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LMAURADE 12 nnoéÀ, zud hr at k dD Lésabbe : A cu sax etramno SANDER D'UN LT RCE AADDA GS EN e BOAT CEE ssh LPS ‘ \ EU Ko k. d'A +4 rai LATE Ac A TAB Home “a MR 48 - pt ANNALES DES SCIENCES NATURELLES. PARTIE ZOOLOGIQUE. RrcmEnRcHEs anatomiques, physiologiques et zoologiques sur les Eschares ; Par M. H. Mrrxe Epwanps. CHAPITRE PREMIER. INTRODUCTION. Pour peu que l’on examine les coquilles, les plantes sous« marines et même les pierres qui abondent sur les bords de la mer, On ne tarde pas à remarquer à la surface d’un grand nombre de ces corps une sorte de croûte mince et rude que les pêcheurs appellent souvent une teigne, comme s'ils voulaient l'assimiler ainsi aux produits morbides des affections cutanées confondues par eux sous le même nom. Ces croûtes, de couleur terne, n’offrent pour celui qui les observe à l'œil nu que peu d'intérêt; mais vues sous la loupe, elles changent d’aspect et excitent l'admiration, tant leur structure est délicate et élé- gante : les unes se présentent alors comme une fine dentelle dont le travail serait d’une régularité parfaite et dont les mailles seraient remplies par une membrane plus fine encore; d’autres paraissent composées d’une multitude de petites cellules sail- 6 MILNE EDWARDS: =» Swdes Eschares. lantes diversement réunies et ornées de stries, de pores ocellés ou de granulations miliaires; enfin, par leur forme et par leur disposition, elles varient presque à l'infini. Une structure semblable se voit aussi dans les touffes folia- cées'que le filet ramène fréquemment du fond de la mer, et elle existe également dans diverses productions de consistance pier- reuse et d’un volume assez considérable, qui se trouvent fixées aux flancs des rochers sous-marins. Rondelet fut, à ce quenouscroyons, le premier naturaliste qui, à l’époque de la renaissance, ait appelé l'attention sur un de ces corps singuliers. Dans son ouvrage sur les Poissons, il figura sous le nom dé Géroflade de merle Rétépore celluleux des auteurs mo- dernes, et le considéra comme pouvant bien être l’£schara men- tionnée par Athénée; il le rangea parmi les Zoophytes, c’est-à- dire à la place qui lui appartient, maisil n’entra dans aucun dé- tail propre à étayer l'opinion qu'il semblait avoir sur la nature animale de ce produit de la mer. (x) Environ cinquanté ans après, un Italien dont le nom est à juste titre célèbre, Imperato, étendit davantage nos connais- sances sur les êtres quinons occupent ici. Parmi les divers corps marins plus ou moins calcaires étudiés par ce naturaliste, et désignés de nos jours sous le nom commun de Polypiers, se trouve en effet, à côté du Rétépore, le Porus cervinus, qui west autre chose que FEschare cervicorne des classificateurs modernes. Imperato alla aussi plus loin que Rondelet sur la nature de ces êtres, car il leur reconnut les caractères de l’ani- malité, (2) Pendant le dix-septième ét la première moitié du dix-huitième siècle, le nombre connu des corps ayant une structure analogue à celle des PRolypiers dont il vient d’être question, s'accrut beau- coup; mais ces observations nouvelles ne firent guère qu’aug- menter la superficie de la science sans lapprofondir, car, au lieu de suivre la route si heureusement ouverte par Rondelet et Tmperato, et de chercher de nouvelles lumières sur la nature (x) Libri de Piscibus marinis (1554 et 5.) Trad, française (1558) 2° partie, p. 93. (2) Historia naturale, p. 630 (Venise, x5 72 MILNE EpwanDs. — Our les Eschares. 7 de ces êtres, on se contenta de noter leur existence, et on s’ac- corda généralement à les exclure du règne animal pour les ran- ger parmi les végétaux. Aussi est-ce dans les ouvrages de Clu- sius (1), des deux Bauhins (2), de Lobel (3), de Ray (4), de Mo- rison (>) de Tournefort (6), et des autres botanistes de cette époque, et non dans les traités de zoologie; que sont consignées les notions imparfaites recueillies jusqu’aiors sur l’histoire des Eschariens. Ce fut Bernard de Jussieu qui découvrit la nature véritable de ces êtres. Stimulé par les observations de Marsigli, qui avait signalé dans le corail des parties qu’il appelait des fleurs, et surtout par ceiles bien plus importantes de Peyssonell, qui avait reconnu . dans ces prétendues fleurs des animaux analogues aux actinies ou orties de mer, Bernard se rendit en 1741 sur les côtes de la Normandie, pour observer à l'état vivant, « avec la loupe et le . microscope », les diverses productions marines que ces parages pourraient lui offrir. Dans cette première excursion, il put déjà se convaincre de la vérité de l'opinion, encore contestée, de Peys- sonell,et constater l'existence de Polypes dans divers corps réputés jusqu'alors des végétaux ; mais avant que de publier le résultat de ses observations, il fit, l'année suivante, un second voyage sur les bords de la mer, et ce ne fut qu’en novembre 1742 qu’il communiqua ses découvertes à l’Académie des Sciences (7). Dans le mémoire qu'il présenta alors à cette société savante , on trouve la description et la figure de la Flustre foliacée des z00- logistes d'aujourd'hui, et on apprend que chacune des mailles de ses expansions lamelleuses est une cellule renfermant un ani- mal dont l'extrémité antérieure est couronnée de tentacules dé- (x) Plantarum sive stirpium historia (1576.) (a) J. Bauhin, Historia plantarum vol. 3, p. 809. (1651.) G, Bauhin Pinax theatri botanici, p. 366 (1671.) (3) Exoticorum libri decem. lib. 1v. p. 124. (1605.) (4) Synopsis methodica stirpium britannicarum, p. 42. (1690.) (5) Plantarum historiæ universalis oxoniensis, t. n. pl. 8, fig. 16 et 17 (1680. (6) Institutiones.rei herbariæ, t. £. p. 568 (1700.) (7) Examen de quelques productions marines qui ont été mises au nombre des plantes et qui sont l'ouvrage d’unesorte d'insecté de mer, par Bernard de Jussieu, Mém, de Acad, des Sc. 1742,p. 290, : 8 | MILNE EDWARDS. «— Our les Eschares. liés, et dont le corps, semblable à un pétit ver blanchâtre , est un peu renflé au milieu et attaché au fond de sa loge par son extrémité postérieure. En examinant un autre animal de la même famille, cet habile observateur découvrit un canal intérieur com- muniquant au dehors par une ouverture buccale, et paraissant faire les fonctions d'un estomac; enfin il fit connaître les ani- maux de quelques autres productions marines, et il désigna tous ces êtres sous le nor commun de Po/ypes, pour rappeler l’analogie qu'ils présentent avec les Hydres ou Polypes d’eau douce, sur lesquels l'attention du public venait d’être fixée par les belles expériences de Tremblay. Peu de temps après, un naturaliste suédois, Loefling (1), étudia à l’état vivant une autre espèce de Flustre qui envahit la sur- face des Fucus de nos mers, et que Pallas a nommée Æschare pileuse. 1} en observa les Polypes; et vit le développement du bourgeon reproducteur qui nait à l'extrémité de la cellule de l'animal adulte et constitue bientôt une nouvelle cellule dans la- quelle apparaît un nouveau Polype; fait qui explique la dispo- sition sériale qu’affectent toujours ces animaux aggrégés. Vers la même époque, Ellis (2) publia sur les Polypiers en gé- néral, qu’il désigna sous le 5om de Corallines, un ouvrage plein de faits nouveaux et enrichi de nombreuses planches d’une exactitude remarquable. A l'exemple de Ray, il les divisa en Co- raux, Corallines, Kératophytes, Eschares, Éponges et Alcyons, etil consacra au genre dont nous nous occupons ici un chapitre dans lequel il donna la description et la figure de plusieurs espèces nouvelles; mais ce travail, si important pour la zoologie propres ment dite, ne contribua que peu au perfectionnement des con- naissances que l’on possédait déjà sur l’organisation intérieure des Eschariens. Il en fut de même de l'Elenchus z0ophytorumde Palias, pu- bhie en 1766. Le célèbre auteur de ce traité ex professo sur les Polypes (3) résume de main de maître ce que l’on savait sur la * (1) Der Schwedeshen akademie der Wissenschaften abhandlungen, t. 14, p. 117 (1952.) (2) Essay towards a Natural history of corallines, by J. Ellis. 1755. (8) Dans cet ouvrage il n’est guère question que des Polypes, car le groupe des Zoophytes tel que Pallas l'admettait est loin de renfermer tous les animaux rayonnés désignés aujovrd’hr: MILNE EDWARDS. — Sur les Eschares. 9 nature des Eschares, et en décrit les formes extérieures avec une grande précision; mais il n’ajoute que peu à l'histoire anato- mique de ces petits êtres. Cependant les services qu’il rendit à cette branche de la zoophytologie ne consistent pas seule- ment à mieux caractériser les espèces déjà observées et à dé- crire des espèces nouvelles, il sut reconnaitre les types princi- paux autour desquels les êtres qu'il avait à classer se groupent naturellement, et il porta dans leur distribution d’heureuses in- novations. Dans l’Elenchus, on trouve non-seulement le genre Eschare nettement défini et composé d’élémens homogènes , maïs aussi, à la suite de cette division, un autre groupe dans lequel l’auteur réunit une foule de zoophytes qui présentent, comme nous le verrons dans un prochain mémoire, la même organisation indi- viduelle que ces Polypes, et qui, à raison de leur port, avaient cependant pour la plupart été confondus jusqu'alors avec les Sertulaires, dont la structure est cependant tout autre. Vers la fin du siècle dernier, Muller (r) et Othon Fabricius(2) fournirent quelques nouveaux matériaux pour l’histoire des Es- chares ou Flustres, nom nouveau que Linné avait déjà substitué au premier, et que la plupart des auteurs ont adopté. Un des meilleurs observateurs de cette époque, Cavolini, étudia sur le vivant plusieurs espèces d’Eschares, et signala l’a- nalogie qui existe entre les animaux de ces Polypiers et ceux des Millepores, mais toutefois sans indiquer aucune différence im- portante entre la structure de ces derniers et celle des Sertu- laires, etc. Il fait connaître pour quelques espèces le nombre de tentacules , et la disposition que prennent ces appendices lors- qu'ils rentrent dans la cellule; il signale l'existence d’une cavité tu- biforme qui descend de l4 bouche et sert d'estomac; enfin il parle d'une matière jaunâtre située au fond des cellules, et la consi- sous le même nom; à l'exception des Brachions, qui n’appartiennent pas à ce 1ype, il n’y admet que de véritables Polypes ou du moins des êtres que presque tous les zoologistes rangent en- core dans cette classe, (x) Fauna Danica, 1, 111,(1789.) (2) Fauna Groenlandica, p. 434-438. 10 _ MILNE EDWARDS, — Sur les Eschares. dère comme pouvant être une espèce d’ovaire; mais il n’ajoute rien de plus sur la conformation intérieure de ces petits étres.(1} Un autre naturaliste italien dont le nom sera toujours cher aux physiologistes, Spallanzari, est souvent cité comme ayant puissamment contribué à l'avancement de l’histoire des Eschares. On trouve en effet, dans la relation de son voyage en Sicile, des détails pleins d'intérêt sur un animal qu'il appelle ainsi (2); mais il est à remarquer que ce Polype, au lieu d’appartenir au genre Eschare ou au genre Flustre, tels que tous les auteurs systématiques circonscrivent ces groupes, se rapporte évidem- ment au genre Cellularia de Pallas ou Cellaria de Lamarck , et se rapproche des Eucratées et des Ménipées de Lamouroux et de M. de Blainville. (3) En 1803, Mohl publia à Vienne une monographie des Es- chares (4), mais sans donner de nouveaux détails sur la structure intérieure de ces animaux; car il se borna à en étudier les dé- pouilles solides telles qu'on les voit conservées par dessiccation dans les cabinets zoologiques. On lui doit d’avoir décrit et figuré avec soin plusieurs espèces nouvelles ou mal observées, et d’a- voir signalé dans la conformation extérieure de ces Polypes quelques points importans à connaitre, tels que l'existence d’une (x) Memorie per servire alla storia de’ Polypi marini , Prima e terza memorie. Naples, 1785. (2) Viaggi alle due Sicilie, 1. 4. p. 260. tab. x. fig. 9. Spallanzani donne à ce Polype le nom d’Eschara ramosa {op. eit. p. 244). Lamouroux le mentionne sous le nom de Flustra italica (Hist. des Polypiers coralligènes flexibles, p. 111.) (3) Voici du reste ce que Spallanzani a observé relativement à la structure de ce polype. Les cellules, qui sont réunies en séries linéaires et rameuses de manière à former unessorte de petit buisson touffu, présentent chacune une seule ouverture et renferment un Polype dont l'extrémité antérieure est couronnée de tentacules insérés autour d’une bouche centrale, pou- vant à la volonté de l'animal saillir au dehors ou rentrer dans sa loge. Ces tentacules qui, en s’épanouissant figurent une cloche renversée, déterminent dans l’eau ambiante des courans et dirigent ainsi vers l’orifice buccal les corpuscules alimentaires suspendus dans ce liquide. La moindre commotion détermine la rentrée du Polype, et lorsqu'il est rentré dans sa cellule on aperçoit encore à travers les parois transparentes de cette cavité. Ses tentacules sont alors ras- semblés en un faisceau , et son corps est courbé en are; son extrémité postérieure ne paraît pas fixée au fond de sa loge; enfin on le voit mourir pendant que de nouvelles cellules renfer- mant de jeunes Polypes, se développent et paraissent se fixer au sommet des anciennes cellules dont elles semblent naître par des espèces de bourgeons. (4) Eschara ex Zoophytorum sive Phytozoorum ordine pulcherrimum ac notala dignissimum geuusnovis speciebus auctum, methodice descriptum. br, in-4°. MILNE EDWARDS. == Sur les Eschares. 1r sorte d’opercule servant à férmer l'entrée de la cellule polypifère de la même manière que cela a lieu dans certains Millepores, chez lesquels Cavolini avait déjà remarqué cette particularité. ‘D'autres naturalistes, en étudiant les eouches fossiliferes de Vécorce du globe, acquirent la preuve de lexistence des ani- maux presque microscopiques dont nous nous occupons ici, à une époque bien antérieure à celle marquée par l'apparition de l'homme sur la terre. On reconnaît leurs dépouilles dans quel- ques fossiles de la craie de Maëstricht, figurés par Faujas de Saint-Fond (r), et MM. Desmarets et Lesueur ont décrit, dans un mémoire spécial , plusieurs autres Eschares antédilu- viens. (2) | : Le nombre toujours croissant des espèces inscrites dans les catalogues de la zoologie sous le nom d'Eschare, ne tarda pas à faire sentir la nécessité d'établir dans ce groupe plusieurs sub- divisions génériques. Lamarck, qui a rendu de si grands services à la zoophytologie aussi bien qu’à la conchyliologie, entreprit cette tâche, mais ne fut pas toujours heureux dans le choix des caractères dont il fit usage pour l'établissement de ses divisions : prenant pour base de sa classification la consistance plus ou moins pierreuse et la conformation générale du Polypier, c’est-à-dire de la dépouille tégumentaire des Polypes, il ne pouvait en effet arriver à un ar- rangement naturel, car les différences que l’on rencontre dans la dureté de cette enveloppe et dans la manière dont les divers individus d’une même souche s’aggrègent, ne paraissent avoir que peu d'importance dans l’économie de ces petits êtres , et ne coïincident avec aucune modification constante dans leur struc- ture intérieure. Aussi, non-seulement il existe beaucoup de vague et d’arbitraire dans la délimitation de ses divisions géné- riques, mais encore les affinités naturelles les plus étroites sont souvent méconnues, et des êtres conformés d’après des types différens rassemblés dans le même groupe. Dans le système de Lamarck, la section des Poly piers à réseau correspond à-peu-près (x) Histoire naturelle de la montagne Saint-Pierre, (2) Bulletin de la Société Philomatique, t, 4. ! 12 MILNE EDWARDS. =— Sur les ÆEschares. au genre Eschare de Pallas, et se divise en divers genres désignés sous les noms de Flustre, de Tubulifère, de Discopore, de Celle- pore, d Eschare , d’_Adéone ; de Rétépore, d'Alwéolite, d Ocellaire et de Dactylopore (1). Quant aux Cellulaires de Pallas, qui se lient de la manière la plus étroite aux Eschariens en général, Lamarck les relégua dans la section des Polypiers vaginiformes où elles se trouvent enclavées entre les Sertulaires, les Plumu- laires, etc., qui appartiennent à un autre type organique, et les Dichotomaires, qui ne diffèrent pas essentiellement des Coral- lines, et doivent prendre place dans le règne végétal. Malgré les défauts que nous venons de signaler, le travail de Lamarck ne laissa pas que d’être très utile aux progrès de la branche de la zoologie dont nous nous occupons ici, car il montra combien sont nombreux et variés les petits êtres con- fondus avant lui sous le nom commun d’Eschare, et il fixa sur eux lattention des naturalistes. Du reste, il n’étudia que la dé- pouille desséchée de ces Polypes, et par conséquent il ne put rien découvrir de nouveau touchant leur structure intérieure. Pendant que Lamarck préparait le grand ouvrage dont le se- cond volume est consacré aux Polypes, Lamouroux s’occupait du même sujet, et fit paraître à Caen un traité spécial sur les Polypiers coralligènes flexibles. D’après la date de la présenta- tion de son manuscrit à l’Institut, on pourrait même lui attri- buer l’antériorité sur Lamarck, et penser que ce dernier savant, nommé par l’Académie des Sciences commissaire pour l'examen du mémoire de Lamouroux, avait profité de cette circonstance pour s'approprier les résultats obtenus par ce zoologiste. Un auteur récent semble porté à croire que les choses se sont pas- sées de La sorte; mais les traditions du Muséum prouvent qu'il n’en est rien, et je me plais à rendre ici toute justice à la con- duite de Laniare En effet, M. Valenciennes, qui était alors at- taché à :amarck en “ d’aide-naturaliste, m'a assuré que depuis long-temps toutes les divisions génériques établies par ce professeur dans la classe des Polypiers se trouvaient indiquées dans la collection publique du Muséum, et que pour faciliter le (1) Histoisc des animaux sans vertèbres, t, 2 (:816.) drive EbpwaAnRps. — Sur les Eschares. 13 travail de Lamouroux sur le même sujet , Lamarck avait mis gé- néreusément à sa disposition toutes les richesses de cet établis- sement déjà dénommées et classées par ses soins. Du reste, la méthode adoptée par Lamouroux et développée dans ses deux principaux ouvrages, est encore moins naturelle que celle de Lamarck, car, divisant toute la classe des Polypes d’après la flexibilité ou la rigidité complète du Polypier, il sépare les Eschares de Pallas en deux groupes placés, l’un dans la sec- tion qui renferme les Cellaires, les Sertulaires, les Gorgones, etc., l'autre dans celle qui comprend les Millépores et les Madrépores. Il augmenta le nombre des espèces connues, mais se borna à l'étude des parties solides desséchées , et ne dit presque rien des animaux qui les habitent; toutefois ce qu’il avait pu apercevoir de l’organisation de ces Polypes le porta à croire de is étaient beaucoup plus compliqués dans leur composition qu’on nele pen- sait généralement. « A la vérité, dit-il, le sacalimentaire n’a qu'une « seule ouverture, mais la variété des parties qu’offrent ces pe- « tits êtres est telle, qu’on y découvrira, en les étudiant, des « organes destinés à diverses fonctions vitales subordonnées à « l'organisation générale (1). » Du reste, il n’en donne aucune description anatomique. Cuvier, dans son immense travail sur la distribution du règne animal fondée sur l’organisation, semble s’être contenté, pour les Polypes, des observations faites par ses prédécesseurs, et n'évita pas les imperfections que nous venons de signaler dans les systèmes de Lamarck et de Lamouroux. Il n’ajouta rien à ce que l’on savait déjà sur la structure intérieure des Eschariens et se borna à les comparer aux Hydres, c’est-à-dire aux Polypes les plus simples que l’on connaisse. (2) M. de Blainville, dans l’article lustre du Dictionnaire des Sciences naturelles, après avoir {rapporté les observations de Spallanzani sur les Polypes, rangés à tort dans ce genre , ajoute en parlant des cellules : « Il paraîtrait certain que quelques es- « pèces offrent deux ouvertures, ce qui pourrait faire croire (1) Hist. des Polypiers coralligènes flex. p. 100. (2) Règne animal, première édition, t, 4, p. 74. 14 MILNE EDWARDS. =— Sur les Eschares. « que le canal intestinal de animal en a autant, et que, par « conséquent, il doit être placé plus haut que les véritables Po- « lypes, et peut être rapproché des animaux qu’on a nommés « Alcyons à double ouverture, c'est-à-dire des Ascidies, ce qui « est encore au moins fort hasardé » (1). Nous verrons bientôt que cette prévision ne tarda pas à être vérifiée, et cependant il n’existe aucun rapport entre la seconde ouverture de la cellule et la terminaison anale de l'intestin. | Cu En 1827, M. Grant, à qui l’on doit des observations si inté- ressantes sur les Éponges , publia à Édimbourg un mémoire très important sur la structure et la reproduction de la Flustra car- basea et de la Flustra foliacea (x). Cet habile anatomiste, après avoir fait connaître la conformation extérieure de leurs cellules, : étudie la structure intérieure de ces Polypes, décrit les cils vi- bratiles dont leurs tentacules sont garnis ; leur cavité digestive recourbée sur elle-même, et un organe particulier appendu. à l'extrémité de cet appareil ; enfin ik suit le développement des germes reproducteurs qui apparaissent d’abord sur Ja face in- terne de la paroi postérieure de la cellule, et qui, devenus libres, sortent de ces loges ; nagent dans le liquide ambiant, puis se fixent sur quelque corps sous-marin et se transforment en autant d'animaux sédentaires semblables ‘à leurs parens, et pouvant aussi se multiplier par de simples bourgeons. Revenu depuis peu d’un voyage sur les bords de la Méditer: ranée, où je m'étais livré à l'étude des Polypes qui vivent dans cette mer, je ne connaissais pas encore le travail de M: Grant, lorsqu’en 1828 je me rendis aux îles Chausay avec M. Audouin, pour y poursuivre nos recherches anatomiques et zoologiques commencées à Granville deux ans auparavant. Pendant cette ex: cursion, nous nous sommes occupés aussi de l’organisation des Flustres , et, tout en observant de notre côté les: faits anato- miques déjà constatés par M. Grant, nous avons fait un pas de plus. En effet, nous nous sommes assurés que la cavité diges- tive des Flüstres n’est pas un cul-de-sac ne communiquant au (x) Dict. des Sciences naturelles, t. 17, p. 193. Paris 1820. (2) Observations of on the structure and näture of Flistre, Edinburgh; nèw Phitosophical fournal, vol. 3, p, 107, MILNE EDWARDS. == Sur les Eschares. 15 dehors que par la bouche, ainsi que le pensaient M. Grant et les autres naturalistes, mais bien un tube s’ouvrant au dehors par ses deux extrémités et recourbé sur lui-même comme celui des Ascidies. 3 Cé fait, que nous avons communiqué à l'Académie des Scien: ces en Septembre 1828 (1), nous parut devoir changer les idées généralement reçues sur les affinités naturelles de ces animaux avec lés autres zoophytés, et acquérir encore plus d'intéfêt par la découverte que nous fimes en même temps, d’un mode d’or- ganisation analogue chez d’autres animalcules marihs rangés jusqu'alors parmi les Vorticelles ou les Hydres. Jusqu'à l'époque dont je viens de parler, on n'avait classé les Polypes que d’après la considération de leur dépouille solide; et en effet ce que l’on savait de leur organisation intérieure de- vait paraitre insuffisant pour “per de guide dans une distri- bution méthodique de ces petits êtres. Mais, profitant des ob- servations que nous avions ea l’occasion de faire sur là structure de ces zoophytes, et de celles dont la science avait été enrichie par d’autres zoologistes , nous avons cherché à poser les bases anatomiques de c2tte classification naturelle et nous avons pro- posé de distribuer les animaux de la classe des Polypes en quatre groupes principaux. L'une de ces familles comprenait les éponges et les autres corps d’une structure analogue qui semblent jouir d’un premier degré d’animalité sans présenter cependant aucune trace de Po- lypes proprement dits. Une seconde division était formée par les Polypes, soit nus, soit à polypiers, dont la cavité digestive ne communique direc- tement au dehors que par une seule ouverture et a la forme d'un cul-de-sac creusé dans la substance même du corps, c’est. à-dire par les Hydres, les Sertulaires, etc. Une troisième famille se composait des Polypes dont le corps est creuséd’une grande cavité au milieu de laquelle est suspendu un tube alimentaire membraneux communiquant au dehors par (1) Résumé des Recherches sur les animaux sans vertèbres faites aux îles Chaussay, par MM, Audouin et Milne Edwards, Annales des Sciences naturelles, t, 15. 16 MILNE EDWARDS/»— Sur les Eschares. une seule ouverture; les Alcyons à polypes , les Gorgones, les Pennatules et tous les Polypes actiniformes se rapportaient à ce type. Enfin notre quatrième famille renfermait les Flustres et les autres Polypes dont le canal digestif communique au dehors par deux ouvertures distinctes et dont l’organisation se rapproche de celle des Ascidies composées. Ce premier essai d’une classification naturelle des Polypes fon- dée sur l’organisation de ces animaux ne fut pas adopté par les zoologistes. M. Cuvier, dans la seconde édition du règne animal, publiée en 1830, continua à distribuer ces zoophytes d’après la confor- mation générale de leur Polypier et rangea encore les Flustres entre les Sertulaires et les Corallines, tandis que les Eschares dont lastructure diffère à peine de celle de ces Flustres, se trouvaient relégués dans la tribu des Lilhophytes à la suite des Coraux et des Madrépores. (1) M. de Blainville adopta dans son article zoophyte du Diction- naire des Sciences naturelles publié en 1830 et dans son Manuel d’actinologie publié en 1834, une marche qui me paraît pré- férable. En effet, il chercha les bases de sa classification dans la structure intime du Polypier plutôt que dans la forme géné- rale de cette dépouille solide, ce qui est nécessairement plus en rapport avec le mode d'organisation des animaux eux-mêmes. Ce serait m’éloigner de mon sujet que de m’étendre davantage sur la méthode de ce naturaliste, et} je me bornerai à rap- peler qu’il a réuni dans deux familles de sa classe des Po- lypiaires tous les Polypiers composés de cellules polypifères et dépourvus d’une tige commune. Du reste M. de Blainville n’a pas cru nécessaire de s'arrêter aux faits que nous avions con- statés touchant l'anatomie des Flustres et semble même douter (x) En mentionnant en note les rapports que nous avions signalés entre les Flustres et les Ascidies, Cuvier semble penser que certains de ces polypiers sont habités par de véritables Ascidies et d’autres par des polypes hydriformes ; il fonde cette dernière supposition sur des observations de MM. Quoy et Gaymard, et ajoute qu’il sera important de savoir quelles espèces appartien— nent à l’une ou à l’autre de ces catégories. ( Voyez Règne animal deuxième édition , t. 3. p. 303.) AMILNE eowanps: — Sur les Eschares. 1 encore de l'existence d’un anus distinct chez ces animanx, car il n’en parle que dans les termes suivans : © « Dans la classe des Polypiaires proprement dits (c’est-à-dire «les Millépores, les Flustres, les Eschares, les Sertulaires, etc.), « la disposition du canal intestinal est assez peu connue : sil « fallait en juger d’après les Hydres, ce ne serait qu’un enfonce- « ment assez profond, occupant une grande partie de la lon- « gueur du corps et sans plis ou lamelles, et dont la surface est « tellement semblable à l’extérieure que l'une peut remplacer « l’autre par retournement comme la montré Tremblay; mais « il n’y a peut-être que ce genre qui offre cette particularité. Il « est même à remarquer que dans les Flustres, les Eschares et « les Cellaires, l'appareil digestif paratt être plus complexe que « dans les autres genres, en ce qu’on a remarqué une sorte d’es- « tomac distinct de l'intestin proprement dit qui se recourbe « en avant, et qui paraît même se terminer à l'extérieur par « un orifice anal; du moins dans les Eschares on a pu le « croire. »(1) | Le mode d’organisation que nous avions fait connaitre dans les Flustres ne tarda cependant pas à être observé par M. Delle- Chiaje sur une autre espèce du même genre rapportée par cet anatomiste à la division des Cellépores et décrite dans letroisième volume de son ouvrage sur les animaux sans vertèbres de Na- ples. (2) Dans ces derniers temps M. Ehrenberg, qui parait ne pas avoir eu connaissance de ce que M. Audouin et moi avons pu- blié sur la structure et la classification des Polypes, est arrivé à un résultat analogue. En effet il prend pour base de son système l'existence d'une seule ou de deux ouvertures au canal digestif des Polypes, et divise de la sorte ces animaux en deux groupes principaux auxquels il donne les noms de Bryozoaires et d’An- thozoaires (3). Or, notre quatrième famille, celle qui a pour type LA (r) Manuel d’Aclinologie, p. 71. Paris 1834. (2) Memorie su la storia e notomia degli animali senza vertebre del Regno di Napoli. (3) Beitrage zur physiologischen Kenntniss der Corallenthiere im allgemeinen und besonders des Rothen Meeres, nebst einen Versuche zur physiologischen systematik derselben. VI. Zoor,, — Juillet. 2 _18 MILNE EDWARDS. — Sur les Eschares. les Flustres, est évidemment la même division que la section des Bryozoaires de M. Ehrenberg. (1) Tel était l’état de la science en ce qui concerne les Eschares lorsque, voulant poursuivre mes recherches sur les Polypes en général, je me suis rendu de nouveau sur les bords de la Médi- terranée. | Pendant que je faisais ce voyage, un micrographe anglais, M. Lister, publia sur ces zoophytes un mémoire très intéressant dans lequel, sans avoir connaissance de notre travail antérieur sur les Flustres, ilconfirme pleinement les faits que nous avions constatés touchant l'existence d’une ouverture anale et l’analo- gie qui se remarque entre la structure de ces animaux et celle des Ascidies composées (2). M. Lister mentionne aussi un petit polype nu, très voisin de l’un de ceux que nous avions dit res- sembler par leur organisation aux Flustres, et il ajoute que, d’a- près leur conformation intérieure, les Añguinaires et les Tibia- nes doivent appartenir à la même famille; mais nous verrons par la suite que c’est à tort qu’il désigne sous ce dernier nom le Polype auquel se rapportent ses observations. D'après les détails dans lesquels je suis entré en esquissant les progrès de l’histoire des Eschariens, on a pu voir que l'or- ganisation des Flustres diffère beaucoup de celle des Sertula- riens, des Alcyoniens et des Zoanthaires, et constitue un type distinet. Par analogie on est porté à croire que les autres Polÿ- pes dont la dépouiile solide ressemble à celle des Flustres doi- vent présenter une structure semblable; mais on ne sait encore que peu de choses à cet égard, et on ignore si, parmi les Polypes dont la conformation extérieure est différente, il existe des exem- | piles d’une pareille organisation intérienre. ( Les recherches dont je vais rendre compte dans les chapitres suivans rempliront une partie de ces lacunes, et me parais- sent de nature à jeter quelques lumières sur la physiologie (x) N'ayant pas assigné de nom particulier à cette division de la classe de Polypes nous adopterons celui employé par M. Ehrenberg. (2) Some observations o1 the structure and fonctions 6f Tubular and Cellular Polypi and of ‘Ascidia, Philosophical transactions, 1834, part. 2 MINE #bwarps. — Sur les Eschares. 19 aussi bien que sur l'anatomie et l'histoire zoologique de ces ani- . maux. CHAPITRE IL DES ESCHARES PROPREMENT DITS. 1° DES ESPÈCES RÉCENTES. SI De l’Eschare cervicorne. (1) (Planche rx et planche 2; figure 1.)] Lamarck, comme nous l’avons déjà dit, divisa les Eschares de Pallas en plusieurs genres, et réserva à l’un de ses groupes le nom qui leur était d’abord commun à tous. Les zoologistes ont généralement adopté cette division, mais ne s'accordent pas sur les limites qu'il convient d’assigner a genre Eschare ainsi restreint, ni sur sescaractères essentiels. Avant que d’avoir étudié la valeur des particularités de structure offertes par ces Polypes, la discussion de ces questions serait prématurée; nous ne nous y arréterons donc pas pour le moment, et nous nous bornerons à rappeler que tous les auteurs les plus récens, quelle que soit leur opinion à cet égard, rangent dans la division géné- rique des Eschares l'espèce dont nous allons nous occuper. Ce zoophyte, dont Imperato a donné une figure sous le nom de Porus cervinus , est l'Eschare cervicorne des zoologistes mo- dernes; il habite la Méditerranée et, en suivant la pêche dés co- railleurs devant le cap Falcon, à l’ouest d'Oran, je m’en suis pro- curé plusieurs échantillons à l’état vivant. Ce polypier, comme on le sait, est tout-à-fait pierreux et formé de branches aplaties qui lui donnent quelque ressemblance (x) Synonymes : Porocervino Imperati Historia naturale, p.630 (Venise 1573.) — Bonanni Museum Kircherianum p, 286, fig. 13 (Rome x 709). El serait bien possible que 2. 10 MILNE EDWARDS. — Sur Les Eschares. : avec le bois ‘d’un cerf (1); il se trouve fixé par sa base aux rochers sous-marins, et n'offre dans nos collections qu’une teinte blanchâtre; mais à l’état frais il est de couleur rouge, tirant un peu sur l’orangé. . Une multitude de petites cellules disposées par séries longitu- dinales ,alternes et réunies dos à dos sur deux plans, constituent ce polypier; leur forme est à-peu-ptès elliptique, et leur surface extérieure est toute couverte de petites granulations microsco- piques. (2) Lorsqu'on laisse bien en repos dans de l’eau de mer un frag- ment de cet Eschare vivant, et qu'on l’observe à la loupe, on ne tarde pas à voir sortir d’une ouverture située vers l'extrémité antérieure de chaque cellule, un faisceau de tentacules longs et déliés, qui d’abord droits, se recourbent bientôt en dehors, cette figuré, ainsi que celle d’Imperati ait été faite d’après un petit échantillon de l’Eschare à bandelettes, mais elle ressemble davantage à l’espèce à laquelle nous le rapportons. Porus cervinus minor Marsigliz Histoire physique de la mer (1525), p. 63, pl. 6; fig. 23 et 24 ; le Polypier figuré ici a le port de l'Eschare cervicorne, mais dans la portion de branche grossie, il semble y avoir beaucoup plus d'ouvertures qu’on n’en trouve dans cette espèce. Millepora cervinus Ellisand Solander. Natural history of many curious and urcommon Zoo- phytes (1786), p.252. Millepora corvicornis Pallas. Hoche Zoophytorum, p. 252. Eschara cervicornis Lamarcks Hist. nat. des anim. sans vertèbres 1° édit. t. 2. p, 176 et 2° édit. t. 2, p. 269. — Lamouroux. Encyclopédie méthodique, Zoophytes, p. 374. — De Blainville. Diction, des Sciences naturelles, t. 15, p. 297 et Manuel d’actinologie, P. 428. D’autres espèces ont été souvent confondues avec celle-ci : Le Porus cervinus Imperati de Marsigli (Hist. de la mer) est un Flustre. Le Polypier que Bernard de Jussieu rapporte au Porus cervinus (mem. de l’Acad, 1742, p- 299), est le Flustre foliacé. ù Le Porus cervinus Ellis, (Essai sur les Corallines pl. 30, fig. 2.) est l’Eschare à bande- letes. ; | ; M. Fleming a décrit aussi sous le nom de Cellepora cervicorais (British animals, p. 532) un Polypier qu’il a trouvé sur les côtes de l’Ecosse, et qu’il considère comme identique avec le Porus cervinus d'Imperati, etc., mais d’après l'inspection d’un échantillon qu’il a envoyé sous ce nom au Musée de York, nous ne doutons pas que ce ne soit une espèce tout-à-fait distincte et même un véritable Cellépore plutôt qu'un Eschare. Il est probable que le Porus cervinus figuré par Borlase (natural history of Cornwall. pl, 24, fig. 7) appartient à l'espèce de Cellépore dont il vient d'être question. (D) Ex, 9 Er (2) PI. x, fig. 1%, montrant ces cellules grossies , et fig. 1f, montrant la section fransver- sale d’une branche formée par leur réunion sur deux plans. | MILNE EDWARDS. — Our Les Eschares. 21 vers le bout surtout , et représentent ainsi une espèce de cloche renversée. Leur nombre normal paraît être de 16, mais varie un peu; leur diamètre est sensiblement le même dans toute leur longueur, et lorsqu'ils sont étendus, ils présentent une appa- rence très singulière: on les croirait garnis de chaque côté d’une rangée de petites perles qui rouleraient sur elles-mêmes à la suite les unes des autres, depuis la base de l’appendice jus- qu’à sa pointe, et de là à sa base, en montant d’un côté et en des cendant de l’autre. Ce mouvement, qui a évidemment beaucoup d’analogie avec celui qui se voit chez un grand nombre d’animal- cules infusoires et notamment chez les Rotifères, avait déjà été remarqué par M. Grant dans la Flustra carbasea et la Flustra foliacea (1); M. Audouin et moi l’avions également observé dans une autre espèce du même genre ,et, comme nous le verrons par la suite , il parait exister dans toute la famille des Eschariens, tandis que les Sertulariens et les Alcyoniens ne le présentent pas. Il était naturel de penser qu'il dépendait de l’existence d’une rangée de cils vibratiles très fins qui, en décrivant avec une rapi- dité extrême des cercles égaux, produiraient sur notre rétine l'impression d’autant de sphères en rotation; c’est en effet l’ex- plication que l’on donne généralement des mouvemens vibratiles observés à la surface du corps d’un grand nombre d'animaux aquatiques; mais tous les naturalistes ne l’admettent pas, et M. Raspail, en la combattant, affirme que jamais on n’a vu ces pré- tendus cils à l’état derepos (1), et révoque en doute leur exis- tence. Suivant lui, cette illusion d'optique serait produite par la différence qui existerait entre la densité de l’eau exhalée par l'animal et celle du liquide ambiant; un autre observateur l’at- tribue à la séparation de l'air dissous dans l’eau. {2) Dans l'Eschare que nous étudions ici et dans les Flustres, de même que dans beaucoup d’autres Polypes dont nous parlerons par la suite, nous ne pouvons conserver aucun doute sur l’exis- tence d’une frange marginale dont le jeu produit ce mouvement (x) Histoire naturelle de l Alcyonelle craie Mémoires de la Société d'Histoire naturelle de Paris, t. 4. p. 131 et 132, (2) Voyez Recherches sur l'anatomie et la physiologie des Polypiers composés d'eau doucer par M. Dumortier, Bulletin de l'Académie royale des Sciences de Bruxelles ,1835,n. 12. 23 MILNE EDWARDS. +— Sur les Fschares. vibratoiré, car nous avons eu maintes fois l’occasion de le voir en repos, et elle nous a paru alors composée de petits appen- dices filiformes rangés côte à côte. (r) La couronne de tentacules dont je viens de parler, s’insère à l'extrémité d’une sorte de trompe, qui elle-même est renfermée dans une gaîne cylindrique et rétractile. Les Polypes sur lesquels je faisais ces observations ayant bien- tôt cessé des’étendre complètement, je n’ai pu distinguer à tra: vers cette gaine la position du tube alimentaire, ni celle de l'ouverture anale que, par analogie, je devais supposer y exister. J'eus par conséquent recours à la dissection pour continuer l'examen de ces petits êtres , et après avoir ouvert quelques cel- lules, je fis sortir les parties molles cachées dans l’intérieur de ces loges. Je me suis assuré de la sorte que du pourtour de l’ouverture de la cellule naît une gaîne membraneuse de forme cylindrique qui égale en longueur les tentacules contractés, et les renferme lorsque l’animal se retire dans sa loge (2). Ces appendices, ainsi rentrés, ne sont pas recourbés sur eux-mêmes, comme cela se voit chez les Sertulaires, les Alcyons, etc., mais parfaitement droits, et réunis en un faisceau dont la longueur est cependant beaucoup moindre que celle de ces mêmes organes lorsqu'ils se déploient en forme de cloche. Par l'extrémité opposée à celle fixée au pourtour de l’ou- verture de la cellule, cette gaine tentaculaire se continue avec un tube assez large dont les parois sont d’une mollesse et d’une délicatesse extrême(3). Vers ce point on voit aussi de chaque côté (:) M. Dutrochet qui a fait, il y à déjà plusieurs années, des observations encore inédites sur cé phénomène chez divers Polypes d’eau douce, pense que lespèce de frange qui l’occa- sionne ne se compose pas de filamens, mâis d'une membrane eontinueet plissée dont les mou- vemens seraientondulatoires ; or, comme une bordure plissée pourrait facilement offrir le même aspect qu’une rangée de cils serrés les uns contre les autres, il serait peut-être nécessaire de soumettre ces appendices à de nouvelles observations, avant que de se prononcer définitive- ment sur leur conformation ; mais toujours est-il que le mouvement vibratoire en question ré- sulte de l’action d’une bordure mobile et non de l’exhalation ou de l’absorption dont la surface des tentacuies peut être le siège. Du reste, nous.sommés persuadés que cette bordure est divisée en lanières ou cils (2) PL 1, fig. :: à gaîne tentaculaire. (3) PI. x, fig. :° et xd, MILNE EDwarDs. — Sur les Eschares. 23 un faisceau de fibres qui se portent en bas et en dehors, pour aller s’insérer sur les parois latérales de la cellule (x). Ces fibres paraissent striées en travers, et sont évidemment de nature | musculaire; leur usagé n’est pas douteux: lorsque l'animal veut s'étendre, la gainemembraneuse dont nous venons de parler se renverse en dehors comme un doigt de gant, en même temps que les tentacules s'avancent; les faisceaux musculaires se trou- vent alors entre le tube alimentaire et la gaine ainsi renversée, et en se contractant ils doivent faire rentrer le tout dans l’intérieur de la cellule. On pourra donc appeler ces faisceaux contractiles les muscles rétracteurs de la gaine tentaculaire, et il ne sera pas inutile de leur donner un nom particulier, car bientôt nous aurons à parler d’autres faisceaux de même nature dont les usa- ges sont différens, et dont il faudra par conséquent les distinguer. La première portion du tube alimentaire est renflée et beau- coup plus large que le reste; elle forme une espèce de chambre dans laquelle l’eau, mise en mouvement par les cils vibratiles des tentacules, paraît circuler librement. Ses parois sont d’une tex- ture très délicate; la membrane molle qui les forme est froncée et ma paru creusée de plusieurs canaux longitudinaux réunis par de petits vaisseaux transverses; mais je n'oserais affirmer que cette disposition dont quelques autres Polypes de la même famille m'ont offert des exemples bien nets, existe réellement ici. Au dessous de cette première cavité, le tube alimentaire se rétrécit, mais aussitôt se renfle de nouveau, et présente dans ce point un certain nombre d’appendices filiformes qui paraissent être libres et flotter dans l’intérieur de la cellule. A cette se- conde cavité succède un conduit étroit qui débouche bientôt dans une troisième dilatation du canal alimentaire; celle-ci varie un peu dans sa forme, mais est ordinairement presque sphérique. Il en part une espèce d’intestin assez gros qui ne tarde pas à se recourber sur lui-même et à s’accoler à un or- gané de texture molle et membraneuse qui a la forme d’un cœ- cum,et qui paraît se continuer supérieurement avec le canal digestif. Celui-ci continue à se diriger vers la partie supérieure (1) PL x, fig. x°, g. 24 MILNE EDWARDS. — Sur les Eschares. de la cellule, et va enfin se terminer par, une ouverture anale distincte, à la face supérieure de la gaine tentaculaire. D'après la position de l'anus, on voit que cet orifice ne peut communiquer avec l'extérieur que lorsque le Polype s’é- tend hors de sa cellule, et que c’est la même ouverture de cette loge qui livre passage aux deux extrémités du tube alimentaire. Cette ouverture commune , dont la forme, comme nous le verrons bientôt, varie avec l’âge, est fermée par un opercule qui se termine par un bord semi-circulaire libre (1).et qui a déjà été signalé par M. de Blainville. Denx faisceaux musculaires, que nous nommerons les zzuscles abaisseurs de l’opercule, s'in- sérent à la face interne de cette espèce de valvule, par l'inter- médiaire de deux filamens analogues à des tendons. Par leur ex- trémité inférieure qui est très élargie, iis vont s’insérer aux parois de la cellule, et lorsque, par l'effet de son élasticité, l’o- percule s’est renversée et a laissé béante l'entrée de la loge, ils la ramènent contre les bords de cette ouverture , comme une porte dans son chambranle. Nous avons vu plus haut que l'extrémité supérieure de la gaine tentaculaire s’insère au pourtour de l’ouverture commune de la cellule; il était intéressant d’examiner la nature de cette connexion, et d'étudier la structure de cette espèce de loge. Les auteurs s'accordent généralement à admettre que la cel- lule de l’Eschare, comme les autres portions pierreuses des Po- lypiers, ne fait point partie de lanimal, mais est le produit d’une exsudation de matière calcaire qui se moule sur la surface de la membrane dont elle suinte, et constitue ainsi une espèce de croûte analogue à une coquille. Lamarck pose en principe que tous les Polypiers se forment ainsi (2); M. Cuvier professa une opinion semblable et compara le développement de ces corps à celui de l’ivoire des d'nts(3); Lamouroux alla même plus loin, car il décrivit la manière dont les cellules sont produites : « Ces loges, dit-il, sont d’abord ta- (r) Plrfig. 1° et zi. (2) Hist. des animanx sans vertèbres, t. 2. p. 69, etc. (3) Règne animal deuxième édition, t. 3, p. 298. MILNE UDWARDS. — Sur Les Eschares. 2h pissées intérieurement par une membrane analogue au manteau des Mollusques qui se dessèche aussitôt que le Polype cesse de croître, et alors celui-ci n’adhère plus au bord de la cellule, mais y est fixé plus ou moins profondément au moyen d'une membrane particulière (1). Enfin, M. de Blainville, tout en adoptant des idées différentes sur le mode de formation des Po- lypiers lamelleux, dont les parties constituantes se déposeraient, suivant lui, dans les mailles du tissu du Polype (2), admet l’opi- nion de Lamarck en ce qui concerne les Eschares. (3) Les belles expériences de Cavolini sur les Gorgones prouvent en effet que dans certains cas, sinon toujours, la partie solide du Polypier , celle qui constitue l’espèce de squelette, soit inté- rieur, soit extérieur, destinée à protéger les parties molles des Polypes, est le produit d’une simple exsudation qui se fait à la surface des tissus vivans et non dans leur profondeur , et qui, en se solidifiant, se moule sur cette même surface, sans avoir dans sa structure rien d’organisé. La comparaison par laquelle M. Cuvier assimile le mode de production des Polypiers à celui de l’ivoire des dents, est par conséquent parfaitement juste pour certains Polypes; mais l’est-eile également pour tous les ani- maux de cette classe, et surtout pour les Eschares dont l'histoire nous occupe ici? Si les cellules pierreuses des Eschares se formaient de la sorte par l’exsudation &une matière calcaire qui se moulerait sur la surface dela membrane sécrétante, ilest évident que la première couche formée ainsi devrait être la plus extérieure, et que l'addition de nouvelles quantités de cette matière terreuse ne pourrait qu'augmenter l'épaisseur des parois de la loge, et mo- difier la disposition de sa cavité intérieure, sans changer en rien la configuration extérieure de la lame primitivement formée; car ici la coque solide enveloppe l’animal en entier, et n’est pas (1) Lamouroux article cellule de l'Encyclopédie méthodique ; Dictionnaire des Vers et Zov- phytes, p. 185. (2) Manuel d’actinologie, p. 320. ‘cle Polypier du Dictionnaire des Sciences naturelles, t. 42, p. 572. Dans son Manuel u . sw, M. de Blainville ne se prononce pas sur le mode de formation des Polypiers à cellules. 26 MILNE EDWARDS? =— Sur les Eschares. débordée par l'organe sécréteur, comme chez les Mollusques gastéropodes, dont la coquille change de forme avec l’âge, parce que le dépôt de matières nouvelles ayant lieu sur le bord de la portion déjà consolidée, l'allonge continuellement et peutse mouler sur des parties molles dont la configura- tion change. Pour jeter quelque lumière sur le mode de formation et sur la nature des cellules de nos Eschares, il devenait par conséquent _ intéressant d'examiner ces loges à différens âges, et de voir si leur forme extérieure changeait ou demeurait toujours la même. Cette étude, indispensable pour l’histoire anatomique et physio- logique de ces petits êtres, pouvait conduire aussi à des con- naissances utiles pour la zoologie proprement dite et pour la géologie; car la détermination des espèces, tant récentes que fossiles, repose principalement sur les caractères fournis par ces cellules : et on ignore encore si elles peuvent ou non être mo- difiées par les progrès de l'âge. Cet examen peut se faire plus facilement qu’on ne le croirait au premier abord; car il n’exige pas l'observation du même in- dividu, à divers degrés de son développement, ni la collection d’une série d'échantillons choisis de manière à représenter tou- tes les’ phases par lesquelles ces petits êtres passent successive- mént. En effet, puisque ces Polypes naissent les uns des autres, et ne se séparent pas de leurs parens, chaque Polypier doit pré- senter une longue suite de générations enchaïnées les unes aux autres, êt dans chacune de ces séries, l’âge relatif des individus vivans doit être indiqué par le fait même de la place qu’ils occu- pent. Pour résoudre la question que nous nous étions posée, il suffirait par conséquent Wlétudier comparativement les cellules situées vers la base du Polypier, dans sa partie moyenne, dans les jeunes branches, et à l'extrémité de celles-ci; car nous nous sommes assurés que ce n’est pas seulement dans ce dernier point que l’on trouve des Polypes vivans, comme l'avancent quelques auteurs, mais qu'il en existe dans presque toute l’é- tendue du Polypier. En examinant de la sorte, avec un grossissement suffisant, les cellules de l’Eschare cervicorne, je ne tardai pas à me con- MILNE FDwARDS. «— Sur les Eschares. 27 vaincre que le mode de développement de ces loges pierreuses n’est pas celui généralement admis. . En effet, j'ai vu que non-seulement la conformation générale des cellules change avec l’âge, mais aussi que ces changemens s’opèrent en grande partie dans la surface extérieure, c’est-à-dire dans la portion de leurs parois, qui, dans l'hypothèse de leur formation par couches superposées, devrait exister dès le prin- cipe, et, une fois consolidée, ne plus changer, à moins que ce ne soit par l'effet de frottemens accidentels. Dans les jeunes cellules dont les parois, quoique minces, ont cependant déjà acquis une consistance tout-à-fait pierreuse, la surface extérieure est très bombée, de facon que ces loges sont bien distinctes entre elles, et les bords de leur ouverture sont aussi fort saillans (r) ; mais par les progrès de l’âge, leur aspect change : leur surface libre s'élève de manière à dépasser le ni- veau des bords de cette ouverture, et à effacer les dépressions profondes qui marquaient leurs limites respectives. Il en résulte que les cellules cessent d’être distinctes et même reconnaissa- bles au-dehors, et que le Polypier semble être formé d’une masse pierreuse, parfaitement continue dans la substance de la- quelle seraient creusés des trous légèrement évasés, et disposés en quinconce. (2) Or, des différences de cette nature ne pourraient se produire par la Simple juxta-position de nouvelles couches calcaires, au- dessous de celles primitivement formées ; car les parties molles de l'animal, les seules qui pourraient être le siège d’une sécré- tion de cette matière calcaire , ne s'étendent pas sur la surface qui se modifie de la sorte, et la position des cellules ainsi im- mergées dans la masse en apparence commune du Polypier, est souvent telle qu’on ne peut attribuer leur changement de forme à une usure déterminée par le frottement des corps étran- gers. Il nous paraît évident que ces faits indiquent, au contraire, la présence de la vie dans la substance dont se composent les pa- (x) PL 1, fig. re, (2) PL 1, fig. z ge 28 MILNE EDWARDS. =— Sur Les Eschares. rois mêmes de ces cellules, et ne peuvent s'expliquer que ‘par l'existence d’un mouvement nutritif, semblable à celui qui amène dans la configuration de nos os des modifications ana- logues. Afin de mieux connaître la nature de ces cellules, jai soumis à l'action de l'acide nitrique étendu d’eau, un fragment du Poly- pier récemment retiré de la mer. Une vive effervescence se ma- nifesta aussitôt, et au bout de quelques instans les cellules, de- venues flexibles, se laissèrent séparer entre elles. Avant de les attaquer ainsi, on ne voyait sur la paroi interne de ces loges au- . cune membrane distincte; et lorsque l'acide nitrique eut détruit tout le carbonate calcaire dont dépendait leur rigidité, ces mêmes parois existaient encore et n'avaient pas beaucoup changé de forme : seulement elles n'étaient plus formées que par une membrane molle et épaisse, qui constituait un sac dans l’inté- rieur duquel on apercevait l'appareil digestif du Polype(r). L’ou- verture de ce sac n’était plus découpée comme elle le paraissait, quand le tissu de la membrane tégumentaire était épaissi par le dépôt pierreux dont on venait de le débarrasser, et cette mem- brane se continuait sans interruption avec la gaine tentacu- laire. On voit donc que chez les Eschares, la cellule dans laquelle on dit que le Polype se retire comme dans une coquille, est une partie intégrante de l’animal lui-même, dans laquelle il se cache comme le Hérisson rentre en quelque sorte dans la peau épineuse de son dos. Ce n’est pas une croûte calcaire qui se moulerait sur la surface de son corps, mais une portion de la membrane tégu- mentaire générale, de la peau du Polype, qui par un dépôt mo- léculaire de matières terreuses dans les mailles de son tissu, s’ossifie comme les cartilages des animaux supérieurs s’ossifient sans cesser d’être le siège d’un mouvement nutritif. On voit aussi que ce que l’on désigne généralement comme étant le corps de ces Polypes, n’en constitue dans la réalité qu’une petite portion, et ne consiste guère que dans l'appareil digestif, et probablement respiratoire, de ces petits animaux. (1): Pr, Get}, MILNE EDWARDS. — Sur Les Eschares. 29 Le sac tégumentaire, débarrassé de son carbonate de chaux, m'a semblé formé d’une membrane tomenteuse, recouverte en dehors surtout, d’une multitude de filamens cylindriques, dispo- sés perpendiculairement à la surface, et serrés les uns contre les autres. C’est dans les interstices laissés entre ces fibres, que le dépôt calcaire paraît s’opérer en majeure partie; car si l’on examine au microscope une coupe transversale du Polypier dans son état naturel, on y distingue encore une conformation ana- logue : la paroi externe des cellules n’est pas composée de cour ches superposées, mais bien de cylindres ou de prismes irrégu- liers, rangés perperdiculairement à sa surface. (1) Quant à l’opercule qui sert à fermer l'entrée de la cellule té- gamentaire de l’Eschare, lorsque l'animal s’y est caché en en- tier, ce n’est autre chose qu’un repli labial de ce qu'on pourrait appeler la peau du Polype, repli saillant dont la portion margi- nale acquiert une consistance cornée, tandis que dans le point où il se continue avec la portion de l'enveloppe générale, en quelque sorte ossifiée, il conserve assez de mollesse pour demeu- rer flexible et obéir à l’action des muscles, dont les tendons s’in- sérent dans son épaisseur. Les changemens que nous avons indiqués plus haut dans la conformation extérieure des cellules de nos Eschares ne sont pas les seuls amenés par les progrès de l’âge dans les tégamens pier- reux de ces petits zoophytes. La forme de leur ouverture se modi- fie considérablement, comme on peut le voir par les figures dont ce Mémoire est accompagné (2); l'espèce d’échancrure située au- dessous de l’opercule, et occupée par une membrane, disparait peu-à-peu, et leur cavité intérieure se remplit au point de n’oc- cuper plus qu'environ le quart de leur diamètre. Cet épaississe- ment change même un peu la forme générale du Polypier; car il est plus considérable dans les cellules situées le plus loin des bords des branches, d’où il résulte que celles-ci, d’abord tout-à- fait aplaties, deviennent de plus en plus cylindriques. Enfin, ce n'est pas sans surprise que nous avons vu ces mêmes cellules, (1) PL 1, fig. x fd (1) PLa,fig. 18, x'ixi, xt, rletre, 30 MILNE EDWARDS. — Sur les Eschares. lorsqu'elles sont arrivées à une vieillesse extrême, perdre l’ou- verture par laquelle le Polype faisait saillir ses tentacules et se fermer complètement. En effet, les bords de cette ouverture, se renflant de plus en plus, viennent enfin à se toucher et à se sou- der de manière à ne plus laisser de trace de son existence, et à clore complètement la petite cavité intérieure qui se retrouvre ‘encore vers l’axe du Polypier. (1) Ainsi donc, le dernier indice extérieur de l’existence indivi- duelle de ces Polypes agrégés, finit par disparaître avant que la vie ne se soit éteinte dans leur intérieur, et le caractère le plus remarquable du Polypier se perd sans retour. Pour peu que lon réfléchisse sur le fait que nous venons de signaler , on est naturellement conduit à se demander comment la nutrition nécessaire à l'entretien du travail sécrétoire dont dépendent les progrès de l’ossification, peut se continuer lors- que la cellule renfermant l'appareil digestif de l'animal se bou- che de la sorte. Est-ce de ses voisins-qu'il reçoit les matières récrémentitielles, ou bien peut-il continuer à les absorber direc- tement du dehors à travers ces tégumens pierreux? La nature de cette coque solide semble au premier abord devoair,opposer de grands obstacles à l’imbibition, surtout à celle qui aurait lieu par la surface libre du polypier; mais une expérience qui est, pour ainsi dire, la contre-partie de celle dont il a été ques tion ci-dessus, montre qu'il en est autrement. En faisant Dan Lin un fragment de la dépouille solide de notre Eschare dans une dissolution de potasse caustique, j'en ai ex- trait la majeure partie des substances dont se compose la portion organisée de son tissu, et j'ai vualors l’aspect du polypier chan- ger considérablement. La paroi extérieure des cellules était devenue d’une texture presque spongieuse, et sa surface, au lieu d’être simplement granuleuse, présentait un grand nombre de pores bien distincts, lesquels étaient auparavant cachés par les parties molles dont ils étaient remplis. (2) On comprend donc que le tissu organisé des vieux Polypes (s) PL à, fig. s. (2) PL x, fig. sh, MILNE EDWARDS. — Sur les Eschares. 31 se trouvant à nu dans divers points de la surface extérieure des cellules, l'absorption peut continuer à s'effectuer directement du dehors, lors même que l'ouverture par laquelle les matières alimentaires pénètrent d'ordinaire dans la cavité digestive se trouve obstruée, Du reste, l'étude du mode de développement de plusieurs autres Polypes nous fournira de nouvelles preuves de la persis- tance de la vie chez ces animaux agrégés lorsque l'appareil di- gestif est bouché ou même atrophié, En résumant les faits anatomiques exposés ci-dessus, on voit que chacun de nos Polypes se compose d’une membrane tégu- mentaire en forme de sac, dont la majeure partie s’ossifie pour constituer une espèce de cellule, et dont la portion supérieure, restée molle, se reploie en dedans comme une gaïîne pour les ten- tacules, ou se renverse en dehors comme la trompe d’une Anné- lide , suivant que l’animal se contracte ou s'étend. A l'extrémité de cette dernière portion de l'enveloppe extérieure se trouvent les tentacules, la bouche et l'anus; le tube alimentaire recourbé sur lui-même et ouvert par ses. deux extrémités, y est appendu, etles muscles destinés à le mettre en mouvement y sont fixés. (1) D'autres muscles s’insèrent au repli de la membrane tégumen- taire qui constitue l’opercule, et à l'extrémité de l’anse intesti- nale se trouve un organe spongieux dont le volume varie beau- coup,et dont les usages ne nous sont pas connus, mais se rap- portent probablement à la reproduction. Il n'existe donc rien de rayonné dans la conformation de ces animaux, si ce n’est dans la couronne tentaculaire dont leur bouche est entourée; la majeure partie de leurs organes sont au contraire disposés symétriquement des deux côtés de la ligne médiane, et leur mode d'organisation montre évidemment une grande analogie avec celui propre aux Ascidies composées. Quant au polypier, il est formé tout entier par l’assemblage et la soudure intime de la portion tégumentaire solide des divers Polypes qui le constituent, et il ne paraît présenter aucune partie () Voyez la coupe théorique, pl, 2, fig: 1 *. 32 MILNE EDWARDS, — Sur les Eschares. réellement commune à toute cettesuite de générations agrégées : chaque cellule formée par l'enveloppe dermoïde de ces Polypes est complète, et si on a cru que ces cavités n'étaient séparées entre elles que par une cloison simple et commune, c’est qu’on n'avait pas cherché à les séparer par les moyens convenables. D’après les faits que nous venons d'exposer, on doit aussi se refuser à admettre que ce Polypier croît par le développement de Polypes nouveaux sur une espèce de lame commune-et géné- ratrice, ainsi que le suppose un naturaliste célèbre (3). Les cho- ses doivent se passer ici comme dans les Caténicelles observés par Spallanzani, et dans les Flustres étudiés par M. Grant, c’est- à-dire que le sommet de l'enveloppe tégumentaire de chaque Polype doit donner naissance à un bourgeon qui, en se déve- loppant, constituera un Polype nouveau, lequel restera adhé- rent à sa mère, etse soudera aussi à ses voisins. $ IL. De PEschare grèle. (1) (Planche 2, figure 2.) De tous les Polypiers que j'ai eu l’occasion d'examiner, l’es- pèce qui, par son aspect général, se rapproche le plus de l'Es- chare cervicorne, est celle désignée par Lamarck sous le nom d’'Eschare grèle; elle en a le port, et, examinée à l'œil nu, ne paraît en différer que par ses branches plus arrondies (2), mais vue au microscope, elle s’en éloigne davantage, car les cellules tégumentaires sont d’une autre forme. Ces loges sont à peine bombées et peu distinctes entre elles, même dans les branches (x) Eschara gracilis Lamarck. Hist. des animaux sans vertébres, t. 2, p. 176, et 2° édit., t.2, p. 268. n. 6. Lamouroux. Encyclopédie méthodique, Dict. des Zooph. p. 375 Blainville. Manuel d’actinologie, p. 428. C’est à tort que Lamarck rapporte à cette espèce le Millepora tenella figurée par Esper (Pflanzinthiere. Millep. tab. xx; ce Polypier n'appartient pas même au genre Eschare, Le Cellepora ligulata d'Esper (Op. cit. Cellep. pl. 8) me paraît avoir beaucoup d’analogie avec l'Eschare grèle ; mais la figure que cet auteur en a donnée est trop grossière pour qu’il soit possible d’avoir à ce sujet une opinion bien arrêtée, {2) PL 2, fig. 2. MILNE FpwAnDs. — Sur les Eschares. 33 les plas jeunes. Leur ouverture est aussi moins saillante que chez l’'Eschare cervicorne, et au lieu d’avoir la forme d’un ellip- soide étranglé vers le milieu, elle est toujours circulaire (r). Il est également à noter que la forme générale de l'enveloppe so- ide de ces Polypes n’est pas tout-à-fait la même que dans l'espèce précédente; les cellules sont plus courtes et plus larges, aussi l’espace qui sépare l’ouverture de deux de ces loges, placées lune au-dessus de l'autre, est-il, en général, moindre que l’espace compris entre deux ouvertures placées sur une même ligne transversale, tandis que, dans l’Eschare cervicorne, la pre- mière de ces mesures l'emporte ordinairement de moitié sur la seconde. Maïs ce qui distingue surtout l’Eschare grèle de l'espèce précédente, c’est l'existence d’uneseconde ouverture occupant la ligne médiane de la paroi antérieure de chaque cellule et située à peu de distance au-dessous de celle que traversent les tenta- cules des Polypes. On peut comparer cette ouverture accessoire à l'échancrure qui, chez l'Eschare cervicorne, occupe la moitié inférieure de l’ouverture principale au-dessous de l’opercule, et paraît remplie par une membrane; mais leur position et leur conformation sont cependant très différentes. Une particularité semblable avait déjà, depuis long-temps, été signalée par Moll dans quelques autres espèces réunies par cet auteur sous le même nom générique, et M. de Blainville a pensé que cette ouverture accessoire pourrait bien correspondre à un anus. Mais nous ne pouvons partager cette opinion, car nous verrons par la suite que le nombre de ces ouvertures accessoires est quelquefois plus considérable, ce qui s’accorderait mal avec les usages que cet auteur leur suppose; et du reste chez l’Eschare cervicorne comme chez tous les autres Polypes d’une organisa- tion analogue dont nous avons pu faire l'anatomie, l'intestin se termine sur le côté de la gaine tentaculaire opposé à celui qui avoisine le trou en question. Il nous paraît bien plus probable que cette ouverture acces- soire se rattache à la fonction de la respiration. Des Poiypes ap- partenant au même type d'organisation que les Eschares mon- (1) P'. 2, fig. 22, VI. Zoor. — Juillet. 3 34 MINE EDWARDS.— Sur les Eschares. trent souvent dans leur cavité viscérale, c’est-à-dire entre leur tube alimentaire et leur enveloppe cutanée, un liquide aqueux en mouvement. Dans le Zoophyte que nous étudions, cette ca- vité paraît devoir communiquer directement avec le dehors par l'ouverture en question et, par conséquent, il est à présumer que l’eau ambiante doit y pénétrer assez librement, et, en baignant les parties molles du Polype, servir à sa respiration, de même que l’eau dont se remplissent les canaux aquifères de divers Mollus- ques et Zoophytes doit concourir à opérer l’oxigénation du suc nourricier de ces animaux. L’Eschare grèle m'a offert aussi de nouvelles preuves des mo- difications que l’âge peut apporter dans la conformation des tégumens osseux de ces petits animaux. En effet l'ouverture ac- cessoire sous-labiale qui est assez grande et bien apparente dans les jeunes branches, devient très difficile à distinguer et quel- quefois semble même disparaître complètement dans les parties les plus vieilles du Polypier. En examinant cet Eschare j'ai été frappé par un autre fait qui ne me paraît pas sans importance: c'est l'existence d’un certain nombre de jeunes cellules semblables en tout à celles dont elles étaient environnées, si ce n’est qu’elles étaient fermées de toutes parts. Q On sait que chez les Flustres, le bourgeon qui doit former un nouveau Polype a d’abord la forme d’un sac tout-à-fait clos, et que c’est lorsque la portion viscérale de l’animal et les tentacu- les sont déjà visibles dans son intérieur, que l'ouverture desti- née à livrer passage à ces appendices se forme dans la paroi antérieure de cette enveloppe. Il en est probablement de même ici, et d’après la position des cellules fermées, qui se trouvent près de l'extrémité des branches, en apparence les plus jeunes, je suis porté à croire que ces loges anomales sont des Polypes dont le développement a été ralenti ou arrêté. Mais s’il en est ainsi, il faudrait admettre que cet arrêt de développement n’a pas empêché ces animaux incomplets de produire chacun un bour- geon reproducteur, et de donner ainsi naissance à de nouveaux individus plus parfaits qu'eux; car dans plusieurs points j'ai trouvé une de ces cellules sans ouverture, suivie de plusieurs MILNE EDWARDS, — Sur les Eschares. 35 autres ayant la forme normale et appartenant à la même série linéaire que la première. N'ayant observé que le Polypier desséché, je n'ose émettre une opinion arrêtée sur ce point; mais si les choses se sont réel lement passées comme je le présume, ce serait un fait bien cu- rieux pour la physiologie, que de voir un Polype en quelque sorte embryonnaire, ou une espèce de monstre, donner nais- sance à des individus d’une structure normale, et transmettre à sa progéniture la configuration propre à sa race, mais dont lui- même était privé. L’échantillon que j'ai étudié est un de ceux qui ont été éti- quetés de la main de Lamarck, et qui sont conservés dans les collections du Muséum; j'en dois la communication à l’obli- geance de M. Valenciennes. On ignore la patrie de cet Eschare. $ INT, De ’Eschare Lichénoide. (1) ( Planche 2, figure 3.) Le Polypier découvert par Péron et Lesueur, et décrit par Lamarck sous le nom d’Æschare lichénoide , est subarbores- cent comme les deux espèces précédentes, et ne s’en distingue au premier abord que par des caractères peu importans, tels que la forme plus aplatie et plus grèle de ses branches, et les fré- quentes anastomoses résultant de leur soudure (2). Mais ici encore la loupe fait apercevoir d’autres particularités, parm lesquelles la plus saillante est la petitesse des animaux dont l’a grégation constitue ces expansioins rameuses. Les cellules de l’Eschare lichénoïde n’ont, en effet, qu’envi- (x) ÆEschora lichenoides Lamarck, Hist. des Animaux sans Vertèbres, t, 2, p; 176, et a° édit, 1, 2, p. 268, — Lamouroux. Encyclopédie méthodique. Zoophytes, p. 375: — Cuvier, Règne animal, 2° édit. t. 3, p. 316. u — De Blainville. Manuel d’Actinologie, p. 428. Le Polypier figuré par Seba (Thes. t. 3, tab. 100. fig, 10) n’appättient pas à cette espèce, comme le pensait Lamarek, mais est probablement le Flustre bombycine. (2) PL. 2, fig. 3° à 34 36 MILNE EDWARDS. — Sur les Eschares. ron la moitié de la dimension de celles de l'Eschare cervicorne et de l'Eschare grèle. Mais quelle valeur pouvons-nous attacher à des différences de cette nature qui tantôt sont employées par les zoologistes comme caractères spécifiques, et d’autres fois sont considérées comme dépendant seulement des circonstances dans lesquelles s’est fait le développement des individus qui les pré- sentent. Chez les animaux dont la croissance est lente, et dont les for- mes ne varient pas assez avec l’âge pour indiquer la période de la vie à laquelle ils sont parvenus, la considération du volume du corps ne fournit d'ordinaire que des caractères peu sûrs pour la distinction des espèces: mais lorsqu'on est certain de pou- voir reconnaitre les individus adultes de ceux dont la croissance n’est pas terminée, on peut souvent y avoir recours avec Con- fiance, car jusqu'ici on n’a pas remarqué que la taille des ani- maux inférieurs soit notablement modifiée par l'influence des circonstances extérieures, au milieu desquelles leur développe- ment s'effectue. Ainsi, pour la plupart des Crustacés, ce caractere serait mauvais; mais pour les Insectes il peut étre trés utile; et sous ce rapport, les Eschares et la plupart des Polypes agrégés me paraissent ressembler aux Insectes; car Îe développement de ces zoophytes est si rapide, qu’on n'en surprend que bien peu dont la croissance ne soit pas achevée ; et du reste ceux qui occupent le bord extrême du Polypier sont les seuls qui puissent être dans ce cas, et tous les autres, d’après leur position même, ont dû nécessairement avoir déjà reproduit par bourgeons de nou- veaux individus, et sont évidemment adultes. Si l’Eschare lichénoïde ne se distinguait de l'Eschare cervi- corne que par la différence que nous venons de signaler dans la grandeur des celluies, nous n’hésiterions donc pas à le consi- dérer comme étant une espèce particulière, tandis que des va- riations de taille dans l’ensemble du Polypier ne nous paraissent avoir aucune importance, car elles ne dépendent que du nombre d'individus réunis en une seule masse. Du reste, l’'Eschare lichénoïde diffère aussi des espèces précé- dentes par d’autres caractères tirés également de la conforma- | MILNE EDWARDS. =— Sur les Eschares. 37 tion individuelle des Polypes. L'ouverture des cellules est ovalaire transversalement, et son bord inférieur est souvent un peu avancé vers le milieu (1). Dans les jeunes branches, ces loges sont, en général, bien nettement séparées par un sillon et sont d’une forme hexagonale; leur surface externe, assez lisse, s'élève graduellement comme un cône surbaissé et forme, à quelque distance en arrière de l'ouverture principale, une pointe mé- diane qui ne tarde pas à se perforer et à se transformer en un trou accessoire analogue à celui que nous avons déjà signalé dans l’Eschare grèle (2). Par les progrès de l’âge, la partie anté- rieure de la cellule se renfle et devient ovoïde, tandis que pos- térieurement ses limites cessent d’être distinctes (3). Enfin , on voit se développer, sur le côté de chaque cellule, près de l’ou- verture principale, un tubercule dont le sommet arrondi est oc- cupé par une substance d'apparence cornée(4); en général, les cel- lules ne portent qu’un seul de ces appendices, mais quelquefois on en trouve deux situés, l’un à droite, l’autre à gauche de l’ou- verture (); quelquefois aussi on en voit se former dans d’autres parties de l’enveloppe solide de ces Polypes. Du reste, ces tu- bercules ne conservent pas la forme que nous venons d’indiquer; en grossissant, ils s’allongent obliquement et deviennent à-peu- près pyriformes; le point, d'apparence cornée, qui en occupait le sommet, s’allonge de la même manière et constitue une espèce de lanière plus ou moins triangulaire qui s'étend sur la face externe de ces prolongemens calcaires depuis leur base jusqu’à leur pointe (6). Enfin, on voit ces mêmes appendices, lorsqu'ils ont acquis encore plus de longueur, constituer une espèce de dent pointue et oblongue qui s’avance comme une épine au- (x) PL 2, fig. 3e ; à. (2) PL 2, fig. 32 ; 8. (3) PL 2, fig. 3b et 3c. (4) PL 2, fig. $e, 8’. (5) PI, 2, fig. 3,3 d (6) PI. 2, fig, 3° — ÿ' et &. 38 MILNE EDWARDS. — Sur les Fschares. dessus de la cellule voisine (r), et qui ressemble alors beaucoup à ce que Moll a figuré chez quelques autres Eschariens. (2) Le développement de ces appendices, sur la surface d’une lame de consistance pierreuse, comme celle dont se composent les parois des cellules de notre Polypier, est une nouvelle preuve à l'appui de ce que nous avons déjà dit touchant la nature de ces cellules, car on ne peut l'expliquer qu’en admettant que les parois de ces cellules sont des parties vivantes et non un simple dépôt de matière inerte. Dans léchantillon desséché soumis à notre examen, rous n'avons pas pu suivre davantage les changemens qui surviennent dans ces appendices pendant leur croissance, et nous n’avons rien vu qui nous ait éclairé sur leur nature et leur usage; mais en observant une autre espèce d’Eschare dont il sera bientôt question, nous avons été plus heureux. $ IV. De l’Eschare foliace. (3) (Planche 3, figure 1.) Le Polypier auquel les naturalistes ont donné les noms d’Es- chare foliacé , d'Eschare bouffant, de Cellépore lamelleuse, etc., diffère beaucoup des espèces précédentes par son port, mais y (x) PL a, fig. 3,5 8". (2) Voyez l’Eschara vulgaris et V'Eschara radiata de Moll. op. cit. pl. 5, fig. ro, etpl. 4, fig. 17. - (3) Eschara foliacea, millepora, lapidea, etc: Ellis. Essai sur l’histoire des Corallines, p. 86, pl. 30, n. 3, fig. a, A. P. C. É Eschara foliacea Borlase, Natural history of Cornwall , pl. 24, fig. 6. Cellepora lamellosa Esper. Planzenthiere, t, 1, p.254. Cellep. tab. vr. Eschara foliacea Lamarck. Hist. nat, des anim, sans vert. , t. 2, p., et 2. éd, , t. 2, pe 266. — Lamouroux. Exposit. méthod. des Polypiers, p. 40 ; Eacyclop. méthod., Zooph., p. 374. — Schweigger Handbuch der naturgeschichte, p. 431. — Cuvier. Règne animal, t. 3, p. 316. — Blainville. Dict. des Sc. nat. , t. 15, p. 396, et Man. d’actinologie, p. 428. Eschara retiformis Fleming, British animals, p. 531. ù L'Eschara fascialis var. B. de Pallas ( Elen. p. 44 ) et de Moll. (op. cit., p. 33, pl. r, fig. 2), me paraît se rapporter plutôt à l'espèce suivante qu'à celle-ci; mais du reste elles ont été tou- jours confondues, ! mine epwAnDs. — Sur les Eschares. 39 ressemble éxtrémement par la conformation individuelle des animaux dont la réunion le constitue, La disposition de l’ensemble de ce Polypier est bien connue et nous n’avons rien à ajouter à ce qui en a été dit par Ellis, Pallas, Moll, Lamouroux et les autres naturalistes qui nous ont précédé dans l'étude des Zoophytes. Le double pian de cellules agrégées commun à tous les Eschares, forme ici de larges ex- _pansions lamelleuses qui s'élèvent, comme on le sait, d’une ma- _ nière irrégulière et venant à se rencontrer se soudent entre elles et constituent une masse caverneuse et légère. (1) Le mode de croissance de l’Eschare foliacé est, comme on le voit, très différent de ce qui existe chez l'Eschare cervicorne et les autres espèces simplement rameuses, dont chaque branche conserve partout à-peu-près la même largeur et ne s’accroit qu’en longueur, tandis qu'ici les lames celluleuses s'étendent latérale- ment autant qu’en avant. Cette différence paraît tenir à ce que dans l’Eschare cervi- corne et les autres espèces dont le port est analogue, chaque Polype ne produit à son extrémité antérieure qu'un seul bour- geon, à moins que ce ne soit dans le point où se forme une nou- velle branche, et alors plusieurs de ces animaux placés près les uns des autres donnent chacun naissance à deux jeunes d’où résulte un changement si brusque dans la direction des séries longitudinales que celles-ci ne tärdent pas à se séparer et à dé- terminer ainsi une bifurcation dans la masse commune. Chez l'Eschare foliacé, au contraire, on voit très souvent une cellule porter à son extrémité antérieure deux cellules plus ieunes et il en résulte une divergence sans cesse renaissante dans la di- rection des séries longitudinales formées par ces Polypes agré- gés et une tendance à l'extension du Polypier dans le sens laté- ral aussi bien que dans le sens longitudinal. La disposition générale du Polypier peut donc être considérée ici comme étant indicative de la tendance unipare ou geminipare des Polypes dont il se compose, et doit par conséquent acquérir aux yeux du naturaliste plus d'importance que ne peuvent en (x) PI, 3, 6g, 1. 4e MILNE EDWARDS.— Our les Eschares, avoir une multitude d’autres variations de formes qui ne parais- sent liées à aucune des grandes fonctions de l'économie. La conformation individuelle de ces Polypes agrégés paraît être essentiellement la même que celle des espèces précédentes ; | mais on remarque néanmoins dans leur dépouille solide des par- ticularités caractéristiques. La comparaison des cellules de di- vers âges nous fournira aussi de nouveaux exemples des chan- gemens qui $ ‘opèrent successivement dans la forme extérieure de ces loges de consistance pierreuse. La forme générale de ces cellules est d’abord à-peu-prèsovoïde, mais par les progrès de l’âge elle se rapproche peu-à-peu de celle d’un ovoïide ou d’un losange dont les angles seraient tronqués(r). Leur ouverture est située beaucoup plus près de leur extrémité antérieure que dans toutes les espèces précédentes; le bord anté- rieur de cet orifice finit même par se confondre entièrement avec la base de la cellule suivante. Son pourtour n’est jamais saillant, comme chez l’Eschare cervicorne, et semble s’enfoncer de plus en plus à mesure que l'animal vieillit, changement qui dépend de l’épaississement de la partie voisine de la paroi de la cellule. Excepté dans la vieillesse extrême sa forme est celle d’une ellipse tronquée postérieurement; on n’y voit pas d’échan- crure labiale, et il existe d'ordinaire sur son bord, postérieur qui est droit un petit tubercule souvent perforé à son sommet. Enfin dans la dernière période de la vie cette ouverture devient circulaire, se rétrécit de plus en plus, se change quelquefois en une simple fente et finit par s’oblitérer complètement (2). La surface externe des cellules présente aussi des changemens re- marquables : elle est d’abord peu bombée et incomplètement ossifiée : le dépôt de matière calcaire se fait principalement dans la ligne de soudure des cellules entre elles et rayonne en quel- que sorte de cette espèce de cadre vers le centre où il laisse un grand nombre d’espaces membraneux qui ressemblent à des pores(3); par les progrès de l’âge l’ossification devient complète. (z) PL 3, fig xt 2° et 16 (2) PL 3,fig.r aa. « (3) PL 3, fig. re, MILNE EDWARDS, =— Sur les Eschares. 4x vers la circonférence de la cellule, et fait disparaître peu-à-peu l'espèce de bordure qui s’y voyait dans ie principe(1); enfin la paroi antérieure de la cellule se boursoufle en quelque sorte et finit par constituer une masse poreuse, épaisse qui déborde de toutes parts le niveau primitif de l'ouverture, et donne ainsi à l’ensemble du Polypier un aspect tout-à-fait différent de celui qu'il avait dans le jeune âge. (2) J'ai trouvé sur la côte d'Alger un petit Polypier qui me parait être une simple variété de l’Eschare foliacé, mais qui diffère ce- pendant notablement des échantillons de cette dernière espèce trouvés sur notre littoral. Sa forme générale était celle d’une lame arrondie sur les bords et fixée sur des tiges de fucus (3), dis- position qui ne doitpas s'éloigner de celle des Eschares foliacés lorsqu'une nouvelle colonie de ces petits zoophytes agrégés commence à se développer. La forme individuelle des cellules était aussi la même que dans le Polypier dont nous venons de donner la description (4); maisles parois de cesloges, même des plus jeunes, étaient d'un tissu bien plus compacte et plus pier- reux. Cette différence était même si grande que j'aurais été porté à considérer cet Eschare d'Alger comme une espèce distincte, si je n'avais pensé qu’elle pourrait bien dépendre seulement de l'influence du climat. En effet, c'est dans les mers des pays chauds qu'on trouve presque tous les Polypiers pierreux ; dans les pa- rages plus septentrionaux, tels que les bords de la Manche, ils ne contiennent que fort peu de carbonate de chaux et dans la plupart des espèces du Nord que j'ai eu Foccasion d'examiner les parties ordinairement calcaires étaient presque membraneu- ses. À la vérité cètte comparaison , ne portant que sur des espè- ces différentes entre elles, ne prouve pas que abondance plus ou moins grandes du dépôt moléculaire de carbonate de chaux dans le tissu de ces animaux soit réellement dépendante de la température et des autres circonstances extérieures sous l’in- fluence desquelles ces êtres ont vécu; mais la généralité de cette (x) PI, 3, fig. xt, (2) PI 3, fig. ze. (3) PL. 3, fig. ré. (4) PI. 3, fig. 1°. 42 MILNE EDWARDS. — Sur les Eschares. coïncidence doit nécessairement nous porter à y voir des rap ports de cause et d'effets. Si les observations ultérieures mon- trent qu’effectivement l'élévation de la température tend à acti- ver la sécrétion de matière calcaire dans l’intérieur de ces Zoo- phytes, ou ne s'étonnera plus de l'abondance extrême des Poly- piers pierreux même à des latitudes très élevées, dans des couches de. l'écorce du globe dont la formation remonte à une époque à laquelle la chaleur terrestre était plus considérable que de nos jours. | L’Eschare foliacé habite comme on le sait nos mers et S'y trouve à des profondeurs assez grandes. $ V. De l’Eschare bidenté. (1) (Planche 3, fig. à et 22.) Parmi les Polypiers du Muséum du Jardin du Roi réunis par Lamarck sous le nom d’Eschare foliacé, j'en ai trouvé un qui ne diffère pas de l’espèce précédente par son aspect et sa confor- mation générale, mais qui s'en distingue par la forme de l’ou- verture des cellules et qui w’a paru devoir être considéré comme une espèce particulière. Dans les vieilles cellules cette ouver- ture a la forme d’un ovale tronqué inférieurement et ne pré- sente rien de remarquable (2), mais dans celles d’un âge moins avancé, on voit de chaque côté une dent qui s’avance plus ou moins au devant de cet orifice et lui donne l'aspect d’un trè- fle (3). Ce Polypier m’a présenté aussi des traces bien distinctes de l'existence de ces vésicules gemmifères qu'on avait déjà ob- servées à la partie antérieure des cellules de plusieurs Eschariens, mais dont les espèces que nous venons de passer en revue pa- raissent être privées. C’est à l'espèce dont nous nous occupons ici que nous parait appartenir PEschare décrit par Moll (4) comme étant l’Eschare (x) Eschara bidentata nob. (2) PL. 3, fig. 2. ° (3) PL 3, fig. 2a, (4) Op. cit. p. 33, pl. #, fig. 2. MILNE EpwARDs, — Sur les Eschares. 43 foliacé et réuni par cet auteur, ainsi que par son prédécesseur Pal. las (1), à l'Eschare à bandelettes, car dans celui-ci la forme de l'ouverture est à-peu-près la même que celle que nous venons de décrire ; et c’est peut-être ce qui a porté ces naturalistes à re- garder ces deux Polypiers comme de simples variétés d’une même espêce. $ VI. De l'Eschare à bandelettes. (2) (Planche 4, fig. 1.) L’Eschare à bandelettes est extrêmement voisine de l'espèce précédente. Ainsi qu’on pourra le voir par les figures qui accom- pagnent ce mémoire, la forme des cellules et de leur ouverture est presque entièrement la même (3); on ne remarque aussi rien de particulier dans les dimensions de ces loges calcaires, mais leur mode d’agrégation est caractéristique et trop constant pour ne pas être considéré comme indicateur d’une différence spécifique. En effet, l’'Eschare à bandelettes tient en quelque sorte le milieu entire l'Eschare cervicorne et l’Eschare foliacé ou l’Eschare bidenté; ses cellules se réunissent de maniere à former des lanières allongées, irrégulières et ramifiées (4), qui sont toujours beaucoup plus larges que les branches de l'Eschare cervicorne, sans jamais s'étendre latéralement, comme les ex- pansions lamelleuses de l’Eschare foliacé, et cette disposition ne parait pas dépendre de l’âge, car j'ai vu un échantillon de ce Polypier ayant près d'un pied de diametre, et offrant (1) Elenchus, p. 44. | (2) Porus cervinus Ellis. Hist, nat. des Corallines, p. 87, pl. 30, fig. à. Millepora tœnialis Ellis and Solander. Nat. Hist. of Zooph. p. 133. Eschara fascialis Pallas. Elenchus, p. 42. — Moll Eschara, p. 30, pl. 1, fig. 1. — Lamarck, Hist. nat. des anim. sans vertèbres, t. 2, p. 175 et 2° édit. t.2, p. 267. — Lamouroux. Encyclopédie méthod. Zooph. p. 375. — De Blainville. Dict. des Scienc. nat.t. 15, p. 297, et Manuel d'actinologie, p. 428. — Fleming. Brit. anim. p. 531. Peut-être faudrait-il aussi rapporter à cette espèce plutôt qu’à l’Eschare cervicorne la figure de Bonanni (Mus. Kirk. pl. 286, fig. 13.) (3) PL 4, fig. x et z°. (4) PL 4, fig. x. 44 MILNE EDWARDS.=— Sur les Eschares. des branches partout de même largeur. Il serait possible qu’elle tint à la position dans laquelle la masse se développe, car on con: cevrait qué, si la croissance latérale de l'Eschare bidenté se trouvait entravé de manière à le forcer à s’allonger comme cela se voit pour les arbres plantés très dru, ce Polypier pourrait prendre la forme de celui dont il est ici question; mais jusqu’à ce qu’on ait constaté de pareilles modifications, sinon chez les Eschares dont nous nous occupons, du moins dans des espèces voisines, on n’en peut admettre l'existence, et on doit continuer à considérer l’Eschare à bandelettes comme formant une espèce particulière. Ce Polypier paraît habiter nos côtes. $ VII. De l’Eschare croisé. (1) (Planche 4, fig. 2.) L'Eschare croisé se rapproche de l’Eschare foliacé par sa forme générale, car le double plan de cellules constitue des expan- sions lamelleuses très larges et flexueuses qui se rencontrent dans des directions variées et_se soudent alors entre elles, de manière à donner naissance à une masse caverneuse (2). La dis- position de ces cloisons ne paraît pas être tout-à-fait la même que dans l’Eschare foliacé; mais n’ayant vu qu’un seul échan- tillon de ce Polypier, je ne sais jusqu’à quel point elle peut être constante. La forme générale des cellules est aussi très peu diffé- rente de celle de ce dernier Polypier; mais l'ouverture de ces loges est tout autre : dans le jeune âge, cet orifice est presque pyrifor- me (3), et, par la suite, il ressemble à un triangle renversé, dont les angles seraient arrondis et les côtés concaves (4). Dans les (x) Eschara decussata Lamarck? Hist. nat. des anim, sans vert. t. 2. p.175 et 2° édit. t. 2, p- 267. ? —Lamourouxs Encyclopédie méthodique. Zoophytes. p. 374. —De Blainville, Dict. des Scienc. nat.t, 15, p, 297 et Manuel d’actinologie, p. 329. (2) PL 4, fig. 2. (3) PI, 4, fig. 2. (4) PI. 4, fig. a+. L' MILNE EDWARDS. — Sur les Eschares. 45 cellules anciennes, on remarque aussi, à côté de l'ouverture principale, une petite ouverture accessoire également trian- gulaire, qui est formée par la chute d’un appendice d'apparence cornée (1), analogue à ce que nous avons déjà rencontré dans l'Eschare lichénoïde. Ce Polypier a été trouvé par Péron et Lesueur pendant leur voyage aux terres australes, et Lamarck dit qu’il habite l'Océan austral; mais on ne peut avoir que peu de confiance dans cette indication, car dans les collections du Muséum tous les Zoophy- tes rapportés par les deux naturalistes que nous venons de nom- mer portent cette même étiquette quelle que soit la localité d'où ils proviennent réellement. $ VIII. De l’Eschare à grands pores. (2) (Planche 4, fig. 3.) Cette espèce, dont M. de Blainville a signalé l'existence , mais dont il n’a été encore publié ni description ni figure, m'a été communiqué par M. Michelin. Elle ressemble beaucoup à l'Es- chare foliacé par son port (3); ses lames sont seulement plus flexueuses, mais elle diffère de toutes les espèces précédentes par la forme des cellules. Ces loges représentent des ellipsoides allongés ; dans le jeune âge, leur surface assez saillante est mar- quée tout autour de stries rayonnantes terminées chacune par un pore et circonscrit par une bordure linéaire (4); mais, par l'épaississement de leurs parois, elles deviennent presque planes, et on ne distingue plus, vers leurs bords, que la série de pores dont il vient d’être question : dans le reste de leur étendue, elles sont presque entièrement lisses (b). Enfin l’ouverture de ces cellules, toujours très grande et à-peu-près circulaire, est d’abord oblique et presque terminale; élle occupe alors toute la lar- geur de l'extrémité antérieure de la loge, mais peu-à-peu elle (1) PI, 4, fige 263 c. (2) Eschara grandipora Blainville. Manuel d'actnolgié, P- 429. (3) PL. 4, fig. 3. (4) PL. 4, fig. 34, (5) PI. 4, fig. 3+. 