test Sites SR RRRE ANNALES SCIENCES NATURELLES. TROISIÈME SÉRIE, ZLOOLOGIE. RE — Paris—Imprimerie de L. MARTINET, rue Migno n 2, quartier de l'Ecole-de-Médecine, 4.D. ANNALES DES SCIENCES NATURELLES COMPRENANT LA ZOOLOGIE , LA BOTANIQUE , L'ANATOMIE ET LA PHYSIOLOGIE COMPARÉES DES DEUX RÈGNES ET L'HISTOIRE DES CORPS ORGANISÉS FOSSILES ; RÉDIGÉES POUR LA ZOOLOGIE PAR M. MEILNE EDWAKDS, ET POUR LA BOTANIQUE PAR MM. AD. BRONGNIART ET J. DECAISNE. Troisième Série. ZOOLOGIE. TOME DIX-NEUVIÈME. PARIS. VICTOR MASSON, PLACE DE L'ÉCOLE-DE-MÉDECINE , 17. 1853. : | rpm wii 2% ] | Agttéros 1 , PE) AK SCENK "x! earmin de bite Mau love trs 41 FA mn otah Lost are épion gati LUCE RE | PET L) à | Modo Un FETE name train MAHSET 07 Deer ( AMEN TON DETLEN ELLE EE 2% smarrosonn da ant 4% on vieiorS 130400% anrtonne ut ETES ANNALES DES SCIENCES NATURELLES. PARTIE ZOOLOGIQUE. REMARQUES SUR LES POISSONS FLUVIATILES DE L'ALGÉRIE, ET DESCRIPTION DE DEUX GENRES NOUVEAUX SOUS LES NOMS DE COPTODON ET TE LLIA, Par M. Paul GERVAIS. Aulant les côtes maritimes de l’Algérie sont riches en belles et bonnes espèces de Poissons, autant les eaux douces de cette partie de l'Afrique sont pauvres en animaux de la même classe. Dans plusieurs circonstances, j'ai essayé de montrer l'utilité qu’il y aurait à introduire dans ce pays quelques unes des espèces alimentaires que nous possédons en France. La distance qui nous sépare du nord de l'Afrique, et l'obligation dans laquelle on se trouverait de transporter au delà de la Méditerranée les Poissons vivants ou leur frai, sont bien loin d’être insurmontables , et, avec quelques précautions, on en triompherait aisément, On peut rappeler à celte occasion que des acclimalations tout aussi diffi- ciles que celles qu'il s'agirait d'entreprendre ici ont été exécutées 6 P. GERVAIS. — REMARQUES avec succès, et cela dans des temps où l’on était bien loin de disposer des moyens avantageux et rapides dont nous pouvons nous servir aujourd'hui. Ce que les Romains ont autrefois opéré, quant au transport de certains Poissons marins, est véritable- ment fort curieux, ét l’on sait que plusieurs espèces fluviatiles, actuellement abondantes en Allemagne , en France, en Angle- terre, etc., ont une origine étrangère. Ainsi la Carpe, depuis longtemps commune dans l’Europe, vient de la Perse, et le Cyprin doré, vulgairement nommé Poisson rouge, a été rapporté de Chine. On sait aussi que le Gourami, autre Poisson de la Chine, a été introduit dans les étangs de l’île de France et de là à Cayenne. Le Gourami (Osphromenus olfax) appartient à la famille des Pharyngiens labyrinthiformes. Nul doute que de semblables entreprises n’obtiennent en Algérie un plein succès, et nous citerons de préférence la Carpe et la Truite parmi les espèces qu'il serait convenable d'y répandre dès à présent, La Carpe réussirait certainement dans les régions basses, et les tor- rents ou les cours d’eau des parties plus élevées conviendraient parfaitement à la Truite, dont la multiplication et le transport ont été rendus si faciles dans ces dernières années. On pourrait encore se demander si les chotts, ou lacs salés de l'intérieur de l’Algérie, ne pourraient pas à leur tour recevoir quelques uns des Poissons qui abondent sur les bords de la Méditerranée , dans les élangs salés qui sont en communication avec celte mer, tels que les Muges, certains Pleuronectes , et d’autres espèces encore. Leur transport à d’assez grandes distances n’est pas impossible, et plusieurs vivent dans des eaux qui sont alternativement douces où salées. Enfin, on pourrait étendre l’expérience à quelques espèces de coquillages propres aux mêmes étangs que les Poissons dont il vient d’être question, comme, par exemple, les Pectens ou Pellerines, les Vénus ou Clovisses, etc.; ce seraient là des essais peu coûteux, et qui de- manderaient bien peu de soins. Comme rien n'indique qu'ils ne puissent réussir, nous croyons ulile de les indiquer , autant dans l'intérêt de la science que dans celui de la pisciculture, aux per- sonnes que leur position met à même de les faire exécuter. SUR LES POISSONS FLUVIATILES DE L'ALGÉRIE. 7 Les détails que nous avons réunis sur les espèces de Poissons, très peu nombreuses encore, que l’on connaît dans les eaux douces de l'Algérie, justifieront peut-être les considérations qu'on vient de lire. A part une espèce de Cyprin signalée dans l’Arrach , et qui a été regardée comme n'étant autre que le Cyprinus auratus ; à part aussi le Brochet qu'on indique dans le lac Felzara, à peu de distance de Bône, mais que nous n'avons pas eu non plus l’occa- sion d'observer, on n’a encore rapporté de l'Algérie que cinq espèces de Poissons fluviatiles, savoir : Trois espèces de BanBEAUx, nommées par M. le profes- seur Valenciennes Barbus callensis, Barbus setivimensis et Bar- bus longiceps ; une espèce d’Arcr, que M. Guichenot a nommée Leuciscus callensis ; et une Anguille bien peu différente de l’An- GUILLE ordinaire. Le même ichthyologiste l’a distinguée sous le nom d’Anguilla callensis. Nous avons nous-même fait connaître, en 1848, sous le nom d’Acerina Zillii, ün Poisson de l’ordre des Acanthoptérygiens et de la famille des Sciénoïdes, que nous con- sidérons aujourd'hui comme devant former un genre à part que nous appellerons Copropow, et nous donnerons dans cette notice la description d’une neuvième espèce algérienne sous le nom de J'ellia apoda. Le TeLria constitue également un genre nou- veau. Ainsi, en admettant comme réelle l'existence, bien probléma- tique cependant, du Brochet dans le nord de l’Afrique, et en comptant comme propre à cette région le petit Cyprin de l'Arrach, qui à élé signalé comme d’origine étrangère , on n'aurait encore recueilli, y compris celle que nous décrivonsici pour la première fois, que neuf espèces de Poissons fluviatiles dans toute l'Algérie. Encore reste-t-il également quelque doute au sujet du Barbus longiceps. 11 est probable néanmoins que de nouvelles recherches feront découvrir quelques autres espèces, mais il n’en est pas moins hors de doute que l’ensemble du pays est très pauvre en animaux de cette classe. Voici d'abord l'énumération de ces neuf espèces avec l’indica- tion des ordres et familles auxquels chacune d'elles appartient, 8 P. GERVAIS. — REMARQUES et le nom des auteurs qui les ont décrites pour la première fois : Ordre des Acanthoptérygiens. 1. Famille des Sciénoïdes : Copropon Zirru, P. Gervais. Ordre des Malacoptérygiens abdominaux. 2, Famille des Cyprinoïdes : CyPriNus auraTus, Bloch. 3. Idem, BARBUS CALLENSIS, Valenciennes, l. Idem, BARBUS SETIVIMENSIS, td. 5 Idem, BARBUS LONGICEPS ? id. 6. Idem, Leuciscus CALLENSIS, Guichenot, 7. Famille des Cyprinodontes : TELLIA ApopA, P. Gervais. 8. Famille des Jjsoces : Esox Lucius? Linné. Ordre des Malacoptérygiens apodes. 9. Familledes Anguilliformes: ANGUILLA cALLENSIS, Guichenot 4. — CopTroDON ZiILLII, Acerina Zillü, P, Gervais, Acad. des sc. et lettr. de Montpr., séances de 1848, p. 36, et Soc. d’agric. de l'Hérault, 1859, pl. 4. — Id., Ann. sc. nal., 3° série, t. X, p. 208. L'espèce de Poisson que je prends pour type du genre Copto- don (4) a la physionomie extérieure des Grémilles (genre 4cerina, Cuvier), et je l'avais d'abord rapportée aux Percoïdes à nageoire dorsale unique ; mais elle s’en distingue par le peu de développe- ment de ses fossettes céphaliques, et surtout de ses dents tout à fait différentes par leur forme de celles qui caractérisent la plu- part des genres appartenant à la même famille. L'os incisif et le maxillaire inférieur, dans son bord dentaire, portent l’un et l’autre une rangée de dents un peu plus larges à leur bord coronal qu'à leur collet, et pour la plupart inégalement bifides. 1 y a dix-sept ou (1) Do xormros, divisé, et »3:us, dent, SUR LES POISSONS FLUVIATILES DE L'ALGÉRIE. 9 dix-huit de ces dents de chaque côté de chacune des mâchoires, et les plus fortement divisées à leur bord coronal sont celles qui approchent le plus de la ligne médiane ou les antérieures; quel- ques unes des postérieures sont au contraire simples. Des deux lobes fournis par la division coronale, l’ivterne, qui est coupé à peu près carrément, est plus fort que l’externe, et celui-ci est subappointi, rejeté en dehorset moins élevé, La même disposition se remarque aux dents des deux mächoires. En arrière de ces dents, on en voit une autre rangée; mais celles-ci sont obtuses, petites, et elles percent à peine la peau, au-dessus de laquelle elles ne s’élèvent pas sensiblement. Les Coptodons manquent de dents vomériennes et palatines, et il est plus convenable de les placer avec les Sciénoïdes qu'avec les Percoïdes. C’est un point sur le- quel j'ai consulté M. Valenciennes. Ainsi qu'il m'en a fait la re- marque, la place naturelle de ce nouveau genre paraît être auprès des Glyphisodons, dans la tribu des Sciénoïdes à dorsale unique et à ligne latérale interrompue. Les autres caractères de la seule espèce que nous connaissions dans le genre Coptodon peuvent être résumés ainsi qu'il suit : Corps plus élevé que celui de la Grémille commune, peu épais ; tête courte; écailles céphaliques descendant au niveau antérieur de l'œil; préopercule non denté; opercule arrondi et non appointi en arrière ; surface coronale des dents en partie colorée en roux ; nageoire dorsale commencant à l’aplomb du bord postérieur de l’opercule, composée de 25 rayons, dont 14 épineux ; ceux-ci faiblement croissants; les rayons mous dépassant médiocrement les épineux en élévation; queue non sensiblement échancrée ; 10 rayons à la nageoire anale, dont 7 mous; 42 rangées verli- cales d’écailles à la partie antérieure du corps, et 25 longitudi- nales. Longueur de l’exemplaire observé 0,08, dont ? centimètres pour la tête, 4 pour le corps et 2 pour la queue; hauteur sous la 0] dorsale, à centimètres, Ce Poisson vit dans les caux des sources artésiennes de la ré- gion saharienne, au sud de Constantine. Nous devons le seul exemplaire que nous en possédions à M. Zill, naturaliste distin- 10 P. GERVAIS. — REMARQUES gué, que nous avous connu à Constantine, Il en avait recueilli plusieurs à Tuggurth. M. Guyon , inspecteur général du service de santé en Algérie, possédait aussi, lorsque nous l’avons vu à Alger, en 1848 , la même espèce, et il nous a écrit depuis lors qu'elle avait été signalée sous un nom différent de celui que nous lui avons donné; mais nous ignorons dans quel ouvrage, et nous ne pouvons par conséquent rien ajouter sous ce rapport aux in- dications synonymiques placées en tête de cet article. C’est du Coptodon Zillii qu'il a été question plus récemment dans une note adressée à l’Académie des sciences de Paris, en octobre 14851, par M. Berbrugger, bibliothécaire de la ville d'Alger. Il y est dit, comme nous l’avions précédemment publié, que cette espèce vit dans les sources artésiennes du Sahara. De plus amples rensei- gnements sur l’origine des eaux habitées par les Coptodons se- raient d’un véritable intérêt pour la science. 2, — CYPRINUS AURATUS? Cyprinus auratus, Bloch. — Valenciennes, ist. nat. des Poissons, t. XVI, p. 75. Ainsi que je l’ai déjà dit, M. Guichenot cite, dans la partie ichthyologique de louvrage publié par la commission scienti- fique de l’Algérie, le Poisson rouge ou Dorade de la Chine, comme se trouvant dans les eaux de l’Arrach, à peu de distance d'Alger. Quoique l'acclimatation du Cyprin doré dans l’Algérie n'ait rien d’impossible, et qu'il soit très facile de l’opérer si elle ne l’est déjà, je regrette de n'avoir pu comparer au véritable Cyprinus auratus, domestique en Europe, des exemplaires pêchés avec cerlitude dans l’Arrach ; et je crois que de nouvelles observations pourront seules trancher la question. Le Cyprinus auratus occupe dans la classification ichthyolo- gique une place voisine de celle des Carpes; mais il rentre, avec un petit nombre d’autres espèces, dans un genre différent du leur, auquel M. Fitzinger a donné le nom de Cyprinopsis. Le caractère principal des Cyprinopsis, par rapport aux véritables Cyprinus, est de manquer de barbillons. SUR LES POISSONS FLUVIATILES DE L'ALGÉRIE. Il d. — BARBUS CALLENSIS. Barbus leptopogon , Agassiz ? — BB. callensis, Valenc., Hast. nal. des Poissons, t. XVI, p. 110. — Guichenot, Partie ichth. de l’explorat. scient. de l'Algérie, p. 93. Le Barbeau de nos rivières d'Europe (Cyprinus barbus de Linné, Barbus fluviatilis des auteurs actuels) est devenu le type d’un genre de Cyprinoïdes dont M. Valenciennes décrit une soixantaine d'espèces dans l'Æistoire naturelle des Poissons, qu'il a rédigée avec Cuvier. C’est à l’une de ces espèces que ce savant ichthyologiste a donné le nom de Barbus callensis, rappelant par là qu'il a recu de la Calle, en Algérie, les exemplaires d’après lesquels il l’a étudiée. Ce Barbeau de la Calle se retrouve dans beaucoup de cours d’eau des possessions françaises , et nous l'avons nous-même rapporté du Rummel, qui coule à Constan- tine, ainsi que de l’Oued-Chedakra, dans lequel versent les sources chaudes d’Hammam-Meskhoutin, situées à 18 kilomètres de Guelma, dans la même province, M. Guyon vient de nous en adresser quelques exemplaires recueillis par lui dans les Zibans, et il y en a dans beaucoup d’autres lieux. Le Barbus callensis paraît fort voisin du Barbus fluviatilis d'Europe, et il appartient coinme lui à la division des Barbeaux pourvus d’un fort rayon denté à la nageoire dorsale. Il est plus facile à distinguer du Barbus caninus du midi de l’Europe (1). C’est sans doute la même espèce que M. Agassiz a désignée par le nom de Barbus leplopogon dans son Prodrome sur la famille des Cyprinoïdes. Une comparaison attentive de ce Poisson avec le Barbeau ordinaire pourra seule nous fixer sur ses véritables caractères. Nous avions cru d’abord pouvoir rapporter au Barbus setivi- mensis, qui diffère d’ailleurs assez peu du callensis, des Barbeaux que nous avions recueillis à Hammam-Meskhoutin ; mais nous (1) On péche le Barbus caninus dans le Lez et dans le Mosson, auprès de Montpellier, et il se vend sur le marché de cette ville. 12 P, GERVAIS. — REMARQUES pensons maintenant qu'il est plus convenable de les attribuer au Barbus callensis lui-même. A l’occasion de ces Poissons, déjà signalés par plusieurs auteurs comme vivant dans les eaux thermales d'Hammam- Meskhoutin, nous rappellerons quelques uns des détails que nous avons donnés en 18/8 sur ces eaux (1). Au moment de leur sortie des différentes sources qui les four - nissent, les eaux thermales de cette remarquable localité accu- sent au thermomètre + 95° centigr. On fait aisément durcir des œufs en les plaçant, pendant un temps convenable, dans ces espèces de chaudières naturelles. On pourrait aussi y amener la viande, les légumes , elc., à leur point de cuisson, et souvent on s’en sert pour échauder les volailles, au lieu de les flamber. Il est inutile d’ajouter qu'on ne trouve en cet endroit aucun animal ni aucun végélal aquatique vivant. Cependant on voit courir sur les cônes d’où jaillit l’eau bouillante, et en des points où le pied éprouve, même à travers la chaussure, un sentiment de vive chaleur, de petites Araignées qui m'ont paru être du genre Lycose; quelques unes s’aventurent même, et cela sans inconvé- nient, à traverser la surface des pelits cratères remplis d’eau chaude que présentent les cônes dont il s’agit. Dans la substance calcaire, également fort chaude, de l’un de ces cônes , que nous percions à coups de pioche pour en faire sortir l’eau bouillante par le flanc, nous avons trouvé plusieurs exemplaires vivants d’un petit Coléoptère de la famille des Hydrophiles, l'Hydrobius orbi- cularis, qui y avaient fixé leur demeure. L'eau, à + 95°, qui sort des différents points de la source thermale d'Hammam - Meskhoutin , perd assez rapidement cette température élevée. Elle n’a déjà plus que 57 degrés dans les vasques du second liers de l’espèce de cascade qu’elles ont for- mée, et l’on commence à y trouver des productions cryptoga- miques ; celles-ci sont en partie recouvertes par un enduit ferru- gineux assez épais. L'eau d’une vasque supérieure à la leur, ayant 63 degrés, n’en montre pas encore ; la blancheur du dépôt calcaire dont celle-ci est formée reste dans loute sa pureté. (1) Acad. des sc, et lettres de Montpellier, séances de 1848, p. 31 à 26. SUR LES POISSONS FLUVIATILES DE L'ALGÉRIE, 15 L'Oued-Chedakra, qui coule au pied de la cascade, recoit, des sources d’Hammam-Meskhoutin, une eau encore fort chaude, et qui élève sa température à 36 et même 40 degrés. Avant de s'être mêlé à l’eau chaude, le Chedakra nourrit divers animaux : des Anguilles, des Barbeaux, ainsi que des Grenouilles vertes et leurs Têtards. Nous y avons aussi observé des Crabes du genre Telphuse(lelphusa fluviatilis), semblables à ceux qui fréquentent les ruisseaux voisins d’'El-Arouch et d’'El-Cantour, le Rummel de Constantine, elc. Ces animaux, et surtout les Poissons, sont exposés, en suivant le cours de la rivière, à passer assez rapide- ment d’une eau à latempérature ordinaire dans une eau bien plus chaude. Dans certains endroits, la main ne supporte qu'avec peine l’immersion pendant quinze ou vingt secondes. Les Pois- sons, et en particulier les Barbeaux, qu'il est facile d'observer à cet égard, n’y vont pas subitement ; beaucoup s'arrêtent même au-dessus du point de déversement de la cascade et ne se hasar- dent pas au-dessous. On en voit cependant quelques uns dans les endroits où l’eau est assez chaude pour affecter désagréablement la main, si on l'y plonge ; mais ils semblent préférer la rive gauche à la rive droite, qui est celle par laquelle les eaux chaudes affluent ; et, quoique le ruisseau ne soit ni large ni profond, ils se tiennent évidemment dans les couches inférieures , qui sont les moins chaudes, plutôt que dans les supérieures. Les Têtards semblent prendre les mêmes précautions. Quant aux Grenouilles, elles préfèrent, dans les endroits chauds, l’ombrage des herbes à l’eau elle-même , et celles que l'on poursuit évitent de plonger aussi longtemps qu’elles le peuvent sans risquer d’être prises. On a signalé, dans la partie chaude du Chedakra, des animaux de très petite taille, doués de beaucoup d’agilité, que l’on a don- nés comme étant de la classe des Mollusques bivalves. Nous nous sommes assuré que ce sont des Crustacés du genre Cypris, comme d’ailleurs l’agilité qui leur avait été attribuée tendait à le faire supposer. Îls vivent en grand nombre parmi les plantes confer- voïdes , dans les endroits de la rivière où l’eau est assez chaude pour que la main ne puisse la supporter sans éprouver un senti ment assez vif de brûlure, Al P. GERVAIS. — REMARQUES L. — BARBUS SETIVIMENSIS. Barbus setivimensis, Valenciennes, Hist. nat. des Poissons, t. XVI, p. 3. — Guichenot, loc. cit. D. — BARBUS LONGICEPS? Barbus longic., Valenciennes, Hist. nat. des Poissons, t. XVT, p. 135. — Guichenot, loc. cit. M. Guichenot a reçu des eaux du Chedakra, auprès d’Ham- mam-Meskhoutin, des Barbeaux qu’il rapporte à cette espèce; mais nous ne l'y avons pas trouvée , et nous devons faire remar- quer que, dans sa courte description, il donne au Barbus longi- ceps d'Hammam-Meskhoutin un rayon dentelé à la nageoire dor- sale, tandis que M. Valenciennes place l’espèce elle-même parmi les Barbeaux à rayon dorsal non denté. 6. — LEUCISCUS CALLENSIS. Leuciscus callensis, Guichenot, loc. cit., p. 94, pl. 7, fig. 2. Le groupe des Cyprinoïdes auxquels on donne le nom géné- rique d’A ble ( Leuciscus, Cuv. }, et que le prince Charles Bona- parte élève au rang de tribu sous le nom de Leuciscins, est carac- térisé par l'absence des barbillons, par la petitesse de la nageoire dorsale et par la nature non muqueuse de la peau, dont les écailles sont superficielles et striées. Il comprend un grand nombre d’espèces et se partage lui-même en plusieurs petits genres. Le Leuciscus callensis en est jusqu’à présent le seul re- présentant algérien. M. le docteur Roudet, aide-major dans l’armée, avec qui j'avais visité en 18/8 les sources d’'Hammam-Meskhoutin, m'a remis plus récemment deux exemplaires d’une espèce de Leu- cisceus qui vit dans l’Oued-Messid, un des affluents du Smendou ; ils ont les caractères distinctifs du L. callensis. SUR LES POISSONS FLUVIATILES DE L'ALGÉRIE. 