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QUATRIÈME SÉRIE

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BOTANIQUE

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Paris, — Imprimerie de L. MARTINET, rue Mignon, 2.

COMPRENANT

LA ZOOLOGIE, LA BOTANIQUE
L'ANATOMIE ET LA PHYSIOLOGIE COMPARÉE DES DEUX RÈGNES

ET. L'HISTOIRE DES CORPS ORGANISÉS KFOSSILES

RÉDIGÉES
POUR LA ZOULOGIE

PAR M. MILNE EDWARDS

POUR LA BOTANIQUE

PAR MM. AD. BRONGNIART ET J. DECAISNE

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QUATRIÈME SÉRIE

BOTANIQUE
TOME XII

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LIBRAIRIE DE VICTOR MASSON

PLACE DE L’ÉCOLE-DE-MÉDECINE

1859

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SCIENCES NATURELLES

PARTIE BOTANIQUE

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NOUVEAUX DOCUMENTS

DESTINÉS A FAIRE CONNAITRE
LA FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES,

Par M, Wilhem HOFMEISTER,.

{Traduction partielle.)

[

Dicotylédons à endosperme primitivement unicellulé, ne s’accroissant que par
l'effet de la division cellulaire.

Chez toutes les plantes phanérogames, pendant que se développe
l'embryon , il se produit dans le sac embryonnaire une forma-
tion celluleuse qui donne souvent naissance, dans la cavité de
ce sac, à un corps volumineux, dans la profondeur duquel l'em-
bryon vient s’enfoncer en s’accroissant. Dans les cas où cette for-
mation est la plus restreinte, elle se manifeste par l'apparition
passagère de quelques cellules libres où de nucléus cellulaires
dans le liquide du sac embryonnaire, tout au moins sur certains
individus de ces espèces (comme dans les T'ropæolum, Trapa,
Naïas, Zostera, Ruppia, Canna et les Orchidées). Toutefois cette
formation de cellules subit une modification particulière chez les

6 W, HOFMEISTER,

plantes de certains groupes. Là, dans le sac embryonnaire fécondé,
il se produit une sêule cellule, proportionnément grande, qui en
remplit la majeure partie, de telle sorte que, dès l’instant qu’elle
apparait, elle s'applique exactement de toutes parts contre la pa-
roi interne du sac. Cette cellule est ensuite divisée par une cloison
en deux autres secondaires, et ce genre de division se répète
dans les cellules ainsi produites successivement, jusqu’à ce que le
nombre de celles que doit comprendre l’albumen ou périsperme se
soit complété. Les plantes dans lesquelles les choses se passent
ainst appartiennent aux familles suivantes :

Loranthacées, Santalacées, Aristolochiées, Asarinées, Cytinées,
Balanophorées ; — Orobanchées, Scrofularinées, Bignoniacées,
Acanthacées, Labiées, Verbénacées, Sélaginées, Globulariacées,
Lentibulariées, Gesnériacées, Hydrophyllées, Plantaginées ; —
Éricacées, re Pyrolacées (en y comprenant les Mono-
tropées), Droséracées ; — Campanulacées, Loasacées, Bartoniées.

La cavité tout entière du sac se comporte comme cellule ini-
tiale de l’albumen dans les Asarinées, Aristolochiées, Balano-
phorées, Pyrolacées, Monotropées ; la première subdivision de
ce sac est due à la formation d’une cloison qui le partage en
deux moitiés à peu près égales, dont chacune renferme un nucléus
cellulaire, et dont chacune aussi produit, au moins une fois, à son
tour, de nouvelles cellules. Ailleurs, au contraire, la cellule ini-
tiale de l’albumen occupe seulement le haut du sac embryonnaire ;
celui-ci, après la fécondation, est partagé par une cloison en deux
moitiés, dont la supérieure se transforme en albumen par une
série de divisions en deux, tandis que l'inférieure n'offre rien
d’analogue. C’est ce qu’on observe dans les genres #rscum,
T'hesium, Lathræa, Rhinanthus, Mazus, Melampyrum, Globu-
laria. — Cette cellule initiale remplit la région moyenne du sac
embryonnaire dans les J’eronica, Nemophila, Pedicularis, Plan-
tago, Campanula, Loasa et les Labiées; elle en occupe l’extré-
mité inférieure dans les Loranthus, Acanthus, Catalpa, Heben-
streilia, V'erbena, F'accinium. Les Re qui viennent d’être

M ouaite entre les divers modes de développement de l’albumen
peuvent être exprimées plus nettement:et plus convenablement

FORMATION DE L'EMBAYON DES PHANÉROGAMES. 7

si l’on regarde, dans tous les cas, le sac embryonnaire tout entier
comme la cellule mère de l’albumen, si l’on considère les deux
moitiés qui résultent de sa première division comme les pre-
mières cellules périspermiques, et si l’on indique ensuite l’inten-
sité avec laquelle s'effectuent les divisions ultérieures dans Îles
différentes régions de ce sac. Ceci admis, les faits se coordonnent
de la manière suivante :

À. Les cellules de l’albumen se multiplient toutes ; l'intensité
de leur multiplication va en diminuant peu à peu des deux extré-
mités du sac vers son milieu :

Aristolochia, Balanophorées, Pyrola, Drosera, Bartonia (pour
celui-ci, abstraction faite de l’excroissance terminale du sac em-
bryonnaire, qui ici, dès avant la fécondation, est séparée par une
cloison transversale).

B. L'une des deux premières cellules produites par le partage
du sac embryonnaire ne se multiplie pas du tout, et c’est unique-
ment l’autre, sa sœur jumelle, qui en donne de nouvelles,

a C'est seulement l’inférieure de ces deux cellules, issues de Ia
cellule primaire, qui devient le siége d’une multiplication : Loran-
thus, Lepidoceras, Catalpa, Acanthus.

g. C'estau contraire seulement la supérieure qui se subdivise.

1. Sa subdivision s'opère de tous les côtés uniformément dans
le même sens que pour « : Viscum, Thesium, Asarum.

2. Les cellules secondaires qui remplissent le sommet du sac
embryonnaire s'arrêtent dans leur division de bien meilleure heure
que les autres.

a. Les divisions de la cellule terminale extrême qui entoure
les vésicules’embryonnaires, sont seulement au nombre de 1 :
Lathræa, Mazus, Veronica hederæfolia et triphyllos, Rhinanthus,
Melampyrum, Plantago, Globularia.

b. Cette même cellule ne se subdivise pas du tout par formation
de cloisons longitudinales : Pedicularis, Feronica hederæfolia et
Bucbaumii, Nemophila, Acanthus, Catalpa, Lamium, Prostan -
thera, Hebenstreitia, Campanulacées, Loasa.

Quoique cette particularité que présente le développement de
l’albumen, dans les plantes qui viennent d’être citées, soit nette

8 W. HOFMEISTER,

ment marquée, il est difficile de tracer la ligne ‘de démar-
cation entre les Phanérogames dont le périsperme ne s'accroît
que par l’effet d’une subdivision des cellules, et celles chez les-
quelles il doit sa première ébauche à une formation de cellules
libres.

Dans quelques plantes appartenant à d’autres familles, on ob-
serve encore un albumen unicellulé à l’origine. Très peu de temps
après la fécondation, l’extrémité supérieure du sac embryonnaire
est séparée du reste de la cavité par une cloison transversale ; or
c’est uniquement dans cette portion supérieure, qui renferme en
même temps les vésicules embryonnaires, qu’a lieu la production
ultérieure des cellules secondaires. C’est ce qui a lieu, parmi les
Dicotylédons, chez les Nymphœa, Nuphar, Ceratophyllum ;
parmi les Monocotylédons, chez l’Anthurium longifolium. Mais
une différence importante entre le premier cas et celui-ci, c'est
qu'ici l’albumen persistant est dù à une production cellulaire libre,
qui à lieu dans la moitié supérieure du sac embryonnaire. Dans sa
cellule mère unique se produisent simultanément plus de deux
nucléus libres. Autour de ceux-ci naissent des cellules qui, à leur
première apparition, ne remplissent pas encore entièrement la
cellule mère. Ceci est très manifeste chez l’Anthurium, et difficile
à constater dans le Nuphar , le nombre des nucléus qui naissent
librement ne dépassant pas trois pour l'ordinaire.

Les plantes dont l’albumen se forme par une série de partages
successifs d’une seule cellule mère offrent ce caractère commun
que leur sac embryonnaire grandit rapidement, et dilate considé—
rablement sa membrane. Dans la plupart d’entre elles, dès avant la
fécondation, ce sac gagne beaucoup en longueur. Après que la fé-
condation s'est opérée, il développe souvent des processus ou
appendices en cæcums latéraux ou basilaires, quelquefois même
apicilaires, qui pénètrent profondément dans les tissus voisins en
les détruisant. Sa membrane est partout résistante, et plus parti-
culièrement épaissie vers le sommet. Sous tous les rapports, ce sac
embryonnaire se montre plus indépendant el moins relié aux tissus
adjacents que dans les autres Phanérogames.

La grande majorité des vrais parasites appartient à ce grand

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES, D
groupe (1). Dans cette catégorie se rangent seulement des végé-
taux dicotylédons, parmi lesquels les plus nombreux sont, avec les
vrais parasites, ceux dont la végétation exige un sol très riche
en humus (par exemple, les Rhinanthacées et Scrofularinées non
parasites, les Monotropées, Pyrolacées, Éricacées, Asarinées, ete. ).

A cause de la disposition, de la grandeur et de la consistance
des cellules de leur albumen, les plantes de ces familles peuvent
très bien donner matière à des discussions sur la question de savoir
si un albumen peut se produire, même sans fécondation, dans des
sacs embryonnaires où les vésieules embryonnaires ne développent
pas d’embryon. Mais les nombreuses recherches dont l'exposé va
suivre auront pour résultat de résoudre négativement cette ques-
ton.

I. — LORANTHACÉES.

Loranthus europœus Lin.

Les boutons de fleurs du Loranthus europœus se forment au
printemps qui précède d’une année la floraison. Au milieu du mois
de juin, la jeune inflorescence femelle se montre sous l’apparence
d’une petite pousse qui porte de quatre à huit paires de bractées
charnues, courtes, décussées. Dans l’aisselle de chaque bractée
se trouve une masse cellulaire en forme de mamelon déprimé,
ressemblant assez à un tronc de cône renversé (pl. [, fig. 4). Ce
mamelon est l’ébauche d’une fleur.

Ün mois plus tard, sur la surface terminale de cette masse cel-
luleuse se sont relevés deux verticilles trimères d'organes foliaires,
alternant entre eux, qui constituent des lamelles celluleuses, épais-
ses et courtes, à contour triangulaire, inclinées vers le centre de
la fleur (pl. [, fig. 2). Ce sont là les folioles périgoniales. — Le
bord de la même surface s’est accru en un bourrelet circulaire de
même hauteur sur tout son pourtour, qui formera ce qu’on à
nommé le calicule.

(4) 11 faut excepter seulement les Cuscutes, dont l’albumen se forme par
production cellulaire libre, et cela tardivement, longtemps après la fécondation,

40 WW. HOFMEISTER,

Les coupes longitudinales de boutons de cet âge montrent, plus
à l’intérieur que les deux cercles trimères de feuilles périgoniales,
deux autres verlicilles également trimères d’organes alternes avec
les premiers, et qui sont nés peu antérieurement (PI. I, fig. 3). Ce
sont les ébauches des étamines, La face dorsale de chacune de
celles-ci se soude largement avec la face antérieure de la foliole
périgoniale située devant elle vers l'extérieur. Au centre de ce
bouton se trouve l’extrémité de son axe, sous la forme d’un cône
irès déprimé, C’est après que les choses en sont arrivées à ce point
que survient le repos hivernal,

A la fin du mois d'avril suivant, on voit s’élever, dans le centre du
bouton, un cinquième verticille de trois organes foliaires, les car-
pelles. Ceux-e1 sont dressés ; longtemps encore après leur première
apparition, ils sont entièrement distincts l’un de l’autre, et chacun
d'eux a la forme d’un triangle équilatéral (pl. I, fig. 4-6). Le
centre de la fleur parait alors profondément enfoncé et entouré par
eux. L'arrangement des cellules qui forment cette extrémité de
l'axe floral destinée à un développement ultérieur rappelle, sur une
coupe longitudinale, la structure du bourgeon terminal de l'Ophio-
glossum. À une faible profondeur, au-dessous de lui, une portion
en forme de ménisque du tissu de l'axe floral se montre composée
de très petites cellules cubiques, laissant entre elles d’étroits méats
remplis d'air. Ce tissu particulier, qui, sur les tranches longitu-
dinales, ressort, grâce à la réfraction de la lumière, sous l’appa-
rence d’un eroissant foncé, correspond à la chalaze d’un ovule
pour sa cornposition (et aussi, comme on le verra plus loin, pour
sa situation) (pl. !, fig. 4, ch). Il reste reconnaissable pendant
fort longtemps dans la graine en voie de développement.

Vers le milieu du mois de mai, l'extrémité de l’axe floral se
trouve de nouveau conformée en cône déprimé (pl. E, fig. 5). Les
trois carpelles, entièrement soudés entre eux par les bords, for-
ment:un cône tronqué, remplissant le milieu du bouton, et arrivant
jusqu’au niveau des étamines rudimentaires, à la troncature du-
quel vient s'ouvrir un étroit canal axile, qui conduit jusqu’à l’ex-
trémité de l'axe floral, et qui n’est pas autre chose que le canal
stylaire.

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES, fn

A partir de cet instant, les parties de la fleur s'allongent très
rapidement, Déjà, dans la seconde moitié du mois de mai, le som-
met du style arrive jusque dans la concavité de la voûte formée
par le sommet du bouton. Son accroissement a lieu par l'effet d’une
multiplication de cellules d’abord apicilaire, plus tard imtercalaire,
qui s'opère principalement dans sa base élargie. Dans les folioles
périgoniales, la multiplication des cellules est uniquement inter-
ealaire, et limitée à leur portion située tout au-dessus de leur
base, Les rudiments des étamines se trouvent ainsi fortement
élevés, L’axe floral, de son côté, est aussi le siége d’une mul-
tiplication de cellules intercalaire, encore plus rapide, qui s'opère
immédiatement au-dessous de l’attache des feuilles périgoniales et
carpellaires, et dont l'effet est d’en rendre ovoïde-allongée la masse
tissulaire qui était jusque-là demi-globuleuse ; en outre, selon la
marche ordinaire du développement des ovaires infères , l’extré-
mité de l’axe floral en vient ainsi à se trouver profondément dé-
primée entre les parties périphériques qui gagnent rapidement en
hauteur.

Pendant ces développements , il se fait une soudure complète
entre l'extrémité en cône déprimé de l’axe floral, constituant
l’ovule unique, nu et dressé du Loranthus, et la paroi interne de la
cavité que forment les carpelles soudés en ovaire..….. Peu avant
l'épanouissement du bouton de fleur, la portion axile de l'ovaire,
qui constitue alors une masse cellulaire solide, se montre comme
un corps celluleux en forme de fuseau, que sa plus grande transpa-
rence distingue des autres tissus (pl. LE, fig. 6, e), et que composent
des cellules courtes, presque cubiques, avec d’autres plus ou moins
allongées. Les plus longues de ces cellules (le plus souvent trois
disposées en cercle, assez souvent aussi deux) sont les sacs em-
bryonnaires, qu'on voit ordinairement cylindriques avec les deux
bouts un peu renflés (pl. I, fig. 9), qui parfois aussi présentent
des courbures particulières et des excroissances. Le canal stylaire
est maintenant fermé; les cellules qui le limitent ne sont pas
récilement soudées; elles sont seulement devenues papilleuses,

étroitement feutrées, et elles peuvent se séparer mécaniquement
(pl. I, fig. 6).

12 W. HOFMEISTER.

Le développement des fleurs mâles concorde avec celui des
fleurs femelles quant à ses traits principaux. Les différences con-
sistent en ce que les étamines forment leurs anthères, que le ca-
licule prerd un plus grand accroissement, et en ce qu’on ‘n’y
observe pas la même multiplication intercalaire de cellules dans
le plan horizontal inférieur à l'insertion des feuilles périgoniales.
Par l’eflet de cette dernière circonstance , l’ovaire imparfait est
supère. La structure des anthères est analogue à celle de ces or-
ganes dans la grande majorité des Phanérogames. Elles ont ori-
ginairement quatre logettes, et elles s'ouvrent en deux valves ;
leur filet est court et épais. Le développement et la configuration
du pollen ne présentent non plus rien de particulier.

Le sac embryonnaire non fécondé ne contient que deux vési-
eules embryonnaires allongées (pl. [, fig. 7), dont la membrane est
délicate, au point de n’opposer qu'une faible résistance aux actions
externes. [n'existe pas de vésicules antipodes. Ce sac ne cesse de
croître en longueur lorsque les vésicules embryonnaires sont for-
mées. Il s’insinue, en s’allongeant de bas en haut, dans le canal
stylaire que ferment des cellules feutrées entre elles, et il arrive
ainsi jusque vers le quart de la longueur de celui-ci (pl. I, fig. 40).
C'est là que son extrémité supérieure est rencontrée par le tube
pollinique grêle, qui arrive à ce point lorsque les folioles du péri-
gone commencent à se flétrir. Le bout obtus de ce tube s'applique
tantôt contre le sommet même, tantôt contre un des côtés de l’ex-
trémité supérieure du sac; parfois encore ilse courbe assez forte-
ment en arrière (pl. IL, fig. 15, 16). La membrane du sommet du
sac embryonnaire est uniformément et assez fortement épaissie.

Après que le bout du tube pollinique a atteint le sommet du
sac,-une des deux vésicules embryonnaires ne tarde pas à s’allon-
ger en un long tube grêle, ou en une utricule-embryon, qui tra-
verse rapidement la cavité de ce sac dans toute sa longueur ; l’autre
vésicule disparait bientôt. Quand le bout de cette utricule-embryon
est parvenu près de l'extrémité inférieure du sac embryonnaire, il
se forme dans son intérieur une cloison transversale (pl. IF,
fig. 13). La cellule terminale, ainsi séparée de la cavité supérieure
cylindrique de ce préembryvon maintenant bicellulé, s’allonge

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES,. 15

à son tour en un cylindre qui atteint le fond du sac embryonnaire.

Pendant ce temps, à l’intérieur de cette extrémité inférieure
élargie du sac, a commencé de se former l’albumen , constitué
primitivement par une seule grosse cellule qui la remplit entière-
ment (pl. I, fig. 13). Au moment où le bout du préembryon arrive
ici, cette cellule ayant été divisée en deux, deux fois de suite,
par des cloisons longitudinales perpendiculaires l’une à l’autre,
s’est changée par cela même en un corps composé de quatre cel-
lules situées sur un plan (pl. IE, fig. 44, 15). C’est entre les angles
par lesquels ces quatre cellules se touchent que s’insinue l’extré-
inité du préembryon, dont les fortes courbures qu’il présente en-
suite fréquemment sur ce point attestent qu'il a dû surmonter une
résistance prononcée (pl. IF, fig. 14).

Le corps périspermique multiplie ses cellules d’abord par des
divisions transversales successives des quatre qui existaient déjà.
Les premières cloisons transversales se forment près du bout infé-
rieur de chacune de ces cellules; les cellules inférieures ainsi
produites se distinguent nettement des supérieures par leurs di-
mensions plus faibles et par la plus grande concentration de leur
contenu (pl. If, fig. 16). La multiplication cellulaire s’opère
ensuite, au bout inférieur du périsperme, beaucoup plus énergi-
quement qu’à son bout supérieur. Jusque vers la maturité, les
cellules de ce bout inférieur sont plus petites et remplies d’un con-
tenu plus dense (pl. EL, fig. 11 ; pl. I, fig. 17, 18). Grâce à cette
mulüplication cellulaire qu’elle subit dans tous les sens, la masse
périspermique, qui était primitivement ovoïde, gagne beaucoup
en largeur (pl. L fig. 11 ; pl. IV, fig. 17, 18).

Pendant que le périsperme multiplie ainsi ses cellules, le bout
du préembryon s'enfonce toujours plus profondément au milieu
de sa masse. Il en atteint la limite inférieure, et rencontre la mem-
brane du fond. du sac embryonnaire, en général, dès l'epoque à
laquelle le périsperme est encore conformé en un corps ovoïde
(pl. L fig. 12); plus rarement, il n'arrive là que lorsque cet albu-
men s'est arrondi (pl. 1, fig. 11). Parvenue dans le fond du sac
embryonnaire, l'extrémité inférieure de la cellule terminale du
préembryon se renfle considérablement, et bientôt une cloison

1h W. HOFMEISTER.

transversale l’isole de sa partie supérieure qui est cylindrique
(pl. EL, fig. 12). Assez souvent, en se renflant ainsi, la cellule
terminale prend une forme irrégulière, lobée ; elle est subdivisée
soit immédiatement par une cloison longitudinale, soit d’abord
par une cloison transversalement oblique (pl. IE, fig. 17). Dans
les cellules parallèles, dont est formée à cette époque l'extrémité
du préembryon, a lieu bientôt une nouvelle division longitudi-
nale due à des cloisons perpendiculaires aux premières. Il résulte
de là que l’extrémité renflée de ce préembryon se montre alors
constituée par quatre files parallèles de cellules (pl. If, fig. 48),
d'une manière fort analogue à ce qu’on observe dans le préem-
bryon d’une Abiétinée.

Il s'effectue encore quelques divisions en sens transversal dans
les cellules terminales de chacune de ces quatre files longitudinales ;
puis cette multiplication cellulaire cesse dans trois d’entre elles,
tandis que, dans la cellule terminale de la quatrième, il commence
à se former des cellules dans tous les sens. Bientôt les cellules du
corps parenchymateux qui s’est produit de cette manière s’allon-
gent, et dès lors elles constituent seules la portion inférieure du
préembryon qui devient très volumineux; elles refoulent ainsi
latéralement les files de cellules de la moitié supérieure du pré-
embryon, dans lesquelles a cessé la production cellulaire. On peut
en reconnaître encore quelques-unes dans le susperiseur de l’em-
bryon déjà très avancé en développement. Jusqu'à ce moment,
c’est-à-dire jusqu'au commencement d'août, l’accroissement lon-
gitudinal de l’albumen suit celui du préembryon. L’extrémité in-
férieure obtuse de ce dernier ressort toujours un peu au delà de la
face basilaire de l’albumen, et vient reposer sur lé tissu qui a été
désigné comme étant la chalaze, dont elle est séparée seulement
par la membrane du fond du sac embryonnaire qui est un peu re-
broussée vers le dehors (pl. IE, fig. 18). Seulement la multiplica-
tion et l’extension très modérées que prenneñt les cellules du
sommet du corps périspermique l’emportent ordinairement d’un
côté, même pendant que le fruit est encore dans cet état fort peu
avancé, sur l'allongement qu’a pris la portion supérieure et fili-
forme du préembryon enfermé dans l’albumen. La conséquencé

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES. 15

en est que la moitié supérieure et la plus longue du sac embryon-
naire, qui est en forme de cylindre étroit et vide de cellules, se
trouve généralement rejetée un peu de côté, et se montre dès lors
appliquée obliquement contre l’albumen un peu au-dessous de son
sommet (pl. IL, fig. 48, 19). L’extrémité supérieure de cette por-
ton vide de cellules du sac embryonnaire se détache et tombe en
même temps que le style dans le canal duquel elle s’est introduite,
au moment où celui-ci se sépare du jeune fruit par suite de la trans-
formation en un tissu, comme subéreux, que subit une couchehori-
zontale de sa base. L'ouverture de l'extrémité du sac embryonnaire
qui s’est ainsi rompue se ferme ensuite, parce qu'il s’y forme un
bouchon d’une substance granuleuse, qui paraît brun-rouge à la
lnmière transmise, et parce que au-dessous de ce bouchon le sac
est comprimé par les cellules ambiantes qui s’allongent dans le
sens transversal.

Au moment de l'apparition du globule-embryon, la multiphica-
üon cellulaire devient beaucoup plus active dans la portion infé-
rieure de lalbumen. Ce globule est formé par un tissu composé de
petites cellules cubiques, qui est logé dans l'extrémité inférieure du
préembryon; cette extrémité constitue les parties de l’embryon
qui persistent sans sécher, parties que remplissent des matières
assimilées vers l’époque de la maturité de la graine. La masse cel-
lulaire de l’albumen déborde, d’abord ordinairement d’un côté, le
sommet du jeune embryon ; puis, la production cellulaire devenant
plus active sur toute la périphérie de cette face basilaire de l’albu-
men, le sommet de l’embryon se trouve d’abord enfoncé dans une
dépression cylindrique du tissu périspermique; après quoi les cel:
lules qui forment les parois de cette dépression se multiplient et
s'étendent, s'unissent au-dessous de l’embryon et ferment l’ou-
verture, de telle sorte que l'embryon se trouve enfin couvert
par l’albumen et enfoncé dans sa masse... Dès cet instant,
l'embryon est enveloppé de tous les côtés par l’albumen, et il
reste dans eet état jusqu’à la germination. La partie de cet albu-
men qui est située plus bas que l’extrémité de l'embryon gagne
encore beaucoup en longueur et en circonférence vers l’époque
de la maturité.

16 W. HOFMEISTER.

Pendant cet accroissement de l’albumen, les cellules qui forment
le tissu adjacent de l'ovaire se multiplient rapidement. Ce déve-
loppement a lieu surtout pour le parenchyme qui se trouve à côté
et au-dessous de la chalaze. Le contenu de ces cellules, qui était
d’abord troublé par un grand nombre de granules, devient clair et
translucide (pl. Il, fig. 21, y). C’est surtout aux dépens de ce tissu
que l’albumen s’accroit en en comprimant les cellules tout autour
de lui et les aplatissant jusqu’à faire disparaître leur cavité (pl. I,
fig. 18), à ce point qu'elles finissent par n’être plus visibles. Pen-
dant que cela se passe, le parenchyme de la chalaze se conserve
longtemps sans altération. Perdant sa cohérence avec le tissu adja-
cent, qui devient comme pâteux, il reste au milieu de celui-ci
comme un corps mort, mais intact. Ordinairement lorsqu'on retire
l'albumen de l'ovaire, ce tissu y reste attaché.

Les cellules des parois ovariennes qui sont situées entre les
cercles de faisceaux vasculaires extérieur et intérieur, et qui, de
bonne heure, présentaient déjà une disposition rayonnante (pl. II,
fig. 21), commencent, à la mi-juin, de produire de la viscine dans
leur intérieur. Chacune d’elles offre dans son milieu de petits amas
libres d’une substance visqueuse, filante, qui réfracte fortement
la lumière. Plus tard, à partir de la mi-août, une production ana-
logue a lieu dans les cellules de la portion axile de l'ovaire au-
dessus et au-dessous de la masse périspermique (pl. IF, fig. 21).
A la fin d’août, les parois des cellules qui renferment de la viscine
se ramollissent à leur tour, après que les petites masses de cette
substance ont augmenté en nombre dans leur intérieur jusqu’à les
remplir. La couche mince de tissu qui se trouve au dehors du
cercle externe de faisceaux vasculaires (pl. IT, fig. 24, z) forme la
paroi de la baie.

L'embryon naissant, qui était demi-globuleux au commence-
ment du mois d'août, devient globuleux à la fin de ce mois. Au
commencement de septembre, on voit les deux cotylédons se des-
siner à côté de son sommet, qui a la forme d’un cône déprimé ; ils
s'appliquent l’un contre l’autre par leur face supérieure, par la-
quelle ils adhèrent entre eux plus tard ; ils ont déjà toute leur lon-
gueur vers la mi-septembre. A cette époque, l'extrémité radicu-

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES. 17

laire épaissie et globuleuse de l’embryon, sur laquelle on reconnait
encore les restes du suspenseur en voie de sécher, montre l’ébau-
che de la radicule (pl. IE, fig. 22, r). La piléorhize de celle-ci
(cbid., h) est profondément enfoncée dans le tissu de l'embryon.
Le Loranthus europæus est une plante endorhize, absolument de
la même manière que ces Palmiers dont la première racime se
trouve sur le prolongement de l’axe longitudinal de embryon,
comme le Sabal Adansonii, par exemple. ;

Tout étranges que peuvent être les particularités par lesquelles
le développement de l'embryon du Loranthus europœus diffère de
celui qu’on observe chez les autres Phanérogames, elles le sont
encore moins que celles qu’offrent certaines Loranthacées des
Indes orientales, dont nous devons la description à Griffith. L'his-
toire exacte de l’accroissement de l'embryon du Loranthus euro-
pœus, que je viens de donner, permet de remplir les nombreuses
lacunes de la description de Griffith, et d’esquisser la marche
que suit la formation des graines dans ces intéressantes formes
tropicales,

Dans toutes les espèces de Loranthus qu'il a étudiées (L. scur -
rula, globosus, bicolor), Griffith à vu qu'aux premiers degrés du
développement de la fleur, il existe une cavité ovarienne très appa-
rente, communiquant hbhrement avec le canal stylaire, qui devient
ensuite obscure, et disparaît par l'effet de l'accroissement du fruit,
Du fond de cette cavité s’élève un petit mamelon celluleux en
forme de cône déprimé («a nipple shaped process »); c’est Ia
formation que j'ai regardée comme lovule. Dans le Loranthus
bicolor, Griffith à reconnu et figuré Ja portion de tissu située au-
dessous de l’ovule, que j'ai désignée comme la chalaze. Les sacs
embryonnaires (ovules d’après Griffith et d’après M. Decaisne)
ont été vus par lui longtemps avant la fécondation ; généralement
il y en a plusieurs, jusqu’à six dans le Loranthus bicolor. I n’a pu
s'assurer entièrement qu'ils naissent de l’ovule ; mais ce que nous
savons du Loranthus europœæus ne permet pas d’en douter. Dans
le Loranthus bicolor, ces sacs embryonnaires s'élèvent beaucoup
dans le canal stylaire, jusque près du stigmate. Le canal stylaire
est beaucoup plus visible et plus ouvert dans les espèces des Indes

£° série. Bor. T. XII. (Cahier n° 1.) ? 2

18 W. HOFMEISTER.

orientales que dans celle d'Europe. — Après que le pollen était
tombé sur le stigmate, Griffith a vu les extrémités des tubes polli-
niques fixées sur le sommet des sacs embryonnaires, et l'intérieur
de ceux-ci traversé dans toute sa longueur par des cellules fili-
formes. Le diamètre de ces tubes polliniques est à son maximum
vers le sommet du sac embryonnaire; plus bas, ils se rétrécissent
beaucoup, mais sans toutelois devenir jamais aussi grêles qu’en
dehors du sac. Ces cellules filiformes, que l'influence des idées
erronées de M. Schleiden a fait prendre à Griffith pour des tubes
polliniques, qui auraient pénétré dans le sac embryonnaire, sont
incontestablement les vésicules embryonnaires fécondées et déve-
loppées en utricules-embryons. Un fait assez remarquable, qui
constitue la principale différence entre le développement des es-
pèces indiennes et celui de notre espèce européenne, c'est que
chaque utricule-embryon est comme double. En effet, chacune
d'elles est formée de deux cellules demi-cylindriques, parallèles,
intimement unies entre elles par des faces planes. Il est très vrai-
semblable que la cause de cette circonstance curieuse consiste en
ce que la vésicule embryonnaire fécondée s’est divisée dans sa
longueur avant même de s’allonger. — L’albumen apparaît, dans
les Loranthus bicolor et globosus, tout aussitôt que dans le L, euro-
pœus ; comme dans celui-ci, il est traversé rapidement par le pré-
embryon, qui vient ensuite faire saillie à son extrémité inférieure,
mais faiblement chez le L, bicolor ; même le globule embryonnaire
encore très jeune est toujours enveloppé par l’albumen, au moins
partiellement. Il en est tout autrement chez le L. globosus. lei les
préembryons, longuement saillants hors de l’albumen, se con-
tournent en vis, absolument comme ils le font dans l’albumen des
Conifères après leur sortie des corpuscules. — Dans ces deux
espèces, c’est la règle que plusieurs sacs embryonnaires sont fé-
condés à la fois. Non-seulement les masses périspermiques mul-
tiples qui naissent de là, mais encore les préembryons qui en
ressortent inférieurement, se soudent ordinairement entre eux,
sans toutefois que la masse cellulaire formée par la réunion des
bouts des préembryons donne généralement naissance à plus
d’un embryon chez le L. bicolor. Au contraire, le L. globosus se

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES. 19

distingue par sa tendance à séparer les préembryons préalable-
ment unis, tendance qui se manifeste, parce que souvent ce corps
cellulaire donne deux embryons pourvus même de suspenseurs
distinets..— Vers l’époque dela maturité, l’albumen vient dépasser
et enfermer l’embryon ou les embryons, tout à fait comme dans le
L. europæus. Cette circonstanee est très curieuse chez le L. globo-
sus, chez lequel l'embryon est d’abord très éloigné de l’albumen,
— La troisième espèce étudiée par Griffith, le L. scurrula, paraît
être entièrement analogue au L.europæus sous ee dernier rapport.

Une remarque , présentée par M. Decaisne dans son célèbre
mémoire sur le Viscum album, relativement à la structure des
jeunes graines du L. aphyllus, montre que l'allongement que
prend la vésicule embryonnaire fécondée, pour former un pré-
embryon qui traverse le sac embryonnaire dans toute sa lon-
sueur, suppose une multiplication de cellules par division plus
considérable et plus compliquée qu’on ne peut la supposer pour
le L, globosus. M. Decaisne a trouvé au sommet du sac em-
bryonnaire (de l'ovule, d’après sa terminologie), déjà rempli
par l’albumen, une masse conique de tissu cellulaire plus dense
que celui de l’albumen, de la base de laquelle partaient quatre cel-
lules étroites, tubuleuses, faciles à séparer l’une de l’autre, qui
s’étendaient à travers toute la longueur de l’albumen en se tordant
en vis. Les extrémités inférieures de ces tubes s’unissaient intime-
ment, et formaient une masse cellulaire homogène (« une espèce
de petit sac ou de mamelon charnu, sur lequel on ne peut décou-
vrir aucun indice d’une strie »). Plus tard, on voit que de l’ex-
trémité inférieure de ce corps celluleux naît l'embryon ; lui-même
appartient au suspenseur ; la radicule du préembryon fait saillie
dans ce même corps. Vraisemblablement celle-ci est entourée par
une hypertrophie en fraise du préembryon, à peu près comme
dans les Tropæolum ; ou à un plus haut degré dans le Trapa.

M. Karsten, dans un travail sur l’organogénie des Lorantha-
cées (1), a fait connaître la structure de la fleur et la formation de
l'embryon dans une espèce de Loranthus de l'Amérique centrale,

(4) Botanische Zeitung, 1852, p. 305.

20 WW. HOFMEISTER.

à laquelle il a donné le nom de Passowia odorata. I n'a pas vu
que la production du style fût due à un verticille d'organes fo-
liaires soudés entre eux. Il admet que la portion médiane du bou-
ton de fleur se voûte vers le haut, et s’allonge jusqu’à égaler
presque en longueur les autres organes de la fleur. Il décrit Ja
formation du sac embryonnaire comme due à la résorption des
cloisons horizontales de la file de cellules médullaires qui occupe
l’axe de la fleur femelle. Ce sac se remplit, selon lui, de tissu cel-
lulaire, dès avant la fécondation, au point de ne laisser qu’un étroit
espace intercellulaire axile, dans lequel pénètre plus tard le tube
pollinique qui s’insinue jusque près du fond du sac, où son extré-
mité devient ensuite l'embryon naissant. — Je n’hésite pas à dire
que ces assertions me semblent erronées. Dans les observations
de M. Karsten, autant du moins qu’on peut les contrôler par les
figures jointes à son mémoire, 1l existe une lacune considérable
entre l’état de la fleur où les étamines sont uniquement ébauchées,
et celui qui précède immédiatement l’anthèse. Ce que cet auteur
dit au sujet du développement du style et du sac embryonnaire
n’est évidemment pas le résultat d'observations directes, mais
a été simplement déduit de l’état adulte. Que les carpelles de
l'espèce américaine se soudent plus tôt et plus complétement ; que
le sac embryonnaire croisse plus rapidement encore que dans
l'espèce européenne, il n’y a pas de raison pour douter que
la marche du développement ne soit analogue dans les. deux
cas. Le sac embryonnaire rempli par l’albumen a été certainement
déjà fécondé ; le cylindre axile donné pour un espace intercellu-
laire, dans lequel l’utricule-embryon se serait développé, n’est
que la vésicule embryonnaire fécondée qui est descendue jusqu'à
ce point.

L’admission des Loranthacées dans la classe des Gymnospermes
me semble ne devoir être mentionnée que comme fait historique.
D'après ce qui précède, il est aussi peu nécessaire de discuter
cette opinion que de rapporter l’assertion erronée des anciens au-

teurs systématiques qui attribuaient aux Loranthacées des ovules
pendants.

FORMATION DE L'EMRRYON DES PiHANÉROGAMES, p

Lepidoceras Kingii Hook. fil.

Les organes femelles du Lepidoceras et des formes voisines sont
beaucoup plus complets que dans les espèces de Loranthus qui
ont été examinées jusqu'ici.

Du fond de la cavité ovarienne du Lepidoceras Kinguüi s'élève
un corps en cône élancé, composé de cellules étroites et allongées,
qui cache dans son intérieur quelques cellules plus larges , éga-
lement allongées. La pointe de ce corps touche au plafond de la
cavité de l'ovaire. Ce qu’on sait sur le développement de la fleur
femelle des Loranthus semble autoriser parfaitement à regarder
cette masse celluleuse conique comme l'ovule, et les grosses cel-
Jules qui se trouvent dans l'intérieur de celui-ci comme des sacs
embryonnaires. L'espace qui s'étend entre la surface externe de
l’ovule et la face interne de la paroi ovarienne, qui est solide et
persistante, est rempli par un tissu cellulaire, dont les grandes
cellules ont des parois minces (pl. IL, fig. 32). Les choses se
présentent ainsi dans l'ovaire long de 4 millimètre 4/2, d’où le
périgone s’est détaché évidemment depuis peu de temps.

Dans l'ovaire plus avancé, plus long de moitié environ, et de-
venu trois fois plus épais, on ne trouve plus le tissu lâche à
grandes cellules interposé à l’ovule et aux parois de l’ovaire.
L’extrémité inférieure de l’un des sacs embryonnaires (celui qui a
été fécondé) s’est fortement élargie, et elle est remplie par un albu-
men qui a déjà plusieurs cellules (pl. HE, fig. 3à). Cette partie
remplie de tissu cellulaire se présente comme un corps à trois
angles émoussés, lorsqu'on la regarde par son extrémité. La moi-
tié supérieure du sac embryonnaire, qui est plus grande et sans
cellules à l’intérieur, est traversée par la cellule supérieure cylin-
drique et allongée du suspenseur. Le globule embryonnaire formé
de peu de cellules, que celle-ci supporte (tbid., k), se trouve dans le
centre del’albumen aplati.

Le tissu des parois ovariennes s’est maintenant divisé en trois
couches très différentes. La plus intérieure de ces couches est

22 W. HOFMEISTER,

composée d’une assise simple de cellules en table, dont le diamètre
longitudinal est environ quatre fois plus grand que le transversal.
La seconde couche est formée de cellules allongées transversale
ment, très étroites, contre lesquelles s'applique la couche la plus
extérieure des parois ovariennes, qui forme une lame épaisse de
parenchyme à parois épaisses. — Dans le fruit voisin de sa matu-
rité, cette couche moyenne a pris un développement très considé-
rable; en effet, dans le haut du fruit, ses cellules se sont beaucoup
allongées , et, comme la couche la plus externe des parois ova-
riennes les empêche de s’étendre librement, il en résulte qu’elles
prennent une direction sinueuse (pl. IT, fig. 34, b). A l'endroit
où l’une de ces cellules cylindriques, bien isolée de ses voisines,
tient à une des cellules en table et à membrane épaisse qu'offre
la couche interne de l'ovaire, sa paroi présente une ponctuation.
L’ovaire est devenu charnu à l'extérieur ; il se ride en séchant.
L'espace intérieur de cet organe est maintenant tout à fait rempli
par un albumen pyriforme (pl. TT, fig. 34), qui lui-même se trouve
réduit à n’avoir plus que deux ou trois couches de cellules sous
l'effort d’un gros embryon vert, dont l'extrémité radiculaire est

très développée, et qui a deux grands cotylédons appliqués l’un
contre l’autre,

Viscum album Lin.

Dès le premier printemps, avant le réveil de la végétation (au
commencement de mars), la pousse naissante du Gui qui fleurira
l'année suivante est entièrement cachée dans une cavité fermée
par un renflement du pétiole ; cette cavité se trouve dans l’aisselle
des feuilles situéés sous l’inflorescence qui est destinée à s'ouvrir
dans l’année{pl. IL, fig. 23, æ). Cette pousse porte deux préfeuilles
en écailles ‘opposées, que suivent, au bout d’un entre-nœud assez
dévelopyé, ses deux feuilles opposées en croix avec les premières.
Ces feuilles sont déjà assez grandes ; à l’aisselle de chacune d’elles
se trouve l’ébauche de la pousse qui se développera dans deux ans,
sous la forme d’un mamelon déprimé que compose un tissu cellu-
laire délicat. Le bout de la pousse, entre les feuilles, présente en-
core une paire de bractées..…, au-dessus desquelles il s’en montre

FORMATION DE L’EMPBRYON DES PHANÉROGAMES. 93

une autre paire. À l’aisselle des bractées inférieures apparaissent
des ébauches de bourgeons (pl. IE, fig. 24, y), qui sont les pre-
miers indices des fleurs latérales de l’inflorescence. L’extrémité de
la pousse, entre les bractées supérieures, s'organise en fleur ter-
minale ; et d’abord (dans la fleur femelle) le développement plus
considérable de ses parties périphériques donne naissance au cali-
cule, qui n’est pas un verticille d'organes foliaires, mais une simple
hypertrophie du parenchyme circonserivant un enfoneement,

Au milieu de juin, du centre de cet enfoncement se relève de
nouveau en cône le point végétatif. Dans les fleurs latérales de
l'inflorescence, qui sont alors un peu en avance sur les terminales,
on aperçoit déjà les sommets des deux folioles périgoniales exté-
rieures, situées à droite et à gauche de l’axe floral, qui sont bientôt
suivies par les deux intérieures.

A partir de ce moment, le développement marche beaucoup
plus vite. Au bout d’une ou deux semaines, le bouton terminal
présente deux cercles formés chacun de deux folioles périgoniales,
dont les deux externes croisent évidemment les bractées supé-
rieures. Ce rapport de position est moins apparent dans les jeunes
fleurs latérales.

Les inflorescences et fleurs mâles se développent jusqu’à ce
moment comme les femelles, dans toutes leurs parties. Leur or-
ganisation morphologique est alors complète. Bientôt, sous la face
supérieure des feuilles périgoniales, quelques groupes de cellules
se distinguent des autres, et deviennent des cellules mères du
pollen ; dès lors, il ne se produit plus de nouveaux organes foliaires
dans le bouton mâle.

Dans les boutons femelles, au contraire, au milieu du mois de
juillet, on voit apparaitre, au-devant des folioles périgoniales ex-
ternes, deux organes foliaires peu proéminents, dont le contour
forme un quart de cercle (pl. IF, fig. 24). Ces deux mamelons en
saillie arrondie à l’intérieur de la fleur, formés de tissu cellulaire,
sont les carpelles. Bientôt ils se touchent par leurs faces antérieures
aplanies, et ne laissent plus entre eux qu’une fente étroite (pl. IT,
fig. 25). Le groupe formé d’un très petit nombre de cellules qui se
trouvent au fond de cette fente doit être regardé comme l’ovule du

DA W.- HOFMEISTER.

Gui. Déjà, au commencement d'août, les carpelles, dans lesquels
les cellules se multiplient rapidement, se sont soudés sans laisser
de traces de leur première séparation; avec le réceptacle floral,
ils constituent une masse homogène, terminée en un cône tronqué
qui fait saillie entre les folioles périgoniales.

La multiplication cellulaire dont les carpelles sont le siége ré-
sulte principalement de divisions transversales souvent répétées.
La portion du réceptacle qui se trouve immédiatement sous l’inser-
tion des folioles périgoniales se transforme, par l’effet d’une pro-
duction intercalaire de cellules, en ovaire infère. Dès le commen-
cement du mois d’août, le tissu cellulaire axile de celui-ci est formé
de cellules cubiques disposées en files longitudinales parallèles. De
cette multiplication cellulaire sont exceptées seulement deux ou
trois cellules, dont la situation correspond au point où se terminait
inférieurement l’étroite fissureintercarpellaire qui maintenant s’est
fermée. Ces cellules s’allongent en formant plusieurs courbures,
tandis que leurs voisines se divisent et se subdivisent transver-
salement; leur allongement s'opère aussi vers le bas; par leur
extrémité jeune, elles s'insinuent inférieurement entre les cellules
parenchymateuses de l’axe de l'ovaire. Ce sont là les sacs em-
bryonnaires (pl. IL, fig. 26, 28).

Déjà, au commencement d'octobre, les vésicules embryonnaires
et les cellules antipodes sont formées. Le sac embryonnaire et ces
vésicules ont encore une membrane délicate. Les vésicules em-
bryonnaires, au nombre le plus souvent de deux, plus rarement de
trois, s’attachent par une large surface à la paroi interne du sac
embryonnaire. Leurs surfaces d'attache sont même quelquelois
distantes l’une de l’autre, Ces vésicules sont pyriformes, courtes,
et elles renferment un nucléus, dont le contour pâle est faiblement
accusé (pl. I, fig. 27). Le nombre de leurs antipodes varie d'une
à deux ; assez souvent elles manquent tout à fait.

Pendant l'hiver, la membrane du sac et celledes vésicules pren-
nent plus de fermeté. Celle du sac et celle des vésicules antipodes
acquièrent même une épaisseur extraordinaire (pl. HT, fig. 29), et
montrent nettement des couches (pl. UE, fig. 31). Celle des vésicules
embryonnaires s’amincit, mais elle présente évidemment tous les

FORMATION DE L'EMBRYON. DES PHANÉROGAMES. 2

caractères d’une membrane de cellulose. Tel est l’état sous lequel
s'offrent les sacs embryonnaires à la fin de mars, époque à laquelle
il n’est pas difficile de les isoler, sans les rompre, du parenchyme
ambiant. Quand on les a isolés, on observe, vers leur sommet,
une particularité qui n’a élé vue chez aucune autre plante. Leur
épaisse membrane présente une ou deux places neltement cir-
conserites, où elle ne s’est nullement épaissie, et qui forment de
vraies ponctuations, bouchées par une membrane mince, très sou-
vent convexe en dehors (pl. LT, fig. à). Ces ponctuations se
trouvent tantôt sur les surfaces d’adhérence des vésicules em-
bryonnaires, tantôt à côté d'elles. On ne les observe pas sur tous
les sacs embryonnaires. |

Au réveil de la végétation, les parois de l’ovaire infère laissent
voir plus clairement les quatre zones de tissus différents qui les
composent, et qui n'étaient que faiblement indiquées auparavant
(pl. I, fig. 51). L’externe de ces zones, l'épicarpe, parcourue par
les faisceaux vasculaires qui se rendent au périgone, est médiocre-
ment riche en chlorophylle ; les parois de ses cellules sont plus
épaisses et plus fermes que celles de la zone suivante qui est pauvre
en chlorophylle, et qui constitue le mésocarpe mince ; enfin l’en-
docarpe, qui remplit l’axe de l’ovaire, est très abondamment
pourvu de chlorophylle ; mais son intérieur renferme un groupe
de cellules riches en protoplasma, et pauvre en chlorophylle, le-
quel entoure les sacs embryonnaires. On reconnait que la forma-
tion de ces quatre couches résulte uniquement des modifications
subies par les cellules d’un seul et même tissu continu; il suffit pour
s’en assurer de suivre l’organogénie de l’organe, et, en outre, de
remarquer la transition tout à fait graduelle qui existe, par exem-
ple, de la seconde couche à la troisième.

Chez nous, c’est ordinairement dans la première moitié du mois
d'avril que le Gui répand son pollen. Le temps nécessaire au tube
pollinique pour se développer, et pour arriver jusqu'aux sacs em -
bryonnaires, varie beaucoup surtout en raison du temps et de la
température. Le contact du tube pollinique avec le sac embryon-
naire à eu lieu, en 1851, vers la fin du mois de mai; en 1852,
dés le commencement; en 1855 et 1856, vers le milieu du même

QT

26 W, HOFMEISTER.

mois, Ce tube se fraye une route à travers le parenchyme du corps
stigmatique, sans que sa marche, souvent très sinueuse, soit en-
travée par l’ancienne fente intercarpellaire maintenant oblitérée.
Je ne suis parvenu que difficilement à en isoler par la dissection
de longs fragments. Dès l'instant qu’il s’insmue à travers le corps
stigmatique, ses parois gagnent considérablement en épaisseur. Il
s'applique par son extrémité obtuse contre la face externe du sac
embryonnaire, souvent sur une des ponctuations de celui-ci; mais
tout aussi fréquemment il arrive à côté de l’une d’elles. Dans un
cas, j'ai observé l'extrémité du tube bifurquée ; la branche la plus
mince et la plus aiguë s’attachait au point où le sac offrait une ponc-
tuation ; l’autre, qui était plus obtuse et plus épaisse, rampait quel-
que peu contre la paroi externe de celui-e1. Assez souvent, l’adhé-
rence entre le tube pollinique et le sac embryonnaire est assez
faible pour que les deux se séparent facilement.

Au moment où le tube pollinique arrive au sac embryonnaire,
il ne reste généralement plus, en parfait état, qu’une des vési-
cules embryonnaires qui adhèrent à l’extrémité supérieure du
sac (pl, TT, fig. 30, 31); l’autre ou les autres sont déjà racornies,
etleur contenu constitue une matière grumeleuse, blanchâtre (qui
parait jaune brunâtre par la lumière transmise). Rarement leur
membrane est-elle encore visible (pl. IT, fig. 31); plus souvent
la cellule est transformée en un corps de matière granuleuse, qui
tantôt a conservé encore la forme de la vésicule, et qui tantôt n’a
plus qu’un contour indéterminé. Dans des cas plus rares encore,
peu avant que le tube pollinique soit arrivé au sac embryonnaire,
jont vestige de la vésicule embryonnaire non fécondée a déjà dis-
paru. Au contraire, la membrane de la vésicule fécondée se montre
beaucoup plus épaisse et plus ferme qu'avant l’arrivée du tube
pollinique. |

Le premier changement important qui s'opère dans le sac em-
bryonnaire, après que le tube pollinique est arrivé à son sommet,
consiste dans l’apparition de deux gros nucléus flottant librement
dans sa cavité, que des bandes ou des fils rayonnants de mucilage
rattachent au même mucilage déposé sur les parois. L'apparition
de ces nucléus est bientôt suivie de la formation d’une cloison qui

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES. 97

divise le sac transversalement en passant entre eux ; par là celui-
ci se trouve partagé en une portion inférieure ordinairement plus
longue et une supérieure plus large. I est très vraisemblable que
celte cloison est simplement la surface de contact de deux cellules
délicates, complètes, qui remplissent chacune une moitié du
sac...

L'inférieure des deux cellules périspermiques ainsi produites,
ou bien ne se subdivise plus, ou ne produit qu’un petit nombre de
cloisons transversales ; au contraire, la supérieure, après avoir
développé quelques cloisons transversales, commence à former
plus tôt ou plus tard de nouvelles cellules dans tous les sens, de
telle sorte qu'environ quatre semaines après la fécondation le haut
du sac est déjà transformé en une masse-périspermique composée
d’un grand nombre de cellules. :

Les cellules se multiplient avec une extrême lenteur dans la
vésicule embryonnaire fécondée. Le plus souvent, même quatre
et cinq semaines après la chute du pollen sur le stigmate, elle
n'a pas subi de changement et forme une cellule simple. C'est
seulement au commencement de juin qu’elle est partagée pour la
première fois par une cloison transversale. Les deux cellules ainsi
distinguées sont ensuite subdivisées à leur tour par des cloisons
longitudinales, l’inférieure de meilleure heure et plus rapidement
que la supérieure. Plus tard, les cellules ne s’y multiplient que
très lentement; au commencement de juillet, le jeune embryon
est encore un très petit corps formé seulement de six à huit cellules,
enfermé dans l'extrémité supérieure de l’albumen, qui est déjà
volumineux. A la fin de juillet seulement son développement de-
vient rapide. À l’extrémité inférieure du préembryon, qui est court,
épais, et qui donne un suspenseur, ressort l'embryon, qu’on voit
s'enfoncer toujours de plus en plus profondément dans l’albu-
men (1).

Le Pscum album est une des plantes qui ont été le plus sou-

(1) Pour la suite du développement jusqu'à la maturité de la graine, notam-
ment sur la soudure qui s'opère entre plusieurs sacs embryonnaires qui se sont
développés en albumen dans le même ovaire, ainsi que surila polyembryonie,

28 W. HOFMEISTER.,

vent étudiées sous le rapport de la naissance et du développement
de la graine et de l'embryon. Les deux travaux qui ont eu le plus
de retentissement, au sujet de l’organogénie de cette plante, sont
le mémoire déjà cité de M. Decaisne et un écrit de MEyeR peu
élendu, mais très substantiel.

M. Decaisne regarde le tissu interne et peu dense de l’épaisse
paroi ovarienne du Gui comme l'ovaire, et les sacs embryonnaires
comme les ovules. Les plus jeunes de ceux-ci qu'il ait observés
(au commencement de juin) étaient déjà fécondés et divisés par
plusieurs cloisons transversales. Dans leur cellule supérieure il n’a
pas rencontré la vésicule embryonnaire fécondée. A côté de ces
‘sacs embryonnaires, il en a vu d’imparfaits qui étaient restés non
fécondés et unicellulés. M. Decaisne n’a observé les embryons
qu’au commencement de juillet ; il y a distingué le suspenseur et
le globule-embryon.

Les observations de Meyen ont été publiées une année plus tôt(4.
Cet observateur a commencé ses recherches dès le mois d’avril :
à cette époque il a trouvé les sacs embryonnaires, dans lesquels
cependant il n’a pas vu les vésicules embryonnaires ; mais il a très
bien découvert la vésicule fécondée dans les sacs embryonnaires
divisés en quatre à six cellules périspermiques ; quelquefois même,
à côté d’elles, il a observé la vésicule non fécondée. Toutefois il est
singulier qu'il n’ait pu se convaincre de l'existence du tube polli-
nique. La détermination des organes floraux donnée par Meyen
est entièrement conforme à celle de M. Schleiden : pour lui, le
stigmate est le mamelon d’imprégnation de l’ovule nu, sur lequel
se trouvent sans intermédiaire les folioles périgoniales. Dans un
mémoire publié plus récemment, M. Treviranus (2), après avoir
très bien décrit les états assez avancés de l’embryon et le change-

on peut consulter le travail de M. Decaisne, dans les Mémoires de l'Académie de
Bruxelles, t. XHI (1841), p. 29 et suiv., et celui de M. Treviranus, dans les
Abhandlungen d. Kais. Bayr. Akad., 2° cl., VIF, 1853.

(4) Meyen, Noch einige Worte über den Befruchtungsakt und die Polyembryo-
nie bei den hüheren Pflanzen. IAn-8°, Berlin, 1840.

(2) Treviranus, Ueber Bau und Entwickelung der Eychen und Samen der
Mistel (Abhandl. d. K. Bayr. Akad., 2° cl., 1853).

FORMATION DE L'EMRRYON DES PHANÉROGAMES, 29

ment de la fleur en fruit, détermine singulièrement les organes
floraux du Gui. Partant de l’ancienne explication de l'ovaire infère,
que l’organogénie contredit formellement, il regarde l’épicarpe
comme le tube adhérent et charnu du périanthe ; le mésocarpe est
pour lui l'ovaire ; l’endocarpe devient le tégument unique de l’ovule
dressé ; enfin le tissu léger plus intérieur est le nucelle de l’ovule.
Il reconnait le sac embryonnaire comme tel (comme amnios),
dans la supérieure des cellules périspermiques que contient ce
sac; il signale la vésicule embryonnaire fécondée, encore uni-
cellulée ; mais, ee qu'on ne peut comprendre, il prend le nucléus
cellulaire de cette vésicule pour un corps celluleux et pour «le
commencement de la substance qui, dans la graine müre, se montre
comme albumen. » Cette idée conduit M. Treviranus à des consé-
(quences erronées.

M. Schacht a dessiné en passant l’ovaire et les sacs embryon-
naires du Gui, sous l’influence de la théorie de Horkel et Schleiden.
Sans parler de ses inexactitudes, il n’a rien appris qu’on ne sût
depuis le travail de M. Decaisne.

Griffith s’est occupé de l’embryogénie (4) d'espèces indétermi-
nées de ’iscum de l'Inde. L'une de celles qu’il a étudiées (espèce
de Mergui) diffère évidemment des Fiscum, quant au genre, à en
juger par ses figures : c’est une Santalacée. — Dans l’espèce de
l'Himalaya, la soudure des organes essentiels de Ia fleur femelle
s'opère plus tard et moins complétement que dans le Fiscum album.

L'opinion de M. Decaisne relativement à l’affinité intime des
Loranthacées et des Santalacées, qui a été adoptée dans ces derniers
temps par la majorité des botanistes, est encore confirmée par la
connaissance exacte de l’organogénie. L'organisation des organes
femelles de l’une et de l'autre de ces deux familles ne présente
qu'une différence importante, à savoir, que, dans les Loranthacées,
l'ovule unique, renfermant plusieurs embryons, est dressé sur le

(4) Trans. Linn. Soc, XVIII (1841), p. 74; XIX (1845), p. 181.

30 W. HOFMEISTER.

fond de la cavité ovarienne, tandis que dans les Santalacées il
existe un placenta central libre, qui porte à son sommet plusieurs
ovules pendants, ne produisant chacun qu’un seul sac embryon-
naire. C’est là une différence de degré qui tient plus à notre ter-
minologie qu’à la marche même du développement. De là ces deux
familles présentent un certain parallélisme dans leur embryogénie.
Sous ce rapport, les Osyris, Thesium, ressemblent aux Fiscum ;
les Santalum sont plus rapprochés des Loranthus.

IT. — SANTALACÉES.

Thesium alpinum Lin., et Th. intermedium Schrad.

Les trois ovules nus, pendants de l'extrémité du long placenta
cylindrique et basilaire des T'hesium, dirigés obliquement vers le
bas, consistent, avant la fécondation, en masses ovoides oblongues,
formées d’un tissu à petites cellules, dont l’axe est occupé par une
cellule étroite et cylindrique, qui égale presque en longueur
l’ovule lui-même. Cette cellule est le sac embryonnaire. Il est en-
vironné de cellules qui, autour de sa portion supérieure, ne for-
ment qu’une seule couche, tandis qu’elles en constituent plusieurs
autour de sa portion inférieure. Sous sa voûte sont fixées deux
cellules proportionnellement petites, pyriformes-raccourcies, qui
sont les vésicules embryonnaires. Les tubes polliniques descendent
rapidement du stigmate et arrivent généralement en grand nombre
dans la cavité ovarienne, où ils forment un lacis entremêlé et
lâche. Parfois certains d’entre eux présentent de gros renflements
vésiculeux dont le contour est irrégulier. Les ovules ne subissent
pas de changement appréciable, jusqu’à ce que l'extrémité d’un
tube pollinique pénètre entre les cellules de la couche qui recouvre
le sommet du sac embryonnaire et arrive ainsi jusqu'à la mem
brane de ce sac. à

. Immédiatement après l’arrivée de ce tube, la membrane du sac
embryonnaire commence à gagner considérablement en étendue,
à son côté extérieur, opposé au placenta, tout à fait sous son extré-
mité: Là sa membrane se voûte vers l’extérieur, écarte les cellules

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES. 31

de la couche enveloppante, et ressort en vésicule. Ainsi le sac
change entièrement de configuration : tandis que son côté interne
reste aussi peu étendu qu’à l’origine, l’externe s’étend en un ren-
flement dont la section est demi-cireulaire et devient elliptique par
la suite du développement. Son sommet primitif, où s’attachent les
vésicules embryonnaires, semble par suite avoir rétrogradé sur
son côté interne,

Pendant ce temps les vésicules embryonnaires s'étendent dans
la direction du plus grand renflement du sac. D'abord elles se
montrent allongées dans une direction perpendiculaire à l’axe lon-
gitudinal de ce dernier. L’une d'elles s’accroit beaucoup plus que
l’autre, qui ne tarde pas à s’oblitérer et disparaitre. Peu au-dessous
de ces vésicules, il s’est formé une eloison transversale qui sépare
la grande portion inférieure du sac, enfermée dans le tissu de
l'ovule, de sa portion supérieure demi-globuleuse et en saillie dans
la cavité ovarienne. — Cette portion inférieure continue de former
une cellule simple pendant tout l’accroissement ultérieur de la
graine; son extrémité inférieure s’allonge en un long tube qui pé-
nètre d’abord dans le tissu de l’ovule, et qui, après avoir percé
celui-ci, se coude en angle aigu, et, descendant verticalement, pé-
nètre encore profondément dans la substance du placenta. Quant
à la portion supérieure du sac embryonnaire, une longue suite de
partitions cellulaires la change en un albumen qui, s’accroissant
dans le même sens, se transforme en une masse ovoïde, longue-
ment pendante dans la cavité ovarienne,

Le développement de la vésicule embryonnaire fécondée en
préembryon et embryon s'opère également ici (selon la règle
presque générale) dans la direction selon laquelle l’albumen
s'étend le plus fortement, Comme cette direction, dans les
T'hesium, est presque diamétralement opposée à la ligne qui
s'étendait de l’un à l’autre bout du sac embryonnaire non fé-
condé, l’extrémité du préembryon qui est en voie d’accroissement
s’arque, souvent dès la première jeunesse, vers le fond de la ca-
vité ovarienne. Dans sa courbure, le préembryon reproduit la dif-
férence qui existe entre la direction de l'accroissement du sac em-
bryonnaire chez les T'hesium et chez la majorité des Phanérogames

a? W. HOFMEISTER,

(chez lesquelles elle est opposée à celle de l’ovule, tandis qu’elle
est dans le même sens chez les T'hesium). La cellule terminale du
préembryon ne se subdivise par des cloisons horizontales qu'un
petit nombre de fois avant que les cellules commencent à s’y mul-
tiplier dans tous les sens. Une petite portion du tissu cellulaire
qui se produit ainsi contribue à former le suspenseur.

Pendant que l’albumen se développe, beaucoup d’entre les tubes
polliniques qui sont arrivés dans la cavité ovarienne restent encore
vivants. Souvent quelques-uns s’attachent par leur surface laté-
rale à l'extérieur de l’albumen recouvert par la membrane du sac
embryonnaire, et cela avec une telle force, qu’on ne peut les en
détacher sans les rompre.

Les ovules non fécondés (je n’en ai jamais trouvé plus d’un fé-
condé) grandissent pendant que celui qui a été fécondé s’ac-
croit; la cause en est que les couches qui enveloppent le sac
embryonnaire augmentent aussi beaucoup le nombre de leurs
cellules ; mais jamais le sac de ces ovules ne rompt la couche
cellulaire qui le couvre...

III. — ARISTOLOCHIÉES.

Aristolochia Clematitis Lin.

Les ovules de l’Aristolochia Clematitis offrent une forme trian-
oulaire par devant, et parallélogrammique de protil. Le raphé,
considérablement développé, constitue la plus grande partie de
l’ovule non fécondé. Le nucelle, recouvert de deux téguments
minces, est fortement aplati en’avant et en arrière. Le sac em-
bryonnaire, situé dans le sens de son axe longitudinal et complé-
tement enfermé dans son tissu, a la forme d’une massue étroite.

Quand la fécondation a eu lieu, avant que les vésicules em-
bryonnaires subissent quelque changement, le sac embryonnaire
se subdivise plusieurs fois par production de cloisons transver-
sales. À l’époque où le périanthe se flétrit, ce sac se montre, sur
les coupes longitudinales menées par le raphé, comme une file
longitudinale de cinq à sept cellules, de même que le sac em-

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES. 33

bryonnaire fécondé du Gui... L’albumen gagne d’abord seu-
lement en largeur, mais non en épaisseur. Deux semaines après la
chute du périanthe, si on l’isole par la dissection, on le voit consti-
tuant une masse plate, formée d’une seule couche de grandes cel-
lules, dont chacune renferme un nuecléus pariétal. L'une des vési-
culesembryonnairesa disparu alors ; l’autre, qui a étéfécondée, n’a
que peu changé : c’est une cellule à parois plus épaisses qu'avant
et peu après la fécondation, encore simple et pyriforme raccourcie,
attachée par une large surface à la paroi interne du sac. Le déve-

loppement de l'embryon est très lent et faible, semblable à celui de
l'Asarum.

IV. — ASARINÉES.

Asarum europæum Lin., et A. canadense Lin.

Les ovules de ces deux espèces d’Asarum ne sont pas aplatis
comme ceux de l’Aristolochia, mais ils ressemblent à ceux-ci
pour l’organisation. De bonne heure, même avant la fécondation,
on remarque un développement prédominant dans le côté posté-
rieur du raphé. La cause en est que les cellules de la couche sous-
épidermique grandissent considérablement, tandis que celles de
l'épiderme lui-même, augmentant beaucoup en nombre dans le
sens des tangentes, recouvrent les premières, très grandies, en
formant une couche de très petites cellules.

Le sacembryonnaire en massue se trouve dans l’axe du nucelle,
recouvert de tous les côtés par le tissu de celui-ci, qui forme
même trois assises sur son sommet. Les vésicules embryonnaires,
proportionnément petites, globuleuses, au nombre (le deux ou plus
rarement de trois, sont fixées par de petites surfaces à la paroi
interne de la voûte du sac. Le gros nucléus primaire, aplati,
ellipsoïde du sac se trouve dans la région moyenne de la paroi
latérale de celui-ci, au point de concours de lignes rayonnantes
de protoplasma granuleux. Les vésicules antipodes, au nombre
de trois, sont d’une grosseur qui n’a pas d’égale ailleurs, et,
pressées l'une contre l’autre, elles remplissent toute la moitié in-

4° série. Bor. T. XII. (Cahier n° 1.) 5 3

ol W. HOFMEISTER,
férieure du sac. Je les ai trouvées ainsi, constamment chez l’A4sa-

rum europæum, généralement chez l’4. canadense. Cependant

cette dernière espèce présente des exceptions ; ainsi on en voit
quelquefois plus de trois, à différentes hauteurs, paraissant former
un parenchyme, et ailleurs elles manquent complétement.

Quand le tube pollinique est arrivé au sommet du sac embryon-

naire, celui-ci est subdivisé par une cloison transversale en deux

cellules, qui occupent ioute la portion de sa cavité supérieure aux
vésicules antipodes. Dans les cas où ces dernières manquent, l’in-
férieure des cellules récemmentformées se montre séparée par une
cloison de l'extrémité chalazique du sac, ce qui indique l'existence
d’une membrane tout autour de ces mêmes cellules. Dans un cas,
j'ai reconnu nettement que cette production de cellules avait eu
lieu dans le sac embryonnaire avant que le bout du tube pollinique
eût atteint le sommet de celui-ci (4). Ces cellules de seconde gé-
nération continuent ensuite de se subdiviser par des cloisons lon-
gitudinales et obliques ; par là l’albumen devient rapidement un
corps celluleux, d’abord cylindrique, et plus tard ventru. Pendant
que ceci se passe, les vésicules embryonnaires et leurs antipodes
restent longtemps sans altération. Enfin l’une des vésicules em-
bryonnaires disparait; mais l’autre, qui a été fécondée, demeure
encore à l’état de cellule indivise. C’est seulement quand l'albumen
est parvenu à ses dimensions à peu près définitives, qu'il com-
mence à s’opérer dans cette vésicule fécondée une suite de divi-
sions successives. C’est d’abord une division transversale que suit
bientôt le partage dans le même sens de la cellule secondaire in-
férieure en voie de s’allonger. Le jeune embryon est alors un corps
cellulaire ovoïde raccourci, qui présente, à son extrémité infé-
rieure, généralement quatre cellules, plus haut deux cellules, et qui
est fixé lâchement par une seule cellule-suspenseur à la parorinterne
du sac embryonnaire. Plus tard, la cellule -suspenseur elle-même
subit une subdivision longitudinale. Même dans la graine müre,

(1) Sans doute on pourrait expliquer cette observation en admettant qu'un
autre tube pollinique avait pénétré dans l’ovule, et qu'il a pu être enlevé par
la section qu'on a faite; cependant je n'ai jamais vu plus d'un tube pollinique
s'introduire dans le micropyle de l'ovule des Asarum.

SO

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES. 35

l'embryon est un très petit corps oblong, dont le contour est
presque quadrilatéral (pas plus large au sommet qu’à la base), que
composent un petit nombre de cellules qui vont en diminuant de
grandeur du point d'attache vers le sommet de l'embryon, tandis
que leur contenu solide va en augmentant dans le même sens.

V. — CYTINÉES.

Cytinus Hypocistis Lin.

Les huit placentas de l’ovaire infère du Cytinus forment à la
face interne de cet organe huit bandes longitudinales saillantes,
dont la disposition correspond à la direction des faisceaux vascu-
laires, qui se rendent par deux à chacune des quatre pointes péri-
goniales. Ces placentas ressemblent tout à fait pour la forme à ceux
des Orchidées : ils se montrent ramifiés en arbres tant en long
qu’en travers. Aucune ramification des faisceaux vasculaires ne se
rend à ces placentas, dont les dernières subdivisions, nombreuses
et serrées, sont les ovules fort petits et transparents.

A l’état le plus jeune que j'aie observé (environ huit jours avant
l’ouverture du périanthe), l’extrémité de chaque processus ovu-
laire est une masse cellulaire en massue étroite, composée d’une
seule file axile de cellules, que recouvre une assise cellulaire,
Cette portion de l’ovule est le futur nucelle. Tout autour de sa base
le tissu du funicule donne naissance à un bourrelet circulaire, que
des subdivisions répétées de ses cellules transforment bientôt en
une enveloppe entourant étroitement le nucelle, et comprenant
deux couches de cellules : c’est là le tégument unique de l’ovule.….

La cellule supérieure de la série axile de cellules du nucelle
grossit de bonne heure considérablement... Les cellules qui l’en-
ferment suivent son extension en s’aplatissant de plus en plus, se
divisant et se multipliant. Cette cellule en voie de développement
rapide est le sac embryonnaire. Son gros nucléus primaire, qui
d’abord flottait au milieu du protoplasma granuleux dont est rem-
plie toute la cellule, se montre plus tard englobé dans le revête-
ment pariétal de la même matière... Outre cet amas protoplas-

36 NV. HOFMEISTER.

mique qui entoure le nucléus primaire, il s’en forme encore deux
dans le jeune sac embryonnaire : l’un dans la concavité de sa
vouüle, l’autre dans celle de sa base, Dans l’un et l’autre apparais-
sent des nucléus cellulaires libres, généralement au nombre de
deux pour le premier, de trois pour le second, et autour de ces
nucléus se produisent des cellules sphériques. Les deux cellules
qui se sont formées ainsi dans le haut du sac sont les vésicules
embryonnaires; les trois qui se sont produites dans le bas de la
même cavité sont les vésicules antipodes. Les vésicules embryon-
naires deviennent bientôt pyriformes, et pendent dans la cavité
du sac, largement attachées à sa paroi interne. Les vésicules anti-
podes se dépriment à mesure que l'ovule grossit.

C'est à ce degré de développement que sont arrivés les ovules
du Cytinus quand le périanthe s’épanouit. Les cellules de la couche
qui enveloppe le sac embryonnaire, bien que fortement aplaties,
sont encore reconnaissables. Mais, pendant la floraison, le gon-
flement considérable de l’ovule, et particulièrement du sac em-
bryonnaire, a pour effet de faire disparaitre la cavité de ces cel-
lules, de telle sorte que la membrane de ce sac semble appliquée
immédiatement contre la face interne du tégument. Du pollen dé-
posé artificiellement sur le stigmate a émis son tube au bout de
six à douze heures. (La mort des sujets qui avaient été envoyés
frais de Trieste n’a pas permis à M. Hofmeister de pousser plus
loin ces observations.)

L'organisation des graines mûres du Cyfinus a été décrite par
Rob. Brown (1). Je n’en ai pas eu à ma disposition. Le corps cel-
luleux logé dans l’intérieur du tégument séminal, que Rob. Brown
regarde comme un embryon homogène, est à mes veux l’albu-
men, dans l’intérieur duquel il faudra chercher l'embryon.

(1) Transact, Linn. Soc., XIX, p. 229.

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES. y

VI. — BALANOPHORÉES.

Cynomorium coccineum Mich.

Un nombre non exactement déterminé de faisceaux vasculaires
(deux à cinq, le plus souvent trois) entrent dans la base de la fleur
. femelle du Cynomorium. Au niveau où l'ovaire s’enchâsse dans
l'axe claviforme de l’inflorescence, ils sont tellement rapprochés,
qu'ils semblent n’en faire qu'un. Leur nombre parait être en
rapport avec celui également variable des folioles périgoniales.
Dans les cas où celles-ci manquent tout à fait, ou bien dans les-
quels il n’en existe qu’une seule à l’état rudimentaire, Ja fleur fe-
melle n’a que deux faisceaux vasculaires : c’est ce qu’on voit, par
exemple, pour celles qui constituent les dernières ramifications des
dichasium. Chaque foliole périgoniale complétement développée
reçoit un rameau du faisceau vasculaire qui se trouve le plus rap-
proché d’elle dans la paroi ovarienne; ce rameau parcourt la lon-
gueur de la foliole, et se termine un peu au-dessous du sommet de
celle-ci par un groupe de cellules fibreuses spirales et réticulées.
Le reste du faisceau de chaque foliole périgoniale est composé de
vaisseaux spiraux, de même que ceux de l'ovaire. Arrivés à la base
du style, les faisceaux vasculaires, s’il en existe plus de deux, se
réunissent en deux qui pénètrent dans le style, montent verticale -
ment dans son épaisseur, et vont se terminer un peu au-dessous
du stigmale velouté, aux deux côtés de la fente longitudinale pro-
fonde de celui-ci. Un canal longitudinal étroit, mais bien visible,
suit l'axe du style, et aboutit à la cavité ovarienne (pl. IV, fig. 35),

Immédiatement au-dessous de l'embouchure du canal stylaire
dans la cavité ovarienne se montre, suspendu par un funicule
court, l'ovule conformé en ellipsoïde presque globuleux; il rem-
plit entièrement cette même cavité. Le point d'attache de cet
ovule se trouve entre les deux points d'entrée des faisceaux vas-
culaires dans le style, tantôt exactement au milieu entre les deux,
tantôt plus rapproché de l’un des faisceaux. Ces faisceaux envoient
au funicule des rameaux qui se joignent tout au-dessus de sa nais-_

38 W. HOFMEISTER.

sance, et arrivent jusqu’à la chalaze. Le funicule est légèrement
recourbé en S (pl. IV, fig. 35).

Le nucelle ellipsoïde aplati, recouvert d’un seul tégument épais,
fait avec le funicule un angle d'environ 120 degrés. La direction
horizontale de l’ovule correspond exactement à celle de l’entaille
du sügmate ; un plan passant par la chalaze et le micropyle ren-
contre également eette entaille, au point intermédiaire entre les
deux faisceaux vasculaires du style... Le nucelle et le canal mi-
cropylaire n’offrent absolument aucune courbure.

Le tégument est composé en majeure partie de cellules polyé-
driques, de grandeur médiocre, qui deviennent toujours de plus
en plus petites vers le micropyle. Ces cellules sont complétement
remplies de grains d'amidon. La couche cellulaire la plus interne
du tégument est formée de cellules fortement aplaties en table.
Des cellules semblables revêtent le canal micropylaire. Quant au
nucelle, 1l est composé de cellules à parois minces, un peu aïlon-
gées. Comme dans la grande majorité des Phanérogames, ces cel-
lules vont en rayonnant de tous les côtés et vers le haut, à partir de
la chalaze. Le sac embryonnaire est enfermé dans l’intérieur de ce
tissu, dont deux couches recouvrent même son sommet (pl. IV,
fig. 35); il constitue une grosse cellule claviforme, qui occupe
presque toute la longueur de l’axe du nucelle. Dans l’ovule non fé-
condé, on voit sous sa voûte deux vésiculesembryonnaires courtes,
tenant par une large surface à la paroi de ce sac, et qui n’ont pas
de membrane solide. Dans la région moyenne de ce sac, on re-
marque appliqué contre sa paroi son gros nucléus primaire.

Dans l’état le plus jeune que j'aie observé, le sac embryonnaire
fécondé était rempli par quatre grosses cellules périspermiques
arrangées par paires les unes à côté des autres (pl. IV, fig. 86).
Ces cellules provenaient, sans doute, de deux partages successifs
de la cavité entière du sac. Sous la voûte de celui-ci, je n'ai vu
alors qu'une seule vésicule embryonnaire, circonscrite à cette
époque par une membrane de cellulose ; l’autre avait disparu sans
laisser de traces.

Dans un jeune fruit plus avancé, le nombre des cellules de l’al-
bumen a beaucoup augmenté, et cela principalement dans la moitié

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES. 39

supérieure du sac dont la forme en massue se prononce de plus en
plus (pl. IV, fig. 37). Là les nouvelles cellules sont disposées selon
les trois directions de l’espace, tandis que celles qui occupent la
moitié inférieure et la plus étroite du sac ne subissent pendant long-
temps que la division transversale. On trouve souvent le bout du
tube pollinique adhérent à la paroi externe du sac (pl. IV, fig. 87).
La vésicule embryonnaire fécondée est divisée de bonne heure par
une cloison transversale. La supérieure des deux cellules ainsi
distinguées représente le suspenseur; bientôt l’autre cellule est
subdivisée par des cloisons dirigées en divers sens qui la changent
en globule-embryon. La cellule-suspenseur reste le plus souvent
très courte; il est rare qu’elle devienne plus longue qu’elle n’est
large.

Là finissent mes observations; les seuls matériaux dont j'aie pu
disposer ne m'ont pas permis de voir les états plus avancés, Il ré-
sulte des faits concordants qui ont été vus par L.-C. Richard (1),
MM. Weddell (2) et J.-D. Hooker (3), que le seul changement
important que subisse le fruit, jusqu’à la parfaite maturité de la
graine, observée uniquement jusqu’à ce jour par M. Hooker, con-
siste en ce que le tissu du nucelle et la plus grande partie de celui
du tégument cèdent sous la pression qu’exerce sur eux l’albumen
dont le volume augmente toujours, et qui finit par devenir globu-
leux. — L'embryon globuleux, le premier et pendant longtemps
le seul qu'on ait connu dans les Balanophorées, a été décrit,
dès 1822, par Richard. Son prolongement unilatéral, conique, di-
rigé obliquement en bas, dont la découverte est due à M. 3. D.
Hooker, a été regardé comme l’extrémité radiculaire, ce qui est
parfaitement exact, puisque ce prolongement regarde le micropyle
que j'ai moi-même découvert.

Ge qui précède prouve qu’on ne peut signaler que comme une
singularité l'essai qu'a fait M. Weddell pour étendre même au
Cynomorium sa théorie de la nudité de l’ovule et des graines des

(4) Ann. du Mus., VIIT, p. 426, pl. xxr, fig. O, P.
- (2) Ann. des sc. nat., 3° série, t. XIV, p. 480.
(3) Transact. Linn. Soc., XXII, p. 36.

h0 W. HOFMEISTER.

Balanophorées, et pour qualifier de testa la paroi ovarienne de ces
plantes. Or la situation de l'embryon, qu'il avait exactement re-
connue, aurait dù lui faire abandonner cette idée ; car, pour l’ex-
pliquer, il a été forcé d'admettre l'existence d’un suspenseur d’une

longueur demesurée, qui parcourrait le sac embryonnaire dans
toute sa longueur.

Langsdorffin hypogæa Mart. (1).

On sait que les fleurs femelles cylindriques du Langsdorffia
sont très serrées à la surface de l’axe floral, qui est demi-globuleux
à l’état jeune. Dans leur tiers supérieur, ces fleurs sont soudées
entre elles; leur portion inférieure, en forme de colonne hexago-
nale, est complétement libre, bien qu’elle soit en contact immé-
diat avec les fleurs voisines. Au moment où ces fleurs sont déjà
en état de subir l’action du pollen, leur longueur est d'environ
1°",9, le style compris. Ce style, qui est fortement saillant, est
parcouru par un canal étroit, qui vient s'ouvrir à l’extérieur laté-
ralement, dans le milieu de son extrémité supérieure papilleuse.
Ce canal parcourt toute la longueur de la fleur, pour venir s'ou-
vrir dans la cavité ovarienne qui est ovale, très petite, et située
exactement au-dessus du niveau où cette fleur s'implante sur l'axe
floral (pl. IV, fig. 38). Les parois de la cavité ovarienne sont com-
posées de petites cellules en table hexagonale, dont le contenu est
très riche en protoplasma. Autour de cette cavité et dans toute
l'étendue au-dessus, dans laquelle l'ovaire est libre, non soudé àses
voisins, les parois, relativement épaisses, sont formées de cellules
étroites, prismatiques allongées, qui peuvent être facilement 1s0-
lées, dont le contenu est aqueux, et qui, outre le nucléus, ne ren-
ferment que peu de matières solides. A partir du niveau où com-
mence l’adhérence réciproque de la partie supérieure des fleurs,
les cellules sont beaucoup plus grandes, modérément allongées,

(1) Les états jeunes ont été observés sur une portion d'inflorescence conser-
vée dans le vinaigre, qui m'a été donnée par M. J. D. Hooker. ‘J'ai reçu de
M. le professeur Mettenius les fruits avec la graine mûre.

FORMATION DE L’EMBRYON DES PHANÉROGAMES. LA

et le contenu granuleux, solide, dont elles sont presque entière-
ment remplies, a pour principe dominant la cire. Dans l'axe de ce
tissu se trouve un cylindre mince, formé de longues cellules
étroites, qui ressemblent à celles dont est formé le bas de l'ovaire.
Ce cylindre se continue directement avec celui du style libre; dans
son axe règne le canal stylaire. Entre les cellules à contenu ei-
reux de la portion supérieure des fleurs se trouvent éparses quel-
ques cellules prosenchymateuses, plus allongées, dont les parois
sont, dès cette époque, fortement épaissies, et marquées de petites
ponctuations. Ces cellules parenchymateuses forment une enve-
loppe cylindrique, concentrique au canal stylaire, qui n’est ni com-
plète, ni bien régulière.

Autour de la base du style libre règne un bourrelet périphérique
(pl. IV, fig. 38, z) composé de saillies cellulaires, inégalement con-
formées, qui peuvent bien être les rudiments d’un périgone. La
face extérieure de ces cellules, comme celle des cellules du som-
met de la fleur, est revêtue d’une cuticule fortement ridée en
réseau, semblable à celle qui se trouve sur les processus latéraux
en massue de l’axe floral des Balanophorées, comme sur le bout
supérieur des écailles des Hélosidées, et sur les inflorescences du
Langsdorffia lui-même.

Dans une partie des fleurs que j’ai examinées, la cavité ovarienne
était presqueentièrement remplie par uneseule cellule relativement
grande. Cette cellule pendait librement dans la cavité de l'ovaire;
elle était seulement fixée à une cellule-pédicule courte, par un point
situé juste au-dessous de son sommet (pl. IV, fig. 39). Elle doit être
regardée, avec son support, comme l’ovule du Langsdorffia. Avec
celui du Sarcophyte, c’est non-seulement le plus petit (longueur
1/11° de millimètre, largeur 1/15° de millimètre), mais encore le
plus simple de tous les ovules connus, puisqu'il ne comprend
qu'une seule cellule. Dans son extrême simplicité d'organisation,
il représente, ainsi que le montre la situation de l'embryon, la
forme la plus pure qu’on puisse imaginer d’un ovule anatrope ;
en effet, 1l n’est pas douteux que la direction de la grande cellule
constituant à la fois l’ovule et le sac embryonnaire ne se portät en
bas, à l'origine, selon le sens du pédicule, et que le développement

2 WW. HOFMEISTER.

prépondérant d’un côté de la portion, qui paraît finalement former
la moitié inférieure, n’ait relevé le sommet du sac embryonnaire.

Je n’ai pu reconnaitre les détails de l’organisation du contenu
du jeune sac embryonnaire. Dans la plupart des cas, il s'était
ramassé en une masse informe (pl. IV, fig. 39). Dans d’autres
ovaires pris sur la même inflorescence, j'ai vu un nueléus cellu-
laire, proportionnellement petit, appliqué contre la paroi du sac.
Je n'ai pas observé de vésicules embryonnaires.

La cavité ovarienne d’autres fleurs moins nombreuses, dans la
même inflorescence, était remplie par un corps très différent. Sous
le rapport de la forme, ce corps ressemblait, en général, au sac
embryonnaire que je viens de décrire; comme celui-ci, ilétait fixé
à la paroi ovarienne par l'intermédiaire d’une cellule-pédicule qui
tenait à lui latéralement, un peu au-dessous du sommet. A cela près,
il n'avait pas de connexion organique avec la paroi de l'ovaire,
d’où on l'isolait sans peine. Il était composé de cellules en nombre
variant entre huit et douze, disposées en quatre files longitudinales,
et toutes pleines de gouttelettes d'huile. Dans une des quatre cel-
lules de l’extrémité de ce corps se trouvait régulièrement une cel-
lule en forme d’utricule cylindrique, fixée par une large surface à
la paroi externe libre de la cellule qui la contenait. Près de ce
point adhérait, dans la plupart des cas, à la surface extérieure du
corps celluleux, une cellule filiforme, à parois épaisses, qui était
indubitablement le bout d’un tube pollinique (pl. IV, fig. 40). Les
cellules qui forment ce corps adhèrent peu entre elles (vraisembla-
blement par l'effet du séjour prolongé dans le vinaigre concentré) ;
une pression légère sur la lame de verre dont on couvre la pré-
paration, le simple contact accidentel des aiguilles à dissection,
résolvent ce corps cellulaire en un groupe de cellules rétrécies aux
deux bouts et presque fusiformes. On voit ensuite déchirée la
membrane qui renfermait ces cellules dissociées.

Par les caractères principaux de son organisation, ce corps
cellulaire correspond tout à fait à un sac embryonnaire fécondé
depuis assez peu de temps, divisé en un petit nombre de cellules
périspermiques, où une de ces cellules les plus hautes renferme la
vésicule embryonnaire fécondée (sous la forme d’une utricule cy-

*

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES, h3

lindrique). Cependant deux circonstances viennent à l’encontre de
celte interprétation : ce sont l'abondance des gouttes d'huile dans
le contenu liquide des cellules, et la petitesse des cellules de l’albu-
men comparée aux dimensions de ces mêmes cellules dans la graine
mûre. La dernière de ces particularités, quoique ne se présentant
aussi prononcée nulle part dans les autres végétaux, se retrouve
dans les autres Balanophorées, comme dans le Sarcophyte san-
_ guinea et dans les Balanophora. La présence de l’huile dans lal-
bumen très jeune, en voie de développement actif, quelque isolé
que paraisse le fait, d’après ce qu’on a vu jusqu’à ce jour, est con-
firmé, pour le Langsdorffia, par M. Karsten, qui a pu étudier la
plante vivante, dans ses figures (1) qui, pour le reste, différent
beaucoup des miennes. Mais peut-être cette circonstance est-elle
très répandue ; car les granules du protoplasma, que leur petitesse
soustrait à l’observation directe, peuvent n’être, dans beaucoup de
cas, que des gouttelettes d’huile. C’est ce que j'ai parfaitement re-
connu, par exemple, chez le Zathrœa squamaria. Ces raisons me
font regarder les corps celluleux dont il s’agit comme des sacs
embryonnaires développés normalement et non déformés, ni près
de mourir.

Ce sont ces corps que M. J. D. Hooker a reconnus pour les
ovules du Langsdorffia, et dont il a donné une description exacte,
qui peut être regardée comme un beau modéle pour les recherches
de la phytotomie la plus fine. — Je n’ai pas eu à ma disposition
les: états intermédiaires entre ce degré de développement et la
oraine müre,.

La masse de fruits mûrs est environ cinq fois plus large que
n’était l’inflorescence; sous les autres rapports, la formation des
fruits n’a fait subir à celle-ci que de faibles changements. Les ex-
trémités libres des styles sont tombées ; le bourrelet périphérique
qui entoure leur base a considérablement gagné en hauteur, par
simple agrandissement de ses cellules, à ce qu’il paraït, et s’est
resserré (pl. IV, fig. 41). Une pointe parcourue par un canal en eul-
de-sac indique, à la surface de la masse fructifère, la situation de

(1) Nov. Acta Acad. nat. cur., XXVI, pars 2, tab. rv, fig. 6, 7,

TA WW. HOFMEISTER.

chaque graine cachée dans son intérieur. Dans la portion supé-
rieure des parois ovariennes qui renferme de la cire, le nombre
des cellules fusiformes à parois épaisses a beaucoup augmenté ;
maintenant elles forment un long cylindre qui renferme le canal
stylaire oblitéré. La portion inférieure de l’ovaire, sur toute son
étendue qui est libre dans la fleur, et qui est composée de cellules
prismatiques allongées, molles et lâches, est maintenant presque
totalement occupée par la graine et par son enveloppe immédiate.
Cette enveloppe est entièrement analogue au noyau des fruits dru-
pacés, et elle est formée de deux couches de cellules à parois très
épaisses et ponctuées, qui sont allongées sur ses faces latérales et
presque cubiques dans sa large surface terminale (pl. IV, fig. 41). La
graine, comme provenant d’un sac embryonnaire nu, est dépour-
vue de tout tégument à elle propre. Elle consiste en un corps ovale-
oblong (pl. IV, fig. 41,42), logé assez au large dans le noyau, com-
posé de grandes cellules à parois minces, que remplit un mélange
de beaucoup d'huile et d’un liquide peu albuminoïde. — Ce tissu
cellulaire est l’albumen ; à son quart supérieur se trouve, dans
son axe longitudinal, l'embryon globuleux, composé de petites
cellules, qu’un suspenseur grêle et, cylindrique, formé d’une file
simple de cellules, a fixé à la surface interne et près du sommet
du sac embryonnaire (pl. IV, fig. 44).

La structure intérieure du pistil du Langsdorffia était Set tout
à fait inconnue jusqu'aux observations de M. J. D. Hooker.
M. Weddell non-seulement ne s’était pas aperçu de l’existence de
la cavité ovarienne, mais encore avait cru pouvoir en nier formel-
lement l'existence (4). — Le travail de M. Karsten (2), qui est
postérieur à celui de M. Hooker, diffère de celui du botaniste an-
glais et du mien; il est d’ailleurs moins complet. M. Karsten
admet que le sac embryonnaire est uni organiquement de tous les
côtés avec les parois de l'ovaire; comme M. Weddell, il prend
toute la fleur pour un ovule nu... Il n’a pas non plus reconnu le
suspenseur de l'embryon; mes observations sur ce point, pour

(1) Ann, des sc. nat., 3° série, XIV, pl. xi, fig. 56.
(2) Novg Acta Acad. L. C, nat, cur., XX VI, pars. 2, pag. 906 et seq.

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES,. L5

les Balanophorées, seront donc les premières publiées ; elles per-
mettent aujourd’hui de déterminer la direction de l'embryon de ces
plantes.

Sarcophyle sanguinea Sparrm.

Les fleurs femelles du Sarcophyle, réduites à des pistils sans
enveloppe florale, sont, comme on le sait, réunies en petites têtes
elobuleuses, dispersées sur les branches d’une panicule lâche ;
chacune d'elles est intimement soudée par les côtés avec ses voïi-
sines, et ne devient libre que dans sa portion supérieure.

Le pistil a la forme d’une bouteille basse, à col court et à ori-
fice entouré d’un large rebord. Ce rebord est le stigmate, dont la
surface est couverte de courtes papilles demi-globuleuses, aux-
quelles, 'sur les exemplaires que j’ai examinés, adhéraient quelque -
fois des grains de pollen émettant leur tube. Au centre du stigmate
s ouvre le canal Stylaire étroit, qui descend ensuite verticalement
jusqu’à la petite cavité arrondie de l'ovaire (pl. IV, fig. 48). Celle-
ei est entourée de nombreuses couches concentriques de cellules à
parois minces, dont le contenu est trouble et blanc grisàtre. Une
couche mince du même tissu entoure le canal stylaire. La masse
principale des parois ovariennes consiste en cellules assez grandes,
arrangées en damier rayonnant, à parois fermes, ponctuées , à
contenu et parois brun rouge (sur les échantillons conservés dans
le vinaigre). Les cellules ossifiées des parois ovariennes, qui sont
caractéristiques pour le Langsdorffia et pour beaucoup d’Hélosi-
dées, manquent complétement au Sarcophyte. On ne trouve aussi,
n1 sur les fleurs de cette plante, ni sur aucun organe voisin, la cu-
ticule élégamment aréolée qui a été signalée chez le Langsdorffia.

Dans les fleurs fécondées depuis peu, la'voüûte de la cavité ova-
rienne présente latéralement, près de l'embouchure interne du
canal stylaire, un corps globuleux ou en ovoïde raccourei, fixé par
l'intermédiaire d'une cellule-pédicule discoïde, qui pend librement
dans cette cavité et en remplit environ un tiers. Ce corps est formé
d'une grande cellule, que des cloisons subdivisent en deux à

6 W. HOFMEISTER.

quatre cellules de seconde génération (pl. V, fig. 44). Les infériéures
de celles-ci sontremplies de protoplasma, dans lequel on voit le plus
souvent un gros nucléus globuleux. La supérieure, qui est la plus
rapprochée de l’orifice du canal stylaire, contient moins de proto-
plasma ; dans sa concavité supérieure sont attachées deux petites
cellules pyriformes, presque demi-globuleuses. La surface externe
de la cellule qui renferme ces dernières présente, à leurs points
d'attache, de petites lignes proéminentes, rayonnantes, semblables
à celles qui, dans les Crocus et les Sorghum, se montrent sur le som-
met du sac embryonnaire. Près de ce point s’attache une cellule
filiforme, qu'on peut suivre jusqu’au canal stylaire (pl. V, fig. 44).

On ne peut méconnaître, dans le corps celluleux en question,
l'ovule suspendu et anatrope du Sarcophyte, formé seulement du
sac embryonnaire et de la cellule-pédicule qui lui sert de support,
dont la structure estidentique avec le type de celui du Langsdorffia.
Le sac embryonnaire est divisé en un petit nombre de cellules
périspermiques. Quant aux cellules pyriformes qui se trouvent
dans la supérieure de ces dernières, ce sontles vésicules embryon-
naires ; enfin la cellule filiforme qui adhère à l'extérieur du sac
est le tube pollinique (pl. V, fig. 44).

Beaucoup d’autres fleurs dans les mêmes inflorescences présen-
tent une organisation essentiellement différente. Le canal stylare
va se rendre dans un vide étroit, ayant la forme d’une fente trans-
versale creusée dans l’intérieur du tissu. Inférieurement ce vide
est limité par un corps largement cordiforme, composé de petites
cellules riches en protoplasma. Par les côtés et par le bas, ce
corps est en connexion organique avec le tissu mou, et disposé en
couches concentriques des parois ovariennes. Dans son intérieur
se trouvent deux cavités excentriques, ovales-oblongues, dont
chacune est occupée en partie par une grosse cellule simple, fixée
au-dessous du sommet. Ces deux cavités communiquent par un
canal étroit avec le vide en fente dans lequel aboutit le canal stylaire
(pl. V, fig. 45). Les fleurs ainsi conformées constituent un ovaire
biloculaire, dont chaque loge renferme un ovule suspendu, réduit
au sac embryonnaire. Il est vraisemblable que l'ovaire du Sarco-
phyte est formé à l’originé, comme celui de l’AZelosis, de deux car-

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES. h7

pelles qui se touchent par leurs bords à la manière des feuilles en
préloliation valvaire, et qui se réunissent ainsi de manière à ne
former qu’une seule loge. La marche normale du développement
ne donne qu’un seul ovule suspendu ; mais anormalement il peut
aussi se développer deux ovules pendants, un par carpelle, et
l’hypertrophie du tissu cellulaire des parois ovariennes rend cet
ovaire biloculaire en apparence. Comme l’organisation de la graine
. müre se déduit facilement de celle de l'ovaire uniloculaire, tandis
que les nombreuses graines qui avortent peuvent être considérées
comme provenant des ovaires biloculaires, je crois être autorisé à
considérer les premiers comme des formations régulières, et les
derniers comme des anomalies.

Dans le fruit mür, le stigmate et la portion supérieure de
l'ovaire, dans toute l’étendue formée de cellules à parois fermes
et à contenu rouge, ont à peine été modifiés. Au contraire, la place
du tissu mou, qui environnait la cavité ovarienne, est occupée par
la graine et par le noyau dans lequel celle-ci est renfermée,

Ce noyau est composé normalement de deux couches cellu-
laires : l’extérieure, formée de cellules un peu allongées dans le
sens radial, à parois très épaisses, plus ou moins abondamment
ponetuées ; l’intérieure, constituée par des cellules en table, à merg-
brane lisse, médiocrement épaisse. La graine renfermée dans le
noyau est uniquement composée d’un albumen à grandes cellules,
et de l’embryon à petites cellules qui en occupe le centre. L’albu-
men varie de configuration : d'ordinaire 1l est aplati, ancipité, à
contour largement ovale, avec l'extrémité large généralement en
haut, tandis que, dans quelques cas, c’est le contraire qu’on voit
(pl. V, fig. A6). Dans des cas rares, la graine est triangulaire, à
angles émoussés, ou bien elle forme un corps oblong, dont la
coupe transversale donne un triangle équilatéral. Les cellules de
l’albumen ont les parois molles el minces ; elles sont remplies
de gouttes d’une huile grasse très fluide.

L'embryon variait beaucoup dans les divers fruits que j'ai exa-
minés et qui appartenaient à la mème inflorescence. Il formait une
masse de cellules tantôt fort petite, tantôt plus grosse, globuleuse
(pl. V, fig. 46) ou ellipsoïde allongée. Ailleurs il était beaucoup

h3 W. HOFMEISTER.

plus volumineux, et montrait nettement les rudiments de deux co-
tylédons (pl. V, fig. 47). Son suspenseur est dirigé en haut et se
dévie légèrement de côlé (ibid.); je n’ai pu le suivre que sur une
longueur égale à celle de l’embryon lui-même ; il paraît que sa por-
tion qui s’étendait de là jusqu’à la face interne du sac embryon-
naire a complétement disparu par suite du grand accroissement
qu'ont pris les cellules périspermiques.

La grande majorité, au moins les neuf dixièmes des fruits que
j'ai examinés, montrent, en place du développement normal de la
graine, une anomalie remarquable. Dans leur intérieur, on trouve,
à la place du noyau qui renferme la graine normale, un corps de
configuration analogue, mais plus petit, et toujours arrondi sur sa
section transversale ; ce corps, au lieu de contenir un albumen avec
un embryon, est composé dans la plus grande partie de sa masse
de cellules à parois épaisses, lignifiées et ponctuées, semblables à
celles qui forment la couche externe du noyau normal. Au centre
de ce « nucléus ligneux » on trouve, soit un groupe irrégulier de
cellules à parois minces, soit une ou deux cellules très grandes et
à parois également minces. Je suis disposé à regarder ces cellules
comme des sacs embryonnaires avortés, et à penser que la masse
ligneuse qui les entoure résulte de l’ossification des cellules qui,
dans l’ovaire biloculaire, constituent le tissu brun situé au centre de
la fleur, à l’intérieur de la couche en globule creux que forment
des cellules molles disposées en assises concentriques. Ces fruits
mal formés sont les seuls que Griffith ait examinés, et la dissection
qu'il en a faite l'a conduit à cet énoncé que l'embryon du Sarco-
phyte est homogène, et n’a pour élément constitutif que des cel-
lules « cuirassées. »

L’analogie intime qui existe entre le Sarcophyte et le Langs-
dorffia, quant à l’organisation du pistl et de la graine, esttellement
frappante, d’après ce qui précède, qu'il n’est pas besoin de discu-
ter l'opinion de Griffith, qui croyait devoir exclure le Sarcophyte
de la famille des Balanophorées. Mais, relativement à l’organisa-
tion florale, les énoncés de cet observateur, bien que très incom-
plets, ne sont pas en contradiction avec les miens.

FORMATION DE L’EMBRYON DES PHANÉROGAMES, 9

Balanophora dioica R, Br., B. polyandra Griff., B, involucrata Hook. f.,
B. fungosa Forst.

On sait que les fleurs femelles des Balanophora consistent en
un pistil sans trace de périanthe. Les plus jeunes que j'aie pu exa-
miner étaient longues de 9 millimètres; elles étaient prises dans des
_inflorescences du 2. dioica encore cachées par les bractées, Dans
cet état, elles constituent un corps en forme de bouteille composé
d’un petit nombre de cellules (pl. V, fig. 48). Le col de la bouteille
est le style en voie de développement; c’est un cylindre composé
de quatre séries longitudinales de cellules, et entièrement fermé au
sommet. À son centre, les cellules qui le forment sont exactement
jointes les unes aux autres ; celles de son extrémité sont encore
en voie de multiplication. En comparant plusieurs de ces styles, on
reconnait que leurs cellules se multiplient de telle sorte que la
cellule du sommet est successivement partagée par des cloisons
diversement inclinées (pl. V, fig. 48). Dans le haut de la por-
{ion renflée de ce corps celluleux se trouve intérieurement une
cavité ovale, circonscrite par une assise unique de cellules, et
remplie presque entièrement par une cellule volumineuse. Sur les
pistils qu’une section longitudinale bien réussie a ouverts convena-
blement, on voit que cette grande cellule renflée est fixée à la paroi
latérale de l'ovaire, peu au-dessous de la voûte de la cavité, par
l'intermédiaire d’une cellule-pédicule courte, discoïde, et qu'elle
pend librement dans la cavité ovarienne, laissant au-dessous d’elle
un assez grand espace vide (pl. V, fig. 48). Dans le Balanophora
dhoica, j'ai toujours vu la cavité de l'ovaire parfaitement close de
tous les côtés, même dans les états les plus jeunes que j'aie pu
observer. Il en a été de même pour le Balunophora polyandra,
dont jai eu sous les yeux des pisüls à peu près aussi jeunes, mais
moins bien conservés (1). Dans les pistils du Balanophora fungosa,
qui sont beaucoup plus gros et composés d’an plus grand nombre

(1) Ces observations concordent avec celles qui ont été publiées par M. Gæp-
pert dans les Nova Aclu Acad. L. C. nat. cur., vol. XVIII, Suppl, pl. XI, |
&° série. Bor. T. XIL. (Cabier n° 4). 4 k

50 | W. HOFMEISTÉR.

de cellules, j'ai observé au contraire, sur un côté du jeune ovaire,
une courte ouverture longitudinale, qui donnait vue dans la cavité
ovarienne et sur la cellule stipitée qui y faisait saillie (pl. V,
fig. 49).

Cette observation semble autoriser à penser que le développe-
ment du pisul des Balanophora rentre dans le type que M. Du-
chartre a fait connaître dans son travail sur les Nyctaginées (1),
et qui plus tard a été retrouvé par M. Payer dans les Urticées (2).
Quand les bords infléchis du carpelle unique se sont soudés de
manière à ne laisser qu'une ouverture latérale, son extrémité (sa
partie supérieure qui se trouve au-dessus du haut de l'ouverture)
se développe en un prolongement cylindrique qui est le style;
ensuite la séparation des cellules qui forment ce style, dans le sens
de l’axe longitudinal, donne naissance à un canal qui vient aboutir
à la cavité ovarienne, en même temps que l'ouverture latérale
de cette cavité disparait sans laisser de traces.

Très souvent, à côté de la base des jeunes pistils, on trouve une
petite écaille composée d’un petit nombre de cellules; cette
écaille reste ordinairement fixée à l'ovaire lorsqu'on arrache du
réceptacle. Peut-être cette circonstance indique-t-elle que, chez
les Balanophora, le pistil est encore formé typiquement de deux
carpelles, dont l’un avorte régulièrement de très bonne heure,
avant même qu'il y ait eu soudure entre eux.

Les fleurs femelles, plus avancées que les précédentes, que j'ai
eues à ma disposition, sont celles du Balanophora involucrata
Hook. f. Ici la cavité ovarienne était entourée d’une double couche
de cellules. Le style était déjà ouvert au sommet, et parcouru,
dans toute la longueur de son axe, par un espace intercellulaire
étroit, qui mettait la cavité ovarienne en communication avec l’ex-
térieur. La cellule-pédicule, qui s’attache latéralement dans la voûte
de la cavité de l'ovaire, supporte maintenant un corps plurceillulé,

fig. 40-51. — Ce que M. Gœæppert prend pour des graines, ce sont des ovaires
encore non fécondés et fermés au sommet. Cela seul explique très bien l'absence
d'embryon.

(4) Ann. des sc. nat., 3° série, t. IX, p. 263.

(2) Organ. végét., pl. 60, 62.

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES. 51

cemposé, dans quelques cas, de quatre cellules disposées dans un
même plan longitudinal ; formé, dans d’autres cas, d’un plus grand
nombre de cellules disposées de telle sorte que deux d’entre elles,
erandes et presque globuleuses, sont en contact avec la cellule-
pédicule, en laissant entre elles un petit intervalle, et qu’une
couronne de quatre à six autres plus petites remplit le profond en-
foncement qui existe entre les premières (pl. V, fig. 50). Il est évi-
dent que ce corps pluricellulé provient des partages successifs
de la première cellule globaleuse que portait, à l’origine, la cel-
luie-pédicule, partages qui ont donné naissance d’abord aux deux
grandes cellules, ensuite à celles qui forment une sorte de cou-
ronne autour de l'équateur du corps sphérique entier. Le corps
celluleux dont il S’agit est l'ovule suspendu des Balanophora. Le
développement prédominant de sa portion imférieure montre qu’on
doit le considérer comme anatrope, ainsi que le prouveront en-
core mieux ses élats suivants.

Dans les pistils an peu plus avancés du même Balanophora
involucrata, l’ovule à tellement gagné en grosseur, qu’il remplit
presque toute la cavité ovarienne. L’mférieure de ses deux grosses
cellules polaires n’a pas subi de changement important ; son nu-
cléus est resté proportionnellement petit ; au contraire, celui de
l'autre grande cellule s’est considérablement accru, et son proto-
plasma est devenu beaucoup plus abondant. Dans le haut de cette
cellule supérieure sont fixées deux masses nettement circonserites
et sombres d'un protoplasma très dense, qui adhèrent par une large
surface à l’intérieur de la cellule (pl. V, fig. 51). Ces deux masses
sont évidemment les vésicules embryonnaires, tandis que la
cellule qui les renferme est le sac embryonnaire. Celui-ci paraît
maintenant entouré par une couche simple de cellules en table.
Ces cellules paraissent provenir d’un développement annulaire de la
zone de cellules équatoriales interposées aux deux grandes cellules
polaires de lovule ; s’il en est réellement ainsi, ce développement
rappelle jusqu’à un certain point celui d’un tégument ovulaire.

Le Balanophora polyandra m'a présenté des ovules tout sem-
blables à ceux que j'ai décrits plus haut et provenant d’une inflo-
rescence de £.:nvolucrata, dans laquelle aucun des nombreux

02 W. HOFMEISTER,

ovaires que j'ai examinés n'avait été fécondé. Quelquefois on pou-
vait y voir les nucléus des vésicules embryonnaires (pl. V, fig. 52).
Dans quelques cas, l'enveloppe du sac embryonnaire était incom-
plète où manquait même tout à fait (pl. V, fig. 52). Ici les parois
ovariennes présentaient deux assises de cellules...

