CEA Eu ANNALES DES SCIENCES NATURELLES CINQUIÈME SÉRIE BOTANIQUE Paris, — Imprimerie de E, Manriner, rue Mignon, 2 CINQUIÈME SÉRIE BOTANIQUE COMPRENANT L’ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE ET LA CLASSIFICATION : DES VÉGÉTAUX VIVANTS ET FOSSILES PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION DE MM. AD. BRONGNIART ET J. DECAISNE TOME XV PARIS LIBRAIRIE DE G. MASSON PLACE DE L’ÉCOLE-DE- MÉDECINE 1872 4 ÿ L » | 4 À L] Do - 5 & 3 CR > | D DÉTETNTS + x Li - u : à D CE: 1 ' à u + : di f & a = : a 4, i . ñ … û - A c ) 11 TE D 4: Û 5 = . pe = —_ 5 “ AS fé: j ti d . # f LM 24 UNE s}: : L pni ‘ = u U x [PE j M $ - L Re k mx “ ', Î = = = 1 HO > { À À É cl L É UE ; = : È * AURA 1 { c EP 20 A Da 24 ( 1 ei. © PEN -1R0É FUREUR re. it 2 È Et # j 1 4 H 1 : ‘ = Î u = L à . L _ 3 L k l ï Ê nl ? È 13 "1 £ 2 ni « à . CRUE | A _ ee | L ‘ 0 { h + U - 1 + L * : “ a L ‘ as 5 : ù ü LA j Le > _ - % L : — L 5 À à l , DR D - L Î nn — = + 6 - 5 47 3 UE F4 i L r= GES ÿ it ’ Le ( ti = 3 . É Hi € = à o 2 3 2- ES ù KR : CE = , : HAN + < nn ANNALES DES SCIENCES NATURELLES BOTANIQUE MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES ÉTUDE PHYSIOLOGIQUE ET SYSTÉMATIQUE Par M. Xiax. CORNU. PREMIER MÉMOIRE. REPRODUCTION SEXUÉE PREMIÈRE PARTIE. INTRODUCTION. La famille des Saprolégniées, qui constitue un petit groupe naturel de Champignons (1) aquatiques, a reçu successivement des accroissements de plus en plus considérables. Les mémoires sur ce sujet sont pour la plupart écrits en allemand et signés des noms les plus illustres, Schleiden, Unger, Braun, Pringsheim, de Bary. En France, M. Thuret (2) seul y consacra quelques pages et une planche; mais on peut dire que malgré la brièveté du texte, la beauté et l'exactitude merveilleuse du dessin tiennent la place de longs développements : rien de mieux n’a été fait en ce sens. Ces mémoires, disséminés dans divers journaux, sont consacrés à des espèces ou à des genres particuliers ; aucune étude générale de la famille n’a encore été faite. Pendant l’automne de l'année 1568, j'eus, en sologne, l’oc- (1) Considérées autrefois comme faisant partie de la classe des Algues, elles sont placées aujourd’hui dans les Champignons, Les botanistes spéciaux qui partagent cette opinion sont MM. Tulasne et Thuret en France, de Bary en Allemagne. (2) Ann. sc. nat.,3® série, t. XIX, p. 229, pl, 22. 6 M. CORNU. casion d'observer plusieurs espèces rares ou nouvelles: c'étaient l’Achlya racemosa, espèce récemment établie par M. Hildebrand dansle journaldeM.Pringsheim (1) ; le parasite du W'olffia arrhiza, que nous avons décrit, M. Roze et moi, sous le nom de Cystosiphon pythioides (2); un Achlya nouveau, que je propose de nommer A. recurva (3); ces singuliers sporanges réticulés, considérés par M. Pringsheim comme donnant naissance à desandrospores, et qui ne sont autre chose que les sporanges du Dictyuchus monosporus Leitgeb (4); une plante fort singulière, qui appar- tient à un genre nouveau, et que je propose de nommer Mono- blepharis polymorpha (5). Toutes ces espèces se présentèrent, et plusieurs autres encore; dans l'intervalle de quelques semaines seulement. La richesse des matériaux ainsi récoltés par hasard m’engagea à tenter une étude complète de la famille; c’est un sujet difficile, et j'étais peu sûr de le mener à bien : rien n’est aussi aléatoire que des travaux de ce genre, où la recherche des éléments est, aussi bien que leur étude, incertaine et livrée à tous les hasards. Les espèces doivent être observées vivantes (aucune, du reste, ne se trouve en bon état dans les collections) ; il a donc fallu les cultiver, apprendre à les élever et à les conser- ver en bonne santé. La durée très-limitée de leur existence, la rapidité de leur développement, l'incertitude de les retrouver, si l’on n’achève pas leur étude du premier coup, sont autant de causes d’insuccès. Aussi je réclame l’indulgence de ceux qui me liront : la difficulté était double; car, d’une part, il fallait rechercher les matériaux, de l’autre en tirer parti, et le moindre obstacle pouvait ainsi entraver ou arrêter les recherches. J'ai rencontré une partie des espèces mentionnées dans les auteurs qui m'ont précédé ; j'en ai trouvé quelques-unes de nou- velles, et je tiens pour certain qu'il y en a encore un grand (4) Jahrbuech. fuer wiss. Bot.,t. VI, p. 249, trad. Ann. des sciences nat., 58 série, t. VII, p. 314. (2) Ann. des sc. nat., 5° série, t, XI, p. 72, pl. 3. (3) Voyez plus loin, p. 22, (4) Jahrbuech. fuer wiss. Bot., t. VII, p. 357. (5) Voyez plus loin p. 16, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 7 nombre d’inconnues : leur connaissance pourra faciliter la solu- tion de questions encore obscures et incomplétement élucidées, à l’aide de celles que l’on connaît actuellement. La monographie que j’entreprends aujourd’hui se compose de plusieurs parties à peu près terminées, et qui sont les suivantes : 41° Étude de la reproduction seœuée. 20 tude de la reproduction aseæuée (z0ospores). 3° Étude systématique. L° Physiologie et Biologie. L'étude dela reproduction seæuée est la partie la plus discutable et la plus importante; c’est par elle que je commence. On y rencontre des difficultés assez sérieuses, sur lesquelles les savants ue se prononcent pas encore nettement (1). Elle a lieu par le moyen de conceptacles remplis de spores provenant d’une fécon- dation. Tantôt l’organe mâle est constitué par des branches laté- rales terminées par une cellule (anthéridie) qui, selon M. Prings- heim, contient des anthérozoïdes; dans d’autres cas, selon le même savant, iln°y a pas de branches latérales, mais des anthé- ridies qui diffèrent suivant les genres. M. de Bary révoque en doute quelques-unes des idées de M. Pringsheim et recom- mande de nouvelles recherches. Ces recherches, je les ai tentées, non pas tout d’un coup et directement, mais successivement et comme par surcroît, en étudiant chaque espèce. Je suis arrivé, petit à petit, à conclure qu'il y avait un grand nombre d'erreurs, même sur les faits capitaux de la théorie. Ces erreurs sont dues, soit aux difficultés inhérentes au sujet (et elles sont considérables), soit aux espèces, se prêtant mal à l'observation; mais surtout aux matériaux sou- vent trop rares et trop incomplets, et aux vues de l'esprit trop rapidement acceptées comme la réalité des faits. Si dans ce mémoire je contredis un des savants les plus dis- tingués. de l'Allemagne, si je lui oppose, sans nom et sans auto- (1) De Bary, Morph, und Phys. der Pilze, 1866, p. 155, traduction Ann, des se, nat., 5° série, t. V, p. 333, 8 RE. CORNE, rité, mes jugements et mes observations, ce n’est pas par un puéril désir de critique; j'ai pour lui tout le respect dû à d’émi- nents travaux, mais 1l m'est impossible d'admettre des conclu- sions que je crois inexactes. En protestant ainsi de mon admira- tion pour lui, je combattrai la théorie qu’il a émise de la sexua- lité des Saprolégniées, calquée sur celle des OEdogoniées : et je demande en conséquence que les inexactitudes reconnues dans ce travail ne soient pas jugées avec trop de sévérité, puisque des botanistes du plus grand renom ont pu, sur ce sujet, tomber eux-mêmes dans l'erreur. Ces études ont été faites en plusieurs endroits, soit à Paris, au laboratoire de la Faculté des sciences, soit à la campagne, en diverses localités, et dans ces dernières elles ont été particulière- ment fructueuses. Je dois ici remercier M. Duchartre, professeur de botanique à la Faculté des sciences et membre de l’Institut, de ses bien- veillants conseils et de ses utiles encouragements qui ne m'ont jamais fait défaut, ainsi que M. Roze, vice-président de la Société botanique de France, qui n'a initié à la cryptogamie et de l'amitié duquel je m’honore. L'étude dela reproduction sexuée nécessite un résumé succinet du mode de reproduction asexuée dans la famille des Saprolé- gniées. Cette partie sera traitée à fond dans ün mémoire ulté- rieur; l'historique des-travaux sur cette famille, qui ne serait pas ici à sa place, y sera développé avec détail; on peut, en attendant, se reporter à celui qui a été donné par M. Prings- heim (1), le sujet traité ici étant assez restreint et nettement limité pour ne pas l’exiger. (1) Entwickelung d. Achlya prolifera (Nova Acta Acad. CL, C. Naturæ curiosnrum, 4851,t. XX, p. 397; — Jahrbuech. fuer wiss. Bot, t, 1, p. 284, traduction Ann. des sc. nat., 4° série, t, XI, p. 349). MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 9 DE LA REPRODUCTION ASEXUÉE. La reproduction asexuée s'effectue, dans la famille des Sapro- légniées, par le moyen de zoospores, produites dans des cellules- mères spéciales qu'on nomme sporanñges. Les sporanges sont formés par le cloisonnement d’une portion terminale, très-rare- ment intercalaire, de l’utricule unique, diversement ramifiée, qui constitue l'espèce. Le plasma qui s'est accumulé en cet en- droit se divise ensuite en petites masses égales, dont chacune devient une zoospore : la division à lieu, soit dans l'intérieur, soit à l'extérieur du sporange. Dans plusieurs espèces du genre Peronospora, qui rentre plei- nement dans les Saprolégniées, les conidies {acrospores) ne sont pas des sporanges et ne produisent pas de zoospores : les unes germent en émettant directement un filament; les autres épan- chent leur plasma au dehors, et c’est ce plasma, primitivement dénué de membrane, quis’entoure d’une couche de cellulose etqui germe à son tour en émettant un filament. Ainsi, dans un mème genre, les zoospores peuvent exister ou ne pas se présenter, et le cas cité en dernier lieu semble être l'intermédiaire entre les deux extrèmes. La dissémination des germes s'opère done tantôt par le moyen de l’eau, tantôt par le moyen de l'air; cela montre le peu d'importance de l’appareil de locomotion de ces germes, considéré à un point de vue un peu élevé; la partie plasmatique seule est essentielle. Les sporanges sont des cellules tantôt cylindriques irrégulières, tantôt ovoides, renflées, de forme constante dans certains genres (Saprolegnia, Achlya), de forme variable dans d’autres(Pythium, Monoblepharis). D’après le mode de sortie des zoospores el leur conformation, on peut établir dans la famille des coupes très-naturelles (1). Les genres sont basés en général sur le mode de reproduction asexuée, (4) Dans ce qui précède ou dans ce qui suit, plusieurs faits sont en contradiction avec les idées admises ou énoncées par certains auteurs; la discussion et la démons- tration nous entraîneraient trop loin, elles seront reportées à un mémoire ultérieur. 40 M. CORNU. et sur l'organe de végétation. Cette classification que je propose me semble tenir compte des affinités réelles des différents genres. ÉTUDE DES GENRES. Premier groupe. a. Saprolégniées non munies d’élranglements. — Le genre Saprolegnia présente des sporanges cylindriques légèrement renflés vers le sommet : les zoospores qui s’y forment sont ovales- acuminées, munies de deux cils antérieurs, d’un rostre trans- parent auquel ils sont fixés, comme chez les zoospores des Conferves (4), et d’une ou de plusieurs vacuoles latérales : leur mouvement dure peu, cinq minutes environ; elles s'arrêtent, deviennent sphériques, perdent leurs cils etgerment en émettant un filament. Dans d’autres cas plus rares et surtout non obser- vés jusqu’à ces dernierstemps, la zoospore, munie d’une mem- brane et formant une cellule sphérique, émet une zoospore de deuxième formation et de forme différente. Cette 20ospore est réniforme aplatie, munie d'une vacuole médiane, excentrique, des bords de laquelle partent deux cils, l’un antérieur, l’autre postérieur plus long: c’est la forme connue des zoospores dans les genres Achlya et Pythium d’après M. de Bary. J'ai observé cette germination dans les Saprolegnia ferax (Gruith.), monoica Pringsh., asterophora De By et spiralis (2) (spec. nova). C’est à tort que M. Leitgeb a cru devoir fonder un genre nouveau (3) (Diplanes) pour ce mode de germination, qu'il avait observé chez le S. monoica. J'avais avant lui observé, mais non publié ce fait, chez le S. feraæ. Une fois le sporange vidé, l'axe s'accroît au travers pour en former un autre, et ainsi de suite. (1) Cladophora, Draparnaldia. Voy. Thuret, Ann. des se. nat., 1850, 3° série, t. XIV, p. 249, pl. 16. (2) Le S, spiralis se distingue du S. monoica par les filaments porteurs des oogones le plus souvent contournés en hélice; le nombre des oospores beaucoup moins nombreuses et souvent solitaires, présentant une couleur brune et non pas blanche. (3) Jahrbuech, fuer wiss, Bot., t. VIX, p, 385, pl. XXIV, fig. 6. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. Al Le genre Achlya Nees (1) présente avec le précédent les plus grandes analogies ; il est impossible de ne pas les confondre en- semble, quand les organes dereproduction manquent. Cette res- semblance est remarquable lorsque dans les autres genres l’ap- pareil végétatif de deux espèces est en général très-différent. Le trait d'union entre les Saprolegnia et les Achlya a cependant échappé jusqu'iei à tous les botanistes. Les zoospores sont de deux sortes, comme chez les Saprolegnia. Les premières, au lieu de se mouvoir pendant plusieurs minutes, ont juste assez d’agilité pour gagner l'ouverture du sporange : elles sont munies de deux cils antérieurs, visibles dans des con- ditions favorables. Elles adhèrent les unes aux autres en général par le moyen de ces cils : à l'ouverture du sporange, elles s’arré- tent, se disposent en une sphère creuse, formée de l’ensemble de toutes ces zoospores soudées, et elles y demeurent trois ou quatre heures en s’entourant d’une membrane. Au bout de ce temps, elles présentent, soit le premier mode de germination, qui con- siste à s’allonger en filaments, soit le deuxième, et émettent alors des zoospores de deuxième nature. Au rebours des Saprolegnia, ce deuxième mode de germination est de beaucoup le plus fré- quent; chez les Saprolegnia, il faut des conditions particulières et un état florissant de la plante pour qu'il ait lieu. Le nouveau sporange se forme par le cloisonnement de l'axe, qui s'accroît latéralement sous l’ancien. | Le genre Aphanomyces (2) n’en diffère que par ses sporanges très-grêles et très-allongés, où les zoospores sont disposées sui- vant une file unique. Dans le genre Dictyuchus (3) Leitgeb, qui présente aussi avec les précédents une grande analogie, les zoospores de pre- mière forme ne sortent mème plus du sporange, mais s’en- tourent sur place d’une membrane et émettent au dehors, en (1) Carus, Nova Acta nat, cur., 4813,t. XI, pl. Il,fp. 493, — De Bary, Ach/ya prolifera (Bot. Zeitung, 1852, p. 472). — M. A. Braun le nomme Saprolegnia capi- tulifera (Verjuengung, 1850, p. 204). (2) De Bary, Jahrbuech. fuer wiss. Bot., 1859, t. II, p. 170, pl. XIX et XX. (3) Jahrbyech. fuer wiss. Bot., t. VII, p. 357, pl. XXII. 42 M. CORNE. perforant la paroi qui les renferme, des zoospores de deuxième forme ; la membrane de la zoospore primitive demeure dans l’in- térieur du sporange, et l’ensemble forme un réseau cellulaire d’où le nom du genre a été tiré : déxruov, réseau ; Éyew, avoir. Comme il sera souvent question de sporanges analogues, je pro- pose de les désigner sous le nom de dictyosporanges ou sporanges réticulés. Une zoospore de première formation ne donne jamais nais- sance qu'à une seule zoospore de deuxième, dans lesquatre genres cités ci-dessus : Saprolegnia, Achlya, Aphanomycesou Dictyuchus. Ainsi, dans le genre Saprolegnia, les sphérules vides abandon- nées par les zoospores de deuxième nature sont libres ; dans les genres Achlya et Aphanomyces, elles sont soudées en un capitule creux, à l’orifice du sporange; dans le genre Dictyuchus, elles remplissent le sporange d’un réseau cellulaire particulier. Mais si pour une cause ou pour une autre, dans les genres Saprolegnia ou Achlya, les zoospores de première nature n’ontpu sortiretsont demeurées, soit en totalité, soit même en partie, dans le sporange, elles peuvent présenter le mode de germination en zoospores : de sorte que le sporange renferme unréseau cellulaire interne, comme dans le genre Dictyuchus ; mais c'est une pro- duction anormale et dont l'explication est simple aujourd’hui. — La présence de deux sortes de sporanges, l’un vide, l’autre rempli de sphérules vidées, et par cela réticulé sur le même filament, n’a donc rien qui doive surprendre : on n’y doit pas attacher une grande importance. M. Pringsheim à voulu entirer des conclusions(i) particulières relatives à la sexualité; mais nous verrons plus loin ce qu'il faut en penser. Ces faux dictyosporanges diffèrent assez souvent de ceux du Dictyuchus en ce qu'ils sont formés de sphérules ne rem- plissant pas complétement le sporange, car une partie des z00- spores de première nature sont souvent sorties, et il offre alors une ouverture à la partie supérieure. C’est justement l’un de ces cas qui à été représenté par M. Pringsheim (2). (4) Jahrbuech. fuerwiss. Bot., t. IH, p. 214. (2) Loe. cit, pl XXIL, fig. 7. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 13 Ainsi ces quatre genres présentent entre eux une étroite ana- logie qui n'avait pas encore été signalée et qui est mise nette- ment en évidence par la présence de zoospores à deux cils anté- rieurs chezles Achlya. M. Leitgeb l'avait cependant entrevue). Dans le genre Pythium, chez le P. monospermum Pringsh., par exemple, le plasma s’épanche au dehors en refoulant devant lui l'extrémité du sporange et la couche située au-dessous, qui se gonflent sous son influence comme une bulle de savon et l'entourent d’une membrane mince que j'appelle la vésicule. Elle est située à quelque distance du plasma ; c’est dans son inté- rieur qu’il se fractionne en petites masses, qui deviennent des zoospores et en crèvent, pour sortir, la paroi peu résistante : cette dernière devient presque aussitôt indistincte, sauf à la base, qui persiste encore quelque temps. Les zoospores sont semblables aux zoospores de deuxième nature des Saprolegnia et Achlya. Dans deux espèces nouvelles, le P. 1mperfectum et utriforme, la sortie du plasma a lieu par l’extrémité d’un long tube, comme dans le P. Cystosiphon, mais la vésicule crève normalement après avoir acquis un développement très-faible (2). On pourrait tirer de là une série de conclusions que je me réserve de développer à un autre endroit. Chez le P. proliferum de Bary, la sortie des zoospores a souvent lieu comme chez le P. monospermum; dans d’autres cas, les zoospores, toutes formées dans le sporange, s'échappent directement au dehors : la durée, depuis la rupture du spo- range jusqu'à la dissémination des zoospores, n’est que de une à deux minutes, tandis que, dans l’autre cas, elle était de (4) Loc. cit., p. 386. (2) Le P, imperfectum présente des sporanges sphériques, munis d’un long tube de sortie du plasma et situés à l'extrémité de filaments grêles comme ceux du P. prok- ferum. Le P, utriforme, très-voisin, possède des sporanges également munis d’un long tube de sortie, mais ils sont toujours irréguliers, utriformes, réniformes allongés, et parfois intercalaires. Ces deux espèces sont assez voisines du P. Cystosiphon (Cystosiphon pythioides), mais sont prolifères comme le P. proliferum de Barv. 4h M. CORNE. vingt à trente minutes; la vésicule se montre encore, mais pen- dant quelques instants seulement. Ce mode de sorte est identique avec celui qu’on observe dans les Cystopus et chez les Peronospora de la section qui présente des zoospores (1); seulement, dans ce cas, la vésicule n’est pas toujours nettement visible. On voit l’analogie que présentent avec les Pythium les espèces dont les conidies émettent au dehors, sans produire de zoospore, le plasma de leur intérieur, lequel s’entoure d’une membrane et germe alors comme une conidie ordinaire (2). Les zoospores, dans tous ces genres, germent en donnant lieu à un filament simple ou rameux dans lequel le plasma aban- donne successivement les parties les plus âgées et s’en sépare par quelques cloisons ; ou bien elles émettent des zoospores sem- blables à elles-mêmes (ex. Pythium proliferum et ses var.). Les deux modes de germination peuvent se présenter dans la même espèce. b. Saprolégniées munies d’étranglements. — Les genres cités jusqu'ici sont constitués par des filaments cylindriques, mais il existe une série de genres parallèles aux premiers, quiprésentent des utricules non cloisonnées, munies çà et là d’étranglements particuliers. Le type de cette structure se rencontre chez le Leptomitus lacieus Ag. Parallèlement au genre Saprolegnia Nees, on peut citer le Leptomitus lacteus Ag. (3), etle L. brachynema Hildebr. (4), pour lesquels je propose d'établir le genre Apodya (5). Le genre Achlyogeton (6) Schenk correspond aux Achlya Nees et Aphanomyces de Bary (7). (4) De Bary, Développement des Champignons parasites (Ann. des sciences nat,, Bor., 4° série, t. XX, p. 19, pl. 8, fig. 3). (2) 1d., p. 38, pl 7, fig. 3, 4, 41 et12. (3) D'après M. Pringsheim, Jahrbuech, fuer wiss, Bot., t. 11, p. 228, qui propose de le désigner sous le nom de Saprolegnia luctea. (4) Jahrbuech. fuer wiss. Bot.,t VI, p. 18, pl. XVI, fig. 13-23. — Ann. des sc. nat., Bor., ot série, t. VIII, p. 327, pl. 19, fig. 13-23. (5) Du grec drodveu, quitter une enveloppe. {6) Bot. Zeitung, 1859, p. 398, pl. XII A. (7) Jahrbuech, fuer wiss. Bot., 4859, €. IF, p. 470. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 19 Aux divers Pythium Pringsh. correspondent les genres Myzo- cytium Schenk (1) et Rhipidium (2) (gen. nov.). Ainsi, 1l y a deux séries dans lesquelles la sortie des zoospores est presque identique ; la forme d’une sorte de zoospores y est iden- tique aussi, et une ressemblance générale réunit tous ces genres. Deuxième groupe. Monoblepharidées. —11 n'en est pas demême du genre Mono- blepharis (3), dont il reste encore à parler et qui ne se relie à aucun des autres : il s’en distingue par la forme de ses zoo- spores et surtout par la constitution de ses filaments, qui ne pré- (1) Ueber das Vork. contr. Zellen im Pflanzenr., p. 10. (2) Le genre Rhipidium (du grec pridiov, éventail) est caractérisé par un support général formé de cellulose épaisse, sorte de filament basilaire irrégulier, duquel par- tent, en rayonnant, des filaments munis çà et là d’étranglements, comme le Lepto- milus lacteus Ag. et le Lept. brachynema Hildebr. en présentent, Les sporanges sont ovales et séparés du reste du filament par un étranglement obli- téré par un dépôt de cellulose formant une épaisse cloison. Le plasma s’en épanche sous forme d’une masse cylindrique, large comme la moitié du sporange et deux fois plus longue. On reconnait bientôt qu’il est entouré d’une mince vésicule à parois transparentes ; les zoospores se séparent sur le champ, crèvent la vésicule et se dispersent dans l’eau (Bulletin de la Société botanique de France, t. XVIII, p. 58, séance du 24 mars 4871). Ce phénomène ne .dure qu'un petit nombre de minutes. Ge mode de sortie rappelle celui que l’on observe chez certaines formes du Pythium proliferum de Bary. La structure des zoospores est la même, sauf des points de détail, que dans le genre Pythium. Le deuxième mode de reproduction a lieu par oogones et par anthéridies. La gono- sphérie est unique, ctoilée ou un peu irrégulière ; après la fécondation, elle s’entoure d’une membrane qui reproduit ce contour. Par ce fait, le genre RAïpidium se distingue- rait de toutes les autres Saprolégniées, si le support général n’était pas un caractère d’une plus haute importance encore. Il y en a quatre espèces, Deux présentent une oospore étoilée. L'une est munie de filamenis à étranglements nombreux (R4. interruptum). Dans l’autre, il n’y à jamais qu’un seul étranglement à la base de chaque filament (Rh, continuum), Dans une troisième espèce, l’oospore est à contour extérieur ondulé; les articles, c’est-à-dire les intervalles entre deux étranglements successifs, ne sont pas cylindriques, mais claviformes et parfois très-allongés (4 millimètre) (KA. elongatum). Une dernière espèce, beaucoup plus rare et moins bien étudiée, présente certains sporanges (?) munis de pointes longues dirigées en baut ou en bas (RA. spinosum). (3) Bulletin de la Société botanique de France, t. XVIII, p. 59, séance du 24 mars 1871.— Le genre Monoblepharis (du grec Bacpapis, cil; ôvos, unique) est caractérisé par des zoospores normalement munies d’un cil unique; il n’y a pas d’autre exemple 16 RE. CORNE. sentent pas avec le chloro-iodure de zinc la réaction cellulosique que l’on peut observer dans tous les autres genres. Tels sont les principaux faits que l’on rencontre dans l'étude de la reproduction asexuée. Ils seront développés plus complé- tementdans un autre mémoire. Je propose donc de partager les Saprolégniées en plusieurs groupes : l’un comprenant les genres à filaments cylindriques, l’autre les genres à filaments munis d'étranglements et qui cor- respondent aux premiers. Dans tous ces genres on observe des zoospores réniformes communes à toute la série; ce sont Îles Saprolégniées vraies. Leur membrane est constituée par de la cellulose. On aurait, d'un autre côté, les Monoblepharidées, composées jusqu'ici du seul genre Monoblepharis : la forme des zoospores et leur constitution, celle des spores sexuées, les éloignent des autres Saprolégniées et les rapprochent des Chytridinées, ainsi que l’absence de cellulose dans la membrane, qui les fait rentrer dans la généralité des autres Champignons. Le deuxième mode de reproduction, ou reproduction sexuée, qui va nous occuper plus spécialement, nécessite un certain nombre d'organes qui sont les suivants : 4° Des cellules sphériques en général, à parois plus épaisses de ce fait dans la famille des Saprolégniées, Le mode de sortie des zoospores est aussi spécial que leur constitution, Le corps de la zoospore sort du sporange, le cil y restant encore engagé; par la traction qu'elle exerce pour l’en retirer, elle en fait sortir une seconde, puis, la seconde aidant aussi, une troisième ; elle est libre alors et s'échappe dansle liquide, On voit ainsi, à l’ou- verture des sporanges, où les zoospores sont disposées en file, trois d’entre ellesimparfai- tement libres et encore retenues par leur cil, dont des longueurs diverses pour chacune sont dégagées déjà; si, dans les sporanges, les zoospores sont disposées d’une autre façon, un plus grand nombre sort à la fois. La reproduction sexuée a lieu par oogones et par aathérozoides ; ces derniers sont identiques aux zoosporcs, de taille moitié moindre, et présentent un contenu moins riche en granules. Il y en a trois espèces : l’une présente des sporanges prolifères, comme le Pythium proliferum de Bary ; la reproduction sexuée n’y est pas connue : c’est le M, proliferum Les deux autres espèces, À. sphœærica et M. polymorpha, seront étudiées en détail un peu plus loin. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. A7 que celles des filaments, constituent l’organe femelle : ce sont les 00gones. 2° Ces oogones contiennent des spores sphériques, immobiles, munies, à la maturité, d’une enveloppe à double contour et qui germent après un long temps de repos : ce sont les oospores. Elles proviennent de la fécondation des gonosphéries par l’élé- ment mâle. 3° Les gonosphéries (Befruchtungskugel) sont des globules sphé- riques, formés aux dépens du contenu plasmique de l’oogone, qui se concentre en une ou plusieurs masses égales. Elles sont dénuées de membrane avant la fécondation; cette dernière a pour effet de les transformer en cellules parfaites. h° Dans les environs des oogones se développent certaines ramifications grêles, qui les entourent et s'appliquent sur eux : elles représentent l'organe mâle : on les appelle branches latérales (Nebenaeste) : leur extrémité renflée et isolée par une cloison constitue ce que Pringsheim appelle l’anthéridie. Dans certains cas, les branches latérales manquent; il faut chercher ailleurs l'organe mâle. Ce cas sera étudié à part. Les sujets traités successivement dans celte première partie le seront dans l’ordre suivant : 41° Description des oogones et des branches latérales adultes ; leur développement. ; 2° Action réciproque de ces organes, c’est-à-dire fécondation. 3° Examen des eas dans lesquels manquent les branches laté- rales. Théorie de M. Pringsheim sur la sexualité des Saprolé- gniées. k° Fécondation par anthérozoïdes véritables. 5° Des oospores ; leur germination. Enfin une étude aussi complète que possible sera faite des Chytridinées, parasites des Saprolégniées, pris jusqu'ici où qu'on pourrait prendre pour des organes sexuels. 12 5e série, Bor. T, XV. (Cahier n° 1.) 18 M. CORNE. EPRODUCTION SEXUÉE. HISTORIQUE. Le premier qui rencontra des spores immobiles ou sexuées est Scbleiden (4); M. Nægeli n’en dit que quelques mots (2): ni lun ni l'autre ne les ont étudiées complétement. Meyen et Kuetzing n’en parlent pas et semblent ne pas les avoir vues. M. Al. Braun (3) décrit très-exactement les spores immo- biles et leur formation. I ne dit pas sur quelle espèce de Saprolegnia ont porté ses observations ; il ne parle pas des ou- vertures que présentent normalement les cellules qui renferment ces spores. Dans un auire endroit (4) il cite certains rameaux grèles qui entourent ces cellules, et qui lui semblent analogues aux cornicules des F’aucheria; mais leur présence n’est pas constante, ajoute-t-1l, et 1l n’a constaté d’ailleurs aucun abou- chement réel (wirkliche Einmuendung). M. Thuret (5) décrit et représente les sporanges sphériques du Saprolegnia ferax remplis de spores immobiles; il signale les perforations naturelles des parois ; il n’obtint pas le développe- ment de ces spores. M. Pringsheïm (6), dans son étude du S. ferax, qu'il appelle improprement Achlya prolifera, confusion générale à cette époque, consacre plusieurs pages aux spores immobiles et aux sporanges sphériques qui les renferment, à leur formation et à la germination des spores. La description est plus complète que dans le mémoire précédent : il a observé les perforations du sporange sphérique, et prouve que ce n’est pas une simple (4) Grundz, erst. Aufl., 1845, II, p. 36. (2) Zeitschrift, 4846, p. 29. (3) Verjuengung, 1849-1850, p. 288, (4) Loc. cit., p. 318, (5) Ann. des sc. nat, Bor., 1850, 3° série, t. XIV, p. 234, pl. 29, fig. 41. (6) Die Entwickelungsgeschichte der Achlya prolifera (Nova Aeta Acad, C. L. €, nat. curtos,, 1891, pars I, €. XXII, p. 418). MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 49 apparence, mais que ce sont des ouvertures véritables. Cepen- dant il affirme avoir trouvé de l’amidon dans l’intérieur des spores, fait que je révoque en doute. Il ne parle aucunement de ces branches latérales vues par M. AL Braun, et ne cite même pas son mémoire, dontil n'avait pas connaissance, proba- blement, à cause de la date récente de la publication (1850). M. de Bary (1) a de mème observé les spores immobiles du S. ferax et celles de l4. prolifera. Il considère les deux fruc- tifications comme très-analogues. Il n’a, ni dans l’un, ni dans l’autre cas, rencontré de ces rameaux dont parle M. AI, Braun ; il ne les signale pas du moins. Plus tard, dans son premier mémoire sur la sexualité des Algues, M. Pringsheim (2) émet l'opinion que les spores immo- biles sont dues à une fécondation, et que les perforations du sporange sont destinées à laisser passer les anthérozoïdes. M. Al. Braun (3), dans une élude sur le genre Chytridium, revient sur les idées émises précédemment à propos des rameaux analogues aux cornicules des Vaucheria. il représente le Sapro- legnia sur lequel ont porté ses observations, et qui ressemble beaucoup à celui que je propose de nommer $. spiralis ; il croit à l'existence d’anthérozoïdes contenus dans ces sortes de cornicules. M. Pringsheim (4), dans un mémoire classique aujourd’hui, décrit les branches latérales d’une espèce nouvelle qu’il nomme $. monoica ; il remarque que les extrémités des branches laté- rales (Vebenaeste) sont renflées, cloisonnées, qu’elles sont appli- quées sur la cellule dilatée qui contient les spores, et il affirme que ces dernières proviennent de la fécondation de certains globules sans membrane par les anthérozoïdes sortis de le celluie renflée terminant la brauche latérale. (1) Bot. Zeitung, 1852, p. 473, I distingue l'A. prolifera (Sapr. capitulifera A.Br.) du S. ferax (Gruith.). (2) Monatsberichte der k. Acad, d. Wiss, zu Berlin, mars 1855, p. 156-157 Une analyse en à été donnée Ann. des se. nat., Bor., 4° série, t, IIT, p. 373, (3) Abhandl, d. physik. Klasse d, k. Acad, d. Wiss, zu Berlin, juin 1855, p. 63, pl. V. — Un tirage à part en a été publié sous le titre : Ueber Chytridium, eine Gat- tung einselliger Schmarotzergewaechse auf Algen und Infusorien. Berlin, 1856 (4) Jahrbuech. fuer wiss. Bot., 1899, &. 