45 7. — TELLIA APODA. M. le docteur Guyon, que nous avons déjà cité plusieurs fois dans ce travail, et qui a rendu à l’histoire naturelle des services importants par les recherches qu’il a faites aux Antilles et en Algérie, nous a récemment envoyé plusieurs exemplaires d’une petite espèce de Poissons recueillie par lui dans les sources du Tell, au sud de Constantine. C’est un Malacoptérygien de l’ordre des Abdominaux et de la famille des Cyprinodontes ou Pœæci- lioïdes, mais qui manque entièrement de nageoires abdominales. Sous ce rapport il ressemble aux Orestias, genre établi par M. Va- lenciennes en 1839 , et dont ce naturaliste a fait connaître avec détail neuf espèces, dans le t. XVIII de l’Aistoire naturelle des Poissons. Mais les Orestias ont les dents fines et en crochets, tan- dis que les petits Poissons du Tell, qu’on peut leur comparer, les ont à trois pointes dont l'intermédiaire est plus forte que les deux autres. Ce caractère et tout le reste de leur organisation les rap- prochent singulièrement des Lebias et Cyprinodontes , tels que M. Valenciennes les a circonscrits sous ce dernier nom. Le nom générique de T'ellia, que je donne aux Poissons décrits dans cet article, rappellera la partie de l’Algérie qui les a seule fournis jusqu’à présent. Les Cyprinodontes, dont ils se rapprochent tant, sont, comme eux , essentiellement propres à la région circum- méditerranéenne , et l’on en connaît en Espagne, en Sardaigne et en Égypte. Il y en a aussi sur les bords de la mer Rouge et même une espèce aux États-Unis, Voici une description plus détaillée de notre nouveau Poisson : La forme générale des Tellia rappelle celle des Pæcilies et des Cyprinodons. Leur corps est peu comprimé ; leur tête est assez large, et la mâchoire inférieure dépasse très sensiblement la supérieure, ce qui fait que la bouche paraît ouverte obliquement en dessus ; elle est également un peu protractile ; les yeux aussi sont presque supérieurs ; les opercules sont lisses et écailleux, et leurs écailles, ainsi que celles du reste du corps, sont cycloïdes à demi striées ; le dos est arrondi surtout dans sa partie la plus voi- sine de la tête ; il ne porte qu’une nageoire dorsale, laquelle est 16 P. GERVAIS. — REMARQUES située un peu avant le troisième tiers de la longueur du corps ; on lui compte 15 rayons mous, c’est-à-dire multi-articulés , et décomposés chacun en plusieurs rayons secondaires ; elle est de moitié moins élevée que le corps. Les pectorales se prolongent très peu au delà de la moitié du corps. Ainsi que nous l’avons déjà dit, il n’y à pas de nageoires abdominales ; l’anale est sub- arrondie et formée de 13 rayons ; la caudale est également sub- arrondie, et on lui reconnaît 25 rayons, dont les inférieurs et les supérieurs très pelits ; la ligne latérale est à peu près droite ; les dents, placées sur une seule rangée aux deux mâchoires, sont tri- cuspides, à pointe médiane plus forte que les latérales. Il ÿ a deux plaques subarrondies de dents pharyngiennes supérieures en carde. Le plus grand de nos T'ellia apoda n’a que 0",045 de lon- gueur totale, l1 queue comprise. La couleur paraît grisâtre, mais elle est relevée chez plusieurs individus de bandes brunes verti- cales, rappelant celles des Cyprinodon calarilanus et fasciatus. 8. — Esox Lucius? Le Brochet, Esox lucius, Linné, etc. Ainsi que nous l'avons déjà fait remarquer, on nous a signalé ce Poisson comme existant dans le lac Fetzara, mais sans que nous ayons pu obtenir la preuve qu'il s’y trouve réellement. Nous ne le citons donc ici que pour appeler sur lui l’attention des natu- ralistes, Dans le cas où il y aurait véritablement en Algérie des Poissons du même genre que notre Brochet d'Europe, leur com- paraison avec ce dernier devrait être faite avec soin, dans le but de reconnaître s’ils appartiennent ou non à la même espèce. 9, — ANGUILLA CALLENSIS, Anguilla callensis, Guichenot, loc. cit, p. 111, pl. 7, fig. 2, On vend au marché de Bône et dans d’autres lieux de l’Algérie des Anguilles prises, soit dans les eaux douces, soit dans les eaux saumätres et littorales de ce pays. M. Guichenot a pensé qu’elles çonstituaient une espèce différente des Anguilles propres à l'Eu- SUR LES POISSONS FLUVIATILES DE L'ALGÉRIE. 17 rope, et il leur a donné le nom sous lequel nous en parlons ici. Cependant la description qu’il en a faite ne met en relief aucun caractère véritablement spécifique, et d’ailleurs il n’a pas en- core été fait une comparaison rigoureuse entre les Anguilles algé- riennes, celles des îles de la Méditerranée , et celles des parties méridionales du continent européen (1). On peut également faire remarquer que ces Poissons étant aussi bien fluviatiles que marins , puisqu'ils vont frayer à la mer pour revenir ensuite dans les eaux douces, comme nous en avons la preuve par la montée des jeunes Anguilles , il n’est pas impossible que la même espèce ne gagne à la fois les eaux douces qui abou- tissent à la Méditerranée par la côte d'Afrique comme par celle d'Europe. Nous signalons donc ce genre de Poissons comme étant un de ceux qui sont susceptibles de donner lieu à des observa- tions nouvelles pour la science ; et l’on sait d’ailleurs que jusqu’à présent on n’a encore rien recueilli de positif sur plusieurs des points les plus importants de leur histoire naturelle, (1) Les auteurs distinguent quatre espèces d'Anguilles dans la région médi- terranéenne de l'Europe , savoir : 1. Anguilla vulgaris, ou l'Anguille long bec. 2. Anguilla latirostris, Yarrel, où l'Anguille plat bec. 3. Anguilla septembrina, Bonaparte. 4. Anguilla cloacina , Bonaparte , ou l'Anguille pimperneaur. 3° série. Zoo. T. XIX. (Cahier n° 4.) » 2 OBSERVATIONS SUR LE LOMBRIC TERRESTRE, Per M, le D: PONTALLIÉ, Professeur à l’école de médecine de Rennes, On admet généralement que le Lombric terrestre est pourvu d’une bouche à deux lèvres, l’une supérieure avancée en trompe, l’autre inférieure très courte, qu’il s’accouple la nuit dans une cer- taine saison de l’année et seulement à la surface du sol , qu’il fait sa nourriture de la terre elle-même dont il sépare l'humus. La majeure partie des naturalistes lui refusent, au contraire, une trompe, un tentacule et des pénis. Les considérations dans lesquelles je vais entrer démontreront, je l'espère, que le premier et le second segment, pris pour des lèvres , et par suite désignés sous ce nom, ne servent point à la préhension ; que la cavité regardée comme la bouche n’en rem- plit pas les fonctions ; que , bien loin d’avoir fixé au Lombric un temps pour ses amours, la nature lui a donné la faculté de s’ac- coupler dans toutes les saisons; que l’humus , s’il sert à son ali- mentation , n’est pas son unique nourriture ; enfin, qu’il possède une trompe, un tentaculeet, sinon despénis, au moins des organes excitateurs. La trompe du Lombric terrestre est celte partie du canal diges- tif qui occupe l’espace compris entre le 8° et le 7° anneau, la partie appelée lèvre supérieure étant considérée comme le premier seg - ment ; en un mot, c’est le pharynx de la plupart des auteurs. Pour s’en faire une idée exacte, il faut mettre sur le dos le ver tué préalablement en l’imprégnant à plusieurs reprises de quel- PONTALLIÉ. — OBSERVATIONS SUR LE LOMBRIC TERRESTRE. 19 ques gouttes d'alcool un peu concentré , le fixer dans cette posi- tion avec deux épingles placées , l’une dans le 1% segment , et l’autre vers le 20° anneau environ, puis inciser avec des ciseaux, et dans leur partie moyenne, les anneaux compris entre ces deux points, en ayant soin de rapprocher le plus possible de cette partie la branche de l'instrument introduite, afin de ne pas intéresser l'organe que l’on veut mettre à découvert. Après avoir écarté avec des épingles les deux lambeaux qui résultent de cette division , on aperçoit deux renflements : l’un , situé vers le 16° anneau et ouvert par l’incision , est le gésier ou le jabot ; l'autre, que l’incision a respecté, est la trompe , espèce de sac musculeux susceptible de se contracter et de se dilater , ta- pissé intérieurement par une membrane qui ne diffère en rien de celles dites muqueuses , à ouverture infère arrondie et dont les bords sont entièrement libres. Je ne puis mieux la comparer, lorsqu'elle vient à se montrer à l’ouverture antérieure du canal digestif, qu'à la trompe de l'OŒnone brillante de la mer Rouge représentée par MM. Audouin et Milne Edwards à la planche 10 de leur Mémoire sur la classi- fibation des Annélides. Ses rapports avec les deux premiers seg- ments, lorsqu'elle apparaît au dehors, sont encore les mêmes que ceux de la trompe de la Glycère, dont M. Milne Edwards donne là figure dans ses Éléments d'histoire naturelle , avec celte diffé. rence, cependant, que celle-ci proémine bien davantage et est armée de mâchoires comme celle de l’OEnone. Mais ce n’est pas de prime abord que l’animal dirige sa trompe vers l’objet dont il veut s'emparer. Il s’est assuré auparavant, à l'aide d’un autre organe, si cet objet est un de ceux qui peuvent être employés à sa subsistance, et l’organe dont il se sert est pré- cisément le 1‘ segment, celui regardé généralement comme la lèvre supérieure. Ses usages, sa faculté rétractile, qui constitue l’un des princi- paux caractères des tentacules, l’exquise sensibilité dont il jouit et qu'il doit aux deux nerfs assez volumineux qui naissent des gan- glions cérébroïdes et viennent se ramifier dans son intérieur , 20 PONTALLIÉ. — OBSERVATIONS prouvent jusqu’à l'évidence qu'il est le principal organe du tou- cher. Au reste, les fonctions de la trompe comme organe de préhen- sion (1) et celles du 1° segment comme organe du tact , peuvent être vérifiées sans difficulté par l'expérience. En effet, si, dans un temps humide et à la chute du jour , on dirige la lumière d’une lanterne sur la plate-bande d’un jardin où se trouvent des frag- ments de végétaux, comme pédoncules ou feuilles de vigne , de pêcher, etc. , on ne tarde pas à voir un Lombric sortir de sa ga- lerie, ramper sur la terre, porter la partie antérieure de son corps dans toules les directions, en allongeant le 1e" segment , toucher à plusieurs reprises le pédoncule le plus rapproché de lui avec ce segment, faire saillir sa trompe, en envelopper l’une des extré- mités du pédoncule, puis se retirer à reculons et rentrer dans son trou. C’est en réitérant celte manœuvre que ces animaux parviennent à former ces amas de végétaux qui finissent par obstruer l’entrée de leurs galeries et en décèlent la présence. Attire-t-on au dehors ces produits, on s’apercoit que, de l’extré- mité qui a séjourné dans la galerie, il ne reste plus que les fibres ligneuses : tout le parenchyme a disparu, Ouvre-t-on l’animal au moment où il vient de manger, on trouve souvent dans le canal digestif desrestes de son repas, remarque que Montègre avait déjà faite. Enfin, la présence constante de ces Annélides dans les fu- miers, et en général dans tous les lieux où abondent des débris de végétaux morts, vient encore corroborer l'opinion que ce ver emprunte sa principale nourriture au règne végétal. Je n’en crois pas moins, d’après Montègre, des observations duquel on n’a pas assez tenu compte, que le Lombric terrestre puisse se nourrir d'animaux ou de parties d'animaux ; mais je suis loin d’être convaincu que ce soit pour séparer l’humus con- tenu dans la terre et s'en alimenter qu’il avale celle-ci. Il est plus on 2 : : (1) Non seulement elle sert à la préhension des aliments, mais encore c'est dans son intérieur que ceux-ci s’imbibent du fluide qu'y versent les glandes salivaires au-dessous desquelles elle est placée. SUR LE LOMBRIG TERRESTRE, 24 rationnel de penser, avec de Blainville, le seul , je crois, qui ait émis cette opinion, que l’animal avale la terre pour creuser sa galerie. C’est bien probablement dans le même but que le Siponcle nu et l’Arénicole des pêcheurs remplissent de sable leur canal diges- tif, et non, comme on le prétend , pour en extraire les particules animales qui peuvent s’y trouver. Gertes, il ne serait jamais venu à l’idée de personne de considérer comme aliment la terre ren- fermée dans le corps du Lombric, si l’on avait vu cet annélide chercher sa nourriture, s’en emparer et l’emporter dans sa de- meure. Et quoique l’expérience n’ait pas démontré que les choses se passent ainsi pour le Siponcle et l’Arénicole , l’analogie que ces vers marins présentent avec le ver de terre, sous ce rapport qu'ils vivent dans des canaux qu’ils ont creusés dans le sable, au- torise, il me semble, à regarder le fait comme certain. Fabricius, Léo, Montègre et M. Morren ont admis chez le Lom- bric terrestre des pénis ou des organes excitateurs. Le premier a prétendu avoir fait sortir par l’orifice dont, suivant lui, ces corps sont percés, une humeur limpide. Les autres les ont considérés comme de simples organes excitateurs, et l’un d’eux, M. Morren, a émis l'opinion qu'ils pénètrent dans la vulve pendant l’accou- plement. D'un autre côté, Treviranus soutient qu’on ne trouve point de parties sexuelles correspondantes aux vulves ; que ce que beau- coup de naturalistes ont décrit come organes sexuels mâles n’était que des lambeaux de peau , des soies recouvertes d’un enduit muqueux ou des parcelles de la ceinture déchirée ; qu’en supposant même que ces éminences soient de vérilables organes, il est évident qu’elles servent seulement à exciter à l’acte de la fécondation ; enfin , que c’est à tort que M. Morren a cru qu’elles pénètrent dans les vulves pendant l'accouplement , attendu que ces ouvertures aboutissent à des conduits qui n'ont point la moindre analogie avec la structure d’un vagin. Il n’est pas possible de nier l’existence de ces appendices, qui sont au nombre de deux. Chez le Lombric herculéen, ils sont 29 PONTALLIÉ. — OBSERVATIONS situés sous le 26° ou le 27° anneau , sur la même ligne que le faisceau de soies le plus interne. Le plus souvent ils occupent le milieu du segment; parfois cependant ils se trouvent sur le bord ; d’autres fois, enfin, ils sont placés l’un au centre et l’autre sur le bord du segment. Chez le Lombric trapézoïde, ils appartiennent tantôt au 29+, tantôt au 30° segment. Le premier cas est, pour ainsi dire, une exception. Lors de mes premières expériences, il m’arrivait quelquefois de n’en trouver qu’un seul ou même pas du tout, ce qui tenait évidemment au procédé dont je me servais; car, depuis que j'emploie celui de Montègre, je ne me rappelle pas qu’il me soit arrivé une seule fois de ne pas les rencontrer. Ce procédé consiste à prendre un couteau dans chaque main, à couper en même temps chaque lombric au delà des parties accouplées , et à plonger celles-ci dans l'alcool immédiatement après la section. On remarque alors : 1° Dans un mucus plus ou moins sale, masquant en grande partie ou en totalité les organes extérieurs de la génération , de petits flocons blancs qui ne sont autre chose que des spermato- zoïdes ; 20 Une turgescence très marquée des deux lèvres de la vulve, lesquelles, dans beaucoup de cas, présentent une belle teinte ro- sée, et, dans quelques autres , une vive coloration rouge par places ; 30 Les appendices, de forme ovalaire, non introduits dans les vulves, mais tellement rapprochés de ces ouvertures et leur cor- respondant si exactement, qu’on ne peut conserver le plus léger doute sur leur introduction pendant l’accouplement. Au reste, la douleur violente résultant des blessures faites dans un pareil mo- ment rend suffisamment raison du retrait de ces appendices sur les fonctions desquels Léo, Montègre et M. Morren ne paraissent pas s'être mépris. Si l’on n’a voulu parler que des Lombrics herculéen et trapé- zoïde, on a eu raison d'avancer que les vers de terre ne s’accou- SUR LE LOMBRIG TERRESTRE. 23 plent que la nuit et à la surface du sol; mais rien ne prouve qu'il en soit ainsi des autres espèces. Pour mon epmpie, je n'ai jamais rencontré dans cet état que ces deux lombrics , et constamment en plein jour , jusqu’à dix et onze heures, et même jusqu'à midi, tandis qu’il m'est arrivé une fois de trouver, au milieu d’un tas de terreau , deux petits Lombrics , munis de leur ceinture, dans un accouplement si parfait, qu’à la première vue je crus avoir devant moi un cas de monstruosité. Ce ne fut qu’en les séparant que je reconnus mon erreur. Par conséquent, l’accouplement des Lom- bries n’a pas lieu seulement la nuit, et, parmi ces vers, il en est qui s’accouplent ailleurs qu’à la surface du sol. Je me suis assuré aussi que l’accouplement des Lombrics her- euléen et trapézoïde peut s’effectuer en loute saison , et qu’une seule cause , la sécheresse de la terre occasionnée par le froid ou par la chaleur, peut y mettre obstacle ; mais, chose assez remarquable, jamais, sur plus d’une trentaine de couples, il ne m'est arrivé de constater le croisement d’une espèce à l'autre. Les testicules des vers de terre ne communiquent pas toujours entre eux. Cette disposition, qui m'a semblé exister chez les Lom- brics herculéen et trapézoïde, se remarque surtout chez celui qui est si commun dans le terreau, et dont les teintes jaune sale lui donnent un aspect repoussant. Ces organes sont très aiiongés , piriformes, mais un peu évasés vers l'extrémité, qui se termine à la peau où existe une ouverture que j'ai bien distinguée au mi- croscope du côté de la face externe. Pendant que j'examinais cet orifiee externe des testicules sou- mis à une légère compression, il se passait à l’intérieur de ceux-ci le phénomène suivant : Le corps qu’ils contenaient, de même forme qu'eux, et à une certaine distance de leurs parois, se con- tractait et s’allongeait alternativement en décrivant une spirale. Il en résultait qu’il occupait tantôt seulement la partie la plus large du teslicule, tantôt cette partie et le pédicule en même temps. Les testicules, comprimés davantage , laissèrent_ échap- per à travers leurs parois déchirées dé nombreux spermato 94 PONTALLIÉ. — OBSERVATIONS SUR LE LOMBRIC TERRESTRE. zoïdes très vivants, doués d’un mouvement ondulatoire qui explique le phénomène dont je viens de parler. Un autre fait encore plus curieux , que j'ai observé aussi au microscope, sur une portion d’ovaire d'un Lombrie dont je m'étais emparé pendant qu’il était encore accouplé est celui-ci : de nom- breux spermatozoïdes, doués d’une grande agilité, faisaient tous leurs efforts pour pénétrer dans des ovules que renfermait celte portion d’ovaire. Des naturalistes croient à l’invagination du testicule dans l'ovaire chez le Lombric terrestre ; mais quand même j’admet- trais avec eux que les organes que je considère comme des tes- ticules ne sont que des vésicules séminales, aucun des Lombrics que j'ai étudiés ne m'ayant jamais rien présenté qui rappelât cette invagination, il me serait impossible de partager leur opi- nion, Dans tous ces animaux, les testicules n’adhéraient point aux ovaires, disposition qui doit exister aussi chez le Lombric géant, si l’on s’en rapporte à la figure 1" de la planche 9 du Mémoire de Dugès sur les Annélides abranches. Ne serait-ce pas la présence des spermatozoïdes introduits dans les ovaires pendant l’accouplement qui aurait donné l’idée de cette invagi- nation ? RECHERCHES SUR L'ARMURE GÉNITALE FEMELLE DES INSECTES NÉVROPTÈRES (1), Par M. le D' LACAZE-DUTHIERS. L'ordre que nous allons maintenant étudier est certainement l’un des plus hétérogènes de la classe des Insectes ; aussi quelques naturalistes ont-ils proposé de former avec les principaux genres qui le composent des ordres nouveaux, Cela doit faire prévoir de nombreuses variétés de formes dans l’armure génitale. Toutefois, sans nous arrêter à toutes les espèces qui présentent des différences, nous nous contenterons de prendre trois types distincts, l’un très complexe, l’autre très simple, un intermédiaire. Réduit à ces pro- portions , l’ordre des Névroptères nous fournira des preuves encore très convaincantes à l’appui des idées que nous