pl.8, fig. 1-5. 1842. (3) T.-A. Spratt et Edw. Forbes, Travels in Lycia, Milyas and the Cibyratis, t. II, p. 422. 1847. SUR LE CÉRIANTHE. 345 Depuis les travaux de M. Delle Chiaje etde M. Forbes , aucune autre observation (du moins que je sache) n’a été publiée sur le Cérianthe, et là se bornent les notions que la science a acquises sur ce type intéressant. CHAPITRE I. OBSERVATIONS ZOOLOGIQUES. Tous les animaux qui composent la section des Zoanthaires mala- codermés (1) sont, à l'exception des Mynias, essentiellement côtiers ; mais, tandis que le plus grand nombre d’entre eux, comme les Acti- nies, s’attachent aux corps sous-marins où aux rochers au moyen d’un disque charnu, d’autres, les Edwardsies, par exemple, vivent librement dans le sable ou dans la vase. Les conditions d'existence du Cérianthe sont différentes, à certains égards , de celles des deux derniers genres que je viens de citer, bien qu'elles les rappellent l’un et l’autre. I ressemble, en effet, aux Edwardsies, en ce que son corps, cylindrique dans presque toute sa longueur, est subconique et libre postérieurement ; mais il habite toujours à la même place dans un tube feutré qu'il sécrète, et qui adhère par sa base aux pierres situées sous la vase. Il en résulte que, malgré l’absence de disque pédieux et la liberté de toute la surface de son corps, ce Coralliaire vit en réalité fixé, et même d’une manière plus complète que les Actinies ordinaires, lesquelles, du moins, sont susceptibles de mouvements lents dans le sens horizontal. Pourtant, comme il n'existe aucune connexion de tissu entre l'appareil cutané et le tube qui l'entoure, il est possible que, dans certains cas , le Cérianthe abandonne complétement son étroite prison pour se laisser porter par les flots sur quelque autre point du rivage, ce que, du reste, je n'ai jamais observé. Jusqu'à présent, on n’a signalé la présence de ce genre que dans la Méditerranée, etseulementdans les lieux oùrègne habituellement (1) Voyez, pour les caractères et les subdivisions de ce groupe, le Tableau général de la classification des Polypes, placé en tête de la Monographie des Poly- piers fossiles des terrains paléozoïques , par MM. Milne Edwards et Jules Haime (Archives du Muséum, t. V), p. 7. 1851. 36 JULES HAÏME. le plus grand calme. Spallanzani l’a rencontré dans le golfe de la Spezzia, célèbre par la tranquillité de ses eaux ; Rapp, dans une des petites anses de la eôte du Languedoc ; Delle Chiaje, dans le golfe de Naples et la baie de Misène ; et M. Forbes, sur les rives méri- dionales de l’Asie Mineure, Quant à moi, je l'ai étudié à Mahon, c’est-à-dire un des ports les plus sûrs et les mieux abrités; et encore c’estuniquement dans les anfractuosités de ce port, qui sont surmontées de collines, et où le mouvement de la vague est à peme sensible, que les Cérianthes trouvent les conditions favorables à leur développement et à leur multiplication. Ces fleurs de mer, ou Marguerites de mer, comme les appellent les matelots de Minorque, émaillent de leurs vives couleurs les bords peu profonds des nombreuses petites criques situées vis-à- vis de lacapitale de cette île. Leur zone d'habitation est extrêmement limitée; elles s'épanouissent à quelques pouces au-dessous de la surface de l’eau, et l’on en voit très peu à plus d’un mètre de profon- deur ; mais contrairement à la plupart des Actinies , qui se placent de manière à passer successivement du sein des eaux dansun milieu simplement humide, le Cérianthe descend tout juste assez avant dans la mer pour que , lors des mouvements de marée basse, qui, comme on le sait, sont presque inappréciables dans la Méditerranée, il ne puisse jamais rester complétement à découvert. Je me suis assuré qu'il meurt promptement hors de l’eau. La nature du sol immergé dans lequel il habite présente, à Mahon, des particularités qui méritent d’être notées. Ce sol est formé de pierres solidement unies ensemble, et dans les interstices desquelles se dépose un sable vaseux très fin et noirâtre; or, c’est dans ces étroits espaces que s'engagent et se fixent les Cérianthes. Des circonstances semblables ne paraissent pas se représenter dans les autres localités où on les a également rencontrés : Rapp dit seu- lement qu'ils se tiennent dans les fonds vaseux, etDelle Chiaje, qu'ils vivent au milieu des éponges. Les individus du golfe de la Spezzia atlacheraient leur bourse membraneuse , suivant Spallanzani, aux racines des plantes marines. Si cette observation est exacte, on doit croire qu'ils sont alors soutenus dans la position verticale par ces plantes elles-mêmes, leur tube étant de sa nature trop flexible pour SUR LE CÉRIANTHE. 317 se maintenir droit au milieu de l’eau , s’il n’est étayé par quelque corps étranger. Enfin M. Forbes a trouvé les exemplaires qu'il à décrits enfoncés dans le sable, et il ne s'explique pas sur la manière dont leur gaîne est fixée. Quoi qu'il en soit, les bords des petites criques de Mahon offrent aux Cérianthes des conditions doublement favorables , en ce que le sable vaseux fournit à leur tube un milieu convenablement dense, et que les pierres entre lesquelles ils s'enclavent les protégent contre leurs ennemis. La gaine feutrée qui entoure et soutient le corps de ces polypes est entièrement enterrée dans la vase, ou bien son bord supérieur ne fait à la surface qu'une légère saillie ; elle se prolonge beaucoup, et souvent même se recourbe inférieurement. La surface de l’ani- mal est lisse et lubrifiée d’une mucosité qui lui permet de glisser aisément dans la cavité du tube. Grâce à l'introduction ou au rejet de l’eau dont il gonfle ou vide son corps à volonté, et au moyen surtout des contractions de ses diverses parties et de l’action de ses tentacules, il lui est facile de s'élever et de descendre rapidement dans cette gaine, où il peut même se retirer très profondément lors- qu'un danger le menace. L'état habituel du Cérianthe est l'extension. I a alors (pl. 7, fig. 4)les deux cinquièmes du corps hors de son tube ; son disque est élargi ; ses tentacules marginaux sont étalés, et ses appendices labiaux dressés ou faiblement penchés les uns sur les autres. Lors- qu'un petit Crustacé ou toute autre proie vient à toucher un point quelconque de la couronne appendiculaire externe, les tentacules voisins de celui qui a reçu l'impression se recourbent en dedans pour conduire le petit corps à la couronne centrale, et à leur tour les tentacules labiaux s’infléchissent pour l'introduire dans la bouche. Le plus souvent, la préhension s'opère ainsi sans que l’ani- mal effectue de mouvements généraux , et sans qu'il cesse même un instant d’avoir ses armes prêtes à ressaisir un nouveau butin. Mais si sa proie est considérable , si on le soumet au contact d’un corps dur ou à la pression de la main , si des secousses violentes se font sentir autour de lui, il commence par descendre légèrement dans son tube, relève les bords de son disque, et rapproche ses ten- 38 JULES HAIME. tacules en haut et en dedans; en même temps , tous ses organes perdent une partie de l’eau qu'ils contenaient, et diminuent de volume. Quand l'atteinte est légère ou ne se prolonge pas , il con- serve un instant ses tentacules groupés, etne tarde pas à les étendre de nouveau l’un après l’autre ; mais ordinairement , après les avoir ramenés en faisceau , il glisse brusquement jusqu’au fond de sa gaine, et laisse quelques moments s’écouler avant d’oser reparaître au dehors. Cette prudente retraite, à l'approche du danger, s'exécute avec une grande précision et une rapidité extrème ; elle rappelle tout à fait les actes semblables de quelques autres animaux ma- rins d’une organisation plus élevée, tels que les Serpules et les Sabelles. M. de Quatrefages a constaté que la lumière exerce une action marquée sur les Edwardsies. Ce savant zoologiste, ayant dirigé sur ces Actiniens la lumière d’une lampe concentrée à l’aide d’une len- tille, a vu qu'ils rentraient sur-le-champ leurs tentacules, mais que bientôtils les développaient de nouveau , « comme si, dit-il, après avoir cédé à un premier mouvement de surprise, ils s'étaient habi- tués à une impression qui n'avait d’ailleurs pour eux rien de désagréable (4). » Chez les Cérianthes on observe une influence analogue , mais plus prononcée encore. Lorsque je faisais tomber brusquement sur eux quelques rayons de soleil, ils relevaient aussi- tôt et rapprochaient leurs tentacules , mais ils ne les étendaient ensuite que très incomplétement. Il était visible que cette sensation les gênait, et qu'ils ne s’y accoutumaient qu'avec difficulté. Jai eu plusieurs fois l’occasion de remarquer dans le port de Mahon que, lorsque le ciel est sans nuages, ils ne se montrent pas en plein midi, au moins pendant l'été, et restent cachés dans leurs tubes jusqu’à ce que le soleil ait perdu un peu de son éclat. De même que les autres Zoanthaires malacodermés, les Cérianthes vivent très bien en captivité, pourvu que leur eau soit suffisamment renouvelée. Le liquide qui les baigne se corrompt rapidement; il se trouble, et prend une mauvaise odeur. Cet effet est, sans doute, düà la présence du mueus abondant que ces polypes rejettent par la (1) Annales des sciences nalurelles, 2° série, t. XVIII, p. 76. 1842, SUR LE CÉRIANTHE. 349 bouche et de celui qu'ils sécrètent par toute la surface de leur Corps. Lorsqu'on arrache un Cérianthe de la gaîne qu’il habite, et qu’on le transporte dans un vase rempli d’eau de mer , il tombe d’abord au fond comme un corps inerte, et y demeure étendu pendant quel- que temps sans tenter aucun mouvement; puis il étend ses ten- tacules pour pouvoir saisir la proie qui se présenterait , mais sans jamais avoir la force de redresser aucune autre portion de son corps qui reste toujours couché. Il peut cependant se déplacer un peu ; ses mouvements sont alors extrêmement lents, et il m'a semblé qu'ils s’effectuaient au moyen de contractions et d’allongements successifs du tronc et avec l’aide des tentacules, mais sans le secours de l'extrémité postérieure, mode de reptation qui ressemblerait un peu, comme on le voit, à celui que M. de Quatrefages a constaté chez les Edwardsies. Il est facile de replacer l'animal captif dans des conditions semblables à celles où il se trouve naturellement, en le suspendant dans un tube d’étoffe, ou seulement dans un anneau qu'on glisse au-dessous de son disque tentaculifère. Dans cette position , il ne tarde pas à s'épanouir complétement, et l’on peut alors l’observer aisément. Le corps du Cérianthe (pl. 7, fig. L) est allongé, vermiforme et cylindroïde. Ordinairement son diamètre est un peu élargi dans le tiers supérieur où les ovaires s’aperçoivent par transparence, de même que dans le voisinage de l’extrémité postérieure ; celle- ci est conico-convexe, libre, et terminée par une petite ouverture ronde. Toute la surface est uniformément lisse, ou ne montre que des stries transverses extrêmement fines; aucun de ses points n’adhère même imparfaitement aux parois de la gaine feutrée qui l'enveloppe. Le disque supérieur est médiocrement étendu , circulaire ou très légèrement elliptique. I porte sur son bord un grand nombre (une centaine environ)de tentacules similaires, simples, susceptibles d’adhérer , non rétractiles, eylindroïdes, mais pourtant un peu renflés près de leur base, et s’atténuant graduellement jusqu’à l'extrémité. Dans l’état d'extension complète, ils paraissent dispo- sés sur quatre cercles très rapprochés entre eux ; ceux du cercle 350, JULES HAIME. interne se dirigentun peu en haut, ceux du cercle suivant presque horizontalement, et ceux des deux cercles externes en bas, mais avec un inégal degré d’inclinaison. Tous ces tentacules représen- tent ainsi quatre cônes évasés, inégaux, et tous tronqués au même point, qui est le bord du disque; les deux externes étant dirigés dans un séns opposé à celui des deux internes. La bouche est médiocre, elliptique et peu saillante ; elle esten- tourée d’appendices semblables aux tentacules marginaux, de même forme, en même nombre et semblablement disposés, mais beau- coup plus grêles etplus courts. La portion du disque comprise entre ces tenfacules labiaux et la couronne tentaculaire externe est légèrement renflée, et l’on distingue à sa surface des lignes radiées correspondant à l’insertion des lames verticales intérieures. Les couleurs du Cérianthe varient beaucoup dans les divers indi- vidus. On en trouve qui sont entièrement d'un violet pur, tantôt très intense ét noirâtre, tantôt de la nuance archevèque où même tirant sur le rose. D’autres ont toutes leurs parties d’un jaune bru- nâtre plus ou moins foncé, avec leurs tentacules annelés de vert, Entre ces deux types très distincts, on rencontre tous les intermé- diaires. Il n’est pasrare de voir des exemplaires d'un fauve clair, qui n’ont que l'extrémité inférieure rose ou violette, ou dont les tenta- cules sont violets pendant que tout le reste de leur corps est jau- nâlre. Quelquefois le disque seul est presque noir avec les tenta- cules et le tronc très pâles ; ailleurs, c’est le disque qui est très pâle et les tentacules sont très foncés. Il arrive même qu'au milieu d’une couronne de tentacules clairs et verdâtres, deux ou trois seulement sont violets, et réciproquement. Enfin sur la surface du corps, où les deux nuances principales , brune-jaune ou violette, peuvent se fondre et passer graduellement de l’une à l’autre, on distingue aussi dans certains cas des bandes ou taches longitudinales, ordinaire- ment plus claires que le fond, où même des ponctuations très déli- cales (1). Toutes ces modifications de couleur , dont on reconnait bien vite (1) Les exemplaires décrits par M. Forbes avaient le disque et les appendices labiaux blancs ; les tentacules marginaux annelés de brun jaunâtre; la partie supérieure du tronc blanche, et l'inférieure d’un brun jaunâtre, SUR LE CÉRIANTHE. 