Fort souvent on trouve des grains de pollen encore attachés à
l'extrémité du style du Balanophora polyandra. J'ai vu très nette-
ment la sortie du tube pollinique à travers l’exine, et son entrée
dans le canal stylaire. Ce tube pollinique se montre rempli par
places d’une substance qui réfracte la lumière comme la membrane
cellulaire, et ailleurs d’un liquide aqueux.

Plusieurs fois j'ai trouvé en contact avec le sommet du sac em-
bryonnaire, dans les Balanophora polyandra et fungosa, une cel-
lule filiforme, dont le contenu réfractait fortement la lumière (pl. VE,
fig. 53, 54). Parfois même on pouvait la suivre assez haut dans le
canal stylaire. I n’est pas douteux que ce ne füt l’extrémité du tube
pollinique. Partout où je l'ai vue, il n'existait plus qu’une seule vé-
sicule embryonnaire , et la cavité entière du sac était divisée au
moins en deux cellules secondaires. Ces deux premières cellules
de l’albumen sont dues à la formation d’une cloison longitudinale
perpendiculaire à un plan qui, passant par l’axe longitudinal de
l’ovule, le diviserait en deux moitiés symétriques. Chacune de ces
cellules renferme un nucléus ellipsoïde, aplati, fixé contre la paroi,
et duquel partent des lignes rayonnantes de protoplasma (pl: VI,
fig. 53). Après celte première division, il s’en opère d’autres qui
résultent de la formation de cloisons longitudinales et transver-
sales ; puis, dans les huit cellules de l’albumen ainsi formées, se
produisent des cloisons diversement inclinées. Même quand le
nombre des cellules périspermiques est déjà assez élevé, leur
arrangement permet de retrouver encore sans peine le sens des
cloisons qui se sont formées les premières. L'albumen du Bala-
nophora polyandra conserve, pendant son développement, la
forme ellipsoïde oblongue du sac embryonnaire. Celui du Bala-
nophora fungosa se montre, en général, très élargi, même en
ellipsoïde aplati.

D'abord la vésicule embryonnaire fécondée ne subit pas de chan-

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES. 53

gements bien notables; elle s’allonge à peine sensiblement. Les
membranes cellulaires qui forment les parois du canal stvlaire,
par suite de l’amplification transversale des cellules, viennent sc
joindre peu après le passage du tube pollinique, de telle sorte que
ce canal s’oblitère entièrement; après quoi ces parois ceilulaires
s'épaississent assez fortement, et prennent une coloration en brun
foncé. Cet épaississement des parois cellulaires ne s'étend pas jus-
qu'aux cellules des parois ovariennes.

Les cellules de l’ovule qui entourent le sac embryonnaire per-
dent, pendant que s’opèrent les premières divisions du sae lui-
même, la forte adhérence qui les unissait à celui-ci et entre elles,
Leurs parois se rident, se racornissent de plus en plus. La cavité
ovarienne parait souvent ensuite presque vide, 1à où l’albumen
ne la remplit pas. Mais le sac embryonnaire reste toujours assez
solidement fixé à la cellule-pédicule de l’ovule qui s’aplatit gra-
duellement. Ainsi l’albumen est maintenu dans la situation primi-
live du sac embryonnaire.

Le Balanophora dioica est la seule espèce du genre dont j'aie eu
à ma disposition des graines à différents états de maturité. Comme
on le sait, les ovaires de cette plante ne changent pas notablement
de forme ni de grosseur depuis la fécondation jusqu'à la maturité ;
de même, ils sé modifient assez peu à leur intérieur. Les deux
assises de cellules des parois ovariennes épaississent leur mem-
brane ; l’interne le fait de tous les côtés, et ses cellules s'arrêtent
au tiers du diamètre transversal, à la moitié de la longueur et de
la largeur de celles de la couche externe ; quant à ces dernières,
elles épaississent très fortement leur membrane qui regarde l’in-
térieur , plus faiblement les latérales, et pas du tout lexterne.
Toutes les membranes ainsi épaissies sont percées de ponctuations,
surtout celles par lesquelles les deux assises se superposent. Dans
l'épaisseur de lalbumen en voie de développement, la vési-
eule embryonnaire fécondée s’allonge en une utricule-embrvyon,
qui attemt presque le centre de ce corps celluleux; ensuite une
cloison transversale se forme près de son extrémité (pl. VE,
fig. 55). Quelquelois cette division transversale se répète
à la base des deux cellules qui ont été ainsi séparées. Je n'ai

5l W. HOFMEISTER.

observé le changement de cette cellule terminale en globule em-
bryonnaire que dans les fruits chez lesquels l’albumen remplissait
entièrement la cavité ovarienne, et qui présentaient tous les signes
de la maturité parfaite. Là j’ai vu la cellule terminale du préem-
bryon divisée en quatre par deux cloisons longitudinales perpen-
diculaires l’une à l’autre (pl. VI, fig. 56), état semblable à celui
auquel l’embryon des OEnothera, par exemple, arrive dans l’es-
pace de huit jours après la fécondation. Il faut admettre que, pour
les Balanophora, la suite du développement ne s'opère que lorsque
la germination commence (1).

Parmi les recherches antérieures dont la fleur femelle des Bala-
nophora a été l’objet, j’examinerai particulièrement celles de
Griffith, de M. J. D. Hooker et de M. Weddell. Griffith (2) avait
déjà reconnu ce fait, intéressant pour l’organogénie des ovaires,
que le style est primitivement fermé à son extrémité. Quant à
l’albumen, dont il a, du reste, très bien décrit la structure et les
rapports avec les parois ovariennes, il l’a pris pour l'embryon,
erreur dans laquelle l'ont suivi les observateurs postérieurs (3).
Pour les faits en eux-mêmes, mes observations concordent en-
tiérement avec celles de M. F. D. Hooker; mais je suis moins
d'accord avec ce botaniste au sujet de leur interprétation. L’objet
que M. Hooker prend pour un sac embryonnaire jeune avec deux
cellules périspermiques, chez le Balanophora involucrata, n’est
pour moi qu'un ovule jeune... Sa description de l'entrée du
tube pollinique dans le canal stylaire, de sa marche dans la lon-
oueur de ce canal, et celle que j’ai donnée des mêmes phéno-
mènes, se confirment et se complètent l’une l’autre.

Je suis obligé de contredire formellement les descriptions et
les énoncés donnés par M. Weddell (4), énoncés pour la eri-

(1) On sait qu'il existe un embryon de Phanérogame encore plus simple;
c'est celui du Monotropa Hypopitys qui, comme je l'ai montré {(Entsteh. des Embryo,
p. 36, pl. XI, fig. 46), n’est formé que de deux cellules demi-globuleuses
séparées par une cloison transversale,

(2) Trans. Linn. Soc., t. XX, p. 93 et suiv.

(3) Cependant M. J. D. Hooker avec des doutes légitimes.

(4) Ann. des sc. nat., 3° série, t. XIV, p. 468, pl. 9.

FORMATION DE L'EMPRYON DES PHANÉROGAMES. 55

tique desquels je puis incontestablement prendre pour base mes
observations sur le Balanophora dioica, puisque le B. indica
Wall., étudié par ce botaniste, ne paraît pas être spécifiquement
différent du B. dioica, d’après l'opinion imposante de M. Hooker.
La différence la plus marquante entre les idées de M. Weddell et
les miennes, c’est qu'il prend l’albumen pour l'embryon, et qu’il
admet l'existence d’un albumen à petites cellules, partiellement
* transitoire, mais dont il existerait, selon lui, une portion encore
assez considérable, même dans la graine müre. — En comparant
les figures que je donne avec celles de M. Weddell, on verra que
nos deux manières de voir sont absolument inconciliables. Je crois
deviner l'erreur d'observation qui a conduit ce botaniste à tracer
des figures impossibles et contre nature. 11 est probable qu’il a
fait plus habituellement usage pour ses recherches du compres-
seur que des instruments de dissection. Ne tenant pas suffisam-
ment eompte ensuite de la nature des images obtenues sous de
forts grossissements, 1] a pris pour de petites cellules les ponc-
tuations des cellules épaissies qui entrent dans la composition
des parois ovariennes, et de là est née sa théorie d’un albumen
qui entourerait le véritable corps périspermique. Il suffira de
comparer sa figure 13 avec celle que je donne sous le n° 55,
pl. VE, et aussi avec la nature, pour ne pas douter que cette suppo-
sition ne soit parfaitement fondée.

M. Karsten a décrit récemment (1), d’après des préparations
de M. Schacht, l’organisation des fleurs femelles des Balanophora
tout autrement que je ne viens de le faire. Ce qu’on prend pour le
pisül serait, d’après lui, un nucelle nu. Chez le Balanophora glo-
bosa , 11 y aurait sous la voûte du sac embryonnaire une cellule
olobuleuse flottant librement. C’est incontestablement le sac em
bryonnaire ; mais 1l est assez bizarre que M. Karsten prenne
pour un sac embryonnaire la cavité de l’ovaire. Il est d’ailleurs
facile de reconnaître sur toutes les coupes qu’on fait de l'ovaire
que ce sac n’est pas libre dans la cavité ovarienne.

(1) Nova Acta. Acad. L. C. nat, cur., t. XXVI, pars 2, p. 168, pl. 9.

56 W. HOFMEISTER.

- Helosis mexicana Liebm., H. guyanensis Rich.

Les fleurs femelles très jeunes de l’Helosis mexicana sont des
masses cellulaires allongées, obconiques, dont la surface terminale

présente les ébauches des deux carpelles et des deux ou trois fo-

lioles périgoniales. Ces fleurs, enfoncées entre de nombreuses
écailles serrées, sont celluleuses, claviformes allongées, compri-
mées latéralement, formées de quatre séries longitudinales et
parallèles de cellules dont l’extrémité supérieure se trouve recou-
verte d’une cuticule encore lisse à cette époque.….

Les coupes longitudinales de ces jeunes fleurs femelles montrent
que le pédicelle en forme la principale masse. Il est composé de
cellules parenchymateuses hexagonales, à parois minces, et son
axe longitudinal est occupé par un cordon étroit de cellules pro-
senchymateuses. La cavité ovarienne paraît déjà tout à fait infère
par rapport au périanthe encore entièrement rudimentaire ; elle
est couverte au sommet par deux carpelles, déjà soudés entre
eux par les bords, bien que les extrémités soient encore libres,
et qu’elles commencent à se développer en styles cylindriques ,
dont la section transversale offre huit cellules, quatre périphé-
riques et quatre axiles. Entre ces styles naissants se trouve une
large fente héante, qui fait communiquer directement la cavité
ovarienne avec l'atmosphère.

Du fond dela cavité ovarienne s’élève, en la remplissant presque,
une masse celluleuse conique émoussée à large base. Les cellules
qui constituent cette masse rayonnent en éventail dans sa portion
supérieure libre en formant des couches concentriques vers son
attache au pédicelle... Ce tissu ressemble beaucoup à celui qui
constitue la chalaze dans les ovules des autres plantes. Ce qui va
suivre montrera que cette masse cellulaire est l’ovule unique et
dressé de l’Æelosis.

Le second état dans lequel jai observé l'Helosis meæicana m'a
été fourni par des inflorescences dont les bractées élaient tombées
en majeure partie, et dans lesquelles les styles des fleurs femeiles,
entièrement développés, élaient papilleux à leur extrémité (sans

|
|

FORMATION DE. L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES. 57
cependant que des grains de pollen y fussent attachés). Ces fleurs
élaient évidemment en état d’être fécondées.

Leur organisation différait de celle qui vient d’être indiquée, en
ce que la fente qui conduisait à la cavité ovarienne, entre les styles,
s'était fermée, et qu’une cellule de l’ovule s’était développée en
sac embryonnaire. — Le pédicelle, qui formait auparavant la
majeure partie de la masse de la fleur, n’occupe plus maintenant

que le üers de la longueur de celle-ci. Le cordon de cellules pro-

senchymateuses qui en suivait l’axe s’esttransformé en un faisceau
de trachées (pl. VE, fig. 57), qui semblent être les terminaisons des
nombreux faisceaux vasculaires de l’inflorescence. L’ovule remplit
complétement la cavité ovarienne ; il s'applique exactement contre
toute la surface interne de celle-ci, souvent jusqu’à se souder avec
elle, tandis que, dans d’autres cas, on peut l’en isoler sans déchi-
rure. La masse de cet ovule est principalement formée de cellules
prismatiques allongées, chement unies par leurs côtés, auxquelles
succèdent brusquement, dans le bas, les cellules disposées con-
centriquement, dirigées en travers et que nous avons comparées
plus haut à la chalaze. Ce tissu se distingue très nettement de celui
du pédicelle par la délicatesse de ses membranes, ainsi que par
l’arrangement de ses cellules; il forme la limite tranchée de
l’ovule à son point d'attache (pl. VL, fig. 57, ch). Les cellules de
celui-ci deviennent promptement, vers son sommet, beaucoup plus
petites et presque cubiques. Là elles forment deux couches en-
tourant une grande cellule, à parois fermes, qui est le sac embryon-
naire (pl. VI, fig. 57, e). Celui-ci peut être facilement isolé du tissu
qui l'entoure, et retiré tout entier sans déchirure. Alors on re-
connait très bien à son centre un gros globule de couleur foncée :
c’est le nucléus central primaire du sac, duquel partent en rayon-
nant des cordons d'une substance transparente, renfermant de
nombreux granules, protoplasma durci sous l'influence de la
conservation des fleurs dans le vinaigre. Enfin, dans le haut de
la voûte du sac, on voit deux masses foncées demi-ellipsoïdes,
à contour net, adhérentes par une large surface ; ce sont les deux
vésicules embryonnaires non fécondées.

A ce moment, la fente qui existait entre les styles a disparu sans

58 WW. HOFMEISTER.

laisser de traces. A la place qu’elle occupait, le haut de la cavité
ovarienne est fermé par une lame épaisse formée de six assises
d’un tissu à petites cellules. Au contraire, dans chaque style s’est
formé un canal qui en parcourt l’axe longitudinal, et qui va s’ou-
vrir dans la cavité de l’ovaire(pl. VE, fig. 57, s). Les pointes périgo-
niales, formées d’une couche simple de grosses cellules allongées
obliquement vers le haut, égalent en longueur le sixième de toute
la fleur femelle. Leur cuticule présente d’élégantes rayures longitu-
dinales, faiblement ondulées, tandis que celle du sommet des brac-
tées est marquée de nombreuses rides transversales qui for-
ment un réseau dont les mailles sont allongées horizontalement
(pl. VL, fig. 57, æ).

Je n’ai pas vu d'états plus avancés de l’Helosis meæicana, tan-
dis que j'ai pu étudier des graines mûres de l’Helosis guyanensis.
Son inflorescence, longue seulement de ? centimètres , montrait
le phénomène remarquable, déjà fort bien décrit par L.-C. Ri-
chard, de la sortie des fleurs mâles qui ne s’opère sur le même
réceptacle que lorsque les graines ont atteint leur maturité. Les
fruits sont des corps cylindriques, légèrement comprimés, qui
mesurent 1"%,75 de longueur, y compris le périanthe desséché,
‘mince, qui les couronne. Ce fruit en lui-même est formé d’une
couche double de cellules courtes, à parois brun rouge, très
épaisses (pl. VIT, fig. 58). Les cellules de l’assise externe sont en
table, celles de l’interne cubiques. Le sommet de cette enveloppe
est formé par un groupe de petites cellules à parois également
épaisses, qui marque la place où s’attachaient les styles. La cavité
ovarienne est entièrement remplie par l’albumen, constituant un
corps ellipsoïde oblong, composé de cellules à parois minces,
renfermant beaucoup d’albumine, avec une moindre proportion
d'huile et quelques petits grains globuleux d’amidon. Le sommet
de cet albumen loge l'embryon, proportionnellement petit et glo-
buleux , et fixé à la paroï interne du sac embryonnaire par un
court suspenseur filiforme, d’une seule file de cellules (pl. VIT,
fig. 58). Les cellules de cet embryon renferment un protoplasma
dense, finement granuleux, un gros nucléus très visible, mais
elles sont dépourvues d'amidon.

De ni te

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES, 59

On a jusqu’à ce jour assigné généralement aux Helosis et aux
genres voisins des ovules pendants ; on les a même figurés ainsi,
contrairement à ce que l’organogénie montre clairement, de même
que dans les Loranthus. Quant à l’organisation intérieure de la
graine et à l’état de l’embryon, ils étaient tout à fait mconnus.

Phyllocoryne jamaicensis Hook. f. ; Corynea crassa Hook. f.;
Rhopalocnemis phalloides Jungh.

Pour chacune de ces trois plantes, je n’ai pu examiner qu'un
seul état de l'organe reproducteur femelle. Mais l’accord de ces
observations avec celles que j'ai faites sur les Helosis est tel, qu'il
ne peut y avoir la moindre incertitude, quant à la détermination
des organes que j'ai étudiés.

J'ai eu à ma disposition les fleurs ouvertes, mais non fécon-
dées, du Corynea crassa, elles ont tout à fait la forme de celles
de l’Helosis meæicana; seulement leur ovule est complétement
soudé sur tous les points de sa surface avec les parois de la cavité
de l'ovaire. Le sac embryonnaire est aussi facile à isoler par dis-
section que dans l’H'elosis, et l’on y voitencore plus de protoplasma
que dans celui de cette dernière plante. Sous l’influence du liquide
conservateur, ce protoplasma s’estcomplétement durci ; on en voit
non-seulement très bien les filaments formés par les courants qui
partaient du grand nucléus central, mais encore une couche dépa-
sée sur la face interne de la cellule solidifiée, de manière à pouvoir
être isolée sans rupture sous la forme d’une vésicule fermée. Un
fait intéressant, c’est que les vésicules embryonnaires se montrent
en dehors de cette couche de protoplasma imitant une cellule.
Elles tiennent fortement à la paroi cellulaire.

Pour le Phyllocoryne jamaicensis Hook. f., j'ai pu examiner des
fruits jeunes, du sommet desquels le style s’était détaché. Les nom-
breuses écailles dont le fruit était étroitement entouré montraient
une particularité de leur structure intérieure. Les deux ou trois
séries axiles de cellules de leur portion supérieure, qu’entoure une
couche périphérique simple, composée de quatre séries longitudi-

60 W. HOFMEISTER.,

nales, ont des parois très épaisses formées de couches superposées
et ponctuées (pl. VIT, fig. 64). Une assise de cellules semblables
se trouve à l’intérieur de la portion supérieure des parois ova-
riennes...…. Cette particularité rappelle ce qui existe dans le Sey-
balium. Sans doute, c’est Ià l’origine de la couche de cellules à
parois épaisses qui existe dans le fruit, et qui finit par former un
noyau complet et fermé.

Pour le reste, la structure du pistil ne diffère pas de celle que
j'ai décrite dans l’Helosis mexæicana.— L'ovule dressé se distingue
très nettement sur tout son pourtour, et même à son insertion ba—
silaire, du tissu des parois ovariennes. Les cellules qui forment le
mamelon du nucelle sont d’une petitesse remarquable et très ser-
rées ; au-dessus de ce mamelon se trouve un vide très visible. Sur
ce point, la face externe de l’ovule n’adhère pas à la face interne des
parois de l'ovaire, tandis que toutes deux se soudent par les côtés.
Le sac embryonnaire est conformé en ellipsoïde aplati; sa mem-
brane très cassante est d’un jaune sombre, pourvue de petits gra-
nules sur les deux faces. Dans tous les fruits que j'ai disséqués, j'ai
trouvé un albumen, mais le plus souvent racorni, ramassé en un
petit corps arrondi, reposant vers le fond du sac embryonnaire,
et n'occupant que les deux tiers environ de sa cavité. Au con:
traire, d’autres sacs embryonnaires étaient exactement remplis
d’un tissu continu, et se trouvaient dans un état évidemment nor-
mal, Ils variaient de développement : les moins avancés ne mon-
traient sur leur coupe transversale qu’un nombre modéré de cel-
lules périspermiques, dans la masse desquelles s’enfonçait un
préembryon, formé seulement de deux ou trois cellules en file,
qui pendait du haut du sac. Les cellules de ce préembryon se
distinguent de celles de l’albumen par leur contenu plus dense, et
présentant de petits granules. -— Dans les fruits les plus avancés,
on trouvait au centre de l’albumen un embryon globuleux, aplati,
relativement gros, fixé à la membrane du sac par l'intermédiaire
d’un suspenseur cylindrique, à deux cellules (pl. VIL fig. 64).
Les sacs embryonnaires, contenant un embryon très avancé,
n’occupent eux-mêmes qu'une faible portion du volume de l’ovule,
tandis que dans la graine mûre l’albumen remplira, sans doute,

FORMATION DE, L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES, 61

toute la cavité du fruit. [Il est vraisemblable que le Phyllocoryne
est une forme à très gros embryon, de même que le genre suivant.

Pour le Rhopalocnemis phalloides Jungh. (Phæocordylis areolata
Griff,), j'ai étudié des fruits mürs. Ils sont, conformément à la
description de Griffith, fortement comprimés par les côtés, large-
mentovales, quand ils sont vus par les deux faces. Ils consistent en
une enveloppe mince, formée de cellules lignifiées, aplaties, à parois
colorées en brun foncé, sous laquelle est renfermée une graine
blanchâtre et cornée, Cette graine à été regardée jusqu’à ce jour
comme une masse celluleuse homogène ; cependant si l’on en fait
des tranches minces, et qu’on traite celles-ci par l’eau iodée, on
reconnait qu’elle est composée de deux parties différentes. Son
milieu forme un corps exactement semblable pour la forme
(en petit) au fruit entier, et composé de cellules assez grandes,
en général allongées, contenant de gros grains d’amidon. Ce
corps central est l'embryon, qu’une cellule-pédicule, située à son
sommet, fixe à la membrane dont la graine est enveloppée. Cet
embryon est renfermé de toutes parts dans une couche presque
absolument simple de cellules plus courtes, à parois plus minces,
dans lesquelles on ne trouve que fort peu d’amidon à grains fins,
mais beaucoup de matière albuminoïde. Cette couche de tissu cel-
lulaire est l’albumen. — Lorsqu'on laisse sécher lentement des
tranches minces de ces fruits entre des lames de verre, on voit
ordinairement se produire des vides très manifestes correspondant
aux surfaces de contact de l’albumen et de l’embryon (pl. VI,
fig. 59; pl. VE fig. 60).

Scybalium fungiforme Schott et Endl. (1).

Le Scybalium fungiforme a un intérêt particulier, en raison de
cclte circonstance que son ovaire renferme deux sacs embryon-

(1) Étudié sur deux inflorescences, dont l’une non fécondée et l'autre voisine
de la maturité du fruit, que M. Fenzl a bien voulu m'envoyer du Musée de
Vienne. — On sait que les échantillons qui se trouvent dans cet herbier sont
les seuls qui existent, la plante n'ayant pas été retrouvée depuis sa découverte,

62 WW. HOFMEISTER.:

naires (regardés comme des ovales par les auteurs). Pour le reste,
la structure de son pistil est semblable, quant à ses caractères
essentiels, à celle des autres Hélosidées. L’ovaire est moins élancé
que celui des Æelosis,compriméjlatéralement; le style est beaucoup
plus long ; ceux des fleurs qui occupent la périphérie des groupes

arrondis, formés par les fleurs femelles sur le réceptacle aplani,

sont fortement arqués vers le dedans. Ces styles sont composés,
comme ceux des Æelosis, de quatre séries longitudinales périphé-
riques de cellules larges et de quatre séries axiles de cellules très
étroites qui entourent le canal stylaire. Un peu au-dessous du ni-
veau de l’insertion du périanthe rudimentaire, se trouve un groupé
en couronne de cellules qui, même dans le pisül encore non fé-
condé, ont des parois fortement épaissies et ponctuées (pl. VIF,
fig.61). Les bractées sont formées généralement de quatre séries
longitudinales de cellules, entre lesquelles se trouvent assez sou-
vent quelques rangées de cellules axiles, ce qui semble déjà con-
duire à la structure plus compliquée et régulière des bractées du
Phyllocoryne.

La cavité de l'ovaire est entièrement remplie par un corps qui,
au premier coup d'œil, ressemble tout à fait à l’ovule dressé de
l’Helosis. Comme celui-ci, il tient fortement au plancher de cette
cavité, ne se laisse détacher que difficilement et mcomplétement
des parois latérales, s’isole au contraire sans peine et compléte-
ment de la voùte ovarienne. Dans sa partie inférieure, ce corps
est composé de cellules allongées, à parois minces, qui passent
vers le haut à d’autres plus courtes, pour arriver enfin à celles de
l'extrémité supérieure qui ne sont pas plus longues que larges. —
Dans l’intérieur de ee corps celluleux, homogène en apparence,
on trouve deux sacs embryonnaires disposés de telle sorte, qu'une
section menée parallèlement aux grands côtés de l’ovaire, et par les
embouchures des deux canaux stylaires dans la cavité ovarienne,
les partage l’un et l’autre (pl. VIF, fig. 61). Sur ces coupes, ces sacs
se montrent fortement inclinés en dedans, vers l'axe longitudmal de
l'ovaire. Au contraire, sur une section longitudinale perpendicu-
laire aux premières, leurs faces latérales se présentent situées pa-
rallèlement aux faces élargies dé l'ovaire. La membrane des sacs

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES. 63

embryonnaires adhère fortement au tissu ambiant, qui est formé de
deux ou trois couches concentriques de cellules tabulaires. On ne
peut la détacher que par fragments. Ces sacs renferment une ma-
tière mucilagineuse, demi-fluide, mélangée d’une grande quantité
de granules, au milieu de laquelle on distingue plus ou moins
nettement le gros nucléus. Dans le haut de leur voûte adhèrent à
leur paroi interne deux masses protoplasmiques à contour net;
ce sont les vésicules embryonnaires (pl. VI, fig. 61).

Un examen plus attentif fait reconnaitre la commissure foncée
de deux séries longitudinales de cellules s’étendant dans la longueur
et dans le milieu de la masse cellulaire qui renferme les deux sacs
embryonnares (pl. VI, fig. 61 ,æ); là, entre les parois des cellules
se trouve, en quantité extrêmement faible, une substance granu-
leuse, qui parait brunâtre par la lumière transmise. On retrouve
cette même ligne de séparation sur les coupes transversales, moins
apparente à la vérité. Je n’ai pas réussi à séparer l’une de l’autre,
sans rupture, les deux moitiés, distinguées par cette ligne, de la
masse cellulaire qui remplit la cavité ovarienne. Néanmoins je
suis porté à penser que le Scybalium possède deux ovules nus,
droits et dressés, intimement adhérents entre eux par leur face en
contact, qui a été aplatie par l’effet de la pression réciproque, les-
quels remplissent tout à fait la cavité de l'ovaire. L'idée que les
deux sacs embryonnaires appartiennent à un seul et même ovule
est inconciliable avec la loi déduite des observations faites jusqu’à
ce jour, que c’est une cellule aæile de l’ovule qui se développe en
embryon.

Parmi les fruits presque mürs que portait l’autre inflorescence,
il s’en est trouvé un qui était en retard pour le développement. Un
de ses sacs embryonnaires avait pris un diamètre environ quatre
{ois plus considérable, de telle sorte qu'iloccupait à peu près le tiers
dela cavitéovarienne ; il était rempli par un albumen à nombreuses
cellules, qui renfermait un préembryon bicellulé (pl. VIE, fig. 62).
La ligne de séparation probable des deux ovules y était beaucoup
plus apparente que dans les états antérieurs. Quant au second sae
embryonnaire, il était vide, racorni, refoulé par son voisin for-
tement accru ; l’ovule qui le renfermait, n'ayant pas été fécondé,

GA W. HOFMEISTER,

avait été fortement refoulé de côté par l’autre. Les deux couches
de cellules qui circonscrivaient la cavité ovarienne avaient leurs
parois brunes, épaisses et ponctuées. L’épaississement des parois
cellulaires, qui ne se montrait d’abord que dans le groupe si-
gnalé sous l'insertion du périanthe, avait ensuite gagné de proche
en proche, et il en résultait déjà un noyau complet.

Ce noyau avait augmenté encore en dureté dans les autres fruits
de la même masse fructifère. Ici l’albumen grandi et à très larges
cellules remplissait la plus grande partie de la cavité ovarienne,
dont le fond seul renfermait encore un petit reste du tissu de l’ovule
(pl. VIE, fig. 63). Ce peu de tissu restant avait même disparu sur
d’autres. Les cellules de l’albumen offraient des parois minces et
molles; sous l'influence de la conservation dans l'alcool, leur
contenu, ramassé en une masse qui n’occupait que les deux tiers
de Ja cavité ovarienne, formait ainsi un dépôt pariétal épais de
protoplasma, dans lequel se trouvaient beaucoup de gouttes d’huile
et un nucléus cellulaire, Un peu à côté du sommet se montrait,
attaché à Ia face imterne de la membrane du sac embryonnaire
qui entourait l’albumen, le suspenseur, fixé par une large surface
et formé de deux cellules cylindriques, placées bout à bout ; la
cellule inférieure portait un embryon de forme ovoïde, et composé
d'un petit nombre d’assez grandes cellules (pl. VIE, fig. 63).

Les recherches qui précèdent montrent que les Balanophorées
présentent deux sortes d’ovules : ovules pendants, hémitropes
dans le Cynomorium, anatropes dans les Balanophora, Langsdorffia
et Sarcophyte ; ovules dressés, atropes dans les genres à deux
styles. Ces différences ne suffisent pas pour autoriser la subdivi-
sion de cette famille, généralement polymorphe et cependant ho-
mogène sous plusieurs des rapports les plus essentiels, en deux ou
trois autres familles (Cvnomoriées, Langsdorffiées, Hélosidées). En
effet, on y trouve une gradation marquée pour la perfection de la
structure de la fleur femelle et de la graine. A partir de la forme
la plus simple des ovules dans le Langsdorffia et le Sarcophyte, le
cenre Balanophora forme le passage à la forme parfaite du Cyno-
morium. L'embryon, muni d’un'petit nombre de cellules dans les

|

FORMATION DE L EMBRYON DES PHANÉROGAMES. 65
Baianophora, est plus développé dans les genres Langsdorflia,
Helosis, encore plus dans le Rhopalocnemis, le Cynomorium ;
enfin il a des indices de cotylédons dans le Sarcophyte, des coty-
lédons plus développés dans le Mystropetalon. Le noyau du fruit
manque dans le Cynomorium ; iln’est qu’indiqué dans les Bala-
nophora ; on ne le distingue pas du reste du |tissu des parois du
fruit dans l’Helosis quyanensis et le Rhopalocnemis ; entin 1} est
plus complétement formé dans les gerires Langsdorffia, Sarco-
phyte. Phyllocoryne, Scybalium.

La connaissance plus exacte qu'on ne l'avait du développement
de la graine et de l'embryon confirme parfaitement l'opinion de
M. J.-D. Hooker, qui regarde les Balanophorées comme voisines
de l’Hippuris. Deux particularités méritent, à cet égard, d'être
signalées : d’abord l'Hippuris est une des plantes en petit nombre
dont l’ovule manque de tégument, comme celui des Balanopho-
rées, des Loranthacées et des Santalacées ; en second lieu, l'Hip-
puris a également un albumen qui, par des divisions successives,
finit par remplir toute la cavité du sac embryonnaire.

EXPLICATION DES FIGURES.
(PL. Ia VIL)

LORANTHACÉES.

Loranthus europæus L.

Fig. 4. Coupe longitudinale d'une inflorescence femelle naissante, telle qu'on la
trouve au milieu du mois de juillet de l'année qui précède la floraison. A l'ais-
selle des bractées bb se montrent les ébauches des fleurs aa, qui ont la forme
de mamelons déprimés, un peu concaves à leur côté supérieur, composés d'un
tissu homogène, à petites cellules. Grossissement de 25 diamètres.

Fig. 2. Fragment d’une pareille inflorescence prise un mois plus tard, vu
en perspective. En c, le bourrelet parenchymateux, formé par un développe-
ment considérable du réceptacle de la fleur, auquel on a donné le nom de ca-
licule ; p, folioles périgoniales. Grossis. de 10 diamèt.

Fig. 3. Coupe longitudinale d'une fleur semblable : c, calicule ; p, folioles pé-
rigoniales ; d, étamines stériles ; v, extrémité végétante de l'axe floral. Grossis.
de 50 diamèt.

4° série. Bor. T. XII. (Cahier n° 2.) 1

Cr

66 WW. HOFMEISTER.

Fig. 4. Section longitudinale d’un bouton de fleur femelle pris à la fin d'avril
(1852). Aux organes qui se montraient sur les figures précédentes se sont
ajoutés les trois carpelles ca, dont un (celui de droite)a été coupé selon sa ligne
médiane. Vis-à-vis de celui-ci la section passe par les bords déjà soudés des
deux autres carpelles, en ca’. Au-dessous de l'enfoncement circonscrit par les
carpelles on voit la coupe en croissant du tissu disposé en ménisque, à méats
intercellulaires pleins d'air, qui est désigné comme la chalaze. Grossis. de
30 diamèt.

Fig. 5. Coupe longitudinale d'un bouton femelle, observée le 12 mai. Entre les
carpelles qui se sont déjà considérablement allongés et qui se sont soudés par
leurs bords, l'extrémité de l'axe floral s’est prolongée en un mamelon conique
déprimé. Grossis. de 40 diamèt.

Fig. 6. Coupe longitudinale d'un bouton femelle près de s'ouvrir. Le canal sty-
laire (s) est déjà fermé par l'effet du développement en papilles qu'ont pris
les cellules de ses parois ; mais il est encore reconnaissable. Les sacs embryon-
naires (e), de forme très allongée, se trouvent au milieu d'une masse fusiforme
de tissu plus transparent. Grossis. de 18 diamèt.

Fig. 7. Extrémité supérieure d'un sac embryonnaire isolée par dissection ; elle
renferme deux vésicules embryonnaires, Le sac est pris dans un bouton au
même degré de développement que le précédent. Grossis. de 160 diamèt.

Fig. 8. Coupe longitudinale d'un bouton de fleur mâle pris à la fin d'avril. c,
calicule; pp, folioles périgoniales; s, élamines ; ca, carpelles déjà réunis en
un pistil qui ne se développe pas. Grossis. de 30 diamèt.

Fig. 9. Coupe longitudinale de la portion axile de l'ovaire que remplit un tissu
transparent (ovule soudé aux parois internes des carpelles). Cette préparation
est prise dans une fleur qui vient de s'ouvrir. e, un sac embryonnaire mis à
découvert par la section ; ch, chalaze.

Fig. 40. Portion de la coupe longitudinale d’une fleur femelle faite le 45 juin.
On n’a pas figuré l’une des moitiés du style. On voit le tube pollinique (1)
adhérent au sommet du sac embryonnaire (e), qui s'est élevé très haut dans
le canal du style. On n’a pas représenté la portion inférieure de l'ovaire. Sur
le stigmate on voit des grains de pollen (g). Grossis. de 30 diamèt.

Fig. 11. Partie inférieure, dilatée et remplie d'albumen d’un sac embryonnaire,
avec. un fragment de la partie cylindrique qui la surmonte, isolée par la dis-
section le 2 juillet, et vue sur une coupe longitudinale. k, est la vésicule em-

bryonnaire déjà développée en préembryon. Grossis. de 450 diamèt.

Fig. 12. Coupe longitudinale de l’albumen à cellules peu nombreuses, qui
remplit l'extrémité inférieure d'un sac embryonnaire fécondé. Cet albumen
est traversé dans sa longueur par le préembryon (k), dont l'extrémité infé-
rieure renflée, qui a pénétré jusqu'à la membrane du bout inférieur du sac,

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES. 67

montre deux nucléus au milieu d’une masse de protoplasma. Préparation faite
le 3 juillet 14853. Grossis. de 150 diamèt.

Fig. 13. Portion inférieure du sac embryonnaire d’une fleur dont le périanthe
se flétrit (13 juin). La dissection l'a détachée, par rupture, de la portion supé-
rieure. Au-dessus de la rupture on voit s'élever un fragment du préembryon
qui est déjà divisé en deux cellules superposées. Dans l'extrémité inférieure et
renflée du sac embryonnaire se montre l'unique cellule-mère de l'albumen,
Grossis. de 250 diamèt.

Fig. 14. Sac embryonnaire d’un ovaire fécondé (au moment de la chute du pé-
rianthe, le 15 juin) entièrement isolé par dissection. Près de son extrémité
inférieure sont restées quelques-unes des cellules voisines, les unes allongées,
les autres presque cubiques. k, vésicule embryonnaire fécondée, qui s’est
allongée en une longue vésicule-embryon. edp, cellules de l'albumen. Grossis.
de 150 diamèt.

Fig. 45. Préparation analogue, avec le tube pollinique £ adhérant encore au
sommet du sac. Même grossissement.

Fig. 16. Sac embryonnaire d'un ovaire fécondé, préparé le 20 juin. À son som-
met adhère le tube pollinique (1). Les cellules de l’albumen se sont divisées
par la formation d’une cloison transversale. Même grossissement.

Fig. 17. Préparation analogue à celle que présente la figure 42, mais prise le
12 juillet, et sur un ovule plus avancé. L'extrémité inférieure et renflée du
préembryon forme déjà plusieurs cellules. Grossis. de 120 diamèt.

Fig. 18. Coupe longitudinale de l'extrémité inférieure élargie d’un sac embryons
naire, laquelle est remplie par l’albumen ; préparation faite le 21 juillet, Les
cellules de l’albumen se sont produites plus abondamment d'un côté, à son
extrémité supérieure, d'où il résulte que la partie supérieure ou cylindrique
du sac embryonnaire, que traverse le suspenseur (/) de l'embryon, se montre
rejetée de côté. La partie inférieure épaisse du préembryon est composée de
quatre files longitudinales de cellules. ch est le tissu qui correspond à la cha-
laze de l'ovule. Grossis. de 90 diamèt,

Fig. 49. Coupe longitudinale d’une jeune graine, faite le 30 juillet. La ligne
noire, qui s étend de la masse périspermique ed p vers le haut, est la poruon
cylindrique du sac embryonnaire, qui se montre rejetée de côté. Grossis. de
20 diamèt.

Fig. 20. Préembryon de la même préparation, accompagné de quelques cellules
périspermiques. Grossis, de 60 diamèt.

Fig, 21. Coupe longitudinale d’un jeune fruit faite le 23 août. Grossis. de
10 diamèt.

Fig. 22. Embryon d'un fruit mür (29 septembre) coupé longitudinalement.
f, Suspenseur ; h, racine (endogène) enfermée dans l'extrémité radiculaire r.
Grossis, de 410 diamèt.

\

68 WW. MOFMEISTER.

Viscum album L,

Fig. 23, Coupe longitudinale d’une inflorescence femelle, au commencement de
mars. ll, pétioles des deux feuilles situées immédiatement au-dessous ; x,
pousses axillaires, qui se développeront pendant l'été suivant; dd, les deux
bractées de la fleur terminale coupées longitudinalement. Grossis. de 3 diamèt. -

Fig. 24. Fleur femelle terminale coupée longitudinalement le 44 juillet. A l'in-
térieur des deux folioles périgoniales externes on voit deux petites proémi-
nences qui sont les carpelles. Grossis. de 36 diamèt.

Fig. 25. Fleur femelle terminale, en section longitudinale faite le 5 août.
Grossis. de 30 diamèt,

Fig. 26. Fleur femelle latérale, en section longitudinale faite le 28 septembre.
On a indiqué le contour du tissu axile, plus transparent que le reste, qui en-
vironne les sacs embryonnaires. Grossis. de 20 diamèt.

Fig. 27. Sac embryonnaire d'une fleur latérale disséqué et isolé au commence-
ment d'octobre. On y voit deux vésicules embryonnaires parfaitement dévelop-
pées. Grossis. de 150 diamêt.

Fig. 28. Coupe longitudinale du tissu axile d'un ovaire faite le 12 février. La
section a rencontré les deux sacs embryonnaires, de telle sorte qu’on en voit
très bien les contours. Il y a non-seulement les vésicules embryonnaires, mais
encore leurs antipodes. Grossis. de 50 diamèt.

Fig. 29. Extrémité inférieure de celui de ces sacs embryonnaires qui est à droite.
Grossis. de 200 diamèt.

Fig. 30. Sac embryonnaire fécondé depuis peu, isolé par dissection le 9 mai.
L'inférieure des deux vésicules embryonnaires (qui a été fécondée) s’est un peu
allongée. La cavité du sac a été divisée par deux cloisons transversales en
trois cellules superposées. Grossis. de 50 diamèt.

Fig. 34. Extrémité supérieure d’un sac embryonnaire fécondé, montrant le bout
du tube pollinique adhérant à l'unique ponctuation de ce sac. Il n’y a déjà
plus de traces de la vésicule (ou des vésicules) embryonnaire non fécondée.
Grossis. de 500 diamèt.

Lepidoceras Kingii (d'après des échantillons d’herbier).

Fig. 32. Coupe longitudinale d'un ovaire long d'un millim. et demi, duquel il
est probable que se sont détachées depuis peu de temps seulement les folioles
périgoniales. Le long ovule conique (g) dressé est entouré d'un tissu lâche, à
grandes cellules (v). Dans le bas de l’ovule se voient trois sacs embryon-
naires (e). Grossis. de 30 diamèt.

Fig. 33. Sac embryonnaire rempli dans sa partie inférieure par l'albumen,
isolé par dissection, avec le suspenseur et l'embryon (k). Grossis. de 90 diamèt.

FORMATION DE L EMBRYON DES PHANÉROGAMES, 69

Fig. 3%. Coupe longitudinale d’une graine à peu près mûre. k, l'embryon;

ed, l'albumen fort mince, réduit à deux assises de cellules; a, couche simple

de cellules à parois épaisses ; b, masse de cellules allongées, étroites, à mem-

brane très hygroscopique ; c, parenchyme externe, consistant. Grossis. de
10 diamèt.

BALANOPHORÉES.

Cynomorium coccineum.

Fig. 35. Fleur femelle immédiatement avant la fécondation, coupée longitudi-
nalement, de telle manière que le canal stylaire est ouvert sur toute sa lon-
gueur. Sur le stigmate se trouvent trois grains de pollen qui ont émis leur
tube. i, tégument de l’ovule ; e, sac embryonnaire; m, micropyle ; c, canal
stylaire. Grossis. de 30 diamèt.

Fig. 36. Un sac embryonnaire venant d’être fécondé, entièrement isolé par
dissection. L'utricule primordiale des cellules de l’albumen s’est rétractée par
l'effet de la conservation dans l'alcool, de même que dans la figure suivante.
k, vésicule embryonnaire fécondée. Grossis. de 210 diamèt.

Fig. 37. Une portion de tégument montrant la coupe longitudinale du micro-
pyle m, sous lequel on voit quelques cellules du sommet du nucelle. Au-
dessous de ces cellules on voit la portion supérieure du sac embryonnaire e
fécondé, qui en a été éloignée par la dissection, laquelle y est encore ratta-
chée par l'intermédiaire du tube pollinique t ; k, la vésicule embryonnaire
fécondée, encore unicellulaire. Grossis. de 420 diamèt.

Langsdorffia hypogæa Mart.

Fig. 38. Portion d'une tranche longitudinale mince d’une inflorescence femelle
qui répond à une fleur femelle que la coupe a coupée dans le sens de son axe.
Dans la partie supérieure de l'ovaire, qui renferme de la cire, et dont on a
dessiné les cellules, on a indiqué un peu de la substance des fleurs voisines.
c, cavité ovarienne ; s, canal stylaire. (rro$sis. de 30 diamèt.

Fig. 39. Coupe longitudinale d’une fleur semblable, dans sa région qui ren-
ferme la cavité ovarienne. Avec les aiguilles à dissection on a enlevé la plus
grande partie des cellules pour mettre plus à découvert l’attache de l'ovule.
e, l'ovule, c'est-à-dire le sac embryonnaire nu ; f, la cellule-pédicule. Grossis.
de 250 diamèt.

Fig. 40. Sac embryonnaire fécondé. 1, le tube pollinique ; k, la vésicule em-
bryonnaire fécondée. Même grossissement.

Fig. 41. Portion de la coupe longitudinale d'une inflorescence fructifère corres-
pondant à un fruit. pt, noyau; e d p, albumen ; e, embryon ; sp, suspenseur.
Grossis. de 50 diamèt.

70 W. HOFMEISTER.

Fig. 42. Partie supérieure de la coupe longitudinale d'une graine müre. Le
suspenseur est un peu arqué dans le haut. sp, suspenseur ; edp, albumen ;
e, embryon.

Sarcophyte sanguinea Sparrm.

Fig. 43. Coupe longitudinale d’une fleur femelle peu après la fécondation. 5,
canal stylaire ; g, cavité ovariennne ; o, ovule. Grossis. de 50 diamèt,

Fig. 44. Cavité ovarienne et ovule de la figure précédente, sous un grossisse-
ment de 350 fois. t, tube pollinique ; 4, vésicules embryonnaires.

Fig. 45. Coupe longitudinale d'un ovaire à deux loges. Grossis. de 35 diamèt.

Fig. 46. Coupe longitudinale d'un fruit mûr. edp, albumen; e, embryon;
p, noyau. Grossis. de 20 diamèt.
Fig. 47. Embryon avec une portion de son suspenseur et quelques cellules de

l'albumen, le tout pris sur la coupe longitudinale d’une graine mûre. L'em-
bryon présente les rudiments de deux cotylédons. Grossis. de 150 diamèt.

Balanophora dioica KR. Br.

Fig. 48. Ovaire très jeune, sur une coupe longitudinale. Grossis. de 300 diamèt,.

Balanophora fungosa Forst.

Fig. 49, Ovaire jeune, vu tout entier par l'extérieur. Grossis. de 200 diamèt.

Balanophora involucrata Hook. fil.

Fig. 50. Coupe longitudinale d’un pistil jeune. o, ovule; st, canal stylaire.
Grossis. de 200 diamèt.

Fig. 51. Portion ovarienne d'un pistil plus avancé. La section, qui a ouvert la
cavité ovarienne, a laissé le style entier ; aussi voit-on celui-ci par sa face
externe. e, sac embryonnaire. Grossis. de 20 diamèt.

Balanophora polyandra Griff.

Fig. 52. Ovaire non fécondé, ouvert par une coupe longitudinale qui ne passe
pas par le point d'attache de l’ovule. Grossis. de 120 diamèt.

Fig. 53, Coupe longitudinale d’un ovaire fécondé depuis peu. Le sac embryon-
naire est divisé en deux cellules périspermiques. Grossis. de 160 diamèt,.

Balanophora fungosa Forst.

Fig. 54. Coupe longitudinale d’un ovaire dont le sac embryonnaire est déjà
pluricellulé. t, le tube pollinique ; k, vésicule embryonnaire fécondée.

FORMATION DE L'EMBRYON DES PHANÉROGAMES,. 74

Balanophora dioica KR. Br.

+

Fig. 55. Ovaire à moitié mür ouvert par une section longitudinale et vu en
dedans. æ, quelques-unes des cellules de l'ovule qui restent encore ; k, vési-
cule embryonnaire développée en préembryon. Grossis. de 200 diamèt.

Fig. 56. Ovaire mür vu sur une coupe longitudinale qui passe par l'axe.
k, embryon tenant au suspenseur. Même grossissement.

Helosis mexicana Liebm.

Fig. 57. Fleur femelle prête à recevoir la fécondation, avec des bractées à droite
et à gauche, le tout coupé longitudinalement. Sur une de ces écailles x on a
dessiné les aréoles de la cuticule, ch, région chalazique. Grossis. de 400
diamèt.

Helosis guyanensis Rich.

Fig. 58. Coupe longitudinale du fruit mûr. Grossis. de 100 diamèt.

Rhopalocnemis phalloides Jungh.

Fig. 59. Coupe longitudinale d’un fruit mür menée parallèlement à ses grandes
faces. p, péricarpe; edp, albumen; k, embryon. Grossis. de 45 diamèt.

Fig. 60. Coupe longitudinale d’un fruit mûr menée selon un plan perpendicu-
laire à ses grandes faces. Mêmes lettres. Grossis. de 90 diamèt.

Seybalium fungiforme Schott et Endl.

Fig. 61. Fleur femelle non fécondée, vue sur une coupe longitudinale qui passe
par les deux styles. o, ovule; ch, chalaze ; e, sacs embryonnaires ; æ, ligne
d'apparence commissurale. Grossis. de 70 diamèt.

Fig. 62. Fruit jeune vu sur une coupe longitudinale menée dans un sens ana-
logue à celui de la figure précédente. Le côté droit montre intérieurement un
sac embryonnaire fécondé, rempli par l'albumen, tandis que le côté gauche
présente un sac embryonnaire avorté. Grossis. de 30 diamèt.

Fig, 63. Coupe longitudinale d’un fruit presque mür. Grossis. de 40 diamèt.

Phyllocoryne jamaicensis Hook. fil.

Fig. 64. Coupe longitudinale d’un fruit jeune et d’une bractée. o, ovule;
ch, chalaze ; edp, albumen ; 4, embryon. Grossis. de 400 diamèt.

OBSERVATIONS
SUR

LA NATURE ET L'ORIGINE DE LA PULPE

QUI ENTOURE LES GRAINES DANS CERTAINS FRUITS,

Par F, CARUEL..

L’organogénie végétale, qui date de Malpighi (1), est devenue
dans ces derniers temps une branche considérable de la botanique,
par suite des travaux d'hommes éminents. Elle a déjà rendu
d'importants services à la science ; et elle est appelée à en rendre
de plus grands encore, lorsqu'elle aura perfectionné ses méthodes
d'investigation, et surtout lorsqu'elle aura permis d’assigner leur
juste valeur aux résultats qu'elle peut fournir , au lieu de leur
attribuer une importance exclusive, comme le voudraient quelques
adeptes trop zélés, qui oublient que si l’organogénie est un moyen
précieux d'arriver à la science, elle est fort loin d’être la science
elle-même.

L'organogénie végétale a surtout servi dans les recherches sur
les tissus des plantes, et dans l’étude de la fleur et de l'embryon.
On en a peu fait usage pour d’autres sujets d'étude ; et cependant
le beau travail de M. Planchon sur les arilles, et celui de M. Tar-
o1on1 sur les périspermes (2), montrent quel parti on peut en tirer
pour tous les genres de recherches en botanique. J'ai voulu m'en
servir pour arriver à une connaissance plus exacte sur la nature
et l’origine de la pulpe qui entoure les graines dans certains fruits;
et les résultats que j'ai pu obtenir, quoique bien incomplets en-

(1) Voy., dans l’Analome plantarum, les articles où il expose les formes
successives des feuilles dans le bourgeon, le développement progressif de l'em-
bryon, etc.

(2) Ce travail a été publié dans les Mémoires de l'Académie des sciences de
Turin pour l'année 4854.

«
pet er “es ft lc and" ue - st sm -pmms os ur EE EMMA ES

ORIGINE DE LA PULPE QUI ENTOURE LES GRAINES, 73

core, montreront cependant tout l'intérêt qu'offre un sujet jusqu'ici
peu ou point étudié.

Je commencerai par mes observations sur la pulpe du fruit des
Cucurbitacées, ordre dans lequel l’existence de cette nature d’or-
ganes est très générale.

CucurgiTacées. — Dans la plupart des plantes de cet ordre, trois
gros placentas pariétaux remplissent exactement toute la cavité de
lovaire uniloculaire. Ils se touchent par les côtés, sans adhérer
autrement entre eux, et portent de nombreux ovules sur leurs
flancs retournés et très rapprochés de leur base d'insertion. Le
tissu des placentas s’interpose entre les ovules, et, se rejoignant
et se confondant de toutes parts, forme autant de cavités distinctes
et parfaitement closes, dans chacune desquelles se trouve un
ovule.

Tel est l’état des choses lors de la floraison, La maturité du fruit
transforme la substance des placentas en pulpe, dans laquelle se
trouvent nichées les graines. Cette pulpe est solide et ferme dans
le Melon d’eau (Citrullus vulgaris) et dans les Courges (Cucur-
bita). Elle est filandreuse, et d’une consistance plus sèche et lâche
dans d’autres espèces, jusqu’à devenir tout à fait sèche et papyra-
cée, dans le Luffa acutangula par exemple, où, à vrai dire, on ne
peut plus lui donner le nom de pulpe. Dans les Bryonia, elle est
à demi liquide; et dans le Cucumis Dudaim, elle devient tout à
fait liquide, ainsi que dans l’Ecbalium elaterium : on voit que dans
cette dernière plante la contraction des parois du fruit la chasse
au dehors sous forme de mucilage mêlé aux graines.

Dans les Momordica (M. balsamina, M. charantia), il se passe
un autre ordre de phénomènes. A mesure que le jeune fruit gros-
sit et avance vers la maturité, la substance des placentas devient
spongieuse. La couche qui enveloppe chaque graine dans sa niche
se colore en jaune, puis en orangé, et peu à peu elle se sépare
du reste du tissu placentaire ; et enfin, à la maturité complète du
fruit, elle se trouve former une membrane distincte autour de la
graine, une espèce de sac clos, dans lequel la graine se trouve en-
fermée, La couleur de cette membrane est alors du rouge le plus
vif, et elle ne tient presque plus au reste de la substance des pla-
centas, qui s’est dissoute en une espèce de pulpe filandreuse.

7h F. CARUEL.

C’est cette membrane que Gærtner, et la généralité des auteurs
jusqu’à ce jour, ont décrite et figurée comme un arille ; tandis que
d’autres, se rapprochant davantage de la vérité, l’ont fait dériver
de la paroi interne du péricarpe. On pourrait l'appeler sac aril-
loide.

Les Momordica ne sont pas seuls à avoir de ces sacs arilloïdes.Le

Trichosanthes anguina en a de tout semblables. Dans le Bryonia
verrucosa, on trouve autour de la graine une mince pellicule de
nature analogue. Le Joliffia africana, figuré dans le Botanical
Magazine, t. 2752, doit aussi avoir un de ces sacs arilloïdes dans
cette « masse de filaments en réseau, distincte de la graine elle-
même, et la renfermant cependant en entier, » que sir William
Hooker à décrite, et qu'Endlicher a transformée en test de la
graine (Gen. plant., p. 935). Quelque chose d’analogue doit aussi
exister dans lErythropalum scandens Blume, dont on dit: «& Se-
men unicum funicatum » (Ser. in DC,, Prodr., vol. III, p. 803).

Une modification remarquable du sac arilloïde se trouve dans le
Cucumis metuliferus E. Mey. A la maturité, la substance pla-
centaire qui enveloppe chaque graine se sépare en deux portions :
la plus extérieure forme une membrane excessivement mince et
continue qui sépare toutes les niches des graines les unes des
autres ; tandis que tout le reste de la substance placentaire consti-
tue autour de chaque graine une enveloppe verte, succulente,
transparente, malgré son épaisseur, logée dans une cavité parfai-
tement circonscrite.

SoLanacÉEs. — Toutes les espèces du genre Solanum que j'ai
pu examiner ont une structure identique du fruit. Après la florai-
son, des replis de l’endocarpe s’avancent vers l’intérieur du jeune
fruit; ils finissent par rejoindre les placentas et se soudent avec
eux, en même temps qu'ils s’interposent aux graines, et leur con-
stiluent autant de niches séparées. A la maturité, toute cette masse
de tissu cellulaire provenant de l’endocarpe, ainsi que les placen-
tas, se réduit en pulpe, dans laquelle se trouvent nichées des
graines.

Les Lycopersicum, si voisins des Solanum, doivent cependant
la pulpe de leurs fruits à une origine différente. Dans l’espèce cul-
tivée (L. esculentum), ce sont les placentas qui, après la floraison,

a + sam

EE n —

hé

ORIGINE DE LA PULPE QUI ENTOURE LES GRAINES. 75

envoient des prolongements entre les ovules ; ces prolongements
finissent par les envelopper de toutes parts, et se rendent en une
masse qui s’avance jusqu'aux parois du fruit, sans cependant
jamais contracter d’autre adhérence avec les parois que celle qui a
toujours lieu entre deux surfaces molles mises en contact. Quand,
à la maturité, la masse placentaire se réduit en pulpe, elle se sé-
pare autour des graines en sacs arilloïdes épais et suceulents, qui
rappellent ceux du Cucumis metuliferus (1).

Argurus Uneno. — Les loges du fruit de cette plante sont rem-
plies par une masse pulpeuse, qui, comme dans les Lycopersicum,
doit son origine aux prolongements du placenta interposés aux
ovules.

Capparipées. — La formation de la pulpe dans les fruits des
Capparis présente quelque analogie avec celle des Cucurbitacées.
A l’époque de la floraison, l’ovaire se trouve divisé en un cer-
tain nombre de loges (elles sont de six à huit dans le €. rupestris),
par autant de lames placentaires minces qui se sont avancées des
parois au centre de l'ovaire, et qui là se sont soudées en colonne,
et portent plusieurs séries d’ovules de chaque côté. Après la flo-
raison, la substance des lames placentaires s’avance entre les
graines, et, par le procédé ordinaire, finit par remplir tout l’inté-
rieur du fruit en formant une niche séparée à chaque graine. Puis
à la maturité, le tout se résout en pulpe.

AuranrTiacées. — Dans les fleurs des Orangers et des Citron-
niers, l'ovaire montre ses nombreuses loges vides de pulpe ; mais
déjà sur les parois pointent des papilles. Ces papilles deviennent
plus saillantes après la floraison ; et, à mesure que l’ovaire grossit
et passe à l’état de fruit, elles s’allongent, et finissent par remplir
tout l’intérieur des loges. Leur forme, d’abord conique dans l’ori-
gine, devient ensuite cylindrique, puis clavilorme, puis fusiforme ;
elles sont composées d’un tissu cellulaire compacte. A l’époque
de la maturité, les couches de cellules les plus extérieures for-
ment un épiderme résistant, tandis que tout le reste s’injecte de

(1) M. Gasparrini, dans ses Observations sur la structure de l’arille (Rendi-
conto dell” Accad. delle scienze di Napoli, 1843, p. 265), a le premier noté
l'existence du sac arilloïde dans le Lycopersicum, mais sans avoir pu $’en expliquer
la nature.

76 F. CARUEL..

sucs plus ou moins fortement colorés en jaune. A cette époque,
les papilles de différentes longueurs, et ayant pris diverses formes
par suite de leur pression mutuelle, entourent les graines, et for-
ment la pulpe où elles se trouvent nichées. Il est à remarquer que
jamais ces papilles ne se ramifient, et que jamais non plus il ne
s’en développe sur les cloisons des loges.

Cacracées. — La présence d’une pulpe dans le fruit n’est pas

générale dans cet ordre, pas même dans toutes les espèces d’un
même genre : ainsi l’'Opuntia gracilis n’en a point, tandis que
l'O. vulgaris et l'O. polyacantha en ont en grande abondance.'La
pulpe est ici une dépendance de la graine, ou plutôt du faux test
dérivant du funicule (4) qui enveloppe l’ovule et la graine. Elle se
développe quelque temps après la floraison sous forme de petites
papilles qui recouvrent toute la surface des ovules, et y constituent
une couche épaisse, et presque comme un tissu, tant elles sont
serrées; elles sont composées d’une seule cellule allongée et cylin-
drique. Dans le fruit mür, on les voit, devenues plus ténues et
filiformes, se feutrer én tous sens, se colorer de sucs semblables
à ceux du péricarpe, et former ainsi la pulpe des graines.

Le Mamillaria simpleæ, qui n’a pas de faux test sur la graine,
montre des papilles sur le funicule seulement (2).

Aroïnées, — Beaucoup d’Aroïdées ont une pulpe plus ou moins
abondante, contenue dans l’intérieur des ovaires, et plus tard à
l'intérieur des fruits. Cette pulpe consiste en filaments isolés, nés
tout le long du placenta, sur le funicule même, et autour de la base
des ovules ; ces filaments sont mous, confervoïdes, composés de
cellules tubuleuses ajoutées bout à bout. Souvent à ces filaments
s’en joignent d’autres, qui sont une dépendance du tissu conduc-
teur. C’est à M. Parlatore que nous devons la connaissance de
cette pulpe des Aroïdées ; il en a même fait usage pour la distinc-

tion des genres de cet ordre (3).
Notons, en passant, que ces filaments nés sur le funicule et au-

(4) Gasparrini, op. cit., p. 264.— Planchon, Mém. sur les arilles, p. 24,
f. 4-4.

(2) Planchon, op. cit., t.2,f, 5.

(3) Voy. Flora italiana, vol, II.

ee incendie re. A vs

un

ORIGINE DE LA PULPE QUI ENTOURE LES GRAINES. TA

tour de la base des graines des Aroïdées ont une certaine analo-
gie avec ceux qu'on observe-dans les Ravenala et les Hedychium
(H. Gardnerianum), et qui ne sont après tout qu’une forme par-
ticulière d’arille.

J'espère pouvoir étendre et compléter ces études sur la pulpe
des fruits. En attendant, les faits indiqués nous permettent déjà de
les résumer sous forme de conclusions générales. Ainsi nous
voyons que, dans les fruits qui ont une pulpe, l’époque de sa for-
malion varie suivant les plantes, et qu’elle peut se développer
avant la floraison et la fécondation, tout aussi bien qu'après. En
second lieu, la pulpe peut dépendre soit de l’endocarpe, soit du
placenta ou des funicules. Enfin elle ne paraît jamais se former
sur le tégument propre des graines, quoique ce fait ne soit pas
impossible à concevoir.

L'organogénie n’est pas seulement nécessaire pour nous indi-
quer l’origine de la pulpe des fruits ; elle nous est également utile
pour nous mettre en garde contre certaines apparences trom-
peuses, qui nous feraient voir une pulpe là où il n’en existe point.
C'est ainsi que nous venons à savoir que le mucilage amorphe qui
remplit les loges de l'ovaire et du fruit du Cytinus Hypocistis (1)
et du Nymphæa alba n’est point un organe sui generis, mais
seulement une substance transsudée par les parois des loges. Il
arrive souvent que, dans certains fruits charnus, ceux des Capri-
foliacées par exemple (Lonicera, Leycesteria, ete.), le péricarpe et
les cloisons des loges deviennent tellement mous et juteux à la
maturité, qu’ils fondent comme on dit, et remplissent de jus et de
üssus désagrégés l’intérieur des loges, de manière à y simuler une
pulpe qui, en réalité, n'existe pas. Dans le Phytolacca decandra,
il arrive de même que les graines adhèrent fortement aux parois des
loges du fruit, et puis quand, à la maturité, le tout devient juteux
et fondant, les graines ont l’air d’être nichées dans une pulpe qui
dépendrait d'elles.

(4) Planchon, op. cit., p. 24.

INDICIS SEMINUM

HORTI REGII BOTANICI NEAPOLITANI

ADNOTATIONES

auctore M. TENORE.

Antirrhinum Barrelieri, Boreau, est A. tortuosum, Ten. —
Bertol., Flor. Ital.

Monechma bracteatum, H. R. Madritensis, est M. angustifo-
hum.

Pistacia narbonensis fœmina, in horto R. Neapolitano culta,
quotannis semina profert fæcunda, riteque germinantia, sine ma-
ris Opera, nec ejusdem nec alienæ stirpis.

Senecio magellensis, Ten. — Caule unifloro simplici ; folüs alter-
nis, ovali-oblongis, basi denticulatis, per petiolum decurrentibus
(à poll. Jongis, 4 5 poll. latis), utrinque incano-tomentosis,
senescentibus sparsim denudatis, integerrimis vel quandoque
obiter denticulatis; floribus discoideis (capitulo 1-4 5 poil. dia-
metri); involucrisquamis ovato-cuspidatis ; flosculis luteo-croceis,
extiinis fæmineis, in disco hermaphrodiüs (3-4 lin.), quinquefidis;
stigmatibus trunçatis ; achænus glabris sulcato-angulatis ; pappo
piloso, flosculos subæquante, pilis argenteis caducis ; receptaculo
paleaceo. Ten. {ndex Seminum H. R. Neapol., 1857. — In
pascuis montanis Apruti ; floret julio. Perennis.

Solanum Lobeli, Ten. (Index Sem. H. R. Neapol., 1851) est
S. teæanum, DC. Prodr. XIII, anno 1852, p. 352 et 682. No-
men prius servandum.

Solanum trongum, H. paint est S. ovigerum var.
fructu ovali luteo, Dunal, in DC. Prodr.

REVUE

DES CUCURBITACÉES

CULTIVEËS AU MUSEUM, EN 1859,

Par M. Ch. NAUDIN.

Ainsi que je l’ai annoncé dans mon dernier mémoire, les
recherches que je poursuis au Muséum au sujet des Cucurbitacées
ne se bornent pas aux seuls genres Cucumis et Cucurbita; elles
en embrassent déjà beaucoup d’autres, et je me propose de
les étendre à tous ceux dont 1l me sera possible d'observer au
moins quelques espèces à l’état vivant. Je ne me dissimule pas
qu'une pareille tâche pourra m'occuper bien des années, et même
que je ne pourrai probablement jamais l'achever entièrement, car,
à la difficulté déjà grande de se procurer les graines des Cueurbi-
tacées sauvages s’ajoute celle de la culture de ces plantes, presque
toutes tropicales, sous le climat beaucoup trop froid du nord de
la France. Nous l'avons éprouvé depuis que ces expériences sont
commencées, dans ces dernières années surtout, où, malgré des
étés exceptionnellement chauds et prolongés, et malgré l’emploi
des procédés artificiels que fournit le jardinage pour activer la
végétation, plusieurs espèces d’un grand intérêt n’ont pu ni fruc-
üfier n même fleurir. Une autre difficulté se présente encore :
c'est celle qui résulte de la diæcie d’un assez grand nombre
d'espèces dont il arrive souvent qu’on ne possède qu’un seul sexe,
Toutelois, malgré les insuccès amenés par ces différentes causes,
je crois ètre en mesure, dès à présent, de modifier les dia-
gnoses de quelques genres, de rectifier la synonymie d’espèces
mal reconnues, et même d'en signalerun petit nombre de nou-
velles. Diverses observations de croisements opérés entre variétés

80 CH, NAUDIN.

de même espèce ou espèces différentes offriront peut-être aussi
de l'intérêt à une certaine classe de lecteurs.

Avant d'aborder la partie descriptive de ce mémoire, je crois
utile de présenter ici quelques réflexions sur la nature et la dis-
position de quelques-unes des parties constitutives de la fleur des
Cucurbitacées. J’ai déjà touché à ce sujet dans une première note
publiée en 1855 (1), note dans laquelle j'ai cherché à démontrer
que l'ovaire, chez ces plantes, est simplement invaginé dans le
pédoncule modifié en fruit, et non point embrassé par les bases
soudées des trois verticilles extérieurs de la fleur. Aujourd’hui je
me propose d'étendre cette manière de voir aux fleurs mâles
elles-mêmes, en déclarant que ce qu’on y appelle le tube du calice
n’est autre chose, à mes yeux, qu’une dilatation plus ou moins
campanuliforme ou tubuleuse de l'extrémité du pédoneule, c’est-
à-dire un vrai réceptacle comparable à celui de la rose, et dans la
composition duquel les folioles calicinales n’entrent pour rien.
Je l’assimilerais même volontiers au réceptacle d’un capitule de
Composée, avec cette différence toutefois, que, dans les Compo-
sées, le réceptacle contient plusieurs fleurs, tandis qu’il n’en ren-
ferme qu'une dans les Cucurbitacées. Remarquons, du reste, en
passant, qu'entre les fleurs proprement dites et les inflorescences,
la différence est moins profonde qu'elle ne peut le paraître au pre-
mier abord ; une fleur isolée n’étant en réalité qu’une inflorescence
uniflore.

La croyance à la soudure congénitale ou à la coalescence des
pièces calicinales, dans les calices dits monophylles ou gamosé-
pales, est si fortement enracinée dans les esprits, qu'il serait mal-
séant de chercher à l’ébranler ; je me bornerai à dire que, dans la
famille qui nous occupe, cette théorie n’est pas admissible. Dans
aucune Cucurbitacée connue, le tube du calice des fleurs mâles ne
présente à l'œil de traces de soudures ; il est tout d’une venue,
absolument comme le réceptacle des Pomacées, dont il ne diffère
qu’en ce que, ordinairement, il ne contient pas d'organes femelles.
Quelquefois il est assez sensiblement pentagonal, mais c’est la

(1) Ann. des sciences nat., &° série, t. IV, p. 5 et suiv.

REVUE DES CUCURBITACÉES. S1

conséquence de la forme du pédoneule, pentagonal lui-même, et
dont les angles se prolongent sur le tube du calice, qui n’en est
que la dilatation ou, si l’on’aime mieux, l'épanouissement. Le
vrai calice, à mon sens, et les seules parties qui le constituent,
sont ici les cinq folioles, tantôt réduites à l’état de denticules im-
perceptibles, tantôt au contraire fort développées. Il est des cas
où elles manquent totalement: par exemple, dans certaines variétés
de Potirons (Cucurbita maxima), où la fleur se trouve alors vé-
ritablement réduite à la corolle et au faisceau stamimal ; mais il en est
d’autres où elles prennent tout à fait la forme des feuilles, ayant
comme elles un pétiole et un limbe des mieux caractérisés. La
Courge musquée (C. moschata) en offre de fréquents exemples.
On trouve d’ailleurs tous les états intermédiaires entre cette der-
nière forme et la forme linéaire ou subulée, qui est la plus fré-
quente, et l'examen de ces divers degrés de développement du
même organe amène à conclure avec certitude que, chez les
Cucurbitacées, la foliole calicinale de la fleur mâle, aussi bien que
de la fleur femelle, est tout entière au-dessus du tube du calice,
qu’elle n’a aucune part à sa composition, et qu’elle-même repré-
sente un pétiole et une nervure médiane sur laquelle un limbe
se développe accidentellement.

Mais si le tube du calice, dans les Cucurbitacées, n’est qu’une
dépendance du réceptacle de la fleur, n’en serait-il pas de même
aussi de la partie inférieure de la corolle, jusqu’au point où elle
commence à se diviser en lobes ? Il est des Cucurbitacées où la
corolle est assez franchement polypétale (Luffa, Momordica, T'hla-
hantha, ete.), mais il en est d’autres en plus grand nombre chez
lesquelles elle est tout à fait campanulée, et où elle semble n’être
que la continuation de la cupule réceptaculaire. Il n’est même pas
rare d'en voir les lobes se rétrécir quelque peu vers leur base,
comine pour accuser un dernier vestige de pétiole. On y retrouve
donc, quoique à un degré affaibli, les divers états que je viens de
signaler dans les folioles du calice, et peut-être serait-on en droit
de conclure, iei aussi, que les lobes seuls constituent le pétale tout
entier, et que par conséquent, la partie tubulaire située au-dessous

n'est encore qu’une suite du réceptacle plus profondément mo-
4° série. Bor. T. XII. (Cahier n° 2.) ? 6

82 CH. NAUDIN.

difié et devenu plus pétaloïde. Cette question, que d’ailleurs je
laisse indécise, et sur laquelle les botanistes organographes feront
bien de porter leur attention, pourrait être étendue à beaucoup
d’autres plantes ; et il ne serait pas sans intérêt d'examiner de
nouveau à quel point est fondée la théorie de la soudure des
pièces de la corolle gamopétale et staminifère, dans certaines
familles où il n’existe pour l’œil aucun mdice de coalescence, soit
entre les pièces de la corolle, soit entre les filets staminaux et
cette dernière.

Dans la note que j'ai citée tout à l’heure, j'ai ramené à trois les
cinq étamines que beaucoup d’auteurs prétendent exister dans la
fleur mâle des Cucurbitacées, et toutes les observations que j'ai
faites depuis qu’elle a été publiée n’ont fait que me confirmer
dans mon opinion. Cette théorie de l'existence de cinq étamines
est fondée sur le cas tout exceptionnel, et assez rare, où les deux
étamines biloculaires et complètes sont divisées jusqu’à leur base
en deux moitiés distinctes, comme on le voit dans les espèces
du genre Luffa. Un examen plus attentif eùt fait reconnaître que,
même dans ces cas de division totale, les cinq filets staminaux ne
sont pas en alternance avec les cinq lobes de la corolle, qu'ils sont
au contraire groupés deux à deux, et que dans chaque paire ils
sont insérés collatéralement l’un à l’autre sur le même point du
réceptacle. Ce qui est encore plus décisif, et ce quin’était pas moins
facile à apercevoir, c’est que les anthères très sinueuses du Luffa
sont symétriques l’une de l’autre dans une même paire, présentant
leurs parties homologues en sens inverse, c’est-à-dire les unes à
droite, les autres à gauche, comme les deux moiliés d’un même tout
de forme binaire. C’est d’ailleurs ce qui s’observe dans toutes les
étamines sinueuses de cette famille, à quelque degré que leur con-
nectif soit divisé. On conçoit que si les étamines biloculaires résul-
taient ici de l’accolement de deux étamines uniloculaires et indé-
pendantes, leurs parties correspondantes ne seraient point symé-
triques, mais prendraient des positions telles qu'elles pourraient
être, comme on dit en géométrie, superposées l’une à l’autre ou
emboîtées l’une dans l’autre.

Il y a d’ailleurs une autre preuve, et à mon avis sans réplique,

REVUE DES CUCURBITACÉES. 82

que les étamines biloculaires des Cucurbitacées sont simples, mais
complètes : c’est le fait de l'existence d'espèces chez lesquelles ces
étamines sont réellement au nombre de cinq, et alors décidément
alternes avec les lobes de la corolle. J'ai observé ce retour à la
symétrie ordinaire dans une plante que je n’ai pas encore déter-
minée avec cerlitude, mais qui probablement appartient au genre
Æchmandra d’Arnott, et dont les graines nous ont été envoyées
de Ceylan par M. Thwaites, directeur du jardin botanique de cette
colonie. Dans un grand nombre de fleurs, sinon dans toutes, les
étamines sont au nombre de cinq et biloculaires, à connectif
indivis et à loges droites, absolument pareilles, en un mot, aux
deux étamines complètes des Zehneria, du Sicydium et de quel-
ques autres genres. Si la théorie que je combats, et qui a été récem-
ment appuyée par des recherches organogéniques d’un grand
mérite, était fondée, il faudrait admettre que, dans l'espèce dont il
vient d’être question, il y a dix étamines soudées deux à deux,
et dont les paires alterneraient régulièrement avec les pièces de la
corolle. Ce serait un cas sans exemple dans le règne végétal, et
tout le monde conviendra, je crois, qu'accepter cette explication
serait pousser l’hypothèse beaucoup trop loin.

Pour ces différentes raisons, je maintiens ce que j'ai dit dans
ma note : que, dans l’immense majorité des Cucurbitacées, les
étamines sont au nombre de trois, deux entières’ et biloculaires, et
une réduite à une moitié, par conséquent uniloculaire. Cette der-
nière peut, du reste, devenir complète, et présenter deux loges
bien conformées : les exemples n’en sont pas rares; mais elle
peut aussi avorter totalement et disparaître, ainsi que nous le
voyons dans le genre Anguria, où il n'existe généralement que
deux étamines biloculaires, opposées l’une à l'autre, et sans trace
de division du connectif.

Ceci expliqué, j'arrive aux rectifications et additions qui font
l'objet principal de ce mémoire.

8! CH. NAUDIN,.

I. — CUCURBITA.

Cucurbitæ species auctorum.

Flores monϾci. Masculi in axillis fohorum 5solitarii ; corolla
campanulata, usque ad medium 5-loba, stamimum connectivis ima
basi liberis ; antheris flexuosis, in columnam cylindricam coalitis
vel agglutinatis, apice exappendiculatis ; polline magno, globoso,
subtiliter muricato, multiporoso. Fœminei pariter solitari, stami-
num trium rudimentis instructi, in fundo nectarifert ; stylo crasso,
in stigmata 3 biloba vel bifurca papillosa diviso ; ovario glabro vel
hirsuto, triplacentifero. Pepo sæpius magnus, carnosus aut fibro-
sus, Sæpe corticosus. Semina ovalia, complanata, margine tumido
cincta, vel rarius immarginata.

Plantæ utriusque orbis indigenæ, herbaceæ, annuæ aut radice
crassu napiformi perennantes ; flagellis multimetralibus, humi
serpenhibus et ad nodos radicantibus,nonnunquam etiam scanden-
libus. Floribus magnis aut maximis, luters. Peponum ca rne dulci
et tunc eduli aut amara et venenosa.

A. CUCURBITA MAXIMA.

Cucurbita maxima Duch.,in Lamk, Dict. encycl., IT, p. 316. — Seringe in
DC. Prodr., III, 316. — Ndn, Ann. des sc. nat., IV® série, t. VI, p. 47.
— Non C. maxima Wight et Arnt, in Prodr. Flor. pen. Ind. or., 1, 354,
nec Wight Jcones, II, tab. 507.

2. CUcURBITA PEPO.

Cucurbila Pepo Seringe, loc. cit., 316. — Ndn, loc. cit., p. 29. — C. Pepo
polymorpha et C. Pepo pyxidaris Duch., loc. cit.,148.—NonC. Pepo Roxbgh,
Flor. ind., II, 718, nec Loureiro, Flor, coch., p. 593,

3. CUCURBITA MOSCHATA.

Cucurbila moschata Duch., Dict. des sc. nat., XI, p. 234. — Seringe, luc. cit.,
317. — Ndn, loc. cit., p. 47.

C. Pepo moschata Lamk, Dict. encycl., 1, p. 152.

REVUE DES CUCURBITACÉES. 89
C. farinosa Blum., Bijdr:, 931. |
Cucurbita maxima Wight et Arnt, Prodr. Flor.pen. Ind. or., L, 354.— Wight,
Icones, tab. 507.
C. Melopepo Lour., Flor. coch., 593.
Schakeri-Schora Rheed, Malab., VITE, p. 3, tah. 2.

Plusieurs variétés nouvelles de cette espèce, dont les graines
nous ont été envoyées du nord de P’Afrique, de l'Inde et de la
Chine méridionale, ont été cultivées au Muséum en 1859. Les
seules qui me paraissent mériter d’être citées sont :

10 Une petite variété d'Algérie, à feuilles profondément lobées
et digitées, dont les fruits grêles, claviformes, plus ou moins cour-
bés, n'avaient guère que la grosseur du bras d’un enfant, sur une
longueur de 0" ,40 à 0",50. Elle est, dans son espèce, l’analogue
du Melon serpent ou de la Gourde massue.

2° Une autre variété du midi de la Chine, à feuilles simplement
lobées, et à fruits très déprimés d’avant en arrière et presque disci-
formes, c’est-à-dire exactement le contre-pied de ceux de la variété
précédente. |

On trouve dans l’Hortus malabaricus de Rheed (£. c.), publié
en 1688, une assez bonne figure du C. moschata, sous le nom de
Schakeri-Schora. C’est aussi cette espèce qui a été décrite et figu-
rée par Wight sous le nom de C. maxima.

h. CUCURBITA MELANOSPERMA.

Cucurbita melanosperma Al. Braun, Cat. hort. Karlsr., ann. 4824, — Ndn,
loc. cit., 53. |

D. CUCURBITA PERENNIS.

Cucurbila perennis As. Gray, Plant. Lindh., 11, p. 493. — Ndn, loc. cit,
p. 54, et in Rev. hort., anno 4855, p. 61, cum icone.

6. CUCURBITA DIGITATA.

Cucurbita digilata As. Gray, Plant. Wright., part. IF, p. 60. — Ndhn, loc. cit.,
p. 56.

Depuis deux ans, nous cultivons au Muséum cette espèce qui

86 CH. NAUDIN.

nous a été envoyée par M. Asa Gray, mais elle n’y a pas encore
fructifié. Sa racine est vivace et assez semblable à celle du C. pe-
rennis , dont toutefois elle ne paraît pas devoir atteindre la gros-
seur. Ses tiges sont grêles, anguleuses, scabres, quelque peu gé-
niculées à tous les nœuds, radicantes lorsqu'elles traînent sur le
sol, longues de 8 à 10 mètres, quelquefois plus. Les feuilles
en sont de la grandeur de la main, à cinq digitations profondes,
lobulées, scabres, d’un vert gris et bariolées de blanchâtre le long
des nervures. Les vrilles y sont remarquablement courtes et faibles,
à trois, quatre ou cinq divisions qui naissent presque à l’origine
même de la vrille. Dans les deux années qui viennent de s’écouler,
nos divers échantillons ont montré beaucoup de boutons de fleurs
mâles, qui ont tous péri avant d'avoir atteint leur entier développe-
ment, et quelques fleurs femelles qui se sont ouvertes, mais sont
restées stériles, faute de pollen pour les féconder. Ces dernières
sont à peu près de la grandeur de celles du C. perennis, mais, à
ce qu'il m'a paru, d’un jaune beaucoup plus pâle.

La Courge à feuilles digitées parait aussi rustique que la précé-
dente , mais elle est beaucoup plus tardive. Elle entrera avanta-
geusement, comme elle, dans l’horticulture ornementale.

M. Blume (1) mentionne, sous les noms de Cucurbila viltata,
C. villosa et C. hispida, trois plantes dont la brièveté de ses des-
criptions ne permet pas de se faire une idée. On ne sait, en l'absence
de ses échantillons, si ce sont des espèces distinctes ou de simples
formes de quelqu’une des espèces citées plus haut, ni même si elles
appartiennent au genre. Le C'ucurbita exanthematca de M. Fenzl
(Kotschy, Zter nubicum), ainsi que je le dirai plus lom, n’est qu’une
ou peut-être deux espèces du genre Coccinia. Enfin il me paraît
probable, sinon tout à fait certain, que la Cucurbitacée américaine,
décrite par M. Hasskarl, dans son Hortus Bogoriensis (2), sous le
nom de Cucurbita evodicarpa, estla même que celie qui est figurée
dans le Flora fluminensis de Vellozo, tome X, planche 99, sous

(1) Bijdrage, p. 934 et 932.
(2) Hortus Bogoriensis descriptus, sive Retziæ, edit. nov., pars 1*, 1858,
p. 305.

I

REVUE DES CUCURBITACÉES. | 87

le nom de C. odorifera, et même que le Curua où Curuba de
Pison (1). Il est bien douteux qu’elle appartienne à ce genre.

IT, — BENINCASA.

Benincasa Savi, Mem., 1818, p. 6, cum icone. — Delile, Mém. Acad. de Par.,
1824, t. VII, p. 395. — Seringe, Mém. de la Soc. d'hist. nat. de Genève,
III, 32, tab. #., et in DC. Prodr., IL, p. 303. — Endlich., Gen. plant.,
n° 54135.

Cucurbitæ species auctorum.

Flores monϾci, omnes in axillis foliorum solitarn. Masculorum
calyx patulus, foliaceus, tubo brevi quasi complanato et rotato.
Corolla fere 5-petala, id est lobis basi vix inter se cohærentibus.
Stamina 3, omnino libera ; antheris crassis, brevibus, subsessili-
bus, valde flexuosis, exappendiculalis ; polline magno, globoso,
multiporoso, subtiliter muricato aut papilloso. Fœmineorum calyx
et corolla ut in maribus; ovarium triplacentiferum ; stigma sub-
sessile, trilobum, undulatum. Pepo cucurbitaceus, undique hispi-
dus, maturatione glaucescens. Semina ovalia, plana, margine
tumido cireumdata.

Herba austro-asiatica, annua, repens, pauciramosa, 2-l-metra-
hs, undique hispida aut hirsuta. Folirs palmato-5-lobis, lobis acu-
hs; cirrhis sœpius 2-fidis. Fruchibus ovoideo-cylindricis ovoi-
deisve, primo intense viridibus et hispidissimis, demum nonnihil
calvescentibus et ceram glauco-albicantem pulverulentam sudanti-
bus ; carne alba, succosa, cucumerina, eduli.

A. BENINCASA CERIFERA.

Benincasa cerifera Savi, loc. cit.—Seringe, loc. cit.— Rœmer, Synops. monogr.
EEvp:.62.

Cucurbita cerifera Fischer, ex Endlich., loc, cit.

Cucurbita Pepo Loureiro, Flor. coch., p. 593, et Roxbgh, For. ind., IIT, 748.

Cucurbita alba Roxbgh, Icon. ined., in East Ind. Comp. Mus., tab. 457.

Camolenga, Condor, Rumph, Herb. amb., V, p. 395, tab. 143.

Cumbulam Rheed, Hort. malab., VIT, p. 5, tab. 3.

(4) Marcgr., Hist. nat. el med. Bras., 1. IV, p. 262.

88 CH. NAUDIN.

Le Benincasa est un des légumes classiques et les plus estimés
de l’Asie austro-orientale, et particulièrement de la Chine (4).
Quoique décrit avec détail par Rumph et par Rheed, qui en ont
donné d’assez bonnes figures, il a élé pris par Loureiro et Rox-
burgh pour le Cucurbita Pepo de Linné, qui n’est lui-même que
la confusion de deux ou de trois espèces très différentes. Son in-
troduction en Europe remonte à près d’un demi-siècle, et cepen-
dant c’est à peine s’il est connu hors de quelques jardins bota-
niques. Le volume de son fruit, qui est de la taille d’une petite
Citrouille et quelquefois beaucoup plus gros, sa conservation facile
pendant plusieurs mois et quelquefois même pendant toute une
année, l'excellence de sa chair, et enfin la facilité de sa culture,
auraient dû depuis longtemps le faire admettre dans les potagers.
On s’explique difficilement l'oubli dans lequel on l’a laissé. Ce fruit
est remarquable par l’abondante exsudation cireuse et pulvéru-
lente dont il se couvre à l’époque de la maturité, et qui se continue
bien longtemps encore après qu'il a été cueilli.

Je ne connais jusqu'ici que deux variétés de Benincasa, et en-
core très peu différentes l’une de l’autre. La première, qui est celle
de nos jardins botaniques, se reconnait à ses fruits cylindriques,
longs de 0,25 à 0",40. Le plus bel échantillon que j’en aie vu
avait été envoyé d'Alger à l'Exposition universelle de 1855; il
mesurait près de 60 centimètres de longueur sur 20 à 25 d’épais-
seur. La seconde variété, arrivée récemment de la Chine, s’en dis-
üngue par des fruits Simplement ovoïdes, plus courts et en même
temps plus gros. Peut-être aussi la sécrétion cireuse en est-elle
moins abondante.

III, — PEPONOPSIS.

Flores diæei. Fœminei axillares, solitari ; ovario ovoideo, gla-
berrimo, triplacentifero ; calyce 5-dentato ; corolla campanulata,
usque ad medium 5-loba. Stylus basi disco carnoso aurantiaco

(1) « Inter Cucurbitas hœc est omnium cibo aptissima et saluberrima, quæ
vix unquam negatur infirmis. » (Loureiro, Flor, coch., p. 593.)

er gr ner CEEEnne

nn. © os + dE ER Pace

de le nd M M à némmmn PV

REVUE DES CUCURBITACÉES. 89
circumdatus, apice in stigmata 3 magna biloba papillosa divisus.
Flores masculi nondum cogniti.

Planta incertæ patriæ (fortassis mexicana ?); caulibus lignescen-
tibus perennans, alle scandens ; flagelhis subteretibus, in prima
œtate puberulis. Foliis maxime variabilibus, nunc ovatis ovatove-
cordalis et integerrimis, nunc 3-5-lobis imoet interdum fere usque
ad basim limbi divisis et tunc digitatis, intense viridibus, glabris
aut glabratis nitidulisque; cirrhis multifidis, in superficie vel
lϾvissima adminiculorum extrema digitorum parte cohϾrentibus.
Floribus forma et magnitudine Cucurbitarum flores æœmulantibus,
pallide luteis, nervis eætus virentibus.

A. PEPONOPSIS ADHÆRENS. Ÿ

Caules, in caldario Musæi Parisiensis, 8-10-metrales, nec minores
quum planta sub dio colitur. Folia decimetrum sesquidecimetrumque
longa et lata. Ovarium omnino ovoideum, sub flore constrictum, lævissi-
mum, viride, crassitudine olivæ.

Il y à huit ou dix ans que cette plante remarquable est cultivée
dans une des serres du Muséum. Nous n’avons aucune donnée sur
son origine ; mais je suppose, d’après de vagues analogies avec
d’autres espèces, qu’elle est américaine, et peut-être des parties
montagneuses et tempérées du Mexique ou de l’Amériqne cen-
trale, ce que semblerait indiquer sa rusticité relative. Une bouture
détachée du pied mère, et déjà enracinée, fut mise en pleine terre
au pied d’un mur en 4857 ; elle s’y développa avec autant et peut-
être plus de vigueur que ne le faisait la plante mère dans la serre
chaude où elle se trouve encore aujourd’hui, et, en quelques se-
maines, elle couvrit une grande partie de ce mur, sur plusieurs
mêtres de hauteur, d'un épais rideau de feuillage, comme l'aurait
fait un Lierre. Elle continua à y végéter, jusqu'aux premiers
jours de novembre, après avoir résisté, sans beaucoup en souffrir,
aux premières gelées de l'automne.

Le nom de Peponopsis que je lui donne ici est destiné à rap-
peler son analogie avec les Courges, au moins en ce qui concerne

90 CH, NAUDIN.

la plante femelle, qui nous est seule connue. Sa fleur, en effet, ne
diffère par rien d’essentiel de celle des Courges ; elle est presque
aussi grande que celle du Cucurbita perennis, et en a toute la
structure, avec cette différence toutefois qu’on n’y trouve pas de
vestiges d’étamines avortées, et que le stigmate en est proportion-
nellement plus grand. Elle s’en distingue encore par sa couleur
jaune très pâle, qui est à peu près celle du soufre ; mais la teinte
orangée reparail au fond du réceptacle sur une sorte de disque
dont il est tapissé.

Ce qu'il y a de tout à fait particulier dans la plante qui nous
occupe, et qui me parait mériter un moment d'attention , c’est
l'usage qu’elle fait de ses vrilles multifides, non plus pour les en-
rouler, comme les autres Cucurbitacées, autour des tuteurs ou des
plantes qui sont à sa portée, mais pour les fixer à la surface des
corps solides, particulièrement des pierres ou du bois, sur les-
quels elle cherche son point d'appui. Lorsque ces vrilles se trou-
vent en contact, par les extrémités de leurs digitations étendues,
avec des corps résistants, quels qu’ils soient, elles deviennent, sur
ces points de contact seulement, le siége d’un nouveau travail cel-
lulaire, en vertu duquel elles s’élargissent, s’aplatissent, etse chan-
gent en autant de ventouses intimement appliquées sur le corps.
Lorsque l’adhérence est suffisante, les digitations des vrilles se
roulent en spirale, se contractent, et rapprochent ainsi la tige ou
le ramean du corps qui doit le soutenir. Il en résulte que la
plante s'applique contre les murs avec toute la précision d’un
Lierre et presque avec la même solidité, car elle offre une certaine
résistance lorsqu'on essaye de l’en détacher. Il est évident d’ail-
leurs que cette adhérence doit être assez forte pour ne pas céder
sous le poids des fruits, qui doivent être fort nombreux, à en juger
par l’abondance des fleurs femelles. De cette particularité d’orga-
nisation, il est permis de croire que la plante, dans son site na-
turel, croit en lieu découvert, et qu’elle tapisse la surface des
rochers.

J'ai vainement essayé d’en faire nouer les fruits par l’emploi du
pollen d’autres Cucurbitacées, notamment de celui des diverses
espèces de Courges, et de deux Coccinia cultivés au Muséum.

REVUE DES CUCURBITACÉES. 9»

IV. — LAGENARIA.

Lagenaria Seringe, Diss. in Mém. de la Soc, d'hist. nat. de Genève, III, part.
Hp. 1, et in DC. Prodr., II], p. 299.

Cucurbitæ species auctorum.

Flores monœæci, in axillis foliorum solitarü et longe peduncu-
lati ; corolla vix non 5-petala. Masculorum tubus calycimus campa-
nulatus, dentibus 5 brevibus (raro foliaceis) coronatus. Stamina 3,
libera sed conniventia ; antheris fere sessilibus, crassis, loculis
flexuosis ; polline Iævi, sicco ovoideo trisulco, humefacto glo-
boso triporoso. Fœmineorum stigmata 3 subsessilia, obtuse bi-
loba, papillosa ; ovarium diversiforme, hirtellum, triplacentiferum.
Pepones nonnunquam maximi, sæpius corticosi, puberuli aut gla-
brati ; carne fungosa, alba, insipida aut amara, demum fatiscente.
Semina multiformia, varie marginata.

Herba in veteri orbe indigena, nunc in Asia meridionali
adhucdum sylvestris, annua, mulhimetralis, alte scandens, tota
pube mollhi conspersa, moschum redolens (prϾsertim si contrectata
fuerit) ; flagellis obtuse angulatis. Foliis majusculis, suborbicula-
ribus, basr cordatis, lobis indistinctis ; cirrhis bifidis. Floribus al-
bis. Peponibus maximis et minimis, nunc oblongo-obovoideis
ampulliformibus aut cylindricis et clavatis, nunc ovoideis vel etiam
depressis et disciformibus, carne alba insipida eduli, aut amara
el venenata, demum sub cortice lignoso fatiscente.

1. LAGENARIA VULGARIS.

Lagenaria vulgaris Seringe, loc. cit, — Wight et Arnt, Flor. pen, Ind. or., I,
p. 341. — Rœmer, Synops. monogr., II, p. 60.

Lagenaria idolatrica Seringe, loc. cit. — Don, Gen. syst. of. Gard, — Ach,
Rich., Tent. Flor. abyss., [, 293.— Hochst. in Schimp. ter abyss., n°1574,
ex Ach. Rich., non autem n° 4755 (saltem in Herb. Deless.). — Cucurbita
idolatrica Blum., Bijdr., 930.

Lagenaria cochinchinensis RϾmer, loc. cit., p. 64.

92 CH. NAUDIN.

? Lagenaria vittata Seringe, loc. cit. — Rœmer, loc. cit., 61. — Cucurbila vit-
tata Blum., Bijdr., 932.

Lagenaria microcarpa Ndn., Revue horticole, 1855, p. 65, cum icone.

Cucurbita lagenaria Linn., Spec., 1434.— Rumph, Amb., V, p. 397, tab. 144.
— Tournef., Inst. , 107. — Vélins du Mus., t. 61, tab. 40, 41,42.

Cucurbita leucantha Duch., in Lamk. Dict., II, 450.
Cucurbita longa, folio molli, flore albo G. Bauh., Cat., n° 100.— Sloane, Jam.
1, 225.

Cucurbita sphærica maxima, C. Bauh., Cat., n° 100. — Sloane, loc. cit.

Cucurbita tertia seu lagenarit, flore albo molli, C. Bauh., loc. cit. — Sloane,
loc. cit.

Cucurbila lagenaria maxima, recurva, C. Bauh., loc. cit. — Sloane, loc. cit., 226.

Cucurbita lagenaria longa, recta, minor, C. Bauh., loc. cit. — Sloane, loc. cit.,
tab. 441.

Taquera Marcgr., in Pison, Hist. nut. et med. Bras., IV, 264, cum icone.

Bela-Schora Rheed, Malab., VIII, p. 1, tab. 4. Fortassis et Caipa-Schora ejus-
dem, loc. cit., p. 6, tab. 5.

Gallice : Gourde, Calebasse.

Le genre Lagenaria, séparé, avec raison, par Seringe, du genre
Cucurbita, est très probablement monotype ; mais l'espèce unique
qui le compose est à peu près aussi polymorphe par ses fruits et
ses graines que la Courge commune (Cucurbita Pepo). Cepen-
dant, comme la plante varie elle-même très peu, et qu’elle se dis-
tingue au premier abord de toutes les autres Cucurbitacées con-
nues, elle n’a que rarement induit les botanistes en erreur.

Seringe est le premier parmi eux qui ait essayé d’en classer les
variétés, et il les réduit à cinq, savoir : la Gourde pèlerine, la
Cougourde, la Gourde plate, la Gourde pyriforme et la Gourde
massue ; mais l'observation d’un très grand nombre d'échantillons
reçus de pays divers, et la plupart cultivés au Muséum pendant
trois années consécutives, m'a appris que les variétés de la Gourde
étaient beaucoup plus nombreuses, et que leurs différences ne
portaient pas uniquement sur la forme des fruits, mais aussi sur
leurs volumes relatifs et sur la figure des graines. Partant de ces
nouvelles données, je répartirai en neuf variétés principales les

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REVUE DES CUCURBITACÉES. 93

formes plus ou moins persistantes de la Gourde qui me sont au-
jourd’hui connues. Ces variétés sont les suivantes :

1° La grande Calebasse d’A frique, plante très forte et générale-
ment trop tardive pour fructifier sous le climat de Paris. Ses fruits
acquièrent ou dépassent le volume d’un Potiron moyen ; ils sont
tantôt étranglés au-dessus du milieu, à la manière de la Gourde
pèlerine, tantôt seulement rétrécis à leur partie postérieure (celle
qui regarde le pédoncule) en une sorte de goulot plus ou moins
long. Leur coque ligneuse, épaisse de 6 à 8 millimètres, et très
dure lorsqu'elle a müri sous le soleil de l’Afrique, permet d'en
faire des vases et des ustensiles variés d’une certaine solidité, et
qui sont d’un usage général chez les nègres, surtout dans l'Afrique
occidentale. Les graines de cette grande race se font remarquer
à la fois par leur taille et par leur forme ; nous en avons reçu du
Sénégal, qui n’ont pas moins de 2 centimètres de longueur, sur une
largeur seulement un peu moindre, et dont la forme approche par
conséquent de celle d’un carré; le bourrelet marginal s’y amincit
en un bord presque tranchant, particularité que j'ai d’ailleurs
observée sur plusieurs autres variétés.

2° La Gourde pèlerine, ou Gourde bouteille, dont la forme type
est connue de tout le monde. Elle présente, comme on sait, deux
renflements inégaux, séparés par un col rétréci, le renflement ter-
minal (celui auquel tenait la fleur) étant généralement beaucoup
plus volumineux que l’autre, et contenant seul des graines. 11 me
parait que cette ancienne variété devient rare à Paris, probable-
ment parce que, cultivée au voisinage d’autres races, son croise-
ment avec elles l’a fait dégénérer ; mais elle s’est bien conservée
dans nos provinces du Midi, où l’on en fait encore assez fréquem-
ment usage comme vase à contenir du vin. Ses graines sont
oblongues, fortement marginées, et terminées au sommet par deux
angles arrondis et saillants, que les descripteurs ont souvent com-
parés à deux tubercules.

3° La Cougourde, qui n’est qu’une simple dégénérescence de
la Gourde bouteille, et qui n’en diffère qu'en ce que la partie
postérieure du fruit, au lieu de se renfler comme dans cette der-
nière, s’allonge en un goulot plus ou moins grêle, On peut réunir

94 CH. NAUDIN.

à cette sous-variété la Gourde turbinée ou pyriforme de Seringe,
qui fait Le passage à la forme suivante.

h° La Gourde massue, nommée aussi Gourde trompette, de forme
cylindracée, souvent un peu renflée à son extrémité antérieure, et
longue quelquefois de 4 mètre à 1 mètre 1/2. Il en existe d’ailleurs

beaucoup de sous-variétés, les unes énormes et de la grosseur de

la cuisse, les autres presque aussi grêles que le bras d’un enfant.
De même que dans les variétés précédentes, l’épiderme en est
tantôt uniformément vert, tantôt marbré de blanc. Cette dernière
particularité est surtout remarquable dans une sous-variété que
nous avons reçue d'Egypte.

5° La Gourde Hahre-Hawam, à laquelle je conserve le nom
sous lequel elle nous a été envoyée par M. Figari, directeur du
jardin botanique médical du Caire. Son fruit est d’une forme par-
faitement ovoide, de la taille d’un Melon moyen, d’un vert pâle,
marbré de blanchâtre, à coque comparativement peu épaisse. Je
soupçonne qu'elle n’est cultivée, en Égypte, qu’à litre de plante
potagère.

6° La Gourde plate de Corse, dont la forme est diamétralement
l'inverse de celle dela Gourde massue. [ci le fruit est très déprimé ;
quelquefois, lorsque la race n’est pas pure, 1l est un peu conique
du côté du pédoncule, mais souvent aussi tout à fait plat et presque
disciforme. J’en ai vu une sous-variété à la fois si petite et si
aplatie, que, dans quelques-unes de nos provinces, on lui donne
le nom de Gourde tabatière, parce qu’effectivement on s’en sert
quelquefois comme de boîte à tabac.

7° La petite Gourde du Brésil, dont les fruits, étranglés vers le
milieu, sont à peine plus gros que le pouce, sur une longueur de
8 à 10 centimètres. Sa coque est très dure, et les graines qu’elle
contient, comparativement très petites (7 à 8 millimètres de long),
sont bombées sur les deux faces et presque triangulaires.

8° La petite Gourde de Guinée, exactement de la forme d’une
Gourde pèlerine, mais plus courte encore que la précédente. Je
ne la connais que par des fruits incomplétement mûrs, qui nous
sont arrivés du Gabon par l'intermédiaire de M. Porte, qui a
lui-même introduit cette variété au Brésil. Ce qui la distingue

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REVUE DES CUCURBITACÉES. 95

de toutes les autres, c’est que ses graines, au lieu d’être comme
tronquées ou bidentées au sommet, ont exactement la forme
ovale de celles des Courges et des Pastèques; et c’est pour avoir
donné trop d'importance à ce caractère, à une époque où je n’avais
pas assez étudié l'espèce, que je l’ai décrite comme espèce dis-
tincte, dans la Revue horticole (1), sous le nom de Lagenaria
mAcrocar pa.

9° Les Gourdes sauvages, qui fourniront probablement matière
à de nouvelles subdivisions lorsqu'elles seront mieux connues,
mais qui paraissent avoir un caractère commun dans la grande
amertume de leur chair, et sont par suite très vénéneuses. Ce ca-
ractère cependant ne leur est pas exclusivement propre, car il est
fréquemment question, dans les auteurs, de Gourdes cultivées
qui partagent cette mème amertume. Rumph est le premier, je
crois, qui en ait parlé. Dans l’Herbarium amboinense (2), il fait
mention de diverses variétés de Gourdes, les unes cultivées, les
autres sauvages, et tellement amères (3) qu’elles ne peuvent ser-
vir qu’à faire des vases.

Royle (4) signale aussi la Gourde sauvage dans le nord de l'Inde,
où les indigènes, qui l’'emploient dans leur médecine en qualité de
drastique, lui donnent le nom de T'oumbie. Elle est amère et vé-
néneuse, et cet auteur cite un cas d’empoisonnement auquel son
usage a donné lieu. Il n’est done pas douteux que l'espèce ne soit
véritablement indigène des contrées chaudes de l’Asie, et proba-
blement aussi des îles les plus voisines de ce grand continent. On
ne peut rien affirmer quant à l'Afrique, mais il est à peu près cer-
tain qu’elle n’existait pas originairement en Amérique ; et s’il est

(1) Revue horticole, année 1855, p. 65, avec une planche.

(2) Tome V, p. 397, planche 144.

(3) «.... Altera sylvestris quoque occurrit species, plerumque in littore cre-
scens, priori (scilicet cultæ et eduli) in omnibus similis, sed minora gerens folia
ac flores. Fructus ejus haud spithamam longi sunt, plerumque breviores, par-
vum gerentes ventrem ac longum incurvumque collum, instar, reloriæ, omnes-
que ejus partes amaræ sunt et ingratæ, ita ut manus amaro inficiant sapore si
fuerint attactæ, immo pejus quam Colocynthidis. Vocatur Calabassa Ulan,quum
sponte in arenosis crescat littoribus. » (Rumph, loc. cit.)

(4) Plant. Him., t.1, p. 249.

D6G CH. NAUDIN.

vrai, comme quelques auteurs le prétendent, que les indigènes de
diverses parties du nouveau monde la cultivaient déjà à l’arrivée
des Européens, comme on ne l’y a trouvée nulle part à l’état sau-
vage, on peut supposer qu'elle y aura été portée à une époque
inconnue par des navigateurs égarés, ou simplement charriée par
les courants marins ; ce que ses fruits à la fois légers et très ré-
sistants rendent possible et même assez vraisemblable. |

Ce dont on ne peut douter, c’est que la Gourde n’ait été connue
en Europe depuis une haute antiquité. Les auteurs anciens, Pline
et Columelle entre autres, sont très explicites à ce sujet. Bien qu'ils
n'aient généralement pas su distinguer les espèces de Cucurbita-
cées, dans le sens botanique du mot, leurs expressions suffisent
pour faire reconnaître la Gourde dans celle ou plutôt une de celles
qu’ils désignent sous le nom de Cucurbita. Columelle en parle
avec quelque détail dans deux endroits de son traité De re rustica,
et il indique des procédés de culture différents, suivant qu’on se
propose d'obtenir des fruits pour la table, ou seulement des vais-
seaux propres à contenir les liquides. Il insiste même sur le choix
à faire dans les graines qui, tirées de la partie ventrue du fruit,
donneront les plus grands vases, mais qu'il faut prendre dans le
col ou dans la partie rétrécie pour obtenir des fruits plus longs,
plus délicats et d’un meilleur débit : « De media parte cucurbitæ
» semen inverso cacumine ponito, ut fiat incrementi vastioris ;
» nam sunt ad usum vasorum satis idoneæ, sicut alexandrinæ cu-
» curbitæ, cum exaruerint. At si esculentæ merci præparabis,
» recto cacumine de collo cucurbitæ sumptum semen serendum
» erit, quod prolixior et tenuior fructus ejus enascatur, qui scilicet
» majus cæteris invenit prætium (1). » Dans son petit poëme de la
Culture des jardins (le livre X de son Traité d'agriculture), il
répète à peu près la même idée :

Intortus cucumis prægnansque cucurbita serpit,
Una neque illis facies, nam si tibi cordi
Longior est, gracili capitis quæ vertice pendet,
Et tenui collo semen lege : sive globosi

(4) Colum., liv. XI, c. 3.

REVUE DES CUCURBITACÉES, 97

Corporis, atque utero nimium quæ vasta tumescit,
Ventre leges medio ; sobolem dabit illa capacem
Naryciæ picis, aut Actæi mellis Hymetti,

Aut habilem iymphis hamulam, Bacchove lagenam.
Tum pueros eadem fluviis innare docebit.

Je n’ai pas besoin de dire que ce choix si recommandé des
graines est fondé sur une erreur; mais ce qui est digne de re-
marque, c’est que cette erreur et d’autres très analogues se sont
perpétuées jusqu'à nos jours, et qu'on les retrouve dans la pra-
tique de quelques jardiniers.

Pline (iv. XIX, xxiv) parle très clairement aussi de la Gourde,
mais en entremélant sa description avec celle d’une autre espèce
qui est probablement une Courge. Le savant traducteur de
Pline, M. Littré, de l'Institut, ne me paraît pas avoir fait celte
distinction d'espèces, car 1l rapporte toutes ces cucurbitæ de l’au:
teur latin au Cucurbita Pepo de Linné. On reconnaitra aisément
la Gourde aux passages suivants : « Vires sine adminiculo standi
» non sunt, velocitas pernix, levi umbra cameras ac pergulas ope-
» riens. Inde hæc duo prima genera : camerarium et plebeium,
» quod humi repit. In priore (camerario) mire tenui pediculo li-
» bratur pondus immobile auræ. Cucurbita quoque omni modo
» fastigatur, vaginis maxime vitiibus, conjecta in eas postquam
» defloruit, crescitque qua cogitur forma, plerumque et draconis
» intort figura. Libertate vero pensili concessa, jam visa est no-
» vem pedum longitudinis...…. Nuper in balnearum usum venere
» urceorum vice, jampridem vero ehiam cadorum ad vina con-

| » denda (1). »

Ce fruit suspendu à un pédicule long et grêle ne peut manifes-
tement être que celui de la Gourde, ce que confirme d’ailleurs

(1) Voici la traduction de ce passage par M. Littré : « Naturellement avides

| de s'élever, les courges n'ont pas la force de se soutenir sans support ; elles
| croissent très rapidement, et couvrent d’un ombrage léger les berceaux et les

treillages. De là vient la première distinction en deux espèces : la courge de

berceaax et la courge commune, qui rampe à terre. Dans la première espèce,

à un pédicule d'une singulière ténuité est suspendu un fruit pesant, immobile

au souffle du vent. La courge s’allonge de toute façon, surtout à l’aide d’étuis
Le série. Bor. T. XII. (Cahier n° 2.) 5 F

98 CH. NAUDIN.

l'usage qu’on en fait, après l'avoir vidé, pour conserver les
vins. Ce qui est encore digne de remarque, c'est l’existence en
Italie, dès l’époque de Pline, de la variété à fruits cylindriques et
allongés, analogues à notre Gourde trompette. On voit d’ailleurs,
d’après les paroles de Pline, que la Gourde n’était pas alors une
nouveauté, et que ses usages étaient connus depuis longtemps. Il
ajoute un peu plus loin que les jardiniers en dessèchent les fruits
à la fumée, et s’en font des vases rustiques où ils conservent
leurs graines.