cher- chons à développer ; nous verrons mieux que partout ailleurs quelle est la composition de l’abdomen, et quels rapports ont avec lui les orifices de la génération et du tube digestif. Les exemples que nous avons choisis sont, pour les types complexes, l’Æsna maculatissima, le Calopteriæ virgo; pour les simples, les Libel- lules, en particulier la depressa ; enfin, pour les intermédiaires, la Panorpa germanica et la communis. S I. — Types complexes. Æ5snes ; Agrions. On voit sous la face inférieure de la dernière portion de l’ab- domen de l’Æsna maculatissima une fente longitudinale , limitée par deux valves latérales, rappelant exactement le même fait observé sur les Phytocores. Ici, comme là, en pressant légère- ment l’animal, on fait sortir de cette fente une partie cornée, (4) Voyez les premiers Mémoires publiés en 4849, 4850 et 1852, 26 LACAZE-DUTHIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE courbée, que les études auxquelles nous nous sommes déjà livré font bientôt reconnaître pour une tarière. Comparé à la longueur de l'animal, cet oviscapte , décrit par Réaumur et les auteurs qui l'ont suivi, est très petit, très court. Assez épais et fortement corné, il offre une grande ré- sistance; son aspect seul indique ce caractère; son étendue n'excède pas celle de l’urite auquel il correspond; aussi ne dépasse-t-il pas l'anus, et ne s’avance-t-il pas sous l’abdomen , vers le thorax, comme nous l’avons fréquemment remarqué. Vu par le dos, l’Æsne ne paraît pas être armée d’une tarière. Tous les tergites de l'abdomen se ressemblent; il n'y a aucune différence entre eux, si ce n'est dans le volume qui varie avec le point où l’on examine l'Insecte, Quelle est la composition de la tarière de l'Æsna maculatis- sima ? Après les nombreux détails qui ont précédé , les analogies et démonstrations qu'il nous a été donné de faire sentir et de donner , il paraît inutile d’une part d'insister sur l'emploi de la nomenclature introduite dans nos études, et de l’autre de décrire chaque pièce avec les mêmes développements que dans les ordres précédents ; nous dirons donc que la tarière des Æsnes se compose absolument des mêmes pièces que celles des Hymé- noptères, des Orthoptères et des Hémiptères. Il ne nous restera qu'à signaler les différences qui séparent l'organe de ceux-ei d'avec les instruments de ceux-là. Nous avons dit que, dans les armures génitales femelles, les pièces qui semblent conserver le plus de fixité sont celles qui composent la partie tergale : eh bien , dans les Insectes qui nous occupent en ce moment, le tergite, l’épimérite et les tergorhabdites, sont d’une évidence extrême ; il n’y a qu’à sépa- rer de l’armure les urites abdominaux pour voir tout de suite l’analogie qui existe entre les pièces tergales de l’oviscapte d’un Névroptère et l’aiguillon d’un Ichneumon. Nous devons indiquer toutefois quelques particularités : le ter- gite, très long, en forme de demi-cylindre, ressemble à tous les tergites de l’abdomen ; il s’unit avec eux largement par ses deux extrémités, et descend sur les côtés assez bas pour s’articuler DES INSECTES NÉVROPTÈRES. 27 dans une étendue égale à sa longueur avec une autre pièce, l’épisternite. L'épimérite, irrégulier, petit, comme cela arrive le plus sou- vent, est caché entre l’épisternite en bas et le tergite en haut; soudé en avant avec le tergorhabdite, il est articulé par son angle moyen et postérieur avec la partie sternale , sur laquelle il peut exécuter des mouvements assez marqués. Le tergorhabdite offre une forme analogue à celle que l’on trouve dans les autres Insectes ; courbé à son extrémité adhé- rente pour se diriger vers l'anus , il présente cette différence remarquable que sa base, considérablement dilatée, se rapproche de celle du côté opposé, et forme avec les pièces précédentes un cercle complet, dans l'intérieur duquel se trouve la partie ster- nale. Son extrémité libre porte quelques dents cornées qui n'existent pas toujours ; solide et résistant, il est assemblé avec le reste de l’armure d’une manière peu intime, car on l’en détache avec facilité. La portion sternale se reconnaît aisément; elle se compose des mêmes pièces, disposées de la même manière que dans les ordres précédents. Le sternite est joint par deux supports, ou branches de bifurcation , aux épisternites, et ceux-ci portent des sterno- rhabdites. Le premier, bifide dans toute sa longueur, moins volumi- neux, mais aussi long que le tergorhabdite, corné comme lui, porte des dents très évidentes, placées sur son bord inférieur, un peu en dehors, et dirigées en avant. Quand on sépare les diffé- rents éléments de l’armure, on trouve toujours deux parties très distinctes l’une de l’autre résultant de la division longitu- dinale du sternite. Son bord inférieur est assem blé avec le bord supérieur du rhabdite; il est uni à l’épisternite par une partie coudée très courte. Celui-ci a une forme irrégulièrement triangulaire, dont le côlé le plus long, le plus régulier, est parallèle à la tarière propre- ment dite : c’est ce bord qui, libre et rapproché de celui du côté opposé, forme la fente d’où l’on fait sortir la tarière quand on presse le corps de l'animal. L’angle antérieur, plus ou moins aigu 28 LACAZE-DUTHIERS, — ARMURE GÉNITALE FEMELLE ctrésistant, est soudé au support du sternite ; le postérieur, tron- qué, loge l'extrémité adhérente du rhabdite sternal, et le supé- rieur, moyen, en forme d’apophyse, doit servir à des insertions musculaires. Le côté du triangle étendu entre l’angle antérieur et le moyen ou supérieur présente au milieu de sa direction une échancrure articulaire qui recoit l’extrémité postérieure de l’épi- mérite. L'épisternite s’articule largement avec le tergite, qu'il égale en longueur, mais à l’aide de membranes lâches qui per- mettent aux deux pièces un jeu assez étendu. Le sternorhabdite est un petit appendice terminé par un bou- quet de poils très courts, qui n’a vraiment ici aucune fonction appréciable, à l'inverse de ce que nous avons vu fréquemment. Dans les Agrions, et en particulier dans le Calopteriæ virgo, on retrouve les mêmes pièces semblablement disposées ; je dois signaler une différence qui mérite notre attention , elle porte sur les rhabdites dorsaux. Nous n'avons pas signalé à la base des rhabdites de l’Æsne une pièce étendue de leur articulation épimé- rale à leur bord inférieur ; cette pièce doit être regardée comme l’analogue de celle que nous avons fait connaître à la même place dans la Cigale, la Phytocore et quelques Bourdons, Xylo- copes, etc. Ici elle prend un grand développement, et s’unit avec le rhabdite. Dans les Agrionides, l'union devient plus intime; la soudure est complète et le développement plus con- sidérable , en sorte que ces pièces semblent constituer la base des tergorhabdites ; de plus, elles se confondent sur la ligne mé- diane, et paraissent former à l’extérieur comme une bandelette impaire, couvrant la base de la tarière. Toutes ces soudures sont si complètes, qu'avant d’avoir étudié l’Æsne, l’armure des Agrions embarrasse beaucoup ; car les rhabdites ainsi réunis représentent si bien un sternite que, malgré les rapports, il reste dans l’esprit un peu de doute. Le sternite est bifide comme dans les Æsnes, et plus petit relativement aux tergorhabdites. L’épisternite est beaucoup plus régulier ; il porte sur son bord tranchant et libre des dentelures dirigées en arrière. L’épimérite n’est représenté que par une bandelette cornée , DES INSECTES NÉVROPTÈRES, 29 très grêle, qui s’articule avec le tergite, un peu en arrière des tergorhabdites. Dans l’Æsne , l’union des parties tergales se fait par une articulation, où les angles des trois pièces viennent se réunir ; qu’on suppose l’épimérite s’éloignantun peu, et les deux autres s’articuleront directement : celte exception se montre dans les Agrions, où le tergorhabdite s'articule avec le tergite. Quelle est la composition de l'abdomen ? Quels sont les rapports de l'anus et de la vulve avec l’armure géniale dans ce premier type le plus complexe ? Du thorax jusqu’à la vulve, on compte, dans les deux exemples que nous venons d'étudier, huit urites complets ; l’armure forme le neuvième; après elle, on en trouve deux autres très distincts : l’un, le décaturite, complet, a son sternite soudé au tergite, et forme un cercle non interrompu autour des parties molles; l’autre, complexe, présente cinq pièces valvaires, au milieu desquelles s'ouvre l'anus. Ces cinq pièces sont deux inférieures, symétriques, une supérieure, médiane impaire, presque aussi grande à elle seule que les précédentes, et deux latérales, allongées, véritables appen- dices qui se prolongent assez loin au delà du corps. Les trois premières se rapprochent, et forment par leur réunion une sorte de cône, dans lequel elles cachent l’anus; les deux autres sont libres. Dans quelques espèces, ces dernières, fortes et résistantes, mues par des muscles puissants, deviennent de véritables organes de préhension , ce qui a conduit les auteurs à faire des espèces sous le nom de forcipata. L’oviducte s’ouvre entre les hogdurites et ennaturites, comme d'habitude ; mais il existe une particularité dans les Agrions en rapport avec la disposition anatomique que nous avons indiquée. Les tergorhabdites , par leur union en dessous sur la ligne mé- diane, embrassent l’oviducte, et, par conséquent, l’ouverture des organes génitaux se fait au milieu même de l’armure. Cela nous force à admettre que les œufs traversent la tarière lors de la ponte. Les tergorhabdites , relevés en dessus en forme de gout- tière, ressemblent absolument à un gorgeret ou sternite. Maintenant quelles analogies pouvons-nous apercevoir entre celte armure complexe des Névroptères et celles des ordres pré- 30 LACAZE-DUTHIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE cédents? Elle s'éloigne plus de celle des Hyménoptères que de toute autre : ainsi, là nous trouvons un sternite ou gorgeret tou- jours résistant et central ; ici nous voyons qu'il est bifide, et plus grêle que les autres parties. Les épisternites portent là des appen- dices formant un fourreau à l’arme; ici ils remplissent eux- mêmes celte fonction, leurs appendices sont rudimentaires. Quant à l'abdomen , les différences augmentent. Ainsi les der- nières parties, rentrées sous les autres dans un cas, sont appa- rentes dans l’autre : l’armure, voisine de l’anus dans les uns, en est séparée par deux urites dans les autres. La ressemblance est plus grande avec les Orthoptères, surtout pour l'abdomen. On trouve, en effet, la même disposilion dans les deux cas. Des onze urites, deux, les derniers, sont composés sur le même plan ; aussi pouvons-nous dire maintenant que les pinces des Forficules sont les mêmes choses que les forceps des Libel- lules, Peut-être l’urite préanal est-il ici plus complet. En effet, dans les Orthopières, il ne présente qu'un tergite, tandis que nous venons de voir qu’il est ici corné à sa face sternale comme à sa face dorsale, Ainsi, par la composition de leur abdomen , les Névroptères se rapprochent des Orthoptères, et l’on sait que les entomologistes font aussi ce rapprochement dans les classifi- cations en se basant sur d’autres raisons, L’'analogie de latarière des Æsnes avec celle des Phytocores est très marquée : l’épisternite forme, dans ces Hémiptères, la valve, lé fourreau de l’arme , comme cela existe ici. Le sternorhabdite reste rudimentaire , et les pièces appendues aux bases des rhab- dites embrassent l’orifice de la génération dans les deux cas. En résumé, les tarières des Névroptères sont semblables aux tarières des Hyménoptères, Orthoptères et Hémiptères ; les dif- férences que l’on rencontre sont dues aux modifications de formes des animaux eux-mêmes, et toutes les considérations théoriques précédentes leur sont applicables, Si quelques dispositions parti- culières exceptionnelles ont présenté des difficultés d’interpréta- tion , elles ont cependant pu être rapportées aux types naturels à l’aide de quelques exemples intermédiaires. Ainsi ces pièces de la base des tergorhabdites sont dues à des dédoublements qui, DES INSECTES NÉVROPIÈRES, 31 par une soudure nouvelle, une fusion et un déplacement vers la ligne médiane , peuvent en imposer un instant, et faire croire à une composition différente de la tarière, L’Æsne nous a fourni un passage entre les armures connues et celles des Agrions pré- sentant ces particularités. SIL. — Types simples. Zibellules. L'abdomen d’une Libellule (en particulier de la Libellula de- pressa) se compose de onze urites. Les dix premiers se ressem- blent tous ; ils n’offrent d’autre différence que celle causée par leur position dans cette partie du corps, qui, gonflée à sa base près du thorax , devient plate vers le milieu, et se termine en pointe à son extrémité. Le onzième est plus complexe que les autres , il à la même composition que dans l’Æsne. C’est surtout dans la division des Libellulides que ces deux appendices prennent la forme et les fonctions de pinces , et que le mot spécifique de forcipatus a été employé. Ges forceps servent, comme chacun sait, aux animaux pour s’accrocher, et accomplir les préliminaires fort longs de la fécondation. La vulve s'ouvre entre l'hogdurite et l’ennaturite. L’hogdo- sternite, un peu plus développé que le septième et le neuvième, a son bord postérieur libre et festonné. En le soulevant on aper- coit l’orifice vulvaire ; du reste, à part cette différence légère , il ressemble absolument pour tout le reste à ceux qui le précèdent ou le suivent. Ainsi même composition dans les zoonites pré- et postgénitaux. Le sternite , très nettement distinct dans le huitième urite, est plus petit dans le neuvième relativement au tergite , qui s’a- vance en dessous et masque un peu ses bords ; c’est là un passage à ce que l’on observe dans le décalurite, où le sternite est tout à fait confondu avec la pièce tergale, Telle est la disposition, je ne dirai pas de l’armure, car il n’y en a pas, à proprement parler, mais de la terminaison de l’ab- domen. On voit que si nous comparons ce type simple des Névro- ptères à celui plus complexe que nous avons étudié en premier 932 LACAZE-DUTHIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE lieu , il n’y a aucune espèce de rapport à établir au point de vue des fonctions. Quant à l’origine des pièces, il y a, au contraire, des rapprochements intéressants et utiles à faire. Ainsi nul doute que, dans les deux cas, les orifices de la génération et de la diges- tion ne s'ouvrent dans des points parfaitement semblables. Deux des anneaux qui les séparent se ressemblent en toutes choses : ce sont le déca- et l’endécaturite. Nous arrivons forcément à com- parer l’ennaturite fort complexe de l'Agrion au inême fort simple de la Libellule. La position , les rapports, la ressemblance des urites qui le suivent , tout nous porte à admettre que l’un est le correspondant de l’autre. Mais tandis que là des modifications importantes se sont produites, ici tout est resté simple ; l’urite est réduit aux parties ordinairement les plus fixes, le sternite et le tergite. Si déjà nous n’élions arrivé à démontrer, d’une ma- nière absolue , que ce sont les éléments du zoonite postgénital qui produisent l’armure , nous trouverions ici un exemple très frappant pour montrer au moins ce fait que les armures génitales correspondent à la partie du scléroderme située immédiatement après la vulve, quelles que soient leur complication ou leur sim- plicité. Alors il devient impossible de se refuser à admettre que des groupes de pièces représentent des pièces plus simples ; et ce premier pas fait, il n’est pas difficile de montrer comment ces pièces multiples ne sont pas des productions nouvelles, mais bien les pièces d’un segment abdominal développées avec des formes spéciales. Cette disposition si simple n’est pas seulement propre aux Névroptères ; on la rencontre dans les Orthoptères ; comparons- la donc dans ces deux ordres. La Taupe-Grillon a, comme la Li- bellule, onze urites à son abdomen ; presque tous sont composés de la même manière par un sternite et un tergite. L’oviducte s'ouvre entre les huitième et neuvième, tandis que l’hogdoster- nite, bien développé, cache la vulve. L’ennatosternite est presque rudimentaire ; c’est avec soin qu’il faut le chercher pour le découvrir. Le décaturite n’a pas de sternite; le onzième est formé par deux longs filaments et trois pièces valvaires qui en- tourent l’orifice anal. Les différences portent donc sur le volume DES INSECTES NÉVROPTÈRES, 32 de l’hogdosternite, sur l’absence de la partie sternale du décatu- rite ; elles sont peu importantes comme on peut en juger, et le rapprochement de ces deux insectes est facile à faire. Il permet de mortrer que l’analogie des appendices qui terminent l’abdo- men est complète; et surtout que, lorsque la nature ne forme pas d’armures pour les besoins physiologiques de l’animal , les z00- niles conservent la forme la plus simple. La Taupe-Grillon, moins complète que la Libellule, forme le passage entre les insectes où la vulve est nettement séparée de l'anus par trois urites distincts, et ceux où les deux orifices voisins l’un de l’autre semblent se toucher ; nous trouverons dans les ordres qui nous restent encore à étudier, des familles ayant l’orifice de l’oviducte et celui du rectum dans un même segment sclérodermique. $ IT. Type intermédiaire. Panorpe. Entre les deux types opposés que nous venons d'étudier, on en trouve d’intermédiaires, formant la liaison des plus simples aux plus complets. Ils nous montrent la nature s’essayant pour ainsi dire à modifier les formes ordinaires, à changer les dispositions sans toutefois ajouter rien à la composition générale. Quand on fatigue une femelle de Panorpa germanica ou communis, elle fait saillir de son abdomen un tube grêle allongé, qu'elle cherche à porter vers l'objet qui l’inquiète. Bientôt une gouttelette d’un liquide blanchätre apparaît à son extrémité, c’est un moyen de défense; dans le repos, l’abdomen conique, terminé en pointe, paraît composé d’un moins grand nombre de segments. Quand le tube, dont nous venons de parler, est sorti, on en compte neuf, plus les appendices terminaux. L'oviducte s’ouvre après le huitième, en sorte qu'il semble exister une différence ; car il n’y aurait que deux uriles entre lui et l'anus: mais en séparant les éléments de l'hogdurite, on trouve au-dessus de la vulve une pièce impaire , terminée par deux angles saillants, qui rappelle par sa forme, jusqu’à un certain point, les sternites modifiés des armures génitales. Au- dessous de cette pièce, qui, plus large sur les côtés, se prolonge 3° série, Zoor. T. XIX, (Cahier n° 1.) 5 3 3 LACAZE-DUTMSERS. — ANRMURE GÉNITALE FEMELLE en deux apophyses en arrière, viennent s'ouvrir des glandes, annexes des organes génitaux, correspondant aux vésicules co- pulalrices. Quelle valeur pouvons-nous attribuer à cette pièce? En se basant sur la régularité de la composition de l’abdomen, il est naturel de la regarder comme représentant un zoonite dont la portion tergale avorte; alors on retrouve les onze urites. Le neu- vième incomplet, post-génital, est rentré sous les autres. Sa dis- parition explique les connexions du huitième avec le dixième. Le décaturite se présente, comme dans la Libellule, formée d’une seule pièce cornée, sans distinction de partie tergale et sternale; enfin, le onzième présente cinq pièces, un tergite, deux écailles correspondant au sternite et deux appendices, articulés avec le tergite ; ceux-ci sont divisés sur le milieu de leur longueur ; une articulation en unit les parties. Et maintenant la comparaison est facile à établir avec les deux types précédents; dans tous les cas, nous trouvons la vulve et Janus séparés par trois urites ; le onzième ou dernier est sembla- blement composé. Le tergite seul présente cette différence que dans les Panorpes il fournit le point d'insertion aux rhabdites, tandis que cela n’a pas lieu dans les Libellules et les Agrions; toujours le préanal ou décaturite est cylindrique, formé d’une seule lamelle cornée, due à la fusion des parties tergales et des parties sternales. L'hogdurite ou prégénital est formé de la même manière ; c’est sur la face supérieure de son sternite que s'ouvrent les organes de la génération. Enfin, l’ennaturite, neuvième, ou postgénital, offre trois dispositions, tantôt simple, et sans aucune modification, comme dans les Libellules, tantôt complexe, autant que dahs tous les insectes armés des tarières les mieux consti- tuées, comme dans les Agrionides, les Æsnes; tantôt enfin, profondément modifié, non plus par le développement de toutes ses parties, mais par l’avortement du tergite et le chevauchement dé son sternite, il donne naissance aux trois types qui nous ont servi à caractériser l'armure des Névroptères. 