46 MILNE EDWARDS, «= Sy les Eschares. se rétrécit et finit par se boucher, changement qui paraît dû à l’ossification et à la soudure de l’opercule plutôt qu’au rappro- chement des bords de l’orifice, car on distingue toujours la place occupée par ceux-ci (1). Il est enfin à noter que, par le progrès de l’âge, la petite échancrure située au milieu du bord inférieur de l'ouverture devient plus Jarge et plus profonde. On ne connait pas la patrie de ce Polypier. SIX. De l’Eschare épais. (2) (Planche 5, fig. s.) Le Polypier qui a été mentionné par M. de Blainville, sous le nom d’Eschare épais, et qui se trouve dans la collection de M. Michelin, est également remarquable par son port et par la conformation des cellules dont il se compose. Je pense que c’est la même espèce que celle figurée par Esper sous le nom de Cellepora crispata (3); mais dans la crainte d'augmenter la con- fusion qui rèène déjà dans la synonymie des Zoophytes, j'ai préféré adopter la dénomination dont l’application ne laisse au- cune incertitude. Les lames qui constituent ce Polypier sont beaucoup plus épaisses que chez la plupart des Eschares, et toutes, assez étroites à leur base, s’élargissent promptement, se contournent diver- sement, se divisent en branches et se soudent, de mamière à ne laisser entre elles que peu d'intervalles et à former une masse confuse. (4) Les cellules sont très grandes et fort larges (5). Dansles échan-: tillons que j'ai vus, leurs parois étaient très épaisses et elles étaient peu distinctes entre elles, ce qui dépendait probablement de l’âge auquel ils étaient parvenus. Leur surface est ornée de séries longitudinales de tubercules , perforés au centre; enfin, (r) PL 4, fig. 3b 2. (2) Eschara incrassata Blainville. Manuel d’actinologie, p. 429. (3) Esper Pflanzenthière Cellep. tab, 1x. (4) PL. 5, fig, 1. (5) PL. 5, fig. 14. MILNE EDWARDS. — Sur les Eschares. 47 leur ouverture est circulaire, presque terminale, et dirigée très obliquement en avant; un gros tubercule, qui s'élève de chaque côté de cet orifice, en modifie considérablement l'aspect; ces mamelons se dirigent d’abord en avant (1), mais bientôt se pro- longent en dedans comme deux cornes qui finissent par se joindre au-devant de l’ouverture, se soudent entre elles, s’épaississent, et donnent ainsi à la cellule la forme d’un carré allongé, en même temps qu'elles diminuent beaucoup l'étendue de l’orifice de ces loges. (2) On ignore la patrie de ce Zoophyte. SX. De l’Eschare sillonné. (3) (Planche 5, fig. 2.) Parmi les Polypiers rapportés de lAustralasie par MM. Quoy et Gaymard, et conservés dans le Muséum du Jardin-du-Roï, se trouve une autre espèce d'Eschare, qui ne me parait pas avoir été décrite, et qui se distingue facilement de toutes les précé- dentes : je la désignerai sous le nom d'Eschare sillonné. Elle forme de larges expansions lamelleuses un peu contour- nées et d’une consistance tout-à-fait pierreuse. Les cellules, de grandeur médiocre et presque aussi larges que longues, sont très bombées et séparées entre elles par des sillons profonds qui se correspondent de manière à former, sur toute la surface du Polypier, une sorte de réseau à mailles quadrilatères. L’ouver- ture des cellules est subterminale, dirigée presque perpendi- culairement au grand axe de la cellule et de forme à-peu-près ovalaire; quelquefois cependant elle devient presque semi-cir- culaire par l'effet dn développement de son bord inférieur (4). Dans le jeune âge, la surface de ces cellules n'offre rien de par- ticulier, mais dans celles situées à quelque distance des bords du Polypier, on y remarque, sur la ligne médiane, à quelque (r) PL 5, fig. 14. (2) PI. 5, fig. ze. (3) Æschara sulcata nob, Collect, du Muséum. (4) PI. 5, fig. a, 438 MILNE EDWARDS. — Sur les Eschares. distance au-dessous du bord inférieur de l’ouverture, un tuber- cule qui devient pyriforme, se recourbé en avant et présente en dessus une lame triangulaire d'apparence cornée, qui paraît enchässée dans un cadre calcaire (1). Le sommet de cette émi- nence s’avance plus tard au-dessus de l'ouverture de la cellule, la cache peu-à-peu et envahit même la base de la cellule située au-dessus. Enfin, on voit dans le voisinage de ces grands ap- pendices d’autres productions qui s'élèvent au-dessus de la sur- face générale du Polypier, et qui semblent être ces mêmes par- ties parvenues à un degré ultérieur de développement: ce sont de grandes cellules ellipsoïdes, très bombées, environ deux fois aussi grandes que les cellules primitives placées au-dessous et présentant une grande ouverture transversale qui, située d’abord vers le tiers de la surface supérieure, en occupe l’extrémité chez celles dont le volume est plus considérable. (2) La manière dont ces productions se forment et se développent a la plus grande analogie avec ce qui a lieu dans un autre point des parois de la cellule tégumentaire du Polype chez d’autres Eschariens, à l'extrémité antérieure de laquelle on voit appa- raître un tubercule qui grandit peu-à-peu, et finit par constituer une grosse vésicule dont la surface présente souvent une ouver- ture semblable à celle occupée ici par la lame cornée dont nous avons parlé. Les observations de Loefling et de plusieurs autres naturalistes nous ont appris que ces vésicules sont des capsules gemmiféres, et par consquent nous sommes porté à croire qu'il doit en être de même ici, et que le tubercule pyriforme, dont nous venons de décrire Vs divers états, doit être considéré comme étant un réceptacle contenant les A et servant à leur livrer passage. D’un autre côté, ces tubercules ressemblent aussi beaucoup aux prolongemens cornés que nous avons déjà vus se former sur les parties latérales des cellules de l’Eschare lichénoïde, et nous croyons que, sans faire aucun rapproche- ment qui ne soit fondé sur des analogies évidentes, on peut rapporter toutes ces productions à une même classe. Une ob- (a) PL 5, fig. a? ; Bet c. (2) PL 5, fig. 2%, MÉGNE FDWARDS. — Sur les Eschares. 49 servation qui vient à l'appui de cette opinion, c'est que, dans aucune-des espèces où nous avons trouvé ces tubercules pyri- formes plus ou moins développés, nous n'avons rencontré de vésicule gemmifère insérée sur le bord supérieur de l'ouverture de la cellule et vice versé; cette coexistence pourrait cependant avoir lieu sans impliquer uné différence dans la nature de ces productions, car il arrive souvent que deux où même trois tu- bercules pyriformes se développent sur la surface d’une même cel- lule; l'espèce dont nous nous occupons ici nous a même fourniun exemple de cette multiplication de tubercules reproducteurs. (1) : \ & 11. De l’Eschare lobulé. (2) | (Planche 5, fig. 3.) L’Eschare lobule de Lamarck m'a présenté de nouveaux exem- ples des divers degrés de développement des tubercules pyrifor- mes que j'ai cru pouvoir assimiler aux vésicules gemmifères sus-orales de quelques autres Eschariens. ; j Cette espèce se compose, comme toutes les précédentes, de deux plans de cellules adossées , intimement soudées entre elles et se correspondant en général exactement. Les lames ainsi for- mées sont larges et tendent à s’étaler latéralement en lobes plus ou moins subdivisés (3); leur tissu est très dur et les ou: vertures des cellules si petites qu’on ne les distingue qu’impar- faitement à l'œil nu. Les dimensions des cellules elles-mêmes sont aussi très petites comme on pourra.s’en convaincre en compa- rant les figures qui les représentent grossies vingt-quatre fois avec celles des autres Eschares également amplifiées (4). Dans le jeune âge on distingue autour de chacune de ces loges une es- pèce de bordure formée par une multitude de petits replis pa- rallèles, et on remarque aussi sur la surface ainsi entourée un (Tr) PL 6, fig.2 e. - (2) Æschara lobulata Lamarck. Hist, des an. sans ver. ,t, 2.p. 177, et a° éd.,t. a. 268. — Laraouroux. Encyclop. méthod. Zooph. p. 375. — Blainville, Diet. des Sc. nat., t. 15, p. 277, et Man. d'actinol. p. 428. (3) PI. 5, fig. 3. (4) PL. 5, fig. 3. VI. ZOOL., = Juillet, LÀ 50 MIENE EDWARDS. — Sur les Eschares. certain nombre de tubercules arrondis, déprimés et disposés régulièrement, au milieu desquels est une élévation lisse et peu saillante (1), mais par les progrès de la croissance tout cela chan- ge: la bordure disparaît et les limites respectives des cellules cessent d’être reconnaissables à l'extérieur; les tubercules ver- raqueux se perdent dans les inégalités de la surface du Poly- pier ; enfin le centre de chaque cellule s'élève et bientôt présente sur la ligne médiane une ligne d'apparence cornée dont la por- tion postérieure ne tarde pas à s’élargir de manière à y prendre une forme triangulaire; cette élévation, d’abord régulièrement bombée, s’avance ensuite vers l’extrémité antérieure de la cel- lule, devient à-peu-près pyriforme, chevauche sur l'ouverture de cette loge, la recouvre complètement et s'avance même sur la cellule suivante en acquérant des dimensions très considéra- rables. Quant à l'ouverture de la cellule, elle est terminée en avant par un bord semi-circulaire et en arrière par un bord droit; elle se trouve dans le plan même de la surface du Polypier, L’Eschare lobulé, de couleur violacée, parait appartenir aux mers de l’Australasie; Péron et Lesueur l’ont rapporté de leur voyage de circumnavigation, et on en voit plusieurs échantillons dans la collection du Muséum du Jardin-du-Roiï. $ 12. On connaît quelques autres Polypiers récens qui paraissent appartenir au même type générique que les précédens ; mais mayant pas eu loccasion de les observer directement je . crois inutile d'en parler iei. Je me bornerai à en indiquer les noms : | A | 1° Eschara lobata Lamouroux. Exposition méthodique des genres de l'ordre des Polypiers. p. 40, pl. 42, fig. 2° Eschara scorbinula Lamarck. Hist. des animaux sans vert. t. 2, P. 177. (1) PI. 5, fig. 3°, 2) PI 5, fig. 3°, } MILNE RDWARDS. — Sur des Eschares. bi 3 Cellépora palmata Fleming. British'animals. p. 532. be Cellepora lævis Fleming loc. cit. | L'Eschara chartacea de Lamarck présente des particularités de structure que je me propose de décrire dans une antre occa- sion et qui me paraissent devoir le faire exclure du genre des Eschares proprement dits. EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE I. Fig. r. ESCHARE CERVICORNE, Eschara cervicornis de grandeur naturelle. Fig. 14. Portion d’une jeune branche du même Polypier, grossie vingt-quatre fois (r), pour montrer la forme et l’arrangement des cellules tégumentaires. Fig. 1%, L'une de ces cellules, dont les paroïs sont réduites à l’état membraneux par l’action d’un acide sur le carbonate de chaux dont son tissu était rempli. — 4. l'ouverture de la cellule; b, sa face antérieure; ec. sa face postérieure. On distingue dans son intérieur la gaine renfer- mant les tentacules et le tube intestinal. Fig. 1°, L'un de ces Polypes dépouillé de sa cellule tégumentaire et de la gaîne des tenta- cules, grossi encore davantage.— a. les tentacules qui entourent la bouche; 2. première cavité digestive, qui paraît être analogue à la cavité respiratoire des ascidies composées ; c. filamens naissans de la portion du canal alimentaire qui suit cette première cavité ;.d. estomac; e. intes- tin; /. anus; g. muscles rétracteurs de la gaine tentaculaire. Fig. 14. L'un de ces Polypes également dépouillé de sa cellule tégumentaire, mais ayant conservé la gaine tentaculaire, a. bords de cette gaîne qui se continuent avec le pourtour de l'ouverture de la cellule ; 2. la gaine contenant les tentacules contractés ; e, ses muscles rétrac - teurs; d. première cavité digestive; e. appendices filiformes du canal alimentaire ; f. estomac contracté; k. organe qui paraît étre un ovaîre, et qui est suspendu à l'intestin g. Fig. }1°, Opercule de l'une des cellules détaché et très fortement grossi. a. l’opereule b. ses muscles abaisseurs. Fig. 1 f. Coupe transversale d’une jeune branche du Polypier, pour montrer la manière dont les cellules sont adossées sur deux plans. Fig. 16. Portion d'une vieille branche du même Polypier , grossie comme celle sopiilntie fig. 1°, pour montrer les modifications que l'épaississement de la paroi externe dés cellules dé- termine dans la forme extérieure de ces loges. Fig. 14, Une jeune cellule dont les parties organiques ont été détruites {par l’action d’un dissolution alcaline, Fig. 1à Porlion d'une jeune cellule, pour montrer la forme de son onvertare et la dispos tion de son operculeg (x) Toutes les figures grossies ont été dessinées à l'aide de la chambre claire appliquée au microscope, Les grossissemens indiqués sont linéaires, £. 592 MILNE FEDWARDS. — Sur les Eschares. Fig. ti. Ouverture d’une cellule plus avancée en âge, dont la lèvre inférieure s’avance et le bord s’épaissit. Fig. 14. Ouverture d'une cellule plus âgée que la précédente. Fig. 1!. Ouverture d’une cellule dont la portion inférieure est déjà complètement chétrlé, et dont la forme est devenue circulaire. PLANCHE II. Fig. 1. Portion du même Polypier dont les cellules très vieilles sont déjà presque toutes complètement fermées et confondues entre elles ; vers le centre du Polypier, on voit la double rangée de ces cellules ( :) dont la paroi externe est devenue extrêmement épaisse, o. ouverture de l'une de ces cellules devenue rudimentaire et prête à se fermer. Fig. 1e. Coupe théorique de l’un des polypes de l’Eschare cervicorne, pour montrer les con- nexions de la cellule avec la gaine tentaculaire, la position du tube digestif, ete. Fig. 2. ESCHARE GRÈLE, Eschara gracilis Lam. , de grandeur naturelle, Fig. a%, Portion d’une jeune branche grossie vingt-quatre fois, pour montrer la forme des cellules. Fig. 3. ESCHARE LICHENOIDE, Eschara lichenoïdes de grandeur naturelle. Fig. 34 Jeunes cellules du même, grossies 45 fois à. une cellule qui n’a pas encore d’ou- verture accessoire; c, cellules qui présentent cet orifice. Fig. 3°. Cellules du même polypier plus avancées.en âge et ayant pris une forme elliptique. Fig. 3c. Cellules du même plus âgées; a. ouverture accessoire; à. premier vestige de l’ap- pendice latéral; 4’ un de ces appendices plus avancés en âge; 2’” un troisième dont le développe- ment est plus avancé; B”? un de ces mêmes appendices ayant la forme - d’une corne oblique; d. une cellule sur laquelle se développent deux de ces appendices. ré PLANCHE II. Fig. 1. ESCHARE FOLIACÉ. Eschara foliacea de grandeur naturelle. Fig. 14. Jeunes cellules grossies 24 fois. Fig. 1°. Cellules du même Polypier plus avancées en âge. Fig. 1°. Portion dre vieille du même Polypier ; a. a. cellules dont l’ouverture est déjà bouchée, Fig. 14, Variété B de l'Eschare foliacé de grandeur naturelle. Fig. 1°. Jeunes cellules du même Polypier, Fig. 1. Vieilles cellules du même. Fig. 2. ESCHARE BIDENTÉ. Æschara bidentata; quelques cellules grossiés 24 fois. Fig. 2°." Cellules du même dont l'ouverture s’est modifiée par les progrès de l’âge. PLANCHE IV. Fig. 1. ESCHARE A BANDELETTES, Æschara. fascialis de grandeur naturelle dessiné au trait. Fig. 1a. Cellules du même grossies 24 fois, Fig. 1°. Vieilles cellules du même. Fig. 2. ESCHARE CROISÉ. Eschara decyssata de grandeur naturelle ; dessiné au trait, 1 MILNE EDWARDS. — Sur les Eschares. 53 Fig. 2°. Cellules du même grossies 24 foie … Fig. 2°. Cellules plus âgées ; 4. ouverture d’une cellule; b. ouverture a accessoire laissée après la chute des appendices (c.) Fig. 3. ESCHARE À GRANDS PORES, Eschara grandipora de grandeur naturelle ; dessiné au trait. Fig. 34. Jeunes cellules du mème grossies 24 fois, Fig. 3%. Vieilles cellules; a. une cellule dont l'ouverture persiste; . une cellule dont l'en- . trée est oblitérée, - PLANCHE V. Fig. r. ESCHARE ÉPAIS , Æschara incrassata de grandeur naturelle. Fig. 14, Cellules du même grossies 24 fois. Fig. 16, Croquis de quelques cellules plus âgées. Fig. 1°. Croquis de quelques cellules plus vieilles encore; a. cellules dont les tubercules la téraux se recourbent au dessus de la bouche ; 2. cellule plus âgée ; c. cellule dont l'ouverture s’est modifiée davantage par le développement des tubercules latéraux. Fig. 2. ESCHARE SILLONNÉ, Eschara sulcala ; croquis de quelques cellules grossies 24 fois ; a. une cellule sans tubercule; 2. cellule sur la face antérieure de laquelle une des loges py- riformes commence à se montrer ; c. un de ces appendices plus développé et commençant à s’a- vancer‘au devant de l'ouverture de la cellule; d. un des mêmes appendices beaucoup plus grand et ayant déjà recouvert toute la partie supérieure de la cellule; e. une cellule sur laquelle il se forme trois de ces appendices. Fig. 2%, Portion du même polypier ; même grossissement ; «, cellule dans son état ordinaire; b. cellule portant un appendice pyriforme peu développé; c. un de ces appendices devenu très grand; d. et e. grosses loges ovoïdes qui recouvrent les cellules normales et qui paraissent être le dernier terme du développement de ces appendices. Fig. 3. ESCHARE LOBULÉ, Eschara lobata de grandeur naturélle. Fig. 3a. Cellules dû même grossies au même degré que dans toutes les figures précédentes. Fig. 3°. Jeunes cellules grossies 45 fois; a. cellule sans tubereules reproducteurs ; #. premie? vestige d'un de ces tubercules ; c. un de ces tubercules plus développé. Fig. 3°, Quelques cellules plus avancées en âge, grossies davantage et portant de grands tu- bercules (a); — . un de ces appendices recouvrant toute la portion supérieure de la cellul Ÿ dont il naît et une grande partie de la cellule voisine. 54 Académie des Sciences. ANALYSE des travaux anatomiques, physiologiques et xoolo- giques présentés à l’Académie des Sciences pendant le mois de juillet 1836. \ Séance du 4 juillet 1836. Etudes sur l’Orang-Outang de la Ménagerie; par M. Grorrroy-Sanr- Hiraie. M. Geoffroy entretient de nouveau l'Académie des particularités d'organisation dé cet animal. Si on compare, dit-il, l’Orang-Outang à l'homme, on est frappé de voir les ressemblances apparaître sur tous les points; il n’y a ni un vaisseau ni un nerf, ni uné fibre musculaire ni un élémentosseux de plus ou de moins. Mais en même temps chaque élément organique offre des modifications dans la longueur, Fé- paisseur, etc., des parties. Voici en quoi consistent ces modifications : * 1° L’axe vertébral est comparativement plus court, non par suite de l'absence d'aucune des parties, mais en raison de leur concentration du bas vers le haut. 2° La tête est généralement plus volumineuse, mais plus encore en apparence qu’en réalité. Le cou paraît supprimé, et les parties qui le forment semblent ap- partenir à l’arrière-tête et la prolonger jusqu’à l'épaule. Voici par quel méca- nisme. Chez l’orang comme chez les chauve-souris , les clavicules sont extrèmément longués ; et pour se maintenir sous les tégumens sans prendre trop de place, elles sont dirigées obliquement, de sorte que leur extrémité externe a comme remonté vers le crâne et entraîné avec lai un certain nombre de muscles qui, vénant ajoutér à leur épaisseur celle des muscles propres à la région postérieure du cou, comblent la large gouttière formée par là rangée des apophyses épineu- ses qui sont elles-mêmes très développées. L’action de cette puissante coùthe de muscles cervicaux tend à rejeter la tête en arrière. L'allure que doit prendre l'animal, conformément à cette modification générale, c’est de se tenir habituel- lement dans une direction parallèle au tronc des arbres, les embrassant par les extrémités et s’y attachant aussi par les mains sur les branches assez petites pour être saisies. Le système encéphalo-medullaire chez l’orang, dans le jeune âge, ressemble beaucoup à celui de l’homme enfant. La boîte cérébrale, qui alors représente fidèlement les formes de l'organe qu'elle protège, pourrait être prise pour un crâne humain , et l'illusion serait presque complète sans le développement en avant des os de la face. Mais il arrive , par suite des progrès de l’âge, que le contenu cesse de s’accroître tandis que le ‘contenant grandit toujours; il y a . Académie des Sciences. 55 épaississement général des parois, mais un épaississement inégal ; il se forme des crêtes osseuses énormes, et l'animal prend une physionomie effroyable. En total, dit M. Geoffroy, quand on compare les effets de l’âge chez l’homme et chez l’orang, on voit que la différence consiste en ce que chez l'orang il y a sur-développement des systèmes osseux musculaire et tégumentaire plus vers les parties supérieures que vers les inférieures, tandis qu'il y a arrêt de développe- ment pour le sysième encéphalo-medullaire. te Recherches sur quelques Entosoaires et larves parasites des insectes or- thoptères et hyménoptères ; par M. Léon Durous. Parmi les faits qu’ expose l'auteur, il en est un très curieux qui lui a été fourni patuve lave supposée apparteuir à un insecte diptère, larve qui vit dans la ca- vité abdominale de _Ændrena alerrima. Une larve, celle de 'Ocyptera bicolor, emprunte au pentatome dont il est parasite un stigmate qu’elle s'approprie ex- clusivement et qui devient pour elle orifice unique au moyen duquel l'air pé- nètre dans son appareil respiratoire. Cette usurpation anatomique, dit M. Léon Dufour, est déjà assez curieuse; mais elle le devient bien davantage dans le parasite dont nous avons parlé d’abord, dans la larve qui vit aux dépens de l’Andrène. Celle-ci établit son domicile sur la grande vésicule trachéenne qui s'observe à la base de la cavité abdominale de l’hyménoptère. Elle y est fixée au moyen de deux troncs trachéens similaires qui vont se râmifier dans son corps. « Cette double trachée, poursuit Pauteur, est évidemment fournie par la grande vésicule dont elle est une continuation anatomique. Voilà donc deux trachées nutritives, dépendantes de la grande utricule aérifère de YAndrène, qui vont fondér tout l'organe respiratoire du parasite, c’est-ï-dire son appareil le plus es- sentiel an maintien de la vie. Ainsi l'existence de la larve se trouve doublement sous la dépendance de celle de l’hyménoptère; celui-ci l'alimente de son tissu adipeux splanchnique, et non-seulement il se charge de respirer pour elle et de lui administrer la dose uécessaire d'air, mais encore il lui fournit aux dépens de sa propre substance Vorgane destiné À la circulation de te Auide vital. « Ce mode insolite de parasitisme, cet exemple de deux êtres de genre fort dissemblable dont l’un est greffé sur l'autre par l'appareil organique le plus i im- portant, celui de la circulation, constituent, dit l'auteur, un fait inouï dans la stience. On ne peut lui comparer que la circulation utéro-fétale des grands ani- maux; et il serait superflu de faire ressortir l'énorme différence entre ces deux cas, entre ces deux conditions physiologiques. 6 Recherches sur la marche de l’ossifiralion dans le sternum des oiseaux ; par M. Larruinren. ( Nous donnerons un extrait étendu de ce travail dans notre prochain cahier.) 22 56 Academues es Sciences. Séance du 11 juillet. D Leorre de M. Axexanpre BrononiART sur l'existence des Fossiles microsco- piques dans des roches en apparence homogènes. M. Adolphe Brongniart fait une communication à ce sujet, d’après une lettre de son père, écrite de Berlin, en date du 3 juillet. FF « Aujourd’hui, dit M. Alexandre Brongniart, j'ai eu connaissance d’une dé- couverte toute nouvelle, due à M. Ehrenberg, et qu’il m’a fait voir dela ma- nière la plus positive : c’est que les roches d’apparence homogènes, qui sont peu dures, friables, fissiles même, entièrement formées de silice, et qu’on connaît sous es noms de tripoli plus ou moins solide (polierschiefer de Werner), sont en- tièrement composées de dépouilles ou plutôt de squelettes parfaitement reconnais- sables d'animaux infusoires de la famille des Bacillariées et des genres Coconema, Synedra, Gaillonella, etc. Ces dépouillés qui ont conservé parfaitement la forme des carcasses siliccuses de ces infusoires, se voicnt avec Ja pis grande netteté au mycroséope, et peuvent facilement être comparées à des espèces vivantes obser- . vées et parfaitement dessinées par M. Ehrenberg. Dans beaucoup de cas il n’y a point de différences appréciables; les espèces sont déterminées par la forme et plus sûrement encore par le nombre des cloisons ou lignes transversales qui di- visent leur peut corps, et M. Ehrenberg, qui a pu lès compter au microscope, à reconnu le même nombre de ces tie dans les espèces fossiles. C’est dans les tripolis de Bilin en Bohème, de Santa-Fiora en Toscane, et d’autres lieux dont je ne me souviens pas avec exactitude ( de l'Ile-de-France et de Francis- bad, si je ne me trompe), qu’il a fait ces curieuses observations. Le fer limoneux des marais est presque entièrement composé de Gallionella ferruginea. « J'ai vu:toutes ces merveilles de mes propres Yeux, j'ai pu les comparer avec les beaux dessins des espèces vivantes que M. Ebreuberg a faits, et'je ne puis conserver le moindre doute que ces roches siliceuses, si abondantes qu'il y en a une rosâtre qui est employée pour peindre les murs des maisons, ne soient com posées de squelettes siliceux :d'infusoires, Au reste, il sufñit de prendre us échan- tillon d’un de ces tipolis, de celui de Billin, par exemple, d’en gratter un peu sur üne lame de verre , de délayer cette poussière dans une goutte d’eau, pour voir, au moyen d’un bis microscope, des milliers ou plutôt des milliards de dé- bris d’animalcules, « La plupart de ces espèces sont doses , mais, il y en a aussi de marines, notamment dans le tripoli de l'Ile-de-France. « Les planches-qui doivent accompagner le travail de M. Ehrenberg sur cette découverte aussi curieuse qu'inattendue, sont presque toutes faites et vont pa- raitre bientôt. » : +! - ‘ Académie des Sciences. 5 Lettre de M. Ponrus, professeur à Cahors, relative à une pluie de Cra> pauds.. ; M. Pontus, professeur à Cahors, adresse une communication relative à un fait de cette nature dont il a été témoin. | Ag" mois d'août 18084, dit-il, j'étais dans la diligence d’Albi à Toulouse; le temps était beau et sansnuages. Vers quatre heures après midi, la diligence s’ar- réta pendant quelques minutes à La Conseillère (3 licues de Toulouse) pour changer de chevaux. Au moment où nous remontions en voiture, un nuage très épais couvrit subitement l'horizon et le tonnerre se fit entendre avec éclat. Le nuage devait être à une très petite élévation, car les gouttes d’eau qu’il laissa tomber sur nous étaient très grosses. Ce nuage creva sur la route, à 60 toises du point où nous étions. Deux cavaliers qui revenaient de Toulouse, où nous allions et qui se trouvaient exposés à l'orage, furent obligés de mettre leurs manteaux pour s’en garantir, mais ils furent bien surpris et même effrayés lorsqu'ils se vi- rent assaillis par une pluie de crapauds. Ils hâtèrent leur marche et s’empressè- rent, dès qu’ils eurent rencontré la diligence, de nous raconter ce qui venait de leur arriver. Je vis encore sur leurs manteaux de petits crapauds qu’ils firent tomber en les secouant devant nous. ; La diligence eut bientôt atteint le lieu où le nuage avait crevé, et c’est là que nous fûmes témoins d’un phénomène bien rare et bien extraordinaire. La grande route et tous les champs qui la longeaient à droite et à gauche étaient jonchés de crapauds dont le plus petit avait au moins le volume d’un pouce cube, et le plus grand près de deux pouces, ce qui me fit penser que tous ces crapauds avaient dépassé l’âge d’un à deux mois. J’en vis jusqu’à trois ou quatre couches super- posées les unes sur les autres. Les pieds des chevaux et les roues de la voiture - en écrasèrent plusieurs milliers. Certains voyageurs voulaient fermer les stores afin de les empêcher d’entrer dans la voiture : leurs bonds devaient le faire craindre ; je m’y opposai et ne discontinuai pas de les observer. Nous voya- geûmes sur ce pavé vivant pendant un quart d'heure au moins, les chevaux allant au trot. ml Action du pus sur le sang fraîchement tiré des veines. (Extrait d’une let- tre de M. Doxx£ à M. Dumas.) Lorsque lon méle du pus phlegmoneux de bonne nature, ce que l’on appelle : du pus fouable à du sang sortant de la veine (environ une partie de pus pour 9 à 10 de sang), le caillot se forme à-peu-près comme, à l'ordinaire ; le sérum reste Seulement un peu trouble ; au bout d’un certain temps, six, douze, ou dix- huit.heures, suivant la quantité de pus, peut-être aussi suivant sa qualité et celle du sang, le-caillot qui s'était formé devient difiluent, «et se dissout entière- ment, tandis que le même sang pur présente encore ses élémens solides et li- quides parfaitement distincts; si la proportion du pus est plus considérable , la liquéfaction du caillot commence en moins de deux ou trois heures. 58 Académie des Sciences. # En observant ce sang mêlé de pus au moyen du microscope , on voit dès la sixième heure, après le mélange opéré, les globules du sang se déformer, pâlir, perdre peu-à-peu la netteté de leurs contours, et le lendemain, quand le sang est tout-à-fait liquéfié, on ne trouve plus absolument que des globules purulens. La dissolution des globules sanguins, s’est-eile réellement opérée comme par un ageut chimique, ou bien les globules ont-ils subi une altération, une espèce de transformation purulente ? je ne puis pas encore me prononcer, mais je suis porté à admettre cette dernière opinion. Afin de mieux étudier les modifications qui s 'opérent dans les globules san- guins, j'ai pris du sang de grenouille que j'ai mêlé à un peu de pus; le caillot s’est formé, puis s’est Hquepé au bout d’un certain temps; ayant examiné ce sang à plusieurs reprises, j'ai vu les globules se plisser, se dépouiller de leurs enveloppes et leurs noyaux nager séparément dans le liquide; plus tard, je m’ai plus trouvé que des globules analogues à ceux du pus comme si les enveloppes des globules sanguins se fussent dissoutes et que les noyaux centraux 'cussent subi la transformation purulente, Cette expérience demande à être répétée. Les conditions vitales dans lesquelles se trouve le sang en sortant des vaisseaux, sont-elles pour quelque chose dans ce phénomène ? Tout ce que je puis dire, c'est qu'il ne se passe rien de semblable sur du sang refroidi : le pus n’a plus aucune action sur lui; mais dans ce cas, le sang n’a pas senlement cessé d’être sous l'influence de la vie, il a encore subi des modifications phvsiques et chimi- ques dont il faut tenir compile; la coagulation n'est-elle pas la circonstance principale à laquelle on doive aitribuer la résistance du sang à action du pus après son refroidissement ? Pour détruire aütant que possible l'influence vitale, si elle existe, j'ai plongé le tube dans un mélange de glace et de sel, après avoir opéré le mélange du pus et du.sang; cette opération n’a rien changé au résul- : lat, et le caillot s’est liquéfic comme de coutume; d’un autre côté, eu recevant du sang dans un tube contenant du pus et maintenu pendant nne heure à 42°, le caillot s’est formé à-peu-près comme à la température ordinaire et sa liquéfaction ne s’est pas opérée plus tôt. ‘J'ai fait un mélange de sang sortant de Ja veine avec du pus et de l'acide hy- dro-sulfurique (cet acide n'a pas d’action marquée ni sur le caillot, ni sur la forme des globules), et tout s’est passé comme si le pus ct le sang se fussent trou- vés seuls en contact. | Le pus est-il le scul fluide de l'économie capable de produire cette action ? L’urine et la bile ont été sans effet, du moins sous le rapport que je consi- dère ici. $ Le pus acide s’est comporté comme le pus alcalin, Les seules espèces de pus dont l’action a été peu-marquée, sont des pus séreux, et le pus contena dans | les crachats. Le pus louable perd, au bout de quelques jours, la propriété de li- quéfier le sang. Je n’ai employé pour ces expériences que du sang provenant de malades at- teints d’affections très légères, mal de tête, bronchite, etc. Académié des Sciences. 59 Je poursuis ces expériences qui me semblent propres à éclairer Vhistoire en core obseure des altérations du sang, de la formation du pus et de la production de vastes colléctions purulentes au sein de nos organes. | Etudes sur lorang-cutang, et considérations philosophiques au sujet de l& ruce humaine (4° et dernier article); par M. Grorrroy Sarnr-Hrcarre. M. Geoffroy commence par des remarques sur l'organisation des singes : orga- nisation telle qu'elle ne les rend propres ni à se mouvoir dans l'air comme les chéiroptères, ni à se mouvoir sur le sol comme la plupart des autres mammifères. Cette nature ambiguë fait qu'aucune position, aucune locomotion régulière ne peut leur convenir long-temps, et c’est réellement pour éviter la fatigue qu'ame- nérait nécessairement en se prolongeant une posture ou une allure pour laquelle léurs membres ne sont qu’imparfaitement disposés, qu’ils sont perpetuellement en mouvement. Ils ne s'arrêtent guère que pour dormir , et la position qu’ils prennent pour ce repos indispensable est si peu commode que, chez les singes de l’ancien continent, elle a fait développer une callosité sur la partie qui porte alors le poids du corps. Chez les quadrumanes du nouveau continent, une dispo= sition particulière sert à diminuer la pression sur un point particulier, etil n’y a point développement de la callusité ischiatique. L’orang- outang, animal lent, gra- ve, réfléchi, porte à la douceur, peut-être en raison de son excessive puissance musculaire et de la conscience qu’il à de sa force, se distingue des singes aussi bien par ses habitudes que par son organisation, et c’est ce qu’aperçoivent tout d’abord les- personnes même les plus étrangères aux sciences : & C’est un être à part, dit le public qui vient avec empressement voir le nouvel arrive ; ce n’est ni un singe ni un homme. » - Chez Phomme, poursuit M. Gcoffroy, le système eéphalique (encéphalo-ra- chidien) domine sur les appareils dont il est enveloppé, tels qu’os, muscles et tégumens, lesquels ne s'accroissent point portionnellement à lui. Chez l'orang- outang les choses se passent tout différemment ; les masses médullaires du cer- veau et de l'épine gagnent pen ; tout le fort du développement portant, et à un point excessif , sur les os chveloppant les muscles et la peau, il y a en quelque sorte mouvement de bascule. D'après les pièces que possèdent nos cabinets, nous savons que cet excès de développement dans les systèmes ossenx et musculaire est beauconp plus grand chezladulte que nous ne l'observons. chez notre jeune individu. Il serait bien à desirer qu'on pôt suivre pas à pas ces transformations; qu’on s’assurât s’il y. aura modification dans les mœurs aussi bien que dans l’organisation, si, en acquérant une grande force, il perdra la douceur de caractère qui le distingue aujourd’hui. Rien ne prouve qu'il en soit ainsi, et quoique le système sensitif participe peu à l'accroissement du système locomoteur, il s’en faut qu’il s’atrophie. L’orang adulte pourrait donc être un ‘animal intelligent qui n'userait de ses forces que pour sa- tisfaire à ses besoins, et n’en abuserait point pour de cruels caprices. Go Academie des Sciences. Le lion, obligé à vivre de chair, n’est plus disposé à l'attaque lorsque sa faim est apaisée ; l’orang, dont la diete est toute végétale, n’aura jamais le besoin de nuire à d'autres animaux. Pourquoi en aurait-il la volonté ? On a pensé qu'en grandissant ses mœurs devenaient brutales; mais sur quoi repose ce soupçon ? seulement sur ce qu’on sait que sa physionomie devient repoussante. La conctu- sion est au moins hasardée, et Foccasion est belle pour arriver par des observa- tions directes à savoir à quoi s’en tenir sur ce point. Pour cela il-faut qu’on prenne des moyens de conserver la santé du jeune animal qui est en ce moment très bien portant, mais qui, né dans un climat tropical, pourrait dès les premiers froids contracter le germe d’une maladie de poitrine qui l’emporterait infaillible- ment. Il faut donc le vêtir, le loger chaudement et commodément, M. Geoffroy annonce qu'après s'être entendu à ce sujet avec plusieurs médecins éminens, il a proposé à l'administration du Muséum une suite de mesures qui, si elles sont réalisées, semblent promettre un plein succès. Séance du 18 juillet. a Nouveau genre d Infusoire. M. Serres communique à l’Académie le dessin d’un nouveau genre d’infusoire qu’il nomme Aotelline à cause de sa disposition en forme de petite roue. nt Note sur le Guacharo de la caverne de Caripe (Steatornis caripensis Humb.); par M. Luseminier. 3 Le Guacharo est, comme on le sait, un oiseau crépusculaire de l Amérique méridionale, qui pendant le jour habite des retraites obscures et notamment une caverne très profonde de la vallée de Caripe, dans la province de Cumana. M. de Humboldt, qui visita cette caverne en 1999, fit le premier connaître le Guacharo aux naturalistes ; il en forma un nouveau genre qu’il désigna sous le nom de Steatornis, à cause de la graisse abondante que présente l'animal dans le jeune âge, graisse que les habitans du pays recucillent et conservent après l'avoir fait fondre, pour l’employer aux mêmes usages que l’huile et le beurre. On n’eut d’abord en Europe d’autres renseignemens sur le Guacharo que ceux qui se trouvent dans les lettres de M. de Humboldt à MM. Delambre et de La- métherie, insérées dans le journal de Physique , année 1800. Plus tard, M. àe Humboldt en donna une description plus étendue dans un mémoire lu à l'Aca- _démie en 1817 et imprimé dans le second volume de ses observations de zoolo- gie et d'anatomie. Aucun autre naturaliste jusque-là n'avait pu voir cet anima curieux, les collections de M. de Humboldt qui le renfermaient ayant été per- dues dans un naufrage sur la côte d'Afrique. Enfin en 1834, l Académie reçut de M. Lherminier, médecin établi à la Guadeloupe, un Guacharo. conservé dans P’al- ‘cool avec un mémoire renfermant la description de l'oiseau, quelques nouveaux détails sur ses mœurs, et des considérations sur la place qu’il convenait de lui assiguer dans le cadre ornithologique. M. de Blainville, chargé conjointement - Académie des Sciences. 61 avec M. Geoffroy-Saint-Hilaire de prendre connaissance de ces différentes pièces, en fit l’objet d’un rapport lu dans la séance du 6 octobre 1834, rapport dont nous extrayons le passage suivant : | « Le corps du Guacharo n’excède guère en grosseur celui du pigeon; sa forme générale est assez ramassée et peu élégante, la tête étant grosse, triangulaire, élar- gie en arrière et prolongée en avant par un bec très fendu, très large à sa base et pourvu de quelques longs poils raides qui se portent sur les narines ; assez ro- buste et solide dans son étui corné, Phémiramphe supérieur, à dos arque et sub- tranchant, est terminé par un crochet aigu avec une dent bien marquée à son origine marginale; l'hémiramphe inférieur est comme tronqué à son extrémite, ce qui donne à ce bec quelque chose de celui des oiseaux de proïe nocturnes. « Les narines sont ovales, obliques, assez grandes, médio-latérales, entière- ment et largement ouvertes, sans traces d’opercule. Les yeux sont de grandeur médiocre. Les oreilles sont assez petites, étroites et verticales. La langue est adhé- rente, en fer de flèche, bordée. « Les ailes sont fort grandes, surtout par l'étendue e la main, car le bras est - assez court ; elles sont bordées de pennes très longues, dont dix à la main et dix à l'avant-bras ; les pennes rectrices constituent une aile presque aïguë ou sub- arrondie, la huitième et la septième étant les plus longues. . « Les nenbesé abdominaux sont au contraire assez courts quoique robustes. « Le tarse, à peine aussi long que le doigt mcdian, n’est couvert que d’une sorte de cuir, sans traces de dispositions squammeuses : les doigts au nombre de quatre également peu allongés (le pouce le plus court et versatile}, sont entière- ment libres à leur base et armés d'ongles, forts, arqués, assez aigus, sans élargis- sement et sans dentelures au côté interne du doigt médian. « La queue est pourvue de cinq paires de pennes longues, sub-égales, et par conséquent sub-arrondies. « Le système général de coloration est un roux-marron mêlé de brun à reflets verdâtres, barré ou piquet de noir plus ou moins foncé et marqué de taches blanches de grandeurs variées suivant les parties. » M. Lherminier ajoute à ces détails extérieurs, que nous-avons dû ubrégér, quelques observations anatomiques d’où il résulte que cet oiseau a un appareil sternal tout-à-fait semblable à celui des Engoulevents, etque comme eux il n’a pas de jabot, mais seulement un ventricule succenturié et un gésier de médiocre épaisseur, avec deux cœcums assez longs à la fin d’un intestin assez large et court. M: Lherminier a été conduit à supposer que le Guacharo, qui ressemble aux Engoulevents par ses habitudes nocturnes, par ses formes générales et par la dis- tribution des couleurs de sa robe, s’en rapprochait encore “write régime ali- mentaire; cépendant, comme M. de Humboldt assurait qu’on ne voit pas les adultes faire la chasse aux insectes et qu’au contraire on trouve souvent le gésier des jeunes que l'on prend au nid encore plein de noyaux de fruits, M. Lhermi- nier pensa qu'il était nécessaire d'obtenir de nouveaux renseignemens sur les mœurs de cet oiseau, et il envoya en conséquence une seconde fois à Garipe 62 Académie des Sciences. une personne chargée de recueillir des observations et de se procurer des in- dividus à différens états de développement. Cette expédition n’eut pas tout le succès qu’il en avait espéré ; cependant il obtint de très jeunes animaux ct put se convaincre que, dans ce genre d'oiseaux, l’ossification du sternum suit la même marche que dans le genre des Éngoulevents. Bieutôt après il profita du voyage qu’un de ses amis, M. Daniel Bauperthuy, faisait dans Ja province de Cumana, pour renouveler des tentatives qui, cette fois, furent plus heureuses. De deux Guacharos adultes qu’il se procura jar ce moyen, il en envoie un à l’Académie, pour être déposé ensuite dans les galeries du Museum, L'animal est empaillé et dans un bel état de conservation; il offre, comme celui qui a été l'objet du pre- mier envoi, une dent seulement de chaque côté à la mâchoire supérieure, et quelques poils aux pattes : sa couleur est aussi toute semblable à celle que pré- sentait l’autreavant qu’on l’eût placé dans l'alcool. « Les jeunes Guacharos ont le même plumage que les adulies; ils sont éga- lement remarquables par Pampleur du conduit digestif, par l'égalité du volume des deux lobes du foie et le développement de la vésieule biliaire, qui est, de même que les canaux excreteurs , distendue par une bile très abondante. Le ge- sier était vide chez la plupart des individus que M. Lherminier a pu observer, Chez quelques-uns seulement, il y a trouvé des noyaux de fruits; chez aucun il n’a pu rencontrer le moindre vestige d'insectes; ainsi l'opinion de M. de Hum- boldt, relativement au genre de vie de ces oiseaux, est maintenant confirmée par des observations directes. « M. de lumboldt avait encore annoncé qu'on ne parvenait pas à élever de jeunes Guacharos pris au nid et la vérité de cette assertion est demême constatée par les résultats des essais qu’a faits M. Bauperthuy. « Je me suis procuré, dit cet observateur, de jeunes oiseaux, et malgré tous les soins que jen ai pris, huit sont morts dans le cours du second mois , deux seulement ont vécu jusqu’à la fin du troisième. La nourriture qui semblait leur convenir le mieux était la figue banane coupée par morceaux : ils la digéraient bien dans les premiers temps mais plus tard cet aliment irayersait le canal intestinal presque sans subir d’al- tération. L'animal n’ouvre point le bec pour demander la pâture et il est toujours nécessaire de la lui entonner. Observé à l'état de captivité, le jeune Guacharo est triste.et se tient habi- tuellement la queue relevée et le bec à terre. Quand on l'approche il recule dans cette position et présente alors quelque chose de l'aspect repoussant du crapaud. Si on le touche, il pousse des cris aigus d’un effet très désagréable, mais qu'on a eu tort de comparer à ceux du chat, Pendant le jour il cherche les lieux sombres et s’ÿ tient coi; vers le soiräl semble sortir de cette apathie et parcourt sa prison en criant et en: agitant les ailes. Un de ceux que j'elevais, ajoute M. Bauperthuy, s’échappa vers cette épo- que de la journée et j'eus alors occasion de le voir voler facilement eten pla« nant au-dessus des sayanes. À Ja fin il s’abattit et fut repris par les enfans. A Yapproche d’un chien, le jeune Guacharo s’eflraie, mais ilne se jette point sur Je "+ Académie des Sciences. 63 dos pour se défendre, comme font les chouettes; il se sert du bec quand on l’a- gace. Je ne V'ai point vu chercher à grimper; quand il marche c’est avec diffi- culté et en imprimant à son corps des mouvemens latéraux. « Son œil est noir et me paraît pas beaucoup plus grand que celui d'une poule. Son corps exhale une odeur désagréable comparable à celle des pétrels. La chair . des Guucharos est maigre et coriace ; celle des’jeunes est grasse, teadre et d’une saveur qui est à-peu-près la même que celle-du pigeonneau. La graisse qui garnit leur abdomen est excessivement abondante ct si fluide qu’elle transsude quand on la manie. Fondue à un fen doux et légèrement salée, puis renfermée dans une calebasse bien bouchée, cette graisse après trois mois, était encore par- faitement Hmpide et inodore. Son goût était celui de la graisse de jambon, mais avec quelque chose de pres délicat. Quant aux graines qu’on trouve dans le gésier de jeunes Guacharos pris au nid, graines auxquelles les Indiens du voisinage attribuent, comme on le sait, de grandes vertns medicivales, elles appartiennent à divers végétaux et particulière= ment à un qu'on appelle dans le pays Mataca. Ce sont des semences arrondies, du volume d’une noix de muscade, d’une odeur aromatique, que l’animal rejette par régurgitation quand il les a dépouillées du péricarpe dont il se nourrit, Les Indiens qui accompagnaient M. Bauperthuy daus son expédition lui ap— prirent que la caverne de Caripe n’est pot le seul äsile des Guacharos, et qu’on en trouve aussi dans d’autres cavernes situées vers le nord-est. M. de Humboldt, dans sa visite à la caverne de Caripe, s'était avancé jusqu’à 472 mètres de l'ouverture et serait alle plus loin, si ses guides retenus par des craintes superstitieuses, n'avaient menacé de l’abandonner. Aujourd’hui les In- diens, plus aguerris, consentent à accompagner les curieux bien au-delà de ce point. M. Bauperthuy a parcouru avec eux une distance de plus de 1,200 mè- tres dans ce conduit souterrain sans en atteindre toutefois l'extrémité. Il avait été précédé de quelques mois par un officier italien, M. Codazzi, qui avait pénétré presque anssi loin. Ce dernier a publié dans un journal de Venezuela le récit: très détaillé de son expédition ; M. Lherminier envoie la traduction complète de: ce morcea”, et des extraits de la relation de M. Bauperthuy. Les deux voyageurs ont reconnu qu’au-delà du point où s’est arrêté M. de Humboldt, la caverne perd sa régularité, et se tapisse de stalactites, qui dams certains endroits, ferment presque le passage. Dans des grottes latérales, situées à 550 mètres de lonverture, M. Codazzi a trouvé les Guacharos en troupes innom- brables; enfin, 200 mètres plus loin, dans une galerie secondaire qui s’embran- che avec la galerie principale, il remarqua sur le sol de nombreuses empreintes de pieds, et ses guides ne purent reconnaître à quelle espèce appartenaient les mamnufères qui les avaient laissées. On lui dit depuis que ces traces étaient celles du Lapæ. (r) (1) Il ne s’assura pas si la galerie où il avait trouvé les foulées de ces animaux n’avait pas avec l'extérieur quelque communication plus directe que par l'entrée principale. Le nom de Lapa est employé dans quelques parties du Venezuela et dela Nouvelle-Grenade pour désigner Je Paca ; on l'applique aussi quelquefois au Cabiai, A + 64 Publications nouvelles. Plusieurs morceaux de stalactites détachés de la voûte de la caverne, des graines de Mataca trouvées sur le sol, un flacon de graisse limpide extraite du Guacharo ; enfin un jeune Guacharo conservé dans l'alcool, complètent l'envoi de M. Lherminier, Ces differens objets, conformément au desir qu'il en exprime, ) q ’ r 4 . . . . n ’ seront déposés au Muséum d’histoire naturelle, ainsi que le Guacharo empaillé dont il a déjà été parle. ( La suite au prochain cahier.) Histoire physiologique et pathologique de la salive, considérée particulière- ment sous les rapports de ses usages, du rôle que joue ce fluide dans les fonctions digestives ‘et duns les affections gastriques, par le D' Axe. Donné, ex-chef de clinique de la Faculté, membre de la Sociéié philomati- que, etc. (1) | Le Mémoire de M. Donné se compose de deux parties ; l’une physiologique, l’autre pathologique ; nous ne nous occuperons que de la première. Cette partie est précédée d’une esquisse historique de la salive où l'auteur démontre que depuis Haller il n’a été ajouté que peu à nos connaïssances sur les usages physiologiques de ce fluide; depuis un siècle en effet, les usages attribués à la salive par tous les physiologistes, se divisent en deux points et peuvent se résu- mer ainsi : 1° humecter la bouche, favoriser les mouvemens de la langue, faci- liter la parole et la déglatition ; 2° pénétrer les alimens, leur faire subir une altération, et aider l’action dissolvante du suc gastrique. M. Donné ajoute à ces usages de la part du fluide salivaire, celui de neutrali- ser à l’aide de l’alcali libre qu'il contient, l’excès d’acide de suc gastrique:dans l'intervalle des digestions. Fe Indépendarament de ce nouvel usage signalé par M. Donné et dont on peut tirer des conséquences intéressantes relativement à la digestion, ce fait nous donne la solution d'une question restée jusqu’à présent fort obscure en physiolo- gie; nous voulons parler de la composition du suc gastrique et de la diversité des opinions des chimistes et des physiologistes, sur la nature de ce fluide im- portant ; les uns, comme on sait ont trouvé ce suc fortement acide, les autres l'ont trouvé neutre et d’autres encore alcalin ; dans leur grand travail sur la di- gestion, MM. Tiedmann et Gmélin signalent cette difficulté comme fort embar- rassante, quoique les plus grands chimistes s’en soient occupés. M. Donné a établi dans ce mémoire que les differences dans la composition _ du suc gastrique, tiennent aux circonstances dans leequelles ce suc a été re- cueilli; ainsi 1l est évident que ceux qui, comme Montègre l’ont vomi le matin à jeun, ont dû le trouver faiblement acide où même alcalin, ce suc étant mé- langé à toute la salive que l’on avale pendaut la nuit; tandis queles expérimén- tateurs qui, comme Tiedmann et Gmélin, Prevot et Branconot, l'ont recueilli après avoir excité l'estomac des chiens à l'acide de substances excitantes ou d’e- ponges, devaient y rencontrer une notable proportiôn d'acide, ce suc étant alors puret sans mélange. L'auteur de ce mémoire pense que la salive ne peut pas passer à l’état acide, comme cela arrivé suivant lui, dans Ja gastrite, sans réagir à son tour sur les dents et même sur l'estomac. De là vient une des causes de la carie générale des dents à la suite des affections chroniques de l'estomac. 1) Brochure in-8°, Paris. 1836. J ren PRÈS Q-Q Esp CL MORREN, =— Sur le Puceron du péchers 65 Mémomme sur l’émigration du Puceron du Pécher (Aphis per- sicæ), ét sur les caractères et l'anatomie de cette espèce. Par M. Cu. Mornew, Docteur ès-sciences et en médecine, professeur de l’Université de Liège. ne aatiel PREMIÈRE PARTIE, — HISTOIRE ET CARACTÈRES. $ I. Considérations générales. Les Pucerons appartiennent, comme on le sait, à l'ordre, des Hémiptères , à leur seconde section ou celle des Homoptères, et enfin à la famille des Aphidiens dont ils constituent le genre principal. Animaux suceurs, ils n’ont que Fe LE et du mä- choires déformées, réunies entre elles et concourant à former une pièce unique en apparence, véritable bec ou suçoir, où l’on distingue trois soiés contenues dans une gaîne , les deux soies supérieures sont les mandibules, la soie inférieure formée de deux filets représente les mâchoires des insectes dent la bou- che est faite pour broyer. Quant à la-lèvre, elle se retrouverait dans la gaine du bec, et le labre lui-même aurait son analogue dans une pièce triangulaire qui existe à la base dessorganes buc- Caux. La languette et les palpes sont ou rudimentaires ou com- plètement avortés. Telle est la structure de la bouche admise par les auteurs les plus justement renommés , pour les Hémiptères. Il se pourrait bien que cette structure füt beaucoup plus simple dans les Pu- cerons proprement dits. À côté d'eux, se rencontrent les Thrips, que M. Straus regarde comme des Orthoptères, précisément à cause de la bouche, et Latreille lui-même n'hésite pas à décla- rer que l'organisation buccale chez ces insectes les éloigne com- VI, Zoor. — Août. 5 66 em. monkex. — Sur le Puceron du pécher. plètement de l'ordre où ils ont été rangés jusqu’à présent. M. Kirby et Leach élevent les Homoptères en ordre particulier. _ Les Hémiptères sucent leur substance alimentaire qui a be- soin cependant chez la plupart d’être pénétrée de salive avant de servir à la digestion. M. Léon Dufour a démontré chez ces animaux l'existence des. vaisseaux salivaires. Je crois que lors- que ces insectes sont destinés à se nourrir de la sève déjà éla- borée des plantes et surtout lorsqu'ils vont la chercher sur les plus jeunes pousses , la préparation par la salive ne devient plus nécessaire et les vaisseaux destinés à la sécréter disparaissent ; c’est là du moins ce que me semble démontrer l'anatomie des Aphis proprement dits. | Quant aux organes du vol, il est à remarquer que, dans ce seul ordre, ils suivent une décroissance d'organisation très sin- gulière. Epaisses et d’une consistance égale sur toute leur éten- due, les ailes supérieures deviennent de vrais étuis chez lesuns ; . chez les autres elles ne sont coriaces qu'à moitié; enfin elles deviennent membraneuses dans toutes leurs parties, chez quel- ques Hémiptères, et dans les Pucerons on les voit disparaitre en‘entier, de même que Îles ailes inférieures. Un fait sur lequel ‘je ne crois pas que les auteurs aient fixé l'opinion, si tant est qu'ils l'ont connu, est la présence à l'aile inférieure d’un cro- chet qui la tient fixée au bord interne de la supérieure; une bride analogue se retrouve dans les familles des Crépusculaires ét des Nocturnes chez les Lépidoptères. Si les Aphydiens se lient aux Hyménoptères par la consistance membraneuse de leurs quatre ailes, ils montrent un rapport avec les Lépidop- tères par le crochet que jé signale ici et par la poussière écail- leuse qui les couvre parfois en tont ou en partie, . Le corselet lie encore les Hémiptères aux Hyménoptères par une concordance de formes. Le premier segment est très petit ‘surtoût chez les Aphis. Si dans la plupart les gibbosités tégu- mentaires et ses masses musculaires sont disposées pour lhori- zontalité des ailes, on voit:au contraire chez les Aphis une ‘structure opposée; dans le répos ces organes sont maintenus en toit très aigu. ‘19 | © Un assez grand nombre d'observations anatomiques ont prou- CH, MONREN, ==. Sur le Puceron dupécher. 6 vé que la structure de leurs organes digestifs n’est pas éloignée de celle deces mêmes organes dans beaucoup d’autres insectes, On y a trouyé un œsophage plutôt court que long, un estomac mus- culeux, un intestin grèle plus où moins long, un gros intestin , et des vaisseaux biliaires en petit nombre et s’insérant assez bas sur le canal digestif. Je modifie ees données générales en di- sant que. parfois le canal digestif ne présente aucun vaissean biliaire et que le grosintestin, loin d’avoir plusieurs renflemens, est très simple dans les Aphis. Ainsi, absence de vaisseaux sali- vaires et biliaires, absence de gros intestin à plusieurs renfle- mens; au contraire, présence d'un canal digestif simplement renflé en estomac sous le corselet et en gros intestin dans les derniers anneaux de l'abdomen, voilà la structure qu'offrent les moins composés des Hémiptères, ou mieux les Homoptères. L'appareil générateur semble se conserver chez les, insectes de cet ordre sur un plan plus uniforme. Si lon compare en effet les anatomies de la MNepe cendrée et de la Ranatre linéaire faites par M. Léon Dufour, avec celles de l_Zphis que je donne ici, on se convaincra que l'appareil. mâle présente outre les or- ganes copulateurs, des testicules et des vésicules séminales; tan- dis que l'appareil femelle offre des ovaires, et chez les Hémip- tères supérieurs un organe dont le produit lubrifie l’oviducte et les œufs; je dis chez les Hémiptères supérieurs, parce que dans les Aphis cet organe n'existe. plus. Tous les Hérmiptères ne sont pas ovipares; ce sont les Due rons. qui nous présentent lovi parité à une saison et la viviparité à une autre, $ IL. Notes sur La classification des Pucerons. MM; Lepelletier de Saint-Fargeau etA, Serville ont présenté pour le genre des Pucerons plusieurs caracteres génériques: évi- . demment contredits par les caractères spécifiques qu'ils attri- buent aux espèces décrites par eux (1). La synonymie .de ces (1) Encyclop. méthodiq, Entomologie , tom, x, x825, art, Puceron, page 246-250, $. 68 cm, MonREN. — Sur le Puceron du pécher. espèces doit même être révue et corrigée, car il est impossible dans l’état actuel de la science de bien s'entendre sur les espè- ces. C’est ainsi que l_Æphis pomi de ces auteurs n’est pas le Pu- ceron du Pommier décrit par M. Blot sous le nom de Myzoxy- de (x), ni l4phis mali, ou Puceron du pommier décrit ré- cemment par M. Tougard de Rouen (2). M. Dutrochet, à son tour, nous a fourni des détails anatomiques sur un Puceron du Cichorium inty bus sur lequel nos auteurs systématiques sont loin d’être d’accord (3). On ne peut assez attirer l'attention des entomographes sur ce genre intéressant. s Aussi, je pense qu’il faudrait adopter la division de Latreille (Familles du Règne animal, p. 428-429), sa famille des Æyméné- dytres etsa troisième tribu des .4phidiens. Après avoir séparé les Aleyrodes, des Puceronset des Myzoxyles par un autre caractère que celui des métamorphoses complètes ou incomplètes, tou- jours trop difficiles à vérifier sur un individu dont on ne suit pas constamment les mœurs, j'étendrais le genre Myzoxyle à tous les Pucerons à abdomen bituberculé, et je laisserais dans le genre #phis tous ceux à abdomen bicorniculé, Alors on obtiendrait comme caractères génériques les suivans: Genre Puceron (Aphis). Antennes plus longues que la moitié du corps (4), sétacées, de sept articles dont Îes déux premiers courts ; grenus, le troi- sième cylindrique plus long que chacun des autres, hormis quelquefois le dernier. Bec perpendiculaire ou recourbé sous le corps, naissant de la partie postérieure de la tête; formé de trois articles dont l'intermédiaire le plus long; conique au bout. (:) Blot. Mém. de la Soc. linn, de Coen. 1824. p: 114. (2) Tougard. Du Puceron lanigère. Ann. de la Soc, d’horticult, de Paris, Vol, xtv, p. 341= 850. Juin 1834. (3) Dutrochet. Ann. des Sc. nat. tom. xxx. p- 204-208. Oct. 51833. (4) MM. Lepelletier de St. «Fargeau et Serville disent : Antennes plus longues que le corps ; et lorsqu'ils parlent de l'Æphis pomi , ils lui donnent comme caractère d’avoir les Antennes de ‘la longueur de la moitié du corps, Quand ils traitent de l’A4phis millefolii, de V'Aphis farinosa, del’ Aphis tiliæ , on remarque la même contradiction entre les caractères se et spéci- ques qu’ils ont éaumérés dans leur travail. cu, MORREN. — Sur le Puceron du pécher. 6q Yeux semi-globuleux, entiers, munis parfois d’un appendice tuberculeux, conique ou arrondi. Corps mou, ovale. Corselet à segment antérieur transverse, étroit, le suivant élevé, bos- selé et plus grand. Ailes supérieures (élytres ) plus grandes que les ailés inférieures ; mémbraneuses, avec le côté externe crus- tacé, ayant près de sa fin un point épais d’où part une nervure en delni-cercle qui va trouver la côte on l'extrémité postérieure, précédée d’une nervure bi ou trifurquée en Y. Ailes inférieures petites, parfois munies sur leur bord externe d'un angle sail- lant faisant l'office d’un crochet qui les fixe au bord interne des ailes supérieures. Les quatre ailes élevées en toit aigu dans le repos. Æbdomen muni de chaque côté d’un tuyau allongé, déstiné à-la-fois à l'introduction de l'air dans le corps de l’ani- mal, et à la sortié d’une substance mielleuse qui sert de pre- mière nourriture aux petits. Pattes longues et gréles; dernier article des tarsés muni de deux crochets, et non vésiculeux (1). — Insectes vivipares tout l'été, même quand les deux sexés sont pourvus d’ailes ; ovipares à l’arrière-saison , n’ayant pas besoin d’accouplement pendant une suite plus ou moiris longue de gé- nérations, pendant lesquelles il ne naît que rarement des mâles. Animaux herbivores. Dans ce genre entreraient les Æphis Pruni, Ap. Pomi, Ap. Millefolit, Ap. Rosæ, Ap.farinosa, Ap. tiliæ de Latreille, plus VAp. cichorii de Dutrochet, lÆp. humuli, récemment décrit par M. James Web. (Gardeners’s magazine), et espèce nou- velle que je vais faire connaître. Par la même raison, on devrait révoir avec soin les soixante-dix espèces décrites par Schrank. (2) (x). Ceux qui voudront comparer ces caractères avec ceux fournis par MM. Lepelletier de Saint-Fargeau et Serville , s'apercevront que si j'ai suivi deur texte, je change et modifie pour- tant plusieurs caractères PARC (2) Savoir : 4phis Bumeliæ , Salicis , Salicti, Vitellinæ, Cap ræ, Avenæ sativæ, Dipsaci, Scabiosæ, Aparines, Galii scabri, Plantaginis, Urticæ , Sanguisvrbæ , Corni, Betulæ , Alni, Symphyti, Verbasci, Xylostei, Eronymi, Ribis, Chenopodii, Ulmi, Gallarum ulmi, Humuli , Danci, Podagraziæ, Sambuci, Viburni, Rumicis, aceris, platano: lis, avellanæ, Quercus, robo- ris; Dryophile, Populi nigræ, Bntomi, Dianthi, Lychnidis, Lyth#, Padi, Pruni, Cerasi, Oxya- canthæ, Mali; Ulmariæ, Rose, Tilie, Nympheæ, Papaveris, Na elli, Thlaspeos, Brassicæ, Ra- »honi, Juniperi, Craccæ, Sonchi, Lactucæ, Nieracii, Picridis, O, opordi, Acanthi, Serratulæ, Cnici, Absinthii, Tanaceti, Jacobæ , Millefolii, Jaceæ. ( Voyez Schrauk, Fauna boica, s° vel, 1"° partie (1801), p. 102-124, 70 CH, MORREN, == Swr le Puceron du pécher. $ HI. — Des émigrations des Pucerons. Il y a bien peu d'auteurs qui aient mis Îles Pucerons parmi les animaux émigrans. Il ést cependant indubitable qu'ils le soient à un très haut degré : les faits suivans le prouvent à toute évidence. L'hiver de 1833 à 1834 füt extrémement doux; tous les jour- naux nous ontentretenus des phénomènes extraordinairés d’une végétation anticipée. L'été de 1834 fut à à son tour excessivement chaud et sec; il se passa des mois entiers sans pleuvoir, En avril et en mai, il y eut bien de fréquens orages et des transi- tions subités du froid au chaud; mais, malgré ces changemens atmosphériques si nuisibles aux insectes, M. Van-Mons prédit (c’est le mot propre), dès le 12 mai, que tous les légumes seraient dévorés par les pucerons, parce que, selon lui, la sève extravasée se serait surorganisée en ces animaux. Je ne suis pes partisan des générations spontanées : : je combattis son opinion; ; mais, je dois l'avouer avec justice, jamais prévision d'horticulteur ne s’est mieux réalisée, (: 1) En septembre 1834, on cura les rivières à Gand; la boue resta pendant long-temps sur les quais et dans les rues. La s0- ciété de médecine prévit l'invasion du choléra. A peine deux jours s'étaient écoulés depuis le curage et la retraite des eaux, que l'épidémie commença: Précisément, c'était vers ce temps que parurent pour la première fois.les légions du puceron du pêcher, et ces deux phénomènes parurent alors à plusieurs médecins essentiellement liés l’uñ à l’autre: 4oc post hoc; érgo proper hoc , tel est le sophisme dans lequel on tomba. La première mention authentique qui ait.été faite de la pré- séñce de ce pucéron rassemblé en masse; ést celle d'une nuée de ces animaux qu'on apércut le 28 séptembre au-delà de Ma- -riakerke;, entre Bruges et Gand, Le 29, on les vit à Gand vol- tiger par troupes, et en telle quantité, que la lumière du jour (r) Voy. Horticulteur belge, par Morren, tom, 11, 108-11x3 GI MORREN. =« Sur le Puceron du pécher. 1 en était offusquée. Ils commençaient à voler vers sept heures du matin jusqu’au soir. Sur les remparts, on en observa une masse si grande, que l’on ne pouvait plus distinguer les murs des fabriques et habitations. Des champs de choux en étaient noircis. On se plaignait surtout du mal qu'ils faisaient aux yeux. Le 5 octobre suivant, ily en avait très peu à Anvers; mais quand on passait l'Escaut à la Tête-de-Flandre, on en était inondé. Toute la route d'Anvers à Gand était noircie de leurs imnombrables légions; partout on disait les avoir vus subite- ment. gi Vers la même époque, ils s’'étendaient vers Eccloo en masse : effroyable ; on devait se couvrir les yeux de lunettes et le visage de mouchoirs, pour se préserver du chatôuillement qu'occa- sionnent leurs six pattes. Le 9 octobre , ils s'étaient étendus jusqu’au-delà d’Alost : ils n'avaient pu, ce jour-là , franchir la lisière des collines qui sé- parent le Brabant de la Flandre; ils étaient acculés entre Moor- sel, Meldert, Afflishem, Hekelghem et Teralphène, Sur les col- lines de ces villages, je n'en vis pas un seul individu; mais à peine me trouvai-je sur le flanc nord-ouest de ces monticules, que le conducteur à qui j'avais donné l’ordre de me montrer de suite les moucherons dont les journaux de la Flandre ne ces- saient de parler; s'écria : des voila] Et en effet, une nuée nous envahit. À cette époque, on n'avait pas signalé la présence d’un seul de ces individus à Bruxelles. C'est là une observation re- miarquable, et qui prouve qué ces insectes sont intérrompus dans leur marche par des montagnes , des collines , des ondula- tions de terrain, même peu élevées, mais suffisantes pour influer sur le vent. | | Jusqu'ici nous n’aVons constaté que deux directions princi- palés de l’émigration, c’est-à-dire du sud au nord ; et de l’ouest à l’est. Mais elle a marché aussi du nord au sud ; témoin ce fait, qu'avant le 13 octobre les pucerons étaient déjà en masse à Tournay. « Vous me demandez, me disait M. Dumortier à cette « époque, des renseignemens sur les pucerons ; depuis quelque « temps, il s’en observe ici une quantité innombrable, telle- « ment que les branches et les feuilles des pèchers en sont tout 72 CH. MORREN. — Sur le Puceron du pêcher. « couverts; ils volent le soir en immenses tourbillons , ce que je « n'avais jamais observé les annéés précédentes. » Le 12 octobre, ils ervahirent subitement Bruxelles; ils se ruèrent sur le parc en nombreuses nuées. | :À la même date, ils parurent à Mons, où les journaux les désignèrent sous le nom de mouchettes, apparemment parce qu ils semblaient éteindre le soleil. De Bruxelles ils marchèrent sur Louvain. « Nous aussi, me mandait M. Van-Mons, nous avons le puceron du pêcher ; nous l'avons cherché sur les feuilles d’autres arbres fruitiers, mais il ne s’y trouvait pas. Ce n’est pas le puceron qui ravage au prin- temps et presque chaque année la feuille tendre et à peine dé- veloppée du pêcher. Celui-ci naît sous l’épiderme de toute la page inférieure de la feuille. Le puceron d'automne est trouvé appliqué contre le nerf médian ou le prolongement du pétiole. Jusqu'’alors il est d’un vert pâle; plus tard il devient noir, et semble se partager en individus femelles qui restent appliqués en différens endroits de là feuille, et en individus mâles qui s’envolent. Cet état de choses subsiste encore en ce moment (25 novembre). L’animalcule est engourdi , mais à la moindre chaleur il s’éveille, se meut, grandit bientôt, et quitte sa pri- mitive demeure. Le puceron des choux (Koo! murvel en::fla- mand (:)), dit Mulver s'envole dès l'instant qu'on introduit dans une place chaude; il n’en reste pas un seul. Le puceron que vous avez observé ne fait pas friser la feuille, laquelle est trop peu tendre pour se contracter. Sa présence n’appelle pas la: vi- site des fourmis, ce qui prouve que la liqueur saccharine qui les attire ne provient pas de linsecte, mais de la sève de:la feuille que le froid avait rendue: stagnante, et qui ensuite s'extravase. L'insecte lui-même naît de cette sève. Mon jardinier pense que le puceron provient d'œufs destinés à éclore au printemps, pro- chain , et que la chaleur prolongée de l'automne a fait éclore par anticipation et intempestivement (2). L'absence de pucerons à (1) C’est l'Aphis Brassicæ de Linné. Faun. Suec. n° 985. (2) Les dissections les plus soïignées m'ont prouvé qu’en été les pucerons ne pondent pas d'œufs, mais font des petits vivans, Quant à l’origine spontanée des pucerons qui seraient de la CH. MORREN, — Swr de Puceron du pécher. 7à. la saison prochaine donnerait quelque consistance à cette vue. Moi, je crois que l’une.et l’autre espèces sont spontanées : il y a cette différence, que celle du printemps naît d’un temps chaud qui succède à un temps froid qui déjà avait succédé à un temps chaud , et que l'espèce d'automne prend naissance d'un temps * Chaud qui succede à un autre temps chaud. L’insecte se nourrit de l’épiderme de la feuille. Nous l'avons la première fois observé il y a cinq semaines (1). Ils étaient alors en très grande abon- dance, et toute la face inférieure d’un grand nombre de feuilles en était couverte; ils pullulaient toujours sur les feuilles que la gelée n’avait pas flétries. M. de Koninck les à vus de quatre à cinq jours avant que le temps se soit la première fois refroidi : ils auraient donc quelques jours d'avance pronostiqué le temps froid. » Le 15 octobre, vers le soir, éclata à Gand un violent orage qui fut suivi de quelques jours de pluie; les pucerons mou- raient par milliers : on voyait leurs petits cadavres noircir les vitres, les murs, les meubles, etc. Dès cette époque, dans notre ville, ces insectes incommodes disparurent ; de temps en temps, j'en vois encore un ou deux se traîner péniblement sur quelque plante dans nos orangeries ou nos serres tempérées. Dans les autres villes, le froid de l’autoimne les a tués ; mais avant cette époque, les mères, chez lesquelles il s'opère alors un changement important dans les ovaires, ont pu pondre leurs œufs. Si lon suit maintenant, la carte devant soi, la manière dont ces insectes ont apparu en différens lieux, on remarque : 1° Que partout leur apparition a été subite ; 2° Que partout ils ont apparu en masses considérables ; 3° Que les dates de leur, apparition dans les différentes loca- lités ne sont pas les mêmes, mais qu’elles sont d'autant plus éloignées de la première apparition, que le lieu. d'observation sève animalisée, je ne puis adopter cette opinion extraordinaire sans les preuves les plus posi= tives. Je me suis expliqué ailleurs sur cette manière de voir. (Voy. Horticulteur belge, tom, 11, P: 108-171). -(r) Donc, vers le av octobre, c'est-à-dire 8 jours après leur invasion à Bruxelles, 14 CH. MORREN. — Sur le Puceron du pécher. est lui-même plus distant de la partie ouest de la Flandre orien- tale, ou peut-être du point 7 sur la côte dé la Flandre occidentale ; f° Qu'’ainsi il devient probable que, dans notre pays du moins, l'émigration a eu un centre Où un foyer ; 5° Que ce foyer est un point d'irradiation, puisque des troupes ont émigré vers le nord, vers l’est et vers le sud, l’ouest étant la côte maritime elle-même. Le puceron du pêcher est donc un véritable insecte émi- grant; mais maintenant d’où vient-il ? Schrank est de tous les naturalistes celui qui nous donne la description du plus grand nombre de pucerons; parmi ses soixante-dix espèces, je ne trouve pas notre puceron du pêcher, et même je n’en trouve aucun qui appartienne à cette plante. Aucune autre faune ne m’a démontré que cèt insecte füt con- nü ; mais il faut ajouter que cé genre d'insectes à jusqu'ici fixé fort peu l'attention des éntomologistés qui s'occupent des éspèces. : On pourrait m ’objectér que si le foyer de l’émigration parait être entre Gand et Bruges, ou au moins à l’ouest de la pre- mière ville, ce Sont les boues des canaux qu’on à curés en 'au- tomne qui ont servi à dohnéf naissance où plutôt à favoriser le développement de cette espèce. Je ne saurais être de cet avis, parce que la question des gé- nérations spontanées est aujourd'hui trop éclaircie pour ajouter foi aux organisations des matières inertes en végétaux et aux surorganisations des tissus végétaux en espèces amimalés. Ces opinions n’ont plus besoin d’êtré réfutées. | Quant à l'influence favorable qu’aurait pu avoirsur le déve- loppement des pucerons le dévasément des canaux, elle me paraîtrait plus probable, si à chaque dévasement nous avions ainsi un foyer de développement pour cette espèce d'insecte ou quelque analogue; et si l'expérience n'était là pour nous prouver que des espèces de pucerons sont arrivées de fort loin par mer, en certains pays qu'ils ont infectés de leur progéni- ture, et d’où ensuite ils émigrent peu-à-peu. C'est surtout ce CH, MORREN. == Sur le Puveron du pécher. 75 dernier fait qui me porte à croire que le puceron du pêcher nous est arrivé par une voie semblable. | Citons un exemple, Avant 1829, on ne connaissait pas en Belgique le puceron lanigère qui fait tant de ravages sur les pommiers. M. Van-Mons ne l’a pas même vu encore dans ses immenses plantations. Avant 1812, cet insecte était inconnu à la France; avant 1787, on ne l'avait pas encore vu en Angleterre; mais cette année-là il y est apporté de l'Amérique septentrionale. Vingt-cinq ans plus tard, il franchit la Manche, se propagé dans les départe- mens des Côtes-du-Nord, de la Manche, du Calvados ; en 1818, il fait irruption à Paris , et s'établit dans le jardin du collège de pharmacie; én 1822, il envahit le département de la Seines Inférieure; peu de temps après , il gagne celui de la Somme, de l'Aisne, passe la frontière en 1829, et depuis cette époque étend ses ravages jusqu’aux environs de Tournay. M. Tougärd, qui fournit ces rénseignemens précieux (1), nous explique parfaitement comment une telle émigration dut se faire : elle a sa source dans l'effroyable multiplication de l'ani: mal. Un puceron lanigère, dit-il, produit dix générations vivi- . pares par an, et une ovipare, Chaque génération produit de 90 à 115 individus; terme moyen, 100. Il obtient ainsi la table sui vante des générations : 17° génération, + . à puceron, produit : M sontæisttepenolus 6 0: di à là 45 ve 0 c00nt 3° mouse) aile ge 10000) se 18 she iaisiece. dix mille, dote * + + + # 1,000,000 »« « + + = + + + + un million, B°. . , « « « + . 100,000,000 , « + + + + « * Cent millivris. 6°. . . . .,. : : 10,600,000$000. : + «+ + « . dix billions: 7 + + + + + + 1,000,000,000,000, . . . # . un trilliot. OS bi 474 4 A A RSA à « +» à cént trillions. ge à « . + . . : 10,000/000,000/000,000. : « +. dix quatrillions, 10%, + ,#0+ + + + + 1,000;000,000,000,000,000 . . un quintillion, Si on ajontait à ce nombre, dit M. Tougard, la génération ovi- (x) Du Puceroü lanigère; Ann: de la Soc. d'Horticultüre dé Paris, Tom, xtv. p. 34r. 76° CH. MORREN. — Sur le Puceron du pécher. pare de chaque individu, on aurait un résultat trente fois plus fort. | Un calcul semblable pent s'appliquer au puceron du néchee ; chez qui la même succession de générations a lieu. On voit donc combien une fécondité si monstrueuse doit fa- voriser l’émigration , si tant est qu’elle ne la nécessite pas. Aussi croyons-nous que si l’histoire de tous les pucerons nous était mieux connue, nous trouverions dans ce genre des exemples nombreux d’émigration. Je ne crois pas que ce soient les boues qui aient favorisé le développement de ces insectes, parce que la vase des rivières ne renferme rien qui ait quelque rapport avec la vie de Tanimal ni quelque influence sur ses mœurs. Dès sa naissance, il se nourrit de la sève du pêcher, du réséda et de quelques autres plantes à feuilles tendres, et encore , ces plantes sont-elles moins nom- breuses qu’on ne le pense. Mais la température douce de l'hiver 1833 à 1834, la séche- resse et la chaleur de l'été 1834, le grand nombre de jours sans pluie et sans rosée, voilà où je place les principales causes du développement des pucerons du pêcher. L'influence de la tem- pérature sur ces animaux est manifeste; chez les autres puce- rons, et dans les circonstances ordinaires , la femelle pond des œufs lorsqu'elle est ailée, et après un acceuplement avec le mäle ailé à la même époque. Cette ponte se fait ainsi à la septième génération pour les uns, à la neuvième ou. même à la onzième pour les autres; avant elle, il y a seulement naissance de fe- melles naissant à l’état de larves. Or, chez le puceron du pé- cher, j'ai vu un grand nombre de fois, et j'ai montré le phéno- mène à mon collègue M. Burgraeve, que la femelle ailée et propre à la fécondation ne renfermait point des œufs et n'en pondait point, mais. qu’elle renfermait des petits pucerons vi- vans qui naissaient tout développés avec leurs pattes , leur trompé et leurs antennes. Ce ne‘fut qu'en novembre que les femelles sans ailes présentaient des œufs dans les ovaires et les oviductes , et pour cela il fallait un froid déjà assez vif, Il est Echos que nous n ‘ayons point quelques recherches faites en Angleterre sur cette espèce. Il serait curieux. de savoir cH, MORREN. — Sur le Puceron du pécher. 77 sison développement y a précédé lé émigration sur le continent, car cette espece pourrait bien nous avoir été amenée d’Angle- terre par un vent de nord-ouest, comme le puceron lanigère le fut en 1812. Ces détails suffiront pour nous convaincre que l'apparition du puceron du pêcher et la réapparition du choléra dans nos provinces, sont deux phénomènes indépendans lun de l’autre, mais coïncidant par hasard avec un hiver doux et un été chaud et sec. j $ IV,— Du Puceron du pécher considéré comme espèce, et de ses. mœurs. a J'établis pour cette espèce les caractères suivans : pu pècHER. = Aphis persicæ. Nobis. Vid. tab, vx. fig. 1, 2. A. nigro-viridis, nigro maeulata, antennis nigris, corpore longioribus, pedi- bus flavo-nigrescentibus, abdomine viridi, nigro irregulariter maculato, bicor- niculato, corniculis longis. Habit. ad superficie inferiorem foliorum Amygdali persicæ, Autumno. Descriptio. Insectum perfectum, alatum. Mas. Caput transversum, parvum, antice mu- cronatum, nigrum. Æntennis corpore longioribus, nigris, setaceis, septem articu- lis, primo, secundo etsexto brevioribus, ultimo filiformi, tertio, quarto, quinto et sexto clavatis. Rostro extremitate inflato, flavo-nigrescente, basi dilatato, medio elongato, flavo, lateraliter nigro-maculato, ultimo articulo conico, nigro, pilis pau- cis ad latera instructo, thoracis gr PTT Oculis semi globosis, quasi tuberculo minimo instructis, rubris. Thorax supra obsolete triquetrum, nigrum, splendens, plurimis lineis impres- sis et costis auticè longitudinalibus, posticè transversis notatum; insertionibus alarum luteis. Æ/is corpore duplo longioribus, vitreis, superioribus margine anteriore {lavo, inferioribus unco ad marginem anteriorem præditis. Abdomen pentagonum, viridi-nigrum , suprà depressum, bicorniculatum cor- niculis longis, flavis, cylindrico-truncatis ; cauda fusiformi, brevi, Pedibus longissimis, gracilibus, flavo nigrescentibus. Longitudo corporis : à 1/2 milk, ; cum alis 6 mill 78 CH, MORREN. — Sur le Puceron du pécher. Fœmina. Caput transversum, parvum, anticè suprà truncatum, nigrum. Æ1n= tennis ut in mare, reséro et oculis etiam, T'horax ut supra. - Abdomen inflatum , infra globosunt, viride maculis nigris irregularibus an tice et postice adspersum; corniculis, cauda et pedibus ut in mare. Jnsectum nondum perfectum; viride, flavum, luteum, Fibéuit aut purpurum; antennis flavis, oculis nigris, pedibus luteo-nigrescentibus abdomine sæpe flavis maculis notato, corniculis nigris, interdum transversis, caud4 nullà. Observations. L’Aphis persicæ doit prendre rang après l'Aphis rosæ Linn., avec lequel il a les plus grands rapports. Chez celui-ci, les ex- trémités seules des antennes sont noires, les cornes de l’abdo- men se terminent par une sorte de bouton; ces cornes sont plus grosses que dans l’Æphis persicæ ; le ventre a des taches noires sur les côtés dans lphis rosæ, tandis que l'4phis per- sicæ les a en avant. et en arriére ; chez lui, les taches sont aussi plus irrégulières et plus grandes. "i Les TE pucerons varient beaucoup en couleur, jaunes, verts brunâtres, quelquefois d’un beau rouge pourpre avec des taches jaunes; 1ls varient après leurs mues successives. Jai pu observer quelques circonstances de leurs mœurs qui ne doivent pas être négligées, Les pucerons ailés sont embarrassés de leurs ailes dans la marche, et-cet embarras les invite à voler. Quand on leur coupe les ailes , ils marchent mieux et plus vite. Is.ont de l'attraction “vers la lamière; j'en tenäis une centaine enfermés dansiune boîte pour l'observation, quand je l'ouvrais tous se retournäient du côté de la croisée; dans la chambre ils volent vérs les vitres et s’y tiennent constamment. Le soir ils deviennent apathiques et semblent dormir. Au lever et au coucher. qua soleil ils valent autant que la ; joursiées Ces insectes n'aiment pas l’eau; une gouttelette d’eau les dé- tourne de leur marche. Lorsque la ville était pleine de leurs tourbillons, j'observais dans mon jardin que pendant la pluie tous les pucerons s'étaient réfugiés sur le mur,.les vitres et la porte, tous tournés du même côté, la tête au midi, l'abdomen 4 . CH: MORRES, — Sur le Puceron du pécher. 79 au nord, mais tous inclinés d'environ 45 degrés sur l'horizon. Les pêchers surtout, les résédas, les choux, quelques géra- niums, des mésembryanthèmes, telles sont les plantes sur les- quelles j'ai trouvé ce puceron. Les pêchers ont leurs feuilles dévorées par ces insectes; ils se tiennent le long de la nervure médiane , à ses deux côtés et le long des nervures secondaires, toujours sur le dessous des feuilles Quand ils étaient morts dans les maisons, et que les rues de la ville n’en étaient plus infectées, on les trouvait encore vivans sur les pêchers ; c'étaient là qu'ils faisaient leurs couchés. C’est sur les feuilles de cet arbre qu'il faut chercher les petits, et en hiver les œufs déposés sur les jeunes branches. La femelle pond surtout la nuit, un fœtus à-la-fois; quatre fœtus ou plus se sui- vent dans la journée ou la nuil suivante; il ÿ en a qui accouchent ainsi de 7,8, 10, 14 et jusqu’à 100 jeunes. Quand la femelle est grosse, on peut l'écraser dans l’eau, les petits sortent de l'abdo- mén, et ceux qui sont assez avancés restent vivans. J'avais sé- paré des femelles dans des bocaux de verre pour observer leur - accouchement; les petits après leur naissance venaient sucer le suc doux et mielleux qui sort des cornicules de l'abdomen’, fait observé déja par Bonnet, et qui nous démontre que quel- ques insectes sont des mammifères dans le sens étymologique de ce mot. Si les fourmis viennent lécher les pucerons pour re- cueillir ce suc doux et sucré, on voit que la nature destinait celui-ci à un but directement plus utile, à la conservation de l'espèce. | Quand les pucerons meurent, ils meureñt sur place en res- tant accrochés par les pattes au lieu où la mort les saisit ; on les trouve alors ayec les ailes plus ouvertes, le ventre rétréci, le corselet jauni, et tout le corps d’une raideur extrême ; ils de- viennent cassans , surtout aux ailes. Quand on sépare une patte du plau de sustentation, on enlève d'ordinaire tout l’insecte. Tous ne meurent pas l’hivers j'en observe encore plusieurs (janvier 1835) qui se traînent péniblement dans les serres tem- pérées et dans les appartemens échauffés, où quelque jeune plante puisse suffire à leur nourriture, 80 CH. MORREN. — Sur le Puceron du pécher. DEUXIÈME PARTIE. — ANATOMIE. : Je me propose d'exposer dans cette seconde partie les obser- vations anatomiques que j'ai faites sur l_Æphis persicæ. Cet in- secte, dont le corps chez les plus grosses femelles ne dépasse pas deux millimètres de grandeur ou n’atteint qu'un millimètre et demi chez les mâles, devait nécessairement présenter quel- ques difficultés pour la dissection. Cependant l’opération de- vient plus aisée sous l'eau et à l'aide du microscope simple; les appareils , après avoir été séparés des organes envi- ronnans, ont été soumis au microscope d’Amici, et malgré la perfection de cet instrument et la finesse de mes aiguilles à dis- séquer, je ne suis jamais parvenu à isoler et même à trouver quelques systèmes ir1portans, comme le système nerveux, le vaisseau dorsal, etc. Ces recherches seraient d'autant plus inté- ressantes que, dans les derniers écrits de MM. Burmeister {1} et Léon Dufour (2), on ne trouve aucun détail sur ces organes chez les Aphidiens. On remarquera cependant que les dissections ont pu me don- ner de meilleures idées sur la structure des appareils génitaux que les divers écrits qui ont été publiés à leur égard; ces appa- reils éveillent un vif intérêt, puisque la génération des pucerons est encore un de ces mystères inexplicables dont l’histoire na- turelle nous offre plusieurs exemples. M. Devau a même proposé de commencer dans l’histoire des sciences une époque particu- lière qui daterait de la découverte de cette génération (1740- bo), comme la découverte de la gravitation a fait commencer une période nouvelle à la date de 1665. (x) Handbuch der Entomologie von Hermann Burmeister. Berlin 1832. (2) Recherches sur les Hémiptères , par M,Léon Dufour, (Mémoires de l’Institut de France; savans étrangers. Sciences mathématiques et physiques. Tom. 1v. 1833.) CH: MORREN. =< Sir le Puceron du pécher. 8r $ IL. -— Système tégumentaire. ‘Aucun auteur à ma connaissance n’a signalé des détails epé- Ciaux sur l’organisation des tégumens chez les pucerons. Ces tégumens sont généralement très mous. Ceux de la tête, des antennes, des pattes et du corselet sont un peu plus durs que ceux de l'abdomen. Mais sur toutes ces parties on découvre un derme membraneux , transparent, et parcouru par une mul- titude de fibres anastomosées dont l'ensemble prend l'aspect d’un réseau. Ces fibres sont-elles des vaisseaux ? (pl. 6, fig. 2). On a reconnu depuis long-témps que les ailes des insectes sont formées de deux membranes qui se touchent par leur sur- face interne, et entre lesquelles serpentent les nervures, pro- longemens tubulaires dans lesquels on suppose qu'ils existe des vaisseaux et des nerfs (1). Chez l’Æphis persicæ les ailes parais- sent très lisses, et si glabres qu'elles réfléchissent une vive lu- mière en même temps que les deux membranes en enclavant une certaine portion d'air, décomposent le fluide lumineux et renvoient ses rayons colorés, de la même manière que le font deux lamelles de mica séparées par un petit intervalle. Mais avec un fort grossissement on aperçoit que l'aile du puceron est par- semée d’une foule de petits points saillans qui imitent autant de papilles (pl. 6, fig. 12). Ces petites aspérités entourent égale- ment la base du crochet conique au moyen duquel l'aile infé- rieure s'accroche au bord de la supérieure. Quand on dépouille l'aile d’un papillon des lamelles écail- leuses et pédiculées qui donnent à organe du vol ses brillantes couleurs, on aperçoit que le support de chaque lamelle corres- pond à une petite excavation d'attache. La poussière colorante existe aussi chez quelques insectes voisins des Aphidiens, et nous voyons chez les Aphis proprement dits le commencement de (x) Straus-Durckheim. Considérations générales sur l'anatomie comparée des animaux arti= culés, 1828. p. 108 et 112. VI, Z001,, -« Aoû, 6 8% cé. Monnen. — Sur le Puceron du péshen l'organisation des ailes poudreuses ou le passage de ne -ci aux ailes nues. L’appendice anal de Æphis rosæ est allongé, étroit, et armé de six paires de poils ou soies; celui de l_Æphis persicæ est court, plus ou moins triangulaire, et n’a que trois paires de poils ou de soies recourbées ( pl. 7, fig. 8 @) : $ IL. — Appareil digestif. Le sucoir du paceron du pécher ést allongé et formé princi- pailemient de trois articlés, dont le premier ou celui de l'extrémité hibre est conique, court, armé de poils rares et latéraux; le se- cond est le plus long, un peu en massue, aplati d’un côté; le troisième est très large et forme la base de tout l'organe. Ramdohr nous a donné une figure et la description du canal digestif de lAphis mali (1). M. Léon Dufour à disséqué l’appa- reil digestif des Æphis rosæ, papaveris, longipes, pini maritimæ, et a figuré cet appareil pour les trois premieres espèces (2). Mes observations s'accordent parfaitement avec celles de ces auteurs. | On né découvre pour tot appareil de la digestion chez les pucerons qu'un canal renflé dans deux de ses portions, trois fois plus long que le corps, mais dépourvu de toute glande salivaire et de tout vaisseau biliaire. Cette absence constitue pour M. Léon Dufour non-seulement lé caractère anatomique le plus distinctif de la famille des Aphi- diens, mais encore une exception uñique chez les Insectes. Chez le Lombric terrestre on voit disparaître aussi les canaux biliai- rés ; mais chez cette annélide (3), comme chez les Anatifes (4), © (x) Ab handlung über die verdauungs werkzeuge der Insecten von Katl Ramdohr. Hallé 1817. p. 198. Tab, xxvr. fig. 4. (2) Rech. sur les Hémiptères. p. 242-245. PL 1x, fig. 214, 215, 126, 115. == PE, XVI fig. 192. (3) De Lumbrici terrestris historia naturali necnon Anatomia, auct. Car, Morren. Brux. 1829. p. 138-144. / (4) De l’organisation des Cirrhipèdes et de leurs räpports naturels avec les animaux articulés, par M. Martin Saint-Ange. Paris, 1834. CH, MORREN, + Sur le Puceron du pécher: 83 le canal intestinal devient épais , se double d’un typhlosolé, et semble retrouver un foie dans une duplicature particulière de ses parois. Chez les Aphidiens le tube digestif reste musculo- membraneux, et conserve une organisation fort délicate. Il faut donc que la sève des plantes pour ces animaux puisse facilement s'assimiler en leur propre substance, et cette simplicité extrême dans l'appareil de la digestion ramène ces singuliers insectes bien près des Hydres, avec lesquels on ne leur aurait reconnu aucun rapport sans le secours de l'anatomie comparée, Dans l’Aphis persicæ l'œsophage est capillaire, filiforme, court. Quand l'estomac est presque vide, on remarque en avant et immédiatement après son origine cardiaque , un léger étran- glement comme indice faible d'un gésier (pl. 6, fig. 3); mais quand l'estomac est plein, ce trait s’efface, et alors l'organe a plus d’analogie avec celui de l’Aphis mali figuré par Ram- dohr. ; L’estomac des pucerons du pavot et de la rose, figuré par M. Léon Dufour, est turbiné ou ovoide. Celui du puceron du pêcher a cette forme quand il n’est pas gorgé d’alimens. Dans ce dernier cas il est plus ou moins allongé et cylindrique (pl. 6, fig. 5). Le canal intestinal est plus long dans l4phis persicæ que ‘dans les Z. papaveris et Rosæ ; mais il se rapproche plus de la longueur de celui de V4. mali. Ce tanal est tout-à-fait cylin- drique vers le bas; il se termine chez le puceron du pommier par un gros renflement cœcal. Ramdobr le figure plus volumi- neux que l'estomac lui-même. M. Léon Dufour dit que cette poche est remplie d’une humeur excrémentitielle limpide, et figure l'organe plus allongé et presque aussi gros que l'estomac chez les pucerons de la rose et du pavot. Sur le puceron du pêcher j'ai constamment trouvé ce cœcum très allongé, un peu plus large que l'intestin, mais ne s’approchant jamais du volume de lestomac; la portion rectale qui le termine est plus mince que l'intestin. Cette considération mérite de l'attention parce que je crois que la structure du canal digestif en a im- posé à un auteur célèbre, dans l'explication qu'il a voulu don- ner de la génération des pucerons. : 6, < i 8% ‘ CH, MORREN. — Sywr le Puceron du pécher: M. Straus a mentionné chez le Hanneton des vaisseaux qu'il prétend être urinaires, et qui s'ouvriraient dans l'intestin ; leur produit serait surtout abondant dans le passage de la sm à l'état d'insecte parfait , et ce serait lui qui constituerait le #2eco- nium blanchâtre que les insectes parfaits lâchent en si grande abondance après leur dernière métamorphose (1). Bonnet croyait que les pucerons avaient aussi de l'urine ; il prenait pour telle la liqueur qui sort des cornicules abdominales; liqueur sur laquelle ce naturaliste philosophe’ a émis les idées les plus contradictoires. L’urine, selon lui, sortirait même des pores du corps et se figerait en fils, ce qui formerait le duvet de quelques pucerons (2). Les dissections m'ont démontré qu'il n’y avait aucune communication entre l'appareil des cornicules ét celui de la digestion, et rien ne m'autorise ainsi à reconnaître chez les pucerons le moindre vestige d'organes urinaires. $ TT. — Organes génitaux. C'est à propos de la génération que les pucerons excitent le plus vif-intérèt. Neuf ou onze générations qui se suivent sans le concours de mâles chez des espèces où il y a deux sexes diffé- rens, et autant de successions de femelles sans qu'aucun mâle naisse parmi elles; voilà, sans contredit, un de ces phéno- mènes étranges où l'esprit $’abime, et devant l'explication du- quel on recule malgré soi. Certes on a dû s’inaginer qu'ici du moins l'anatomie, l'autopsie des diverses espèces auraient sou- levé un coin. du voile, et qu on aurait mis le doigt sur la cause en disséquant l'animal; mais il n’y a là que le doigt de Dieu, et quand on a mis à nu 1 organes intérieurs, on reste encore plus confondu qu’äuparavant devant l’étrangeté du fait. Goëdart, peintre de Midelbourg, assure que les pucerons naissent d’une humeur que les fourmis déposent sur les saules et autres arbres : « Nascuntur illæ ex: humore quodam quem (x) Straus. Ouvrage cité, P: 269-299. (2) Bonnet, OEuvres d'Histoire naturelle et de Philosopliie. tom. t, p. 23, CH. MORREN: = Sur le Puceron du pécher. 