351 le peu d'importance quand on observe un grand nombre d’indivi- dus, ont dû en imposer aux naturalistes qui n’ont pas fait ces com- paraisons, et qui n’ont eu entre les mains que quelques variétés bien tranchées. Si l’on joint à cette apparence extérieure les différences dépendant de l’âge et du degré d'extension de l'animal , on aura la somme des caractères inconstants , d’après lesquels Delle Chiaje a établi ses trois espèces de Cerianthus, et qui ont porté Rapp à regar- der son exemplaire comme spécifiquement distinet de celui qu'avait découvert Spallanzani. Ces considérations m’engagent à conclure que, jusqu'à présent, le genre Cérianthe se compose d’une espèce unique, autant toutefois qu’on én peut juger par les descriptions et les figures très incomplètes des auteurs. Malgré les variations considérables et presque infinies que je viens de signaler, il y a cependant, sinon dans les couleurs elles- mêmes, au moins dans le système de coloration , quelques traits que je n’ai jamais vus disparaître entièrement, et que par consé- quent je dois croire caractéristiques dans cette espèce. Toujours les tentacules sont annelés, des espaces clairs distincts , surtout à la face interne ou supérieure, alternant avec des espaces plus foncés ; toujours la base des grands tentacules est marquée en dedans d’une tache plus sombre que les parties voisines , et l’ensemble de ces taches donne lieu sur le disque à une étroite bordure circulaire ; toujours enfin sur la moitié supérieure du tronc, on reconnait les traces d’une ou deux bandes claires longitudinales. Des observations qui précèdent, on peut déduire les diagnoses suivantes : Gene CÉRIANTHE (CERIANTHUS). Coralliaire simple, habitant dans un tube feutré et flexible, qu'il sécrète à la surface de sa peau. Corps cylindroïde, libre postérieure- ment, où il présente une petite ouverture centrale, Tentacules mar- ginaux simples, Similaires, cylindro - coniques , adhésifs et non rétractiles ; la bouche entourée d’appendices labiaux en même nombre que les précédents, mais beaucoup plus petits qu'eux. 352 JULES HAIME. CERIANTHUS MEMBRANACEUS, Tubularia...., Spallanzani, Mem. della Soc. ital. di Verona , t. II, 2° part., p. 627. 1784. Tubularia membranacea, Gmelin, Lin.\Syst. nat., édit. 43°, t. VI, p.3836. 1789. Tubularia solitaria ? Rapp, Nova acta Acad. cur. nat., t. XIV, 2° part., p. 653, pl. 38, fig. 2. 1829. Cerianthus cornucopiæ, Delle Chiaje, Deser. e not. degli anim. invert. della Sic. cit, €. IV, p.124, pl. 154, fig. 42 et 45; pl. 455, fig. 16 et 22 ; et pl. 156, fig. 3, 5 et 8. 1841. Cerianthus Breræ, id., ibid., p. 124, pl. 156, fig. 2. Cerianthus actinoides, id., ibid., p. 124, pl. 34, fig. 24, et pl. 453, fig. 12. Aclinia.….… ? Forbes, Ann. and. mag. of nat. hist., Are sér., t. VIII, p. 244, pl. 8, fig. 1-5. 1842. Edwardsia vestita, Spratt et Forbes, Travels in Lycia, etc.,t IT, p. 122. 1847. Cerianthus cornucopia , Milne Edwards et Jules Haime, Arch. du Mus. d'hist. nat., L. V,p. 14, 1851, Corps lisse, présentant une ou deux bandes latérales claires ; disque tentaculifère entouré d’une ligne foncée; tentacules très nombreux, grèles, annelés. Dimensions des individus adultes : longueur, totale de 45 à 20 centimètres ; diamètre du corps, de 4 1/2 à 2 1/2 ; diamètre de la couronne tentaculaire, de 42 à 14. CHAPITRE II. OBSERVATIONS ANATOMIQUES ET PHYSIOLOGIQUES. La contractilité extrême des tissus dans tous les Zoanthaires a rendu très difficile jusqu’à ce jour l'étude de l’organisation de ces animaux. Les moyens qu'on a essayés pour diminuer en eux l’éner- gie de cette propriété sont très insuffisants. Le Cérianthe n'échappe pas à la loï commune, mais il paraît être une des espèces chez les- quelles cette excitabilité tend à s’affaiblir, et je l'ai toujours trouvé moins réfractaire à l’action du scalpel que les Cereus, les Adamsies, les Anémonies et les Cladocores, que je disséquais en même temps sur les côtes des Baléares. Cette contractilité s'exerce d’ailleurs , d’une manière {rès inégale, dans les diverses régions de son corps, SUR LE CÉRIANTHE. 393 et présente beaucoup moins d'intensité autour des organes de la digestion et de la génération que sur le disque et dans les deux tiers inférieurs du tronc. Lorsqu'on fend l'animal suivant sa longueur, ilseraccourcit encore notablement ; mais comme, pendant l'état d'extension , j'avais pu reconnaître par transparence l'étendue occupée par les ovaires , il m'a été facile de constater que la vivisection n’amenait aucune dimi- nution dans cette quantité, tandis que les parties situées au-dessous se raccourcissaient considérablement, et que le bourrelet du disque, mesurant la distance comprise entre les tentacules marginaux et les labiaux, disparaissait presque complétement. Tous les appen- dices perdaient environ un quart de leur longueur par suite de l'amoindrissement de leur extrémité. Les irritations locales pou- vaient déterminer encore de nouvelles contractions, mais qui s’ef- fectuaient toujours dans des proportions semblables, selon les diverses parties. Il est utile, on le conçoit, de tenir compte de ces manifestations inégales de la contractilité dans les différents organes du Cérianthe, si l’on veut avoir une juste idée de leurs rapports. La vitalité se conserve assez longtemps dans les individus mu- tilés ; mais aussitôt qu'ils sont morts leurs tissus s’altèrent avec plus de rapidité encore que ne l’a constaté M. de Quatrefages pour les Edwardsies. J'en ai vu quelques-uns dont l’une des extrémités se contractait encore sous la piqüre d'une aiguille, pendant que l’autre commençait déjà à se décomposer. Chacune des fonctions physiologiques n'ayant pas toujours pour siége un appareil spécial , il est impossible d'introduire ici un ordre logique dans l'examen des divers organes. Il me parait simple et naturel à la fois de procéder de dehors en dedans, et ensuite du sommet à la base du corps. Cette marche nous fera passer succes- sivement en revue: 1° la gaine protectrice ; 2 les téguments ; 3 la tunique musculaire ; 4° les tentacules marginaux et labiaux ; 5° les loges sous-tentaculaires ; 6° l'appareil digestif; 7° l'appareil reproducteur ; 8° la gouttière interlamellaire impaire ; 9° enfin la tunique interne. Je n'ai pu découvrir dans le Cérianthe ni système nerveux , ni appareil vasculaire proprement dif. 4° série. Zooc. T. L. ( Cahier n°6.) * 23 3bli JULES HAIME. $ 1. — Gaine protectrice. Quoique cette partie constitue une enveloppe morte , sans adhé- rence avec la surface de l’animal, elle n’en est pas moins un produit complétement organique, et dont la structure mérite d’être étudiée avec soin. Spallanzani et Rapp ont très bien reconnu qu’elle n’a aucune connexion avecle polype; ils lui donnent l’épithète de mem- braneuse, et la comparent, l’un à l’étui des Tubulaires, l’autre au tube des Sabelles, mais en faisant observer, dans les deux cas, qu’elle se distingue par sa flexibilité très grande. Delle Chiaje la considère comme une mucosité plus abondante que celle qui enduit le corps des diverses Actinies, mais {out à fait de même nature. Cette gaine protectrice, dont l'épaisseur est souvent considérable, a un aspect feutré plutôt que membraneux. Elle est formée de cou- ches concentriques peu distinetes et fortement unies entre elles , dont les extérieures se déchirent en lambeaux, tandis que les parois internes du tube sont parfaitement lisses. Lorsqu'on cherche à la rompre, on éprouve la même résistance que quand on veut séparer en plusieurs parties une bourre de laine ou une pelote de chanvre , et la déchirure montre qu'on a également affaire à une substance filamenteuse très dense ; mais ce n’est qu'avec le secours du micro- scope, et même en employant des grossissements assez forts, qu’on peut arriver à en distinguer les éléments. Je me suis assuré par ce moyen que toute la masse de ce tube feutré est uniquement com- posée de fils extrêmement longs et extrêmement déliés s'enchevé- trant de mille manières , et je n’ai pas tardé à me rendre compte de la nature et de l'origine de ces filaments. J'ai trouvé, en effet, qu'ils tenaient par leur base à de petites coques vides en totalité ou en partie, et qu'ils constituaient avec elles des organites de tout point semblables aux corps qu'on à décrits dans les Actinies et les Aca- lèphes sous les noms d'organes urticants et de vésicules ou capsules filifères. Je les appellerai nématocystes. Ces vésicules spéciales qui, comme nous le verrons plus loin, se forment dans l'épaisseur de la peau , et viennent ensuite sortir à sa surface , ont des proportions relativement assez considérables , et sont surtout remarquables par l'extrême longueur des fils pelotonnés SUR LE GÉRIANTHE. 359 qu'elles renferment. J'en ai distingué trois sortes principales qui diffèrent un peu entre elles par la taille et par la disposition du fila- ment intérieur. Ces particularités correspondent peut-être à divers états du développement d’une seule et même espèce d'organites : mais comme je n’ai pas trouvé de degrés intermédiaires , et que d’ailleurs ces trois formes offrent des caractères assez tranchés , il est bon de les décrire séparément. Les vésicules les plus abondantes constituent des ovoïdes allongés (pl 7, fig. 2) dont la longueur fait un peu plus du double de la largeur, et dont l’une des extrémités est un peu moins grosse que l’autre. Leur enveloppe est hyaline, très mince, résistante, sans texture appréciable, et semble fermée de toutes parts. Leur cavité est presque entièrement remplie par un fil grèle, et irrégulièrement pelotonné sur lui-même un grand nombre de fois. La plus grande étendue de ces corpuscules est de 0,07 de millimètre; mais j'es- time que le filament intérieur , lorsqu'il est déroulé, est quatre ou cinq cents fois plus grand, ce qui lui donnerait une longueur réelle de 3 à 4 centimètres, bien que son diamètre soit moindre que 0,004 de millimètre. Du moment où la vésicule arrive à la surface de l'animal , elle se présente, au moins dans les circonstances ordi- naires, comme le montre la figure 2 de la planche 7, c'est-à-dire qu'elle a son fil pelotonné tout entier dans son intérieur; mais, après avoir séjourné quelque temps dans l’eau, etsurtout lorsqu'elle arrive en contact avec quelque corpuscule , il s'opère un mouvement brusque et instantané dans les parties voisines de son petit bout, et son enveloppe s'évagine en ce point de manière à montrer au de- hors un tube cylindroïde transparent long de 0,5 à 0,7 de mil- limètre , mais qui atteint à peine 0,01 de millimètre dans sa plus grande largeur (pl. 7, fig. 3). Ce tube entraine avec lui, par son extrémité, un des bouts du filament , dont presque toute la masse reste encore quelques instants dans l’intérieur de la vésicule un peu diminuée de volume; puis, par un mouvement très rapide, le fil délié sort à son tour, soit en une seule fois ou à deux ou trois reprises , et finalement la coque ovoïde ne tarde pas à être com- plétement vidée. I m'a semblé que c'était encore par évagination que s’eflectuait l'issue de ce filament, qui serait alors un cylindre 396 JULES HAIME. creux très délicat. Le tube formé en premier lieu se termine d’abord de manière à fournir l'apparence d’un petit canal central , et ensuite une certaine graduation s'établit au même point entre le diamètre de ce tube et celui du filament, comme si la force pro- pulsive avait étiré la substance continue qui constitue les parois de l’un et l’autre cylindre. Malheureusement ha célérité, pour ainsi dire électrique, avec laquelle s'opère le déroulement ne m'a pas permis de changer cette probabilité en certitude. La seconde sorte denématocystes (pl. 7, fig. 4) entre encore pour une large part dans la constitution de la gaîne feutrée des Cérianthes. Elle ressemble beaucoup par ses caractères extérieurs à celle que je viens de décrire ; seulement elle est relativement moins épaisse, et, en général, un peu arquée, et amincie à l’une de ses extré- mités. Pour une longueur de 0,05 à 0,06 de millimètre, elle a un diamètre qui dépasse à peine 0,015 de millimètre. Son fila- ment est de même volume que celui des grosses vésicules; il remplit également la cavité intérieure et est pelotonné de la même manière, mais il se déroule différemment. En effet, celui de ses deux bouts qui s’avance au dehors me paraît avoir été d’abord libre dans la vésicule , et sortir ensuite directement par un pore ouvert à l'extrémité atténuée de l’enveloppe hyaline. Comme, dansles deux sortes de nématocystes dontil vient d'être question, le filament remplit à peu près également la cavité interne, et que, dans l’un et l’autre eas, il présente le même diamètre , il existe nécessairement une relation entre la capacité de ces cap- sules et la longueur de leur filament. La capacité des petites faisant un peu plus du tiers des grandes, leur filament atteindra une éten- due de 4 centimètre 1/2 environ, si l'évaluation que j'ai donnée précédemment approche suffisamment de la vérité. Au milieu des nématocysles de ces deux formes , on en trouve encore d’autres relativement très rares (pl. 7, fig. 5), dont le fil, disposé verticalement en caducée sur un des côtés, et pelotonné irrégulièrement à la base du côté opposé, n’occupe qu’une petite partie de la capacité intérieure de la vésicule ellipsoïdale. Les di- mensions de cette troisième sorte de capsules filifères sont sensible- ment égales à celles de la seconde; elle s’en rapproche aussi beau- SUR LE CÉRIANTHE. 