11 nous parait maintenant, par l’examien de cés trois organisa- tions extrêmes, suffisamment démontré, sans étendre nos études 2 DES INSECTES LÉMIPTÈRES. 39 plus loin, que dans les Névroptères, comme dans les ordres pré- cédents, il est vrai de dire que la nature, en développant les élé- ments primitifs du zoonite post-génital, compose des tarières identiques à celles des autres insectes; que lorsque ces instru- ments sont inutiles à l’accomplissement des fonctions de repro- duction, le zoonite reste réduit à ses deux éléments habituels. Les fonctions sont, on le comprend, à peu près nulles dans les types simples ; les œufs doivent être déposés là où se trouve pla- cée la partie postérieure de l’abdomen ; mais les Agrions font de véritables entailles aux végétaux, Réaumur en a donné la figure; il a même dessiné des insectes dans la position où ils se trouvent quand ils divisent les plantes aquatiques. Nul doute qu'il se passe des mouvements entre les stergorhabdites et les lobes du ster- nite ; nul doute aussi que les dents, dont sont couvertes les extré- milés de ces parties, n'aient pour but de faciliter leur action. Nous n'avons qu’à rappeler la soudure des deux tergorhabdites, pour faire comprendre que leur jeu doit être simultané. D'un autre côté, l'indépendance des lobes du sternite permet d’ad- mettre que ceux-ci agissent alternativement. Disons, toutefois, qu’il est probable que cet instrument pénètre sur tout les corps par la force d’impulsion que l'abdomen lui communique, et que l'animal, armé d’un corps dur et peu tranchant, déchire plutôt les tissus qu'il ne les perfore. Les dispositions admirablement réunies dans les tarières des Cigales Tenthrèdes, etc., manquent ici. On comprend que le nombre des espèces , dont nous faisons connaître les armures, est trop restreint, pour que nous puissions traiter celte question; quelle est la valeur des caractères que l’armure génitale fournit ponr la classification ? Cependant, les différences considérables que nous avons montrées entre des genres aussi voisins que les Æsnes et les Libellules permettent de penser que leur valeur ne peut être de premier ordre, et que dans les Névroptères pas plus que dans les Hÿménoptères ou les Hémiptères, on ne peut s’en servir pour établir de grandes di- visions. Nous pensons néanmoins que la spécification ou la distinction des genres et divisions peu élevées tireraient un bon parti de leur connaissance. 36 LACAZE-DUTHIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE Les travaux qui ont élé faits sur les tarières des Névroptères n'ont pas une très grande importance ; aussi doit-on s’attendre- ici, moins qu'ailleurs, à trouver des nolions d'ensemble, des idées comparatives, Réaumur à parlé longuement des Agrions, des Mouches- Demoiselles ; il a vu et décrit leur tarière , dont il appelle les pièces limes internes. Ses figures sont exactes ; seulement elles représentent l’ensemble de l'appareil et la terminaison de l’abdo- men, Aussi est-il difficile de dire, s’il a bien reconnu toutes les parties qui entrent dans leur composition. On ne doit pas le penser, car il ne semble admettre que deux lobes ou deux lames. C’est à M. Léon Dufour que l’on doit la descriplion la moins incomplète de l’oviscapte des Æsnes et des Agrions. Il en a re- connu la composition, décrit les parties, et a dit, sans nous faire connaître les raisons motivant son opinion, qu’elle ressemblait à celle des Orthoptères. Du reste, point de figures suffisantes pour montrer les relations des pièces entre elles ou avec l’abdomen; c’est Loujours comme appendues aux organes génitaux qu'il les représente, et, de plus, certains doutes font soupconner que toutes les particularités de cet oviscapte n’ont pas été bien con- nues par lui. « Je suis même porté à croire, dit-il, que, pendant » la vie de l’insecte, il s'exerce un mouvement obscur de ces deux » demi-lames l’une contre l’autre. La macération de l’oviscapte » met en évidence ce mode d'union, car on peut alors dédoubler » les lames. » On ne trouve, du reste, dans ce travail aucune comparaison, et les descriptions elles-mêmes ne sont pas pous- sées bien loin. Le fait si important de la soudure des tergo- rhabdites, l'union de larmure avec les tergites, n’y sont pas éludiés. Pour Burmeister, l’oviscapte des Æsnes serait ur vagin bivalve. Nous avons eu occasion de critiquer, et ces noms de classes et ce mode de groupement des organes; il est inutile d’y revenir ; les Panorpes seraient munies d’un Layng tube ou Fagina tu- buliformis ; nous ne pouvons nous empêcher de montrer que dans cetle classe d’armures se placent aussi les aiguillons des Chrysides ; et cependant quelle différence les sépare! Dans l’un, DÉS INSECTES THYSANURES. 97 les anneaux abdominaux postérieurs sont développés, l’urite post- génital n’est représenté que par un sternite; dans l’autre, au con- traire, les urites voisins de l'anus avortent, mais le postgénital se développe en véritable aiguillon. Ce qui fait rapprocher des choses aussi dissemblables par Burmeister, ce n’est pas la consi- dération de l’armure proprement dite, qu’il n’étudie pour ainsi dire pas, mais bien la terminaison de l’abdomen qu’il semble prendre dans son entier pour une oviscapte. M. Westwood n’a donné que peu de détails sur l’ordre qui vient de nous occuper; il a signalé les différentes espèces por- tant des tarières, mais il n’a pas même donné de détails analo- gues à ceux qu’il a indiqués assez souvent à propos des autres ordres. ARMURE GÉNITALE FEMELLE DES INSECTES THYSANURES. Lepisme. Les Thysanures sont des fnsectes fort petits, vivant dans la poussière , les livres ou les vieux linges. D’après leurs mœurs et leur apparence extérieure, on ne s’attendrait pas à voir l’abdo- men de leurs femelles armé d’une tarière très complète, et sem- blable à celles des animaux précédemment étudiés. Puisque nous rapprochons les Insectes d’après le plus ou le moins de ressem- blance de leurs oviscaptes, le Lepisma saccharina, ou petit poisson d'argent , doit prendre place ici; il mériterait tout aussi bien, comme on va le voir, d’être placé même avant les Névroptères. Nous pourrions nous dispenser de décrire en détail sa tarière ; mais son existence n’a pas été signalée par les entomologistes, qui se contentent de dire que la femelle dépose ses œufs dans la poussière. D’ailleurs il nous paraît utile, en signalant ce fait nou- veau, de montrer combien des Insectes aussi éloignés des Ichneu- mons et des Cigales peuvent être rapprochés au point de vue de leurs instruments térébrants. Sans donc apprendre rien de plus sur la composition de l'organe, les détails qui vont suivre ne se- 38 LACAZE-DUTIIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE ront que des preuves nouvelles de cette idée, à savoir que tou- jours la nature, quaud elle donne une arme aux femelles des Insectes, la forme sur un même plan. Rien, comme nous le disions, ne fait supposer à priori l’exis- tence d’une armure bien constituée ; c'est là une des causes de l'oubli où elle a été laissée, mais il en est d’autres : ce sont la ténuité et la fragilité des parties qui la composent. C’est done avec un soin infini qu'il faut se livrer à son étude. Les pinces avec lesquelles on veut saisir et désarticuler les pièces, quelque fines et délicates qu’elles puissent être, les brisent toujours; enfin, c’est sous des grossissements assez forts, qu'on doit faire les dissec- tions, et l’on comprend alors toutes les difficultés qu'il peut y avoir à faire de bonnes observations. L’abdomen des Lépismes est terminé par de longs filaments qui ont fourni les éléments principaux pour former la déno- mivalion de l’ordre. Nous verrons, en étudiant séparément les urites, quelle signification il faut donner à tous ces appendices. L’armure se trouve peu éloignée de l’anus; elle le sépare de l’oviducte. 11 faut écarter les urites voisins du premier orifice, ainsi que ceux antérieurs à la vulve, pour bien voir l’appareil qui ressemble beaucoup aux armures des Hyménoptères, des Hé- miptères, el surlout des Névroptères. En désarticulant les parties qui le composent, on reconnaît sans peine le tergite, l’'épimérite et le tergorhabdite d’une part; le sternite, l’épisternite et le ster- norhabdite de l'autre. Les pièces tergales ressemblent d’une manière étonnante dans leur ensemble à celles des Hyménoptères à tarière, aux Ichneu- mons, Tentbrèdes, Sirex, etc. ; et même à celles de la Cigale, de la Phylocore, mais peut-être un peu moins à celte dernière, à cause de la différence du volume des épimérites. Le tergite, plus petit que ceux du reste de l’abdomen, paraît très bien à l'extérieur ; il recoiten grande partie dans son intérieur celui du zoonite préanal, L’épimérite triangulaire lui est uni par son angle supérieur, et porte le rhabdite à son angle antérieur. Le rhabdite est droit, un peu courbé à son origine épimérale, en forme de lame de couleau, W'anchant sur son bord inférieur, plus épais à son DES INSECTES THYSANURES, 39 côté supérieur, Ces trois pièces se portent un peu en avant eten bas pour embrasser la partie sternale. Dans celle-ci les formes s’éloignent de celles que l’on ren- contre dans les Hyménoplères et les Orthoptères, pour se rap- procher un peu plus de celles des Hémiptères et des Névrop- tères. On peut dire que la partie sternale, vue dans son ensemble, ; par rapport à ces derniers, ce que la partie tergale est par rapport aux premiers. Ainsi, enfre le sternite, l’épisternite et le sternorhabdite d’un Lépisms ou d’une Æsne, d’un Agrion, il n'y a pas de différence. Le sternorhabdite est un appendice grêle, couvert de quelques poils, articulé dans une échancrure de l’extremité postérieure de l’épisternile, absolument comine dans le Caloptéryx; il ne forme point une valve du fourreau de l’arme. L’épisternite, au contraire, est vaste, à peu près triangulaire. Son côté inférieur, libre, régu- lier, forme avec celui du côté opposé un véritable fourreau pour abriter le sternite. Sur son côté antérieur, un peu irrégulier, pa- rait une cavité articulaire très nettement dessinée, qui recoit l'angle postérieur de l’épimérite. La description de ces parties est absolument celle des Névroptères. Enfin, lesternite , lamelliforme, part de l’angle inférieur et antérieur, un peu prolongé de l’épi- sternite pour se diriger en arrière ; il est assemblé avec le tergo- rhabdite dont il égale la longueur. Gomment se fait cel assem- blage? Je dois déclarer que la ténuité des parties ne n’a point permis de le voir ; il est peu parfait, car on sépare les deux pièces avec facilité ; un dernier point de ressemblance entre cette pièce et celle des Æsnes, c’est que par la plus légère traction opérée sur les épisternites, on la divise en deux lames secondaires, ce qui doit nous faire admettre qu’elle est bifide. Les lergorhabdites et les sternites réunis, formant la partie active de l’armure, se logent dans la fente que laissent entre eux les épisternites. Ils ne sont pas armés de dents, leur bord infé- rieur est tranchant, et leur face couverte de quelques poils, semblables à ceux des autres pièces. Les fonctions de cette arme doivent être bien obscures, sa fragi- lité et sa ténuité ne lui permettant pas d’inciser et de couper des HO LACAZE-DUTMIERS, — ARMURE GÉNITALE FEMELLE corps très solides. Du reste, les détails manquent sur la ponte de cet insecte, et c’est là tout un sujet de recherche, qui, en fai- sant connaître ses mœurs, pourra mettre aussi sur la voie tou- chant le but et les fonctions de son armure. L’abdomen se compose de onze urites, exemple de plus à l’ap- pui de cette opinion, à savoir que le nombre normal des urites n’est point neuf, mais bien onze. Les huit premiers se composent d’un sternite et d’un tergite, celui-ci embrasse le premier par ses bords qui descendent très bas sur les côtés. L’ennaturite forme l’armure, Le décaturite, représenté par un tergite seulement, s’avance au delà de l’anus, et cache l’origine des filaments ter- minaux. Enfin, l’endécaturite est composé de plusieurs pièces rangées autour de l’anus. On le voit donc, l'abdomen d’un Lé- pisme se compose absolument comme celui d’un Orthoptère et d’un Névroptère. L’oviducte s'ouvre du reste en avant de l’ar- mure, entre l’hogdo et l’ennatosternite. À partir du cinquième, mais surtout du sixième, chaque seg- ment de l'abdomen porte un petit filament poilu, qui va en aug- mentant progressivement de volume, à mesure que l’on s'approche davantage de l’anus ; il faut certainement regarder ces filaments comme des rhabdites appartenant à la partie sternale; dans le mâle, on voit très clairement leurs insertions sur des échancrures du sternile prégénital. Après l’armure, on en trouve trois, l’un médian incliné en bas ; deux autres, latéraux, redressés. Le pre- mier est le tergite de l’endécaturite, qui, en forme d’écaille, dans les Névropières et les Orthoptères, prend ici un accroissement en longueur extrêmement considérable ; les deux latéraux sont les analogues des longs filaments des Taupes Grillons, du forceps des Forficules , et des appendices des Libellules, etc. Nous les avons considérés comme faisant partie de l’endécaturite, dont ils sont les épimérites; disons qu'ici un peu éloignés de cet urite, ils sont articulés très nettement avec le décatotergite, Celui-ci, prolongé en arrière, au-dessus de l'anus, courbé un peu en voüle, cause l’inclinaison du tergite anal ; mais les échancrures latérales permettent aux filaments latéraux de se relever. Ainsi, en résumé, le Lépisme présente une tarière complète, DES INSECTES COLÉOPTÈRES. 1 semblable à celles que nous avons étudiées comme tvpes les mieux caractérisés : elle se rapproche, par la partie lergale de l’armure, des Hyménoptères, Hémiptères et des Orthoptères, un peu moins de celles des Névropières. Par la partie sternale, au contraire, elle présente plus d’analogie avec celle des Névroptères et de quelques Hémiptères, ce qui l’éloigne surtout des Orthop- tères et des Hyménoptères. L’abdomen, composé des mêmes parties que dans les Orthoptères et les Névroptères, diffère surtout de celui des Hyménoptères, et présente cette parlicularité d’avoir un certain nombre d’arites portant des rhabdites. Le Lépisme est donc un exemple heureux, car, très éloigné des ordres pré- cédents, il rentre cependant dans le principe que nous cherchons à démontrer. ARMURE GEÉNITALE FEMELLE DES INSECTES COLÉOPTÈRES. En abordant l'étude de l’armure femelle des Coléoptères, on a naturellement présent à l'esprit le nombre immense des espèces qui composent cet ordre. Est-ce à dire que nous établirons la comparaison de l’organe dans une série d’exemples considé- rable? Non; le groupe est très naturel, et quelques types pris dans les subdivisions principales permettront de généraliser et de fixer suffisamment les idées. Nous ne suivrons pas plus ici que dans les familles précédentes la classification ; nous éloignerons et rapprocherons, plus ou moins, des genres voisins ou éloignés ; peu importe, n'ayant qu'un but, celui de montrer que les variétés de formes de l’armure se lient les unes aux autres d’une manière in- time par l’origine toujours la même de leurs pièces, nous cherche- rons à l’atteindre sans tenir compte des différences ou des res- semblances nalurelles et caractéristiques des genres, groupes ou familles. Néanmoins, nous aurons soin, comme nous l’avons déjà fait, de montrer les relations qui existent entre les divisions natu- relles de l’ordre et les formes de l’armure. Nous ne trouverons pas dans les Coléoptères de tarière pro- Ü2 LACAZE-DUTMIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE prement dite; peut-être pourrions-nous dire avec les auleurs que quelques espèces sont munies d’un oviscapte, en donnant à ce mot le sens qu'on lui attribue en général, qui représente à l'esprit un organe moins complet, plus simple que la tarière proprement dite, et qui ressemble à un prolongement de l’oviducte. Dans cette acception, quelques Coléoptères sont pourvus d’un oviscapte , mais ils sont en très petit nombre ; ils appar- tiennent pour la plupart aux insectes aquatiques du groupe des Dytisques. Les variétés, du reste, sont loin d’être aussi nombreuses que pourrait le faire supposer la mulliplicité des espèces: elles sont toujours représentées par des types principaux, auxquels on peut les rapporter. Ainsi, par exemple, on peut établir deux grandes divisions caractérisées par la présence ou par l'absence du sternite postgénital; et l’on comprend tout de suite quelle différence capitale sépare ces deux divisions. Dans la première, en effet, les orifices de l’anus, de l’oviducte, sont éloignés ; dans la seconde, ils sont rapprochés. Entre ces dispositions opposées, on trouve des intermédiaires, c'est-à-dire des armures, où le sternite, à l’état rudimentaire, commence à se montrer. Passons successivement en revue ces trois types, depuis le Dytisque qui commence la série jusqu’au Hanneton qui la ter- mine, en plaçant le Carabe entre les deux. SL — Types les plus complets où le sternite de l’armure existe. Hydrovanthares {Dytisciens). Les Dytiscus marginalis, circumscriptus, V Acilius sulcatus, le Cybister Roeselü, les Colymbètes, ont une sorte d'oviscapte, qui peut certainement servir au dépôt des œufs. Il est placé sous le huitième urite et occupe par conséquent le neuvième rang. De anus à la vulve il forme un véritable cercle laissant celle-ci en avant. Enfermé dans cette sorte de cavité, que les auteurs se plaisent à nommer cloaque, il en sort pour les besoins de l’ani- mal, à l’aide de muscles assez puissants, et se compose de pièces dont la forme varie d’après les espèces. C’est surtout dans les DES INSÉCTES COLÉOPTÈRES. h5 Dytisques, Cybister et Acilius, qu'il a une organisation complète et très sensiblement la même. ; Dans le Dytiscus marginalis, on trouve, après avoir enlevé, avant l’armure, tous les sclérodermites, et avoir conservé la ter- minaison de l’oviducte et de l'intestin, un tergite très petit, mais très reconnaissable dans la plupart des cas. Il arrive néanmoins que, divisé sur la ligne médiane, ses deux moiliés puissent tout d’abord être prises pour autre chose que des plaques tergales. Le plus habituellement il est entier dans les Cybister. De ses angles antéro-inférieurs partent deux prolongements cornés qui se diri- gent obliquement en bas et en avant ; une autre pièce médiane impaire, creusée en gouttière, un peu courbée, se porte en arrière et en haut. Les pièces latérales sont les épimérites et épisternites réunis ; l’inférieure est le sternite. Le sternite comparé au tergite est infiniment plus grand. Sa forme rappelle assez bien celle du gorgeret de quelques Hymé- noptères. Libre dans une grande étendue, il jouit de beaucoup de mobilité, et peut avec la plus grande facilité exécuter des mou- vements qui se passent dans son articulation avec les parties la- térales ; tandis que la base reste à peu près immobile, la pointe s’abaisse ou s'élève beaucoup. C’est au-dessous de lui que s’ouvre l'oviducte. On trouve ici une particularité qui n’est pas fréquente ; l’ovi- ducte fait saillie, en forme de tube charnu, d’une quantité égale en longueur presque à celle du sternite. Ce tube est libre et se cache pendant le repos dans la gouttière sternale. Sur sa face in- férieure, non loin de l’extrémité