85 formicæ in. virgulta excernunt, quique solis calore fœtus in viva hæc'exit animalcula (1). Leuwenhoëck, le premier, ouvre le corps des pucerons femelles et y découvre des petits prêts à naître et tout formés. ‘Réaumur soupçonne la viviparité de ces insectes , tandis que de La Hire observe qu’ils pandent des œufs - lorsqu'ils sont ailés et que les œufs ne donnent que des indivi- dus aptères. Bonnet établit par ses belles recherches que les pucerons isolés et séquestrés produisent sans le secours de la fécondation une longue succession de femelles, et qu'après un certain nombre d’accouchemens l’oviparité revient. Les œufs ne se sont pas ouverts pour cet illustre naturaliste, mais Lyonet a vu éclore ceux du puceron du chêne. Réaumur croit aussi que les pucerons sont hermaphrodites. Aucune recherche intéressante n’est faite sur l'anatomie de ces animaux jusqu'en.1833, époque à laquelle M: Dutrochet a publié ses Observations sur les organes de la génération chez les Pu- cerons (2), et M. Léon Dufour ses Recherches sur les Hémip- tères (3). M. Dutrochet à fait ses observations sur le puceron de la chicorée sauvage (4phis cichorii intybi), et M. Léon Du- four a disséqué seulement les organes femelles du puceron de la rose; son travail est incomplet et ne décide rien sur - singu= lière reproduction des Aphidiens. D'après cela on peut résumer les opinions des naturalistes sur la rate des pucerons en ces trois systèmes : Ou les pucerons sont hermaphrodites, 2° Ou leur génération est spontanée, en ce sens qu'ils nais= sent les uns des autres, sans accouplement immédiatement préa- ‘able ou sans le secours des mâles, c’est-à-dire sans fécondation. 3°. Ou le dernier accouplement fonde toutes les générations * des femelles, qui se suivent de neuf à onze fois, et le pouvoir fécondant se transmet d’individu à individu par parenté, mais de manière à ne produire que des femelles jusqu’à la neuvième + (x) Metamorphoseos et historiæ naturalis pars sec. de Insectis, auctore Joanne Goedartio, Medioburgi. p. 75. Experimentum xx11. (x) Annales des Sciences naturelles. p. 204, tom. xxx. Octobre 1833. (3) Mémoires de l’Institut (savans étrangers), Scienc. phys. et math. tom. 1v. 86 CH, MORREN, == Sur le Puceron du pécher. ou onzième génération, où des nouveaux mâles naissent , dont le secours devient nécessaire pour féconder les successions - suivantes de générations. La première opinion est celle de Réaumur; elle est insoute- nable. | | | La seconde opinion paraît être celle de M. Léon Dufour, La troisième est celle de M. Dutrochet, : M. Dutrochet a fondé son opinion sur la structure des or- ganes. il a trouvé que l'appareil mâle se composait de chaque côté de quatre vésicules qui ahboutissaient à un canal déférent commun ; ce canal se joignait à celui du côté opposé pour for- mer un canal unique. L'appareil femelle était formé d’un ovaire composé de dix branches; chaqué branche est moniliforme et constituée par six renflemens dans lesquels il a aperçu les fœtus. Au-dessous de la jonction des ovaires avec l'oviducte, il a trouvé un canal assez long conduisant à une vésicule ; et sur la figure il représente l'extrémité de cette vésicule armée d’un petit ap- pose terminal. Au premier instant on aurait pu prendre cette vésicule pour un organe préparateur de la semence, et la fe- melle serait devenue hermaphrodite ; mais alors on ne voit pas _« pourquoi les pucerons se passeraient d’accouplement pen dant l'été, et en auraient besoin en automne : leur prétendu organe mâle cesserait donc alors de remplir ses fonctions. » D'ailleurs une poche semblable existe chéz d’autres insectes, et on la croit destinée à sécréter la matière visqueuse avec laquelle les œufs se collent aux corps sur Jesquels la femelle les dépose.. Ici je ne puis m ‘empêcher de faire observer qu’il est assez sin- gulier que les femelles qui ne pondent pas des œufs, mais des petits vivans, aient un appareil sébifique à leur oviducte.M. Léon Dufour n’a point trouvé cet organe sur les aphis qu'il a dissé- qués. « Dans les pucerons, dit cet auteur (1), qui sont décidé- ment vivipares, et chez lesquels, par conséquent, un appareil organique propre à sécréter un vernis pour les œufs eût été su- perflu , la glande sébifique manque absolument, » (1) Ouvrage cité, p. 322, l CH. MORREN. — Sur le Puceron du pécher. Ê7 87 1! suffira d'exposer ce que j'ai vu sur l'aphis persicæ pour con- vaincre le lecteur que mes observations! sont sensiblement dif- férentes de celles de M. Dutrochet. Cela peut tenir à la diffé- rence des espèces que nous avons examinées; mais il est fort singulier que de telles anomalies se présentent dans un genre si naturel. - 1. A ppareil méle. 11 est formé à sa partie supérieure de quatre testicules qui chacun ont la figure d’une petite sphère; ces testicules sont ré- unis deux à deux par un petit pédicule et forment bientôt un canal déférent. D’autres fois, et cela est’assez commun, il y a cinq testicules, dont un ou deux plus petits, et alors le cordon qui réunit les pédicules des testicules passe de droite à gauche sans interruption, et l'appareil mâle figure un cercle continu. (pl 6, fig. 3 et4). Chaque testicule sphérique est blanc et done par le moyen de son pédicelle dans le cordon déférent ; celui-ci est long, des- cend verticalement de chaque côté du canal intestinal, et four- nit une vésicule séminale vers le bas, avant sa réunion avec celui du côté opposé pour former le canal éjaculateur. Cette vésicule est allongée, cylindroide, obtuse à son sommet; on voit dans son intérieur deux surfaces glanduleuses destinées à sé- créter une matière qui doit diluer le sperme. Elle donne dans un canal cylindrique au-dehors, sinueux dans sa cavité interne (pl. 6, fig. 4). Au-dedans de chaque testicule, j'ai aperçu des masses arron- dies d'un sperme très dense. En ouvrant la cavité de l'organe, ces masses en sont sorties et se sont diluées dans l’eau du porte- objet. Elles ne montrent en dernière analyse que des animal- cules spermatiques globulaires qui se meuvent avec facilité. (pl. 6, fig. 7). Ainsi l'appareil mâle des pucerons rentre dans le type géné- ral des Hémiptères. Je ne connais aucun ouvrage où la structure des organes mâles de ce genre ait été exposée ; car on voit main- tenant que la vésicule trouvée par M. Dutrochet sur la femelle 88 CH, MORREN. — Sur le Puceron du péchér. existe au contraire chez les mâles. Nous verrons que nous ne avons pas trouvée chez les femelles. 2. Appareil femelle. Sur lAÆphis rosæ , M. Léon Dufour a trouvé, dit-on, douze ovaires sans ligament suspenseur, et dont chacun était com- posé de cinq ou six loges diminuant successivement de volume à mesure qu'elles étaient plus haut, celles du bas renfermaient des fœtus bien reconnaissables à leurs deux yeux noirs. Je rap- pelle ici que M. Dutrochet a trouvé dans le puceron de la chi- corée un ovaire à dix branches renfermant des fœtus d'autant plus gros qu'ils sont plus près de l'oviducte, et que dans cet oviducte se débouchait le canal d’une vésicule sébifique.' Dans le puceron du pêcher, il y a un ovaire à huit gaines ovi ou fætigères. Durant l'été, et même pendantque la femelle était ailée, il y avait des fœtus dans ces gaînes. Prenons d’abord ce premier état. Ces gaines sont moniliformes, formées detrois ou tout au plus de quatre loges. Les loges sont plus ou moins -sé- parées par des conduits filiformes. Celles du haut sont sphé- riques, petites; celles du milieu ovoïdes, et celles du bas presque cylindriques et très longues. Dans les premières, un fort grossis- sement fait reconnaitre un œuf formé de globules réunis et sans aucune enveloppe apercevable. Dans les loges du milieu , ces œufs s’allongent et deviennent inavinlblennent des fœtus. Eifiu dans les loges du bas, on voit vers le haut des fœtus où l’onre- connaît les yeux et un étranglement pour la tête (pl. 73 #g. 1). Quelquefois deux fœtus sont accolés l’un à l’autreau haut des loges inférieures (pl. 6, fig. 6). C’est toujours dans-les loges pres de l’oviducte que se fait le développement:fostal. Le fœtus n’a d’abord qu'un étranglement céphaliquésoù les yeux sont dis- tincts. Peu après les pattes deviennent visibles (pl. 7, fig.r, A, B); le corps s’allonge, ses divisions se prononcent, les pattes s'al- longent aussi (pl. 7,fig. 1, C); enfin le bec est bien visible, il est énormément développé; sa pièce basique est formée de trois portions ; l'échancrure du front se prononce; les antennes ont _ cu. MOnREn. — Sur le Puceron du pécher. 89 leur article frontal; les pattes montrent leurs articulations ; leur tarse à deux crochets, etc. Le fœtus est parfait (fig. 1, D, E); quand on le libère, il ouvre ou étend ses membres. En automne, et même lorsque la femelle ailée avait produit d’autres femelles dont les ailes ne se développaient plus ( phé- . nomène fort remarquable chez ces insectes, puisque les auteurs assurent que ce sont les insectes ailés qui s’accouplent), l'appa- reil femelle était bien changé (pl. 7, fig. 3). Les gaînes ovigères méritaient bien ce nom, car on n’y voyait plus aucun fœtus. Chacune d'elles était rigoureusement compo sée de trois loges dont la première ou terminale était enflée, sphérique , et remplie de douze à vingt-quatre petits œufs bien formés, jaunes au centre, blancs à la périphérie (pl. 7, fig. 4, 5, 6, A). Ces œufs descendaient dans la seconde loge, et là s’allongeaient et prenaient plus de volume; mais en général, ne se revétissaient de leur enveloppe dure que dans-la troisième où dernière loge, que dans toutes les femelles on trouvait occupée par un œuf fort grand, ovoïde, verdâtre(pl.7,fig.8E, pl.6, fig. 8). Ces œufs s’y couvraient en même temps de la liqueur sébifique, car on en voyait quelques-uns pourvus d'un petit appendice destiné à les fixer au corps sur lequel la mère les aurait pondus (pl. 6, fig. 8). Cet appendice était muqueux et venait d’une _ liqueur visqueuse épaissie. J'ai dessiné (pl. 7,fig. 4) l'ovaire avec des œufs; au centre, on voit la terminaison du canal digestif avec le cœcum, et un petit bout de l'intestin. Si cet organe était resté adhérent à l'appareil femelle de l'4phis cichorir , il aurait bien pu produire l'illusion dont j'ai parlé, et la glande sébifique ne serait ainsi que l’extré- mité de l’appareil digestif. Il est maintenant facile de se convaincre de l'impossibilité ab- solue d'admettre l'hermaphrodisme chez les Pucerons femelles, et l'opinion de Réaumur doit être complètement abandonnée. Quant à l'opinion suivant laquelle on regarde les Pucerons corame les résultats d’une génération fécondée à l'avance dans ses aïeux de la neuvième ou de la onzième génération antérieure, il est bien difficile de plier son esprit à une telle hypothèse ; car, après tout, la onzième génération n'existait pas au moment de la fé- t 90 ci Monnen, = Sur le Puceron du pécher; condation de a première-Nous voyons dans les premières loges des gaines de l'ovaire , ou des fœtus ou des œufs naître d'emblée et se former de toutes pièces. À dire vrai, je me refuse à émettre une opinion au riliou d'un tel dédale, et je tiens pour plus philosophique d’avouer son ignorance dans un phénomène où la nature nous refuse même Va apparence d’une explication. S'il fallait une explication à toute force, j'admettrais que la génération se fait ici comme chez quel- ques Entozoäires, par éndividualisation d’un tissu précédem- ment organisé. La génération n'est pas pour cela spontanée ; une génération spontanée doit être la production d’un être or- ganisé de toutes pièces , lorsque des élémens inorganiques se réuniront pour produire un animäl, une plante. Cette généra- tion est impossible, et n’a jamais lieu. Une génération équi- voque est celle où des tissus organisés préalablement par un être déjà pourvu de vie, s'individualisent , c'est-à-dire se sépa- rent de la masse commune et participent encore, après cette séparation, de l’état dynamique de la masse, c'est-à-dire de sa vie, mais à son propre profit, C'est ainsi qu'un tissu produit un Entozoaire. C’est dela vie continuée. Mais supposez que la vie ait assez d'énergie pour imprimer au tissu qui s'individua- lise, la forme de l'espèce productrice, et vous avez la généra- tion des pucerons. Cette énergie se perd au bout de quelques générations, et une nouvelle impulsion devient nécessaire, c'est celle du mäle. Voilà, à tout hasard, une hypothèse que dans ma jeunesse j'aurais embrassée avec plaisir; mais aujourd'hui je préfère dou- ter : les faits que ja exposés plus haut valent mieux qu'une théorie. $ IV. — Système respiratoire et organes de sécrétion. M. Léon Dufour déclare, dans son travail sur les Hémiptéres, que « l'insuffisance de ses instrumens amplifians ne l'a pas mis à même de constater l'existence des stigmates dans les puce- OH, MONRENS = Sur le Puceron du pécher, ‘9x rons » (1). Long-temps avant les travaux de ce judicieux ob. servateur, Ch. Bonnet avait trouvé les stigmates sur le puce: ron du fusain, Ils sont situés latéralement au nombre de six paires, et dans Ja ligne des cornicules, ce qui faisait penser à l'illustre. philosophe génevois que les petites cornes abdomi- nales pouvaient bien être en partie des organes de la respira- tion (2), Il s’appuie sur l’analogie qu'offrent, ces organes avec d'autres appendices évidemment respiratoires, sur la projection du.fluide sucré et sur.les mouvemens de balancement que les pucerons exécutent en masse pour lancer cette matière, Après cela, Bonnet soupçonne que la respiration pourrait bien ne servir qu'à l’éjaculation de cette liqueur sucrée qu'ailleurs il prend pour de l'urine, Ge qu’il y a de certain, c’est que l'anato- mie confirme entièrement les prévisions de Bonnet sur la na- ture des cornicules. Ces organes sont évidemment des appen- . dices du système respiratoire. | En effet, ces appendices tubulés de M. Léon Dufour, ces pe- tites cornes ou cornicules des anciens, ces siphoncles de plu- sieurs auteurs, sont des prolongemens de J’avant-dernier an- neau du corps. En dedans, on remarque un lacis considérable de trachées qui partent du point auquel vient aboutir la corni- cule (pl. 7, fig. 7,8). La cornicule n’est qu’un stigmate pro- longé, et il devient évident que c’est l'air de ces trachées qui repousse le fluide dont cet appendice est souvent rempli, tan- tôt sous la forme d’un filet continu (fig, 7), tantôt sous celle de plusieurs bulles (fig. 8). A la base de ces éorpicules, on voit une glande (fig. 7, a) qui sécrète la liqueur sucrée; celle-ci se répand sans doute dans le canal excréteur (la cornicule) en même temps que l'air de l'intérieur peut passer dans sa cavité. La liqueur visqueuse est ainsi éjaculée pendant l'expiration, J'ai vu plusieurs fois de jeunes pucerons sucer le bout de ces cornicules en y plongeant leur bec. Cela est arrivé chaque fois que je faisais accoucher des femelles dans des bocaux sans au- (x) Ouvr. cité, p, 387. (2) Bonnet, OEuvres, tom, x, p.15. 92 CH. MORREN. — Swr le Puceron du pécher. cune feuille de pêcher qui püt servir de nourriture aux jeunes et à la mère. Or, une glande placée à la surface du corps, armée d'un canal excréteur et sécrétant une liqueur sucrée destinée à nourrir les jeunes, est en définitive une mamelle, Ce rapprochement entre les Mammifères et les Hémiptères est aussi inattendu que celui qui semble exister entre les Dorthe- sies , autre genre de cette-classe d'insectes et les Marsupiaux , ar l’existence d’un sac prolifère où les petits peuvent rentrer après leur naissance. La nature se joue tous les ; Jours de nos spéculations. EXPLICATION DES PLANCHES. Les grossissemens sont marqués à côté de chaque figure par une fraction dont le numéra- teur exprime l'agrandissement et le dénominateur l'unité ou le diamètre naturel. Toutes les figures où le pouvoir amplifiant ne dépasse pas 49 sont faites à la loupe montée de Raspail ; les autres sont dessinées au microscope d’Amici armé de sa camera lucida. PLANCHE 6. , Fig. 1. Femelle vue en dessous. Fig. 2. Mâle vu en dessus. Fig. 3. Tête vue en dessous et canal digestif avec l'appareil mâle. Fig. 4. Appareil mâle avec une seule vésicule séminale, Fig. 5. Tête vue en dessous et canal digestif avec l'appareil femelle. Fig. 6. Appareil femelle isolé et dépouillé de ses sept grands fœtus, dont un, le huitième, est conservé. Il y avait 28 fœtus dans cet appareil. Fig. 7. Amas spermatiques isolés avec les animalcules. Chic ro testiculaire renferme quelquefois de 7 à 9 de ces amas. Fig. 8. OEufs libres ou pourvus d’un petit appendice 2 Fig. 9. Portion du derme tégumentairè. Fig ro. Aile supérieure. ù Fig, 11. Aile inférieure avec son crochet. 7 148 PLANCHE 7, A. Fig. 7. Divers états de fostus pris dans les loges de l'ovaire, Fig. 2. Pelit dessiné le jour de sa naissance, 12 heures après l'accouchement. Fig. 3. Femelle remplie d'œufs, Fig. 4. Appareil femelle ovigère; a, Loges près de l’oviducte ayant chacune un œuf vert. bien formé ; à. Secondes loges ordinairement vides ; c. Troisièmes loges renfermant des œufs très petits: 2, Portion cœcale de l'intestin. Fig. 5. Petits œufs des troisièmes loges isolés. Fig. 6; Une gaine de l'ovaire isolée; a, Loge terminale sphérique ayant dans son intérieur une foule de petits œufs; 2. Loge intermédiaire paraissant vide ou pourvue d’un œuf c plus grand que ceux de la dernière loge; d. Dernière loge ayant un grand œuf eq puis. — Nouvelle espèce d’Actinie. 93 Fig. 7. Avant-dernier anneau du corps ouvert; a. Glande du fluide mielleux; #. Son canal excréteur ou cornicule ; c. Son ouverture terminale; d, Lacis de trachées tubulaires se rendant à la cornicule, Fig. 8. Appendice anal et cornicule; a. Appendice anal; 3. Pièce de l’avant-dernier anneau de l'abdomen; c. Cornicule; d. Bulles d'air venues des trachées ; « Glande dans laquelle plonge la cornicule. 6 Fig. 9. Crochet plus grossi, Note sur une nouvelle espèce d’Actinie, Par M. Ducs , de Montpellier. » … Une circonstance qui peut servir à prouver combien les pro- ductions marines de nos côtes sont encore peu connues, mal- gré les nombreuses visites qu’elles ont reçues des zoologistes ; combien elles auraient besoin d’être explorées encore par des observateurs habiles, c’est celle qui va nous occuper un instant. Rondelet a donné sous ce titre : -De utricæ quarta specie ; la figure grossière, mais reconnaissable, d’une Actinie qui enve- loppe fréquemment, ditil, les coquilles, et surtout celle des pourpres; si Je ne me trompe, cette Actinie n’a plus été recon- nue depuis cette époque, quoiqu’elle soit des plus communes, et que souvent chaque coup de filet de nos pêcheurs en ra- mène des centaines avec les fucus. Du moins, l’Actinie que je vais décrire et que j'ai ainsi recueillie et reconnue conjointé- ment avec le savant professeur Lichtenstein de Berlin, me pa- rait pouvoir être rapportée à celle de Rondelet, en raison des filamens violacés qu’elle laisse fréquemment échapper ; et dont la couleur brillante excitait l'admiration de ce célèbre icthyo- logiste , et en raison aussi de ses habitudes; il est vrai que les sujets soumis à mon observation, beaucoup plus petits , plus jeunes sans doute que celui qu a représenté notre ancien com- patriote , n’offraient point la rigidité, l'épaisseur qu'il attribue à sa quatrième espèce d'ortie de mer; mais il est plus certain en- core que ni lune ni l’autre, si ce n’est pas la même espèce, ne 04 DUGÈS. — Nouvelle espèce d’_Actinie. saurait être rapportée à l'Actinia effæta comme l’a pensé Cu-. vier. Celle-ci n’est point rare dans la Méditerranée; elle adhère aux pierres, aux fucus, aux huitres; mais je ne L'aiiÿ jamais vue sur des coquilles turbinées , ni avec la forme et les couleurs de celle qui nous occupe ici, et que nous nommerons Æctinie parasite. Nous ne l'avons rencontrée que sur des coquilles habitées par des pagures, autrement dits Bernard-l’Hermite. Toujours la _ bouche du'zoophyte répondait vis-à-vis de celle du crustacé, ‘sans doute pour profiter des débris qu’il laisse échapper du reste de ses repas. Le centre de l’Actinie parasite est Lies fixé sur le dernier tour de spire de la FO près de son ouverture et du côté de la columelle ; mais ce n’est là qu'un centre idéal, car le corps s'étend en s’amincissant sur le reste de la copie qu'il enve- loppe souvent en totalité comme ur manteau; d’autres fois, cette mince enveloppe laisse passer le sommet de la spire, sur- tout si elle est conoïde (fuseau, vis, etc.) et non arrondie comme celle des natices. | Dans tous les cas, les deux larges lobes formés par l’épanouis- sement du corps se rencontrent au moins dans la majeure par- tie de leur étendue, et non-seulement se touthent, mais en- core s'agglutinent assez solidement en formant, du côté op- posé à la bouche, une suture longitudinale sous forme d’une ligne enfoncée. Détachée de la coquille après qu’on a rompu cette suture, l'Actinie parasite présente donc une forme assez irrégulière ; elle n'offre une épaisseur notable qu'au voisinage de la bouche, Celle-ci est entourée de nombreux tentacules où barbillons, creux et peut-être perforés au bout. Quant aux filamens pour- pres que Rondelet a cru voir sortir de la bouche, c’est par des pores nombreux, disséminés à la Surface du corps, qu'ils s'é- chappent. Ces pores sont eux-mêmes colorés en violet brillant durant la vie, et forment un semis de gros points pourpres qui tranchent sur le fond blanc laiteux de la peau, laquelle brunit seulement par degrés à mesure qu'on se rapproche de la péri- phérie, Cette espèce n'est certainement pas la seule qui laisse puëès, — Nouvelle éspèce d’ Actinie. 95 ainsi échapper ces filamens qu'on regarde comme des ovaires (Cuvier) par des ouvertures plus ou moins éloignées de la bou: che; mais rarement sont-elles ainsi disséminées : je n’en ai trouvé que sur la moitié de la surface la plus voisine de la bou ché dans l’Actinia effæœta. Si on cherche ces filamens par la dissection ; or: les trouve à l’intérieur du corps dans des loges longitudinales et étroites, où ils sont tortueusement repliés. Ces loges, séparées par des cloisons , donnent à la surface de l'Actinie un aspect cannelé qui devient surtout remarquable quand la pièce a été conservé dans l'alcool , où elle prend uné teinte uniforme et brunâtre. De nombreux corpuscules hya« lins, de forme allantoïde , sont sortis de ces loges ouvertes sous le microscope. Étaient-ce des œufs? Je n’en ai point trouvé dans les filamens pourpres et vermiculés. Nous sne terminerons pas sans faire ressortir encore cette singulière association de deux animaux si différens, et qui pas raissent avoir pris ensemble un accroissement simultané, : Nous avons vu quel profit le Radiaire peut gagner de cette association ; le Crustacé n’y gagne pas moins, En effet, ce n’est pas seulement la coquillé que l’'Actinie re- vêt de son manteau; elle enveloppe un espace souvent deux ou trois fois plus grand que cette coquille qui ne peut renfermer que le bout de la queue d’un hermite arrivé à l’état d’adulte. Get agrandissement permet à l'animal de conserver le même loge- ment qui le contenait tout entier datis son enfance; mais c’est dans l'espac ecirconscrit par l’Actinie qu'est contenu le corps du Pagure et que sont enfermés ses œufs en masse considérable, On pourrait croire que le Crustacé n’est pas bien solidement garanti par un semblable vêtement, puisque son thorax même est fort mou; mais une production de couleur brune, de con- sistance cornée , garnit intérieurement toute la portion du zoo- phyte qui n’est pas en rapport avec la coquille : l'embouchure de celle-ci se trouve ainsi prolongée par une expansion un pen moins dure il est vrai, et qu'au premier abord on pourrait prendre pour un ramollissement du dernier tour de spire, car elle suit aussi la forme spirale dans son développement déter- miné sans doute en cela par l’obliquité native du pagure même: 96. DUGÈS. — Nouvelle espèce d’Actinie. on reconnait toutefois sans peine que c’est une addition à La, coquille, et non une détérioration partielle ; il suffit pour cela de les détacher lune de l’autre. Cette production cornée est l'ouvrage de l’Actinie ou du pagure? C’est indubitable- ment à la première qu'il faut l’attribuer; car elle ÿ adhère fortement , et les stries transversales de cette expansion comme épidermique répondent évidemment à la forme du bord du manteau constitué par son corps ; un épiderme semblable, mais seulement moins épais et moins consistant, se retrouve d’ail- leurs le plus souvent aussi entre elle et la coquille. On peut ob- server encore, relativement à cet objet, 1° que les pagures vi- vant dans une coquille nue , ne se fabriquent jamais un prolon- gement semblable; 2° que dans les masses d'alcyons ou de thethÿes éhlärovailes De Lamarck, etc. ) qui encroûtent sou- vent les coquilles habitées par les Crustacés, et qui amplifient de même leur demeure en constituant au-delà de son embou- chure une caverne proportionnée à la taille de l'habitant, on ne trouve point non plus ce prolongement cornéo-membra- meux; 3° enfin qu’on l’a rencontré au contraire autour des glands de mer (Zepas), sur lesquels notre Actinie ou quelque espèce voisine paraît s'établir aussi parfois en parasite : c’est du moins ce qui me semble ressortir du passage suivant que j'em- prunte à Jonston : « Datur et in lepade nota (Urtica) de quà « ferrantes 1m peratus ita scripsit : in dorso esse sex rimas stel- « lam amulantes : in medio dorsi figuram purvam cum figurà « quâädam inclusà, conchæ rhomboïdi simili, sustinerique a « lateribus lepadis mediante membranàâ continu, et cavitatem « quæ est in animali non habere aliud intermedium quari mem- LC4 « à branam. À parte anteriore conspici fructum Fe | 3 , instar penicilli pictoris in se revoluti. » EXPLICATION DE LA PLANCHE 7 C. Fig. 1, L'Acünie parasite, DE BLAINVILLE. =— Sur le genre Chionis. 97: ‘ D Exrrair du mémoire sur la place que doit occuper dans le sys- tème ornithologique le genre Chionis, ou Bec-en-Fourreau; Par M. DE BLAINVILLE. . Lu à l’Académie des Sciences le 16 août 1836. Parmi les genres d'animaux dont la place dans la série z00- logique est encore douteuse, genres dont le nombre diminue cependant tous les jours, à mesure que les collections se comple- tent ou s’enrichissent d’une manière plus convenable, l’un des plus controversé est sans aucun doute celui que constitue cet oiseau d’un blan de neige, à ailes aiguës, à jambes peu élevées, à bec solide, épais, conique, et comme revêtu d’une sorte de gaine à sa base, ce qui lui a valu le nom français de Bec-en-four- reau. Les navigateurs lui ont donné depuis long-temps celui de Pigeon des Malouines, ou antarctique, ou même du Cap, à cause de son facies, de sa taille, de son vol, et même de la forme ai- guë de ses ailes, que l'on peut comparer à ce qui existe dans les pigeons, et aussi des lieux où on le rencontre le plus souvent; mais les ornithologistes l'ont désigné, les uns sous la dénomi- nation de Chionis, à cause de sa couleur ; les autres sous celle de Vaginalis et de Coléoramphe, à cause de la disposition particu- lière de son bec; ou par le nom de Wécrophage, parce que l'on admet que sa nourriture consiste principalement en animaux morts qu’il-rencontre sur le rivage. Le premier auteur qui ait parlé de cet oiseau d’une manière scientifique et certaine, car il est probable que les navigateurs qui ont les premiers doublé le cap Horn l'avaient aperçu avant lui, et qu'ils ont pu en dire quelque chose dans leurs relations, parait être Forster, le compagnon de Cook, dans son second voyage; il le rencontra sur la terre des Etats (1); il en fit un genre qu'il nomma Chionis, à cause de sa blancheur de neige, (x) Deuxième voyage de Gook, tom. 1v ; pag. 39. VI . Zoo, Es | Août, 7 98 DE BIAINVILLE, == Shr Ze génre Chiônis. et il le plaça dans l’ordre des oiseaux aquatiques qui marchent à gué, c'est-à-dire parmi les Gralles de Linné; c’est ce qu'il fit égaleïnéñt dans son Znchiridion publié ën 1988, én le caracté: risäñt àSséz cohivénablèment, et lui ässighant sa placé entre les genres Tringa et Rallus. | | Après Forster, un grâäh4 nümbre de faturalistes, Pennant, Latham, Gmelin, Bonnaterre, Illiger, Vieillot, MM. Oken, Tem- minck , Goldfuss, l'abbé Ranzani, Quoy ét Gaymard, Lesson , ss gouse fus rapports naturels. Malheureusement, toutes nos demandes d'un Bec-en-fourreau conservé dans l'esprit:de:vin, où'des parties dE DEANNVIERS, = Sir le genre Chiônis, 99 principales de son squeletté , avaient été peñdant long-ternps Sans succés, lorsque, dans un voyage que j'ai fait l’année der nière x Abbeville, M. Ballon, correspondatit aussi zélé qu'éclairé duMuüséuri d'Histoire Naturelle de Paris;a rempli uñe partie dé es désirs, en me dontant le squelette du tronc d’un Chionis, A vés élémehs les plus importans d'une évaluation un peu posi: tivé des rapports naturels de cet oiseau (puisque j'ai montré, depuis long:témp$, que l'appareil sternal, avec ses annexes ; lès rénfermme dans cette classe d'animaux), j'ai pu joindre quelques détails d'organisation intérieure; et même d'histoire naturelle, que je dois à M; PE, Botta; l’un de mes préparateurs au Mus séum, qui a eu Poccasion d’observer un de cés oiseaux ; dans un voyagé de Circumnavigation commerciale , dirigé par M, le capitainé Duhautcilly, en sorte qu'il m'est permis dé remplir cette petite lacune dans le système ornithologique. Le Bec-en-fourreau est un oiseau de la taille d’un gros pis geon environ, c'est-à-dire de 14 à 15 pouces de long, sur 4 poui ces dé large , dont le corps est ovale, assez épais, le col assez gros et court, la tête également forte, un peu déprimée ; termi+ née en avant par des mâchoires coniques, assez courtes, robus- tes, cornprimées, égales et fendües jusqu’au-delà des yeux: Les narines sont grandes, ovales, transpercées, c'est-à-diré sans cloison intermédiaire complète, largement ouvertes à lex: térieur, sans indice d’écaille operculaire , et situées vors le nant dé la machoire supérieure. Les yeux soft assez grands, arrondis, bordés de paupières blanches, épaisses, ét formant un bourrelet considérable, Lire est d’un brun déré. Les oreilles ont leur ouverture extérieure fort grande, ét à Peine récouverte par les plumes, -niLes membres antériéurs, où ailes, sont très développés, et surtout augmentés qu'ils sont par les longues ss qui bor- dent la main et l'avant-bras. Les membres postérieurs sont, au contraire, assez courts, très forts ét très robustes ; le tarse, qui n’est pas comprimé, dés passant à peine la théiair du doigt médian. Les doigts sont au nombre de quatre, comme dans le plus 7: 100 DE BLAINVILLE. — Sur le genre Chionis. grand nombre des oiseaux. Le postérieur ou pouce est petit; ou à peine médiocre, assez élevé au-dessus du plan de position , et cependant pouvant atteindre le sol. Quant aux trois antérieurs, ils sont sub-égaux, l’interne un peu plus court que l’externe, assez sensiblement réunis à leur base, surtout les deux externes, par un repli de la peau, et élargis dans toute leur longueur par un épatement de la plante épaisse et calleuse comme dans les Huitriers, ce qu'avait déjà fort justement noté M. Quoy. La peau est nue seulement dans l’espace qui sépare la ra-. cine du bec de l'ouverture de l'oreille, et cet espace nu est comme caronculé par des boursouflures qui forment un demi- cercle au devant de l’œil. (1) Sur les pattes elle est couverte, à prendre du talon, par un épiderme réticulé, aussi bien avant qu’en arrière des tarses , si ce n’est sur les doigts, où il existe des squammes transverses, assez médiocres cependant. En dessous l’épiderme est au con- traire très épais et fortement granuleux. Sur le reste du corps, la peau est couverte de plumes larges, peu nombreuses, peu serrées, et fournies à la base d’un duvet assez considérable. Les pennes de la queue sont au nombre de douze en six paires ; elles sont presque égales, de manière qu'il en résulte une queue carrée et assez courte. , Celles des ailes sont beaucoup plus puissantes et robustes dans les deux parties qui les constituent. Elles sont à la main “ au nombre de 10 et à lavant-bras de 15, formant ainsi deux paquets à-peu-près égaux quand l'aile:est fermée, et dont;la pointe atteint presque l'extrémité de la queue. Ilen résulte une aile, fort large, et en même temps aiguë. En effet, la proportion des pennes digitales et carpiennes est telle, que c’est la première qui est la plus longue et que les neuf autres vont en se dégra- (x) N parait qu'il y a quelques variations dans la disposition de la partie nue et verru« queuse de la face, Suivant Forster, les joues des adultes sont garnies de verrues d’un jaune pâle, et il y en a une plus large et brune au-dessus des yeux. D’après M. Quoy, les joues sont jaunâtres, avec des caroncules de la même couleur, Suivant M. Lesson , le corps glanduleux qui occupe les joues et la base du fourreau corné est couleur de chair; et enfin, M. Botta se borne à dire que la peau est nue dans l'espace qui est entre le bec et l'œil, A] DE BLAINVILLE. — Sur le genre Chionis! 107 dant assez rapidement jusqu’à la dernière. Quant aux pennes cubitales, elles croissent de la pre un peu plus grande que la dixième de la main , jusqu’à la douzième, et décroissent ensuite. | Le système corné des mächoires constitue un bec droit, assez court, épais, très notablement comprimé, solide, à bords tranchans. L’hémiramphe supérieur, à peine légèrement ar- qué dans toute son étendne, avec le dos mousse, et les côtés subcanaliculés ‘sé termine én pointe assez obtuse : il est garni à sa base d’une espèce de gaîne ou de fourreau incomplet, corné, comme le reste, et dont le bord antérieur libre ou soulevé, est régulièrément sinueux et avance un peu sur les narines; c'est une sorté de cire cornée (1). L’hémiramphe inférieur est pres- que égal au supérieur; il est également assez obtus et sa sym- physe est fort longue, ascendante; le menton reculé et arrondi, sa moitié postérieure est membraneuse. Lés phalanges terminales sont armées d'ongles assez courts, épais, robustes, légèrement arqués et assez obtus; celui du doigt postérieur étant presque égal aux autres. Quant au système de coloration du Bec-en-fourreau, son nom de Chionis mdique qu’il est uniforme, et d’un blanc de neige plus ou moins pur sur tout le corps; les pieds d’un noir orangé suivant M. Quoy , et gris d’après M. Botta. Le bec est d’un blanc sale et noirâtre suivant M. Quoy; de couleur verte’assez foncée, avec une tache d’un rouge-brun sur les côtés, d’après MM. Lesson et Garnot, enfin, suivant M. Botta, l'extrémité du bec est noire, le fourreau, qui en recouvre la base, verdâtre, et sur les côtés de la mâchoire inférieure il y a deux taches orangées. La partie nue et caronculée de la face est de couleur de chair suivant M. Lesson, jaunâtre d’après M. Quoy, et enfin (x) J'avoue que je ne comprends pas trop comment cette espèce de gaine ou de cire cornée ‘st mobile , de manière à pouvoir être relevée ou appliquée sur le bec , comme la dit Latham, du moins à en juger par individu en parfait état de conservation, que j'ai observé, M. Quoy ni M. Bstta ne font mention de cette particularité ; et si M. Lesson , dans la caractéristique de ce genre, dit encore.que la gaine est mobile, je ne vois pas qu'il ait parlé de cette mobilité dans ses observations directes. 102 DE BLAINVILLE, — Sur Le genre Chionis. blanche d’après Forster, M. Botta ajoute que les paupières sont : blanches et formées par un bourrelet assez considérable, Enfin, l'iris est d'un brun doré, suivant ce dernier, d'un gris-bleu entouré d’un cerclerouge-brun pour la pupille, d après M, Lesson, Si nous passons maintenant à l'examen de l'organisation in- térieure, nous remarquerons dans Je squelette les particularités suivantes : | Le nombre des kéntèbres cervicales est de 15. Celui des thoraciques de 6. Des lombo-sacrées de 14, dont la première el :… Des coccygiennes de sept; ce que je ne puis cependant as surer, la queue du squelette que je décris étant incomplète. Le sternum est parallélogrammique, plus long que large, un peu recourbé dans sa totalité, Son bord antérieur est, presque en. tièrement occupé par l’articulation des ischions antérieurs ou præischions; son apophyse médiane est peu saillante et com- primée. Le bord abdominal présente de chaque côté denx échan- crures séparées par trois apophyses égales, coupées carrément, lexterne plus large et plus profonde que linterne qui tend à convertir l'échancrure en trou, La face inférieure ou externe est assez bombée; la crête d'i ins sertion du moyen pectoral s'étend obliquement daps toute la longueur de cette face, et Ja fossette du muscle sterno-præischia= tique est petite et profonde. Quant à la crête ou brêchet qui occupe toute la longueur du plastren, elle est haute; son bord inférieur est convexe ou arrondi, et l’antérieur assez profondément excayé. Les côtes sont en général grèles, c’est-à-dire étroites et fai- bles; elles sont au nombre de neuf; 2 asternales antérieures, dont la première est extrêmement petite; 6 sternales, dont 5 avec apophyses récurrentes et une asternale postérieure. Je ne connais des pièces osseuses qui forment les membres antérieurs quê celles qui constituent la ceinture. L’omoplate est fort longue, puisqu'elle atteint la dérhière côte et qu’elle dépasse assez l’épine antérieure de l'os dés îles; ET + nn. : «à oi pe pme. — Sur de genre Chioniss 103 elle est en forme de sabre, assez peu recourbée et assez étroite. La tlavicule forme avec celle du côté opposé un os furcus laire enfer à cheval assez profond, médiacrement ouvert, à branches étroites et plates, sans apophyse à la symphyse, qui est du resté assez éloignée de toucher au bréchet. Le præischion est assez court, assez aplati, et fortement élargi à son extrémité sternale, son angle externe se-prolon- geant en une apophyse très prenoncée débordant un peu l'angle correspondant du sternum. L'humérus a la tête fort large et fort aplatie, Le bassin n'offre rien de bien remarquable; seulement l'os des iles est large et assez profondément excavé en cuillère, Le pubis est fort grèle. L'ischion, large et aplati à son articulation vertébrale, est inégalement bifurqué en arrière, Quant au fémur, seul os que je connaisse des membres postérieurs , il est assez long et même assez fort, sans autre par- ticularité, Je n'ai observé de la tête osseuse de cet oisean, que la par- tie postérieure du erâne et même sans l'occiput. Le sinciput est large et bombé; les fosses temporales assez larges et profondes ; les orbites médiocres avec la cloison intermédiaire en partie membraneuse; et l’on remarque à la racine des os du nez, contre les frontaux, un trou ovalaire considérable , qui commence une fosse surciliaire bien marquée , comme dans la Pie de mer... Des parties viscérales du Chionis on sait seulement, d’après M. Potta, que la langue, de la longueur du bec, est en forme de fer de flèche assez pointue; que l'estomac (sans doute le gésier) est petit; que le foie et la vésicule du fiel sont très grands3 et que l'intestin, outre les deux cœcums de à pouces de long, qui sont à son point de jonction avec le rectum, en offre un trai- sième très petit de 6 lignes tout au plus de longueur vers son Hère supérieur. . Voilà tout ce que j'ai pu réunir de mes propres observations à celles de MM. Botta, Quoy et Lessôn, sur l'organisation du Bec-en-fourreau. Ce que l’on sait de ses mœurs et de ses habitu- des est encore moins eirconstangié. 40 7 104 DE BLAINVILLE. == Sur le genre Chionis: Sa patrie parait s’étendre dans les latitudes australes , depuis le 5o° degré'de latitude australe jusqu’au-delà du 668. C'est un oiseau marcheur maritime ou même pélagien , puisque l'individu observé par M. Botta avait été pris en mer, étant venu se reposer sur le bâtiment, au 55° degré de latitude méridionale et au 64° degré de longitude occidentale, pendant un vent-de N. E. assez fort, et que celui qu’a étudié M. Garnot avait été également pris à 80 lieues de la terre des Patagons, terre la plus voisine. , Suivant M. Lesson , c'est un oiseau farouche, vivant solitaire ou en petites troises; Cependant l'individu rapporté par M. Botta s’est laissé prendre aisément sans chercher à s'échapper, mais peut-être par suite d'un grande fatigue; Anderson l’apercut par volées dans la baie de Noël, de la terre de Kerguelen. Son vol ressemble tout-à-fait à celui du pigeon, d’après M. Botta, ce qui sans doute lui a fait donner le nom de pigeon des Malouines par les navigateurs. Cependant M. Lesson dit que le vo! du Bec-en-fourreau est lourd et peu analogue à celui des oi- seaux de haute mer, ce qui nous semble peu en harmonie avec la grande étendue et la forme voilière des ailés. On dit que cet oiseau hante les rivages, où il cherche sa nourriture, consistant, suivant les observateurs, en coquillages et en animaux morts; mais ce qui est plus certain, c’est que M. Botta a trouvé dans l'estomac de celui qu’il a ouvert, un cer- tain nombre de petites pierres. Quant à la puanteur de la chair de cet oiseau, fait signalé par Forster et probablement accidentel, MM. Quoy et Lesson assurent que les individus qu’ils ont observés ne leur ontoffert rien de semblable; et M. Botta, qui a lui-même enlevé la peau qu’il a rapportée, ne parle pas non plus de cette singularité; bien plus, Anderson, médecin qui a accompagné Cook dans son second voyage, dit qu on: le trouve aussi bon à manger que du canard. Voyons maintenant, à l'aide de ces élémens, à déterminer la place du Chionis dans la série ornithologique, et par conséquent ses rapports naturels. La forme de son appareil sternal l’éloigne tout d'abord des DE BLAINVILLE, «=— Sur Le genre Chionis. 105 gallinacées et même des dernières familles des palmipèdes, tan- dis qu’elle le rapproche de la famille des coureurs parmi les échassiérs, et de celle des tachydromes parmi les palmipèdes. C'est en effet, le même nombre de vertèbres cervicales, dorsales, lombo-sacrées et probablement coccygiennes, de côtes, d’échan- crurés au bord postérieur du sternum, même nombre de paires de pennes à la queue; les ailes ont également la forme aiguë. Voilà ce qu'il y a de commun entre cet oiseau et les deux fa- milles citées. | Par la brièveté des tarses, et surtout par le peu d’étendue de la partie nue des jambes, il se rapproche plus des Larus que des échassiers ordinaires; mais par l'absence presque complète de palmure des doigts, par la forme non comprimée des jambes, il tient davantage aux échassiers, dont quelques-uns, comme les Pies dé mer, par exemple, ont également les tarses courts et la jambe à peine nue vers le talon. Le système de coloration du Chionïis le rapprocherait sans doute encore plus des Larus, qui sont presque blancs, que des échassiers, qui sont beaucoup plus $ouvent maculés de brun ou de noir; mais la proportion et la forme des échancrures post- sternales, qui sont inégales, la supérieure étant la plus grande, cè qui est constamment le contraire dans les Larus, décide la question en faveur des échassiers de la famille dés coureurs, ce que confirme du reste la forme des pieds, celle des doigts pres- - que entièrement libres ou séparés, avec un élargissement plan- taire qui les borde dans toute leur longueur, fait qui prouve que cet oiseau est essentiellement marcheur. ù Nous croyons donc avoir démontré d’une manière à-peu- près irréfragable, que c’est avec les gallinacées, et même en y comprenant à tort, suivant nous, les colombes ou pigeons, que ce genre a le moins de rapports, quoique le système voilier soit ä-peu-près le même; car sous tous les autres points, il y a dissem- blance complète, aussi bien dans l’organisation que dans les _ mœurs et les habitudes. Entre les échassiers et les palmipèdes, le choix est plus difficile , parce qu’en effet ces deux ordres pas- . sent de l’un à l’autre sous presque tous les rapports. Cependant c’est avec la famille des coureurs parmi les échassiers, que nous 706 DE BEAINVILLE. = Sur le genre. Chionis; lui trouvons le plus de ressemblance, et entre autres avec le genre Huitrier (1), dont l'organisation, les mœurs et les habi- tudes sont fort rapprochées. Dans ces deux genres en effet ; 1° Le nombre des vertèbres 15—6—14— 8, est le même. 2° Le nombre et la forme des côtes sont les mêmes. 3° Le sternum, de même forme générale, a deux échancru- res sub-égales, la supérieure un peu plus grande que l’inférieure. 4 Le canal intestinal a également trois cœcurms dont deux terminaux médiocres et un médian fort petit. 5° L'estomac est également formé d’un gésier fort petit sans jabot, 6° La. queue est courte et composée de six paires de pennes égales. 7” Les ailes, formées de dix pennes à la main, sont aigués. 8 Les jambes sont peu élevées et nues seulement vers le talon. | 9° Les tarées, non comprimés, sont également réticulés en ayant comme en arrière. 19 Ja plante des, doigts est élargie de manière qu'ils sem: blent bordés latéralement. Ke Ce sont également des oiseaux marçheurs et coureurs; 2° Habitant les rivages de la mer; 13 Où ils cherchent leur nourriture, consistant en enquis lages et peut-être en animaux morts, Cest donc auprès de ce genre que le Chionis doit être mis, quoique la forme du bec. soit fort différente; mais aujourd’hui quel est le zoologiste qui ignore combien la considération de cette partie est peu importante pour juger les rapports naturels des oiseaux? » (1) Hæmatopus ostralegus. ». EMERMNTER. — Slernium des Oiseaux, 107 Exrnarr des Recherches sur la marche de l’ossification dans le slernum des oïseaux, pour faire suile aux travaux de MM. Ouvier et Geoffroy Saint-Hilaire ; et à l'Aca- démie des Sciences le ! juillet 1836, Par M. F. Lurrminier, médecin à la Guadeloupe. En s’en tenant aux seuls faits fournis directement par l'ob: sérvation, et écartant toute idée systématique, on ne trouvait en dernière analyse pour la généralité des oiseaux, que deux modes d’ossification du sternum, savoir : cinq pièces pour les gallinacés, et déux pour les canards et les autruçhes. Cependant, en considérant les formes si variées sous lesquelles cet os peut se présenter chez les oiseaux, il devenait difficile, dit M. Lherminier, de croire qu'il n’existât réellement que deux types pour la disposition des pièces qui concourent primi- tivement à sa solidification , et il était plus naturel de supposer que les observations avaient été jnsqu'à présent trop restreintes, qu'on s'était trop empressé d'en généraliser les résultats. On avait pu être induit en erreur par l'étude d'individus trop jeu- nes ou trop vieux, et c'est en effet ce qui m'était arrivé à moi- même dans certains ças, ainsi que j'ai pu m'en convaincre en continuant ce genre de recherches. » : Les premières recherches de M. Lherminier avaient été limi- tées aux oiseaux de basses-cours et à ceux des oiseaux sauvages \ qui habitent toute l’année la Guadeloupe ou qui y viennent au temps de la ponte. Depuis elles ant été étendues aux espèces que fournissent les îles voisines, à plusieurs de celles qui habi- tent le continent des deux Amériques et à diverses espèces eu- ropéennes; jusqu'à présent l'auteur n’a pu:s6 procurer des oi- seaux propres à l'Afrique, à l'Asie, ou à l'Océanie, dans l'état pou avancé de développement qu'exige le genre d’études dont il s'occupe. D'apres les! "observations qu'il a faites jusqu'ici, N. Lhermi- 108 . LHERMINIER. = Sernum des Oiseaux. nier croit pouvoir fixer à neuf le nombre des pièces qui entrent dans la composition du sternum considéré en général chez les oiseaux. Nous disons considéré en général, car quand on étudie séparément les différentes espèces , on n’en trouve peste chez laquelle il ne manque quelquesutes de ces pièces , à quelque époque de son dévèloppement qu’on létudie. Ces neuf pièces peuvent être considérées comme appartenant à trois rangées ou séries transversales, l’une antérieure ou pro- sternale , l'autre moyenne, ou méso-sternale , et la troisième pos- térieure, ou méta-slernale. La première rangée comprend une : pièce baie ou médiane, le pro-sternum , et deux pièces paires ou latérales , les pro-sternaux ; la deuxième se compose de même ‘d’un méso-sternum et de deux méso-siernaux , la troisième d’un méta-sternum et de deux méta-sternaux. Il faut remarquer cependant que lenombre des pièces de cha- ‘que série peut être quelquefois de plus de trois, et dans certains groupes d'oiseaux M. Lherminier l’a vu aller jusqu’à six. « La première série, quand elleexiste, est en général resser- rée dans un espace beaucoup plus étroit que les deux autres; elle est tantôt complète , tantôt réduite aux deux pièces latérales et tantôt à la seule pièce médiane. Elle sert d’appui aux os cora- coïdiens, et fournit une insertion fixe à pr age sterno-co- raco-claviculaire. La deuxième série peut de même être complète, ou formée seulement par la réunion des deux pièces paires, mais elle n’est jamais réduite à la seule pièce impaire. Quand les trois pièces existent, tantôt le méso-sternum fait partie du corps de l'os et s'aperçoit à la face supérieure, tantôt il appartient à la-quille et en occupe la partie supérieure ou adhérente. Dans le premier cas ; il peut être double ou simple; dans le second , c'est tou: jours un noyau unique. Malgré cette différence dans la position, M. Lherminier ne pense pas qu'il y ait lieu d'admettre lexis- tence de deux méso-sternums distincts, ear il ne les a jamais rencontrés À-la-fois. Quand le méso-sternum est supérieur, il s’unit bientôt aux méso-sternaux et contribue à assurer-la con- solidation du sternum en s'étendant à-la-fois en avant, en arrière et en bas; quand au contraire il est inférieur, ou appartenant : À (4 À LHERMINIER. — Siernum des Oiseaux. 109 à la quille, il s'étend de la crête au corps de l'os, va opérer sa jonction avec les pièces de la première série, quand il en existe, s’unit ensuite aux méso-sternaux et marche enfin conjointement avec eux jusqu'à la partie postérieure du sternum. La deuxième série a surtout pour usage de fournir un point . d'appui aux côtes sternales et de concourir au développement de ‘la crête et du corps du sternum. En cas d’absence de la pre- mière série, la deuxième la remplace vis-à-vis des os coracoi- diens qui s'appuient alors sur le méso-sternum, s’il existe, et, à son défaut, sur les méso-sternaux. La troisième série appartient tout entière au corps de l'os; elle est tantôt complète, tantôt réduite aux deux pièces latérales ou à la seule pièce médiane, celle-ci est quelquefois assez diffi- cile à distinguer des deux autres pièces centrales. Quand ces dernières manquent, le méta-sternum supporte directement les os coracoiïdiens. Les méta-sternaux partagent avec les méso- sternaux l'emploi de soutenir les côtes. Ils ont aussi d’autres usages relatifs aux membranes fibreuses du sternum dont ils maintiennent. la tension d’une manière uniforme et favorable à l'action des muscles qui s’y insèrent quoique sujets à varier dans leurs formes. Voici maintenant ce qu'on peut remarquer. relativement. à l'ordre dans lequel se développent les pièces appartenant aux trois séries. Pour la première, quand les trois pièces existent, elles peu- vent se développer simultanément, ou bien l'apparition des deux pro-sternaux peut précéder celle du pro-sternum, ou ce peut être l'inverse; le second cas est à beaucoup près le plus com- -mun. Quand la première série n’est représentée que par deux ièces, il y en a presque toujours une qui surpasse l’autre en | y presq ] grosseur. "Pour la seconde série, il peut aussi y avoir apparition simul- tanée des trois élémens, développement des. pièces latérales _ avant celui de la pièce moyenne, ou enfin, formation du méso- _ Sternum long-temps avant celle des méso-sternaux. + Les méso-sternaux existent dans tous les groupes sans ex4 ception. 4io BHERMINIER, + Srerhum des Oiséaut: Qüâñit à la troisième série, lorsqu’ellé est complèté, le dé: déléppeméne des trois pièces est à très petit près simultané; quand elle ést réduite à deux ou à une seule, ce développément est toujours jlus tärdif que celui de là série précédente. Le riéta-stérnuin est Souvent divisé primitivement en deux pièces qui $e réunissent Te surtout quand les métestertiaux Man: qüuent: Eñ évaluant limpôrtance des différentes piècés qui peuvéñt entrér dans là cémpüsitiün dü Sternuümi, d’ après le plus où rhoins de fréquence des cas où chadütie 8e présente, oh les voitse rame gér dans l’ordré suivant : > | 1° Méso-stérnaux ; 2° méso-Sterntih ; 34 pro-Sternaux; 4° mé: ta-sternum; 5° pro:sterniuim et nôtasateliatis ex quoi Dans la seconde partie dé son mémoire, M. Lliertinier fait contiättre là tharche de l’ossification dans les différentes familles naturelles dé la élassé des oiséaux, dans toutés celles du moins qu'il a pu étudier, et datis l’ordre où il a étudié chacune d'elles: Pour les oistaux domestiques, il indiqué toujours par le nombre dé jours écoulés depuis la fiaissance, l'époque dé l'apparition _ de châque pièce, et de sa réunion avec les pièces voisines; pose les oiseaux sauvages, au lieu d'indiquer approximativeiment l’ägé du Suüjét, cofimé quelques jours en plus ôu en Moins apportent Souvent dé grandes différerices dañs le nombre apparent des pièces , il donne le poids de l'individu qu’il a observé; l'état dé dévelôppenient des plumes, en uri mot, les différens signés à l'aide desquels le naturaliste qui voudra s’assurer de l’éxactitude dés faits annoncés; pourra reconnaitre qu'il observe danses mêmes circonstances. Voici lés principaux résultats auxquels l'auteur ést arrivé, et dans l’ordre où ilsse trouverit si di dans son Mémoire: d ù Famille des Pigeons.— On peut distinguer dsts la marche que ner lossification du sternum chez ces oiseaux quatre époques : ° Appärition des méso:sternaux-èt. du méso-sternum- 3 piès sr Apparition .du pro:stermumet des pro-sternaux == pièces. — 3° Réunion de ces-trois derniers osselets en: un==# _piècésie— 4" Réunion de toutes les pièces en une seule; marche tranversale de la transformation osseuse d’arrière en avant: titan. = SMium dés Oiséaus. fi + paille des Güllinacés.=— Le stertiuri résulté de la réunion de éinqrioyatit oéécux, dés deux pièces latérales de la sérié inoÿenne ét dés trois de la sérië postérieure. Dans détx cs sétilémérnit, une fois dans un poulet, et l’autre dans un dindonnéau, l'aüteur à trouvé engagé entre les deux Ôs cofacoïdieñs; üh petit nôyau osseux qui potiVait êtré pris pour uñ pro:stérhüm; les tfois sés fies aüfaient été ainsi représentées, ce qui du reste n’a Jièd ni pour éetré famille, fi pour äucuñe autre dafs ui état Hofial d'üréganisation: | 14 Famille dés Canards.=-L'ossihitation du Sternum ést très tars dive; éllè hé cominélicé que plus dé qüaränté jours après la fiaissañéé, ét né se térmnine guère avant lé cent trentièmé jour: Elle offre béaucoup d'irrégularité chez dés individus d'uhé ème couvée. Dahs le plus grand noïbre dés tas, élle se fait üiquémént aûx dépens des déux méso-stérhaux; cependant quand lés déux plaques osseusés, eñ contintianit à marcher l’üné véts l'autre, ôñt comiéticé à s'étendre sur la crête , où voit quél- quefois , dans l'angle rentrant qu’elles forment, apparaîtré vers lé éentiètfié jouf ün noÿau osseux distinct, d’aboïd de la crête ét dù bouiclier sternal, puis bientôt adhérerit à l’un et à l’autre. M. lhiérminier croit qué cé noyau doit être considéré comme üñ méso-sterniüm inférièur. On conçoit d’ailleurs que n’étänt pas éonstant, ét apparaissant à une époque tres tardive, il aura pu diséinént échäppét à l'attention. Quoi qu'il én s6it, où në trouvé Babituéllemiént qüé deux noyaüx ôsseux primitifs dans le sternum des canards ; jainais plus dé trois : tous appartiennent à la sérié moyenne MR EE Sr : Fâinillé des Passereanx.2= Les observations ont été faités sûr tigrand nombre d'individus apparténänt aux espèces suivantes! 16 Troupialé à queue en toit {Qwiscalus versivolor. Viell.), le büxia portoricensis, le Lanins tyrannus , le Cérthia flaveola, ete. Chez lé Troupialé, l'ossification du stéfnuin ne corntience qué lôrsque lès rémigés ont cominéncé à sortir de leürs tuyaux. On voit alors äpparaitre sûus les côtés ; aux angles antérieurs éxtera és du stérhum, deux points osseux trianguiairés ; ce sont les méso-sternaux ; bientôt le méso-sternum se montre, d’abôrd très petit, puis les trois os s'étendant, se joignent par deux pe- 112 LHERMINIER. — Sfernum des Oiseaux. tites bandes transversales de points osseux; plus tardenfin, les os confondus forment une plaque osseuse qui continue à s’éten- dre ensuite d'avant en arrière en descendant dans la crête et formant son apophyse bifurquée. La Pie et le Geai de France ont offert-la même disposition, à cela près, que le méso-sternum est primitivement double. . Famille des Accipitres.— Espèces diurnes. — Émerillon de la Caroline, vingt-et-une observations. L’ossification du sternum commence assez tard, puis elle marche très rapidement. D'abord se montrent deux méso-sternaux triangulaires, qui s'étendent de l'angle antérieur et externe de l'os jusqu’à la dernière côte; bientôt ils se sont prolongés jusque vers la ligne médiane; alors on voit apparaitre en avant deux pro-sternaux arrondis, et au- dessous d'eux, à la racine de la crête, un méso-sternum infé- rieur, qui se prolonge en un mince filet osseux. vers le bord postérieur, et se confond bientôt avec les quatre osselets:supé- rieurs. Plus tard, l’ossification se complète en avant et s'étend au reste de l'os. Espèces nocturnes;— les Chouettes. Chez ces oiseaux, l’ossi- fication du sternum est à-peu-près aussi tardive que chez les Faucons; elle en diffère en ce que les méso-sternaux et le méso- sternum inférieur se développent presque en même temps. Plus tard apparaissent les deux pro-sternaux égaux et bien séparés d’abord, se confondant ensuite, puis s’unissant avec les trois pièces de la série méso-sternale, pour former une plaque qui s'étend graduellement à toute l'étendue du sternum, , Famille des Grimpeurs.— Le Pic-Lherminier, seule espèce qui habite la Guadeloupe. Toute l’ossification du sternum .se fait aux dépens de la série méso-sternale. Le méso-sternum est formé d’abord de deux pièces qui se soudent bientôt entre elles et plus tard s'unissent aux méso-sternaux. La solidification de l’appareil sternal commence quand les rémiges pointent hors de leurs tuyaux; elle est à-peu-près complète quand ces plumes sont aux trois quarts exsertes. L’ossification, dans les Torcols, suit à- peu-près la même marche; seulement elle parait commencer plus tard. Famille des Hérons. — Bihoreau à six brins et Héron crabier re cusnMinier — Slernum des oiseaux. 113% vert. Ossification tardive, long-temps bornée aux méso-sternaux, qui se développent surtout vers la partie antérieure, laissant entre eux, en arrière, un large espace où apparait un méta- sternal double, et qui conserve assez long-temps les traces de sa division; puis toutes ces pièces croissent rapidement et ont bientôt achevé de consolider le sternum. M. Lherminier n’a pas eu l'occasion d'étudier des Cigognes; mais au grand développement de leur crête sternale, il juge que l’ossification, chez ces oiseaux, doit différer en quelque point de ce qui s’observe chez les Hérons. Fumille des Colibris. — L'ossification commence peu de jours après la naissance par le développement du pro-sternum. Bientôt on voit apparaître deux méso-sternaux et un méso-sternum in- férieur; le pro-sternum s’unit ensuite aux méso-sternaux, la réunion du méso-sternum est plus tardive. Il est à remarquer que dans ces oiseaux, malgré l'élargissement considérable du corps de l’os en arrière, son ossification s’accomplit sous la seule influence des points osseux qui occupent sa partie extérieure, partie qui est, comme on le sait, très rétrécie. Famille des Mouettes.-— Apparition presque simultanée des méso-sternaux et d’un méso-sternum inférieur. Plus tard se montrent deux pro-sternaux allongés transversalement, et qui ne tardent pas à se réunir sur la ligne médiane; bientôt les cinq pièces s'étendent et finissent par n’en plus former qu’une seule, qui gagnant de proclie en proche, envahit le reste de l'os. Famille des Pélicans. — Dans les Phaétons, l’ossification du sternum commence d'assez bonne heure, et se fait tout entière aux dépens des trois pièces de la série méso-sternale, dont l’appa- rition parait être simultanée, Il y à lieu de croire, d’après une seule observation, que la marche de l’ossification est la même chez les Fous, et il est probable que c’est encore celle qu’on trouvera pour les autres genres de cette famille. Famille des Gallinules ou Poules d’eau.— Ossification assez tardive, commençant par les deux méso-sternaux. Plus tard, apparition de deux méta-sternaux , qui ne tardent pas à se réu- nir chacun au méso-sternal du même côté et à s’avancer vers la crête. À la partie inférieure de celle-ci commence à se montrer VE, Zoor. Des Aoüt, 8 + . LA 11/4 LHERMINIER. — Sfernum des oiseaux: un méso-sternum inférieur qui concourt aussi, avec les quatre autres pièces, à solidifier la partie antérieure du sternum. Les Poules d’eau sont, avec les Gallinacés, les seuls oiseaux’ dans lesquels, jusqu’à présetit, on ait observé dés méta-sternaux. Famille des Perroquets.—Ossification du sternum très tardive et présentant, sous ce rapport, d'assez grandes différences d’un individu à l’autre. Les points de départ de la solidification sont au nombre de quatre ou cinq, savoir : pour le corps, deux la- téraux qui se réunissent en avant sur la ligne médiane, et un médian placé derrière et entre les deux premiers; celui-ci est un méta-sternum primitivement double, mais dont les deux moitiés se sont promptement réunies. Le cinquième point est placé au sommet de la crête dans l’apophyse qui surmonte cette lame, et il envahit de bas en haut. M. Lherminier y voit un méso-sternum inférieur remonté plus haut que de coutume. Famille des Pétrels. — Ossification précoce commençant par l'apparition du méso-sternum, puis par celle des méso-sternaux; ces trois pièces, surtout la première, s'étendent rapidement; en- suite se montrent deux petits pro-sternaux qui, avant de s'unir entre eux, sont rejoints par les méso-sternaux. Famille des Echassiers vrais; Echasse de Buenos-Ayres, Bé- casse de France, etc. — Ossification tardive commençant par un méso-sternum de la quille, après quoi apparaissent les pro:ster- maux, puis les méso-sternaux; les PATES se réunissent d’abord entre eux, puis au méso-sternum ; la réunion des méÉsO+ stérnaux a lieu un peu plus tard. | . Famille des 1bis.— Trois centres d'ossification; les méso-ster- naux qui apparaissent les premiers, et un méso-sternum infé- rieur qui ne se montre que plus tard. Famille des Latirostres ; Guacharo et Engoulevent, — L’ossifi- cation se fait de même par les deux méso-sternaux et un méso- sternum inférieur. | Famille des Coucous.— C’est encore uniquement aux dépens de la série méso-sternale que se consolide le sternum; la marche paraît être tout-à-fait la même que dans les passereaux. Famille des Pingouins.— L’ossification du sternum a lieu plus tard encore que chez les canards. Les pièces qui y concourent Académie des Sciences. : 115 apparaissent dans l’ordre suivant : les pro-sternaux qui s'unissent bientôt entré eux, un méso-sternum inférieur, les deux méso= sternaux. æ Famille des Grèbes. —Les méso»sternaux paraissent se déve: lopper les premiers, puis les pro-sternaux, et enfin un méso- sternum inférieur. Famille des Tinamous.— L'auteur n’a pu faire qu’une seule observation, et sur un individu où toutes les pièces du sternum. étaient déjà réunies; cependant il lui a semblé qu’il n’y avait que trois points de départ pour l'ossification du sternum, les, trois pièces de la série méso-sternale; si cette conjecture se vé- rifiait, ce serait, dit-il, un nouveau motif pour tenir ces oiseaux séparés des gallinacés. Famille des Coureurs ; Autruche, — Le sternum ne présente que deux points primitifs d’ossification, un de chaque côté de la ligne médiane; ce sont les méso-sternaux, nés des bords laté- raux du sternum, sous les côtes; ils marchent vers la ligne mé- diane à la rencontre l’un de l’autre en décrivant une courbe, se touchent en un point qui correspond au milieu de leur hauteur, en laissant en haut et en bas un espace cartilagineux qui les sépare , et finissent plus tard par ne former qu’une seule pièce. L’ostéogénie du Nandou et du Cascoar ne diffère point de celle à l’Autruche, et il est probable, dit M. Lherminier, qu'il en sera de même de l'Apterix. Anaivse des travaux anatomiques, physiologiques et z00l0- giques présentés à l'Académie des Sciences pendant les mois id Juillet et août 1856. Séance du 3x juillet, Lettre de M. Rovrax sur l'existence du Guacharo dans la province de Bogota. ; M: Roulin annonce que le Guacharo se trouve dans diverses localités de cette, province, et il indique un ravin profond , situé à peu de distance de la petite ville de Guadas, et l'arche dû pont naturel de Pandi ou fcononzo, M, de Humboldt, dont le nom se présente si fréquemment dans Îles diverses 8. 116 Académie des Sciences. questions qui se lient à l’histoire de l'Amérique espagnole, est encore le premier qui ait indiqué la présence de ces oiseaux crépusculaires au pont de Pandi; mais les circonstances défavorables dans lesquelles il les observa ne lui permirent pas de reconnaître dans les cécas qui se mouvaient sous la voûte obscure du pont de Pandi les Guacharos qu’il s'était procurés à la caverne de Caripe, et qu’il avait pu examiner de près, J’ai été plus heureux, dit M. Roulin, et au moment où j'ai visité le pont, il pénétrait sous la voûte assez de lumière pour que j'aie pu très bien distinguer non-seulement les formes des oiseaux, mais encore leur couleur et jusqu’à leurs taches. J’ai eu occasion en outre de voir un de ces animaux qui avait été cloué sur une porte, comme chez nous on cloue les chouettes. M. Justin Goudot, naturaliste, établi dans la Colombie, est parvenu à se pro- ‘curer un des oiseaux du pont de Pandi, et il a dû l’envoyer en France, mais il ne paraît pas qu’on l'ait reçu. , - M. Roulin a appris des habitans de Pandi que tous les soirs les cécas sortaient en grande troupe de leur retraite et s’envolaient vers une forêt voisine chercher les fruits dont ils se nourrissent. Il ne ‘paraît pas qu’à Pandi on recherche les jeunes Câcas pour les manger et faire usage de leur graisse, comme on le fait pour les Guacharos de Caripe ; mais cela tient sans doute uniquement à ce que la si- tuation de leurs nids les protège, car dans une autre localité, distante de celle-ci d’une vingtaine de lieues, dans Ja paroisse de Quebrada-Honda (arrondissement de Guadas) on va chercher les jeunes Cécas et on en détruit beaucoup chaque annce.. Dans ce dernier licu les foiseaux n’habitent plus une voûte, mais seu- lement un ravin dont la profondeur est assez grande pour qu’ils y trouvent l’obs- curité qu’ils recherchent. D’après les renseignemens qui ont été fournis à l’auteur de la lettre, il parat- trait que le Guacharo se trouve dans d’autres lieux situés plus au sud; mais il, pense qu’on pourrait avoir confondu cette espèce avec une autre qui appartient à la famille des engoulevens. Ce dernier oiseau, qui se rapproche de l'Uruiau d’Azara par l'habitude singulière de se tenir, pendant son sommeil diurne, accro- che par les pattes et le corps dans une direction verticale, en diffère par d’autres points de ses mœurs. L’Urutau s'accroche , comme le pic-vert, au tronc d’un arbre mort, et y reste souvent exposé tout le jour au soleil ; l’autre recherche les forêts profondes et se suspend aux #i/landsias, qui pendent des rameaux. comme de longues barbes grises. M. Roulin n’a pu observer de près cet engoulevent, quoiqu'il l'ait souvent vu voler à l’époque du crépuscule dans les plaines que parcourt le Méta, un des principaux aflluens de l’Orénoque. Il annonce avoir rencontré dans les mêmes cantons un engoulevent qui, comme l’Urutau, reste endormi au soleil, posé sur des arbres morts, mais non accroché verticalement, et qui se distingue d’ailleurs de l'oiseau qu'a décrit Azara, et par la taille, par la couleur, et par l'absence d’aigrette, Cet engoulevent, en effet, n’est guère plus gros qu’une hirondelle. Le fond dé sa robe est d’un gris jaunâtre. Il viten troupes, et on en voit jusqu’à trente ou Académie des Sciences. 117 quarante réuvis sur un de ces arbres morts que charrie la rivière, et qui s'arré- tent sur les bas-fonds, ou sont laissés sur les plages sablonneuses quand ps eaux baissent. M. Roulin n’a trouvé ces engoulevens que dans la partie supérieure du Méta: Au contraire, il n’a trouvé le Stryx cunicularia, la chouette à clapier de Molino, que dans les parties inférieures de la même rivière. Il a vu ces oiseaux en grande abondance dans les plaines de la province de Casanare, et ils lui ont présenté les mêmes habitudes que celles que les auteurs ont décrites tant au Chili que dans le territoire des Etats-Unis. On n'avait pas éncore indiqué leur Are dans à Colombie. Education des Vers à soie. M. Camille Beauvais adresse à ce sujet, des observations fiites:à à la ferme des bergeries de Sénart, en 1836. On pensait, il ya peu de temps encore, que l’éclosion spontanée de la génie des vers à soie, à certaine époque du printemps, serait un obstacle invincible à l’acclimatation de cette industrie dans le centre de la France. ‘A la vérité , dit M. Beauvais, depuis huit ans j'avais reconnu par expérience qu’à une tempéra- ture de six degrés on pouvait conserver plusieurs années de la graïne de vers à soie; mais cette découverte restait sans fruit entre nes mains, parce que je n’avais pas réussi à faire éclore de la graine conservée au-delà des limites ordinaires. En vain j'avais essayé une élévation progressive de température et les divers moyens d’incubation employés dans le midi de l'Europe ou décrits dans d’autres .ouvra- ges, rien ne me réussissait jusqu’au moment où j'eus l’idée de rendre à l'embryon l'eau qu’il avait perdu dans un long séjour dans un lieu sec, et de restituer en même temps à la coque par un excès d'humidité la souplesse nécessaire pour qu’elle pût ouvrir un passage à la larve. » Vers le milieu du mois de mai dernier, on retira deux gros de graine de vers à soie d’un flacon qui avait été déposé le 20 juillet 1830 dans la glacière de Neuilly. Cette graine qui était parfaitement conservée, a été mise dans une étuve chauffée à 14 degrés et élevée graduellement jusqu’à 24° de Réaumur. On augmenta aussi graduellement l'humidité et pendant huit jours que dura Péclo- sion, l’hygromètre de Saussure marqua depuis 80 jusqu'à 100°. Cela ne suffit Pourtant pas, et il fallut couvrir la boîte dans laquelle la graine était renfermée d'un linge plié en quatre qu'on arrosait. d’heure en heure. Par ce moyen, l’é- closion qui: d’abord avait paru languir, se développa avec un ensemble et une -imultanéité qu'offre rarement la graine d’une aunée abandonnée à elle-même. L'abbé de Sauvage, Rosier et d’autres agronomes plus modernes annoncent avoir réussi à élever des vers à soie par une temp rature de 30 degrés: M. Beau- vais a vu qu’à cette haute température, si l’on n’avait pas soin d’augmenter par des moyens artificiels, humidité de l'atmosphère, la chaleur sèche non-seulement - favorisait chez les vers le développement de maladies souvent mortelles, mais les faisait nécessairement souflrir de la faim si on se bornait à leur donner, suivant 118 _ Académie des Sciences. Fusage . quatre repas par jour; car les feuilles, par cette température, se des- sèchent si dl ha ape que les vers doivent jeuner vingt heures sur vingt- quatre. En chargeant d’ bumidité Yatmosphère, M. Beauvais a réussi à élever les vers par une température soutenue de 30 degrés ; mais il y a plus d'inconvéniens que d'avantages à pousser ainsi la chaleur, et il est préférable de se tenir à 22 ou 33 degrés. A cette température, dit l’auteur, j'ai fait, le mois dernier, une éducation en 21 jours. J'adresse à l'Académie quelques-uns des cocons qui en proviennent. Il n'en a fallu que 230 à la livre, et j'ai obtenu 180 livres de cocons pour 2,000 livres de feuilles non mondées. Ce succès est dû à un soin scrupuleux de main tenir l'air pur, et d’en assurer la libre circulation au moyen de procédés qu’a suggérés M. Darcet, en entretenant une humidité constante de go à 95 degrés de lhygromètre ; en donnant de fréquens repas aux vers, 48 le premier jour, 36 le second, 24 le troisième, et 12 pendant le zeste de léducation , c’est-à-dire pendant 18 jours, ce qui fait en tout 324 repas. Par cette méthode, le ver consomme moins de feuilles que lors- -qu’il est élevée dans une température de 18 à 20 degrés , et qu'il ne fait que 180 repas. M, Beauvais annonce en terminant que c’est a duus les écrits du Pre Du Halde qu’il a puisé l'idée de multiplier les pa get et d’en proportionner le nombre à l'élévation de la température. Recherches anatomiques et physiologiques sur la Muscardine, par M. dv DOUIN. (Ge mémoire paraîtra dans un de nos prochains cahiers.) Séance du 1e août 1836, : ‘Observations d’'Enadelphie abdominale où monstruosités par inclusion ; par le docteur Roux, du Var. L'auteur rend compte d’un cas de Kyste abdominal contenant des chéveus, des dents. et des fragmens d’os. _ Réflexions sur l Héiéradelphie, par M. Grorrrov-Sar-Hrrame. A l’occasion de la communication précédente, M. Geoffroy pers re= marques suivantes : « L'observation de M. Roux me paraît d’un haut intérêt, je la conçois d’un “puissant enseignement, riche de details aussi bien circonstanciés que concluans ; _ellé figurera un jour dans les fastes de la science à côté des travaux analogues de Dupuytren, exposant le cas d’inclusion qui fut dans le jeune garçon de Verneuil, celui-ci nommé Bissieu. | « On sait que les cas di inclusion abdominale ont été récemment recueillis lit- : térairement et bibliographiqüement dans une monographie divisée en deux mé- . moires, que M. le docteur Girardin a publiée dans les Ærchives de médecine. : Ce qui ressort de cet intéressant travail, c’est la diversité des faits en chaque ‘ _Acadéfnie des Sciences. 119 exemple , diversité qui ne se rattache à rien de commun, s'appliquant indifé- remment à l'âge, au sexe, et à toute nature d'organes ; différant dans la durée, l'intensité et le mode de terminaison des évènemens. Or, comme tous ces cas té- ratologiques formaient autant de désordres d'organisation, sans liaison comme sans réciproques relations, j'ai pensé un moment à y rapporter l'évènement de -Syra, quand il fut bruit dans cette île de la Grèce, d’un jeune garçon-mère qui, sous ce titre ridicule , était encore réputé avoir vomi un cxyon humain. J’a- vais accepté la mission, etje m'étais effectivement etçupe à déméler ce que ren- .fermait de mystique, le récit d’un tel vomissement. Je n’ai trouvé au fond de ces recherches, qu’une indigne déception ; mais les efforts de combinaison et d’ima- gination dans lesqnels j’ai été entraîné, m’ont amené sur un point de théorie où ‘j'aïété aussi surpris qu’heureux de rencontrer une cause principale, et par suite une explication très simple à tous les évènemens si variés d’inclusion abdomi- male. M. Lesauvage, de Caen, a proposé pour cette classe de faits le mot énadel- phie, adopté et employé par M. Roux : la racine de ce mot est empruntée à ma nomenclature. « Je ne puis aujourd’hui consacrer à ma nouvelle théorie que les quelque courtes réflexions suivantes. Des recherches approfondies sur la cause des for- mations organiques, qui produit la confusion et la pénétration de deux?germes congéniaux, ont occupé la sagacité de Pockels (Isis, décembre 1825). Sans re- monter aussi haut dans la considération de ces premières relations tératologiques, je me smis fixé à-peu-près dans le même temps, en 1825, aux faits clairs et. pa tens de la jonction de deux frères jumeaux , étant non pas seulement de gran- deur et de formes diverses, mais d’inégal développement ; j'ai donné à cette ‘conformation spéciale, chez les monstres doubles, le nom d’Aétéradelphes. « Je me suis jusque-là borné à ne traiter que du seul cas d’Aétéradelphie qu'avait aperçu mon esprit, et pour lequel j'avais recueilli bon nombre d’obser- yalons ; car la monstruosité hétéradelphique, dans son état simple, est assez fré- quente, se reproduisant constamment sous la convenance d’un même principe d’arrangement. Il faut pour la compléter la réunion et soudure de deux jumeaux, lun grand et vivace, appelé à passer par tous les degrés du dé veloppement nor ‘mal, et l'autre petit, informe, acéphale, vivant et végétant en parasite sur le corps .de son grand frère, étant l’un et l'autre suspendus ventre à ventre. « D'anciens auteurs, Aldrovande, Ambroise Paré, Licétus, etc., ont figuré de : “ces hétéradelphes dans l'espèce humaine, ainsi que beaucoup d’autres dans les animaux domestiques. Le nombre s’en est accru dans ces derniers temps, par le motif seulement qu’on y donne aujourd’hui plus d'attention; et l’un des volumes “des Mémoires du Muséum d'Histoire naturelle , le xv°, à la date de 1827, _coutient à lui seul les publications sur ce sujet des’ quatre anteurs ci-après : .Busseuil, qui a décrit lhétéradelphe de Chine; Orye, l’hétéradelphe de Bénais ; Geoffroy-Saint-Hilaire, qui dans ce volume, est revenu sur ses premiers travaux - de classification; et Serres, qui y est.aussi venu éclairer la complication.et la 120 Æcademie des Sciences. semi-confusion des conditions hétéradelphiques, dans son important travail sur l'Organisation anatomique des Monstres héléradelphes. & Dans cette création de double monstre, ou da genre hétéradelphe , chacun des frères le composant parcourt sa ligne de développement sans obstacle ni trouble de Ja part des causes et actions extérieures, le grand frère pour s’y con- duire comme ua être complet et bien doté de tous ses organes, et Le petit frère pour y subir une vie d’acéphale et de parasite, une vied’empruat, par lalimen- tation que versent en lui, comme on pourrait le coneevoir pour l'entretien d’un membre de plus, les masses sanguines d’un grand frère. Comme cet embryon acéphale est une fois donné par l'acte congenial des deux germes primitivement engages et l’un sur l'autre soudés, cet évènement de monstruosité persiste pour n’éprouver de variation que celle de l'accroissement proportionnel des parties respectives. « Jusque-là, me renfermant dans les soins de l'observation et dela constata- tion des faits, je n'avais cu qu'à pourvoir aux conséquences de mes règles de classification pour arriver à l'essence du gènre hétéradelphe, et je ne voyais qu'an cas possible ou du moins qu’un cas donne, celui où l’embryou acéphale était placé ventre à ventre à l'égard de son grand frère ; et pour m’exprimer sur la circonstance de cette position, qu’à constater le cas où l’acéphale était extra- abdominal, « Or je fus occupé, en avril dernier, de recherches touchant le prétendu vo- missement de l’enfant-mère de Syra; c’est alors que lancé dans une revue des faits de sujets-inclus, je me suis aperçu de la non-coïncidence de tous ces faits d’inclusion abdominale, qui depuis trois à quatre siècles étaient inscrits dans les fastes de la science anatomique. H fallait à ces faits pour point de départ ou pour ces données de formation congéniale, un principe commun , et l’idée m’est venue que la contre-position des deux frères dissemblables dans la monstruosité hété- radelphique, viendrait peut-être présenter cette origine commune à tant de cas variés qui sont exposés dans les monographies de M. le D' Girardin. « Et, en effet, d’où provient le petit acéphale dans le cas de l’hétéradelphie, que je viens déjà de distinguer et de signaler sous le nom d’exéra-abdominal ? De l'emploi, je crois, des vaisseaux’ céphaliens, de leur jonction et soudure au moment de la fusion des deux germes. Cet évènement, que ce n’est pas aujour- d’hui le lieu de développer, a donné ces précieux résultats, les seuls jusqu'ici aperçus, ceux de Fhétéradelphie extra-abdominale. Le petit acéphale, que les vaisseaux céphaliens laissent sans l'œuvre accomplie d’une tête, étant plus loin dégagés de leur réunion insolite avec les vaisseaux analogues chez le grand frère, poursuivent, dégagés qu'ils sont dans le petit frère leur cours d’action pour la {ormation du tronc à la suite de la tête, quand le reste du sujet, moins la tête, est produit, toutefois incomplètement et dans l’effet d’atrophie. « Il y a possibilité d'exposer avec simplicité et clarté cette marche dans ces développemens organiques. Ce qu'il me suffit d'indiquer aujourd’hui, c’est que ce travail se passe à l’eflleurement du tronc du grand sujet, et en partie au sein de ses propres tégumens. Ceux-ci, à un point donné, sont percés et donnent exté- rieurement, le long du ventre, le corps et les dépendances du petit frère, moins sa tête. < « Maintenant il peut aussi bien arriver que ce même travail se passe entière- ment en dedans des tégumens du grand frère et que cette œuvre verse ses ré- sultats tout au travers du système organique de celui-ci; alors nous aurions un second cas d’hétéradelphie, celui qu'il Latin nommer alors par opposition au premier, l’hétéradelphie intra-abdominale. « Ces idées théoriques ainsi conçues , j'ai passé en revu tous les faits difié- Académie des Sciences. 121 \ remment circonstanciés des monographies des cas d’inclusion (1) et je me suis convaincu que ce principe, d'une telle et commune origine, allait à tous les . faits de ces monographies, mais sous la réserve des explications partielles à four- air pour chacun. « Ce qui reste persistant, comme on l’a vu plus haut, dans l’hétéradelphie extra-abdominale, n'est plus le fait de l’autre mode d’hétéradelphie. Les commen - cemens du développement congénial sont favorables à l’inégale condition ou na- ture des deux frères, pour donner en dedans comme au dehors de l'abdomen, des fruits analogues; et tout au contraire, ceci cesse d’être possible à un moment donné du volume du plus petit de ces frères. Tant que celui-ci restera adhe- rent par des vaisseaux prolongés de l'un à l’autre germe, qui le feront tenir à la masse la plus volumineuse, rien n’est dans le cas de changer dans les rapports de primitive formation. Mais que le cas arrive qu'un volume d’un plus grand relief soit acquis au petit frère végétant dans sa vie de parasite, son existence d’emprant n’est plus tenable; une carrière toute nouvelle doit commencer et li- vrer aux changemens les plus désordonnés , cet être sans ressort propre. L’acti- vité des mouvemens et travaux d’intestin, l'énergie de ces organes partiels, leur toute-puissance à l’encontre d’un corps bien frèle (car celui-ci ne peut guère op- poser à de tels ravages que la résistance d’une attache pédiculaire), agissent si- multanément : et alors que de causes incessantes, pour amener la séparation du petit frère, du point où il avait jusque-là été greffe. C’est de principe que, plus jeune est un tel sujet, et plus assurée sera sa disjonction, quand il n’existe encore que d’aussi frèles membranes à dilacerer. « Dans ce cas, le petit frère tombe, détaché de l'abdomen du grand frère; ses rapports comme ancien parasite de ce grand frère cessent; et sans relations commuues et vitales, l’mdividu acéphale meurt ; il devient une masse insensible, inerte. Dès ce moment une lutte s’établit entre le vif et le mort. Celui-ci, conti- nuellement batiu par les forces actives , par les atteintes du jeu peristaltique des intestins, finit par céder. « Ce sujet mort échappera-t-il en totalité ou en partie, du champ abdominal ? Peut-être. Et à l'appui de cette supposition, il me suffit de citer cette célèbre observation de 1750, du docteur allemand Schurigt, cas aussi singulier qu’heu- reux dans son résultat , où une trouée intervint dans le flanc à la suite d’un grave et large abcès, et devint une issue d’où des débris inclus furent versés au- dehors. « Le plus ordinairement , il arrive que la masse détachée reste errante dans le bassin abdominal , jusqu'à ce qu’étant résorbée, quant à toutes les parties qui en sont susceptibles, 1l n’y restera plus que les substances les | réfractaires , lesquelles demeurent rompues et disjointes, comme le sont des cheveux, des dents, quelquefois le rocher crânien ; celui-ci pour la raison qu’il subit de bonne heure uve consolidation éburnée. Or, ces débris sont vaguans, ou ils trouvent à .s'enkyster scparcment, conservant une tendance, s’ils restent libres, à se rendre au point extrême et terminal de l’un des systèmes organiques. - « Jene puis placer ici que les idées-mères de ma théorie; car à l’occasion de chaque débris, çe devient pour celui-ci, en raison de sa forme et du lieu où il se fixe, un sujet d’examen à part et d’une explication distincte. Il me suffit aujour- d'huj, de faire comprendre qu'un principe général préside comme point de dé. (x) Je renvoie pour plus de détails mieux étudiés et pour les recensemens de tous les faits _consacrés (dents et cheveux inclus), à l'ouvrage sur la Terntologie, dé mon fils, Isidore Geof- froy-Saint-Hilaire, t 11 ; chap. x 122 Académie des Sciences. part à tous les acccidens d’inclusion, accidens incompris jusqu’à ce jour, et ce- pendant dont les fastes de la science sont remplis. | € M. Roux, médecin du Var, fut de bonne heure l’un de mes correspondans les plus dévoués sur les faits tératologiques ; c’est de lui que je tiens l’une-.de mes -espéces du genre anencéphale, « L'observation qu’il est venu nous lire en ce jour me paraît encore le fait le plus concluant pour la théorie que je viens d'indiquer si brièvement. & Madame D**#, épouse de l’un de ses confrères, aura conservé toute sa vie, durant 52 ans, son petit frère héléradelphique ; cette existence tératologique , qui lui à ainsi constitué une condition d’Aétéradelphie! intra-abdominale. ‘Or, ceci n’a pourtant point empêché que cette dame ne devint mère de quatre enfans, dont. on en cite qui vivent présentement; circonstance due probablement à la position de petit frère refoulé haut. et près de l'axe ver- tcbrel. F (EE EF € Quoi qu'il en soit, voilà où m’a conduit mon infructueuse recherche tou- -hant le prétendu vomissement qui fit tant de bruit en Grèce et plus tard en Europe. On m'avait ménagé, dans cet envoi, la tromperie d’une très indigne dé- : che ir ii ucès; — Sur les Aranéides. 