Seringe a réuni, avec doute, au genre Lagenaria, le Cucurbita
hispida de Thunberg (1), qu'il est difficile de reconnaitre sur une
description fort incomplète; néanmoins 1l est extrèmement pro-
bable que cette espèce n’est autre chose que le Benincasa cerifera.

D'après Achille Richard (2), la plante d’'Abyssinie (herbier
de Schimper) rapportée par M. Hochstetter au Lagenaria ido-
latrica de Serimge ne diffère pas du L. vulgaris ; c’est done par
suite d’une simple erreur d’étiquetage que l'échantillon de l’her-
bier de Schimper, catalogué dans l’herbier Delessert sous le
n° 1755 et étiqueté par M. Hochstetter, se trouve être le Cucumis
dipsaceus.

On doit retrancher du genre le prétendu Lagenaria sphærocarpa
d'E. Meyer (plantes de Drège) : cette espèce ne parait pas avoir
été décrite ; il se pourrait qu’elle appartint au genre Luffa, dont
elle m'a paru, à un examen d’ailleurs très superficiel, avoir quel-
ques caractères, au moins dans l’inflorescence mâle.

d'osier, où on la fait entrer après qu'elle est défleurie ; elle prend en croissant
la forme à laquelle on la soumet : c’est la plupart du temps celle d'un dragon
replié sur lui-même. Abandonnée à sa suspension naturelle, on l’a vue acquérir
neuf pieds de longueur... Il y a peu de temps que les courges sont employées
dans les bains en guise d’aiguières; mais il y a longtemps qu'on s’en sert
comme de vases pour garder les vins. »

(4) Flor.jap., 322.

(2) Tentam. Flor. abyss., 1, 293.

REVUE DES CUCURBITACÉES. 99

V. — CITRULLUS.

Citrullus Schrader, in Linnæa.

Cucumeris, Cucurbitæ et Anguriæ species auctorum.

Flores monϾci, omnes in axillis foliorum solitarti ; tubo caly-
cino late campanulato, corolla ultra medium 5-partita. Masculorum
stamina 3, libera ; antheris subsessilibus, flexuosis, exappendicu-
latis ; polline sicco ovoideo trisulco et triporoso, humefacto glo-
boso Iævi. Fœæmineorum stigma (e tribus confectum) subsessile,

8-lobum, lobis obtuse bilobulatis ; ovarium triplacentiferum ,
ovoideum, villosum aut aubersininns: Pepones globosi, r'arius
oblongi. Soir ovalia, plana, sæpius, immarginata.

Herbæ in veterr orbe indigenæ, annuæ aut radice fusiformi pe-
rennantes, moschum redolentes aut fœtidæ ; flagellis subteretibus,
humafusis, non aut vix radicantibus. Foliis ambitu fere triangu-
laribus, profunde 3-5-lobis, lobis ipsis lobulatis, imo interdum in
lacinias angustas dissectis, sinubus rotundatis ; cirrhis sæpius bi-
fidis, rarius trifidis aut indivisis. Floribus sulfureis. Peponibus
(nonnunquam maximis) globosis obovoideisve, varie coloratis, gla-
berrimis, pulvere subtili magis minusve perspicuo glaucescenti-
bus ; carne succulenta aut fungosa, alba lutescente rubra aut pur-
purea, dulci et eduli aut amara.

Ge genre ne renferme que les deux espèces suivantes :

À. CrTRuziLus CoLocyNTHIS.

Citrullus Colocynthis Schrad., in Linnæa, t. XIE (1838), 414. —— Endlicher,
Gen. plant., n° 5131. — Rœmer, Synops. monogr., IL, p. 49.

? Citrullus Pseudo-Colocynthis Rœmer, loc. cil., p. 50. — Cucumis Pseudo-
Colocynthis Wdr., in Sel. sem. hort. Acad. Marb., 1834.

Cucumis Colocynthis Linn., Spec. 1433. — Seringe in DC. Prodr., III,
p. 302.

Cucumis bipinnatifidus R. Wight, in herb. Hook.

E

100 CH. NAUDIN.

C. radice perennans ; folis scaberrimis; peponibus omnino
globosis, viridi et luteo eleganter variegatis, plenis, carne fungosa
alba amarissima ; seminibus lœvibus, nitidulis, immarginatis,
colore sæpius castaneo.

Has. In aridis totius Africæ et Arabiæ frequens. Nec rarus crescit in
India orientali, æque ac in insulis Archipelagi ; in Hispania quoque repe-
ritur loco dicto Cabo de Gata. Rarius, et tunc advena, in maritimis Galliæ
meridionalis occurrit.

La Coloquinte officinale, malgré l'extrême étendue de son aire
géographique, varie comparativement peu. Nous l'avons reçue
de l'Afrique et de l'Inde, et les échantillons de cette dernière pro-
venance ne différaient de ceux de la première que par des feuillesun
peu plus blanches et comme argentées. On la distinguera toujours
aisément de la Pastèque à sa grosse racine pivotante et vivace, et
à son feuillage grisâtre ettrès scabre. Ses fruits sont, en moyenne,
beaucoup plus petits que ceux de la Pasièque, et varient de la
taille ‘d’une pomme d’api à celle d’une grosse orange. La pulpe
en est toujours extrêmement amère, et les graines très lisses et
plus ou moins basanées. Ces dernières n’ont guère que 5 à 6 milli-
mètres de longueur , mais ce caractère seul ne suffirait pas pour
faire distinguer la Coloquinte de la Pastèque, dont certaines va-
riétés ont les graines tout aussi petites et presque pareilles de forme
et de couleur.

La Coloquinte a joué un rôle considérable dans la pharmacopée
des anciens, ainsi que beaucoup d'écrivains grecs et latins nous
l'apprennent; aujourd’hui même elle n’est pas sans usage. Elle est
mentionnée dans plusieurs endroits de la Bible sous les noms de
Paka et Pakuot, et c’est à elle que les commentateurs attribuent
l'empoisonnement du potage dont les Prophètes faillirent être vic-
times; mais peut-être ces deux noms s’appliquent-ils aussi à
l'Ecbalium et au Cucumis Prophetarum de Linné.

9. CITRULLUS VULGARIS.

Citrullus vulgaris Schrad., LinnϾa, t. XIT (1838), p. 412.

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REVUE DES CUCURBITACÉES, 101
Citrullus edulis Spach, Hist. des vég. phan., VI, p. 214. bei Rœmer, loc. cit
p. 90.
Citrullus Pasteca Sageret, in Ann. des sc. nat., 17° sér., VIII, p. 342, —
Rœmer, loc. cit., p. 51.
Citrullus amarus Schrad., loc. cit., t. XIT (4838), p. 413, et t. XIX (1846),
p. 651. — Rœmer, loc. cit., p. 50

Citrullus cafer Schrad., loc. cit., XII (1838), 413. — C. Cafrorum Rœmer,
loc. cil., p. 51.

Citrullus fistulosus J. Ellert. Stocks, in Hook. Journ. of bot. and Kew gard,
Misc., t. IN, p. 74, tab. 3. — Walp., Ann. bot. syst., IV, 863.

Cucumis citrullus Linn., Spec. 1435. — Seringe in DC. Prodr.. III, 301. —
Nees von Esenb., Beschreib. officinell. Pflans., sive Plant. medic. Düsseld.,
1833, tab. 71 b, et 72.

. Cucumis amarissimus Schrad., Hort. Gœtling., 1827. — Nees von Esenb.,

loc. cit., tab. 71 a.

Cucumis dissectus Dene, Herb. Timor. p. 121, — Spanoghe, in Linnœæa, t. XV
(1841), 205.

Cucumis laciniosus Eckl., Collect., 1829.
Cucumis Colocynthis Thunbg, ex Linnœa, t. XIX (4846), p. 651.
2? Cucumis bicirrha Forst., Mss., ex Guillem., Zephyr. tait., B6.

Cucumis sativus, Battich Djebbal, Battich Brullos et Battich Ennemis Forsk.,
Flor. ægyptiaco-arab., 169.

Cucurbita citrullus Lour., Flor. coch., 598. — Schkuhr, Bot. Handb., LIL,
296. — Blume, Bijdr., 932.

Cucurbita Anguria Duch., in Lamk, Dict., II, 450.

Cucurbita cafra Eckl. et Zeyh., Coll, sem., 1833.

Anguria indica seu Battecu Rumph, Amb., V, tab. 146.

Anguria africana hirsuta, Vélins du Mus.,t. LXE, tab, 55.

Jacé sive Anguria Marcgr., Hist, nat. med. Bras., IV, 263, cum icone.

Gallice : Pastèque, Melon d'eau ; hispanice : Sandia, Sandilla.

C. annuus ; foliis quam in præcedente majoribus et mollioribus ;
| peponibus eham majoribus, unicoloribus aut marmoratis, pulvere

ceraceo subtil haud infrequenter glaucescentibus ; carne hi lu-

Lescente, rubente aut purpurea, dulci et eduli, nonnunquam amara,
imo et amarissima ; seminibus polymorphis multicoloribusque.

Has. Planta antiquitus culta, nunc in regionibus calidis temperatisque

102 CH. NAUDIN,
totius orbis propagata passimque efferata viget. In Africa, præsertim

orientali et transæquatoriali, adhucdum sylvestris copiose reperitur, fru-
ctuum sapore mire ludens.

La synonymie du Citrullus vulgaris, telle que je viens de l’éta-
blir, pourra être contestée par quelques botanistes, au moins en ce
qui concerne les Citrullus amarus, C. cafer, C. amarissimus et
Cucumis laciniosus ; mais, d’après les descriptions des auteurs
etles échantillons des herbiers, ces quatre prétendues espèces sont
absolument identiques entre elles. Le sont-elles aussi avec la
Pastèque proprement dite? C’est ce que je prétends établir dans
les détails suivants.

En 1855, M. Decaisne et moi avons trouvé à l'Exposition uni-
versellé plusieurs fruits très beaux du Citrullus amarus de Schra-
der, envoyés directement du cap de Bonne-Espérance, comme
échantillons des produits naturels de ce pays. Les nombreux indi-
vidus vivants que nous avons obtenus de leurs graines, et qui ont
très bien fructifié à Paris, de 1856 à 1859, n’ont différé de nos
Pastèques communes, ainsi que des Res variétés africaines
dont je parlerai tout à l’heure, que par l’amertume des fruits ; il y
avait identité complète dans le port, le feuillage, la manière de
végéter, et jusque dans l’odeur fétide des pousses et des jeunes
feuilles, avec de légères variations dans la forme, la grosseur et
les marbrures des fruits. Une différence, en apparence plus essen-
tielle que la saveur de la chair, était la petitesse des graines, à peine
plus grandes que celles de la Coloquinte officinale et toutes noires ;
mais par là ces graines ressemblaient exactement à celles d’une
autre variété sauvage le Pastèque, à fruits très doux et très comes-
tibles, envoyée d’Abyssinie par M. Schimper, et cultivée de même
au Muséum. Au total, toutes ces variétés différaient incompara-
blement moins les unes des autres que ne différent entre elles
celles des Courges ou du Melon; et comme, d’un autre côté, j'ai
obtenu du croisement de la Pastèque amère du Cap par une Pas-
tèque comestible, des métis très féconds et à fruits presque doux,
je conclus, conformément au principe que j'ai admis, que toutes
ces races ne constituent qu'une seule et même espèce, dont la Pas-
tèque amère est une des formes sauvages les mieux caractérisées.

REVUE DES CUCURBITACÉES. 103

Mais la Pastèque n'est pas toujours amère à l’état sauvage. Je
viens de parler d’une variété douce d’Abyssinie; le célèbre voya-
seur Livingstone, qui a exécuté de si longues pérégrinations en
Cafrerie, va nous en fournir d’autres exemples, qui auront de plus
l'avantage de faire ressortir l'identité spécifique des variétés à
fruits doux et à fruits amers. J’emprunte le passage suivant à la
traduction française de la relation de ses voyages (1) par madame
H. Loreau (page 56) :

«... Le plus étonnant de tous les produits du désert est, sans
contredit, le Melon d’eau (Cucumis cafer), qui porte dans le pays
le nom de Kengoué ou Kémé. Dans les années où la pluie est un peu
plus abondante que d'habitude, des terrains d’une immense éten-
due sont littéralement couverts de cette espèce de Melons. Ce fait
avait lieu tous les ans, à l’époque où la pluie était moins rare que
de nos jours, et les Bakouains envoyaient chaque année des cara-
vanes au lac Ngami pour acheter de ces Melons aux tribus de la
contrée. Aujourd’hui cette abondance ne se produit plus que tous
les dix ou onze ans; c’est alors une véritable fête non-seulement
pour les habitants du pays, mais encore pour les animaux de toute
espèce. L'éléphant, véritable seigneur de la forêt, mange ces
Melons avec délices, de même que les rhinocéros, bien que natu-
rellement il diffère beaucoup de ces derniers dans le choix de sa
nourriture. Toutes les antilopes, à quelque genre qu’elles appar-
tiennent, dévorent le Melon d’eau avec une égale avidité; les
lions, les hyènes, les chacals, les souris, tous enfin semblent
apprécier le bienfait de cette manne qui satisfait les goûts les plus
divers. Ces Melons, néanmoins, ne sont pas tous comestibles ; il y
en a qui ont tant d’amertume, que les Boërs ont donné à la plante
le nom générique de Melon d’eau amer. Les naturels frappent
chacun de ces fruits l’un après l’autre d’un coup de hache, et
mettent la langue à l'ouverture qu'ils ont faite, ce qui leur permet
dé distinguer immédiatement les bons fruits des mauvais. Les
Melons amers sont malsans ; les autres sont extrêmement salubres.

(4) Explorations dans l'intérieur de l'Afrique australe, etc., de A840 à 1856,
par le D" David Livingstone. Paris, Hachette et Cie 4859; 4 vol, in-8°.

104 CH. NAUDIN.

Il suftit qu'il v ait dans le voisinage quelques Melons d’eau amers,
pour que les Melons cultivés contractent cette amertume, parce
que les abeilles communiquent le pollen d’une espèce à l’autre.

» Cette particularité de fruits doux et de fruits amers portés par
la même plante se reproduit également dans une espèce de Con-
combre à fruits rouges et mangeables, que l’on trouve fréquem-
ment dans le pays (4). Ce Concombre, d’un brillant écarlate à
l’époque de sa maturité, a environ un pouce et demi de diamètre
et quatre pouces de longueur ; il est souvent d’une grande amer-
tume, et parfois complétement doux. »

Nous avons reçu, en 1857, d’un parent du docteur Livingstone,
domicilié à Sainte-Foi-la-Grande, près de Bordeaux, les graines
de plusieurs variétés de ces Melons d’eau de la Cafrerie, récoltées
par M. Livingstone lui-même. Quelques-unes étaient étiquetées
de noms indigènes, tels que Mahoshélang, Makhibé, Lothloé,

“Naka-Loa-Tlou, Lélopa (2), Maségosébé, Mashéa-Balale, Léga-
pou, Sémérioane ; beaucoup d’autres n’avaient pas de noms. Ce qui
frappait, au premier abord, c'était la prodigieuse diversité de ces
graines qui aurait pu facilement faire supposer plusieurs espèces
différentes. Il y en avait de blanches, de noires, de rouges, de
jaunes, de vertes, de nuances intermédiaires, de marbrées, de
mouchetées, elc.; les unes étaient lisses et luisantes, les autres
rugueuses etternes ; quelques-unes n'avaient pas de traces de mar-
gination, d'autres au contraire étaient entourées d’un épais bour-
relet, et parmi elles il s’en trouvait qui ressemblaient à s’y mé-
prendre aux graines du Benincasa. Dans deux ou trois variétés,
elles ne différaient pour ainsi dire pas des graines de la Coloquinte

(1) J'ai supposé, dans mon précédent travail sur le genre Cucumis, que cette
espèce pouvait être le Cucumis metuliferus.

(2) D'après M. Durrieu, directeur du jardin botanique de Bordeaux, avec qui
j'ai partagé les graines venues de Cafrerie, la Pastèque Lélopa serait une excel-
lente acquisition pour la culture potagère du Midi. A Paris, je ne l'ai pas distin-
guée des autres variétés de même provenance ; mais à Bordeaux, les fruits en
ont été énormes et la chair de qualité tout à fait supérieure pour la confection
des confitures, seul objet pour lequel les Pastèques soient culiivées dans le sud-
ouest de la France.

REVUE DES CUCURBITACÉES. 105
officinale, tandis que dans une autre elles étaient si semblables
à celles d’un Melon, que je n’en ai reconnu l'espèce que par le ré-
sultat du semis. Néanmoins toutes les plantes qui naquirent de ces
graines différèrent fort peu les unes des autres : c'était le même
feuillage et presque la même taille; dans quelques-unes cependant,
les ovaires furent parfaitement glabres, tandis que chez d’autres
ils étaient extrêmement velus, ressemblant par là à ceux de la
Pastèque amère. Même variation dans les odeurs des feuilles :
chez les unes, elles rappelaient la senteur du musc; chez les autres,
l'odeur forte et nauséabonde de la Pastèque amère. Quant aux
fruits que toutes ces plantes produisirent en abondance, ils offrirent
une grande uniformité, variant à peine de la forme sphérique dé-
primée à celle d’un ovoïde court et renversé. La plupart étaient
dépourvus de marbrures, et lorsque celles-ci existaient, elles dispa-
raissaient presque sous une teinte générale d’un vert grisâtre. Dans
presque tous, la chair était jaune pâle et très fade; mais les graines
reproduisirent à très peu près toutes les variations de forme et de
couleur que j'avais déjà observées.

La Pastèque était-elle connue des anciens? Il est à peine possible
d’en douter, quoique Matthiole avoue en avoir vainement cherché
la preuve dans les écrits de Pline, de Dioscoride et de Galien. In-
digène de l'Afrique, de la vallée du Nil, et probablement aussi de
l’Arabie, elle a dû être remarquée de bonne heure par les peuples
de ces pays, comme nous voyons qu'elle l’est par ceux de la Cafre-
rie. S'il en eût été autrement, on ne saurait à quelle plante ratta-
cher au moins l’une des deux espèces de Cucurbitacées, désignées
dans le texte hébreu de la Bible par les noms de Kissuim et
d’Abattichim, que la Vulgate traduit par Cucumeres et Pepones,
et dont le souvenir excita plus d’une fois les murmures des Israé-
lites contre Moïse, dans le désert (1). En admettant que l’une des
deux füt le Melon (Kissuim), l’autre (Abattichim) ne pouvait être
que la Pastèque, plante du pays, dont le nom hébraïque s’est con-
servé dans les mots arabes Battich et Batteca, qui la désignent

(4) « Recordamur piscium quos comedebamus in Ægyplo gratis ;in mentem nobis
veniunt cucumeres, el pepones, porrique, et cepe, et allia. » (Num., XI, vers. 5.)

406 CH. NAUDIN.

encore aujourd'hui, et d’où le nom français lui-même a été tiré.
Quant aux Kissuim, les commentateurs font remarquer l’analogie
de ce mot avec le grec Etxvos, qui semble en être dérivé, mais avec
une transposition de consonnes. J’incline à voir dans cette espèce
le Melon, plutôt que le Concombre ou la Courge, d’abord parce
que ces derniers sont plus probablement asiatiques qu’africains,
ensuite parce que les circonstances dans lesquelles se produisaient
les récriminations des Israélites s’appliquent mieux à des fruits
rafraichissants qui se mangent crus qu’à d’autres qui ne seraient
comestibles que cuits.

Si l’on admet que la Pastèque était cultivée par les Égyptiens et
les Israélites, on ne pourra guère refuser aux Grecs etaux Romains
de lavoir connue avant l’ère chrétienne. Je trouve effectivement
dans le petit poëme attribué à Virgile, et intitulé Copa (1), une
citation qui me paraît ne pouvoir s'appliquer qu'à la Pastèque. Une
cabaretière, voulant décider un passant à s'arrêter chez elle, lui
fait l’énumération des fruits qu’elle a à lui offrir :

Sunt autumnalis cerea pruna Deæ ;
Sunt et mora cruenta, et lentis uva racemis,
Et pendens junco cæruleus cucumis,
Castaneæque nuces, et suave rubentia mala.

Le sens général du poëme indique qu'il ne s’agit ici que de
fruits prêts à être consommés immédiatement et sans prépara-
tions ; par conséquent, ce Cucumis ne saurait être une Courge ni
un Concombre : on n’a le choix qu'entre le Melon et la Pastèque ;
mais cette dernière seule justifie l’épithète de cœruleus, qui assu-
rément n’est pas jetée au hasard. Effectivement, comme je l’ai
dit plus haut, les Pastèques, et principalement celles à peau noire,
et qui sont proprement les Melons d’eau, prennent, sous la légère
efflorescence cireuse qu’elles exsudent, une teinte glauque souvent
très prononcée,

Il n’est pas facile de reconnaitre dans le récit de Pline (liv. XIX,
xxn1) à quelles espèces botaniques il applique les noms de Cucu-
meres, Pepones et Melopepones; mais il est probable que la

(1) P. Virgilii Maronis carmina, édit. Dubner. Firmin Didot, 4858.

REVUE DES CUCURBITACÉES, 107

Pastèque était du nombre. Voici d’ailleurs ses expressions en par-
lant des Cucumeres, où l’on s’est trop hâté de voirnotre Concombre
proprement dit : « Crescunt qua coguntur forma. In Italia virides
» et quam minimi, in provinciis quam maximi : et cerini aut nigri.
» Placent copiosissimi Africæ, grandissimi Mæsiæ : quum ma-
» gnitudine excessere, pepones vocantur. Vivunt hausti in stoma-
» cho in posterum diem, nec perfici queunt in cibis, non insalubres
» ftamen plurimum. »

M. Littré, dans sa traduction de ce passage (1), rapporte très
arbitrairement, je crois, à une Courge, ces volumineux Pepones
des provinces de l'empire. Mais cette interprétation me parait con-
tredite par la dernière phrase. En effet, les Courges ne se mangeant
que cuites, ne peuvent guère encourir le reproche d’être de diffi-
cile digestion, qui, au contraire, peut très bien s'adresser à des
fruits mangés crus, comme le Melon et la Pastèque. Malgré le
vague des expressions de l’auteur latin, je penche iei pour l’une
ou l’autre de ces deux espèces, et mieux encore pour toutes deux.
D'après ce que nous avons vu plus haut, la culture de la Pastèque
_en Italie, même avant l'ère chrétienne, ne peut guêre être mise
en doute; quant au Melon proprement dit, Pline nous donne la
preuve certaine qu'il y existait de son temps, ainsi que je le dirai
plus loin. |

Je conclus de ce qui précède que toutes les espèces de Citrullus
énumérées dans la synonymie que j’ai donnée ci-dessus n'en font
qu’une ; que cette espèce, toujours annuelle, et par là facile à
distinguer de la Coloquinte officinale, est essentiellement africaine ;
qu’elle existe encore à l'état sauvage en Afrique, et qu’elle est cul-
tivée depuis un temps immémorial dans la vallée du Nil, d’où elle

(1) « Les concombres prennent, en poussant, la forme qu'on leur impose.
En Italie, ils sont verts et très petits; dans les provinces, ils sont très gros : ils
sont couleur de cire ou noirs. On aime ceux d'Afrique, qui sont très productifs,
et ceux de Mæsie qui sont très gros. Quand ils acquièrent un volume considé-
rable, on les nomme pépons (Potiron, Cucurbita pepo Linn.). Mangés, ils
demeurent sur l'estomac jusqu'au lendemain, et sont de difficile digestion, sans
pourtant être malsains d'ordinaire, » (Littré, traduction de Pline, t, I, liv. XIX,
p. 724.) |

108 cn. NAUDIN.

a passé, même assez anciennement, chez la plupart des peuples
civilisés du bassin méditerranéen. Aujourd’hui, elle existe dans
tous les pays chauds de la terre, et comme les graines en sont
jetées au hasard, partout où on la consomme, il n’y à rien d’éton-
nant qu’on la retrouve à demi-sauvage dans beaucoup de contrées
où elle n'existait certainement pas primitivement.

VI, — CUCUMIS.

Cucumeris species Linn. et auct. — Ndn, Ann. des sc. nat., 1V° série, t. XI,
p. 9. — Rigocarpus Neck., Elem., 386.

4. CUCUMIS METULIFERUS.

Cucumis metuliferus Mever. — Ndn, loc. cit., p. 10.

2. Cucumis ANGURIA.

Cucumis Anguria Linn., Spec. 1436. — Ndn, loc. cit., p. 414.

Cette espèce, qui nous avait été, en premier lieu, communiquée
par M. L. Vilmorin, nous est aussi arrivée d'Algérie sous le nom
de Concombre Arada. Les plantes des deux provenances, cultivées
à côté les unes des autres en 1859, se sont montrées absolument
identiques dans toutes leurs parties. Toutes ont été extrêmement
productives, à tel point que je n’estime pas à moins d’un millier
le nombre de fruits mürs qui ont été récoltés sur neuf pieds. Ces
fruits constituent un excellent légume et se mangent cuits, mais il :
faut avoir soin de les cueillir avant qu'ils aient pris tout leur
accroissement, c’est-à-dire avant que l’enveloppe des graines se
soit durcie, attendu que leur petite taille ne permet guère de les
vider.

3. CUCUMIS PROPHETARUM.

Cucumis Prophetarum Linn., Spec. 1436, et Amænit. acad., IV, 295. — Ndn,
loc. cit,, p. 14. — Non C. Prophetarum Jacq.

h. Cucumis FiIGAREI.

Cucumis Figarei Delile, Cat. hort. monsp. — Ndn, loc. cit., p. 46.

REVUE DES CUCURBITACÉES. 109

5. CUCUMIS MYRIOCARPUS.

Cucumis myriocarpus Ndn, loc. cit., p. 22. — C. Prophelarum Jacq., Hort.
Vindob., tab. 9.

6. CUCUMIS DIPSACEUS.

Cucumis dipsaceus Ebrenbg. — Ndn, loc. cit., p. 25. {

7. CUCUMIS SATIVUS.

Cucumis sativus Linn., Spec., 4437. — Ndn, loc. cit., p. 27.

8. CUCUMIS TRIGONUS.

Cucumis trigonus Roxbgh, Flor. Ind., III, p. 722. — Ndn, loc. cit,, p. 30.

Plusieurs pieds du C. trigonus, cultivés au Muséum en 1859,
y ont beaucoup mieux réussi qu'en 1858, ce qui me permet de
compléter aujourd’hui ce que j'ai dit de cette espèce dans ma mo-
nographie du genre. Les tiges couchées sur le sol s’y enracinent
presque à tous les nœuds, et non-seulement elles en acquièrent
plus de vigueur, mais elles donnent par là naissance à de nou-
veaux individus qui doivent être pour la plante un moyen de mul-
üiplication indéfinie. La grande chaleur de l’été de 1859 aidant,
J'en ai récolté une vingtaine de très beaux fruits, la plupart en-
tièrement sphériques, quelques-uns sensiblement trigones, qui
ont müri dans les mois d'août et de septembre. Presque tous ré-
sultaient de fleurs fécondées artificiellement. Trois fleurs femelles
fécondées par le pollen du Melon ont également noué et müri leurs
fruits, dont les graines ont paru bien conformées. La pulpe de
tous ces fruits est très amère, ce qui justifie le nom de C. Pseudo-
Colocynthis, sous lequel Royle (1) a décrit et représenté l’espèce.

9. Cucumis MELo. ù

Cucumis Melo Linn., Spec. 1436. — Ndn, loc. cil., p. 34. =

Quelques variations intéressantes qui se sont produites en 1859,

(4) Plant. Himal., 1, p. 220, tab. 47.

410 CH. NAUDIN.

dans nos cultures, confirment une fois de plus l'identité spéci-
fique des races que j'ai réunies au Melon proprement dit. Je me
bornerai à signaler les suivantes :

1° Le Melon rouge de Perse (C. Melo erythrœæus), dont un
échantillon s’est transformé, sans doute par croisement avec le
Cantaloup, en un Melon de grande taille, à côtes, à peau verru-

queuse, blanche, mais avec une imperceptible teinte rougeâtre.

Ce Melon était très odorant et sucré presque à légal du Cantaloup
Prescott. |

2° Le Melon sauvage de l'Inde (C. Melo agrestis), dont un in-

dividu a produit des fruits dix à douze fois plus gros que ceux de
la race type, ovoïdes, à peau très blanche, sensiblement odorants
et à chair rougeâtre. Un autre individu s'était modifié en sens in-
verse, ses fruits n'ayant pas dépassé la taille d’une noix.

3° Le Melon de F'igari (C. Melo maculatus ?), si peu altéré jus-

qu’alors, qui a pris tout à coup la forme d’un Melon serpent, selon
toute probabilité par croisement avec cette race. Les fruits se sont
allongés jusqu'à 35 ou 40 centimètres ; mais ils ont conservé la
teinte vert foncé qui les caractérise dans l’état ordinaire; aussi
avaient-ils plus de ressemblance avec cette variété du Melon
serpent que Sageret a nommée Melon trompe qu'avec le Melon
serpent proprement dit.

h° Enfin le Melon serpent (C. Melo fleæuosus), issu d’une forme
déjà très raccourcie en 1858, qui s’est totalement transformé en
un Melon ovoïde, à côtes, réticulé, tout semblable à certaines dégé-
nérescences du Melon maraicher.

Dans le courant de l'hiver dernier, nous avons reçu du Texas,
par les soins de M. Victor Considérant, les graines d’un Melon qui
croit maintenant à l’état sauvage dans ce pays, et dont M. Trécul
a rapporté un échantillon desséché au Muséum. Malgré les appa-
rences, je ne fais guère de doute que ce Melon n’y soit simplement
naturalisé, et qu’il ne descende d’une race introduite de l’ancien
continent. Nous l’ävons cultivé en 1859 avec le plus grand succés,
et nous en avons récolté plus de cent fruits mürs sur trois ou
quatre pieds. Le feuillage en est relativement petit, semblable du
reste à celui de beaucoup de Melons ; mais les fleurs, tant mâles

DV

SOU sole és Es Misian Se ds".

REVUE DES CUCURBITACÉES. A11

que femelles, en sont presque sessiles. Les fruits, sphériques, très
lisses, du plus beau jaune, légèrement odorants, arrivent à la
grosseur d’une belle prune de reine-Claude; la char en est
blanche, un peu fade, mais sans arrière-goût désagréable. Au to-
tal, ce Melon se rapproche beaucoup du Melon Chito, dont il n’est
probablement qu’une variété, remarquable surtout par la brièveté
du pédoncule des fruits.

Dans mon précédent mémoire, j'ai examiné cette question de
savoir si l'espèce botanique du Melon était connue des anciens.
Des passages de Columelle et de Pline, que je n'avais pas alors
assez remarqués, me paraissent lever tous les doutes à ce sujet.
Columelle, dans son poëme des Jardins cité plus haut, déerit ainsi
un Cucumis à fruits très allongés et contournés :

Lividus at cucumis, gravida qui nascitur alvo,
Hirtus, et ut coluber nodoso gramine tectus,
Ventre cubat flexo, semper collectus in orbem,
Noxius exacuit morbos æstatis iniquæ.

Il n'est guère possible de voir là le Concombre proprement dit,
dont les fruits ne sont jamais assez longs pour pouvoir être com-
parés à des serpents. Au contraire, tous ces caractères convien-
nent au Melon serpent, même la fâcheuse propriété que l’auteur
lui attribue d’exaspérer les maladies inhérentes aux chaleurs de
l'été. Le passage de Pline est plus formel, et, à mon avis, tranche
la question : « Ecce quum maxime nova forma eorum(cueumerum)
» In Campania provenit mali cotonei effigie. Forte primo natum ita
» audio unum : mox semine ex illo genus factum : melopeponas
» vocant. Non pendent hi, sed humi rotundantur. Mirum in his,
» præter figuram coloremqué, et odorem, quod maturitatem adepti,
» Quanquam non pendentes, statim a pediculo recedunt (4). »

On reconnait aisément, aux incohérences de son récit, que Pline

(1) Ce passage est traduit ainsi par M. Littré: « Au moment où j'écris,
on vient d’en obtenir en Campanie une variété qui a la forme d’un coing : on
m'apprend qu'un premier individu naquit ainsi par hasard, ensuite que la graine
en à fait une espèce; on nomme ces concombres mélopépons (Melon, Cucumis

112 CH. NAUDIN.

n'avait pas observé lui-même les plantes dont il parle, et qu'il se
bornait à rapporter les dires d'autrui ; néanmoins il précise bien,
dans ce passage, les caractères du Melon, sa forme obovoïde, sa
couleur jaune, son odeur et sa séparation spontanée d'avec le pé-
doncule, bien qu’il s'arrondisse à terre, et ne soit pas suspendu.
Ces deux derniers caractères suffiraient pour caractériser le Melon,
à l'exclusion de toute autre espèce ; réunis aux deux précédents,
ils font disparaitre tous les doutes.

M. Littré, dans une note annexée à sa traduction du XIX° livre
de Pline, fait observer que cet auteur doit avoir fait confusion avec
quelque autre plante, lorsqu'il dit que le Mélopépon (notre Melon
proprement dit) venait d’être créé par la culture, attendu qu’on le
trouve mentionné dans Hippocrate, c’est-à-dire bien des siècles
plus tôt, sous le nom de cixvos rérwv. L'autorité du savant traduc-
teur de Pline et d'Hippocrate est ici d’un grand poids ; néanmoins,
bien qu'il soit très vraisemblable qu'Hippocrate ait connu le
Melon, il se pourrait que son ctxvos térwy fût une Pastèque.

Aux espèces décrites dans ma monographie, il faut ajouter la
suivante, dont les graines nous ont élé envoyées de la Nouvelle-
Calédonie par M. Pancher, directeur des pépinières du gouver-
nement dans celte ile :

10. Cucumis PANCHERIANUS +, tab. 8.

C. annuus ; foliis 3-5-lobis, scabris ; floribus quam in C. Melone
mullo minoribus ; fructibus parvulis, obovoideis, adpresse pubenti-
bus, maturatione odoris et a pedunculo secedentibus ; pulpa cucu-
merina non amara.

Hag. In ruderatis Novæ Caledoniæ frequens.

Planta pro genere parva et microphylla, Melonem habitu floribusque re-
ferens, nec ab illo facile segreganda. Caules obscure angulati, scabri, pen-
nam anserinam crassitie æquantes, vix metrales. Folia 5-7 centim. longa,

Melo, Linn.). Ils ne sont pas suspendus, mais ils s’arrondissent sur le sol. Ce
qu'ils offrent de singulier, outre la figure, la couleur et l'odeur, c'est que, deve-
nus mûrs, ils se séparent de leur queue, bien qu’ils ne soient pas suspendus. »

REVUE DES CUCURBITACÉES. 113
h-6 lata, obtuse triangularia, frequentius 3-5-loba, lobis sinubusque
rotundatis. Flores floribus Melonis simillimi sed plus quam dimidio mi-
nores ; fæminei pariter in ramis secundariis tertiarlisque axillares, ovario
semen tritici crassilie vix superante, villosulo. Pepones maturi pedunculo
gracili tereti longiusculo suffulti, caduci, forma et magnitudine olivam
æmulantes, virides maculisque saturatioribus variegati, nonnihil flaventes
et tunc odorem debilem Melonis redolentes. Caro subnulla, aut potius in
pulpam semifluidam incolorem mutata, sapore fatuo cucumerimo. Semina
ovalia, minuta, vix sesquimillimetrum longa, albentia et immarginata,
Sesami orientalis seminibus fere similia.

De toutes les espèces du genre actuellement connues, le C. Pan-
cherianus est celle dont les fruits sont les plus petits; en moyenne,
ils ne dépassent pas celui d’une belle olive, dont ils ont à peu
près la forme, avec cette seule différence qu’ils sont un peu co-
niques à la partie postérieure, semblables en cela à ceux du Melon
de Figari. À part l’exiguïté de toutes ses parties, c’est à peine si
l’on peut le distinguer du Melon proprement dit ; aussi est-ce un
peu prématurément que j'en fais ici une espèce distincte. Plusieurs
fleurs femelles, ayant été fécondées par le pollen d’unepetite variété
très dégénérée de Melon cantaloup, ont noué et müri leurs fruits
tout aussi bien que si elles avaient reçu du pollen de la plante même,
et ces fruits ont été remplis de graines bien conformées. Il reste à
savoir si elles germeront. Dans le cas où elles produiraient des
plantes intermédiaires entre les deux types et aussi fertiles qu'eux,
je me verrais contraint, en vertu du principe que j'ai adopté pour
déterminer les espèces douteuses, de rattacher le C. Pancherianus
au Melon proprement dit, comme simple race. Dans tous les cas,
qu'on le considère comme une race ou comme une espèce dis-
tincte, sa parenté avec le Melon me parait indubitable, et jy vois
un nouvel argument en faveur de l'hypothèse de l’origine com-
mune des formes analogues, quelle que soit la qualification qu’on
leur applique.

Le C. Pancherianus est tout à fait sauvage à la Nouvelle-Calé-
donie, où ses fruits sont mangés par les enfants des indigènes.

4° série. Bot. T. XII. (Cahier n° 2). 4 8

A1! CH, NAUDIN.

VIL. — COCCINIA.

Coccinia Wight et Arnt, Flor. pen. Ind. or.,t. [, p. 347. — Endlich., Gen.
plant., n° 5139. — Rœmer, Synops. monogr., II, p. 92. — Ndn, Ann. des

sc. nat., IV° série, t. VIII, p. 365.

Bryoniæ, Cucurbitæ, Cucumeris et Momordicæ species auctorum.

1. CoccCINIA INDICA.

Coccinia indica Wight et Arnt, loc. cit. — Wight, Illustr. of Ind. bot., II,
tab. 105. — Dene, in Jacquem., Voyage, IV, p. 60, tab. 72. — Walp.,
Repert. bot. Syst., IT, p. 202. — Hasskarl, Plant. Jav. rar., p.188.

Coccinia grandis, C. Loureiriana et C. Wightiana Rϟmer, loc, cit.

Bryonia grandis Linn., Mant., 126. — Loureiro, For. coch., 595. — Willd.,
Syst., IV, p. 617. — Lamk, Dict. encycl., I, p. 496. — Seringe, in DC.
Prodr., III, p. 305.

Bryonia ? Moimoi Seringe, loc. cit.

Bryonia barbata Hamilt., Icon. ined., in ÆEast Ind. Comp. Mus., tab. 625.

Bryonia folio anguloso, aculo, glabro, Burm., Thes. Zeyl., p. 48 et 49, tab. 49,
fig. 4.

Bryonia foliis subrotundis angulosis, Momordic® facie, Burm., loc. cit., tab. 49,
fig. 2.

Cucumis dioica Roxbgh, Icon. ined., in East Ind. Comp. Mus., tab. 213.

Momordica monadelpha Roxbgh, Flor. Ind., III, p. 708.

Vitis alba indica Rumph, Amb., V, p. 448, tab. 166.

Covel, Rheed, Hort. malab., VIV, p. 27, tab. 14.

C. dioica, glaberrima, scandens aut humi prostrata et tunc cre-
berrime radicans ; caulibus ramisque teretibus, demum frutescen-
hibus; foliis obtuse 5-gonis aut profundius 5-lobis ; floribus ma-
jusculis, subcampanulats candidissimis ; peponibus obovoideis ,
maturatione intense coccinets.

Has. In tota India et China meridionali vulgatissima reperitur.

Planta in Horto parisiensi vix bimetralis (in regionibus calidioribus abs-
que dubio vegetior), radice crassa caulibusque primartüs lignescentibus
perennans ; folis intense viridibus, glabris et nitidulis, h-S centim. longis
et latis, in planta fœminea quam in mascula profundius lobatis interdum-

REVUE DES CUCURBITACÉES. 115
que fere digitatis aut dissectis. Flores utriusque sexus in axillis foliorum
solitarii, floribus Lagenariæ vulgaris paulo minores, corolla campanulata
aut semiaperta, intus puberula. Pepones circiter crassitudine ovi colum-
bini sed oblongiores, glaberrimi, demum coceinei, ad basim tamen viro-
rem sæpius retinentes ; pulpa molli, rubra, insipida. Semina complanata,
subinæquilatera, ovalia, subtiliter asperata et spurco-alba.

La Coccinie de l’Inde, l’ancien Bryonia grandis de Linné, est
encore une de ces espèces classiques dont la plupart des auteurs
qui ont écrit sur les Cucurbitacées semblents’être plu à embrouiller
la synonymie. Elle est cependant parfaitement caractérisée comme
espèce, et il est presque impossible de la méconnaître lorsqu'on
l’a vue vivante en fleurs et en fruits ; elle varie néanmoins quelque
peu par le feuillage, comme presque toutes les Cucurbitacées, et,
sous ce rapport, elle peut tromper un observateur superficiel ou
réduit à de mauvais échantillons d'herbier.

Depuis deux ans, nous la cultivons au Muséum, et elle y a abon-
damment fructifié en 1859. Ses rameaux, lorsqu'ils traînent sur
le sol, poussent, presque à tous les nœuds, des racines qui s’y en-
foncent perpendiculairement, grossissent, deviennent napiformes,
et donnent naissance à autant d'individus nouveaux. Sous un cli-
mat chaud, où la plante n’est pas exposée à périr l'hiver, cette pro-
pagation par rameaux enracinés doit être pour elle un moyen
rapide de multiplication. Lorsqu'elle s'élève sur des tuteurs, on
n’y observe aucune production de racines adventives.

J'ai remarqué que presque toujours les plantes femelles ont le
feuillage plus découpé que les mâles. Les feuilles y sont ordinai-
rement à cinq lobes, dont les sinus rentrants sont quelquefois
assez profonds pour qu'elles en paraissent digitées, ou même dis-
séquées quand les lobes se divisent eux-mêmes en lobules, Celles
des individus mâles sont plutôt pentagonales, à angles obtus, que
véritablement lobées.

La Coccinie de l’Inde, si distincte spécifiquement de celle
d’Abyssinie, semble cependant s’allier très bien avec elle par voie
de croisement. J'en ai fécondé, en 4859, une dizaine de fleurs
femelles avec le pollen de cette dernière ; presque toutes ont noué
leur ovaire, et müri des fruits contenant des graines en apparence

116 © CH. NAUDIN.

bien conformées. Je m’attends donc à obtenir, dans la saison pro-
chaine, une nombreuse collection d’hybrides de ces deux espèces,
ce que je ne puis cependant pas affirmer avant d’en avoir fait
l'épreuve par le semis.

9, COoccINIA SCHIMPERI.

Coccinia Schimperi Ndn, Ann. des sc. nat., IV° série, t. VIII, p. 366.

Cucurbita exanthematica Fenzl, in Kotschy Jler. nubie., n° 308, non autem
n° 1418.

C. dioica, fere glaberrima, alte scandens ; caulibus ramisque
velustioribus lignescenhibus; folirs palmato-5-lobis, lobis acutis ;
floribus masculis sæpius sohitarus (rarius ut videtur geminatis
aut pauci-glomeralis), ochraceis; peponibus ovoideo-ellipticis ,
rubris.

HAB. Frequens in Nubia, Abyssinia et fortassis tota Africa orientali.

Planta præcedente multo altior, in Horto parisiensi 5-6-metralis (in.
patria 8-10-metralis aut fortassis amplius), radice caulibusque lignosis
perennans. Folia decimetrum et quod excedit longa etlata, sæpius 5-loba,
rarius subdissecta, lobis acutis, sinubus rotundatis. Corollæ quam in
C. indica fere dimidio minores, colore inter flavum et roseum dubio.
Pepones ovum columhinum vix superantes, in prima ætate virides et albo
variegati, demum rubri et unicolores ; pulpa rubra, insipida, Semina semi-
nibus prioris fere simillima.

Cette espèce, originaire de l’Abyssinie et probablement d’une
grande partie de l'Afrique orientale, a été, comme la précédente,
cultivée avec succès au Muséum en 1859. Plusieurs pieds, tant
mâles que femelles, qui avaient passé l'hiver en orangerie, furent
mis en pleine terre au printemps de cette année. Les individus
mâles fleurirent de bonne heure et avec profusion ; les femelles
n’ont donné que quelques fleurs, qu'on s’est hâté de féconder ar-
tificiellement, et qui ont toutes produit des fruits et de bonnes
graines. Ces fruits sont un peu plus gros que des œufs de pigeon,
d’une belle forme ovoïde-elliptique, quelque peu marbrés de blan-
châtre dans la jeunesse, et passent au rouge vif en mürissant.

REVUE DES CUCURBITACÉES. 117
La pulpe en est rouge et insipide, comme cellé des fruits de la
Coccinie de l'Inde,

Ces deux plantes pourraient être employées avantageusement
pour la décoration des jardins ; mais il faudrait, sous des climats
aussi froids que celui du nord de la France, les rentrer en serre
tempérée ou en orangerie pendant l’hiver.

Je n'ai point répété ici la diagnose que j'ai donnée du genre
Coccinia dans la notice que j'ai publiée 1l y a deux ans à propos du
C. Schimperi, parce qu'il est fort possible qu'il faille prochaine-
ment la modifier en faisant entrer dans ce genre de nouvelles
espèces. Il me paraît probable, effectivement, qu'il faudra joindre
aux deux précédentes la plante africaine que Schrader a décrite
sous le nom de Cephalandra quinqueloba, et dont le Botanical
Register (pl. 82) et le Botanical Magazine (pl. 1820) ont repré-
senté l'individu mâle. Cette espèce, dont la femelle n’est pas suffi-
samment connue, me parait très analogue, par son facies général,
par ses fleurs mâles ordinairement solitaires (au moins d’après les
figures, sinon d’après les textes) et par la couleur ochracée de la
corolle, à notre C. Schimperi, dont elle différe assez notablement
par la forme des feuilles. Dans tous les cas, elle a le caractère
essentiel assigné aux C'occinia : des étamines monadelphes à an-
thères très sinueuses. La dénomination générique de Cephalandra,
étant la plus ancienne, devra peut-être être substiluée à celle de
Coccinia.

Sous le nom de Cucurbita exanthematica, M. Fenzl me paraît
avoir confondu deux espèces de l’herbier de Kotschy : ia première,
cataloguée sous le n° 308, n'est autre chose que le Coccinia
Schimperi ; la seconde, sous le n° 1418, est très probablement
aussi un vrai Coccinia, mais avec une inflorescence mâle assez
différente de celle des deux espèces types. Il existe encore, parmi
les plantes d’Abyssinie du Muséum, deux ou trois autres Cucurbi-
tacées très analogues, entre antres le Cucumis striatus d'Ach. Ri-
chard, et l’ancien Bryonia abyssinica du Muséum, qu'il faudra ,.
selon toute vraisemblance, réunir aux Coccinia, lorsqu'elles auront
été suffisamment étudiées.

C'est tout à fait à tort que Rœmer a créé les Coccinia grandis,

118 CH. NAUDIN.

Loureiriana et W'ightiana. Ces prétendues espèces ne sont rien de
plus que le €. 2ndica, qu’il n’a pas su reconnaitre. Je crois qu'il
faut de même éliminer du genre, du moins jusqu’à plus ample in-
formation, son C. Moimori, plante absolument inconnue, dont
Adanson, qui seul l’a observée, n’a donné aucune description, et
que Seringe a rapportée à tout hasard aux Bryones, en la décri-

vant d’après deux assez mauvaises figures de Burman qui se rap-

portent au C. indica. I] doit en être de même du C. palmata de
Rœmer (Bryonia palmata de Linné), espèce qu’il est impossible
de reconnaître aujourd'hui, ou plutôt qui n’est que la confusion de
deux ou trois espèces différentes, parmi lesquelles se trouverait
probablement le Bryonia laciniosa, mal observé et incomplétement
décrit.

VII. — LUFFA.

Luffa Tournef., Act. R. S., p. 107.
Petolæ, Turiæ, Luffe, Momordicæ, Poppyæ, Cucurbitæ et Cucumeris species auc-
torum.

Flores monœei, corolla 5-petala aut profunde 5-loba. Mascu-
lorum tubus calyeinus late campanulatus aut turbinatus, dentes
iangulari-acuti. Slamina à ; duo bilocularia, usque ad basim aut
saltem ad mediam filamenti longitudinem parüta, tertium unilocu-
lare indivisum ; omnium antheris valde flexuosis. Pollen Iæve,
albens, siccum ovoideum 3-sulcum, humefactum globosum 3-po-
rosum. Fœmineorum petala sæpius singillatim caduca; ovarium
triplacentiferum ; stigma e tribus partialibus obtuse bilobis confe-
ctum, subüliter papillosum. Pepo maturus exsuceus, intus rete e
fibris coriaceis dense intricatis contextum loculisque tribus longi-
tudinalibus excavatum continens, stylo persistente apicatus, sub
apice demum cireumseissus et operculo caduco apertus. Semina
late ovalia, complanata.

Herbæ annuæ, inter tropicos utriusque orbis indigenæ, scan-
dentes, muliimetrales. Caulibus flagellisque angulatis. Folus
palmato-lobatis; cirrhis 2-3-5-7-fidis. Floribus pulchre luters,

RE

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REVUE DES CUCURBITACÉES. 119

majusculis ; masculis in racemos awillares longos gradatimque
florentes (florem solitarium longiuscule pedicellatum haud raro co-
milantes) dispositis ; fœmineis solitaruis (rarius et fortassis mons-
trose racemosis aut in racemo masculo commiælis). Fructuum
juvenilium pulpa nondum fibrosa cucumerina, dulci aut amara.

Le genre Luffa, limité aux espèces dont les caractères sont con-
formes à la diagnose que je viens de donner, sera une de asso-
ciations les plus naturelles qui aient été faites dans la famille des
Cucurbilacées. Le plus frappant de ces caractères est la contexture
du fruit, dont la pulpe disparait graduellement, laissant à sa place
un réseau serré de fibres blanches, coriaces, élastiques, dans l’in-
térieur duquel sont ménagées trois cavités longitudinales qui con-
tiennent les graines. A la maturité, ce fruit, qui reste suspendu à
la plante et dont le sommet regarde la terre, s’ouvre par une sorte
d’opercule qui se détache de son extrémité, à une faible distance
de la base du style, ordinairement persistant et endurci, et laisse
échapper les graines. Le réseau fibreux, dépouillé de l'écorce qui
l’entourait, est connu, dans nos colonies d'Amérique, sous le nom
de torchon, qui rappelle l’usage que l’on en fait communément
pour nettoyer ou frotter les meubles. Dans deux espèces, les Luffa
cylindrica et acutangula, le fruit est comestible lorsqu'il est jeune,
et que les fibres n’ont pas encore eu le temps de se durcir. Les
seules espèces bien observées qui appartiennent à ce genre sont
les suivantes, la plupart décrites par les auteurs sous plusieurs
noms différents.

À. LUFFA CYLINDRICA.

Luffa cylindrica Rœmer, Synops. monogr., IE, p. 63.
Luffa Petola Seringe, in DC. Prodr., IT, p. 303. — Rœmer, loc. cit., p. 65.
Luffa Cattu-Picinna Seringe, loc. cit. — Rœmer, loc. cit., p. 64.

Luffa pentundra Roxbgh, Flor. Ind., IIT, p. 712.— Wight et Arnt, Flor. pen.
Ind. or., p. 343. — Wight, Icones, II, tab. 499.
Luffa ægyptiaca Miller, Dict. — Seringe, loc. cit. — Rœmer, loc. cit., p. 64.

— Miquel, Symb, ad, Flor. Surin. (ex Linnæa, t. XVIII, annis 4844-1845,
p. 366).

120 CH. NAUDIN.

Luffa striata Schrad., in LinnϾa, t. X, Litt. Ber., p. 8, et Ibid., t. XF,
p. #22. — Walpers, Repert., II, 201.

Luffa leucosperma Rœmer, loc. cil. p. 63.

Luffa Arabum Alp., Plant. æœgypt., p. 199 et 206, tab. 58 et 59.

Luffa clavata Roxbgh, Flor. Ind., WI, p. 714 (teste herb. Hook.).

? Luffa racemosa Roxbgh, Flor. Ind., 1IL., p. 745.

Luffa scabra Schum. et Thonn., Dansk. Vidensk. Selsk. Afhandl., IV, p. 179.—
Rœmer, loc. cit., p. 65. — Hook., in Journ. of bot., 1857, p. 264.

Luffa leiocarpa Ferd. Müller, in herb. Hook.

Poppya Fabiana Ch. Koch, in Berlin. allgem. Gartenzeit., anno 1856 (?), ex
Journ. de la Soc. centr. d'hort., t. III (4857), p. 202.

Cucumis pentandrus Roxbgh, Icon. ined., in East. Ind. Comp. Mus., tab. 459.—
Wight, Icones, II, tab. 499.

Cucumis lineatus Bosc, Journ. d'Hist. nat., t. IT, p. 254, tab, 37. — Seringe,
loc. cit., p. 304. — Don, Gen. Syst. of Gard., p. 27.

Cucumis megacarpus Don, loc. cit., p. 28.—Rœmer, loc. cit., p. 79.

Cucumis malabaricus amarus, fructu sine costulis, Plukenet, Phytogr., IL, tab.
172.

Cucumis ægypticus reticulatus, seu Luffa Arabum, Moris., Hist., I, p. 35, tab. 7,
fig. 1-2.

Momordica Luffa Linn., Spec., 1433. — Willd., Syst., IV, 603. — Loureiro,
Flor. coch., p. 590. — Vélins du Mus., t. LXI, tab. 11.

Momordica cylindrica Linn., Spec., 1433. — Willd., loc. cil., p. 604. — Lou-
reiro, loc. cit., p. 590.

Turia monoica pentandra Forsk., Flor. ægypt.-arab., p. 165.

Turia cylindrica Lamk, Dict. encycl., VIII, p. 139. — Rœmer, loc. cit.,

_p. 67.

Turia cordata Lamk, loc. cit. — T. foliis cordato-angulatis, Forsk., loc. cit.,
p.166. |

Pepo indicus reliculatus, seminibus albis, Burm., Zeyl., p. 185.
Petola Tschina Rumph, Herb. amb., V, p. 405, tab. 147.
Cattu-Picinna Rheed, Hort. malab., VITE, p. 15, tab. 8.

L. foluis palmalo-angulatis, intense viridibus, utraque pagina
scabrelhs ; fructibus cylindricis aut obscure trigonis, rarius ovot-
deis, ecostatis, lineis decem atrovirentibus longitudinaliter in-
scriplis ; seminibus levibus, aia brevi circumeinctis, aterrimis aut
rarius spurco-albis.

REVUE DES CUCURBITACÉES. 121
Hag. Planta patriæ incertæ, nunc inter tropicos ubique colitur, nec rara
occurrit in hortis Europæ ubi fructus facile maturat.

Gaules 3-6-metrales aut amplius, angulati, glabri. Folia ut plurimum
9-loba, lobis sinubusque inter lobos interjectis pariter anguliformibus.
Flores majusculi, rotati, intense lutei. Pepones circiter pedales, oblongi,
rarius obovoidei, verruculis depressis sublinearibus dilutius coloratis sæ -
pius conspersi, cæterum leves nec ullo modo costati ; rete interiore tena-
_Gissimo ; seminibus breviter alatis, levissimis.

Var. G leucosperma, formæ typicæ simillima, sed seminibus albis aut
spurco-albis.

Var. y lesocarpa, foliis quam in typo minoribus ; peponibus ovoideis,
everrucosis, nitidulis nec aut vix lineatis, circiter crassitudine ovi galli-
nacel vel paulo majoribus ; seminibus nigris.

Le Lufja cylindrica, auquel on a conservé dans quelques-unes
de nos colonies le nom indien de Pétole, est probablement origi-
naire de l’Asie méridionale, mais peut-être l’est-il aussi de
l'Afrique, de l'Australie et des îles de l'Océanie. On le trouve cul-
tivé par presque tous les peuples des pays chauds, et il paraît
s'être naturalisé dans beaucoup de lieux où sans doute il n’exis-
tait pas primitivement. De même que les autres Cucurbitacées
assujetties à la culture, il a donné naissance à quelques variétés qui
ne diffèrent guère que par la forme et la grandeur des fruits. Les
seules qui me paraissent mériter d’être citées sont le L. clavata
de Roxburgh, simple variante du type ordinaire, à fruits seulement
un peu plus allongés, plus grêles et plus claviformes ; le L. leuco-
sperma de Rœmer, tout semblable au type, mais avec des graines
blanches ou blanchâtres ; et le L. lesocarpa de M. Ferdinand
Müller, qui croit sauvage en Australie, et dont le fruit très lisse,
de forme obovoïde et dépourvu de ces lignes d’un vert noir si
caractéristiques dans la forme type, est à peine plus gros qu’un
œuf de poule. Ces deux dernières variétés ont été cultivées en 1859
au Muséum ; aussi n’hésité-je pas à les réunir au L. cylindrica,
dont elles ne différent par rien d’essentiel. Il me paraît en outre
fort probable que le L. insularum de M. Asa Gray (1), qu'on

(1) Unit. Stat, explor. Exped., p. 644.

192 CH. NAUDIN.,

trouve indigène ou naturalisé dans quelques iles de l'Océanie,
devra aussi rentrer dans cette espèce.

2. LUFFA ACUTANGULA.

Luffa acutangula Roxbgh, Flor. Ind., IT, p. 713. — Seringe, in DC. Prodr.,

III, p. 302. —- Rœmer, Synops. monogr., II, p. 66.

Luffa fœtida Cavan., Icones, I, p. 7, tab. 9 et 10. — Blum., Bidr., 929. —
Seringe, loc. cit., p. 302. — Rœmer, loc. cil., p. 65. — Lindl., Bot. Mag.,
tab. 1638.

Luffa drastica Mart., Syst. mat. med. Bras., p. 81.

Luffa fluminensis Rœmer, loc, cit., p. 64.

Momordica Luffa Velloz., Flor. flum., X, tab. 93.

Cucumis acutangulus Linn., Spec., 1436.— Lour., Flor. coch., 591,— Jacq.,
Hort. Vindob., III, 73-74. — Lamk, var. A, Dict. encycl., II, p. 74. —
Schkuhr, Handbuch, III, p. 297. — Roxbgh, Zcon. ined., in East Ind.
Comp. Mus., tab. 458.

Cucumis indicus Grew, in Mus.reg. Soc., tab. A7, fig. 2.

Cucurbita acutangula Blume, Bijdr., 932:

Petola bengalensis Rumph, Herb. amb., t. V, p. 408, tab. 449.

Picinna Rheed, Hort. malab., VIIL, p. 43, tab. 7.

L. folirs palmato-5-7-angulatis, scabriusculis ; peponibus obo-
voideo-clavatis, acute decemcostatis ; seminibus apteris, rugosis,
nigris aut nigricantibus.

Has. Species ex Africa fortassis primitus oriunda, nam in Senegambia,
ubi a Nigritis nuncupatur Papengaye, copiose sylvestris reperitur. Nunc
inter tropicos totius orbis colitur.

Planta præcedentem statura et habitu æmulans, sed foliis paulo majo-
ribus, magis rotundatis pallidiusque viridibus. Florum etiam quam in illa
color luteus dilutior. Pepones ut plurimum semipedales aut subpedales,
everrucosi, coslis 10 valde prominentibus acutisque angulati, unicolores
aut rarius in ipsa angulorum acie atrovirentes. Semina corrugata, nigra,
margine aliformi omnino destituta. Variat fructuum juvenilium pulpa cu-
cumerina et eduli aut amara et tune venenata.

Le Luffa acutangula, ou Papengaye, car ce mot a cours dans

Frame RL tt) he had et état sat) ©

REVUE DES CUCURBITACÉES, 193

nos coloniés, est une espèce fort distincte de la précédente, avec
laquelle toutefois elle conserve encore une certaine affinité, comme
le prouve son facile croisement avec elle. Jai obtenu de ce eroi-
sement de nombreux hybrides, parfaitement intermédiaires entre
les deux espèces et tous fertiles, mais qui, dès la deuxième géné-
ration, sont déjà presque rentrés dans la forme du L. cylindrica.
Ce fait, d'autant plus intéressant qu’il est le premier exemple bien
constaté d’hybrides dans la famille des Cucurbitacées, sera l’objet
d’une note particulière.

3. LUFFA AMARA,

Luffa amara Roxbgh, Flor. Ind., HA, p. 745, et Hort. beng., p. 70.

Luffa Plukenetiana Seringe, in DC. Prodr., IE, p. 302. — Rœmer, Synops.
monogr., II, p.65.

Cucumis acutangulus var. B, Lamk, Dict. encycl., IL, p. 74.

Cucumis oparculatus Roxbgh, Icon. ined., in East Ind. Comp. Mus., tab. 460.

Cucumis indicus striatus, operculo donatus, corticoso putamine tectus, Plukenet,
Almag., I, p. 123, et Phytogr., tab. 172, fig. 1.

Cucumis sylvestris malabaricus, fructu striato amaro, Commelyn, in Not.

Petola sylvestris, seu Petola Utan, Rumph, Herb. amb., V, p. 409, tab. 150.

L. foluis 5-7-lobis, in juventute haud inconspicue albentibus et
tactu moilibus, demum scabrellis ; fructibus ovoideis, parvis, lon-
gitudinaliter costulatis ; seminibus immarginatis, vix rugosulis,
magis minusve fuscescentibus.

Has, In India sylvestris crescit. Jam biennium in Horto Parisiensi
colitur.

Planta 2-4-metralis, habitu L. acutangulæ proxima, sed foliis paulo
minoribus et nonnihil albentibus distincta. Folia eæteram ut in illa bre-
viter et subobtuse 5-7-loba ; juniora quasi velutina et canescentia, vetu-
stiora scabrella. Cirrhi 2-3-fidi, Flores pallide flavi. Pepones ut in præ-
cedentibus speciebus mature cernui, ovoidei, utrinque obtuse conici, cras-
situdine inter ovum gallinaceum et columbinum ambigentes, costulis 10
longitudinalibus parum prominentibus et s&pe atrovirentibus ornati ; pulpa
ante maturitätem amara, demum sub rete fibroso fatiscente; seminibus

124 CH. NAUDIN.

quam in L. acutangula multo minoribus, nunc omnino levibus, nunc
etiam parum rugulosis.

Cette jolie espèce, presque inconnue des botanistes actuels,
quoiqu’elle ait été très bien décrite par Rumph, et qu’elle soit
mentionnée par tous les auteurs qui l’ont suivi, est voisine du
L. acutangula, qu'elle rappelle par son port, la forme de ses
feuilles, la nuance un peu pâle de ses fleurs et, jusqu’à un certain -
point, par les côtes de son fruit. On l’en distinguera toutefois, sans
difficulté, à ses feuilles généralement moindres et légèrement
blanchâtres, et surtout à son fruit beaucoup plus petit, de forme
ovoïde, dont les côtes peu saillantes sont souvent d’un vert pres-
que noir. Les graines y sont aussi plus petites, moins foncées en
couleur et à peine chagrinées. Nous la cultivons depuis deux ans
au Muséum, de graines envoyées de Pondichéry par M. Jules
Lépine, à qui nous devons beaucoup d’autres Cucurbitacées. J'en
ai fait plusieurs fois nouer les fruits par l'emploi du pollen des
deux espèces précédentes, ce qui prouve son analogie avec elles.

h. LUFFA GRAVEOLENS.

Luffa graveolens Roxbgh, Flor. Ind., WE, p. 716, et Icon. ined., in East Ind.
Comp. Mus., tab. 1693. — Rœmer, Synops. monogr., II, p. 64.
Luffa saccuta Ferd. Müller, in Litt. et herb. Hook.

L. subglabra; foliis majusculis, fere rotundatis, breviter et
obtuse 5-lobis ; fructibus parvis, ovoideis, muricatis aut tubercu-
lato-exasperatis ; seminibus levibus, immarginatis.

Has. In India (Roxburgh) et in Nova Hollandia (Ferd. Müller).

Planta congeneribus habitu similis, 3-5-metralis, vix non glaberrima.
Folia ambitu fere rotundata, lobis brevibus obtusissimis. Cirrhi sæpius 3-
h-fidi. Flores quam L. cylindricæ multo minores et pallidiores ; fæminei
nune axillares solitarii, nunc in racemo masculo intermixti, ovario lævi
aut sparsim et inconspicue muriculato. Fructus ovoideo-conici, ovum
columbinum crassitie vix superantes, non lineati nec costati sed molliter
muricati aut tuberculis inermibus exasperati, maturatione atrum colorem
induentes. Semina magis minusve fuscescentia, levia et immarginata.

REVUE DES CUCURBITACÉES. 195

L'examen que j'ai fait, dans l’herbier de sir W. Hooker, des
échantillons du L. saccata de M. Ferd. Müller, récoltés en Austra-
lie, et du L. graveolens de l’Inde, ne m'a laissé aucun doute sur
leur identité spécifique, confirmée encore par les échantillons vi-
vants que nous avons eus au Muséum en 1859, et dont les graines
nous avaient été envoyées de la colonie de Victoria par M. Ferd.
Müller lui-même. Je regrette d’avoir à ajouter que les fruits obte-
nus de ces plantes, quoique arrivés à leur grosseur naturelle,
n'ont pas eu le temps de mürir sous le climat de Paris.

5. LUFFA PURGANS.

Momordica operculata Linn., Spec., 1433. — Willd., Syst., IV, p. 603. —
Seringe in DC. Prodr., If, p. 311. — Non M. operculata Velloz.

Momordica purgans Mart., Reise in Bras., IL, p. 546, n° 14.

Momordica americana, fructu reticulato sicco, Casp. Commelyn, Hort. Amstel.
rar., tab. 22 (in-4°, non in-folio).

Momordica indica Cucumeris folio, Vélins du Mus., t. LXI, pl. 14.
Poppya operculata Rœmer, Synops. monogr., IL, p. 59.
? Cucumis sepium Meyer, Primit. Flor. Esseq., p. 278.

Vulgo : Bucha de Paulistas et Purga de Joao Paes (ex Martio).

L. glabra sed scabrella; foliis late cordiformi-reniformibus,
| o-0-lobis ; cirrhis bifidis, nonnunquam simplicibus ; ovario seria-
| fm muricalo, superne in collum longrusculum atlenuato; fructu
| angulato-spinoso, acuminato ; semanibus levibus, immarginatis.

Has. In America meridionali intertropica frequens. Specimina pauca
habemus prope Œuayaquii a clar. Remy collecta. Fructus maturos
| quoque recepimus e Brasilia meridionali.

Planta in Horto parisiensi circiter 3-metralis, multiramosa et frondosa.
| Folia (quam in cæteris speciebus multo minora) raro decimetrum lata, sæ-
| pius 6-8-centimetralia, lobis duobus lateralibus subacutis, intermedio non-
nunquam acuminato, inferioribus rotundatis. Flores utriusque sexus florum
| Melonis aut Cucumeris sativi magnitudine æmuli, pedunculis inflorescen-
| tiarum gracilibus, sesquidecimetrum circiter longis, paucifloris. Flores
»| fœminei in eadem axilla qua racemi masculi solitarii, breviuscule pedi-
|

|

|

|
|

1926 CH. NAUDIN.

cellati; ovario ovoideo, muriculato, superne in collum longiusculum pro-
ducto. Pepones crassitudine ovi gallinacei aut paulo majores, apice ro-
Strati, tactu scaberrimi, costis prominulis irregularibus tuberculisve Spi-
nosis basi confluentibus et in serias quasi dispositis armati, maturatione
nigrescentes. Semina fuscescentia.

Deux années de suite j'ai cultivé le Luffa purgans au Muséum,

mais sans pouvoir l’amener à nouer des fruits, par suite de la.

précocité des fraicheurs de l'automne sous notre climat. Ces fruits,
d’après tous les auteurs qui en ont parlé, sont fort amers ; aussi
entrent-ils en quuité de drastiques dans la pharmacopée brési-
lienne. C’est la seule espèce connue du genre qui soit indigène en
Amérique ; mais comme elle en offre tous les caractères au même
degré que celles qui précèdent, elle nous fournit un nouvel
exemple d’un genre naturel de Cucurbitacées qui se partage entre
les deux continents. J’ai quelques raisons pour supposer que c’est
d’elle qu'il est question dans la Flore d’Essequibo de Meyer, sous
le nom assez impropre de Cucumis sepium.

On voit une assez bonne figure du Luffa purgans, sous le nom
de Momordica americana fructu reticulato sicco, dans le Trauté des
plantes médicinales du jardin d’ Amsterdam (1), par Gaspard Com-
melin, planche 22. Il est essentiel de ne pas confondre cet ou-
vrage, qui est un in-quarto, avec un in-folio presque du même
titre (2), et qui est de Jean Commelin.

Plusieurs autres espèces ont été rapportées au genre Luffa par
les auteurs; mais elles sont si vaguement indiquées, qu’en lab-
sence des échantillons sur lesquels elles ont été décrites, il est à
peine possible de s’en faire une idée. Il est probable cependant
que quelques-unes devront être rejetées du genre, et que d’autres
font double emploi avec les espèces décrites ci-dessus. En consé-
quence , Jadmets provisoirement comme appartenant au genre
les sept suivantes, dont quelques-unes ne sont peut-être encore
que des variantes mal reconnues du L. cylindrica :

(1) Horti medici Amstelodamensis plantæ rariores el exoticæ. .
(2) Horti medici Amstelodamensis rariorum plantarum descriptio et icones.

. REVUE DES CUCURBITACÉES. 197

4. LUFFA INSULARUM.

Luffa insularum Âs. Gray, Unit. Stat. eæplor. Exped,, p. 644, — Walp.,
Annal., IV, 863.

2, LUFFA SATPATIA.

Luffa Satpatia (aliis Salpatia) Hamilt., in Wall., L. 6757.—Rœmer, loc. cit., 63.

3. LUFFA KLEINII.

Luffa Kleinü Wight et Arnt, Prodr. Flor. pen. Ind. or., 344. --- Rœmer, loc.
cit., 63, « |

h. LUFFA UMBELLATA.

Luffa umbellata Rœmer, loc. cit., 63. — Cucurbita umbellata Willd., Syst., IV,
608.

5. LUFFA PARVULA.

Luffa parvula Hamilt., in Wall., L. 6758.

6. LUFFA HEDERACEA,

Luffa hederacea Wall., L. 6752.

7. LUFFA CORDIFOLIA.

Luffa cordifolia Blume, Bijdr., 929. — Seringe in DC. Prodr., III, 302.

Il n’en est pas de même de celles qui suivent ; leurs affinités
avec les vrais Luffa sont très douteuses, et deux ou trois d’entre
elles au moins devront probablement passer à d’autres genres :

S. LUFFA TUBEROSA.

Luffa tuberosa Roxbgh, Flor. Ind., 1, p. 747. — Wight et Arnt, loc. cit.,
344,— Cucumis tuberosus Roxbgh, Icones, ined., in East. Ind. Comp. Mus.,

tab. 461.

Cette espèce, qui n’est certainement pas un Luffa, pourrait être
un Momordica

123 CH, NAUDIN.

9. LUFFA ECHINATA.

Luffa echinala Roxbgh, Flor. Ind., IX, 745. — Wight et Arnt, loc. cil., 343.
— Cucumis operculatus Roxbgh, Icon. ined., loc. cit., tab. 460.

40. Lurra BInpaaLr,

Luffa Bindaal (alis Bandaal) Roxbgh, Flor. Ind., loc. cût., p. 747. — Walp.,
Annal., IV, 863.

41. LUFFA LONGISTYLIS.

Luffa longistylis Edgew., Banda Plants, in Asiat. Journ. of Beng. (4852),
t, XXI, p. 472.

De ces quatre dernières espèces, le Luffaechinata, que Roxburgh
dit operculé, est le seul qui me paraisse, quoique dioïque, avoir
quelque chance de rester dans le genre. Pour décider la question,
il faudrait en connaître les étamines, et s'assurer si le fruit mûr
renferme ce réseau fibreux que nous savons être un des traits
caractéristiques de ce groupe de Cucurbitacées.

Je trouve dans la Collection des plantes de Java, par Zollinger,
sous le n° 1372, une plante à feuilles cordiformes, malbeureuse-
ment dépourvue de fruits, mais dont les vrilles et les inflorescences
mâles rappellent tout à fait celles des vrais Luffa. Je soupçonne,
sans pouvoir l'assurer, que c’est le L. cordifolia de Blume. Peut-
être faudra-t-1l ajouter à ce genre, lorsqu'on la connaîtra mieux,
la Cucurbitacée de l’Afrique australe, désignée par E. Mever, dans
la collection de Drège, sous le nom de Lagenaria sphærocarpa.
Je n’en ai vu qu'un échantillon fort incomplet dans l’herbier de
M. Delessert ; mais, chez elle aussi, les vrilles et les inflorescences
mâles sont à peu près exactement celles des Luffa. Elle se distingue
de toutes les espèces connues de ce genre par des feuilles profon-
dément quinquélobées, et assez semblables à de grandes feuilles
de vigne.

REVUE DES CUCURBITACÉES. 199

IX. MOMORDICA.

Momordicæ et Cucumeris species Linnæi et auctorum.
Amordica et Poppya Neck., Elem., 391, 392.

Zucca Commers.; Muricia Loureiro ; Neurosperma Rafinesq. auctorumque poste-
riorum.

Amara et Papari Rumph. : |
Pavel, Pandi-Pavel et Bem-Pavel Rheed.

Le genre Momordica, si remarquable entre les Cucurbitacées
à fruits triloculaires ou, pour mieux dire, à trois placentas, par
sa corolle presque ou tout à fait polypétale, la bractée sessile que
porte le pédoncule de l’inflorescence mâle, au moins dans quel-
ques espèces, et la déhiscence ou plutôt la rupture spontanée et
quelque peu élastique de son fruit charnu, contient encore trop
d'espèces inobservées où mal étudiées, pour qu'il soit possible
d’en tracer avec certitude les caractères définitifs. La plupart des
auteurs qui se sont occupés des Cucurbitacées, ayant donné à cette
déhiscence des fruits une importance exagérée et la considérant
comme un caractère générique de première valeur, ont accumulé
sous ce nom de Momordica, une multitude d'espèces qui n’ont de
commun les unes avec les autres, que d’appartenir à la même
famille. Sans m'aventurer à donner ici une diagnose générique
dont les matériaux sont encore loin d’être prêts, je considère
cependant, comme types du genre, les Momordica Charantia et
Balsamina, plantes classiques, cultivées à peu près partout, et
que la plupart des descripteurs, depuis et y compris Linné, ont
toujours rapportées à ce genre. Partant de là, je circonserirai
provisoirement le groupe Momordica conformément aux carac-
tères de ces deux espèces, ce qui me parait d'autant plus néces-
saire que, d’après la définition qu’en ont donnée Pœppig et Endli-
cher (1), ces espèces types devraient en être exclues.

Flores utriusque sexus 5-petali, petalis nonnunquam singulatim

(1) Nova genera ac spec. plant, peruv., [l, p. 54 et suivantes.
4° série. Bot. T. XII. (Cahier n° 3.) 9

130 CH, NAUDIN.

caducis ; masculorum pedicellis bractea sessili instructis. In mas-
culis Stamina 3 (unum dimidiatum) lhbera, loculis flexuosis ; polline
sicco ovoideo trisulco, humefacto globoso aut obscure triquetro,
poris tribus dehiscente ; in fœmineis süigmata à conniventia, bi-
loba. Ovarium triplacentiferum ; ovulis horizontalibus. Pepones
penduli, carnosi, non fibrosi, in tempore maturationis ab apice ad
medium imove ad basim irregulariter lacert et hiantes. Semina
primo pulpam fructus retinentia et tune quasi arillata, demum
nudata, complanata, marginibus fasciata et undulata, faciebus varie
exsculpla aut lineata.

Planiæ annuæ aut perennantes, scandentes; folis simplhcibus
lobatis aut usque ad basim dissectis et quasi foliolatis ; currhis in-
divisis ; floribus monœcis diæcisque, luteis; peponibus tubercula-
hs muricahisve, maturalione magis minusve coccineis.

Ainsi que je viens de le dire, cette définition n’est que provi-
soire, car très probablement il faudra la modifier pour conserver
ou faire entrer dans le genre plusieurs autres espèces mal con-
nues, qui, bien que très différentes par certains traits de leur
physionomie des deux espèces qui m'ont servi de type, ne me
paraissent cependant pas pouvoir être placées sans inconvénient
dans d’autres genres.

J'ai cru quelque temps que les vrais Momordica (je ne parle pas
ici de ceux de Pœppig et d’Endlicher) étaient totalement étrangers
à l'Amérique; cependant W ydler en a rapporté de Porto-Rico une
espèce bien caractérisée et probablement inédite, dont j'ai vu un
échantillon dans l’herbier de M. Delessert. Il reste toutefois à
savoir si elle est réellement indigène de cette île, ou si elle y a
été portée d'Afrique par les nègres, ce qui n’aurait rien d’invrai-
semblable. Beaucoup d'espèces appartiennent effectivement à
l'Afrique; d’autres sont de l’Asie méridionale, de l'Australie, et
probablement aussi de quelques archipels de l’océan Pacifique.

Les espèces observées vivantes au Muséum, en 1859, se rédui-
sent aux trois suivantes, qui sont aujourd’hui trop connues pour
qu'il soit utile de les décrire de nouveau, mais dont il me paraît
nécessaire de donner la synonymie :

‘

REVUE DES CUCURBITACÉES. 134

4. MomorpicA CHARANTIA.

Momordica Charantia Linn., Spec., 14433. — Loureiro Flor. coch., 589. —
Willd., Syst., IV, 602. — Lamk., Dict. encycl., IV, 239. — Roxbg., Flor.
ind., HI, 707. — Seringe, in DC., Prod., [IE, p. 311. — Sims, Bot. mag.,
tab. 2455. — Wight et Arnt., Prod. Flor. pen. Ind. or., III, p. 348. —
Wight, /cones, tab. 504. — Rœmer, loc. cit., 56.
Momordica muricata Willd., Syst., loc cit., 602. — Roxbg., Flor ind., IL,

p. 707. — Wight et Arnt,, loc. cit., 348.-— Rœmer, loc. cit., 56. — Non
M. muricata Velloz.

Momordica Roxburghiana Don, Gen. syst, of Gard., 35. — Rœmer, Synops.
monog., II, p. 54.

Momordica zeylanica Mill., Dict., ex Lamk., Dict., IV, 239.

Momordica senegalensis Lamk., loc. cit., 239. — Seringe, loc. cit., 314, —
Rœmer, loc cit., 56.

Momordica operculata Velloz., Flor flum., t. X, tab. 92%. — Non M. operculata
Linn.

Balsamina cucumerina pampinea fronde Tournf., Inst.

Balsamina cucumerina indica, fructu majore flavescente, Commelyn, Rar., 54.

Cucumis africanus Lindl., in Bot. reg., XIT, tab. 980. — Rœmer, Loc. cit., 80.
— Non C. ufricanus Linn.

Cucumis intermedius Rœmer, loc. cit., p. 80

Cucumis puniceus Morison, Hist., II, p. 33.

Cucumis malabaricus, fructu ex flavo rubente, minor, Commelyn, loc, cit. in not.
Cucumis puniceus indicus, major et minor Herm., Lugd., 204 et App., 663.
Amara indica seu Papari Rumph, Hort. amb., V, 410, tab. 151.

Pavel Rheed, Hort. malab., VIII, p. 49, tab. 10, et Pandi-Pavel, ibid., p. 47,
tab. 9. |

Le Momordica Charantia, qui est certainement indigène de
l’Inde, l’est peut-être aussi de l'Afrique, car l'espèce de Sénégam-:
bie, décrite par Lamarck sous le nom de M. senegalensis, n’en
est qu'une simple variété, un peu plus petite dans toutes ses par-
iles, mais de tous points semblable à la forme asiatique. Il paraît
même assez probable que le M. muricata de Willdenow n'est
aussi que cette petite variété. Ce qui prouve bien d’ailleurs leur

4132 CH. NAUDIN.,

identité spécifique, c’est la facilité avec laquelle elles se croisent
et donnent des métis très fertiles et exactement intermédiaires
entre elles pour la grandeur des feuilles, des fruits et des graines,
ainsi que je l’ai constaté expérimentalement. Les deux variétés
ont été transportées en Amérique, et elles sont connues au Brésil
sous les noms vulgaires de Æerva où Melon de San Gaelano.

2, MOMORDICA BALSAMINA.

Momordica balsamina Linn., Spec., 1433.— Willd., Syst., IV, 601— Blackw.,
Herb., tab. 539. — Lamk., Dict., IV, 237. — Seringe, in DC., Prod.,
III, p. 311. — Rœmer, Synops. monog., IF, p. 55.

Momordica garipensis E. Mev., in Plant. natal,

Cucumis agrestis Mill., Dict.

Le M. Balsamina, connu dans nos jardins sous le nom de
Pomme de Merveille, parait, comme l'espèce précédente, apparte-
nir à l'Afrique et à l’Asie méridionale. On le trouve aujourd’hui
naturalisé dans la plupart des contrées intertropicales.

3. MOMORDICA MIXTA.

Momordica mixta Roxbg., Flor. ind., II, p. 709, et Icon. ined. in East. Ind.
Comp. Mus., tab. 993. — Wight et Arnt., Flor. pen. Ind. or., IT, 349.—
Hook., Bot. mag., tab. 5145.

? Momordica Heyneana Wall., L. 6744. — Rœmer, Synops. monog., Il,p. 53.
Momordica cochinchinensis Spreng., Veg., IL, p. 44.

Muricia cochinchinensis Lour., Flor. coch., IT, 732. — Seringe, in DC. Prod.
IIE, p.348.

Z'ucca Commersoniana Seringe, loc. cit., p. 319.

Le M. mixta, plante dioïque et vivace, est originaire de l'Inde
et des contrées les plus chaudes de l'Asie orientale. Il a été trans-
porté, sans doute à litre de plante d'agrément, aux iles Masca-
reignes, où Commerson, qui en récolta des échantillons encore
existants dans l’herbier du Muséum, lui donna le nom de Zucca,
que Seringe a adopté, malgré l’affinité évidente de l'espèce avec
les deux Momordica qui précèdent, et dont on pourrait même

?

REVUE DES CUCURBITACÉES. 133
dire qu'il exagère les caractères. Il est surtout remarquable à
la grandeur de la bractée qui est située ici immédiatement au-
dessous de la fleur mâle, à l’extrémité d’un long pédoneule. La
corolle, aussi grande ou plus grande que celle du Luffa cylin-
drica, est à 5 pétales libres, presque cordiformes et rétrécis,
à leur point d'insertion sur le torus, comme en une sorte de court
pétiole. Les trois plus intérieurs présentent sur ce point une ma-
cule d’an pourpre obscur, presque noir, qui est évidemment
l’analogue de taches semblablement placées, mais à peine per-
cepübles, sur la corolle du M. balsamina.

Cette belle plante a fleuri l’été dernier dans les serres de Kew,
ce qui à permis à sir W. Hooker de la faire représenter dans le
Potanical Magazine. Nous la cultivons aussi au Muséum, mais
sans lavoir encore vue fleurir, de graines quinous ontété remises
par le savant directeur des jardins royaux de Kew.

Aux trois espèces qui précèdent doivent être ajoutées, du moins
avec la plus grande probabilité, les suivantes qui ne nous sont
connues que par des échantillons d’herbier :

h. MOMORDICA DIOICA,

Momordica dioica Roxbg., Flor. ind., ILf, p. 709, et Zcon. ined. in East Ind.
Comp. Mus., tab. 993. — Wild, Syst., IV, p. 695. — Seringe, in DC.
Prod., II, p.312.—Wightet Arnt., Prod. Flor. pen. Ind. or., FE, p. 349.
— Wight, /cones plant., Il, tab. 505 ct 506. — Dcne.,in Jacquem. voy.,
IV, p. 60, tab. 71. — Rœmer, loc, cit., p. 58.

9 Momordica Missionis Wall,, L. 6739?

Rœmer (loc. cit., p. 58), sans raison bien plausible, sépare du
M. dioica Ge Roxburgh et des auteurs qui l'ont suivi deux nou-
velles espèces, sous les noms de M. Roxburghii et M. W allichii.
Je dois cependant faire remarquer que les trois échantillons de
lPherbier de Wight, étiquetés W. dioica, et portant les n° 1127,
1128 et 1129, tels du moins qu'ils sont dans l’herbier du Muséum
et dans celui de M. Delessert, se ressemblent assez peu pour faire
supposer, au premier abord, au moins deux espèces différentes.
Peut-être conviendrait-il que eette espèce fût examinée de nou-

13h CH. NAUDIN.

veau. Il en est de même du M. subangulata de Blume (Bijdr.,
928), qui me paraît à peine différer du M. dioica.

5, Momorpica MorkoRRA.
Momordica Morkorra Ach. Rich., Tent. Flor. Abyss., I, p. 292, tab. 53.

Cette remarquable espèce d’Abyssinie, qu'on ne saurait éloigner
du genre Momordica, diffère cependant très notablement des
autres espèces par son port, son inflorescence très ramifiée et la
réduction des bractées florales, si petites 1c1 que c’est à peine si
on les remarque. Elle sera du nombre de ces espèces qui, mieux
connues, feront modifier la diagnose provisoire que j'ai donnée
ci-dessus,

G. MOMORDICA CYMBALARIA.

Momordica cymbalaria Fenzl, in Kotschy Zter nubic., n° 447.

Petite plante d'Afrique, chez laquelle la bractée florale est aussi
fort réduite, mais qui me parait néanmoins devoir être conservée
à ce genre.

7. MOMORDICA INVOLUCRATA.

Momordica involucrata E. Mey.

Peut-être faudra-t-1l encore ajouter à ces espèces le Momordica
pterocarpa de Hochstetter (Zter Schimperri abyssinicum, n° 187),
plante d’Abyssinie, à racine persistante et napiforme, à feuilles dé-
coupées en folioles distinctes et à fruits ailés, Le Momordica adoen-
sis du même auteur (loc. cit., n° 166), quoique accepté par Ach.
Richard, est bien plus douteux, et devra probablement être éliminé
du genre. Je ne dis rien ici de l'espèce supposée américaine dont
j'ai parlé plus haut, nides M. Fogelii, M. cissoides, M. maculata
et M. quitata Planchon (Niger flor., p. 369), ni de ces autres
espèces assez nombreuses de l’intérieur de l’Afrique, qui appar-
tiennent certainement au genre, mais n’ont encore été décrites par

. À

REVUE DES CUCURBITACÉES. 135

personne. Toute publication qui en serait faite, d’après les maté-
riaux insuffisants qu'on trouve dans les herbiers, ne servirait
qu’à accroître la confusion déjà beaucoup trop grande qui existe
dans ce genre.

Je retranche dès à présent des Homordica toutes les espèces qui
suivent, bien que, soit par le manque d'échantillons authentiques,
soit par suite de l'insuffisance des descriptions, je n’aie pas tou-
jours pu en reconnaître le genre.

M. americana, fructu reticulato sicco, Casp. Commelyn, Rur., tab. 22 — Lurra
» PURGANS.

M. bicolor Blum., Bijdr., 928. — DC. Prod., IIT, 311, — Rœmer, loc. cil.,
b8. — CocciniA INDICA ?

M. brachybotrys Pœpp. et Endl., Nov, gen., IT, p. 54. — Rœmer, loc. cit.,
53, — ÉLATERIUM.

M. carinata Velloz., Flor. flum., X, tab. 97. — Rœmer, loc. cil,, 58...

M. cylindrica Linn., Spec., 1433. — Willd. Syst.. IV, 604. — Rœmer, loc.
Gil, 593. —, LUrrA GYLINDRICA.

M. dasycarpa Hochstt., in Schimp. lter abyss., sectio IT, n° 1419. — Ach.
Rich., Tent. Flor. abyss., I, p. 291. — Rœmer, loc. cit., 58. — Cucumis
DIPSACEUS,

M. echinata Willd., loc. cit., 604. — Poiret, Dict. encycl., suppl., IIT, 723.
— EcxinocysTis LOBATA.

M.? Elaterium Linn., Spec., 4434. — Sims, Bot. mag., 1914. — Seringe,
loc. cit, p. 311 — ÉcBaLiumM ÉLATERIUM,

M. erinocarpa Fenzi, in Kotschy Iter nubic., n° 122...

M. hystrix Gillies, in Hook., Journ, of bot. misc., LIT, 324, — Walp., Repert.,
V, 762 — CYCLANTHERA HYSTRIX.

M. indica, Cucumeris folio, vélins du Mus., t. LXI, tab. 14. — Lurra PuRGANS.

M. lanata Thunbg., Prod., 13. — Willd., loc. cit., 605. — Seringe, loc. cil.,
312. —- Rœmer, loc. cit., 57...

M. Lambertiana Seringe, Mss. et in DC., Prod., LIT, 314.

M. Luffa Linn., Spec., 1433. — Vellozo, Flor. flum., X, tab. 93. — Lurra
CYLINDRICA.

M. macropoda Pœpp. et Endl., loc. cit., p. 54, tab, 173. — Rœmer, loc. cit.,
54. — ELATERIUM.

M. monadelpha Roxbg., Flor. ind, INT, 708. — Coccinta INDicA.

M. muricala VeNozo, loc. cit., tab. 94 (non M. muricata Wild.) — Erareriüw.

136 CH. NAUDIN.
M. operculata Linn., Spec. 1433. — Seringe, loc. cit., 314 (non M. opercu-

lata Velloz.) — Lurra PuRGaANS.

M. pedata Pœpp. et Endl., loc. cit,, p. 54. — Rœmer, loc. cit., 57. —
CYCLANTHERA.

M. purgans Mart., Reis. Bras., II, p. 546, n° 14. — Rœmer, loc. cit,, 54, —
LUFFA PURGANS.

M. quinqueloba E. Meyer, Plant. natal. — CEPHALANDRA QUINQUELOBA.

M. quinquelobata Vellozo, loc. cit., tab. 95. — Rœmer, loc. cit., 55. — Era=
TERIUM.

M. racemosa Std. Nomencl., ex Rœmer, loc. cit., 53... — ELATERIUM,

M. spicata Linn. Mss., ex Smith, in Rees Cyclop., XXII1.— Seringe, in DC.,
Prod., HI, 312. — Rœmer, loc. cit., 54...

M. tubiflora Wall. — Cucumis tubiflorus Roxbg., Icon. ined, in East Ind.

Comp. Mus., tab. 1696. — Ræœmer, loc. cit., 53...
in East Ind. Comp, Mus., tab. 629.—Karrvra ?
M. umbellata Roxbg., Flor. ind., LT, 710. — KaRiviA UMBELLATA.

M. tubulosa Hamilt., Zcon, ined.,

M. verticillata Vellozo, loc. cit., tab. 96. — Rœmer, loc. cit., 55... — Wiz-
BRANDIA DRASTICA.

Outre ces espèces, les auteurs citent encore les suivantes, mais
d'une manière si vague que, faute d'échantillons étiquetés de leur
main, il m'est impossible d’en soupçonner le genre, et dont quel-
ques-unes font peut-être double emploi avec celles qui sont men-
lionnées plus haut :

M.? aculeata Poiret, in Lamk., Dict. suppl., III, 723.—Seringein DC. Prod.,
III, 312. — Rœmer, Synops. monogr., I, p. 57...

M..? sicyoides Seringe, Mss. et DC., Prod., LI, 3142. — Ræœmer, loc. cit., 53.

M. fœtida Schum. et Thonn., Dansk. Vidensk, Selsk. Afh., IV, 200. — Walp.,
Repert., Il, 200. — Rœmer, loc. cit., 53.

M. renigera Wall., L. 6748. — Rœmer, loc. cit., 53.
M. Hamilloniana Wall., L. 6748. — Rœmer, loc. cit., 53.
M. Paina Hamilt., in Wall., L. 6748. — Roœmer, loc. cit., 53.
M. anthelminthica Schum. et Thonn., loc. cit., 197.— Rœmer, loc. cit., 57.
M. trifoliata Linn., Spec., 1434. — Willd., Syst., 604, — Poppya sylvestris
Ramph, Amb., V,p. 413, tab. 152, fig. 2.
Je ne vois absolument pas sur quoi se fonde Rœmer pour faire
de cette dernière plante l’Znvolucraria trifoliata.

REVUE DES: CUCURBITACÉES. 1357

X. BRYONIA.

Bryoniæ species auctorum.

Quoique l’ancien genre Bryonia de Linné ait été récemment
subdivisé par M. Arnott en plusieurs autres, les espèces qui lui
restent me sont encore trop peu connues pour que j'essaye de lui
assigner des caractères définitifs. En admettant provisoirement le
senre tel qu'il a été compris par M. Arnott, je me bornerai à citer
les espèces qui ont été ou sont encore cultivées au Muséum.

1. BRYONIA DIOICA,

Bryonia dioica Jacq., Flor. austr., tab. 199. — Blackw., Herb., tab. 37. —
Seringe, in DC. Prod., III, p. 307, — Rœmer, Synops. monog., I, p. 42.

Bryonia alba. Desf., Flor. atl., Il, p. 360; fortassis etiam B. acula ejusdem,
. doc. cil.-— Lamk,, var. a, Dict., 1, p. 496.

Bryonia aspera sive alba, baccis rubris, Bauh., Pinaæ, p, 297.

La Bryone dioïque, qui est commune à l’Europe, au nord de
l'Afrique et à une notable partie de Asie, est extrêmement poly-
morphe, et pourrait aisément donner lieu à la eréation de beau
coup d'espèces artificielles, si on s’en laissait imposer par les
différences très notables que, suivant leurs provenances, les indi-
vidus présentent dans les formes et les dimensions de leurs feuilles
et de leurs inflorescences femelles. Autant que j'en puis juger sur
une assez nombreuse série d'échantillons desséchés de l’herbier
du Muséum et tirés de pays très divers, les caractères essentiels et
invariables de l'espèce seraient la diœcie des fleurs et la couleur
rouge des fruits. Par ces deux caractères, elle se distingue très
aisément du Bryonia alba, dont les fleurs sont monoïques et les
baies noires à leur maturité ; mais, sous ce double rapport, elle ne
diffère pas de la Bryone de Crète, avec laquelle elle paraît avoir
été souvent confondue. Il me paraît extrêmement probable que le
B. acuta de Desfontaines, si incomplétement décrit, n’est autre
chose qu'une des mille formes de la Bryone dioïque.

138 CH, NAUDIN.

Cette espèce a élé longtemps rangée parmi les plantes officinales
de l’Europe, et son usage n’est pas encore tout à fait tombé en
désuétude dans la médecine populaire. On en trouve une figure
très reconnaissable dans le Livre d’heures d'Anne de Bretagne (1),
manuscrit illustré du xv° siècle (entre 1476 et 1514), où elle est
désignée sous les noms de Vaveaulx sauvages et de Napus syl-
vestris.

2, BRYONIA CRETICA.

Bryonia cretica Tournef., Inst., 102.— Linn., Spec., 1439,—Lamk., Dict., I,
p. #98. — Seringe, in DC., Prod., II, p. 307. — Lindl., in Sibthorp,
Flor. græc., t. X, p. 31, tab, 940. — Rœmer, loc. cit., p. 43. — Desf.,
Choix de pl., p. 94, tab. 70.

Bryonia cretica maculata C. Bauh., Pinax, p. 297. — Boerh., Lugd., I,
p. 64, — Vélins du Mus., tom, 614, tab. 4.
Bryonia alba maculata C. Bauh,, Hist., II, p. 146.

Bryonia foliis palmatis, supra calloso-punctatis, dioica, Linn., Hort. Cliff.
p. 453.

Les seuls caractères que je trouve à assigner à la Bryone de
Crète, pour la différencier de la Bryone dioïque, sont des feuilles
plus fermes, plus rudes au toucher et ordinairement marbrées de
blanc ou de blanc-verdâtre le long des nervures, avec des fruits
moins nombreux aux aisselles des feuilles, un peu plus gros, et
légèrement marbrés ou ponctués de blanchâtre avant la maturité ;
mais je ne puis pas affirmer que ces caractères soient toujours
constants, ni qu'ils ne se montrent jamais sur quelques-unes des
nombreuses variétés de la Bryone dioïque. Il en résulte que l'espèce
peut, dans certains cas, être difficile à distinguer , et qu’on ne

(1) Ce manuscrit, un des plus beaux spécimens de l’art chirographique de la
fin du xv° siècle, contient près de 500 figures de plantes coloriées et assez
bien dessinées, mais dont la nomenclature est généralement très incorrecte
et souvent même barbare. Ce n’en est pas moins un monument intéressant
pour l’histoire de la botanique et de l'horticulture. Une très belle reproduction
du texte et des figures, augmentée d'une table explicative des planches par
M. Decaisne, va être prochainement publiée par les soins de l'éditeur Curmer.

REVUE DES CUCURBITACÉES. 139
serait peut-être pas éloigné de la vérité en la considérant comme
une simple race de la première. |

La plante rapportée avec doute, par M. Lindley, au B. cretica,
dans le Flora græca de Sibthorp, et à laquelle il attribue des
fruits verdâtres marbrés de blanc, ce que représente aussi la
figure jointe à sa description, est certainement cette espèce, mais
observée avant la maturité des fruits. C’est en effet une des parti-
cularités de la Bryone de Crète que ses fruits ne prennent qu’un
peu tardivement la belle nuance rouge qui leur est commune
avec ceux de la Bryone dioïque.

9. BRYONIA ALBA,

Bryonia alba Willd., Syst., IV, p. 621. — Blackw., Herb., tab. 533. —
Seringe ,in DC. Prod., IT, 307. — Lamk., Dict., 1, p. 496, var. B. —
Rœmer, loc. cit., p. 38.

Bryonia alba, baccis nigris, Bauh., Pinax, 297, — Tournf., Inst., 102.

Bryonia nigra Dod., Pempt., 399, n° 2.

h. BRYONIA LACINIOSA.

Bryonia laciniosa Linn., Mant,, p. 498. — Willd., Syst., IV, 624. — Lamk.,
Dict., I, p. 497.— Roxbg., Flor. ind., III, p. 728. — Blum., Bijdr., 927.
Seringe, in DC. Prod., IT, p. 308. — Wight et Arnt., Prod. Flor. pen.
Ind. or., I, p. 345. — Wight, Zcones, tab. 500.— Rœmer, loc. cit., p. 40.
— Planch., Flor. des serr., 2° sér., t. IT (1857), p. 39, tab. 1202.

Bryonia zeylanica, foliis profunde laciniatis, Herm., Hort. Lugd., p. 95,
tab. 97.

Bryonia pedata Hassk., in Flora, 1842, Beibl., p. 42.

? Bryonia palmata Linn., Spec., 1438.

Bryonia zeylanica, folio quinquepartito Burm., Thes. zeyl., p. 353. — Coccinia
palmata Rœm., loc. cit., p. 93.

Bryonopsis pedala Hasik., Cat. Plant. Hort. Bogor., p. 168, necnon in Plant.
Jav. Zolling., n° 9722, — Rœmer, loc. cit., p. 32. — Walp., Repert., V,
760.

Nehoemeka Rheed, Hort. malab., VIT, p. 37, tab., 19.

La Bryone laciniée, très commune à Ceylan et dans une grande

140 CH, NAUDIN.

parte de l'Inde, a été plusieurs fois cultivée au Muséum, mais sans
y mürir ses fruits. Ainsi que je le dirai tout à l'heure, elle n’appar-
tient qu'imparfaitement à ce genre , les espèces d'Europe étant
prises pour type ; elle est au contraire très analogue à l'espèce sui-
vante.

D. BRYONIA PANCHERI.

Bryonia Pancheri Ndn., Ann. des sc. nat. 4° série, t. IX, p. 398.

Cette espèce, dont les graines nous ont été envoyées il y a trois
ans de la Nouvelle-Calédonie, parait aussi se trouver à la Nou-
velle-Hollande, à en juger du moins par quelques échantillens en
trés mauvais état de l'herbier du Muséum. Presque semblable à
la précédente par son feuillage à cinq lobes allongés, ses vrilles
bifides et son pollen papilleux, elle s’en distingue à ses baies
ovoïdes-coniques et rouges ou rougeâtres à la maturité ; celles du
Bryonia laciniosa étant tout à fait sphériques, jaunâtres et mar-
brées de blanc.

Dans sa revue générale des genres de Cucurbitacées (1),
M. Arnott a désigné sous le nom de Bryonopsis courtallensis une
plante de l’Inde, dont il n’a donné ni description ni figure, et dont
la diagnose générique est elle-même si vague, qu’on ne sait à quoi
la rapporter. Il n’est pas probable qu'elle ait été faite pour le
Bryonia laciniosa, puisque, dans ce même travail (2), M. Arnott
conserve cette espèce parmi les Bryones ; néanmoins, à tort ou à
raison, M. Hasskarl a appliqué la diagnose du Bryonopsis à la
Bryone laciniée, et, prenant sans doute cette dernière pour une
espèce de récente invention, il l’a décrite, dans son Catalogue des
plantes du jardin de Bogor (p. 68), sous le nom de Bryonopsis
pedaia, qui se retrouve encore dans son étiquetage des plantes
récoltées à Java, par Zollinger, sous le n° 9722, Qu'il y ait eu, ou
non, erreur de sa part, peut-être conviendrait-1l effectivement de

(1) Hooker's Jour. of bot., t. II, p. 275 et suiv.
(2) Page 276.

REVUE DES CUCURBITACÉES. Ti
séparer des Bryones proprement dites les B. laciniosa et B. Pan-
cheri, et de conserver à ce nouveau genre le nom de Bryo-
nopsis déjà appliqué à l’une des deux. Ce genre, quoique faible
comme tant d’autres de celle famille, serait cependant très na-
turel, et se distinguerait aisément des Bryonia par le port, par
des vrilles bifides, une inflorescence mâle assez différente de
celle des Bryones proprement dites, nn pollen sphérique et fine-
ment muriqué (celui des vraies Bryones étant ovoïde, lisse et
à trois sillons à Pétat sec), et enfin, peut-être, par l'absence
d'une racine charnue et napiforme, ce que toutefois je n'ai pas
été à même de vérifier. Il comprendrait deux espèces, les Bryo-
nopsis Pancheri et Bryonopsis laciniosa, car il conviendrait de
rendre à cette dernière son ancien nom spécifique. Il est presque
inutile d'ajouter que le nom de Bryonopsis, ainsi employé, ne cor-
respondrait plus à l’idée qu'y attachait M. Blume lorsqu'il s’en est
servi pour désigner une section de l’ancien genre Bryonia, sec -
tion dont la plupart des espèces sont devenues types de nouveaux
genres.

XI. MUKIA.

Mukia Arnott, in Hook., Journ. of Bot., t. IT, p.271. — Endlich., Gen.
Plant., Suppl., Il, p. 77, n° 5430.

Bryoniæ et Cucumeris species auctorum.

Flores monœcr. Masculi fasciculati; feminei solitarii-ageregati ;
omnes axillares. Masculorum tubus calyeinus campanulatus, lim-
bus 5-dentatus, corolla profunde 5-loba et quasi 5-petala, lobis
apice rotundals. Stamina 3 libera ; 2 integra bilocularia, tertium
dimidiatum aut rarius integrum; antherarum loculis rectis pa-
rallelis, filamento brevi, connectivo supra loculos in appendi-
eulam brevem conicam producto ; polline globoso, lævi, poris
tibus dehiscente. Fœmineorum calyx et corolla ut in maribus ;
ovarium ovoideum, sub calyce constrictin, selulosum, 2-3-pla-
centiferum; stylus brevis, bast disco annulari cireumeinetus,
sugmalibus 2 vel 3 bilobis papillosis terminatus. Fruetus baccifor-

412 CH, NAUDIN.

mis, globosus, lævis aut setulis paucis cchinulatus. Semina oblongo-
ovalla, ovoideo-complanata, inconspicue marginata, subtiliter
serobiculata.

Herba austro-asiatica annua, undique scaberrima, intricato-
ramosissima, scandens aut humi prostrata ; flagellis metralibus,
angulatis, setuloso-asperatis ; foliis irregulariter et obtuse triangu-
latis, basi cordatis, nonnunquam obscure 3-5-lobis; cirrhis sim-
plicibus; floribus parvis, pulchre luteis ; baccis globosis, primo
viridibus el longitudinaliter fusco variegatis, demum ruberrimas

et unicoloribus, baccam Ribis nigri crassitie œmulantibus, pulpa
amaricante.

1. Muxia SCABRELLA.

Mukia scabrella Arnt., loc. cit., 276. — Wight, Jllustr. of Ind. bot., LE, tab.
105. — Walp., Repert. bot. syst., 11, 499. — Rœmer, Synops. monogr.,
IT, p. 47. — Non Hassk., in Plant. Jav. rar., p. 184.

Bryonia scabrellu Linn. fil, Suppl., 424. — Lamk., Dict., I, p. 497. —
Blum., Bijdr., 926. — Roxbg., Flor. ind., ILE, p. 724, et in East Ind.
Comp. Mus., tab. 466. — Wight, Icones, t, II, tab. 501.

Bryonia maderaspatana Berg., Cap., 351. — Lamk., Dict., I, p. 496.

Cucumis maderaspatensis Plukenet, Phytogr., I, tab. 170, fig. 2.

Cucumis maderaspatanus Linn., Spec., 1438. — Non Roxbg. nec Lour.

Mucca-Piri Rheed, Hort. Malab., VIII, p. 25, tab. 13.

Le Mukia est un de ces genres faiblement caractérisés comme
il y en a tant dans les Cucurbitacées, mais qu'on est cependant
forcé d’accepter, faute de pouvoir le faire entrer exactement dans
un autre. Il semble tenir des Zehneria et des Sicydium par ses
anthères, dont les loges sont droites et non flexueuses, en même
lemps qu'il se rapproche des Cucumis par le faible prolongement
du connectif au sommet des anthères, et un peu aussi par son
port et son aspect général. D’un autre côté, la petitesse de ses
baies rondes le rapproche des Bryones et la forme de ses graines
des Coccinia. Il arrive assez souvent que le style ne se divise
qu'en deux stigmates, et qu’il n’y ait que deux placentas dans

|

REVUE DES CUCURBITACÉES, 1h13
l'ovaire : mais cette particularité me semble, comme je Far dit
ailleurs, n'avoir aucune importance pour caractériser le genre.

Le Mukia scabrella, dont la graine nous a été envoyée de
l'Inde et de la Chine méridionale à plusieurs reprises, se cultive
aisément en pleine terre, et mürit bien ses graines sous le climat
de Paris.

M. Hasskarl s’est totalement mépris au sujet du M. scabrella. KI
décrit très longuement et très minutieusement sous ce nom, dans
ses Plantæ javanicæ rariores, p. 184, une Cucurbitacée entière
ment différente, et qui n'appartient pas même au genre Mukra,
mais que, malgré la prolixité de sa description, il m’a été impos-
sible de reconnaitre.

XII. SICYDIUM.

Sicydium As. Gray., Plant. Lindh., fasc. Il, p. 194.— Non Schlechtdendal.

Flores diæei (num semper ?) ; masculi in racemos axillares di-
gesti (fortassis et solitarn) fϾminei semper solitarn. Masculorum
tubus calycinus cyhadricus aut campanulatus, apice breviter
5-lobus ; corolla profunde 5-loba. Stamina 8, in fauce calycis
inserta; duo integra et bilocularia, alterum dimidiatum unilocu -
lare; omnium loculis rectis parallelis, filamentis crassis brevissi-
mis exappendiculatis ; polline lævi, sicco ovoideo trisulco, hume-
facto globoso porisque 3-dehiscente. Fæmineorum limbus calycinus
corollaque ut in maribus; ovarium ovoideum sub flore constrictum
elaberrimum triplacentiferum multiovulatum, stigmate trilobo pa-
pilloso. Fructus baccatus. Semina ovoidea, margine prominente
circumeincta, in pulpa horizontaliter nidulantia.