397 coup par sa forme , mais elle est à peine atfénuée à l’une de ses extrémités , qui d’ailleurs reste droite. Le diamètre de son filament est encore le même que dans les capsules précédemment exami- nées ; mais je ne crois pas que sa longueur {otale, lorsqu'il est dé- roulé, fasse plus de quinze fois celle de son enveloppe, soit environ 0,9 de millimètre. Je n'ai pas réussi à voir sortir le fil de cette vésicule ; la singulière disposition qu'il présente dans sa première portion semble destinée à lui donner beaucoup d’élasticité Tels sont les éléments qui entrent dans la composition du tube protecteur des Cérianthes. Les chiffres approximatifs énoncés plus haut montrent que la proportion des coques vides à la masse fila- menteuse est extrêmement faible, et cette relation est très frappante lorsqu'on place sous le microscope un lambeau quelconque de la gaine. La longueur et la ténuité des fils enchevêtrés sont des con- ditions favorables à la flexibilité et à la solidité de l’ensemble du feutre qui les constitue ; la substance de ces fils est, en outre, très tenace, et, pour les rompre, il faut exercer sur eux une traction assez forte relativement à leur diamètre. Cela explique comment la gaine protectrice peut être molle en même temps que très résistante et difficile à déchirer. L'action prolongée de l’eau de mer n’altère que très lentement la substance transparente et d'apparence cornée dont sont formés les vésicules et leurs fils. J’ai conservé pendant plusieurs mois un cer- tain nombre de ces organites sans qu'ils aient perdu aucun de leurs caractères primitifs. Cette propriété assure une assez longue durée à la gaine protectrice, et semble dispenser l'animal de la renouveler fréquemment. Pourtant l'épaisseur considérable qu'elle offre ordi- nairement prouve que la sécrétion des nématocystes est très éner- gique. On remarque aussi, en général, un rapport direct entre l'épaisseur ou la densité du tube feutré, et la taille de l'individu qu'il renferme; ee qui doit faire supposer que cette sécrétion s'exerce à peu près également aux différents âges, et qu’elle ne cesse pas chez les adultes. Du reste, on l’active singulièrement en enlevant le Cérianthe de son tube , et en le plaçant librement dans l’eau. 1 lui suffit alors de quelques heures pour former à la surface de son corps d’épais an- 398 SULES BAIME. neaux, où même une enveloppe complète. Ce nouveau produit, dont la couleur est blanchâtre , a l'aspect d’une mucosité filante , et se trouve entièrement composé de nématocystes de tout point semblables à ceux des vieilles gaînes. Dans le port de Mahon , les tubes des Cérianthes retiennent dans les interstices de leur tissu un grand nombre de molécules vaseuses, de petits grains de sable ou de petits corps microscopiques, tels que les Navicules ; mais ces matériaux étrangers ont presque toujours un volume insignifiant, et n’ajoutent que très peu à la solidité de l'ensemble. Les exemplaires trouvés dans la mer Égée ont, sui- vant M. Forbes, leur gaine fortifiée par du gravier et des coquilles ; on conçoit bien que cet effet puisse se produire dans une cer- taine limite, mais je ne crois pas que cette gaine puisse jamais de- venir bien forte par ce moyen, parce qu'elle n’a pas la propriété d’agelutiner les corps solides. De l’examen qui précède, il résulte manifestement que le tube du Cérianthe diffère tout à fait, par ses caractères anatomiques , de la partie correspondante chez d’autres animaux marins, et que l’on aurait tort de le comparer sous ce rapport, soit au tube des Tubu- laires , soit à celui des Térébelles. Jusqu'à présent, on ne connaît aucun autre exemple, dans l’embranchement des zoophytes et dans le règne animal tout entier , d’une excrétion de même nature servant de retraite à l'animal qui l’a produite. Au point du vue physiologique, au contraire, il y a sous ce rapport une curieuse analogie à établir entre des animaux de classes très différentes , dont le genre de vie est presque identique. Les Cérianthes ont , en effet, des conditions biologiques qui rappellent complétement celles de certaines larves d’Acalèphes (Tubulaires , ete.) ou d’Insectes (Friganes, etc.), et principalement celles de plusieurs Annélides. Quelques espèces de Térébelles offrent même dans leur station , dans leur mode d'extension, dans la manière dont elles exécutent leurs mouvements, une ressemblance si grande avec les Cérianthes, qu'il devient facile de les confondre lorsqu'on les regarde sous l’eau à quelque distance. sé R SUR LE CÉRIANTHE. 399 S2, — Téguments. La peau des Cérianthes est lisse, mince, visqueuse, peu résistante, et présente beaucoup d’homogénéité dans les diverses régions où on l’observe. Elle couvre également toute la surface du corps, en- toure tous les appendices extérieurs, se replie en dedans de la : bouche pour tapisser les parois du tube intestinal et même inférieu- rement rentre un peu dans la cavité générale avec le sphincter de l'orifice terminal. Cette enveloppe complète, qui est partout adhérente à la couche musculaire située au-dessous, et qui suit exactement les modifica- tions de forme et de volume qu'éprouve cette dernière, est en appa- rence d’une très grande simplicité, et les auteurs qui l'ont décrite (Rapp et Delle Chiaje) n°y ont vu qu'une membrane délicate formée d’une couche cellulaire unique. Lorsqu'on cherche à la détacher sur un individu vivant ou mort depuis peu de temps, il est en effet difficile de supposer que sa com- position soit plus complexe ; mais la macération fait voir qu’elle résulte réellement de l’intime union de plusieurs plans super- posés, dont la constitution élémentaire est différente. Déjà M. de Quatrefages avait pu séparer deux feuillets dans les téguments des Edwardsies, l’épiderme et le derme, dont il a étudié la structure avec le plus grand soin. Il a très bien reconnu dans la partie profonde de l’épiderme des petites granulations colorées, et sur le derme d’abondantes capsules filifères. Il avait donc par le fait observé, dès 1842, tous les élérnents qui caractérisent les diffé- rents Strates tégumentaires retrouvés , en 14851, chez d’autres Actiniens par le docteur Hollard (4). Ce dernier auteur divise du premier coup la peau de ces animaux en quatre strates, qu’il appelle épithélium, corps pigmental, couche de capsules cylindracées et fond d'éléments granulo-cellulaires. J'ai reconnu dans les téguments du Cérianthe les deux feuillets principaux et aisément séparables , décrits pour la première fois chez les Edwardsies , et, dans chacun de ceux-ci, deux des strates (1) Annales des sciences naturelles, 3° série, t. XV, p. 267, 4851. 360 JULES HAIME. distingués plus tard chez les Actinies. Le premier feuillet se com- pose ici de deux plans superposés, qui correspondent, en procé- dant de dehors en dedans, à l’épithélium et au corps pigmental de M. Hollard, tandis que les deux plans du second feuillet sont formés par ceux qu'il a nommés couche de capsules cyhindracées et fond d'éléments granulo-cellulaires. On ne saurait cependant attacher beaucoup de valeur à cette classification ; car, s’il est vrai que le plus ordinairement la macé- ration sépare de la sorte, deux par deux, les strates de la peau du Cérianthe, il peut arriver aussi que la seconde couche entraine avec elle la troisième, ou, ce qui est moins rare encore, que la première se détache seule. Ces irrégularités tiennent à la faible cohésion des éléments qui entrent dans la constitution des deux couches inter- médiaires , la seconde et la troisième. Première couche ou couche épidermique. — C'est une lame transparente, très délicate, formée de cellules un peu inégales, dont les plus nombreuses sont larges environ d’un centième de milli- mètre. Quelques -unes de ces cellules se rapprochent beaucoup de la forme sphérique, mais la plupart d'entre elles sont irrégulière- ment polyédriques ; elles ne renferment que peu ou point de gra- nules. Il est très facile de les disjoindre ; pourtant elles sont assez solidement unies pour constituer , par leur ensemble, une mem- brane imparfaite. Deuxième couche ou couche pigmentale. — Au-dessous de la lame épidermique , on trouve une multitude de cellules inégales , dont le diamètre varie de 0,005 à 0,015 de millimètre, et qui sont toutes sphériques ou faiblement déformées. Elles con- tiennent un certain nombre de grains irréguliers n’ayant guère qu’un millième de millimètre, et dont la couleur parait être par réfraction tantôt le rouge carmin, tantôt l’orangé foncé. Elles adhèrent à peine par leurs points de contact, et dans leurs inter- valles on remarque beaucoup de grains colorés semblables aux grains intérieurs. La couche pigmentale est plus épaisse que la pré- cédente, bien qu'encore extrêmement mince. Troisième couche ou couche de nématocystes. — 11 n'existe aucune cohésion entre les éléments qui la composent, et qui son SUR LE CÉRIANTHE, 361 d’ailleurs assez différents les uns des autres. Elle est constituée en majeure partie par les trois sortes de nématocystes que nous avons reconnues dans la gaine protectrice, et qu’on trouve fréquem- ment ici enveloppés dans la cellule qui les sécrète. Ainsi le corps représenté planche 7, figure 6, correspond évidemment à notre première sorte de la figure 2, et celui de la figure 7 à notre deuxième sorte de la figure 4. Quant à celui de la figure 8, il paraît être l’ori- gine de notre troisième sorte. On rencontre aussi, à divers degrés de développement, de très petites vésicules ellipsoïdales, très trans- parentes, mais dans lesquelles j'ai cependant pu distinguer desstries obliques qui répondent certainement au commencement d’un fila- ment intérieur (pl. 7, fig. 9, 10, 11, 12), et je suis porté à croire que ces corps ne sont que de jeunes vésicules filifères de la pre- mière sorte. Indépendamment de ces diverses capsules, la troisième couche tégumentaire renferme des cellules transparentes et sans granulations intérieures , et dont un des bouts , ou même tous les deux , sont étirés en pointe , ce qui leur donne la forme de poires , de cornues, de navettes, etc. C’est, comme on le voit, dans cette partie de la peau que naissent et se développent les nématocystes, destinés à arriver au dehors pour constituer le tube feutré qui sert de retraite au Cérianthe. D'après ce que j'ai dit de la structure lâche des deux premières couches tégumentaires, on comprend aisément que ces capsules peuvent les traverser ; leur sortie doit être d’ailleurs puissamment aidée par les diverses contractions du corps. J'ai trouvé un certain nombre de ces organites engagés dans les couches épidermique et pigmentale, ayant leur grand axe normal à la convexité du tronc, et leur extrémité atténuée dirigée en dehors. Quatrième couche ou couche profonde. — Les éléments de cette dernière couche sont beaucoup moins distincts,'et plus intimement unis que ceux des strates précédents. Ils forment une véritable membrane, très délicate et peu résistante, à la vérité, mais tout à fait continue ; elle est très transparente, et montre de très pelites granulations avec des stries courtes, irrégulières, et diversement croisées. Il résulte de ces observations histologiques, tout incomplètes 362 JULES HAIME. qu’elles sont, que le système tégumentaire du Cérianthe est loin de présenter la simplicité que lui supposaient Rapp et Delle Chiaje, et qu'il n’est pas moins complexe que l'enveloppe correspondante des Actiniens. La diversité et la complication des nématocystes sont même portées ici beaucoup plus loin que chez ces derniers. Les quatre couches qué je viens de décrire se retrouvent égale- ment sur toute la surface du Cérianthe, etne se modifient pas sensi- blement dans les diverses régions. La composition de la peau qui recouvre les tentacules n’est pourtant pas complétement identique avec celle du reste du corps ; mais la seule différence consiste dans la présence de nouvelles formes de vésicules filifères dans la troi- Sième couche de ces organes appendiculaires. La surface des téguments est dépourvue de cils vibratiles propre- ment dits ; mais en employant de forts grossissements, jy ai aperçu des prolongements analogues peu nombreux, excessivement ténus et courts, qui sont peut-être des cils atrophiés, et qui, dans certains cas, m'ont paru s’agiter un peu. Le rôle physiologique de la peau est aussi considérable chez le Cérianthe que chez les Actinies, c’est-à-dire qu’elle est le siége de lexhalation, de l'absorption, de la respiration et de diverses sécré- tions. Elle n’exerce aucune action irritante sur l’épiderme, ni même sur les muqueuses de l’homme ; sa sensibilité tactile ne paraît offrir une certaine délicatesse que dans les tentacules. $ 3. — Tunique musculaire. La tunique musculaire constitue un tube cylindroïde complet, et replié en dedans à ses extrémités. Elle est partout composée de deux plans de fibres superposés, les fibres de la couehe externe étant circulaires et transversales , celles de la couche interne verti- cales et conséquemment perpendiculaires aux précédentes. Cette structure a été mise en évidence par M. de Quatrefages chez les Edwardsies, et par divers auteurs récents chez d’autres Actiniens. Mais Delle Chiaje n’a fait que la soupçonner dans le Cérianthe , et Rapp parle seulement des fibres longitudinales , les- quelles sont, il est vrai, les plus fortes et les plus nombreuses. SUR LE CÉRIANTHE. 