1, p. 202; (rad. dans les Azn. des sc, nat, &® série, t, XI,p. 358, pl. 6. 20 NM. CORNE. Mais, pour employer la terminologie usitée aujourd’hui et les expressions de M. Pringsheim, appelons gonosphéries les globules non fécondés encore, oospores les spores produites par la fécon- dation, et oogones les organes qui les renferment. Quant aux branches latérales, elles sont terminées par une cellule que nous désignons avec l’auteur sous le nom d’anthéridie ; la valeur de ce nom sera examinée plus tard, lorsque les faits énoncés dans le iémoire cité ci-dessus seront repris et discutés en détail. Depuis, M. de Bary (4) publia un mémoire où celte question de la fécondation est à peine effleurée à propos de lAphano- myces lœævis de Bary. M. Pringsheim (2), dansle même volume, fit paraître un deuxième mémoire sur les Saprolégniées, où ilexpose une théorie complète de la sexualité, On y reviendra plus loin. Les corps reprodueleurs auires que les zocspores sont les spores immobiles. On peut cependant citer encore quelques formations observées par différents observateurs, outre les spores 1inmobiles ou oospores. Ce que M. Nægeli (3) a décrit comme une troisièmesorte de cellules reproductrices, doit vraisemblablement être rapporté à des zoospores parvenues à l’état de repos. L'auteur lui-même se demande s'il n'en serait pas ainsi. Ce sont aussi probablement des zoospores au repos que signale M. Al Braun (4) dans les sporanges aliongés du Leptomitus lacteus Âg., et qu'il considère comme des spores immobiles. Ce qui rend probable cette opinion, c’est qu'il n'en a pas vu les zoospores, déerites plus tard par M. Pringsheïm (5), et qui se développent dans des sporanges cylindriques. Les oogones sont au contraire toujours (sauf les cas anormaux) renflés et dilatés. Quant aux spores éloilées rencontrées par M. Pringsheim (6), dans l'intérieur des filaments de quelques espèces, ce sont les (4) Etnige neue Saprolegnieen (Jahrbuech. f. wiss. Bot., LU, p. 479). (2) Nachtræge zu Morph. der Saprolegnieen (Jahrbuech. f. wiss. Bot.,t. 11, p.205). (3) Zeitschrift, f. wiss. Bot., 3es und, 4tes Heft. Zurich, 1846, p. 29. (4) Verjuengung, p. 289. (5) Jahrbuech. f. wiss. Bot., &, IL, p. 228. (6) Jahrhuech, fe uuoss. Bot, te ll;2p 295, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 21 spores immobiles d’un parasite qui sera décrit dans ce mémoire sous le nom de Chytridium Saprolegniæ ou d’un autre voisin. DES OOGONES, Les oogones sont des cellules sphériques, le plus souvent, formées par le cloisonnement d’une portion renflée et dilatée, en général terminale, d'un filament. La cloison, dans la plu- part des cas, détache aussi une portion non renflée du fila- ment, de sorte que la cellule entière se compose d’une partie sphérique et d’une portion cylindrique. La forme sphérique et régulière est la plus générale; cependant on trouve des exceptions. Les Saprolegnia présentent parfois des oogones ovoides où oblongs (il en est de même chez certains Achlya : ex. À. polyandra Hildebr.); l’altération de leur forme va même plus loin : on en voit de très-allongés et même de tout à fait cylindriques. Cette forme est le plus souvent due aux conditions de développement de l’oogone. Chez les Myzocytium, loogone a une forme assez spéciale : il est ovoide (M. globosum Schenk) (4), sphérique, et muni d’une portion un peu irrégulière (M. (Pythium) entophytum Pringsh.); ou bien linéaire renflé et irrégulier (W. lineare sp. nova) (2). Chez les Pythium, le renflement qui produit l’oogone ne se forme pas toujours à l'extrémité même du filament, mais par- fois un peu au-dessous ; l’oogone est donc surmonté d’une petite portion cylindrique. El en est de méme dans les Péronosporées. Les parois de l’'oogone sont plus épaisses que celles du reste du filament ; 1! y a cependant des degrés dans l'épaisseur : ainsi tandis qu'elle est à peine double de celle du filament dans la plu- part des espèces, chez d’autres (ex. Achlya racemosa Hildebr.) (4) Max. Cornu, Nofe sur l'oospore du Myzocvlium (Bulletin de la Société botanique de France, 1869, t; XVI, p. 222). (2) Le M, lineare se distingue du M. globosum par ses sporanges linéaires, simples ou rameux (et non ovoides), disposés en file. Le M. entophytum (Pringsh.) présente des sporanges cylindriques rameux ; le tube de sortie du plasma et l'habitat dans l'inté- rieur des spores des Zyÿgnémacées le distinguent suffisamment des deux autres. 29 BE. CORNE. elle s'exagère beaucoup : dans ce dernier cas, les parois sont fréquemment colorées par une teinte jaunâtre, qui s’accentue d'autant plus que les oogones vieillissent davantage. Les parois peuvent être lisses ou munies d’échinules. Ces der- nières varient de forme, de longueur et de nombre. Elles sont nombreuses, larges, obtuses, à parois minces dans l'Achlya re- curva, Sp. nova (4); ce sont des sortes de prolongements émis par la membrane de l’oogone. Chez l’Achlya racemosa (2), au contraire, elles sont plus rares, courtes, coniques et formées par un épaississement de la membrane, comme st elles avaient été comblées intérieurement par un dépôt de cellulose. Dans la variété spinosa, ce sont de véritables épines dont la longueur acquiert jusqu’à la moitié du diamètre de l'oogone. Cette espèce, dont les oogones sont échinés ou lisses, présente des ondulations dans le contour interne de sa paroi, des plissements et des épaississements irréguliers. I y a donc une sorte d'indication de la variation de forme : cette apparence diverse de l’oogone n'a pas laissé que de m'embarrasser quelque peu. Enfin, une espèce rencontrée deux fois, mais dont je n’ai trouvé que trois oogones, et qui appartient à un Saprolegnia ou un Achlya, présentait un oogone ovoïde, muni à sa partie supé- rieure d’une pointe conique. Je n’ai pu déterminer le genre de cette plante, spécifiquement différente de toutes celles que je connais; je me suis donc abstenu de la nommer. Malgré toutes les variations signalées, on voit que les oogones ont une forme en général constante, sphérique, ou au moins (1) Cet Achlya se distingue des autres par ses oogones échinés, non perforés, portés par un rameau recourbé en arc, vers l'extrémité duquel il nait solitaire et en général latéralement; les branches latérales naissent, soit du rameau, soit de l'axe. Le nombre des oospores est en général de six à huit. Parfois l’oogone porte une portion cylin- drique, comme les Pythium, à sa partie supérieure. (2) L'Achlya racemosa Hildebr, est une espèce très-polymorphe; la forme appauvrie et non richement fructifère constitue l'A. lignicola du même auteur. J'ai rencontré deux autres variétés : l’une munie d’oogones à échinules plus ou moins rares, c’est la variété stelligera ; l'autre munie de véritables épines, c’est la variété spinosa. On arri- vera peut-être à les ériger en espèces; pour moi, ce ne sont que des variétés du type primitif, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 23 renflée. Il n’est pas question ici du genre Monoblepharis, qui sera examiné ultérieurement. Chez certaines espèces des genres Saprolegnia et Achlya, les oogones sont normalement munis de perforations régulièrement réparties, et destinées à faciliter la fécondation (S. monoica). Ce fait a été reconnu successivement par MM. Thuret, Prings- heim, de Bary, et est aujourd'hui hors de doute. Pour bien se rendre compte qu’on a sous les yeux des perforations véritables et non de simples amincissements de la membrane, on peut écraser un oogone avec le verre mince qui recouvre la prépa- ration; on en déchire ainsi les parois, et l’on constate, lorsque la déchirure passe par une des parties claires de la membrane, qu'il y a positivement une échancrure, et qu'aucun débris cellu- losique ne se trouve sur les bords. En faisant agir le chloro- iodure de zinc, la membrane de l’oogone, comme celle de toute la plante (sauf lemycélium), se colore en bleu violacé, et les perforations ne présentent pas la plus légère teinte. Ces divers moyens, proposés dans les premiers mémoires sur ce sujet, sont à l’abri de toute objection. Les perforations, vues de face, se montrent comme des ouver- tures circulaires, à bords nettement taillés dans les parois de l’oo- gone ; elles sont en nombre variable, mais en général régulière- ment disposées, Sur le contour, elles se projettent suivant un espace plus clair ; la double ligne est interrompue sur une lon- gueur égale à leur diamètre. Par l’action du chloro-iodure de zinc, la coloration est plus intense sur le bord de la perforation. Faut-il en conclure, avec M. Pringshein, que la paroi est plus épaisse au bord de l’orifice ? Je ne le crois pas, car l'épaississe- ment n’est pas visible sur le contour (4). Vues obliquement sur la paroi, elles apparaissent comme une ellipse très-déprimée, dont le grand axe est parallèle à l’élément de contour le plus voisin, et (1) Avant la fécondation, l’oogone se colore absolument comme le reste de la plante; après la fécondation, la coloration est plus difficile à obtenir ; elle est rougeâtre quand lesfautres parties sont franchement bleues: la membrane s’est donc modifiée. Ea colo- ration plus intense des bords de l’ouverture prouve seulement qu’en ce point la modi- fication de la paroi à été moins complète, 2 M. CORNE. dont l’une des moitiés, celle qui est tournée vers l’extérieur, est beaucoup plus nette et brillante que l'autre : cela tient à la ré- fraction de la lumière par le bord nettement découpé, et vu de face de la paroi cellulaire. L’apparence change suivant qu’on se rapproche plus ou moins du contour ou du centre de l'oogone, et suivant encore qu'on fait varier le point dans un sens ou dans l'autre. M. Pringsheim avait cru devoir attacher beaucoup d’impor- tance à ces perforations; elles manquent très-fréquemment. Dans toute la famille, il n’y a que les espèces suivantes qui les présentent : Saprolegnia ferax (Gruith.). — monoica Pringsh. — spiralis sp. nova (1). Achlya prolifera Nees. — leucosperma (2) sp. nova. Pythium monospermum Pringsh. (d’après M. Pringsherm). Les oogones peuvent être situés de différentes façons : tantôt ils terminent le filament qui leur a donné naissance; tantôt des rameaux plus ou moins allongés partent du tronc; quelquefois ils naissent sur le tronc lui-même. D’autres fois, mais beaucoup plus rarement, et surtout chez les Saprolegnia, ils sont formés par une portion même du tronc, qui se renfle plus ou moins et s’isole par deux cloisons. C'est dans des cas pareils qu'on a sou- vent ces oogones de forme particulière dont il a été question plus haut, et qui sont ovales, oblongs, cylindriques, où munis de deux portions cylindriques dans le prolongement l'une de l'autre, l’une supérieure, l’autre inférieure. Les vogones intercalaires sont très-rares chez les Achlya ; ils sont communs chez les Pythium etles Péronosporées; ils existent normalement chez les Hyzocytium. (1) Voyez plus haut, page 10. (2) Gette espèce se distingue des autres Achlya par les perlorations de l’oogone (iln’y en à que deux dans ce cas), par ses spores blanches et non brunes, et par ses anthéridies cylindriques situées en file à l'extrémité des branches latérales ; elles pro- viennent de cloisons successivement disposées sur un même filament, qui entoure sou- vent l’oogone sphérique suivant un grand cercle. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 25 La forme, la longueur, comme la position du filament porteur de l’oogone, varient, mais peuvent cependant donner de bons caractères spécifiques. C'est à son extrémité qu'est en général fixé l’oogone ; 1l y a pourtant quelques exceptions : ainsi chez l'Achlya recurva, et, dans certains cas, chez le $. spiralis, le filament porteur se termine brusquement, et les sogones sont insérés sur une portion latérale plus ou moins éloignée de l’ex- trémité. Ce fait est rare, du reste, dans Ja famille. Les filaments porteurs sont courts ou longs : dans le premier cas, ils sont fréquemment plus étroits à leur naissance que dans une portion plus éloignée (A. racemosa Hild.); dans le second, ils ont des formes très-variables : : tantôt droits, tantôt irrégulie- rement flexueux (S. monoica, Pringsh.). tantôt courbés en arc de cercle (4. recurva). Deux espèces, le $. spiralis et l'A. con- lorta (sp. nova), sont caractérisées par les formes particulières de ces filaments porteurs: dans la première, ils s'enroulent sou- vent en hélice, suivant un ou deux tours de spire plus où moins régulière ; chez la seconde, ils sont plus ou moins contournés en spirale et tordus dans divers sens; ils peuvent se reufler par endroits d'une facon très-remarquable et qu'on ne retrouve nulle part ailleurs. Dans chacune de ces espèces, les formes, sans être constantes, tendent vers ces deux types, et plus rarement les filaments sont rectilignes (E). Enfin, chez d’autres, les variations sont trop irrég alicres pour pouvoir être facilement caractérisées (S. monoica Pringsh., A. polyandra Hild.), et n’ont pas ainsi de valeur spécifique. Le nombre des oogones portés par un filament varie beaucoup dans chaque espèce; ilest en général d’une dizaine en moyenne, mais ce nombre n'a rien d’absolu. Chez l'A4chlya racemosa Hild. se rencontrent les écarts les plus considérables. On voit des in- dividus porteurs d’un seul oogone; M. Hildebrand en a compté jusqu’à 18. Souvent on en trouve un plus grand nombre : j'en ai observé sur un seul filament jusqu’à une centaine, et même (1) Outre ce caractère, l'A, contorla présente des oogones lisses contenant un nombre assez restreint d’oospores, huit en moyenne, avec des variations en plus ou en moins. 26 RE. CORNE. davantage. Dans ce cas, l’espèce mérite réellement le nom im- posé par l’auteur, et elle a l'aspect d’une véritable grappe de raisin à grains pressés les uns contre les autres. Lenombre desoospores contenues dans un même oogone dépend en général du diamètre de l’oogone dans les espèces polyspores ; chez le $. monoica et l'A. leucosperma, j'en ai compté de quatre à trente-deux. Ces limites peuvent très-certainement être dé- passées dans un sens ou dans l’autre. Les Aphanomyces sont monospores, mais quelquefois, très- rarement, dans PA. stellatus de Bary, on rencontre 1e spores dans l'oogone, d’après M. de Bary (t). Dans la plupart des genres de la famille, Pythium, Rhipi- dium, eic., l'oospore est unique. I n’y a que les Saprolegnia, Achlya (et Aphanomyces) qui fassent exception, et ce dernier genre doit être signalé sous toute réserve. Les oosporessont sphériques ou un peuirrégulièrement étoilées ; elles sont blanches, brunes, rosées; à parois minces ou très- épaisses. La couleur est due, soit au contenu (Saprolegnia), soit à la paroi tout entière (Pythium), soit à une pellicule mince qui la recouvre extérieurement (Péronosporées). Le deuxième mode de reproduction se rencontre par- fois sur les individus qui présentent déjà le premier; et ce cas est beaucoup plus fréquent que M. Pringsheim ne semblait le croire, d’après le S. feraæ (2). Dans le cas où il se montre sur des individus isolés ou mal caractérisés, 11 y a quelque difficulté, s’il y a mélange de genres, à rapporter les organes de la fructification sexuée au genre auquel ils appartiennent. Parmi les espèces rentrant dans cette catégorie embarrassante, on peut citer l'A. racemosa Hild.; ja Ron du genre à arrêté M. Hildebrand, aussi Hi que moi-même après lui : la difficulté est considérable quand on n’a que des individus rares et isolés en état de fructification, au mulieu d’un mélange de filaments. Cependant plusieurs remarques peuvent mettre sur la voie (4) Jahrbuech. f. wiss, Bot., t.1X, p. 478. (2) Entwick. d. À, prolifera (Nova Acta nat. cur.,p. 419). MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES, 27 et donner, dans certains cas, des indications utiles. Si l'on trouve un oogone terminant un filament qui s’est développé à travers un sporange vidé, on peut supposer qu'on à sous les yeux une espece du genre Saprolegnia. Néanmoins les difficultés subsistent, et il me semble bien difficile de séparer dans tous les cas (sauf peut-être en cultivant la plante en litige) le Saprolegnia astero- phora de Bary de la forme échinée de l'Achlya racemosa Hild. Le deuxième mode de fructfication se montre plus ou moins longtemps après l'apparition du prennier. Dans une cul- ture de l’Achlya leucosperma, je l'ai vu apparaître quatre jours après l’inoculation des zoospores, c’est-à-dire environ deux jours après la sortie des premières zoospores. M. Pringsheim dit que dans ses cultures le S, feraæ (4) montrait des oogones déjà cinq jours après le semis; pour moi, c’est seulement après huit jours que je les ai observés. Tout cela est assez variable d’ailleurs : dans une série de cultures entreprises pour la recherche de quel- ques faits et la vérification de quelques idées théoriques, j'ai placé dans des conditions identiques tous les individus que je faisais développer. Les oogones se montrèrent, malgré les con- ditions identiques, après des intervalles différents, du sixième au dix-huitième jour. L'espèce mise en expérience était l'Achlya contorta. En moyenne, ils apparaissent une dizaine de jours apres le premier développement des zoospores. Quand la plante est très- florissante, ils se montrent avant. Si elle végète mal, ce qui ar- rive quand les infusoires ou d’autres végétations l’envahissent, la fructification est retardée ou même fait complétement défaut. Quand plusieurs espèces cohabitent sur le même substratum, l'une d’elles peut présenter des oogones sans que l’autre en déve- loppe jamais. Dans les cultures citées plus haut et qui furent nombreuses d’À. contorta, se trouvait un Saprolegnia qui ne put être mené à bien comme l'Achlya. Cela démontre, en passant, que la fructification sexuée ne se manifeste pas, comme le dit M. Pringsheim, à la suite du changement de nourriture (2) de (1) Entwick, d, À, prolifera (Nova Acta nat. cur., p. 499). (2) Entwick., p. 430. 28 M. CORNE. la plante, car les modifications du substratum qui faisaient frucüfier lune auraient dû exercer la même action sur l’autre, DES BRANCHES LATÉRALES, Dans les espèces que nous étudions d’abord; l'organe mâle est constitué par les branches latérales : ce sont des rameaux nais- sant dans le voisinage des oogones, que M. AL Braun rencontra et décrivit le premier. L'espèce sur laquelle il les observa n’est peut-être autre chose que le $. spiralis, dont on a dit quelques mots plus haut. Les branches latérales se composent de deux parties : l’une, importante et terminale, de formation constante, c’est l’anthé- ridie ; l’autre, bien plus variable, en général, et bien moins im- portante, c’est le filament porteur de cette anthéridie. L'une et l’autre peuvent fournir des caractères spécifiques. F'ilament porteur. —— Le filament porteur est court ou long, droit où flexueux, simple ou rameux. Chez VA. racemosa Hild., il a une forme arquée et reste simple en général ; chez l'A. po- lyandra Hnd., il s'allonge et se ramifie dans tous les sens, s’en- roule à aroite et à gauche autour des filaments et des oogones placés dans le voisinage, au s'applique directement sur l'oogone en parcourant un trajet plus où moins flexueux. Eest cylindrique dans toutes les espèces. Dans le genre Rhi- pidium, où les filaments sont munis çà et là d’étranglements, 1l perd le caractère du genre, n’est plus composé d'articles suc cessifs, et prend entièrement l'apparence d’un tilament cylin- drique. Dans ce genre il est fort allongé et volubile. Il procède, en général, des parties voisines de loogone, soit du filament porteur de l'oogone, soit du tronc principal, soit encore de troncs non porteurs d’oogones. Ces divers cas peuvent se présenter dans la même espèce. On le voit même, maus c'est rare et accidentel, naître de la surface de l’oogone lui-même. Ex.: À. racemosa Hild. (pl. 4, fig. 2). Dans le genre Düictyuchus Leitgeb, qui se compose d’une MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 29 seule espèce, il y a séparation complète des individus porteurs d’oogones et de ceux qui donnent naissance aux anthéridies : ces derniers émettent un grand nombre de rameaux qui enlacent les autres, surtout dans le voisinage des oogones, comme des plantes grimpantes. Chez le Rhipidium elongatum, 11 semble aussi qu'il y ait diœcie; maisil n’en est rien (1). Il y a enfin des cas où le filament porteur de l’anthéridie est entièrement nul : c’est ce qu'on observe chez les Myzocylium. Le Myzocytium globosum Schenk (2) est uniquement composé d'organes de reproduction; il est formé de cellules renflées, ovoïdes elliptiques, soudées les unes aux autres par l’extrémité de leur grand axe. Les unes sont des sporanges déversant au dehors leur contenu, qui se transforme en zoospores à la ma- nière des Pythium. Les oogones sont des cellules un peu plus exactement sphériques ; quant aux anthéridies, elles ont à peu près la forme des sporanges et sont intercalées entre les oogones dans le filamént niouiliforme du Myzocytium. Le filament por- teur est nul. J'ai décrit cette disposition dans un autre recueil (3). Le Myzocytium entophytum (Pringsh.), et le M. lineare ne possèdent pas davantage de filaments porteurs des anthé- ridies. Anthéridies. — La partie terminale, ou anthéridie, est for- mée par le cloisonnement de l’extrémité renflée des branches latérales où afflue le plasma. Ce nom d’anthéridie est critiquable, parce qu'il est employé d'ordinaire pour désigner un organe contenant des anthérozoïdes, el c’est dans ce sens qu'il était admis. Nous verrons que leur existence y est au moins con- testable. (1) Le Rhipidium elongatum offre une particularité singulière : la portion du fila- ment porteur présente presque invariablement, au-dessous de l’anthéridie, un tour de spire, sorte de boucle incomplétement formée. Ge fait ne se présente que dans cette espèce, et il est très-coustant. (2) M. Schenk à décrit {Verhandl der med. Ges. in Wurzbury, t, IX, 1859, p.12) sous le nom de Pythium proliferum et globosum, une seule et même espèce pour laquelle plus tard il proposa le genre Myzocytium (Ueber das Vork. d. c. Zellen, p. 10). M. Walz (Bot. Zeilung, 1870, p. 553) propose de l'appeler P. globosum, pour éviter la confusion avec l'espèce de M. de Bary, qui porte le même nom. (3) Bulletin de la Société botanique de France, 1869, t. XVI, p. 222. 30 Bi. CORNE. Je n'ai pas voulu me permettre de changer le nom admis, quoiqu'il consacre une idée fausse. Je préférerais, si l'on devait le modifier, celui d'androcyste, qui ne préjuge rien. Cependant je le conservera dans ce mémoire, parce que c’est le nom adopté par tous pour désigner ces cellules. On conserve de même dans les Floridées le nom d’anthérozoïdes aux corpuscules mâles, chez lesquels M. Nægeli avait cru reconnaître des cils, et qui sout parfaitement inertes, quoique, d’après l’étymologie, ce nom doive être rejeté. Les anthéridies sont des cellules à parois plus épaisses que celles du filament qu’elles terminent : elles sont remplies d’un contenu réfringent, tenant en suspension quelques granules oléa- gineux. Je n’y ai jamais observé d’anthérozoïdes. Le mouvement qu’on y remarque quand elles sont à demi vidées doit être attri- bué à une trépidation moléculaire et nullement à un mouvement ciliaire. Il s’observe souvent en même temps dans les portions du filament extérieures à cette anthéridie. Elles sont oblongues, ovoïdes, claviformes, à contour régulier ou dyssymétrique. Dans certaines espèces, elles sont cylindriques (Achlya leucosperma, 4. contorta), formées par le cloisonnement, répété plusieurs fois, d’une longueur plus ou moins grande du filament. Dans ce cas elles sont situées en file. Dans quelques cas, la partie isolée par une cloison est rameuse, l’anthéridie est pour ainsi dire lobée ou digitée (Achlya polyan- dra, A. recurva). Elle peut aussi présenter des ramifications situées à angle droit; ceci est fréquent dans les anthéridies cylindriques. L’anthéridie située à l'extrémité de la branche latérale qui s’est courbée à cet effet, s'applique sur l'oogone : près de la base de l’oogone (pl. 4, fig. 2 et 4), quand le filament porteur est court (4. racemosa Hild.) ; n'importe où, quand ce dernier a des dimensions variables. Cependant, daus le genre Rhipidium, le point où se fixe l’anthéridie semble assez constant : c’est vers ja base chez les À. continuum et interruptum ; vers le sommet, chez le À. elongatum, Tantôt elle s'applique perpendiculairement, c’est-à-dire par MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 91 sa partie terminale (4. racemosa, Rhipidium interruptum) ; tan- tôt, au contraire, suivant une portion latérale qui va de la base au sommet (Saprolegnia monoica, Achlya contorta, pl. 1, fig. 12). Quand elles sont cylindriques, elles se fixent sur la surface de l’oogone et l'entourent suivant un grand cerele, qui est parfois celui du contour apparent. L'observation des phénomènes ulté- rieurs est alors grandement facilitée. La portion extrême de la branche latérale peut s'appliquer sur l’oogone suivant un trajet plus ou moins long, et émettre des anthéridies à droite et à gauche, en se cloisonnant diversement. La description des divers cas particuliers qu’on obtiendrait ainsi serait trop longue et sans intérêt. Dans le Rhipidium elongatum, l'anthéridie a une forme spé- ciale; elle est oblongue, courbe, et porte à son extrémité un bec recourbé : c'est par ce bec seulement qu'elle touche à l’oogone. — On a vu plus haut la disposition spéciale du filament porteur (page 29). Le nombre des anthéridies appliquées sur un oogone varie suivant les espèces, et, dans la même, il dépend des dimensions de l’oogone et dela ramification des branches latérales. Dans cer- taines espèces, il est assez limité : l'A. racemosa en offre de un à trois en général. Chez l'A. polyandra Hild. (pl. 4, fig. 1), elles sont irès-multipliées; on voit parfois l’oogone en être entière- ment couverl. Ajoutons, en outre, que les branches latérales s'appliquent non-seulement sur les oogones, mais sur le support et sur desfilaments ordinaires. Cependant toutes les ramifications des branches latérales ne sont pas forcément terminées par des anthéridies, surtout lorsqu'elles sont situées lom des oogones. Les anthéridies fixées sur l’oogone émettent à travers des per- forations, pratiquées à l'avance naturellement ou qu’elles dé- terminent elles-mêmes, des prolongements diversement flexueux et ramifiés, qui s’enfoncent dans l’intérieur des gonosphéries, et elles se vident entièrement, mais avec lenteur (pl. 4, fig. 12-15). C’est ainsi que s'accomphi l'acte fécondateur, à la suite duquel les gonosphéries se changent en oospores. 32 MA. CORNE. FORMATION DES OOGONES. Les oogones sont formés par le renflement de certains rameaux terminaux ou latéraux, dans lesquels une grande quantité de plasma s’est successivement accumulée. Quand la concentration est suflisante, une eloison se forme, qui isole la portion terminale, et la cellule ainsi séparée subit un développement ultérieur dont le résultat est la formation d'une ou plusieurs gonosphéries. Dans tous les genres à oogones monospores, le développement se ressemble beaucoup, et sauf certaines exceptions, paraît iden- tique dans tous et est assez simple. Il n’en est pas de même dans les genres Saprolegnia et Achlya, la formation des gonosphéries s'accompagne alors de phénomènes plus compliqués, et sur l'in- terprétation desquels les savants sont loin d’être d'accord. C'est par cette étude qu’il est bon de commencer; les cas plus simples s'en déduiront aisément. Espèces poiyspores. Jusqu'ici on s’est contenté d'observer des exemplaires isolés, etde les rattacher les uns aux autres d'après des présomptions raisonnables ; on obtient ainsi la série probable du développe- ment. Cependant, dans plusieurs cas, il est nécessaire, pour décider certaines questions, de suivre le même organe pen- dant un ou deux jours. Quoique la culture des Saprolégniées sur le porte-objet présente des difficultés considérables, j'ai cependant réussi quelquefois. Je dois surtout citer des espèces développées sur du biscuit de munition; elles étaient dans un bel état d’abondance et de pureté. J'en arrachai quelques touifes avec précaution, Îes racines ne se rompirent point et entrainèrent une certaine portion du substratum, qui leur per- mit de vivre pendant quelques jours. Sur la lame qui les reçut, je les baignai d’eau en évitant la dessiccation; elles ne furent recouvertes du verre mince que pendant le temps strictement nécessaire à l'observation, et, quand elle fut finie, on les plaça dans un vase largement ouvert, rempli d’une eäu très-pure MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 39 et très-aérée, Cette méthode peut encore s’employer, mais moins commodément, quand le subsiratum est animal. Lorsqu'on a obtenu une culture marchant d’une façon régulière, ce qui arrive si la plante est en bonne santé, tous les oogones se trouvent en- semble au même éiat, et la série naturelle s’observe très-bien. Il est possible de suppléer ainsi à la culture sur la lame de verre par des observations isolées, mais dans ce cas seulement. Sur les espèces les plus robustes, en général sur les Achlya, on peut, quand on observe la marche du développement, voir à quel instant la plante est sur le point de donner des oogones. Les filaments prennent une teinte opaque et sombre à l'extrémité qui va se transformer ; on les voit souvent s’allonger et devenir ondulés, en un mot perdre leur aspect ordinaire ; les oogones se montrent un ou deux Jours après. Quand les supports des oogones sont contournés, spiraux ou de forme variable (S. spi- ralis, À. contoria et polyandra Hild.), ils s’allongent en prenant la forme qu'ils garderont plus tard; mais leur extrémité n'est pas encore renflée: elle commence par devenir plus obtuse, le plasma s’y accumule en grande quantité, et des courants de granules s’observent tout le long du filament; enfin elle se renfle en deve- nant d'abord oblongue, puis sphérique (À. polyandra, Hild., et contorta), ou bien le renflement prend d’abord la forme sphé- rique et s’accroit ensuite en volume (Saprolegnia en général). Dans tout cela il n’y a cependant rien d'absolument fixe. Dans le cas où les oogones naissent de ramific :tions courtes, portées par le tronc principal (A. leucosperma), il y a peu de différence avec ce qui vient d’être dit. Le plasma aïilue sans cesse dans la partie renflée, et s'amasse sur les parois en couche épaisse, de sorte que le centre en est moins abondamment pourvu que la périphérie. Cette disposition est facile à constater, car le centre reste plus clair et présente un espace analogue à celui que Unger (4) a désigné sous le nom d’areola daus la formation des sporanges du $. ferax ; il est ici plus large, mais moins distinct, car il s'aperçoit à travers une (1) Linnæa, 1843, p, 136 ; trad. in Ann, des se, nat, Bor., 3° série, 4844, t, 11, p. 10. 5e série, Bor. T. XV. (Cahier n° 4.) 