Plantæ boreali-americanæ, radice napiformi perennantes, qla- :
berrimæ ; caulibus annuis scandentibus ; foliis profunde 3-lobis,
lobis inferioribus sæprus lobulatis, nonnunquam etiam dissectis ;

| cèrrhis simplicibus ; (loribus luteolis, baccis intense rubris.

|

LA CH. NAUDIN.

À. SicypruM LINDHEIMERI.

Sicydium Lindkeimeri As. Gray, loc. cit.

Bryonia abyssinica Alb. Gouault, Revue hort., 1853, p. 61, cum icone.

S. caulibus gracilibus, obtuse angulatis ; foliis profunde 3-5-lo-
bis, lobis subcuneatis apice etiam lobulatis aut dentatis ; racemis
masculis subumbellatis, folio ut plurimum brevioribus, calycibus
cylindricis ; peponibus elliphico-ovoideis aut globosis, lœvibus,
pulpa insipida aut saltem non amara.

Hab. In regionibus temperatis aut calidioribus Americæ septentrio -
nalis, præsertim occidentalibus. Jam multos annos colitur in horto Musei
parisiensis ubi floret et fructus maturat.

Caules 2-A-metrales, modice ramosi, pulvere subtili cœrulescente
quum adoleverunt afflati. Folia 4-6 centim. longa et lata, forma varia-
bilia, sæpius profunde 3-loba, lobis divergentibus subcuneatis, haud raro
subquinqueloba aut etiam cordiformia et margine dentata. Flores utrius-
que sexus floribus Melonum paulo minores; petalis subangustis, apice
obtusis, intus villosulis, luteis, nervis extus virentibus ; calycis tubo cylin-
drico aut ima basi nonnihil ventricoso. Pepones crassitudine circiter ovi
columbini, subglobosi aut elliptico-ovoidei, apiculati, glaberrimi, primo
virentes et longitudinaliter variegati, demum rubri et unicolores. Semina
ovoidea, tumida, margine prominente eincta, basi bidenticulata, nigri-
cantia.

Var. B tenuisectum As. Gray, foliis dissectis, 5-7-9-lobis, lobis an-
gustis; calycibus masculis brevioribus quam in typo et fere campanula-
tis. Fortassis species propria est.

Le genre Sicydium, tel que l’a admis M. Asa Gray, n’est pas le
même que celui de Schlechtendal, ainsi qu'il est facile de s’en con-
vaincre en comparant les descriptions données par ces deux au-
‘teurs. Le Sicydium de Schlechtendal (Linnœa, t. VIT [1832/,
p. 388) est le plus ancien; cependant je n’hésite pas à le sacrifier
à l’autre, parce qu'il n’a été décrit que très incomplétement et sur
un seul sexe, tandis que celui de M. Asa Gray est aujourd'hui fort
connu, et qu'il est même représenté par une plante qui vit et se
reproduit dans nos jardins depuis plusieurs années.

REVUE DES CUCURBITACÉES, 445

J'ai trouvé, dans l’herbier de la Nouvelle-Grenade de M. Triana,
une Cucurbitacée qui m'a paru avoir de l’analogie avec le Sicy-
dium Schiedeanum de Schlechtendal ; mais l'échantillon, dépourvu
de fleurs mâles et de fleurs femelles, ne me permet pas d’en
affirmer l'identité. Dans tous les cas, cet échantillon n’a aucune
affinité de port ni d’aspect avec la plante de M. Asa Gray, que
j admets comme type du genre. Celle de M. de Schlechtendal,
lorsqu'elle sera mieux connue, devra donc passer dans un autre.

. La variété 8 du Sicydium Lindheiïmeri, dont l’herbier du Mu-
séum possède un échantillon donné et étiqueté par M. Asa Gray
lui-même, paraît, au premier coup d'œil, si différente du type ordi-
naire de l'espèce qu'on a quelque peine à la croire identique avec
lui. Je suis loin de supposer une erreur de détermination de la part
du savant professeur de l’Université d'Harward ; mais il y a sou-
vent de telles difficultés à reconnaître les espèces dans la famille

qui nous occupe, qu'il me semble qu'une nouvelle comparaison
_des deux formes, à l’état vivant, pourrait n’être pas superflue pour

|

lever tous les doutes.

Nous cultivons encore au Muséum une Cucurbitacée inédite du
Texas envoyée par M. Victor Considérant, et qui me paraît devoir
entrer dans le genre Sicydium, dont il faudra alors modifier lé-

_ gèrement la diagnose. Son feuillage est presque identique de forme
| et d'aspect avec celui du S. Lindheimeri ; les étamines y ont aussi

la même structure, mais les fleurs mâles sont solitaires, et leurs

calyces, au lieu d’être cylindriques, sont campanulés, et sensible-
| ment resserrés sous le limbe. N'ayant encore vu que des individus
, mâles peu développés, je m’abstiens de la nommer et de la dé-
| crire ici.

Le S. Lindheimeri est une très belle plante d'ornement, qui a

l'avantage d’être rustique sous le climat de Paris, où sa racine hi-
| verne fort bien sous terre. Il a été d’ailleurs recommandé à ce
titre, il y a plusieurs années, par la Revue horticole, qui en a donné
en même temps une bonne figure.

4° série. Bor. T. XII. (Cahier n° 3.) ? 10

4

146 CH, NAUDIN.

XIII. RHYNCHOCARPA.

Rhynchocarpa Schrad., in Linnæa, XII (1838), p. 403. — Endl. Gen. plant.,
n° 5429.

Trichosanthis, Melothriæ et Cyrtonematis species auctorum.

Flores monϾei; maseuli in racemos breves paucifloros digesti,
calyce campanulato profunde 5-lobo ; corollæ petalis basi tantum
coalitis. Stamina 3 libera, duo integra (scilicet bilocularia), ter-
tium dimidiatum ; omnium antheris brevibus, loculis ovoideis,
connectivo supra loculos in appendicem complanatam, apice bilo-
bam (in stamine dimidiato simplicem) producto; polline ovoideo,
trisulco, triporoso. Flores fæminer in nsdem axilhisquibus masculi,
solitarii, subsessiles, ovario basi ventricoso, superne in collum
gradatim angustato, limbo calycino corollaque ut in masculis. Sty-
lus brevis, basi disco carnoso annulari cireumeinctus, stigmate
capitato-dilatato, papilloso, obscure bilobo. Ovarium placentis
duabus instructum (et ut videtur bicarpellare), pauei-ovulatum.
Fructus baccatus, subsessilis, ventricosus, superne in rostrum co-
nicum productus, oligospermus. Semina transversim in pulpa ni-
dulantia, ovoidea, margine aliformi circumdata,

L. RHYNCHOCARPA FŒTIDA,

Rhynchocarpa fœtida Schrad., loc. cit.

Trichosanthes fœtidissima Jacq., Collect., 11, 341 , et Icon, rar., tab. 624,— Vé-
lins du Mus., t. LXI, pl. 63.

Melothria fœtida Lamk., Dict., IV, p.87.—Seringe, in DC., Prod., I, p. 313.

Cyrionema convolvulaceum Fenzl, Mss.— Ach. Rich., Tent. Flor. Abyss.,1, 286.
— Walp., Ann. Bot. syst., IT, 642.

R. radice hd lignescentibus perennans, ramosissima,
molliter pubescens, alte scandens ; foliis breviter petiolatis, ovatis,
basi cordatis, apice subrotundatis, margine crenulatis; cirrhis
simplicibus ; floribus minuts, luleis ; fructibus piso paulo crassio-
ribus, intense rubris ; seminibus nigrescentibus.

REVUE DES CUCURBITACÉES. 147
Hab. In Africa tropica, ab oris occidentalibus ad mare Rubrum. Spe-
- cimina habemus ex Abyssinia recepta (Schimper, Kotschy), quorum semina
sata in horto Musei parisiensis plantas florentes fructiferasque ediderunt,

Planta odore ingrato si manibus contrectata fuerit, cæterum tactu
mollis et visu haud indecora, præsertim quando fructibus numerosis
maturis aut maturescentibus ornatur. Folia 5-7 centim. longa, paulo
minus lata, læte viridia. Flores quam Bryoniæ nostratis minores. Baccæ
parum carnosæ, late ventricosæ , in rostrum sæpe sequicentimetrale
molle rectum aut incurvum abeuntes, longitudinaliter nervosæ, ineunte
. maturatione flaventes, mox aurantiacæ, demum ruberrimæ, sæpius 2-4-
Spermæ, nec raro abortu 1-spermæ. Plantæ sub dio cultæ jam primo
anno ætatis florent et fructificant, sed in caldariis hyeme sepositæ et tem-
pore vernali iterum cœlo creditæ multo uberiores fiunt.

Tous les ovaires, ainsi que tous les fruits du Rhynchocarpa que
j'ai analysés, ne m'ont offert que deux placentas, et ce qui semble
attester encore qu'il n’y à ici que deux carpelles, et non pas trois
comme le prétend Schrader, c’est que le stigmate est lui-même
assez sensiblement bilobé. Au surplus, le nombre absolu des car-
pelles me parait n'avoir ici qu’une importance secondaire, et il se
pourrait qu’on trouvât quelques fruits à trois placentas, et d’autres
réduits par avortement à un seul, sans que le caractère générique
en füt altéré. Ce qui est plus déterminant pour fixer la place que ce
genre doit occuper dans la famille, c’est la direction toujours hori-
zontale des ovules, et par suite des graines, qui ne sont jamais
verticales, comme dans les Sicyos ou les Echinocystis, même
lorsqu'elles sont réduites à l'unité. En définitive, ce genre appar-
ent au même groupe que les Bryones, les Courges et autres
genres analogues.

Les anciens Bryonia rostrata et B. epigæa de Rottler, transférés
par M. Arnott au genre Æchmandra, me paraissent, à n’en juger
il est vrai que par les fruits, avoir une grande analogie avec le
KRhynchocarpa, mais n’en connaissant pas encore les fleurs mâles,
je ne puis pas décider s'ils doivent lui être réunis génériquement.
Je me borne à dire que le groupe des Æchmandra est probablement
trop hétérogène pour n'être pas divisé quelque jour en nouveaux
genres. Peut-être même ne faudrait-il pas s'étonner si le Bryonia

118 ù CH, NAUDIN.

ampleæicaulis de Lamarck, devenu un Karivia pour Arnett, ren-
trait aussi quelque jour dans les Rhynchocarpa, avec lesquels il me
paraît, d’après les figures de Wight, avoir la plus grande affinité.

XIV. MELOTHRIA.
Melothria Linn. et species auctorum.

Flores monœcei. Maseuli in racemos paucifloros axillares agore-
gali, fœminei in sdem axillis solitarit, omnes antheriferi ; calyce
campanulato, breviter 5-dentato ; corolla profunde 5-loba aut fere
5-petala, Masculorum stamina 3, libera, uno dimidiato (nonnun-
quam eliam integro); antheris brevibus, ovoideis, loculis non
flexuosis. Fœmineorum stamina ut in maseulis pollinifera ; ovarium
ovoideum, glabrum, 8-placentiferum, sub flore constrietum ; stylus
brevis, basi disco annuliformi circumeinctus, sligmatibus tribus
bilobis. Pepones parvi, Iæves, longe pedunculati, maturatione
atrovirentes. Semina numerosa, In pulpa aquosa nidulantia, ova-
lia, plana, haud indistincte marginata.

Herba annua, Americæ utriusque necnon Asiæ ortentalis 1n-
cola, ramosissima, pro familia microphylla, humi prostrata et
tunc ad nodos radicans, rarius scandens ; flagellis tenuibus fere
filiformibus ; foliis palmato-3-5-lobis ; cirrhis indivisis ; floribus
masculis raris (interdumque subnullis), ad apicem pedunculi gra-
cillimi 3-5 aggregatis ; fœmineis pariter longe pedunculatis ;
omnibus luteis; peponibus vix dimidiam olivam crassitudine
æquantibus, viridibus, demum extus nigricantibus et a pedunculo
sponte secedentibus ; pulpa insipida cucumerina.

A. MELOTHRIA PENDULA.

Melothria pendula Linn., Spec., 49. — Seringe, in DC. Prod. , IT, 313. —
Rœmer, Synops., IT, 27.

On ne connaît jusqu'ici, avec certitude, que la seule espèce que
je viens de nommer ; elle est commune dans la plus grande parte

REVUE DES CUCURBITACÉES. 149
de l'Amérique du Nord, et elle est signalée de même à la Guyane
etau Brésil par la plupart des botanistes qui ont visité ces pays. On
peut cependant encore douter que toutes les Cucurbitacées qu'ils
ont rapportées à cette espèce soient absolument identiques avec
elle. Ce qu’il y à de certain, c’est qu’elle existe aussi en Chine, car
nous en avons reçu des graines par l'entremise de M. Fontamier,
consul de France à Macao, et les plantes que nous en avons
obtenues, en 1859, ont été de tous points semblables à celles de
provenance américaine que l’on cultive depuis bien des années au
Muséum.

Ainsi qu'on peut en juger par la diagnose ci-dessus, le genre
Melothria est faiblement caractérisé. Il tient de près au Sicydium
d’Asa Gray par ses inflorescences, par la forme de ses étamines
dont les anthères ne sont pas sinueuses, par ses vrilles simples et
jusqu’à un certain point par ses fruits; il en diffère par l’aspect
général et le port, et surtout par l’hermaphroditisme de ses fleurs
femeiles où les trois étamines sont entièrement développées et
pollinifères, ce qui explique comment la plante est si fertile, mal-
gré la rareté générale des fleurs mâles, qui manquent même quel-
quelois presque totalement. Ce dernier caractère est, à mon sens,
le principal; cependant on ne peut se dissimuler qu’il est encore
très faible, si l’on considère que la présence d’étamines rudimen-
aires est un cas fréquent dans les fleurs femelles des Cucurbita-
cées, et que quelquefois ces vestiges d'organes sont assez déve-
loppés pour produire de bon pollen.

On devra, selon toute vraisemblance, éliminer du genre le
Melothria prunifera de Pœæppig et Endlicher (1), qui diffère con-
sidérablement du Melothria pendula par sa grande taille (10 à
12 mètres), son port, ses inflorescences mâles, et la couleur
blanche de ses fleurs.

(4) Nov. gen. ac spec. Plant. peruv., LE, p. 55. tab, 174.

150 «CH, NAUDIN.

XV. THLADIANTHA.

Thladiantha Bunge, Enum. plant. Chin. bor., 29. — Endlich., Gen. plant.
n° 5451. — Walp., Repert., II, 205, et V, 763.

Flores diæeci, 5-meri. Masculi dimorphi, inæquales; tubo caly-
cino late campanulato, sepalis majusculis complanatis. Majorum
petala fere usque ad basim libera, erecta, conniventia, corollam
carapanulatam fingentia, sepalis (ut plurimum reflexis) longiora.
Antheræ 5, dimidiatæ, æquales, uniloculares, oblongæ, rectæ,
omnes fertiles et filamento proprio donatæ, quarum A per paria
collaterales petalis duobus objiciuntur antherisque completis (id
est bilocularibus) respondent; quinta solitaria, cum petalis duobus
alternans ; omnium polline globoso, lævi. Appendicula tenuis,
petaloidea, obtusa, e basi petali antheram solitariam ex adversa
floris parte spectantis porrecta discumque centralem horizontali-
ter tegens. Florum minorum petala sepalis breviora, unum appen-
diculæ lamelliformis rudimento basi instructum ; antheræ5 pariter
dimidiatæ et liberæ, subsessiles et ut videtur steriles. Flores
fœmine: adhucdum ignoti.

‘ 3. THLADIANTHA DUBIA. Tab. 10.
Thladiantha dubia Bunge, loc. cit.

T, tuberculis radicalibus perennans; caulibus annuis, angula-
hs, circiter sesqui-bimelralibus ; folus late ovalibus, basi profunde
cordatis, apice acuminatis, margine crenatis, undique hirtis aut
hirsutis ; cirrhis simplicibus ; floribus majoribus et fertilibus lon-
giuscule pedicellatis, in ramulis foliosis oliganthis et fere panicu-
hformibus aggregatis, singulis tamen aæillaribus et solitarus, pul-
chre flavis; minoribus palhdioribus, subsessihbus, in capitula
foholosa breviter pedunculata pauciflora congestis, serotinas ?

Has. In China septentrionali. Specimen vivum habuimus in horto
Musei parisiensis e seminibus in hac regione collectis.

Cette espèce dioïque, dont, jusqu'ici; on ne connait que le mâle,

REVUE DES CUCURBITACÉES. 451

est la modification la plus curieuse du type des Cucurbitacées que
J'aieencore rencontrée. Il n’en existe probablement pas qui appuie
mieux, en apparence du moins, la présence de cinq étamines dans
la fleur de ces plantes. Au premier abord, on croit effectivement
voir cinq étamines distinctes, mais un peu d'attention suffit pour
faire reconnaitre qu'il n’y a pas ici dérogation à l’état ordinaire
des choses. Quatre de ces étamines forment deux paires opposées
à deux pétales, ou plutôt à une moitié de ces deux pétales, et dans
chacune d'elles les deux filets s'insèrent collatéralement sur le
même point du réceptacle. De plus, les anthères, qui sont uni-
loculaires et droites, opposent leurs connectifs l’une à l’autre,
manifestant par là qu’elles font partie d’un même tout de forme
binaire, dont les deux moitiés sont symétriques dans le sens que
la géométrie attache à ce mot. En définitive, les deux étamines
d’une même paire représentent une élamine simple, biloculaire,
mais divisée en deux jusqu’à la base du filet. C’est un degré de
plus que ce que l’on voit dans beaucoup d’autres genres de Cucur-
bitacées, où les deux grosses étamines montrent le commence-
ment de cette séparation des loges.

Ce qui est encore plus digne d’attention, c'est l’apparition,
unique jusqu’à présenté dans la famille, d’un appendice pétaloïde à
la base d’un des pétales. Cet appendice membraneux, représenté
sur la figure a (pl. 10), se projette horizontalement au-dessus de la
cavité centrale et nectarifère de la fleur. Le pétale auquel il adhère,
et dont il semblerait le dédoublement, fait face à la demi-étamine
isolée, située sur le point opposé de la fleur, et qui, seule, corres-
pond à l'intervalle de deux pièces de lacorolle. Quelles sont la nature
et la signification morphologique de ce processus sans analogue
connu dans le reste des Cuecurbitacées? C'est ce que je ne saurais
dire; mais il est possible qu'un jour il serve de point de repère
pour expliquer la symétrie encore si obscure du verticille stamimal
de cette famille, Tout ce qu’on peut en induire dès à présent, c’est
que la fleur du Thladiantha, et probablement aussi celles de la
plupart des autres Cucurbitacées, ne peuvent pas être considérées
comme des fleurs absolument régulières.

M. Bunge, qui a le premier fait connaître cette smgulière forme,

152 CH. NAUDIN.

en a décrit les grandes fleurs fertiles comme ayant la corolle bila-
biée. À moins que sa plante n’ait différé spécifiquement de la
nôtre, ce qui me parait peu probable, j'incline à croire qu’il a été
induit en erreur par quelque anomalie de cet organe, ou peut-être
par une simple déformation accidentelle. J'ai cru aussi un instant
voir des corolles irrégulières par inégalité de développement sur
la plante que nous cultivions au Muséum ; mais en y regardant avec
plus d’attention, cet effet disparaissait, ou du moins il était si peu -
prononcé, qu'il n’affectait pas sensiblement la régularité de la fleur.
Au surplus, n’ayant encore observé ces fleurs que sur un seul in-
dividu, c’est sous toutes réserves que je me permets d’infirmer
l’assertion de M. Bunge sur ce point. Dans tous les cas, même en
laissant de côté l’anomalie très incertaine d’une corolle bilabiée, la
structure du T'hladiantha est encore assez étrange pour justifier
l'hésitation d’'Endlicher qui, en le reléguant dans les Genera peni-
tus dubia, se demande même si ce n’est pas plutôt une mon-
struosité (1 )qu’un type normal et nouveau de Cucurbitacées. Il est à
regretter que l’on n’ait pu encore observer la plante femelle, dont
les fleurs aideraient peut-être à expliquer celles du mâle, et les
fruits à déterminer la place du T'hladiantha dans une classification
des genres de la famille.

C’est par la Société impériale d’acclimatation que nous estarrivee
de Chine la graine qui a produit l’unique échantillon que nous
avons cultivé en 1859. Sans savoir sur quel point de cette vaste
contrée elle a été recueillie, il est permis de supposer, à la vigueur
et à la croissance rapide de notre plante sous le climat de Paris,
qu’elle provenait de quelque province septentrionale (2), peut-être

(4) An monstri aliquid? Endlich., Gen. plant., n° 5454.

(2) Depuis que ces pages ont été écrites, j'ai eu la preuve de la parfaite
rusticité du Thladiantha sous notre climat. On sait qu'à Paris, au mois de dé-
cembre 1859, la température s'est abaissée jusqu'a — 16 degrés centigrades,
et que la terre a gelé à une assez grande profondeur. Or une vingtaine de tu-
bercules de Thladiantha enfouis à environ 0,15, et sans autre abri que la terre
qui les couvrait, ont parfaitement résisté au froid. En ce moment (31 mars),
leurs pousses commencent à sortir de terre, et elles promettent des plantes vi-
goureuses pour la saison prochaine.

REVUE DES CUCURBITACÉES, 153
même des environs de Pékin où M. Bunge en a découvert l’espèce.
Quoique semée tardivement (dans le courant de mai), elle à pro-
duit dans les mois d’août et de septembre une abondante floraison,
principalement composée de ces grandes fleurs en forme de cam-
panules qui renferment les étamines fertiles. Ce n’est que dans les
derniers jours de septembre et au commencement d'octobre que
j'ai reconnu l'existence des petites fleurs à étamines stériles, qui
me paraissent n'être que des fleurs atrophiées ; mais peut-être
existaient-elles dès le début de ja floraison. C’est aussi vers la
même époque que j'ai découvert les tubereules radiculaires, qui
paraissent avoir échappé à l’attention de M. Bunge. Ces tubercules
sont placés sur le trajet de racines longues et déliées qui s’éten-
dent horizontalement, à une faible distance de la surface du sol.
Leur taille variait de la grosseur d’une noisette à celle d’un petit
œuf de poule ; ils étaient blancs, très tendres, farineux, presque
tout semblables extérieurement et intérieurement à ceux de la
Pomme de terre, et portaient, comme eux, des yeux ou bourgeons
rudimentaires. Un de ces tubercules mis dans l’eau bouillante s’y
attendrit en moins d'un quart d'heure, et sa pulpe ressemblait
encore, à s'y méprendre, à celle de la Pomme de terre cuite. Je
regrette d’avoir à ajouter qu’elle était imprégnée d’une certaine
amertume, qui, sans être très prononcée, était cependant plus que
suffisante pour la rendre immangeable.

La planche 10 représente un rameau fleuri du T'hladanthia du-
bia. On voit en a une grande fleur isolée et ouverte artificielle-
ment pour montrer la forme et l'insertion des étamines, ainsi que
l’appendice pétaloïde dont il a été question plus haut. En b est
représentée une inflorescence de petites fleurs stériles. Toutes ces
figures sont de grandeur naturelle.

XVI. ECHINOCYSTIS.

Echinocystis Torr. et Gray, Flor. north. Am., 1, 542. — Endlicher. Gen, plant.,
suppl., 1, p. 14214.
Sicyi et Momordicæ species auctorum.

Flores monϾci, 5-6-7-meri; masculi pedicellati, in racemos

15 | CH. NAUDIN.

axillares dispositi; fœminei in üisdem axillis quibus priores solitarii
aut rarius pauciglomerati; omnium calyce late campanulato, den-
ticulis 5-7 vix conspicuis coronato, corolla subrotata profunde
9-7-loba. Masculorum stamina 2 vel 3, in columnam centralem
coalita; antheris fere horizontalibus undulatis aut flexuosis, loculis
conniventibus non autem confluentibus; pollinelævi, sicco elliptico-
ovoideo 4-5-sulcato, humefacto globoso et tune manifeste 4-5-po-
ros0. Fæœmineorum ovarium globosum aut breviter ovoideum, sub
flore constrictum, dense echinulatum, 2-3-loculare ; loculis L- ra-
rius 2-ovulatis, ovulis e fundo loculorum erectis ; stigmate subses-
sil, hemisphærico, Iævi. Fructus bacca exsucca, undique echinata,
demum sicca et apice irregulariter lacera, intus fibroso-reticulata,
L-h-sperma. Semina magna, ovoidea aut complanata,

Herbæ boreali-americanæ, radice carnosa napiformi perennan-
les aul annuæ (teste Asa Gray); caulibus repentibus scandentibus-
que; folis palmato-5-7-angulatis ; cirrhis simplicibus bifidis tri-
fidisve ; floribus albis, parvis aut magnitudine mediocribus.

1. EcniNocysTis FABACEA. +. Tab. 9.

E. radice perennans , viæ puberula aut olabrata ; caulibus
subteretibus striatis ; foliis scabriusculis ; cirrhis simplicibus, bifi-
dis trifidisque; fructibus globosis, dense echinats, 1-l-spermis ;
seminibus magnis, obovoideris nec complanatis.

Planta californica, ramosissima, 2-A-metralis. Folia (absque petiolo)
0-6-centim. longa et lata, angulata, basi cordata, sinubus inter lobos
obtusis. Racemi masculi circiter decimetrales, graciles, erecti, 5-20-flori;
floribus 5-6-7-meris, pedicello proprio 5-8-millimetrali suffultis, quam
flores Bryoniæ nostratis minoribus et candidioribus. Columna staminea
(seu androphorum) brevis, crassiuscula, e tribus staminibus (aut uno
abortiente duobus) usque ad apicem coalitis compacta ; loculis varie cur-
vatis, inter se conniventibus sed distinctis, nec ut apud Cyclantheram in
orbem confluentibus. Flores fœminei solitarii, pedunculati, sæpius ex
eadem axilla qua inflorescentia mascula orti; ovario dense echinulato;
corolla pariter 5-7-mera, quam masculorum paulo majore. Pepones glo-

REVUE DES CUCURBITACÉES. 159
bosi aut breviter ovoidei, aculeolis densis robustis fere pungentibus hor-
ridi, involucrum fructiferum Castaneæ vescæ forma et magnitudine
referentibus, abortu haud raro 4-2-spermis, loculorum parietibus fibro-
sis. Semina obovoidea, lævia, linea tenui marginiformi circumcincta ,
pallide fulva, crassitudine nucis avellanæ.

L'Echinocystis fabacea, dont le nom spécifique rappelle à la fois
la grosseur et la forme de la graine (pl. 9, fig. b), qu’au premier
abord on prendrait plutôt pour celle d’une Légumineuse que pour
celle d’une Cucurbitacée, nous a été apporté, il y a deux ans, de
Californie. Ses racines vivaces ont déjà passé deux hivers (de 1858
à 1860) en pleine terre, à Paris ; et, ce qui doit le faire regarder
comme très rustique sous notre climat, c’est que ses premières
pousses sortent de terre du 45 fevrier au 1° mars, et fleurissent
dans le courant d'avril, malgré quelques gelées, dont elles ne pa-
raissentpas souffrir. Toutes les fleurs produites par trois individus
ontété mâles, et je n’aurais pas encore pu prendre connaissance des
fleurs femelles et du fruit, si M. le docteur Aubé, membre de la
Société centrale d’horticulture, qui se trouvait en avoir un pied dans
un jardin situé près de Clermont (Oise), n’avait eu l’obligeance de
m'en faire passer des rameaux portant à la fois des fleurs mâles et
des fleurs femelles. C’est par là aussi que j’ai reconnu que l'espèce
est bien réellement monoïque; mais il peut se faire, comme cela
arrive dans beaucoup de Cucurbitacées munies des deux sexes, que
certains individus aient une tendance marquée à la diœcie, ce qui
expliquerait comment les trois plantes qui ont fleuri au Muséum
en 1859 (1) n’ontdonné que des fleurs mâles. M. le docteur Aubé
a récolté sur la sienne plusieurs fruits parfaitement mürs qu’il m'a
de même communiqués. L'espèce peut donc être considérée dès
maintenant comme acquise à nos jardins botaniques.

_ On ne connait encore que deux espèces d’Echinocystis, VE. lo-
bata Torr. et Gray, décrit en premier lieu par Michaux sous le
nom de Srcyos lobata, et plus tard par Seringe sous celui de Mo-
mordica lobatu, et celui dont il vient d’être question ici. Tous deux

(4) En avril 1860, ces mêmes plantes, très vigoureuses, ont de nombreuses
inflorescences mâles et pas une seule fleur femelle.

156 CH. NAUDIN.

sont de l'Amérique septentrionale, mais il me paraît probable
qu'on en découvrira d’autres sur des points plus méridiopaux du
nouveau continent. Je fonde cette opinion sur la présence, dans
l’herbier du Muséum, d’un échantillon de l'Amérique méridionale
très voisin par le port et les inflorescences mâles de lEchino-
cyshis fabacea, mais que l'absence de fleurs femelles et de fruits
m’empêche de rapporter avec certitude à ce genre.

Les Échinocystis ont, avec les Srcyos, des analogies qu’on ne
peut méconnaitre, mais ils en diffèrent essentiellement par le
nombre des loges de l'ovaire et par la position des ovules et des
graines, dont la direction est exactement l'inverse de ce qu'elle
est dans les Sicyos.

La planche 9 représente un rameau fleuri de l’Echinocystis fabacea.
En a et en b sont les figures, de grandeur naturelle, du fruit et de la graine.

XVII. CYCLANTHERA.

Cyclanthera Schrader, in Linnæa, VIII, p. 23.
Discanthera Torr. et Gray, Flor. north. Am., I, 697.
Momordicæ et Anguriæ species auctorum.

Sousle nom générique de Cyclanthera, proposé pour la première
fois par Schrader en 1831, ont été réunies un petit nombre de
Cucurbitacées à fruits uniloculaires, probablement monocarpellés,
mais polyspermes, dont les étamines, syngénèses au plus haut de-
gré, ont leurs anthères fondues en une seule de formeorbiculaire et
horizontale, où l’on ne distingue plus aucune trace des trois pièces
élémentaires qui, selon toute vraisemblance, entrent dans sa compo-
sition. L’anthère y est unique par le fait, et, semblable à un disque
ou à une roue, elle termine la colonne centrale qui résulte de la
coalescence des filets staminaux ; de là, les noms de Cyclanthera
et de Discanthera successivement donnés aux espèces de ce genre.
Ce caractère est en effet si frappant, qu’on n'hésite guère, au pre-
mier abord, à lui attribuer une valeur générique, surtout lorsqu'on
a vu, dans d’autres groupes de la famille, la forme et les rapports
mutuels des anthères concourir avantageusement avec d’autres
particularités d'organisation à la délimitation des genres. Mais il

REVUE DES CUCURBITACÉES. 197

n’en est plus de même dans celui des Cucurbitacées à fruits uni-
loculaires polyspermes. Avec une structure de l'ovaire particu-
lière et identiquement la même dans toutes les espèces, on trouve
les anthères tantôt soudées en une seule pièce circulaire et sans
sinuosités, tantôt tout à fait distinctes et à loges très flexueuses.
Ces deux dispositions ne coïncident pas elles-mêmes avec les
formes des feuilles, qui sont indifféremment simples ou pédati-
partites, malgré la plus grande similitude des anthères ; mais il y
a identité dans le mode de déhiscence des fruits, qui se rompent
spontanément avec élasticité en projetant au loin leurs graines.
Cette élasticité varie d’ailleurs d'intensité suivant les espèces; chez
quelques-unes elle est peu prononcée.

C'est ce mode curieux de déhiscence élastique qui a fait établir,
par Jacquin (D), le genre Élaterium, pour une espèce de l’Amé-
rique équatoriale, l'Ælaterium carthaginense, dont le fruit réni-
forme et échinulé est absolument pareil à celui d’une autre espèce
de la même région que nous cullivons au Muséum, et qui s'ouvre
avec la même élasticité. Mais, tandis que dans notre plante l’anthère
unique el orbiculaire présente exactement la forme de celle du
Cyclanthera pedata de Schrader, dans celle de Jacquin les trois éta-
mines, quoique syngénèses et soudées dans toute la longueur de
leurs filets, se reconnaissent encore aux sinuosités de leurs anthères.
Les deux plantes se ressemblent par leur feuillage simple et leurs
vrilles bifides, et par là diffèrent notablement toutes deux du Cyclan-
thera pedata, où les feuilles sont en quelque sorte composées ét
les vrilles multifides. D'un autre côté, l'espèce du Muséum se
rapproche du Cyclanthera pedata par la forme du calvce des fleurs
mâles qui est largement cupuliforme, tandis qu'il est tubuleux et
très allongé dans l’Elaterium carthaginense. Or nous avons vu
que, dans la plupart des Cucurbitacées à ovaire triloculaire, la
forme du calyce, rotacé, campanulé ou tubuleux, coïncide habi-
tuellement avec d’autres caractères, dont l’ensemble est considéré
comme ayant une valeur générique.

Il n’en reste pas moins que l’analogie est très grande entre les

(1) Plantes d'Amérique, p. 241.

4158 CH. NAUDIN.

espèces que l’on a décrites sous les noms de Cyclanthera et d’Ela-
terium, et que l’on ne sait encore où placer les limites respectives
de ces deux genres. Pour moi, j'incline à croire qu'à cause de
cette analogie qui se manifeste surtout dans les fruits et dans l’in-
florescence, et aussi à cause de l’entrecroisement des caractères
sur lesquels on chercherait à les établir, ces deux genres doivent
n’en faire qu'un, et, dans ce cas, le nom d’Elaterium étant le
plus ancien devrait être seul conservé. Il serait même fort pos--
sible aussi qu'on dût un jour y réunir le genre Rytidostylis de
MM. Hooker et Arnott (1), établi sur une espèce incomplétement
observée, mais que, d’après la description et la figure données par
les auteurs, je Juge avoir la même organisation que l'Elaterium
de Jacquin.

Je ne connais pas encore assez les espèces de ce groupe de
Cucurbitacées pour pouvoir prendre un parti à ce sujet ; je laisse-
rai donc indécise la question de savoir s’il vaut mieux réunir les
genres Élaterium et Cyclanthera, ou les maintenir séparés, me
bornant pour le moment à tracer les caractères généraux qui leur
sont communs, et que je résume dans la diagnose suivante :

CYCLANTHERA. — ÉLATERIUM.

Flores monœci. Masculi in racemos axillares, nonnunquam
contractos et subumbelliformes, dispositi. FϾminei in iisdem axil-
lis solitarti; omnium calyce denticulis minuüs 5 (6 in floribus
6-meris) instructo. Stamina in columnam centralem apice antheri-
feram coalita. Pollen siccum ovoideum, 4-5-sulcum (num sem-
per ?), humefactum globosum porisque tot quot sulei longitudinales
apertum. In floribus fæmineis ovarium ovoideum, magis minusve
curvatum aut gibbum, L-loculare, secus placentam unicam longi-
tudinalem horizontaliter pluriovulatum ; stigmate subsessili hemi-
sphærico. Pepo malurus follicularis, vix carnosus, gibbus aut reni-
formis,sæpius elastice dissiliens. Placenta funiformis, ex apiceloeuli
pendula, hibera. Semina 5-10 (fortassis et pauciora aut numero-
siora), complanata, marginibus varie crenata, Iævia aut exasperata.

(1) Bot. of Beech., p. 42k, tab. 97.

REVUE DES CUCURBITACÉES, 159

Plantæ americanæ, annuæ (nonne quædam radicibus peren--
nantes ?), scandentes ; flagellis angulatis, cirrhis bi-mulhfidis, {o-
lis nunc pedato -5-7-foliolatis, nunc simplicibus ovatis aut 3-5-lo-
bis; floribus ut plurimum parvis herbaceis, rarius majusculis el
candidis ; fructibus maturis virenhibus aut pallide lutescentibus,
lœvibus aut sæpius echinats, sapore cucumerino el nonnunquam
edulibus ; seminibus nigris aut nigricantibus.

À. CYCLANTHERA PEDATA.

Cyclanthera pedata Schrad., in Index sem. Hort. Gætting., anno 1831. Iterum
in Linnæa, Litter. Bericht, t. VIII (1833-4837), p. 23, et t. XII (1838),
p. 408. — Arnott, in Hook. Journ of boi., t. III, p, 280. — Walpers Repert.,
V,p. 761. — Rœmer Synops, monogr., I, p. 101. — Non Elaterium ribi-
forum Schlecht., in Linnæa, VII, p. 388, ut affirmavit Clar. Arnott, loc. cüt.

Le Cyclanthera pedata, originaire du Mexique, est cultivé de-
puis longues années dans la plupart des jardins botaniques ; c’est
une plante trop connue pour qu'il y ait utilité à s’y arrêter plus
longtemps.

Nous avons reçude la Nouvelle-Grenade, sous le nom de Pepiño
de comer, par l'entremise de M. de Geoffroy, consul de France à
Bogota, les graines d’un Cyclanthera, qui, s’il n’est pas identique
avec le C. pedata, comme je suis tenté de le croire, en est extré-
mement voisin. Nous l’avons cultivé au Muséum en 4859, mais
par suite de divers accidents, les trois où quatre individus vivants
que nous en avons eus ont été si retardés, qu'ils n’ont pu fleurir
qu’à l’arrière-saison, et n’ont pas noué un seul fruit. Les ovaires
y étaient parfaitement lisses, et c’est à peu près la seule différence
que je leur aie trouvée avec le C. pedata, où ils sont quelque peu
muriqués. D’après ce que nous a dit M. de Geoffroy, les fruits en
sont comestibles avant leur maturité, et se mangent cuits. Cette
espèce est probablement le Momordica pedata, pomis striatis du
P. Feuillée (1), plante au moins très voisine du Cyclanthera
pedata, et très mal à propos confondue par Lamarck et par

(4) Plantes du Pérou, t, I, p. 754, pl. 41.

160 CH, NAUDIN.

Seringe avec l’Anguria pedata de Linné, qui est un véritable
Anguria.

2. CYCLANTHERA EXPLODENS. ++.

C. annua, fere glabra, ramosissima ; flagellis 5-anguls ; cir-
rhis inæqualiter bifidis, folio longioribus ; foliis simphcibus, irre-
gulariter 3-5-lobis, nonnunquam obscure triangularibus, vix-
puberulis ; racemis masculis 10-20-floris, contractis, folio brevio-
ribus, floribus parvis subherbaceis ; flore fæmineo subsessili, ova-
rio ovoideo-gibbo, hinc muricato; fructu subreniformi, molliter
echinato, sponte dissiliente ; seminibus omnino complanatis.

HaB. Frequens in montibus Novo-Granatensibus.

Planta in Horto parisiensi 2-3-metralis, præcocissima, nam ineunte
april sata jam ante exitum maïi florebat fructusque post paucos dies
maturabat. Flagella glaberrima , angulata. Folia 5-7 centim. longa et lata,
limbo petiolum excedente, diversiformia, basi obsolete cordata, sæpius
3-loba quam 5-loba, lobo intermedio lateralibus productiore subacuto,
utraque pagina vix puberula aut tactu scabrella. Flores utriusque sexus
5-6-meri, diametro circiter 4-millimetrali, lutescenti-virides ; calyce
late cupuliformi, denticulis 5-6 minutis instructo; petalis triangulari-
acutis. Masculorum anthera orbicularis brevissime stipitata , polline
h-sulco. Fœmineorum ovarium semine cannabino paulo crassius, sub
flore constrictum, hinc læve, illinc molliter echinulatum; stigma late
hemisphæricum, depressum, subsessile. Fructus bacca subexsucca, pe-
dunculata, valde gibba et dorso echinulata, circiter 2 centim. et quod
excedit longa, paulo minus crassa, sæpius 8-sperma, subglaucescens.
Maturitate jam pr'oxima gradatim pallide lutescit moxque, sive sponte,
sive tactu levissimo concitata, subito impetu in lacinias tres laceratur et
semina explodit. Laciniæ in ipso momento eruptionis elastice revolvun-
tur, quarum media placentam rigidam porrectam seminibusque orbam
retinet. Semina nigricantia, Iævia, margine eleganter crenata, centime-
trum longitudine vix metiuntur.

C’est un peu au hasard que je donne cette espèce comme nou-
velle, car 1l pourrait se faire qu’elle eût été déjà décrite soit sous
le nom d’Elaterium, soit sous celui de Cyclanthera. Elle a effec-

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REVUE DES CUCURBITACÉES. 161

üivement des analogies avec l’Elaterium brachystachyum de Se-
ringe, l’Elaterium hastatum de Kunth (1) et l'EÉlaterium ribiflo-
rum de Schlechtendal (2); mais les descriptions de ces trois
espèces sont si vagues qu'il m'est impossible d’en rien conclure
relativement à celle que je viens de proposer. Ce qu’il y a de cer-
tain, c'est que celle dernière est un Cyclanthera par la forme de
l'anthère, étun ÆElaterium par le fruit.

XVII. SICYOS.

»

Sicyos Linn. et auctorum.

Le genre Sicyos, un des plus riches de la famille en espèces,
n’est pas exclusivement américain, comme on l’a cru longtemps ;
il a un certain nombre de représentants dans quelques-uns des
archipels de l'océan Pacifique; mais il ne parait pas que, jusqu'ici,
on l'ait trouvé à la Nouvelle-Hollande, ni en Asie. Par la structure
de son fruit uniloculaire (3), où une graine unique est suspen-
due verticalement au sommet de la loge, 1l appartient à ce groupe
remarquable de Cucurbitacées dont le Sechium est le type. IL a
aussi une grande affinité avec le Sicyosperma, ainsi qu'avec les
Elaterium et les Cyclanthera, qui n’en différent, à proprement par-
ler, qu'en ce que leur fruit est polysperme, circonstance qui
oblige les graines à prendre üne direction à peu près horizontale.

Les espèces de Sicyos me sont encore trop peu connues pour
que je puisse proposer une nouvelle diagnose du genre ; je l'ad-
mets pour le moment telle qu’elle a été formulée par Linné et les
auteurs qui l'ont suivi.

Nous cultivons au Muséum les deux espèces suivantes :

(1) Kunth, in Humb. et Bonpl. Nov. gen. et spec., t. II, p. 420.

(2) Schlechtendal, in Linnæa, VII (anno 1832), p. 388.

(3) Dans le Sicyos Badaroa l'ovaire est en même temps monocarpellé, comme
le démontre la présence d’un stigmate unique, quoique bilobé, et qui correspond
par conséquent au tiers du stigmate total des Cucurbitacées où l'ovaire est à trois
placentas et à trois carpelles. Ce fait contredit l’assertion des auteurs qui disent,
en parlant du genre Sicyos : Stigma 3-4-fidum. Je n'affirme cependant rien rela-
tivement aux autres espèces que je n'ai pas encore examinées.

Ac série. Bor. T, XII, (Cahier n° 3) 5 A1

162 CH. NAUDIN.

À, SICYOS ANGULATUS,

Sicyos angulatus Linn., Spec., 1438. — Seringe, in DC. Prod., III, 309. —
Rœmer, Synops., Il, p. 403.

Espèce du nord de l’Amérique, qui se reproduit d’elle-même,
sous nos climats, là où elle a été une fois cultivée, et qui s’est
même naturalisée dans divers lieux de l’Europe, en Ukraine par
exemple, et dans le Banat hongrois, où elle nuit déjà aux cultures,
ainsi que nous l’apprend le docteur J. Heuffell, de Vienne (4). Il
paraît même, d’après Achille Richard (2), qu’elle s’est propagée
jusqu’en Abyssinie. On conçoit, en effet, que son tempérament
rustique qui s’accommode de tous les climats, et ses petits fruits .
hérissés de pointes, qui se mêlent facilement à diverses denrées
commerciales, favorisent également sa dispersion sur le globe, et
tendent à en faire une plante cosmopolite.

2, SICYOS BADAROA.

Sicyos Badaroa Hook. et Arnt., in Bot. misc., IIT, 234. — Don, Gen. syst. of
gard., III, 33. — Rœmer, Loc. cit., 106.

Espèce du Chili, beaucoup plus petite et moins rustique que la
précédente. Elle est commune dans tous les jardins botaniques de
l’Europe.

Nous avons encore cultivé au Muséum, en 1859, une troisième
espèce de Sicyos de la Nouvelle-Grenade, mais qui, n'ayant com-
mencé à fleurir qu'au moment des premières gelées de l'automne,
et ayant péri presque aussitôt, n’a pas pu être déterminée.

XIX. SICYOSPERMA.

Sicyosperma As. Gray, Plant. Wright., part TE, p. 62.

Flores monœci. Masculi in paniculas axillares contractas aggre-

(4) « Sicyos angulatus frequentissime crescit in sepibus ad Lugos ; Zizania
hortis molestissima, ante annum 1836 non observata, » J. Heuffel. Enumeru-
tio plantarum in Banatu Temesiensi, Vindob., 4858.

(2) Tentamen Flor. Abyss., t. I.

REVUE DES CUCURBITACÉES. 163

gali; calycis tubo brevi, late eupuliformi, denticulis 5 minutis co
ronato etin corollam profunde 5-lobam aut 5-petalam confluente ;
petalis appendicula apicali bifurca terminatis, Stamina filamentis
connectivisque coalita, in medio flore subsessilia, e loculis 5 pollini-
feris(qui antheris toidem dimidiatis respondent) brevibus, æquali-
bus, rectis nec flexuosis, longitudinaliter dehiscentibus composita ;
polline tenuissimo, globoso, 10-sulcato. Inflorescentiæ femineæ
ex lisdem axillis orientes quibus masculæ, mox in ramulos andro-
gynos elongatæ ; floribus fæmineis ut plurimum solitariis, subses-
silibus sessilibusque, petalis exappendiculatis, ovario uniloculari,
stylo tamen im stigmata duo vel tria diviso, ovulo unico ex apice
loculi pendulo: Fructus utricuhformis, exsuceus, compressus,
1-spermus, indehiscens.

erba texana annua, micrantha, ramosissima, humi prostrata
aut scandens, vix puberula; foluis obtuse palmato-3-5-lobis ; cir-
rhis 2-fidis; floribus minutis, albis; fructibus sæpius 3-brac-
leolatis, lenticularibus, maturatione nigricanhibus et caducis.

A. SICYOSPERMA GRACILE.

Sicyosperma gracile As. Gray, loc. cit.

Flagella sesqui-bimetralia, dense foliosa. Folia 3-5-centimetralia, paulo
latiora quam longiora, sæpius 5-loba ; lobis brevibus, obtusis. Flores
ütriusque sexus millimetrum sesquimillimetrumve diametro vix exceden-
tes. Inflorescentia mascula multiflora, petiolo longitudine subæqualis aut
brevior ; fœminea (aut potius androgyna) primo brevissima, demum in
ramulum foliosum inflorescentias novas masculas floresque fœmineos pro-
ferentem mutata ; floribus fæmineis singulis solitariis, inferioribus nudis,
reliquis bracteola triplici (scilicet una superiore, duabus lateralibus) sessili
ovita crenata sensimque crescente circumvallatis. Fructus maturi nigri-
cantes, exsucci, caduci, lateribus compressiuseuli, semen cannabinum
crassitudine æmulantes, sapore amariusculo.

Le genre Sicyosperma, jusqu'ici réduit à une seule espèce, est
une de ces formes ambiguës qui semblent destinées à relier les
uns aux autres des groupes naturels dont, sans elles, on s’exagé-
rerait les différences. Par ses vrilles composées, la forme de ses

164 CH, NAUDIN.

inflorescences mâles et ses étamines monadelphes, il $e rattache
aux ÆEchinocystis et aux Cyclanthera ; par ces mêmes caractères
et par son fruit monosperme à graine suspendue, il se rapproche
encore davantage du Sechium et des Sieyos ; mais tandis que,
dans ces deux derniers genres, la forme du stigmate peut quel-
quefois, sinon toujours, faire supposer, avec une certaine vraisem-
blance, un ovaire monocarpellé, dans le Sicyosperma, la présence
de deux ou de trois stigmates bien distincts ne laisse pas de doute
que l’ovaire n’y soit composé de deux ou de trois carpelles, et ne
contienne les éléments d’un pareil nombre de placentas, bientôt
atrophiés sous la pression de l’unique ovule qui se développe. Le
Sicyosperma à encore une autre affinité avec le Sechium dans son
pollen sphérique, et parcouru par une dizaine de sillons conver-
gents vers deux pôles opposés. Enfin on peut encore lui trouver
une analogie, éloignée il est vrai, avec les espèces des genres
Trichosanthes , Hodgsonia et quelques autres, dans l’appendice
bifurqué qui termine chacun des lobes de la corolle des fleurs
mâles, appendice qui correspond certainement aux laciniures
beaucoup plus développées qu’on remarque sur les fleurs dans
ces différents genres.

C’est grâce à M. Asa Gray, qui nous en à envoyé des graines,
que nous avons pu observer le Sicyosperma gracale sur le vivant.
Depuis trois ans que nous le cultivons au Muséum, il s’y est déjà
pour ainsi dire naturalisé, car il se sème de lui-même, et ses
graines résistent aisément à toutes les intempéries de l'hiver.

Outre les espèces de Cucurbitacées décrites ou signalées ci-des-
sus, le Muséum d'histoire naturelle en possède beaucoup d’autres ;
mais comme la plupart n’y ont pas encore fleuri, elles feront, en
temps convenable, l’objet d’un nouveau mémoire.

DELECTUS SEMINUM

IN HORTO BOT. UNIVERSITATIS VINDOBONENSIS
COLLECTORUM ANNO 1858.

Auctore Eduardo FENZE.

Muscart azureum, Fzl. (Sect. Botryanthus, Fzl., mse.) —
Bulbo solido ; scapo digitali ac subpalmart; foliis 2-5 carnosulis,
sub anthesi inceurvo-patulis, late linearibus navicularibus, supe-
riore triente sensim oblonge-dilatatis, apice obtusissimo callose
subfornicatis ; racemo multifloro compacto ovoideo v. subgloboso,
demum ellipsoideo (4-12 lineas longo); pedicellis sub anthesi cer-
nuls, fructiferis erectis ; perigonio læte azureo, campanulato, fauce
amphato, triente sexfido, hmbi lacintis concoloribus, patule por-
rectis nec recurvis, late ovatis acutiuseulis ; staminibus supra peri-
son basim insertis, inclusis, dimidio tubo vix longioribus.

Habitat in Tauro cilicio, supra arcem Gülek, alt. 7500 ped.,
unde bulbos attalit Kotschy. — Floret apud nos imeunte martio.

O8s. Proximum M. pallenti Fisch. (Ledeb., Flor. Ross., nec
aliorum), quod differt perigonio albido, fauce subconstricta, laci-
nis suborbicularibus recurvis. Affine porro M. leucophæo, K.
Koch. (Hyacintho leucophæo, Stev., in Ledeb., {. c.; M. pallenti,
Bess.), præter alias jam prima fronte pedicellis nunquam cernuis
diverso.

Diaxraus PRuINOSUS, Janka. (Sectio Armerastrum, Ser.) —
Perennis ; fasciculatim eæspitans ; caulibus robustis, altissimis
(2 &-h ped.), simplicissimis, lævibus ; foliis omnibus cum caule
dense cæsio-pruinosis, late linearibus, multinervis, carnosulis,
flaccidis, ore lævissimis, turionum semi-pedalibus ac longioribus
(2 in. ut plurimum latis), caulinis mediis omnium latissimis (4-8
poil. longis ac 3-6 lineas latis); vaginis 7-10 lineas longis; folio-
rum pari supremo bracteali chartaceo, late ovali, subrepentine in
euspidem reetam herbaceam producto, dilatata parte plerumque

166 E. FENZL.

pallide roseo, demum ferrugineo ; floribus glomerato congestis ;
calyce exanthi squamis dimidio longiore, 10 lineas longo, den-

tibus acutis. — Reliqua omnino D. Carthusianorum.

Habitat in rupestribus aridis ad cataractas Danubi inferioris,
infra Orsova in F’allachia. — Floret medio juhio. (Wact. de
Janka.)

Os. Omnium maximus, babitu, foliis latis mox flaccidis capitu-
lisque amplis insignis, mihilominus tamen characteribus certis a
D. capitato et formis procerioribus D. Carthusianorum ægerrime
dirimendus, ae fortasse nil nisi unius alteriusve varietas gigantea.
(Janka, msc.)

ALTHÆA APTEROCARPA, Fenzl. (Sect. Alcea, DC.) — Biennis ;
caule stellato-tomentoso, nec basi longe hirsuto; carpellis alte re-
piformibus, 1 #-2 lin. longis ac media facie À © < lin. latis

2

ibique glaberrimis, dorso <- lin. lato, 3 oblique rugosis anas-
tomosibus parcissimis, nonnisi in sulco longitudinali subtilissime
stellato-pubescentibus, reliqua parte glabris, margine exalatis v.
hoc ad latitudinem + lin. extenuato horizontali, imo deflexo nec
erecto-patulo ; seminibus parcissime lepidoto-punctulatis, extre-
mitate radiculari brevissime barbellatis. —- Reliqua omnino À. pal-
lidæ, W.etF.

Habitat in Tauro cilicio, cirea Gülek (Kotschy ?).

Os. Proxima 4. pallidæ quæ differt caule immixta pube stel-
lata longa inferne hirsutissimo, carpellis dorso profunde sulcatis,
marginibus in alam erecto-patulam extenualis, ac seminibus dense
lepidoto-punctulatis, versus extremitatem radieularem dorso simul
adpresse setulosis. |

HUITIÈME CENTURIE

DE

PLANTES CELLULAIRES NOUVELLES

TANT INDIGÈNES QU'EXOTIQUES,

Par Camille MONTAGNE, D. M.

DÉCADES IX ET X (1).

ALGÆ.

81. Hycrocrocis Amisiana Montag. (in Ann. de la Soc. d’hydrol.
médicale, t. V, p. 360) : rubricosa, velutina, exsiccata pulve-
racea; filis brevissimis rubro-brunneis subspiraliter flexuoso-
crispis ramulosis aut furcatis, basi adnata 0"",0035, apice
0"®",0018 diametro metientibus, articulis inferne quadratis dia-
metrum subæquantibus, superne oblongis moniliformi-conca-
tenatis eodem duplo longioribus (2). — Has. Rupes in scaturi-

(1) Ces deux dernières décades renferment encore la description de plantes
cellulaires exotiques et indigènes, quelques-unes nouvellement reçues de nos
correspondants, quelques autres incomplétement décrites ou à peine signalées,
mais non enregistrées dans nos ouvrages généraux , d'autres enfin dont le défaut
de types et de secours pour la comparaison, nous avait fait ajourner jusqu'ici la
publication. Chacune de ces plantes est accompagnée d'observations nouvelles,
propres à la faire distinguer de ses congénères, ce qui est le but constant de nos
efforts. |

Nous avons eu encore à examiner les productions végétales renfermées dans de
nouvelles eaux minérales soumises à notre détermination, ce sont celles de Gazost
(Hautes-Pyrénées), de Saint-Honoré (Nièvre), de Vaudier ou Valdieri (Piémont),
d'Ems et de Louèche, communiquées soit au nom de la Société d’hydrologie
médicale de Paris, soit en leur propre nom par MM. Becquerel, Cazin, Delafond
(d’Alfort) et Fermond.

(2) Cette diagnose, reproduite au lieu cité, est remplie d'erreurs typogra-
phiques qui la rendent complétement inintelligible, et qu'un errata va, j'espère,
bientôt corriger.

| 168 C. MONTAGNE.

ginosis aquarum thermaliim Amisianarum nec non parietes
canalium quos eædem percurrunt aut piscinarum ubi refriges-
cunt strato velutino ferrugineo vel lateritio hæcce species obte-
git. CI. D' Becquerel, medicus hospitii La Pitié dicti, invenit
mecumque eam Communica vit.

DEsc. — Fila erecta, crispato-flexuosa vel interdum ad speciem spira-

liter torta, parce ramulosa aut apice tantum furcata, decimillimetrum longa,

basi adnata, diametro inferne Oww,0035 superne 0””,0018 æquantia,
articulata. Articuli basis filorum quadrati diametro subbreviores, apicem
versus attenuatum vero oblongi eodem duplo longiores.

Ogs. — Cette excessivement petite Algue forme sur les rochers d’où
s’échappent les eaux thermales de l'établissement d’Ems, dans le duché
de Nassau, une couche très mince de filaments dressés, qui se continue
sur la paroi des conduits et des réservoirs de réfrigération. La longueur
de ces filaments, assez difficile à évaluer, ne dépasse guère un dixième
de millimètre. La détermination de cette plante n’est pas exempte de
quelque ambiguïté. Toutefois les articles oblongs qui terminent Îles ra-
meaux en les rendant moniliformes, nous semblent suffisamment caracté-
ristiques. La couleur de brique ou rouge-brun est d’ailleurs propre à
faire distinguer l'espèce. Par la dessiccation, cette plante prend un aspect
pulvérulent, mais, comme elle est avide d’eau, à peine en rapproche-t-on
une goutte qu’elle s’en empare sur le champ et reprend sa première
apparence. Elle n’a qu’une analogie éloignée avec | Hygrocrocis ochracea
Bréb. dont M. Kützing a fait un Leptothrix et qui me semble différer
d’une Algue homonyme que je tiens de mon ami M. le professeur Mene-
ghini, de Pise.

82. Hycerocrocis Saucerri Montg. in lit. : fils primariis tenuissi-
mis ramosissimis hyalinis ramis subdichotomis erecto-patenti-
bus articulatis, geniculis constrictiusculis inde submoniliformi -
bus, globulos seriatim appressos includentibus, in cespitulos
sphæricos natantes lubricos sanguineos consociatis. — Has. In
solutione concentrica aluminis evolutam hancce speciem obser-
vavit Cæsaroduno mecumque communicavit D Saugerres,
quintæ legionis medicus primarius.

DEsc. — In primordiüis hæc alga sub forma sphærularum solution:

|
€

cœur S$ s

PT

PLANTES CELLULAIRES NOUVELLES,. 169
memoratæ innatantium plus minus rubro tinctarum se præbet. Micro-
scopii compositi objectivo subjecta potentissimo (455) tum structura mani-
feste patet filamentosa. Fila tenuissimia, vix À ad 2 millimillim. crassa,
hyalina, ramosissima, articulata, e centro mucoso sanguineo quoquo-
versum irradiant. Rami alterni, erecto-patentes, moniliformes, sensim
ascendendo breviores. Articuli diametro æquales aut longiores. Sphæ-
rulæ coloratæ interdum confluent.

OBs. — Quant à son mode de formation, cette espèce a beaucoup de
rapports avec l’H. Phyllireæ Biasol. et un peu aussi avec notre H. Cycla-
minæ, décrit plus baut n° 51: mais elle diffère du premier par la cou-
leur de son noyau central, par la nature du milieu où elle s’est dévelop-
pée, enfin par ses articles égaux au diamètre et non pas oblongs, et du
second par ses filaments droits. Toutefois, plane encore sur cette myco-
phycée le même doute que j'ai manifesté à l’occasion de la dernière, à
savoir si nous n’avions pas affaire là au Conferva sanguinea Dillw.

EAUX THERMALES DE VALDIERI.

Les eaux thermales de Valdieri en Piémont ont été l’objet des
travaux de plusieurs médecins. Ceux que j'ai en ce moment sous
les yeux sont de M. Giovanni Garelli, docteur en médecine et en
chirurgie à Turin. Je citerai surtout celui qui a pour titre : Saggio
intorno alle Muffe nelle aque termali di Valdieri, con tavole
illustrative, Torino, 1857, et dans lequel j'ai puisé quelques-uns
des renseignements qu'on va lire.

Sur la pente rocheuse du Monte-Matto, là où jaillissent les
sources chaudes de Saint-Martin et de Saint-Laurent, on voit leur
lit tapissé par une substance parenchymateuse, charnue ou comme
lardacée, à laquelle on donne improprement le nom de Muffa,
puisque ce n’est point une moisissure. Cette substance molle,
flexible, un peu tenace et de couleur variable, résulte du rappro-
chement et du feutrage d’une immense quantité de filaments
simples, confervoïdes, de la plus grande ténuité, allongés et
flexueux, dans une sorte de gangue mucilagineuse fort avide d’eau.
Cette avidité est même si grande, qu'une plaque de deux pouces
d'épaisseur et d’un palme (0°,2483) de longueur peut, au dire de
M, Garelli, absorber et retenir plus d’un kilogramme d’eau, et se

170 | C. MONTAGNE.

réduire ensuite par la dessiccation, au point de ne représenter plus
que l’épaisseur d’un parchemin. La couleur de l’Algue varie
comme la température du liquide, rougeître de 62 à 56 degrés
centigrades, elle devient blanche de 54 à 46 degrés, et verte de
hh à 34 degrés. Ceci n’est pas constant, car telle plaque prise en
un lieu déterminé peut présenter réunies ces diverses couleurs.

C'est dans cet état que ces plaques ou placentas furent soumis à
mon examen par MM. Cazin et Fermond, chimistes distingués, et
membres de la Société d’hydrologie médicale. Le premier de ces
deux savants en a fait l’objet d’un rapport qu’on pourra lire dans
les Annales de la Société, à la page 90 du tome V.

L’Algue, qui constitue la prétendue Muffa, avait déjà été étudiée
par M. le chevalier Delponte. professeur adjoint au Jardin des
plantes de Turin, qui en avait reconnu la nature, et l'avait suc-
cinctement décrite dans l’ouvrage cité de M. le docteur Garelli,
mais sans en résumer les caractères dans une diagnose. Nous
allons tâcher d'y suppléer en conservant toutefois religieusement
le nom imposé par ce naturaliste.

* Leprorrix Vazperia (Del.).— Montag, (Ann. de la Soc. d’hy-
drol. méd., t. V, p. 296) : strato gelatinoso-carnoso placentas
lamellosas (!) efformante, filis tenuissimis, simplicibus, diame-
tro 0"",0012 ad 0035 æquantibus, hyalinis flexuoso<intricatis,
continuis vel obselete articulatis, globulos uniseriatos plus mi
nus approximatos includentibus. — Has. In aquis thermalibus
Valderiæ. — L. Falderia Delponte in Garelli, Saggio intorno
alle Muffe, etc.

Deux autres Algues étaient mélangées avec ce Leptothriæ: l'une,
qu'avait entrevue mais non déterminée M. Delponte, est le Scyto-
nema thermale Kg.; l’autre est une espèce nouvelle de Sphæro-
3yga, que je nomme S. Garelliana.

* SCYTONEMA THERMALE Ke., Alg. Dec., n. 140. — Spec. Alg.,
p. 804, et Tab. phycol., Band. IL, t. 18, fig. LIL.

Ogs, — Les filaments de cette espèce, que j'ai pu comparer avec
l’exemplaire authentique des Décades, offrent une teinte brune avec leur

PLANTES CELLULAIRES NOUVELLES. 171

gaine (aureo vel luteo-fuscescentia) et mesurent en diamètre de 2 à 1
centimillim. Le filament intérieur verdätre est obscurément, mais distinc-
tement cloisonné dans les rameaux. Ceux-ci sortent latéralement solitaires
ou géminés dans le trajet de la gaîne (M. Kützing ne les a vus que soli-
taires). Ges rejetons sont beaucoup plus minces; leur “ile est incolore et
leur contenu verdâtre et articulé.

83. SPnÆROZYGA GARELLIANA Montag., L. e., p. 297 : filis dilute
æruginosis seu cæruleo-viridibus simplicibus flexuosis, inter
strata Leptothricis sparsis vel ad superficiem placentarum libe-
ris aggregatis, diametro 0"",0036 ad 0080 subæquantibus,
subeylindricis vel torulosis fine incrassalis moniliformibus
muco involutis, articulatis, articulis vartis, quadratis, oblongis
sphæricisve, spermatiis sphæricis terminalibus filo duplo cras-
sioribus. — Has. Inter fila placentarum quæ fundum canalium
ab aquis thermalibus valderianis pereursarum vestiunt.

Ogs. — Ce Sphærozyga se rencontre mélangé avec le Leptothrix de
la même localité, tantôt en filaments isolés et épars entre ses couches,
tantôt réunis çà et là en coussinets tomenteux. Il ne me semble pouvoir
être rapproché d'aucune des nombreuses espèces ou variétés que j'ai
eu l’occasion d'examiner, ni des figures données dans les T'abulæ phyco-
logicæ. L’espèce dont la nôtre se rapproche le plus est la $. variabilis.
Extrêmement variable en effet, comme celle-ci, soit dans le diamètre de
ses filaments, soit dans la forme de ses articles, elle s’en distingue surtout
par son habitat dans des eaux thermales sulfureuses et par $es spermaties
qui ne sont ni sériées, n1 elliptiques, ni fuscescentes, et dont le diamètre
est double de celui du filament,

Enfin, et pour terminer ce qui les concerne, nous ajouterons que nous
avous encore observé dans les placentas quelques diatomacées dont voici
les noms: Epithemia alpestris Kg. — Navicula lanceolata Kg. —
N. cryptocephala Kg. .

8h. SywenyosiPHon Guyanensis Montag. mss. : corticicola, late
cæspitosus, tomentoso-velutinus, e fusco nigricans ; filis verti-
calibus confertis fasciculatis, flexuosis, fastigiatimque ramosis,
hinc inde conerelis, internis articulatis, articulis quadratis
oblongis aut sphærieis, basi æruginosis, apice vaginisque aspe-

172 C. MONTAGNE.

rulis 1/50 millim. crassis obtusis vix lanellosis luteo-fusces-
centibus. — Has. In corticibus ad truncos imos arborum
(Palétuviers) inuudatos apud Cayennam legit mecumque (sub
n. 542 hucusque neglecto) communicavit el. Leprieur.

DESC. — Crustam latam, fusco-atram, velutinam, opacam e filis cæspi-
tose confertis erectis constante hæc species ad corlices efficit. Fila verti-
calia, bimillimetra et quod excedit longa, basi maxime intricato-concreta, :
sursum apposita et hinc inde in fasciculos fastigiatos simul coalita, flexuosa,
imo, si libera, serpentina, ramosa. Interiora diametro 0"®,005, 0®®,010
æquantia, articulata, articulis secundum ætatem vel locum forma et colore
variis, nempe junioribus aut inferioribus transversim oblongis, brevioribus
æruginosis; terminalibus subsphæricis; adultis aut mediis quadratis sub-
dolioliformibus aureo-fuscentibus. Rami corniformes, laterales, simplices
aut gemini, mox ut videtur a filo matricali disjuncti et cum eo coalescentes.
Vaginæ basi apiceque hyalinæ, asperæ, vix autem manifeste lamellosæ,
cæterum luteo-fuscæ obtusæ, 1/50 millimetri diametro metientes.

OBS. — Parmi les dix-huit espèces de ce genre qu’a figurées M. Küt-
zing, je n’en vois qu’une seule qui offre quelques caractères concordant
avec ceux de la présente, c’est son S. Javanicus. Les articles du fila-
ment intérieur sont à la vérité assez semblables quant à la forme et aux
dimensions, mais il diffère manifestement du nôtre par son port et ses
filaments couchés ou ascendants. Ne confondez pas cette Algue avec le
Scytonema Leprieurii Kg., dont vous pourriez croire, vu la localité, que
c’est une forme plus compliquée. Sous le microscope, il vous sera im-
possible de prendre le change.

85. ANABÆNA JAUBERTIANA Montag, mss. in Hb. Comit. Jaubert :
gypsicola, stratum lubricum, saturate viride, reticulato-spongio-
sum ; filis brevibus admodum tenuissimis flexuosis in funiculos
intricatis submoniliformi-articulatis, articulis e globoso oblon-
gis, terminali sphærico majore. — Has. In pluteo fenestrali
gypsaceo apud Clamart prope Parisios invenit celeb. Comes
Jaubert mecumque benigne ut determinarem communicavit.

DEsc. — Strato mucoso atro-viridi madido præsertim reticulato gypsum
fenestrarum hæc species inducit. Fila cylindracea omnium hujus ordinis
exilissima, vix 0®®,0020 ad 0m,0030 crassa, valde flexuosa, in funiculos

PLANTES CELLULAIRES NOUVELLES, 173

contortos lubricos centimillimetrum et ultra crassos coalita, articulata.
Articuli subæquales, ad genicula leniter vel haud constricti, globosi aut
oblongi, terminali sphærico duplo majore.

Ogs. — J'ai comparé cette espèce aux À. intricata, lichenifornus et
rudis, avec lesquelles elle me semblait avoir quelque affinité, soit par
certains caractères soit par l’habitat. C’est avec la première (Monormia
intricata Berk.) qu’elle me paraît en avoir davantage. Ainsi les filaments
de celle-ci sont bien, comme chez la nôtre, réunis en funicules, mais ils
sont deux à trois fois plus gros, décidément moniliformes et vivent dans des
fossés marécageux à la surface de l’eau desquels on la trouve flottante.
Notre Anabène a le port et l'aspect des A. lichemiformis Bory et À. rudis
Menegh., mais elle diffère de l’une, qui est devenue un Cyhindrosper-
mum pour M. Kützing, par ses filaments excessivement ténus, à peine
rétrécis au niveau des articulations, et de cette dernière par son habitat.
Je ne dois pas omettre de mentionner un caractère propre à faire recon-
naître ma plante, c’est que, vue à une simple loupe et surtout humectée,
elle offre l’aspect réticulé de la fronde du Riccia crystallina.

86. Conrærva sesquirepaziS Montag, mss. : longissima, crassa,
viridis (decolorans); articulis diametro (0"",05) triplo-quintuplo
longioribus, siccitate alternatin collapsis. — Has. In canalibus
Louisianæ inferioris ad arva Arundine saccharifera culla exsic-
canda adhibitis miro modo pullulantem communieavit cl. Cazin.

Ogs. — Cette conferve, qui, d’après les renseignements reçus, peut
atteindre jusqu’à deux mètres de longueur, est principalement remarqua-
ble par son habitat, suffisant presque seul à la faire distinguer de ses
congénères. Elle forme dans ces canaux d’asséchement des masses con-
sidérables de très longs filaments simples dont la couleur d’abord verte
s’alière et pälit au contact de l’air. Ces masses ne sont pas sans ressem-

_ blance avec ces sortes de feutres formés par le Cladophora fracta var.
terrestris après le retrait des eaux dans les crues de la Loire. Notre
| espèce diffère de la Conferva Antillarum Kg. par le diamètre de ses
| tubes cloisonnés et par la longueur, du reste fort variable, de ses endo-
| chromes.

|

87. Psicaormiun Wezwrrscun Montg., Hb. : glauco-viride, fra-
oile; filis simplicibus mediocribus articulatis, articulis diametro
(0®®,012-010) subæqualibus, genieulis vix ant non constrictis,

1

s

174 C. MONTAGNE.

cingulis approximatis ut plurimum transversim oblongis glau-
cis. — Has. In fontibus ad parietes prope S. Pedro de Sal in
provincia Beira Lusitaniæ anno 18438 legit cl. Welwitsch, cui
gratus et memor lhibenter dicavi.

OBs. — Les anneaux calcaires (cinguli) qui encroûtent cette confer-
vacée forment de longues séries continues qui laissent çà et là quel-
ques espaces entre lesquels on voit à nu plusieurs articles du filament.

Comme d’ailleurs ces articles sont à peine plus longs que leur diamè--

tre, il en résulte que les anneaux, hauts d’un centimillimètre et larges
de deux, sont transversalement oblongs. Il y en a pourtant quelques-uns
sphériques. |
Si nous consultons les T'abulæ phycologicæ de Kützing, la seule espèce
dont la nôtre se rapproche pour la couleur et le port est le Ps. cinereum
dont elle nous paraît différer par les articles deux fois plus courts.
Quant au Ps. verrucosum, que mon ami de Nordhausen donne pour le

Conferva verrucosa d’Agardh, il y a là pour moi des doutes que je ne

saurais éclaircir. [l est vrai que la diagnose du Systema Algarum, p. 93,

ne parle pas de la couleur ; elle est d’autre part si abrégée qu’elle pour-

rait tout aussi bien s'appliquer à vingt autres conferves d’eau douce. Si

M. Kützing n’a pas eu sous les yeux un exemplaire authentique pour

réunir cette Algue et son Conferva rufescens des Dec. Ag. dulc. n° 149

(non 144) sous le nom de Psichornuum verrucosum, j'ignore sur quel

motif il se fonde pour opérer cette réunion. M. Duby, lui aussi, a donné

du Conferva verrucosa une bonne diagnose, plus explicite que celle du
phycologiste suédois. Cette diagnose peut convenir de tout point à des
exemplaires fort beaux que j'ai reçus dans le temps de M. de Brébisson
qui les avait recueillis à Falaise. Au premier aspect, j'avais pensé que la
conferve portugaise ne différait pas de mes types normands; le microscope

m'a démontré que j'étais dans l’erreur.

88. RuzocLoniuu rHgrMALE Montag. mss. : mucosum, atro=viride,
cæspitoso-velutinum, thermale; filis basi radicantibus crassis
subsimplicibus brevissimis flexuoso-curvatis flavo-viridibus sen-
sim vero attenuatis glaucis articulatis, articulis inæqualibus
diametro tamen vix longioribus. — Has. In saxis rivuli a sca-
turigine Sancti Laurentis originem ducentis, in thermis Helve-
tiæ Louèche dictis, hancce speciem, quæ illa strato velutino

PLANTES CELLULAIRES NOUVELLES. 175

lubrico induit, legit mecumque communieavit cl. Delafond,
professor Alfortianus.

Desc. — Fila brevissima, erecta, flexuoso-curvata, quandoque in zig-
zag flexa, flavo-olivacea, agmine denso in saxa velamen atro-viride mu-
cosum efformantia, à basi incrassata interdum bifurca, diametro 0"",0070
æquantia, manifeste articulata, articulis subquadratis vix diametrum su-
perantibus, sensim vero attenuata et medio 0®®,0050-apice glauco vel
vel viridi-cærulescente tandem 0"®,0020 diametro metientia, punctis
minutissimis (an heterogeneis ?) asperula. Articuli supremi filorum haud
conspicui seriem nucleorum e sphærico oblongorum fovent.

Ogs. — La longueur des filaments est presque incommensurable tant
est grande leur brièveté. Cette Algue croît dans des eaux thermales salines
mais non sulfureuses comme les À. crispum Kg., subterrestre Menegh.,
et Elizabethæ Montg. Elle diffère pourtant de ces trois espèces par des
caractères importants. C’est ainsi qu’on pourra la distinguer de la première
par ses filaments trois fois plus épais à leur origine qu’à leur sommet
très effilé, de la seconde et de la troisième par la brièveté de ses articles.
Salie par la boue gélatineuse et dont peut-être les granules les plus fins
occasionnent par leur adhérence ces points saillants qui la rendent rude
et inégale, elle n’a, du reste, aucune ressemblance avec le Rhizocloniwm
aponinum Kg.

* Ecrocarpus aragicus Kg., Tab. phycol., Band. V, t. 72, fig. IL,
— EE. Giraudianus Montag. in litt.

O8s. — C’est pour confirmer la légitimité de cette espèce que j’en parle
iei. Sa taille très exiguë et la forme de ses spermatoïdies la font prompte-
ment distinguer de ses congénères nombreuses. Ces spermatoïdies sont
presque toutes oblongues et sessiles dans mes échantillons que je dois à
M. Giraudy et qui sont originaires du littoral de Gebel-Tor. Elles ne
renferment que quatre ou cinq séries transversales de granules gonimiques
et ressemblent un peu aux spores du Sphæria Herbarum P. Leur lon-
gueur est de quatre à cinq cenlimillimètres et leur diamètre de deux, en
y comprenant un limbe transparent très manifeste.

89. PozysipmoniaA Bosrrycniones Montag. in lit. : parvula, cæspi-
toso-intricata, frondibus e basi caudiciformi brevi corticata plu-
ribus erectis filiformibus distiche ramosis, ramis alternis subu-

176 C. MONTAGNE.

latis apice uno latere versis, articulis frondi primariæ 1/5 millim.
crassæ letrasiphoniis diametro plus duplo-ramellorum quintu-
plo minoribus; fructu.... — Has. Ad littora guyanensia cum
Biddulphia australi Montag., Podosira hormoides Ehrenb. et
Achnanthe pachypode Montag. parasitantibus lecta mecumque

a cl. Le Jolis, familiæ Algarum scrutatore diligentissimo com-
municala.

DEsc. — Frondes plures (4 ad 6) teretes, capillares, centimetrum et
quod excedit longæ, 12 ad 8 centimillimetra crassæ, a basi caudiciformi
brevissima corticata torulosaque cæspitantes, erecti, subsimplices, disti-
che ramosi, articulati. Rami erecti, conferli, alterne ramulosi. Ramuli
subulato-incurvati subnutantes. Articuli fili primarii fere tertium milli-
metri partem crassitudine æquantis plus duplo breviores, tetrasiphoniü,
ramellorum apicem versus minores vix quintam diametri partem æquantes.
In sectione horizontali frondis decem siphones in cellulas totidem cortica-
les tubum axilem monosiphonium continuum circumdantes observantur.
Fructus uterque desideratur.

Os. — Cette espèce, vue à l’œil nu, ressemble si bien à de jeunes
individus du Bostrychia pilulifera, que de prime abord je ne faisais aucune
difficulté de la prendre pour un de ces individus. Mais cette dernière
Algue présente tous les caractères des autres Bostrychia, tandis que de
la base de la fronde au sommet des ramules, notre Algue nouvelle offre
l’organisation de Polysiphonies. Si nous en exceptons toutefois cette sorte
de caudex d’où j’ai dit que partaient les frondes et qui, haute de un mil-
limêtre et demi, et épaisse vers sa partie moyenne de presque un demi-
millimètre, présente une écorce ponctuée. Quand on regarde les filaments en:
face et à contre-jour, on remarque un limbe transparent assez considérable
entre la paroi du tube extérieur et les siphons.

On sent qu’il n’est pas facile, dans un genre qui se compose aujour-
d'hui de près de trois cents espèces, d'indiquer exactement de laquelle elle
se rapproche davantage et en quoi elle en diffère. La nôtre a quelque ana-
logie avec le Polysiphonia fastigiata par un siphon en apparence continu
qui occupe toute la longueur de l’axe et qu’on aperçoit très bien sous le
microscope entre les deux siphons internes d’un endochrome.

90. Bosrrvcnia SerruLaria Montag. in litt, : cæspitosa; fronde
primaria tereli capillari vage ramosa, ramis distiche bipinnatis,

PLANTES CELLULAIRES NOUVELLES. 177
pinnis pinnulisque brevissimis patenti-erectis rigidis ; con-
ceptaculis terminalhibus ovoideis acuminatis. — Has. In Guyanæ
littoribus lectam ad me misit el. Le Jolis.

Desc.— Species parvula, concinna. Frondes pollicem altæ, cespitose
crescentes, capillo humano vix crassiores, teretes, continuæ, punctatæ,
a basi vage ramosæ. Rami ramulique patentes, apicem frondis haud attin-
gentes, distiche bipinnati, pinnis pinnulisque alternis brevissimis patenti-
erectis. Conceptacula (nondum matura) terminalia ovoidea, acuminata,
1/5 millim. longa, 1/6 millim. in medio crassa. Stichidia non vidi.

OBs. — Grâce à la générosité de mon savant ami M. le professeur
Harvey, je possède dans ma collection la presque totalité des espèces de
ce genre (1) que j'ai fondé dans la Cryptogamie de Cuba. En les compa-
rant avec celle-ci, je n’en vois pas une seule qui lui ressemble. On ne
saurait en donner une idée plus exacte, quant à la forme et à la disposi-
tion des pinnules, qu’en disant qu’elle rappelle la Sphacelaria Sertularia
Bonnem. C’est ce qui m'a fait choisir ce nom spécifique.

Les pinnules primaires des rameaux ont environ un quart de millimètre
vers le milieu de ceux-ci, car elles diminuent de longueur en s’élevant,
et les secondaires deux à trois centièmes de millimètre seulement dans
les mêmes conditions. La fronde ou le rameau se continue, vaguement
divisé et nu, bien au delà du lieu où cessent les pinnules. Les concepta-
cles, quoique bien formés, n'étaient point encore assez avancés dans leur
évolution pour qu’on y pût remarquer des spores.

* Pcocamium cnannarum Montag., Ann. des se. nat., t. XIII,
p. 245, avril 1850 (et non circinatum, comme on me fait dire).
— Portieria coccinea Zanard., in Regensb. Flora, 1851, p. 33.
— Desmia coccinea Ejusd., Plant. mar. Rubri, p. 55, cum ic.
analyt. eximia.

OBs. — Il importe peu sous quel nom de genre milite aujourd’hui cette
magnifique Floridée. Ce que j'ai pour but de revendiquer ici, c’est le
mérite, quelque mince qu’il puisse être, d’avoir le premier dévoilé sa
structure et conséquemment le droit de lui conserver au moins le nom

(1) Près d’une vingtaine dues à nos travaux respectifs. (Voy. Nereis Boreali-
Americana et Cryplogamia guyanensis.)
4° série, Bor. T. XII, (Cahier n° 3.) 4 12

L]

1778 C. MONTAGNE.

spécifique sous lequel je l'ai fait connaître. Pour mettre ce droit hors de
doute, il n’est en effet, besoin que de constater et de comparer les dates.
Le nom de circinatum (fait autour) ne pouvait convenir à cette Algue,
tandis que l’autre, qui signifie bouclé, lui va à merveille, puisqu'il mdique
un deses caractères saillants. La place que lui assigne M. Zamardini parmi
les Desmia, genre sous lequel Lyngbye réunissait des choses si hétéro-
gènes, ne me parait pas encore définitive et, si l’on veut que j’exprime ici
uné opinion, je donnerais la préférence au nom de Portieria, et pour

beaucoup de raisons faciles à comprendre et que je n’entreprendrai pas

d'exposer en ce lieu.

LICHENES.

91. Evernia (Chlorea) carirornica Lév. Hb. : thallo cæspitoso
anguloso compresso lacunoso ramuloso, basi cinerascente, apice
flavo-virente ; apotheciis sessilhibus amplissimis tandem disco
fusco explanatis, margine sinuoso cilatis, ramo interdum pro-
lilero appendiculatis. — Has. Ad ramos arborum Americæ
Borealis in viciniis Lacus salsi lectam miserunt ad cl, Boisdu-
val, qui mecum communicavit. — Sy. Chlorea cahfornica
Nyl., Classific. des Lich. in Mém. de la Soc. des sc. nat. de
Cherbourg.

DEsc. — Thallus cæspitose crescens, pulvinatus, hemisphæricus, 12 ad
15 centim. diametro metiens, ex individuis quamplurimis basi uno puncto
affixis inde quoquoversum irradiantibus 5 ad 6 centim. longis constans.
Singulum cæspitis individuum basi compressum, angulosum, griseum,
punctis nigris adspersum (an spermatia ?) ramosissimum. Rami ramulosi,
attenuati, rimuloso-pulverulenti, flavo-virentes sub apice fertili semel aut
repetito-proliferi. Apothecia sessilia amplissima, 2 ad A centim. lata,
semimillim. fere crassa, subtus insigniter rugoso-reticulata , margine
fibroso-ciliata, ciliüis subsedecim thalli naturæ haud dissimilibus, ad
centim. longis. Discus e livido fuscus. Lamina proligera tenuissima, vix
decimillim. crassa ex ascis constans et paraphysibus tam arcte simul
concrelis ut vix ab invicem separare valeas. Asci breviter clavati vel ob-
ovoidei, À centimillim, longi, centimillim, et quod excedit apice crassi,

hyalini, suboctospori. Sporæ inordinatæ evolutione centrifuga insignes, in

ri
L
à

PLANTES CELLULAÏRES NOUVELLES. 179

situ ad speciem globosæ et limbo cinctæ (4), liberatæ vero oblongæ,
O",005 ad O ,009 longitudine metientes.

Ogs. — Ce lichen est surtout remarquable par l’ampleur de ses apo-
thécies, par les beaux cils qui en ornent le bord et par la belle couleur
jaune citrin de son thalle humecté. L’espèce est néanmoins voisine de
VE. vulpina qu’on rencontre rarement chez nous en fructification. Je
possède des exemplaires de celle-ci en cet état, et un examen comparatif
des uns et des autres m’a convaincu que ce sont deux espèces qu’on ne
. saurait confondre. Il y a d’ailleurs peu de différence dans les organes de
la reproduction. On peut cependant faire encore ici la remarque à laquelle
donnent également lieu les Usnées et qui n’a pas échappé à Fries, c’est que
ces organes offrent d'autant plus d’exiguité que la lame proligère présente
une plus grande étendue.

M. Nylander à fondé un genre sur l’Evermia vulpina, il devait natu-
rellement y rattacher celle-ci. C’est en consultant sa Classification des
Lich., insérée dans les Mém. de la Soc. impér. des sc. nat. de Cher-
bourg, que j'ai reconnu qu'il avait seulement mentionné cette espèce pour
lavoir vue dans l’herbier de mon savant confrère Léveillé. Après avoir
pris près de ce dernier les informations nécessaires et obtenu de lui et de
M. Boisduval l'autorisation de faire connaître celte magnifique espèce par
une diagnose et une description, je me hâte de les publier ici, dans lin-
certitude où je suis si le Synopsis Lichenum, se continuera ou non. Je
conserve, au reste, religieusement les noms que je trouve dans le lichéno-
graphe finlandais.

FUNGI.

92. Mecanconiun Grapminioines Montag. mss. : acervulis sparsis
linearibus cürvulis aut rectis atris cortice exteriori rupta tectis,
sporis tandem fuseis ex ovoideo oblongis fragihibus sporophoro
longo hyalino fultis. — Has. In cortice arboris mihi ignoti a
el. Leprieur circa Cayennam lectum et mecum absque numero
communicatum.

DEsc, — Graphidi cuidam sat simile. Acervuli distantes, supra corti-

(1) Dans l'Evernia vulpina, les spores sont plus décidément oblongues et
dans mes échantillons du moins, ne présentent aucun limbe apparent.

180 C. MONTAGNE.

cem interiorem enati, lineares, angustissimi, recti, curvuli aut flexuosi
472 ad À mm. longi prismatici seu in sectione verticali trigoni atri cortice
exteriori vix elevata tecti, angulum supremum denudatum relinquens post
ejusdem rupturam. Sporophora e stromate longitudinali sursum lateraliter-
que radiantia, hyalina, 1/25 mm. longa sporam initio limpidam mox
brunneam caducam duram fragilem, ex ovoideo oblongam, 1/50 mm. lon-
gam sustinentia.

O8s. — Par la forme linéaire de ses réceptacles qui la font ressembler
à quelque Graphs avorté, cette espèce s’éloigne de toutes les congénères
à moi connues.

*MyriocepHaLuM 8oTRYosPORUM (DNtrs) Montag.— Fresen., Beitr.
zur Mycol., I, p. 49, tab. V, Ê. 1-9. — Cheirospora Fries,
S. O. V.et Sum. Veg. Scand., p. 508 (nomen minus aptum).
— Rhabdosporium diffusum Cheval., FI. des envir. de Paris,
I, p. 428, t. IN, fig. 18 et t. 20, fig. 8. — Stilbospora botryo-
Spora Montag., Ann. sc. nat., 2° sér., t. VI, p. 338, t. 18,
fig. 5, ubi nomen T'hyrsidium propositum. — Thyrsidium
botryosporum Montag., F1. Alq., 1, p. 324, et Sylloge, p. 310.
— Myriocephalum Hederæcolum DNtrs., Microm, Ital. Dec.,
HT, n. 10, cum icone exinia. —ÆHyperomyxa Stilbosporoides
Corda, Ic. F'ung., UE, p. 84, t. VI, fig. 89.

O8s. — Les nouvelles observations qu'a faites sur cette plante et qu’a
publiées au lieu cité M. Fresenius m'ont décidé à adopter, comme il le
propose, les noms de Myriocephalum botryosporum. Je reviens aujour-
d'hui à ce singulier et curieux Coniomycète pour indiquer que M. Derbès
Va trouvé abondamment sur les rameaux morts du Lierre, aux environs de
Marseille.

93. NipTERA macRospoRa Montag. mss. : superficialis, ceraceo-
gelatinosa, ambitu byssino alba, centro convexo-mamillari
rosea; sporophoris basi ramosis brevissimis apice monosporis,
sporis ex ovato oblongis nucleum granulosum foventibus. —
Has. In summitate ramulorum Citri aurantii et in consortio
Trichothecii rose à cl. Pepin lecta mihique benigne impertita
species.

PLANTES CELLULAIRES NOUVELLES. 181
Desc. — Cupulæ nullæ, quarum vice cccurrit crusta membranacea,
4-5 mm. lJata, ambitu albo byssina, subciliata, sessilis, a matrice facile se-
parabilis, centro tremellosa, rosea mamillis obruta concoloribus, singulis
aut pluribus convexo-hemisphæricis. Hymenium e sporophoris vix 1/50
mm. longis, ramosis, ramis fastigiatis fusiformibus sporam fulcientibus
constans. Sporæ pro ralione crassæ, sphæricæ, ovoideæ oblongæve, dia-
metr inter 0®",0035 et 0"",0065 variabiles, longiores interdum et
Oum 0085 metientes, intus granulis aut sporulis farctæ.

Ogs. — Cette production, de nature tremelloïde, a été pour moi l’objet
d’un long examen et de nombreuses comparaisons. Elle a l'aspect d’un
Fusarium ou d’un Dacrymyces, mais l'analyse microscopique montrant
tout à fait l’organisation que j'ai observée et figurée dans mon Niptera
rosea (Voy. El. Chil., t. VIE, p. 415 et Atlas, t. 10, f. 7), force a été de
la ramener à ce genre de l’illustre mycologue d'Upsal.

Je dirai à cette occasion que la Peziza triformis (voy. Ann. Sc. nat.,
2e sér., t. V, p. 58/4) rapportée par moi de Perpignan et nommée par
Fries en 1831, doit rentrer dans ce genre, car son disque n’est pas formé
de thèques. Ses spores sont 2/3 plus petites que celles de l’espèce que je
* viens de décrire. M. le baron Gesati m’en a adressé l’année dernière une
autre espèce pour laquelle il proposait l’établissement d’un nouveau genre,
ne connaissant pas de visu celui de Fries.

94. Aseeraizzus (Sporodinia) BezLomonri Montag. mss. : floccis
cinereis (!) continuis, sterilibus laneis, fertilibus erectis di-tri-
chotomis, divisionibus patentibus apice capitatis, sporangiis
olobosis, sporis concoloribus. — H4s. Ad Mycenam quamdam
putredine consumptam in sylvula Wointel dicta prope Bellomon-
ium-ad-Isaram (Seine-et-Oise) autumno 1858 ipse legi.

DEsc. — Flocci steriles laneï, in Mycenæ cujusdam lamellis longe late-
que procumbentes, cinerei, fertiles, conlinui, erecti, conferti, dichotome
trichotomeve ramosissimi. Rami patentes, subdivaricati, ultimi incrassato-
rotundali. Sporangia globosa, mox rupta Omm,08 crassa. Sporæ conco-
lores, sphæricæ, 1-2 centimillim. diametro æquantes, levissimæ haud aut
vix concatenatæ, capitulum columelliformem ramorum peridio soluto
evanidoque circumdantes. Accedunt quoque crystalli juxta nonnullos
floccos primarios sparsi, cujus natura me latet. Diametro sesquicentimilli-
metrum hi autem metiuntur. Quoad formam generalem, globosi et echi-

182 C. MONTAGNE.
nati sunt. Fila fertilia 2 ad 8 centimillimetra crassitudine adæquant nec
in eorum continuitate ullum septi vestigium invenire mihi licuit.

*: OBs. — Cette espèce, qui ne ressemble guère aux autres congénères,
a néanmoins de grands rapports avec l'A. maæimus, croissant aussi sur
des Agarics. Il n’est point étonnant que Link, prenant en considération le
mode d’évolution des spores signalé par Ehrenberg, en ait fait un genre
distinct sous le nom de Sporodinia, dont l’Acmosporium Corda me paraît
bien voisin, si même il n’est point identique avec lui. En effet, on n’observe
point ici ces chapelets de spores, qui, irradiant du sommet renflé du ra-
meau, donnent un tout autre port aux Aspergillus. J'ai pu même constater
sur quelques capitules la présence d’une sorte de péridion caduc qui
enveloppe primitivement les spores comme chez l'espèce suivante.

Quant aux différences qui me semblent justifier la séparation que Je
fais de mon espèce de l’Aspergillus maximus, je les trouve dans la couleur
grise, et non jaune fauve des filaments, dans ja continuité et la ramifi-
cation souvent trichotome des flocons fertiles, dans le renflement en
tête et non en massue des derniers ramules, enfin dans la disposition des
spores en une seule couche rarement en deux.

95. AsPerGLLus (Sporodinia) Poucuern Montag. in litt. : floccis
sterilibus (mycelio) subcontinuis in aquam aere privatam immer-
sis undulato-flexuosis conglomeratis intricatis tenuissimis hel-
volis ; fertilibus emergentibus cylindricis albis ramosis, ramis
brevibus alternis remote articulatis, deorsum intus gonimicis,
sporangio terminatis sphærico membranaceo levi brunneo, dia-
metro 0"”",0700 metiente tandem evanido, sporis tune liberis
ovoideis concoloribus, longitudine 0®",0028-0084 crassitudine
vero 0°®,0028-0050 æquantibus, primilus columellæ globosæ,
diametro 0"",0280 metiente sessilibus nec concatenatis. —
Has. In aqua ære prorsus deslituta cauliculis Fœni affixus oritur.
V. mycel. et ie. fructus.

OBs. — Espèce fort curieuse et en même temps très ambiguë, quant
à la place qu’elle doit occuper dans le système, observée dans des cir-
constances extraordinaires par notre savant confrère M. le professeur
Pouchet, de Rouen.Autorisé par lui à le publier dans mes Centuries, je
me fais un plaisir de lui dédier cet Aspergillus qui, comme le précédent,

PLANTES CELLULAIRES NOUVELLES. 183
ne saurait être rapproché du genre de Micheli qu’en y laissant comme
transition l’Aspergillus maximus, me paraît plutôt appartenir au Sporo-
dinia de Link, lequel est plutôt une Mucorinée.

Les conditions dans lesquelles s’est produite cette plante sont dignes
d'attention. En effet, ses filaments stériles ont été d’abord remarqués
dans une eau totalement privée d’air atmosphérique, où, réunis en amas
globuleux le long des brins de foin, ils revêtent la forme et la couleur de
baies de groseilles blanches (1). Lorsqu'ils affleurent la surface du liquide,
ils poussent des filaments fertiles, dressés, incolores, à rameaux courts,
alternes et cloisonnés. Ces filaments renferment de fines granulations et
la longueur de leurs articles égale six à dix fois leur diamètre, lequel est
inférieurement d’environ 0®®,0056 et au sommet de 0"",0025 ou 0028.
Tous les rameaux ne sont pas terminés par un sporange, C’est vers le
quatrième jour que les flocons du mycelium ont commencé à se montrer
attachés aux brins de foin, et vers le neuvième seulement que, arrivés à
la surface du liquide et mis en contact avec l’oxygène pur, ils ont produit
leurs flocons fertiles. |

Cette espèce a quelque ressemblance éloignée avec l’Asp. nigrescens
Ch. Rob., mais elle en diffère par une foule de points dont les plus sail-
lants sont le mode de ramification et la forme du sporange, Elle a bien
aussi des affinités avec lAsp. alternatus Berk. (Ann. and Mag. of nat.
Hist. june 1838, p. 257, cum icone) dont elle offre la ramification et le
sporange globuleux, mais dont tout le reste est fort différent.

La mucédinée en question, que l’auteur attribue à la génération
spontanée ou hétérogénèse, a soulevé, dans le sein de l’Académie des
sciences, une longue discussion qu'il n’est pas nécessaire de rappeler ici
et à laquelle beaucoup de membres ont pris part. Quand je dis une dis-
cussion, Je me trompe, car tout le monde a été d’accord pour réfuter
cette opinion déjà bien vieille et bien souvent reproduite, mais qui,
Jusqu'ici, ne s'appuie que sur des faits contestables. Dans plusieurs de
mes ouvrages, j'ai manifesté moi-même, sur cette question, un sentiment

. conforme de tout point à celui qu'ont émis mes illustres collègues.

* Eurotium lateritium Montag., Centur. VI, n. 35, Ann. sc.
nat,, 3° sér,, XI, p. 154, 1849, et Sylloge, p. 257.

OBs. — Cette espèce, remarquable par ses spores renfermées dans des

(1) J'ai observé le mycelium avec cette apparence.

18. C. MONTAGNE.

thèques, n'avait encore été observée par moi que sur du pain de muni-
ton moisi. Un de mes correspondants, M. le docteur Saugerres, méde-
cin-major du 5° régiment de ligne, en garnison à Tours, vient de m’en
adresser des échantillons sur de l’opium provenant d'Égypte. J’ai cru de-
voir constater ce nouvel habitat. Il reste à savoir si cet Eurotium s’est
développé en Egypte ou durant le voyage, ou seulement dans les officines
de France. Je rappellerai à cette occasion, qu’en 1853, M. Riess, de
Cassel, qui ne connaissait sans doute pas mon observation, puisqu'il n’en
dit mot et donne la sienne comme nouvelle, a retrouvé des thèques dans
un autre Æurotium (1) assez semblable au mien et pour lequel il pro-
pose un nouveau genre.

* Thamnomyces rostratus Montag., Centur., Il, n. 21, Ann. sc.
nat., juin 1840, cum icone, et Sylloge, p. 206.

Ogs. — Dans un envoi récent, mon ami Leprieur, qui a retrouvé cette
curieuse Hypoxylée autour de Cayenne, m’en adresse de nombreux indivi-
dus qui me permettront d’en distribuer aux naturalistes qu’elle peut
intéresser. Malheureusement elle est si fragile qu’elle ne peut parvenir
entière à sa destination qu’à condition d’être placée dans de longues boîtes
bourrées de coton. Un nouvel examen m’a permis de constater que les
spores ne sont pas continues, mais portent une ou deux cloisons transverses.
Un lapsus memoriæ m’a fait omettre d'enregistrer dans ma Cryptogamia
guyanensis les deux belles espèces de ce genre qu’on y rencontre, c’est-à-
dire les T°. Chamnssonis Ehrenb. et le T. rostratus Montag.

96. SPxæria (Folicola) Roux Montag. in litt.: amphigena, gre-
garia, Confluens; peritheciis globosis immersis integris con-
vexis epidermide atrata nitida tectis haud collabescentibus, poro
minuto pertusis, ascis sporisque simplicibus continuis fusifor-
mibus. — Has. In foliis morientibus aut delapsis £ricæ multi-
floræ prope Massiliam a el. Roux detecta et eidem dicata.
Profess. Derbès mecum communicavit.

Desc. — Perithecia immersa, conferta, imo confluentia, sphærica,
integerrima, 2/5 mm. crassa, pachydermatina, supra depresso-hemisphæ-

(1) Voy. Botan. Zeit., 1853, p. 134, t. LL, fig. 4-7.

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PLANTES CELLULAIRES NOUVELLES. 185

rica, epidermide nigrefacta nitida tecta poroque minimo (0"",03 diam.)
pertusa. Nucleus niveus gelatinosus. Asei hyalini basi apiceque attenuati,
12 centimillim. longi, 2 centimillim. medio crassi, octospori, para-
physibus punctatis stipati. Sporæ oblongo-fusiformes, rectæ continuæ 3
centimillim. longæ, centimillim. diametro æquantes, obsolete granulosæ,
albæ.

Ors. — J’ai déjà communiqué cette Hypoxylée à plusieurs de mes cor-
respondants anglais qui l’ont trouvée charmante et bien distincte. L'espèce
foliicole à laquelle elle ressemble le plus est le S. Cassiæ Lév. Toutefois,
outre que celle-ci est épiphylle, les périthèces diffèrent encore par leur
forme conique dimidiée, et par des thèques et des spores de moitié plus
petites, celles-ci d’ailleurs étant parfaitement elliptiques et non fusiformes
comme dans la nôtre. Pour dernier coup de pinceau, j’ajouterai que les
individus confluents ont une certaine ressemblance avec le Dothidea gra-
nulosa Hook. et Arn., non Lév. mais que cette dernière à des périthèces
dimidiés.

97. Spnæria (Obturata) Despreauxit Montag., Hb. : crumpens,
simplex, subseriata ; perithecis sphæricis atris opacis apice
depressis ostiolo mamilloso minuto pertuso ; ascis..…. Sporis
maximis continuis ex oblongo cymbiformibus fuscis. — Has.
In ramis emortuis dejectis in insula Terræ-Novæ legit 1896 cl.
Despréaux.

O8s. — Cette espèce n’a pas besoin de description. Pour la faire re-
connaître et distinguer de ses nombreuses congénères, il suffira de dire
qu’elle ressemble pour la forme du périthèce au Sphæria pomiformis P.

| et par sa fructification au S. stercoraria Sow. Ses spores, brunes et

opaques, sont longues de 4 à 5 centimillim. et épaisses dans leur
milieu de 1 à 2 centimillimètres environ. Dans le jeune âge elles sont

| enveloppées d’un limbe mucilagineux fort large, qui diminue à mesure
| qu’elles approchent de la maturité.

* Necrria cinnaBarina Tode, var. BuxicoLa Montag. in litt. : cæspi-

tosa ; perithectis globoso-depressis corrugatis stromati luteo vix
tubercularioideo parvulo insculptis cinnabarinis, ostiolo minuto
discolori instructis, ascis sporisque quam in typo duplo majo-
ribus. — Has, E ramis Buæi sempervirenhis siccis erumpens

186 C. MONTAGNE.
in viridartis apud Saint-Pons prope Massiliam lecta. An species
legitima ?

OBs. — Je n’ai pas voulu distinguer spécifiquement cette Hypoxylée
du type auquel je la rapporte, bien que, dans plusieurs de leurs caractères
comparés j’aperçoive des différences très marquées, pour ne pas dire
essentielles. Il convient d'indiquer ces différences pour mettre les mycolo-
gues à même de décider.

Les groupes de périthèces sont en général plus petits, ne dépassant
presque jamais un millimètre; mais les périthèces sont plus amples quel-
quefois du double et d’ailleurs soudés entre eux de façon que dans une
coupe verticale passant par l’axe du stroma le sommet seul de chaque loge
fait saillie et rend le groupe ondulé et comme bossué, Dans le type, ces pé-
rithèces sont ordinairement libres et sessiles sur le stroma, comme on le
voit dans la belle figure qu’en a donnée M. Greville à la pl. 135 de son
Scot. Crypt. Flora. L'intérieur des loges de notre Nectria buæicola est
plus long que large, atteignant un quart de millim. dans la première di-
mension ; il est tapissé d’un mince enduit blanc, résidu du nucléus. Le
nombre de loges varie de une à quatorze dans chaque stroma. Les ostioles
brunâtres et papilliformes sont aussi plus apparents. Il est remarquable
que, dans le grand nombre d'exemplaires qui ont été soumis à mon exa-
men, je n’ai pas rencontré une seule loge affaissée au sommet, encore moins
cupuliforme. Peut-être mes échantillons étaient-ils trop jeunes, et cepen-
dant ils étaient bien fructifiés. Les thèques, dans leur type, mesurent en
longueur 0®®,11 et les spores à peu près un centimillimètre dans la
même dimension; dans la variété, au contraire, les premières sont longues
de Om, 21 et les spores de 0°",025 ou environ. Les spores sont d’ailleurs,
dans l’une et dans l’autre forme, divisées transversalement par une cloison
médiane, ou, ce quirevient au même, par l’affrontement de deux nucléus.
La figure 175 de M. F. Currey (1), qui les montre uniseptées, est fort
exacte.

98. Dorainea Jucrannis Montag. in lit. : erumpens; tuberculis
subcutaneis rugosis rotundis confluentibus extus intusque atris
cellulis immersis clavatis niveis, evacuatis stromati concolori-
bus ; ascis eylindrico-clavatis sporas octonas continuas unise-

(4) Voy. Onthe Fructif. of Comp. Sphœriæ, in Mem. Soc. Lin. London.
March 1858.

PLANTES CELLULAIRES NOUVELLES, 187
rialas vel inordinatas includentibus. — Has. Ad truncos J'u-
glandis regiæ emortuos prope Massiliam lecta et cum priori
mihi missa.

DEsc. — [nter corticem interiorem et exteriorem observantur tubercula
stromati fusco-nigro insidentia, magnitudine maxime varia, initio orbicu-
laria, tandem ob confluentiam elongata difformia, extus intusque aterrima
opaca, sat crassa, supra rugosa, imo adulta ostiolis conicis confertis
quandoque instructa mox erumpentia prominentiaque cortice sublevato
lacero semitecta. Cellulæ numerosæ parvulæ, in sectione verticali cory-
noideæ fere millimetrum longæ, octavam milim. partem crassitudine
metientes, nucleo mucilagineo niveo bibulo factæ. Asei cylindrici aut
sæpius, ut cellulæ, clavæformes, 15 centimillim. longi, octospori, fila-
mentis intertexlis nidulantes. Sporæ oblongæ vel subcymbiformes, conti-
nuæ, 0®®,0025 longæ, medio subventricoso centimillim. crassæ subhya-
linæ, intus granulosæ.

OBs. — J'ai reçu dernièrement (mars 1859) cette Hypoxylée de
M. Derbès. Après l'avoir suffisamment étudiée et reconnu que j'avais
affaire à une vraie Dothidée, je me suis demandé quel rapport il pouvait
exister entre elle et le type du Sphæria Dothidea Moug. dont je n'ai
jamais connu que la var. b. Rosæ. Il est évident, après analyse scrupu-
leuse de la variété, que, comme le présumait Fries lui-même, c’est un
véritable Dothidea. Or Schleicher ayant primitivement débité cette plante
sous le nom de Sphæria Rosæ, n'est-il pas de toute justice, en la faisant
passer dans ce dernier genre, de lui conserver le nom spécifique? La
comparaison que je n'ai pu établir entre mon espèce et le type du Sphæria
Dothidea observé sur les rameaux du Frêne, je l’ai faite avec la variété
et je me suis convaincu que, pour le facies, le mode de développement,
la forme des cellules ou loges et des spores, ce sont deux choses évidem-
ment distinctes. Les organes de la reproduction qu’on ne rencontre pas
toujours à l’état de maturité, mais que j’ai très bien vus, ont été derniè-
rement figurés, thèques et spores (fig, 190) dans un travail déjà cité de
M. F. Currey, inséré dans les Mémoires de la Société Linnéenne de
Londres. Si j’établis maintenant un parallèle entre mon espèce et le
D. Sycophila, Hypoxylée tout à la fois sarde et algérienne, je reconnais
que la saillie des loges sur le stroma et leur forme feront aisément dis-
tinguer celle-ci, que ces organes de reproduction rendent d’ailleurs am-
_biguë au point que l’on pourrait, presque avec autant de raison, la placer

158 C, MONTAGNE.

indifféremment soit dans le genre Sphærva, avec mon ami M. De Notaris,
soit parmi les Dothidea, comme nous l’avons fait M. Durieu et moi dans

la Flore d'Algérie.

GRAPHIOLA. Poit. emend. (1).

CHar. GENER. Perithecium duplex; exterius innato-erumpens,
dimidiatum, crustaceum, atrum, friabile, initio subelausum, tan-
dem discoideo-apertum, cupuliforme, simplex aut confluenti-plu-
riloculare, extus oreque obtuso lineolis concentricis striatulum ;
interius membranaceum lacero-dehiscens exteriore longius, fugax.
Filamenta (eapillitu) e fils pluribus inferne brevissine submonili-
formiter—superne longius articulatisconcretis compositaet e fundo
peritheen a matrice 1psa formato oborta, capillitium sistunt flavum
elasticum, apice contortum vel cincinnatum cut inspersæ sunt
sporæ innumeræ, globosæ, pellucidæ, concolores. - Phacidium
Moug. in Fries, Syst. Myc. — Graphiola Poiteau. — Fries, El.
Fung. —- Duby. — Montag., Cuba, Crypt. — Trichodesmrium
Chev., F1. Par.