173 terminales et divisées en deux lobes soutenu chacun par une griffe, sont d’autres fois prolongées en une double rangée sur toute la face inférieure des deux derniers articles du tarse aux- quels elles donnent l’aspect du velours. Le premier cas est celui du genre Saltique, Sélénope ; le se- cond celui des genres Philodrome, Micrommate, Dysdère, Cy- cose, Drasse, Clubione, Mygale; la Mygale aviculaire, est surtout remarquable sous ce rapport; la Mygale de Leblond et la Ma- çonne sont beaucoup plus faiblement partagées, et n’ont point les pattes élargies en apparence comme la première. Chez les Drasses et quelques autres, les houppes n'existent qu'aux qua- tre pattes de devant. Ce qu’il y a de plus important à remarquer dans la compo- sition de ces houppes, et ce qui ne l'avait pas été encore jus- qu'ici, c'est la nature des poils qui les composent; vus au mi- croscope, ils sont façonnés en massue ou en spatule, élargis, aplatis vers le bout, mous dans cet endroit et pouvant s’appli- quer\et adhérer comme une lanière de cuir sur les corps à sur- face glissante ; leur innombrable quantité supplée au peu de force d'adhésion de chacun pris en particulier. | Le rapprochement de ces soies lamelleuses emprisonne des minces lamelles d'air qui leur donnent chez les grandes My ga- les, un aspect irisé dès qu'on les plonge dans l’eau. Cette cir- constance explique comment les espèces si bien conformées pour gravir les surfaces les plus polies, peuvent aussi se soutenir et courir à la superficie des eaux quand elles y tombent acciden- tellement ou quand elles y chassent habituellement le gibier qui leur sert de nourriture (Lycoses corsaires). Les poils ordi- . naires, en retenant aussi l'air atmosphérique autour du corps, permettent à une espèce plus décidément aquatique encore (Argyronète), de vivre et de respirer au fond de l'eau. Selon certains voyageurs, il en serait de même d’une espèce encore différente, d’une énorme araignée de la Nouvelle-Hollande, sur laquelle on n’a pas jusqu'ici de notions zoologiques suffisantes. Nous avons dit un mot des poils simples, ce sont des cônes très allongés, à base renflée, subglobuleuse, logée dans un trou de l'épiderme, quelquefois soudée, quelquefois mobile, mais rece- #74 pucès, = Sur les Aranéides. vant sa nourriture de la partie pulpeuse de la peau: Les plus fins; les plus poiritus sont quelquefois assez rigides pour entrer dans la peau des doigts et y causer des démangeaisons comme ceux de certaines chenilles; je n'ai toutefois jamais éprouvé cet effet que de la part de là Mygale avicülaire conservée dans l’al- cool. Il est d’autres formes de poils qui peuvent se trouver mé- langés avec les poils $imples. Un bon nombré d'araignées, et notamment l’Æranea doméstica ont des poils plumieux qui re- présentent le duvet des mammifères et des oiseaux; une tige raide sert de point d'implantation à des villosités latérales. Ges villosités se changent quelquefois én lamelles, et le poil ressemz ble à une feuille pinnée; d’autres fois le poil est entièrement lamelleux et réprésente une écaille toute comparable à celle des insectes lépidoptères. Ces poils écailleux sont colorés, ét c’est à eux que sont dues surtout les vives nuarices des Erèses, dés Sal- tiques, des Oxyopes, des Philodromes; aussi leurs diverses for- mes nous ont-elles paru pouvoir servir à des déterminations de genré et d'espèce; nous les avons soigneusement exprimées dans les planches déstinées à accompagner la nouvelle édition du Règne animal de Cuvier. Nous terminerons cé qui tient à ce sujet par une réflexion qui me sera pas sans prix pour les amateurs de collections : c'est que toutes les Aranéides dont les couleurs sont dues au pigment sous-épiderrhique; ét dont la peau est presque glabre; les per- dent tout-à-fait par la dessiccation, et la conservent eh partie du moins, par l'immersion dans l'alcool ; tandis que ce liquide ternit immédiatement les couleurs dués à la présence d’un ve: lüuté formé de poils écailleux; la dessiccation déforme alors, il est vrai; l'abdomen; mais conserve parfaitement les teintes non sont revêtues toutes les partiés du corps. Arricre HIT. Des organes sensoriaux. Tréviranus a très bien reconnu et passablement figuré les trois ganglions principaux qui constituent le système nerveux D à - - did DUGÈS: — Sur les Aranéides: a75 central des aräignées ; le premier ou cérébral donne les nerfs mandibulairés et les optiques, un pour chaque œil; et de plus en arrière, les nerfs récurrens ; analogues du grand sympathis que des animaux supéfieurs et sur lesquels on vient de publier, dans les Annales; un mémoire fort intéressant de Brandt. Ayant pu récemment disséquer une Mygale aviculaire conservée dans l'alcool, je puis, jusqu’à un certain point, süppléer à ce qui mian- que à son travail relativement aux Aranéides. De la partie pose térieure et latérale du cerveau part, de chaqué côté; uti plexus ou ganglion réticulé, plat et mince; qui se divise bientôt eri nombreux filets lésquels se jettent sur l'estomac: Cette dispos sition rappelle fort bien celle des plexus solaires de l’homme: J'ai cru voir aussi un filament impair fort grèle se porter sur la ligne médiane de l'estomac; mais il paraissait partir d’une origine. commune et membraniforme avec celle des deux plexus latéraux et ne faisant point système à part: L'oœsophage passe entre le premier et le deuxième ganglions que réunit un épais et court collier. Le deuxième renflement; très considérable, éfoilé, appuyé sut le plastron du céphalodère, donne des nerfs aux palpes et aux pattes: Il se prolonge en deux cordons postérieurs qui pénètrent dans le pédicule du thoraco-gastre, et y forment un troisième renflement beaucoup moindre que les déux autres et duquel émanent tous les nerfs viscéraux et ceux des filières remarquables par leur volume: (+) Les yeux dés araignées méritent assurément l'attention que Jeur ont accordée les zoologistes, et les rapports constans qu'ils ont; pour la disposition; la grandeur et le nombre; avec lacont formation générale et les habitudes de chaque genre et de cha- que espèce prouvent assez tout le parti qu'on pourraititirér, en physiologie, d’une étude comparative et approfondie de cét wbjet. Contehtons-nous de quelques remarques généralès. La composition des Stemmates chez les Arachnides est bien con- nüe depuis les travaux de J. Müller ; Lyonnhet connaissait déjà leur cristallin que nous avons aussi trouvé avec la plus grande _ facilité. On sait que les yeux, le plus souvent aûù nombre de (i) Voÿ. la nouvelle édition du Règue animal de Cuvier, Arachnides, pl: 2; fig, 8. 176 puGÈs, = Sur les Aranéides. huit, jamais en moindre nombre que six, sont diversement y cés sur le devant de la tête. Il nous a paru que l’analogie n’é tait pas bien difficile à établir entre eux et ceux des insectes ; car on en trouve généralement quatre plus médians que les au- tres; placés le plus souvent, pour ne pas dire toujours, en carré ou en trapèze, ne sont-ils pas analogues aux ocelles des diptères orthoptères, hémiptères et hyménoptères, avec cette seule diffé- rence que le postérieur ou supérieur est dédoublé? Quantaux deux paires d'ocelles latéraux souvent rapprochés l’un contre l’autre, leur groupe représente l'œil composé de la majorité des insec- tes. La direction la plus ordinaire de ces différens Stemmates vient à l'appui de ces analogies; car indépendamment de leur inclinaison générale en dehors, les plus voisins de la ligne mé- diane, ceux qui rappellent le plus les yeux simples des insectes, regardent les antérieurs en avant, les postérieurs en haut. Quant aux latéraux , les antérieurs regardent en bas, les posté- rieurs en arrière. Déjà Lyonnet avait noté ces diversités de di- rection dans l'araignée domestique ; la généralisation que nous en donnons ici souffre plutôt des modifications que des exCep= tions. En ce qui concerne le rapprochement des ocelles, voici ce que nous avons observé de plus positif : 1° les Aranéides qui vivent dans des tubes ou des retraites obscures, soit sous terre, soit dans les trous de mur, les fentes de rocher , et n’en sortent que quand une proie passe à leur portée , ont les yeux groupés en masse plus ou moins serrée sur le milieu du front : telles - sont les Mygales, l'Atype , la Filistate, les Clothos, la Ségestrie, les Dysdères; 2° celles qui habitent des tubes courts et termi- nés par une large toile exposée en plein air, ou bien des cel- lules ‘exposées au grand jour , ont les yeux écartés, étalés sur le devant de la tête comme les Aranea, les Micrommates, les Clubiones aériennes ; ils sont plus serrés chez les Drasses et même chez les Clubiones terrestres; 3° celles qui se tiennent au milieu d’une toile libre ou qui la parcourent souvent, ont les yeux portés sur des tubercules plus ou moins saillans et qui permettent dans leurs axes une plus grande divergence : tels sont les Epéires, les Théridions. Ceci est bien plus prononcé encore chez les Thomises, qui se tiennent en embuscade sur les vucis. — Sur les Aranéides. 197 fleurs ; l’ocelle latéro-postérieur du Thonfse citron est telle- mént dirigé en arrière, qu'on n’aperçoit, par-devant, que son, support; 4° enfin la plupart des Aranéides errantes, les Sale: tiques, Erèses, Lycoses , ont les yeux bien plus étalés encore ; » les latéraux sont tout-à-fait rejetés derrière les tempes, sur les | bords du corselet. Pour ce qui est de la différence de grosseur » des uns et des autres, du volume des antérieurs chez les Sal- | _: “sslté tiques et des latéraux chez les Lycoses, nul doute qu'on'en trouve l'explication dans la différence de leurs habitudes; les Saltiques chassant à découvert sur les murailles et les buissons, les Lycoses chassant terre à terre et dans l’intrication des basses, herbes. Du reste, nous ne doutons pas non plus qu’on ne trouvât: d’autres rapports tout aussi intéressans entre la disposition des yeux et Les proportions des autres parties du corps, car tout est: harmonie dans les corps vivans ; mais nous laisserons à d’autres. ces recherches de détail, et nous finirons par une simple men- tion de la différence des yeux décidément diurnes et décidé- ment nocturnes en ce qui concerne la coloration; les premiers . ont pour type ceux des Saltiques, ornés souvent d’un iris véri- table vert, rouge ou brun, et un fond toujours noir; les der-. niers sont au contraire dépourvus de pigment € Mygale ma- çonne, Tarentule , etc.) d’où leur aspect brillant, resplendis- sant comme ceux des chats, pourvu que la lumière y arrive de manière où d'autre, mais non, comme on l'a prétendu, dans une complète obscurité. ARTiCLe IV, D. | Des organes digestifs. Je ne m’appesantirai pas sur la description des mandibules ; dont nous aurons encore à nous occuper par la suite, ni sur celle des maxilles, ces hanches des membres destinés à la man- « ducation, et dont les autres articles forment le palpe ; et, quant . à la lèvre (lèvre ou langue sternale de Savigny, languette de La- treille) , je ferai remarquer seulement qu’elle est tantôt mobile VI, Z001, — Septembre, de 178 DUGÈS. « Sur les _Æranéides. sur le plastron comîne dans la majeure partie des Aranéides, et tantôt soudée, immobile, comme dans les Mygalées et les Scy- thodées. Quant aux parties cachées de la bouche, il est, certes, bien difficile de s’en faire une idée d’après les descriptions des autèurs, qui n'en ont pas d’ailleurs connu toutes les parties. Essayons de nous faire mieux comprendre. Entre les mandi- bules et la lèvre , d'avant en arrière, entre les deux mâchoires, d’un côté à l'autre, est un enfoncement qu'on a souvent consi- déré à tort comme la cavité de la bouche. Le fond de cette ca- ” vité, ou plutôt de cet interstice ; est garni d’une plaque cornée que je considère comme le labre, et qui n'est pour Latreille qu'une partie de ce qu’il nomme cämérostome. Cette plaque .carénée, velue, s’élargit et s’'avance davantage vers l'extérieur en se rapprochant de la lèvre, contre laquelie elle appuie son bord postérieur; la saillie formée par leur ensemble a été, avec quelque raison, nommée museau par M. Strauss ; en effet, entre le labre et la lèvre est une fente transversale ou demi circulaire, véritable et seule ouverture de la cavité orale, Cette cavité, qui est la vraie bouche, est fort petite et évidemment impropre à recevoir autre chose que les sucs des insectes percés, écrasés par les mandibules et malaxés entre les mâchoires : elle est for- mée de deux parois cornéo-membraneuses ‘assez larges, mais appliquées l’une contre l’autre et semboitant l’une dans l’autre, car la postérieure ést concave et l’antérieure convexe; leur mi lieu offre un sillon longitudinal qui peut faciliter le passage des fluides et que soutient une crête cornée plus épaisse que le reste ; leur contour est parabolique. L’antérieure de ces parois, ou plutôt la pièce cornée qui la forme, peut se nommer le pa- lais, et nous paraît comparable à l'épipharynx ou voile du pa- lais des Hyménoptères ; elle se réunit à angle droit avec le labre, et Latreille l’a considérée seulement comme une deuxième par- tie de son camérostome; la postérieure, non moins distincte de la lèvre à laquelle elle s'attache comme l'autérieure ou labre, me paraît représenter la languette des insectes, mais renversée en arrière et devenue ainsi parallèle à la lèvre qui représente le menton. Le palais et la langue, intérieurement cachés et envi- ronnés par les chairs dans l’état habituel , se retrouvent à uu DE DUGÈS. — Sur des Arandides: 179 dans la dépouille résultant de chaque mue. Appliquées l'une contre, l’autre, ces deux plaques sembleraient alors n’en faire, qu’une; assez semblable à une truelle dont l’œsophage forme: rait le manche; aussi Lyonnet n’en représente-t41l qu'une seule, Tréviranus les a connues toutes deux, mais sans concevoir leurs vrais rapports et leurs usages, le palais, c'est pour lui une lèvre intérieure, et la langue un hyoïde. L'œsophage est fort étroit , de substance cornée en dessus, où il est formé de deux pièces latérales, membraneux en des- Sous. Lyonnet, qui l'a bien connu, a eu le tort seulement de le représenter courbé en haut et en arrière, c’est tout l'opposé, Ce célèbre investigateur a de même fort bien aperçu une pièce cornée, oblongue, carénée en dessous, que j'avais crue d’abord incorporée dans la paroi supérieure de l'estomac, mais qui ap- partient réellement à l'inférieure, comme me l'ont prouvé des dissections plus attentives. Cette pièce est attachée au bout pos- térieur. de l’œsophage, comme le sont au bout antérieur les pièces orales dont ila été précédemment question, et l’on pourra observer cet assemblage en examinant avec: un peu de soin la carcasse épidermique de laraignée domestique qu’on trouve si aisément autour de ses toiles. L'estomac, qui ‘occupe le centre et à-peu-près toute la Langéut du corselet, m'a paru remarquable surtout par les prolonge- mens coœçaux qu'il envoie dans chaque patte jusqu’à l'origine de la cuisse , et même dans les palpes, ce qui fait cinq expansions de chaque côté; de plus, il jette en haut un autre cœcum ren- flé , et en arrière un tube qui traverse le pédicule du corps et arrive dans le thoraco-gastre. Là, ce canal intestinal , diverse- . ment élargi et contourné, va enfin se terminer dans une poche rectale qui se continue, en se rétrécissant, jusqu’à l'anus. | Dans la première partie de son trajet, l'intestin reçoit de grosses branches qui, ramifiées à l'extrême, gauche, se termi- nent par des vésicules pulpeuses : ce sont les canaux hépatiques et les granuiations du foie. Le ventre volumineuxdes araignées est principalement rempli par ce foie granuleux qui en forme la masse, et que l'écrasement réduit si facilement en une boue roussâtre ; visqueuse et dégoütante, C’est indubitablement Ja LE 180 DUGÈS, — Sur les Aranéides. l'organe sécréteur de la bile, et pourtant certains faits porte- raient à le regarder comme pouvant aussi jouer le rôle d’esto- mac secondaire, de réservoir aux sucs alibiles, de même, au reste , que chez les poissons on trouve souvent, dans les cœ- cums pancréatiques, des matières alimentaires. Donnez à une araignée, à jeun depuis long-temps, une proie volumineuse , et bientôt son ventre se renflera considérablement, et certes, ce n'est pas la réplétion du canal intestinal seul qui peut produire de pareils effets. L'Erèse Petagna Aud. Sav. (Er. impérial, Duf.; Er. noir, Lät.; Er. frontal, Walck.), à qui je livrai un gros Géo- trupe, y resta trois jours attaché; son ventre avait alors plus que triplé dans toutes ses dimensions, et il fallut plusieurs se- maines de jeüne pour le réduire à son premier état. Ceci prou- verait que la digestion se fait bien lentement dans les vésicules hépatiques, et que ce sont plutôt des réservoirs que des organes d’assimilation. Au reste, ii y a toujours un rpoielestiuine cu- rieux à faire entre cette disposition et celle de l'intestin rameux de divers invertébrés, vivant d’humeurs sucées sur d’autres ani- maux, comme les Ixodes, les Sangsues, les Clepsines et Piseico- les surtout et plus encore les Planaires et les Fascioles. On sait aussi que les divisions cœcales de l’estomac pénétrent dans les pattes de certains acariens et des nymphons, que celui des fau- cheurs est dirisé en poches nombreuses, etc. Il me reste à parler des canaux urinaires. Tel est du moins le nom que l’on peut donner à deux canaux assez grèles, blan- châtres, nés de la poche rectale et perdus en contours, puis en ramifications d’une excessive ténuité, entre les lobules du foie. Sans doute ce sont eux qui sécrètent, comme chez les oiseaux, la partie blanche et liquide des excrémens, dans laquelle nagent de petits grains noirs très probablement fournis par l'intestin, comme dernier résidu de la digestion. J'ai trouvé quelquefois, dans le corps de la Mygale maçonne, autour du rectum, des calculs blancs, ovoïdes, gros comme des grains de moutarde, probablement de nature urinaire, comme ceux que le profes- seur Audouin a trouvés récemment dans les vaisseaux urinaires du Lucane cerf-volant (1), mais je n’en ai pas bien constaté le (x) Voy, Annales, t, Ÿ, p. 129. _DUGÈS. — Sur les Aranéides. 181 siège anatomique vu la facilité avec laquelle ils en sortaient, sans doute par déchirure de quelque membranule très fine, car on ne peut guère supposer qu'ils fussent libres et pour ainsi dire flottans dans la cavité abdominale. ARTICLE V, Des organes circulatoires et respiratoires. On connaît cet organe fusiforme et contractile, dont on aperçoit et la teinte obscure en raison de sa demi-transparence, et les mouvemens, même à travers la peau du dos chez l'animal vivant; on en voit même aussi partir des prolongemens vascu- liformes qui s’enfoncent, surtout en arrière, entre les lobes du foie. Ces apparences ne sont point trompeuses : le cœur occupe effectivement la partie antérieure et supérieure du Thoraco- gastre; recourbé comme la surface gibbeuse de cette région, il envoie, dans le céphalodère , un prolongement tubuleux à pa- rois fort minces, et qui m'a paru s’y renfler de nouveau. Les pa- rois du cœur lui-même sont, au contraire, assez épaisses, et for- mées essentiellementde fibres charnues transversales; il en a aussi de longitudinales sur le milieu de sa face supérieure. Quant aux vaisseaux qui en partent, j'en ai constaté la nature plus équi- voque, à un examen rigoureux qu'on nue le croirait à la pre- mière vue : je l'ai constatée en les coupant près de leur embou- chure sur des sujets durcis par l'alcool ; ils conservent alors leur calibre, tandis qu'ils s’affaissent complètement lors de la dissec- - tion sur un animal frais. Jai essayé d'injecter ceux qui se ren- dent aux poumons et j'y ai quelquefois réussi avec une disso- lution de carmin poussée d’arrière en avant dans le cœur à l'aide d’une pipette terminée par un bec capillaire. Les pou- mons se sont colorés en rose, et à la base de leurs lamelles j'ai vu des troncs et des branches vasculaires. Bien plus souvent, je dois le dire, des épanchemens ont eu lieu colorant uniformé- ment le tout; mais je ne pouvais me méprendre à cette teinture universelle. Au reste, je pense qu'il ne part du cœur que des 182 | DUGËS. = Sur les Æranéidés. artères , et point de veines si ce n’est peut-être pour les pou- mons, auxquels la deuxième paire dé vaisseaux m'a paru appar: tenir comme la première. Mais comment le sang revientäil äu cœur des autres parties du corps? J'ai bien vu dans intérieur de cet organe, des replis valvulaires, mais non les fentes latérales que M.Strauss a décrites et que MM. Carus, Wagner et autres ana- tomistes, au nombre desquels je méplace,ontreconnu dans di- vers insectes. L'absence des veines me paraît prouvée par la manière dont On voit, au microscope, marcher les globules san- guins dans les pattes des jeunes araignées et de quelques adul- tes à peau translucide (pholque, etc.). Ces globules, rares, arron- dis, incolores, assez égaux entre eux, et à-peu-près compara- bles à ceux du sang humain pour le volüme, suivent un chemin étroit, invariable, et marchent avec une grande rapidité de l’o- rigine à l'extrémité du membre, ét reviennent au contraire pe un trajet moins régulier et avec assez de lenteur, se glissant, à ce qu'il semble, dans les interstices des musclés, là où ils trou: vent momentanément plus de liberté. Je n'ai rien à dire de nouveau sur la structure feuilletée des poumons ou branchies aériennes : leur opercule est formé d’une peau plus dense, souvent cornée et colorée différemmént des parties voisines, mais non pércillée, comme l’a cru Lyonnet. Je ne dirai rien de plus sur le large stigmate en forme de bou- tonnière, qui sért à porter Pair dans la poche pulmonaire, et près duquel est fixée la lame de corne qui supporte lés feuillets, ni sur l’excessive ténuité de ceux-ci, qui va jusqu’à iriser la Tue ière même sous le microscope. On sait toute l'importance que Latreille, s'afipuyant, en grande partie, sur les remarques de M. Léon Dufour, a donnée aux organes respiratoïres, dans la classification des Arachnides ; san$ doute ils méritent l'attention du zoologiste; mais peuvent-ils servir à caractériser de grandes section? D'abord leur situation intérieure les rend peu proprès à fournir des caractères zoologiques ; et ensuite il est certain que leurs différences ne sont pas toujours proportionnélles à celles de l'ensemble des autres parties du corps. Peut-on rationnelle- ment éloigner les Cheliféres des Scorpions, parce que les pre- miers ont des trachées et les seconds des poumons branchifor- nion temporaire (1),et i il n est | pas rare de rencontrer (un gros pe. loton de ces petits animaux qui, daus un repos complet, atten- | _ dent le moment de quitter à-la-fois et leur premier-vêtement et leur berceau commun; vient-on à leur imprimer quelque se- cousse,, le groupe s'élargit, s’éclairdit , la petite famille-se, dis- perse, et c’est quelquefois pour'se, rassembler bientôt;de non. veau, d'autres fois les voilà disséminés pour toujours, Les habi- tudes des Lycoses ou Tarentules se rapprochent de celles. des : Dolomèdes , autant que les genres|s’avoisinent én réalité. Ici, ce n’est plus à la bouche, c’est aux filières qué le cocon ést Atta- ché; la Lycose le traîne ainsi partout avec elle, marchant avec célérité, malgré la gène, que doit lui causer ce paquet. globu- | leux ou discoïde souvent plus gros qu’elle-même après,la réduc- tion,que la ponte a amenée dans ses dimensions: Toutefois, ici encore nous rencontrons des anomalies singulières : : j'ai trouvé : . quelquefois la Lycose narbonnaise, ‘parvenue à peine à la moitié de. son plus haut accroissement, mais pourtant prête à pondeg, dans une, céllule comparable à.celle des Clubiones , et j'ai dé- couvert, dans une chambre telle que celle du Micrommate ‘éme- | raude, une autre Lycose bien caractérisée telle, quoique rés- semblant assez.aux Dolomèdes par la disposition de ses yeux; là, elle avait crar ses, œufs en un paquet collé aux sert de. | la jus: à oc | Au reste, ces pesites| irrégularités. ne détruisent point les rè- gles. générales ; elles nous. font voir seulement que dans les phé- . nomènes. di instinct, tout n’est pas avengle- et machinal comme on l’imagine généralement, qu'il s’y. mêle toujours, dés: phéno-, mènes de véritable intelligénce, comme nous. en! avons déjà cité, | chemin faisant, quelques preuves; qieces animaux savent s'ac- commoder aux circonstances et y, ployer les impulsions mté- . rieures qui les déterminent à leurs'actes instinctifs. N’allons pas non plus tomber daus l'excès. contraire, et croire que.chez eux, tout est intelligence et prévoyance raisonnée; rien de plus fa (1) Les jeunes Epéires fasciéés subissent leur première mue dans le coton maternel, au m- -Vieu de la bourre qui sépare l’enveloppe extérieure de la cuvette intérieure où elles’ ne Taissént ! . que les coques de leurs œufs. 73. 196 DUGÈS. — Sur Les Aranéides. cile que de prouver le contraire. Certes, c'est une impulsion touté machinale ; tout ‘organique, qui pousse la Lycose ou le Dolomède à saisir et porter’un sac dont elle ne connäît le con: tenu que par souvenir, mais dont elle ne peut connaître, lors d’un premier enfantement , la destination future. 11 y à si bien là instinctiaveugle, qu'on peut le tromper assez grossièrement : ! une boule dé coton sera, le plus ‘souvent, adoptée et protégée” avec autant de soin qu’ un cocon véritable par la femelle à la quelleôn aura enlevé le sien. Il°est vrai que sito lui’ offre lé! choix, elle reconnaîtra le plus souvent son érreür, et ne sy laisserä pas toujours prendre’une deuxième fois. Il n'y a donc là qu un sentiment inné et aussi péti raisonné que celui qui, au moment de la naïssancé! détermine les petits, dans les es pèces de ce même genre, ‘à/montér sur lé dos de leur mère, sen- timent /qui toutefois se rapproche beaucoup de celui qui pré= side aux rassembleméns témpôrairés dont il 4’été question plus! hat. On sait; en effet} que/les Lycoses ressemblent, sous ce rapport, aux Oppossurns , aux Pipas, et, plus directement, aux Scorpions : ellés savent'ainsi alliér leur vié'errante avec le soin de leur progéniture:D’autrés espèces non moins vagabondes ha: bituéllement, deviennent ; à cet effet , momentänément sédéer- taires. Le Salé Frich (Aud:Sav.) sé loge, pour pondre, dans une coquille d’'Hélice à bouche rose (1); on l'y trouve parfoisavec des petits parvenus à la moïtié de leur taille extrême, et li mère chargée de pourvoir à leurs bésoins se voit obligéé de renoncer à la manière de’ chasser ordinaire aux Saltiques ; élle ténd'au-* | dessus de la coquille une grande toile verticale soutenué comme une brigantine de navire sur les chaumes environnans. Autant en fait le Philodromé rhombifère, qui place son cocon plat et” étoilé contre terre, au pied des touffes de gramen, ét le sur-” motte d’une voile toute pareille à celle dont il vient d'être parlé. : C'est cependant là une araignée essentiellement errante, comme V mdique assez lé nom imposé au genre dont elle fait partie, (x) 11 y passe même l'hiver, et ainsi font d’autres Saltiques et diverses jeunes Clubianes nées dans l’antomne. DUGÈS. Sur les A ranéides. 197 D Abboie VIX. De la soie et des industries qui s'y rattachent. Nous parlerons ici plus particulièrement de la sécrétion de la soie, et de la construction des habitations ou des pièges. La dernière partie de l’article précédent nous dispense.de revenir sur quelques autres usages auxquels cette. matière est employée par les Aranéides. La sécrétion de la soie s'opère dans une masse glandulaire, demi transparente et glaireuse, qui occupe la partie postérieure de l’abdomen et offre généralement moins de volume qu’on ne 8 q serait tenté de le croire en raison de l'abondance de ses pro- duits. Chez l’Epéire fasciée même, qui fait de si grandes toiles et de si volumineux cocous, l’organe sécréteur de. la soie n’oc- cupe pas plus du quart du thoraco-gastre; il est réduit à,bien peu de chose chez la Mygale maçonne. Les Pholques nous,pré- sentent cet organe dans sa plus grande simplicité anatomique : (RS c'est un composé de six vésicules de dimensions différentes, quatre allongées et deux rondes, terminées chacune par un.cs nal excréteur qui va s'ouvrir seul au bout de l’une des six filières. La plupart des autres Aranéides ont également six filières ; mais il s'en faut beaucoup que leur glande soit aussi _simple, lors même qu'il n’y a que deux filières utiles comme chez la Mygale maçonne. Puisque nous parlons de ces appendices externes, arrêtons- nous-y un moment. La Mygale maçoune, n’a, outre ces deux … grandes filières, que deux autres mamelons = Frise et imperforés ; la M. aviculaire utilise, au contraire, ces deux ma- .melons un peu mieux développés et pourvus de l'appareil excréteur. Chez l’Atype, il y en a déjà six; il en possède deux de plus, de grandeur médiocre , outre les petites qu’on voit chez les Ni Des six que Lie + toutes les autres - Araignées, toujours on voit les deux postérieures, plus allongées, les antérieures externes plus grosses et plus courtes, les inter- ‘médiaires plus petités et souvent cachées par les autres ; aussi : 198 DUGÈES. — Sur les ÆAranéides. « ces appendices différens ont-ils assurément des fonctions diffé- rentes, et excrètent-ils des fils à différens degrés de ténuité (r). E Lorsqu'on parle de filières égales, comme pour les Drasses, les Clubiones, ce n’est que d'après une apparence de premier coup- - d'œil, ou par comparaison avec les genres voisins, les Aranéas, : par.exemple. Celles-ci, comme toutes les grandes fileuses , ont ‘les filières postérieures longues, à articulations bien distinctés , “redressées en arrière et véritablement caudiformies; elles ont % même valu son nom spécifique à l’Hersilie trouvée par M. Savigny en Egypte ; elles ont une disposition analogue dans les grandes Mygales d'Amérique , PAtype, la Clotho; aussi ces afalèhées “savent-elles tisser ‘des tissus soyeux très fins, très serrés et très considérables. L’Atype, comparée à la Mygale maçonne, nous “offre sous ce rapport une différence bien notable, la dernière ne garnissant d'une couche mince de soie que le couvercle et ‘ deux à trois pouces de son boyau ; creusé dans un terrain ordi- nairemient assez solide, tandis que le premier creuse dans un terrain meuble dont il soutient jusqu’au fond de la mine les pa- rois peu solides au moyen d’une épaisse tapisserie. C’est toujours en dessous de ces grandes filières que se trouvent, mêlés avec des poils raides et constituant une sorte de brosse, les organes excréteurs dont nous allons parler. Chez les Epéires, il en est de même; mais les quatre grandes filières, très élargies à leur base et un peu-aplaties, présentent ceci de remarquable qu’elles peuvent se reployer l’une vers l’autre, formant ainsi avec la pa- “pile qui recouvre l'anus une sorte de rosette à cinq divisions ; ‘quand l'animal veut s’en servir, il renverse ces quatre battans ‘en dehors, épanouit cette singulière fleur et fait sortir de la sur- face villeuse ainsi mise à nu une multitude de fils. Dans tous les cas, ce n’est point par des trous, comme on le répète souvent, que la matière soyeuse est poussée au dehors, c'est par une “multitude de canules microscopiques, transparentes, renflées à (x) À en juger par l’araignée domestique les petites filières ou les médianes, sont destinées ‘à émettre les plus gros fils, les antérieures que Lyonnet a cru simplement perforée ont réelle- ment des canules très fines et doivent servir à façonner le duvet le plus délicat ; les postérieures ont trois canules assez grosses à leurs extrémités, et d'autres de moyenne grosseur sur le resté ‘de teur surface. ELA pucès. — Sur Les Aranéides. 199 la base, et qui même chez la Mygale aviculaire sont envelop- pées dans ce point par un renflement vésiculeux. Ces canulés ont été connues de-Lyonnet, qui par une erreur bien singulière les’ a refusées aux grandes filières de l’Araignée domestique, tandis que c’est là qu’elles sont en plus grande abondance : M. Walckenaer les a crues aussi impuissantes à filer, bien qu’une inspection directe puisse aisément démontrer le contraire en conservant une araignée prisonnière dans un vase transparent. De ces canules, quelques-unes sont plus grosses que les autres, et en nombre bien moindre , telles les cinq centrales de Particle terminal de la Mygale maçonne ; mais, grandes ou petites, toutes reçoivent un canal particulier , distinct, et qui vient aussi d’une vésicule distincte. Dès-lors, on conçoit que l'organe sécréteur est infiniment plus complexe en général que chez les Pholques ; ses vésicules sont innombrables : Tréviranus en représenté de rameuses. Ces canules peuvent indubitablement se mouvoir, s'ériger , s'ouvrir ou se fermer au gré de l’animal, de même que les filières se meuvent à sa volonté et en tous sens, au moyen des muscles nombreux et forts, tant intrinsèques qu’extrinsèques dont elles sont pourvues ; l'animal les aide encore dans leurs fonctions par des mouvemens de l'abdomen et même du corps en totalité, et il est curieux de voir comment il s’agite pour ta- pisser une toile dont la trame seule est jetée, comment il s’in- fléchit et secoue ses filières pour fixer contre un corps solide le bout d’un càble de sûreté ou d’une corde résistante, et qui doit servir de support à son léger édifice. La soie est une matière gluante qui se dessèche plus'ou moins rapidement selon les espèces et selon la ténuité des fils ; les « toiles des grandes Epéires conservent long-temps une certaine “viscosité, et les gros cordages qu’elles tendent d’un arbre à Jautre sont souvent noueux, parsemés de gouttelettes de ma- tière soyeuse concrétée en masses roussâtres ; il y a plus, quel- quefois cette matière semble être exploitée en couche continue pour former une sorte de carton ou de papier, comme nous le . verrons par la suite, Cette matière est insoluble dans l’eau : les pluies déchirent les toiles sans les dissoudre, et l’Argyronète aquatique tend ses rets au fond des eaux demi stagnantes avec 200, DuGÈS. —. Sur les :Æranéides. autant de succès que Le Théridions qu’elle avoisine le font dans les airs. | | ÿ _Ges fils sont-ils éjaculés pour ainsi .direi, tonbomémentii à l'opinion de Lister et de Latreille? Il ne nous à pas paru qu'il en fût ainsi : généralement, ils sont tirés hors des filières, ou par le mouvement de celles-ci et du corps même en s’éloignant du point où ils ont été préalablement fixés, ou par des trac- tions exercées à l’aide des pattes, et surtout.celles de derrière, sans que la droite s y emploie plus que la gauche, malgré l’as- sertion de M. Carus. Deux ongles en forme de peigne, plus. un ergot crochu entre eux au bout de chaque patte, voilà un appa- reil bien propre à soutenir, étirer, séparer les filamens, àles : poser au lieu voulu, à les tendre au degré convenable; c'est. avec une des pattes postérieures que l'Erèse Petagna carde et- floconne, si l'on peut s'exprimer ainsi, la soie duveteuse dont il tapisse sa demeure; nul doute que ce soit en crépant ainsi leurs‘ fils que les autres araignées composent la bourre moel- . leuse qui entoure immédiatement leurs œufs. La Filistate bico-. lore ne COPOSE aussi que des tissus mous et crêépus; la soie grisätre, vue à la loupe ,se montre toute formée de filamens en, zigzags ou en tire-bouchon; mais il est probable que cette dis- position est due au mouvement des filières plus qu'à celui des pieds. : | _Avant de parler des pièges construits au moyen de la soie, arrétons-nous davantage sur les habitacles qu'elle sert aussi à édifier, soit pure, soit mélangée à des matériaux divers, Les Clubiones, les Drasses, les Dysdères, les Micrommates, la plu- : part des, Thomises, se font des cellules.de soie en s’aidantide. quelque feuille contournée. ou recourbée par artifice, ou des ti- gelles «et des fleurettes, d’une ombelle ou d'un corymbe; ils y: laissent une ou deux issues par lesquelles, en.cas d'attaque , ils échäppent avec rapidité; ils abandonnent même spontanément cette habitation passagère pour chercher fortune, sürs de s'en fabriquer une nouvelle en moins d’un quart d’heure au premier. endroit favorable. Seulement, au moment des mues, ces ani-. maux s’enferment complètement, de manière à ne.pouvoir.sor+ ür de leur niche qu’en fendant avec leurs crochets les murs de. vucÈs. — Sur les Aranéides. 20. cette prison volontaire où ils passent un temps d'inertie, de ra- mollissement, qui les livrerait sans défense au plus faible de leurs ennemis. On. connaît la cloche de l'Argyronète, la guérite quese fabrique , à côté de sa toile, l’Epéire apoclyse ; le cornet que suspend au milieu l'Epéire sclopétaire; la tente de la Clotho . Durand a été trop bien décrite par M. Léon Dufour pour que _ nous.ayons besoin d'y revenir; on a moins insisté sur le méca- | ES par lequel les Sultious cupreus , œneus, chalybeus , for- micarius et autres se tiennent en süreté dans leur sachet oblong, plat.et collé contre une pierre; un des bouts:est fendu, et,ses deux lèvres arrondies s'appliquent exactement l’une sur l’autre comme les bords.d’une bourse à fermoir métallique. L'Enyo oc-! citanique se. bâti sous les grosses pierres une hutte constituée par. des graviers que réunissent quelques brins de soie, . Des tubes plus ou moins longs servent d'habitation à plusieurs geures d’Aranéides : ia Ségestrie en fabrique de, si, forts dans les fentes des vieux murs, que si l'on introduit dans leur ouverture, évasée, étoilée, une petite baguette flexible qu'on tourne cinq ou six fois sur elle-même, on peut souvent enlever.en entier le fourreau, long de cinq à six pouces, avec le nid qui le termine, renferinant les œufs et l’Arachnide mêine, C’est dans les mêmes lieux que la Filistate bicolore construit également des tubes. souvent .à double embouchure, à ouvertures aussi évasées et garnies de cordages disposés en. étoile ; mais la soie crèpée qui les. compose.est grisâtre et non-blanche comme celle de la Sé- gestrié; elle est d’ailleurs infiniment plus molle et plus fragile. Cette araignée, la plus commune de. toutes aux environs de: Montpellier , ferme; durant l'hiver, l'entrée de son séjour par, _un grillage de fils assez serrés, Une soie moins crépée, moins. “preuante, mais tout aussi molle, constitue les tubes que se fait aussi entre les pierres des vieilles, murailles lArariea rustique; . Souvent, aussi cette espece, de même que la Filistaté, certaines Clubioues {C. atrox), certaines Drasses, .pousse-ses, conduits soyeux, dans les.fentes d’un terrain sec et abrupte, d'une roche, tandis que ceux, toujours fort courts d’ailleurs, de l’Aranea do- _mestique et de la labyrinthique sont totalement ou presque to-. talement ‘aériens. Au contraire ,..les Lycoses. se creusent elles- 20% pucès. — Sur les _Aranéides. mêmes des trous en terre, et souvent même ne les garnissent pas de la moïndré parcelle de soie (ZL. picta Hahn } ‘La Tycose narbonnaise , lorsqu'elle habite des lieux déserts et qu’elle a ac- quis une grande taille, garnit seulement l’entrée de son souter- rain d'une sorte d’entonnoir papyracé soutenu par les herbes voisines, et qui à été parfaitement décrit par M. Léon Dufour. On connaît trop bien aussi , depuis les descriptions de Sauvage et de M. Audouin, le couvercle ingénieux’ dont la Mygaäle ma- çonne et la M. mineuse, munissent, de même qu’une autre Mygale d'Amérique ( M. Martinii) , le seuil de leur demeure pour que nous en donnions une nouvelle description ; remärquons seu- lement que cette cheminée cylindrique, à paroïs nues, mais lisses et bien tassées, dans laquélleila Mygalé maçonne passe sa vie, n'offre point les tortuosités qu’on lui a supposées : elle est presque verticale , et lon n’en perd jamais la trace si l’on y in- troduit à l’avance une paille qui sert de guide et empêche les éboulemens d'en cacher le trajet; c’est là qu'habitesouvent une famille composée de la mère et d’une trentaine de petits dont lé nombre est d'autant moindre qu'ils sont plus grands par suite d'émigrations successives; car, déjà de la grandeur d’une mouche commune , ils savent miner la terre avec le râteau de léürs man- dibules, et se construire un couvercle bien régulier. Ce n’est que dans les temps des chaleurs que l'animal vient s’accrocher à ce couvercle pour empêcher qu’on ne l’ouvre; l'hiver, il reste au fond de son trou et le récreuse même pour mieux échapper au froid, surtout si quelque pluie pénétrante vient à ramollir les terres et à rendre ainsi son travail plus facile. Des déblais sur la” pente du terrain sont l'indice de cé travail, et une petite dé- pression circulaire , comparable à celle que le bout du doigt lais- sérait sur la terre molle, est la place occupée par le couvercle. Les terriers de l’Atype sont moins profonds ; moins verticaux, mieux garnis de soie, et leur embouchure est fermée par un artifice d’un autre genre. Le tube de soïe qui sert de doublure au conduit souterrain, se prolonge au dehors et s'élève en s'é- largissant entre les betbes qui le soutiennent ; cette partie ex- térieure salie de quelques cofpüsetiles collée vélottairément2 à sa surface, est renflée et ressemble à un cocon blanchâtre, à pueès. — Sur les Aranéides. 203. celui du Bombyx neustriæ par exemple; son bout effilé est fer- mé ennasse de manière à ne point retenir prisonnier son con- structeur, qui d’ailleurs, avec ses énormes mandibules , à bien- tôt fait justice de cette faible barrière si quelque agitation la- vertit du passage d'une proie; si au contraire une attaque est dirigée contre lui, il ne's’en fie pas encore à cette disposition propre à défendre ses pénates contre les insectes voraces, les grandes Carabes ou la Scolopendre mordante , il accourt dans son vestibule, en fronce les parois en les attirant chiffonnées vers l'entrée. de sa caverne. Terwinons cette étude rapide de ce qui concerne les habita- tions des araignées par une remarque sur la préférence que cer- _tains de ces animaux accordent à tel ou tel séjour, les uns choi- sissant l'air libre et le feuillage des arbres, les autres se cachant plus volontiers sous les pierres ou dans des cavités souterraines. Cela ne dépend pas de leur conformation extérieure, car si la Mygale maçonne, l'Atype surtout, ce basset des Aranéides, sont faits de manière à pelotonner aisément leurs membres autour des trous de manière à former un tout cylindrique, il n’en est pas ainsi des Lycoses. Ce n’est pas non plus parce que les unes sont diurnes et les autres nocturnes, car si la Clubione lapidi- cole vit sous les pierres, la nourrice, la soyeuse, l’erratique, la trompeuse, également nocturnes, vivent sur les végétaux. Si le voisinage de la terre convient tant aux araignées précédem- ment désignées, de même qu'aux Drasses, aux Dysdères, etc. , c'est en raison de l'humidité dont ils aiment à être entourés, et dont ils nepeuventse passer long-temps sans danger, pas plus que les Scorpions et une foule d’Acariens. Tenus dans des vases secs, malgré l'abondance de la nourriture; on les voit devenir languis- sans, dépérir rapidement et succomber enfin ; tandis qu’on leur rend presque instantanément la vigueur et qu’on les conserve pres- que indéfiniment en vie en plaçant dans ce même vase quelques boules de coton suffisamment humectées pour saturer l'air. Ces animaux, ne: boivent effectivement que quand ils sont épuisés par la sécheresse ; c’est en pareil cas que j'ai vu la Lycose nar- bonnaise sucer les gouttelettes d’eau que je faisais tomber dans Sa prison, L :204 DUGÈS. — Sur les Aranéides. :Quelques-unes des demeures dont nous venons de parler ser- vent aussi d’embuscade, soit pour attendre que les victimes tombent dans un piège voisin (Epéires), comme l’oiseleur se tient tapi près de ses filets, soit pour cacher le chasseur prêt à fondre sur Ja proie qui passe à sa portée. Ainsi la Mygale ma- çonne,-qui abandonne si rarement ( et jamais peut-être pour la femelle) son puits profond quelquefois «’un pied, ne reste au - fond que dans l'hiver, ainsi que nous l'avons dit déjà; l'été, et surtout le soir, elle.est à l'entrée ,-et tient soulevé son opercule au moyen de ses pattes de devant : lamoindre vibration au voi- -sinage d’avertit du passage d’un insecte, d’une fourmi ; et bien des fois, en me cachant à sa vue, je l'ai fait sortir de son domi- cile en froissant légèrement à l’entour un fétu de paille sur le- .quel-elle se jetait précipitamment; mais les pattes de derrière n'avaient pas quitté l’ouverture du nid, et l’Aranéide y rentrait rapidement quand elle avait reconnu $a méprise ; ce’n’est au : contraire qu'avec quelque lenteur qu'elle parvient à soulever son couvercle quand on la forcée de labandonner totalement. La Ségestrie, la Filistate , ne quittent guère non plus l’éntrée de leur repaire; elles se jettent brusquement sur les’insectes qui . viennent se heurter en passant aux fils tendus en rayons à l’en- .tour,.et nous-:avons vu. même plusieurs fois la Ségestrie faire un rapide circuit dans cette. circonférence, soit dans l’espérance -d'une découverte fortuite, soit trompée: par quelque frémisse- . ment illusoire de:ses cordons d'avertissement.-Les Lycoses, les : Clubiones, vont au contraire à la recherche de leur nourriture, comme les Dolomèdes ; les Micrommates, Les Saltiques. Ceux-ci parcourant les murailles élevées, les hauts buissons , laissent, -comme da plupart des araignées sédentaires quand’elles sont :forcées de sé mettre en marche, un fil dont elles embarrassent les feuilles et les branchages,. beb Lycoses , etc.; au contraire, -ne le font qu’en cas de nécessité évidente, et le Sa/ticus cinctus même n’en file pas non plus habituellement, sins doute pour ne pas ralentir la course rapide :qui lui fait parcourir pour ainsi -dire en un clin-d’œil toutes les ramuscules , toutes les feuilles des plantes sur lesquelles il poursuit sa proie: L'émission de ces fils dans d’autres cas où ils doivent servir de moyen de trans- puéès. = Sur les Aranéides. 205 port à l’araignée; ou bien même quelquefois de fondemens à des ouvrages plus durables, doit maintenant nous occuper comme. nous conduisant à l'étude des : pièges; qui ‘doit entrer dans cet'article. On voit!fréquemment des ‘Epéires :établir leur toile à une grande hauteur, entre deux arbres, deux maisons : sont-elles descendues ; jusqu ’à terre pour remonter ensuite? Oui , pour de | petites:élévations, des plans unis et connus; non; certes, dans * | le cas contraire ;'et surtoüt si quelque espace d'eau sépare les points de support; car les: Epéires n'ayant pas de houppes aux tarses , ne! sauraient eoûrir: sur l’eau, :et le ventre volumineux des adultes entraînerait une subinersion inévitablement mor- telles Qu'a-t-on: supposé alors? Tantôt on’a dit qu’ellés s’aban- donnaient’ aw vent, qui les emportait..de l'autre côté : cela pourrait-être pour !de très petites seulement; et à l’aide d’un veut impétueux auquel ces animaux prudens ne'se livréraient pas volontiers; car, quand le vent est violent, ils ré setiérinent même: pas: d'ordinae‘au centre dé leur toile; enfin on a cru” les voir ramer! dans lestairs:et s'élèver par la vive agitation de leurs pattes. C'est ici que se trouve la solution du problème ; il ne s’agit plus que d’ expliquer le fait et de mettre la réalité à la place d’une trompeuse apparence: Voici ce que j'ai pu observer dans mon cabinet même. Un cocon de l’Epéire apoclyse (où de: l'E virgata) avait été posé sûr ün arbuste dont les rameaux se ‘ trouvèrent bientôt envahis par ‘une multitude dé petits nouvel: ! lementéclos. Cette colonie ee tarda pas même à s’éparpiller sur’! les meubles:environnans , à’ s'élever même de mon bureau à la corniche de ma bibliothèque; > séparée pourtant en largeur et en hauteur par un espace! assez considérable; dés fils tendus de “lun à l’autre servaient d’échelle‘pour cetté ascension perpétuel lement: renouvelée , malgré le soin que je prenais dé rompre bien: fréquemment ces supports. Comment ces fils étaient-ils ainsi jetés et tendus ? C’est ce que je parvins bientôt à recon- naîtré. Sur l'extrémité des branches se tenaient fixèment quel-” ques petites araignées tantôt immobiles, tantôt manœuvrant avec activité de leurs pattes antérieures ; une vue exercée, une attention ey trême, mé devinrent ici plus que jamais nécessaires ; 206 DUGÈS. — Sur les Aranéides. mais ce fut sans incertitude et sans équivoque que je les vis ainsi tirer de leurs filières et faire flotter librement dans l’air un éche- veau de fils si légers, que le moindre courant, celui de la porte: à la fenêtre, les enlevait dans une direction constante : l'animal cependant tirait à lui de temps en temps ce faisceau délicat le pelotonnant entre ses pattes antérieures ‘et s'assurant ainsi du moment où il s'était fixé au loin sur quelque corps solide; quand: la résistance et la tension lui paraissaient suffisantes, il n’hési- tait pas à s'élancter, en habile acrobate,:sur ce pont presque imperceptible ; il. s’élevait ainsi sans support apparent pour un: œil.peu attentif, et semblait:ramer dans l’espace; mais le fil qu'il. doublait par une addition nouvelle en en parcourant la lon- gueur, devenait plus visible à la suite; et pouvait ultérieure-: ment servir avec plus d'efficacité encore à de nouveaux voyages. Nul doute que ce ne soit à nne émission de ce genre qu’on: doive rapporter la formation des. £/s. de la vierge ; ils sont rares. dans nos contrées méridionales ; mais. dans le nord, j'ai trouvé: une fois, au milieu de leurs flocons ; la jeune araignée, qui s’é+ tait imprudemment confiée à leur douteuse! solidité, et qui me parut alors appartenir au.genre Théridion; c'est aussi un Thé-. ridion, le triangulifère de Walékenaer, que j'ai trouvé dans le midi, sur des fils floconneux jetés d’une plante à une-autre ;: c'était un, mâle, et, peut-être ces fils servent-ils souvent à favori- ser, les recherches amoureuses; souvent encore ils:servent à poser. les premières traverses d’une de ces toiles singulièrement placées dont nous parlions précédemment ; puis, allant.et venant, l'araignée fixe à des points voisins d'autres cordages qu’ellé écarte avec sa. patte de derrière, et qui sont de plus en plus divérgens de celui, qui lui.sert d'échelle; enfin elle croise, cesrayons par une spirale lâche, mais provisoire, et destinée seulement à lui servir de support lorsqu'elle veut .poser ensuite la spirale défi- nitive, Celle-ci. est bien plus serrée, plus régulière ; un. mouve- ment uniforme du. corps et des pattes sert. de compas à. notre architecte, qui, chemin faisant, coupe et détache les premiers. fils circulaires devenus.dès-lors inutiles. et discordans au reste d’un ouvrage fort industrieux sans doute, mais dont la fabrica- tion est moins difficile à concevoir, quand on l'a vu opérer _DUGÈS. —— Sur les A ranéides. 207 qu'on ne l'aurait pensé de prime abord. A ces opérations géné- rales, quelques Epéires, la fasciée et la soyeuse en ajoutent une | Ré fé c'est l'apposition de quelques rubans en zigzag au- dessus etau-dessous du centre de leur toile : il semble que ce soit une, précaution qu’elles prennent pour rendre plus sûre et plus commode leur station dans ce point central. C'est là, en effet, qu’elles se tiennent accrochées la tête en bas, sans doute pour. éviter des tiraillemens à l’étroit pédicule qui unit le tho- raco-gastre ou ventre au céphalodère ou corselet. Je n'insisterai pas sur les autres formés de ces pièges si con- nus, sur ces longues traînasses que la Malmignatte jette entre les herbes le long du revers d’un fossé, sur la tente plus serrée, mais dé mêmenature, que l’Erèse Petagna élève au-déssus de son terrier, sur les fils croisés sous divers angles des Théridions, soit qu'ils les disposent sur un plan horizontal (7. obscurumi) , soit qu'ils les tendent à-la-fois dans un sens vertical , oblique ét horizontal, de manière à intercepter un espace à troïs dimén- sions (7. sisyphum), soit qu'ils les jettent en forme de rets 1r- réguliers sur les feuilles d’un rameau ( 7’ benignum), soit enfin qu’ils en tapissent des trous de muraille ( 7. trianguliferum ). Les toiles des Aranéas sont encore moins symétriques dans leur structure intime, et non moins irrégulières dans leur forme générale ; on connaît assez le tube à une ou plusieurs issues (4: labyrinthæ ) qui. termine leur nappe souvent triangulaire ; on a moins remarqué comment le bord, libre de cette nappe est soutenu par des cordages dirigés vers le haut du mur même où le reste est appuyé de sorte que ce bord est souvent recour- bé en dessus, iet qu'il,en part des.filamens encore utiles comme … de véritables gluaux, plus lächement disposés que le resté de ouvrage; la labyrinthique. se fait remarquer surtout par cette -dernière. addition quand elle cesse d'ajouter en largeur à ces vastes toiles dont elle garnit les buissons .et les talus herbeux des grandes routes. On a depuis long-temps mentionné le dôme des, Linyphies ;. j'ajoute qu’elles s’en bâtissent quelquefois jus- qu'à trois, l’un au-dessus, de l’autre, et que les PAolcus, le :ri- vulatus, du moins, s’en fabrique un tout semblable, tandis que 208 DUGÈS, — Sur les Æranéides. le Phalangista ne jette aux voûtes de nos caves que des fila- mens irréguliers. SE | J'abrège tous ces détails, et je termine par quelques mots sur une circonstance où la soie est accidentellement fournie # pro- fusion par un certain nombre d’Aranéides ; c’est quand il s’agit d'emmaillotter un insecte dangereux soit par sa vigueur mus- ‘cuülaire et les pointes dont ses mémbres sont armés , telle une Sauterelle, uni grand Coléoptère, soit par des armes plus redou- tables encore, un aiguillon venimeux , ou bien seulement Hop incommode à cause du violent trémoussement qu'il imprime à son corps par l'agitation de ses ailes. L’araignée s'approche avec. précaution du prisonnier enchaïné sur satoile se tient à une .distance convenable pour ne courir aucun risque, commence même quelquefois son opération par surprise, se laissant tom- _ber, suspendue à un: fil, chaque fois qu’elle a,subitément jeté sur lui un nouveau lacet, et ne reste à portée de sa proie que quand les .entraves sont assez solides pour lui défendre tout mouvement dangereux. C'est à l’aide des pattes que les Epéires, les Ulobores, les Pholques, jettent ainsi autour du corps de l'a- nimal capturé des fils, ét. même, pour les grandes espèces, de larges rubans ou écheveaux de soie;' aussi l’ont-elles bientôt “enveloppé de toutes parts; et cette conclusion est hâtée encore par une autre manœuvre : l’araignée roule entre ses'pattes ce ‘corps déjà bien garrotté, le couvrant, à chaque tour, d’unénou- ‘velle nappe échappée dé'sés filières épanouies. Tie Théridion Malmignatté, pour aller plus vité encore , commencé par jéter “sur linsecte pris dans ses rets de séiRa bte gouttes de cette ma- “tière glutineuse qui conétitue la soie quand elle est étirée én ‘fils; nous avons vu, pour le dire en passant, la Scolopendre ‘sesquipédale ou'Géôphile de TL. Dufour jeter de même sur les insectés arrêtés dans sés replis des goutteléttes d’une glu rou- ‘ geâtre sécrétée par les pores médians qu offre en dessots cha- | cun de ses segmens. Revenons à nos Aranéides : “quand leur victime ‘est rendue “ainsi inoffensive , on les voit, pour plus de sécurité, s'en appro- cher davantage, a mordre de leurs mandibules à venin ; puis, quand elle a cessé tout mouvement, la détacher de leur toile et DUGÈSs. — Sur les Æranéides. 209 l'emporter toujours dans son linceul jasqu’au centre où elles la sucent à leur aise. Quelques-unes laissent ensuite le cadavre sus- pendu comme un trophée {venationis gloriola, dit Lister) ; mais la plupart le rejettent : seulement, si, au moment de leur der- _nière prise, elles étaient déjà occupées à nn autre repas, cette » provision inattendue est momentanément suspendue à un fil, ét l’on n’y touche qu'après avoir suffisamment tiré parti du pre- * mier butin; c’est ordinairement l'affaire de quelques heures » pour que l’un et l’autre aïént été exploités et rejetés, à moins qu'ils n’aient un très grand volume de manière à fournir à la succion pendant une journée entière. Après ces repas copieux, l’araignée reste long-temps immobile; elle en fait de même après un repas médiocre , et ce n’est que la nuit, ou du moins le soir, qu’elle répare les brèches faites par elle-même ou par d’autres animaux dans sa toile, ou bien qu'elle s'en fabrique une tout , entière dans un autre endroit quand le dommage est trop con- { sidérable. Voilà comment des animaux beaucoup plus grands et : plus forts, mieux couverts et mieux armés en apparence, ne peuvent néanmoins lutter avec avantage contre un ennemi plus industrieux, qui les tient d’ailleurs comme suspendus dans les | airs: c’est l'avantage de la force intellectuelle sur la force phy- siqne. 1] est toutelois des insectes trop robustes et trop dange- reux , comme la Mante religieuse l'est pour'les plus grosses arai- gnées, comme de grandes Sauterelles, de grands Criquets à jambes épineuses , ou de gros Bourdons , le sont pour des arai- gnées médiocres ; celles-ci en paraissent convaincues, car elles restent immobiles, laissant à ces captifs trop difficiles à domp- ter le soin de briser leurs chaînes, ou les aidant même de “loin dans cette opération, malgré le dégât qu'ils occasionnent 2. leurs possessions. Quant aux araignées errantes, toute lenr industrie consiste à se jeter sur le dos de l’insecte plus fort qu'elles, à le saisir par le corselet de manière à paralyser ses ailes tout en évitant son aiguillon s’il en est pourvu , et à se laisser entrainer en tourbillonnant avec leur victime, jusqu’à ce que l'action du venin l’engourdisse et la mette à mort, ce qui ne tarde guère à arriver; c'est ainsi que j'ai vu de petites Saltiques s'emparer d’une mouche trois fois plus grosses qu'elles, et des VI Zoor. — Octobre, 14 4 210 DUGÈS. — Sur les Aranéides. Thomises de petite taille se rendre maîtresses d’abeilles quatre à cinq fois plus volumineuses; l'une de ces dernieres me donna l'exemple d’un manège assez ingénieux , $e laissant pendre avec sa proie ; qui agitait vainement dans les airs ses pattes au moyen desquelles elle entrainait auparavant son ennemi à travers les feuilles et les fleurs épineuses du chardon sur lequel se passait cet épisode. ARTICLE VIH. De l'humeur venimeuse , des moyens d'attaque et de défense des Arancides.... Nous avons déjà parlé de la bouche’ en général; les mandi- bules en sont la partie la plus apparente, et nous avons, en passant, signalé la grandeur de celles de certains mâles qui, sous ce rapport, ressemblent assez au Lucanus cervus. On sait qu’elles sont composées d’un corps mobile sur la tête, et d’un ongle ou crochet mobile sur le corps. Le crochet n'a que des mouvemens de gynglyme, et un muscle épais le fléchit sur une gouttière à bords denticulés , creusée au ‘côté interne on au côté inférieur du corps dans lequel est logé ce muscle, aussi bien qu’un extenseur beaucoup plus faible. C’est pour donner . plus d’espace à ces muscles et plus de force aux mouvemens du . crochet ; que le corps de la mandibule est renflé en avant dans les Drasses , les Clubiones, les Lycoses; èn dehors, ce corps montre un condyle lisse et subglobuleux qui indique assez que les mouvemens de totalité sont des mouvemens de déduction et d'adduction; elle n’en exécute én effet que de peu d’étendue dans le sens antéro-postérieur. Tout ceci ne s'applique point, il est vrai, au Théraphoses de M. Walckenaer, dont les mouvemens principaux se font d'avant en arrière : exemple les Mygales. On comprend aisément le mé- canisme par lequel les mandibules exécutent la préhension ; les maxilles ne peuvent remplir le même office et serrer entre elles! des corps peu volumineux que dans les Drasses et toute la fa- mille des Scythodées où elles se touchent au-devant de la lèvre: … DUGÈS. — Sur les .4ranéides. ait aussi avons.nous vu un-Drasse ventre noir arracher à une J,y- cose agreste la patte qu'il avait mordae ainsi: Cet usage était essentiel chez les Scythodées, dont les mandibules sont petites et génées dans leurs mouvemens par la coalescence de leurs bases: Les mandibules des antres Aranéides servent encore à couper les fils, à fendre les toiles, soit par compression entre le “crochet et la rainure destinée à le recevoir, soit par arrache- 4e ou plutôt par l’un et l’autre de ces deux mécanismes à- | la-fois, les palpes soutenant ; poussant ce que le crochet perce et tiraille : ce dernier est d’ailleurs ordinairement aminci, et vé- ritablement tranchant à son bord concave. Mais il doit surtout nous occuper comme arme offensive : il représente effectivement la dent venimeuse des vipères, selon la remarque de Tréviranus ; comme elle, il est mobile ; comme elle, percé d'une ouverture oblongue sur sa convexité et près de sa pointe; comme elle, il transmet dans la blessure qu'il a faite une liqueur empoisonnée, Le conduit membraneux qui en - parcourt l'intérieur n'est pas , comme on l'a cru, l'origine d’un . double œsophage, il n’est point un organe d'absorption, mais « d'excrétion, et provient d’une glande, ou plutôt d’une vésieule - sécrétoire de. forme ovoïde très allongée , épaisse et consistante. striée en hélice, de sorte que ses parois semblent composées d’une couche de cordonnets parallèlement contournés. Ces cor- donnets, bien connus de Lyonnet et de Tréviranns, nous avaient paru d’une nature fortéquivoque ; mais la Mygale aviculaire n'a permis de les constater incontestablement à laide du micros- cope; ils sont musculaires, Ainsi cette vésicule doit jouir dune grande force expulsive ; son extrémité libre reçoit un filet peut- “être nerveux qui la rend apte sans doute à :e contracter au gré “de l'animal: aussi avons-nous vu souvent des araignées irritées, laClubione nourrice surtout lorsqu'elle défendait ses petits, émettre une gouttelette parfaitément limpide par la fente de leurs crochets redressés et prêts à frapper l'ennemi qui avait violé leur domicile et les excitait par de nouvelles attaques. La propriété délétère de cette humeur est assez démontrée par les effets qu’en ressentent les insectes piqués, ne füt-ce que sur une patte, ainsi que l'observe avec toute raison Tréviranus. Nous 14. 212 puGËs. — Sur les Araneïides. avons voulu pousser plus loin uos observations, et, à l’imita- tion de quelques zélés naturalistes, éprouver sur nous:même les effets de leurs morsures. Plusieurs fois, des Epéires, des Séges- tries et autres, nous ont fait sentir un pincement peu doulou: reux, l’épiderme n'ayant pas été traversé. La Dysdère érythrine, plus petite, mais pourvue de crochets proportionnellement plus longs et surtout plus aigus, a produit plus d'effet sur nos doigts : une cuisson vive , mais très passagère , a été le résultat de cette piqûre. La Clubione nourrice, choisie de la plus grande taille , puissamment armée et pourvue de grosses glandes, n’a produit également que des piqüres si fines et si superficielles, que j'au- rais cru l’épiderme intact sans le vif sentiment de cuisson , le petit gonflement et la rougeur qui se montraient à chaque en- droit pressé par la pointe de ses crochets. Ces effets durèrent à peine une demi-heure. Enfin une grande araignée dite des caves (Segestria perfida), appartenant à une espèce réputée venimeuse dans nos pays tempérés À a été choisie pour sujet d'expérience principale : elle avait neuf lignes de long mesurée des mandibules aux filières. Saisie, entre les doigts, du côté du dos, par les pattes ployées et ramassées ensemble ( c’est ainsi qu’il faut prendre les Aranéides vivantes, pour éviter leurs piqüres et s’en rendre maîtres sans les mutiler), je la posai sur différens objets, sur mes vêtemens, sans qu’elle manifestât la moindre envie de nuire; mais à peine appuyée sur la peau nue de mon avant-bras, elle en saisit un pli entre ses robustes mandibules d’un vert métal- lique, et y enfonça profondément ses crochets; quelques in- stans elle y resta suspendue, quoique laissée libre ; puis elle se détacha, tomba et s'enfuit, laissant, à deux lignes de distance l'une de l’autre, deux petites plaies rouges, mais à peine sai- gnantes, un peu ecchymosées au pourtour, et comparables à celles que produirait une forte éningle. Dans le moment de la morsure, la sensation fut assezWive pour mériter le nom de dou- leur, et se prolongea pendant cinq à six minutes encore, mais avec moins de force: j'aurais pu la comparer à celle que produit l’ortie dite brülante. Une élévation blanchätre entoura presque sur-le-champ les deux piqüres, et le pourtour, dans une étendue d'un pouce de rayon à-peu-près, se colora d’une rougeur érvsi- DUGÈS. — Sur les Aranéides. 213 pélateuse accompagnée dun tres léger gonflement. Au bout d’une heure et demie, tout avait disparu, sauf la trace des pi- qüres, qui persista quelques jours comme aurait fait toute autre petite blessure. C'était au mois de septembre, et par un temps un peu frais ; peut-être les symptômes eussent-ils offert quelque | » peu plus d'intensité dans une saison plus chaude, mais il n’en serait certainement résulté rien de pareil même à ces boutons # que quelques personnes trouvent le matin sur leurs lèvres, vé- . ritables efflorescences dues à une cause interne, à un léger mou- vement fébrile, et qu'on attribue bien gratuitement à la mor- sure «le l’araignée domestique. Cette espèce, effectivement, ne parait pas avoir la force ni le courage nécessaires pour attaquer ainsi sans nécessité; les plus grands individus que j'en ai pris (et j'en ai pris d'aussi volumineux que la Ségestrie dont je viens de parler) n’ont jamais fait le moindre effort pour mordre. J'en . dirai autant de la Malmignatte, dont la piqüre est réputée mortelle en Italie. Quant à la Tarentule, l'espèce de la Pouille est rare chez nous ; je ne l'y ai trouvée qu’une fois; mais, en re-- vanche, la T. narbonnaise y est commune et y acquiert une très grande taille, et l'on sait qu’elle diffère bien peu de la précé- dente. M. Léon Dufour va jusqu’à croire que la Lycose narbon- naise est la vraie Tarentule ; il l'a du moins trouvée abondam- ment en Espagne, et je lai reçue même d'Afrique. Cependant ‘on n'a ‘jamais parlé , dans ces contrées, des dangers de sa mor- sure, hi, par conséquent, observé les ridicules symptômes qu'on propose de guérir par des jongleries non moins ridicules. Aussi’ personne, parmi les naturalistes, ne croit-il aujourd’hui au ta- rentisme. Les Tarentules ont des glandes venimeuses assez cor: - …sidérables, mais pas plus pourtant que l’araignée domestique , Mes Drasses, les Clubiones, proportion gardée à la taille (r). Enfin les grosses Mygales d'Amérique passent aussi pour pouvoir Causer la mort d’un homme. Mais s’il fant juger de l'importance d'un organe par son volume proportionnel, et de l'intensité de (1) Dans une Lycose d'un pouce et uu quart, Meckel a trouvéà ces glandes quatre lignes de longueur; elles oùt une ligne et demie dans une Clubione nourrice de neuf lignes, trois lignes seuiement dans une Mygale aviculaire ayant près Jde deux pouces de long. Lu 214 DUGÈS. — Sur les AÆranéides. ses effets par son volume absolu , la Mygale aviculaire ne saurait étre bien dangereuse. Ses glandes ne s’étendent pas comme chez les Araneas, les Clubiones , les Lycoses, jusque dans le corselét; au lieu d'occuper de même une bonné partie de la région cé- phalique, elles sont enfermées totalement dans le corps de la mandibule, et, en les comparant à celles d’une Clubione nour- rice parexemple, je ne leur aïtrouvé que le double en longueur, et peut-être le triple en masse : or , le poids total dé la Clubione n'était que de sept grains; celui de la Mygale était de deux gros et demi , l’une et l'antre conservées dans l’alcool. J'avais déjà , depuis long-temps, soupçonné cette petitesse des organes sécré- teurs du venin dans les Mygales d'Amérique d’après celle que je trouvais à la Mygale maçonne. Elles sont, chez celles-ci, presque rudimentaires , et la force musculaire supplée à linsuf- fisance du venin ; aussi une mouche bleue, mise en expérience, a-t-elle survécu aux profondes blessures que lui avait faites une de ces Aranéides vivement irritée, et qui l'avait ténue accrochée pendant dix minutes, tandis qu’un lézard gris de trois pouces de longueur a été étranglé en deux minutes, malgré sa vive résis- tance. Peut-être la petite quantité de venin que possède la My- gale maçonne suffirait-elle pour faire périr les fourmis dont elle se nourrit principalement , et dont'elle x accumulé les débris au fond de son terrier; mais sés crochets à eux seuls suffisent bien pour écraser un ennemi si disproportionné; cet ennemi, toutefois , n’est point sans courage, et, dans des occasions plus heureuses, il sait prouver que la valeur supplée à la force. M. Walckenaer a remarqué que si l’on pousse une fourmi dans le trou d’une Ségestrie , celle-ci cherche à la chasser en secouant sa toile, et finit même par s'enfuir hors de sa retraite. J'ai eu l'explication de cette étonnante antipathie dans entrevue forcée d'une grande fourmi des bois avec une Ségestrie que je nourris- sais dans une fiole, et qui y avait fait son nid et pondu ses œufs. 1’Aranéide s’était avancée pour reconnaître le nouveau venu, cherchant à le toucher du bout de ses longues pattes ; la fourmi se jeta sur cette extrémité, et la mordit si vivement, que l'arai- gnée s'enfuit au plus profond de sa taniere, manifestant par ses trépidations de la douleur et de la frayeur qui lagitaient à-la- DUGÉS. — Sur Les /1ranéides. 215 fois. C'est donc une crainte raisonnée et non une aveugle anti- pathie qui produit ce phénomène; aussi quand on empêche la Ségestrie de sortir, quand on la force de rester en présence de la fourmi, finit-elle par la broyer entre ses maudibules. 11 faut de même qu’elles soient forcées de combattre pour s'attaquer entre elles quand elles sont de force égale , soit qu’elles appar- tiennent à la même espèce, au même genre, ou bien à des es- pèces ou des genres différens ; il faut les exciter à beaucoup de reprises, les jeter Pune sur l’autre, et alors c’est ordinairement le hasard qui donne la victoire à lindividu mieux placé, qui peut saisir par le dos son adversaire et le sucer sans miséricorde, comme aussi sans résistance, sans agitation de la part de la vic- time résignée ou engourdie par le venin du vainqueur : c’est ce que j'ai vu dans un cas où la Mygale maçonne devint la proie de la Lycose narbonnaise; avant cette conclusion presque for- tuite, la lutte avait été longtemps égale; les deux individus, poussés l’un contre l’autre, se repoussaient mutuellement à l’aide de leurs quatre premières pattes, et avec plus de force qu'on ne le croirait. Cette dernière remarque est applicable surtout aux es- pèces à pattes trapues, comme la Mygale maçonne femelle; aussi relève-1-elle ses pattes de devant d’un air de menace quand elle se tient sur la défensive. Cette espèce cherche en général peu à fuir : elle reste immobile, pelotonnée, ou bien elle se soulève sur ses pattes de derrière, élevant les antérieures ;"redressant et déployant ses fortes mandibules. La Ségestrie, les grandes Lycoses , ouvrent de même leurs grandes pinces, mais seulement après avoir reconnu que la fuite est impossible s’il s’agit d’un ennemi supérieur , de la inaïn d’un curieux par exemple. Les pattes antérieures servent de moyen de défense à-peu-près exclusif à plusieurs Saltiques, qui les ont longues et robustes (2). Les Saltiques, au reste, trouvent dans l’agilité de leurs sauts un moyen de süreté que les autres arai- gnées cherchent dans la vélocité de leur course et quelquefois (x) Elles ne servent pas au saut, comme on serait tenté de le croire ; nous nous en sommes assuré par l'expérience; le saut ne cessait d'être exécutable que quand on avait coupé les pattes de la quatrième paire. 216 _ puGÈs. — Sur les Aranéides. dané une chute volontaire. L’Epéire armide, la Dromadaire, la Clubione soyeuse, l’erratique, etc., se laissent tomber dans l'herbe et s’y cachent. D'autres espèces, de couleur sombre comme lEpéire angulaire, la diadème, se collent contre les branches des arbres, et confoncient, anx yeux de l’ennemi, leurs nuances avec celles des rugosités de l’écorce. Les Micrommates se cachent sous les feuilles, et la teinte verte de l'espèce la plus commune aide encore à la soustraire à la vue. IlLen est de même de plusieurs Thomises qui habitent les feuilles (7. viridis; ou les fleurs ( T. citreus). Le Tétragnathe se dissimule en allongeant contre les feuilles de Graminées son corps grèle et ses pieds dé- liés. Enfin l'Epéire fasciée, la soyeuse, échappent presque aux yeux, et doivent du moins dérouter les élans des gros lézards verts par les balancemens rapides qu’elles impriment à leur toile si large et si forte. Ces oscillations se continuent quelquefois pendant un quart d'heure, et augmentent de vivacité et d’éner- gie à mesure qu’on inquiète davantage l'animal. Bien plus ra- pides encore sont celles que font exécuter les Pholques à leur corps suspendu à ses pattes longues et filiformes : c'est sans exa- gération qu'on peut dire qu’il devient alors invisible, et tel est sans doute le but de ce balancementinstinctif qu'exécutent aussi les Tipules et autres insectes à pattes fines et allongées. Toutes ces tactiques ne mettent pas les Aranéides à l'abri des atteintes des rombreux ennemis friands de cette chair molle et succulente qui plaisait si fort à la savante Anne de Schurmann et au célèbre Faïande. Les plus jeunes surtout deviennent la proie d’une foule d'animaux voraces , et si l’on y joint la quantité de celles qui périssent presque en naissant, faute de nourriture ou faute d’un abri d’une force suffisante contre les pluies, etc., on s’étonnera moins de ne pas les voir se multiplier davantage malgré leur étonnante fécondité. Indépendamment des Mammi- fères et des oiseaux insectivores, des Lacertiens, des Batraciens, il faut compter encore, parmi ces ennemis , les Scorpions, les Scutigères qui dévorent les araignées des appartemens , des ma- sures ; la Scolopendre mordante, qui attaque les pius grosses au moins parmi les espèces souterraines, les enveloppe, les garrotte de vingt bras àa-la-fois, les perce de ses crochets non moins ve- puGès. — Sur les Aranéides. 217 nimeux que les leurs, et les mange ensuite jusqu’au bout des pieds. Le Prega-Diou des Languedociens (Mantis religiosa) en fait autant, des araignées campagnardes qu’il peut atteindre hors de leur toile; les plus fortes ne résistent pas à ces bras tran- chans, dentelés et crochus qu'on nomme pattes ravisseuses. C’est aussi avec ses pattes chéliformes que notre Scorpion com- mun saisit et mutile les araignées; les Ségestries, les Epéires, ne peuvent lui résister; mais il a été quelquefois victime dans des combats forcés avec la grande Lycose, quand celle-ci par- venait à le saisir par le ventre, évitant ainsi à-la-fois et l’aiguil- lon de la queue qui ne peut se recourber que vers le dos, et ces serres redoutables dont le renflement loge un muscle puissant, et qui peuvent en conséquence couper sans difficulté les pattes saisies entre leurs mors, ou écraser le corselet , mais qui ne peu- vent manœuvrer que dans un plan parallèle à la longueur du corps ; aussi le scorpion d'Europe ne cherche:t:il pas ces com- bats comme on l’a cru, et ne s’adresse-t-il en aggresseur qu'aux individus les plus petits, les plus faibles et les plus mous. Parmi des ennemis moins grands encore les Araignées en comptent quelques-uns de non moins dangereux. Je ne ferai que mentionner les parasites qui les infestent quelquefois, soit à l’intérieur, soit à l'extérieur ; telles sont en premier lieu les Filaires et certaines larves d'insectes, peut-être dOcyptères, comme celles que M. Léon Dufour à trouvées dans le Pentatome gris : ce qui me le fait croire, c’est qu’une de ces larves à bords doublement crénelés , à corps aplati, élargi en arrière, avait à l'extrémité postérieure deux plaques stigmatiques, et cette ex- trémité, placée dans l’une des poches pulmonaires de la Mygale maçonne, le parasite se servant ainsi, comme dans le penta- tome, des organes de sa victime pour respirer à son aise. En deuxième lieu, ou comme parasites extérieurs, nous signalerons les larves de Trombidions qui, de même que celles dont les Faucheurs sont infestés, se fixent immobiles sur diverses parties du corps et quelquefois épuisent l’araignée, mais le plus souvent lincommodent à peine; elles sont plus grosses que celles des Faucheurs, mais également rouges et hexapodes. Mais les Ara- > néides ont bien plus à craindre des Sphèges. Diverses espèces 218 e DUGÈS. — Sur les -Aranéides. paraissent s'attacher de préférence à la poursuite de telles ou de telles araignées ; le Sphex albicinctus s'attache particulièrement à la Lycose narbonnaise et les individus qu’il attaque de préfé- rence sont ceux de moyenne taille, c’est-à-dire qu'ils le dépas- sent toujours considérablement en volume. Piquée par l’aiguil- lon vénénifère de cet insecte, l’araignée tombe dans la torpeur et se laisse entrainer, sans pouvir opposer la moindre résistance Jusqu'au trou préparé d'avance où elle est ensevelie pour servir de pâture aux jeunes larves dont les œufs y sont déposés en même temps qu'elle. J'ai arraché à son vainqueur une de ces Lycoses déjà totalement immobile; j'ai voulu voir si elle était blessée à mort, et, dans le cas contraire, combien durerait l’en- gourdissement produit par le venin de l'hyménoptère. Ce n'est qu'au bout de huit à dix jours qu’elle à commencé à remuer l'extrémité de lune ou de Pautre patte et à avaler quelques gouttelettes d’eau ou de ma salive déposée sur la bouche. Cha- que jour les mouvemens devinrent plus étendus quoique la tor- peur fût habituellement profonde encore en l'absence de tout excitant : au bout d’un mois l’aranéide put saisir une mouche que je faisais bonrdonner sur ses mandibules; et enfin, après sept semaines environ, elle avait recouvré assez de vigueur et d'activité pour se soustraire à la captivité. Ceci confirme donc bien positivement l'opinion de Réaumur qui attribue au venin du Sphège la propriété de stupéfier sans tuer la victime destiné à fournir ainsi aux petits à naître, une pâture facile et toute fraîche en même temps. nn De PAYEN. — Sur un Crustacé des marais salans. 219 Nore sur des animaux qui colorent en rouge les marais salans , Par M. PAyen. ( Lune à Y'Academie des Sciences.) Lorsque je partis dernièrement, accompagné de M. Bru- gnelli, pour un voyage dont le but principal était de visiter les beaux établissemens fondés en Toscane par M. Larderel, et d'y étudier les circonstances de la production de l’acide bo- rique dans les suffioni volcaniques des Maremmes, je priai plusieurs membres de l’Académie de me recommander quelques recherches à faire sur ma route. M. Dumas m'indiqua l'étude du phénomène qui précède et annonce la cristallisation du sel dans les marais salans, et dont la cause était encore inconnue. Les observations des voyageurs et des habitans de nos con- trées méridionales ont appris depuis iong-temps que les eaux de la mer, spontanément rapprochées sous l'influence de Fair et de la température, arrivent à un terme où bientôt toute évapo- ration ultérieure éliminera de la solution une quantité équiva- lente de chlorure de sodium; ie sel ne se montre pas encore à l’état solide, maïs un phénomène précurseur donne la certitude qu'il ne tardera pas à paraître : on aperçoit sur toute la super- ficie du lac artificiel, peu profond, appelé fable, une légère écume rouge; à son aspect, les ouvriers disent : /a table va sauner ; Et dans un temps ordinairement très court, qui dépend de l'état de l'atmosphère, la précipitation du sel commence en effet. La même substance rouge se remarque sur les tas de sel ; elle répand une odeur aromatique , fort analogue à celle qu’ex- halent les violettes, et agréable surtout lorsque la masse d'air ambiante est assez grande pour atténuer l'odeur putride qui l'accompagne. La coloration rouge et l'odeur en question étaient-elles dues à une matière organique ou organisée, à des êtres végétaux ou \ 220 PAYEN. — Sur un Crustacé des murais salans. animaux, à leurs débris, ou encore à des substances minérales ? Ces hypothèses étaient toutes permises , et l'observation directe sur les lieux pouvait seule faire espérer la solution du pro- blème. Je m’empressai, à mon retour en France , de me rendre à la saline de Marignane , dont les directeurs , MM. Frémerat, m'of- frirent avec la plus grande obligeance et le zèle le plus éclairé tous les moyens d'atteindre promptement le Lut de cette ex- cursion. Voici les résultats de nos recherches : l’eau de la mer, in- troduite d’abord dans un très vaste bassin que forment des murs glaisés, dépose une grande partie des matières terreuses en suspension, divers débris d'animaux et de végétaux, ainsi que plusieurs de ces êtres vivans. A l’aide de vannes ou de bondes et de canaux, on fait passer l’eau de mer successivement dans plusieurs réservoirs que sépa- rent des murs aroileux. Cette eau s’épure graduellement en même temps qu’elle se concentre de plus en plus, en sorte que les corps étrangers observés dans le premier bassin, où la densité est de 1 degré, ne s’aperçoivent plus dans les autres réservoirs , et que, jusques à ceux où l’aréomètre Baumé marque 15 degrés, la limpidité de l'eau est complète; on n’y découvre aucun corps flottant ou suspendu, mais seulement une certaine quantité de vase qui reste ordinairement au fond. Au-delà de ce terme, et surtout près du 20° degré , la solu- tion.est encore limpide, mais on peut découvrir de distance en distance, entre deux eaux, des parties nuageuses grisâtres ou d'un gris verdätre, qui, examinés de près, laissent distincte- ment voir une nouvelle population de petits animaux nageant en troupes, ou divisés, qui, dans leurs mouvemens individuels rapides , s'approchent, restent en présence, et s’écertent si vite qu'ils semblent se repousser. Quelques-uns d’entre eux, vus au microscope sur le marais même, paraissent diaphanes et presque incolores dans toutes les parties de leur organisation , excepté : 1° aux points noirs fixes et écartés où sont leurs yeux; 2° sur le devant de leur sont se di > - re x pAyEN. — Sur un Crustacé des marais salans. 291 tête, et: 3 dans l'étendue de leur canal digestif, qui était gri- sâtre, opaque et complètement rempli. MM. Julien de Marseille et Frémerat de Marignane ont bien voulu vérifier ces faits avec moi. D'ailleurs, je n'insisterai ici que sur le dernier, devant obtenir plus tard une description qui par le nom de son auteur puisse-mériter toute la confiance de l’Académie. Dans les bassins suivans des salines, l’eau augmente encore de densité; un peu avant qu’elle n’ait atteint le terme de 25°, tous les petits Crustacés, devenus rougeâtres, arrivent à la su- perficie de la solution , et forment une écume rouge dans la- quelle se confondent bientôt leurs parties désagrégées. Celles-ci répandent aux alentours l'odeur caractéristique en question, et aucune autre substance ne paraît concourir à la production de ce double phénomène. Les dernières pluies ayant augmenté les eaux contenues dans les tables et les réservoirs, ramenérent à 10° les solutions, rapprochées déjà à près de 20 degrés, et formérent une se- conde couche surnageante d’eau plus légère et moins salée ; les ‘ diverses troupes de nos petits animaux se tinrent alors en géné- ral dans la couche inférieure. Les plus petits de ces Crustacés avaient de 3 à 5 millimètres de longueur , le plus grand nombre étaient longs de 8 à 10 mil- limètres , enfin les plus gros avaient 16 millimètres ; quelques- uns de ces derniers portaient vers l'extrémité de leur corps, à la naissance de la queue, un paquet arrondi contenant des œufs, et visible à l'œil nu. ÆEn plongeant au milieu de leur troupe un flacon de 2 déci- litres renversé, plein d'air, et le retournant alors , il fut facile d'en prendre une centaine environ. Quelques-uns de ceux qui portaient des œufs furent pêchés à part, plus rapprochés de la superficie du liquide. J’eus grand soin, pendant le reste de la durée de mon voyage, c’est-à-dire du 25 octobre au 1 no- vembre, de préserver le flacon des trop fortes secousses et de la gelée; plusieurs fois, chaque jour, je le débouchai pour re- nouveler Pair, qui contractait promptement une odeur assez forte au-dessus de la solution : le froid et le défaut d'air paru- 292 PAYEN. — Sur un Crustaté des marais salans. rent à plusieurs reprises engourdir les animaux, et les circon- stances contraires les rarnimer. A mon arrivée, la pétite colonie était bien portante, à quel- ques individus près; cependant tous étaient moins agiles, et présentaient leur tube digestif à demi vidé et diaphane; une teinte légèrement rosâtre dominait parmi eux; et lon æperce- vait au microscope quelques points plus rouges. Je m’ermpressai de rendre compte à M. Dumas des 6bsérva- tions précédentes, de lui. montrer l'échantillon que j'avais rap-+ porté, et de le partager avec M. Audouin , qui voulut hien me promettre une description et la détermination exacte de l’es- pèce des petits habitans de nos salines , bien qu’il ne deutât pas dès-lors que ces animaux ne fussent des Crustacés de l’ordre des Branchiopodes très voisins du genre Branchipe. De mon côté, je m’occupai d'observer sur eux l'influence des solutions à plusieurs degrés de concentration, et de quelques autres réactifs. Je répartis le reste de mon échantillon dans quatre solutions de sel marin brut, faites à l’eau de rivière, et marquant pour la température de 16° centésimaux 10°, 15°, 20° et 23 à l’aréo- mètre de Baumé. Voici ce qui se passa relativement à chacune d'elles : La so UTION À 10° fut séparée en denx parties : dans l’une, on suspendit une parcelle de mie de pain, et dans l’autre un très peut morceau de chair musculaire ; les petits animaux s’ap- prochèrent fréquemment de ces substances; ceux qui restèrent le plus long-temps ou constamment sur la chair devinrent moins actifs; plusieurs moururent; ces derniers furent enlevés. La solution fut renouveléeet la viande remplacée par une miette de pain. Ceux qui étaient languissans reprirent alors en partie leur vivacité. Le lendemain ; on changea la solution ; elle fut remplacée par un mélange de 33 parties de solution de sesqui- carbonate de soude et 67 de chlorure de sodium ; l’une.et l’autre à 10° de l’aréomètre , et filtrées, contenaient toujours la par- celle de pain. Les petits animaux y reprirent graduellement.des mouvemens plus rapides, etse conserverent dans le même état PT, PAYEN. = Sur un Crustacé des marais salans. 293 «le santé péndant quarante-hmt heures sans renouvellement du hquide. Voulant alors essayer si l’on parviendrait à remplir leur tube digestif à l’aide d’un corps solide très divisé, on mit plusieurs des petits Branchipes dans le même mélange non filtré. Le car- bonate de chaux , en se précipitant , troubla la solution, et le lendemain on le vit au microscope brun-opaque par transmis- sion et blanc par réflexion, tapissant les parois du conduit di- gestif dont il gardait la forme en quelque sorte moulée parmi les excrémens. Cette action sur les corps solides en suspen- sion explique bien le phénomène de clarification ôbservé par les ouvriers et rapporté par Schlosser, suivant la lettre de M. Audouin ; on conçoit d’ailleurs que la substance inorga- nique, en augmentant le poids spécifique de tous les individus, devait les aider beaucoup à plonger au fond du liquide ; nous verrons plus bas que d’autres moyens d’ingestion leur permet- tent de s'emparer des substances déposées ou même faiblement agrégées au fond des réservoirs. L'autre solution à + 10° (qui contenait le pain) commencça à se troubler et à devenir très légéreinent acide au bout de wingt- quatre heures, Tous les individus qu’elle contenait devinrent moins vifs, et restèrent la plupart près de la superficie. On changea le liquide, et la santé parut revenir dans toute la pe- tite population. Les mêmes soins et les mêmes phénomènes se reproduisirent le jour suivant; le conduit digestif resta pour tous les individus en grande partie vide; on parvint à le faire remplir en ajoutant quelques gouttes de carbonate alcalin qui troublèrent la solution. La socuriox 4 15° renouvelée chaque jour, soit avec le pain, soit avec la chair musculaire, employés successivement ; entre- tint mieux que les précédentes l’activité de-ses habitans. Cepen- dant, le quatrième jour, ceux-ci devinrent moins vifs; le plus grand nombre restaient à la superficie, leur tube digestif était en grande partie vidé : en alcalisant faiblement le liquide, on les ranima très sensiblement ; au bout de vingt-quatre heures, on les sépara en deux flacons, dans l’un desquels la solution fut étendue à 5°, et une petite lamelle de gélatine fat ajoutée à 224 PAYEN. — Sur un Crustacé des marais salans. tous deux; on l'y laissa pendant trois jours, en renouvelant trois fois les deux solutions : les petits animaux vinrent fré- quemment se frotter sur chaque lamelle gonflée; ils se main- tinrent en bon état et fort vifs. La gélatine employée étant sensiblement insoluble à lei froide, dans laquelle elle se gonfle beaucoup , il fut facile d’ob- server la diminution de son volume et d'en conclure qu’elle était attaquée réellement par nos Crustacés. Cependant , afin d'obtenir une démonstration directe de son passage et de son séjour dans le conduit digestif, je remplaçai la lamelle incolore par une autre qui était colorée en un beau rouge de carmin et ne se dissolvait pas dans le liquide : quarante-huit heures après, il fut facile de voir que tous les petits nageurs avaient rempli en totalité on en grande partie leur tube digestif avec la sub- stance rouge dontils continuaient à venir-de temps à autre s’ap- provisionner au fond du vase. Dans deux autres essais, on fit varier encore la coloration du même conduit, et on le rendit opaque en délayant dans le li- quide un peu d’encre de chine (formée de noir de fumée et de gélatine } ou de l'argile grisâtre très fine : lorsque celle-ci fut dé- posée au fond du vase, on put observer les petits Crustacés ve- nant l'y chercher, afin sans doute de continuer ainsi à se tenir lestés convenablement et de mieux vaincre la résistance que la densité du milieu environnant oppose à leur immersion. : Dans la socurion À 20°, presque tous les individus restèrent très agissans pendant deux jours; le troisième, quelques-uns moururent ; les autres s'étaient beaucoup ralentis dans leurs mouvemens et flottaient à la superficie : on les ranima en alca- lisant, puis filtrant le liquide; on n’y ajouta d’ailleurs aucun corps solide qui püût les alimenter; le lendemain , ils retombé- rent dans le même état de prostration : vus au microscope, ils étaient complètement diaphanes ; leur tube digestif, entière- ment privé de substances solides , était én grande partie rempli de gaz: on les ranima encore en changeant le liquide, mais plusieurs moururent successivement après avoir quelque temps flotté a la superficie , et tous les autres succombérent dans les vingt-quatre heures suivantes. a al ir TEE ei PAYEN. — Sur un Crustaté des marais salans. 225 Tous ceux des petits Branchipes qui, retirés des liquides salés furent placés dans de l’eau douce, moururent au bout de deux à quatre jours. La sozurron À 23° rendit très pénibles les efforts que tous les individus faisaient pour gagner le fond , où on leur avait comme aux autres ménagé un peu d'ombre qu’ils semblaient recher- cher, y voyant peut-être une apparence du dépôt ou sédiment utile à leur bon entretien. Vingt-quatre heures après, tous languissaient à la superficie, où ils moururent successivement. Leur couleur rougeûtre et leur transparence avaient augmenté. Le surlendemain, la plu- part étaient tombés au fond du vase : ils prirent peu-à-peu une teinte brune partielle. Le fait qui précède montre comment, avant le terme de l’é- vaporation où le sel se précipite, c’est-à-dire de 23 à 2bo, les eaux des marais salans doivent se recouvrir de l’écume rouge observée. . On pourrait conclure des autres expériences , que lalcali- nité des eaux est favorable aux petits animaux en question, et que ceux-ci supportent aisément la présence de fortes proportions de chlorure de sodium et de sesquicarbonate de soude dans le milieu où ils vivent (1); que leur aptitude à s’empa- rer des corps très fins en suspension dans les liquides, justifie et explique la dénomination de C/earers donnée par les ouvriers anglais aux réservoirs où on les trouve; qu'enfin, dans les circonstances ordinaires de leur développement, la rapidité de la concentration des eaux salées ne leur laissant que quelques jours d'existence, n’aurait pas permis, plus tôt, de les bien dé- crire et de constater leur connexité avec les phénomènes de la (x) Propriété remarquable qui fera paraître possible et même probable leur identité avec les petits animaux trouvés par M. F. Darcet dans les lacs de Natron en Égypte. (Voir ci-après.) © J'ai observé que l'addition du bicarbonate de soude dans le liquide salé convient très bien. aussi aux petits Branchipes de nos marais salans. C’est même dans une solution à 10 degrés, dont la substance saline était formée de 0,34 de bi-carbonate de soude et de 0,66 de chlorutre de sodium, que , toutes choses égales d’ailleurs, ils ont vécu le plus long-temps; il y en existe encore deux aujourd'hui 25 novembre, tandis que dans tous les autres liquides il ne reste plus aucun individu vivant depuis six jours. VI, Zoor, — Octobre, 1ÿ A 226 AUDOUIN. — Sur un Crustacé des marais salans. coloration rouge et de l’odeur spéciale des eaux à l'instant où elles vont saliner. | EXAMEN des crustacés rapportés de la saline de Marignane. (Extrait d’une lettre de M. Aupouix à M. Payex.) « J'ai examiné le petit animal que vous n'avez remis, et je vous transmettrai bientôt le résultat dé mes recherches. Il est évident, comme je vous l'ai dit d’abord, que c’est un crustacé de l’ordre des branchiopodes; quant à sa détermination spécifi- que, quoiqu'elle présente plus de difficulté, à cause du peu de soin qu'ont mis en général les naturalistes à décrire et à fi- gurer les crustacés de petite taille, je crois, dès à présent, pou- voir affirmer que c’est ou le cancer salinus de Linné ou une es- pèce très voisine, . « Linné est le premier auteur systématique qui, en 1767, ait mentionné ce crustacé dans la douzième édition de son Systema naturæ (Insecta, p. 1058), il se trouve, dit-il, dans les salines de : Lymington en Angleterre. Il cite le docteur ScAlosser , comme ‘Vayant récolté dans cette localité. | « Depuis la publication du Systema naturæ jusqu'en 1815, époque sur laquelle je reviendrai plus loin, tous les auteurs systématiques reproduisent plus ou moins fidèlement la phrase de Linné, et aucun ne paraît avoir eu l’occasion d'examiner de nouveau l'animal qu'il décrit; quelques-uns citent le nom de Schlosser , mais*d’autres omettent de le rappeler, et cependant, le docteur Schlosser ne s'est pas borné à recueillir le petit crus- tacé, comme on pourrait le supposer d’après la citation de Linné, mais il l’a décrit et figuré. Le naturaliste suédois et tous les na- turalistes qui ont écrit jusqu’à nos jours, paraissent avoir ignoré ce fait; il est donc bon de le faire connaître, et j'entrerai ici dans quelques détails pour réhabiliter le premier auteur dans ses droits, « Le docteur Schlosser a consigné ses observations sur le erus- tacé des salines dans une lettre écrite de Lymington à la date du 7 octobre 1755, et qui a paru avec figure dans le numéro de aupourx. — Sur un Crustacé dés marais salans. 