5 . à 3! RE. CORNE. couche beaucoup plus épaisse de plasma. Le futur oogone possède maintenant une teinte brune, assez foncée ; le contenu est composé de granules très-fins, tous égaux, identiques avec ceux qui sont englobés dans les courants muqueux du reste du filament, et ils n'ont pas d'autre provenance : c’est la seule accumulation de ces granules qui colore le renflement. À cet instant se forme la cloison. Le plasma se sépare en deux portions qui ne sont distinctes qu'un court instant et se rejoi- gnent presque aussitôt : c'est le phénomène qui s’observe lors de la formation de la cloison dans les sporanges, et qu’on a décrit chez les F’aucheria. Pendant ce court espace de temps se forme la membrane : la nouvelle cloison est située au -des- sous du contour circulaire de la portion terminale, de sorte que la cellule se trouve formée d’une petite partie cylindrique, qui fait suite à la portion sphérique. L’oogone est alors définitive- ment constitué. Si l'on à affaire à une plante en bonne voie de culture et en pleine vigueur, on voit la cloison se former un jour après l’ap- parition du renflement des oogones. Pendant tout ce temps, le plasma ne reste pas identique avec lui-même et sans changements : après la formation de la cloi- son (pariois aussi avant, Ce qui montre l'indépendance des deux phénomènes), on voit apparaitre des vacuoles (pl. 4, fig. 4) en assez grand nombre; suivant les espèces et les dimensions de l’oogone, elles présentent de légères variations. Elles sont claires, à contour circulaire et net : ce sont des places dégarnies des globules cités plus haut. D'abord elles ne sont pas en con- tact direct avec la paroi de l'oogone, mais situées à quelque distance, au liers ou au quart du rayon à partir de la surface et près de la portion où le plasma est accumulé en couche très- épaisse. On peut s'en convaincre en faisant varier le point du microscope depuis la surface de l’oogone jusqu'aux parties pro- fondes. On peut remarquer, en outre, qu’on ne les aperçoit pas sur les bords de l’oogone, c’est-à-dire de profil; elles ne sont donc pas sphériques, mais lenticulaires, sans cela elles devraient être visibles près des parois, quand elles en deviennent voisines, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 39 avec le même contour qu'ailleurs : elles disparaissent subitement versles bords, comme si leur épaisseur était très -faible. La figure donnée par M. Pringsheim lui-même (1) reproduit ces appa- rences d’une façon très-exacte. L'interprétation de ces vacuoles a donné lieu à des opinions peu justes. M. Pringsheim prétend qu'elles se montrent précisément aux places où la paroi se résorbera plus tard. Or, il ne dit pas qu'il ait compté les vacuoles, puis les perforations dans le développe- ment du même oogone. M. Reinke (2) fait du reste remarquer que s’il en était ainsi, dans le cas représenté par M. Pringsheim (5), les perforations seraient trop rapprochées. Mais la meilleure objection, et qui est irréfragable, c’est que ces vacuoles se mon- trent aussi chez les espèces dont les parois restent parfaitement entières et non perforées (A. racemosa). (Voy. pl. À, fig. 2.) M. Al. Braun (4) les appelle vésicules (Blaeschen) et les con- sidère comme les nueléus des futures spores. Ce serait d’ailleurs le seul cas où des nucléus se renconireraient dans les Saprolégniées. Il est impossible de les assimiler à des nucléus, l'apparence et la nature de ces formations ne le permettent pas; elles seraient en nombre trop considérable : ainsi, dans l’une des figures de M. Pringsheim, ily a 17 vacuoles; sur l’autre face, par symétrie, il devrait y en avoir autant, cela ferait 34 spores ; dans tous les exemples représentés par l’auteur il y en à un nombre notable- ment moindre. I était bon de montrer avec des dessins connus et classiques que cette interprétation est inadmissible. J'ai voulu m'assurer de ee fait d’une facon plus précise : j'ai, dans une touffe cultivée à part, dessiné un oogone (pl. 1, fig. 4) muni de vacuoles; il était choisi de telle façon qu'on püt le reconnaître aisément au milieu des autres et le retrouver. Il présentait 45 vacuoles visibles sur un seul côté; le lendemain (1) Jahrbuechs, LT, pl. XIX, fig. 3 et4.— Ann. des sc, nat., Bor., 4° série, t, XI, pl. 6, fig. 3. La figure 2 reproduit mal cetle du mémoire original, (2) Archiv. f, mikr. Anat, von Max. Schultze, 1869, t. V, p. 186. (3) Jahrbuech, 1, p. 2914. — Ann. des se. nat., série, &. XI, p.357. (4) Verjuengung, p. 288, 36 RE. CORNE. il s'était formé deux gonosphéries seulement. Il n’y a rien à objecter à cette démonstration. Du reste, dans l'A. racemosa Hild., espèce à laquelle cette plante se rapporte, le nombre des oospores n’est jamais très-élevé (1-7), tandis que le nombre des vacuoles est toujours beaucoup plus considérable. Quel est alors le rôle de ces vacuoles? Elles ne se rencontrent que chez les Saprolegnia et les Achlya, c’est-à-dire les espèces polyspores; elles sont probablement le premier indice de la sé- paration du contenu de l’oogone en sphérules et en sont le pre- mier effet. En tout cas, on les voit parfois disparaître; ou bien encore elles finissent par atteindre la surface de l’oogone ; on observe alors nettement que ce sont simplement des places dégarnies de grauules. Vers cette époque, le plasma change d'aspect et de constitution dans certaines espèces; les granules fins et tous égaux se réu- nissent en partie, de façon à former des globules plus gros, tous égaux aussi et également répartis dans la masse des globules plus petits : ils sont brillants, jaunâtres, formés d'une matière oléagineuse et réfringente et situés à la périphérie de l’oogone ; il semble qu'ils n'existent que là. Suivant les espèces, ils sont plus gros ou plus petits; ils manquent parfois totalement. L’as- pect de l’ensemble est alors complétement modifié. De nouveaux changeinents se passent encore dans l’oogone. La partie claire centrale, ou areola, qui était devenue presque indisiüincie avant l'apparition des vacuoles, se montre de nouveau et avec netteté : elle a pris un contour, non plus déchiqueté comine auparavant, mais ondulé. Cette apparence provient d’une concentration du contenu près des parois ; le centre de- vient alors de plus en plus clair. La couche, plus épaisse en certains points, du plasma concentré, semble, dans la coupe optique, présenter un contour sinueux, sans que pour cela les anincissements locaux de cette couche s’avancent jusqu’à la paroi. Dès qu'ils l'atteignent, on observe facilement le méca- nisme de la séparation des parties. (PL. 1, fig. 6.) La paroi se dégarnit de granules, gros et pelits, avec lenteur, et le plasma se retire comme l’eau sur une lame enduite d’une MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 9 légère couche grasse. Tel est l'aspect du phénomène pris d’en- semble et vu superficiellement. L'observation attentive montre quelque chose de plus. Les globules ne sont pas libres, mais contenus dans un liquide mucila- gineux, très-clair et visible avec des grossissements plus forts : ils se retirent en suivant le mucus mcolore qui les entraîne. Les places dégarnies s'étendent de plus en plus et finissent par com- muniquer entre elles; on voit alors qu'elles ont laissé des îlots plasmatiques de forme et de situation diverses (pl. 4, fig. 7). Vue de profil, la masse ressemble à un fragment de matière à demi fondue, qui s'étale en devenant liquide : ce sont les futures gonosphéries. Les portions par lesquelles se relient encore les îlots deviennent de plus en plus grèles; au dernier instant, elles ue sont plus qu'un cordon de plasma incolore, dans lequel se meuvent diversement et un à uu des granules très-fins (fig. 7, c). Ce cordon se brise enfin; le mucus clair, qui forme un rebord à peine visible autour des îlots, se replie de proche en proche, et les masses prennent ainsi une forme plus globuleuse. Elles quittent lentement la paroi en s’arrondissant, et finissent par devenir entièrement sphériques. Les gonosphéries sont alors complétement formées. Depuis le eloisonnement de l’oogone jusqu'à la complète for- mation des gonosphéries, il s’écoule environ un jour. L'apparition des vacuoles, qui se montrent même avant la formation de la cloison, prouve que le travail interne du plasma, pour arriver à cette division, commence de très-bonne heure dans l’oogone. Une fois formées, les gonosphéries quittent les bords de l'oo- gone et se rassemblent au centre, laissant ainsi libres les parois neltes et pures, notablement épaissies, et sur lesquelles les moindres modifications sont visibles. On aperçoit alors avec évi- dence les perforations dans les espèces qui les présentent. Si l’on cherche l'instant auquel on peut en observer la première appari- tion, on trouve qu'elles se montrent bien avant cette époque, sinon entièrement formées, du moins déjà reconnaissables. Dans certains cas, lorsque le contenu ne présente pas encore 38 RE. CORNU. 4 la moindre tendance à se diviser, l’oogone étant nouvellement formé, on peut remarquer, sur le contour, des espaces de couleur différente, suivant lesquels il est interrompu, et présentant l’as- pect et le diamètre des perforations véritables. A la surface de l’oogone, la teinte sombre du contenu empêche l'observation : peut-être la perforation ne s’étend-elle pas encore dans toute l'épaisseur ; peut-être encore ce que l'on apercçoit sur le contour n'est-il pas une perforation véritable, mais seulement la diffé- rence de réfraction d’une portion destinée à se dissoudre plus tard. Quoi qu'il en soit, l’indication de la place où la membrane se résorbera, a lieu de très-bonne heure. Disons en passant, pour confirmer ee qui a été dit plus haut, que les vacuoles ne semblent pas en rapport avec ces portions qui seront résorbées. Les phénomènes relatifs à la fécondation vont commencer désormais à se produire. Chez le Saprolegnia ferax (Gruith.), qui n’est pas muni de branches latérales, les phénomènes sont les mêmes. Chez l’Achlya prolifera Nees, qui est dans le même cas, les oogones et les oospores semblables, d'après M. de Bary (1), à ceux de la plante précédente, doivent montrer un dévelop- pement analogue. Ainsi, l'absence de branches latérales ne semble pas exercer une grande influence sur lesorganes femelles dans les deux genres étudiés Jusqu”ici. {Espèces monospores. Les espèces à oogones monospores présentent un développe- ment moins compliqué. Les oogones sont formés de même par le cloisonnement de portions renflées, où afflue le plasma. Dans la suite, le contenu se dispose en un gros globule formé d’une matière opaque, com- posée de granules oléagineux ; la substance renfermée dans l’oogone se sépare en deux : un liquide clair et semblable à de l'eau, et un grand nombre de gouttelettes d'huile réunies par un (4) Bot. Zeit., 4859, p. 473, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES, 39 mueus presque incolore, dont l’ensemble est opaque. Cette sépa- ration s'effectue le long des parois, de sorte que le plasma plus dense se décolle petit à petit et les quitte en prenant une forme sphérique. C’est ainsi que s’isole la gonosphérie. L’intervalle qui existe entre les deux contours est plus ou moins considérable et la grosseur des globules oléagineux varie d’une espèce à l’autre. Les Rhipidium présentent un cas spécial : les globules oléagi- neux, au lieu de se disposer suivant une masse à contour circu- laire, offrent un contour étoilé ou ondulé; de plus, le liquide sans granules, provenant de la séparation du plasma, et qui entoure la gonosphérie, n’a pas la même apparence que l’eau ; il est très-réfringent, quoique presque incolore. On voit qu'il y à une différence qui méritait d'être signalée. Chez les Péro- nosporées, on rencontre aussi un plasma spécial autour de la gonosphérie (4). Dans l’un et l’autre cas, à la maturité de l’oospore, ce plasma aura disparu. Les oogones polyspores sont normalement terminaux. Il y a cependant des exceptions, mais elles n’offrent rien qui mérite d’être signalé. Les oogones monospores le sont aussi en général. Dans certaines espèces du genre Pythium et dans les Péronospo- rées, 1lssont fréquemment intercalaires : dans ce cas, l’oogone terminal est le plus avancé (2), celui qui est situé au-dessous est moins âgé ; le premier a souvent achevé son évolution et contient une oospore müre, que le second n’est même pas encore isolé par des cloisons. Les gonosphéries une fois formées, la fécondation va bientôt avoir lieu ; mais elle exige encore quelques conditions prépara- toires. FORMATION DES BRANCHES LATÉRALES. L'oogone futur a déjà pris une forme sphérique, qu’on com- mence déjà à voir apparaître les branches latérales. Elles nais- (1) De Bery, Développem. des Champ. paras., 4® série, t, XX, pl. 8, fig. 12-16 ; e dans d’autres endroits, (2) Cystosiphon pytlioides parasite du Wolffia arrhiza, in Ann, des se. nat., Bor. 5e série, t, XI, pl. 3, fig. 18 a. 0 RE. CORNU. sent sous la forme d’un mamelon, qui s’allonge rapidement. Quant à l'endroit où elles se montrent, il est variable suivant les espèces et change aussi dans la même. On r'a qu'à se reporter à ce qui a été dit page 28. Si elles doivent rester courtes, Îles filaments demeurent roides, de forme et de courbure à peu près régulière ; sinon ils deviennent bientôt flexueux et ondulés. Quand elles doivent atteindre une longueur notable (Achlya polyandra Hld., Dichyuchus monosporus Leitseb), elles paraissent avoir une grande avance sur l’oogone et l'entourent avant qu’il soit en état d'être fécondé. Le plasma s'accumule à leur extrémité légèrement dilatée, et cette dernière ne tarde pas à s’isoler par une cloison : l’anthéridie est par là constituée défini- tivement. Il faut remarquer, d’ailleurs, que cette cellule peut se former longtemps avant la fermeture de l’oogone par une cloison (voy. pl. 1, fig. 1, 2et A). I n’est pas rare de rencontrer des oogones qui ont péri avant d'être entièrement développés, ils montrent ce fait avee une grande netteté. L’anthéridie demeure stationnaire pendant le temps que l’oo- gone emploie à se transformer : la membrane alors s’épaissit notablement ; le contenu est elair, présente quelques granules et est fort différent du plasma de la gonosphérie. Chez les espèces polyspores, c’estau moment où les gonosphé- ries se sont rassemblées au centre de l’oogone, que les anthé- ridies commenceñt à préparer l'acte fécondateur. Chez les autres, l'instant est plus difficile à préciser ; il a lieu aussi quelque temps après la formation définitive de la gonosphérie. La préparation consiste dans la naissance de prolongements spéciaux, qui naissent de la cellule anthéridienne, filaments dus à une sorte de germination (1). Lorsque l'oogone est perforé à l’avance, c’est par les ouver- tures toutes formées que passent les prolongements; chaque anthéridie en émet un ou deux, suivant qu’une ou deux perlo- rations se trouvent sous elle. Si, au contraire, les parois sont continues, deux cas se présentent : dans l’un, le prolongement (4) M. Roze la comparerait volontiers à la germination des grains de pollen sur le stigmate. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. IA repousse la paroi de l’oogone et finit par la perforer comme par suite d’une pression considérable (Rhipidium elongatum); dans l’autre, et c’est le cas de beaucoup le plus fréquent, la parot est traversée sans effort et sans action mécanique. Ainsi une portion émanée de l’anthéridie a la propriété de dissoudre un point de la surface de l’oogone. Cette propriété existe du reste chez les fila- ments de certaines espèces du genre Pythium, pour perforer les membranes appartenant, soit à la plante nourricière, soit à la plante elle-même (1). Ces deux faits méritaient d'être rapprochés. Les prolongements émis dans l’intérieur de l’oogone sont cylindriques ; ils sont rectilignes ou flexueux (pl. 4, fig. 12-15), demeurent simples, se bifurquent ou se trifurquent. (est par eux que l’anthéridie se vide entièrement dans l’oogone. Le nombre de ces branches est en rapport avec le nombre des gonosphéries. Chacun des rameaux, après un trajet plus ou moins ondulé, se dirige vers une gonosphérie, et, quand l'observation est possible, on remarque qu'ils s'y implantent perpendiculairement. Dans les espèces monospores (et c’est le plus grand nombre), le fait est hors de doute : Pythium, Péronosporées, — Achlya et Sa- prolegnia, quand il n’y a qu'une seule gonosphérie (pl. 4, fig. 8). Lorsqu'il y a deux gonosphéries et une seule anthéridie, le filament issu de lanthéridie se bifurque et va manifestement (pl. 4, fig. 3 et 5) retrouver chacune d'elles. Il en est de même, lorsque le nombre des gonosphéries n’est pas trop grand (pl. 4, fig. 10 et 11). Sile nombre des gonosphéries est très-considé- rable, la difficulté est plus grande, mais on s’en rend compte encore : la pénétration est évidente quand l’une des gonosphé- ries est un peu isolée des autres ; pour le reste, la probabilité est grande. M. Priagsheim dit (2) que le contenu de l’anthéridie est formé par des anthérozoïdes, qu’elle déverse entre les gonosphéries. Quand il n’y en à qu'une ou deux, le tube devrait s'ouvrir à quel- (4) Ge dernier cas se présente chez les P. #mperfectum et utriforme, dont les spo- ranges sont prolifères; le tube de sortie du plasma d’un sporange, né dans l'intérieur d’un autre, se fraye par résorption un passage à travers la paroi de l’organe vidé. (2) Jahrbuech, f. wiss. Bot., t, T,p. 293.—Ann. des sc. nat., 4° série,t. XT,p. 359. h2 M, CORNU. que distance de chacune d'elles: or, il n’en est rien. Si ce con- tenu était épanché dans l’oogone, on devrait voir, à travers les parois libres et nettes, le mouvement des substances qui y sont répandues. Normalement on ne voit jamais rien de pareil, et cependant la moitié de l’oogone est souvent dégarnie de tout contenu, les gonosphéries étant à cet mstant réunies au centre. La présence d’anthérozoïdes dans des organes ainsi constitués est au moins douteuse à priori. En effet, pourquoi des corps agiles seraient-ils épanchés par un tube de sortie aussi long ? Pourquoi jusqu'à deux tubes partant d’une si petite anthéri- die? À quoi bon des ramifications? Il semble singulier que les corps agiles aient besoin d'être conduits jusqu'au centre de l’amas des gonosphéries, quand, dans les Edogonium dioïques, l’anthérozoïde, venu de si loin, trouve uneouverture unique, pra- tiquée dans la paroi de l’oogone, et s’y introduit pour féconder la gonosphérie. Il en est de même dansle genre Sphæroplea. Ceci est contraire à tout ce qui se voit ailleurs dans les espèces monoïques ou dioïques, appartenant à d'autres plantes (Ex. : (Vaucheria, Fucus, etc.). S1 l'on admet, au contraire, dans les cas les plus compliqués, ce qui sobserve dans les cas les plus simples (quand on a de une à trois gonosphéries), c’est-à-dire qu'il y à implantation directe des ramifications dans les gonosphéries, tout s'explique et devient rationnel. On conçoit alors pourquoi les gonosphéries se ras- semblent au centre de l'oogone (pl. 1, fig. 9); c’est pour se trou- ver au point de concours de tous ces processus ramifiés, de telle sorte que chacune d'elles soit en communication directe avec une anthéridie au moins (pl 4, fig. 12, 13, 1h et 45); le nombre des rameaux étant supérieur à celui des gonosphéries. En résumé, M. Pringsheim a observé surtout le cas le plus compliqué, il n’est pas étonnant qu'il n'ait pas vu la termi- naison des processus ; il est bien certain qu'ils ne s'ouvrent pas au milieu de la masse des gonosphéries, car celte asserlion est mise en défaut dans les cas particuliers les plus simples, quand il n’y en a qu'une ou deux. Ainsi l'existence des anthérozoïdes est donc douteuse à priori ; MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. h3 nous verrons que l'examen approfondi des changements qui surviennent dans le contenu de l’anthéridie ne permet pas non plus de s'arrêter à cette supposition. Ajoutons en outre que les gonosphéries ne présentent pas de partie claire antérieure comme on en rencontre chez celles des OEdogonium et des Vaucheria, et qu’on appelle tache germinative (Keimfleck). Malgré les divergences d'opinion sur ce sujet, le fait admis par tous, c’est que l’anthéridie se vide entièrement de son contenu dans l’oogone, au moyen des processus qu’elle ya émis à cet effet. Cet épanchement, qu’il s'effectue d'une manière ou d’une autre, a pour effet de déterminer autour des gonosphéries la produc- tion d’une membrane. Elles quittent le centre de l’oogone. La membrane, mince d’abord, s’épaissit diversement, suivant les genres. Ce sont alors de véritables oospores. Depuis la formation des gonosphéries jusqu'à l'évacuation complète des anthéridies et la formation des oospores, il s'écoule environ un jour. I va être question maintenant de la fécondation : elle sera étudiée d’une façon plus complète, et les théories émises succes- sivement seront discutées. — [l ne sera d’abord question que des espèces munies de branches latérales ; celles qui ne sont pas dans ce cas sont, comme il a été déjà dit, les suivantes : Saprolegnia ferax (Gruith.), Achlya prolifera Nees, et les espèces du genre Monoblepharis. Leur étude est réservée pour plus tard. FÉCONDATION CHEZ LES ESPÈCES MUNIES DE BRANCHES LATÉRALES, Nécessité de la fécondation. Dans son deuxième mémoire sur les Saprolégniées, M. Prings- heim se croit obligé de démontrer que la deuxième sorte de spores qui se rencontrent dans les Saprolégniées est due à une fécondation. La sexualité des Algues, niée pendant longtemps, est maintenant acceptée par tous les botanistes ; les belles décou- vertes de MM. Decaisne, Thuret, Pringsheim, etc., l’ont démon- trée sans réplique. Quant à la nécessité de la fécondation, la kil ; RA. CORNE. preuve qu'en donne M. Pringsheim dans son mémoire est trop accidentelle et n’a pas assez de portée. Chez une espèce à laquelle il n'assigne pas de nom, et qui semble, par tous ses caractères, se rapporter au Dichyuchus monosporus Leitgeb, le développement des gonosphéries n'eut pas lieu à cause de l’état imparfait des plantes spéciales qu'il faut considérer comme constituant l’or- gane mâle. Il en conclut que la fécondation des gonosphéries a réellement lieu et qu’elle est nécessaire. Il vaut mieux choisir des arguments plus généraux et fondés sur un cas normal. Pour prouver la fécondation, il suffira de remarquer que les branches latérales, dans une même espèce, existent constamment et qu’elles y ont une forme particulière qui sert souvent à la caractériser; cette constance dans des plantes aussi polymorphes dénote un organe important. On les voit se fixer exclusivement sur les oogones ou conceptacles futurs des spores; on voit parfois naître des gonosphéries en dehors de leur influence, mais elles ne peuvent se développer, c’est-à-dire s’entourer d’une membrane, que lorsque les anthéridies se sont entièrement vidées. Dans une même espèce, jamais les branches latérales ne font défaut, et jamais elles ne manquent de s'appliquer sur l’oogone et de déverser leur contenu dans son Intérieur : mais si par une cause accidentelle les anthéridies ne peuvent épancher le plasma qu'elles contiennent, la forma- tion des spores n’a pas lieu. Ce cas tératologique se rencontre fréquemment ; il est surtout net dans les espèces chez lesquelles la disposition des branches latérales est simple, Ex. : À, race- mosa Hild. Dans les espèces dépourvues de branches latérales, nous avons vu que chez les unes, comme chez les autres, il existe des oogones présentant des perforations naturelles. Dans certaines espèces, j'ai rencontré les anthérozoïdes et observé l’acte fécondateur (genre Monoblepharis); dans les autres espèces, nous verrons que cette fécondation est extrêmement probable. La fécondation, qui a lieu évidemment dans le cas des branches latérales, est donc encore mieux prouvée, quand elles font défaut, par la pénétra- tion directe des anthérozoïdes dans la gonosphérie. ( (| MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 5 Il n'était peut-être pas besoin d’insister, comme M. Pringsheim l’a fait, sur la nécessité de la fécondation, ear elle est reconnue aujourd'hui par tout le monde sans démonstration ; cependant on voit que désormais un progrès très-important dans cet ordre d'idées a été accompli : je veux parler de la preuve directe de la fécondation par anthérozoïdes. C'était à ce cas-là seulement qu'on appliquait autrefois le mot de fécondation. Maintenant que la nécessité de la fécondation est suffisam— ment établie, voyons comment elle s’accomplit dans le cas où les branches latérales constituent l'organe mâle. Historique. } M. Al. Braun est le premier qui ait observé et décrit des branches latérales sur un Saprolegnia que je rapporte au S. spi- ralis. [l les compare aux cornicules des Faucheria; voici ce qu’il dit à ce sujet (4): « D'après les recherches de Pringsheim, que de Bary a véri- fiées, les conceptacles qui contiennent ces spores immobiles sont généralement portés par de courts rameaux latéraux, et ils pré- sentent de véritables ouvertures : c’est une circonstance qui rend très-vraisemblable que ces spores soient fécondées d’une ma- nière analogue à celle des F’aucheria. Les organes probable- ment destinés à cet usage sont des rameaux grèles, recourbés ou sinueux, semblables aux cornicules anthéridiennes des Y’au- cheria, dont la place ordinaire se trouve dans le voisinage des sporanges, comme je l’ai déjà décrit (2). Il est difficile de douter que ces cornicules n'aient la même destination que celles des Vaucheria, qui contiennent des spermatozoïdes dans leur inté- rieur. J'ai vu une seule fois, dans un renflement terminal, au lieu de zoospores normales, de petites cellules agiles se former; leur diamètre était de + de millimetre de longueur, à peine 300 le tiers de la longueur des zocspores normales; elles avaient (4) Ueber Chytridium, p. 63. (2). Verjuengung, p. 318. l6 M. CORAN. un mouvement rapide. C’étaient peut-être des spermatozoïdes développés à une place anormale (4). » Un peu plus loin (2) 11 parle de certaines spores «qui pour- raient n'être autre chose que les spermatozoïdes (non encore connus) contenus dans les cornicules ». Si je cite ces passages, c'est pour montrer que le mot sper- matozoïde y revient plusieurs fois. Le mémoire de M. Pringsheim sur les Saprolégniées (3) se trouve en germe dans le mémoire cité de M. Al. Braun; 1l y développe en ces termes l’analogie signalée avec les Vaucheria : « La structure et la disposition latérale des organes sexuels des Saprolégniées rappellent, sous plusieurs rapports, les formes ana- logues des Vaucheria, dont les Saprolégmées, comme on peut le voir, se rapprochent par ia production terminale des sporanges et par la structure unicellulaire des filaments (4).» Hn’apas bien vu les anthérozoïdes; il afirme cependant leur existence. On va voir qu'il y conclut plutôt qu'il ne les a réelle - ment observés (5) : «Les anthéridies déversent leur contenu entire les gonosphé- ries. Comme les appendices s’avancent presque sans excep- tion jusqu'au centre du contenu de l'oogone, où leurs extré- mités sont plus ou moins masquées, l'observation présente ici de grandes difliculiés, et malgré l'attention la plus soutenue, je n’ai pas réussi à observer les anthérozoïdes, au moment où ils sortent des anthéridies, aussi ne suis-je pas complétement édifié sur leur structure. Néanmoins leur existence est tout à fait certaine. » Ainsi que cela à lieu dans les Faucheria, les anthéro- zoïdes des Saprolégniées sont entourés d’une gelée dont ils (4) IL s’agit peut-être d’un parasite, le Roze/la sepligena (voy. à la fin de ce mémoire les parasites des Saprolégniées), (2) Loc. cit., p. 69. (3) Jahrbuech, fuer wiss, Bot., t. T4, p. 284; trad. Ana, des se, nat,, Bor., 4° série, t, XI, p: 349. (4) Loc: cit., p: 290: — Ann, des se. nat., p. 355. On fa signalé plus haut les cloisons des filaments germes émis par les zoospores, ce qui ne permet pas une assi- milation très-complète. Nous discuterons plus loin l’analogie des Saprolégniées avec les différents genres de la classe des Algues, Elle est multiple, (5) Loc, cit, p. 293; trad, Ann; des sc: nat., p: 359: MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES, h7 doivent se séparer après leur sortie de l’anthéridie. Bien que la masse gélatineuse qui les enveloppe les empêche de se mouvoir librement à l’intérieur des anthéridies, cependant le mouvement vibratile particulier qui se produit à l’intérieur des anthéridies müres amène forcément à conclure qu'il existe réellement ici des anthérozoïdes mobiles. En outre 1l n’est pas rare, dans le cas où, par une cause quelconque, la totalité du contenu de l’anthéridie n’a pas pu sortir, d'observer dansle fond de l’anthéridie vidée, de petits corpuscules qui y tourbillonnent sur place d'un mouve- ment faible, il est vrai, mais bien reconnaissable. Ces corpus- cules sont opaques et très-brillants, comme les anthérozoïdes du F’aucheria sessilis; mais lorsqu'ils sont arrivés à la période de repos, ils forment de petites vésicules claires et transparentes, ce qui les rapproche des anthérozoïdes des Vaucheria. Une autre raison qui prouve encore que, malgré leur petitesse (car ils n’atteignent pas = de millimètre), ces corpuscules sont bien les anthérozoïdes des Saprolegnia, c'est que, même en faisant abstraction des conditions où ils se montrent, on en trouve pareillement dans les anthéridies mûres du Pyihium monosper- mum., où leur mouvement est plus vif. » Il ajoute encore une phrase dénotant qu'il sent le besoin de démontrer à priori l'existence des anthérozoïdes. «Mais ce qui en démontre mieux la nature, ce sont les phé- nomènes qui se passent dans les gonosphéries après que les an- théridies se sont ouvertes. » . Ce dernier argument prouve seulement qu'il y a fécondation. Mais à cette époque l’idée de fécondation élait intimement liée à celle d’anthérozoïdes agiles; témom l'erreur que commit M. Nægeli à propos des corpuscules mâles des Floridées. Ils sont inertes, et cependant l'illustre observateur crut qu'ils étaient munis de cils et agiles. D'autre part, M. Pringsheim n’a-t-il pas eru pouvoir affirmer que la fécondation chez les Phanéroganes devait avoir lieu vraisemblablement par le moyen d’anthéro- zoïdes (1)? ; (4) Monatsbericht der Kæmygl. Akad. der Wissensch. z. Berlin Mai, 1856, Trad, Ann. des sc, nat.; Bor., 4€ série, 1856, {, V, p. 258. 46 Ni. CORNE. «Si celte analogie (avec ce qui a lieu chez les CEdogonium) ne me trompe pas, il est vraisemblable, non-seulement que le pollen doit contenir des spermatozoïdes, mais encore que les vésicules embryonnaires présentent des ouvertures, et que, si ces choses ont échappé jusqu'ici aux recherches laborieuses de nos habiles embryologistes, la cause en est sans doute dans la difficulté inhé- relite au sujet et les circonstances qui en accompagnent l'étude.» C'est en partant de la ressemblance avec les Vaucheria, et en admettant à priori l'existence d’anthérozoïdes analogues, que M. Pringsheim se trouvera entraîné à des erreurs plus considé- rables encore, comme de prendre pour des anthérozoïdes cer- taines formations parasites. Dans son livre (4), M. de Bary admet, sur la foi de M. Prings- heim, la présence des anthérozoïdes : « Le contenu des anthéridies, pendant qu'il s'écoule, laisse voir des corpuscules très-agiles, dont le diamètre égale à peine =, de millimètre, et qui, eu égard à leur ressemblance avec ceux que l'on qualifie du nom de spermatozoïdes chez les F’aucheria, doivent être tenus pour des corpuscules fécondateurs. » M. Hildebrand (2), en étudiant son Achlya lignicola (3), est amené à écrire Ce passage : «J'ai d'abord cru que cet Achlya confirmerait l'exposition faite par M. Privgsheim de la fécondation du Saprolegnia mo- noica ; il m'avait semblé voir des anthérozoïdes agiles analogues à ceux des J’aucheria ; mais plus tard j'ai dù reconnaître que le mouveinent des corpuseules globuleux contenus dans les an- théridies et leurs appendices tubuleux était purement molé- culaire. Je ne vois d’ailleurs 1C1 aucune nécessité de supposer l'existence d’anthérozoïdes comparables à ceux des autres Cryptogaies ; le contenu des anthéridies peut bien, par son union avec l’embryocyste, en déterminer la fécondation. » (4) Morph. und Phys. der Pilze, 1866, p. 155, — Trad. Ann, des sc. nat., 5°séries t, V,p. 333. (2) Jahrbuech. fuer wiss, Bot, t. VX, p. 249. — Trad, Ann, des sc, nat., 5° série, 1867, t. VIII, p. 322. (3) Get Achlya n'est qu'une variété appauvrie de 1'À, raceïnosa Ejusd, | | MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES, 9 Les observations de M. Hildebrand sont contredites et discu= tées par M. Reinke (1), dans un mémoire spéeial sur la féconda- tion dans le Saprolegnia monoica. I prétend avoir observé et représente des anthérozoïdes; 1ls seraient ovales et munis d’un long cil. Il a vules tubes émis par les anthéridies s’'avancer jus- qu’au centre de l'oogone et se cacher entre les gonosphéries. «Sur ces entrefaites, dit-il, apparaissent dans l’anthéridie une quantité de corpuscules qui se distinguent des granules proto- plasmatiques, par une taille plus forte et un pouvoir réfringent plus considérable. Tout d’abord quelques granules passent de l'anthéridie dans le filament de sortie (Entleerungsschlauch), avec le mouvement proioplasmatique ordinaire ; ensuite suivent quelques-uns de ces corpuscules plus gros, très-réfringents, for- més dans l’anthéridie. Un mouvement de rotation particulier, lent d’abord, ilest vrai, montre leur différence avec les corpus- cules du protoplasma. Ce sont les spermatozoïdes. » Il dit ensuite avoir constaté, à l'extrémité d’un de ces fila- ments, une ouverture évidente, et il la représente figure 6; elle est circulaire et d’un diamètre inférieur à celui du filament. « Alors je pus voir comment quelques-uns des spermatozoïdes sortaient par cette ouverture du tube dans le liquide ambiant de la cellule, Aussitôt échappés du filament rempli de proto- plasma visqueux, ils montraient le mouvement rapide si spécial et si reconnaissable des spermatozoïdes; au moment de leur sortie, comme quelquelois pendant le mouvement, le cil était visible avec évidence. Leur mouvement dura de cinq à dix minutes ; alors ils pénétrèrent lentement dans l’intérieur des gonosphéries. J’observai que plusieurs spermatozoïdes entre- rent successivement les uns après les autres dans une gono- sphérie; il pouvait y avoir une demi-heure ou trois quarts d'heure ettre la sortie des premiers et celle des derniers. Après ce temps, les spermatozoïdes, qui s’agitaient, ne pou- vaient plus pénétrer dans la gonosphérie, car une membrane mince les en empêchait...» (à) Archiv fuer iikrosk. Anal, von Max. Schultze, 1869, 1, V.