Ogs. — Nous avons analysé avec soin des échantillons en bon état de
ce Champignon, mais nous n’avons pu le suivre dans toutes les phases de
son développement, ce qui eût été nécessaire pour compléter son histoire.
De là vient sans doute que, malgré nos laborieuses recherches, nous

(1) Les trois pages 617, 618 et 619, qui renferment la fin de la famille des
Pyrénomycètes, dans la Flore d'Algérie, étant restées en placard, quoique cor-
rigées, faute de copie pour compléter la feuille 78 du premier volume, nos ob-
servations faites et imprimées depuis dix années n'ont point encore vu le jour.
Comme nous pensons qu'elles valent la peine d'être publiées, puisqu'elles ont
avancé la connaissance de la structure anatomique de ce singulier genre, et que
nous ignorons l’époque, peut-être encore bien éloignée, où pourra être continuée
l'impression de cette cryptogamie algérienne, si intéressante pourtant, nous de-
mandons la permission de reproduire dans ces Annales quelques faits importants
qu'une étude attentive nous a mis à même de constater, et les modifications que
nous avons cru en conséquence devoir apporter à la définition qui avait été donnée
de ce genre, soit par Poiteau, soit par les mycologues qui l'ont suivi. (Voir aussi
mon Sylloge, p. 273.)

PLANTES CELLULAIRES NOUVELLES. 159

n’avons pu rencontrer ce réceptacle intérieur dont Poiteau et Chevalier,
son copiste, disent qu'il se fend au sommet en plusieurs lanières. Le
périthèce carbonacé ou le réceptacle extérieur, né sous l’épiderme, la
rompt et la soulève pour se montrer au dehors. Cette rupture de l’épi-
derme a lieu de plusieurs façons très bien décrites et figurées par l’auteur
de ce genre anormal. Le périthèce, plutôt corné que carbonacé, est com-
posé de cellules et devient très friable. Il est d’un noir mat devenant bril-
Jant sous le scalpel; on n’en voit pas de trace inférieurement. Son épais-
seur est d'environ un quart de millimètre. Quand on le coupe horizontale-
ment vers le milieu de sa hauteur, on aperçoit plusieurs cloisons qui le
partagent en deux ou trois loges complètes, ce qui nous paraît dû à la
soudure primordiale de deux ou trois individus. Non-seulement son orifice,
mais encore sa face externe sont marquées de lignes concentriques qui
peuvent être attribuées à des zones d’accroissement. Du fond de chaque
loge formé par le parenchyme de la matrice s’élévent d'innombrables fila-
ments de la plus grande ténuité, puisqu'ils ont tout au plus un huit-cen-
tième de millimètre en diamètre, articulés, à articles égaux qui donnent
au filament l’aspect moniliforme. Au-dessus de six à sept centièmes de
millimètre à partir de leur origine, ils paraissent se réunir pour former
les poils de ce chevelu si élégant qui couronne la plante à la maturité.
Chacun des poils en question, composé en effet de plusieurs filaments
réunis, est cylindrique et mesure en diamètre un cinquantième de milli-
mètre. C’est le long de ces poils que sont placées les spores pour lesquelles
ils font pour ainsi dire la fonction d’élatère ou d’organe de dissémina-
tion.

* GRaPioLa Paognias Poit.: characteres idem ac generis. — Pha-
cudium Phæœnicis Moug.in Fries, Syst. myc., Il, p. 572 (1823)
et El. Fung., HE, p.135. — Graphiola Phænicis Poit., Ann.
se. nal., 1'° sér., HE, p. 473 (1824) c. icone. — Duby, Bor.
Gall., p. 727. — Montag., Cuba, Cryplog., p. 32h. — Tri-
chodosmium Phæœnicis Cheval., FI. Par., 1, p. 882, cum icone
mala, — Has. In foliis Phænicis dactyhiferæ.

OBs. — Quant aux affinités de cette production et à la place qu’elle
doit occuper on ne saurait disconvenir que les premières sont multiples
et que la dernière n’est pas facile à assigner. Jusqu'au moment où sa
morphose sera parfaitement connue, on ne ‘pourra faire que des conjec-

190 €. MONTAGNE,

tures à cet égard. Toutefois, la nature de son périthèce, sa consistance
et surtout son mode d'évolution en font, selon nous, un Pyrénomycète,
quoique la présence d’un chevelu élastique semble protester contre cette
classification. Nous ne connaissons que le genre Cirrholus, qui sous ce
dernier rapport, ait quelque analogie avec le Graphola. Or, le genre
brésilien, dont on ne sait pas non plus la morphose, est placé par Fries
comme genre anormal à la suite des Myxogastres et par Sprengel parmi
les Pyrénomycètes. Dans un travail tout récent (Fragm. mycol.) M. Lé-
veillé, s'appuyant sans doute uniquement sur les caractères du fruit et-
surtout sur l’organe de dissémination des spores, a compris le genre Gra-
phiola dans ses Coniogastres. Quelque bonne volonté que nous y mettions,
nous ne saurions partager cette manière de voir, par la raison que le mode
d'évolution des périthèces nous semble s’y opposer péremptoirement. Tous
les myxogastrés sans exception se développent en effet dans une gangue
mucilaginiforme et sont toujours (primitivement) superficiels (1). Nous
n’en connaissons aucun qui naisse sous l’épiderme des plantes. Sous ce
rapport, le Graplhola se rapprocherait davantage des Urédinées, du Rœæs-
teha par exemple, mais il y a un périthèce corné. Tout bien considéré
et en attendant mieux, nous penchons à le placer avec M. Duby (loc. cit.)
à la fin des Hypoxylées ou Pyrénomycètes. (Voyez encore, à ce sujet, le
sentiment de notre savant collègue M. L.-R. Tulasne, Second mémonre
sur les Ustilaginées, Ann. Sc. nat., 4° sér., t. I, p. 177.)

99. Tuécepñora (Merisma) Dergesi Montag. in litt. : selacea,
dendroidea, ochraceo-pallida, stipitata, mox fasciculato-ramo—
sissima, ramis alternis flexuosis longis acutis. — Has. Inter
muscos ad terram in pinetis, loco Saënt-Loup dicto prope Mas-
silam invenit anno 1855 cl. Derbès cui mecum benigne com-
municanti dicare hancce speciem novam dicare in animo est.

DEsc.— Fungus terrestris, erectus, dendroides, 5 ad 6 centimill. altus,
coriaceus, ochraceo-pallescens. Stipes cylindraceus, glaber nec exsicca-
tione tomentosus, brevis, 5 ad 6 millim. longus, 4/8 ad 3/16 millim.
crassus, mox fasciculato-ramosus. Rami filiformes, tenues, iterum ramu-

(1) Omnes Gasteromyceles systema vegetativum habent superficiale et libere evo-

lutum, quod melamorphosi perfecta in fructificans abit. (Fries, Summa Veget.
Scandin., p. 429.)

L 4
PLANTES CELLULAIRES NOUVELLES. 191
losi. Ramuli erecto- patentes flexuosi, capillari-attenuati, longissimi,
alterni, fastigiati, acutissimi. Structura : Stratum quidem interius € filis
longitudinalibus ramosis intricatis constans, exterius vero e cellulis qua-
drato-rotundis factum. Hymenium e sporophoris brevibus undique radian-
tibus et sporis globosis hyalinis constitutum.

Ogs. — Est-ce une Clavaire? Est-ce un Merisma? J'avoue que je
reste dans l'incertitude à cet égard. Je ne lui connais, ni dans Pun ni
dans l’autre genre, aucune autre espèce analogue en France. Je ne vois
qu'un champignon de la péninsule indienne, ma Clavaria dilata (1) dont
j'ai fait un Calocera dans mon Sylloge, p. 181, avec laquelle je puisse
la comparer. Elle lui ressemble en effet beaucoup, mais elle en diffère par
ses rameaux filiformes et non dilatés en patte d’oie sous les divisions.
Elle a bien aussi quelques rapports éloignés avec une autre Clavaire exo-
tique (Cl. dealbata Berk. Dec. n° 608), mais sa ramification fasciculée
et non dichotome l’en fera aisément distinguer.

100. Marasmius (Collybia) Lepriguri Montag. mss.: pileo carnoso-
membranaceo convexo, tandem depresso-umbilicato ochraceo-
luscescente glabro,margine nudo involuto, stipite solido fibroso-
striato torto subexcentrico basi subsquamuloso, lamellis tridymis
confertiusculis secedenti-liberis, um remotis integris primo
pallidis dein fuscescentibus, — Has. Ad truucos ramosque
arborum in Guyana 1858 legit cl. Leprieur, cui dicatus est,

DEsc. — Pileus carnoso-membranaceus , siccitate fragilis , rigidus,
convexus, dein depressus, vix nisi exsiccatione umbilicatus, margine late
involutus quidem 8 ad 12 mm., expansus, vero 15 ad 18 mm. latus, ex
ochraceéo fuscescens, levis, in siccis rugulosus. Stipes cartilagineus sub-
lignôsus, solidus, quibusdam individuis excentricus, fibris longitrorsum
Striatus, quæ apicem versus liberis eumdem exasperant, basi squatnulis
aliquot superpositis, nec tamen semper præsentibus onustus, tortus, pileo
concolor, 1/2 ad 2 centim. longus, 1 ad 1 1/2 millim. crassus. Lamellæ
tridymæ, 5/8 mm. medio latæ, utrinque attenuatæ, in ætate tenera stipitis
apici, ut videtur, affixæ, demum definite secedentes et aream nudam circa
Stipitem relinquentes, madidæ subgelatinosæ, initio pallidæ, cam pileo
fuscescentes. Sporæ albæ, minutissimæ vix 0"”,0035 diametro me-
tientes.

(4) Voy. Bélanger, Voy. Ind. orient, Cryplog., p. 452.

199 C. MONTAGNE,

Ogs. — Si l’on s’en rapportait à quelques-uns des caractères mention-
nés dans la diagnose, ce champignon, que je viens de recevoir (1859) de
M. Leprieur serait voisin du M. rubricosus Montag., Crypt. Guyan.
n° 304; mais il en diffère essentiellement par la couleur, la forme et
l'épaisseur de l’hyménophore, par l’absence de stries marginales, par la
brièveté et la solidité de son pédicule, etc., etc.

| Muscr.

* Gymnosromun cacareum Nees et Hornsch., Bryol. Germ., p.185,
tu Xi, LE

Ogs. — La Société d’'Hydrologie médicale de Paris vient de recevoir de
M. le docteur Chapelain, inspecteur des eaux thermales de Luxeuil, de
nouveaux exemplaires du Coprinus luxoviensis, que j'ai décrit au n° 80
de cette Centurie et qui offre ceci de remarquable qu’il a pour matrice ou
support un Himantia. Parmi plusieurs autres numéros présentant des
productions déjà connues et de peu d'importance se trouvaient, sous le
n° 9, quelques plaques minces, veloutées et d’un beau vert que l’on avait
détachées de la voûte du bain des Capucins et de la piscine de celui des
Bénédictins. Ces plaques, prises pour des moisissures, m’ont offert, sous
le microscope, les filaments proembryonnaires d’une mousse qui croît habi-
tuellement sur les murs enduits de chaux, ainsi que l'indique son nom
spécifique. Du gazon vert, ras et touffu que forment ces filaments très
ramifiés s'élèvent çà et là quelques jeunes tiges de la mousse, dont les
racines, de couleur fauve, se confondent insensiblement avec eux. C’est
à la disposition, à la forme et au réseau des feuilles qui garnissent ces
tiges, dont la hauteur atteint à peine deux ou trois millimètres, que j'ai
cru reconnaître l’espèce et la distinguer. de deux autres, l’Eucladium
verticillatum et le Gymnostomum curvirostre, qui se développent dans
des conditions semblables ou analogues. Ce n’est donc point à cause de
ces conditions que j'appelle un instant l’attention des bryologistes sur
cette mousse, mais bien pour signaler le réseau velouté de ces filaments
proembryonnaires dont jene sache pas qu'aucun auteur ait fait mention en
la décrivant. Il serait curieux de savoir si ce développement est normal ou
exceptionnel et dépendant des localités, et surtout si la plante, dans ces
circonstances, arrive à son entière et complète évolution.

OBSERVATIONS

SUR

LA FLEUR DES MARANTÉES,

Par Arthur GRIS,

Aide-naturaliste au Muséum d'histoire naturelle de Paris (1).

I y a un an environ, M. Brongniart voulut bien attirer mon
attention sur le groupe des Marantées, dont l’organisation florale
n'avait pas été soumise jusqu'alors à un sérieux examen scienti-
fique, et chez lequel la valeur et la limite des genres étaient par
cela même incertaines. Depuis cette époque, j'étudiai avec un
esprit libre de {oute préoccupation systématique les plantes de la
tribu des Marantées, qui fleurissaient dans les serres du Muséum,
me contentant d'inscrire au bas de mes dessins le nom faux ou
vrai porté par l'espèce observée. |

C'est ainsi que j'analysai vivantes les espèces dont les noms
suivent :

Calathea albicans Ad. Brong. Stromanthe sanguinea Sonder.
— %ebrina LindI. — spectabilis Ch. Lem.
— villosa Lindl. — Porteana À. Gris.
— orbiculata Lodd. Maranta bicolor Ker.
— flavescens Lindi. — arundinacea L. Rosc.
— Warscewiczii Kcke. — indica {?) Tuss.
— grandifolia Lindi. Thalia dealbata Fras.
— modesta Ad. Brong. Ischnosiphon

Ayant donc réuni un certain nombre d'observations isolées, et
comparé mes analyses, je commençais enfin à saisir quelles sont

(1) Un très court extrait de ce travail a été inséré dans les Comptes rendus
de l'Institut, séance du 47 octobre 4859.
£° série. Bot. T. XIE. (Cahier n° 4 )! 13

10! A. GRIS.

les parties de la fleur qui présentent des différences propres à
caractériser les genres, et, autant que pouvait le permettre le
nombre restreint des espèces étudiées vivantes, à comprendre
la valeur et les limites de ces genres, quand je pris connaissance
du très intéressant travail que M. Kôrnicke a publié récemment
sur le même sujet (1). Je me décide donc à publier immédiatement
le résultat de mes observations, bien qu’il soit encore incomplet.
Il sera seulement question ici d’organographie et de physiologie.
Les dessins qui accompagnent le texte serviront à faire com-
prendre plus aisément des formes tourmentées et souvent indé-
cises qu'il est très difficile de décrire avec clarté.

PÉRIANTHE.

Je ne dirai que quelques mots des enveloppes de la fleur qui
sont doubles et épigynes, comme on sait. Les divisions du calice,
presque toujours inégales entre elles, sont tantôt plus courtes que
le tube floral, tantôt aussi longues que ce tube où même que la
fleur entière; elles sont rarement vertes, par exemple dans les
Maranta bicolor, M. indica, M. arundinacea. Souvent elles
prennent des teintes analogues à celles de la corolle : c’est ainsi
que les sépales sont roses dans le Stromanthe sanguinea, où la co-
rolle est rose ; violets dans le Calathea zebrina, où la corolle est
violette ; jaunes ou d’un jaune verdâtre dans les Calathea villosa
et orbiculata, où la corolle est jaune.

Quant au tube de la corolle, sa structure est très complexe, puisque
les staminodes, l’étamine fertile et souvent le style, sont confondus
avec lui en un seul corps. Ce tube, par l'inégalité de son développe-
ment, donne aux espèces des aspects bien différents : il est droit,
court et ample dans les Stromanthe et dans le Thalia dealbata ; il
est assez long et arqué dans les Maranta arundinacea, indica el
bicolor ; 1l est long et plus ou moins droit dans les Calathea ; 1l est
très long et étroit dans le genre Zschnosiphon (2).

(1 ) Gartenflora , 1858, p. 66, Beiträge zur Kenniniss der in unsern Gürlen
cullivirten Maranteen, von Dr. Fr. Kôrnicke.
(2) Nous croyons pouvoir rapporter au genre 1e TRE de M. Kürnicke

OBSERVATIONS SUR LA FLEUR DES MARANTÉES, 195

ANDROCÉE.

Cinq organes au plus, disposés en deux verticilles, constituent
l’'androcée. Au verticille interne appartient l’étamine fertile unique
qu'accompagnent deux staminodes. Deux autres staminodes au
plus forment le verticille externe.

Staminodes extérieurs.

Le nombre des staminodes extérieurs semblant constant dans
une même espèce, nous croyons que M. Kôrnicke a pu à juste
titre considérer ce nombre comme un bon caractère générique
Dans les Stromanthe et dans les Maranta, j'ai toujours trouvé deux
staminodes externes : chez les premiers (S. sanguinea, S. Por-
teana), ils sont petits, dressés (pl. 44, fig. 2, ste). Dans les Ma-
ranta arundinacea et indica, ils sont très développés et longuement
exserts. Ils le sont moins dans le Maranta bicolor. Dans les Cala-
thea grandifolia, flavescens, zebrina, villosa, W'arscewiczii, etc.,
je n'ai trouvé qu'un seul staminode externe ; il arrive souvent que
ce staminode externe unique forme avec l’un des deux staminodes
internes (le staminode calleux) les deux divisions les plus appa-
rentes et les plus développées de la fleur, et lui donnent un aspect
bilabié, comme on le voit dans les Calathea villosa, flavescens, ete.
(pl. L4, fig. &).

Dans le T'halia dealbata je n'ai trouvé qu’un staminode extérieur,
comme (ans les Calathea, et il est très développé. Il en est de
même dans l'Aschnosiphon.

En résume, il y a deux staminodes externes dans les Séromanthe
etles Maranta (À), un seulement dans les Calathea, Thalia,

une plante cultivée dans les serres du Muséum sous le nom de Thalia farinosa
(Ad. Brong. Mss) ; nous ignorons où M. Kôrnicke a donné la description com=
plète et détaillée de ce genre, dont nous avons recueilli un à un et çà et là
quelques-uns des caractères, dans ie travail que nous avons cité plus haut.

(1) Ilest bien entendu que les caractères rapportés à uh genre ne doivent
s'appliquer qu'aux espèces de ce genre que j'ai mentionnées plus haut,

196 | A. GRIS,

Tschnosiphon. Je dois faire remarquer que par exception le Cala-
thea albicans m'a présenté tantôt un, tantôt deux staminodes ex-
ternes. Cette même plante nous présentera tout à l'heure une ano-
malie encore plus curieuse.

L'

Staminodes intérieurs.

Des deux staminodes qui complètent avec l’étamine fertile le
verticille interne de l’androcée, il en est un dont le sommet,
façonné en forme de capuchon, s'applique étroitement et plus ou
moins complétement sur le stigmale au moment de l’épanouisse -
ment de la fleur : c’est le staminode cucullé ; l’autre est ordinai-
rement muni, à sa face interne, d’un callus dont le développement
et la forme varient, et vers lequel le style porte brusquement le
stigmate à l’époque de la fécondation : c’est le staminode calleux
dont nous nous occuperons d’abord.

Staminode calleux.

Nous venons de dire que la forme du callus était très variable :
elle varie en effet, non-seulement d’un genre à l’autre, mais
encore dans un même genre. Il est peu développé et ne forme
effectivement qu’une sorte de callosité dans les Calathea, l'Ischno-
siphon et le Maranta bicolor, mais se transforme par un dévelop-
pement excessif en une lame ou crête, dans d’autres espèces de
Maranta., de Stromanthe et le T'halia dealbata.

Chez les Stromanthe, le staminode calleux est à lui seul un sys-
tème compliqué dont j'indiquerai sommairement l'aspect général
comme il suit : une lame ou crête c, dont le bord antérieur libre
est profondément lobé vers sa partie moyenne, s'élève obliquement
sur la face interne de ce staminode (pl. 14, fig. 8), depuis sa base
jusqu’à une petite distance du sommet ; là elle se replie de manière
à former une cavité, une sorte d’oreillette où vient se nicher le
stigmate. Ce système se retrouve, à quelque différence près, dans
certaines espèces de Maranta, mais non dans le Maranta bicolor
où sa forme est toute différente, ce qui est vraiment singulier : là le

OBSERVATIONS SUR LA FLEUR DES MARANTÉES, 197

staminode, presque triangulaire, est parfaitement concave, charnu
et boursouflé ; son sommet, large, tronqué, présente trois ou quatre
dents obtuses, et sur un de ses côtés, un peu au-dessous de sa
partie moyenne (pl. 14, fig. 4), est un petit appendice en forme de
corne et ascendant; il n’y a ni erête, ni oreillette : tout cela
semble remplacé par un renflement peu prononcé 6, sorte de callus
situé à la face interne du staminode et portant quelques poils.

Chez le T'halia dealbata (pl. 11, fig. 5), nous retrouverons une
crête «assez développée.

Le staminode calleux est allongé, étroit, pétaloïde, comme asy-
métrique chez l’{schnosiphon ; ses bords sont onduleux et pré-
sentent d’un seul côté un lobe assez développé (pl. 114, fig. 8) ; un
callus peu développé, ressemblant: à une petite lame trigone c,
s’insère par sa base élargie à la face interne de ce staminode. On
voit en b quelques grains de pollen déposés par le stigmate, lors-
qu'il est venu s'appliquer avec force par sa face externe et supé-
rieure en ce point très voisin du callus.

Dans leCalathea grandifolia, le staminode en question est large,
lisse, concave, d’un tissu épais et solide; son bord supérieur,
quoique présentant à sa partie médiane une légère éminence, est
d'apparence tronquée : il offre un peu au-dessous de son sommet,
et d’un côté seulement, près du bord, un renflement allongé et
étroit €, qui est le callus(pl. 42, fig. 6) ; ce callus se prolonge bien-
tôt en une sorte de petit bras transversal qui se continue avec le
filet de l’étamine.

Dans le Calathea flavescens, le staminode calleux est très déve-
loppé, pétaloïde, bilobé an sommet. A côté du callus qui s’insère
ici beaucoup plus bas quechezle Calathea yrandifolia, mais qui a à
peu près la même forme et les mêmes rapports avec le filet stami-
nal, ou trouve une petite fossette où le stigmate vient se nicher
en laissant déborder autour de cette fossette les grains de pollen
dont il était le dépositaire; un semblable rapport entre les deux
organes s’observe encore dans les Calathea villosa (var. pardina),
C. orbiculata, etc.

198 A, GRIS.

Staminode cucullé.

Ce staminode, ainsi nommé parce que son sommet est façonné
en une sorte de capuchon qui s'applique sur le stigmate, va: nous
fournir des caractères différenliels d’une certaine valeur.

M. Kôrnicke a insisté, non sans raison, sur un appendice laté-

ral que présente toujours ce staminode, et dont la forme et le dé-

veloppement ne sont pas sans quelque importance. ‘

Ainsi, dans le Maranta bicolor, le bord étalé ou légèrement
sinueux, qui n'entre pour ainsi dire point dans la formation du
capuchon, produit environ vers sa partie moyenne un appendice al-
longé, sensiblement élargi el tronqué obliquement à son extrémité
et dont la direction est descendante (al, pl. 44, fig. 13); dans le
Maranta arundinacea, cet appendice est de même allongé, plan et
descendant ; dans le Maranta indica, il est court, large et arrondi,
et sa direction est toujours descendante; 1l est ascendant, au con-
traire, dans les Stromanthe Porteana (al, pl. 14, fig. 47) et sangui-
nea, mais {andis qu'il est large, plan et court dans le premier, 1l
est plus allongé dans le second.

Dans le T'halia dealbata, l'un des bords s’épanouit en un lobe
triangulaire, obtus, agréablement denté, et se prolonge immédia-
tement au-dessous en deux languettes étroites et parallèles a/ un
peu inclinées (pl. 24, fig. 16); il est probable que ees deux lan-
ouettes résultent d’une division profonde de l’appendice latéral.

Chez l’Ischnosiphon, après l’anthèse, c’est-à-dire quand le sug-
mate est allé s'appliquer à la face interne du staminode calleux, la
partie supérieure du staminode cucullé se rejette en arrière et vient
se placer dos à dos avec la partie inférieure : l’un des bords, en
se repliant, forme toujours en grande partie le capuchon ; l'autre
bord, qui est également très développé, recouvre largement le
premier (pl. 44, fig. 14), sert ainsi à compléter la cavité cueullaire
et donne naissance à un apperndice latéral a! allongé, rostriforme,
linéaire, horizontal ou légèrement ascendant. Les deux bords de
ce rostre, se recouvrant à la base, constituent un canal cylindrique
fermé: un peu plus loin, les bords, atténués et seulement légère

À
no
(I
(

OBSERVATIONS SUR LA FLEUR DES MARANTÉES, 199

ment relevés, forment une sorte de gouttière : enfin ils s’évanouis-
sent, en sorte que l’extrémité obtuse du rostre est plane.

Dans les Calathea, les deux bords supérieurs du stamimode con-

courent à la formation du capuchon qui enveloppe exactement le
stigmate, et l’appendice latéral est toujours en forme de rostre
façonné en gouttière par le relèvement et le reploiement des bords
(pl. 12, fig. 4) ; ce rostre est en général horizontal ou légèrement
ascendant. — Le Calathea albicans m'a présenté plusieurs fois
la curieuse anomalie que voici : au lieu d’un seul staminode
cucullé, la fleur en contenait deux ; dans ce cas il n’y avait pas de
staminode calleux. Celui-ci avait donc été remplacé par un organe
dont la forme et les fonctions sont très différentes. J'ai dit plus haut
que cette espèce m'a présenté, tantôt un, tantôt deux staminodes
externes; comme il y a longtemps qu’elle est cultivée dans les
serres, il serait possible que ces variations fussent l’indice d’une
dégénérescence du type normal.
_ En résumé, dans les Marantha, les Stromanthe et le T'halia deal-
bata, le capuchon est formé presque exclusivement par le déve-
loppement et le reploiement de l’un seulement des deux bords du
staminode eucullé, en sorte que le stigmate n’est qu'incompléte-
ment couvert. Dans l’Zschnosiphon et les Calathea, au contraire,
le bord supérieur, qui tout à l'heure était peu développé et presque
étalé, se replie sur celui qui est façonné en capuchon, le recouvre,
et concourt ainsi pour sa part à la formation d’une cavité dans la-
quelle le stigmate semble parfaitement enveloppé. L'avenir nous
dira si ce caractère, dont M. Kôrnicke n’a pas fait mention, est
absolu pour toutes les espèces d’un même genre. — D'autre part,
l’appendice latéral du staminode cucullé est plan et descendant
chez les Waranta ; plan et plus ou moins ascendant chez les Stro-
manthe ; divisé en deux languettes étroites et parallèles chez le
T'halia deulbata ; rostriforme, linéaire, légèrement ascendant chez
l'Zschnosiphon ; rostriforme, légèrement ascendant dans les Cala-
thea. |

200 A GRIS.

Étamine fertile.

L'étamine fertile se compose d’un filet toujours distinct, sinon
libre ; d’une anthèreuniloculaire, qui, dans sa jeunesse, est parta-
gée en deux logettes (pl. 11, fig. 9); et d’un appendice membraneux
plus ou moins développé, et qui est soudé à des hauteurs variables,
soit au filet seulement, soit à l’anthère et au filet.

Dans le Maranta bicolor, on voit le long du filet staminal une
petite lame membraneuse étroite qui se termine au-dessous de
l'anthère en une sorte de petite dent ; l’anthère est donclibre. Dans
le Maranta indica, l'anthère est bre aussi, puisque l’appendice
n’est soudé au filet que jusqu’à la base de l’anthère, mais combien
ilest plus développé que dans le Maranta bicolor ! Là il s’épa-
nouit en une expansion membraneuse large et obovée, élégam-
ment dentée, parcourue par un réseau de fines nervures rami-
fiées a,p ; en un mot, tout à fait pétaloïde (pl. 14, fig. 10).

L’anthère est également libre et l’appendice très développé,
pétaloïde, dans le M. arundinacea.

Dans le Stromanthe Porteana, l'insertion de l’appendice se fait
encore plus bas sur le filet: 1à, comme dans les autres espèces de
ce genre, l’anthère est libre, et l’appendice allongé, pétaloïde
(a,p, pl. 44, fig. 45).

L’étamine du T'halia dealbata présente des caractères analogues,

Mais il n’en est plus de même dans l’Zschnosiphon et les Cala-
thea. Chez le premier, l’appendice est, il est vrai, très développé
(ap), mais au lieu de s’insérer sur le filet à la base de l’anthère,
ou un peu au-dessous de cette base, 1l remonte le long du connec-
tif charnu, environ à la moitié de sa longueur, en formant une
petite crête membraneuse qui devient de plus en plus étroite à
mesure qu’il s’élève : au point où elle s'arrête, ce n’est plus qu'un
mince filet (pl. 44, fig. 14)

Chez les Calathea, l’appendice n’est plus pétaloïde; on ne
trouve là qu'un rebord membraneux plus ou moins étroit, qui
s’insère à moitié de la hauteur du connectif et dont le bord libre et

OBSERVATIONS SUR LA FLEUR DES MARANTÉES. 201

arrondi est plus où moins flexueux ; ce rebord membraneux s’atté-
nue quelquefois vers son point d'insertion sur le connectif, et
d’autres fois est assez développé en largeur à ce même point, et
partant plus facile à distinguer. Bien qu’on puisse dire que le plus
souvent l’appendice s’arrête à moitié de la hauteur de l’anthère
chez les Calathea, il ne me semble pas toujours devoir en être
ainsi, puisque dans le €. flavescens, par exemple, l’appendice ne
s'arrête qu'à une très petite distance du sommet de l’anthère et
quelquefois même semble atteindre ce sommet.

Nous avons déjà signalé plus haut le fait de la connexion du
filet staminal avec le callus du staminode calleux, chez les Calathea
flavescens, grandifolia, villosa (var. pardina), orbiculata, etc.

On voit donc que chezlesStromanthe et le T'halia dealbata, l’éta-
mine fertile a toujours l’anthère libre et l’appendice staminal pé-
taloïde. Dans les Maranta, l’anthère est également libre et l’appen-
dice staminal presque toujours pétaloïde.

Chez l’Ischnosiphon etles Calathea, l’anthère est adnée jus-
qu’en son milieu; mais tandis que chez le premier l’appendice
staminal est pétaloïde, chez les seconds il est seulement margini-
forme.

Ces caractères sont essentiels, et M. Kürnicke en a déjà d’ailleurs
reconnu l'importance.

GYNÉCÉE.

Les trois carpelles qui entrent dans la constitution du gynécée
ne sont sensibles que dans l'ovaire, qui est surmonté d'un seul
style épanoui en un stigmate unique. Nous allons étudier successi-
vement le stigmate, le style et l'ovaire.

Stigmate.
Le style, à son sommet, se dilate en une sorte d'infandibulum

plus où moins développé et de forme variable, que les auteurs
désignent sous le nom de stigmate. Cependant, M. Kôürnicke

202 A. GRIS.

prétend, dans le travail que j'ai déjà cité, qu’on ne saurait con-
sidérer comme stigmate que le bord de linfundibulum, d'où
suinte une humidité visqueuse. — Avant de décrire les formes
différentes que présente cet infundibulum, il importe d’exami-
ner si on le doit considérer comme étant, oui ou non, le stig-
male.

Dans une note publiéeil y a quelque temps dans les Ænnales (A),
j'a signalé l'existence d’un organe glanduleux particulier, qui
surmonte l'extrémité de la lèvre supérieure de l’infundibulum
dans le Siromanthe Porteana. « Si avec la pointe d’un scalpel on
gratte légérementla surface de cet organe, disais-je, on enlève une
espèce de pulpe qui se résout, sur le porte-objet du microscope, en
un nuage de très petits granules, et il reste sur la lèvre supérieure
de linfundibulum comme un petit panache de cellules allongées,
dressées, qui ont sans doute sécrété la matière pulpeuse et granu-
leuse qui les recouvre. » Cet organe, selon M. Kürnicke, serait le
véritable stigmate, et le liquide qu'il sécrète serait alors la véri-
table humeur stigmatique; mais sil en est ainsi, les grains de
pollen qui, au moment de l’anthèse sont contigus à la glande,
devront produire leur boyau pollinique sur cette plate-forme où
ils sont rangés avec tant d'ordre. Nous n'insisterons pas sur la
difficulté qu’auraient ces tubes polliniques (qu’on n'a jamais vus à,
que je sache) à gagner la cavité stylaire ; et d’ailleurs si les choses
se passaient ainsi, on ne comprendrait pas pourquoi les Marantées
culüvées dans nos serres fructifient si rarement. — Toutes les
hypothèses doivent tomber devant ce fait de la présence et du
“développement des grains de pollen dans linfundibulum du
style, que j'ai constaté dans plusieurs espèces. Nous reviendrons,
du reste, plus loin, sur ce dernier point, et nous admeltons comme
parfaitement démontré que cet infundibulum est le véritable stig=
mate, ef que l'humeur très apparente qu'il sécrète est la véritable
humeur stigmatique. La glande que M. Kôrnicke considère comme
étant le stigmate est pour nous un appareil accessoire, collecteur,
analogue à celui qu'on observe, par exemple, chez les Orchidées ;

(4) Ann. des sc. nat. , 4° série, t. IX, p. 485 (1858).

A

OBSERVATIONS SUR LA FLEUR DES MARANTÉES. 203

elle existe, mais à des degrés de développement très divers dans
toutes les espèces de Marantées que j'ai analysées vivantes,

Si nous étudions maintenant en détail les formes diverses
et caractéristiques que présente cet Imfundibulum stigmatique
qui ont élé à peine indiquées par les auteurs, et complétement
passées sous silence par M. Kornicke, nous verrons que dans
le Maranta bicolor, le stigmate est un peu comprimé latérale-

ment; son sommet plan ou légèrement concave figure une sorte

de plate-forme étroite et oblique, destinée à recevoir les grains de

pollen; le bord antérieur de cette plate-forme se termine en une

lèvre légèrement saillante concave, La lèvre inférieure est séparée
de la lèvre supérieure par un sinus profond d’un côté, et de l’autre
côlé par un sillon très peu marqué; elle est comme tronquée et
légèrement concave à sa partie moyenne, et se dilalte du côté du
sinus en un appendice latéral déjeté, tandis qu’elle est peu déve-
loppée du côté opposé. Par suite de cette conformation, la bouche
stigmalique, qui est étroitement ouverte et très oblique, présente
une forme obscurément trigone (pl. 12, fig. 4, 5).

Cette dernière apparence est plus sensible dans le jeune âge,
comme onle voit (pl. 42, fig. 8,9). Quant à la glande gl, elle est peu
ou point visible à l’état adulte, mais assez apparente dans le bou-
ton, bien qu’elle y soit peu développée; elle semble l’être davan-
age dans les Maranta arundinacea et indica.

Dans le Stromanthe Porteana, le stigmate est bilabié; la lèvre
supérieure est si courte, qu’elle semble nulle; son bord est droit ou
à peine infléchi ; elle est séparée d’un seul côté de la lèvre infé-
rieure par un sinus profond, dont le sillon se prolonge sur le style
et dont les deux bords sont renflés et charnus ; la lèvre inférieure,
qui se prolonge sans ihterruption du côté opposé au sinus avec la
lèvre inférieure, est plus développée du côté du sinus, sans cepen-
dant former, comme dans le Maranta bicolor, une sorte d’oreillette
déjetée. La bouche stigmatique, assez largement ouverte et présen-
tant trois angles arrondis, est très oblique, ainsi que la plate-forme
qui constitue la partie supérieure et externe du stigmate. La glande
gl, dont la lèvre supérieure est décorée, forme .une petite masse

920! | A. GRIS.

plus ou moins arrondie, blanche, d'aspect cireux et de consistance
pulpeuse (pl. 12, fig. 17).

Le stigmate, dans les Maranta arundinacea et indica, se rap-
proche plus par sa forme de celle du stigmate des Stromanthe
que ne le fait celui du Maranta bicolor. Cependant la bouche
semble être plus étroite et plus franchement trigone, et l’une des
extrémités latérales de la lèvre inférieure est aussi plus développée
dans ceux-ci que dans les Stromanthe.

Je sais bien que ces différences ne sont pour ainsi dire que des
nuances, mais il ne faut point pour cela les négliger.

Dans l’Ischnosiphon, le stigmate s’allonge en une sorte de bec
dans lequel l'ouverture stigmatique longue, étroite et oblique,
semble être découpée. La partie postérieure du stigmate est termi-
née par une gibbosité très caractéristique. Dans le bouton on voit
aisément que la glande forme un collier autour de la partie supé-
rieure de la bouche ou plutôt de la fente stigmatique (pl. 42,
fig. 7).

Dans le Thalia dealbata (pl. 12, fig. 12), la lèvre supérieure,
semi-cireulaire, est si courte, qu’elle semble nulle : elle se prolonge
d’un côté, sans interruption, avec une lèvre inférieure bilobée et
si développée, qu’elle rappelle le long labelle d’une Orchidée,
tandis qu'il y a un sinus profond sur la paroi latérale opposée ;
la glande stigmatique qui couronne le bord supérieur de l’infun-
dibulum est très facile à voir.

Dans les Calathea, le stigmate est encore bilabié; la lèvre
supérieure est presque toujours plus développée que l'inférieure,
qui est en général très courte, et ne forme qu'un petit rebord
arrondi ; sur la surface externe et légèrement convexe de cette
lèvre, sont déposés les grains de pollen ; ‘son bord antérieur est
entouré d’un mince collier glanduleux qu’on voit très nettement
dans le bouton. Nous retrouvons ici cette gibbosité postérieure
que nous venons de signaler dans l’Zschnosiphon (pl. 12, fig. 41,
13, 14, 15, 16). |

Résumons maintenant rapidement les formes propres aux di-
vers groupes de Marantées : chez les Maranta et les Stromanthe,

OBSERVATIONS SUR LA FLEUR DES MARANTÉES. 205

les lèvres sont courtes et comme tronquées ; chez le Thalia deal-
bata, la lèvre inférieure bilobée est très allongée, pendante; chez
les Calathea, la lèvre inférieure est en général plus courte que
la supérieure; chez l’Ischnosiphon, le stigmate est en forme de
bec et fendu obliquement. On voit donc que les genres semblent
pouvoir aisément se reconnaitre à l’aspect du stigmate, qui fournit
un caractère facile à saisir, et qu'il importe de ne pas négliger pour
la commodité de la détermination.

Style.

Le style n’est jamais entièrement libre d'adhérence avec les
autres parties de la fleur ; sa longueur varie dans les divers groupes.
Il est relativement court dans les T'halia et les Stromanthe, long
dans les Calathea, très long dans l’Zschnosiphon. Quant à son
volume, il n’est pas toujours le même dans toute la longueur de
cet organe, et, à ce point de vue, on pourrait diviser les Marantées
que j'ai étudiées vivantes en deux groupes: dans le premier, ce
volume serait sensiblement égal de haut en bas ; dans le second,
il diminuerait considérablement vers le bas. Chez les T'halia deal-
bata et Stromanthe sanguinea et Porteana, le style ne s’amincit
point ; il est épais, solide et résistant de haut en bas (pl. 19, fig. 2).

Dans les Maranta bicolor, arundinacea et 1ndica, le style com-
mence à s’atténuer environ à moilié de sa longueur, puis se rétrécit
insensiblement jusqu’à son point d'insertion sur l'ovaire (pl. 12,
fig. à). Cependant il est encore assez volumineux pour qu'on le
distingue aisément, et qu’on le puisse isoler sans difficulté, sinon
sans rompre ses adhérences. Mais arrivons aux Calathea, au Ca-
lathea grandifohia, par exemple. Le style, en s’aminaissant et se
collant à la face interne du tube du périanthe, ne forme bientôt
plus qu'une bandelette étroite, aplatie, blanchâtre, qu'on a peine
à distinguer d’autres raies blanches qui lui sont voisines ; le style
semble s'être confondu avec le tissu même du tube de la fleur ; on
peut aisément s’en assurer en faisant une coupe transversale de ce
tube, dans cette partie inférieure renflée très voisine de l'ovaire ;
on voit alors qu’au bord intérieur de cette tranche, le tissu se sou-

206 A. GRIS.

lève en une petite éminence arrondie peu saillante, dont le centre
est occupé par une ouverture ovale, bordée de cellules papilleuses :
c’est le canal stylaire. La fusion du tissu du style avec celui du
tube floral est très manifeste. Il en est à peu près de niême dans le
Calathea orbiculata (pl. 12, fig. 6), dans les Calathea Warsce-
wiczt, albicans ; dans le Calathea flavescens, où l’éminence sty-
laire n’est plus sensible pour ainsi dire dans la partie tout à fait
inférieure du tube; dans l’Zschnosiphon.

Quant à la partie supérieure du style, qui est très épaisse, elle
offre un canal stylaire unique très excentrique (pl. 12, fig. 10).

Si l’on regarde comment le style se continue avec l'ovaire dans
le Stromanthe Porleana, par exemple, on verra que sa base n’est
point assise sur toute l'étendue de la face supérieure de l'ovaire,
mais seulement sur une petite partie marginale de cette face
(m, pl. 12, fig. 2); l'espace qu'il occupe est encore plus restreint
dans les Maranta, et presque nul dans les Calathea et les Lschno-
siphon, comme il est facile de le deviner après ce que nous avons
dit de la fusion du style avec le tube floral.

Nous étudierons plus tard le phénomène remarquable de len-
roulement brusque et élastique du style, et de son transport vers
le staminode calleux, à la face interne duquel le stigmate vient,
pour ainsi dire, frapper de la tête lors de l’anthèse. En résumé,
dans les espèces que nous avons analysées vivantes, nous avons
trouvé que le style n’était point atténué inférieurement dans les
Stromanthe et les Thalia ; qu'il l'était au contraire chez les Ma-
ranta; qu'enfin il se confondait mférieurement avec le tissu du tube
du périanthe dans les Calathea et l'Ischnosiphon. M. Kôrnicke
a gardé le silence à ce sujet; cependant ce caractère de l'égalité
ou de la diminution de volume du style, s’il est général, pourrait
aisément servir à distinguer les groupes.

Ovaire.
Le Calathea (pl. 15, fig. 2) a trois loges fertiles à l'ovaire, ne

contenant chacune qu’un seul ovule. Dans les Maranta, Thaha,
Zschnosiphon, il n’y à qu'une seule loge fertile, qui est de même

OBSERVATIONS SUR LA FLEUR DES MARANTÉES, 207
uniovulée. Plusieurs des auteurs qui se sont occupés de ces der-
niers genres n’ont pas saisi la véritable structure de l’ovaire, bien
que Nees d’Esenbeck ait reconnu, il y a près de trente ans (1),
quily a trois loges dans les ovaires du Maranta arundinacea et
du T'halia dealbata. C’est ainsi, par exemple, qu'on lira dans
Endlicher que les genres Maranta et Thalia ont un ovaire uni-
loculaire.

Cependant si l’on fait une coupe transversale de l'ovaire d’un
Maranta, d’un Stromanthe, d'un Thalia, d’un Æ{schnosiphon, et
qu’on la regarde sur le porte-objet du microscope avec un gros-
sissement suffisant, quoique assez faible, on y distinguera nette-
ment les trois loges (pl. 13, fig. 1): l’une, [f, est très large, c’est
celle qui est fertile; les deux autres, £. st, stériles, symétriquement
placées par rapport à celle-ci, sont représentées par deux fentes
plus ou moins onduleuses et plus ou moins béantes.

Dans les intervalles ou les cloisons de ces loges, on trouve trois
glandes septales. Ges glandes ont été prises par M. Lemaire pour
des loges stériles, et M. Kôrnicke, qui ne s'explique pas sur leur
nature, les appelle simplement des lumières (lumina).

Je n'ai jamais trouvé que trois loges à l'ovaire des Stromanthe,
des Maranta et de l’Zschnosiphon ; mais le T'halia dealbata m'a
offert quelques cas d’anomalie assez curieux, où le nombre des
loges augmentant, 1! n'y avait toujours qu'un seul ovule. On voit
pl. 13, fig. 4, la coupe transversale d’un ovaire à quatre loges dont
trois sont stériles ; 11 y a, dans cé cas, quatre glandes septales.

Les ovules des Stromanthe, Thalia, Calathea, Maranta, sont
basilaires et dressés; ils paraissent souvent plus où moins ana-
tropes dans leur jeunesse, et subissent plus tard une inégalité de
développement telle, qu'ils se rapprochent de la forme campylo-
tropique. Qu'on compare, par exemple, lovule du S#romanthe
sanguinea (pl. 15, fig. 5) avec la graine de cette même plante
(pl. 44, fig. 15), on dirait d'un ovule anatrope et d’une graine
résultant de la maturation d’un ovule campylotrope.

(1) Ueber die Gattungen Marantu und Thalia (Linnœu, 1831, p. 303).

208 A. GRIS.

RÔLE DES DIVERS ORGANES DE LA FLEUR.

Fécondations naturelle et artificielle.

Chez les Marantées, le stigmate et l’anthère sont accompagnés
de deux staminodes qui, s'ils ne produisent point l'élément fécon-
dateur mâle, servent du moins à préparer, à favoriser le contact
du grain de pollen avec le stigmate. C’est le jeu des divers organes
de la fleur qui servent directement ou indirectement à la reproduc-
tion que nous allons d’abord étudier ; pour le comprendre, il faut
voir venir les choses sur des fleurs d’àâges différents. Prenons
pour exemples le Stromanthe sanguinea et le Calathea orbiculata,
et assistons au développement de la fleur depuis cet âge où les
organes sont déjà nettement accusés et bien reconnaissables, jus-
qu’à l'épanouissement. Pour ne point trop compliquer les choses,
indiquons seulement les rapports de position et de grandeur de
trois organes, le stigmate, l’étamine et le staminode cucullé. Je
laisse de côté le staminode calleux, dont le rôle passif ne semble
commencer qu'à l’état adulte.

Detrès bonne heure, l’anthère est appliquée par sa face anté-
rieure sur un des côtés du stigmate, pendant que le staminode
cucullé, plus ou moins ouvert par en haut, embrasse par un de
ses bords la partie inférieure seulement de l'organe mâle.

Plus tard, quand le staminode cucullé a grandi, qu'il a dépassé
l’anthère, que son sommet forme une petite voüle un peu au-
dessus d'elle et du stigmate, le bord de cette petite voute la retient
encore prisonnière; son filet est droit et sa loge unique toujours
contiguë au stigmate. C’est à ce moment que la loge s'ouvre et
verse sur la face externe et supérieure (plate-forme) du stigmate
les grains de pollen reliés entre eux par une sorte de mucus. En
effet, si l’on ouvre une fleur un peu plus âgée que celle-ci, on voit
que le filet de l’étamine est rejeté en arrière, que l’anthère est
béante, plus on moins vide; que sous le capuchon du staminode
cucullé, le stigmate, qui, par l'allongement du style a grandi jus-
qu'à toucher la face interne de ce capuchon, porte sur sa plate-

OBSERVATIONS SUR LA FLEUR DES MARANTÉES. 209
forme un disque de grains de pollen admirablement rangés les uns
à côté des autres. C’est à ce moment que la fleur s'épanouit. Si
alors on touche légèrement cette fleur qui vient d’entr'ouvrir ses
diverses pièces, le style ou la partie supérieure du style se courbe
brusquement, et porte le stigmate, qui se dégage de son capuchon,
dans l'oreillette membraneuse du staminode calleux ou dans le
voisinage du callus. Mais, dans cette rapide opération, le stigmate
a subi quelques avaries : une portion de pollen dont il était le dé-
positaire et de la substance de la glande demeure souvent au fond
du capuchon, et l’on trouve ces mêmes traces de son passage près
du sommet du staminode calleux, où le stigmate est venu pour
ainsi dire frapper de la tête, avant de se dérober aux regards dans
l'oreillette ou de s’appliquer près du callus.

M. Lemaire (1)pense que «l’anthère, étant latérale, doit évidem:
ment faire sur son pédicelle un mouvement de torsion pour venir
s'appliquer sur l'organe femelle, à moins que l’on n'aime mieux,
comme M. Planchon, dit-il, faire faire ce mouvement de torsion
par le style épais et solide de ce même organe. » Il n’y a point de
mouvement de torsion de l’anthère; ce n’est pas elle qui vient
s'appliquer sur l'organe femelle : c’est l’organe femelle, qui dès
un âge très jeune lui est contign, et cette contiguité, qui continue
pendant l'allongement du style, est favorisée d’ailleurs par le sta-
minode cucullé, qui empêche l’anthère de s’écarter du stigmate,
tant que la déhiscence n’a pas eu lieu. De plus, M. Planchon (2) n’a
appliqué l’incurvation du style qu’au phénomène par lequel le stig-
mate va se loger dans l’oreille membraneuse du staminode calleux,
comme il est aisé de le voir par la phrase suivante : « Stylus...
» primum cucullo staminodi adjacentis vi tensus, demum verisi-
» iniliter élastice desiliens, curvaturaque validiore deflexus, apicem
» stigmaticum in duplicaturam staminodn latioris seu labelli oppo-
» siti occultans. »

La barrière qu’opposent la présence et la situation même de la
olande à la pénétration des grains de pollen dansla cavité stigma-

(4) Jardin fleuriste, £° vol, pl. 40.
(2) Flore des serres et des jardins de l'Europe (1852-1853).
4° série. Bor. T. XII. (Cahier n° 4.) ? 14

210 A. GRIS.

tique ; le mode de revêtement du stigmate par le cucullus exacte-
ment appliqué, au moment de l'épanouissement de la fleur sur la
glande et sur les grains de pollen; l’incurvation brusque du style
pour porter le stigmate dans l’oreille du staminode calleux ou dans
le voisinage du callus, sont autant de phénomènes compliqués dont
j'oserai tout à l'heure offrir la raison, mais dont la nécessité phy-
siologique n’est guère compréhensible pour nous.

Nous avons dit plus haut que nous considérions la glande qui
couronne la lèvre stigmatique supérieure comme un organe col-
lecteur. Mais pourquoi y a-t-il un staminode cucullé et un stami-
node calleux ? à quoi servent-ils ? Pourquoi ce brusque mouvement
du style? Pourquoi le stigmate vient-il appliquer sa tête à la face
interne du staminode calleux ? Questions bien dignes d’exciter la
curiosité du botaniste, auxquelles personne, que je sache, n’a
jusqu'ici répondu et que je vais essayer d'aborder.

Voyons d’abord quel est le rôle du staminode cucullé. Il nous
semble qu’il est double : il sert à retenir l’anthère en contact immé-
diat avec le stigmate jusqu’au moment de la déhiscence de cet
organe, comme nous l'avons montré plus haut; de plus, je suis
porté à lui attribuer la formation de ce disque de granules polli-
niques qui se moule sur la partie supérieure et externe du stig-
mate. Les grains de pollen sont versés confusément par l’anthère
sur la plate-forme stigmatique et y forment ainsi un petit amas
irrégulier. La pression du stigmate sur le fond du capuchon, lors
de l'allongement définitif du style, ne peut-elle pas déterminer le
nivellement de cet amas irrégulier de granules, sur un plan qui
est celui de la surface même de la plate-forme stigmatique? Des
lors ces grains, réunis en une sorte de disque légèrement adhérent,
pourront subir sans accident le choc violent que le style, lors de
son brusque enroulement, imprime au stigmate qui les porte.

Examinons maintenant pourquoi le stigmate vient s’appliquer à
la face interne dustaminode calleux. En provoquant artificiellement
le dégagement du stigmate emprisonné sous le capuchon et l’incur-
vation brusque du style, j'ai remarqué souvent que le stigmate
s’appliquait avec tant de force sur le staminode calleux, que les élé=
ments du disque pollinique en étaient désassociés et dispersés.

OBSERVATIONS SUR LÂ FLEUR DES MARANTÉES. 211

N'est-ce pas à ce moment que les grains de pollen ont le plus de
chance de pénétrer dans la cavité stigmatique ?

Soit que j'aie provoqué moi-même le brusque transport du stig-
mate sur le staminode calleux, soit que ce transport se füt faul
naturellement, c’est au moins après l’application du stigmaté sur
ce staminode que j'ai trouvé des grains de pollen dans l’infundibu-
lum stigmatique du Calathea villosa (var. pardina) et du Maranta
indica. M. Lindley en a trouvé également dans le stigmate du
_ Calathea zebrina. Je n’en a1 point vu chez le Maranta bicolor et
le Calathea grandifolia.

Les deux Staminodes du verticille interne concourraient donc
également à l’acte de l’imprégnation : l’un en assurant le dépôt du
pollen sur la plate-forme stigmatique, l’autre en favorisant la péné-
tration de ce pollen dans le stigmate même.

Cépendant les Marantées ne fructifient que rarement dans nos
sérres, tandis que lé T'haha dealbata, qu’on cultive en plein air dans
nos bassins, se couvre chaque année de riches panicules de fruits.
Céla ne tiendrait-il pas à ce qu’une excitation extérieure quel-
coriqué est nécessaire pour que le stigmate puisse se dégager du
capuchon qui l'enveloppe étroitement? Les vents, les oiseaux, les
insectes, sont sans doute, pour ces plantes bizarres, les intermé-
diaires naturels indispensables à l’imprégnation. Ces intermé-
diairés, qui font défaut dans nos serres, nous expliquent la stérilité
trop fréquente des fléurs; peut-être que, pour rendre certaines
espèces fécondes, il suffirait seulement d’agiter l’inflorescence ou
dé toucher les fleurs, dé manière à provoquer le transport du
style.

Quüoï qu’il en soit, j'ai essayé de faire des fécondations artificielles
diréctes dans lés serres du Muséum, c’est-à-dire que j'ai introduit
du! pollen dans la cavité stigmatique du pistil chez le Stromanthe
sanguined.

L’axe de l’infloréscence sur lequel j'ai opéré a donné quelques
fruits assez volumineux ; mais un axe voisin abandonné à lui-
même à présenté de’jeunes fruits. Il serait possible que l’ébrante-
ment produit par un contact assez prolongé eüt provoqué ces
fécondations indirectes. Cependant tous ces jeunes fruits sont tom-

9212 A. GRIS.

bés de bonne heure, sans atteindre à la maturité. Un jeune fruit
résultant de l'imprégnation artificielle directe continua de grossir ;
j'attendis plus de deux mois que quelque signe certain m'avertit
qu'il était mûr et que la graine avait acquis tout son développe-
ment.

Fruit.

Étudions d’abord ce fruit de Stromanthe sanguinea.

Dans sa jeunesse l'ovaire est rose, 1l devient vert quand il com-
mence à grossir ; à maturité, il est d’un beau jaune orangé (pl. 14,
fig. 10). Il ressemble alors à une petite sphère déprimée vers les
pôles ; des sillons qui vont d’un pôle à l’autre dessinent à sa sur-
face neuf côtes saillantes, dont trois grosses et six petites, celles-ci
étant disposées une à une à droite et à gauche d’une grosse côte.
Ce fruit est déhiscent, il s'ouvre en deux parties ét de haut en bas
(pl. 44, fig. 11). Deux valves inégales écartées en haut, laissant
entre elles dans la partie moyenne un intervalle qui permettait de
voir la graine, étaient rapprochées et soudées entre elles à la base,
au point d’adhérence avecle pédicelle ; l’une des valves présentait
trois côtes (pl. 14, fig. 13), une grosse accompagnée de deux pe-
tites ; l’autre en présentait six, deux grosses et quatre petites dis-
posées comme je l’ai indiqué plus haut. Afin de comprendrela struc-
ture du fruit, il n’est peut-être pas inutile de rappeler que l'ovaire
desStromanthe est triloculaire, que deux de sesloges sont stériles,
et qu'il n’y à qu’un ovule dans la loge fertile. La valve à trois
côtes appartient à la loge fertile; c’est elle qui s'est écartée pour
ne point faire obstacle à la chute de la graine ; l’autre valve est
réellement composée de deux valves soudées correspondant aux
deux autres loges qui ne se sont pas séparées. Si nous ajoutons que
le fruit est charnu ou presque charnu, on voit qu'il n’entrera
aisément dans aucune des divisions admises pour la classification
des péricarpes.

Chaque pédoncule floral de la grappe de Maranta indica(pl. 14,
fig. 19) porte deux fleurs, l’une à l'extrémité d’un pédicelle
allongé, l’autre presque sessile. Quand ces deux fleurs sontfécondées,

OBSERVATIONS SUR LA FLEUR DES MARANTÉES, AE

chaque pédoncule floral porte donc deux fruits : le court pédicelle
de l’un est entièrement et fortement renflé; l’autre, également
renflé dans le point où le fruit est assis, s’atténue insensiblement, et
devient bientôt, commele pédoncule lui-même, étroit et comprimé.
Le fruit est vert, lisse, presque pyriforme, finement pubescent et
parcouru de haut en bas par trois sillons, ce qui le divise en trois
valves : l’une de ces valves est plus étroite que les deux autres el
beaucoup moins convexe. M. Kôrnicke dit que le fruit des Maranta
est membraneux; il ne l’est pas au moins dans celui que j’examine
icl : sa consistance est semblable à celle du fruit du Stromanthe
sanguinea, c’est-à-dire que c’est un tissu charnu, mais d’une cer-
laine solidité. On peut aisément séparer les trois valves qui s’ajus-
lent par la tranche relativement très épaisse du péricarpe. L’endo-
carpe, d'un blanc verdâtre, présente de petites rides transversales
inégales (pl. 13, fig. 20), empreintes laissées par la graine que
pressent étroitement les parois du péricarpe.

Le fruit du T'halia dealbata est un peu irréguliérement ovoïde,
membraneux (pl. 44, fig. 4) : l'ovaire est violet; mais, à mesure
que l’ovule se change en graine, le péricarpe devient vert, pour se
colorer plus tard d’un pourpre noir.

Le fruit du Calathea villosa est vert, trigone, membraneux, sur-
monté de trois sépales persistants non flétris, enveloppant un filet
mince, noirâtre, qui résulte du desséchement des diverses parties
de la fleur (pl. 14, fig. 18) ; son sommet, couronné de trois doubles
pointes obtuses, est façonné en une sorte de petite capsule ; il y a
un sillon très marqué entre deux valves contiguës ; la soudure
cesse même vers le sommet des valves, qui est épaissi et creusé
obliquement, pour se changer en un simple rapprochement. A la
maturité, les trois valves s’écartent et tombent par déhiscence
loculicide.

La graine.

Dans le Stromanthe sanguineu, la graine est obscurément tri-
gone, munie de trois côtes peu sensibles, noire, brillante, à surface
inégale (pl. 14, fig. 14); elle est accompagnée à sa base d’une

21/ A. GRIS.

expansion arilliforme ar, formant un cercle presque complet autour
du hile et se recourbant en une petite voute au-dessus de lui. Celle-
ci est formée de petites lanières d’un jaune orangé, reliées entre
elles, diversement et très élégamment contournées ; sous les tégu-
ments de la graine on trouve un albumen farineux, abondant, en-
veloppant un embryon recourbé en forme de crochet (pl. 44,
fig. 15); un canal cest situé entre les deux crura de l'embryon.

La graine du Maranta indica est un prisme triangulaire à
arêtes courbes (pl. 14, fig. 16); ces arêtes se terminent en haut,
chacune par une petite pointe, et le sommet de la graine est oc-
cupé par une petite pyramide triangulaire. Les deux faces latérales
de la graine sont légèrement convexes et présentent quelques
rides transversales ; elles comprennent la face ventrale, qui est
beaucoup plus étroite que les deux autres et concave. A la base de
la graine on trouve une expansion arilliforme d’un blanc d’ar-
gent, assez analogue à celle du Stromanthe sanguinea. Sous les
téguments, un albumen farineux abondant enveloppe un embryon
plié par le milieu sur lni-même (pl. 44, fig. 21) ; un canal sensible-
ment droit s’élève entre les deux crura de l'embryon.

La graine du Calathea villosa (pl. 14, fig. 22) présente trois
faces : celle qui est tournée du côté du péricarpe est la plus déve-
loppée, elle est convexe, ridée, irrégulièrement mamelonnée ; les
deux autres, planes, faisant entre elles un angle dièdre, sont fine-
ment chagrinées. A la base de la graine on trouve une expansion
arilliforme d’un blanc jaunâtre, assez développée. Sous ses tégu-
ments un albumen farineux abondant enveloppe un embryon re-
courbé en crochet (pl. 414, fig. 23); un canal analogue à celui du
Maranta indica s'élève entre les crura de l'embryon.

Arrivons enfin à la graine du T'halia dealbata, sur la structure
de laquelle nous allons nous arrêter un peu plus longtemps. Elle
est lisse, subelobuleuse, légèrement aplatie sur deux faces corres-
pondantes (pl. 44, fig. 2). On aperçoit à sa base une expansion
charnue (pl. 14, fig. 6), d’un jaune clair rosé sur la graine fraiche,
d’un brun noir sur la graine sèche, formant comme un disque ar
muni de deux lobeslatéraux plus ou moins arrondis, et présentant
une petite ouverture centrale qui est sans doute le micropyle. Si

OBSERVATIONS SUR LA FLEUR DES MARANTÉES. 915

l’on fait une coupe longitudinale de la graine dans un plan mené
convenablement, suivant les faces convexes de cette graine, on
découvrira l'embryon, qui est très élégamment recourbé en cro-
chet et contenu dans nn canal de même forme, lequel est creusé
dans l'épaisseur de l'albumen (pl. 14, fig. 3). Deux autres
coupes longitudinales, menées toujours par les faces convexes
de la graine, mais l’une en avant l’autre en arrière du plan qui
contient le canal embryonnaire, nous feront découvrir deux autres
Canaux recourbés également en crochet, mais vides en apparence
(pl. 44, fig. 4); il y a donc, dans l’albumen de la graine du
Thalia dealbata, trois canaux à peu près parallèles, dont le cen-
tral renferme l'embryon. Lorsqu'on divise transversalement cette
graine environ vers son milieu, on voit vers les bords de la sec-
lion six orilices disposés trois à trois en deux groupes, l'orifice
médian étant occupé par l'embryon (pl. 14, fig. 5); de même,
si l’on fait une coupe longitudinale suivant un plan déterminé
et passant par les faces aplaties de la graine, on verra deux
groupes de six orifices, L'existence de ces canaux supplémentaires
a déjà été signalée depuis longtemps. Rob. Brown (Prodromus
flore Novæ Hollandiæ, p. 307), après avoir indiqué l'existence et
la position des canaux vides, ajoute : «Hæc et propriis observatio-
» nibus didici nec non ex opüima figura D. Ferdinandi Bauer. »

Quant au sens que l’illustre botaniste anglais attribue à ces
canaux vides, il me semble être nettement indiqué dans les pas-
sages suivants : « Sin vero per medium albumimis sectio ducta, sex
» cavitates in conspectum venient, nempe crura ipsius embryonis
» etlectulorum duorum lateralium abortientium. Cum itaque struc-
» tura huic omnino similis, hactenus absque exemplo nec ulla ana-
» loga (nempe embryones plures in distinctis cavitatibus ejusdem
» albuminis\, nisi in Cycade et nonnunquam in Visco cognita sit ;
» rem memorari dignam esse credidi quamvis a proprio sCopo
» libelli alienam. » Telle n’est pas notre opinion sur les canaux
parallèles du Thalia, qui semblent tirer leur origine de la cha-
laze. |

M. Nees d’Esenbeck (loc. cit.) explique ainsi la présence des
canaux parallèles : «.... quos quidem canales e massa cellulosa in-

216 A. GRIS

» termedia et connectente ovuli campylotropi ab embryone in-
» terjecto ad utrumque latus dimota, ortos esse, ovulorum hujus-
» ce modi evolutione demonstratur. » De plus il ne les considère
pas absolument comme vides, car il dit : «.... Canalis... membrana
» subfibrosa fuscescente vestitus, inanis fibrisve hinc inde cellu-
» losis refertus..….. » J'ai pu m'assurer, en étudiant des graines
fraiches de Thalia dealbata, que ces cavités ne-sont pas seule-
ment des cavités circonscrites par du tissu périspermique, mais
qu’elles renferment au contraire un tissu très richement orga-
nisé. Il se compose, en effet, de cellules présentant des épaissis-
sements pariétaux disposés en une sorte de réseau et formant une
enveloppe dense et obscure ; en dedans, d’un tissu cellulaire à
parois minces, traversé par un nombre limité de faisceaux vascu-
laires rangés en cercle et composés essentiellement de trachées ;
enfin, d'un système de cellules reliées entre elles par des branches
de communication, souvent très fines, et qui ne sont pas sans
quelque ressemblance avec des laticifères.

Cette curieuse organisation des canaux parallèles dans le Tha-
lia dealbata se retrouvera à peu de différence près dans les
canaux plus ou moins droits qui s'élèvent entre les deux crura
de l'embryon, dans les graines du Maranta indica, du Calathea
villosa et du Stromanthe sanguinea. Le canal unique de chacune
de ces graines résulte d’un développement excessif de la chalaze,

EXPLICATION DES PLANCHES.
PLANCHE 41.

Fig. 4. Le staminode externe unique du Calathea flavescens.

Fig. 2. Une fleur en bouton du Stromanthe Porteana, dont on a enlevé le calice
et la corolle; ste, staminodes externes.

Fig. 3. Le staminode calleux du Stromanthe Porteana : c, callus.
Fig. 4. Le staminode calleux du Maranta bicolor : c, callus.
Fig. 5. Le staminode calleux du Thalia dealbata : c, callus.

OBSERVATIONS SUR LA FLEUR DES MARANTÉES. 217
Fig. 6. Le staminode calleux du Calathea grandifolia, accompagné de l'étamine :
c, callus.
Fig. 7. La fleur du Maranta indica : ste, staminodes externes.

Fig. 8. Le staminode calleux de l’Zschnosiphon (Thalia farinosa, Ad. Brong.):
c, callus.

Fig. 9. Coupe transversale d'une jeune anthère de Calathea grandifolia; on
voit qu’elle est divisée en deux logettes.

Fig. 10. L'étamine du Maranta indica avec son appendice pétaloïde ap ; l'an-
thère est libre.

Fig. 41. L'étamine de l'Ischnosiphon avec son appendice pétaloïde ap: l'an-
thère est adnée.

Fig. 12. L'étamine du Calathea villosa avec son appendice marginiforme am :
l'anthère est adnée.

Fig. 43. Le staminode cucullé du Maranta bicolor : al, appendice latéral ;
ca, capuchon.

Fig, 44. Le staminode cucullé de l'Ischnosiphon ; al, appendice latéral ; ca, ca-
puchon.

Fig. 15. L'étamine du Stramanthe Porteana avec son appendice pétaloïde ap ;
l'anthère est libre.

Fig. 16. Le staminode cucullé du Thalia dealbata : al, appendice latéral :
ca, capuchon.

Fig. 17. Le staminode cucullé du Stromanthe Porteana : al, appendice laté-
ral: ca, capuchon.

PLANCHE 492.

Fig. 4. Le staminode cucullé du Calathea 3ebrina : al, appendice latéral ;
ca, capuchon,

Fig. 2. Le pistil du Stromanthe Porteana : ov, ovaire; st, style ; sig, stigmate.
Fig. 3. Le pistil du Muranta bicolor : ov, ovaire; st, style ; stg, stigmate.
Fig. 4,5. Le stigmate d’une fleur adulte de Maranta bicolor.

Fig. 6. Coupe transversale du tube floral dans le Calathea orbiculata : d, émi-
nence stylaire ; o, canal du style. La fusion du tissu du style avec celui da
tube floral est très manifeste.

Fig. 7. Le stigmate de l’Ischnosiphon.
Fig. 8,9. Stigmates dans de jeunes fleurs de Maranta bicolor : gl, glande.

Fig. 40. Coupe transversale du style dans le Stromanthe Porteana : o, canal du
style,

218 | A. GRIS.

Fig, 141. Le stigmate du Calathea Warscewiczü : gl, glande.
Fig. 42. Le stigmate du Thalia dealbata.

Fig. 43. Le stigmate du Calathea zebrina : gl, glande.

Fig. 14, 16. Le stigmate du Calathea orbiculata.

Fig. 45, Le stigmate du Calathea grandifolia.

Fig. 17. Le stigmate du Stromanthe Porteana : gl, glande,

ee
PLANCHE 19.

Fig. 1. Coupe transversale d'un jeune ovaire de Stromanthe sanguinea : lf, loge
fertile : !st, loges stériles ; gls, glandes septales ; ovl, ovule.

Fig. 2. Coupe transversale de l'ovaire du Calathea grandifolia : gls, glandes
septales ; ovl, ovule.

Fig. 3. Jeune ovule de Calathea grandifolia.

Fig. 4. Coupe transversale d’un ovaire anomal à quatre loges du Thalia deal-
bata : gls, glandes septales ; {st, loge stérile ; ovl, ovule.

Fig. 5. Ovule de Stromanthe sanguinea.

Fig. 6. Ovule de Calathea grandifolia : a, vu par la face antérieure ; b, par la
postérieure ; s, secondine ; r, raphé ; f, funicule.

Fig. 7. Ovule de Thalia dealbata.
Fig. 8. Ovule jeune de Calathea grandifolia.

Fig. 9. Ovule de Maranta indica.

PLANCHE 14.

e, embryon.
a, albumen.
ar, expansion arilliforme.

c, canal situé entre les deux crura de l'embryon.

Fig. 4 à 9, Thalia dealbata.

Fig. 1. Le fruit.

Fig. 2. La graine.

Fig. 3. Coupe longitudinale de cette graine pour faire voir l'embryon.

Fig. &. Coupe longitudinale de la même, intéressant l'un des deux canaux pa- |
rallèles, cp.

OBSERVATIONS SUR LA FLEUR DES MARANTÉES. 219

Fig. 5. Coupe transversale de la graine, pour mettre en évidence les six orifices
disposés trois à trois, dont le médian, pour chaque groupe, est occupé par
l'embryon, et les latéraux par des sections des canaux parallèles,

Fig. 6. Graine vue par sa base,

Fig. 7. La même, préparée de manière à mettre à nu l'embryostége eb.
Fig. 8. La même, dont on a enlevé l'embryostége : r, radicule.

Fig. 9. L’embryostége.

Fig. 10 à 45. Stromanthe sanguinea.

Fig. 10. Le fruit.

Fig. 41. Le même, s'ouvrant en deux valves inégales et laissant voir la graine gr.
Fig. 12. Le même, dont on a enlevé la valve de la figure 13 et la graine.
Fig. 13. Une valve du fruit.

Fig. 14. La graine.

Fig. 45. Coupe longitudinale de la graine,

Fig. 16, 17, 19, 20, 21. Maranla indica.

Fig. 16. La graine.

Fig. 17. Coupe transversale de cette graine.

Fig. 19. Le fruit.

Fig. 20. Coupe longitudinale du fruit.

Fig. 21. Coupe longitudinale de la graine.

Fig. 18, 22, 23, 24. Calathea villosa.

Fig. 48. Le fruit. :

Fig. 22. La graine.

Fig. 23. Coupe longitudinale de cette graine.

Fig, 24. Coupe transversale de la même.

INDEX SEMINUM

IN HORTO BOTANICO HAMBURGENSI
(ANNO 1858 COLLECTORUM)

Auctore LEHMANN.

NICOTIANA EXASPERATA Lehm.

Bipedalis ; caule erecto, tereti, tuberculis subhyalinis pilisque
glanduligeris dense adsperso ; foliis sessilibus, inferioribus ova-
libus obtusiuseulis basi valde attenuatis, superioribus lanceolatis
acutis, omnibus basi cordatis vel auriculatis, valde undulatis et
subrepandis, piloso-glandulosis hirtellisque, subtus ad costam
exasperatis ; floribus paniculatis ; pedicellis fructiferis nutantibus ;
calycibus 10-costatis valde viscoso-glandulosis, laciniis inæquali-
bus longe attenuatis obtusiuseulis ; quinta reliquis multo longiore ;
corolla (horis tantum matutinis et vespertinis aperta) extus viridi-
purpurascente, pubescente-glandulosa, tubo angustissimo calyce
triplo longiore ; limbi laciniis oblongis, acutiusculis, plicalis,
intus albicantibus, dein purpurascentibus ; staminibus brevissimis,
inclusis, summo tubo insertis.

Accedit ad N. repandam et Donnianam. Differt a priore præ-
sertim caule et foliorum costa subtus exasperata formaque folio-
rum ; a posteriore forma foliorum et floribus paniculatis, ab utra-
que pedicellis in fructu nutantibus.

Accepimus sub nomine N. repandæ, Lehm. in E. Otto, Gar-
ten- und Blumen-Zeitung, 1858, p. 139.

ŒNOTHERA MACROSIPHON Lehm,

Herbacea, erecta, bipedalis, molliter pilosa; pilis patentissimis ;
caule tereti, firmo, a basi ramoso; foliis sessilibus, lanceolatis,
remote glanduloso-dentatis ; superioribus sinuato-undulatis, basi

INDEX SEMINUM IN HORTO BOTANICO HAMBURGENSI. 291

latioribus ; floribus axillaribus, sessilibus ; tubo calycis prælongo,
gracil, curvulo, quam ovarium subcylindrieum quintuplo fere
longiore, valde piloso et purpurascente, limbi laciniis longitudine
fere ovarti; petalis ovalibus, obtusiusculis, integerrimis (flavis,
dein purpurascentibus), quam calycis lacinia et stamina breviori-
bus ; stigmate 8-partito ad orificium tubi calycis ideoque stamini-
bus multo breviore ; lobis crassiusculis elongatis ; capsulis oblongo-
clavatis, curvulis, obsolete 8-costatis.

. Accepimus sub nomine OE. villosæ ex Horto Darmstadiano,
Lehm.,1. c.

PAVETTA UNDULATA Lehm.

Fruticosa, tripedalis, glaberrima; foliis coriaceis, petiolatis,
oblongis v. oblongo-lanceolatis, oblique acutis, basi attenuatis
undatis ; stipulis longe acutatis marcescentibus ; pedunculis
terminalibus , trichotomis, corymboso-multifloris ; floribus al-
bis, suaveolentibus ; dentibus calycinis brevissimis, obtusis ; limbi
lacinus lanceolatis, margine revolutis, longitudine tubi et styli.
Lehm., 1. c., p. 437.

NOTE
L'ORIGINE ET LE DÉVELOPPEMENT DES URNES
DANS LES

PLANTES DU GENRE NEPENTHES,

Par M. Jos. Dalton HOOKER.

(Extrait d’un mémoire présenté à la Société Linnéenne de Londres en 4859.)

fl ÿ à dix-sépt ans (1), le botaniste Griffith avait cherché à
établir le fait que l’appareil si remarquable qui termine cer-
tainés feuilles, dans les Vepenthes, avait pour point de départ une
simple glande située sur un prolongement de lanervure médiane.
M. J. D. Hooker, reprenant les observations de Griffith, arrive au-
jourd’hui à la même conclusion. Il nous paraît donc intéressant de
reproduire ici, en les empruntant àson mémoire, les raisons sur les-
quelles il base cette interprétation d’un organe dont la forme
étrange et la structure compliquée ont si souvent éveillé la curio-
sité des botanistes et donné lieu à plus d’une explication hasardée.

« Les feuilles les plus jeunes qu’il m’a été possible d'observer,
dit M. D. Hooker, sur des individus adultes de Vepenthes cultivés
dans les serres de Kew, se montrent sous la forme d’un petit ma-
melon conique, obtus à son extrémité, long d’environ un + de
pouce (à peu près 1/4 de millimètre) (fig. 1), et parcouru, sur sa
face supérieure, par un sillon peu prononcé qui va aboutir à une
légère dépression de forme ovale, située immédiatement au-dessous
du sommet. A cet âge, la cuticule est à peine perceptible, mais

(1) Voy. le Journal of Natural History, de Calcutta, numéro de juillet 4843,
p. 234.

Il
l
}

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URNES DES NEPENTHES. 298

déjà la dépression ovale se fait remarquer par une surface plus
lisse et plus luisante, et par une couche superficielle de cellules
moins nettement définies que sur le reste du corps. Si l’on divise
ce dernier par une coupe longitudmale passant par le sillon me-
dian et par la dépression ovale (fig. 2), on voit que sa substance
se compose d’un parenchyme assez dense, qui devient peu distinct
et comme déliquescent au niveau de la cavité ovale. Cette cavité
est, à cette période du développement de la feuille, tout ce qui
existe de l’urne future, et elle n’est rien autre chose qu'une
simple glande.

A un âge un peu plus avancé, quand la spécialisation des par-
ties est déjà mieux marquée, on voit le mamelon conique tendre à
devenir le limbe d’une feuille, au sommet de laquelle serait super-
posé un organe particulier. À ce moment (fig. à), il peut avoir #&
de pouce de longueur ; sa pointe s’allonge et se redresse; son sillon
longitudinal se creuse et prend insensiblement, par le relèvement
de ses bords, la forme d’une gouttière. Bientôt, à peu près à égale
distance de la base et du sommet, on le voit se retirer sur un
espace de plus en plus grand; sa pointe terminale continue à
croître et à se recourber au-dessus de la cavité ovale, devenue
elle-même plus profonde. L’enveloppe générale est aussi plus
caractérisée, excepté sur la glande, qui a décidément pris l’aspect
d’un corps sécréteur et dont la consistance est celle d’une pulpe
visqueuse et homogène.

Dans la période suivante, c’est-à-dire lorsque le corps entier
est long de + à + de pouce, des modifications considérables
ont eu lieu. Le rétrécissement que nous avons vu tout à l’heure
se former vers son milieu se présente maintenant sous la forme
d’un col allongé qui sépare deux régions désormais très distinctes,

c’est-à-dire une partie basilaire, qui sera le limbe de la feuille, et

une-partie terminale qui deviendra l’urne. Le sillon longitudinal
est peu marqué sur la partie rétrécie, qui semble déjà n’être qu’un
prolongement de la nervure médiane de la feuille, ainsi que sur
Vurne rudimentaire qui la termine, mais 1l forme un véritable
canal à bords relevés sur le limbe situé au-dessous. La glande est
déjà une cavité profonde, béante par un large orifice quadrangu-

991 J. D. HOOKER.

laire, au-dessus duquel se projette la pointe recourbée quenous avons
vue se former au sommet du mamelon primitif, et qui va devenir
le couvercle de l’urne. En faisant passer une section longitudinale
par le milieu de l’organe (fig. 5), on voit une ligne pâle et étroite
se diriger, dans l'épaisseur du tissu, le long du bord dorsal, et par-
venir jusqu’à l’extrémité du futur opercule : c’est le premier linéa-
ment d’un faisceau vasculaire. Le petit corps conique qui, dans la
_ figure 4, se montre à la base du sillon longitudinal d’une feuille
en voie de développement, n’est autre chose qu’une seconde feuille
naissante. ss

Un peu plus tard, le limbe de la feuille, le prolongement de la
nervure médiane ( ou rétrécissement colliforme dont il a été ques-
tion ci-dessus), et l’urne naissante, sont déjà nettement caractéri-
sés ; l’opereule aussi a fait quelques progrès. Le limbe de la feuille
ést de forme conique, mais c’est un cône très allongé, et ses bords
relevés, qui lui donnaient la forme d’une gouttière, ont commencé
à s’infléchir en dedans, représentant ainsi la disposition de cette
partie de l’organe dans l’état de vernation. Le rétrécissement colli-
forme, ou, si l’on aime mieux, la nervure médiane prolongée, a
pris plus d’accroissement, toute proportion gardée, que le limbe et
que l’urne, et son sillon s’est presque effacé. Le sommet de l’urne,
c'est-à-dire le point extrême qui se trouve au delà de l’opercule,
commence aussi à s’allonger ; quant à l’opercule, il s’est abaissé
sur l’orifice de l’urne qu’il obture à peu près en totalité. Une sec-
tion longitudinale de l'organe (fig. 7) fait voir sa cavité se
prolongeant de haut en bas, et formant comme un sac dont la di-
rection est parallèle à celle des bords extérieurs. A mesure
que l’urne grandit, sa pointe, qui s’allonge d’abord beaucoup plus
rapidement que l’opercule lui-même, se recourbe insensiblement
en arrière, et devient finalement cette apophyse styliforme qui est
située sur le côté dorsal de l'urne. Une coupe longitudinale (fig. 8)
fait reconnaître que le faisceau vasculaire principal se rend à la
pointe de cette apophyse, ce qui amène à conclure qu’elle est le
véritable sommet organique de la feuille.

Les états plus avancés de développement ont été examinés sur
les Nepenthes Rafflesiana et N. phyllamphora (?), dont les urnes

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URNES DES NEPENTHES. 225
naissantes ne différent que faiblement, à l'extérieur, de celles que
nous avons observées précédemment. Dans le N. Rafflesiana, il
arrive souvent que l’apophyse terminale s’élargit et se divise ; elle
se couvre, de même que toute la surface de l’urne, de poils cou-
chés, qui se dirigent tous vers le haut de l’organe, excepté sur le
Jeune opercule où il affectent une direction opposée, Si, à ce degré
de développement, on fait une section longitudinale, on voit que
l’opercule s’est profondément enchâssé dans l’orifice de l’urne, qu'il
clot exactement (fig. 10), et on remarque, en même temps, qu'un

ou deux faisceaux vasculaires, dérivés du faisceau principal que

nous avons vu se rendre dans l’apophyse, pénètrent dans la sub—
stance de l’opercule et s’y ramifient.

On sat généralement que la vernation des feuilles, dans les
MNepenthes, est involutée, les deux bords étant roulés en dedans
et s’avançant au niveau de la nervure médiane. Cette remarquable
disposition, qui d’ailleurs n’est pas particulière au genre, me
semble plutôt un effet secondaire, et même accidentel, que l’état
prinntl ; car, sur de très jeunes feuilles de NW. Rafflesiana, j'ai
observé qu'à mesure qu'elles s’épaississaient et que leurs bords
s'étendaient, ces bords chevauchaient manifestement l’un sur
l'autre (fig. 4L), donnant lieu, par là, à une vernation convolutée.
Mais par suite du développement plus rapide de la moitié de limbe
destinée à envelopper l’autre, et de sa tendance prononcée à se
courber en dedans, il arrivait qu'au lieu de recouvrir l’autre moi-
lié, elle prenait simplement la forme d’un rouleau cylindrique,
parallèle à celui que la moitié de limbe opposée avait formé par
un procédé analogue, et en contact avec lui, au-dessus de la ner-
vure médiane. Si celte observation se confirmait, elle tendrait à
établir que la vernation involutée des feuilles est, au moins dans
quelques cas, une simple modification de la vernation convolutée,
qui est la plus ordinaire pour ces organes.

Dans l’exposé qu’on vient de lire, je me suis servi du terme,
déjà employé par Griffith, de nervure médiane prolongée (excur-
rent midrib); mais j'ai à peine besoin d'expliquer que la partie
rétrécie de la feuille qui sépare le limbe de l’urne, et qui devient
le pédicule de cette dernière, n’est pas plus une prolongation du

4° série. Bor. T. XII. (Cahier n° 4) 5 15

2926 3. D. HOOKER.

limbe lui-même que ne l’est le pétiole dans les espèces du genre où
les feuilles sont munies de cet organe. C’est une production plus
ou moins exactement analogue au cirrhe terminal de la feuille des
Gloriosa, des Flagellaria, de différentes espèces de Convallaria,
ete.; et quoique le développement en urne d’une glande située au
sommet de cet appendice soit quelque chose de très extraordinaire
et peut-être unique dans le règne végétal (1), l'existence de
landes au sommet des feuilles, ce qui, physiologiquement, a uñ
orand intérêt dans la question qui nous occupe, est loin d’être un
fait aussi rare et aussi anomal qu'on pourraît le supposer au pré-
mier abord. Ces glandes terminales sont très visibles sur les feuilles
du Limnocharis, des Caladium et de beaucoup d’autres genres
tant monocotylédonés que dicotylédonés. Dans lé Limnocharis
Plumieri en particulier, on voit, sur les jeunes sujets, l'extrémité
de la nervure médiane des feuilles occupée par une glande, et
comme cette glande est creuse, elle rappelle tout à fait le premier
âge de l’urne naissante d’un Vepenthes.

Depuis que les observations qu’on vient de lire ont été faites,
j'ai eu occasion d'examiner de jeunes sujets de Vepenthes, obte-
nus dé semis, ét que m'a communiqués M. Hugh Low, horticul-
teur fort habile, établi à Clapton, près de Londres. Ces plantes
naissantes sont très curieuses à observer, et elles me paraissent
jeter beaucoup de jour sur la question. Une d’entre elles, dont je
ne puis déterminer l'espèce, est représentée de grandeur naturelle,
dans la figure 49, et notablément grandie dans la figure 20. Lés
deux premières feuilles (fig. 20, a), c’est-à-dire les cotylédons,
sont opposées, lancéolées et aiguës ; les suivantés, sans transition
ni intermédiaires, portént à leurs sommets des ascidies, qui par
leur situation , leur forme, leurs proportions relatives, ressemblent
d’une manière frappante À celles des Sarracenia. Les feuilles les
plus jeunes, après les cotylédons, ont le limbe plus où moins
élargi, et la moitié supérieure de leur nervure moyenne est creusée
en un godet, ouvert par en haut, mais obturé partiellement,

(1) Je n'ai pas encore été à même d'étudier l’origine des urnes, dans le Cephas
lotus et les Sarracenia.

URNES DES NEPENTHES. 291

sur ce point, par un petit opereule cilié. À mesure que la feuille
croît, son limbe s’élargit à la partie supérieure, de manière à de-
venir successivement cunéiforme, puis obcordiforme et bilobé, le
godet ou ascidie occupant le sinus qui sépare les deux lobes. Lors-
qu’elles ont pris tout leur développement, ces feuilles ont de 4/4 à
3/h de pouce de longueur. On voit, à leur face supérieure, une
canaliculation médiane aboutissant, en haut, à une aréole triangu-
laire, légèrement bombée, qui correspond au ventre de l’ascidie,
dont le col dépasse d’une manière assez notable le limbe de la
feuille. Quant à ce hmbe lui-même, ses bords se prolongent, sous
forme d'ailes, sur les côtés du col de l’ascidie, jusqu’auprès de
son orifice, où ils se rencontrent et se réunissent, formant sur ce
point, et en decà de lorifice lui-même, une membrane transver-
sale, réfléchie et ciliée. La face inférieure de la feuille est bombée,
et on y voit la nervure médiane, très forte vers la base, s’éva-
nouir insensiblement, c’est-à-dire à mesure qu'elle se dilate pour
former le ventre de l’ascidie.

La remarquable structure des feuilles ascidifères du Vepenthes
naissant me suggère les idées suivantes :

4° Qu'il y a une très grande différence entre le développement
de la feuille et de son ascidie, dans les jeunes individus, et celui des
mêmes organes sur les plantes adultes, et qu’à première vue ces
deux modes de formation ne semblent pas se correspondre. Dans
la plante adulte, le limbe de la feuille, le pétiole, la nervure mé-
diane prolongée et l’urne qui la termine, sont très nettement déli-
mités, et l’urne elle-même commence par l'état le plus rudimen-
taire possible, celui d’une simple glande nue. Dans la plante nais-
sante, l’ascidie et son opercule se montrent déjà tout formés, dès
les premiers instants où la feuille entière est perceptible, et cette
ascidie n’ést ici qu'une nervure médiane creuse, ouverte au som-
| met et portant un opercule, et sur les côtés de laquelle le limbe
| foliaire se développe en un plan horizontal et non point d’après le
| Lype de la vernation enroulée. À mesure que la plante grandit, la
| partie supérieure de la nervure creusée, sur chaque feuille succes-
sive, s’enfle de plus en plus; son extrémité, qui forme le col de
| l’ascidie, se prolonge graduellement aussi au-delà du limbe de la

228 J. D. HOOKER.
feuille, et son orifice, ainsi que l’opercule qui le ferme,.se présen-
tent avec l’organisation compliquée qui caractérisent ces organes
dans le genre.

2° Que ce qui mérite surtout d’être remarqué dans la situation de
l'ascidie, c'est qu’elle occupe principalement la face inférieure de
la feuille ; que l'organe entier ne ressemble pas à une ascidie
portant de chaque côté une aile foliacéc, mais à une feuille, à la
face inférieure de laquelle serait adhérente une ascidie soudée en
partie avec elle ; que plus la feuille est développée, plus lascidie
semble s’en détacher et reculer vers l'extrémité du limbe. Cette
dernière circonstance me porte à conjeclurer que, sur la plante
adulte de cette espèce, l’ascidie finira par se dégager entièrement
du limbe de la feuille, bien qu'étant toujours en continuité, par sa
base, avec la nervure médiane (4). Lorsque la plante est arrivée à
un âge où le limbe de la feuille est un organe plus important que
l’urne, la vernation de ce limbe doit être sans doute ce que nous
avons vu plus baut sur une plante adulte.

3° Que le développement horizontal du limbe de la feuille sur
les côtés de l’ascidie, et la prolongation de ses bords sur le col de
cette dermère, semblent au premier abord devoir faire admettre
que les ailes de l’urne, dans la plante adulte, ne sont aussi que
les bords de la feuille, et que le limbe apparent n’est rien de plus
qu'un péliole ailé. Mais dans les individus naissants, les bords
décurrents, ou plutôt excurrents, du limbe foliaire n'arrivent pas
jusqu'à l’orifice de l’ascidie ; avant d’y atteindre, ils convergent
l’un vers l’autre et se confondent en une aile membraneuse trans-
versale, située en deçà de cei orifice; et plus la feuille s'éloigne
des cotylédons, plus aussi le col de l’aseidie se prolonge au-delà de
celle aile. En définitive, si on compare ces feuilles déjà avancées
des jeunes sujets de Vepenthes avec celles des individus adultes,
on pourra être amené à penser que l’aile transversale est le véri-
table sommet de la feuille, attendu que, dans ces derniers, l’extré-

(1) Depuis que ces observations ont été faites, M. J.-D. Hooker a reçu de
MM. Veitch, des échantillons plus avancés sur lesquels, effectivement, les
urnes étaient totalement dégagées du limbe de la feuille, et seulement en conti-
nuité avec la nervure médiane.

URNES DES NEPENTHES. 2%)

mité du limbe forme un rebord sensible en avant de l'insertion
du pédicule de l’urne (1). Ce rebord, qui reste rudimentaire dans
la plupart des espèces, est quelquefois même anssi très développé.
Il l’est tellement, dans le Vepenthes Rajah, par exemple, que le
linbe en est comme pelté, par suite de l’insertion du pédicule de
l’urne sur un point intermédiaire, entre le milieu et l'extrémité.
Je n’ai pas besoin d'ajouter que cette insertion a lieu à la face infé-
rieure du limbe.

h° Dans la description que j'ai faite du développement des
feuilles dans le Vepenthes adulte, j'ai établi que la glande qui se
transforme en urne est située vers le sommet de la feuille nais-
sante. L'examen de ce qui se passe dans les individus naïssants,
tend à démontrer que cette glande est le véritable sommet or-
ganique d’une nervure en voie de formation, et il en est certai-
nement amsi. Le fait n'est pas douteux non plus dans le Limno-
charis Plumieri. Des glandes analogues se montrent souvent sur
les bords des feuilles, sur les nervures médianes et latérales, et
enfin sur les pétioles ; elles sont surtout fréquentes aux points de
rencontre des nervures et à la base du limbe (comme dans les
Cucurbitacées, les Légumineuses, etc.), ou aux serratures des
feuilles, là où les nervures latérales rejoignent une nervure mar-
ginale (dans les Auranliacées, les Myrsinées, etc.), ou enfin, là où
des nervures latérales convergent vers le sommet d’une nervure
médiane (dans le Vepenthes, les Limnocharis, ete.).

5° Le passage subit que nous remarquons, sur les Vepenthes
naissants, des feuilles cotylédonaires sans ascidies aux feuilles
ascidifères qui les suivent immédiatement, est un fait extrêmement
remarquable. Dans l’espèce que j'ai examinée, 1] n’y a entre ces
deux états aucun intermédiaire. Ceci reng moins anomale, à mes

(1) Des sujets plus développés que ceux dont il a été question ci-dessus, ne
confirment pas cette manière de voir. Il paraît au contraire que les ailes des
urnes, dans les plantes adultes, correspondent aux prolongements du limbe sur
les ascidies des jeunes sujets, et que l'aile transversale s'v évanouit. L’anneau
n existe pas encore sur les ascidies des plantes naissantes, et, dans les sujets
adultes, il occupe tout l'espace qui se trouve entre l'orifice de l'urne et l'aile
transversale. (Note de l'auteur.)

230 J, D, HOOKER,

yeux, la formation des urnes et ascidies dans les Sarracenia et le
Cephalotus, où ces organes, autant que j’ai pu m'en assurer, sont
toujours parfaitement caractérisés et jamais dans un état de transi-
tion avec la forme ordinaire des feuilles. Si, dans les Vepenthes,
il existait une transformation graduelle des feuilles en ascidies et
en urnes, l’absence de ces transitions, dansles deux genres que je
viens de nommer, y constituerait un état de choses tout à fait
exceptionnel.

La ressemblance qu'il y a entre les ascidies des jeunes Ve-
penthes et celles du Sarracenia purpurea est très grande, et elle
laisse peu de doute, dans mon esprit, sur l'identité morphologique
de ces organes dans l’un et l’autre genre. Je n’ai jamais observé
d'individus naissants de Sarracenia et de Cephalotus, mais la com-
paraison des très jeunes feuilles de ce dernier avec celles des
Nepenthes montre de curieux et nombreux points de contael
entre elles. Dans le Cephalotus, les feuilles ordinaires sont par-
faitement simples et semblables aux feuilles cotylédonaires du
Nepenthes, et les feuilles ascidifères y naissent déjà caractérisées
comme telles, présentant leur cavité et leur opereule cilié, dès
l'instant où elles deviennent perceptibles à l'œil ; et bien qu'elles
s’entremêlent, pendant toute la vie de la plante, aux feuilles
ordinaires, et qu’elles soient dans leur voisinage immédiat, 1l n'y
a jamais de formes intermédiaires qui fassent le passage des unes
aux autres, pas plus, en un mot, qu'entre les cotylédons des jeunes
Nepenthes cités plus haut et les feuilles pourvues d’ascidies qui
leur succèdent. Il faut ajouter à cela que, dans l’ascidie naissante
du Cephalotus, le pédicule a tout l’aspect d’un pétiole qui porterait
à son extrémité un renflement creux et inséré obliquement à sa
face inférieure. Si cette analogie avec les Vepenthes est réelle, le
pédieule de l’urne du Cephalotus n’est autre chose qu’une nervure
médiane sur les côtés de laquelle aucun limbe ne s’est développé.

URNES DES NEPENTHES, 251

EXPLICATION DES FIGURES.

PLANCHES #6 ET 4#7—

Fig. 4. Mamelon conique, qui est le commencement d’une feuille dans le Ve-

penthes gracilis, Korthls (N. lævis, Hort.). En «, grandeur naturelle de ce mi-
melon,

Fig. 1. b. Le même mamelon plus avancé.
Fig. 2. Section longitudinale de ce mamelon,

Fig. 3. Le même un peu plus avancé ; la nervure médiane prolongée et l’urne
qui la termine commencent à se dessiner.

Fig. 4. État plus avancé de l'organe. On voit poindre en a une seconde feuille,
Fig. 5. Section verticale de cet organe.

Fig. 6. Sommet de la feuille, lorsque le limbe, le prolongement de la nervure
médiane et l'urne sont déjà nettement limités.

Fig. ‘7. Section verticale de cette urne.

Fig, 8, Section verticale d une urne commençante du N. Rafflesiana,
Fig. 9. La même urne plus avancée.

Fig. 10, Sa coupe longitudinale, dans ce dernier état.

Fig. 414. Vernation convolutée du limbe commençant de la feuille du M, Raffle-
siana. 3

Fig, 42. Urne plus avancée de la même espèce, coupée longitudinalement,
Fig. 143. Urne très jeune du N. phyllamphora.

Fig. 14. Section verticale de cette urne.

Fig. 15. La même plus avancée.

Fig. 16 et 17, Sections verticales d'urnes encore plus développées de cette
espèce.

Fig, 18. Vernation d’une très jeune feuille du N. Rafflesiana.

Fig. 49. Nepenthes naissant, de Bornéo. Espèce indéterminée, de grandeur na-
turelle.

Fig. 20. La même notablement grossie. a, feuilles cotylédonaires.
Fig, 21. Une feuille cotylédonaire de la même plante, isolée.

Fig. 22-25. Aspects divers des feuilles de ce Nepenthes jeune.
Toutes ces figures, à l'exception de la figure 19, sont plus ou moins grossies

RECHERCHES

PHYSIOLOGIQUES, ANATOMIQUES ET ORGANOGÉNIQUES

SUR LA

COLOCASE DES ANCIENS, COLOCASTA ANTIQUORUM Schott ;

Par M. P, DUCHARTRE,

L'existence d’une production d’eau assez abondante pour four-
nir en peu de temps une quantité notable de ce liquide, assez
rapide pour être facilement observée et suivie à l’œil nu, est
certainement une des particularités les plus curieuses et les plus
dignes d’attention que présente le règne végétal. C'est dans la
famille des Aroïdées qu’on la remarque, et, parmi les plantes de
ce groupe naturel chez lesquelles elle paraît avoir lieu, aucune ne
l’a offerte encore s’effectuant chez elle avec autant d'intensité que
chez les Colocases proprement dites, qui, pour M. Schott, le sa-
vant monographe de cette famille, forment, avec les seuls genres
Ariopsis Graham et Remusatia Schott, une sous-tribu des Caladiées
désignée sous le nom de Colocasinées.

1l y a déjà près de trente ans que ce curieux phénomène a été
constaté et observé avec soin par le docteur Schmidt, de Stettin,
qui en a fait le sujet d’un mémoire intéressant (1); mais, depuis
cette époque, je ne sache pas qu’il ait donné lieu à de nouvelles
observations, et cependant j’espère montrer dans ce mémoire que
les circonstances dans lesquelles avaient été faites celles du savant
allemand, auraient pu conduire à se faire une idée peu exacte du
fait tel qu'il se produit dans la marche normale des choses; j’a-
jouterai que, par l'effet même de ces circonstances défavorables,

(1) Beobachtungen über die Auss”heïdung von Flüssigkeit aus der Spitze der
Blätter der Arum Colocasia ; Linnæ\à,t. VI, 1831, p. 65-75.

!
fi

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS. 9239

Schmidt, malgré la sagacité peu commune dont il a fait preuve
en cette occasion, n'avait pu envisager qu'un côté de la ques-
tion, qu'il restait beaucoup à voir après lui, qu’il importait même
de revoir tout ce qu’il avait observé, mais en se plaçant dans des
conditions différentes de celles où il s'était trouvé lui-même.

Le mémoire de Schmidt étant, à ma connaissance, le seul qui
existe encore sur ce Curieux sujet, je crois qu'il ne sera pas inu-
ile d’en donner d’abord un résumé succinct; l'exposé que je ferai
ensuite de mes propres observations montrera la différence des
conditions dans lesquelles je me suis placé et des résultats auxquels
je suis arrivé.

Au mois de mars 1831, le savant médecin de Stettin reçut un
pied d’Arum colocasia Lin. (Colocasia antiquorum Schott), qui
était déjà en végétation et qui allait épanouir sa première feuille.
Afin de donner à cette plante la chaleur et l'humidité qui lui étaient
nécessaires, il en plaça le pot derrière la fenêtre d’une chambre
exposée au midi, sur un plat profond qu'il maintint constamment
plein d’eau. Dans cetle situation, la Colocase se développa rapi-
dement et la végétation en fut vigoureuse. À peine la première
feuille eut-elle pris tout son accroissement, que son sommet se mit
à offrir constamment une goutte d’eau claire et limpide, qui tom-
bait aussitôt que son poids l’entrainait et que remplaçait immédia-
tement une nouvelle goutte qui grossissait ensuite peu à peu comme
la première. Cette production d’eau eut lieu pendant plus d’une
semaine, mais elle cessa dès que la plante eut développé une
seconde feuille, plus grande que la précédente, et elle ne se mon-
tra plus, pendant l'été, ni sur cette seconde feuille, ni sur aucune
de celles qui lui succédèrent, au nombre de dix à douze, et dont
une couple existaient généralement à la fois. A la fin du mois de
septembre suivant, la Colocase n'avait plus qu'une seule feuille
bien développée et une autre déjà fanée ou tout à fait décolorée et
pendante. Alors la sécrélion recommença et Schmidt put en faire
l'objet de ses études attentives. Il recueillit Peau produite par
cette feuille pendant plusieurs jours de suite. Cinq jours après la
réapparition du phénomène, il sortit du sommet de cette feuille,
qui avait alors onze pouces (0",30) de longueur et six pouces et

23 P. DUCHARTRE.

demi (0”,18)de largeur, une drachme et quarante-six grains (6,5)
de liquide, entre six heures du matin et sept heures du soir,
puis une drachme et demie (6**), de ce dernier moment jusqu’au
lendemain matin à six heures et demie. Ce fut là le maximum de
production qui s’éleva, comme on le voit, à douze grammes et
demi pendant vingt-quatre heures de sécrétion non interrompue.
La quantité de liquide sécrété alla, dès ce moment, en diminuant
tant de jour que de nuit, et le phénomène avait entièrement cessé
dès le matin du quatrième jour suivant. La température de la
chambre avait été, pendant ce temps, au maximum de 15° 25 €.,
au minimum de 13° c. L'eau produite était parfaitement limpide
et incolore, dépourvue de saveur et d’odeur. Le temps nécessaire
à chaque goutte pour acquérir le poids qui la faisait tomber varia
beaucoup : il était d’abord long, il finit par se réduire à cinq ou
même à quatre minutes, après quoi et finalement il devint égal à une
heure entière ou même davantage. Le moment de la journée parut
n’influer que faiblement sur la marche du phénomène, car la sé-
crétion fut à fort peu près la même pendant les douze heures du
jour et celles de la nuit.

Les circonstances essentielles du phénomène, tel qu’il fut observé
par Schmidt, furent done : 4° qu’il n’eut lieu que vers le com-
mencement et vers la fin de la période végétative de la plante ;
2 qu'il se montra sans interruption pendant les vingt-quatre heures
de la journée ; 3° qu’il commença pour chaque feuille seulement
lorsqu'elle eut pris tout son accroissement. Ces résultats furent

donnés par une plante en pot, constamment baignée par l’eau et
tenue dans une chambre.

Les recherches dont je vais maintenant exposer les détails, ont
été faites dans des conditions fort différentes. Pour mettre de l’ordre
dans l'exposé que je me propose d’en faire, je le diviserai en trois
parties : dans la première, qui sera purement physiologique, j’étu-
dierai la production d’eau par les feuilles de Colocase en elle-
même, quant aux particularités diverses qu’elle présente et aux
circonstances extérieures dont elle subit l'influence; dans la se-
conde, qui sera essentiellement anatomique, j'examinerai la struc-

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS, 23

ture des parties de ces feuilles par lesquelles s'accomplit ce curieux
phénomène; enfin j'ajouterai, comme une sorte d’appendice, une
troisième partie dans laquelle je m’occuperai du développement
des feuilles des Colocases, et des mouvements qu'elles effectuent
aux différents moments de la journée.

J. — PARTIE PHYSIOLOGIQUE.

Les Colocases qui ont été l’objet de mes recherches ont été cul-
tivées en pleine terre, à Meudon (Seine-et-Oise), pendant la belle
saison et jusque vers le milieu de l’automne des années 1856,
1857 et 1858. Mes observations ont porté principalement sur
une plante dont je devais deux tubercules à M. Delessert, qui en
avait reçu une assez grande quantité, à la fin de l’année 1855,
de M. Schwabe, son correspondant à Chang-Haï. Cette plante est
certainement un Colocasia, dans le sens restreint que M. Schott
assigne à ce nom générique, et, bien que la détermination exacte
ne laisse pas d'en être au moins difficile, puisqu'elle n’a pas fleuri,
je crois pouvoir affirmer qu'elle forme une variété du Colocasia
antiquorum, circonscrit conformément à l'opinion professée par
cet auteur, dans son Synopsis Àroidearum (1). On sait, en effet,
que ce savant monographe des Aroïdées, après avoir admis, comme
la plupart des botanistes, notamment comme Kunth, MM. Ch. Koch,
Hasskarl, etc., un assez grand nombre d'espèces distinctes de
Colocasia, plus ou moins analogues à son C. antiquorum, a été con-
duit par la suite de ses études à rassembler plusieurs de celles-ci,
comme simples variétés, dans l’espèce polymorphe à laquelle il a
conservé le nom de C. antiquorum Schott. Ainsi, selon lui, toutes
les Colocases à tubercule comestible ou plus rarement âcre, qui
avaient reçu les noms de €. nymphæifolia Kth., C. esculenta Sch.,
C. acris Sch., C. Fontanesii Sch., C. euchlora C. Koch, Cala-

dium glycyrrhizon Fraser, rentrent dans le seul €. antiquorum.

La plante venue de la Chine septentrionale, que j'ai cultivée

(4) Voy. Schott, Synopsis Aroidearum ; in-8°, Vindobonæ ; 1856 ; p. 40.

936 P, DUCHARTRE,

et observée pendant trois années consécutives, constitue sans
doute une nouvelle variété de cette espèce polymorphe ; malheu-
reusement elle n’a développé son spadice ni chez moi, ni, que je
sache, dans aucun des jardins de Paris où elle a été cultivée, de
telle sorte qu'elle ne peut être caractérisée rigoureusement. En
outre, les fortes gelées qui sont survenues assez à l’improviste
dans l’automne de 1858, en ont détruit les deux beaux pieds que
je possédais, ainsi que ceux qui existaient au Jardin-des-Plantes et
chez M. Delessert lui-même. Il est dès lors à craindre qu’elle n'ait,
au moins momentanément, disparu de nos cultures, où elle aurait
certainement figuré avec avantage à cause de la rare beauté de
son feuillage. Je dois me borner à dire qu’elle m'a semblé différer
des autres variétés du Colocasia antiquorum, qui ont été décrites
jusqu’à ce jour, par les caractères suivants : 1° ses proportions
sont moins fortes; 2° ses feuilles fortement peltées, ovales, en-
taillées largement à leur base jusqu’au tiers seulement de la dis-
tance qui sépare l’extrémité du pétiole d’une ligne tangente au
sommet des deux oreillettes ou lobes basilaires, sont arrondies à
leur sommet que surmonte presque brusquement un épais et assez
long acumen, doublement ondulées et sans bordure discolore:
leur face supérieure est d’un beau vert foncé, à reflets veloutés
bleuûtres, qui devient plus tard un vert jaunâtre ; l’inférieure est
d'un vert glauque et blanchâtre; elles sont entièrement dépourvues
de poussière farineuse et portées sur un pétiole deux fois au plus
aussi long que le limbe ; celui-ci s'implante à peu près perpendicu-
lairement (pendant le jour) sur son support. Le pétiole est coloré
en vert clair, elil offre un peu de rouge sur sa moitié interne, à
sa partie supérieure; 3° ses stolons ou Jets souterrains sont courts,
je ne les ai jamais vus se porter à plus de 0",1 du pied mère ;
h° elle est originaire du nord de la Chine. Je désignerai ici cette
plante sous le nom de Colocase de la Chine, Colocasia antiquorum
sinensis, sans vouloir toutefois, en l’absence de matériaux suffi-
sants pour une étude si difficile, décider si elle ne rentre pas dans
quelqu’une des nombreuses variétés du Colocasia antiquorum qui
ont été signalées par divers auteurs, particulièrement par M. Hass-

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS. 237
karl, dans son Catalogus plantarum horti bogoriensis,p. 55, bien
qu'elle me paraisse distincte de toutes celles-ci (4).

(1) Je crois devoir compléter les indications précédentes en donnant une des-
cription plus détaillée de cette Colocase, d'après un des deux pieds que j'en pos-
sédais, tel qu’il était au milieu du mois de septembre 1857.

