ELLE ÉHELEE ns ir " 1 Ve s: ss ANNALES DES SCIENCES NATURELLES. TOME XXIV. A RSC CR IMPRIMERIE DE Ve THUAU, Rue du Cloître Saint:Benoîit , n. 4. PAR MM. AUDOUIN , ao. BRONGNIART Er DUMAS, COMPRENANT LA PHYSIOLOGIE ANIMALE ET VÉGÉTALE , L' ANATOMIE COMPARÉE DES DEUX RÉGNES , LA ZOOLOGIE, LA BOTANIQUE, LA MINÉRALOGIE , ET LA GÉOLOGIE. TOME VINGT-QUATRIÈME, ACCOMPAGNÉ DE PLANCHES. CROCHARD, LIBRAIRE - ÉDITEUR , RUE ET PLACE DE L'ÉCOLE-DE-MÉDECINE , N° 13. 1831. D ? 0 « Et SOUL 3) DV er a X ANNALES DES SCIENCES NATURELLES. VAAAAA AAA Description des Coquilles terrestres recueillies pendant un voyage à la côte occidentale d’A4- frique , et au Brésil ; Par M. Sanner Rance, Officier au corps de la Marine, Membre de plusieurs Sociétés savantes. Uxe partie des coquilles terrestres dont je vais m'oc- cuper se rencontrent dans beaucoup de cabinets où quel- ques-unes sont déterminées et nommées depuis long- temps; néanmoins je pense que les naturalistes appren- dront avec intérêt ce qu’elles m'ont donné lieu d'observer sur le sol même où leurs animaux vivent. Je suivrai en cela l’exemple qui m'est donné par plusieurs savans distingués qui pensent qu’il vaut mieux travailler à ap- profondir un sujet désigné que d’en signaler un nouveau. On trouvera cependant dans ce court aperçu un peu de chaque chose ; les amateurs de coquilles y verront de nouvelles espèces , les zoologistes des animaux, et les XXIV. — Septembre 1531. ï (6) uns et les autres auront quelques détails et less des localités. x Parti de Toulon , le 4 octobre 1829, sur le brick de l'État La Champenoise que je commandais, je fus d'a- bord contraint de relàcher à Alméria , en Espagne. La présence del. gualieriana sur les montagnes qui cou- ronnent cette ville m'invitait à commencer dès ce mo- ment mes recherches; elles furent fructueuses. Bientôt j'arrivai à la côte de la Sénégambie et mouillai en rade de Gorée. Dans cette petite île et sur le continent voisin, je m'attachai à la recherche des coquilles terrestres ; l’ÆZ. K ambeul d'Adanson et deux espèces infiniment petites furent les seules que je rencontrai. Un terrain sablon- neux , peu de végétation et rarement de l’eau n'offrent point, ou très- peu du moins, les circonstances qui fa- vorisent l'existence des mollusques terrestres. Quittant Gorée pour aller à l’île du Prince , je parcourus rapide- ment les 500 lieues de côtes qui les séparent; aussi ne me fui-il possible que d’efflenrer les points nombreux que je visitai sur ma route. Sur toute cette côte, si riche en productions naturelles, et qui n’a, pour ainsi dire, jamais été explorée dans l'intérêt de la science, la végé- tation est extrêmement vigoureuse ; le sol est chargé de bois épais dont la hauteur est extrême et d'innombrables rivières , des canaux naturels serpentent de tous côtés sur un terrain uni. Là, les espèces de coquilles terrestres sont nombreuses , et semblables à tout ce qui les entoure elles sont grandes, fortes, variées et riches de l'éclat des plus belles couleurs. Un séjour d’un mois à l’île du Prince m'a permis de l’explorer avec quelque soin. Formée de montagnes escarpées et très-hautes , revêtue 40 de forèts , elle est exposée à toute l’ardeur des feux de la ligne ; mais les orages et ces terribles tornados que les vents du continent chassent vers elle l'abreuvent fré- quemment en entourant ses crêtes de nues, et lui donnent cette fraicheur que les limaçons recherchent toujours. Peu variées, mais très-distinctes comme espè- ces , les coquilles terrestres que j’ai recueillies à l'ile du Prince sont belles et extrêmement répandues dans les bois, Enfin un séjour de deux semaines au Brésil , cette terre inépuisable en Bulimes et en Hélices, m'a permis d’en récolter plusieurs parmi lesquelles ïl s’en trouve qui sont inédites. Genre HÉLICE, Férvssac. Sous-Genre HELICOGÈNE. Helix , Lin. 1) H. conrusa, Fér. Fér,, PE #xx1, fig. no x,et PE. xxxvr 4, n@#2 et 3. Testa globulosa , perforata , tenui, diaphana, succinea, regulariter et exilissime striata ; subius lucida ; spira breve , contusa; apice obtusa ; apertura ovali; colu- mella breve , alba ; labro reflexo , albo. Long., 16 à 19 mill. Larg., 19 à 22 mill. Corpore elongato, acuminato , luteo-florido. Description.—L'. contusa est globuleuse, perforée, mince, diaphane et de couleur de succin lorsqu'elle est fraîche. Sa surface est finement et très-régulièrement striée sur tous ses tours, moins cependant à la partie (8) inférieure qui est toujours luisante ; sa spire est courte et un peu aflaissée ; mais ce qui la distingue particuliè- rement et donne à cette coquille un aspect singulier et un caractère constant, c’est que plusieurs de ses tours, et surtout l’avant-dernier, sont déjetés du côté posté- rieur, ce qui paraîtrait un accident, si tous les individus ne présentaient pas la même particularité. Le sommet est obtus , et le nombre des tours est de sept ; l’ouver- ture est un peu petite, ovale, aussi large que haute; son plan est très-oblique à l’axe ; sa columelle est courte, blanche et se confond avec le péristome qui est égale- ment blanc et réfléchi. L'animal est très-eflilé ; sa couleur est un beau jaune très-vif que la coquille reproduit agréablement par sa transparence. Je n’ai point vu que les tentacules infé- rieurs fussent palmés à leur extrémité, comme on la avancé. Observation. — LH. contusa présente deux varié- tés assez remarquables , mais qui ne consistent que dans leur grosseur (1). L'une de ces variétés, que l’on pos- sède dans quelques collections à Paris, est du double plus grosse que l'individu type que je viens de décrire, et l’autre est infiniment plus petite. M. de Férussac , à qui je communiquai cette dernière après mon premier voyage au Brésil , en fait l’espèce suivante. Habitat. — 1’. contusa est commune dans tout le (1) Lorsque l'A. contusa est jeune, c’est-à-dire que ses tours de spire ne sont pas complets, elle ne peut présenter la difformité si ca- ractéristique de la coquille parfaite ; il en résulte qu’elle est très-difficile à reconnaître ; la manière dont elle est striée en fournit cependant le moyen. (9) Brésil oriental. On la trouve sous les broussailles, parmi les rochers; mais il est assez difficile de l'obtenir dans un état bien frais: 2) H. conrusura, Fér. Long. , 5 mil. Larg., 5 mil. Les caractères de cette espèce. sont les mêmes que ceux de la précédente avec laquelle elle ne diffère que par la taille qui est beaucoup moindre, peut-être aussi par le sommet qui semble ici un peu plus aigu et les stries qui sont plus fortes. Son animal m'est inconnu. Habitat. — Je l'ai trouvée dans le voisinage de Rio- Janeiro , dans les bois et sous les haies. Sous-Genne HÉLICIGONE. Caracole, Montf. Carocole, Lam. 3) H. GuazrerrAna, Lin. Gualteri , t. 68, f. F. — Chemnitz, V, p. 273, vign. 44. Cochlea scabriuscula , Humphrey, Mus. Cal. Helix obversa, Born., Mus., tt. xirr,f. 12, 13. Helix Gualteriana , Gmelin , p. 3621, n° 33. Tberius Gualterianus, Montf. — Schroetter, £inl. in Conch., CUVE, 1v, £a! Carocola Gualicriana , Garocolke scabre , Lam. Helix Gualteriana, Féruss., Tab. Syst., no 139, PI. zx, f. 1. Testa orbiculata, supra plana , subtus convexo turgida, imperforata , scabra , decussatim striata , sordide cine- rea ; spira planissima ; labro tenui, margine reflexo — Lamarce. Long., 1+à 27 cent. Larg. , 3 + à 5 cent. Corpore albido , sordido. Long. , ro cent. (x) Description. — L’'H. Gualteriana est orbiculaire , plus ou moins aplatie en dessus , toujours très-convexe en dessous, et, par suite de, cette disposition , forte- ment carénée. Elle est peu épaisse, presque opaque, et d'une couleur blanche un peu terreuse, qui est à peu près aussi celle des montagnes qu’elle habite. Sa surface est profondément sillonnée par des stries rugueuses et comme écailleuses qui suivent la direction des tours et vont se terminer au bord de l'ouverture , où elles sont beaucoup plus prononcées que vers le sommet. La spire est généralement très-aplatie, de même que les tours qui sont au nombre de 4, et le sommet est presque toujours sans saillie. L’onverture est un peu arrondie , anguleuse el très-oblique par son plan à l’axe de la coquille ; ses bords sont minces, fortement et largement réfléchis , et blancs de même que l’intérieur. L'animal, qui est en tout semblable , pour la forme, à celui des autres espèces d’Hélices, est d’un blane sale. La figure qui en a été donnée par M. de Férussac, PI. rxrr, ne laisse rien à désirer. Observation. — L'. Gualteriana varie beaucoup dans sa forme ; elle a généralement la spire aplatie, tan- dis qu’au contraire sa face inférieure est bombhée ; mais quelquefois cette spire présente une surface convexe et dans quelques individus plus rares un véritable cône ; dans ce dernier cas, la surface inférieure est bien moins bombée ; d’autres fois la spire est tellement affaissée et les bords des derniers tours tellement élevés que la face supérieure paraît concave, et, dans ce cas, la partie op- posée de la coquille est heaucoup plus bombée que de . (y } coutume. Ainsi donc F Æ. Gualteriana fourmi trois va- riétés de formes bien distinctes dont toutes lés antres ne sont que des modifications qui les Kent entre elles par des passages insensibles. k Habitat. — Cette singulière coquille habite dans le royaume de Grenade et dans celui de Murcie ; mais elle est surtout très-commune sur la chaîne de montagnes qui couronne ja ville d’Alméria et va ensuite former en mer le cap de Gatte. Elle se tient plus habituellement au sommet de ces montagnes, cachée dans les trous des rochers d’où on a quelquefois de la peine à la retirer. Une remarque que l’on ne peut s'empêcher de faire en contemplant cette coquille sur le sol sec et aride d’AI- méria , c'est que sa couleur s’harmonise parfaitement avec lui par sa teinte blanchâtre et sablonneuse. Elle diffère singulièrement en cela des autres espèces qui vivent avec elles et qui toutes sont de France et semblent” y avoir été importées, telles que les Æ7. lactæa qu'on trouve en Roussillon, candidissima qui acquiert une grosseur extraordinaire, pisana, variabilis, decolata, acuta , etc. Sous-Genre HÉLICELLE. Hélicelle, Lam. 4) H. peLzis serpenTis, Chemn. Lister, Conch., t. 1xvt , f. 64. — Petiy., Gaz., t. cLvt, f. 1. — Fav., Conch., PI. 63, fig. G 3. — Chemn., Conch., IX, t. cxxv, f. 1095, 1096, et Conch., IL, t. covunt , f. 2046, 2047.— Guwel. , p. 3620, n° 254. Helix nudata, Port, Cat. C1) Helix pellis serpentis, Fér., Tab. Syst., ne 185. — Lam.,t. VI, 22 p.,:p.! 73, n°, 80. Solarium serpens , Spix , f. x. Testa orbiculato-convexa , umbilicata , griseo-flavicante , Jaciis flammeis rubris albisque picta, subtus seriebus pluribus punctorum rufescentium ornata ; spira obtu- sissima ; ultimo anfractu subangulato; labro margine albo , reflexo. — Lamarck. Long. , 2 à 3 cent. Larg., 3 1 à 5 cent. Corpore ‘griseo-sordido , obscur ; captite tentaculisque nigricantibus. Long., 8 à 12 cent. Description. — La forme de l'A. pellis serpentis esi orbiculaire convexe en dessus et concave au milieu de sa face inférieure qui est ombiliquée. Elle est épaisse et peu transparente ; sa surface est striée et finement chagri- née, surtout en dessus ; sa couleur est d’un blanc jaunätre un peu sale, et ornée dans toute la longueur des tours de flammes brunâtres parallèles, serrées et formant des zigzags. À sa partie inférieure, ces flammes disparaissent et sont remplacées par des séries de taches brunes qui deviennent plus petites en se rapprochant de l’ombilic. La spire est obtuse et très-affaissée ; ses tours, au nom- bre de six, sont peu arrondis et le dernier est souvent auguleux dans son milieu. L'ouverture est plus large que haute et très-oblique par son plan à l’axe de la co- quille ; son bord , qui est blanc, est épais et réfléchi. L'animal participe un peu, par sa couleur, de l'aspect sombre de cette coquille; il est d’un gris-sale obscur, les tentacules et la partie supérieure de la tête tirant davantage sur le noir. (:x8) Observation. — On a cherché à établir des variétés dans cette espèce; ainsi M. de Férussac , dans son Ta- bleau systématique de la famille des Limaçons , signale une variété a sous la qualification de pilosa. D'autres personnes paraissent distinguer une variété chagrinée d’une autre qui ne le serait pas. Quant à moi , après avoir observé un grand nombre de ces coquilles avec leurs animaux vivans, je ne crois pouvoir reconnaître que deux variétés tout au plus , celle de la Guyane, qui est la plus grosse et dont le dernier tour est anguleux , et celle du Brésil , qui est la plus petite et dont le dernier iour est arrondi. Après cela on trouve desindividusinter- médiaires qui rapprochent plus ou moins complètement ces deux variétés , et tels sont, par exemple , ceux de la province du Cantagallo qui m'ont toujours paru plus volumineux que ceux de la province de Rio-Janeiro et qui n’ont pas non plus le dernier tour anguleux. Le caractère de la variété citée par M. de Férussac, ainsi que celui dont j'ai encore parlé , me paraissent tenir à l’âge. Toutes sont chagrinées , et ce caractère, qui s’af- faiblit avec le temps, ne disparaît cependant pas assez complètement sur les vieux individus pour ne laisser aucune trace , surtout dans le voisinage du sommet; toutes aussi sont pileuses ou plutôt veloutées dans leur jeunesse ; mais avec l’âge ce velouté tombe, parce qu'il appartient à l’épiderme qui disparait promptement. Je n’ai jamais eu occasion de remarquer sur les indi- vidus du Brésil cet enfoncement d'apparence acciden- telle qui se voit toujours à l’arête du dernier tour dans la variété de la Guyane et qui est particulier à cette coquille. (14) Habitat. — L'H. pellis serpentis appartient à l'A- mérique méridionale , où elle n’a encore été rencontrée que dans les régions de l’est. Dans un voyage précédent je lai eue à Cayenne, et parmi les individus que je me procurai, plusieurs avaient été recueillis dans le nord de la Guyane. Je viens d’en avoir de différens points du Brésil, de la province de Saint-Paul, de celle de Mara- gnan et du Para. Tout me porte donc à croire qu’elle occupe en entier cette vaste étendue de pays, si riche en productions naturelles, qui s'étend depuis la rive gauche de la Plata dans le midi, jusqu’à la rive droite de l'Oréuoque dans le nord , étendue qui est d’au moins huit cents lieues. C’est à la partie moyenne et inférieure des montagnes, dans les forêts, sous les broussailles et dans les anfrac- tuosités des rochers, qu’elle habite, recherchant l'ombre et la fraîcheur. 5) H. parvuza, Nobis (1). PI. 1x, fig. 6. T'esta orbiculata , convexa, umbilicata, lævigata, lucida, diaphana, luteo-brunea ; spira obtusa ; apertura ro- tunda ; labro tenui. Long. , ? de mil. Larg., 1 mil. Corpore bruneo. Long. , 3 mil. +. Description. — Cette coquille est orbiculaire , très- (x) Chemnitz a donné, sous le nom d'A. Senegalensis, une espèce qui n’est point de la côte d’Afrique, mais bien de la Chine. — Chemn., Conch.,IX , tab. aix, fig. 915 ct 918. (15) convexe en dessus et en dessous où elle est ombiliquée ; elle est lisse, luisante, transparente et d’une couleur brune un peu verdâtre; la spire est peu élevée, obtuse et se forme de trois tours peu arrondis ; l'ouverture est arrondie et le bord droit mince et tranchant. L'animal tient de la coquille par sa coment mais il est seulement un peu plus pâle. Habitat. — Cette petite espèce , fort voisine de l’Æ. minuta , vit sur la presqu’ile du Cap-Verd. Elle se tient sous l'écorce pourrie des Baobabs. ( {dansonia di- gitata. ) 6) H. srmiraris, Fér. Tab. Syst., f. 43, no 262. Testa orbiculato-convexa, perforata, ténui, subdiaphana, albido-fulva; exilissime striata ; apice obtusa, labro albido , reflexo. Long. , 7 à 10 mil. Larg., 1 cent. 2 mil, à 1 cent. 6 mil, Corpore griseo-pallide. Long. , 5 cent. Description. — Cette coquille est perforée , orbicu- laire , convexe et presque globuleuse dans certains in- dividus plus élevés; elle est mince, fragile, un peu diaphane et d’une couleur pâle qui tire sur le fauve et quelquefois sur le roux; sa surface est finement striée ; sa spire est très-affaissée, et son sommet obtus. L’ou- verture , qui est ovale arrondie , est assez grande et le bord un peu réfléchi est blanc. L'animal est d’un gris pale fort clair et présente (16) uelques lignes plus foncées à sa partie antérieure et 8 F supérieure. Observation. — Cette espèce renferme deux variétés distinctes par un seul caractère ; l’une est désignée par M. de Férussac sous la dénomination de «& ) unicolor, parce qu’en effet elle est toute pâle et sans aucune bande, et l’autre sous celle de 6) zonulata , parce qu’elle pré- sente une bande brune &n peu au-dessus du milieu du dernier tour. Habitat. — L’H. similaris est la plus répandue de toutes celles que j'ai observées dans mes voyages. M. de Férussac l'indique comme ayant été rapportée de Timor par Baudin ; je l'ai recueillie dans de précédens voyages à Bourbon, où elle est singulièrement commune , et à l'ile de Cuba ; enfin je l’ai rencontrée à Rio-Janeiro et particulièrement au jardin de Saïnt-Christophe qui ap- partenait à l’ex-empereur du Brésil. Les deux variétés que j'ai citées se trouvent toujours ensemble. Sous-Genre HELICOSTYLE, Fér. 7) H. Mowrovra, Nobis. PI. xx, fig. 3. T'esta globuloso-conica , perforata ; tenui, diaphana, re- gulariter et exilissime striata , albida, lineolis viridi- bus longitudinaliter ornata ; apice obtusa ; apertura subquadrangulata. Long. , x cent. 4 mill. Larg. , 1 cent. 9 mill. Description.— Cetie coquille est presque globuleuse ; sa spire est conique et son dernier tour anguleux. Ce (17) dernier caractère dans les deux seuls individus que je possède provient peut-être de ce qu’ils sont jeunes. Elle est mince, transparente, très-fragile, finement et très- régulièrement striée, blanche, mais ornée surtout à son dernier tour de linéoles longitudinales vertes et plus ou moins larges ou serrées. Les tours de spire , qui sont au nombre de six, paraissent un peu arrondis; le sommet est fort peu aigu; enfin l'ouverture est anguleuse, et son bord, dans l’état où se trouvent les deux individus que j'ai sous les yeux, est mince et tranchant; l'ombilic est médiocrement large et en partie masqué par le bord gauche. Observation.—La coquilleque je viens de décrire sous le nom de Monrovia forme avec la petite espèce du Cap- Verd que j'ai nommée parvula les deux seules espèces terrestres du genre /Zelix de Linné que j'ai trouvées à la côte d'Afrique ; toutes les autres rentrent dans le genre Æchatina. Les individus que je possède me paraissent jeunes et sans doute qu'il leur manque près d’un tour de spire ; dans ce cas , le dernier tour devrait être plus arrondi, l'ombilic masqué et le bord de l'ouverture plus ou moins réfléchi ; ma description est donc incomplète. Quoi qu'il en soit, jai cru devoir la donner et nommer cette espèce, d'abord parce que, non adulte, elle présente cependant des caractères qui la feront toujours reécon- naître , ensuite à cause de sa localité qui, bien connue ; ajoute encore aux moyens de la retrouver plus entière peut-être, et enfin à cause de la rareté des coquilles héli- ciformes dans une contrée d’où l’on n’a encore rapporté que des Ægathines. XXIV, (18) La place de cette espèce me semble devoir être dans le sous-genre Æélicosty le de M. de: Férussa c, près des 1, studeriana ei strobilus. Habitat. — Elle appartient au cap Mésurade de la côte de Malaguette ; c’est là que les Américains ont formé Vétablissement de Liberia, aujourd’hui Monrovia, pays extrémement riche en animaux de toute espèce, et dont les rivières renferment une foule de coquilles précieuses. L'AT. que nous venons de faire connaître vit ayec l’/7. achatina eiT /1. purpurea dans les bois qui couronnent lé cap, car je l'ai trouvée au pied des falaises du haut desquelles elle a dü tomber après la mort de l’animal (1). Sous-GEenre COCHLOSTYLE. 8) H. Taunaisir, Fér. Tab. Syst., p. 48, no 331. T'esta ovato-elongata, crassa, fulvo-brunea , fascia pal- lida antice cincta, longitudinaliter striata ; spira co- nica, magna ; apertura ovali; columella alba, subtorta; labro albo, crassg, simplici ; intus griseo-cærulescente. Long., 5 cent. 5 mil. à 8 cent. Larg., 2 cent. 5 mil. à 3 cent, 8 m. Description. — Cette coquille ést ovoïde -allongée , presque fusiforme, épaisse et peu diaphane ; sa surface un peu rugueuse, est irrégulièremént striée dans le sens de la longueur; sa couleur varie d’ün fauve roussâtre (1) Adanson n’a point trouvé d’'Hélices à l’île de Gorée, et malgré le soin que j’ai mis à en faire la recherche, je n’ai pas été plus heureux que lui, On m’a cependant assuré que, dans la saison des pluies, il s’en montrait une petite espèce sur les murs. (19 ) au brun foncé un peu olivâtre ; l'épiderme est mince; luisant et très-foncé ; une fascie pâle où jaunâtre se pré- sente toujours sur le milieu du dernier tour. La spire est grande, conique et composée de six tours très-peu conyexes ; le sommet est un peu obseur. L’ouvertureest ovale , plus longue que large et cependant plus courte que la moitié de la longueur totale de la coquille ; elle est plus oblique à l'axe par son plan que par sa direc- tion; la columelle, qui est continue avec le bord droit, est assez courte et blanche ; celui-ci est également blane, épais et simple; l’intérieur de la coquille est d’un gris sombre tirant sur le bleu et participant quelquefois d’une teinte laqueuse. Observation. — L’'H. Taunaisii présente trois va- riétés constantes, bien distinctes par leur taille, et qui ne proviennent point de l’âge, car les nombreux individus sur lésquels je les établis sont tous complets et montrent le même nombre de tours de spire. La prémière a 8 cent. de longueur ; elle est d’un brun foncé uniforme; la fascie du dernier tour est pes “De rente en dessus et le test est peu épais. La deuxième a 7 cent. 2 mill.-de longueur ; ellé est d’un “brun jaunâtre beaucoup plus clair que dans la première variété et est ornée de fascies plus foncées qui suivent la direction des stries ; la fascie transversale que l’on remarque sur la partie antérieure est jaunâtre’ et trés-distinete en dessus comme en dessous ; le test est épais. La troisième variété a énviron 6 cent. de longueur seulement. Sa couleur ‘est un fauve verdâtre assez l ( 20 ) sombre avec quelques fascies plus foucées dans le genre de celles de la précédente ; la fascie transversale du dernier tour est pale et bien distincte. En avant de cette fascie on trouve quelquefois, mais rarement, une strie assez bien marquée qui lui est parallèle et qui pénètre dans l’ouverture par le bord gauche. Cette va- riété a le test mince. Habitat. — Les individus que je possède proviennent tous de l’intérieur du Brésil. Sous-Genre COCHLITOME. Liguus, Monitf. 9) H. azasasrer, Nobis. PL. 1, fig. 2,24. Testa ovato-conica , subcrassa., diaphana, polita , alba, Jasciis rufo-bruneis: antice cincta; spira alla; apice subacuta; suturis linea alba marginatis; apertura ovali; columella complanata ;, antice truncata ; labro sim- plict, acuto. Long. , 4 cent. Larg., 2 cent, 2 mil. Corpore elongato , angusto , luteo viridis ; tentaculis elon- gauis. Long., 7 cent. 5 mill. Description. — Cette belle et curieuse coquille est solide et.assez épaisse comme toutes les espèces du sous- genre Cochlitome ; elle est lisse ou presque lisse, car ses siries paraissent à peine, luisante , assez transpa- rente ; suntout lorsqu'elle est jeune, et d’une belle blan- cheur qui tient beaucoup de ceile de lPalbätre. Lors- é aù à \ 2E ) qu’elle renferme lanimal qui la forme elle se pare plus ou moins, selon son épaisseur et son àge, de la couleur verte qui le distingue. Sa blancheur est inter- rompue par une, deux et quelquefois trois bandes plus ou moins larges, de couleur brune, et qui présentent cela de particulier qu’elles sont indépendantes du tissu de la coquille, étant formées par une sorte d’épiderme qui n'existe que là, tombe facilement avec l’âge et ne se re- produit nulle part ailleurs (1). L'Æ. alabaster est co- nique , à spire assez élevée et presque aiguë au sommet. Les tours, qui sont au nombre de six et demi, sont quelquefois un peu arrondis , d’autres fois presque plats; une bande étroite et d’un blanc mat suit la suture à la partie postérieure de chaque tour depuis le sommet jus- qu’à l'ouverture; celle-ci est un peu plus courte que la moitié de la longueur totale de la coquille , de forme ovale , et est parallèle à l'axe par sa direction, tandis qué par son plan elle lui est fort oblique, ce qui pro- vient de ce que le bord droit est avancé à sa partie postérieure. La columelle est solide , presque droite , aplatie et un peu repliée en dedans de manière à pré- senter une petite troncature en avant; le bord droit est simple, tranchant et légèrement coloré de jaunàtre. L'animal, d’un jaune pâle et verdâtre, avec des re- flets bieus dans la partie qui remplit la coquille, ne pré- (1) C’est une particularité assez remarquable , que la présence d’un épiderme en forme de bande sur quelques points seulement de cette coquille. En examinant l’/. virginea, je crois reconnaître la même chose, du moins dans les bandes vertes ou verdâtres, quand il s'en trouve. Les bandes jaunes, rouges, etc. , ne sont pas dans le même cas. Ce caractère appartiendrait-il au groupe des Rubans ? (22) sente de vraiment remarquable que la longueur peu ordinaire de ses tentacules supérieurs ; il m'a semblé aussi que l’orifice des organes de la génération était placé un peu plus en arrière que dans les autres espèces que j'ai examinées. Observation. — La découverte de cette charmante coquille me donne occasion de faire les deux observa- tions suivantes. Jusqu'ici on était porté à croire que les espèces qui forment le groupe des Rubans et qui se dis- tinguent toujours facilement des autres n’appartenaient qu'aux Antilles, à quelques points peut-être du continent américain et aux grandes Indes; il semblait que Îles Agathines fussent plus particulièrement le partage de l'Afrique. Voici donc maintenant une espèce du groupe des Rubans d'Afrique , car l'ile du Prince est tellement voisine du continent africain , qu’il est permis de croire que cette Hélice y vit dans quelques endroits, comme V7. bicarinée qui est à la fois de cette île et du con- tinent. La seconde observation est que l'animal de VA. alabaster est ovo-vivipare. Un officier de ma- rine de mes amis, M. Le Barbier de Tinant, zélé con- chyliologiste, m'a montré un individu qui contenait 14 œufs et 10 petits tout formés avec leur coquille. J'ai depuis renouvelé cette observation importante qui, réunie à celle faite par M. de Férussac sur les espèces dont il a composé son genre Partule, prouve que si la plupart des Eimaçons sont ovipares, il en est aussi d’ove-vivipares. Je pense en outre que cette observation contribuera à faire rejeter la distinction génériqué des Partules à laquelle M. de Férussac lui-mème parait renoncer. (23 ) Les œufs de l'Æ. alabaster sont blanchâtres et oblongs. Les petites coquilles sortant de l'utérus sont submembraneuses , striées, très - diaphanes, jaunàtres et courtes, l'ouverture se trouvant alors un peu plus longue que la moitié de la coquille, ce qui, comme nous l'avons vu, est le contraire dans les mdividus adultes ; leur sommet est obtus et le dernier tour caréné ; le nombre de ceux-ci n’est que de deux ou de deux et un quart. M. Le Barbier de Tinant m'a dit avoir trouvé une va- riété de l’/7. alabaster beaucoup plus petite et présen- tant également des bandes brunes ; je ne l’ai point vue. La place que j'assigne à cette espèce dans la série des Hélices est entre l’Æ. vexillum ei V A. virginea. Habitat. — J'ai recueilli l'Æ. alabaster à Vile du Prince où elle est très-commune , mais cependant difficile à trouver fraiche. Elle: se tient dans les boïs, à la partie moyenne et à celle inférieure des montagnes. Les champs cultivés en sont souvent remplis, mais celles-là sont mortes et décolorées , y ayant été traînées par des Pagures qui gravissent ces montagnes sur lesquelles ils paraissent séjourner fort long-temps. Ce crustacé , qui traîne aïasi des Nérites , des Natices et beaucoup d’autres coquilles, est extrêmement vif, actif et vorace; il se cache pendant la chaleur du jour sous les plantes mortes où il trouve une fraicheur salutaire. 10) H. sicarinata, Lam. List., Conch., t. xxxvir, f. 36. — Tournef., 7’oy., vol. IL, p. 446. Bulla Achatina sinistrorsa, Chemn. , IX , t. our, f. 895, 856 (24) Bulimus bicarinatus , Brug. , Encycl., no 10%. Bulla bicarinata , Dillwyn. Helix bicarinata , Fér., Tab. Syst., p. 49. Achatina bicarinata , Lam. ,t. VI, 2° p., p. 129, n°6. T'esta sinistrorsa , ovato-oblonga , ventricosa , longitudi- naliter et irregulariter rugoso-striata , cœruleo-nigri- cante, postice fulvo-lutescente flammulisque bruneis ornata ; apice obtusa , lutea ; suturis linea albida mar- ginatis ; ultimo anfractu magno ; apertura semi-lunari ; columella cœrulea, truncata; labro simplici, acuto, nigro marginato ; intus cœrulea. Long., 10 à 13 + cent. Larg. , D+à 7 cent. Corpore sinistrorso, crasso, griseo-olivaceo ; antice nigri- cante ; tentaculis nigris. Long., 17 cent. Description. — L’H. bicarinata est senestre , peu épaisse et nullement diaphane ; sa forme est ovale- oblongue et ventrue; sa couleur est d’un bleu d’ardoise mêlé de laque et tirant sur le noir (1); les premiers tours de la spire sont jaunätres, ornés de flammes brunes , et le sommet est jaune; une ligne pâle, quelquefois bleuâtre et souvent d'un beau blanc, borde en avant les sutures des derniers tours ; toute sa surface est gros- sièrement et irrégulièrement striée dans le sens de la longueur, et quand on l’examine avec attention , on s’a- perçoit que ces siries sont croisées par d’autres stries beaucoup plus fines et plus régulières qui, vues à la loupe, forment un tissu granuleux remarquable. La (1) En nettoyant ces coquilles ; elles deviennent toujours plus rou- geàtres. (25 ) spire est assez élevée, obtuse au sommet, et se com- pose de sept tours médiocrement arrondis, dont le der- nier est plus grand que tous les autres réunis ; celui-ci présente souvent une carène très - faiblement marquée et quelquefois deux , l’une constamment au milieu et l’autre plus en avant ; quelquefois aussi il présente dans son milieu une ligne blanche ponctuée. L'ouverture est semi-lunaire et occupe presque la moitié de la longueur de la coquille ; la columelle, bien arrondie , est arquée, tronquée en avant et d’un bleu clair ; le bord gauche (bord extérieur } est simple , tranchant et bordé en de- dans de noir; tout l’intérieur est d’un beau bleu clair et satiné. L'animal est senestre , gros , épais et moins allongé que dans beaucoup d’autres espèces; il présente à la partie postérieure de son pied et en dessus un aplatisse- ment longitudinal qui se retrouve dans presque toutes les Agathines ; sa couleur générale est un gris-verdâtre plus ou moins obscur selon les individus ; la partie pos- térieure tire davantage sur le jaune , et celle qui lui est opposée sur le noir ; les tentacules sont entièrement noirs ; le pied est de couleur de chair pâle. Observations. — J'ai fréquemment obtenu les œufs de cet animal ; ils sont gros , oblongs , d’une belle cou- leur jaune et réunis dans le canal déférent au nombre de 3,4, à et quelquefois même de 6. Parmi les individus de l’Æ. bicarinata que j'ai re- cueillis moi-même sur les montagnes de l’île du Prince il se trouve une variété aussi belle qu'elle est rare et dont, malgré tout ce que j'ai pu faire , je ne me suis { 26 ) procuré qu'un seul exemplaire ; il a 13 centimètres et demi de longueur et ne diffère en rien pour la forme, pour le tissu , le nombre des tours de la spire, etc. , etc. , des individus types de l'espèce ; le seul caractère qui lui est propre et qu'il possède au plus haut degré consiste dans sa couleur qui est un blanc uniforme parfaitement agréable à l’œil par sa pureté ; l’intérieur est aussi blanc que l'extérieur sur lequel règne encore un peu d’épi- derme dans le voisinage du bord gauche ; cet épiderme est jaune, et s’il était enlevé, la eoquille n’offrirait plus sur toute sa surface qu’une blancheur de lait. Elle est un peu transparente et présente une seule carène asssez distincte. Les Noirs à qui j'ai montré cette belle variété et qui l'ont vue avec surprise prétendent qu’elle est extrèmement rare , et je n’en ai entendu qu’un seul qui dit l'avoir vue. L'animal , qui était vivant lorsque je l'ai trouvé, ne différait en rien pour les couleurs de celui que je viens de décrire. Habitat. — La patrice de l'A. bicarinata était in- connue, car il y avait tout lieu de douter de celle qui lui avait été fixée par Tournefort (1). Aujourd’hui je si- gnale cette belle coquille comme étant de l’île du Prince où elle est commune sur les montagnes. On m'a assuré qu’elle vit à la côte correspondante du continent d’A- frique, dans le voisinage du Gabon, ce qui me semble de toute probabilité. Rare dans les collections , elle n'avait pu être apportée en France que par les négriers ; main- tenant que l’ile du Prince est fréquentée annuetlement (x) Le Levant, (27) par nos navires, elle deviendra certainement commune, d'autant plus que j'ai donné aux habitans du pays l’idée d’en faire commerce. C’est dans les bois qui couronnent les sommets des montagnes du milieu de l'ile qu’elle se tient, et les Noirs qu’on y envoie pour couper du bois la trouvent sous les petits arbustes et quelquefois même, comme je l'ai vu , sur les arbres. Ils les rapportent dans leurs habitations où, après les avoir enfilées avec une branche de liane et au moyen d’un trou pratiqué près du bord , ils les pendent au-dessus de la porte de leurs cases comme un fétiche agréable à leur divinité et sus- ceptible d'attirer sa protection sur leur modeste foyer. Aujourd'hui c’est réellement pour eux un bon fétiche qui leur procure du tabac, de l’eau de vie, de vieux effets et même de l’argent. 11) H. purpurEA, Gmel. Lister, Conch., t. prxxxt , f. 35. — Knorr, Verg., IV, t. xx1v, EVT- Bulla purpurea , Gmelin , Dillwyn. Id., Chems., Conch., IX ,t. exvuir, f. 1017, 1018. Bulimus purpurascens , Brug. , Encycl. ,n° 103. Helix purpurea , Fér,, Tab. Syst., f. 49. Achatina purpurea, Lam. ,t. VI ,0e P: p- 128, n°0 4. Testa ovato-conica , ventricosa, subcrassa, striata, luteo- viride, punctis nigricantis irregulariter sparsis, postice rosea flammulisque bruneis ornata ; apice obtusa ; su- turis marginatis ; apertura ovali, purpurea ; columella arcuala, purpurea ; truncala ; labro acuto 3 intus nigro marginato. Loug.,6 à $ cent. Larg., 5 à 6 cent. F QG (25) Corpore elongato, crasso, griseo-obscuro , dorso nigri- cante ; tentaculis nigris ; pede pallido. Long., 15 à r9 cent. Description. — 1’. purpurea est ovoïde , à spire co- nique médiocrement élevée , très-ventrue , assez épaisse, grossièrement et irrégulièrement striée dans sa longueur et au contraire très-finement et régulièrement dans le sens de sa largeur; sa couleur est d’un jaune verdàtre très-agréable et qui s’harmonise avec le pourpre et le rose que l’on y remarque encore de manièçe à en faire une des coquilles les plus agréables à l'œil. La surface des deux derniers tours qui seuls montrent cette couleur verte est en outre parsemée d’un assez bon nombre de points noirs un peu allongés, comme effacés , et généra- lement transverses par leur direction ; les premiers tours et le sammet sont d’un joli rose interrompu par quelques flammes brunes en zigzag; le sommet est obtus ; les tours, qui sont au nombre de six, sont passablement arrondis , et le dernier. qui est très-ventru, est plus grand que tous les autres ensemble; la suture est mar- ginée en avant. L'ouverture est ovale, grande , un peu plus haute que large et plus longue que la moitié de la coquille ; elle est remarquable surtout par sa magnifique coloration pourprée que rien ne peut surpasser dans les beaux individus ; sa columelle est fortement arquée, ar- rondie et tronquée en avant ; le bord droit est simple, tranchant et marginé en dedans de noir. L'animal estgros , allongé et d’un gris sombre plus ou moins olivâtre ; sa tête et ses tentacules sont noirs, une bande de la même couleur s'étend sur la partie dorsale ( 29 ) d'une extrémité à l’autre ; le pied est de la même cou- leur que le corps, mais beaucoup plus pâle. Observation. — Tous les individus que j'ai recueillis et qui viennent de servir à la déscription précédente appartiennent à une variété moins grosse que celle que l’on voit généralement dans les cabinets; elle est aussi bien plus éclatante en couleur. Les œufs que l’on retire facilement de l’utérus au nombre de 4 et de 5 sont assez gros , oblongs et d’une couleur jaune qui devient vive dès qu'on les expose à l'air, mais qui s’aflaiblit insensiblement à la lumière. Les Noirs des rivières de Mésurade, Sestre et Sino désigneut cette Hélice sous le nom de Fouca qu'ils pro- noncent avec un accent guttural, comme si, aulieu duc, il y avait le jota des Espagnols. Ils en mangent l'animal qu'ils font rôtir dans la coquille même , et ce mets ne m'a pas paru trop mauvais. | Habitat. — J'ai rencontré l’Æ. purpurea sur toute l'étendue de la côte de Malaguette , c’est-à-dire dans un espace de plus de 120lieues. Elle y est pour le moins aussi commune que l //. aspersadans les contrées de l’ouest de la France. Elle se cache dans les bois sous l'ombre et à la fraîcheur des plantes et feuilles mortes ; mais après le passage d’un Z'ornados ; lorsque tout est humide autour d'elle, on voit son animal ramper sur les troncs des arbres. C’est surtout à la rivière de 5estre que j'en ai remarqué une grande quantité ; les Noirs, à qui je té- moignai le désir d'en avoir, en ramassèrent plus de 200 dans l’espace de dix minutes. ( 30 ) 129) H. Acaarina, Lin. Bulla Achatina, Linn., Gmel., Dill., Chems., IX , tab. cxvur, f. 1012, 1013. Buccinum Achatinum, Mull., F’erm., f. 140,332. — Bonanni, Récr., ani, f. 192. — Lister, Conch., t. DLxx1x, f. 34.— Guatt., Test. ,t. xzv, {. B.— Fav., Conch., PI. 65, fig. M 5.— Séba, Mus., XII, t. xxr, f. 1-3 et 7-10: Chersina tigrina, Humphr., Mus. Calonn. Bulimus Achatinus, Brug., Encycel. , n° 101. Achatina variegata, Lam., Boissy. Helix Achatina, Fér., Fab. Syst., n° 353. Achatina perdrix , Lam., no 1. Testa mazxima, ovaio-oblonga, ventricosa, subtenui, longitudinaliter atque transversim striata , luteo-fulva, flammis nigris undulatis ornata ; apice purpurea; Su— turis marginatis ; apertura ovali; columella arcuata , purpurea , truncata; labro simplici, acuto ; intus albo- cœrulescente. Lorg., 10 à 19 cent. Larg. , 7 à 10 cent. Corpore elongato , crasso , griseo-obscuro. Long. , 12 à 22 cent. Description. — Cette belle coquille , commune dans les cabinets , est la plus grande que je connaisse parmi les terrestres ; elle est de forme ovale-oblongue, ventrue, assez mince et striée sur toute sa surface de manière à présenter grossièrement le tissu d’une toile. Les stries sont les unes longitudinales et les autres transversales; les premières sont peu profondes , serrées et presque régulières; les secondes sont moins distincies, mais plus régulières et moins rapprochées. Sa couleur générale est un jaune fauve plus où moins chaud, orné d'un (31) nombre considérable de flammes noires longitudinales, assez serrées eL décrivant des zigzags nombreux et très- irréguliers, mais tels que leurs angles se correspondent assez généralement entre flammes voisines. Le som- met, qui est tmpeu pointu et toujours dépouillé d’é- piderme , présente une magnifique couleur pourpre. La spire est assez haute ; ses tours, qui sont peu arrondis, se développent aa nombre de sept et demi; le dernier étant plus grand que les autres réunis, et les sutures qui les séparent sont fortement marginées en avant. L’ouver- ture est ovale, plus longue que large et de très-peu de chose plus longue que la moitié de la coquille ; la colu- melle est arrondie; arquée , de couleur de pourpre et tronquée en avant; le bord droit est simple, tranchant, fragile , et l'intérieur est d’un blanc bleuâtre et soyeux. L'animal est de couleur grisàtre-obscure plus où moins foncé; son pied est blanchâtre , et quand il se contracte sa surface présente-de petites rides qui ont l’aspect de varices étoilées. Les tentacules sont plus foncés. Observation. — Je n’ai pu distinguer aucune variété bien remarquable parmi les individus de l’Æ. achatina que j'ai recueillis ; l'animal seul m'en a offert par sa cou- leur plus ou mois sombre. Les œufs sont très-gros et oblongs. Habitat. — La'patrie de cette belle coquille, le géant du genre , n’est pointaux Antilles ni à Cayenne, comme l'avait pensé M. de Lamarck.Je crois pouvoir avancer aussi qu'elle n'est pas davantage à Madagascar, d’où M. de Férussac la fait venir; elle est de cette partie du conti- (3) nent d'Afrique qui s'étend depuis l’équateur jusque vers le dixième degré nerd et que l'Océan borne à l’ouest. Là elle est aussi commune dans les bois que lÆ. purpu- rea. dont j'ai déjà parlé. En côtoyant ces plages, j'ai souvent vu des naturels venir à notre rencontre dans leurs pirogues pour nous les vendre avec des fruits’ et d’autres marchandises ; ils savent donc que nous les re- cherchons ; mais il est bien singulier que l’idée ne leur soit jamais venue d'apporter de la même manière les autres coquilies, soit terrestres , soit marines , qui se trouvent chez eux. J’ignore aussi quelle idée ils se for- ment de notre empressement à les recueillir; ce west point dans la pensée que nous mangeons l'animal, puisque la plupart du temps ils les apportent vides ; et d’un autre côté, s'ils pensent que nous attachons un prix à l'éclat de leurs couleurs , pourquoi ne cherchent- ils pas de préférence les plus beaux individus , et ne prennent-ils pas le soin de les conserver entiers au lieu de les percer d’un large trou, comme ils font pour en porter beaucoup à la fois? Auraïent-ils la pensée du roi de Sino qui, me voyant recueillir des insectes et les pi- quer dans une boîte, me demandait si je n'emportais pas ces animaux en France pour faire servir. comme modèle leurs couleurs et leurs dessins à la confection de nos étofles et de nos différens meubles? Ces. Noirs, exempts des besoins sans nombre que les peuples civilisés se sont imposés , trouvent presque toutes leurs ressources dans les productions naturelles qui les en- tourent. L’/7. achatina nous en fournit une preuve , car ils s'en servent pour différens usages. Ils mangent l'animal après en avoir retranché certaines parties telles | (33) que les intestins ‘et le pied ; maïs ils n’usent pas de cette nourriture habituellement , et dans les villages de la côte, ce n'est mème que dans le cas où la ressource de la pêche vient à leur manquer. Avec les jeunes coquilles ils for- ment souvent leurs boites à tabac, seuls meubles , avec leurs couteaux ou leurs poignards, qui ne les quittent jamais. Avec les grosses ils fabriquent différentes sortes de vases au moyen d’un frottement prolongé qui a pour but d'enlever une portion de la coquille; enfin ils se servent de leurs sommets pour composer des ornemens à leurs femmes. 13) H. marcrvara, Swenson. Testa ovato-conica , ventricosissima , crassa, exilissime siriala, sublævigata, luteo-fulva , flammis bruneis ‘aut nigris longitudinaliter ornata; apice obtusa , alba; su- Luris MArginalis ; aperturæ ovali;columella) arcuata ; alba , truncata ; labro Lato., acuto ; intus-alba cœrules- cente. Long. , i1,3à 12 cent. Larg., 7 à :9#cent., 1 Description. — F/H. marginata est ovale-conique, très-ventrue; épaisse et presque lisse, du moins ne distingue-t-on, à sa surface que ‘de faibles stries lon- gitudinales qui ne sont point sensibles au toucher. Sa couleur est d’un jaune fauve présentant toujours deux tons diflérens dans déux zones qui occupent toute la surface du dernier tour ; la zone antérieure est la plus foncée et aussi la plus large, et la ligne qui les sépare et qui est assez bien tranchée dans certains individus prend Sa naissance à l'extrémité de la suture, c’est-à-dire à XXIV, 3 (34) l'extrémité postérieure de l'ouverture. En outre de cela. toute la surface de ses trois à quatre tours antérieurs est ornée de flammes brunes ou noires longitudinales et très-irrégulières. La spire est médiocrement élevée et se compose de sept tours; son sommet est obtus et très- blanc , et ses sutures marginées en avant, L'ouverture est ovale, un peu plus haute que large et un peu plus longue que la moitié de la coquille; par sa direction comme par son plan elle est peu oblique à l'axe ; la colu- melle est blanche, solide , arquée , arrondie et tronquée en avant; le bord droit est simple , tranchant et évasé dans toute sa partie antérieure, caractère qui distingue éminemment cette espèce de celles qui lui sont voisines. L'intérieur est d’un blanc bleuâtre émaillé. Observation. — Le jeune âge présente de grandes difiérences dans les caractères de cette coquille; par exemple on y remarque que le test est moins épais, l'épiderme prolongé jusqu’au sommet, les flammes peu nombreuses et situées à la partie antérieure seulement, le dernier tour peu ventru , l'ouverture plus petite et le bord droit nullement évasé. Habitat. — FElle habite à la côte de Malaguette , mais surtout à celle des Dents et d'Or. Elle m'a semblé com- mune à Axim. Sous-GExrE COCHLICOPE. 14) H. corumna, Mall. Buccinum columna, Mull., Verm., p. 11, ue 341. — Lister, Conch. ,t. xxxvirt, f. 37, et t. xxx1x , f. 39 b.— Fay., Conch., PJ, 61, f, 4 13. = (35) Helix columna, Chemu., IX, t, oxu, f: 054, 955, et Il, t: cexur, £. 3020 , 3021. Helix pyrum, et Helix columna , Gmel. Bulimus columna, Encyel. , PI. 459, f. 5a 4. Columna grisea , Panz. Helix columna, Fér.; Tab, Syst. , n° 367. Lymnea columnaris , am. ,t, VI, 2°p.,no:. Testa sinistrorsa, elongato-turrita, transversim aique longitudinaliter striata, rugosa, luteo-fulva , flammulis rufis trregulariter ornata; apice obtusa, brunea } an- fractibus in medio pl'anulatis; suturis marginatis ; apertura ovali, postice angulata ; columell@uniïplicata, alba , truncata ; labro simplici, acuto ; intus alba. Long. , 8 à 10 cent. Larg., 1 + à à cent. Corpore sinistrorso, elongato, nigricante ; dorso tentatu- lisque nigris ; pede luteo-sürdido , aurantio margintto. Long. ,8 à gcent. Déscription: — Cette belle et curieuse coquille esi senestre eude forme allongée, presque cylindrique; sa surface est finement guillochée, ce qui provient'de Veritrecroisement des stries longitudintiles avec les'stries transversales dont elle est sillonnée, aussi est-elle un pet rugueuse attoucher. Sa couleur est d'un jaune fiuve qui se rembrunit près du sommet; mais ce qui la rend d'un aspect agréable , ce sont de nombreuses flaminies rousses , irrégulières et loiigitudinales qui se montrent sur tous les tours et d’une manière bien plus complète et plus tranchée dans les jeunes individus que dans les vieux. Le sommet ést obtus et les tours, qui soft au nombre de huït,' présentent un caractère fort rémar- quable qui consisté dans l’aplatissement du milieu de ( 56 ) leur surface; les sutures sont faiblement marginées. L'ouverture est ovale, anguleuse en arrière , et par sa direction elle est à peu près parallèle à l'axe , tandis que par son plan elle lui est très-oblique. Quand-on met l'œil dans le prolongement de cet axe en avant, on voit le vide qui le représenté et qui se prolonge jusqu’au sommet intérieur de la coquille. La columelle est arquée er forme un pli assez épais ; elle est tronquée en avant et blanche; le bord gauche , qui est ici l'extérieur, est mince, fragile et tranchant ; l’intérieur est d’un blanc un peu sale. « L'animal de lÆ. columna:ne diffère en rien pour la forme de ceux des espèces voisines. De mème qu’on le voit dans toutes les Agathines, la partie supérieure et postérieure du pied est ur peu aplatie de manière à pré- senter la forme d’une pyramide quadrangulaire dont le sommet se trouverait à l'extrémité de la queue du mol- lusque. Ses couleurs le distinguent mieux des autres es- pèces; le pied est d'un jaune sale.un peu verdâtre, marginé tout autour en dessous , et surtout en dessus, d'une teinte aurore assez vive; le corps et le dessus du pied sont foncés, presque noirs, surtout en avant; les tentacules sont extrêmement noirs; lés fissures de la peau sont profondes eu bien tranchées , et les éminences qu'elles laissent entre elles se détachent. en clair. Ce mollusque est senestre comme celui de |°{7. bicarinata. Observation. — L'H. columna,a long-1emps excité le doute des naturalistes sur le genre qui doit la recevoir, comme on, peut le remarquer par la synonymie qui est en tête de cette description. Quoi qu'il en,soit , sa/place (37) a été dans ces derniers temps fixée parmi Les Hélices, et * la connaissance que je viens d'acquérir de son animal confirme cette détermination. J'ai fréquemment trouvé trois œufs dans le canal déférent , et quelquefois quatre. Ces œufs sont oblongs- allongés, un peu arqués dans le sens de leur longueur, caractère qui me semble devoir être la conséquence de l’enroulement rapide et de l’étroitesse de la coquille. Ils sont d’une belle couleur jaune comme ceux de toutes les autres espèces d’Agathines que j'ai eu occasion d'ob- server dans ces contrées. Les seules variétés remarquables dans cette espèce sont le résultat de l’âge. Jeunes, leur test est orné de flammes plus vives et plus nombreuses ; aduites, elles commencent à palir et les flammes s'éteignent plus ou moins. « Habitat. — La patrie de cette coquille avait été indi- quée par les uns aux Antilles et par d’autres au Brésil. M. de Lamarck la place à la côte de Guinée où, selon quelque apparence , elle se trouverait aussi, non dans les rivières, comme le pensait ce savant qui en faisait une Lymnée, mais sur la surface du sol. C’est à lile du Prince , très-voisine de cette côte , que je l'ai trouvée ; elle y est fort commune , sans doute parce que les habi- tans n’en fout aucun usage. Hs, la connaissent cependant fort bien et la désignent simplement sous le nom de Caracola qui est plutôt le nom du genre chez les Por- tugais que celui d’une espèce. On la trouve dans les bois les plus épais, sous les broussailles sèches et inortes ; elle ne s'élève point sur. la partie la plus haute des ( 38 ) montagnes , mais seulement à leur partie moyenne. Lorsque l'animal meurt, sa coquille, entraînée sur le rivage par la chute des eaux pluviales, devient aussitôt la demeure des Pagures dont j'ai déjà parlé, et qui la remontent sur les montagnes où ils se plaisent. 15) H. srrrazezza, Nob. PL. ru, fig. 7. Zestu elongato-turrita, tenu, subdiaphana, exilissime atque longitudinaliter striata , bruneo-lutescente; apice subacuta ; ultimo anfrüctu subcarinato ; apertura ovali; columella arcuata; labro simplici, acuto ; intus albido. Long. , 2 cent. à 2 cent. et 2 mill. Larg., 4 à 5 mill. Corpore albo-sordido. Long. , 1 cent. à 1 cent. +. Description. — Cette coquille est allongée, turri- culée , presque cylindrique , mince, translucide, et son épiderme est d’un jaune sale un peu foncé, surtout vers le sommet; sa surface est finement et régulière- ment striée dans toute son étendue ; le sommet est obtus et les tours, au nombre de neuf, sont arrondis, à l’ex- ception d’un seu], le dernier, qui est anguleux. L’ouver- ture est ovale, petite, presque parallèle à laxe par sa direction , mais assez oblique par son plan ; la columelle est très-concave et le bord droit simple et tranchant. L'animal est d’un blanc sale qui tient un peu de la teinte générale de la coquille. Observations. — Cette petite espèce se rapproche beaucoup'de l’/7. octona, si commune à Cayenne et aux (39 ) Antilles ; cependant elle en difière suflisamment par les stries fines et régulières qui l’enveloppent dans toute sa surface, ainsi que par la forme anguleuse du dernier tour, qui , quoique faiblement marqué , se montre cependant sur tous les individus comme une sorte de carëne. Habitat. — File est très-commune à l’île du Prince , où on la trouve au pied des montagnes , proche le bord de la mer , et rassemblée en nombre sous les pierres ou les broussailles mortes. 16) H. Maracuerrana, Nob. PL. ux, fig. 4, Testa elongata, conica , tenui, subdiaphana, exilissime atque longitudinaliter striata, bruneo-lutescente ; apice obtusa ; apertura ovali; columella arcuata, truncata ; labro simplici, acuto. Long., 1 cent. + à 2 cent. Larg. , 8 à 9 mill. Corpore luteo-sordido. Long. , 2 cent. ©, Description. — Cette coquille est allongée, conique, mince, presque diaphane , irès-finement et régulière- ment striée ; l’'épiderme dont elle se revêt et qui est très- mince est d’un brun jaunâtre sale et semblable à celui de l'espèce précédente ; le sommet est obtus et les tours, qui sont au nombre de six, sont assez arrondis. L’ou- verture est ovale et peu oblique à l’axe par son plan comme par sa direction. La columelle est très-concave el tronquée en avant ; le bord droit est mince , fragile et tranchant. (40 ) L'animal tent beaucoup par la couleur de celle de la coquille , il est d’un blanc sale. Observations. — Cette espèce est sans contredit très- voisine de la précédente, cependant elle s’en distingue suflisamment par des caractères constans , tels que la forme moins allongée et plus conique, le nombre des tours de la spire qui est toujours moindre, et enfin la co- lumelle qui est tronquée. Quant aux animaux, ils ne diflèrent pas sensiblement. Habitat. — C'est sous les buissons , les broussailles et dans les anfractuosités des rochers qu’elle vit sur toute la côte de Malaguette. 17) H. myazina, Nob. PI. rx, fig. 5. T'esta ovato-elongata , tenuissima ; diaphana , lævigata ; luteo-pallida ; apice obtusa; apertura ovali; columella convexa , extrinsecus reflexa ; labro simplici , acuto. Lons. , 7 à 9 mill. Larg., 3 à 4 mil. Corpore luteo-pallide. Long., 11 cent. Description. — Cete coquille est de forme ovale- allongée, lisse, luisante, très- mince , transparente et d'un jaune pâle imitant la couleur de la corne. La spire est assez élevée et obtuse ; elle se compose de six tours un peu arrondis et dont le dernier est plus grand que tous les autres réunis. L'ouverture est ovale un peu allongée , son plan et sa direction sont presque parallèles ! C4) à l'axe. La columelle présente un arc sortant, c'est-à- dire dont la convexiié est en dehors; son bord est un peu réfléchi ; le bord droit est mince, simple et se con- ünue avec elle. L'animal ne présente rien de particulier. Habitat. — Elle est de Mésurade, où je l’ai rencontrée avec |’. malaguettana dans les anfractuosités des ro- chers au pied du cap et non loin du bord de la mer: Sous-GEnrEe COCHLICELLE. 18) H. mannensis, Nob. PL. zx, fig. 8. T'esta conico-elongata , tenui , diaphana, lutescente, ext- lissime striata ; apice obtusa ; apertura ovali ; columella recta ; labro simplici, acuto. Long. , 4 à 5 mil. Larg. , 1 + à 2 mil, Corpore luteo-florido. Long. , 6 à 7 mil. Description. — Cette petite coquille est conique allongée , mince , transparente, lisse et de couleur jau- nâtre un peu sale, plus foncée vers le sommet ; celui-ci est. un peu obtus; les tours, qui sont légèrement arroudis , sont au nombre de six, le dernier moins grand que les autres réunis. L'ouverture estovale et pres- que parallèle à l’axe par son plan et par sa direction. La columelle est droite et se continue sans troncature avec le bord droit qui est tranchant et simple. L'animal est d’une belle couleur jaune qui se trans- met à travers la transparence du test. (42) Observations. — L’fi. hannensis paraît très-voisine de l'A. elavulus qui est de l'Ile-de-France , cependant elle s’en distingue par des caractères suflisans. Habitat. — Je l'ai trouvée au village de Hann sur la presqu'île du Cap-Verd où elle recherche le voisinage des eaux douces , particulièrement de celles que l’on y recueiile dans des barriques enfoncées dans la terre. LA Sovs-GEnre COCHLOGÈNE. 19) H. Kawseuz, Adans. Adaus., l’oy. au Sénégal, G.N.,tab.1,f. 1. Bulimus Kambeul, Brug., Dict., n° 40. Helix Kambeul, Dul. [d., Fér., Tab. Syst., n° 388. Bulimus Kambeul, Law. ,t. VI, 2e p., n° 15. Helix flammata, Féruss. , Tab. Syst. , no 385. Buccinum strigatum , Mull. Bulla strigata, Gmel., Däll. Bulimus strigatus , Brug. Helix undata, Gmel., Dill. 3 esta ovato-elongata, conica, perforuta, tenui, exilissime atque irregulariter striata, luteo-pallide, plerumque flammis rufis longitudinaliter dispositis ornata; apice subacuta , albida; anfractibus convextusculis ; apertura ovali; columella subrecta, albida aut violacea ; labro simplici, acuto. UE Long. , 3 cent. 3 mill. à 10 cent. Larg., 1 cent. + à 4 cent. Corpore griseo-sordido. Long. , 6 cent. à 15 cent. Description. | 11. Kambeul, telle que je comprends (43) cette espèce, est ovale-conique plus ou moins allongée et plus ou moins ventrue. Elle est perforée, un peu mince, très-faihlement et très-irrégulièrement striée dans sa longueur, et de couleur blanche, jaunâtre ou mème rousse , ornée le plus souvent de flammes longitudinales d’un brun roux plus ou moins foncé s’étendant sur tous les tours , à l'exception des deux ou trois premiers qui sont généralement blancs. La spire est conique, assez élevée, et se compose de 8 à 9 tours arrondis dont le dernier est toujours assez grand et ventru. L'ouverture est ovale, presque parallèle à l’axe par sa direction, mais uu peu oblique par son plan. La columelle est arrondie, réfléchie en dehors , peu arquée , souvent presque droite et de couleur violacée ou blanche. Le bord droit qui lui est continu est simple, fragile et tranchant. L'animal n'offre rien de particulier dans sa forme ; il est d’un gris sale plus ou moins obscur. La partie anté- rieure ei surtout les tentacules sont plus foncés. Observations. — Mes recherches sur la côte de la Sénégambie m'ont procuré les variétés de l’Æ. Kambeul signalées par Adanson, j'ai donc pu Îles comparer entre elles et m’assurer de l’exactitude de ses descriptions ; j'ai en outre rencontré sur la côte de Malaguette quatre va- riétés de l’/7. flammata de M. de Férussac , et je dois dire qu'en les comparant aux premières, j’ai trouvé qu'elles se lient tellement avec elles qu’il m'est impos- sible d’assigner de limites aux deux espèces. Leurs animaux, qui sont les mêmes pour la forme, le sont aussi pour les couleurs, à l'exception cependant de quelques variétés dans la teinte générale , variétés qui du resie marchent toujours avec celles que l’on remarque (44) dans les coquilles. Je ne traiterai done de ces Hélices que sous le nom spécifique de Kambeul qui est le plus ancien. Je distingue sept variétés de l’H. Kambeul appar- tenant à cette partie de l'Afrique que j'ai visitée et paraissant aflecter plus particulièrement tel lien que : tel autre. Ces variétés reposent sur quatre sortes de caractères : le volume de la coquille, la couleur du fond, la présence ou l'absence de flammes brunes et sa forme étroïte ou ventrue. Quant aux variétés qui résultent de la disposition plus ou moins serrée, plus ou moins étendue, plus ou moins oblique de ces flammes, elles sont innombrables, et il est inutile d'en faire mention. Le tableau suivant fera connaître > au premier coup d'œil, la disposition et le rapport de ces variétés prin- cipales. VARIÉTÉS, & ( Var. 4. Fond blanc, avec des flam- E | mes nombreuses sur tous = les tours ; la columelle un o peu violette. Grande Var. | S | Var. B. Fond blanc ; aucune flamme; K . j © la columelle blanche. | A AAC eA ? : Var F: V. cc. Fond blanc, avec des flam- | Grande Var. 2 mes nombreuses sur tous = 4 D}. LA E V.D les tours ; la columeile cl Moyenne V j ; iolette. 4 } SRNVS CE. peu violette Peute Var. f H 5 Var. F. Fond brun, avec des flam- : ; ae à = 2 2 mes nombreuses sur tous | dit à = les tours ; la columelle vio- À 3 lette. $ \ = Sn * Petite Var! | SE Var. G. Fond blanc uni; aucune flamme ; la columelle blan- che. (#) Je possède dans ma collection une 1. flammata du voyage de M. Caillaud en Égypte, et qui rentre sans aucune difliculté dans ma variété D de l’/7. Kambeul. Si l’on pensait qu'il füt possible de tirer parmi ces variétés des caractères propres à la distinction d’une seconde espèce, et que dans ce cas on fit valoir la di- mension si variable , la forme , l'absence ou la présence des flammes , et enfin la coloration quelquefois violacée ou bien blanchâtre de la columelle, je combautrais cette opinion par l’exemple de beaucoup d’autres espèces sur lesquelles il ne s’est élevé jusqu’à ce jour aucun doute. Ainsi, pour la coloration de la columelle, je citerai V7. ovata , dans laquelle cette partie et le labre sont tantôt d’une blancheur extrêmeet tantôt d’un pourpre éclatant. Pour l’absence de toute coloration de la surface exté- _ rieure du test, je citerai l'Z{. bicarinata dont je viens de signaler plus haut la variété si blanche , si identique. Pour la forme plus ou moins ventrue ou allongée, n'y at-il pas quelque chose de semblable dans l’/7. fulica ? Enfin pour:le volume , une foule d'espèces présentent une petile et une grosse variété , et le meilleur exemple que je puisse en eter est celui de V7. contusa que j'ai décrit au commencement de ce Mémoire. Ces anomalies se reproduisent dans beaucoup d'espèces où. elles con- stituent des variétés , et l’on pourrait citer telles de ces espèces où des variétés se présentent avec des carac- tères bien autrement tranchés. J'en donnerai pour exemple l'{7. fulica:dont je viens de parler, et qui en produit une si remarquable dans certains individus que j'ai rapportés de l'Ile-de-France et dont un semblable vient d’être envoyé par M. Desjardins à la galerie du ( 46) Muséum où elle intrigue singulièrement par les parui- cularités de sa forme. Cette variété , qui du reste présente les mêmes couleurs et les mêmes flammes que £es congénères , est beaucoup plus ventrue , ombiliquée , sans troncature à la columelle et montre une spire co- nique et pointue dont les lignes de profil sont un peu concaves. Certes ,1l serait difhicile de reconnaître dans cette monstrueuse coquille une 77. fulica, si sa surface extérieure n’en décélait l'identité par une parfaite con- servation , et J’ajouterai si Je n’en avais obtenu plusieurs individusmunis de leurs animaux pêle-mèle avec ceux qui forment letype de l’espêce. L’individu du Muséum étant détérioré par un long séjour dans Fesprit de vin et n'offrant plus ni couleur ni épiderme à l'extérieur, a dû nécessairement donner de l’incertüitude à son sujet. Habitat. — 1H. Kambeul formée des sépt variétés dont nous venons de parler, occupe iouie cette vaste étendue de pays qui s'étend depuis ie Sénégal jusqu’au golfe de Guinée. Les grosses variétés sont plus généra- lement de la partie qui avoisine le Sénégal , et les petités de la côte de Malaguette et de celle de Guinée. On les trouve en grande quantité dans les bois et même dans les champs cultivés. 20) H. rira, Fér. Fér. , Tab, Syst., p. 54: — Quoy et{Gaimard, Voy+ de /'Uranie. — Spix et Martius, Cog: du Brésil. Testa ovato-conica , tenuissima , fragili, diaphanä , exi- lissime et irregulariter strtata, alba. flämmulis rufo- ( 47) bruneis lineolatis ornata; apice subaruta ; apertura ovali ; columella recta ; labro simplici, acuto , lato. Long., 3 à 3 cent. Lars. , 1 cent. 3 mil, à 1 ceut. 5 mil: Corpore albido. Long. , 6 cent. Description. — L}1. lita est ovale-allongée, conique, extrèmement mince, légère, fragile, blanche et transpa- rente ; elle présente des flammes longitudinales de cou- leur brune, un peu nébuleuses, chargées de petites linéoles blanches. Ces flammes ont entre elles une ressem- blance de forme assez complète et sont telles qu’en les observant attentivement , on y voit confusément tracées deux fascies transversales et blanches. Outre cela , la surface de cette coquilleest légèérementempreintede stries d’accroissement très-irrégulières, mais peu distinctes. La spire est assez élevée et presque aïguë ; elle se com- pose , dans les individus adultes, de six tours peu arron- dis, dont le dernier est un peu plus grand que les autres réunis. L'ouverture est ovale, un peu allongée, paral- lèle à l’axe par la direction de sa longueur et oblique par son plan. La columelle est droite ou très-peu ärquée, mince , arrondie et réfléchie en dehors ; le bord droit est mince, tranchant et évasé, surtout en avant. L'intérieur de la coquille est blanc comme lextérieur et présente les mêmes flammes , seulement plus foncées , et sans li- néoles. C’est une des plus agréables coquilles de nos collections. L'animal we présente rien de particulier ; sa couleur est blanchätre un peu sale. (48) {abitat.—Cette espèce est extrêmement communé au Brésil. Je l'ai recueillie en grande quantité sur les haies d’accacias du jardin de Pex -empereur don Pedro à Saint-Christophe. fx 21) H. ovara, Mull. Mull., J’erm., p. 85 , n° 285.— Lister, Conch. ,t. mzv, f. 1. Bulla ovata, Chemn., IX, t. exix , f. 1020, ro21. Bulimus ovatus , Brug., Dict., n° 33. Helix ovalis , Gmel., p. 3637, ne 66. Helix ovata, Fér., Tab. Syst., n° 410. Bulimus ovatus, Lam., VI,2p.,n0 1. mn à T'esta ovato-oblonga , ventricosa , subcompressa , crassa, longitudinaliter striato-rugosa , maleata, luteo-fulva, J'asciis bruneis longitudinalibus , irregulariter sparsis ; apice costata, rosea ; ultimo anfractu magno, oblique posito; apertura oblonga ; columella crassa , subrecta; labro crasso , reflexo ; intus albido. D Long. , 11 cent. 2 mil. à 14 cent. 3 mil. Larg., 9 cent 2 mil. à 8 cent, Corpore crasso, griseo-sordido , tentaculis obscuris. 2 Larg., 16 à 18 cent. Description. — L’A. ovata, une des plus grandes es- pèces connues, est de forme ovale-oblongue vue de droite à gauche et un peu comprimée dans le sens opposé ; elle est ventrue, épaisse, marquée destries irrégulières et plus ou moins rugueuses , fortement martelée et d’une cou- leur jaunâtre variant au fauve etau châtain. Les prenners tours et surtout le sommet sont rosés et incomplètement costelés : le dernier tour est orné de fascies brunes, irré- gulières qui se combinent avec les lignes d’accroisse- (49) nent. Le sommet est obtus; les tours sont au nombre de cinq et demi, peu arrôndis , le dernier beaucoup plus grand que les autres réunis et ayant sa suture très-oblique par rapport à celles des tours précédens. L'ouverture est ovale-oblongue , un peu plus longue que la moitié de la coquille , parallèle à l’axe par son plan et très-peu oblique par la direction de sa longueur. La columelle est épaisse et presque droite, formant un angle plus ou moins obtus avec le profil de la convexité du dernier tour; le labre est épais et se réfléchit au dehors en un bourrelet généralement peu épais. L'animal est très-gros, un peu court et largement marginé ; son pied est très-grand; sa couleur est un gris sale tirant sur le brun. Les tentacules se montrent, comme dans presque toutes les espèces, d’une teinte plus foncée. Observations. —fette espèce se compose de deux variétés fort belles : l’une a le labre et la columelle rosés, mais bordés extérieurement de pourpre éclatant, et l’autre les a d’une blancheur parfaite. Habitat. — Cette magnifique espèce se trouve dans les forèts vierges du Brésil où son animal monte parfois sur les arbres. Dans un précédent voyage, ayant été du Brésil à l'ile de Bourbon , et portant avec moi plusieurs individus vivans de cette espèce, j'en laissai quelques-uns dans un jardinde cette ile, à la demande d’un habitant. Il est possible qu’ils s’y soient multipliés, comme l’ont fait autrefois les individus de lÆ. fulica apportés de Mada- gascar par l’ordre de M. Mothé, intendant de la colonie. XXIV. 4 (50 ) 22) H. canTAGAzLANA, Nob. T'esta ovata , ventricosa, compressa, crassa , exile atque longitudinaliter striata, antice fulva, postice castanea ; apice obtusa , albida ; uliimo anfractu magno, oblique posilo , striis transversalis postice notato ; suturis fasc a albida marginatis ; apertura ovali ; columella labroque albis, crassis, reflexis ; tntus alba. Long. , 8 cent. +. Larg., 5 cent. 8 mil. Description. — L'H. cantagallana est ovoïde , ven- true , eomprimée de dessus en dessous , à texture épaisse, presque opaque, finement et longitudinalement striée à sa surface. Quand on l’observe attentivement et la loupe à la main, on voit qu'outre les stries d’accroissement le dernier tour en présente une infinité de petites d’une finesse extrême et que l'œil nu ne saurait jamais saisir, tandis que tous les autres tours , qui sont d’une couleur foncée , ont leur surface finement pointillée et comme rongée par le temps. Ce caractère, qui est constant dans cette espèce, ne s’est présenté à ma connaissance dans au- cune autre. L'aspect de cette Hélice est remarquable par la présence de deux couieurs bien tranchées à la suture antérieure; ce sont, pour la partie spirale ou postérieure, un brun foncé très-voisin du châtaïn , et pour le dernier tour ou la partie antérieure, un fauve plus où moins clair. Ces deux couleurs se confondent insensiblement vers le commencement du dernier tour. La spire , peu élevée, complète presque six tours; ceux-ci sont peu arrondis, et le dernier, qui ést plus grand que tous les autres réunis, présente en arrière de son milieu quelques stries C5) transverses, larges et quelquefois à peine apparentes. Le sommet est obtus ; les sutures, dont la dernière est un peu plus oblique que les autres , sont marginées en avant d’une bande bianchâtre assez large. L'ouverture est ovale, plus longue que large et occupe un peu plus de la moitié de la coquille; son plan est parallèle à l'axe et sa direction lui est oblique. La columelle est épaisse, arrondie et arquée en dedans; elle se réunit sans inter- ruption au bord droit qui est épais , réfléchi, en un bour- reletet toujours blanc comme elle, L'intérieur est blanc. Observations. L'H. cantagallana se twouvait rap- poriée par quelques personnes à l/Æ7, ovata et par quel- ques autres à }'Æ. oblonga (,B.: hæmatomus , Lara. ). Après en avoir observé un grand nombre des unes et.des antres , Jje.crois devoir l'en séparer pour en former une espèce à part, et Je vais faire.en sorte de prouver que chacune a en effet des caractères qui ne lui permettent pas de se ranger sous la mème désignation spécifique. L’/Æ. cantagallana est à peu près de la mêmertaille que l’{1. oblonga; le nombre des tours de spiré est le même à un quart de tour près, et le dernier, beaucoup plus grand que les autres réunis, est également ventru et presque aussi oblique ; elle est pareillement striée dans le sens de la longueur, quoique les stries ne soient pas aussi saillantes et aussi fortes. Son ouverture est égale- ment ovale et occupe en longueurun peu plus de la moilié ; enfin cette coquillé est-aussi épaisseet solide que celle à laquelle nous la comparons. Voilà les seuls rap- ports bien sensibles , et voici maintenant les différences. L°{1. cantagallana est plus courte et cependant plus (52) ventrue que l'A. oblonga. Elle est comprimée de dessus en dessous, ce qui n’arrive jamais dans cette dernière ; sa spire est moins élevée , sa surface est bien moins striée , le plan de son ouverture est parallèle à l’axe au lieu de lui être oblique ; la columelle , loin d’être droite, est arquée et ne forme point un angle avec le profil de la convexité du dernier tour; enfin cette columelle, le bord droit et l’intérieur de la coquille sont d’une grande blancheur, tandis que dans l’Æ. oblonga la columelle et Le bord droit sont pourprés et l’intérieur d’un blanc fauve. Si je compare maintenant ma nouvelle espèce avec l'A. ovata, je trouve que, comme elle et comme quel- ques autres espèces , elle est comprimée de dessus en dessous, qu’elle a également six tours de spire, qu’elle est ventrue , que la suture de son dernier tour est obli- que , que le plan de l'ouverture est pareillement paral- lèle à l’axe, et qu’enfin sa columelle et son bord droit sont blancs comme dans une variété bien connue de l’ovata. En fait de différence de caractères , je trouve que l'A. cantagallana est de moitié au moins plus petite que l’//. ovata; que, toutes proportions gardées, elle est plus courte et en même temps plus ventrue ; que sa surface , au lieu d’être fortement martelée, est légère- ment marquée de stries d’accroissement ; que les bords de l'ouverture ne sont jamais pourprés, et enfin que la columelle forme un arc avec le profil de la convexité du dernier tour au lieu de former un angle. La séparation de cette coquille d’avec celles auxquelles je viens de la comparer paraîtra encore mieux établie s; (53) l'on tient compte de la couleur et surtout si, la loupe à la main , on étudie leur tissu dans ses plus petits détails. Habitat. — J'ai rapporté cette espèce du Brésil, où elle a été trouvée dans la province du Cantagallo. J'en possédais déjà une dans ma collection et j'en ai reconnu d’autres dans quelques-unes de celles de Paris, 23) H. eranuzosa, Nob. L Pire Bulimus hæmastomus, Lesson | Centurie zool. Testa ovata, ventricosa. compressa, tenut, longitudina- l'ter striato-rugosa, fulva; epiderma brunea, exilissime granulosa ; apice subacuta; ultimo anjractu magno , oblique posito ; apertura ovalï ; columella subcompla- nata, purpurea:; labro reflexo, purpureo, in medio presertim calloso ; intus pallido-cærulescente. Long. , 9 cent. Larg. , 5 cent. 3 mil. Description. — Cette belle coquille , que je présente sous une dénomination spécifique particulière , est voi- sine des précédentes par plus d’un caractère ; mais aussi elle s’en distingue par des différences sensibles. Elle est ovale, ventrue et comprimée de dessus en dessous ; son test est assez mince et strié dans le sens de la lon- gueur ; sa couleur sous l’épiderme est fauve, plus foncée vers le sommet, avec des bandes blanchätres près des sutures; l’épiderme est épais, cassant et d'une belle couleur brune ; observé attentivement , il présente une infinité de petites lignes granuleuses commeuçant à la spire et se terminant au bourrelet. Ce caractère le rend (54) âpre au toucher et lui donne l'apparence de la peau de chagrin. La spire est presque aiguë; les tours sont au nombre de cinq et quart , peu arrondis ; le dernier beau- coup plus grand que les autres réunis et ayant sa suture, comme dans l’espèce précédente, oblique à celles qui Ja précèdent. L'ouverture est ovale, plus longue que la moitié de la coquille; la direction de sa longueur est un peu oblique à l'axe , mais son plan l’est encore da- vantage. La columelle est aplatie et pourprée, de même que le bord droit qui est calleüx dans son milieu ei bordé extérieurement par un épais bourrelet. L'intérieur est d’un blanc sale. Je n’en connais pas l’animal. Habitat. — Elle est de l'imtérieur du Brésil, où elle habite les bois. 24) H. PLaniDens, Micheliv. Magasin de Conchyliologie, p.25, Pl. 25. Testa ovata , elongata , diaphana longitudinaliter et exi- lissime striata, bruneo-viride ; apice rubescente ; ultimo anfractu magno , oblique posito; apertura ovali; colu- mella purpurea ; labro crasso , reflexo, purpureo, dente subcomplanata in medio armato ; intus albo-grisea. Long. , 7 cent. Larg., 3 cent. 2 mill. Description. — L’I{. planidens est ovale allongée et peu ventrue; sa lexture est assez épaisse , et cepen- dant un peu diaphane; elle est finement siriée daus sa longueur, et plus finement encore dans sa largeur, ce qui n'est visible qu’à l’aide d’une loupe. Dépouillée de son épiderme , le sommet est d’un rouge brun, les tours (55) qui suivent roses, et le dernier blanchätre , la transi- tion de l’une de ces couleurs à l’autre étant insensible. Recouverte de son épiderme qui est mince, solide et lisse, elle est généralement d’un brun verdatre, plus olive en avant et plus rougeûtre en arrière. La spire est formée de éinq tours et demi, ious très-peu arrondis ; le dernier, plus grand que les autres ensemble, pré- sente, comme les deux espèces précédentes , cette par- ticularité qu’il est plus oblique que les autres, et par conséquent que sa suture n’est point parallèle aux autres sutures ; celles-ci sont marginées en avant. L’ouver- ture est irrégulièrement ovale, de grandeur moyenne, et occupe en longueur la moitié environ de celle de la coquille. Elle est parallèle à l’axe par sa direction, et oblique par son plan. La columelie est épaisse et pour- prée comme le bord droit qui forme un large bourrelet armé, en dedans et au milieu de sa longueur, d’une dent très-saillante, un peu allongée et aplatie. L’inté- rieur de cétte coquille est d’un blanc légèrement gris ou bleuâtre. Habitet.— Cette curieuse espèce , dont j'ai trouvé les premiers individus au commencement de l’année der- nière , habite au Brésil, et seulement , à ce qu'il paraît, dans la province du Cantagallo. Je n’en ai malheureu- sement point observé l'animal. 25) H. muzrricoror, Nob. Pl'Aure fier. Testa ovato-coniva ; perforata , tenuissime striata , albo, luteo, bruneo nigroque irregulariter variegata ; ajice (56) subacuta , flavescente; ultimo anfractu magno; apertura oblonga ; columella «lba ; labro lato, reflexo, purpu- reo; intus cœrulea. Long. , 3 cent. 5 mil. Larg., 1 cent. 9 mil. Description. — L’H. multicolor est une des espèces les plus distinctes et les plus jolies, tant par la dispo- sition de son ouverture que par sa forme générale et Ja diversité de ses couleurs. Elle est de forme ovale co- nique , mince, et cependant nullement transparente. Sa surface est marquée de stries longitudinales très-fines , croisées par des stries transverses encore plus fines et visibles seulement à la loupe. Elle se revêt d’un épi- derme à peine sensible, qui laisse voir par sa transpa- rence du blanc, du jaune, du brun et du noir, com- binés de manière à produire un assemblage serré de taches diverses, irrégulières, pâles près du sommet, qui est d’un jaune clair, et bien tranchées et plus foncées sur la surface du dernier tour. Le sommet est presque aigu ; les tours, qui sont au nombre de cinq et demi, sont passablement arrondis, et leurs sutures sont paral- lèles ; le dernier est plus grand que les autres réunis. L'ouverture est oblongue , parallèle à l'axe par sa direc- tion et assez oblique par son plan. La columelle est blanche ; le bord columellaire , ainsi que le bord droit, sont évasés, réfléchis et d’une magnifique couleur de pourpre ; l’intérieur est d’un bleu foncé un peu laqueux. Habitat. — Cette espèce, qui est du Brésil, a d’abord été trouvée dans la province de Saint-Paul; je l'ai ren- contrée depuis, non loin du Corcovado , sous un rocher. 26) H. Auris Lrporis, Brug. Bulimus auris leporis , Brug., Dict., n° 82. — Maw., 7rav. of Brasil, PI. de coquilles, no ret 2. Helix auris leporis, Tab. Syst., PL. 56, n° 438. ÆAuricula leporis, Lam., An. sans vert. , t. VI, 2° p., p. 138. Testa ovato-conica , antice depressa , perforata, albida aut fulva aut nigra, flammulis griseo-fulvis nebulosis variegata ; striis decussatis , ad interstitits impresso punctatis ; apertura labiis utrisque margine lato reflexis, albis ; columella uniplicata. Long. , 4 à 5 cent. Larg., 2 cent. 7 mil. à 3 cent. 3 mil, Corpore albido griseo. Long. , 6 à 8 cent. Description. — 1, H. auris leporis est de forme ovale conique, un peu déprimée en avant, perforée et de texture mince et faiblement transparente. Elle est striée longitudinalement , et ses stries sont remarquables, vues à la loupe, par leurs nombreuses et petites aspérités. Son épiderme est presque nul; sa couleur varie du blan- châtre au gris , au fauve et même au noirâtre. Certains individus, et ce sont les plus nombreux , sont ornés de flammes longitudinales nébuleuses, plus ou moins fon- cées, dans l’arrangement desquelles on remarque quel- quefois des vestiges de bandes ; il en est d’autres qui ne préseutent qu’une couleur uniforme. Une petite banäe noire ou brune se montre constamment, sortant de l’om- bilie et se dirigeant en avant jusqu’au bord réfléchi de la coquille. La spire est très-conique, assez aiguë, et les tours, que l’on remarque au nombre de cinq et demi, ( 58 ) sont à peine arrondis ; leurs sutures sont parallèles ; le dernier, plus grand que les autres réunis, est fortement caréné en avant. L'ouverture oblongue , un peu étroite, surtout en avant, est par sa direction très-oblique , et par son plan presque parallèle à l'axe. La columelle est d’une blancheur remarquable, et présente un gros pli en dedans. Le bord de cette ouverture est assez mince, très-blanc, réfléchi, et tellement évasé en avant qu'il semble y former un large canal terminal. L'intérieur est plus ou moins blanc. L'animal est d’un blanc grisâtre. Je n’ai point re- marqué que ses tentacules inférieurs fussent palmés , comme on l’a dit. Observation. — Les variétés de cette espèce sont nombreuses , elles consistent particulièrement dans leur coloration , dans labsence ou la présence des fascies et dans leur arrangement. Habitat. — File se rencontre dans presque tout l’em- pire du Brésil. Je l’ai recueillie dans les bois des environs de Rio de Janeiro , où elle se tient sous les feuilles mor- tes; on la trouve aussi à l’aqueduc du Corcovado. Bru- guière cite l’/7, auris leporis comme étant de Madagascar. Je ne lai jamais trouvée avec les coquilles terrestres que j'ai recueillies dans ce pays, non plus que parmi celles que j’en ai reçues depuis. | (‘59 ) 27) H. coniosroma , Fér. Lister, Synop., tab. murx, f. 4.— Maw., Trav., PI. de coq. fig. 3. Testa fusiformis, postice acuminata , antice acuta , per- forata , longitudinaliter striata , rufo-brunea, ad api- cem rubescente ; uliimo anfractu magno ; apertura ovali elangata , antice angulata ; columellu purpurea; labro reflexo > Purpureo ; intus cæœrulescente. Long. , 5 à 6 cent. Larg,, 2 cent. à 2 cent. et 3 mil. Description.— 1; . goniostoma est fusiforme, c’est- à-dire, ovale, allongée et atténuée aux deux bouts. Sa spire est conique, haute et un peu obtuse à son som- met. Elle est perferée, à texture peu épaisse et peu transparente. Sa couleur, ou plutôt celle de son épi- derme qui est assez fort, est d’un roux plus rouge vers le sommet. Toute sa surface est striée longitudinalement, et si on l’examine à la loupe, on voit qu’elle l’est aussi transversalement , de manière à présenter une sorte de granulation. Les tours de spire sont au nombre de six et demi , assez arrondis, et le dernier se trouve occuper la moitié de la coquille. L'ouverture est, par son plan ai nsi que par la direction de sa longueur, parallèle à l'axe ; elle est ovale-ailongée et très-fortement angu- leuse en avant , ce qui rend cette partie de la coquille aiguë et comme canaliculée. La columelle et le bord droit sont pourprés et réfléchis en dehors. L'intérieur est d’un bleu laqueux. Habitat. — Elle se trouve dans la partie orientale du Brésil , où elle paraît peu commune. (60 ) 28) H. rusrronmis, Nob. PI. 1x, fig. 2. T'esta fusiformi, perforata, tenui, diaphana , longitudi- naliter striata , fulva-pallide , lineolis rufis ornata ; spira elongata , acuta , in medio inflata ; apertura elon- gata, antice subcanaliculata ; columella alba, plana, reflexa ; labro albo, reflexo, intus nigro marginato ; interiore albido. Long. , 4 cent. +. Larg., 1 ce t. 2 mil. Description. — La nouvelle espèce que je propose sous le nom d’/7 fusiformis mérite plus que toute autre cette dénomination caractéristique. Elle est allongée, ren- flée dans le milieu, atténuée à ses deux extrémités, mince, diaphane et presque lisse; cependant en l’examinant avec attention on y remarque quelques légères stries longitudinales, irrégulièrement éparses à sa surface. La spireest haute, pointue, et un peu renflée dans son milieu. Elle se compose de neuf tours peu arrondis età sutures pa- rallèles ; le dernier de ces tours n’est pas aussi grand que les autres réunis. Sa couleur est un fauve clair, inter - rompu par quelques lignes roussâtres qui suivent la direction des stries. L'ouverture caractérise surtout cette espèce ; son plan est presque parallèle à l'axe ; mais la direction de sa longueur lui est plus oblique; elle est de forme allongée, un peu plus large en arrière qu’en avant, où elle forme une sorte de canal. La columelle est plate, très-blanche et réfléchie ; le labre est pareil- lement blanc, réfléchi et largement marginé de noir en dedans , et surtout en avant. L'intérieur est d’un blanc jaunàtre. (6r) Habitat. — Cette curieuse espèce m'a été donnée au Brésil, comme venant de la province de la Mine. Sous-Genre COCHLONINE. 29) H: carcanrua, Kér. Tab. Syst. Testa cylindracea, fusiformi, tenui, diaphana, rufo- rubescente, regulariter et tenuissime striata , perforata; apice acuta ; ultimo anfractu antice carinato; apertura oblonga subguadrangulata, octo dentato; labro con- Linuo , reflexo , rufo-purpurascente. Long., 4 cent. 2 mill. Description. — Cette belle espèce est de toutes celles qui composent le sous-genre la plus grande; elle est de forme presque cylindrique, atténuée en arrière , où elle se termine par uu sommet pointu. Elle est un peu moins grosse en avant qu'au milieu, et largement perforée. Elle est mince , transparente, d’une couleur rougeàtre uniforme et finiment et régulièrement striée sur toute sa surface. Les tours, qui sont au nombre de six, se montrent peu arrondis en avant et au milieu, mais'ils le sont davantage au sommet ; le dernieriest moins grand que les autres réunis et fortement caréné en avant. L'ouverture est oblongue et anguleuse ; la direction de sa longueur est parallèle à l'axe, oa presque parallèle , tandis que son plan lui est un peu oblique; elle est armée de huit dents placées de la manière suivante : trois, dont une, celle du milieu, est toujours plus lon- gue et plus forte sur ia columelle ; trois, dont celle du (62) milieu est la plus grosse et toujours plus ou moins dif- forme , ayant quelquefois une apparence double sur le bord droit; une seule petite et pointue sur le bord postérieur ; et enfin une huitième petite, peu élevée, située un peu à gauche, et formant le sommet d'un mamelon sur le bord antérieur. Le bord de l’ouverture est continu, large, réfléchi, surtout à droite, et de couleur rousse un peu pourprée. L'intérieur est d’un jaune roussâtre. Habitat. — Ceue belle coquille, encore rare dans les collections, vit au Brésil, dans les bois et sur les montagnes. 30) H. ExEsA, Spix. Clausilia exesa , Spix , tab. xav, f. 1. Pupaexesa, Wagner, t.,x1v, f. 1. Testa cylindracea , fusiformi , tenut, diaphana, exesa, albida, griseo fulvoque marmorata , subtiliter striata et malleata; apice subacuta; ultimo anfractu parvo ; apertura parva, oblonga , subangulata , quinqueden- tata; columella albida ; labro reflexo ; non continuo ; roseo. | Long. , 2 cent. 8 mil. Larg., 9 millt MO Description. — Cette jolie espèce est fusiforme, assez pointue au sommet, mince, diaphane et de .eouleur blanchâtre ou grisätre , marbrée.de taches plus foncées. Sa surface est finement striée, mais ces stries ne sont || apparentes à l'œil nu qu’auprès des sutures ; elle est aussi un peu martelée lorsqu'on la regarde à l’aide de (65 ) la loupe. Les tours sont à peine arrondis, et on en compte facilement neuf. L'ouverture est oblongue , an- guleuse, et présente cinq plis ou dents, et non quatre, comme dit M. Wagner. L’une de ces dents, mince et saillante, se trouve placée sur la convexité du dernier tour ; une seconde sur la columelle ; celle-ci est trian- gulaire ; une troisième , qui est fort petite, à l'extrémité d'un pli, en avant de la columelle ; enfin les deux autres, qui sont également assez petites, occupent le côté droit. Toutes ces dents sont bien visibles et se détachent en blanc sur un fond plus ou moins coloré. La columelle est faiblement rosée et aplatie; le bord droit est d’un beau rose , il est réfléchi, mais non continu comme dans l'espèce précédente. Habitat. — Cette coquille, qui est fort rare, est de l’interiear du Brésil, et, m’a-t-on assuré, de la pro- vince du Cantagallo. (64) Tasceau de la Végétation primitive dans la province de Minas Geraes ; Par M. Aueusre DE SainT-HiLAiRE, Membre de l'Institut (1). PREMIÈRE PARTIE. Coïncidence de la constitution physique avec les diverses sortes de végétation. A l'exception de quelques sommets élevés, il n’est peut-être pas en Allemagne , en Angleterre, en France, un seul coin de terre qui n'ait été bouleversé mille et mille fois, et partout la végétation primitive (2) a dis- paru. Les sombres forêts où le Druide célébrait ses mystères , ont fait place à de fertiles moissons ; les co- teaux sur lesquels croissaientsans doute des buissons épi- neux, se sont revêtus de vignes taillées avec soin, et des marais fangeux où naissaient en liberté les Nénuphars, d’obscures Nayades, des Scirpes et des Joncs offrent au- jourd’hui des carrés de légumes symétriquement rangés. Nos bois mêmes, coupés à des intervalles réglés, sont devenus notre ouvrage, et nos prairies, sans cesse re- tournées par la main de l’homme, sont aussi artificielles (x) Plusieurs fragmens de ce tableau sont empruntés à la première partie des Voyages de l’auteur ( Voyage dans les provinces de Rio- Janeiro et Minas Gerues), qui se vend chez Grimbert , rue de Savoie, no 14, et d'autres fragmens à la seconde partie , encore iné- dite, (2) Par végétation primitive, j'entends celle qui n’a été modifiée par aucun des travaux de l’homme. (6) que les pâturages auxquels il nous a plu de donner plus particulièrement ce nom. Au milieu de tant de change- mens , combien d'espèces ont disparu! combien d’autres se sont introduites avec nos plantes potagères ou avéc nos-céréales, et, étrangères comme elles, passent au- jourd’hui pour indigènes ! Cependant si l’on excepte quelques faits de détail, l’histoire des changemens de la végétation européenne restera toujours inconnue, parce qu'on n’a point observé les faits dont la série composerait cette histoire (1). Une vaste portion de l'Amérique brésilienne a déjà changé de face; une grande Fougère, le Saccharum appelé Capé remplacent des forêts gigantesques, et, dans des espaces immenses , tous les végétaux semblent fuir devantle Capim gordura( Tristegis glutinosa). Des plantes de l’Europe, de l'Afrique (2) et de l'Amérique (x) Il est clair que les événemens qui ont dù occasioner les modifica- tions les plus notables dans la végétation de la France, sont: vo la fondation de Mirseille par les Phocéens'; 2° ia conquête de Jules César ; 3e les grands encouragemens donnés à la culture de la vigne par V’em- pereur Probus ; 4° la création de certains ordres religieux , ct les im- menses défrichemens qui en ont. été la suite; Bo les croisades ; 6° ja découverte de l'Amérique ; 7° les encouragemens donnés à l’agriéulfure par Heori IV et Sully ; 8° enfin la révolution , qui a conduit une foule d'hommes éclairés à s'occuper de la culture des terres, et qui, par le Partage des biens communaux et la division des grandes propriétés, a amené de nouveaux défrichemens ve (2) L’Herva de $. Caetano.Getteïplante , dit Vabbé Manoel Ayres de Cazal (Corog. Braz., 1; 103), a étéitransplantée de la côte! de Guinée au Brésil. Dans son pays patäl , elle. porte le nom Vhezikem; mais comme Les premiers Brésiliens quila reçurent la plantérehit auprès d’une chapelle consacrée à S.