— Ueber die Geschlechts- verhætlnisse von Saprolegnia monoica, p. 1483, pl. XI. 5€ série. Bo, T. XV. (Cahier n° À.) # li 50 RE. CORNE. Il représente ces spermatozoïdes avec un grossissement de 1400 fois; dans l’anthéridie, il les montre comme environnés d’un cercle inachevé, sorte d’auréole incomplète (?). il attaque ensuite M. Hildebrand, qui n’a vu qu'un mouvement moléculaire; 1l aurait dû se servir d’un grossissement plus fort ou faire agir liode. Il ajoute ensuite la phrase suivante : « J'ai trouvé les sper- malozoïdes dans lous les oogones que j'ai examinés ; j'ai, dans presque lous les cas, observé leur introduction (Æ). » Je dois avouer que dans aucun cas, je n’ai vu rien de sem- blable. Au début de cette étude, j’admettais, sur la foi de M. Pringsheim, la présence des anthérozoïdes, ei j'ai bien des fois cherché, mais inutilement, à revoir après Lu les corps opaques et très-brillants dont il parle. Mes observations ont porté sur un certain nombre d'espèces, particulièrement les Saprolegnia monoica Pringsh. et spiralis, Achlya leucosperma et contorta; Pythium Cystosiphon et gra- cile Schenk. Dans tous les cas, le résuitat a été le même. Le plasma est assez clair et peu granuleux; il contient quelques globules oléagineux. Ils ne se résout jamais en anthérozoïdes, et s'épanche entièrement dans l’intérieur de l’oogone. Nous avons vu plus haut que les prolongements émis par l’anthéridie implantent l'extrémité de leurs nombreuses ramifications dans les gonosphéries : la gonosphérie est tellement opaque, qu’il est impossible d'apercevoir l'exirémité du rameau, mais il est hors de doute que cette extrémité doit se rompre pour livrer pas- sage au plasma. La preuve qu’on peut en donner, c’est que les globules oléagineux qui sont répandus dans l’anthéridie finissent par être entièrement évacués, L'endosmose seule ne peut expliquer cette disparition. M. Reinke affirme avoir fréquemment vu les anthérozoïdes et leur pénétration dans les gonosphéries. Je dois avouer que je n’ai jamais été, malgré de nombreuses observations sur des espèces variées, tres-bien portantes, dont la culture était très-floris- (4) Loc cit, p. 190. «cit habe die Spermatozoiden in alien von fiir untersuchteit » Oogonien gefunden, babe auch in fast allen ihr Einschiuepfen gesehen; » MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 51 sante et entièrement dénuée d’infusoires, assez heureux pour observer ce qui semble s'être présenté si souvent à lui. Quant à lui, est-il bien sûr de s'être inis en garde contre toutes les causes d'erreur si fréquentes dans ces sortes d'observations? n’a-t-il pas observé des êtres n’ayant aucun rapport avec la plante, qui ont cependant l’aspect et le mouvement de corps agiles ou d’anthérozoïdes? Il ne le dit pas. Les ‘infusoires, cependant, peuvent faire commettre de singulières méprises. J'ai, du reste, plusieurs raisons pour mettre en doute quel- ques-uns de ses résultats; il considère comme des formations anormales ces places dégarnies de plasma rencontrées par MM. Braun (1) et Pringsheim; et il prétend qu’elles ne se mon- trent que sur les oogones qui sont altérés. On peut voir (pl. 4, fig. 4 et fig. 5) que l’oogone qui les présentait un jour, donna le lendemain naissance à deux gonosphéries (2); il était donc en bonne santé et se développa bien. Il prétend, en outre (3), que la membrane de l’oospore du S. monoïca est simple et munie de perforations radiales, donnant un contour en dent de scie sur les lignes -de rupture : M. Prings- heim n’a rien signalé de pareil, M. Leitgeb non plus; j'ai pu moi-même voir cette espèce, qui n'offre rien de semblable. Peut- être a-t-il pris les nombreux granules qu'elle contient à la couche périphérique, pour des perforations de la membrane : cette erreur serait si grossière, que j'ose à peine la formuler. En tout cas, la paroi des oospores ne m'a jamais montré la rupture sin- gulière qu'il représente. Il décrit ensuite une germination des oospores qui s’accom- paguerait de particularités assez extraordinaires. D'après lui, l'oogone (qui est une cellule morte, puisqu'elle est munie de per- forations nombreuses et que le contenu s’est résolu entièrement en gonosphéries) émetirait nn prolongement, et dans ce prolonge- ment la membrane de l'oospore se romprait en plusieurs parties; (4) Loc. cit,, p, 188: (2) Voyez un peu plus loin la discussion toinpleté des opinions émises sur ces fot mations, (3) Page 191, pl. XII, fig. 8. 92 #1. CORNU. le contenu se résoudrait en plusieurs sphérules de protoplasma qui, «sans doute », reproduiraient des filaments. Tout cela est au moins singulier et repose sur des observa- tions anormales, inexactes ou légèrement faites. Je ne les discu- terai pas davantage. Fécondation. J'ai voulu me rendre compte de cette évacuation, sur laquelle M. Pringsheim donne peu de détails. I fallait choisir une plante dans de bonnes conditions, et la chose est assez difficile. Je pris 1e Pythium gracile Schenk développé dans l’intérieur d'un fila- ment de Vaucheria. On a vu que M. Pringsheim avait rencontré un mouvement remarquablement vif dans les anthéridies d’une espèce voisine, le P. monospermum Pringsh.; la plante n'était en rien altérée, puisque tout était identique dans la nature et sur le porte-objet; les filaments du Pythium, protégés par le Vaucheria, n'avaient été ni meurtris, ni froissés, et étaient garantis de la pression de la lamelle à couvrir : il y avait donc des conditions particulièrement favorables. Dans l’un des cas, il y avait un oogone muni de deux anthé- ridies : l’une était en train d'épancher son plasma ; c’est elle que j'observai de cinq en cinq minutes. Le premier état fut dessiné à cinq heures trente-cinq minutes. Le plasma était en grande partie accumulé d’un seul côté; la portion correspondant à la courbure externe de l’anthéridie était déja vidée (1). À cinq heures quarante, après cinq minutes, le plasma a changé de place; il a émis une traînée qui est allée rejoindre le côté opposé, et d’autres traînées se sont anastomosées. À cinq heures quarante-cinq, les trainées anastomosées ont disparu ; une autre se forme vers la cloison de l’anthéridie. À cinq heures quarante-neuf, le plasma se contracte et tend manifestement à se condenser vers l'aogone. (4) Les organes sexuels du P, gracile Schenk (P. reptans de Bary) n'ont pas encore été signalés ; ils sont identiques avec ceux du P. Cystosiphon ou du P. monospermum Pringsh., moins les perforations de l’oogone. La planche qui les représente est déjà gravée : les mouvements du plasma décrits ici y sont figurés. Elle paraitra dans la deuxicme parue de cette monographie, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 98 À cinq heures cinquante, cette tendance s’accuse de plus en plus. A six heures, l’épanche ment est manifeste; la quantité de plasma diminue encore. À six heures deux, un mouvement brownien se produit subite ment dans une portion du plasma; les granules, jusque-là, étaient entièrement immobiles. On distiigue parmi eux de petits cor- puscules brillants, de formes diverses, sphériques ou allongés, et de nature oléagineuse; l’un d’eux à la forme d'un bâtonnet. Sont-ce les corpuscules brillants dont parle M. Pringsheim? Ils s’agitent assez irréguliérement, tantôt s’engageant dans la masse du contenu, tantôt s’en éloignant: le mouvement est purement moléculaire. A six heures sept, le bâtonnet s’est à peu près isolé de la masse. À six heures vingt, le bâtonnet a changé un peu de place et s’est dirigé vers l’orifice : la forme que prend le plasma montre qu’il continue à s’épancher. À six heures vingt-sept, le bâtonnet est de nouveau engagé dans la masse. À six heures trente et une, un globule oléagineux, visible depuis quelques minutes, demeure immobile, sans participer au mouvement d'entrainement. À six heures quarante-sept, le plasma se décompose subite- ment en un nombre considérable de très-petits globules agités d'un mouvement brownien. À six heures cinquante-sept, il s’est réuni en une masse qui se relie à la gonosphérie. Le globule oléagineux est demeuré dans l’anthéridie ; on en trouve ainsi fréquemment quand elles se sont vidées. À sept heures vingt-cinq, rien de nouveau ne s’est passé dans l’anthéridie, qui présente le même aspect que précédemment. Entre cinq heures et demie et sept heures et demie, l’autre anthéridie a présenté des changements notables ; des vacuoles qui n'existaient pas au début de l'observation se sont formées à la partie antérieure et à la partie postérieure, premier indice de l’épanchement du plasma, et augmentent successivement de 5 HE. CORNU. volume; cependant, à sept heures vingt-cinq, l’épanchement est bien moins avancé qu'il ne l'était dans l’autre anthéridie deux heures auparavant. On peut juger, d’après cela, que l’é- vacuation avait dû commencer au moins deux heures avant l'époque de l'observation, et que l'évacuation complète aurait dû se terminer au plus tôt deux heures après. Les granules oléagineux, qui ont diverses formes, ne peuvent être pris pour des anthérozoïdes; j'ai observé ceux des Wauche- ria, qui sont extrêmement différents et beaucoup plus gros. Les bâtonnets ne se voient pas dans toutes les observations ; je ne les ai même rencontrés que dans le cas cité plus haut, qui est le plus favorable à la théorie de M. Pringsheim; même dans ce cas, il est impossible d’admeitre que ces petits corps, qui n’ont que + de millimètre et sont si rares (il n'y avait que deux bâtonnets), puissent être des anthérozoïdes. Ces observations ont été failes avec un excellent éclairage, à l’aide de la lentille à immersion n° 10 de M. Hartnack, et sur aucune des deux anthéridies je n'ai pu voir à aucun instant de véritables anthérozoïdes : il faut se garder d’ailleurs de confondre les mouvements browniens avec des mouvements ciliaires. Le mécanisme de l'évacuation semble le suivant : le plasma quitte la partie centrale et n'occupe ples que les parois; les parois elles-mêmes se dégarnissent peu à peu, et des cordons muqueux entraînent lentement les granules; l’ensemble se replie vers l'orifice, et c’est ainsi que s’accomplit le mélange des élé- ments de la gonosphérie et de l’anthéridie. Pendant ce temps la gonosphérie du P, gracile augmenta notablement de volume ; les granules oléagineux qui la remplis- saient montrérent un diamètre plus considérable. Au commen- cement comme à la fin, aucune membrane ne se montra : le phénomène de la fécondation n’était probablement pas encore terminé. Pour que l’autre anthéridie se vidàt, il fallait au moins encore deux autres heures, ce qui porte environ à six la durée de l’éva- cuation totale, D'après ce qui a été dit plus haut, ii faut environ MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES, 55 un jour pour que toutes les gonosphéries d’une culture en bon état se transforment en spores pourvues d’une membrane. Ce n'est pas la seule fois que j'aie suivi l’épanchement du plasma, mais l'observation relatée est la plus complète et la plus probante. Des observations analogues ont été faites sur le P. Cystosiphon. Ajoutons en outre que les Pythium possèdent des anthéridies dont le plasma semble plus granuleux que celui des autres. Les espèces dont les gonosphéries sont nombreuses présen- tent des particularités intéressantes. On peut en suivre le plasma, non pas seulement dans l’anthéridie (pl. 4, fig. 10, a), mais en- core en dehors d’elle (pl. 1, fig. 9). Le prolongement n’y est pas court comme dans l'espèce précédente; ils’allonge (pl. #, fig. 14) et se ramifie dans l’intérieur de l’oogone. On y constate les mêmes traînées plasmatiques que dans l’anthéridie ; elles chan- gent lentement de place, mais jamais non plus on n’y voit d’anthérozoïdes ; le contenu est plus clair en général et moins riche en granules que dans le cas précédemment cité. Il reste souvent, attachées aux parois, de petites masses claires et transparentes presque sans granules ; ce reste du con- tenu finit aussi par disparaître entierement : c’est cela qui peut avoir été décrit par M. Pringsheim comme constituant de petites vésicules claires et transparentes ; il me semble impossible d'y voir autre chose que des masses plasmatiques sans importance, Après la fécondation accomplie et la formation complète des oospores, les processus des anthéridies deviennent, le plus souvent, indistincts et disparaissent. Dans la plupart des genres des Saprolégniées, il y a évacuation complète des anthéridies. Cependant les Péronosporées sem blent faire exception à cette règle : d'après les observations de M. de Bary, que j'ai pu vérifier, les anthéridies, dans ce groupe, sont en partie remplies de plasma, même lorsque l'oogone qui les supporte renferme des oospores müres depuis longtemvs. QI est remarquable (1) que, chez ces Champignons, le tube (1) A. de Bary, Recherches sur le développement de quelques Champignons para- siles (Ann. des sc. nat., Bor., 4e série, &. XX, p. 17, 18). 56 RE. CORNU. poussé par l’anthéridie opère la fécondation par le seul contact. Jamais son extrémité ne s'ouvre, jamais on ne trouve des anthé- rozoïdes; tout au contraire, l’anthéridie conserve, jusqu’à la maturation de l'oospore, l'aspect qu’elle présentait au moment de la fécondation. » Peut-on considérer les Péronosporées comme étant dans les mêmes conditions que lesautres Saprolégniées? Évidemment non. Leur situation au milieu d’un Ussu appartenant à une autre plante peut produire des modifications particulières dans l’ap- pareil reproducteur. Peut-être une partie seulement du contenu de lanthéridie est-elle épanchée en quantité suffisante par la fécondation ; la membrane se formant quand cette fécondation est achevée, fermerait le canal, qui reste engagé dans la paroi de l’oospore. En tout cas, 1l n’en reste pas moins établi qu'ici aussi il n'y a d’anthérozoïdes à aucun instant. Mais si chez les Péro- nosporées la fécondation s'opère sans rupture de l’appendice anthéridien, il n’en est certainement pas de même dans les autres Saprolégniées (1). En résumé, la fécondation chez les espèces munies de bran- ches latérales résulte du mélange de la substance de la gono- sphérie avec le contenu de l’anthéridie, qui n’est nullement transformé en corpuscules agiles, mais qui s’épanche avec des mouvements communs à tout plasma vivant, Au reste, à quoi servirait l'appareil ciliaire du plasma décom- posé en petites masses agiles, puisque des canaux conduisent la substance fécondante jusque dans l'intérieur de l’'oogone, au centre de l'amas des gonosphéries, comme le croyait M. Prings- heim, et plus exactement dans chaque gonosphérie ? Cette objec- tion est d’une grande valeur: elle ne permet pas de s’arrèter à l'opinion de l’illustre professeur. (1) Dans ces plantes entophytes, où les organes peuvent être soumis à des pressions et à des contractions dues à la plante nourricière, entre les cellules de laquelle elles rampent, il y aurait ainsi excès d’élément mâle, comme pour obvier à l'arrêt possible de l’épanchement fécondateur. Chez les Phanérogames de même, la quantité des grains de pollen produits par les anthères est de beaucoup supérieure à celle qui est stricte- ment nécessaire ; celle abondance est destinée à contre-balancer les influences qui entravent la chute du pollen sur le stigmate, | | MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 91 La durée de l'évacuation de l’anthéridie fournit aussi une démonstration frappante. Voit-on des corps agiles dans Îles autres groupes de plantes demander un temps aussi long pour quitter leur cellule mère? Que ce soit des zoospores ou des anthé- rozoïdes, dans les Vaucheria, les OEdogoniées, les Fucacées, on n'a pas d'exemple d’un temps d'évacuation aussi long. Ce qui est réel, c'est qu'on a affaire à une véritable conjuga- tion tout à fait comparable à celle qui se présente dans les Con- juguées. Seulement ici les deux cellules qui se soudent ensemble sont très-différeutes de forme et de contenu : chez les Conju- guées, au contraire, une différence de forme se montre seule, el elle est assez faible, même dans les cas où elle est sensible (Spirogyra Grevilleana et insignis). Chez les Saproléguiées, il y a un cas où les deux cellules copulatrices sont presque identiques, c’est celui qui est pré- senté par les Myzocylium. Ces petites plantes sont constituées uniquement par des organes de reproduction : le M. globo- sum (1), en particulier, présente des oogones à peu près de même forme que les anthéridies, et les deux organes sont situés bout à bout: la conjugation à lieu par la perforation de la cloison commune ; il en résulte une oospore unique. Ce fait rappelle tout à fait ee qui a lieu chezles Rhynchonema, dans les Zygnémacées; et l'analogie entre ces plantes et les Saprolé- gniées reçoit donc une preuve nouvelle. Ce qui peut-être arrêta M. Pringsheim, et l'empécha de s’ar- rêter à l’idée d’une conjugation, c’est l’opinion qu'il avait à cette époque, que ce mode de reproduction n’a pas lieu par suite d’une fécondation. M. Pringsheim a, depuis, abandonné cette manière de voir etadopté l'opinion contraire (soutenue depuis longtemps par M. de Bary), depuis ses études sur le Pandorina et la décou- verte de la conjugation des zoospores. On consultera avec fruit diverses notes (2) qui montrent le chemin parcouru par ces savants sur un terrain aussi difficile. (1) Voyez plus haut, page 21. (2) Bot. Zeit,, 1869, p. 90 et 265. Trad, Ann, des se, nal., 5° série, t, XIL, p. 121 et suiv. 58 BE. CORNU. THÉORIE DE M. PRINGSHEIM SUR LA SEXUALITÉ DES SAPROLÉGNIÉES, Dans le cas où les oogones sont dépourvus de branches laté- rales, il faut chercher ailleurs l'organe mâle. M. Pringsheim émit, dans un deuxième mémoire (1) sur les Saprolégniées, une théorie complète de la sexualité, théorie qui fait pendant à celle qu'il avait donnée des OEdogoniées. Malheureusement, l’ana- logie véritable qui existe entre ces deux groupes n’a pas été aperçue par le savant professeur; d'autre part, nous avons vu qu’il avait assimilé à tort les extrémités renflées des branches latérales aux anthéridies des F’aucheria : il résulta de là une série d'erreurs que le peu d’abondance et l'état imparfait des matériaux qu'il eut à s4 disposition exagéra encore. Parmi les espèces dénuées de branches latérales, il y aurait, selon M. Pringsheim, deux cas à distinguer : L'un qui correspondrait à la diæcie. Les espèces dioïques donneraientdes anthérozoïdes, produits par certaines cellules for- mées dans les filaments, et qu'il appelle anthéridies ; elles seraient analogues à celles qui terminent les branches latérales. L'autre qui correspondrait au cas intermédiaire à la monœæcie et à la diœcie, qu'il a distingué chez les OEdogomiées : les espèces gynandrosporiques émettraient certaines zoospores mâles prove - nant de sporanges spéciaux, qui produiraient des individus mâles remplaçant les branches latérales. Nous examinerons cette théorie, et nous verrons que les faits cités par M. Pringsheim se rapportent, dans le premier cas, à des Chytridinées ; dans le second cas, à une espèce décrite plus tard par M. Leitgeb sous le nom de Dictyuchus monosporus, et qu'ils n’ont ainsi aucun rapport avec la fécondation des Saprolégniées. Gynandrosporie et Dictyosporanges,. Apalysons d’abord la partie du mémoire de M. Pringsheim relative aux espèces gynandrosporiques. (1) Jakrbuech. fuer wiss. Bot,, 1864, t. IT, p. 214, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES, 59 Selon lui, certaines espèces de Saprolegnia et d’Achlya, outre less poranges ordinaires et simultanément, en portent encore une deuxième sorte: ce sont ceux dont nous avons parlé plus haut, et pour lesquels le nom de dictyosporange a été proposé. I s’y développe un certain nombre de spores plus petites que les zoospores ordinaires, qui se forment chacune dans une cellule particulière, et qui s'échappent en perforant la paroi. Elles sor- tent lentement, et laissent dans le sporange l'enveloppe vide qui les contenait; l’ensemble de ces enveloppes forme un réseau cellulaire élégant ; chaque cellule donne naissance à une ou plusieurs spores. Suivant l'espèce à laquelle appar- tient le sporange, ce sont des zoospores de Saprolegnia ou d'Achlya. M.Pringsheim donne ensuite le développement ultérieur de ces spores dans deux espèces : un Saprolegnia et un Achlya. Les oogones ne sont perforés ni chez l’une ni chez l’autre ; ceci est pour M. Pringsheim un fait capital, car les quatre espèces dont il a vu jusqu'alors les ougones ont toutes les parois munies de perforations. Chez le Saprolegnia, ces androspores spéciaux se fixent sur l’oogone, s’y développent en petites plantes mâles courtes, ana- logues aux branches latérales, et faciles à confondre avec elles ; mais avec quelque attention, on peut remarquer qu'ils ne procèdent pas des autres filaments. Chez l'Achlya, ces androspores germent sans se fixer, et pro- duisent des individus mâles ayant à peu près la taille des indivi- dus femelles ; ils entourent ces derniers et les enlacent comme des lianes, envoyant de tous les côtés un grand nombre de ra- meaux grèles qui s’entortillent autour de l’oogone et de son sup- port; ils se renflent à leur extrémité et produisent ainsi des anthéridies. | Dans l’un et l’autre cas, la fécondation était possible ; cepen- dant, malgré la formation normale des gonosphéries, elle n’eut pas lieu; de grosses gouites oléagineuses apparurent, et tout périt. L'auteur en conclut la nécessité de l’acte fécondateur non encore démontrée alors. 60 M. CORNE. Il rappelle, en terminant, les faits principaux sur lesquels il base son opinion, et qui sont : 1° La présence simultanée chez le Saprolegnia et l'Achlya de deux sortes de sporanges, les uns ordinaires, les autres réti- culés, donnant des zoospores de même forme, distinctes (?) pour chacune des deux espèces. 2° L'existence de plantes mâles naines dans le cas du Sapro- legniä cité ; plus robustes et en forme de lianes dans le cas de l’'Achlya, et produisant les unes et les autres des anthéridies. Le premier fait lui semble réduire à néant l'opinion de M. A. Braun, qui voyait dans ces sporanges réticulés l'indication d'un genre spécial, et celle de Meyen, de MM. Cobn et de Bary, qui les considéraient comme des formes anormales de sporanges ordinaires. Nous avons vu que, chez les Saprolegnia et les Achlya, les zo0spores peuvent, dans l’intérieur même du sporange, germer en produisant un filament, ou présenter un autre mode de ger- mination, c'est-à-dire émettre des zoospores de deuxième forme ; que, dans ce second cas, il résulte de là la formation de spo- ranges réticulés ou dictyosporanges ; qu'on les rencontre sur des espèces munies de branches latérales, de sorte que les aflir- malions de M. Pringsheim perdent beaucoup de leur valeur. La présence simultanée de ces deux sortes de sporanges est donc expliquée, et le rôle sexuel qu'il leur attribuait fortement mis en question. Si, du reste, on jette un coup d'œil sur la figure 7 de la planche XXIE, représentant la sortie des prétendus andro- spores d’un Achlya dans le mémoire de M. Pringsheim, on y reconnaîtra ce que nous avons déjà signalé plus haut (page 12). Le sporange montre l'ouverture par laquelle une partie des z00- spores se sont échappées ; ce qui reste ne le remplit pas : on a ainsi la preuve, par celte figure même, que ce sont des zoospores qui n’ont pas été évacuées, et qui ont présenté ensuite le second mode de germination. Si l’on cherche à retrouver les espèces qu'il a étudiées parmi celles qui sont décrites, on remarque quele Saprolegnia à oogones non perforés à l'avance et lisses est inconnu encore ; les détails MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES, GI qu'il donne d’ailleurs ne suflisent pas pour établir une espèce, aussi ne lui a-t-il pas donné de nom; quant à l'Achlya, il rentre pleinement dans le Dictyuchus monosporus Leïtgeb. Nous le prouverons tout au long plus tard; il nous suffira de dire que ces deux plantes possèdent simultanément : des dietyospo- rauges, des sexes séparés, des pieds mâles en forme de lianes, et des oogones non perforés. Geei constitue un ensemble de propriétés communes qui assure l'identité des deux espèces. Relevons en passant deux erreurs assez notables, M. Prings- heim dit que les dictyosporanges émeltent des zoospores iden- tiques avec celles de l’espèce à laquelle ils appartiennent (4). Nous avons vu plus haut que, dans l'un et l'autre cas, Saprolegnia ou Achlya, Les zoospores de seconde formation sont identiques entre elles et différentes de celles de premiere, et que l’un des genres ne se distingue de l’autre que par le mode de formation des nouveaux sporanges; et il est bien certain que chez le Sapro- legnia, ces zoospores de seconde formation n’ont pas deux cils antérieurs comme celles de première. Il dit ensuite que de chaque cellale 1l sort une ou plusieurs zoospores ; ceci est encore Inexact, et a été relevé, du reste, par M. Leitgeb dans son travail sur les Dictyuchus (2). Une zoospore n'émiet jamais qu'une seule zoospore de seconde formation ; nous avons insisté là-dessus page 12. En résumé, des deux espèces soit-disant gynandrosporiques, (4) «Düieser (Inhalt) gestaltet sich næmlich zu einem zusammenhængenden, das » Sporangium erfuellenden Mutternetz, in dessen einzelnen Zellen je eine oder mebrere » Androsporen entstchen, welche den gewæbnlichen Schwærmsporen der Art in Bau » und Geslalt zwar gleichen..….. » (Loc, cit., p.214.) Cela semble singulier lorsqu'on sait que M. Pringsheim considérait dans son premier mémoire la forme des zoospores des Saprolegnia, Achlya et Pythium comme identiques. Ilne semble pas du reste avoir changé d’opinion sur ce sujet, car, à propos des zoospores du Leptomitus lacteus Ag. (Sapr. lactea, selon lui), qu'il représente comme munies de deux cils antérieurs, il dit que leur struclure est celle des zoospores des autres Saprolégniées: «Sie besitzen 2 cilien und gleichen vollkommen denen anderer » Saprolegnicen.» (P. 233.) Cependant, dès 1852, M. de Bary (Bot, Zeitung) avail indiqué la différence entre les zoospores des Achlya et des Saprolegnia, et dans le volume qui contient le mémoire de M. Fringsheim, il représente très-exactement les zoospores des Aphanomyces et des Pythium. (Voyez plus haut, pages 10, 41 et 13.) (2) Jahrbuech, f, wiss. Bol.,t. VIT, p. 364. 62 M1. CORNU. l’une est douteuse, l'autre est le Dictyuchus monosporus Leitgeb. S1 les observations de M. Pringsheim sont médiocres, c’est qu'elles portaient sur des plantes rares, incomplèteset mélangées à d’autres, ainsi qu'il l’avoue lui-même ; il semble même prévoir les objections, lorsqu'il déclare ne faire guère autre chose que de montrer la route à d’autres observateurs (1). Les causes d'erreur qu'il a rencontrées sont justement celles qu'ont ren- contrées successivement ceux qui se sont occupés des Saprolé- gniées : c'est pour cela que ces plantes ont été si mal connues au début. Cependant le Dictyuchus présente un intérêt très-réel au point de vue de la sexualité ; c’est la seule espèce connue munie de branches latérales qui semble être divique. Nous verrons plus loin que le fait n’est pas absolument prouvé, mais qu'il est pro- bable. J'avais longtemps considéré comme dioïque le Rhipidium elongatum ; J'ai cru reconnaître depuis que les filaments mâles (très-différents des filaments ordinaires) partent bien du même pied; mais c’est souvent fort loin de l'endroit où se trouve l’oogone qu'on retrouve la preuve de l'origine commune. Il est nécessaire de placer ici l’étude complète du Dictyuchus monosporus Leligeb, pour bien prouver que c'est justement l'Achlya cité par M. Pringsheim, et démontrer inexacte la théorie des espèces gynandrosporiques. Dicryucaus MoNosrorus Leitgeb. Leitgeb, Jahrb. f, wiss, Bot., t. VII, p. 357. Ce genre a été établi par M. Leitgeb pour une Saproléguiée dont les zoospores quittent le sporange en perforant la paroi, et laissent dans l’intérieur un élégant réseau cellulaire. Nous en avons déjà parlé, et un pareil sporange a été désigné d'un nom spécial, diciyosporange, pour plus de commodité. Meyen (2) est le premier qui, dans ses recherches sur Achlya (4) Loc, ci. (1) Pflanzenphys,, U A, p, 457, pl, X, fige 45, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 63 prolifera, ait signalé et représenté les diciyosporanges ; le réseau est, selon lui, constitué par les cellules-mères des zoospores qu’elles ont abandonnées dans l'intérieur du sporange. MM. De Bary (1) et Cohn (2) en ont observé de pareils : 1ls Les considèrent comme des sporanges d’'Achlya, chez lesquels les spo- res n'ayant pu se réunir en capitule,s’entourent cependant d’une membrane et émettent chacune une zoospore à travers la paroi. M. Pringsheim (3) considère les dictyosporanges comme ayant trait à la fécondation; on a vu plus haut le résumé de ses opinions. M. Kuetzing (4) ne semble pas les distinguer des autres spo- ranges. M. Al. Braun (5) pense qu'il faudrait peut-être les considérer comme appartenant à un genre spécial qu'il conviendrait de séparer, et que ce sont des sporanges normaux. C’est à cette opinion que se range M. Leitgeb, et je m'y range après lui. Cependant l'auteur paraît évidemment tourmenté par la théo. rie de M. Pringsheim sur les dictyosporanges, 1 dit à plusieurs reprises qu'il n'a trouvé sur sa plante qu'une seule sorte de spo- ranges, et que l’espèce étudiée par M. Pringsheim est différente de la sienne. La première affirmation est exacte, la seconde ne l'est pas. Nous examinerons plus loin ses raisons. Il trouva le Dictyuchus au commencement de mars, sur un fragment d'oignon de Tulipe jeté dans l'eau; il transporta la plantesur des Mouches, et elle y végéta bien; de temps en temps il le transportait sur d’autres Mouches fraîches. Il la cultiva ainsi pendant quatre mois. Le Dictyuchus est ‘’uneï des espèces que j'ai le plus souvent rencontrées, dans presque toutes les localités, de l'automne au printemps, sur les branches tombées dans l’eau,! mais toujours très-rare et par filaments isolés : les sporanges sont fréquem- (4) Bot. Zeilung von Mohl und Schlecht., 1852, p. 477; (2) Nova Acta nat. cur., 1854, t. XXIV, p. 158, pl, I. (3) Jahrbuech fuer wiss, Bot., &. 