327 juillet 1756, d’un recueil format in-4”, imprimé à Paris, et ayant pour titre : : Observations périodiques sur la Physique, l'Histoire naturelle et les Beaux-Arts; par Gautier. Quelques années plus tard, en 1765, Alléon Dulac a réimprimé cette lettre par extrait dans le tome IT, et à la p. 11, de ses Mélanges d'histoire natu- relle (format in-8°). « Je visitais ce matin, dit le docteur Schlosser , les salines qui se trouvent ici le long du bord de la mer, et, apres avoir vu tout ce qui regarde la manière de réduire l'eau marine en une lessive extrémement âcre et saline, je fus frappé d'y découvrir des millions d'insectes les plus agiles du monde. Leur couleur rouge teignait l’eau d’une vaste citerne d’eu on la tire pour la mettre dans des chaudrons. Je ne manquai pas de remplir une bou- teille de cette eau et de suivre de mon mieux les opérations de mes insectes dans leur élément chéri. Leur corps n’est qu’un tube cylindrique ou vermiculaire très mince et d'environ un tiers de pouce de longueur. Au bout ide ce tube on voit deux petites antennes très fines et assez courtes, et deux yeux noirs, ronds et relevés. Leur place est à chacun des côtés, et au milieu se trouve une autre petite tache noire qui peut-être sert de troi- sième œil. Une bouche courbe est placée sous ces yeux, et aplatie contre, la poitrine; toutes ces parties composent la tête. Le corps est pourvu de 22 jambes natatoires, qui occupent toute la moitié de la longueur du tube; il ÿ en a 11 de chaque côté, elles sont fort près l’une de l’autre; la plus longue est an milieu, et c’est de là que les autres décroissent insensiblement, en sapprochant ou de la tête ou de la queue. Cette dernière partie est toute nue, l'anus en fait l'extrémité, et l’on y aperçoit souvent une fente. Outre ces divers organes communs à chacun des individus, il y en a qui ne se trouvent que dans quelques- uns, et ceci joint aux actions qui leur sont particulières me pa- rait constituer la différence entre les mâles ét les femelles. Les premiers ont tous entre leur tête et les premières jambes nata- toires, deux espèces de bras longs et plats; lèurs articulations mettent l’insècte en état de les plier et de les mouvoir presque en tous sens. Les femelles ont sous le ventre, près des dernières jambes natatoires, un sac mou et membraneux , qui par $a trans- 15, 228 AUDOUIN. — Sur un Crustacé des maruis salans. parénce permet d’y apercevoir plusieurs œufs; ce sac èst com- munément trois ou quatre fois plus gros que le diamètre du tube. Les individus qui ont cet organe, n’ont jamais les bras dont je vous ai parlé, et ceux qui ont les bras se distinguent d’ailleurs des autres par leur empressement à sauter sur leur dos , dès qu'ils les rencontrent en nageant. Les deux bras leur servent à serrer le sac dont j'ai vu sortir alors plusieurs œufs. Les insectes unis nagent quelque temps ensemble; à peine sont-ils séparés que d’autres prennent leur place, et jamais je n'ai vu des insectes de la même espèce unis de cette manière. Je n'ose décider si cette action est un véritable accouplement et si mes insectes à bras sont les mâles ou les accoucheurs des femelles, n'ayant pu, à l’aide d’un très bon microscope, voir autre chose que ce que je viens de vous dire. J'aurais bien sou- haité pouvoir conserver. une paire de ces insectes dans leur si- tuation favorite; mais ni l’eau fraîche d’une fontaine, ni le vin de Portugal, ni l’esprit-de-vin même n’a pu les faire mourir en moins d’une demi-heure, ni les empécher de se séparer. » « J'oubliais de vous dire que ces insectes se meuvent avec une prodigieuse vitesse : ils font mille sauts, se culbutent sou- vent et peuvent nager sur le dos. Les gens qui travaillent aux salines leur donnent le nom de brine-worms (ver de saumure ils m'assurérent qu'ils y sont en hiver aussi bien qu’en été, mais que si la lessive n’est pas forte , il ne s’y en trouve que peu. Je leur ai demandé si ces vers ne se transformaient point en mouches ; mais ils m'ont tous répondu négativement, et parmi tant d'in- sectes de ce genre que j'ai examinés, je n’en ai vu aucun plus ou moins formé que les autres , ou qui montrât quelque dispo- sition à se métamorphoser. » | « Les détails que je viens de transcrire, poursuit M. Audouin, étaient restés ignorés des naturalistes, qui ne connaissaient en- core le cancer salinus que par la description très succincte de Lin- né, lorsqu’en 1815 M.Thomas Rackett publia dans le tome XI des Transactions de la Société Linnéenne de Londres (part. 2°, p.205) un mémoire sur le Cancer Salinus de Linné qu’il avait observé à Lymington, c'est-à-dire dans cette même localité où 60 an- nées avant Schlosser l'avait étudié; et cependant M. Rackett auvouin. — Sur un Crustacé des marais salans. 229 croyait être le premier à en donner la figure. Cette figure au trait (PI. 14, fig. 8, 9, 10), qui est moins exacte que celle de Schlosser quant au nombre des pattes, ne lui est pas supérieure pour les autres parties, et elle n’est accompagnée d'aucune autre descrip- tion que celle de Linné. L'auteur entre dans quelques détails qui confirment ceux qu’on doit à Schlosser. Ces petits Crustacés se trouvent, dit-il, par myriades dans les réservoirs où l’on dépose la saumure avant de la faire bouillir ,et où elle reste une quinzaine de jours exposée au soleil. Ces réservoirs se nomment C/earers, parce que la liqueur y devient claire; et les ouvriers attribuent en partie cet effet aux mouvemens rapides et continuels du pe- tit Crustacé qu’ils nomment Brine-Vorm, c'est-à-dire er de la Saumure. Les ouvriers sont si convaincus de ce fait, qu’ils ont l'habitude de transporter quelques vers d’un réservoir qui en est pourvu dans un autre qui en manque, afin d'opérer lef- fet qu'ils desirent. Lorsque ce liquide s’augmente beaucoup par l’eau de la pluie (du mois d'octobre au mois de mai, époque du- rant laquelle les travaux cessent), on ne voit plus qu’un petit nombre de ces Crustacés; mais, à l'approche de l'été, ils repa- raissent en grand nombre. « Si la figure de Schlosser, dit M. Audouin, eût été connue des auteurs systématiques, ils n ‘auraient pas He l'animal dont il s’agit parmi les Cancer et ils n'auraient pas hésité à le rapprocher d’un petit Crustacé qu’on trouve dans les mares d’eau douce, et que Schaeffer a fait connaître dès l’année 1754, sous le nom d’Apus Pisciformis ; il s'en rapproche à beaucoup d’égards et peut-être serait-il convenable de le réunir au genre Branchipe que l’on a créé pour y placer l'4pus Pisciformis. Cependant, le docteur Leach a cru devoir fonder un nouveau genre sous le » nom d’AÆrtemia(1) qui a pour type le Cancer Salinus de Linné. Nul doute que le Crustacé que vous m'avez remis n’appartienne à ce genre Ærlemia, mais je ne saurais encore vous dire sil dif- | (x) Dictionnaire des Sciences naturelles , article Entomostracés, Lamarck avait établi de son côté, et vers la même époque , un nouveau genre sous le nom d’Artemisus , et renfermant de même le Cancer salinus L, Le D’ Leach cite une seconde espèce différente de celle-ci , et dont Latreille fait un genre sous le nom d’Æulimène ; quoiqu’elle soit originaire de la Méditerranée , on ne sauräit lui comparer l'espèce des marais salans de Marseille, # 230 AUDOUIN. — Sur un Crustacé des marais salans. fére spécifiquement de lÆrtemia Salina Lxacu (Cancer Salinus, Liné), ou, en d’autres termes, si l'espèce des marais salans de Marseille est exactement la même que celle des réservoirs de Ly- mington ; ce sera un point facile à décider, si vous où moi pou- vons obtenir de l'obligeance de nos correspondans d'Angleterre, quelques Crustacés de cette localité. « Je ne terminerai pas cette lettre sans vous phrlèr d’un fait curieux qui m'a été communiqué , il y a quelques années, par M. Félix D’Arcet. À son retour d'Égypte en 1830, il voulut bien me remettre deux très petits Crustacés conservés dans l'alcool, mais qui malheureusement étaient un peu détériorés. L'examen qu'il me fut possible d’en faire, ne me permit pas de douter qu'ils ne fussent voisins des Branchipes, et je supposai même, à quelques traits de leur organisation, qu’ils appartenaient au genre Artemia de-Leach; mais comme je n’ayais pas encore eu l’occasion d'observer moi-même des Crustacés de ce genre, j'é- tais resté dans le doute et je n’avais pas cru devoir publier mon observation incomplète. Aujourd’hui que, grâce à vous, j'ai pu les étudier en détail, je n’hésite pas à rapporter au genre A#rte- mia, ces petits Crustacés, qui devront peut-être former une espèce distincte. « Or, voici le rapport curieux que les observations de M. Fé- lix D’Arcet, relativement à ces Crustacés, présentent avec les vôtres ; c’est qu'ils habitent en Égypte divers lacs de natron (les lacs de Goumphidich, Ahmaruh et Bédah). Le fond de ces lacs est couvert d’une couche de cristaux de natron et dé sulfate de soude mélangés de sel marin , et quant aux eaux dans lesquelles ils nagent, elles contiennent en dissolution du carbonate de soude, du sulfate de soude et des sels magnésiens; leur densité est de 1,255. Ces eaux, qui sont colorées en rouge, ne renfer- ment ni poissons, ni coquilles, ni aucun autre animal. Leur température était, pour l'un deux (le lac Goumphidich), au mois de mars 1830, de 26 degrés cent. Mais pendant l'été, elle monte jusqu’à 55 et même 60. M. D’Arcet ne croit pas que la coloration en rouge soit due à la présence de ces Crustacés, parce que, dit- il, il n’en a vu que 5 à 6 individus par litre d’eau; mais il est très possible que la matière colorante soit formée par les débris enmenrEnc. = Sur l'existence d’Infusoires fossiles. 231 très minces de ces animaux qui, à une autre époque, pullulent | en plus grand nombre dans ces lacs, et qui succombent peut- être, comme cela a lieu dans les marais salans de Marseille et dans les réservoirs de Lymington, lorsque le liquide prend plus de densité. | | « Je joindrai au mémoire que je rédige sur l'Artémie des ma- rais salans de Marseille quelques détails sur l’organisation de l'Artémie des lacs de natron en Égypte.» | os OBSERVATIONS PRÉLIMINAIRES sur l'existence d’Infusoires fossiles et sur leur profusion dans la nature , Par M. EURENGERG. (1) Au mois d'avril de cette année, je communiquai à PAcadé- mie (2) le résultat surprenant que m’offrirent les sources miné- rales de Carlsbad , dont les Infusoires sont les mêmes que ceux des côtes françaises de l'Océan atlantique et des eaux de la mer Baltique. Je suis redevable de cette observation à la bonté de \ M: Christian Fischer, propriétaire de là fabrique de porcelaine à Pirkenhammer, près Carlsbad, qui voulut bien m'envoyer, à » Berlin, sur ma prière, un échantillon de l'eau de ces sources renfermant des Infusoirés vivans. Dans le but de vérifier en- core et de compléter ce résultat , %e sollicitai un second envoi que j'obtins au bout de quinze jours dans un très bon état. M. Fischer me fit savoir en même temps, vers le 20 juin, qu'il avait fait lui-même une observation importante. Il a re- marqué, en effet, que les dépôts siliceux (Xteselguhr) des tour- bières de Franzbad, auprès d’Egn en Bohème, déjà indiquées par “ M.Radig (et non pas Stadig) dans les Annales des sources miné- « rales dé l'Allemagne;etc. publiées par MM. de Græfe et le D'Kalisch L à (1) Extrait des Annales de Poggendorff, t, 38. (r) Voyez le Compte-Rendu des travaux de l'Académie des Sciences de Berlin pour 1836, pages 36 , £o et 55, et les Archives de Berlin pour l'histoire uaturelle, 1836, p. 240. 232 EHRENBERG. —< Sur l'existence d’Infusoires fossiles. (p.193, année 1836), se composent presque exclusivement d'enveloppes de Navicules, et semblent provenir du fond d’une mer échauffée par le feu de quelque volcan. En même temps que cette annonce, M. Fischer me fit parvenir un échantillon de cette masse siliceuse fossile ( que j'ai déposée dans le Cabi- net Royal de Minéralogie, et qui avait originairement un peu plus de deux pouces de longueur, onze lignes de largeur et ueuf lignes de hauteur), en me priant de déterminer l'espèce de ces animaux , et de publier son observation en même temps que le résultat de mon examen. Je crois que ce résultat se borne à des considérations parti- culières, mais encore provisoires, que je vais présenter ici. D'abord, l'examen microscopique et l'observation de M. Fis- cher, d’après laquelle le Xieselguhr de Franzbad se compose presque entièrement de Navicules , ainsi que la grande transpa- rence et la pureté des petits débris minéraux , rendent tout-à- fait vraisemblable qu’une chaleur intense a pu occasioner leur combustion et leur agglomération en masses d’un grand va- lume. Mais l'opinion d’après laquelle ils auraient appartenu à un terrain marin devient bientôt invraisemblable, lorsque l’on considère que la masse principale se rapporte exactement par les formes ainsi que par la figure, la grosseur et le nombre des stries intérieures , au /Vayicula viridis, qui est encore aujour- d’hui répandu très abondamment dans toutes|les eaux douces des environs de Berlin et d’autres endroits. De plus, outre les Navicules, très faciles à reconnaître dans l'échantillon des tour- bières, ce même échantillon renfermait plusieurs espèces dif- férentes, quoique se rapportant également à celles aujourd’hui vivantes ; elles y étaient les unes à l'égard des autres dans des proportions très diverses et généralement aussi, en quantité proportionnellement bien moindre que les premières. Ayant examiné au microscope les échantillons même du Ca- binet Royal de Minéralogie, tant ceux du Xieselguhr de lile- de-France, analysées chimiquement par M. Klaproth, que la farine fossile ( Bergmehl) de Saïnt Fiora en Toscane, qui por- tent des indications écrites de la main de Klaproth, j'ai trouvé que ces substances tout entières se composent presque exclu- ENRENRERG, —— Sur l'existence d’Infusoires fossiles. 233 sivement d’un grand nombre d'espèces différentes d’Infusoires fossiles, de sorte qué toute cette masse siliceuse, décrite par Klaproth, se trouve être composée d’enveloppes d'Infusoires. Déjà, en 1834, je confirmai à l'Académie , dans la courte no- tice qui est insérée en supplément à mon troisième Mémoire sur l’organisation des animaux microscopiques, la découverte de M. Kützing , alors pharmacien, et aujourd’hui professeur au Gymnase, qui avait pour objet de prouver que les enveloppes de Bacillaires sont formées de silice. Les expériences que je fis alors et celles de M. Henri Rose, prouvèrent qu’on trouvait cette substance , non-seulement dans les enveloppes de Bacillai- res, mais encore dans celles d’autres espèces vivantes. Ainsi cette nouvelle observation de M. Fischer et les recherches que j'ai faites sur le Xieselguhr, analysés par Klaproth , confirment en- core ce même fait. Comme l'intérêt qui s'attache à ce phénomène paraissait de- voir être très grand, je comparai plusieurs autres substances siliceuses et terreuses du Cabinet Royal de Minéralogie, que M. Weiss mit à ma disposition avec beaucoup de bienveillance, sans obtenir cependant des résultats plus étendus sur l'objet de mes recherches. Par une heureuse inspiration, il me vint en pensée que des enveloppes de ce genre, semblables aux végétaux de nature siliceuse, tels que la Prêle, l'Equisetum, étaient peut-être employées à polir dans les arts. J'achetai donc chez les droguistes de Berlin les différentes espèces de tripoli et de terres à polir pour me livrer à mes recherches. J'examinai d’abord le tripoli ordinaire, ou le tripoli feuilleté (Zlætter. tripel), et Je reconnus aussitôt qu'il se composait également et unique- ment d’enveloppes d’Infusoires. Tous les autres étaient d’une nature différente et inorganique. La comparaison de ce tripoli « du commerce, qui passe pour venir du Hartz et de Dresde, avec l'espèce de tripoli classée scientifiquement dans le Cabinet Royal de Minéralogie, me fit reconnaître que ce prétendu tripoli feuil- leté était visiblement une seule et même chose avec la terre à polir désignée dans la Minéralogie de Werner, comme une es- pèce distincte et envisagée depuis de la même manière. Les échantillons provenant de Kritschelberg, près de Bilin, me pré- 234 EHRENRERG. — Sur l’existence d’Infusoires fossiles. sentèrent une ressemblance si parfaite, tant dans l'aspect exté- rieur, que dans les espèces d’Infusoires dont ils étaient compo- sés, que le tripoli feuilleté qui se vend à Berlin provient vi- siblement de Bilin, en Bohême,et non pas de Dresde. Il en est absolument de niême de la terre à polir qui vient de Planitz, près de Zwickau , si toutefois les échantillons que j'ai examinés proviennent bien de l'endroit désigné. Au contraire, cette argile schisteuse (K/ebschiefer) de Montmartre, que: Klaproth a analysée, ne m'a présenté que des traces incertaines d’enve- loppes d'infusoires. Une chose surtout fort importante pour l'examen ultérieur des rapports géognostiques, c’est certaine- ment la présence des Infusoirés fossiles dans la terre à polir de Bilin. On trouve dans ce même terrain les empreintes d’un pois- son perdu, le ZLeuciscus papyraceus de, Bronn d’après Agassiz , et plusieurs empreintes de plantes qui APP NNR évidem- ment à la formation tertiaire. Avant de n'être livré à ces recherches , j'étais déjà porté à at- tribuer une grande influence dans la formation du fer limonite tufacé des marais (Raseneisen), à une espèce d’Infusoire que je découvris en 1834, que j'ai depuis représentée en avril 1835, sur la planche x de mon Catalogue des Infusoires, sous le nom de Gaillonella ferruginea, et qui est peut-être la même chose que l’'Hygrococis ochracea des botanistes. Cependant la petitesse des corpuscules m’empécha d'émettre une opinion aussi impor- tante. Mais la découverte des coques d’infusoires si nombreuses et si variées réunies en’grandes masses, et surtout l'observation que j'ai faite que l'animal dont la pierre à polir de Bilin se com- pose presque exclusivement, est aussi une espèce de Gaïllo- nella, ne me laissent plus aucun scrupule de faire connaître cette obédirätheis On sait que la formation de ce fer limonite (Rasencisenstein), ou autrement du minerai de fer des tour- bières ( Wiesenerze), reconnue comme un fait constant, attira | une grande attention, et qu’elle donna naissance à des théories très nombreuses, mais encore insuffisantes. Je remarquais alors annuellement dans les terrains marécageux et en particulier dans les tourbières des environs de Berlin, à l'époque du printemps surtout, ne masse très voluminetise, d’une couleur de jaune bis réa hd S FHRENSERG. > Sur Poxistence d'Infusoires fossiles. 235 _ d’ocre très intense, qui se changeait quelquefois en rouge de chair; cette masse, qui offrait une grande extension, couvrait souvent le fond des fossés d’une couche épaisse de un à plu- . sieurs pieds. Elle était même très remarquable dans de petits | espaces, dans les traces des animaux qui y paissaient. Cette … masse ést extrêmement fine ét sans aucune cohésion; elle $e divise, an moindre contact, en une infinité de petites parties. Quand, par suite de l’évaporation de l’eau , elle vient à se des sécher, elle ressemble tout-à-fait à de l’oxide de fer, et on l’a prise jusqu'ici pour cette substance. Mais quand on l’examine au microscope, sans employer même un fort grossissement, on y reconnait distinctement des filamens très fins, articulés, dont les articles ont tout au plus un millième de ligne et qui con- sérvent leur couleur jaune. Au commencement de l'été dernier je me suis éonvaincu que ces filamens articulés si fins ne per- daient pas leur forme à une température très élevée, mais qu’ils - prenaient alors une couleur rouge-brune, ce qui est exacte- mérit le cas de l'ocre de fer. Traités par l'acide muriatique, leur couleur disparut, mais leur aspect de filamens articulés ne changea pas; on pouvait aisément réconnaître le fer préci- pité dans la dissolution. Il existe donc un êtré organique très petit éttrès voisin du genre Gaïllonella dans le groupe des Bacil- lariées, qui présente une couleur jaune d’écre et vraisemblable- ment aussi une grande partie des propriétés du fer, de la même manière que les os renferment ‘de la chaux phosphatée. Or, la dissolution de la chaux n'empêche pas la partie gélatineuse de os de conserver sa forme primitive ; de même aussi le Gatllonella . ferruginea, qui présente visiblement une enveloppe minérale, se montre avec lamême forme qu'auparavantaprès la dissolution du fer qu'il renfermait. “ Maintenant que j'ai examiné sous le microscope des minerais - de fer limonite des marais (ARaseneisenerze)très variés de Berlin, de l’'Oural, de New-York et autres lieux, je trouve que l’oxide jaune de fer qu'ils renferment en très grande quantité et qui primitivement les constituait peut-être exclusivement, se com- pose pareillement: aussi, en grande partie, d’articulations régu- lières et liées entre ellés, qui ressemblent à cette espèce de 236 EHKENBERC. -— Sur l'existence d’Infusoires fossiles. Gaillonella par leur grosseur, leur forme et leur couleur, et qui résistent à l’action de,la chaleur rouge. et de l'acide muriatique ; seulementles filamens articulés n’y sont plus aussi distincts que dans l’animal vivant. Si j'examine maintenant les articulations disjointes du Gaillonella distans que renferme la terre à polir, je ne trouve aucune raison pour rapporter à une autre espèce les débris qui se trouvent dans l'ocre du minerai des marais. J'ai obtenu depuis par les bons offices de M. Karsten les pro- ductions végétales qui croissent dans les sources des salines de Colberg, et avec elles une substance terreuse et jaune qui se forme en grande quantité dans ces salines. Elles se rassemblent d'abord, comme on me le marquait, sous la forme d’une masse solide, semblable à l’oxide fer, à la surface des salines. Evaporée et exposée à la lumière, elle conserve sa belle couleur de jaune d’ocre; mais quand je la traitai par la chaleur, elle prit une cou- leur rouge-brun, semblable à de la sanguine. Dissoute dans l’a- cide hydrochlorique, elle présente d’une manière anaiogue une grande quantité de fer avec un résidu siliceux. Cette substance se compose, comme l’ocre des tourbières, de filamens articulés, qui se séparent ensuite en articulations isolées et ressemblent aussi beaucoup au Gaïllonella ferruginea. Peut-être emploie-t- on à Colberg de ces Gaillonelles dans la peinture au lieu de couleurs ferrugineuses. Cette.propriété de la substance qui se trouve dans les salines de présenter d’abord uue couleur verte et de se rassembler à la surface, puis de tomber au fond en prenant une couleur jaune, indique peut-être une espèce particulière et sans doute encore inédite de ce genre. (1) Ainsi, il est très vraisemblable, d’après l'apparence terreuse du minerai de fer des marais et la structure organique et incom- bustible des petits corpuscules qui forment l’ocre dontil est en- vironné, qu'une proportion organique existe dans la formation (x) Un nouvel envoi de cette masse des salines de Dürrenberg m’a paru donner pour expli- calion de ces faits que les animaux vivans (?) sont probablement toujours jaunes , mais qu’a= près la mort ils s'élèvent à la surface et deviennent d’un gris vert (oxide de fer), pour re- prendre leur couleur jaune lorsqu'ils tombent ensuite au fond. 11 de oi 4 | fred D 4 carenrerG. = Swr l'existence d’Infusoires fossiles. 237 des {nfusoires, bien qu’elle soit assez peu étendue, pour que leur nature ferrugineuse et dure “onne lieu, après leur mort, à la formation d’un point central, ou d’un noyau sur lequel est atti- _ rée toute la matière ferrugineuse répandue aux alentours. * Les animaux que j'ai observés dans les fossiles indiqués sont _ les espèces suivantes : I. Il y en a neuf dans la roche de Franzbad. 1. Navicula viridis, qui en forme la masse principale. 2.. — gtbba,; 3. — jfulva, 4, — lLibrile, qui toutes sont des espèces d’eau douce que lon trouve encore à l’état vivant et très abondamment autour de Berlin. 5. Navicula viridula, 6, — striatula, deux espèces des eaux salées et encore vivantes, dont la première ne m’est connue que des côtes de la mer Baltique, auprès de Wismar, et dont la seconde se trouve au Havre-de-Grâce et dans les eaux minérales de Carlsbad. | 7. Gomphonema peradoxum. 8 . — clavatum ; deux espèces encore répandues aujourd’hui autour de Berlin. 9. Une espèce de Gaillonella, G. varians ? dont je n’ai eu jusqu'ici que des fragmens. II. J’ai trouvé neuf espèces dans la tourbe de Franzbad qui accompagne le dépôt siliceux (Kieselguhr). = d'at n. t nes * 1. Navicula granulata, forme très commune, qui ne se trouve pas dans le dépôt siliceux (Kieselguhr). 2. Navwicula viridis, rare, 3. Bacillaria vulgaris ? 4. Cocconeis undulata , deux espèces marines. 5. Gomphonema paradoxum (clavatum ?) encore vivant autour de ' Ainsi la tourbe ne présente que deux formes communes avec « le Xieselguhr, qui en fait partie et dont on doit par conséquent . attribuer la formation à une époque différente. III. J'ai trouvé quatre ou cinq espèces dans les concrétions siliceuses (Kiesel- guhr) de YIle-de-France. , 1. Bacillaria vulgaris, formant la masse principale. n major, espèce inconnue, peut-être à réunir à la précé= dente, qui est elle-même une espèce déjà connue des eaux salées. 238 ennenenc. — Sur l’emistence dTrfusoires fossiles. 3. Une petite Navicule, qui est spotrftet le jeune âge da N. fulva. 4. NN. gibba. 5. AN. bifrons, espèce encore Fine mais rare autour de Berlin. IV. La farine fossile (Beromehl) de Santa-Fiora ; de la collection de Kla- proth, renferme dix-neuf espèces différentes. 1. Synedra capitata n. sp. formant la massé principale, parmi laquelle on trouve le 2. Synedra Ulna, espèce vivant Limeit dans les eaux douces et les eaux salées. 3. Navicula inæqualis. &. — capitata. 5. — wviridis. 6. _ gibba. 7 — phænicenteron. 78 — librile. 0. — zebra, toutes ces espèces propres À l’eau douce. 10. sul : espèce de la mer Baltique. 11. — granulata | deux espèces encore inconnues ou détruites. 1% — Follis, dE 13. Cocconeis undulata, espèce marine. 14. Gomphonemä paradoxum. 15. — _ clavatum. 16. — acuminatum , espèces d’eau douce des environs de Berlin, 17. Cocconema cymbiforme, espèce d’eau douce; 18. Gaillonella italica n. sp. et 19. Des spicules pétrifiés d’une éponge marine, ou le Spongilla des eaux douces. V. Le tripoli schisteux de Bilin, que M. Weiss à recueillie lui-même, ren- ferme les quatre espèces suivantes : 1. Podosphenia nana n. sp., formant la masse principale. 2. Gaillonellx distans n. sp. 3. Navicula Scalprum ?: et &. Bacillaria vulgaris? qui sont tete des asjius marines. VI. Le tripoli feuilleté ( Blættertripel) du commerce de Berlin , qui d'après . la maison de commerce de drogues de MM. Lampe et Kaufmaun, est . pris au dessus de Dresde et qui provient du Hartz , suivant les ren- w seignemens peu probables, d'un autre droguiste, renferme les trois 1 espèces suivantes : ERRENBERG. —— Sur l'existence d’Infusoires fossiles. 239 2. Gaillonella distans, en proportions bien supérieures aux deux autres. 2. Podosphenia nana n. sp. ) 3. Bacillaria vulgaris ? VII, J'ai trouvé deux fois, dans l'argile schisteuse ( Kbschiefer ) de Ménil- montant des fragmens du Gaillonella distans, maisje suis incertain s'ils ne seront pas tombés par hasard de la terre à polir de Bilin. Il se présente maintenant une remarque à fairé ; c'est que la plus grande partie de ces vingt-huit espèces d'Infusoires fossiles, qui toutes appartiennent à la famille des Bacillariées et se rapportent à huit genres différens , encore aujourd’hui vivans, savoir : les genres Vavicula, Cocconeis, Synedra, Gomphonema, Cocconema, Podosphenia, Bacillaria, Gaillonella ; c’est que, disons-nous, sur ces 28 espèces, il y en a r4 que l’on ne peut en aucune façon distinguer des Infusoires d'eau douce aujour- d'hui vivans, et einq que l’on ne peut séparer des espèces ma- rines. Les neuf espèces qui restent, c’est-à-dire le tiers environ, sont ou des Infusoires pareillement vivans, ét encore inconnus, ou des espèces détruites. Mais la comparaison que j'ai faite » de mes observations multipliées et cette circonstance, qu'aucun des fossiles que j'ai nommés ne renferme exclusivement des espèces perdues, me font regarder comme plus probable que ces nouvelles espèces fossiles , parmi lesquelles il n’y à pas un | seul genre nouveau, se rapportent à des espèces qui ne sont * pas détruites, mais que l'on n’a pas encore trouvées vivantes. . Le plus grand nombre des individus de ces petits animaux est encore assez bien conservé, et plusieurs d’entre eux le sont même si bien, que j'aurais pu fixer d’après eux les caractères des … espèces vivantes ; la comparaison directe faite avec ces dernières : m'a montré que certaines différences, probablement caractéris- » tiques, se laissent voir difficilement sur les individus vivans et _ m’'avaient échappé jusqu'ici. C’est ainsi que les ouvertures des “ Gaillonelles ne m'ont été connues d’abord que par l’examen de à la terre à polir et je les trouve à présent dans toutes les espèces À de ce genre. Les six ouvertures du Navicula viridis ne s'étaient “ pas montrées auparavant d’une manière aussi distincte. (1) (1) Comme les hotanistes ont souvent pris pour des plantes ces formes d'animaux , ilest bon 240 ERRENBERG. — Sur l'existence d’Infusoires fossiles. La forme bien arrêtée et la netteté des contours de toutes ces enveloppes fossiles semble due, sans aucun doute, à une cha- leur plus qu'ordinaire, qui aura volatilisé Le charbon tant ani- mal que végétal, car les animaux se nourrissaient certainement alors comme aujourd’hui de végétaux ; plus tard les terres so- lubles auront été enlevées par dissolution , tandis que la silice seule aura résisté. Déja Werner avait Sp - que l’embrasement du sol était la cause de la formation des tripolis, ce qui est en grande partie le cas. Une chose remarquable dans la plupart des ue d’infu- soires fossiles dont nous avons parlé, c’est la prédominance pres- que constante de certaines espèces. Ainsi dans le dépôt siliceux : de Franzbad , presque toute la masse est formée de Vavicula viridis , celle de l'Ile-de-France de Bacillaria vulgaris, celle de Santa Fiore de Synedra capitata, celle de Bilin de Gaillonella distans ; et cela dans une proportion tellement prédominante que toutes.les autres espèces semblent y être mélées acciden- tellement. | Enfin le nombre proportionnel de ces petits animaux peut nous fournir une dernière-observation que l’on peut consigner en passant. Il à déjà été souvent question de millions d’Infu- soires et leur grand nombre excitait l’incrédulité, peut-être parce que l’on avait une fausse idée de leur matérialité. On a de faire remarquer que Jes raisons qui doivent les faire regarder comme des animaux , et que j'ai déjà exprimées plusieurs fois, sont les suivantes : 1° plusieurs Navicules et d’autres Bacil- lariées ont un mouvement de reptation très distinct et très énergique, à l'aide duquel elles écartent et repoussent cà et là des corps étrangers qui sont beaucoup plus gros qu’elles. mêmes; 2° on peut reconnaitre positivement dans quelques-unes le mouvement progressif d’un organe analogue au pied d’une limace , et la force de ce dernier pour la reptation; 3° à l’aide de recherches délicates, on parvient à reconnaître dans toutes les formes accessibles à l’exa- men , des ouvertures que l’on peut considérer comme les orifices de la nutrition , de la généra- tion et de la locomotion ; 4° on peut distinguer dans leur intérieur des organes toul-à-fait com parables aux vésicules des Infusoires polygastriques et d’autres qui semblent les analogues des ovaires granuleux ; 5° outre la ponte des œufs qui est chez elles plus que vraisemblable, elles se mnltiplient encore, non par des bourgeons, comme les véritables plantes, mais d’une manière très distincte, en se divisant ellesmèmes, genre de reproduction qui les éloigne de tous ceux que l'on a signalés dans les végétaux, mais qui a êté observé dans certains animaux; 6° cer- taines formes de ces animaux, dont les mouvemens sont très lents, et qui se fixent comme les huîtres, ne donnent pas naturellement lieu, par cela même, de penser qu’elles soient des végé- taux, Voyez le Compte-Rendu de l’Académie des Sciences de Berlin, 1336, p. 34, MN EUE Fa ». 28 \ Diet À s a . : EHRENBERG. — Sur d'existence d ’Infusoires fossiles. 241 souvent déclaré que telle ou telle espèce n'existait que dans l'imagination. Mais depuis qu’on a été forcé de reconnaître que la terre à polir de Bilin n’était presque autre chose qu'une pro+ digieuse agglomération d'Infusoires sans aucun corps intermé- diaire, ces animaux ont commencé à prendre ouvertement place » parmi les êtres matériels aux yeux de la science et des hommes. * Le Kieselguhr pourrait bien, dit-on, n’être que de formation récente; il n'en est pas üe même du tripoli : il forme des bancs très étendus remplis de plantes et de poissons fossiles. On en emploie à Berlin, d’après les informations que j'ai prises, dans une seule maison de drogueries jusqu’à 20 quintaux par an. On peut ainsi évaluer à 5o ou 60 quintaux par an l'emploi des Infusoires à l’état de tripoli, soit pour mouler , soit pour autre chose, qui se fait à Berlin et dans les environs, et prédire ainsi la durée approximative de ce qui en existe à Bilin. J'espère obtenir bientôt des détails plus étendus sur ce sujet, mais en un mot les Infusoires fournissent largement à toutes les exi- gences des arts. Si on passe ensuite à leur rôle comme minerais de fer limoneux, ne trouvons-nous pas que le soldat nettoie ses armes avec le tripoli ? que l’ouvrier en métaux, le serrurier, … etc., se servent d’infusoires pour polir, et qu’on les emploie éga- lement à mouler la fonte ? Ces petits animaux , si utiles après » leur mort et qui forment des couches entières de terrain, ob- | tiennent aujourd'hui un intérêt tout spécial sous le rapport de : À leur individualité. La grosseur d’un Infusoire considéré isolément, s'élève terme . moyen et dans le plus grand nombre des cas à 1/288 de ligne, ce qui est égal à 1/6 de l'épaisseur d’un cheveu humain, dont le diamètre moyen serait évalué à 1/48 de ligne. Un globule du sang de l’homme, évalué à 1/300 de ligne, n’est pas beaucoup plus petit. Les globules du sang d’une grenouille sont donc une - fois plus gros qu’un de ces infusoires. La pierre à polir de Bilin est à la vérité feuilletée, mais n’offrant jamais d’intervalles, les Infusoires qui la forment sont serrés les uns contre les autres, - et doivent par conséquent, dans un morceau d’une ligne cubes former une masse de 23 millions d'individus, termé moyen. Un pouce cube renfermant 1728 ligues cubes, doit ainsi con- VL Zoo. — Octobre, 16 CN 242 ERRENBERG. — Sur l'existence d’Infusoires fossiles. tenir, terme moyen, 41,000 millions de ces petits animaux. Un pouce cube de cette même masse pèse 3 gros: 2/5 ou 270 grains. Ainsi un grain doit renfermer 187 millions d’Infusoires; ou autrement l'enveloppe fossile d’un seul Infusoire pèse la 1/187 millionième partie d’un grain. | Les Infusoires du fer limonite n’ont que 1/1900 de ligne en diamètre, ou la 21° partie du diamètre d’un cheveu hu- main, 1/3 du. diamètre d’un globule du sang de l’homme, 1/8 du diamètre d'un globule du sang d’une grenouille. Une ligne cube de ces enveloppes ferrugineuses d'animaux devrait, dans une semblable proportion ; renfermer 1000 millions, un pouce cube 1 billion, et un cube de 9 pieds de diamètre 1 trillon de. ces animaux à l'état vivant. a Maintenant si l'on veut n’admettre comme existant réelle- went que le quart de ce nombre, et négliger les trois autres quarts, ce qui restera formera encore une quantité prodigieuse et digne d’exciter au plus haut degré notre admiration. Ces observations pourraient être accompagnées de considé- rations plus étendues, dont les unes sont faciles à y ratta- cher, et les autres auraient encore besoin de recherches plus spéciales ; il en résulte qu’un examen plus approfondi ne pou- vait trouver ici sa place. EXPLICATION DES . FIGURES: (PLANCHE 8 B.) Fig. 1. Navicura, SurIRELEA viridis, grands de 1/9 de ligne, dans le Xiese/eukr de Franzbad. L'un des individus est vu de côté, afin de rendre visibles les orifices des trois ouver- tures , et l’autre est vu sur le dos ou sur le ventre, afin de faire voir à-la-fois les six ouvers. tures. Les stries que lon aperçoit sont des lamelles internes, entre lesquelles sont placés les ovaires des individus vivans, ÿ Fig. 2. Navicezx, Surirerra granulalta, des tourbières de Franzbad, vus de côté et vus. sur le ventre. Fig, 3. Syxnepra capitata, la forme prédominante du Kieselguhr de Santa Fivre, vu de eôté et sur le ventre. — L’infusoire en forme de navette placé au-dessous est un NavicuzA inœqualis vu de côté. Fig. 4. Bacizranta vglgaris ? forme prédominante du Kieselguhr de l’I'e-de-France. Fig. 5. GarnronezLA distans ayant une épaisseur de 1/384 à 1/r92 ue ligne. C'est la forme predominante de la pierre à poli de Bilin ou du tripoli feuilleté (Blættertripel) va de côté et par la surface transversale. Fig. 6. GAILLONELLA férruginea ayant une épaisseur de 1 millième de ligne; c’est l’enve- loppe d’oere ferrugineux ( Æisenockerthierchen). On a représenté à côté un des filanens grossi 2000 fois. Lyngbye a pris cet Infusoire pour l'enveloppe de son Oscrrraroria ochracea. Les Oscillatoires s’y montrent quelquefois en parasites , mais ils constituent plusieurs espèces diffé- rentes; aussi Agardh a-t-il eu raison de ne pas les reconnaître comme une espèce distincte, Toutes les figures sont grossies de 290 à 300 fois. rer OR Re Q Q Q Ssepeee———— rd I : \ F : tar =, 1 ’ fl c. L. puvennoy. — Sur le Foie. 243 DU FOIE des aninaus sans vertèbres , en général et particulière: ment sur celui de plusieurs Crustacés. Par M. G. L. Duvernoy. (Mémoire lu à l’Académie des Sciences, le 7 novembre 1836. )| Rien de plus difficile que de déterminer dans les classes in- férieures quels sont les open analogues à ceux des classes supérieures, Un même organe, remplissant une même fonction, peut être tellement modifié dans sa forme, dans sa couleur, dans son volume et dans son tissu, qu'on n’a le plus souvent, que ses rapports pour le reconnaître. Encore ceux-ci peuvent-ils aussi se trouver plus ou moins modifiés. Le foie qui joue un rôle si important dans la vie de nutrition des animaux vertébrés, soit pour la chylification, soit pour la dépuration du fluide nourricier ; est un exemple frappant de ces variations de toute espèce qu’il éprouve dans les classes in- férieures , jusqu'à ce qu il finisse par être entièrement mécon- naissable et qu'on n’en découvre plus aucune trace. Le foie chez les animaux vertébrés est toujours un organe distinct du canal alimentaire, dans lequel les veines provenant de ee canal, des mésentères et de la rate, après s'être réunies dans un eu plusieurs troncs sous le nom de veine-porte , se ._ divisent à la manière des artères. La bile que sécrète cette glande est, le plus souvent, tenue en réserve dans une vésicule particulière où elle prend des qualités plus prononcées. Elle est toujours versée soit directement du foie, soit de son réser- : voir dans la partie du canal alimentaire où se fait plus particu- Jièrement la transformation des alimens en chyle, et le x soi des excrémens. Le type des mollusques présente déjà à cet égard des dif 26, 244 _ G. L. DUVERNOY. — Sur le Foie. férences, suivant les classes. Dans toutes, à la vérité, le foie ne reçoit plus, ainsi que l’observe M. Cuvier, le sang qui a circulé dans les intestins, et il manque très généra- lement de réservoir. Du moins n’y a-t-il que la classe des Ce- phalopodes et les Doris, parmi les Gastéropodes, où l'existence d’une vésicule du fiel pourrait-être sujette à discussion ; dans tous les autres mollusques cette vésicule manque absolument. Mais les caractères différentiels qui distinguent le foie des mol- lusques , dans chaque classe, sont bien plus nombreux que les caractères communs. Il forme dans les Céphalopodes, un organe de sécrétion bien séparé du canal alimentaire , qui verse l'hu- meur qu'il sécrète dans une portion de ce canal, qu’on peut regarder comme l’analogue du duodenum dans les vertébrés. Sa structure intime nous a paru semblable à celle es cet or- gane présente chez les-poissons. Dans les Gastéropodes, le foie est plus divisé. Il s’y com- pose de grains réunis par grappes, formant des lobes bien séparés qui s’entrelacent avec l'intestin auquel ils se lient par beaucoup de lames celluleuses, et de vaisseaux. Chez eux comme chez les Céphalopodes c’est dans la partie supérieure de l'intestin que la bile se verse ; chez quelques Gastéropodes ce- pendant (les Scutibranches et les Cyclobranches etc.), C'est dans l'estomac même qu’elle arrive; tandis que chez d’autres (les hétérobranches nucléobranchidés de M. d'Orbigny), elle n’est versée que dans la dernière portion de l'intestin, comme bu- meur excrémentitielle. Dans les autres classes de ce &xpE , le foie ne se montre plus comme un organe bien séparé ; il s’unit intimement avec l’esto- mac qu'il enveloppe, et il verse toujours immédiatement Ja bile par, des culs-de-sac, qui communiquent entre eux en devenant de plus en plus larges. Sa structure y paraît évidemment vésicu- leuse. Ce sont des cœcums ramifiés, analogues aux coœcums pyloriques des poissons, ou des vésicules rondes ou ovales, pé- -diculées, à parois très minces, transparentes, qui se remplis- sent de l'humeur que ces parois sécrètent et en prennent la couleur. On çoncoit que cette structure peut se lier si intimement me - 4 G. L. DUVERNOY. == Sur le Foie. : 245 avec les parois de lestomac que le foie finit par se confondre avec-elles et par perdre son individualité. Qu'on me permette cette expression. Voilà, sans doute pourquoi, dans quelques Ascidies compo- sées, l'existence de ce viscère n’a pu être constatée. On conçoit encore que, dans ces dernières classes, la sé- crétion du foie semble tenir lieu à-la-fois de bile, d'humeur pancréatique et de salive. Déjà dans les Céphalopodes et les Gastéropodes, elle rem- plaçait avec des glandes salivaires bien développées, l'humeur pancréatique. L'existence du foie est très problématique dans quelques vers intestinaux cayvitaires et dans les Méduses. Sauf quelques cas très contestables, on peut dire qu’on n’a découvert ; Jusqu'ici aucune trace ésilente du foie dans les Zoophrtes. Quant au type des Articulés, le foie, quand il existe, sy mon- tre, comme dans les mollusques inférieurs , plntôt un appen- dice du canal alimentaire, qu’un organe distinct et ‘indépen- dant. 11 paraît même réduit dans les Lombrics et dans les Hi- rudinées, ainsi que l’ont annoncé M. Morren pour les pre- miers, et M. de Blainville pour les dernières, à une couche d’un tissu vasculaire jaunâtre dans les Lombrics, ou noirâtre dans les Hirudinées , qui fait partie des parois de ce canal , ou qui les recouvre du moins extérieurement. Mais son existence est loin d’avoir été constatée dans toutes les Ænnélides, dansles 4rach - rides Trachéennes et dans beaucoup de petits Crustacés. Les tubes qui en tiennent lieu, dans immense majorité des insectes, paraissent manquer dans quelques Hémiptères. L'œil exercé de » M. Léon Dufour, n’a pu en découvrir dans les Pucerons. Ram- - dohr n’en avait pas vu davantage, non plus que dans les Gallin- sectes. On sait que, dans cette classe, l'organe qui tient lieu de « foie se compose de tubes simples ou vésiculeux, dont le nom- ras" bre varie suivant les familles et les genres, et même les espè- ces , et qui aboutissent le plus souvent, chacun séparément, dans le cercle pylorique à la fin de cette partie du canal ali- mentaire , que M. Léon Dufour a désignée, d’après ses fonctions, sous le nom de ventricule chylifique, et que je nomme , d'après 246 G. L+ DUVERNOY. == Swr le Foie. les organes qu'elle remplace, estomac-duodénal. Dans un seul cas, celui du genre Grillon, tous les vaisseaux biliaires se réunis- sent en un seul tronc, avant de s’unir à cette même partie. Chez quelques Hémiptères Hétéropières , ce n’est pas au pylore, mais dans le gros intestin, où s’amassent les excrémens, qu’arrive la bile ; ainsi que l’a démontré M, Léon Dufour; et dans les Co- Koptères Hétéromères, Tétramères et Trimères, ces mêmes ca- naux biliaires ont l’une et l’autre insertion que je‘viéns d’'indi- quer, et la bile arrive à-la-fois dans le pere et dans le gros in- testin. Cette revue générale du foie des animaux sans vertèbres , nous dispensera d'entrer dans beaucoup de détails sur celui des Crustacés, que nous devons faire connaître plus particu- liérement. Après avoir indiqué la disposition que présente cet organe chez plusieurs classes d’articulés, j'arrive énfin à la considérer chez les Crustacés, * « Leur organe générateur de la bile, dit M; Cuvier (r), est « formé simplement d’une quantité de petits tubes aveugles. « C'est apparemment comme le pancréas des poissons, que .« l'on juge être remplacé par cette multitude de petits cœcums « qui s'ouvrent à l’origine de linstestin: » On pourrait pousser plus loin la comparaison et ajouter que le nombre ét lexistence des cœcums pancréatiqués dans les poissons, ou des cœcums biliairés dans les Insectes ; Sont sujets à des variations analogues, ét que les parois de l'intestin pren- nent uné structure propre à les remplacer ; quand ces pe ol diceés manquent, Ainsi sa déscription abrégéé que nous venons dé rapporter convient sans doute à la plupart des genres de Crustacés Déca- podes; mais ces paquets de cœcums ramifiés, si considérables, entre autres dans les genres 4siacus,Palinurus, Pagurus, éte., parii lès Décpodes macrogastres et dans les Décapoues brachy- gastres, se réduisent, dans les autres ordres, à quelques tubes isolés dont l'existence même n’a pas été démontrée dans tous les (1) Leçons d’analomie comparée , !. xv. noel ii de de D. F4 G. DUVERNOY. — Sur le Foie. 247 genres. Cependant la structure du foie s’écarterait beaucoup dans les Sqwilles, suivant M. Cuvier, dans les Palemons, les Pénées et les Squilles, suivant Meckel, de celles que nous ve- nons d'indiquer. « Les Mantes de Mer (Squilles Fabr.), est-il dit dans les le- & çons d’anatomié comparée (1"* éd., t. IV), font exception à « la règle; elles ont un foie rangé par lobes des deux côtés de « toute la longueur du canal initéstinal, et qui est solide et tout- « à-fait semblable à uné glande conglomérée. Dans quelques « décapodes , dit Meckél (1), et notamment dans les Pénées « et les Palemons, ainsi que dans les Squilles, le foie est plus « ferme, plus solide, ses cœcums sont plus étroits, plus courts, « et cét organe y présente bien davantage (que dans les autres « Crustacés) «la structure glanduleuse de cet organe dans lee « classes élevées. « Quant à la forme extérieure , ajoute Meckel, le foie est plus « court dans les Décapodes. Cependant dans les Palémons, dans « les Pénéés et dans les Squilles , il est tellement allongé, qu'il « occupe presque toute la longueur du corps.» (2) Les recherches que je viens de faire me persuadent que €’ést uniquement d’après les Leçons d'anatomie comparée que Mecke! et tous les auteurs qui ont parlé depuis 1803 du foie des Squil- les, l'ont décrit. Cet organe à lobes réguliers, étendu : depuis l'estomac, jus- qu'à l'extrémité postérièure du corps, et immédiatement sous le vaisseau dorsal ou le cœur et sur lé canal intestinal, est d’un volume variable, mais généralement très considérable , quand il existe. J'avais été trés étonné de né pas le trouver dans une » belle Syuille Mante, que le musée de Strasbourg a reçu d’An- » cône l’an dernier. En éKaminant tout récemment la prétendue structure granuleuse de cét organe lobé, dans un grand exem- plaire de Squille Rubannée, j'ai découvert, en effet, une quantité innombrable de petits grains ronds, qui m'ont paru évidemment être des œufs. Ce fut pour moi un trait de lumière. Je reconnus (x) Systeme der vergleichensen, Anat. t. 4. p. 160. Halle, 1829. (2) Meckél. Ibid, t. 4, p. 6x, 248 G: L. DUVERNOY. == Our le Foie. de suite que cet organe lobé, de consistance assez ferme, dont le développement proportionnel varie beaucoup suivant les in- dividus ; qui manque entièrement chez quelques-uns; qui peut avoir laspect. plus ou moins granuleux; dont la position est au-dessus du canal alimentaire et non au-dessous, ou tout, au moins sur les côtés, comme cela aurait dü avoir lieu pour le foie, était l'ovaire die Squilles. Cet ovaire, farci d'œufs assez développés dans l'individu que j'examinais, a une enveloppe propre, formant un sac divisé en autaut de cellules qu’il y a de lobes. Un oviductus considéra- ble. règne dans toute l'étendue de la ligne moyenne de la face supérieure. Il commence en arrière par un canal très fin, mais qui ne tarde pas à prendre un assez grand diamètre en s’avan- çant vers la partie antérieure de l'abdomen. Dans la partie la plus large, sa cavité présente un grand nombre de- plis paralle- les, et obliques. Dans trois Squilles Mantes que j'ai observées ensuite, ce même ovaire avait une couleur jaune-brun , un développement proportionnel variable, et s’étendait au-dessus du canal intes- tinal, depuis son commencement jusqu’au-delà de l'anus, où sa portion la plus mince pénétrait dans une espèce de capsule que forme le dernier segmentdu corps. Ses divisions consistant en six ou sept lobes réguliers de chaque côté, étaient constantes ; mais l’'oviductus n’avait pas le même développement que dans la Squille Rubannée. Dans celle-ci des ramifications partaient par intervalle, des différens lobes de chaque côté, et se dirigeaient vers l’axe du corps pour se joindre à l’oviductus. D'après la conviction que je venais d'acquérir que l'organe qu'on avait pris pour le foie dans ces Squilles, était leur ovaire, je devais chercher quel pouvait être leur foie, ou son remplaçant. Je ne pouvais le trouver qu’en étudiant leur canal alimentaire. L'appareil d’alimentation de ces animaux présente plusieurs singularités bien connues : « 1° Dans la structure des mandi- bules; 2° dans la position de l’estomac qui est plus en avant que son orifice cardiaque, et qu’il faut chercher dans une sorte de chaperon et conséquemment dans une région qui peut être G, Le DUVERNOY. — Sur le Foie. 249 considérée comme faisant partie de la tête; 3° dans une | lame bi-articulée qui part de ce même orifice, et se replie de bas en haut, et d'avant en arrière, à travers le pylore jusque dans lintestin Cette dernière organisation était nécessaire pour em- pêcher les matières alimentaires qui entrent dans l'estomac, de passer immédiatement dans le dernier canal, le pylore étant tout à côté du cardia. Outre cette valvule qui est un peu creu- sée en canal, il y a de chaque côté du pylore, deux replis den- telés, dont l’un est un peu plus en dedans que l’autre. L’intes- tin s'étend directement et sans faire de sinuosités, du pylore à l'anus. 1l est d’abord large, plat et comme dentelé sur ses bords. Arrivé au niveau des premières pattes thoraciques, il produit dans la Squille Mante , un premier cœcum de chaque côté, qui s'étend transversalement et pénètre entre les muscles qui vont à cette paire de pattes. D’autres cœcums semblables se détachent successivement et régulièrement de chaque côté du canalintes- tinal vis-à-vis les anneaux de l'abdomen; leur extrémité se divise et se sous-divise, mais en se terminant toujours par des culs-de-sac. Ces branches cœcales pénètrent entre les muscles du seg- ment précédent de labdomen et ceux du segment suivant. A commencer de l’antépénultième segment, l'intestin s’élargit beaucoup, et m'a paru former deux grands culs-de-sac, qui remplissent une partie du vide du dernier segment. Mais entre ces deux grands cœcums, il y a un tronc moyen, la continuation directe de l’intestin, qui répond au rectum et se termine à l'anus. La couleur de cet intestin singulier et celle de ses appendices était la même dans les Squilles Mantes que j'ai pu observer. ». C’est l'apparence d’un nerf plutôt que d’un intestin. Cette cou- . leur tenait aux substances alimentaires contenues dans cet in- testin, et a l'extrême minceur de ses parois qui sont transpa- … rentes et présentent d’ailleurs intérieurement un réseau de mailles, formées par les plis de la membrane interne. (On dirait que ces animaux se nourrissent de laites de poissons ou de très etits œufs). Quant à la disposition si particulière de ce canal, je n’en connais aucun autre exemple dans les Crustacés ; maïs dans les Scorpions , Tréviranusa décrit quelque chose d’analogue, puis- 250 G. L: DUVERNOY. == Sur le Foie. qu'on y voit se détacher par intervalle et successivement de l’in- testin quatre ou cinq Canaux de chaque côté qui vont se diviser dans un organe que je regarde comme leur foie. | Dañs les Squilles, à la vérité, ces cœcums ramfiiés, qui peus vent bien être des organes de sécrétion, tout aussi bien que des organes de digestion, ne sont que des appendices de l'intestin. Les Nymphons , suivant l'observation de M. Milne Edwards, offrent une disposition organique plus analogue encoré dans des branches intestinales, qui PRRE TE aussi jusque dans les membres. Enfin cette organisation rappelle les nombreux cœcums ra- mifiés des Aphrodites. Quoi qu'il en soit, je pense que cette singuliére division de l'intestin sert entre autres à la sécrétion de sucs gastriques , qui tiennent lieu de bile, et qu'il n’y à pas dans ces animaux d’au- tre organe analogue au foie, où qui ait pour fonction de le remplacer. Dans les Palemons qui sont des Décapodes, il y a encore une autre organisation. Leur foie ma paru être une très grande capsule membraneuse, à cavité anfractueuse, ayant plus de capacité que l'estomac, placée sous ce viscère et divisée en plusieurs petites poches, dont le fond était rempli d’une matièré jaune, änalogue à la bile. Cette forme et cette struc- ture seraient donc encoré bien différentes de celle annon- cée par Meckel. Cela tiendrait-il à ce qu'il à obsérvé d’autres espèces que celle soumise à mes investigations? (1) Quant aux Pénées » je n’en ai pas éu d'exemplaires assez bien conservés, pour servir à des observations exactes et positives. On peut conclure de cellé que je viens de rapporter avec assez de détails : 1° Que le foie des Crustacés y forme à des po- ches, ou des appendices cœcaux, rassemblés én un ou plusieurs paquets qui s’ouvrent dans le commeticement de l'intestin ; où qui sont séparés et communiquent dans un ou plusieurs points du canal intestinal. (x) Celle que j'ai vue était le Palemion jamaïcensis ; grande espèce de là Martinique. PPS M el ST ha ttonthinttns bc UE oh G. L DUVÉRNOY. = Sur le Foie. o5t 2° Que les Squilles, loin d’avoir, comme on l'avait crü, un foie dont la structure se rapproche davantage de celle des animaux supérieurs,s’én écartent plus à cèt égard que la plupart des autres Crustacés. | 3° Que les divisions singulières de leur canal intestinal en deux séries latérales de coœcums fourchus, ou même ramifiés à leur extrémité, outre qu’elles présentent un très rare exem- ple d'un enchevétrement d’appendices intestinaux, ävéc les muscles du mouvement, tiennent lieu probablement d’organe sécréteur d’un suc gastrique , remplaçant ici la bile. 4° Que dans les Palemons , le foie paraît avoir également une organisation très simple et non compliquée, puisqu'il ne con- siste que dans une poche à cavité anfractueuse dans les cellules de laquelle s’amasse la bile. | C'ést en gros ce qu’on voit en dernière ahalyse ; et très én petit, dans la structure intimé des organes de sécrétion plus compliqués : une rnembrane interceptant des poches ou des ca- naux dont Les parois ont séparé l'humeur que ces cavités tien- nent en réserve ; où qui passe immédiatement dans d’autres or- ganes. EXPLICATION DE LA PLANCHE 15. . Vig. r. Une Squille mänte ouvérté par la fâcé dorsale, &. estomac ouvert. ». valvule en orme de languette, qui empêche les substances alimentaires dé passer directement du cardia dans le pylore. d, première portion du canal intestinal répondant au duodénum,; cette portion 4 été ouverte jusqu’en d’ ; oh ÿ aperçoit le réseau à mailles larges qui forme la membrane in- terne; c. cc, €. €. e, cœcums que produit le canal iutestinal à mesure qu’il se porté d’un au- neau de l’abdomén à l'autre; ces cœcums sont plus ou moins divisés vers leur extrémité en. r. hr. r, on à mis à découvert, du côté droit, leurs différentes ramifications ; du côté gauche, ces ramifications sont cachées par les muscles des segmens ‘de l'abdomen, entre lesquels elles se / placent. Je les ai trouvées remplies de la même substance, corime lardeuse, dont tout le canal intestinal était farci. Ge sont ces cæcurms ramifiés qui me paraissaient tenir lieu de foie. Il y en a deux plus grands en arrière, qui forment deux longues poches c! e! lesquelles pé- . -nètrent dans l'espèce d’étui que leur fournit le dernier segment du corps. C’est entre cés deux poches que se voit le dernier intestin ou le cæcum (à). Jn voit en A4... les grands muscles érecteurs de l'abdomen, qui s'étendent du corselet au dernier segment de cette partie, et présentent des intersections tendineuses comme les muscles droits de l’abiomen des vertébrés. -. On trouve immédiatement sous ces muscles le vaisseau dorsal qui tient lieu de cæœcum, et sous lui, l’oviducte et l'ovaire dans les femelles ; et c'est sous l'ovaire Æulement qu’est placé le canal intestinal, C’est cet ovaire (dont on voit la forme fig. 2) qui a été pris pour k foie. Fig, 3. Un des lobes de l'ovaire rempli d'œufs. 252 | Académie des Sciences. ANALYSE des trasaux anatomiques, physiologiques et zooto- giques présentés à l’Académie des Sciences pendant le mois . d'octobre 1836. Séance du 3 octobre, Notes sur quelques ossemens fossiles de l’ Alsace et du Jura, par M. Du- VERNOY, | Dans un premier article l’auteur décrit des vertèbres et des côtes trouvées dans une- roche de calcaire grossier appartenant aux terrains tertiaires ou aux mollasses qui reposent sur des terrains jurassiques au fond de la vallée de Ræ- dersdorf. Ces fossiles paraissent appartenir à une espèce de Lamantin et étaient méêlés avec quelques débris de Tortues, avec une quantité prodigieuse de dents de Squales et quelques coquilles des genres Modiole, Cardium, Arche et Lucine. Un second article est consacré à la description d’un crâne de Lophiodon, et d’un fragment de mâchoire renfermant les deux dernières molaires d’une très pe- tite espèce de pachyderme qui paraît appartenir au genre. Sus, trouvés dans le calcaire d’eau douce de Baslberg près de Bouxwiller. On sait, dit l’auteur, que les Lophiodons ont un système dentaire très ressemblant à celui des tapirs ;mais jusqu’ici, personne que je sache n’en a fait connaître le crâne. Celui que j’an- nonce doit donc intéresser comme un fait nouveau pour la science; le crâne, à la vérité, n’a plus entièrement sa forme naturelle; il a été violemment déprimé. Par leffet de cet écrasement, la face inférieure a été rapprochée de la supérieure, et l'os maxillaire supérieur gauche qui subsiste, touche au frontal, de manière que l'orbite a disparu. Cependant ce crâne montre une circonstance organique très remarquable, c’est l’étenduc des fosses temporales,. qui paraissent avoir ete très grandes, puisqu’elles se rencontrent en arrière sur le sommet de la tête, où elles ne sont séparées que par une forte crête. Cette grande dimension des fosses temporales constitue un nouveau caractère différenciel entre ces animaux et le tapirs de l'Inde, chez lequel elles ne se rapprochent pas à ce point vers le som-. met de la tête; mais elle établit un rapport entre ce lophiodon et les tapirs d'Amérique, qui les ont ainsi conformes. Les vieux babiroussa montrent bien encore ce rapprochement des fosses temporales tout-à-fait à l'arrière du crâne , mais ces fosses ne s’étendent pas chez ces animaux, aussi loin en avant. La partie frontale de ce crâne paraît assez large; les restes de mâchoire infc- rieure, du moins ceux des deux espèces de Bouxwiller que nous possédons, et qui sont tous d’une grande proportion, font d’ailleurs comprendre que les fosses tem- porales de ces animaux devaient être assez étendues pour fourmir une attache suffisante à des muscles puissans, destinés à mouvoir ces lourdes mâchoires. . 1 . , . x , 4 ‘Le troisième article de ce mémoire fait/connaître un fragment de bassin pre- sumé d’ÆZippotherium, trouvé dans une brèche du Jura. « L'histoire des brèches osseuses de la Méditerranée, dit l’auteur, a été traitée avec tout l'intérêt qu’elle mérite, par M. Cuvier dans le t, 1v de ses Recherches sur les ossemens fussiles. {| termine ce chapitre remarquable par le catalogue des restes d'animaux que ces brèches renferment; parmi lesquels les uns pourraient être considérés, à la rigueur, comme ayant appartenu à des animaux 4 D FR Académie des Sciences. 263 qui habitent encore le pays, et dont les autres sont tout-à-fait étrangers à la po- pulation actuelle. j 3 du L ; « Il en conclut que tous ces restes doivent être considérés comme les débris de la population coztemporaine des éléphans et des rhinocéros fossiles. Il se de- mande d'ailleurs pourquoi ces ossemens ne se retrouvent pas dans d’autres brè- ches, dans les fissures du Jura, entre autres, remplies, suivant l’observation de M. Biongniart, par une terre rougeâtre qui est souvent durcie par des infiltrations spathiques, et enveloppe des fragmens du corps de la montagne et des grains d’hé- matite, dont il se forme une brèche fort semblable à celles qui contiennent des os. « J’eus, peu de temps après la publication de ce volume, l’occasion de prou- ver à M. Cuvier que ces brèches du Jura renferment aussi des reste de mam- mifères fossiles. C'était un premier fait remarquable de la note que je lui adressai à ce sujet, note qui a été insérée par extrait dans le supplément du tome v du “même ouvrage, page 515. Un autre fait également nouveau pour la science, à cette époque, était que les os trouvés dans cette brèche formaient les premiers Eee rs dBrer d'ours découverts en France. L'existence de ceux que renferme en si grand nombre la vaste grotte d’Osselle, dans le département du Doubs, n'avait point encore été indiquée par le célèbre Buckland, et confirmée par l'intéressante description que M. Fargeaud, mon collègue à la Faculté des scien- ces de Strasbourg, a donnée de cette grotte. MM. Tériac et L. Fallot n'avaient pas encore trouvé, dans plusieurs grottes de la Haute-Saône, les beaux fragmens dont on leur doit la découverte, et que ce dernier a déposés dans le Musée de Strasbourg. Ces nombreux débris d’ossemens d’ours fossiles des grottes de Fran- che-Comté (1) et de la brèche de Châtillon, semblent indiquer que les animaux -des unes et de l’autre étaient contemporains. La brèche en question est extrê- mement dure ; les os qu’elle renferme ne peuvent en être détachés sans se briser, et ils se distinguent de ceux des “brèches de la Méditerranée en ce qu’ils sont un peu pétrifiés; ce qui n’a pas lieu, comme l’on sait, pour les ossemens de ces dernières brèches. D'ailleurs, la plupart des os que la brèche de Châtillon ren- ferme ne sont que des fragmens brisés et méconnaissables. « Malgré plusieurs voyages et des recherches opiniâtres pour y découvrir . d’autres ossemens, je n’avais pu en trouver de bien caractérisés que des molaires è | t L is et des canines d’ours; mais j'avais recommandé à M. Binet, qui habite le haut du rocher où se trouve cette brèche, et sur laquelle on avait construit, dans le moyen âge, un des murs du château de Châtillon , de suivre mes recherches et de recueillir tous les fragmens qu’il verrait contenir d’autres os que ces mêmes dents. Au mois d'avril 1835, j'ai reçu de M. Binet, par les soins de M. le doc- teur Marcou, qui habite le Pont-de-Roïde, à deux lieues de Châtillon, arrondis- -sement de Montbéliard, où se voit cette brèche, non loin de la vallée du Doubs, un fragment d’os assez caractéristique ; c’est une portion de bassin qu’il est face de reconnaître pour un iléon. Il a même un caractère remarquable qui le rap- — proche de celui des ruminans et encore wieux de celui du cheval. I présente un angle spinal ou interne et un angle externe, entre lesquels se trouve un espace considérable, à bord arrondi, à surface lisse et non rugueuse. Le bassin des ru- minans ordinaires, dit M. Cuvier (1), a l'angle spinal de l'os des iles plus large . (x) Sans parler de ceux découverts dans le midi de la France, et sur lesquels M. Flourens a lu récemment un rapport à l'Académie, dans lequel il a bien youlu rappeler la découverte des ossemens de Châtillon que j'avais annoncée à M, Guvier, (1) Ossemens fossiles , tome 1v, page 20, 254 ‘Académie des Sciences. et plus en arrière que D externe, et la troncature de celui-ci est oblique ét presque continue au bord antérieur de Pos. | { « Tandis que le bassin du cheval a son angle spinal pointu aussi avance que l'externe, lequel est de plus tronqué presque carrément, le fragment fossile de Châtillon a bien langle spinal plus étroit que l'angle externe ; 11 se rapproche, sous ce rapport, de celui du cheval; mais cet angle spinal était moins ayancé que dans ce dernier animal, Le bord antérieur lombaire , ou l'intervalle entre ces deux angles, présente une ligne concaye au milieu dans le cheval. Dans ce bassin de Chatillon, cette ligne est un peu convexe; le bord inférieur externe, entre l'angle externe et la cavité cotyloïde, dessine une portion d’ellipse dans le cheyal. 11 forme deux courbures, et conséquemment le trait d’un S'dans le fossile de Châtillon. Il est évident, d’après cela , que ce bassin diffère à plusieurs égards des bassins de cheyal, dont cependant { se rapproche le plus. Je crois pouvoir conjecturer qu'il pourrait bien avoir appartenu au genre Hippotherium. «© Quoi qu'il en soit, ce bassin de mammifère fossile, découvert danses brè- ches de Châtillon , qui n’a certainement pas appartenu à un ours, ou à tout autre carnassier, mais bien à un rwminant où a un pachyderme, enrichit d’une nou- velle espèce la population de ces brèches. » Rene | Expériences sur l'électricité de la Torpiile , par M. Marreuccr, extraites d’une lettre adressée à M. Donné. j « 1° On obtient la décharge de la Torpille, quoique la peau de Forgane ait été enlevée et même des tranches de la me Po. de l'appareil électrique aient été coupées. , « 2° Quand la Torpille ne se décharge pas, il est impossible d'obtenir dans l'intérieur de l'organe, en quelque point que ce soit, la moindre trace d’électri- cité, soit au galvanomètre, soit an condensateur, « 3° L’intensité de la décharge diminue en réduisant le nombre des filets ner- veux qui vont à l'organe. « 4° Dans Pacte de la décharge, on trouve le courant électrique dirigé du dos au bas-yentre constanament, et cela soit extérieurement, soit dans lintérieur même de l’orgave, soit en parcourant les nerfs et le cerveau, en allant toujours par les nerfs au bas-ventre. « 5° Trois grains d’hydrochlorate de morphine introduits dans l'estomac d’une torpille, la tuent en dix minutes; mais la mort est accompagnée de décharges plus fortes qu’à l'ordinaireét de convulsions. « 6° Lorsque la torpille a cessé de donner, quoique irritée, la décharge élee- trique, si l’on met son cerveau à découvert, et si l’on touche d’abord légèrement le dernier lobe du cerveau , celui qui denne les nerfs à l'organe , on à des dé- charges (trois ou quatre) plus fortes qu’à l'ordinaire, et qui ont la direction con- stante du dos au has-ventre. Si au lieu de toucher simplement la surface du cer- veau, on le blesse sans discrétion , alors des décharges très fortes se renouvel- lent, mais sans asoir la méme constance dans la direction du courant; j'en ai observé trois dirigées l’une à la suite de l’autre du bas-ventre au dos, et tout cela sans aucune loi apparente. « Ces faits, et surtout le dernier, poursuit M. Matteucci, suffisent pour dé- montrer que l'électricité de la torpille ne se produit pas dans les organes qu’elle présente de chaque côté du cerveau ; que-ce courant reçoit du cerveau la direc- tion, et que l'électricité n’est dans l'appareil que condensée, comme dans une bou- tcille de Leyde ou une pile secondaire. « Je suis loin de regarder l'étude de la torpille comme épuisées il y & encore Académie des Sciences. | 255 trop à faire : mais il me semble digne d'intérêt d’avoir démontre que dans la torpille l'électricité n’est que condensée par les organes. Si nous n’avons pas de traces d'électricité chez les autres animaux, c’est que les organes condensateurs manquent et que l'électricité disparaît continuellement par le plus grand nom- bre des fonetions, » Cette série d'expériences a été faite sur trente-six Torpilles. + Séance du 10 octobre. M. de Blainville met sous les yeux de l’Académie des lithographics représen- tant le crâne du Dénotherium giganteum découvert à Eppelshein. Séance du 24 octobre. Expériences sur la Torpille, par M. Corranon , de Genève. « Les expériences qui forment le sujet de cette note ont été faites à la Ro- chelle, au mois d’août 1831, en présence de M. Lebrun, professeur de physique au collège de cette ville ; l’auteur a opéré sur plus de 40 torpilles, « Les premières expériences ont eu pour but de reconnaître la nature de l'électricité fournie par les differens points du corps de l’animal, La manière dont l’élecwicité se distribue à la surface se trouve, dit l’auteur , exprimée dans les trois propositions suivantes : « 1° Tous les points du dos sont positifs lorsqu'on les met .en commu nication avec un point quelconque du ventre, et que lu torpille donne une coms motion, . « 2° Deux points dissymétriques du dos, ou deux points également dissymé- triques du ventre sont presque toujours électrisés différemment et donnent un courant au galvanomètre, La déviation est quelquefois de 30 ou 40 degrés. Le point le plus voisin des organes donne au fil l'électricité positive ou négative selon que l’on opère sur le dos ou sous le ventre. « 3° En touchant deux points symétriques de la régien du dos ou de celle du ventre, on n’a point de déviation au galvauomètre. «Ces deux derniers résultats , dit M. Colladon,, me paraissent avoir échappé insqu’iei aux recherches des physiciens, » D’autres expériences sont relatives à la rapidité avec laquelle peuvent se suc- céder les commotions. Le minimum du temps compris entre deux secousses a paru à M. Colladon à-peu-près d'un tiers de seconde. . . L'expérience suivante est donnée par lui comme exemple de la série de com- motions qu’on peut obtenir d’une torpille lorsqu'elle est légèrement excitée, et - qu'elle est tenue dans une position qui ne la gène pas trop. . .« Je plaçai, dit-il, sur ma main une petite torpille de auze centimètres de diamètre et avec l'extrémité du pouce je touchai légèrement son dos près du » centre d’un des organes ; dans l'espace de deux minutes je reçus 78 commo- tions à-peu-près de même force et à des intervalles régulièrement croissans ; … voici en effet comment ces 78 ooups furent répartis : première demi-minute 24, … deuxième 59, troisième 19, quatrième 13. + « Dans les 20 secondes suivantes je ne reçus plus que trois faibles secousses, puis il y eut un intervalle de quinze secondes, Je pressai alors plus fortement la torpille avec mon pouce pour Pirriter; elle fit un effort violent, plia son dos | 256 Académie des Sciences. et me lança un choc si violent que je ne pus la retenir suffisamment, de sorte qu’elle m’échappa de la main et retomba dans le baquet. Reprise presque aussitôt et fortement excitée, elle ne me donna plus de secousses : ce ne fut qu'après plusieurs minutes de repos dans de l’eau üédie qu’elle recouvra un peu de pou- voir électrique. Je me suis souvent servi ainsi d’eau chaude pour ranimer des torpilles qui étaient tout-à-fait épuisées, et ce moyen m'a toujours paru bien réussir, «J'ai fait plusieurs fois passer le courant d'une torpille fortement excitée à travers le corps d’autres torpilles très fraîches et légèrement essuyées; celles-ci n’en ont point paru affectées. M. J. Davy a constaté de son côté que le courant d’une pile ne paraît pas faire souffrir ceux de ces poissons qui sont interposés dans le courant. L’effet d’une bouteille de Leyde n’a pas encore, je pense, été essayé; le temps m'a mangué pour cette expérience. J'ai répété avec un électromètre à double feuille que j'avais préparé avec beaucoup de soin, l'expérience faite par MM. Gay-Lussac et de Humboldt. J'ai essayé plusieurs torpilles, et je les ai mises séparément, et à diverses fois, en con- tact avec le condensateur de l’'électromètre ; pour cela, je les plaçais sur un corps isolant, etje réunissais par un filde platine la surface supérieure ou inférieure de l'organe avec l’électromètre : je n’ai jamais aperçu, même à la loupe , aucune déviation dans les petites lames de l’appareil. Ce résultat paraît d’abord suffisant pour en conclure que lélectricité accumulée sur la surface intérieure des orga- nes, n’y est qu’à un état de tension trop faible pour que cette tension puisse faire diverger l’électromètre. « Cependant cette conclusion n’est point évidente, parce que l'écartement des feuilles ne dépend pas uniquement du degré de tension, mais aussi du temps pendant lequel la force agit. Les observations de Walsh et d’autres expérimen- tateurs, sur le passage de l'électricité animale à travers une petite couche d’air, semblent indiquer en effet, que le fluide lancé par la torpille possède une ten- sion capable d'agir sur les corps légers, si le temps de l’action était plus pro- longé. | « Dans une de mes dernières expériences je voulus voir si une torpille épuisée par plusieurs excitations, donnerait encore des secousses lorsqu'elle serait pro- fondément blessée. Je fis d’abord de fortes incisions dans les parties charnues, sans obtenir de déviations bien sensibles ; mais ayant enfoncé la pointe d’un canif dans le cervelet d’une torpille , ainsi mutilée en tous sens, je vis l'aiguille du galvanomètre pirouetter complétement par l'action d’une violente secousse. Cette expérience , répétée avec une pointe d'ivoire sur une autre torpille, la dernière que j'avais à ma disposition m’a donné des résultats semblables. Cette ex- périence , que j'avais communiquée à quelques personnes, et que j'espérais alors reprendre plus tard, vient d’être faite par M. Matteucci, auquel l'honneur de la publication en appartient; elle conduira, sans doute, à d’autres résultats aussi intéressans que ceux que M. Matteucci a déjà publiés; le renversement du courant, qu’il a le premier observé, est surtout un fait d’une haute impor- tance pour les idées théoriques que l’on peut essayer de faire coïncider avec les faits connus. » ne. MILNE EDWARDS, — Sur les Pagures. 257 Onsenvarions zoologiques sur les Pagures et description d’un nouveau genre de la tribu des Paguriens. Par M. H. Mine Enwarps. Les Crustacés singuliers qui, pour protéger leur abdomen mou et traïnant se logent dans l’intérieur de diverses coquilles turbinées et les transportent partout avec eux, ont depuis long- temps excité la curiosité des naturalistes; ils n’avaient pas échap- pé à l'attention des anciens, et un des premiers anatomistes qui se soit occupé de la structure interne des animaux inférieurs, . Swammerdam en a étudié l’organisation. Pendant long-temps D nr atl Le cependant les auteurs paraissent avoir confondu les divers ani- maux qui présentent ces caractères généraux; mais depuis la fin du siècle dernier on les a examinés avec plus de soin, et on a vu qu’il en existait un grand nombre appartenant à des espèces distinctes. Fabricius; qui les sépara des Crabes pour en former sous le nom de Pagures un genre particulier, en mentionne quinze, et depuis lors il n’est presque aucun naturaliste-voya- geur qni n’en ait augmenté le nombre. Aussi ce groupe est-il aujourd’hui un des plus nombreux de la classe des Crustacés, et faute d’avoir été étudié d’une manière assez comparative, il est devenu en même temps un de ceux où la détermination des espèces est la plus difficile. Cette circonstance nous à porté à en entreprendre la révision et nous avons trouvé dans les riches collections du Muséum d’abondans matériaux pour ce travail. Le genre Pagurus de Fabricius, de même que la plupart des _ autres didous ç génériques de ce grand entomologiste, a été sub- divisé par les auteurs récens ; mais il était si naturel que les chan- gemens n’ont porté que sur la distribution en quelque sorte in- térieure des espèces dont il se compose, et que le groupe est resté avec ses anciennes limites : seulement, au lieu d’être conservé comme genre il a été élevé au us à de tribu, VI, Zoot,, = Novembre, 27 258 MILNE EDWARDS. — Sur les Pagures. L'auteur du bel ouvrage sur les Crustacés de la Grande-Bre- tagne, Leach, qui vient de mourir en Italie, mais qui depuis long-temps était perdu pour la science, a, le premier, séparé des Pagures proprement dits le Cancer latro dont Rumph avait donné une bonne figure; il en forma le genre Birgus. À une époque plus récente, Latreille, qui pendant sa longue carrière s'est occupé'avec tant de persévérance et de succès du perfec- tionnement des méthodes entomologiques, a signalé dans l’or- ganisation extérieure des autres Pagures des modifications inaperçues jusqu alors et en a fait la base de nouvelles divisions. Dans l'édition du Règne animal, publiée peu d'années avant sa mort, ilsépara des Pagures proprement dits les Cénobites, qui se reconnaissent à leurs longues antennes médianes, et à un ensemble de caracteres d’où résulte un actes particulier ; enfin il établit sous le nom de Prophylace un autre groupe générique qu’il considéra comme devant également appartenir à la tribu des Paguriens,, mais sur la nature duquel il reste encore beau- coup de doute. se L'on s'accorde généralement à penser que chez les Pagures proprement dits, aussi bien que chez les Cénobites, l'abdomen ne porte des appendices ovifères ou des fausses pattes que d’un seul côté et que cette partie du corps est tout-à-fait mem- braneuse endessus ; M. Desmarest , au contraire, dit que chez la femelle il existe sur l'abdomen des fausses pattes destinées à porter les œufs, et que ces organes sont plus grands d’un côté que de l’autre; enfin, suivant Latreille, le Birgus aurait deux rangées d’appendices lamelleux sous cette partie du corps. Toutes ces opinions sont plus ou moins inexactes. Chez un grand nombre de Pagures proprement dits, l'abdomen est garni en dessus de lames cornées transversales très développées et d’une consistance assez grande; et lors même que ces plaques sont réduites à un état rudimentaire, elles sont presque toujours assez distinctes pour marquer les sept anneaux dont cette partie du corps. se compose. Les deux derniers anneaux sont toujours très solides , et ce sont les membres du pénultième segment qui servent. à l'animal pour se fixer dans sa demeure et la trainer après lui; l’espèce de queue ainsi formée est toujours séparée © MHNE-FPWARDE — Sux les Pagures. ‘29 de l'antépénultième anneau par un espace membraneux très considérable, et chez les Birgus, aussi bien que chez les Pagures proprement dits et les Cénobites, elle existe et manque tout-à; fait de symétrie (1). Le genre nouveau que j'ai établi sous le nom de Cancelle est la seule division de cette tribu où cette portion terminale de l'abdomen soit symétrique (2). Chez les femelles on trouve fixés aux quatre lames cornées qui représentent les quatre anneaux abdominaux compris entre le premier segment et le sixième, quatre membres qui occupent le côté gauche de l'animal et qui servent à porter les œufs; ces fausses pattes sont souvent assez grandes , et quelquefois il en existe une semblable du côté droit, mais on n’en trouve jamais deux ran- gées, même chez les Éiéeué. Chez le mâle ces organes man- quent quelquefois complètement (chez les Cancelles et les Bir- gus); en général on en trouve trois du côté gauche de l'abdomen “et chez certains Pagures proprement ditsil en existe à droite aussi bien qu à gauche. Chez ces derniers, on trouve immédiatement en arriére des pertes thoraciques postérieures une paire de per tits appendices insérés près de la ligne médiane sur une pièce cor- née qui représente le premier anneau de l'abdomen (3); ils sont formés chacun d’un article basilaire et d’une lame terminale con- tournée eu gouttière d’une manière qui rappelle ce qui existe chez les Décapodes brachyures et chez plusieurs Anomoures . cancériformes dont nous avons formé la famille des Aptéru- res (4). La plaque cornée qui représente le second anneau de l'abdomen porte aussi une paire d’appendices symétriques qu sont beaucoup plus allongés et s'insèrent beaucoup plus en de- hors, mais qui, dans la position ordinaire, sontreployés en avant et en dedans, de maniere à se loger entre ceux de la première paire. Les trois segmens suivans portent chacun un seul appen- . dice semblable à ceux de la seconde paire, et il est à noter que chez les Pagures où le nombre total de ces appendices n’est que (x) Voyez la nouvelle édition du Règne animal ; Crustacés ; pl, 43 et 44. (2) PL 14, fig. 13. (3) PL 14, fig. 1°, (4) Hist, nat, des Crustacés, t, 2, p. 168, 260 MILNE EDWARDS: =— Our Les Pagures. de trois, ce sont ces derniers qui existent tandis que ceux du second anneau ne sont représentés que par un faisceau de poils et que ceux du premier anneau ont complètement disparu. Chez les Pagures proprement dits et les Cénobites l'abdomen, comme on le sait, est contourné sur lui-même, tandis que chez les Birgus il ne présente rien de semblable et ne cesse d’être symétrique qu’à son extrémité postérieure, qui est d'ordinaire cachée sous les grandes plaques des anneaux précédens ; dans notre genre Cancelle au contraire, l’abdomen quoique mou, est parfaitement symétrique dans toute sa longueur. (1) La structure de la Carapace est très remarquable chez tous ces Crustacés. Ce bouclier est divisé en plusieurs portions par des lignes plus ou moins membraneuses et un de ces sillons di- rigé Ne le sépare en deux moitiés dont l’antérieure constitue la région stomacale et se confond sur les côtés avec les régions hépatiques qui sont très petites, et en occupent les angles postérieurs ; la moitié postérieure est divisée longitudina- lement en trois portions, dont la médiane constitue les régions cordiale et intestinale, et les deux latérales les régions bran- chiales ; enfin celles-ci sont à leur tour séparées par une ligne semblable des portions latérales de la carapace qui descendent vers la base des pattes. Au milieu de toutes ces divisions il est bien difficile de retrouver les analogues des pièces élémentaires de la carapace des Décapodes ordinaires; mais il nous semble cependant que la pièce stomacale et la pièce médio-postérieure, dont la consistance est toujours beaucoup plus grande que celle des parties latérales, représentent la portion tergale de ce bou- clier et que les pièces de la région branchiale en représentent la portion épimérienne. L’anneau ophthalmique est quelquefois caché en dessus par un petit prolongement rostriforme de la carapace, mais ilest tou- jours libre et porte en dessus de chaque côté, un petit prolon- gementsquamiforme ; les pédoncules oculaires, dirigés en avant, ne sont pas rétractiles, et s’insèrent directement au dessus des (1) Pl 14, fig, 3%. G \ MILNÉ EDWARDS, 4 Our les Pagures. 261 antennes intérnes. Ces derniers organes présentent des dimen- sions très variables, mais toujours leur article basilaire est petit ou allongé, et ils se terminent par deux filets multi-articulés, courts ou de longueur médiocre. Les antennes externes s’insè- rent en dehors des internes, sur les côtés des pédoncules ocu- laires; leur deuxième article porte en dessus une piècé spini- forme qui est ordinairement mobile (1); elle est l'analogue de la grande lame qui recouvre la base de cesorganes chez les Salicoques etnous paraît être représentée par la portion mitoyenne du mem- bre qui aux appendices buccaux et aux pattes porte le nom de palpe. Les pattes-mächoires externes sont pédiformes et les au- tres parties de l'appareil buccal ne présentent aucun caractère important. Le sternum est presque linéaire en avant, et ne s’élargit qu'un peu postérieurement ; en général, les deux derniers anneaux du thorax sont tout-à-fait libres et mobiles; le dernier dépasse même la carapace, et est complété en dessus par une pièce cornée tergale. Les pattes antérieures, comme on le sait, sont grandes et presque toujours de dimensions inégales ; elles se terminent par une grosse main dont les pinces sont courtes et très fortes. Les pattes des deux paires suivantes sont très gran- des; celles de la quatrième paire sont au contraire courtes, re- levées au dessus des autres, et terminées par une main presque toujours didactyle ; celles de la cinquième paire sont également courtes, relevées sur les côtés du corps et terminées par une pince nie ou moins bien formée. Dans l’état actuel de la science, la tribu des Paguriens ne nous paraît devoir se composer que des genres Pagure proprement dit, Cancelle et Birgus. Le genre Prophylace de Latreille, que l’on ne connait encore que très imparfaitement, paraît ne dif- férer que fort peu de notre genre Glaucothoé ou même ne pas devoir en être séparé (2), et dès-lors il nous paraïtrait plus na- G:) Pkr4, fige » (2) M. Latreille ne connaissait lui-même que très imparfaitement le petit Crustacé d’après le- quel il a établi son genre Prophylace, et paraît l'avoir perdu avant Ja publication de son travail ; car , ayant été chargé par l’Académie des Sciences de faire à cette Société savante un rapport Ê S e 562 MILNE EDWARDS. — Sur lès Pugures. \ turel de le ranger dans la section des Macroures, à côté des Cal- lianasses et des Gébies. En adoptant ces limités pour la tribu des Paguriens on peut caractériser de la manière suivante ce groupe ét les quatre genres dont il se compose. Trigu DES PAGURIENS. Crustacés Décapodesanomoures, de la famille des Ptérygures, ayant les appendices terminaux de l'abdomen épais et non la+ melleux ; le plastron sternal presque linéaire; les pattes anté- rieures didactyles et celles des deux dernières paires très courtes et terminées par une petite pince plus ou moins parfaite, Génre Pacure PROPREMENT Dir (Pagurus). — Abdomen pres- que entierement membraneux, contourné sur lui-même, et portant à son extrémité (sur le pénultième segment) une, paire d’appendices non symétriques. Antennes in- ternes courtes, ne dépassant qué de peu le pédoncule des antennes externes et terminées par deux tigelles trés courtes. Genre Cawcrite (Cancellus).=Âbdomen mou, péu contourné sur lui-même et portant à son extrémité une paire d’ap- péndices symétriques. Anténnes internes comme dans le genre précédent. Cenre Cewosire (Cenobites). — Abdomen mou, contourné sur lui-même et terminé par dés appendices non symé- triques. Antennes intérnes très longués; leur deuxième sur le mémoire dans lequel j'ai établi lé genre Glaucothoë, il a examiné ce dernier , et, bien que ses caractères ne fussent pas en accord avec ceux Assignés aux Prophyllaces, il a pensé qu'ôn he dévait pas les séparer ( voy. Anh. des Sc, nät., t. 19 p. 333%). Cependant il n’a pu vé- rifier l’exactitude de cette opinion dans son dernier ouvrage publié en 1831, il ne décide pas la question (voyez son Cours d'Entomologie, p. 373). En attendant qu’on ait observé de nou- veau un Crustacé ayant une grande ressemblance avec nos Glaucothoés et appartenant néan- moins à la tribu des Paguriens, je crois par conséquent qn’il est inutile de s’en occuper, et de charger la classification de divisions dônt les caractères ne peuvent être que fort douteux ; jusqu'à cé que le contraire ait été démontré , je regarderai donc les Prophylaces comme iden- tiqués avec les Glaucothoés. MILNE EDWARDS. ‘— Sur les Pagures. 263 article dépassant de beaucoup le pédoncule des antennes internes et terminé par deux tigelles dont l'une est assez longue. Genre Bmeus (Birgus). — Abdomen non contourné sur lui- même et presque entièrement solide en dessus. Antennes internes comme chez les Cénobites. | DES PAGURES. Les Pagures proprement dits se ressemblent beaucoup entre eux, tant par le port que par les détails de leur organisation, et par leurs mœurs. La portion céphalothoracique de leur corps est moins longue que la portion abdominale (1); leur carapace est presque aussi large en avant qu'en arrière, et ne se pro- longe latéralement que peu ou point au dessus de la base des pattes, comme cela a lieu chez les Birgus etles Cénobites(2); én arrière elle est fortement échancrée; au milieu, et en avant elle est tronquée ou armée seulement d’un petit rostre rudimen- taire. La portion basilaire des pédoncules oculaires est à décou- vert; la longueur de ces tiges varie beaucoup suivant les espe- ces, mais elles sont tonjours plus ou moins cylindriques, et ne sont jamais comprimées comme chez les Cénobites. L’anneau qui porte ces organes est quelquefois armé au-dessus d’une petite lame médiane qui simule un rostre , mais qui n’est pas uni à la carapace (3). Les antennes internes sont placées direc- tement au dessous de ces pédoncules ; leur premier article est renflé et presque globulaire ; les deux suivans sont minces et cylindriques , et ne dépassent que de peu soit la partie pédon- .culaire des antennes externes, soit les yeux; enfin les tigelles terminales de ces organes sont très courtes, et ont la même forme que chez les Brachyures, tandis que chez les Birgus et (x) PL 3, fig. x, et pl. 14. (2) Règne animal; Crustacés, pl. 43 , fig. z et 44 ,! fig. …. (3) PL 14, fig. 2. 