-Gaetan , elleprit :dé le le noth der a XXIV. ji, 5" (66) du nord (x) semblent suivre Iles pas de l'homme et se répandre avec lui; d’autres s'introduiront probablement encore, et; à mesure.que notre race s’étendra sur la terre des Indiens, la végétation primitive disparaîtra comme dé. Cactano. Onl’émploie, dit Le même écrivain, dans divers remèdes domestiques; èt l'on assure qu'elle augmente l'effet ordinaire du savon. J'ai comparé l’Herva,de $. Caetano avec le Momordica Senegalen- sis, Lam. , rapporté du Sénégal par M. Perrotet , et je me suis con- vaincu de la parfaite identité des deux plantes. L'espèce d’Afrique, aujourd’hui devenne également brésilienne , a été bien décrite par Pil- lustre Lamarck ( Dict., IV, 239) ; cepéndant les échantillons que j'ai ‘ sous les yeux ne sont pas plus velu$ que ceux du Momordica tharan- cias ; leurs feuilles ne me paraissent pas plus petites que celles de cette espèce , et enfin leur bractée n’est pas pointue. Dans les échantillons de M. Perrotet, ni dans les miens, les feuilles ne sont pas non plus rudes au toucher en dessus et en dessous, comme M: Sprengel le dit ( $ys£., LIL , 15 ) du Mom. Senegalensis. Ce ne serait pas ici le lieu de donner de cette plante une description détaillée ; mais je tächerai de la distin- guer par une phrase plus caractéristique que celles des auteurs qui m'ont précédé : Momordica Senegalensis,; foliüs profundè palmatis, 5-7-lobis, subpe- datis , grossè remotèque serratis; bracteà cordatà integerrimà pauld supra basim peduneuli ; petalis caducis ; fructibus ovato-mueronatis, tuberculatis. Momordica Senegalensis, Lam., Dict., IV, 289. — Ser. in DC., Prod. , IL. — Spreng., Syst., UE, 16. INhezikem apud Guineæ incolas ; Lusitanicè Herva de $. Caetano. In Senegalä , Guineâ spontè nascitur ; nunc in Brasilià intermedià apud domos vulgatissima. Oss. IL paraît que le mot /Vhezikem est, dans certaines parties de l'Afrique, une sorte de nom générique ; car dans l’herbier de Burman, que le Banks français, M. Benj. Delessert, communique aux botanistes avec tant de générosité, ce nom se trouve attaché, avec un léger changement ( Vezikin ) , à une autre espèce de Momordica. (1) Datura stramonium, L. ( 67 ) eux. Îlest important de constater ce qu'est cette végéta- tion si brillante et si variée avant qu’elle soit détruite , aussi, dans mes divers ouvrages , ai-je souvent déhrié sur ce sujet des détails qui , s’ils ne sont pas aujourd’hui sans intérêt, deviendront bien plus intéressans encore, lorsqu'il faudra les considérer comme appartenant uni- quement à l’histoire de notre globe et à celle de la géo- graphie botanique. Les différences de la végétation primitive sont telle- ment sensibles dans la province des Mines, qu’elles ont frappé les hommes les plus rustiques, et qu'ils les ont désignées par des noms particuliers. Je ferai bientôt connaître ces différences avec détail; mais auparavant j'en présenterai, dans un seul cadre, le tableau succinct, et je suivrai la classification même qui en a été faite par les habitans du pays. Toute la contrée se distingue en matos ; bois, ét cam- pos, pays découvert. Ou les bois appartiennent à la végétation primitive, ou ils sont le résultat du travail des hommes. Les premiers sont les forêts vierges (matos virgens ); les catingas dont la végétation est moins vigoureuse que celle de ces dernières et qui perdent leurs feuilles tous les ans; les carrascos, espèce de forêts naines , composées d’arbrisseaux de trois ou quatre pieds rapprochés les uns des autres ; enfin les carrasquenos (1) qui , plus élevés que les carrascos, forment une sorte de transition entre eux et les catingas. C’est encore à la végétation primitive qu’il faut rapporter les capoes , bois (1) Le mot de carrasqueno a souvent une autre signification ; et dé- signe, dans les pays de bois, les arbrisseaux qui succèdent aux forêts vierges nées dans un terrain d’une uature inférieure. ( 68 ) qui s'élèvent dans les fonds, entourés de tous les côtés par des campos. Quant aux bois dus, au moins d’une manière médiate, aux travaux des hommes, ce sont les capoeiras qui succèdent aux plantations faites dans des forêts vier- ges, et les capoeiroes , qui peu à peu remplacent les ca- poeiras , lorsqu'on est un certain temps sans couper ces dernières. Le mot campo indique un terrain couvert d'herbes, ou si l’on veut , tout ce qui n'appartient à aucune des espèces de bois que j'ai fait connaître tout-à-l'heure, Le campo est naturel (campo natural), quand il n’a jamais offert de forêts; il est au contraire artificiel (artificial ), lorsque les herbes ont succédé aux bois détruits par les hommes. Souvent on voit dans les campos naturels des arbres tor- tueux , rabougris , épars çà et là ; maïs cette modification n'empêche pas les terrains qui la présentent, de con- server leur nom de campos. On sent au reste que toutes ces expressions ne sau- raient être parfaitement rigoureuses, puisque les diffé- rences qu’elles indiquent, se nuancent entre elles par des dégradations insensibles. Il est des bois que personne n'hésitera à appeler mato virgem ou calinga ; mais il n’existe point dans la nature de limites bien fixes entre les bois viergesset les catingas, celles-ci et les carrascos , et enfin entre ces derniers et les véritables campos. Pour faire voir quelles sont les coïncidences de ces diverses sortes de végétation avee la constitution physique de la province des Mines , il sera bon , je crois, de jeter sur l’eusemble de cette constitution un coup-d’œil rapide. La province de Minas Geraes, située entre les 13° et 23° ( 69.) 27" lat. sud, et entre les 328° et 336° long., est partagée, dans sa longueur, en deux portions très-inégales, par une immense chaîne de montagnes (Serra do Espinhaço Eschw. ) qui s'étend du sud au nord, donne naissance à une foule de rivières, divise les eaux du Rio Doce et du S. Francisco, et dont les pics les plus élevés attei- gnent environ six mille pieds au-dessus du niveau de a mer. Entre cette chaîne et celle qui, comme l'on sait, se prolonge parallèlement à l'Océan dans une grande partie du Brésil, s'étendent d’autres montagnes. Celles-ci laissent au milieu d’elles de profondes vallées; elles for- ment, si Je puis m'exprimer ainsi , uue sorte de réseau ; mais c'est principalement de Fest à l’ouest qu'elles se dirigent. Par ce qui précède , on voit que tout le côté orien- tal de la province des Mines est en général extrème- ment montagneux ; mais il n’en est pas de même du côté occidental, Là des collines, ou mème de simples ondu- lations succèdent aux montagnes, et le terrain s’abaisse peu à peu jusqu’au Rio de S. Francisco. À l'ouest de ce fleuve , le sol s'élève pour la seconde fois , et l’on arrive à un plateau qui divise les eaux de la même rivière de celles du Paranna. Quelques points de ce plateau pré- sentent de véritables montagnes , telles que la Serra da Canastra , celles da Marcella et dos Cristaes ; mais d’ail- leurs il est peut-être trop généralement égal pour porter le nom de chaîne (r). Des pics très-remarquables par leur hauteur existent {:) Voyez mon Iniroduction à l'Histoire des Plantes les plus remar- quables du Brésil et du Paraguay ; à Paris, chez Belin; et l'ouvrage de M. d'Eschwege, intitulé : Brasilien Neue Welt, 1, 164. (70 ) dans toute l’étendue de la grande chaîne ; mais je crois que, considérée dans son ensemble, la comarca (1) du Rio das Mortes, la plus méridionale des cinq qui compo- sent la province des Mines , en est aussi la plus élevée. En effet, c’est dans cette comarca que le Rio de S. Fran- cisco prend naïssance, et que commencent à couler ses premiers afiluens ; c’est là que sont les sources du Rio Preto, affluentdu Parahvbuna, et le Jaguarhy qui se jette dans le Tieté; là enfin naissent les affluens du fameux Rio Grande, et ce dernier fleuve lui-même qui, uni au Paranahyba, au Paraguay et à l’Uruguay, finit par de- venir le Rio de la Plata. En partageant la province des Mines en deux parties, l'une très-montagneuse , et l’autre simplement ondulée, la grande chaîne la divise aussi en deux zônes ou ré- gions végétales également très-distinctes; à l’orient celle des forêts , et à l'occident celle des pâturages ou campos; régions qui, parallèles à la chaîne, s'étendent, comme elle, dans le sens des méridiens. Il y a plus: cette même cordilière sépare la province des Mines en deux régions zoologiques presque aussi distinctes que les régions végé- tales. Les plantes des campos, n'étant pas les mêmes que celles des bois, ne sauraient nourrir les animaux qu'on a coutume de voir au milieu des forêts, et d’ailleurs il y a trop de fixité dans les habitudes et les mœurs des ani- maux, pour que les mèmes espèces puissent vivre éga- lement dans des pays qui, quoique contigus , présentent de si grandes différences. Le versant oriental de la cordilière elle-même est , je crois , dans la plus grande partie de son étendue, couvert (x) Les coma cassont au Drésil Les divisious premières des provinces. (71) de forêts comme le pays voisin. Maïs il est à observer qu'au nord de la chaîne , les campos s'étendent jusque sur ce versant, tandis qu'au midi au contraire ce sont les forêts qui débordent sur le versant occidental, comme j'ai pu m'en convaincre ; en me rendant de Sabara à la capitale de la province des Mines et en parcourant la comarca de S. Joao d'El Rey : espèce de croisement qui s'explique , ce me semble, par l'humidité qui règne au midi du versant occidental de la chaîne et la sécheresse qui se fait sentir au nord du côté oriental. Quant aux points culminans de la chaîne, tels que les Serras do Papagaio , da Ibitipoca , da Caraça , d’'Itambé , da Lapa , de S. Antonio près Congonhas da Serra, do Serro do Frio et de Curmatahy, ils présentent générale- ment de petits plateaux couverts de pâturages herbeux. C’est là que l’on trouve la végétation la plus curieuse et la plus variée qu'offre le Brésil méridional ; c’est là que croissent, entre autres, ces charmantes Melastomées à petites feuilles dont j'ai fait connaitre les formes .élé- gantes dans la dernière livraison de la magnifique Mono- graphie de illustre Humboldt (r). Ce ne sont pas seulement les deux grandes régions végétales des bois et des campos qui sont renfermées dans des limites à peu près certaines ; les nuances que présentent ces régions n’en ont pas de beaucoup moins précises. Jai dit plus haut que l’on vbservait dans la province des Mines trois sortes de bois, Les forêts propre- ment dites , les catirgas qui, moins vigoureuses, per- dent leurs feuilles chaque année , et enfin les carrascos , (1) Monographie des Melastoma et autres genres du méme ordre , par Humboldt et Bonplard, (72) espèce de forêts naines. Depuis les limites de la province de Rio de Janeiro par le 22° lat. sud jusqu'au termo de Minas Novas, ou, si l’on aime mieux, jusqu'aux sources de l'Arassuahy par le 18°, s'étendent des bois vierges pro- prement dits. Plus loin, le pays fort élevé, mais en même temps peu montagneux , ne donne plus naissance qu’à des carrascos. Enfin vers le 17° 30’, en tirant du côté de lest, ou, si l’on veut, vers les villages de Sucuriu et de S. Domingos, le sol s’abaisse , la température de- vient très-chaude, la terre grisâtre et légère offre un mélange d’humus et d’un peu de sable , et l’on voit pa- raître des catingas. Du côté du sud-est, ces deux sous-régions sont enca- drées, un peu en deçà des limites de la province, par une ligne de forêts qui servent d’asile aux Botocudos, et qui s'étendent dans les provinces d’Espiritu Santo et dos Iiheos jusqu’au bord de la mer. Quant aux limites sep- tentrionales du pays des carrascos et de celui des catin- gas, les diverses directions que j'ai suivies dans mes voyages, ne m'ont pas permis de les observer; mais Ja relation de l’excursion si pénible que M. le prince de Neuwied fit de la ville dos Iheos par le 13 :° lat. sud, jusqu'aux frontières de la province des Mines, prouve que les deux régions continuent à s'étendre, hors de cetie dernière province, dans le sens des méridiens (1). De tout ceci il résulte que, si, partant du petit port de Belmonte par le 15° 30’ environ, on se dirigeait vers le sud-ouest, on traverserait les quatre régions ou sous- régions végétales qui s’observent dans la province des (1) Voyage Brés. , trad. Eyr., IL, p. 1 etsuiv. (73) Mines. L'on passerait successivement des forêts aux catingas , de celles-ci aux carrascos, des carrascos aux campos ; et il est à observer que ces régions forment ainsi, dans le sens de l'équateur, une sorte d'échelle où l’ensemble des végétaux diminue graduellement de hau- teur, peut-être parce que l’humidité du sol et de lat- mosphère éprouve également une diminution graduelle. Quand M. le prince de Neuwied , suivant aussi à peu près la direction du sud-ouest, quitta la côte à environ un degré nord de Belmonte, pour gagner le Désert du S. Francisco , il trouva également des forêts vierges, des catingas, des carracos et des campos , et il serait cu- rieux de savoir sous combien de degrés de latitude , on rencontrerait les mêmes échelles de régions végétales. … Comme la zône des forêts se divise en plusieurs sous- régions , de mème aussi l’on en observe deux bien dis- tinctes dans la zône des campos qui tantôt ne présente, ainsi qu'on l’a déjà vu, que des herbes et des sous- arbrisseaux (taboleiros descobertos), et tantôt offre cà et là, au milieu des pâturages, des arbres tortuetfx et rabougris ( taboleiros cobertos ). Les deux sous-régions dans lesquelles se partagent les campos n’ont peut-être pas des limites aussi précises que celles des trois sous-régions dont l’ensemble compose la zône des forêts. Cependant on peut établir que les parties les plus élevées de la zône des campos sont uniquement couvertes de pacages herbeux , et que, dans les parties les plus basses, les pâturages sont parsemés d’arbres. Ainsi je n’ai trouvé que des campos formés d'herbes et de sous-arbrisseaux dans une immense portion de la comarca de S. Joao d'El Rey, la plus haute de toutes, ( 74) et ce sont encore des pâturages de même nature, que j'ai revus partout, en traversant , presque au pied de la grande chaîne , le pays fort élevé qui, à l’ouest de la même chaîne , s'étend de Caeté ou Villa Nova da Rainha aux limites du territoire de S. Joao d’El Rey. Au con- traire, j'ai trouvé beaucoup de pâturages parsemés d'arbres rabougris sur le territoire de la comarca de Paracatu ; c’est le genre de végétation que j'ai constam- ment observé dans les 150 lieues portugaises que j'ai parcourues au milieu du Sertao ou Désert, à pea près entre les 14 et 18 degrés de latitude sud dans un espace où le S. Francisco est déjà fort éloigné de sa source ; et, dans cet espace, les pâturages parsemés d’arbres tor- tueux s'étendent jusqu’au pied de la chaîne , du moins, si j en puis juger par ce que j'ai observé sur deux points différens. De tout ceci, il résulte que la sous-région plus plus méridionale des campos simplement herbeux ou taboleiros descobertos, correspond particulièrement à celle des forêts proprement dites , ou , si l’on aime mieux, que ces sous-régions sont plus particulièrement com- prises entre les mêmes parallèles, et que la sous-région plus septentrionole des campos parsemés d’arbres ra- bougris (taboleiros cobertos), correspond davantage à celle des carrascos et des catingas. D'après ce qui précède, il ne faudrait pas croire que, dans la région des campos , il n’existe point de bois. Si au milieu des terrains découverts et simplement ondulés de cette immense région , il se trouve une vallée humide et profonde, s’il existe quelque enfoncement sur le pen- chant d’un morne, on peut ètre assuré d'y trouver une réunion d'arbres. Ces petites forêts qui forment comme RP (y) autant d'oasis au milieu des campos s'appellent, comme je l'ai déjà dit, capoes , du mot caapoam , qui, dans la langue significative des Indiens, veut dire une île, et c’est uniquement là que les Mineiros forment leurs plantations, fidèles à ce défectueux système d’agriculture qui ne leur permet pas de rien semer ailleurs qu’au mi- lieu de la cendre des arbres (1). Si la constitution physique de la province des Mines a une si grande influence sur la nature de sa végétation primitive, on doit croire qu'elle en a également sur celle qui résulte des travaux de l’homme, et que l’on peut appeler artificielle. La partie de la province située à lorient de la grande chaine n’est plus, comme autre- fois, entièrement couverte de forêts. Là se trouvaient des terrains aurifères d’une étonnante richesse ; une po- pulation nombreuse s’y précipita, et l’on incendia les bois , soit uniquement pour éclaircir le pays , soit pour y faire des plantations. Lorsque , dans cette contrée , on coupe une forêt vierge (2) et qu’on y met le feu, il suc- cède aux végétaux gigantesques qui la composaient , un bois formé d’espèces entièrement différentes et beaucoup moins vigoureuses ; si l’on brüle plusieurs fois ces bois nouveaux pour faire quelques plantations au milieu de leurs cendres , bientôt on y voit naître une très-grande Fougère ( Pieris caudata) ; enfin, au bout de très - peu de temps , les arbres et les arbrisseaux ont disparu , et (1) Voyez mon Mémoire sur le Système d'Agriculture adopté par les Brésiliens, et les résultats qu’il a eus dans la province de Minas Geraes, dans les Mémoires du Muséum , vol. XIV, p. 85. (2) Voyez mon Introduction à l'Histoire des Plantes les plus remar- quables du Brésil et du Paraguay. (76) le terrain se trouve entièrement occupé par une graminée visqueuse grisâtre et fétide qui souffre à peine quelques plantes communes au milieu de ses tiges serrées et qu’on appelle Capim gordura (Y'Herbe à la graisse, Tristegis glutinosa des botanistes ). Dans les environs de la capitale des Mines, et entre cette dernière et Villa do Principe, le voyageur ne dé- couvre plus que des campagnes de Capim gordura , où s’élevaient naguère des arbres majestueux entrelacés de lianes élégantes. La région des forêts embrasse donc au- jourd’hui de vastes pâturages ; maïs ceux-ci, par la na- ture même de leur végétation , indiquent d’une manière certaine, la place des forèts détruites. Au milieu des campos des environs de la ville de Paracatu, et peut- être dans ceux de quelques autres parties de la province des Mines également situées à l’ouest du Rio deS. Francisco, le Capim gordura s'empare des terrains autrefois boisés, lorsqu'on ne les laisse pas reposer assez long-temps, ou que le feu y prend par hasard; mais là cette graminée peut être facilement détruite, et comme elle ne paraît qu’où il y avait des bois , et que ceux-ci ne sont que des capoës de peu d’étendue , elle ne forme jamais d'immenses pâturages. D'ailleurs entre la grande chaîne et le Rio de S. Francisco , on ne voit ni la Fou- gère, ni le Capim gordura , se rendre maître des terres défrichées , et par conséquent l’on peut dire que la chaine est la limite de ces plantes, comme elle est celle des bois qu'elles ont remplacés. Du côté du nord, je n'ai point trouvé le Capim gordura au-delà du 17° 40’ latitude sud ou environ. Cette plante ambitieuse n’est pas naturelle à la province des Mines ; elle s’yestrépandue sur les traces de l’homme, (( 78) et il sera curieux de rechercher dans quelques années, si elle aura fait des progrès vers le nord, ou si elle s'est définitivement arrêtée au point que j'ai reconnu pour être sa limite actuelle. Je crois cependant qu’à cet égard on peut déjà former quelques conjectures assez plausibles. Il est à observer que la limite boréale du Capim gordura est en mème temps celle des forèts pro- prementdites ; que, plus au septentrion, le pays, quoique fort élevé, ne présente plus , comme dans la sous-région des forêts , de hautes montagnes séparées par des vallées étroites et profondes, et que là enfin commence la sous- région des carrascos. Or, du côté de l’ouest , la graminée dont il s’agit s'arrête avec les montagnes , et comme on ne la trouve point au nord dans un pays qui n’est pas non plus montagneux, il est à croire qu'elle ne s’étendra pas davantage du côté du septentrion ;, et que ses véritables limites sont à jamais celles de la sous-région des forêts. Autrefois le Saccharum appelé Sapé formait l’en- semble des pâturages dans les pays de bois vierges , et, en certains cantons, on le trouve encore avec abon- dance. C’est seulement depuis 45 à 50 ans que cette gra- minée a cédé la place au Capim gordura qui fut ap- porté dans la province des Mines-par un hasard singu- lier ou introduit comme fourrage. On a vu avec quelle rapidité étonnante il s’est répandu ; cependant, lorsque la nature n’est contrariée par aucune circonstance;,, ce qui malheureusement n’est pas asséz commun ; elle finit par reprendre ses droits sur l’ambitieux étranger. Quand les bestiaux n’approchent point du Capim gordura , les vieilles tiges forment 1ôt ou tard une couche épaisse de plusieurs pieds qui empèche des tiges nouvelles de se développer. Alors de jeunes arbrisseaux commencent à (78) se montrer; lorsqu'ils peuvent donner de l’ombrage, ils achèvent de détruire la graminée, et, dans les bonnes terres, elle fait place, au bout de dix années, à ces bois peu vigoureux et peu fournis qu’on nomme capoei- ras. Si l’on est long-temps sans couper ces derniers , et que le bétail n'y pénètre point, des arbres élevés finis- cent par faire disparaître les Baccharis et les autrés ar- brisseaux qui ‘composent les capoeiras, et de grands bois reparaissent. Ainsi, pour retourner à sa vigueur primitive, la végé- tation passe, en sens inverse, par les phases qui l'avaient réduite à ne plus offrir que d’humbles graminées. Quant à ces successions de plantes qui n’ont aucun rapport les unes avec les autres et qui ressemblent à une suite de générations spontanées , elles sont sans doute diflicilés à expliquer; mais en Europe même elles ne sont point sans exemple (x). On voit, par tout ce qui précède, que les campos de Tristegis , triste résultat des destructions causées par le travail ou les caprices de l’homme, méritent à juste titre le nom de campos artificiels qu’on leur donne dans le pays même. Comparativement à ces derniers , les pâturages de la région des campos peuvent sans doute être appelés naturels ; maïs ïl n'en est pas moins vrai que nécessairement aussi ils ont dû être extrêmement modifiés par le travail de l’homme. En effét, dans cette partie de l Amérique, comme dans beaucoup d'autres (2), (1) Voyez Dureau de La Malle, Mém, alterr. dans les Ænn. ‘8e. nat., vol. V. (2) L’incendie d’un pâturage dans l'Amérique du Nord forme un épisode intéressant dans l’un de ces romans de Fenimore Cooper, où qE nature est aussi bien peinte que les mœurs ( 79 ) les cultivateurs ont coutume de mettre chaque année le feu aux pâturages, afin de procurer anx bestiaux une hérbe plus fraiche et plus tendre, et peut-être la pro- vincewdes Mines n’offrirait-elle pas une lieue carrée de campo naturel qui n'ait été plusieurs fois incendiée. On sent qu'au milieu de ces brülemens tan: de fois répétés, il est difficile que plusieurs espèces annuelles n'aient pas entièrement disparu ; peut-être aussi quelques espèces grèles et délicates qui auraient été étouflées par les tiges amoncelées des espèces vigoureuses, ont-elles été préser- vées de la destruction par les intendies, et par eonsé- quent les campos qu'on nomme aujourd’hui naturels ne sauraient être ce:que furent jadis les campos réellement primitifs. Où ne peut sans doute s'assurenide ce fait par la com- päraison.; mais il est facile de concevoir que les incendies répétés ont eu une très-grande influence sur l’ensemble des espèces.qüi composent la végétation des campos na- turels ; car, ainsi qu’on va le voir, un:incendie seul suffit pour modifier de la manière la plus étrange les individus déjà existans. À peine l'herbe d’un campo naturel a- t-elle été brûlée, qu’au milieu des cendres noires dont la terre est couverte , il paraît çà et là des plantes naines dont les feuilles sont sessiles et mal développées et qui bientôt donnent des fleurs. Pendant long-temps, je l'avoue , j'ai cru que ces plantes étaient des espèces dis- tinctes, particulières aux queimadas ou campos récem- ment incendiés , comme d’autres espèces appartiennent exclusivement aux taillis qui remplacent les forêts vierges ; mais un examen attentif m'a convaincu que ces prétendues espèces n'étaient autre chose que des indivi- dus avortés d'espèces naturellement beaucoup plus ( 80 ) grandes et destinées à fleurir à une autre époque de l’année. Pendant la saison de la sécheresse , qui est celle de l'incendie des campos, la végétation de la plupart des plantes qui les composentest en quelque sorte suspeñdue , et celles-ci n’offrent que des tiges languissantes ou des - séchées. Cependant il doit arriver ici la même chose que dans nos climats; pendant cet intervalle de repos, les racines doivent se fortifier et se remplir de sucs destinés à alimenter des pousses nouvelles , comme on en voit un exemple frappant chez la Colchique et chez nos Or- chidées. L'incendie des tiges anciennes détermine le développement des gemmes cachées sous la terre; mais comme les nouvelles pousses paraïssent avant le temps, et que les réservoirs de sues destinés à les nourrir ne sont pas encore suffisamment remplis, les feuillés se développent mal : le passage de celles-ci aux verticilles floraux se fait rapidement, et ces derniers mettent bientôt un terme à l'accroissement de la tige (1). Non-seulement nos plus faibles travaux influent sur la végétation de toutes les parties du globe ; maïs elle porte, pour ainsi dire, l’empreinte de nos pas, et, dans des lieux aujourd’hui inhabités, la nature a pris soin de conserver les preuves de la présence de l’homme. Des plantes s’attachent à lui ; elles le suivent partout , et elles continuent à végéter quelque temps encore dans les campagnes qu'il a abandonnées. J'ai vu la halte accou- tumée du voyageur indiquée dans l'endroit le’ plus soli- taire par des pieds touffus de Capim gordura. Lorsque je traversais les déserts qui s'étendent de Paracatté' aux limites de Goyaz, j'aperçus avec étonnement, au milieu (1) Voyez l’Introduction à mon Wistoire des Plantes les plus remar à quables du Brésil et du Paraguay. Seal : (8r ): d’un pâturage uniquement parcouru par des cerfs , des chats sauvages et des seriemas, j'apercus , dis-je, quel- ques-unes de ces plantes qui ne croissent ordinairement qu'aütour de nos habitations; mais bientôt des débris, cachés sous l’herbe épaisse, m’indiquèrent assez qu’une chétive demeure s'était élevée jadis dans ce lieu solitaire. C’est ainsi qu'autrefois M. Ramond , guidé en quelque sorte par un Chenopodium, arriva dans les Pyrénées à la cabane d’un pasteur. Après avoir fait connaître les limites de la zône des campos et de celle des forêts, il ne sera pas inutile de rechercher quelles sont les causes qui déterminent à l’orient de la grande chaîne la présence des bois et à l'occident celle des pàturages. Il est incontestable que la nature de la couche suyer- ficielle du sol a de l'influence sur la végétation de la province des Mines, et qu’en certains endroits, on voit paraître successivement des bois et des pâturages, suivant que la terre est fertile ou qu’elle devient ferrugineuse, sablonneuse ou pierreuse. Aïnsi près d'Ttambé, pays fort élevé, je vis, dans un petit espace , la végétation changer brusquement quatre fois de suite avec la nature du ter- rain; je la vis présenter des forêts , lorsque celui-ci était argileux rouge et compacte, et des végétaux rares ra- bougris très- variés, quand la couche superficielle se com- posait d’un mélange de sable blanc et noir. Lorsque, voyageant dans la région des foréts entre Villa do Prin- cipe et Passanha , je passais sur le morne appelé Morro Pellado, tout à coup les grands bois disparurent à mes yeux, et il leur succéda de simples arbrisseaux , tels que des Cassia et des Melastomées ; alors le ierrain était XXIV. 6 ( 82 ) devenu fort sablonneux: il changea brusquement de nature, et, sans aucune transition , les grands bois se montrèrent avec une nouvelle pompe. Dans le pays élevé, mais simplement inégal, qui s'étend à l’ouest de la grande chaîne , entre Congonhas do Campo et S. Joao d'El Rey, la campagne offre des campos naturels parse- més de bouquets de bois : ceux-ci ont pris possession des terres les meilleures , et, s’il existe quelques inter- valles sablonneux et caillouteux , c’est là que l’on est sûr de voir des pâturages. Du côté d’Araxa, au milieu des déserts qui conduisent à Paracatu , la végétation devient d'autant plus vigoureuse que la terre est plus rouge, et des pâturages parsemés d'arbres rabougris ou simple- ment herbeux, coïncident avec les teintes plus ou moins foncées du sol. Mais il est à remarquer que tous les changemens de végétation que je viens de signaler, et qui s'accordent si exactement avec d’autres changemens dans la couche superficielle du sol, se manifestent dans une même ré- gion et sur des surfaces d’une étendue peu considéra- ble# Pour que la présence des forêts, d'un côté de la grande chaîne , et celle des campos , du côté opposé, fussent dues à des différences dans la nature du sol , il faudrait que la chaîne divisàt la couche superficielle en deux zônes , comme elle divise les végétaux en deux ré- gions, et alors les sous-régions végétales seraient déter- minées sans doute par des nuances de terrain, constantes dans la même sous-région. Mais je ne crois pas qu'il en soit ainsi. La terre qui , à Minas Novas, ne produit que des carrascos, ressemble à celle qui, aux environs de Villa do Principe, fut autrefois couverte de bois vierges, (83) etj'ai retrouvé dans les campos du Sertao des terrains qui m'ont paru analogues à ceux où l'on voit naître ailleurs tantôt des carrascos et tantôt des forêts. Je crois donc que la nature proprement dite de la couche superfi- cielle du sol n’a point eu d'influence sur le singulier partage de la province des Mines en deux grandes ré- gions, celle des forêts et celle des campos. La véritable cause de l’absence des bois à l’ouest de la grande chaîne, me paraît être une différence dans les inégalités du sol et le défaut d'humidité, On à vu que, dans la sous- région des foréts , le pays présentait un réseau de mon- tagnes, et que celui des campos était simplement on- dulé. Quand les mornes sont fort hauts et terminés par des crêtes , lorsqu'ils sont séparés par des vallées étroites et profondes , ils s'abritent réciproquement et l'effort des vents ne s’y fait point sentir; les ruisseaux, toujours multipliés dans ces terrains montagneux , contribuent à y développer la végétation , et elle est encore favorisée par les débris des troncs et des branchages sans cesse ac- cumulés et réduits en terreau. Au contraire , lorsque le pays est simplement ondulé, que rien n’yarrête les vents, que la terre n’y est rafraîchie par aucun ruisseau , il ne serait pas possible que la végétation y eût une grande vigueur, quelle que fût d’ailleurs la bonté naturelle du sol. Dans le pays élevé de Minas Novas, situé, comme je l'ai dit, à l’est de la grande chaîne, la surface de la terre n'offre cependant pas de hautes montagnes; elle n’est pas non plus simplement ondulée; mais elle pré- sente des mornes peu élevés séparés par des vailons. Les inégalités de ce pays sont par conséquent intermédiaires entre celles des contrées de bois vicrges proprement ( 84) dites et celles si peu sensibles de la région des campos. Or des nuances analogues se manifestent dans la végé- tation ; car elle ne présente ici ni de simples pâturages comme la région des campos, ni des arbres gigantes- ques comme la sous-région des foréts , mais ces boïs nains qu'on nomme carrascos. Ce qui prouve encore la réalité des causes que j'assigne ici au partage des campos et des forêts , c'est que si un morne couvert de carras- cos, ou de simples pâturages , offre sur ses pentes quel- que enfoncement où lhumidité puisse se conserver et où les végétaux soient à l’abri des vents, on y trouve toujours des bois, et ceux-ci, dans la sous-région des carrascos, montrent d'autant plus de vigueur que les gorges sont plus profondes. A la vérité, M. d'Eschwege a remarqué que la végé- tation était plus vigoureuse dans les terrains primitifs de la province des Mines que dans ceux dont la formation est plus récenie; il a observé que des bois croissaient sur les montagnes de granit, de gneïs, de schiste micacé, de sciénite, et que les pâturages naturels et les arbustes tortueux se rencontraient dans des terrains dont le fond se compose de schiste argileux, de grès et de fer. Mais si les grandes différences de végétation qu'on observe dans la province des Mines coïncident avec des diffé- rences dans la constitution minéralogique du sol , il n’en est pas moins très-vraisemblable que ce ne sont point celles-ci qui modifient l’ensemble des productions végé- tales. Déjà depuis long-temps M. de Candolle a mon- tré (1) que la nature minéralogique des divers terrains (1) Diet. Sc. nat., vol. XVIII. (169) n’exerçait aucune influence sur la végétation, ou du moins qu’elle en exerçait peu, et les observations faites par M. d'Eschwege lui-même tendent à démontrer la vérité de cette opinion; car, dans le voisinage du Rio de S. Francisco, près Formiga et Abaïté, ce savant a vu des terrains calcaires d’ancienne formation rester décou- verts en certains endroits, tandis qu'ailleurs ils produi- sent une végétation riche et d’épaisses forèts. Ce qui, sous la méme latitude et à des hauteurs semblables, modifie véritablement la nature des productions végé- tales, ce sont l'exposition du sol, le plus ou moins d'humidité qu'il renferme, la division plus ou moins sensible de ses parties, la quantité plus ou moins grande d’humus qui compose sa surface. On a vu qu'aux deux premières de ces quatre causes sont dues les deux grandes divisions que lon observe dans la végétation de la provinee des Mines, et que les deux autres amènent principalement des différences de détail. Il est ici cependant une exception très-remar- quable. Lorsqu'on se rend de la rivière du Jiquitinhonha à Villa do Fanado, on traverse d’abord des forêts vierges ; mais tout à coup la végétation change, et l’on passe dans la sous-région des catingas. Cependant aucune chaîne de montagne ne sépare les denx sous-régions; aucune difé- rence de niveau, tant soit peu sensible, ne se manifeste dans la surface de leur sol. Des catingas sont éparses au milieu des campos du Désert; là, comme les capoes pro- prement dits, elles se montrent très-souvent dans les fonds et sur les pentes ; mais, près le village de Formigas et sans doute en bien d’autres lieux, aucune inégalitéde solne ( 86 ) marque le passage des campos aux catingas. La présence de ces dernières n’est donc point toujours déterminée par la forme du terrain, et elle doit avoir pour cause princi- pale la qualité même de la couche supérieure. Cela est si vrai que, lorsque j'ai passé des forêts du Jiquitinhonha dans les catingas, j'ai observé que la terre devenait brus- quement très-meuble, légère, grise et un peu sablon- neuse; J'ai observé qu’une nature de terre absolument semblable coïncidait aux environs de Formigas , avec la présence des catingas qui d’ailleurs ne sont, comme on l'a vu, séparées des campos par aucune inégalité du sol; enfin j'ai encore retrouvé un terrain léger, gris et un peu sablonneux dans les catingas voisines du S. Francisco. D'autres causes sont, à ce qu'il paraît, nécessaires encore pour qu'un terrain donne naissance à des catin- gas. Il ne paraît pas que cette sorté de bois se montre à une latitude plus méridionale que le milieu environ de la province des Mines et il n’est pas à ma connaissance que des catingas croïssent à une grande hauteur au- dessus du niveau de l'Océan. SECONDE PARTIE. Description des diverses sortes de végétation. Après avoir montré de quelle manière les diverses sortes de végétations sont distribuées dans la province des Mines, je tâcherai de donner une idée juste de chacune d'entre elles. Je n’entrerai point dans des détails de genres et d'espèces ; je me contenterai de peindre à grands y . (87) traits l’aspeci des bois et des campos , et je commencera par les forèts primitives. Lorsqu'un Européen arriveen Amérique, et que, dans le lointain, il découvre des bois vierges pour la première fois, il s'étonne de ne plus apercevoir quelques formes singulières qu’il a admirées dans nos serres , et qui sont ici confondues dans les masses ; il s'étonne de trouver , dans les contours des forêts, aussi peu de différence entre celles du Nouveau-Monde et celles de son pays; et si quelque chose le frappe , c’est uniquement la grandeur des proportions et le vert foncé des feuilles qui, sous le ciel le plus brillaut, communique au paysage un aspect grave el austère. Pour connaître toute la beauté des forèts équinoxiales, il faut s’enfoncer dans ces retraites aussi anciennes que le monde. Là rien ne rappelle la fatigante monotonié de nos bois de chènes et de sapins ; chaque arbre à un port qui lui est propre ; chacun a son feuillage et offre sou- vent une teinte de verdure différente de celle des arbres voisins. Des végétaux gigantesques qui appartiennent aux familles les pins éloignées entremèêlent leurs branches et confondent leur feuillage. Les Bignonées à eing feailles croissent à côté des Cesalpinia , et les fleurs dorées des Casses se répandent, en tombant, sur des Fougères ar- borescentes, Les rameaux mille fois divisés des Myrtes et des Eugenia font ressortir la simplicité élégante des Palmiers, et parmi les Mimoses aux .folioles légères, le Cecropia étale ses larges feuilles et ses branches qui ressemblent à d'immenses candélabres. Il est des arbres qui ont une écorce parfaitement lisse ; quelques-uns sont défendus par des épines, et les énormes troncs d’une ( 88 ) espèce de Figuier sauvage s'étendent en lames obliques qui semblent les soutenir comme des ares-boutans. Les fleurs obscures de nos hêtres et de nos chènes ne sont guère aperçues que par les naturalistes; maïs, dans les forêts de l'Amérique méridionale , des arbres gigan- tesques étalent souvent les plus brillantes corolles. Les Cassia laissent pendre de longues grappes dorées , les Vochisiées redressent des tyrses de fleurs bizarres ; des corolles tantôt jaunes et tantôt purpurines , plus longues que celles de nos Digitales, couvrent avec profusion les Bignonées en arbre ; et des Chorisia se parent de fleurs qui ressemblent à nos lys pour la grandeur et pour la forme , comme elles rappellent lÆ/stroemeria pour le mélange de leurs couleurs. Certaines formes végétales qui ne se montrent chez nous que dans les proportions les plus humbles, là se développent , s'étendent et paraissent avec une pompe inconnue sous àos climats. Des Borraginées deviennent des arbrisseaux ; plusieurs Euphorbiacées sont des ar- bres majestueux , et l’on peut trouver un ombrage agréa- ble sous leur épais feuillage. Mais ce sont principalement les Graminées qui montrent le plus de difiérence entre elles et celles de l'Europe. S'il en est une foule qui n’acquièrent pas d’autres dimensions que nos Bromes et nos Fetuques, et qui, formant aussi la masse des gazons, ne se distinguent des espèces européennes que par leurs tiges plus souvent rameuses et leurs feuilles plus larges ; d’autres s’élancent jusqu’à la hauteur des arbres de nos forêts, et présen- tent le port le plus gracieux. D'abord droites comme des lances , et terminées par une pointe aiguë , elles n’offrent ( 89 ) à leurs entrenœuds qu’une seule fenille qui ressemble à une large écaille; celle-ci tombe; de son aisselle naît une couronne de rameaux courts chargés de feuilles véritables: la tige du Bambou se trouve ainsi ornée, à des intervalles réguliers , de charmans verticilles ; elle se courbe , et forme entre les arbres des berceaux élégans. Ce sont principalement les Lianes qui communiquent aux forèts les beautés les plus pittoresques; ce sont elles qui produisent les accidens les plus variés. Ces végétaux, dont nos Chèvrefeuilles et nos Lierres ne donnent qu'une bien faible idée, appartiennent , comme les grands vé- gétaux , à une foule de familles différentes. Ce sont des Bignonées, des Bauhinia, des Cissus, des Hipocra- _tées, etc. ; el si toutes ont besoin d’un appui, chacune a pourtant un port qui lui est propre. À une hauteur prodigieuse , une Aroïde parasite, appelée Cipo d’imbé, ceint le tronc des plus grands arbres ; les marques des feuilles anciennes qui se dessinent sur sa tige en forme due losange la font ressembler à la peau d’un serpent ; cette tige donne naissance à des feuilles larges, d’un vert luisant, et de sa partie inférieure naissent des racines grèles qui descendent jusqu’à terre, droites comme un fil à plomb. L'arbre qui porte le nom de Cipo matador, ou la Liane meurtrière, a un tronc aussi droit que celui de nos Peupliers ; mais, trop grêle pour se soutenir isolément, il trouve un support dans un arbre voisin plus robuste que lui; il se presse contre sa tige, à l’aide de racines aériennes qui , par intervalles, embrassent celle - ci eomme des osiers flexibles ; il s’as- sure, et peut défier les ouragans les plus terribles. Quelques Lianes ressemblent à des rubans ondulés ; ( 90 ) d’autres se tordent ou décrivent de larges spirales; elles pendent en festons , serpenteut entre les arbres, s'é- lancent de l'un à l’autre, Îles enlacent et forment des masses de branchages de feuilles et de fleurs, où l'obser- vateur a souvent peine à rendre à chaque végétal ce qui lui appartient. Mille arbrisseaux divers, des Melastomées, des Bor- raginées , des Poivres , des Acanthées, etc., naïssent au pied des grands arbres, remplissent les intervalles que ceux-ci laissent entre eux , et offrant leurs fleurs au na- turaliste , le consolent de ne pouvoir atteindre celles des arbres gigantesques qui élèvent au-dessus de sa tête leur cime impénétrable aux rayons du soleil. Les troncs ren- versés ne sont point couverts seulement d’'obscures cryp- togames ; les T'illandsia, les Orchidées aux fleurs bi- zarres leur prêtent une parure étrangère, et souvent ces plantes elles-mèmes servent d'appui à d’autres para- sites. De nombreux ruisseaux coulent ordinairement dans les bois vierges ;ils y entretiennent la fraîcheur ; 1.2 offrent au voyageur altéré une eau délicieuse et limpide, et sont bordés de tapis de Mousses , de Lycopodes et de Fougères du milieu desquelles naïssent des Begonies aux | tiges délicates et succulentes , aux feuilles inégales, aux | fleurs couleur de chair. Excitéesans cesse par ses deux agens principaux, l’'humi- dité et la chaleur, la végétation des boïs vierges est dans une activité continuelle ; l'hiver ne s’y distingue de l'été que par une nuance de teinte dans la verdure dufeuillage et , si quelques arbres y perdent leurs feuilles, c’estpour reprendre aussitôt une parure nouvelle, ais il faut en! convenir, celte végétation qui he se repose jamais ne (or) permet pas qu’on trouve dans les bois vierges autant de fleurs que dans les pays découverts. La floraison met, comme l’on sait, un terme à la végétation; des arbres qui produisent sans cesse des branches et des feuilles ne donnent des fleurs que fort rarement ; et, par exemple, un Qualea Gestasiana, ASH., qui s'était chargé de fleurs élégantes , est ensuite resté pendant cinq ans sans en rapporter de nouvelles. Il ne faut pas croire que les forêts vierges soient par- tout abolument les mêmes; elles offrent des variations suivant la nature du terrain , l'élévation du sol et la dis- tance de l'équateur. Les bois du Jiquitinhonha au- delà de la Vigie , par exemple, ont plus de majesté peut- être que tous ceux des autres parties de la province , les arbres y montrent une vigueur surprenante, mais Îles lianes n’y sont pas très-nombreuses ; ailleurs les planies grimpantes étalent toute la bizarrerie de leurs formes; en quelques endroits , ce sont les Bambous qui à eux seuls forment presque toute la masse de la végétation, et dans d’autres, l’on voit dominer les Palmitos (Eu- terpe oleracea, Mart. ) et les Fougères en arbre. Si les forêts vierges servent de retraite à quelques ani- maux dangereux ; tels que les jaguars et les serpens, elles sont l'asile d’un nombre bien plus considérable d'espèces entièrement innocentes, telles que des cerfs, des tapirs, des agoutys, plusieurs espèces de sin- ges, ete, , etc. Les hurlemens des Macacos bardados répétés par les échos ressemblent, dans les grands bois, au bruit d’un vent impétueux qui s’'interromprait par intervalle en se ralentissant peu à peu. Des milliers d'oiseaux, dont le plumage diffère autant que les mœurs, (92) | font entendre un ramage confus; les batraciens y mêlent leur coassement aussi varié que hizarre, et les cigales leurs cris aigus et monotones. C’est ainsi que se forme cette voix du désert qui n’est autre chose que l’accent de; la crainte, de la douleur et du plaisir exprimé de diflé- rentes manières par tant d'êtres divers. Au milieu de tous ces sons, un bruit plus éclatant frappe les airs , ! “fait retentir la forêt et étonne le voyageur. Il croit en- tendre les coups d’un marteau sonore qui tombe sur l’enclume et auquel succéderait le travail étourdissant de la lime s’exerçant sur le fer. Le voyageur regarde de tous côtés; et il s'étonne, lorsqu'il découvre que des sons qui ont autant de force sont produits par un oiï- seau gros comme un merle qui, presque immobile au sommet d’un arbre desséché, chante, s’interrompt, et attend pour recommencer qu’un autre individu de son espèce ait répondu à ses accens. C’est le Casmarynchos nudicollis, Tem.(le Ferrador des Mineiros, l’Æraponga de la province de Rio de Janeiro), qui change de plu- mage à ces diflérens âges, et qui, après avoir été d’un vert cendré, finit par devenir aussi blanc que nos cygnes. Des myriades d’insectes habitent les forêts primitives, et excitent l'admiration du naturaliste, tantôt par la singularité de leurs formes , tantôt par la vivacité de leurs couleurs. Des nuées de papillons se reposent sur le bord des ruisseaux ; ils se pressent les uns ‘contre Îles autres, et, de loin, on les prendrait pour des fleurs dont la terre aurait été jonchée. Entre les bois vierges que je viens de décrire et les plus grauds carrascos , viennent se placer comme inter- médiaires les catingas, qui se distinguent surtout des ( 93) remiers, parce qu'elles perdent leur feuilles tous les ns. Dans le pays des Mines-Nouvelles où , comme je l’ai Li t, croissent des catingas , les pluies qui ont duré six mois, cessent en février, et la chaleur diminue peu à peu. Alors les feuilles des catingas commencent à tomber, et, en juin , les arbres en sont presque entièrement dé- pouillés. Cependant, au mois d'août, les boutons des arbres commencent à se développer, et, ce qui est fort remarquable, ils précèdent ordinairement les pluies. Celles-ci arrivent bientôt; les chaleurs deviennent chaque jour plus fortes, et les végétaux reprennent leur parure. Presque depuis Sucuriu dans les Minas Novas jusqu’à la fazenda de Bom Jardim, dans un espace d’environ 33 lieues portugaises, j’ai toujours traversé des catin- gas. Lors de mon voyage, elles étaient presque entiè- rement dépourvues de feuilles. Ces bois présentent des modifications diverses ; mais c’est, à ce qu'il paraît , sur la limite du territoire des carrascos que lesnuances sont le plus multipliées. Sur cette limite, entre Sucuriu et Setuba, les catingas ressemblent singulièrement aux bois d'Europe , et m'offrirent un épais fourré de broussailles , de plantes grimpantes et d’arbrisseaux | de dix à vingt pieds, au milieu duquel se montraient çà et là des arbres de hauteur à peu près moyenne (1). Tantôt les arbrisseaux qui faisaient partie de ces bois étaient peu élevés , et rappelaient nos taillis de 3 ou 4 ans , et tantôt on les eût pris pour des taillis de 18 an- (1) On verra plus bas que ce n’est pas toujours la grandeur qu'ils atteignent. ( 94 ) nées; le plus souvent les grands arbres laissaient entre eux beaucoup de distance, et quelquefois ils étaient assez rapprochés ; tantôt ils n’atteignaient pas même la grandeur moyenne , tantôt ils la surpassaient, mais nulle part ils n'étaient aussi élevés que ceux des forêts primi- uves. Entre Setuba et Boa Vista, plus loin de la limite des carrascos , dont je parlerai bientôt , j'observai de nou- velles différences. Les arbres qui s’élevaient au milieu des arbrisseaux, étaient plus grands, moins éloignés les uns des autres, et, surtout dans les environs de Boa Vista, la végétation était plus vigoureuse. De grandes lianes environnaïent les arbres, comme dans les forêts vierges ; elles pendaient du haut de leurs branchagee ,L et formaient d'immenses lacis qui se croïisaient en tous sens. La plupart des grands végétaux ne différaient point de ceux de l’Europe par la disposition de leurs branches; cependant il en était qui indiquaient assez d’autres climats. Ainsi, un Cactus que j'avais déjà vu près de Rio de Janeiro élevait ses troncs coniques et ses rameaux verticillés au milieu des lianes tortueuses. Un autre Cactus très-rameux, dont la tige et les branches épineuses et profondément canelées n’ont guère que l'épaisseur de deux doigts, semblait serpenter entre les : rameaux dépouillés des arbres voisins ; et, par sa cou- leur verte, il contrastait avec l'écorce grise dont ils étaient revétus. Parmi les arbres des catingas , iljen est trois qui atti- rèrent mon attention par la singularité de leurs carac- tères. L'un d’eux , qui a beaucoup plus de deux brasses de circonférence, frappe d'autant plus que le diamètre ( 95 ) de ceux qui l'entourent ne va guère au-delà d’un pied. Comme certaines colonnes, il est plus renflé au milieu qu'à la base; le plus souvent il grossit déjà à peu de distance de la terre , et, à sa partie supérieure, il va en diminuant à la manière d’un fuseau. Son écorce rous- sâtre et luisante n’est point fendue ; mais elle porte des tubercules gris qui sont les restes des épines dont l'arbre était chargé pendant sa jeunesse. Dans toute sa longueur, le tronc , qui atteint une grande élévation , ne présente pas un seul rameau , et son extrémité seule se termine par un petit nombre de branches presque horizontales. Le Barrigudo ou Ventru (Chorisia ventricosa, Nees et Mart.), c’est ainsi qu’on appelle larbre dont üt est question, a un bois très-tendre, et c’est ce bois qui, jeune encore, est employé par les Botocudos pour faire les singuliers disques qu’ils placent dans leurs oreilles et leurs lèvres inférieures. Le second arbre que je remarquai encore s'élève beau- coup moins que le Barrigudo; mais il présente à quel- ques pieds du sol des renflemens ovoïdes. Le troisième enfin, appelé ÆEmburana ( Bursera lephtophloeos , Mart.), a un tronc généralement incliné, et il est couvert d’une écorce rousse qui se lève en lam- beaux, et laisse voir, par intervalle, la nouvelle écorce dont la couleur est d’un beau vert. Ce fut entre les villages de Chapada et Sucuriu , en- viron par le 16° 48’, que, pour la première fois, je vis des catingas. On était alors au mois de mai. En des- cendant une côte, j'entrai dans un bois composé d’ar- brisseaux serrés les uns contre les autres, et au milieu desquels s’élevaient de distance en distance des arbres ( 96) d'une grandeur moyenne. Ce bois , qui était une catinga peu vigoureuse, avait une ressemblance parfaite avec ceux de nos taillis où on laisse çà et là croître des bali- veaux. Les arbres conservaient à peine quelques feuilles jaunâtres ou d’un pourpre foncé; la terre était jonchée de celles qu’ils avaient perdues, et de temps en temps il en tombait encore quelques-unes à mes pieds. Les gazons qui bordaient le chemin avaient été brülés par l'ardeur du soleil; une seule Acanthée laissait aperce- voir de petites fleurs à deux lèvres et à tube allongé ; mais ses feuilles presque flétries retombaient sur la tige, et l’on aurait pu prendre cette plante pour notre Ga- leopsis ladanum , tel qu’il se montre dans les plaines de la Beauce après la canicule. Le soleil était sur son dé- clin ; la chaleur avait diminué ; aucun vent ne se faisait sentir, et le ciel n’offrait plus que des teintes affaiblies. Je me serais cru en France par une belle soirée d’au- tomne , si quelques Palmiers que j'apercevais çà et là avaient pu me permettre de m'abandonner à une erreur si douce (le Guariroba des Brésiliens , Cocos oleracea, Mart.). Si l’on demandait pourquoi les catingas perdent leurs feuilles, tandis que les véritables forêts gardent toujours les leurs , il ne serait pas, je crois , bien diflicile de ré- pondre à cette question. La terre où s'élèvent les bois vierges m'a paru moins susceptible de se dessécher que le sol un peu sablonneux, meuble et fort léger qui donne naissance aux catingas, et celles-ci ne se voient point, comme les forêts proprement dites, dans des pays où de hautes montagnes s’abritent réciproquement, et où de nombreux ruisseaux entretieunent une continuelle frai- ee Sa (97) cheur. Ce qui prouve d’une manière incontestable que les catingas doivent à la sécheresse la chute de leurs feuilles, c’est qu'elles les conservent sur le bord des rivières et dans les licux mouillés. Lorsque je traversais les catingas du Jiquitinhonha, un peu au - dessous du confluent de l’Arassuahy, les rives du fleuve, ornées d’une lisière de la plus fraiche verdure, contrastaient avec les bois voisins dépouillés de leurs feuilles, et, ce qui peut-être n'a jamais eu lieu dans aucun pays du monde , j'avais tout à la fois sous les yeux l’image de l'hiver et celle des jours les plus délicieux du printemps. Le savant Martius, qui a vu les catingas dans un pays où, dépouillées de verdure , elles sont, à ce qu’il paraît, plus tristes encore que celles de Minas ; Martius, dis-je, partage entièrement mon opinion sur la chute de leurs feuilles. Voici en effet comment il s'exprime dans un éloquent discours où d’un coup d'œil rapide il embrasse cette immense portion de l'Amérique qui s'étend dn Rio de la Plata à la rivière des ÂAmazones. « On nous a assuré « que les catingas restaient quelquefois plusieurs années « de suite sans se couvrir de feuilles , lorsque les pluies « manquaient pendant le mème espace de temps, comme « cela arrive à Fernambouc; et, au contraire, des arbres « qui appartiennent à la végétation des catingas con- « servent leur parure, lorsqu'ils croissent sur le bord « des rivières. Cela prouve que le manque d’eau est ici « Ja seule cause de la chute des feuilles... Une pluie soudaine vient-elle humecter la terre..... un monde « nouveau paraît comme par enchantement. Des feuilles d'un vert tendre ont couvert tout-à-conp les branches dépouillées ; des fleurs nombreuses ont ételé leurs XXIV. 7 (oë ) « brillantes corolles, les buissons hérissés d'épines et « les lianes grimpantes qui n’offraient plus que des tiges « arides se sont revêtues d’une parure nouvelle... Par- « tout l’air est embaumé des plus doux parfums, et les « animaux qui avaient fui la forèt desséchée, y accourent « de nouveau ranimés par les sensations délicieuses que « fait naître un printemps enchanteur (1). » C'est ainsi que des phénomènes , occasionés sous la zône tempérée par l'absence et le retour de la chaleur, sont produits, dans les contrées équinoxiales, par l'alternative de la sécheresse et de l'humidité. Les carrascos proprement dits se distinguent encore plus des véritables catingas , pour la vigueur et l’éléva- tion, que celles-ci ne diflèrent des bois vierges. Dans les parties de Minas Novas où s'observe ce genre de vé- gétation, on ne voit point, comme je l'ai dit, de hautes montagnes terminées par des crêtes ou des pics aigus, et séparées par des vallées étroites et profondes. Là sont des mornes peu élevés, bordés par des vallons et dont le sommet présente une espèce de petite plaine, Dans le pays on donne à ces sommets singuliers le nom de tabo- leiros, qui signifie plateau, et on les appelle chapadas, quand ils ont une plus grande étendue. Des espèces de forêts naines couronnent ces plateaux, et sont compo- sées d’arbrisseaux à tige et à rameaux gréles, hauts de 3 à 5 pieds, en général rapprochés les uns des autres. Tels sont les carrascos. Certaines plantes Îles caractérisent d’une manière spéciale ; telles sont la Composée à feuilles de bruyère qu’on appelle “lecrim do campo, le Pavo- (+) Phys, Pflanz. Braz. 17. (99 ) nia que ses fleurs charmantes ont fait surnommer la Rose des champs (Pavonia Rosa campestris, AS HJC.), deux Hyptis, le petit Palmier à feuilles sessiles appelé vulgai- rement Sandaia ou Sandaiba ; enfin surtout une Mimose dont les tiges sont légèrement épineuses, les feuilles d’une délicatesse extrème et les fleurs disposées en épis (Mimosa dumetorum , ASH.). La nature ne met point ordinairement , entre ses di- verses productions, une distance aussi considérable que celle que j'ai signalée entre les véritables carrascos et les catingas ; aussi existe-t-il une sorte de végétation qui forme le passage des carrascos proprement dits aux ca- üngas ; ce sont les carrasquenos. Ceux-ci présentent des arbrisseaux d’environ'6 à 15 pieds, dont les tiges droites et menues sont fort rapprochées les unes des autres, et qui, par leur ensemble, donnent l’idée de nos taillis. C’est encore dans les Minas Novas que se trouvent les carrasquenos ; et tandis que les carrascos croissent sur les plateaux, les carrasquenos se montrent sur leur pente; ce qui achève de prouver que la végéta- tion s'élève à mesure que le terrain devient plus abrité. En ne consultant que la hauteur, on peut, je crois, rapprocher des carrasquenos une végétation qui, du moins dans la province des Mines , ne s’observe que sur les bords du Rio de S. Francisco. Chaque année, ce beau fleuve sort de son lit; et sur les terrains qu’il inonde (alagadicos), s'élèvent des buissons impénétrables, formés principalement par deux plantes épineuses , l_4- cacia Farnesiana et le Bauhinia inundata, A SH (Per- lebia Bauhinioides, Mart.). J'ai tâché jusqu'ici de donner une idée de la physio- ( 100 }) nomie des diverses sortes de forêts naines ou gigantesques qu’on observe dans la province de Minas Geraes. A présent je dirai quelques mots de ses campos. Ceux qui sont simplement herbeux ont assez l’aspect de nos prairies; mais les plantes ne s’y pressent pas au- tant, el, dans aucune saison, ils ne sont émaillés d’un aussi grand nombre de fleurs. Des Grraminées entremè- lées d’autres herbes, de sous-arbrisseaux et quelquefois d’arbrisseaux peu élevés forment ces paturages; on y trouve en abondance des Composées et surtout des Ver- nouies ; les Myrtées, les Mélastomées à fruits capsulaires' y sont fort communes ; mais on n’y revoit plus d’Acan- thées, famille si nombreuse dans les bois vierges (1). Dans le Sertao ou Désert, des arbres sont épars, comme Je l'ai dit, au milieu des päturages ; mais , loin de s'élever avec cette majesté qui caractérise ceux des forêts primitives , ils n'approchent pas même, à beau- coup près, de la hauteur ordinaire de nos chènes, de ‘pos bouleaux ou de nos hètres. Ils sont tortueux et ra- bougris ; une écorce fendillée et souvent subéreuse revêt leur tronc , et leurs feuilles, assez ordinairement dures et cassantes, ont pour ja plupart la forme de celles de nos poiriers. Ces arbres ont généralement le mème as- pect que les pommiers d'Europe, et lorsque l’on parcourt les campos du Désert, ou se croirait transporté au mi- lieu de ces vergers que les habitans de certaines pro- vinces de France plantent dans leurs prairies. Mais , si les arbres du Sertao n’ont rien dans leur port qui excite l’'admiratiou, ils charment le voyageur par la beauté et (x) Voyez mon Introduction à l’Æistoire des Plantes remarquables du Brésil et du Paraguay. ( rot ) l’étonnante variété de leurs fleurs. Tan'ôt ce sont des Légumineuses aux grappes pendantes, et une Rignonée à cinq feuilles qui étale des fleurs d’un jaune doré ; tantôt des Ochna, des Ternstromiacées, des Malpighiées à longs épis , de nombreux Qualea , des Vochisia , enfin le Salvertia à odeur de muguet, qui redresse ses thyrses plus beaux peut-être que ceux de l’Æippocastanum. Le passage des campos aux forêts ne se fait pas tou- jours d’une manière brusque , comme il ne s’opère pas toujours non plus par des transitions plus ou moins in- sensibles. Lorsque je me rendais de Rio de Janeiro à Barbacena, ville de la province des Mines située par le 21° 21° latitude sud (1), un Millepertuis, que je n’a- vais pas coutume de voir dans les bois, se montra vers Mantiqueira, comme l’avant-coureur d’une végétation nouvelle; sur l’un des côtés du chemin, les arbres com- mencèrent à ne plus étaler la même vigueur, et me sem- blèrent moins rapprochés les uns des autres: bientôt j'apercus des pâturages , mais ils étaient encore parse- més de bouquets de bois; peu à peu ceux-ci devinrent plus rares , et ils finirent par disparaitre. Il n’en fut pas ainsi lorsque , deux années plus tard, je me dirigeai, par une route différente, de la capitale du Brésil à S. Joao d'El Rey, autre ville de Minas Geraes située par le 21° 10° 35”. Je venais de traverser des forêts épaisses où souvent j'aurais pu toucher avec la main les arbres majestueux dont j'étais entouré; tout-à-coup l'aspect du pays changea avec la mème rapidité qu'une déco- ration de théâtre; une étendue presque incommensu- (1) Jai fait connaître cette ville dan; la Relation de mon voyage, vol. 1, p. 17. ( 102 ) rable de mornes arrondis couverts seulement d’une herbe rare et grisâtre se déroula sous mes yeux, et je pus con- templer une image de l’immensité moins imparfaite peut-être que celle qui est offerte par la mer, lorsqu'on y jette les regards sur un rivage peu élevé. Je n’étendrai pas ce tableau davantage. De plus longs détails rentreraient dans le domaine des Flores et des ouvrages de botanique spéciale ; et je n’ai pas eu d’autre but que de faire connaître dans son ensemble la végéta- tion de Minas Geraes telle qu’elle est aujourd’hui. Mais si l'intelligence et la sagesse des habitans de cette pro- vince peuvent la préserver des dangers terribles qui la menacent dans ce moment, comme tout le reste du Brésil, sa population augmentera avec rapidité; où l’on voit d’humbles hameaux, s’élèveront des cités florissan- tes ; de nouveaux défrichemens diminueront encore l’é- tendue des forêts; enfin les icampos eux-mèmes seront creusés par la bèche et sillonnés par la charrue. Alors il ne restera plus rien de la végétation primitive; une foule d'espèces auront disparu pour jamais, et les tra- vaux sur lesquels le savant Martius, mon ami le docteur Pohl et moi, nous avons consumé notre existence, ne seront plus en grande partie que des monumens histo- riques. sine { 103 ; \ Extrait d'une Lettre de M. Constant Prévost, datée de Malte le 3 octobre 1831, et adressée à l’ Aca- démie des Sciences , sur le nouvel Islot volca- nique de la mer de Sicile (1). M. Constant Prévost, envoyé par le gouvernement français sur la demande et la présentation de l’Académie (1) On sait que cette nouvelle île , qui s’est élevée dans la mer située entre les sources chaudes de Sciacca , sur la côte de la Sicile, et l'ile vol- canique de Pantellaria , a été aperçue pour la première fois le 8 juillet par le brigantin sicilien e/ Gustavo ; elle paraît s’être souleyée à la suite des secousses de tremblemens de terre qui ont été ressenties sur les côtes de Sicile du 28 juin au 2 juillet, et qui ont même renversé quelques mai- sons à Sciacca. Elle a été revue pendant l’irruption par plusieurs bâlimens siciliens ; le vice-amiral anglais Hotham y a envoyé un petit bâtiment qui, le 18 juillet, a déterminé sa hauteur à 80 pieds et sa circonférence à 374 de mille anglais ; à cette époque elie était circulaire et présentait une échan. crure par laquelle la mer communiquait dans le cirque intéricur. Le capitaine Savy de Mondiol Pa vue de loin le 3 août; elie paraissait assez basse, et ii en sortait une colonne de fumée très-considérable. M. Hoffmann a publié sur ce sujet un article intéressant dans les journaux allemands. M. de Humboldt en a rendu compte à l’Académie des Sciences, et nous lui empruntons les renseignemens suivans : « L'ile de Pantellaria a souffert anciennement des tremblemens dé terre très-considérables ; mais depuis 1540 elle avait été exempte de secousses juqu’en 1816, où elle fut agitée de mouvemens ressentis Éga- lement sur la côte opposée de la Sicile. Trois jours avant l'apparition du volcan , le même phénomène s’est reproduit , et un physicien qui obser- vait en Sicile la direction des mouvemens à l’aide d’un instrument très- précis inventé pour cet effet, a constaté qu'ils avaient lieu du S. 0. au N.E., c’est-à-dire, dans nue direction parallèle à celle qu’aflecte la ligne des volcans de cette contrée. «€ On n’a vu sortir aucun feu pendant l'apparitioe des premières terres de Verita, mais le feu s’est montré quelque temps après. Le volcan a fait saillie sur Le banc même de JVerüa , dont Là position était bien détermi- née sur plusieurs cartes, et particulièrement sur celle du capitaine Smith, Ç 104 ) royale des sciences pour observer l'île d’origine volca- nique qui a paru cetie année dans la Méditerranée, vient d'adresser à l’Académie un premier rapport rédigé, pour ainsi dire, sur le lieu même des observations qu’il a faites sur cetie nouvelle île volcanique. Nous allons donner un extrait de ses observations et citer textuellement quelques-uns des passages les plus remarquables de la lettre adressée à l’Académie. M. Constant Prévost, parti de Toulon le 16 sep- tembre sur le brick Za Flèche, capitaine Lapierre, est arrivé le 25 au matin à la hauteur de l’extrémité occiden- tale de la Sicile, après avoir côtoyé d’abord les îles d'Hvyères et traversé le canal qui sépare la Corse de la Sardaigne dont les rives inspirent, par leur correspon- dance remarquable, le désir de les examiner de plus près. | Le soir sur les cinq heures , la vigie placée dans les mèts , signala une terre de laquelle on voyait s'élever de la fumée; étant monté sur les hunes, M. C. Prévost apercut en eflet distinctement l'ile qui avait assez bien la forme de deux pitons réunis par une terre plus basse. « Nous étions à 18 milles, dit M. Prévost, et nous voyions par moment des bouffées d’ane vapeur blanche qui s’élevaient, du côté du sud, principalement, à une hauteur double de celle de lile. A plusieurs reprises , Comme les sondes s’y trouvent marquées, on voit qu’un changement considérable a eu lieu au fond de la mer, par suite de cet événement. Au- jourd’hui, en effet, dans le voisinage de l’île, on trouve le fond à environ 80 brasses, tandis qu'auparavant il n’y avait que 15 ou 20 brasses sur toutes ces parties où l’on faisait une pêche assez active de corail. Lorsque M. Hofiman a visité Verita , il a trouvé dans les roches dont elle est formée, beaucoup de pyroxène, ct presque pas d’amphibole. Alors le vol- can n'avait guèresr ue 48 pieds de hauteur, aujoard’hni il en a de 150 à 200. » F° (1405) et lorsque nous étions sous le vent, nous sentimes use odeur sulfureuse plus analogue à celle du lignite pyriteux en combustion qu'à celle de l'hydrogène sulfuré. « À 8 milles, l’île paraissait comme une masse noire, solide , ayant tantôt la forme d’un dôme surbaissé dont la base était triple de sa hauteur, tantôt celle de deux col- lines inégales séparées par un large vallon; ses bords s’élevaient à pic, à l'exception du côté d’où la vapeur sor- tait avec le plus d’abondance ; celle-ci s’échiappait visi- blement de la surface de la mer elle-même à une assez grande distance (30 ou {o pieds). » « Les arètes vives des escarpemens , la couleur d’un brun brillant et parfois gras de ces faces abruptes, la forme généralede l’île, rappelait un massifde roche solide; et si, me laissant guider par l’analogie, j'avais dû m’en tenir à des conjectures , J'aurais cru avoir sous les yeux un cirque formé par du Basalte, de la Serpentine ou du Porphyre, figurant un véritable cratère de soulèvement dans le centre duquel l’eau de la mer serait venue s’en- goufirer ainsi qu'on l’a avancé dans des relations pré- cédenies ; toutes ces apparences m'auraient conduit à une erreur, ainsi que les observations des jours suivans me l’ont moutré. » «Le 28 au matin, nous püûmes approcher jusqu’à 2 milles et voir alors distinctement que la vapeur s'élevait non-seulement de la mer, mais encore d’une cavité sépa- rée de celle-ci par un bord tres-mince du côté du Sud. » «A midi, la mer étant un peu tombée, le capitaine voulut bien faire mettre un canot à notre disposition, et, en moins d’une heure, nous arrivames sur les brisans ; nous reconnümes alors que ceux-ci étaient produits par ( 106 } la lame qui venait frapper avec force contre une plage courte et terminée brusquement par une pente rapide et non par des roches solides ; l’eau vert-jaunâtre dans la- quelle nous étions et qui était couverte d’une écume rousse, avait une saveur sensiblement acide ou moins amère que celle de la grande mer. Sa température était aussi plus élevée, mais de quelques degrés seulement, de 2rà23 c. Nous sondâmes à environ 30 brasses du ri- vage et nous trouvâmes le fond à 4o ou 5o : nous nous étions dirigés vers le seul point où de la surface de File on peut descendre par une pente douce vers la mer : c’est une espèce de golfe que la figure r représente assez bien. » La mer était trop agitée pour permettre un débarque- ment, M. Prévost fut encore réduit ce jour à étudier l'ile de loin; il n’était qu'à 40 brasses du rivage, mais il put se convaincre qu’au moins pour la partie qu’il | avait sous les yeux , l'ile était formée de matières meu- bles et pulvérulentes (cendres, rapilli, scories ) qui étaient retombées, après avoir été projetées en lair pendant les éruptions. « Je n’aperçus , dit-il , aucun indice de roches solides | soulevées; mais je reconnus bien distinctement l'exis- | tence d’un cratère en entonnoir, presque central, duquel | s’élevaient d’épaisses colonnes de vapeur et dont les parois | étaient enduites d'efflorescences salines blanches. Enfin M. de Groulcroy, élève de 1'° classe, et deux matelots | ayant réussi à aborder dans l’ile à la nage, on vit ces intrépides marins s'élever jusqu'au bord du cratère, marchant sur des sables et des scories brülantes et au milieu des vapeurs qui s’'exhalaient du sol ; ils annon- F q ; cèrent que ce cratère était rempli d'une eau roussatre et. ( 107 ) bouillante, formant un lac d'environ 180 pieds de dia- mètre ; enfin ils revinrent à bord après nous avoir fait passer, au moyen d’une corde, un panier d'échantillons. » « On n'avait vu que des cendres et des scories , ce- pendant, parmi les morceaux rapportés, je trouvai, dit M. Prévost, un fragment de calcaire blanc, ayant tous les caractères de la Dolomie ; je conçus dès-lors l’espoir de trouver quelques roches soulevées et modifiées par l’ac- tion voleanique et je me décidai à tenter une nouvelle expédition, si le temps plus beau et la mer plus calme le permettaient le lendemain. » « En efiet, le 29 un canot fut de nouveau mis à la mer vers dix heures. J'avais fait mes préparatifs, fait disposer des flacons, des bouteilles, des boîtes de fer blanc; nous primes des thermomètres et une machine faite à bord pour puiser l’eau à différentes profondeurs. « Cette fois le capitaine confia la conduite de l’expé- dition à deux officiers, MM. Aragon et Barlet; MM. de Franlieu , élève de 1° classe, Baud , chirurgien major, Derussat, commissaire, nous accompagnèrent et nous fümes conduits par le maître canonnier et huit matelots d'élite , parmi lesquelsse trouvaient les deux qui avaient été à terre le jour précédent. . . . . . « Les observations faites les 26 , 27 et 28 par le capi- taine, observations dont je n’entretiendrai par l’Acadé- mie, parce qu’elles font l’objet d’un rapport détaillé que M. Lapierre envoie en même temps au ministère de la marine, l'ayant convaincu que le nouveau volcan n’est pas placé sur le point où Smith indique dans sa carte marine le banc de Verita ; qu’au contraire cet îlot vol- canique est situé sur un fond qui avait 5 à 500 pieds ( 108 ) d’eau, nous pensâmes qu'il y aurait de graves inconvé- niens pour les marins à donner à la nouvelle île le nom de Merita qui a déjà été proposé ; et comme le phéno- mène a paru dans le mois de juillet, nous convinmes de désigner la nouvelle île sous le nom de Julia; nom sonore , dont la terminaison italienne et harmonieuse peut facilement ètre adoptée par les habitans les plus rapprochés: tra ir 00e « MM. Aragon et Barlei se chargèrent de mesurer la circonférence de l'ile qu'ils trouvèrent être d'environ 709 mètres sur 70 de hauteur. Le docteur Baud fit toutes les expériences thermométriques ; M. de Franlieu fit sonder dans le cratère et puiser de l’eau aux diverses'pro- fondeurs et sur les différens bords. M. Joinville se mit à faire des dessins parmi lesquels se trouve une vue de l’in- térieur du cratère (voyez fig. 2). . . . . . « Deux matelots m’accompagnant, je me mis en devoir de parcourir tous les points de notre îlot pour recher- cher surtout si en quelque endroït des matières appar- tenant au fond de ja mer n'auraient pas été soulevées ou projetées. » « Après avoir gravi la plus haute cime au milieu de scories brülantes , après avoir deux fois fait le tour en- tier au pied des falaises, je fus assuré que ce monticule dont la base était peut-être à 5 ou 600 pieds dans la mer, était entièrement composé, comme je l'avais présumé le 28, de matières pulvérulentes, de fragmens de scories de toutes les diménsions jusqu’à celle de 2 pieds cubes au plus ; je trouvai quelques blocs, dont le centre, très-dur, avait l’aspect et la consistance de la lave , mais ces masses globulaires avaient été projetées ; enfin toute l'ile me pa- (" ro) ; rut être évidemment, comme tous les cratères d'érup- tion , un amas conique autour d'une cavité également conique , mais renversée ; en effet, examinant Îles parois intérieures du cratère, on voit que ceux-ci ont une pente d'environ 45°, et dans les coupes latérales produites par |Jes éboulemens , on distingue que la stratification est | parallèle à cette ligne de pente, tandis que du côté exté- | rieur les mêmes matériaux sont disposés dans un sens | opposé. Quant à la coupure à pic des falaises, il est facile de voir qu’elle est l'effet postérieur des éboulemens | causés, soit par des secousses imprimées au sol, soit plus | probablement par l’action des flots qui, entraînant les | matières meubles accessibles à cette action , ont succés- sivement miné les bords ; ceux-ci se trouvant en sur- plomb sont tombés , tous les jours ils se dégradent et c’est | déjà aux dépens des éboulemens qu’il s’est formé autour | de l'ile une plage , sorte de bourlet de 15 à 20 pieds dé largeur qui se termine brusquement en pente dans Ja mer. » « D’après la manière de voir que je viens d’exposer, il est facile de voir que les éboulemens continuant à avoir lieu par la cause qui les produit tous les jours, l’île s’abaissera graduellement jusqu’à ce qu’une grosse mer, venant à enlever tout ce qui restera au-dessus de son ni- veau , il n’y aura plus à la place qu'un banc de sable vol- canique d'autant plus dangereux qu'il sera difficile d'en avoir connaissance à quelque distance ; aussi la détermi- nation bien précise de ce point aura-t-elle rerdu dans ce cas un grand service à la navigation, et l’on voit combien , dans la supposition que l’île actuelle soit trans- formée en un banc, il est important de ne pas con- fondre celui-ci avec celui de Verita. » ( 110) « Les figures font assez voir que les bords actuels du cratère sont d’inégale hauteur et épaisseur. Du côté du nord l'élévation est d'environ 200 pieds , tandis qu’elle n'est que de 30 à {0 au sud. » | « L'eau contenue dans le cratère paraît être au niveau | de la mer; elle est d’un jaune orangé, couverte d’une écume épaisse; les scories qui bordent ce bassin sont enduites de fer hydroxidé. » « Des vapeurs blanches s’élèvent continuellement non- seulement de la surface de l’eau qui semble être en ébul- lition , mais de tout le sol par de nombreuses fissures. C’est surtout du côté du sud que ces vapeurs sont le plus abondantes, et, comme je l’ai dit, elles sortent de la plage et de la mer elle-même en dehors du cratère. » « Aussi n'est-ce pas sans peine que nous parvinmes à faire le tour complet de l’île en passant à travers cette étuve de vapeurs brülantes et parfois suffocantes , car l'odeur sulfureuse n’était pas toujours sensible lorsque nous étions au centre de la colonne de vapeurs. Dans un espace qui peut avoir 50 à 6o pieds de long, le sable noir de la plage est véritablement brülant. » | * « Le thermomètre indiquait sur le sol baigné par la | mer à chaque flot, une température de 81 à 85° c. L’eau | qui restait dans des dépressions semblait bouillir; mais, | en y plongeant la main, je ne la trouvai pas assez chaude pour qu'elle püt être en réelle ébullition : enfonçant | ma main à quelques pouces dans le sable brûlant de a surface, je le trouvai frais ; dans une de ces expériences, l'un de mes doigts s'étant trouvé sur le trajet d'une bulle de gaz ou de vapeur, qui visiblement était partie d’une grande profondeur, je fus vivement brülé, et convaincu Gr) que l’ébullition était produite par des bulles qui venaient de l'intérieur de la terre : chacune d'elles projetait, | même avec une légère détonation, du sable et des grains volcaniques , représentant autant de petits cratères d’éruption. Parmi ces milliers de volcans en miniature, j'en fis remarquer un qui servit à donner à mes com- pagnons de voyage une idée de la manière dont l'ile Julia avait été formée. Il avait environ un pied de dia- mètre, c’est-à-dire que le sable et les scories lancées continuellement par lui jusqu'à 2 pieds de haut , avaient formé autour de sa bouche d’éruption une scrie de tau- pinière d’un pied de base sur 5 à G pouces de hauteur. Je fis ébouler les parois extérieures de ce cône, et j'en fis un cratère semblable à l’île Julia. » « Je cherchai en vain à enflammer le gaz qui s'échappait ainsi du sol ; il me parut sans odeur; mais , à quelques pas de distance, des vapeurs sulfureuses sortaient des parois du grand cratère , et déposaient du soufre et du muriate de soude sur les parois environnantes. « Ne pouvant entrer dans plus de détails, et n’ayant pu encore réunir les matériaux que nous avons recueillis en commun, je me bornerai à annoncer que J'ai re- cueilli tous les échantillons importans ; que j'ai pris de l’eau dans des bouteilles qui ont été cachetées de suite. » « Celle du bassin intérieur était à une température de 95 à 98° €. » « J'avais promis une prime aux matelots qui m’appor- teraient des cailloux blancs ou jaunes et des coquilles ; J'ai rassemblé plusieurs des premiers et j'en ai trouvé moi-même mêlés avec les produits volcaniques : ils sont altérés et ils ont été projetés du fond avec les scories. » (‘er2 ) « Tout me porte à croire que ce volcan a produit des coulées de laves sons-marines, et si, comme cela est pré- sumable, l'apparition du cratère d’éruption a été précé- dée du soulèvement du sol qui paraît avoir été à 5 à Go pieds au-dessous du niveau de la mer, il doit exister autour de l'île Julia une ceinture de rochers soulevés qui seraient le bord du cratère de soulèvement ; peut-être cette nouvelle disposition du fond est-elle la principale cause de la coloration particulière en vert-jaunätre des eaux de la mer à une assez grande distance de l’île, et des courans qui se manifestent autour, et qui n'existaient pas avant l'apparition du phénomène volcanique (r). x) Les figures 1 et 2 qui nous font voir les formes ef la structure de cc sol évidemment soulevé, moutrent en même temps une ressemblance frappante entre ce terrain meuble , ses pentes , ses dépressions , sa stra- tification inclinée, dont le parallélisme s’est conservé malgré la force vio- lente et perturbatrice de soulèvement, el des terrains solides strati- fiés, à pentes abruptes d’un côté, douces de l’autre, à dépression en ‘forme de bassin, qu’on observe dans des cantons d’une nature et d’une origine bien différente , tels sont le cap de Gibraltar , le creux du Van, la dent de Vaulion, dans le Jura, etc. Les observations et les figures faites par M. Constant Prévost ont donc déjà contribué à nous faire concevoir et admettre la réalité et la généralité de la théorie des soulèvemens. Les idées précises que la vue et l'étude de ce curieux phénomène géologique lui ont déjà données, vont le mettre à même d'observer avec plus d'intérêt et de fruit les différens terrains volcaniques , de cristallisation et de sédimens qui avoisinent le nouvel ilot . afin d’arriver à déterminer, s’il est possible, la liaison de cause et d’effet qui peuvent exister entre ce nouveau piton de soulève- ment et les divers terrains des pays qui l'entourent. L'Académie ayant senti l'intérêt de ces observations comparatives faites, pour ainsi dire, sous l'influence même d’une grande expérience géologique, a chargé M. Constant Prévost de les suivre et de leur donner toute l’étendue né- cessaire avant de revenir en France. Az. B. ( 113 ) Osservations sur le mode de fécondation des Orcndées et des CisTinÉEs ; Par M. Anozcpue BRONGNIART: (Lues à l’Académie des Sciences le 4 juillet 183r.) Dans un Mémoire que l’Académie a jugé digne du prix de physiologie expérimentale, en 1827, j'ai pré- senté les résultats d'observations assez nombreuses sur la structure et le mode d’action des divers organes qui concourent à l’acte de la fécondation et sur le dévelop- pement de l'embryon végétal. J'ai particulièrement cherché à déterminer comment le pollen agissait sur le stigmate , par quelle voie le fluide fécondant se portait du stigmate jusque dans l’ovule et sous quelle forme se montraient les premières traces de l'embryon. Les ob- servations que j'avais faites sur ce sujet me paraïissaient assez variées pour qu'on püût en déduire avec beaucoup de probabilité la manière dont ces phénomènes se pas- saient dans la plupart des végétaux , dans tous ceux du moins qui ne présentaient pas de ces modifications in- solites dans la structure de leurs organes reproducieurs les plus importans qui auraient pu faire supposer dans les phénomènes de la fécondation des différences notables. Les familles des Asclépiadées, des Orchidées et des Cistinées étaient du nombre de celles qui semblaient devoir s'éloigner, sous ce rapport, des plantes ordinaires, Jai dû chercher à étudier avec un soin particulier la structure de leurs organes et leur mode d'action. xx1v. — Octobre 1831. 8 (14) Cependant mes observations sur les Asclépiadées ne sont pas encore assez précises et assez nombreuses pour queje puisse les soumettre au jugementde l’Académie (1); mais celles sur les Orchidées et les Cistinées me parais- sent mériter de fixer quelques momens l'attention des savans, car en montrant comment s'opère la fécondation dans ces plantes, qui présentent des anomalies remar- quables dans leurs organes reproducteurs, elles prouvent combien les phénomènes de la reproduction s’opèrent d’une manière uniforme dans tout le règne végétal. Les Orchidées diffèrent de tous les autres groupes de plantes monocotylédones par la singulière structure de leur pollen. Sous le rapport de cet organe, on les a sou- vent comparées aux Asclépiadées ; mais , malgré quelque analogie de forme extérieure entre les masses polliniques des plantes de ces deux familles , il me paraît qu’il y a des différences essentielles dans la structure intime de ces masses polliniques. C’est sur les vraies Orchidées ( Orchis et Ophrys) et sur les Épipactidées (Epipactis et Neottia), qui crois= sent fréquemment dans nos environs, que j'ai fait des recherches sur le mode d’action du pollen sur le stig- mate et sur le mode de transmision du fluide pollinique aux ovules. (x) Depuis la lecture de ce Mémoire j’ai complété les recherches dont je m’occupais sur Le mode de fécondation dans les Æsclepias , et je suis arrivé à des résultats parfaitement clairs que je publierai mcessamment ; mais je n’ai pas pu, comme je le désirais, étendre ces observations à d’au- tres genres que les Asclepias et les Cynanchum, le peu de plantes appar- tenant à d’autres genres de cette famille qui fleurissent dans nos jardins n’y fructifiant presque jamais , et l'absence de la fécondation étant évi- demment dans ee cas la cause de leur stérilité. C5) Le pollen des Orchis (pl. v) fofme deux masses pé- dicellées en forme de massue, divisées en deux lobes et fixées par la base de leur pédicelle à l'extrémité infé- rieure de la loge de l’anthère. Chacune de ces masses est uné sorte de grappe com- posée de masses secondaires très - rapprochées , serrées et fixées le long d’un axe commun (4, fig. 3); enfin ces masses secondaires (P, fig. 2) sont elles-mêmes formées par la réunion de petits groupes (PB, fig. 3) composés de 3, 4 où 5 grains de pollen sphérique ; ce mode d’aggré- gation successif des grains de pollen qui n'avait pas été bien connu jusque dans ces derniérs temps, est cepen- dant représenté avec exactitude dans l’ouvrage récent de M. Lindley sur les Orchidées. Dans ces plantes les masses de pollen paraissent réster intactés à l’époque de la fécondation, et mème après; ce- peñdant si la masse de pollen vient à tomber tout entière sur le stigmate , ce qui arrive souvent, quelques-uns des grains sphériques qui composent les dernièrés masses ou même quelques-uns de ces aggrégats de 3 à 4 grains de pollen se séparent, se fixent sur le stigmate, et bientôt chacun de ces grains de pollen donne naissance à un tube membraneux (pl. v, B, fig. 4) qui pénètre dans le tissu du stigmate (pl. vr, fig. r, f). Ce tissu est formé d’utricules allongés, blancs, transparens, tout-à-fait libres, simplement unis par un liquide visqueux, et se séparant dès qu’on les met dans l’eau (pl. vr, fig. 2) ; c'est entre ces utricules , qui sont dirigés perpendiculai- rement à la surface du stigmate , que pénètrent les appen: dices tubuleux des grains de pollen. Le même phénomène a lieu dans les Orchidées de la ( 116 ) section des Épipactidées ; mais, dans ces plantes , le pollen a une structure très-différente : il est pulvérulent , formé de petites aggrégations de quatre grains de pollen sphériques qui restent toujours unis, et forment des grains composés (pl. vir, fig. 2). Lorsque ces grains sont tombés sur la surface du stigmate, ils donnent naïssance à des prolongemens tubuleux qui proviennent tantôt d’une seule des quatre vésicules qui composent chaque “ grain de pollen , tantôt de deux ou de trois de ces vési- cules (pl. vit, fig. 3, 4 et 5), absolument comme les tubes membraneux qui sortent de chacun desangles des grains de pollen des OEnothera ou de la Balsamine. Ces appendices tubuleux, qui sont très-allongés , pé- nètrent profondément dans le tissu du stigmate (pl. vu, fig. 1, f). On voit donc que le phénomène singulier de la pénétration des appendices tubuleux du pollen dans le tissu du stigmate n’est pas propre seulement à quel- ques végétaux , mais qu'il se retrouve même dans les plantes parmi lesquelles on aurait pu s'attendre à trouver. quelques exceptions, par suite de la structure singulière du pollen; je dois ajouter que, parmi les végétaux dont le pollen offre la structure habituelle, j’ai eu occasion d'observer très-fréquemment ce même phénomène, de- puis la publication de mon travail sur la génération des plantes, et je ne doute pas qu'on ne l’observe dans toutes les fleurs qu’on soumettra à un examen attentif. La structure de l'ovaire dans les Orchidées semblait offrir de nombreuses difficultés pour le transport du fluide fécondant jusqu’au mamelon d’imprégnation des ovules. En effet , cet ovaire est unilocalaire; les placentas forment trois lignes saillantes sur les parois, et chacun | (117) d'eux est divisé en deux lames qui portent à leur extré- mité les ovules (pl. 1x, fig. 1 et 2). Ces ovules, à l’é- poque de la floraison, ont l’orifice de leurs tégumens et leur mamelon d’imprégnation presque diamétralement opposés à leur point d'attache sur le placenta ; par con- séquent l'ovaire de ces plantes présentait uné structure presque semblable à celle que M. R. Brown avait signa- lée dans les Cistinées, et qu’il considérait comme difficile à concilier avec les idées qu’on pouvait se faire sur le mode de transmission du fluide fécondant. Cependant , en examinant avec attention la structure de l'ovaire dans les Orchidées , peu après la fécondation, au moment où les ovules doivent recevoir l’influence du fluidé fécondant , on découvre comment la communica- tion peut s'établir entre ces organes et le stigmate. Le tissu stigmatique se continue dans le centre de la co- Jonné qui constitue le style (pl. vi, fig. 1, g), et ce tissu arrivé au sommet de la cavité de l’ovaire se divise en trois faisceaux (pl. vir, fig. 1, g), qui correspondent à chacun des placentas (pl. vir, fig. 1, A). En s’éloignant du stigmate , ce tissu conducteur ne subit d’autre chan- gement que d’être formé d’ütricules beaucoup plus allongés et presque filiformes. Les trois faisceaux qu'il forme au sommet de l’ovairese partagent bientôt chacun en deux bandelettes qui se placent sur chaque côté des lames du placenta et qui , à cette époque du développe- ment de l'ovaire, sont simplement appliquées contre cette partie de ses parois sans lui adhérer aucunement. Ces deux sortes de bandelettes filamenteuses, planes, s'étendent donc le long de la base des placentas (pl. vu, fig. 1, e); mais les filamens très-ténus, flexibles et ( 118 ) blancs qui les constituent se replient diversement de manière à former sur le bord qui correspond aux ovules des sortes de festons qui, pénétrant entre les ovules (planche vi, fig. 1, e; fig. 2, a), paraissent souvent s'étendre jusqu’à leur mamelon d’imprégnation et mettre « ces parties en communication avec les bandelettes du « tissu conducteur et par son intermédiaire avec le stig- mate. Dans les Orchidées, le tissu conducteur est donc tout-à-fait séparé du placenta, et quoique appliqué contre lui , il n’en forme réellement pas partie. Cette disposi- tion rappelle, à quelques égards , celle des filets con- ducteurs des Caryophyllées , si bien décrits par M. Au- guste de St.