11, p, 214. (4) Phycologia generalis, p. 157, pl. I, fig, 2: (5) Verjuengung, p. 287, 6 RE. CORNE. ment en bon état, et J'ai eu le loisir d'observer la sorte des zoospores en imainte circonstance. Cependant, en mai 1870, je rencontrai cette espèce à peu près pure sur une branche d'Osier, dans une mare de la forêt de Fon- tainebleau. Transportée sur une autre branche, elle y fructifia vers le commencement de septembre, après quatre mois. Trans- portée encore sur une autre branche dans le courant de l'hiver, elle se montra à l’état de fructification au mois d'avril suivant. Dans l’un et l'autre cas 1l est possible que je n’aie aperçu les oogones que longtemps après leur apparition; cependant M. Leitgeb les décrit comme assez fugaces. La plante lignicole répondant en tous points à celle de M. Leitgeb, j'essayai de la transporter aussi sur une bulbe de Colchicum autumnale, coupée en morceaux, et sur une autre de Tulipa sylvestris : j'y réussis parfaitement ; elle se développa de même, quoique moins bien, sur un Ver de la farine. J'avais donc pu obtenir le développement sur un animal et sur une por- üon végétale dans des conditions analogues à celles de l’auteur ; c'était une vérification (1). Plus tard, au mois d'octobre 1874, je trouvai le Dictyuchus dans un état parfait de pureté et de développement sur un Limaæ tombé dans l’eau d'un fossé à Châteauneuf-sur-Loire (Loiret). En résumé, les résultats que J'ai obtenus et les observations que j'ai pu faire concordent pleinement avec ceux de l’auteur. Son mémoire est consciencieusement fait et rempli de détails exacts, un peu trop longuement développés peut-être. Ea formation du sporange a lieu comme dans le genre Achlya. Le plasma s'accumule à l'extrémité des filaments et une cloi- son se forme ; mais à cet instant les spores ne sont pas séparées les unes des autres : la division s'opère en commençant par le haut, cela est visible le long des sporanges. Dans les sporanges grèles, les spores sont souvent disposées en file; cette variété est (4) Le développement sur des substratum divers s'obtient sans difficulté : il suffit de plonger le nouveau substratum dans de l’eau qui a baigné quelque temps une touffe de la plante à reproduire; cette eau contient alors des zoospores qui se déve- lappent en peu de jours sur la substance qu’on v plonge, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 65 fréquente quand la plante est lignicole, M, Leitgeb la rencontra surtout dans des cultures déjà un peu anciennes. Un cas qu'il signale comme commun, c'est celui où le sporange est formé de trois files de spores terminées par une seule située à l’extrémité du sporange. fes formes qu’il représente sont en général plus trapues et moins allongées que celles que j'ai rencontrées; mais là, comme chez les Saprolegnia et les Achlya, le substratum doit influer beaucoup. La disposition des sphérules, et par consé- quent du réseau qu’elles abandonnent, varie d'autant. Le nombre des zoospores oscille entre des lnnites très-éloi- gnées, selon M. Leitgeb entre deux et trois cents. La limite supé- rieure est beaucoup plus élevée ; j'ai observé un sporange qui en renfermait trois, et un autre qui en contenait plus de sept cents. À l’époque de la sortie, le contour s’altère un peu et de- vient ondulé sous la pression des globules plasmatiques ; chacun d'eux successivement émet un mamelon et donne naissance à une zoospore. Les phénomènes sont les mêmes que ceux qu'on remarque en observant les capitules d’Achlya ; ce n’est pas le lieu d’y insister ici. La zoospore épanchée de même est aussi de même forme; tout est comparable. (Voy. page 11.) La sortie du plasma dure d’une minute à une minute et demie ; la formation de ia zoospore aux dépens de ce plasma en exige environ vingt. La zoospore se meut pendant une dizaine de minutes, puis s'arrête, devient sphérique, et germe en émettant ur ou deux filaments ; je n'y ai pas remarqué de cloison. Une fois les zoospores sorties, chacune des cellules, qui s'étaient gonflées sous leur pression, revient à sa forme initiale, le contour du dictyosporange alors n’est plus ondulé. On remarque aisément ce gouilement des cellules, lorsque plusieurs spores sont sorties; on voit que la ligne de séparation de deux cellules, dont une seule est vide, n'est plus rectiligne, mais formée d'un arc sensi- blement circulaire. Tous ces phémomènes prouvent que la masse de la zoospore subit avant l’épanchement une notable augmentation de volume. Quelquefois les zoospores ne sortent pas et germent, soit en 5€ série. Bot., T. XV (Cahier n° 2). 1 6] 66 MA. CORNU. totalité, soit en petit nombre seulement, dans le sporange. M. de Bary a signalé un fait analogue pour l'Achlya prolifera, M. Thuret pour le Saprolegnia ferax. M. Leiigeb fait remarquer que M. Pringsheim dit à tort que plusieurs zoospores sortent parfois d’une cellule unique du spo- range réticulé; 11 n'a, pour lui, rien observé de pareil; mes observations confirment les siennes. j La formation des nouveaux sporanges a lieu ici comme dans les Achlya, à l'extrémité d’un rameau né latéralement sous l'an- cien sporange; quelquefois de même, une portion de l’axe fait partie du sporange. Chez les mdividus lignicoles, la ramification était assez rare; daus les cultures de M. Leitgeb, au contraire, elle était abondante et figurait des sortes de sympodes. Les réseaux demeurent très-longtemps sans s’altérer; ils finissent enfin par se détacher à la base, et tombent ainsi après un certain temps. Îl en est de même des sporanges chez les mdivi- dus trop âgés; 1ls n'émettent plus de zoospores et se désarti- culent au niveau de la cloison inférieure. M. Leitgeb a remar- qué qu'après deux mois et demi de culture, la plante, tout en formant de nombreux sporanges, n’émet plus normalement ses zoospores; on voit se présenter des phénomènes qu’il considère comme maladifs et quisont l'indice que la végétation est épuisée. L'auteur cultivait le Champignon depuis quinze jours, lors- qu'il aperçut le premier développement des oogones. Ils se for- ment à l'extrémité de rameaux nés à angle droit sur les flaments. ls sont sphériques, d’un diamètre égal environ à 0"",025. Quant aux filaments qui donnent les anthéridies, rien ne les distingue, à la base, de ceux qui portent les oogones; mais ils en sont bien distincts par leur partie supérieure : ils portent un grand nombre de rameaux grêles et situés à angle droit, qui ne sont Jamais terminés par des oogones; ils s'appliquent, au contraire, sur ceux-Cc1 et les entourent étroitement : leur extré- mité sisole par une cloison et l’anthéridie est ainsi formée. On voit souvent les branches d’un même filament s'enrouler an- tour de plusieurs oogones, se ramifier leur surface et les réunir conne en grappe, | MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 67 M. Leitgeb semble ne pas reconnaître les plantes mâles citées par M. Pringsheim, qui entourent les plantes femelles comme des lianes. Il dit que rien d’analogue ne se présente dans le Dictyu- chus; or ses figures, notamment la figure 2 de la planche XXIH, rendent parfaitement compte de cette comparaison. Dans les organes que j'ai vus, jai pu vérifier moi-même la justesse de la comparaison. Il arrive ici, plus fréquemment encore que dans d’autres espèces, que des oogones, mème entourés d’anthéridies, ne se développent pas et repassent à l’état de portion ordinaire de filament végétatif. Ceci semble une particularité de la plante. Dans chaque oogone il se forme une gonosphérie qui, à la suite de la fécondation, s’entoure d’une membrane, devient une oospore et remplit presque entièrement l'oogone., M. Leitgeb n'a pu voir les prolongements partant des anthéridies ; la plante est en effet peu favorable à ce genre d'observation. L’oospore est blanche, munie à la maturité d’une grosse goutte oléagi- neuse centrale, incolore, et présente la constitution des autres vospores ; la blancheur seule la distingue de la généralité. C’est à tort que M. Leitgeb s'étonne de voir cette goutte oléagineuse centrale et se demande si de telles oospores sont capables de germer. Cet auteur a observé qu’une fois les oospores formées, les fila- ments porteurs des oogones ne tardent pas à se détruire ; il en est de mème des anthéridies et des branches latérales. Les oogones tombent au fond du vase ou restent isolés çà et là sur le pul- vinule du Champignon : ce sont des sphérules entièrement lisses, sans aucune trace d’anthéridies. Dans ses cultures, le dévelop : pement des organes sexués était limité à un court intervalle; à ne durait en pleine vigueur qu'une seule semaine et diminuait déjà trois semaines après la première apparition des oogones. Dans les miennes, la durée de ces organes était fort longue; je ne les observai très-probablement que longtemps après leur apparition, et ils persistèrent longtemps encore. Cette diffé rence est constante entre les cultures entreprises sur des insectes 68 Rd. CORNE. et sur des branches; dans le premier cas la végétation est plus riche, mais plus tôt terminée. D'après lui, les individus sexuels se distinguent à peine des autres; ils s’en séparent peut-être par une légère différence de taille et d'aspect; les individus asexués sont un peu plus robustes et moins ramifiés. il a observé que les mdividus sexuels portent aussi des spo- ranges, surtout les femelles ; plus rarement, mais sûrement aussi les males. Je n'ai pas été assez heureux pour constater ce fait, Je ne le mets pas du reste en doute, au contraire; il a une assez grande importance au point de vue de la théorie de M. Prings- heim, qu'il renverserait presque à lui seul. M. Leitgeb a tout à fait à cœur de prouver que les dictyospo- ranges sont bien les sporanges normaux de sa plante, et qu’il n’y en à jamais d’autres : 1l semble craindre toujours qu'on ne lui oppose l'affirmation de M. Prmgsheim, qui a vu deux sortes de sporanges. Voici les preuves qu’il donne : 4° Pendant une étude qui a duré quatre mois, le Dictyuchus ne lui montra que des dictyosporanges. 2° Il le transplantait d’une mouche sur d’autres sans diffi- culté ; 11 n'en aurait pas été de même si les filaments à sporanges réticulés eussent été des individus sexuels. On peut ajouter, sans crainte de se tromper, car on en a de nombreux exemples, qu'ils seraient redevenus des filaments végétatifs ordinaires. Cepen- dant l'auteur aurait dû opérer d’une façon qui ne donnât pas prise à une objection : il aurait dû ne pas renouveler sa plante en en introduisant une touffe dans l'abdomen d’une mouche nouvelle, comme 1l le faisait d'ordinaire, mais uniquement au moyen de zoospores, et ilaurait vu ainsi bien plus nettement que ces zoospores donnaient le Dictyuchus. J'ai fait cette expérience sur une bulbe de Colchique et un ver de la farine, et dans l’un et l’autre cas les zoospores seules (que M. Pringsheim considé- rait comme des androspores germant librement) reproduisirent des individus munis de dictyosporanges. 3’ I remplaça, dit-il, la touffe de filaments vivants par une {oufle de filaments morts depuisdeux mois etbrunis, mais couverts MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 69 d'oospores, etilen plaça un flocon dans l'abdomen d'une mouche : deux jours après, la surface de la blessure était garnie d’un cous- sinet de Dictyuchus, qui se développa rapidement. On peut encore objecter qu'il y avait peut-être une portion de filament encore vivante, et que le pulvinule ne proviendrait pas alors de la ger- mination desoospores. Il aurait évité cela en triant les oospores. En exécutant l'expérience précédente, comme il suit, on évite toute objection. Dans l’eau qui baigne un pulvinule il y a un grand nombre de zoospores que le Dictyuchus émet à chaque instant ; on enlève le pulviuule, on le remplace par une mouche ou par un ver de la farine coupé en morceaux. On ne peut dire qu'il reste un seul filament, puisqu'on a tout enlevé ; l’inoculation ne peut done provenir que des zoospores. J'ai rapporté que cela avait été fait avec un fragment de bulbe de Colchique et avee un ver; mais ces cultures furent abandonnés pour une cause indé- pendante de ma volonté (1). Une expérience analogue, faite sur une branche de Tilleul, amena la fructification sexuée, mais au bout d’un temps fort long : c’est l’un des cas cités plus haut. On est donc en droit de dire que les zoospores sorties des dic- tyosporanges reproduisent non-seulement des dictyosporanges, mais encore des filaments porteurs, les uns d’oogones, et les autres d'anthéridies, Cette preuve est sans réplique et montre bien que le Dictyu- chus est un genre digne d’être maintenu et non pas une forme d’une espèce d'Achlya : mais il y a deux faits signalés par M. Leitgeb qui ont aussi une grande importance. Le premier, c'est que les pieds mâles comme les pieds femelles partent du corps de l’insecte. Or, M. Pringsheim dit en parlant de ses androspores (p. 216) : «ls ne s'appliquent pas sur les oogones, mais germent à une place quelconque; les filaments qui en naissent se distinguent à peine des filaments femelles entre lesquels ils se trouvent. » Il n’est pas question que ces androspores germent sur le sub- stratum qui leur a donné naissance (au sujet duquel d’ailleurs il (4) Je fus forcé, par suite des événements, de quitter Paris dans les premiers jours du mois de mai 4871. 70 RE. CORNE. ne s'explique pas) (4). Le sens du mot gynandrosporique aurait été un peu modifié, si l'auteur de la théorie avait reconnu cette implantation et l'opinion du savant professeur un peu ébranlée, car le premier et le second cas des espèces gynandrosporiques auraient été trop dissemblables. Le second fait important, c'est que les individus mâles comme les individus femelles, quoique plus rarement, portent aussi des sporanges réticulés. Il est difficile désormais d'admettre le rôle des zoospores issues de ces dielyosporanges, tel que l'a assigné M. Prmgsheim. Si la théorie des espèces gynandrosporiques s'applique au Saprolegnia cité par lui, elle ne s'applique pas du tout ici. Le second eas est done complétement en désaccord avec les faits. J'ai dit déjà plus haut et j'ai répété que le Dictyuchus était cette seconde espèce mentionnée, sans nom et sans figure (2), par M. Pringsheim. M. Leitgeb ne veut pas que ce soit elle; admet- tant que l'illustre botaniste à reconnu deux sortes de sporanges et qu'il n'a pu se tromper, il faut, dit-il, que l’autre sporange soit une formation anormale ou bien qu’on ait eu affaire à une autre espèce. C'est vers cette opinion qu'il penche, et il tâche de l’étaver en disant que le Dictyuchus est dioïque et non gynan- drosporique, et que les oogones sont monospores et non poly- spores. Je ne mets pas un seul instant en doute que M. Pringsheim n'ait vu sur le même filament des sporanges de deux sortes, mais seulement cette affirmation que ces anthéridies spéciales appartinssent à un véritable Achlya : c’est cette partie seule que je nie. Du reste, M. Pringsheim avoue qu'il s’est servi de maté- riaux rares; il ne croit pas que ces dictyosporanges (comme le pensent MM. de Bary et Cohn, et comme cela est) puissent pro- venir de l'altération de certains sporanges d’Achlya : il a donc (4) Il semble pourtant, d'après le texte, que ces Saprolégniées «croissant dans des eaux courantes » étaient lignicoles ; cela expliquerait la difficulté de reconnaitre si les filaments partent ou non du substratum, (2) La figure 7 de la planche 22 se rapporte, ainsi que nous l'avons vu, page 60, à un faux dictyosporange d’un Ach/yas MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 71 élé conduit à les considérer comme appartenant tous à une même espèce; de là son erreur. Il a pu se tromper encore en lui assiguant plusieurs gonosphéries au lieu d’une seule; il aura pu confondre plusieurs espèces. Cela tient encore au petit nombre d'échantillons qu’il avait à sa disposition et qui étaient d’ailleurs en assez Mauvais élai, car aucun oogone n’amena d’oospores ; cela lui aurait permis de vérifier le nombre des gonosphéries, sur lequel il n’insiste pas, du reste. Quant à l’objection tirée de la sexualité, elle est sans valeur, car M. Pringsheim n’a pas prouvé que son espèce ft réellement gynandrosporique. Chez les OEdogoniées c’est évident à première vue, ici il fallait le démontrer. Je me résume : M. Leitgeb dit, pour montrer que son Dic- tyuchus n'est pas l'espèce de M. Pringsheim, qu'il n’y a pas deux sortes de sporanges; que les oogones sont monospores et non polyspores, et que la sexualité est différente. À cela Je réponds que M. Pringsheim, par suite de l’insufti- sance de ses matériaux, a très-bien pu confondre deux espèces, dont l’une lui aurait accidentellement montré des dictyospo- rauges, et l'autre normalement, dont l’une aurait eu des oogo- nes polyspores, l’autre des oogones monospores. Enfin, qu’il n'a pas démontré que son Achlya à plantes mâles en forme de lianes fût gynandrosporique plutôt que dioïque. Maintenant que nous avons examiné les différences, voyons les analogies. Nous les trouverons beaucoup plus importantes que les différences et d’une bien autre valeur. Le mode de succession des sporanges réticulés étant celui des Achlya, 11 n'est pas étonnant que M. Pringsheim ait fait rentrer sa plante dans ce genre. En outre, les filaments qui portent les oogones ne sont pas porteurs d’anthéridies ; ces dernières nais- sent à part sur des filaments spéciaux ne se distinguant pas des précédents par une taille différente ou un autre diamètre. Ces filaments émettent un grand nombre de rameaux, qui entouren: les filaments porteurs d’oogones comme des plantes grimpantes : l'expression est juste et les figures que donne M. Leitgeb en sont la preuve; J'ai du reste pu vérifier le fait. Chez les Aehlya, 72 A. CORNU. d’ailleurs, la forme et la disposition des anthéridies caractérisent les espèces. De plus, les cogones sont entièrement lisses et non perforés, caractères que deux Achlya seulement (sur six ou sept) possèdent à la fois. Outre ces particularités, qui concordent par- faitement dans les deux plantes, on trouve une prédisposition à l'avortement des gonosphéries. C’est une particularité plus intime, mais qui se relrouve chez l’une et chez l’autre plante. Donc le Dictyuchus et la plante de M. Pringsheim, qu pos- sèdent des organes essentiels si semblables et même certaines prédispositions identiques, ne constituent qu'une seule et même espèce. Ce qui a éloigné M. Lertgeb de cette idée, c’est que, ne connaissant pas les faux dictyosporanges d’une part, de l’autre ne voulant pas mettre en doute les observations de M. Prings- heim, il a tout tenté pour prouver la différence des deux plantes; mais dans son mémoire, on remarque qu'il s'efforce constam- ment de montrer la vérité de ses observations, tout en évitant de les opposer à celles de M. Pringsheim. Nous avons considéré dans cette étude le Dictyuchus comme dioïque ; mais en est-on bien sûr? C’est le seul exemple connu de diœcie, aussi faudrait-il en avoir des preuves. Il semble bien que cela soit, mais ce n’est pas prouvé, Pour cela il faudrait pren- dre un sporange né sur un individu femelle, et un autre né sur un individu mâle, en inoculer séparément les zoospores à deux fragments de ver de la farine, ou à deux mouches, et voir si ces deux pulvinules donneraient un pulvinule mâle et un pulvinule femelle. On pourrait encore essayer de placer dans l'abdomen ouvert d’une mouche des filaments mâles et dans un autre des filaments femelles triés avec soin. Ce sont des expériences qui mérileraient d’être faites et qui confirmeraient ce qui jusqu'ici semble très-raisonnable, mais n’est pas démontré. Ce qui est relatif au Dictyuchus a été développé longuement et méritait de l'être à cette place. Cette espèce est le troisième terme d’une série dont les Saprolegnia, d’une part, les Achlya et Aphanomyces de l’autre, sont les premiers termes, et il était nécessaire de montrer que la théorie de M. Pringsheim, en tant qu’elle le touche, est mexacte, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES, 73 THÉORIE DE M. PRINGSHEIM SUR LA SEXUALITÉ DES SAPROLÉGNIÉES : DIOECIE. Le deuxième cas de la sexualité chez les espèces dénuées de branches latérales correspondrait, selon M. ut à la diœcie (voy. plus haut, page 58). Il considère comme les organes mâles de ces espèces cer- taines formations rares et ambiguës, diversement interprétées par les observateurs qui les ont rencontrées ; les uns les consi- déraient comme des sporanges, d’autres comme des parasites : c’est à cette dernière opinion qu'il faut s'arrêter maintenant. L'historique complet et les raisons qui appuient cette manière de voir seront développés plus loin, quand nous nous occuperons spécialement des parasites des Saprolégniées. Pour le moment, il n’en faut dire que ce qui est nécessaire à l'intelligence du sujet. Historique. Le premier qui observa ces formations fut M. Nægeli (4) qui en rencontra deux sortes ; il les considéra comme identiques et constituant un second mode de sporange de l’Achlya prolifera (S. ferax).—M. Cienkowski (2) adopta cette manière de voir pour l’une d’elles sans parler de l’autre. M. Al. Braun (3) considère la même formation comme appar- tenant à un parasite. Plus tard (4), dans un travail spécial sur les parasites, 1l la nomme Chytridium Saprolegniæ; mais après la lecture du mémoire de M. Cienkowski, ses opinions ont changé, et à la suite de son article sur le Ch. Saprolegniæ, 11 écrit un autre passage dans un sens très-différent. Cet opuscule de M. AL. Braun est le point de départ du mémoire deM. Pringsheim sur les Saprolégniées ; on y rencontre même le germe de ses erreurs, comme la présence des anthérozoïdes dans les corni- (1) Zeitschrift. fuer wiss. Bot. Zurich, 1846, Heft. IIT, p. 29, pl. IV, fig. 40. (2) Bot. Zeitung von Mol u. Schlecht., 1855, p, 801. (3) Verjuenqung, p. 286 et 287. (4) Ueber Chytridium, Bexlin, 4856, p.61. 7l M. CORNE. cules des Saprolégniées comparées aux /’aucheria, et lassimi- lation des formations nægeliennes à une deuxième sorte d'an- théridies donnant aussi des anthérozoïdes. Il dit en effet : «…… Cela deviendrait certain si l'on pouvait prouver queles formes des Saprolégmiées, qui contiennent les cellules næge- liennes, ne présentent pas de cornicules, et que les corps agiles que ces cellules renferment sont les mêmes que les spermato- zoïdes (non encore connus) contenus dans les cornicules. » M. Pringsheim, dans son premier mémoire sur les Saprolé- gniées (L), revient en effet sur cette idée ; mais c’est dans le second qu'il donne sa théorie tout entière. Nous en avons déjà vu une partie, nous allons en continuer l'examen. Voici l'analyse de cette partie du mémoire : Certains sporanges décrits par M. Nægeli sur des espèces indéterminées ne sont autre chose que des organes mâles d'espèces particulières. Anthéridies du Saprolegnia dioica Pringsh. (2). M. Pringsheim parle d’abord d’une espèce nouvelle qu'il nomme Saprolegnia dioica. On voit, parmi les filaments de ce Saprolegnia, quelques-uns d'entre eux, un peu plus courts, se cloisonner de distance en distance : les porlions comprises entre deux cloisons pré- eeut un contenu épais qui bientôt se remplit de vacuoles (pl. 6, fig. 4 c, 11 d); à ces vacuoles succède une quantité considérable de très-petits corpuscules, remplissant entière- ment la ‘cellule mère; leur formation suit immédiatement un cerlain aspect écumeux de la cellule que nous retrouverons dans toutes les formations suivantes (fig. £ c) ; chaque article présente une ou deux papilles (fig. 6 0), l’article terminal en présente une àson extrémité. À un instant les papilles s'ouvrent et les corpus- cules sortent etnagent avec une extrême rapidité : ce sont de petits (4) Jarbuech. fuer wiss. Bot., 1, p. 293.—Ann. des se, nat., 4° série, t. XI, p. 362. (2) Nous verrons plus loin que cette formation est constituée par un parasite appartenant à la famille des Chytridinées, le Rozella septigena. (Vox. pl. 6.) | MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES, 15 bätonnets dyssymétriques munis d’un cil unique (fig. 2), mvisible pendant le mouvement, mais rendu visible par l’action de l’iode qui arrête le corps mobile et jaunit le cil. Ils ont une longueur de + de millimètre; leur eil est environ triple. Ils ne présentent jamais aucun développement et périssent sans germer. On ne peut done leur accorder la fonction de zoospores. D'abord rares, ces sorties des corps agiles deviennent de plus en plus fréquentes, mais elles ont à peu près cessé lorsque se montrent les oogones; on en voit à cette époque une nouvelle apparition, et il arrive même de voir le filament femelle se cloi- \ sonner lui-même et donner des anthérozoïdes. L Les oogones de ce Saprolegnia sont analogues à ceux du S. monoica, mais plus petits et contenant un moins grand nombre de spores; les parois sont de même perforées, mais il n'y a pas de branches latérales; des centaines d'oogones n’en ont pas montré trace (4). n'a pas vu la pénétration des anthérozoïdes dans l'oogone par les ouvertures disposées à l'avance, mais son opinion, dit-il, se laisse facilement justifier sans cela. En résumé, la preuve qu'on à affaire à un organe véritable de la plante, et non à un parasite, se trouve dans les faits suivants : 1° La simultanéité de ces articles et des oogones ; 2° Leur développement normal de haut en bas; 3” L'apparition de la payille longtemps avant la formation des corps agiles ; h° L'analogie des papilles sporangiales des Saprolegnia avec celles de ces articles, et surtout avec la papille de l’article ter- minal ; 5° La décomposition des corps agiles, qui périssent sans germer ; 6° L'absence constante de branches latérales et la perforation naturelle des oogones. (4) M. Pringsheim en rencontra cependant quelques-unes, mais très-rares, et dans ce cas, dit-il, les branches latérales n'émettaient pas de prolongement comme les branches latérales ordinaires; il en figure (pl. XXII, fig, 6) un individu, muni de ceS cloisons particulières. 76 MA. CORNU. Ces raisons paraissent assez convaincantes ; mais, sans entrer dans des détails qui seront développés plus loin, donnons tout de suite une réponse à chacune d’elles. 4° I avoue lui-même que le maximum de développement de ces Corps agiles est antérieur au développement complet des oogones; on l'observe même souvent sans qu'aucun oogone n'apparaisse ultérieurement. 2° Le développement de haut en bas s’expliquerait aussi bien dans l'hypothèse d’un parasite. En quoi d’ailleurs ce développe- ment est-1l normal ? 3° S1 la papille est une formation qui dépend du parasite, il n'est pas singulier qu’elle précède l'apparition des corps agiles. h° L'analogie de cette papille avec celle des sporanges ordi- naires est très-discutable et sera démontrée mexacte ; la place de la papille de l’article terminal est assez variable ; il yen a quel- quefois deux, ni l’une ni l’autre n'étant terminales. 5° Chez les Chytridinées, les zoospores germent très-difficile- ment dans l’eau. M. AT. Braun, dans sa monographie, ne repré- sente pas une seule germination. 6° La perforation des oogones et l’absence de branches laté- rales démontrent la nécessité des anthérozoïdes, cela est sûr ; mais les formations dont il s’agit se retrouvent sur des espèces munies déjà de branches latérales : j'en aitrouvé d'identiques sur le Saprolegnia spiralis, et les Achlya pelyandra etracemosa Hild. M. Pringsheim en représente lui-même sur une espèce qui parait être le S. monoica. D'un autre côté, on rencontre le S. feraxæ avec des oogones dénués de branches latérales, sans rien qui res- semble à ces filaments articulés; M. Pringsheim n’a rien décrit de pareil dans son mémoire sur ce sujet (4). MM. Thuret (2) et de Bary (5) n'ont rien signalé d’analogue. On ne les rencontre d’ailleurs pas toujours ; ces formations sont accidentelles et n'ont aucun rapport avec la fécondation : elles seront étudiées en (1) Entwickelungsgesch. d, Achlya prolifera (S. ferax) (Nova Acta Acad. N. C., t XXIU). (2) Ann. des sc. nat., Bor., 3° série, 1850, t. XIX, p. 229, pl. 22. (3) Bot. Zeitung, 1852, p. 473. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 77 détail un peu plus loin; je propose de les désigner sous le nom de Aozella sepligena. Le mode de développement en sera indiqué, ainsi que celui d’un second mode de reproduction de ce parasite, qui est constitué par des spores immobiles. Le Saprolegnia dioica Pringsh. semble n’être autre chose que le S, ferax (Gruith.), attaqué par le Rozella sepligena. Anthéridies de l’Achlya dioica Pringsh. (1), Le second cas de la diœæcie s’est présenté sur un Achlya qu'il nomme À. dioica. Les organes mâles ont les plus grandes ana- logies avec ceux de l'espèce précédente : les filaments se cloi- sonnent de même, mais le contenu, au lieu de s'organiser directe- ment en corps agiles, se concentre et, par un développement mal connu, se dispose en sphérules toutes égales, qui ont le même diamètre que les zoospores arrivées au repos. — Plus tard, elles présentent des vacuoles comme les articles du $. dioica, puis cette apparence écumeuse dont nous avons parlé; enfin, dans leur intérieur, on voit se former un certain nombre de corps agiles, de vingt à trente dans chacune d'elles (fig. 7). Hs se répandent dans l’intérieur de l’article qui contient leurs cellules mères; celui-ei ne tarde pas à s'ouvrir à son tour par une ou plusieurs papilles, etles anthérozoïdesse répandent au dehors. Par leur structure ils sont identiques avec ceux du Saprolegnia ; leur sorte s'opère régulièrement dans chaque article successivement en partant de l'extrémité terminale; après qu'elle a eu lieu, les articles sont remplis (fig. 16 et 17) des sphérules vides qu'ils ont abandonnées. Le parallélisme des deux organes mâles est complet : chez l’une des espèces, le Saprolegnia, il imite le sporange des Saprolegnia ; chez l’Achlya, le sporange des 4chlya. Les preuves alléguées pour établir que les organes mâles de l’Achlya ne sont pas dus à un parasite, sont les mêmes que dans (4) Nous verrons plus loin que cette formation n’est autre chose qu'une Chytridi née parasite, le Woronina polycystis. (Vox. pl, 7.) 78 ME. CORNE. le cas précédent, et elles se rétorqueraient par les raisons qui ont servi à rétorquer les arguments précédents. J'ai rencontré ces formations sur le Saprolegma spiralis et l'A. polyandra Hild., espèces munies de branches latérales. Elles ne caractérisent done pas plus les Saprolegnia que les Achlya ; elles sont constituées par les sporanges d'un parasite pour lequel je propose le nom de Woronina polycystis, et qui sera étudié plus lom. Les Rozella septigena et Woronina polycystis vivaient simul- tanément sur les deux Saprolégniées citées plas haut : le pre- mier occupait parfois des filaments porteurs d'oogones et les branches latérales, comme M. Pringsheim en a figuré un exemple; il occupait même l'intérieur de l’oogone. — Ainsi loin de servir à la reproduction, il l’entravait. Les spores immobiles ont été aussi observées chez le #7. poly- cyslis. Anthéridies douteuses d'un Saprolegnia (1), il reste encore, pour compléter l'exposé de la théorie de M. Pringsheim, à parler de l’une des sortes de sporanges à petites zoospores trouvée par M, Nægeli, étudiée ensuite par MM. Cien- kowski et Al. Braun, et que ce dernier avait nommé Chytridium Saprolegni®. Dans son premier mémoire sur les Saprolégniées, M. Prings- heim la considère conime constituant une deuxième forme d’an- théridies. H diten effet (2): «de ne crois pas me tromper lorsque jé considère comme les anthéridies de ces Saprolégniées dépour- vues de branches latérales ces organes qui ont été vus et repré- sentés la première fois par M. Nægeli, qui ont été signalés de (4) Nous verrons plus loin que ces formations constituent des espèces du genre Olpidiopsis. (Voy. pl 3 et 4; partim,) (2) Hi faut remarquer que M. Al Braun avait représenté [Ueber Chytridium) ces organes Chez ui Saprotequia (S.spiralis ?) muni de branches latérales ; ce sont même les premières qui aient été figurées: C'était une première contradiction avec sa théorie que M. Pringsheim aurait pu apercevoir, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 79 nouveau par M. Al. Braun (1), et qui n’ont été enfin décrits et représentés que par M. Cienkowski. » Ce sont des utricules ovoïdes, de dimensions très-variables, ordinairement tres-nombreuses, et qui prennent naissance dans les extrémités renflées des filaments, par une formation cel- lulaire hbre (pl. 3, fig. 4, 4, 6,8), sans que l'extrémité de l’utri- cule se soit préalablement divisée par une cloison, comme cela arrive pour les sporanges et les oogones. Le contenu plastique de ces cellules se transforme en un nombre extraordinaire- ment grand de corpuscules mobiles (pl. 3, fig. 4 et 8), dont la dimension est à peine de +, de nullimètre ; ils s’échappent finalement par un appendice, qui, partant de ces cellules ovoïdes, traverse la membrane de l'extrémité de l'utricule pour aller s’ouvrir au dehors. Leur volume, excessivement petit, rend déjà invraisemblable qu’ils puissent avoir, comme M. Nægeli le sup- posait, la valeur de zoospores. » Je me suis en outre assuré qu'ils ne germent pas, mais qu'ils dépérissent au bout de quelque temps sur le porte-objet qui sert à l'expérience, sans subir aucun développement, » Il a rencontré ces formations sur des Saprolegnia et sur des Achlya, et il les nomme «une seconde forme encore douteuse d’anthéridies » . Tout ce passage procède directement de celui de M. AI. Braun, cité plus haut. Dans son second mémoire sur les Saprolégniées 1l revient sut celte idée, mais il est moins affirmatif que pour les productions précédentes ; 1l donne des détails sur la formation de ces cel- lules au milieu du filament renflé, 11 décrit les trainées plasma tiques qui l'entourent, puis le développement du contenu de ces cellules en zoospores, qui rappelle ce qu'on observe chez le S. dioica et l'A. dioica : Ce sur quoi il insiste. Ce sont, dit-il, des organes de même nature ; les corps agiles qui s'en échappent sont identiques et ne germent pas plus dans un cas que dans l’autre, M. Pringsheim se demande quel est le rôle de ces corpuscules ; (1) Jahrbuech, f, iwiss, Bol, KT ps 296, — Ann, des se, nat, Bor., 4€ sétics t XI, p. 362. 