264 MILNE EDWARDS, — Sur les, Pagures. s les Cénobites leur forme est différente. Les antennes externes sont insérées sur la même ligne que les pédoncules oculaires; l'épine mobile qui représente le palpe est très grosse et souvent fort longue ; le dernier article de leur pédoncule est gréle et cylindrique; enfin, elles se terminent par un filet multi-articulé en général très long. Les pattes-mächoires externes sont de grandeur médiocre ; leur tige est pédiforme, et leur palpe très développé. Les pattes antérieures sont en général très inégales, et l’une des mains est très renflée. Les pattes de la quatrième paire sont très courtes, et leur pénultième article, garni en dessus d’une plaque ovalaire verruqueuse, est en général très large, et prolongé en dessus de l'article suivant, de manière à constituer avec celui-ci une petite pince didactyle. Les pattes de la cinquième paire sont plus longues, plus grèles et plus recourbées en haut; elles présentent aussi vers le bout une plaque granuleuse, et se terminent par une pince didactyle plus ou moins bien formée. L’abdomen est grand, membraneux et contourné sur lui-même du côté droit; les plaques qui en garnissent la face dorsale sont en général à-peu-près symé- triques, mais très minces et très éloignées entre elles. Quel- quefois il existe à la base de l'abdomen une paire de fausses pattes rudimentaires chez la femelle, et deux paires d’appendices plus développés chez le mâle (1); mais en général le premier segment n’en porte pas, et le second, de même que les trois seg- mens suivans, n'en portent qu’un seul placé du côté gauche, et fixé au bord de la plaque dorsale (2); du reste, ces appendices sont toujours petits, et terminés par une, deux ou même trois lamel- les ciliées sur les bords, qui, chez la femelle , acquièrent des dimensions assez considérables, et servent à l'insertion des œufs. Les appendices du pénultième anneau de l'abdomen se compo- sent chacun d'un article basilaire, court et gros, portant deux autres pièces, courtes et crochues, insérées lune à son bord inférieur, l’autre à son extrémité, et garnies chacune en dessus (r) PL 14, fig. 24. (2) PL 15, fig. 3, etc. 13" Tnt de. A 4 MILNE gpwanns, — Sur les Pagures. 26 d'une plaque verruqueuse , semblable à celle que nous avons déjà vue sur les pattes postérieures ; ces deux fausses pattes cau- dales n’ont pas exactement la même forme, et sont de grandeur très inégale, celle du côté droit étant beaucoup plus petite que l’autre. Enfin la plaque médiane qui représente le dernier an- neau de l'abdomen est presque toujours beaucoup plus grande d’un, côté que de l’autre, et semble composée de plusieurs pièces. Ce genre peut être divisé en trois groupes ou sous-genres naturels, savoir : 1° Les PAGURES oRDINAIRES qui n’ont sur les cinq premiers anneaux de labdomen qu’une seule rangée d’appendices tou- jours placée à gauche et qui n’ont pas d’épine rostriforme sur l'anneau ophtlalmique. 2° Les PAGURES APPENDICULÉS qui ressemblent aux précédens par l'absence d’une épine rostriforme sur l’anneau ophthalmi- que, mais qui ont à la base de l'abdomen, chez le mâle, deux paires de fausses pattes. 3° Les PaGurEs ARMÉs qui se distinguent par l’épine rostri- forme qui naît du milieu de l’anneau ophthalmique et s’avance entre les pédoncules oculaires. Pour faciliter la distinction des espèces, nous en avons disposé les principaux caractères sous la forme d’une table synoptique; mais en présentant ce tableau, nous croyons devoir rappeler ce que nous avons déjà dit ailleurs de l'emploi de ces moyens analy-. tiques ; ilssont d’un usage très commode pour écarter de la com- paraison avec l'animal à déterminer un grand nombre d’espèces, . mais pour constater son identité spécifique avec celle à laquelle elle paraît se rapporter d’après les caractères indiqués dans ces tableaux, il ne suffit pas d’avoir reconnu l’existence de ces mé- mes caractères, il faut nécessairement comparer l’ensemble de l'organisation extérieure. Si l’on se servait uniquement de ta- bleaux semblables et qu’on vint à rencontrer une espèce qui ne s'y trouve pas mentionnée, il serait impossible d'acquérir sur les affinités naturelles des idées exactes ; car les caractères sur les- 266 MILNE EDWARDS. — Swr les Pagures. quels réposent les diverses coupes successiyes n'étant pas dans des rapports de subordination naturelle, n’entraînent pas dans toutes les espèces qui les présentent un mode de conformation analogue. Cette méthode est par conséquent tout-à-fait artifi- cielle ; mais en l’employant dans de justes limites, élle ést sans inconvéniens et facilite considérablement l'étude. Il est aussi à noter que dans ce tableau nous n’avons fait mention que des espèces assez bien connues pour être déterminées avec quelque certitude, et que nous avons évité de faire usage des caractères fournis par la disposition des appendices de la base de l’abdo- men à cause de la difficulté que présente en général l'examen de cette partie du corps chez les Pagures, tels qu’on les voit d'ordinaire dans les collections zoologiqnés , où ces animaux sont presque toujours déformés par la dessiccation. I. SOUS-GENRE. PAGURES ORDINAIRES, 4 Cette division comprend , comme nous l'avons déjà dit, es espèces dont l'anneau ophthalmique n’est pas garni en désone d’un appendice rostriforme , et dont l'abdomen ne présente pas à sa base des appendices pairs. s À. Espèces dont les pédoncules oculaires sont gros et plus courts que la portion basilaire des antennes externes: a. Palpé spiniforme des antennes externes dépassant l'extrémité des pédoncules oculaires. 1. Pacure Brrnarn. Pagurus Bernardus. (1) Bord antérieur de la carapace assez profondément échantcré au-dessus de la base dés pédoncules oculaires , ét préséntant sur la ligne médiane un d'en sail- (1) Cancellus, Swammerdam; Biblia nat. tab. xr. Bernhard l'hermite $ Réaumur, Acad*mie des Sciences,1 710, p. 464, pl. 10, figé 19 et 20: MILNE EDWARDS. — Sur les Pagures. 267 : ant qui simule un petit rostre obtus. Pédoncules oculaires gros, eonrts, de ‘. même longueur que la portion du front que recouvre leur base, et renflés au … bout; un espace vide entre les deux articles basilaires de ces pédoncules, qui sont armés d’une dént large, aplatie et presque ovalaire, ou plutôt lancéolée, . Troisième afticle des antennes internes dépassant à peine là portion basilaire des antennes externes; celles-ci ayant leur second article ariié à son angle ex- terne d’une dent très aiguë, et portant sur le milieu de son bord supérieur le palpe spiniforme qui est très long (au moins aussi long qué l’artiéle terininal des pédonéules oculaires), grèle dès sa base, et recourbé en déssous, puis en avänt, un … peu én forine de S (1). Pattés antérieures grosses et hérissées de tibercules isolés, inégaux et plus où moins spiniformes , célle de droite beaucoup plus grosse que celle de gauche; le carpe presque aussi long que la portion palmaîitre dé la main, qui ést rebfléé eh déssus ; grosses pinces très obtüses et sans ongle ter- minal distinct. Les pattes des deuxième et troisième paires épineuses et tuber- culeuses en dessus; leur dernier article très gros, comprimés tordu sur lui- même , et s’élargissant un peu vers l'extrémité, que ensuite se rétrécit brus- quement en pointe. Les pattes de la troisième paire séparées à leur ‘base par un petit plastron sternal presque carré. Mains dés pattes postérictres très côtes, : ét terminées par une pince très aplatie ét excessivémént courté. Abdomen ne présentant dans sa partie membraneuse que des plaqués latérales. Chez la fe- melle, quatre fausses pattes ovifères, formées pat un articlé basilaire cylindrique et allongé, et deux branches terminales lamelleuses. La quatrième fausse patte est TRS plus petite que les aütres, et sa branche externe est rudimen- taire. Chez le mâle , trois fausses pattés composées également d’un aïticle eylin- drique et de deux pinces terminales , dont une lamelleuse etassez grande ; l’autre + rudimentairé ; point d’appendices semblables à droite; une échancrure semi-lu- | maire au bord postérieur de la lame terminale de l'abdomen. Taille ordinaire, environ 5 pouces ( depuis le front jusqu’à l'extrémité de l'abdomen), mais peut . devenir plus grande. Habite nos côtes de l’ouest, la Manche, et plus au nord jusqu’en Islande. (Collection du Muséum.) \J L Cancer Bernhardus, Lin. Syst. nat. et Mus, Lud. Ulr., p: 454, etc. — Herbst. t. 11. p. 14. pl. 22. fig. 6, Bernhard l’Hermite, Degéer, Mém. sur les Insectes; t. vil, p. 40. pl. 23. fig, 5. Pagurus Bernhardus, Fabricius , Supplém. Eutom, System. p. 411, # — Olivier, Encyclop. méthod. , Insectes , t. vrtr, p. 64r: | — Latreille, Genera crustaceorum et insectorum, t. 1, pi 46. Hist, des Grust. & vi, p. 160. — Lamarck, Hist. des anim. sans vertèbr. t. v, p. 220. Pagurus streblonyx, Leach, Malac. Brit. pl. 26. fig. 1-4. — Latreille, Encyclop. pl. 309, fig. 3-6 (d’après Leach.) Pagurus Bernhardus, Desmarets, Consid, sur les Crust. 173. pl. 30. fig, 2. (x) Voyez les planches déjà citées du Règne animals pl. 44, fig. 2 et 2°. 268 MILNE EDWARDS. = Sur les Pagures. 2. Pacure pr Pringaux. — Pagurus Pridauxii. (1) Cette espèce ne diffère que fort peu de la précédente, dont elle ne se distin gue guère que parce que la main est plus allongée et moins épineuse : {es turses des puttes de la troisième et de la quatrième paires sont plus grèles ; canne- lés lutéralement, pas sensiblement tordus, et s’amincissant très graduelle- ment vers le bout, et le péuultième article de ces membres est à peine dentelé sur son bord supérieur. L’abdomen (du mâle, sinon des deux sexes) est garni en dessus de cinq grandes bandes FREE transversales. Longueur , environ 3 pouces. Habite les côtes de la Manche et de la Méditerranée. (Col. du Mus.) 3. PAGURE ANGULEUX. — Pagurus angulatus. (2) Cette espèce se distingue du Pagure Bernhard, auquel elle ressemble du reste extrêmement par la forme des mains, dont la face externe présente trois grosses crêtes longitudinales (une médiane et deux marginales), hérissées de tubercules et séparées par des gouttières profondes et presque lisses. Les larses des pattes de la deuxième et troisième paires s’amincissent graduellement et ne sont pas tordus sur eux-mêmes et le pénullième est fortement dentelé sur le bord. Enfin l'abdomen du mâle est pourvu de quatre fausses pattes sem- blables à celles du P. Bernhard. Longueur, environ 3 pouces. — Habite la Méditerranée. (C. M.) Le Pacure crarnrir (3) de Roux ne paraît être qu'une variété de l'espèce précédente; on le trouve dans les mêmes mers. (x) Leach, Malac. Brit. pl. 26. fig. 5, 6, — Latreille, Encyclop. pl. 309. fig. x (d’après Leach,) : P. solitarius, Risso, Hist. nat. de l’Eur. mérid. t. v. p. 40. P. Pridauxii, Desmarets, Consid. sur les Crustacés, p. 173. 0 P. solitarius, Roux, Crustacés de la Méditerranée , pl. 36. (2) Risso, Crustacés de Nice, pl. 1. fig. 8. Desmarets, Consid. sur les Crustacés, p. 173, Roux, Crust. de la Médit, pl. 4x. (3) Pagurus meticulosus, Roux, Crust, de la Méditerranée, pl. 42, | MILNÉ EDWARDS. — Sur les Pagures. 269 4. Pacure De GaupicnauD. — Pagurus Gaudichaudis. ‘ Conformation des yeux et des antennes à-peu-près la même que chez le P. Bernhard. Pattes antérieures très grosses, poilues et hérissées en dessus d’une multitude de grosses épines acérées , noires à la pointe et isolées; carpe main et doigts longs. Pattes des deux paires suivantes épineuses sur le bord supérieur, un peu comprimées et terminées par un tarse gros et cylindrique. Main des pattes postérieures très courtes; abdomen du mâle garni de plaques cornées , dis- posées par paires éloignées de la ligne médiane, et ne portant qu’une seule fausse patte filiforme , fixée à la dernière de ces plaques du côté gauche. Par son aspect cettee spèce ressemble beaucoup au Pagure rusé. Longueur, 5 pouces. Habite la côte de Valparaiso, (C. M.) 5. PAGURE À CRÈTE. = Pagurus cristatus. Dent médiane du bord antérieur de la carapace un peu plus saïllante que chez le P. Bernhard, et pédoncules oculaires moins gros. Pattes antérieures granu- leuses ou légèrement épineuses ; bords supérieur etinférieur du carpe minces et en forme de crête dentelée. Mains un peu comprimées et garnies d’une ou deux crêtes longitudinales, minces , saillantes , plus ou moins dentelées, et dis- posées d’une manière un peu différente des deux côtés du corps et dans les deux sexes. Pattes suivantes minces , comprimées et dentelées finement sur leur bord su- périeur ; tarse long, courbe et comprimé, mais pas tordu. Trois fausses pattes pe- tites età deux lamelles terminales, fixces à Fapdomen) à peiue quelques poils sur les pattes. Longueur, 18 lignes. Trouvée à la Nouvelle-Zélande, par MM. Quoy et Gaymard. (C. M.) Le Pagurus pollicaris de Say (1) paraît appartenir à cette subdivision. Mais nous n’osons l’affirmer car ce naturaliste ne dit rien de la disposition des fausses pattes de l'abdomen; parmi les caractères qu'il indique les suivans nous semblent les plus “importans. Appendice des antennes extrêmes aussi long que les yeux; mais inégales, la grosse situé à droite, couverte de * granulations assez fortes, garnies en dessous d’une crète denti- culée et ayant le pouce élevé au point d'être anguleux. Habite _ les côtes des Etats-Unis d'Amérique. (x) Account of the Crustacea of the United-States ; Jourz of the acad. of science of Philadel- phiay vol. 1, p. 163, - , 270 MILNE EDWARDS. — Sur les Pagures. a a. Palpe spiniforme des antennes exiernes dépassé par les pédoncules oculaires. 6. Paeure srrié. — Pagurus striatus (3). Angle médian du bord antérieur"de la carapace à peine marqué. Pédoncules oculaires gros, sans renflement notable au milieu, et bésyeoup plus longs que la portion échancrée du front qui recouvre leur base; leur pièce basilaire termi- née en dedans par un bord droit assez éloigné de celui du côte OPPOsé » et se prolongeant sous la forme d'une dent courte, large, plate, et épineux sur le bord externe qui est courbe. Troisième article des antennes internes dé- passant de. beaucoup la portion basilaire des antennes externes. Palpe spi- niforme de celles-ci gros à sa base, presque de la longueur de l’article terminal du pédoncule oculaire; et très épineux en dessus. Pattesantérieures très grosses, surtout du côté gauche, et couvertes presque partout de lignes transversales , courbes, tuberculeuses, et garnies de petits poils assez serrés ; SUx la partie supérieure du membre, plusieurs des tubercules de ces lignes squammiformes acquièrent des dimensjois assez grandes pour devenir de grosses épines poinz tues; le carpe est court ; la portion palmaire de la main longue et les pinces très courtes, très obtuses , ct terminées par un ongle noirâtre bien distinct; les pattes de la deuxième et de la troisième paires sont presque cylindriques, et garnies de petites crêtes squammiformes comme les antérieures. La portion du sternum qui les sépare à leur base est presque linéaire, La main des pattes postérieures est très longue, et les doigts sont presque cylindriques et assez longs. Enfin l’abdo- men du mâle présente dans sa portion membraneuse cinq plaques cornées, transversales, dont \j première est fort petite, et dont les quatre dernières por- tent chacune à gauche une fausse patte terminée par une seule lame ovalaire. Les trois premières fausses pattes ovifères de la femelle sont terminées par trois grandes lamelles ciliées. Pince terminale de l'abdomen divisée postérieurement (x) Cancer arrosor, Herbst, t, 1, p.170. pl. 453, fig. r. P. strigosus, Bose, Hist. des Crast. t, 11, p. 77. Pagurus striatus, Latx, Hist, nat. des Crust. t, vi. p. 163. — Olivier, Eneyc. t. vus, p. 64 à. : P.incisus, Lamarck, Hist. nat, des anim. sans vertèbres, t. w p. 220. — Latreille, Encyclop. pl. 310, P. striatus, Risso, Crust. de Nice, p. 54. .. — Desmarest,! Consid. sur les Crust. p. 198: 5 — Roux, Crust. de la Méditerrahée, pl. 10 Le Pagure figuré par M. Savigny dans le grand ouvrage sur l'Égypte (Crust, pl: 9, fig. 1) me paraît être un jeune individu de cette espèce, LE 4 s'| 2 | TERRA 1 . | 4 È : | | MILNE RDWARDS:-— Sur des Pagures. 271 en deux lobes inégaux et arrondis, Couleur, rouge mêlé de jaune. Longueur du corps, 7 à 8 pouces. L Habite la Méditerranée. :? 7. Pacune rusé, — L'agurus callidus. (1) Espèce très voisine du P. strié, dont elle se distingue par les nombre uses _ dents spinifor “mes, dont toute La face supérieure des mains est hérissée. Le; pattes suivantes présentent aussi , au Jieu de crêtes tuberculeuses squammi- formes, de petites rangées d'épines ppuryues chacune d'une touffe de poils. Les fausses pattes abdominales du mâle présentent une seconde lamelle terminale ru- dimentaire, et sont portées sur quatre graudes plaques transversales, Un peu moins grande que l'espèce précédente. Habite la Méditerranée. (G. M.) LA 8. Paoure rPrINT. — Pagurus pictus, Angle médian du borcl antérieur de la carapace arrondi, mais assez saillant, Pédoncules oculaires presque aussi longs que le pédoncule des antennes exter- nes , dépassant à peine le palpe spiniforme de ces appendices , et à-peu-près de la longueur du bord antérieur du test. Cornée des yeux, à peine échancrée au bord supérieur. Pattes antérieures longues, minces, d'inégale grandeur, et un peu poilues ; une rangée d'e dents aiguës sur le bord supérieur du carpe, mains un peu couwrbées en dedans. Pattes suivantes grèles, peu poilues, et armées sur le bord inférieur du tarse d’une rangée de grosses épines. Abdomen de la femelle présentant sur sa face inférieure , près de la base, deux renflemens py- ramidaux, mous, et garni sur le côté gauche de quatre stades ovifères, dont les trois premiers grands et terminés par deux lames ; appendicesabdominaux du mâle petits et simples, Longueur 1 pouce ; couleur jaune-rougeàtre , avec des | taches rouges linéaires et longitudinales. Habite les côtes de la Provence. (C. M.) 9. Pacure Ten, — Pagurus timidus. (2) Cette petite espèce paraît être très voisine de la précédente, mais s’en distin- . gue par la forme des pattes antérieures; la main est très courte , et le carpe pré- sente au-dessous un prolongement en forme de grande dent ; les pattes suivantes (t) Roux, Crust, de la Méditerranée, pl. 15. (2) Roux, Crust, de la Méditerranée, pl, 24, 65, 6-9, 272 MILNE EDWARDS. — Sur les Pagures. sont grèles, et leur dernier article est moïns long que le précédent. Longueur, environ un pouce, Habite la Méditerranée. 10. PAGURE TENAILLÉ — Pagurus forceps. Dent rostriforme, large et avancée; pédoncules oculaires presque aussi longs que la portion basilaire des antennes externes. Pattes antérieures très inégales et finement granulées ; celle du côté droit très grande, ayant le carpe beaucoup plus grand que la main, et armée de deux fortes crêtes , l’une supérieure, l’autre inférieure ; enfin ayant la main comprimée et les pinces pointues; celle du côté.gauche terminée par une main dont la portion palmaire est extrême ment courte, et dont les doigts sont grèles , longs et pointus ; le doigt mobile presque filiforme et droit, ou méme recourbé en S. Pattes suivantes compri- mées, grèles et non poilues. Fausses pattes abdominales du mâle petites et sim- ples. Longueur, 10 lignes. Couleur rougeâtre violacée avec les pattes annelées. Habite les côtes du Chili. (C. M.) B. Pédoncules oculaires dépassant la portion basilaire des antennes ex= lernes. b. Point de prolongement rostriforme sur le bord antérieur de la ca- rapace. 11. PAGURE DIFFORME. — P. deformis. (PL 14, fig. 2.) Pédoncules oculaires très gros et courts, quoiqu’un peu plus longs que la por- tion basilaire des antennes externes ; ; beaucoup moins longs que le bord anté- rieur de la carapace ; cornée grande et occupant la. moitié de la longueur de l'article terminal des pédoncules oculaires. Pattes antérieures courtes ét gros- ses, surtout du côté gauche, lisses en dehors et épineuses en dessus ; une crête den- telée sur le bord superieur du doigt mobile de celle du côté gauche. Pattes suivantes lisses et peu poilues ; celles du côté gauche garnies en dehors d’une crête saillante qui s'étend sur les deux derniers articles, etqui sur la-troisième pate esttrès forte et finement dentelée; rien de semblable du côté opposé. Abdomen garni de qua= tre grandes plaques transversales , portant chacune une fausse patte ovifère, dont les trois premières'sont grandes, et terminées par trois lames allongées et ciliées chez la femelle. Chez le mâle tous ces appendices sont petits, et terminés par une seule lame. Longueur, 5 pouces. Habite les côtes de l'Ile-de-France et des îles Séchelles, (CG. M.) MILNE FDWARDS, —« Swr les Pagures. 273 LE : j L 19. PAGURE POINTILLÉ, — P. punctulatus. (1) Pédoncules oculaires gros, cylindriques et assez longs, mais ne dépassant que de fort peu le pédoncule des antennes externes, moins longs que le pédoncule des antennes internes , et beaucoup moins longs que le bord antérieur de la ca- rapace; cornée petite, n’occupant pas le quart de la longueur du pédoncule et échancrée comme d'ordinaire pour recevoir un prolongement de la portion opaque du pédoncule. Palpes spiniformes des antennes externes petits. Pattes antérieures renflées , très inégales (la gauche fort grosse) , et couvertes de grosses épines acérées , garnies àleur base de faisceaux de poils longs etraides Pattes des deux paires suivantes presque cylindriques, et garnies d’une multi- tude de faisceaux de poils raides, à la base de chacun desquels on voit deux épi- nesacérées plus ou moins longues, Abdomen garni de quatre larges plaques trans- versales et de quatre fausses pattes qui, chez le mâle, sont simples et très pe- tites, et qui, chez la femelle, sont, à l'exception de la dernière, grosses et pourvues de trois lames très développées. Couleur générale, rouge-orangée, avec des taches ocellées, blanches , bordces de brun ou de noir, qui sur les mains sont, pour la plupart, situées. sur les épines; poils roux et très raides ; chez la femelle les plaques abdominales sont colorées comme le reste du corps. Quelquefois ces taches disparaissent presque entièrement. Longueur, & ou 5 pouces. Habite l'Océan Indien. (C. M.) ‘ 13. Pacure moucnerÉ. — Pagurus guttatus. (2) Pédoncules oculaires médiocres , beaucoup moins longs que le bord antérieur de la carapace , mais dépassant le pédoncule des antennes internes ; cornée pe- tite, et n’occupant qu'environ le cinquième de la longueur du pédoncule. | Palpe spiniforme des antennes externes très petit. Portion antérieure de la ca- » rapace très déprimée , polie et marquée de plusieurs sillons linéaires, dont les médians circouscrivent une espèce d’écusson , mieux marqué que dans le P. poin- \tillé, mais de même forme. Pattes antérieures petites (la gauche un peu plus | grosse que la droite), poilues, et un peu épineuses sur le bord supérieur. … Celles des deux paires suivantes courtes, grosses, cylindriques, pew poilues (1) Olivier, Eneyclop. Méth. t. vaux, p. 641. Desmarest, op, cit. p. 178. Quoy et Gaymard, Voy. de l’Uranie, p. 620. pl. 98. fig. a; (2) Pagurus guttatus, Olivier, Eneyclop. t. vin, p. 640. — Quoy et Gaymard. Voÿ: de l'Uranie, pl. 79. fig. 3. — Dict. classique d’hist. nat, pl. 64, fig. 2. VE, Zoor, — Novembre, 18 274 MHLNE EDWARDS. — Sur les Pagures. et à peine épineuses , si ce n’est au bord externe de leur troisième article. Ster- num chez la femelle très large ,surtout entre les pattes de la troisième et qua- trième paires , où sa largeur égale la longueur du bord antérieur de la carapace, Abdomen garni de grandes plaques transversales, qui, en avant, se touchent pres- que. Fausses pattes ovifères de la femelle grandes et à trois laines terminales ;enfin un appendice mou, en forme de corne , et de grandeur très variable à la partie latérale et lotérieure de l'abdomen de la femelle , un peu en arrière de la troi- sième fausse patte. Couleur du corps blanc-jaunatre ; pattes rouges avec des points jsanes ; et sur la face supérieure du quatrième article de celle des trois pre- mières paires, une grande fache circulaire qui paraît être bleuâtre dans le vivant, mais devient blanchätre après la mort. Longueur, environ 3 poutes. Habite lOcéan indien (C. M. ) Le Pacure SANGUINOLENT (1) de MM. Quoy ét Gaymard, déposé par ces na- turalistes dans la collection du Muséum, ne me paraît être qu'une simple va- riété de l'espèce précédente. Il est cependant À noter que la forme des lobes de la région genitale , qui embrassent l'extrémité postérieure de l'espèce d’écusson représenté par la région stomacale, est un pen différente, Ici ils sont beaucoup moins larges, et leur bord extérieur, au lieu d’être échancré vers le milieu, est 1 régulièrement courbe, Du reste il ne paraît différer aussi en rien du Pagurus Hungarus, figuré par Herbst, PI. 23, fig. 6. (2) 14. PaGuRE vorsiN. — Pagürus a finis Espèceïtrès voisine du P. pointillé, mais ayant les pédoneules oculaires. ex- trémement longs (environ une fois et demie aussi lôngs que le bord antérieur de la carapace) ; le palpe spiniforme des antennes externes rudimentaire (ne dé « passant pas le pénultième article pédoncuaire |, les pattes de la deuxième et troisième paires à peine poilues , si ce n’est sur le dernier article, et l'abdomen du mâle armé d’un prolongement mou, en forme de core, ln peu en arrière ét au-dessous de la troisième fausse patte, Longueur, 3 pouces environ, Habite les côtes de Ceylan. (C. M.) 15, Pacune sérirëre, — Pagurus setifen. Cette espèce ne diffère que fort peu du Pagure moucheté , mais s’en distin gue, ainsi ques des espèces précédentes, par a forme dela patte gauche de la troisième paire, qui présente trois crêtes longitudinales, ‘séparées par des sillons * (1) Voyage de l’Uranie, pl. 70. fig. 2, et Diet. elass, d'Hist, nat, , pl, 62, fig, x. (2) Dans le texte de Herbst, cetic figure est citée à tort sous Je n,.7, 72765 44 1 pi 264 nd LL 7e MILNE FDWARDS, = Surles Pagures. 270 profonds, et dont les deux externes sont marginales et sétifères. Les pattes sont couvertes d’une grande quantité de longs poils fauves. L’abdomen de la femelle est conformé de la même manière que chez le P. déprimé. Longueur, 3 pouces. Couleur, rouge mêle de jaune. Habite la Nouvelle-Holiande. (C. M.) 16. PAGURE GRANULEUX, — Pagurus granulutus. (1) Pedoncules oculaires longs et grèles, plus longs que le bord antérieur de la car rapace, et dépassant de beaucoup le pédoncule des antennes externes, mais dépassés par le troisième article des antennes externes; cornée transparente très petile et n’occupant qu'environ un sixième de la longueur de l’article terminal du pédoncule. Carapace garnie de petites touffes de poils. Pattes antérieures très grosses, celle de droite un peu plus grande que l'autre, et toutes deux armées en dessus d’une rangée de fortes épines, et couvertes dans tout le reste de leur étendue de tubereules, dont la base est entourée en avant d'une rangée de . pouls très courts et très serrés qui décrivent des demi-cercles, et par leur réunion simulent la disposition d’écailles ; sur la main ces tubercules sont formés d’un groupe de granulations plus ou moïns grosses et nombreuses, les patt*s des deux paires suivantes sont grosses, presque cylindriques, et couver- tes de crêtes poilues , squammiformes, disposées à-peu-près de même qu'aux pattes antérieures. La pince des pattes des deux dernières paires est bien formée. Sternum assez large entre les pattes de la troisième paire. Abdomen garni de quatre plaques transversales, portant chacune une fausse patte, qui, chez le mâle, se termine par une longue lame ciliée, et qui, chez la femelle, se ter- mine (à l'exception de la dernière) par trois lames ayant à-peu-près la même Lr- geur. Longuenr 7 à 8 pouces. Habite les. Antilles. (C. M.) bb, Bord antérieur de la carapace armé sur la ligne médiane d’une dent ros- trale, plus ow moins saillante. (x) Cancellus maximus Bahamensis. Catesby, Hist, of Carolina, vol. æ. tab, 34, Macao Parra Descripcion de diferentes piezas de Historia natural, pl. 61. Pagurus granulatus, Olivier. Encyclop. t. vrrr. p. 640. Lamarck, Hist. des anim. sans vert, t, v3 p. 220. 18. 276 MILNE EDWARDS, = Swr les Pagures. 17. PAGURE obuLÉ. — Pagurus oculatus. (1) . Dent rostriforme à peine marquée. Pédoncules oculaires moins longs que la portion pédonculaire des antennes internes, mais plus longs que le bord anté- rieur de la carapace; leurs écailles basilaires, petites, courbées, presque ova- laires et rapprochées. Patæes antérieures presque symétriques et médiocres ; la main épineuse et garnie de quelques poils ; les doigts gros, presque cylin- driques, et terminés par un ongle noir ; pattes de la deuxième et de la troisième paires presque cylindriques, garnies de quelques faisceaux de poils courts et rares, et terminées par un tarse styliforme beaucoup plus court que le pénul- tième article. Abdomen du mâle garni de quatre fausses pattes petites et à une seule lamelle terminale. Laine terminale de l'abdomen arrondie au bout. Lon- gueur, 2 pouces. Couleur, rougeâtre ; des lignes longitudinales jaunes et rouges sur les tarses. Trouvée à Noirmoutiers (C. M.) 18. Pacure cuirassier. — Pagurus clibanarius. (2) Dent rostriforme triangulaire, extrémement petite, et séparée du front par un sillon. Pedoncules: oculaires très grèles, plus longs que le bord antce- rieur de la carapace, mais en général dépassés par le troisième article des an tennes internes; la dent squarmiforme de leur base petite, pointue, en con- tact avec son congénère , et'tronquée en dehors ; cornée très petite, et sans échancrure notable à son bord supérieur. Palpes squammiformes des antennes externes médiocres ; l’article basilaire de ces organes dépassant bien notablement l'angle externe de la carapace. Pattes antérieures médiocres , renflées, très épineuses, et légèrement poilues en dessus ; les suivantes garnies de faisceaux , de poils de poils raides et brunes, Tarse court. Fausses pattes abdominales du mâle assez grandes, et portant deux lames terminales ciliées. Longueur, 4 pou- ces, Couleur, rouge brun , avec des lignes longitudinales pâles sur les pattes, qui dans le jeune âge sont bordées de lignes d’un rouge foncé. Gette espèce, qui habite les mers d'Asie, est très voisine-de la précédente, (G. M.) (x) Cancer.oculatus , Fabricius. Ent, Syst. 2. ps 4914 Pagurus oculatus , Fabr. Suppl. p. 413. —Latreille. Hist. des Crust. t, vr. p. 162. {2) Cancer clibanarius, Herbst. t. 11. p. 20. pl. 23. fig. r. — Latreille, Hist. des Crust. et des Ins. t. vr. p. 167. — Olivier, Encyclop. t. vrir. p. 646. — Quoy et Gaymard, Vor. de l'Uranie. pl, 78. figz r. sm ass te dette de de GR nb ol à nn 2 à MILNE EDWARDS, — Sur des Pagures. | 27? 19. PAGURE MAINS ÉPAISSES. — Pagurus crassimanus. Petite espèce très voisine de la précédente, dont elle ne se distingue guère que par les pattes plug grosses et couvertes de longs poils ; les mains sont ex- trêèmement courtes , presque globuleuses et tuberculeuses en dessus aussi bien qu’en dessous; les pédoncules oculaires sont un peu plus gros et légèrement courbés en dehors. Couleur, rouge lie-de-vin ; longueur, environ 2 pouces, Habite la mer du Sud. (GC. M.) 20. PAGURE misANTHROPE, — Pagurus misanthropus. (1) Espèce très voisine des précédentes ; les pédoncules oculaires sont très grèles, allongés, et terminés par une petite cornée sans échancrure notable ; il paraît y avoir une dent rostriforme rudimentaire, les pattes antérieures sont médiocres et poilues, et ne paraissent offrir ni épines, ni tubercules. Les caractères assignés à cette espèce par Roux sont tirés de la disposition des couleurs : un grand zombre de taches bleu-ciel sur un fond verdâtre. Longueur, environ 18 lignes, Habite la Méditerranée. 21. PAGURE DÉCORÉ. — Pagurus ornatus. (2) Espèce très voisine de la précédente dont elle ne paraît différer que par ses pédoncules oculaires plus gros, par ses pattes antérieures plus grosses et à peine poilues ; les pattes des deux paires suivantes plus longues et par ses couleurs ; les mains sont marquées de points rouges sur un fond vert et blanc, et les pattes suivantes présentent des lignes rouges sur un fond vert. Longueur, environ 1 pouce. Habite la Méditerranée. (x) Pagurus tubularis | Risso, Crust. de Nice p. 56. . P, misantropus, Risso. Hist. nat. de l’Eur. mérid. t. v. p. 41. — Roux, Crust. de la Méditerranée, pl. 14. fig. r. MM. Risso et Roux rapportent à cette espèce le Pagurus tubularis de Fabricius ( Supp. p. 413). — Le Pagure figuré par M. Savigny dans le grand ouvrage sur l'Égypte (Crust. pl. 9. fig. 2) paraît aussi se rapporter à cette espèce : il est cependant à noter que la disposition de l'abdomen semble anomale, | (2) Roux, Crust, de la Méditerranée, pl. 43. 278 miné eDwANDS. — Sur les Pagures. 22, Pacune rusirouieux. = Pagurus tuberéulosus : (PI. 13, fig. 1.) Espèce éxtrémement voisine de la précédente, mais qui sen nee dr par ses pultes antérieures, gränuleuses séulément; les pattes suivantes sont à peine “poilues. Longueur, environ 3 pouces. Couleur, rougeâtre rayé de jaune. Habite lés Antilles. (C. M.) Je suis porté à croire que le Pagurus scopetarius figuré par Herbst, pl. 13, fig. 3, est un jeune de cette espèce. 23. PacuRE FLUTEUR. — Pagurus tibicen. (1) Dent rostriforme à peine saillante, rudimentaire. Pédoncules oculaires de la longueur du bord antérieur de la carapace, et depassant le troisième article des antennes internes; leurs écailles basilaires petites, triangulaires et rappro- chées. Palpe spiniforme des antennes externes extrêmement petit. Pastes entiè- rement lisses ; celles de la première paire extrêmement inégales ; Ja main gauche très grosse et renflée ; pinces obtuses et sans ongle terminal; tarse des pattes de la deuxième et de la troisième paires court. Abdomen du mâle garni de quatre fausses pattes à deux lamelles terminales. Fausses pattes ovifères de la femelle grandes et à deux lames étroites, Derhier atticle de l'abdomen presque symétri- que. Longueur, 18 lignes. Couleur , jaune-rougeâtre, avec de grandes taches blanches à l'extrémité des pattes. Habite la mer du Sud. (C. M.) 34. Pâcüté Écféanr. + Pagurus elévans. | Méuud PL tata) foie Petite espèce extrêmement voisine de la précédente, 1 mais qui s’en distingue par l'existence de petits tubercules arrondis sur les pinces et la partie voisine de la main. Longueur , 10 lignes; pinces jaunes; pattes dés dèux paires sui- vantes annelées "ds rougé et de pee corps et pédéncules oculaires blan- châtres. Trouvée par MM. Quoÿ et Gaymard, 4 la Nouvelle-ilande. {C. M) (1) Herbst, t, 1. pl. 23. fig. 6: Bosc, op. cit. p. 78. Latreille, Hist. nat. des Crust. t. vr. p. 169. Olivier. Encyclop. t. var. p. 646. MILNE FDWARDS, — Sur les Pagures. 279 ! 25. PaouRE cmxtEN. — Pagurus Chilensis. (1) Espèce très voisine de la précédente, mais ayant les pédoncules oculaires beaucoup plus longs que le bord antérieur de la carapace. Habite la côte du Chih. (CG, M.) 26. PAGURE SILLONNÉ, — Pagurus sulcatus. @) Petite espèce, qui ne diffère guère du P. fluteur que par la formie de fx trok sième patte droite, dont le pénultième article, au lieu d’êwe arrondi, est conte primé , et palsete en dehors, au dessous de son bord supérieur, un large sillon longitudinal. Longneur, 10 lignes. Couleur, blanchôtre. Ha bite les Antilles.C. M.) : 29. Pacure vierctarn.— Pagurus aniculus. (3) Dent rostriforme, grande et triangulaire, mais peu avancée. Pédoncules oculaires très rétrécis vers le milieu, et de même longueur que le bord antérieur de la carapace et la portion basilaire des antennes internes; leurs écailles basi- laires très larges, triangulaires, et rapprochées entre elles. Palpe spiniforme des antennes externes très petit. Pattes antérieures courtes, grosses, présque de même grosseur, et marquées de shies transversales qui en occupent toute la largeur , sont très éloigrices entre elles, et garnies vers le haut de petites épines noirés et de poils; doigts très courts, et terminés par un ongle noir très gros: Pattes des deux paires suivantes courtes, grosses, arrondies, un peu comprimées, et garnies de lignes transversales comme les précédentes ; tarses extrêmement courts. Abdomen de la femelle garni en dessus de grandes plaques cortiées, transver- sales, lobées sur leur bord postérieur ÿ trois premières fausses pattes ovifères grandes , terminées par deux articles ciliés, et portant près de leur baserune énorme Jame foliacée, qui, en se réunissant avec un grand repli tégumentaire et lamelleux placé obliquement sur la face inférieure du ventre, forment une po- che ovifère très vaste ; la quatrième fausse patte presque rudimientaire, (r) Edwards. Hist. nat. des Crustacés, pl. 24 , fig. 9: (2) Quoy et Gaymard. Collect, du Museum: (3) Fabricius. Suppl. p. 411. Olivier, Encyel. t. vri. p. 640: Latreille, Hist, nat, des Crust. t. vr. pt 163. — Encycl. pl. 312, fig. 2. Quoy et Gaymard. Voy, de l'Uranie, p. 531. pl. 79. fig. r. | 280 MILNE FDWARDS.— Sur les Pagures. Taille, environ 2 pouces. Couleur, jaunâtre lavé de rouge ; poils jaunes. Habite l'Ile-de-France. (C. M.) C'est la même espèce qui a été décrite une seconde fois par Olivier, sous le nom de Pagurus ursus. (1) Le Pagurus longicarpus de Say (2), appartient probablement à l'un des deux sous-genres dont nous venons de nous occu- per, mais est trop imparfaitement connu pour que nous puis- sions lui assigner une piace naturelle. Son front est armé d’une petite pointe rostriforne ; ses pattes enfoncées allongées, le carpe est aussi long que la main et offre en dessous un léger sillon formé par deux rangées de granulés; lés mains sont linéaires granulées , garnies d’un bord moniliforme en dessous et pré- sentent au dehors une crète. Il est très commun sur les côtes des États-Unis d'Amérique. 2° SOUS-GENRE. PAGURES APPENDICULÉS. Nous avons réuni dans cette division-les divers Pagures dont : l'anneau ophthalmique ne porte point d’appendice médian ros- triforme et dont l'abdomen est garni chez le mäle de deux paires d’appendices suivies de trois fausses pattes impaires (3), et chez la femelle d’une paire d’appendices fixés sous la base : audevant des appendices oviferes ordinaires.’ Il est aussi à re- marquer que chez tous ces Pagures il existe sur le bord anté- rieur de la carapace une petite dent médiane. {r) Encycl. £, vrz, p, 640. Desmaret, op. cit. p. 179. (2) Journ. of science of Philad, vol. r. p. 163. (3) Voy. pl. 14, fig, ‘. Te D ET L i (EL ic MILNE EDWARDS. — Sur les Pagures. 281 | À) A \ 28, PAGURE TAOBETÉ. — Pagurus maculatus. (1) Dent rostriforme, mince et allongée. Pédoncules oculaires un peu rétrécis vers le milieu, plus longs que le bord antérieur de la carapace, et dépassant un peu la portion basilaire des antennes internes. Antennes externes de longueur médiocre. Pattes antérieures courtes, épaisses et finement granulées ; main renfléc à sa base, mais devenant presque triangulaire vers le bout, garnie en dessus d’une petite crête épineuse, et portant une seconde crête à son bord in- férieur; doigts gros, triangulaires, pointus , et se touchant par un bord droit. Pattes des deux paires suivantes très comprimces et dentelées sur leur bord su- périeur ; leur dernier article presque lamefleux, falciforme, et de longueur mé- diocre. Pénultième article des pattes de la quatrième paire ne se prolongeant pas notablement au-dessus du tarse, qui est conique et peu mobile. Abdomen du mâle portant à sa partie antérieure et inférieure une paire d'appemdices courts, gros et lamelleux , qui sont appliqués contre les orifices génitaux , et qui sont suivis d’une seconde paire d’appendices également symétriques , mais grèles et filiformes ; trois fausses pattes, terminées par une lamelle simple, fixées sur le côté gauche de l'abdomen comme d'ordinaire. Ab- domen de la femelle portant à sa base une paire de fausses pattes rudimentaires, appliquées contre la base des pattes thoraciques de la première paire, et suivies de quatre appendices ovifères, dont les trois premiers, fixés à des lames longitu- dinales, étroites, se terminent par deux lamelles, et sont recouvertes par un grand repli latéro-inférieur de la peau de l'abdomen, qui constitue une lame concave, ciliée sur le bord, et dirigée en avant pour loger les œufs ; le quatrième filet ne paraît pas donner attache à des œufs, et est simple, Habite la Méditerranée. (G. M.) 29. PAGURE GONAGRE. — Pagurus gonagrus. Dent rostriforme ; mince, pointue et assez avancée. Pédoncules oculaires grèles, et plus long que le pédoncule des antennes internes et le bord antérieur _ (x) Pagurus oculatus , Herbst: t, 11. p. 24. pl. 23. fig, 4, Pagurus oculatus, Risso. Crust, de Nice, p. 59. Desmarest, Consid. sur les Crust, p. 179. P. maculatus , Risso. Hist, de l'Eur. mérid. t, v. P- 39. Roux. Crust, de la Méditerranée, pl. 24, fig. 1-4. Nous sommes portés à croire que le Pagurus eremita de Fabricius (Suppl. p 413 ) pourrait bien appartenir à cette espèce. Le Pagure figuré par Baster (Opus. subses, pl. 30. 6g. 3) semble aussi s'en rapprocher plus que de tout autre. 282 MILNE EDWARDS. = Sz les Pagures. de la carapace; leurs écailles basilaires aiguës, et écartées entre elles. Partes antérieures médiocres, un peu épineuses sur le bord supérieur, et couvertes en dessus de poils longs, serrés et flexibles ; mains courtes et renflées; pinces fortes, et se touchant par une surface presque plane et très large. Pattes de la deuxième et de la troisième paires médiocres, comprimées, et poilues sur les bords. Celles de la quatrième paire terminées par un article court, styliforme, et nullement subchéliforme, Abdomen du mâle portant à sa base deux paires d’ap- pendices disposés comme chez le Pagure tacheté, et suivi de trois appendices impairs très petits; dernière pièce de l'abdomen profondément échancrée au bout. Abdomen de la femelle garni en dessous d’un grand prolongement cutané, falciforme, oblique, de trois fausses pattes ovifères, dont les deux premières por- tent trois lamelles étroites, et d’une paire de fausses pattes rudimentaires et symétriques ; accolces contre la base des pattes thoraciqnes de la cinquième paire. Longueur, 2 pouces; Habite les mers de la Chine, (C. M.) 30: PaGurE poicu, — Pagurus pilosus. (BL 14, fig.) Dent rostriforme, large, eb à peine saïillante. Pédoncules oculaires cylin- driques, moins saillans que la portion basilaire des. antennes internes, beaucoup moins. longue que le bord antérieur de: lu carapace, et armée en dessus. d’une rangée longitudinale de petits points ; leurs écailles basilaires petites, pointues, et écartées l’une de l’autre. Filet, terminal des antennes externes gros et court. Pattes antérieures très inégales, et armées degranulations spiniformes et d’é- pines, et couvertes en dehors de longs poils flexibles et serrés, qui cachent tout-à-fait la surface de la main ; patte gauche la plus forte ; sa main ren- flée, et ses pinces très comprimées. Les. paties suivantes garnies également du poils longs et très serrés. Plaques abdominales du mâle très petites, et divisées sur la ligne médiane par un espace membraneux ; deux paires d’appendices ab- dominaux disposés comme chez le Pagure tacheté et le Pagure frontal, suivies de trois fausses pattes, terminées par une seule lame très grande et très allongée. Chez la femelle, ces appendices ont deux grandes lamelles terminales. Longueur, 3 pouces. Habite la Nouvelle-Zélande. (CG, My i | ÿ . . . - les deux premiers appendices ovifères , du reste disposés comme chez le 1: MILNE EDWARDS, == Sur les Pagures. 283 31. Pacure rroNTAL, — Pavurus frontalis. (PL 13, Bg. 3.) Dent rostriforme grande, triangulaire, et assez saillante. Front profondé- ment échantré de chaque côté de cette dent, et fortement sillonné près de son bord, Pédoncules oculaires cylindriques, de la longueur du bord'antérieur de la carapace, ét dépassant de beaucoup le troisième article des antennes internes ; les dents squammiformes de leur base petites, bombées, pointues et très rappro+ chées. Pattes antérieures inégales, renflées, très finement granulées et un peu épineuses supérieurèment, Pattes de la deuxième et de Ja troisième paires lisses, et portant sur leur bord supérieur et sur le tarse quelques pointes spiniformes noires. Pattes de la quatrième paire à peine subchéliformes ; la paire de pattes postérieures extrêmement courte, Abdomen de la femelle garni d’un grand repli cutané subconiforme, faisant office de poche ovifère et de filets oviformes à deux lames terminales. Le mâle pourvu de deux paires d’appendices abdominaux sy- métriques, suivis ,du côté gauche, de trois fausses pattes très petites, et à une seule lame terminale, Longueur, environ 4 pouces. Couleur rougeâtre , livide + quelques poils jaunâtres sur la main et les côtés de la carapace, Rapporté de la Nouyelle-Hollande par MM, Quoy et Gaymard. (C. M.) 32. Pacure pg Gama. — Pagurus Gamianus. Dent rostriforme dange; triangulaire; mais peu saillante ; front profonde- ment échancré de chaque côté de sa base. Pédoncules oculaires très grèles, à- peu-près de même longueur que le pédoncule des antennes, mais beaucoup moins Jougs que lé bord antérieur de la carapace; filet términal des antennes externes très court, Pattes antérieures presque égales, épaisses, médiocrement poilues et épineuses, Pattes suivantes lissès en dehors , poilues sur les bords, et un peu épineuses sur leur face interne ; tarse gros et de longueur médiocre. Appendices abdominaux du mâle comme dans les éspèces précédentes. Abdomen de la fe- melle garni de deux plaques longitudinales, étroites ét très poilues, qui à agure … gonagre. Longueur , 2 pouces. Trouvé au cap de Bonne-Espérance par M. Reynaud. (C, M.) 284 Mizne EDWwanDs. — Sur les Pagures. 3° SOUS-GENRE. PAGURES ARMÉS. Anneau ophthalmique armé en dessus d’un appendice rostri- forme à bords dentés qui est tout-à-fait séparé du front et s’avance entre les pédoncules oculaires. (1) 33. Pacure socpar. — Pagurus miles. (2) Pédoncules oculaires médiocres, ne dépassant pas notablement le pénultième article pédonculaire des antennes internes et externes; leurs écailles basilares larges, plates et appliquées contre le prolongement rostriforme. Pattes antérieures très inégales ; celle du côté gauche très forte, et toute couverte en dessus d'é- pines plus ou moins acérées. Les pattes suivantes granuleuses et épineuses en des- sus ; leur tarse très long, à bord tranchant, sillonné en dehors, et armé en dessus d'épines. Abdomen du mâle portant quatre fausses pattes assez grandes, termi- nées par une longue lamelle simple. Longueur, environ 3 pouces. Couleur, jaunâtre. Habite les côtes de l'Inde. (C. M.) 30. PAGURE SENTINELLE. — Pagurus custos, (3) Espèce très voisine de la précédente , dont elle .ne diffère que parce que là grosse main est finement granulée en dessus , et n’est armée d’épines que sur le : bord supérieur, Le tarse des deux paires de pattes suivantes est également dé- pourvu d’épines (Dans les individus que j’ai eu l’occasion d’examiner, l'abdomen _ était tellement déformé par la dessiccation, qu’il était impossible d’en reconnaître le mode de conformation.) Longueur, 2 pouces. Habite les côtes de l'Inde. (C. M.) (1) Voy. pl. 14, fig. 2. (2) Cancer miles, Fab, Ent. Syst. 4. p. 470. Cancer Diogenes, Merbst, t, 11, p. 19. pl. 22. fig, 6e Pagurus miles Fabricius. Suppl. p. 412. Latreille. Hist. nat. des Crust. t. vr. p. 165, (3) Pagurus custos, Fabricius. Suppl. p. 412. Latreille, Hist. nat. des Crust. t. vr, p. 165. Olivier, Encycl. t, vi p. 644. ati MILNE ÉDWARDS. — Sur les Pagures. 285 ‘7 3o. PAGURE DIAPHANE. — Pagurus diaphanus. (1) Espèce très voisine du Pagure soldat, mais dont la grosse main est lisse en dessus, comprimée et articulée obliquement, de manière à former avec le carpe un angle dont le sommet est dirigé en dessus ; le carpe fortement dilaté en de- dans. Le tarse des pattes des deux paires suivantes est lisse en dessus. Enfin il | existe chez le mâle deux fausses pattes abdominales filiformes à droite, et quatre à gauche. Habite l'Océan, (C. M.) On trouve dans divers ouvrages la description de plusieurs espèces de Pagures qne nous n’avons pas eu l’occasion d'observer ét qui nous paraissent même ne pas être assez bien connues pour être déterminables, telles sont : Le Pagurus hungarus de Fabricius, Suppl. p. 412) figuré par Herbst ( op. cit. t. 1, p. 26, pl. 23, fig. 3); espèce qui, suivant Fabricius, habite la mer des Indes, et suivant Herbst se trouve sur la côte de Naples. (Voy. ci-dessus, p. 274.) Le Cancer dubius de Herbst (t. ur, p. 22, pl. 60, fig. 5.) Le Cancer tympanista du même auteur (t. xx, p.25, pl. 23, fig. 5.) Le Pagurus pedunculatus (Herbst, t. rx, p. 25, pl. 61, fig. 2), qui est re- marquable par la grosseur des pédoncules oculaires, et dont les mains paraissent être surmontées d’une crête dentelce. Le Pagurus araneiformis de Fabricius (Suppl. p. 414); espèce qui habite les côtes d’Ecosse. Le Pagurus alatus de Fabricius (Suppl. p. #13), qui habite les côtes de l'Islande, et qui a les mains lisses et garnies de trois crêtes ; peut-être devra-t- elle être rapprochée du P. anguleux décrit ci-dessus. Le Pagurus vittatus de Bosc (Hist. des Crust. t, 1x, p. 8, pl. 12); espèce dont les mains sont tuberculeuses , et qui se trouve en abondance sur les côtes . de la Caroline. …._ Le Cancer megistus de Herbst (t. 1m, p. 23, pl. 61, fig. 1, Pagurus mepis- - “us, Oliv. Encyclop.), paraît être une espèce imaginaire dont la portion inté- rieure du corps appartiendrait à un Pagure voisin du P. pointillé, et dont la mageoire caudale, disposée en éventail, serait prise à puelque Macroure (une Langouste, par exemple.) (1) Pagurus diaphanus, Fabricius. Suppl. p. 412 Cancer miles, Herbst. t, 11. p. 19. pl. 22. fig, 7. P. PAR Latr, Hist, nat. des Crust, t. vr. p. 165, 286 MILRE EDWARDS, — Sur les Pagures. Le Crustacé fossile. décrit par Faujas de Saint-Fond (1) sous le nom de Bernard-l’Hermite, et par M. Desmarest, sous le nom de Pagurus Faujasii(2), n'appartient pas à ce genre. Mais se xAppere évidemment au genre, Callianasse. Genre CawceLe, Cancellus. (Nobis). Nous avons cru devoir établir cette nouvelle division généri- que pour recevoir un Pagurien dont nous ne connaissons pas la fe- “melle, mais dont l'organisation s’éloigne assez de celle des autres animaux de la même tribu pour qu'il ne puisse prendre place dans aucun des genres déjà établis. Il ressemble aux Pagures proprement dits DancouE plus qu'aux Cénobites ou aux Birgus, mais s'en distingue essentiellement par la conformation de son abdomen qui est symétrique, et ne présente point d’appendice ‘si ce. n’est ceux fixés au pénultième segment. La carapace (3) ne présente rien de remarquable; sa forme est la même que chez les Pagures, sa portion antérieure est bombée et sans sillon notable, enfin le front est armé d’une . dent médiane triangulaire peu saillante et profondément échan- crée de chaque côté de cette espèce de rostre rudimentaire. Les ! pédoncules oculaires sont grèles et dépassent le pédoncule des ! antennes externes dans près de la moitié de leur longueur, mais ! ils sont cependant plus courts que le bord antérieur de la’ ca- parace; la cornée transparente Ets les termine est très petite et sans échancrure à son bord supérieur. Les antennes internes ! sont conformées comme chez les Pagures ; il en est de même des antennes externes, seulement, elles sont extrêmement courtes, leur filet terminal n’a guère plus de deux fois la longueur des pédoncules oculaires. Les pattes antérieuresne sont pas inégales comme chez les Pagures; elles ont toutes les deux la même . (x) Histoire de la montagne Saint-Pierre de Maestricht, pl, 32, f° 5 et 6, (2) Hist. des Crustacés fossiles, p. 129, pl. xt, fig. 2. (3) PI, 14, fig, 3, mix ÉowArps: — Sur des Pagures. 287 forme et sont déprimées supérieurement; on remarque sur le bord supérieur de la main une créle dentelée qui se réunit à une élévation longitudinale et arrondie de sa face externe, de façon à former sur le carpe une pyramide à trois faces; il est aussi à noter que la face externe de la main est un peu verru- queuse et que les pinces sout très courtes. Les pattes de la deuxième paire sont très grosses et recourbées un peu en de- dans : leur face supérieure est garnie d’une erête qui s'étend du _ milieu du troisième article cut leur extr émité, en décrivant une courbure régulière dont la convexité est en dehors; l'ex- trémité étpériennis de cette crête s'élève en pyramide comme celle des pattes antérieures, et correspond exäctément à l'extré- mité des pédoncules oeulaires lorsque les pattes sont dirigées en avant; le tarse est gros et très court. Les pattes de la troi- sième paire sont beaucoup moins grosses et-très comprimées. Les pattes des deux dernières paires ne présentent rien de par- ticulier si ce n’est que l’article basilaire de celles de la dernière paire est très grand et squammiforme (1). L'abdomen est mem: :braneux comme chez les Pagures , mais n'est pas contourné sur lui-même en spire ainsi que cela se voit chez ces animaux ; il est large, court, recourbé en dessous vers le bout, partant symétrique et terminé par une lame médiane symétrique de chaque côté de laquelle sé trouve une pairé d'appendices con- formés de la même manière que chez les Pagures, mais an ne diffèrent pas entre eux. D'après la mollesse de l’abdomen de ce Pagurien, il est évi- : dent qu’il doit se loger dans quelque coquille; mais d’après les * formes symétriques de cette partie du corps, il est probable qu’il ne choisit pas une coquille enroulée en spire. Nous ne connaissons pas la patrie de ce crustacé auquel nous donnerons le nom de Caxceze Tyre (Cancellus Typus). Le Pagurus Canaliculatus (x) figuré par Herbst, nous paraît. être voisin de cette espèce. (1) Krabben, PI, 60, fig: 6, 288 MILNE EDWARDS, — Sur les Pagures. , EXPLICATION DES PLANCHES, PLANCHE XIII. Fig. 1: PAGURE TURERCULEUX, grossi de moitié. Fig. 14. Seconde fausse patte abdominale, Fig. 2. Pacure ÉLÉGANT de grandeur naturelle, Fig. 2°. Face externe de la grosse main. Fig. 3% Pacure rronraL de grandeur naturelle. Fig. 4. PaGure pirrorme de grandeur naturelle. Fig. 44. Face externe de la troisième patte de droite. Fig. 5. Pacure rorcers de grandeur naturelle, sortant de sa coquille, PLANCHE XIV, Fig: r. Paceure porr.u de grandeur naturelle; Fig. 12, Portion antérieure de l'abdomen du mâle, vue en dessous. — a, base des pattes de la quatrième paire; 6. pattes de la cinquième paire, à la base de chacune desquelles se voit l'ouverture de la génération; ce, appendices abdominaux de la première paire; d. appendices abdominaux de la seconde paire ; e. troisième appendice du côté gauche ; f. abdomen. Fig. 1°. L'un des appendices abdominaux de la première paire, grossi. Fig. 1°. L’un des appendices abdominaux de la seconde paire, également grossi, Fig. 14. Extrémité de la patte postérieure. Fig. 1e. Extrémité de l’une des pattes de la quatrième paire. Fig. 2. Région frontale du PaGure sozpar. — a, carapace; 2. appendice rostriforme de l'anneau ophthalmique; e. écailles qui recouvrent la base des pédoncules oculaires ; d, yeux; c. antennes internes ; f. appendice spiriforme du pédoncule des antennes externes. Fig. 3. Cancezre Tyre vu en dessus et grossi du double, : Fig. 3. Le même vu en dessous. cH. LEBLOoND. — Helminthologie. 289 QUELQUES OBSERVATIONS D'HELMINTHOLOGIE. Mémoire lu à la Société Philomatique, le 10 décembre 1836, Par CHARLES LEBLOND. Malgré les travaux systématiques des auteurs les plus célèbres, malgré les recherches patientes des anatomistes les plus distin- gués, l'helminthologie est peut-être, de tous les cadres spéciaux que l’histoire naturelle ait reconnus, celui qui renferme le plus de vides à combler, le plus d'erreurs à détruire, le plus d’incer- titudes à dissiper. LUOUEEEES Quelles lumières en effet la science possede-t-elle sur l’orga- nisation des espèces helminthologiques rares et même sur celle de plusieurs espèces communes ? Quelles fables n’ont pas été reçues avec nonchalance, et transmises, comme elles avaient été accueillies, sans critique et sans examen ? Combien de discus- sions vaines n’ont pas été engagées sur la valeur systématique d'une circonstance, d’un accident remarquable à la vérrté, mais d’ailleurs accessoire et tout-à-fait impropre à servir de caractère, je veux dire l'existence parasite des véritables helminthes? fes entozoaires doivent-ils former dans la série zoologique une. . classe (1), une famille (2) distinctes, ou bien être répartis, sans À égard à leur qualité de parasites intérieurs et d’après la seule considération de leur structure, entre les groupes divers à l’éta- -blissement desquels tous les naturalistes s'efforcent de donner pour base l’organisation même des animaux ? (3) Voilà quel est encore aujourd'hui l'état de l’helminthologie, .- (x) Le Règne animal distribué d'après son organisation, etc., par le baron Cuviér. t. 1tr. Paris, 1830. Page 245. (2) Zoologie analytique, etc. , par A. M, Constant Duméril. Paris, m. nooc. vr. Page 302. (3) De l’organisation des animaux, ou Principes d'anatomie comparée, par M. H.M. Du- crotay de Blainville. Tom. 1. Paris, 1829. * V1 Zoo. — Novembre, ty 200: CH. LEBLOND. — elnmunthoiogie. et néanmoins, j'en ai lintime conviction telle n’est pas sa des- tinée probable. Ici comme ailleurs en effet la synthèse a pré- cédé l’analyse : mais l'analyse d’abord effacée revient nécessai- rement tôt ou tard contrôler la synthèse et l'établir sur d’iné- branlables fondemens ; la marche ordinaire de l'esprit humain l'exige. Les taches qui RL l'histoire des Entozoaires et qui semblent remonter à l'enfance même de la zoologie n’étonne- raient pas les esprits sérieux, si elles apparaissaient dans les vieilles pages de la science, ou si du moins elles se montraient à l’occa- sion de fornies insolites et paradoxales : mais de quelle manière doivent-elles être jugées quand elles persistent malgré les dé- couvertes récentes de l'anatomie comparative, et lorsque, effacées de-temps en temps, elles renaissent à de courts intervalles bril- lantes de toutes les prétentions de la nouveauté ? Ainsi, tantôt bornée à la description zoologique des espèces, tantôt soumise à des règles impuissantes de classification géné- rale, tour-à-tour chancelante, incomplète ou mensongère, une seule fois rationnelle et philosophique, lhelminthologie réclame plus instamment que toutes les autres branches de l'histoire naturelle et de nouveaux efforts et de nouvelles lumières. Or, il est certain que l'anatomie seule ‘est capable de l'éclairer. L'observation, pour servir efficacement aux progrès de l’hel- minthologie, a donc besoin d’être plus que zoologique , il faut. qu’elle soit anatomique : elle ne doit plus se contenter d'aper- ! cevoir les formes extérieures, son but est de connaitre la structure intime des organes et les rapports variés qui les-en- ‘chainent. | Le travail que j'ai Fheuisur de soumettre ‘au jugement de la Société philomatique servira peut-être, malgré des limites res- treintes, à prouver la vérité de ces assertions. | Vers le milieu de septembre 1835, je trouvarentre les feuillets péritonéaux d’un congre (Muræna conger. Linn.) un tubercule “blanchätre de deux à trois millimètres de diamètre. Je dégageai avec précaution ce tubercule des brides celluleuses principales qui lembarrassaient et je ne tardai pas à reconnaître un kyste nettement circonscrit et renfermant un Entozoaire. Ses dimen- c&. LEBLOND. — Helminthologie. 291 sions étaient petites; car il avait à peine deux millimètres de longueur, et sa largeur était difficilement appréciable. ( pt. 16. fig: 1 légèrement grossie). Ses parois d'un brun-fanve très clair et d’une consistance élastique marquée avait peut-être subi une déchirure ( fig. 2 a, considérablement augmentée) quand je les avais séparés des prolongemens cellulaires voisins, Us m'ont paru formés d’une substance muqueuse, épaissie, qui ressem- blait à l'écaille blonde fondue et dont la transparence égale per- mettait d’entrevoir aisément un helminthe de forme nouvelle. (fig 2 b.) lEutozoaire observé dans son enveloppe accessoire présen- tait mne extrémité volumineuse (c.) arrondie vers l'une de ses faces (c.), et creusée à l’opposite d'une ventouse large et profonde (d.); non loin de la ventouse latérale et suivant la di- rection de l’axe du corps se montrait un léger renflement (e.) auquel succédait le reste du corps sous la forme d'un ruban long, très étroit, marqué de quelques plis superficiels et irré- guliers (f). L’extrémité libre de cette partie rubanée offrait une dépression beaucoup moins étendue que la ventouse si- gnalée précédemment et plutôt semblable à lorifice d'une ca- vité profonde qu'à une simple excavation de la surface (g:) La forme générale de l'enveloppe accessoire (2.) était en rap- port avec la forme générale de l'helminthe, mais elle n'était . pas exactement moulée sur lui, elle n’en suivait pas tons les contours. | J'eus beaucoup de peine à déchirer le kyste protecteur : la consistance, l’élasticité de la matière qui le formait, l'épaisseur » même de ses parois s’opposaient à ce que je le déchirasse aisé- … ment avec des aiguilles montées, d'autant plus qu'il me fallait “ user en cette occasion d’une extrême prudencé, afin de ne pas intéresser l'animal contenu : je parvins toutefois à obtenir le résultat que je demandais et l’Entozoaire fut libre. La vie ne l'avait pas encore abandonné complètement ; il se développa, il s'étendit un peu dans la goutte d’eau qui le tenait en suspension et sa forme éprouva quelque léger changement. Un autre renflement ( fig. 3 a.) apparut entre l'extrémité du corps sur une des faces de laquelle existait la grande ven- 19. ’ 02 CH. LEBLOND. — Âelminthologie. touse (b.) et le renflement voisin (c.) qne d’abord j'avais seul constaté. Restait à déterminer les noms générique et spécifique de cét Entozoaire. Au moment où je venais de l'extraire, je le considérai comme une espèce nouvelle du genre douve : mais bientôt je changeai d'opinion, et continuant à tort de le rapporter au genre Dis- toma, je crus devoir reconnaître (1)en lui une espèce de donve que déjà Creplin avait décrite sous le nom de distoma lonpi- colle (2) et qu'avant Creplin, Jurine avait lui-même étudiée. (3) Cette détermination était erronée, il est facile de le voir; je m’empresse donc aujourd’hui, que je l'estime à sa juste valeur, de Ja changer entièrement. Les helminthologistes attachent, suivant moi, une trop grande importance à l'intervalle plus ou moins considérable qui sé- pare les ventouses des distomes. Cette opinion émise par Brem- ser et Bojanus, est du reste aussi partagée par M. de’ Blain- ville (4). Mais quelques auteurs ont pensé différemment : le genre Fasciola de Linnæus est donc partagé en deux groupes génériques distincts, le genre Distome et le genre Æmphistome. Or, il est évident que l'Entozoaire trouvé parasite du congre appartient au genre Æmphistoma de Rudolphi, puisque les deux ventouses occupent les deux bouts opposés du corps. Cette première rectification ne suffisait pas. Je devais cher- cher encore à savoir si, parmi les espèces connues des natura- distés, il n’en existait pas une à laquelle je pusse rapporter lin- dividu que j'avais observé. Aucune espèce décrite ne m'a sem- blé pouvoir lui être comparée : je suis donc autorisé à le regar- der comme le type d’une espèce nouvelle, et je propose en con- séquence de lui imposer le nom spécifique d’Æmphistome ro- paloïide (Amphistoma ropaloides, mihï), voulant indiquer par (1) Bulletin de la Société des Sciences naturelles de France, année 1835, dernier trimestre. Page 103. ; F (2) Observationes de entozois, auctore Fr. Cr. Henr. Creplin. pars 1. Gryphiswaldiæ. M: DCCC. XXV. Pag, 57, n. 2. (3) Annales des Sciences naturelles. Paris 1824. Tom, 11, pag. 495 et suiv. ° (4) Dictionnaire des Sciences naturelles, tom. rvn. Päris, 1838, article Vers, pag. 583. je CH, LEBLOND. — /elminthologie. 25 cette épithète la forme générale du corps, étroit dans la plus grande partie de son étendue et renflé subitement à l'une de ses extrémités, comme le serait une massue. J'avais recueilli les caractères zoologiques de l’Amphistome ropaloïde; je n'avais plus qu'à étudier les détails de son orga- nisation. Armé de deux aiguilles rendues tranchantes sur la pierre, je läcerai doucement le parenchyme de sa grande ventouse , et quelle ne fut pas ma surprise quand, par celte manœu- vre, J'eus donné la liberté à un Entozoaire véritable (fig. 4) qu’entourait de toutes parts le tissu même du trématode. J'avoue sincèrement que je n’osai d'abord en croire mes propres yeux, et bien que depuis long-temps j'eusse préparé dans mes notes une feuille‘spécialement destinée au relevé des entozoaires que j'admettais & priori devoir rencontrer parasites des Entozoaires, cette observation me sembla tellement neuve, tellement insolite que j'eus peine à l’accepter. Je ne pouvais toutefois échapper à l'évidence; j'avais sous les yeux un Tétrarhynque d'une peti- tesse extrême à la vérité, maïs facilement reconnaissable. M. de Blainville et M. le professeur Laurent ont bien voulu constater eux-mêmes la réalité de l'observation que j'avais faite. Les trompes de l’Entozoaire étaient saïllantes (fig. 5 a.) l'ex- trémité postérieure de son corps offrait un appendice con- fusément ridé, infundibuliforme (fig. 5 b.). C’est même avec l'intention d'exprimer l'usage étourdiment snpposé à cet ap- pendice d'agir comme une ventouse que je nommai Tétrarhyn- que opistocotyle \1) le Tétrarhynque parasite de Famphistome robaloïde. Mais je ne crains pas de le dire, je mw’étais encore trompé dans cette circonstance ; la forme de l’appendice ter- Minal m'avait induit en erreur, et je n'avais trouvé réellement que le Tetrarhynchus appendiculatus de Rudolphi. Je regarde comme sans exemple en helminthologie l'exis- tence bien constatée d’un Entozoaire parasite d’un autre Ento- (1) Bulletin de la Société des Sciences naturelles de France, année.1 835, dernier trimesixe, page 104. 294 CH. LEBLOND. — Helminthologie. zoaire : les recherches Bibhiegr4p#Ryes nombreuses auiquelles je me suis livré m’autorisent à cette affirmation. Je sais toutefois que M. Léon Dufour à consigné dans les An- nales des Sciences naturelles (1)}une observation analogue. Mais quand on réfléchit mürement à l'incertitude des termes em- ployés par lillustre entomologiste, on reconnaît bientôt queson Filaria tricuspidata n’est réellement que la femelle d’une espèce de gordius, et que le Ffilaria filariæ, ainsi que Fa démontré M. Charvet (2), professeur à la Faculté des Sciences de Gre- noble, est toute autre chose qu'un filaire parasite d’un autre filaire. Le seuls faits qui puissent avoir une sorte d’analogie avec le fait que j'ai rapporté se rencontrent dans les ouvrages de Brem- ser et de M. de Blainville; mais 1ls ne lui sont pas rigoureuse- ment comparables : quelques mots suffiront pour établir ce que j'avance. Brenser a donné la figure d’urie agrégation de Tétrarhyn- ques parasites les uns des autres en ce sens qu’ils s'étaient réci- proquement déchirés et pénétrés à l’aide de leurs trompes ré- tractiles armées de crochets aigus (3). M. de Blainville a trouvé . dans le canal digestif d’un Lépidoptère de Gouun pêché sur les côtes de Bretagne, quelques entozoaires dont ila formé un genre nouveau sous le nom de Dibothriorhynque adhérens par les crochets de leurs trompes à des faisceaux d’A{searides para- sites du même animal. (4) ILest facile de reconnaître de prime abord à ce simple exposé qu'il n’y a pas de similitude réelle entre l'observation qui m'est propre et les observations empruntées que j'ai cru devoir rap- peler en même temps. Le Tétrarhynque vivait encore , ainsi que l'Amphistome, au moment où je le retirai de son habitation, accidentelle. Je le (zx) Tom, x1v. pag. 222 à 225, année 1828. (2) Nouvelles Annales du Maséum d'histoire naturelle, tom. 111, p. 37 et suiv. : (3) Icones helminthum systema rudolphia entozoologicum illustrantes. Curante J. G. Brem- ser. Viennæ m. pecc, xx1v. tab. xr. fig. 19. c. a. b. (4) Dictionnaire des Sciences naturélles, tom. Lvix, Paris, 1828, art, Vers, pag. 589 et 5go. d CESR EU CH, LEBLOND. — Helminthologie. 209 plaçai dans une goutte d’eau sur le porte-objet d'un micros- cope simple, et je l'examinai avec une loupe de force moyenne. Je le vis très distinctement se mouvoir, D'abord replié sur lui- même , il s’allongea presque immédiatement, et je pus dès-lors aisément l’observer. Il se contractait et s’épanouissait lentement, et les modifications de forme qu'éprouvait la totalité de son corps étaient surtout remarquables vers les extrémités antérieu - res; ses trompes armées d’aiguillons crochus et mobiles ren- traient et sortaient d’une manière ivégale , sans accord et pour ainsi dire étrangères les unes aux autres par l'indépendance absolue de leurs mouvemens. Il était aisé, grâce à l'enveloppe générale, mince et translucide qui. les renfermait et dont le parenchyme entier de lhelminthe était constitué, d’apercevoir les spirales irrégulières de ces trompes vers leur partiemoyenne et les renflemens allongés que présentait leur base. L'extrémité du corps opposée à l’extrémité céphalique supportait un ap- pendice dont la forme est généralement assez variable dans les Tétrarhynques, et qui, dans le cas présent, rappelait celle d’un enutonnoir renversé. Je n'ai pu reconnaitre ni la structure, ni l'usage de cet appendice. Après quelques minutes d'immersion, le Tétrarhynque cessa toute espèce de mouvemens : il était mort. Je ne discontinuat pas de l’examiner et je constatai d’une manière positive un fait qui semble au premier abord indifférent; mais qui peut néan- moins avoir quelque importance systématique: je vais m'expli- quer. Les fossettes ( Bofhria ) latérales conservèrent, après la mort de l’helminthe, dans l’eau comme dans l’alkool affaibli, la forme qu’elles avaient à l’instant même où la vie s’était dissipée, et les mêmes contours se maintinrent aussi long-temps que la consistance du parenchyme organique resta la même. Cette observation, que je pourrais étayer de plusieurs autres obser- vations analogues, démontre que les zoologistes prudens ne doivent pas attacher une trop grande valeur à la disposition des fossettes céphaliques des Tétrarhynques; elle prouve que les caractères empruntés à la forme générale de ces parties, sont très variables , très fugaces, et répètent, si je puis m'exprimer ainsi, les accidens innombrables de leurs contractions et de 296 CH. LEBLOND. — Helminthologie. leurs épanouissemens successifs. Il est donc nécessaire de les interroger systématiquement avec beaucoup de réserve. ‘En exposant les particularités d'organisation que la transpa-, rence du parenchyme de cet entozoaire m'a permises d’entre- voir, j'ai à peine indiqué la conformation des trompes, si en- rieuse cependant et si remarquable. Un lecteurinattentifcon- clurait peut-être d’un abandon pareil que les détails sont inuti- les à ce propos, et que les annales helminthologiques ont de- puis long-temps enregistré les faits sur lesquels j'ai si rapide- ment glissé; mais avoir une semblable pensée serait commettre une erreur grave : la struciure des trompes chez les Tétrarhyn- ques n’est pas en effet bien connue. Voici, eu-peu de mots , le résultat de plusieurs recherches anatomiques faites et sur une espèce de Tétrarhynque (Zetra- rhyncus macrobothrius Rud.), trouvée entre les tuniques intes- tinales d'un maquereau (Scomber Scomber. Linn.} et sur un grand nombre de Bothriocéphales (Bothriocephulus Corollatus, Rud.) recueillis dans les intestins de la raie commune (Raja batis, Linn.) J'ai toutefois étudié de préférence la structure des trompes dans le Bothriocephalus corollatus (fig. 6), à cause de la plus grande taille de cet entozoaire et de la facilité avec laquelle on . le rencontre toujours. La seule préparation nécessaire pour isoler DE les trompes rétractiles du parenchyme qui les revêt, consiste à retrancher le tissu {qui les cache en même temps qu’on le dé- chire avec précaution. Chaque trompe peut alors être aisément distinguée. Libres de toute adhérence intime, lestrompes ne sont pas rén- nies entre elles ; elles ne tiennent à l'enveloppe générale qu’au moyen de brides minces et fragiles que j’appellerai celluleuses, n'ayant pas d'autre terme pour exprimer leur texture élémen- taire, et l'adjectif du mot sarcode n'étant pas encore inventé. Ces trompes (fig. 6, a,b, c,d) renflées en arrière sous forme de cylin- dres arrondis à chaque bout (fig.6 e, f,g,h), sont plus solide- ment fixées vers leur extrémité postérieure que dans le reste de eur étendue : c'est en effet là qu'est le point d'appui ordinaire PÉPES ® > 1 . - . CH. LEBLOND. — Helminthologie. 297 de leurs contractions. Les parties renflées de ces organes con- stituent ensemble un faisceau quadrangulaire et se terminent d’une manière brusque pour se continuer chacune avec un fila- ment (fig. 6. B,C, D, E) de même nature, beaucoup moins gros qu’elles et très vaguement contourné en spirales. Ce filament augmente un peu de volume à la hauteur de l'extrémité cépha- lique du corps, et commence dès-lors à se couvrir de crochets (fig. 6, H) recourbés et mobiles, disposés en quinconces aussi réguliers peut-être qu'on les observe sur les trompes des échi- norhynques, et cependant impropres , selon nous, comme les : crochets de ces helminthes, à servir de caractères spERIAUUES, tant ils sont variables dans leur nombre. Le tissu des trompes n’est pas également dur, également con- tractile dans toute la longueur de ces organes, bien qu'il soit réellement homogène, Les trompes sont en général d'autant moins contractiles , d'autant plus fermes qu'on les examine plus près de leur extrémité libre et plus loin de leur origine. Cette consistance plus ou moins considérable , suivant qu’on l’étudie à différentes hauteurs, est, pour ainsi dire, nuancée entre le point où elle est tres molle et le point où elle estle plus ferme par exemple , dans la portion armée de crochets aigus. Vers ce lieu, en effet, la consistance des trompes augmente tout-à-coup no- tablement, et voilà même pourquoi, lorsque les trompes se con- tractent aux dépens de leur longueur, il se forme, an point où les premiers crochets existent , une sorte de prépuce momen- tané, qui se prolonge sur les aiguillons les plus rapprochés des spirales (fig. 7, A). Leur substance élémentaire est cependant identique partout ; la densité seule en varie. Les mouvemens des trompes peuvent être simultanés et de “ même étendue, ou bien indépendans et de force inégale. Il n’y | ärien en cela qui doive étonner : letir indépendance anatomi- que entraîne, il est facile de le concevoir, leur indépendance physiologique. Mais, chose remarquable! la mêmeindépendance existe dans les mouvemens qu’exercent les crochets , en sorte que ceux-ci peuvent ensemble ou isolément se relever ou s'a- baisser aux ordres de l’entozoaire. Les trompes demeurent cachées au fond de Févasement cé- 298 CH. LEBLOND. — _Helminthologie. phalique antérieur (fig. 8. A), ou font hors de la tête une saillie plus ou moins considérable (fig. 6). Dans le premier : cas, leur portion étroite est contonrnée en spirales nombreu- | ses et rapprochées; dans le second cas, le nombre et le rap- prochement des spirales diminuent sensiblement. Mais comment s’exécutent la rétraction et Pallongement al- ternatifs des trompes ? le phénomène est complexe; il a besoin conséquemment d’être analysé. Si l’on suppose les trompes hors de: enveloppe qui les ren- _ ferme, le mécanisme suivant se chargera de leur rétraction. La portion du corps à laquelle l'extrémité postérieure des cylin- dres basilaires correspond, se contracte et devient alors un vé- ritable point d'appui; l'infandibulum s’élargit en même temps. Aussitôt les cylindres commencent eux-mêmes à se contracter d'arrière en avant, et entraînent les filamens étroits avec les- quels se continuent les trompes proprement dites. Au contraire, si l'on suppose les trompes retirées dans len- veloppe qui les protège ; voici comme elles en pourront sortir. Toutes les parties du corps situées au-devant de l'extrémité pos- térieure des cylindres basilaires se contracterontsuccessivement de l'extrémité postérieure à l'extrémité antérieure; les spirales des trompes seront déroulées alors dans le même sens, d’au- tant plus que par des contractions particulières et concordan- tes, elles coniribueront elles-mêmes à se pousser au dehors. ILest facile de suivre et d'étudier ces divers mouvemens sur * un Tétrarhynque plein de vie : la transparence du parenchyme organique laisse, en effet, apercevoir tous les mouvemens in- térieurs , et permet conséquemment de les analyser avec pré- cision, Les détails qui précèdent me semblent confirmer d'une ma- nière irréfragable l'opinion d'abord émise par le docte Leuc- kart (1), et consécutivement adoptée par M. de Blainville (2). Cette opinion consiste en effet à penser que les Æloriceps sont (1) Zoologische Bruchstucke von F. 8. Leuckart. Helmstadt 1819. T. r. fig. 2. et D. #1. £g. 33. | (a) Dictionnaire des Sciences naturelles, t. Lvrt, Paris, 1828, art. Vers, pag, 595. CH. LEBLOND, +. Helminthologie. 299 des Tétrarhynques dont le corps allongé se terminerait par un renflement vésiculaire, et que les Botriocéphales à quatre trompes retractiles sont aussi des Tétrarhynques, à l'extrémité postérieure desquels seraient ajoutés un nombre plus où moins considérable d’anneaux ovariques. Ainsi des considérations anatomiques nouvelles seront ve- nues confirmer le rapprochement de certains genres d’helmin- thes que le tact éminemment systématique des auteurs célèbres que j'ai nommés plus haut avait provisoirement établi. Je passe maintenant à l'exposé d’une autre série d’observa- tions. M. le docteur Bourjot, professeur d'histoire naturelle au col- lège royal de Bourbon, eut l’obligeance, il y a quelques mois, de me faire remettre des Entozoaires trouvés par lui dans le canal digestif d’une espèce de Boa qu’il m'a dit être l’Anacondc (Boa scytale, Linn.) J’examinai ces helwinthes avec le plus grand soin, et j'acquis bientôt la certitude entière d'avoir rencontré le type d’un nou- veau genre, Les détails qui suivent ont été recueillis sur les individus les mieux conservés et les plus frais. Le corps de ces animaux formé d’articulations nombreuses emboîtées les unes dans les autres indique au premier abord qu'ils doivent être rapportées à l’ordre des Cestoides limité sui- vant la méthode de Rudolphi. Mais si l’on cherche à quel genre, à quelle espèce ils appartiennent, on se.trouve alors dans un véritable embarras. L'extrémité céphalique de ces Entozoaires est en effet très élargie comparativement aux segmens articulés qui lui succè- dent. Elle offre vers chacun des quatre angles principaux qui la terminent une ouverture distincte, plus ou moins béante, plus où moins profonde (fig. 9. B. C. D.E.) Elle est aplatie dans le sens même de l’aplatissement des articulations, et les deux grands côtés de sa surface présentent un sillon (F.) médian , longitudinal qui la divise en deux moîtiés semblables , lune droite et l’autre gauche. La ligne médiane du corps n’est donc pas imaginaire, elle est facile à reconnaître. Les deux orifi- 300 CH, LEBLOND.. — Âelminthologie. ces antérieurs (B, C.) sont des fentes étendues transversalement à bords gonflés et pour ainsi dire labriformes. Les deux orifices postérieurs (D, E ) sont plus étroitement circonserits et dirigés. latéralement : leur: contour inégal ressemble à l'entrée d’une : bourse qu’un lien circulaire aurait mal fermée. | | De ces premières données, il était facile d’induire la structure de l'extrémité céphalique; il était naturel de penser que cet or- gane avait pour élémens deux canaux aplatis ouverts à chaque bout et séparés l’un de l'autre par une cloison intermédiaire : or, un examen ultérieur a justifié mes prévisions. Une soie fine de sanglier introduite avec précaution dans . l'un on l’autre des orifices antérieurs. (B, C.) traverse aisé- ment toute l'étendue longitudinale de la tête, et ressort bien- tôt par les orifices postérieurs droit ou gauche (D, E), quand toutefois elle ne: vient pas s'arrêter contre les parois du canal. Cette expérience exige pour réussir, d’être faite sur a tête d'un helminthe qui n’a pas été froissé, et. qui par conséquent à pu conserver sa forme naturelle intacte. Si au lieu d'introduire la soie exploratrice dans l’une des ou- « vertures antérieures (B, C.), on la pousse dans l’une dés ouvertu- res postérieures (D, E), elle pénètre d’abord facilement, elle glisse même assez vite jusque près de Fouverture opposée qu'on desirerait lui voir franchir, mais presque toujours alors elle rencontre d'invincibles obstacles, et de nombreux tàätonnemens, peuvent seuls la conduire au but qu’on se proposait de lui faire | atteindre. | | La difficulté plus grande qu'on éprouve à franchir de de- dans en dehors les orifices antérieurs, sera plus tard expli- quée. dr ts ; “ | Pour. connaître la disposition . interne. de ces. deux canaux: céphaliques, il suffit de les ouvrir suivant leur longueur, en: ayant soin de ménager, si cela se peut, la paroi opposée. Voict M en peu de mots les particularités que l’on distingue alors. On M remarque vers chacun. des orifices antérieurs deux saillies (fig. 10, a , b.) très prononcées, correspondantes à la dépression de la’ tête et suspendues à la face interne des parois. Ces deux, 6. saillies à bords libres, mousses, arrondis, sont:aisément.OPpOSan M / .- CH. LÉBLOND. — Helminthologie. 3ot bles l'une à l'autre’et circonscrivent de chaque côté de la tête, lorsqu'elles se rapproclient ‘ou lorsqu'elles se touchent , une fente linéaire, transversale, plus ou moins profonde (fig.11, A,B). Elles sont d'autant moins adhérentes aux parois qu'on les exa- mine plus loin de leur insertion au contour des orifices anté- rieurs et nlus près de leur bord interne ; on peut donc les con- sidérer comme des espèces de lèvrès allongées et renversées en dedans au lieu de l’être en dehors. Il est facile de voir à cette conformation pour quel motif une soie introduite par les orifices postérieurs de la tête, éprouve plus de difficulté à sortir des canaux que si elle eût pénétré par les orifices antérieurs. La difficulté que la soie éprouve à se faire jour dans le premier cas , tient à ce qu’elle rencontre sur son passage, l'obstacle que lui oppose le contour libre des sail- lies buccales. L'intérieur des canaux ne présente rien qui doive être signalé. Leur forme est tout-à-fait la même au dedans qu’au dehors ; mais la cloison, en d’autres termes la partie commune qui les sépare est beaucoup plus épaisse que les RE, spéciales qui constituent chacun d'eux. Les orifices-postérieurs (fig, 9, D,.E) sont limités par des fron- cemens inégaux qui se prolongent plus ou moins dans linté- rieur sous forme de plis irréguliers (fg. 10, c. ). Quant à la structure même des parois elle est partout sem- blable. On n'y découvre en effet qu’un parenchyme homogène, également contractile, qu’il faudrait appeler musculaire si on était forcé de lui donner un nom purement anatomique, et . dans lequel il est impossible d’apercevoir aucun nerf, aucun “vaisseau, aucun élément, distinct et spécial. Nouvelle confirma- “tion de la nécessité ; à laquelle sont réduits les naturalistes qui “étudient sans idées préconçues et définitives , l’organisation des animaux inférieurs, d'oublier, momentanément du moins, les types organiques dont la structure complexe leur est connue et de divorcer pour ainsi dire avec le résultat de leurs travaux ha- bituels les plus longs et les plus difficiles. L'examen des articulations considérées dans leur ensemble, n'offre rien qui mérite-d’être signalé. En effet, comme dans 302 CH. LEBLOND. — Helminthologie. toutes les espèces de vers tænioïdes, les segmens les plus rappro- chés de la tête ne peuvent être aisément distingués les uns des autres et sont beaucoup plus étroits que ceux qui leur succè- | dent; aussi pourrait-on dire qu'un véritable col vient après | l'extrémité céphalique de ces entozoaires , si, à l'exemple de . plusieurs helminthologistes et pour se potifsraienà à l'usage reçu, on ne craignait pas d'employer un mot dont la valeur est depuis ! long-temps fixée, et qui ne peut être sans inconvénient appli- : qué à des animaux vermiformes. Plus ou moins loin de la tête, je veux dire à une distance variable suivant les individus, les “articulations commencent à se prononcer et leur distinction ne tarde pas à devenir tellement nette, qu’on ne saurait plus mettre en doute leur existence. Leur diamètre transversal augmente visiblement à mesure qu’on les observe plus en arrière. Leur dia- mètre longitudinal augmente aussi dans les mêmes proportions; : et si quelquefois on trouve des articulations plus étroites, moins longues que celles qui les précèdent et qui les suivent, il faut les regarder comme flétries ou peut-être comme arrêtées dans leur développement. Il est presque inutile de dire que plus les segmens ont d’étendue, plus les saillies que font leurs angles postérieurs sont considérables : le corps de ces ani- : maux est donc moins profondément incisé en avant qu'en arrière. L’œil armé d’une loupe de moyenne force, et souvent même l'œil nu distingue , sur l’une des faces de chaque articulation , ? deux orifices assez rapprochés (fig. 12, A,B, C, D, E), qui con- duisent évidemment à l'ovaire dont chaque segment est le siège. Ces orifices réunis deux à deux suivant la direction de l’axe du corps, occupent la ligne médiane , n'existent que d’un seal côté , et forment, avec les ouvertures analogues que présentent les articulations voisines , une chaîne de points enfoncés ou plu- tôt une série linéaire de véritables pertuis dont l’ensemble rap- pelle assez bien la disposition générale des ovaires dans le Zigula uniserialis de Rudolphi. De ces deux orifices correspondant au milieu de chaque articulation, l’antérieur plus distinct que le postérieur , est quelquefois caché sous le bord voisin de l'articulation précédente, de telle sorte qu'il faut soulever CH. LEBLOND. — Helminthologie. 305: ou déchirer celui-ei pour apercevoir les deux ouvertures gé- nitales (fig. 13, a, à.) Je dois faire remarquer ici, comme une disposition raré chez les entozoaires, la présence de deux orifices génitaux réunis sur la partie moyenne de chaque articulation. Ce n'est pas que: cette particularité soit tout-à-fait nouvelle en helminthologie. Déjà Creplin l’a reconnue chez une espèce de Bothriocéphale- qu’il a nommé, précisément à cause d'elle; Bothriocephalus ditremus (1). Mais bien qu’ellè ait été déjà observée, il n'est pas moins difficile d’en apercevoir le but, d'en préciser l’usage, si, comme il faut Vadmettre dans l’état actuel de la science , malgré les assertions opposées (2) et les doutes contraires (3) de quel- ques naturalistes, aucune espèce d’Helminthes cestoides n’a d'autre sexe reconnaissable que le sexe femelle. Avant qu'un examen sérieux m'ait révélé tous ies détails de structure que je viens d’esquisser rapidement ; à la seule in- spection de l'apparence extérieure, je m'étais cru fondé à recon- naître une espèce nouvelle d’'Entozoaire dans l'animal que M. le D: Bourjot m'avait fourni l'occasion d'étudier. Toutefois j'avais aussi remarqué l’analogie qui, malgré les différences nombreu- ses précédemment annoncées, excitait à rapprocher cet helmin- the de l’entozoaire nommé par M. de Blainville Bothridie du Pithon, Bothridium Pithonis(4). Plus tard, quand l’organisation mieux appréciée de ces animaux devait à plus de titres me con- firmer dans lopinion que j'avais conçue, et me faire négliger les doutes qui m'embarrassaient, je restai dans la même incer- titude , et même je sentis encore, je dois en faire l’aveu, mon incertitude s'accroiître. La ressemblance des formes extérieures Mir) Observationes de Emtozois, auctore Fr Chr. Henri Creplin, pars 1. Gryphiswaldiæ , M, pocc. Xxv. p. 65, n, (a) x1x tabulæ anatomiam entozoorum illustrantes congestæ nec non explicatione præditæ ab Fdüardo Schmalz. Dresdæ et Lipsiæ. 1831 , pag. 6 et 7, tab. 111. (3) Observationes de entozois. auctore Fr. Chr. Henr, Creplin. Pars x, etc. Pag. 65 à 67. n. ï, (4) Traité zoologique et physiologique sur les vers intestinaux de l’homme, par Bremser ; traduit de l'allemand par Grundler; revu et augmenté de notes par M. de Blainville. Paris , M. pccc. xx1v, appendice page 520, note 5 ; atlas, pl. 1x, fig: 15 de leppondiee ie Diction- naire des Sciences naturelles, tom. 57. Paris, 1828, pag. 6ag. 304 CH. LEBLOND. = Helminthologie. du Bothridium Pithonis et des animaux que j'avais observés, l'identité presque entière des ophidiens qui avaient nourri les deux parasites, me rappelaient invinciblement à l'idée que le Bothridium Pithonis était le même animal que l’entozoaire _ trouvé dans le Boa scytale de Linnæus; et ces motifs, auxquels je m'accusais d’attacher trop de valeur et d'importance, étaient maîtres de mon esprit. Cependant, que devais-je faire? quelle résolution devais-je prendre? ! Je savais avec quelle indulgence M. de Blainville, plus d’une fois, m'avait accueilli; je savais que M. de Blainville aime rencon- trer, chez les jeunes gens surtout, la franchise des opinions scientifiques et l'amour des recherches consciencieuses: je n’hé- sitai donc pas un seul moment à livrer mes doutes aux lumières de l’illustre professeur d’anatomie comparée. Ce que j'avais prévu se réalisa: mes soupçons ne m’avaient pas trompé; le Botridium Pithonis observé par M. de Blainville était évidemment la même espèce d’entozoaire que M. Bourjot avait trouvé dans les intestins d’un Boa Scytale, et que, grâce à lui, j'avais pu soumettre aux investigations du scalpel. Voici , au reste, comment , à cet égard, mes doutes se sont transformés en certitude. M. de Blainville, après avoir scrupuleusement examiné les dessins que je lui présentais, conçut l'opinion que j'avais moi- même conçue d’abord, et me dit sans hésiter qu'il était porté àt croire identiques le Botridium Pithonis et l'entozoaire parasite » q P du Boa scytale. Puis il ajouta que l'identité de ces animaux lui semblait & priori d'autant plus probable, d'autant plus réelle, que la seule réflexion devait conduire à la supposer, car l'étude comparée des Botriocéphales proprement dits, montre que les w espèces à fossettes superficielles .et peu étendues sont réunies par des nuances intermédiaires et presque insensibles aux espè= ces à fossettes profondes. Or il est aisé de comprendre que, si les bords latéraux de ces fossettes venaient à se prolonger l’un vers Jautre jusqu’à se confondre dans leur partie moyenne, il résul- terait de leur soudure partielle l’assemblage de deux canaux céphaliques terminés chacun par deux ouvertures opposées. À L2 . CH. LÉBLOND. — Heiminthologie. 