363 Ces diverses fibres, qui sont hyalines ou à peine colorées, pré- sentent, suivant leur longueur, quelques stries faibles et interrom- pues. La manière dont elles se rompent, jointe à ce dernier carac- tère, me semble indiquer qu’elles sont composées de fibrilles plus petites ; toutefois il m'a été impossible de séparer ces fibrilles sur une certaine étendue. Je n'ai jamais pu distinguer de stries trans- verses. Le diamètre des fibres musculaires des Cérianthes est d'environ 4 centième de millimètre, c’est-à-dire notablement supérieur à celui des Edwardsies, qui est de À cent-cinquantième suivant M. de Quatrefages, et surtout à celuides Actinies, que M. Hollard évalue à L trois-centième seulement. Au moyen des contractions et dilatations totales ou partiellesde cette tunique musculaire, l'animal chasse ou fait rentrer à volonté l'eau contenue dans son corps, et en même temps diminue ou aug- mente de volume, mais il ne modifie ordinairement que très peu sa forme naturelle. Je ne l'ai jamais vu se contourner en spirale, ainsi que l’a figuré M. Forbes. $ 4. — Tentacules. Les organes appendiculaires forment, comme je l'ai dit plus haut, deux groupes de couronnes séparés l’un de l’autre par une large zone lisse. Quoique les tentacules labiaux aient une forme, une structure et des fonctions presque identiques avec celles des tentacules marginaux , ils s’en distinguent très nettement par leur origine et leurs rapports : c’est pourquoi je les examinerai séparé- ment. A. Tentacules marginaux ou proprement dits. — Ces tentacules, comme chez les autres Zoanthaires, sont à la fois des organes des sens, de respiration et de préhension; de plus ils agissent ici comme organes locomoteurs, en aidant aux mouvements que l’ani- mal exécute dans son tube protecteur. Structure des tentacules marginaux. — On peut les considérer comme des évaginations de l’enveloppe générale , et on les trouve également composés des quatre couches cutanées avec leurs divers 364 JULES HAIME. éléments, et des deux plans de fibres musculaires qui constituen cette enveloppe ; seulement les muscles sont ici très amincis, tandis que la troisième couche tégumentaire est très développée , et ren- ferme quelques nouvelles formes de nématocystes. La cavité intérieure dont sont creusés ces appendices selon toute leur longueur, s'ouvre largement dans les espaces situés autour du tube digestif. Il est très facile de s’en convaincre, soit par la dissec- tion, soit en poussant une injection par les chambres sous-tentacu- laires; dans ce dernier cas, lorsque la matière colorée est arrivée aux 4/5 environ de la longueur totale du tentacule, c’est-à-dire à 6 ou 8 millimètres de son extrémité, elle sort en abondance par un pore très étroit et en forme de boutonnière, qui est situé à sa face interne. La substance de l'injection pénètre quelquefois au delà de ce pore et tout près du sommet; mais il m'a été impossible , même en exerçant au-dessous une légère pression, de la faire sortir par l'extrémité , et j'ai tout lieu de croire que celle-ci est complé- tement imperforée comme chez les’Edwardsies. Le pore interne remplace ici l'ouverture terminale des tentacules des Actinies ; il remplit les mêmes fonctions, et sa position seule l’en distingue. Les grains de la couche pigmentale sont ordinairement trop fon- cés et trop serrés pour permettre de reconnaître aisément par trans- parence des courants dans le liquide qui baigne la cavité des ten- tacules. Pourtant , chez de jeunes individus , j'ai vu distinctement des corpuscules qu'ils avaient avalés passer avec assez de rapidité d’une chambre sous-tentaculaire dans la cavité du tentacule corres- pondant. Il n’est pas rare de trouver aussi des œufs engagés dans cette cavité, lesquels sortent bientôt par le pore interne dont j'ai parlé. Le fluide des tentacules est done agité de mouvements assez énergiques, et analogues à ceux que M. de Quatrefages a observés chez les Edwardsies (L), et à ceux que j'ai moi-même vus très net- tement dans de jeunes Anémonies (2). Il y a cependant cette diffé- (1) Loc. cit., p. 99, pl. 2, fig. 42. (2) On y distingue, à l'aide d’un assez faible grossissement, des globules pig- mentaires très réguliers, de 0,015 de millimètre environ, fortement colorés en brun roux, qui suivent un courant ascendant et descendant ; ils montent du côté externe, et descendent du côté interne, De temps en temps ils interrompent SUR LE CÉRIANTHE. 369 rence, que jamais ici je n'ai trouvé de globules de pigment dans la cavité des tentacules. J'ai pu m’assurer que la paroi interne de cette cavité est garnie de cils vibratiles petits et très nombreux, qui pro- duisent les courants que je viens de signaler. La peau des tentacules contient, outre les trois sortes de néma- tocystes de la peau du trone, des corps de même nature, qui peuvent se rapporter à trois autres sortes. Ce sont d’abord des capsules hyalines (quatrième sorte) ellipsoïdales, longues au plus de 0,04 et larges de 0,01 de millimètre, droites, et ne contenant qu'un fil peu développé et enroulé en spirale autour d’un stylet longitu- dinal (pl. 7, fig. 43). Les nématocystes d’une cinquième sorte sont très semblables aux précédents, mais amincis à l’une de leurs extrémités, arqués et beaucoup plus grands ; ils ont en lar- geur 0,015, et en longueur 0,06 de millimètre (fig. 14). Peut-être ne forment-ils qu'un état plus avancé des vésicules de la quatrième sorte , mais je n’ai pas trouvé de grandeurs intermé- diaires. Enfin, ceux de la sixième sorte sont subeylindriques , un peu irréguliers, constitués par un fil spiral à tours contigus , et déroulable à la manière des fils de bretelle ; les uns sont entourés complétement par une fine enveloppe, reste de la cellule dans la- quelle ils se forment (fig. 15,16, 17), et le fil intérieur la traverse en se déroulant (fig. 18). Chezles autres le fil se déroule librement (fig. 19, 20 ), soit par suite de la destruction de leur enveloppe cel- lulaire, soit parce qu'ils ont été produits avec d’autres dans une cel- lule unique (fig. 24); ils varient en longueur de 0,02 à 0,04 de millimètre , et en largeur de 0,002 à 0,007 de millimètre. Parmi les six formes de nématocystes contenus dans les tentacules , ceux de la dernière sorte sont les plus abondants de tous ; les plus rares sont les capsules dont il a été question immédiatement avant. Disposition des tentacules marginaux. — J'ai dit plus haut que l'appareil appendiculaire marginal représente , dans l’état d’exten- ce trajet pour osciller en différents sens , et un certain nombre d’entre eux s'ar- rêtent sur plusieurs points pour y former de petits groupes. Ces amas de pigment, auxquels est due la coloration fauve de l'animal à cette époque, sont surtout larges et rapprochés vers la base des tentacules, et sur la paroi des loges sous-tenta- culaires, 366 JULES HAÏME, sion , quatre cônes ou entonnoirs ordinairement très distincts. Ces cônes sont très semblables entre eux , mais les deux inférieurs s’in- sèrentsur une même rangée circulaire, ou forment en apparence un seul cycle, en prenant ce mot dans le sens précis que lui a attribué M. Hollard. Tous les tentacules se ressemblent extrèmement par leur forme, leur mode de coloration et même par leurs dimensions ; toutefois ceux de la dernière rangée circulaire sont un peu plus courts et plus grêles que ceux des deux rangées internes. L'absence de toute autre différence, et surtout d'inégalités appréciables dans l'insertion des tentacules internes, empêche de ramener par l’ob- servation directe ces trois cycles apparents aux diverses lois de mul- tiplication que M. Hollard à formulées le premier pour les Acti- niens (L), et que, presque dans le même temps, M. Milne Edwards et moi-même nous avons rectifiées en partie, et surtout généralisées par l'étude comparative des cloisons solides correspondant aux ten- tacules dans tous les Zoanthaires à polypier (2). Les seules indications qui puissent guider ici dans l’application de ces lois sont, d’une part, la connaissance acquise du nombre des éléments du premier eyele réel (je montrerai plus loin qu'il est de k seulement), et ensuite celle du nombre des éléments des cycles apparents. Chez les individus les plus développés que j'ai rencon- trés, le nombre des tentacules marginaux était, pour chacune des deux rangées internes, 32, et pour l’externe ( divisible en deux cônes égaux), 64 ; total : 428. Si l’on suppose qu'il ne s’est produit, dans l’évolution des cycles réels, aucune irrégularité, comme parai- trait l'indiquer ce multiple du chiffre originel et de ses dérivés, il est évident ici que le premier cycle apparent répondrait aux quatre premiers cycles. Les eyeles seraient done au nombre de six, et tous complets ; mais l’expérience montre qu'il est très rare de trouver des Zoanthaires ayant un appareil radiaire aussi riche en éléments , et aussi régulier dans toutes les parties. On pourrait admettre encore, et la direction de la moitié des tentacules du der- nier cycle apparent semble donner beaucoup de probabilité à cette (1) Études sur l'orgamisation des Actinies, in-4. 1848. (2) Observations sur la structure et le développement des Polypiers en général (Annales des sciences naturelles, 3° sér., t. IX, p. 64). 1848. SUR LE CÉRIANTHE. 367 opinion, que le dernier cycle réel est réduit à la moitié de ses élé- ments, mais que, dans certains points, il s’est développé un égal nombre de tentacules dépendant en réalité d’un septième eycle. Dans cette seconde hypothèse, les 32 tentacules du premier cône pourraient représenter encore les quatre premiers cycles complets, et ceux du second cône le cinquième cyele complet; mais ceux du {roisième cône ne correspondaient qu'à la moitié du sixième eycle, et ceux du quatrième cône au quart seulement du septième cyele. Beaucoup d'individus adultes présentent le nombre total de 96 tentacules ; d’autres, moins développés, n’en ont queGk, ete. Il est facile de se rendre compte de tous ces multiples de 4 par l'espèce de stérilité qui frappe, pour ainsi dire normalement, la moi- tié ou le quart des cycles, lorsque ceux-ci sont un peu nombreux ; mais on rencontre aussi des chiffres qui ne se prêtent pas à de sem- blables combinaisons, et qu'on ne peut expliquer que par des irré- gularités tout à fait partielles. L'étude suivie du développement donnerait, sans doute, la clef de toutes ces exceptions, qui ne por- tent probablement que sur les tentacules des derniers ordres. En attendant que nos connaissances se complètent sous ce rapport, il est utile de remarquer que les quatre groupes de tentacules, qui, dans l’état d'extension , ont l’aspect de quatre cônes évasés , sont toujours égaux numériquement dans un même individu. La régularité radiaire de l'appareil appendieculaire marginal tout enlier, et de chacune des séries circulaires qui le composent, peut être considérée comme parfaite , et il ne parait pas qu'aucune iné- galité marquée vienne laltérer. Sur un point du pourtour du disque, on remarque bien deux tentaeules appartenant au premier eyele apparent, qui sont très rapprochés à leur base, et qui, au pre- mier abord, semblent rompre l'alternance très régulière des élé- ments de ce cycle avec ceux du second; mais, en y regardant de plus près, on ne tarde pas à reconnaitre à la surface du disque le prolongement inférieur et interne du tentacule intermédiaire , et même on découvre aisément celui-ci en écartant ceux de la première rangée. Le tentacule, ainsi caché dans sa région inférieure, est un peu moins développé que ses semblables , et il présente une parti- 368 JULES HAÏIME. cularité qui mérite d’être signalée. En dessus ou en dedans de sa base, il porte à gauche une petite verrue peu saillante, et à droite un petit bourrelet circulaire. Ce bourrelet semble entourer un étroit orifice , mais il m'a été impossible d'y introduire un ajustage très délicat, ni même la pointe d’une soie fine. B. Tentacules labiaux ou accessoires. —Ces appendices ressem- blent extrêmement aux précédents par leur forme, leur structure et leurs fonctions, et ne paraissent en différer que par leur position plus voisine de la bouche et par leurs plus petites proportions. Mais leurs connexions sont tout autres par rapport à ceux-ci. Au lieu de s’inter- caler entre eux et de surmonter des loges périgastriques particu- lières, ils naissent sur la région interne de la voûte des chambres situées sous les tentacules marginaux, et l’on doit les regarder comme des prolongements internes des rayons du disque. Leur nombre est le mème que celui des tentacules proprement dits, car ils leur correspondent un à un. Chacun d'eux s'ouvre inférieure- ment dans la chambre dépendant de son homologue parmi les ten- tacules proprement dits , en sorte qu'il y a communication directe entre cet espace , l’intérieur de l'appendice marginal et celui du prolongement labial qui se continue sur le même plan verti- cal. Quand on pousse une injection dans l’une de ces trois cavités, on est sûr de remplir également les deux autres avec elle. Le groupe labial répétant en petit, près du centre du disque , lappareil tentaculaire marginal tout entier , on devait s'attendre à retrouver dans ces appendices accessoires les mêmes rapports de position que j'ai constatés entre les divers tentacules prin- cipaux ; c’est, en effet, ce qui arrive. On y reconnaît de même trois rangées circulaires, qui reproduisent exactement, par le nombre et les relations de leurs éléments, les trois rangées de ten- tacules principaux, le cercle interne de ceux-là correspondant au cercle interne de ceux-ci, et ainsi des autres. Dans leur composition anatomique , les prolongements péristo- miens n'offrent que de très légères différences avec les tentacules marginaux ; leurs téguments renferment les mêmes sortes de némalocysles, mais dans une proportion plus égale ; les parois de leur cavité intérieure sont garnies de cils vibratiles plus forts, SUR LE CÉRIANTHE. 