-Hilaire , si ce n’est que dans ces plantes les filets sont unis plus intimement au tissu du placenta, quoiqu'’ils s’en distinguent par leur couleur et leur aspect et qu'ils puissent même souvent être séparés assez w facilement de la partie vasculaire de ces placentas, la seule qui donne réellement insertion aux ovules. En outre, dans ces plantes, les ovules étant moins nombreux , rangés régulièrement le long de ces filets conducteurs et l'ouverture des tégumens de chaque ovule correspondant directement à la surface du filet conduc- teur voisin , ces filets n’envoient pas entre les ovules ces sortes de franges qu’on observe dans les Orchidées ; maïs j'ai observé sur plusieurs Silénés que le point de ces filets qui correspond à chaque ovule présentait un cercle de petits poils, formés par de petits utricules allongés et redressés presque perpendiculairement à ces filets. C’est au milieu de ce cercle de poils lymphatiques que se trouve comme enchàssée l'extrémité de l’ovule qui n | Ai | | Il (119 ) présente l'ouverture par laquelle le fluide fécondant doit pénétrer. On voit que tout est disposé dans ces plantes pour rendre aussi immédiat que possible le contact entre le tissu conducteur qui vient du stigmate et la partie de l'ovule qui est dépourvue de ses enveloppes extérieures et qui correspond au point dans lequel l'embryon doit se développer. En général, une dissection faite avec soin et un examen attentif des points de la surface de lovaire qui répondent aux ouvertures des tégumens des ovules que cet ovaire renferme, montre toujours que le tissu con- ducteur s'étend du stigmate jusque dans ce point des parois de l'ovaire, et forme le plus souvent dans cet endroit, soit une papilie saillante qui s'applique contre l'orifice des tégumens, ou pénètre même dans cet orifice, soit une sorte de capsule qui embrasse cette partie de l’ovule. Si ce n’est pas par cette voie, par ce tissu particu- lier que l'influence du pollen, le fluide fécondant ou les granules spermatiques sont transportés du stigmate jusqu’à l’ovule; si, comme quelques savans le pensent, le pollen n’est même pas nécessaire pour déterminer le développement de l'embryon, on doit du moins con- venir qu'au milieu des modifications si nombreuses que présente l’organisation du pollen et du pistil, ces par- : ties sont toujours disposées de manière à établir une communication facile entre le point de la surface du pistil sur lequel le pollen répand la matière qu'il ren- ferme et le point de l'ovule dans lequel l’embryon se développe. Une famille de plantes paraissait cependant ( 120 ) offrir de grandes difficultés pour cette communication directe du fluide fécondant, du stigmate jusque dans l'intérieur de l’ovule par l’ouverture des tégumens de cet ovule , c'était celle des Cistinées, Voici ce que M. R. Brown disait, à cet égard, dans l'important Mémoire sur la structure de l'ovule, qu’il a publié en 1825 : « Dans plusieurs familles de plantes däns lesquelles le nucleus n’est pas réfléchi et dont les placentas sont polyspermes , comme dans les Cistinées , il est difficile de comprendre comment cette influence (l'influence du pollen ) peut atteindre son sommet (le sommet du nu- cleus) par l’extérieur, excepté par la supposition, qu’on ne doit pas se hâter d'admettre, d’une vapeur fécon- dante qui remplirait toute la cavité de l'ovaire, où par la séparation complète des tubes fécondans des placentas, ce que Je n'ai pas été capable cependant de découvrit dans ces cas: » (Page 22 et 23. ) La disposition singulière du tissu conducteur dans les Orchidées, et la généralité du contact du tissu conduc- teur avec le point de l’ovule où le nucleus se trouve à découvert me fit penser qu’on devait pourtant trouver quelque moyen de communication entre les ovules et lé stigmate , dans ces plantes comme dans toutes lès autres. La famille des Cistinées est essentiellement com posée des genres Ciste et Hélianthème ; les deux genres Lechea et Æludsonia , peu nombreux et rares , ne pouvaient pas ètre soumis à un examen anatomique convenable. Dans les Cistes, l'ovaire est à cinq loges , ‘et chaque - loge ne renferme généralement que quatre ovules. Dans les Hélianthèmes , l'ovaire est à une seule loge, et les Le Ve. Lane (x )) lovules, plus où moins nombreux , sont insérés le l6ng _de trois placentas pariétaux plus ou moins saillans et : formant quelquefois des cloisons incomplètes. Dans la plupart dé ces plantes, l’ouverture des tégu- mens de l’ovule est opposée au point d'attache de cet ovule sur son cordon ombilical. Cependant ce caractère, indiqué par M. Brown comme distinctif de cette famille, n’est pas sans exception, comme on va le voir. Dans toutes les espèces où on l’observe, et c’est le plus grand nombre, ces ovules sont portés sur un cordon ombilical beaucoup plus long que celui des ovules de la plupart des végétaux , et égalant à peu près la longueur de l’ovule lui-même , au moment de la fécondation. Dans les Cistes , les ovules , peu nombreux dans chacune des loges de l’ovaire, sont réfléchis sur leur cordon ombilical , de manière que l'ouverture des tégumens de l’ovule correspond à la surface des cloisons près de leur bord interne, le long duquel se trouve le placenta et que suit probablement le tissu conducteur. L'ouverture des tégumens de l’ovule se trouve ainsi rapprochée des pa- rois de l’ovaire, dans ces plantes comme dans la plupart des autres végétaux. Une disposition semblable a lieu dans plusieurs Hélianthèmes , où l'ovaire ; quoique uni- loculaire , présente des placentas pariétaux très-saillans qui portent les ovules; ces ovules ; fixés à l'extrémité d’un cordon ombilical assez long, sont généralement recourbés de manière que leur extrémité libre qui pré- sente l'ouverture des tégumens , est encore en contact avec les placentas qui sont continus par leur partie su- périeure avec le tissu conducteur de la base du style. Les ovules sont plus ou moins nombreux dans les di- (21) verses espèces qui présentent cette disposition ; ils sont en grand nombre (12 à 15) sur chaque placenta dans l’Æe- lianthemum halimifolium (pl. x, fig. 1), beaucoup moins nombreux dans les Æ/elianthemum vulgare, mutabile , pilosum , pulverulentum (pl. x, fig. 3). Dans ces dernières espèces, ils sont moins régulière- ment recourbés sur eux-mêmes et leur extrémité libre paraît souvent s'appliquer contre l’un des deux pla- centas voisins; enfin un certain nombre d’ovules ne touche par ce sommet à aucun des trois placentas ; mais aussi on remarque que, dans ces espèces où le contact des ovules avec les paroiïs de l'ovaire est beau- coup moins régulier, un grand nombre de ces ovules avorte , le fruit mür contient beaucoup moins de graines qu’il n’y avait d’ovules dans l’ovaire, et on trouve entre ces graines les restes des ovules avortés. Les Helianthemum lævipes et thymifolium présen- tent une modification de structure qui rapproche ces plantes du plus grand nombre des végétaux , et rend très- facile la communication du fluide fécondant. Dans ces espèces , chacun des trois placentas pariétaux ne porte que deux ovules attachés près du sommet de la cavité de l'ovaire et dont le cordon ombilical est très-court; mais dans ces ovules , l'ouverture des tégumens n’est pas op- posée au point d’attache de lPovule, elle en est très- rapprochée , et cette ouverture se prolonge en un petit tube qui s’applique exactement contre la base du style, dans le point où vient aboutir l'extrémité du tissu con- ducteur (pl. x, fig. 2, 3). J'ai toujours vu les six ovules de ces plantes se développer complètement. Où voit que dans toutes ces plantes de la famille des (391) Cistinées le point de l’ovule par lequel le fluide fécon- dant parait pénétrer, se trouve ramené en contact avec la partie des parois de l’ovaire que suit le tissu conduc- teur. Mais il est un dernier groupe de plantes du genre Hélianthème, dans lequel les ovules sont très-nom- breux , insérés sur des placentas pariétaux peu saillans , et dirigés perpendiculairement à ces placentas, sans être recourbés sur leurs cordons ombilicaux , de manière que les sommets des ovules, qui offrent l'ouverture des té- gumens , sont tous dirigés vers le milieu de la cavité de l'ovaire et bien éloignés de tous les points de la paroi interne de cette cavité (pl. xt, fig. 2). C’est dans ces espèces peu nombreuses, et dont je ci- terai pour exemple les Zelianthemum niloticum et ægyp- tiacum , que j'ai pu étudier sur des échantillons frais, que Ja communication directe du fluide fécondant pa- raïssait très-diflicile et semblait exiger l'admission d’une des deux hypothèses présentées par M. Brown. En effet , en examinant la cavité de l’oyaire dans ces plantes au moment où elles défleurissent, lorsque le stigmate est couvert de pollen et que la fécondation est opérée, on voit que de la base du style part un faisceau de filamens réunis entre eux vers leur base, libres à leur extrémité et qui sont interposés entre les sommets des ovules. Il est facile de s'assurer que ces filamens sont continus avec le tissu conducteur qui occupe le centre du style et ne sont réellement que ce tissu flottant au milieu de la cavité de l'ovaire ec subdivisé en nombreux | faisceaux et enfin en filamens isolés de manière à pou- voir porter le fluide fécondant jusqu’à tous les ovules. Comment cependant ces filamens se répandent -ils C3) dans cette cavité de manière à atteindre chacun des ovules? C’est ce que je ne saurais expliquer, car on con- çoit qu’en disséquant les ovaires de ces plantés, ces fila- mens libres et flottant dans cette cavité changent de posi- tion aussitôt que l'ovaire est ouvert , quelque soin qu’on puisse prendre pour conserver les parties dans leür po- sition naturelle. Il n’en est pas moins certain que ce mode de commu- nication du fluide fécondant est très-favorable à la fé- tondation, car, dans ces espèces, les ovules, quoique très-nombreux , parviennent presque tous à leur parfait développement , presque aucun n’avorte. On voit que, dans ces plañtes, le tissu ou plutôt les filamens conducteurs constituent un organe encore plus distinct du placenta (formé par les vaisseaux nourri- ciers ) que dans les Orchidées et les Caryophyllées ; mais que cependant il y a beaucoup d’analogie entre la ma- nière dont ces filamens se distribuent entre les ovules et la manière dont les franges qui naissent des bandelettes conductrices des Orchidées s’insinuent entre les masses d’ovules du placenta de ces plantes. L'examen des familles qui par la structure de leuf pollen ou de leur ovaire semblaient pouvoir présenter des exceptions au mode de fécondation et d’imprégnation que j'avais décrit dans mon premier travail sur ce sujet, n’a donc fait que confirmer ces premiers résultats et prouver combien il y a d’uniformité dans les phéno- mènes les plus importans de cette fonction. Quelle que soit la structure du pollen , on voit tou- Jours chacun des grains qui le composent donnér nais= sance à un long tube membraneux qui , pénétrant entre | ( 129) les utricules du stigmate, dépose dans le tissu de cet organe la matière contenue dans les grains de pollen ; on voit toujours ce tissu stigmatique, formé de longs utri- cules blancs lächement unis entre eux , se continuer dans le style, et, malgré toutes les modifications de structure que présente l'ovaire, arriver constamment en contact avec la partie de la surface de l’ovule où l’absence des membranes externes de cet organe permet facilement l'introduction de la matière fécondante jusque dans l’in- térieur de l’ovule. La manière dont l'influence du pollen se communique de l'extérieur du pistil jusque dans le point de l’intérieur de l’ovule où l’embryon doit se for- mer, paraîtrait donc être toujours la même dans tous les végétaux, quelles que soient les modifications diverses que présentent leurs organes reproducteurs mäles ou femelles. EXPLICATION DES PLANCHES. PI. v. Z. Structure du Pollen de Orchis bifolia , E. Fig. 1. Une des masses polliniques entière : on voit qu’elle est formée de deux masses ou grappes distinctes. Fig. 2. Quelques-unes des petites masses polliniques qui composent la masse générale , isolées avec Les tubes membraneux ct élastiques qui les supportent. Fig. 3. Portion de la masse pollinique divisée, montrant la manière dont les masses secondaires sont réunies sur les filamens centraux. PL. v. B. Structure du Pollen de l'Orchis latifolia, L. Fig. 1. Une des masses polliniques entière : elle est composée comme la précédente de deux masses principales formées elles-mêmes de plus petites masses polliniques. Fig. 2. Une des masses ou aggrégats polliniques de second ordre qui forment Les masses principales et qui sont unies par des filamens élas- tiques qui se séparent de leur base. ( 156 ) Fig. 3. Petits aggrégats de deux, trois, quatre où cinq grains de pollen qui forment , par leur réunion , les masses secondaires précédentes. Fig. 4. Grains de pollen isolés ou encore réunis deux ou trois ensemble, retirés de dessus le stigmate, et présentant un long tube membraneux qui pénétrait dans Le tissu du stigmate. PI. vr. Fig. 1. Coupe longitudinale passant par le milieu du labelle et de Pan- thère , du stigmate et du sommet de l'ovaire de lOrchis Latifolia. a. Base de l’anthère. b. Base de la division supérieure du périanthe. c. Base du labelle. d. Parois de l'ovaire. e. Surface de stigmate. f. Grains de pollen qui sont fixés à sa surface, et dont les appen- dices tubuleux pénètrent dans son tissu. g. Continuation du tissu du stigmate qui se divise pour accompa- guer les trois placenta pariétaux. Fig. 2. Utricules du tissu du stigmate et du tissu conducteur séparés na- turellement : les plus renflés viennent de la surface du stigmate ;1les plus étroîts et les plus allongés de la partie plus profonde du tissu con- ducteur. Fig. 3. Un grain de pollen retiré de la su:face du stigmate, et dont le tube membraneux est déjà un peu développé. PI. vrr. Fig. 1. Coupe longitudinale, passant par le milieu du labelle , du stig- mate, du gynostème et de la partie supérieure de l'ovaire de l’'Epi- pactis latifelia. aa. Tissu cellulaire extérieur du gynostème. b. Base de la division supérieure du périanthe. b'. Base du labelle. c. Portion postérieure du stigmate formée par le tissu cellulaire serré du gynostème. ddd. Surface du stigmate. ; e. Partie supérieure du stigmate à laquelle est fixé le sommet de la masse pollinique. ff. Grains de pollen fixés sur la surface du stigmate. g. Tissu conducteur faisant suite au tissu du stigmate et occupant le centre du gynostème. 1 } € k j (ax }r hh, Ge même tissu se séparant en trois bandelettes qui se bifarquent pour suivre les deux bords de chaque placenta. kk. Parois de l'ovaire. i. Commencement des ovules fixés sur les placenta pariétaux. 1, Base du court filament qui supporte l’anthère, Fig. 2. Un grain de pollen composé de cette même plante, retiré de l'an- thère. Fig. 3, 4 et 5. Grains de pollen retirés de dessus le stigmate, et dont plu- sieurs des vésicules composantes ont donné naissance à un tube mem- braneux plus ou moins long qui pénétrait le stigmate. PI. vrr. Placenta de l’£pipactis latifolia. Fig. 1. Coupe longitudinale d’un placenta passant entre les deux lames 5 P 5 P P de ce placenta (voyez la planche suivante) et montrant son bord externe. aaa. Parois de l’ovaire. bbb. Bord libre d’une des lames du placenta. cec. Ovules qui y sont fixés. d, Base du tissu conducteur au point où il se divise en trois bande- lettes qui accompagnent les placenta. eee. Une des bandelettes du tissu conducteur suivant le bord externe du placenta et dont les franges pénètrent entre les ovules. Fig. 2. Portion de cette bandelette de tissu conducteur isolée. aaa. Filamens reployés formant des sortes de franges qui pénètrent entre les ovules: Fig. 3. Quelques-uns de ces filamens cloisonnés grossis. PI. 1x, Coupes transversales des Placenta de l’Epipactis latifolia. Fig. 1. Esquisse d’une coupe transversale de l'ovaire pour montrer la position des trois placenta pariétaux à, Fig. 2. Coupe transversale d’un de ces placenta dans un ovaire aû mo- ment du commencement de la floraison. aa. Parois de Povaire. b. Faisceaux vasculaires (trachées) correspondant au placenta, mais ne se distribuant pas aux ovules, qui ne recoivent aucun vaisseau. cc. Les deux lames du placenta séparées jusqu’à la basé à cette époque et portant les oyules. dd, Ovyules. ( 128 ) ee. Coupe des deux bandelcttes de tissu conducteur qui accompa- gnent chaque lame du placenta. b Fig. 3. Coupe des mêmes parlies sur un ovaire plus avancé après la dé- floraison (fleurs inférieures d’une grappe dont les fleurs supérieures étaient parfaitement épanouies). Les mêmes lettres indiquent les mêmes organes. Fig. 4. Deux ovules plus grossis pris sur un ovaire au même degré de développement que le précédent. PIX: Fig. r. Coupe longitudinale du pistil de l’Æelianthemum halimifolium. aa. Graias de pollen répandus à la surface du stigmate et dont les appendices tubuleux pénètrent dans son tissu. bb. Tissu du stigmate formé d’utricules allongés , lächement unis entre eux. \ cc. Tissu cellulaire serré qui forme la partie externe du style. d. Tissu conducteur faisant suite au tissu du stigmate et occupant le centre du style. ce. Parois de lovaire. ff. Cloisons incomplètes qui supportent sur leur bord libre les ovules. gq. Ovules recourbés sur leur cordon ombilical et dont le micropyle est. le plus souvent rapproché du placenta. AA. Grains de pollen retirés de la surface du stigmate et pourvus de leur prolongement tubuleux. BB. Deux ovules détachés. Fig. 2. Coupe longitudinale du pistil de l'AHelianthemum lævipes. a. Stigmate. b. Style. cc. Parois de l'ovaire. d. Base de la cloison qui porte les ovules. ee. Les deux ovules qui sont fixés vers le sommet de cette cloison , et dont l’orifice des tégumens est prolongé en un petit bec qui corres= pond à La base du style et à l'extrémité du tissu conducteur. Fig. 3. Coupe d’un ovaire déjà très-développé. a. Stigmate flétri. b. Style. ec. Parois de l’ovaire. d, Cloison placentaire ( 129.) ee. Les deux ovules. Fig. 4. Un ovule jeune. a. Cordon ombilical. b. Chalaze. c. Perforaison des tégumens se prolongeant en un tube court. Fig. 5. Un ovule déjà très-developpé. Ù a. Cordon ombilical. b. Chalaze. c. Micropyle se prolongeant en une sorte de bec. PLxr. Fig. 1. Coupe longitudinale du pistil de l’Helianthemum niloticum. aa. Paroïs de l'ovaire. bb. Couche externe du style formé par un tissu cellulaire serré semblable à celui des parois de l’ovaire. : ; cc. Stigmate couvert de grains de pollen. É d. Tissu conducteur faisant suite au tissu du stigmate et occupant le centre du style. ce. Filamens qui font suite à ce tissu et qui flottent au milieu de la cavité de l'ovaire entre les extrémités des ovules. f. Base d’un des placenta pariétaux. gg. Ovules très-nombreux qui sont insérés perpendiculairement sur ce placenta. Fig. 2. Coupe transversale d’un ovaire de cette même plante. aaa. Parois de l'ovaire. bbb. Suture séparant les trois valves. ccc. Placenta occupant le milieu de ces trois valves. ddd. Ovules très-nombreux insérés perpendiculairement sur ces placenta. ‘ A. Un grain de pollen pris dans l’anthère. BB. Grains de pollen retirés de la surface du stigmate et présentant de longs appendices tubuleux. C. Une des papilles du stigmate soutenant plusieurs grains de pollen dont les prolongemens tubuleux descendent ie long de cette papille pour pénétrer dans le stigmate. D. Un des faisceaux filamenteux qui flottent dans la cavité de Povaire plus grossi, £E. Un des ovules isolé. ( 130 ) P. xir. Fig. r. Coupe du stigmate et du style de l’Helianthemum niloticurn . aa. Partie supérieure des parois de l’ovaire. bb. Tissu extérieur du style. cc. Stigmate. d. Tissu conducteur occupant le centre du style et faisant suite au tissu du stigmate. ee. Faisceaux de filamens qui sont continus avec le tissu conducteur du style et qui flottent entre les ovules. Fig. 2. Coupe du stigmate et du style de l’Heliantemum ægyptiacum : les lettres indiquent les mêmes parties que dans la figure précédente. Fig. 3. Coupe longitudinale de l'ovaire de l’Helianthemum vulgare. aa. Parois de l'ovaire. bb. Tissu extérieur du style. ec. Cloisons incomplètes qui portent les ovules. d. Tissu conducteur qui occupe le centre du style. ce. Ovules. De la Distribution par mois des Conceptions et des Naissances de l’homme (à) ; Par M. L. Vrrrermé. Nous aurions voulu que l’espace nous permit de reproduire en entier, ou du mojns de donner un extrait détaillé de l'important Mémoire de M. Villermé. Dans l’impossibilité où nous sommes de satisfaire à ce désir, nous nous bornerons à en faire connaître le résumé (2). (1) Considérée dans ses rapports avec les saisons, avec les climats, avec le retour périodique annuel des époques de travail et de repos, d’abondance et de rareté des vivres, et avec quelques institutions et coutumes sociales. (2) Ce Mémoire, de 103 pages, est imprimé dans les Annales d'Hy- ( 481) Ici, dit en terminant M. Villermé, se bornent les recherches que j'ai faites sur la distribution par mois des conceptions et des naïssances. Elles démontrent que l’un des problèmes les plus complexes est celui des causes qui exercent une influence sur notre fécondité. On en a d’ailleurs la preuve , quand on sait que, parmi ceux qui se sont occupés de ce sujet, les uns, voyant dans les lieux soumis à leurs observations la proportion des naissances augmenter vers le Midi, ou bien au contraire vers le Nord, ont conclu que c’est à l’action, sur notre économie , d’un soleil ardent, ou d’un cer- tain degré de froid , qu’il faut attribuer la différence ; et que les autres , frappés de ce qu’ils voyaient naître plus d’enfans dans Îles campagnes que dans les villes, dans celles-ci que dans celles-là , dans les pays vignobles que dans les pays arables, sur les montagnes que dans les plames , sur les côtes de la mer que dans les continens, elc., ont cru s'en rendre compte par une nourriture où entre abondamment le poisson , par un air particulier à tel ou tel site , etc. , etc. Mais ni les uns ni les autres n’ont pas assez étendu leurs recherches. S'ils s'étaient donné la peine de les multiplier davantage, de ras- sembler, de comparer les observations recueillies dans tous les lieux, ils auraient appris que, dans des pays parfaitement semblables sous un rapport quelconque, la distribution des naissances varie souvent beaucoup d’un endroit à un autre , ainsi que M. Benoïston de Château- neuf l’a très-bien établi (1), et que l’on peut à la fois, giène publique et de Médecine légale, dont M. Crochard est l’édi- teur, (1) Voyez Voice sur la Fécondité en Europe, au commencement (182) avec les résultats de deux localités d’une catégorie don- née , soutenir ou combattre la même opinion. Plusieurs de leurs assertions n'auraient jamais été émises , s'ils avaient connu la distribution par moïs des naissances , et s'ils avaient pu soupçonner les changemens que les mœurs d’un peuple où même la mesure de ses opinions religieuses y apportent; eli un mot , que ces opinions , ces mœurs, se trouvent écrites dans une semblable dis- tribution , et qu’il ne faut que savoir les y lire. Conclusions. Sans reproduire en particulier une seule des consé- quences auxquelles j'ai été conduit par l’examen des dif- férentes causes qui déterminent ou règlent la distribution par mois des conceptions et naissances, et sans avoir égard à l’ordre que j'ai suivi, je résume aïnsi mes conclusions les plus générales. 1°. Les circonstances que l’on voit coïncider avec la plus grande énergie de la fécondité, ou qui lui parais- sent être favorables , sont : Le retour du printemps, principalement la fin de cette saison et le commencement de l'été ; Les époques d’abondance des vivres , de la meilleure nourriture , et des fêtes, des réunions qui mettent les sexes en présence l’un de l’autre ; A un très-faible degré, les époques des mariages les plus nombreux ; du 19° siècle, lue à l'Académie des Sciences dans sa séance du 23 oc- tobre 1826 , insérée dans le Bulletin universel des Sciences de M. Fé- russac , sixième section , cahier de janvier 1827, p. 5 et suiv. (21850) À quoi il faut très-vraisemblablement ajouter, pour la femme , des rapprochemens pas trop fréquens avec Pautre sexe. 2°. Les circonstances qui sont, au contraire, défavo- rables à la fécondité, ou pendant la durée desquelles on compte le moins de fécondations, sont : La fin de l'été et le commencement de l'automne ; Les époques d’insalubrité, principalement celles des épidémies produites par des émanations marécageuses ( c'est mème par l’insalubrité en grande partie qu'il faut expliquer ce qui vient d’être dit de la fin de l'été et du commencement de l’automne ) ; Les époques de rareté des vivres, de difficulté de se les procurer, ou de mauvaise nourriture ; Les abstinences observées pendant le carème ; Et, à un degré extrèmement faible , les époques des mariages les moins nombreux. 3°. Enfin, ceux qui restent durant tout le cours de l’année dans des circonstances de nourriture, de tem- pérature, de salubrité , de communication avec l’autre sexe , etc. , qui varient peu , offrent une marche annuelle de leur fécondité plus égale que chez ceux pour lesquels ces circonstanees deviennent très-diflérentes à chaque saison. Voilà pourquoi , en général, du moins on doit le croire , la distribution des conceptions et des nais- sances varie moins d'un mois à l’autre pour les habitans des villes que pour ceux des campagnes. En d’autres termes, et pour résumer mes conclu- sions , les circonstances qui nous donnent de la vigueur, augmeutent notre fécondité ; et les circonstances qui ’ (134 ) nous affaiblissent, à plus forte raison celles qui altèrent ou ruinent notre santé, la diminuent, Néanmoins, on serait grandement dans l'erreur si l’on concluait que la santé règle seule les fécondations. Celles-ci dépendent encore , en faisant abstraction de ce que J'ai dit du carême, des travaux les plus pénibles, etc., de l’âge, et de plusieurs autres circonstances étrangères à notre objet actuel. On conçoit maintenant que la distribution par mois des conceptions , conséquemment des naissances, varie selon l'intensité et la combinaison très-variable des di- verses causes ou influences qui agissent sur cette distri- bution , et que celle-ci ne saurait être bien exactement la même dans deux endroits, ni dans deux années dif- férentes. Mais la tendance, qui surtout nous intéresse , se reproduit. Résultat de toutes les oscillations dues au hasard des lieux, du temps et des circonstances, cette tendance se manifeste toujours et partout, lorsqu'on l’examine attentivement , comme principalement déter- minée , en définitive, par une cause qui domine et masque , pour ainsi dire , toutes les autres. Nous avons vu que cette cause consiste dans la marche annuelle de la température , ou dans l'influence des diverses posi- tions du soleil par rapport à la terre. L'influence solaire sur le besoin de la propagation est donc le fait le plus général que démontrent mes recherches. Et pourtant les mois de juillet, août et septembre, qui sont les plus chauds, offrent, com- parés aux trois mois précédens, du moins dans tous nos climats, une diminution notable dans la force généra- irice. Y a-1-il, dans le retour du printemps , autre chose (2597) que là chaleur réunie à une lumière plus vive et à des jours plus longs , qui rauime la vie et la rend féconde ? L’aspect du rajeunissement de la nature n’y coniribue- t-il pas aussi par une influence morale ? On conçoit, en admettant cette hypothèse , pourquoi le nombre des conceptions diminue dans les pays chauds, lorsque le soleil a tout desséché, tout brülé à la surface de la terre; pourquoi dans nos climats cela s’observe principalement en automne lors de la chute des feuilles, ou quand la vie générale semble se retirer et s’affaiblir autour de nous; pourquoi l’amour occupe si peu les Lapons, et tant les Grecs , les Italiens ou les Espagnols; et pourquoi, au contraire, la faculté génératrice , le désir de s’y livrer, se développent par certains spec- tacles , par certaines réunions, qui rassemblent les deux sexes , quoique ces spectacles ou ces réunions aient ordi- nairement lieu en hiver. Faisons remarquer que l’époque annuelle de l’affai- blissement de la fécondité dans l'espèce humaine est précisément celle où plusieurs animaux manifestent leur fécondité avec le plus d'énergie. Aïnsi, chez nous, la brebis entre en chaleur dans ie mois de juillet, la vache en juillet et août, le cerf en août et septembre; et il en est de même, à ce qu'il paraît, des autres ruminans. Or, pour ces animaux , la saison d’abondance, de santé, de réplétion, de vigueur, c’est l'été. Ces circonstances prépareraient-elles ou détermineraient-elles , sinon tout- à-fait, du moins en très-grande partie, l’époque de leur rut ? Ce qui porterait à le croire, c’est que le loup, le re- nard, et les autres carnassiers de notre pays qui n’ont ( 586 jamais une nourriture plus facile ni plus abondante que pendant l'automne, entrent en chaleur depuis la fin de décembre jusques et compris le mois de février ; que certains oiseaux, la perdrix , par exemple, font une seconde ponte lors de la maturité des moissons, quand ils ont en plus grande quantité que jamais, les herbes, les graines et les insectes dont ils se nourrissent. Enfin, nous avons vu pour l’homme lui-même , le mois de dé- cembre, c’est-à-dire la saison de la meilleure nourri- ture, être marquée dans le nord de l’Europe , particu- lièrement en Suède , où ce même mois est encore celui du repos, et où d’ailleurs la chaumière du pauvre est aussi bien close et mieux chauffée que ne l’est chez nous le palais du riche ; nous avons vu, dis-je, le mois de décembre être marqué, dans le nord de l’Europe , par un très-grand nombre de conceptions. Mais, d’une autre part, le lièvre, quoique herbivore, se reproduit dans le mois de février, c’est-à-dire à l’épo- que de l’année où il est loin d’être dans l’état de réplé- tion qui résulte d’une abondante nourriture. Celle-ci, ni le soleil ne sauraient nous rendre compte d’un pareil fait ; il faut donc admettre une autre influence qui nous échappe , et quelle qu’elle soit, elle doit nous rendre circonspect dans l'évaluation des causes qui augmentent périodiquement notre fécondité ou la diminuent. Toutefois, les retours annuels de grande et de faible activité des organes de la génération chez l’homme, ou de leur réveil et de leur sommeil chez les animaux , ne dépendent évidemment que d’un petit nombre de cir- constances. Et s’il nous était donné de compter les nais- sances respectives de chacun des douze mois pour les CPU (197 ) peuples sauvages, comme nous les comptons pour les peuples civilisés , nous trouverions très-vraisembla- blement, pour les premiers comparés aux seconds, une énorme différence entre la saison du maximum et celle du minimum. La distribution comparative de la fécon- dité par mois dans les villes et dans les campagnes en serait déjà une preuve, sans les faits rappelés dans ces réflexions. On conçoit, et c’est par là que je veux terminer, on conçoit, dis-je, le parti que des époux qui désirent des enfans, par exemple, ceux dont le mari s’éloigne de sa femme une partie de l’année pour des raisons de com- merce ou d’autres intérêts, pourraient tirer de la con- naissance des époques les plus favorables à la fécon- dation. On conçoit encore que dans les pays qui ne sont pas assez peuplés, un gouvernement habile donnerait à ceux que, pour son service, il sépare de leurs femmes, des congés aux époques annuelles des fécondations les plus fréquentes , et qu'au contraire dans les pays assez peu- plés il préviendrait, autant qu’il serait en jui, le rap- prochement des sexes à ces mêmes époques. (138) Suite des Expériences sur la génération des Plantes ; Par Ca. Girovu pr Buzareinceues, Correspondant de l’Académie royale des Sciences. Jar communiqué à l’Académie les résultats que j'avais obtenus en 1827, 1828 et 1829, de mes expériences sur la génération des plantes. Je vais avoir l'honneur de l’entretenir d’autres résultats obtenus sur le même objet, en 1830 et1931. En octobre 1829, j'ai semé du chanvre, comptant qu'il germerait tout au moins au printemps de 1830, et qu'il parviendrait à parfaite maturité bien avant celui qu'on aurait semé, suivant l'usage, en cette dernière saison. J’attendais de cette expérience la solution de la question , si le chanvre non fécondé produit de la graine et de la graine susceptible de produire des sujets féconds. Personne ne s’avisant, en effet, de semer du chanvre en automne, et étant moi-même dans l'intention d’arracher tous les mâles du mien , avant la fleuraison , la frucüifi- cation de celui- ci n’eût pu être rapportée à du pollen charrié par l’atmosphère et eût été infailliblement le produit de la femelle seulement. Ce chanvre n’a germé qu’au commencement du prin- temps 1830. 158 pieds : 66 mâles , 90 femelles et 2 mo- noïques se sont conservés. J’ai arraché soigneusement les males et les monoïques aussitôt que j'ai pu les recon- naître et bien avant la fleuraison. Les femelles ont fleuri ( 139 ) en mai, époque à laquelle on sème ordinairement le chanvre; toutes leurs fleurs , sans exception, ont avorté. Les plantes avaient pris des formes insolites ; elles avaient poussé de longs rameaux et de larges feuilles dont plusieurs étaient soudées ensemble; les stigmates étaient grêles. Surpris de ce résultat, j'ai laissé ces fe- melles sur pied pour examiner ce qui adviendrait dans le courant de l’été. Elles ont subi une métamorphose vers la mi-juillet, époque de la fleuraison ordinaire du chanvre femelle semé au printemps. Ces sujets, en apparence monstrueux , ont pris insensiblement les formes ordinaires , ils se sont allongés; leurs rameaux sont devenus relativement plus couris ; ils ont fleuri une seconde fois, et oht produit du chenevis bien développé. Devais-je attribuer l'avortement de la première fleu- raison à l’absence totale du pollen dans l'atmosphère, ou bien aux habitudes contrariées de la plante ? Pour résoudre cette double question, j'ai semé de nouveau du chenevis, en octobre 1830; il a germé, comme le précédent, au commencement du printemps de 183r. J'ai laissé fleurir les mâles et n’en ai arraché aucun. Les femelles ont fleuri en mai, comme l’année précédente , et ont toutes avorté. Ce n’est donc pas à l'absence du pollen , mais bien aux habitudes du chanvre que doit être rapportée cette infécondité de sa floraison trop hâtive. On pourrait ètre tenté de l’attribuer au défaut d’une suffisante chaleur. Mais, outre que le chanvre vient dans les climats qui ne sont pas chauds, mon thermomètre est monté , en juin 1830 et 1831, à 27°.centigrades , et du chanvre semé à la fin de juillet 1820 m'a donné du bon chenevis en septembre suivant, C0) dont la plus haute température n’a été que de 26°, et dont la température moyenne a été bien inférieure à celle du mois de juin précédent. Il arrive souvent, d’ailleurs , qu'à l’époque de la fleuraison du chanvre, le temps est froid et pluvieux , sans que la récolte du chenevis en souffre. Plusieurs autres faits, en outre, prouvent qu'elles sont grandes les influences des habitudes sur la végétation des plantes. Du froment, par exemple, cueilli dans des lieux où la moisson ne se fait que vers la fin d'août , mürit plus tard, d’après mes observations , que celui qui a été cueilli dans des lieux où l’on moissonne vers Ja mi-juillet, quoique semés l’un et l’autre sous même température et mème exposition. Aïnsi l’expérience que je viens de rapporter n’a pu me servir à résoudre la question si le chanvre femelle peut produire , sans le concours du mâle, de la semence et de la semence féconde. Je passe à d’autres expériences. Après avoir divisé enttrois parties , en allant du som- met à la base, l'ensemble des épis rameux du chanvre provenant de mes expériences de 1829, j'ai pesé avec une balance très-sensible cent grains pris au hasard, de chacune de mes trois divisions. L'expérience a été ré- pétée sur deux qualités de chanvre , et a donné constam- ment le résultat suivant : le chenevis de la plus haute division a été moins pesant, et partant moins gros que celui de la suivante ou de la moyenne, et plus pesant que celui de la plus basse. La moyenne de ces rapports a été : 100 : 104 : 97. Ainsi, c’est le milieu de lépi qui produit les grains les plus gros et sa base les plus petits. (Cr41) Le chanvre de 1829, d’où j'ai extrait le chenevis semé en 1830, m'avait fourni quatre qualités de semence. 1° Chenevis non fécondé , ou censé tel, pendant deux générations ; 2° chenevis non fécondé, où censé tel, pendant une génération ; 3° sur ces deux premières qua- lités , chenevis fourni par les plus bas rameaux ; 4° che- nevis fécondé. Les deux premières qualités ont été sous- divisées, comme je l’ai déjà dit , chacune en trois autres, par une division des épis en trois parties; et les deux dernières , chacune en deux autres, par une division des épis en deux parties seulement. Ce qui m'a donné en tout dix qualités différentes de chenevis. Un premier semis a été fait le 2 avril 1830 ; il se com- posait des six premières qualités seulement. Un second semis a été fait le 19 du mème mois ; il se composait des dix qualités. ; J’ai obtenu de ces divers semis 14,001 sujets. J'en ai arraché successivement tous les mâles avant la floraison , ainsi que tous les pieds monoïques. Ces derniers , très- peu nombreux, surtout lorsque le chanvre est semé dru et point rameux , n'ont point été comptés. | Ce chanvre occupait la même partie du jardin que celni des expériences de 1827 et 1828; ainsi il a été éga- lement éloigné de toute chenevière, et protégé par une haute muraille contre les influences du pollen que pour- rait apporter le vent du couchant. Il était hâtif et a fleuri avant celui du voisinage. Celui du premier semis a fleuri avant celui du deuxième. Tous les mâles, je le répète, ont été arrachés avant la fleuraison. Cependant elle a été également féconde sur tous les points, et les résultats en (142) ont été en tout semblables à ceux d’autre chanvre semé à la fin de mai dans le même jardin, et dont je n’ai point détruit les mâles. Contre mon attente, le chenevis non fécondé ne m'a pas donné une plus grande quantité relative de femelles que le chenevis fécondé. Celui qui a été privé du mäle pendant deux générations ne m’en a pas donné plus que celui qui n’en a été privé que pendant une seule. Dois-je, puis-je supposer que la présence du mâle soit ici nécessaire à la fécondité de la femelle ? J'ai l’intime conviction du contraire. Il s'y montre même sans in- fluence sur les capacités des graines à produire un sexe plutôt que l’autre. Voici maintenant quel a été le résultat de la division de la semence. Je m’abstiens de lire les chiffres (voyez le tableau à la fin du Mémoire). 1°. Dans chacune des deux qualités de chanvre dont les épis ont été divisés en trois parties, celle du sommet a donné proportionnellement le plus de femelles, et celle du milieu le plus de mäles. 2°. Dans chacune des deux qualités de chanvre dont les épis ont été divisés en deux parties, celle du som- met a donné proportionnellement le plus de femelles et celle de la base le plus de mâles. 3°. Le chenevis des plus bas rameaux a donné pro- portionnellement le plus de mâles. 4°. Le chenevis fécondé a donné proportionnellement le plus de femelles. Mais ici les nombres sont trop petits pour qu'on en puisse déduire que c’est à la fécondation même que doit être rapportée la prédominance du sexe féminin. (143) 5°. Le chenevis le plus petit, ou celui qui provenait de la base de l'épi, a donné plus de femelles que le plus gros qui provenait du milieu , et moins que le moyen qui provenait du sommet. Chez le chanvre, comme chez les oiseaux et les mammifères , les germes les plus gros et les plus petits donnent spécialement des mâles , et les moyens des femelles. J'avais semé encore séparément du chenevis provenant des sujets les plus grèles. Ici le produit a offert une parfaite égalité numérique des sexes , tandis que le sexe féminin a prédominé dans tous les autres résultats. Ce dernier résultat, qui s'accorde avec celui qu'ont donné les plus bas rameaux, qui sont aussi les plus grèles, montre ou fait soupconner une autre analogie entre les plantes et les animaux où, dans une espèce donnée, les femelles les plus faibles sont aussi celles qui engendrent le plus de mâles. Les différences numériques des sexes que m'ont pré- sentées ces expériences sur le chanvre seraient, je dois le dire , trop petites pour qu’il füt permis d’en rien dé- duire, si elles ne concordaient avec celles que m'ont présentées tant mes expériences , déjà publiées, sur la même plante , que celles que j'ai encore faites sur d’au- tres plantes , et dont je vais avoir l'honneur d'entretenir l’Académie. Epinards. J'avais fait trois semis d’épinards en 1829. Dans deux , la graine avait été divisée , comme dans le chanvre, en trois qualités par des sections transversales sur la tige, en allant du sommet à la base. La troisième se composait (144) de grains provenus des plus petits rameaux , qui n'avaient été soumis à aucune division. Ils ont produit ensemble 1519 sujets. Dans l’un des deux premiers semis, la première des trois divisions a donné proportionnellement plus de fe- melles que les deux autres, et la deuxième plus que la troisième (1). Dans l’autre, la première des trois divi- sions a été un beau matin retournée et enfouie par les valets de la ferme qui n'avaient pas été prévenus, et le résultat en est nul. Mais la deuxième a encore donné proportionnellement plus de mâles que la troisième (2). Le troisième semis enfin, ou celui de la graine fournie par les plus petits rameaux , m'a donné proportionnel- lement plus de mâles que les deux autres (3). Le nombre relatif des mâles décroît donc ici, comme dans le chanvre , en allant de la base au sommet, etilest plus grand dans les plus petites tiges que dans les autres. J'avais eu le soin d’arracher, avant la fleuraison , les mâles de la récolte dont je viens de parler. J’ai semé la graine de cette même récolte en 1830. Celle des plus petits rameaux a été séparée de celle des autres tiges et semée à part. De ces deux semis, celui de la graine des plus petits rameaux m'a donné moins de femelles que de mâles , et l’autre plus de femelles que de mäles (4). (1) La première , 51 femelles et 57 mâles. Rapport :: 1000 : 1118. La deuxième , 55 femeiles et 78 mâles. Rapport :: 1000 : 1418. La troisième , 32 femelles et 52 mâles. Rapport :: 1000 : 1625. (2) La deuxième , 293 femelles et 367 mâles. Rapport : : 1000 : 1266. La troisième, 214 femelles et 281 mâles. Rapport :: 1000 : 1313. (3) 16 femelles et 23 mäles. Rapport :: 1000 : 1437. (4) L'un, 106 femelles et 109 mâles. Rapport :: 1000 : 1027; L’autre , 964 femelles et 941 mâles, Rapport : : 1000 : 975. (rx) . Cette récolte totale à fourni 2120 sujets. Il y à eu pro- portionnellement bien plus de femelles que dans celle de l’année précédente (1). Serait-ce parce que j'avais dé- truit les mâles de celle-ci? Je n'ose l’afirmer. Lycnide dioique. Après avoir, par des coupes transversales , partagé des capsules et des trophospermes de Lycnide dioïque, j'ai semé séparément , en 1830, la graine des deux divisions. Quelques sujets ont fleuri la même année; les autres, en plus grand nombre, n’ont fleuri qu'en 1831. La ré- colte totale en a fourni 1151. La partie supérieure du trophosperme m'a donné proportionneilement bien plus de femelles que la partie _ inférieure (2). Dans cette dernière se sont rencontrés 8 sujets androgynes ; il ne s’en est rencontré aucun dans la première. Cette expérience , dans laquelle la capacité de repro- duire des femelles s’est montrée près d’un tiers plus grande vers le sommet du trophosperme que vers la base, me paraît probante : il n’est guère vraisemblable qu'un pareil résultat soit l'effet du hasard. Je dois dire sur la Lycnide dicique, qu’en ayant semé de la graine , il y a quatre ans, à une des expositions les plus chaudes de mon jardin, j'y en ai trouvé depuis, (x) Récolte de 1830. — 661 femelles et 858 mâles. Rapport : : 1000 : 1208. Récolte de 1831. — 1070 femelles et 1050 mâles. Rapport :: 1000 : 981. (2) L’une a produit 257 femelles et 255 mâles. Rapport : : r000 : 992 ; L’autre a produit 265 femelles et 374 mâles, Rapport :: 1000:14rr. XXIV. 10 ( 146) tous les ans, quelques pieds dont la fleuraison a été de plusieurs jours plus hâtive que celle de la même plante dans les prés ou dans les champs du voisinage ; et qu'ayant supprimé les mâles avant l'épanouissement des fleurs , les femelles n’ont point été privées pour cela de la ca- pacité de produire de la graine féconde. De ces faits particuliers je ne déduis que ce qu'ils prouvent. Oseille sauvage. Après en avoir divisé les épis rameux en deux par- ties, comme dans les expériences précédentes, j’en ai semé séparément la graine en 1830. Celle du sommet de l’épi m'a donné, en 1831, proportionnellement bien plus de femelles que celle de la base (1). Le nombre total des sujets obtenus a été 239 , et celui des femelles presque double de celui des mâles (2). Résumé. Dans ces expériences longues et minutieuses sur en- viron 20,000 sujets, 1°. Le sommet , soit de l’épi , soit des trophospermes, a produit constamment plus de femelles que la base. 2°. Le sommet de l’épi du chanvre a produit plus de femelles que la base qui en a produit plus que le milieu. 3°. Les tiges les plus grèles tant du chanvre que de l’épinard ont donné le plus de mâles. 4°. Le chenevis de moyenne grosseur a fourni le plus de femelles. (x) L'une a donné 28 femelles et 12 mâles. Rapport : : 1000 : 428; L'autre, 122 femelles et 57 mâles. Rapport : : 1000 : 63r. (2) 150 femelles et 89 mâles. Rapport :: 1000 : 593. (147) 5°, La graine d'épinards non fécondée, ou censée telle, a donné plus de femelles que la graine fécondée. J'ai observé, dans toutes ces expériences, que la végé- tation suit l’ordre de l’inflorescence ; et dans celle sur le chanvre , que les semences les plus grosses produisent les plantes les plus grandes, tandis que les semences les plus petites produisent les plantes les plus petites. Elles m'ont fourni encore sur les rapports des sexes dans le règne végétal, d’autres observations qui font partie d’un mémoire spécial dont j'aurai l'honneur de donner lecture à l’Académie , si elle daigne me le per- mettre. TABLEAU des Expériences sur le Chanvre faites en 1830. Il a été divisé en quatre qualités, provenant : la 1°, de chenevis non fécondé pendant deux générations ; 2 F 1 la 2°, de chenevis non fécondé pendant une génération ; la 3°, de chenevis fourni par les plus bas rameaux seu- lement ; la 4°, de chenevis fécondé. Les deux premières qualités ont été divisées chacune en trois sections , selon les rapports de situation de la graine sur le trajet de l’épi. 1°° section : graine fournie par le sommet de l’épi ; 2° : graine fournie par le milieu; 3° : graine fournie par la base de l’épi. Les deux autres qualités n'ont été divisées qu’en deux sections : l’une (548) fournie par la moitié supérieure, l’autre par la moitié inférieure de l’épi. On a pesé cent grains pris au hasard dans chacune des sections des trois premières qualités. QUALITÉS , | SOMMET. | MILIEU. : TOTAL. ro des _ nombres 4 [EE et J D» a ds @ rapports. 2 3 : : es. « 225 me 1926 1998 100 10/ 94 *SNOILVAUASEO ..11000/1167 1000|1040! 1000]1037 870| 93312546 9511 97214370/4523!100| 04/99 .|i000!1072 1000| 1025] 1000|1035 3e qualite. Nombres. .| 352| 365 181| 178) 533 Rapport . .[1000|1042 1000| 98311000 5 100 4e qualité. Nombres..] 36| 42 0 LR) CI TRE .[1000|1166 1000|1154 1163 [1937/1901 1370! 1402]6878 pi .|1000| 1094 1000| 10231 1000|1035 RapporT sur un Mémoire de W. le docteur Vallot, de Dijon, intitulé : Notes sur plusieurs Végé- taux mentionnés par les voyageurs qui ont par- couru l'Afrique centrale ; ( Fait à l’Institut, dans sa séance du 26 septembre 1831.) Par M. Avucusre DE Saint-HiLairE, Membre de l'Institnt. Les différences qui existent entre la végétation de nos climats rigoureux et celle des contrées équinoxiales, où même de lazône detransition, sonttellementremarquables qu’elies ont toujours frappé les hommes même les plus rustiques. Le matelot nédans des régions septentrionales, qui visite les côtes situées sous les tropiques, ne peut se défendre d’un sentiment de surprise, lorsque, pour la pre- mière fois, il jerte les veux sur le majestueux palmierdont la cime aussi simple qu'élégante diffère tant de celle des arbres de nos forèts; et ce n’est jamais sans un enthou- siasme souvent mêlé d’un peu d’exagération que , de retour dans sa patrie, il entretient ses voisins casaniers des longues feuilles des Figuiers d’ Adam et de leurs immenses régimes. Les nombreuses gravures que nous avons sans cesse sous les yeux, et nos jardins eux-mêmes nous ont un peu familiarisés avec quelques-unes des formes végétales des pays les plus lointains ; mais quel dut être l’étonne- ment des premiers voyageurs, lorsque, ne retrouvant dans leurs souvenirs que l’image de la végétation mes- ( 150 ) quine du nord de l’Europe, ils parvenaient à ces rivages où des plantes gigantesques étalent tant de variété de pompe et d'élégance. Leur admiration s'est souvent peinte dans leurs écrits d’une manière pleine de charmes ; voulant communiquer à leurs lecteurs les impressions qu'ils ont reçues , et n'ayant point encore à leur dispo- sition de langage technique, ils empruntent des com- paraisons aussi naïves qu’expressives aux objets que dans leur pays natal ils avaient sans cesse sous les yeux; c’est à l’imagination qu'ils parlent, et si, comme cer- tains peintres, ils embellissent souvent les objets , ils ne les rendent pourtant point méconnaissables. Deux des plus illustres écrivains de notre siècle (Bernardin de Saint-Pierre et Châteaubriand) se sont plu à rendre hommage à ce genre de description qui prête tant d’in- térêt aux récits des anciens voyageurs et surtout des premiers missionnaires. Îl serait impossible , par exem- ple, de lire sans un plaisir extrème la charmante des- cription que le P. Vasconcellos fait de l’acajou et le ministre Lery du canindé, ce brillant ara auquel les naturalistes modernes ont si mal à propos , sur la foi de Marcgraff , appliqué le nom d’araruna. Aujourd’hui nous étudions toutes les parties des plantes avec l'exactitude la plus scrupuleuse ; nous exa- minons tout; nous faisons tout connaître; un poil, une glande, rien n'échappe à nos recherches. Le langage botanique manié par tant d’honimes habiles , les Linné, les Jussieu , les Desfontaine, les Kunth , a acquis une ri- gueur, une précision , telles que la même plante décrite par plusieurs botanistes également exercés, le serait à peu près dans les mêmes termes, et les bons modèles (aôre à sont devenus si nombreux , la route qu'il faut suivre a été tracée d'une manière tellement certaine, qu’aujour- d’hui, disons-le, parce que c’est la vérité , il n’est quel- quefois pas beaucoup plus difficile de bien décrire une plante qu'il ne l’est à un commis de remplir les blanes d’un passeport. Tout le monde sentira l’extrème utilité d'une langue technique aussi parfaite ; mais, comme l’a déjà fait observer M. de Candolle, le talent propre de l'écrivain a disparu dans ce style où tout est réglé d’a- vance , et l’on a vu, ajoute le même savant, des écri- vains sans génie faire des livres presque aussi bons que ceux des hommes supérieurs. Le style botanique ne peut plus avoir rien d’original ; il a perdu jusqu’à l’om- bre de l’individualité. [y a plus : nous indiquons succes- sivement avec le plus grand soin tous les caractères de la plante; nous fournissons les meilleurs moyens d'étude et de détermination; mais, au milieu de tant de dé- tails, l’ensemble échappe entièrement , et celui qui bit nos descriptions, si tant est qu'on puisse les lire, ue saurait se figurer l'espèce que nous cherchons à faire connaître , à moins qu'il n'ait eu l’occasion de voir un nombre prodigieux de formes végétales différentes. Les fanciens voyageurs et peut-être quelques-uns des modernes sont peintres ; nous sommes des descripteurs. Mais , si le style consacré par les botanistes a des in- convéniens qui tiennent à sa perfection même, il offre, entre autres avantages , celui d’être applicable à toutes les plantes , quelles que soient leurs formes, leurs dimen- sions et la classe où elles doivent entrer. Il n’en est pas ainsi du style pittoresque et un peu poétique des voya- geurs. Ce style s’adaptera bien sans doute aux végétaux (28e) dont les formes sont très-prononcées, à ceux dont le port remarquable peut laisser des souvenirs dans la mémoire des hommes les plus vulgaires. Mais il est une multitude de plantes qui n’ont ; pour ainsi dire, aucune physiono- mie à elles, et dont les formes indécises frappent peu l’imagination. Ces plantes, il faut le dire, les voyageurs étrangers à l’histoire naturelle ne savent plus les peindre; les descriptions qu’ils en font sont vagues, sans couleur, quelquefois même elles sont ridicules. Cependant il est arrivé maintes fois que les voyageurs ont donné des notons précieuses sur les usages et les propriétés des végétaux qu'ils avaient fait connaitre d’une manière si incomplète. Pour que ces notions ne soient point perdues, il est clair que les naturalistes doivent s'appliquer à découvrir quelles espèces les voya- geurs ont eu sous les yeux , et à faire la concordance des noms indiqués par ces derniers avec la nomenclature scientifique. Ce genre de travail est difficile, peu sédui- sant, et peut-être a-t-il été beaucoup trop négligé par les naturalistes modernes. Les maîtres de la science avaient pourtant donné l’exemple de ne point dédaigner de telles recherches. Notre illustre confrère, M. de Jus- + sieu, a toujours eu soin de noter les noms vulgaires des plantes qu’il trouvait indiquées dans les livres anciens et dans les écrits des auteurs modernes étrangers à l’his- toire naturelle ; il a tâché de rapporter ces noms à ceux admis par les botanisies , et il a consigné le résultat de ce travail dans le Dictionnaire des Sciences naturelles. Il sentait que, par ce moyen , il pouvait préserver quel- ques découvertes utiles d’une perte à peu près certaine; rendre plus vulgaire l'étude des végétaux, la rattachez (153) à des connaissances qui, pour être généralement répan- dues , ne sont pourtant point à mépriser, et enfin em- pècher la botanique de devenir uniquement la science de quelques adeptes. Ce que M. de Jussieu avait voulu faire pour l'ensemble des végétaux, M. le docteur Vallot l’a essayé pour quel- ques espèces particulières dans son travail intitulé: Votes relatives à plusieurs végétaux mentionnés par les voyageurs modernes dans l'Afrique centrale, travail sur lequel l’Académie m’a chargé de lui faire un rapport. Je m'’abstiendrai d'entrer dans tous les détails d’une con- cordance synonymique qui ne sauraient être saisis à une simple lecture ; mais je puis assurer l’Académie qu'ayant étudié avec un très-grand soin les notes de M. Vallot , jy ai trouvé tout à la fois de l'instruction et de la sagacité. Si l’auteur avait eu à sa disposition un plus grand nombre de livres, s’il avait pu consulter les herbiers qui se trouvent à Paris, et s’entretenir avec les bota- nistes qui habitent cette ville , il aurait sans doute évité quelques erreurs. Je lui aurais dit, par exemple, que l’Ochradenus dont j'ai fait l'analyse dans l’Herbier de M. Delile, est certainement une Résédacée et n’a de commun avec le Sodada decidua de Forskahl que quel- ques rapports de famille ; il eût appris de M. Perottet que l'arbre laiteux indiqué par Caillié comme croissant dans l’île St.-Louis du Sénégal , n’est point un Baquois, mais un Figuier; il eût appris encore que l’Euphorbiacée à écorce blanche dont on fait des haies au Sénégal, a déjà été décrite par M. de Jussieu le fils sous le nom d'Anthostema, et il aurait reconnu qu'il faut bien se Ca54) donner de garde de créer des espèces nouvelles sur quel- ques mots presque jetés au hasard. Mais lorsqu'on a tra- vaillé soi-mème dans les départemens, on sait combien de difficultés rencontrent ceux qui veulent s’y livrer à ’étude des sciences : pour être juste, il ne faut point leur reprocher quelques fautes inévitables; on doit au contraire applaudir à leurs efforts. Les données qu'offraient à M. Vailot les auteurs dont il a fait la concordance, étaient tellement faibles qu'on ne doit point s'étonner si , pour plusieurs plantes , il a émis son opinion avec toutes les formes du doute. Loin même de l’en blämer, je pense que plus souvent encore il aurait pu laisser voir quelque incertitude. Il est très- possible, par exemple , que le Foignié des Mandingues et le Gefolly de Ghraat soient le Zeff des Abyssins , c'est-à-dire le Poa abyssinica des botanistes; mais ne se pourrait-il pas aussi qu’il existàt dans les pays visités par Caillié et Denham une graminée qui, voisine peut- être du Zeff de l'Abyssinie, en fût néanmoins différente et dont les semences seraient employées aux mêmes usages. Je citerai encore un autre exemple. L'illustre Brown rapporte avec quelque doute l4uil d'Oudney au Ta- marix gallica. X sevait un peu étrange, il faut en con- venir, de dire de cette dernière plante, comme l’a fait Oudneyde son Attil,qu’elle est un arbre et donne de l'om- brage; mais parce que l’A4tlé des Égyptiens est un arbre, est-il done absolument nécessaire que l’_Æutil du Fezzan soit celui de l'Egypte. En Europe comme en Amérique, le vulgaire applique souvent le mème nom à des espèces distinctes ; Brown dont l’autorité a tant de poids, juge que les échantillons d'Oudney ressemblent extrêmement au TE ER a —— (:a55 ) Tamarix gallica, et, je dois l'avouer, je ne retrouve guère le fucies de cette dernière plante dans la figure de l’Atlé des Égyptens , publiée par Sonini de Manon- court; ne pourrait-il pas se faire qu'il existàt dans le Fezzan une espèce de Zamarix qui, avec des rameaux presque semblables à ceux du gallica, füt pourtant un arbre ; ainsi qu'en Amérique l’Ænacardium humile ASH, fort différent par les dimensions et par le port de l'occidentale, en a pourtant à peu près le feuillage. Des descriptions faites avec soin , de bonnes figures, la comparaison mème des échantillons laissent quelque- fois des doutes sur l’exactitude de certaines détermina- tions ; à plus forte raison doit-on bien rarement se con- tenter de quelques ressemblances de nomsetde propriétés, pour déclarer que deux plantes sont identiques. Après avoir comparé le Cissampelos Pareira des Antilles avec les descriptions que Marcgraff et Pison donnent de leur caapeba , l'immortel Linné les avait cru identiques; j'ai rapproché des échantillons recueillis au Brésil d’autres échantillons récoltés dans nos îles, et j'ai reconnu deux espèces entièrement différentes. M. Vallot lui-même me fournira un exemple du même genre. Il a fait preuve de sagacité en reconnaissant un Spondias dans le Cauza de Caillié ; mais ensuite il s’est trompé très-vraisemblable- ment , lorsqu'il dit que ce Spondias est le Monbin de l'Amérique , et cependant il avait pour lui l'autorité d’'Adanson qui cite pour le Sob du Sénégal probablement identique avec le Cauza, où du moins très-voisin de cette plante, un synonyme que je crois appartenir au Monbin du Nouveau-Monde. M. Perrotet, qui a voyagé en Amé- rique et au Sénégal, a bien trouvé plusieurs Spondias ( 140) dans cette dernière contrée, mais il n'y a point vu Île véritable Monbin. Au reste, sil existe dans le travail de M. Vallot quelques imperfections qu'il ne pouvait éviter dans la position où il se trouvait lorsqu'il'a écrit, il n’en est pas moins vrai que ce travail peut être considéré comme un indicateur très-utile pour ceux qui marcheront sur les traces de Caïllié, d'Oudney et de Denham ; il n’en est pas moins vrai que les naturalistes y trouveront de bons renseignemens et ne le liront point sans intérêt. Je pense donc que l’Académie peut encourager l’auteur à com- pléter ses notes sur les végétaux de l’intérieur de l’Afri- que et à se livrer à des recherches du mème genre pour les plantes de quelques autres parties du globe. Mémoire sur les Rapports des Sexes dans le règne végétal. (Lu à l’Académie des Sciences.) Par Ca. Grrou DE BuzAREINGUES, Correspondant de l’Académie royale des Sciences. Je vais avoir l’honneur de communiquer à l’Académie les observations, que je lui ai annoncées dans sa séance du 24 juillet dernier , sur les rapports des sexes dans le règne végétal. Il n'entre point dans mon dessein d’épuiser ce vaste sujet; mais de présenter quelques aperçus qui en indi- quent quelques lois. (197) Obligé de me servir de termes peu usités en botanique, pour exprimer mes idées , Je vais d'abord les définir. Me permettant d'introduire dans la physiologie végé- tale des expressions admises , tolérées du moins, dans la physiologie animale, j'appelle vie extérieure d’une plante sa puissance vitale qui préside aux évolutions de ses couches superficielles ; et wie intérieure, celle qui préside aux évolutions de ses couches profondes. Ces deux vies concourent ensemble à la formation de la plupart des organes végétaux; mais elles n’y concourent pas également. Les écailles, les feuilles, les aiguillons, les poils , les calices, les corolles , les étamines , appar- tiennent principalement à la vie’extérieure ; les tiges, les épines, les vrilles , les pistils , les semences, appar- tiennent principalement à la vie intérieure. Lorsque l’une des deux vies est dépensée spécialement, vers un point de la plante, dans une formation où elle prédomine, sa prédominance diminue, disparait même au-dessus de ce point où naissent d’autres organes dans lesquels l’autre vie prédomine. Mais celle-ci, en s’affai- blissant à son tour, dans ses propres formations , permet à la première de reprendre sa prédominance et de pro- duire des formations nouvelles ; ainsi de suite. Les rap- ports de ces deux vies sont très-variables; et les divers résultats de leurs diverses combinaisons très-nombreux. Lorsque la végétation d’une plante est luxuriante et rapide, elle produit spécialement des feuilles et des tiges : les zônes élémentaires de ses couches principales restent unies. Lorsqu'elle est affaiblie et lente , elle produit spé- cialement des fleurs : chacune de ces zônes fait son évo- lution séparée. Il y a perte ou affaiblissement de la vie ( #54, ) extérieure lorsque des fleurs mâles tiennent lieu de feuilles; ou de la vie intérieure lorsque des fleurs femelles üennent lieu de rameaux. Dans la prédominance de la vie extérieure, la force 1 AT végétative est spécialement dépensée en formations d’o- rigine superficielle ; la fibre vasculaire prédomine sur le tissu utriculaire, les feuilles sont petites, sessiles, ou dé- currentes, épaisses ou chargées de poils; l'écorce est velüe ou garnie d’aiguillons ; par son ampleur, elle rend quel- quefois la tige ailée; les rameaux peuvent êtrenombreux, parce que les feuilles sont nombreuses ; mais ils sont ou grèles ou rabougris. La végétation peut être hâtive ; maïs ses produits sont chétifs ou exigus. L'organisation super- ficielle est mieux représentée dans la fleur que l’organi- sation profonde, et si cette fleur est uni-sexuelle , élle appartient au sexé masculin. Dans la prédominance de la vie intérieure , la force de végétation est spécialement dépensée en formations d’origine profonde ; le tissu utriculaire est abondant, la tige est. lisse et élancée , la feuille est ample, glabre, son pétiole est fort et son limbe peu divisé ; les rameaux sont rares et allongés ; les couches internes sont mieux re- présentées dans la fleur que les couches superficielles ; et sielle est uni-sexuelle, elle appartient au sexe fé- minin. La vie intérieure est la base de la végétation générale. Si dans le Chanvre, l'Epinard , l’Oseille, Ortie, on compare le mâle à la femelle, on se convainera que la tige de l’un est fistuleuse ou tubulée, et à paroi très- mince ; tandis que celle de l’autre est pleine ou presque pleine : on verra chez le mâle une végétation hâtive , une à 4 ( 159 ) fleuraison précoce, des racines latérales nombreuses et un pivol grêle , des feuilles obéissant, en allant de bas en haut, aux lois d’une progression rapidement décrois- sante; des mérithalles courts, des pédoncules floraux en grand nombre et allongés , chargés d’une infinité de fleurs et tenant lieu de feuilles et de rarneaux. Chez la femelle , on rencontrera une végétation et une fleurai- son plus retardée, des racines latérales plus rares, mais plus fortes, ainsi que le pivot ; des feuilles, au pétiole plus gros et au limbe plus grand , soumises à un décrois- sement moins rapide, des mérithalles plus longs ; et enfin à l’aisselle des feuilles qui continuent de naître jusqu’au sommet , des rameaux terminés par des fleurs bien moins nombreuses. Dans ces plantes, et en général dans la diœcie , le mâle est bien plus petit que la fe- melle, 11 porte un bien plus grand nombre ou de ra- meaux ou de fleurs , et sa végétation demande moins d'humidité. Il est chez l’ortie mieux pourvu d’aiguillons que la femelle. Dans le Chanvre mâle, les feuilles naissent presque constamment opposées ; dans le Chanvre femelle, elles naissent en spirale vers le sommet de la tige. La Lycnide dioïque offre des particularités qui mon- trent clairement la prédominance de la vie extérieure chez le mâle et de la vie intérieure chez la femelle. On peut, presque toujours sans erreur, distinguer de loin les deux sexes de cette plante. Le mâlé est plus petit; ses rameaux sont plus nombreux et terminés par bien plus de fleurs. Ils forment des bifurcations dichotomes par l'avortement, au-dessus du point de leur naissance , de la tige qui les produit. Lorsque cet avortement n’a pas lieu, ( 160 ) cette tige devient , au-dessus de l’origine de ces rameaux, bien plus grêle qu'eux. Tandis que chez la femelle non- seulement cet avortement est très-rare, mais encore la tige médiane continue d’être plus forte que les rameaux et porte une plus grande capsule. Dans la Bryone blanche, chez le mâle les feuilles sont plus petites, vers le sommet surtout, mais plus nom- breuses et couvertes de poils, plus rudes et plus nom- breux; les fleurs sont plus hâtives et plus abondantes ; le pédoncule, la corolle et le calice sont plus grands que chez la femelle. Ces fleurs sont distribuées sur pres- que tout le trajet de la tige chez le mäle, et, presque exclusivement, vers ie sommet chez la femelle. Dans cette plante, la vrille avorte plus souvent chez la fe- melle que chez le mâle ; la puissance qui la produit s’é- puise ou s’affaiblit dans la formation des fleurs femelles. Le même fait a lieu chez d’autres plantes grimpantes et dioïques, dans la Zanone par exemple. Chez les plantes monoïques, on voit , dans les Amenta- cées , les fleurs femelles naître des bourgeons terminaux; et les fleurs mâles des bourgeons latéraux. Les unes sont accompagnées de feuilles ; les autres en sont souvent to- talement ou presque totalement privées : la vie exté- rieure y est alors employée à former les fleurs. Plus la végétation de la plante est lente, plus ces fleurs sont nombreuses et complètement privées de feuilles à leur base, comme on peut l’observer dans le Chêne, et sur- tout dans les vieux Chênes. | Dans l’Auine, les pédoncules des fleurs femelles sont la continuation directe de la tige; ceux des fleurs mâles en sont la continuation oblique. ( 161 ) Dans l’Erable commun, on trouve des sujets qui ne portent que des fleurs mâles, d’autres qui ne portent + que des fleurs femelles, d’autres enfin qui portent à la fois des fleurs mâles et des fleurs femelles. Les premiers ont le plus de rameaux, sont les plus hérissés. Leurs feuilles sont petites, minces, bosselées , chiffonnées, profondément lobées et d’un vert foncé. Elles sont en grand nombre; leurs pédicelles sont allongés et leur bouquet corymbiforme est lâche et étalé. Les se- conds ont les rameaux moins nombreux, mais de plus belle venue, les feuilles plus planes, plus glabres, moins profondement lobées et moins foncées que les précédens. Si dans les fleurs de ceux-ci on rencontre des étamines , l’anthère en est sessile. Les troisièmes tiennent le milieu , entre les deux premiers : les fleurs femelles s’y rencon- trent sur la prolongation directe de la tige et les fleurs mâles sur ses rameaux latéraux. Les premières sont d'autant plus nombreuses qu’on approche davantage de la tige principale ou médiane. Dans chaque groupe, les fleurs les plus centrales, ou les plus parallèles à la di- rection de l'axe de la tige , appartiennent au sexe fémi- nin ; et les plus excentriques , ou obliques à cet axe , au sexe masculin. Le pédicelle de celles-ci est plus long que celui des autres. Le filet des étamines est d’autant plus allongé que l'avortement du pistil est plus complet. Dans les Pins, la tige semble se partager entre les fleurs mâles et les fleurs femelles. Les pédoncules des uné$ et des autres semblent naître sur un méme plan perpendiculaire à l’axe de la tige ; et, comme le cône qui porte les fleurs femelles se dirige de haut enthas, tandis que l’épi des fleurs mâles se dirige de bas en haut, mème XXIV, î II (1621) lorsque l'extrémité du rameau où il a pris naissance a une direction contraire , on croit d’abord rencontrer iei une anomalie; mais elle n’est pas réelle; car, comme ailleurs, la fleur femelle appartient aux couches profon- des et la fleur mâle aux couches superficielles. La diffé- rence des deux directions du cône et de l’épi annoncerait= elle que ces deux formations sont électrisées différem- ment ? Je me résous par cette question. Il m'a paru que la direction du cône cessait d’être constante , M: un épi cessait de l'accompagner. Dans le Frêne dioïque, le mâle fleurit plus tôt que la femelle ; il est moins haut ; ses rameaux sont plus horizontaux et plus nombreux ; ses feuilles moins larges. Les menuisiers en préfèrent le bois à celui de la femelle, parce qu’il est souple, tandis que celui-ci est cassant. Dans la Pimprenelle, les rameaux sont ordinairement plus pleins et plus forts que la continuation directe et supérieure de la tige qui leur donne naissance. Ils s’élè- vent verticalement, tandis que celle-ci s’infléchit pour devenir oblique à sa direction première, et souvent ils la dépassent en hauteur. Ici, les sujets de belle venue et pourvus de grandes feuilles sont exclusivement femelles ; les sujets grèles à feuilles très-petites sont exclusive- ment mâles. Ceux qui tiennent le milieu entre les pré- cédens sont monoïques; et à l'inverse de l’Erable, leurs fleurs mâles sont constamment, sur le prolongement et au sommet de sa tige principale, devenues obliques ; et les fleurs femelles , presque toujours , sur ses rameaux devenus verticaux. Celles-ci naissent à laisselle des feuilles ; les autres en tiennent lieu. Le sujet qui produit beaucoup de feuilles ne porte guère de fleurs mâles ; ( 163 ) celui qui ne produit presque pas de feuillesn’en porte guère de femelles. J’ai rencontré un sujet garni, contre l'ordinaire, de fleurs mâles tout le long de la tige. II n'avait pas une seule feuille. Lorsque le même glomérule porte des fleurs mâles et des fleurs femelles, celles-ci naissent au-dessus des au- tres. Plus les tiges sont obliques , plus est grand relati- vement le nombre des fleurs mâles; leur capacité pour la production des mâles augmente aussi par la torsion. Chez les monocotylédones monoïques, les choses se passent le plus souvent, à peu près, comme dans la Pimprénelle. Prenons le Maïs pour exemple. Ses gros rameaux forcent à se dévier un peu de sa direction la tige principale, qui ne redevient verticale au-dessus de chaque rameau, qu’à la hauteur du milieu de lépi, parce qu'elle est alors poussée par le développement du rameau opposé qui la rend oblique à son tour. Ainsi, tandis que chaque rameau croît verticalement, la tige principale croît en zigzag comme le rachis d’un épi du Froment. La végétation du rameau est ralentie par l’en- veloppe qu’il recoit de la feuille engaînante à l’aisselle de laquelle il est né ; et la force végétative de ses couches superficielles s’épuise à former les nombreuses feuilles qui enveloppent immédiatement l’épi qui le termine, lequel ne porte que des fleurs femelles. La chose conti- nuc d’être ainsi, jusqu’à ce que les couches les plus in- ternes de la plante se sont épuisées à former les épis fé- minins qui naissent alternativement sur deux côtés op- posés de la tige dont le sommet , quoique cylindrique, n'est plus réellement que la continuation des couches ( r64 ) superficielles du collet, et ne peut produire que la pani- cule terminale d’épis masculins. Dans les monoïques monocotylédones dont les feuilles sont radicales , les femelles occupent aussi la partie in- férieure de la hampe. Mais il n’en est plus de mème lors- que les feuilles naissent le long de la tige et sont pétio- lées ou rares , et éloignées de la panicule ou de l’épi. Dans l'Olyre, graminée de l'Amérique méridionale dont les feuilles sont pétiolées, les fleurs mâles sont situées vers le bas et les fleurs femelles vers le haut. Chez l'Houlque, plante polygame dont les fleurs sont disposées en épis paniculés, les mâles naissent près de la base et au-dessous des fleurs androgynes qui occupent le centre de chaque épillet. Il en est de même chez le Barbon , autre graminée polygame. Dans le Mabier, plante dicotylédone de la Guiane, les fleurs femelles naissent au-dessous des fleurs mâles ; et cependant elles ne naissent pas à l’aisselle des feuilles. Mais, si lon y prend garde, on remarquera que c’est parce que les feuilles avortent : car le pédoncule de cha- que fleur femelle est accompagné des deux stipules qui, plus bas, accompagnent les feuilles ( voyez planche 753 des Illustrations de Lamarck). Ici, c’est au-dessus des fleurs femelles seulement, et par suite de l’épuisement des couches internes employées à leur formation , que la vie extérieure devient prédominante à son tour. Chez les Radiées, la force végétative des couches su- perficielles s’épuise d’abord en partie dans la formation du calice commun, et ensuite dans celle de la corolle allongée des demi-fleurons qui sont femelles , à cause, (1660 sans doute de cet épuisement de la force qui eût pu for- mer des étamines. Dans ces plantes , le phorante est un disque convexe sur les bords duquel , comme on peut s’en assurer par une coupe verticale , est réunie la plus grande somme de substance utriculaire, laquelle diminue à mesure qu’on approche du point culminant de la con- vexité , où prédomine le tissu cortical. Or, c’est en effet au bord du disque que naissent les femelles : viennent ensuite les androgynes auxquelles sont inscrits les mâles, lorsqu'il y en a , comme dans le Souci. Dans la Figue , une forme contraire du réceptacle est accompagnée d’une distribution inverse des sexes. Dans les Radiées qui, comme le Tournesol, ont le phorante plane , les demi-fleurons deviennent stériles. Dans les Flosculeuses dont le phorante est plane et charnu et toutes les fleurs semblables , elles sont toutes herma- phrodites. Dans Fa Lampourde et l’Ambrosie, les sexes sont autre- ment distribués que dans le Figuier; et cette distribution s’y rapproche de celle qu’offrent les Astères ou les Mar- guerites , en ce sens que , placés au haut de la tige, les mäles semblent en occuper les couches centrales ; mais, dans la réalité , ici comme dans certaines Synanthérées, ces couches sont employées à former les fleurs femelles qui y tiennent lieu de rameaux : il en est de même dans plusieurs Euphorbes. Dans la Ricinelle, l’une d'elles, la vie extérieure con- serve , au-dessus des fleurs femelles et jusqu’au haut de la tige, sa prédominance sur la vie intérieure, comme on peut en juger par la production des feuilles qui se continue au-dessus même des fleurs mâles. On observera ( 466 ÿ} : : en outre qu'ici, les fleurs femelles sont accompagnées de bractées involucriformes bien plus grandes que celles qui accompagnent les fleurs mâles, et que c’est à former ces bractées qu'est dépensée dans le bas de la tige la puissance végétative des couches superficielles. Dans le Mancenillier aussi, les mâles naissent sur des points plus élevés que les femelles. Mais ils sortent sur les parties latérales des vieux bois, tandis qu’elles termi- nent les jeunes rameaux. Dans le Ricin cependant, et dans un bien grand nombre d’autres Euphorbes , les fleurs femelles sont situées vers le haut de la tige ou placées au centre des fleurs mâles : cette dernière disposition est remarquable dans l’Eu- phorbe chargée de papilles, où les fleurs mâles , au nom- bre de vingt-cinq, sont disposées autour d’une fleur femelle unique et centrale ( Flore du Brésil ). Dans l'Hernandier (laurinée) , la fleur mâle a un seul calice ; la fleur femelle en a deux. Elles naissent trois ensemble dans l’aisselie des feuilles : celle du centre est sessile et femelle ( Illust. de Lam. 955 ). Dans les diverses espèces d’un même genre, les fleurs femelles sont inférieures ou supérieures aux fleurs mà- les, suivant qu’elles naissent ensemble aux aisselles des feuilles, comme dans la Zizanie flottante , ou qu’elles ap- partiennent à une panicule terminale, comme dans Ja Zizanie des marais: dans cette dernière plante les fleurs mâles sont en panicule ouverte et les fleurs femelles:en épi. Le Theligonum ynocrambe, dont M: le professeur Delille a donné une bonne. description très-détaillée , nous offre un excellent sujet d'observations. ( 167 ) Dans la partie inférieure de sa tige, les feuilles sont opposées. À l’aisselle de chacune d'elles naît d'abord un rameau, et plus haut des fleurs femelles accompagnées d’une bractée qui les sépare de la tige, de feuilles flora- les grandes et pétiolées, et d’écailles qui font office de stipules. Plus haut encore, les feuilles deviennent al- ternes. À leur aisselle naissent toujours des fleurs fe- melles ; des fleurs mâles tiennent lieu de la feuille op- posée. Plus on s'élève , plus les feuilles florales et leurs stipules deviennent exiguës; les fleurs mâles en sont totalement privées. Il suflit d’avoir dit que les feuilles sont devenues al- ternes , qu’à leur aisselle ne naissent que des fleurs fe- melles et que des fleurs mâles tiennent lieu de la feuille opposée, pour qu'il soit inutile d'ajouter que les fleurs femelles et les fleurs males sont aussi aliernes et qu'un groupe des unes succède à un groupe des autres sur la mème ligne. Plus on approche du haut de la tige, plus le nombre des étamines décroit. La marche de la végétation , sous l'influence alterna- tive de chacune des deux vies, se dessine bien dans cette plante. Près du collet, elles produisent ensemble des feuilles et des rameaux allongés. Mais la vie intérieure, plus af- faiblie que la vie extérieure par cette dernière production, ne peut former au-dessus de ces rameaux que des fieurs femelles , d’abord opposées et ensuite alternes ; tandis que la vie extérieure peut encore fournir d’abord à des feuilles opposées , à des feuilles florales , à des stipules, à des calices ; mais, bientôt affaiblie à son tour par ces nombreuses formations , elle ne produit plus que des ( 168 }) feuilles alternes , et des fleurs mâles en remplacement soit de la feuille avortée, soit du surplus des organes foliacés qui l’accompagnent. La marche de la végétation , à laquelle cette vie préside, est-elle ralentie, sur une même ligne, par ses productions foliacées ? elle ne forme plus que des fleurs mâles seulement; est-elle restaurée ? elle forme de nouveau des feuilles. Lorsque les deux sexes naissent séparés à l’aisselle d’une même feuille, la femelle est située à l’aisselle du pédoncule qui porte le mâle : comme ; par exemple, dans la Tragie (euphorbiacée), la Tonine, la Zanichelle. Le Phare, graminée, semble s’éloigner de cette loi ; mais ici le pédoncule de la fleur mâle est une continua- tion de la couche superficielle de celui de la femelle et non de la tige (voyez la planche 769 des Illustrations de Lamarck). Dans cette plante, la partie inférieure du chaume produit des fleurs femelles unies à des fleurs mà- les, et la partie supérieure des fleurs femelles seulement. Dans le Sicyos, plante grimpante , sortent du même nœud , des fleurs femelles ensemble avec une vrille d’un côté, et des fleurs màles ensemble avec une feuille de l’autre. Et sur une mème ligne, ou d’un même côté, naissent alternativement l'appareil masculin et l'appareil féminin. Or, la vrille, comme la fleur femelle, appartient aux couches profondes : elle n’est qu’une tige où sont en défaut les couches superficielles du tronc qui la four- nit. Dans la plante qui nous occupe, c’est plutôt à côté qu’à l’aisselle des feuilles que naissent les fleurs mâles ; c'est plutôt à côté qu’à l’aisselle des vrilles que naissent les fleurs femelles. Dans les fleurs androgynes , les organes féminins sont inscrits aux organes masculins. C’est donc toujours aux ( 169 ) dépens des couches profondes que se forment les uns ; et aux dépens des couches superficielles que se forment les autres. Il serait trop long, trop pénible, trop difficile peut-être, de résoudre toutes les apparentes anomalies : j'en ai dit assez pour montrer qu'elles ne doivent pas empêcher de considérer la loi que je viens de proclamer comme générale. Toute couche est divisible , au moins par la pensée, en trois zônes, l’une superficielle ou externe, l’autre mé- diane, la troisième profonde ou interne. On peut faire cette division tout aussi bien sur les couches nouvelles de l'écorce que sur celles du système central. On peut donc voir dans toute fleur de dicotylédone , au moins six zônes possibles, dont l’évolution paisible et lente peut produire six organes différens. Appelons périanthe ou périgone l'organe où prédomine la zône superficielle de l’écorce ; étamine celui où prédomine sa zône médiane ; pollen ce- lui où prédomine sa zône profonde ; pistil celui où pré- domine la zône superficielle du système central ; ovule celui où prédomine sa zône moyenne; embryon celui où prédomine sa zône profonde (1). Plus est profonde la zôue à laquelle appartient spécia- lement un organe, plus complètement la plante y est représentée ; parce que toute zône entraine nécessaire- ment avec elle, dans son évolution, les zônes qui lui sont circonscrites et non toutes celles qui lui sont inscrites. Donc l’étamine représente spécialement la vie exté- (1) Linné avait dejà voulu attribuer l’origine des divers organes de la fleur à des couches différentes du pédoncule ; mais on a reconnu depuis, par une anatomie plus exacte, que tous les organes de la fleur tiraient également leur origine des diverses couches de ce pédoucule, Rép. (370) rieure ; et l'embryon la vie intérieure; et de tous les organes floraux, l'embryon est le seul dans lequel toute la plante puisse être complètement représentée. Il peut la représenter de plusieurs manières, selon les rapports des zûnes quiconcourent à sa formation. Mais, puisqu'il la représente tout entière, s’il arrive que les zônes repré- sentées y soient entre elles à peu près sous les mêmes rapports que dans la plante, il peut en ce cas, comme le bourgeon dont il devient l’image, la reproduire à lui seul. Mais il ne le peut que sous cette condition. Dans les fleurs androgynes , chaque zône a sa repré- sentation, et doit, par conséquent ; être bien faiblement représentée dans les autres. Ce n’est donc que par le pollen que la représentation de la vie extérieure peut ici s'unir, dans l'embryon, à celle de la vie intérieure ; et que cette formation centrale peut réunir en elle les deux grandes conditions de la vie. Aussi n’a-t-on pu jamais obtenir des semences fécondes des plantes à fleurs an- drogynes dont on avait supprimé les étamines. Dans les plantes uni-sexuelles , ilen est autrement. Un des deux organes a avorté; et la zône qui en eût été la base doit ou peut être notablement impliquée dans un des autres : la zône fondamentale de l’étamine , par exemple, dans le pisul , si elle n’est déjà soudée avec la corolle, et par cette voie, les représentations de la vie extérieure peuvent s’unir à celles de la vie intérieure. Je ferai remarquer que, chez les exogènes , l'absence | du calice ou de la corolle est aussi fréquente dans les fleurs uni-sexuées, qu'elle estrare dans les plantes à fleurs androgynes ; que parmi les apétalées à fleurs androgynes, les rois quarts sont ou épistaminées ou péristaminées ; que dans les familles appartenant à la classe des apéta- Cagr ) lées péristaminées , qui forme à elle seule la très-grande partie de la division des dicotylédones apétalées , on trouve beaucoup de genres on beaucoup d'espèces à fleurs uni-sexuées ; et que s’il était permis de juger des affinités , lorsque les fleurs sont incomplètes , d’après des caractères étrangers aux rapports d'insertion des organes floraux , il y en aurait beaucoup entre la plupart des diclines et des apétalées à fleurs épistaminées ou pérista- minées; d'où il serait peut-être rationnel de présumer que c’est par leur tendance à la soudure des organes floraux , et surtout de l'étamine avec le pistil, que bien des diclines ont acquis la forme qui les distingue. Cependant , l'organe qui résulte de l’union de deux organes peut posséder les attributs de ses composans. Il ne serait donc pas surprenant que dans la diœcie, et même dans la monœcie, il y eût des plantes susceptibles de se reproduire sans le concours du mâle. Ce n’est pas la poussière que nous appelons pollen qui féconde ; maïs la liqueur contenue dans ses globules, ou plutôt l’être fécondant qui nage dans cette liqueur: or, savons-nous si cet être qui représente la vie exté- rieure ; ne peut exister en l’absence du pollen , ou si le pollen en est l’unique véhicule? Ce qui se passe dans plusieurs Cryptogames ne doit-il nous donner aucun doute là-dessus ? Quoï qu'il en soit, je ferai observer 1° que, chez la femelle du Chanvre, le volume des stigmates invite à pen- ser que plusieurs zônes élémentaires y sont représentées ; 2° que: si le pistil est grêle , et il le devient dans toutes les circonstances où la vie extérieure de la femelle du Chanvre s'épuise en productions latérales ou foliacées , (172) elle est stérile ; 3° qu'il peut y avoir capacité de repro- duction dans cette plante, puisqu’en certaines circons- tances elle se montre monoïque ou polygame. Cependant, de ce que les femelles des plantes qui ren- ferment en elles une puissance masculine qui souvent de- vient patente, peuvent se reproduire sans le concours du màle , serait-on admis à conclure que celles qui, comme la femelle du Dattier, se montrent toujours uni-sexuelles, doivent aussi jouir de la même faculté? ou pourrait-on déduire de la constante marche de la reproduction, sous des rapports constamment les mêmes, une pareille con- stance sous des rapports mobiles et fugitifs ? Non sans doute. Les faits me prouvent que le Chanvre est susceptible de se reproduire sans le concours du mâle. Je trouve en lui des conditions particulières qui le distinguent d’au- tres plantes dioïques dont la femelle n’a pas la même capacité, et qui expliquent cette apparente anomalie : je n’ai donc aucune raison de la révoquer en doute. Mais ce serait , je pense , manquer aux règles d’une saine déduc- tion que de conclure l’analogie des effets en l'absence de celle des causes. Spallanzani n’a pu obtenir de la Mer- curiale des jardins le résultat qu’il avait obtenu du Chanvre, c’est-à-dire une semence fertile sans le con- cours du mâle : or, je n’ai jamais vu que cette Mercuriale si commune, passät, comme le Chanvre, de la diœcie à la monœcie, ou à la polygamie. Elle est, si je ne me trompe, comme le Dattier constamment dioïque. De ce que quelques pieds de Chanvre femelle, cului- vés séparément el avec grand soin , n’ont pas produit de la graine, ou de la graine fertile en l'absence du mâle, (173) on a cru pouvoir déduire, malgré d’autres faits con- traires, que le concours du mâle est nécessaire à la formation ou à la fertilité du chenevis. Je ne sais si je me trompe , mais il me semble qu’on peut appliquer ici le principe très-connu, plus valet unus affirmans quam mille negantes. Un seul pied de Chanvre femelle qui produit de la graine fertile , lorsqu'on ne peut supposer qu’il a reçu les influences du pollen, prouve bien plus sûrement le fait qu’il atteste, que mille pieds de Chanvre femelle stériles, en l'absence du mâle, ne prouvent la généralité du fait opposé. Il faudrait pour que cette der- nière preuve eût de la valeur, qu’elle fût appuyée d’un autre fait que l'hypothèse rend impossible : c’est-à-dire qu'il fût constant que si le mâle eût été présent, la femelle eût été fertile. L'expérience que j'ai déjà rapportée du Chanvre semé en automne, a montré que je me serais trompé, si je m'étais trop hâté d’attribuer la stérilité de ce Chanvre, dans le printemps suivant, à l’absence du mâle. La possibilité d’une chose n’en est pas la nécessité , ni son absence l'impossibilité. De ce qu’une plante peut sortir d’une loi qui semble générale , il ne s’ensuit pas qu'elle en soit toujours affranchie : comme aussi de ce qu'on ne l'en a pas vu sortir, il ne s’ensuit pas qu’elle n'en sorte Jamais. L’exception vient souvent de causes inconnues : ces causes manquant, l’exception n'arrive pas. Si, comme je le crois vraisemblable, le corps fécon- dant exerce sur le germe ou le rudiment de l'embryon une action en partie analogue à celle des piqüres et des œufs des insectes sur les feuilles, et détermine le déve- ( 1794 ) loppement du périsperme par celui de l'embryon et ce- lui du péricarpe par celui du périsperme , en occasion- nant dans l’organe ou la formation qu’il imprègne un ralentissement, une stagnation des principes nutritifs qui se propage dans les organes voisins ; l'absence de ce corps doit être ordinairement cause que tout le fruit avorte ; mais pour être certain qu’elle rend toujours cet avortement nécessaire , il faudrait l’être aussi que le dé- veloppement qu'on attribue à la présence du mème corps , n’a jamais d'autre cause. Il est beaucoup de circonstances qui peuvent rendre une plante femelle stérile : outre les influences de Pha- bitude dont j'ai déjà parlé dans mon dernier mémoire , une culture trop soignée, des engraïs trop actifs ou trop abondans, une atmosphère ou trop humide, ou trop froide , ou embrasée , peuvent accélérer ou interrompre la végétation, occasionner une nombreuse production de feuilles et de rameaux et rendre nulle celle des fleurs. D’autres circonstances peuvent faire avorter les fleurs femelles : l'ovule peut rester confondu avec le pistil, ou l'embryon avec l’ovule; comme la corolle avec le calice, ou l'étamine avec la corolle. Si je me suis ex- primé clairement, on a pu aisément comprendre que l’évoluiion qui produit une fleur complète, peut être remplacée par une évolution qui produit une fleur in- complète, comme la formation d’une feuille ou d’une tige peut être remplacée par celle d’une fleur. Le règne animal offre dans la femelle du Puceron, de l'Abeille, de l’Araignée fileuse, de la Daphnie puce, de la Vivipare à bandes , le même phénomène que le règne végétal dans celle du Chanvre. Pérsonne n’a conelu ce- ( 279 ) pendant, de ce que le Puceron femelle est susceptible quelquefois d’engendrer sans le mâle, qu’il le puisse toujours , ni qu'il doive en être de mème des autres in- sectes et, à fortiori, des vers intestinaux. D'un fait particulier, on ne peut rien déduire de général. Quoique la séparation des sexes devienne d’autant plus générale dans le règne animal et dans le règne vé- gétal, que l’organisation est plus compliquée, elle n’est pas cependant le produit immédiat du perfectionnement. Chez les animaux , on la trouve au-dessous, comme au- dessus des mollusques , où en général elle n'existe pas. Je crois avoir prouvé, dans mon ouvrage sur la généra- tion , qu'elle devait être rapportée, chez les animaux, à l’abstraction de la vie d’action de celle de nutrition, et à la prédominance de la première dans le sexe masculin et de la seconde dans le sexe féminin : laquelle abstrac- tion provient de la constance des causes qui invitent l'animal à se mouvoir et de celles qui lui rendent le mouvement facile. Chez les plantes, elle doit être rap- portée aussi à l’abstraction de la vie extérieure, qui re- présente celle d’action des animaux et qui devient prédo- minante dans les sujets masculins : laquelle abstraction provient de la constance des causes qui sont spéciale- ment favorables à l’évolution superficielle. Lorsque la vie intérieure contribue éminemment, dans une femelle de plante dioïque susceptible de se repro- duire sans je concours du mâle, à la formation de l'em- bryon, les caractères de forme, de nature, d'organisation qui dominent dans le sexe féminin de cette plante, sont fidèlement représentés dans cet embryon : il est spécia- lement propre à produire une femelle ; dans le cas con- ( 3900) taire , il devient apte à produire un mâle. Or, comme ; d’après ce qui précède, on peut connaître dans quelles parties de la plante prédomine l’une ou l’autre vie, on peut aussi savoir d'avance sur quelles de ces parties naissent les semences aptes à produire un sexe plutôt que l’autre : le sommet est le plus souvent, dans un bien grand nombre de plantes, une de ces parties. Plus ure plante est grêle , plus sa surface est grande, comparée à sa masse; plus par conséquent sa vie exté- rieure devient prédominante, comparée à sa vie inté- rieure. Les plantes les plus grêles doivent donc produire le plus de mäles dans une espèce donnée. Ces déductions qui me semblent rigoureuses, ne sont que l'expression des faits consignés dans mes précédens mémoires. Rarporr de M. le baron Cuvier sur ur: travail de M. Deshayes ayant pour titre : Tableaux com- paratifs des Coquilles vivantes, avec les Fossiles des terrains tertiaires de l’Europe. ( Fait à l’Académie des Sciences , le 31 octobre 1831.) L'Académie nous a chargés, MM. Brongniart, Cordier et moi, de lui rendre compte du travail que M. Deshayes lui a présenté, sous le titre de Tableaux comparatifs des Coquilles vivantes, avec les Fossiles des terrains ter- tiaires de l’Europe. Chacun sait que la géologie n’a commencé que depuis une soixantaine d'années à sortir de ses langes, et que c’est seulement par les observations des Pallas, des de C0) J Saussure et des Werner que, se soustrayant enfin à l'empire arbitraire des conjectures, elle s’est élevée au rang des sciences positives ; mais, pour être devenue une science positive, elle n’en est pas moins une science encore bien jeune, et qui a bien des progrès à faire pour arriver au mème degré de croissance que ses ainées ; et, toutefois, on ne peut douter, d’après l'intérêt général qu'elle inspire, qu’elle ne répare promptement le temps perdu. Déjà elle a fait un grand pas en associant à l’exa- men de la nature minérale des couches, celui des débris organiques qui les remplissent, et les résultats que cette étude à peine naissante a donnés en si peu de temps, égalent en netteté et en importance, si même ils ne les surpassent pas, tous ceux qui pouvaient se déduire de la simple étude minéralogique ; aussi, l’Académie, qui en a été entretenue si souvent , a-t-elle toujours accueilli avec faveur les faits de ce genre qui lui ont été présen- tés par MM. de Férussac, Defrance, Adolphe Brongniart, Constant Prévost, Jules Desnoyers, Dufresnoy et par les autres naturalistes occupés de ces recherches. En ce qui concerne les coquilles fossiles en particulier, la dé- couverte des terrains d’eau douce, celle des caractères à déduire pour les terrains des espèces et des genres de coquilles qu'ils recèlent, celle de certaines successions qui doivent avoir eu lieu parmi les habitans de la mer, comme les ossemens et les végétaux fossiles en annon- cent pour les habitans de la terre , sont des faits devenus désormais incontestables et dont la géologie s’est enrichie e plus récemment. Parmi les corps organisés ensevelis dans les couches de la terre, il n’en est pas de plus abondans ni de plus XXIV. 12 LA { 175 ù répandus et par conséquent de plus intéressans pour la science que les coquilles. On comprend en effet que leur multiplication rapide, leur nature pierreuse ont dû à la fois les mieux conserver et les conserver en plus grand nombre , et qu’elles doivent avoir laissé les témoignages les plus positifs de l’état du liquide à l’époque où cha- que couche se déposait sur son fond. Cette idée a engagé M. Deshayes à consacrer plusieurs années à l'étude des coquilles, soit vivantes, soit fossiles, et le mémoire dont nous rendons compte prouve qu'il l’a portée à un degré dont elle n’approchait pas avant lui. Il s’est proposé d'examiner les coquilles propres à cha- que couche, de les comparer à celles qui se trouvent dans les couches supérieures et inférieures de tous les degrés et à celles que la mer nourrit aujourd’hui à toutes les latitudes, et de s'assurer par là s’il y a des succes- sions, des extinctions de races, et comment celles de ces races qui ont échappé aux altérations de la surface du globe sont aujourd’hui réparties dans les diverses ré- gions de la mer. Il a bien senti qu’il ne pourrait arriver sur ces importantes questions à des conclusions hors d'atteinte, qu'autant qu'il aurait observé et comparé le plus grand nombre d'espèces possibles ; que ce n’est pas des genres, mais des espèces qu'il s’agit; et que les genres qui ne sont que des créations de l'esprit ne fourniraient aucune conséquence quand ils passeraient d’une couche ou d’une série de couches à une autre, tant qu'ils ny passeraient pas en espèces identiques. Il est donc par- venu, par une assiduité sans exemple, à réunir plus de 3000 espèces de coquilles fossiles d’une origine certaine, etil en a dressé des tableaux qui, comparés avec l’ordre (179 ) | connu de la superposition des couches > montrent à quelle époque chaque espèce a commencé » à quelle épo- que elle à fini, tandis que leur comparaison avec plus de {000 espèces vivantes, montre aussi quelles sont celles de ces espèces qui se sont conservées jusqu’à pré- sent et quelles sortes de couches se sont déjà déposées sur elles depuis leur apparition. Sans doute ce genre de recherches suppose l'idée de l'espèce ; dont l'application en histoire naturelle à tou- Jours quelque chose d’un peu vague et susceptible de controverse ; mais M. Deshayes s’en est tenu à cet égard à l'opinion commune, il a considéré comme de même espèce celles des coquilles fossiles qui ne diffèrent pas plus entre elles que celles que les naturalistes regardent, parmi les coquilles vivantes , comme appartenant aussi À une même espèce. De cette comparaison il en résulte, pour M. Deshayes, la conviction que l’on peut diviser les terrains coquilliers d'une manière tranchée en deux grandes séries qui cor- respondent à deux séries déjà déterminées sous le rap- port minéralogique, mais avec moins de précision : la première, qui est la plus considérable et la plus ancienne et que l’on connaît sous le nom de terrain secondaire , ne contient plus une seule espèce fossile qui ait son analogue vivant dans les mers actuelles > Di même son analogue fossile dans la seconde série ; en sorle que tou- tes les races de cctte époque non-seulement seraient éteintes aujourd'hui, mais l’auraient été déjà lorsqu’a commencé la seconde série. IL faudra voir comment M. Deshayes accordera ce ré- sultat avec l'observation de M. Dufresnoy, qui assure ( 180) avoir trouvé dans des terrains crétacés des coquilles des terrains tertiaires; mais cette question n’est pas précisé- ment celle qui fait l’objet du mémoire que nous analy- sons, l’auteur ne s’y occupe que de la seconde série de celle qui comprend les terrains tertiaires proprement dits : elle commence, dit l’auteur, une zoologie nouvelle qui dans son ensemble a de très-grands rapports avec celle qui existe actuellement et qui se lie à l’époque dont nous sommes contemporains , parce qu’elle nous montre dans des proportions diverses, pour chaque couche, des espèces fossiles identiquement les mèmes que celles qui vivent aujourd'hui. Ces derniers terrains étant les mieux connus, c’est par eux que M. Deshayes commence son exposition. ya reconnu trois groupes bien distincts qui annon- cent trois époques de formation. Le premier et le plus ancien a déjà été observé dans les bassins de Paris, de Londres, de Valognes , dans une partie de la Belgique et dans quelques cantons des envi- rons de Bordeaux et de l'Italie. On y a déjà déterminé environ 1400 espèces, et sur ce nombre 38 seulement sont regardées comme analogues à des espèces vivantes ; c'est un peu moins de 5 ; il n’y en a que 42 qui se retrouvent à l’état fossile dans des groupes plus récens. Le deuxième groupe dont la superposition au précé- dent a été constatée en Touraine par M. Jules Desnoyers, se montre dans le falun de cette province et dans plu- sieurs couches de la Gironde, de l’Autriche, de la Hon- grie , de la Pologne , dans certaines collines des environs de Turin et ailleurs. ( 181 ) M. Deshayes, parmi plus de goo espèces, y en décou- vre 161 qui ont leurs analogues vivans , c’est-à-dire 100 ? et 173 ou - qui se sont continuées à l’état fossile dans le groupe suivant. Celui-ci , qui est le plus nouveau, occupe les collines du pied des Apennins, et se montre en Sicile , en Morée, à Perpignan : on y a déjà recueilli près de 700 espèces, dont plus de moitié paraissent analogues à des espèces vivantes ; ainsi la mer qui l'a produit ressemblait déjà beaucoup à la mer actuelle par sa population. Le terrain nommé crag en Angleterre, quoique les coquilles qu'il contient soient généralement différentes de celles des autres bassins, offre néanmoins une pro- portion à peu près la même ( 47 ) de coquilles analo- gues à celles de la mer actuelle; en sorte que M. Des- bayes le range aussi dans sa troisième classe. En efet, ‘quoique l’on n'ait pas toujours obtenu par une intuition effective la superposition de ces trois groupes de ter- rains , il est naturel de croire que celui-là est le plus nouveau dont la ressemblance avee l’ordre actuel des choses est la plus grande ; ainsi la première de ces épo- ques de terrains tertiaires qui se lie aux suivantes par un trentième de ses espèces, s’en sépare par les 29 autres trentièmes, et quand on viendrait à doubler ce trentième, il resterait toujours -+ de différence ; ces différences di- minuent entre les époques suivantes; mais toujours reste- til qu’il y a des es pèces qui passent d’une époque à l’autre pour s'y éteindre et que le petit nombre d'espèces com- munes à la première et à la troisième, le sont aussi, sans exception, à la seconde, au travers de laquelle elles sont passées sans altération. ( x682 ) La troisième époque paraît à M. Deshayes le com- mencement de l’état actuel des choses; il pense que lorsqu'on pourra la sous-diviser , on trouvera que le nombre des analogues vivans y augmente à mesure que les lits sont plus superficiels. Treize espèces seulement , que M. Deshayes nomme , se trouvent dans les trois groupes, et paraissent avoir résisté à toutes les causes de destruction. M. Deshayes ne se dissimule pas que les proportions qu'il a constatées pourront varier par des observations ul- térieures ; mais, d'après le nombre immense de coquilles d’où il a déduit ses chiffres, il ne pense pas que ces alté- rations soient jamais bien considérables , et il y a tout lieu de penser avec lui, qu'à mesure que l’on découvrira quelques espèces perdues dans chaque terrain , le nom- bre des espèces vivantes s’y accroîtra aussi. L'auteur ne s’en est point tenu à cet examen des pro- portions des analogues dans les couches , il a aussi re- cherché à s'assurer de la distribution actuelle sur le globe des espèces qui ont aussi leurs représentans dans l'antiquité. Il à remarqué que sur les 38 espèces vivantes de la première époque , dont douze seulement lui sont propres, il yen a aujourd’hui de réparties à presque toutes les latitudes ; que le plus grand nombre cependant appar- tient aux régions intertropicales. La même observation a lieu pour les 161 de la secondé époque; on en trouve la plus grande partie au Sénégal , à Madagascar et dans l'Archipel des Indes; un moindre nombre habite le midi de la Méditerranée, et quelques- unes seulement vivent dans les mers d'Europe. ( 185 ) Ce qui est particulier aux espèces analogues de la troisième époque, c’est qu’elles vivent encore dans les mers qui baignent une partie des dépôts qui les recèlent; c’est ce qu’on observe à Nice, à La Rochelle et en beau- coup d’autres lieux, où des terrains coquilliers de cet ordre avoisinent la mer : le crag d'Angleterre contient des espèces de la mer du Nord. Aïnsi , ce grand travail sur les coquilles des terrains tertiaires confirme ce que l'examen des ossemens et des végétaux fossiles avait déjà fait connaître , c'est que les terrains tertiaires ne sont pas de formation d’une même époque, mais qu’ils ont été déposés les uns après les autres et probablement séparés entre eux par des phé- nomènes puissans , qui seuls ont pu altérer à ce point l'ensemble des êtres organisés contemporains de chacun d'eux; la diminution de la température a été manifeste- ment un de ces phénomènes , mais il est difficile de croire qu’elle ait été le seul; mais ceci nous ramenerait à la région des conjectures dont rien n’est mieux fait pour nous tenir éloigné que l'excellent travail de M. Deshayes. Ce travail nous parait à tous égards un modèle fondé sur l'observation de plus de 40,000 échantillons ; tout s’y démontre par des faits, tout s’y réduit en chiffres po- sitifs ; les conclusions en sont en quelque sorte mathé- matiques ; de nouveaux faits pourraient les altérer, mais, d'après toutes les règles de probabilité, laltération qu'elles y porteraient ne pourrait avoir une grande im- portance. Que l’on ne ‘se lasse point cependant , que les nom- breux observateurs qui s'occupent de la géologie, dans toutes ses branches, cherchent ainsi à en compléter la (164 ) statistique, et bientôt cette science atteindra à ses grandes destinées. Nous avons l'honneur de proposer à l’Académie de témoigner à M. Deshayes la satisfaction que son ouvrage lui a fait éprouver et de l’admettre, s’il n’est pas imprimé auparavant, dans le recueil des savans étrangers. Fait à Paris le 31 octobre 1831. Signé baron Cuvier , ÂALex. BroNGNIART et Corpter. L'Académie adopte les conclusions de ce rapport. Anazyse des travaux de l'Académie royale des Sciences , pendant l'année 1830 (1); Par M. le baron Cuvier, Secrétaire perpétuel. MINÉRALOGIE ET GÉOLOGIE. Travaux de M. Rozet. M. Rozet , ingénieur-géographe attaché à l'état-major de l’expédition d'Alger, a eu occasion d’étudier, sous le (1) Plusieurs Mémoires , dont M. le baron Cuvier donne l’analyse. nous ayant élé communiqués par les auteurs et se trouvant déjà impri- més, soit en totalité, soit par extrait, dans nos Annales, nous avons cru, ainsi que nous l’avons fait les années précédentes, devoir supprimer, au moins en partie , leur analyse , et renvoyer aux volumes des Annales qui les contiennent. (R.) ( 185 ) point de vue géologique , tout le pays qui a été parcouru par les troupes françaises. Voici les principaux résultats de ses reconnaissances. Les moniagnes peu élevées qui, à partir de Sidi-el- Ferruch, bordent la côte d'Alger et sur le penchant desquelles cette ville est bâtie , sont composées de roches primordiales , gneiss, schistes micacés, schistes talqueux et calcaire blanc ou gris, saccaroïde, dont les couches plongent de 10 à 15 degrés vers le sud. Sur cette petite chaîne sont des lambeaux d’un terrain tertiaire horizontal , formé de grès diversement colorés, de poudingues ferrugineux, de marnes sablonneuses et d’un calcaire grossier marin peu ancien, dans lequel on observe quelques coquilles d’eau douce ou terrestres. L’analogie de cette dernière espèce de roche avec celles de même nature qui existent dans les parties basses de nos départemens de l’Aude et de l'Hérault est très-frap- pante et très-remarquable. Le terrain tertiaire s’étend au sud, dans une partie de la grande plaine de la Hétidjah. Le reste de la plaine , jusqu’au pied du petit Atlas, est composé d’alluvions anciennes, argiles limoneuses, graviers et galets. La chaîne du petit Atlas atteint sa plus grande hau- teur à la latitude de Bleïda. Dans cette partie, les principaux sommets s'élèvent d'environ 1200 mètres au- dessus de la Méditerranée; les crêtes sont découpées , les vallées profondes et étroites , et les pentes offrent un grand nombre de déchirures escarpées. Les roches que les torrens amènent de cette partie de la chaîne vers Bleïda sont des schistes talqueux ou phylladiens, des ( 186 ) calcaires gris lamellaires et quelques fragmens de gneiss. M. Rozet n’a point pénétré dans cette partie des montagnes. L'expédition dont il faisait partie a franchi la chaîne en suivant une direction qui est de plus de trois lieues à l’ouest. Dans cette traversée , on ne rencontre que des roches bien moins anciennes que les précédentes. M. Rozet les rapporte à la formation connue en Europe sous le nom de lias ou calcaire à gryphites: Ce sont des calcaires compactes noirâtres, des argiles schisteuses et des marnes feuilletées , quine renferment d’autres restes organiques que quelques peignes , quelques huîtres, et d’autres petites bivalves. Lies couches en sont rompues et dé- placées ; elles plongent en général vers le sud , et rare- ment vers le nord. Les inclinaisons varient de 10 à 70 degrés. Au pied du revers méridional du petit Atlas est un pays inégal , beaucoup plus élevé au-dessus de la Médi- terranée que ne l’est la plaine de la Métidjah, et dont la largeur, jusqu’à la chaîne du grand Atlas, est de près de quarante lieues. L'expédition française ne s’est avan- cée que jusqu’à Média, c’est-à-dire à environ trois lieues vers le sud. La petite portion traversée a présenté un terrain tertiaire analogue à celui des environs d'Alger , et dont les couches se montrent horizontales ou faible- ment inelinées. Les matériaux dominans sont des grès et des sables ferrugineux. Les coquilles fossiles les plus abondantes sont des pétoncles, des peignes , des huîtres à grand talon, des espèces de bucardes , et surtout de grands murex identiques avec ceux qui caractérisent Îles calcaires grossiers de la Provence. M. Rozet estime que ( 187 ) ce terrain s'étend jusqu’au pied du revers septentrional de la chaîne du grand Atlas. Travaux de M, Geoffroy Saint-Hilaire. On sait que les bancs de pierre calcaire, qui appar- tiennent à la formation appelée jurassique par les géolo- gistes, recèlent les os de beaucoup de grands animaux de la classe des reptiles , et notamment plusieurs espèces de la famille des crocodiles. On en a découvert entre autres depuis long-temps deux espèces à long museau däns les environs de Honfleur, et les carrières de pierre blanche des environs de Caen en ont fourni plus récemment une autre. M. Cuvier, dans son grand ouvrage sur les osse- mens fossiles, a fait connaître ces animaux, autant que cela lui était possible, d’après ce qu’il avait de leurs fragmens à sa disposition. Pour celui de Caen en parti- culier, quoiqu'il n’en possédât que la moitié d’un crâne, quelques vertèbres et des empreintes des écailles, il a fait remarquer que ses arrière-narines sont fort différentes de celles des crocodiles ordinaires, beaucoup plus ou- vertes et ouvertes beaucoup plus en avant, et que l'os ptérygoïdien n’y approche pas du développement qu'il a dans les crocodiles où il termine en arrière et sous la base du crâne le long tube nasal. Il a annoncé aussi que les écailles y sont imbriquées , c’est-à-dire que le bord postérieur de chacune recouvre la base de celle qui la suit. Enfin il fait voir que les corps de ses vertèbres ne s’aruiculent point comme dans les crocodiles vivans par des faces convexes et concaves , et ses figures montraient la direction particulière des dents qui ne paraissent pas { 188 } aussi verticales que dans les crocodiles ordinaires , mais se dirigent plus ou moins sur les côtés. - M. Deslongchamps , professeur d'histoire naturelle à Caen, qui avait concouru à la première découverte de ces os , ayant suivi cette recherche , et plusieurs autres ama- teurs d'histoire naturelle de cette ville s’en étant aussi occupés, on a recucilli un nombre de pièces beaucoup plus considérable , et M. Geoffroy - Saint - Hilaire , s'étant rendu sur les lieux, en a fait un objet particu- lier d’études , et a présenté à l’Académie les résultats de ses observations. Dès 1825, ainsi que nous l'avons dit dans notre ana- lyse de cette année-là, il avait conclu de cette différence des arrière-narines , qu’il convenait de faire de cet ani- mal de Caen un genre particulier qu’il avait appelé Teleo-saurus ( parfait lézard ), parce que cette circon- stance d'organisation le rapproche un peu d'animaux plus parfaits, des mammifères. Conjecturant que les arrière-narines devaient avoir quelque chose de sem- blable dans les crocodiles d’'Honfleur, il en a fait égale- ment un genre à part, nommé Sfeneo-saurus. Dès-lors aussi il était allé plus loin. Considérant que les conditions physiques et matérielkes du globe et par- ticulièrement la composition de l'atmosphère ont dû éprouver de grands changemens aux époques des révo- lutions géologiques, et que ces changemens ont dù affec- ter de préférence les premières voies de la respiration, il en avait conclu qu’il est très-possible que les gavials ou crocodiles à long museau d'aujourd'hui ne soient que les anciens téléosaurus , dont l’organisation aura été modi- fiée conformément à ces modifications du globe lui- ( 189 ) même. C’est la doctrine qu'il a généralisée dans un Mé- moire de l’année dernière , dont nous avons aussi rendu compte. Cette année, appuyé sur le grand nombre de pièces découvertes à Caen, ilest revenu sur le sujet des téléo- saurus. Parmi ces pièces se sont trouvées quelques parties des membres , et l’armure robuste dont ces téléosaurus sont revètus. Les écailles du dessous de leur corps ne sont pas seulement cornées et flexibles comme dans les cro- codiles ordinaires, mais dures et pierreuses ; en sorte qu’elles forment ensemble un plastron presque inflexi- ble. Celles du dos ont une force proportionnée , et four- nissent des bandes transversales encore plus épaisses et plus dures que les écailles du ventre. L'animal était ainsi enveloppé entre deux puissantes pièces de cuirasse. On n’a encore rien de bien complet sur les extrémités, et l’on attend à cet égard les résultats des fouilles que l’on fait avec une grande ardeur. Néanmoins, d’après cet empiétement des écailles les unes sur les autres , que M. Geoffroy juge être un carac- tère de poisson , il ne s'attend point, dit-il , à voir sor- tir de ces carrières un pied armé de griffes, comme celui du crocodile, mais il croit que ce sera une sorte de na- geoire analogue à celles des ichthyosaurus et des plesio- saurus. Nous devons ajouter que, dans un nouveau voyage fait à Caen depuis peu, M. Geoffroy a reconnu qu'il existe dans les carrières de ce canton deux espèces dis- tinctes de téléosaurus ; il s’est assuré aussi que des ns trouvés à quelques lieues plus haut et attribués à ce mème ( 190 ) reptile, appartiennent au genre voisin des sténéosaurus, lequel lui paraît intermédiaire entre les téléosaurus et les crocodiles, et dont il existe aussi, dit-il, un grand nombre d'espèces. Dans un Mémoire tout récent où il examine la posi- tion géologique de ces divers animaux, il les présente comme d’un àge intermédiaire entre celui des ichthyo- saurus et celui des crocodiles , comme ayant commencé à exister cependant, avant l’anéantissement des premiers avec lesquels on les trouve quelquefois, ce qui, dit-il, n'a pas lieu pour les crocodiles. M. Geoffroy trouve plus de ressemblance entre l’ar- rière-crâne du téléosaurus et du crocodile qu'entre les arrière-narines , et c’est ici qu'il reproduit son ancienne opinion sur l'os du rocher qu’il suppose placé au-dessus de l’arrière-crâne et se soudant avec son correspondant et avec l’occipital supérieur, qui sert, dit-il, aux deux rochers de muraille extérieure ; les deux oreilles forment ainsi, selon lui, un bandeau transversal passant par- dessus le cerveau; et il assure avoir vu dans une mon- struosité une disposition semblable, avec cette différence essentielle cependant, que c'était par-dessous et non par-dessus que les oreilles se joignaient. M. Cuvier n’admet point cette position du rocher , et il a rappelé à ce sujet à l’Académie qu'ayant examiné l'oreille interne de crocodile , il s’est assuré que leur labyrinthe , ainsi que celui des oiseaux et de la plupart des reptiles , est entouré de trois os , l’occipital latéral , l’occipital supérieur et un troisième dans lequel il eroit voir le vrai rocher; que la fenêtre ronde est tout entière dans l'occipital latéral; que la fenêtre ovale est une (191 ) échancrure du rocher complétée par le bord de cet oc- cipital latéral. Cette position profonde du rocher du ero- codile, sa petitesse et la manière compliquée dont il s’entrelace avec les os voisins , lui paraissent avoir em- pêché M. Geoffroy de le distinguer et de lui assigner son véritable nom. PHYSIQUE VÉGÉTALE ET BOTANIQUE. Observations de M. Adolphe Brongniart. La structure et les fonctions des feuilles ont fait depuis long-temps l’objet des travaux des botanistes, et les avis étaient partagés à la fois sur les organes qui entrent dans leur composition et sur l’usage de ces organes , lorsque M. Amici, à l’aide d’instrumens d'optique per- fectionnés, répandit un nouveau jour sur ce sujet. M. Adolphe Brongniart, dans un Mémoire relatif à cet objet , a , pour tout ce qui se rapporte à l’organisation de l’épiderme, des stomates et du parenchymedes feuilles aériennes , confirmé, par de bonnes observations et des dessins exacts , les assertions de M. Amici (r). Les botanistes connaissent , sous le nom de charbon, une maladie commune à plusieurs graminées, et qui détruit les organes de la reproduction avec leurs enve- loppes, de manière qu'il ne reste à leur place qu'une poussière noirâtre granuleuse , assez semblable à du charbon pulvérisé. M. Adolphe Brongniart a tenté d’é- claircir ce que l’histoire de cette maladie présentait en- core d’obscur, et, de ses observations faites sur des épis (x) Voyez ce Mém. dans les Ann, des Se, nat. t. xxx, p. 420. ( 192 ) d'orge parvenus à jdes degrés différens de développe- ment , il conclut que les organes de la fructification, au lieu d’être transformés en matière charbonneuse , sont, dans un état rudimentaire , attachés au sommet d’une masse charnue occupée par le charbon, et que ce char- bon ne se développe primitivement ni dans l'ovaire ni dans les parties environnantes , comme on l'avait cru jusqu'alors, mais dans le pédoncule de la fleur , dont il cause l’accroissement en une masse qui, d’abord charnue, devient plus tard pulvérulente (x). Travaux de M. Schultz. M. Schultz , professeur à l'Université de Berlin , qui a passé quelque temps l’année dernière à Paris , a soumis à l'examen de l’Académie des recherches sur l’anatomie et la physiologie végétale, qui tendraient à prouver l'existence d’une véritable circulation dans les plantes phanérogames (2). Travaux de M. Turpin. Il se forme dans l’intérieur de certaines plantes des cristallisations sur lesquelles on ne possédait encore qu’un petit nombre de faits. On n'avait vu ces cristaux que séparés les uns des autres, très-menus et d'une apparence filiforme. M. Turpin en a observé dans un cierge du Pérou, mort dernièrement au Jardin des plantes, après y-avoir vécu cent trente ans (3). Il a trouvé des cristaux dans (x) Voyez les Ann. des Sc. nat., t.xx ; p. 171. (2) Voyez les Ann. des Sc. nat., t. xxI1, p. 75. (3) Voyez les Ann, des Sc nat.,t.xx, p.26. rt L Se € ( 193 ) l'intérieur des vésicules , où ils sont solidement rassem- blés en paquets : ce ne sont plus de longues et fines ai- guilles , mais de véritables cristaux épais et assez courts, offrant à l’aide du microscope des faces et des angles nettement déterminés. Travaux de M. Adrien de Jussieu. L'Académie a recu de M. Adrien de Jussieu un Mé- moire très-étendu sur le groupe naturel de plantes connu sous le titre de Méliacées. L'auteur a suivi avec beaucoup de sagacité et de succès, pour les divisions de sa monographie, la méthode gé- néralement adoptée aujourd’hui, et qui consiste à con- sidérer les familles naturelles sous tous les rapports dont la science exige l’appréciation, c’est-à-dire sans sé- parer, comme on Je faisait autrefois, la botanique pro- prement dite ou descriptive, de la physiologie et de la statique végétales. Des recherches auxquelles il s’est livré sur la distri- bution géographique de ces plantes, il résulte : 1°. que les Méliacées deviennent de plus en plus fréquentes à mesure qu’on se rapproche des tropiques, et qu’elles occupent, outre la zône équatoriale , celle que M. Mirbel a nommée zône de transition tempérée. 2°. Qu'il existe un accord frappant entre les affinités des genres et leur habitation. Iln’est pas de notre sujet de suivre l’auteur dans la description très-détaillée qu’il donne de tous les carac- tères propres à la famille des Méliacées. C’est sur la présence ou l’absence du périsperme autour de lem- XXIV. 15 (194 ) bryon, qui paraît se lier ici à quelques autres diffé- rences , que M. de Jussieu se croit autorisé à fonder sà division des Méliacées en deux tribus nommées Méliees et Zrichiliées ; le périsperme existant dans la première et non dans la seconde. Il se livre à un examen attentif et à une critique sévère des genres qui doivent composer chacune de ces tribus. I! s'occupe ensuite de la famille des Cédrélacées , qu'il regarde comme distincte , quoique formant avec la précédente un même groupe naturel. Les Cédrélacées sont dignes d'intérêt en ce qu'elles offrent de grands ar- bres dont le bois odorant, d’un tissu serré , d’une belle coloration, et peu aliérable ; est éminemment propre aux ouvrages d'ébénisterie. Nous marquerons en peu de mots les principales diffé- rences que l’auteur signale entre les deux familles. L’inflorescence des Méliacées est plus souvent axil- laire que terminale. C’est tout le contraire dans les Cé- drélacées. Les pétales des Cédrélacées, au lieu d’ètre larges à leur base, s’y rétrécissent souvent en un court onglet et leur préfloraison est souvent tordue. Les étamines de beaucoup de Cédrélacées sont par- faitement distinctes entre elles; dans les Méliacées les filets des étamines sont soudés en un tube; maïs c’est dans la nature du fruit, dans sa déhiscence, dans la disposition relative de ses valves, de ses cloisons et de ses graines, dans le nombre, la forme et la structure de celles-ci , que l’auteur trouve les caractères de premier ordre distinguant les Cédrélacées des Méliacées. M. de Jussieu divise la famille des Cédrélacées en deux tribus : la première , celle des Swiéténiées , est placée à ( 195 ) la suite des Méliacées auxquelles elle se lie intimement par son tube anthérifère ; la deuxième , celle des Cédré- lées, s’en éloigne davantage par ses étamines libres. Considérant ensuite les deux familles comme formart par leur réunion un seul groupe naturel, l’auteur re- cherche soigneusement leurs affinités avec quelques au- tres groupes , et il conclut de cet examen que le groupe dont il s’agit n’a que fort peu d’analogie avec les Vini- fères ; qu’il a, au contraire , une affinité réelle avec les Aurantiées; qu’il en a beaucoup moins avec les Rutacées; qu’enfin il offre des rapports évidens, soit avec les Sa- pindacées , soit avec les Térébinthacées. Cette partie du Mémoire se termine par un article concernant les propriétés et les usages des plantes qui en sont l’objet. On sait que M. Decandolle a le premier insisté sur l'accord qui existe le plus souvent entre les propriétés médicales des plantes et leurs affinités orga- niques. M. Adrien de Jussieu trouve dans Papplication de ce principe , comme il l’avait trouvée dans les consi- dérations géographiques , une confirmation de sa division du groupe en deux familles distinctes. À cet égard , il fait observer que les Cédrélacées sont remarquables par l’amertume et l’astringence de plu- sieurs de leurs parties, propriétés auxquelles se joint as- sez souvent un principe aromatique; et qu'il en résulte des qualités fébrifuges généralement connues et em- ployées dans la patrie de ces plantes. Dans les vraies Méliacées se retrouvent aussi, quoique moins fréquemment et à un moindre degré, des prin- cipes amers , astringens et toniques ; mais les principes excitans s y montrent très-développés , et souvent assez (à 106 \ énergiques pour qu'il y ait du danger à s'en servir. Les deux dernières parties du Mémoire, consacrées à des descriptions techniques et détaillées des genres et des espèces , ne soni point susceptibles d'analyse. Travaux de M. Cambessèdes. M. Cambessèdes a décrit avec exactitude , et expliqué d’une manière ingénieuse , les diverses altérations et mé- tamorphoses qui s’observent dans les fleurs de plusieurs Capparidées , dont les unes sont régulières , tandis que dans d’autres les étamines et le pistil sont déjetés d’un seul côté , et qu'entre ces organes on trouve deux appendices glanduleux. À l’aide d’une analyse attentive des diflérens genres , et notamment d’une espèce nouvelle du Sénégal, il a reconnu que ces appendices glanduleux ne sont que des faisceaux d’étamines avortés. D’après ces nouvelles observations, il expose ainsi qu'il suit les caractères de la fleur des Capparidées : Calice à 4 feuilles ou à 4 divisions; disque calicinal ; 4 pétales alternant avec les folioles du calice , insérés sur le réceptacle , sur le disque ou même au calice ; un ou plusieurs rangs d’étamines hypogynes, dont une partie avorte quelquefois ; un pistil central ou déjeté de côté. M. Cambessèdes fait remarquer, dans le cours de son Mémoire, que le mœrua angolensis présente le fait encore assez rare , de pétales périgynes et d'étamines hy- pogynes dans une même fleur. Travaux de M. Achille Richard. M. Achille Richard à soumis à un nouvel examen les nn SE ut Mur ( 197 ) familles de plantes à trophospermes pariétaux , c'est-à- dire celles où les follicules qui composent la boite pisti- lienne étant soudés bord à bord pour former une cavité unique, le petit corps particulier formé de vaisseaux nourriciers, où s’attachent les ovules, est appliqué sur la paroi interne de l'ovaire , et ne constitue pas un axe central. L'auteur examine d’abord les trois familles des Oro- banchées, des Gesnériées et des Cyrtandracées , et il démontre qu’elles doivent se réunir en une seule et mème famille. Des observations très-délicates et une saine critique le conduisent à la mème conclusion, relativement aux deux familles des Flacourtianées et des Bixinées. Il classe dans les familles à trophospermes pariétaux celle des Marcgraviacées, en démontrant que la plupart des botanistes avaient à tort attribué plusieurs loges à l'ovaire et au fruit. Une étude attentive lui à fait voir également que les Maregraviacées sont réellement poly- pétales. L'auteur combat la division que M. Decandolle avait formée de la famille des Podophyllées en deux tribus, les Zydropeltidées et les Podophyllées vraies : il s’ap- plique à prouver que les premières sont monocotylé- dones, et les secondes dicotylédones , et il annonce, ce qu'avait d’ailleurs pressenti M. Jussieu le père , que le genre podophyllum doit se placer dans les Papavéracées. Enfin M, Richard démontre par ses observations que la famille des Cistinées ne doit pas être rangée, comme , . € ve. l PAÉPAUI LE on l'a fait, parmi celles à trophospermes pariétaux , et ( 198 ) que l'ovaire de ces plantes est formé dans sa jeunesse de trois loges bien distinctes. Les dissertations de M. Richard sur chacune de ces familles sont accompagnées d’une critique exacte des genres dont elles se composent ; il rectifie les classifica- ons vieieuses qu’on en a faites , et complète la descrip- tion de certaines espèces encore mal connues. Nous re- grettons de ne pouvoir le suivre dans tous les détails qui servent de base à ses décisions. Qu'il nous suflise de dire que partout il substitue des faits vrais à des aperçus in- complets ou erronés. Travaux de M. Fée. M. Fée à présenté à l’Académie une monographie du genre de plantes agames fondé par Acharius, sous le nom de Trypethelium, mais où ce savant Suédois n'avait réuni que huit espèces , tandis que le travail de M. Fée en fait connaître vingt-deux , toutes étrangères de l'Europe (1). Observations de M. Ledanotïs. M. de Humboldt avait remis à l Académie une boîte renfermant des feuilles et des fleurs de deux espèces de jalaps . qui lui ont été envoyées d'Orizaba par M. Leda- nois , pharmacien établi dans cette ville depuis plusieurs années. L'une de ces plantes, connue dans le pays sous le nom de jalap mâle , est, selon M. Ledanois, un très- bon purgatif, qui n’a pas l’âcreté du jalap ordinaire. Ces deux jalaps appartiennent au genre Liseron. (1) Voyez les Ann. des Se, nat, &. xxut, p. 410. L 0 dise æÆ | (199 ) Mais les échantillons qui ont été remis sont trop incom- plets pour qu'on puisse sayoir.si ces deux plantes sont connues, ou si elles n’ont pas déjà été décrites Toutefois on peut assurer qu'elles diffèrent du jalap commun. Plantes recueillies par M. Leon de Laborde. M. Léon de Laborde, qui, fidèle à des traditions de famille, s'intéresse à toutes les branches des connais- sance humaines , a recueilli sur le mont Sinaï ou dans le désert qui l’environne , environ quatre-vingts plantes qu'il a rapportées en France avec les autres richesses scientifiques , historiques, archéologiques et littéraires, fruits de son intéressant voyage. Il à confié ces plantes à l’examen de M. Delille, cor- respondant de l’Académie. La plupart étaient déjà con- nues ; mais plusieurs étaient fort rares dans les herbiers; d’autres laissaient à désirer des reuseignemens sur leur origine , leur habitation , leurs usages ; quelques espèces enfin étaient tout-à-fait nouvelles. M. Delille les a nom- mées , classées et décrites avec le soin que l’on devait attendre d’un botaniste aussi exact et aussi instruit. Publication de M. de Theis. M. de Theis , auteur d’un glossaire de botanique pu- blié en 1810 , a soumis au jugement de 1’ Académie une seconde édition de cet ouvrage, qu’il se propose de faire imprimer prochainement. L'auteur, plus érudit encore que botaniste, paraît avoir mis beaucoup de soins à ne donner que des étymologies exactes, non hasardées et puisées aux meilleures sources, Son livre peut êwe utile ( 200 ) aux botanistes , et surtout aux élèves, presque toujours effarouchés par une nomenclature accablante pour la mémoire et stérile pour la pensée, tant qu'une idée ne se rattache pas à chaque mot. ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE. Travaux de M. Bennati. M. le docteur Bennati a lu à l’Académie un Mémoire sur le mécanisme de la voix humaine pendant le chant, et les résultats de ce travail, sans être entièrement neufs pour la science, ont été appuyés par lui de preuves et d'observations nouvelles , et ont acquis sous sa plume un développement qui fixera davantage l'attention des physiologistes (1). M. le docteur Gerdy a rappelé à ceue occasion à l’Aca- démie que lui-même avait présenté plusieurs vues en partie semblables , dans le Dictionnaire de Médecine et dans le Bulletin de M. de Férussac. Travaux de M. Flourens. On a cru, pendant long-temps, que c'était l’eau en nature qui était respirée par les poissons. On à reconnu ensuite que la respiration de ces animaux ne s'exécute qu’au moyen de l’air ou, plus exactement, de l’oxigène de l’air, contenu dans l’eau, et l’on a dû se demander dès-lors quel est donc le rôle que joue l’eau dans cette respiration ? C’est la question que M. Flourens s’est proposé de résoudre (2). (1) Voyez les Ann. des Sc. nal., t. xxiu , p. 32 (2) Voyez les Ann. des Se, nat.; 1, xx, p. 5: ( 201 ) M. Flourens annonce aussi à l'Académie qu'il se pro- pose de développer, dans une suite de mémoires, les mo- difications que les résultats de ses nombreuses expériences sur l’encéphale lui paraissent devoir introduire, soit dans les opérations chirurgicales que l’on pratique sur cet organe, soit dans les opinions que l’on s’est faites de la plupart de ses maladies. I] commence, dans un pre- mier Mémoire, par l'examen du mécanisme selon le- quel agissent les épanchemens cérébraux (1). On se souvient des expériences par lesquelles M. Flou- rens a montré qu'en retranchant successivement diverses parties du cerveau, on abolit successivement ses diverses fonctions ; et qu’ainsi chaque partie distincte de cet or- gane a sa fonction propre. On se souvient aussi qu'il a a montré, par d’autres expériences, que certaines sub- stances, bien qu'introduites dans les voies digestives, n’en portent pas moins leur action, soit sur l’encéphale entier, soit sur telle ou telle partie de lencéphale ; et que, dans tous ces cas, l’effet de chaque substance sur chaque partie, est absolument le même que celui de la lésion mécanique de cette partie. Dans un troisième Mémoire sur le cerveau , présenté cette année, M. Flourens a procédé d’une manière dif- férente. Il a appliqué immédiatement certaines substances sur les diverses parties du cerveau mises à nu; ceîles dont les efiets lui ont paru tout à-la-fois et les plus mar- qués, et les plus opposés, sont l'huile essentielle de té- rébenthine, l’opium et l'alcool (2). (1) Voyez les Ann. des Se. nat., &. xxt. (2) Voyez les Ann, des Se. nat., t. xxut, p. 335. ( 202 ) Travaux de M. Geoffroy Saint-Hilaire. Il a été présenté à l’Académie , dans le cours de cette année, plusieurs monstruosités plus ou moins remar- quables. M. Geoffroy Saint-Hilaire qui a été chargé d’en faire l'examen, a décrit avec beaucoup de détail les faits qu’elles lui ont présentés, et il les a rattachés, avec des développemens nouveaux, aux idées qu’il a déjà publiées sur ce sujet dans plusieurs de ses onvrages. Chacun de ces exemples lui a en même temps fourni l’occasion de citer des faits analogues aujourd’hui oubliés, qu’il a re- trouvés épars dans différens auteurs anciens (1). Travaux de MM. Meyranx et Laurence. Poiemique entre MM. Cuvier et Geoffroy. Un Mémoire de MM. Meyranx et Laurencet, dans lequel ces deux naturalistes croyaient pouvoir établir une analogie d'organisation entre les céphalopodes et les animaux vertébrés, par la seule supposition que le cé- phalopode serait un vertébré ployé en deux par le dos, et de manière que le bassin et les jambes reviendraient près de la tête, ayant donné lieu à un rapport où cette explication était présentée comme détruisant le hiatus, la limite tranchée, reconnue jusqu’à présent entre les animaux vertébrés et les mollusques, M. Cuvier jugea né- cessaire d'examiner cette question, ce qui occasiona entre Jui et M. Geoffroy Saint-Hilaire un échange de quelques Mémoires où des questions beaucoup plus générales fu- rent traitées, et particulièrement celle de savoir si la (1) Voyez les Ann. des Se. nat., t. xxx , p. 65. ( 203) ressemblance de plan et de composition que tout le monde avoue avoir lieu entre les animaux vertébrés , s’étend aux autres embranchemens du règne animal, et si parmi les vertébrés eux-mêmes, cette ressemblance va au point de pouvoir être appelée une identité de compo- sition , où comme s’exprimait d’abord M. Geoffroy en termes absolus, si les mémes parties se répètent indéfi- niment dans les animaux (1). Ces sortes de discussions se résolvent d'ordinaire en distinctions subtiles : de part et d’autre , quand on se sent pressé, on se retranche dans de nouvelles défini- üons ; on cherche à donner à ses expressions une inter- prétation différente de celle que leur attribuait celui au- quel on répond , et ce qu'il en reste d’utile se borne presque toujours aux faits que chaque auteur recherche dans le besoin de sa défense, et dont il est rare qu'il n’y en ait pas quelques-uns nouveaux pour la science. C’est aussi ce qui est arrivé dans cette occurrence. M. Geoffroy, pour soutenir ses idées d’une composition identique, a examiné beaucoup de parties des squelettes qui n'avaient point encore été suffisamment comparées. I y a fait voir dans certains animaux des ressemblances qui n’y avaient point encore été aperçues. M. Cuvier, pour combattre ces idées, à repris cette comparaison; il a montré les énormes diflérences de nombre et de connexion que ces mêmes parties offrent dans d’autres animaux. Il a fait voir que ces parties disparaissent même absolument dans des familles eutières ; il en a conclu qu'il ne s’y trouve ni (1) Voyez la Revue des Ann. des Sc. nat , séances de Académie du 15 février 1830 et suivantes. ME ( 204 ) unité constante de plan, ni unité constante de composi- üon, M. Geoffroy à déclaré alors que par unité, il enten- dait seulement analogie, et que le vrai nom de sa théorie est thcorie des analogues, et il a insisté sur les analo- gies plus suivies et plus particulières que cette théorie lui a fait découvrir relativement à l'os hyoïde, au ster- “um, à l'appareil branchial et à l'appareil operculaire des poissons , analogies que nous avons déjà fait con- naître pour la plupart dans nos analyses. Ici encore il y a eu de nouvelles discussions, mais elles ont fini par &e- venir trop spéciales , trop détaillées pour que les auteurs pussent continuer à réclamer pour elles le temps et l’at- tention de l’Académie. M. Geofiroy Saint-Hilaire a pu- blié ses Mémoires sous le titre de Principes de philoso- phie zoologique, et il y a intercalé des extraits de ceux de M. Cuvier, tels que les avaient donvés les feuilles pé- riodiques qui veulent bien rendre comple de nos séances. * M. Cuvier se propose de publier aussi les siens, et d’y en joindre plusieurs qui n’ont point été lus à l’Académie et qui embrasseront l'ensemble de l’organisation ; l’ouvrage aura pour ütre : De la variété de composition des ani- maux. C’est une polémique amicale entre des natura- listes qui ont l’un pour l’autre une juste estime, et dont le public tirera toujours, comme nous venous de le dire, quelque utilité à cause des faits nouveaux que chacune des parties contendantes y fait connaître pour l'avantage de sa cause. ZOOLOGIE. Travaux de M. Frederic Cuvier. M. Frédéric Cuvier a présenté un essai de classification | dus € mat. ( 205 }) naturelle des chauve-souris de la forme la plus ordinaire, que les naturalistes désignent par le nom de vesperti- lions, et a donné la description de quelques espèces nou- velles de ce genre, Le nombre de celles que l’on y réunissait était devenu si considérable, et leurs caractères distinctifs demeu- raient si indéterminés ou si peu sensibles, qu’on avait peine à éviter de les multiplier ou de les confondre les uns avec les autres. Pour remédier à cet inconvénient , l’auteur a cherché à les elasser d’après des caractères d’un ordre supérieur à ceux qui distinguent communément les espèces. Les or- _ganes de la mastication et du mouvement ne présentant aucune différence, et ne pouvant conséquemment servir à son but, il a eu recours aux organes des sens; et comme il résulte des expériences de Spallanzani et de Jurine que le sens du toucher et celui de la vue ne peuvent être pour les vespertilions que d’un très-faible secours, et que toutes les probabilités portent à penser qu’ils ne se con- duisent pour éviter les obstacles, dans leurs mouvemens rapides et irréguliers, qu’à l’aide de leur ouie, c'est sur la structure de la tête et sur celle de l'oreille externe qu'il a fondé leur classification. La tête de ces animaux lui a donné trois types différens qui sont représentés par la noctule, par la sérotine et par la chauve-souris vulgaire ; et les vespertilions rangés sous ces trois types ont été subdivisés d’après la forme de Fo- reille et celle de j’oreillon. Les oreilles se présentent sous six formes différentes : échancrée, en capuchon, en entonnoir, obtuse, en cornet et évasée. Les oreillons affectent cinq formes; ils sont ( 206 ) en couteau ; en alène , en pétale , en demi-cœur et en massue. M. Frédérie Cuvier décrit ces différentes formes et en donne des figures, afin que ieur définition ne laisse aucun doute ; il présente ensuite une description détaillée de six espèces nouvelles de vespertilions du Nouveau-Monde et de quatre espèces des Indes. Travaux de M. le baron Cuvier et de M. de Blainville. Les naturalistes connaissent depuis long-iemps, mais seulement par des figures et des descriptions faites dans le 16° et au commencement du 1;° siècle, un grand oiseau M hors d’étai de voler, qui habitait l’île de France lors de sa découverte, mais dont l'espèce paraît y avoir été entie- rement extirpée, seul exemple connu depuis les temps « historiques d’une destruction aussi complète. On l’a nommé dronte, dodo, ou oiseau de dégoût; c’est le genre raphus de Moœring, ou didus de Linnæus, lequel en à désigné l'espèce sous le nom de didus ineptus ; on n'en“ possède aujourd’hui qu'une tête et un pied déposés au musée Ashmoléen d'Oxford , et un autre pied avec une figure peinte à l'huile d’après le vivant, qui sont au muséum britanniqne. Cauche, qui l'avait aussi vu à l’ile de France, en donna une description imparfaite où il ne lui attribuait que trois doigts, ce qui a donné lieu aux nomenclateurs d’en faire une seconde espèce qu'ils ont appelée didus naza- renus. Leguat parle encore d’un oiseau dépourvu de la faculté de voler, qui se trouvait à l’île Rodrigue , et qui paraît aussi y avoir été anéanu ; c'est le didus solitarius des EE" ( 207 ) naturalistes récens. Si l’on s’en rapportait à la figure ct à la descripuüon que Leguat en donne, il serait fort dif- férent du dronte; mais ce voyageur ignorant a tellement altéré d'autres animaux qu’il a voulu représentér, comme le lamantin ou le rhinocéros , que son témoignage est un peu suspect. Divers naturalistes se sont occupés de déterminer la famille naturelle où il convient de placer ces oiseaux. Les uns en ont fait des gallinacés, d’autres des échas- siers, et Daudin avait même imaginé de considérer le dronte comme un manchot mal décrit. M. Cuvier ayant recu de M. Desjardins , naturaliste fort instruit de l’île de France, de grands os d'oiseau trouvés à l’île Rodrigue et en partie incrustés de stalac- tite, a supposé qu’ils pouvaient provenir du dronte, et dans tous les cas, d’après leurs formes, et surtout celles du crâne, du sternum, du très-petit humérus, du fémur et du tarse, il a jugé qu’ils appartenaient à un oiseau ap- parenté aux gallinacés : il les a présentés à l’Académie avec une note où il en parlait dans ce sens. M. de Blainville a lu à cette occasion un Mémoire étendu sur les gros oiseaux sans ailes des îles de France et Rodrigue, rédigé quelque temps auparavant, et pour lequel il avait fait de grandes recherches et consulté la peinture et le pied du muséum britannique , et des des- sins des pièces conservées à Oxford. Dans ce Mémoire, où il reproduit chronologiquement et avec beaucoup d’exactitude et d’érudition toutes les indications données par les voyageurs sur ces oiseaux, depuis Vasco de Gama, et tout ce qui en a été dit par les naturalistes qui ont pu en observer quelques parties en ( 208 ) Europe, depuis Clusius, M. de Blainville en donne des descriptions aussi complètes que ces documens le per- mettaient, s'atiachant plus particulièrement au dronte sur lequel il avait des matériaux plus authentiques. Il montre que son analogie avec les manchots est chi- mérique ; qu’il s’en faut aussi beaucoup que l’on puisse Le rapprocher des autruches ; et tout en reconnaissant qu’il a beaucoup de rapports avec les gaïlinacés, il signale les caractères qui l’éloignent des gallinacés connus, et dont le principal est son bec très-fendu , allongé, crochu au bout, et qui rappelle plutôt un oïseau de proïe qu’un gra- nivore. Il arrive enfin à cette conclusion que c’est aux vautours qu’il ressemble le plus par le bec, par la tête, par les ongles, et par plusieurs autres circonstances de son organisalion. M. Cuvier ayant fait sur ces entrefaites un voyage en Angleterre , y a comparé soigneusement les restes du droute qui se conservent à Londres et à Oxford, avec les os incrustés envoyés par M. Desjardins. Le crâne lui a offert une identité à peu près parfaite ; mais le tarse est plus allongé que celui du muséum britannique , lequel est aussi plus gros et plus court que celui d'Oxford. Il reste donc quelque incertitude sur le tarse, mais M. Cu- vier ne croit pas qu'il y en ait sur le cràne; il le juge vraiment de dronte, et comme ce crâne, ainsi que le ster- num trouvé avec lui sont incontestablement de gallinacés, et que le fémur et l’humérus ont aussi des formes de gal- linacés, c’est dans cette familie qu’il croit devoir laisser cet oiseau. S'il se trouvait que le solitaire ait été réelle- ment une espèce différente du dronte, et que les os en question lui eussent appartenu , cette classification vau- drait au moins pour cette espèce. Sr ( 209 ) Au surplus, M.de Blainville ne désespère point encore que l’on ne puisse retrouver le dronte, et si cela arrivait, il serait aisé, en se procurant une connaissance plus com- plète de son intérieur, de fixer les idées sur ses vérita- bles aflinités. Publication de M. Lesson. Le brillant ouvrage que M. Lesson publie sur les oi- seaux mouches et les colibris, continue avec succès ; on y admire plusieurs espèces nouvelles non moins remar- quables que celles que l’on connaissait précédemment, __par le prodigieux éclat de plumes qui rivalisent avec les pierres précieuses ; l’auteur a poussé la division consa- crée aux colibris jusqu’à la huitième livraison. Publications de MM. le baron Cuvier et Valenciennes. La grande histoire naturelle des poissons de M. Cu- vier er de M. Valenciennes en est au huitième volume. On à distribué pendant l’année dernière le sixième qui traite des sparoïdes, et le septième où il est question des chætodons et des poissons dont les branchies ont des appendices compliquées et propres à tenir de l’eau en ré- serve. Ces deux volumes contiennent trois cent trente- sept espèces nouvelles dont plusieurs sont remarquables par leur grandeur et leur éclat, d’autres par la provriété singulière de pouvoir vivre long-temps hors de l’eau. Parmi les genres entre lesquels elles sont réparties, il y en a trente-trois propres aux auteurs. Le huitième vo- lume traite des Scomberoïdes, c’est-à-dire des Maque- reaux, des Thons, des Germons et des autres espèces non XXIV. 14 ( 210 ) moins importantes par leur bonté que par l'habitude de vivre en grandes troupes , et les grandes pêches anx- quelles elles donnent lieu. Travaux de M. Duclos. Linnæas a donné le nom de Cypræa à un genre de co- quilles que nous connaissons en France sous celui de Porcelaines, et qui ont toujours été fort recherchées, non-seulement à cause de leur forme singulière, mais surtout pour la beauté de leur robe, la variété presque infinie des couleurs. dont elle est ornée, et l'espèce de vernis éclatant dont elle semble couverte. Leur classifi- cation était surtout diflicile à cause des trois ou quatre états distincts par où passe la coquille suivant l’âge de l’animal, et dans lesquels elle est très-différente de forme, de structure, d'épaisseur et de couleur. M. Duclos a en- trepris sur ce sujet un grand travail, dont il a soumis le prodrome à l’Académie, et dont il s’est occupé depuis plus de quinze ans. Dans des voyages en Belgique, en Hollande et en Angleterre, il a constamment acquis de nouveaux matériaux et perfectionné ceux qu'il avait ac- quis précédemment. Il a mis tous ses soins à se procurer les trois ou quatre variétés de développement de chaque espèce depuis sa sortie de l'œuf jusqu’à son état de dé- crépitude, ainsi que celles qui peuvent dépendre de la grandeur proportionnelle et de l'intensité de la colora- tion ; il en est résulté une collection d’espèces et de va- riétés que l’on peut regarder comme unique. C’est à l’aide de ces matériaux que M. Duclos a exécuté Ja monographie complète de toutes les espèces de porce- ( 22F ) laines actuellement existantes dans les collections du centre de l’Europe. Il a pu rectifier ou confirmer ce que ses prédécesseurs avaient fait sur le mème sujet; mais surtout 1l a notablement augmenté le nombre des espèces connues. Enfin, il a distribué ces coquilles en trois sec- tions, les espèces lisses, les tuberculées et les striées. Nous ne pouvons pas le suivre dans ces détails, mais les naturalistes qui s'occupent de conchyliologie doivent vivement désirer la publication de son travail. Travaux de M. Deshayes. M. Deshayes a recherché si l’on ne trouverait pas, dans ? quelques mollusques du grand genre //elix de Linnæus, des caractères anatomiques suflisans pour établir d’une manière positive, certains genres qui, n'étant fondés :us- 2 te] 9 n] qu'à présent que sur des caractères tirés de la coquille, avaient été négligés par plusieurs auteurs (r). Travaux de MM. Audouin et Milne Edwards. MM. Audouin et Milne Edwards ont continué de présenter à l’Académie les résultats des recherches aux+ quelles ils se livrent, depuis plusieurs années, sur les animaux sans vertèbres qui peuplent nos côtes. Leur premier Mémoire a pour objet la classification et la description des Ænnelides de la France. Un autre Mémoire des mêmes auteurs traite des poils des annelides considéres comme moyen de défense. Le troisieme Mémoire de MM. Audouin et Edwards (1) Voyez les An n. des Se: nat., t. xxtr, p. 845. Ca) est le résumé de leur voyage sur les-côtes de la Not: mandie et de la Bretagne (1). Travaux de M. Milne Edwards. Dans un Mémoire relatif à l’organisation de la bouche des crustacés suceurs, M. Milne Edwards a tenté de faire pour les crustacés ce qu'avait fait M. Savigny relativement aux insectes : d'établir une concordance entre les parties de la bouche des crustacés broyeurs et des crustacés su- ceurs. À cet effet il a examiné avec beaucoup de soin le suçoir d'une espèce de calige rentrant dans le genre Pendarus de Leach, et en a ensuite comparé les pièces avec celles de la bouche des crustacés pourvus de mä- choires. Deux lames impaires, l’une antérieure, l’autre pos- térieure, et présentant une fente qui s'ouvre dans l'intérieur d’un tube conique formé par leur réunion, et deux longs filets styliformes portés chacun sur un tubercule inséré près de la base du tube, et péné- trant dans son intérieur : voilà les pièces qui con- stituent le sucoir. Un peu plus en dehors est une paire d’appendices consistant chacun en une petite tige cornée, * terminée par un crochet avec ur palpe rudimentaire. En dessous et un peu plus en arrière sont deux autres ap- pendices formés d’un tubercule et d’une pièce en forme de stylet dirigée en arrière ; sur les côtés extérieurs tant du siphon que de ces autres parties, sont rangées sur deux lignes longitudinales trois autres paires d’appen- dices qui paraissent être de petits pieds propres à la pré- (1) Voyez les Ann. des Se. nat., t. xxx, p. 317. + ie ( 253) hension ; les deux supérieurs et les deux inférieurs étant terminés par un crochet ou un fort onglet. Les deux premiers se portent en avant, et on pourrait les prendre pour des antennes intermédiaires. Au dessous de tous les appendices précédens viennent ceux qui forment les pattes. | Les commissaires de l’Académie ont donné des éloges au soin avec lequel M. Edwards a observé et décrit l’or- ganisation du crustacé qui fait l'objet de son Mémoire : mais ils n’ont pu regarder que comme un parallèle ingé- nieux la comparaison qu'il cherche à établir entre ses organes de la manducation et de la Iocomotion et ceux des crustacés pourvus de màchoires. Le mème auteur appliquant à quelques divisions des crustacés les principes de la méthode naturelle , propose de rendre à l'appareil respiratoire l'importance qui lui appartient. D’après son idée, les caractères de l’ordre des crustacés Stomapodes se simplifient et les limites s’en déterminent d’une manière plus certaine. Ayant étudié plus particulièrement l’organisation du genre Mysis, il a découvert que ces crustacés étaient dépourvus de tout appareil branchial ; il a reconnu que les Phyllosomes étaient dans le même cas, et de nouvelles recherches lui ont permis de constater l'absence des mêmes organes dans le geure Lucifer de M. Thompson, Selon M. Ed- wards , l’ordre des Sitomapodes serait distingué de celui des Décapodes en ce qu’il n’aurait pas de branchies lo- gées dans une cavité située de chaque côté du thorax. Dès lors les Mysis, les Thysanopodes, ainsi que le genre Lucifer, appartiendraient à cet ordre. ( 214 ) Travaux de M. Guérin. M. Guérin a communiqué à l’Académie un travail sur l'organisation extérieure des Phyllosomes, et la monogra- phie de ce genre de crustacés. L'auteur ayant eu à sa dis- position les riches collections de MM. Lesson et Ray- naud, a pu facilement remplir les lacunes qu’avaient dû laisser ses devanciers. Les caractères qu'il assigne à ce genre d’après ses principales observations , sont les suivans : Test divisé en deux boucliers minces et transparens, dont l’antérieur, grand, de forme arrondie ou ovalaire, donnant attache en avant à deux yeux pédiculés, à quatre antennes, et en arrière à la bouche ; le second portant à son pourtour les secondes mâchoires, les pieds-mâchoires, les pieds proprement dits, l'abdomen ou la queue; bou- che formée d'un labre globuleux, dé deux mandibules tranchantes , un peu coriaces , dépourvues de palpes ; d’une paire de mâchoires bifurquées et armées d’épines denticulées ; seconde paire de mâchoires, et première paire de pieds-màchoires radimentaires, aplaties, de forme variable, et plus ou moins éloignées de la bouche proprement dite ; deuxième et troisième paires de pieds-" machoires, composées de plusieurs articles, et portant à leur partie inférieure et externe un appendice flagelli- forme, ou à sa place un petit corps oblong et rudimen- taire ; pieds au nombre de dix, fort longs , composés de quatre articles, terminés généralement par un onglet crochu , et portant vers leur base un appendice flagelli- forme ; abdomen ou queue composé de cinq segmens, dont les quatre premiers portent chacun en dessous une ( 5) paire d’appendices natatoires divisés en deux feuillets, et dont le dernier est terminé par une nageoire de cinq feuillets. Tel est, selon M. Guérin, le signalement du genre Phyllosome. Les organes de la génération et les mœurs de ces ani- maux sont inconnus. Tout ce que l’on sait, c’est qu'ils se tiennent à la surface de la mer, qu’ils y nagent lente- ment en agitant leurs appendices flagelliformes, et qu’é- tant transparens, leur présence n’est décelée que par la couleur bleue de leurs yeux. Ces animaux, si l'on en excepte l'espèce découverte par M. Risso, dans la Médi- terranée, habitent exclusivement les mers intratropicales. Les espèces mentionnées par M. Guérin sont au nom- bre de douze , dont six inédites. Il les distribue, d’après Ja forme des antennes extérieures et celle des seconds pieds-mâchoires, en deux sections principales, qui elles- mêmes se subdivisent chacune en deux, la première d’après la situation de la bouche, la seconde d’après la longueur des deux pieds postérieurs. Travaux de M, Latreille. L’impulsion communiquée , dans ces derniers temps , à l'étude des sciences naturelles, a été si vive et si géné- rale, qu’elle s’est étendue jusqu’à des objets qu'une pré- vention presque universelle semblait condamner à l'ou- bli, et dont les noms même inspiraient la frayeur ou le dégoût. Tels sont les scorpions , les araignées, les aca- rus , et autres animaux composant aujourd'hui la classe des Arachnides. Lister, Albin, Clerck et Degéer, s’éle- vant au-dessus des préjugés vulgaires, donnèrent les premiers une attention spéciale à ceux qui forment le (216 ) genre Æranea de Linnœus. Une espèce propre aux cou- trées méridionales de l’Europe , et très-remarquable par la manière dont elle construit son habitation, l Æraignée maconne, devint, pour l’abbé de Sauvages, un sujet curieux d'observations. Ses habitudes sont très-analogues à celles d’une autre espèce, dont long-temps avant lui avait parlé Brown dans son histoire naturelle de la Jamaï- que , l’A{raneanidulans de Linnæus. Une troisième es- pèce, semblable aux précédentes par sa manière de vivre, et propre à la Toscane, à l’île de Corse, l’Araignée de Sauvages, fut ensuite l’objet des recherches de Rossi. Mais jusqu'alors l’organisation particulière de ces Arach- nides avait été négligée. Dorthez, le premier, en observa la composition buccale, ainsi que celle de l’4raignée aviculaire. Cependant il ne remarqua point les carac- tères propres aux espèces précédentes et qui consistent dans la présence d’une série de petites dents cornées , formant une espèce de ràteau, à l'extrémité supérieure de la première articulation de leurs griffes ou de leurs mandibules. M. Latreille remplit cette lacune dans un Mémoire qui fait partie du recueil de ceux de la Société d'histoire naturelle de Paris. Ces espèces , ainsi que les autres aranéïdes qui présentent la même conformation dans les parties de la bouche, furent comprises par un autre de nos confrères, M. Walckenaer, dans un genre particulier, celui des Mygales. Depuis cette époque, c’est-à-Gire depuis trente et quelques années, ces deux savans n'ont cessé d’éclaircir par leurs investigations l'étude de cette intéressante famille , qui rentre dans une division de la classe des Arachnides , distinguée par la présence d'organes pulmonaires. L'un de nos correspon- ( 217) dans , M. Léon Dufour, qui a publié sur l’anatomie de divers insectes des Mémoires d’un grand intérêt, et qui ne s’est pas moins cecupé de celle des Aranéïdes, a divisé cette famille en deux coupes très-naturelles, d’après le nombre de ces organes , qui est tantôt de quatre, tantôt de deux seulement. De là l’origine des dénominations de quadripulmonaires et bipulmonaires. Les Mygales et quelques autres genres appartiennent à la première section. Des vues générales sur les Aranéïdes quadripulmonai- res, une notice de quelques espèces inédites du genre Mygale , et la description des nids de l'espèce de ce genre, citée plus haut, sous le nom d’{ranea nidulans , et qui est la Mygale recluse de M. Walckenaer, sont le sujet d'un Mémoire présenté par M. Latreille. Nos colons américains désignent l’Araignée aviculaire et d’autres grandes espèces de Mygales sous la dénomi- nation d’Araigrées crabes. D'après Pison, les grandes Mygales sont appelées collectivement par les Brésiliens Nhamdu ou Nhamdiu ; et sur la côte de Malabar, au témoignage de feu Lesche- nault de La Tour, les Crabes sont connus sous une dé- nomination presque identique , Namdou. Par le nombre plus considérable (huit) de leurs pou- mons , les Scorpions semblent devoir ouvrir la classe des Arachnides. A l'égard des Aranéïdes , cette quantité donne aussi le moyen d’établir la transition des Théra- phoses de M. Walckenaer à celles de sa division suivante, portant le titre général d’Araignées. Au lieu de mettre en tête de celle-ci le genre les Lycoses ou les Araignées loups , il faut évidemment passer des Théraphoses aux ( 218 ) Dysdères , puisqu’ici le nombre des poumons est encore de quatre. Ce dernier genre se lie avec celui des Séges- uries, et par conséquent avec les autres genres de la division des Araignées tapissières. À ces caractères, il faut ajouter celui que l’on tire du nombre des filières ; il n’est que de quatre dans les Théraphoses, au lieu de six ; et deux, dans tous les cas, ne méritent point cette qualification , en ce qu’elles ne fournissent point de soie. On voit encore que le dernier article des palpes des mèles , ce bouton qui, suivant les uns , est l'organe fé- condateur, et, selon d’autres, un simple organe excita- teur , est beaucoup plus simple dans les Théraphoses, les Dysdères et les Ségestries. Feu Olivier avait pensé que les Mygales pourvues d’un râteau, ou celles dont il avait formé une petite famille, avec la désignation de mineuses , devaient être séparées génériquement. M. Latreille partage ceite opi- nion, et cette nouvelle coupe compose son genre Ctenize, queM. Savigny a nommé depuis (Description de l'Égypte) Nemesia. La Mygale cardeuse ne formera plus une espèce. Aïnsi que l’avait avancé M. Dufour , elle n’est que le mâle de Ja Maçonne. Tous les individus de ce sexe que M. Latreille a eu occasion d'examiner, si l’on en excepte deux espèces, ont un ergot ou forte épine à l'extrémité inférieure des jambes. Il avertit que, pour faciliter le signalement des espèces, :] est important de tenir compte des proportions relatives des articles du tarse. C’est ainsi que dans quel- ques-unes , notamment l’Aviculaire, ces articles sont plus courts, guère plus longs que larges, presque car- rés, ct que le dernier forme une sorte de palette, tan- \ \ (219) dis que dans les autres le tarse est linéaire, avec le premier article beaucoup plus long que le suivant. Les poils qui en revêtent la face intérieure , et composent dans quelques-unes une brosse très-fournie, doivent aussi fixer l’attention. M. Latreille décrit deux espèces de Mygales propre- ment dites, l'une dédiée à M. Barthelemi, qui l'avait recue vivante, et l’autre qu’il nomme weinée, à raison des lignes rouges du dessus de son abdomen. Celle-ci se range dans la division des Mygales à pattes longues, et l’autre dans celle où ces organes sont beaucoup plus courts el terminés en palette. Avec les Mygales sans brosse, du moins aux quatre tarses postérieurs , se placent la M. calpéienne de M. Walckenaer , fa même que celle que M. Dufour nomme Valencienne, et la Cténize sicilienne. Les mâles de ces deux espèces n’offrent point d’ergot aux deux jambes antérieures. M. Latreille, en visitant la collection de la société linnéenne de Londres , y a toùvé un individu de l4- ranea nidulans , autre sorte de Cténize , très-voisine de la M. pionnière de M. Walckenaer, et il en donne la description, aiusi que celle de son nid , envoyé par M. Prior à M. Royer, secrétaire de l'administration du Muséum d'histoire naturelle , et qui ressemble beaucoup à celui de l'espèce précédente. II est long de neuf pouces, en forme de cône renversé où d’entonnoir à sa partie supérieure , et rétréci et cylindrique ensuite. Son inté- rieur présente intérieurement, au point où finit la portion conique, une saillie en forme de cordon ou de bourrelet. L'ouverture à un pouce de diamètre. Elle se ferme au moyen d’un opercule circulaire , à charnière , et mobile, ( 220 ) comme celui du nid des autres Cténizes, mais plus mince, très-plat , et qui, vu extérieurement , paraît être composé de plusieurs feuillets de terre appliqués les uns sur les autres. Une couche de terre de même nature recouvre le tube qui forme les parois intérieures. de l’habitation. Brown n’a représenté que ce tube , et, d’après son des- sin, l’on croirait que l’opercule est double. Il place cette Aranéïde dans son genre Z'arantula. Badier , au. rapport d'Olivier , avait observé la même espèce dans l’île de la Guadeloupe. Sa piqüre produit une douleur très-vive, contre laquelle on emploie des sudorifiques. M. Latreille, à qui l'histoire littéraire n’est pas moins connue que l’histoire naturelle, s’est occupé de déter- miner les connaissances que les anciens ont eues de la. soie et de l’animal qui la produit. Nous avons parlé, dans notre analyse de 1826 , en: faisant l'extrait d’un Mémoire de M. Mongès, des che- nilles que Pline prétendait habiter sur le Chène, le Té- rébinthe, le Frêne et le Cyprès de l’île de Cos, et y filer: des cocons dont on préparait de la soie. M. Latreille pense que, dans les récits d’où celui de. Pline a été tiré, il ne s'agissait pas de l’île de Cos dans l’Archipel , mais d’une contrée beaucoup plus éloignée. Rappelant à ce sujet le passage de Pausanias sur l’animal du pays des Sères , qui produit la soie, et où il est dit que la Serie est une île du fond de la mer Érythrée AE cherche à prouver que les Sères n’habitaient point, comme on l’a cru, dans l’Asie centrale ou à la Chine, mais bien dans quelqu’une des îles formées par divers fleuves, aux environs du cap Martaban, au royaume d’Ava, cap qui lui parait le Zabin de Pline. I] juge C'EST) même que le nom de Sères y est encore conservé dans celui de la villede Sirian. Déjà M. Gosselin avait reconnu le fleuve Serus de Ptolémée, qui doit être le Ser de Pausanias , dans la rivière de Pégu qui coule à Sirian. Or tout ce pays abonde , ainsi que le midi de la Chine et le Bengale , en vers à soie sauvages de différentes espèces , dont il en est une qui tire sa soie en fils très-longs qui s’attachent aux arbrisseaux et aux buissons suivant que les vents les poussent d’un côté ou de l’autre. On les amasse, et l’on en ourdit, selon du Halde , une espèce de droguet. L'un des arbres dont ces vers sauvages se nourrissent est un Térébinthe; un autre, une sorte de Frène ; un troisième, un Chène dont les feuilles ressem- blent à celles du Châtaignier. Roxburgh a fait connaître les vers à soie sauvages du Bengale, dont l’un (le Bombyx militta de Fabricius ) vit sur le jujubier ; un autre (le Phalæna cynthia de Drury ) se tient sur le ricin. Aristote attribue la découverte de l’art de dévider la soie à Pamphile, de l'ile de Cos, et M. Latreille fait remarquer que c’est aussi à une femme, à Si/ing , fille de l’empereur Æoang-ti, que les Chinois font honneur de cette invention ; et comme $Sénèque dit en parlant de ces gazes de soie qui ne garantissaient ni le corps ni la pudeur, qu’on les faisait venir de pays inconnus même au commerce , M. Latreille doute que cette Pamphile aitappartenu à une île aussi rapprochée que celle de Cos, ou bien il croit que si elle inventa quelque chose, ce fut l’art d’efliler les étoffes de soie et d’en ourdir de nouveau les fils avec du lin, pour faire ces étoffes que Pline nomme framo-serica. (363 Parmi les îles que forment les branches de la rivière d’Ava ou l'Iraouaddi, il s'en trouve une qui s'appelle Cosmin; et c’est là que M. Latreille croit reconnaître la Cos des vers à soie, que l’on a confondue ensuite avec la Cos de l'Archipel. Une partie de son mémoire est d’ail- leurs employée à expliquer les rapports des Anciens sur la manière d'opérer de ces vers, rapports où la vérité est fort altérée , comme cela devait être d’après des récits faits par des voyageurs ignorans et qui peut-être né tenaient pas même les faits de la première main (1). Travaux de MM. Percheron et Gaury. MM. Percheron et Gaury ont entrepris la monogra- phie de la division des Mélitophiles , dans la famille des insectes lamellicornes. Ces animaux, remarquables par la richesse et la variété de leurs couleurs, et auxquels appartient le scarabé vert doré, si commun sur les fleurs, ont été l’objet de nombreuses et importantes recherches. Néanmoins le travail de MM. Percheron et Gaury, ap- puyé sur un grand nombre d’observaiions nouvelles, ne pourra que profiter à la science. C’est sur le caractère du corselet dont le bord postérieur est tantôt droit, tantôt dilaté en forme de lobe dans son milieu, de manière à diminuer l'étendue de l’écusson, et même à le remplacer, et sur la consistance du lobe terminal des mâchoires, qui est tantôt corné et denté, tantôt membraneux et sans dents, que reposent les divisions principales des deux auteurs. Leur première section des Mélitophiles , celle (1) Voy., pour p'us de dévéloppemens , le Mémoire de M. Latruille, inséré en entier dans les Ann. des Se. nat., t. xxa1r, p. 58. ( 208 :) qui répond au genre Zrichius de Fabricius, se compose de huit genres; et la seconde, celle qui embrasse le genre Cetonia du même auteur, en n'y comprenant que les espèces à mandibules membraneuses, en renferme treize. Sur le nombre total de vingi-un genres, huit sont propres aux auteurs ; et s’il est vrai de dire que dans ce nombre quelques-uns reposent sur des caractères trop secondaires , et plutôt spécifiques que génériques, les commissaires de l’Académie n’en ont pas moins cru de- voir recommander à son approbation la monographie de MM. Percheron et Gaury. Travaux de M. Strauss. M. Strauss à ajouté à ses précieuses recherches sur l'anatomie du Hanneton et sur celle de l’Araignée avicu- laire, un nouveau travail destiné à faire connaître les organes du mouvement de l’une des plus grosses espèces d'insectes Hyménoptères de notre pays, la guépe-frelon. Comme les frelons sont des insectes qui ont besoin tout à la fois de couper, de broyer et de sucer leurs ali- mens, l’auteur a cru devoir les choisir de préférence à d’autres espèces de l’ordre des Hyménoptères, parce que les parties de leur bouche devaient par cela même lui offrir la réunion de diverses particularités d'organisation. En effet, quant au nombre des pièces, les organes de leur bouche sont semblables à ceux des Coléoptères; mais déjà leurs formes altérées indiquent les modifications qu'elles éprouveront dans les Hémiptères, comme les punaises , et dans les insectes à deux ailes, comme les taons. ( 224 ) Nous ne pouvons présenter qu’une analyse rapide de ce grand travail, qui est surtout intéressant par les dé- tails descriptifs et par les comparaisons que ces détails permettent. M. Strauss a isolé, désarticulé, décrit et figuré sous divers aspects toutes les pièces solides qui forment la charpente des frelons , au nombre de 267, et les 258 muscles, dont l’action et les usages sont distincts et dé- terminés. La première partie est consacrée à l'étude du têt ou de l’ensemble des tégumens. L'auteur fait remarquer que dans tous les Hyménoptères, au contraire de ce qui a lieu dans les insectes à élytres, les ailes supérieures servant plus au vol que les inférieures, les muscles qui meuvent les premières ont , par leur développement, modifié les dimensions des pièces du corselet. La seconde partie est consacrée au système musculaire. Les muscles du frelon diffèrent peu de ceux des Coléop- tères décrits dans le hanneton. L'ordre suivi dans leur exposition est d’ailleurs le même que celui de la descrip- tion des tégumens. L'auteur se propose de faire connaître par la suite les appareils digestifs, sécrétoires, génitaux mâle et femelle, et les systèmes respiratoire et nerveux du même insecte. Travaux de M. Dugès. M. Dugès qui, il y a quelques années, avait déjà en- tretenu l’Académie de ses recherches sur les planaires, lui a présenté un nouveau Mémoire sur ces animaux et sur plusieurs genres voisins (1). (1) Voyez les Ann. des Sc. nat,, t. XXI, p. 72. ( 225%) Publication de M. Ehrenberg. Une acquisition bien précieuse pour la zoologie, c’est l'ouvrage que M. de Humboldt à présenté à l’Académie, de la part de son auteur, M. Ehrenberg, et qui a pour objet les petits animaux connus sous les noms de micros- copiques et d’infusoires; non-seulement M. Ehrenberg en a beaucoup observé pendant le voyage qu’il a fait en Égypte et en Nubie, et a déterminé les espèces euro- péennes qui se retrouvent les mêmes dans ces contrées éloignées ; non-seulement il a établi dans cette classe remarquable de nouvelles distributions méthodiques, et y a ajouté de nombreuses espèces nouvelles; il a surtout fait une découverte qui change beaucoup les idées que l’on avait de leur organisation. En teignant l’eau où ces animaux vivent , avec des matières colorantes organiques non altérées, comme de l’indigo, du carmin , du vert de nerprun, il est parvenu à rendre leur canal alimentaire très-visible, er il s’est assuré ainsi qu'aucune de leurs espèces ne se nourrit par l’intus-susception de sa surface, mais qu'elles ont toutes un canal intestinal, et même souvent fort compliqué, contourné sur lui-même et muni d'estomacs ou de cæœcums quelquefois très-nombreux. Il a même aperçu dans quelques-uns des organes spéciaux de reproduction et jusqu’à des traces de système nerveux et musculaire. Les naturalistes avaient déjà reconnu des organes intérieurs et particulièrement un estomac, dans les plus grands de ces animaux, nommément dans les rotifères ; mais nous ne pensons pas que personne avant M. Ehrenberg, se soit douté que dans les espèces regar- dées comme simplement homogènes et gélatineuses, dans xx1v. — Novembre 18351. 12 (‘326 9 ces monades dont une goutte d’eau renferme souvent tant de milliers, 41 y eût cependant un canal digestif et des estomacs. Cette découverte change entièrement les idées, et renverse surtout bien des systèmes ; elle est du nombre de celles qui font époque dans les sciences. Un fait d’un vif intérêt pour la géographie des ani- maux, et, sous de certains rapports, pour l’histoire des ossemens fossiles, l'existence du grand tigre du Bengale dans le nord de l'Asie (entre les latitudes de Paris et de Berlin), a été constaté par M. Ehrenberg dans son voyage de Sibérie. M. de Humboldt nous a communiqué l’ex- trail d’un Mémoire manuscrit de ce naturaliste, dans lequel il discute ce fait , et donne des éclaireissemens sur la grande panthère à long poil, Felis irbis, des monts Atlas, comparée au Felis pardus de Cuvier et au Felis chalybeata (1). Voyage et Travaux de M. de Humboldt. M. de Humboldt, un des huit associés étrangers de l’Académie, est revenu à Paris après une absence de quatre ans, ét il a prouvé par un grand nombre de Mé- | moires et par des Notices qu’il a données de travaux non encore terminés , que ni son activité ni son zèle pour les progrès des sciences n’ont diminué. Dans une des séances du mois d'octobre, il a passé rapidement en revue les résultats principaux du voyage qu'il a fait, sous les aus- pices de S. M. l’empereur de Russie, conjointement avec MM. Ehrenberg et Gustave Rose , aux mines de l’'Oural et de l’Altaï, aux frontières de la Songarie chinoise et à | (x) Voyezles Ann. des Se. nat.,t:xxt, p. 387. ( 227) la mer Caspienne, voyage de plus de 4500 lieues. Pendant une seule année (celle de 1829) quatre expéditions scien- tifiques très-remarquables ont été entreprises dans cette partie de l’ancien continent : celle de M. de Humboldt; celle de M. Parrot fils au sommet de l’Ararat, qu'il a trouvé couvert de laves d’obsidienne et de 452 mètres plus élevé que le mont Blanc; ceïle de M. Kupfer à la montagne trachytique d’'Elbrouz dans le Caucase, qui atteint à la hauteur de 5ooo mètres ; enfin, le grand voyage de MM. Hansteen de Christiania et Adolphe Erman de Berlin, entrepris dans le but de déterminer les lignes magnétiques depuis Pétersbourg jusqu’au Kamtschatka. M. de Humboldit s’est embarqué à Nischni-Nowgorod sur le Wolga pour descendre à Casan et aux ruines tar- tares de Bolgari, ancienne résidence des Timurides. De là il est allé par Perm à Ekatherinebourg sur la pente asiatique de l’Oural , vaste chaîne composée de plusieurs rangées presque parallèles, dont les plus hauts sommets atteignent à peine 14 ou 1500 mètres, mais qui suit, comme les Andes, depuis les formations tertiaires voi- sines du lac Aral jusqu'aux roches de grünstein voisines de la mer Glaciale, la direction d’un méridien. M. de Humboldt a visité pendant un mois les parties centrales et septentrionales de l’Oural , si riches en alluvions qui contiennent de l’or et du platine, les mines de malachite de Goumechefshoi , la grande montagne magnétique de Blagodad, les fameux gisemens de topaze et de béryl de Moursiusk. Près de Nischni Tagilsk, contrée que l’on peut comparer au Choco de l'Amérique du sud, on a trouvé une pépite de platine du poids de plus de 8 kilo- (:228 9 grammes. D'Ekatherinebourg le voyageur se dirigea par Fioumen à Tobolsk sur l’Irtyche, et de là par Tara, la steppe de Baraba redoutée à cause de la piqüre d'insectes de la famille des Tipules qui y abondent, à Barnaoul sur les rives de l’'Obi, au lac pittoresque de Koliwan et aux riches mines d'argent du Schlangenberg, de Riddersk et de Sirianofski , placées sur la pente sud-ouest de l’Altaï, dont le plus haut sommet, appelé par les Calmoucks Tjictou (montagne de Dieu) ou Alastou (montagne Pelée), et exploré récemment par le botaniste M. Bunge, atteint presque l'élévation du Pic de Ténériffe. La production annuelle en argent des mines de Koliwan est de plus de 76,000 marcs. En se dirigeant de Riddersk au sud vers le fortin d'Ust-Kamenogorsk, MM. de Humboldt, Ehren- berg et Rose passèrent par Boukhtarminsk à la frontière de la Songarie chinoise ; ils obtinrent même la permission de franchir la frontière pour visiter le postemongol de Baty Khoni-Maïlakhou, point très-central de l'Asie (au nord du lac Dzaïzang), qui se trouve , d’après les détermina- tions chronométriques de M. de Humboldt, par les 82° de longitude, par conséquent presque dans le méridien de Patna et de Katmandou. En retournant de Khoni- Maïlakhou, à Ust-Kamenogorsk, les voyageurs virent sur les rives solitaires de la Boukhtarma, par une longueur de plus de 5,000 mètres, le granite divisé en bancs pres- que horizontaux, épanché sur un schiste dont les lits sont en partie inclinés de 85°, en partie entièrement verticaux. Du fortin d’Ust-Kamenogorsk , on longea la steppe de la Horde moyenne des Kirghises par Semipo- latinsk, Omsk, puis la ligne des Cosaques de l’Ischim et du Tobol, pour atteindre l’Oural méridional. C’est là ( 229 ) que près de Miask, sur un terrain de très-peu d’éten- due, à quelques pouces sous terre, on à trouvé 1rois . pepites d’or natif, dont deux avaient le poids de 28 et la troisième de 43 marcs. Les voyageurs longèrerit l'Ou- val méridional jusqu'aux belles carrières de jaspe vert près d’Orsk , où la rivière poissonneuse du Jaïk brise la chaîne de l’est à l’ouest ; de là ils se dirigèrent par Oren- bourg (ville qui, malgré son éloignement de la mer Cas- pienne, se trouve déjà au-dessous du niveau de l’Océan, d’après les mesures barométriques faites pendant ue année entière par MM. Hofmann et Helnersen); puis à la fameuse mine de sel gemme d’Iletzki, située dans la steppe de la petite horde des Kirghises ; au chef-lieu des Cosaques d’Ouralsk, qui, munis de crochets, prennent de nuit, de leurs mains, en plongeant, des esturgeons de 4 + pieds à 5 pieds de long ; aux colonies allemandes du gouvernement de Saratow sur la rive gauche du Wolga; au grand lac salé d’Elton, dans la steppe des Calmoucks ; et par Sarepta belle colonie des frères Moraves), à Astra- kan. Le but principal de cette excursion à la mer Cas- pienne, était l'analyse chimique de l’eau que devait faire M. Rose, l'observation des hauteurs barométriques cor- respondantes à celles d'Orenbourg, de Sarepta et de Ca- san ; et la collection des poissons de cette mer intérieure, pour enrichir le grand ouvrage sur les poissons de MM. Cuvier et Valenciennes. En effet, le Muséum d'histoire naturelle du Jardin des Plantes a reçu, par M. Ehren- berg, plus de 30 espèces de la mer Caspienne et de dif- férens fleuves de la Russie européenne et asiatique. Les poissons du lac Baïkal ont été demandés par M. de Humr- boldt. D’Astrakan, les voyageurs retournèrent à Moscou ( 230 }) par l’isthme qui sépare le Don et le Wolga, par le pays des Cosaques du Don, Woroneje et Toula. C’est pendant le cours de cette expédition, qu'a été faite, au commencement du mois de juillet 1829, la découverte importante des diamans de l'Oural, par M. le comte de Polier et un jeune minéralogiste de l'école de Freiberg, M. Schmidt, qui avaient accom- pagné M. de Humboldt depuis Nischni-Nowgorod. Des analogies géognostiques entre les formations dn Bré- sil et de l’Oural, et l'identité d’association de certains minéraux dans les régions les plus éloignées du globe, avaient fait naître chez ce savant, de même que chez M. d'Engelhardt, professeur de minéralogie à Dorpat, la ferme persuasion de l'existence des diamans dans les terrains d’alluvions aurifères et platinifères de l’Oural, du Choco et de la Sonora. M. de Humboldt s'était ocenpé de cette recherche avec beaucoup d’ardeur, conjointe- ment avec MM. Rose et Schmidt, dès son arrivée à Eka- therinebourg , en examinant à la loupe les résidus des lavages ; mais ses recherches ne furent pas coùronnées de succès, et la découverte du diamant par le comte de Polier et M. Schmidt, eut lieu sur la pente européenne de l’Oural, 8 lieues au nord-est de Bissersk, dans les al- luvions de Krestowosdvijenski, trois jours après que ces messieurs eurent quitté l'expédition dans les environs de Kouchwa et de Tourinsk, pour passer le dos de la chaîne centrale et revenir sur Perm. M. de Humboldt a présenté à l’Académie, en son nom et en celui de son compagnon de voyage M. Gustave Rose, plusieurs minéraux recueillis pendant ce voyage, parmi lesquels il y en à de très-rares ou dont la compo- ( 58) sition était entièrement inconnue jusqu'ici, tels que l'ae- chynite, qui est, selon Berzélius, un titanate de zircone; le pyrochlore de Miask, qui est un titanate de chaux avec oxide de cérium, substance que M. Wohler n'avait trouvée jusqu'ici que dans la cyanite à zircone de Chris- tiania en Norwège ; la pyrophyllite de Bérésow (silicate d’alumine hydraté et se gonflant à la flamme du chalu- meau), analysée par l’habile chimiste de Moscou, M. Herr- mann ; la gahnite de Kyschtim dans l'Oural central: la cancrinite, qui a des rapports avec le lazulite et se trouve dans les monts Ilmen, dans une roche d’élæolithe très- répandue dans ces contrées ; de beaux cristaux de diop- tase de la grande steppe des Kirghises de la Horde moyenne au pied de la colline d’Altyn-Tubé, mais ré- cemment découverte aussi sur la pente occidentale de l’'Oural; enfin, deux nouvelles combinaisons de tellure de la mine de Sawodinski, au pied sud-est des monts Al- tai, peu éloigné de la frontière chinoise. Le tellure était jusqu'ici inconnu en Asie. M. Rose a trouvé que le mi- nérai de Sawodinski, qui avait été confondu avec le sul- fure d'argent d’une couleur très-claire , renferme deux substances différentes : le tellure d'argent, composé de 62,42 argent, 36,92 tellure et 0,24 fer, c’est-à-dire d’un atome de telluriam et d’un atome d’argent, et le tellure de plomb, composé de 1,28 d'argent, 60,35 de plomb et 38,35 de tellurium. Ces minérais de tellure d'Asie dif- fèrent entièrement de la composition des tellures auri- fères de Nagyag en Transylvanie. M. de Humboldt a aussi annoncé à l’Académie ur grand travail de M. Gustave Rose sur l’or des filons, et l'or des terrains d’alluvion de l’'Oural , chaine de mon- M : ( -23a ) tagnes qui, sur son dos, offre des terrains d’alluvion auri- fères et platinifères, depuis le 53° jusque bien au-delà du Gr° degré de latitude. M. Rose a trouvé dans les lavages de Chabrowski, près Ekatherinebourg, sur la pente asia- tique de l'Oural , de l'or presque pur renfermant 99,34 d’or , 0,14 d'argent, 0,43 de cuivre, et 6,05 de fer, par conséquent de l'or plus pur encore que celui de Giron et de Bucaramanga en Colombie , analysé par M. Boussin- gault; mais parmi les échantillons rapportés de l’Altaï, des filons de Sirianowski, M. Rose a trouvé de l'or natif argentifère à 60,49 d’or et 38,79 d'argent. M. de Humboldt à fait connaître encore à l’Académie son travail sur les Systèmes de montagnes de l’intérieur de l'Asie, sur les volcans qui y ont été actifs dans les temps historiques , même en jetant des laves, et sur la grande dépression de l’ouest de l’Asie, dépression dont les surfaces de la mer Caspienne et du lac Aral forment la partie la plus basse (l’une est de 98, l’autre de 62 mè- tres au-dessous du niveau de l'Océan), mais qui s'étend conformément aux nouvelles mesures barométriques de MM. Hofman , Helmersen, Humboldt et Rose, fort loin dans l’intérieur des terres, jusqu’à Saratow sur le Wolga et Orenbourg sur le Jaïk, vraisemblablement aussi au sud-est jusqu’au cours inférieur du Sihoun (laxartes) et de l’Amou (Oxus des géographes anciens). Cette conca- vité de l’Ancien Monde est un pays-cratère, comme le sont sur Ja surface lunaire les taches appelées Hipparque et Archimède : c’est un creux dont la formation paraît être en rapport intime avec le soulèvement du Caucase, du plateau de la Perse , et de cet énorme massif que l’on désigne par le nom bien vague et bien incorrect de pla- ( 233 ) teau de l'Asie centrale, sur les limites de la Songarie chi- noise et de la steppe des Kirghises. C’est à Ust-Kame- nogorsk , à Semipolatinsk et à Orenbourg , où arrivent tant de caravanes de l’intérieur, que M. de Humboldt s’est efforcé d’obtenir des Tatars, des Boukhares et des Tachkendis, des itinéraires et des informations sur les contrées voisines de leur pays. Les voyages à Thourfan, Aksou, Khoten, Jerkend et Kachemir sont assez rares : mais Kachgar, le pays situé entre l’Altaï et la pente septentrionale des Monts - Célestes, Gouldja sur les rives de l’Ili (lieu d’exil des grands de la cour et des mi- nistres chinois), Khokand, Boukhara et Samarkand, sont aujourd’hui fréquemment visités par des marchands et commis voyageurs, de race asiatique, établis dans la Sibérie méridionale. Nous ne pouvons suivre M. de Hurboldt dans le détail de ees renseignemens géographiques, qui se lient à ceux que MM. Abel Rémusat et Klaproth ont tirés de la con- naissance approfondie des ouvrages de statistique chinois et mantchoux. Nous dirons cependant que la partie moyenne de l’Asie ne formant ni un immense nœud de montagnes, ni un plateau continu, est traversée de l’est à l’ouest par quatre grands systèmes de montagnes, qui ont influé puissamment sur les migrations des peuples et leur état de société. Ce sont : l’Altaï, qui n’est aucunement lié par une chaine continue (le fabuleux Alghidin Tsano de nos cartes), dans la steppe des Kirghises, à la chaine de l’Oural ; les Monts-Célestes (Thian-chan, Mouz-tagh ou Moussour des Tatars, dont le point culminant est le Bokhda-oola ou Bogdo), entre la Songarie et la Petite ou plutôt la Haute-Boukharie ; le Kuenlun on Koulkoun, (284) entre la Haute-Boukharie (le pays de Kachgar, Jerkend, et Khoten) et le Tubet ; enfin l'Himalaya , le plus étendu et le plus développé de tous. Le troisième et Le quatrième de cés Systèmes sont pour ainsi dire réunis et confondus dans les grands nœuds de montagnes du Badakhchan,'du Petit-Tubet et de Kachghar. En deçà des 69° et 70° de- grés de longitude, il n’y a qu'une seule chaîne, celle de l’'Hindou-kho, qui s’abaisse rapidement vers Herat, et se relève de nouveau plus à l’ouest dans le volcan du De- mavend. Du plateau de l'Iran, qui dans sa plus grande étendue (de Tehran à Chyraz) conserve une hauteur moyenne de 1300 mètres, la chaîne de l'Hindou-kho en- voie en se bifurquant à la manière des filons, vers l’In- dostan et le Tubet, deux branches, ou plutôt deux cre- vasses, sur lesquelles ont été soulevées l'Himalaya et le Kuenlun. L'espace intermédiaire comprenant le Katchi, le Tu- bet et le pays de Ladak, est un plateau presque con- tinu, traversé par un réseau de petits chaînons dont la direction et l’origine rappellent aussi les phénomènes variés de la formation des filons. Entre Kachemir, Ladak et Badakhchan , dans le méridien d’Attok , l'Himalaya semble ne former qu’un même et grand massif avec le Hindou-kho , le Kuenlun et le Tsoungling. Ce dernier se prolonge sous le nom de Bolor du sud au nord; réunit à angle droit les deux grands systèmes de montagnes du Kuenlun ou Tubet septentrional, et du Mouz-tagh ; ferme comme un mur à l’ouest le plateau de la Petite ou Haute-Boukkarie , et offre (d’après les idées ingénieuses de M. Élie dé Beaumont), analogue à celle de lOural par sa direction même, une chaîne de montagnes d’un âge ( 2883 relatif très-différent de l’âge des systèmes plus ou moins parallèles à l'équateur. Aucune partie du monde, sans même en excepter l'Afrique méridionale, n'offre une masse de terres aussi étendue, seulevée à une si grande hauteur, que l'Asie intérieure, depuis le Kachemir et les lacs sacrés du Tubet, jusqu’à la chaîne neigeuse du Kingkhav. L’axe principal de cet exhaussement , qui probablement a précédé l’éruption des chaînes sorties sur des fentes allant de l’est à l’ouest , est dirigé du sud- ouest au nord-est. C’est dans cette direction oblique que se trouvent les immenses et hauts plateaux du Gobi, du Tangout, du Khoukhan-noor, des sources du Jeniseï, de la Selenga et de l'Amour ; mais ces plateaux ne remplis- sent pas, comme on le suppose vaguement , toute l'Asie moyenne, entre les 30° et 50° de latitude. Les produetions et les genres de culture de la Petite-Boukharie, celles des pays remplis de lacs, entre les Monts-Célestes et l’Al- tai, prouvent que dans l’Asie moyenne ou centrale, à l’est du méridieu de Fyzabad ou d’Attak, il y a de vastes régions moins élevées au-dessus du niveau de l'Océan, que ne Île sont dans l’intérieur de l’Europe les plaines de la Bavière, du canton de Berne ou de l'Espagne. M. de Humboldt n’a trouvé tout le terrain qui du pied de l'Altaï s'étend vers la Songarie chinoise, qu’à 300 on 350 mè- tres de hauteur absolue ; cependant ce terrain est bien central, car il y a de là également six à sept cents lieues (de 25 au degré) à la mer Glaciale et au golfe du Bengale, et 5 à 900 lieues à la mer Noire et à la mer du Japon. Depuis qu'on multiplie les mesures barométriques pré- cises , beaucoup de fausses idées sur la configuration du sol fondées sur des considérations vagues de climatologie ct d'hydrographie, et répandues sous des formes dogma- ( 236 ) tiques dans nos traités de géographie, s’'évanouissent peu à peu. Après avoir jeté un coup d'œil général sur la constitu- üon géologique de l’Asie, M. de Humboldt examine ce que l’on sait aujourd'hui avec exactitude, d’après les iti- néraires et les ouvrages chinois et mantchoux, sur les phénomènes volcaniques encore actifs dans l’intérieur de l'Asie, à de grandes distances des côtes. Les points les plus remarquables sont les volcans de Pèchan et de Hot- cheou, et la solfatare d'Oroumitsi, placés sur la pente septentrionale et méridionale de la chaîne neigeuse du Mouz-tagh ou des Monts-Célestes, les environs du lac Alakoul et les crevasses de Khobok où l’on recueille le sel ammoniac. Le volcan Pèchan (appelé aussi Hochan ou Aghie, montagne de feu), situé par les 42° 25° ou 42° 35° de latitude, est celui dont l’éruption au septième siècle de notre ère est le mieux constatée. Les relations qui parlent de cette éruption de laves « coulant comme une graisse liquide » sont de l’an 643 de J.