antérieure du sternite, on aper- coit deux légères impressions cornées, qui doivent représenter quelques parties appendiculaires du zoonite, probablement les sternorhabdites. Dans toutes les espèces que nous avons dissé- quées elles existaient, même dans celles où le sternite, tout à fait rudimentaire, élait remplacé dans ses fonctions par les épi- sternites. Dans quelques Acilius, et un peu moins dans les Cy- byster, leur longueur est considérable , et fournit une preuve à l'appui de cette opinion. > Les pièces latérales, considérées avec attention, présentent une hh nacaze-purmIERS, — ARNURE GÉNITALE FEMELLE ligne oblique formant une arête saillante, indice de soudure. C’est ce qui a déterminé à les regarder comme représentant à la fois les épisternites et les épimérites. Dans les Cybister, les premiers sont plus développés que dans les Dytisques, et ne sont point sou- dés aux seconds ; une articulation très nette et très distincte les unit. Dans les Colymbètes et autres Hydrocanthares, la sépa- ralion existe bien plus marquée encore, puisque le sternite est, comme nous le disions il n’y a qu’un instant, rudimentaire, et que les pièces épisternales s’allongent beaucoup. Dans les Colymbètes Sturmii, le tergite est presque rudimen- taire et divisé sur la ligne médiane ; chacune de ses moitiés est soudée avec l’épimérite, qu’elle semble terminer. L’épimérite est long et descend jusque vers le bord de la vulve; là il s'articule avec l’épisternite, qui est en grande partie libre, triangulaire, et dont le sommet aigu et le bord supérieur couvert de dents très fines lui permettent pendant la ponte de jouer le rôle d’ovis- capte. Les Cybister montrent un passage entre cette armure et celle des Dytisques. On voit, en effet, dans les premiers, l’arti- culation des deux sclérodermites latéraux, et surtout le dévelop- pement du dernier qui commence à prendre une forme triangu- laire. Ainsi les Dytisciens rentrent par leur disposition dans la règle habituelle ; huit urites sont en avant de la vulve, et un sternite la sépare de l’anus. Ce premier exemple, que nous étudions dans les Coléoptères, nous montre, d’une manière incontestable, que toujours la nature place dans ces Insectes l’orifice des organes génitaux femelles apr ès leshuit premiers sternites ; il nous montre aussi que c’est l’ennatarite qui forme l’armure : à ce point de vue les Dytisques ne diffèrent pas des autres Insectes. Mais déjà nous voyons une dégradation bien grande dans la tarière. C’est cependant l’une des plus complexes de l’ordre ; nous n’y trouvons pas ces pièces multiples, aux formes variées, jouant les unes sur les autres, avec une perfection qui a fait l'admiration de tous ceux qui les ont éludiées. Nous devons encore dire , avant de passer aux autres formes, DES INSECTES COLÉOPTÈRES. h5 que, dans les Hydrocanthares, les genres les plus voisins présen- tent de grands rapports : ainsi l’armure d’un Cybister est iden- tique à celle d’un Dytisque , d’un Acilius. Celui-ci, peut-être, s'éloigne davantage des deux premiers. Dans l’4. sulcatus, le sternite est beaucoup plus long relativement ; son extrémité libre est mousse au lieu d’être aiguë : naturellement les épimérites et les épisternites s’allongent aussi. Ceci donne une apparence un peu différente à l’armure, mais on ne tarde pas à reconnaître que la différence est bien légère. Nous aurons, du reste, à remarquer, plus d’une fois, dans l’étude des Coléoptères , la ressemblance qui existe entre les pièces vaginales des genres voisins, Dans les genres qui suivent, on trouve des dispositions encore plus complexes ; ainsi, avec le sternite très caractérisé, on voit les épisternites porter un sternorhabdile souvent remarquable - ment développé. Agripnus Senegalensis (Élatérides. Taupins). Si nous placons les Élatérides avant les Buprestides, c’est que leur armure , plus simple, représente mieux et plus facilement le zoonite primitif. Les Taupins de notre pays, le Pyrophorus nyc- tophanos et l’Agripnus Senegalensis se ressemblent entièrement : nous nous contenterons de décrire l’armure du dernier. L'abdomen se compose de huit urites complets ; les pièces gé- nilales forment le neuvième : elles se composent d’un tergite, d’un sternite , des épimérites, épisternites et sternorhabdites. Le tergite très régulier, quoique pelit, représente tout à fait les tergites tels qu’on les voit habituellement ; placé au-dessus de l'armure, il est dépassé par elle. Sur ses côtés paraissent les épiwué- riles, auxquels il est uni dans toute l'étendue de son bord latéral ; ceux-ci ont une forme assez rapprochée de celle d’un triangle, dont la base affleurerait les bords du tergite, et dont le sommet mousse descendrait très bas en dessus; fortement courbés, ils représentent avec le tergite un cercle presque complet. La forme triangulaire que nous avons indiquée, en donnant une idée des épimérites, nous permet de faire connaître facile- 6 LACAZE-DUTMIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE ment leur union avec les épisternites. Tout le côté postérieur du triangle est recu dans la concavité du bord antérieur de la pièce épisternale ; celle-ci, en partie adhérente, accompagne l’oviducte, en parlie libre représente au delà de lui des appendices mousses tordus qui sont les s{ernorhabdites. On voit même, du côté de la face inférieure , des lignes de soudure et d'interruption cornée, qui permettent de mieux reconnaître les rhabdites des épi- sterniles. En dessous, entre ces pièces qui se reploient et S’approchent, est l’orifice de l’oviducte. Au-dessus de lui paraît le sternite, dont la forme rappelle, mais de loin, celle du gorgeret des Abeilles. Sa figure est celle d’un fer de flèche. L’angle ter- minal correspond à la pointe; il est libre et dépasse la vulve : courbé dans sa longueur, il paraît un peu crochu vu de profil. Ses deux bords se reploient un peu en dessous, et forment sur l’oviducte une sorte de gouttière. Enfin la hampe de la flèche peu allongée se voit sur le dos du canal : elle dirigée en avant. Nous avons omis de signaler, afin de ne pas compliquer la des- cription, deux apophyses grêles, qui dépassent de beaucoup en avant l’armure : ce sont des apophyses musculaires qui naissent sur les bords antérieurs des épisternites un peu en dedans et en haut. Leur fonction est certainement de faire saillir l’armure en dehors. Tel est l’ensemble des pièces qui entourent l’orifice de la génération des Taupins. Malgré les modifications considérables de forme, il est, si je ne me trompe, inutile d’insister sur la comparaison de cette armure avec celle des Hydrocanthares, La nomenclature suflit pour faire sentir les analogies; quant aux différences elles sont très grandes : mais loujours nous ren- controns ce fait capital, de la séparation de l’anus et de la vulve, par un sternite, le neuvième. Si nous y insistons encore, c’est que bientôt nous allons étudier des Coléoptères présentant neuf urites, sans que les orifices qui s'ouvrent à l'extrémité de l'abdomen soient séparés par une pièce cornée. De plus, nous avons ici un de ces exemples simples et heureux montrant le premier pas des modifications si profondes qu'éprouvent les sternites pour de- venir un filament long et grêle, comme l’aiguillon d’un Cynips. DÉS INSECTES COLÉOPTÈRES. 17 Sternocera irregularis, Euchroma gigantea (Buprestides), Nous avons dit pourquoi nous étudions ces deux genres plus tard que les Toque-Maillets. Si nous les réunissons, c'est à cause de l'identité absolue de leurs armures. L'oviducte a son orifice séparé de l’anus par le sternite du neuvième urite qui forme l’armure. Celle-ci fait saillie en dessus du corps, quand on le presse fortement; elle se compose des mêmes pièces que dans les Taupins, mais avec des formes différentes. La partie anale est séparée à la partie vaginale par une pro- fonde dépression dont l’étendue égale celle de armure tout entière , et c’est vers la terminaison de cette dépression que s’o- père la jonction des deux parties. Cette particularité entraîne une disposition toute spéciale dans les épimérites, qui, fort grêles et allongées , ressemblent à des apophyses ; ils unissent le tergite tout petit qui abrite l'anus, et les épisternites bien développés qui cachent le sternite et la vulve. L'’épisternite et le sternite sont soudés entre eux. Le premier, recroquevillé, présente dans une échancrure latérale une pièce , qu’à la rigueur on pourrait regarder comme le sternorhabdite rudimentaire. L’angle antérieur de l’épisternite est uni intime- ment à l'épimérite ; son angle supérieur et médian, un peu en avant de l’échancrure dont nous parlions, est soudé aux angles du sternite ; son angle postérieur est libre, et placé sur les côtés de la fente vulvaire. Le sternile est fort, très résistant; mais sa pointe n’est pas aiguë, elle est mousse, un peu creusée en gouttière, Ses branches, qui l’unissent aux épisternites, sont plus où moins tordues. On voit queles différences principales qui séparent l’armure des Richards de celle des Taupins sont l’absence de sternorhabdites et l’allongement extrême des épimérites, la soudure du sternite avec l’épisternite, enfin l'éloignement de l’anus et de la vulve par une dépression profonde, M 3 Eli 8 LACAZE-DUTHIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMÈLLE Hydroplhilus piceus (Hydrophiliens). L'armure des Hydrophiles est formée par des pièces multiples, très peu résistantes qui font voir le commencement des dé- gradations, et le passage entre les parties solides des Dy- tisques et celles plus molles qui vont suivre. En tenant compte seulement du tergite, elle occupe la neuvième place, et précède immédiatement l’anus; elle est rentrée dans la dernière partie de l’abdomen , cachée sous les derniers tergites et sternites qui rentrent eux-mêmes; ceux-ci sont, comme nous l'avons fréquem- ment rencontré, profondément échancrés sur leur bord. Cette échancrure est surtout très marquée dans le tergite de l’ar- mure dont elle change la forme ; car il représente un fer-à-che- val, et, dans quelques exemples même, ses deux branches sont séparées sur la ligne médiane. Vers les angles antérieurs du tergite, on voit des pièces laté- rales , larges et triangulaires, dans leur partie supérieure, s’ap- pliquer de chaque côté du rectum. Leur angle postérieur est libre, tandis que l’antérieur se rapproche de l'extrémité du ergite; l’inférieur, opposé à la base qui unit les deux précédents, se prolonge en long appendice corné, qui descend jusque dans le voisinage de l’oviducte, où il se soude presque à angle droit avec une pièce transversale, qui le dépasse en avant et en arrière ; celle-ci fournit des insertions mnsculaires en avant, landis que, plus large en arrière , elle s’articule très nettement avec le reste de l'appareil. Ces deux parties réunies paraissent représenter l’épimérite. En arrière, un peu en dessus de la partie inférieure de l’épi- mérite, se trouve une sorte d’écaille concoïde, bombée en dehors, portant sur son bord antérieur, non loin de son articulation avec la pièce précédente, un appendice corné, qui se contourne pour en suivre le bord, se cacher sous elle, et se diriger enfin en arrière, assez loin, sous forme de pointe, ou de stylet aigu et libre ; nous croyons que ces pièces correspondent, la première, à l'épisternite ; la seconde, au slernorhabdite. Enfin en dessous, mais surtout en arrière, existe une pièce DES INSECTES COLÉOPTÈRES. 19 médiane impaire, difficile à décrire, car elle est complexe : c’est le sternite. Son bord postérieur se prolonge en deux épines plus courtes que les précédentes, soutenues à leur base par quelques filaments de matière dure. La substance cornée se partage en deux divisions : l’une d’elles se continue avec l’extrémité posté- rieure du sternite; l’autre descend, sur les côtés de l’orifice, d’une poche que l’on voit dans la profonde échancrure du bord postérieur. On pourrait mieux faire comprendre sa forme en disant que le sternite est en ler-à-cheval ; que ses branches se prolongent en stylet grêle et libre en arrière, qu'entre elles s'ouvre une poche annexe de la génération. L'oviducte s'ouvre au-dessous de cette pièce, et nous trouvons encore ici cette disposition, que toutes les fois qu’un sternite existe dans l’armure, il sépare l’anus de la vulve. 11 nous est facile de voir quelle différence l'Hydrophile pré- sente avec les Dytisciens. Dans ceux-ci les pièces cornées, dispo- sées de telle sorte qu’elles peuvent remplir le rôle d’oviscapte, acquièrent, en outre, une résistance très grande. Cette dernière qualité leur est donnée par un épaississement considérable , et surtout par des soudures étendues et des articulations parfaites, permettant un jeu à la fois facile et régulier. Ici, au contraire, les parties sont peu résistantes, et les articulations n'existent pas entre le sternite et les épisternites, le tergite et les épimérites. Si nous prenions chacune des pièces pour les comparer à celles des Hydrocanthares, les différences seraient bien plus grandes ; elles sont faciles à sentir par la simple opposition des descrip- tions. Il faut surtout rapprocher l’armure de l'Hydrophile de celle d’un Insecte que nous étudierons plus loin, du Blaps!, parce que l’on voit nettement dans ce rapprochement le passage que forme le premier entre les Coléoptères ayant un sternite postgénital, et ceux n’en ayant pas. Dans le Blaps, le tergite est profondément divisé; l’épimérite semble composé de deux parties; l’épisternite, plus ou moins recroquevillé, porte à son bord supérieur un stylet, qui rappelle tout à fait celui de l'Hydrophile ; mais il n’y a pas de sternite. 3e série Zooz. T. XIX. (Cahier n° 4 } 4 n 90 LACAZE-DUTIIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE La comparaison de ces deux armures peut servir à mon- trer la valeur des significations données à chacune de ces pièces, car le rapprochement des Blaps avec les Méloés, les Lampyres, ne permet pas de douter que, bien qu'avec des formes peu ordi- naires et très distinctes, elles ne soient des tergites, épimérites, épisternites , etc. S II. —Types intermédiaires où le sternite de l’armure moins développée commence à disparaître. Les Carabes, les Cicindèles, les Nécrophores et les Pimélies , nous offrent une armure moins solidement constituée que dans les insectes précédents, plus résistante que dans ceux qui forment le type le plus dégradé. Le sternite seul commence à perdre ses proportions habituelles; il se divise et avorte en partie. Quand les avortements portent sur une pièce, il existe toujours plus de difficulté à la reconnaître; non seulement parce qu'elle devient plus petite et perd ses caractères, mais encore parce que des incrustations cornées accidentelles, sans forme bien limitée, peuvent en imposer ; c’est ce que nous allons trouver dans les Carabiques. Le Carabus monilis et le C. catenulatus présentent une simili- tude absolue ; dans ce dernier les pièces sont peut-être un peu plus fortement unies et cornées. Ce sont là des différences insigni- fiantes. Le dernier sternite apparent du corps est très développé, pro- longé en pointe; il cache l’armure dans sa concavité : il est le septième; l’armure est au neuvième rang. Après avoir enlevé les élytres, on remarque très bien à l'extérieur le tergite qui lui correspond; il faut noter cette particularité, que le huitième tergite ne paraît pas à l'extérieur ; il est rentré sous le septième, en sorte que celui de l’armure semble avant la dissection être le huitième. L'anus et l’oviducte s'ouvrent près l’un de l’autre. Ils sont en- tourés par des pièces assez résistantes, que l’on peut considérer comme élant un tergile, des épimérites, des épisternites, des sternorhabdites et un sternite rudimentaire. DES INSECTES COLÉOPTÈRES. 51 Le tergite a la forme habituelle ; bien développé, il est placé commetoujours au-dessus du rectum, et c’est exactement près de l’échancrure médiane de son bord postérieur que s'ouvre l’anus, De ses bords latéraux partent deux apophyses tortueuses qui l’unissent aux épimérites. Ceux-ci, larges et irrégulièrement triangulaires, descendent sur les côtés, assez bas en dessous, et sont en connexion avec les épisternites par leur angle inférieur, Au-dessous d’eux, et ayant une étendue un peu moins grande, se voient les épisternites, qui sont obtus en arrière, terminés en pointe en avant, placés de chaque côté de la vulve. Leur bord postérieur donne insertion dans une grande étendue au ster- norhabdite ; l’angle extérieur est uni, par son sommet au rudi- ment de sternite, par son côté à l’épimérite. Le sternorhabdite est une pièce très distincte de la précédente, à laquelle il adhère par sa base, tandis qu'il est libre par son extrémité postérieure; vu de profil, il paraît se détacher com- plétement du reste de l’appareil. Quant au sternite, voici ce qui se présente. Sur la partie in- férieure membraneuse séparant les deux épisternites et touchant à la dernière partie de l’oviducte, on trouve deux languettes cor- nées qui marchent l’une vers l’autre sans se souder toutefois sur la ligne médiane. Faut-il les considérer comme étant le sternite postgénital, bifide, rudimentaire, bien que l’oviducte s'ouvre plus loin qu’elles? Cette circonstance de la division sur la ligne mé- diane de la pièce sternale nous expliquerait jusqu'à un certain point la position de la vulve. Mais on trouve dans jes parois de l’oviducte une pièce cornée résistante , impaire, médiane; dans le cas où on la considé- rerait comme le sternite, les autres seraient des appendices appartenant aux pièces que nous avons décrites. Nous verrons dans les Pimélies une disposition qui nous porte à admettre la première manière de voir. La Cicindele (C. campestre) a une armure composée de la même manière que le Carabe ; les formes des pièces sont un peu différentes. Ainsi le tergite semble être composé de trois pièces secondaires ; c’est une subdivision des parties, non une produc- 52 LACAZE-DUTHIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE tion de nouveaux éléments; l’épimérite s'articule directement avec le tergite, sans l'intermédiaire d’une apophyse. L’épister- nite, très manifeste, porte deux appendices plus ou moins crochus et longs qui sont, le plus grand, le sternorhabdite ; le plus petit, un prolongement de l’un des angles de l’épisternite. On ne rencontre pas dans ces insectes les deux linéaments cornés que j'indiquais sur la ligne médiane , et que nous regar- dions comme les rudiments du sternite; mais dans l’oviducte même on trouve des pièces analogues à celle des Carabes, Necrophorus Vespillo. Ces trois exemples font bien voir le passage d’une forme simple à une forme en apparence plus compliquée. Dans la Cicindèle, relativement aux autres parties, l’épimérite avait pris beaucoup de développement ; dans le Nécrophore cela augmente, et les pièces sternales sont non seulement rejetées en dedans, mais encore recouvertes par les parties épimérales qui semblent se rejoindre en dessous. Aussi, en considérant l’armure par la face inférieure, on voit, en allant vers l’anus, trois séries de pièces échelonnées, et de plus en plus internes, qui sont les épimérites, les épisternites et enfin les sternorhabdiles ; que si l’on désarti- cule ces pièces, on voit qu’elles se sont unies et reployées les unes sur les autres, à peu près comme les éléments d’un éven- tail; ne pouvant toutes prendre place à l'extérieur, elles sont rentrées. Du reste, chacune d’elles peut être reconnu avec la plus grande facilité. Les pièces sternales se terminent en pointes ou épines plus ou moins courbes, qui font paraître l’abdomen du Nécro- phore femelle armé de crochets. Pimélies (Pimelia punctata, P. barbara). La forme du corps, la soudure des élytres en un seul bouclier, la mollesse de la face abdominale supérieure, font rapprocher beaucoup ces insectes des Blaps. Nous les placons à la fin de DES INSECTES COLÉOPIÈRES, 9 cette série intermédiaire, parce qu'ils présentent un rudiment de sternite. Du reste, pour la forme des armures, ils servent de pas- sage entre les Carabes et les