La plante formait alors une forte masse dé feuilles, qui couvrait un cercle d’un
mètre au moins de diamètre, et qui résultait de la réunion de plusieurs jets ou
touffes, dont le développement avait été successif. Ti y avait trois touffes princi-
pales et quinze touffes secondaires, rangées autour des premières, sans régula-
rité, et qui sortaient de terre dans un rayon de quelques centimètres seule-
ment. Chacune de ces touffes résultait de la réunion de plusieurs feuilles qui
s'étaient montrées successivement, sortant chacune de la gaîne pétiolaire de la
feuille antérieure, et qui étaient devenues de plus en plus grandes de la premiere
à la dernière, c'est-à-dire à mesure que la plante avait pris plus de force. Ainsi
les cinq feuilles qui constituaient alors la plus centrale et, par conséquent, l’une
des plus fortes d’entre ces touffes avaient les dimensions suivantes : la première
ou la plus ancienne et l'extérieure par cela même — 0".215 sur 0", 175; Ja
27 our 0 27 Ia 3 — 07 57 sûr 07979 IQ 4 — (ES Sur 031 ;
la 5°, qui venait de dérouler ses deux côtés et qui était encore en voie d'accrois-
sement, — 0" 450 sur 0" 335, La feuille la plus grande que portät alors la
plante était longue de 0" 48. En 1848, ces dimensions ont été notablement
dépassées.

Toute la plante est parfaitemement glabre.

Le pétiole se divise en deux portions : une inférieure engaînante et une supc-
rieure arrondie, l'une et l’autre de même longueur ; ainsi, dans une grande feuille
adulte, chacune de ces parties a 0" 325 de longueur, le pétiole entier étant, par
conséquent, long de 0" 65. Dans sa portion inférieure ou engaînante, le pétiole
est canaliculé de plus en plus profondément, du baut vers le.-bas, et il se dilate
sur les côtés en deux larges prolongements marginaux, épais, à bord aigu, qui
forment la gaine (voyez la coupe transversale de cette partie engainante, sur la
figure 8, p), et qui viennent s'appliquer l'un sur l'autre. La cavité tubulaire
ainsi formée renferme la feuille nouvelle; lorsque celle-ci s'est fait jour au
dehors et s'est déployée, les deux bords de la gaîne de la première restent
redressés parallèlement l’un à l’autre, circonscrivant ainsi un large canal. La
portion supérieure ou arrondie du pétiole diminue d'épaisseur du bas vers le
baut ; son extrémité supérieure est un peu déprimée, de manière à former deux
angles latéraux assez prononcés, qui vont s’effaçant graduellement du haut vers
le bas ; il en résulte : 1° une face supérieure ou interne médiocremert convexe,
colorée en rouge-pourpre sale et sombre, au-dessous de l'insertion du limbe,
laquelle teinte s'éclaircit et s’affaiblit peu à peu en se divisant en str.es, qui se
fondent enfin elles-mêmes dans la teinte verte générale du pétiole ; 2° une face

238 P, DUCHARTRE.

Les deux tubercules de Golocase de la Chine que je devais à l’obli-
seance de M. Deélessert, ayant été plantés en pleine terre immé.-
diatement après que Je les eus reçus, au commencement de juillet
1856, donnèrent, cette même année, deux pieds assez faibles; ces
tubercules, déjà petits au moment de la plantation (37 grammes
pour l’un, 17 gr. 60 pour l'autre), ne prirent pas d’'accroissement.
Ayant été arrachés à l'automne, ils furent replantés en pot dès le
mois de février 1857, et ensuite, au mois de mai suivant, en pleine
terre, devant un mur, à l’exposition du midi, dans le même jardin
que précédemment. Cette seconde année, ils prirent un dévelop-
pement remarquable, qui fut encore surpassé par celui auquel
ils arrivèrent en 1858, après que leurs tubercules eurent été
divisés.

En 1857, je voulus donner un champ plus large à mes obser-
vations et je plantai, à côté de la Colocase de la Chine, deux pieds
d'un grand Colocasia antiquorum, qui me paraît être le type de
l’espèce et dont les tubercules avaient été donnés au Jardin-des-
Plantes par M. de Montigny, qui les avait rapportés de Madère,
ainsi que deux pieds d’une autre plante qu'on cultive dans l’aqua-

inférieure beaucoup plus convexe et arrondie, — Le limbe de la feuille est
ovale, sensiblement sagitté, arrondi au sommet que surmonte assez brusque-
ment un acumen ou pointe épaisse et peu allongée, doublement ondulé, les on-
dulations principales étant larges et bien ouvertes, tandis que les secondaires
sont petites, bordé d'une ligne rouge visible seulement en dessous ou à peine en
dessus ; il est entaillé à sa base d’un grand sinus en angle droit, à sommet
émoussé, qui n'arrive qu'au quart ou au tiers de la distance entre l'insertion du
pétiole au limbe et l'extrémité des deux grandes oreillettes ou lobes basilaires ;
ces oreillettes sont à peu près arrondies. Les nervures primaires de ces feuilles
sont au nombre de sept de chaque côté de la côte médiane ; elles sont toutes
fortement proéminentes en dessous, indiquées seulement en dessus par une
faible convexité que bordent deux légers sillons. Les nervures voisines du
sommet sont alternes entre elles à leur point d'origine; les autres sont oppo-
sées ; chaque oreillette en reçoit deux. De toutes ces nervures, il ne part qué
des nervures secondaires uniformes d'épaisseur, qui s’anastomosent en arcades
dans l'intervalle, et qui vont aboutir les unes directement, les autres médiate-
ment à la nervure périphérique submarginale, sensiblement plus forte qu'elles.
La face supérieure entière du limbe forme une assez faible concavité ; les bords
se rabattent même plus ou moins dans les grandes feuilles.

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|
}

l

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RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS. 239

rium du même établissement, qui se distingue des deux précédentes
par ses feuilles plus oblongues, à petiole rougeûtre et qui me semble
pouvoir être le Colocasia antiquorum F'ontanesii Sch. (prius Col,
Fontanesii Sch.) Quoique mis tardivement en pleme terre, les
quatre pieds de ces deux dernières Colocases prirent en peu de
temps un assez beau développement, surtout ceux de la première
qui dépassa, sous ce rapport, la Colocase de la Chine. L'iden-
tité complète des phénomènes que j'ai observés sur ces trois
variétés du Colocasia antiquorum Sch., autorise, je crois, à
penser que ces phénomènes se retrouveraient avec fort peu de
variations dans les nombreuses formes que présente cette espèce
intéressante à divers titres.

Je dois faire observer que la Colocase de la Chine ayant été l’ob-
jet principal de mes observations et de mes recherches anatomiques,
c’est à elle que se rapporteront les détails consignés dans ce mé-
moire, toutes les fois qu’ils ne seront accompagnés d’aucune dési-
gnation particulière de variété.

A, — Emission d’eau par les Colocases, considérée en elle-même,
et d’une manière absolue.

Ao Partie de la feuille par laquelle elle a lieu.

Les grandes et belles feuilles du Colocasia antiquorum Schott,
examinées à l'œil nu, se montrent pourvues d’une nervure péri-
phérique qui en suit le bord, à la distance d’un millimètre ou un
peu plus. Leur sommet présente, comme je l'ai dit plus haut, une
pointe ou acumen, dont la largeur est de quelques millimètres,
et qui surmonte assez brusquement leur extrémité plus ou moins
arrondie. C'est à cette pointe, à cet acumen, que vient se rendre
la nervure submarginale. Non loin de cette même pointe leur bord
s’épaissit peu à peu pour atteindre son maximum d'épaisseur à la
base de celle-ci, sur les deux côtés de laquelle les deux épaississe-
ments se continuent pour se réunir à l'extrémité ; ilse forme ainsi,
en dessus de l’acumen, une sorte de cadre saillant qui entoure une
dépression médiane, continue au plan de la face supérieure du

2h10 P. DUCHARTRE,

limbe ‘fig. 1}. En examinant atlentivement cette petite dépression,
on y reconnait, quelquefois à l'œil nu, habituellement à la loupe
et quelquefois au microscope, des orifices inégaux, ovales ou
arrondis (00', fig. 1 ; fig. 6), peu nombreux, dont je me contente
en ce moment de signaler l’existence et sur lesquels j'aurai à reve-
mir beaucoup plus en détail dans la partie anatomique de ce tra-
vail. Ces orifices ou trous, percés en dessus et au sommet de Ia
feuille, donnent sortie à l’eau sécrétée par celle-ci. Ils avaient été
vus par Schmidt qui les décrit « comme deux ouvertures circu-
laires, placées l’une devant l’autre et dont celle qui est située le
plus profondément est la plus petite » (Zwei kreisrunde OEffnun-
gen, die über einander stehen und von denen die am tiefsten ste-
hende die klemere 1st, loc. cit., p. 69). Plus tard les physiolo-
gistes ont trouvé si singulière l'existence, dans une plante, d’orifices
excréteurs nettement circonscrits, qu’ils en sont venus à la révo-
quer en doute ou même à la mer, et à regarder les trous signalés
par lhabile observateur de Stettin comme dus simplement à des
déchirures accidentelles de l’épiderme. C'est, par exemple, la
manière de voir de Meyen qui n’hésite pas à dire (1) que « toutes
ces sécrétions d’eau (celle des Colocases, du Richardia, etc.) sont
dues à une simple extravasation de séve brute ascendante, s’opérant
par des déchirures de l’épiderme. » La suite de ce mémoire prou-
vera surabondamment, j'ose le croire, que cette idée est en contra-
diction avec les faits.

L'eau expulsée par ces petits orifices, en très petites gouttelettes,
se ramasse peu à peu, au bout de la pointe terminale, en une goutte
qui, après avoir ainsi grossi graduellement, se détache dès que son
poids est devenu assez fort pour l’entrainer. Quand la feuille est
horizontale, ce qui n’a lieu que rarement et seulement parfois au
commencement de la végétation annuelle, ces gouttes d’eau viennent
se réunir sur la face supérieure et concave de cet organe, qu'elles
ne mouillent pas, à cause de la présence d’une couche d’air inter-
posée aux papilles de l’épiderme. On voit alors le liquide s’amas-
ser dans cette sorte de bassin en assez grande masse pour frapper

(1) Voy. Meyen, Neues System der Pflanzen hysiologie. t. IT, p. 508.

|

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS. 211
même un œil inattentif. Le plus souvent, au contraire, l'inégalité
notable de poids qui existe entre les deux portions de la feuille
situées en avant et en arrière de son insertion sur le sommet
du pétiole, jointe à un mouvement périodique sur lequel j'au-
rai à revenir, rend l'organe plus ou moins pendant, surtout
pendant la nuit; dans ce cas, les gouttes d’eau tombent à terre
à mesure que leur poids les entraîne, et l’on pourrait très bien ne
pas en remarquer la production, si l’on n’était déjà prévenu. Il est
cependant facile de reconnaitre que, tous les matins, la terre est
très mouillée, sur une surface plus ou moins étendue, au-dessous
de l’extrémité de chaque feuille.

Il est, je pense, inutile de prouver combien serait dénuée de
fondement l’idée d’attribuer à la rosée l’origine de l’eau qui
tombe de la pointe des feuilles des Colocases. En effet, comme on
voit sortir cette eau goutte à goutte par les petits orifices excré-
teurs, qu’elle est produite également par les plantes abritées
contre le rayonnement nocturne au moyen d’une toile épaisse,
enfermées dans une serre ou une chambre, ele., je ne pense pas
qu’il puisse y avoir même l'ombre d’un doute à cet égard.

2° Nature de l’eau excrétée par les feuilles des Colocases,

Comme l'avait très bien vu Schmidt, le liquide qui sort par
l'extrémité des feuilles des Colocases est parfaitement clair et
limpide, tout à fait insipide et incolore. Le savant médecin de
Stettin, ayant fait analyser par un chimiste celle qu'il avait recueillie,
acquit ainsi la certitude qu'on n’y trouvait absolument aucune
trace de substances étrangères, en d’autres termes, que c'était
de l’eau disullée parfaitement pure. « L'eau recueillie s’est .
montrée, dit-il, chimiquement pure sous tous les rapports. »
(Loc. cit., p. 72.)

Je dois modifier légèrement cet énoncé si précis. Grâce à la
grande quantité de ce liquide qu'il m'a été possible de recueillir,
la recherche des substances qu’il renferme en très faible propor-
tion est devenue possible. Avec une obligeance pour laquelle je

ne saurais lui offrir de trop vifs remerciments, M. Berthelot à
Le série. Bot. T. XII. (Cahier n° 4.) # 16

22 P, DUCHARTRE,

bien voulu, à ma prière, en faire une analyse complète. Ce chi-
miste distingué a ainsi reconnu que cette eau est presque identique
avec l’eau distillée, et qu’elle renferme seulement des traces à
peine appréciables de matières étrangères. Pour reconnaitre
celles-ci, il à fallu évaporer environ 400 grammes de liquide.
L'analyse a fait alors reconnaitre que ces substances étrangères,
en si faibles proportions, sont: 1° du chlorure de potassium;
du carbonate de chaux; 3° une matière organique muerlagi-
neuse, qui fait mousser l’eau pendant l’ébullition, qui se colore en
jaune vers la fin de la concentration, sans perdre sa solubilité
dans l’eau, et qui se carbonise sous l’action d’une plus forte
chaleur. |

L'eau excrétée par les feuilles des Colocases n’est donc pas
rigoureusement pure, comme l'avait dit Schmidt, qui, à la vérité,
n'avait pu en faire analyser qu’une assez faible quantité.

3° Époques de l’année et de la journée auxquelles a lieu l'émission d’eau par
l'extrémité des feuilles des Colocases.

a. Dans l’année.

J'ai rapporté plus haut que Schmidt, faisant ses observations
sur un pied de Colocase cultivé en pot et tenu constamment dans
une chambre, n’en avait vu sortir de l’eau qu’à peu près au début
et vers la fin de la période végétative annuelle, et seulement
lorsque cette plante, vigoureuse du reste, n'avait qu’une feuille
développée. Sous ce rapport, mes six pieds de Colocases, cultivés
en pleine terre et en plein air, ont présenté des faits entièrement

différents. En effet, aussitôt que ces plantes ont eu développé une
feuille, celle-ci a donné de l’eau par son extrémité. En 1856, les
deux petits tubercules de Colocase de la Chine, que je devais à l’obli-
geance de M. Delessert, n’ont produit d’abord chacun qu’une très
petite feuille à peu près orbiculaire, large seulement d'environ
2 centimètres ; ces très petites feuilles ont émis de l’eau, tout comme
celles qui, venues plus tard, ont pris des dimensions considérables,
tout comme celles qui, sur les mêmes pieds, devenus finalement
beaucoup plus forts, ont atteint 0",50 de longueur.

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RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS. 245

Une fois commencée, la production d’eau ne s’est plus inter-
rompue, quelque grand que fût devenu le nombre des feuilles
développées en même temps; et elle avait encore lieu chaque
année à la fin du mois d'octobre, c’est-à-dire au moment où l’ar-
rivée des premiers froids m'obligeait à retirer de terre les tuber-
cules pour les conserver, pendant l'hiver, à l'abri de la gelée.

Le nombre des feuilles que portait chaque plante à été encore
sans la moindre influence sur la production du phénomène. Grâce
aux bonnes conditions dans lesquelles se trouvaient mes plantes,

elles n’ont pas tardé à former chacune une masse de feuilles

assez belle pour qu'un de mes pieds de Colocase de la Chine, ayant
été mis sous les yeux de la Société impériale et centrale d’horti-
culture, au mois d'octobre 1857, ait été regardé par les membres
de cette compagnie comme une plante vraiment ornementale. Or,
toutes ces feuilles, existant en même temps, donnaient de l’eau par
leur extrémité.

L'émission d’eau par les feuilles des Colocases qui végètent en
plein air et en pleine terre n’est done pas un phénomène tran-
sitoire ni momentané, comme on aurait dû le conclure des obser-
vations de Schmidt, mais bien une particularité physiologique
permanente pendant toute la période végétative annuelle de ces
plantes.

b. Dans la journée.

Le pied de Colocase observé par Schmidt a émis de l’eau, par
l’extrémité de sa feuille unique, pendant les vingt-quatre heures
de la journée, sans interruption. L'émission n’a cessé que pour ne
plus reparaître. — Les choses se sont passées tout autrement pour
mes six plantes. Pour chacune d’elles le phénomène n’a commencé
de se manifester que le soir, au coucher du soleil où peu de temps
auparavant. D'abord peu intense, il a pris graduellement plus d'’in-
tensité jusqu’à la nuit, pendant toute la durée de laquelle il a con-
tinué d’avoir lieu ; le lendemain matin il s’est montré encore jusque
vers sept ou même huit heures, rarement au delà. En 1856 et
1857, c'était à ce moment que le soleil arrivait sur mes plantes et
meltait fin à toute sécrétion visible, En 1858, leur situation était

2h P, DUCHARTRE.

différente : placées devant un mur, elles restuent à l'ombre de
onze heures à midi, et cependant elles ne continuaient guère plus
longtemps que dans le premier cas à émettre de l’eau par leur
extrémité.

IL s’est produit une seule exception à la marche générale du
phénomène, et celte exception est assez remarquable pour que je
doive m'en occuper plus loin avec quelque détail. Pendant les
journées de pluie ou de brouillard épais, c’est-à-dire dans les cir-
constances où l’atmosphère était chargée d'humidité, en même
temps que sa température avait subi un abaissement notable,
l'émission d’eau par les feuilles de mes Colocases s’est continuée
sans interruplion pendant les vingt-quatre heures.

Ainsi, encore sous ce nouveau rapport, mes plantes, placées
dans des conditions beaucoup moins éloignées des conditions nor-
males que celle qui était le sujet des observations de Schmidt, ont
donné des résultats entièrement différents de ceux qui avaient été
constatés par cet habile observateur.

4° Quantité d’eau émise par une seule feuille pendant une nuit,

Il n’est presque pas besoin de dire, tant cela se conçoit d'avance,
que l'émission d’eau par les Colocases à varié d’une feuille à
l’autre, et, à différentes époques, pour une même feuille, en raison
de circonstances diverses dont il seraimportant de rechercher plus
loin et de tâcher d'apprécier l'influence ; mais ici je crois devoir
présenter quelques chiffres pour donner une idéc de la quantité
d’eau qui peut sortir du sommet d’une seule feuille de ces plantes
pendant une nuit. En tenant compte de celte circonstance, que mes
Colocases ne végétaient pas dans une terre marécageuse, ni avec
la vigueur que donnent à cette espèce une extrême humidité et
une haute température dans les régions tropicales ; en multipliant,
en outre, le produit d’une seule feuille par le nombre de celles qui
composent un pied tout enter avec ses toufles généralement nom-
breuses, on pourra se faire une idée de l’abondance avec laquelle
peut avoir lieu, au total, cette remarquable distillation végétale, s’il
m'est permis d'appeler ainsi ce phénomène.

RECHERCHES SUR LA COLOCISE DES ANCIENS. 2/5

a. Colocase de la Chine. — La produetion d'eau par l'extrémité
des feuilles de cette variété n’a jamais été aussi considérable que
dans les deux autres, qui étaient cultivées à côté d’elle et traitées
de la même manière. Je donnerai d’abord ici quelques-uns des
résultats fournis par deux feuilles d'un même pied, pendant la fin
du mois d'août et la première moitié du mois de septembre 1886.
L'une de ces feuilles, que je désignerai par A, avait pris à peu près
tout son développement le 26 aout 1857 : elle mesurait alors
_0",18 de longueur sur 0",14 de largeur. Entre sept heures et demie
du soir et sept heures et demie du matin, elle donna 3%,65 d’eau.
Le lendemain, 27 août, sa sécrétion aqueuse fut de 3“,30; le
28 août, elle fut de 3*,55. Dans la première quinzaine de sep-
tembre, n'ayant à peu près pas changé de dimensions, elle donna,
le 4°, après une pluie, 3*,70 ; elle atteignit son maximum le 11,
par un temps pluvieux, mais en étant elle-même à l'abri de la
pluie, et elle produisit 7,65 de liquide. Le produit fut presque
aussi fort le 42; il s’éleva à 7%,00; enfin le 13, il fut encore
de 5,60. Cette augmentation considérable, dans la dernière de
ces circonstances, se reliait à l'humidité abondante du sol à la suite
des pluies.

La seconde de ces feuilles, que je désignerai par B, étant encore
un peu plus petite, mais en même temps plus jeune que la pre-
mière, émit par son extrémité 4*,00 d’eau, pendant la nuit du
80 août 1856, pendant laquelle la feuille À n’en avait donné que
2*,75. Son produit fut de 4,20 la nuit suivante, de 5,45 dans la
nuit du 31 août au 1° septembre. Sa longueur était alors de 0",20,
tandis que sa largeur était de 0",147. Le 11 septembre, par un
lemps pluvieux, mais sous un abri qui la garantissait de la pluie,
elle émit 6“,20 d’eau, et ce chiffre était certainement trop faible
par suite d’un déplacement qui avait fait tomber du liquide hors de
la capsule disposée pour le recueillir. Le lendemain elle donna,
dans des conditions à peu près semblables, 6“,55, et le 14 son
produit descendit à 5,00. La diminution continua plus tard, len-
tement, il est vrai, le 5 octobre suivant, par un beau temps, mais
après un arrosement donné la veille, la quantité de liquide obtenue
de la même feuille B fut de 4,25. et le 21 du même mois elle

216 P, DUCHARTRE,
était encore de 3 grammes, bien que la plante n’eût pas reçu d’eau
depuis quelques jours.

La plus forte production d’eau que j'aie constatée pour cette Co-
locase à eu lieu dans la nuit du £7 au 18 octobre 1858. Elle s’est
élevée à 12,79 pour une grande feuille qui avait près de 0,50
de longueur. La plante était abritée pendant la nuit par une toile
épaisse tendue horizontalement au-dessus d'elle.

b. Colocasia antiquorum var. Fontanesii.—Les feuilles de cette
variété, aussitôt que les deux pieds que j'en avais plantés un peu
tard ont eu pris de la vigueur, m'ont donné une quantité d’eau
sensiblement plus forte que celles de la précédente. Voici quelques-
uns des chiffres que j'ai obtenus. |

Une feuille en voie d’accroissement, dont la longueur était de
0",28 et la largeur de 0",18, le 26 août 1857, a sécrété pen-
dant la nuit 12 grammes d’eau. Le lendemain, ses dimensions
étaient de 0",30 sur 0",194, ct sa production d’eau s’est élevée
à 13*,10. Enfin le phénomène est arrivé à son maximum dans
la nuit du 1% au 2 septembre, à la suite de laquelle j'ai re-
cuel.li 14%,35 d’eau. La feuille mesurait alors 0",392 sur 0°,91.
La plante n’avait été arrosée que par une pluie d’orage, le
31 août.

ec. Colocasia antiquorum {ype. — La plante qui me paraît ren-
trer dans le type pur du Colocasia antiquorum Schott s'est dis-
tinguée des deux précédentes par l'abondance de sa sécrétion
aqueuse ; ses feuilles avaient sans doute pris un assez grand déve-
loppement, mais la différence qu’elles présentaient, sous ce rap-,
port, ne suffit pas entièrement pour rendre compte de la quantité
de liquide qu’elles ont produit.

Le 24 juillet 1857, une feuille encore jeune, puisqu'elle venait
seulement de s'étaler après s'être dégagée de la gaine de ln
feuille antérieure, a produit, dans la nuit, 95,90 d'eau. Elle me-
surait alors 0°,275 sur 0",18. Le 28 du même mois, une autre
feuille, qui venait également de se dérouler et qui était un peu
plus grande que la première, puisque sa longueur était de 0",30,

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS. 247

a donné, pendant la nuit, 40,05. Son maximum de production
a eu lieu le 80 juillet ; il a été de 46“ ,20. La nuit suivante, la quan-
lité d’eau recueillie n'était plus que de 13,20.

Voici les résultats les plus considérables que j'aie constatés. Une
feuille C, qui avait 0",425 de longueur sur 0",30 de largeur,
m'a donné, pendant la nuit du 26 août, 22° ,60 d’eau. Une autre D,
portée sur le même pied et qui mesurait 0",452 sur 0",292, m'en
a fourni, la même nuit, 20%,60, et je me suis assuré qu'il y avait
eu un peu de perte par l'effet d'un déplacement. Ces deux nombres
n'ont jamais été atteints plus tard. Ainsi la feuille C a donné, le
27 août, 215,70 ; le 28 août, 13% ,25 seulement, et le 2 septembre,
après l'orage du 31 août, 18%,10. De son côté, la feuille D a
fourni, le 27 août, 19,60, avec un peu de perte d’eau ; le 28 août,
un dérangement de la feuille a déterminé une perte d’eau plus
considérable, et je n’ai recueilli que 12%,40 de liquide. Enfin la
même feuille m'a donné 18,80 pendant la nuit du 2 septembre,
quarante-huit heures après l'orage du 3L août.

Ainsi l'émission d’eau par une seule feuille de Colocase, de
proportions bien inférieures à celles qu’elles peuvent atteindre dans
nos jardins, sur un sol engraissé et abondamment arrosé, à plus.
iorte raison dans les parties marécageuses des pays chauds, a pu
s'élever, en une nuit, à plus de 22 grammes. Cependant la terre
dans laquelle se trouvaient les racines de ces plantes est assez
sableuse pour ne pas retenir une humidité snrabondante. D'ail-
leurs, quoique recevant de bons arrosements, mes plantes se trou-
valent évidemment, sous ce rapport, dans des conditions moins
favorables que celle de Schmidt, dont le pot était posé sur un
plat creux qui restait constamment plein d’eau. Cette production
considérable de liquide me semble done bien digne de fixer l’at-
tention des physiologistes.

5° Rapidité avec laquelle les gouttes d’eau sortent par les orifices des feuilles
des Colocases.

A moins de l'avoir observé soi-même, on ne peut guère se
faire une idée de la rapidité avec laquelle l’eau est expulsée par

218 P. DUCHARTRE.,

l'extrémité des feuilles des Colocases. Son émission a lieu par
petites gouttelettes qui sortent brusquement et comme si une im-
pulsion vive les chassait de l’intérieur à l'extérieur. L'eau qui forme
ces gouttelettes glisse immédiatement vers l'extrémité même des
feuilles plus ou moins pendantes, et s’y ramasse jusqu'à former une
goutte qui atteint d’un à près de deux millimètres de diamètre.
Alors, entrainée par son poids, cette goutte se détache et tombe,
après quoi il commence immédiatement à s’en former une nou-
velle. Lorsque la sécrétion est faible, 1l faut longtemps pour qu’une
goutte acquière un poids capable de l’entrainer. Schmidt dit en
avoir vu qui ont exigé une heure, et j'en ai observé moi-même
plusieurs qui sont restées pendantes au bout d’une feuille pendant
au moins aussi longtemps sans tomber. Mais, pour peu que le phé-
nomène ait d'intensité, le temps nécessaire pour la formation
d’une goutte devient beaucoup plus court, et généralement il en
tombe plus d’une par minute. Enfin, quand les circonstances sont
favorables, on en voit tomber plusieurs par minute. Voici quel-
ques chiffres qui montreront avec quelle rapidité on peut les voir
alors se succéder.

Ainsi qu'on peut le prévoir sans peine, la Colocase de la Chine
ayant produit, en général, moins d’eau que les deux autres va-
riétés, a dû, par cela même, former aussi moins de gouttes dans
le même espace de temps. Dans les circonstances ordinaires, le
nombre de celles qui se sont montrées au bout de chaque feuille
pour s’en détacher ensuite lorsque leur poids les entrainait, a été
de deux ou trois par minute. Cependant ce nombre a été dépassé
en différentes occasions ; il s’est même élevé au double, parfois
au triple de cette moyenne. Aïnsi, le 29 août 1856, à six heures
et demie du matin, j'ai vu sortir quatre gouttes par minute de la
pointe d’une feuille qui venait de se dégager de la gaine pétiolaire
et qui avait encore une de ses moitiés enroulée. Le 1° septembre
suivant, par un jour couvert et pluvieux, j'en ai vu, dans la soirée,
tomber sept et même huit gouttes par minute. J’en comptais six,
dans le même espace de temps et dans la soirée, pour une feuille
qui avait 0",20 de longueur sur 0,147 de largeur, ainsi que pour
une autre qui ne Ss'éfait entièrement déroulée que depuis deux

|
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RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS. 2h19

jours. Cette dernière m'en montrait einq par minute, le 13 sep-
tembre, à six heures du matin, et ses dimensions étaient alors de
0",17 sur 0",12 ; le soir du même jour, quelque temps après que
l'émission d’eau se recommencé, elle formait six et sept gouttes
par minute. Pendant l'été de 1857, mes deux plantes avaient pris
plus de développement; elles formaient deux belles touffes. L'une
des deux, en particulier, outre plusieurs feuilles de dimensions
moyennes, en portait cinq grandes, dont la longueur variait de
0,37 à 0",455. Sur toutes à la fois je voyais se former et tomber
de quatre à six gouttes d’eau par minute. Enfin voici les nombres
les plus considérables que j'aie observés sur cette variété : une
feuille longue de 0" ,473, large de 0",167, laissait tomber succes-
sivement de sa pointe terminale dix gouttes assez grosses en une
minute, le 21 août 1858, à six heures du matin ; et à la même
heure, deux jours plus tard, elle en donnait encore huit dans le
même espace de temps.

Le Colocasia antiquorum Fontanesh n'a pas pris dans mon
jardin tout le développement dont il est susceptible ; aussi n’a-t-1l
pas dépassé la variété précédente , quant au nombre des gouttes
d’eau qu’il a produites. Je me bornerai à citer pour lui les trois
exemples suivants. Le 25 août 1857, un peu avant cinq heures
du matin, je voyais tomber sept gouttes d’eau par minute d’une
feuille qui avait 0",255 de longueur sur 0",16 de largeur. Le 29
du même mois, à cinq heures du matin, j'en voyais tomber quatre
ou cinq par minute d'une autre feuille longue de 0",31, large de
0",21, de laquelle il n’en sortait plus que trois ou quatre, le len-
demain, à la même heure, dans le même espace de temps.

Le Colocasia antiquorum type, qui a produit habituellement la
plus grande quantité d’eau, comme on l’a déjà vu, m’a montré
les gouttes de ce liquide se succédant avec une remarquable ra-
pidité au bout de ses feuilles. J'en comptais onze par minute, le
27 août 1857, un peu avant cinq heures du matin, pour une feuille
| développée depuis peu de jours, et qui avait 0",425 de longueur
sur 0",28 de largeur. A la même heure, le surlendemain, je voyais
la même feuille former successivement 18 gouttes par minute ; or,

| j'ai reconnu que chacune de ces gouttes résultait de la réunion de

250 P.. DUCHARTRE,

cinq à sept gouitelettes distinctes dont on voyait sans peine la sortie
à l'œil nu. Ainsi, dans ce cas, en prenant six pour nombre moyen
pour chaque goutte, on arrive au total vraiment surprenant de
108 gouttelettes expulsées en une minute ou presque deux goutte-
lettes par seconde. Le lendemain, à la même heure, cette feuille
qui était parvenue à son développement complet, avait atteint
0",46 de longueur. J'en vis sortir, par minute, quinze gouttes
d’eau assez grosses, dont chacune avait exigé, pour sa formation,
huit, neuf et même dix gouttelettes. En prenant 8 comme le
nombre moyen, ce qui est plutôt au-dessous qu’au-dessus de la
vérité, on arrive à voir que cette feuille de Colocase expulsait alors
1920 gouttelettes en une minute.

Si surprenant qu'il puisse paraître, ce résultat a été confirmé
par les observations suivantes, faites sur la même feuille. Ainsi, le
29 août 1857, à cinq heures du matin, j'ai compté, par minute,
25 et 26 gouttes d’eau qui généralement avaient réuni quatre
gouttelettes avant de se détacher ; le lendemain, j'ai compté, dans
le même espace de temps, 22 gouttes dont chacune résultait de la
réunion de cinq et plus souvent même de six gouttelettes. Enfin le
à septembre suivant, vers sept heures et demie du matin, une pluie
abondante étant tombée la veille, j'ai compté jusqu’à 30 gouttes
assez grosses par minute.

L’extrême rapidité avec laquelle ces gouttelettes sont expulsées
par une impulsion vive, et j'oserais presque dire par une pulsation
appréciable à la vue simple, me semble un des phénomènes les
plus curieux et les plus intéressants qu’on ait encore observés dans
le règne végétal.

B, — Emission d’eau par les Colocases considérée d’une manière relative.

40 Par rapport aux dimensions des feuilles.

Il y a intérêt à rechercher si la quantité d’eau produite par les
fouilles des Colocases est en rapport avec la grandeur de ces or-
œanes. Malheureusement il n’est guère possible de procéder à
cette recherche, ni d’en exprimer les résultats avec une parfaite

RECHERCHES SUR LA GOLOCASE DES ANCIENS, 251

rigueur. En effet, la sécrétion aqueuse dont ces feuilles sont le
siége subit à un haut degré l'influence de diverses circonstances
extérieures, telles surtout que l'humidité du sol et de Pair. De
là résultent, pour une même feuille, à différents moments, des
variations notables dans la quantité d’eau qu’elle laisse sortir. Ces
variations peuvent même, dans beaucoup de cas, masquer entiè-
rement les différences dans la production d’eau qui découlent de
l'inégalité de grandeur des feuilles, à moins toutefois que cette
inégalité ne soit très considérable. Cependant, en tenant compte au-
tant que possible de ces variations, eten comparant entre elles un
fort grand nombre d'observations, je crois pouvoir établir en prm-
cipe que, dans des conditions égales de végétation, la quantité d’eau
produite par différentes feuilles est en proportion de leur grandeur.
Ce rapportest assez manifeste tant que les feuilles ne dépassent pas
la grandeur moyenne; mais, au-dessus de ce terme, il devient
beaucoup moins appréciable. Je donnerai quelques exemples à l’ap-
pui de cet énoncé qui, du reste, me semble facile à justifier même
par le raisonnement.

En 1856, la première feuille qui s'est développée, quand est entré
en végétation chacun de mes deux petits tubercules de Colocase de
la Chine, était très petite et ne dépassait pas 2 ou 3 centimètres
de longueur. La quantité d’eau qui en est provenue, à la fin de
juillet, a été généralement de 0%,35 à 0%,45 par nuit. La seconde
feuille de l’un de ces pieds s’est épanouie au commencement du
mois d'août ; elle avait 0,04 de longueur. Le 1° août, elle laissait
tomber une petite goutte d’eau toutes les deux minntes ou deux mi-
nutes et demie, et le lendemain matin j’en recueillais 05,65 d’eau,
avec la certitude d’avoir perdu quelques centigrammes de liquide.
Le 4 août, une nouvelle feuille atteignait environ 0",06 de lon-
gueur; le lendemain matin, je la voyais produire une goutte par
minute, etj'en obtenais 1*,45 d’eau sortie pendant la nuit. Le 48 du
même mois, S'épanouissait une quatrième feuille qui avait 0",18 de
longueur sur 0",14 de largeur. Le lendemain matin je trouvais
que la quantité d’eau produite par celle-ci, pendant la nuit, s’éle-
vait à 3°,65, el j'en obtenais un poids peu différent pendant la quin-
zaine suivante. Celte quatrième feuille avait déjà la grandeur

959 P, DUCHARTRE,

moyenne, ct, dès ce moment, le rapport entre ses dimensions et
l'intensité de la sécrétion devint assez obscur pour qu’il fût difficile,
sinon même impossible de le déterminer, en raison des variations
accidentelles que j’ai mentionnées. Enfin lorsque mes deux pieds
de Colocase de la Chine sont parvenus à leur plus beau développe-
ment, leurs feuilles les plus grandes ont émis les plus fortes quan-
lités d’eau que j'aie recueillies. C’est ainsi qu’à la fin du mois d'août
1857, il est sorti, en une nuit, 9,50 et même 12“,70 d’eau par
l'extrémité d'une feuille qui était déjà longue de 0",38 quand elle
s'est dégagée de la gaine, et qui a finalement atteint 0",50 de lon-
sueur. D'autres feuilles, de dimensions à peu près semblables, ont
donné des résultats anssi forts, comme je l’ai déjà rapporté plus
haut, |

I est presque inutile de dire que la différence, dans la quan-
lité d’eau produite, entre des feuilles de dimensions très dis-
semblables, existant sur un même pied, au même moment, s’est
montrée tout aussi bien que celle que j'ai constatée en observant
ces organes d’après leur ordre de succession, c’est-à-dire à diffé -
rentes époques.

2° Par rapport à l’âge des feuilles.

L'émission d’eau par l'extrémité des feuilles des Colocases com-
mence de très bonne heure. On sait que chacune de ces feuilles
est d’abord enroulée, un côté sur l’autre, c’est-à-dire convolutée
longitudinalement, et qu’elle est enfermée dans la gaïne que forme
le long élargissement basilaire du pétiole de celle qui l’a précédée.
A peine sa pointe terminale se fait-elle jour à l'extrémité de celte
oaîne, qu'on en voit déjà sortir, dès le soir, de nombreuses goultes
d’eau. La production de ce liquide est même abondante dès ce
moment où l'organe est loin d’avoir acquis les proportions qu'il
doit atteindre. Bientôt le phénomène est dans toute son inten-
sité, et il se continue ainsi jusqu'à ce que la feuille soit entie-
rement développée. Peu après il commence, en général, à dimi-
nuer, et en même temps la couleur verte de celte feuille perd
de sa fraîcheur; elle prend bientôt une nuance jaunâtre qui

RECHERCHES SUR LA COLOUASE DES ANCIENS. 25,
se prononce de plus en plus, et dès lors la sécrétion aqueuse
devient de plus en plus faible, pour cesser enfin tout à fait.

Ainsi ce eurieux phénomène est intimement lié à la vie de la
feuille ; il en suit régulièrement la marche et les phases; 1l atteint
son maximum lorsqu'elle-même est en plein et rapide accroisse -
ment; il reste quelque temps stationnaire, et décroit ensuite gra-
duellement jusqu'à cesser tout à fait, lorsqu'elle à terminé son
développement et qu’elle commence à dépérir. Ce parallélisme
entre la marche de la végétation et celle de la sécrétion aqueuse
* était facile à prévoir, mais il n’était peut-être pas sans intérêt de le
constater par l'observation directe.

3° Par rapport aux circonstances extérieures.

a. Influence de l'humidité du sol el des arrosements.

L’humidité du sol est l’une des circonstances qui exercent là plus
puissante influence sur la sécrétion aqueuse des Colocases et sur son
abondance. Organisées pour vivre dans les parties marécageuses
des pays chauds, ces plantes ont besoin, pour végéter avec vigueur,
de trouver dans le sol une humidité considérable, surabon-
(ante même, sans laquelle elles peuvent souffrir. Celles que j'ai
cultivées en pleine terre étaient loin de trouver autour d'elles de
pareilles conditions. Comme je l’ai dit plus haut, la terre dans la--
quelle elles étaient plantées est assez sableuse de sa nature pour
ne pas conserver une humidité extrême. Aulour du pied de cha-
cune d'elles j'avais formé un petit bassin que je remplissais d’eau
lorsque je les arrosais ; mais ces arrosements étaient au plus journa-
liers. Souvent même, soit dans un but expérimental, soit pour tout
autre motif, j'ai laissé parfois s’écouler plusieurs jours sans leur
donner de l’eau. En comparant ce qui a eu lieu dans ces diverses
circonstances, par exemple après quelques jours d'arrosements
réguliers, où après une interruption plus ou moins prolongée, j'ai
reconnu, ce qu'il était facile de prévoir, l'influence puissante de
l'humidité du sol. Cette influence est devenue encore appréciable
à la suite de pluies abondantes, comme on peut le voir notamment

25h | P. DUCHARTRE.

pour les observations du commencement de septembre 1857, qui
sont rapportées plus haut. Cependant ces faits de détail ne me pa-
raissant pas suffisamment démonstratifs, j'ai fait une expérience
qui ne m'a plus laissé le moindre doute à cet égard ; en voici les
résultats : |

Au mois de septembre 1858, mes deux pieds de Colocase de la
Chine étaient dans toute la beauté de leur développement, et leurs
feuilles excrétaient en abondance, chaque nuit, par leur extrémité.
Je cessai alors de leur donner de l’eau, et pendant un mois en-
tier ils ne furent plus arrosés que par des pluies assez rares:
Dans les premiers jours du mois d'octobre, je reconnus que toute
production d’eau avait cessé pour ces plantes. Des capsules pla-
cées sous l'extrémité de leurs feuilles, pendant plusieurs nuits de
suite, ne m'offrirent aucune trace de liquide ; cependant elles ne
paraissaient pas encore souffrir ; mais leur développement s’était
ralenti. Le 13 octobre, j'arrosa, et le lendemain matin il se trou-
vait une petite quantité d'eau dans les capsules. Un nouvel arrose-
ment fut donné le 14 et chacun des jours suivants. La sécrétion
d’eau reprit bientôt sa première abondance ; et ensuite, après
chaque nuit, je recueillis une quantité considérable de liquide.

Je dois faire observer lLoutelois que, lorsque la terre est une fois
bien imbibée d’eau, on peut suspendre les arrosements pendant”
deux ou trois jours sans constater une diminution notable dans la
sécrétion aqueuse. |

b. Influence de l'humidité de l'air.

On a vu plus haut que, dans les circonstances ordinaires, la
sortie de gouttes d’eau par le sommet des feuilles de mes Colocases
cessait dans la matinée pour recommencer le soir; elle n'avait
done pas lieu dans le milieu du jour. Les choses se sont passées
tout autrement quand l’atmosphère a été surchargée d'humidité,
soit par un temps très pluvieux, soit par l'effet d’un brouillard
épais. Parfois même le brouillard ou la pluie n'ayant duré qu’une
portion de la journée, la sortie des gouttes s’est continuée pendant

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS. 2595
tout ce temps, et n’a plus eu lieu dès que le ciel s’est découvert.
Voici, à cet égard, quelques-unes de mes observations.

Le 6 septembre 1856, le ciel est resté couvert constammeni,
etil y aeu un brouillard qui est devenu très dense entre dix
heures du matin etune heure après midi. L'excrétion n’a pas cessé
de se faire du matin au soir. Le 20 du même mois, la journée en-
lière a été pluvieuse et froide. Je voyais des gouttes d’eau tomber
des feuilles de mes Colocases à une heure après midi. — Le sur -
lendemain, la pluie est tombée à peu près sans interruption jusque
vers deux heures après midi, et le ciel est resté ensuite couvert
jusqu'à la nuit; la production d’eau a été continue. — Le 27 du
mème, mois et le 10 octobre suivant ont été des jours de pluie,
pendant lesquels le phénomène n'a pas subi d'interruption. Enfin,
les 18 et 20 du même mois, il ÿ a eu un brouillard épais, du
malin au soir ; les feuilles n’ont pas discontinué d’émettre de l’eau
par leur extrémité.

J'ai vu plusieurs fois les mêmes circonstances extérieures ame-
ner la même conséquence, en 1857 et 1858; mais je crois inutile
d'emprunter de nouveaux exemples à mon registre d'observations,
ceux qui précèdent me paraissant plus que suffisants pour établir
la généralité du fait.

c. Influence du soleil.

Celte influence est très prononcée et très prompte. J'ai vu con-
stamment l’excrétion aqueuse s'arrêter dès que le soleil frappait
mes plantes. Je n'ai done pas besoin de rapporter en détail ines
observations qui établissent ce fait général et sans exception.

d. Influence de la température extérieure.

ll est difficile de dégager cette influence de celles qui agissent
en même temps qu'elle, et, en particulier, de celle qu’exerce
l'état hygométrique de Pair. Cependant la comparaison de mes
nombreuses observations me semble autoriser cette conelusion :
qu'une température un peu basse favorise l’émission d’eau par

250 P, DUCHARTRE.

les feuilles des Colocases, et réciproquement, qu'une température
élevée empêche qu’elle n'ait lieu. Ainsi le refroidissement qui
survient à l'approche de la nuit marque constamment l’appa-
rition périodique du phénomène, de même que le réchauffement
de l’air qui s'opère le matin en amène la terminaison, lors même
que le soleil reste caché par des nuages, ou que les plantes se
trouvent, comme l'étaient les miennes, en 1858, garanties de ses
rayons par un mur pendant presque toute la matinée. Cependant
il ne faut pas perdre de vue que le refroidissement de la nuit aug-
mente l'humidité de l'air, que le réchauffement qui a lieu le matin
la diminue, et que l'influence de l’état hygrométrique de l’atmos-
phère est certainement plus puissante encore que celle de la tem-
. pérature, comme le prouve la non-interruption de la sortie de
l’eau par des jours de pluie continue ou de brouillard épais.

C. — Cause probable de l’émission d’eau par l'extrémité des feuilles
des Colocases.

Après avoir examiné en détail les particularités que présente le
remarquable phénomène dont les Colocases sont le siége, après
avoir recherché l'influence que les circonstances extérieures
exercent sur sa production, je suis conduit à me demander si c’est
là un fait indépendant de la marche générale de la végétation, ou
si c’en est au contraire une dépendance directe. Or tout ce qui
précède me semble ne pas laisser de doute à cet égard. Il en
résulte, je crois, comme conséquence naturelle, que cette produc-
tion d’eau à l’état liquide est due à la diminution que subit la
transpiration des feuilles dans les circonstances où on l'observe.
En effet, c’est pendant la nuit, et pendant le jour, seulement quand
l'atmosphère est surchargée d'humidité, c’est-à-dire lorsque les
circonstances extérieures rendent la déperdition d’eau en vapeur
nulle ou presque nulle, qu’on voit se produire, sous la forme
liquide, cette eau à peu près pure, qui sort en gouttelettes par les
orifices de l'extrémité de ces feuilles. D'un autre côté, la portion
de la journée pendant laquelle il ne sort pas deliquide de ces feuilles

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS. 9257

est précisément celle où tout se réunit pour rendre considérable la
déperdition d'eau en vapeur ou Ja transpiration. Il me semble dès
lors difficile de ne pas conclure de là que l’eau qui sort en gouttes
pendant la nuit correspond à celle que la feuille rejette dans l'air, :
pendant le jour, sous forme de vapeur. En d’autres termes, la
transpiration et l’excrétion aqueuse sont en raison inverse l’une de
l’autre, bien qu’en réalité ce ne soient que deux manifestations dif-
férentes du même phénomène physiologique ; la dernière s’accom-
plit lorsque la première diminue considérablement ou cesse pres-
que tout à fait; l’une et l’autre ont pour objet et pour résultat de
débarrasser la plante de la portion surabondante de l’eau qu’elle
puise en grande quantité, par ses racines, dans le sol très humide
ou marécageux sur lequel elle végète. Le phénomène que pré-
sentent les Colocases est donc, si je puis employer cette expression,
une transpiration liquide nocturne qui remplace la transpiration
gazeuse ordinaire ou diurne.

Le Richardia {Calla æthiopica L.), dont les feuilles offrent un
phénomène analogue, mais beaucoup moins énergique, ainsi que
l’a reconnu L. Habenicht (1), est encore une plante de marais
pour laquelle, par conséquent, le fait et son explication doivent
être les mêmes que pour les Colocases.

IT. —— PARTIE ANATOMIQUE.

Les deux parties des feuilles des Colocases, qu'il importe le
plus d'examiner au point de vue anatomique, sont : 1° leur bord
ct particulièrement dans celui-ci la ligne un peu épaissie qui se
montre à l'œil nu sous l’apparence d’une nervure submarginale ;
2° leur pointe terminale, et spécialement dans celle-ci les orifices
par lesquels s'opère la sortie de l’eau. Ce sont aussi les parties de
ces organes dont je m'attacherai surtout à faire connaître la struc-
ture.

Schmidt avait été naturellement conduit à rechercher l’organi-

(1) Ueber die tropfbare Absonderung des Wassers aus den Blättern der Calla
æthiopica (Flora de 1823, n° 34, 14 septembre, p. 529-536).
4° série. Bor. T. XII. (Cahier n° 5.) ! 17

258 P, DUCHARTRE.

sation de ces mêmes parties dans la feuille de sa Colocase, et voici
comment il expose les résultats de ses observations à cet égard :

« Le bord de la feuille, dit-il (loc. cit., p. 68), présente une
structure très remarquable et particulière. En effet, la feuille en-
tière est parcourue, dans son contour extérieur, par trois canaux
qui, n'étant reliés entre eux que par du tissu cellulaire, restent
toujours à la même distance les uns des autres. Le canal le plus
interne est le plus étroit, et c’est à lui que viennent aboutir les
différents faisceaux de la feuille ; je n’ai pu parvenir à y introduire
un erin ni un cheveu, bien que, sous le microscope, j'en aie vu
nettement la cavité. Le canal médian, qui vient ensuite, est si
grand et si largement ouvert, qu'on peut y insinuer, sans la
moindre difficulté, et y faire mouvoir une forte soie de cochon.
Enfin le canal externe est plus étroit que le précédent, maïs plus
large que le premier ; on peut encore y faire pénétrer une soie
fine... Ces trois canaux que je viens de décrire, après avoir fait
le tour de la feuille, viennent se rendre de l'un et l’autre côté à sa
pointe. Cette pointe est plus épaisse que le reste de la substance
de la feuille et que son bord... A sa face supérieure se montre une
petite dépression aplatie, dans laquelle on observe deux ouvertures
circulaires, qui sont situées l’une en avant de l’autre, et dont la plus
enfoncée est la plus petite. Si l’on introduit un gros cheveu dans
cette dernière ouverture, on arrive dans le canal qui suit la péri-
phérie de la feuille ; d’un autre côté, quand on fait entrer une soie
fine dans l'ouverture la plus grande, cette soie arrive dans le canal
médian, le plus grand des trois. Quant au canal le plus interne, on
ne peut le reconnaitre à lœil nu, dans la pointe de la feuille ; s’il
y existe, il est au moins certain qu'il n’a pas d’orifice à lui propre,
comme les deux autres. »

Cette description donnée par Schmidt me semble avoir besoin
d'être modifiée à quelques égards et, dans tous les:cas, d’être
complétée. |

1° Structure de la feuille en général.

La feuille de la Colocase de la Chine, que j'ai jirise pour sujet

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS. 259
principal de mes observations anatomiques, étant coupée transver-
salement, sur un point quelconque intermédiaire aux nervures et
aux veines, présente une structure analogue, sous presque tous les
rapports, à celle de la généralité des feuilles minces. Son méso-
phylle, ou sa portion intermédiaire aux deux épidermes, se divise
en deux zones distinctes, dont l’une pourrait, au besoin , être
subdivisée, à son tour, en deux portions distinguées par quelques
caractères. La zone supérieure, sous-jacente à l’épiderme supé-
rieur, est formée (pp, fig. à) d’un parenchyme à cellules oblongues,
dirigées perpendiculairement à cet épiderme. Ces cellules, super-
posées, en deux ou trois assises (fig. 3, pp; fig. 4), par files ré-
gulières, contiennent en assez grande abondance de gros grains
de chlorophylle. La zone inférieure est formée tout entière d’un
parenchyme à cellules courtes et plus où moins exactement arron-
dies ou vaguement polyédriques, assemblées Achement, de manière
à constituer un tissu mou et un peu spongieux. La portion supérieure
de ce dernier parenchyme, qui occupe le milieu de l'épaisseur de
la feuille (pm, fig. 3), consiste en grosses cellules, entre les-
quelles sont creusées de nombreuses lacunes (4, fig. 3) générale-
ment rangées sur un seul plan médian, et dont la cavité est plus ou
moins sinueuse dans le sens de sa longueur ; enfin sa portion in-
férieure (pi, fig. 3) est formée de cellules notablement plus petites.
Il y à une transition bien marquée entre les grandes cellules mé-
dianes et ces dernières, tandis qu’il n’en existe pas entre ce paren-
chvme inférieur et le supérieur à cellules oblongues. En outre, les
deux portions du parenchyme inférieur contiennent, en propor-
tions à peu près égales, des grains de chlorophylle, d’où il résulte
que le mésophylle est vert dans toute son épaisseur, bien que
cette teinte soit plus prononcée dans sa zone supérieure.

Quant aux deux épidermes qui revêtent les faces de la feuille,
ils sont remarquables par une particularité qui explique les beaux
reflets veloutés de la face supérieure, la teinte glauque de la face
inférieure et la faculté qu'ont lune et l’autre de laisser glisser
l’eau sans en être mouillées. En effet, ils sont composés d’une
couche de cellules, dont chacune se relève extérieurement, dans
son milieu, en une grande et haute papille arrondie (ep, fig, 3;

260 P. DUCHARTRE.

fig. 5). Les papilles de l'épiderme supérieur (ep, fig. 3) sont plus
coniques que celles de l’épiderme inférieur (ep', fig. 3), qui for-
ment chacune une caloite hémisphérique un peu exhaussée. C’est
à la couche d'air constamment retenue entre ces papilles que sont
dus les différents effets que je viens de signaler comme se produi-
sant aux deux faces de la feuille.

Les stomates, qu'on remarque principalement à la face infé-
rieure des feuilles de la Colocase, sont petits, assez espacés, et peu
faciles À voir à cause de leur enfoncement entre les papilles (sé,
fig. 5), ainsi que de la présence de la couche d’air qu’il est essen-
tiel d’expulser pour les bien observer.

Les nervures secondaires ou veines, à peu près uniformes
d'épaisseur et de structure, qui s'étendent dans la substance du
mésophylle, et qui, comme je l’ai dit plus haut, vont aboutir, en
dernière analyse, à la nervure périphérique, sont essentiellement
formées d’un faisceau fibro-vasculaire analogue à ceux qui existent
en grand nombre dans le pétiole.

Or ceux-ci, dont la figure 9 montre la disposition sur la section
transversale du pétiole, présentent un caractère anatomique re-
marquable : leur portion interne est creusée d’une grande lacune
longitudinale (4, fig. 10 et 11) ,-dont la cavité est le plus souvent
unique, rarement (fig. 10) subdivisée par une cloison en deux
tubes juxtaposés. Ces faisceaux pétiolaires sont épars au milieu
d’un parenchyme lâche, à grandes cellules devenant beaucoup
plus petites vers la circonférence, qui est creusé d’un grand
nombre de vastes lacunes tubuleuses et longitudinales (4, fig. 9).
J’ajouterai que la portion périphérique du pétiole offre un cercle
assez régulier de faisceaux, dont les uns sont fibro-vasculaires,
comme ceux que je viens de signaler, dont les autres (f”, fig. 9)
sont, au contraire, formés exclusivement de cellules allongées, à
parois très épaisses, et me semblent dès lors devoir être regardés
comme libériens.

2° Nervure périphérique.

La nervure périphérique et submarginale offre une structure
complexe qu’il est nécessaire de décrire en détail. On peut v dis-

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS, 261
tinguer deux parties qui n'ont pas de rapport organique essenliel
l’une avec l’autre, savoir le faisceau submargimal et l'appareil des
CATIAUX. |

Le faisceau submargimal (f, fig. 13, 15 et 16) est un petit groupe
de trachées qui se trouve un peu plus rapproché de la face infé-
rieure que de la face supérieure de la feuille, à peu près à moitié de
la distance du canal externe et du bord libre du limbe. Ce qui le
caractérise essentiellement c’est, en premier lieu, qu'il n'offre
pas de lacune dans son épaisseur ; en second lieu, que je n'ai pas
vu d'anastomoses latérales entre lui et les faisceaux vasculaires
des canaux.

L'appareil des canaux, considéré dans la portion de la feuille où ti
est entièrement développé, c’est-à-dire sur des points qui nesoient
pas très rapprochés de la base de cet organe, se montre formé de
trois canaux situés au milieu de l'épaisseur de l’organe entier, paral-
lèles au bord de celui-ci et entre eux. Ces canaux sont loin de pré-
senter la régularité qui leur est attribuée par Schmidt, soit pour la
grandeur relative, soit même pour le nombre. Il suffit, pour se faire
une idée des variations de grandeur qu'ils peuvent présenter, de
comparer entre elles les figures 13 et 15 quien montrentla coupe
transversale, sur deux points analogues de deux feuilles diffé-
rentes, mais arrivées à peu près au même degré de développement.
On voit ainsi que, dans la première de ces feuilles (fig. 45), les
trois canaux répondent aux énoncés de Schmidt, le plus petit des
trois étant l’interne (e) et le plus grand étant le médian (e°); mais
que, dans la seconde, il en est tout autrement, le canal interne
(e, fig. 13) étant beaucoup plus grand que les deux autres, tandis
que l’externe (c”) est le plus petit des trois. D’un autre côté, le
nombre de ces canaux peut encore varier, ainsi que leur grandeur,
sur les différents points de la circonférence d’une même feuille.
C’est ce qui ressort, par exemple, avec évidence de la comparaison
des deux figures 13 et 14 qui représentent des sections transver-
sales du bord d’une même feuille menées l’une (fig. 13) dans la
partie antérieure de cet organe, l’autre (fig. 14) vers sa base. Or
on voit que, sur ce dernier point, il n'existe que les deux canaux

262 P, DUCHARTRE,
internes c et c’, encore même incomplétement développés et dès
lors cloisonnés. |

Je crois donc devoir apporter un correctif à l’énoncé de Schmidt
et dire que l’appareil auquel est due l’émission d’eau par Îles
feuilles de la Colocase des anciens comprend trois canaux, sur les
points de ces organes où il acquiert tout son développement ; mais
que, sur ces trois canaux, c’est tantôt le médian, tantôt l’interne
qui est le plus grand.

Une autre conséquence qui découle encore de mes observations,
c'est que l'appareil dont il s’agit ici va en se développant et se
perfectionnant de la base vers le sommet des feuilles, c’est-à-dire
à mesure qu'un plus grand nombre de nervures secondaires vien-
nent successivement y aboutir, où, en d’autres termes, que l’or-
gane a un développement proportionnel à l’intensité de la fonetion.

Le plancher de ces cavités tubulaires périphériques est formé
par un groupe de grandes trachées brunâtres (4, fig. 43, 16), qui
se montrent plus ou moins sinueuses dans le sens de leur longueur
(fig. 16). Ces trois gros faisceaux de trachées marchent parallèle-
ment les uns aux autres, selon la direction des canaux qu'ils
accompagnent ; mais ils s’envoient de fréquentes anastomoses
obliques, qui font de cet ensemble un tout continu. Il est facile
de reconnaître l’existence de ces branches de communication tra-
chéennes au moyen de coupes longitudinales du bord de la feuille,
menées parallèlement aux faces de celle-ci.

Au-dessous de ces faisceaux de trachées longitudinales se trouve
un groupe plus ou moins considérable de cellules étroites et allon-
gées, Quant à la cavité du canal lui-même, elle est circonscrite
par une couche de cellules un peu oblongues (co, fig. 43 et 16),
assez étroites, qui en forment la paroi propre. Enfin tout cet en-
semble est entouré par le parenchyme foliaire, qui, dans cette
portion marginale de la feuille, correspond presque entièrement
à la zone inférieure du mésophylle considéré sur les autres points
du limbe. Quant à la zone supérieure, elle est ici très réduite,
puisqu'elle ne présente guère qu’une rangée de cellules oblongues,
perpendiculaires à l’épiderme; cette rañgée s’arrêle même à quel-

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS, 268
que distance du bord proprement dit. Enfin l’épiderme des deux
faces ne présente plus de papilles vers le bord même de la feuille,
où il est tout à fait lisse.

Ces détails connus, il est permis de se demander si les canaux
submarginaux des Colocases sont un appareil spécial, sui generis,
ou s'ils ont leur analogue dans les autres parties des feuilles de
ces plantes. La réponse à cette question ne me paraît pas dou-
teuse; en eflet, il y a, ce me semble, une complète analogie de
structure entre ces canaux, avec les parties qui se rattachent à
chacun d'eux, et les faisceaux fibro-vasculaires qui, après avoir
parcouru le pétiole des feuilles, se rendent au limbe pour former
la portion fondamentale de ses nervures. On sera frappé de cette
analogie si l’on compare entre elles les figures 410 et 44, qui re-
présentent deux faisceaux pétiolaires, avec les figures 13 et 45
qui montrent l'organisation des canaux foliaires. On verra que, de
part et d'autre, ilexiste une lacune circonscrite en majeure partie
par une couche de tissu cellulaire assez serré, distinct du paren-
chyme plus large qui l’environne, et qu’au-dessous de cette lacune
se trouve la masse fibro-vasculaire ou la portion fondamentale du
faisceau tout entier. On remarquera même l'identité de situation
de la lacune dans les deux cas, car elle $e trouve à la partie in-
terne du faisceau dans le pétiole (fig. 9), d’où il résulte qu’elle
doit venir en dessus, quand les différents faisceaux qui étaient
groupés dans le pétiole se sont dissociés et rabattus pour s’épa-
nouir en un limbe, dont le plan est perpendiculaire à la direction
du pétiole ; or c’est en réalité ce qui a lieu.

J'ai reconnu que l’organisation dont je viens d’essayer de don-
ner une idée se retrouve dans le Colocasia antiquorum lype ;
seulement, dans celui-ci, je n'ai vu généralement que deux canaux
bien formés dans la nervure périphérique.

Je crois donc pouvoir dire que les canaux périphériques des
Colocases ne sont pas un appareil spécial, mais que ce sont sim-
plement les lacunes de trois faisceaux submarginaux, parallèles et
reliés entre eux en un système unique. Seulement ici la lacune
prend plus de développement qu'ailleurs, en raison même du rôle
de canal déférent qu’elle est appelée à jouer.

926 P, DUCHARTRE,

Au premier coup d'œil, jeté sur les figures 13 et 15, on est
frappé de l’irrégularité que présente le contour de chaque canal ;
cette irrégularité est la conséquence naturelle de la manière dont
se forme chacun de ces tubes.

En effet, dans une feuille encore très jeune, les faisceaux péri-
phériques ne présentent pas de lacune ; mais, à leur côté supérieur
se trouvent de deux à quatre files de grandes cellules, dont les
cavilés sont, à cette époque, distinctes et séparées (fig. 7, 4-B.
C-D; fig. 12, c). Cette subdivision de ce qui doit être plus tard
une seule lacune en plusieurs cavités cellulaires distinctes per-
siste plus ou moins longtemps, et peut même se retrouver
dans des feuilles déjà bien formées, soit vers leur base (fig. 44),
soit ailleurs dans les canaux les moins développés (c”, fig. 13);
mais quand le canal commence à revêtir son caractère propre et
à servir de conduit à l’eau que la feuille doit expulser par son extré-
mité, cette division disparaît, les cloisons se rompent (c', fig. 15),
leurs débris sont résorbés, et finalement il n’exisie plus qu'un
grand tube unique là où se trouvaient d’abord des files plus ou
moins nombreuses de grandes cellules.

3. Orifices excréteurs.

Les perforations par lesquelles est expulsée l’eau que sécrètent
les feuilles des Colocases sont, à mes yeux, le point le plus curieux
qu'offre l’organisation de ces plantes remarquables. Elles avaient
été seulement entrevues par Schmidt, qui ne nous avait appris
presque rien sur leur manière d’être et rien du tout sur leur na-
ture réelle. Je crois donc que les observations dont je vais exposer
les résultats auront pour elles le mérite de la nouveauté.

Un examen à la loupe de la dépression oblongue dont est creusée
en dessus la pointe terminale des feuilles de laColocase de la Chine,
ÿ fait remarquer (fig. 1) deux petites ouvertures placées assez ré-
gulièrement sur la ligne médiane et inégales de forme comme de
grandeur. Sur toutes les feuilles que j'ai examinées, l'ouverture la
plus rapprochée du sommet était petite et arrondie, l’autre élait
notablement plus grande et ovale. Sous le microscope et à l’aide

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS, 265

d'un grossissement modéré, il est facile de reconnaître que ces
deux ouvertures ont un contour très net et, par conséquent,
qu’elles ne sont pas dues à une déchirure de l’épiderme, comme
Meyen l'avait supposé sans fondement. Si l'on parvient à enlever
l’épiderme de la même dépression et qu’on l’examine avec toute
l'attention nécessaire, on arrive à s’éclairer entièrement sur la
manière d’être de ces orifices et sur leur nature réelle. D'abord on
ne tarde pas à voir que les deux dont il vient d’être question
n'existent pas seuls, mais qu'avec eux 1l s’en trouve quelques autres
qui sont seulement plus petits et dès lors beaucoup moins visibles.
On peut même suivre sans peine le décroissement graduel de ces
diverses perlorations depuis la plus grande, à contour ovale
(fig. 6, F), jusqu’au simple ostiole d’un stomate (fig. 6, 4). On
reconnait, en outre, que toutes ces ouvertures, de dimensions fort
dissemblables, ont un contour également net, et que chacune d'elles
est entourée d’une bordure régulière, unie, transparente, formée
de deux cellules en demi-lune, qui contiennent une certaine quan-
tité de granules. Ces deux cellules marginales sont d'autant plus
faciles à observer qu’elles se trouvent comme encadrées au milieu
de l’épiderme à cellules moins transparentes, sans granules inté-
rieurs et pourvues chacune de sa grosse papille. Les figures A,
B,C, D, E,F (fig. 6), fournies toutes par la même pointe de
feuille suffisent, j'ose le croire, pour montrer que, sauf la gran-
deur, toutes ces ouvertures sont absolument semblables entre
elles ; or la conséquence toute naturelle qui découle du fait de
cette parfaite identité est que toutes sont de la même nature ou, en
d’autres termes, que s’il est impossible de méconnaitre des sto-
mates, à l’état normal dans la figure A (ibidem), de plus en plus
grandis dans les figures B, C et D (ibidem), il est également im-
possible de se refuser à voir des stomates encore plus amplifiés
dans les deux grands orifices excréteurs que présentent les figu-
res E etF (1bidem).

Je crois donc pouvoir énoncer de la manière la plus catégorique
ce fait, si je ne me trompe, entièrement nouveau pour la science,
que les orifices par lesquels sort l’eau sécrétée par les feuilles des

266 P. DBUCHARTRE.

Colocases ne sont pas autre chose que des stomates qui ont subi
graduellement une amplification énorme, lout en conservant leurs
deux cellules marginales et même les granules contenus dans
celles-c1.

J'ai fait des observations tout à fait semblables sur la feuille du
Colocasia antiquorum lype ; la seule différence que j'ai reconnue
dans celle-ci, comparée à la feuille de la Colocase de Chine, c’est
que ses deux orifices excréteurs sont habituellement arrondis.

Après les détails qui précèdent sur la structure anatomique des
feuilles des Colocases, il me semble possible de se former une idée
générale de la marche que suit l’eau dans ces organes pour arri-
ver finalement à leur extrémité. J’ai montré que, dans le pétiole
lui-même, chaque faisceau fibro-vasculaire est creusé d’une lacune
ou d’un conduit qui le suit sur tout son trajet. Des conduits du
même genre se retrouvent dans les nervures des différents ordres,
qui viennent aboutir aux Canaux périphériques. Il existe donc là
un système continu de tubes qui viennent apporter l’eau produite
par le mésophylle dans les canaux périphériques ; ceux-ci doivent
être regardés comme les tubes côllecteurs de tout ce système ; le
liquide y marche d’arrière en avant. Plus ces tubes collecteurs
reçoivent de nervures et de veines, plus ils doivent aussi re-
cevoir de liquide apporté par celles-ci ; par À s’expliquerait le fait
signalé plus haut que les canaux périphériques sontimparfaits vers
la base du limbe, où 1! ne leur est encore arrivé qu’un très petit
nombre d’affluents.

Afin de voir si ces idées, qui sont basées sur l'observation de la
structure anatomique, étaient d'accord avec les faits physiolo-
giques, j'ai fait quelques expériences qui m'ont semblé en fournir
la confirmation,

Dans plusieurs circonstances, j'ai tranché de chaque côté avec
un rasoir la nervure périphérique sur un ou plusieurs points, non
loin du sommet. Celui-ci, qui jusqu'alors avait donné de l’eau en
abondance, a cessé aussitôt d’en émettre; dès cet instant, la sor-
lie du Hquide a eu heu par les solutions de continuité qui avaient
été pratiquées. Quand les incisions ont été faites près de la base de

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS, 267
la feuille, il n’en est à peu près pas sorti de liquide. Sur une feuille
adulte, j'ai enlevé, de chaque côté, une bande marginale à partir
d’un centimètre environ du sommet, et sur une longueur de
0",015. Immédiatement l’eau a cessé de sortir par le sommet, et
elle a commencé de couler par la section des canaux périphériques,
au bord postérieur des deux entailles. Il en est même sorti une
très petite quantité, pendant quelques jours, par leur bord anté-
rieur. Enfin, j'ai vu quelques petites gouttes au bord interne de
ces entailles, aux poinis où des nervures avaient été tranchées par
l'instrument. Quand une fente à été pratiquée sur un point quel-
conque de la surface du limhe, de manière à couper des nervures,
il en est sorti des gouttes d’eau. J'ai enlevé, avec un rasoir, sur
quelques feuilles, la portion terminale que surmontait l’acumen ;
dans ces cas, l’eau est sortie par les deux extrémités de cette tron-
cature, aux points où les canaux marginaux se trouvaient ainsi
ouverts. Quand la nervure périphérique a été tranchée sur un
point éloigné du sommet, il est sorti de l’eau par ce point, mais
ilen a coulé néanmoins une plus grande quantité par le sommet,

Je crois mutile de multiplier ces exemples qui me semblent
tous concourir à prouver que les nervures apportent leur con-
lingent liquide aux canaux périphériques collecteurs, qui le diri- .
gent ensuite vers le sommet en quantité de plus en plus grande,
à mesure qu’ils en reçoivent eux-mêmes davantage,

APPENDICE.

J'ai eu occasion, dans ce mémoire, de mentionner plusieurs fois
les changements de position qu'exécutent les feuilles des Colocases
aux différents moments de la journée; il ne sera peut-être pas
inutile de donner maintenant quelques détails sur ces changements
de position, qui constituent pour ces plantes de véritables mouve-
ments périodiques réguliers.

Dès le soir et pendant toute la nuit, le limbe de ces feuilles est
pendant ; leur pétiole est dirigé obliquement, plus ou moins arqué
dans sa longueur, et son extrémité supérieure, que surmonte le
limbe, forme une courbe brusque très prononcée, grâce à laquelle

268 P, DUCHARTRE.,

cette lame devient tout à fait verticale, Alors le pétiole présente
une flaccidité sensible. Il résulte de là que, malgré la grandeur de
ces feuilles, la touffe volumineuse que forme un pied tout entier
de Colocase, ne couvre que imparfaitement la terre de laquelle elle
s'élève. Le matin, dès que le jour paraît, cette situation commence
à changer : le pétiole se redresse peu à peu, devient plus rigide,
et affaiblit sa courbure terminale. En même temps le limbe se re-
lève, soit relativement à la direction du pétiole, soit d’une manière
absolue. Enfin, de sept à hait heures en été, le changement de
situation est ordinairement complet : dans ce nouvel état, le pé-
tiole est rigide et rectiligne ; sa courbure terminale a notablement
diminué, s’est même effacée sur certaines des feuilles centrales de
la touffe ; par là, le limbe est devenu horizontal ou peu ineliné à
l'horizon, de telle sorte que ces grandes feuilles forment, par leur
réunion, une sorte de grand parasol, dans lequel celles qui occu-
pent le centre de la touffe, c’est-à-dire les plus grandes et les plus
récentes, sont presque horizontales, tandis que les autres se mon-
trent plus inclinées, selon qu'elles sont plus extérieures ou plus
anciennes. |

Cet état de redressement maximum dure peu. Peu après midi,
quelquelois même plus tôt, les feuilles commencent à s’abaisser,
d’abord lentement, ensuite plus vite, et le soir, dès avant la nuit,
elles ont repris leur situation verticale nocturne. Dans une air-
constance, par un beau jour du mois d’août, j'ai vu leur abais-
sement commencer de dix à onze heures du malin.

III. —— PARTIE ORGANOGÉNIQUE.

Développement des feuilles du Colocasia antiquorum.

Jen'ai pas la prétention de présenter l’histoire complète du dé-
veloppement de la feuille dans la Colocase des anciens ; ayant cultivé
cette plante surtout afin de suivre avec attention la marche du sin-
oulier phénomène physiologique qu’elle présente, j'ai dù respecter
le plus possible les pieds que j'en possédais, et leur épargner des
mutilations qui auraient pu altérer, de manière ou d'autre, la

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS, 269
marche naturelle de leur végétation. Je n'ai donc pu en observer
les premiers états. Au reste, de très bonne heure et dès que ces
feuilles ont formé leur lame, elles en enroulent les deux côtés,
l’un autour de l’autre; en outre, elles restent entièrement enfer-
mées dans la gaine formée par l'élargissement de la portion infé-
rieure du pétiole de la feuille qui les a précédées dans l’ordre de
formation. Ces deux circonstances s'opposent à ce qu'on prenne
une série de mesures successives de la même feuille, condition in-
dispensable pour arriver à se fixer sur l'accroissement relatif de
ses différentes parties. C’est done uniquement quand cet organe,
encore fort éloigné des dimensions auxquelles il doit arriver fina-
lement, s’est dégagé de son enveloppe protectrice, surtout quand
il a déroulé un de ses côtés ou les deux, qu’on peut commencer
a le mesurer, et dès lors à en observer avec attention l’accroisse-
ment. C’est ainsi que j'ai suivi l'extension graduelle de plusieurs
de ces feuilles que j'ai mesurées en divers sens, de jour en jour
et même plusieurs fois par jour. Pour ne pas étendre outre me-
sure ce mémoire déjà trop long peut-être, je me contenterai de
rapporter en détail un petit nombre d'exemples pris, l’un en 1857,
l’autre en 1858, sur la Colocase de la Chine.

Dans l'intention d'apprécier l'accroissement de la feuille, selon
ses principales lignes, j'ai mesuré : 4° la longueur de son limbe
prise entre l'extrémité de sa pointe terminale et le sommet de l’un
de ses deux grands lobes basilaires ou oreillettes; 2° sa plus
grande largeur ; 3° la distance du sommet au centre de son inser-
üion, c’est-à-dire de l'extrémité du pétiole, où de ce que je nom-
merai, pour abréger, le centre organique; 4° celle de ce même
centre au sommet d’une oreillette. Quant au pétiole, j’en ai me-
suré : 1° Ja longueur totale, à partir du niveau du sol, et 2° la
partie supérieure ou arrondie, dont la mesure permet d'obtenir,
par une simple soustraction, celle de la partie inférieure ou engai-
nante. Dans les tableaux qui comprendront les résultats de ces
observations, je ne ferai figurer que la longueur et la largeur du
limbe, la longueur totale du pétiole et celle de sa portion supé-
reure arrondie. J’at reconnu que les deux autres données que

+?

j'avais obtenues pour le himbe n’ajoutent rien d’important pour la

270 P. DUCHARTRE.
connaissance du développement ; aussi les négligerai-je, en vue
de simplifier mes tableaux.

Premier exemple. — Le 26 août 1857, à six heures du matin,
la sixième feuille d’une forte touffe, qui venait d'en donner une
longue de 0,45, montrait à peine sa pointe à l'extrémité supérieure
de la gaine de cette dernière feuille. Le 27, à la même heure, elle
sortait de 0",03. Je dois faire observer que cette sullie de à cen-
timètres était la somme de l’allongement du pétiole et de celui du
limbe lui-même, dans sa portion antérieure. La saillie hors de la
gaine était de 0",06 le 28 août, de 0",087 le 29, de 0”,012
le 30, toujours à six heures du matin. Le 1° septembre, à la même
heure, la feuille était sortie de la gaine, en écartant les bords du
pétiole, sur une longueur de 0",345 ; enfin elle se dégagea tout à
fait le 2 septembre, mais en restant encore entièrement convolu-
tée. Le 3, elle commença de déployer l’un de ses côtés. Ce Jour-
là, elle avait de longueur totale 0",380. Voici maintenant le ta-
bleau de ses dimensions mesurées, vers neuf heures du matin,
pendant toute la suite de son accroissement :

LONGUEUR TOTALE LARGEUR LONGUEUR TOTALE ||
cb ait du limbe, du limbe, du pétiole.
m, m. m

3 septembre 1858. . . 0,380
n — dés aie 0,390 0,280 0,420
enr 043 RU199.01 0,410 0,285 0,488
8 — mé si 0,445 0,324 0,550
PORN TT 0,460 0,340 0,560
der o5:8b ollon sf à 0,470 0,350 0,590
is He Cu 0. 0,485 0,360 0,600
en Tori, Beruil 0,492 0,362 0,630
0,370 0,640

18 10 Let Ga 0,500

L'accroissement de cette feuille était alors terminé, car, les deux
jours suivanis, je ne reconnus aucun changement dans les dimen-
sions de son limbe.

Deuxième exemple fourni par la quatrième feuille de la touffe

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS. 271
la plus forte d’un pied vigoureux. — Le 11 août 1858, à dix
heures du matin, cette feuille s’est dégagée entièrement de la gaine
de la feuille précédente; celle-ci avait 0",40 de longueur, avec un
pétiole long de 0,614.

DaAÏES Étimauris LONGUEUR TOTALE | LARGEUR TOTALE | LONGUEUR TOTALE
1 du limke, de la feuille. du pétiole.
|
m, m, m.
A1 août 1858, à 10 h. matin, . 0,325 0,260 0,400
— — 48 h. soir... 0,335 0,270 0,430 ;
12 — — à6 h. matin... 0,345 0,280 0,440
— — à8 h.soir. .. 0,362 0,296 0,475
13 — — à6 h. matin... 0,370 0,304 0,485
— — à8 h. soir. .. 0,396 0,324 0,505
14 — — à6 h.matin .. 0,404 0,336 0,515
— — à8 h.soir. .. 0,426 0,356 0,535
45 — — à 6 h. mätin. . 0,435 0,364 0,548
D 20e hi so: 7.11: 00848 0,372 0,555
16 — — à6 hb. matin... 0,450 0,374 0,560
ne "28 hlsot:". 0,455 0,380
17 — — à 6 h.matin.. 0,460 0,386 0,565
ti. 28 Nasoir, . ll. 06 0,390 0,590
18 — — à 6 h., matin, . 0,470 0,394 0,590
19 — — à 6 h. matin... 0,475 0,400 0,610
20 — — à6 h. matin. .| 0,480 0,400 0,635
21 — — à 6 h. matin... 0,480 0,400 0,640

Au 31 août, le limbe de la feuille n'avait pas gasné en gran-
deur, mais le pétiole s'était encore allongé notablement. A celte
date, de l'extrémité de sa gaine sortait le bout de la cinquième
feuille, qui déjà faisait saillie de 0",085.

Troisième exemple fourni par une feuille qui appartenait à une
forte touffe d'un pied vigoureux. — Elle succédait à une feuille
qui, entièrement développée, avait mesuré 0",44 de longueur,
0",336 de largeur, et dont le pétiole entier était long de 0",6à5.
Le 14 aout 1858, au moment où ont commencé les observations
qui suivent, la feuille venait de se dégager de la gaîne de la feuille
précédente, et elle commençait seulement de dérouler l’un de ses
côtés, à savoir le gauche. Son côté droit ne fut entièrement étalé,
à son tour, qu'au bout d'environ quarante-huit heures.

279 P, DUCHARTRE.

LONGUEUR LARGEUR LONGUEUR LONGUEUR
DATES ET HEURES. totale Jacnmpedell totale | Uper ondre
du limbe, feuille. du pétiole, du pétiole.
” m. m,. m., m,.
A4 août 4858, à 6 h. mat.| 0,325 0,360 0,160
— — à 8 h. soir. 0,338 ATEN 0,400 0,240
15 — — à 6h. mat. 0,345 0,246 0,420 0,235
— — à 8 h. soir. 0,350 0,258 0,425 0,240
16 — — 3à6h. mat. 0,370 0,260 0,430 0,245
17 — — à 6h. mat. 0,385 0,268 0,450 0,280
— — à 8 h. soir. 0,398 0,275 0,480 0,300
48 — — à6h. mat, 0,405 0,285 0,498 0,320
19 — — à 6 h. mat, 0,435 0,305 0,540 0,360
— — à8 h. soir. 0,452 0,312 0,565 0,385
20 — — à6h. mat. 0,460 0,316 0,570 0,400
— — à 8 h. soir. 0,465 0,327
21 — — à6h. mat. 0,473 0.332 0,585 0,425
T7 7 adshosoir.|" 0460 0,334
22 — — à6h. mat. 0,483 0,338 0.595 0,430
— — à 8 h. soir. 0,487 0,341 0,605 0,335
23 — — à6h. mat. 0.490 0,341 0,640 0,335
24 — — à6h. mat. 0,499 0,348 0,625 0,340
— — à 8 h. soir.|, 0,500 0,350 0,630 0,350
25 — — à6h. mat. 0,504
26 — — à6h. mat. 0,502 0,353 0,650 0,355
27 — — à6h. mat. 0,503 0,355 0,650 | 0,355
31 — — àth.. .. 0,506 0,355 0,675 0,370
& sept. 1858, à 6h. mat, 0,506 0,355 0,700 | 0,385

Quatrième exemple fourni par la feuille qui a succédé à celle
dont le deuxième tableau montre le développement.

31 août 1858, à midi, son sommet dépasse la gaîne

de la feuille antérieure de . . . . . . . . . . 0,035
A septembre, à 8 h.'matin. : ."."".". 4 «'."#, O0
2 — SN OUUR. 5. . 9 ME: 0,060
3 — d'oRtmann 104 JECONQS INSEE S 0,085
mn — à Fihmaln.: rats QE. Matér-sse À 0,140
5 =& At hrmaezs. dhrcodureh troke 0,140
6 — RD OR 6 RE 0,160
7 — AUS MAUR ha nue Lie 0,475
8 — A A ANS be eee 0,490
9 — à 7 DS AU. À AS SSP ORRERR NE 0,220
10 — à 6 h. soir, elle se dégage de la gaîne,

toute cnroulée.

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS. 973

LONGUEUR LARGEUR LONGUEUR LONGUEUR

È . de la portion

DATES ET HEURES. totale du lotale supér,arrondie
du limbe. limlie, du pétiole, du pétiole,

TS ns ee en ne

m, , m,.
sept.1858,à 6 h. | 0,356 + 04 0,400
à 7 b. 0,360
à 8 h. 2.053170 PT Le. 0,435
à 8h. mat.| 0,390 na 0,460
à 8 b. F ? 0.480
à 8h. k 22 0,525
à 8 h. 5 0,540
à 8 h. 0,565
à 8 h. Ë ) 0,589
alAh, mat. 0,600
à 8 h. d ) © 0,610
à 8 h. , ». 0,620
à 8h. 0,645
à 8 h. mat. | 0,665
alO0h. é D 4 0.680
al0h. à 0,690
à 9 h. 0,705

Je dois faire une remarque au sujet des nombres consignés
dans mes tableaux. Malgré tout le soin que j'ai nas à prendre les
mesures qu’ils expriment, je ne puis en garantir l'exactitude qu’à
À ou 2 millimètres près. On conçoit, en effet, qu'il était im-
possible de mesurer avec une rigueur mathématique les dimen-
sions de feuilles qui ne formaient pas une surface parfaitement
plane, mais qui avaient une concavité prononcée, et dont les bords
étaient ondulés. En outre, je crois que certaines irrégularités
qu'offre la série de ces nombres résultent des inégalités qui
ont dû exister dans le développement des feuilles, d’un jour
à l’autre, en raison des variations de la température et de
l'humidité du sol. |

Ces réserves faites, il me semble résulter de la discussion et de
la comparaison des quatre exemples précédents, diverses consé-
quences intéressantes :

1° L'accroissement du limbe, d’abord assez faible, tant que la
feuille, enveloppée dans la gaine pétiolaire, ne laisse sortir que son

extrémité, devient plus considérable quand elle s’est dégagée,
4° série. Bor. T. XIT. (Cahier n° 5) 2 18

27 P. DUCHARTRE,

surtout quand elle a déployé successivement ses deux côtés. Son
maximum arrive peu de jours après que le déploiement est ter-
miné. À partir de ce moment, il décroit rapidement, et quelques
jours suffisent ensuite pour qu’il arrive à son terme.

2° Ce limbe s’allonge de 50 à 55 pour 100 depuis le moment
où il s’est dégagé de la gaîne, jusqu’à celui où il termine son élon-
gation. Il s’élargit de 50 pour 100 en moyenne, à partir de Pin-
stant où 1l a déployé ses deux côtés.

3° Le développement en longueur du pétiole se continue pen-
dant plusieurs jours, après que la lame a cessé de grandir. Il
paraît être à peu près uniforme, jusqu’à une époque un peu anté-
rieure à celle où ce pétiole cesse lui-même de s’allonger.

k° A partir du moment où la feuille se dégage jusqu'à celui où
tout accroissement cesse pour elle, le pétiole double presque de
longueur. Sa portion supérieure qui surmonte la gaine, et qui est
arrondie sur sa coupe transversale, prend la plus forte part à cet
allongement tolal ; elle fait plus que doubler de longueur. Ainsi le
second exemple nous la montre longue d’abord de 0",160 et arri-
van! finalement à 0",385, c’est-à-dire gagnant à 0",2925.

J'ai cru qu'il y aurait intérêt à reconnaître si les deux côtés de
la feuille, séparés par la côte médiane, prendraient le même
accroissement en largeur. A priori, l’un d’eux étant totalement
enveloppé par l’autre qui s’enroule autour de lui, il était permis de
supposer que le premier serait un peu en retard de développement
par rapport au second. L'observation a justifié cette idée; elle a
montré de plus, ce qu’il était difficile de prévoir, que le côté in-
lérieur dans la préfoliation finit par égaler l’autre et même par le
dépasser quelque péu, son accroissement se prolongeant un peu
plus longtemps. C’est ce que montrera le tableau suivant, où sont
rapportées les mesures prises sur la feuille qui m’a fourni mon
troisième exemple :

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS. 975

tentl À

CÔTÉ GAUCHE CÔTÉ DROIT
étalé le premier, étalée le dernier ,
DATES ET HEURES. c’est-à-dire extérieur [c’est-à-dire intérieur
dans dans
la préfoliation, la préfolialion,
m1. m.
17 août 4858, à 8 h. du soir. . . . . 0,440 . 0,135
18 — —— à 6 h, du matin. . .. 0,145 0,140
19 — — à 6: OUR MATE. Le, 0,155 0,150
20 — — à 6 h, du matin. . .. 0,160 0,156
24 — — à 6 h. du matin. . .. 0,467 0,465
22 —. — à 6 h. du matin. . .. 0,470 0,168
23 — — 2. 6h. SW Matin. !/ © | 0,171 0,170
24 —_ — à 6h. du matin. . .. 0,173 0,175
Me. à 6.hdemaline:t!. 0,175 0,178
27 — — à 6 h, du matin. . .. 0,175 0,180

Enfin j'ai tenu à voir si accroissement considérable que pren-
nent les feuilles de la Colocase de Chine, après qu’elles se sont
étalées, agrandit dans la même proportion et selon la même loi les
différentes parties de leur limbe. Cette recherche acquérait plus
d'intérêt par cette circonstance que M. Trécul a constaté une par-
faite uniformité d’agrandissement dans les feuilles du Victoria et
du Nelumbium speciosum, qui sont peltées comme celles des Colo-
eases,même à un plus haut degré.

Pour nr'éclairer à ee sujet, lorsque la feuille qui m’a fourni mon
quatrième exemple a été tout à fait étalée, le 13 septembre 4858,
dans la matinée, j'ai marqué à sa surface plusieurs séries recti-
lignes de points espacés les uns des autres d’un centimètre. Parmi
ces séries, l’une s’étendait, sur la côte, du centre d'insertion du
limbe jusqu’à son sommet; elle était terminée par quatre. petits
espaces d’un millimètre chacun sur la portion terminale et en
pointe de la feuille. La deuxième série allait de ce même centre
au fond de l’échancrure basilaire, c’est-à-dire qu'elle formait
comme un prolongement de la première en arrière de ce centre ;
la troisième suivait la grande nervure récurrente dirigée dans
l'oreillette, et elle se terminait à l'extrémité de celle-ci ; la qua-
trième et la cinquième suivaient les deux principales nervures,
dont l’une marche obliquement en avant, tandis que l’autre, diri-
gée transversalement, marque la largeur de la feuille, Le 30 du
même mois, l’aceroissement de la lame était entièrement terminé ;

276 P, DUCHARTRE,

or voici l'allongement qu’avaient pris les espaces situés entre les
points d’abord équidistants :

1° Série médiane, du centre organique au sommet. — À partir
de ce centre, les onze premiers espaces se sont allongés de moïi-
tié ; chacun d’eux est maintenant de 0",045; tous ensemble font
une longueur de 0",165. Les quatre espaces suivants ont moins
gagné; chacun d’eux fait maintenant 0",01/4. Les suivants, jusqu'à
la base de l’acumen, sont longs de 0",043, et quelques-uns de
0",012 seulement. Quant aux quatre espaces d’un millimètre tra-
cés à partir du rétrécissement brusque terminal, c’est-à-dire sur
la pointe et à sa base, ils se sont considérablement allongés ; la
série en est maintenant 0",006, 0",005, 0",0045, 0",004, en
allant vers le sommet de la feuille.

2 Série médiane postérieure. — Ici l’élongation s’est opérée
tout autrement que dans la série précédente. Le centimètre qui
partait du centre même est long maintenant de 0",012, le suivant
de 0",014, le troisième et le quatrième de 0",015 ; les autres qui
viennent ensuite, au nombre de cinq, ont chacun 0",016; enfin
les à millimètres marginaux se sont allongés chacun d’environ
moitié de leur longueur initiale.

Ainsi l'accroissement dans le sens de la ligne médiane de cette
feuille s’est fait de deux manières inverses en avant et en arrière
du point d'insertion ou du centre organique du limbe. En avant, il
est allé en diminuant régulièrement vers le sommet, abstraction
faite toutelois de la pointe terminale dans laquelle il a été considé-
rable, mais dirigé selon la même loi; en arrière, il a été, au con-
traire, de plus en plus grand du centre jusqu’au bord.

3° Séries transversale et oblique. — L'une et l’autre ont agrandi
leurs espaces selon la même loi générale que la côte médiane,
c'est-à-dire que leur élongation est allée en diminuant du centre
vers le bord.

L° Série récurrente oblique, dirigée du centre du limbe à l’ex-
trémilé de l'oreallette. — Ses espaces présentent maintenant, à par-
ür du centre, la succession suivante : 0,014, 0",013 0",0445,.

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS, 977

0°,0145, 0°,015 ; puis également 0",015 REA les suivants jus-
qu'au bord.

En somme, on voit que la feuille peltée du Colocasia antiquo-
rum est loin de présenter, dans son accroissement, l’uniformité
reconnue par M. Trécul dans celles du F’ictoria et du Nelumbium.
Elle offre ce fait curieux que, dans sa portion antérieure, l’exten-
sion devient de plus en plus considérable vers la base (déve-
loppement basipète, dans la nomenclature de M, Trécul), tandis
qu'elle diminue, au contraire, de la base organique vers le bord
(développement centrifuge, Trécul) dans sa portion postérieure.
En outre, la partie rétrécie qui forme l'extrémité de cette feuille
constitue encore pour elle comme un champ particulier d’accrois-
sement, dans lequel l'extension est plus grande que partout ail-
leurs, et s'opère selon la loi constatée pour la portion antérieure
tout entière.

Peut-être cet exemple autoriserait-1l à conclure que les quatre
catégories dans lesquelles M. Trécul a cru pouvoir faire rentrer
les diverses évolutions des feuilles sont encore insuffisantes pour
les comprendre toutes, à moins toutelois qu'on ne veuille faire
rentrer parmi les formations mixtes admises par ce botaniste
toutes celles qui ne peuvent être rattachées aux trois autres.

EXPLICATION DES FIGURES,

N. B. — Elles se rapportent à la Colocase de Chine. — Toutes ont été dessi-
nées à la chambre claire. Le grossissement est indiqué sous la forme fraction-
naire à côté de chacune d'elles.

Fig. 4. Extrémité d'une feuille adulte de Colocase vue par la face supérieure ;
elle montre la dépression terminale, circonscrite par un bourrelet marginal,
dans laquelle se montrent deux ouvertures, 0, 0’, destinées à la sortie de l’eau.

Fig. 2. Contour de la coupe transversale de cette pointe de feuille, menée à
peu près au milieu de sa longueur, pour montrer la saillie des bourrelets mar-
ginaux, et par suite, la profondeur de la dépression.

Fig. 3. Coupe transversale d'une feuille encore non adulte, menée dans l'inter-
valle des nervures. ep, épiderme de la face supérieure ; ep’, épiderme de la
face inférieure. Chacune des cellules qui forment l'un et l'autre est relevée
extérieurement en une forte papille arrondie; les papilles de la face inférieure

278 P, DUCHARTRE.

sont généralement plus larges et moins coniques que celles de la face supé-
rieure. La couche d'air qui est retenue entre ces papilles produit les effets de
velouté et de glauque, qu'on observe à ces deux surfaces ; en outre, elle
empêche que l’eau ne mouille ces feuilles. — Sous l'épiderme supérieur se
trouve une zone de parenchyme, pp, à cellules dirigées perpendiculairement
à cet épiderme ; sous l'épiderme inférieur est une zone de parenchyme lâche,
à cellules irrégulièrement arrondies ou un peu polyédriques, qui passe peu à
peu à une zone médiane de parenchyme (pm), à grosses cellules, au milieu
desquelles existent de nombreuses lacunes, {. Toute l'étendue de ce méso-
phylle renferme de la chlorophylle en gros grains. Celte matière colorante
est sensiblement plus abondante dans le parenchyme perpendiculaire à
l'épiderme supérieur.

Fig. #. Fragment d'épiderme de la face supérieure, avec quelques cellules du
parenchyme sous-jacent désagrégées par la section, de manière à montrer
clairement leur forme.

Fig. 5. Lambeau d'épiderme de la face inférieure vu par-dessus, pour montrer
ses papilles et deux stomates, st.

Fig. 6. Série de figures prises sur l'épiderme de la dépression supérieure de la
même pointe de feuille. Elle constitue une succession bien graduée d'états
différents, depuis le simple stomate A, avec son ostiole, analogue aux sto-
mates que montre la figure 5, jusqu’au grand orifice excréteur ovale, F,
dont l'ouverture n'a pas moins de 0,12 de millimètre environ, On voit que,
jusque dans ce dernier, les deux cellules stomatiques se sont parfaitement
conservées, avec leurs rares granules, Il est donc clair que les grands orifices
E et F ne sont pas autre chose que des stomates agrandis.

Fig. 7. Coupe transversale des futurs canaux marginaux, prise sur deux
feuilles encore jeunes. On voit qu’ils sont encore formés chacun de deux ou
plusieurs grandes cellules, dont les parois, faisant cloison, ne tarderont pas
à disparaître de manière à confondre les cavités, maintenant distinctes, en
un seul tube. Dans chaque paire A-B et C-D, les futurs canaux ont été dessi-
nés à leurs distances respectives.

Fig. 8. Coupe transversale de la portion vaginale du pétiole d'une feuille adulte,
montrant la convolution de la feuille nouvelle qui ne tardera pas à sortir de
cette gaîne. La coupe passant par la portion inférieure de cette jeune feuille
en rencontre à la fois les deux côtés et le pétiole p’, qu'embrasse le côté
placé en dehors dans l’enroulement. cm, côte médiane de cette jeune feuille ;
p, pétiole de la feuille enveloppante; gg, les deux bords de l'élargissement
vaginal de celui-ci.

Fig. 9, Coupe transversale du pétiole d'une feuille adulte, dans sa portion
arrondie. Cette figure est destinée à montrer la disposition des faisceaux (f)
et des nombreuses lacunes (1) longitudinales dont est creusé le tissu cellulaire
général du pétiole. Elle montre, en outre, que les faisceaux fibro-vasculaires,

RECHERCHES SUR LA COLOCASE DES ANCIENS. 279

qui ont été ombrés sur le dessin, présentent dans leur portion interne un
grand canal aérien, simple ou double. f', faisceaux périphériques libériens.

Fig. 40 et 14, Coupe transversale fortement grossie de deux de ces faisceaux
pétiolaires, pour montrer la couche de tissu cellulaire à petites cellules, qui
forme les parois du canal aérien ou de la lacune (!). La figure 10 représente
un faisceau dont le canal aérifère est encore partagé par une cloison qui
n'aurait probablement pas tardé à se résorber.

Fig. 12, Coupe transversale du bord d'une feuille jeune qui était encore entiè-
rement enfermée dans la gaîne pétiolaire de la feuille antérieure par ordre de
formation, On voit que ses trois canaux marginaux (c) sont encore tous sub-
divisés par des cloisons minces, qui ne tarderont pas à disparaître pour laisser
une cavité tubulaire unique. Dans cette figure, comme dans les suivantes 13
et 14, les grandes trachées qui se trouvent à la partie inférieure des canaux,
et qui en forment comme le plancher, sont distinguées par la ligne fortement
accusée de leur contour.

Fig. 13. Coupe transversale de la portion marginale d'une grande feuille qui
n'était pas encoreentièrement étalée. On y voit qu’il existetrois canaux (c c’ c”)
dont le calibre est d'autant plus grand qu'ils sont plus éloignés du bord. Le
plus voisin du bord ou c”', a son tube subdivisé en trois par des cloisons cel-
lulaires. fs, face supérieure de la feuille ; fi, sa face inférieure ; f, faisceau
submarginal ; co, cellules oblongues qui circonscrivent les canaux ; ttt, tra-
chées ; b, bord de la feuille.

Fig. 14. Coupe transversale de la portion marginale de la même feuille menée

_ à sa base. Il n'existe en ce point que deux canaux, beaucoup plus petits
que les précédents et subdivisés par des cloisons en deux et trois cavités
distinctes. Quant au troisième canal c’,il n'a pas d'autre représentant
que quelques grandes trachées. b, bord de la feuille.

Fig. 45. Coupe transversale de la portion marginale d’une grande feuille sem-
blable à la précédente, menée à peu près à moitié distance entre le sommet
et la base. Ici il existe trois canaux dont le plus grand est le médian, qui
présente encore des restes d'une cloison; le plus petit est le plus éloigné du
bord. Quant à celui (c''c'”) qui est le plus rapproché du bord, il est partagé en
deux cavités par une cloison formée d'une seule file de cellules. f, faisceau
submarginal ; fs, face supérieure de la feuille ; fi, face inférieure ; b, bord
de la feuille.

Fig. 16. Coupe longitudinale de la portion marginale de la feuille qui a four-
ni le sujet des figures 13 et 14, menée près du sommet. f, faisceau submar-
ginal; cc'c'', les trois canaux qui, étant ouverts par la coupe, laissent voir
leurs grosses trachées plus ou moins sinueuses et très inégales ; t, trachées
en général ; co, cellules oblongues qui ciréonscrivent les canaux ; d, bord de

la feuille.

PRODROMUS

EXPOSITIONIS LICHENUM NOVÆ CALEDONIEÆ.

SCRIPSIT

WILLIAM NYLANDER.

Geographiæ Lichenum seriæ, quæ nonnisi decennüs binis ulti-
mis ortum debet, plurima contribuit cel. J. D. Hooker. Quoque
symbolas varias eidem scientiæ parti adtulerunt auctores quidam
ali, ut præsertim cel. Tuckerman, Fée, Montagne et Bahington.
Attamen longe abest quin notiiæ in hoc capite adhuc abundent,
quare crederem haud inutile censeri examen dare collectionis
parvæ e Nova Caledonia Museo Coloniarum Gallicarum Parisiis
nuper instituto missæ, utpote specimina sistentis vegelationis
-omnino ante ignotæ.

Supra (in tomo XI) Lichenes regionum exoticarum quarumdam
synoptice enumeravi, atque ibi (pp. 234-247) eos Polynesiæ
breviter exposui. Sunt Polynesienses numero saltem 143, separa-
tis scilicet Stictina quercizante et Sticta dichotomoide (pro « Sticta
damæcorni var. lineari ») additisque Parmelia cervicorni Tuck.
(in Insulis Sandwich obvia) et Parmelia relicina Fr. (in Insulis
Marianis), sed excludenda forte Physcia parietina, quæ vix propius
quam ex Australiæ Insula Lord Howe innotuit, ubi quoque viget
Parmelia limbata Yaur. Ex his Lichenibus 143 Polynesiensibus
occurrunt in Europa 47, scilicet pro tribubus diversis :

3 Collemei (e toto numero 42),

& Cladoniei (e — 7),
4 Usneeus (e — 2),
2 Ramalinei (e — 9),
2 Peltigerei (e — 2
12 Parmeliei @{e — 20),
8 Lecanorei ({e — 25),
8 Lecideei (e — 20),
& Graphidei (e — 2D),

3 Pyrenocarpei (e — 16).

LICHENES NOVÆ CALEDONIÆ, 281
Sunt igitur lertia pars (vel 33 0/0) e speciebus iis europææ,
observaturque in Collemeis, Lecideeis, Graphideis et Pyrenocar-
peis minimam partem specierum europæarum occurrere. Deinde
in Stereocauleis, Siphuleis et Pyxineis nullæ europææ adsunt.
Quod adtinet ad collectionem, de qua agitur, e Nova Caledonia,
facta fuit a DD. Vieillard et Pancher. Sequentes sistit Lichenes 26.
Eorum 6 sunt europæi (vel fere quarta pars) ; ceteri vel Polyne-
sienses (præcipue Leptogium cyanescens, Pyxine retirugella, Per-
tusaria trypetheliiformis et Graphis mendaæ), pauciores Javanici
(ex. gr. Leptogium sphinctrinum) et Australienses (præcipue Cla-
donia relipora et aggregata). Notetur, in Nova Zelandia plus
quam dimidiam partem specierum 1b1 vigentium europæas esse.
Plurima pars Lichenum sequentium lecta fuit a D. Vieillard,
pauciores a D. Pancher.

2. CozLeua eyrsiNum Ach., Nyl. Syn. p.113 (1). Typica; atque
simul varietas nova (var. divisum mihi, in coll. Vieill. n° 89),
lacinüs thalli anguste lineari-divisis (latit. circa 4 millim.) tur-
gidulis (haud adpressis), quasi placodiiformis (at vix specie diffe-
rens), latit. Speciminis visi circa 1-pollicaris, corticola.

2. CoLLeMA ampaiurum, n. sp. — T'hallus lurido-cinereus
lere mediocris (latit. 1-pollicaris et ultra), ambitu lobatus (ibique
sat late tenuiter albido-pruinosus), margine subcrenatus, superficie
Iævis vel passim tenuiter costato-rugosus, subtus albido-cinera-
scens hine inde nigricans et hine inde rhizinosus; apothecia
badia vel badio-rufescentia parva vel fere mediocria, margine re-
ceptaculari tumidulo crebre ruguloso-plicatulo ; sporæ ellipsoideæ
simplices, longit. 0,015-20 millim., crassit. 0,009-0,011 mil-
lim., utroque apice apiculo acuto munitæ, paraphyses mediocres.
Gelatina hymenea iodo cœrulescens.

Ad cortices in Nova Caledonia {Pancher).

Forte optime mox post Collema. byrsinum sit disponendum, quocum
textura thallina satis convenit æque ac sporis (exceptis harum apiculis).
Facie externa prope est Pannariæ luridæ. Apiculi sporarum maxime
singulares, singuli longit. 0,004-9 millim.

(1) Addenda ibi varietas Collematis byrsini thallo subtus fusco-nigro. Talis
(var. hypomelæna mihi) obvenit saltem in Taiti (Vesco), ex Museo Parisiensi. In
typo thallus subtus sordide pallidus,

289 W, NYLANDER,

à, LEPTOGIUM sPHINCTRINUM Nyl, Syn. p. 131. — Ad saxa et
cortices arborum (coll. Vieill. n° 80).

h, Leprocium cYanescENs Nyl.Syn. p.131. —Coll.Vieill. n° 84.
5, CLADONIA RETIPORA FÎk., Nyl. Syn. p. 218. — Coll. Pancher.

_6. CLanonia acerEGaATA Eschw., Nyl. 1bid.— In Insula Pinorum
(Pancher).

7. CLADONIA FIMBRIATA Var, CONIOCRÆA (Del.) Nyl. Syn. p. 195,
forma intermedia Del. mser. (« Cenomyce cenotea var. gracilis »
Pers. in Gaudich. Uran. p. 213 est eadem e Brasilia), prolifera,
facie fere Cladoniæ cenoteæ Schær., podetiis passim foliolosis,
confluens cum « Borbonica » Del. — In Nova Caledonia (Pan-
cher).

8. Usnea TrRicaopea Ach., Nyl. Syn. p. 270. — Coll, Vieill.
n 892, 85.

9. Rawazina EckLonn Spr., Nyl. Syn. p. 295, minor. — Ad
ramulos (Pancher).

40. STicTiNA FILICINA Var. MARGINIFERA (Mnt.) Nyl. Syn. p. 849,
minor (coll. Vieill. n° 84). Eadem major thallo subtus subnudo vel
nudo, ad saxa humida montium (coll. ejusdem n° 79). Stictina
crocala supra, in t. XI, p. 238 (et in Syn. p. 338) pro Taiti omissa
(ubi lecta fuit a Vesco) forte quoque in Nova Caledonia inve-
nienda sit.

11. Sricra DAmMæcoRNis var. picHoromA (Del.) Nyl. Syn. p. 357.
— Insignis, altitudine 800 metrorum supra mare obveniens
(Pancher).

42. ParMELIA PERLATA Ach, — Coll. Vieill. n° 67.

13. Parmezia sinuosa (Sm.) Ach. (P. Despreauxii Del. in Dub,
Bot. Gall, p.602). — Coll. Vieill. n° 68.

1h. Payscra picra (Sw.; Parmelia applanata Fée Ess. p. 126;
P. plumosa Tayl. in Hook. Journ. Bot. 1847, p. 173). — Coll.
Vieill. n° 69.

15. Pvxne Meissnert Tuck. mser. Facie Pyæines Cocoës (vel
fere Physciæ applanatæ), thallo intus sulphureo. — Coll. Vieill.
n° 88. Forsan hoc genus optime jungatur subtribui Physcieorum.

LICHENES NOVÆ CALEDONIÆ, 283

16. Pyxne rerIRuGELLA Nvl. Lich. exot., in {, XI, p. 240. —
Coll. Vieill. n° 73, corticolà.

A7. Pannarra pannosa Del. —- Coll. Vieill. n° 83. P. FuLvEs-
cexs (Mnt.), in Insula Pinorum, ex bb. Hooker,

48. Coccocarpra mozyBDpæa Pers, — Coll. Vieill. n° 87.

49. Lecanora su8rusca Ach. — Coll. Vieill, n° 77.
20. Lecanora sopnones Ach. — Supra saxa in Insula Pinorum
(Pancher).

91. PerTusaRIA TRYPETHELHFORMIS Nyl. Lich. eæot., int. XI,
p. 241. Sporæ 3-6 in thecis, longit. 0,060-0,105 millim.,
crassit. 0,030-45 millim.; gelatina hymenea 10d0o cœrulescens.
— Ad cortices (coll. Vieill. n° 74).

29. Lecivea sTELzLuLATA Tayl. in Mack. F1. Hib. 2, p. 118
(Lecidea atroalba var. atroalbella Nyl. Chil., supra in ser. 4, TT,
p. 465). — Supra saxa in Insula Pinorum (Pancher).

93. Grapmis mexpax Nyl. Lich. eæot., int. XI,p. 244. Apothe-
cia albo-pruinosa ; sporæ longit. 0,090-0,100 millim., crassit.
0,030-34 millim.

24. Grapuis oBrecra Nyl. in hb. Hook, — Affinis et forte ni-
mis affinis Graphidi reniformi Fée Ess. p. 6, t. 41, f. 2, Suppl.
p. 34,t. 39, f. 38, sed hypothecium incolor, gelatina hymenea et
sporæ iodo cœrulescentes ; sporæ longit. circa 0,102 millim.,
crassit, circa 0,040 millim. — Ad cortices (coll. Vieill. n° 70).