80 RS. CORNU. on verra dans le résumé de la discussion à laquelle il se livre, combien il est embarrassé : le deuxième mode de reproduction du parasite constitué par des spores échinées n’est pas fait pour éclaircir la question à ses yeux. Voici du reste celte discussion : Ces cellules appartiennent-elles bien au Saprolegnia? Cela ne peut faire l’objet d’un doute, car on les trouve à l’intérieur de filaments développés à travers un sporange déjà vidé, ce qui caractérise les Saprolegnia. Ce sont peut-être des parasites ? Mais il faudrait voir com- ment le germe s'introduit. La question ne sera pas résolue tant qu’on n'en aura pas observé directement l'introduction. La facon dont elles s'ouvrent au dehors rappelle les CAytri- diumetle Pythium entophytum, mais les corps agiles n’ont aucune analogie avec les zoospores caractéristiques des Saprolégniées et des Chytridinées; ils ne germent pas, donc ce sont des anthé- rozoïdes. On pourrait peut-être les considérer comme les plantes mâles d'un parasite unicellulaire; les spores échinées seraient les indivi- dus femelles appartenant à un Chytridium ou à un Pythium. Ces cellules échinées sont rares. M. Cienkowski en repré- sente sans les distinguer des sporanges; on ne les rencontre cependant jamais vidées. M. Pringsheim n’a jamais vu d’infusoires ni d’autres orga- nismes pénétrer dans les filaments des Saprolégniées; ni de z00spores de Chytridium ou de Pythium, ce qui serait facile à voir (?); et d'où viendraient les parasites ? Il compare ensuite la perforation de la paroi du filament par le prolongement issu de cette formation ambiguë à celle que pro- duisent pour s'échapper les androspor es, ce qui pourtant ne peut les faire ranger parmi des parasites. Ne seraient-ce pas des parasites issus de zoospores mâles, para- sites internes, tandis que les androspores germant sur les oogones seraient des parasites externes? Mais ce n’est pas prouvé. On aurait ainsi des formes monoïques, dioïques ou gynandrospo- riques, analogues à celles qui ont été vues dans les familles MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 81 des OEdogoniées et des Coléochétées; mais iei la complication serait plus grande. On voit que cette idée de parasitisme s'impose à lui, et mal- gré la grande analogie qu'il trouve avec les organes mâles du Saprolegniaet de l’Achlya, 11 n'est pas convaincu. Dans l’explica- tion de la planche, il les désigne sous le nom d’anthéridies (?) d'un Saprolegnia. Ces anthéridies douteuses, je les tiens, au même titre et pour les mêmes raisons que précédemment, pour un véritable Chytridium, comme le pensait d’abord M. AI. Braun, comme inclinait à le croire M. de Bary (1). Il me suflira de dire qu'elles se rencontrent chez des espèces munies de branches latérales : on peut citer le Saprolegnia de M. Al. Braun, lÆchlya leucosperma et le Dictyuchus monosporus Leitgeb; on retrouve en outre le second mode de reproduction constitué par des spores échinées. Cette opinion est donc absolu- ment certaine. Ces cellules libres appartiennent, soit au Chytridium Sapro- legniæ À. Br., soit à des espèces voisines : tout cela sera examiné plus tard, quand nous les étudierons à nouveau, à un point de vue différent de celui auquel nous nous sommes placé 1er. FÉCONDATION PAR ANTHÉROZOIDES. La théorie de M. Pringsheim étant démontrée imexacte, où faut-il chercher les organes mâles des Saprolégniées, peu nom- breuses du reste, dépourvues de branches latérales ? Quand on étudie le Saprolegnia ferax, on n'y rencontre jamais, outre les oogones, autre chose que des sporanges. C’est ce qu'ont observé MM. Thuret, Pringsheim et de Bary. Mais si, d’une part, la nécessité de la fécondation est évidente, et si, de l’autre, on ne rencontre que des oogones et des sporanges, \ on est alors amené à se demander si tous les sporanges qu'on (1) Morph. und Phys. der Pilie, p. 155. — Ann, des se. nat., 4866, 5€ série, t. V, p. 333. 5€ série, Bor. T. XV. (Cahier n° 2.) 2 6 82 RE. CORNU. regarde comme identiques entre eux ont bien la même signifi- cation et le même rôle. Monoblepharis, nov. genus. (PL 2.) Dans le geure Monoblepharis, la reproduction sexuée a été observée sur les deux espèces à sporanges cylindriques; on y trouve des anthérozoïdes nés dans de petits sporanges spéciaux plus où moins séparés des autres ; ils ont la forme des zoospores et fécondent la gonosphérie unique en se fondant avec elle. C’est par l’étude de ces deux espèces que nous allons continuer, et l'on verra quelle imduction puissante on peut en tirer pour les espèces de Saprolegnia et d'Achlya, chez lesquelles on ne trouve que des sporanges et des oogones. Ces deux espèces de Monoblepharis sont identiques, si l’on ne considère que les filaments végétatifs et les sporanges; mais l'appareil de reproduction sexuée montre entre elles des différences considérables et profondes ; c’est lui qui servira à les distinguer. Oogones ; leur développement. — Chez l'une d'elles, l’oogone est sphérique, solitaire à l'extrémité du filament, ou faussement latéral par suite de l'accroissement ultérieur de l'axe au-dessous de lui. Cette forme de l’oogone est caractéristique et suflit pour distinguer cette espèce de l’autre; Je propose de la nommer Monoblepharis sphærica (pl. 2, fig. 1-6). L’extrémité du filament, qui doit se changer en oogone, se renfle en massue, puis se gonfle de façon à présenter l'aspect d'une sphère (fig. 2). Le plasma afflue à cette extrémité et se condense bientôt en une foule de grains oléagineux, brillants, jaunâtres et réfringents ; pendant ce temps le renflement sphé- rique se sépare et s’isole par une cloison. Bientôt après on y con- state, comme chez les aogones des autres Saprolégniées, un épaississement notable de la paroi. L'oogone ainsi développé a toujours la même forme. Immédiatement au-dessous de lui, se trouve une portion, où le plasma finement granuleux, trouble et peu réfringent, pré- sente un aspect entièrement différent, et montre les divers indices d’un sporange en voie de formation (fig. à a). Elle MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 53 a une longueur égale à quatre ou six fois son diamètre ; elle n’est nullement dilatée et est la continuation directe du fila- ment qui la supporte, sans qu'il y ait le moindre changement de dimension ou la moindre différence. On remarque seulement un prolongement dirigé vers l’oogone, comme si l'axe s’accroissait latéralement; mais le développement ne va pas plus loin, et cette partie s'isole par une cloison. Elle présente tous les caractères d'un petit sporange : c’est l’anthéridie. Comme l’oogone, elle est constante de forme ; elle occupe aussi une position constante. Donc, en résumé, les oogones du À. sphærica sont sphériques et munis d’une anthéridie unique, située au-dessous d'eux dans le filament. Ils sont généralement solitaires et très-rarement gémi- nés. Ces organes ont une forme identique chez tous les individus. Il est loin d’en être de même dans la seconde espèce. Les oogones y sont de forme différente, suivant qu’ils portent ou non des anthéridies, qu'ils sont solitaires ou groupés; le groupement: d’ailleurs est variable comme le nombre et la position des anthéridies; Je propose de lui donner le nom de Monoblepharis polymorpha (pl. 2, fig. 7-32). L’oogone, quand il est isolé, est ovoïde, obtus à son extrémité supérieure et tronqué à sa base (fig. 7, 8 et 10): quand plu- sieurs oogones sont placés à la file, cette forme est un peu altérée ; l'inférieur porte une sorte de plate-forme latérale sur laquelle vient s'appliquer celui qui est immédiatement supérieur, et ainsi de suite en remontant. On voit que plusieurs dispositions pour- ront avoir lieu suivant la disposition de la plate-forme à droite ou à gauche, d'un même côté où non. On trouve parfois un grand nombre d'oogones aimsi superposés, jusqu'à douze. Tantôt ils sont solitaires, tantôt réunis en grand nombre à l'extrémité des filaments; quelquefois ils sont au contraire interealaires. Ces diverses formes seront signalées ultérieurement quand on fera l’histoire de cette espèce. De même que celles des oogones, la forme et la disposition des anthéridies et leur situation même sont des plus variables. Tantôt, en effet, comme chez le M. sphærica, elles supportent l’oogone (pl. h, fig. 15 a); tantôt elles partent du pied de cet ël RE. CORNE. oogone, ou sont situées sur lui (pl. 2, fig. 7 et 8), soit sessiles, soit à l'extrémité d’un filament plus ou moins long. Ces diverses dispositions sont quelquefois mélangées; plusieurs anthéridies peuvent être disposées en file, comme les sporanges, auxquels elles ressemblent entièrement, sauf la taille, et être placées sur eux ; on peut en voir plusieurs sur un même oogone et parfois des oogones réunis en groupe ne portent pas une seule anthéridie. Dans ce cas elles sont en général situées aux extrémités des filaments. | On les confondrait avec des sporanges, n’était leur taille très- réduite, leur longueur moims développée, et surtout la présence d'un grand nombre d’entre elles sur les oogones eux-mêmes ou dans les environs. La différence entre les deux espèces est bien caractérisée par les oogones Jeunes : nous allons voir qu'il y a une différence encore plus grande entre elles pendant et après la fécondation. Préliminaires de la fécondation. — Lorsque la fécondation est sur le point de s'accomplir, des changements notables se pro- duisent dans loogone. La partie supérieure, Indistincte dans l’une des espèces, est un peu proéninente dans l’autre; elle forme une papille obtuse dans le . sphœærica (fig. 3). Elle se dissout lentement, laissant à sa place une ouverture dont le diamètre égale jusqu’au tiers du diamètre de l'oogone (fig. 4). En même temps le contenu de l’oogone subit des modifications considérables. Les globules oléagineux uniformément répandus dans tout l'intérieur se ras- semblent vers la partie médiane et s'y accumulent. Le plasma se détache de la partie inférieure et il remonte, laissant au-dessous de lui un liquide sans réfringence et sans granules, qui a tout à fait l'apparence de l’eau. En même temps il quitte aussi la partie supérieure et se dispose un peu au-dessous du niveau de l’ou- verture. fl est presque incolore, réfringent, non granuieux, et renferme à son centre loutes ces gouttelettes oléagineuses, jau- nâtres et brillantes, dont nous avons parlé. Il forme une large bande transversale, qui ne laisse aucune trace de plasma au- MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 89 dessus et au-dessous (fig. 5). La surface supérieure et l'infé- rieure sont légèrement bombées; le volume est environ les trois quarts du volume total. C'est la gonosphérie. Elle peut être con- sidérée comme formée d’un globule aplati dans le sens du dia- mètre vertical; elle ne touche ni la partie supérieure de l'oo- gone, ni l'inférieure, mais s'applique exactement sur les parois latérales. C’est donc un cas intermédiaire entre les JEdogonium. où la gonosphérie est libre, et les F’aucheria, où elle s'applique sur toute la paroi. On voit en même temps dans l’anthéridie se produire une remarquable transformation. Quand elle est située sous l'oogone, comme dans le Monoblepharis sphærica, ou sur lui, ou à côté de lui, comme dans quelques formes de l’autre espèce, la simulta- néilé des phénomènes s’observe aisément. On voit en une vingtaine de minutes les anthérozoïdes se former aux dépens du plasma séparé en petites masses et sortir au dehors. Dans tous les cas, les anthéridies se comportent comme de petits sporanges. Les anthérozoïdes, au nombre de cinq à six chez le M. sphærica, sont disposés en file (fig. 4). Il en est de même chez le M. poly- morpha, le plus généralement; cependant on y rencontre des anthéridies plus riches en corps agiles, surtout lorsqu'elles ne sont pas dans le voisinage des oogones. La segmentation du plasma et la sortie des anthérozoïdes sont identiques en tout point à ce qui a été dit à propos des zoospores. Ajoutons encore que les anthérozoïdes ont la même constitution qu'elles et n’en diffèrent que par leur taille moitié moindre (1). La fécondation a lieu par la fusion des éléments de la gono- sphérie avec ceux d’un anthérozoïde, après la pénétration de ce dernier dans l’intérieur de l’oogone. Les moyens qui facilitent cette pénétration sont assez spéciaux. Chez le M. sphærica, l'ouverture de l’anthéridie est placée presque sous l’oogone et dirigée vers lui (fig. 5). Chaque anthé- rozoïde à sa sortie touche le plus souvent loogone : s'il ne le (1) Cependant on doit dire que les premiers anthérozoïdes seuls montrent le siu- gulier mode de traction du cil (voy. p. 15); les derniers (comme les dernières z00- spores demeurées au fond du sporange) s’échappent presque librement les uns après les autres. 86 Æ. CORNE. touche pas, il s'échappe et nage dans le liquide comme une petite zoospore ; s’il le touche, au contraire, il y reste adhérent et de- meure Comme attaché à sa surface. Chez le Monoblepharis polymorpha, l'extrémité de l’anthéridie est libre et s'ouvre à l'extérieur, loin de Foogone; les anthéro- zoïdes sortent el nagent comme des zoospores. Au bout de quelque temps, lorsqu'ils sont en assez grande abondance dans la prépara- tion, on les voitentourer les oogones arrivés à l’état indiqué plus haut et se fixer à leur surface pour y ramper. ai vu plusieurs fois des anthérozoïdes, nageant en ligne droite et avec rapidité, ren- contrer un pareil oogone et s’y fixer en s'arrêlant brusquement ; ils heurtaient cependant les filaments végétatifs, les oogones trop Jeunes ou déjà munis d’oospores, mais sans jamais s’y arrêter. Quelle est la cause qui les retient; est-ce un mucus ou toute autre matière ? On observe ici une cause analogue à celle qui dirige les anthérozoïdes des OEdogonium monoïques vers l’ori- fice de l’oogone. Cependant cet arrêt brusque ferait plutôt croire à une force mécanique les assujettissant à la surface. Lorsque les anthérozoïdes se sont fixés sur l’oogone, ils s'y déplacent lentement en rampant à la manière des Amibes (pl. 2, fig. 41-21); ils portent dans un sens où dans l’autre telle ou telle partie de leur plasma : on voit alors le reste suivre; on constate le glissement des granules dans l'intérieur; mais, d'après leur nombre ou leur position, on ne peut dire que ce soit plutôt la partie antérieure qu’une autre partie quelconque, qui dirige le reste. Ils se meuvent ainsi dans une direction où dans une autre, tantôt à droite, tantôt à gauche, prenant les formes les plus variées. Dans cette reptation, le cil est le plus souvent placé perpendiculairement à la surface; faut-il en conclure que c’est la partie antérieure qui en est la cause? Le cil, du reste, reste roide, mais oscille lentement, changeant de direction lorsque la partie qui le supporte change de place; 1l est étranger à l’ori- gine de ce mouvement et est entrainé par lui. L'anthérozoïde demeure, sans s’en éloigner beaucoup, sur les parties de loogone voisines de l'ouverture, mais n’y pénètre souvent qu'après un temps fort iong. C’est d’ailleurs une preuve qu'il peut demeurer MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 87 longtemps sans arriver au repos, faculté qu'il partage avec les z00Spores. Dans l’une des préparations soumises à l'examen microsco- pique se trouvait un oogone incomplétement ouvert, probable- ment par suite d’un accident si fréquent dans ces végétaux déli- cats (fig. 10) ; la gonosphérie était en bon état; cinq anthéro- zoïdes étaient fixés sur l’oogone, et pendant six heures un quart que je les observai, ils tentèrent de pénétrer dans l'intérieur sans pouvoir y réussir : leur vitalité est donc très-grande (1). Les uns demeurent presque immobiles et remuent à peine; d’autres sont plus actifs et se déplacent rapidement (fig. 11-17 et 18-21). Quelques-uns mème, plus ou moins agiles sur l’oo- gone, peuvent s'en détacher brusquement et se mettre à nager dans le liquide. Fécondation : formation de l'oospore. — La fécondation s'opère par la pénétration d’un anthérozoïde par l'ouverture largement béante de l’oogone. | J'ai constaté sur le Monoblepharis sphærica les divers phéno- nènes qui viennent d’être décrits. J'ai observé plusieurs fois la sortie des anthérozoïdes et leur mouvement à la surface de loo- gone (lig. 5), mais sans voir la pénétration directe. L'existence d'une oospore située dans l’intérieur de l’oogone, la position con- stante des anthéridies, placées d’une façon invariable, et la pré- sence des anthérozoïdes montrent clairement comment la fécon- dation doit avoir lieu. Il y alà une analogie extrême avec ce qui se passe chez les OEdogonium monoïques ; malgré ces indications, je n'ai pas vu toutes les phases de la fécondation. Si j'avais eu la plante en bon état pour longtemps et le loisir de l’étudier, j'au- rais pu Ja suivre ; mais j'étais gêné par le temps et la petite quantité de matériaux d'étude; 1l y avait en présence deux espèces, dont lune rappelait plusieurs genres d’Algues connues, et dont l'autre, au contraire, s’éloignait notablement de ce (1) Je n’ai vu ni le commencement ni la fiu du mouvement ; la préparation se dessé« cha pendant une interruption. La durée possible de ce mouvement est donc encore supérieure à celle qui est donnée ici, 88 M. CORNU. qu'on est habitué à voir; elles se trouvaient ensemble : celle qui semblait la moins intéressante fut donc sacrifiée pour l’autre. Cet exemple montre les difficultés que présente l’étude des Saprolégniées. La culture de ces espèces est très-incertaine et réussit incomplétement ; on à done un double obstacle à sur- monter, celui qui provient de l'observation et celui qui provient de la conservation incertaine du sujet. On doit done se restrein- dre strictement à la partie la plus importante. Cependant les observations ne firent pas complétement défaut. La gonosphérie, après avoir quitté les parois latérales de l’oogone, devient sphérique, et se tient au centre de la cavité: elle est munie d’une membrane mince et lisse au début. Il ne reste plus aucune trace des anthérozoïdes, qui, au nombre de deux ou trois, placés à la partie supérieure de l'oogone, y ram- paient lentement, non loin de l’ouverture. Ce qui n’a pas été vu, c'est l'instant précis où la gonosphérie se détache des parois en perdant sa forme aplatie et devient sphérique. Ilest facile, du reste, de combler cette lacune par la pensée, surtout après l’exa- men du W/noblepharis polymorpha. Chez cette dernière espèce, l'oospore est extérieure à l’oogone et y est cependant adhérente. Ce fut une des premières Sapro- légniées lignicoles que je récoltai; elle avait depuis longtemps accompli sa végétation, 1l n’en restait que des lambeaux, et je ne compris pas d'abord la signification de cette oospore extérieure ; ce ne fut que plus tard, après avoir rencontré le Monoblepharis sphærica, que je m'en rendis compte. Mais comment cette oospore sort-elle de l’ongone? C’est ce que je tâchai de voir et d'observer de préférence à tout le reste. Chez le M. polymorpha, la fécondation à pu être suivie; elle y présente des phénomènes spéciaux. La gonosphérie y forme ce gros globule aplati dont nous avons parlé plus haut, et qui remplit incomplétement l’oogone; la par- tie antérieure est, comme dans les ŒEdogonium (1), plus claire et non granuleuse. Les anthérozoïdes rampent à la surface de l'oo- (1) Fig. 10 k, fig. 22 k. C’est la tache germinative (Keëmfleck). Les gonosphéries des autres Saprolégniées n’en présentent pas. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 89 gone, et l’un deux arrive enfin à rencontrer l'ouverture (fig. 23). La matière qui le constitue s’épanche comme un corps visqueux sur la surface de la gonosphérie. On lui voit prendre la série des formes indiquées dans les figures 23-27 et dessinées pendant cet instant. L’abouchement et la fusion durent deux minutes en tout, Il demeure quelque temps distinct de la gonosphérie ; le cil visible et roide restant en arrière. Mais il disparaît deux minutes après environ, soit qu'il se réunisse à la masse, soit qu'il se dis- solve dans le mucus de la partie antérieure de la gonosphérie. La gonosphérie alors, par un mouvement lent, se renfonce dans l’oogone jusqu’à la base et y demeure environ cinq mi- nutes : elle S'applique sur la cloison basilaire sans en remplir cependant très-exactement les angles. Après ce laps de temps, la gonosphérie se détache du fond en commençant par les angles (fig. 28) et s’'épanche lentement au dehors. On peut suivre aisément la marche des globules qui sortent par l'ouverture, d’un mouvement continu, avec le plasma qui les environne (1). Cette sortie dure en tout huit minutes; l’épanchement du plasma arrivé à l'ouverture en dure environ cinq (fig. 28-31). A quoi sont dus ces mouvements ? L’endosmose seule est im- puissante à expliquer l'un et l’autre; il y a donc ici une cause en dehors des raisons purement physiques. La sortie v’a lieu qu'après la fécondation, je m'en suis bien rendu compte. Dans un grand nombre de cas j'ai rencontré des oogones où la gonosphérie, prête à être fécondée et en bon état, ne subissait l’action d'aucun anthérozoïde, soit qu’il n'y en eût pas dans la préparation, soit qu'ils ne se fussent pas fixés sur l’oogone, et, même après plusieurs heures, la gonosphérie ne s’échappait pas. Au contraire, je vis plusieurs fois des anthéri- dies émettre sous mes yeux leurs anthérozoïdes, la fécondation avoir lieu, et la gonosphérie sortir au dehors dans l’espace de moins d’une heure. (4) Dans les figures de la planche 2, les globules ne sont pas représentés, parce que leur position exacte n’a pu être dessinée pendant ce mouvement, 90 M. CORNE. Je dois cependant dire que ee mouvement du plasma en arrière dans l’oogone ne se montra pas toujours ; mais je le tiens cepen- dant pour le cas normal, car il m'est apparu dans des circon- stances de santé de la plante et d'observation les plus favorables. La gonosphérie fécondée a quitté l'oogone sans y laisser un seul globule; elle est située à l'ouverture (fig. 31), le contour en est parfaitement sphérique ; mais elle ne flotte pas dans le liquide, et demeure encore adhérente aux bords de l’orifice. Elle n’est, du reste, munie d'aucune enveloppe, cela est mis hors de doute par la facon dont elle vient de s'épancher. Après un quart d'heure les contours sont plus nets et semblent indiquer déjà la formation d’une membrane (1). Les globules, qui primitivement à la sortie sont disséminés, se rassemblent au centre et prennent un aspect plus nettement déli- mité. D'autre part, le plasma qui les entoure devient plus aqueux et plus clair. La membrane de l’oospore est mince, lisse et incolore, dans les premiers instants, lorsqu'elle est très-jeune ; au bout de quelque temps elle change tout à fait d'aspect. Comme, dans les deux espèces, la constitution est identique et le développement est Île même, ce qui va suivre s'applique aux deux. Pius tard cette membrane se couvre d’ornements qui méritent une mention spéciale, parce que, là encore, le genre Mono- blepharis s'éloigne de tous les genres de la famille. La paroi de l'oospore (fig. 6), même après un fort long temps, lorsque cette dernière flotte dans l’eau après avoir quitté: l’oogone, c’est-à-dire à l’époque de la maturité parfaite, ne peut se dé- doubler, comme cela a lieu chez les Péronosporées, et particu- lièrement les Cystopus (2), qui présentent aussi des ornements ; ainsi on ne voit pas d’endospore bien distincte de l’épispore. Ea membrane, qui semble simple et qui est probablement double, se (4) Le nombre des préparations sur lequel ces faits furent observés fut assez restreint ; je n'ai pas voulu ies perdre en les traitant par un réactif, pour démontrer un fait sur lequel on a déjà beaucoup de données. I suffira de citer les exemples analogues de production de membrane dans la fécondation des Fucacées, Vaucheria, Œdogoniées, etc. (2) Voyez de Bary, Ann, des sc. nat., Bor., 4° série, 4863, t. XX, pl. 2, fig. 6. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 91 couvre en vieillissant, à sa partie externe, de verrues très-petites et hémisphériques, en même temps qu’elle se fonce en couleur et prend une teinte brune. Ces verrues sont transparentes et réfringentes, et semblent participer à cette couleur brune; mais quand on ne s’en tient pas à un examen superficiel et qu’on les examine soigneusement en changeant le point et faisant mou- voir la vis du microscope, on remarque qu'elles sont incolores et que l'illusion provient d'un phénomène de réflexion totale à leur intérieur. Le centre de l’oospore est rempli de granules oléagineux jau- nâtres, tous égaux, pressés les uns contre les autres, et dont la masse est notablement distante des parois. La germination de ces 00spores n’a pas été observée. Si l’on cherche par l’action des réactifs chimiques à se rendre compte de la nature des parois, voici ce que montre le chloro- iodure de zinc. La coloration de la membrane par ce réactif n’a lieu qu’à la longue et après plusieurs heures : la teinte est violet pâle et indique la présence de la cellulose ; mais à aucun instant les ornements de la surface ne se colorent: ils demeurent en- tièrement hyalins, et se voient mieux encore quand l’oospore a été écrasée. La coloration de la membrane de loospore est assez intense en comparaison de celle que prennent les oogones, qui ne se colorent que très-faiblement ; quant aux filaments, leur teinte est à peu près insensible, ainsi qu’il a été dit plus haut (page 16). Le diamètre de l’oospore varie de 0"",016 à 0"",027 environ, dans le rapport de 3 à 5; 1l est en général un peu plus faible chez le M. polymorpha que chez l'autre espèce. La teinte varie beaucoup aussi, mais dans les limites que l’on conçoit, depuis ’état jeune, où elle est incolore, jusqu'a la maturité ; elle offre alors une teinte d’un brun rougeàtre. Dans les deux espèces les oospores sont tellement semblables, qu’on ne peut les distinguer les unes des autres (4). (1) La planche 2 ne donne pas une idée des formes variées du M. polymorpha ; de nouvelles figures seront données ultérieurement : l’oogone de la figure 22 était inter- calaire ; la portion de filament qui lui était adhérente s’est détachée. 92 M. CORNT. Cette similitude extrême des oospores, l'identité absolue des organes de la végétation et de la reproduction par zoospores, ue permettent pas de songer un seul instant à séparer deux espèces aussi voisines et de les placer dans deux genres distincts; et ce- pendant, à ne considérer que le mode de formation de l’oospore, on trouverait eatre elles des différences considérables et pre sque génériques. Quoiqu'on puisse donner à cette idée des dévelop- pements qui la rendraient plus saisissante, il est inutile d’y in- sister : 1l est bon d’ailleurs de noter que certains cas tératolo- giques montrent d’une façon irréfragable le lien qui unit ces deux espèces. Dans certains cas, en effet, la gonosphérie du Monoblepharis polymorpha, ne pouvant s'échapper de l’oogone, s'y entoure directement d’une membrane, imitant en cela le M. sphœærica ; mais la cavité de l’oogone étant trop petite pour la contenir à l’état sphérique, la spore se moule sur les parois ; d’autres fois elle ne s'échappe que partiellement (1). La portion adhérente aux parois ne se couvre pas alors de verrues réfringentes. Enfin on observe, quoique beaucoup plus rarement, un fait caractéristique, et qui est fort remarquable : la gonosphérie du M. sphærica sort quelquefois en partie de l’oogone comme dans l’autre espèce ; je ne l’ai observé qu'une seule fois. Il y a donc passage réel d’une espèce à l’autre par les cas tératologiques qui viennent d'être cités. Or, on peut de ces faits tirer une conclusion particulière au groupe dont nous nous occupons, et qui pourra avoir son 1IMmpor- tance générale. Le mode de reproduction asexuée est très- constant le plus souvent et caractérise le genre; le second mode de reproduction caractérise l'espèce. Nousen voyons un exemple trés-net chez les Saprolegnia, les Achlya et les Aphanomyces ; chez les Pythium, au contraire, il y a, comme chez les Monoblepharis, une variation considérable dans la forme des sporanges et même dans le mode d'émission des zoospores. Chez ces derniers, le se- (4) Dans un oogone, j'ai rencontré deux petites oospores provenant évidemment de a division de la gonosphérie unique, séparée accidentellement en deux parties. L MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 93 cond mode de reproduction présente aussi des différences assez importantes. La conséquence générale, c’est que, même pour un groupe très-circonscrit, 1l ne peut y avoir une caractéristique certaine, un criterium parfait pour le genre, puisque, dans des plantes si voisines, les propriétés constantes chez les unes de- viennent variables chez les autres, et réciproquement. Maintenant que l'existence de véritables anthérozoïdes est démontrée et hors de doute dans les Saprolégniées, on voit que M. Pringsheim avait méconnu, comme 1l à été dit page 58, la véritable analogie de cette famille avec celle des OEdogo- niées. — Les caractères communs ne se rencontrent que dans le genre Monoblepharis. On y trouve en effet des anthé- rozoïdes semblables aux zoospores, présentant le même mode de sortie hors de l’anthéridie, et fécondant un oogone à large ouverture contenant une gonosphérie unique. — La ressem- blance est la même avec les Coléochétées. Il n’y à pas, parmi les Algues, de groupes qui se rapprochent autant des Monoble- pharis que ces deux-ci. Les analogies sont cependant toutes générales et les différences sont assez sensibles pour qu’on n'y insiste pas. Quant à l'oospore externe, elle rappelle de loin les oospores libres des Fucus, du Pandorina, et du Gonatozygon, cette sin- gulière Desmidiée chez laquelle la fusion du contenu des cel- lules accouplées s’accomplit dans le liquide extérieur. Saprolegnia et Achlya dépourvus de branches latérales (1). Revenons maintenant aux Saprolegnia et Achlya dépourvus de branches latérales, chez lesqueis bien des observateurs n’ont trouvé aucune de ces formations parasites prises à tort par M. Pringsheim pour des anthéridies. Ces observateurs, dont les noms sont faits pour inspirer de la confiance, sont MM. Thuret, de Bary, et M. Pringsheim lui-même. J'ai plusieurs fois observé le Saprolegnia feraæ muni d’oogones avec spores immobiles, et, (4) On a vu plus haut que les deux espèces dans ce cas sont les S, ferax (Gruith.) et l'A. prolifera Nees (A, dioica Pringsh.), Je n'ai rencontré que la première, 94 M. CORNT. quoique Je fusse désireux de rencontrer les organes mâles, je ne trouvai jamais que des sporanges. Mais après ce qui vient d'être dit des Monoblepharis, on est conduit à se deniander si tous les sporanges sont bien identiques et si quelques-uns, comme dans le genre précédent, ne seraient pas des anthéridies, etless pores agiles contenues dans leur intérieur, des anthérozoïdes. Cette supposition n'a rien de déraisonnabie, puisqu'elle s'appuie sur l’analogie avec d'autres espèces et sur labsence d’autres organes mâles. Le lecteur peut s'étonner que les observateurs n'aient pas dé- couvert une chose si simple, ou ne l’aient pas encore vérifiée, s'ils en ont eu l'idée. Il suffira de répondre que nous retombons en- core ici dans des difficultés assez considérables, qu'il n’est pas toujours possible de surmonter toutes. Il est assez aisé d'obtenir pure une espèce de Saprolegnia quel- conque et de la mener jusqu’à la fructification oogoniale ; mais il est rare de l'obtenir en très-bel état et se prêtant cominodé- ment à l'observation. 