305 Mais la bienveillance de M. de Blainville ne devait pas se borner à ces premiers conseils. Afin que je pusse m’assurer d’une manière définitive si le Bo- thridium Pithonis était réellement le même animal que l’ento- zoaire parasite de l'Anacondo, le savant professeur ne me con- fia pas seulement toutes ses notes manuscrites et l'original de ses dessins déjà publiés, il autorisa encore M. Florent Prevost à me laisser examiner le Botridium Pithonis conservé dans le ca- binet d'histoire naturelle de la Faculté des sciences de Paris. J'avais donc à ma disposition tous les élémens propres à ré- soudre les difficultés relatives au sujet que j'ai précédemment exposé : je devais toutefois respecter l'échantillon et me cir- conscriré dans un examen purement zoologique. IL suffira de jeter les yeux sur les figures 13, 14 et 15 de la planche pour se convaincre de l'identité irréfragable du Botri- dium Pithonis et de l'enthelminthe de l’anacondo. Les deux ou- vertures antérietires (fig. 14. A. B.) ont la même position, la . même forme générale. Les deux ouvertures postérieures (fig. 14, C. D.) sont seules un peu différentes : ce n’est pas qu'elles soient placées dans un autre point de l'extrémité céphalique, mais ellessont moins béantes , moins larges, et les bords qui leur servent de limites sont plus réguliers et plus mousses (fig. 14. C. D, fig. 15. A.). Or, comme ces particularités ne sont pas nettement définissables , et comme tous les individus provenant de l’Anacondo étaient plus grèles, plus flasques, et, si je puis m’exprimer de la sorte, plus maigres que l'individu provenant du Pithon, je ne crois pas devoir tenir compte de nuances dis- tinctives aussi peu tranchées, et j'admets, sans restriction “aucune la similitude entière de ces helminthes. Les segmens “articulés présentent en effet deux orifices générateurs aussi “aisés à reconnaître que dans les parasites de l’Ænacondo , si toutefois on a soin, pour les trouver et les bien voir sur une _ articulation quelconque, de soulever le bord saillant de larti- culation qui précède et sous lequel l’orifice antérieur est sou- vent caché (fig. 13, a, db). | Avant que jeusse vérifié sur l'individu même décrit par M. de Blainville les caractères que j'avais reconnüs aux: para- VI Zoor. — Novembre. id \ 306 CH. LEBLOND. — Helminthologie. sites de l'Anacondo, lorsque j'avais seulement en main mes pro- pres observations, j'avais cru devoir fonder sur: elles un genre nouveau de Cestoïde. Je leur avais donc imposé le nom généri- que de Prodicælie ({Prodicælia), voulant indiquer ainsi la pré- sence des deux canaux élémentaires de la tête, et le nom spé- cifique de Ditrème (Ditrema), pour exprimer la duplicité re- marquable des orifices générateurs sur chacune des articula- tions. Mais je ne me dissimulais pas qu'un jour peut-être la Prodicælie ditrème (Prodicælia ditrema) perdrait son épithète spécifique; car il est impossible d'établir avec süreté le nom d’une espèce nouvelle quand'on n’a pas d’autres espèces voisi- nes qu’on puisse mettre avec elle en comparaison. Que serait devenu, par exemple, le nom spécifique du premier Bothrioce- phale connu, s’il eüt été donné d’après la position médiane des pertuis ovariques. Or, maintenant que l'identité complète du Prodicælia ditrema et du Botridium Pithonis est démontrée par la confrontation des types eux-mêmes, est-il opportun, est- il même convenable de changer une appellation reçue? Je laisse au lecteur le soin de décider la question. : M. Duvernoy, professeur à la Faculté des Sciences de Stras: bourg, ma montré, aux vacances dernières, le dessin original d’üne espèce nouvelle de Bothridium désignée par lui sous le nom de Bothridium laticeps (1), et sur l'histoire delaquelle il est revenu plus tard en émettant le doute qu’elle pouvait êtreune simple variété du Bothridium Pithonis. (2) Je n'avais pas, à cette époque , les données anatomiques suffi- santes pour éclairer la question; je ne me suis donc pas cru en droit de rien affirmer, et je n’ai dès-lorsélevéaucun doute; maïs ayant eu plus tard l’occasion d'étudier le sujet sous toutes ses faces, je dois à la vérité de dire que je partage entierement la seconde opinion émise par le savant anatomiste , et que, sui- (1) Fragmens d’anatômie sur l’organisation Gés serpens ; lus à l’Académie des Sciences dans les séances du 18 juin et suiv. 1832. — Annales des Sciences naturelles, tom. xxx, pag. 77- de l’exemplaire tiré à part que M. Duvernoy a bien voulu me donner, (2) L'Institut, 7 septembre 1836, n. 174, p. 298; extrait des procès-verbaux de la Société des Sciences naturelles de Strasbourg , séance du 4 mai 1836. Cu. LRBLOND. — Helminthologie.. 307 vant moi, le Bothridium laticeps n'est qu’une variété du Bo- thridium Pithonis. | Je ne ferai plus maintenant qu'une seule remarque. La formation des papilles saillantes et réunies par paires (r, r, r) (1), que M. Duvernoÿ dit correspondre aux capsules cé- phaliques (0, o, 0), s’explique avec la plus grande facilité par les détails anatomiques exposés naguère. Il suffit d'admettre, en effet ,.que la partie moyenne des canaux céphaliques se con- tracte et se ferme quand la tête préalablement appliquée sur la membrane muqueuse intestinale s’est vidée, au moyen de ses orifices postérieurs, de tout l'air qu'elle contenait ét qui empé- chait son adhérence. Les saillies internes et opposables l’une à l'autre des ouvertures antérieures doivent agir concurremment pour déterminer l'ascension de la membrane muqueuse et pro- duire les doubles papilles qui se développent à sa surface. EXPLICATION DE LA PLANCHE 16. Fig. 1. Amplistome ropaloïde encore renfermé dans son Kyste; grandeur naturelle. Fig. à. Le mème très grossi. — @, déchirure du kyste; #. Amphistome ropal. en place; c. face convexe de la grande ventouse; d. grande ventouse; e. renflement qui succède à la grande ventoüse ; f: portion rétrécie de l’entozoaire ; g. orifice de l'extrémité rétrécie; L, kyste, Fig. 3. Amph. ropal. sorti du kyste, — a. renflement particulier devenu visible après l’ex- tension de l’auimal ; 2. grande ventouse; c. renflement indiqué en e, fig. 2. Fig. 4. Tétrarhynque appendiculé , grandeur naturelle. Fig. 5. Le même tres grossi. —= a. a. trompes ; 2. appendices. Fig. 6. Bothriocephalus corollatus. — à. b. c. d. porlion-des trompes, armée de crochets ; B. C. D. E. portion étroite des trompes ; e. {. g. h. renflement basilaire et cylindroïde des trompes. Fig..7. Trompe séparée du Bothr. corol. — a. repli préputial de la trompe. Fig. 8. Extrémité céphalique du Bothr, coroll. — A. infundibulum. Fig. 9. Prodicælie ditrème recueilli dans les intestins du Foa Scytale; B. C. orifices inté- … rieurs; D. £. orifices postérieurs de la tête; F, sillon intermédiaire aux deux canaux cé- LA phaliques. $ ; Fig. 10. a. b. saillies opposables de l'orifice antérieur ( voyez fig, 9, 2. C.);e. orifice pos= … térieur ouvert pour montrer les plis internes. ‘ Fig. 12. Articulations du même animal, laissant voir la série des deux orifices ovariques A. B. C. D. E. . Ê Fig. 13. Autre série d’articulations. — a. à. orifices ovariques. Fig: z4. Bothridium Pythonis d'après l'individu conservé à la Faculté des Sciences de Paris, - et décrit par M. de Blainville. — 4. B, orifices antérieurs; C. D. orifices postérieurs. Fig. 15. Même animal vu de côté. — a. l'un des orifices postérieurs. ‘1) Mémoire cité, pl, ar, fg. 1. 20. 308 P. GERVA:ïS, — Reptiles de Barbarie. ÉAUMÉRATION de quelques espèces de Reptiles provenant de Barbarie, / Par M. P. GERVAIS. Les Reptiles que nous avons étudiés proviennent du Maroc, et de la province d’Alger. Nous devons les uns à M. Fortuné Eydoux, qui a visité Tanger , lorsqu'il était chirurgien-major de la frégate La Victoire; les autres ont été pris aux environs d’Al- _ger, par M. le docteur Marloy, qui a-bien voulu nous les com- muniquer; nous en avons également vu plusieurs qui viennent aussi de Bone et d'Oran; ces derniers ont été envoyés au Mu- séum de Paris, par MM. Bravais, Gérard , Guyon et Stenheil. Les espèces que nous ont fourni les recherches des diverses per- sonnes que nous venons de citer, ne s'élèvent qu’à vingt-sept, mais quoique leur nombre soit peu considérable, elles suffisent pour donner, de l’erpétologie de la Barbarie une idée assez complète. Comme il était facile de sy attendre, les Reptiles de cette contrée sont peu différens de ceux des autres parties du littoral méditerranéen; mais toutefois un fait mérite l'attention, c'est que le nombre d’espèces communes à l'Espagne et à la Mo rée, qui se retrouvent en Barbarie, est plus grand sans con- tredit que celui des espèces égyptiennes. Nous n’insisterons pas \ sur cette remarque qui se lie à des recherches géographiques d’un autre genre; les connaissances des naturalistes sur les pro- » ductions de ces pays intéressans sont d’ailleurs si peu avancées, … que toute généralisation qu’on chercherait à établir dès à présent, serait sans contredit prématurée. On n’a encore sur l’erpétologie « du nord de l'Afrique, que les renseignemens recueillis par MM. Geoffroy, Savigny, Ruppel, etc, pour l'Égypte; et par Shaw et Poiret, pour la Barbarie. Vandelli a étudié les Reptiles d'une partie de l'Espagne; Wagler en a aussi décrit quelques- % uns, mais par une erreur assez bizarre, il les a donnés comme du Brésil; feu Michaëllis les à plus récemment observés. M. Du- oies ed p. GFRVAIS. — Aeptiles de Barbaïie. 309 gès a fourni d’excellens renseignemens sur plusieurs especes de la France méridionale; M. Ch. Bonaparte étudie celles d'Italie, sur lesquelles s’est déjà exercé Metaxa; et tout dernièrement MM. Bi- bron et Bory ont publié les noms de trente-et-une espèces, dont . quelques-unes nouvelles, rapportées de Morée. D'autres rensei- gnemens existent aussi sur les Reptiles des mêmes contrées, mais ils sont pour la plupart dispersés dans différens ouvrages, et n’ont pas pour but spécial la géographie erpétologique. Les Reptiles Chéloniens commenceront la liste des espèces de Barbarie que nous avons à signaler. 1. TesrupO mancinara Schæff. (d’Alger.) 2. Tesruno 18£RA Pall. 7°. pusilla Shaw., 7°. mauritanica Dum. et Bibr. 11. p. 44. (d’Alger où elle est commune et d’où on l’apporte fréquem- ment à Paris.) 3 Emvs Lerrosa Schweig. Clemmys sigris Michaëllis. sis 1830; E, sigris Dumw. et Bibr. p. 240. Alger.) Dans l’ordre des Saurophidiens, nous avons reconnu : 4. Geoxo (platydactylus) rascicuzaris Daud. (Alger. Tanger.) 5. Groxo (hemidactylus) verrucuzarus Cuv. 6. GymnopacryLus maurtranicus Dum. et Bibr. 1. 3. f. 414. (Alger.) 7. CHAMELEO vuzGaris Linn. (Tanger, Alger, etc.) 8. Uromasryx (acanthinurus). Bell., Zool. journ. 1. pl. 17 (Alger). 9. LacerrA virinis L, (Alger.) : 10. Lacerra AGrxis L. (Alger.) 11. ALGIRA BABARICA, Lacerla algira Lina. (Alger.) 12. Lenisra Dumeriiu Cocteau, tab. scincoideorum | Alger). 13. Sccus ocezLaTus (Tanger, Alger). Plusieurs individus sont ocellés, mais un de ceux de Tanger . ne l’est pas et se distingue au contraire par une bande latérale d'un brun roussâtre ; il sera question de cette variété dans les Études sur les Scincoïdes que publie le docteur Th. Cocteau. 14, SCINOUS CYPRIUS | Cuv. Règu. anim. 2. p. (2 Anolis gigantesque Geof. Egypte p.3 £. 3. Voyez le Scirque de Geoffroy. Th. Cocteau doc. cit. (Alger, par M. le D' Guyon.) 310 P. GERVAIS. — Reptiles de Barbarie. 15. Sers TrinAcryYLus Daud, Nous en avons deux variétés; l’une d’elles paraît n’avoir point encore été décrite : elle est fauve avec six lignes d’un brun- chocolat. | Les variétés de cette espèce peuvent être distinguées ainsi qu'il suit : a. 8-lineatus (Alger, Espagne, France méridionale, Italie.) C'est ie Zygnis striatus Fitzinger. 8. 6-lineatus (Alger.) 7. 4-lineatus. Cette troisième variété, le Lacerta chalcides de Linné ne nous est connue que d'Italie. 16. AxGurs FRAGILIS Linn. (Alger.) 17. Anouts ruxcratissimus Bibr. et Bory, Expéd. Morée, Reptiles sp. 18. pl. x1. f. 5, (Alger.) Cet orvet, tout nouvellement caractérisé, n’a encore été indi- qué qu’en Morée. Il peut être distingué de l'A. fragilis par les apparences que voici : plaque rostrale plus grande que chez l'4. fragilis, contiguë avec les nasales, ce qui n’a pas lieu chez ce dernier, celles-ci se touchant ellesmêmes sur laligne médiane par leur bord interne; chaque nasale envoyant en arrière un petit sillon qui fend FT toute cette portion de son étendue la plaque dans laquelle elle est percée. Les plaques rostrale et nasales un peu élevées au-dessus des autres céphaliques et formant une sorte de petit masque; les deux rangées de squames médio- dorsales, moins différentes par leurs formes des rangées voisi- nes que dans l’4. fragilis; taille moindre que chez celui-ci, et corps marqué de petits points bruns disposés en lignes, assez peu régulières sur un fond de couleur claire. La langue est d’ailleurs légèrement bifurquée comme chez le fragilis et les autres Scincoïdes; on distingue bien les yeux, et il n’y a point d'opercule anal, ce qui rapproche l’orvet pointillé de cette dernière espèce pour l’éloigner des 4. Meleagris et 4. Cœcus qui’ sont des Æcontias pour Cuvier. 2 P, GERVAIS. — Aeptiles de Barbaric. 311 18, Pseuporus seneenrinus Mer. Lacerta apoda Pall. Fitzing. P. Pallasii et Durvillii G. Cuv. Règn. anim. 11. p. 69, etc. Nous avons reçu d'Alger par les soins de M. Marloy, un indi- vidu de cette espèce qui se rapporterait au P. Durvilii de Cuvier; mais il nous paraît évident, ainsi que nous l’avons fait remar- quer ailleurs, que ce Pseudopus n’est autre que le P. Serpentinus dans son jeune âge. Les plaques de la tête sont les mêmes chez Jun et chez l’autre et les squames , non plus que les carènes, n'offrent aucune variation soit dans leur nombre, soit dans eur . formes. Toutefois nous devons faire remarquer que M. Ménétries, dans son Catalogue raisonné d'objets recueillis au Caucase , assure que les jeunes P. Serpenlinus se distinguent seulement par leurs couleurs plus foncées et par les carènes de leurs écail- les, qui sont plus prononcées, tandis que la coloration du P. Durvillii est assez différente. De plus, ce naturaliste décrit comme formant une autre espèce, qu'il appelle P.. Fischer, un Sheltopusik, qui nous paraît être le P. Durwillii lui-même. Celui-ci, s'il constitue réellement une espèce différente ; ce qui ne nous est pas, démontré, et ce que n’admet pas non plus M. Ch.. Bonaparte, existerait done en Géorgie, en Morée , en Italie, etc., toutes localités qui possèdent le P. Serpentinus. Nous connaissons trop peu les espèces de Barbarie, pour. dire qu'il s’y rencontre seul dans cette contrée, ce que notre opinion ne per- met pas de supposer, 19. AMPHISRENA CINEREA Vandeli. 4. oxyura Wag]. äpud spix, serp. Brésil pl. 25. f 1. (Tanger). Nous avons donné dans le Magasin de Zoologie, CI. ni, PI. x, des détails sur cette espèce dont Wagler (Systema P. 197) fait son genre B/anus. 20. AMPHISBÆNA ELxGANS Gerv. Magas. zoo. el. 11: pl. 9. (Alger, par M. Guyon ; Tanger, îles Zaffarines, M. Bravais, M. Eydoux.) A. Capite brunneo, corpore cinereo,quadratis maculis eleganter or- nato ; oculis sculisque Amphibænæ albæ ; poris præ-analibns nut- lis ; caudû breyissimé, acutiuscul& ; in non nullis, long. 9. poll. 339 P. GERVAIS. — Reptiles de Barbarie: 21. CoLuBEr AcGassizr, Rhünechis Agassiziü Michaëll. in Wagler Icones Amphib. pl. 18. 22. CoLuBER HrppocRErIS Linn. (Tanger, Alger.) 23. Cozuser AusrriAcus Linn. (Alger, Tanger.) 24. Cozuser virerNus Lion. l'arietas : C. V. ÆAuro-lineatus , où Vipérine à deux raies (d'Alger, de Bone, de Tanger). Elle se trouve aussi dans le midi de la France, où M. Dugés l’a indiquée (Ann. Sc. nat. 2° série. Zool. m1, p. 138). 25. Coruser æscuLarir, Lacép. non Lion.— Savigny, Egypte, Rept. suppl. pl. 5: fol. Oo = Cotlopetlu lR0IRT vs 26. Buro ARABICUS Gé apud. Rupp. Zoo!. atl. Amph. p. 20. pl. 5.f. 2. (de Bone.) 27. Trrron Pormert Gerv. Bull. Soc. Sc. nat 1835. p. 113; Lacerta Palus- tris ? Poiret. Voy. en Barbarie part. 1. p. 290. (Alger, etc.) Wagler, dans son Systema Amphibiorum, p. 208, donne les Tritons comme ne vivant qu’en Asie, en Europe et en Améri- que; il pense donc queces amphibiens n’existent point en Afri- que. L’assertion de Poiret eût pu néanmoins permettre au sa- vant erpétologiste de Munich de rectifier cette légère erreur, car il indique (Loc. cit.) le Lacerla Palustris , c'est-à-dire une espèce de Triton, parmi les animaux qu’il a recueillis en Bar- barie. Nous avons aussi des Tritons qui proviennent de la même localité; M. de Blainville en a reçu qui viennent de la Syrie, pays si analogue à l’Afrique Septentrionale par toutes ses pro- ductions zoologiques et botaniques ; enfin M. Al. Lefèvre a rap- porté de l’Oasis de Barieh, dans la Haute-Egypte, une autre sorte de Triton. Il nous semble que c’est à tort que Poiret rapporte au Lacerta Palustris, les Tritons qui vivent en Barbarie; ceux que nous avons reçus de Bone , d'Alger , etc., aiffèrent certainement des Salamandres aquatiques qu’il avait confondues sous la dénomi- nation de Palustris ; nous donnerons à l'espèce à laquelle ils ap- partiennent, le nom du voyageur auquel on en doit la pre- mière indication. Le 77, Potreti peut être caractérisé de la ma- nière suivante : L ÉLIE DE BEAUMONT. — Temperature du globe. 313 T. capite depresso , lato , corpore undique verrucoso, caudæ longitudinem æquante; pedibus anterioribus tetradactylis ; pos- terioribus pentadactylis ; colore supra brunneo saturatiore macu- lato, infra exalbido vel sæpius ferrugineo fuscoque variegato. Synon. Lacérta Palustris, Poiret, voyage en Barbarie , pre- mière partie, p. 290, non Linn. nec auct. Cette Salamandre nous paraît intermédiaire aux vrais Tritons et à l'espèce dont Michaëllis a fait le genre Pleurodeles (PI. Valil, Mich. Isis xxm, pl. 2) ; ses côtes sont moins longues que chez celle-ci, mais eiles le sont plus que chez les Tritons ordi- naires. Nous avons compté dans le squelette déposé au Mu- séum du 7. Poireti seize vertèbres dorso-lombaires et trente- trois caudales ; les dernières caudales sont entièrement carti- lagineuses. REMARQUES sur l’évaluation de la température de la surface du globe pendant la période tertiaire, d’après la nature des dé- bris organiques qui s'y rapportent, Par M. Ezre DE BEAUMONT. Présentées à la Société philomatique le 28 mai 1830. À la suite d’une communication de M. Deshayes relative à la détermination des températures qui existaient à la surface de la terre pendant la formation des terrains tertiares (voir les Ann. des Sc. nat. t. 5), M. Elie de Beaumont annonce à la Société que ses leçons au collège de France l'ayant mis depuis long-temps dans le cas de s'occuper de la température dont nos latitudes ont * dü jouir pendant les différentes périodes géologiques, il est ar- rivé relativement à la période de l'argile plastique et du calcaire grossier à un résultat un peu moins élevé que celui qui a été trouvé par M. Deshayes. 314 ÉLIE DE BEAUMONT. — Zempérature du globe. D'après M. Deshayes le bassin de Paris aurait :joui, à l'épo- que du calcaire grossier d’une température au moins équato- riale, c'est-à-dire d’au moins 27° 4/2. c. M. Elie de Beaumont pense, conformément aux résultats déjà obtenus depuis plu- sieurs années par M. Ad. Brongniart, que le climat de nos con- trées, pendant la plus ancienne période tertiaire, doit avoir ressemblé beaucoup, quant aux conditions générales de tem- pératures, à celui de la a ie dont la température moyenne est au Caïre de 22°. Il fonde son évaluation sur les considérations suivantes. A l'époque de l'argile plastique et du calcaire grossier, les fougères arborescentes et les cycadées, qui précédemment avaient peu- plé nos continéens, et dont les formes se retrouvent encoré de nos jours entre les tropiques, avaient sans doute cessé d'exister sous nos latitudes, puisque, d’après les recherches de M. Ad. Brongniart, on n'en trouve pas de restes dans les terrains tertiaires. À cette même époque, les récifs madréporiques qui, durant l'époque silurienne, ou peut-être même durant l'époque carbo- nifère avaient peuplé les mers, jusqu’à Inglowlick au nord de l'Amérique, par 69° 1/2 de bétide, qui, durant l’époque juras- sique, s'étaient étendus jusqu'à Kirkdale en Yorkshire par 54° 1/2 de latitude, avaient ÉGAICMER cessé de figurer dans nos parages, et depuis lors, ils ne s’y sont pas remontrés. Ün abaissement dans la température des hivers paraît à M. Elie de Beaumont la seule cause qu’on puisse assigner à cette triple disparition. La température des hivers de nos lati- tudes devait déjà être assez basse, à l’époque dont il s’agit, pour que les fougères en arbres et les cycadées ne pussent conti- nuer à exister sur nos continens et pour que les espèces de po- lypiers qui ont la faculté de se grouper en récifs ne pussent continuer à vivre dans nos mérs. D'un autre côté, l'argile plastique ét le calcaire grossier de nos environs, et même des couches formées plus récemment en- core sur le sol de la France ou des contrées voisines, présentent de nombreux débris de palmiers, de crocodiles et de grands quadrupèdes pachydermes. La température des hivers à l'épo- ÉLIE DE BEAUMONT, — Température du globe. 355 que du calcaire grossier était donc assez élevée pour permettre à ces formes organiques d’y prospérer, et même elle a pu s’abais- ser encore un peu sans les faire disparaître. En joignant cette considération à la précédente, on obtient deux limites entre lesquelles dut être comprise la température des hivers de nos contrées, à l'époque où le calcaire grossier s'y déposa. Ces deux limites sont assez rapprochées l’une de l’autre et les hivers du Caire tombent précisément entre elles. En effet, les palmiers et les crocodiles prospèrent en Egypte ; des hippo- potames et d’autres grands quadrupèdes y vivent. D'un autre côté, les fougères en arbre et les cycadées ne s’y montrent pas, et les récifs de polypiers qui bordent les rivages d'une grande partie de la Mer-Rouge, s'arrêtent au port de Tor, en Arabie, à . près de 2° de latitude au midi du Caire. Quant à la fempérature des momenis les plus chauds de l’an- née elle est aujourd’hui presque la même dans toutes les con- trées qui ne sont pas très rapprochées des pôles, et M. Elie de . Beaumont pense que ce maximum normal des températures terrestres ne peut avoir varié considérablement depuis que la » terre est couverte de végétaux. RE Or si les températures des hivers et celle des momens les plus chauds de l’année étaient dans le bassin de Paris à l'époque du dépôt calcaire grossier , ce qu’elles sont aujourd'hui au Caire, la température moyenne devait être la même aussi, c'est-à-dire de.22°. M. Deshayes base une évaluation plus élevéesur le grand nom- bre des coquilles fossiles recueillies dans le’ bassin de Paris. Ce nombre est de 1200, tandis que dans les mers du Sénégal et de la Guinée on ne connaît encore que 900 espèces de coquilles ; mais il est à remarquer, dit M. Elie de Beaumont, que les 1200 espèces de coquilles fossiles trouvées dans le bassin de Paris n'y ont pas vécu simultanément, elles proviennent de plusieurs as- sises formées successivement , et dont la plus riche serait, bien loin de pouvoir en fournir un aussi grand nombre; peut-être aussi ; ajoute-t-l, connait-on: mieux les coquilles fossiles des 316 ELIE DE BEAUMONT. — Tempéralure du globe. environs de Paris que les coquilles vivantes des mers équato- riales. M. Elie de Beaumont entre ensuite dans quelques détails sur la manière dont il conçoit que les climats décroissans des pé- riodes géologiques successives ont pu résulter du refroidisse- ment graduel de la masse interne de la terre. On sait qu’il existe un apport constant entre l'excès de tem- pérature que la terre présente à sa surface, au-dessus de celle que le soleil et l'atmosphère tendent à lui communiquer, et l'augmentation graduelle de la température des lieux profonds. Aujourd'hui lorsqu'on s'enfonce dans la terre, la température augmente d'environ + de degré cent. par mètre, et l'excès de température de la surface est d'environ + de den A l'épo- que du terrain houiller l'augmentation de la mr) NEA par mètre de profondeur pouvait sans doute s'élever. à =; mais d'importantes considérations géologiques s’opposeraient à ce qu'on le supposât plus considérable. F’excès de la température de la surface ne pouvait donc dépasser lui-même + de degré cent., quantité trop petite pour pouvoir rendre compte di- rectement de la différence des climats actuels. = L’explication de cette différence, si bien constatée par les géologues, ne peut donc se trouver que dans les effets acces- soires que pouvait entrainer une augmentation plus rapide qu'aujourd'hui dans la température des lieux profonds. Ces effets accessoires, selon M. Elie de Beaumont, pourraient être réduits à trois, qui tous auraient concouru à rendre les cli- mats polaires beaucoup moins différens du climat équatorial qu'ils ne le sont aujourd’hui. | Premièrement dans les plus anciennes périodes géologiques les glaces polaires ne devaient pas exister, et leur suppression suffirait probablement à elle seule pour relever jusqu’à o° la température moyenne du pôle qui est peut être aujourd hui de 25° au dessous de zéro. Secondement ; lorsque les glaces. polaires n'existaient pas, la mer devait présenter, depuis la surface jusqu'au fond, uné tem- pérature beaucoup moins inégale qu'aujourd'hui. Cette tempé- rature devait être partout d’un certain nombre de degrés au MS SRE Académie des Sciences. . 317 dessus du maximum de densité de l'eau de mer. Dans une pa- reille mer, li température de la surface ne pouvait jamais s’abais- ser que d’une très petite quantité au. dessous de la température de la masse ; cette mer devait se couvrir de brouillards dans les parties voisines (les pôles aussitôt que le’ soleil vopuntt de l'horizon. T'roisièmement : lorsque là température des lieux profonds croissait dix fois plus vite qu'aujourd'hui, les sources thermales et les jets de vapeur chaude étaient beaucoup plus fréquens qu'aujourd'hui , presque toutes les sources étaient nécessaire- ment thsmale] et chaque fois que le soleil s’éloignait de l’ho- rizon des pôles, le sol devait se couvrir de brouillards qui dé- truisaient le rayonnement nocturne et le rayonnement hiver- nal. Ces brouillards qui n’existaient que pendant l’absence du soleil, tempéraient le froid des nuits et des hivers, sans rien changer à la chaleur des étés. Ils élevaient donc la température moyenne et rendaient le climat plus doux, plus uniforme, plus équätorial. Ils se joignaient à Paction d’une mer plus chaude et plus difficile à refroidir à sa surface, pour produire dans la température du pôle une anomalie positive, diamétralement contraire à l’'anomalie négative que les glaces permanentes y produisent aujourd’hui. - ANALYSE des travaux anatomiques, physiologiques et zoolo- giques présentés à E Académie des Sciences pendant le mois de novembre 1836. Séance du 7 novembre. Puicosopmie DE LA NATURE. — M. Gcoffroy Saint-Hilaire donne lecture d’une dissertation intitulée : de l’histoire naturelle générale considérée comme appelée à donner un jour les révélations de la première philosophie. Note sur une téte de chameau fossile trouvée dans le grès des Sous- Hyma- daïa ; par M. de Bramvizzs. « Jusqu'ici, les personnes qui se sont le plus occupées de recueillir tout ce à 318 ” Académie des Sciences. qui a été fait et publié sur les ossemens fossiles de mammifères, n’en ont en- core indiqué aucun qui aurait appartenu d’une manière certaine à l’ordre des quadrumanes (singes et makis), ni à la famille des chameaux dans l'ordre des ruminans, animaux qui semblent en effet être confinés dans des limites bien déterminées. Il est bien vrai que Bojanus, äyant acheté d’un marchan@ trois dents molaires d'un animal ruminant qu’on lui assura avoir été trouvées dans la Sibérie, avec des dents de mastodonte, crut qu’elles avaient appartenu à un ani- mal de la famille des chameaux, et en fit cependant, à cause de quelques légères différences, un genre sous le nom de Merycotherium ; on sait aussi que M. Mar- cel de Serres envoya, il y a quelques années, à M. Cuvier, le dessin d’une por- tion de fémur qu’il attribuait à un chameau; mais, comme le fait justement ob- server celui-ci, en supposant que ces restes aient réellement appartenu au cha- meau, äl n’est pas certain qu'ils soient réellement fossiles. En sorte que jusqu'à présent, on pouvait regarder au moins comme fort douteux, qu’il y eût des os- semens fossiles de chameau; il n’en est plus de même aujourd’hui que l’on vient de découvrir un crâne presque entier, qu’il est impossible de ne pas rap- porter au dromadaire ou chameau à une seule bosse, comme le prouve le dessin que je mets sous les yeux de l'Académie, et l'extrait, que je demande la permis- sion de lui lire, d’une lettre de M. Henry Durand, oficier attaché au service de la Compagnie des Indes à Dadoopor, adressée, le 14 avril dernier, à son frère etque celui-ci a bien voulu me remettre. Ce crâne a été trouvé dans un grès ou sandstone fort dur, exploité sans doute comme pierre de construction de l’Inde, le long du versant méridional des Sous-Hymalaïa. , « L'Académie verra encore par la lecture que je vais avoir l'honneur de lui faire, que dans les mêmes lieux a été découverte la partie antérieure de la tête d’un mammifère intermédiaire aux genres Ænoplotherium et Palæotherium des environs de Paris, mais dont M. Henry Durand ne nous a malheureusement pas envoyé de dessin, et enfin une dent d’une espèce de mastodonte qui res- semble beaucoup à celle de l'espèce que M. Cuvier nomme Mastodonte à dents étroites (Mastodon angustidens), et qui, si ce rapprochement était exact, se trouverait fossile.dans trois parties du monde : en Europe, en Amérique et en Asie, » Extrait de la lettre de M. Duraxr. Dadoopor, 14 avril 1836. « Je voùs envoie l’esquisse d’un crâne fossile d’une espèce de chameau qui existe dans notre collection ; il a été trouvé sur les bords du versant méridional des Sous-Hymalaïa, ? à environ deux milles de Ramghur et six de Pinjor. Com- yaré avec les espèces existantes dans ce pays, il offre quelques légères différences dans la forme et plus encore dans la disposition sériale du petit nombre de mo- laires qui restent dans l'échantillon : vous pourrez peut-être m'apprendre si cette e offre une ressemblance un peu marquée avec quelque espèce de chameau Académie des: Sciences. 319 du Museum d'histoire naturelle, Nous avons plusieurs fragmens de la mâchoire inférieure et de quelques autres os, que je n’ai pas dessinés, parce qu’ils ne sont pas dans un état assez parfait de conservation pour qu'on puisse tirer aucune déduction de leur étude. Le dessin qui accompagne ma lettre, est réduit à moi- tié de grandeur vaturelle. « J'avais l'intention de vous envoyer par la même vus > les dessins d'un fragment d'os fossiles découvert dans le même pays et d'un très hautintérêt pour nos collections qu’il vient d'enrichir dernièrement. Des affaires-particulières et » pressces m'ont ôte le loisir nécessaire pour m’en-occuper: Le fossile en question ! consiste dans la partie antérieure d’une tête de mammifère de l'ordre des pa- chydermes ; malheureusement la partie postérieure de ce crâne, depuis la. cin- quième molaire jusqu'aux condyles occipitaux manque, ayant été brisée en mor- ceaux etles morceaux ayant été perdus par l'incurie des ouvriers. Toutefois ce qui reste est suflisant pour montrer que cet animal a beaucoup d’analogie avec les Anoplotheriwm ei le Palæotherium, quoique offrant des caractères essen-— tiels qui lui sont propres. La mâchoire supérieure seule a pu être examinée, l'inférieure.et ses molaires étant fortement appliquées contre la supérieure. « J'ai aussi placé dans ma lettre une figure lithographiee d’après un de mes dessins, représentant deux molaires qui me paraissent avoir appartenu-à une | espèce d’Antracotherium, les différences qu’elles présentent n'étant pas suffi- | santes pour l'établissement d’un nouveau genre, du moins suivant moi, car d’au- tres pensent différemment. Au resté, je vous envoie cette figure afin que vous puissiez voir dans les collections d’ossemens fossiles , s’il en est avec lequel ces dents puissent être comparées. » (1): à —_—_—_—— Dvidnie mémoire sur le Foie, par M. Duvennoy. ( Voyez ci-dessus, page 243.) Note sur les causes de la Coloration en rouge des marais salans, par M. Paye. (Voyez ci-dessus, page 219.) Ve Séance du 14 novembre. Cette séance a été occupée en entier par des travaux étrangers à la zoologies 5 LA | Séance du 21 novembre. … Mémoire sur les Polypiers fossiles du genre Eschare ; par M. Mrs En- WARDS, (Ge travail paraîtra dans notre prochain cahier. ) Séance du 28 novembre. Lettre de M. Durarnin sur les polypiers fossiles de la craie. « La lecture faite à la dernière séance de l’Académie, par M. Milne-Edwards, (1) Le dessin envoyé par M. Henry Duränd représente non deux dents, mais une seule dent de Mastodoute voisin , comme il a été dit plus haut de celle du Mastodonte à dents étroites. - B. 320 Académie des Sciences. me met dans la nécessité de prier l’Académie de vouloir bien recevoir les cinq premières planches gravées d’un travail que j'ai préparé depuis long -terups sur les polypiers fossiles de la craie, afin que lors de ma publication, qui aura lieu dans quelques mois, il soit bien reconnu que mes observations ne sont pas poslé- rieures à celles de M. Edwards. -« Ces planches représentent 22 espèces de polypiers foraminés de la craie de Touraine; les trois autres planches, qui seront prochainement terminées, com- pléteront une série comprenant les polypiers foraminés de cette localité et de plusieurs terrains crayeux analogues. « La seule inspection de ces planches prouve que je n'ai pas négligé d’ob- server, ainsi que M. Edwards, les changemens opérés par l’âge dans les Eschares et que de plus j'ai étendu cette observation aux deux autres groupes des Millé- porés et des Rétéporés (1). Elle m’a donné le moyen de réduire considérable- ment le nombre des espèces, et d'expliquer le mode d’encroûtement ou d’épais- sissement du test. En effet, j'ai trouvé dans les animaux vivans de plusieurs genres voisins, des tentacules nombreux filiformes qni traversent les pores ou spiracules de la surface et produisent l'encroûtement à l'extérieur et non à Pin- térieur comme dans les coquilles. Ces pores se trouvent à la face antérieure pour certains polypiers; ils sont au contraire à la face postérieure pour les Ré- téporés. « Une autre observation qui, je crois, m’appartient exclusivement, c’est la découverte des porès de communication entre les cellules, lesquels pores éta- blissent la communaute de vie de tous les polypiers foraminés, etservent en même temps à la propagation par gemmation ou à l'émission des germes qui se déve- loppent au bord libre et à l'extrémité du polypier, et déterminent son accroisse- ment, tandis que les œnfs qui sont destinés à reproduire l'espèce dans un autre lieu, se trouvent dans des capsules particulières au-dessus de l’ouverture de la cellule. « Ces communications, que j'ai trouvées dans tous les polypiers vivans, où elles sont sos és formées par une lame criblée, se voient dans les poly- piers fossiles que j'ai dessinés, lorsque le test a été divisé artificiellement dans un sens ou dans l’autre, et j'ai eu soin de les représenter de ces diverses manières. | « Il résulte donc de ce fait, que lon ne peut admettre une vie isolée pour les Eschares et pour les autres polypes à cellules, à aucune époque de leur déve- loppement. C’est pour ce fait surtout que j'ai desiré prendre date en mettant mes planches gravées sous les yeux .de l’Académie. » (x) Je crois devoir rappeler que cé n'est pas dans le mémoire lu dans la séance précédente que j'ai éxposé mes premières observations sur ce sujet,.mais dans le travail que j'ai lu à PA- cadémie le 24 février ; et qu’elles sont consignées dans le compte-rendu de cette séance, pu- blié depuis près de huit mois. (Voyez aussi la page 5 de ce volume des Annales. Enwanps. se QOQ ne — — MILNE EDWARDS, — Æschares fossiles. 3ar Onsenvarions sur les polypiers fossiles du genre Eschare ; Par M. H. Mirwe Enwarps. (Mémoire la à l'Academie des Sciences, le 21 novembre 1836.) Dans un mémoire que j'ai eu l'honneur de lire à l'Académie il y a quelques mois (1), j'ai exposé le résultat de mes recherches sur l'anatomie et la physiologie des Polypes du genre Eschare, et j'ai donné la description zoologique des diverses espèces qui vivent dans les mers actuelles. Aujourd'hui je me proposé de traiter des espèces fossiles. La texture pierreuse, ou plutôt osseuse de la tunique exté- rieure des Eschares est une condition des plus favorables pour la conservation des dépouilles laissées par ces Polypes dans les couches sédimentaires qui ont successivement envahi leur de- meure ; aussi, malgré leur grande délicatesse, en rencontre-t-on souvent à l’état fossile, et aujourd’hui le nombre des espèces dé- truites, mais dont l'existence passée a été constatée de la sorte, excède-t-il de beaucoup celui desespèces récentes, recueillies par les zoologistes dans les mers actuelles. La recherche de ces fossiles a cependant été long-temps négligée, et laliste des auteursqui en ont traité est bien courte. M. Desmarest en a signalé quelques espèces à l'attention des naturalistes ; Faujas de Saint-Fond et La- “ mouroux en ont également découvert; mais ce n’est guère que dans louvrage de M. Goldfuss que l'on trouve à ce sujet des renseignemens précis et assez détaillés pour être réellement utiles. L'étude de ces Polypiers présente du reste quelques difficultés, ar elle nécessite un examen minutieux de la conformation des (1) Voyez tome vr page 5, VI. Zoo. — Décembre. 322 MILNE EDWARDS. — Æschares fossiles. cellules presque microscopiques dont ils se composent , et pour que les dessins que l’on en donne soient satisfaisans, il. faut qu’ils représentent les objets grossis vingt fois au moins, et qu'ils soient comparatifs entre eux quant au pouvoir amplifiant employé. Mais ce qui contribue surtout à diminuer la valeur des travaux dont cette branche de la zoologie a déjà été enrichie, c’est l'ignorance où l’on était des modifications de forme amenées par l’âge dans une même cellule; car, à défaut de la connais- sance de ce fait, on devait être naturellement porté à se con- tenter de l’examen de quelques loges bien conservées dans chaque Polypier ; et en agissant de la sorte on était exposé d’une part, à multiplier sans raison les espèces, et de l’autre à confon- dre des espèces réellement différentes, mais dont les caractères distinctifs disparaissent dans la vieillesse. En effet, les change- mens que nous avons constatés dans la conformation extérieure des cellules tégumentaires des Eschares vivans, observés à dif- férens âges, se remarquent aussi dans les dépouilles fossiles de ces Polypes, et pour se prononcer sur l'identité ou sur la distinc- tion spécifique de celles-ci, il devient souvent nécessaire de les comparer dans les diverses périodes de leur existence, compa- raison qui n’est pas toujours possible ; car souvent on ne trouve que des fragmens trop petits pour offrir des cellules d’âges très différens. | Presque toutes les espèces d’Eschares fossiles dont on a publié jusqu'ici de bonnes descriptions ou des figures reconnaissables appartiennent à une époque géologique bien reculée, car elles proviennent pour la plupart de la formation crayeuse. Ces ter- rains ne sont cependant pas les plus riches en Polypiers de ce genre, et c’est surtout dans des couches beaucoup plus récentes de l'écorce du globequ’onles trouve en abondance. Dans certains terrains dont la formation est postérieure à celles des couches tertiaires les moins anciennes du bassin de Paris, le nombre des Eschares est si considérable qu’à l'époque géologique corres- pondante, ces zoophytes semblent avoir contribué , sous nos la- titudes élevées, à la formation de grands bancs, à-peu-près de la méme manière que de nos jours on voit d’autres polypiers éle- ver des récifs dans les mers voisines des tropiques. RTE Le + ‘ MILNE EDWARDS.— Eschares fossiles. 323 Les observations combinées des géologues et des zoologistes ont conduit à faire penser que, dans la création des êtres orga- nisés, latendance générale de la nature avait été de procéder du simple au composé. Dans la série des animaux vertébrés cette marche est indubitable; elle n’est peut-être pas aussi évidente pour la série des mollusques, et on ne sait encore que trop peu de choses sur les animaux articulés du monde ancien pour dé- cider si elle existe dans ce grand embranchement du règne ani- mal; mais cette tendance nous parait se montrer d’une manière bien marquée dans la structure des divers Polypes qui se sont succédés à la surface du globe. En’effet, nos précédentes recherches montrent que les Es- chares'et les genres voisins sont de tous les polypes connus les plus élevés en organisation. Or ; parmi les zoophytes nombreux qui habitaient les mers dans lesquelles se sont formés les cal- caires de transition , nous ne connaissons aucun exemple bien constaté de Polypier appartenant à cette famille; il est même pro- bable qu’à cette époque reculée il n’existait que fort peu de Po- lypes dé l’ordre des Bryozoaires, tandis que les Alcyoniens et Jes Zoanthaires, dont la structure est plus simple, abondaient. Dans la formation jurassique , les Eschariens sont rares; mais dans la craie et dans les calcaires tertiaires leur nombre proportion- nel augmente beaucoup, et dans les terrains plus récens dési- gnés par quelques géologues sous les noms de terrains quater- naires ou Pliocènés, la quantité de débris laissés par ces Polypes dépasse de beaucoup celle des fossiles appartenant aux ordres moins élevés des Zoanthaires et des Alcyoniens. Les Eschares proprement dits paraissent avoir commencé à exister vers l'époque dela formation des calcaires jurassiques de ‘Caen; Lamouroux a.en effettrouvé dans ce terrain un fossile qui appartient indubitablemeut à ce genre(x),etM.Desmaresten a fait connaître un second (2). Dansla craie de Maestricht ces Polypiers ne sont pas rares; le nombre desespèces figurées par M. Goldfuss comme provenant de cette formation géologiques’élève à dix (3); .(1) Bulletin de la Société Philomatique , 1814. (2) Exposition méthodique des genres de l’ordre des Polypiers, page 113. (3) Petrefacta germaniæ. at. 0 MILNE EDWARDS. — Æschares fossiles. mais, comme nous le verrons par la suite, les fossiles désignés par cet auteur, sous le nom d’'Eschares, ne paraissent pas devoir tous rester dans ce groupe, et il nous semble bien probable aussi que de simples modifications dépendantes de l’âge, ont, dans plusd’une circonstance, été considérées comme constituant des différences spécifiques, et auront de la sorte donné lieu à des doubles emplois. Cette liste des Eschares de la: craie se réduira par conséquent beaucoup ; mais , d’un autre côté, elle sera aug- mentée par les espèces nouvelles que je me propose de faire con- naître dans la suite de ce Mémoire. Les terrains tertiaires -des environs de Paris et de la Westphalie ont fourni également à MM. Desmarest et Goldfuss plusieurs Eschares; mais malheureu- sement tous-ces ‘fossiles n’ont pas été figurés de manière à en perméttre une détermination certaine. Nous avons également rencontré quelques espèces qui appartiennent à cette époque géologique, et qui nous paraissent nouvelles; mais c'est dans le Crag d'Angleterre et dans les terrains analogues du bassin de la Loire que nous avons trouvé le plus de diversité dans -ces Po- lypiers ; jusqu'ici on n’en a pas décrit un seul, et ceux que nous allons faire connaître suffiront pour-doubler presque le nombre total des espèces déjà signalées dans tous les autres dépôts ma- rins de l'écorce du globe. | Plusieurs Eschares fossiles s’éloignent beaucoup des espèces actuellement existantes; d’autres, au contraire, s’en approchent extrêmement; mais jusqu'ici nous n'avons pu constater l'identité spécifique d’aucun de ces Polypiers avec les espèces récentes, et il est par conséquent présumable que les Polypes de ce genre qui habitaient les mers anciennes ont tous été détruits avant la créa- tion de ceux propres à l'époque actuelle. Dans les descriptions qui vont suivre je me suissattaché à faire ressortir les modifications que l’âge du Polypier a pu détérminer dans la forme extérieure de leur enveloppe solide, et c’est sur- tout dans la conformation individuelle de leurs cellules que j'ai cherché les caractères distinctifs des espèces; car, ainsi que l’a très bien fait remarquer M. de Blainville, les différences que l'on y rencontre ont une importance zoologique bien plus grande que celles offertes par la forme générale du Polypier. MILNE £DWARDs.— Eschares fossiles. 325 Du reste , l'insuffisance des descriptions même les plus minu- tieuses se fait sentir ici peut-être plus vivement encore que dans la plupart des autres branches de la zoologie; et le secours de figures exactes et considérablement grossies devient souvent in- dispensable pour la détermination spécifique. Aussi en étudiant les Eschares nouveaux ou mal connus dont l’examen va nous occuper ici, ai-je eu le soin d'en faire toujours des dessins à l’aide de la camera lucida appliquée au microscope et de repré- senter ces Polypiers avec les différentes variétés de forme que leurs cellules tégumentaires présentent aux divers âges. # 1. DE L'ESCHARE ENTAILLÉ. Eschara incisa. (Planche 9, fig. 2.) Un: des Eschares fossiles les plus voisins de certaines espèces récentes est celui que je désignerai sous le nom d’Eschare en- taillé, Par son port, il ressemble beaucoup à l'Eschare foliacé de nos mers; les lames résultantes de l’adossement de la double série de cellules se contournent de même en divers sens, et se réunissent entre elles de façon à circonscrire des espaces vides plus ou moins considérables, et à former de grandes masses ca. verneuses (1). Les cellules ont aussi à-peu-près les mêmes dimen- sions.et la même conformation que celles de l'Eschare foliacé , et elles présentent des modifications du même ordre lorsqu'on les compare entre elles dans des parties du Polypier dont l’âge doit être différent. Je n'ai vu aucun échantillon assez intact pour offrir des cellules très jeunes, comparables à celles encore in- complètement ossifiées, que j'ai représentées dans la planche 3, fig. 1 4. de mon Mémoire sur les Eschares vivans ; mais j'en ai trouvé beaucoup qui étaient encore dans la période de croissance qu'on-peut considérer comme étant l’âge adulte de ces petits animaux. Ces cellules (2) sont allongées, à-peu-près ovalaires et bombées en dessus; une dépression assez forte indique leurs li- (1) PI 9. fig. à. (a} PI gi fig. as. 326 MILNE EDWARDS. — Eschares fossiles. mites respectives, et leur surface externe est criblée d’un nombre assez considérable de petits trous; enfin leur ouverture , quoi- qu'à-peu-près perpendiculaire à leur grand axe, est presque terminale; son bord antérieur est semi-circulaire ; maïs son bord postérieur est droit et divisé sur la ligne médiane par une fis- sure large et profonde qui semble remplacer le trou accessoire que nous àvons vu chez l’Eschare foliacé. C’est surtout cette dernière différence qui rend facile la distinction des deux es- pèces. Dâns les parties du Polypier quel’on reconnaît à raison de leur position, pour avoir été formées avant celles dont nous venons de parler, et que l’on doit par conséquent considérer comme étant parvenues à un âge plus avancé, on voit que les pa- rois des cellules sont devenues plus épaisses et plus compactes ; les pores de leur surface ont presque entièrement disparu, et on ne distingue plus de dépressions correspondantes à leurs pour- tours respectifs(3). Leur ouverture est considérablement rétrécie et se trouve enfoncée au-dessous du niveau de la surface géné- rale du Polypier; la fissure de son bord inférieur disparait aussi peu-à-peu, et dans beaucoup de vivilles cellules, sa forme gé- nérale est complètement changée; car, au lieu de représenter la moitié d’un ovale comme dans le jeune âge, elle ‘est devenue tout-à-fait circulaire. Enfin, dans ce Polypier fossile on voit aussi des exemples fréquens de l’occlusion complète des cellules, et lorsqu'il est parvenu à cet état de vieillesse extrême, on pourrait bien fa- cilement se méprendre sur sa nature, à moins d’avoir étudié avec attention sa structure intérieure ; car dans l'épaisseur des ‘cloi- sons on retrouve encore les cavités intérieures de ces loges. T’Eschare incisé se trouve dans le Crag du comté de Suffolk, eu Angleterre. Les échantillons que je possède ont été pris à Sudbourne, et proviennent de la couche inférieure de cette for- mation , désignée sous lenom de Craga Corallines, par M. Char- lesworth à qui on doit d’intéressantes observations sur FPhistoire géologique de ce terrain. (1) fl. 9 fig. 2°. : ét MILNE EDWARDS. — Éschares fossiles. 327 2. DE L'ESCHARE MONILIFÈRE, Eschara monilifera. (Planelie 9 , fig. 1.) Une autre espèce d'Eschare qui paraît être beaucoup plus abondante dans la localité si riche en Polypiers dont nous ve- nons de parler, est celle que nous avons désignée sous le nom d’Eschare monilifère, à cause de l’aspect produit par les séries de petits trous dont sa surface est ornée. Ce Polypier forme aussi de grandes expansions dont la réunion constitue une masse ca- verneuse; mais ces lames, au lieu de s'élever d’une base très large, naissent d’une portion étroite qui représente une sorte de tige. (v) Les cellules tégumentaires de cet Eschare sont allongées et py- riformés (2). Dans le jeune âge leur ouverture est ovalaire et se prolonge inférieurement sous la forme d’une échancrure ; elle est peu saillante, parallèle à la surface du Polypier et située près de l'extrémité antérieure des cellules. La surface extérieure de ces loges est légèrement bombée et présente de chaque côté un sillon longitudinal, dont le fond est percé par une série de petits trous; l’espace médian compris entre ces deux rangées de trous est très étroit, et celui situé entre les deux rangées correspondantes des cellules voisines est renflé et constitue une sorte de bordure onduleuse qui se continue entre les séries pa- rallèles de cellules et donne ainsi naissance à une multitude de lignes saillantes qu’on remarque à la surface du Polypier. Dans beaucoup de cellules on distingue de chaque côté de l'ouverture un renflement ou un tubercule dont le sommet est occupé par un trou pyriforme beaucoup plus grand que les pores dont il a déjà été question (3). Ces protubérances ont beaucoup d’analo- gie avec celles dont nous avons décrit le développement chez divers Eschares vivans et pourraient bien être aussi des capsules G:) PL 9, fig. r. (2) PI. 9, fig. 1°. (3) +, fig.a°, pl 0. 328 MILNE EDWaRDS. — Æschares fossiles. gemmifères. Dans les cellules plus avancées en âge ces protubé- rances ont, en général, disparu, et l'ouverture, sans avoir changé de forme, paraît s'être enfoncée dans la substance du Polypier par suite du renflement des parties voisines. Dans des parties encore plus anciennes du Polypier on voit qu’il est sur- venu par les progrès de l’âge des changemens plus grands. Les ouvertures des cellules, après s'être rétrécies et enfoncées de plus en plus, s’oblitèrent complètement (1); les doubles rangées de pores qui ornaient les cellules disparaissent aussi et les pa- rois de ces loges acquièrent une texture plus caverneuse ; les bourrelets qu’on remarquaità la jonction des séries longitudinales de cellules se distinguent encore, et l’espace compris entre eux et correspondant à la portion médiane des cellules montre une tendance à se sillonner de manière à former d’autres bourrelets longitudinaux semblables aux premiers. Enfin, dans les parties les plus inférieures du Polypier, dans celle qui en constitue la tige, par exemple, toute trace de l’exis- tence des ouvertures cellulaires s’est effacée et la surface de cette agrégation de loges oblitérées est entièrement couverte de stries longitudinales saillantes et légèrement onduleuses qui se continuent dans une longueur considérable et qui sont serrées les unes contre les autres (2). Dans cet état ce Polypier fossile ressemble beaucoup plus à un morceau de corail qu’à un Eschare ordinaire; une pareille disposition est même si éloignée de tout ce qu'on pouvait s'attendre à trouver dans un Polypier de ce genre que, l'ayant d'abord observée sur un fragment dont au- cune partie ne laissait apercevoir de cellules, je me suis trompé sur la détermination de mon fossile et que peut-être serais-je resté dans l'erreur si d’autres échantillons ne m’avaient offert dans le même Polypier toute la série de changemens par lesquels les cellules avaient passé pour se confondre de la sorte en une masse d'apparence homogène. L’Eschare monilifère est très commun dans le Crag à Polypiers de Sudbourne et se rencontre aussi dans les Faluns de la Tou- (1) PL 9 , fig. 1°. (a) PL 9, fig. te. MILNE EDWAuDs. — Æ£schares fossiles. 329 raine qui, d'après les observations de M. Desnoyers, doivent être considérés comme appartenant à une même époque géologique. 3. DE L'EscHARE CriBLé. Eschara pertusa. (Planche 10, fig. 3.) Si l’on se contentait d’un examen superficiel, on pourrait fa- cilement confondre avec l'espèce précédente un autre Polypier qui habitait les mêmes mers et qui existe également à l'état fos- sile dans le Crag de Sudbourne. En effet, ce qui frappe le plus dans ce dernier Polypier, auquel je donnerai le nom d’Eschare criblé, ce sont deux rangées longitudinales de trous assezgrands sur la surface de chaque cellule à-peu-près comme chez l’Eschare monilifère ; mais, du reste, ces deux espèces ne se ressemblent que peu. Ici les cellules (1) sont très renflées en-dessus , obtuses aux deux bouts et à bords latéraux presque parallèles ; elles res- tent bien distinctes entre elles, même dans la vieillesse, et au fond du sillon résultant de leur jonction on distingue une série de pores. L'ouverture de ces loges représente la moitié d’un ovale dont la troncature serait postérieure et légèrement con- cave; elle est située à une petite distance du bord antérieur de la cellule et toute la portion voisine de celle-ci est bombée. En- fin , vers la moitié de leur longueur, les cellules sont un peu ré- trécies et déprimées , mais en arrière elles se renflent de nouveau. Dans un certain nombre de cellules on remarque sur la ligne médiane immédiatement en arrière de l'ouverture un petit ren- flement dont le sommet est occupé par un pore (2), etsur d’autres cellules on voit que cette protubérance est devenue une grosse capsule sphérique qui recouvre une partie de l'ouverture située au-devant {3). À sa partie supérieure on aperçoit une dépression pyriforme perforée vers sa base et analogue à ce que uous avons déjà signalé sur plusieurs Eschares vivans, tandis que par sa (1) PL 10, fig. 5. (2) PL 0, fig. 3°, (3) PL 10, fig. 3e 330 MILNE EDWARDS. — Eschares fossiles. forme générale cette capsule ressemble tout-à-fait aux vésicules gemmifères des Flustres et dés Escharines. Dans des points du Polypier où l'âge des cellules doit avoir été plus avancé (r) j'ai trouvé plusieurs de ces loges dont l’ouver- ture n’était plus qu’une fente semi-lunaire , et un grand nombre d’autres dont toute la partie antérieure était complètement bouchée bien que les pores de la partie postérieure fussent res- tés béans et que la forme générale de ces loges n’eût pas changé. L'Eschare criblé forme de grandes lames foliacées qui parais- sent se réunir de manière à constituer des masses caverneusés ; mais Jusqu'ici je n’ai vu aucun échantillon asséz complet pour être bien certain de la forme générale du Polypier. 4. DE L'ESCHARE DE sEDGwICk. Eschara Sedawickix. (Planche ro, fig, 5.) L'espèce d’Eschare que je dédie au savant professeur de géo- logie de l’université de Cambridge se trouve à l'état fossile dans la même localité que les précédentes , dont elle’est du’reste fa- cile à distinguer. Les cellules qui la forment sont très larges et renfléés à léur partie antérieure; leur ouverture est très grande et tout-à-fait circulaire et près de leur pourtour sé trouve une série dé petits trous (2). On voit aussi plusieurs de ces pores sur la partie moyenne ct inférieure de la surface de chaque cel- lule, ét, en général, ils y forment par leur réunion quatre ran- gées longitudinales bien distinctes. Ici, de même que dans les espèces précédentes, on voit qu'au moment de leur mort plusieurs de ces polypes étaient dans l'acte de produire ces protubérances, que l’analogie nous'a fait appe- ler des capsules gemmifères (3); elles se développent sur la ligne médiane vers le milieu de la portion postérieure ou verticale de là cellule et ressemblent beaucoup à celles que nous avons dé- crites chez l’Eschare lobulé. fx) PL 10, fig. 30. (a) PL ro, fig. 5. (3) PI, 10, fig. 5a. MILNE EDWARDS. — Æschares fossiles. 334 5. DE L'ESCHARE LARGE. — ÆEschara lata. ( Planche 15, fig. 11.) On trouve dans le terrain tertiaire de Doué, connu sous le nom de:Grison, une autre espèce d'Eschare fossile également remarquable par la grandeur de l'ouverture des cellules, mais qui diffère de toutes les espèces précédentes par les dimensions et la forme -générale de ces loges (1) Elles sont hexagonales, presque aussi larges que longues, renflées et percées de quelques pores placées irrégulièrement; on remarque aussi une rangée de petits trous au fond des sillons qui séparent les cellules entre elles. L'ouverture de ces loges est ovalaire plutôt que circulaire et retrécie vers sa partie postérieure ; enfin, au lieu d’être située près du bord antérieur de la loge, elle en est très éloignée et se ouve vers leur tiers antérieur. 6. DE L’ESCHARE DE DESmAYESs. Æschara Deshaysii. { Planche 10, fig. 4.) Je dédierai à l'habile naturaliste qui a si bien fait connaitre les coquilles fossiles des environs de Paris une espèce d’Eschare provenant de la même localité que la précédente. Ce fossile con- stitue de grandes lames foliacées diversement anastomosées entre elles (2). Les cellules (3) se rapprochent assez, par leur forme générale, de celles de l’Eschare lobulé des mers d’Austra- lasie (4), mais sont beaucoup plus grandes. Dans le jeune âge (5), elles sont bien distinctes entre elles et sont séparées par une rangée de petits trous; leur portion antérieure a la forme d’une moitié d’ellipsoïde , mais dans leur portiou postérieure elles se (1) PL5, fig. 34 et 36. (2) PL 11, fig. zx, (3) PI. 10, fig. 4. (4) PI. 10, fig. 4a, 4!, 4°, (5) PI. 10 , fig. 4. 33a MILNE EDWARDS. — Æschares fossiles: rétrécissent beaucoup et leurs bords latéraux deviennent conca- ves. Leur surface est assez bombés et ne présente pas de pores notables, enfin leur ouverture plus longue que large, se termine postérieurement par un bord droit ou légèrement convexe, et dans ce dernier cas, on remarque aussi un faible rétrécissement au devant des angles latéro-postérieurs (1), defaçcon que la dispo- sition de cette partie rappelle un peu ce que nous avons vu chez l'Eschare denté (2) et l’Eschare cervicorne. (3) Par les progrès de l’âge, les petites lacunes qui existaient d’a- bord entre les cellules disparaissent et les parties latérales de ces loges se renflent de manière que la surface générale du po- lypier s’applanit(4). Mais plus tard cette surface devient de nou- veau inégale par suite du développement de deux renflemens qui occupent, l’une la portion postérieure de la cellule, l’autre compris entre celui-ci et l'ouverture, et qui paraissent être les premiers vestiges d'autant de capsules gemmiferes. (5) 7: De L'ESCHARE Voisin. Eschara affinis. ( Planche 10, fig. 6.) Le Grison de Doué nous a fonrni une troisième espèce d’Es- chare qui ressemble beaucoup à l'Æschara cancellata de la craie de Maestricht figurée par M. Goldfuss (6), mais qui s’en distingue par plusieurs caractères. Dans l’un et l’autre de ces fossiles, on voit au devant de chaque cellule deux crêtes obtuses et di- vergentes qui se dirigent vers le bord antérieur des deux cellules voisines, mais qui s’effacent presque entièrement avant que d’y parvenir; dans l’Eschara cancellata, ces lignes partent d’un même point et leur réunion forme une multitude de petits car- rés dont toute la surface du polypier est couverte, tandis qu'ici elles sont éloignées à leur base et séparées par le bord antérieur (1) PI, 10, fig. 4°. (2) PL 3, fig. 2°. (3) PIX, 68 T7. (4) PL, ro, fig. 4°. (5) PI, 10, fig. 4 . (6) Petrefacta, pl. 8 , fig. 13. MILNE FDWARDS. — ÆEschares fossiles. 333 de la cellule qui est saillant et assez long, de façon que l'espèce de cadre, résultant de leur réunion est hexagonal (1). La sur- face de la cellule, comprise entre ces lignes marginales, est bombée, mais moins élevée qu’elles, et on n’y voit pas de pores ; l'ouverture qui eu occupe la partie antérieure est médiocre et à-peu-près pyriforme. Les lames fournies par le double plan de ces cellules sont assez épaisses et onduleuses (à) ; elles se réunissent de façon à constituer une masse caverneuse à-peu-près comme chez l’Es- chare foliacé. 8. DE L'ESCHARE POREUX. Æschara porosa. (Planche 11, fig, 7.) Cette espèce est remarquable par la multitude de petits pores dont toute la surface du Polypier est couverte. Dans l’échantil- lon que j'ai examiné je n’ai pas trouvé de jeunes cellules; toutes étaient peu distinctes entre elles, mais par les dépressions qui correspondaient à leur point de jonction on pouvait reconnaître qu’elles devaient avoir eu une forme ovalaire (3). Leur ouverture est circulaire et se dirige d’abord très obliquement en avant, comine nous l'avons déjà vu chez l’Eschare épais (4); mais par les progrès de l’âge toutes les parties voisines s'élèvent à-peu- près au même niveau, et alors elle ressemble à un trou percé directement au fond d’une petite excavation dont la profondeur parait augmenter peu-à-peu (5). Sur un assez grand nombre de ces cellules j'ai trouvé aussi un renflement qui en occupe la moi- tié inférieure et qui paraît dû à un premier degré du dévelop- pement des capsules gemmifères. (6) Les cellules ainsi réunies entre elles constituent, comme d’or- %i) PI. 10, fig. 6. (a) Pl. 11, fig. 7. (3) PI. 11, fig. 7°. (4) PI 5, fig. r. * (5) PL ir, fig. 7°. (6) PL. sr, fig. 5°. 334 MILNE EDWARDS. — Æschares fossiles. dinaire, de grandes lames adossées deux à deux; maïs l'union dé celles-ci est moins intime que chez la plupart des Eschares et souvent elles se séparent sans que les cellules se déchirent. Du reste les expansions qu’elles constituent sont très larges et se réunissent entre elles à-peu-près comme dans les espèces’ pré- cédentes (1). L’Eschare poreux provient des terrains rate il nins du Plaisantin. 9. DE L’ESCHARE BIFURQUÉ. ÆsChara bifurcata. ( Planche x1, fig. 8.) J'ai cru devoir rapporter à l'espèce décrite par M. Desmarest sous le nom de Flustre bifurquée (1) un Eschare fossile des ter- rains tertiaires des environs de Paris que j'ai trouvé à Grignon et qui diffère de toutes les espèces précédentes par la petitesse extrême des cellules. Dans le jeune âge ces loges sont de forme à-peu-près ovalaire , rétrécies postérieurement , un peu renflées en avant et à parois très épaisses ; leur ouverture est pyriforme plutôt qu’ovalaire et leur surface ne paraît pas sensiblement po- reuse (2). À une époque plus avancée de la vie, la plupart des cellules présentent vers leur partie inférieure un renflement oblique dont la surface ne tarde pas à offrir une dépression ou même une ouverture pyriforme (3). A peu de distance au-dessous des cellules ainsi conformées on en voit d’autres dont louver- ture est devenue très petite et circulaire ou bien s’est bouchée complètement (4!, etil est à remarquer que le tissu des parois de ces loges parait devenir alors beaucoup plus poreux que dans le jeune âge. Dans toute la partie inférieure du Polypier on ne voit pas une seule cellule poreuse de son ouverture, mais on distingue encore dans la masse commune formée par leur réu- nion un léger renflement qui correspond à chacune d’elles. (5) (1) Flustra bifurcata Desmarest , Bull. de la Soc. Philom. 1814, t. 4, p. 53, pl. 2, fig.6. (a) PL 1r, fig. 8a; a (3) PL 11, fig. 8°. (4) © fig. 8e. (5) Fig. 84. MILNE EDWARDS. — Æschares fossiles. 335 Cet Eschare, qu'on ne trouve ordinairement qu’en fragmens très petits, forme des expansions foliacées et rameuses qui se dé- doublent assez facilement. (1) Ilse pourrait bien que le fossile mentionné par M. Defrance sous le nom d’Æschara grignonensis (2), mais dont il n’a été pu- blié encore ni description ni figure, se rapportât à cette espèce. 10. DE L'ESCHARE DE BRONGNIART. Æschara Brongniartii. ( Planche 11, fig. 9). Parmi les fossiles des terrains tertiaires des environs de Paris que possède M. Brongniart se trouve un petit Eschare lamelleux dont les cellules sont à-peu-près de même grandeur et de même forme que dans l'espèce précédente; mais l'ouverture de ses loges est beaucoup plus grande et de forme circalaire, et de cha- que côté de leur ligne de jonction on voit une rangée de pores dont deux, situés un peu en arrière du bord postérieur de l'ou- verture, sont plus grands que les autres. Du reste ce petit Poly- pier ne m'a paru présenter rien de remarquable. DE L'ESCHARE MILLÉPORACÉ. Eschara milleporacea. (Planche 12, fig. r2). On trouve aux environs de Chaumont, dans le département de l'Oise, un Eschare fossile remarquable par l'épaisseur qu'il soquierl avec l’âge et par le grand nombre de petits trous épars qu'on aperçoit sur sa surface lorsque toute trace extérieure de la distinction des cellules s’est effacée. Dans les parties du Polypier peu avancées en âge les cellules sont assez distinctes(3) ; leur surface æ presque plane et leurs parois sont très épaisses; leur ouverture; un peu plus longue que (x) Fig. 8 (2) Art. Escnare rossiLx du Dict, des Se. nat, ,t. xv,p. 298, (3) PI. à, fig. 2 et 2°. 336 MILNE EDWARDS., — Æschares fossiles. large et assez grande , est terminée postérieurement par un bord droit; enfin la surface de.leur portion inférieure est légèrement poreuse et présente, en général, trois trous accessoires bien distincts, dont deux sont antérieurs et latéraux ; quelquefois on en voit un plus grand nombre. Les cellules ne paraissent rester que peu de temps dans cet état, car dans la majeure partie du Polypier on n’en trouve pas de semblables à ceilesque nous venons de décrire, et on voit que l'ouverture de ces loges s’est rétrécie de plus en plus (1) et a fini par disparaître ou se changer en un pore semblable aux trous accessoires dont il a déjà été question (2). L’épaisseur de la paroi antérieure des cellules augmente en même temps beaucoup et son tissu devient plus poreux. Parvenu à cet état, ce Polypier ne ressemble en aucune façon à un Eschare ordinaire et il se- rait facile d’en méconnaitre la nature si, par suite de quelque dé- chirure, on netrouvait pas,comme cela arrive presque toujours, un certain nombre de cellules ouvertes. En effet, les deux lames constituantes du Polypier sont unies très intimement et ne se séparent pas, comme nous l'avons vu dans quelques autres es- pèces; mais les parois externes des cellules étant très massives comparativement à leurs cloisons latérales, celles-ci se déchi- rent souvent de manière à fendre le tout en deux feuillets et à mettre à nu l'intérieur des cellules(3); c'est même dans cet état qu’on le trouve le plus fréquemment. Ce fossile m’a été communiqué par M. Michelin, et se voit. aussi dans la collection de M. Brongniart. 12. DE L'ESCHARE MAMILLAIRE. Æschara maimnillaris. (Planche 11, fig. 10.) Le petit Polypier que je désigne sous ce nom se rapproche beaucoup de l’Eschare grèle dont j'ai donné des figures dans mon Mémoire sur les espèces récentes de ce genre (4). A en ju- (1) a, fig: 12°. (a) a, fig. 124. (3) b, fig. rat. (4) b, fig. z26, PE Loi MILNE EDWARDS. — Æschares fossiles. 337 ge: par le fragment que j'ai vu, il devait être rameux plutôt que foliacé ; ses cellules sont étroites, allongées et peu distinctes en- tre elles (1); enfin leur ouverture est circulaire et se trouve au sommet d’un mamellon saillant, comme dans l'Eschare grèle, seulement ses bords ne sont pas festonnés , comme chez ce der- nier, Par les progrès de l’âge l'ouverture parait s’oblitérer et alors on ne voit à sa place qu’un petit mamelon., Ce fossile, dont je dois la communication à M. Brongniart, paraît provenir des terrains tertiaires des environs de Paris;- mais je n’ai pas de données précises sur son gisement. 13. DE L'ESCHARE ÉLÉGANT. Æschara elegans. (Planche 12, fig. 13.) Cette espèce d'Eschare, qui se trouve dans les terrains ter- tiaires de Bordeaux, ést une des plus remarquables que je con- naisse. Les cellules sont beaucoup plus grandes que dans tou- tes les espèces précédentes et ont à-peu-près la forme d’un quadrilatère allongé (2); leur bord antérieur est, il est vrai, arqué et leur bord postérieur concave, mais leurs bords latéraux sont presque droits et parallèles. Tous ces bords sont beaucoup plus saillans qué le reste de la surface de la cellule et forment autour d’elle une sorte de cadre dont les côtes sont striés en travers et accolées aux parties correspondantes de la bordure des cellules voisines ; au-devant de l'ouverture, qui est très grande et semi- circulaire, on remarque une espèce de cintre ou de voûte et près de son bord postérieur on voit de chaque côté un trou ac- cessoire. Quant à la portion de la surface des cellules située en _ arrière de ces trous, elle est légèrement bombée et perforée > par un grand nombre de pores. N'ayant observé qu’un fragment très petit de ce Polypier, je ne puis rien dire de son port ni des changemens qu’il subit par les progrès de l’âge. (1) PL ri, fig. t0'a. (2) Pl. 12, fig. 13. VI, Zoo, — Décembre, 22 338 MILNE EDWARDS. — Æschares fossiles. ; 14. DE L'ESCHARE À CÔTES. Eschara costata. (Planche 12, fig. 14.) Cette espèce affecte la forme d’expansions foliacées plus ou moins contournées sur la surface desquelles on remarque de distance en distance des lignes longitudinales légèrement sail- lantes et pleines, tandis que partout ailleurs cette surface est criblée par les ouvertures -des cellules ou par les fossettes que ces ouvertures laissent après leur occlusion. Les cellules(r) sont ovalaires et souvent avancent un peu les unes au-dessus des au- tres; dans l'âge adulte leur patrie antérieure est bombée et pré- sente une ouverture semi-circulaire; mais, par les progrès de l’âge, les parties latérales et déprimées de leur surface extérieure s'élèvent de manière à arriver partout à- zpeu-prés au même ni- veau et à dépasser celni de l'ouverture qui, en même temps, s'o- blitère et ne constitue plus qu’une fossette terminée antérieu- rement par un bord semi-circulaire bien net. Ce Polypier se trouve dans la craie des environs de dafiles et m'a été communiqué par M. Michelin. 15. DE L'ESCHARE BOUFFI. Eschara inflata. ( Planche 12, fig. 15.) Ce petit polypier, qui se trouve dans la craie d'Angers, est | remarquable par l’extrême convexité de ses cellules; par la: forme générale de ses loges il se rapproche de l'Eschare folia- cé (2) et de l’Eschare à bandelettes (3), mais leur ouverture est grande, ovalaire et très profonde, et leur surface est tellement bombée que, vue à l'œil nu, elles ressemblent à des tuberculés pérloïdes dont toute la surface du polypier serait couverte; des sillons évasés et très profonds séparent ces renflemens entre (1) Fig. 14 a. (2) PL, 12, fig. 15 0. (3) PL 12, fig. 18. pr MILNE EDWARDS. — Æschares fossiles. | 339 eux et se portent obliquement d'une ouverture à une autre; enfin, on aperçoit quelques pores sur les parois des cellules , mais le tissude celles-ci est en général très compacte(r). Cet Es- chare a la forme d'une petite expansion foliacée assez épaisse dout la portion inférieure est étroite, presque cylindrique et s'élargit peu-à-peu. (2) 16. DE L'ESCHARE HEXAGONAZ. Eschara sexangularis ( Planche 12, fig. 16.) Parmi les fragmens de Polypiers que M. Lonsdeal s’est pro curés en désagrégeant sous l’eau des morceaux de la craie infé- rieure de Patsdoun, près Portsmouth, se trouve un Eschare dont les cellules, hexagonales, déprimées et lisses, ont une ouverture semi-circulaire et sont séparées entre elles par un rebord saillant . Commun qui forme sur toute la surface du polypierune sorte de réseau à mailles hexagonales. Ce mode de conformation est exac- tement celui que l’on voit dans la figure que M. Goldfuss a donné de son Æschara sexangularis de la craie de Maëstricht (3). La seule différence que j'ai pu apercevoir entre ces deux polypiers consiste en ce que dans celui des environs de Portsmouh, les cellules sont un peu plus allongées et leur bordure est plus épaisse, que. M. Goldfuss ne l’a représenté pour celui de Maes- tricht ; aussi ai-je cru devoir les regarder comme appertenant à une même espèce, car des différences de cette naturese rencon- trent souvent dans le même Polypier. D’autres fragmens de ces Eschares de la craie de Portsmeuth m'ont présenté des cellules ayant exactement la même forme -et les mêmes dimensions que les précédentes, mais dont la por- . tion centrale s'était élevée au-dessus de la portion marginale de _ manière à faire disparaître le cadre saillant Ai se remarquait autour des premiers, et à produire dans ce même point un sillon (x) Voyez pl.3, fig. 1# €, etc. (2) Voyez pl. 4, fig. 6. (3) Petrefacta, vol. 1, p.24, pl. 8, fig, 12. 21. 340 MILNE LDWARDS. — Æschares fossiles. plus ou moins profond. Ces différences ont tant d’analogie avec celles que j'ai vu souvent amenées par les seuls progrès de l’âge dans un même Polypier que je n’ai pas hésité à les consi- dérer comme dépendantes d'une même cause, et à regarder ces deux formes comme de simples variétés d'ige d'une même ‘espèce. sr Or, notre Eschare hexagonal, dans ce dernier état, ne paraît pas différer notablement d’un autre Polypier. de la craie de Maestricht, figuré par M. Goldfuss sous le nom d’£schara stisma:- copora (1); il serait par conséquent intéressant de chercher si ce dernier doit réellement être distingué spécifiquement de l’'Eschare hexagonal, ou bien être considéré comme ‘en étant une variété d'âge; jusqu'ici les matériaux m'ont mag it résoudre cette at A y ) ) l'est aussi à remarquer ques lÆ Ni dichotoma deM Gold: fuss (2), se compose de cellules qui ne paraissent différer de celles de l’Eschare stigmatopore , ‘par aucune particularité: de structure que l’on: doive considérer comme caractéristique ; seulement le port du Polypier n'est pas le même. Le premier :af- fecte la forme de larges expansions lamelleuses , tandis que le second constitue des rameaux étroits. Mais ici encore! de nôu- velles observations nous paraissent nécessaires: pour ‘établir la constance de cette dissemblance dans le mode de croissance de l'agrégat de Polypes, et pour motiver suffisamment ‘la dis- tinction spécifique adopté par le savant géologue de Bonn: 17. DE L'ESCHARE DOUTEUx. schara dubia. ( Planche 12, fig. 17.) Où rencontre fréquemment dans la craie de Maëstricht un petit Polypier du genre Escharé, qui est assez épais, et pré- sente des surfaces presque planes, cribléeside trous ronds et en- foncés, débouchant chacun dans une cellule courte et large. Ces Eschares sont évidemment très vieux; mais en Îr< »°-° (rx) Petrefacta, vol. 1, p. 24, tab. 8, fig. 11. (2) Petrefacta, vol. 1, p. 25, tab. vu, fig. 15 MILNE EDWARDS, — Æschares fossiles. 34t attentivement on distingue encore une sorte de réseau à mailles | hexagonales, résultant. de la réunion ‘des lignes de jonction des cellules. Il en. résulte donc que par la forme;générale des cel: lules ce fossile a-beaucoup d’analogie avec ce que l'on doit s’at- tendre à. voir, dans l'espèce précédente lorsqu'elle parvient à un âge, très avancé. La forme des ouvertures est d'ordinaire fort différente (1), mais dans les parties supérieures du Polypier, nous les avons trouvées moins régulièrement circulaires, et nous en avons même rencontré dont le bord inférieur était presque droit; par conséquent il se pourrait bien que leur forme pri- mitive füt semblable à celle de l'ouverture des cellules de l’'Es- chare hexagonal , et qu’elles ne soient devenues rondes que par le renflement des parties voisines déterminé par les progrès € l’âge; genre de modification dont nous ayons déjà signalé quel- ques exemples. La seule particularité de structure qui nous parait impossible à expliquer par les changemens de forme que, par analogie, on peut présumer survenir dans la vieillesse chez l’Eschare hexagonal, c’est la position de Pouverturedes cel- lules; en effet, dans le Polypier dont il est ici question, cette ouverture est située presqu’au centre ‘de la surface externe de la cellule, tandis que dans l'espèce précédente et dans toutes celles que nous en avons rapproché, cette même ouverture est placée tout auprès du bord antérieur de sa cellule. En attendant de nouveaux faits, nous croyons donc ne pas devoir confondre spéficiquement ces Polypiers et nous désigne- rons celui dont nous venons de donner la description, sous le nom d’Eschare douteux.” 18. DE L'ESCHARE DE LONSDALÉ, Æschara Lonsdealii. (Planche r2 , fig. 18.) NL Cette espèce se trouve avec l’'Eschare hexagonal dans la Craie . de Portsmouth, et.elle en a été extraite par M. Lonsdale à l’aide du procédé déjà mentionné; elle a beaucoup d’analogie avec (1) Fig. 17. 342 MILNÉ EDWArDS. — Eschares fossiles. les deux espèces précédentes. De même que chez l'Eschare hexagonal dans le jeune âge, lés cellules sont entoüréés d’une bordure commune qui est assez élevée et représente sur la sur- face du Polypier une sorte de réseau (r); maïs elle est plus épaisse, et $es mailles sont en forme de losange plutôt qu’hexagonales. Les dimensions des ‘cellules ne permettent pas de confondre cette espèce avec les deux précédentes. Enfin les ouvertures sont très grandes et ovalaires. < Pour compléter la liste des Eschares fossiles connus aujour- d’hui, nous aurions encore à parler de plusieurs espèces qui ont été décrites par divers auteurs; mais n'ayant pas encore trouvé l’occasion de les examiner, nous nous bornerons à en rappeler les noms : L’EscHARA ARACHNOIDEA ( Goldfuss, Petrefacta , vol. 1,p. 24, pl. 8, fig: 14.— Faujas de Saint:Fond; Hist. nat: dé la mon- tagne Saint-Pierre, pl. 39, fig, 8). Fossile de la craie de Maes- tricht; très remarquable par le réseau dont sa surface est couverte. : L'EÉscHara canceLLara ( Goldfus, op. cit., p.24, pl. 8, fig. 13), provenant de la même localité, et offrant, comme nous l’avons déjà dit, beaucoup de TAN avec notre Eschare voisin. L'Escrara FILOGRANA (Goldfuss, op. cit., p.25. pl. 8; fig,15). Propre au même terrain que les précédens. L’EscHarA srriarA (Goldfuss, op. cit., p. 25, pl. 8, fig. 16), qui se trouve avec les précédens'et noùs semble êtré trop avancé en âge pour pouvoir être bien caractérisé; il se pourrait, en effet, que cet Eschare ne fût qu’un vieux Polypier ,de l’espèce dont le jeune âge est désigné sous le nom d’Æschara filograna. L’EscHarA PyriFormis (Goldfuss, op: cit, p.24, pl ‘8, fig. ro). Espèce très remarquable de la éraie de Maestricht: ‘ (x) Fig: 16. MIÈNE EDWARDS. — Æschares fossiles. 343 L'EscHARA SUBSTRIATA (Goldfuss, op. cit., p. rot, pl. 36, fig. 9). Fossile du calcaire tertiaire de la Westphalie. La FLusrrA FLABELLIFORMIS de Lamouroux (Exposition mé- thodique dés genres de Polypiers, p. 113 , pl. 76, fig. 11). Fos- sile du calcaire jurassique des environs de Caen. JEscnara cycrosroma de M. Goldfuss ( Pétrif. , D°23, pl 8, fig:9 ), appartient au genre Membranipore. L’EscHARA CELLEPORACEA du même auteur (op. cit., p. 101, pl. 36, fig. 10) nous paraît se rapprocher des Cellepores pro- prement dits plutôt ges des véritables Eschares. Enfin , on devra ranger aussi dans le genre Eschare plusieurs des fossiles décrits par M. Desmarest sous le nom de Flustres ; mais ces espèces ne sont pas encore assez bien connues pour être déterminables. EXPLICATION DES PLANCHES O, 10, 11 et r2. Fig. 1. (Pl. 9). Escaane monirtrène, Eschara monilifera de grandeur naturelle. Fig. a*, Portion dela surface du même ; grossie 24 fois, pour montrer la forme des cellules dans le jeune âge ; £ tubercules perforés qui se trouvent de chaque côté de l'ouverture, Fig. 15. Cellules plus anciennes du même polypier, montrant comment les bords de l'ou- verlure se dépriment. Fig. 1°, Portion du même polypier composée de cellules encore plus vieilles, dont les unes sout presque formées, et d’autres complètement closes. F ig. 14, Porlion inférieure du même polypier, dans laquelle les vellules constituantes ces- seut d’être reconnaissables extérieurement. Fig. 1°. Cellules ouvertes pour montrer la face interne de leurs parois latéraux. Depuis la lecture de ce mémoire et sa publication par extrait dans les comptes-rendus de l’Académie, M. Dujardin a communiqué à cette Société savante les résultats de ses observations sur le même sujet et appelé l’attention sur les pures qui existent en général dans les parois latérales des cellules aussi bien qu’à leur paroi antérieure, Dans la plupart des Eschares, ces pores ne sont pas, à beaucoup près, aussi distincts ni aussi régulières que dans l'espèce figurée ici, et je ne vois aucune raison suffisante pour admettre qu'ils sont destinés à livrer passage aux gemmes reproducteurs; comme le pense M. Dujardin, (Voyez les Annales,t. vi, p. 320) Fig: 2. Escsare INGISÉ, £schara incisa. Croquis de l'ensemble du Polypier. Fig. 2°. Cellules encore jeunes grossies 24 fois. 334 MILNE EDWARDS.-— Æschares fossiles. Fig. 2,4. Cellules plus âgées. Fig. oc. Portion du Polypier montrant des cellules nent fermées et la cavité inté— rieure de quelques-unes de ces loges. Fig. 24, Intérieur des cellules, montrant les pores de leurs parois latéraux. Fig. 3. t@t 10.) Escnare CR1BLÉ, Eschara pertusa. Cellules de moyen âge cbr 24, fois. Fig. 34. Cellules plus âgées dont plusieurs ont leur ouverture oblitérée. Fig. je Cellule sur laquelle une capsule gemmifère commence à se développer. Fig. 3°. Cellule sur laquelle on voit une de ces capsules dout le volume est très considérable. Fig. 4. Escuare De Desuavxs, Eschara Deshayesii. Fragment de Polypier degrandeur na- turelle. Fig. 4°. Céllules toujours grossies 24 fois. Fig. 4b. Cellules d’un âge un peu plus avancé. Fig. 4°. Cellules dont les fossettes marginales ont disparu. Fig. 44. Cellules plus âgées dont les limites ne sont plus distinctes extérieurement, et dont la surface est bosselée, « Fig. 5. Escmare De Senewiox, Eschara Sedgwickii. Quelques eellules grossies 24 fois. Fig. 5e. Cellules du même offrant des renflemens gemmifères. Fig. 6. Escmare voisin, Eschara affinis. Croquis du Polypier de grandeur naturelle. Fig. 6,. Cellules grossies 24 fois. Fig. 7 (pl. 11) Escaarx roREUx, Eschara porosa de grandeur naturelle. Fig. 74. Cellules dans le jeune âge, grossies 24 fois. Fig. 74. Cellules plus âgées. Fig. 7°. Cellules dont la surface s’est élevée beaucoup au dessus du niveau de l’ouverture et dont les limites ne sont plus reconnaissables à l'extérieur. Fiè, 74. Cellules dont la surface présente un renflement qui serait rene devenu une capsule gemmifère. Fig. 8. Escuire BFURQUÉ, Eschara bifurcata. Esquisse du SE ar 1e “por na- turelle. Fig. 84. Portion du Polypiergrossie 24 fois, montrant : en a, des cellules, en 2. des cellules portant des tubercules pyriformes, en c. des cellules oblitères, et én 4. la’ face postérieure des cellules de la rangée opposée. Fig. 82. Portion du Polypier dont les cellules sont fermées et sonblisdiihe 5" t ii Fig. 9. Escaane DE BRONGNIART, Eschara Brongniartii de grandeur naturelle. . Fig. g®. Le même grossi. Fig. gt. Cellules grossies 24 fois. _ Fig. 10. Escuare mamicLaiRe, Eschara mamillaris. Kragment du Polypier représeuté “ grandeur naturelle sur un fond noir. Fig. 104 Cellules grossies 18 fois. Fig. 1r. Escmarx LARGE, Æschara lata. Cellules grossies 24 fois. Fig. 12. (pl. ro.) Escare mrccérornaGé, Eschara milleporacea, Fragment du Polypier de grandeur naturelle. MILNE EDWARDS. -— Eschariens fossiles. 345 Fig. 124, Portion du Polypier grossie 24 fois, montrant,en a. la face extérieure des cellules dans l’âge est peu avancé, et en à la cavité de quelques cellules de la rangée opposée. Fig. 126. Portion du même; a. cellules plus avancées en âge que celles de la figure précé- dente ; #. cellule dont l'ouverture est oblitérée. Fig. 13. Escnare ÉLÉGANT, Eschara elegans. Cellules grossies 24 fois. Fig. 14. Escuare à côres, Eschara costata de grandeur naturelle, Fig. 142, Cellules grossies 24 fois; a. cellules externes’; &. cellules ouvertes et usées. Fig. 15. Escnare sourri, Eschara inflata de graudeur naturelle. Fig. 154, Cellules grossies 24 fois. Fig. 16. Escmare mEexAGONAL, Eschara sexangularis. Cellules grossies 24 fois. Fig. 17. Escnane poureux, Eschara dubia de grandeur naturelle. Fig. 170. Cellules du'même grossies 24 fois. $ à Fig.. 18. des DE LONSDALE, Rent Lonsdalei. Cellules grossies 24 fois. NOTE sur un nouveau genre de Polypiers fossiles, de la famille des Eschariens, nommé MéÉLicÉRITE, Par M. Mie Epwanps. Parmi les Eschariens fossiles de Cray de Sudbourne, il s’en trouve une espèce qui, au premier abord, semble devoir être rapportée au genre Eschare proprement dit, mais qui, exami- née de plus près, offre des différences dont l'importance nous paraît suffisante, pour motiver une. distinction générique, car ces particularités semblent devoir être liées d’une manière in- time au; mode de, reproduction de ces animaux. Dans ce polypier nouveau (1),.de même ‘que dans rés Es- chares,, les cellules tégumentaires des polypes sont complète- ment ossifiées et réunies entre elles sur deux plans adossés de manière: à former des expansions lamelleuses; chaque cellule présente aussi une ouverture bien circonscrite, dont la forme est semi- circulaire, et dont le plan est parallèle. à, celle de la (1) Voy.pl. 12, fig 19. 346 MILNE EDWARDS, — Æschariens fossiles. surface externe de la loge. Au-dévant de cette ouverture, on distingue en général un petit trou accessoire situé sur la ligne médiane, et dans la ligne de jonction des cellules entre elles se trouve un bourrelet élevé qui constitue autour de, chacune d'elles une sorte de cadre, et forme sur la surface du polypier un réseau régulier à mailles hexagonales. Jusqu'ici nous n'avons vu aucun caractère qui ne se retrouve chez les Eschares; mais le rapport des cellules entre elles est ici essentiellement différent de ce qui existe chez ces derniers. En effet, chez les Eschares, chaque polype produit, par son extré- mité antérieure, un autre polype, de manière que dans les agré- gats fournis par l’enchaîinement d’une longue suite de généra- tions, les cellules tégumentaires de ces petits animaux Constitüent des séries longitudinales parallèles ‘et alternes bien régulières, dans lesquelles le grand axe de chaque cellule se confond avec l’axe général de la série, et dans lesquelles aussi les membres de la même lignée sont toujours en contact. Enfin, ces séries alternent entre elles de façon que dans l'ensemble du polypier les cellules sont disposées en quinconce, et celles qui se tou- chent latéralement ne se trouvent pas sur le même niveau. Dans le polypier dont nous nous occupons ici, il n’en est pas de même. Les cellules sont disposées par rangées transversales, et le sorimét ‘de chacune dé ées loges correspond än point de jonction de deux cellules de la rangée suivante; il'en résulte que les cellules dont lé grand axe occupe la même ligne lon: gitudinalé, aû lieu d’être réunies entre elles, sont séparées par lés logés de cetté ligne. Or, ‘on ne peut se rendre compte de cétté disposition qu’en admettant que chaqué polype produit son bourgeon reproducteur, non'pas à'son extrémité antérieure, comme chez les Eschares , mais sur l’un des 'déux' pans par les- quels la loge tégümentaire se termine en avant, €é qui suppose une organisation intérieure moins symétrique, et produit des séries d'individus dirigées obliquément et composées de loges , dont les gränds axes sont parallèles entre eux et chevauchent en quelque sorte les uns sur les autres. Cette disposition est assez analogue à celle qui caractérise le genre Electra de Lamouroux F. CUVIER. — Genre Plagiodonte. 347 Nous donnerons lenom de Mélicérite à la nouvelle division générique que nous proposons d'établir , pour recevoir ce fos- sile , et nous y assignerons les caractères suivans : Génre MÉLICÉRITÉ, Melicerita. Polypes de l’ordre des Bryozoaires, de la famille dés Escha- riens , dont les cellules téguméntaires , disposées sur deux plans adossés, forment des rangées transversalés alternes, et non des rangées longitudinales continnes. Nous ne connaissons encore qu’une seule espèce de ce genre. Nous la nommerons MéricéRiITE DE CHARLEswoRTx, en l’hon- neur du jeune géologue à qui l’on doit les connaissances les plus précises sur le crag à polypiers de Sudbourne, terrain dans le- quel ce fossile se trouve. PLANCHE 12. Fig. 19. Mélicérite de Charlesworth. Cellules grossies 24 fois. PIS RE - Là à 4 CaRacTÈREs du geñre Plagiodonte et description du Plagiodonte des habitations. PragrovontziA ÆDnium. Par M. F.Cuvier, de l’Institut (Académie des Sciences). Un a déjà tenté bien des conjéctures, et soulevé bien dés discussions, dans la vue de reconhäaîtré les grands rongeurs propres aux Antilles, dünt lés voyagéurs ot ‘parlé ‘sous les norhs d'Hutia, de Quemi, de Mohüy(1), de Pilori (>), de Grands- (x) Histoire naturelle et générale dés Indes (espagnoles) , par Gohzalét-Hernandez-Oviedo. (2) Histoire naturelle des Antilles, etc., par Rochefort. — Histoire naturelle des Antilles françaises , ete. , par Dutertre. 348 F, CUVIER, — Genre Plagiodonte. Rals ; de Castor à queue linéaire et cylindrique (1), de Lapin de Bahama (2) etc. A l'exception des Piloris que l’on a claire- rement reconnus, à la description que Rochefort et Dutertre en donnent, dans une grande espèce du genre Rat, noire en des- sus, blanche en dessous, tous ces autres rongeurs de Saint- Domingue, de la Jamaïque, de Cuba, etc., remarquables par leur grande taille, sont jusqu’à ce jour restés cachés sous les traits obscurs, qu'Oviedo, Browne et Catesby en ont tracés, . M. Desmarest, il est vrai, a pensé retrouver l’Hutia (3) ou le Quemi d'Oviedo, dans l'espèce qui a fait le type de son genre Capromys; mais la description que l’auteur espagnol donne de ces animaux, pourrait comme"nous le verrons , tout aussi bien s'appliquer à l'espèce nouvelle de Saint-Domingue dont nous avons à parler, qu’à celle que M. Desmarest a décrite. Ce qui est vrai, C’est que ces anciennes descriptions sont si vagues, si incom- plètes, contiennent si peu de choses, des choses si hasardées sur lenaturel des animaux qu'elles ont pour objet defaire connaître, qu’il n’y a guère d'avantage à les soumettre à une critique scien- tifique, et que dans le cas même, ou par hasard on les rappor- terait aux espèces qu’elles devaient ‘caractériser, l'histoire de ces espèces n'aurait que bien peu à y gagner. Si cependant nous ne pouvons pas dire avec laquelle de ces anciennes espèces la nôtre se confond, nous pouvons du moins affirmer qu’elle n’est ni le Mus subfuscus maximus , cauda…. pilosa ultra trietem albida de Browne , ni son Mus maximuspullus cauda..pilosa, ni son Mus major... cauda truncata, car sa queue est nue, lon- gue et d’une seule couleur. Elle n’est pas non plus le Castor cauda-lineari tereti du même auteur , qui est: aquatique: Mais est-elle l’'Hutia ou le Quemi d’Oviedo , ou bien le Cuniculus Ba- hamensis de. Catesby? C’est ce que. je ne déciderai pas. Ce’ qui est certain, c’est que plusieurs traits de ces animaux lui con- viennent, sans qu'aucun autre la repousse absolument ; d'où résulte que c’est aussi à elle jusqu’à présent, que se rapportent (x) Histoire naturelle et civile de la Jamaïque , par P, Browne. {2) Histoire naturelle de la Caroline, etc. , par M. Cateshy. (3) Mémoires de la Société d'histoire naturelle , tome r, page 43, L Fe. CUvVIER. — Genre Plagiodonte. 