25. VERRUCARIA GLABRATA ACh., Nyl. Pyrenoc. p. 7. Sporæ
longit. circa 0,022 mullim., crassit. 0,010 millim. — Ad cortices
(coll. Vieill. n° 78).

26. VErrucariA vaGa Nyl. Pyrenoc. p. 55. Sporæ longit.
0,015-19 nullim., crassit. 0,004-5 millim. — Ad cortices (coll.
Vieill. n° 86).

Hæc imaginem, licet mancam, dare valeant vel quasi sensum
indicare vegetationis lichenosæ Novæ Caledoniæ. Plurima ibi sine
dubio detegenda restant, nee nisi matertis plenioribus collectis
cognitio ejus accuratior obtinebitur.

NOTICE
ME sUR

LE GENRE HAPALIDIUM,

Par MM. CROUAN frères,

Pharmaciens.

Le désir d’élucider les caractères du genre Hapalidium, dont la
fructification, jusqu’à ce jour, est restée ignorée, nous a déterminés
à l’étudier, et nous sommes heureux que nos études et persévé-
rantes recherches nous permettent aujourd’hui de réformer les
caractères de ce genre, d’en faire connaître les deux modes fruc-
tifères et trois espèces nouvelles. ù

Genre HAPALIDIUM Kutz., Phyc. gen., p. 385, Sp., p. 695.
Crouan, mscr., char. reform.

Fronde calcareuse, en filaments capillaires dichotomes articu-
lés, ou en petits disques lobés ou flabellés, fixée horizontalement
et adhérente de toutes parts ; à stratum simple, formé par des
cellules disposées en lignes rayonnant vers sa périphérie, carrées
ou rectangulaires, pourvuëés au centre d’un nucléus rose et entou-
rées d’un bord crétacé formant réseau. Céramides, non opaques,
de deux sortes : les unes renfermant dans leur partie inférieure
une masse de sphærospores ellipliques ou pyriques, redressés,
divisés transversalement en quatre spores, et fixés sur un placenta
réliculé ; les autres contenant dans leur intérieur une masse de
spores rondes immergée au milieu d’un tissu filamenteux.

SECTION PREMIÈRE. — Fronde disciforme ou 1rrégqulièrement lobée.

HAPALIDIUM ZONALE, Cr., nov. sp.
(ERA 479, 3, 8150, 00

Fronde horizontale, calcareuse, de 4 à 5 millimètres et plus
de diamètre, mince, d’un rose pâle, suborbiculaire, à bords

NOTICE SUR LE GENRE HAPALIDIUM,. 2895
entiers ou lobés, à cellules s’irradiant du centre vers la périphérie
sous forme de filaments composés d'articles ovoïdes ou rectan-
oculaires d’une à deux fois la longueur du diamètre, marqués à
leurs sommets d’un point chromulaire d’un poupre très foncé,
et se soudant entre eux de distance en distance par un appendice
latéral, comme cela se voit aux filaments du genre Spirogyra.
Céramides hémisphériques, pourvues à leurs sommets d’une ostiole
très petite, renfermant dans leur intérieur des sphærospores
ovoides, dressés, zonés transversalement en quatre spores.

Croit sur des morceaux de porcelaine et de verre, dans les pro-
fondeurs de la rade de Brest et de Camaret. Hiver : très rare.

Ogs. — Les points chromulaires d’un pourpre foncé au sommet des
cellules, dans cette espèce, donnent à la fronde, vue au microscope, un
aspect zoné.

HAPALIDIUM COCCINEUM {r., nov. sp.

(Fig. B. — 8, 9,40, 44, 49, 13.)

Fronde horizontale, d’un centimètre et plus de diamètre, mince,
. suborbiculaire, d’un rose carminé, à bords entiers, quelquefois
lobés ; formée par des cellules ayant deux à trois fois la longueur
du diamètre et disposées en séries dichotomes s’irradiant vers la
périphérie. Céramides hémisphériques, petites, nombreuses, peu
rapprochées, disséminées sur toute la fronde, renfermant des
sphærospores pyriques, zonés transversalement en quatre spores,
et fixés sur un placenta incolore, réticulé, occupant toute la partie
inférieure de la céramide.

Croit sur des morceaux de faïence et de porcelaine, dans les
profondeurs de la rade de Brest. Automne, hiver : très rare.

OBs. — Le réseau à mailles rectangulaires est si ténu dans cette jolie
espèce, que sa fronde en paraît privée ; nous crûmes avoir affaire, non pas
à une Corallinée, mais bien à une Squamariée, car on l’enlevait comme
une pellicule de dessus les corps sur lesquels elle était fixée, sans la briser,
ét soumise au microscope, elle apparaissait à l’œil avec l’aspect d’une
Rhododermée. Notre illusion cessa dès que nous vimes les céramides, et
que, mise dans une eau légèrement acidulée, elle produisit un dégage-
ment d’acide carbonique.

286 CROUAN.

Observations sur l’HapaziDIUM PHyYLLACTIDIUM Kutz., Sp., Alq., etses deux
sortes de fructification.

peu pe (Fig. C. — 14, 15, 16, 47,48, 19, 20.)

Cette petite espèce, lorsqu'elle croît sur les frondes de l’Alcidium
dasyphyllum Cr. et du Champia parvula Harv. (4), s’enroule
sur ces frondes qu'elle recouvre quelquefois presque entièrement,
et les étrangle à la manière du Myrionema strangulans, lorsque
celui-ci se développe sur des Algues filamenteuses. Ce qui fixe
l'attention de l’algologue dans l’organisation de cette espèce, c’est
l’épaisseur des mailles crétacées qui forment le réseau à la sur-
face de la fronde. On observe au microscope, à un fort grossisse-
ment, dans le centre de chaque maille, un nucléus formé par une
matière chromulaire granuleuse rose : l'aspect est tel que le nucléus
ne nous paraît pas calcaretx, vu sa transparence ; le calcaire
n’existerait, ou du moins en grandes proportions, que dans la
partie en forme de réseau. La sécrétion calcareuse est. tellement
abondante dans cette partie, que le nucléus, de carré ou presque
carré qu'il est dans l’origine, devient tout à fait sphérique et les
angles internes du réseau s’emplissent de calcaire.

Lorsque l’on a fait agir sur cet Hapalidium de l'acide chlorhy-
drique très affaibli, on voit que le réseau à mailles crétacées a
disparu totalement, et qu'au lieu de ce joli réseau, il n’y a plus
que des cellules rosées, disposées en lignes filamenteuses se dicho-
tomisant à certaines distances, et ressemblant assez par leur
ensemble et leur disposition à la surface flabellée de la fronde de
certains genres de la famille des Squamariées.

Les céramides, dans cette espèce, sont hémisphériques, nom-
breuses, disséminées sur toute la fronde qui est suborbiculaire,
lobée à son pourtour ; quelquefois elle est si petite, qu’elle ne

(4) Harvey, Vereis bor. Amer. — Cette intéressante espèce (Lomentaria Cr.
olim, Alg. mar. Finistère, vol. IT, p. 273) est un curieux représentant du genre
Champia sur nos côtes. Même fructification, même diaphragme et mêmes fila-
ments partant des diaphragmes contre les parois intérieures entre eux, ce que
nous avons observé il y a plusieurs années. d

NOTICE SUR LE GENRE HAPALIDIUM, 287

supporte qu’une ou deux céramides : celles-ci renferment dans leur
intérieur des sphærospores elliptiques, redressés, divisés trans-
versalement en quatre spores et fixés à la base de la céramide sur
un placenta plan, réticulé. Nous avons observé une seconde fruc-
tification, où des spores rondes sont réunies en une petite masse
au centre de la céramide et fixées sur un placenta subfilamenteux
gélatineux. Véritable cystocarpe !

Croit sur diverses Algues, et sur la Zostère, la faïence, la por-
celaine et le verre, etc. Commun dans la rade de Brest.

SECTION DEUXIÈME, — Fronde capillaire dichotome.
HAPALIDIUM CALLITHAMNIOIDES Cr., nov. sp.
( Fig. D. — 91, 22, 23, 24.)

Fronde horizontale, peu calcareuse, de 2 à 5 millimètres de
longueur, capillaire, à filaments très fins, plusieurs fois dicho-
tomes, droits ou incurvés, donnant souvent naissance sur les deux
côtés à d’autres filaments plus courts, simples, se soudant aux fila-
ments principaux dans plusieurs endroits, et formant quelques
grandes mailles irrégulières ; articles aussi longs que larges dans
toutes les parties de la fronde, à chromule granuleuse rose.

Croit sur des morceaux de verre dans les profondeurs de la
rade de Brest et de Camaret. Hiver : très rare.

OBs. — Cette très petile espèce est on ne peut plus remarquable ;
vue à la loupe, elle a l’aspect et le port d’un très petit Callithamnion.

té NOTICE SUR QUELQUES ESPÈCES

ET GENRES NOUVEAUX

D'ALGUES MARINES DE LA RADE DE BREST,
Par MM. CROUAN frères,

Pharmaciens.

ULVELLA Crouan, gen. nov.

Fronde verte, lentiforme, de À à 2 millimètres de diametre,
horizontale, adhérente par toute sa face inférieure, formée au centre
de sa surface par des cellules rondes, ovées où anguleuses, ni-
chées dans une substance subgélatineuse, réticulée, et contenant,
dans leur intérieur, quelques sporidies ! Puis, vers la phériphé-
rie, elles se traduisent sous la forme ovoïde ou rectangulaire,
sont beaucoup plus petites, espacées et disposées en lignes rayon-
nantes, simples ou fourchues à leurs extrémités. Une section ver-
ticale de la fronde présente les cellules du centre disposées en
séries presque perpendiculaires et remplies de chromule,

ULvELLA LENS Cr.

(Fig. E. — 25, 26, 27, 28.)

Mêmes caractères que ceux du genre.

Dragué dans la rade de Brest, à 20 mètres de profondeur, sur
des fragments de porcelaine, de verre, et parasite sur le Rhodo-
dermis elegans, divers Melobesia et Hapalidium. Hiver, prin-
temps : rare.

Ogs. — Les très petits disques de cette singulière Algue sont ordinai-
rement espacés; quelquefois 1ls se rapprochent, deviennent confluents,
et alors forment sur les corps où ils croissent de petites taches vertes, de
4 à 5 millimètres et plus de diamètre. A la première vue, au microscope,
cette curieuse Algue rappelle beaucoup, par le rayonnement de la péri-
phérie, le premier développement des sporidies du genre Enteromorpha;
aussi cette particularité a-t-elle été cause que, pendant quelque temps,
nous l’avons considérée comme étant la première évolution de ce genre.
Mais sa grandeur constamment la même dans toutes les saisons de l’année,

NOTICE SUR DE NOUVELLES ALGUES MARINES. 269
son organisalion remarquable et ses sporidies, nous confirmèrent que
celte Phycée pouvait faire un genre nouveau dans les Ulvacées, où elle se
classe naturellement par son organisation celluleuse réticulée et sa colo-
ration verle.

CRUORIELLA Crouan, gen. nov,

Fronde horizontale de 1 à 2 centimètres et plus de diamètre,
adhérente par toule.sa face inférieure, d'un pourpre foncé, ayant
l'aspect d'un Peyssonnelia, composée de filaments plongés dans un
gélin qui les relie ; surface présentant des lignes de cellules sphé-
riques s’irradiant vers la périphérie en forme d’éventail. Néma-
thèques nombreuses, disséminées sur la fronde, très peu saillantes,
formées par des filaments simples, articulés, à articles inférieurs
très gros, sphériques ou carrés, puis une fois et demie la longueur
du diamètre et trois ou quatre fois dans les sommets qui sont atté-
nués. Cystocarpes immergés au milieu de ces filaments nématoïdes
à l'endroit où la diminution abrupte du diamètre à lieu ; ils sont
ornés par des spores rondes ou carrées, accolées bout à bout et
simulant de petits agglomérats à séries simples ou dichotomes,
soudées entre elles par un gélin. Sphærospores oblongs, cruciés,
fixés sur le sommet d’un long pédicelle articulé, et immergés au
milieu de filaments fourchus et fibrilleux constituant la néma-
thèque.

CRUORIELLA ARMORICA (Cr.
(Fig, G. — 34, 35, 36, 37.)

Mêmes caractères que ceux du genre.

Croit sur les Haliotis, les Melobesia, etc. Dragué rade de Brest.
Hiver, printemps : rare.

Os. — Nous avons été obligés, malgré notre répugnance à créer de
nouveaux genres, d’en faire un pour cette curieuse Squamariée dont la
fructification et l’organisation différent de tous ceux connus dans cette
famille.

RHODODISCUS Crouan, gen. nov.

Fronde de 3 à 8 millimètres de diamètre, disciforme, d'un
4° série, Bor. T. XII (Cahier n° 5,) 5 19

290 CROUAN.

beau rose carmin, adhérente par toute sa face inférieure, un peu
épaissie au centre, qui se soulève quelquefois et se détache du
support; s’épanouissant vers la périphérie en une membrane très
mince, flabellée, lobée à son pourtour, quelquefois laciniée, et
présentant à sa surface des séries dichotomes de cellules ovoïdes
ou anguleuses qui s'irradient. Sphærospores nombreux, internés,
obovés, cruciés, occupant le sommet des séries perpendiculaires
des cellules.

RHODODISCUS PULCHERRIMUS Cr.
(Fig. F.— 29, 30, 31, 32, 33.)

Mêmes caractères que ceux du genre.
Dragué rade de Brest, près Roscanvel, sur faïence et porce-
laine, le 6 mars 1657, et rade de Camaret, le 40 janvier 1859.

Ogs. — Une coupe perpendiculaire et très mince de la fronde offre, au
microscope, des séries de lignes verticales formées par trois ou quatre
cellules carrées ou rectangulaires, terminées à leurs sommets par un
tétraspore crucié, ohové, le tout plongé dans un gélin qui les relie, et
empêche, même à l’aide du compresseur, de séparer ces sortes de fila-
ments du gélin dans lequel ils sont immergés. Nous classons ce genre,
vu son organisation, dans la tribu IT des Squamariées J, Ag., pour lequel
nous formons une nouvelle section.

CALLITHAMNION SERPENS Crouan, nov. sp.
(Fig. I. — 41, 42, 43.)

Fronde de 2 à 4 millimètres de longueur, sans racine, rose,
rameuse, horizontale, adhérente par toute la face appliquée ;
rameaux bipennés, à filaments opposés; articles du milieu de la
fronde quatre fois la longueur da diamètre, ceux des rameaux une
à deux fois, ceux des ramules une fois ; chromule des articles des
rameaux se transformant, à la maturité, en quatre spores !

O8s. — Ce singulier et très curieux Calhthamnion est le seul qui ait
Ia fronde totalement adhérente horizontalement et sans racine. Dragué

sur des morceaux «le verre, à 20 mètres de profondeur dans la rade de
Brest. Hiver : très rare, trouvé deux échantillons seulement.

Ogs.— Ce Calothrix forme de petites touffes isolées ou réunies en un
stratum de forme circulaire ; sa coloration en brun violet le fait remar-
quer à la loupe sur les corps où il croît. Dragué, rade de Brest, sur le
Pecten maximus, Y Aglaozonia parvula, et sur des lames de verre avec

NOTICE SUR DE NOUVELLES ALGUES MARINES,

CALOTHRIX FUSCO-VIOLACEA Crouan, nov. sp.

(Fig. H.— 38, 39, 40.)

Filaments d’un brun violet, de 2 à 3 millimètres, simples, obtus,
droits ou presque droits, incurvés ou géniculés seulement à leur
base, très rapprochés ou accolés ; articles plus larges que longs.

Melobesia. Hiver : très rare.

+ OO © À QC 19 —=
7. «(©

14.
15.
16.

17.

EXPLICATION DES PLANCHES.

PLANCHE À.

En

vig. À. — Hapalidium sonale Cr.

. Grandeur naturelle.
. Grossi à la loupe.
. Fronde privée de son calcaire, grossie 340 fois.

Céramide coupée perpendiculairement, grossie 4 20 fois.
Surface de la céramide.

. Placenta.
. Sphærospores grossis 3 fois.

Fig. B. — Hapalidium coccineum Cr.

. Grandeur naturelle.

. Grossi à la loupe.

. Fronde dépouillée de son calcaire, grossie 340 fois.

. Fronde dans son état normal, grossie 340 fois.

. Coupe perpendiculaire de la céramide, grossie 120 fois.
. Surface de la céramide, grossie 120 fois.

Fig, C. — Hapalidium phyllactidium Kurtz.
Grandeur naturelle.
Grossi à la loupe.
Grossi 420 fois.
Coupe perpendiculaire de la céramide, grossie 120 fois.

292 CROUAN.

18.
49.
20.

25.
26.
21:
28.

29.
30.
31.
32.
33.

34.
35.
36.

37.

33.
39.

40.

A4.
12.

43.
£4.

Cystocarpe grossi 120 fois.
Spore sortie du cystocarpe.
Sphærospore plus grossi.
Fig. D. — Hapalidium callithamnioides Cr.

Grandeur naturelle.

. Grossi 40 fois.

Partie de la fronde, grossie 120 fois.

. Articles grossis 340 fois.

PLANCHE 2.

Fig. E. -— Ulvella Cr.

Grandeur naturelle.

Grossi à la loupe.

Coupe perpendiculaire de la fronde, grossie 3 40 fois.
Surface de la fronde, grossie 340 fois.

Fig. F. — Rhododiscus Cr.

Grandeur naturelle.
Coupe perpendiculaire de la fronde, grossie 120 fois.
Surface de la fronde, grossie 420 fois.

Surface de la fronde fructifiée, grossie 340 fois.
Coupe perpendiculaire, grossie 340 fois.

Fig. G. -— Cruoriella Cr.

Grandeur naturelle, sur Haliotis.

Surface de la fronde non fructifiée, grossie 340 fois.
Cystocarpes grossis 340 fois.

Sphærospores grossis 340 fois.

Fig. H. — Calothrix fusco-violacea Cr.
Grandeur naturelle, en groupe.
Grossi 120 fois.
Grossi 340 fois.

Fig. | — Callithamnion Serpens Cr,

Grandeur naturelle.
Grossi 420 fois.
Grossi 340 fois.
Sphærospores.

DISPOSITIQ

PSOROMATUM ET PANNARIARUM.

SCRIPSIT

WILLIAM NYLANDER:.

Facile patet, ipsum jam locum, in dispositione systematica rite
facta speciebus singulis adtributum, tisdem determinandis multum
conferre debere. Maximi igitur est momenti, ut spécies ordine
methodico secundum affinitates naturales disponantur, nec scien-
tiæ nomine sit dignus modus qui eas sine consiho promiscue negli-
genter conjiciat. Si quidem absque cura et absque ordine mil
boni in scientia præstare liceat, hoc præsertim valet de disciplina
systemalica, quæ synthesin efficere debet Historiæ Naturalis.

In studio Lichenum nisui in hoc sensu attento operam dedi,
atque hic specimen dare quæso expositionis generum Psoromats
et Pannariæ, quam nuper elaborare tentavi. Quoad notas distin-
clivas inter hæc genera Lecanoreorum sat est indicare, thallum
in Psoromate offerre gonidia vera, in Pannaria autem granula
gonima ; distinctio inter ea itaque analoga observatur ac inter
Nephroma et Nephromium atque inter Stictam et Shictinam. Vix
ullam differentiam genericam meliorem æstimandam crederem,
quam talem, quæ absolnta est etin minutissimis quidem particulis
thallinis facillime conspieua.

I. — PSOROMA (Fr. pr. p.) Nyl.

a. — Species margine apotheciorum receptaculari crenato.

L. Ps. EuPHYLLUM Nyl. in hh. Bab. — Species insignis thallo laci-
nioso, e Nova Zelandia.

2. Ps. HyPNoRuM (Hffm.) Fr. — In Europa, in America Boreali, et
in America antarctica.

* Ps. PALEAGEUM (Fr., Hook. Anfarct., sed ibi sporæ erronee 1-se-

294 WW. NYLANDER.
ptatæ indicatæ in t. XXCVIIT, nam in specimine auctoris eas simplices
vidi), — Dania, Ins. Maclovianæ.
* Ps. corALLOIDEUM Nyl. — Nova Zelandia (coll. Colenso, n° A548).

3. PS. ARANEOSUM (Bab. N. Zeal. p. 25). — In Nova Zelandia
(Ps. subpruinosum Nyl. in hb. Hook.) — Nova Zelandia.

h. Ps. misprpuzum Nyl. in Flora 1855, p. 674. — Chili (coll. Lechl.,
n° 854).

5. Ps. cvLINDROPHORUM (Tayl. in Hook. Journ. Bot. 1847, p. 165).
— India Orientalis.

b. —— Species margine apotheciorum receptaculari (sensubus radialibus eorum)

crenulato.
6. Ps. SPHINCTRINUM (Mni.). — Ins. Borbonia, Mauritii, Prom.
B. Spei, America antarctica, Tasmania, Nova Zelandia. — Var discre-

tum Nyl., in Chili.

7. Ps. sugxispipuLum Nyl. in Ann. sc. nat., h, XI, p. 256. — Ins.
Borbonia.

8. Ps. pazzipum Nyl. in Mus. Paris., Syn.t. I, f. 23. — Fret.
Magellanicum.

9. PS. xANTHOMELANUM Nyl. in hb. Hook. — Nova Zelandia (coll.
Colenso, n° 1546).

IT. — PANNARIA Del.
a. — Apothecia lecanorina.
4. P. Luripa (Mnt. sub Collemate). — Ins. Sandwich, Madagascar,

Borbonia, Philippiu. (coll. Cum., n° 2117), America Borealis.
2. P. suBzuripa Nyl. in Ann. sc. nat. h, XI, p. 256. — Java.

3. P. FULVESCENS (Mnt.). — Polynesia, Fret. Magellanicum.
h. P. pannosa Del. — In terris æquinoctialibus calidis frequens.
5. P. RUBIGINOSA Del. — Europa, America, Africa, India Orientalis,

Var. CREAPIAE (Ach.), in Europa.

P. pHocinoTa (Mnt.). — Chili, Mexico.

P. imBricATa Nyl. — Tasmania (hb. Hook.).

P. LeucosricrA Tuck. — America Borealis.

9. P. BRUNNEA (Sw.) Mass. — Europa, America Borealis.
P, NEBULOSA (Hffm.) Nyl. — Europa.

DISPOSITIO PSOROMATUM ET PANNARIARUM,. 299

114. P. Lurosa (Ach. Syn. p. 309). Nyl. — Gallia.
42. P. cHeiLeA Nyl. in hb. Carroll. — Hibernia.
13. P. Hooker (Sm.). — Scotia.

A4. P. gcæina (Whlnb.) Nyl. — Lapponia.

b. — Apothecia biatorina.

15. P. PRÆTERMISSA Nyl. in Sallsk. pro F. et Fl. F. Noûs. h, p. 97.
— Europa (Norvegia, Finlandia).

16. P. micropnyzLa (Ach.) Mass. — Europa, Algeria, Asia, America
Borealis.

17. P, SauBinETI (Mnt.). — Gallia.

18. P. micropayzLoines Nyl. Chil. p. 150. — Chih.

19. P. rripropayzLa (Ach.) Nyl. — Europa, America Borealis.

* P. nicra (Ach.) Nyl. — Europa, America Borealis, Nova Zelandia.
P, cæsra (Duf.) Nyl. — Europa media et calidior.

20. P. Scuærern Mass., ex Arn. in Flora 1858, p. 309. — Bavaria.

21. P. ruDETA (Lecidea rudeta Ach. Syn. p. 338). — Suecia.

22. P. NIGRO-CINCTA (Mnt.). — Chili.

28. P. NIGRO-cINEREA Nyl. in hb. Lév. — Borneo.

24. P. muscorum (Ach.) Del. — Europa. — Var. determinata ( sporis

determinate 1-septatis), in Hibernia (Jones).
25. P. sTELLATA (Tuck. sub Coccocarpra in hb.). — Carolina.

26. P. crossopayzza Tuck. mscr. — Nova Anglia.

Huic generi ante relatæ P. erythrocarpa Del. et Gayana (Mnt.) sunt
Coccocarpiæ Pers. (Nyl. Enum. p. 109). Pannaria subradiata Nyl;
Prodr. p. 68 est Pterygium (nec Pannaria). Psorothichia riparia Arn.
in Flora 1859, p. 145, facile pro Pannaria sumpta, est Pyrenopsis.

CALENDRIER DES CHAMPIGNONS

SOUS

LA LATITUDE MOYENNE DE LA SUÉDE,

Par M. Elias FRIES,

Professeur de botanique à l’université d'Upsal . d

(“* Svamparnes Calendarium under medlersta Sveriges horizont”” (1). — Ofversigt af
Kongl. Vetenskaps-Akademiens Fôrhandlingar, 1857, pp..137-155.)

La nature n’a pas seulement départi aux diverses zones et aux
diverses stations des productions différentes, elle les a, en outre,
distribuées entre les diverses saisons de l’année, afin que la vie
fût exprimée sur chaque point du globe par la plus grande multi-
ude possible de formes. L'infinie richesse de la nature résulte de
ce qu'une organisation multiple, variée, est la condition de l’appa-
rition et de l'existence des êtres dans des milieux inégaux, en sorte
que plus d'espace soit accordé à l’extension de chaque espèce. Si

(4) Soit littéralement : « Culendrier des Champignons® sous l'horizon de la
Suède moyenne. » Ce mémoire a été lu le mercredi 13 mai 1857 à l'Académie
des sciences de Stockholm, et nous devons à l’obligeance de M. le docteur Wil-
liam Nvylander la traduction que nous en publions ici. Celle-ci s'est efforcée
d’être aussi fidèle qu'il était possible, mais peut-être n'a-t-elle pas toujours réussi
à dégager de toute obscurité la pensée de l’auteur, enveloppée parfois d’une
métaphysique trop vague, ou accompagnée d'images poétiques qu'il n’est pas
sans difficulté de faire passer de la langue de Tegner et de Runeberg dans
celle de Corneille et de Racine. D'ailleurs, en publiant ces pages intéressantes,
où se peignent exactement le caractère scientifique et l'esprit systématique du
célèbre professeur d'Upsal, aux écrits duquel les Annales n'avaient encore rien em-
prunté, les rédacteurs de ce recueil n’entendent pas se rendre garants de toutes
les opinions et assertions contenues dans le. Svamparnes Calendarium, dont
toute la responsabilité demeure naturellement à son auteur.

(Nore DE La Répacrion.)

CALENDRIER DES CHAMPIGNONS. 297
toutes paraissaient à la fois, les plus grandes par la taille, celles
dont le développement est le plus vigoureux, étoufferaient les plus
petites et les plus faibles. Cela est vrai surtout du règne végétal,
dont les productions sont privées de la liberté de choisir entre
différentes stations, et sont au contraire tout à fait dépendantes du
milieu ambiant. Ainsi le nombre des espèces dans la zone froide
estexcessivement borné, comparativement aux zones plus chaudes,
quoique le nombre des individus v soit à peine moindre ; et cela
parce que, pendant une période très courte de végétation, 1l y a
peu de variations dans les conditions atmosphériques, lesquelles
au contraire varient extrêmement dans les pays où la végétalion ne
subit pas d'interruption pendant toute l’année ou pendant la plus
grande partie de l’année. Le nombre des espèces qui s’accroit suc-
cessivement des pôles vers l'équateur dépend de cette circon-
stance et non de l'élévation de la température ; car la nature
créatrice produit sans doute avec la même facilité les formes parti-
culières à la zone froide et celles propres à la zone chaude. Peut-
être cela est-il encore plus vrai pour les Champignons qui consti-
tuent dans la flore de nos régions le domaine incomparablement
le plus riche en espèces; mais ces plantes forment sous plusieurs
rapports, tant par leur distribution géographique que par le temps
de leur végétation, un contraste frappant avec les végétaux supé-
rieurs. En effet, lorsque ces derniers, à l’époque du solstice , sont
dans le plus grand éclat de leur floraison, la végétation des Champi-
onons est la plus pauvre; la période végétative particulière de ces
derniers ne commence qu'après le solstice, de sorte que l’automne
est le temps de leur jeunesse, mais la plupart d'entre eux ne fructi-
fient qu'au printemps. Si l’on comprend bien cette circonstance
que nous expliquerons plus loin par de nombreux exemples, plu-
sieurs anomalies disparaitront de la biologie des Champignons.
L'automne est le printemps de ces végétaux; le printemps au con-
traire est leur automne, comme s'ils étaient des antipodes des
autres plantes ; de façon que c’est par une appréciation instinctive,
mais juste, de leur caractère, qu’on les tient pour un autre hémi-
sphère du monde végétal.

Dans cet âge de la botanique, qu'on pourrait appeler sa jeunesse

298 E, FRIES.

vive et enthousiaste, dans le vieux témps linnéen, avant que la
science fût devenue raffinée, subtile et diffuse par une recherche
exagérée des détails ; lorsque la contemplation des grands phéno-
mènes de la nature l’emportait sur l’étade des détails qui pré-
domine aujourd’hui; lorsqu'on concevait la nature où chacun
de ses règnes dans son majestueux ensemble, quoique fractionné,
comme dans un prisme infini, en une multiphecité non moins infi-
nie ; dans ce temps on étudiait beaucoup plus qu’à présent les phé-
nomènes de la vie, la nature dans son action spontanée. La science
était alors plus supra-naturaliste ; elle comprenait la nature comme
une révélation supérieure. De nos jours, la science est plus ratio
naliste ; elle cherche plutôt dans des explications ingénieuses sa
propre gloire. Quoique la première eût une part plus réelle et plus
active à la civilisation générale, et qu’elle entrât davantage dans la
vie pratique, nous ne pouvons pas cependant, dans l'intérêt de la
doctrine abstraite, rejeler la science moderne, pourvu que l’exé-
gèse ne lui fasse négliger ni travestir la source divine , la nature.
On dirait qu’un souffle poétique anime tous les magnifiques mé-
moires de Linné, tels que les Prolepsis plantarum, Somnus plan-
larum, Gemmæ arborum, Vernatio arborum, Horologium Floræ,
Calendarium Floræ, ete.; ils renferment tous une incalculable
richesse de contemplation fidèle et passive, qui saisit les phéno-
mênes fugilifs de la nature non-seulement avec des yeux péné-
trants, mais avec la perspicacité du génie. Il semble qu’on pour-
rait dire d’une manière générale qu’à mesure que la puissance de
l'œil a été multipliée par les microscopes, l’acuité naturelle de la
vue a diminué dans une égale mesure, par la même raison que les
sens extérieurs sont plus développés chez le sauvage qué chez
l’Européen civilisé. C’est pour ce motif que la plupart des ques-
tions que Linné a traitées dans les mémoires cités plus haut n’ont
pas depuis avancé d’un pas, et quoique la géographie botanique
ait été l’objet de travaux multipliés, le Calendarium Floræ à été
négligé jusqu’à ces dernières années ; cependant n'est-il pas vrai
de dire que la manifestation de la nature dans le temps n'est pas
moins essentielle que dans l’espace. Dans son Calendarium Flore,
Linné n’a pas fixé son attention sur les Champignons, et comme

CALËNDRIER DES CHAMPIGNONS. 99

personne après lui n’a apporté aucune contribution scientifique
à ce sujet, il nous sera permis d'essayer de répandre quelque
lumière sur ce champ ténébreux du monde végétal.

Déjà Aristote avait remarqué que les quatre saisons de l’année
(hiver, printemps, été, automne) sont pour les plantes comme les
quatre âges (enfance, jeunesse, âge adulte, vieillesse) de la vie des
animaux, et que la vie de l'individu végétal s’achève dans le cours
d’une année. Gette opinion est parfaitement juste, st l’on prend la
plante annuelle pour type de l'individualité dans le règne végétal ;
elle est en outre la seule applicable à toutes les plantes. Les végétaux
complexes, les arbres par exemple, se divisent en autant d’indivi-
dus qu'ils ont de bourgeons annuels. Mais nous serions entraîné
trop loin de notre sujet,'st nous voulions introduire iei une discus-
sion sur l’idée qu'il faut se faire de l'individu dans le règne végé-
{al ; il uous coùterait d'avoir à montrer que c’est par défaut des
premiers éléments de la science philosophique qu’on n’a pas com-
pris que l'individu, dans un sens plus élevé, peut embrasser une
multitude d'individus de divers degrés. Ainsi, l'arbre peut bien
être conçu comme individu, mais dans un autre sens que la plante
annuelle. Toutefois 1l devrait en être autrement des Champignons
ligneux vivaces (par exemple dés Polyporés), car, quoiqu'ils
forment chaque année des couches nouvelles, distinctes les unes
des autres et qu'il est possible de compter, l’ensemble ne consli-
tue qu'un seul individu, un stroma continu né du mycelium el
recouvrant une souche ancienne ; 1l n’y a donc ici qu’une diffé-
rence peu considérable avec ce qui s'observe dans les autres Cham-
pignons, dont le système végétatif ordinairement vivace est seul
caché dans la terre, dans le bois pourri, ete. La nouvelle couche
des Champignons ligneux commence à se former au premier temps
pluvieux qui suit le solstice d'été. A la même époque commence,
à peu d’exceptions près, toute la végétation fongine de la nouvelle
année. Les Gastéromycètes mucilagineux arrivent les premiers à
leur parfait développement ; plus tard, vers l’automne, les espèces
charnues. Mais tous les Champignons d’une consistance plus
ferme ou plus dure n’atteignent leur développement parfait, ne
mürissent leurs spores qu’au printemps suivant; et vers l’époque

300 K. FRIES.

du solstice d'été se termine la végétation fongine de l’année.
Ainsi, puisque l'été est l'enfance des Champignons, l'automne
leur jeunesse, c’est-à-dire l’époque où leur force vitale est le plus
énergique, l'hiver au contraire et le printemps leur âge adulte et
leur vieillesse, nous sommes en droit d'admettre que les saisons
de l’année ont pour ces végétaux une signification tout autre que
pour les autres plantes. Parmi les nombreux exemples que nous
pourrions invoquer à l’appui de ce que nous venons d'avancer,
nous n’en citerons qu’un seul qui montrera de la manière la plus
frappante la sagesse du plan que présente l'ordre de la nature. Les
Rhytisma apparaissent en été sous la forme de taches noires, sur
les feuilles vertes des arbres et arbustes ; ils se gonflent vers l’au-
tomne et deviennent tuberculeux, sans offrir cependant encore la
moindre trace de spores, ce qui fait qu’on n’a su pendant longtemps
s’il ne fallait pas les regarder comme de purs exanthèmes ; enfin,
il m'est arrivé au printemps de rencontrer par hasard sur des
feuilles tombées des tubercules de Rhytisma ouverts et abondam-—
ment fructifères, alors que sur les arbres et arbustes apparaissaient
déjà les nouvelles feuilles où devait germer la poussière des spores
qui s'élevait élastiquement dans Pair. Si la nature n'avait pas dif-
féré jusqu'à cette époque la maturation des germes, elle n'aurait
pas sans doute atteint son but.

Si l’on à égard au sort ordinaire des Champignons, qui est de
vivre en parasites et de croître aux dépens de végétaux morts ou
mourants, on trouvera naturel qu’ils se développent de préférence
lorsque les autres plantes dépérissent. De l’organisation propre
des Champignons et de leurs rapports biologiques avec les autres
végélaux résultent des contrastes qui sautent tout de suite aux yeux.
Quoique l’automne soit leur printemps, ils portent cependant en
eux le caractère particulier et la physionomie de plantes autom-
nales. Ainsi, ils manquent tous de la couleur verte qui est le ca-
chet des productions vernales ou des fils du printemps. Selon la
nature de la végétation automnale, le système fertile ou fructifiant
se développe aux dépens du système végétatif. Par suite de leur
consistance molle et lche, les Champignons se hâtent vers leur
destruction. Tandis que les Algues et les végétanx printaniers

CALENDRIER DES CHAMPIGNONS. 301

tirent leur nourriture des substances ‘inorganiques, les Champi-
onons, de même que les végétaux supérieurs à l’époque de la for-
mation des graines, ont principalement besoin d'aliments azotés ;
l'azote en effet constitue un élément prépondérant chez les Cham-
pignons charnus, ce qui semble expliquer et leur accroissement
et leur destruction rapides. Car les espèces qui croissent sur des
matières excrémentilielles ou des débris organiques en état de fer-
meutation sont celles qui se développent le plus rapidement, qui
disparaissent de même le plus vite, et qui sont le moins propres à
telle ou telle saison particulière : les Coprins sont, par exemple,
en ce cas ; 1! n’est pas rare de voir au mois de mars ou d'avril le
C. fimetarius sur les famiers en fermentation. Les Champignons
au contraire qui croissent sur les écorces, les bois durs, elc., se
développent très lentement, persistent toute l’année, mais ne fruc-
üfient guère qu’au printemps. Outre ces espèces, il y en a d’autres
qui, dans notre climat si variable (4), ne sont pas plus liées à telle
ou telle saison que plusieurs Phanérogames, mais qui apparaissent
sitôt que les circonstances extérieures leur sont favorables ; ces
espèces ont, entre toutes, la distribution géographique la plus
élendue et se rencontrent dans la plupart des pays du globe.
Cependant elles sont encore, pour le plus grand nombre, astreintes
à une saison déterminée, et c’est à elles que nous aurons prinei-
palement égard dans les pages suivantes. Mais on distingue de
plus un autre ordre d'espèces qui nese produisent, du moins abon-
damment, qu’en certaines années très pluvieuses, où la tempéra-
ture s'élève beaucoup, et qui apparaissent surtout aux temps
d'orage, principalement au mois d’août, de sorte qu’une tension
électrique plus forte dans l’atmosphère semble être une condition
de leur végétation et de leur multiplication. Il est probable que
des pays plus chauds que le nôtre sont leur véritable patrie ; mais

(1) Les saisons ne sont pas chez nous aussi déterminées que sous la zone
tropicale et dans les régions chaudes de la zone tempérée. Un temps autom-
nal peut ici venir au milieu de l'été, et alors plusieurs Champignons automnaux
(mais non tous) peuvent se produire. Cela n'est pourtant vrai que des Champi-
gnons charnus, car ceux d’une texture plus ferme ont des époques fixes de
développement.

802 E. FRIES.

une insoluble énigme est de savoir où, pendant le temps de leur
disparition, sont conservées leurs spores, par exemple celles des
Nyctalis, qui ne se montrent chez nous qu'environ tous les sept
ans, et qui croissent sur d’autres Champignons charnus. Leur my-
célium se serait-il donc conservé pendant ce laps de temps dans
ces Champignons ?

On objectera peut-être à notre explication de la signification
opposée qu'auraient les saisons quant aux Champignons comparés
aux autres plantes, que l'hiver interrompt leur végétation, tandis
que l'été ne suspend pas celle des végétaux supérieurs. La raison
en est que nous vivons dans la zone subarctique, et nous ferons
remarquer que dans la zone torride la végétation s’interrompt de
même pendant la saison la plus chaude, les arbres y perdent leurs
feuilles, ete. Un froid rigoureux et une chaleur excessive agissent
done de la même manière. De même que nous sommes privés
des plantes printanières du Midi, par exemple de ces Liliacées si
magnifiques dans leurs fleurs, de même les contrées tropicales
manquent de la plupart de nos Champignons automnaux, des
Hyménomycètes charnus. La loi générale doit être déduite des
conditions intermédiaires, à savoir, du climat dont on jouit sous
le 45° degré de latitude; les deux extrêmes ne constituent que
des exceptions. Sous le 45° parallèle, qui est la région des pluies
(selon Schouw), la végétation fongine est interrompue pendant
l'été; elle ne commence qu'en automne, et arrive à son plein
développement au solstice d'hiver (témoin le T'uber cibarium) ;
mais plus on avance vers les pôles, plus on voit reculé le temps
d'apparition des Champignons proprement dits. Le genre le plus
caractéristique sous ce rapport est celui des Cortinaires. Dans
l'Italie méridionale leur meilleure époque est du 15 octobre au
15 décembre; dans le mudi de la France, du 15 octobre jus-
qu'au 45 novembre ; dans le nord de l’Allemagne, selon Alber-
lini et Schweinitz, depuis le 45 septembre jusqu'au 45 octobre ;
mais chez nous, année commune, depuis le 15 août jusqu’au
45 septembre. Il est superflu d'observer que ces dates ne doivent
pas être prises trop rigoureusement, mais seulement comme
des moyennes, car les époques peuvent être, suivant les années,

CALENDRIER DES CHAMPIGNONS. 208
tantôt avancées, tantôt reculées. Dans la zone aretique toute la
végétation fongine se renferme dans l'été, qui est très court. La
chaleur et l'humidité réunies sont aussi nécessaires aux Cham-
pignons qu'aux autres végétaux, mais avec cette différence
que c’est principalement la chaleur qui détermine les différences
de la végétation des plantes supérieures, tandis que c’est l’humi-
dité qui remplit ce rôle à l’égard des Champignons. Telle est la
cause première de la diversité que nous constatons aussi bien
dans leurs saisons que dans leur distribution géographique (1).

La division linnéenne de l’année en douze périodes de végétation
(menses, L..) esttellementexcellente, que, même pour notre sujet, on
ne pourrait guère en proposer une autre qui füt plus convenable.
Nous n’avons cependant pas voulu appeler ces périodes des mois,
parce que, d’une part, elles n’ont rien de commun avec les révolu-
tions de la lune, et que, de l’autre, elles ne peuvent, à cause de leur
longueur variable, être réellement comparées avec les mois ordi-
naires de l’année. Le plus exact serait aussi de commencer le
alendrier des Champignons avec le jour de leur nouvelle année,
c’est-à-dire avec le solstice d'été ; mais ce qui n’est qu’une partie
devant être subordonné au tout, nous suivrons entièrement l’ordre
linnéen, et nous y trouverons plus de facilité à comparer les
Champignons avec les autres végétaux. Nous ajouterons enfin que
sous la latitude moyenne de la Suède se trouvent aussi les contrées
montueuses de Smäland, où, quant au temps, la végétation fon-
oine s'accorde avec celle d'Upsal. La plaine de la Scanie diffère
davantage sous ce rapport, car l'époque la plus féconde en Champi-
gnons s’y trouve être le mois d'octobre.

Ï. — Hiver OU PÉRIODE GLACIALE ( ‘‘ Vintren eller Isperioden ” )..

L'hiver ou la période glaciale (mensis glacial, L.) des Champi-
enons comprend non-seulement le mois de janvier, mais encore,
dans les années ordinaires, celui de février tout entier ou en ma-

(1) Mon fils, E.-P. Fries,.a développé ces considérations dans sa thèse pour
le doctorat ès sciences, où il traite de la distribution géographique des Cham-
pignons.

ô0! E. FRIES.

jeure partie. Lorsque la température est au-dessous du zéro de
l'échelle thermométrique, il faut que toute végétation cesse, par
la raison que les éléments nutritifs des végétaux doivent tous être
recus dans leurs tissus à l’état liquide ou dissous dans l’eau. Cela
n'empêche cependant pas une multitude de Champignons tenaces
et coriaces (Lenzites, Polypori, Dœdaleæ, Irpices, Sterea, etc.)
de se conserver durant cette période frais et intacts ; il en est de
même de quelques espèces charnues, comme les A garicus veluti-
pes, salignus, serolinus, ou gélatineuses, telles que les Trémelli-
nés. Plusieurs Champignons qui à l'entrée de l'hiver n’ont pas
atteint tout leur développement, comme les Corticium et certains
Discomycètes, ne souffrent en aucune façon du froid, quoique leur
accroissement soit interrompu. Pour la maturation des Pyrénomy-
cètes, il semble que cette période glaciale soit importante, car on
les voit bien fructifier au premier dégel. Pendant le même temps
se produit abondamment le Vemaspora crocea sur les branches du
Hêtre coupées et mises en tas. Dans les serres et autres lieux, où
grâce à l'industrie de l’homme la température ne descend pas au-
dessous de zéro, les Mucédinés se développent souvent d’une façon
incommodante; cependant nous n'avons pas d'espèces de ce
eroupe qui soient propres à la saison hivernale (si ce n’est l’Hypo-
chnus serus). Il en est au contraire tout différemment dans le midi
de l'Europe. Si l'hiver est doux, commeil arrive quelquelois, la
végétation fongine peut ne souffrir aucune interruption. En
Scanie, cela n’est pas rare. En 1853, le 12 janvier, l’Agaricus mu-
ralis S'est montré près d’Upsal après plusieurs jours sans gelée.

IT. — ARRIÈRE-HIVER (‘ Sidvintren” ).

L'arrière-hiver, ou la période du dégel (mensis reyelationis, L.),
commence ordinairement à la fin de février, et continue, avec des
retours de froid plus ou moins intense, jusqu’au 15 ou 24 avril.
Parmi les Champignons charnus , on voit naître durant cette pé-
riode les Agaricus unguicularis, hiemalis, azymus, et sur les
famiers en fermentation les Coprinus fimetarius el C. congregatus

(à Upsal en 1857) ; indépendamment de ces espèces, revivent les

CALENDRIER DES . CHAMPIGNONS. 205
Agaricus velulipes, T'intinnabulum, et plusieurs Marasmius (4).
Pour certains Hyménomycètes (Kneiffia, Corticium, Radula, ete.)
qui croissent près du sol, sur le tronc des arbres, la fin de
l'hiver est le temps le plus favorable, et celui de leur fructiffcation.
On peut dire la même chose de plusieurs Pistillaria et À crosper-
mum, des Sclérotiacés !, du Thelebolus terrestris et du Dacryobo-
lus sudans. Une multitude de Pyrénomycètes fructifient également
alors parfaitement : ee sont les Diatrype, les Falsa, et surtout les
Cytispora ; les Sphæronæma rufum, Ceratostoma niveum et Cro-
ciceras, espèces intéressantes, sont aussi caractéristiques de cette
période de la végétauion fongine. Il en est de même très évidem-
ment des Discomycètes tenaces, comme les Dermatea, Hetero-
sphæria, Lachnella, Cenangium, T'rochila, Phacidium Pini, 4 gy-
rium ; il estcurieux de voir à cette époque la maturité du Rhytisma
Urhicæ qui habite les tiges des Orties avec le Dacryomyces Urticæ,
coïncider avec l'apparition des nouvelles pousses de ces plantes,
tandis que les autres Rhytisma qui eroissent sur les feuilles des
arbres ne fructifient que lors de l’épanouissement des bourgeons.
Ce qu'il y à de plus remarquable cependant, c'est que déjà appa-
raissent quelques-unes des Pézizes les plus développées, telles que
les Peziza nigrella, coccinea, melastoma, protracta (Microstomum
hiemale Bernst.), Helotium pithyum, aureum, et, parmi les pe-
ttes espèces, les Peziza calycina, bicolor, cerina, flammea, cor-
hcola et une infinité d’autres. Les Gastéromycètes ne se montrent
encore qu’en pelit nombre , mais ils sont tous fort remarquables :
ce sont, par exemple, les Reticularia olivacea, Lachnobolus cir-
cinans, Physarum hypnophilum, et les Licea. Les bornes de cette
notice ne nous permettent pas de mentionner toutes les espèces de
Gymnomycètes et d'Haplomycètes qui accompagnent les Champi-
gnons précédents ; la plus caractéristique est le Lanosa nivalis qui,
dans les jours de douce température, se produit à la surface de la
neige amoncelée et fondante, mais qui, frappé par les rayons du
soleil, s’affaisse sur lui-même comme une toile d’araignée.

(1) Dans les serres des jardins botaniques apparaissent à celte époque les
Agaricus cristatus, echinatus, flabellatus Bolt.

&° série. Bor. T. XII. (Cahier n° 5.) # 20

306 E, FRIES.

IT. — PÉRIODE D'ENSEMENCEMENT (‘“Säningstiden” ).

La période d’ensemencement, ou la période de floraison des Amen-
tacées (mensis germinationis, L.), se compte depuis la débâcle des
glaces jusqu’à l'épanouissement des feuilles des arbres. Pendant
ce temps où les autres végélaux germent, on rencontre un grand
nombre de Champignons dans un état de maturité parfaite, ce qui
ne saurait avoir lieu, si les saisons n'avaient pour ceux-ci une si-
gnification tout autre que pour les plantes supérieures. Parmi les
Hyménomycètes terrestres, on compte peu d'espèces qui appar-
tiennent à cette saison, comme les Agaricus esculentus (exces-
sivement commun), majalis, albellus et le Cantharellus lobatus ;
mais quelques autres qui se montreront pendant tout l'été se
voient dès à présent : ce sont les Agaricus Campanella, umbelli-
ferus, alcalinus, carbonarius, atro-rufus, ete., les Panæolus et les
Coprinus ; les parasites inférieurs de la période précédente conti-
nuent de vivre pour la plupart, et avec eux l’Hymenula nigra.
Mais le plus grand nombre des Hyménomycètes tenaces et co-
riaces qui avaient survécu à l'automne sont maintenant morts ;
seul le Polyporus brumalis revit. Les Champignons les plus re-
marquables pour ce mois, ainsi que pour le précédent, sont les
Discomycètes, pour lesquels le mensis germinationis est sans
contredit le temps de la plus haute manifestation ; c’est en effet
dans ce mois que se produisent les Discomycètes les plus nobles,
tels que les Morchella, Gyromitra, Discina perlata et vaporaria
(dans les serres, Rhizina vaporaria du S. M.), Verpa, Peziza
Acetabulum (l'espèce la plus remarquable du genre), venosa, tu-
berosa, Ciborium, melæna, vernalis, vesicularis, ciborioides, et
d’autres nombreuses espèces ; c’est aussi le temps des Bulgaria
globosa (le plus singulier des Distomycètes) et Ombrophala viola--
cea, de la plupart des Phacidiacés, des Actinothyrium, Actidium,
Polynema ; les Ditiola, Tympanis et Cenangium, fructifient sur-
tout maintenant. De nombreuses Pézizes, qui ne sont propres à
aucune saison déterminée, se montrent aussi à cette époque : ce
sont, par exemple, les Peziza varia, Catinus, badia, repanda,

CALENDRIER DES CHAMPIGNONS. 307

sculellata, etc. Les Pyrénomycètes abondent également, et plu-
sieurs sont particuliers à cette période, mais il serait trop long de
les énumérer. Le Stegia arundinacea est peut-être le plus spécial
à la saison, de même que les Myriococcum, Hyphelia et Physarum
vernum parmi les Gastéromycètes ; mais les genres plus caracté-
ristiques de ce dernier groupe n’appartiennent pas à la saison dont
il s’agit. Cependant on rencontre alors l'Onygena equina qui,
comine on sait, croit sur les sabots du cheval, C’est au contraire le
moment de l'apparition ou de la fructification d’un grand nombre
d'espèces remarquables de Champignons inférieurs, tels que les
Glutinium, Myriophysa, Isaria monilioides, toutes les espèces
d'Arthrinium, le Dematium hispidulum, et les plus curieuses
espèces parmi les Helmisporium et Cladosporium ; il ne faut pas
oublier que la végétation de presque tous ces Champignons a com-
mencé dès l’année précédente.

IV. — ÉPOQUE DE LA FEUILLAISON (‘‘ Lüfsprickningen ” ).

La période de l'épanouissement des feuilles (mensis frondescen-
hiæ, L.) comprend le temps qui s'écoule depuis la mi-mai jusqu'à
la deuxième semaine de juin ; elle n’est qu’une suite de la période
précédente, et voit plutôt décroître que grandir la végétation fon-
gine , quoique, dans certaines années exceptionnellement favo-
rables, elle soit signalée par le développement de nombreuses
espèces d'Hyménomycètes terrestres qui n’appartiennent à aucune
saison déterminée, tels queles Agaricus infundibuliformis, buty-
raceus, dryophilus, rubro-marginatus, ostreatus, Fibula, Prunu-
lus, pyæidatus, Hygrophorus conicus, Marasmius oreades, Bole-
tus scaber, Clavaria fragilis, mucida; mais toutes ces espèces
sont plus communes dans l'automne. Un petit nombre d'Hyméno-
mycêtes sont particuliers à cette période, à savoir, les Ægaricus
gambosus, graveolens, sinopicus, icmadophilus, clypeatus, verna-
hs, præcox, Bolbitius vitellinus, Lenzites lepideus. Les Polyporus
squamosus, Hydnum fusco-atrum, commencent aussi maintenant
à se montrer, mais ils se développent davantage durant la période

wæ
vw 308 E. FRIES.

suivante, Plusieurs Discomycètes persistent depuis le mois pré-
cédent ; seulement quelques nouvelles espèces s'ajoutent à eux,
telles que les F’ibrissea, Mitrula paludosa, Helvella lacunosa ; le
fait le plus remarquable est la maturité des Rhytisma épiphylles
coïncidant avec l’épanouissement des feuilles. Le meilleur temps
des Pyrénomycètes est passé. Les Gastéromyceètes, tels que les
Lycoperdon, deviennent au contraire plus communs ; mais ce sont
surtout les Myxogastres qui abondent, par exempie le Reticularia
atra el divers autres qui sont également communs pendant les
mois d'été, comme les Æthalium, Licea cylindrica, Stemonitis
fusca, f[erruginea, Physarum nutans, Trichia fallax, chryso-
sperma. Plusieurs Champignons inférieurs se montrent égale-
ment ; les plus caractéristiques sont les Zsaria carnea, Cephalo-
trichum flavovirens et Gymnosporangium juniperinum, et, parmi
les Entophytes, les Peridermium Paint et corruscans. Les Æci-
drum et les Uredo commencent à paraitre sur les feuilles, et spé-
cialement sur celles des Renonculacées, des Saxifragées, etc.

V. — PÉRIODE SOLSTICIALE ( ‘‘ Solstäntiden ” ).

La période du solstice (mensis florescentiæ, L.) correspond aux
trois dernières semaines du mois de juin; c’est une interruption
dans la végétation des Champignons , par la raison que celle de
l’année précédente est terminée, et que celle de la nouvelle année
ne commence qu'après celle période. Une pareille interruption
est cependant beaucoup plus prononcée dans les pays qui jouissent
d'un été plus chaud que le nôtre ; car il survient souvent en Suède,
dans celte saison, un temps pluvieux et automnal qui fait apparaître
quelques-uns des Hyménomycètes les plus communs (appartenant
plus spécialement à la période de la moisson) : outre les espèces
déjà nommées, on voit habituellement alors les A garicus vagina-
tus, platyphyllus, ectypus, laccatus, galericulalus, cervinus, mu-
tabilis, campestris, Fænisecu, Sphagnorum, des Panæolus, des
Russula, le Cantharellus cibarrus, le Bolelus sublomentosus, ete.;
mais nous ne saurions indiquer d’autres espèces exclusivement

CALENDRIER DES CHAMPIGNONS. 309
propres à cette période, que les Agaricus solstitialis, Pes Capræ
et affricatus ; le Polyporus sulphureus commence à $’arrondir sur
les troncs des vieux arbres à feuilles caduques. Les Discomycètes
et les Pyrénomycètes n’offrent pas plus d'espèces particulières ;
le Peziza hemisphærica commence de se montrer. Les Myxo-
gastres, tels que le Lycogala epidendron, les Arcyria et les Tri-
chia, deviennent au contraire plus nombreux, si le temps est favo-
rable ; les Æcidium et les Uredo se multiplient également ; mais
parmi les Champignons épiphylles, les Phyllériacés sont alors les
plus dignes de remarque, bien qu’ils ne constituent pas des végé-
taux autonomes.

VI. — Nineu pe L'ÉTÉ ('‘Karttiden eller Hôgsommaren ” ).

Les fruits comestibles sont encore verts, mais ils grossissent
rapidement ; nous sommes à cette époque de l’année que Linné
appelle mensis grossificationis, et qui embrasse la plus grande
parie du mois de juillet; ce n'est pas non plus une saison riche
eu Champignons, mais c'est alors qu'a lieu leur germination ou le
développement de leur mycélium. La végétation des Champignons
durant celte période dépend plus qu’en aucun autre temps de
l'année de l’état du ciel, des conditions atmosphériques : si le
temps est clair et sec, les Champignons manquent presque com-
plétement ; s’il est humide, il fait naître la plupart des Hyméno-
mycêtes précédemment nommés, auxquels s’ajoutent les Agari-
cus granulosus, mucidus, radicatus, clavipes, pascuus, pediades,
tener, et surtout les F’olvaria, Pluteus et [nocybe, Paæillus 1nvo-
lutus, Gomphidius glutinosus, Lactarius torminosus, rufus, Rus-
sula adusta et decolorans, Boletus variegatus et luridus, Crate-
rellus lutescens, et quelquelois l'Hydnum repandum. Parmi les
Cortinaires, le C. cinnamomeus est le seul qui se soit montré jus-
qu’à présent ; ils appartiennent essentiellement aux mois suivants.
Sont particuliers à l’époque actuelle les Agaricus squamulosus et
les Leptonia, ainsi que d’autres Hyporrhodius analogues ; leur
maximum de développement ne coïncide cependant qu'avec le

o10 E. FRIES.

mois suivant. Parmi les Discomycètes, il nv a presque aueune
espèce à signaler dans cette période; en revanche, plusieurs
Pyrénomycètes , surtout les espèces épiphylles, comme les Rhy-
hsma et les Dothidea, apparaissent alors pour n’atteindre cepen-
dant leur maturité qu’au printemps suivant, Le Cordyceps typhina
appartient à cette période. Si le temps est très humide, on voit les
Myxogastres, par exemple les Spumaria, obtenir leur plus grand
développement. Dans les années sèches au contraire, plusieurs
espèces de Diderma, de Didymium, de Craterium, de Cribraria
et de Dictydium, font entièrement défaut, car, quoique leur dé-
veloppement soit alors ajourné au mois suivant, ce développement
tardif n'est jamais aussi riche que lorsqu'il s'effectue dans la pé-
riode estivale.

VIL — TEMPS DE La FENAISON | ‘‘Slottertiden ” ).

La période de la fenaison (mensis maturationis, L.) comprend
la dernière semaine du mois de juillet et les deux premières se-
maines du mois d’août. La végétation des Champignons, surtout
celle des Hyménomycètes, acquiert une importance considérable.
Si le temps est favorable , on voit se produire un grand nombre
d'Amanita, de Lepiota, de Pholiota, de Lactarius, V'Agaricus
lugubris, le Gomphus rutilus, l’Hygrophorus olivaceo-albus, cer-
taines espèces du sous-genre Hydrocybe (H. murinaceus), les
Boletus luteus, granulatus, bovinus, piperatus, edulis, èmpolitus,
ainsi que les espèces les plus communes des Æydnum et des Cla-
varia. De tous les Cortinaires, le €. scaurus est le plus précoce ;
mais parmi les plus grands et les plus vulgaires de ceux qui se
montrent alors, 1l faut citer les C. caperatus, saginus, traganus,
lorvus, brunneus, evernius, limonius, raphanoides, armeniacus,
castaneus. Les Hyporrhodius et les Myxogastres arrivent au
maximum de leur développement, et diminuent pendant les pé-
riodes suivantes. C’est surtout à l’ombre des forêts humides que
se manifeste avec le plus grand luxe là végétation des Champi-
gnops ; là vivent des légions innombrables de Mycènes, tels que

CALENDRIER DÉS CHAMPIGNONS. o11
les Agaricus galopus, zephyrus, lacteus, integrellus, ete. Les
espèces de cette période et des mois d'été se distinguent en géné-
ral par des couleurs vives et plus pures que n’altère pas la dessic-
cation, tandis que les espèces automnales sont ordinairement d’un
gris sale ou brunâtre, et pâlissent en séchant (species hygro-
phanæ). Ainsi VA garicus vaginatus fulvus apparait surtout en été,
l'A. vaginalus spadiceus au commencement de l’automne, et
l'A. vaginatus lividus dans l’arrière-automne. Les types si remar-
quables du groupe des ‘Tricholomes manquent encore pour la
plupart, à l'exception de l’Agaricus inamænus. Les Discomycètes
sont peu représentés, sinon par les Ascobolus qui appartiennent
principalement à cette période. I faut dire la même chose des
Pyrénomycètes, parmi lesquels on ne peut citer que les Hypo-
crea qui commencent à paraitre, mais qui appartiennent cepen-
dant plutôt à la période suivante. Les plus remarquables types des
Gastéromycètes se développent an contraire maintenant, par
exemple le Phallus qui surgit principalement aux temps d'orage.
Parmi les Champignons inférieurs , les Ceratium sont les plus
intéressants ; les espèces épiphylles, telles que les Æcidium, les
Uredo , les Phragmidium et les Uromyces, abondent presque
partout.

VIT. — Temps DE LA Moisson (|‘‘ Skôrdetiden ” ).

La période de la moisson (messis, L.) embrasse ordinarement
la dernière moitié du mois d'août et les huit premiers jours de
septembre. C’est l’époque du maximum de la végétation des grands
Champignons charnus , époque qui emprunte également un ea-
racière particulier à la présence des Cortinaires, lesquels se pro-
duisent sous une multitude infinie de formes diverses, sinon peut
être d'espèces distinctes, en telle manière cependant que les plus
charnus (les Phleymacium et, Inoloma non hygrophanes) appar-
tiennent de préférence à cette période; les Cortinaires plus minces,
plus aqueux, ceux qui, par conséquent, changent de couleur en
séchant, sont plutôt propres à la période suivante. La plupart des

912 E. FRIES.

genres des Hyménomycètes charnus sont maintenant aussi riche
ment représentés que possible; de sorte qu'il devient impossible
d'en énumérer les types divers; seulement un petit nombre
d'espèces précoces, par exemple les Leptonia, diminuent. Nous
devons signaler, comme les Champignons les plus remarquables
de ce mois, les Boletus cyanescens, fulvidus, felleus, badrus ; les
Poiyporus subsquamosus, ovinus, confluens et autres espèces voi-
sines; des Hydnum charnus terrestres; le Sistotrema con-
fluens, ete. Les Tricholomes, qui sont du nombre des Champi-
enons les plus tardifs, commencent à devenir communs, par
exemple les Agaricus rutilans, imbricalus, vaccinus, terreus,
flavo-brunneus, coryphœus, ete.; leur maximum, et celui des
Pratellus et Pleurotus qui apparaissent encore plus tard, ne se
rencontre que dans les périodes suivantes. Parmi les Discomy-
cètes, on voit naître des espèces excessivement remarquables, des
Helveila et Geoglossum, le Cudonia circinans, des Spathularia et
Peziza (par exemple, les P. macropus, aurantia, onotica, lepo-
rina), le Rhizina undulala ; parmi les Pyrénomycètes, on peut
mentionner les Cordyceps alutacea et purpurea. C’est aussi pour
les Lycoperdacés la saison la plus favorable , de nième que pour
le Reticularia maxima et autres Myxogasires. La plupart des
Champignons météoriques apparaissent durant cette période.
Parmi les épiphylles, ce sont surtout les £rysiphe qui pullulent.

IX. — L’ARRIÈRE-ÉTÉ (‘ Eftersommaren ” ).

L'arrière-été (mensis disseminationis, L.) s'étend du 8 de
septembre jusqu'à la fin du même mois. La vigoureuse végétation
fongine de la période précédente continue pendant celle-ei, à moins
que le temps ne devienne sec et clair, et surtout qu'il ne gèle pen-
dant la nuit, car en ce cas cette végétation s’amoindrit sensible-
ment. Si cependant à quelques nuits de gelée succède un nouveau
temps pluvieux, les mêmes espèces reparaissent, ce qui n’a pas lieu
dans la période suivante. Celle dont nous parlons offre peu de nou-
veautés, excepté quelques espèces lignicoles, telles que les Polypo-
rus umbellatus, frondosus, hispidus, borealis ; les Eydnum septen-

CALENDRIER DES CHAMPIGNONS. 313

trionale, coralloides, Erinaceus, des Théléphores et denombreuses
espèces analogues. Le maximum des Cortinaires et des Hydropho-
rus arrive au commencement de cette période; celui des Stro-
pharia et des Coprinus à la fin deseptembre. L’A4garicus melleus,
quoique en son déclin, forme des groupes considérables à la ra-
cine des arbres ; l’Ægaricus squamosus au contraire, qui com-
mence de se montrer, végête avec luxe dans la période suivante.
Les Tricholoma sont plus nombreux que précédemment, mais
plusieurs des espèces les plus remarquables qui en font partie,
par exemple les Agaricus equestris, portentosus, saponaceus,
personatus, brevipes, ete., n’acquièrent tout leur développement,
et ne deviennent communs que dans la période suivante. Les
espèces particulièrement caractéristiques de cette saison sont, pour
ne nommer que les plus remarquables, les Ægaricus bulbiger,
giganteus, nebularis, atro-marginatus, radicosus, pehianthinus,
les Cantharellus cinereus et sinuosus, le Marasmius chordalis,
l'Hygrophorus penarrus, le Boletus floccopus, le Fistulina hepa-
hca, ete. Il est à remarquer qu’à Femsjo le Sparassis parait tou-
jours dans cette période, souvent pendant la première sernaine de
septembre, tandis qu’à Upsal on ne le rencontre ordinairement
qu'à la fin d'octobre; cependant il n’est pas rare qu’il se montre
à Upsal plutôt que dans la Suède méridionale. A la période dont
nous parlons appartiennent les Gastéromycètes dont la texture est
solide et résistante, tels que les Ælaphomyces, Scleroderma, Po-
lysaccum, Rhizopogon, Hyperrhiza, Slerrebeckia, Cenococcum ;
elle revendique aussi l’Ecchyna faginea (Onygena du S. M.),
ainsi que divers T'richia et Arcyria. Parmi les Discomycètes et
Pyrénomycèles les plus caractéristiques, nous nommerons seule-
ment les Helvella elastica, Peziza sepulta, etc., les Phacidium
coronatum et Hysterium tumidum qui frucüfient en même temps
que les Cordyceps militaris et ophioglossoides, les Nectria et plu-
sieurs Sphæria. Les Champignons inférieurs offrent les Zsaria,
les Anthina, etc.; et les Entophytes foliicoles, les Puccinia,
Asteroma, etc.

all E, FRIES.

X. — PéRIODE DE LA DÉFOLIATION ( ‘‘ Lüffällningen ” ).

La période de la chute des feuilles (mensis defoliationis, L.)
commence avec les premières nuits de gelée intense, c’est-à-dire
habituellement avec les derniers jours de septembre ou les pre:
miers jours d'octobre. La végétation fongine prend alors un tout
autre caractère : les Champignons terrestres diminuent considé-
rablement ; les espèces estivales disparaissent de même que la
plupart des Boletus; les Champignons, au contraire, qui croissent
sur le tronc des arbres deviennent plus nombreux, de sorte que
c'est actuellement le maximum des A garicus Pleurotus (tels que les
A. glandulosus, salignus, petaloides, ulmarius, serotinus, mitis,
nidulans, mastrucatus, fluæilis, etc.) et Crepidotus, ainsi que des
Polypores apodes (même des espèces charnues), des Zrpex et des
Phlebia. Les Cortinaires charnus et succulents -disparaissent, à
l'exception du C. orichalceus et d’un très petit nombre d’autres
analogues qui appartiennent à cette période ; on voit au contraire
s’accroitre le nombre des Cortinaires aqueux et hygrophanes.
L'espèce la plus caractéristique pour cette période est l'Hygro-
phorus hypotheius, qui parait partout immédiatement après la
première nuit de gelée, et qui continue de se produire jusqu’au
mois de décembre, ce qui est d'autant plus digne de remarque,
qu’on voit en même temps disparaître son congénère le plus voi-
sin, l'A. olivaceo-albus que nous avons rencontré dans le cours
des mois précédents. Parmi lès nombreuses espèces qui mainte-
nant apparaissent soit pour la première fois, soit en plus grand
nombre, nous ne nommerons que quelques-unes des plus remar-
quables, les Agaricus tyrianthinus, lentus, lupinus, cyathiformis,
velutipes, collinus, supinus, l'Hygrophorus unguinosus, les Ma-
rasmius porreus, prasiosmus, terginus, l'Arrhenia Auriscalpium,
lés Cantharellus crispus (1) et muscigenus, divers Cyphella, les

(1) C’est le Merulius crispus Pers., qui par ses caractères analytiques diffère
tout à fait des Cantharellus (CF. Nyl., in Sällsk, pro F. et. FI. F. Notis,, n.
ser., 1, p. 424).

CALENDRIER DES CHAMPIGNONS. 249

Clavaria juncea, fistulosa, argillacea, des T'yphulu, ete. ; plusieurs
Tricholoma, comme l’Agaricus equestris et autres mentionnés
dans le mois précédent, ont encore une végétation luxuriante ; les
A. loricatus et compressus viennent s’y ajouter (en Scanie, les
A, Schumacheri, hordus, popinalis, obluratus, ele.) ; c’est aussi
la saison de plusieurs Hygrophorus Hygrocybe, comme les A. psit-
tacinus, coccineus, puniceus. Quant aux Discomycètes, il sort du
tronc des Hêtres d'innombrables familles de Bulgaria inquinans ;
le Bulgaria sarcoides avec sa forme stérile (Tremella sarcoides)
est moins fréquent. D'ailleurs les plus petits d’entre les Discomy-
cètes et les Pyrénomycètes deviennent maintenant si nombreux,
qu'on nesauraiten énumérer les espèces diverses. Les Gastéromy-
cètes diminuent au contraire sensiblement ; on peut noter comme
caractéristiques de cette période les Tulostoma (le Scleroderma
Bovista en Scanie), le Reticularia versicolor, le Trichia serotina,
quelques Physarum et des Licea. La saison dont 1l s’agit est de
même éminemment favorable aux Botrytis, aux Trichothecium et
autres Mucédinés, surtout à ceux qui vivent aux dépens des Cham-
piguons pourris. L’'Hydrophora stercorea et le Mucor caninus
jouent un rôle important, dans les jours brumeux d'octobre, sur la
plaine de la Scanie. Parmi les Entophytes épiphylles prédominent
maintenant les Septoria, les Ascophora, etc.

XI — LE Mois DE La GELÉE ( ‘‘ Frostmänaden ”).

Le mois de la gelée (mensis congelationis, L.) est celui pendant
lequel des jours d’un temps doux alternent avec des nuits de
gélée; la neige tombe, mais elle fond habituellement ; dans les
années ordinaires 1l coïncide avec le mois de novembre. C’est le
plus variable de tous les mois de l’année. 1! lui arrive en certaines
années, comme en 1847, d'offrir une douce température ; alors
la végétation fongme du mois précédent continue, et quelques
espèces se produisent en grande quantité qui manquent compléte-
ment au contraire en d’autres années (par exemple, les Coprinus
ephemeroides el Bolbitius luteolus), ou ne se rencontrent qu’isolées

916 E. FRIES,

(par exemple, l’Agaricus Arrhenu). D'autres fois, comme en 1856,
arrive subitement un hiver rigoureux, froid et neigeux, qui déter-
mine une cessation complète de la végétation. Dans les années
normales on voit persister quelques Champignons charnus ter-
restres ; mais le plus souvent ils sont tellement détériorés, qu'ils ne
fructifient point (parmi les Cortinaires, c'est le €. rigens qui per-
sévère le plus longtemps); quelques-uns seulement se maintiennent
frais, comme les Agaricus cyathiformis, brumalis (et espèces voi-
sines), pyxidatus, umbelliferus, rugosus, les Panæolus et les Mu-.
rasmius. Il en est différemment des Champignons lignicoles, qui
sont très nombreux et dont quelques-uns, tels que les Agaricus
velutipes et serotinus, les Panus et les Lenziles, n’atteignent que
maintenant leur parfait développement ; on peut dire encore plus
exactement la même chose des Polypores et des Mérules; les
Calocera continuent leur accroissement jusqu’à ce que la neige soit-
devenue permanente. On ne voit maintenant que peu d'Hyméno-
mycètes nouveaux : ce sont les Agaricus tenacellus, supinus, cor-
licola, unguicularis, le Cantharellus glaucus, le Cyphella læta,
le Clavaria contorta. La végétation des Trémellinés semble au
contraire devenir plus riche, et plusieurs espèces, comme les
Exidia, Nematelia, Diaphanium, n’obliennent que dans la pé-
riode suivante le maximum de leur développement, Quant aux Dis-
comycètes, qui déclinent, et aux Pyrénomycètes, dont le nombre
grandit au contraire de plus en plus, on peut leur appliquer ce
que nous avons indiqué pour le mois précédent. Les Gastéromy-
cètes sont devenus très rares ; ceux en petit nombre qui subsistent
encore semblent des retardataires des périodes précédentes ; à
ceux-là s'ajoutent comme réellement caractéristiques, le Cribraria
purpurea et les Physarum hyalinum, utriculure, columbinum.
Parmi les Champignons inférieurs on voit les Dématiacés et des
Sporidesmiacés qui commencent à croître sur des tiges herbacées
languissantes, mais qui ne frucüfieront qu’au printemps prochain,
comme les Cladosporium, Hendersonia et Diplodia. Au nombre
des épiphvlles de cette époque je signalerai les Melampsora.

CALENDRIER DES CHAMPIGNONS. 317

XI. — LE mois pes n&iGes (‘‘ Snômanaden ” ).

Le mois des neiges, ainsi appelé à cause de la persistance de la
neige sur la terre, coïncide ordinairement avec le mois de dé-
cembre ; mais comme la température dans cette saison varie beau-
coup suivant les années, la végétation fongine peut s’y maintenir
telle que dans le mois précédent, sauf toutefois la perte de quel-
ques espèces. Les Pyrénomycètes seuls gagnent en importance.
Lorsque la neige recouvre le sol, nul Champignon terrestre ne
peut se montrer, mais les troncs d'arbres privés de vie se couvrent
en revanche d’un grand nombre d'espèces, et de quelques-unes
même encore plus communément qu'auparavant : c’est la meil-
leure saison des Agarieus corticola et hiemalis, des Sthictis et
leurs analogues, et des Trémellinés, tels que les £xidia, Nemate-
lia et Calloria, qui fructifient alors parfaitement. De nombreux
Pyrénomycètes appartenant aux genres Xylaria, Hypoæxylon,
Diatrype, Gibbera, Dichæna, ete., sont maintenant mieux déve-
loppés qu’en aucun autre temps. Les Gastéromycètes mentionnés
dans le mois précédent reparaissent parfois en celui-e1. Au nombre
des Champignons épiphylles qui se rencontrent alors, figurent
surtout des Phoma et des Stigmatea. H en est tout autrement dans
le midi de l'Europe et aussi dans le sud-ouest de l'Angleterre, où
le temps des pluies hivernales, si la température est douce, est la
saison la plus riche en Champignons, et celle en particulier de
la Truffe comestible (T'uber cibarium).

Pour chacune des périodes précédentes 11 nous aurait été facile
de signaler un nombre d'espèces dix fois où même cent fois plus
considérable, mais nous avons cru plus convenable de ne men-
tionner que des espèces communes, remarquables à divers titres,
et observées depuis une longue suite d'années ; car des plantes
qui n'auraient été rencontrées que rarement et comme par hasard
auraient eu iei moins d'importance.

En prenant pour point de départ que l’année fongine commence
à l’époque du solstice d'été, nous comprendrons nettement plu-
sieurs des conditions biologiques de ces végétaux. Il est manifeste

318 E. FRIES,

d’abord que la cause principale de la diversité de leur distribution
géographique ne gît pas dans la chaleur, qui exerce au contraire
tant d'influence sur la répartition des végétaux supérieurs, mais
qu’elle est plutôt dans l'humidité et la pluie. Nous trouvons ensuite
que les Champignons apparaissent en général d'autant plus tôt que
leur texture est plus Ache, de sorte que les Gastéromycètes, qui
sont primiivement mucilagineux, ont les premiers, c'est-à-dire en
été, leur maximum de végétation; viennent ensuite les genres char-
nus qui signalent le commencement de l'automne ; plus tard, vers
la fin de l'automne et en hiver, les Champignons tenaces, coriaces
et qui ont la consistance de l’amadou. Ceux dont la nature est celle
de la cornée ou du charbon {par exemple, les Pyrénomycètes etles
Dématiacés) n'arrivent au contraire à leur complet développement
qu'au printemps. À eux se joignent les plus remarquables d’entre
les Discomycètes à substance céracée, et cela pour une autre
cause intime que nous ferons connaître tout à l'heure. A l’époque
du solstice d'été se termine la végétation fongine de l’année.

La grande classe des Champignons peut être partagée en trois
divisions : 1° les Champignons élémentaires mfériears, privés de
couche fructifère particulière (Mucedines) ; 2° les Champignons
proprement dits (Fungi), pourvus de sporophores exosporiques, el
5° les semi-champignons (Mycetes ou Ascomyceles), qui ont des
sporophores endosporiques ou, comme on dit, des asc. De ces
trois groupes, le premier se lie par plusieurs intermédiaires
aux Algues (Phycées), le dernier passe aux Lichens. Les Champi-
gnons proprement dits, qui constituent le centre de la classe,
s’éloignent complétement de toutes les autres productions natu-
relles et n’offrent d’affinité avec aucune famille végétale en dehors
de la classe des Champignons. Ceux qui s'écartent le plus des
autres sont incontestablement les Myxogastres. Si nous considé-
rons maintenant en particulier chacune des trois sous-classes
(Mucedines, Fungi, Ascomycetes), nous constatons que les Cham-
pignons proprement dits (Fungi) sont ceux qui apparaissent les
premiers après le solstice d'été, et que parmi eux les plus anor-
maux des Myxogasires sont les plus précoces; que l’automne
et le printemps sont la saison des Mucédinés; et enfin que les

CALENDRIER DES CHAMPIGNONS. 219

Ascomycèles, qui, en raison de leur analogie avec les Lichens,
exigent le plus de temps pour leur entier développement, ont évi-
demment leur maximum au printemps. À mesure que les condi-
tions biologiques se rapprochent ou s’identifient les unes avec les
autres, on voit disparaître les limites qui séparent les différentes
classes des Homonémées, ainsi que M. le docteur Nylander l’a
montré dans une Note insérée dans ce recueil même; mais c’est
1à un fait qu'à coup sûr aucun botaniste n’a songé à contredire, de
tous ceux qui depuis cinquante ans se sont tant soit peu occupés
de l'étude des végétaux inférieurs (4).

(1) M. Fries fait ici allusion à une Note relative aux différences systématiques
(‘‘ Om den systematiska skillnaden emellan Svampar och Lafvar, ” — Ofvers,
Vet. Akad. Fürh. 1855, pp. 7-11) qui existent entre les-Lichens et les Cham-
pignons. Cette note n'avait pas pour objet, comme M. Fries l'a cru, d'éta-
blir un rapprochement naturel et intime entre les Algues, les Lichens et les
Champignons, mais de chercher à montrer leurs différences, et surtout celles
qui distinguent les Lichens des Champignons ; il y est dit que les Algnes n'of-
frent guère aucune affinité réelle avec les Lichens, mais qu’au contraire, les
limites entre les Champignons et les Lichens se confondent en certains points.
La remarque de M. Fries porte donc à faux, d'autant plus qu’il semble lui-
même s'être antérieurement singulièrement mépris sur les affinités d’un grand
nombre de ces végétaux, ainsi qu'on peut l'inférer de son Summa vegetabilium
Scandinaviæ (Upsaliæ, 1845-1849), où l'on trouve la disposition systématique
suivante : Classis XIX. Accz : Fam. 1. Lichenes L.; Fam. 2. Byssaceæ
Fr. (Exemples : Collema, Cœnogonium, Racodium ? ebeneum, Byssus aureus,
lolithus, etc.); Fam. 3. Fucaceæ; Fam, 4. Ulvaceæ Fr. — Classis XX,
Funer. — M. Fries pèche évidemment contre les affinités naturelles, en rappor-
tant aux Champignons les Sphinctrina, Agyrium rufum, Xylographa parallel,
Hypochnus Tubrocinctus, nigrocinctus, eic., el les Cora (Fr., Epicr., p.556 ;
S. V. Sc., p. 333). Ajoutons que la proposition nouvelle que les Mucédinés for-
ment un passage aux Algues n'est pas non plus une des opinions les moins
hasardées du célèbre professeur d'Upsal.

(Note ou TRADUCTEUR. )

RECHERCHES CHIMIQUES

SUR

LA COMPOSITION DES CELLULES VÉGÉTALES,

Par M. E. FRÉMY.

(Extrait des Comptes rendus des séances de l’Académie des sciences.)

PREMIÈRE PARTIE.

La nature des liquides qui se trouvent dans les cellules végé-
ales a été déterminée quelquefois avec exactitude par les méthodes
ordinaires qui sont employées dans l’analyse organique immédiate.

Mais on ne possède que des notions imparfaites sur la compo-
sion de la partie insoluble qui forme les parois des cellules.

On sait que des corps solides viennent se déposer intérieure-
ment sur la membrane cellulaire, et augmenter ainsi son épaisseur ;
quelques réactifs démontrent que ces couches sont souvent azotées et
que souvent aussi leur composition est ternaire ; mais l’insolubilité
de ces corps dans les liquides neutres rend jusqu'à présent leur
séparation impossible et empêche d'établir nettement leur compo-
sition chimique. |

L'examen des membranes cellulaires des végétaux présente
cependant un grand intérêt, au double point de vue de la chimie
et de la physiologie végétale. On voit, en effet, ces membranes
éprouver pendant la végétation des modifications remarquables ;
dans certains cas leur épaisseur augmente avec rapidité, et dans
d’autres elle diminue d’une manière notable.

C'est ce dernier phénomène qui se présente pendant la matura-
tion de presque tous les fruits. Les parois de la cellule d’un fruit
vert sont d’abord très épaisses et formées de plusieurs membranes
concentriques, qui s’amincissent rapidement au moment de la
maturation. Celle altération des membranes cellulaires est indiquée
par les changements que le fruit éprouve dans la dureté et Ja

COMPOSITION DES CELLULES VÉGÉTALES. 321
transparence ; elle peut être appréciée rigoureusement par
l'analyse.

J'ai examiné le péricarpe solide de deux espèces de poires prises
à différentes époques de leur développement et de leur maturation ;
les nombres que je vais citer prouvent que dans ces fruits la pro-
portion de membrane cellulaire éprouve de grandes variations.

POIRE D'HIVER. POIRE D'ÉTÉ.

Tissu membraneux. Tissu membraneux.

06 UN. à. rare : 47,7 p. 400. 13,4 p. 100.
AID »: à 1. 17,4 43,4

De quiet. Vers à 14,8 11,0
PAUMIEL PUR. A 4,0 11,0
népquilletintes, Nr :495 11,0

Po juilletio 2.101014 9,2 6,7
AO ne tcorst do. 5,8 6,0

A ADR. 1 à | 4,8 5,1
ROME on. «0 3,8 4,4
TR TAIOMT. Or 5, 3,4 3,9

Des analyses semblables aux précédentes ont été faites sur les
fruits qui, comme les pommes, mürissent lorsqu'ils sont détachés
de l'arbre, et dont le volume ne change pas pendant la maturation ;
il est résullé de mes recherches que dans ces fruits le poids des
parois de la cellule éprouvait aussi une diminution notable à l'époque
de la maturation.

Ces changements étant donc bien constatés, je devais recher-
cher quelles étaient les membranes qui, dans les parois de la cel-
lule, pouvaient ainsi disparaître à un certain moment de la végé-
tation. |

J'avais démontré dans un travail publié en 1848 que le tissu
des végétaux contient une substance insoluble à laquelle j’ai donné
le nom de pectose, qui accompagne presque constamment la cellu-
lose, et qui, sous des influences très faibles, peut devenir soluble
en produisant la pectine.

Cette modification m'avait permis d'expliquer l'apparition d’une
substance gommeuse dans le sue d’un fruit qui mürit ou que l’on
soumet à la coction; elle me faisait croire que les membranes alté-

rables et internes des cellules végétales sont formécs de pectose,
&° série. Bor. T. XII. (Cahier n° 6.) ! 21

922 E. FRÉMY.
tandis que la membrane externe a pour base la cellulose, qui est
caractérisée, comme on le sait, par sa grande fixité.

Je désirais depuis longtemps soumettre cette hypothèse à
l'épreuve de l'expérience ; mais jusqu’à présent les corps gélati-
neux des végétaux n'étaient connus que par les dérivés solubles
qui prennent naissance lorsque les acides ou les alcalis agissent
sur la pectose : l'examen microscopique ne permettait pas de les
distinguer de la cellulose, et de déterminer la place qu’ils occupent
dans la cellule végétale ; il fallait donc trouver un réactif qui eût
la propriété de dissoudre la cellulose en laissant à l’état insoluble,
et avec sa forme naturelle, le composé pectique qui existait dans
la cellule. |

En voyant avec quel succès M: Peligot a employé le réactif
ammoniaco-cuivrique découvert par M. Schweitzer pour détermi-
ner la composition de la peau des Vers à soie, j'ai pensé que je
pourrais aussi me, servir de ce précieux agent pour apprécier la
nature chimique des parois de la cellule végétale.

Le nouveau réactif devaif en effet dissoudre la cellulose ainsi
que les substances azotées qui l’accompagnent, et isoler ensuite la
matière pectique : l'expérience est venue confirmer entièrement
celle prévision.

M. Peligot avait déjà simplifié beaucoup la préparation du com-
posé ammoniaco-cuivrique en produisant ce corps par l’action
direete de l’ammoniaque et de l'oxygène atmosphérique sur le
cuivre; j'ai aussi obtenu ce réactif présentant une composition
très simple en traitant l’oxyde de cuivre hydraté par un excès d’am-
moniaque : la liqueur que l’on produit ainsi opère en quelques
instants la dissolution de la cellulose (4).

(4) Lorsqu'on veut obtenir rapidement un réactif dissolvant la cellulose, le
procédé de M. Peligot me paraît beaucoup plus simple que celui qui vient d’être
indiqué ; car la préparation de l'hydrate de bioxyde de cuivre offre quelques
difficultés ; ce corps se déshydrate pendant les lavages, sous des influences qui
ne sont pas encore bien connues, et perd alors sa solubililé dans l'ammoniaque.

La préparation du nouveau réactif avec l'oxyde de cuivre pur présentait
cependant un intérêt que je dois faire connaître ici.

En étudiant l'action de l’ammoniaque sur plusieurs composés de cuivre, j'ai

COMPOSITION DES CELLULES VÉGÉTALES. 925

Pour déterminer avec ce réactif la composition des cellules
végétales, je coupe des tranches très minces de fruits ou de ra-
eines, el je les abandonne pendant quelques heures dans la liqueur
ammoniaco-CuiVrIque.

Les cellules prennent alors une coloration verdâtre, se gonflent
légèrement et semblent se désagréger.

J'ai eu recours à la complaisance de M. Decaisne pour apprécier
au microscope les modifications que les cellules végétales ont
éprouvées dans leur contact avee le nouveau réactif.

Notre savant confrère a reconnu que le üssu cellulaire avait
conservé après l'action du réactif sa forme primitive, seulement
les parois des cellules présentaient des contours plus indécis.

Dans ces observations, j'avais eu le som de choisir des cellules
quine contenaient pas de traces d’amidon, pour éviter les réactions
secondaires qui ont été décrites avec soin par M. Payen dans une
communication récente.

En examinant la liqueur ammoniaco-cuivrique qui a réagi sut
les cellules, jai reconnu qu'elle tient en dissolution des traces de
corps azotés et toute la cellulose qui formait la preinière membrane
des cellules et le tissu fibreux.

Il est facile de déterminer la proportion de cellulose qui a été
dissoute, en saturant la liqueur par un acide faible et en lavant le
précipité avec une dissolution de potasse étendue.

obtenu des liqueurs qui agissent très différemment sur les membranes végétales,
L'hydrate de bioxyde de cuivre produit, comme je l'ai dit, un liquide qu
dissout instantanément les membranes végétales.
Le sulfate de cuivre donne lieu au même phénomène.
Les principaux sels de cuivre contenant des acides énergiques n'attaquent

Le pas la cellulose.

Le carbonate de cuivre basique, en dissolution dans l’ammoniaque, n’attaque
pas immédiatement la cellulose, mais la gonfle beaucoup, et permet d'apprécier
très facilement au microscope certains détails importants du tissu des végé-
taux.

L'énergie du réactif dépend donc de la nature du composé cuivrique que l'on
combine avec l’ammoniaque : en faisant varier ce composé, on obtiendra des
liqueurs agissant de différentes manières sur les tissus dont on veut étudier
l'organisation.

o21 E. FRÉMY.

La substance verte insoluble, qui a conservé exaétement la forme
des cellules, est la matière pectique modifiée par l’action du réactif ;
c’est elle qui se trouvait au-dessous de la membrane extérieure ;
elle ne contient plus de cellulose; l’analyse démontre qu’elle est
formée de pectate de cuivre : aussi se décolore-t-elle par l’action
des acides, et laisse-t-elle un résidu d'acide pectique qui se
dissout entiérement dans les alcalis; il ne reste dans le liquide
que des traces impondérables de substances minérales.

En faisant donc réagir successivement sur les parois des cel-
lules le réactif ammoniaco-cuivrique, un acide et en dernier lieu
la potasse, on isole, on caractérise et l’on peut même doser les
différentes matières insolubles qui constituaient les membranes
végétales.

En effet, le nouveau réactif dissout la cellulose et les corps
azotés, et transforme en outre la pectose en pectate de cuivre ;
l'acide décompose le pectate de cuivre et laisse l'acide pectique à
l’état insoluble ; la potasse dissout l'acide organique en précipitant
des traces de sels calcaires.

Le composé ammoniaco-cuivrique rendant ainsi tous les éléments
de la cellule attaquables par les réactifs, agit dans l’analyse immé-
diate organique comme la potasse dans une analyse minérale, qui
rend solubles et attaquables par les acides les éléments qui résis-
taient d’abord à l’action des agents chimiques.

Les faits que je viens de signaler ne laissent donc aucun
doute sur le rôle important que jouent les composés pectiques
dans l’organisation végétale. Dans certaines cellules, ces corps
sont plus abondants que la cellulose même ; ils incrustent les cel-
lules, augmentent l'épaisseur de leurs parois, et le réactif qui
enlève la cellulose extérieure laisse un tissu pectique dont la
forme rappelle exactement celle du tissu cellulaire intact. Ces ré-
sultats donnent done une nouvelle preuve des services que peuvent
rendre les réactifs chimiques dans les recherches d'anatomie
végétale.

Je viens de prouver que la liqueur ammoniaco-cuivrique pou-
vait être employée avec avantage pour analyser les parois des cel-
Jules qui existent dans les fruits et dans les racines.

COMPOSITION DES CELLULES VÉGÉTALES. 929

Mais le nouveau réactif n'attaque pas toutes les membranes cel-
lulaires, comme M. Payen l’a parfaitement reconnu; c’est ainsi
que la moelle de certains arbres et le tissu fongueux des champi-
gnons résistent à l’action du réactif.

Dans ce cas, la liqueur ammoniaco-cuivrique ne pourrait plus
être employée pour attaquer ces cellules réfractaires, mais elle
servirait à démontrer que nous donnons à tort le nom de cellulose
à des corps qui peuvent avoir la même composition élémentaire,
mais qui différent entre eux par leurs propriétés chimiques. En
voyant le nouveau réactif dissoudre instantanément la cellulose
des racines ou celle des fruits, et n’exercer aucune action sur les
parois des cellules qui forment la moelle des arbres, je suis disposé
à admettre aujourd'hui qu'il existe dans l’organisation végétale
plusieurs espèces de celluloses ; je compte du reste revenir sur ce
sujet intéressant dans une prochaine communication.

Les méthodes que j'ai employées pour rendre solubles les parois
des cellules végétales me permettaient de rechercher si les pro-
duits de cette désagrégation sont uniquement la cellulose, la sub-
stance peclique, les corps azotés et des matières minérales.

Cette étude m'a fait découvrir un corps intéressant que je nom-
merai acide cellulique; il prend naissance lorsque les parois des
cellules de fruits ou de racines se désagrégent et qu’elles sont sou-
mises à l’action des acides ou à celle des alcalis. |

J'ai reconnu que cet acide ne dérive ni de la cellulose, ni
de la pectine, car ces deux corps, convenablement purifiés, ne se
transforment sous aucune influence en acide cellulique.

J'obtiens facilement cet acide en soumettant à l’action de la
chaux des pulpes de fruits ou de racines débarrassées par des
lavages de tout principe soluble. Il se produit alors du cellulate de
chaux qui reste en dissolution dans l'eau et que je précipite par
l'alcool: ce sel, décomposé par l'acide oxalique, donne l’acide
cellulique pur.

Ce corps est soluble dans l’eau; son acidité est comparable à
celle de l'acide malique : il forme avec toutes les bases des com-
posés solubles; il n’est pas volatil, et réduit avec une grande
facilité les sels d'or et d'argent. Dans un travail qui est consacré à

326 | H. FRÉMY.

l'analyse immédiate des cellules végétales, je devais parler de
l'acide cellulique, qui est un produit de la désagrégation des mem-
branes végétales ; mais je réserve pour un mémoire spécial tout
ce qui se rapporte à l’analyse et à l’étude chimique de cé corps.

La découverte de l'acide cellulique n’intéresse pas seulement
l'analyse organique immédiate, elle présente au point de vue in
dustriel une importance que l’Académie mé permettra de lui
signaler.

Il existe un procédé de fabrication de sucre de betterave, dans
equel la pulpe est soumise à l’action de la chaux avant d’être pres-
sée. Sous l'influence de la base, la membrane végétale se modifie,
perd son élasticité et se laisse plus facilement comprimer; le com-
posé pectique qui s’y trouve se change en pectate de chaux. On
obtient alors par la pression un jus qui se travaille avec uñe
erande facilité ; seulement les mélasses conservent nne réaction
alcaline que l’acide carbonique ne leur enlève pas, et retiennent en
dissolution une proportion notable de sel calcaire. Ayant été con-
sulté depuis longtemps sur ces accidents de fabrication, il me fut
impossible d’en déterminer la cause ; aujourd’hui leur explication
est facile.

J'ai reconnu en effet que le corps alcalin, qui est gommeux, qui
s'oppose à la cristallisation des mélasses et qui leur donne une
saveur désagréable, est du cellulate de chaux. Ce sel a pris nais-
sance dans la réaction de la chaux sur les parois des cellules de la
racine. Si le nouveau procédé de fabrication est conservé, on évi-
tera la production du cellulate de chaux en modérant l’action de la
base sur la pulpe, et en opérant à une température peu élevée.

Telles sont les considérations qui, à des degrés différents, me
paraissent donner de l'intérêt à l’étude chimique des cellules végé-
tales. Lorsqu'on voit des membranes animales agir sur les corps
organiques tels que le sucre, et produire tantôt la fermentation
alcoolique, tantôt la fermentation lactique, on peut croire aussi que
l'étude des membranes végétales permettra d'expliquer quelques-
unes de ces transformations de principes iminédiats qui s’opèrent
dans les végétaux. |

Je crois done avoir démontré dans ce travail que les parois des

COMPOSITION DES CELLULES VÉGÉTALES. 227

cellules de fruits ou de racines sont formées par des membranes
différentes, que l’observation microscopique ne permet pas tou-
jours de distinguer les unes des autres, mais que l’on peut étudier
et caractériser nettement en suivant la méthode que je viens de
faire connaitre.

Dans les fruits et dans quelques racines, la membrane externe
est formée essentiellement de cellulose ; les membranes internes
ont pour base la substance pectique. Cette dernière matière est
associée dans la cellule à un principe nouveau qui, sous des
influences diverses, produit un acide énergique que j'ai désigné
sous le nom d'acide cellulique.

DEUXIÈME PARTIE.

Caractères distinctifs des fibres ligneuses, des fibres corticales et du tissu
cellulaire qui constitue la moelle des arbres.

Dans une communication précédente, je crois avoir démontré
que les membranes qui constituent les cellules des fruits et des
racines ne sont pas formées exclusivement de cellulose, mais
qu'elles sont constituées par la superposition des couches concen-
triques présentant des compositions différentes : les membranes
externes offrent tous les caractères de la substance qui constitue
les fibres corticales des végétaux, tandis que les membranes in-
ternes des cellules sont formées par de la pectose.

Je viens aujourd’hui faire connaître les caractères distinctifs
des corps qui constituent les fibres ligneuses, les fibres corticales
et le tissu cellulaire de la moelle : il m'a paru intéressant de com-
parer entre elles les substances qui existent dans le lissu utricu-
laire et celles qui caractérisent les fibres végétales.

Jusqu'à présent les chimistes ont considéré les tissus utriculaires
et fibreux des végétaux comine formés essentiellement par un
même principe immédiat, que notre confrère M. Payen a étudié
sous le nom de cellulose.

A. de-Jussieu ayant à résumer les travaux publiés sur cette
question, dit que la cellulose forme la charpente du végétal, les

928 E. FRÉMY.

parois des cellules, des fibres et des vaisseaux ; les différences
apparentes qu’on trouve à celte substance, dans l’organisation
végétale, sont dues à des produits variables déposés à la surface
de la cellulose ou même infiltrés dans son épaisseur. Lorsque cette
séparation des corps étrangers est opérée , la cellulose provenant
des parties végétales si diverses se présente toujours avec les
mêmes propriétés.

Cette opinion ne me parait plus admissible, et je crois qu'il me
sera facile de prouver que les tissus utriculaires et fibreux des vé-
gétaux ont pour base des principes immédiats différents, ou du
moins des états isomériques du même corps.

En effet, le réactif ammoniaco-cuivrique dissout immédiatement
les fibres corticales de tous les végétaux ou le tissu utriculaire des
fruits, et n’exerce aucune action sur la moelle des arbres ; 1l est
donc difficile de considérer ces tissus comme étant formés par la
même substance : la différence ne peut être attribuée ici à la pé-
nétration inégale de la partie organique par le réactif, car la moelle
est beaucoup plus poreuse que la masse qui constitue les fibres
corticales. L’impureté du corps insoluble dans la liqueur ammo-
niaco-cuivrique ne peut pas être invoquée pour expliquer les dif-
férences d'action du réactif, car la moelle convenablement choisie
présente tous les caractères d’un principe immédiat pur; elle ne
laisse, par la calcination, que des quantités insignifiantes de cen-
dres, et les liquides nentres que nous employons pour purifier les
principes immédiats ne lui font éprouver aucune modification.

Les caractères chimiques viennent donc établir une différence
très tranchée entre le tissu cellulaire de la moelle des arbres et les
fibres corticales.

I restait à examiner les caractères de la substance solide placée
entre la moelle et les fibres corticales, c’est-à-dire le tissu fibreux
qui constitue le bois.

Cette étude présentait quelques difficultés : on isole avec peine
les fibres ligneuses parfaitement pures ; elles sont pénétrées sou-
vent de matière incrustante, de substance azotée, de corps morga-
niques et de pectose.

En opérant cependant sur des fibres de nouvelle formation, J'ai

COMPOSITION DES CELLULES VÉGÉTALES. 329

reconnu que la substance qui les constitue ne pouvait pas être
assimilée à celle qui se trouve dans les fibres corticales ; en effet,
les fibres ligneuses sont entièrement insolubles dans Île réactif
ammoniaco-euivrique, et se confondent sous ce rapport avec le
tissu cellulaire dela moelle : mes expériences ont été faites sur des
fibres ligneuses provenant d'arbres différents, et elles m'ont tou-
jours donné le même résultat.

Contrairement à l'opinion généralement admise, j'établis done
une différence notable entre les fibres ligneuses qui constituent le
bois et les fibres corticales employées dans la confection des tissus
de lin.

Le degré de cohésion des molécules qui forment le bois ne peut
pas rendre compte des différences chimiques qui existent entre ce
corps et les fibres corticales, car il est facile de prouver que la
liqueur ammoniaco-cuivrique agit souvent sur les corps les plus
durs. |

J'ai soumis, en effet, à l’action du nouveau réactif l’albumen
du Phytelephas , connu dans le commerce sous le nom d'ivoire
végétal, et qui présente une dureté telle que l’acier l’entame avec
difficulté : cette substance organique est entrée rapidement en
dissolution dans la liqueur ammoniaco-cuivrique; si le bois, qui
est beaucoup plus tendre et beaucoup plus poreux que l'ivoire vé-
gétal, résiste à l’action du réactif, c’est que, semblable à la moelle
des arbres, il n’a pas pour base le principe immédiat qui caracté-
rise les fibres corticales ou le tissu utriculaire des fruits et des
racines.

Il est impossible également d'attribuer l’insolubilité des fibres
ligneuses dans le nouveau réactif à la présence de corps étrangers,
car j'ai eu le soin dans mes expériences d'opérer sur des fibres
aussi pures que possible qui se seraient au moins désagrégées, si
elles eussent été formées par la substance qui existe dans les fibres
corticales.

En établissant iei des différences chimiques entre les fibres qui
se montrent dans l'écorce et celles qui forment le bois, je erois, du
reste, être d'accord avec toutes les observations d'anatomie végé-
tale qui ont été faites sur le développement des couches ligneuses.

ÿo0 E, EnÉMEs

Après avoir reconnu que la tige ligneuse, considérée dans son
ensemble, est formée par des principes immédiats différents, jai
recherché si ces principes, qui sont évidemment isomériques,
comme cela résulte des analyses publiées par notre confrère
M. Payen, ne pourraient pas se modifier par l’action des réactifs
et revenir à un même état.

Ces transformations, qui intéressent à un si haut degré la phy-
siologie végétale, ont pu ètre réalisées facilement par l’expé-
rience.

Mes premiers essais ont été faits sur le tissu cellulaire qui
constitue le papier de riz, et dont on connait la pureté remar-
quable. -

Cette substance est insoluble dans le réactif ammoniaco-cui-
vrique ; elle conservé cette propriété caractéristique, après avoir
été soumise à l'influence de tous les agents de purification dont
nous pouvons disposer.

J'ai même fait bouillir le papier de riz avec de l'acide acétique
concentré, qui aurait enlevé toutes les bases ou les substances
salines pouvant préserver la matière organique de l’action du
réactif ; après cette ébullition prolongée pendant quelque temps,
le tissu cellulaire est resté insoluble dans la liqueur cuivrique.

Mais, en soumettant le papier de riz aux influences qui trans-
forment l’amidon en dextrinié et en sucre, c’est-à-dire en em-
ployant les acides minéraux convenablement étendus, j'ai vu les
cellules végétales devenir transparentes, éprouver un gonflement
sensible, et se transformer en une membrane immédiatement so-
luble dans le réactif ammoniaco-cuivrique.

Les älcalis opèrent la même transformation, mais avec plus de
lenteur.

Les fibres ligneuses se sont comportées comme le tissu cellu-
laire de la moelle ; par l’action des acides, elles se changent en une
substance entièrement comparable à celle qui forme les fibres cor-
ticales.

Ces expériences prouvent done que, s’il existé des différences
entre les substances solides qui constituent le squelette des végé-
taux, ces corps présentent entre eux aussi des rapports que L'an

COMPOSITION DES CEBLULES VÉGÉTALES. 961
ne doit pas méconnaitre, et paraissent être produits par des états
isomériques d'un même principe. |

On voit, en outre, que dans de pareilles recherches il faut se
garder, pour purifier les corps, d'employer des agents énergiques ;
ainsi l’action des acides a communiqué au tissu cellulaire de la
moelle des propriétés qu'il n'avait pas d’abord.

Cette transformation du tissu cellulaire ou des fibres ligneuses
par l’action des acides ou celle des alcalis ne doit pas surprendre;
ne sait-on pas que les substances amylacées et pectiques se modi-
lient immédiatement sous l’influence de ces réactifs ?

Jai voulu enfin reconnaître si le tissu fongueux des champi-
gnops, qui est insoluble dans le réactif ammoniaco-cuivrique, se
modifierait comme la moelle et le bois sous l'influence des acides :
l'expérience a démontré que ce tissu, qui, par ses caractères ana-
tomiques, diffère sous tous les rapports du tissu ligneux, s’en
éloigne aussi par ses propriétés chimiques; car les acides ne le
rendent pas attaquable par le nouveau réactif.

Tels sont les faits que je me suis empressé de communiquer à
l’Académie, parce qu’ils me paraissent de nature à compléter mes
premières recherches sur la composition des cellules végétales : ils
prouvent que les tissus fibreux des végétaux, semblables aux issus
utriculaires, sont formés par des principes immédiats différents,
que l’on peut aujourd’hui caractériser nettement; ils démontrent,
en outre, que les membranes cellulaires des végétaux n’ont pas
toujours la même composition, puisque le tissu qui constitue la
moelle des arbres différe par sa composition et ses caractères
chimiques de celui qui forme les parois cellulaires des fruits.

Dans un prochain travail, je ferai connaître les résultats de
mes essais sur la matière incrustante du bois.

TROISIÈME PARTIE.

Recherches chimiques sur la cuticule.
Avant de continuer le travail que j'ai entrepris sur les tissus

organiques, je tenais beaucoup à répondre aux objections qui m'ont
été faites par un de nos savants confrères, et à donner une dé-

992 EE. FRÉMY.

monsiration rigoureuse de l'existence des celluloses isomériques
dans l’organisation végétale : tel a étéle but des expériences dont
je vais soumeltre d’abord les résultats à l’Académie.

Après avoir constaté des différences notables entre les pro-
priétés de certains tissus utriculaires et fibreux des végétaux, j'ai
avancé, dans des communications précédentes, que ces corps doi-
vent être considérés comme ayant pour base des états isomé-
riques d’une même substance organique : en effet, leurs carac-
tères chimiques sont différents ; ils présentent la même composition
élémentaire, et peuvent être ramenés au même état par l’action des
réactifs les plus divers, tels que les acides minéraux, les acides
organiques, la potasse, la soude, l’'ammoniaque, etc. (2).

On me fit cependant les objections suivantes : « Les tissus utri-
» culaires et fibreux des végétaux sont difficiles à purifier ; ils lais-
» Sent par l’incinéralion un résidu de cendres qui reproduit exacte-
» ment la forme du tissu végétal, ce qui semble démontrer une
» combinaison de la matière minérale avec la substance organique ;
» ces Corps étrangers ne seraient-ils pas la cause des différences
» que les réactifs indiquent lorsqu'on les met en présence des tis-
» sus utriculaires ou fibreux ? Si ces tissus sont ramenés au même
» élat par l’action des acides on par celle des alcalis, c’est que les
» réactifs enlèvent les substances étrangères qui étaient la cause
» principale des différences observées. »

Pour répondre à ces objections sérieuses et prouver que les
différences dans les propriétés de la cellulose sont dues à l’état
même de la substance organique, et non à la présence des corps
minéraux, j'ai dù chercher une méthode qui me permit de faire
varier les propriétés de la matière organique sans modifier la pro-
portion et même la disposition intime des corps minéraux conte-
nus dans les tissus des végétaux.

Je suis arrivé à ce but par deux procédés différents. Jai soumis

(1) Dans une expérience faite récemment par M. Payen, et qu'il a bien
voulu me communiquer, le brovage à l’eau de la moelle de l'OEschynomène a
rendu soluble dans le réactif cuivrique 45 pour 100 du tissu organique : en fai-
sant précéder le broyage d’une dessiccation dans le vide à 110 degrés, la portion
soluble s'y est élevée à 75 centièmes.

COMPOSITION DES CELLULES VÉGÉTALES. 992

la moelle végétale, qui est insoluble dans le réactif cuivrique, à une
torréfaction prolongée pendant plusieurs heures, et qui ne dépas-
sait pas 150 degrés.

Dans une autre expérience, j'ai maintenu pendant vingt-quatre
heures dans de l’eau bouillante le tissu utriculaire de la moelle.

En examinant le tissu végétal soumis à ces deux épreuves, j'ai
reconnu qu'il était devenu immédiatement soluble dans le réactif
cuivrique, comme le coton ou les fibres corticales.

Des essais analytiques m'ont démontré ensuite que cette modi-
fication ne portait que sur la partie organique du Uissu, car la pro-
portion de matière minérale restait la même dans les deux cas, et
le tissu, devenu soluble dans le réactif cuivrique, laissait après la
calcination un réseau minéral, rappelant exactement la forme des
cellules végétales, comme cela arrive pour le tissu non modifié
par la chaleur sèche ou humide.