-C., du temps de Ja dynastie chinoise des Thang, alors possesseurs tran- quilles de la Petite-Boukharie et de la Songarie. « La montagne vomit, disent ces relations, sans interruption du feu et de la famée. C’est de là aussi que vient le sel ammoniac. Sur une des pentes du Pèchan, toutes les pierres brälent et coulent à une distance de quelques dixaines de lis. La masse en fusion durcit à mesure : qu'elle se refroidit. » D’autres passages d’historiens chi- nois qui décrivent la marche d’une armée des Hioungnou au premier siècle de notre ère, parlent « de masses de pierres en fusion. » Le Pèchan n'était donc pas alors une solfatare, mais un volcan actif comme l’Etna et le Vésuve; ( 237 ) c'était un volcan à coulées de laves, et tellement central, que son éloignement à la mer Caspienne, à la mer Gla- ciale, aux mers du Sud et de l’Inde, dans toutes les direc- tions , est de 5 à 600 lieues (de 25 au degré). Encore en 15797; la Description de l'Asie, publiée à Péking , rap- porte que « la montagne d’ammoniac, au nord de la ville de Koutché, offre des cavernes et des crevasses dont les ouvertures sont remplies de feu, de sorte que pendant la nuit elle paraît comme illuminée par des milliers de lampes. » A l'est du volcan Pèchan (le Mont-Blanc du pays des Eleuts), toute la pente septentrionale du grand système des Monts-Célestes (Thianchan ou Mouz-tagh) présente « des laves, des pierres ponces, et des solfatares que l’on nomme des lieux brülans, er dont la plus grande, celle d'Ouroumtsi, a 8 lieues de circonférence. Si l’on jette une pierre dans ce bassin, il s’en élève des flammes.» Sur la pente méridionale de la chaîne des Monts-Célestes, à 195 lieues de distance du volcan Pèchan, se trouve un autre volcan actif, celui de Tourfan ou de Hotcheou, vol- can de la ville de feu, ville dont les ruines se voient en- core à 3 lieues de Tourfan. M. Abel Rémusat, dans son Histoire de Khoten, et dans la Lettre à M. Cordier, a déjà parlé de ce volcan. « Il en sort tous les jours une flamme semblable à celle d’un flambeau. » À 75 lieues au nord-ouest de la solfatare d'Ouroumitsi, dans une plaine voisine de la rivière de Kobok, s'élève une colline dont les fentes sont très-chaudes et offrent des croûtes d’ammoniac sublimé. Une montagne conique qui s’élève dans le lac Alakoul, et qui, d’après les rapports de Bouk- hares recueillis à Orenbourg , a jadis vomi du feu ; les sources chaudes à l’est ; le gouffre d'Ouybé , duquel sort ( 238 ) un vent chaud d’une force extraordinaire; enfin:les trem- blemens de terre, très-communs entre les lacs Balcachi , Alakoul et la pente méridionale des Monts-Célestes , se lient aux phénomènes que nous venons de décrire rapi- dement. M. de Humboldt croit que la grande dépression de l'Asie, dont l’Aral et la Caspienne sont les parties les plus basses, a peut-être des rapports intimes avec lori- gine et la position de volcans si éloignés de l'Océan. La circonstance remarquable du voisinage de la mer partout où les volcans sont encore en activité, semble tenir moins à l’action chimique de l’eau, qu’à la configuration de la croûte oxidée du globe et au défaut de résistance que dans le voisinage des bassins maritimes les masses sou- levées opposent aux fluides élastiques et à l’issue des matières en fusion dans l’intérieur de notre planète. De véritables phénomènes volcaniques peuvent se manifes- ter, comme dans l’ancien pays des Eleuts et à Tourfan, partout où, par d'anciennes révolutions, une fissure dans la croûte du globe s’est ouverte loin de la mer. Les vol- cans en activité ne sont rarement éloignés des côtes que parce que là où l’éruption n’a pu se faire sur la déclivité des masses continentales vers un bassin maritime, ila fallu un concours de circoustances très-extraordinaires pour permettre une communication permanente entre l’intérieur du globe et l'atmosphère, et pour former des ouvertures qui, semblables à des sources thermales inter- mittentes, épanchent , au lieu d’eau, des gaz et des terres oxidées en fusion, c’est-à-dire des laves. L'auteur a présenté à l’Académie l’esquisse d’une carte qui montre la direction des quatre grands systèmes de ( 239 ) montagnes de l’Asie centrale et le terrain volcanique qui s'étend depuis la pente méridionale des Monts-Célestes à l’est des’pics du Bogdo jusqu’au lac Darlai. C’est la première sur laquelle on trouve l'indication des volcans de l’intérieur, et des hauteurs du sol au-dessus du niveau de l'Océan. M. de Humboldt, en offrant à l’Académie la fin du 3° volume de la Relation historique de son Voyage aux Régions équinoxiales du Nouveau-Continent, a annoncé que de l’ensemble de ses publications sur l'Amérique , qui renferment plus de 1300 planches, il ne reste plus à faire paraître qu'un seul volume de la Relation histo- rique et quelques feuilles du Recueil d'observations de zoologie et d'anatomie comparée, dans lesquelles M. Va- lenciennes terminera la description des coquilles fluvia- tiles et marines trouvées par MM. de Humboldt et Bon- pland dans l’intérieur du Mexique et sur les côtes de la mer du Sud. C’est ainsi que cette grande entreprise, uniquement soutenue par la bienveillance du public et souvent interrompue, sera enfin terminée. Elle forme déjà dans la grande édition 28 volumes, dont 17 in-folio et 11 in-quario. On ajoutera des tables de matières très- étendues qui offriront , à chaque article de botanique, de géographie, de météorologie, de magnétisme terrestre ou de géographie astronomique, ce qui a rapport soit à l'Amérique équinoxiale seule, soit à la physique du globe en général. ( 240 ) Nore sur la position géologique du Calcaire de la Brie, et en particulier sur celui des environs de Champigny ; Par M. Durrenoy. Le sol fertile de la Brie est formé sur la plus grande partie de sa surface par un calcaire contenant une grande quantité de silice, tantôt disséminée dans la masse mème du calcaire, et lui donnant des propriétés hydrauliques très-prononcées, tantôL réunie sous forme de rognons ou de masses plus ou moins considérables. Ces silex ne rem- placent point de corps organisés comme cela est habituel dans la craie; néanmoïns, ils paraissent être égaleinent le produit de concrétions siliceuses. Le calcaire de Cham- pigny cité constamment comme Île type de ce calcaire, montre cette disposition d’une manière très-remarquable; ses cavités sont souvent tapissées de parties siliceuses ma- melonnées , et la surface des silex présente fréquemment la disposition réniforme des Agates. Cet ensemble de ca. ractères a conduit M. Brongniart à désigner le calcaire de la Brie sous le nom de calcaire siliceux , nom qui donne une idée assez exacte de sa nature. Les coquilles que l’on y observe sont uniquement d’eau douce ; ce sont de petites Paludines (P. lævigata, Desh.), des Lymnées (L. longiscata, Brongn.) et des Planorbes. Ces deux der- niers fossiles , rares dans la masse du calcaire, sont au contraire assez nombreux dans quelques couches mar- neuses inférieures ; ils ont presque constamment con- servé leur têt, tandis que les Paludines sont ordinaire- ment à l’état de moules siliceux, ou ne présentent que des empreintes. ( 241) L'absence du Gypse dans la presque totalité du pays; recouvert par le calcaire siliceux, a rendu jusqu'ici la position de ce calcaire incertaine. M. Brongniart l’a assi- milé par analogie aux marnes d’eau douce qui existent à Saint-Ouen à la séparation du Gypse et du calcaire gros- sier ; et il l’a regardé par suite comme appartenant à la partie inférieure du Gypse. J'ai reconnu, d’après des observations nombreuses, que cette position du calcaire de la Brie n’est pas entièrement exacte. Il est en partie supérieur à la pierre à plâtre, mais il est toujours infé- rieur au grès de Fontainebleau. Le calcaire de là Brie est donc une alternance de plus du terrain marin et du terrain d’eau douce dans les formations tertiaires du bassin de Paris. Je donnerai seulement quelques exemples pour mon- trer cette position. Les collines qui bordent la rive droite de la Marne, entre Nogent et Lagny, présentent de nombreuses ex- ploitations de pierre à plâtre. Cette substance ne se retrouve plus sur sa rive gauche ; mais les marnes vertes caractéristiques de cette formation s’y montrent encore de manière à présenter un repère géologique certain. L’amincissement de la formation de pierre à plâtre n’est pas la seule circonstance remarquable que présente la rive gauche de la Marne. Cette formation qui s'élève presque jusqu'à la hauteur de la buite des moulins de Plaisance près de Nogent, se retrouve à Petit-Brie, au niveau de la Marne , d’où il résulte que les couches du terrain plongent vers le S.-O. assez fortement. À Fontenay-sous-Bois, situé à un quart de lieue en- viron de Nogent, la formation gypseuse se montre dans XXIV. 16 (242) toute son épaisseur. Elle y présente, comine à Mont- martre et à Pantin, deux masses : l’inférieure est ex- ploitée par des puits qui ont une cinquantaine de pieds de profondeur ; la supérieure , fort puissante , se montre au jour dans plusieurs points en montant vers le sommet du plateau, et bientôt un sol glaiseux qui décèle la pré- sehce des marnes vertes succède aux derniers indices de pierre à plâtre. Enfin des fragmens de calcaire répandus sur la surface du sol avec une grande profusion nous annoncent peu à peu que sa nature a changé et que des calcaires ont succédé à la formation de plâtre et à ses marnes, Le défaut de carrières ouvertes apporte quelques difficultés à l’étude de ce calcaire. Néann:oins on re- connaît facilement qu’il présente tous les caractères du calcaire siliceux; tantôt il possède une dureté assez grande à cause du mélange intime de silice, tantôt il offre de larges plaques siliceuses plus ou moins colorées en noir comme Îles silex de la craie. Ce calcaire a bien quelque analogie avec la pierre meulière, mais il en dif- fère essentiellement par son tissu qui n’est point carié comme dans la pierre meulière. Ce caractère général pour la formation d’eau douce supérieure dans les envi- rons de Paris est d’accord avec l'absence des sables ma- rins qui n'existent pas à la séparation du gypse et du calcaire dans la côte de Fontenay et de Nogent. Ces sables ont cependant une épaisseur assez considérable dans le prolongement de cette même côte à Pantin, quoique les hauteurs de ces deux sommités soient à peu de chose près les mèmes. Cette circonstance, qu'il est difficile d'attribuer à l’amincissement ou au manquement du sable dans les environs de Nogent, conduit à penser, (243 ) d'accord avec les caractères extérieurs , que le calcaire qui recouvre la formation de plâtre est différent des meulières. La continuité des coteaux de la rive droite de la Marne et du plateau de la Brie jointe à l'identité du terrain nous prouvent au contraire que c’est le même calcairesiliceux qui recouvre les sommités des premières côtes et forme le sol de la Brie, de sorte que si la vallée de la Marne n’était point ouverte , il y aurait continuité de hauteur et de constitution géologique. La descente vers Nogent nous montre la même succes- sion de couches que nous venons d’indiquer à la montée de Fontenay sur le sommet du plateau. Seulement une tranchée ouverte au-dessus des moulins de Plaisance pour la construction d’un fort fait voir la superposition directe du calcaire siliceux sur les marnes, circonstance que nous n'avions fait que juger sur le revers opposé. On remarque en cutre que la position des marnes est moins élevée qu’à Fontenay et que la formation calcaire a par suite une épaisseur beaucoup plus considérable. Entre Brie-sur-Marne et Champigny, bourgs situés tous deux sur la rive gauche de la Marne, mais sur deux pentes opposées du plateau de la Brie, on voit le calcaire siliceux sur une grande épaisseur. L'étude de ces deux localités nous montre encore l’amincissement du terrain de pierre à plâtre et l’abaissement des marnes. La présence du calcaire marin dans la plaine qui sépare Champigny de Saint-Maur nous donne un moyen cer- tain de juger cet amincissement du terrain de pierre à plâtre. Le calcaire marin est exploité dans cette plaine par plusieurs carrières à puits dont la profondeur varie de 32 à 36 pieds , suivant l’épaisseur du terrain d’atter- (244) rissement qui recouvre le fond de la vallée de la Seine et de la Marne et qui s’élève à une certaine hauteur sur la pente des coteaux que suivent ces deux courans d’eau. Ce diluvium cache souvent le contact des marnes et du calcaire siliceux, cependant il est à découvert dans quelques points, comme aux environs de Brie-sur-Marne et surtout près du moulin qui est situé à un quart de lieue au-dessous du village. Ce contact s’observe égale- ment dans un puits qui a été creusé pour l'alimentation de la maison des fours à chaux de Champigny. Ce puits, profond de 120 pieds, traverse d'abord le calcaire siliceux, puis les marnes du gypse surero à 12 pieds de puissance, et se prolonge jusqu'au contact du calcaire grossier où est la nappe d’eau. Je crois utile de dire quelques mots sur cette coupe dans laquelle le calcaire siliceux est très- développé, parce que cette formation ayant une grande uniformité dans tout le plateau de la Brie, cet exemple en donnera une idée très-exacte. Les couches qui reposent inimédiatement sur les marnes gypseuses sont composées de marnes feuilletées blanches, assez solides, et semblables à celles qui con- tiennent la magnésite. Il existe dans ces marnes une très- grande quantité de silex formant des masses plus ou moins irrégulières , et des plaquettes ou petites couches qui ont un pouce à un pouce el demi de puissance. Ces silex , assez fortement colorés en gris, ne se fondent pas dans la pâte , et par suite ne donnent pas naissance à de véritables calcaires siliceux. La surface des silex est re- couverte d'une petite couche blanchâtre terreuse qui est en grande partie siliceuse , quelquefois cependant ma- gnésienne. Ces marnes sont riches en fossiles. Ce sont ( 245 ) principalement des Lymnées fort allongées (ZL. longis- cata), Planorbes et des Paludines. Ces différens fossiles ont conservé leur têt , il est terreux et friable. On trouve en outre dans les marnes une assez grande quantité d'empreintes de végétaux allongés ; ce sont des feuilles de monocotylédones appartenant probablement à des graminées, désignées par M. Ad. Brongniart sous le nom de Poacites. Ces marnes n’ont pas une grande puissance près du moulin de Petit-Brie où elles sont exploitées pour recueillir le silex. Files peuvent avcir 30 pieds d'épaisseur. Au-dessus de ces marnes le calcaire devient compacte, mais d’une manière irrégulière et par parties plus ou moins larges. Tantôt il est d’un gris jaunâtre clair, comme le calcaire lithographique; il présente alors une cassure esquilleuse ; tantôt il est d’un gris blanchâtre, et sa dureté est beaucoup moins grande. La silice s’y trouve aussi disséminée de deux manières assez différentes et en rapport avec la différence dans la nature du calcaire. Ainsi le calcaire jaune esquilleux est pénétré de nom- breuses veines de quarz agate , bleuâtre ou rougeûtre , et de cavités tapissées de petits mamelons de la même sub- stance. Ces veines et ces cavités se ramifient dans tous les sens , ainsi qu'on le voit aux fours à chaux de Cham- pigny. Le calcaire lui-mème est pénétré de silice, cir- constance qui lui donne des qualités hydrauliques supé- rieures. Dans le calcaire blanc un peu terreux, la silice n'aflecte pas des caractères de concrétions aussi pronon- cés ; elle forme des silex blonds qui se fondent dans la pâte et s’en détachent difficilement; de telle sorte qu’au contact des silex et sur une étendue plus ou moins con- sidérable la roche est à la fois ealcaire et siliceuse, comme ( 246 ) cela est habituel dans le fire-sione des Anglais qui ap- partient au grès vert. Le banc calcaire contient une très-grande quantité de petites Paludines , souvent transformées à l’état siliceux, d’autres fois ayant encore son têt, ainsi que nous l'avons observé à Villiers entre Petit-Brie et Champigny. On y trouve aussi quelques Lymnées ; mais ces fossiles, très-abondans dans les marnes inférieures, sont rares dans cette partie supé- rieure de la formation. Ayant reconnu depuis long-temps que le calcaire sili- ceux est supérieur à la pierre à plâtre, ainsi que je viens de le démontrer par deux exemples, j'avais conclu qu'il devait être assimilé aux meulières avec lesquelles ce calcaire a quelquefois de l’analogie, quoiqu'il présente également de grandes différences. L'absence du grès sur une grande partie du plateau de la Brie m'avait surtout confirmé dans cette opinion, lorsqu'une course faite à Pantin par MM. les élèves des Mines , sous la direction de M. de Beaumont, est venu éclaircir la position du calcaire siliceux. On a reconnu dans les tranchées faites pour la construction des fortifications de Paris qu'il existait au-dessus des marnes vertes et au-dessous de la couche qui appartient encore à la formation de pierre à plâtre une couche de calcaire siliceux de 2 mètres de puissance environ. Ce calcaire blanc un peu terreux contient de nombreux silex noirâtres. Le calcaire et le silex renferment des coquilles d’eau douce , Lymnées et Planorbes. Le grès marin supérieur recouvre le tout, de sorte que la position de cette couche de calcaire sili- ceux est incontestable. Ce fait intéressant ayant excité notre attention et fait soupconner qu'il en était peut- ( 247) être de mème du calcaire siliceux du plateau de la Brie, j'ai fait, concurremment avec M. de Beaumont, des courses dans les environs de Champigny, de Sussy, etc., pour constater la superposition du grès. Nous ne l'avons pas trouvée dans ces localités immédiates, maïs on la voit à quelques lieues , à la montée de Mont-Lery, où le grès repose de la manière la plus positive sur Îe calcaire siliceux qui est ici dans toute sa puissance , dans Ja forêt de Gros-Bois et à la butte du Griffon près de Villeneuve Saint-Georges. Dans la forêt de Gros-Bois la formation de grès marin est représentée par des argiles bariolées , mélangés de sable et de galets, caractères qu’on lui retrouve souvent sur les plateaux de la Normandie, où elle paraît s'être déposée sous une petite profondeur d’eau. A Ja butte du Griffon elle offre les caractères habituels au grès de Fontainebleau. La descente vers Villeneuve Saint-Georges donne une excellente coupe de tout ce terrain. Au grès qui forme le monticule du Griffon et qui peut avoir 20 mètres de puissance ; succède le calcaire siliceux sur une épaisseur de 4o mètres environ. Enfin les marnes du gypse ressortent sur les bords de la Seine; on trouve mème des rognonsde strontiane sulfatée dans ces marnes. Les détails que nous venons de donner sur le calcaire siliceux , détails que nous aurions pu multiplier à l'infini. les mêmes superpositions se voyant dans un grand nombre de localités , nous portent à conclure : Que le calcaire siliceux de Champigny est supérieur à la pierre à plâtre de Paris ; Qu'il est inférieur au grès marin de Fontainebleau ; Enfin qu’il dépend encore de la formation gypseuse. . Cette position du calcaire siliceux de Champigny est absolue. Néanmoins il ne serait pas exact d'en conclure ( 248 ) que toute la formation du calcaire siliceux de la Brie est plus moderne que la pierre à platre. L'exemple de St.- Ouen , où l’on voit la partie supérieure du calcaire gros- sier passer à l’état de calcaire siliceux , nous porte à croire , comme MM. Cuvier et Brongniart l’ont indiqué dans la description géologique du bassin de Paris, qu’une partie du calcaire siliceux de la Brie est parallèle aux silex de St.-Ouen. Seulement la pierre à plâtre, au lieu d’être une formation distincte et de former des couches continues, serait accidentelle ; elle constituerait de vastes amas enclavés dans le calcafre siliceux qu’elle partagerait en deux parties. La liaison que cette supposi- tion établit entre les couches inférieures au grand dépôt gypseux de Paris et des couches qui lui sont supérieures n'est pas la seule que nous admettons dans les terrains tertiaires de Paris. Plusieurs considérations nous con- . duisent à regarder ces terrrains comme ne formant que deux groupes dont la ligne de séparation serait le grès marin supérieur. Les assises qui composent chacun de ces groupes sont parallèles et peuvent se remplacer mutuel- lement, quelle que soit la nature des fossiles qui s’y rencontrent. La superposition directe que l’on observe à Montereau du calcaire siliceux sur l'argile plastique et le passage que présentent ces deux formations sont d’ac- cord avec cette idée. Dans cette dernière localité, non- seulement le calcaire siliceux remplacerait le plâtre, mais il représenterait en outre le calcaire grossier. ( 249 ) Nore sur les caractères de la V’égétation des iles Bourbon et Maurice. (Extrait d'une Lettre de M. L. Bouron, de l’ile Maurice.) Après avoir jeté un coup d’œil rapide sur le mode de végétation qui se fait remarquer dans les iles Bourbon, Maurice et Madagascar, M. Ach. Richard, dans l’intro- duction de sa Monographie des Orchidées, considère, à l'exemple de tous les géographes , ces trois iles comme dépendant de l'Afrique, et c’est en effet de ce continent, dit-il, qu'elles se trouvent le plus rapprochées. « Mais, « continue M. Richard, par la nature de leur végétation, = « elles s'éloignent entièrement du système africain pour « revèur un caractère particulier qui néanmoins les rap- « proche beaucoup de l’Archipel des Indes dont elles « sont cependant séparées par des mers d’une immense « étendue. » Un peu plus loin, M. Ach. Richard s’ex- prime ainsi : « On voit donc que la Flore des iles de « France et de Bourbon, dont ce travail fait partie, a « beaucoup plus d’analogues dans l’Archipel des Indes « que dans les environs du cap de Bonne - Espérance , « dont elles sont beaucoup plus voisines, et que si, sous « le rapport de leur position géographique, ces iles ap- « partiennent au continent africain, elles font partie de « l'Inde, et par conséquent de l'Asie, par le caractère « de leur végétation. Sans vouloir donner, continue « M. Richard , une explication satisfaisante de ce phé- « nomène, nous nous contenterons d'ajouter les deux « observations suivantes, dont il nous semble facile de ( 250 ) « déduire quelques conséquences prepres à éclaircir ce « point. 1°. Les terres du cap de Bonne-Fspérance sont « situées hors des tropiques ; les îles de France et de « Bourbon, de même que l’Archipel indien , appartien- « nent aux régions intertropicales. Or, on sait toute « l'influence que cette position exerce sur les caractères « de la végétation. 2°. IL paraît que les vents qui règnent «le plus habituellement sur l’Archipel indien sont ceux « d’est et de nord-est, c’est-à-dire, justement ceux qui « viennent de la direction des îles de l’Inde. » (Voyez Monographie des Orchidées des îles de France et de Bourbon , dans les Mémoires de la Société d'Histoire naturelle de Paris, t. 1v, p. 5, 6 et 10.) Ces deux observations me semblent concluantes; la première surtout est d’une importance assez grande pour ètre prise en considération. En effet , les naturalistes qui ont parcouru sur le globe des étendues de pays considé- rables, ont tous retrouvé dans la végétation intertropicale un caractère d'identité bien remarquable. Je citerai à ce sujet M. Dumont-Durville, qui, dans une note commu- niquée à l’Institut sur le voyage de circumnavigation de la Coquille, s'exprime ainsi : « Plus de la moitié de notre « campagne s’est effectuée sous la zône torride et au mi- « lieu de ces nombreux archipels semés dans l'immense « océan Pacifique. Sur toutes ces iles, à partir des plus « avancées vers l'Orient, jusqu'aux confins de l’Asie et « même de l'Afrique, ce n’est à peu près qu'une mème « Flore; les herbes, les arbustes, les arbres même le « plus souvent, sont les mêmes, et la seule nuance qu’on « y observe est que le nombre de ces espèces va sensi- « blement en augmentant à mesure qu’on se rapproche » 25 ( 256% « des continens. » (Annales des Sciences naturelles, mai 1825.) Maurice, Bourbon et Madagascar se trouvent com- prises dans ces généralités ; maïs le cap de Bonne-Espé- rance, situé hors des tropiques, et à 14 degrés plus au sud que l’ile Maurice, en fait nécessairement exception. La Flore du promontoire africain est empreinte d'un caractère particulier qui cependant me paraît offrir cer- tains rapprochemens avec la Flore de cette partie de la Nouvelle-Hollande située à peu près entre le même pa- rallèle. On retrouve effectivement dans la masse de la végétation de ces deux localités des genres entièrement identiques. Plusieurs Protea croïssent, il est vrai, au Cap; mais on en retrouve aussi quelques espèces à la Nouvelle- Hollande, et on y remarque des genres très-voisins, tels que les Banksia, les Embothrium, Hakea et Persoonia. Les Gnaphalium, les Elichrysum, les Diosma et plusieurs genres appartenant aux Iridées, aux Légumineuses et aux Ficoïdées, croissent également au cap de Bonne-Espérance et à la Nouvelle-Hollande. Les familles naturelles qui do- minentdans cettedermièrelocalité,suivantles observations de M. Leschenault (Annales du Muséum, v. xv11, p. 86), sont celles des Protéacées,des Éricinées,des Synanthérées, des Légumineuses et des Mvrtinées; or, ces familles consti- tuent l'ensemble de la végétation du promontoire africain. Il existe encore un troisième point sur le globe qui semble offrir dans sa Flore quelques traits de ressemblance avec les deux localités que je viens d'indiquer, c’est l’extré- mité méridionale de l'Amérique, où se retrouvent plu- sieurs des genres qui croissent dans le sud-ouest de la Nouvelle-Hollande. Du reste, la végétation que l’on re- (ME) marque sur ces trois points ne présente aucun rappro- chemuat avec celle de l’île Maurice, et notre Flore diffère essentiellement de celle du Cap; mais la végétation de notre île n’en a pas moins de nombreux rapports avec celle du continent africain , et particulièrement de cette partie de l’Afrique située à peu près entre les mêmes parallèles que Madagascar, Bourbon et Maurice. Or, cette étendue corisidérable de pays est encore à peine connue ; la partie qui avoisine le bord de la mer est la seule, je pense, qui ait été explorée, et mon estimable ami, M. Bojer, qui a parcouru ja côte Zanguebar et le Mozambique , m’a dit avoir retrouvé dans ces localités une grande partie des plantes qui croissent dans nos îles et d’autres extrêmement voisines des nôtres par le rang ER: qu’elles occupent dans les familles naturelles. Il n’en est pas moins vrai qu'il existe à l'ile Maurice quelques genres qui paraissent lui être propres, et qui forment, ainsi que la dit M. Richard, la physionomie particulière de sa végétation ; mais tout semble faire conjecturer que ces traits détachés finiront par disparaître et se fondre entiè-” ment dans la masse de la végétation , lorsque l’on sera parvenu à mieux connaître la botanique de cette partie du continent africain située entre les tropiques, et qui doit, plus que toute autre partie du globe, renferme des végétaux dont les congénères existent à Maurice. (. 25307 Nores, extraite d'un Mémoire de M. Reboul, sur la structure des Pyrénées , présenté à l'Acade- mie des Sciences le 26 septembre 1831. Comme on s'occupe aujourd’hui plus que jamais de chercher dans la direction des grandes chaînes et dans leurs relations géologiques des indices propres à déceler le mode et l’âge de leurs formations, l’auteur à cru devoir _ soumettre à un nouvel examernr la détermination de l’axe | pyrénéen et les rapports de cet axe soit avec la direction des strates inclinées, soit avec les principales parties dont se compose la chaine totale. Ces recherches l’ont conduit à des conclusions différentes de celles qui sont aujour- d’hui généralement admises, et pouvant se résumer dans les propositions suivantes : 1°. Les Pyrénées ne sont point dirigées, comme on l'annonce communément, de l’E.-S.-E. à l'O.-N.-0., mais à 12° au moins au sud de cet alignement. Cet axe, en effet, commence dans la Méditerranée au cap de Cer- vères, dont la crête sépare les cours d’eau dirigés vers le nord de ceux qui coulent au midi. A l'occident, l’extré- mité de l’axe pyrénéen est plus difiicile à déterminer, à cause de la bifnrcation de la chaine dont un rameau finit au cap Ortegal et l’autre au cap Finistère; mais un alignement dirigé du cap Cervères au point où com- mence la bifurcation, et qui vient atteindre la mer près de la Corogne, semble remplir le mieux les conditions prescrites pour un axe géographique. Or, cet alignement s'écarte seulement de 6 à 7° de la parallèle à l'équateur. 2%, La direction des strates dans les Pyrénées est rare- (254 ) ment parallèle à l’axe de la chaîne. Ces strates sont presque partout dirigées vers l’'O.-N.-0., et nous avons" vu que c’est mal à propos qu’on avait supposé cette di- rection à l'axe. 3°. Les Pyrénées, se composant de plusieurs arêtes qui affectent des directions différentes, soit dans l’aligne- ment. de leurs masses, soit dans celui de leurs strates, ne constituent point une chaîne simple et qu'on puisse sup- poser avoir été formée d’un seul jet. 4°. On trouve dans les Pyrénées les indices de roches" soulevées à plusieurs époques, soit avant, soit après celle P P ; ; des dépôts secondaires les plus récens portés au sommet du Mont-Perdu. Ê 5°, Ces évulsions, qui paraissent s’être succédé pendant la longue durée des anciennes périodes , se sont prolon= gées, comme celles des Alpes, jusque dans les temps assez avancés de la période tertiaire. Mémoire sur la conformité organique dans l'échelle ——— animale, lu à l Académie des Sciences , séance du 18 octobre 1831 ; Par M. Duceez. (Extrait.) La zoologie se perfectionne comme toutes les sciences d'observation, par des travaux de deux genres bien dis- tüncts, et qui ont pour objet, les uns de rassembler des faits, les autres de les classer et d’en déduire des con- séquences générales. ie ( 255") Ainsi, les lumières qu’a fait jaillir une discussion ré- cente entre des hommes placés au premier rang parmi les zoologistes , permettent maintenant , ce me semble, d’énoncer d’une manière plus satisfaisante le principe de l’unité de plan dans les formes animales. Ce principe sera sans doute plus facilement admis quand on le réduira à la formule de conformité orga- nique dans l'échelle animale, surtout dès qu'il restera bien entendu que l’on ne veut envisager ainsi que la dis- position mutuelle des principales parties et non les mêmes détails de leur structure. Maïs , pour le mettre plus à l’a- bri des contestations , nous croyons devoir le poser sur de nouvelles bases. Pour la constitution de l’échelle ani- male, pour les démonstrations de la conformité organique et l'explication de ses écarts apperens, on ne s’esl servi jusqu'ici que de la complication graduellement crois- sante de l’organisation. À cette loi, que nous formulerons loi de complication des organismes , nous en joindrons une autre plus importante selon nous, la loi de répétition ou de multiplicité des organismes. Par organisme, l’auteur entend un ensemble d'organes dont la réunion suffit pour constituer idéalement ou réel- lement uu animal complet. Un organisme est comme un animal élémentaire ou simple; plusieurs organismes réunis forment un animal composé. On a dit depuis long-temps que chez l’homme il y a en quelque sorte deux hommes, le droit et le gauche. En admettant cette idée, on aurait déjà l'exemple d’une réunion de deux organismes concourant à faire un seul animal. Mais dans l'homme, suivant l’auteur, il n’y a pas seulement une composition binaire, et chaque moitié résulte elle-même (‘836 7) d’un grand nombre d'organismes intimement soudés, quoique cette composition soit moins apparente qu’elle ne l’est chez beaucoup d’invertébrés dans lesquels chaque . segment représente en petit tout l'animal, et est formé lui-même de deux organismes tout pareils réunis par les faces symétriques. Dans chaque segment d’une sangsue, par exemple, ainsi que l’a signalé pour la première fois M. Moquin, se trouve un système complet d'organes, un centre ner- veux, des anses et des renflemens vasculaires, une paire de lobes gastriques, de poumons, de vésicules séminales (r). Aussi a-t-on remarqué depuis Iong-temps qu'un de ces segmens peut vivre quelque temps, quoique séparé des autres. À mesure qu'on s'élève dans l'échelle animale, on voit ces différens segmens s’unir plus intimement les uns aux autres, et l’individualité du grand tout se pro- noncer davantage. L’individualité dans les animaux composés ne consiste pas seulement dans la soudure de tous les organismes , mais encore dans la jouissance commune d’un nombre“ (1) M. de Blaimviile avait, à notre connaissance, émis, dès l’année 1810, des idées analogues, et l’un des rédacteurs des Annales, dans ses divers travaux sur le système solide des animaux articulés, s'était atta- ché à montrer que, généralement , les Annélides , plusieurs larves d’in= sectes, les Myriapodes, et parmi ces derniers les Jules et les Scolopendres | ? présentaient un fait digne de remarque : l’uniformit£ presque complète de tous les anneaux de leur corps qui, à dire vrai, étaient une répétition les uns des autres, Passant ensuite à d’autres considérations, il était arrivé à démontrer que toujours cette uniformité du corps, comme il l’appelle, êt dont la scolopendre est un des principaux types, était détruite lorsqu'un certain nombre d’anneaux prenait un plus grand développement, soit que ce nombre fût de trois, comme dans les insectes, de quatre, comme dans les crustacés, ou de cinq, comme dans les insectes. Ces idées sont beureu sement confirmées par le travail beaucoup plas général de M. Dugez. R: ls CS a a PC (257) de parties, nombre qui devient plus grand à mesure qu'on approche des degrés supérieurs. La centralisation devient plus complète à mesure que l'animal monte dans l’échelle, et cette loi est observable même pour les diverses époques de la vie d’un animal à métamorphoses ; ainsi, dans la chenille observée dans sa pleine croissance, à l’époque voisine de sa transformation et dans son nouvel état de chrysalide, près de sa troi- sième métamorphose, on voit le nombre des ganglions diminuer de 13 à 9, non par la destruction, mais par la fusion de quelques-uns des plus rapprochés. Afin de démontrer plus aisément cette fusion des or- ganismes chez les êtres animés, l’auteur considère les animaux composés comme divisés en trois classes, suivant que les groupes d'organismes dont ils se composent sont disposés en grappes, en couronne ou en deux séries paral- lèles. Dans la première classe entrent des animaux dont la connaissance est tout-à-fait moderne et dont les parties symétriques, n'étant point dans le plan d’un cereleunique, comme celle des radiaires avec lesquelles on les avait long-temps confondues, sont séparées de ces dernières par M. Dugez et désignées collectivement sous le nom de racémiaires. Dans la seconde classe sont les radiaires. Dans la troisième classe, enfin, se trouvent rangés tous lés autres animaux. Du reste, cette différence que pré- sentent les trois classes entre les arrangemens des orga- nismes ne porte aucune atteinte à l’uniformité du plan ; c’est ainsi qu'un collier de perles est toujours le même, soit que le fil qui les unit soit disposé en cercle (ce qui représente le cas des radiaires), soit que ses deux moitiés étirées dans toute leur longueur rapprochent les perles XXIY. 17 i ( 258 ) sur deux lignes droites contiguës (ce qui.est le cas des ani- maux à disposition bisériale).Ce qui montre, ajoute M.Du- gez ; qu’en effet cette différence de disposition. est de peu d'importance, c’est qu’on voit tout une classe d'animaux (les helminthes) qui, par l’arrangement des parties de la tête, appartiennent aux radiaires, et par celui des parties du corps aux bisériaux. De mème dans les mollusques, certaines dispositions ambiguës établissent le passage avec les racémiaires, tandis que d’autres conduisent aux bisériaux. On arrive donc à ceux-ci en partant des mona- daires par deux voies différentes : dans l’une, on rencontre sur la route, les racémiaires et les mollusques ; dans l’au- tre, les radiaires et les helminthes. Les deux chaînes viennent se réunir à la classe des animaux articulés ; « mais de ceux-ci aux vertébrés comment établira-t-on le passage? Ce ne sera pas en considérant comme un sque- lette extérieur l'enveloppe cornée des insectes, car dans ce cas il n’y aurait pas de raison pour ne pas voir aussi dans l'enveloppe dure du Tatou un second squelette. D'ailleurs on ne saurait établir ce renversement de toutes les parties sans manquer à un principe sur lequel on ensuite besoin de s'appuyer, le principe des connexions: Il semble beaucoup plus rationnel de confesser qu’une# grande distance sépare en effet les vertébrés des invertés brés ; les uns ayant un squelette intérieur complet et une peau souvent molle, les autres ayant une peau géné ralement dure et uu squeleue rudimentaire. L'absence de la charpente osseuse, poursuit M. Dugéz, n'empêche pas l’uniformité de plan. Le vulgaire a reconnu depuis long-temps l’analogie d’un grand nombre de parues chez les insectes en les désignant par les mêmes noms que chez les vertébrés , une tête, un cou, une poitrine, un | | | | ! | ( 259 ) abdômen renfermant les principaux viscères. La difficulté est plus grande quand on arrive aux appendices ; cepen- dant on peut reconnaître 1° que les mandibules des arti- culés sont comparables à la mâchoire supérieure des vertébrés, puisque chez certains reptiles (les serpens hé- térodermes) nous voyons les deux moitiés de cette mà- choïire mobiles isolément ; 2° que les mâchoires des pre- miers répondent aux deux sous-maxillaires des autres os qui, chez les serpens déjà mentionnés, sont aussi mobiles isolément et composés de même assez souvent de plu- sieurs pièces distinctes ; 3° que la langue et la lèvre in- férieure des invertébrés répondent bien à quelques-unes des pièces hyoïdiennes et à la langue des vertébrés ; 4° que les pieds-mächoires des crustacés, de même que les palpes labiaux des insectes, représentent d’autres pièces hyoï- diennes, celles qui chez les poissons servent à former les ares branchiaux. Toutes les parties que nous venons d'énumérer ne sont considérées d'ailleurs, par M. Dugez, que comme les appendices d'autant d'organismes centraux, comme des membres proprement dits. Si le nombre de ces membres est moins grand chez les vertébrés que chez les animaux dépourvus de squelette, cette différence n’est qu’un ca- ractère d’assez peu de valeur, puisque le nombre des appendices est loin d’être constant même dans la série des articulés, et qu'il va diminuant progressivement des myriapodes aux crustacés, de ceux-ci aux arachnides, et de ces derniers aux insectes proprement dits. Si parmi ces articulés on prend les plus élevés dans l'échelle, les crustacés , on leur voit cinq paires äe pieds au thorax et quatre paires à l’abdomen, c’est-à-dire de chaque côté cinq doigts thoraciques et quatre abdominaux. M. Dugez ( 260 ) ne serait pas éloigné de considérer les doigts de la main de l’homme comme l'extrémité libre de cinq paires de membres thoraciques réunis dans le reste de leur lon- gueur. On voit, dit-il, la réunion de ces appendices latéraux s'effectuer graduellement à mesure qu'on ap- proche du tronc. Aux cinq doigts, parfaitement libres, succèdent cinq métacarpiens' qui déjà sont entourés d’une enveloppe molle commune, puis viennent quatre os car- piens, puis trois (le pisiforme étant un vrai os sésamoïde), puis les deux os de l’avant-bras, enfin l’os unique de l’hu- mérus. Les membres inférieurs seraient de mème la réu- nion de cinq membres abdominaux distincts seulement aux orteils. Passant à la comparaison de la structure intérieure des articulés et des vertébrés, M. Dugez adopte l’idée émise il y a quelques années par un autre zoologiste, que l’a- nimal articulé présente en haut le ventre, et que la partie dirigée vers le sol est réellement le dos ; il se fonde pour soutenir cetie opinion , non-seulement, comme on lavait fait avant lui, sur la position du système nerveux dans l'adulte, mais encore sur celle du vitelius dans l’œuf des articulés. 2 : é Communicarion d’une Emeraude gigantesque, faite à l'Académie des Sciences par ledocteur Rouuw, dans la séance du 7 novembre 1831. L'Emeraude mise sous les yeux de l’Académie, est remarquable par son volume et la pureté de ses formes cristallines. Cette pierre a été extraite récemment de la ( 261 ) mine de Muzo , mine située à trente lieues au nord de Bogota. On avait cherché à enlever le cristal avec sa gangué; la séparation s'en est faite par accident, mais l'ajustement parfait des deux pièces ne permet pas de conserver de doutes sur leurs rapports primitifs. C’est de la mine de Muzo et de celle de Somondoco, située à peu près à la mème latitude, mais plus vers l’est, que proviennent en grande partie les émeraudes qui se trouvent maintenant en Europe, on peut même en dire autant de celles qui existent en Orient, car dans les 16° et 17° siècles on en tirait pour l’Asie des quan- tités considérables de l'Espagne ; mais les galions, chaque année, en apportaient d'Amérique des masses énormes. Le P. Acosta , auteur très-digne de foi en tout ce qu'il raconte de visu , rapporte que sur la flotte avec laquelle il revint en Espagne en 1587, étaient chargés deux caisses contenant chacune plus d’un quintal espa- gnol (4 arrobas) d'émeraudes. Ces pierres étaient habi- tueJlement désignées dans le commerce sous le nom d’émeraudes du Péroa , quoique Muzo appartint réelle- ment à la Nouvelle-Grenade. La Nouvelle-Grenade fut découverte en 1537, et il n’y avait pas quatre mois que les Espagnols étaient arri- vés sur le plateau de Bogota qu’ils avaient déjà trouvé la mine d’'émeraudes de Somondoco, malgré tout le soin que mettaient les indigènes à la cacher ; du reste cette mine , difficile à travailler à cause du manque d’eau, ne fut jamais exploitée avec grand succès, et la plus grande partie des émeraudes d’abord envoyées en Es- pagne , étaient prises aux Indiens qui en étaient assez bien pourvus, les recueillant le long des torrens voisins de la mine, après les grandes averses. Cette source , ( 262) comme on le pense bien, fut promptement épuisée, grâce à l’avidité des conquérans ; maïs en 1564, le 9 août , un accident joint à une méprise fit découvrir une nouvelle mine à une demi-lieue de Muzo , dans la montagne d'Itoco. Quoique le pays ne fût encore que très- imparfaitement soumis, les Espagnols s’appliquèrent avec ardeur à exploiter la nouvelle mine, tenant, comme disent les vieilles chroniques, d’une main la pioche et de l'autre l'épée. Xs obtinrent des émeraudes dont deux furent jugées dignes d’être présentées à l’empereur Charles V, et achetées par lui au prix de 24,000 florins d'or. On ne dit pas quelle était leur dimension. Pour donner une idée de la quantité d’'émeraudes qui se retira de la mine de Muzo, il suflira de dire qu’en 1620 , c'est-à-dire cinquante-six ans après sa découverte, cette mine avait payé en quint 300,000 piastres, sans compter ce qui avait été fraudé. La fraude devenant chaque jour plus grande, le gouvernement, dans le 18° siècle, jugea à propos de prendre pour son compte l’exploitation ; mais les vols, loin de diminuer par ce changement, augmentèrent à tel point, que l’administra- tion, ne retirant pas ses frais , fit cesser les travaux, et bientôt une ordonnance royale fit fermer la mine à la- quelle les particuliers n’eurent plus la permission de travailler, Les choses restèrent en cet état jusqu’à la révolution. L'ordre étant enfin rétabli dans le pays, une commission obtint du congrès la concession de cette mine. Elle en a déjà retiré des produits assez nombreux et dont plusieurs sont remarquables, les uns par leur belle eau et leur couleur, les autres par leurs dimensions et la pureté de leurs formes cristallines. L’échantillon mis sous les yeux de l’Académie est un prisme hexaëdre ( 2081) droit de 46 millimètres de diamètre, et de 50 millimètres environ de hauteur. Sa teinte est très-foncée, malheu- reusement la partie supérieure seule est exempte de gerçures. Querques Observations sur la manière dont s'opère la fécondation dans les ASGLÉPiADÉES ; Par M. An. BroncniarrT. Les plantes qui composent les familles des Orchidées et des Asclépiadées diflèrent tellement , au premier as- pect , de presque tous les autres végétaux phanérogames par la structure de leur pollen , que depuis l’époque où j'ai publié mes Recherches sur la génération des plantes, J'avais toujours désiré étudier plus complètement la structure et le mode d'action de leurs organes féconda- teurs. J'ai fait connaître , dans un Mémoire lu à l’Aca- démie des Sciences le 4 juillet 183:, le résultat de mes observations sur quelques espèces d'Orchidées (1),et on a vu que les principaux phénomènes qui accompagnent la fécondation étaient les mèmes dans ces plantes que dans les autres végétaux phanérogames. J'avais déjà réuni à celte époque quelques observations sur la struc- Lure du pollen et sur son mode d’action sur le stigmate dans les Asclépiadées; j'ai poursuivi ees recherches pendant les mois d'août et de septembre, et les résultats que j'ai obtenus me paraissent assez curieux pour méri- ter d’être publiés, quoiqu’ils n’aîent pour objet que (1) Ce Mémoire est imprimé daus le uo d'octobre 1931 des Annales des Sciences naturelles. (264) quelques espèces du genre Asclepias. J'ai tâché, dans le courant du mois d'octobre, d'étendre ces recherches à quelques espèces de Stapelia qui fleurissaient alors dans les serres du Jardin des Plantes, mais toutes restaient stériles ; dans aucune la fécondation ne s’opérait natu- rellement, et les essais que J'ai tentés pour la déterminer n'ont pas réussi. On sait que les Asclépiadées diffèrent des A pocynées avec lesquelles elles étaient réunies dans le Genera Plantarum äe M. de Jussieu et avec lesquelles elles ont en effet les plus grands rapports, par la structure particu- lière de leur pollen. Le pollen forme dans ces plantes autant de masses qu’il y a de loges aux anthères , c'est- à-dire dix en tout. Ces masses polliniques sont réunies deux par deux au moyen de prolongemens de forme diverse, plus ou moins allongés, qui se joignent vers leur extrémité et sont fixés par l'intermédiaire d’un petit corps noir, qu'on a désigné par le nom de glande, à la surface externe du stigmate très-volumineux de ces fleurs. Ces deux masses polliniques ainsi réunies appar- tiennent aux loges voisines de deux anthères différentes. La disposition de ces diverses parties a élé surtout discutée et décrite avec soin par Jacquin (1) et plus ré- cemment par M. R. Brown (2). Ce dernier a surtout établi un fait très-important, savoir : que les masses polliniques ne sont pas unies au stigmate dans leur principe, et que ce n’est qu’à un âge plus avancé qu’elles s'unissent aux appendices qui naïs- sent des glandes du stigmate. (1) Genitalia Asclepiadearum controversa. Viennæ , 1811. (2) Essay on Asclepiade®æ , Trans. Werner, 1.1, p. 19 (1809). ( 265 ) Mais cet illustre botaniste, comme la plupart de ceux qui l'ont précédé , paraît supposer que c’est par le moyen de ces appendices et de la communication qu’ils établissent entre les masses polliniques et le stigmate que la fécondation s'opère. Cette opinion avait déjà été émise par M. de Jussieu dans son Genera, et elle était encore appuyée par les observations récentes de M. Tréviranus (1). La plupart de ces auteurs paraissent considérer chaque masse pollinique comme un sac solide rempli d'une ma- üière granuleuse ou mucilagineuse. Cependant M. Trevi- ranus établit clairement l'existence dans ce sac de grains polliniques simples dont les parois minces et transpa- rentes sont exactement appliquées les unes contre les autres (2). M. Ehrenberg, dans une notice fort succincte, mais très - intéressante sur la structure du pollen dans les Asclépiadées (3), établissait que chaque masse polli- (1) Zeitschrift für Physiologie , t. 11, p. 230 et suiv. Après avoir élabli par ses recherches que le contact du pollen avec la surface visqueuse du stigmate est nécessaire dans les Orchidées pour que la fécondation s’opère, il conclut au contraire de ses observations sur les Asclépiadées (p. 149), que cette famille diflère de toutes les Phanéro- games et même des Orchidées, en ce que le liquide fécondant est transmis au stigmate non pas immédiatement , mais par un corps inter- médiaire et peut-être sans le contact de l’air. (2) Iles à figurés pl. x1, fig. 58. (3) Cette notice , insérée dans le Zinnea , 1829, p. g4 , se termine par les conclusions suivantes : 1. Corpuscula flava, a columnæ fuscis corpusculis (connecticulo seu autherio ? ) pendentia , antherarum singulos loculos exactè referunt. 2. Antheræ Asclepiadearum conficiuntur bursà membranaceà interdum cellulosà, in latere suturà (apud S'rapelias tumidà et cartilagineä) instructä ( 266 }) nique était formée par un sac membrameux présentant une fente le long de son bord interne , et que dans l’in- térieur de ce sac se trouvait un grand nombre de grains de pollen prolongés en tubes souvent très-longs qui sortaient par la fente du sac pollinique. Mais il ajoute que ces pro- longemens tubuleux sont une suite de la structure habi- tuelle du pollen de ces plantes , et différent en cela des” prolongemens tubuleux ordinaires du pollen qui sont le résultat d’une action vitale et ne se développent qu’au moment de la rupture du pollen. On voit que si les observations de M. Tréviranus, et surtout celles de M. Ehrenberg , avaient jeté un nouveau jour sur la structure du pollen de ces plantes , cependant on ignorait encore comment le pollen contenu dans ces sacs polliniques transmettait son influence au stigmate ; car si les dernières observations de M. Ehrenberg ôtaient beaucoup de probabilité à la transmission de l'influence fécondante par les appendices des masses polliniques et par les corpuscules ou glandes stigmatiques, on ne et fissili, pollinis utriculos elongatos eorumque multos longissime cau- datos gerente et emittente. 3. Pollinis utriculorum caudæ omneés, dum bursà suâ includuntur, su- luram versus spectant. 4. Pollinis utriculi , qui in reliquis plantis globi formam appetunt, in Asclepiadeis vero elongati et caudati cérnuntur; eâdem in omnibus mass granulosà repleti sunt. 5. Pollen quod in reliquis plantis siccum est, apud Asclepiadeas oleo ? circumfuso et viscido perunctum deprehenditur , quo difhcilius disper- gitur. 6. Pollinis appendices BronewrarTst ab Asclepiadearum pollinis caudis eo differunt, quod h& ad ipsara pollinis naturam pertinent, ille vis vitalis alicujus externe effectum produnt et in ipso pollinis fissionis momento demum accedunt. er ( 267 ) voyait pas cependant sur quel point spécial du stigmate volumineux des Asclépiadées le pollen et ses tubes pou- vaient agir pour opérer la fécondation. C’est ce que j'ai cherché à déterminer par des observations faites sur ces organes à diverses époques de l’aete de la fécondation dansles Æsclepias syriaca, amænaetfruticosa , quine différant , quant à ces organes , que par de légères mo- difications de formes, peuvent être décrits simultané- ment. Si on examine les masses polliniques dans un bouton peu de temps avant son épanouissement, on voit que chacune de ces masses est ovale ou oblongue , amincie à son extrémité supérieure et appliquée par cette extrémité contre le bout élargi de l’appendice du stigmate auquel elle est ainsi suspendue, mais dont le tissu est cependant complètement distinct de celui du sac pollinique. La surface de la masse pollinique est parfaitement lisse et marquée de lignes aréolées qui indiquent les cellules qui la composent. Si on cherche à la briser ou à la couper, on s'aperçoit que la membrane qui la constitue est dure , résistante et d’une consistance presque cornée. Lorsqu'elle est brisée, on reconnait qu'elle constitue un sac fermé de toute part, sans ouverture ni suture, qui après avoir été vidé des substances qu’il renferme présente toujours sa struc- ture aréolaire et sa couleur d’un jaune d’or, ce qui annonce que cette texture aréolaire n’est pas due à un tissu cellulaire interne , mais aux cellules même qui constituent la membrane et qui sont disposées comme celles de l’épiderme. Dans les Æsclepias et les Cynanchum on ne voit ( 268 ) aucune trace de suture à ce sac; les cellules qui com- posent la membrane forment des aréoles continues de toute part. Dans les Stapelia seuls, parmi les plantes que j'ai examinées , j'ai vu la suture indiquée par M. Ehrenberg, suture qui dans ce cas est en effet entourée d’un rebord saillant (r). Ce sac pollinique ne paraît d’abord contenir qu’une infinité de granules très-fins mêlés à quelques goutte- lettes huileuses; mais si on l’ouvre avec plus de soin, on voit qu'il est entièrement rempli par des grains de pollen simples, formés d’une membrane très-fine, trans- parente , se déchirant avec la plus grande facilité, ren- fermant dans leur intérieur les granules et la matière huileuse que plusieurs auteurs avaient cru être renfer- més directement dans le sac pollinique. Les grains de pollen sont presque tous légèrement anguleux par suite de leur pression mutuelle (2) ; ils étaient déjà bien figu- rés par Tréviranus (3). A cette époque il n’y a évidemment dans les Æsclepias ni suture au sac qui renferme les grains de pollen, comme semblerait l'indiquer la description trop générale de M. Ehrenberg ; ni prolongemens tubuleux aux grains de pollen qui, bien loin d’être allongés ou tubuleux, sont alors presque globuleux ou ovales. Si on examine à la même époque le stigmate et ses re- lations avec les anthères , on voit que cet organe très- (1) Voyez la pl. x1v B, fig. 2, 5. (2) PL. xiv À, fig. 3. (3) Loc. cit, pl. xt, fig. 58. ( 269 ) volumineux et commun aux deux styles, d’une forme à peu près prismatique à 5 angles , est appuyé par tout le pourtour de sa base sur le bord interne et supérieur du tube formé par les étamines réunies (1). Il n’y a pas, il est vrai, continuité de tissu entre ces parties, mais application et adhérence assez forte, de manière à ne “laisser aucune communication entre les anthères et la base du stigmate qui correspond à cette cavité formée par les filets des élamines soudés en tube et par le tube de la corolle et qu’occupe les ovaires et les styles. Les parois latérales du stigmate marquées de 5 angles saillans et de dépressions plus ou moins profondes cor- respondent au contraire directement aux anthères et aux sacs polliniques , et c’est à la partie supérieure des 5 angles saillans que sont fixés les cinq petits corps noirs bilobés qui supportent chacun les deux appendices allongés auxquels sont attachés les sacs polliniques. En examinant avec attention, soit la surface supé- rieure, soit les surfaces latérales de ce gros corps stig- matique , On ne voit aucune partie qui par son aspect extérieur paraisse être le véritable ou les véritables points stigmatiques ; aucun n’est hérissé de papilles ou ne se lubréfie par la sécrétion d’un liquide visqueux. Des coupes longitudinales , faites dans diverses posi- üons, n'annoncent également aucune modification es- sentielle, soit dans le tissu superficiel de cet organe , soit dans le tissu profond qui aurait dû servir de communi- cation entre la surface stigmatique et les styles. En examinant, au contraire, la surface de la base du (x) Voyez pl. xx, fig. x, cc. CR VS (270 ) stigmate près du sommet des styles, on remarque que cette surface est moins lisse, légèrement veloutée, et dans les coupes longitudinales de cet organe, on voit que cette partie est formée d’utricules plus allongés, " moins adhérens entre eux , formant de petites papilles saillantes à la surface et se continuant avec le tissu cen- tral du style (1). ; Cette disposition ne pouvait guère laisser de doutes sur la nature réellement stigmatique de cette partie in- férieure du stigmate, mais on concevait difficilement comment le pollen pouvait agir sur cette partie infé- rieure du stigmate qui est complètement séparée des masses polliniques par l’adhérence intime du bord externe de la base du stigmate avec le tube staminal. Pour tâcher de résoudre ce problème , il fallait , après avoir examiné les organes reproducteurs avant qu’ils entrent en action, les étudier de nouveau pendant et après la fécondation pour tàcher de saisir la nature sur le fait. Dans les fleurs complètement épanouies, les masses polliniques se présentent encore souvent dans l’état que j'ai déjà décrit, sans avoir subi aucun changement ; mais sur un grand nombre de fleurs, sur la plupart même dans les espèces d’Æsclepias que j'ai étudiées, plusieurs des masses polliniques de chaque fleur ont subi un chan- Sans que ces masses polliniques aïent changé de gement très-remarquable. position, le bord aplati qui est dirigé obliquement vers | le stigmate et qui correspond en mème temps à la cloison (r) Voyez pl. xuux, fig. 4, Ub; fig. 5, bb; fig. 8, bb; et pl. x1v, fig. 1, f. (271) médiane des anthères s’est déchiré dans le tiers environ de son étendue et dans sa partie moyenne, la partie inférieure qui est enfoncée dans la loge de l’anthère et la partie supérieure qui correspond à l'extrémité amincie fixée aux appendfées du stigmate étant restées entières ; la fente qui s’est opérée est une véritable déchirure dont les bords sont irréguliers et lacérés (1). Par cette fente sort un grand nombre de filamens plus ou moins allongés qui, examinés au microscope, sont des tubes membraneux , cylindriques , renfermant des granules plus ou moins nombreux, et entre lesquels se trouve souvent interposée également une matière granu- leuse plus où moins abondante. En divisant alors la membrane du sac pollinique , on voit que ces tubes sont des prolongemens tubuleux qui naissent chacun d’un grain de pollen, et qui sont une suite de l’allongement particulier de la membrane transparente qui le compose. Nulle part l’existence de la membrane qui constitue ce tube ne m'a pas paru pius apparente, et j'ai vu plu- sieurs fois les granules qui sont renfermés dans son inté- rieur se mouvoir en sens opposé, comme M. Amici l'avait déjà décrit dans les tubes du pollen du Portulaca; mais ici évidemment la membrane ne naît pas de l’inté- rieur du grain de pollen , comme cela a lieu le plus sou- vent , elle est une continuation de la membrane simple incolore et transparente de ces grains. Si on continue à examiner ces masses polliniques sur des fleurs de plas en plus développées, on en trouve bientôt , et c’est même le plus grand nombre , dans les- (1) Voyez pl. xt, fig. 6, et pl. xrv, fig. 2. (272 ) quelles les tubes polliniques nombreux qui sortent par- la fente qui s’est opérée au sac qui les renfermait , s’insi- nuent en masse entre la base du stigmate et le bord du tube staminal , les écartent en ce point et pénètrent ainsi sous le stigmate dans la cavité qui renferme les styles et les ovaires; ils se trouvent alors immédiatement en contact avec la surface réellement stigmatique que nous avons décrite plus haut et pénètrent dans l’inté- rieur de son tissu. Je les ai vus d’abord plusieurs fois s'étendre jusqu’au point de jonction du stigmate et des styles , point dans lequel plus tard ces deux organes se séparent après la fécondation ; mais ayant ensuite exa- miné un grand nombre de fleurs de l’Æsclepias fruti- cosa parmi lesquelles il y en avait de plus développées, je me suis assuré que ces tubes réunis en une sorte de corde pénétraient souvent jusqu'à la moitié du style et même quelquefois jusque près de la cavité de l'ovaire (1). Le tissu dans lequel ils pénètrent et qui fait suite à celui du stigmate, occupe le centre du style et se distingue facilement du tissu qui forme la gaîne ou la partie externe de cet organe; ce dernier est continu et semblable à celui du péricarpe. Le tissu conducteur blanc, mou, formé de cellules oblongues, transparentes, très-délicates , est continu et semblable d’une part à celui qui forme les papilles stig- matiques , et d’une autre part à celui qui forme la partie externe du placenta , comme on peut le voir par la coupe longitudinale, pl. xrv, fig. 5, A, et par les coupes trans- versales, fig. 6, », 8, 9, &. (3) Voyez pl. xiv, fig. 5, e, f, g. 2 ( 273 ) La fécondation s'opère donc encore dans ces plantes par l'introduction dans le tissu du stigmate des tubes membraneux qui proviennent de chaque grain de pollen. La seule différence ici consiste : 1°. Dans la réunion de ces grains dans un sac commun épais et coriace. 2%, Dans la nécessité de la rupture de ce sac pour que les tubes polliniques puissent agir sur le stigmate. 3°. Dans le développement de ces tubes indépendam- ment de l’action du liquide qui lubréfie ordinairement la surface du stigmate, liquide qui dans ce cas ne paraît pas être sécrété par la surface stigmatique, et qui dans tous lés cas re pourrait pas agir sur les grains de pollen ni même sur le sac pollinique qui en est séparé par la cloison formée par le tube staminal. Mais dans ces végétaux, les tubes des grains de pollen se forment-ils par suite seulement du développement graduel de toutes les parties de la fleur, ou bien le pollen pour les produire a-t-il besoin d’une action spéciale en rapport avec le développement des organes femelles, comme cela a lieu dans presque tous les végétaux pha- nérogames où le pollen ne donne naissance à ces tubes que par suite de l'action qu’exerce sur lui le liquide sécrété par le stigmate ? S'il m'était permis d'avancer à cet égard une hypo- thèse en rapport avec la structure des organes féconda- teurs des Asclépiadées et avec quelques observations faites par divers auteurs , je dirais que les appendices du stigmate à l'extrémité desquels sont suspendus les sacs polliniques sont destinés à transmettre dans ce sac, au moment où la fécondation doit s’opérer, une humeur XXIV. 18 ( 274 ) sécrétée par les petites fossettes du stigmate dans les- quelles sont fixés les corps noirs qui réunissent ces ap- pendices ; que l'introduction de ce liquide dans ce sac détermine le gonflement des grains de pollen , le com- mencement du développemeni des appendices tubuleux et la rupture de la membrane du sac pollinique , et con- ünae ensuite à produire l'allongement de ces tubes jus- qu'à ce qu'ils soient parvenus à la surface du véritable sligmate, L'existence de ce liquide au fond des petites fossettes qu'occupent les corps noirs n’est pas une simple hypo- thèse. J'ai observé souvent, en enlevant ces petits corps noirs, que la surface sous-jacente était humide et comme lubréfiée par un liquide. M. Treviranus avait déjà. fait la même observation, et il en concluait même que ce point devait être le véritable stigmate et que c'était par Jui que la matière fécondante devait pénétrer dans le pistil. Il dit en effet (p. 248): « C’est un fait digre de remarque que lorsqu'on enlève au moment de la fécon- dation un de ces corps, on trouve sous lui dans la cavité # qu'il occupait un liquide, tandis qu’on n’en voit aucune trace sur le reste de la surface intacte du stigmate. » La disposition des anthères et des masses polliniques ! dans les Stapelia est assez différente pour faire sup- poser des différences notables dans le mode d’intro- duction de la matière fécondante. Ainsi les masses polli- niques qui sont dressées et non suspendues, comme dans les Asclepias, sont appliquées sur la surface supérieure d’un stigmate en forme de disque, et tellement éloignées de la face inférieure de cet organe qu'il n’y a pas de probabilité que ee soit parce pot que la fécondation à } L { Ê H : | lu | ES ( 275 ) s'opère ; en outre, on ne voit dans cet endroit aucun changement appréciable dans la nature de sa surface. On remarque au contraire aux angles de la face supé- rieure en dedans des corps noirs et entre les appendices qui supportent les masses polliniques, cinq petits mame- lons couverts de petites papilles qui ont beaucoup l’as- pect des surfaces stigmatiques (1). Serait-ce par ces points qui sont rapprochés des fentes des masses polliniques que pénètrent les tubes polli- niques; c'est ce que de nouvelles observations pourront seules éclaircir. EXPLICATION DES PLANCHES. PL. xuir. Structure des organes reproducteurs de lAselepias amæna. Fig. r. Coupe longitudinale d’une fleur. a. Sommet du pédoncule. bb. Divisions réfléchies de la corolle. ce. Tube formé par les filets réunis des étamines. dd. Appendices en forme de capuchon qui naissent du sommet du tnbe staminal et sont opposés à chaque étamine. eee. Prolongement en forme de corne qui est renfermé dans chacun des appendices précédens. fF. Bord supérieur du tube staminal qui est appliqué contre la base du stigmate. gg8". Anthères, g est vue par son côté externe ; g' est coupée lon- gitudinalement et montre la cloison qui la partage. h. Une des masses polliniques contenues dans ces anthères. î. Tubes polliniques qui en sortent et péuètrent dans le stigmate. k. Corps stigmatique qui surmonte les véritables stigmates. 11. Les véritables points stigomatiques. mm. Les deux styles. (x) Voyez pl. x1v, B, fig. 1, ge. ( 276 ) nn. Les deux ovaires, Fig. 2. Une anthère vue par sa face interne, a. Corps noïr bilobé qui était fixé sur le stigmate et qui se termine inférieurement par les deux appendices 8b, auxquels sont fixés les deux masses polliniques cc’, dont l’une appartient à l’anthère qui est figurée ici , et l’autre à l’anthère voisine. Fig. 5. Coupe transversalé d’une anthère près de sa base. aa. Coupe des deux masses polliniques qui flottent dans chacune des loses. ù Fig. 4. Le stigmate et la partie supérieure des styles vus de côté. aaa. Tro's des cinq fossettes auxquelles sont fixés les corps noirs ou glandes d’où naissent les appendices qui supportent les masses pol- liniques ; les côtes saillantes qui partent deux par deux de chacune de ces fossettes correspondent à ces appendices et aux masses polliniques. bb. Surface réellement stigmatique. ce. Sommet des deux styles. Fig. 5. Stigmate vu par sa face mférieure. aaaaa. Côtes saillantes correspondant aux fossettes auxquelles sont suspendues les masses polliniques ; les parties creuses qui les séparent sont en face des anthères. bb. Surface inférieure veloutée et réellement stigmatique. ce. Origine des deux styles. Fig. 6. Une des masses polliniques avec les tubes polliniques qui en sortent au moment de la fécondation. a. Corps noir qui était fixé sur Le stiymate. b. Apperdice en forme de lame qui en naît. c. Sac pollinique qui est fixé à l'extrémité inférieure de cet appendice. d. Fente qui s’est opérée sur son bord externe. « e. Tubes polliniques qui sortent par cette fente. Fig. 7. Trois grains de pollen avec leurs tubes ou boyaux membraneux extraits de l’intérieur du sac pollinique. Fig. 8. Coupe de la partie inférieure du stigmate dans sa position re- Jative aux masses polliniques et aux anthères lors de la fécondalion. aa. Masse celluleuse et vasculaire du corps du stigmate, bb. Surface réellement stigmatique correspondant au bord supérieur &. du tube formé par les filets des étamines, Voyez fig. 1, ff. ce. Sommet des deux styles. dd. Partie supérieure du tube staminal. e. Cavité d’une des loges d’une anthère, : (AP J. Sac pollinique qui y est renfermé. gg. Grains de pollen contenus dans ce sac, dont les tubés mem- braneux pénètrent dans le stigmate. PI. xrv, 4. Structure des organes reproducteurs de l’Æsclepias fruticosa. | Fig. 1. Coupe longitudinale d’une partie du stigmate avant la fécon- dation. a-b. Partie médiane du stigmate correspondant à l’intervalle des deux styles. c. Surface externe en rapport avec les anthères et les masses polli- niques et-recouverte par une couche de tissu cellulaire serré. d. Partie externe ile la base du stigmate qui se trouve appliquée contre le tube formé par les étamines réunies. ce. Masse de tissu cellulaire qui constitue toute la partie stpérieure du stigmate. J. Surface réellement stigmatique formée par l'extrémité libre du tissu conducteur qui se continue dans le style en $. RL. Partie supérieure d’un des styles. i. Vaisseaux (trachées) qui traversent le tissu cellulaire du style et vont se distribuer dans la partie supérieure du stigmate. Fig. 2. Sac pollinique déchiré naturellement le long de son bord in- terne pour donner issue aux tubes polliniques qui avaient déjà pénétré profoudément dans le stigmate, mais qu’on en a retirés facilement. a. Extrémité d’un des apperdices du stigmate auquel est fixé la masse poilinique. b-c. Fente qui s’est opérée dans la membrane celluleuse de ce sac du côté qui correspond au stigmate et par laquelle sortent tous les tubes des grains de pollen. | ddd. Grains de pollen qui n’ont pas encore produit de tubes, et qui étant encore remplis de leur matière granuleuse, se distinguent par leur opacité à travers la membrane du sac pollinique. eeee. Tubes des grains de pollen plus ou moins allongés qui restent souvent rapprochés en un ou deux faisceaux et qui pénétraïent ains; dans le tissu du stigmate. Jf. Matière granuleuse qui est inter posée entre ces tubes près de leur sortie du sac pollinique, et qui me paraît provenir de graius de pollen qui se sont rompus sans former de tubes. Fig. 3. Uu grain de poilen entier avant qu’il ait donné naissance à sou (298.7 boyau ou tube membraneux ; il est entièrement rempli de petits gra- nules. Fig. 4. Deux grains de pollen qui se sont déjà prolongésen tubes très- allongés et qui sont plus ou moins complètement vides des granules qu’ils renfermaient , qui se trouvent alors dans leur prolongement tubuleux. Fig. 5. Coupe longitudinale du stigmate, d’un des styles et d’un des ovaires, avec la masse pollinique et les prolongemens tubuleux qui en sor- tent, dans la position qu'ils occupent lcrsque la fécondation est accomplie. aa. Masse du stigmate avec les vaisseaux qui s’y distribuent. b. Corps noir bilobé qui est fixé dans une des cinq fossettes dn stig- mate et qui supporte les appendices e, auxquels soni fixés les masses polliniques d. d. Une des masses polliniques dans la position qu’elle occupe éga- lement avant et après la fécondation. e. Faisceau de tubes polliniques qui sortent du sac pollinique et for- ment une sorte de corde qui pénètre dans le véritable stigmate en f, et qui se prolonge dans Le tissu central du style jusqu’en g. R.. Tissu conducteur occupant le centre du style et faisant suite d’une part au tissu du stigmate et de l’autre au tissu qui forme la couche su- perficielle du placenta, ä. Tissu cellulaire du péricarpe se continuant avec le tissu externe du style et renfermant les vaisseaux qui se distribuent dans le péri- carpe et dans la masse celluleuse du stigmate. k. Partie centrale du placenta qui renferme les vaisseaux qui se dis- tribuent aux ovules. Il. Ovules. Fig. 6. Coupe du style au point «, fig. 5. a. Vaisseaux du style et du stigmate. b. Tissu conducteur, Fig. 7. Coupe du style au point £, fig. 5. a. Faisceau vasculaire. b. Tissa conducteur. Fig. 8. Coupe transversale correspondant au sommet de la cavité de l'ovaire au point y, fig. 5. aaa. Faisceaux vasculaïes du péricarpe. bb. Tissu conducteur s’étendant sur la partie supérieure du placenta. cc. Partie vasculaire du placenta. Fig. 9. Coupe transversale de l'ovaire dans le point d' de la figure 5; même disposition des diverses parties que dans la figure précédente. RCE > —— mm +. # * ( 279 ) Fig. 10. Portion du tissu conducteur formant la surface du placenta, détachée parallèlement à cette surface. a. Point d’attache d’un ovule. 0 PE a, \ PL. x1v, B. Masses polliniques du Stapelia variezata. Fig. 1. Partie de la surface supérieure du corps stigmatique tel qu’il se présente lorsqu'on a enlevé les anthères. aa. Base de deux des éperons qui se prolongent en dehors des anthères. bb. Poiut d'attache des anthères qui ont été enlevées. cc'c". Trois des cinq angles du stigmate auxquels sont fixés les petits corps noirs qui supportent les masses polliniques; ces corps, les ap- pendices qui en dépendent et les masses polliniques ont été enlevés en c'e’, on les a conservés en c. dd. Les deux appendices auxquels sont attachées les masses polli- niques. ee. Deux masses polliniques. J. Centre du stigmate avec deux petites dépressions qui correspon- dent aux sommets des deux styles. gg- Partie du stigmate qui difière du reste de la surface de cet or- gane, dont l'aspect est plus velouté et qui pourrait êtrela véritable sur - face stigmatique ? Fig. 2. Deux masses polliniques avec les deux appendices cornés et le corps noir qui Les réunit et les fixe aux angles du stigmate. On distingue sur lenr côté interne la fente avec un rebord épais et saillant par la- quelle les tubes polliniques doivent sortir. Fig. 3. Une de ces masses polliniques vue de côté, dé mauiére à mieux montrer le bord saillant qui entoure la fente du sac pollinique. LA ( 280 ) Mémoire sur la Greffe ou le Collage physiologique des Tissus organiques , et particulièrement sur celle du Cactus truncatus enté sur le Cactus triangularis ; Par P. J. F. Turp»rn. (Lu, par extrait, à la Société d'Horticulture de Paris, dans sa séance du 20 avril 1831.) L'action de la soudure vitale entre des tissus organiques analogues, est toute dans l'attraction mutuelle des molécules dont se composent les masses tissulaires conjointes. Rien n’est plus répandu, plus multiplié, dans la nature, que les exemples de greffes uissulaires , soit végé- tales, soit animales. C’est donc une chose qui n’a jamais été une découverte et qui, par la même raison, n’a point eu d’inventeur, puisqu'il a toujours sufli de regar- der autour de soi et en soi pour y voir des greffes natu- relles de tissus organiques. La seule chose qui appartienne à l’homme, et dont il peut se considérer comme l'inventeur, consiste unique- ment dans les différens modes d’ajuster ou de mettre en contact les tissus vifs des végétaux et des animaux; tissus ayant entre eux, bien entendu, une certaine somme d’analogie. Ces diflérens modes d’ajustages , pouvant, pour ainsi dire, se multiplier à l'infini, ont été, pour les végétaux, décrits et figurés par A. Thouin dans son excellente Mo- nographie des greffes , au nombre de 126 espèces (1). (1) Chez madame Huzard, mars 1821. ( 281 ) La soudure vitale des tissus organiques ne peut s'opé- rer qu'entre de jeunes ou de nouveaux tissus (gemmes) développés , par extension, des faces conjointes des deux masses tissulaires , après l'opération de la greffe. Les tis- sus existans , au moment de l’opération , paraissent avoir perdu cette faculté. Dans le rapprochement des tissus vifs, dans les plaies des animaux, il n’y aurait jamais de soudure ou de cicatrisation véritable si, de ces tissus faits, il ne se développait pas, de part et d’autre, une multitude de petits gemmes, bourgeons ou extensions nouvelles. Ces gemmes ou extensions nouvelles, seules, peuvent se coller ou s’unir vitalement. Il en est de même dans toutes les greffes tissulaires des végétaux. Deux masses de tissus accolées ne se souderaient pas, si de la surface de ces masses, mises en contact, il ne se déve- loppait pas latéralement , des fibres existantes, un grand nombre de gemmes nouveaux , et si les vésicules du tissu cellulaire n’accouchaient pas des gemmes ou nouvelles vésicules (globuline) qu’elles contenaient au moment de l'opération de la greffe. Ces gemmes nouveaux , soit ceux extérieurs des tigellules confervoïdes du tissu tigel- lulaire (1), soit ceux intérieurs des vésicules du tissu : (x) Dans plusieurs de mes Mémoires j'ai appelé tissu tigellulaire tout ce qui, dans une masse tissulaire végétale, se distingue, sous forme fila- menteuse , des vésicules du tissu cellulaire ou vésiculaire, et j'ai nommé tigellules confervoides les composans de ce tissu, parce que ces végéta- tions internes sont autant de petites tiges élémentaires destinées à for- mer, par agglomération, ce faisceau que l’on désigne sous le nom de tiges proprement dites, et enfin parce qu’elles offrent une très-grande analo- gie avec La végétation et la multiplication des rameaux latéraux , par gemmes , des conferves rameuses. Ces tigellules confervoides des tissus végétaux tirent leur origine du ( 282 ) cellulaire, comme dans la greffe ou cicatrisation des tis- sus animaux, sont les seules choses susceptibles de se greffer. Depuis quelque temps il a été souvent question, dans notre Société , de divers modes de grefles végétales. MM. Féburier et Oscar Leclere ont fait connaître que des greffes de jeunes tiges de Dahlia , appliquées sur des racines tnberculées d'espèces du même genre de plante, leur avaient parfaitement réussi. M. Soulange-Bodin a présenté en nature des exenrples de tiges de Pivoines en arbre (1), greffées sur des racines tuberculées de Pivoines herbacées. On a aussi parlé des point qui unissait au végétal-mère, soit l'embryon de la graine, soit le bourgeon axillaire. Elles végètent et multiplient leurs rameaux parmi les vésicules du tissu cellulaire, qui leur sert de territoire, mais elles en sont toujours distinctes et n’en proviennent jamais. C’est une production nou- velle qui ne peut naître ailleurs que dans le milieu d’un tissu cellulaire presque naissant. (x) Les Pivoines arborescentes ne diffèrent des Pivoinesdites herbacées que parce que celles-ci ne sortent pas leur tige hors de terre. Ces deux sortes de tiges, également ligneuses, offrent le méme mode de végétation, Chaque année la production terminale périssant en partie et étant rem- placée l’année suivante par un bourgeon latéral , il eu résulte ce vilain aspect tortueux qu'offre toutes les tiges de Pivoines, soit terrestres, soit aériennes. La dénomination de Pivoine herbacée et de Pivoine en arbre est vi- cieuse, puisque toutes ont uné tige verticale et ligneuse. Celle de Pivoine à tige souterraine et de Pivoine à tige aérienne serait exacte et aurait l’a- vantage de faire connaître le véritable état des choses. Quant aux racines, d’abord filamenteuses, elles ont la même tendance à s’épaissir en tubercules que celles des Patates et des Dahklia, et,commeé le tubercule de la Patate, celui des Pivoines contient dans les vésicules de son tissu cellulaire une grande quantité de fécule ou de globuline. Ox sait que ceux des Dahlia en sont dépourvus. ( 283 ) greffes herbacées ou grefles Tschoudy, comme si toutes les greffes végétales n'étaient pas herbacées et comme s’il était possible de greffer ou de souder vitalement les vé- gétaux par d’autres parties que par celles qui sont vives et herbacées , comme, par exemple, les écorces des tiges et des racines, les tissus les plus jeunes et les plus exté- rieurs du bois-aubier, les feuilles et les jeunes fruits. La greffe de Cactus sur Cactus a été plusieurs fois un sujet de discussion et de controverse. On a douté de son existence. Cette association, tentée ou plutôt prati- quée par plusieurs horticulteurs, a été expliquée, à priori il est vrai, de diverses manières. Les uns n’ont vu dans cet assemblage qu’une tige plongée dans une autre, et vivant quelque temps en cet état, en absorbant l'humidité nutritive de celle-ci, comme elle le ferait si on l’introduisait dans un navet ou dans une carotte hu- mide. Ils ont ajouté que cette prétendue greffe pouvait , comme plante grasse, vivre, prendre de l'accroissement, fleurir et fructifier en absorbant par tous les points de sa surface l'humidité nutritive environnante , sans que pour cela il y eüt le moindre collage organique et vital entre les individus assemblés. Personne ne peut contester cette possibilité. On sait qu'une foule de végétaux isolés de la terre et de leurs racines peuvent , pendant un temps , continuer de vivre, de croître , de fleurir et de fructifier dans cet isolement. On peut se rappeler que Aubert Dupetit-Thouars et M. le docteur de Lens ont fait connaître , d’après leurs propres expériences, celles de Conrad Gesner et de Tour- uefort, que le moyen de faire produire des péricarpes , des graines et des bulbilles aux aisselles des feuilles du ( 284 ) Lis blanc (r) consistaient dans l'isolement des tiges de leurs bulbes un peu avant la floraison et à les suspendre, la tête en bas, dans des milieux plus ou moins humides (2). On sait que des portions de troncs d’arbres employées l'hiver dans des constructions, développent, assez souvent au printemps suivant, sur les écorces ménagées, des branches adventives qui vivent et croissent pendant toute la saison et qui pourraient ensuite vivre perpétuellement, par voie de génération, si du point où elles ont pris naissance on jes transportait sur un sol dans lequel elles s’établiraïent au moyen de racines adventives et latérales. Toutes ces végétations isolées cessent d’étonner dès que l’on sait que chaque globule, chaque vésicule, cha- que fibre et chaque tube dont se compose tonte la masse tissulaire de l’individualité composée d’une plante, est un végétal tout entier, qui a son centre vital particulier d'attraction, d'absorption et d’assimilation, et qui consé- quemment peut végéter quelque temps à l’aide d’humi- dité muqueuse ou nutritive. Les autres ont avancé, comme fait observé, que las- sociation de deux espèces de Cactus ne constituait point une véritable greffe; que les tissus des deux individus associés ne se collaient pas et que conséquemment Îles deux masses vivantes restaient parfaitement isolées. Que l'individu supérieur, ou ce qu’on appelle la greffe, n'était qu'une véritable bouture développant de sa base une cou- ronne de radicelles latérales, qui, s’enfonçant dans le tissu lâche et aqueux de l’individu inférieur ou sujet, y pui- (1) Lilium candidum, Lion. (2) Annales de la Societé d'Hore., &, 1v, p. 36, et t. vi, p. 34. ! ( 285 ) saient, comme dans un territoire, l’eau muqueuse néces- saire à l'assimilation et à l'accroissement de l'individu supérieur (1) ou prétendue grefle. Ils prenaient, comme objet de comparaison de ce mode de végétation, celui entièrement parasite du Gui (2), qui, comme l’on sait, ne se greffe point aux arbres sur lesquels il végète , mais seulement dans l’écorce et l’au- bier tendre desquels il enfonce ses racines ou suçoirs pour y pomper l’eau muqueuse dont cet arbrisseau singulier et rayonnant dans tous les sens se nourrit en partie (3). (1) Du besoin pressant que l’on éprouve, dans les sciences, de commu- niquer à autrui ce que l’on sait, naît la nécessité des dénominations ; mais comme les choses ne sout pas toujours d’abord suffisamment com- prises, il en résulte assez souvent que ces dénominations deviennent plus tard absurdes ou au moins insignifiantes. Celles de sujet et de greffe sont dans ce cas. La dénomination de sujet pourrait également convenir aux deux parties associées, mais non celle de greffe, qui doit être réservée pour exprimer l’action du collage entre deux masses tissulaires orga- niques, C’est à cause de cette absurde dénomination de greffe, accordée seulement à l’une des parties associées que souvent, en parlant des grefles végétales, je m’exprime par individu inférieur (sujet) et ivdividu supérieur (greffe). (2) P’iscum album, Linn. (3) Je dis en partie, parce que tous les végétaux , sans exception, ab- sorbant leur nourriture par les pores de toutes leurs surfaces, on sent que le système aérien et rayonnani du Gui présentant une surface incompa- rablement plus étendue que celle de ses courtes racines, absorbe bien plus que celles-ci. Tous les végétaux , pour être mieux compris, devraient être consi- dérés sous la forme d’uue sphère organique vivante, compusée de tissu globulaire , de tissu cellulaire, de fibres et de tubes entre-mélés, munie sur tous les points de sa surface de pores absorbans et excrétans tout à la fois. isolée et comme suspendue dans un milieu, pouvant offrir trois den- sités différentes , tel que la terre , l’eau et l'air, ( 286 ) On verra tout à l'heure que ce parasitisme du Gui, mode de végétation très-rare dans les végétaux et surtout dans les végétaux appendiculés ou d'ordres supérieurs, n’a nullement lieu dans l’opération de la greffe des Cac- tus sur Cactus et que ces végétaux sont, au contraire , par la nature de leurs tissus très-muqueux et très-vivans, plus susceptibles que beaucoup d’autres de s'unir, par un collage physiologique , et de donner lieu conséquem- ment à une véritable greffe. Si, comme on l’a avancé dans l’union de deux espèces de Cactus, l'individu supérieur produisait, du bourrelet formé à sa base, de longues radicelles s’enfonçant dans le tissu de l'individu inférieur, cela augmenterait néces- sairement le diamètre de celui-ci, et cela fournirait un exemple ou au moins une image explicative de la théorie partielle sur l'accroissement en diamètre des végétaux dicotylédons (1). Mais, et pour le fait des Cactus et pour la théorie erronée dont il vient d’être question, l’observation aidée du microscope n’apprend rien qui puisse, le moins du monde, servir à appuyer ces deux erreurs. M. Jacques, notre confrère , possédant dans les jardins du roi, à Neuilly, de très-belles greffes de diverses espèces de Cactus, nous invita, M. Poiteau et moi, à nous porter sur les lieux pour y observer ensemble ces (x) Idée concue par Philippe de La Hire (Mém. de l’ Acad. royale des Sciences, 1708, p. 233), développée ensuite , sous forme de théorie, par Aubert du Petit-Thouars. Idée ingénieuse, séduisante, mais qui ne peut, le moindrement , résister à aucune des nombreuses objections positives qu’on lui oppose. = 2 LL | ( 287 ) grefles afin de bien constater le véritable état de ces associations organiques, Celle de ces associations qui a servi à nos investigations et dont j'ai l'honneur de présenter à la Société l’objet en nature et le dessin qui la représente (pl. xv, fig. 1 et2), consistait dans l'union du Cactus truncatus (1), comme greffe ou individu supérieur, et du Cactus triangularis (2), comme sujet ou individu inférieur. Cette greffe, qui avait acquis un très-beau développe- ment et qui était brillante de santé, paraissait comme plongée dans un vase au sommet tronqué de la grosse tige triangulaire du sujet. Là elle formait un couronnement très-élégant et contrastait d’une manière très-pittoresque, au moyen de ses nombreuses tiges articulées , coralloïdes et aplaties en feuilles, avec les tiges robustes et à trois angles aiguillonnés du sujet qui lui servait de support ou de territoire intermédiaire. À la base de cette greffe, tout près du point d’union, était sorti un jeune rameau (pl. xv, fig. 1, c), qui, au lieu d’être aplati et foliacé comme ceux de sa mère, était cylindrique, muni de plusieurs côtes chargées de fais- ceaux d’aiguillons divergens et disposés alternativement et en spirale (3). (x) Cereus truncatus, Epiphyllum truncatum. (2) Cereus triangularis. (5) Ce jeune rameau, par sa forme cylindrique et ses côtes, rappelle une observation déjà faite, savoir que tous les Cactus à tiges aplaties ou foliacées , et dont on a composé le genre Epiphyllum, commencent tous, dans leur germination, par être des Cierges (Cereus), et que ce n’est que plus tard que le nombre des angles s’'évanouit peu à peu, que les tiges s’a- platissent et prennent l’aspect de feuilles. Voyez pl. r, fig. E, 4 de mes Observations sur la famille des Cactées. (Ænn. de l'Inst. royal et Hort. de Fromont, t. 11, avril 1830.) ( 288 ) Une coupe longitudinale (pl. xv, fig. 2), faite en même temps sur la grefle et sur le sujet, nous a montré, sans la moindre équivoque, que l'union des tissus par collage physiologique des deux individus était parfaite et qu'en conséquence il y avait greffe dans toute la force du terme. Que cette greffe pouvait être rigoureusement comparée à toutes les espèces de greffes en fente pratiquées sur des végétaux dicotylédons, comme il vous sera possible, Messieurs, de vous en assurer en comparant la coupe longitudinale de la greffe de pommier sur pommier que je vous présente, avec celle de nos deux Cactus accolés. Les tissus des deux individus, coupés par tranches minces et longitudinales, soumis à l’action du micro- scope, présentaient au point de leur union un simple collage, soit des vésicules du tissu cellulaire, soit des fibres et des tubes du tissu tigellulaire. Partout on ne voyait qu'un simple ajustage des tissus