349 les caractères sous lesquels ces grands rongeurs nous ont été présentés. En effet tout ce que dit Oviedo de propre à caractéri- ser l’Hutia, c’est qu'il ressemble au Lapin; mais avec une taille moindre , que sa queue et ses oreilles sont semblables à celles des Rats et que sa couleur est d’un gris-brun; or il n’y a rien là qui ne soit propre à Panimal qui fait l’objet de ce mémoire. Son Quemi avait la couleur, la forme et les proportions de l’'Hutia, seulement il aurait été plus grand; car Oviedo ne parle de cet animal que sur ce qui lui en avait été rapporté. Son Mohuy, dont il ne: parle aussi que sur la foi des autres, ne différerait de f'Hutia que par une couleur plus claire et un poil plus rude. Il est évident qu’il y a trop de vague dans l’expression des ca- ractères distinctifs de ces animaux pour qu’on puisse fonder sur eux:des distinctions d'espèces. (1) Le Lapin de Bahama, plus petit que le Lapin de garenne, mais en ayant la physionomie, et ressemblant aux Rats par les pieds, la queue et les oreilles, avec un pelage brun sans mé- lange de gris, ne différerait de l’'Hutia, du Quemi et du Mohuy, etconséquemment du Capromys, et de l'espèce que je vais dé- crire, que par une teinte plns brune du pelage; caractère peu propre, il faut en convenir, à être considéré comme spéci- fique, chez des animaux aussi peu connus. < Tout nous porte donc à éloigner de nous la pensée de cher: cher à déterminer à laquelle de: ces espèces, se rapporte celle qui doit particulièrement mous occuper ici. Ce rapprochement pourra avoir lieu'si le temps répand sur ce sujet des lumières nouvelles; ce qui nous paraît le plus convenable aujourd’hui, c'est de faire connaître notre nouveau rongeur comme s’il n’a- vait pas encore été décrit, LA Nous n'avons malheureusement point possédé cet animal en vie; nous n'avons eu que les notes que M. Ricord qui l’a décou- vert, nous a remises, avec les' caractères et la physioromie qu'il en avait tracés, et dont nous avons pu vérifier l'exactitude sur les dépouilles qui en sont conservées dans les collections du (1) M. Mac-Lea à étaoli la synonymie de ces Er avec les Capromys. Journal zoologreal , lome 1v, page 269. + 350 F. CUVIER. — Genre Plagiodonte. Muséum: mais ces restes quelque incomplets qu’ils soient, pour faire entièremeñht connaitre cette espèce, suffisent pour établir la nature de ses rapports avec les espèces de l’ordre auquel elie appartient, pour montrer les différences et les ressemblances par lesquelles elle se sépare des unes et,se rapproche des autres. Ce grand rongeur est un peu plus petit que le: Lapin: sa lon- gueur du bout du museau à l'origine de la queue; est d’un pied, mais sa queue a cinq pouces ; et il est très bas sur les pieds de derrière, comme sur ceux de devant. Sa physionomie générale est celle des rats, avec une tête moins lourde ; ses oreilles, pro- portionnellement à sa taille, sont fort petites ; ses yeux, situés entre l'extrémité du museau et les oreilles, sont un peu plus rap- prochés de celles-ci; ses narines sont étroites et environnées d’un petit mufle, et sa bouche est de médiocre étendue. Tous les pieds ont cinq doigts ; mais le poûce de ceux de de- vant n’est, comme celui de la plupart des autres Rongeurs, que rudimentaire; ilne se montre guère au-dehors que par le très petit ongle plat qui le termine; les quatre autres doigts sont armés d'ongles minces crochus et assez forts; les deux moyens sont d’égale longueur et plus grands que les deux externes, aussi de longueur égale. Les cinq doigts des pieds de derrière, plus grands que ceux de devant, sont tous armés de forts ongles crochus et comprimés; le pouce est le plus court; vient ensuite le doigt externe; les trois moyens sont à-peu-près d'é- gale longueur. La queue cylindrique est entièrement nue, et rien ne permet de supposer qu’elle soit prenante. Le pelage.est généralement d’un brun-clair qui devient d’un blond jaunâtre aux parties inférienres.:Sur le dos, la croupe , les épaules, les flancs et la tête ; sur toutes les parties supérieures du corps en un mot, le pélage, qui est épais, se compose de poils soyeux, fins, gris dans les trois quarts de leur longueur et fauve à leur extrémité. D'autres poils en assez grand nombre, plus raides et entièrement noirs, dépassent les autres ; et c’est de leur mélange avec les premiers que résulte la teinte générale de l’animal. Les poils les plus nombreux des parties inférieures sont blonds dans toute leur longueur, et les longs poils, plus F. CUViER. — Genre Plagiodonte. 35x rares, y sont devenus blanchätres. Des moustaches bien fournies se montrent de chaque côté du museau, au-dessus des yeux et au-dessous. La queue, entièrement nue, est revêtue d’écailles pentagones très petites, serrées l’une contre l’autre, et répan- dues uniformément sur toute la surface de la peau. On sait que celles de la queue des rats forment des verticilles d’entre les- quels naissent des poils courts et en petit nombre. Ces animaux portent à Saint-Domingue le nom de Rat-Cayes, c’est-à-dire Rat des habitations, d’où nous avons tiré le nom spécifique que nous leur donnons; ils se rapprochent en effet des lieux habités, mais pendant la nuit seulement, car ils fuient la clarté du jour. Le mâle et la femelle se quittent peu. Leur nourriture principale consiste en racines et en fruits, et, comme tous les rongeurs frugivores , ils sont fort bons.à manger, et les Haïtiens, qui en sont très friands, les recherchent si soigneu- sement, qu'ils ont fini par rendre ces animaux très rares. Aux caractères tout-à-fait extérieurs que nous venons de dé- crire, on serait conduit à faire de notre animal une espèce de Capromys. L'étude de son système dentaire et de sa tête osseuse, sans Conduire à l'éloigner absolument de ce genre, montre ce- pendant. assez de différences entre l’un et l’autre pour qu'on doive les séparer génériquement, et c’est par cette considération » que j'ai fait de l’espèce nouvelle qui m'occupe le type dune di- vision générique que-je:nomme PLaGioponte à cause de l’obli- quité,des festons d’émail qui caractérisent la forme de ses dents molaires, et qui n’a encore été observée sur les dents d'aucun . Rongeur, Ces dents sont au nombre de seize : huit à chaque mà- . choire, quatre de chaque côté, et toutes sont privées de racines | proprement dites. À la mâchoire supérieure, elles diminuent de grandeur, par degré de l’antérieure à la postérieure, et toutes … présenteut à la surface de leur couronne deux plis ou festons . d'émail qui se-dirigent obliquement , l'un de la partie antérieure à la postérieure, l'autre de la postérieure à l’antérieure, Le pre- mier nait du côté externe, le second du côté interne de chaque dent, et tous deux s'avancent jusqu’au côté opposé. parallèle ment l’un à l'autre, Les molaires de la mâchoire inférieure ne différent pas autant, pour la grandeur, que celles de Ja mà- 352 F. CUVIER. — Genre Plagiodonte. choire supérieure; les trois premières sont de grandeur égale ; la dernière seule est plus petite que les autres; l’obliquité des plis n’est pas non plus aussi marquée , et il y en a deux qui naïs- sent du côté interne, et un seul du côté externe, lequel est beaucoup moins profond que les deux premiers. Les incisives supérieures ne prennent racine qu’à la base de la prémière mo- laire, et les inférieures s'étendent jusqu’à la base dé la dernière; du reste, elles ne présentent'rien de notable, et elles sont lisses et jaunes. Comparées aux molaires du Capromys, également | privées de racines, on voit que celles de notre animal n’ont rien de l’obliquité des plis qui sont un des caractères des mo- laires du Plagiodonte, et que les supérieures ont deux plis à leur côté interne , tandis que le Plagiodonte n’en a qu'un. La structure de la tête osseuse se fait d'abord remarquer par son allongement, résultant surtout de celui des frontaux et des pariétaux, et par la grandeur des trous sous-orbitaires. Les fron- taux, à-peu-près de même largeur dans toute leur étendue; sont déprimés dans leur partie moyenne, au contraire de leur partie postérieure et des pariétaux qui se relèvent, comme pour offrir une plus grande capacité au cerveau. Toutes les: parties de l’ar- cade zygomatique, mais principalement celles qui se constituent du jugal et de la partie du maxillaire qui circonscrit postérieu- rement le trou sous-orbitaire, sont fort étendues, et les inter- maxillaires se prolongent peu. La mâchoire inférieure se carac- térise aussi par les longues surfaces qu’elle offre à l’attache des muscles et par le prolongement de l’apophyse coronoïde: Ces caractères de la tête osseuse sont, à quelques modifica- tions près, ceux que présentent la tête des Capromys, et comme tout ce qui nous est connu d’essentiel dans l'organisation de notre Rongeur, le rapproche aussi fort intimement de ces ani- maux, nous les considérerons l'un et l’autre comme’appartenant à une même famille et en ‘constituant les premiers types. En effet, il est contre toute analogie de laisser ; comme on l’a fait jusqu’à présent, les Capromys dans là famille des Rats : tout les en ‘éloigne; et si des Rongeurs herbivores pouvaient entrer dans la même famille que des omnivores, ce serait des Equimys, représentés par l’Equimys dactylin, qu'il faudrait les rappro- SURIRAY. — Parasites du lombric terrestre. 353 cher. Et quand nous parlons des Capromys, nous n’entendons indiquer que le Fournerii et le Pilorides ; car il est permis de douter que les espèces désignées par les noms de Prehensilis par M. Pœppig (1), et de Pocyi par M. Guérin (2) soient des Capromys ; nous regrettons fort que ces naturalistes n’aient pas fait connaitre d’une manière complète les caractères des cu- rieuses espèces dont ils ont enrichi la science, et qu'ils n'aient pas prévu les doutes qui naïîtraient inévitablement de leurs des- criptions, bornées aux caractères spécifiques , sur les vrais rap- ports génériques de ces animaux. EXPLICATION, DE LA PLANCHE 17. 1, Plagiodonte mâle, moins de moitié de sa grandeur. 2. Tête de grandeur naturelle, vue en dessus. \ 3. La même vue de profil. 4. Dents molaires de la mâchoire supérieure. 5. Dents molaires de la mâchoire inférieure. Norice sur quelques Parasites et produits organiques du Lombric terrestre pour servir à sa Physiologie, Par M. Surtrary. Ayant pris Connaissance dans les Annales des Sciences natu- relles, décembre 1835, du beau travail de M. Dujardin sur un entozoaire du lombric terrestre, que l’on nomme Proteus tenaz , j'ai bientôt reconnu que c'était le même ver que j'avais rencontré quelquefois parmi les parasites nombreux de ce (1) Journ. of the acad. of nat. scienc. of Philadelphie. Juillet, 1824. tom. 1v. n, 1. (2) Icon du Règne anim, Mammif. , pl. 25 , fig. 2. Magaz. de z:0]., 4° année, 1834, pl. 15, classe première. VI. Zoor. — Décembre, ; 23 354 SURIRAY. — Parasites au lombric terrestre. lombric et sur lesquels javais communiqué un mémoire il y à plus de trois ans, à la société Linnéenne de Normandie. J'ai cru, en attendant une meïlleure dénomination, devoir le nommer Sablier protéiforme, à cause de ses contractions plus fréquentes et surtout par le refoulement assez régulier des granules d’une des extrémités gonflées à l’autre. On dirait d’un courant de sable, comme je tâcherai de l’expliquer plus bas. Malgré les formes bizarres et promptes que cet animaleule prend d’une manière si visible à un grossissement médiocre, ce n’est pas un vrai protée , comme ceux figurés par M. Dujardin dans le tome 4 des Annales, pl. 10; ce ne peut être le Proteus tenax de Muller, qui n’est point parasite. Pour découvrir les vrais Protées, il faut souvent beaucoup de temps et des grossis- semens trés forts, et celui qui nous occupe maïntenant peut être vu même à la triloupe, J'ai toujours observé que les, véritables Protées se meuvent lentement, au lieu que: celui de M. Dujar- din peut avoir la vivacité Boge anguille. Je prends la liberté de soumettre à la Société des sciences naturelles quelques notices sur des parasites et produits organi- ques encore inconnus, du lombric habitant les terres saumâtres aux environs du Havre. Depuis le célèbre Willis (1) qui a donné d’assez beaux dessinsde anatomie du Lombricus terrestris jusqu’à nos jours , plusieurs autres observateurs habiles sesont occupés du mêmeobjet, et ont présenté de nouveaux faits dans diverses publications scientifi- ques que je n’ai pu me procurer (2): ainsi parmi les observations que j'ai l'honneur de soumettreà la Société, celles qui ne parai- traient pas nouvelles serviront à constater les anciennes et l’on peut dire quand il s’agit d'objet aussi délicats, qui ne peuvent ptre bien étudiés qu'avec des instrumens paris guod .abun- dat non vitiat. Quoique le lombric terrestre soit à- DEAD le même par- tout, cependant il diffère par la grandeur, la couleur et la (r) Willis opera f. 11. p.28, 18. Collections académiques f, 7. p, 597. | (2) M. Morren de Gand a publié en latin anatomie du Lombrie Terrestre; parmi ses pa- rasites je n’ai vu défiguré que le Vibrion des intestins. SURIRAY. — Parasites du lombric terrestre. 355 variété des êtres vivans qu'il renferme dans ses viscères et ses fluides. L’inflaence de la terre végétale noirâtre et un peu imprégnée d’eau saumâtre' dans les environs l'embouchure de la Seine, change la couleur de cet annélide qui devient d’un vert glauque et parvient quelquefois à un volume beaucoup plus considé- rable que la même espèce vivant dans les terres argileuses plus élevées et conséquemment moins imbibées d’eau. C'est sur plusieurs individus de telles localités humides que j'ai rencontré les corps organiques microscopiques et les ani- maux parasites qui suivent En faisant une incision longitudinale vers les trois quarts supérieurs du corps, une liqueur incolore s’écouleet contient beaucoup de corpuscules ardoisés, que des observateurs ont nommé rosaces; ce sont des petits globules serrés les uns con- tre les’ autres, renfermés dans une pellicule difficile à recon- naître. Il y a des variétés de ces rosaces d'un assez bel éffet au microscope (1), et on voit qui ressemblent à des Trichodes so- leil (fig: 4). La plus légère crevasse desintestins laisse échapper bon nom- bre devibrions ondoyans, J’ibrio undula, ayant quelque ressem- blance ‘à l’'anguille du vinaigre, mais beaucoup moins d’acti- vité. | D'autres espèces de cette famille se rencontrent quelquefois parmi: les précédens; elles ont presque la forme d'une larve bata- vique-et sont remplies decorpuscules opaques et réguliers (2). Ayant soumis à un grossissement de 225 fois le liquide dans le quel semblaient flotter les instestins, j'ai remarqué qu'il était rempli de myriades de Monades (peut-étre molécules organiques) (fig. 5) qui se balançaient mollement les unes vers les autres sans s'écarter beaucoup, et étaient de temps en temps traversées rapi- dement par une nouvelle espèce de Leucophre avec un crois- santivers les trois quarts antérieurs (fig. 6 et 7). Lesplus petits individus étaient oviformes, en nageant ils tour- (1) V. pl. 18, fig. 1, 2, 3, 4. (2) PI, 18, fig. 8 et 9. 23: 356 SURIRAY. — Parasitrs du lombric terrestre. naient rapidement sur leur axe longitudinal etfaisaient voir clai- rement que des cils vibrans recouvraient toute leur surface. Aux environs du bourrelet des lombrics,renflement très sen- sible au temps des amours , se trouvent agglomérés des petites vésicules blanches sphériques, de divers diamètres, et en nom- bre variable , pour la plupartremplies d’un liquide plus ou moins laiteux et fourmillant d’animalcules spermatiques ; nul doute que ces petits organes ne soient destinés aux fonctions de la reproduction. Mais quel peut être l’usage de ces autres parasites qui remplissent une ou deux des vésicules ci-dessus ? ils sont voisins du cyclidium nucleus, cyclide pepin, mais pointus aux deux bouts (fig. 10), leur corps très simple, d’une grande luci- dité, ne contient rien qui ressemble à des organes reproduc- teurs, point de mouvement. Mais le plus intéressant, selon moi, des parasites du ver qui nous occupe et que l’on ne rencontre que quelqualois est le suivant : Je le nomme Sablier protéiforme ; on peut l’apercevoir avec la triloupe sous la forme d’un point blanc, même à travers les membranes transparentes des vésicules ci-dessus mentionnées. Un grossissement de cent fois environ est suffisant pour le faire bien voir; alors on-reconnaît toutes les formes bizarres et changeantes qui constituent les caractères apparents d'un protée. (1) Les granules sphériques et mouvans dont il estrempli se distinguent aisément à travers des membranes pellucides. La figure 14 le représente en repos,.les figures 11, 12 et 13 dans un changement successif de formes: plusieurs approchent de celle d’un sablier dont le contenu s’écoulérait irrégulièrement (fig. 12 et 13.) Souvent le même individu bien observé offre la paper des contractions bizarres ci-contre en moins d’une minute.Quelque- fois par l'effet d’un resserrement simultané des deux extrémités de cet animalcule, deux courans ‘opposés se rencontrent vers (1) La mobilité des granules internes que l’on rencontre aussi dans les autres protées eon- nus, mais beaucoup plus petits, confirme eette opinion. (V. Protée Dict. des Sc. nat ) DS PRE RES sURIRAY. — Parasites du‘lombric terrestre. 357 le milieu du tube, alors le plus fort fait retrograder l’autre (fig. 13). Quelquefois la même disposition se présente sans qu’il y aitencore decourantétablientre les deux extrémités renflès par la présence des granules. Les fig. rr et 12, montrent les plus forts étrangle- mens qui constituent deux à trois ventres. La fig. 13 n’a pas encore commencé à se contracter, et je soupçonne un suçoir à une de ses extrémités, ce quila rapprocherait des monostomes. En novembre et décembre, lorsque le temps est doux et pluvieux, j'ai surpris pendant le jour des lombrics collés par leurs bourrelets réciproques: au moindre bruit ces vers se sépa- rent avec promptitude. Il n’est pas toujours aisé de les sur- prendre dans leur état d’accouplement : lorsqu'on y parvient, il suffit d'ouvrir le renflement si prononcé de l’un des deux individus, pour faire suinter une liqueur laiteuse dont une très petite portion sur le verre porte-objet et à un fort grossisse- ment, présente le phémonène d’un liquide animé (1). On voit çà et là des masses en forme de tourbillons se portant en divers endroits, ressemblant à des pincées de cheveux mélés,tournoyant dans de l’eau (fig. 15, 16, 17). Après un quart-d’heure environ, le mouvement cesse : alors ayant recours à une combinaison de lentilles grossissant quatre à cinq cents fois en diamètre, on ne découvre plus que des mouvemens partiels, ce sont ceux des myriades de zoospermes du lombric. Leurs corps ressemblent à une ligne droite, un quart ou à- peu-prés de la longueur totale , la queue présente un mouve- ment vif d’ondalation , tandis que le reste du corps paraît en repos (fig. 8.) J'avais pensé que les vers à longues queues , se rencontrant et se mêlant, pouvaient former ces espèces de touffes animales qui nagent en masse avec assez de lenteur et d’irrégularité ; mais cette opinion paraît devoir être infirmée par la présence de ces masses inconnues dans le hquide des mêmes vésicules d’un lom- (x) Spallanzani, (opusculis de ph. vegetanius.) Bouillonnément confus de la semence du chien, du béller. Gleichen avait déjà rémarqué une force motrice inhérente au sperme, une substance spiritueuse qui produisait le mouvement, ete. p. 153, 166, 160, 167. 358 Ducs. — _Ædditioa au mémoire sur les Aranéides. bric très jeune et chez lequel je n’ai pu rencontrer, d’animal- cule de la semence. nf in hote Nuldoute quel’on nerencontre plusieurs autres êtres animés et même de nouveaux. organes dans ce, ver de terre, lorsqu'il aura été plus étudié et avec de meilleurs instrumens. IL faut qu'il soit observé en différentes saisons, âges et terrains. Ænimalculum hoc licet vile: et contemptibile habeatur , organa vitalia necnon et alia viscera et membra divina artificio admirabiliter fabrefacta sortitur. (Willis) EXPLICATION DE LA PLANCHE 18. Parasytes et produits organiques du Lombric terrestre. ADoniTioNs au Mémoire de M. DucÈs sur les Aranéides. (1) $ I. A propos de la circulation du sang ( page 182), ajoutez: « Depuis l’époque où a été composé le Mémoire sur les Ara- néides j'ai fait quelques observations propres à éclaircir ce qui concerne leur circulation. J'ai bien constaté, sur la Mygale aviculaire, que de la partie antérieure du cœur ,partaient deux gros vaisseaux ou du moins un certainement pour chaque pou- mon (2). Ce vaisseau semble s’élargir vers le viscère plutôt que s’y ramifier, de là la coloration uniforme qu’il a pris quand mes iujections ont réussi. De plus, j'ai remarqué que ces. vaisseaux s'ouvrent dans le cœur entre deux lèvres transversales consti- tuées par des plis ou étranglemens dont je n'avais pas encore (x) Nous regrettons que ces additions nous soient parvenues trop tard pour être intercallées dans le Mémoire de M. Dugès , inséré daus notre ayant-dernier cahiér (voyez pare 189 )- (2) Celui des deux qui occupait le fond de la scissure du foie traversée par eux était plus petit, brillant et opaque comme un muscle ; le plus superfciel et le plus gros était évidem- meut creux et membraneux , aplati seulement en raison de sa vacuité. attends mestit fl fée be pucès. — Addition au mémoire sur les Aranéides. 359 bien apprécié la nature ni la disposition ; ; il en est de même des vaisseaux qui s’enfoncent plus en arrière dans la masse viscérale de l'abdomen. Il résulte de là que ce sont évidemment des vais- seaux afférens amenant d’une part le sang oxigéné par les pou- mons, de l’autre, le sang chargé des principes nutritifs fournis par le canal digestif. En effet les deux lèvres musculaires qui bordent et masquent leurs orifices doivent permettre l'arrivée des fluides pendant la diastole et empêcher leur rétrogression pendant la systole. De là la difficulté que j'ai si souvent éprou- vée à faire réussir une injection. C’est le même mécanisme qui, selon MM. Audouin et Milne Edwards, permet au sang bran- chial d’affluer dans le cœur des Crustacés; et c’est le contraire de ce qui avait été énoncé conjecturalement par notre hono- rable compatriote M. Marcel de Serres. Mais comment le sang est-il porté aux poumons? L’Epéire cornue de Walkhenaer me l’a appris ou du moins m'a fourni matière à une théorie fort vraisemblable. Chez cette grosse araignée, la peau de l'abdomen est fort transparente, peu colorée après une mue récente, et alors on voit tout l'abdomen transversalement et obliquement vergeté de ramifications vasculaires très superficielles, partant de toute la longueur des bords latéraux et supérieurs du cœur et de son extrémité postérieure. On les voit moins distinctement sur l’Epéire diadème. Ses innombrables vaisseaux trop minces, trop pellucides pour étre disséqués , se recourbent en dessous eten avant vers les poumons; ils s’élargissent et semblent se confondre à mesure qu’ils s'en rapprochent comme pour con- stituer une lacune parallèle aux grands muscles longitudinaux qui occupent la région inférieure du ventre; cet espace est transparent et rempli de fluide chez le Pholcus. Je crois donc que ces vaisseaux sont des artères fournissant du sang aux vis- cères et dont les rameaux superficiels viennent inoncer le pou- mon d'une masse de fluide qui a besoin de s’oxigéner de nou- veau, qui, se mêle avec celui que le corselet renvoie par son pédicule, et finit par rentrer dans le cœur à travers les veines pulmonaires et mésentériques : le sang veineux proprement dit reviendrait aux poumons par courans comme chez les insectes. Nous sommes entré dans ces longs détails à cause de l'obscu- 360 Académie des Sciences. rité qui régnait dans la science sur ce point d'anatomie et de physiologie comparées. » $ IL. Au sujet de l'émission des fils de soie que les araignées laissent flotter dans l'espoir À ‘ils se fixeront au loin (page 205), ajoutez : « Déjà J. Müller avait, il y à quelques. : années, énoncé la même théorie (Revue bibliographique des Annales des Sc. nat. cahier vir, 1828.) » $ IIT. Au sujet des effets venimeux de la Tarentule (page 213), ajoutez : « Je viens d’en recevoir une d’Alger qui offre tous les ca- ractères de la Lycose narbonnaise, elle est énorme et a au moins 17 lignes des filières aux mandibules; elle m'a été envoyée par M. Guyon, chirurgien en chef. On conçoit que la piqûre d’ane pareille araignée pourvue de grandes vésicules à venin produi- rait des accidens assez graves et beaucoup plus que ceux dont on accuse à tort sans doute les grandes mygales d'Amérique. ANALYSE des travaux anatomiques, physiologiques et z00lo- giques présentés à l’Académie des Sciences pendant le mois de decembre 1836. | Séance du 5 décembre. Rapport de M. Dumériz sur plusieurs mémoires ow notices concernant diverses espèces d'insectes, par M. le docteur RoBINEAU Desvoiny, médecin à Saint-Sauveur ( Yonne ). L'Académie a chargé M. de Blainville et moi de lui rendre compte de sept mémoires relatifs à l’histoire de quelques insectes sur lesquels M. Robineau Des- voidy a eu occasion de faire des observations fort intéressantes. Chacun de ces mémoires est assez détaillé pour éclairer vivement la science entomologique ; mais il nous est impossible de les faire connaître autrement que par, un. abrégé sommaire. Le premier concerne deux espèces d’abeilles (du genre osmie), qui con- NSP RP EN ETRTE — Académie des Sciences. 361. struisent leur nid dans des coquilles vides de colimaçons (elix ) : l’une de ces abeilles maçonnes était connue des naturalistes, quant à son industrie ; maïs ses mœurs et surtout les soins qu’elle prend pour assurer le développement ultérieur de sa progéniture, et pour la préserver des attaques extérieures , n'avaient point été complètement observés. Il y a deux sortes de coquilles choisies par les osmies pour devenir le ré- ceptacle de leur travail; ce sont celles du colimaçon des jardins ( Aelix haspersa), et de la livrée ou rubanée ( helix nemoralis). Le nid construit par la première espèce d’osmie, que l'auteur nomme Heki- cicola , se reconnaît de prime abord, parce que l'entrée que l’on nomme la bou- che de la coquille, se trouve fermée à son orifice par une sorte d’opercule con- stitué par une lame d’un carton composé de débris de végétaux réunis par uu suc gommeux provenant de la salive de l’insecte. Ce couvercle ferme une cavité remplie d’un miel jaunâtre au milieu duquel on trouve une larve sans pattes, qui est celle de l’abeille. Suivant la largeur de l'entrée de la coquille , il y a, soit sur les côtés de cette première loge , soit immédiatement au-dessous, d'autres cloisons papyracées et quelquefois successivement jusqu'au fond de la spire, dix ou douze autres loges ou cellules bien circonscrites , semblables et sans aucun vide. Cependant cette espèce adopte quelquefois une coquille de Y’hélice ruban- née : alors il n’y a que quatre ou cinq cellules construites un peu différemment. La seconde espèce d'Osmie, que l'auteur désigne avec Latreille sous le nom de bicolor, construit spécialement son travail de gésine dans la coquille de l’Ae- lix nemoralis ; mais elle y emploie d’autres matériaux : oa y trouve constam- ment de petits graviers ou des fragmens, soit calcaires, soit siliceux, disposés par couches successives au nombre de quatre ou de cinq, couches séparées en- tre elles par autant de cloisons ou de lames de carton; et c’est au fond seulement qu’on découvre une ou deux cellules au plus contenant chacune également du miel jaunâtre et une larve. L'auteur donne la description détaillée du mâle et de la femelle de ces deux espèces d’Osmie ; et il indique le manège dont elles font usage , soit pour boucher les trous des coquilles altérées, soit pour y transporter les matériaux qu’elles empruntent ou extraient des végétaux. Eu étudiant les inœurs de ces abeilles, dont M. Robineau Desvoidy avait réuni plus de cent nids divers pour suivre les métamorphoses des insectes qu’ils contenaient, il a reconnu d’abord que les larves subissaient leur métamorphose en uymphes en se filant un cocon d’une soie plus ou moins blanche ou jaunûtre. Plusieurs de ces nymphes n'étant pas écloses, il eut aussi occasion de reconaai- tre que leur coque était occupce par plus de deux cents petites larves d'insectes hyménoptères"de la famille des Chalcides, qui se sont changées en nymphes sans filer de cocons. Elles ont produit des £wlophes , ainsi nommés par Geoffroy. H a donné une description très complète du mâle et de la femelle, et il a désigné l'espèce sous le nom d'Eulophus osmiarum. 362 Académie des Sciences. Le second mémoire est destiné, suivant l'auteur, à faire connaître quelques faits relatifs, à l'histoire des Sapyges, genre d’hyménoptères, que Latreïlle et M. Lepelletier Saint-Fargeau soupçonnaient être des insectes parasites, ou En- tomotilles , comme l’un de nous les appelle. C’est ce que vient confirmer M, Des- voidy. Nou-seulement il a trouvé les coques de l'espèce nommée Sapyga punc- tata par les auteurs, dans les nids des Osmies dont nous venons de parler; mais il en a observé les métamorphoses sans pouvoir découvrir les manœuvres que les femelles mettent en pratique pour pénétrer dans la coquille de l'Æelix , afin d'y pondre ses œufs; cependant il a observé le fait sur une autre espèce. Celle-ci est celle que Fauteur nomme Sapyga chelostomæ. On sait que La- treille appelle, Chelostoma un genre d’abeilles À corps arrondi, dont le yentre est garni en-dessous d’une brosse soyeuse, et dont les mandibules sont allongées, ctroites, arquées ou fourchues, C’est dans le nid préparé par un de ces insectes, dans le tronc d’un vieux arbre et au moment où il venait de le quitter, qu’il a observé l’insecte parasite s’introduisant avec promptitude et en sortant avec. un certain air de triomphe. Il a vu cette manœuvre répétée un grand.nombre de fois. L’insecte parasite est une espèce que l’auteur a dû décrire avec soin, parce qu'il croit qu’elle n’a pas encore été désignée par les entomologistes. De ces deux faits observés sur la Saprga punctata, qu'il a’ trouvée dans Je nid des Osmies et de celle gu’il,a surprise dans celui des Chélosiomes , M. Robineau conclut que le genre Sapyge doit être retiré de la famille des fouis- seurs. Le troisième mémoire a pour titre : Sur plusieurs insectes parasites du blaireau. Ayant eu occasion d’assister à une chasse au blaireau, Vauteur fait connaître quelques particularités sur les habitations souterraines et les mœurs de ces ani- maux, ainsi que sur la diversité de leurs alimens ; mais ses observations ont sur- tout été dirigées sur plusieurs insectes dont l’existence semble être attachée à celle de ces mammifères. | | Il a reconnu dans leur estomac et leurs intestins grèles , un grand nombre de larves d’œstres, qu’il présume être celles d’une espèce particulière. Il a ob- . servé sur leur corps divers insectes parasites , une sorte de puce dont il donne la description, ainsi que celle de deux Ixodes ou Tiques, qu’il indique sous les noms spécifiques de mellinus et d’auricularis. Comme l’auteur n’a adressé à l'Académie que de simples descriptions, il nous a été impossible de reconnaître si ce sont véritablement des espèces non décrites jusqu'ici. Îl en est de même d’une sorte de Staphylin que l’anteur appelle Subterraneus. Le quatrième mémoire concerne un insecte à deux ailes dont la larve vit.en parasite dans le. corps d’une abeïlle-bourdon, et que M. Robineau-Desvoidy indique comme appartenant à une espèce nouvelle connue sous le nom de Co- nops auripes. Déjà MM. Audouin et Lachat avaient reconnu l'existence d’une larve et d’une nymphe d’un diptère analogue, dans le corps du même hymé- Académie des Sciences. 363 noptère ; et un jeune naturaliste l’avait vu naître ou apparaître sous l’état parfait dans une boîte, d’ailleurs bien close , qui renfermait plusieurs bourdons vivans. M. Robineau-Desvoidy raconte dans ce mémoire les manœuvres dont il a été témoin au moment où une de ces abrilles-bourdons était poursuivie par l'es- pèce de Conops qui cherchait à déposer ses œufs dans son corps. II suppose que le diptère exerce une sorte de fascination, et voici comme il décrit cette ma- nœuvre. « Le bourdon entrait eu colère, frémissait des ailes, augmentait son bruisse- a ment, comme s'il eut voulu inspirer de Ja terreur; mais; lui-même se trouvait «sous l'influence d’un sentiment qu’il ne pouvait maîtriser. Au lieu de se jeter « sur son adversaire , beaucoup plus petit que lui , au lieu de s’enfuir à la hâte, « il demeurait obstinément sur la place où il était venu d’abord pour recueillir « du miel ; il tournoyait comme sans idée fixe ou sans but, entre les rameaux « de la sauge; tantôt il restait accroche à la tige, et aussitôt le Conops de s’é- « lancer sur son dos et de s'enfuir au plus vite, Cette manœuvre fut exécutée « sept à huit fois sous mes yeux. » L'auteur, a’un coup de filet s’empara du Conops, mais le Bourdon profita du moment pour prendre son vol, de sorte qu’il a été impossible de constater si des œufs avaient été déposes sur lui. M. Robineau signale son observation comme une sorte de preuve que certains insectes seraient doués de même que quelques oiseaux de proie et plusieurs reptiles, de la faculté de fasciner leurs victimes, ou de leur inspirer une sorte de terreur panique. Un cinquième mémoire est une Notice sur un nouvel ennemi de l'abeille domestique ; c’est une espèce d’Asile que Fabricius nomme Diadema. L'auteur raconte qu’il prit d’abord au vol an individu femelle de ce diptère, qui emportait, comme un épervier, une abeille .ouynicre. Cette victime, sans être entièrement privée de la vie; était frappée d’une torpeur &'Ù dune;sorte de paralysie qui l’empêchait de se mouvoir. L'Asile, au momentioù ilavtit.Saisi l'a- beille, lui avait enfoncé dans la tête son suçoir garni de lamés tranchantes e& 77 bablement couvertes d’une salive empoisonnée. L’un-de ces Asiles ainsi chargé de sa proie, après s'être précipité sur ne. partie .du terrain où.se voyaitun ‘trou | s’y enfonça rapidement et disparut aux yeux de l’observateur, dont Ja curiosité se trouva stimulée par l'idée qu'il veuait de rencontrer un diptère fouisseur. Il prit les précautions convenables pour arriver au fond de Ja tanière , où il trouva l’Asile qui venait y déposers a victime. Il devint donc pour lui évident que l’Asile diadème enfouit l'abeille domestique dans des galeries souterraines, où son corps devra servir d’aliment à la larve qui y est déposée. Il renouvela son observation sur trois individus ; mais il n’a pu s’assurer.si cet Asile dépose une ou plusieurs abeilles et plusieurs œufs dans le même domicile. A cette occasion, l'auteur raconte encore! qu’à une époque où il s’occupait d un travail particulier sur les\ Asiles, il observa, daus la collection de M. le comte Dejean, un individu de cette même espèce , de l’Æsilus diadema , portant pour 36% Acadériie des Sciences. indication : fpud Masilias in gallo provincid. Fæmina cum ape mellificé inter pedes. An prœda et latro ? Mais ce document n’offrait qu’une pure et sté- rile conjecture, qui se trouve maintenant vérifiée. Une notice sur une mouche nouvelle qui vit dans les liliacées, et que l’au- teur nomme Æerbina Narcissi, fait le sujet du sixième mémoire. A cette occasion, l’auteur discute les classifications des diptères proposées dans ces derniers temps par les entomologistes allemands, et par l’auteur de l’ou- vrage sur les Diptères du nord de la France. Nous n’entrerons pas dans les dé- tails de cette discussion, ni dans la description de l’insecte, dont il estimpossi- - ble de suivre les détails quand on n’a pas un individu sous les yeux. Ce diptère a été constamment rencontré sur les feuilles des lys, des jacinthes, des fritillai= res, des tulipes, et sur celles du Narcissus pseudo -narcissus. Enfin, dans un septième mémoire, M. Robineau décrit plusieurs espèces de diptères ou de mouches qui vivent dans les excrémens du blaireau , dela chauve- souris et de la belette, insectes que l’auteur désigne comme n’étant pas encore connus des naturalistes. Les détails dans lesquels M. Robineau a dû entrer, ne peuvent intéresser que les personnes qui s’occupent spécialement de cette sorte étude. Ces descriptions et ces mémoires sur les mœurs. de plusieurs insectes, sont généralement importans pour l’entomologie. Nous pensons que l’Académie doit engager l’auteur à les publier; mais il serait à desirer qu'il y joignît des figures qui donneraient plus de prix et d'intérêt à ses recherches et à ses décou- vertes. ae Rapport sur un mémoire de M. Desnates, intitulé : Observations générales sur le genre Bélemnite; par M. ve Brainvirre. Les Bélemnites ont, depuis un très long témps, attiré l'attention des natu- ralistes sous les différens rapports de leur structure, de leur analogie plus où moins éloignée avec les êtres actuellement existans à Vétat vivant; de la distinc- tion et de la distribution des espèces, et enfin de leur position dans les couches de la terre, où elles ont été trouvées jusqu'ici, de manière à en tirer une sorte de mesure géologique. On a senti d'assez bonne heure les nombreux rapports que ces corps ont avec les coquilles des nautiles et des spirules parmi les êtres vivans, et avec les: orthocères véritables que l’on ne connaît encore aujonrd’hui qu'à Fétat ossi, Mais quand on a voulu aller plus loin, et chercher quels pouvaient avoir été les animaux de ces coquilles si différentes de toutes les autres par les cloisons per- . 1 . 1,1 k forées ou siphonées dont une partie de leur cavité est remplie, ou a ete tout naturellement porté à établir la comparaison avec les seiches et les calmars , l'a* nimal des nautiles et des spirules ayant été long-temps inconnu, ou tout au plus fort mal connu ; et comme on a rencontré, dans des couches plus récentes que celles où se trouvent les bélemnites, des corps organisés fossiles dont les rap= Académie des Sciences. 365 ports avec l’os des seiches est évident, en même temps qu'ils ont quelque chose . des bélemnites, l'os de la seiche a été analysé d'une manière plus complète, et | par conséquent plus comparable. On y a en effet reconnu trois parties principa- les: la pointe ou le cône, plus ou moins excavé à sa base, qui la commence en arrière ; les ailes qui l’accompagnent de chaque côté, en s'étendant plus ou moins en avant et s'irradiant sur les bords, et enfin le disque antérieur com- posé d’une partie solide et calcaire, dure et granulense en dessus, tendre et poreuse en dessous , et d’une partie membraneuse, plus ou moins recouvrant et dépassant les bords. On a pu dès-lors établir ou proposer d'admettre qu’une bélemnite n’est qu’un os de seiche, intérieur comme lui, s’accroissant par cou- ches enveloppantes , dont la partie conique aurait un très grand developpement par suite de dépôts successifs, mais sans partie alaire et sans partie avancée cly- péiforme autre que la portion membraneuse de la dernière couche débordant plus ou moius l'ouverture ; avec, cette grande différence cependant , ou avec cette particularité , que la cavité enveloppée par la portion conique est remplie, en plus ou moins grande partie, par une suite de cloisons convexes-concaves, échancrées ou percées à la marge inférieure, et dont l’ensemble, considéré comme un tout , a reçu le nom d’a/véole de la bélemnite. D'après cette manière de voir, les bélemnites se trouvent commencer la série des nombreuses coquilles cloisonnées siphonées, que l’on a désignées sous le nom de spirules, de nautiles et d'ammomites, et par conséquent devoir suivre immédiatement les seiches, qui terminent la première division des animaux mollusques. Tel était l’état de nos connaissances sur ce point deil’histoire des bélemni- tes, par suite des travaux de l’un de nous ( M. de Blainville), et de ceux de MM. Miller, Woltz, etc. , dont le premier a même figuré un calmar ayant dans le dos une bélemnite, et malgré quelques objections qui ne paraissent pas avoir été admises, lorsquz M. de Zieten décrivit et figura des empreintes de corps orgauisés trouvés dans le calcaire de! Solenhaufen , qu’il attribua à la lame car- tilagineuse d’une espèce de calmar, mais que l'on a regardées comme des em- « preintes d’os de seiche, ce qui est évidemment bien plus probable, et ce qu’en “effet M. Ruppell semble avoir mis hors de doute. Quoi qu'’ilen soit, M. Agassiz, qui paraît avoir émis cette opinion l’un des premiers, découvrit en 1834, pen- dant ses investigations sur les poissons fossiles, dans la collection de Mistriss Phlippots , à Lyme-Regis, des échantillons de roches calcaires , dans lesquelles des bélemnites , telles qu’on les connaissait alors, se trouvaient jointes sans dis- continuité avec des empreintes semblables à celles que M. de Zieten considérait comme provenant de la lame cartilagineuse du calmar. _ Cette découverte fut bientôt répandue par M. Agassiz lui-même dans le se- cond cahier de l'Annuaire de Minéralogie et de Géologie, de MM. Leonhard, pour 1835, et ensuite par M. de Férussac, dans une note qu'il crut devoir adresser à l’Académie des Sciences , dans sa séance du 16 novembre de la même aunée , et où il se borne à ajouter ce qui était dès-lors généralement admis et 366 Académie des Sciences. connu , que le genre bélemnite était intermédiaire aux seiches et aux spirules , que la bélemnite était interieure. La note delM. Deshayes, sur laquelle l'Académie nous a chargés, M. Isidore Geoffroy Saint-Hilaire et moi , de lui faire un rapport, et qui lui a été envoyée à-peu-près à la même époque que la lettre de M. de Férussac , ne contient au- cun élément nouveau. Pas plus que celui-ci, M. Deshayes n’a vu les pièces sur lesquelles repose l’assertion do M. Agassiz; seulement, il paraît avoir eu en sa possession un dessin fait par celui-ci ou sous ses yeux, et il l’a copié dans une plañche jointe à sa note, à côte de la figure d’un os de seiche et de celle d’un béloptère, pour montrér les grands rapports de ces corps entre eux, comme l'avait fait l’un de nous dans la première planche de ses observations sur les bé- lemnites. M. Deshayes a joint à sa note une nouvelle analyse comparative de ces coquilles, dans laquelle, plus heureux que ses prédécesseurs, il pense avoir mis hors de doute l'existence des cloisons dans la cavite des béloptères, A ce sujet, et pour, expliquer au contraire leur absence présumée dans les jeunes bé- lemnites, et dans la bélemnite pleine, type du genre Æctinocamax , il suppose que Îles cloisons constituant l’alvéole étaient entièrement membraneusés ou car- tilagineuses , et attachées aux rides plus ou moins régulières qu’on remarque à la base de cette bélemnite; rides que M. Sowerby et depuis lui M. le comte de Munster, ont regardées comme des indices d’altérations, peut-être à tort, suivant nous. ; jh Passant ensuite à la comparaison de ces béloptères avec les orthocères, et de celles-ci avec la bélemnite telle qu’il la conçoit d’après le dessin joint à son mémoire , et qui représente réellement une bélemnite dilatée, dans sa partie terminale, en une sorte d'expansion semblable à un os de seiche ou à une lame de calmar, M. Deshayes admettant que les bélemnites , sinon toutes les espèces , du moins le plus grand nombre, se continuaient par une expansion dorsale très mince et très fragile, ayant à‘peu-près la forme de l’os de la seiche , et pouvant différer en étendue et en forme suivant les espèces, arrive aux conclusions sui- vantes : | 10 L'animal de la bélemnite avait sans doute le dos élargi, le corps, terminé en pointe et garni de nageoires dans toute sa circonférence, comme dans les seiches ; PR 2° IL est probable que sa coquille offrant à-la-fois la combinaison de celles des seiches appartenant aux céphalopodes décacères et de celles des nautiles, c’est-à-dire de céphalopodes sans ventouses, il est bien à présumer que l'ani- mal devait également offrir dans les appendices de locomotion et de préhension la combinaison des caractères propres aux. deux genres d'animaux dont il vient d’être parlé ; k nb El 3° On pourrait eucore, ajoute M. Deshayes ,f au moyen de l'animal de la spi- rule, supposer que celui des bélemnites, malgre qu'il soit cloisonné , a appar- tenu À un céphalopode décacère tout-à-fait analogue à ceux déjà connus, et cette opinion peut être soutenue comme celle déjà avancée; Académie des Sciences. 367 Conclusions qui renferment des opinions dont la dernière a déjà été pro- posée par M. Miller, maïs qui ne sont l’unc et l’autre que de simples hypothè- ses, sans considérations bien nouvelles pour les appuyer, et sur lesquelles il ne nous semble guère possible de porter un jugement sans risquer de compromettre l'Académie, En conséquence , nous avons l'honneur de lui proposer de déclarer que le sujet de la note envoyée par M. Deshayes ne lui paraît pas susceptible : d’un jugement motivé jusqu’à ce que les pièces observees par M. Agassis puis- sent être soumises à l'examen de ses commissaires , ou aient au moins été exami- nées par M. Deshaies lui-même. Tel, était .notre rapport au mois d’août dernier, et que, à défaut d’un ren- seignement que nous croyons nécessaire pour rendre justice à l’auteur d’un mé- moire envoyé il y a quelques années à l'Académie, à-peu-près sur le même su- jet, nous avions retardé de lire à l’Académie. Aujourd’hui nos conclusions nous semblent complètement corroborées par la lecture de l’ouvrage remarquable que M. le professeur Buckland vient de publier sous le titre de Géologie et Miné- ralogie considérées dans leurs rapports avec la T'héologie naturelle. En effet, nous trouvons dans la pl. 44, fig. 7 et 9, représentés avec soin les échantillons de bélemnites observées par M. Agassiz à Lyme-Regis, et nous n’y voyons, comme M. Buckland lui-même, qu’une bélemnite assez complète pour que la partie membraneuse qui formait la véritable loge de l'animal avant la dernière cloison de l'alvéole, ait laissé des traces évidentes, et même, à ce qu’il paraît, avec Ja poche à encre propre à toutes les espèces du grand genre sepia de Linné ; maïs sans qu’on puisse y trouver rien qui soit réellement analogue à une lame cartilagineuse ou calcaire de calmar ou de seiche, telle que la repré- sente la figure donnée par M. Deshayes. Au reste, cette découverte de bélem- nites complètes, c’est-à-dire formées du corps, de l’alvéole et de la cavité mem- braneuse, ou loge de l'animal, était, dès 1830, mentionnée et figurée d’une manière complète dans le mémoire extrêmement intéressant que M. le comte de Munster a publié à Baïrêuth, sous le titre de Mouvelles observations sur les « bélemnites ; et dont M. Boué a donné la traduction dans le premier volume de … ses Mémoires géologiques et paléontologiques. Quant au mémoire auquel nous avons fait allusion plus haut, et dans lequel . on prétendait aussi prouver que la bélemnite , telle que nots la connaissons, est incomplète et qu’elle se terminerait en avant par une large expansion, voici ce que nous pouvons dire à son sujet. Son auteur , M. Henry , bibliothécaire à Per- pignan, ayant rencontré dans un terrain de blue Lias , à je ne me trompe, des bélemnites qui lui paraissaient se prolonger à leur base et sans discontinuité de substance, avec une dilatation clypéiforme assez considérable, envoya à l’Aca- démie un mémoire accompagné de figures , à l'appui de son opinion énoncée ci- dessus. Nommé commissaire pour examiner ce travail , je crus m'apercevoir que _ expansions regardées par M. Henry comme appartenant aux beélemnites, W'éaient autre chose que des morceaux d’une espèce de pinne, commune dans ces mêmes terrains, et qui, par hasard , s'étaient trouvées placées à la base et 368 Académie des Sciences. dans la même direction que la bélemnite. Je fis part de cette manière de voir à l’auteur, qui, sur mes observations, crut devoir retirer son mémoire ; depuis lors, M. Henry ayant continue ses observations, est revenu à sa premiére opi- nion, € j'ai appris de M. Puzos, dont la riche collection de fossiles des ter- rains.anciens est si habilement disposée et si généreusement employée pour l'étude, qu'ilse proposait d'envoyer, à ce sujet , un nouveau mémoire à l’Académie; nous attendrons cet envoi pour examiner de nouveau la question : mais ce que nous pouvons affirmer ;' c’est que l'échantillon adressé par M. Henry à M. Puzos, et que celui-ci a eu la complaisance de me montrer, est indubitablement un mor- ceau d’une espèce de pinne voisine de la pinna subquadrivalwis. Séance du 12 décembre. Recherches anatomiques sur le corps muqueux ou appareil muqueux où ap- pareil pigmental de la peau dans l’Indien charrua, le nègre et lé mulätre, par M. Frouress. Ce Mémoire paraîtra dans notre prochain cahier. Des rapporis de la tératogie avec les sciences anatomiques et zoologiques, par M. Isinore Grorrroi Sr-Hipaire. Dans ce mémoire, l’auteur considère successivement les rapports de la térato- Jogie avec l'anatomie comparée, avec la physiologie générale, avec l'embryologie, et avec la philosophie zoologique ; nous indiquerons succinctement les prin- cipaux résultats auxquels il est arrive. Anatomie comparée et physiolcgie générale. « La tératologie nous offre, dit l’auteur dans chacun de ses innombrables faits un exemple de différences seulement partielles entre des êtres qui, issus dela même.espèce, offrent d’ailleurs hors de la région anomale , une ressemblance qui va le-plus souvent jusqu'à l'identité parfaite. Il suit de là que l'appréciation des différences ; con- sidérées soit dans leur essence , soit dans leur valeur , se trouve. dégagée, dans les comparaisons entre Vétat normal et l’anomalie, de tous les élémens d'incertitude qu’introduit dans lescomparaisons entre deux êtres d’espèces diffé- rentes , la nature seulement analogique de leurs rapports... On pourrait dire de l'étude des organes et des fonctions des êtres anomaux qu’elle offre à l'ana- tomiste une série de dissections toutes faites; au physiologiste , une série d’expériences toutes préparées par la nature, et où les causes d'erreur qui viennent si souvent modifier les vésultats de nos recherches zootomiques, se trouvent presque toutes annulées. » Les faits généraux et les lois de l’organisation que M. Isidore Geoffroy présente comme confirmés par le résultat de ses recherches tératologiques, sont les, suivantes : Ts) et a Ge TRES Académie des Sciences. 369 1* L'unité de composition organique, ou, suivant les expressions moins abstraites qu'emploie M. Isidore Geoffroy , la tendance de l’analogie qui se manifeste au milieu des innombrables variétés de l'organisation. L'auteur après avoir rappelé ici que son père a, le premier, appliqué l'étude des faits anomaux à la démonstration de l'unité de composition , cherche à apprécier dans quelles limites peuvent être invoquées les considérations de ce gcnre. Il les regarde comme pouvant , à l'égard de cette grande question, conduire à des résultats très importans, mais non à des preuves rigoureuses et applicables à l’ensemble du règne animal. « Mes recherches, dit l’auteur, fournissent d’ailleurs la con- firmation la plus satisfaisante , en même temps que le complément des résultats depuis long-temps énoncés par mon père. Obligé , par le plan même de mon travail d’étendre mes recherches, non pas seulement à un plus ou moins grand nombre de groupes arbitrairement choisis, mais bien à la totalité de la série, j'ai trouvé dans l'examen de chacun des genres non encore étudiés sous ce rapport , une preuve de plus à l'appui des idées de mon père. Tous les faits de la tératologie concordent entre eux, et peuvent se résumer dans cette formule générale : variété presque infinie dans les formes et l’organisation des êtres anomaux , mais unité essentielle , analogie constante dans les organes ou au moins dans leurs élémens constituans. » 2° La loi du balancement des organes , également établie par M. Geoffroy Saint-Hilaire père. 3° Cette règle, la plus simple (x) et la plus évidente de toutes, et cependant partout omise, que la variabilité des organes en série croît avec le nombre des homologues; cette règle n’est pas seulement confirmée par la tératologie : c’est d’après l'examen de divers faits tératologiques que M. Isidore Geoffroy l’a indiquée d’abord dans le premier volume de son Æistoire des anomalies, etne l’a étendue que secondairement aux êtres normaux. 4° Le principe de la rénovation des organismes, ou cette loi, également énoncée par M. Isidore Geoffroy dans le même ouvrage, que presque toutes les (1) Si simple même que l’on peut, dit M. Isidore Geoffroy, s’en rendre compte par des considérations purement numériques, et même généraliser celles-ci; circonstance bien rare dans les sciences anatomiques, et assez remarquable par cette extrême rareté, pour qu'il ne soit pas inutile d’insister sur elle. En désignant par l'unité une série normale d'organes, et par » le nombre des organes qui entrent ordinairement dans sa composition, chacun de ces LA LA 1 . . L “ organes sera représenté par —. Si maintenant un nombre a d'organes semblables à ceux de la à - série normale viennent à Ini être ajoutés, ou si un nombre a d'organes normaux en sont re- tranchés par exception, sa série ne sera plus 1, mais elle deviendra dans le premier cas a a a ; x 1 + —, et dans lersecond, 1: — . La fraction — exprime donc dans les deux eas la dif- n ñ n ’ . * , . . a e 9 férence de l'état exceptionnel à l’état ordinaire. Or — a évidemment une valeur d'autant plus [4 faible que le nombre & (nombre des. organes ajoutés ou soustraits à la série) est plus petit, et qu'au contraire x (nombre total des organes de la série normale) est plus grand. VI. Zooz. — Decembre. | 24 370 Académie es Sciènces. fonctions sont successivement exécutées par deux appareils, Pan primitif et transitoire, l’autre défintf, antagonistes l’un de l’autre dans les diverses phases de leur existence, et dont le premier, après avoir coexisté quelque temps avec le second, disparaît ou du moins tombe dans les conditions rudimentaires. 5° La tendance à l’union qui se manifeste si souvent et si manifestement entre les appareïls ou les organes similaires ; principe déduit par M. Geoffroy pèré de ses recherches. sur les monstres doubles, et que M. Isidore Geoffroy confirme présentement par une étude attentive des conditions de la réunion simple des organes chez les individus unitaires. 6° La thcorie des arrêts de développements, dont l'application à Ja tératologie est due surtout à MM. Meckel, Geoffroy Saint-Hilaire père et Serres. a pi Embryogénie. — M. Isidore Geoffroy résume lui-même cette partie de son mémoire dans les termies suivans : « La vérification de la loi du déve- loppement centripète par la tératologie, se posait d'elle-même comme l’un des buts principaux de mes recherches. Le plan de mon travail embrassant la série tout entière des anomalies, je ne pouvais éviter, lors même que je l’eusse voulu, de mettre la nouvelle théorie embryogénique à l'épreuve. non-seulement des faits déjà étudiés par M. Serres, mais aussi de tous ceux qu'il n’avait pu embrasser dans ses recherches partielles. Ainsi m'était ouverte une voie certaine vers la confirmation éclatante. ou l’infirmation d’un principe qui ne pouvait être que vrai?, s’il était d'accord avec tous les faits, faux sil les contredisait. Tel devait être l’un des résultats principaux de mes études tératologiques , et tel il a été. II m'est présentement pèrinis d'affirmer que la tératologie n’est dans son ensemble, qu’un immense corollaire de la loi du développement centripète ; qu’elle ne la confirme pas seulement, mais qu’elle en offre dans son ensemble une démonstra- tion presque aussi complète et plus facile peut-être que l'observation directe. IL. peut sembler exagéré , et cependant il est rigoureusement vrai de dire, que dans cette série innombrable des faits tératologiques , je n’en ai pas trouvé un seul contraire à la nouvelle loi embryogénique , pas plus que je n’ai déduit de celle-ci une prévision contraire aux faits. C’est un accord complet , constant : entre la théorie et l'observation , et tel, que la physiologie pourra le citer comme un de ces cas encore si rares où la précision et la rigueur de ses methodes le cèdent à peine à celles de la physique elle-même. » Zoologie. — « La zoologie et la tératologie, dit l'auteur, sont présentement assez avancées pour que l'utilité réciproque de leur association ne soit pas seule- ment une vérité théorique. Par la transmission mutuelle déjà réalisée de leurs principes les plus généraux , ces deux sciences reposent solidement établies sur des bases identiques , et le nom de zoologie anomale, que les auteurs ont quel- quefois donné à la tératologie, n’exprime plus une simple tendance, mais un progrès accomph. Ainsi, pour la classification , mêmes principes , la subordi- nation des caractères , et la prééminence de ceux que fournit la forme générale ; Académie des Sciences. 371 mêmes résultats, l'existence des groupes vraiment naturels, et la possibilité d’une classification parallélique. » | La subordination des caractères, l'existence de groupes vraiment naturels aussi bien parmi les êtres anomaux , que parmi les êtres normaux , et la pos- sibilité de classer les uns et les autres par séries parallèles, sont des questions que M. Isidore Geoffroy a traitées ayec soin daus le premier volume de son Æistoire des anomalies , et dans divers trayaux déjà publiés; et il se borne à les indiquer ici ; mais il insiste sur le principe de Ja prééminence de forme générale, récem- ment introduit dans la zoologie par M. de Blainville , et encore contesté on du moins négligé per presque tous les zoologistes. Il pouvait me sembler utile, dit M. Isidore Genffroy , il m'était même commandé par le plan de mon travail » de chercher aussi à importer dans la tératologie le principe zoologique de M. de Blainville, et d'établir ainsi entre les deux sciénces un lien de plus. J’ayoue n’a- voir point eu cette pensée , mais telle est la puissance de la méthode naturelle, que ce que je n’avais point cherché , elle m’a conduit d’elle-même à le réaliser complètement. Il se trouve en effet finalement que toutes les divisions primaires que j'ai déduites de l'observation et de l'analyse des faits , à l'égard des monstres unitaires, et par suile, des monstres composés, sont parfaitement identiques avee celles que j'aurais pu déduire immédiatement , et avant tonte étude approfondie, du principe de Ja prééminence des caractères de la forme générale ; et tellement, que ma classification générale des monstres unitaires , faite indépendamment de toute considération étrangère à la tératologie , semble avoir été calquée fidè- lement sur la classification zoologique de M. de Blainville. » Philosophie zoologique. — Cette partie du mémoire de M. Isidore Geoffroy résumé succinct d'idées très générales, est peu susceptible d'analyse: Nous en citerons textuellement plusieurs fragmens. « Dans un autre ordre de considéra- tions , dans l'examen philosophique de ces hautes mais problématiques questions qui forment.comme le couronnementde la science, la zoologie et la tératologie s'unissent de même encore dans une alliance intime , dans une fraternité tour-à- tour profitable à toutes deux. Ainsi la tératologie n’eclaire pas seulement l’origine des variétés de localité et des races domestiques... L'explication elle-même des différences spécifiques ne reste pas entièrement en dehors des enseignemens feconds de l'étude des aromalies. Deux systèmes sont présentement en lutte sur cesujet, l'uu des plus grands qui aient jamais divisé les opinions scientifiques des hommes : la fixité des espèces, leur variabilité sous l'influence des circonstances extérieures qui réagissent sur elles. Le système de la fixité des espèces en d’autres termes, cette hypothèse toute gratuite que les espèces aujourd’hui exis- tantes ont été créées initialement, et se sont transmises immuables depuis leur origine , est encore la base presque universellement admise de la zoologie. La définition de l'espèce , telle qu’elle est presque partout reproduite, est fondée sur cette pure abstraction , et c’est sur la définition de l'espèce que s'élèvent à leur tour successivement les définitions du genre , de la famille et de tous les groupes supérieurs. Il est donc vrai de dire que l’échafaudage tout entier de la 24. 372 Académie des Sciences. classification zoologique repose sur une base bien peu solide ; et presque qu'il est suspendu sur le vide. .. De même qu’une vérité une fois découverte ouvre la voie à d’autres vérités , de même aussi une erreur une fois accréditée dans la science, enfante rapidement d’autres erreurs. Nce, à l’insu peut-être de ceux qui l'ont créée, de l'idée de la préexistence des germes, l'hypothèse de la fixité des espèces est à son tour devenue origine de tous ces abus de la doctrine des causes finales qui , pour la plupart des zoologistes , ont si long-temps tenu lieu de tonte philosophie. Les livres sont pleins de raïsonnemens où la puissance providentielle de Dieu est représentée comme intervenant dans la conservation des espèces, non par ces lois générales d'harmonie qu’elle a posées à l’origine des choses , mais par des soins apportés minutieusement et spécialement à la créa- tion de chaque être. Raïsonnemens absurdes dont le talent de plusieurs écrivains et peut-être aussi ce besoin d'explications qui est une des règles de notre nature, ont pu seuls protéger si long-temps la fragilité ! Que diraït-on d’un astronome qui voudrait substituer à la théorie newtonienne, dans la mécanique céleste , l'hypothèse d'autant de causes et de principes particuliers de mouvemens que les espaces renferment d’astres errans! ... Les faits de la tératologie tendent avec évidence an renversément de toutes ces doctrines et des conséquences secondaires qui s’en deduisent. Non-seulement ils sont inconciliables avec Île principe de la préexistence des germes ‘qui est la prémisse commune de toutes ; mais ils frappent directement chacune d'elles en particulier. » « S'il ne faut chercher, reprend plus bas Fauteur , dans les enseignemens des faits tératologiques ni une réfutation certaine de l'hypothèse de l’invariabilité spécifique, ni encore bien moins l’intelligence complète des relations des êtres avec. leur monde extérieur, il est du moins vrai qu'ils éclairent et aplanissent la voie qui doit conduire la zoologie à Jun et à l’autre de ces progrès. Ils ne proavent pas que ce que nous app#lons espèces sont dans un plus ou moins grand nombre de cas de simples variétés dont l’origine se perd dans la nuit des temps ; mais ils démontrent la possibilité physiologique ; ils indiquent la vrai- semblance de cette thèse hardie de Bacon , de Lamarck , de mon père , et ré- duisent désormais !e problème à ces termes simples : les espèces étant susceptibles de variations , déterminer si elles en ont éprouvé. Ils sont loin de nous donner la clef de ces réactions mutuelles et multiples des organes sur les fonctions et des fonctions sur les organes, des êtres sur leur monde extérieur et de leur monde extérieur sur eux-mêmes; mais ils nous arment d’une sage défiance dans V'interprétation de phénomènes, dans la détermination de causes presque in- finiment complexes , et abaissent les barrières élevées devant les progrès futurs par des sysièmes prématurément conçus. » Recherches sur les rapports qui existent entre les propriétés nutritives de di- verses substances végétales et la proportion d’azote qui entre dans leur com- position ; par M. BoussINGAULT. En dosant l'azote contenu dans les différens fourrages, l'auteur à eu parti- Académie des Sciences. 373 eulièrement en vue de rechercher une base qui pût servir de point fixe pour mesurer comparativement leur faculté nutritive. Depuis long-temps, les agro- nomes les. plus distingués de l'Allemagne et de l'Angleterre ont essaye de ré- soudre cette importante question d'économie rurale ; c’est dans ce but que Thaër et plusieurs autres observateurs ont donné comme résultat de leur expérience, des nombres qui expriment les rapports en poids dans lesquels les différentes es- rèces de fourrage peuvent être substituées l’une à l’autre. Ces nombres sont de véritables équivalens ; ils indiquent , par exemple, que telle quantité de foin ou de racines, peut être remplacée par telle autre de feuilles où de grains, pour nourrir également , soit un bœuf à l’engrais , soit un cheval de labour. « Toutefois, remarque M. Boussingault , eu examinant les équivalens donnés par divers auteurs, On remarque, pour une même substance, des différences souvent très fortes. Il n’en pouvait être autrement : d’abord , il est impossible que les observations qui ont servi à les établir y aient été faites dans des condi- Uons exactement semblables ; de plus, il est fort difficile d'apprécier avec exac- titude leffet favorable ou nuisible que produit sur les animaux, un changement de régime alimentaire, de dire si un Lœvf a augmente en chair, si un cheval a perdu ou gagné en vigueur. Néanmoins , et malgré leur imperfection, ces nom- bres équivalens ont éte utiles, et aujourd’hui encore, ils dirigent les agricul- teurs qui n’ont ni le loisir ni les moyens de s’éclairer par leur propre expé- rience. ; « Toutes les substances végétales qui servent de nourriture aux animaux, ren- ferment une certaine quantité de matières azotées; et l’on sait, en effet, par les beaux travaux de M. Magendie, que des alimens privés d’azote seraient impro- pres à entretenir la vie. Les farines de céréales contiennent un principe analo- ge par sa nature, aux matières azotées d'origine animale. Ce principe, d’abord découvert dans le froment par Beccaria, a êté désigné sous le mom de gluten vegetabile. Plus tard, Rouelle trouva dans la plupart des sucs végétaux une matière coagulable par la chaleur, et offrant sous ce rapport une certaine res- semblance avec l’albumine de l'œuf. C’est cette substance qu'Einhoff a uommée principe végélo-animal, et qu'il essaya de duser, dans les analyses qu'il fitde plusieurs plantes alimentaires. Einhoff pensait , et tout le monde le croyait alors avec lui, que le sucre, la gomme, l’amidon, et le principe végéto-animal, for- maient par leur reunion la partie nutritive d’un végétal; en partant de cette idée, il chercha à comparer la valeur nourrissante de certains végétaux , d’après les diverses quantités de ces matières dosées en masse. A l’époque où Einhoff exé- cutait ses analyses , le fait capital découvert par M. Magendie était inconnu. Au- jourd’hui, il paraît bien avéré qu'une plante qui ne contiendrait avec sa fibre li- gneuse, que du sucre , de l’amidon, ou de la gomme , ne saurait être considé- rée comme aliment; on admet que sa vertu alimentaire réside principalement dans le gluten et l’albumine végetale qui penvent s’y trouver; et tout nous porte à croire ; qu'une substance végétale est d'autant plus nutritive, qu’elle contient une plus forte proportion de principes animalisés, « Nous admettrons donc, poursuit M. Boussingault, que la propriété nour- rissante des fourrages réside dans la matière azotée qu'ils contiennent, et que leur faculté nutritive est proportionnelle à la quantité d'azote qui entre dans leur composition. La suite de ce travail fera voir que les nombres équivalens qui se déduisent de la richesse en azote des fourrages, se rapprochent souvent de ceux qui sont données par des moyennes de résultats pratiques. J’ai tout lieu d'espérer que la table d’équivaleus dressée sur le principe théorique que j'ai éta- bli , remplacera avec quelque avantage celle formée à l’aide des observations des cultivateurs, et que les nombres qui y représenteront les fourrages qui n’ont 374 Acadérnie des Sciences. pas encore été l'objet d’essa's comparatifs, né seront pas infirmés par Péxpé- rience. » Dans mes recherches, je me suis borné À déterminer la quantité d'azote. J'ai négligé à dessein de doser les autres principes. Une analyse complète eût aug- ! menté singulièrement la longueur du travail , sans ajouter beaucoup à son inte- rêt; le ligneux, la gomme, l’amidon, le sucre, qui sont des substances commu- nes à presque tous les végétaux, ayant à quelque chose près la même composi- tion, on eût presque toujours obtenu des quantités semblables de carbone, d'hy- ! drogène et d’oxigéne ; mais j'ai déterminé avec soin l’eau contenue, et la récher- che de l'azote a toujours été faite sur des matières long-temps desséchées à la M température de l’eau bouillante ; on a pu ensuite calculer les quantités respecti- ves d’azote contenues dans les fourrages secs, et dans ceux qui n'auraient pas été desseches, « J'ai cru devoir commencer par étudier le gluten du froment ; ce principe existe dans beaucoup de substances végétales, et ce qu’on désigne sous le nom d’albumine, de caséum des plantes, n’en sont probablement que de légères mo- difications. La composition élémentaire du gluten était d’ailleurs inconnue : on savait seulement qu’il renferme de l'azote. | « Le gluten obtenu par le procéde de Beccaria, est un mélange de différen : tes matières. Selon M. Berzelius, il contient de l’amidon qui a résisté au lavage, de l’albumine , du gluten et un autre principe peu abondant, que l’on a uomme gélatine végétale. Pour obtenir le gluten , on traite par l'alcool bouillant le glu- ten de Beccaria ; on décante et on laisse refroidir. Pendant le refroidissement , h liqueur devient laiteuse , il se dépose de la gomme et un peu de gélatine vé- gétale. On ajoute de l'alcool froid pour être certain de l'entière précipitation de | la gomme ; on filtre et l’on évapore. « Desséché à 100°, le gluten est très cassant , transparent, d’un blanc légère- ment jaune ; il brûle en commençant à se fondre, et én répandant l’odeür que donnent, dans la même circonstance, les matières animales. « Pour dozer l'azote, j'ai fait usage, dans toutes mes expériences, du procédé dé M. Dumas. 1, 0,300 de gluten ont fourni : acide carbonique.. 0,586. Eau. .. 0,205 TI. 0,300. Ni, © 76 10 1100 100 OA" Le lee, Le, 0: e- à Veil CRE | 0,581. . . - 0,203 ce. eube. mm, i | 1. 0,300 ont donne : azote. . . 36,1. Temp: 8° c. Barom. 741,0 T. B. 12°,E MON nn di ie 36,3. Temp. 5° Barow. 730,9 T. B. 12°,5 1. ri. Gaïbone. . .4.1:1:4 ‘6,540 ° :".. 116,535 | Hydrogène. . . .. 4160075 21 7; ‘8366 Ontgenes ns 00 SE PTS SOS Azote. 1,0 MSG ININL NT 1,000 ),000 Cette composition se rapproche de celle de l’albumine animale, telle qu’elle résulte dé l'analyse de MM. Thénard et Gay-Lussac , l'albumine contient Carbone. . . . . 0,529 Hydrogène. . . . 0,075 Oxigène. . . . . 0,240 Azote. . … . 0,157 1,000 Académie des Sciences. 375 L'auteur expose ensuite les procédés au moyen desquels il a détermine la pro- portion d'azote contenue dans chaque espèce de fourrage ; et par suite le nombre qui exprime leur équivalent. Ses résultats sont consignés dans le tableau suivant, en regard de ceux qui ont été obtenus par différens agronomes , d’après des ex- périences d’une nature toute différente. i- EAU AZOTE | AZOTE |, ile AUTEURS perdue dans la dans la | Equivalens | Équivalens ui ont donné SUBSTANCES. ie, di _—— FRERES PRESS Fa quivalens à 100 ©, | dessèchée. | desséché pratiques. Foin ordinaire. ...| 0,112 | 0,0118| 0,0104| 100 roo |Thaer. Trèfle rouge coupé en fleur,......| 0,166 | 0,0217| 0,0156 60 90 DR à sed E esenses. | dissctsses 0.0050 | 208 » Luzerne. ........| 0,166 | 0,0166| 0,0338 75 go |Thaer. Luzerne verte .... 0,0030 | 347 » Fanes de vesces sé- chées. .:......] ‘0,110 | 0,0157| o,dr41 74 83 |Thaer. Paille de froment. .| 0,193 | 0,0030| 0,0020| 520 400 Paille de seïgle....| 0,122 | 0,0020| o,d017| 6rt 400 |rhaer Paille d’avoine. ..,| 0,210 | 0,0036| o,0019| 547 400 k Paille d'orge .....| o,110 | 0,0026| 0,0020| 520 400 Pommes de terre ..| 0,923 | 0,0180| 0,0037| 281 200 |Thaer. Topinambour. ....| 0,755 | 0,0220| 0,0042| 248 205 |Block. Choux pommés ...| 0,923 | 0,0370| 0,0028| 3%r 429 |Thaer. Carotte ..,......1] ‘0,876 | 0,0240| 0,0030 | ° 547 ‘319 |Thaer 300, Mid- leton 338. Betterase. .......] 0,905 | 0,0270| 0,0026| 4oo 397 Einboff, Thaer, Schwatz. Navets. .........] 0,918 | 0,0220| o,0017| 612 607 |Einhoff,Thaer, Mi dleton, Murre. Féveroles. .......| 0,079 | 0,0550| 0,0511 20 " Pois jaunes. , . . ..4| 0,167 | 0,0408| 0,0340 31 80. |Block. Haricots blancs ...| 0,050 | 0,0430 | 0,0408 25 Lentilles ...,....| 0,090 | 0,0440| 0,0400 26 Vesces, .,:.:..:1:,1 0,146 | 0,0513| 0,0437 24 Tourteau de colza.| 0,105 | 0,0550| 0,0492 21 Maiïs.....,.,....| 0,180 | 0,0200!| 0,0164 63 59 Sarrasin.........| 0,125 | 0,0240 | o0,0210 5o Froment.........| 0,105 | 0,0238 | 0,0213 49 27 |Block. Seïgle ..........| 0,110 | 0,0229| 0,0204 5r 33 |Block. Orge ;, ..,.,..1:/ 0,232 | 0,0202 | 0,0176 5g 54 |Einhoff, Block.« Avoine 4........| 0,124 | 0,0222| 0,0192 54 61 |Einhoff, Block. Farine de froment .| 0,125 | 0,0260 | 0,0227 46 » Farine d'orge. .;..| 0,130 | 0,02%0 | 0,0190 55 » » Parmi les substances qui figurent dans le tableau qui précède, il en est qui sont presque exclusivement employées à la nourriture des hommes ; il peut être utile decomparer entre eux ces différens alimens sous le rapport de l'azote qui Sy trouve; c’est pour faciliter cétte comparaison que j'ai formé le tableau sui- 376 Académie des Sciences. vant : je me propose de lui donner de l’extension lorsque mes occupations me le permettront. Je prends pour base la farine de froment, dont l'équivalent sera re- présenté par 100. « Comme les bulbes, les racines et les feuilles peuvent être moulues lors- qu’elles ont été desséchées a 100°, je désigne ces matières sèches par le nom de farine. SUBSTANCES. ÉQUIVALENS. Farine de froment. Froment. . . . Farine d'orge. . Orge. . . Seigle, . . . Sarrasin . : . Mais dt TS Féverolles. . . Pois jaunes. . . Haricots blancs. . Lentilles. its: | Choux pommés blancs. . . !l Farine de choux. . . . . Pommes de terre. . . . Farine de pommes de terre. Carotte ts TL sn ont Farine de carotte, . . . . Navets . . . . Séance du r9 décembre. Rapport de M. Dumerrz sur un mémoire de M. L. Durour ayant pour titre Recherches sur quelques Entozoaires et sur des larves parasites trouvées dans l'intérieur des insectes de l’ordre des Orthoptères et des Hyménoptières- Ge mémoire paraîtra dans notre prochain cahier. ES Rapport sur un mémoire de M. RonnEau Desvoinx , ayant pour titre: Sux des chenilles qui ont vécu dans les intestins de l’homme , quiy ontsubi leur mue et qui en ont été expulsées vivantes par l'estomac; par M. Duuérrz. « Tel est en effet le titre du mémoire qui a été adressé à l’Académie avec quatre de ces chenilles; et sur lequel M. de Blainville et moi avons été chargés de faire le r2pport que nous avons l'honneur de lui présenter. « Voici l'analyse du fait essentiel, raconté par M. Lechin, médecin à Len- gny. Une femme, âgée de 57 ans, était affectée d’une hydropisie de bas-ventre, à la suite d’une fièvre muqueuse. Le trois mars 1836, on lui avaitadministré six gouttes d'huiles de croton tiglium, prises en trois doses égales, chacune à Académie des Sciences. 377 une heure d’intervalle. Dans les matières évacuées par le haut, et sur la nature desquelles il n’est pas douné de renseignemens, il fut reconnu d’abord quatre chenilles vivantes et ensuite dix autres semblables. Deux de ces chenilles furent enveloppées dans du papier par le médecin , qui les emporta chez lui, où il les retrouva agissantes ; mais elles s’échappèrent. Les autres furent adressées à l’un de ses confrères et celui-ci en a transmis sept à M. Robineau , elles étaient con- servées dans l’alcool : ce sont quatre de ces dernières qui ont été soumises à l’ob- servation de vos Commissaires. « M. Robineau a parfaitement reconnu l’indentité de ces chenilles avec celles qui proviennent constamment d’yne espèce de phalène, ou de papillon de nuit, que Line avait désigné sous le nom de Pyralis pinguinalis ; mais dont le nom générique a été depuis changé par Fabricius en celui de Crambus , et en dernier lieu par Latreille, sous la désignation d’Æglossa, à cause de la briè- veté de sa langue. L'histoire du développement de ces insectes étant bien connue ainsi que nous aurons occasion de le rappeler à la fin de ce rapport, M. Ro- bineau suppose que l’origine de ces larves doit être attribuée à la ponte qui en avait #té faite par la mère dans des matières graisseuses alimentaires, et puis in- troduites, sous cette forme , dans la cavité digestive ; que ces œufs éclos là, ont produit des larves qui s’y sont nourries et développées, au point de nécessiter leur mue ou leur changement de peau. « Dans l'opinion où il est que l’Æglossa pinguinalis ne vit pas en societe , il regarde comme une espèce nouvelle celle qu'il a sous les yeux et il en donne une description particulière, sous le nom d'intestinalis. Vos Commissaires se sont assurés que c’est bien la chenille de la première espèce, et que l’auteur s'est probablement abusé en supposant que ces chenilles ont dû se dévolopper dans l'intestin duodénum, opinion qu’il n’a pu établir que sur le récit du méde- cin qui traitait la malade, celle-ci lui ayant accusé une douleur fixe et insup- portable dans la région correspondante à cet intestin. A la vérité, M. Robineau ne croit pas que la présence de ces insectes ait déterminé la nature de la mala- die; mais il est, dit-il, porté à penser que la fièvre muqueuse a été une cir- constance qui a favorisé lanaissance et l’accroissement de ces chenilles; et, toujours dans l'hypothèse que ces larves seraient le produit d’une espèce distincte appelée à ne vivre qu’en société et dans le tube intestinal , l’auteur se demande à quels signes on pourrait reconnaître leur présence et obtenir leur évacuation. I] finit cependant par rester dans le doute en avouant que, dans le cas dont il s’agit, le hasard seul semble avoir déterminé leur expulsion. « Ge mémoire, dans lequel l’auteur est entré dans de très longs détails, que nous avous dù abrèger, présente cependant un véritable intérêt pour l’histoire naturelle et la pathologie, puisqu'il en résulte que M. Robineau Desvoidy a eu occasion de reconnaître des larves ou des chenilles d’une espèce d’aglosse , qui ont été rendues en grand nombre par une femme, à la suite de vomissemens provoqués; que ces larves ont été observées vivantes par un autre médecin, et par plusieurs assistans. Mais rien ne prouve que ces larves ont Cté engendrées 378 Acadérnie des Sciences. par üne éspècé d’aglosse inconnue jusqu'ici, ni qu'elles ont été introduites sous la formerd’œufs ét non de chenilles déjà développées, ni enfin qu’elles avaient déjà subi quelques-uns de leurs changemens de peau, pendant qu’elles séjout- nsient et $e nourrissaient dans le duodénum, où «elles seraient éloses dés œufs déposés dans des alimens avec lesquels ils auraient été ingérés. « Nous concluons cependant quel "observation communiquée par M. Robineau est un fait curieux, qui mérite l'accueil de l'Académie. » s L’Acadcmie sante les conclusions de ce rapport, « Après avoir présenté ces conclusions, reprend le rapporteur , Yos Coimmiis- saires croient devoir rapprocher ici les indications priucipales qu'ils ont trou- vées consignées dans les auteurs, sur les faits relatifs à ces mêmes in- sectes. «Il y a dansles {ces de Stockholm, pour l'année 1731, un mémoire de Rolander sur cette espèce de Pyrale dont il a présenté l’histoire complète ac- compagnée d’une planche qui donne la figure de toutes les circonstances de ses développemens successifs : il a décrit l’organisation de la chenille et en particulier celle de ses stigmates, qui lui permettent de vivre long-temps, et de respirer au milieu des matières grasses , telles que le beurre , la graisse des fritures, le lard , le jus de viande. Il déclare Pavoir très souvent reconnue avec répugnance , dans plusieurs des alimens qui lui étaient servis. (1) « Linaé, dans la deuxième edition de la Faune de Suède publiée en 1761, après avoir rappelé l'observation de Rolander , ajoute (2) : cette chenille fait beaucoup de mal dans estomac de l'homme ; on l’expulse avec de Pinfusion du lichien cumatilis, et dans l’édition du Système de la Nature de Gmelin , il ajoute : on la trouve souvent dans l’intérieur des maisons et des cuisines, plus rarement dans l'estomac de l’homme ; c’est de tous les animaux qui vivent dans les animaux vivans, celui qui est le plus nuisible. (3) « De Géer , dans ses mémoires , a décrit et figuré lé même insecte; mais il a cité À ort comme gppartépant à la même espèce la Teigne du cuir, dont Réau- mur avait $i bien fait connaître l’histoire. (4) « Enfin la partiesynonymiquea été relevée avec exactitude par M. Duponchel, (5) qui a lui-même donné une figure parfaite de cette Aglosse, dans son grand ouvragé sur les lépidoptères de France. (x) Analeët. Transalpin, page 375. Sœpius illam in jusse carnium, et brassicé atqué pisis reperi, nec dicere ausim in cochleari et ore, traduite aussi dans la Collection académique, tom. xI, p. 75. part. étrang. (2) Zn ventriculo humano pessima ; expellenda infuso lichenis cumatilis. (3) Zntrà domos et culinas frequens, in ventriculo humano rarior; est inter viventia intra viventia pessimum, Linne, Système naturel de Gmelin, p, 2523, n. 336. (4) Tome 1, pl. 6, n. re. (5) Tome virr, 2° partie, p. 63, pl. 213, fig. 6 Académie des Sciences. 379 « En dernièreanalyse, vos Commissaires pensent queles chenilles de lÆglossa pinguinalis , peuvent être introduites du dehors avec les alimens gras dans la cavité de l'estomac de l’homme, qu’elles ont la faculté d’y rester vivantes, pen- dant un certain temps; mais que c’est un castout-à-fait fortuit, et que rien ne prouve que ces insectes soient de véritables animaux parasités. » Rapport de M. GrorFrox sur un cas d'hermaphrodisme observé par M. BERTHONNEAU. M. Geoffroy pense que des faits analogues, se trou vent déjà fréquemment repro- duits dans les Annales de la sience,etque toutesles questions qu'ils soulèvent ont êté abondamment traitées dans les écrits sur l’hermaphrodisme publiés récemment par{M. Isidore Geoffroy dans son traité de tératologie; il juge par conséquent inutile d’en entretenir davantage l’Académie. Note sur un cas de monstruosité présenté par un enfant âgé de deux ans ; par M. Haxo, membre de la Société d’émulation du départe- ment des Vosges. Chez cét enfant les os dés membres thoraciques se réduisent de chaque côté à un humérus très court, et qui l’est cependant un peu moins à gauche qu’à droite, Quant à ceux des membres abdominaux, ils paraissènit manquer com- plétement à droite, tandis qu’à gauche, on distingue, à travers lés tégumens, un fémur long d’envirôn 5 pouces, dont l'extrémité inférieure porte le gros or- tëil réduit à deux osselets ; ces osselets sont mobiles l’un sur l’autre mais nôn surle femur. Les deux articulations scapulo-humérales et l'articulation coxo-fémorale droite sont,très mobiles ; et l'enfant les fait mouvoir très rapidement , paraissant s’a- muser du craquement que font alors les os en sortant de la cavité articulaire qui est très peu prononcée. La santé de l'enfant est très bonne, et son développement a été sensiblement le même que celui d’un enfant organisé normalement, La Note de M. Haxo est renvoyée à l'examen de M. Geoffroy Saint-Hi- lâire. Séance du 26 décerñbre. Recherches expérimentales, physico-physiologiques sur la température des tissus et des liquides animaux, par MM. Becquerel et Breschet. (Ce Mémidire paraîtra dans le prochain cahier. ) TABLE DES MATIERES CONTENUES DANS CE VOLUME. MAMMIFÈRES. Caractères du genre Plagiodonte et description du Plagiodonte des habi- = tations. PLacroponTiA Ænivm, par M. F. Cuvier. . . 347 Observations sur les genres Gerboïse et Gerbille, par M.F.Cuvier. (Extrait) 152 Études sur drones par M. Grorrroy -Sainr-Hicaie. (Ex- trait.) +. . fe DA 1 ri mt Lettre de M. op sur une espèce de Canis, . . .. . . .. 156 Observations sur les caractères spécifiques des grands Cétaicées, tires de la conformation de l'oreille osseuse, par M. VANBENEDEN. (Extrait, . 158 Lettre sur la structure des dents, par M. Rrrzius. . . . . . . . . . 155 OISEAUX. Mémoire sur la place que doit occuper dans le système ornithologique le genre Chionis ou Bec-en-fourreau, par M. ne BLarnvirze. Œxtrait. .: 1 04 Recherches sur la marche de lossification dans le sternum des oiseaux, pour faire suite aux travaux de MM. Cuvier et Geoffroy Saint-Hilaire ; par M. F. Laerminier. (Exlrait.) : 44 404. 4 40 4 40 4000407 Note sur le Guacharo de la caverne de Cain (Stealcrnis caripensis Hoümb.), par M. L'Henminier. (Extreit.) . . . . . . . . . . . 60 Lettre sur le même sujet, par M. Rouxzin. . . . , + . . . . « - L REPTILES. Révision de la famille des Anolis, à l'occasion d’un nouveau genre de ce. groupe de reptiles sauricus (acanthiols), par M. Cocrgau. (Extrait.) - 12 Letire de M. Ponrus relative à une pluie de Crapauds. . . . . . . . 57 Enumération de da hs espèces de reptiles de la Barbarie, par M. GEn- ic: FO DUT re COR T Te. «à « à + 8 0 ES Table des matières. POISSONS. Expériences sur la Torpille, par MM. Brcquerez et Brescuer. (Extrait.) Lettre sur-le même sujet, par M. Marreucor. + + + + + + . . . . . Lettre sur le même sujet, par M. CozLapon. . + . . . . . . .‘.. MOLLUSQUES. Rapport sar un mémoire de M. Deshayes intitulé : Observations géné- rales sur le genre Bélemnite, ts M. pe BLAINVILLE. . . . « . . ANIMAUX ARTICULÉS. Mémoire sur l’émigration du Puceron du Pêcher et sur les caractères et l'anatomie de cette espèce, par M. Cm. MoRREN. . _. + . . . . Notes sur les caractères zoologiques du Pulex penetrans, par M. Dai Rapport de M. Dumériz sur plusieurs mémoires ou notices concernant ‘diverses espèces d'insectes, pe M. Rogineau Desvorpy. . . . . Lettre sur l’éducation des vers à soie, par M. Bgauvais. . . . . . Observations snrles Aranéides, par A. Ducès. . . . . . . ; - . . Observations relatives à lAcarus scabiei, par M, Gras. (Extrait.) . . . Du foie des animanx sans vertèbres en général et particulièrement sur celui de plusieurs Crustacés, par M. Duvernoy.. , . . . . . . . Note sur des animaux qui colorent en rouge les marais salans, par M. PAYEN. L D . L . . . . . . . . . . . . v* . © . . . . Examen des Crustacés rapportés de la saline de Marignane, par M. Au- DOUIN. . L2 . L LA La . - LA a L . LA LA . Li LL . . . . L2 L2 . Observations zoologiques sur les Pagures et description d’un nouveau geure de la tribu des Paguriens, par M. Mixxe Enwanps. . . . ANIMAUX RAYONNÉS. Recherches anatomiques, physiologiques et zoologiques sur les Eschares, par M. Mrine Enwanns. , . . . . . .. . . .... ... Observations sur les Polypiers fossiles du genre Eschare par le même. . Note sur un nouveau EE de ji d'os fossiles nomme Mélicérite, par le même. . . . VERTUS eee TRE VE A Recherches sur ie rs Postasieié te par M.Mrran. . . Observations sur les animalcules contenus dans le pus, par M. Donvé. Extr ait. ) je LL L2 . LL . LL L L LL LL e LZ LA . L L LL . . LL . Observations Piholocic: par M. Lesconv. . . . . . . . . . Notice sur quelque parasites et produits organiques du Lombricterrestre, ONE SORT à + 5e à 4 à e à or ee Lettre de M. Durarnix sur les Polypiers fossiles de la CES 5 123 254 255 354 65 129 360 117 15g 122 243 219 226 353 519 382 à able des matières. PALÉONTOLOGIE. Lettre de M. Azex. BronenrarT sur l’existence de fossiles microscopi- ques dans des roches en apparence homogènes. . + . . . . . . . Observations sur des ossemens fossiles découverts dans une assise nou- velle de largile plastique du bassin de Paris, par M. Cuanrzes n'Or- BIGNY. (Extrait.), . … . : Observations préliminaires sur V'écisthats d’Infusoires fossiles el sur hs. profusion dans la nature, par M. ER TS à Lettre de M. Kawr sur le Dinotherium. . . . .: . . d di | dois Note sur qoéiques fossiles de l’Alsace et du Jura, par W. Duvernoy. (Extrait.) . nee D PAU UNS à SU STE WIN TS RES Notesur une tête de NS fossile fragvé dans le grès du Sous-Hyma- dois, par Eos Brnminses "0e Re oc SU UNE MÉLANGES. De l’action du pus sar le sang, par M. Donn£. (Extrait), . . ,: à: . . Recherches sur la strugture de l’encéphale, par M. Gerpy. (Extrait.) . Observations de monstruosités par inclusion, par M. Roux. (Extrait.) Réflexions sur l’'Hétéradelphie, par M. Grorraoy Sainr-Hiraire. . : . Des rapports de la tératologie avec les sciences anatemique et re que, par M. Isinore Grorrroy Sainr-Hicaime. (Extrait) . ba: dei Di De l'influence de la pression atmosphérique, par M. Domsrs Frans (Extrait) , ai as di al Sn ne elite lit ous Sr DT Der, Remarques sur Pélération de la température de la surface du globe pen- dant la période tertiaire , d’après la nature des débris organiques qui s y rapportent, par M. Érar DE PRADINE. , Æschares. Zool. Tom 6. PL 6. Generation des Pucerons / Tom. 6. PL, 7. Zool. un MES. dE 6 AE Ni ETES ons. B. Puce penetrante. ©. Aclque parartte ts Pucer , ’ 2eReraUon « Zool, Tom. 6. PL..8, [ll 1 TELL Ge IL EE x —— ee ; - Li] Eure < Er « & DU D è “ LAID | de, TN dr ne 7 it SEE nt Ste. em Léeonpis ri ee ss. æ € xt > le à ._< ” Va Re j £ : LE .…" Less dhtie . _ Le ns = ... œ 50e ER R SE à 5. ee ‘. en n. des Seiene. nat. 2° Série “chares s ”. Ann. des Science. nat. 2 “Serie Je AGES eme». PRLELET eÙ Ÿ 2 Eschares Li Zool, Tom.6, PL 10, Zool, Tom. 6. PL un. , ESA hares SC Zool. Tom. 6. PL. 12, Ann. des Scienc. nat. 2"Serie. schares &'° E Zool.Lom 6. PL.13. Zool. Lom.6.PL.1 . ur.der Seine nat. 2° Série. AR ‘ T. Cancelle pe. Zool. Tom.6.PL. 15 Foie de la Squlle . RER PO OR PIN TOR QU CPE PPT TT, Ann. des Science. nat. 2° Série I T Ann. des Seienc. nat. 2° Serie Zool. Tom. 6. PL 16. Vers intestinaux . ‘ANQN) J'SUOI)P)IQPY Sop) AUoporbD}, / PP EP D US GO M UE UE EU Le TR PE el NT LE UT 1 20 28 EE NET ES Se AS AA 4 f ‘ | Ne HZ CNT RNNVALT ER SN! biais. y S Wu, L ?/ C4 L CL ( 8 É k e jt AN , 1 ] " LL à 7. MNT \ PA, 7 /} Mn Zool. Tom . 6 PL .18 m1 (61e) 7 il NUE Im \ [4 Gen nm RD À. . se ass Se 00060 Re | ee: RP. 5 TT | F ae à n > TES PR M. ur #6 ET, o ; es À ar ES Xe 2 a vieu El FT CER LEeS Fe PE + pr, s nu Es ; eu k PARA NES KA ‘4 pt PER rte = PC MRE IN TEMANE) : | “ 5 KR mL à . os : : ÿ ; 1 ui ‘à | t * $ $ £ 3 - e 51 ; = # ÿ : : \ à « É AN , ‘ fn ; à é ; * 9 # | Fr à - \ . ” ñ è - Ês ? 5 L, ES Pet PS FT à FE 5 cp vf mu: Tue 7 20 - APE ie FA NUE ELU ‘ra & MO a BE Gr 2 Taser. ETCTETIEENE" Sie Cr COTE RCILIE RS mr S = . = NrErerC Es PENSER EEE RE TETS Lier £. te à eee HE 5 + BRU PEER ne Rrramnranaramte = __— erert RES me : G RCE EEE SE TE Cu smumiminan » pce * Lee = Tnrmisisnmnm rs à Dr tomenes ca amanasen mama 2= : 2 Ponts ns rs Ta 7 DSTI ATTEINTE IT Sites ès let te sitits _—_ 1 Z C2 L - onem ananas à DESCENTE De 0 ! CCE EI Rissnnsmnmermdattmmme Tee mue PPRSETECEPEEEEE TS CELTIELSE LI Puramemmnm sn sms es mnmamnmaneemmmenmtnse Étiarem ses mammmmmes mnt OR Pr nnecrcesenes