Je crois donc avoir démontré ainsi, de la manière la plus rigou-
reuse, que les tissus, dont j'ai parlé dans mes communications
précédentes, contiennent réellement deux eelluloses différentes et
isomériques : 1° celle qui se trouve dans le coton, dans presque
toutes les fibres corticales, dans le tissu utriculaire des fruits ou
des racines, et qui est immédiatement soluble dans le réactif cui-
vrique ; 2° celle qui constitue principalement la moelle des arbres,
les fibres ligneuses, le tissu utriculaire de l’épiderme, etc., qui ne
se dissout pas immédiatement dans le nouveau réactif.

Pour apprécier la nature d’une cellulose, il ne faut pas laisser
pendant un temps trop long le réactif cuivrique en rapport avec le
tissu organique que l’on veut caractériser ; car j’ai reconnu que
l'excès d’ammoniaque qui se trouve dans la liqueur peut opérer à
la longue la modification isomérique de la cellulose.

Tels sont les faits qui prouvent nettement l’isomérie des deux
celluloses végétales; qu’il me soit permis de déclarer en même
temps que ces résultats nouveaux ne modifient pas les travaux que
notre confrère M. Payen a publiés sur la cellulose, qui est carac-
térisée par sa solubilité immédiate dans le nouveau réactif.

Pour éviter dorénavant toute confusion dans l’étude des sub-
stances qui constituent les tissus des végétaux, et pour établir entre

99! | E. FRÉMY.

ces corps une distinction utile, je désignerai sous le nom de para-
cellulose la substance qui ne se dissout dans le réactif cuivrique
qu'après avoir été soumise aux influences que j'ai fait con-
naitre.

Ce premier point étant une fois établi, j'arrive à l’objet princi-
pal de cette communication, qui est de caractériser chimiquement
une substance fort curieuse qui recouvre l'épiderme des végétaux,
et qui me paraît présenter des propriétés toutes spéciales.

Je rappellera d’abord les observations de M. Payen, qui prou-
vent que cet épiderme contient toujours une matière grasse, un
corps azoté et de la silice.

On doit à M. Ad. Brongniart la découverte importante d’une
pellicule épidermique qu'il a étudiée sous le nom de cuticule.

M. Brongniart a obtenu la cuticule en soumettant des feuilles à
une macération prolongée; sous cette influence , les tissus utri-
culaires et fibreux se désagrégent et se dissolvent en partie, tandis
que la cuticule, qui est remarquable par sa fixité, reste en suspen-
sion dans la liqueur sous la forme de membranes que l’on peut
isoler facilement.

J'ai pensé que les procédés chimiques que l’on possède aujour-
d'hui pour séparer les tissus organiques les uns des autres pour-
raient me servir à isoler les pellicules épidermiques des végétaux,
et me permettraient d'en obtenir une quantité suffisante pour en
faire l’étude chimique complète.

Guidé par les conseils si éclairés de notre savant confrère
M. Decaisne, mes premiers essais ont été faits sur les feuilles
d’Iris.

Tout le monde sait que l’on peut détacher très facilement à la
main la membrane épidermique de ces feuilles sans enlever le
parenchyme vert : j’opère sur celte membrane incolore et trans-
parente qui est formée de deux parties distinctes : l’une, externe,
est la cuticule ; l’autre, interne, est composée de cellules épider-
miques transparentes.

Ce tissu utriculaire est à base de paracellulose ; il ne se dissout
pas dans le réactif cuivrique ; mais, lorsqu'on le fait bouillir avec
de l'acide chlorhydrique, il se dissout en partie, et le résidu de-

COMPOSITION DES CELLULES VÉGÉTALES. 599

vient alors attaquable par le nouveau réactif. Cette observation
m'a permis de préparer avec une grande facilité la cuticule des
feuilles d’Iris.

Je fais bouillir l’épiderme de la feuille avec de l’acide chlorhy-
drique étendu; cette action est prolongée pendant une demi-
heure ; je lave les membranes à grande eau, et je les soumets à
l’action du réactif cuivrique qui dissout entièrement la cellulose ;
ces membranes sont traitées ensuite suecessivement par l’eau, par
l'acide chlorhydrique qui enlève l’ammoniaque et l'oxyde de
cuivre, par une dissolution étendue de potasse qui dissout les
matières albumineuses et l'acide pectique, par l'alcool et l’éther
qui entraînent tous les corps gras. J’obtiens alors la membrane
épidermique dans un état de pureté absolue : l’examen microsco-
pique démontre qu'elle est entièrement débarrassée du tissu utri-
culaire ou fibreux : elle a l'aspect d’une membrane continue, qui
ne présente pas d'apparence d'organisation, et qui conserve des
ouvertures correspondant aux stomates.

J'ai appliqué la méthode que je viens de décrire à la préparation
de la euticule de feuilles très variées ; j'ai toujours obtenu le même
résultat, seulement avec certaines feuilles provenant de plantes
grasses, j'ai isolé des cuticules beaucoup plus épaisses que celles
de l'Iris, et qui conservaient l'empreinte du tissu épidermique
sous-jacent.

J'ai pu préparer également par ce procédé la membrane épi-
dermique qui recouvre les pétales des fleurs; j'obtiens alors des
pellicules d’une ténuité extrême, et qui, mises en suspension dans
l'eau, présentent quelquefois ces phénomènes d’irisation qui ca-
ractérisent les lames minces.

Les épidermes de fruits, soumis aux mêmes réactions, donnent
avec ja plus grande facilité une cuticule présentant les propriétés
des membranes précédentes, et caractérisées seulement par leur
épaisseur qui est plus considérable.

J'ai examiné les épidermes des jeunes tiges et ceux des racines ;
ils me paraissent différer des épidermes dont je viens de parler et
se rapprocher beaucoup des fibres ligneuses.

Fai l'honneur de présenter à l’Académie des cuticules de feuilles

990 E. FRÉMY.
d’Iris, de fleurs de Camellias et de Pommes qui ont été préparées
en quelques heures.

Avant ainsi retiré avec la plus grande facilité des parties végé-
tales exposées à l'air, c’est-à-dire des feuilles, des fleurs et des
fruits, une membrane épidermique déjà bien remarquable par sa
résistance, puisque, malgré sa ténuité, elle n’a pas été altérée par
nos réactifs les plus énergiques, je devais déterminer la nature
chimique de cette singulière substance. Ces recherches ont été
faites principalement sur la cuticule de Pommes, que l’on peut
obtenir en quantité considérable. Cette substance laisse par l’inci-
nération 10 à 15 millièmes de cendres qui sont principalement
calcaires ; elle est insoluble dans tous les dissolvants neutres; elle
n'est pas altérée par la potasse étendue, par l’ammoniaque, par le
nouveau réactif cuivrique, par l’acide chlorhydrique bouillant, par
les acides sulfurique et azotique employés à froid : elle possède
une élasticité très marquée lorsqu'elle est desséchée.

Soumise à l’analyse, elle m’a présenté la composition suivante :

Carbone. . . . . . SH Got 2 73,66
Hydrogène. (fs sn sie ns Abies ia
ORNE à Ne NN ETS al 14,97

100,00

Cette composition remarquable, qui établit une si grande diffé-
rence entre la cuticule et les autres tissus des végétaux, place en
même temps cette substance à côté des corps gras.

Pour confirmer ce rapprochement, je m’empressai alors de
soumettre la cuticule à l’action des réactifs qui caractérisent les
substances grasses, et je constatai, à mon grand étonnement, les
faits suivants :

La membrane épidermique des végétaux soumise à l’action de
la chaleur donne naissance à de véritables acides gras; l’acide
azotique bouillant produit, en réagissant sur elle, tous les corps
qui dérivent de l’action de ces acides sur les corps gras, et prin-
cipalement l’acide subérique, qui, d’après les belles observations
de M. Chevreul, caractérise le tissu subéreux : il est remarquable

COMPOSITION DES CELLULES VÉGÉTALES. 297
de voir ici la cuticule et le liége, qui jouent peut-être le même rôle
physiologique dans l’organisation végétale, donner le même pro-
duit par l’action de l’acide azotique.

Enfin, en soumettant la membrane épidermique à l’action de la
potasse concentrée et bouillante, on voit cette substance perdre à
un certain moment son aspect membraneux, et se saponifier comme
un véritable corps gras.

Le savon que l’on obtient ainsi donne par sa décomposition un
acide liquide qui présente tous les caractères des corps gras, qui
est soluble dans l'alcool et l’éther, et qui ne me paraît pas identique
avec l'acide oléique.

Cette Prius intéressante à été répétée sur toutes les cuti-
cules que j'avais retirées des feuilles, des fleurs et des fruits, et,
dans tous ces essais, les membranes se sont entièrement saponi-
fiées par l’action des alcalis concentrés.

I ne faudrait pas croire que la cuticule fût formée par un mé-
lange de corps gras et de tissu ligneux : l’insolubilité dans l’éther
et la composition élémentaire de la membrane épidermique ren-
dent d’abord cette supposition invraisemblable ; mais, lorsqu'on
voit la cuticule se saponifier par l’action des alcalis sans laisser de
résidu insoluble, l'hypothèse précédente ne peut plus être admise.

Il résulte donc des faits que je viens de soumettre à l’Académie
que les cellules épidermiques des végétaux sont recouvertes par
une membrane ayant pour base un principe immédiat nouveau,
que je désignerai sous lé nom de cutine.

Cette substance présente certaines annees avec les corps
gras; elle se saponifie comme eux ; elle s’en rapproche également
par sa composition élémentaire et par les dérivés qu’elle produit
sous l'influence de la chaleur ou par l’action de l’acide azotique ;
mais elle s'éloigne des substances grasses par son insolubilité
complète dans l’éther et par cet aspect membraneux qui la carac-
térise : c’est donc une substance à part, et dont les propriétés sont
bien appropriées au rôle physiologique qu’elle doit jouer.

N’est-il pas remarquable, en effet, de trouver à la surface des
végétaux une matière qui présente la stabilité des corps gras, la
continuité d’une membrane, la ténacité des tissus ligneux, et en
&e série. Bor. T. XII. (Cahier n° 6) 2 22

398 E, FRÉMY.

quelque sorte l’élasticité du caoutchouc? En raison de toutes ces
propriétés, elle peut épouser les formes des parties végétales les
plus délicates, empêcher l'oxygène atmosphérique de pénétrer
dans l’intérieur des cellules, et mettre ainsi le tissu utriculaire à
l'abri des agents extérieurs pouvant laltérer.

On comprend donc tout l'intérêt qui s'attache aujourd’hui à
l'étude chimique de la membrane épidermique des végétaux dé-
couverte par notre confrère M. A. Brongniart, et dont il avait déjà
démontré toute l'importance physiologique.

Il faut actuellement analyser les principales cuticules, examiner
les produits qui résultent de leur saponification, constater si la
composition de ces membranes varie avec les espèces et avec
l’époque de la végétation, rechercher enfin si elles se trouvent sur
les épidermes qui ne sont pas exposés à l'air.

Des expériences se poursuivent dans ces différentes directions,
et je m’empresserai de communiquer à l’Académie la suite de mes
recherches sur ces questions intéressantes,

QUATRIÈME PARTIE.

Recherches sur la composition chimique du bois.

Je crois avoir démontré, dans mes communications précédentes,
que lestissus des végétaux ne peuvent plus être considérés comme
formés par une substance unique, la cellulose, dont les proprié-
tés varieraient avec l'agrégation des particules, ou avec la pro-
portion et la nature des corps étrangers qui incrusteraient cette
matière organique.

Chaque tissu paraît présenter une composition chimique et des
propriétés spéciales qui dépendent en quelque sorte du rôle phy-
siologique qu'il est appelé à jouer dans la végétation.

Les travaux que je poursuis en ce moment ont pour but d’éta-
blir ee point si important de la science.

Déjà M. Chevreul nous avait appris, dans ses belles recherches
sur le liége, que ce tissu ne doit pas être confondu avec la cellu-

—

COMPOSITION DES CELLULES’ VÉGÉTALES. 999
lose, et qu'il est caractérisé par la production de l'acide subérique,
lorsqu'on le soumet à l’action de l'acide azotique.

Les travaux récents de M. Mitscherlich sur les cellules végé-
tales, et principalement sur la membrane épidermique des pommes
de terre, qui est un véritable liége, sont venus confirmer les
observations de notre illustre confrère.

J'ai prouvé également que les tissus des végétaux peuvent con-
tenir une substance particulière que j'ai décrite sous le nom de
pectose, ei qui avait été confondue souvent avec la cellulose dans
des observations microscopiques.

On avait admis que la cuticule était formée par la cellulose
injectée de matière azotée et de silice ; les recherches que j'ai eu
l'honneur de présenter récemment à l’Académie sur cette mem
brane intéressante sont en opposition complète avec les analyses
de cuticule qui avaient été publiées précédemment, et démontrent
que cette substance s'éloigne de la cellulose par ses caractères et
par sa composition.

Le tissu des Champignons présente également des propriétés
spéciales qui ne permettent plus aujourd’hui de le confondre avec
les tissus organiques qui ont pour base la cellulose, comme
M. Cramer l’a prouvé dans ses importantes recherches.

Enfin la substance qui constitue la. moelle des arbres, que j'ai
désignée sous le nom de paracellulose, est un exemple remar-
quable des principes immédiats qui, sous des influences très va-
riées, peuvent éprouver une modification isomérique et se trans-
former en cellulose immédiatement soluble dans le réactif cuivrique.

En présence de tous ces faits, il ne me paraît done plus possible
d'admettre que les parois des cellules, les fibres et la cuticule sont
formées par de la cellulose différemment agrégée et incrustée par
des matières étrangères diverses.

Les tissus organiques sont formés par des principes immédiats
particuliers : les recherches que j'ai entreprises sur la constitution
chimique du bois, et dont je vais présenter le résumé à l'Académie,
viennent donner une nouvelle confirmation à cette règle générale.

On avait annoncé que le bois était formé par de la cellulose plus
où moins imprégnée d'incrustations organiques.

310 * R. FRÉMY.

Je suis obligé de dire que mes expériences se trouvent en con-
tradiction complète avec cette manière d'interpréter la constitu-—
tion du tissu ligneux.

En conservant le nom de cellulose à la substance immédiate-
ment soluble dans le réactif cuivrique et qui constitue le coton,
les fibres corticales, ou le périsperme du Phytéléphas, je ne ren-
contre pas cette cellulose dans le tissu ligneux : quant à la partie
du bois qui a été nommée matière incrustante, il m'a été impos-
sible de la caractériser chimiquement, et je comprends que les
physiologistes les plus distingués nient aujourd’hui son existence.

Sachant que des expériences faites sur un mélange de tissus
organiques différents pouvaient entrainer à de graves erreurs, je
me suis appliqué, dans mes recherches sur les tissus ligneux, à
isoler les différents organes qui les constituent pour déterminer
séparément leurs caractères spécifiques.

Tous les botanistes considèrent le bois comme formé par des
faisceaux fibro-vasculaires qui sont séparés les uns des autres par
des bandes de tissu cellulaire étendues à la manière de rayons de
la moelle à l'écorce : je reproduis ici textuellement les expressions
de A. de Jussieu. Dans certaines parties de cette masse ligneuse,
se trouvent des amas de trachées déroulables et des vaisseaux
annulaires rayés et ponctues.

Ainsi, pour apprécier la composition et les propriétés chimiques
du bois, je devais isoler et étudier séparément les trois parties
constituantes du tissu ligneux, c’est-à-dire les fibres, le tissu cel-
lulaire et les vaisseaux proprement dits. Je suis arrivé à la sépa-
ration de ces trois organes qui forment le bois, en suivant la mé-
thode que je vais décrire.

Pour obtenir à l’état de pureté les vaisseaux ligneux entière-
ment débarrassés de substance fibreuse ou utriculaire, je fais réa-
gir sur le bois, en premier lieu, de la potasse étendue qui enlève
le tannin, les substances albumineuses et les matières pectiques :
je soumets ensuite le tissu organique à l’action de l'acide chlorhy-
drique différemment concentré, en commençant par l’acide étendu
de plusieurs volumes d’eau, et en terminant ce traitement par de
l'acide chlorhydrique famant ; sous ces influences le tissu utriculaire

COMPOSITION DES. CELLULES VÉGÉTALES. 3!
se dissout en partie, et les fibres ligneuses deviennent solubles
dans le réactif ammoniaco-cuivrique. |

En dernier lieu, je fais réagir à froid l'acide sulfurique con-
centré, qui dissout les parties utriculaires ou fibreuses qui ont
échappé à l’action de l’acide chlorhydrique et à celle de la liqueur
cuivrique: des lavages à l’eau, à l'alcool et à l’éther complètent
cette préparation.

J'obtiens alors les vaisseaux ligneux parfaitement purs; les
botanisies pourront désormais avoir recours à cette méthode qui
leur permettra d'isoler avec la plus grande facilité les vaisseaux
et les trachées qui existent dans le tissu ligneux.

Au point de vue chimique, ilm’a paru utile d'établir une dis-
üinction entre les parties du bois qui se dissolvent dans les
acides et celles qui résistent à l'action de ces réactifs : je désigne-
rai done sous le nom de vasculose, la matière qui forme les vais-
seaux et les trachées. Cette substance est caractérisée par son in-
solubilité dans l'acide chlorhydrique ou dans lacide sulfu-
rique concentré et dans le réactif ammoniaco-cuivrique; elle se
dissout au contraire dans la potasse concentrée et bouillante : sous
ce rapport elle présenterait quelque analogie avec la cutine et
s'éloigne entièreinent, comme on le voit, de la cellulose.

Après avoir ainsi caractérisé le principe immédiat qui constitue
les vaisseaux du bois, je me suis oceupé de la substance utriculaire
qui forme les rayons médullaires. 11 m'a été facile de reconnaitre
que cette matière est identique avec celle qui existe dans la moelle
des arbres: elle est, comme elle, insoluble dans la liqueur cui-
vrique et devient attaquable par ce réactif, lorsqu'elle a été soumise
à l’action des acides et des alealis ou à l'influence de la chaleur
sèche et humide ; les rayons médullaires du bois sont donc à base
de paracellulose.

Ce que j'ai dit sur cette substance dans mes communications
précédentes s'applique exactement à la partie du tissu ligneux qui
forme les rayons médullaires. Je ferai seulement ressortir ici une
propriété très importante de la paracellulose qui m'a permis de
compléter mes recherches analvtiques sur le bois en me donnant
le moyen d'isoler à l'état de pureté les fibres ligneuses.

349 E. FRÉMY.

La dissolution de potasse concentrée et bouillante qui dissout les
vaisseaux ligneux peut opérer également la dissolution des rayons
médullaires ; on obtient ainsi une liqueur alcaline qui, par l’action
des acides, laisse précipiter une inatière organique peu colorée,
ét qui doit être identique avec le produit que notre confrère
M. Péligot à obtenu en faisant agir les alcalis sur le bois. La sub-
stance utriculaire de la moelle, les fibres corticales et le coton
donnent lieu à la même réaction.

Cette solubilité de la cellulose et de la paracellulose dans la po-
tasse concentrée devait me permettre de caractériser le troisième or-
gane du tissu qui constitue le bois ; je veux parler des fibres ligneuses.

Lorsqu'on soumet à l’action-de la potasse étendue des copeaux
de bois, la liqueur prend une coloration jaune et n’opere pas d’abord
la désorganisation du tissu ligneux : mais lorsque la dissolution al-
caline a été amenée à un point de concentration telle, qu’elle peut
agir sur les rayons médullaires et sur les vaisseaux, le tissu végé-
ial se trouve immédiatement détruit : afin de suivre ce phénomène
curieux, il est convenable d'opérer dans un ballon de verre et de
ne pas dépasser la température à laquelle la désorganisation du
bois s’est produite, car alors les fibres ligneuses se trouveraient
altérées.

En reprenant ensuite la masse par l’eau, on enlève l’alcali tenant
en dissolution les corps qui résultent de l’action de la potasse sur
les vaisseaux et les rayons médullaires, et on laisse à l’état msoluble
les fibres ligneuses qui sont souvent d’une blancheur parfaite et
d’une pureté absolue, lorsqu'on lés a lavées à l'eau, à l'alcool et à
l'éther. Cette expérience, répétée sur différents bois, a toujours
donné les mêmes résultats : mes essais ont été faits principale-
ment sur des copéaux de chêne et de sapin.

Noire confrère M. Decaisne a bien voulu soumettre à l’exa-
mèn microscopique les fibres ligneuses que j'ai obtenties par
la méthode précédente : il a reconnu qu’elles présentaient leurs
formes ordinaires ; seulement lorsque l'alcali a réagi sur elles pen-
dant un temps trop prolongé, elles ont éprouvé une dilatation
considérable qui fait disparaître en partie leur ponctuation carac-
téristique.

COMPOSITION DES CELLULES VÉGÉTALES. 53

En se dilatant par l’action des alcalis concentrés, les fibres
ligneuses ont-elles perdu une partie de leur substance ? Je ne le
pense pas, parce qu’elles ont conservé après ce traitement leur
forme et leur solidité : c’est cependant une question que Je réserve
ic complétement et que j'essayerai de résoudre lorsque j'aurai
examiné l'influence que la potasse exerce sur les fibres ligneuses
isolées.

On pourra done dorénavant extraire les fibres ligneuses qui
existent dans le bois et même déterminer leur proportion.

Les fibres que l’on obtient ainsi sont blanches ; elles se laissent
feutrer facilement et présentent les caractères d’une véritable pâte
à papier : l’industrie pourra peut-être un jour tirer parti de cette
réaction, pour extraire du bois une substance fibreuse plus pure
que celle qui a été préparée jusqu’à présent et qui entrerait avec
avantage dans Ja fabrication du papier.

Les chimistes qui répéteront les expériences que je viens de
décrire, verront avec étonnement un bois dur et coloré comme le
eæur de chêne donner des fibres ligneuses aussi blanches que le
coton.

Le mode de préparation des fibres ligneuses que je viens de
faire connaître démontre déjà que la substance qui les constitue
ne doit pas être confondue avec celles qui ont été décrites précé-
demment : je lui donnerai le nom de fibrose. |

Elle est caractérisée : 4° par son insolubilité dans la liqueur
alcaline qui dissout les vaisseaux et les rayons médullaires; 2° par
sa solubilité dans l'acide sulfurique concentré qui ne dissout pas
les vaisseaux ligneux ; 3° par son insolubilité dans le réactif cui-
vrique, qui dissout immédiatement la cellulose et qui n’attaque les
fibres ligneuses que lorsqu'elles ont été modifiées par les agents
chimiques.

Du reste, l’action de l'acide sulfurique concentré vient établir
encore une distinction entre la fibrose et la cellulose.

On sait que la cellulose traitée par l’acide sulfurique concentré
se dissout immédiatement et se transforme en dextrine que
l'eau ne précipite plus:

La fibrose soumise à l’action de l'acide sulfurique concentré, se

BYE E. FRÉMY.

dissout comme la cellulose; mais, lorsqu'on ajoute immédiatement
de l'eau dans cette liqueur acide, on voit la matière organique se
précipiter aussitôt sous la forme d’une gelée épaisse et transparente.

Telles sont les principales observations que j'ai faites sur la
constitution chimique du bois: elles s’éloignent complétement,
comme on le voit, de celles qui ont été admises jusqu’à présent.

Au lieu de considérer le bois comme formé essentiellement par
une matière unique, la cellulose, qui s'incrusterait à la longue par
des substances minérales et organiques, j'isole du tissu ligneux les
trois organes qui le constituent et que les botanistes ont décrits
avec tant de précision, c’est-à-dire les vaisseaux, les fibres et le
tissu qui constitue les rayons médullaires : je prouve que ces or-
ganes sont formés par des principes immédiats qui diffèrent entre
eux par des caractères très nets.

Je n'admets donc pas dans le bois l'existence de ces matières
incrustantes qui, en se déposant dans les cellules ou les fibres,
viendraient augmenter la dureté du tissu ligneux : je ne pense pas
que la substance qui forme d’abord les parois d'une cellule puisse,
en s’incrustant où en prenant de l’agrégation, produire des fibres
ligneuses ou des vaisseaux, parce que des différences dans l’agré-
gation des molécules d’un corps ne changent pas ses propriétés
chimiques, comme M. Chevreul l’a démontré depuis longtemps (4).

Après avoir constaté dans ces recherches que les trois organes
du tissu ligneux, pris aux différentes époques de leur développe-
ment et dans des espèces très variées, présentent des caractères
constants, je suis en droit de dire que si la solidité et la dureté
du bois augmentent avec l’âge du végétal, c’est que les couches
qui dans Je jeune bois formaient des tissus peu épais, sont deve-
nues avec le temps plus nombreuses et plus denses ; mais la com-
position chimique de ces tissus n’a pas éprouvé de modifications.

Les couches qui durcissent dans un bois ancien, les utricules
des rayons médullaires ou les fibres ligneuses, sont de même na-

(1) En 1832, De Candolle, dans sa Physiologie végétale, p. 959, disait déjà
qu'il était impossible de rapporter aux cellules seules la structure entière des
végétaux.

COMPOSITION DES GOMMES. 95
ture que celles qui existent déjà dans une tige à peine formée,
comme je l'ai reconnu sur des tiges d’asperge.

Qu'il me soit permis de dire, en terminant, que lorsqu'on
prouve que les organes qui constituent les végétaux ont pour base
des principes immédiats particuliers, et qu’on démontre que la cu-
licule, le liége, les fibres corticales, le tissu utriculaire, les fibres
ligneuses et les vaisseaux se modifient différemment par l’action
des réactifs, la chimie confirme ainsi complétement les enseigne-
ments de la physiologie et de l'anatomie végétales. En effet, il eût
été singulier que des organes qui différent entre eux par leur forme
et leurs fonctions physiologiques, fussent formés par le même
principe immédiat.

CINQUIÈME PARTIE.

Sur la composition et le mode de production des gommes dans
l’organisation végétale,

Les recherches générales que j'ai entreprises sur les tissus des
végétaux et sur les modifications que certains principes immédiats
éprouvent sous l'influence de l’organisation, devaient nécessaire-
ment me conduire à examiner les phénomènes. qui se rattachent à
la production des sabstances gommeuses.

Tous les chimistes savent que sur ce point nos connaissances
sont peu étendues ; les propriétés chimiques des gommes sont à
peine connues : les relations qui existent entre les parties solubles
et les corps insolubles que l’on trouve dans presque toutes les
sommes, n’ont pas été établies d’une manière précise.

La même obscurité règne encore sur les circonstances
physiologiques qui déterminent la sécrélion de la gomme. Des
observations intéressantes, dues à notre savant confrère M. De-
caisne, démontrent que la production anormale de la gomme,
dans certains arbres, coïncide avec l’époque de la formation des
parties ligneuses et qu’elle se fait à leurs dépens; mais nous ne
connaissons pas Île principe qui, par sa modification, produit,

016 E. FRÉMY.
dans les arbres, la substance gommeuse, et nous voyons'avec éton-
pement une gomme neutre sortir d'un fruit acide.

Lorsqu'on songe que la gomme est sécrétée avec abondance
par plusieurs arbres, qu’elle se change facilement en matière su-
crée pouvant concourir ainsi à la production du Sucre dans les vé-
gétaux, qu’elle entre dans plusieurs opérations industrielles, on
doit regretter que Îles chimistes aient en quelque sorte délaissé,
dans leurs recherches, une substance aussi importante.

Ces considérations m'ont fait tenter souvent des expériences sur
les gommes, dans l’espoir d'appliquer utilement la chimie à l’exa-
men d’une question de physiologie végétale. Après avoir démon -
tré, dans des recherches précédentes, que les corps gélatineux
dérivaient tous, par transformations isomériques, d’un principe
insoluble, la peciose, qui se trouve dans le tissu utriculaire des
végétaux, j'ai essayé d'appliquer aux gommes les observations que
j'avais faites sur les matières gélatineuses : j'étais en droit de sup-
poser que ces deux séries de corps organiques qui présentent
plusieurs caractères chimiques communs , qui se transforment
avec la même facilité en acide mucique par l’action de lacide
azotique, offriraient aussi quelque ressemblance au point de vue
physiologique.

Jusqu’à présent mes essais étaient restés infructueux; et il
m'était impossible de faire entrer les gommes dans une série
comparable à celle qui comprend les dérivés de la pectose.

Une observation inattendue, que je vais avoir l’honneur de
soumettre à l’Académie, est venue établir cette analogie que je
cherchais depuis longtemps entre les corps gélatineux des végé-
taux et les gommes ; elle me permet aujourd'hui de présenter des
vues nouvelles sur la constitution des matières gommeuses.

J'ai reconnu que l'acide sulfurique concentré pouvait faire
éprouver à la gomme arabique une modification remarquable et
la changer en un nouveau corps entièrement insoluble dans l’eau.
Cette réaction aurait été observée depuis longtemps si, pour se
produire, elle n’exigeait pas des circonstances toutes spéciales que
j'ai étudiées avec soin et que je vais décrire.

La transformation de la gomme en substance insoluble ne

COMPOSITION DES GOMMES. 37

s'opère ni sous l'influence de l'acide sulfurique étendu agissant
sur une dissolution de gomme, ni par la réaction de l'acide sulfu-
rique concentré mis en présence de la gomme pulvérisée.

Pour opérer facilement cette modification, on doit faire agir de
l'acide sulfurique concentré sur de la gomme qui se trouve dans
un état particulier d'hydratation.

Les circonstances favorables à l’expérience peuvent être réali-
sées de la manière suivante: je prépare d’abord un hydrate de
gomme d’une viscosité telle, que la décantation le détache diffici-
lement des vases qui le contiennent; je verse ce sirop épais dans
un vase qui contient de l'acide sulfurique concentré ; l'hydrate de
gomme vient recouvrir le liquide acide sans se mélanger avec lui ;
je laisse le contact se prolonger pendant plusieurs heures ; après
ce temps, je reconnais que la matière gommeuse s’est transformée
en une sorte de membrane insoluble même dans l’eau bouillante.

Pour rendre les explications qui vont suivre plus faciles à saisir,
je désignerai immédiatement cette nouvelle substance sous le nom
d'acide métagummique. Après avoir reconnu que ce nouvel acide,
une fois lavé convenablement, ne retenait pas de traces d'acide
sulfurique, je dus penser qu’il résultait d’une transformation 1s0-
mérique où d’une déshydratation opérées par l’action du réactif
. énergique que j'avais employé pour modifier la gomme.

Mais les observations suivantes, en donnantun grand intérêt à
l'étude du nouvel acide, devaient m'indiquer nettement les rela-
tions qui existent entre ce corps et la matière gommeuse qui l’a
produit.

L’acide métagummique résiste pendant plusieurs heures à l’ac-
üon de l’eau bouillante ; j'ai soumis, sous pression et à une tem-
pérature de 100 degrés, cet acide à l’action de l’eau, et il n’a éprouvé
aucune modification : mais lorsqu'on le fait chauffer avec des
traces de bases telles que la potasse, la soude, l’ammoniaque, la
chaux, la baryte et la strontiane, il se dissout immédiatement et
se.modifie, car les acides ne le précipitent plus de la dissolution
alcaline ; il se change alors en un acide soluble que j’appellerai
gummique, qui reste en combinaison avec la base employée pour
opérer la modification du corps insoluble dans l’eau.

J'ai dû étudier ces transformations avec un grand soin, car les”

308 E, FRÉMY.

composés obtenus dans les circonstances précédentes en faisant
agir les bases sur l'acide métagummique m'ont présenté tous les
caractères de la gomme arabique.

Ces expériences sont donc de nature à modifier toutes les idées
que l’on pouvait se faire jusqu’à présent sur la gomme arabique :
cette substance, qui a été considérée jusqu'alors comme une ma-
üière neutre comparable à la dextrine, dériverait d'un principe in-
soluble dans l’eau, l'acide métagammique qui, sous l'influence des
bases, perdant son ipsolubilité dans l’eau, comme cela arrive À
l’acide tartrique anhydre ou à la lactide, se transformerait d’abord
en acide gummique soluble, pour se combiner ensuite à des
traces de bases et principalement de chaux, et former ainsi de
véritables sels constituant les gommes solubles.

Pour confirmer cette manière de voir, je devais reprendre
l'examen de la gomme et rechercher si effectivement cette sub-
siance peut être envisagée comme une combinaison de chaux
avec un acide organique.

On sait, d’après les observations de plusieurs chimistes et prin-
cipalement de celles de Vauquelin, que la gomme ne peut, dans
aucun Cas, être débarassée des matières inorganiques qu'elle con-
üent : lorsqu'on la calcine, elle laisse un résidu caleaire qui s’élève
à 8 ou {centièmes. En outre la gomme est toujours précipitée d’une
manière nolable par l'oxalate d’ammoniaque.

Quand on traite la gomme par le sous-acétate de plomb, il se
forme, comme on le sait, un composé insoluble; j'ai reconnu que,
dans ce cas, la chaux se trouve séparée de la matière organique et
reste unie à l'acide acétique. Faisant bouillir l’acide métagammique
avec de Ja chaux, j'ai obtenu une substance soluble etidentique avec
la gomme arabique : comme la gomme, elle est neutre, insipide,
incristallisable , soluble dans l’eau, précipitable par l'alcool et
le sous-acétate de plomb; soumise à la calcination, elle laisse
5 pour 100 de cendres calcaires, comme la gomme arabique.

Tous ces faits semblent done démontrer que la gomme est
réellement une combinaison de chaux avec un acide organique, et
non un principe immédiat neutre, comme on la admis jusqu’à
présent.

Dans cetie hypothèse il était intéressant d'étudier les change-

COMPOSITION DES GOMMES. 319
ments que la gomme éprouverait dans ses propriétés, après l’éli-
mination de la chaux qu'elle contient, au moyen de l'acide
oxalique.

La gomme, traitée ainsi par l'acide oxalique et privée de chaux,
ne produit pas d'acide métagummique insoluble, comme cela
arrive lorsqu'elle est soumise à l’action de l'acide sulfurique, dans
les conditions que j'ai fait connaitre précédemment.

Ce fait peut être explique avec facilité: lorsque l'acide sulfu-
rique agit sur une matière organique, il peut non-seulement lui
enlever de l’eau ou les bases minérales qu’elle contient, mais lui
faire éprouver une modification isomérique que la chaleur peut
également produire : j'ai done pensé que je pourrais, au moyen de
l'acide oxalique et d’une légère torréfaction, faire éprouver aussi
à la gomme arabique la transformation que l'acide sulfurique
opère avec tant de facilité : l’expérience est venue confirmer cette
prévision, et il m’a été possible, par cette nouvelle méthode, de
transformer encore la gomme en acide métagummique ; ce corps,
sous l'influence de la chaux, reproduit immédiatement la gomme
arabique. -

Ainsi dans cette dernière expérience l'acide oxalique précipite
la chaux contenue dans la gomme, et élimine l'acide gummique,
qui est soluble dans l’eau ; et la chaleur transforme cet acide so-
-Juble en acide métagummique insoluble.

On doit à M. Gélis une observation fort intéressante sur la
somme arabique, dont je trouve aujourd'hui une explication très
simple : cet habile chimiste à reconnu que, sous l’influence d’une
température de 159 degrés soutenue pendant plusieurs heures, la
gomme devient insoluble dans l’eau et que par l’action prolongée
de l’eau bouillante cette matière insoluble peut régénérer de la
gomme.

Jai reconnu que dans ce cas il ne s’élimine pas sensiblement de
malière calcaire : la gomme ne se change donc pas en acide mé-
tagummique ; mais sous l'influence de la chaleur la gomme (gum-
mate de chaux) éprouve une transformation isomérique et produit
du métagumimate de chaux insoluble.

On comprend donc facilement que le corps obtenu par M. Gélis

350 E. FRÉMY.

puisse régénérer de la gomme par l’action de l’eau bouillante,
tandis que l'acide métagummique obtenu par les méthodes que
j'ai décrites, ne peut régénérer des gommes que sous l'influence
des bases.

Les chimistes qui se sont occupés de chimie appliquée à l’orga-
nisation, ne s’étonneront pas de voir la gomme, qui est un se]
calcaire, contenir seulement 3 pour 100 de chaux. Ils savent que
les acides gommeux et gélatineux qui se trouvent encore rappro-
chés des substances organisées, ont toujours une capacité de sa-
turation très faible, qui ensuite augmente à mesure que nos réac-
tifs les éloignent de l’organisation.

C’est ce principe important que j'ai développé dans mes
recherches sur les matières gélatineuses des végétaux : on a vu,
dans cette série remarquable,‘les premiers acides gélatineux pré-
senter une capacité de saturation aussi faible que celle qui carac-
térise l’acide de la gomme.

Ainsi, d’après mes expériences, la gomme serait comparable
aux composés pectiques ; elle dériverait d’une substance insoluble,
l'acide métagummique, comme les corps gélatineux des végétaux
dérivent d’une matière insoluble, qui est la pectose.

L'analyse élémentaire de l’acide métagummique m'a donné les
nombres suivants :

M A0 UE baton 5,93 6,10
RAT ACTE PRES TT Va 52,97 53,08
100,00 100,00

Ces nombres s’éloignent d’une manière sensible de ceux qui
représentent la composition de la gomme brute, mais comme cette
dernière substance n’a jamais été débarrassée préalablement de la
chaux qu’elle contient, son analyse ne peut pas être considérée
comme exacte.

Je réserve du reste pour l'impression de mon Mémoire toutes les
discussions qui se rapportent à la composition élémentaire des
substances gonimeuses,

COMPOSITION DES GOMMES. 351

Après avoir étudié la gomme la plus importante, qui est la
gomme arabique, je devais examiner d’autres matières gommeuses
et surtout celles qui contiennent des parties gélatineuses et in-
solubles.

La gomme du cerisier contient .une substance soluble qui est
identique avec la gomme arabique, comme M. Guérin-Vary l’a
parfaitement établi dans ses importantes recherches sur les
sommes : je devais done eroire que la partie insoluble et gélati-
neuse que l’on peut extraire de cette gomme, la cérasine, présen-
terait de l’analogie avec l'acide métagummique.

Le chimiste que je viens de citer avail déjà prouvé qu'une
longue ébullition pouvait rendre soluble la cérasine et la transfor-
mer en gomme arabique : j’ai reconnu en outre que les carbonates
alcalins réagissent très rapidement sur la cérasine en donnant
naissance à du carbonate de chaux et à des gommes entièrement
comparables à celles que l’on obtient directement par l’action des
bases sur l'acide métagummique.

Les acides étendus et employés à froid décomposent la cérasine,
s'emparent de la chaux contenue dans cette substance et éliminent
de l’acide métagummique qui, par l’action de la chaux, reproduit
de la gomme arabique.

La cérasine n’est donc pas un principe immédiat neutre; on
doit considérer cette substance comme une combinaison de chaux
avec l’acide métagummique.

La cérasine naturelle est identique avec le produit insoluble
obtenu par M. Gélis en chauffant la gomme à 450 degrés: ces
deux corps reproduisent la gomme arabique dans les mêmes
circonstances. Cette transformation, qui s’opère par l’action de
l’eau bouillante, peut se faire aussi sous l'influence de la végétation ;
il est done naturel de rencontrer dans l'organisation végétale des
mélanges de gomme arabique et de cérasine, puisque ces deux
corps doivent être considérés comme constituant deux états isomé-
riques du même composé calcaire.

J'ai reconnu que la sécrétion gommeuse qui vient se solidifier
souvent à l'extérieur d’un fruit acide, se trouve toujours en com-
munication avec un dépôt intérieur d’une matière gélatineuse

392 E. FRÉMY.

identique avec la cérasine et qui est formée comme elle par la
combinaison de la chaux avec l'acide métagummique : c’est done
la modification isomérique de ce composé calcaire et gélatineux
qui produit la gomme neutre qui sort du fruit.

Il existe enfin des gommes qui, comme celle de Bassora,
semblent s'éloigner des précédentes par leurs propriétés et leur
constitution; elles ne contiennent pas sensiblement de parties
solubles, et sont forméés par une substance qui éprouve dans l’eau
un gonflement considérable.

Il résulte de mes expériences que la gomme de Bassora contient
une substance gélatineuse et acide présentant une certaine analogie
avec l’acide métagummique, mais qui ne doit pas être cependant
confondue avec lui.

Lorsqu'on soumet la matière insoluble de la gomme de Bassora
à l’action des bases alcalines et alcalino-terreuses, on obtient de
véritables substances gommeuses, solubles, insipides, ineristalli-
sables, insolubles dans l’alcool comme la gomme arabique, mais
qui sont précipitées par l’acétate neutre de plomb, tandis que ce
réactif, comme on le sait, n’exerce aucune action sur la gomme
ordinaire.

Il résulte done de ces dernières observations que les parties
gélatineuses contenues dans les gommes peuvent se changer en
substances gommeuses solubles, sous l’influence de l’eau bouil-
lante ou par l’action des bases, mais que ces dernières ne pré-
sentent pas toujours des propriétés identiques.

Les gommes solubles, véritables composés caleaires, paraissent
donc dériver de principes gélatineux différents, et constituer plu-
sieurs termes d’une même série organique.

Tels sont les faits nouveaux que j'ai observés dans mes pre-
mières études sur les gommes; je les résumerai de la manière
suivante :

41° La gomme arabique n’est pas un principe immédiat neutre ;
on doit la considérer comme résultant de la combinaison de la
chaux avec un acide très faible, soluble dans l’eau, que je nomme
acide gummique.

2° Cetacide peut éprouver unemodification isomériqueet devenir

9Kr9

COMPOSITION DES GOMMES, 999
insoluble, soit par l’action de la chaleur, soit sous l'influence de
l'acide sulfurique concentré : j'ai donné le nom d’acide métagum-
mique à ce composé insoluble.

9° Les bases et principalement la chaux transforment cet acide
insoluble en gummate de chaux, qui présente tous les caractères
chimiques de la gomme arabique.

h° Le composé calcaire soluble qui forme la gomme ordinaire
peut éprouver aussi par la chaleur une modification isomérique,

. comme M. Gélis l’a démontré, et se transformer en un corps in-

soluble qui est le métagummate de chaux ; cette substance inso-
luble reprend de la solubilité par l’action de l’eau bouillante ou
sous l'influence de Ia végétation ; elle existe dans l’organisation
végétale, c’est elle qui forme la partie gélatineuse de certaines
gommes, comme celle du cerisier; on la trouve dans le tissu li-
gneux et dans le péricarpe charnu de quelques fruits ; sa modifica-
tion isomérique peut rendre compte de la production des gommes
solubles.

9° Il existe dans l’organisation végétale plusieurs corps gélati-
neux insolubles qui, par leurs transformations, produisent des
gommes différentes : ainsi la partie insoluble de la gomme de
Bassora, modifiée par l’action des alcalis, donne une gomme qui
ne doit pas être confondue avec la gemme arabique; les réactifs
établissent entre ces deux corps des différences tranchées.

6° Lorsqu'on voit avec quelle facilité la gomme et ses dérivés
peuvent, en éprouvant une modification isomérique, se trans{or-
mer en substances insolubles, on peut espérer que l’industrie,
profitant de ces indications et les rendant pratiques, pourra un
jour donner facilement de l’insolubilité à la gomme et l’employer
comme l’albumine à la fixation des couleurs insolubles,

4° série. Bot. T. XIL. (Cahier n° 6.) 3 33

DE LA TERRE VÉGÉTALE
CONSIDÉRÉE
DANS SES EFFETS SUR LA VÉGÉTATION,

Par M. BOUSSINGAULT.

(Extrait des Comptes rendus des séances de l'Académie des sciences
du 14 février 1859.)

A une époque qui n'est pas encore très éloignée, on croyait
qu'il y avait une étroite connexité entre la composition et la qua-
lité du sol arable. Cependant de nombreuses analyses ne tardèrent
pas à modifier cette opinion, en démontrant que les éléments mi-
néraux n’ont pas toujours l'importance qu’on leur attribuait. Un
physicien d’une grande sagacité, Schübler, chercha même à prou-
ver, dans un excellent travail, que la fertilité d’une terre dépend
bien plus de ses propriétés physiques, de son état d’agrégation,
de son aptitude à l’imbibition, etc., que de sa constitution chi-
mique.

Ce qui caractérise le sol cultivable, dont le fond consiste né-
cessairement en substances minérales désagrégées, c’est la pré-
sence de débris organiques plus ou moins modifiés, tels que l’hu -
mus et le terreau. La terre végétale proprement dite résulte de
cette association ; quant à sa nature intime, je ne crains pas d’aflir-
mer que, malgré son apparente simplicité, nous ne la connais-
sons encore que très imparfaitement. Je ne veux en apporter ici
d'autre preuve que cette faculté absorbante que le sol exerce sur
l’ammoniaque, sur la chaux, sur la potasse, sur les sels de ces
diverses bases : actions aussi mystérieuses qu'imprévues, dont
nous devons la connaissance à MM: Thompson et Way.

Toutefois, les recherches dont je vais avoir l'honneur d’entre-
tenir l’Académie n’ont pas exigé que j’entrasse dans la voie nou:
velle si heureusement ouvérte par l’habile secrétaire de la Société
royalé d'agriculture d'Angleterre. Je me suis uniquement propose

EFFETS DE LA TERRE VÉGÉTALE SUR LA VÉGÉTATION. 999
d'étudier une terre végétale éminemment fertile dans ses effets
sur la végétation.

La composition chimique, les propriétés physiques ne permet-

tent pas, selon moi, de prononcer sur le degré de fertilité de la
terre. Pour statuer avee quelque certitude, il est indispensable de
recourir à l'observation directe ; 1l faut cultiver une plante dans le
sol, et constater avec quelle vigueur elle s’y développe : l’analyse
intervient ensuite utilement pour signaler la qualité et la quantité
des éléments assimilés.

Les résultats auxquels je suis arrivé en procédant ainsi sont des
plus singuliers et bien différents de ceux que j'attendais. Ils me
paraissent établir de la manière la plus nette que l’on ne doit, en
aucune façon, considérer la matière d’origine organique dont la
terre est pourvue comme la mesure des principes fertilisants
actuellement assimilables ; ils conduisent même à une conclusion
que l’on taxerait d’absurde si on l’adoptait sans un plus ample exa-
men, puisqu'on l’énoncerait en disant qu’une terre extrêmement
fertile est impropre à la culture productive.

La méthode que j'ai suivie dans ces recherches rentre complé-
tement dans celle que j'ai imaginée, il y a bien des années, et que
les physiologistes appellent aujourd’hui la méthode indirecte; elle
consiste, quand il s’agit d’une plante, à comparer la composition
de la semence à la composition de la récolte, et, quand il s’agit
d’un animal, la composition des déjections et des sécrétions à la
composition des aliments.

Écæamen de la terre végétale employée dans les expériences.

|
| La terre provenait du potager du Lichfrauenberg ; sa base est
| un sable siliceux dérivé du grès bigarré et du grès des Vosges; elle
| constitue un sol léger cultivé depuis plusieurs siècles, comme
| l'atteste une date de 1384, inscrite sur la four du vieux mo-
| nastère. |

Afin d'obtenir une matière aussi homogène que possible sans
recourir à la porphyrisation qui en aurait change les conditions
(physiques, la terre prise à À décimètre de profondeur a été d’abord

900 BOUSSINGAULT.
intimement mêlée, desséchée à l’air, puis passée par un crible de
toile métallique portant 120 mailles par centimètre carré, pour en
séparer les cailloux, les pailles non brisées apportées avec le
fumier. |

La terre du potager, lorsqu'elle est sèche, est d’un gris clair,
presque noire quand elle est mouillée. A l’aide d’une loupe, on y
distingue des grains de sable d’un blanc sale, c’est l'élément do-
minant; des débris de végétaux, particulièrement des fibrilles de
racines, puis une substance noire, en fragments irréguliers, angu-
leux, doués d’un certain éclat, fragiles, donnant une poussière
brune soluble dans la potasse, dans l’ammoniaque, en colorant en
brun foncé les solutions alcalines.

Un décimètre cube de terre sèche et tassée a pesé 1,300.

100 grammes de cette terre, après une complète imbibition, ont
retenu 42 grammes d’eau, tandis que 100 grammes de sable sili-
ceux n’en gardent que 25 grammes.

On voit par là combien la faculté absorbante est plus prononcée
dans Ja terre végétale, quoique cependant le sable siliceux y entre
pour une très forte quantité.

Dosage de l'azote dans la terre végélale.

Dans la terre séchée à l'air, passée au crible et mise en réserve
pour les expériences, on a dosé l’azote par la chaux sodée en opé-
rant dans des tubes de Bohème de grandes dimensions.

Résumé des dosages.

I Terre 10 grammes. . . . . . . 0,0263
IL. 20 et AE RCA , 0,0524
III ALIAS ER a st se MUONORDT.
I, 108.4... LHOLANENNE 0,0255
Vs AO Sete de LS BU 2 0,0261
VI. TE CRE POMENREN Le 0,0136
VIL. SUN PAUSE JE QUO! 084

a

UOTE CU CET 0,1824

EFFETS DE LA TERRE VÉGÉTALE SUR LA VÉGÉTATION. 397

70 grammes de terre ont donné azote 0,182 ; pour 100,
0*,261 ; sous le rapport des matières azotées, la terre du Lieb-
frauenberg est certainement d’une grande richesse, puisque chaque
kilogramme renferme 2,61 d’azote.

Si l’on considère que le litre de terre sèche pèse 1°°,300, que
la profondeur moyenne du sol est de 33 centimètres, l’hectare con-
liendrait 11310 kilogrammes d'azote représentant 13*°,734 d’am-
moniaque. Il est hors de doute, comme on le verra bientôt, que

cet azote, pour la plus grande partie, n’est pas engagé dans une

combinaison ammoniacale ; l'examen microscopique en indique
d’ailleurs l’origine : il appartient surtout aux détritus organiques, et
particulièrement à la substance noire que j'ai signalée. A la vérité,
dans l'analyse des 70 grammes de terre, on a bien réellement

_dosé 0,221 d’ammoniaque en nature équivalent à0,182d’azote ;

mais cette ammoniaque, pour la presque totalité, ne préexistait
pas dans le sol; elle est résultée de l’action de la chaux sodée
sur les substances azotées ; elle a été produite et non pas dé-
placée.

En rappelant ces faits, je viens d'exposer les raisons qui autre-
lois m'ont porté à critiquer le mode d'évaluation de l’ammoniaque
d’un terrain par le dosage de l'azote. Le principal argument que je
faisais valoir alors n’a pas perdu de sa force (1), en tant du moins
qu'il s'agit du procédé : c’est qu’un sol dans lequel il entrerait des
débris de schistes carburés, de tourbe, comme celui de certaines
houblonnières de la plaine de Haguenau, pourrait être fort riche en
azote, en contenir par hectare 30000 kilogrammes et davantage,
mais par cela même que cet azole serait engagé dans des combi-
naisons stables, exiger néanmoins, pour être productif, d’abon-
dantes et fréquentes fumures.

Dans la circonstance actuelle, je reconnais que cet argument a
diminué de valeur. Primitivement la terre du Liebfrauenberg a
été du sable provenant de la désagrégation du grès ; la fécondité
acquise est la conséquence d’une culture intense non interrompue
pendant une longue suite d'années. La matière organique qui s’y

(4) Boussingault, Æeonomie rurale, t, IF, pe 77,

998 BOUSSINGAULT

trouve accumulée dérive uniquement des engrais qu'on n’a cessé
_d’y introduire, des résidus laissés par les récoltes. La localité, par
sa situation élevée, par sa constitution géologique, ne laisse pas
supposer un seul instant qu’il y ait eu intervention de roches car-
burées ou de débris tourbeux, et, s’il n’est pas justifiable de tra-
duire en ammoniaque la proportion d’azote trouvée par l'analyse,
on est du moins suffisamment autorisé à voir dans cet azote le
représentant des substances d’origine organique, que tout porte à
considérer comme capables d'agir favorablement sur le développe-
ment des plantes.

Dosage de l’ammoniaque dans la terre végétale.

La terre sèche, délayée avec de l’eau pure contenant de Îa
potasse, a été introduite dans l'appareil dont je me sers pour doser
les très faibles quantités d’ammoniaque de la pluie. De 100
grammes on n’a reliré que 0%,0022 d’alcali, 22 millionièmes. La
terre ameublie d’un hectare dévant peser 43330 quintaux ne con-
tenait pas au dela de 95 kilogrammes d'ammoniaque lorsque
l'échantillon avait été prélevé, Il y a loin de ce nombre aux
1373h kilogrammes auxquels on arrive par le dosage de l'azote.

Il s’est élevé un scrupule dans mon esprit sur cette faible pro—
portion d’ammoniaque fournie par un sol aussi fertile que celui du
Liebfrauenberg. Je me suis demandé si, pendant la dessiccation à
l'air, pendant l'exposition au soleil, la plus grande partie de l’ammo-
niaque ne s'était pas dissipée, puisque, ainsi que je lai démontré,
une terre humide, quand elle renferme des carbonates alcalins ou
terreux, laisse échapper à l’état de carbonate volatil, pendant toute
la durée de sa dessiccation, une partie notable de l’ammoniaque
des sels fixes qu’elle renferme.

En conséquence, j'ai dû doser l’ammoniaque dans la terre avant
qu’elle eût été soumise à la dessiceation, On l’a prise dans la même
plate-bande, à la même profondeur d’où la première terre avait
été enlevée le 15 juin, On était alors au commencement de sep-
tembre. L’humidité a été déterminée, et en en tenant compte,
j'ai trouvé que dans 100 grammes de la terre végétale sèche,

EFFETS DE LA TERRE VÉGÉTALE SUR LA VÉGÉTATION, 399

mais traitée avant la dessiccation, il y avait 0f,0041 d’ammonia-
que, précisément la moitié de ce que l’on avait trouvé le 15 juin.

Pour apprécier la perte occasionnée par la dessiccation, il res-
ait encore à doser l’ammoniaque dans la terre préalablement
desséchée avant d’être introduite dans l'appareil.

109 grammes de terre ont donné 0“,0011 d’ammoniaque.

La perte en alcali, durant la dessiccation à l’air, n’adoncpas été
sensible, et au commencement de septembre l’hectare de la terre

. du potager n'aurait plus renfermé que A7 kilogrammes d’ammo-

nique.

Dosage de l'acide nitrique dans la terre végétale.

J'ai eu plusieurs fois l’occasion de reconnaitre combien la pro-
portion des nitrates varie aux diverses époques de l’année dans la
terre du Liebfrauenberg ; néanmoins l'acide nitrique était un élé-
ment qu'il importait de doser, par la raison que son azote agit avec
autant d'efficacité sur la végétation que l’azote de l’ammoniaque.

Dans 100 grammes de la terre sèche prise le 15 juin, celle que

j'ai employée dans toutes les expériences, j'ai trouvé 0,0008/4

d'acide nitrique, quantité bien faible représentant seulement
0“ ,00063 de nitrate de potasse.

Avec la terre enlevée du potager en septembre, les résultats ont
été bien différents :

‘100 grammes de terre sèche ont donné 0‘,0093 d’acide ni-
trique, équivalant à 0*,0175 de nitrate de potasse.

Ainsi, dans le même sol, dans la même situation, du 45 juin au
7 septembre, la nitrification avait fait un notable progres.

En juin, loterre contenait en nitrates, par mètre cube, l’équiva-
lent de 8,2 de nitrate de potasse ; par hectare 27 kilogrammes.

En septembre, en nitrates, par mètre cube, l’équivalent de
227,5 de nitrate de potasse; par hectare 758 kilogrammes.

Dosage du carbone dans la terre végétale.

Dans la terre prise en juin, l’azote, qui n’était pas engagé dans
les faibles proportions d'acide nitrique et d’ammoniaque que l'on

360 BOUSSINGAULT.

avait trouvées, faisait évidemment partie de matières organiques
dans lesquelles il entre nécessairement du carbone. Il y avait done
un certain intérêt à doser ce dernier corps.

L'analyse a indiqué, dans 100 grammes de terre sèche, 2*,43
de carbone.

La terre du potager du Liebfrauenberg que l’on avait préparée
et réservée pour les expériences, contenait pour 100 grammes :

AZOLE, LV. Re fe 08,261
Ammoniaque. . . . 08",0022 renfermant azote 08',00481
Acide nitrique . . . 08",00034 08',00009

08r,00290
PREMIÈRE EXPÉRIENCE.
Lupin cultivé dans la terre végétale en atmosphère confinée (1).
Les graines employées dans ces expériences renfermaient 5, 1

pour 100 d’azote.
Le sol était formé de:

er
Terre végétale sèche . . . . . . 430,00
Sable quartzeux lavé et calciné . 4000,00
Cendres végétales. . . . . . . . 0,20

Le sol a été imbibé avec de l’eau distillée exempte d'ammoniaque.

Le 29 juin, on a planté un lupin pesant 0,400.

Après la germination, on a porté le volume de gaz acide carbo-
nique à 3 pour 100 du volume de l'atmosphère confinée.

Le 10 août, la végétation était vigoureuse : on comptait dix
feuilles développées. Les cotylédons, encore charnus, conservaient
leur couleur verte.

Le 31 août, les cotylédons étaient décolorés, flétris ; la plante
avait perdu de sa vigueur.

Le 9 septembre, plusieurs pétioles étaient inclinés ; quelques-

(1) L'appareil dont j'ai fait usage est décritdans un Mémoire intitulé : Recherches
sur la végétation ( Mémoires de Physiologie et de Chimie agricoles, p. 459, et
Ann. des sc, nat., 4° série, vol. I, p. 241, 1854).

EFFETS DE LA TERRE VÉGÉTALE SUR LA VÉGÉTATION. 361

unes des feuilles avaient perdu leur couleyr, L'état de la plante
indiquait une insuffisance de principes fertilisants. On à terminé
l'expérience. |

Le lupin avait 22 centimètres de hauteur ; il portait douze feuilles,
dont quelques-unes avaient acquis un remarquable développe-
ment. La plante, y compris les débris de racines, bien débarrassés
de la terre adhérente, a pesé sèche 1,337.

Résumé de l’expérience.

gr
La plante, pesant 48',337, a donné par une seule opération, azote. 0,0246
Dans la graine pesant 08,400, il devait y avoir. . . . . . su 0,020%

Azote acquis en soixante et dix Jours de végétation . . . . . . , 0,0042

Le poids dela matière végétale développée pendant la culture
indique d’ailleurs, comme l’analyse, que les principes fertilisants
du sol sont à peine intervenus. En effet, la récolte n’a pesé que
trois fois et un tiers autant que la semence. C’est à peu près ce qui
arrive quand un lupin croît dans un terrain stérile, dans du sable
ou de la brique calcinée.

Il y avait tout lieu d’être surpris de ce résullat, puisque dans
les 130 grammes de terre végétale mêlés au sable il entrait 0,34
d’azote, c’est-à-dire ce qu’il y a dans 2%, 45 de nitrate de potasse
ou dans 0%,44 d’ammoniaque. Or il est incontestable qu’à de
semblables doses, l’une ou l’autre de ces substances aurait déter-
miné une production bien supérieure à celle que l’on a constatée,
Dans l'acide nitrique et l’ammoniaque contenus dans les 130
grammes de terre végétale, il entrait 0°", 0039 d'azote éminem-
ment assimilable, et il est assez remarquable que, dans cette cir-

constance , l’azote assimilé par le lupin ait précisément pesé
0%, 0042.

362 BOUSSINGAULT.

DEUXIÈME EXPÉRIENCE.
Lupin cultivé dans la terre végétale en plein äir.

Le sol était formé de :

Terre végétale sèche. . . . , . .. 130,00
Sable de quartz lavé et calciné. . . 200,00
Fragments de quartz lavés et calcinés 300,00
Cendre végétales: "4n Lino . 0,40
Pot à fleur lavé et calciné . . . . . 218,00

Le sol a été imbibé et entretenu humide avec de l’eau distillée
exempte d'ammoniaque et renfermant le tiers de son volume de
gaz acide carbonique.

Le 29 juin, on a planté un lupin du poids de 0%,400.

Le 10 août, les cotylédons étaient flétris ; trois feuilles se sont
détachées. Les feuilles supérieures étaient très saines, et l’on aper-
cevait de nouvelles pousses. |

A partir de l’époque à laquelle les cotylédons ont été épuisés,
l’affaiblissement graduel de la plante est devenu de plus en plus
prononcé. Les feuilles, vers le bas de la tige, se flétrissaient à me-
sure qu'il en surgissait de nouvelles au sommet. Tout s’est passé
comme j'ai eu maintes fois occasion de l’observer en cultivant des
lupins dans des sols rendus stériles par une calcination préalable.

Le 9 septembre, quand on a mis fin à l’expérience, le lupin
portait sept feuilles d’un vert assez pâle ; dans le cours-de son
existence il y en avait eu en tout seize de formées. La plante avait
18'centimètres de hauteur ; desséchée à l’étuve, elle a pesé, réunie
aux feuilles détachées, 1%, 5/8.

Résumé de l'expérience.

gr
Le lupin pesant 48,548, a donné, en une seule opération, azote. 0,0246
Dans la graine, pesant 08", 400, il devait y avoir. . . . . « « 0,020

Azote acquis en soixante et dix jours de végétation, . . . . . . . 0,0042

exactement ce que le lupin avait acquis, dans le même temps,

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|

EFFETS DE LA TERRE VÉGÉTALE SUR LA VÉGÉTATION, 309
dans la même quantité de terre, en végétant dans une atmosphère
confinée. Comme dans la première expérience, les principes orga-
niques que j'étais assez disposé à considérer comme fertilisants
n'ont réellemént produit aucun effet sur la végétation; car ei
encore l'organisme formé en soixante et dix jours, l'azote fixé, ne
différent pas de ce que l’on observe dans nne culture faite en un
sol absolument stérile.

TROISIÈME EXPÉRIENCE.

Chanvre cultivé dans la terre végétale à l'air libre.

La graine a été prise dans un échantillon dont plusieurs analyses
avaient indiqué 3,72 d’azote pour 400,

Le 9 juillet, on a planté deux graines pesant ensemble 0“, 060,
dans 40 grammes de terre végétale placés dans un pot de fleurs,
lavés et calcinés, du poids de 46%,158. Pour ameublir le sol on
y avait ajouté des fragments de quartz lavés et calcinés. On a arro-
sé avec de l’eau distillée exempte d'ammoniaque et contenant le
tiers de son volume de gaz acide carbonique.

Le 28 août, le plant mâle portait des fleurs.

Le 31 août, le plant femelle est entré en fleurs.

Le 15 septembre, les fleurs et les feuilles du plant mâle étaient
tombées, on les avait recuéillies avec soin. Le plant femelle, haut
de 22 centimètres, était terminé par un bouquet de petites feuilles
d'un beau vert ; les feuilles situées plus bas étaient fanées. On en
a retiré deux graines d’un volume fort réduit, mais bien formées,
Les feuilles n'avaient pas à beaucoup près les dimensions qu'ont
celles du chanvre normal ; les deux plants, par leur chétive appa-
rence, ressemblaient à ceux que j'avais obtenus en 4857, par une
culture faite dans du sable calciné. Dans cette troisième expérience,
les A0 grammes de terre végétale n'avaient pas exercé d’action
visiblement favorable, bien qu'ils continssent 0“,1044 d'azote,
autant qu'il s’en trouve dans 0,76 de nitrate de potasse, ou
dans 0*,126 d’ammoniaque.

Les deux plants de chanvre, desséchés, ont pesé, 0,329, cinq
fois seulement ce que pesaient les deux graines.

36! BOUSSINGAULT,
Résumé de l'expérience,

Z gr.
Analysés, en une seu'e opération, ils ont donné, azote, 0,U061
Dans les graines, il deyait y avoirs. . .44. pr . 00. 0,0022

Azote acquis, par les plantes, en soixante et un jours de
Hé AdOn 2e RSS Cv 0,0039

QUATRIÈME EXPÉRIENCE.

Haricot nain cultivé dans la terre végétale, en atmosphère confinée.

Une graine pesant 0%, 422 a donné à l'analyse 0%", 0182 d'azote ;
pour 400, 4,51.

A0 grammes de terre végétale sèche ont été placés dans l’appa-
reil, où, pour les maintenir, on avait mis un cercle de terre cuite
lavé et calciné. La terre a élé humectée avec de l’eau distillée
exempte d’ammoniaque.

Le 19 juillet, on a planté un haricot du poids de 0,422, La
germination accomplie, on a donné du gaz acide carbonique à
l'atmosphère.

Le 19 août, les feuilles primordiales, d’un vert foncé, avaient
des dimensions extraordinaires.

Le 18 septembre, la plante portait trois belles fleurs ; contraire-
ment à ses habitudes, elle avait tellement monté que, depuis plu-
sieurs jours sa sommité touchait le faite de l'appareil. Bien à regret,
celte circonstance obligea de terminer l’expérience.

La tige avait alors 70 centimètres de hauteur et 3 à 4 milli-
mètres d'épaisseur. Quelques racines, prolongées au delà du cercle
occupé par la terre végétale, avaient 1 mêtre de longueur ; toutes
étaient parfaitement saines, et comme le sol était très meuble, d’un
volume fort restreint, on put les enlever en totalité et entières
pour la plupart.

La plante séchée à l’étuve a pesé 1*,100, pas tout à fait trois
fois ce que pesait la semence.

Résumé de l'expérience.

La plante, analysée en une seule opération, a donné, azote. . 0,0215
Dans da graine il devait voir. à Lensns nt - dote Las : pe 0,0182

Azote acquis en soixante jours de végétation. . . . . . .. + 0,000

EFFETS DE LA TERRE VÉGÉTALE SUR LA VÉGÉTATION, 909

Cette fois encore, l'effet produit par le sol ne répond aucunement
aux 05,104 d'azote qu'il renfermait, et le végétal en fleurs que
l'on a récolté est véritablement comparable à une de ces plantes
limites nées d’une graine déposée dans un terrain dénué d'engrais,

CINQUIÈME EXPÉRIENCE.

Haricot nain cultivé dans la terre végétale, en plein air.

Dans un pot à fleurs en terre, préalablement calciné au rouge,
on a mis 50 grammes de terre végétale. Le fond du vase était
occupé par une couche de fragments de quartz. La terre a été ar-
rosée avec de l’eau distillée exempte d’ammoniaque, et contenant
le üers de son volume en gaz acide carbonique.

Le 16 juillet, on a planté un haricot pesant 0*,422.

Le 3 août, les deux premières feuilles étaient développées, les
cotylédons flétris.

Le 19 août, les feuilles primordiales se sont détachées; les
nouvelles feuilles avaient une belle couleur verte.

Le 31 août, la plante portait des fleurs et six feuilles.

Le10 septembre, trois gousses étaient formées ; trois des plus
anciennes feuilles avait pris une teinte jaune.

Le 26 septembre, une des gousses s'était atrophiée; dans les
deux autres il y avait trois graines ; la plus grande, celle qui se
trouvait seule dans une gousse, avait, lorsqu'elle était encore
humide, 1 centimètre de longueur et 5 millimètres de largeur. La
tige, haute de 14 centimètres, soutenait encore 6 feuilles vertes.
Desséchée à l’étuve, la plante récoltée a pesé 15,890.

Résumé de l'expérience.

gr
La plante analysée, en une seule opération, a donné, azote. . . 0,0408
Dans la graine, pesant 08',422, il devait y avoir. , . . . . . .. 0,041 82
Azote acquis en soixante et onze jours de végétation. . . . . .. 0,0226

Il est remarquable qu’en poussant avec une certaine vigueur
dans 50 grammes de terre végétale d'excellente quantité, dans
laquelle 05,13 d'azote d’origine organique représentait comme

366 BOUSSINGAULT.

engrais pres de À gramme de nitrate de potasse où 0%, 16 d'ammo-
niaque, la plaute parvenue à la maturité ne se soit pas développée
davantage, car c’est à peine si l’azote initial a été doublé, et la
récolte sèche n’a pas même pesé cinq fois autant que la semence.

SIXIÉME EXPÉRIENCE.

Terre végétale laissée en jachère.

Le 29 juillet, on a placé dans un vase cylindrique en verre,
de 2 centimètres de profondeur, 120 grammes de la terre du
Lichfrauenberg dans l’état où on l’avait employée dans les expé-
riences. Cette terre, formant une couche d’un centimètre d’épais-
seur, a été entretenue constamment humide avec de l’eau distillée
exempte d’ammoniaque. Trois mois après, j'ai recherché si elle
renfermait encore les mêmes proportions de carbone et d'azote.

Desséchée, elle a pesé 4195,070 ; par conséquent, la perte
aurait été de 0,930 (1).

Dosage du carbone de la terre végétale après la jachère.

De 19“ ,8450 de terre, le + de la totalité, on a obtenu :

)

gr.
Acide carbünique, 48,177 — carbone, . . . . du shontl: D 0,321
Dans les 1498r,070 de terre, provenant de 420 grammes. . . . . . . . 1,926

Dans les 120 grammes de terre, avant la jachère, il y avait, carbone . 2,916

Perte.en carhane: . (7 a. 0,990

Ce résultat était à prévoir, mais c’est peut-être la première fois
que l’on a constaté par l’analyse la combustion lente du carbone
dans une terre végétale soumise à l’action de l’humidité, de l'air
et de la lumière.

(4) Ce nombre est donné comme un simplerenseignement; l’état de dessicca-
tion, aux deux époques, a pu ne pas être le même.

EFFETS DE LA TERRE NÉGÉRALE SUR LA VÉGÉTATION. 367

Dosage de l'azote dans lu terre végétale après la jachère.

gr.
25 de terre, le -£- de la totalité, ont donné, azote. 0,0268

I. 9s',922

|| AO) ACT LENS ESS = 0,0269
Dans le . . + —— 0,0537
Dans les 4 198r,070 de terre, azote. . . . . . , 0,3222

Résumé de l'expérience.

L , sr
Dans les 120 grammes de la terre végétale, avant la jachère,azote. 0,3132
— après la jachère. . . 0,3322

Différence. . 0,0090

L'analyse indiquerait donc un gain en azote de près de 0,01
par les 120 grammes de terre exposée à l'air pendant trois mois.
Dans les expériences que j'ai faites antérieurement, l'argile cuite,
le sable quartzeux, la pierre ponce pulvérisée, placés dans les
mêmes circonstances, en ont rarement acquis plus de 2 milli-
grammes. Il reste à décider, ce que je n’ai pu faire faute de ma-
tière, s’il y a eu production de nitrates, formation ou simplement
absorption d’ammoniaque (4).

Ce qui ressort de cette observation, c'est que, en abandonnant,
par la combustion lente, une partie du carbone appartenant aux
matières organiques qu'il recèle, le sol n'a pas perdu d’azote.

Dass les recherches dont je viens de rendre compte, la terre si
éminemment fertile du Liebfrauenberg, dans les proportions où
elle a été employée, n’a pas eu d'effet sur la végétation. Le lupin, le
chanvre, les haricots ne se sont guère mieux développés que s'ils
eussent vécu dans un sol privé d'engrais, dans du sable, dans de
la brique, dans de la pierre ponce, caleinés. Cependant la quantité
de terre qu'on leur a donnée renfermait jusqu’à 0,34 d’azote ori-
ginaire de substances organiques, à peu près ce qu'il y a dans 2 à
à grammes de salpêtre, dans + gramme d’ammoniaque ; malgré

| cela. l'accroissement des plantes a été si faible, qu'il paraît n’a-
Î ? 1

(1) J'ai entrepris une série d'expériences dans l'espoir de résoudre celle

question.

966 BOUSSINGAULT .

voir été excité que par l’azote des quelques milligrammes de
nitrate ou d’ammoniaque signalés par l’analyse. Il résulte claire-
ment de ces expériences que la plus grande partie de l’azote con-
tenu dans le sol du potager n’est pas intervenue. On est, par
conséquent, conduit à cette conclusion, que certaines substances
organiques, en se modifiant, forment des combinaisons douées
d’une assez grande stabilité pour résister à l’action assimilatrice
des végétaux. J’entrevois dans cette circonstance l'explication
d’un fait dont jusqu’à présent je n’avais pu me rendre compte, je
veux parler de la nécessité où l’on est, dans la culture intense,
de renouveler fréquemment les fumures, quoique les récoltes,
théoriquement parlant, ne semblent pas devoir les épuiser; c’est
que réellement une fraction du fumier enfoui se constituant dans
un état passif, n’agit plus à la manière d’un engrais.

La matière azotée, une fois devenue stable, perd-elle irrévo-
cablement la faculté fertilisante que semble lui assigner sa
composition? Je ne le pense pas. Sans aucun doute cette faculté
ne s'exerce plus avec l’énergie que réclame une végétation rapide,
mais par les influences météoriques 1l est vraisemblable qu’elle
récupère peu à peu ses propriétés actuellement dissimulées ; l’in-
tervention d’un alcali, en favorisant la combustion de ses élé-
ments, amène probablement un changement dans sa constitution ;
et c’est peut-être là un des effets les plus manifestes comme les
plus utiles du chaulage que de la dégager de ses combinaisons,
de la disposer à engendrer soit des nitrates, soit de l’'ammoniaque,
les seuls agents connus jusqu’à présent comme étant capables de
porter l’azote dans l’organisme des végétaux. Cette modification
néanmoins ne doit s’accomplir qu'avec une lenteur qui assure la
durée de son action. J'imagine, par exemple, que si le sol du
Licbfrauenberg cessait de recevoir le fumier qu'il reçoit annuel-
lement depuis des siècles, il resterait encore productif, non plus
au même degré, mais pendant une longue période de temps, car
la terre une fois dotée d’une grande richesse de fond, par cela
même qu’elle renferme en abondance des principes stables, ne
s’appauvrit plus que graduellement jusques à arriver à cet état
de fertilité normale subordonnée à sa constitution, au climat, et

|
|

EFFETS DE LA TERRE VÉGÉTALE SUR LA VÉGÉTATION. 969
dont la végétation naturelle n’a d’autres ressources que les ma-
tières organiques, les substances minérales accumulées dans le
terrain depuis son origine, et les éléments que lui fournissent
incessamment l’eau et l'air. C’est ainsi que végètent les Grami-
nées dans la steppe, les arbres dans la forêt, les plantes aquati-
ques dans les marais; c’est ainsi que végéteraient des plantes
dont on aurait déposé les semences dans une terre arable épuisée,
car il est reconnu, par des expériences réitérées, que la stérilité

n’est jamais absolue dans un sol perméable tel que le gravier, le

lehm, le sable limoneux, où, sans faire intervenir les engrais, on
obtient des récoltes, chétives à la vérité si on les compare à celles
que rend une culture fumée, mais persistantes et représentant en
quelque sorte l’équivalent de la production végétale qui se déve-
lopperait spontanément. C’est que, en raison de son immensité,
l'atmosphère est une source intarissable d'agents fertilisants dont
il ne faut pas juger les effets d’après la faiblesse de leur propor-
tion; aussi est-ce une singulière manière de raisonner que de sup-
puter ce que les plantes doivent y trouver en recherchant, comme
on l’a fait, ce qu'un prisme d’air reposant sur une culture dont on
prend la surface pour base, renferme d'acide carbonique et d’am-
moniaque. Hypothéquer ainsi l’air au sol, c’est méconnaitre deux
propriétés très essentielles de l’océan aérien : la mobilité et la fa-

culté de diffusion. Des régions polaires aux régions tropicales où
règnent les vents alisés, l'atmosphère est dans une agitation per-
manente ; sous toutes les latitudes, à toutes les hauteurs, sa con-
stitution reste tellement uniforme, qu'il semblerait qu’elle ne prend
rien, qu'elle ne cède rien aux myriades d'êtres organisés qui
naissent, vivent et meurent dans son sein; cette invariabilité dans
_ la composition est la preuve la plus évidente de la rapidité de
ses mouvements , comme de la promptitude avec laquelle se
mêlent ses divers éléments. La molécule d'acide carbonique dont
aujourd'hui, près de nous, une plante éclairée par le soleil as-

| simile le carbone, est peut-être sortie hier de l’un des volcans de
| l’équateur.

Maintenant, pourquoi dans les observations que j'ai décrites

| la terre du Licbfrauenberg n’a-t-elle pas eu plus d'effets sur la

4° série, Bor. T. X{L. (Cahier n° 6.) 4 24

9170 BOUSSINGAULT .
vésétation, lorsqu'elle en a exercé autant et de si favorables sur
toutes les cultures du potager?

» Je n'hésite pas à voir la cause de cette différence d'action
dans l’inégalité des volumes de terre dont les plantes disposaient
dans l’un et l’autre cas.

» À 100 grammes de terre végétale, les plantes dans les expé-
riences n'ont pas pris en moyenne plus de 0*,009 d’azote, bien
que ces 400 grammes en continssent 0,261. C'est de ce résultat
que j'ai üré la conclusion que la plus grande partie de cet azote
n’est pas immédiatement assimilable; ce qu’il y a eu de fixé répond,
comme je l’ai déjà fait remarquer, aux très petites proportions de
nitrates et d’ammoniaque préexistantes dans le sol ou formées
dans le cours de la végétation. Si chacune des plantes eût dis-
posé de cent fois, de mille fois plus de terre, c’est-à-dire de 10,
de 100 kilogrammes, elle aurait certainement organisé cent fois,
mille fois plus de matière, assimilé cent fois, mille fois plus de
carbone et d’azote. C’est précisément ce qui arrive dans la culture
normale du potager où les végétaux ont à leur disposition une
quantité de terre incomparativement plus grande que celle qu’on
leur accorde dans les expériences. Comme exemple, voici quel
était le volume et le poids de la terre occupée par quelques plantes
venues au Liebfrauenberg en 1858 :

Azole apparlenant à l’acide

Poids ; SRE :
nitrique et à l’ammoniaque

Volume. ALSe Azote contenu, contenus dans la terre au
Ed A des expé-
Haricot nain. . . . 231. 29 kil. 76 sr. ie à
Pomme de terre . . 68 86 245 3
Tabac, porte-graine. 465 245 561 7
Houblon (4). . . . 1056 1334 3482 45

» On comprend tout de suite qu'alors même que, dans la cul-
ture normale, la terre ne contient qu’une proportion infime de
principes azotés immédiatement assimilables, son poids est tel,
que la plante doit cependant y rencontrer les éléments dont elle
a besoin ; il suffit d’ailleurs qu’une partie du composé azoté perde

(1) La terre défoncée et fumée à 0,8 de profondeur.

EFFETS DE LA TERRE VÉGÉTALE SUR LA VÉGÉTATION. 374
sa stabilité, devienne acide nitrique ou ammoniaque pour que la
fertilité en soit notablement accrue. Il y a, au reste, dans l’am-
pleur du terrain de la culture des champs, et l’exiguïté obligée du
sol dans lequel on fait une expérience physiologique, des con-
ditions de masses essentiellement différentes, dont il est impossi-
ble de nier l'influence. Ainsi l’air enfermé dans quelques cen-
taines de grammes de terre est sensiblement le même que l'air
extérieur, à cause de la promptitude avec laquelle s’accomplit la
diffusion des gaz. Il n’en est plus de même pour une culture faite
sur un hectare ; l'atmosphère confinée dans 4000 à 8000 mètres
cubes de terre fumée possède une constitution tout autre que celle
de l’atmosphère ambiante; ce ne sont plus des dix-millièmes, mais
bien des centièmes, des dixièmes de gaz acide carbonique que
l'on y rencontre, et la présence de l’ammoniaque, dans certains
cas, y est si prononcée, qu’il devient possible de la doser en opé-
rant sur 50 à 60 litres d’air (4).

» À très peu de profondeur au-dessous de la surface du sol,
l'atmosphère est saturée de vapeur aqueuse; aussi le plus faible
abaissement de la température souterraine occasionne-t-il un
brouillard, une rosée dont les gouttelettes, déposées sur les ra-
cines, prennent dans leur contact avec la terre, et entrainent
ensuite dans le végétal, des substances qui ne sauraient y pénétrer
autrement que par voie de dissolution. C’est par cette condensa-
tion de vapeur, par l'apparition d’un météore aqueux au sein de
l'atmosphère confinée, que je comprends comment, même aux
époques des plus grandes sécheresses, la plante trouve néanmoins
de l’eau dans une terre qui n’est pas mouillée (2).

» Il résulte de l’ensemble de ces recherches :

» Que dans un sol extrêmement fertile, tel que celui du Lieb-

frauenberg, les 5 de l'azote qui s’y trouve engagé peuvent ne

(1) Boussineauzr et Lévy, Recherches sur l'atmosphère confinée du sol arable.

(2) Dans l'été si sec de 1858, des plantes de tabac ont continué de végéter
vigoureusement, quoique la terre occupée par leurs racines ne contint que 9 pour
100 d'eau. La même terre, quand elle était complétement imbibée d'eau, en
retenait 29 pour 400.

972 BOUSSINGAULT.

pas avoir d'effets immédiats sur la végétation, quoique cet azote
dérive évidemment et fasse même encore partie de matières or-
ganiques ;

» 2° Que les seuls agents capables d'agir immédiatement sur la
plante en apportant de l'azote à son organisme paraissent être les
nitrates et les sels ammoniacaux, soit qu'ils préexistent, soit qu'ils
se forment dans le sol pendant la durée de la culture;

» 8° Qu'en raison des très faibles proportions d’acide nitrique
et d’ammoniaque généralement contenues dans le sol, une plante,
pour atteindre son développement normal, doit disposer d’un
volume considérable de terre qui n’est nullement en rapport avec
la teneur en azote indiquée par l'analyse ?

» 4° Qu'en ce qui concerne l'appréciation de la fertilité ac-
tuelle d’une terre végétale, l’analyse conduit aux résultats les plus
erronés, parce qu'elle dose à la fois, en les confondant, l’azote
inerte engagé dans des combinaisons stables et l’azote susceptible
d’entrer dans la constitution des végétaux ;

» 9° Que la terre végétale, mise en jachère, perd une notable
quantité de carbone appartenant à la matière organique dont elle
est pourvue. Que la proportion d’azote, loin de diminuer pendant
la combustion lente du carbone, semble augmenter ; qu’il reste à
décider si, dans les cas où l'augmentation de l'azote est mani-
feste, 11 y a eu nitrification, production ou simplement absorption
d’ammoniaque. »

INDEX SEMINUM

HORTI BOT. IMPERIALIS PETROPOLITANT.

Auctore E. REGEL,,

Drpcazium KarTzer: Regl.

Petiolo basin versus paleis lanceolato-subulatis onusto, apirem
versus mox glabro ; lanina coriaceo-membranacea, utrinque gla-
bra vel infra ad nervos paleis raris parvis fuscescentibus adspersa,
oblonga , acuminata, pinnatipartita; foliolis inferioribus breviter
petiolatis, e basi æqualiter cordata oblongis, acuminatis, pinnati-
lide crenatis v. basi pinnatifidis, lobis rotundatis crenulato-repan-
dis ; foliolis superioribus sessilibus, basi tantum pinnatifido-crena-
tis, apicem versus crenato-dentatis ; foliolis supremis confluentibus,
crenato-dentatis ; nervislateralibus lacinias intrantibus, ramis sim-
phcibus v. fureatis utrnque 2—4 pinnatis ; soris elongatis, utrinque
2—{} ad costulas laciniarum seriatis ; indusio membranaceo, glabro.

Folia incluso petiolo pedalia et ultra, Iæte viridia; foliola inferio-
ra circiter 2 1/2 poil. longa et 3/4 poll. lata. Ab affinibus foliolorum
infimorum basi æqualiter cordata et ab Dipl. Lasiopteride foliis
olabris, foliolis vix pinnatifidis v. integris facile dignoscitur. Domi-
nus Katzer, horti Paullowskiant præfectus hanc speciem ex semini-
bus zeylanicis eduxit.

|
|
|
|
À

ALSOPHILA GUIANENSIS Hort,

Caudice arboreo ; fronde 3—4 pedali et ultra ; stipite basi nigre-
scente denseque aculeato et paleis ovatis acuminatis fuscescentibus
dense vestito : supra basim una cum rhachidi glabrescente v. parce
pilosulo, lutescente, parceque aculeato; lamina bipinnatisecta,
glabra, ovato-oblonga, obtuse-acuminata, supra obscure viridi,
subtus pallidiore ; pinnis petiolatis, lanceolatis, obtuse-acuminatis ;
pinnulis brevissime petiolatis e basi oblique subcordata v. subtrun-
cata oblongo-lanceolatis, pinnatifido-lobatis, apice breviter atte-

97 E. REGEL,

nuato-obtusis sub integerrimisque, subtus in costa media paleolis
minutis bullulatis raris adspersis ; lacintis oblongis, antice rotun-
dato-obtusis, integerrimis v. vix repando-crenulatis; nervis se-
cundariis laciniarum nunc simplicibus et dorso nunce fureatis et ad
furcaturam nune paullo altius soriferis, nervis secundariis superio-
ribus sterilibus; soris in pinnulis utrinque uniserialibus, inter
pinnularum basim et costam mediam intermediüs.

Patria verosimiliter Guiana. Specimen vivum ex horto el. Blassii
accepimus. — À. radenti Kaulf. Enum. 248 affinis.

Accrum BEckERtANUM Regl.

Bulbi oblongo-conici, tunicis reticulato-fibrosis, fuscis; eaule
inferne foliato; foliis filiformibus, canaliculato-semiteretibus, gla-
bris ; spatha monophylla, membranacea, in lacintis 2—3 partita,
peduneulos æquante v. paullo superante : laciniis ovatis acumina-
tis; umbella fastigiata, pluriflora: pedunculis omnibus erectis,
subæquilongis, perianthium æquantibus v. paullo longioribus ;
perianthio carneo-roseo : phyllis nervo medio obscuriore, exterio-
ribus ovato-lanceoleatis acuminatis ; interioribus paullo angustio-
ribus. Filamentis perigonio brevioribus ejusque basi adnatis, inter
se liberis, simplicibus, subulatis, alternis, basi latioribus.

A. calhidictyonr, callimischonr et moschato proximum. Primum
pedunculis spatha plus duplo et perigonio multo longioribus, —
secundum spatha umbella multo longiore, bulbi tunicis laceris,
pedicellis perianthio plus duplo longioribus, perigonii phyllis obtu-
sis, — tertium fois ciliato-scabris, pedunculis corolla 2—4-plo
longioribus, spatha bivalvi, valvis ovatis setaceo acuminatis pedi-
cellos vix æquantibus dignoscitur. CI. Becker hanc speciem prope
Sareptam legit. (Rgl.)

IRIS PULCHELLA Rel.

Humilis, folis ensiformibus caulem æquantibus v. paullo su-
perantibus ; caule compresso 1—2 floro ; spatha diphylla : foliolis
lanceolatis, margine vixmembranaceis, germine paullo brevioribus:
germine Cylindrico obtuso trigono,pedicello subduplo breviore :

IND. SEM. IHORT. ‘BOT. IMPER, PETROPOL, 319

perigonii tubo brevissimo : phyllis externis imberbibus cuneato-
obovalis, recurvo patentibus,—internis spathulato oblongis, erec-
lis, stigmata vix æquantibus. Caulis 8—11 poll. altus, folia usque
pedem longa et circiter 1/2 poll. lata. Flores cærulet ; sepala ex-
terna basin versus albo et luteo variegata et venis cæruleis picta.
Stigmata apice biloba, pallidiora.

Ir. viginica, cui proxima recedit perianthit foliolis internis stig-
mata subduplo superantibus. 7. Boltoniana Hort.

EUPATORIUM MICROCEPHALUM Rel.

(Ser. IE. Subimbricata, capitulis 20—30 floris. DC. Prodr. V, p. 160.)

Suffruticosum (annuum?), erectum, paniculato-ramosum ; caule
ramisque teretibus, puberulis; foliis oppositis, longe petiolatis,
cordatis v. cordato-ovatis, basi in petiolum cuneato-attenuatis,
trinervis, apicem versus acuminato-subacutis, grosse crenato-
dentatis, basi tantum integerrimis, utrinque pilissingulis hispidulis ;
eymis axillaribus terminalibusque, peduneulatis, pleiocephalis,
lola superantibus, puberulis, in paniculam dispositis; capitulis
parvis, sub 80 floris ; involueri squamis laxe imbricatis, lineari-
lanceolatis, omnibus acutis, extus hirtellis ; achentis angulatis,
pappo duplo brevioribus, ad angulos hirtellis.

Folia decrescentia, læte viridia ; petiolo 1—2 pollicari ; lamina
usque 4 poll. longa et usque 3 1/4 poll. lata ; folia superiora mi-
nora, suprema bracteæformia, lineari-lanceolata, ciliata. Capitula
2-3 lin. longa. Flores albi.

Ex Columbia allatum. ÆEupatorio trapezoideo Knth. et E. quate-
malensi Rel. affine, (Rgl.)

EuparoriuM Pagsri Rel,

Eupatoriam DC., Prodr. V, p. 164. Eximbricata. Capitulis 20—70 floris.

Caule suffruticoso, ramosissimo, erecto, cum petiolis pilis arti-
eulatis patentibus puberulo; foliis petiolatis, e basi cordata deltoideo-
ovalis, oblusis, grosse et obluse crenato-dentatis, utrinque ad
nervos hispidulis, ceterum glabris, membranaceis, reticulato-rugo-

9 76 E. REGEL.

sis, basi trinerviis; capitulis 2 — 20 in corymbum dispositis,
20—30 floris; involueri squamis lineari-oblongis, biserialibus,
acutiusculis, pedunculisque glanduloso-puberulis, corollis duplo-
brevioribus; achænio pentagono, hispidulo, pappo rubicundo.

Fruticulus 2—5 pedalis. Caules et rami teretes, deinde brunnei
et glabrescentes. Folia cum petiolo 4 1/2 — 2 1/2 poll. longa,
lamina 1—2 poll. longa et 3/4—1/2 poll. lata, petiola 4/2—1 poll.
longo. Corymbus terminalis-v. pauci, v. pluricephalus. Corolla
alba.

Eupatorium vellincola DC. (1. c. pag. 168) cui valde affine :
foliis subcordatis acutis grosse dentatis, corollis purpurascentibus (?)
involueris nec glandulosis (?) facile dignoscitur.

Patria ignota.

ASTEMON Rel.

Calyx tubuloso-campanulatus, subæqualiter 5 dentatus ; denti-
bus lanceolatis, acuminatis ; fructifer inflatus. Corolla tubo calycem
æquante, limbo brevi subæqualiter quinquefido, lobo inferiore
paullo longiore, fauce barbata. Stamina nulla. Antheræ 4, parvæ,
distantes, tubo infra faucem adnatæ, rotundatæ, biloculares, loculis
basi conniventibus et apice confluentibus. Stylus apice inæqualiter
bifidus, lobis stigmatiferis subulatis recurvatis. Ovaria in fundo
calycis disco adnata ovato-subglobosa.

Frutex bolivianus odore inamæno ; ramis foliisque oppositis ;
spicis paniculatis, verticillastris multifloris distantibus.

Colebrookia Sm. cui hoc genus affinis: laciniis calycis plumo-
sis demum papposis tuboque acheniis connatis, corollæ tubo 4-fido
et antheris nec sessilibus facile dignoscitur.

A. graveolens Rgl.

Frutex 6 — 8 pedalis, caule ramisque obtuse tetragonis, sulcis
h exaratis, tenuiter albido-tomentosis. Folia opposita, petiolata,
oblongo-lanceolata, attenuato-acuta, basirotundata v. subattenuata,
dentato-crenulata, incluso petiolo subpollicari usque 9 poll. longa
et 8 1/2 poll. lata : supra rugosa, viridia, glabriuscula : infra albi-
da, venis prominentibus reliculato-venosa, pilis ramosis tenuiter

IND. SEM. HORT, BOT, IMPER, PETROPOL, 9771

tomentosa et glandulis graveolentibus dense adspersa. Panicula ter :
minalis, tomento albido densiore vestita. Verticillastri multiflori,
distantes, spicati," basi bracteis ? sessilibus oppositis cordato-
subrotundis breviter acuminatis flores subæquantibus fulti. Flores
breviter pedicellati, 4 1/2—2 lin. longi, albi. Calyx tenuiter villoso-
tomentosus, subæqualiter 5-dentatus, dentibus lanceolatis, acumi-
nas, sub anthesi tubulosus deinde subinflato campanulato-tubu-
losus. Corollæ lobis rotundato-ovatis.
Cuming ex Boliviæ provincia Cochambamba semina misit.

CLAvIJA RIEDELIANA Regl.

Polygama. Floribus masculis tetrameris ; hermaphroditis im
racemum brevissimum dispositis.

Fructex 4 — 6 pedalis, subsimplex, apice foliis amplis confertis
coronatus.

Folia cuneato-oblonga, coriacea, glaberrima, remote spinoso-
dentata, basin versus cuneato-attenuata, apice acuminata v. acula
v. obtusiuscula : supra læte viridia et nitentia : subtus pallidiora
et nervo medio valido prominente percursa, nervis secundariis
subhorizontaliter pateutibus et ante marginem anastomosantibus,
incluso petiolo circiter 2/3—1 1/3 pedem longa et 2 1/2—4 poll.
lata ; petiolo brevi tereti v. compresso-tereti, basi Incrassato fus-
cescente.

Flores masculi: Racemi axillares, simplices v. ramosi, laxi,
secundi, folio à — 5 plo breviores. Pedunculus, pedicelli et calyx
brevissime pilosiusculi. Flores pedicellati, pedicellis cireiter 3 lin.
longis, supra basin bracteola minuta, subulato-lanceolata vestitis.
Calyx profunde 4-fidus, lobis ovatis, rotundatis, corolla plus duplo
brevioribus, margine minutissime ciliolato-denticulatis. Corolla
campanulata, profunde A4-fida, ceraceo-ochroleuca, lobis subro-
tundis. Appendices 4, eum corollæ lobis alternantes, tubo corollæ
adnatæ, minutæ, apice retusæ, Stamina 4 in tubum connata,
antheris inclusis apice truncatis.

Flores hermaphrodih : Racemi axillares etextra-axillares, brevis-
simi, cireiter 3 flori. Pedunculus circiter 3 lin. longus, quam pe-

318 E. REGEL.

dicelli et calyx minutissime pilosulus, Pedicelli 4 — 2 lin. longi.
Calyx croceo coloratus, profunde 4-5 fidus, lobis obtusis ovatis
margine ciliato-denticulatis. Corolla profunde 5 fida (an semper?,
campanulata, intense crocea, lobis ovatis oblusis. Appendicés 5,
lobis corollæ alternantes, adnatæ. Stamina 5, petalis opposita,
germine paullo breviora, antheris bilocularibus, apice truneatis,
basi sagittatis, Germen subglobosum, stigmate magno sessili
h-lobo (an semper?) coronatum, uniloculare. Ovula biserialia,
placenta centrali in sériebus 4 adnata. Fructus depresso globosus,
aurantiacus, unilocularis, vix pollic. latus, mdehiscens, pericar-
pio coriaceo. Semina À, placenta centrali adnata, ossea.

Hanc speciem legit cl. Riedel in umbrosis siccis prope Rio
Janeiro.

Affinis C. undulatæ D. Don. — Theophrasta latifolia et Clavija
brachybotrys H. Petrop. Th, latifolia Hort. Schünbr.

PASSIFLORA TRUNCATA Rel.

Sect. V. Decaloba DC., Prodr. IF, p. 325.

Ramis striato-angulatis, petiolis foliis pedicellisque breviter pu-
berulis; foliis semiorbicularibus, trinerviis, basi rotundatis v.
subcordatis, apice truncatis et vix trilobis, subtus glandulosis ;
peuolis biglandulosis ; pedicellis solitartis v. geminis.

Scandens, puberula. Folia alterna; petioli cireiter semipollica-
res, teretes, medio glandulis duobus oppositis vestiti; larnina
semiorbicularia, trinervia, 4 4/4 —® poll. longa, 2—3 poll. lata,
basi rotundata v. leviter cordata, apice truncata et vix repando-
iriloba, supra lætevirens, nitens et brevissime laxeque puberula,
infra pallidior dense puberula et glandulis 6 — 12 vestita, lobis
lateralibus ex apice rotundato plerumque apiculatis, lobo intermedio
emarginato. Cirrhi simplices, axillares. Pedicelli axillares, solitari
v. bini, petiolum subæquantes, medio articulati, basi bracteolis
subulatis 23 stipati. Flores pro genere parvi, vix pollicem in
diametro, albido-virescentes. Calyx 5 partitus; lobis anguste-
oblongis, obtusis, trinerviis, cireiter semipollicaribus. Corolla (ea-
lycis lobi interiores) 5 petala; petalis calycis fauce insertis, lobis

IND, SEM. HORT, BOT. IMPER, PETROPOL, 979

calycis paullo brevioribus, subenerviis. Corona staminea triplex ;
series externa € filis luteolis corollam æquantibus, intermedia e
filis brevibus apice capitatis formata, et interna in coronam bre-
vem plicatam connata. Stamina 5, basi in tubum ovarui pedicellum
involventem connata, apice libera recurva. Antheræ oblongæ,
dorso affixæ, biloculares, longitudinaliter dehiscentes. Ovarium
stipitatum, globosum, puberulum. Styli 3, patentes, stigmatibus
capitatis.
Affinis Passifloræ Rohrii DC.

ABUTILON SELLOVIANUM Regl.

Fruticosum, undique pilis brevibus mollibus dense vestitum ;
caule erecto lignoso ; foliis longe petiolis, subrotundo-profunde
cordatis, 7—9 nervis, acuminatis, integris v. subtrilobis (lobo
intermedio lateralibus multo-majore), inæqualiter crenato-dentatis,
subtus velutino-albicantibus; stipulis erectis, lineari-subulatis,
pedunculis geminis, axillaribus, folium superantibus, sub apice
articulatis ; calyeis tubo depresso-globoso, angulato, limbo 5-par-
lito, lobis lanceolatis, trinervis, erectis, corolla brevioribus ;
corolla pallide purpurea, vix puberula, venis vix pallidioribus per-
eursa ; petalis patentibus oblongo-ovatis , concavis, obtusis ; ger-
mine 8-9-loculare, lanato, mutico, stylo 8-9-partito coronato.

CI. Sello ex Brasilia attulit et nobis communicavit. Affinis
A. planifloro C. Koch et geminifloro Knth. Petioli deinde usque 8
pollices longi et foliorum lamina tandem usque 10 poll. longa et
8 poll. lata. }

POTENTILLA SCHRENKIANA Rgl.

Caule erecto v, adscendente canescenti-piloso pilisque patenti-
bus eglandulosis adsperso, corymboso-ramoso ; foliis quinatis, cau-
linis superioribus lernatis v. subsimplicibus, supra glabriusculis,
infra in venis hirsutis, margine ciliatis. Foliolis cuneato oblongo-
lanceolatis v. fol. radicalium latioribus, inciso-dentatis, dentibus
utrinque À — 7, foliolis foliorum caulinorum plerumque pauci-
dentatis v. fol. superiorum intergerrimis ; calycis villosi lobis ovato-

880 E. REGEL,

lanceolatis, acuminatis, bracteolis æquilongis, lineari-lanceolatis,
petalis obcordatis subæquilongis; carpellis rugulosis, carma con-
spicua cinclis.

P. recta L. cui affinis caule erectiore, pilis basi tuberculo insi-
dentibus, foliorum dentibus crebrioribus, carpellis carina alæformi
cinctis dignoscitur. Schrenk in Targabatai legit.

INDEX SEMINUM IN HORTO BOTANICO BEROLINENSI,

ANNO 1858 COLLECTORUM.

Auctoribus Al. BRAUN et C. BOUCHÉ,

Bromus PARvIFLORUS, Desf.— Bromus commutatus Hortor. plur.,
non Schrad, colitur in Italia sub nomine « Ventolana » (Bromus
Ventolana, Schleich).

Eupxorgia aumirusa, Willd. Suppl. (Herb. n° 9283!) Euphor-
bia pseudo-Chamæsyce, F. et M., Ind. Sem. H. Petropol. IX
_(A° 1843). Ledeb. F1. Ross., II, p. 557. Planta siberica, in
Horto Berolinensi, probabiliter mde a Willdenowit temporibus
quasi spontanea areas horti in consortio Molluginis Cervianæ quo-
tannis infestans.

Nicotrana REPANDA, Willd., ad hance speciem pertinent : N. pan-
durata, Dunal, in DC. Prodr. XII, I, p. 569; N. graciliflora,
Al. Braun, in Cat. Sem. Horti Friburg., 1849; et forte N. RϾ-
meriana , Scheele, in Linnæa 18h8 ; Dun. |. c., p. 568.

INDEX SEMINUM
HORTI REGII BOTANICI GENUENSIS,
ANNO 1858.

ISOETEOS NOVÆ DESCRIPTIO.
AUCTORIBUS

V. CESATI et F. De NOTARIS,

ISŒTES MALINVERNIANA, Cesat. et De Not.

Aquatica; rhizomate trisulco ; foliorum coma supra basim bul-
bose turgescentem consiricta ; foliis basi cochleariformibus, longe
alato-marginatis, prismatico-subulatis, fasciculis fibrosis stoma-
tüibusque (parce) præditis ; glandulæ processu cordiformi ; ligula
lineari subulata, apice subbidentata ; sporocarpiis peltæformibus
nudis ; macrosporis majusculis, vertice tricostatis, granulosis,
granulis tribus ad verticem prominulis.

Submersa, in aquæductibus, solo lutoso-argillaceo siliceo, circa
pagos Greggio et Oldenico in Pedemontni ditione Vercellensi. Ab
initio æstatis in hyemem ipsissimam læte fructificans, facile per
totum annum. In aqua tarde fluente limoque profundo vegetior. —
Nuperrime detecta ab amicissimo et in explorandis Cryptogamis
Vercellensis ditionis solertissimo socio nostro, D. Azext Mazin-
VERNI, Cui meri{o et pro grati animi tessera eam dicavimus.

Isœtes Malinverniana ab I. palustri toto habitu, foliis bulbose
constrictis, fibrarum fasciculis stomatibusque præditis, macrospo-
rarum fabrica et indumento distat. Ab Z. selacea, macrosporis,
quæ in hac toto vertice læves sunt, apprime differt.

Isœtes setacea, Bertol. (Flor. Ltal., Cryptog. 1, p. 115), ex
Sardiniæ speciminibus di Pula ad JT. velatam celeberrimi A. Braun
spectat.

FIN DU DOUZIÈME VOLUME,

TABLE DES ARTICLES

CONTENUS DANS CE VOLUME.

ORGANOGRAPHIE, ANATOMIE ET PHYSIOLOGIE VÉGÉTALES,

Nouveaux documents destinés à faire connaître la formation de l'embryon
des Phanérogames, par M. W. HormeisTer . Dr ;

Observations sur la nature et l'origine de la pulpe qui entoure les graines
dans certains fruits, par M. F. Caruez. . . . .

Observations sur la fleur des Marantées, par M. Arthur Gus.

Note sur l'origine et le développement des urnes dans les Lime du
genre Nepenthes, par M. Jos. Dalton Hooker.

Recherches physiologiques, anatomiques et ruée sur la Colo-
case des anciens ( Colocasia antiquorum), par M. P. DucmantRe. . .

Recherches sur la composition des cellules végétales, — sur la composi-
tion et le mode de production des gommes dans l'organisation végétale,
par M. E. Frémy. ñ : sn

De la terre végétale PAP Een glul ses | effets sur la végétation, par
DS, DOPAGE, JURIRPENURRLENUTE EL AR FRCEPEPNLE

MONOGRAPHIES ET DESCRIPTIONS DE PLANTES.

Revue des Cucurbitacées cultivées au Muséum, en 4859, par M. Ch.
Naomi. sagement ace ae ere :

Huitième centurie de Plantes dei nouvelles, tant RARE qu’exo-
tiques, par C. Moxraene, D. M., décades IX et X. 6

Prodromus expositionis Lichenum Novæ Caledoniæ, scripsit Wizztaw Nr
CU 0), CS dE A LR LUS RE LEE

Notice sur le genre Hapalidium, par MM. l'acses frères.

Notice sur quelques espèces et genres nouveaux d'Algues marines de de
rade de Brest, par MM. Crouax frères. . . SAS

Dispositio Psoromatum et Pannariarum, auctore D bars NYLANDER.

FLORES ET GÉOGRAPHIE BOTANIQUE.

Calendrier des Champignons sous la latitude moyenne de la Suède, par
é M. Elias Fries. Q A e o Q * à « e e e

296

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TABLE DES MATIÈRES.

MÉLANGES.

Indicis seminum horti regii botanici Neapolitani adnotationes auctore
M. Tenore. LÉ: , mn
Delectus seminum in hate bot. Veiouéatis Toad PRE PAES
anno 4858, auctore Eduardo FEnzz ; io &0e. sub sbrl
Index seminum in horto botanico Hamburgensi Sr auct. LEHMANN.

Index seminum horti bot. Imper. Petropolitani auctore Ed. Rece.

‘ Index seminum in horto bot. Berolinensis collectorum auct. A. Braun

et C. Boucré.

Index seminum in hbrto “a Genuensis collect, Isœteos novæ des-
criptio .

TABLE DES PLANCHES

RELATIVES AUX MÉMOIRES CONTENUS DANS CE VOLUME.

Planches 1 et 2. Formation de l'embryon (Loranthus).

— 3. Formation de l'embryon (Viscum et Lepidoceras).

— k,5,6, 7. Formation de l'embryon (Balunophorées).

— 8. Cucumis Pancherianus Ndn.

— 9, Echinocystis fabacea Ndn.

— A0. Thladiantha dubia Bnge.

— 11, 42,13, 14, Fleur des Marantacées.

— 15, 16. Développement des urnes des Népenthes.

— 17,148, 19, 20. Anatomie de la feuille du Colocasia antiquorum.
— 21. Hapalidium. |

— 99. Ulvella, Rhododiscus, Cruoriella, Calathries et Callithamnion:

289

78
165
220
373

380

a ———

\

TABLE DES MATIÈRES

PAR NOMS D'AUTEURS.

BoussineauLT (J.-B.).—Dela terre
considérée dans ses effets sur
la végétation.

Braun (Alex.). — Index seminum
in hort. botanico Berolinensi
anno 4 858 collectorum.

CaRRuEL (F.). — Observations sur
la nature de la pulpe qui en-
toure les Ange dans certains
fruits.

Crouax. — Note sur le genre Hô-
palidium. …. . .

— Notice sur quelques espèces
et genres nouveaux d'Algues
marines de la rade de Brest.

De Noranis (Giuseppe). — In-
dex seminum hort. Bot. Ge-
nuensis. Anno 4858 collecto-
rum—- /sæteos novæ descriplio.

Ducuarrre (Pierre). — Recher-
ches physiologiques, anatomi-
ques et organogéniques sur la
Colocase des anciens (Coloca-
sia antiquorum). . . . .

Fenzz (Edouard). — Delectus
seminum in horto botanico uni-
versitatis Vindobonensis collec-
torum anno 4859. . . .

Frémy (Edmond). -- Recherches
chimiques sur la composition
des cellules végétales. — Sur
la composition et le mode de
formation des gommes dans
l'organisation végétale. . .

Fries (Elias). — Calendrier des
Champignons sous la latitude
de la Suède.

Gris (Arthur). — Observation sur
la fleur des Marantées.

Hormeisrer (Wilhem). — Nou-
veaux documents destinés à
faire connaître la formation de
l'embryon des Phanérogames,

Hooker (Jos. Dalton). — Notesur
l’origine et le développement
des urnes dans les plantes du
genre Nepenthes. ï

Leumanx (Joan. Georg. Christ).
— Index seminum in horto
bot.Hamburgensi collectorum.

Monraexe (Camille). — Huitième
centurie de plantes cellulaires
nouvelles, tant indigènes que
EXOÉQUES. . :. _: A/S ON

Naunix (Ch.). — Revue des Cu-
curbitacées cultivées au Mu-
sed 1009 190 CONSATINE 40

Nycanper (Will). — Prodromus
expositionis Lichenum Novæ
Caledoniæ seripsit. ‘

— Dispositio Psoromatum et Pan-
DA run ME DES BEIRON RE, RE)

Rece (Edouard.).— Index semi-

304

381

232

165

num horti bot. Imperialis Pe-

tropolitani y à |
Tenore (Michael). — Indicis se-
| minum horli regii botanici
j _ Neapolitani adnotationes .

320

FIN DE FA ABLE,

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