369 et il parait n’y avoir de pore ni sur leur côté interne, ni à leur extrémité. Leurs fonctions physiologiques sont évidemment les mêmes que celles des tentacules proprement dits, mais ils sont doués d’une sensibilité tactile plus délicate. Observation. — Si l’on compare le Cérianthe , sous le rapport de la disposition de ses organes appendiculaires, avec les Actinides qui ont été étudiées avec le plus de soin , on est frappé des diffé- rences qui existent entre ces espèces et le polype qui fait l’objet du présent mémoire. Dans aucune de celles-ci on n’a constaté que l'évolution des tentacules ait commencé par le nombre 4; le chiffre initial est 6 chez les Aclinies proprement dites, les Cereus, les Adamsies , les Anémonies (1), et probablement dans tous les genres de la famille. De ce que, pour les grands tenfacules ou pour les grandes lames verticales intérieures , on trouve quelquefois le nombre 8 (comme dans les Edwardsies) ou le nombre 10 (comme dans l’Actinia equina) , on ne doit pas en conclure que ce nombre représente deux eyeles égaux, et que le chiffre initial ait été néces- sairement 4 dans le premier eas, et 5 dans le second. Il est possible que les choses se passent réellement ainsi ; mais il arrive le plus souvent que l’atrophie porte sur le second cycle et non sur le pre- mier , et qu'il faille décomposer les nombres que je viens de citer en 6 et 2, en 6 et 4, et non par parties égales. Quoi qu'il en soit, le nombre initial parait être normalement 6 chez les Zoanthaires, et le Cérianthe, qui n’a primitivement que quatre tentacules , fait exception à celle règle. (1) 11 est ordinairement facile de reconnaître le nombre des tentacules pri- maires chez les adultes, en examinant avec attention le degré de développement et l'insertion de ceux de ces organes qui sont le plus rapprochés du centre , de même que l'impression sur le disque des grandes lames péristomacales. Ces ca- ractères sont surtout évidents sur les individus d'Anemonia sulcata (Actinia cereus, Ellis) qui n'ont encore que cinq cycles; les six tentacules primaires s'y mon- trent avec la plus grande netteté : non seulement les autres cycles, mais tous les ordres s'y distinguent aussi très bien par leur inégalité. Le Cereus pedunculatus (Actinia bellis, Ellis)offre encore, malgré le grand nombre de ses appendices, un exemple de la facilité avec laquelle peut se faire cette détermination. &° série Zoor. T. I. (Cahier n° 6 ) 4 4 21 370 JULES HAIME. On connaît cependant d’autres Zoanthaires où ce nombre se reproduit : ce sont ceux que M. Milne Edwards et moi-même avons désignés sous le nom de Zoanthaires rugueux ; mais ils ne nous sont connus que par leur polypier , et ils appartiennent tous à des genres éleints depuis longtemps. Si lointaine que paraisse d’abord l'analogie qui existe entre le Cérianthe et ces Coralliaires fossiles , c’est pourtant uniquement avec ces derniers qu'il est possible de trouver quelque ressemblance dans la disposition que montre iei l'appareil radiaire, et cette ressemblance ne s'applique pas seule- ment au nombre initial des parties , mais encore s'étend à leur symétrie et à leur mode de répétition. | On sait que les cloisons verticales du polypier occupent les chambres sous-tentaculaires, et qu'elles correspondent aux tenti- cules par leur nombre, leur étendue, leur agencement, ete.; elles traduisent donc jusqu’à un certain point les caractères de l’appareiïl appendiculaire, après que les parties molles ont été détruites. Or l'examen des parties solides des Coralliaires fossiles qui se rangent dans la famille des Cyathophyllides et surtout dans celle des Staurides (1), a fourni de nombreuses preuves de l’évolution des cloisons dans quatre chambres primordiales ; et 1à où ce fait était moins évident, on a trouvé encore des indications qui ont permis de l’étendre à tout le groupe des Zoanthaires rugueux. Les Cyathophylles et les Zaphrentis, qui sont les représentants principaux de cette division , ont généralement leurs cloisons très nombreuses et très peu inégales entre elles ; en outre , le cercle radiaire y est plus ou moins interrompu dans l’un de ses points. Auprès du centre calieinal , il n’est pas rare de voir des lobules ou plis plus ou moins larges, et qui répètent en petit, autour de la fossette médiane, la couronne extérieure dés cloisons. Eh bien! si nous cherchons à nous faire une idée de ce que devait être dans ces Coralliaires éteints l'appareil appendiculaire, en nous fondant sur les caractères que nous offre l'appareil eloisonnaire qui lui correspond, nous trouvons que, dans les Cyathophylles , les Zaphrentis et les genres voisins, les tentacules devaient commencer (1) Voy. Milne Edwards et Jules Haime, Polypiers des terrains palæozoïques Archives du Muséum, t, V), p. 344 et suiv., 4851. s SUR LÉ CÉRIANTHE. 374 par le nombre quatre; qu'ils devaient ensuite se multiplier beau- coup, et atteindre tous des dimensions à peu près semblables ; que leur symétrie radiaire subissait fréquemment de légères altéra- tions , et que, dans certaines espèces enfin, des appendices acces- soires répétaient autour de la bouche les appendices de la périphé- rie. L'ensemble de ces dispositions , que je crois être en droit de supposer, rappelle alors tout à fait celles qu'a offertes le Cérianthe, et nous verrons plus loin que l’analogie ne s’arrête pas R. $ 5. — Loges sous-tentaculaires. Chaque tentacule marginal s'ouvre inférieurement, ainsi que le tentacule labial qui lui correspond dans un espace étroit et allongé, que j'ai désigné déjà sous le nom de loge périgastrique ou de chambre sous-tentaculaire. Cet espace est limité en dehors par l'enveloppe générale du corps, en dedans par les parois externes du tube digestif, et latéralement par des lames verticales charnues, qui en haut concourent à former le disque tentaculifère, et qui se con- tinuent en bas avee les organes reproducteurs. Chacune de ces lames est formée de deux plans de fibres adossés l’un à Pautre, et chaque plan se compose de deux muscles obliques, ainsi que cela se voit dans les Actinies; mais ici les muscles sont beaucoup moins forts et moins distincts. On sait que l'apparition de ces lames ver- ticales est dans un rapport constant avec les cycles de l'appareil tentaculaire ; ce fait a été trop bien établi chez d’autres Zoanthaires par M. Dana (4) et surtout par M. Hollard, pour qu'il soit besoin de le confirmer par un nouvel exemple. Il existe cependant ici une différence importante sur laquelle je reviendrai bientôt. Les loges sous-tentaculaires se prolongent inférieurement dans les espaces compris entre les lames ovigères, et s'ouvrent au bord de celles-ci dans la cavité générale. Leurs parois sont tapissées de même que l'intérieur des tentacules de l’épithélium qui revêt toute la surface interne du corps, et elles présentent partout des cils vibratiles très puissants. L'action de ces cils est plus énergique dans ces lacunes périgastriques que dans tout le reste de la grande cavité du corps ; (1) £xploring expedition, Zoophytes, p. 24, 1846. 372 JULES HAIME, ce sont eux qui déterminent , dans le liquide qui les baigne, les courants destinés à se propager dans les organes appendiculaires. Ces loges sont done , aussi bien que les tentacules marginaux et labiaux, le siége des fonctions fort obscures et fort incomplètes qui représentent la cireulation et la respiration dans ces animaux imparfaits. $ 6. — Appareil digestif. Cet appareil se compose , comme dans les Actinies : 1° d’une bouche centrale ; 2 d’un tube charnu, large et court, qui repré- sente à la fois l'estomac et l'intestin ; 3° de cordons très grêles ou fils pelotonnés fixés au bord des lames verticales, et qui remplissent les fonctions d'organes sécréteurs. Le pore postérieur ne saurait être regardé comme l’analogue d’un anus. Il peut bien arriver, dans certaines circonstances, que les matières excrémentitielles trouvent une issue par cette ouver- ture; mais normalement elles sont rejetées au dehors par la bouche. Bouche. — Nous avons déjà vu qu’elle est médiocrement grande et peu saillante ; elle est allongée en travers , de manière à présen- ter deux lèvres qui, dans l’état de repos, s'appliquent assez exacte- ment l’une contre l’autre, mais qui sont susceptibles d’une grande extension. Ces lèvres forment des plis ordinairement nombreux et irréguliers. Quoique la bouche , en restant un peu entr'ouverte en haut, laisse souvent un petit espace vide entre ses parois , il est difficile de distinguer ici une cavité pharyngienne proprement dite, comme M. de Quatrefages a pu le faire chez les Edwardsies. Le sphineter buccal se confond presque avec le bourrelet labial, Tube digestif. — C’est un véritable cylindre vertical, suspendu au-dessous de la bouche et au milieu de la cavité générale. Sa lon- gueur est d'environ 2 centimètres dans les grands individus, et fait à peine-par conséquent la huitième partie de la longueur de leur corps. Il est maintenu en place par les lames verticales charnues, qui s'étendent de sa surface externe à la paroï interne de l'enveloppe générale. I s’ouvre largement dans la cavité commune, et son bord inférieur ne constitue qu'un très faible bourrelet circulaire, en SUR LE CÉRIANTHE. 373 dehors duquel s’insère l'extrémité supérieure des cordons -pelo- tonnés. La face interne du tube intestinal montre quelques plis trans- verses peu prononcés , et des stries longitudinales fortes et nom-- breuses. On y remarque deux coulisses verticales en continuité avec les commissures de la bouche. Ces demi-canaux existent aussi chez les Actiniens, où ils se présentent sous la forme de deux gouttières égales, et munies inférieurement d’une languette charnue. Ici, au contraire, ces parties sont complétement dépourvues d’appendices basilaires, et différent extrèmement entre elles : l’une n’est qu’un sillon droit, étroit, et faiblement accusé ; l’autre a la forme d’une dépression profonde, arrondie en haut, un peu élargie dans sa moitié supérieure, très atténuée inférieurement, etentourée d’une sorte de bourrelet très résistant et comme cartilagineux. Ce bourrelet, qui est simple à son bord supérieur, se décompose latéralement en deux gros plis de chaque côté. Les plis extérieurs correspondent à des tentacules du premier eyele apparent; les plis internes correspon- dent l’un à un tentacule du deuxième cycle, l’autre à un tentacule du troisième. C’est à son extrémité supérieure que la fossette est la plus profonde ; elle présente en ce point une petite cavité que j'ai d’abord prise pour un pore , mais où il m'a été impossible de faire passer une sole. Le tube digestif n’étant pas autre chose qu’une portion rentrée de l'enveloppe générale, comme on l’a déjà reconnu chez les Acti- nies, on doit s'attendre à y trouver la même disposition de strates élémentaires que dans cette enveloppe, mais suivant un ordre in- verse; c'est en effet ce qui a lieu. Les seules différences qu'on puisse noter n’ont qu'une importance très faible. Les deux couches musculaires sont inégalement développées ; celle des fibres verti- cales étanttres puissante , celle des fibres transverses, au contraire, très réduite. Dans les couches qui correspondent aux téguments, on trouve d'abondants nématocystes de la deuxième et de la troi- sième sortes et quelques-uns de la quatrième, ainsi que des cellules inégales, arrondies ou irrégulières, contenant des granulations très petites et très faiblement colorées La paroi du tube intestinal est complétement garnie de cils vibratiles très distinets. Le mueus qui 37 SULES HAIME. enduit cette surface contient les diverses capsules , cellules et gra- nulations que je viens d'indiquer. Cordons pelotonnés. — Les lames verticales qui circonscrivent les loges sous-tentaculaires, et qui s’attachent au tube intestinal, se continuent au delà du point où s’arrête ce tube, et descendent dans la cavité générale, suivant une certaine étendue. Mais dans ce trajet, elles changent de nature et de fonctions ; elles étaient musculaires autour du tube digestif, et servaient principalement à le maintenir en place ; au-dessous de ce tube, ce ne sont plus que des membranes mésentériques , doubles , traversées seulement par quelques fibres museulaires ; et plus bas enfin, entre leurs deux feuillets, elles con- tiennent les organes de la reproduction. Dans ces deux dernières régions , leur bord libre est garni de cordons ou de petits boyaux cylindracés , très grêles et filiformes , qui sont extrêmement con- tournés et eomme pelotonnés près du tube intestinal, et simplement ondulés sur les ovaires. Ces boyaux, qui sont creusés d’un canal in- térieur , ont été regardés par Delle Chiaje comme des conduits spermatiques , par Rapp comme des oviductes ; mais il est certain qu'ils n’ont aucune communication avec l'appareil générateur. De Blainville, qui considérait les parties correspondantes dans les Acti- nies comme remplissant les fonctions d’un foie, me paraît se rap- procher beaucoup plus de la vérité. Quoiqu'il ne soit pas possible de préciser la nature de la sécrétion dont ces cordons sont chargés, tout porte à croire qu'ils sont destinés à sécréter un liquide utile à la digestion. Ils se terminent en haut au bord libre de l'intestin ; et c’est probablement en ee point que leurs produits trouvent une issue. Je dois cependant avouer que je n’ai pu y decouvrir aucune ouver- ture. Les boyaux pelotonnés adhèrent sur toute leur longueur aux lames verticales mésentéroïdes, et présentent les mêmes caractères dans les deux régions libres de ces lames; ils sont seulement plus contournés, et offrent une plus grande superficie dans le voisinage de l’orilice pyloroïde du tube gastrique que sur le bord des ovaires. Leur couleur est blanchâtre ou légèrement rosée, et leur surface est couverte de cils vibratiles très puissants. Ils sont essentiellement composés de nématocystes , entremêlés ne QE TR SUR LE CÉRIANTHE. 