genres dont le Blaps commence la série. En pressant fortement l’abdomen des femelles, on fait sortir un tube membraneux assez long, qui porte à son extré- mité l’armure. Un zoonite, très petit, le dernier, se remarque à l'origine de ce tube, en sorte que celui qui paraît occuper le dernier rang ne termine pas l'abdomen; il est le deuxième avant- dernier. On voit les orifices de l’oviducte et de l’anus très nettement dessinés à l’extrémité de cette sorte de boyau saillant. L’unest au-dessous de l’autre et plus en avant. Les pièces cornées qui les entourent sont toutes fort grêles et allongées. Le tergite est formé par un filament corné ployé en forme de V, dont la pointe mousse répond à la marge supérieure de l’anus; on a vu dans l'Hydrophile un tergite présentant cette forme bizarre. Il n’a pas de connexion intime de soudure avec les parties latérales de l’armure. Sur les côtés, et parallèlement aux branches du tergite, on trouve une longue apophyse cornée, dont l’origine nous paraît incontestable : c’est l’épimérite. Courbée à son extrémité, elle se dirige vers la terminaison des branches du tergite ; il semble que c’est en ce point que les éléments de l’armure doivent se rappro- cher ets’unir. On comprend, du reste, que l’allongement extrême du tergite entraîne l’allongement des autres pièces tergales. Les autres parties sont d’abord deux sternorhabdites en partie libres, ayant la forme de crochets mousses relevés vers l’anus, et le dépassant un peu; ensuite deux pièces contournées placées entre l’épimérite et le rhabdite dont nous venons de parler : ce sont les épisternites. Ceux-ci se composent de deux portions : l’une, articulée avec l’épimérite , est coupée carrément en avant et en haut, festonnée en dessus, dont l’angle inférieur descend vers la fente vulvaire ; l’autre, courbée , forme une cavité su- périeure où vient se loger l'extrémité adhérente du rhabdite. Enfin, le sternite est représenté par deux plaques minces, peu solides, peu cornées, placées une de chaque côté de la fente vul- 51 LACAZE-DUTHIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE vaire, et en rapport, comme nous le disions plus haut, avec l'angle inférieur de l’épisternite. On voit, en résumé, que cette armure se compose absolument des mêmes pièces que celle des Carabes. Dans les deux cas, nous trouvons des rudiments de sternite. Nous avons dit qu’elle fait le passage entre les deux séries. En effet, supprimez les deux la- melles que nous avons considérées comme un sternite, allongez un peu moins le tergite, augmentez-en un peu l'épaisseur, et vous arrivez à la disposition que nous offrent les Blaps. S$ IL. — Types les plus simples où le sternite de l’armure manque. Dans le groupe des Coléoptères dépourvus de sternite post- génital, nous trouvons, en allant des armures les plus complexes aux plus simples, le Blaps, les Lucanes, les Lampyres, les Méloés et Lytta, les Géotrupes, les Calandra, les Hannetons et les Passales. Blaps gigas. On sait que, chez ces Insectes comme chez les Pimélies , les élytres sont soudés, et forment au-dessus dé l’abdomen un bou- clier résistant. On sait aussi que lorsqu'on les tracasse , ils ré- pandent une odeur des plus fétides, due à une humeur que sécrètent des glandes. Quand on examine l’abdomen , on trouve que les sternites apparents, profondément cornés, très forts, sont au nombre de cinq ; que les tergites , ainsi que la partie dorsale du métathorax , sont tout à fait membraneux ; à l’exception de celui qui répond au sixième sternite, et qui est seul corné. Les plis de la membrane dorsale correspondent assez régulièrement aux sternites ; mais on compte un segment de plus qu’à la face ventrale, en sorte que l’on peut admettre six urites apparents; en séparant les éléments du septième, on trouve caché sous lui un autre urite, le dernier avant l’armure. C’est au-dessous du sixième tergite , entre lui et le septième, que s'ouvrent les deux glandes en cul-de-sac de l'humeur puante ; leur orifice se trouve ouvert dans la membrane unissante des deux pièces tergales, et comme les parties qui suivent peuvent rentrer très profondément dans DES INSECTES COLÉOPTÉÈRES. 09 l'abdomen , il s'ensuit que l'humeur sort et s'échappe facilement au dehors. Nous avons indiqué cette disposition , parce qu’elle est peu commune; on ne voit pas souvent, en effet, des glandes s'ouvrir sur le dos avant les derniers zoonites. L’armure occupe le huitième rang. En étudiant l’abdomen en général, nous chercherons à expliquer cette position anor- male. Elle se compose, comme celle des Pimélies, de pièces latérales et d’un tergite très marqué, avec une échancrure profonde du bord antérieur, échancrure que l’on remarque aussi sur le septième sclérodermite. Ces premières sont plus irrégu- lièrement découpées que dans les Pimélies; mais, néanmoins, on les reconnaît avec grande facilité pour être l’épimérite, l'épister- nite et le sternorhabdite. L’épimérite se compose de deux parties : la supérieure, voi- sine du tergite, large, est appliquée comme une sorte de bouclier latéral sur la terminaison charnue de l’abdomen ; l’inférieure, plus étroite, dirigée en arrière , se termine par deux prolonge- ments, dont l’un, arrondi, mousse, n’est uni à aucune pièce, dont l’autre, pointu , inférieur au précédent, affronte le bord anté- rieur de l’épisternite. L’épisternite, d’abord large, vers le point oùil est uni à l’épi- mérite, se rétrécit peu à peu, el se bifurque en se redressant vers l'anus; la branche inférieure de la division se contourne en S, s’élargit un peu, et descend sur les bords de la vulve; la branche supérieure reste grêle, et porte à son extrémité le sternorhabdite, qui, de forme plus ou moins conoïde, s’allonge et dépasse l’anus ; l'extrémité pointue est libre. L’anus est saillant au-dessous et en arrière du lergite, au-des- sus des pointes libres du rhabdite ; la vulve se voit dans la fente membraneuse qui sépare les deux épisternites. Quand l’Insecte contracte ses muscles rétracteurs, l’armure rentre sous l’hebdurite, et celui-ci à son tour se cache dans l’ab- domen. 906 LACAZE-DUTHIERS. — AURMURE GÉNITALE FEMELLE Lucanes ( Lucanus Cervus), Cerf-Volant. On ne trouve dans ces Insectes, après Je huitième urite , que cinqpièces, entre lesquelles s'ouvrent l’oviducte et le rectum. Ces pièces sont plus simples que dans les Blaps, et plus complexes que dans les Lampyres. Le tergite qui précède immédiatement l’anus est profondé- ment échancré en arrière. Ses formes sont à la fois bizarres et élégantes ; mais elles n’offrent aucun intérêt. Sur les côtés, la pièce latérale, l’épimérite, rappelle assez celle de l’'Hydrophile ; du moins, quant à la partie supérieure qui s’ar- ticule nettement avec les extrémités du tergite , elle se porte en avant, où elle rencontre l’épisternite , après s’être allongée et terminée en appendice grêle. Celui-ci fait avec l’épimérite un angle très aigu : c’est dire qu'il se dirige en arrière. Formé d’une pièce résistante, il est uni par son extrémité postérieure au sternorhabdite et n’atteint pas tout à fait l’orifice vulvaire, tandis que celui-ci le dépasse de toute sa partie libre. Le rhabdite est composé de deux portions bien distinctes : l’une, adhérente, est fixée presque aux parois de l’oviducte; l’autre, en forme de palette, est hérissée de quelques poils. L’armure du Lucane se rapproche assez de celle des Taupins, si l’on supprime dans ceux-ci la pièce sternale. C’est la présence de cette pièce, dans les groupes qui ressemblent le plus à ceux ne l'ayant pas, qui nous empêche d'admettre, avec quelques au- teurs, que dans les Dytisques, par exemple, la tarière est l'ana- logue des deux pièces soudées en une seule, que nous appelons ici sternorhabdites. Lampyres (Lampyris noctiluca), Vers luisants. Simplifions, régularisons les pièces des Blaps; conservons-en le nombre, la position et les rapports, et nous aurons l’armure des Vers luisants. Elle occupe sa place habituelle , le neuvième rang, le dernier; et se compose d’un tergite petit, mais sem- blable à ceux qui la précèdent ; d’un épimérite, large, latéral , DES INSECTES COLÉOPTÈRES. 57 présentant deux apophyses : l’une, antérieure, qui sert à des insertions musculaires; l’autre, postérieure, qui s’unit à l’épi- sternite. Celui-ci, placé en arrière et non en dessous de l’épimé- rite, est assez régulier ; sa terminaison en pointe en avant est en rapport avec l’apophyse postérieure de la pièce précédente ; enfin les sternorhabdites, en forme de stylets articulés avec l’épi- sternite, dans une échancrure postérieure , assez profonde sont très nettement marqués. L’anus fait saillie en arrière et en dessous des tergites; la vulve, placée entre les deux épisternites, s’avance au delà de l’orifice anal. Meloe Proscarabœus. Lytta vesicatoria, Cantharides. Ces deux genres, très voisins au point de vue des caractères, de famille, ne le sont pas moins, au point de vue de la compo- sition de leur armure femelle. La description de l’un peut servir à l’autre ; les figures se ressemblent beaucoup dans l’un et l’autre cas ; aussi pouvons-nous les décrire ensemble. On comprend que l’armure doit se ressentir de l’état de mol- lesse générale de l’abdomen ; en effet, les pièces sont petites, peu cornéifiées. Très reconnaissables toutefois, leur analogie avec celles des Lampyrides est frappante; elles sont très régu- lières, et occupent des positions telles , que l’origine qui leur est assignée est bien plus évidente que dans les Blaps. Le tergite occupe la ligne médiane ; il est pour sa forme sem- blable à ceux qui le précèdent. L’épimérite, placé sur les côtés et au-dessous de lui, est régulier, obtus en arrière, en croissant très peu marqué. [angle supérieur semble se diriger vers l’un des angles antérieurs du tergite dont il est assez éloigné , tandis que l’angle inférieur est en connection avec le prolongement apophysaire antérieur de l’épisternite. Celui-ci, plus allongé que dans le Lampyre, présente en arrière une échancrure, où se loge l’extrémité adhérente du rhabdite sternal, qui se présente comme un tubercule allongé, libre à l’un de ses bouts. La ténuité des pièces fait que l’oviducte et le rectum s'ouvrent très près l’un de l’autre ; du reste, ici comme dans les Vers lui- 08 LACAZE-DUTHIERS, — ARMURE GÉNITALE FEMELLE sants, l’ensemble des parties composant l’armure occupe le neu- vième rang dans l’abdomen. Geotrupes stercorarius. Nous rencontrons dans cette espèce une armure plus simple, plus rudimentaire, avec une particularité qui trouvera son appli- cation, quand nous nous occuperons de l’abdomen en général. L’anus et la vulve sont très rapprochés : la vulve offre des dimensions considérables; sur son bord antérieur est une petite pièce cornée en forme de fer de flèche, dont les angles opposés à la pointe sont un peu recourbés; nous discuterons plus loin s’il faut la considérer comme un sternite. Au-dessus de l'anus paraît le tergite, assez large et bien formé ; il occupe le neuvième rang. De chaque côté, sur ses bords laté- raux , et parallèlement à eux, on voit deux pièces : l’une, plus voisine et plus grande, occupe la place habituelle de l’épimérite, et doit être regardée comme lui correspondant; aussi longue que le tergite, elle est moins large; l’autre, grêle, apophysaire, un peu courbée, n’est adhérente que par sa moitié antérieure. Libre dans le reste de son étendue, terminée par un bouquet de poils, on la voit immédiatement au-dessous de l’épimérite et sur les côtés ; on peut, je crois, la regarder comme représen- tant l’épisternite, ou au moins les parties latérales du segment sternal, Dans une préparation où ne sont conservées que les trois pièces précédentes et les orifices naturels qu’elles entourent , on voit bien distinctement que la vulve est en avant et au-dessous d'elles ; en sorte que, par leur simple position, elles semble- raient indiquer qu’elles sont postérieures à l’orifice génital. Calandra palmarum, Charançons. Cette espèce est grande et facile à étudier , relativement aux variétés si peliles qui composent cette innombrable famille des Charançons : la plupart présentent une grande analogie avec celle-ci; aussi peut-on la prendre pour type. L'abdomen nous DES INSECTES COLÉOPTÈRES, 59 servira à montrer le développement disproportionné que prend quelquefois la partie sternale et les déplacements qui en sont la conséquence. Quand on cherche l’armure, on trouve une sorte de cornet courbe, placé entre les deux dernières pièces abdominales apparentes ; il faut le dire au premier abord , cette disposition nous a beaucoup étonné et même embarrassé. Cette pièce est fendue sur son côté convexe comme sur son côté concave ; on voit le rectum s’enfoncer dans la fente du côté convexe, et l’ovi- ducte se perdre dans la partie concave. Roulée sur ses bords en dessous, cette pièce forme une véritable gouttière , dans laquelle on ne tarde pas à reconnaître l'existence de nouvelles parties groupées autour des orifices de la génération et de la digestion, La première, qui frappe la vue, est longue, Lout à fait apophy- saire en avant, un peu plus large en arrière, et recroquevillée en goultière. Sa longueur et sa courbure sont à peu près égales à celles de la première pièce, en sorte que l’une et l’autre se correspondent. C’est vers l’extrémité de celle-ci que s'ouvre l’oviducte dans une sorte d’enfoncement, au-dessous de l’anus, Ces deux pièces doivent être considérées comme le dernier urite, profondément modifié dans sa forme, mais complet dans ses élé- ments habituels, car on y retrouve un tergite et un sternite. Ces pièces ne forment pas l’armure ; mais certainement elles en rem- plissent en grande partie le rôle. L’armure nous présente une modification très importante que nous n’avions pas encore rencontrée. Il n’entre plus de tergite dans sa composition; ainsi nous voyons successivement dispa- raître les parties qui, habituellement, persistent et offrent le plus de fixité. On ne trouve, en effet, dans les Calandra que des pièces latérales placées sur les côtés de l’oviducte, et qui ressem- blent d’une manière frappante à celles que, dans le Méloë (M. Pro- scarabæus), nous avons considérées comme l’épisternite et le ster- norbabdite ; il manquerait donc de plus l’épimérite. La pièce large (relativement, bien entendu, à l’allongement et au peu de développement des autres), placée sur les côtés de la vulve, donne insertion, en arrière , à un appendice libre en forme de stylet mousse couvert de poils, et en avant à une apophyse 60 LACAZE-DUTHIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE musculaire très allongée. L'ensemble de ces trois parties rappelle, comme je le disais, d’une manière frappante ce que l’on trouve dans les Cantharidiens. Cette longue apophyse musculaire a cer- tainement pour but de faire sortir la vulve du profond cul-de- sac où elle se retire pendant le repos. Melolontha vulgaris, Hanneton. Nous n’avons plus que deux exemples à étudier, le Hanneton et le Passale. Je ne sais s’il y a de grandes raisons pour placer l'un avant l’autre ; les armures sont si simples, que les degrés du plus ou moins sont bien peu sensibles. Quoi qu’il en soit, l’ovi- ducte et le rectum s'ouvrent sous ce long tergite crochu et pointu qui termine l’abdomen; en écartant le sternite, on voit un infun- dibulum membraneux, véritable cloaque, où se placent les deux orifices. C’est là aussi qu’est l’armure, si toutefois on peut donner ce nom à deux plaques légèrement cornées, placées de chaque côté de la vulve; leur forme et leur direction n’ont rien de parti- culier qui mérite de nous arrêter; de tout côté unies aux mem- branes, elles doivent être regardées comme les représentants des parties latérales du zoonite, des épimérites ou des épisternites. Il est encore deux impressions cornées qu'il faut signaler. En fendant l’oviducte en dessous, on voit qu'il renferme dans la par- tie supérieure deux petites pièces très peu étendues et très peu résistantes, Sont-elles des représentants du sternite postgénital à l’état rudimentaire ? C’est ce qu’il est dificile de dire. Passalus transversalis. L’abdomen porte huit urites très manifestes, En écartant le sternite et le tergite du huitième, on voil les orifices rapprochés de l’anus et de la vulve, et entre eux, sur les côtés , une pièce, en grande partie libre. C’est à cela que se réduit l’armure, en sorte qu'ici nousne trouverions qu'une pièce latérale pour repré- senter l’urite postgénital ; il nous serait impossible de dire si elle représente l’épimérite ou l’épisternite; nous devons ajouter que par son extrémité adhérente, elle semble s’articuler avec l’hogdo- DES INSECTES COLÉOPTÈRES. 61 tergite par un petit appendice apophysaire. Malgré cela, je crois qu'il convient de la considérer comme dépendant de l’ennatu- rite à peu près avorté, et non comme un rhabdite tergale de l'hogdurite. SIV. — Composition de l'abdomen. Généralités. Historique. Nous arrêtant peu sur la formation de l’abdomen dans les descriptions précédentes , nous nous sommes contenté d’as- signer le rang de l’armure , et nous avons vu qu’elle occupait toujours le neuvième ou dernier. Il semble y avoir quelques exceptions au nombre des urites prégénitaux. Il faut donc cher- cher maintenant, si ces différences, plus apparentes que réelles, ne peuvent pas être attribuées à des particularités qui disparais- sent par un examen attentif. Dans le premier groupe, que nous avons étudié , les Hydro- canthares, on compte huit urites prégénitaux ; la tarière occupe le neuvième rang, après elle s'ouvre l'anus, avant elle l’oviducte. Ici tout est dans l’ordre, rien n’est changé à la position de l’orifice de la génération. La forme des sternites mérile de nous arrêter, car nous verrons des choses embarrassantes qui peuvent toutefois être expliquées par des termes de comparaison intermédiaires. Le développement des métasomites, nécessaires à l’insertion des muscles natateurs, puissants, fait s’avancer très loin le métaster- nite. Dans les Cybister , cette pièce a autant d’étendue à elle seule que toute la face inférieure de l’abdomen. Il arrive ici quelque chose d’analogue, mais en sens opposé à ce que nous avons vu dans les Sirex, Phytocores et Ptyèles, où la tarière, remontant vers le thorax, refoule les anneaux abdominaux en avant ; on ne compte, en effet, que cinq ou six sternites dans les Dytisciens, mais en y regardant de près, on voit que les proto- deutéro- et tritosternites , rudimentaires ou réduits aux parties latérales seulement, n’ont élé modifiés que pour faire place au métasternite. Le nombre des tergites est, au contraire, parfaitement appré- ciable. Le huitième paraît très bien sous les élytres, et par con- 62 LACAZE-DUTHIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE séquent il n’y a pas de doute possible; celui qui le suit et appar- tient à l’armure est donc l’ennatotergite. Dans les Hydrophiles, les choses sont semblables pour le dos à ce que nous venons de voir; sept urites sont apparents, l’hogdo- tergite est rentré, l’ennatotergite dépend de l’armure. A la face inférieure, on compte à l'extérieur cinq sternites ; un est rentré, c’est le sixième ; il précède l’armure. Mais si, ne se contentant pas de cet examen superficiel, on désarticule les pièces, on en trouve une de plus entre le cinquième et le sixième sternite, Le dernier tergite et le dernier sternite, ceux qui précèdent l’armure, rentrent , se correspondent exactement, et forment, à n’en pas douter, l’hogdurite, L’hebdurite serait-il formé par le septième tergite et le sternite, qui, lui correspondant, termine avec lui l'abdomen ; ou bien par le septième tergite et la petite pièce cachée indiquée plus haut entre les cinquième et sixième sternites apparents? Dans la première opinion, que serait la pe- tite pièce sternale? Serait-elle due à un dédoublement des parties voisines? Dans la seconde , elle deviendrait le septième sternite ; mais alors, pour nous expliquer les rapports du septième tergite _avec le sixième sternite, il faudrait admettre un déplacement de toute la partie sternale, qui