1 faut pouvoir la cultiver sur le porte-oh- jet et ne pas examiner des louffes arrachées où brisées, car dans les études délicates que réclame la fécondation, la libre évolution des organes intervient pour beaucoup; de plus, les filaments sont fréquemment couverts d'infusoires qui fatiguent et tuent la plante. Dans le genre qui nous occupe, les zoospores ordinaires, dont le mouvement dure si peu, s'arrêtent en un endroit quel- conque, encombrent la préparation et la rendent moms claire. Il serait, en outre, assez difficile de distinguer, comme chez les Monoblepharis, les sporanges des anthéridies, puisqu'ils sont inêlés : leur taille est probablement différente, mais il y a des sporauges de toute taille. Ce qui déroute surtout, c’est que les anthéridies ne sont pas à une place déterminée, dans une espèce au moins : elles sont irrégulièrement disposées chez le M. poly- morpha, parfois très-loin des oogones et sont semblables aux sporanges ; mais Chez le M. sphærica, dont l'analogie avec l'autre est si grande, leur existence et leur rôle sont hors de doute, leur position les fait reconnaître même par un observa- teur superticiel. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 95 Une autre difficulté provient de ce que l’oogone est muni d’un grand nombre de perforations et non d’une seule : chez les V'aucheria et les OEdogonium, on n’a à surveiller qu’un orifice unique largement ouvert : 1c1 il y en à plusieurs; les anthéro- zoïdes peuvent pénétrer par un nombre considérable d’ouver- tures, sans qu'on puisse les apercevoir; tandis que chez les Algues précédentes et les Monoblepharis tout ce qui se passe à l’ori- fice est visible. C'est à ces causes réunies qu’il faut attribuer l’état peu avancé de nos connaissances sur ce sujet. — Quoique cela n'ait pas été prouvé directement, il me semble établi par analogie, que la fécondation doit avoir lieu dans les espèces dénuées de branches latérales, par des anthérozoïdes semblables aux Zoospores ordinaires et naissant dans des anthéridies faciles à confondre avec les sporanges. Il pourra sembler singulier à quelques personnes que dans plusieurs espèces il y ait fécondation sans anthérozoïdes, mais par conjugaison, comme cela a été montré plus haut, et que, dans d’autres du méme genre, il y ait au contraire fécondation par anthérozoïdes. Mais on ne doit pas s'arrêter à une objection pareille. 11 est tout aussi étonnant (qu'on admette ou non l'existence des anthérozoïdes semblables aux. zoospores) que, dans certains cas, il y ait des branches latérales et qu’il n’y en ait pas dans d’autres, parmi les espèces d’un seul et même genre. On pourrait comparer ce fait, dans un ordre d'idées tout dif- férent, avec celui qui se présente chez les Peronospora. Dans le même genre, des spores de même forme et de même apparence, nées de la même façon et d’un développement identique, sont, les unes des sporanges, et d’autres de simples acrospores ; les unes émettant par germination des corps agiles, et les autres un filament-germe (1). L’analogie est assez étroite avec ce qui vient d’être dit et peut se soutenir : chez nos Saprolégniées, certains filaments sont terminés par des cellules donnant des corps agiles (anthérozoïdes), d’autres par des cellules donnant (1) Les conidies de la même espèce peuvent, dans certains cas, donner naissance soit à des zoospores, soit à un filament-germe, (De Bary, Développement des Champ: par., p: 49, pl. 5, fig. 4.) 96 M. CORNE. un filament (anthéridies des branches latérales), sans que ces cellules terminales se détachent du filament qui les porte. Cela revient à dire que, dans un même genre, l'élément plasmatique destiné à la fécondation (élément mâle), comme l'élément plas- matique destiné à la reproduction asexuée (zoospores), peut être ou non doué de mouvement. C'est une preuve du peu d'importance de l'appareil de pro- pulsion et de la valeur très-grande au contraire de la partie plasmatique (1); ce qui confirme les opinions généralement admises en France. IL est possible et il est à souhaiter qu'on trouve une espèce qui rende plus faciles et moins incertaines que chez le $. ferax la re- cherche et l'observation des corps mâles : c’est une question d’un grand intérêt qui se pose let, et il serait à désirer qu'elle exertàt lémulation des botanistes. DES OOSPORES. Description des oospores. L'action de l'organe mâle sur l'organe femelle détermine la production d’une membrane autour des gonosphéries et les transforme en des spores sphériques immobiles ou oospores. De quelque façon qu'ait lieu le mélange des deux substances, l’une contenue dans l'oogone, l’autre dans la gonosphérie, le résultat est le même. Cette spore est sphérique et présente dans tous les genres une structure presque identique. La membrane de la spore est com- posée de deux parties, l’une externe et dure, l'épispore, qui crève lors de la germination et laisse linterne, ou l'endospore, faire (1) Dans un mémoire récent sur la reproduction des Fougères, M. Strasbuerger pré- tend, contrairement à l'opinion de M. Roze, que l'acte fécondateur est accompli non pas par le globule plastique de l’anthérozoïde, mais par la partie ciliaire : c’est l’opi- nion soutenue auparavant par M. Hanstein et généralement admise en Allemagne. Ce qui vient d’être dit ici est formellement en contradiction avec les idées de ces savants, qui voudraient attribuer une importance trop grande à des organes aussi variables, (Slrasbuüerger, Mém. de l’Acad, impér. des sc. de Saint-Pétershourg, 7° série, 1868, tu XI, n° 3, trad. Ann. des sc, nat., Bor., 5° série, t. IX, p, 241. — Voyez la ré- ponse de M. Roze, Bull. Soc. bot. de France, 1. XIX, séance du 9 février 4872.) MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGVIÉES. 97 hernie au dehors. Le contenu est formé de deux parties en gé- véral; un ou plusieurs globules oléagineux occupent le centre et sont plongés dans un plasma granuleux et plus sombre. Décrivons d'abord plus exactement les oospores de l’un des genres, et nous verrons après en quoi différent celles des autres genres. Elles sont identiques dans les Saprolegnia, Æchlya et Apha- nomyces. L’épispore y est très-faiblement colorée, assez mince et complétement lisse; le contour est exactement circulaire. L'endospore est plus pâle, un peu trouble, d'apparence plas- matique et n’est visible que sur les oospores müres. In'ya entre les deux, quoi qu’en dise M. Pringsheim (1), au- cune membrane intermédiaire ou aucune partie plasmatique ; je n'ai du moins rien pu voir de semblable. Quand on traite, soit par l’acide sulfurique et l'iode, soit par le chloroiodure de zinc, une oospore mûre, on colore en bleu la partie externe et la partie in- terne de la double membrane ; l’intermédiaire, qui est très-pro - bablement la partie interne de l’épispore, se colore plus faible - ment. Si le réactif possède une teinte jaune, elle se colore un peu en Jaune; si au contraire on emploie du chloroiodure de zinc récemment préparé (par l’action de l'acide chlorhydrique sur l’iodure de zinc) et presque incolore, elle ne se colore nullement en jaune comme les matières plastiques, mais seulement en bleu pâle. — Pour que l’épispore et l’endospore se séparent nette- ment, il faut attendre assez longtemps après la fécondation. Le contenu est composé d’un globule oléagineux central, qui remplit presque toute la cavité : 1l est en général coloré en jaune ou en brun pàle. Le plasma qui l'environne est formé, soit de globules extrêmement petits, soit de globules plus gros (de telle sorte qu'il y en ait de 8 à 10 daus un quart de cercle), rangés avec une régularité parfaite : cela semble tenir aux espèces el aussi à l’âge de la plante. Il y en à une, deux ou trois assises sui- vant les cas.— L’Achlya racemosa Hild. présente quelquefois ce 1) Entwick., p. 424. 5e série, Bot. T. NV. (Cahier n° 2.) 3 1 98 VW. CORNE. fait; 1l en est de mème du Saprolegnia spiralis. — M semble même que cela ne se montre que dans des oospores tres-àgées. Parfois le globule oléagineux n'apparaît pas, quoiqu'il soit assez constant, mais il n'est pas, comme le croirait M. Leitgeb (voy. p. 67), un indice de la mort de l'oospore. Les granules et les globules constitués par une matière oléagi- neuse colorée en brun, communiquent à l’oospore une teinte brune très-appréciable. Cette teinte, du reste, tient uniquement à une absorption de lumière, car directement, c’est-à-dire par lumière réfléchie, et non par lumière transmise, elles sont par- faitement blanches. — On peut s'en convaincre en retournant le miroir du microscope, et n’observant qu'avec la lumière qui tombe directement, ou en les regardant avec une forte loupe. Cependant dans certaines espèces, Saprolegnia monoica, Dic- ljuchus monosporus, Apodya brachynema, les Rhipidium, quel- ques Pythium, les globules sont entièrement incolores et les oospores sont d'une blancheur éclatante ; l'Achlya leucosperma üre de là son nom (voy. p. 2h). C'est à tort, à mon avis, que M. Pringsheim dit avoir trouvé de lamidon dans l’intérieur des oospores de ces Champignons aquatiques; je n'en ai Jamais rencontré. Les oospores des Pylhium et Myzocytium sont constituées de même, à une légere différence près; avec l’âge, la paroi se colore faiblement en rose, et acquiert une épaisseur qui attemt jusqu'a la moitié du rayon. Elle se charge en même temps de quelques aspérités. Un grand nombre de trés-petites cavités hémisphériques produisent par leur ensemble des crêtes spé- clales, qu'on ne retrouve que dans ces deux genres, et qui pourraient presque les caractériser. — Mais cela ne se pré- sente qu'à la maturité : dans la Jeunesse. la paroi est incolore, lisse et mince. Cela se rencontre dans ces deux genres seulement qui offrent une membrane épaisse; rien de pareil ne s’observe chez les Saprolegnia où les Achlya, M. Reinke se trompe, quand il représente des perforations dans la paroi des oospores du $. mo: noica (NoY, plus haut, p, 51). MONOGRAPHIE DES SAPKOLÉGNIÉES,. 99 Les Péronosporées présentent une différence beaucoup plus considérable. L'épispore, assez peu épaisse, mais colorée forte- ment, est très-résistante, Elle recouvre des crêtes de forme très- diverse, variant quelquefois même beaucoup dans une même espece. L'endospore est au contraire beaucoup plus épaisse, complétement imcolore et formée de cellulose. M. de Bary dit, à propos des Cystopus : «que la surface de l’épi- spore est presque toujours munie de verrues brunâtres, que ces verrues sont composées de cellulose, colorée en bleu foncé par les réactifs, tandis que la membrane qui les porte conserve sa couleur primitive » (1). Ceci est une apparence et n a pas leu en réalité ; on peut s'en convaincre aisément en étudiant les oospores du Cystopus Bliti. Là, les crêtes sont tres-nettes ; la plante a de plus un avantage, c'est de se prèter merveilleusement à l'étude. Les tiges de l'#ma- rantus Blitum allaquées par ce Cystopus éclatent souvent : le üssu interne est presque exclusivement rempli d'oospores du parasite; mis à nu, 1l se résout en une poussière grise, et, en la délayant avec de la gomme, on oblient une substance à l’aide de laquelle on peut faire aisément d'excellentes coupes de ces oospores, et dont on peut avoir un nombre limité. On reniarque que l’endospore est fort épaisse, formée de couches concen- tiques, qui se colorent d’une facon intense sous l’action du chloroiodure de zine, tandis que les espaces mtermédiaires restent presque incolores. Ces couches sont au nombre de deux ou trois. La supérieure se moule exactement dans les crêtes de l'épispore et se colore fortement en bleu violacé, L'épispore au contraire, brune et encroûtée, ne se colore pas. En regardant une coupe tangentielle, comme M. de Barvy en représente, on aperçoit, dans la rainure formée par la membrane même des crêtes, la portion de cellulose que la lame du rasoir a détachée el qui a bleui sous l’action du réactif. ILest bon, pour bien voir cette particularité, d'avoir recours (1) Développement des Champignons parasiles (Ann. des se. nil, Bor., 4 série: &. XX, p. 18), Il représente, pl. ©, fig, 19, et pl. 3, fig, 14, l'épisporc bleuic, 100 M. CORNU. non pas aux oospores dont la paroi est chargée de verrues. mais à celles qui présentent des crêtes grèles, comme le Cystopus Portulacæ : c’est du reste l’une des espèces sur lesquelles M. de Bary a opéré. En faisant une coupe très-mince, voici ce qu’on remarque : sous la membrane de l'épispore colorée en brun et qui ne se co- lore pas en violet, on trouve la portion de membrane de l’endo- spore exactement moulée, détachée par le rasoir et colorée en violet par le réactif; la coupe de la crête donne donc au centre une ligne épaisse, violette, et, de chaque côté, une ligne jaune. C'est l'inverse de ce que M. de Bary a figuré (loc. cit., pl. 3, fig. 44). Je maintiens cependant mon affirmation contre la sienne : je soutiens que l'épispore ne se colore pas, et que la partie qui bleuit appartient à l'endospore. Il dit, du reste (page 18), qu'il omet la description plus détaillée de la structure de l’oospore, qui l'éloignerait trop du but de son mémoire. Daws le genre Rlipidium, la membrane de l’oospore est munie de erèles; elle présente un contour interne sphérique et est tres-épaisse, mais on ne peut l'assimiler à celle des Pérono- sporées : elle est incolore et devient entièrement violette sous l’action du chloroiodure. L'origine des crêtes est, du reste, com - plétement différente (voy. p. 103). Dans le genre Monoblepharis, la paroi est brune et chargée de verrues hémisphériques incolores. Le centre est rempli de gra- nules oléagineux, tous égaux et jaunâtres, qui se tiennent grou— pés à quelque distance des parois. La membrane est probable- ment double, mais il est difficile de la séparer en deux. La difficulté provient sans doute de la présence de ces verrues incolores et réfrmgentes. Cette membrane est à peu près la seule partie des Monoblepharis qui se colore en violet sous l’action des réacufs; et encore cette couleur est-elle faible, — Les verrues pe participent pas à la coloration. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. A0: Variation du contenu et développement de l’oospore, Le contenu de l'oospore, dès la formation de la membrane, n'est pas identique avec ce qu'il sera plus tard : il est d’abord homogène comme celui de la gonosphérie. Dans les Saprolegnia et les Achlya, on y voit d’abord apparaître une vacuole sphé- rique ou ellipsoïdale, qui montre que les granules (ou les glo- bules, quand la matière oléagineuse est groupée par masses plus grosses) sont appliqués à la périphérie (1). Cette vacuole finit par être remplacée par un gros globule oléa- gineux, et les petits granules par des globules tous égaux entre eux. — Cette dernière transformation n’a lieu qu’assez tard. Chez les autres espèces, la transformation a lieu sans vacuole, du moins je n’en ai Jamais vu. Pendant ce temps, la paroi des oospores s’accroit en épaisseur, mais l'observation du mode d’accroissement présente des diffi- cultés assez graves ; 1l est en effet peu commode à étudier, et cela tient à plusieurs raisons. D'abord les oospores possèdent des parois peu épaisses, surtout chez les espèces à oogones poly- pores; de plus, elles ont un faible diamètre ; enfiu, toutes les plantes se prêtent mal à une longue culture sur le porte-objet, et le développement complet exige beaucoup de temps. Il ressort de là qu’on ne peut fre d'observations que sur un nombre restreint de genres, et qu’il est impossible d'observer l’accrois- sement du même oogone. Il sera utile de choisir les spores chez lesquelles la paroi devienne épaisse et les nouvelles formations puissent s’observer aisément : nous raisonnerons par analogie pour les espèces sur lesquelles l'observation directe est impossible. Si l’on observe à divers états les oospores des Monoblepharis, on constate qu’elles sont, aussitôt après la fécondation, minces (1) Gette vacuole centrale, formée d’un liquide clair, représente peut-être la tache germinative (Keëmfleck) ; elle serait interne, le mélange des deux plasma ayant lieu par la partie interne. Elle est invisible pendant la fécondation : cela peut tenir à l’opacité du plasma périphérique à ce moment, 102 WE. CORNE. et entièrement lisses (pl. 2, fig. 32); plus tard leur mem- brane se charge de verrues transparentes en même temps qu'elle s'épaissit {fig. 6). La teinte jaunâtre se montre vers la même époque. I y a done certainement accroissement par la partie extérieure ; la présence des verrues en est une preuve. Comme l'oospore est située, soit dans une cellule largement ouverle, soit à l'extérieur de toute cellule, il faut admettre que cel accroissement provient du plasma de la spore. — On peut remarquer que dans le cas des spores échinées des Algues, Sphæroplea annulina, OEdogonium echinospermum, Desmidiées ou des Champignons, Syzygites, ete., la membrane est d'abord lisse el se couvre ultérieurement d'ornements dus au plasma de la spore et non au plasma extérieur, puisqu'il n'y en à pas au- tour de ces spores nues ou situées dans des cellules ouvertes. Chez les Péronosporées, Cyslopus et Peronospora, la mem- brane est aussi d'abord mince et lisse, et le contour parfaitement régulier, Plus tard la paroi devient épaisse el brune. Elle est composée alors d’une épispore mince et d’une endospore épaisse. — Si l'on étudie des organes plus ou moins âgés, on arrive aisément à se convaincre que si le diamètre extérieur de l'oo- spore augmente avec l’âge, le diamètre intérieur diminue, de sorte que la membrane s'accroît en épaisseur dans les deux sens, centrifuge et centripète. Cela est très-net sur les Cystopus, le C. eandidus, par exemple. Ainsi, tandis que la partie extérieure se recouvre d’une mem- brane brune et résistante, la partie interne se double d’une membrane cellulosique mcolore et molle : l'accroissement à donc lieu dans les deux sens, à l'aide de productions différentes. Aux dépens de quels éléments est formée la membrane brune et résistante, qui constitue l’épispore? —- M, de Bary dit briève- ment (4) : «L’épispore est formée aux dépens du plasma péri- phérique; celui-ci disparait à mesure que l’épispore atteint sa perfection, et finalement il ne reste qu’une quantité de granules suspendus dans un liquide aqueux et transparent. » Ailleurs il (4) De Barry, Développ, des Chang, p. 18, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 103 est plus explicite (1) : « Ce tégument externe se forme aux dé- pens du plasma périphérique de l’oogone, lequel se précipite peu à peu sur loospore et prend de la consistance. » Il ne signale pas la diminution de la cavité intérieure, qui est le phé- nomène le plus saillant dans l'accroissement de loospore ; l'augmentation de diamètre étant certaine, mais notablement moins évidente. Quant à l'opinion que le plasma extérieur pro- duit l'épispore, il ne létaye d'aucune raison. —— N'est-il pas plus logique et plus conforme à ce qui se passe dans les autres cas, d'admettre que la spore, formée aux dépens d’une partie du plasma cellulaire, se nourrit ensuite aux dépens du reste qu’elle absorbe? Si ce plasma extérieur à la propriété de se déposer en couche membraneuse, sans être élaboré au préalable, pourquoi ne se dépose-t-1l pas aussi sur les parois de l’oogone? — Si au contraire, ce qui est le plus semblable à ce qu'on voit d'ordinaire, il a besoin d'être élaboré, il devra d’abord être absorbé par la spore, et servira ensuite à la formation exté- rieure, comme à la formation intérieure. Ceci touche de très- près à la théorie des accroissements cellulaires sur laquelle il a été lant diseuté, etil est extrêmement probable, d’après les cas cités plus haut. que l'accroissement a lieu dans les oogones fermés, de même que daus les oogones ouverts, par une sécrétion du plasma interne de la spore. Quant à l'accroissement par la partie interne, il peut. être prouvé d’une façon irréfragable dans le genre Rhipidium. Les Rh. continuum et interruplum présentent de grosses spores blanches munies de crêtes très-saillantes. La gonosphérie est formée d'un grand nombre de globules oléagineux blanes, qui se disposent d’une façon irrégulière et un peu en étoile. Elle s’entoure d’une membrane, après la fécondation par des branches latérales, et l’oospore nouvellement formée est munie d’une membrane qui suit les contours de la gonosphérie. Elle naît donc étoilée. Plus tard, en vieillissant, le contour interne devient (1) De Bary, Morph. und Phys. der Pilie, p.159,— Ann, se, nal., Bor,, 5° série, 1866, LV, p. 349, 10/4 M. CORNU. cireulaire, l'externe conservant le même aspect. IL y a donc accroissement par la partie interne, et d’une facon assez notable d’ailleurs, car la paroi finit par acquérir une épaisseur égale à la moitié du rayon de la spore. Dans ce cas, comme dans le précédent, le plasma périphérique finit par disparaître. Dans les divers exemples cités, l’un des accroissements est très-évident, tandis que l’autre l’est beaucoup n'oins. Les Péro- nosporées seules les montrent simultanément assez bien. On peut donc dire, car cela semble bien prouvé, que la membrane de la spore s'accroît par l'extérieur, comme par l'intérieur, aux dépens du plasma interne, en épispore et en endospore. Ceci rend compte au moins de tous les faits observés jusqu’ier. Germination des oospores. M. Pringsheim est le premier qui ait obtenu cette germina- tion, et qui ait ainsi prouvé d’une facon certaine que ces spores appartiennent bien réellement à la plante qui porte déjà les spo- rauges. Îl dit en effet (1) qu'avant cette époque, 1l avait été tenté de considérer la forme à spores agiles et la forme à spores im- mobiles comme deux espèces distinctes. Il trouva que, longtemps après leur maturité, ces spores, placées en contact avec des matières animales, des pattes de Mouche, par exemple, peuvent émettre un long tube plus ou moins ramifié. Dans certains cas, l'extrémité se renfle en massue et donne des sporesagiles. Dans l’eau pure. les oospores semblent se préparer à germer, mais elles ne germent pas, même après un intervalle très-long (cinq à six mois). La plante de M. Prings- heim était le Saprolegnia ferax, qu'il appelait Achlya prolifera, selon l'erreur commune alors à presque tous les botanistes. M. Cienkowski (2) obtint la germination des spores immobiles, soit apres dessiccation, soit après un long séjour dans l'eau. Il donne peu de détails, du reste, sur la manière dont il a opéré. les vit, ou bien émettre un tube plus ou moins long, dont l'ex - (1) Entwick. Achlya prolifera, p. 419. (2) Bot, Zeitung, 1855, p. 801. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 105 trémité se renflait en sporange, ou se transformer directement elles-mêmes en sporanges. La plante de M. Cienkowskt est le Saprolegnia ferax. M. Pringsheim {1) dit que les spores immobiles des Saprole- gnia, Achlya et Pythium germent longtemps après qu'elies ont pris naissance, en émettant des filaments semblables à ceux de la plante-mère. En parlant des observations de M. Cienkowski, 1l ajoute : «Il a en même temps indiqué que leur contenu peut aussi se transformer directement en zoospores, fait que j'avais déja signalé; la même chose à lieu pour le Pythium mono- spermum. » IL faut ajouter que l'illustre professeur l'avait signalé, il est vrai, mais d'une façon très-vague, et considérait ce fait comme accidentel, tandis qu'il a lieu normalement. «Une seule fois (2) je vis que le contenu d’une spore immobile s'était changé en plu- sieurs petites cellules claires, de chacune desquelles un filament court et grêle s'échappait. Je rencontra ces petites cellules plu- sieurs fois après autour des spores immobiles, non modifiées, dans un sporange sphérique (pl. 47, fig. 17); elles doivent s'être constituées aux dépens de quelques spores immobiles. Ce sont des cellules claires, plus ou moins ovales, semblables aux spores immobiles, mais plus petites. Elles sont ëmmobiles, et il semble, comme cela ressort de la formation du filament, qu’elles peuvent quelquefois reproduire l’Æchlya. Ce sont vraisemblablement les corps que Nægeli croit avoir vus (3). » Il revient sur ce fait (4) à propos d'organismes parasites des Spirogyra : il affirme que les spores immobiles se changent en (1) Jahrb. f. wiss. Bot., t.1, p. 301.— Ann. sc. nat., 4e série, 1859, t. XI, p. 367. (2) Entwick. d. Achlya prolifera, p. 427. (3) Zeitschrift fuer wiss. Bot,, 1846, p. 30. Ces petites cellules, dont parle M. Nægeli, sont probablement des zoospores au repos, comme on en trouve fréquemment dans les sporanges, 11 le presseut en effet, et dit que « cette troisième sorte de cellules existe véritablement, ou bien qu’elle soit identique avec les cellules mobiles, et par consé- quent susceptible de germer. .……, etc.» M. Pringsheim ne se trompe pas ; ce sont bien les mêmes formations, seulement il n'indique pas leur signification et ne dit pas nette- ment que ce sont des zoospores parvenues au repos. (4) Flora, 1852, p. 483, pl. V, fig. 13 et 14. 106 WI. CORNE. corps agiles et décrit la séparation en deux d’une zoospore double; mais tout cela n'est pas mis en évidence d’une façon suffisamment claire et précise. Ce nouveau passage, écrit la même année que le précédent, semble plus explicite que l’autre, et cependant la figure 13 de ce mémoire parait être la même que la figure 17 de la planche 47 de l’autre. Si Jinsiste là-dessus, c’est pour montrer les difficultés qu'on rencontre dans cette étude. M. de Bary (1) décrit et représente quelques germinations de son nouveau genre Aphanomyces. Ce sont des germinations sous forme de filaments qui perforent la paroi de l'oogone; il les observa après un repos de trois mois, sans aucun substratum azoté récemment apporté ; il n°4 avait que des débri de Mouche décomposés depuis tres-longtemps. Dans son mémoire sur les Champignons parasites (2), il décrit la germination des oospores du Cystopus cändidus, qui présente les caractères de celle des conidies-sporanges des Cyslopus; mais il ne donne aucun exemple de germination d'oospores des Péronosporées. Plus tard (3) il cite la germination du Peronospora Faleria- nellæ, qui s'accroît en filaments. J'ai pu moi-même observer la germination des oospores, mais dans un petit nombre de cas seulement. Les espèces étaient les suivantes : Saprolegnia spiralis et ferax, Aphanomyces lævis: Apodya brachynema. En conservant pendant très-longtemps dans l’eau des oospores d'Achlya racemosa, elles ont constamment refusé de germer; un certain nombre d'échantillons furent desséchés sur des lames de mica, mais après deux mois le contenu était fortement altéré et aucune germination n'eut lieu. Des oospores de Pythium utriforme (?), conservées plus de sept mois dans l'eau, refusèrent de germer : une préparation disposée à cet effet fut même gardée pendant plus de deux mois, (1) Einige Saprolegnieen (lahrbuech. f. wiss. Bot, LIT, p.177, pl. XIX, fig. 13). (2) Anu. des se. nat, Bor., 4° série, t, XX, p. 21. (3) Morph, und Phys, der Pile, D. 139, — An, se, nat,, loc, cit, p. 350, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 107 à l'abri de l’évaporalion; des coupes minces d’un tissu végétal ne purent en déterminer le développement. Je conservai de même des branches couvertes d’oospores de Rhipidium et d'Apodya, dont il ne me fut pas donné d'observer la germination. Je fus assez heureux pour obtenir avec une abondance relative celle des oospores du Saprolegnia spiralis. Une touffe mise à part pour l'étude de la fécondation fut placée dans le même vase que le reste de la culture. Les extrémités des filaments de la touffe reposérent sur le corps du Ver de la farine, où le Saprolegnia se développait. Le tout fut abandonné sept jours (du 29 novem- bre au 6 décembre 1871). A cette époque, un grand nombre d'oogones présentaient des oospores en germination. Je pus me convaincre que les germinations devaient s'être présentées sou- vent à moi vers la fin des cultures, et que je ne les avais pas reconnues ; &'est ce qui avait eu lieu pour le Saprolegnia feraæ, par exemple, et un dessin que j'en avais conservé me le montra avec pleine évidence. Les oospores n'ont pas besom d’être hors de l’oogone : elles serment parfaitement dans l’intérieur. Tantôt elles émettent un filament ; tantôt, au contraire, elles s'organisent directement en zoospores. Les deux cas ne semblent pas distincts physiologique- ment : deux oospores de même origine, du même oogone, et ayant subi les mêmes influences, présentent l’un ou l'autre. Ce fait ne laisse pas que d’avoir une grande valeur au point de vue du développement général, et montre le peu d'importance des organes de propulsion du plasma. L'oospore qui va entrer en germination repasse d’abord par l'état qu'elle présentait après sa récente formation. Le plasma redevient homogène, tous les petits globules disparaissent et sont remplacés par des granules très-fins. Le gros globule oléagineux fait place à une vacuole située de façons diverses. mais en géné- ral excentrique et ovale. Dans certains cas, l’oospore s'accroît en diamètre et paraît un peu irréguhére. Le plasma n’a plus cet aspect jaunâtre et brillant qu'il avait auparavant; il devient plus sombre ; enfin, après l'accroissement de la membrane, il prend 408 M. CORNU. l'apparence du plasma concentré aux extrémités des sporanges et des oogones. Pendant que cette dilatation s’est produite, la membrane de l'oospore s’est graduellement amincie en s’éten- dant. Un prolongement se forme, qui s'applique sur la paroi de l'oogone et la suit, jusqu’à ce qu'il ait rencontré une perfora- tion; 1l la traverse alors en s’étranglant légèrement et s’allonge en produisant un tube plus ou moins rectiligne et ramifié. Suc- cessivement, le contenu a pris l'aspect des filaments ordinaires du Saprolegnia; il a abandonné complétement la cavité de l'oospore et se concentre à l'extrémité. D’autres fois la formation du prolongement a lieu sans accrois- sement de diamètre de l'oospore ; la membrane reste parfaitement régulière et sphérique, conserve son épaisseur, et ne présente de discontinuité qu'en un seul point, celui par lequel est sorti le germe assez grêle, qui donne naissance au filament. Il y a enfin un cas intermédiaire entre les deux. La membrane s’est dilatée et comme ramollie; le volume de l’oospore a peu varié ; la forme est cependant devenue ovale : la paroi semble formée d'une matière muqueuse, c'est l’épispore qui s’est ainsi gonflée. L’endospore, beaucoup plus mince, a fendu l'épispore et fait hernie au travers. Le reste est identique avec ce qui a été dit plus haut. C’est à l'extrémilé de ces tubes, issus des oospores, que MM. Pringsheim et Cienkowski ont vu se former des sporanges sans mycélum ou radicelies pour la nutrition du filament. Je n'ai pu réussir à retrouver un développement pareil dans mes préparations, ou du moins il m'a été impossible de rattacher avec pleine certitude aux oospores certains filaments terminés par de petits sporanges spéciaux et ovales fort analogues à celui qui est représenté (1). M. Pringsheim a figuré tous ces cas dans son mémoire. Le résultat final de la végétation de ces tubes émis par les oospores est donc de donner un sporange et des zoospores, sans qu'il soit besoin d’un appareil spécial pour nourrir le jeune (1) Entwick., pl. XLIX, fig. 9. On peut remarquer que ce sporange n'otfre pas de cloison à sa base ; c’est probablement par suite d’une erreur, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 109 filament; l’oospore contient la nourriture nécessaire pour cette formation. On remarquera la grande analogie qu'il y à avec la germination des zygospores des Mucor, qui se transforment en individus munis de conceptacles, sans passer par la forme mycé- liale. M. Tulasne a insisté là-dessus à propos du Mucor fusiger Link (1) et de la germination de ses zygospores. Dans certaines conditions, qu'il paraît impossible de préciser, au milieu des oospores qui émettent des tubes, et dans le même oogone, certaines d’entre elles transforment directement leur contenu en z0ospores. L’oospore s’est un peu dilatée, la membrane de l’épispore s’est gonflée comme dans le cas cité précédemment, et l’ensemble a pris une forme ovale. L'épispore se rompt, et l'endospore fait hernie par cette ouverture. Bientôt après se montre la division du plasma en trois ou quatre petites masses : on voit les zoospores, agitées d’un mouvement faible, qui tâchent de se frayer un passage au dehors; elles s’épanchent lentement par l'orifice de l’épispore, puis par la perforation de l’oogone la plus voisine ; parfois l’épispore semble rompue en deux endroits, et l’éva- cuation à lieu de deux côtés à la fois. Les zoospores qui sortent ainsi sont ovales, acuminées, munies de deux cils anté- rieurs et d’une vacuole latérale au moins; elles sont semblables à celles que donnent les sporanges des Saprolegnia. M. Cien- kowski (Bot. Zeit., pl. XIE, fig. 9) en représente un nombre bien plus considérable (2). On peut rapprocher ces divers modes de germination des oospores de ceux queJ'airencontrés chez quelques Pythèium, oùla zoospore émet tantôt un filament qui reste stérile ou se termine par un petit sporange à une spore, et tantôt se transforme elle- même directement en un petit sporange, comme cela a lieu chez les Saprolegnia et les Achlya. Ces divers cas se montrent dans la mème préparation. (1) Ann. des se. nal., Bor., 5° série, 1866, t. VI, p. 214, (2) N'y a-t-il pas confusion avec la formation que nous démontrerons plus loin n'être autre chose qu'une Chytridinée parasite, et non un sporange libre? Voyez plus loin le senre Olpidiopsis (voy. p. 127). 