379 de quelques cellules et granulations semblables à celles de l'intestin. Parmi les capsules filifères, les unes ressemblent extrêmement à celles de la sixième sorte qui n’ont point d’enveloppe hyaline, et se déroulent comme un fil de bretelle (pl. 7, fig. 29) ; d’autres sont très distinctes de celles que j'ai examinées jusqu’à présent, et se rapprochent beaucoup de celles que renferment les mêmes organes dans plusieurs Actiniens. Les nématocystes de cette septième sorte sont subovalaires, longs de 0,08 environ et larges à peine de 0,04 de millimètre; ils ne contiennent dans leur intérieur qu'une tigelle, garnie d’un double fil spiral. Lorsque cette tigelle s'échappe par évagination, elle s’allonge, et semble garnie de pointes opposées deux à deux, et dirigées du côté de la coque (fig. 23, 24). On rencontre encore au milieu de ces capsules des corps qui me paraissent représenter un état du développement des mêmes organites ; en effet, ils ne diffèrent de ceux-ci que par une taille un peu moins grande, et une tigelle sur laquelle on ne distingue pas nettement de fil spiral (fig. 25) ; enfin il en est dont les propor- tions sont encore moindres, et qui, en raison de leur forme beau- coup plus grêle, semblent devoir former une huitième forme (fig. 26). Observation. — Les nématocystes ou organes urticants parais- sent se retrouver chez presque tous les animaux que M. Leuckart a désignés sous le nom de Cœlentérés, et ne pas se présenter ailleurs. Jusqu'ici on en a étudié un grand nombre de sortes, mais je ne sache pas qué, dans une seule espèce , on ait encore constaté la variété de formes que je viens de faire connaître chez le Cérianthe. Ce même polype me semble aussi offrir l'exemple le plus remar- quable de l'extrême longueur du filament dans ceux de ses orga- nites qui constituent la gaine feutrée. M. Allman en a figuré de très grands qui provenaient de la Capnea; il ÿ en a de bien plus longs encore dans les Physales, mais tous ces fils sont loin d'approcher des proportions que présentent ceux des némato- eystes tégumentaires du Cérianthe. Il existe du reste une grande ressemblance entre ce dernier Zoanthaire et les Actiniens , quant à la forme des vésicules filifères des tentacules et des cordons pelotonnés. Ainsi celles de la sixième, 976 JULES HAIME. de la septième et de la huitième sorte se retrouvent de la même manière chez les Adamsies, les Anémonies, les Cereus, et même chez la Cladocora cœspitosa. $ 7. — Appareil reproducteur. Les cordons que je viens de décrire ne forment de circonvolu- tions que dans une portion assez faible de l’étendue des lames mé- sentéroïdes , c’est-à-dire sur une hauteur de 4 centimètre environ pour les grands individus. La portion de ces lames qui contientles organes reproducteurs est toujours plus considérable, mais elle l’est fort inégalement. Elle offre, près de la ligne qui correspond à la fos- sette de la paroi intestinale, une longueur à peu près double de celle qu’elle occupe dans la direction du sillon étroit de cette même pa- roi; ef, du premier de ces points à celui qui lui est opposé, les lames verticales décroissent graduellement de chaque côté. Au milieu de l'été, ces organes, étant en pleine activité, ont la forme de gros rubans flexueux, un peu inégaux alternativement en longueur et en saillie, et se terminant inférieurement par un lobule arrondi. Ils sont d’un jaune violàtre. Leur nombre total correspond à celui des tentacules d’un seul cercle. Il est à remarquer que ces lames mé- sentéroïdes ne sont pas géminées, comme on le voit dans les Actinies. Chez les Cérianthes , lhermaphrodisme est poussé aussi loin que possible. Toutes les lames contiennent l'élément mâle et l'élément femelle. L'organe reproducteur est simplement composé de grandes capsules polyédriques dont les unes renferment un ovule, les autres un groupe de spermatozoïdes. Il est impossible de reconnaitre aucun ordre dans la disposition de ces capsules; elles sont toutes entremêlées irrégulièrement, mais de manière qu'il y à toujours des capsules spermatogènes en confact avec les capsules ovi- gènes. L'inégalité des diverses capsules est très prononcée ; mais en général celles qui sont les plus rapprochées du bord des lames sont les plus petites, et celles qui contiennent des œufs l'empor- tent en volume sur les autres, qui sont en revanche beaucoup plus nombreuses. Même lorsqu'elles sont jeunes, et que leur con- SUR: LE CÉRIANTHE. 277 tenu estnouvellement formé, on reconnait aisément quelle est leur nature. Les masses de spermatozoïdes sont toujours beaucoup plus claires que les ovules ; elles ont une nuance violette pâle, tandis que les produits femelles sont ordinairement d’un jaune olivâtre terne ; quelquefois ces derniers sont d’un gris violet très foncé. Il n’y a aucun rapport entre cette différence dans la couleur des œufs et celle du corps de leurs parents ; mais il est probable qu’elle déter- mine dansles jeunes qui en naïtront les deux principales variétés de nuances que présente l’espèce. Les ovules ont des formes à peu près polyédriques comme les capsules où ils se forment , mais ils sont au moins arrondis par un de leurs côtés ; lorsqu'ils ont quitté les ovaires et tombent dans la cavité générale, les œufs sont ordinairement sphériques ou légère- ment oblongs. Leur substance est toujours très opaque. La vésicule de Purkinje seule est très transparente, et lorsqu'on l’observe sous un fort grossissement, on distingue les globules hyalins qui la rem- plissent; ces globules sont très réguliers, subpolygonaux , sans noyau intérieur, et disposés par rangées droites ou courbes ; on en compte trente environ sur un des diamètres de la vésicule. Les capsules spermatogènes contiennent chacune une masse fasciculée entourée de grains et de globules irréguliers. Cette masse estordinairementallongée, souvent fusiforme, etles spermatozoïdes qui la composent y sont très régulièrement rangés suivant des lignes longitudinales un peu arquées. J’estime qu'une capsule de moyenne grandeur peut contenir sept ou huit mille de ces pseudo- zoaires. Un certain nombre d’entre eux s’agitent dans l'intérieur de la capsule, lorsque celle-ci est parvenue à son complet développe- ment. Les jeunes capsules spermatogènes (pl. 8, fig. 3) contien- nent une grande quantité de cellules très petites renfermant chacune un ou deux petits globules. Ces globules se multiplient bientôt dans les cellules centrales , et commencent à se disposer en petites trai- nées longitudinales ; ce sont eux qui, en s’accroissant, deviennent les spermatozoïdes. Les petites cellules disparaissent plus ou moins en même temps que leurs produits se développent davantage. Lorsque les spermatozoïdes sont encore groupés en séries alternes , leur tête est sphérique ; mais, après qu'ils sont devenus 378 JULES HAIME. libres, ce renflement, qui n'a pas tout à fait 0,005 de milli- mètre, est un peu allongé, légèrement aplati et subcordiforme. Le filament caudal est très grêle , six ou sept fois plus long que la tête , et il s’agite très peu ; les mouvements sont saccadés , courts , mais les spermatozoïdes conservent longtemps la propriété de les pro- duire. La fécondation s'opère certainement dans les lames génitales elles-mêmes, et très probablement par la rupture de la faible eloi- son qui sépare une capsule spermatogène d’une capsule ovigène. C’est par une semblable rupture que l'œuf fécondé doit tomber dans la cavité générale ; il sort ensuite de cette cavité pour aller se déve- lopper au dehors soit par le pore qui termine inférieurement le corps du Cérianthe , soit par le pore latéral de l’un des tentacules marginaux, soit enfin par la bouche , et ce dernier cas est le plus habituel. On connaît déjà, dans des animaux appartenant à une autre type de l’embranchement des Zoophytes , une disposition analogue à celle que je viens de décrire. Je veux parler des Synaptes , dont M. de Quatrefages a si bien fait connaître l’organisation (1). Ces Échinodermes ont également l'ovaire et le testicule réunis sous une enveloppe commune ; mais ces deux organes ne s’entremélent pas comme on l’observe ici; les capsules ovigènes ne s’y trouvent pas entourées individuellement par les capsules spermatogènes. Ces dernières forment des lobes distinets qui, à la vérité, recouvrent l'ovaire, mais ne se confondent point avee lui. Les Cérianthes offrent donc encore un degré de moins que les Synaptes dans la localisation des organes de l'appareil reproducteur. $ 8. Gouttière interlamellaire impaire. Les lames mésentéroïdes que je viens d'étudier s'arrêtent toutes À une assez faible distance de l’orifice pyloroïde du tube digestif, et ne sont jamais géminées , mais bien alternativement inégales en longueur et en saillie. Deux d’entre elles cependant qui sont juxta- (1) Mémoire sur la Synapte de Duvernoy (Annales des sciences naturelles, 2e série, t. XVII, p.19, 1842). SUR LE CÉRIANTHE. 379 posées l’une à l’autre et égales entre elles se continuent jusqu'à l'extrémité basilaire du corps, et viennent se terminer au petit bourrelet qui entoure le pore inférieur. L'espace qu'elles laissent entre elles forme une profonde gouttière longitudinale, on demi- canal , qui se trouve sur le prolongement de la fossette gastrique, et établit un chemin direct de cette fossette à l'ouverture postérieure. Il semble naturel de penser que ce trajet peut être parcouru par une partie au moins des matières excrémentitielles qui trouveraient une issue au pore terminal] , et que celui-ci remplirait ainsi les fonc- tions d’un anus; mais j'ai déjà dit que les substances qui ne sont pas digérées sont en général rejetées par Ja bouche. Les deux lames longitudinales qui forment cette longue gouttière impaire ne se distinguent pas seulement de leurs homologues par leur grande étendue et leur inégalité : elles ont aussi une structure différente , en ce sens que les modifications que j'ai signalées dans les deux régions inférieures des autres lames apparaissent ici dans un ordre inverse. Ainsi les capsules spermatogènes et ovigènes s’y montrent depuis le point où finit leur insertion , au bas de l'estomac , jusque vers la moitié de leur longueur , et toute leur partie inférieure est formée d’un simple mésentère ; portant à son bord interne le cor- don pelotonné. Observation. — S'il existe un rapport constant entre les cloisons solides et les tentacules des Coralliaires selérodermés ou à polypier, ce rapport est évidemment au moins aussiintime entre ces cloisons et les loges dans lesquelles elles se développent, loges qui sont elles-mêmes la continuation inférieure des cavités tentaculaires. J'ai déjà montré que certaines espèces de la famille des Cyathophyllides offraient dans leur polypier des caractères rappelant la disposition des organes appendiculaires du Cérianthe ; c’est encore avec le même groupe zoologique que le Cérianthe doit être comparé au point de vue de l'agencement des loges interlamellaires, mais non plus cette fois avec les mêmes espèces. En effet, chez le polype qui fait l’objet de ce mémoire, les tentacules et les lames ovariennes présentent une différence marquée dans leur degré de régularité ou de symétrie radiaire; les appendices constituent des couronnes, dont tous les éléments sont sensiblement égaux et semblablement 380 JULES HAIME. placés ; et nous venons de voir, au contraire, que la plus grande inégalité se montre dans l'étendue des espaces interlamellaires. Si l'on supposait que ce polype s’ossifiàt en partie et formât un poly- pier, quelle serait , sur les relations des cloisons de celui-ci, l’in- fluence de ces deux dispositions presque antagonistes ? Il est sans doute bien difficile de le dire ; mais il nous suffit de savoir en ce moment qu'il existe dans les Coralliaires sclérodermés des exemples séparés et de l’une et de l’autre. Si le Cérianthe se rapproche surtout de quelques Cyathophylles par la disposition de ses tentacules , c’est de la Hallia insignis (4) qu'il se rapproche le plus par la disposition de ses loges interlamel- laires. En effet, cette dernière espèce présente une grande eloison impaire qui correspond bien à la gouttière impaire du Cérianthe, et vis-à-vis d'elle de très petites cloisons correspondant aux courtes loges de celui-ci. On ne saurait méconnaître ici, dans l'agencement général des parties similaires, une tendance à mêler au type radiaire le caractère de la bilatéralité. Le Cérianthe, de même que les genres Hallia , Aulacophyllum, Combophyllum, Zaphrentis, ete., de la famille des Cyathophyllides , forme un des exemples les plus frappants de la combinaison de ces deux types dans la classe des Coralliaires. $ 9. — Tunique interne, ou muqueuse. Les parois de la cavité générale du corps sont complétement tapissées par une tunique membraneuse continue qui garnit à la fois l’intérieur des tentacules marginaux et labiaux et des loges sous- tentaculaires , et se replie comme un mésentère sur les lames ver- ticales , que , dans certaines parties , elle constitue presque à elle seule. Cette membrane se compose d’une couche de petites granu- lations, qui reposent immédiatement sur la tunique musculaire, et d'un épithélium vibratile ; elle commence , en haut , au bord infé- rieur de l'intestin, remonte sur sa surface extérieure jusque dans les organes appendiculaires, puis redescend pour s'étendre jusqu'au (1) Milne Edwards et Jules Haime, Polypiers fossiles des terrains palæozoïques, p. 353, pl. vi, fig. 3, 1851. SUR LE CÉRIANTHE. 