reporterait d’un rang en arrière tous les sclérodermites ; le déplacement ne disparaîtrait que dans l’urite avant l’armure , alors un sternite manquerait pour ainsi dire de tergite, et se placerait sur la face supérieure du précédent. On peut croire à ce déplacement, car nous en verrons dans d’autres espèces des exemples très manifestes, Quoi qu’il en soit, l’'Hydrophile ne présente à son abdomen que neuf uriles, un post- et huit prégénitaux. Nous retrouvons les choses bien nettement caractérisées dans les Élatérides. Le Pyrophorus et l'Agripnus ont manifeste- ment sur le dos huit tergites ; celui de l’armure est le neuvième; on n’en compte que cinq en dessous ; le dernier, allongé, termine l'abdomen par une sorte de carène. Il faut admettre l’avorte- ment des proto- et deutérosternites ; le huitième est caché sous le septième. Dans les Sternocera et Euchroma, cette disposition est évi- DES INSECTES COLÉOPTÈRES, 63 dente. Les abdomens très volumineux de ces insectes permet- tent de bien voir que le premier sternite apparent répond à trois tergites. Tous les autres sclérodermites abdominaux correspon- dent exactement à chacune des pièces dorsales ; on est conduit à admettre l’avortement des pro- et deutérosternites. Ces exemples, les plus complets quant à l’armure, suffiraient pour montrer que le nombre des urites est constant. En conti- nuant l'examen, on voit que dans les Carabes, Cicindèles et Nécrophores, il persiste, et que l’avortement porte sur les proto- et deutérosternites toutes les fois que le deuxième et le troisième, surtout dans les Carabes, sont encore représentés par les parties latérales. Arrivons aux exceptions. Les Blaps ne portent que huit urites, On sait qu'à l’exception du dernier, tous les tergites sont mem- braneux; le notum du métathorax participe même à ce caractère que la forme des élytres et l’avortement des ailes peuvent expli- quer. Mais la membrane tergale est plissée transversalement et chaque pli correspond à un sternite ; malgré tous les soins em- ployés à bien examiner, l’armure a toujours paru occuper le hui- tième rang. Quoi qu’il en soit, l'anus et la vulve ne présentent pas une position diffèrente de celle qui existe lorsque le nombre est neuf. Nous pourrions donc admettre que le protonotite, habituelle - ment moins évident que les autres, échappe ici à l’observation, à cause de l’état membraneux général. Dans les Vers luisants, les Lylta vesicatoria, le nombre d’urite est huit, neuf avec l’armure. Mais nous trouvons quelque chose d’analogue à ce que nous indiquions pour le Blaps : le Méloé (Proscarabœus), dont la ressemblance avec le Lytta et même le Lampyre est excessive au point de vue de l’armure, n’a d’appa- rent que huit uriles en lout, N'est-il pas évident que l’état de mollesse de ses téguments abdominaux causc cette différence, qui certainement n'existe pas au fond et n’est qu'apparente ? Dans les Passales et Mélolonthes, on compte à l’extérieur huit urites ; dans les Géotrupes on en compte également huit, l’ar- mure correspond au neuvième; mais ici, suivant que l’on consi- GA LACAZE-DUTHIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE dère cette petite pièce en forme de V, placée dans la lèvre infé- rieure de la vulve, comme un sclérodermite normal ou comme accidentellement développée, on doit aussi considérer les sterniles et tergites comme plus ou moins obliquement disposés les uns par rapport aux autres. Si cette petite pièce est un sternite prégé- nital, elle appartient au, huitième urite qui termine l'abdomen; dans cette manière de voir, il n’y aurait que le protosternite d’a- vorté; dans le cas contraire, le proto et le deutéro disparai- traient. Le manque de relation des sclérodermites du dos et du ventre est surtout Lrès prononcé dans les Calandra, où l’on ne trouve en dessous que cinq plaques, tandis qu’on en compte sept en dessus, Les deux premières inférieures sont à elles seules plusétenduesque les trois autres, elles correspondent aux cinq premières dorsales ; la première surtout semble correspondre à quatre tergites. Cet exemple nous montre combien les tergites et les sternites d’un même zoonite peuvent perdre leurs rapports. Nous avons indiqué la modification profonde qu'éprouvaient les éléments du huitième urite ; il est inutile d’y revenir. Cet abdomen du Calandra rentre exactement dans les types habituels, et cependant, quand on l’étudie pour la première fois, il paraît très difficile de l'y rap- porter. L’armure, considérée en général, est, comme on a pu le voir, d’une grande simplicité dans les Coléoptères. Elle est formée par les éléments facilement reconnaissables d’un seul urite post- génital, en sorte que les Coléoptères, comparés aux ordres précé- dents, nous offrent celte différence que les deux urites préanal et anal avortent. Nous ne pouvons, du reste, comparer les oviscaptes que nous avons étudiés dans les Dytisques avec ceux que nous connaissons, si ce n’est au point de vue des parties élémentaires, et celle comparaison s'établit d'elle-même par l'application de la nomenclature. L’armure, comparée à elle-même dans l’ordre, nous a paru se rapporter à trois types distincts, suivant que le sternite existait, avorlait presque, au disparaissait tout à fait, I nous a été facile de saisir les passages insensibles qui des DES INSECTES COLÉOPTÈRES. 65 premières espèces nous faisaient arriver aux dernières, où véri- tablement l’armure très dégradée semble mème disparaitre. Ainsi dans les Hydrocanthares, le sternite robuste, bien déve- loppé, peut servir d’oviscapte; dans les Élatérides, sa force di- minue ; dans les Carabes, la pièce commence à avorter ; dans tous les autres, elle n'existe pas. — Voilà la loi de dégradation que suit le sternite; nous avons eu l’occasion de le dire souvent, c’est la partie sternale qui est la moins fixe et disparaît la première. Mais le tergite peut aussi éprouver les mêmes changements, et dans les Mélolonthes, les Passales, les Calandra, etc., il dispa- raît complétement. Alors l’armure n’est plus représentée que par les rudiments de pièces latérales, On le voit, l’armure, en se dégradant dans les Coléoptères, a été moins complète, moins complexe que dans les autres ordres ; puis en perdant successivement quelques uns de ses éléments, elle a fini par disparaître, Ces trois groupes de formes sont loin de répondre aux grandes divisions de l’ordre; aussi pouvons-nous dire ici que l’armure ne présente pas de caractères propres à faire distinguer les pre- mières coupes établies au milieu de ces nombreux insectes. Toute- fois les genres voisins, comme.les Méloé et Lytta, Pimélie et Blaps, Dytiscus et Cybister, Sternocera et Euchroma, etc., etc., présentent une grande ressemblance. Peut-être l’armure pour- rait-elle, en arrivant aux dernières subdivisions, avoir une im- portance qu’elle n’a pas dans les premières. C’est là une idée que nous avons surtout eu occasion d'émettre dans le courant de ce travail. Les fonctions des organes génitaux externes sont nulles dans le plus grand nombre des cas. Cependant, il en est où la force, la disposition et la forme permettent à l’insecte de s'en servir à la manière des tarières. Il est incontestable, par exemple, que les Dytisciens ne fassent pénétrer leur sternite représentant un véritable gorgeret, et qu’à la faveur de cette sorte de gout- tière protectrice, l’oviducte, qui peut sortir en forme de doigt de gant, ne porte les œufs dans l’intérieur même des parties incisées. 3° série. Zooc. T. XIX. (Cahier n° 2 )! 5 66 LACAZE-DUTHIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE Quelques petites espèces d'Hydrochantares ont même des pièces cornées dentelées, qui indiquent certainement l’action de diviser ; à part ces exemples, les fonctions de l'armure deviennent très obscures ; dans les Calandra palmarum, i n’est pas douteux que ce ne soit le tergite prégénital qui remplisse les mêmes fonctions que le sternite des Dytisciens. Dans les Richards, on trouve encore un sternite bien consti- tué, mais il est fort petit et ne doit pas avoir une action bien im- portante, bien grande. C’est plutôt l’ensemble de l’armure qui, faisant saillie au dehors avec l’urite prégénital, porle au loin les œufs dans des corps toutefois peu résistants. 11 nous est impos- sible d'admettre les opinions de V. Audouin touchant le rôle de l’'armure très incomplète des Cantharidiens; cet auteur pense qu'elle a pour but de retenir la verge dans le vagin. Dans son histoire anatomique des Cantharides, il dit en effet (1) : « Après » l’oviducte vient un vagin qui n'offre rien de remarquable, si » ce n’est qu'il est clos par deux petites pièces cornées, cupuli- » formes, mobiles, et munies à leur centre d’un tubercule. Ces » deux appendices, en jouant l’un sur l’autre, compriment néces- » sairement le pénis du mâle, qui finit par se rompre ainsi que » nous le verrons bientôt. » Ces pièces cornées sont si peliles et si faibles, qu'il nous paraît peu probable qu’elles puissent sépa- rer la verge; la tuméfaction succédant à l'introduction nous pa- rait bien plutôt la cause de l'impossibilité où est le mäle de re- tenir son organe. Les auteurs se sont bien moins occupés des organes génitaux externes des Coléoptères que de ceux des autres insectes; cela se comprend , ils sont moins saillants. Burmeister en a parlé dans la classification des vagins; V. Au- douin s’en est occupé pour les Cantharides : M. Léon Dufour en a décrit quelques uns à sa manière habituelle ; et enfin Stein (2), dans un ouvrage très considérable, consacré exclusivement à l'étude des organes de la génération, en a donné des descriptions (1) Ann. des se, nal., sér. 4"°, t. IX. (2) F. Stein, Vergleichende Anatomie und Physiologie der Inseclen in mono- graph en Bearbeitet, Berlin , A847 DES INSECTES COLÉOPTÈRES. 67 générales et séparées. Il a consacré son second chapitre à la description générale du cloaque, et des pièces solides constituant les organes externes. Il appelle cloaquela cavité qui se forme entre ces deux derniers segments solides apparents. Il donne le nom de tube recto-vaginal à la terminaison abdominale rentrée dans ce cloaque, et il dit que ce tube peut faire saillie à l'extérieur, que c’est sur lui qu’on rencontre les différentes pièces au nombre de trois : l’une dorsale, qu'il nomme Analplatte, et qu'on doit considérer comme un tergum; deux latérales, Seitenstücke, et deux plus inférieures, F’aginalpalpen , voisines de la vulve, en général courbées, libres et poilues à leur extrémité. D’après la description de ces trois parties, on voit qu’elles correspondent l'Analplatte au tergite, le Seitenstücke à l’épimérite, le V'aginalpal- pen aux épisternites et sternorhabdites réunis. Il émet cette opinion que les organes génitaux externes sont dans leur ensemble formés par un dernier segment abdominal qui est le neuvième. A la fin de ce chapitre général, on trouve un exposé histo- rique des travaux faits sur l’armure ; les opinions de Burmeister, Newport, Léon Dufour, etc., y sont rapportées. C'est le seul auteur qui ait étudié les rapports de l’armure avec le reste de l’abdomen ; c’est surtout le seul qui ait cherché à en donner une idée générale. Avant lui, on avait trouvé que la pièce anale était un tergum, la ressemblance avec ceux qui la précèdent ne permettant, dans la majorité des cas, aucun doute à cet égard. Stein décrit, comme une pièce accessoire, la pièce que dans l’Hydrophile nous avons nommée sternite, On voit, par ce seul fait, combien diffèrent nos appréciations touchant les éléments de l’armure. Il est conduit à donner peu d'importance à celte partie, parce qu’il considère, dans les Dytisciens, l’oviscapte comme formé par la soudure sur la ligne médiane de ses deux vaginipalpes, qui dans les Hydro- philes sont libres et très évidents, Mais nous demanderions alors comment il faut considérer le sternite des Taupins, Euchroma, Sternocera, qui existe en même temps que les vaginalpes ? Ceci prouve que l’auteur dont nous nous occupons n’a pas rap- porté les pièces de l’armure des Coléoptères au zoonite primi- 68 LACAZE-DUTRIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE tif: cela est évident encore par ce qu'il ajoute sur les parties latérales. Dans quelques exemples, on voit, dit-il, que les paèces laté- rales (Seitenstücke) sont les pièces sternales du huitième segment unies au neuvième. La notation des pièces sternales n’est pas la même que celle des pièces tergales ; ainsi, le n° 8 du dos correspond au n° 7 de l'abdomen, ce qui nous permet de penser que l’auteur ne consi- dère pas les sternites comme étant en nombre égal aux Lergites. Quant à ce que les pièces latérales (Seitenstücke) soient les par- ties slernales du huitième segment, cela nous paraît une erreur. Stein en admettant neuf urites n'indique pas d’une manière absolue le point où se trouvent l’anus et la vulve; il ne dit pas si ces deux orifices sont séparés ou rapprochés, et nous avons vu qu’il est très important de s’expliquer pourquoi il y a, tantôt rapprochement, tantôt séparation. A la solution de cette ques- tion se rattache, comme nous le verrons, la détermination positive de la place de la vulve dans les insectes. L'auteur n’a point fait une comparaison de l’armure génitale femelle des Coléoptères avec celle des autres ordres; aussi n'a-t-il émis des opinions sur l’origine des pièces, que pour les Coléoptères ; et la chose est facile au moins, si l’on considère le segment comme formé seulement d'un tergite et d’un sternite. 11 semblerait que Stein n’a cherché , dans la description générale, qu’à trouver ces deux éléments. Ce que je désirais établir, c’est que l’auteur allemand ne s’est pas placé au même point de vue de généralisation que nous ; la preuve en est dans les origines différentes que nous attribuons l’un et l’autre aux pièces latérales (Seilenstüclie), aux parties in- féricures (F’aginalpalpen). Enfin, tout en reconnaissant quel est le nombre des uriles, il ne paraît pas lavoir rallaché à un autre plus considérable, à celui que nous pensons être norinal dans toute la classe. Nous ne pouvons, du reste, que renvoyer, pour les détails, au magnifique ouvrage de Stein. Les nombreuses planches qui l’ac- compagnent servent, non seulement à l'intelligence d’un ‘texte DES INSÉCTES DIPTÈRES. 69 fait avec tout le soin que les Allemands apportent, en général, à leurs travaux, mais encore à en faire une des plus belles mono- graphies des organes de la génération des Coléoptères. Il est très difficile de s'occuper de l’anatomie des Coléoptères, sans parler du travail de M. Slrauss-Durkeim. Cet auteur, restreignant les observations à une seule espèce, a bien re- connu les plaques voisines de la valve dans le Hanneton ; mais il n’a pas recherché leur origine et ne les a pas comparées, surtout aux armures des autres Coléoptères. DE L'ARMURE GÉNITALE FEMELLE DES INSECTES DIPTÈRES. On ne trouve plus de tarière proprement dite dans cet ordre. Les auteurs ont bien indiqué la présence d’oviscaptes ; mais nous verrons que ce nom devient imprepre, car il s'applique toujours dans notre esprit à des instruments assez complexes et complets, et les parties qui entourent l’orifice de la génération de quelques espèces sont loin de présenter ces conditions. Ainsi la Mouche, pour déposer ses œufs sur les animaux morts ou les viandes en décomposition, fait saillir de son abdomen un long tube qui porte les germes au fond des cavités; les Tipules, au moment de la ponte, font pénétrer l'extrémité de leur abdomen dans la terre molle des bords des eaux. Dans l’un et l’autre cas, on a signalé l’existence d’un oviscapte, mais ces quelques mots suffisent pour indiquer des différences correspondant à des orga- nisations qui ne se ressemblent pas; elles représentent deux types d’armures, entre lesquels on en rencontre un troisième in- termédiaire. Après ces trois formes plus complexes de l’ordre, on trouve des organes d’une simplicité extrême. Nous en for- merons un quatrième type. Sans nous préoccuper, plus ici que précédemment, du groupe- ment méthodique des genres, nous les étudierons successivement en partant des plus complexes pour arriver aux plus simples ; mais nous ne pouvons néanmoins nous empêcher de dire 70 LACAZE-DUTHIERS, -— ARMURE GÉNITALE FEMELLE qu’ils correspondent en général à des divisions très naturelles. Ainsi les Tipules, les Asiles, les Volucelles etles Mouches, enfin les Sépedons et Téichomiza , voilà les représentants des Lypes que nous allons étudier. On voit que le degré plus ou moins grand de complication correspond assez à la position plus ou moins élevée de l’insecte dans l’ordre, au moins dans la distribution admise par M. Macquart. SE. — Tipulaires. On sait combien sont nombreuses les espèces de cette division. Leurs larves se développent tantôt dans la terre, les champi- gnons ou les autres plantes sur lesquelles elles déterminent la production de galles. De là les divisions des Tipulaires en terri- coles, florales, fungicoles, gallicoles, etc., admises par les au- teurs, et plus particulièrement par M. Macquart (1). L'une des divisions, celle des gallicoles, semblerait devoir faire rencontrer des insectes munis d’une larière. Mais si l’on étudie les galles produites par les Cécidomyes et autres, on remarque qu’elles appartiennent pour la plupart à cette classe que, dans un travail sur la structure de ces productions, nous avons appelée galles internes fausses (2), et qui correspond à de simples hypertro- phies. En effet, on voit que c’est entre les feuilles ou écailles dés bourgeons du Saule, de l’Euphorbe, etc., que la mère dépose ses œufs, et que la larve, par ses succions et irritations, détermine les modifications que présente plus tard la partie de la plante. Ce n’est donc pas à l’action d’un instrument qu'est due la galle, comme cela a lieu pour les nombreux Hyménoptères gallicoles. Disons toutefois pour faire nos réserves, que l’histoire des galles et des Insectes diptères qui les habitent mérite d’attirer l'attention du naturalisle, car bien des points douteux doivent être éclaircis. !l est nécessaire de bien fixer la position des pièces lamellaires (1) Diptères, Macquart, Suites à Buffon, édit. Roret. (2) Comptes rendus de l'Académie des sciences, avril 1853 ; docteur Lacaze- Duthiers, Recherches sur la structure des galles. DES INSECTES DIPTÈRES. TE qui composent en partie l’armure, à cause des soudures qui les unissent aux zoonites voisins. On compte facilement du thorax aux premières pièces lamel- laires sept uriles complets composés d'un tergile et d’un sternite sans aucune particularité. [ L'hogdotergite est plus petit que le septième; il correspond à un sternite bombé en dessus , long, terminé par deux lamelles cornées, un peu tranchantes, qui se dirigent vers l’anus sans ar- river toutefois jusqu’à lui. Après ce huitième urite on trouve l’en- natotergite et le décatotergite; celui-ci se prolonge par deux ap- pendices semblables à ceux que nous venons d’indiquer. Si l’on écarte ces pièces terminales, on voit que l’oviducle s'ouvre au-dessous des parties multiples cachées, qui sont appen- dues au neuvième tergite, par conséquent entre le huitième et le neuvième urite ; enfin l’anus est placé entre les deux lamelles les plus terminales. Laissons le décaturite et les pièces anales, ainsi que tous les urites prégénitaux, pour ne nous occuper que du neuvième, qui correspond à l’armure et la forme en entier. En examinant avec soin l’hogdosternite, on remarque que les appendices cor- nés qui sont unis à son bord postérieur, s’articulent avec lui, qu’en détruisant cette articulation, ceux-ci restent fixés à l’ar- mure ; c’est qu’en effet ils en dépendent. Nous allons trouver ici des choses bien différentes de celles que nous avons déjà étudiées ; il sera du moins, je l’espère, possible de les rapporter à ce que nous avons admis, et de les faire rentrer dans l'ordre d’idées que toutes les recherches précédentes ont eu pour but d'établir. Le tergite est petit, relalivement à ceux qui précèdent; il a leur forme et n’en diffère aucunement, A l’angle mousse que forment ses bords postérieurs et latéraux, vient affronter une pièce contournée, qui se porte d’abord en avant, puis en bas, et se termine par une apophyse grêle; celle-ci se dirige en arrière, et s’unit à une sorte de pelote ovoïde, dure, brunâtre, dont la couleur foncée tranche sur la teinte plus claire du reste du sclé- roderme, Enfin, sur le bord inférieur de ces deux pièces carac- 72 LACAZE-DUTILERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE téristiques par leur couleur et leur forme rénale, partent des appendices qui les unissent aux lames dont nous avons parlé plus haut , et que nous avons dit être soudées au huitième sternite. Telles sont les parties latérales symétriques en connexion avec les tergites. Il existe encore une pièce ; elle est l’impaire médiane , et sou- dée avec les deux premières parties indiquées de chaque côté du tergite. On l’apercoit comme un crochet dirigé en arrière, quand on écarte les valves. L’oviducte et les différentes poches ou glandes, qui se rapportent à la génération, s'ouvrent au-des- sous d’elle. La siguification de chacune de ces parties nous parait la sui- vante, 11 n’y a pas de doute pour le tergite; il occupe le rang et la place ordinaire. La pièce médiane impaire, que nous signa- lions en dernier lieu, est un sternite, le neuvième, Quant aux la- lérales , elles sont les épimérites et les tergorhabdites. Quelles sont les raisons qui motivent celte manière de voir? D'abord le sternite ne pourrait être rapporté à aucun autre élé- ment du zoonite, car ici il est médian impair ; placé au-dessus de l’oviducte, el de tous les annexes de ce conduit, il correspond exactement au lergile, elsi son peu de développement, sa forme, pouvaient faire croire que l'interprétation est fausse, nous répon- drions que dans les ordres précédemment étudiés, nous avions été conduits à regarder comme sternites des pièces bien plus ru- dimentaires, ou modifiées dans leur forme. Les parties latérales sont multiples; il nous paraît préférable de les regarder comme des dépendances de l’épimérite que d’ad- mettre la présence de l’épisternite, nous fondant sur ce fait, que souvent le premier est représenté par plusieurs pièces, et que le second ne sépare pas le tergile de ses dépendances, comme on serait obligé de l’admettre ici. Quant aux tergorhabdites, ils nous paraissent indubitablement représentés par les lames cornées qui semblent terminer l’hog- dosternite. On les voit, en effet, en connexion avec la partie la plus postérieure de ces appendices qui partent des pièces réniformes des épimériles, Leur soudure avec le slernite pré- DES INSECTES DILTÈRES. 