des deux indivi- dus, et sur ce point de rencontre ou de jonction se termi- uait nettement le caractère propre et individuel de cha- cune des espèces accolées. Là se formait cette ligne trans- versale que l’on remarque à l’intérieur de presque tous (1) les arbres greffés en fente et qui se manifeste souvent jusqu’à l'extérieur des écorces des individus les plus âgés. (PL xvr, fig. !x,.2, cc; pl. xvai, fig.2;cc;et 4,,5,6, cc.) La fente, pratiquée dans l’un des angles rentrans de la (1) Je dis de presque tous, parce que dans les greffes qui ont lieu entre les tissus d’une même espèce ou mieux encore entre les tissus d’un même individu, toutes les analogies sont si grandes que l’on ne peut, à l’œil nu, distinguer la ligne formée par la rencontre successive des tissus, à mesure que les deux individus accolés se sont épaissis, chacun pour leur propre compte, ( 289 ) tige du Cactus triangularis , avait nécessairement mis à découvert ou à nu les tissus cellulaires et tigellulaires du sujet. Ceux de la greffe paraissent ne l’avoir été que par son extrémité tronquée , aussi n'est-ce que par cet en- droit que la soudure, entre les deux individus, a eu lieu. Si l'opérateur, en estimant d’avance la profondeur dans laquelle il se proposait d’enfoncer sa greffe , avait enlevé l’épiderme de ceïle-ci dans la même longueur et si ensuite il avait bien assujetti les tissus vifs au moyen d’une ligature , on aurait obtenu une soudure plus éten- due , plus solide et surtout bien plus vitale. Il est presque inutile de dire qu’une couverture de mastic sur la fente et sur le sommet tronqué du sujet, afin d’intercepter air et la lumière, et d'empêcher les tissus conjoints de s’écarter , était une chose très-néces- saire à la réussite du collage organique. On ne sait ce qui a pu faire douter de la greffe tissu- laire des Cactus sur Cactus. On ne devine pas davan- tage pourquoi la nécessité de cette hypothèse par laquelle on n’a voulu voir dans ces greffes qu’une simple bou- ture enfonçant ses racines dans le tissu du sujet, comme elles les auraient enfoncées dans la terre, dans le cas où l’on se serait proposé la reproduction par bouture. II faut, je crois, en chercher la cause dans ce que l’action vitale de la greffe des tissus organiques n’a pas été conçue dans ses élémens, surtout d’une manière assez générale et partout enfin où cette action , si multipliée dans Ja nature, se manifeste dans toute l’étendue du règne des êtres organisés. XXIV. 19 ( 290 ) $ I. De la matière à l'état meléculaire et à l'état de corps temporaires. En prenant les choses dans leur origine la plus reculée, on peut dire que la matière suspendue dans l'espace s’y trouve toujours sous deux états différens : l’état libre, moléculaire, élémentaire, et l’état d'agglomération , de condensation ou de corps temporaires , et que la même quantité de matière passe , sans cesse et alternativement, de l’un de ces états dans l’autre. Deux sortes de matières élémentaires , très- distinctes, servent : 1° l’une, de nature dure, terreuse, cristalli- sable , à former par attraction et par des juxta-positions extérieures les corps inorganisés ; 2° l’autre, de nature molle, muqueuse, à composer , par aliraction, par ab- sorplion et par assimilation ou juxta-posilion inté- rieure (1), les corps organisés (2). (1) Quel que soit le mode que suit la matière en s’unissant à la matière des corps, on est toujours forcé d’en venir à la simple juxta-position. (2) M. Bory de Saint-Vincent (Düict. class., t.x, p. 248) pense avoir découvert, par l’action du microscope, six états primitifs de la matière tendant à s’agglomérer, soit en corps inorganisés, soit en corps organisés. Ces six états sont : 10 le terreux ; 20 le cristallin ; 30 le muqueux; 4 le vésiculaire; 50 l’agissant ; 60 le vegétatif. Le premier et le second de ces états entrent seuls dans la composition des corps bruts, et peuvent fa- cilement être réduits à un seul. Le troisième , le muqueux , répandu dans toute la nature, soit à l’état moléculaire, soit à l’état d’amas informes et sans organisation , soit à l’état de masses organisées mortes ou vivantes, est manifeste. Chacun sait que tout ce qui est organisé en lui n’est que du mucus plus ou moins condensé sous les formes globuleuse , vésiculeuse, ——— > — ( 29 ) N'ayant à m'occuper ici que de la nature et de la composition tissulaire des êtres organisés, je m'en tien- drai à la seconde de ces matières élémentaires, à la mu- queuse, comme formant elle seule toute la masse orga- nisée et vivante de tous les individus dont se compose le règne organique, et comme devant servir à nous mieux faire comprendre l’action vitale de la greffe, soit entre des tissus végétaux , soit entre des tissus animaux. La matière muqueuse à l’état de division moléculaire est immensément répandue : on la trouve 1° dans les couches d’air les plus rapprochées de la terre; 2° dans l’eau; 3° dans les couches les plus extérieures de la terre , dans celles surtout que l’on désigne sous le nom d'humus. Dans cet état de diffusion et en raison de l’extrême ténuité, de la blancheur et de la grande diaphanéité des molécules , cette matière est inapercevable , même sous la puissance des meilleurs microscopes. Ce n'est ( sem- blable à l’eau qui cesse d’être visible à l’état de grande division ) qu’à l’état de condensation que la matière mu- fibreuse et membraneuse. Le quatrième état, le vésiculaire, n’a point d'existence réelle, puisque les prétendues vésicules ne sont que des bulles qui se forment dans l'épaisseur des liquides , lesquelles sont occasionées par la dilatation de certains gaz captifs qui viennent, en s’éleyant comme de petits ballons, faire explosion à la surface du liquide. Le cinquième et le sixième, l’agissant et le végétatif, n’existent pas davantage, comme ma- tière primitive, puisque ce que M. Bory de Saint-Vincent a pris pour tels, se compose déjà de corps organisés, soit végétaux, soit animaux, au premier degré de vitalité, et étant conséquemment , comme les Monades agissantes , incolores ou colorées en vert, les Lepra, les Protococeus ou Globulines, les Palmella, etc., composés de substance éminemment muqueuse. ( 292 ) queuse devient appréciable au toucher et au sens de la vue. Alors on lanomme matière muqueuse, globulaire ou amorphe. Cet-état de condensation existe, soit dans des dépôts ou amas informes de molécules qui n’ont encore subi aucune espèce d'organisation, soit dans celles, de même nature, admises et faisant partie de toute la masse tis- sulaire d’un végétal ou d’un animal. Ces molécules invisibles, muqueuses et conséquem- ment très-collantes, en se déposant successivement et en formant des enduits muqueux à la surface de tous les corps plongés dans l’eau , y deviennent alors sensibles. Il n’est personne qui n’ait éprouvé combien les pierres , les bois et tout autre corps placés sous l’eau douce ou salée, sont glissans par la présence de cet enduit. Une semblable mucosité recouvre également la surface des végétaux et des animaux qui vivent habituellement sous les eaux. Maïs ici la mucosité est fournie, d’une ‘pari, par la parte extérieure des tissus de ces êtres, tenue par l’action coutinuelle du liquide dans un état de liqué- faction, et est due'de l'autre, comme je viens de le dire pour les corps inertes, au dépôt successif des molécules muqueuses el suspendues dans l’eau qui les environne constamment. La substance muqueuse se dépose et enduit également la surface des corps exposés à l'air. C’est elle , et les mo- lécules terreuses qui s'y mélangent, qui compose et offre aux premières comme aux plus simples végétations le terreau ou le territoire primitif. Le mème mucus, si répandu dans l'air, dans l’eau (tr) (1) La présence du mucus moléculaire dans l’atmosphère est prouvée ( 293 ) et dans l’humus, et que.nous venons de voir revèlissant J’extérieur des corps inertes et des corps animés, plongés sous les eaux , existe au mème état dans toute l'étendue de la surface du canal intestinal des animaux pourvus de cet organe. De là le nom de muqueuse que l’on a donné à la membrane qui tapisse tout ce trajet. La peau des mollusques (les Limaces par exemple), celle des Batraciens, le nez du chien bien portant, etc., etc., transsudent constamment Ja matière muqueuse. L’albu- men et le jaune de l'œuf ne sont pas autre chose. Tous les êtres organisés commencent , sans aucune exception , par des globules de substance purement mu- queuse. L'homme, l'être le plus développé, le plus complexe de la création, dès qu’on l’apercçoit peu de temps après la fécondation, n’offre qu’un globule trans- parent, muqueux, et serait en cet état rigoureusement comparable à une Monade organisée, si dans ce globule humain n'était pas une puissance particulière par laquelle il doit s'étendre et acquérir le déveioppement successif de tous les organes qui composent le plus parfait des animaux. par Les végétaux qui l’absorbent et s’en nourrissent. Elle l’est encore par ces miasmes muqueux ét pestilentiels qui s'élèvent dans l’air en se déta- chant des masses tissulaires de végétaux et d’avimaux morts, et qui, absorbés par l’homme, lui causent ces maïadies désignées par les déno- mivations de fièvre de prisons, d’hôpitaux, de camps, de typhus, de cholera-morbus, de fièvre jaune et de peste. Dans l’eau , le mucus est prouvé par ses dépôts à la surface de tous les corps submergés , parce qu’il est la seule nourriture d’un grand nombre de végétaux qui croissent daus ce milieu, et qui, comme tous les êtres or- ganisés, ue peuvent se nourrir que de mucus, Eufin, c’est à l'existence de la substance muqueuse unie à l’eau , qu'est due la putréfaction de ce liquide, putréfaction si incommode dans les voyages sur mer de long cours, ( 294 ) Toute la substance muqueuse, comme je lai dit en parlant de la matière en général , est constsëmment , dans la nature, sous deux états différens : celui libre , molécu- laire et élémentaire , et celui d'agglomération ou d’orga- nisation tissulaire dans les végétaux et dans les animaux. La masse organique, tout entière , des végétaux et des animaux n'étant composée que de mucus plus ou moins fluide, plus ou moins condensé , plus ou moins corné, il en résulte que ces êtres ne peuvent se nourrir, ni aug- menter de volume qu’en absorbant du mucus, les végétaux par tous les points de leurs surfaces extérieures , les ani- maux par tous les points de la surface du canal intestinal, soit que ce mucus provienne de celui divisé à l’état molé- culaire et épars dans la terre, dans l’eau ét dans l’at- mosphère , soit de végétaux et d'animaux morts , plus ou moins divisés ou broyés, mis en contact avec les faces absorbantes de ceux qui vivent encore. La différence que l’on a établie entre la manière dont se nourrissent les végétaux et les animaux existe à peine. La faculté absor- bante est la même, les uns et les autres ne peuvent as- similer à leurs tissus muqueux que du mucus puisé aux mèmes sources. Si le plus grand nombre des animaux, pouvant être considérés comme des sortes de tubes, ab- sorbent le mucus nutritif par les parois intérieures du tube ou canal intestinal , cette faculté est aussi un des attributs de la peau ou de la surface extérieure , mais seulement à un bien moindre degré d'énergie. On peut nourrir, faiblement il est vrai, un animal en le plon- geant souvént dans un bain nutritif composé d’eau , dans laquelle se trouve en suspension une substance muqueuse quelconque , comme de la gomme , du lait, du sang, de —— = ( 295 ) la fécule , etc. , ou en le tenant dans une atmosphère muqueuse comme celle de l’intérieur des étables ou bien mieux celle des boulangeries , des cuisines et par-dessus tout celle des boucheries. Toutes les surfaces externes ou internes des végétaux et des animaux sont également absorbantes , seulement elles le sont à des degrés différens. Il suffit que ces sur- faces soient mises en contact avec du mucus , soit à l’état libre ou moléculaire , soit à l’état encore agglutiné dans les tissus morts , pour qu’elles absorbent. $ I. Les végétaux et les animaux simplement plongés dans l'eau et dans l'air atmosphérique , ou seulement dans l'un de ces deux milieux , peuvent-ils vivre, se nour- -rir et croître en absorbant le seul mucus suspendu dans ces milieux ? Cette question s'appliquant à tous les êtres du règne organique, si différens dans leur complication et dans leurs besoins d’assimilation , on ne peut y répondre qu’en spécialisant et en citant quelques exemples. Végétaux. Les Globulines vertes ou botryoïdes que l’on rencontre sur toutes les surfaces humides exposées à l'air et à la lumière, les Bichaties vésiculineuses (1) qui naissent et qui se développent sous forme de flocons verdâtres et aqueux aux surfaces internes des vitres des serres chaudes , les Nostocs moniliformes qui apparais- (1) PL xv, fig. 3. ( 296 ) sent simplement posés sur la terre ou sur les herbes comme des membranes gélatineuses, l’Oscillaire parié- tine qui végète librement et aux mêmes lieux que la Globuline verte, etc. , ne se nourrissent qu’en absorbant le mucus moléculaire suspendu dans l’air atmosphérique qui les environne. Parmi les Conferves , les Conjuguées et les Vauchéries germent dans l’eau , souvent à sa surface, et continuent de vivre et de développer leurs longs filamens dans cet état de suspension. D’autres espèces adhèrent seulement auxcorps solides par l’unedeleursfines extrémités. Toutes les plantes marines ou Thalassiophytes, parmi lesquelles il en est d’un développement gigantesque, ne sont fixées inférieurement que par un crampon ou épatement, sou- vent à une petite coquille, qu’elles entraînent avec elles en suivant les mouvemens de la mer.Ces végétaux, donton pourrait citer un bien plus grand nombre d'exemples, soit qu'ils voguent librement dans l'épaisseur des eaux, soit qu'ils adhèrent aux corps solides par un simple crampon, ne vivent qu’en absorbant le mucus molécu- laire suspendu dans l’eau et surtout dans l’eau de mer eù cette matière se trouve si abondamment. Les végétaux aquatiques, plongés dans trois milieux différens, la terre, l’eau et l'air, y puisent la matière muqueuse dont ils se nourrissent, mais c’est ordinaire- ment de l’eau qu'ils en tirent la plus grande quantité. Quelques-uns de ces végétaux, comme , par exemple, le Stratiotes aloïdes , vivent très-bien suspendus moitié dans l’eau et moitié dans l'air, en se nourrissant de la substance muqueuse délayée dans ces deux milieux. Nous ne connaissons point de végétaux voguant et — _- — . (297 ) vivant librement dans l'air; mais nous en connaissons beaucoup , quoique fixés aux corps solides par un point deleur surface, qui véritablement ne vivent et ne crois- sent qu’en absorbant le seul mucus répandu dans l'air atmosphérique. L’Epidendrum flos-aeris et plusieurs autres espèces de ce genre, le Pourretia aeranthos où Plante aérienne, isolées des écorces d'arbres sur les- quelles elles ont germé, végètent , fleurissent ét fructi- fient très-bien suspendues dans l'air où elles puisent toute la substance muqueuse dont elles se nourrissent. Ces Cactus céréiformes et en arbre , que j’ai quelque- fois vus à St.-Domingue, simplement fixés par leur base sur les tuiles sèches et brülantes des toits, ne vi- vaient et ne se nourrissaient bien certainement qu’en absorbant et en s’assimilant le mueus libre et flottant dans l’atmosphère. Ces végétaux n'étant plongés que dans ce seul milieu, ils ne pouvaient en puiser ail- leurs (1). Cet Orme, de 15 à 18 pieds de haut, développé de (1) L'eau étant nécessaire à l’entretien de la vie chez les êtres orga- nisés , la matière muqueuse sèche, quoiqu’elle soit la seule chose qui nourrisse , demande cependant à être imprégnée d’eau et divisée par ce liquide pour pouvoir s’assimiler aux tissus vivans. C’est à cause de ce besoin qu’il est nécessaire que la matière nutritive sèche dont se nour- rissent les végétaux et les animaux soit délayée dans une certaine quantité de liquide. Aïnsi, quoique les Cactus dont je viens de parler soient plongés dans une atmosphère de molécules muqueuses, ils périraient de faim , comme Tantale de soif au milieu de l’eau , si les rosées abon- dantes de la nuit ne disposaient pas les tissus à l'absorption et les molé- cules muqueuses sèches à être absorbées. Mais on ne peut trop le LA L4 . . répéter, l’eau seule ne peut nourrir. Au mucus seul est réservé de faire du mucus. ( 298 ) graine sur les dalles en pierre qui forment le toit d’une vieille fontaine située près de la grille d’Enfer du jardin du Luxembourg, et dont le tronc , gros comme la cuisse, y existe encore , n’a vécu et n’a grandi, comme le Cactus dont il vient d’être question, qu’en assimilant le mucus ambiant de l'atmosphère. Mais il faut dire qu’une graine semblable semée au même instant dans un terrain abon- damment pourvu de mucus et constamment entreteuu de cette substance , aurait , dans le même espace de temps, produit un arbre incomparablement plus grand. Avec de l’eau gommée on nourrirait un jeune enfant ; avec cette seule substance muqueuse il prendrait quelque développement; mais quelle différence existerait entre cet individu et celui auquel on offrirait le mucus plus abondant des farineux et des viandes! Ceux qui ont cru que les engrais, toujours muqueux , étaient inutiles à l’augmentation des masses tissulaires des végétaux et que l’eau seule suffisait, étaient dans une bien grande erreur. Les végétaux sont très-avides de chair ou du mucus qui provient des animaux décomposés , ce qui revient au même; ils s’en nourrissent très-bien et prennent des dimensions beaucoup plus grandes que lorsqu'on ne les nourrit qu'avec du mucus provenant de détritus végé- taux. Des arrosages de lait, de sang, de sérosité , et même de sperme fourniraient aux végétaux une nourri- ture par excellence. Celui du sang, expérimenté et mis en pratique dans la culture des Ananas, réussit très-bien, en donnant à ces plantes de plus grandes dimensions et en leur faisant produire des fruits plus beaux et plus succulens. ( 299 ) Je me résume et je répète : la matière muqueuse est immensément répandue. On ne la trouve 1° que dans la couche la plus extérieure de la terre et là seulement où elle es! formée d’humus ou de terreau composé de détritus de végétaux et d'animaux ; 2° dans l’eau douce et salée ; 3° dans les couches les moins élevées de l’atmosphère. Dans ces trois milieux de densités différentes, la ma- tière muqueuse passe alternativement de l'état libre flottant et moléculaire à l’état de captivité ou de conden- sation en formant , par attraction et par voie d'absorption, des êtres organisés, lesquels plus tard, comme on le sait, rendent en somme au mucus flottant tout ce qu'ils en avaient reçu en détail. Rien n’est plus facile que de sentir que des êtres or- ganisés dont tous les tissus et tout ce qui vit en eux est muqueux, ne: peuvent absorber et se nourrir que de mucus, de même que l'or ne peut être formé qu'avec de Por. Lorsqu'il arrive qu’un chien avale un os et qu'il le conserve pendant un temps assez long dans son intestin, la surface de celui-ci le suce et en absorbe toute la partie muqueuse ou gélatineuse , et quand enfin cet os se trouve expulsé au dehors par l’anus , on voit qu’il est réduit au réseau calcaire et indigeste. L'organique s’est saisi de ses matériaux naturels, le mucus, et a rendu à l’inorga- nique la chaux qu'il ne pouvait s'approprier. La matière muqueuse est la matière organique; elle seule peut former ce qu’il y a de vivant ou de végétant dans les êtres organisés (non la vie); elle possède la faculté, par des juxta- positions intérieures et exté- ( 300 ) ieures (1) de molécules, de former des globules, des vésicules , des fibres, des tubes, des membranes , et à l’aide de ces organisations préparatoires, celles d’un végétal ou d’un animal composé. La matière muqueuse ainsi organisée ne s’y trouve Jamais à l’état de pureté; elle est toujours alliée à des substances étrangères qui s’y présentent en plus ou moins grande quantité ; telles sont en général l’eau, l'hydro- chlorate de potasse et de soude , le lactate de soude, le phosphate de soude, le phosphate calcaire, etc. Indé- pendamment de cet alliage , le mucus, chez les animaux plus particulièrement , offre des différences très-grandes d'organismes et de densités. On le trouve, dans les na- rines et enduisant la membrane de tout le canal intesti- nal, à l’état de matière non organisée et délayé dans une grande quantité d’eau. Il a reçu un commencement d’or- ganisation dans les globules vésiculairesde la sérosité, ceux de la Iymphe, du Jait, du sang et dans les animalcules du sperme. Il est plus organisé dans les globules et les (1) Dans la formation d’un cristal il n’y a que simple juxta-position. de molécules à l'extérieur. Dans les corps organisés il n’y a également que juxta-position de molécules; mais il y a cette différence que les corps organisés, très- pénétrables de leur nature , permettent aux molécules attirées du dehors d'aller s’ajuster à des molécules faisant déjà partie du corps et situées à des profondeurs plus ou moins grandes des masses tissulaires; mais aussi, en même temps, à des molécules entièrement placées aux surfaces de ces masses. C’est comme cela que , chez les êtres organisés , l’assimi- lation moléculaire se fait tout à la fois à l’extérieur et à l’intérieur des masses. Par absorption lorsque la molécule pénètre entre quelques-unes. des molécules les plus extérieures de la masse, et par simple juxta- position extérieure lorsqu’en arrivant elle se pose à la surface des tissus. —— —— ( 30m] fibrilles de la pulpe nerveuse, dans les globules du foie, dans les fibres musculaires et dans es membranes. Il est sec et corné dans l’épiderme, dans les poils, les écailles, les plumes, les ongles et les cornes. Il est fluide et très-imprégné d’eau dans tous les êtres organi- sés commençans et dans l’origine de tous leurs tissus à mesure qu'ils se développent. Naturellement collant, le mucus produit toutes les colles et toutes les gommes du commerce. Les globules muqueux du sang, ceux du lait, les animalcules du sperme, mais surtout les globules des liquides séreux donnent une colle plus ou moins forte et plus ou moins brillante. Le liquide séreux , attiré et accumulé sous l’épiderme distendu en cloche par une cause d’irritation quelconque des tissus, mais plus particulièrement dans le cas du vésicatoire , se compose, comme le sang, d’une grande quantité d’eau dans laquelle sont en suspension un nombre plus ou moins considérable de globules émi- nemment muqueux et collans , blancs et diaphanes. Avec ce liquide, que l’on peut comparer jusqu'à un certain point aux sucs propres ou laiteux de quelques végétaux, on peut faire une colle très-puissante ou un vernis très-brillant et très-élastique. Le même liquide obtenu par ponction dans le cas d'hydropisies , contient bien moins de globules muqueux, et ces globules, en partie décomposés par l’effet de la maladie , ont presque perdu leur action collante ou attractive. Tous les globules, tous les filamens muqueux et orga- nisés , soit qu'ils constituent des individus végétaux ou animaux particuliers et vivant dans l’espace, soit qu'ils (36% ) fassent partie de la masse tissulaire d’un végétal où d’un animal supérieur , tous ont une tendance attractive à se rapprocher, à se coller, à se grefer par approche. Dans cette faculté , se trouve toute l’action, toute l'explication et enfin l’origine de toutes les greffes tissulaires des vé- » gétaux et des animaux. S IX. : Greffes animales naturelles. Les globules monadaires, animalcules très-agissans , qui naissent et se développent dans l’épaisseur de toutes les liqueurs fermentescibles exposées à l'air ou au moins en contact avec une portion d'air, comme vin, bierre, cidre, etc., sont d’abord libres et jouissent de leur individualité et de tous leurs mouvemens instinc- tifs; mais à mesure qu'ils se multiplient et qu'ils s'é- lèvent à la surface du liquide (1), où ils s’entassent, ils se collent et se greffent par approche de manière à former (1) Parmi les animalcules qui prennent naissance dans les eaux , ilen est un grand nombre qui, soit qu’étant vésiculaires ils forment ballon, soit qu’ils éprouvent le besoin d’un contact atmosphérique , s'élèvent à la surface de l’eau et y forment une sorte de crême verte, rouge, blanche, etc. C’est ainsi que les seminules des Vauchéries, des Lemna, après avoir germé sur les vases, s'élèvent successivement et viennent former à la surface de l’eau des miniatures de prairies flottantes et verdoyantes. C’est encore comme cela que sur les mers des tropiques se présentent, aux yeux du voyageur ennuyé, ces grandes îles mobiles et olivâtres, composées de plusieurs espèces de facus désignées sous le nom commun de raisin de mer ou de raisin du tropique (Fucus natans , Linn.; Sar- gassum natans , Lamx.). — —— - (303 } “ ces pellicules que l’oir appelle la fleurette du vin, puis des membranes très-solides, très-élastiques, très-hygro- métriques , ou d'épais coagulum ou fungus. Ces sortes de fungus formés , comme on vient de le voir, par des my- riades de petits animaux entregrefiés , avaient été, avant les belles observations de M. Desmazières , considérés par M. Person comme des Champignons et désignés par lui comme nouveau genre, sous le nom de Wycoderma. Presque toujours , dans le même liquide , il se dé- veloppe, pêle-mèêle avec les animalcules monadaires, de longs filamens (1) muqueux, simples ou rameux, d’une ténuité extrême, blancs, diaphanes, sans cloi- sons, sans mouvement , et conséquemment végétaux. Ces filamens se greffent confusément avec les animal- cules , et contribuent à augmenter le volume du coa- gulum ou Mycoderma. Ce coagulum ou ce Mycoderme , composé d’une quan- tité considérable de globules animés et de végétaux entregreflés par approche, ne peut avoir ni forme ni étendue déterminée, puisqu'il est le produit d’un assem- blage fortuit d'individus distinets. Il est entièrement comparable à cette masse végétale que l’on formerait en greffant, par approche, tous les arbres d’une immense forêt et dans laquelle il s’établirait une communauté en secours mutuel d'absorption et de nutrition. Dans la formation des Mycodermes (2) se trouvent, au (1) Protonema simplex, Turp., Dict. sc. nat. , atl. bot., pl.r. (2) Les globules muqueux qui composent, en grande partie, le suc propre ou laiteux de cette Euphorbiacée que l’on nomme Hevea Guya- nensis, en se collantles uns aux autres, à mesure que l’eau s’évapore, forment un coagulum très-analogue à celui des Mycodermes , dusang, etc. C'est la gomme élastique. ( 304 ) degré le plus bas , les premières greffes , par approche, végétales et animales. Celles-ci peuvent servir d’expli- cation à toutes les autres , puisque toute greffe végétale ou animale consiste tout simplement dans le collage par approche de globules, de vésicules, de filamens, de tubes et de membranes muqueux et imprégnés de vie. Comme c’est toujours à l'origine des choses que l’on peut espérer de découvrir le plus de vérités , et que tou- jours l’état le plus simple explique l’état le plus composé, parce que le composé n’est jamais qu’une sorte d’agglo- mérats des choses plus simples, l’organisation des My- codermes offre dans son étude une foule d'idées et d’ex- plications très - philosophiques et très - importantes sur l’organisation et la physiologie des êtres vivans. N'ayant à parler ici des Mycodermes que sous le rap- port de la greffe ou du collage par contact, je me con- tenterai seulement de faire remarquer qu’une masse . composée d’animalcules globuleux, peut-être vésiculeux, et de fibres entregreffées par approche, présente déjà l’origine ou au moins l’image des tissus globulaires, cellulaires et fibreux qui existent amalgamés dans les masses tissulaires des végétaux et des animaux 'su- périeurs, Les animalcules monadaires , pleins de mouvemens instinctifs tant qu'ils sont isolés, immobiles et purement organiques ou végétans dès qu'ils se greffent les uns aux autres , éontinuent-ils de vivre , par absorption , sous la forme végétative d’un Fungus ? Cela est plus que probable, puisqu'il n’est arrivé d'autre changement dans la nature de ces petits êtres que d’avoir perdu leur mouvement par l’action de la li ( 3054] greffe. Mais si, dans ce bas de l’échelle de l’organisation où les êtres vivans se confondent, le mouvement instinctif est le dernier caractère qui distingue l’animalité de la végétabilité , on sera obligé d'admettre que les globules monadaires des liqueurs fermentescibles, jouissant d’un mouvement instinctif très-vif, appartiennent, par ce mouvement, au règne animal, et qu’ils en forment l’un des premiers échelons ; mais que du moment où ils per- dent, par la greffe, cette faculté de se mouvoir, et que, semblables à une Trémelle ou à un Champignon, ils ne vivent plus que par absorption et sous l’état d'association immobile , ils rentrent entièrement sous toutes les con- ditions du végétal. Je ne ferai plus que cette question. Les petits êtres entregreflés et composant le fungus d'un Mycoderme, après avoir été séchés et abandonnés pendantlong-temps, peuvent-ils revenir à la vie, soit comme animalcule libre, soit comme végétal dans la masse du fungus, dès que l’on offre à cette production l'eau, la chaleur, l’air et la lumière? Nous n'avons point d'observations di- rectes sur ce point de physiologie, mais on peut dire que cette faculté de revivre n’étonnerait pas plus dans ce cas que de voir une mousse où un embryon de Haricot bien desséché, se réveiller, végéter et se développer après plus de 100 ans de sommeil (r). (x) Des grames de Haricot ( P haseolus ) prises dans l’herbier de Tournefort , plus de cent ans après avoir été mises dans cet herbier, ont très-bien germé et reproduit des individus semblables à ceux qui leur avaient donné naissance. Qu’était devenue la vie dans cet embryon, pendant l’espace d’un siècle ? Dans cet embryon composé, tout entier, d’un amas de vésicules remplies de globuline et dont chaque vésicule et XXIV. 20 ( 306 ) Les Bacillaires et les Navicules (1), ces êtres organi- sés , linéaires ou renflés en naveite de tüisserand , très- simples, vivant dans les eaux douces et salées, et dans lesquels vient s’évanouir ce dernier signe distinctif de l'animalité , qui est le mouvement ; ces êtres se greffent côte à côte, tantôt par deux, par trois, par quatre ou dans un si grand nombre qu'alors ils ressemblent à une petite armée marchant en colonne serrée (2). Ces animalcules (3) , qui naissent dans les eaux crou- pissanies des ornières et des tonneaux des jardiniers, qui forment à la surface de ces eaux une sorte de crème d'un beau vert luisant, se greffent aussi par approche à cause du défaut d’espace, perdent leur liberté, leur mouvement, et forment alors de grandes membranes mycodermoïdes qui ne jouissant plus que de l'absorption et de la nutrition rentrent tout-à-fait sous les lois simples de la végétation. Dans le collage, par approche, des globules très -mu- queux du sang en coagulum, dans ceux de même sub- stance, mais plus ténus , qui se coagulent en fibres et en membranes informes auxquelles on donne Îc nom de fibrine (4), 1l y a au moins la première action de toutes chaque grain de globuline sont d’égale valeur et ont leur centre vital particulier d'absorption , d’assimilation et d’accroissement. La vie peut-elle abandonner un corps organisé , pendant un temps; et y rentrer ensuite ? ou y reste-t-elle à l'état de sommeil et sans manifestation ? (1) Plxur, fig. 4,a,6,c,d. (2) P'ibrio paxillifer, Müll. Bacillaria Müllerü , Bory, fig. 4, d. (3) Cercaria viridis, Müll, Furcocerca viridis, Lamk. Raphanella urbica, Bory. (4) Ces coagulums, que l’on a nommés assez improprement fibrine, se composent tout à la fois des molécules muqueuses suspendues dans 30 ( 307 ) les grelfes organiques , s’il est toutefois bien prouvé que ces globules entrecollés ne jouissent pas dans cet état, l’eau ou le serum et de celles qui résultent de la décomposition entière des globules vésiculaires qui donnent la couleur au sang. Cette fibrine, toute artificielle, ne représente en aucune manière la fibre musculaire naturelle , qui est un organe compliqué. Les dernières expériences de M. Dutrochet sur les globules muqueux du sang , du jait et du jaune d’œuf, ne produisent rien qui puisse être comparable à une fibre musculaire organisée et vivante d’un animal. Tous ces globules muqueux et très-collans , étant poussés mécanique- ment les uns vers les autres, s’agglomèrent et ne forment que des petits flocons micrascopiques membraneux , plus ou moins tortillés , informes et sans vie organique. L'appareil électriqne dont s’est servi l'illustre académicien, ne me semble qu’un moyen, purement mécanique, d’accéiérer la formation des flocons, en poussant les uns sur les autres les globules épars et suspendus dans l’eau. Les deux courans électriques n’agissent, dans l'expérience, que comme le feraient deux petits soufflets dont les deux courans d'air seraient dirigés vers un centre commun. Je ne puis voir dans le résultat obtenu par M. Dutrochet qu'un simple coagulum , un agglomérat tout aussi fortuit , tout aussi inerte que le caïllot du sang composé de l’agglomération des globules, que ces agglomérats, partie membraneux , partie fibreux , que l’on nomme de la fibrine et dans laquelle on a cru voir aussi des simulacres de fibres musculaires , je ne vois enfin que tous ces coagulums ou Mycodermes qui se forment dans toutes les liqueurs fermentescibles , c’est-à-dire dans tous les liquides qui contiennent en suspension de la matière muqueuse. Dans cette légère pellicule ou membrane qui se forme peu à peu et naturellement à la surface du lait bouilli, se trouve, je pense, tout le ré- sultat de M. Datrochet. Cette pellicule aussi est un agglomérat membra- neux composé d’un nombre considérable de globules qui se sont successi- vement attirés mutuellement et collés les uns aux autres; elle est l’image explicative d’une membrane animale et végétale, puisque celle-ci n’est véritablement qu’un agglomérat de globule muqueux , mais elle n’en est que l’image et non la réalité. Avec des billes d'ivoire je ferai et j’expliquerai, en les collant les ( 308 ) au moins quelques instans, de l'absorption végétale. Selor M. Gaillon , un nombre considérable de greffes animales auraient lieu dans la nature, puisque, selon cet habile observateur, toutes les productions confer- voïdes , les Oscillaires, les Monilies, les Nostocs, les Mucors, la Truffe, les Champignons et les Charas unes aux autres, les fibres musculaires, les membranes, un homme tout entier, mais je ne ferai ni fibres musculaires, ni membranes , ni un homme eu réalité. Le coagulum qui se forme par l'action de deux courans électriques opposans, et en placant, entre les deux conjonctifs, une goutte d’eau dans laquelle sont en suspension des particules muqueuses, est un coagulum comme tous ceux qui se forment dans la nature et en dehors des moyens . électro-chimiques. Si on emploie le lait, on fait du caillé ; le sang , un caillot ou de la fibrine; le jaune d’œuf, une petite omelette ridée ou plissée. Avec une grande quantité de ces billes versées dans un canal incliné et courant les unes après les autres j’expliquerai rigoureusement l’eau courante , mais je ne ferai point de l’eau. L’expérience de M. Dutrochet m’a rappelé, en la répétant, ces agglomérations de poussière, de formes si différentes , et que l’on obtient successivement , par Le rapprochement des particules , en faisant vibrer la lame sur laquelle on a d’abord répandu uniformément la poussière. Les diverses figures produites persisteraient, si les parti- cules , au lieu d’être sèches, étaient mouillées et collantes ; mais elles ne seraient toujours que de simples coagulums. La molécule de matière, susceptible de s'unir à une molécule sem- blable faisant déjà partie d’un corps , devant être d’une ténuité et d’une trausparence absolue , jamais la vue de l’homme, aidée des plus puissans microscopes présens et futurs, n’apersevra le travail de l’assimilation |, soit dans la formation des corps inorgamisés, soit dans celle des corps organisés. Que nous disions que les corps se forment par des juxta-po- sitions de molécules de matière; que, par la pensée , nous voyions ces molécules cheminer ct s’ajuster sur d’autres , rien de plus raisonnable, mais que nous prétendions le démontrer ostensiblement , voilà l'im- possible. ( 509 ) mêmes , dont nous connaissons si bien les germinations et tous les développemens végétatifs, ne sont que des agrégats sériaux, simples ou rameux, ou des agglomé- rats composés d’animalcules d’abord libres et agissant instinctivement, puis entregreflés par approche, perdant tout mouvement et rentrant conséquemment dans Îles simples conditions de la vie végétale, qui sont l’absorp- tion et l'assimilation. C’est en observant les tubes muqueux simples ou ra- meux du Conferva comoides où Girodella comoides ; dans lesquels , au lieu des granules que l’on observe dans la plupart des Conferves, on trouve les mèmes corps, mais sous forme naviculaire, que M. Gaillon conçut cetie idée d’agrégation ou de greffe animale , et que sous le nom de Némuazoaires il enleva au règne végétal ses productions les plus simples, et qu’il les restitua , selon lui , au règne animal. Je ne pense pas que M. Gaillon ait jamais assisté , ait jamais vu les globules ou les navicules animés , à l’état d'isolement, se greffer bout à bout ou côte à côte de manière à composer les productions dont 1l vient d’être question. Quelques espèces de mollusques, tels que des Bi- phores, se collent ou se greffent par approche, soit dans l'œuf , soit après en être sorti et avoir joui de la liberté individuelle. En cet état d’agrégation, ils continuent de vivre pendant toute la durée de l’existence qui leur était assignée. Chacun des nombreux individus conserve son caractère organique ; mais il s'établit entre tous une vie commune d'absorption et d’assimilation , à tel point que les paresseux qui dormentet ne chassent point peuvent ètre assez bien nourris par les actifs qui seuls avalent les (ro ) petits animaux destinés à servir de nourriture à ces mollusques entregreffés (x). Les animaux d'ordre supérieur dont les tissus élé- mentaires ou composans sont purement organiques ou végétaux , se greflent dès qu'ils se touchent et qu’ils sont maintenus quelque temps dans cet état de contact et de repos. Les monstres paires ou doubles, plus où moins com- plets , sont, comme on le croit (2), deuxjeunes individus muqueux qui , gènés dans leurs développemens , se sont plus on moins profondément greffés par approche pen- dant qu’ils étaient contenus dans le sein de la mère. (1) Ces animaux, agglomérés au moyen de véritables greffes latérales ou par approche, ne méritent pas le nom d’animaux composés qu’on leur donne quelquefois. Cette dénominatiou ne convient qu'aux Hydres, à quelques Actinies et aux Polypes rameux, dont la reproduction gem- mipare, latérale, semblable aux bourgeons latéraux des arbres, persiste quelque temps sur la mère et s’en isole enfin de la même manière que se détachent les Lulbilles axillaires de quelques plantes monocotylédones, (2) Malgré que tout annonce que dans ces monstruosités il y ait eu, à une époque déterminée, contact , grefle ou fusion entre deux individus, distincte d’abord, et que nous éprouverions uve vérilable peine à renoncer à cette idée de greffe ou de collage , cependant toutes les fois que nous n'avons pas été témoins de la jonction , par grefle, de deux individus ou de deux masses de tissus , nous ne pouvons pas, avec toute la certitude possible, assurer que cette action ait eu lieu, En organographie végétale on admet comme organes soudés ou greflés les petites feuilles qui composent les calices monophylles, les corolles monogétales, les ovaires composés , etc. , quoiqu'on sache bien que ces parties n’ont jamais été isolées et que conséquemment la greffe est de toute origine et tout aussi naturelle qu'aux animaux d’avoir des orga- nes doubles, comme les yeux , les oreilles , les testicules et les mem- bres appendiculaires. Pourquoi n’admettrait-on pas, pour les monstres animaux doubles , une semblable origine ? ce qui rejetterait toute idée de jonction entre plusieurs individus à une époque déterminée de leur dé- poq ( re) Tout le monde connaît les précautions qu'il faut prendre pour empêcher, dans les plaies des mains, les doigts de se greffer les uns aux autres. . Les nombreuses adhérences ou connexions entre les üssus sur-irrités , enflammés et à l’état de suppuration des divers organes des animaux, soit extérieurs , soit intérieurs, ne sont autre chose que des grefles par approche. Au nombre de ces greffes on peut citer principalement celles à l'extérieur des paupières soudées seulement entre elles ou encore avec la cornée, de lagglutination des narines, de l'anus, du vagin, des lèvres entre elles, à la suite d’ulcération , etc. Celles à l'intérieur entre les membranes , la dure-mère, l’arach- noïde et la pie-mère , et quelquefois entre celle-ci et les lobes cérébraux, entre le poumon et la plèvre, entre le cœur et le péricarde, entre les viscères abdominaux, d’abord entre eux , puis, par complication, avec d’autres organes voisins, comme la rate, le foie et lépiploon ; entre Îe foie et l'estomac ; entre l'intestin et les parois abdominales, dans une plus ou moins grande éten- due , etc., etc. L'épiderme, les écailles , les plumes , les ongles et Îles poils, parties entièrement végétatives, toujours dé- nuées d’irritabilité et de sensibilité et dans lesquelles ne pénètrent jamais les systèmes nerveux et sanguins, sont dans certains cas très-susceptibles de se greffer. veloppement : il est probable que parmi les monstres animaux par excès il en est qui sont le produit de deux individus d’abord distincts, puis entregreflés , d’autres greffés dès la première formation globulaire , et enfin d’autres dont les parties surnuméraires sont des extensions qui dépendent d’un seul et unique individu , comme un sixième doigt, par exemple. (ET 19) Mais pour cela il faut que ces parties soient gonflées et ramollies par un excès de fluide muqueux qui active leur végétation et les fait souvent croître outre mesure. Dans cette maladie, connue sous le nom de plique polonaise et que l’on croit être occasionée par des affec- tions rhumatismales, les poils de toutes les parties du corps, les ongles, mais surtout les cheveux , étant plus abondamment nourris que de coutume, se gorgent de fluide muqueux, végètent et acquièrent en grosseur, mais surtout en longueur, desdimensions extraordinaires. La matière muqueuse puisée par absorption par le bulbe radicellé du poil implanté dans la peau , est quel- quefois si abondante qu’elle suinte à la surface de cet organe et que même quelquefois elle y occasione des crevasses , comme cela arrive dans la tige des pèchers ou de tout autre arbre, chaque fois qu’il y a excès de sève. En cet état d’orgasme ou d’exaltation végétale, les poils ou les cheveux restent toujours, mème dans leur bulbe, parfaitement insensibles (1), et ils conserveraient tous leur isolement si on faisait en sorte d’empècher tout contact entre eux. La maladie est donc toute dans la peau d’abord, puis ensuite, par irradiation, dans le poil ou le cheveu dans lesquels elle se manifeste par la turges- cence et l’hypertrophie ou l'accroissement extraordinaire de ces organes (2). (r) On a cru pendant un temps que dans la pliqne, le poil recevait du sang des veines, et qu'il acquérait une grande sensibilité, Au- jourd’hui on sait le contraire pour le sang et pour la sensibilité, seu- lement on croit eucore que cette dernière peut se développer dans le bulbe. C’est un reste d’errear dont la cause s’explique facilement. Le poil agit, dans ce cas, comme le ferait une épine remuée dans les tissus, devenus très-sensibles, de la peau. (2) Les poils, tant qu’ils restent implantés dans la peau, qui leur sert D (313) Cette végétation ardente du poil, en le rendant plus mou, plus muqueux et conséquemment plus collant , le dispose en mème temps à se grefler vitalement en ap- proche, soit entre deux, trois, quatre, cinq ou un plus grand nombre formant faisceau ou mèche, ou dans toute la totalité des poils composant une barbe ou une cheve- lure. On peut facilement, d’après le peu de mots qui vien- nent d’être dits sur cette maladie, dont la dénomination de plique est manifestement mauvaise , établir trois états distincts , savoir :”1° lorsque l'affection n’est encore que dans la peau , siége sensible qui permet au malade d’en avoir conscience ; 2° lorsque de la peau elle s’étend, par le bulbe, dans le poil toujours insensible ; et 3° lorsque ces poils se greffent entre eux accidentellement. Dans le feutrage des chapeliers les poils morts se collent ou se greflent par tous leurs points de contact, soit en se croisant et en se touchant, soit côte à côte dans une plus ou moins grande étendue de leur longueur. Trois choses distinctes concourent dans le mécanisme de ce feutrage. Les deux premitres, agissant par des causes diflérentes, produisent seulement l’intrication par entrelacement des poils. La troisième, celle qui achève de donner de la solidité au feutre , consiste dans le collage ou la greffe des poils entre eux , ce qui con- stitue une véritable plique, à la différence près que la greffe de celle - ci s'opère entre des poils morts coupés de territoire, végètent ou croissent même après la mort de l'individu. Le poil ou le cheveu végète et s’étend lors même qu’il est dépourvu du fluide muqueux et plus ou moins coloré qu’il contient dans son canal intérieur. C’est ce que prouve les cheveux et tous les poils devenus blancs chez les animaux âgés. (314) ou arrachés , tandis que dans la plique polonaise les poils s’entregreffent à l’état végétant et plantés dans leur territoire qui est la peau. : L'intrication ou l’enchevêtrement des poils dans la première opération du feutrage et que l’on a considérée comme étant seule et suflisante pour donner assez de consistance à cette sorte de tissu , a été expliquée dans son mécanisme de deux manières différentes. Les uns (1), en rappelant que tous les poils des animaux présentent à leurs surfaces des écailles plus ou moins saillantes, distribuées alternativement et en spirale et se recouvrant de la base au sommet comme des écailles de poisson ou comme les bases pétiolaires et persistantes de certains troncs de palmiers, ont dit, avec raison , que les poils, conformément à leur structure, s’enfonçaient les uns parmi les autres en cheminant par le bulbe ou par leur base, comme, par exemple, un épi de seigle placé entre le poignet et la chemise (2), les pointes des barbes en dehors, s'élève progressivement jusqu’à l’aisselle en s’accrochant tantôt à la peau et tantôt à la chemise. Ils ont en outre ajouté que non-seulement les poils s’entremêlent par-ce mécanisme , mais qu'encore ils s’accrochent les uns aux autres au moyen de leurs écailles. Malheureusement pour cette explication, vraie au fond, on sait positivement que les poils les plus unis , les plus lisses , comme ceux du lièvre et du Japin, (1) Monge, Mécanisme du Feutrage, Ænn. de Chimie, t. vi, p.300. (2) Le bulbe ou la racine du poil, de substance muqueuse très-absor- bante ct souvent en forme de massue, offre à sa surface de petites radi- celles ou sucoirs qui rappellent parfaitement les racines courtes, obtuses et radicellées à leur surface, de ce végétal parasite que l’on nomme le Gui ou Z’iscum album. (: 3780 sont ceux qui se feutrent le mieux , et que ceux au contraire qui sont les plus hérissés ou les plus écailleux se refusent à l’action fentrante (x). Les autres (2), en rejetant à tort la cause d’intrication dont il vient d’être question, n’ont vu dans l’action feutrante qu'une affaire de simple pesanteur. Ils obser- vent que le poil, et surtout le poil arraché, et muni de son bulbe, a un bout pesant et un bout léger, et qu'après avoir été lancé en haut par l’arçon, il tombe de la mème manière qu’une flèche ou ces corps attachés au bout d’une ficelle et que les enfans lancent dans l'air, c’est-à-dire qu’il chemine par le bulbe ou le bout le plus pesant et qu'il s'implante et s'enfonce parmi les poils déposés. (1) La partie aérienne et durcie du poil, creusée à l’intérieur comme un chaume de graminée, et remplie le plus souvent d’uu mucus nutritif et coloré, présente à sa surface une disposition organique comparable à celle des nœuds vitaux sur les tiges des végétaux dont les feuilles sont alternes et en spirale. Cette disposition en hélice et ces nœuds vitaux al- ternes, qui subordonnent l’arrangement symétrique et l’imbrication des écailles des poils, est à peine sentie sur les pois du lapin, du lièvre, de la chèvre du Thibet, de celle d’Abyssinie, de la vigogne, du rat musqué, du castor, etc., poils qui se feutrent et qui ne présentent que de légères nodosités. Ceux de l’ours marin, dont les écailles saillantes et très-symé- triquement disposées imitent de jeunes tiges d’arbres verts dépouillées de leurs feuilles et réduites à leurs nœuds vitaux, saillans et décurrens ; ceux de la taupe qui ressemblent à une vis de pressoir ou à ces mâts autour desquels on fixe alternativement et en spirale des tasseaux des- tinés à seryir de point d'appui aux pieds des personnes qui montent au haut de ces mâts, et beaucoup d’autres poils à écailles plus saillantes encore, ne se feutrent que peu ou point, parce que leurs nombreuses as- pérités s'opposent à la dernière opération du bon feutrage , celle de lag- glutination ou de l’entregreffement des poils. Les poils des animaux, vus Sous le microscope , offrent autant de différence que les espèces qui les produisent en présentent entre elles dans tout leur ensemble, (2) M. Guichardière , auquel l'art de la chapelerie doit plusieurs de- couvertes utiles. (326) Le feutrage des chapeliers rappelle tout naturellement deux autres feutrages qui s’opèrent également entre des corps organiques qui ont cessé de vivre, mais qui en dif- fèrent cependant en ce que ces corps ne se greffent point immédiatement entre eux au moyen de leur propre suint ou mucus, comme dans les poils du feutre du chapeau, mais bien à l’aide d’un mucus intermédiaire puisé dans celui ambiant qui existe dans les lieux où ces feutrages naturels se forment. Le premier de ces feutrages a lieu dans les Egagropiles sous forme plus ou moins sphérique et que l’on trouve quelquefois dans l’estomac de divers animaux ruminans, notamment dans celui du bœuf et de la vache. Ces ani- maux , qui ont l’habitude de se lécher, avalent constam- ment des poils, lesquels en s’enduisant du mucus de la langue et de celui de l'estomac, s’agglutinent les uns aux autres et forment, par des juxta-positions continuelles, des masses considérables qui se solidifient par la pression et s’arrondissent par le mouvement de rotation qu’elles subissent dans l’intestin. Vues à la loupe, ces masses présentent des poils entrelacés et une grande quantité de mucus concrété. Le second, qui porte le nom d’Egagropile de mer, consiste, comme le précédent, dans des boules plus ou moins volumineuses et composées par le même méca- nisme; mais, au lieu de poils animaux agglutinés , ce sont des fragmens de fibres ligneuses végétales, pro- venues, pour la plus grande partie , des feuilles décom- posées des Zostera marina ei Caulinia oceanica qui, après avoir été enduites du mucus, si abondant dans l’eau de mer, s’agglutinent et forment des masses qui s’arrondissent en roulant continuellement, soit dans la cr — —- ( 317) haute mer, soit sur les rivages. Cette concrétion, toute végétale , a la mer pour milieu ; là ele trouve toute la substance muqueuse et agglutinative nécessaire au collage des fibres. L'autre, toute animale, a pour milieu l’es- tomac d’un mammifère dans lequel les poils s’enduisent du mucus propre à cet organe, de manière à pouvoir s’agglutiner les uns sur les autres. On demandera peut-être quels rapports peuvent avoir les trois sortes d’agglutinations, celie du feutre du cha- peau , celle de l’égagropile de l'intestin et celle de l’éga- gropile de la mer, avec la greffe proprement dite des végé- taux et des animaux ? La réponse est simple. La greffe ou la soudure entre des masses tissulaires vives , soit de végétaux, soit d'animaux, est une agglutination tout aussi mécanique que celle qui s’opère entre deux mor- ceaux de bois sec, entre deux morceaux de peau ou de corre ou mème entre des corps inorganisés. La seule différence qui existe entre ces diverses agglutinations consiste dans ce que les masses que l’on agglutine sont privées de la vie ou en sont imprégnées. Dans le premier cas, il faut presque toujours employer un collage étran- ger, tandis que dans le second , les tissus vivans, par suite de l’irritation produite, sécrètent le leur sous l'apparence d’un suintement muqueux. SALAM Greffes animales artificielles. La cicatrisation des plaies animales est une opération purement végétale. Chez les animaux et dans les végétaux ce sont des tissus qui se réparent ou des tissus qui se ( 318 ) collent ou se greffent. Les mêmes lois , les mêmes forces vitales président ; les mêmes précautions , les mêmes soins sont employés dans les deux cas. Partout il s’agit, dans l'opération de la grefle , de mettre en contact, le plus promptement possible, les tissus vifs, de les con- tenir en cet état, pendant le temps nécessaire à la sou- dure, au moyen d’emplâtres agglutinatifs, qui ont le double avantage d’empècher les tissus de s'éloigner et l'air d’y pénétrer. C’est ainsi que les lèvres des plaies produites par un instrument tranchant, soit dans une écorce d'arbre, soit dans la peau et Les tissus sous-cuta- nés des animaux , se recollent ou se greflent. C’est de la sorte que dans l’opération du bec de lièvre , les tissus des lobes de la lèvre , après avoir été avivés par le scalpel , rapprochés et maintenus, se soudent et se cicatrisent d’autant plus prompiement que l'individu qui subit l’o- pération est plus sain et surtout plus jeune. La greffe des os fracturés , soit bout à bout, soit laté- ralement, ne demande également qu’un bon contact entre les parties vives et muqueuses des os , et plus par- ticulièrement entre cette enveloppe membraneuse que l’on nomme le périoste. La greffe bout-à-bout du tendon d'Achille, après qu'il a été cassé , est aussi une opération lout organi- que , toute végétale et toute soumise aux seules puis- sances de la nature. Les greffes animales artificielles les plus curieuses, celles si lonug-temps contestées par presque tous les physiologistes et les médecins , consistent dans des por- tions de chair ou des morceaux de peau triangulaires ou pyramidaux enlevés, soit au front, soit à l’avant-bras, ( 319 ) soit à une fesse, et à l’aide desquels on a quelquefois refait des nez informes, immobiles et blafards, à de malheu- reux qui avaient perdu celui que la nature leur avait accordé. Dans ces greffes animales aruficielles je n’ai parlé que de celles qui ont lieu entre des tissus séparés ou éloi- gnés momentanément, mais adhérant toujours plus ou moins à l’animal. Ces greffes sont comparables à celles , par approche, que l’on obtient entre les branches d’un même végétal, et qu’ensuite on peut séparer si cela convient. Dans l'opération des nez artificiels, le morceau de peau triangulaire que l’on enlève du front reste toujours adhérent à la face par l’une de ses parties, et ceux que l’on fabrique avec des portions de chair prises, soit à l’avant-bras, soit à la fesse, exigent toujours que la face soit d’abord greflée avant que l’on fasse l'extraction de la portion de chair destinée à former le nez. Ces nez informes, blafards , froids, immobiles et pro- bablementinsensibles, donnent lieu de croire qu'ils sont en tout ou engrande partie dépourvus de sang et de nerfs, et que réduits à une masse tissulaire purement organique, ils se sont greflés végétalement, ei que, comme les tissus végétaux, ces nez ne vivent qu'en absorbant les liquides muqueux qui abondent dans les tissus de la face qui avoisinent les points de la greffe. On demandera peut-être s’il est possible que des tissus animaux puissent vivre, se nourrir et croître sans le secours du sang, considéré comme moyen de nutrition. Je répondrai en retraçant ici ce que j'ai déjà dit ailleurs. ( 320 ) Le physiologiste qui n’observe le sang qu’à la vue simple, ou même avec une loupe, ne voit, dans la partie rouge qui s'isole de l’eau et forme le caïllot, que des molécules ou des concrétions de matières destinées à servir de nourriture aux tissus de l’animal et à devenir de la chair fixe après avoir été de la chair coulante dans les vaisseaux. Le physiologiste qui étend le sens de sa vue, en ap- pelant à son secours les verres superposés, voit dans la partie rouge du sang un grand nombre de corps orga- nisés distincts , et alors il s'exprime de la manière suivante. Les globules du sang sont autant d’existences orga- nisées , ayant Chacune son centre vital particulier d’at- traction , d'absorption, d’assimilation et d’accroissement. Ces existences , purement végétales ou organiques , oc- cupent leurs places dans l’organisation composée de l’a- nimal , comme un globule nerveux, comme un globule lymphatique, comme une fibre musculaire, comme un poil occupent la leur. Les globules du sang naissent , se développent , meurent et se décomposent au milieu du Hiquide incolore dans lequel ils sont suspendus, et dans le courant circulatoire duquel ils sont forcément entraînés. Les globules du sang, formés de substance muqueuse etcollante,composent une immense population d’existences globuleuses ou ovoïdes, selon les diverses classes d'animaux, pleines d’abord, puis vésiculaires Je blanches chez quelques espèces d'animaux , ou colorées en rouge, par la présence de plus petits globules inté- rieurs (hématosine), chez d’autres. Le lieu d'habitation des globules du sang, dans l’organisation de l'animal, ( 3308 est l'intérieur des vaisseaux , d’où ils ne sortent point, tels qu'ils sont, pour former ensuite, et par addition , soit des fibres musculaires , soit toutes autres espèces de tissus. Si les globules vésiculaires et organisés du sang se transforment en chair, comme on le dit, cela ne peut avoir lieu que lorsque leur existence propre de globule organisé a cessé , et lorsqu'ils sont entièrement et abso- lument dissous en molécules de matière muqueuse nutri- tive et assimilable. Alors ce ne sont plus les globules organisés du säng qui font de la chair, mais seulement la matière muqueuse et nutritive dont ils se composent, et qui, comme toute autre matière assimilable , peut être absorbée par les tissus voisins , et gagner de contre en contre , par attraction , jusqu'aux tissus les plus profonds de l’organisation. | Mais , dans ce cas, les globules du sang n'auraient pas pour fonction spéciale celle de la nutrition et de faire ou entretenir des tissus. Seulement, comme tous les autres corps organisés qui cessent de vivre et qui se divisent , leur matière serait suscepüble d’être absorbée et assimilée à d’autres organes , vivant encore, dans l’or- ganisation composée de l’animal. Il y a tout lieu de croire qu’à mesure qu’une vieille fibre musculaire se décompose , que les fibres voisines, plus jeunes, en font leur profit, qu’ils la dévorent et s’en nourrissent. Il doit en être de mème de tous les tissus organiques. L'eau ou la partie séreuse du sang , indépendamment des globules organisés, contient encore en suspension uue quantité considérable de molécules muqueuses , nu- XXIV. 21 (35 titives, propres à ètre absorbées par les parois des vais seaux qui font l'office d'autant de petits estomacs parti- culiers, et à être portées, par attraction, dans l'épaisseur des tissus qui les appellent avec le plus de force. Le globule vésiculaire du sang est un être organisé végétant, privé de tout mouvement par lui-même, qui naît, qui absorbe, qui assimile , qui croît, qui meurt et se décompose. Ce globule, tant que l’organisation com- posée de l'animal dure , 6st très-probablement reproduit par l’hématosine ou globulins colorés qu’il contient. Le globule du sang ne me semble pas plus fait pour servir à la nourriture des globules du lait, de ceux de ja lymphe, de ceux de la pulpe nerveuse , de ceux du foie, des fibres musculaires, etc., que toutes ces exis- tences particulières ne le nourrissent lui-même. Chacune de ces existences globuleuses , fibreuses ou membraneu- ses, constituant l'animal composé, naissent, vivent, croissent et meurent sur le lieu de l’organisation qui les a vu uaître. Chacune occupe son poste, y remplit ses fonctions particulières et ne se convertit jamais, tant qu'elle vit, en une autre. Toutes jouissent d'une véritable indépendance orga- nique; touLes puisent , pour leur propre compte, leur nourriture dans la même masse d'humidité muqueuse et nutrilive, et loutes sont nées, en même temps, pour faire partie de l’individualité composée de l’animal. Si l’on observe comparativement et au même instant, sous le microscope , les globules vésiculaires , ovoïdes et nacrés du sang d’une grenouille et les fibres muscu- laires de la cuisse du même animal , on est frappé de la grande différence qui existe entre ces deux sortes d’or- ( 320) ganes ou plutôt entre ces deux sortes d’existences, et on reste pleinement convaincu que le globule vésiculaire du sang n’est pas plus fait pour servir à la construction, soit de l’une des grosses fibres tubuleuses et finement plissées en travers , que ces fibres elles-mêmes ne ser- vent à le former. Le simple contact qui a lieu entre toutes les existences composantes d’un animal suflit pour établir la communi- cation rapide de la sensation , de la même manière que le fluide électrique parcourt la chaîne composée de plu- sieurs centaines d'individus distinets, pour peu qu'un point de leur organisation soit en contact. C’est par de semblables moyens que les divers foyers de notre cerveau et les diverses manifestations qui en émanent , soit simplement affectives ou instinctives, soit celles tout à la fois instinctives et intellectuelles , s’in- fluent , se contrôlent et s’assistent mutuellement. On a cru aussi que les grains de globuline contenus dans les vésicules des tissus cellulaires des végétaux étaient de simples concrétions de matières nutritives amassées en ces lieux pour servir à la nourriture des tissus. Cette erreur analogue à celle des prétendues fonctions nutri- tives des globules du sang , n'existe plus. On sait anjour- *d’hui qu'un grain vésiculaire de globuline est organisé ; qu'il vit, qu'il jouit autant de son individualité que l'embryon d’une graine jouit de la sienne, et qu'enfin cette vésicule de globuline , nullement disposée à se sa- crifier an profit de ses voisines, végète pour son compte , comme le fait le globule du sang, sans s'inquiéter le moindrement du sort, soit des autres grains de globuline ( 324 ) qui l'entourent, soit de toutes les autres parties de Îa masse tissulaire. J'ai déjà publié tout ce que l’on vient de lire et beau- coup plus au long dans l’un de mes Mémoires insérés parmi ceux du Muséum d'histoire naturelle , mais il est certaines vérités qu'il fautredire long-temps avant qu’elles puissent prendre la place des vieilles erreurs accréditées. Combien de temps s’écoulera encore avant que l’on ne considère plus le cœur comme étant le siége d’une grande quantité de fonctions qui n’appartiennent réelle- ment qu’au cerveau, comme, par exemple, la bonté et la méchanceté, la sensibilité et la cruauté, le courage et la pusillanimité, etc. , etc. Modes d'actions qui ne par- tent pas plus du cœur que du pied ou de la main , mais qui seulement agissent sur cet organe comme ils agissent sur l'intestin et sur la peau, parties auxquelles on ne s’est point avisé d'accorder des fonctions morales d'aucun genre, Pendant long-temps on se contente de mots dans les sciences. Qui de nous n’a pas parlé du Cambium de Duhamel, et qui de nous a jamais su ce que c’est que le Cambium ? On a dit que c’est un fluide qui s’organise en fibres et en vésicules. Un auteur moderne très-célèbre a écrit que , de mème que le sang des animaux était de Ja chair coulante , le Cambium des végétaux était de la fibre coulante. La comparaison a cela d’exact qu’elle porte sur deux erreurs analogues. Le mot Cambium , n’exprimant rien de particulier , doit être rejeté du vocabulaire de la science. nn - pe (-325 5 $ V. Greffes animales artificielles opérces à l'aide d'une portion de tissu entièrement isolée et rapportée sur l'animal vivant. La physiologie animale est peu avancée sous ce rap- port. On ignore , faute d'expériences , si un morceau de peau enlevé d’un animal vivant et réappliqué ensuite sur la même place, s’y greflerait vitalement, comme lorsque l’on fait cette opération sur le tronc d’un arbre. Cependant quelques faits qui paraissent assez bien constatés , assurent le succès de cette opération. 1°. Des doigts entièrement coupés , séparés de la main et remis en place, quelquefois plus d’une heure après, se sont greflés par la partie vive des os et par tous les autres tissus. À 2°. Des nez entièrement isolés de la face y ont été rapportés et greffés avec un plein succès. 3°. L’ergot du Coq après avoir été arraché de la patte ou du pied et planté immédiatement après, sur la partie vive du crâne, s’y greffe en même temps qu'avec la peau, y végète et y prend d'autant plus d’accroissement que le nouveau territoire dans lequel il se trouve est mieux ap- provisionné de substance nutritive que celui d’où on l’a extrait. 4°. Une dent, particulièrement une incisive, peut ètre en partie arrachée par un double mouvement d’attire et de torsion et être ainsi maintenue en place où elle se regrefle promptement avec les parois de l’alvéole osseuse et avec les tissus de la gencive. Par ce moyen on par- (326) vient à détruire la douleur et à conserver la dent en l'iso- lant seulement du nerf, On sait que des greffes semblables ont lieu toutes les fois que dans une alvéole dont on vient d’extraire une dent , on y en replace une autre analogue, saine et fraîchement arrachée. On ne peut guère douter que deux individus humains, après avoir vécu isolément quelques années, ne se gref- fassent par approche par une partie quelconque de leurs corps , analogue toutefois , et qu’en cet état ils ne res- semblassent aux deux frères Siamoïs dont les journaux nous ont parlé il y a quelque temps. $ VI. Greffes végétales naturelles , constantes ou seulement accidentelles. Toutes les greffes, soit entre des tissus animaux, soit entre des tissus végétaux , sont rigoureusement les mêmes au fond , puisque les tissus animaux sont purement orga- niques ou végétaux. Dès que la matière muqueuse suspendue , à l’état moléculaire , soit dans l’atmosphère , soit dans les eaux, soit dans les couches les plus extérieures de la terre, s'organise, elle produit un globule (1) et presque au même instant un filament (2). Ces deux productions végétales vivent dans toutes les eaux. Leur substance muqueuse , presque aussi fluide , presque aussi transpa- (x) Protosphæria simplex. (2) Protonema simplex, Turp., Dict. Sc. na, atl. bot., pl. x et 11. gr —— 5 ( 327 ) rente que l'eau, et leur forme sphérique ou filamenteuse présentent à l'imagination tout ce qui peut exister de plus simple en organisation. C'est parmi ces végétaux, qui marquent le premier degré de l'échelle organique, qué l’on saisit l’origine et l'explication très-simple de la composition des tissus vivans et du premier collage ou de la première grefle vitale de ces tissus. Les globales individus considérés en masse, soit libres entre eux, soit greflés par approche , indiquent ou re- présentent ce que, dans l’organisation des végétaux et des animaux d'ordres supérieurs, on appelle tissu globu- laire ou amorphe. On sent aisément qu’en développant en vésicule chacun des globules composant ce tissu amorphe , ou obtient ceite seconde modification de tissu que l’on désigne sous le nom de cellulaire, ou , ee qui vaut mieux, sous celui de vésiculaire. Si, ce qui arrive quelquefois , des filamens entremélés avec ces globules pleins ou vésiculaires s’y greflent , ce méiange offre J’o- rigine des tissus cellulaire et fibreux des végétaux dont : la masse se compose de l’amalgame de ces deux sortes d'organes élémentaires. Les individus vésiculaires de globuline botrvoïde (1) qui forment la plus grande partie de ces couches vertes qui se développent particulièrement au bas des murs humides et du tronc des vieux arbres , manquant presque toujours d'espace , se greflent par deux, trois, quatre ou en si grand nombre qu'ils forment de grandes mem- branes végétantes , rigoureusement comparables à ces grandes masses végétantes qui auraient lieu si tous les (1) Lepra botryoides. (15289 arbres d'une immense forêt s'entregreflaient tous par approche. Les tissus cellulaires des végétaux sont le produit d’un nombre considérable de vésicules muqueuses libres entre elles d’abord , et qui ensuite, à cause du défaut d'espace, se greffent par approche et deviennent , le plus souvent en se gênant mutuellement , plus ou moins polyèdres. Une production végétale très-simple que j'ai décrite sous les noms de Bichatia vesiculinosa et que je repro- duis dans ce nouveau travail à cause de son importance organique, montre et explique parfaitement la grefle dans son origine (7). Voici ce que j'en ai dit dans l’un de mes Mémoires (2): « À la surface interne des vitres des serres chaudes et très-humides , et quelquefois au sommet de la partie in- térieure des entonnoiïrs en verre dont on se sert pour abriter les boutures, il se développe une production végétale de forme irrégulière, d’étendue illimitée, sans cuticule , aplatie en membrane ou relevée en masse et dont le volume varie depuis celui d’une très-petite tête” d’épingle jusqu'à celui d’une noix. Sa substance très- molle , très-aqueuse et de la couleur d’un grain de rai- sin blanc bien mür , rappelle un peu le Nostoc commun. Mais dès que l’on soumet cette production sous le micro- scope, au lieu des individus filamenteux moniliformes ou en chapelets des Nostocs, on trouve ( planche xv, fig. 3, b, c, d, e, f) que ces masses végétantes sont produites par un nombre considérable de vésicules sphé- (x) PL xx, fig. 3, c, d, e, f. (2) Hem. du Muséum d'Hist. nat., 9° année, &, XVIIE, p. 161. ( 529 ) riques, blanches, transparentes, muqueuses et dans l’intérieur desquelles sont des globules vésiculaires (vési- cules futures) verts et variant pour le nombre de une à six. « Dans ces amas de vésicules individus, parmi les- quelles on en chserve d’isolées, de greffées par deux, trois, quatre, et en plus grand nombre , de sphériques et d’hexaèdres , par la pression mutuelle qu'elles sé sont fait éprouver , on surprend véritablement, dans cette production, la nature s’essayant à faire du tissu cellu- laire et montrant, dans son état le plus simple, l’action de la greffe de tous les tissus organiques. « Il était impossible d'arriver à une démonstration plus complète de la formation du tissu cellulaire, je dirai même de tous les tissus organiques , puisque tous ont pour base un tissu cellulaire ou au moins globulaire. Il était également impossible d’avoir sous les yeux une explication plus simple du collage des tissus dans l’opé- ration de la greffe. « Dans cette production privilégiée sont comme accu- mulés une foule de cas qui servent à expliquer ou à dévoiler ce qui se passe dans la formation et dans les fonctions de tous les tissus cellulaires végétaux. Elle offre tous les passages qui conduisent des tissus cellu- laires à vésicules éparses aux tissus cellulaires imparfaits, lâches et aqueux des Cactus, et de ceux-ci aux tissus cellulaires composés de vésicules greflées entre elles et devenues hexaëdres par pression. « Dans plusieurs des vésicules-mères la vésicule future ou globuline , en continuant de végéter , offre assez sou- vent dans son intérieur une troisième génération de glo- ( 330 ) buline propagatrice ; d’autres ne pouvant plus con- tenir leur génération, se déchirent et accouchent de nouveaux individus vésiculaires, dans l’intérieur des- quels on aperçoit déjà une nouvelle génération contenue. « La couleur verte de la globuline est ce qui , comme dans tous les tissus cellulaires végétaux, occasionne la couleur verdâtre des masses de Bichatie vues à l'œil nu; en se séchant les vésicules-mères crèvent, laissent cou- ler l’eau et l'air qu'elles contiennent, et déposent sans ordre leur globuline. Si cette même globuline manque d'humidité muqueuse pour se gonfler, se nourrir et de- venir à son tour des vésicules-mères, alors elle prend successivement , comme la globuline des feuilles à l’au- tomne , les couleurs jaune, rose, aurore, pourpre, brune et noire. C’est en cet état que la Bichatie parait le plus souvent aux vitres des serres chaudes, et surtout aux points où deux de ces vitres s’entrecroisent. « En étudiant cette production végétale si simple , on est porté à se demander: la masse végétante, telle qu’elle se présente à la vue simple, constitue+-elle une indivi- dualité ou bien n'est-elle pas plutôt un amas considé- rable d'individus vésiculaires distincts , lors même qu'ils sont greflés entre eux ? » Il ya, dans cette masse végétante, ce qui existe dans toutes les masses tissulaires de tous les êtres organisés ; il y a composition , c’est-à-dire agglomération d’indivi- dualités simples , ayant toutes leur centre vital particu- lier d'absorption , d’assimilation et formant , par cette réunion, une individualité composée. D'après les observations de M. Vaucher, les Conferves ( 33%) désignées par lui sous le nom de Conjuguées (1), pré- senteraient deux modes de greffes : le premier entre deux ou trois individus filamenteux au moyen de su- çoirs ou de mamelons latéraux situés sar chaque article ou mérithalle de ces végétaux ; le second dans l'union en masse ovalaire de tous les grains verts comme devant , par ces nombreuses greffes en approche, former de toute pièce la seminule ou corps propagateur de l'espèce. La première de ces greffes, quoique peu commune , est réelle. La seconde ne me semble pas suffisamment prouvée. Il est plus probable que la seminule ovalaire de ces végétaux est produite par l’extension d’un seul globule privilégié et que tous ceux qui l’environnent meurent , se dissolvent et servent à nourrir, par absorp- tion , le seul qui persiste (2). Le Nostoc commun qui apparaît, par les temps chauds et humides , comme des morceaux informes de colle ou de gélatine olivâtres à la surface des pelouses ou de la terre, ést un amas considérable d'individus moniliformes , sans couleur, transparens, très-muqueux et qui se collent ou se greffent entre eux de manière à former des coagulums analogues à ceux que composent les globules du sang , ceux des Mycodermes, etc. C'est ainsi que les individus filamenteux , tubuleux et finement cloïisonnés, diaphanes et sans couleur, muqueux (1) S'almacis, Zygnema. (2) Lorsque l’eau , dans laquelle ces végétaux filiformes sont suspen- dus , vient à manquer , étant très-muqueux, ils se collent les uns aux autres comme les cheveux dans la plique ou les poils dans le feutre du chapeau. On les trouve alors sur les herbes ou sur les vases desséchées formant de grandes membranes noires et cornées. (59339 et mobiles, par hygrométricité, de l'Oscillaire d'Adan- son (1) forment en se collant ou en se greffant ces pla- ques noires et comme huileuses qui tapissent la surface des corps qui avoisinent les fontaines et quelques autres lieux humides. Si les monstres paires ou doubles sont, chez les ani- maux , le produit de deux individus distincts qui se sont greffés à une époque déterminée, on ne peut rier offrir de semblable (au moins à ma connaissance) dans le règne végétal. Nous ne connaissons point d’embryons ainsi greflés, malgré cependant que tous , dans leur origine, soient très-muqueux et très-collans, et que dans certains cas ils naissent plusieurs ensemble segrés sous des enve- loppes, comme dans les ovules ou graines des Orangers, des Citronniers, des Cycas, etc. (2). Les ovules, souvent si nombreux et si serrés dans les ovaires , restent presque toujours libres entre eux, même à l’état de graine. Je ne connais que très-peu d'exemples de ces sortes de greffes parmi lesquelles je me contenterai d’en citer une très-belle et très-complète que je possède dans ma collection; elle a lieu entre deux Marrons d’Inde. Cette greffe qui m'a été communiquée par M. Antoine- Laurent de Jussieu, ne s’est opérée qu'entre les enve- loppes luisantes et crustacées de ces grosses graines. Les deux empreintes hilaires n’en forment plus qu'une, mais on voit toujours deux ombilics distincts. Les deux em- bryons sont libres. (1) Oscillaria Adansonü, Dict. Se. natur., all, bot., pl. xrv, fig. 1, a, b, c, d. (2) Citrus Aurañtium, Citrus medica, Cycas circinalis, Linn : (333) Si les ovules, et par suite les graines qui en résultent, se greffent rarement entre eux , il n’en est pas de même de la feuille ou des feuilles qui forment l'enveloppe de cet organe ; celles-ci sont constamment greffées ou sou- dées par leurs bords, Ces feuilles terminales, destinées à abriter le bourgeon-embryon, toujours munies d’une nervure médiane et souvent d’un beau réseau comme dans le cocotier des Indes (1), se dessoudent, croissent, verdissent et s’étalent quelquefois dans certains cas de végétations surabondantes. Parmi ces exemples j'offrirai ceux du Zrifolium repens dont la feuille ovarienne plus ou moins dessoudée, présente sur ses deux bords six ou sepi ovules plus ou moins étalés en autant de petites feuilles vertes et dentées ; du Poly gonum fagopyrum (2) dont les trois feuilles ovariennes dessoudées en grande partie laissent voir à leur base un ovule pédicellé formé de trois petites feuilles réunies en tube et entourant un petit bourgeon qui, à l’état normal, aurait été l'embryon. Dans le Fraisier de Plimouth (3) les ovaires et les ovules s'épanouissent en de petites feuilles vertes et en dedans d'elles est un bourgeon de mème couleur qui représente l'embryon. La greffe entre des péricarpes se montre fréquemment. (x) Cocos nucifera. L’embryon (acotylédon tant qu’il n’a pas germé) de ce végétal est situé à la -base de la nervure médiane de la feuille ovu- laire , ou , par suite, dé la feuille tégumentaire de la graine. (2) Poly gonum pyramidatum, Loiïs., qui paraît n’être qu’une mons- truosité du P. fagopyrurmn. (3) Variété échappée du Fraisier des bois, et désignée par les auteurs sous le nom de Fragaria muricata. Voyez la description que j’ai donnée de cette monstruosité ou chloranthie , dans les Annales d’Horticulture, juillet 1830. (334 ) On voit assez souvent les Pommiers , principalement les Apis et le Châtaignier, développer sur un pédoncule com- mun deux pommes plus ou moins greffées entre elles , assez communément d'inégales grosseurs, mais ayant chacune son œil ou calice et ses cinq loges particulières. Dans ces cas de végétations luxuriantes , les pépins ou graines avortent presque toujours. Les fruits à noyau, Prunes, Cerises, Pêches , etc., offrent de temps à autre des greffes analogues. Je trouve, dans ma collection de dessins , une greffe complète entre les trois péricarpes lisses et crustacés qui se développent naturellement et isolément dans l’involucre hérissé du Châtaignier. Une autre, non moins curieuse, entre trois noisettes ou péricarpes osseux du Noisetier, contenues dans un seul involucre. Les ovaires, et par suite de développement les péri- carpes , toujours formés d’une ou de plusieurs feuilles diversement disposées , offrent constamment et naturel- lement des greffes ou des soudures dans la feuille ou entre les feuilles dont ils se composent; mais il arrive aussi, comme dans les feuilles de l’ovule, que ces feuilles ovariennes se développent librement, croissent et ver- dissent. C’est ainsi qu'au centre des fleurs doubles du Merisier se présentent les pistils, le plus souvent au nombre de deux et sous l’aspect de deux petites feuilles à bords dentés et dont la nervure médiane, en se pro- longeant au-delà de la lame et en se terminant par une glandule latérale, rappelle le style et le stigmate. On pourrait signaler une foule de cas semblables si le sujet de ce mémoire le permettait. La déhiscence des péricarpes n’est qu’une desscudure; L3 (335) c’est un décollement analogue à celui qui a lieu lors- qu'une greffe latérale, soit par approche, soit en sc se détache du sujet. Dans les Phycostèmes {r) les dix lamelles rubanées des Ancolies , parfaitement libres entre elles , ont leurs analogues greffées par leur bord et formant ce sac charnu et coloré qui enveloppe entièrement les ovaires des Pæo- nia Moutan et papaveracea (2). Les éiamines , dont l’insertion vraie est toujours im- médiatement au-dessous des feuilles ovariennes ou du phycostème , quand cet organe existe, offrent des greffes plus ou moins compliquées. D’abord entre elles, dans les cas de monadelphie, de diadelphie et de polyadel- phie (3), puis avec les surfaces, soit de l'ovaire , comme dans les cas d’épigynie, soit de la paroi intérieure du calice comme dans la périgynie (4). (1) Nectaire, Disque, Zorus. (2) Ce phycostème sacciforme de la fleur de ces Pivoines subirait, dans l’Orange , une seconde greffe entre les parois internes et la surface des ovaires , si on pouvait admettre, avec M. de Candolle, que, dans l’Orange, si comparable à an fruit d'Euphorbiacée, principalement de V'Hura crepitans, d’une Pomme, etc., la peau colorée est un Phycostème ou Torus, lorsque cet organe est distinct et persiste à la base du fruit. Org. vég., t. 11, p.41. (3) Ces trois dénominations , qui indiquent un frère, deux frères, et plusieurs frères ou maris , peuvent être ingénieuses , mais il est certain qu’elles sont peu philosophiques , et qu’elles donnent des idées fausses sur l’organisation des fleurs que l’on s’est efforcé d’agglomérer sous ces dénominations, puisque toutes renferment au moins huit maris et sou- vent un nombre presque incalculable. (4) L'insertion hypogynique des étamines est la seule qui existe. L’é- pigynique et la périgynique ne sont dues qu’à des greffes ou soudures constantes, (,336) Les corolles, les calices et les involucres, organes toujours composés de plusieurs feuilles, offrent naturel- lement des greffes, particulièrement dans tous les cas improprement appelés corolles monopétales et calices monophylles. Trois feuilles greflées forment l’involucre charnu et suceulent de la figue. La greffe naturelle s'opère quelquefois accidentelle- ment entre les feuilles proprement dites. M. His m'a procuré deux feuilles d'oranger (1), l’une plus grande, l’autre plus petite , alternes et terminant un rameau; ces feuilles sont seulement greflées par la face interne de leur nervure médiane et par leurs péuioles, de manière à ce que les deux mêmes faces se regardent. On doit supposer , dans ce cas, deux feuilles alternes terminant un rameau , qui se sont soudées dans toute l'étendue des pétioles et des nervures médianes et qui , par cette sou- dure , ont occasionné l’avortement du bourgeon terminal du rameau. J'ai en ce moment, dans mon jardin, deux feuilles d’'Agave Americana greflées , dos à ventre ou convexe contre creux, ou mieux dit surface extérieure contre surface intérieure. C’est surtout entre les tiges que l’on remarque le plus de greffes par approche. Partout où des végétaux , ayant entre eux assez d’a- nalogie, se pressent et s’entrecroisent comme dans les forêts , les fourrés et les haies , leurs rameaux se greffent assez souvent par approche. Dans ces cas, il suflit que l’épiderme soit usé par le frottement des deux tiges, (a) Citrus Aurantium , Linn, (337 ) qu'il y ait un bon contact et un assujétissement durable pour que le collage organique réussisse. Plusieurs espèces de Lianes , après s'être entortillées , comme des serpens, autour du tronc des grands arbres dont se composent les forêts de l Amérique , se greffent partout où elles se rencontrent et forment, de la sorte, une enveloppe épaisse et comme fenestrée. Un Palmier entouré de cette manière existe au Muséum d'histoire naturelle et a été représenté dans plusieurs ouvrages (1). Je possède, parmi mes dessins, une vrille de vigne soudée avec la tige dans la presque totalité du long mé- rithalle. Cette vrille, ayant été admise à partager la nourriture de la tige, s’est convertie elle-même en une tige portant feuilles et vrilles nouvelles. M.de Candolle, dans son Organographie végétale , donne la figure de deux espèces de plantes dont les tiges florifères ou pédoncules sont plus ou moins entregreffées. L'une (2) représente deux fleurs de ia Jacintlie orien- tale (3) dont les hampes sont soudées dans la moitié de leur longueur ; l'autre (4) est une espèce de Centaurée dont les pédoncules sont complètement soudésjusqu’à la naissance des involucres des deux capitules de fleurettes. Dans ce même volume (5), on lit la phrase suivante qui arrête et surprend. C’est en parlant de la greffe de (1) Mirb., Ælém. de Physiolog., pl. xix, fig. 1. Turp., {conogr. vég. tab. 1v;,ifig. 7. De Cand., Organ. vég., t. 11, pl. 1v, dans sa coupe ho- rizontale. (2) Tom. 17, pl. xiv, fig. 1. (3) Hyacinthus orientalis. (4) Tom. 11, pl. xv, fig. 1. (5) Pag. 268, XXIV. — Decembre 1831. 