381 pore postérieur où elle se termine. Elle complète en dedans l’en- veloppe générale du corps , tout en participant à la constitution des appareils sécréteurs et de la génération. L'épithélium interne, tout mince qu'il est, se détache avec assez de facilité, au moins par lam- beaux, non seulement dans la région non lamellée de la cavité générale, mais sur les côtés de l'intestin, et jusque dans l’intérieur des tentacules. Il est formé par l’intime union de cellules irrégu- lières , ordinairement polygonales, qui n’ont en moyenne que 0,07 de millimètre (pl. 8, fig. 6). On ne trouve jamais de néma- tocystes dans la tunique interne. A l'extrémité postérieure du corps , l'enveloppe générale rentre un peu par l’ouverture terminale, etil se forme en ce point un petit bourrelet de fibres concentriques faisant fonction d’un sphincter. On y trouve des fibres musculaires très fortes et tous les éléments des téguments extérieurs; en outre, cet orifice est garni de cils vibratiles assez énergiques. Quoique j'aie déjà montré que le pore postérieur du Cérianthe ne peut être regardé comme l’analogue d’un anus, la présence de cette ouverture n’en est pas moins très remarquable, en ce qu’elle établit une communication de la cavité générale avec le dehors, à l’extré- milé inférieure du corps; c’est jusqu’à présent le seul exemple de cette disposition existant dans la classe des Coralliaires. L’orifice postérieur des Myniadides ne saurait être comparé à celui-ci, car il ne s'ouvre pas dans la cavité générale, mais bien dans un espace particulier circonscrit par les bords repliés du disque pédieux. CHAPITRE TI. OBSERVATIONS EMBRYOGÉNIQUES. I m'a été malheureusement impossible d'étudier d’une manière complète le développement de ce curieux Zoophyte; les jeunes que j'avais obtenus sont tous morts au bout de quelques jours, malgré toutes mes précautions. J'ai cependant observé quelques faits qui me semblent dignes d’intérêtsous plusieurs rapports. Jamais je n'ai rencontré de jeunes un peu avancés en développe- ment dans la cavité générale du parent, comme cela arrive si sou- 382 JULES HAIME. vent chez les Actinies; mais les œufs qui y flottaient librement avaient déjà traversé leur première période, et je n’en ai jamais vu en voie de fractionnement. Tous ceux qui se trouvaient soit dans les tentacules , soit dans l'intestin où dans le voisinage des ovaires , étaient entièrement garnis de cils vibratiles très forts, et consé- quemment étaient déjà à l’état de larves. La forme de ces larves est alors sphérique ou légèrement ellip= soïdale, etelles ne sont pas plus grosses que les grands ovules con- ténus dans les lames verticales, c’est-à-dire qu’elles ont environ 2/3 de millimètre ; mais on ne tarde pas à voir leurs contours se modifier graduellement : elles se creusent d’abord un peu à l’une de leurs extrémités, et bientôt l’autre devient conique. Au centre de la concayité qui s’est formée, il s'établit une ouverture, par où s’échappent des globules ou des granulations. Cet orifice corres- pondra à la bouche, et l’espace qui se conStitue au-dessous de lui, par le rejet d’une certaine quantité de la matière intérieure , repré- sente l'intestin et la cavité générale du corps. Jusqu'iei les mouvements de la larve sont très obscurs et tout à fait indéterminés ; elle ne montre pas de contractilité appré- ciable, et ne se déplace légèrement que par suite de l’action presque incessante des cils vibratiles qui la recouvrent. Mais au bout de très peu de temps, on commence à distinguer autour de l'ouverture buccale quatre petits mamelons irréguliers, qui ne tarderont pas à s’allonger pour donner lieu à quatre appendices tentaculaires; puis deux autres mamelons oblongs saillent plus près encore de la bouche, et forment deux grosses lèvres, tandis que le tronc devient plus grêle et cylindro-conique. Mes jeunes Cérianthes n’ont pas revêtu de nouvelle forme après celle-ci ; mais ils ont vécu dans cet état pendant dix ou douze jours, et j'ai eu tout le temps de les observer; ce qui peut se faire aisé- ment avec une simple loupe, car ils ont alors de 4 millimètre à 4 millimètre 1/2 de longueur. Leur corps, qui restait toujours entièrement cilié, était devenu assez eontractile , et leur tronc, aussi bien que leurs tentacules , se raccourcissait d’un liers à peu près, quand on venait à les toucher. Ds nageaient librement dans le vase qui les contenait à la manière SUR LE CÉRIANTHE. 383 de petites Méduses, avec la bouche en bas et l’extrémité conique en haut, au moyen d’allongements et de raccourcissements successifs du trone, et grâce au rapprochement et à l'écartement alternatif des tentacules. Mais cet exercice paraissait les fatiguer beaucoup , et, après s’y être livrés quelque temps, ils se laissaient tomber au fond, où, en général, ils restaient longtemps sans tenter de nouveaux efforts ; quelquefois ils se bornaient à osciller lentement ou à tour- nèr sur eux-mêmes. Ils sont assez opaques dans toutes leurs par- tes, et leur couleur est d’un gris roussâtre terne ; cependant en les regardant au microscope sous un faible grossissement et avec la lumière réfléchie, on distingue, suivant l'axe du tronc et des ten- tacules , des espaces plus clairs qui correspondent à la cavité géné- rale et aux cavités tentaculaires , celles-ci communiquant très Jar- gement avec celle-là. Les quatre tentacules primaires ne sont pas complétement égaux ; deux d’entre eux sont un peu plus longs et plus gros que les deux autres. Un plan vertical passant par les commissures des deux lèvres séparerait le corps en deux parties égales , et de chaque côté de ce plan on trouverait un tentacule plus grand et un tentacule plus petit. Sur la ligne médiane, j'ai vu se développer, entre les deux tenlacules plus grands, un nouveau mamelon qui, sans doute, était lé rudiment d'un tentacule de second ordre, et qui, en l'absence des autres tentacules du même cycle, augmentait encore l'aspect de bilatéralité produit par l'inégalité des tentacules primaires. Un peu plus tard, il m'a semblé apercevoir dans les autres espaces initertentaculaires des indices très faiblement accusés des autres éléments du second cycle. Je n’ai pas pu, à mon grand regret, suivre plus loin cette évolu- tion des tentacules ; je suis porté à croire que ce tubercule appen- diculaire impair , qui succède immédiatement à la formation des quatre tentacules primaires, doit correspondre à la chambre com- prise entre les deux longues lames verticales dans les individus adultes , ces dernières se trouvant toujours aussi dans le plan de l'allongement de la bouche. Quoi qu'il en soit de cette relation, on voit que, dans les premiers âges de la vie du Cérianthe , aussi bien que lorsqu'il a acquis son 381 JULES HAIME. entier développement, le caractère de bilatéralité se retrouve tou- jours d’une manière très frappante; ilmontre seulement cette diffé- rence entre les deux époques que, pendant la première, il est exté- rieur, et qu'il devient intérieur durant la seconde. Les quelques faits embryologiques qui précèdent concordent bien avec ce que John Dalyell (1) et M. T. Spencer Cobbold (2) ont observé touchant le développement de l’Acrinia equina où mesem- bryanthemum ; mais, dans cette dernière espèce, les tentacules les premiers formés sont toujours au nombre de six, et le corps, au lieu de s’allonger inférieurement , s'aplatit bientôt en ce point pour former un disque pédieux. CHAPITRE IV. AFFINITÉS ZOOLOGIQUES. I résulte de l’ensemble des faits consignés dans ce mémoire que les Cérianthes offrent beaucoup de caractères communs avec les Actiniens. On a vu que la constitution des trois tuniques tégumen- taire, musculaire et muqueuse, est à peu près la même dans ces deux types ; que les tentacules ont la même structure , et que les “diverses fonctions paraissent s'effectuer de la même manière. Mais à côté de ces similitudes remarquables , j'ai constaté aussi des diffé- rences importantes établissant une distinction très nette entre le Zoophyte que j'étudie ici et les espèces rangées par Linné dans son genre Actinia.Ces différences portent sur la composition de l’appa- reil appendiculaire, sur la forme des parois de la chambre gastrique, et principalement sur l’agencement et sur la structure des lames mésentéroides. On ne connaît, en effet, dans la famille des Actinides aucun Zoanthaire où les tentacules se disposent, comme cela arriveici, sur deux zones concentriques, dont l’une occupe le pourtour du disque péristomien , fandis que l’autre recouvre le bord labial. Le tube stomacal ou intestinal montre toujours deux grands sillons égaux (1) Rare and remarkable animals of Scotland, t. If, p. 209, 1848. (2) Observations on the anatomy of Actinia, in Annals and magazine of nalu- ral history, 2° série, t. XI, p. 121, 4853. SUR LE CÉRIANTHE. 589 chez les autres espèces malacodermées dont on à examiné la struc- ture interne , et non pas, ainsi qu'on l'observe dans le Cérianthe , une large fossette oblongue, opposée à un simple sillon. Enfin nous trouvons constamment ailleurs les principales lames mésentéroïdes doubles et prolongées jusqu'au fond de la chambre viscérale où, en s’unissant au centre, elles forment une espèce d'étoile; dans notre Coralliare , au contraire , deux seulement d'entre elles sont gémi- nées, et descendent jusqu’à l'extrémité inférieuré du £orps ; mais les autres sont alternativement imégales et s'arrêtent à une distance assez faible de l'ouverture pyloroïde de l'estomac. J'ai dit déjà que, pour rencontrer dés caractères analogues à ceux-ci, il fallait les chercher non pas parmi les autres Zoanthaires malacodérmés , mais thez les Zoanthaires sclérodermés , et dans certaines formes de la famille des Cyathophyllides. Je ne veux pas entendre par làque lesCérianthes soient plus voisins des Zaphrentis ou des Cyathophyllum que des Actinides. Je erois seulément qu'ils représentent dans le sous-ordre des Malacodermés le groupe formé par les Cyathophyllides dans le sous-ordre des Sclérodermés. 1 serait très possible, à la vérité, que la distinction, basée sur lanature des téguments , dont on se sert aujourd'hui pour former ces deux divisions principales dans l’ordre des Zoanthaires, n'eut réellemént pas toute l'importance qu'on lui attribue ; mais dans l’état actuel de nos connaissances, celte classification paraît préférable à toute autre. ILest un animal avec lequel le Cérianthe a une parenté beaucoup plus étroite qu'avec les Actinides et les Cyathophyllides : é’ést le Moschale , qui jusqu'à ce jour est resté aussi mal connu que le Cérianthe , mais sur lequel je puis donner ici quelques détails , M. Milne Edwards ayant eu la générosité de mettre à ma disposition les dessins qu'il en a faits pendant son voyage en Sicile. Ce Zoan- thaire a été décrit par Renieri au commencement de ce siècle. Dans le seul des ouvrages de ce naturaliste qu'il m'a été possible de con- sultér à Paris (1), il porte le nom d’Actinia cylindrica. A la diffé- (1) Stephano Andrea Renieri, /{ntorno gli esseri viventi della classe dei vermi de mare Adrialico, p. xxii. Padova, 4807 Le 4° série, Zoou, T, I. (Cahier n° 6.) ® +2 € 286 JULES HAINE. rence de toutesles autres Actinies, dit Renieri, cet animal vit et court librement dans l'eau de la mer; son extrémité postérieure est ronde et fermée ; l'extérieur du corps est revêtu d’une membrane filamen- teuse très délicate, et de beaucoup de mucosité qui retient quelques fragments de coquilles et des grains de sable; le corps ne se con- tracte pas, suivant sa longueur , comme celui des autres Actinies. Blainville (4), qui cite cette espèce sous le nom de Moschata rhodo- dactyla Renieri, Cat. Adriat. (2), confirmeles observations précé- dentes , et signale l'existence de deux sortes de tentacules , les uns courts, les autres très longs. La figure qu'il en a donnée, d’après M. Eysenhardt, montre un petit disque aplati à l'extrémité posté- rieure. Cette dernière disposition paraît contredire ce que Renieri el Blainville lui-même ont avancé sur l’état de liberté où l’on trouve le Moschate ; mais M. Forbes a fait voir (3) que ce Coralliaire tantôt progresse dans l’eau, à la manière des Méduses, au moyen de con- tractions et de dilatations successives de son corps, tantôt dilate son extrémité postérieure en forme de disque, et adhère aux corps sous- marins à la manière des Actinies. Cette observation intéressante vient expliquer et confirmer une des assertions d’Aristote, que les naturalistes modernes avaient très mal interprétée (4). (1) Dictionnaire des sciences naturelles, t. LX, p. 28%. 