75 cédent est une particularité intéressante à noler , mais Loutefois pas assez importante pour faire rejeter la signification. Ainsi nous retrouvons toute la partie tergale du zoonite; la partie sternale n’est représentée que par un sternite fort peu dé- veloppé ; les pièces épimérales, composées de parties secondaires, ne ressemblent pas à celles que nous avons décrites ; enfin, les tergorhabdites ne sont libres qu’à leur extrémité ; ils contractent une soudure anormale avec l’urite précédent. Si nous cherchons à rapprocher cette disposition de celles que nous connaissons déjà, les ressemblances se bornent à celles des tergites ; toutefois nous pourrions trouver une analogie, bien éloignée sans doute, avec la tarière du Grillon. On se rappelle, en effet, que dans cet Ortho- ptère, la partie sternale n’était formée que par le sternite très allongé, tandis que la partie tergale était composée des trois élé- ments ; c’est la même chose, avons-nous dit, dans la Tipule. Le rapprochement ne peut se faire que pour le nombre et la nature des pièces ; quant à leur forme et autres caractères, il est impos- sible. Cette comparaison nous suffit, je crois, pour montrer quelles différences bien plus grandes doivent séparer ce premier type le plus complet et le plus complexe de tous les autres insectes munis de tarières, d’oviscapte ou aiguillons. Ainsi l’oviducte s'ouvre bien à sa place ordinaire, entre le huilième et le neuvième urite ; la soudure des rhabdites avec le premier semble favoriser la sortie des œufs. L’abdomen se ter- mine par d’autres pièces lamellaires assez rapprochées des pre- mières, pour qu’au premier abord on puisse les considérer comine unies avec elles. Ce sont les pièces anales. Après l’urite de l’ar- mure ou postgénital, on trouve un tergite très nettement carac- térisé : il occupe le dixième rang ; il doit certainement corres- pondre à l’urite préanal des Insectes à abdomen complet; son bord postérieur se prolonge en pointe; dans la goullière qu'il forme passe le rectum. Sur la face inférieure membraneuse qui lui correspond viennent s'appliquer les bords supérieurs des rhabdites de armure. Après lui on comple quatre pièces, qui nous paraissent re- présenter dans leur ensemble l’urite anal; en dessous on voit, en 74 LACAZE-DUTHIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE arrière du dixième tergite, s’articulant un peu avec lui, deux valves qui, réunies au milieu, paraissent être le sternite, et correspondre aux mêmes pièces des Orthoptères, Névroptères, etc. En dessus et latéralement, deux lames cornées terminent l’abdo- men, comme les rhabdites terminent l'hogdosternite; je verrais en elle les analogues des longs filaments des Grillons et des forceps des Forficules, Libellules, etc. La même signification leur serait dès lors applicable ; elles seraient les épimérites ou les tergorhabdites de l’endécaturite ; quant au tergite, il n’existe- rait pas, ou bien il serait bifide et soudé aux deux pièces précé- dentes, confondu avec elles ; on trouve des traces de divisions sur leurs côlés. Ainsi, dans cette manière de voir, les Diptères présenteraient aussi le nombre onze pour la composition abdominale ; quoi qu’on fasse, on est toujours obligé d'admettre dix urites : ils sont évi- dents et peuvent être comptés sans aucune préparation sur toutes les Tipulaires. On regarderuait, dans ce cas, les dernières pièces que nous venons d'étudier comme appendices du décaturite; l’analogie avec les ordres précédents doit faire certainement pen- ser le contraire. Voyons maintenant comment la femelle se sert de son armure pour déposer ses œufs. Il n’est pas rare de rencontrer les T'ipula hortulana, flavolineata , et surtout oleracea, occupées à pondre dans la terre humide du bord des eaux. Leur position étrange attire notre attention. La femelle se dresse en se soutenant avec ses pieds postérieurs. Peu occupée de ce qui se passe autour d’elle, on peut l’observer avec soin. Naturellement, quand elle se redresse, la première partie qui rencontre la terre est l’urite anal; ce sont aussi ses lamelles cornées qui pénètrent les premières. Cela se fait par la pression que l’insecte exerce en se cramponnant avec ses pattes. Quand cette première partie de l'opération est accomplie, on voit l’abdomen se courber un peu, la Tipule cherche à rapprocher de la terre les lamelles de l’ar- mure qui en sont éloignées ; dès que les rhabdites pénètrent, on voit très distinctement un mouvement de va-et-vient de la partie sternale des hogdo- et ennaturites sur la partie tergale déjà DES INSECTES DIPTÈRES. 15 fixée. Dès que la tarière est suffisamment entrée , on voit les œufs noirs paraître au travers des téguments ; alors les mouve- ments vermiculaires de l’abdomen sont très évidents ; ils sont dus aux contractions qui poussent les œufs dans l’oviducte. On peut croire que l'introduction des lames anales sert d’abord à fixer l'abdomen et à assurer la pénétration plus tar- dive des rhabdites. Ceux-ci, comme les premiers, ne pénètrent que par la force propre de l’animal sans mécanisme ou dispo- sition particulière; etleur but n’est que de favoriser le glissement des œufs et leur dépôt dans un milieu propre à leur développe- ment. S IT. — Asiliens. L’armure femelle de ces insectes est bien plus simple que la précédente ; très facile à étudier, on peut apprendre à en con- naître tous les détails sur les Asilus crabroniformis et forci- patus, que l’on rencontre partout et dont la taille assez grande promet une étude peu laborieuse. Les détails qui vont suivre se rapportent à ces deux espèces, mais plus spécialement au crabroniformis. L’abdomen allongé, de forme conique, se termine par une pointe assez aiguë, dans laquelle on reconnaît plusieurs élé- ments. Il est rare, quand on prend une Asile femelle, qu’elle n’agite en tous sens son abdomen, à peu près comme une guêpe, et qu’elle ne dépose une matière blanc-jaunâtre, épaisse, qui doit être pour elle un moyen de défense ; cette matière sort de l'anus. Si l’on regarde attentivement l'extrémité abdominale, on remarque que le dernier sternite bien apparent, et fort robuste, un peu caréné vers la pointe recourbée légèrement en bas, rappelle un peu le sternite prégénital de la Ranâtre. Le tergite qui lui cor- respond n'offre rien de particulier ; sa largeur est un peu moindre. Relativement à son volume, cet urite est très long. Il occupe le huitième rang quand on compte sur le dos, et le neuvième quand on compte sous le ventre. Après lui on voit encore un tergite très évident, qui correspond au neuvième ; enfin deux valves termi- nent l’apdomen, L’anus s'ouvre entre elles, et l’oviducte présente 76 LACAZE-DUTHIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE son orifice au-dessus de la plaque sternale que nous avonsdit être la neuvième. En étudiant avec soin l’oviducte dans la partie la plus voisine de la vulve, on trouve sur la face supérieure des pièces cornées fort grêles, qui méritent cependant toute notre attention, car elles nous paraissent les rudiments d’un urite en partie avorté. L'une , en forme de spatule appliquée sur l’oviducte, se bi- furque ; ses deux branches s’écartent assez brusquement, puis se rapprechent de plus en plus en avancant vers la vulve, et se terminent en pointes aiguës ; elles logent entre elles une pièce médiane, véritable stylet impair qui les dépasse un peu, et ne remonte pas très loin vers la bifurcation. Dans l’espace limité par la première pièce est tendue une membrane que traversent les poches et glandes annexes des organes génitaux, qui vien- nent s'ouvrir dans l’oviducte, non loin dela vulve. Le tergite préanal porte, à la réunion de ses bords latéraux avec son bord postérieur, aux angles que forme cette réunion, une pièce qui descend sur le côté sternal, se dirige en arrière et forme avec le tergite une échancrure profonde où se logent les valves voisines de l’anus. Celles-ci, au nombre de deux, sont la- térales, une de chaque côté, et ne présentent rien de spécial. Cherchons maintenant à ramener toutes ces dispositions qui paraissent exceptionnelles au type normal que nous avons inces- samment présent à l’esprit comme terme de comparaison. D’abord nous avons dit que l’on trouvait un urite de plus, suivant que l’on examivait la face ventrale ou la face dorsale de l’Insecte. Il existe, en effet, immédiatement après le (horax, trois sternites dont deux plus petits; leur évidence est telle, que l’on ne peut douter qu'ils ne soient trois sclérodermites distincts ; ils corres- pondent à deux tergites seulement. Si nousles considérons comme trois sternites abdominaux, l’oviducte s'ouvre entre le neuvième et le dixième, et nous retrouvons les onze urites. Ce fait, exception- nel jusqu'ici, devait faire tenir en garde contre une telle expli- cation ; aussi, en cherchant le sternite du métathorax , on ne le trouve pas : en arrière des pattes postérieures, il n'y a qu'une membrane sans ossificalion qui ne se remarque pas dans les Ti- DES INSECTES DIPTÈRES. 77 pulaires, par exemple , et dès lors il semble assez naturel de croire que le métasternite est passé à la partie abdominale du corps dans les Asiles. 11 est tellement rare de voir les tergites avorter quand les sternites se développent, qu’on ne peut croire ici à l'avortement d’un tergite. En admettant le passage du méta- sternite dans l’abdomen, les choses reprennent leur place ordi- naire, et nous voyons l’oviducte s’ouvrir au-dessus de l’hogao- slernite. Les urites postgénitaux sont au nombre de trois. Le premier, celui de l’armure, l’ennaturite, est en partie avorté, il n’est représenté que par les pièces sternales que nous avons décrites au dessus de l’oviducte, non loin de la vulve ; le deuxième, celui que nous nommons habituellement préanal, est formé, comme dans le plus grand nombre des cas, par un tergite auquel est soudée la partie sternale du troisième, ou endécaturite. En rap- prochant ces pièces de celles des Tipules, on voit combien ressemblent les parties que là nous avons considérées comme endécatosternites, à celles qui ici sont soudées au décatotergite, Quant aux deux valves anales, elles répondent absolument aux lames anales du type précédent. Quelles sont les fonctions d’une telle armure? On le comprend, elles doivent être ou nulles, ou du moins très obscures ; le ster- nite prégénital peut seul agir pour écarter les corps et laisser glisser les œufs dans les espaces où ils doivent se développer. Quant à comparer cet appareil avec les précédents, c’est im- possible; mais il est un rapprochement qui ne laisse pas que d’avoir de l'intérêt, On se rappelle que, dans les Névroptères, J'un des types, intermédiaire entre les plus simples et les plus complexes , celui que représentait la Panorpe, était absolument dans les mêmes conditions que celui-ci. L’urite postgénital ou de l'armure se composait exclusivement des parties sternales, ren- trées et cachées sous les hodgo- et décaturites. Ces deux fails ne servent-ils pas à confirmer l’un par l’autre les opinions émises à leur égard? Ici, du reste, pas plus que là, nous n’avons cher- ché à déterminer exactement quels étaient les éléments du seg- ment abdominal ; probablement que ce sont pour les Asiles du 78 LACAZE-DUTHIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE moins le sternite et les épisternites. Peu importe, ce nous semble ; ce qu'il suffit de montrer, c’est que l’une des portions de l’urite avorte , et que l’autre conserve sa position au-dessus de l’orifice génital. $ III. — Tabaniens. — Syrphiens. Nous réunissons ici dans ce paragraphe des Insectes assez éloignés les uns des autres , entre lesquels prennent place assez naturellement les Asiliques. On sait que nous cherchons les rapprochements non entre les familles , mais entre les disposi- tions anatomiques semblables. Ainsi nous faisons ici un pas en arrière pour étudier, après les Asiles, les Taons : c’est que ces derniers nous fournissent un passage entre le deuxième type et le troisième, dont le caractère général est qu'une partie de l’abdo- men plus ou moins grande, rentrée en dedans, ne fait saillie que lorsque l’Insecte la pousse au dehors. Nous allons trouver une série d'espèces qui établissent un passage insensible entre les premiers, les plus rapprochés des Asiles, et les derniers, les Eristales , où le caractère est porté à un plus haut degré. Les Tabaniens, qui, par leurs mœurs et leur organisation, se rappro- chent à certains degrés des Asiliques, présentent deux exemples qu'il est utile de comparer entre eux ainsi qu'avec les espèces précédentes. Le premier est l’'Aæmatopota pluvialis, le second le Tabanus glaucopis. L'Hæmatopota pluvialis n'offre rien de spécial dans la forme de son abdomen ; les différents zoonites qui le composent ont à peu près le même volume, sauf le dernier apparent, le seplième, qui est conique. C’est entre ses valves que l’on trouve l’armure, ou plutôt les pièces qui entourent l’anus et la vulve. On recon- naît tout de suite qu’il existe un urite dont les éléments plus pe- tits sont rentrés à l’intérieur, mais qui, du reste, sont joints au segment précédent par des membranes en tout semblables à celles qui unissent les cinquième , sixième , septième. En les saisissant avec des pinces, ou mieux encore en prenant l’abdomen entre les doigts, on les fait saillir, et il devient très facile de reconnaître les tergites et sternites du huitième urite. En poussant plus loin DES INSECTES DIPTÈRES. 79 les recherches , on voit que l’oviducte s'ouvre sur la face supé- rieure de l’hogdosternite , et que le rectum passe sous l’hogdo- tergite. Qu’au-dessus de la vulve est une pièce aux bords et con- tours bizarres, difficile à comparer à quelque chose pour la forme, mais dont l’ensemble représente très vaguement un fer-à-cheval. La voûte est antérieure ; les branches, plus ou moins dilatées et contournées vers leur milieu , se relèvent vers l’anus. Dans les espaces irréguliers qu’elles laissent entre elles, viennent s'ouvrir les différentes vésicules annexes des organes génitaux. Autour de l’anus cinq pièces latérales se rangent : deux supé- rieures, deux latérales un peu en avant, et une médiane en dessous. D’après cette description, il semble que la comparaison avec l’Asile est extrêmement facile. Ainsi, dans l’un et l’autre cas, huit urites prégénitaux ; seulement ici le huitième, très pelit, rentre dans l'abdomen, tandis que là il s’allonge, reste extérieur, prend une forme qui indique la part qu’il prend au dépôt des œufs. Dans l’Asilique comme dans l'Hématopota le neuvième, l’en- naturite, qui produit l’armure, est représenté par une pièce sternale ; à la forme près ces deux éléments sont les mêmes. Quant aux pièces qui environnent l’anus, il faut les regarder dans les deux cas comme représentant les dixième et onzième uriles ; nous trouverons des exemples où elles sont beaucoup plus distinctes et caractéristiques. Ainsi on aura une idée de l’armure des Hématopota en la rapportant à celle des Asiliques, et en la supposant rentrée d’un anneau dans l'abdomen. Dans un genre très voisin du précédent, le T'abanus glau- copsis, les choses sont peut-être plus simples , et se rapprochent davantage des Volucelles, Ainsi l’hogdurite est tout à fait rentré, mais, de plus, l’hebdu- rite plus petit commence à se cacher un peu sous les bords du sixième ; la pièce, en forme de fer à cheval, est très simple, et peut être bien plus facilement comparée à son homologue dans l’Asile. Ses rapports sont absolument les mêmes. Quant aux pièces anales, il est facile d’y retrouver d’abord les deux valves latérales à l'anus, ressemblant beaucoup à celles des 80 LACAZE-DUTIRIERS. — ARMURE GÉNITALE FEMELLE Asiles. Le sternite qui leur correspond est bilobé , comme dans ces derniers. Enfin, un peu au-dessus et soudé avec lui, on voit deux petites impressions cornées qui certainement correspondent à l’urite préanal. On voit encore quelques pièces sur les côtés du rectum entre son extrémité et la vulve ; elles doivent appartenir à quelques éléments des urites incomplétement développés : il est toutefois difficile de leur assigner une signification absolue. En résumé, dans les Tabaniens , nous rencontrons une compo- sition de l'abdomen analogue à celle que nous connaissions déjà ; Porifice de la vulve est après le huitième sternite, et le zoonite postgénital n’est composé que du sternite. LesSyrphiens diffèrent surtout des précédents par le nombre d’urites rentrés : il est, en effet, de trois. Aussi, quand on examine leur abdomen , est- on étonné du peu de segments qu’on y trouve. On voit quelque chose d’analogue à ce que nous avons étudié dans les Hymé- noptères du genre Chrysis. Dans les Volucelles, Zonaria ou pel- lucens, qui ont servi à nos études , les choses ne sont pas aussi marquées que dans les Éristales, et le enax en particulier. Dans la l’olucella pellucens, les cinq premiers urites paraissent seuls; les autres, petits relativement à ceux-ci, sont disposés sur un tube membraneux peu allongé, qu’il est facile de faire saillir ; la vulve est placée après le huitième comme dans les Tabaniens ; au-dessus d’elle on trouve l’ennatosternite , dont la forme en fer à cheval est très régulière : il est toujours en rap- port avec les annexes de la génération. Les pièces anales offrent beaucoup de ressemblance avec les mêmes des Taons ; il est inutile de s'arrêter sur leur compte, Elles sont peut-être un peu plus développées. La F’olucellu