2 k à (338 ) la Jacinthe : Exemple de soudure dans les tiges mono- coty lédones , curieux en ce qu'il tend à prouver que les soudures ne sont pas identiques avec les greffes. Jusqu’aiors on avait cru que les mots greffe, soudure, et même collage, étaient synonymes et pouvaient être employés pour exprimer l’action de deux parties, soit végétales , soit animales, qui s'unissent vitalement par leurs tissus. Est-ce que M. de Candolle penserait que les végétaux monocotylédons ne sont pas tout aussi susceptibles de se greffer que les végétaux dicotylédons ? Si cela était , c’est là que serait vraiment le curieux. Les greffes naturelles par approche se rencontrent aussi fréquemment dans les végétaux monocotylédons que dans les végétaux dicotylédons. C’est ce qui m'a déterminé à prendre au hasard , dans ma collection, deux exemples des premiers et à les placer pl. xvir, fig. 1, 3. L’un de ces exemples (fig. r) consiste dans deux jeunes tiges d’Asperges (1) greflées depuis le collet jusqu’à la moitié de leur longueur, puis libres dans l’espace d’un pouce et ensuite greffées au point de ne plus offrir qu’un seul bourgeon écailleux et terminal. L'autre ( fig. 3) montre deux fleurs d’'Aloe, greffées dans toute la longueur des deux pédoncules et dans la base des deux calices. Je me souviens d’avoir peint, à Saint-Domingue, un Ananas fascié qui était composé de sept fruits greffés entre eux de manière à former une espèce de grande raquette. Les sept couronnes seules étaient libres. Cet Ananas , composé de sept fruits ordinaires entre- (1) Asparagus officinalis, Linn. k L ] ( 339 ) greffés, me rappelle un cas tout semblable que M. Poi- teau et moi avons figuré et décrit dans notre Traité des Arbres fruitiers , sous le nom de Nèfle de Correa (1). Ce sont quatre ou cinq Nèfles greflées côte à côte et couronnées par toutes les folioles persistantes des calices. Au moment de la fleuraison des Ananas, toutes les fleurs réunies en épi sont libres. Ce n’est qu'après que les ovaires inférieurs, en se gênant mutuellement dans leurs développemens , se greffent par approche entre eux et avec les écailles et qu’ils forment cette masse unique, conique , courennée et succulente que nous nommons le fruit de l’Ananas. Si la pratique de la greffe relativement aux végétaux monocotylédons n’a point encore eu lieu, cela vient uniquement de ce que nous possédons peu ou point de végétaux ligneux de cet ordre, ou que plutôt ia néces- sité de ces grefles ne s’est point encore fait sentir en horticulture. Croire que les végétaux monocotylédons ne peuvent pas se greffer, c’est n'avoir pas compris que cette pro- priété appartient, sans aucune exception, à tous les tissus organiques des végétaux et des animaux. Les racines , dès qu’elles se rencontrent , se greffent tout aussi bien que les tiges. On conserve, dans les gale- vies du Muséum d'histoire naturelle, des racines d'If (2) qui se sont entregreflées dans la terre de manière à for- mer un grand réseau. C’est une sorte de plique végétale. Les longues et nombreuses racines aériennes qui (1) AZespilus portentosa, Poit. et Turp., 31° livr., p. 202, pl. 209. (2) Taxus baccata , Linn. (340) s’'échappent de ce végétal parasite que lon nomme Fi- guier maudit (1) et qui descendent, comme de longues ficelles, du sommet des plus grands arbres jusqu’à terre, où elles développent des radicelles latérales , finissent , en prenant plus de diamètre, par se grefler les unes aux autres, par étoufler leur généreux tuteur, en l’envelop- pant de toute part et en lui formant une sorte de cercueil vivant. $ VII. 4 Greffes végétales artificielles ou ‘opérées par main d'homme. Le but de ce travail étant de faire connaître seulement en quoi consiste l’action organique et physiologique du collage des tissus , je n’entrerai point daus les innom- brables modes d'ajuster les tissus les uns sur les autres. Ceux qui désireront connaitre cette partie amusante de l’horticulture pourront consalter la Monographie des Greffes de A. Thouin que j'ai déjà citée an commence- meni de ce travail. Je me contenterai de dire quelques mots sur les trois principales sortes de grefles; celles usitées dans la pra- tique et qui seules peuvent suflire à nos besoins. Ces trois grelles sont : la greffe par approche, la greffe par scion et la greffe par gemma. La greffe par approche s’opère en mettant en contact des tissus vifs, soit entre des branches , des racines, des feuilles et de jeunes fruits d’un mème individu, soit J ? (r) Clusia rosea, Linn. (341) entre ces mèmes parties et celles d’un individu enraciné dans le voisinage. Cette grefle, la seule qui s'effectue dans la nature, est en même temps naturelle ec arufi- cielle. La grefle par scion consiste à prendre, sur un individu, uuc portion de tige de l'année munie d’un ou de plu- sieurs gemma , yeux ou bourgeon , et à la fixer sur un autre. Cette grefle, qui se pratique le plus souvent en fendant le sujet et en enfonçant la greffe amincie dans cette fente de manière à ce que les tissus vivans et ana- logues cuincident, est la plus usitée , la plus selide et Îa moins sujette à se décoller. | La grefle par gemma, toujours latérale , résulte d’un bourgeon où gemme axillaire enlevé d’un végétal avec une portion de l'écorce qui l’environne et appliqué sur l’aubier vif d'un autre. Cette greffe , qui prend souvent le nom d’écusson, se décolle quelquefois. Selon l’époque de l’année où on la pratique elle est dite à œil dormant ou à œil poussant, ce qui veut dire quele gemma appli- qué à lPautomne dort cu s’engourdit pendant l'hiver, tandis que, appliqué au printemps , il végète et pousse peu de temps après l'opération. Ces deux dernières sortes de grelles, avectoutes leurs modifications , sont entièrement artificielles. Au nombre des greffes latérales il en est une qui pré- sente les plus grands rapports avec celle animale’ qui consiste à refaire un nez de toute pièce à l’aide d’un morceau de chair ou de tissu rapporté ; cette grefle, in- diquée par A. Thouin sous le nom de Z'illet(1), a pour (1) Monogr, des Grefes, p. 67. ( 342) but de réparer les lésions faites accidentellement aux écorces en y rapportant des morceaux d’écorce , sans yeux ou pourvus d’yeux, pris sur des sauvageons de même espèce ou ayant au moins assez d’analogie. $ VII. : De l'influence de la greffe sur le sujet et du sujet sur la greffe. Deux espèces de végétaux , ou deux individus de la mème espèce, ou enfin une portion d’individu greflée sur un autre enraciné, restent parfaitement distincts à parür rettement du point de collage ou de contact entre les deux espèces accolées. Les deux masses tissulaires ne se mêlent pas plus que ne le font une portion d’eau et une portion d'huile mises en contact. Lorsque Aubert Dupetit-Thouars a soutenu que les prétendues radicelles échappées de la base des bourgeons de la greffe en des- cendant entre écorce et boïs, pénétraient de la sorte dans le sujet et servaient ou plutôt étaient l’anique cause de son accroissement en diamètre, il a avancé une erreur des plus manifestes. L'air (1), la chaleur, les fluides et les liquides mu- (1) L’air, pas plus que la chaleur, les fluides et les liquides muqueux, n’a point, dans Les tissus végétaux , d'organes creux particuliers et pou- vant être considérés comme des organes respiratoires , malgré que ces idées empruntées du règne animal soient tiès-anciennes, et qu’elles aient été répétées tout récemment par l’un de nos plus habiles physiologistes. L'air , dans les masses tissulaires des végétaux, se loge et occupe, en raison des loïs de l’équilibre, tous les vides qui se trouvent dans ces masses, —— (343) queux ei nutriufs sont les seules choses qui devienneut communes dans les cas d’associations végétales par la " savoir: celui des vésicules , celui des tubes, celui des interstices naturels et celui des lacunes ou déchirures accidentelles des tissus. L'homme n’est jamais libre ; toujours esclave d’une organisation qu’il ne s’est point donnée, il faut qu’il en subisse toutes Les conditions. Né pour une petite taille et pour un nez retroussé, quelque chose qu’il fasse il res- tera court etil n'aura jamais un nez aquilin. Îl en est de même de l’organi- sation de notre cerveau, siége de toutes nos facultés affectives, morales et iutellectuelles : nous pouvons aider, hâter le développement de ces facul- tés; nous pouvons, en les irritant, en augmenter l’activité, mais jamais au point de les rendre remarquables dans leurs actions. Lorsqu'il arrive que l’homme exerce une faculté qu’il ne possède qu’à un très-faible degré de développement, il ressemble à une tortue qui fait effort pour suivre un aigle dans son essor. L’homme fournit les preuves de son esclavage jusque dans les moindres de ses mouvemens, C’est comme cela , qu'avec de l'habitude, on peut le jugér dans son écriture, ses dessins, ses statues, dans les diverses contractions musculaires de sa face, et c’est, en un mot, ce qui a fait dire, depuis long-temps , que l’homme apposait son cachet individuel sur tout ce qu’il touchait. Nous ne sommes pas plus libres dans l’étude des sciences : chaque ob- servateur voit les mêmes choses selon son organisation et selon certaines circonstances qui ont subordonné l’ordre dans lequel il a reçu les diverses connaissances qu’il possède. Ce dernier cas est plus important qu’on ne le croit. Le médecin physiologiste qui a commencé par l’étude de l'homme est naturellement entrainé à vouloir retrouver l'homme ou l’a- nimal dans toutes les productions du règne végétal ; productions qui ne présentent jamais cependant qu’une masse de tissu douée de la vie orga nique, c’est-à-dire, douée des facultés de lattraction, de l'absorption, de la transpiration, de l’assimilation, de l'accroissement, de la reproduction par gemmes, et pouvant se modeler à l'extérieur sous des formes très- variées , avec des densités tissulaires différentes et parées de toutes les couleurs imaginables. Le végétal Le plus complexe n’a que des apparences de complication. Une tige et des appendices , identiques avec cettetige, le composent en entier. On peut justement le comparer au membre d’un animal dans lequel on ferait abstraction des systèmes sanguins et nerveux , et qui alors vivrait ( 344 ) grefle, en imprégnant plus ou moins toute la masse üssulaire des deux espèces; mais, chose digne de re- marque , c’est que chacune des espèces accolées , en ab- sorbant le mème mucus nutritif, se l’assimile en raison d’un principe vital approprié à chacune d'elles, de ma- nière à conserver tous ses attributs caractéristiques de forme, de couleur, de saveur, etc. Si de la base des nombreux bourgeons axillaires de la grefle il se développait des radicelles fibreuses, et si ces organiquement ou végélalement. Il est vraiment malheureux pour la science que Le végétal n’ait pas été envisagé sous le rapport de sa grande simplicité, et que l'imagination romantique porte encore, chaque jour, à vouloir animaliser de simples masses vivantes de tissus organiques. Que les poètes, dont l'imagination tend à tout humamiser, à faire parler les rochers , les foutaines, Les fleurs et Les arbres des forêts, trouvent dans les végétaux des cœurs avec une ou deux oreillettes, des mamelles et des vaisseaux mammaires, des cordons ombilicaux , et des ombilics, des ovules et des ovaires , des cordons pistillaires, des vulves, des pénis, des testicules et un fluide spermatique composé de globules ‘grouil- lans ; qu'ils y trouvent un système nerveux , et conséquemment la con- science du plaisir et de la douleur, des poumons, et enfin des bouches respiratoires semblables aux stigmates des insectes, cela n’étonnera point, parce que de tels hommes n’appliquent presque jamais leurs sens à l'étude des corps, et qu’ils se proposent seulement de ré- créer et de bercer notre imagination. Mais que des sayans de profes- sion , qui ne doivent vivre que de choses positives, nous racontent ou écrivent froïidement tant de belles choses, cela se conçoit bien difficile- ment. Cette extrême simplicité organique des végétaux finira par être reconnue ; l’étude comparative et philosophique la débarrassera de tout cet échafaudage de prétendus organes distincts et de toutes ces pré- tendues fonctions dont on parle encore aujourd’hui partout. On re- connaîtra généralement enfin la réalité de la belle découverte de l’im- mortel Goëthe, puiliée en 1990, relative à l’identité de tous les organes appendiculaires des végétaux. (34) radicelles, en descendant entre écorce et bois, traver- saient le point de la grefle , de manière à produire les accroissemens successifs de l’aubier et du liber du sujet, les dernières couches de celui-ci ne pourraient produire que des bourgeons adventifs qui appartiendraient à l'es- pèce de la grefle : c’est ce qui n'arrive jamais. Le Néflier accolé à FEpine , le Guignier au Merisier (pl. xvr, fig. »), le Bouleau à papier au Bouleau blanc (fig. 1) et tant d’autres associations semblables restent , maloré cette union, des individus fort distincts, qui conservent tous leurs caracières d’espèce, tous leurs attributs pendant toute la durée de leur vie. L'individu inférieur ou sujet ne sert que de terri- toire intermédiaire à l'individu supérieur ou grefle, lequel pourrait être considéré comme une véritable bou- ture si de sa base, au lieu d’être simplement collée au sujet par ses tissus , il se développait des racines. Chacun des individus accolés se termine brusquement intérieurement et extérieurement, au point de sa grefle tissulaire ; ils grossissent indépendamment l'un de l’autre et selon les bornes d'extension vitale accordées par la nature à chacune des espèces conjointes, comme cela peut se voir dans le Pavia jaune greffé sur Marronnier d'Inde (pl. xvix, fig. 5), dans le Tilleul blanc sur le Tilleul d'Europe (pl. xvir, fig. 6), dans le Guignier sur le Me- risier (pl. xvr, fig. 2), dans le Planera crenata sur l'Orme , eic. (pl. xvur, fig. 4). Dans cet état d’accoilement , s’il arrive que les deux sortes de tiges donnent lieu à des bourgeons adventifs # dans le cas, je suppose, du Néflier enté sur l'Épine à celui du Néllier produira les feuilles, les fleurs et les ( 346 ) fruits de cette espèce , et celui de l'Épine les feuilles , les fleurs et les fruits de l'Épine (1). À l’intérieur, la structure et la couleur des masses tissulaires de chaque individu restent parfaitement dis- tinctes sur le point du simple collage organique (pl. xvir, fig. 2). À l’extérieur, ces individus, comme dans l’union du Bouleau à papier sur le Bouleau blanc , sont si diflérens qu'ils semblent comme deux choses entièrement étran- sères l’une à l’autre; comme un vase posé sur un meuble, ou comme un füt de colonne de marbre posé sur un socle d’un marbre de nature et de couleur diflérentes. (PL. xvr, fig. 1.) S IX. De l'influence du sujet sur la greffe, ou, en d’autres termes, de l'individu inférieur sur l'individu supé- rieur. L'individu inférieur ou sujet n’étant qu'une sorte de territoire intermédiaire entre le sol ordinaire et l'indi- vidu supérieur ou grefle, il doit nécessairement exercer plusieurs sortes d’influences sur la greffe, comme sur ses plus ou moins grandes dimensions, la direction et la multiplication de ses rameaux, sur la durée de son (x) Il ne serait pas impossible de rencontrer, dans le cas d'association de deux espèces par la greffe, deux bourgeons adventifs nés très-près du P S ; £ point de contact et développés en une branche composée des deux es- pèces greffées longitudinalement dans toute leur longueur. Cela offrirait de l’analogie avec ce qui a lieu, par des moyens encore inconuus dans 5 1 »P cette variété d'Oranger que lon nomme Bizarrerie. 347) existence , sur la saveur et l’odeur de ses diverses parties. La grefle d’une variété de Prune entée sur le Laurier-Cerise (1) pourrait très-bien recevoir, par con- tagion et par la communication des liquides muqueux , les propriétés délétères ou vénéneuses de ce dernier. Plusieurs maladies, la panachure, par exemple, peu- vent être communiquées à la grefle par le sujet. Mais toutes ces altérations n’attaqueront en rien le caractère de l'espèce et ne feront jamais qu’une cerise devienne une prune et une poire une pomme. Les variétés mêmes resteront toujours parfaitement distinctes entre elles. Les prunes de Reine-Claude et les poires de Saint- srand nombre de différences dans le 8 volume, la forme, la couleur et la saveur, sans que Germain offrent un pour cela elles cessent d’être des Reine-Claude et des Saint-Germain. De l'influence de la greffe sur le sujet, La greffe placée au-dessus du sujet influe sur celui-ci en l’excitant et en l’alimentant en partie au moyen de l’eau muqueuse puisée dans l’atmosphère par les jeunes écorces et les feuilles. Sans ce moyen, la tige du sujet périrait, à moins que ce moyen ne füt remplacé par le développement de bourgeons adventifs. C’est ce que l’on voit tous les jours quand on plante des arbres à têtes (r) Prunus Lauro- Cerasus, Lino. / ( 348 ) coupées ; toute la partie de la tige qui se trouve ‘au- dessus des bourgeons adventifs se dessèche et meurt (1). \ (1) Si sar un arbre semblable il ne se développe aucun bourgeon ad- ventif, les racines ainsi que la tige végètent encore quelque temps avant de mourir ; c’est ce que, en termes de culture, on appelle bouder. Si les racines seulement donnent lieu à des bourgeons , tout ce qui sera au- dessus d’eux cessera de vivre; La tige, son collet, et la portiou de racine située au-dessus de la base du bourgeon, tout se décomposera, et le bour- geon, en s’élevant et en produisant de sa base un supplément de racines, remplacera le végétal-mère. Mais si, ce qui arrive plus souvent, du collet de cet arbre tronqué il par@un grand nombre de bourgeons , toute la tige séchera, et alors on n'aura plus qu’une souche composée d’un grand nombre de scions au lieu de Parbre qu’on s'était proposé. La meilleure réussite de ces arbres, trop souvent inutilement tronqués, est lorsque le plus près possible de la troncature il se développe un bourgeon adventif. Si celui-ci est robuste, et que l’on ait la précaution de détruire, le plus promptement possible, les : s bourgeons qui Pen- virounent, il prendra un développement rapide, saisira peu à peu la direc- tion verticale, et favorisera Les lèvres dé l’écorce de la tige-mère de ma- nière à végéter, à s’allonger, à se grefler, et enfin à envelopper le bois mort de la troncature, comme dans une jambe ou un bras amputés les tissus vifs de la peau se greflent et enveloppent la partie tronquée, imerte et calcaire de l’os. Il arrive assez fréquemment que les arbres tronqués que l’ou plante sur les grandes routes et les promenades, poussent , indépendamment du bourgeon ou des bourgeons latéraux, une quantité considérable d’au- tres bourgeous qui s’échappent en couronnes du point qui distingue l’é- corce de l’aubier. Ces bourgeons, lorsqu'on n’a pas la précautiun de les détruire, affament et font périr les latéraux, et donnent lieu à un broussin qui anéantit le développement majestueux et éleyé sur lequel on avait compté. . Il ne suffit pas de fixer en terre des arbres et de les abandonner en- suite à eux-mêmes; en leur qualité d’êtres organisés, ils exigent des soins de tous les instans. Une nourriture convenable et appropriée à chaque espèce, une taille et un ébourgeonnement indiqués par les lois de la physiologie, un abri contre la chaleur hrülante et contre les froids rigoureux, la destruction de tous les animaux quiles dévorent, la guérison t ( 349 ) La sève ou l’eau muqueuse passant de la greffe dans le sujet comme elle passe de celui-ci dans l’autre (1). il s'ensuit que cette eau peut charrier avec elle des mo- lécules viciées et porter dans les tissus du sujet diverses sortes de maladies. M. Noïsette nv'a dit avoir vu une greffe de Jasmin à feuilles panachées entée sur un Jasmin ordinaire (2) et dont la maladie ou la panachure s'était communiquée au sujet; tous les bourgcons adventifs dé- veloppés sur celui-ci depuis l'opération de la grefle ayant produit des feuilles panachées. prompte de leurs ulcères et autres maladies, n’oflrent encore qu’une partie des soins que le bon cultivateur doit aux végétaux qu’il dirige. (1) Je n’entends point que dans les masses tissulaires des végétaux il y ait uue circulation réglée, c’est-à-dire qu’il y ait une sève montaate par un chemin et par des canaux particuliers, et une sève descendante par un autre chemin et d’autres canaux. C’est une absurdité que la connais- sance positive des divers organes des tissus repousse absolument. N’osant en dire plus sur ce sujet, qui s’eloigne de mon Mémoire, jeme contenterai de poser en principe que la sève ne se porte que la où elle est appelée; que les causes principales qui occasionnent le développement du liquide mu- queux dans les masses tissulaires sont dues : x° à l’équilibre vers lequel tendent tous les fluides et tous les liquides ; 2° à la pesanteur ; 30 à l’état plus oa moins sec , plus ou moins humide et plus ou moins chaud, soit de l'atmosphère, soit de la terre ; et 4° aux besoins vitaux et appétens qu’éprouvent les diverses parties da végétal. C’est ainsi qu’une excitation produite sur un point quelconque des tissus vivans d’une plante , soit mécaniquement, par un frottement, soit naturellement, par le dévelop- pement d’une branche gourmande, la sève ou l’eau muqueuse sera atti- réé et marchera vers ce point ; mais elle y marchera par simple imbibition des vésicules, des fibres et des tubes qu’ellé rencontrera sur son trajet. (2) Jasminum officinale, etc. ( 350 ) $ XI. De l'accroissement des masses tissulaires des végétaux. La greffe, soit végétale , soit animale, consistant tou- jours dans l’accollement de deux masses tissulaires vi- vantes destinées à croître ou à continuer de vivre dans cet état de soudure, maïs chacune pour leur propre compte , il est utile d’avoir des idées nettes et précises sur la composition organique où élémentaire de ces masses et sur leurs modes d’accroissement. Lorsque la matière muqueuse s'organise , elle se glo- bulise et se file presque en même temps. C’est sous ces deux formes si simples que nous trouvons , dans toutes les eaux, ces deux productions végétales que j’ai désignées sous les noms de Protosphæria simplex et de Protonema simplex (1). Dans ces deux existences , il semble que la nature ait préparé les premiers élémens organisés dont elle se sert ensuite pour former et composer toutes les masses tissulaires des végétaux et des animaux, et dans lesquelles, comme on le sait, on ne trouve que des globules , des vésicules , des fibres, des tubes et des membranes, et qui, comme on le saït encore, peuvent être réduites, par l’action de l’eau bouillante ou celle de la simple dé composition, après cessation de la vie, en un amas de glo- bules muqueux ; amas désigné sous le nom de gélatine. Dans les deux existences végétales dont je viens de parler se trouve déjà , dans les Protosphéries , l’origine (1) Dict. des Se. nat., atl. bot., t.ix, pl, ret xx, (360) des tissus globulaires , amorphes , vésiculaires ou cellu- laires , et dans les Protonèmes celle des tissus fibreux , tubuleux et membraneux, Deux sortes principales d’organes, je dis mieux, deux sortes d'individus distincts, ayant chacun leur centre vital particulier de végétation et de propagation , ne se convertissant jamais les uns dans les autres, vivant pour leur compte, par absorption et par assimilation des liquides muqueux qui imprègnent les masses ; nés pour faire partie d’une individualité plus composée, forment la masse tissulaire de la presque totalité des végétaux. Les premiers de ces individus sont les globules et les vésicules remplies de leur globuline ou génération future et dont se composent, par agglomération, les tissus globulaire et cellulaire. Les seconds sont les tigellules confervoïdes du tissu ügellulaire (tissu allongé , fibreux , vasculaire , etc.). L’aecroissement des masses tissulaires organiques a toujours lieu par rayonnement et progressivement des centres vers les circonférences. Dans les masses tissulaires végétales il y a deux modes opposés d’accroissement très-distinets : 1°. Celui de la masse du tissu cellulaire. 2°, Celui de la masse du tissu tigellulaire. Origine, formation et augmentation du tissu cellulaire. Origine. Un globule muqueux, expulsé d’une vésicuie mère (6551.13 faisant déjà partie du tissu cellulaire d’un végétal exis- tant , marque le commencement de tous les tissus cellu- laires végétaux. Formation et augmentation de la masse. Ce premier globule, en se développant en une vési- cule, en produisant de ses parois intérieures d’autres vésicules qui, après avoir été expulsées , s’agglomèrent entre elles , donne lieu, par voie de génération et de multiplication , à la première formation et à la première augmentation du tissu cellulaire. Il est facile de concevoir maintenant comment, à l’aide d’accouchemens semblables et successifs, les masses de tissu cellulaire augmentent, en rayonnant, des centres vers les circonférences. Une masse de tissu cellulaire toute formée est toujours un agglomérat de vésicules sphériques distinctes, sim- plement contiguës les unes aux autres dans les tissus lâches et aqueux. ou grefiées entre elles et devenues polyèdres , à cause du défaut d'espace, dans Îles tissus plus serrés et plus secs. Toutes ces vésicules, qui ont commencé par n'être que des globules pleins et muqueux , jouissent de l'indi- vidualité, absorbent, assimilent, croissent, propagent et meurent indépendamment les unes des autres sur Je lieu quiles a vu, naître. Plongées dans un milieu humide, à mesure que dans la masse les plus vieilles vésicules cessent de vivre, elles se décomposent, en- trent en émulsion et servent de pâture aux plus jeunes qui sen nourrissent. C’est comme cela que dans les vieux tissus cellulaires nous ne découvrons jamais les (5340) cadavres membraneux des vésicules dont l'existence a cessé. T1 faut distinguer deux moyens d'augmentation dans les masses de tissu cellulaire. 1°. L'augmentation occasionée par le développement particulier de chacune des vésicules individus, puisque chacune d’elles n’a été d’abord qu’un point muqueux. 2°, L'augmentation par la multiplication des vésicules à mesure que les vésicules-mères sont accouchées des vésicules nouvelles qu’elles contenaient dans leur sein. Une masse de tissu cellulaire végétal étant un amas considérable d'individus vésiculaires distincts, peut être justement comparée à une masse de Bichatie (pl. xv, fig. 3, a, f), à une association d’animalcules vésiculaires, d’abeïlles ou de toutes autres espèces d'animaux, dont l'étendue augmente et par l’accroissement particulier de chacun des individus et par la multiplication de nou- veaux individus par voie de générations successives. Les vésicules composant les tissus cellulaires végétaux sont autant de conceptacles destinés à donner naissance, soit à de nouvelles vésicules , soit aux corps reproducteurs de l'espèce. De là ces globules (globulines ou fécules) de toutes sortes de couleurs contenus dans les vésicules et jamais dans les tubes des tissus tigellulaires. Le tissu cellulaire forme toujours une masse unique dans tous les végétaux. C'est une erreur que d’avoir cru que le tissu cellulaire du bois et celui de l’écorce étaient séparés et avaient conséquemment chacun un centre vital parti- culier d'action et qu'ils croissaient en sens opposés , c’est- à-dire en s'étendant l’un vers l’autre. XXIV. 23 (354 ) $ XII. Origine , formation et augmentation du tissu tigellu - laire et confervoïde dans le tissu cellulaire des ve- gétaux dicoty lédons. Origine. L'embryon tout entier ne se compose encore que du seul tissu cellulaire enveloppé ou protégé par une mem- brane cuticulaire. À cet âge, le jeune végétal ne s’est encore accru que dans le sens ascendant, puisque , assis immédiatement sur le végétal-mère, il n’a pu de ce côté prendre aucune espèce d’extension, pas plus qu’un bourgeon ou une bulbille n’en prennent tant qu'ils res- tent fixés sur le point qui les a vu naître. On a donc eu tort de reconnaitre dans un embryon une radicule ou système descendant, production qui ne commence que dans l’acte de la germination, c’est-à-dire que lorsque ce corps reproducteur est isolé de sa mère et soumis aux agens excitateurs et extérieurs de la végétation. Je viens de dire tout à l'heure que l'embryon végétal, tant qu'il est fixé sur le végétal-mère , ne croît que dans le sens ascendant; ceci ne me paraît pas encore assez exact, car cet embryon , qui a été d’abord un point, a pris aussi de l'accroissement dans le sens horizontal. Il serait mieux de toujours supposer le végétal de forme sphérique , de ne voir dans un embryon qu’une demi- sphère , et de dire que son accroissement a été rayonnant et successif du centre vers tous les points de la circonfé- rence. — —— (355) Ce n’est qu'au moment de la germination , que du point central de l’organisation naissent les premières tigellules confervoïdes, les unes fibreuses, droites ou roulées en hélice , les autres tubuleuses. Ces tigellules, qui partent d’un point commun, s'étendent en rayon- nant d'abord, mais plus particulièrement en deux sens opposés à mesure que les systèmes ascendant et descen- dant des végétaux se développent. Ici s’offre une re- marque à faire dans ce que les tigellules confervoïdes du système montant forment, dès leur départ du point cen- tral, une sorte de cul-de-sac, et, en s’élevant, un étui qui entoure celte portion de tissu cellulaire qu’on nomme la moelle, tandis que les tigellules confervoïdes qui s’allongent dans le système descendant, plus rappro- chées vers le centre, forment un faisceau primitif et très-rarement ce que l’on appelle un canal médullaire dans les tiges aériennes. Un embryon qui resterait fixé sur le végétal-mère , par la base de sa tigelle, n’aurait Jamais de radicule ; il n'aurait d’autre accroissement que celui d'extension rayonnante de sa base vers sa cir- conférence. Il se comporterait comme un bourgeon fixe, qui ne grandit qu’en s'étendant au dehors , en éloignant de plus en plus son sommet de la branche-mère qui lui a donné naissance et en ne produisant jamais rien de sa base entre l'écorce et le bois, comme l’ont prétendu Philippe de La Hire et Aubert Dupetit-Thouars. Je ne puis m'empècher de remarquer, en passant, que les bulbiiles qui tiennent le milieu entre les embryons des graines et les bourgeons , soit axillaires, soit termi- naux , soit adventifs , étant des corps reproducteurs des- La La “ ,. * LA tinés à s'isoler naturellement de la plante-mère, déve- (356) loppent souvent, par anticipation , des radicelles laté- rales, quoique ces corps soient encore attachés aux aisselles des feuilles de la plante, maïs ils ne peuvent jamais donner lieu de leur base à un pivot central. Cette dernière observation me porte à croire que ce que l’on considère , dans la germination des embryons dicotylé- dons, comme étant un pivot central, n’est jamais qu’une production latérale, et ce qui me fortifie dans cette idée, c'est que ce pivot est presque toujours dévié sur l’un des côtés. Je reviens aux premiers développemens du tissu tigel- lulaire et confervoïde dans le milieu du tissu cellulaire, et je demande d’où proviennent les premières hélicines ou trachées, les premières fibres et les premiers tubes qui y apparaissent et qui partent d’un centre commun ? Personne ne peut le dire, mais ce qui est un fait d’ob- servation, c’est que le uüssu cellulaire est absolument distinct du tissu tigellulaire qui s’y développe ensuite, que l’un et l’autre de ces tissus ont des fonctions diffé- rentes à remplir et que l’un ne devient jamais l’autre (1). (1) M. Poiteau, qui ne fait point habituellement usage du microscope, ct qui, conséquemment , ne peut pas avoir des idées très-précises sur l’organisation tissulaire des végétaux, me fait dire, dans une note surajoutée à un Mémoire qu’il vient de publier (+), que je n’admets pas l'organisation de proche en proche. Si par cette expression de proche en proche l’auteur veut dire extensive, il est vraiment pénible d’être aussi mal compris. Car lorsque je dis qu’un globule muqueux s'étend en une vésicule, qu’une tigellule fibreuse, qui n’est d’abord qu’un point, s'étend et s’allonge ; lorsque je dis enfin que toute la masse tissulaire s'étend progressivement du centre vers la circonférence, il est impos- (1) Mémoire sur Ja théorie de de La Hire, p. 36. Brochure isolée, — —— —————— éme 0 LC On vient de voir que ces productions filamenteuses et vonfervoides qui donnent de la solidité aux tissus végé- sible d'admettre plus positivement que l’accroissement , soit des organes composans, soit de la masse, se fait par voie d'extension. M. Poiteau me fait dire ensuite que la globuline accouche de nou- velles globulines. Cette absurdité seule suffit pour appuyer ce que j'ai dit plus haut, et prouve en même temps l'ignorance dans laquelle est cet habile horticulteur relativement à la connaissance organique des tissus élémentaires des végétaux. C’est comme si l’on disail qu’une graine ac- couche d’une graine et un œuf d’an œuf, au lieu de dire que la graine résulte d’un végétal développé et l'œuf d’un animal qui a atteint toutes ses di- mensions. Le grain de globuline, véritable seminule d’une vésicule-mère du tissu cellulaire , ne peut être engendré que par celle-ci, qui alors en accouche. Entre deux graines et entre deux œufs qui se suivent il y à toujours de grands développemens organiques; il en est de même entre deux générations successives de globulines, il ÿ a le développement né- cessaire de la vésicule-mère. Je ne sais en vérité pourquoi M. Poiteau , qui n’accorde qu’un grain de globuline est le premier développement d’un arbre, qui admet avec moi que l'embryon de cet arbre n’est encore formé que du seul tissu cel- lulaire, s'étonne de ce que dans ce jeune tissu cellulaire il puisse naître des organes différens, comme des fibres ligneuses. L'auteur semble vou- loir faire une cbjection contre la formation et l’accroissement de toute la masse du tissu cellulaire par voie d’accouchemens successifs, non comme il Le dit de globuline à globuline, mais bien des vésicules -mères en de nouvelles vésicules ou globulines. Alors il se demande comment un grain &e globuline , ou , ce qui vaut mieux, une vésicuie, peut accoucher ou produire une fibre qui est physiquement différente ? C’est se créer des difficultés pour se donner ensuite le plaisir de les combattre. Où ai-je dit que les vésicules et leurs globulines , composant le tissu cellu- laire, engendraient les fibres ? lorsque au contraire j'ai dit partout que ces deux sortes d'organes n'avaient rien de commun que de concourir à former la masse tissulaire d’an végétal, et aue les tigeliules ou fibres naissaient de toutes pièces ct pour leur propre compte, non des vésicules, mais parmi les vésicules. Îl west donc pas plus étonnant de voir toute la masse d’un arbre ré- sulter d’un grain de globuline qui ne développe d’abord que du tissu cel, (358) taux que l’on appelle bois, tirent leur origine du collet ou point central de l’organisation, d’où elles s'étendent ensuite en rayonnant plus ou moins vers la circonfé- rence. Comme élémens où composans de la plus grande partie de la masse d’un végétal dicotylédon , la direction naturelle des tigellules tissulaires subordonne entière- ment la direction des rameaux, les diverses formes des feuilles, des fleurs, des fruits et le port général du végétal. On à vu comment les premières tigellules confervoïdes se développent sous la forme d’un étui ou d’une sorte de tube dans la tige ascendante d’une année , soit d’un embryon , soit d’un bourgeon resté fixé sur sa mère, et comment les tigellules , dans les racines des embryons , sont serrées en un faisceau primitif. Cet état est le pro- duit d’une végétation, c’est la couche ligneuse primitive. Toutes ces tigellules confervoides composant l'étui ou la couche ligneuse primitive sont susceptibles de produire des bourgeons terminaax et des bourgeons latéraux très- nombreux qui, au moment de la seconde végétation, s'étendent en de nouvelles ramules, de manière à ce que les terminaux produisent l'accroissement en lon- gueur cet les latéraux celni en épaisseur ou en diamètre. Les ramules latérales, en s'appliquant sur les tigellules- mères de l’année précédente , forment, par ce moyen, lulaire, puis des fibres de toute espèce de forme, qui ne dépendent nulle- ment du tissu cellulaire, que de voir la cicatricule globulaire d’un œuf donner successivement naissance à du tissu cellulaire, à des fibres muscu- laires, à de la corne, à des plumes. Quel est l’anatomiste qui pense qu’une fibre musculaire, qu’une plume , quan poil provient du tissu cellulaire ? Ou sait, au contraire, que ces productions en sont entièrement distinctes. (359 ) une seconde et nouvelle couche. Il est facile maintenant de concevoir qu'au moyen de nouveaux gemmes laté- raux développés en ramules nouvelles sur les tigellules de la seconde couche, on en aura une troisième, et ainsi de suite d’année en année tant que l'arbre végétera. Les bourgeons ou gemmes terminaux des tigellules , à mesure qu'elles se multiplieront , occasioneront ; en se développant , l'accroissement en longueur des tiges. Ces sortes de tigellules confervoïdes et rameuses dont les ramuscules s'appliquent immédiatement sur les tigel- lules-mères de l’année précédente, ne peuvent pousser des gemmes , et conséquemment de nouvelles tigellules , que du côté extérieur, côté favorisé par l’espace et par tous les agens excitateurs et nourriciers de la végétation. A ce sujet je ferai pourtant connaître qu’il n’est pas rare de rencontrer quelques-unes des tigellules de l’étui médul- laire ayant poussé à l’intérieur de l’étui, dans l'épaisseur de la moelle, des gemmes latéraux qui s'étaient déve- loppés en tigellules vagabondes. Avec de semblables développemens successivement répétés, comme on vient de le dire pour la formation des couches, on explique facilement comment certains étuis médullaires peuvent être réduits dans leur dia- mètre primitif, et comment la moelle tout entière peut ètre quelquefois envahie par le bois. Il faut, comme je l’ai diten parlant du tissu cellu- laire , distinguer deux moyens d'augmentation dans les masses du tissu tigellulaire confervoïde. 1°. L'augmentation occasionée par le développement particulier de chacune des tigellules en longueur et en épaisseur ; ( 360 ) 2°. L'augmentation par la multiplication des rameaux latéraux dont se forment , chaque année, les nouvelles couches du tissu tigellulaire. Le tissu tigellulaire, comme le tissu cellulaire dans lequel il végète, forme une masse unique dans tous les végétaux. Parti d’un point, il continue de se développer et de s'étendre par la multiplication annuelle de ses gemmes en de nouveaux rameaux et n’a d’autres limites que celles de la partie vive et extérieure de l'écorce. Le développement successif de la masse entière de ce tissu est entièrement comparable au développement successif et annuel de toute la masse extérieure et aérienne d’un arbre , lorsque ses nombreux rameaux sont dépouillés de tous leurs organes appendiculaires. (La suite au prochain numéro, dans le tome suivant.) EXPLICATION DES PLANCHES. PL xv. Fig. 1. Greffe du Cactus truncatus sur le Cactus triangularis. a. Cactus truncatus formant la greffe on l’individa supérieur. b. Cactus triangularis formant le sujet ou l'individu inférieur. c. Rameau latéral qui, au lieu d’être aplati, foliacé , à nœuds vitaux disposés en deux séries marginales et formés en dents de scie, est cy- lindrique avec des nœuds vitaux peu saillans et disposés alternative- ment et en spirale. Obs. Cette forme cylindrique , que l'on remarque constamment dans le mérithalle de la tigelle qui s'élève au-dessus des Protophylles de toutes les espèces d’£piphyllum, et fort souvent vers le collet des plentes adultes, sert de chaînon entre les Cactus d'aspect foliacé et les Cactus en forme de cierge cannelé et aiguillonné. Cela rappelle ces espèces de Mimosa à feuilles simples de la Nouvelle-Hollande dont Les premières feuilles, qui se développent au moment ou peu de temps après la ger- mination, sont composées. (: 36m) Cette grefle, que j'ai dessinée au jardin royal de Neuilly, est représentée de grandeur naturelle. Fig. 2. Coupe verticale des deux individus associés afin de bien faire voir l’adhérence crganique et physiologique qui s’est établie entre eux par l’action du collage de leurs tissus. a. Cactus truncatus ou individu supérieur. b. Cactus triangularis ou individu inférieur. c. Espace ou points tissulaires par lesquels les deux individus se sont vitalement collés. Obs. Si l'opérateur, plus intelligent, avait enlevé l’épiderme autour de la partie inférieure de la grefle, de manière à mettre vif contre vif les tissus latéraux des deux individus, il en serait résulté uu collage plus étendu et conséquemment une meilleure greffe. d. Membrane cuticulaire. e. Tissa cellulaire de l'écorce. JS. Tissu fibreux et tubuleux du bois. g. Tissu cellulaire central ou moelle. Obs. Das cette grefle, qui n’a pu s’opérer que bont à bout, on pourra remarquer que les deux moelles ne coincident pas ; maïs chose pareïlle arrive dans toutes les greffes, et surtout dans les grefles latérales , soit par approche, soit en écusson, qui s’appliquent toujours sur un bois jeune et qui s’interposent conséquemment entre la moelle de la grefle et celle du sujet. Fig. 3. a.— Une masse de Bichaties vésiculineuses (Bichatia vesicu- linosa) de grosseur naturelle et vue à l’œil nu. b, Deux individus vésiculaires , diaphanes, incolores , d’âges diflé- rens, et contenant chacun une nouvelle génération à l’état de globuline verte. c. Deux individus greflés par approche. d. Quatre indvidus greffés par approche, mais laissant entre eux un espace semblable à ceux que, dans les tissus cellulaires végétaux , l’on nomme des méats intercellulaires. e. Idem, mais dont la grefle, plus complète, ne laisse point de méats. J- Douze individus entregreflés et devenus plus ou moins polyèdres à cause du défaut d'espace. C’est ainsi qu’à l’aide d’un grand nombre de vésicules distinctes, et plus ou moins greflées entre elles, se forment tous les tissus cellulaires végétaux. ( 362) Fig. 4. a. — Deux individus de la Vavicula obliqua , greflés par ap- proche. b. Deux individus de la Bacillaria communis, greflés par approche. c. Quatre individus de la Bacillaria Lyngbyei, greflés par approche. d. Un grand nombre d'individus de la Bacillaria Müllerü, greflés par approche. PL xvr. Fig 1. Grefle artificielle, en fente, du Bouleau à papier (Betula papy - racea) sur le Bouleau blenc (Betula alba). a. Greffe ou individu supérieur. &. Sujet ou individu inférieur. ce. Ligne transversale produite par la jonction des masses tissulaires des deux individus accolés, à mesure de l'extension en diamètre de ces deux masses. Cette grefle, qui existe au jardin du Muséum d'histoire naturelle, est réduite au 9e de son diamètre naturel. Obs. Eu jetant les yeux sur cette association , en voyant combien cha- cune des espèces , à partir du point de collage, a conservé les carac- tères de volume, de couleur et autres aspects de l’écorce extérieure qui lui sont propres, on se demande comment il a été possible de croire que le tronc du sujet, dans celte sorte de greffe, n’augmentait en dia- mètre qu’au moyen des prétendues fibres radicellaires descendant de la base des nombreux bourgeons de l’individu supérieur. Fig. 2. Greffe artificielle, en fente, du Guignier à gros fruits noirs sur le Merisier (Prunus avium). a. Guiguier à gros fruits uoirs. b. Merisier. ce. Le véritable point de jonction ne peut être précisé dans cette grefle vue à l'extérieur, parce que le Guigpier ayant formé un très-gros bourrelet enveloppe quelques pouces du Merisier. Obs. J'ai dessiné, d’après nature , cette grefle dans une cour (1) près de la ville d'Honfleur, où l’on en remarque beaucoup de semblables. L’individu supérieur, le Guignier, d’un bois plus tendre, plus lâche que celui du Merisier, et natureliement d’un diamètre plus grand, Pemporte (1) Enclos herbeux dans lesquels on cultive diverses espèces d'arbres fruitiers pour la table et beaucoup de variétés de Pommes et de Poires propres à faire du cidre et du poiré. ( 363 ) toujours sur le sujet. Quant au bourrelet énorme qui se développe quel- quefois à la base de la greffe, la cause principale dépend des lois de la pesanteur. La sève nutritive en descendant par son propre poids et en s’accumulant en cet endroit, parce qu’elle y rencontre l'obstacle de ia greffe, y excite les tissus, les nourrit et les multiplie au point de produire ces développemens monstrueux entièrement analogues aux loupes et à tous les bourrelets corticaux. Cette greffe est réduite au 15e de son diamètre naturel. PI. xvir. Fig. 1. Deux jeunes tiges d'Asperges greflées par approche à partir du coller de la racine et n’offrant à leur sommet qu’un seul bourgeon , sem- blable à ces moustres animaux qui ont deux corps complets et une seule tête. a. Dans cet espace la soudure ne s’est point opérée. b, c. Écailles ou feuilles rudimentaires, n'ayant qu’une nervure mé- diane, commune aux deux tiges accolées, et ayant dans leur aisselle un bourgeon produit par les deux tiges à la fois. Cette figure est réduite à la moitié de sa grandeur naturelle. Fig. 2. Coupe verticale d’un ancien trouc d’arbre greffé en fente. La greffe ou l'individu supérieur a est un Amaudier (Amy gdalus). Le sujet ou l'individu inférieur b est un Prumier (Prunus). ce. Ligne transverse, complète, montrant les nombreux points de jonction ou de collage des tissus de chaque espèce à mesure qu’ils se sont développés. À partir de cette ligne, bien tranchée, tout est Pru- nier par en bas et tout est Amandier par en haut. Jamais les tissus de lun ou de l’autre individu associé ne dépassent le point de la greffe ; là ils s'arrêtent brusquement et se collent seulement physiologique- ment. Sans cette soudure vitale ce serait deux troncs d’arbres sciés transyersalement et posés l’un au-dessus de l’autre. La seule communauté qui s'établit entre deux individus, ainsi asso- ciés, consiste tout simplement dans les fluides et les liquides nourriciers qu’ils peuvent se communiquer selon leurs besoins, mais que chacun assimile selon le principe vital de son espèce. Les renflemens tissulaires que l’on observe souvent dans le voisi- nage de la greffe sont dus à ce que, dans ce lieu, la sève passant diflici- lement, s’y accumale et y nourrit les tissus outre mesure. Cette figure est réduite au quart de sa grandeur naturelle. (364) d. Bois fait ou tissus ayant absolument cessé de vivre et devant leur couleur plus rembrunie à l’entier abandon de la vie. e. Bois imparfait ou aubier, vivant encore, et d’autant plus qu'il est plus voisin de l'écorce. J. Bois herbacé ou écorce dans lequel la vie végétale est au plus haut degré d’énergie. Le passage brusque de la vie à la mort de l’aubier au bois fait ex- plique le changement subit de couleur entre ces parties, comme par exemple du blanc au noir dans l’Ébène. Fig. 3. Deux fleurs d’4/0e (de grandeur naturelle) greffées par appro- che ct naturellement dans toute la longueur des pédoncules et dans une partie des calices. a. Point sur lequel la grefle a cessé d’avoir lieu. b. Pédoncules soudés de la même manière que le sont les deux tiges accolées dont se compose ce que l’on appelle, siimproprement, la moelle allongée des animaux d’ordre supérieur. cc. Deux écailles ou feuilles rudimentaires excessivement rappro-! chées et à Paisselle de chacune desquelles est née l’une des fleurs accolées. d. Yroncon de la Hampe. e. Coupe transversale des deux pédoncules greflés. Fig. 4. Grefle en fente du Planera crenata sur l'Orme commun (Ul- mmus campestris). La nature ayant accordé à ces deux espèces d’arbres des diamètres égaux, il en résulte que la ligne de jonction ne se distingue que par la différence de couleur, da mode de gercure et de décortication des écorces propres à chaque espèce associée. a. Planera crenata. b. Ulmus campestris, c. Ligne de jonction des deux masses tissulaires. Cette figure est réduite au 8° de grandeur naturelle. Obs. Cette association , qui offrait un très-bel arbre dans le développe- ment du Planera crenata, a existé pendant bien des années au jardin du Muséum d'histoire naturelle. Elle touchait l'entourage de l’ancien potager du côté de la ménagerie. Fig. 5. Greffe en fente du Pavia lutea sux le Marronnier d'Inde (Æs- culus Hippocastanum). L'iudividu supérieur w’atteiguant jamais que les dimensions d'un grand arbrisseau, tandis que linférieur devient un À —_ ( 365 ) arbre de premier ordre, et chacun vivant sans mélange pour son propre compte, à partir nettement du point de contact des deux masses tissu- laires , il en résulte la différence très-remarquable de diamètre q'offre celte association. a. Pavia lutea. b. Æsculus Hippocastanum. cc. Point de la grefle ou ligne de jonction des deux espèces. Les deux écorces présentent un caractère distinct. Cette figure est réduite au 8e de son diamètre naturel. Obs. La greffe ou le Pavia jaune s’est élargie à sa base comme le font tous les troncs d’arbres près du sol. Cet élargissement n’aurait jamais eu lieu sans la circonstance de la grefe. Une ligne de ces arbres associés a long-temps bordé l’ancien carré de l’école des arbres fruitiers du jardin du Muséum d’histoire naturelle. C’est d’après l’une de ces associations que j’ai fait mon dessin. Ces arbres ont été détruits il y a quelques années, lorsqu'on a changé l'emplacement de l’école. Fig. 6. Greffe en fente du Tilleul blanc (7i£ia alba) sur le Tilleul d'Europe (Tilia europæa). Cette association offre l'inverse de la pré- cédente. a. Tilia alba. b. Tilia europæa. cc. Point sur lequel les tissus propres à chaque espèce se rencontrent et se collent physiologiquement. Obs. Cette association existe au jardin du Muséum d’histoire naturelle, où je l’ai dessinée au 8° de son diamètre naturel. (366 ) Recuercues énatomiques et physiologiques sur les Organes transitoires et la métamorphose des Batraciens (1); Par J. G. Manvin-Sainr-Ance, Docteur èn médecine. ©mnia e circulatione. Par ce utre, qui est le résumé de mon travail, j'ai era répondre convenablement à la question suivante : « Déterminer , à l’aide d'observations , et démontrer, par des préparations anatomiques et des dessins exacts , les modifications que présentent , dans leur squelette et dans leurs muscles, les reptiles batraciens , tels que les grenouilles et les salamandres, en passant de l’état de larve à celui d'animal parfait. » Tel était le programme de la question proposée par l’Académie des Sciences pour le concours de 1831, et que j'ai cherché à traiter dans toutes ses parties. J'ai pris pour sujet de mes recherches une espèce de la famille des Urodèles, et une autre de la famille des Anoures , afin d'acquérir des notions exactes et com- plètes sur le groupe entier des Batraciens où Amphibiens, en l'étudiant dans les deux principaux types qui s'y rapportent. (1) Je crois devoir prévenir que ce travail a été publié ici tel qu'il a été envoyé à l’Académie des Sciences , qui lui a accordé une mention honorable. J'ai pensé que mes compétiteurs pourraient désirer con- naître mon Mémoire exempt de tout changement de rédaction, de mème que je prendrai volontiers connaissance de la pièce qui a été conronnée, Le Mémoire qui a été couronné va être publié incessamment, par | l’auteur, M. Dugès. (R.) \ RÉ | | | | | ( 367 ) J'ai revu et vérifié avec un soin tout nouveau les ré- sultats des recherches entreprises jusqu’à ce jour par un grand nombre d’anatomistes nationaux et étrangers sur limportante question de la métamorphose des Batra- ciens. J'ai été conduit ainsi à constater de nouveau l'exactitude d’un grand nombre d’entre eux ; maïs aussi à révoquer en doute plusieurs autres, et, dans ce cas, J'ai cherché à déterminer les causes des erreurs com- mises. Enfin, quel que soit le nombre des faits décou- verts avant moi, j'ai été assez heureux pour l’augmenter encore , principalement pour ce aui concerne les trans- formations de los hyoïde , celle du larynx, la disparition des muscles et des autres organes de la queue; la forma- tion de la mâchoire inférieure et le développement de ses diverses parties en remplacement des muscles transi- toires du bec. Les fonctions de l’hyoïdé , le mécanisme si compliqué et si curieux de ses diverses parties sont des points très-importans que l'oubli presque complet où ils avaient été laissés par tous les auteurs m'a imposé l'obligation de traiter avec plus de soin encore que toutes les autres questions. Un grand nombre d'organes , chez les Batraciens , pré- sente deux périodes bien remarquables et bien tranchées. Avant et quelque temps après la naissance, ils se for- ment , se développent , s’accroissent ; puis , à une époque déterminée , au moment de la métamorphose, ils com- mencent à s’atrophier, à décroître. C’est seulement l’his- toire de cette seconde période que l’Académie a proposée , au moins d’une manière explicite , comme sujet du con- cours; mais je n’ai pas eru devoir eu séparer l’étude non moins importante de la première. En eflet, pour se rendre (368 ) un compte exact de la nature et de la composition de chaque organe, pour comprendre entièrement le rôle qu'il joue et toutes les modifications qu'il éprouve au moment de la métamorphose, ilest indispensable d’avoir remonté à l’époque de sa formation et de lavoir suivi presque sans interruption dans ses premiers développe- mens. Îl suflit, pour se convaincre du soin que J'ai mis à compléter l’histoire de la seconde période par celle de la première , de jeter les yeux sur plusieurs de mes planches où j'ai cherché, en présentant la série des formes successives des principaux organes, à faire com- prendré la dégradation , si l’on peut parler ainsi , qu'ils subissent au moment de la métamorphose, par les di- verses formes auxquelles ils s'élèvent graduellement pen- dant la première période. J'ai cru également devoir m’imposer un autre travail que l’Académie n’avait point non plus demandé d’une manière formelle , mais qu’il était également nécessaire d’avoir traité pour aborder avec quelque espoir de succès la question aussi difficile qu'intéressante de la métamor- phose des Batraciens. Je veux parler de l'examen dé- taillé et comparatif du squelette de ces animaux à l’état adulte , à l’état de tétard, et notamment de la détermi- nation exacte du nombre et des connexions des pièces qui entrent dans la composition du crâne. Il suflit de comparer les résultats de mes observations et ceux des travaux déjà publiés sur le même sujet pour savoir que, même pour ce qui concerne l’hyoïde , sous ce rapport, j'ai encore eu le bonheur de voir récompenser mes re- cherches par la connaissance de quelques faits nouveaux. Je me suis conformé au vœu du programme de l’Aca- rh ( 369 ) démie, en joignant à mon Mémoire , outre des dessins exécutés par moi-même avec le plus grand soin, les préparations les plus importantes parmi celles qui se trouvent relatives soit à des points jusqu’à présent con- troversés , soit à des points entièrement nouveaux. CHAPITRE Ie. Modifications que présentent les os et les muscles des Salamandres en passant de l’état de larve à celui d'animal parfait. Les modifications que présente le squelette de la Sa- lamandre en passant de l’état de larve à celui d’animal parfait, peuvent être envisagées sous deux points de vue. On peut étudier les os du squelette dans tous les âges et décrire leur forme, leurs usages et leurs connexions. On peut aussi, et ce second ordre de considération est non moins important , les examiner par groupes et les comparer ainsi dans leur ensemble chez l'adulte et le tétard. Or, sous ces deux rapports , de très-remarquà- bles différences se présentent d’un âge à l’autre, et l’on n’est pas moins frappé des graves modifications qu'ils éprouvent par les phénomènes de la métamorphose , soit que l’on fixe son attention sur chacun d’eux en particu- lier, soit qu’on examine chaque région dans son en- semble. Aïnsi, pour le crâne , nous verrons que chaque os, chez la Salamandre, peut diflérer de son analogue chez le tétard, et qu'ensuite les connexions de ces mèmes os, chez la Salamanüre , sont, en grande partie, autres que chez le tétard. Toutefois le nombre et Fim- XXIV. 24 ( 370} portance des variations de la tête n’apprache point du nombre et de l’importancede celles de l'appareil hyoïdien. Nous verrons que ce dernier, par une série de change- mens les plus remarquables, passe peu à peu d’une con- figuration très-compliquée à une forme et une disposi- tion très-simple ; sa transformation entraînera d’ailleurs, dans le nombre des muscles qui le font agir, des change- mens correspondans et non moins dignes d'intérêL. L’utilité de l’hyoïde ne sera pas la même avant et après la métamorphose; il remplira chez le tétard une fonction toute différente de celle qui lui est ordinaire. C’est donc cet appareil hyoïdien qui établit, comme nous le verrons , la principale différence entre le tétard et Pani- mal parfait. Ostéologie de la Salamandre crétée aux différentes époques de la vie. Les os de la tète de la Salamandre crêtée sont en nombre très-différent, suivant que l’on compte ceux que l’on peut isoler chez la Salamandre adulte , où bien ceux que l’on peut facilement désunir chez le tétard. Pour déterminer tous ces os, j'emploierai la nomen- clature de M. Cuvier, et je m’aiderai aussi de celle du professeur Geoffroy Saint-Hilaire, lorsque j'anrai à in- diquer les subdivisions d’os uniques chez la Salamandre et fractionnés chez le tétard. Ainsi je trouverai, dans chacune des méthodes adoptées par ces célèbres zoolo- gistes, les noms nécessaires à une description exacte (x). (x) On ne trouvera point dans ce chapitre une description spéciale et minutieuse de chacun des os du crâne des Salamandres, description qui (3729 Ostéologie de la téte. Frontaux. — À la partie antérieure et supérieure du crâne se trouvent deux os plats d’une forme irrégulière {Voyez pl. xvirr, CC). Ce sont les deux frontaux; ils s’ossifient de très-bonne heure, et leur forme est presque la même à toutes les époques de la vie. Ces os ne se soudent jamais entre eux. Pariétaux. — En arrière des frontaux se trouvent les pariétaux { C"C'); ces os peuvent aussi se séparer l’un de l’autre à toutes les époques de la vie. Ils s’ossi- fient en même temps que les précédens. Nasaux. — Ces os (G) occupent la partie supé- rieure du pourtour des narines antérieures ; ils peuvent, ainsi que les précédens, se désarticuler facilement, mème chez les Salamandres très-âgées. Frontaux antérieurs. — Ce sont deux petits osselets triangulaires (/7/1), dont chacun s'articule avec les frontaux , le nasal et le maxillaire inférieur de son côté. Maxillaires supérieurs. — Ces os ( X) sont fort curieux à examiner aux différentes époques de la vie du tétard. Avant la naissance de ce reptile, chaque maxil- laire se présenie sous la forme d’un os carré surmonté d’une multitude de petites dents excessivement té- est tout-à-fait étrangère au sujet proposé par l’Académie. J’ai dû, au contraire, attacher beaucoup d'importance à une détermination de ces os et à l'indication exacte du nombre et du caractère principal de chacun d’eux. Ce travail difficile n’était pas lui-même demandé explicitement dans toute son étendue par le programme , mais il forme la base néces- saire de toute recherche anatomique exacte eb précise sur la question proposée par l’Académie. ( 372 ) nues (Æ). En arrière de cette petite pièce, on voit une lame cartilagineuse extrèmement mince qui semble se joindre avec la précédente ; mais le moindre effort suflit pour l’en séparer nettement. Si l’on examine les maxil- laires chez un tétard de sept à dix jours et même plus, on trouve la plaque cartilagineuse très-mince, dont j'ai parlé, réunie à la petite pièce surmontée de dents. Cet os si singulier constitue le maxillaire supérieur. Intermaxillaire. — Cet os (F) est formé de deux pièces bien distinctes et symétriques ; mais il faut exa- miner le tétard avant la sortie de l’œuf, ou peu de jours après lanaissance , pour trouver les deux intermaxillaires non encore soudés ( f). Les branches ascendantes de chacun d’eux divergent dans le principe ; les deux por- tions dentaires se réunissent, et bientôt les branches elles-mèmes se soudent ensemble. Les Occipitaux latéraux. — L’'occipital supérieur et les rochers ne constituent qu'une seule pièce (B) chez la Salamandre ; mais chez le très-jeune tétard de 2 à 5 ou 6 jours , il y a évidemment trois pièces bien distinctes (bb'b") qui peuvent correspondre aux os que M. Geof- froy nomme les temporaux plur-occipitaux et pléréaux. Il y a, en outre de ces trois pièces osseuses, une plaque cartilagineuse destinée à boucher la fenêtre ovale. Ce cartilage est sans doute l’analogue du lenticulaire. Du Ptérygoïdien. — Cet os (A7) est encore un de ceux qui offrent le plus de variété , si on l’étudie chez les tétards de différens âges. Avant la naïssance , on ne voit qu’une plaque presque triangulaire ; vers le cin- quième ou le septième jour après la sortie de l’œuf, il s'élève une petite pointe osseuse ( Voy. pl. xvrit, m). (373) Du Jugal. —M. Cuvier regarde comme bien difficile la détermination de cet os (o), et semble lui donner à regret le nom de jugal. M. Geoffroy Saint - Hilaire nomme jugaux les os frontaux postérieurs de M. Cuvier. Du Tympanique. — Cet os (NW) semble se rapetisser à mesure que le tétard avance en âge. Il s’ossifie du reste assez promptement comme tous les os du crâne. Du Sphénoïde. — Le sphénoïde (D) est formé de deux pièces bien distinctes (d), dans le principe de sa formation ; mais il faut l’examiner avant la naissance du tétard pour qu’il soit facile de le diviser. L'ossification commence de très - bonne heure pour cet os qui est le premier formé de tous. On remarque sur la ligne mé- diane du sphénoïde , et surtout vers son bord antérieur, un écartement peu considérable à la vérité, mais qui est l’indice de la réunion des deux pièces qui entrent dans sa composition, et représente le sphénoïde avant la naissance. Des Vomers. — Ces os (L), doubles comme les pré- cédens, et que plusieurs anatomistes regardent comme les analogues des palatins , sont formés chacun de deux pièces chez le tétard de 5 à 10 jours et plus. L'illustre auteur du Règne animal avait pensé que cet os pourrait être formé de deux pièces distinctes chez le très-jeune tétard , et que dans ce cas seulement il y aurait un pala- tin de chaque côté. Cette division de l'os existe en effet primitivement, mais elle cesse bientôt d’avoir lieu. La plaque (2) qui touche l’intermaxillaire est garnie d’un grand nombre de petites dents placées sur plusieurs ran- gées peu distinctes, mais très-visibles à l’œil nu. La seconde pièce du vomer est une simple tige longitudi- ( 374 ) nale (/’), garnie aussi de très-petites dents ; cette se- conde portion s’ossifie un peu plus promptement que la précédente. Elle forme la tige dentaire qui se prolonge en arrière de la plaque vomérale et longe le sphénoïde. Il reste encore un os à indiquer, celui qui est situé de chaque côté du sphénoïde à la partie interne de l’or- . bite. M. Cuvier nomme cet os (u) aile orbitaire du sphénoïde. De la mâchoire inférieure. Chaque moitié de la mâchoire inférieure est formée de quatre pièces bien distinctes chez les tétards de Sala- mandre qui n’ont point passé le vingtième jour. Il y à trois pièces osseuses et une cartilagineuse ( Voyez plan- che xvux). Des trois pièces osseuses, deux portent de pe- tites dents (petp') ; cette dernière (p') finit par se sou- der à la branche dentaire (P), et les dents se continuent ainsi plus loin que dans le principe. Toutefois cette se- conde pièce (p’) a perdu un certain nombre de ces den- telures, et il ne lui en reste plus qu’une rangée pour faire suite à celle de la principale pièce maxillaire { P ); la troïsième pièce (p”) n’est qu’une partie du maxillaire devant constituer la partie moyenne ou le corps de cet os ; celte pièce est sillonnée dans presque toute sa lon- !!) est logé dans la rainure de la gueur. Le cartilage (p troisième pièce. Ces quatre os peuvent être les analogues des os nommés, par M. Geoffroy, submalléal , sub- mental, subhérisséal, subincéal et subdental. Tels sont les os qui entrent dans la composition de la tête. Comme on le voit, ils varient en nombre, puisque nous avons 26 os chez la Salamandre, tandis qu’il y en a 40 | l - | | . : (375) chez le tétard, Ils diffèrent aussi par leurs connexions, si on les étudie comparativement chez le tétard et chez la Salamandre; c’est ce que je vais essayer de dé- montrer, Rapports des os de lu téte du tétard entre eux. Tous les os du crâne proprement dit conservent les mèmes rapports qu'ils ont en se développant. Les masses temporales ont aussi les mèmes formes, quoiqu’elles soient composées de trois pièces chez le tétard. Le sphé- noïde et le jugal changent tres-peu de forme et de con- nexions; mais ceux qui présentent le plus de variété dans la configuration et les rapports sont surtout les os palatins, que M. Cuvier nomme vomer, et les maxil- laires supérieurs ; ces quatre os qui, comme nous l'avons vu , doublent ieur nombre chez Île très-jeune tétard , et qui entrent dans la composition de la face, donnent à la partie antérieure de la tête une configuration toute parti- culière. Le maxillaire supérieur , chez le jeune tétard, pe circonscrit point l’orbite en dehors ; il est très-rap- proché de la ligne médiane et se continue avec la plaque vomérale qui est aussi garnie de dents. Cette plaque du vomer 11’esi point encore unie à la tige dentaire qui longe le sphénoïde ; de cette disposition résulte le rétrécisse- ment considérable de la voûte palatine. Les os qui la composent n’ont pas les rapports qu'ils auront plus tard. L'intermaxillaire déborde les os maxillaires, au lieu d’être interposé entre les deux extrémités antérieures de ces os; de telle sorte que les maxillaires, ainsi que les vomers , sont refoulés en dedans vers la ligne médiane. Plus tard ces os se développent davantage et se portent ( 376 ) du centre à la circonférence. Ce mouvement centrifuge est déterminé par l’élargissement de la plaque vomérale , et alors l’arcade dentaire supérieure se porte de dedans en dehors et va rejoindre le bord dentaire de l’inter- maxillaire. Ce mouvement étant effectué , l’arcade den- taire supérieure se trouve sur la mème ligne circulaire, et n’est plus brisée, comme par le passé ; la plaque vo- mérale garnie de dents se réunit à la branche qui longe le sphénoïde , et que l’on peut nommer, par cela même, branche sphénoïdale du vomer ou du palatin. Tous ces changemens ont lieu du cinquième au treizième jour (1). Passé cette époque, on ne trouve plus de dents sur la plaque vomérale , mais il s’en développe sur la tige sphénoïdale , et ces dernières resteront pendant toute la vie du reptile. Ce sont là tous les changemens les plus importans qui s’opèrent pendant que la Salamandre est à l’état de larve. Modification dans le nombre et la forme des os du tronc et des membres inférieurs. Il y a peu de changemens dans la configuration et les rapports des os du squelette. J’ai trouvé constamment 35 vertèbres caudales chez la Salamandre crètée. M. Cu- vier n’en compte que 33. Différence peu importante et que je n'indique qu’en passant. Il ÿ a 18 vertèbres, en comptant depuis l’atlas inclusivement jusqu’à la première caudale exclusivement, ce qui fait en tout 53 vertèbres. Les os du bassin sont ordinairement suspendus à la 18° (x) Il est impossible de déterminer exactement le temps nécessaire à la métamorphose complète du tétard. (°3790) vertèbre chez la Salamandre crêtée; ce point est variable pour chaque autre espèce, et surtout pour la Salamandre terrestre qui a un moins grand nombre de vertèbres. L'épaule des Salamandres aquatiques est composée de trois os : l'omoplate, la clavicule et le coracoïdien. Ces trois os se soudent ensemble de très-bonne heure. Je n’ai point figuré le squelette de la Salamandre et du tétard, à cause du peu d'importance qu’il offre sous le rapport des variations qu’il subit aux différentes époques de la vie; mais j’ai étudié et figuré avec soin les os du carpe et ceux du tarse, à cause de la dissidence qui existe entre MM. Cuvier et Meckel. Le dernier de ces anatomistes célèbres dit, en parlant des os du tarse (à la page 637, t. 11, de son Anatomie comparée ): « Chez les autre Ba- « traciens urodels , du moins les Tritons et les Salamarn- « dres , d'une part ils sont osseux, d'autre part ils sont « plus nombreux. Ces reptiles, d’après M. Cuvier (Leçons « d’anatomie comparée, t. 1, page 316), en posséde- « raient huit disposés par trois rangées : cependant je « n’en ai pu trouver que sept, et ne crois pas m'être « trompé, parce que j'ai fait mes recherches avec le « plus grand soin. » En effet M. Meckel a bien indiqué le nombre d’os qui entrent dans la composition du carpe. Il y en a sept, et si M. Cuvier a dit, dans son Règne animal, qu'il y a huit os pour le carpe, il a dit (1) plus tard qu'ils sont réellement au nombre de sept, dont cinq seulement os- seux et les deux autres cartilagineux. Il dit aussi que les quatre os de la région antérieure s’articulent avec les (1) Voyez p.413, t. v, 2° partie, sur les Ossemens fossiles. (: 398} quatre métacarpiens ; mais cela est dit d’une manière générale , et ne s'applique peut-être pas à la Salamandre crêtée. M. Meckel laisse aussi cette question dans le va- que. Voici ce que j'ai observé dans la Salamandre crêtée. Il y a constamment sept os carpiens , tous également ossifiés (voy. pl. xvrir, fig. 1” et 2°). Deux de ces os sont en rapport avec les os de l’avant-bras ; l’un, plus petit , tient au radius d’une part; l’autre, plus volumineux, üent au cubitus ei un peu au radius. Ces deux os car- piens se touchent entre eux par une très-petite surface articulaire. En avant de ceux-ci se trouve un os arrondi, présentant six facettes articulaires peu prononcées; ce métacarpien est placé au centre des autres pièces qui toutes le touchent par une facette correspondante à celle qu'il présente. Il résulte de cette disposition que non- seulement il est diflicile d'admettre plusieurs rangées, mais qu'il est aussi impossible que les quatre métacar- piens puissent s’articuler avec quatre os du carpe. rois os seulement soutiennent le carpe; le premier, en pro- cédant du bord radial vers le cubitus, s'articule avec les deux premiers métacarpiens; les deux autres sou- tiennent , l’un le troisième, et l’autre le quatrième mé- tacarpien ( voy. les fig. 1” de grandeur naturelle et fig. 2 grossie du double et vues par la face dorsale). Les os du tarse offrent aussi chez la Salamandre crètée des différences de nombre et de rapport si l’on a égard à ce qui en a été dit par M. Cuvier, page 414, t. v, deuxième partie, des Ossemens fossiles. Il est dit que neuf os entrent dans la composition du tarse; cependant la figure qui en a été donnée n'indique que huit osselets , ce qui ferait croire à une faute d'impression. ( 379 ) Les huit os qui composent le tarse sont très-distinets et bien ossifiés. Leur disposition est analogue à celle du carpe, c’est-à-dire qu'il y a une pièce centrale et sept autres autour d'elle. Ici il y a sept facettes articu- laires pour la pièce centrale, au lieu de six que présen- tait l’os carpien. Cela tient à la présence d’un os de plus existant pour le tarse. Il y a trois os pour la première rangée : deux correspondent, l’un au tibia, l’autre au péroné; le troisième , interposé entre les deux précédens, touche également les deux os de la jambe. Trois os seulement soutiennent le métatarse; celui du milieu supporte l'os métatarsien moyen , chacun des deux autres supporte deux os du métatarse (voy. pl. xvrir, fig. 3’et 4’ face plantaire). Chez les très-jeunes tétards seu- lement, les quatre os du métacarpe sont supportés par autant d'os carpiens ; mais jamais les cinq métatarsiens ne sont en contact avec les cinq os du tarse. Ils le sont , iout au plus, avec quatre, et encore cela n’a lieu que dans les premiers temps de l'existence du tétard , lorsque surtout l’ossification n’est point encore achevée. Comme on le voit, j'ai passé très-rapidement sur la description de plusieurs os; je crois cependant ne pas avoir négligé d'indiquer ceux du squelette, qui offrent des variétés soit sous le rapport de leurs figures , soit sous le rapport de leurs connexions. J'arrive maintenant à la description de l'appareil hyoïdien qui de tous est le plus important à étudier. Les variétés de forme, de structure , et le mécanisme, plusieurs fois modifié par la présence de certains muscles qui ne sont que transitoires , constituent presque tous les changemens que le tétard doit subir pour passer de l’état ( 380 ) de larve à celui d'animal parfait. Pour faciliter la des- cripuion de ce curieux appareil, je commencerai par examiner les parties cartilagineuses qui le composent; j'étudierai ensuite les muscles qui doivent le faire mou- voir avant et après sa transformation, l’ordre dans lequel les muscles s’atrophient; et la marche que suit la nature pour se débarrasser d’un appareil qui devient inutile lorsque le tétard passe à l’état d'animal parfait. Formation de l'os hyoïde chez le tétard de la Sala- mandre crétée. L'appareil hyoïdien est ébauché presque en même temps que celui de la circulation; on dirait que l’un ne peut aller sans l’autre, et des fonctions en apparence si dis- parates, se prêtent dans le principe un mutuel appui. Aussitôt que le cœur est formé , huit branches s’écartent du tronc principal qui surmonte le ventricule ; de ces huit rameaux vasculaires , six sont destinés à porter le sang dans les branchies et deux dans les poumons. Chacunde ces vaisseaux, presque aussitôt après sa forma- tion, est soutenu par un cartilage (voy. pl. xx, fig. 1”, n* 1,2, 3 et 4). Au-dessous du cœur se développent trois points cartilagineux placés sur la ligne médiane (voyez fig. 1’,n®%5,6et), et huit autres sur les côtés (voyez les n° 8, 9, 10 et 11). Ces divers points sont dans le principe assez écartés les uns des autres ; mais bientôt ils se rapprochent de la ligne médiane. Les points cartila- gineux n° 8 et ose réunissent, ainsi que les pièces n°* 1 et 10, 2 et 11. En même temps les arceaux cartilagi- neux,n*2, 3 et 4, se rapprochent par leurs extrémités ( 54.9 supérieures. Un peu plus tard les pièces médianes, n°5, Get 7, se joignent. La pièce supérieure semble formée de deux plaques superposées. Cinq à six jours avant la naissance, toutes ces pièces, au nombre de dix-neuf ( voy. pl. x1x, fig. 1°), sont en contact et dans l’ordre suivant. Les trois pièces médianes sont réunies et n’en forment plus qu’une ; les deux branches 8 et 9 sont aussi confondues ; les pièces n° 1 et 10 sont réunies, ainsi que les pièces n° 11 et 2; les autres arceaux cartilagineux , 3 et 4, se touchent par leurs extrémités et avec la pièce n° 2. De cette manière toutes les parties cartilagineuses, d’abord écartées, se sont placées les unes à côté des au- tres et dessinent nettement la forme que doit prendre l’hyoïde du tétard. Je dois faire remarquer que l’arceau cartilagineux ne se joint auxautres, n° 2, 3 et 4, que peu de temps avant la naissance. Il en est de mème de la réunion de cette première pièce n° 1 avec celle n° 11. Cette disposition est importante à connaître, elle nous explique comment le muscle qui va se perdre dans le rudiment de la langue , passe à travers l’œillet ou cercle que présente l’hyoïde de la Salamandre. Trois à quatre jours avant la naissance, les quatre arceaux cartilaginenx se touchent entre eux par leurs quatre extrémités respec- tives, ainsi que les deux pièces n°” 10 et 11. À cette époque l’hyoïde est entièrement formé et cet arrangement doit persister pendant tout le temps que le reptile restera à l’état de larve. J'ai figuré (pl. xrx et xx) l’hyoïde du tétard d’après une pièce anatomique qui fait partie des préparations que j'ai soumises à l'Académie. La figure 1 représente l'hyoïde vu par sa face supérieure; la fig. 3, pl. x1x, le même os vu (:382°) par l’autre face. Les arceaux branchiaux de ces figures portent de petites dents cartilagineuses, ce que je n'ai point indiqué en parlant de ces mêmes pièces chez le tétard avant la naissance : cela ne doit pas faire penser que ces pointes cartilagineuses n'existent point avant cette époque, Si j'ai négligé de dessiner ces petits pro- longemens (pl. xrx, fig. 1), c’est que dans le premier degré de formation elles ne sont point apparentes ; mais elles existent cependant avant la naissance. J'ai dessiné avec soin la forme et le nombre des petites pointes carti- lagineuses , afin de bien en déterminer les usages. Les figures 1 et 1” indiquent le même os hyoïde divisé en deux parties q#f rappellent l’ordre dans lequel la jonction des pièces a eu lieu. En superposant la figure 2 à la figure 1 , on a l’ensemble de l'appareil hyoïdien du tétard fig. 1’. Maintenant que nous connaissons la com- position de l’hyoïde, voyons quels sont ses usages et quels sont les muscles qui le font agir. Fonctions de l'hyoïde chez le tétard. Il est incontestable que cet appareil si cempliqué est destiné en grande partie à soutenir les vaisseaux bran- chiaux; mais ilme paraît aussi certain que ce n’est point là sa fonction exclusive, et que le jeu de cet appareil a aussi pour but de faciliter l’entrée et la sortie de l'eau à travers les branchies. Il entrerait donc dans les attribu- tions de l’hyoïde de fermer et d'ouvrir à volonté la com- munication qui existe entre l'intérieur de la bouche et le dehors. L’utilité d’une telle fonction se déduit facile- ment , et devant ces faits tombe nécessairement l’asser- (383 ) tion de M. Rusconi , qui prétend que les tétards ne peu- vent pas introduire de l’air dans leurs poumons à cause des fentes branchiales qui le laissent échapper , lorsque l'animal veut le faire pénétrer dans ses poumons. Il est évident que si les fentes branchiales peuvent être par- faitement fermées , l’air ne s’échappera pas et l’animal pourra respirer à son aise, si d’ailleurs rien ne sy oppose. Les quatre arceaux cartilagineux sont situés en éche- lons dans l’ordre respectif de leur longueur. Le premier arceau , le plus long, tient aux muscles et à la muqueuse buccale ; le quatrième arceau, le plus petit de tous, est intimement lié aux parties molles du côté correspondant aux muscles abdominaux et pharyngiens ; de cetie ma- nière l’arceau supérieur ainsi que l'inférieur n’ont cha- cun qu'un bord libre qui se trouve en regard avec les deux arceaux médians. De cette manière les trois fentes branchiales qui en résultent sont limitées en haut et en bas par l’adhérence des arceaux n°* r et 4. Les cartilages branchiaux n° 2 et 4 sont garnis, de cha- que côté, de pointes cartilagineuses , tandis que ies autres arceaux nos 1 et 4 ne présentent ces petites éminences que d’un seul côté. Lorsque l’on rapproche les quatre carti- lages dentaires, l’on voit qu'ils se joignent les uns aux autres d’une manière parfaite. On peut alors apprécier l'utilité des pointes cartilagineuses; leur disposition al- terne n'est point du tout sans motif, elle est au contraire bien calculée et d’une utilité réelle. L’engrenage qui résulte du rapprochement des arceaux empêche tout mouvement de glissement qui pourrait s'opposer à l’oc- clusion parfaite des fentes branchiales. On peut compa- ( 384) rer cette espèce d'engrenage des pointes cartilagineuses entre elles, aux saillies et aux sillons de chaque branche d’une pince à disséquer, qui étant rapprochée forment un tout bien compacte. Cetadmirable mécanisme de l’hyoïde avait besoin pour être mis en action de fortes puissances musculaires pour agir. Aussi des muscles particuliers très-variés ont-ils été destinés à le mouvoir. Je vais les indiquer successivement en désignant pour chacun sa fonction spéciale. Neuf muscles servent à mouvoir les arceaux cartila- gineux (voy. pl. xix, fig. 1, 2, 3,et 4); six sont dilata- teurs des fentes branchiales et trois constricteurs ; le muscle (d) est le principal moteur et le plus puissant des muscles dilatateurs ; il s’insère, d’une part, sur l'extrémité inférieure du premier arceau cartilagineux, et de l’autre, à la branche semi-cartilagineuse , qui de l'angle de la mâchoire va au sommet de l’hyoïde. Ce muscle en se contractant porte en haut le premier car- tilage, et, comme celui-ci tient aux autres, il les en- traine tous de bas en haut, à l'exception du quatrième qui est fixé. Un autre muscle bien moins puissant (d') s’insère sur les mêmes pièces cartilagineuses que le pré- cédent, mais un peu plus en dedans que lui: ila le mème usage à un degré bien moindre. Enfin un troi- sième muscle, le plus petit de tous (4”),s’implante, d’une part, sur l'extrémité interne et supérieure du deuxième arceau cartilagineux, et de l’autre sur le corps de l’hyoïde. Ce muscle doit avoir peu d’action ; mais il concourt néan- moins au même but, celui d’écarter les branches cartila- gineuses (1). (1) On pourrait peut-être penser que si les trois muscles de chaque c ( 380%) Les muscles constricteurs des fentes branchiales sont assez forts et doivent agir puissamment si l’on considère leurs points d'attache. Le muscle C s’attache d’une part à l'extrémité supérieure et interne du premier arceau, et de l’autre au tiers interne du bord supérieur du qua- trième cartilage branchial. Ce muscle , en se contractant, doit nécessairement rapprocher les arceaux cartilagineux les uns des autres. Enfin le dernier muscle C, qui n’est point isolé, s'attache d’une part à tout le bord du qua- trième arceau, et se perd de l’autre dans les fibres des muscles constricteurs du pharyrx et les fibres des muscles dilatateurs du larynx. Ce muscle tend à rappro- cher de la ligne médiane tous les cartilages branchiaux, et agit par conséquent dans le sens inverse du plus puis- sant muscle dilataieur d, son antagoniste. J'ai figuré ce même appareil musculaire du côté qui correspond dans la bouche de l'animal (fig. 2), où l'on voit aussi le petit muscle sphyncter c, la glotte et les fibres qui constituent les muscles dilatateurs. Jai aussi figuré par les deux faces (fig. 3 et 4) le même appareil hyoïdien, et ses muscles après la contraction de ces derniers, de manière que , par la seule inspection de ces figures , on peut se rendre compte, je crois, des mouvemens que les mus- cles impriment aux cartilages branchiaux. Il me reste à indiquer une plaque cartilagineuse excessivement mince qui s'attache aux quatre arceaux côté ont la faculté de porter de bas en haut les arceaux cartilagineux, ils pourraient aussi agir sur l’hyoïde en totalité et le porter de haut en bas. Mais ce mouvement de l’hyoïde ne peut avoir lieu, car il est fixé par deux muscles qui s’attachent à la mâchoire inférieure, ct que je décrirai plus tard, XXIV. 25 ( 386 ) branchiaux. La fig. 5 fait voir leur disposition respec- tive. La fig. 6 montre de quelle manière ces lames s’in- sèrent sur les cartilages branchiaux , et la fig. 7 donne l'étendue d’une seule lame. Tous ces prolongemens ont un bord libre qui peut s'appliquer sur la lamelle sous-ja- cente, de manière à compléter, pour ainsi dire , l’occlu- sion des fentes branchiales, si toutefois cela est nécessaire. De ce qui précède on peut conclure que les arceaux branchiaux ont une double fonction, celle de soutenir les vaisseaux des branchies ou de leur servir de supports, et celle d'ouvrir on de fermer les fentes branchiales. Tout ce que je viens de dire de l’appareïil hyoïdien et des muscles qui font agir les cartilages branchiaux s’ap- plique au tétard qui n’a pas encore subi de changement ; mais aussitôt que la métamorphose commence à s’eflec- tuer, l'appareil hyoïdien perd de son volume, et, à compter de ce moment, il éprouve des changemens ‘notables et très-curieux à observer. Les muscles dilata- teurs (d, pl. xix) s’atrophient en très-peu de temps. Le muscle d a pris seul de l’aceroissement , parce qu'il doit servir plus tard. Les muscles d”et c, c’ disparaissent en très-peu de temps. Les cartilages ne sont plus en action, et, soit que l’immobilité détermine leur atrophie , ou, ce qui est plus probabie, que l’atrophie de ces derniers nécessite celle des muscles, il arrive qu'il y a coïncidence entre la disparition des uns et celle des autres. Voyons de quelie manière s’effectue la disparition des cartilages branchiaux. Les principaux changemens qu'offre l’hyoïde sont représentés à la planche xrx : la figure 1 , comme nous l'avons déjà dit, indique les pièces qui doivent former ( 387 ) l’hyoïde,; la figure 2 répète celle de la planche xx; c’est la formation la plus complexe de l'appareil hyoïdien qui doit exister pendant tout le temps que le reptile reste à l’état de larve. La figure 3’ représente l’hyoïde sur le point de se métamorphoser. Les branches 8 et 9 ne sont plus toutes deux cartilagineuses ; la dernière s’est ossi- fiée entièrement , l’autre est restée cartilagineuse. L'ar- ceau branchial n° 1 a déjà une consistance presque os- seuse ; son extrémité supérieure s’est élargie et supporte actuellement les deux pièces n° ro et 11. Les trois pièces cartilagineuses médianes n°% 5, 6 et 7 n’en forment plus qu’une. Les cartilages branchiaux 2, 3 et 4 sont ceux qui ont subi les changemens les plus marqués : leur vo- lume a beaucoup diminué, et leur densité est presque nulle. Les branches se sont approchées l’une de l’autre, et tendent à seconfondre , tout en se détruisant de plus en plus. Les pointes cartilagineuses dont elles sont pour- vues adhèrent les unes aux autres, et c’est dans cet état de choses que d’heure en heure, pour ainsi dire, toute cette masse composée de la presque fusion des trois der- niers arceaux branchiaux se détruit insensiblement : en très-peu de jours tout est résorbé de même que l’est la queue des grenouilles à l’état de larve. Pendant que cette résorption a lieu, le premier arceau cartilagineux prend de plus en plus de la consistance ; son extrémité infé- rieure se dirige de dedans au dehors et perd aussi les petites dents cartilagineuses qu’il avait. Ce partage, que semble faire la nature entre les organes qui doivent res- ter et ceux qui doivent disparaître, est bien curieux à étudier. Les cartilages branchiaux n° 2, 3 et 4 se dé- ( 388) truisent à mesure que la circulation se modifie; de cette coïncidence remarquable on pourrait peut-être en déduire que les modifications survenues du côté de la circulation sont le résultat de l’atrophie des cartilages branchiaux, cela pourrait se présumer si l’on ne connaissait pas les causes des modifications qui doivent faire changer le mode de circulation. En effet , on ne peut attribuer l’a- trophie des vaisseaux branchiaux à la disparition des cartilages ; car nous savons que cette atrophie tient aux changemens survenus dans les vaisseaux anastomotiques des branchies et surtout au volume disproportionné qu'a pris chaque artère pulmonaire. C’est donc par une espèce de révulsion opérée par l’afilux du sang vers l’organe pulmonaire plutôt que vers les branchies qu'est déterminée l’atrophie des capillaires branchiaux et par suite celle des vaisseaux principaux eux-mêmes. Après la disparition des trois arceaux n°2, 3 et 4, l'appareil hyoïdien se trouve simplifié de beaucoup (voy. fig. 4”). Nous voyons qu’à cette époque la tête on l’extrémité supérieure du premier cartilage n° 1 s’est aplatie et élargie en même temps que le cartilage n° ro s’est ossifié. Celui du n° 11 est un peu plus consistant et entièrement uni avec l’os n° r à l’extrémité duquel se trouve encore un résidu de cartilage que l’ossification semble avoir épargnée. Cette portion cartilagineuse reste fort long-temps à s’ossifier, et même ne l’est jamais complètement. Enfin le cartilage n° 6 est celui qui dis- paraît en dernier ; il sert dans le principe à soutenir les muscles sterno-maxillaires. La figure 5 représente l’hyoïde après son entière métamorphose ; il est tel qu’on ( 369 ) le voit chez la Salamandre , c'est-à-dire dans les condi- tions qu'il doit avoir et qui persisteront pendant toute la vie du reptile. En examinant les muscles qui sont restés adhérens à l’hyoïde , nous voyons ( pl. xxr ) que deux seulement de ceux qui servaient à dilater les fentes branchiales sont restés : ce sont les muscles d, d, fig. 1”; les sept autres, destinés à mouvoir les arceaux branchiaux , n’exisient plus et n'étaient que transitoires. IL y a aussi d’autres muscles qui s’iasèrent sur l’hyoïde et que je n'ai point indiqués chez le tétard pour éviter une confusion. Je vais faire connaître ces muscles chez la Salamandre ; leur attache à l’hyoïde a lieu , à très-peu de chose près, sur les mêmes points chez l’hyoïde du tétard. Muscles de la région hyoïdienne chez La Salamandre crétée. Au lieu de commencer par les muscles superficiels de celte région, Je commence par examiner ceux de la couche profonde qui s’attachent à l’hyoïde : ils sont au nombre de trois de chaque côté. Le premier, en procé- dant de dedans en dehors, est l’omoplate hyoïdien (0, fig. 1’, pl. xxx); il s’insère, comme on le voit, sur le corps même de l’hyoïde , et va de là à l’épaule. En dehors de ce muscle s’en trouve un autre plus volumineux et très-remarquable sous plusieurs rapports; il semble} provenir des fibres du petit oblique abdominal. Ces fibres réunies en faisceaux s'engagent dans l'espèce d’anneau que présente l’hyoïde (voy. fig. 1’ et 2’), quelques-unes # ( 390 ) de ces fibres vont s'implanter sur le sommet de l’hyoïde, et les autres, après s'être entrecroisées en grande partie avec celles du muscle opposé, vont s’insérer sur le maxillaire inférieur. Ce faisceau musculaire semble destiné à remplacer les génioglosses et les hyoglosses , il sert à maintenir l’hyoïde rapproché du corps. Sans ce muscle qui passeau travers de cetos, celui-ci serait déplacé considérablement à chaque mouvementdedéglutition. Les rapports qui existententre l'anneau hyoïdien et le muscle qui nous occupe deviendraient difficiles à expliquer, si l’on ne connaissait pas le mode de formation et de dé- veloppement de l’hyoïde. Nous avons vu (pl. x1x et xx) que les cartilages n° ro et 11 sont écartés l’un de l’autre, et qu’ils sont les derniers à se réunir avec les autres car- ilages ; à cette époque donc il n’y a point d’anneau hyoi- dien , et c’est alors que le muscle dont il s’agit se porte librement vers le sommet de l’hyoïde sans être obligé de traverser un cercle. Ce n’est donc que postérieure- ment à la formation des muscles que les branches carti- lagineuses se réunissent pour former cette espèce de lu- nette que je nomme anneau hyoïdien, et qui sert à incarcérer, pour ainsi dire, le muscle dont il s’agit. Cette disposition sert, comme je l’ai dit, à fixer solidement l’hyoïde. Un troisième muscle (d) s’étend de la grande corne ou de la branche (n° x) à la tige semi - cartilagi- neuse, qui de l’angle de la mâchoire inférieure va au sommet de l’hyoïde. Ce muscle est le même que nous avons vu (pl. xrx, d); son utilité semble être actuelle- ment de porter de haut en bas la pointe cartilagineuse où il s’insère supérieurement. Cette extrémité cartila- gineuse, qui daus le principe servait à soutenir l’hyoïde, ( 395 ), n’est plus actuellement fixée au sommet de cet os par un ligameut cartilagineux, mais il fait saillie de chaque côté de la langue, ce qui augmente le volume de cet organe rudimentaire, qui alors peut-être formerait comme un tampon utile à boucher les narines internes. Ces mèmes muscles , en supposant qu’ils prissent pour point d'appui le sommet de ces branches mobiles, ser- viraient à porter la grande corne de l’hyoïde de bas en haut, ce qui tendrait à les écarter l’une de l’autre. Ce résultat paraît n’avoir aucune utilité, tandis que l’action de ce muscle opérée dans le sens inverse , et comme je l'ai dit ci-dessus, concourraità augmenter le volume de la langue et par suite à boucher les ouvertures nasales internes. Les six muscles que je viens de décrire sont recou- verts en partie par deux muscles peu larges et très- minces , qui s'étendent du maxillaire inférieur au ster- num. Quelques fibres vont aussi dans le muscle petit oblique de lPabdomen. Les autres muscles déjà décrits ont les mêmes lettres et sont en rapport avec les sterno- maxillaires. Ces derniers s'attachent, chez le tétard, sur la pièce cartilagineuse (n° 7, pl. xIx}; mais se con- linuent aussi avec les fibres des muscles pett oblique de l’abdomen. Ainsi, comme on le voit, tous les mus- cles que je viens de décrire chez la Salamandre , existent aussi chez le tétard , et ont les mêmes points d'insertion. Il manque à ces muscles ceux qui servaient à mouvoir les cartilages branchiaux, à l'exception de deux, ce qui fait sept muscles de moins pour les mouvemens né- cessaires de l’hyoïde de la Salamandre : ces derniers muscles sont les seuls qui doivent disparaitre chez la ( 392 ) Salamandre. J'ai figuré (pl. xxr, fig. 1 et 2) les muscles superficiels de la Salamandre que j’ai comparés avec ceux du tétard. Ils sont en même nombre, et les différences de forme sont si peu marquées, que je n’ai point cru devoir en donner une figure à part pour chaque époque de la vie du tétard. Il n’y a que le muscle mylo-hyoïdien de différent chez le tétard , à cause du soulèvement de la peau et des fentes branchiales. Ce muscle s'applique fortement sur les autres après l’occlusion des fentes branchiales. Aïnsi tous les changemens qu'éprouvent le squelette et les muscles de ce reptile , en passant de l’état de larve à celui d'animal parfait, consistent principale- ment dans les os qui entrent dans la composition de la tête et surtout dans la métamorphose remarquable que subit l’appareil hyoïdien. Quant aux muscles, c’est aussi ceux de la région hyoïdienne exclusivement qui éprouvent des variétés importantes ; d’où l’on peut con- clure que la métamorphose du tétard de la Salamandre consiste dans les changemens que subit l'appareil hyoï- dier, etsurtout dans l’admirable révolution qu’a éprouvée le système circulatoire, cause déterminante des autres variétés en général , et en particulier de celle de l’appa- reil hyoïdien. CHAPITRE II. Des changemens qu'éprouvent le squelette el les muscles des tétards de Grenouilles avant et après leur métamorphose. Nous avons indiqué dans le chapitre précédent les changemens que présentent le squelette et les muscles ( 393 ) des Salamandres à toutes les époques de leur vie. Nous avons vu qu'il n’y a de changement proprement dit, avant la naissance, ni dans les muscles ni dans le sque- lette, du moins qu’il n’y en a point d’apparent, si l’on en excepte ceux qui s’opèrent du côté de appareil hyoï- dier. Dans ce second chapitre ce sera aussi sur l’hyoïde que se fixera principalement notre attention, et nous aurons surtout à insister sur le changement qu'il subit avant la naissance du tétard, quant au nombre et à l’arrangement des pièces cartilagineuses qui constituent cet appareil. S’il s’opère aussi avant la naissance des changemens dans les autres organes , il est impossible de les saisir, et on tomberait évidemment dans de fausses : conjectures à cet égard, si l’on voulait suppléer à ce que l'observation ne donne pas immédiatement. Aussi mon travail ne sera-t-il basé que sur des preuves irrécusables. L'exactitude de tous les faits que je rapporterai peut d’ailleurs être vérifiée facilement. Si je me suis occupé avec plus de soin, ou du moins avec plus de détails , de la composition et des fonctions de l’hyoïde, c’est parce qu'il présente des changemens plus remarquables qu'aucun autre, et qu'il m'a paru être ainsi l’organe qui joue le principal rôle dans la métamorphose du tétard, en entraînant par sa dispari- tion partielle des changemens correspondans dans les parties qui lui sont annexées. Je n’entrerai point ici dans les détails relativement à la circulation. Lorsque je dis que les changemens , ou du moins les principaux, con- sistent dans la métamorphose survenue du côté de lap- pareïl hyoïdien et de ses dépendances, je sais fort bien que tout changement opéré chez le tétard avant et après ( 394 ) la naissance est subordonné à celui du système circula- toire, et que ce dernier est le régulateur et la cause déterminante de toute métamorphose. La différence qui existe entre le tétard de la Sala- mandre et celui de la Grenouille, consiste surtout dans la disparition de la queue chez le tétard de la Grenouille, dans le mode de développement des pattes et de leur addition, et pour ainsi dire de leur adjonction aux autres parties du corps, ainsi que dans la présence d’un bec cartilagineux très-ressemblant à celui des poissons et sur la structure très-remarquable et la disposition duquel je reviendrai plus tard. Il semblerait que le tétard de la Grilles qui doit devenir un animal plus parfait que la Salamandre, sort de l’œuf trop prématurément; on dirait en eflet que son organisation est bien plus incomplète que celle que présente le tétard de la Salamandre lors de la sortie de l’œuf. Ce dernier a tous les organes qu’il doit avoir, et.il n’est pas jusqu’à la forme générale et définitive du corps qu'il ne possède déjà. Il ne lui reste ainsi à subir, pour passer à l’état d'animal parfait, que de légères modifications , etil est à remarquer que ces modifications consistent, non dans l’addition ou le développement, mais , au contraire , dans l’atrophie et la diminution de quelques organes. Bien au contraire, le tétard de la Grenouille se pré- sente sous une forme tout autre que celle qu'il doit avoir plus tard. Ses membres pelviens et thoraciques ne sont qu'ébauchés et non apparens à l'extérieur ; le train de derrière s'applique pour ainsi dire après coup au reste de l'animal ; le bassin se forme en avant des mus- ( 395 ) cles qui meuvent une longue échine ; un bec cartilagi- _neux se trouve en avant de la mâchoire inférieure incom- plètement développé et remplacé par une bouche en quelque sorte transitoire. Tout ce changement qui s’o- père chez le tétard de la Salamandre avant la naissance, s’effectue chez le tétard de la Grenouille , lorsque celui- ci est sorti de l’œuf, ce qui ferait croire au premier abord que le tétard de la Grenouille subit des changemens plus nombreux etque lacomposition organique est plus élevée. Ce n’est point lorsqu'il se forme et se développe, que le tétard de Ja Grenouille offre le plus d'intérêt, c’est sur- tout dans la période où il perd ces organes. Comme je l'&i dit plus haut, nous voyons s'effectuer sous nos yeux, chez ce tétard , ce qui se passe indubitablement chez le tétard de la Salamandre avant sa naissance ; d’où l’on peut conclure que la larve de la Grenouille esi bien moins parfaite que ne l'est celle de la Salamandre. De ce fait on pent déduire facilement que j'aurai à présenter au sujet des Grenouilles des observations bien plus nom- breuses qu’au sujet des Salamandres. Ce chapitre sera , pour ainsi dire , le complément du précédent, car tout ce que j'aurai à dire de plus s’appliquera en grande partie à la formation de certains organes que je n'ai point indiqués en parlant de la larve des Salamaridres , parce que ces changemens ont lieu chez ces dernières avant la naissance. L'ordre que je suivrai dans ce chapitre sera le même que celui que j'ai adopté dans le précédent ; c’est-à-dire que j'indiquerai d’abord les variétés survenues dans le squelette, puis celle qui s'opère dans les muscles. Je commencerai par étudier le squelette de la Grenouille , - C 396 ) ensuite celui du tétard dont je comparerai successive ment Îles différentes pièces. Je ferai surtout connaître avec les plus grands détails l'appareil hyoïdien et le larynx ; enfin les variétés survenues dans le nombre ou la disposition des muscles seront aussi indiquées avec soin. Ostéologie de la Grenouille verte aux différentes époques de la vie, Si l’on examine l’ensemble du squelette de la Gre- nouille, et si on le compare avec celui de la Salamandre crètée et des autres espèces du même genre , on le trouve moins rapproché du squelette des mammifères que ne l’est celui de Ja Salamandre, si toutefois on fait excep- uion des vertèbres caudales. Le radius et le cubitus sont confondus ‘ensemble; il en est de mème des os de la jambe. Les os du carpe sont cartilagineux : ceux du tarse le sont aussi, à l'exception de deux qui ont pris un dé- veloppement extraordinaire et qui par là sont devenus pour ainsi dire méconnaissables. Chez la Grenouille les phalanges s’éloignent aussi davantage que chez la Salaman- dre de Ja conformation de la main et du pied. Enfin la composition chimique des os de la Grenouille semble différer de celle des os de la Salamandre. Les derniers paraissent contenir une plus grande quantité de carbo- nate de chaux, plus de silice et de phosphate de fer qu'il ne s’en trouve dans les os de la Grenouille, où le phosphate de chaux semble dominer. Cette diversité dans la densité des os m'a engagé à étudier anatomique- mept la structure des os du squeletie de la Grenouille. ” (307 ) J'y ai été aussi déterminé par Putilité de reconnaitre jusqu’à quel point la fusion des os de l’avant-bras et de la jambe peut avoir lieu. Je vais actuellement décrire comparativement tous les os du squelette de laGrenouille et ceux du tétard, en commençant par ceux de la tête. / Ostéologie de La téte. Le nombre des pièces qui entrent dans la composition de la tête est bien plus considérable chez la Grenouille que chez la Salamandre, J’indiquerai par de grandes lettres, et les mêmes que celles employées par M. Cu- vier dans sa description , les os de la tête; les petites let- tres indiqueront ceux des os non mentionnés dans la nomenclature de ce célèbre zoologiste et qui correspon- dent à plusieurs des pièces que M. Geoffroy St.