1830.— Manuel d'ac- tinologie, p. 318, pl. 48, fig. 4. 4834. (2) Je ne sais pas si Blainville a trouvé ce nom dans quelque ouvrage de Re- nieri que je n'ai pas pu me procurer, ou s'il l'a fait lui-même; mais du moment que le genre Moschate se trouve établi postérieurement à la description de 4807, l'espèce doit être appelée Moschata cylindrica. (3) Lieut. T. A. B. Spratt et Prof. Edward Forbes, Travels in Lycia, Mylias and the Cibyratis, t. IT, p. 421. 1847. () « Quelques animaux, dit Aristote, sont tantôt attachés et tantôt détachés : dans le genre de ceux qu'on appelle Orties de mer (Acalèphes), il en est qui se dé- tachent la nuit pour aller chercher leur nourriture. » (Histoire des animauæ, liv. I, chap. 4, trad. Camus.) Les commentateurs du xvi° siècle ont cru que dans cette phrase Aristote fai- sait allusion à deux sortes d'animaux très distinctes : les Acalèphes fixes ou Acti- nies, les Acalèphes libres ou Médusaires; et c'est par suite de cette méprise que Cuvier a donné à la classe qui renferme ces derniers le nom d’Acalèphes, qu'Aris- tote avait bien certainement réservé à nos Zoanthaires malaco lermés. SUR LE CÉRIANTHE. 557 Dans l'individu qu'a observé M. Milne Edwards, le corps est allongé, cylindrique, et fermé à l'extrémité postérieure; il est d’un rose violet inférieurement , d’un fauve clair dans ses parties supé- rieures, elles tentacules sont, en outre, annelés de rose et de vert. Les deux groupes de tentacules paraissent offrir la même disposition générale, la même structure et la même forme que dansle Cérianthe. Le tube gastrique est plus long, et présente deux sillons verticaux opposés l’un à l'autre, simples, peu prononcés , et parfaitement égaux entre eux. Les lames mésentéroïdes sont peu inégales , très courtes, surtout dans les points correspondants aux sillons gastriques , et la moitié inférieure de la cavité générale est lisse de toutes parts. Ces lames ont la même structure depuis l’orifice pylo- roïde jusqu'à leur terminaison inférieure, et leur bord libre est partout muni de cordons pelotonnés, très déchiquetés et ramitiés, qui flottent en partie dans la chambre viscérale. On voit done que la Moschate diffère du Cérianthe par Fabsence d’orifice postérieur et de gouttière interlamellaire impaire, par l'égalité des deux sillons gastriques, et l’uniformité de composition des lames mésentéroïdes dans toute leur portion libre. Ce sont là des caractères qui me paraissent nécessiter la séparation de ces deux Coralliaires dans deux divisions génériques particulières ; mais , d’un autre côté, les rapports entre ces genres sont si frappants, qu'ils font bien évidemment partie de la même famille. En 1851, M. Milne Edwards et moi-même nous avons déjà éta- bli une famille distinete sous le nom de Cerianthidæ (À), pour rece- voir ces animaux que leurs courtes lames mésentéroïdes nous semblaient distinguer suffisamment des autres Sclérodermés, el notamment des Actinides. Les observations auxquelles je viens de me livrer confirment pleinement cette manière de voir, et de plus elles permettent de distinguer deux formes génériques , que nous avions été tentés d’abord de confondre en une seule. Nous avions supposé à cee époque que le genre Zlyanthus de M. Forbes (2) devait prendre place dans cette famille ; mais nous nous Sommes assurés depuis, sur des espèces incontestable ment très (1) Polypiers fossiles des terrains paléozoïques, ete , p 13 1851 ) 2) Annals of natural history, L. V p. AS1. 1S40 388 JULES HAINE. voisines de l’Zlyanthus scoticus, que l'organisation de ces Coral- liaires estla même, dans ses traits généraux, que celle des Actinies, et qu'on ne saurait les éloigner de ces dernières. En conséquence, la famille des Cérianthides se composera seulement des deux genres Cerianthus et Moschata. On peut la caractériser de la manière sui- vante : Zoanthaires malacodermés simples, libres, dépourvus d’une ca- vité pédieusecontractile (4), ayant les tentacules simples, insérés les uns au pourtour du disque péristomien , les autres près du bord labial, et dont toutes, où presque toutes les lames mésentéroïdes ne se prolongent pas jusqu'au fond de la cavité viscérale. EXPLICATION DES FIGURES. PLANCHE 7. Vota.— A l'exceplon de la figure 4, qui est de grandeur naturelle, toutes [es autres figures de cette planche sont grossies de 520 diamètres. Fig. 4. Un Cérianthe adulte dans l'état d'extension, tel qu'il se présente lorsque la partie inférieure de son trone est soutenue par la gaïîne feutrée.— Je dois ce beau dessin à l'obligeance de mon ami le docteur Lacaze-Duthiers, qui m'a accompagné dans les iles Baléares. Fig 2. Um nématocyste de la première sorte. Fig. 3. Le même après la sortie du premier tube. Fig. 4. Un nématocyste de la deuxième sorte dont le filament commence à sortir, Fig. 5. Un nématocyste de la troisième sorte, — Ces trois. sortes de capsules sont les éléments de la gaine feutrée. Fig. 6. Un nématocyste de la première sorte dans la cellule qui le produit. Fig. 7. Un nématocyste de la seconde sorte dans une cellule semblable qui contient en outre une vésicule remplie de granulations. Fig. 8. Un nématocyste dans la cellule-qui le produit ; il paraît être l'origine de la troisième sorte ? Fig. 9, 10, 11, 12. Petites vésicules trouvées, comme celles des figures 6, 7, 8, dans l'épaisseur de la peau, et paraissant être l'origine des nématocystes de la première sorte. Fig. 13. Un némalocyste de la quatrième sorte. Fig. 14, Un nématocyste de la cinquième, sorte, peut-être n'est-ce qu'un état plus avancé du précédent. Fig. 15. Un nématocyste de la sixième sorte. (1) Cette cavité n'existe que chez les Minyadides. SUR LE CÉRIANTHE. 389 Fig. 16, 17. Nématocystes de cette dernière sorte dans les cellules qui les produisent. Fig. 18. Un nématocyste de cette sorte dont le fil traverse l'enveloppe. Fig. 19, 20. D'autres dont l'enveloppe a disparu, et dont le fil se déroule libre- ment, à la manière des élastiques de bretelles. Fig. 21. Quatre organites de cette sorte dans la cellule unique qui les produit. — Les quatrième, cinquième et sixième sortes de nématocystes se trouvent dans les tentacules. Fig. 22. Nématocyste très semblable à ceux de la sixième sorte qui n'ont pas d'enveloppe. Fig. 23. Un nématocyste d'une septième sorte. Fig. 24. Le même dont le filament est sorti. Fig. 25. Une vésicule qui paraît être un premier état de la précédente. Fig. 26. Très petite vésicule appartenant peut-être à une huitième sorte. — Ces capsules, des figures 22-26, proviennent des cordons pelotunnés. PLANCHE 8. Fig. 4. Un Cérianthe adulte fendu suivant sa longueur, pour montrer son organi- sation intérieure. Grandeur naturelle. — a, base des tentacules ; le tube intes- tinal s'étend de b en c, les cordons pelotonnés de c en d,, les lames génitales de dene; o, l'orifice postérieur. Fig. 2. Portion d'une lame génitale grossie environ de 30 diamètres. Le bord libre est en haut. Fig. 3. Deux capsules spermatogènes grossies de 230 diamètres; l'inférieure contient un faisceau de jeunes spermatozoïdes. Fig. #. Portion d'un faisceau de spermatozoïdes bien développés, et dont les queues sont dirigées inférieurement. Fig. 5. Quelques spermatozoïdes libres. Fig. 6. Quelques cellules de la tunique interne: (Les figures #; 5, 6 représentent un grossissement de 520 diamètres.) Fig. 7, 8, 9, 10. Premiers états du Cérianthe vu de profil. Fig. 11. Jeune représenté dans la figure 10, mais contracté. Fig. 12, Le même, contracté, vu par en dessus. (Les figures 7-12 ont été faites sous un_.grossissement d'environ 30 diamètres.) FIN DU PREMIER VOLUME, TABLE DES ARTICLES CONTENUS DANS CE VOLUME. PHYSIOLOGIE. Recherches expérimentales sur le grand sympathique, el spécialement sur l'influence que la section de ce nerf exerce sur la chaleur animale, par M. CI. Bennann. . . : - Résumé d'un travail d' tre comparée, sur É ben 6 “ne chet, de la Perche et de l'Écrevisse, par M. Leresouier. i Expériences sur l'absorption de l'azote par les animalcules et les apaebe DAME MoRREN Mate, na En nds Mot En à 0ES MM ANIMAUX VERTÉBRÉS. Deuxième Mémoire sur les circonvolutions du cerveau chez les Mammifères, par M. Danesre. Note sur les mœurs du Gor ile « et 2 mere par M. ERA À Note sur la génération du Pélodyte ponctué, avec quelques observations sur les Batraciens anoures en général, par M. Tuomas. . . . : Monographie des Balistides, 2° partie. Étude des genres el des espèces, par M. Horrann, . . nf der most AS EL Conspectus systematis Aer C. e rer ur ASite ANIMAUX ANNELÉS. Recherches anatomiques sur les Hyménoptères de la famille des Urocérates, par M. Léon Durour. . . hd: CRD k Rapport sur le grand prix des sciences cons pour 4852 (sur le déve- loppement des Vers intestinaux), par M. pe QuaTRErAGEs. . . . Note sur des expériences relatives au développement des Cysticerques, par M. Van BENEDEN . . ail 46-mrvas base inc Mémoire sur le Bucéphale Hunel M nthe parasite des Huitres et des Bucardes , par M. Lacaze-Duruiers. , D QE ‘ ZOOPIYTES. Mémoire sur le plan général du développement des Échinodermes, par M. Müller, analysé par M. Dareste, . . . . . Mémoire sur le Cérianthe, par M. 3. Hume Publications nouvelles. , . EE. OO « = 00p 303 105 201 [-11 153 341 200 TABLE DES MATIÈRES PAR NOMS D'AUTEURS. Ausay. — Note sur les mœurs du Gorille et du Chimpanzé . Berxanp (C1.). — Recherches ex- périmentales sur le grand sym- pathique . et spécialement sur l'influence que la section de ce nerf exerce sur la chaleur ani- male. ARCS Boxapanre (C. La — Conspectus systematis ornithologiæ. Le Daxa. — Crustacea (Annonce). Daneste. — Deuxième Mémoire sur les circonvolutions du cer- veau chez les Mammifères. Dareste. Voyez Muzer. Durour (Léon). — Recherches anatomiques sur les Hymé- noptères de la famille des Uro- cérates . . . Dcuéri et Bisrox. — | Erpétolo - gie générale (Annonce). EnwanDs (Mure) et J. Haime. — Monographie des Coraux fos- siles de la Grande-Bretagne (Annonce). Georrnoy SaixT-HiLaIRE (is. k== Histoire naturelle générale des Règnes organiques (Annonce). Grariocer. — Mémoire sur les plis cérébraux de l'homme et des primates (Annonce) Guexe et Borspuvaz. — Species des Lépidoptères (Annonce). . Haime (J.). — Mémoire sur le Cérianthe s Horcarn. — Monographie ‘des 10% 341 Balistides(deuxième partie). #1 et303 Lacaze-Duraiers. — Mémoire sur le Bucéphale Haime, helminthe parasite des Huîtres et des Bu- cardes LACORDAIRE. — Genera des ‘Co- léoptères (Annonce). Laurexr. — Études sur les ani- malcules des infusions (An- nonce) CE ERA Leresouzcer. — Résumé d'un travail d'embryologie compa- rée, sur le développement du Brochet, de la Perche et de l'É- crevisse. : MonRex. — Expériences s sur l ab- sorption de l’azote par les ani- malcules et les Algues. Muicer. — Mémoire sur le plan général du développe- ment des Échinodermes, ana- lysé par M. Dareste. QuATREFAGES. — Rapport sur le grand prix des sciences phy- siques pour 1852 (sur le dé- veloppement des Vers intesti- naux). : THiOLLIÈRE. — Description ‘des Poissons fossiles des gisements coralliens du Jura (Annonce). tion du Pélodyte ponctué, avec quelques observations sur les Batraciens anoures en général. Vax Bexenex.— Note sur des ex- périences relatives au dévelop- pement des Cysticerques. 294 38 33 153 290 10% TABLE DES PLANCHES RELATIVES AUX MÉMOIRES CONTENUS DANS CE VOLUME. 1. Développement des Échinodermes. 2. Genre Triacanthe, 392 TABLE DES PLANCHES. 3. Genre Baliste. -k. Anatomie des Urocérates. 5. Genre Baliste (2° section). 6. Bucephalus Haimeanus (celte planche est citée dans le Lexte sous le n° 5). 7 et 8. Organisation des Cérianthes. FIN DE LA TABLE, Il Ann. des Scene. nat "Serie. Zool. T1. Pl 4. Développement des Echinodermes. Dr V'Aément imp v des Noyors 88 Lure. Zoot. T1. Pl 2, Ann. des Seienc. nat. 4"Sérte - Genre Triacanthe. Fr LT Moyens 65 ur 41 4 out. T1 Jeree # 2772 des Seine Ann Genre Balste. (1% Section / NAémont énp. r des Novers. 68 l'ares Ann.des Seine. nat. 4° Serte Zoo. Tom 1. FE. 4 LDyprur det Jébin ÿe Anatomée des UÜroccrates. VAimond En. r. des Vavers. 66. Joris Ra ZE. 8. "zut T1 À Fémumt impr es Moyens, 65. Cenre Paliste 12°Section.) Pucephalus Harrmeartus NW amant ing r des Noyers 66 far. Arndes Jeene, rat, $° Serie Organcesalior des Cérranthes. Fhémsnt cap r tr Nevers 65 Jurer Arnrles Sterne. nat. 4° Serie. 4; À Zool. Tomez. PUS l Hqan «ation des Crranthes. VAearut vos r das Nevers. 5 Juris re + i