-Hilaire a admises d’une manière générale dans la composition de la tête osseuse, en donnant une nomenclature basée sur le plus grand nombre de pièces crâniennes qui exis- tent chez les poissons. Le crâne est formé en avant par un os très-volumi- neux (4, pl. xxiv), que ŸF. Cuvier regarde comme pou- vant représenter très-bien les deux frontaux des serpens réunis. M. Cuvier dit ne les avoir jamais trouvés séparés même dans les individus très-jeunes : cela est on ne peut plus exact. Cependant, en examinant au microscope le tétard avant sa naissance, on voit que cet os est formé de deux pièces latérales. Les deux occipitaux latéraux (B) sont aussi formés de deux pièces avant la naissance du tétard. C’est la ( 398 ) partie qui doit former le condyle qui se trouve isolée de la grande plaque occipitale. La pièce osseuse (C) est très-importante à étudier chez le très-jeune tétard, un peu avant sa naissance : elle est alors composée de trois pièces, deux latérales et une inférieure. L'espèce de crête qui existe sur l'os (C) in- dique suflisamment de quelle manière cette division a lieu dans le jeune âge ; chez la Rainette surtout, on voit la division longitudinale persister jusqu’à un âge très- avancé : quant à la suture transversale, elle existe de très-bonne heure; cependant on peut encore séparer facilement la pièce inférieure, sept à dix jours après la naissance du tétard. M. Bojanus marque cette division dans une tête adulte. M. Cuvier admet que la pièce pos- térieure peut représenter le pariétal selon la nomencla- ture de M. Geoffroy. Une des pièces latérales qui, d’a- près M. Cuvier, constituent le frontal serait sans doute un occipital supérieur. Le sphénoïde (D) est le premier formé pour ainsi dire, et quoique très-mince , il est ossifié de très-bonne heure. Il faut l’examiner quelques jours avant la naissance du tétard pour pouvoir facilement séparer les deux pièces longitudinales qui le composent. Chez le tétard de trois à quatre jours , il est encore possible de séparer ces deux pièces sans trop d'efforts ; au reste, mème chez la Gre- nouille, le sphénoïde présente à son sommet une scis- sure qui montre le mode de division primitif. La divi- sion de Bojanus, en admettant une ligne iransversale qui ferait ainsi un sphénoïde antérieur et un postérieur , est un peu forcée, comme l’a fait remarquer M. Cuvier. ( 399 ) Le rocher (Æ), d’une forme assez irrégulière, se réunit à l’occipital latéral (B) avant même la métamorphose du tétard. La pièce qui chez la Salamandre est osseuse, et con- stitue l'aile orbitaire , est simplement mermbraneuse chez la Grenouille. Les intermaxillaires (Æ) sont bien distinets l’un de l’autre et peuvent se désunir très-facilement, même chez la Grenouille. M. Cuvier est le premier, je crois, qui ait décrit deux petits osselets (G) qu'il regarde comme un vestige du nasal. Les frontaux anté- rieurs (/1) ont une forme plus allongée chez le tétard et ne présentent point deux échancrures sur le bord antérieur. Les deux os (7) sont, d’après M. Cuvier, les analogues des palatins ; ces os existent de très-bonne heure chez le tétard et ont la même forme. Le maxillaire supérieur (X) ne présente point cette éminence qui détermine deux échancrures sur le bord supérieur. Cet os s’ossifie très- tard , ce qui ferait croire qu’il n'existe pas chez le jeune tétard. En avant de ces palatins se trouvent deux os plats (Z) garnis de trois ou quatre petites dents; ce sont les vo- mers que plusieurs anatomistes regardent plutôt comme ‘ les analogues des palatins. Ces os sont peu développés chez le tétard et ne sont point garnis de dents avant la naissance. Le ptérygoïdien (47) a une forme bien différente de celle qu’il présente chez le tétard, surtout si on le com- pare quelques jours après la naissance de ce reptile. Il consiste alors en une plaque élargie vers la base et dont la pointe se dirige en avant. L’os tympanique (W) pré- ( 400 ) sente peu de variété , si on le compare à celui du tétard. 11 semble mème plus développé proportionnellement chez celui-ci. Le jugal (0) est formé de deux pièces chez le tétard de deux à six jours. Cet os se joint au maxillaire supé- rieur (X). La mâchoire inférieure est composée de six os, trois de chaque côté , une pièce médiane (À) , une très- mince ($) qui concourt à former la symphyse, et une dernière (7°) que M. Cuvier nomme tubercule articu- laire. Ces six pièces constituent la mâchoire inférieure du tétard, mais elles sont si peu développées qu’elles deviennent méconnaissables, même chez le tétard de plusieurs jours. L'état cartilagineux de ces pièces per- siste jusqu’à l’époque où la métamorphose commence ; aussi jusque-là il a fallu un appareil buccal nécessaire à la préhension, et c’est pour cela qu’un bec cartilagineux existe chez le tétard de Grenouille. Il me reste à indiquer les pièces osseuses et cartilagi- neuses désignées par les petites lettres; ce sont, d’après la nomenclature de M. Geoffroy : 1° le rkinosphénal (a), le nasal (b\, le ptapéal (c), le malléal (d) , le tympa- nal (e) et le lenticulaire (f). Tous les os que je viens de décrire séparémentse voient dansleurs rapports (pl.xxtr1), où j'ai représenté l’ensemble de la tête vue par la face cränéenne (fig. 1), et par la face buccale ou inférieure (fig. 2). J'ai aussi représenté (fig. 3 et fig.4) la mâchoire inférieure des deux côtés. Des os du tronc. L'épine des Grenouilles est composée de neuf vertè- bres ( voy. pl. xxn ); elles offrent des différences très- se mass Écosse (401) remarquables si on les compare à celle des tétards. Chez les Grenouilles les sept vertèbres intermédiaires ont les surfaces articulaires de leur corps concaves en avant et convexes en arrière, tandis que les deux faces articu- laires sont également concaves chez les tétards : cette remarque a été indiquée par M. Dutrochet et vérifiée par M. Cuvier. Les apophyses transverses des huit der- nières vertèbres semblent ne pas exister dans les pre- miers jours de l’existence du tétard; mais à l’époque où les pattes de derrière commencent à se montrer, elles sont bien distinctes, et l’on remarque surtout la lon- gueur des apophyses transverses de la neuvième vertè- bre, chez le tétard même avancé en âge. Il semblerait que rien ne fait suite aux vertèbres. Cet os long que l’on voit entre les deux tiges montantes du bassin n’existe pas dans le principe, et le cartilage creux, qui constitue la tige caudale, semble se prolonger au-delà de la neu- vième vertèbre. Ici se présente une question, celle de savoir si cet os longqui existedans le bassin (voy. pl.xxr1) se forme aux dépens du cartilage caudal, ou bien en avant de ce mème cartilage. Je crois m'être bien assuré que c’est dans la paroi antérieure du cartilage canaliculé de la queue que se développe le point d’ossification ; ensuite il gagne de proche en proche le pourtour de cette même tige cartilagineuse qui, dès le principe , s’ossifie dans une étendue d'environ une ligne. Il est facile de voir même chez la Grenouille que cet os a dû être canali- culé. On est peu d'accord sur le nom à donner à cet os ; M. Cuvier pense, avec raison , qu’il doit être l’analogue du sacrum plutôt que le coccyx. M. Schultze n’adopte point cette manière de voir. Par cela mème que cet os XXIV. 26 (402) naît dans la tige cartilagineuse de la queue , peu importe, je crois, le point où commence l’ossification ; il suflit en général de voir quelles sont les connexions d’un organe pour le caractériser. L’ossification du sacrum borne les limites du bassin , et c’est jusqu’à lui que la queue doit tomber, comme on le dit ordinairement , ou , pour em- ployer une expression plus exacte, être résorbée. Les os des îles s’ossifient en même temps que le sacrum, et les trois principales pièces qui entrent dans la composi- tion du bassin semblent comme surajoutées à cette lon- gue échine du tétard. Les ischions et les deux parties cartilagineuses qui constituent le pubis, sont peu dis- tincts chez le tétard ; ils se joignent entre eux de cha- que côté et avec l'os des îles, avant de se confondre sur la ligne médiane , avec les mêmes os du côté opposé. De l'extrémité antérieure. L'épaulede la Grenouille est formée de trois os : l’omo- plate, la clavicule et le coracoïdien. Ces trois os con- courent à former la cavité cotyloïde. Les deux derniers se rapprochent petit à petit de la ligne médiane anté- rieure et finissent par se rencontrer avec ceux du côté opposé. Chez le tétard on voit une petite plaque carti- lagineuse qui s’interpose entre les deux clavicules et les deux coracoïdiens. J'ai plusieurs fois rencontré cette pièce, en quelque sorte ossifiée, chez les Grenouilles vertes. Il est bien évident que cette pièce située sur la ligne médiane appartient au sternum qui a deux autres pièces ossifiées placées l’une en avant des clavicules, l’autre en arrière des coracoïdiens (voy. pl. xxr1), c’est-à- ( 403 ) dire aux deux extrémités de la pièce médiane. L’hu- mérus est si peu développé chez le tétard qui vient de daître , que l’on a de la peine à le retrouver ; il est placé au centre d’une substance molle dans laquelle doïvent se dessiner les muscles. Cet os ne prend la forme qu’il doit avoir plus tard, qu'après la métamorphose complète du tétard. Si l’on examine l’humérus de la Grenouille à l’in- térieur, on le trouvecreux dans toute son étendue, surtout vers son extrémité supérieure ; de manière que la tête de l'humérus n’a aucuné consistance étant dépourvue de substance spongieuse. L’extrémité inférieure seulement présente la structure ordinaire qui, en général, offre de la solidité à tous les os des extrémités articulaires : on y voit ue substancé compacte analogue aux tissus spongieux (voy. pl. xxrrt, fig. 1). Le radius et le cabitus sont soudés ensemble chez la Grenouille; ils le sont mème chez les jeunes tétards dans le principe de leur formation. Ces os sont réunis plus intimement vers leurs extrémités supérieures qu'ils ne le sont à leur partie inférieure. Il y a un double canal médullaire très-dis- ünct jusque vers les deux tiers supérieurs. Au-dessus de ce point, les deux cylindres semblent ne former qu’une cavité (pl. xxur, fig. 2). Os du carpe. — Meckel dit, pag. 638 , t. 17, de son Anatomie comparée : «M. Cuvier donne aux Batraciens sans queue le même « nombre d'os carpiens qu'aux Batraciens à queue; maïs « je le dois encore contredire en cette proposition. Chez & Ja Grenouille commune, et la Grenouille ronsse, je ne « trouve pas huit os, maïs seulement cinq qui sont dis- « posés non en trois rangées, mais seulement en deux.» ( 404 ) K J'ai cru devoir signaler ce passage qui ne m'a point paru exact sous plusieurs points. M. Cuvier a indiqué ces os d’une manière générale et a dit, page 402 de la deuxième partie du cinquième volume de son ouvrage sur les fossiles : « On compte six os dans le carpe, sa- « voir: deux au premier rang et...» Meckel parle de cinq os seulement pour le carpe; j'en ai trouvé constamment six sur deux rangées, et un septième très-petit au-dessus du premier métacarpien (voy. pl. xxir, ces os dessinés à part, n° 1,2,3,4,5, 6. 7). Quant à la disposition de ces os, ils sont , comme on le voit pl. xxrr, placés sur deux rangées bien dis- tinctes ; les trois de la rangée supérieure se trouvent en contact avec les extrémités réunies du radius et du eubi- tus ; les trois de la seconde rangée supportent les os du métacarpe ; le premier et le second, en procédant du bord radial vers le cubitus , correspondent au premier méta- carpien et à un petit osselet qui semble être un pouce rudimentaire. Le troisième os carpien très-volumineux soutient les trois derniers métacarpiens. La disposition des os du carpe ne peut être bien ap- préciée que chez la Grenouille. Il est difficile de dire si chez le tétard il y a le même nombre d’os, ou s’il y en a plus : à en juger par le volume du troisième os carpien de la deuxième rangée, on serait porté à croire qu'il est composé de deux 6s; mais je le répète, cette distinction serait hasardée si on l’indiquait comme réelle chez le té- tard. La disposition cartilagineuse de ces pièces dure fort long-temps, et l’on pourrait même dire que la dé- nomivation d'os carpien ne leur convient à aucune épo- que. Ainsi, la facilité avec laquelle on peut diviser ces ( 405 ) pièces chez le tétard et en augmenter le nombre peut induire en erreur, et il faut, pour bien examiner les car- tilages carpiens, laisser dessécher complètement les par- . ties molles qui les environnent. Les os du métacarpe ont presque la même longueur. Le premier, le radial, est le plus gros; il présente à son extrémité inférieure une espèce d’apophyse qui détermine une rainure dans la- quelle passe le tendon de l’extenseur de ce doigt. Les trois autres métacarpiens n’offrent rien de remarquable. L’index et le médius ont chacun deux phalanges, les deux autres doigts chacun trois. Chez le tétard, lorsque le membre supérieur com- mence à se montrer, on ne voit que l'index et le médius s'élever sous forme de deux petits moïgnons , tels qu’on les voit apparaître sur l'extrémité supérieure de l’aile du poulet, lorsqu’on l’examine à certaines phases de l’incu- bation. Les autres doigts se développent chez le tétard d’une manière insensible et sans que l’on puisse exami- ner le progrès des os qui entrent dans leur composition. Cette grande difficulté tient à ce que la résistance des parties molles est plus grande que celle des pièces carti- lagineuses qui doivent constituer les os. De l'extrémité postérieure. J'ai déjà parlé des os qui entrent dans la composition du bassin. [1 me reste à parler des os des membres pro- prement dits. Le fémur est un os long , cylindrique, en- tièrement creux à l’intérieur, surtout à son extrémité ou tête (voy. pl. xxurr, fig. 4 );ce qui le rend extrèmement ( 406 ) léger. Le fémur se développe très-tard chez le tétard et après que l’esquisse des os du bassin à été jetée. Il est droit dans le principe, et sa courbure en S ne commence à se manifester que chez le tétard qui est sur le point de se métamorphoser. La jambe se compose de deux os soudés ensemble dans toute leur longueur. Il y a un point osseux et percé d'un trou, dans lequel passe une artère qui interrompt la continuation des deux canaux. Ce point osseux est placé dans la partie la plus étroite de cet os composé du tibia et du péroné. Chez le tétard, ces deux os de la jambe sont bien moins confondus ensemble , et peu après la formation de chaque os, une artère semble les séparer; c’est cette même artère qui plus tard se trouve entourée d’une substance osseuse très-prononcée. On ne saurait contester la présence des deux os de la jambe réunis en un seul. I] sufit, pour s’en convaincre , de voir les deux cavités adossées (voy. pl. xx, fig. 8). M. Rudoiphi considère cet os comme un fémur secondaire, et à cause de leur excessive longueur il semble avoir pris deux des os du tarse, l’un pour le tibia , l’autre pour le péroné. Des os du tarse. — Si l'on considère comme tels tous ceux qui se trouvent interposés entre les os de la jambe et les métatarsiens , on peut en compter sept et un très- peüt qui n'existe pas constamment. Il est très- difiicile d’assigner à ces os les noms qui leur conviennent. M. Schneider considère les deux os les plus longs du tarse comme étant les analogues de l’astragale et du cal- canéum, M. Rudolphi les prend pour un ubia et un péroné ; Meckel regarde l’interne de ces deux os comme l’astragale et l’externe comme le calcanéum. M. Cuvier ( 407) ne les a point déterminés. Ces deux os sont aussi cana- liculés , mais bien distincts l’un de l’autre (voy. pl. xx, fig. 13). Clez le tétard, les os sont très-courts propor- tionnellement au fémur ; ils sont tout-à-fait distincts l’un de l’autre et ne s’ossifient que très-tard. À Ja partie supérieure et postérieure de ces deux os, se trouve un petit os ( rarement deux ) qui a été indiqué par Breyer comme une rotule ; mais, comme l’a fait re- marquer M. Cuvier, il suflit d'examiner que ces osselets sont situés à la partie postérieure de l'articulation tibio- tarsienne pour ne pas admettre une telle assertion. J'ai figuré pl. xxir, n° 8, cet os tarsien. En avant des deux os longs du tarse, il s’en trouve quatre autres, dont un plus volumineux soutient les trois mélatarsiens du milieu; les trois autres soutien- nent le cinquième et un peu le quatrième ; tandis que le premier métatarsien touche à l'extrémité inférieure de l'os tarsien externe ( voy. pl. xx1r ). Il existe quelquefois un très-pelit os caché enire l'articulation du premier métatarsien et le second. J’ai figuré tous ces os à part (voy. n° 9 à 13). Tous ces os sont aussi très-difficiles à reconnaître chez le tétard , à cause de leur extrème mollesse. Les os du métatarse vont en grandissant du pouce au quatrième ; le cinquième redevient un peu plus court. La même disposition se remarque pour les premières phalanges. Le pouce et le premier doigt ont chacun deux phalanges ; le deuxième eu a trois, le quatrième quaire, et le cinquième trois. Tous ces os du pied sont aussi creux en grande partie. On remarque un peu de substance spongieuse sur l'extrémité supérieure des première et ( 408 ) deuxième phalanges. La troisième et la quatrième du quatrième doigt, ainsi que les dernières des autres, sont entièrement formées à l'extérieur dé substance spongieuse. Il n’y a donc que ces osselets et les os plats qui soient pourvus de la substance réticulaire que l’on remarque ordinairement dans les os, surtout pour les ex- trémités articulaires(voy. pl. xxr11,, fig. 3, 5, 7, 6, o, 1). L’extrémité inférieure , chez le tétard , se développe en même temps que le membre supérieur, quoiqu’elle ap- paraïsse bien avant ce dernier. Elle se présente aussi sous la forme d’un moïgnon informe d’où s’élèvent petit à petit les cinq mamelons qui doivent constituer les or- teils. Les muscles se dessinent successivement sans que l'on puisse dire lequel s’est développé le premier; le tarse semble évidemment formé avant le métatarse et les phalanges. L’ossification de ces os ne commence que vers le moment de la métamorphose du tétard. Du mode de développement de l'hyoïde avant la nais- sance et de la forme qu’il prend chez le tétard avant et après sa métamorphose. L’illustre auteur des Recherches sur les ossemens fos- siles a senti toute l'importance que mérite la connais- sance exacte de la composition et de la métamorphose de l’appareil hyoïdien. Il a étudié avec soin tout ce que l’on voit de cet appareil chez le tétard ; mais il avoue, et semble ainsi encourager les anatomistes, qu’à cause de ses nombreuses occupations, il n’a pas été à mème de porter plus loin l’étude anatomique et physiologique de ( 409 ) ce curieux appareil. J'ai donné des dessins de l’hyoïde que j'ai examiné avec le plus grand soin, d’après une pièce que j'ai soumise à l’Académie. Si l’on examine attentivement la région du cou, chez le tétard de la Grenouille avant sa naïssance , on peut apprécier quelles sont les pièces qui doivent entrer dans la composition de l’appareil hyoïdien. Ce n’est qu'après avoir acquis une connaissance exacte de l’hyoïde du té- tard avant cet âge, qu’on peut parvenir à distinguer les pièces qui doivent le constituer ; c’est donc en passant du connu à l'inconnu que l’on s’habitue à voir ce qu’il serait impossible d'apprécier , si du premier abord on voulait le juger. Il est bien plus difficile d’étudier l'ap- pareil hyoïdien chez le tétard de la Grenouille que chez la Salamandre ; cette difliculté tient surtout à la présence d’une membrane noire présentant l'aspect d’une sorte de duvet, et enveloppant tous les organes. J’ai représenté (pl. xxv, fig. 1) les pièces cartilagineuses telles qu'on les voit au microscope , quelques jours avant la naissance ; leur disposition est aussi à peu près celle que l’on y re- marque. On y voit sur chaque plaque une multitude de petits pores (voy. fig. 1). | Il y a dans le principe une pièce médiane bien dis- tincte (n° 1); deux plus grandes pièces (n° 2); encore deux plus larges plaques (n° 3), et enfin quatre pièces allongées (n°s 4, 5, 6 et 7). Ce qui fait en tout 13 pièces primitives , au lieu de 19 existantes chez le tétard de la Salamandre. Avant la naissance, toutes ces pièces se touchent entre elles et dessinent déjà parfaitement l’appareil hyoïdien. Si nous examinons actuellement l’hyoïde après la nais- ( 410 ) sance, nous le voyons s'étendre considérablement en largeur, surtout les cartilages n° 4, 5, 6 et 7 sur les- quels se trouvent les vaisseaux branchiaux. Il arrive très-fréquemment de voir le cartilage n° 4 envoyer un prolongement de même nature , qui va joindre l’arceau cartilagimeux n° 5, et ce dernier envoyer à son tour un autre prolongement qui va se confondre avec le cartilage n°6. J'ai indiqué cette espèce d’anastomose cartilagineuse, d’abord parce qu’on les trouve le plus souvent , et qu'en- suite il pourrait bien se faire que si on ne les trouve pas toujours , c’est parce qu'on est exposé à les détruire en faisant la préparation de l’hyoïde. La figure 2 montre la forme exacte de l’hyoïde vu par la face inférieure ou extérieure, si l’on considère l’animal couché sur le dos. Si l’on examine le mème hyoïde par la face supérieure, on voit quelque chose de plus que dans la figure précé- dente. Chaque arceau (n° 4, 5, 6 et 7) se recourbe, pour ainsi dire , en s’adossant à la plaque n° 3 (voy. fig. 3 ), et envoie un prolongement (pp). De ces quatre pro- longemens cartilagineux , un seul de chaque côté (P”" P”) est destiné à rester. Les autres doivent disparaître, comme nous le verrons plus tard. Les arceaux cartilagi- neux 4 et 7 semblent s'identifier avec les masses n° 3, surtout celui du n° 4. Les deux pièces supérieures n° 2 présentent un volume considérable. On voit (fig. 3) les deux facettes qui appuient sur l’angle de la mâchoire. Le corps central n° 1 semble superposé aux deux plaques cartilagineuses (n° 3, fig. 2); mais il ne tarde pas à se confondre entièrement avec les parties sous -jacentes, de manière à former plus tard un tout homogène. Lorsque les branchies sont en pleine activité , on remarque sur (Air) les bords internes des 4° et 7° arceaux et sur les deux bords (n° 5 et 6) de petites inégalités qui simulent les pointes cartilagineuses existantes sur les arceaux cor- respondans chez le tétard de la Salamandre. Dans cet état de choses , l'appareil hyoïdien est dans son maxi- mum de composition , et il doit rester tel jusqu’au mo- ment de la métamorphose du tétard. Cependant il subit de légères modifications qui consistent surtout dans la disparition des sutures. Avant d'indiquer le mode de transformation de l’hyoïde, je vais faire connaître son mécanisme et ses usages chez le tétard avant la métamorphose. J’ai dit, en parlant des fonctions de l’appareïil hyoïdien du tétard de la Salamandre, que les arceaux cartilagineux servent surtout à ouvrir et à fermer à volonté les fentes bran- chiales, et que des muscles transitoires existent pour exécuter cetie fonction. Nous avons dit aussi que la pré- sence et la disposition alterne des petites dents cartila- gineuses implantées sur les arceaux branchiaux étaient une condition nécessaire à l’occlusion parfaite des fentes branchiales , et qu’en outre chaque cartilage branchial soutient une plaque membraneuse qui peut concourir au même but. Tout cela n'existe pas dans l’appareïl hyoï- dien du tétard de la Grenouille ; il n’y a aucun muscle transitoire propre à mouvoir les arceaux cartilagineux. Il y a cependant deux muscles qui semblent destinés à rapprocher ces cartilages et à tendre ainsi à fermer les fentes branchiales : ces muscles seront indiqués plus tard. Quant aux pointes cartilagineuses , j'ai déjà dit qu’elles ne sont, pour ainsi dire, qu'ébauchées chez le tétard de la Grenouille. {n’y a point du tout de lamelles (412) insérées sur les cartilages branchiaux. Cette différence de structure entre les deux appareils hyoïdiens du tétard de la Salamandre et de la Grenouille pourrait faire croire, au premier abord, que leur fonction n’est point la même , puisque les arceaux cartilagineux du tétard de la Grenouille n’ont pas tout ce qu’il faut pour qu’en se rapprochant ils puissent oblitérer complètement les fentes branchiales. Cette différence, quoique réelle, n'infirme point du tout l'opinion que j'ai émise sur l’uti- lité des cartilages branchiaux ; car, s’il est vrai que la disposition des arceaux cartilagineux ne suflit point pour fermer parfaitement les fentes branchiales chez le té- tard de la Grenouille, il y a aussi, comme on le sait, d’autres obstacles qui peuvent concourir à les oblitérer complètement. Ainsi, par exemple, les houppes bran- chiales qui sont fixées sur les cartilages , er s'appliquant sur les fentes, peuvent les boucher en grande partie; mais c'est surtout l’enveloppe cutanée recouvrant tout l'appareil branchial qui concourt puissamment à l’occlu- sion des fentes branchiales. On sait qu’il y a une grande différence, sous le rapport des ouvertures extérieures propres à faciliter la sortie de l’eau qui en pénétrant par la bouche traverse les fentes branchiales et sort par des ouvertures externes. Ces ouvertures présentent des diffé- rences considérables, si on compare celles du tétard des Salamandres avec celles du tétard de la Grenouille. Chez les premiers ce sont deux larges fentes situées sur chaque côté de la tête et en avant du cou ; chez les seconds, au con- taire, il n’y a plus qu'un petit trou situé, tantôt sur le côté gauche de l'animal , tantôt sur la ligne médiane en avant du sternum, selon les espèces. Cette grande difié- (415) rence devait entraîner des modifications sous le rapport des muscles, puisque, dans un cas, il y a plus à faire pour empêcher toute communication de l’intérieur de la bouche avec les fentes branchiales, tandis que dans l’autre cette communication est bien moins étendue. Envisegés sous le point de vue de l'utilité, les cartilages branchiaux sont d’une structure plus complète chez le tétard de la Salamandre que chez le tétard,de la Gre- nouille. Il est vrai aussi de dire que les arceaux cartila- gineux , chez le tétard de la Grenouille, ont parmi les autres attributions , celle de soutenir les houppes bran- chiales qui lui sont immédiatement appliquées ; tandis que, chez le tétard âe la Salamandre , les arceaux carti- lagineux ne soutiennent que les vaisseaux branchiaux et non les filets constituant les analogues des houppes branchiales qui se trouvent ici placées en dehors et sur le côté de la tête. Cette singulière différence sert à prou- ver que le véritable usage des arceaux cartilagineux n’est point de soutenir les houppes branctiales. En procédant ainsi par voie d'exclusion , nous sommes naturellement conduit à admettre que, dans tous les cas , les arceaux branchiaux sont destinés à soutenir les vaisseaux du même nom et surtout à établir une communication libre propre à faciliter l'entrée et la sortie de l’eau à travers les fentes branchiales ; fentes qu'un mécanisme plus ou moins compliqué peut modifier en resserrant ou en écartant les arceaux branchiaux. C'est ainsi que la na- ture aurait reproduit , chez les reptiles dont nous nous occupons, un appareil analogue à celui des poissons, surtout sous le rapport de la fonction. Ce rapproche- ment devient encore plus évident si l’on compare, ( #14) comme l’a fait le célèbre M. Cuvier, les pièces qui en- trent dans la composition de l’hyoïde du tétard et si l’on a égard au mode de distribution des vaisseaux bran- chiaux qui , surtout chez les très-jeunes tétards , répètent parfaitement la circulation branchiale des poissons. Tout ce que je viens de dire s’applique à la disposition et aux fonctions d’une partie de l’hyoïde, surtout à celle qui n’est que transitoire. Je vais actuellement parler des autres pièces cartilagineuses qui, quoique destinées à être modifiées , serviront à former l’hyoïde de la Gre- nouille. Nous avons vu qu’en outre des arceaux cartila- gimeux , il y a deux larges plaques (n° 3, pl. xxv) qui servent à les soutenir; ces dernières pièces cartilagi- neuses tendent seulement à se confondre de plus en plus avec le cartilage central (n° 1) : les pièces cartilagineuses (n°2 ) sont assez importantes à considérer; leur volume est tellement remarquable, si on le compare à celui qu'ils auront chez la Grenouille , qu’il est impossible de ne pas admettre une différence de fonction dans les deux cas. Chez le tétard , la forme de ces pièces est difficile à déterminer ; leurs exirémités internes, celles qui tou- chent à la pièce médiane , sont en forme de croissant ; lesquels sont supportés par un rétrécissement ou col que détermine surtout une saillie cartilagineuse du bord supérieur. L’extrémité externe de chacune de ces pièces se termine par un bord arrondi , assez large et présen- tant une facette articulaire (voy. pl. xxv, fig. 3) qui indique le point sur lequel le cartilage de la mâchoire inférieure s'appuie. Sur la face antérieure de ce cartilage, et tout-à-fait sur le bord externe, s'implante un petit muscle très-fort ( 7°, pl. xxvir, fig. 2) qui de son autre ( 415) extrémité va s'implanter sur le pourtour inférieur de l'orbite. Si l’on examine d’une part la direction , le point d'attache et le volume de ce muscle, et de l’autre la dis- position et le rapport de chaque pièce cartilagineuse, on se rendra facilement compte de l'utilité qui doit en ré- sulter. En effet, le cartilage (n° 2, pl. xxv) prend son point d'appui sur la première pièce de la mâchoire infé- rieure. Ce point est un peu dépassé par la tige cartilagi- neuse elle-même, et c’est sur l'extrémité de cette tige que s'implante le muscle qui va s’insérer au bord infé- rieur de l’orbite, et qui doit la mouvoir comme un le- vier du premier genre. La conséquence est le soulève- ment antérieur de la pièce cartilagineuse (n° 1), et par cela même le soulèvement antérieur de tout l’hyoïde. Ce mouvement doit nécessairement écarter les arceaux car- tilagineux et agrandir les fentes branchiales. Un autre muscle très-prononcé chez le tétard s’insère aussi sur la même extrémité de chaque cartilage n° 2 (voy. pl. xxvrr, fig. 2,1); ce qui fait qu'il est placé transversalement en avant du corps de l'hyoïde et au-dessus du cœur. Celui-ci semble l’antagoniste des deux muscles que j'ai décrits ci-dessus : il rapproche les deux extrémités des pièces (n° 1), ce qui ramène tout le corps de l'hyoïde dans la cavité buccale et rapproche les arceaux cartilagineux l’un de l’autre , en leur faisant décrire une courbe plus grande. De ces trois museles que je viens de décrire, les deux premiers sont transitoires, le troisième ne l’est pas tout-à-fait. De très-volumineux qu'il était dans le prin- cipe , il devient de plus en plus peti:, s’élargit et se con- tinue plus tard avec les fibres du muscle mylo-hyoïdien. Beaucoup d’autres muscles s’insèrent sur l’hyoïde ; (416) mais comme les insertions ont lieu sur des pièces qui ne font que varier et qui doivent persister, je décrirai chez la Grenouille tous ces muscles de la région hyoï- dienne. Métamorphose de l'hyoïde. A une époque où les changemens survenus dans la circulation du tétard sont tels que la plus grande quantité du sang n’est plus dirigée du côté des vaisseaux branchiaux, par suite des changemens remarquables survenus dans le calibre des autres branches vasculaires, ‘il arrive que les houppes branchiales s’'atrophient; que les vaisseaux principaux eux-mêmes situés sur chaque arceau cartilagineux s’oblitèrent et que d’autres organes prennent plus de volume. Cette époque de la vie du rep- tile est très-remarquable et très-variable, puisqu'elle est soumise aux conditions physiologiques de la circulation ; conditions qui peuvent être modifiées par plusieurs causes non encore bien appréciées. Tout le monde sait que les tétards de Grenouilles mettent un temps bien plus con- sidérable à leur transformation lorsqu'on les tient cap- tifs. J'ai vu de ces tétards passer un hiver entier presque sans avoir subi de changement. On aurait dit que la saison était passée pour eux. J’ai aussi gardé chez moi plusieurs tétards de Salamandres que j'avais vu sortir de leurs œufs; au bout de quatre mois ils n’avaient pas le volume de ceux de quinze jours. Jai attribué ce retard au défaut de nourriture; mais il y a aussi, je crois, d’autres causes qui agissent sur leur développement plus ou moins rapide; je serais porté à croire que la tempé- rature surtout influe puissamment au passage rapide de (‘Fh) ’état de larve à celui d'animal parfait. Je ne pense pas que la lumière ait la moindre influence sur les tétards, comme on l’a avancé depuis quelque temps. Ainsi, à part les causes déterminant les changemens de calibre des vaisseaux , il me paraît bien certain que la métamorphose du tétard commence lorsque la circulation s’est modi- fiée; aussi voyons-nous cette époque se passer avec une grande rapidité, et coïncider surtout avec l’atrophie de l'hyoïde. On dirait que , n’ayant plus besoin du secours des branchies pour vivre, le tétard ne doit pas non plus avoir besoin d’un appareil hyoïdien semblable à celui des poissons; la fonction disparaît avec l'appareil loco- moteur, au moment où le reptile est appelé à une orga- nisation plus élevée. En examinant donc l'appareil hyoï- dien au moment de la métamorphose de la circulation , nous voyons d’abord les arceaux cartilagineux diminuer surtout en longueur ; ensuite les masses latérales (n° 2, pl. xxv) ; les prolongemens cartilagineux (P, fig. 3) dis- paraissent les premiers , excepté les deux (p'p'). À cette époque tout l’hyoïde semble affaissé et moins soutenu ; cela dépend de la disparition des cartilages (5 p p) qui servaient comme d’ares-boutans aux arceaux branchiaux. Les deux cartilages n° 2 s’amincissent tellement qu'ils semblent ne plus exister. Les trois pièces propres à for- mer l’hyoïde se sont complètement réunies. Les prolon- gemens ( p’p' ) sont rougeûtres et déjà plus durs que les autres pièces hyoïdieunes. C’est sur elles , comme nous verrons plus tard, que s’insèrent les muscles dilatateurs et constricteurs de la glotte. Un dernier changement s'opère dans l'appareil lhyoï- dien lorsque les arceaux branchiaux sont entièrement XXIV: 27 (418 ) 1ésorbés (voy. pl. xxv, fig. 5). Il ne reste alors que deux prolongemens (n° 4) qui ne sont autre chose que ie restant des arceaux branchiaux (n° 4, fig. 4). Ces espèces d’appendices restent très-long-temps à l’état cartilagineux. Enfin les deux pièces supérieures (n° 2) ont diminué en largeur. Après ces changemens opérés, il y a quelque différence entre l’hyoïde du tétard et celui de la Gre- nouille : c’est surtout le cartilage (n° 2) qui en fait encore toute la modification. Celui-ci s’amincit de plus en plus, se détache d’une partie du croissant, laisse ainsi une échancrure inférieure, et la pointe supérieure de ce même croissant s’isole davantage. De ces derniers chan- gemens résulte la forme définitive que prend l'hyoïde chez les Grenouilles (voy. pl. xxv , fig. 6 ): Les deux extrémités (p' p’) sont ossifiées el ont pris une autre forme (voyez tous ces degrés de changemens, fig. 3, 4, 5etG). Description des os qui entrent dans la composition du larynx, avant et après la naissance, et chez la Grenouille adulte. ‘étude de l’appareïl laryngien doit suivre immédiate- ment celle de l'appareil hyoïdien , à cause des connexions qui existent entre eux, non sous le rapport des fonc- tions, mais bien parce que des muscles du larynx s’im- plantent d’une part sur deux prolongemens osseux de l'hyoïde. © Le larynx, étudié dans son ensemble, est formé chez la Grenouille de deux pièces symétriques, bombées et cloisonnées par une membrane presque musculaire et À l | (L ( 419 ) par une espèce de cercle ou couronne, surmontée de plusieurs pointes semi-cartilagineuses , qui embrassent de toute part les deux bases des os symétriques dont j'ai parlé ci-dessus (voy. pl. xxvr). Chez le tétard avant la la naissance , on aperçoit quatre pièces distinctes pour la formation des deux pièces principales : voyez (fig. 6) les deux cartilages n° 1 et les deux plus petits n° 2. Ces derniers ne se réunissent jamais intimement aux autres plaques principales n° r. Après la naissance, les deux pièces principales n° 1 ont pris une configura- tion tout autre et se rapprochent déjà beaucoup de celle que présente la même pièce chez la Grenouille ( voyez fig. 4 et 5). Le cartilage qui doit entourer les deux pièces n° x est formé de deux parties bien séparées avant la naïssance (voy. fig. 7). Ce n’est qu'au moment de la naïssance que les deux arcs qui le composaient se réunissent pour com- pléter le cercle (voy. fig. 8). À cette époque de dévelop- pement on voit déjà des saillies se prononcer sur la cir- conférence du cercle : elles sont destinées à reproduiré ce que l’on voit (fig. 3, n° 1, 2, 3 et 4). Tous ces prolonge- mevs cartilagineux n’ont pour usage que de contenir les larges pièces qui forment, par leur rapprochement , l’ou- verture de la glotte. Ils se développent lentement et ne soat ce qu'ils doivent être qu'après la métamorphose du tétard. Chez la Grenouille, chacune des pièces latérales qui constituent la glotte se trouve cloïsonnée par leur membrane ( m , fig. 4) qui divise la cavité laryngienne én deux parties presque égales, unie supérieure et l’autre inférieure. Cette membrane peut s'appliquer sur cellé du côté opposé , où s’en rapprocher, et déterminer une ou- ( 420 ) verture plus ou moins grande pour le passage de l'air. C’est sans doute à la présence et à la disposition de cette cloison double située dans la cavité laryngienne qu'est due la production de la voix chez les Grenouilles. La figure 5 représente la même pièce (n° 4) vue du côté externe. Sur les deux figures on voit la petite pièce n° 2 logée dans une grande échancrure du principal cartilage glottique n° 1. Les fig. 1 et 2 montrent la disposition et l’ensemble du larynx. On voit que les deux pièces glottiques n° r, en se rapprochant l’une de l’autre , constituent une espèce de cône ( cc, fig. 1 et 2) au sommet duquel se trouve l'ouverture glottique. Les fig. 1 et 2 représentent le même larynx vu des deux côtés , pour bien faire voir quels sont les rapports des prolongemens cartilagineux du cercle (fig. 3) avec les pièces glottiques n° 1. Après avoir in- diqué le mode de développement du larynx, et après avoir suivi tous les changemens qu'il présente depuis le mo- ment de sa formation , jusqu’à l'époque où il ne doit plus changer, je vais indiquer tous les muscles qui servent à mouvoir cet appareil laryngé, plus tous ceux de la région hyoïdienne qui s’insèrent sur l’os hyoïde. Description des muscles de la région hyoïdienne chez la Grenouille verte. Je commencerai à examiner les muscles de cette région par ceux qui servent à mouvoir les pièces qui entrent dans la composition du larynx. Ces muscles sont au nombre de quatre : deux propres à dilater la glotte, et deux des- tinés à fermer cette ouverture. Les premiers méritent le nom de dilatateurs de la glotte, et les seconds peuvent prendre le nom de muscles constricteurs de’ la glotte. (421) Les deux premiers s’insèrent, d’une part, sur le bord supérieur de chaque pièce que j'ai nommée glottique, ct de l’autre vont s'implanter sur les deux prolongernens de l’hyoïde (d’ d', fig. 3°). Ces deux muscles en se contrac- tant portent de dedans et en dehors les pièces glottiques , et les écartent aussi l’une de l’autre, d’où résulte la dila- tation de la glotte. La disposition de ces muscles est très- importante à connaître, car elle nous montre que les points d'insertion qu’ils prennent sur les prolongemens (p p) de l'hyoïde sont indispensables ; d’où il faut conclure que les mêmes prolongemens de l’hyoïde appartiennent autant à cet os lui-même qu’au larynx. Aussi avons-nous dit en parlant de la formation de l’hyoïde que ces deux prolon- gemens cartilagiveux (p' p', pl. xxv, fig. 5 et 6), quoique séparés dans le principe des pièces propres à former l'hyoïde plus tard , s’accolaient fortement à elles pour persister en s’ossifiant de plus en plus. Leur existence, comme on le voit, était nécessaire dès les premiers temps de la naissance , puisque des muscles si importans de- vaient s’y insérer. Je dois faire remarquer que des quatre muscles dilatateurs de la glotte ( voy. pl. xxvi, fig. 3”, dd et d'd'), les deux (d et d), qui sont les plus petits, s'insèrent sur le bord supérieur de la fente laryngée, mais que les fibres du muscle d’un des côtés se confon- dent avec celles du muscle opposé, ce qui pourrait faire croire, au premier abord, que ces muscles ne doivent point pouvoir dilater la glotte ; cependant, si l’on a égard au point d'attache inférieur , il est facile de voir que, par leur contraction , ils doivent tendre à ouvrir la | glotte. Des deux muscles constricteurs , l’un (c) s’insère , par , »P ( 422) ses deux extrémités, sur l'angle que forme les deux prolongemens osseux ( pp ) de l'hyoïde. En passant en avant des pièces glottiques , ce muscle s’y applique forte- meut et yest maintenu par l'implantation de quelques- unes de ces fibres; il circonscrit de cette manière les deux pièces glottiques, et lorsqu'il se contracte, il doit nécessairement rapprocher les deux pièces, ce qui ferme la glotte. Le second muscle contricteur (c') fait tout le tour des pièces glottiques et tient à ces pièces par l’im- plantation de quelques fibres ; son action et ses usages ne peuvent être contestés : il fait la fonction d’un véritable sphincter. Les muscles que je viens de décrire existent, mais à un degré de perfection plus ou moïns grand, suivant que l’on examine le tétard avant ou après la naissance. Ainsi ils ne commencent à devenir apparens que deux ou trois jours après Ja naissance; il est diflicile alors de bien voir tous leurs points d'attache. Cependant on peut, avec quelque attention , distinguer des fibres qui se dirigent sur les prolongemens (p’)de l'hyoïde. Les fig. 4’ er 5’ montrent la moitié de chaque musele covstricteur sur les faces antérieures et postérieures du larynx. Il me reste à examiner les muscles qui s'insèrent sur l’hyoïide pour achever la description de tous ceux qui se touvent dans cette région. Au-dessous de la peau du cou se trouve un muscle très-mince , qui remplit tout l’espace intermaxillaire. Ce muscle est le mylo-hyoïdien (a) que j'ai figuré pl. xxvr, fig. 1”, divisésurla ligne médianeetrenversésurlesbranches du maxillaire inférieur. Il se développe très-tard et n’est ( 428 ) apparent que peu de temps avant Ja métamorphose com- plète du tétard. Au-dessous de ce muscle mylo-hyoïdien se trouve immédiatement placé le génio-hyoïdien (B); il a trois faisceaux dont deux internes se réunissent et vont s'implanter sur les deux prolongemens osseux de l’hyoïde, en se perdant dans les fibres de l’hyo-glosse (G). Le fais- ceau externe (B, fig. 2°) s'implante sur le prolongement cartilagineux de l'hyoïde. Ce muscle sert à porter en haut l'hyoïde lorsque le point d'appui se prend sur la mà- choire inférieure et à abaisser celle-ci lorsque l’hyoïde fixé par les muscles de la région inférieure devient le point d'appui. ! existe une grande différence entre le volume de ce muscle avant ou après la naissance. Chez le tétard ce muscle est extrémement petit; il semble aller sur le bec, mais il passe au-dessous et va s’insérer sur les deux pièces médianes du maxillaire inférieur. Son action doit ètre proportionnée à son volume et son usagé au peu d'utilité qu'il semble avoir chez le tétard : il paraît se développer pour n’agir que lorsque la mâchoire infé- rieure elle-même entrera en action. Sur les côtés de lPhyoïde et sur son bord externe qui présente une grande échancrure, s’insère le mnsele (c’, fig. 1° 3°); l'autre point d’attache de celui-ci se fait sur la pièce temporale , il peut être nommé temporo-hyoïdien. Leur usage est de maintenir l’hyoïde rapproché du corps. Les muscles £ D sont deux portions d’un même fais- ceau musculaire qui s'insère sur la masse temporale d’une part, puis se bifurque en arrivant vers l’hyoïde. Le faisceau supérieur (1) s'implante sur l’extrémité supérieure du prolongement osseux de l’hyoïde; l’autre sur son extrémité inférieure. Ces deux portions du même ( 424) muscle semblent les antagonistes des muscles dilatateurs du larynx, Ils s’implantent sur les mêmes prolongemens (p’ p') de l’hyoïde et servent à les écarter, tandis que les muscles du larynx tendent à les rapprocher. Cette action semble surtout nécessaire lorsque l’hyoïde et ces deux pro- longemens, que je nommerai laryngés, ne sont pas encore ossifiés chez la Grenouille ; donc ils doivent plutôt con- courir à maintenir l'extrémité inférieure de l’hyoïde et par conséquent le larynx rapproché du corps. Chez le tétard les houppes branchiales se trouvent placées entre ces deux portions de muscle (D et E), et lorsque ces muscles agissent , ils doivent, comme nous l’avons déjà dit, tendre à rapprocher les arceaux cartilagineux. Il me reste à examiner deux muscles (F et G): le premier s'implante sur le corps de l’hyoïde (voy. fig. 2”, F)et de là va gagner les fibres du muscle abdominal profond , où il se perd après avoir envoyé quelques fi- bres sur la face interne du sternum. Ce muscle, analogue à Ja fois au sterno-pubien et au sterno-hyoïdien de l’homme etdes mammifères, que l’on peut nommer pubio- hyoïdien, sert à fixer l’hyoïde , lorsque les muscles génio-hyoïdiens agissent pour abaisser la mâchoire infé- rieure ; ils peuvent aussi porter l’hyoïde de haut en bas. Chez le tétard ce muscle n’est point du tout apparent, il ne le devient que quelques jours après la naïssance et lorsque les muscles abdominaux eux-mêmes commencent à se former. Enfin les muscles hyo-glosses (G , fig. 1” et 2°) s’insè- rent sur les prolongemens laryngés de l’hyoïde et vont constituer la langue. Chez le tétard ces muscles sont tout-à-fait blancs et comme muqueux ; ils sont très- (425 ) développés chez la Grenouille et servent à porter la langue au dehors de la bouche. Ici se termine tout ce que j'avais à dire des muscles de la région hyoïdienne. On voit qu’ils existent pour la plupart chez le tétard, quoique peu apparens, et qu'ils sont destinés en partie à faciliter l’occlusion des fentes branchiales. Développement du tétard. — Formation des muscles qui doivent étre permanens , et disparition de ceux qui ne sont que transitoires. Dans la première formation du tétard , il n’y a d’au- tres muscles que ceux qui doivent mouvoir une longue échine au-dessus de laquelle se trouve placée la tête. Ces muscles enveloppent le canal vertébral, et de ce point jusqu’à l'extrémité caudale , une tige creuse de na- ture presque cartilagineuse, qui règne tout le long de la région antérieure de la colonne vertébrale, s'étend jusqu’à l'extrémité inférieure de la queue. Les muscles qui recouvrent toutes ces parties sont très-courts. Des vais- seaux coupent leurs fibres dans des points très-rappro- chés, surtout pour la queue où il y a un grand nombre de veines qui constituent, par le rapprochement anasto- motique de leurs branches, des angles aigus placés les uns dans les autres et à une distance d'environ une ligne. Chaque espace compris entre un angle vasculaire et l’autre constitue un muscle à part, et il est inexact de dire que des muscles longs fout mouvoir la queue ; ils sont au contraire très-courts et aussi nombreux qu'il y a d'espaces limités par les vaisseaux (voy. pl. xxvir, fig. 2). ( 426 ) On remarque, en outre des vaisseaux interposés dans chaque muscle de la queue, un filet blanchätre qui ac- compagne le vaisseau. Je n’ai pu m'assurer si c'était des nerfs, mais j'ai vu bien distinctement qu'ils se portent tous sur la tige cartilagineuse de la queue. À une époque plus avancée, les viscères du tétard placés er avant de cette longue échine garnie de muscles se trouvent enve- loppés de toute part d’une membrane très-mince qui tient légèrement aux musclesquireconvrent les vertèbres. C’est dans un tel degré de formation que le tétard se présente peu avant sa naissance. Aussitôt après la sortie de l'œuf, il offre le même état de développement quant aux muscles. J'ai figuré (pl. xxvir, fig. 1 ) un tétard de quelques jours ; on voit à travers l'enveloppe mince qui renferme tous les viscères abdominaux le paquet intes- tinal placé au milieu de ja cavité abdominale ; au-dessus se voit le cœur et les houppes branchiales. Jai remarqué que le paquet intestinal est placé chez le plus jeune té- tard sur le côté droit, et chez les plus âgés (voy. fig. 2) sur le côté gauche. J’ai attribué ce déplacement à l’aug- mentation de volume que prennent le foie et la vési- cule biliaire. Chez les tétards de 10 à 15 jours on peut facilement enlever tous les viscères abdominaux qui sont comme isolés du reste de l'animal, et renfermés dans une espèce d’enveloppe séreuse. Les branchies de tout l’appareil hyoïdien semblent faire partie du corps et ont des connexions intimes avec la tête. Au-dessous de cette enveloppe extéricure , qui contient les organes abdomi- naux , se forme petit à petit une toile noire qui, comme je l'ai dit, offre l'aspect d’un duvet : on dirait que cette substance est le produit d’une sécrétion qui se condense ( 427) par degrés et à mesure que le tétardavauce en âge. Elle devient si abondante quelques jours après la naissance, qu'il est impossible de voir ce qui se passe dans l’abdo- men , la transparence de la première enveloppe se trou- vant troublée par suite de ce duvet noir qui s'applique sur la face interne. C’est dans cette substance noire que se développent les muscles abdominaux et les membres du tétard. Ces derniers se développent insensiblement, et leurs muscles adhèrent à l'enveloppe noire, ceux de l'épaule se rapprochent de l'axe vertébral , leur aponé- vrose se développe aux dépens de l’envelcppe externe, et les fixe ainsi sur le dos de l'animal. Pour ce qui regarde les muscles des membres infé- rieurs , il paraît y avoir plus de complication ; cependant si l’on sépare tout le bassin du restant du corps, on a l'animal à l’état primitif, c’est-à-dire pourvu simple- ment d’une jongue tige garnie de muscles et des viscères abdominaux renfermés dans uneenveloppe générale. C’est donc en ajoutant le bassin, sur lequel s'implante la plupart des muscles des membres inférieurs, que l’on complète l’organisation du tétard: or, voici comment se fait cette adjonction. Les os des îles se rapprochent l’un de l’autre; les deux extrémités supérieures en contact avec les muscles de l’échine finissent par s’accoler aux apophyses transverses de la dernière vertèbre; les muscles eux- mêmes de l’échine s’y insèrent; le sacrum, qui s’est dé- veloppé aux dépens du cartilage caudal, conserve les muscles qui s’y attachaient, et comme il s’étend jus- qu'à la partie inférieure du bassin, il sert de point d’at- tache aux deux muscles qui des fémurs vont s’insérer sur son extrémité inférieure. Lorsque les membres du ( 428 ) tétard se sont ainsi ajoutés au corps de l'animal , celui-ci est déjà tout autrement conformé. Il se sert de ses deux pattes postérieures pour nager; sa queue semble dès lors superflue, et, à partir de ce moment, elle eom- mence à s’atrophier ; nous verrons bientôt comment. Je dois encore parler d’autres muscles bien plus importans que ceux que je viens d'indiquer : ce sont les muscles transitoires destinés à mouvoir le bec du tétard. [ls sont au nombre de dix, cinq de chaque côté (voy. fig. 3, pl. xxvir,n*1,92,3,4et5). Les trois premiers s’atta- chent au pourtour supérieur du bec cartilagineux , et de là vont s’insérer sur les parois externes et postérieures de l'orbite. Leur action est évidemment de porter en haut et en avant la lèvre supérieure du cartilage buccal et par conséquent de l’écarter de la lèvre inférieure. Les deux muscles 4 et 5 s’implantent, d’une part, sur la lèvre infé- rieure du bec cartilagineux , et, de l’autre, sur la mà- choire inférieure formée de trois pièces et non encore en état d'agir : ces muscles serventà abaisser lalèvre inférieure du cartilage buccal et à l’écarter de celui de la lèvre su- périeure. L'action deces dix muscles , en agissant alter- nativement et dans l’ordre que j'ai indiqué, déterminent les mouvemens si fréquens que présente le bec du tétard toujours occupé à ouvrir et à fermer l’ouverture buccale pour favoriser l'entrée de l’eau dans la bouche, qui du reste peut aussi s'effectuer par les narines. Le bec du té- tard sert à la préhension des alimens , et agit comme une véritable bouche de poisson. J'ai dessiné (fig. 4) les pièces qui entrent dans la formation du bec du tétard, et j'ai représenté l'ouverture béante. La figure 5 repré- sente le même bec fermé. Les petits cercles dentelés que ( 429 ) l'on remarque tout autour des pièces cartilagineuses sont des extrémités des fibres musculaires endurcies. Causes de la disparition des muscles transitoires du tetard. De même qu’un organe ne peut exister ni se déve- lopper sans la forme primitive des vaisseaux sanguins, de même aussi un organe qui vient à perdre ces vaisseaux sanguins doit se détruire promptement. Il arrive donc, chez le tétard, que tous les vaisseaux de son énorme queue s’atrophient, et cela par une remarquable cir- constance. On sait que les vaisseaux qui portent le sang dans les extrémités thoraciques et pelviennes sont exces- sivement petits chez le tétard, avant l’entier développe- ment de ces organes , et que ces derniers ne prennent de l'accroissement qu'à une époque très-rapprochée de la métamorphose du tétard. Or, voici ce qui se passe du côté de la circulation. Tout le sang que pousse le cœur va, dans les premiers temps de la formation du tétard, entièrement dans les branchies, et de là ensuite dans les vaisseaux aboutissant à d’autres organes importans. Plus tard des anastomoses vasculaires qui ont pris de l’accroissement détournent une partie du sang qui allait aux branchies ; les artères pulmonaires, surtout quelques jours après la naissance, prennent un volume bien plus considérable. Le sang y afflue et quitte en partie la route qui jui était tracée dans le principe ; alors les capillaires branchiaux se ressentent déjà un peu du manque de sang et commencent à dimi- nuer. Les membres viennent à se développer, et c’est là ( 430 ) une autre cause de révulsion pour le sang : il afflue de plus en plus dans ces parties sur-ajoutées , pour ainsi dire, et se trouve forcé de ne plus se diriger avec la même force vers les branchies. Cette révulsion n’est point Ja seule, et l'artère caudale qui naît un peu au-dessus de la bifurcation des iliaques éprouve aussi des change- mens. Les artères destinées aux membres pelviens pren- vent de plus en plus du volume : tout le sang qui arrive à l'extrémité de l'aorte passe plus librement dans les artères crurales et n’afflue plus dans l’artère caudale. Alors commence loblitération des capillaires de la queue, de même qu'ont commencé ceux des filets branchiaux lorsque le sang a été détourné de ces organes par son afllue dans les artères anastomatiques et pulmo- aires. De proche en proche toute l’artère caudale s’o- blitère, d’où résulte le défaut de circulation dans les deux veines caudales , et de là la mortification de l'organe qui est entièrement résorbé. Cette résorption est bien digue de remarque , et l’on ne conçoit pas pourquoi la queue ne se détache pas plutôt an point où elle est frappée de moruification ; il est vrai que la portion de queue qui se trouve privée de vie est très-petite dans le commencement , mais il n’est pas moins vrai que pendant les derniers jours le tétard perd de sa queue plus d’une higne par jour. De cette manière s'explique le changement qui s'opère dans les organes. Il faut que les vaisseaux destinés à les nourrir subissent des modifications pour que ces organes eux-mêmes puissent se métamorphoser, et, sous ce der- nier rapport, nous voyons coïncider l’atrophie des bran- chies avec le développement des poumons et des mem- ( 431 ) bres supérieurs, et l’atrophie de la queue avec le volume disproportionné que prennent les pattes inférieures. C’est, par conséquent , de l’état transitoire de la cireula- tion que dépend toute métamorphose; aussi l'étude approfondie de cette fonction qui nous ferait connaître exactement toutes les variétés que présentent les vais- seaux avant et après la naissance , serait un travail im- portant à copnaître pour déterminer avec plus de faci- lité et de précision la métamorphose de tous les organes en général. Après que les branchies ont disparu , ainsi que la queue, le bec persisterait peut-être si la mâchoire inférieure ne venait point le remplacer. Mais comme elle a eu le temps de bien se développer, sa présence et ses mouvemens déterminent l’atrophie des muscles du bec qui se trouvent alors dans l’inaction. J'ai représenté (pl: xxvir, fig. 1”) les muscles de la région superficielle de la face postérieure de la Grenouille. La disposition de ces muscles indique bien mieux que ne le ferait une description tous les changemens qui peuvent et doivent s'effectuer chez le tétard. EXPLICATION DES PLANCHES. PI. xvin:, représentant les os du crâne de la Salamandre crètée. C, C. Les frontaux. C', C’. Les pariétaux. G, G+. Les nasaux. 4, H. Les frontaux antérieurs. KX. Les maxillaires supérieurs. k. Même os chez le tétard. F, L’intermaxillaire, f. Le même os divisé sur la ligne médiane chez le tétard. (432) B. Os composé de trois pièces : l'occipital latéral , l’occipital supé- rieur et le rocher. b, b'et Bb", Les mêmes pièces séparées chez le tétard. I. Les ptérygoïdiens. m. Les mêmes os chez le tétard. O. Le jugal. IV. Le tympauique. D. Le sphénoïde. d. Le même os divisé chez le très-jeune tétard. L. Les vomers. £, '. Les mêmes os divisés chez le tétard. ©. Aile orbitaire du sphénoïde. P. Maxillaire inférieur. - p, p’. Les pièces composant, chez letétard, les maxillaires inférieurs. Fig. 1 et 2’. Os du carpe et leurs rapports. Fig. 3/ et 4’. Os du tarse et leurs rapports. PI. xx. Fig. 1”. Pièces cartilagineuses devant constituer l’hyoide. Fig. 2’. L'hyoïde du tétaid. Fig. 3’. Le même os sur le point de se métamorphoser. Fig. 4. L’hyoïde presque entièrement métamorphose. Fig. 5. L’hyoïde de la Salamandre crêtée. Fig. 1, 2, 3 et 4. Appareils hyoïdiens avec leurs muscles lransitoires. d, d' et d'. Muscles dilatateurs des branchies. e, ec, c'. Muscles constricteurs des branchies, Fig. 5,6 et 7. Dispositions des lamelles qni recouvrent les fentes bran- ! chiales. PI. xx. Fig. 1’. L'ensemble de l’hyoïde dix fois de grandeur naturelle. Fig. 1 et 2. Le même hyoïde divisé en deux parties. PI. xxr. Fig. 1 et 2, représentant les muscles superficiels antérieurs et les pos- térienrs. Fig. 1° et 2°. Muscles qui s’insèrent à l’hyoïde. O. L’omoplate hyoïdien. PI. Ce muscle n’a point reçu de nom, il en remplace plusieurs. d. Le stylo-hyoïdien. (433 ) PI. xxrr. Fig. r. Squelette de la Grenouille verte de grandeur naturelle, Fig. 2. Rapports des os de l’épaule entre eux et avec les rudimens du sternum. No 1 à 9. Os du carpe. No 8. Os innominé. No 9 à 13. Os du tarse. PI, xxrir. Fig. 1”. Rapports des os de la tête chez la Grenouille verte. Fig. 2°. Même tête vue par sa face inférieure. Fig. 3/ et 4. Maxillaires inférieurs de grandeur naturelle. Les fig. 1 à 15 montrent la structure des os de la Grenouille verte. Fig. 1. L’humérus. Fig. 2. Le radius et le cubitus. Fig. 3. L’os du bassin. Fig. 4. Le fémur. Fig. 5. L’omoplate. Fig. 6, 9, 11, 14 et 15. Phalanges. Fig. 7. Le coracoïdien. Fig. 8. Le tibia et le péroné soudés ensemble, Fig. ro. Le sacrum. Fig. 12. La clavicule. Fig. 13. Deux os du tarse réunis. PL, xx1v. Æ, Frontaux réunis. B. Les occipitaux latéraux. C. Les pariétaux. D. Le sphénoïde. £. Le rocher. F. Les intermaxillaires. G. Le nasal. Æ. Les frontaux antérieurs. I. Les palatins. Æ. Le maxillaire supérieur. L. Les vomers. M. Les ptérygoïdiens. IV. Les tympaniques. XXIV. 28 (484) O. Le jugal. R, 8, T. Les os qui composent la mächoire inférieure. a. Le rhinosphénal. b. Le nasal, c. Le ptapéal. d. Le malléal. e. Le tympanal. f. Le lenticulaire. PL. xxv. Fig. 1. Pièces qui entrent dans la composition de l’hyoïde et du tétard de la Grenouille verte. Fig. 2. Hyoïde du tétard dix fois de grandeur naturelle. Fig. 3. Le même hyoïde vu par la face postérieure. Fig. 4. L’hyoïde sar le point de se métamorphoser. Fig. 5. L’hyoïde du tétard métamorphosé, Fig. 6. L’hyoïde de la Grenouille verte. PI}, xxvr, Fig. 1’. Muscles de la région hyoïdienne chez la Grenouille verte, Fig. 2’. Muscles qui s’insèrent à l’hyoïde. Fig. 3’. Muscles du larynx. Fig. 4 et 5’. Muscles constricteurs de la glotte. Fig. 1 et 2. Larynx isolés. Fig, 3 à 8. Pièces qui entrent dans la composition du larynx. PK xxvit. Fig. 1”. Muscles superficiels de la région dorsale chez la Grenouille verte, Fig. 1. Tétard de quelques jours. Fig. 2. Rapport des organes du tétard. Fig. 3. Muscles transitoires du bec du tétard. Fig. 4 et 5. Structure du bec du tétard. (435 ) Rapport versaz fait à l’Académie royale des Sciences, dans sa séance du 18 juillet 1831, sur l'Histoire des Végétaux fossiles publiée par M. Ano1pne BRONGNIART ; Par M. BEeunanrx. L’AcanémiE m'a chargé de lui rendre un compte verbal d’une Histoire des Végétaux fossiles qui lui a été présentée par M. Adolphe Brongniart. Cet ouvrage se compose aujourd'hui de cinq livraisons (1) qui présentent 3: feuillesdetexteet70 planches lithographiéesavec beau- coup de soin, où l’on trouve déjà un grand nombre de plan- tes fossiles avec des figures comparatives prises parmi les plantes analogues vivantés. Mais il est à peine au tiers de l'étendue qu’il doit avoir, et il nous a paru que ce serait donner à l’Académie une idée fort incomplète du tra- vail de l’auteur que de nous borner à parler ici de ce que renferment les cinq cahiers qui nous ont été remis. M. Brongniart a déjà donné sur ces fossiles végétaux un assez grand nombre de Mémoires détachés qui feront nécessairement partie de l'ouvrage général qu’il publie en ce moment ; ét nous avons cru satisfaire au vœu de l'Académie en jugeant l’ensemble des observations dont les sciences lui sont redevables. Depuis long-temps on a décrit des plantes fossiles , et on en a même figuré avec plus où moins de soin; mais ce n’est réellement que depuis une dixaine d'années qu'on les a étudiées sous des rapports susceptibles de conduire (x) La sixième est actuellement publiée. Les livraisons, 8, 9 et 10 paraitront dans le courant de l’année 1832. (436 ) à quelques résultats. On a examiné les analogies plus ou moins rapprochées qu’elles pouvaient avoir avec les végétaux vivans , et c’est alors qu’on a pu les diviser en groupes génériques plus ou moins naturels, y distinguer des espèces et reconnaître quelques généralités dans la manière dont ils sont distribués dans les différentes cou- ches de la terre. Cette étude rigoureuse a été entreprise en Allemagne par M. Sternberg, et en France par M. Adolphe Brongniart ; mais, hâtons-nous de le dire, les résultats les plus précis de classification sont dus au naturaliste français et ont été adoptés depuis par l’auteur allemand. On conçoit que dans les recherches relatives aux dé- bris végétaux qui sont enfouis dans les différentes cou- ches du globe , on ne peut pas procéder comme pour les végétaux vivans que l’on peut récolter dans le moment où ils possèdent tous leurs caractères. Dans les végétaux fossiles, il est rare de trouver des plantes entières , et presque toujours les parties qui ont disparu sont préci- sément celles qui sont susceptibles de fournir les carac- tères de première valeur. Il a donc fallu , pour arriver à reconnaître ces débris avec un certain degré de préci- sion , commencer par étudier sur les végétaux vivans les relations qui pouvaient exister entre les caractères de premier ordre et ceux des ordres subséquens pour pouvoir tirer de ceux-ci des inductions capables de faire remonter le plus près possible des autres. En d’autres termes , les organes de la fructification , qui fournissent lés caractères de premier ordre en botanique, ont presque toujours disparu dans les plantes fossiles , et il ne reste que des feuilles et des tiges qui en général n’ont été étu- (437) diées que très-superficiellement sur les plantes vivantes. Il a donc fallu étudier ces parties, s'attacher minutieuse- ment aux détails de leur organisation et apprécier le plus exactement possible les rapports des caractères qu'on en pouvait tirer avec ceux des organes dont on se sert ordi- nairement pour la classification. C’est ce que M, Bron- gniart a fait avec beaucoup de sagacité ; il a étudié avec soin dans chaque famille les nervures des feuilles, les différens modes d’insertion de ces organes, les impres- sions qu’ils laissent sur la plante; il a cherché quelles étaient les modifications que les diflérentes parties de la structure interne des végétaux pouvait produire à l’exté- rieur ; en un mot, 1l s’est livré à des recherches minu- tieuses sur tous les caractères des végétaux vivans dont il pouvait supposer la conservation dans ceux qui se sont trouvés enfouis dans le sein de la terre. Il a même cherché à apprécier le plus exactement possible les mo- difications que la compression et les diverses sortes de décomposition pouvaient produire sur les végétaux fos- siles , afin de ne pas s’en laisser imposer par une foule de variations que la même plante est susceptible de pré- senter. Îl a montré clairement quels sont les cas où l’on peut avec certitude prononcer sur la famille, le genre, l'espèce mème de la plante, et quels sont ceux qui peu- vent laisser des doutes d’un ordre plus ou moins élevé, où l'on ne peut se prononcer que sur le genre, sur la famille, ou même sur la classe du végétal. | C’est au moyen des précautions et des recherches préalables que nous venons de signaler que M. Adolphe Brougniart est parvenu à distinguer parmi les plantes fossiles des espèces, des genres , des familles tout-à-fait ( 438 ) anaiogues aux divisions de même ordre que l’on distingue parmi les plantes vivantes. C’est en cela que les con- naissances qu'il nous a fait acquérir sur ces débris orga- niques diffèrent essentiellement de toutes celles qu'on avait eues jusqu'alors ; car on n’était jamais parvenu qu’à quelques divisions arüficielles dont il était dès-lors im- possible de rien tirer sous les rapports philosophiques. Aujourd’hui, au contraire , les végétaux fossiles se trou- vant placés à leur ordre naturel , nous pouvons les com- parer, sous tous les rapports, aux végétaux yivans, et en tirer une foule d’inductions du plus haut intérët. En examinant attentivement les diflérens travaux auxquels M. Ad. Brongniart s’est livré sous le rapport de la clas- sification des végétaux fossiles, nous croyons qu'il a parfaitement atteint le but qu’il s'était proposé. Nous voyons déjà plus de 500 espèces de ces plantes disposées dans leur ordre naturel, comparées aux végétaux vivans, et qui nous font connaitre des différences immenses entre la Flore de l'Ancien Monde et la Flore actuelle. Mais il ne sufhsait pas de bien étudier ces restes de l’ancienne végétation, de les représenter avec exactitude et de les classer; il était utile de rechercher les lois de leur distribution dans les diverses couches terrestres, comme on établit les lois de la distribution géographique des végétaux à la surface de la terre; ik était mème .cu- rieux de comparer ces deux ordres de choses. C’est ce que M. Adolphe Brongniart a parfaitement senti, et ce qu'il a exécuté en y mettant Ja réserve gt la critique qu'exige un pareil sujet, Les résultats auxquels il est parvenu sous ce rapport, déjà très - intéressans en eux- mêmes, sont d’une. grande importance relativement à la ( 439 ) théorie de la terre, et entreront désormais dans tous les cours et dans tous les ouvrages de géologie générale. C’est par son travail botanique que nous avons su posi- tivement que les débris végétaux qu’on rencontre dans. les plus anciens dépôts de sédimens du globe, sont des plantes qui appartiennent spécialement aux familles des prèles , des fougères , les lycopodes; que ce n’est que plus haut dans la série des formations, vers le grès bigarré, qu’on commence à trouver quelques conifères ; que c’est encore plus baut qu'on trouve des cycadées , et enfin que les plantes dicotylédones ne paraissent qu’immédiate- ment après la craie. Ainsi la première végétation du globe consistait en cryptogames vasculaires auxquels se trouvait joint à peu près un quinzième de phanérogames monocotylédones ; el ces plantes étaient remarquables par une taille gigan- tesque : il y avait alors des prèles de dix pieds de hautet de cinq à six pouces de diamètre , des fougères de 4o à 50 pieds d’élévation , des lycopodiacées de 6o à 70 pieds. Lorsque les conifères commencent à paraître , les plantes cryptogames deviennent moins nombreuses ; les espèces n’en sont plus les mêmes , et n’atteignent plus à beaucoup près la mème taille. Lorsqu'on commence à trouver des débris de cycadées, les espèces de cryptoga- mes sont encore différentes , plusieurs genres ont mème complètement disparu, et lenombre de ces végétaux, qui dans la première époque surpassait de beaucoup les phanérogames monocotylédones , se trouve ici à peu près le mème que celui de ces derniers. Ainsi les cryptogames qui formaient les + de la Flore primitive , ne sont plus que la moitié de la Flore de l’époque moyenne; l’autre (ét) moitié de cette Flore était formée de cycadées et de conifères , et dans la Flore actuelle de la surface terrestre, les plantes de ces familles en forment à peine la trois- centième partie. É Lorsque les plantes dicotylédones se présentent dans les couches terrestres, leur nombre devient tout-à-coup immense , et les cryptogames qui appartiennent alors à des genres diflérens de ceux qu’on trouvait dans les Flores précédentes, disparaissent presque entièrement. Les rapports numériques des diverses familles les unes aux autres se trouvent alors à peu près les mêmes que ceux que l’on connaît aujourd’hui à la surface de la terre; et les espèces les plus nombreuses ont aussi des analo- gies plus prochaines avec les végétaux vivans. On voit, d’après cela, que la végétation terrestre a prodigieusement changé à diverses époques, et qu'elle est devenue de plus en plus composée. Aïnsi, on peut dire aujourd’hui que le long espace de temps pendant lequel tous les dépôts de sédiment se sont formés se di- vise en diverses périodes plus ou moins longues, pen- dant chacune desquelles la végétation a présenté des caractères particuliers uniformes par toute la terre, et après chacune desquelles la végétation a complètement changé par les espèces, par les genres, par les familles , par les classes même , et par les rapports numériques des espèces d’une classe à celles de Pautre , pour arriver enfin à un point à peu près comparable à ce que nous voyons aujourd’hui. Ajoutons à cela cette remarque qui n'a pas échappé à M. Adolphe Brongniart , que les couches dans lesquelles on trouve des restes de végétaux d’une même période, (441) sont séparées de celles où l’on trouve des débris d’une période différente par des dépôts privés de plantes ter- restres , et nous en conclurons avec l’auteur qu'il ÿ a eu nécessairement des époques de repos où la terre aride ne produisait aucune végétation à sa surface ; circonstance qui se trouve en rapport intime avec les différences qu'on remarque d’une période de végétation à l’autre, qui nous indique des catastrophes brusques qui ont détruit tout ce qui existait, et nous montre à chaque fois un nouvel ordre de choses en harmonie sans doute avec les circon- stances atmosphériques subséquentes,. On voit déjà combien ces considérations sont impor- tantes et combien de données elles peuvent fournir à la géologie générale lorsqu'on les joint aux observations relatives aux débris fossiles des animaux et à celles que M. Élie de Beaumont nous a fournies sur les âges relatifs des montagnes de cristallisation. M. Brongniart s’est encore occupé d’un autre genre de recherches : comparant les lois que présentent les diverses époques de végétation de l’Ancien Monde avec ce qui existe aujourd’hui à la surface de la terre, il a été conduit à diverses inductions qui ne peuvent manquer d’exciter un vif intérêt. On a déjà ren:arqué depuis long-temps que les débris végétaux qui appartiennent à la première période de végétation se rapprochaïent beaucoup plus de ceux que l'on trouve aujourd’hui à l'équateur que de ceux des zones tempérées. Ln effet, on trouve dans la zone torride des espèces de prèles , de fougères , de lycopodes beau- coup plus hautes que celles qu’on connaît vers les pôles ; plusieurs mème y sont arborescentes. Mais la taille est ( 442) encore beaucoup plus considérable, dans les végétaux fossiles de ces familles dans la première période de vé- gétation que dans ceux qui vivent aujourd'hui vers l'é- quateur ; par conséquent les causes de développement étaient encore beaucoup plus intenses alors qu’elles ne le sont actuellement. D'un autre côté , M. Brongniart a fait voir que ces cryptogames vasculaires formaient les - de la végétation primordiale, tandis qu’ils forment Le à peine -- de la végétation actuelle; il y avait donc aussi des causes particulières qui déterminaient cette prédominance. D’après ces réflexions, M. Adolphe Brongniart s’est livré à la recherche des circonstances locales qui rapprochent le plus la Flore actuelle de celle de l'Ancien Monde. Or, en rassemblant les observations qui ont été recueillies, il fait voir de nouveau que c’est entre les tropiques que ces cryptogames acquièrent Ja plus haute taille ; mais il montre, en outre, ce qu’on n'avait pas encore remarqué , que c’est en général dans les îles que leur quantité relative est la plus grande; qu'elle le devient d'autant plus que les îles sont plus petites et plus éloignées des continens , à tel point que dans plusieurs d’entre elles ces sortes de plantes sont presque en même quantité que Îles phanérogames. Il semble par conséquent que s'il n'y avait que de petites îles et point de grands continens, les cryptogames l’em- porteraient peut-être sur les phanérogames. Cette observation devient très -importante pour la théorie de la terre lorsqu'on la joint aux faits géologiques d’après lesquels il faut conclure que les continens n’ont pas toujours été tels que nous les voyons aujourd’hui, qu'ils se sont soulevés pièce à pièce, et que probable- (443) ment dans les temps les plus reculés il n’existait que des îles et des archipels au milieu d’une vaste mer. M. Brongniart continuant ses comparaisons, fait re- marquer encore que dans les périodes subséquentes la végétation se rapproche au contraire de la végétation actuelle des côtes et des grandes îles équatoriales , par la taille des plantes, par les familles auxquelles ces plantes appartiennent," par les rapports numériques entre les espèces de différentes familles ou de différentes classes. Enfin il montre que dans les périodes plus récentes, après l'apparition des plantes dicotylédones, la végétation était analogue à celle que présentent actuellement les grands continens. Je pense qu'après cet exposé, quelque rapide qu'il soit, des principaux objets traités dans les différens Mémoires de M. Adolphe Brongniart, l’Académie jugera que les travaux de ce botaniste sur les végétaux fossiles ont été dirigés avec un grand soin, dans un très-bon esprit philosophique, et que les résultats qu’ils ont four- nis sont d’un haut intérêt tant en eux - mêmes que sous le rapport de leur application à la géologie. Je reviens à l'ouvrage que l’Académie nr’a spécialement chargé d'examiner. Cet ouvrage, qui est une application des principes généraux que j'ai exposés, formera un ta- bleau complet de tous les végétaux fossiles considérés sous le rapport de leur classification et par conséquent de leur analogie avec les végétaux vivans et de leur dis- tribution dans les différentes couches du globe. Dans les cinq livraisons qui ont paru, l’auteur traite des confer- voïdes , des fucoïdes , des prêles, des mousses et de quel- ques-uns des genres de la famille des fougères. De bonnes (444) descriptions de chaque espèce, d'excellentes figures, des comparaisons minutieuses avec les végétaux vivans, Ja citation des gisemens et des localités ne laissent rien à désirer. Chaque famille est précédée de considérations générales sur les caractères des plantes vivantes qu'elle renferme, sur leur organisation anatomique, sur les divisions génériques dont elles sont susceptibles, sur leur distribution à la surface de la terre. L'auteur y compare ensuite les végétaux fossiles de même ordre et décrit les circonstances géologiques dans lesquelles ils se trouvent. Les familles des équisétacées et des fou- gères renferment surtout des détails précieux de struc- ture anatomique, qui étaient indispensables pour bien juger des rapprochemens dont les plantes fossiles étaient susceptibles, et des divisions qu’il était nécessaire d’y établir. Dans la famille des fougères , on trouve une étude approfondie des nervures des feuilles , de l’organi- sation des pétioles et des caractères des tiges, toutes con- sidérations auxquelles on ne s’était livré jusqu'alors que très-superficiellement , et qui étaient de la plus grande importance pour la détermination des nombreuses es- pèces fossiles qui appartiennent à cette famille. Tels sont les travaux de M. Adolphe Brongniart sur les végétaux fossiles , telle est la nature de l’ouvrage général qu’il publie sur cet objet. Tout nous montre que depuis dix ans l’auteur s’est placé et a su se maintenir à un rang très-élevé parmi les botanistes, qu’il a rendu comme tel des services importans à la géologie, et qu'il mérite d’une manière spéciale les encouragemens les plus signalés de l'Académie. FIN DU VINGT-QUATRIÈME VOLUME. TABLE PLANCHES RELATIVES AUX MEMOIRES CONTENUS DANS CE VOLUME: PI. 1. Helix columna et Helix alabaster. PI. 2. Helix granulosa. PI. 3. Diverses espèces d’Hélix. PI. 4. Vues de l’île qui s’est élevée en 1831 dans la mer S.-O. de la Sicile, PI. 5 et 6. Pollen et mode de fécondation de l’Orchis latifolia. PI. 7, 8 et 9. Pollen et mode de fécondation dans l’Epipactis latifolia. PL 10, 11 et 12. Structure du Pistil et mode de fécondation dans les Cistinées, PI. 13 et 14. Structure et mode d’action des organes fécondateurs dans les Asclépiadées. PL. 15, 16 et 17- Divers exemples de greffes végétales. PI. 18, 19, 20, 21, 22, 23, 24, 25, 26 et 27. Structure et changement du squelette et des muscles dans les reptiles batraciens. FIN DE LA TABLE DES PLANCHES. TABLE MÉTHODIQUE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME. > (fs —— \ ’ ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE ANIMALES , ZOOLOGIE. Pages, Description des coquilles terrestres recueillies pendant un voyage à la côte occidentale d’Afrique et au Brésil; par M. Sander Les Rang. De la distribution, par mois, des conceptions et des naissances chez l’homme ; par M. L. Villermé. 130 Extrait de l’analyse des travaux de l’Académie des Sciences pen- dant l’année 1830 ; par M. le baron Cuvier. — Anatomie et physiologie animales. 200 — Zoologie. 204 Mémoire sur la conformité organique dans l’échelle animale; par M. Dugès. (Extrait.) 254 Recherches anatomiques et physiologiques sur les organes transi- toires et la métamorphose des Batraciens ; par M, JT. G. Martin- S'aint- Arige. 366 ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALES , BOTANIQUE. Tableau de la végétation primitive dans la province de Minas Ge- raes ; par M. Auguste de Saint-Hilaire. 64 (447) Observations sur le mode de fécondation des Orchidées et des Cistinées; par M. Adolphe Brongniart. Suite des expériences sur la génération des:plantes ; par M, Ch. Girou de Buzareingues, Rapport sur un Mémoire de M. le docteur Vallot, de Dijon ; iuti- tolé : Notes sur plusieurs végétaux mentionnés par les voya- geurs qui ont parcouru l’Afrique centrale ; par M. Auguste de Saint-Hilaire. Mémoire sur le rapport des sexes dans le règne végétal ; par M. Ch. Girou de Buzareingues. Note sur les caractères de la végétation des îles Bourbon et Mau- rice. (Extrait d’une lettre de M. L. Bouton, de l’île Maurice.) Quelques observations sur la manière dont s’opère la fécondation dans les Asclépiadées ; par M. Adolphe Brongniart. Mémoire sur la greffe ou le collage physiologique des tissus orga- niques, et particulièrement sur celle du Cactus truncatus enté sur le Cactus triangularis; par P.J.F, Turpin. Extrait de l'analyse des travaux de l’Académie des Sciences ; par I. le baron Cuvier. — Physique végétale et botanique. MINÉRALOGIE ET GÉOLOGIE, CORPS ORGANISÉS FOSSILES. Extrait d’une lettre de M. Constant-Prépost, datée de Malte , le 3 octobre 1831, et adressée à l’Académie des-Sciences, sur le nouvel îlot volcanique de la mer de Sicile. Rapport de M. le baron Cuvier sur un travail de M. Deshayes, ayant pour titre : Tableaux comparatifs des coquilles vivantes avec les fossiles des terrains tertiaires de l'Europe. Note sur la position géologique du calcaire de la Brie, et en parti- culier sur celui des environs de Champigny ; par M. Dufrenoy. Note, extraite d’un Mémoire de M. Reboul, sur la structure des Pyrénées, présenté à l’Académie des Sciences le 26 septembre 1831. Pages. 113 138 280 191 103 ( 448 ) Communication d’une Emeraude gigantesque , faite à l'Académie des Sciences par le docteur Roulin. 260 Extrait de l’analyse des travaux de l’Académie des Sciences ; par M. le baron Cuvier. — Minéralogie et géologie. 184 Rapport verbal fait à l’Académie royale des Sciences, dans sa séance du 18 juillet 183r, sur l'Histoire des Végétaux fossiles publiée par M. Adolphe Brongniart; par M. Beudant. 435 FIN DE LA TABLE DES MATIÈRES» ERRATA DU TOME XXII. Mémoire de M. Miller, sur Le Structure des yeux. Page 6, ligne 3, Enfin, des aggrégats d’yeux lisses, ne renfermant ni cristallins sphériques, ni petits corps coniques défrière une cornée commune. Lisez : Enfin , des aggrégats d’yeux simples , renfermant des cristallins ronds, point de petits corps coniques derrière uue cornée communc. Page 12, ligne 19. S'upprimez très-petit. Page 23, ligne 27. Pupille , lisez papille. XXIL 31 (Yet roniter msn La s sp * » 4 2: Es A vE / : : à bris # NAT EURE ENS ue , L FU Va a je " u Ok " 4 se | } MNT 4 Ê té he art LÉ S N ? 3 (SE DE SANT Rs QUE OR TRES «1 5 N « ' Û NES à ex Baie) NS: cn = à b : À : $. Fa D XX LRO WU ti ol été ra ah = . ETAT CEE Le ( + 4 TE \ F'= = GT FA $ re at à RE A TG AN : s PATTES QuS ÿt ue euh SAUT NITTOE SAT, seit “ »\) aid nt Vas “ « fre ; E \ É x | as | 4 # ' Ë. 1 4 Fe “i * s q ; | H LE aug D SR | Mauro fie pe éseait 4x T4 ‘4 8201 ie he ne # à ne TMS DATE af QUE dx "241109 sep ur h motifs so ego APES Rare Pl Le 1} hs i 3 si pdansiéos Ur. "sb Hautes, COL TETE ua (DYAREE sou Lip JR! x us à: ME à Ne f { .re4t0's ET WE? Ju too et POS DLPHATOE LS. aid; : L j PTT U TUE COTE ÿ 4 ; ÿ pi sante Et san 4 F * | ti Er j E Er RE US FA ee guy, Eros À ‘ (: 4 ; à EU QE ’ En É À 7 ! 1 ës à ‘ , n + . 1 ÿ { ve : ss ca ; HA ca e | 4 < = ‘4 7 ; . À \. ‘ N * + 3! e 7h AU RL | ' LR ll 1 . SARrer vmimmet » Ü * + .3æ LS { $ : \ k s Le ? À ; a Vo r à ! 3 + ' x à 2 ) + Fe 0 ‘ { x 1 : 1 4 à ( Fa , 2 \ à A ; _: É | D Hi | ‘+ . \ è x : À s , + ; L È ; : » L « à x. É 4078 D77}] PS ACTOR PUUr0) XII] ZA j TAN JOUR \aRaur APR er fun .des Jvance natur. l'on. 24. } | Î L llaug. Pel Helx gerutosa Va # L. Pumentd Pirex { Dp Ann .des Jetene . natur: Lont. 24. 2, LC) 2 Helix w/rcoloo; 2 fasiformes ; S monrovi , 4 malagrettarra 2 légale; 6 parvule ; 7 striatella ; & hanienusts 3, C4 : LE > [4 Len 7 d Ve pes nya 4 * dnopynoyy 7 NT . e pere É fre ï PA as Sa AE RES TO Jul $ eee PATES vr RAC Eee ra ETATS TER DER er nr an nu PONTS D EE He Na LA AMD LADAAMIAIIL AGIT Ge me: US mn. des Seine. natur. Tom. | 41. Frong. Del. PL Pumeml Lirezr { À. Pollen de V'Ovchis bifolia B. /2/er de VOrchis latifolia. À 240 4 4, = / { Am. des Seine. natur. 10m. 24. L.Dumernt Lirezt J Lymate de V'Orchis latifoha . ON NE NN PT PT EPP 6, dbA id 4 An. des J'rienc. natur. Tom, 24. TURF, 4 == ==, = Re S RSS =—= == = =—=—=— = =—= = ——— SE ==Z —— ==; === = —_—— EE . == = = ==—— == —— = == — IA 1 = == = ==] — — === = == JS ÈÈS==—= EE — === —— - = = S: === = — —_— a — AC ANAL if ji | Jo CAL pl |) | /l} ja Ho) | ed , Jai D ne | HR //77//!| Ji 1) | }- | 1/14 10) At. Brong. Del . LP. Dumentl Pirerit L'ollen el dugmate de VYpipactis latifoha . ADN CR VOIR TN TON BB UE Rs nn dés“ ge 18. 0 —— É == TT nl 1229/7022 M D PA 11) 1} | ) 11411) è / / / ) ] 1) 171111] / W1/H) 1}/1// 1/1) / / — = W 2% D _— —_—_—.-. . — = ER ; SK SZ) ZA À) = —— =— === = == + — = — —— —= = —E— — = -{ == = Æ == a —_— — EE — = —— == === a — == flacenta de l'Epipactis laufolia “: 1 Ann. des Jere . natur. Tom. 24. [Log F-———— —— VONT Ÿ LR ren \ ur EX . Fo RS " . TS ne F0 | DR ss \\ À NINIKNKS NN EXT Qi AU F NES ny OL te, ES . Le ES RER É RL ie (\ \NK Lx RCE et os À (at re on N Êee n TA FE a cs en es . nt HE NE nn — N HA NS Q N \ Ÿ LEE LA Le c ' FT LT Ad. Prong. el. ; NDS RTE" Coupe du llacerta de l'Epipaetis latifolia . 41 La , L 4 x : pr w, ’ MU LLC rie # ” pe : Ann. des Jene. natur … lom. 24. , 10. _— = = == 2 - == = — = lt. Brong. ll L Pumernil Direz! Jéucture de L’estil dans les Welianthemum halimifolium /Z/7.1/ et levipes. (Lig. 2. 5.) Ann. des Seine. nat. Tom. 24. Coupes du Pistil de VMeianthemum miloticum . PL A M pe Ann. des Seine, nat. Tom . 2$. Lg Loupe du Shymate el du Shyle de YWelianthemum nilotieum. /7. 2 far memes partis dans VWelanthemum ægvyptiacum Ag . 3. Coupe de l'ovaire de l'Helianuthemum vulgare : Il AI IN ui ji NT Vi \ | E | Ds nn q nn | Jom nn. der Jeænc ral, L Pumend Pirerit Ad. Brongniart Det J'auclure des ORGan CS fecondateurs de l'Aselepias amœæna . nt L Pumenét Dirertt ut écondateur de VAsclepias amæna . € JE J'ucture des organe Ad. Zrongriaré Del nl | pie Del! À À z-BETULA papyracea. Crefe sur le BETULA alba. 2. GUIGNIER & gros freuts nos Or sur d& PRUNUS avium 4 VT4 LAS. LE L' Pumernit Pr 7.BETULA papyracea. 776 we de BETULA alba. 2. GUIGNIER 4 gros fruits nos Crfe st d& VRUNUS avium . 72 LA I 4 nb. 2 Zi 07/74 S 1n7 me, triangularis L' Pumend Live Zurpin Let! Grefès en, fente, articles. , Lot, 24. Ann. des Jèrene . nat V6! | jt rl mi | : (l age Lu 17 Dr. (\'T are tn. nadia fre, Zur Lel! L° Pumenid Pire z.-BETULA papyracea . cree sur £e BETULA alba. GUIGNIER à gros frutés rois crfe sur & VRUN US S avium,. Crfes en fente, arlficiolles, cl Crefes par croche halur elles, Ann. des Seine ; nat. Lom . 24. LT # 227 ASPARAGUS officinalis . Greffe naturelle, par approche. 3. dut fleurs D'ALOE.. #77 Aaturelle, par proche. 2, AMYGDALUS €: sur un PRUNUS PLANERA crenata. 4e sur VULMUS campestris. 2. PAVIA lutea. 7476 sur ÉÆSCULUS Iippocastanum.#! TILIA alba. 476" sur le TILIA curopæa . LA 2 d'alartandre crétee nn ; 2) 2 lan. des Jerne. natur. Lom. 24. 2.16 Martin S'Ange Del ZDumeil Pire Os du Crane, disposttion des Os du l ape el du Tarise. i À 41. on ds à : n tél ir dé al 4 dat Vaso Er 2 de dan té nié def OU db dééiié d d ne vo ei Médias Lélard de la Jalamandre crélee DL) Ann. des Jeune. natur. Tom. 24. 2 | Morin JE ge Let . . ni À F7; Puménl Pirez Lormaton et metameor ose de l'hyoite, muscles danseuses F 7012, de L pare lyoidien ; TT 248 (à Jom. 24. Ann. des Jeinc. nalur 1 _ Mrtn SJ lAnge Del. F . 2 Pumenil Dirext Disposition et decomposition de l Pyoide . “ US LOTrS Vos : Les ME st CS (a Ann. des Seine. natur . Tom. 24. "d'alamandre crélée L7 Wan 22 | | | Î | | | 3 | Ü (Il. 2 u: J. ï | | | l | | | FT) ER L'Dumendl Diezt superficiels el de la region lyoihienre ? LT rot rate avi « S à AMOR st ”. , Grenouille verte . Ann. des Sewne . rater. 1om.24 . \ DU 272 | Je guelette de grandeur ralurelle L.Dumend . Dire: er Jalamadre crétee Ar. des Jeune. ratur. Tom. 24 1 Îl.23 1 4 | | 1 Martin Slilnge Del . L'Dumenl Dirert Lapport el structure des Ur. _ Crenoulle verte. Ann: des Seine, natur. Tom, 24 . “= _ LL ; \ ” X È \ à Hart JE Ange Del . .— ÿ 3 PE Dumeral Direrit : Os de la léte isoles Letard de la Crenonille verte Ann. des Jeune. nalur . Tom. 24. à Marta S CAnge. Del ï L Dumenit Dire (4 Lormation developpement et mélamorphose de L lyoite . Grenouille verte ” (una. des Seine. natur. om . 24. arr Singe Pel. L. Pumemt Divx! L'ormalon., developpement de laryne el muscles de (4 region loterie 3 Zetard. el brenoulle verte . js | D Ann.des Jine. natur. Tom. 24 27 de —— = a | | | û Pi! A | PE ie se 1 À Horn Sllnge Pet . L. Dument Direct. Dévélgpemnent de Titerd et muscles de le Crnnalle * “LES LT TON MES : = / TAN: en DR _ 1 Cat LENCO = CRU UN 112 Le fairriialie tissriet shnteted AE æe #4. 1, mt AMEN II HAE Pre