110 M. CORNE. Une fois les zoospores sorties, l’épispore et l’endospore, mtr- mement soudées et indistinctes, subsistent plus ou moins long- temps : les sphérules vides, que M. Pringsheïm représente dans plusieurs figutes, n’ont vraisemblablement pas d'autre origine. Les membranes finissent enfin par se dissoudre et disparaître. On trouve alors des oogones munis de leurs perforations, qui par conséquent étaient arrivés à maturité, et qui ne contiennent qu'un nombre très-restreint d'oospores, ou bien sont entiere- ment vides. Quelquefois il reste, dans l'intérieur, des zoospores germées, qui montrent quel à dû être le développement des 00spores. Le cas cité et représenté par M. Pringsheim (pl. 47, fig. 7), dont il a été question plus haut, est Justement celui-là. Il ne reste qu'une oospore non transformée dans loogone, et autour d'elle des zoospores germées; elles provenaient de spores dont les membranes ont disparu par dissolution (1). Selon M. Pringsheun, le Pythium monospermum offre les deux modes de germination ; il ne représente que l’un deux, la ger- mination en filaments (2). M. de Bary (3) décrit la germination des oospores du Cystopus candidus, dont le contenu se transforme en zoospores après un séjour assez long dans l’eau; l'épispore se crève, l'endospore fait hernie au dehors eu poussant un tube court, épais et obtus. La formation des zoospores aux dépens du plasma et leur sortie rappellent ce qui a été dit (voy. p. 14) à propos des Pythium el des conidies des Cystopus ; l'analogie est complète. Il dit en quelques mots la méthode suivie pour obtenir ce développe- ment : la difficulté est assez grande et Je n'ai pu réussir. C'est plus tard seulement, à ce qu'il semble, qu'il à obtenu celui du Peronospora Falerianellæ et des Peronospora voisins. Les oospores, pour présenter ces phénomènes, exigentun temps . (1) Quant à la séparation qu'il représente, chez le Sapr, ferax (Flora, loc: cit, et Entwick., pl. XLVI, fig. 14), d'une masse plasmatique en deux zoospores, c'est un cas anormal et rien de plus. (2) Jahrbuech. f, wiss. Boti, LE, p. 801, pl NA, fig, 9, = Au, sc. nal,; 4e série, L XI, p. 367, pl: 7, lig. 2, !3) Mémoire sur le développement des Champignons parasites: pe 943 pl. 2: fige 7-15: MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. tit de repos prolongé; celles qui sont müres pendant l'été ne se dé- veloppent qu’au printemps suivant. M. de Barv indique l'inter- valle de juin à décembre comme étant celui de l’une de ses expériences. On les conserve à sec; lors de l'expérience, on les plonge un ou deux jours dans l’eau, puis on les dépose sur de la terre humide; le tissu qui les contient se décompose lentement, et après quatre à six jours 1l suffit de les placer dans une goutte d'eau pour en obtenir le développement. Je n'ai observé qu’une seule'germination de l’oospore de l’Apodya brachynema; 11 y avait trois cellules contenues dans la cavité intérieure, vraisemblablement trois articles du mème filament provenant d’une seule et unique zoospore demeurée à l'intérieur. La membrane n'était pas rompue sur le contour, elle pouvait l'être sur un autre point; les parois paraissaient ondulées irrégulièrement. Le rôle des oospores est très-facile à deviner d'apres les faits qui viennent d’être rapportés. Les zoospores germent peu d'heures après leur sortie des sporanges et ne peuvent résister à la dessic- cation ; les oospores, au contraire, ne germent qu'après un fort long temps et même après avoir été desséchées. Chez les Péro- nosporées, la présence de l'eau suffit pour en déterminer le développement; en effet, l'eau fait germer simultanément les graines de la plante nourricière, qui peut se développer en même temps que son parasite. Pour les autres, la présence d’un corps organisé semble, en général nécessaire. Les zoospores qui en proviennent finalement auraient peu de chance, au milieu de l’eau, de se fixer sur un organisme animal; elles se perdraient sans développement ultérieur. La germination n'a lieu que lors- qu un substratum propre à leur nutrition se trouve dans les envi- rons. Mais, dans l’un et l’autre cas, les oospores sont destinées à conserver ces plantes pendant la sécheresse, la gelée, au milieu des circonstances les plus défavorables auxquelles l'appareil vé- gétatif, les sporanges et les oospores ne peuvent résister, DEUXIÈME PARTIE. CHYTRIDINÉES PARASITES DES SAPROLÉGNIÉES (pl. 3-7). Généralités. Certaines de ces formations ont été étudiées par MM. Nægeli, Cienkowski, Braun et Pringsheim, qui les ont prises pour des organes de la plante nourricière, leur ont assigné des rôles diffé- rents et n’en ont pas reconnu la véritable nature. M. AI. Braun seul en devina le parasitisme, mais il revint ensuite sur son opi- nion. Elles sont si rares et si accidentelles, que bien des obser- vateurs ne les ont pas aperçues; leur étude est extrêmement in- complète; elle n’a même pas été entrevue. En la tentant aujour- d’hui, je n'espère pas la traiter à fond, mais poser seulement des jalons pour les observations futures. Ces parasites sont très-peu communs ; malgré le nombre assez considérable de matériaux que j'ai examinés, je n'ai trouvé qu'un nombre relativement restreint d'espèces attaquées par des Chvtridinées. Lorsque les Saprolégniées sont pures et nettes, c'est-à-dire sans infusoires ou Algues qui si souvent altèrent la transparence des touffes, on peut, à la loupe, chercher si on n’apercevrait pas certains filaments d'un aspect différent de celui des autres : ce moyen est excellent quand la plante est assez for- tement attaquée et permet un peu de choisir les éléments des préparations à examiner. Mais le plus souvent cela est impos- sible ; il faut alors se contenter d'observer ce qui se rencontre sous la main et faire des préparations au hasard. Quand on tombe sur une préparation plus heureuse que les autres, il faut en tirer tout ce que l'on peut; il n’est pas rare de ne pas en retrouver une seconde. La difficulté de l'observation est assez grande à cause de l'é- MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES, 115 crasement trop fréquent de ces parasites délicats: c’est surtout sensible pour ceux du premier groupe, qui sont renfermés dans des tubes notablement renflés; si l’on n’écarte pas cette cause d'insuccès, tout s’altère et se décompose pendant l’observation. Souvent, pour obtenir les éléments de la préparation, on arrache les filaments et on les brise ; cela suflit en général pour empé- cher la sortie des zoospores : les sporanges ne sont plus à la place qu'ils occupaient, l'eau se mêle au plasma nourricier qui les entoure, et il y a des perturbations considérables dans la vie du parasite. On doit enlever les filaments attaqués tout entiers avec leurs racines, et les observer ainsi sur le porte-objet. H faut, autant que possible, n’ajouter, par-dessus, le verre mince qu’à la der- mere extrémité; on laisse ensuite la plante se reposer et végé- ter dans un vase à part: on peut ainsi en suivre pendant plu- sieurs jours de suite le développement et les transformations. Ces! ainsi qu'il à été fait pour les Rozella septigena et Woronina polycyslis. Les sporanges sont tantôt entièrement libres dans l’intérieur d’un filament renflé diversement, tantôt soudés en partie aux parois de ce filament ; tantôt même ils font entièrement corps avec lui, et les deux membranes, intimement unies, ne peuvent être séparées, même avec l’aide des meilleurs instruments : dans ce cas, les sporanges du parasite simuleat de véritables sporanges de la plante nourricière (Rozella Rhipidu spinosi, pl. 5, fig. 9 “et 4) ou des formations autonomes (R. septigena, pl. 6, fig. 4). Dans un autre cas plus compliqué, les sporanges sont envi- ronnés d’une membrane générale, commeles groupements qu’on nomme sores chez les Synchytrium de Bary ei Wor.; seule- ment ici la membrane n’est pas étroitement appliquée sur ces sporanges, elle est soudée aux parois du filament (pl. 7 fis.06,b, c): Ces trois manières d'être permettent de distribuer nos Chytri- dinées en trois groupes qui seront successivement étudiés : 1" groupe : espèces non adhérentes ; 2° groupe : espèces soudées , 3° groupe : espèces présentant des sores, 5e série, Bor, T, XV. (Cahier n° 2.) 8 c] 14 ME. CORNE. Ces trois groupes correspondent à trois groupes de Chytridi- nées déjà connues. Le premier correspond aux Olpidium (1) et en est très-voisin. Le second montre plusieurs exemples d’un fait, présenté jusqu'ici par le seul Olpidium simulans de Bary et Wor., pa- rasite sur le T'araæacum officinale Wigg., qui pourrait devenir le type d’un genre particulier. Le troisième est fort analogue aux Synchytrium des mêmes auteurs, parasites sur des plantes aériennes et non aquatiques (2). Mais les parasites des Saprolégniées ne peuvent entrer dans les groupes déjà établis; ils s'en distinguent par plusieurs carac- tères, et notamment par la forme très-spéciale de leurs z00- spores et de leurs spores immobiles,. Je propose d'établir pour ces plantes, qui ne rentrent dans aucun des genres établis précédemment, trois genres nouveaux correspondant à ces trois groupes : 1® groupe, genre Olpidiopsis, ainsi nommé à cause de l’a- nalogie qu'il présente avec les Olpidium. 2° groupe, genre Rozella, dédié à M. Roze (3), mon excellent ami, dont les travaux sur les anthérozoïdes des Cryptogames supérieures sont bien connus. 5" groupe, genre #oronina, dédié à M. Woronine, de Saint- Pétersbourg, auteur de plusieurs mémoires relatifs aux Synchy- trium, genre voisin de celui-ci. (4) Ueber Chytridium, p. 75. (2) Pour le genre Synchytrium, consulter le mémoire de MM. de Baryÿ et Woro- nine (Comptes rendus de la Société des naturalistes à Fribourg en Brisqau, vol. I, livr. IL, et trad. Ann. des se. nat., 52 série, 1865, t, II, p. 239), celui de M. Woro- nine (Bot. Zeilung, 1868, p. 81), et une courte note que j'ai donnée (Bull. Soc. bot. de France, 1871, t. XVIII, p, 26) sur le S. Stellariæ Fuck. et le S. Alismatis Sp. noY. (3) J'avais d’abord proposé le nom de Rozia (Bull. Soc. bot. de France, 5 jan- vier 4872), mais on me fit remarquer que M. Bescherelle avait établi pour quelques Hypnacées du Mexique le genre Rozea ; je dus changer le nom primitif trop voisin de celui-là. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 445 Premier mode de reproduction. — Le développement du spo- range présente les plus grandes analogies dans les trois groupes: le plasma est d’abord clair et réfringent, sans granules, et non entouré d’une membrane; puis il s’entoure d’une membrane etse montre muni de grandes vacuoles; il se remplit ensuite de vacuoles beaucoup plus petites et très-nombreuses, et peu après il se divise en petites masses, futures zoospores, qui ne tardent pas à s’échapper. Chez les espèces non adhérentes, c'est par un tube de sortie plus ou moins long ; chez les espèces soudées, ce tube se réduit à son extrémité perforatrice seule et constitue la papille du sporange; il peut y en avoir une ou plusieurs, suivant Îles espèces. Les zoospores sont très-petites et elles ont toutes la même con- stitution, à peu de chose près. Ce sont de petits corps formés d'une matière homogène, claire à la partie antérieure, plus dense à la partie postérieure, où s'attache le cil unique ; ce eil a trois fois environ leur longueur. La zoospore est allongée, souvent courbée légèrement : elle présente des mouvements saccadés et irréguliers comme les zoospores des autres Chytridinées. Le eil est constamment en arrière (pl. à, fig. 9, a; pl. 5, fig. 3 et"; pl. 6, fig. 2). Leur mouvement dure peu; elles s'arrêtent et deviennent sphériques; le cil devient aussitôt indistinct. Elles se décomposent rapidement sans germination. il y à une particularité de structure chez les zoospores de nos parasites, qu’on ne retrouve dans aucune espèce de la famille. Les zoospores normales ont la forme de bétonnets et sont dépour- vues, en général, des globules que M. AL. Braun (1) considérait comme caractéristiques (cependant on en retrouve quelquefois : Rozella Rhipidis spinosi, pl. 5, lg. 8! ); le fait de l'absence du globule n’est cependant pas sans précédents, ainsi le Chytri- drium roseum n’en présente pas. (4) C’est peut-être parce que M. Cienkowski ne la signale pas dans la formation qu'il appelait d’abord Chytridiun Saprolegniæ À, Br., que M. Al. Braun renonça à sa première opinion à l'égard de sa plante. 416 M. CORRE. Quant à l'absence de germination des zoospores dans l’eau, elle est très-fréquente dans la famille. Je n’en ai rencontré que de très- rares exemples, en particulier dans une espèce que je propose d'appeler Chytridrium æylophilum, où des milliers de zoospores vivant et s’agitant dans une préparation ne donnèrent qu’un nombre très-restreint de germinations. Les zoospores germées ressemblaient au début à celles que MM. de Bary et Woronine représentent (1) chez le Ch. roseum de Bary et Wor., et que J'ai pu revoir et mener plus loi (2). Mais chez les espèces véri- tablement parasites (les deux précédentes ne le sont que dans le sens le plus large du mot), et qui se nourrissent aux dépens de plantes vivantes, les zoospores germent encore plus rarement (3). M. AI. Braun n'en représente pas un exemple dans son mémoire sur les Chytridinées. Chez les Synchytrium et l'Olpidium simu- lans, on ne les voit pas germer non plus. Les zoospores (4) des espèces entophytes ne s'entourent d’une membrane que lors- qu'elles ont pénétré à l’état plasmatique dans la cellule de la plante et y ont végété quelque temps. C'était sur l'absence de germination, qui, comme on le voit, est uu fait constant chez les Chytridinées, que s’appuyait M. Prings- heim pour refuser aux corps agiles de ces formations singulières le rôle de zoospores réelles. L’argument tombe ainsi tout à fait. On peut donc considérer ces corps agiles comme des z0ospores, (4) De Bary et Wor., loc. cit. Le Chytr. roseum se montra sur la terre d'anciennes cultures. (2) Bull, de la Soc. bot. de France, t. XNI, p. 223 (1869). (3) J'ai cependant rencontré quelques germinations Zbres des zoospores tres-petites de l’Olpidium apiculaturn A. Br., développé sur le Pandorina Morum. (4) Chytridrium xylophilum (sp. nova). J'ai rencontré cette espèce dans des cul- tures de Saprolégniées continuées pendant plusieurs semaines dans ma chambre ; elle y était abondante, notamment : sur les fibres libériennes du Corylus Avellana, conser- vées du 9 janvier au 2 mars 4870 ; sur les fibres du Tilleul abandonnées dans l’eau du 26 mai au 30 août 1870 ; sur des fibres de Chanvre flottant dans l’eau d’une carafe. IL y fut rencontré par hasard et retrouvé ensuite plusieurs fois, Les sporanges sont ovales, acuminés, ovoides, déprimés, munis ou nou d’un long col ou lagéniformes. Ils reposent sur la substance dense et opaque des fibres; tis sont groupés en file souvent sur une longueur notable, ce qui explique le grand nombre d'individus rencontrés, Le col est fermé par un bouchon muqueux à l’époque de la MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 117 mais comme des zoospores qui ne peuvent germer que dans l'intérieur de la plante nourricière. M. Pringsheim dit encore dans son mémoire, qu’il n’a jamais vu la pénétration de zoospores de Chytridium dans les filaments des Saprolégniées; ce qui serait facile à voir, ajoute-t-il. Que l’on considère la petite taille de ces zoospores, et l’on ne sera pas de l'avis du célèbre professeur; qu'on se représente bien ces pe- tits corpuscules, avec leur taille très-réduite (environ 0"",004), clairs et transparents, uniquement plasmatiques, sans globule oléagineux et rien qui les distingue, et l’on verra qu’on peut les laisser passer Inaperçus. Il faut d’abord qu’ils se présentent exactement sur le contour de la paroi, sans cela on peut ne pas les remarquer. Ajoutons encore que les parois des tubes ne sont jamais complétement pures et nettes, et surtout que dans le liquide circulent constamment des Infusoires de toute nature, dont un grand nombre peuvent être confondus avec ces zoospores : on en trouve, en effet, qui sont à peu près de même forme et qui s'attachent aux filaments. D'ailleurs, dans les con- ditions de la nature elle-même, chez ces parasites à zoospores si nombreuses, beaucoup d’entre elles ne se développent pas: si les milliers de zoospores qui proviennent d’un sporange ne péris- saient pas en grande partie, tous les filaments des Saprolégniées ou des Algues seraient attaqués et périraient. maturité. Par l’action du chloroiodure de zinc il se colore en violet à son extrémité; c’est la seule partie qui présente cette réaction, Un certain nombre de zoospores se forment dans le sporange ; elles sont sphé- riques, munies d’un cil unique et pourvues du globule oléagineux excentrique, caractéristique de beaucoup d’espèces. On voit souvent, dans les cultures où l’eau n’a pas été renouvelée depuis quelque temps, les sporanges présenter dans leur intérieur ces globules équidistants, indice de la formation complète des zoospores, sans qu'aucune sortie ait lieu. Si l’on vient à les placer dans une goutte d’eau pure, les corps agiles sortent en grand nombre. On peut observer alors leur mouvement rapide et saccadé, leur reptation amiboïide quand ils sont près d'arriver au repos, et, dans des cas très-rares, leur germination, Une fois, sur des milliers de zoospores, je n’obtins que deux germinations ; une autre fois je pus en voir un nombre plus grand, mais restreint encore. Les spores immobiles sont libres, sphériques, à parois médiocrement épaisses et lisses, pourvues d’une grosse goutte oléagineuse et faiblement colorées en brun, (4) Bot, Zeit., 1855, p. 8M. 118 M. CORNE. Comment doit s'effectuer cette pénétration si difficile à con- stater? D’après les observations de M. Cienkowski (1), que jai pu vérifier sur d’autres espèces que lui, et celles de MM. de Bary et Woronine, les Chytridinées entophytes proviennent du dé- veloppement d’une zoospore. Cette zoospore pénètre à l’état plasmatique et sans membrane dans l’intérieur de la cellule. Ce qui se passe chez le Rhizidium Confervæ glomeratæ et les Synchytrium (2) doit se passer ici. Dans les espèces libres, nous verrons qu'il est assez difficile de s’en rendre compte; mais chez les espèces dont les sporanges sont soudés aux parois, la membrane ne se forme que lorsque le plasma du parasite les touche; il se distingue de celui du filament par sa couleur, tantôt grise, tantôt au contraire jaunâtre oléagineuse. La membrane se forme autour de lui avec des phénomènes différents de ceux qui accompagnent la formation des membranes des Saprolé- guiées (3). Les deux plasma se séparent ; celui du parasite se retire, comme de l’eau sur une surface un peu huilée: il se contracte etse montre muni d’un contour très-net. Après quelques minutes on remarque la présence certaine d'une membrane où il n’y en avait pas auparavant; elle est munie d’un double contour et sa convexité est tournée vers la partie extérieure au parasite. Cette cloison, du reste, au lieu d'être rigoureusement transversale, est quelquefois oblique ou même irrégulière (pl. 6, fig. 9 n). Ainsi donc, surtout dans les espèces du 2° et du 5° groupe, le plasma du parasite se trouve placé au milieu de celui de la plante nourricière, vit à ses dépens, et en assimile les éléments, sans être protégé lui-même par une membrane. C’est un fait d’une grande importance, au point de vue philosophique, comme au point de vue systématique. Nous retrouvons ici ce que pré- sentent dans un autre règne les Protozoaires, mais d’une façon {4) Bot. Zeit., 1857, p. 233, pl. V, fig. 1-6. (2) Chez ces derniers, elle y reste sept jours sans enveloppe, et le développement complet exige quatorze jours, (3) Dans les cloisons qui limitent les sporanges, par exemple, ce qui est facile à observer, le développement est le suivant et tout autre : au point où va se former la membrane, le plasma se retire quelques secondes sans contours aussi nets, puis se réunit de nouveau, C'est pendant ce temps que se forme la cloison. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 119 moins singulière et moins surprenante. M. de Bary (1) a insisté sur l’analogie des Myxomycètes avec ces animaux, et proposait même de les ranger dans le même règne sous le nom de Myco- zoaires. Les cordelettes sarcodiques et les réseaux sans membrane, qui y représentent le mycelium, rampent à travers des corps solides poreux : vieux bois, tan, humus, etc. ; mais ici on a un plasma plongé dans un autre, et qui conserve cependant sa vie et ses fonctions distinctes, comme s’il était une formation propre de la cellule. Le parasite garde une existence séparée, comme les Infusoires décrits par M. Cienkowski (2), qui pénètrent, vivent et se nourrissent dans l'intérieur des cellules des Algues ; il fait plus encore : il se substitue à la cellule dont il absorbe le contenu ; il en prend les apparences, et met ainsi en défaut la saga- cité des observateurs les plus habiles, qui le prennent pour des productions spéciales, pour des crganes sexuels de la plante atta- quée. Au milieu du contenu de la cellule, 1l a encore, comme tout plasma vivant, la propriété de se mouvoir, faiblement, il est vrai, mais cela est rendu hors de doute par les phénomènes qui précèdent la formation de la membrane autour de lui; à cet instant 1] peut encore se contracter. Les Chytridinées rappellent à cet état le plasmodium des Myxomycètes, et sont constituées elles-mêmes par un véritable plasmodium; mais ce n’est pas la seule analogie que ces deux groupes présentent entre eux. Ces singulières zoospores, munies d'un cl unique, que M. de Bary a décrites (3), et chez lesquelles il à signalé ce remarquable mouvement ami- boïde, ne sont pas très-différentes des zoospores de certaines Chytridinées ; ces dernières ont comme les précédentes un eil unique, et leur marche rapide et saccadée se change à la fin en un mouvement amiboïde qui persiste assez longtemps. Les unes, (1) Bot. Zeil., 1858, p. 357, trad. Anx, sc. nat., d° serie, 1859, t. XI, p. 153. (2) Jahrbuech. fuer wiss. Bot., t. IT, p. 371, pl. XXIV. (3) IL faut remarquer que la genèse de ces zoospores (Schwærmer) est très- différente de ce que l’on voit chez nos Chylridinées; elles proviennent uniquement de la germination de spores immobiles, Mais chez certains Synchytrium, 1 n’y à pas non plus de sporanges, et les zoospores proviennent uniquement aussi de la germination des spores immobiles, Ex. Synch. Mercurialis (Woronine, Bot. Zeit.,1868,p. 81), 120 VA. CORNE. comme un certain nombre des autres, ne s’entourent pas d'une membrane dès leur premier développement. Sans poursuivre plus loin la comparaison, on peut conclure que ce serait à tort qu'on assimilerait les Myxomycètes aux ani- maux, puisque des êtres dont la nature végétale est hors de doute présentent aussi les faits sur lesquels on voudrait s’'appuver. Il faut que l’on s’habitue de plus en plus à cette idée, qu'il n’y à aucune différence nette, aucune limite tranchée entre les deux régnes qui comprennent les êtres vivants, et que la nature ne va pas par bonds, mais qu’elle procède toujours d’une manière continue. C’est ainsi que certaines Algues et certains Cham- pignons sont doués, aux premiers instants de leur vie, de la faculté de se déplacer ; d’autres, plus surprenants, conservent ce mouvement toute leur existence. Si les Vaibrio, les Spirillum, les Leptothriæ et les Hyphæothrix rappellent les Infusoires et établissent d’un côté la transition du règne végétal au règne animal, les Myxomycètes et les Chytridinées létablissent de l'autre. En quittant ces questions, quis’éloignent un peu du sujet traité ici, on peut dire, en résumé, que les Myxomycètes, êtres singu - liers, pourvus d’une membrane seulement à l’époque de la re- production, et dont la place est encore assez ambiguë dans la classification, doivent être placés certainement dans les Cham- pignons, et dans cette classe non loin des Chytridinées. Dans les deux groupes on rencontre en eflet des propriétés communes: la forme des zoospores, le mouvement amiboïde, l'existence d’un plasmodium, qui ne s'entoure d’une membrane qu'à l'époque de la reproduction. Seulement chez les parasites, elles ne sont pas réunies sur un même être, mais réparties sur des espèces différentes. On sait que le deuxième mode de reproduction des Chytri- dinées consiste en spores immobiles (Dauerzellen Ruhesporen), qui ne sont pas connues dans beaucoup d'espèces. Dans le genre Synchytrium (4) elles sont très-apparentes et très-visibles; leur (4) Voyez plus haut la bibliographie relative à ce genre, page 114. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 191 diamètre, relativement considérable, leur couleur brune, le ren- flement et l’hypertrophie qu’elles déterminent sur les cellules de la plante nourricière, sont autant de caractères qui ne per- mettent pas de les laisser inaperçues. Dans le reste de la famille, il n'y a que trois espèces, d’après M. AI. Braun (1), où on les connaisse, et depuis son mémoire il n'y en à pas eu, que je sache, d'autre publié sur ce sujet (2). Dans les Chytridinées parasites des Saprolégniées, les spores immobiles ont pu être rencontrées, sauf dans une seule espèce, peu importante, du reste, le Rozella Aphanomycis. Ce sont des spores sphériques ou elliptiques, à membrane assez peu épaisse, tantôt munie d’aiguillons courts, tantôt de verrues anguleuses, tantôt encore d'une couche inégale de matière amorphe. Elles naissent en général dans des situations analogues à celles des sporanges, c'est-à-dire dans des portions de filaments renflés ou des articles terminaux. Dans certains cas elles se présentent à l’intérieur de renfle- ments latéraux très-semblables à des sporanges de Saprolegnia ou d'Achlya (Rozella septigena. pl. 6, fig. 15-17); mais l'absence de branches latérales, de perforations. et surtout de cloison à (4) Bert. Monatsb., 1856, p. 588, n° 591. On n'a trouvé jusqu'à présent les spores immobiles que chez les Chytridium anatropum et le Rläizidium mycophilum ; 1e dé- veloppement n’en a pas été observé. (2) J'ai observé les spores immobiles dans plusieurs espèces, dont voici quelques-unes: Le Phlyctidium decipiens À. Br. vit en parasite dans les oogonces des (Edogoniées : Ed. Vaucheri, echinospermum, Braunii; Bolbochæte, ete. Les spores immobiles sont ovales-oblongues, blanches, lisses, au nombre de deux ou trois dans l’oogone occupé déjà en partie par le sporange plissé du parasite et l’oospore de l’'OEdogonium. Dans une espèce voisine du Chytridium acuminatum A. Br., et qui vivait aux dépens des zygospores du Mesocarpus scalaris, le sporange s'ouvre comme une pyxide, au moyen d’un opercule ; les spores immobiles ne sont pas extérieures comme les sporanges, mais contenues dans l’intérieur des zygospores : ce sont des cellules sphériques, lisses, avec un globule oléagineux au centre. La zygospore prend une couleur foncée qui gène beaucoup l’observation. Le Phlyctidium vagans À. Br. (ou Pollinis A. Br.), parasite sur du pollen de Pin, présente de même des spores immobiles contenues dans l'intérieur de la cellule nourricière et constituées comme dans l’espèce précédente. Pour l'étude de ces parasites, voyez M. Al. Braun, Ueber Chytridium, p. 29, 40 e 54; pl. LE, fig. 11; pl. I, fig, 1-45 ; pl, V, fig, 1-4. 122 M. CORNE. ce faux oogone, ne peut permettre de les confondre avec des oospores de Saprolégniées. Lorsqu'elles se montrent dans des articles terminaux renflés de Rhipidium où d'Apodya (pl. 5, fig. 9 et1#), il y a encore là une grande analogie avec des oogones, mais les raisons indi- quées ci-dessus ne permeltent pas l'erreur. Dans toutes les espèces, le développement de ces spores est analogue. Elles sont constituées par un globule de plasma grisâtre et rempli de granules oléagineux, qui s'accroît aux dépens du contenu de la cellule rassemblé aulour de lui; ce contenu se dispose bientôt en traînées rayonnantes, partant de la masse cen- trale et se dirigeant vers les parois. Il devient de plus en plus clair ; les éléments nutritifs disparaissent, absorbés par le para- site, qui demeure seul au milieu d’un liquide presque sans gra- nules. On remarque alors que la spore est environnée d’une -auréole transparente, incolore et comme muqueuse, à l’inté- rieur de laquelle se forment peu à peu les dents, qui hérissent la surface de la spore adulte. À mesure que ces dents prennent plus de consistance et de couleur, l’aurécle diminue, elle devient à la fois indistincte. La spore adulte est d’une couleur foncée, qui va du brun vio- lacé au brun verdâtre; les dents sont des points coniques et non pas des crêtes comme dans certaines espèces de Chytridinées (pl. 7, fig. 22), qui sur le contour apparaissent aussi comme des pointes. L'ensemble de ces ornements ne permet pas de voir nettement, au travers, la nature du contenu ; il paraît de couleur sombre, et s'il a gardé la constitution qu'il avait lors de l'appari- tion de l’auréole, il est formé d’un grand nombre de globules oléagineux très-petits, dont l’ensemble intercepte presque com plétement la lumière. Comment doit-on interpréter la valeur de ces spores immo- biles? Sont-ce des spores asexuées? sont-ce, au contraire, des spores sexuées ? Si l’on se reporte au double mode de reproduc- üon que l’on connaît dans un grand nombre d’Algues (les OEdo- goniées, les Coléochétées, les Vauchériacées, et depuis peu les Protococcacées), on y trouve, d’une part des zoospores, de l’autre MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 193 des spores provenant d’une fécondation et qu’on appelle 00- spores. Si l’on compare les Chytridinées aux Saprolégniées, le parallélisme devient plus net; si enfin parmi les Saprolégniées on choisit les Monoblepharis, on est obligé d'admettre que les spores immobiles sont dues à une fécondation. Quoique ce soit un raisonnement par simple analogie, il doit être regardé comme juste. I faut done chercher les organes sexuels, soit dans nos espèces, soit dans les espèces connues auparavant, et surtout dans celles où Les spores sont les plus grosses : ce sont les Synchytrium qu'on devrait choisir pour cette recherche. Si l’on observe la spore jeune ou près d’être adulte, on ne trouve rien d’analogue aux branches latérales ou aux anthéridies. Du reste, la cellule qui recoit ces parasites referme aussitôt le trou très-étroit par lequel la zoospore est entrée et ne garde pas de perforation pour laisser pénétrer les anthérozoïdes; il faut done que la fécondation ait lieu par un corps qui a pénétré avec la gonosphérie et simultanément, ou bien qu'elle ait eu lieu avant l'introduction, c’est-à-dire que la gonosphérie n'ait péné- tré qu'après avoir été fécondée. Si l’on compare ce que dit M. Pringsheim à propos du Pando- rina Morum (1), on est tenté de lui assimiler les Chytridinées. Il est bien évident que les Algues unicellulaires, qui possèdent deux sortes de zoospores, les unes à deux cils avec un seul point oculiforme, les autres à quatre cils avec deux points oculiformes, présentent, comme l'espèce citée, la copulation des zoospores : M. Pringsheim le fait pressentir. Les Chytridinées sont aux Champignons ce que les Protococcacées sont aux autres Algues; ce sont, dans l’un et l’autre cas, des plantes unicellulaires ; l’accouplement des zoospores doit se présenter vraisemblablement dans les deux familles, qui ont plus d’une ressemblance générale et qui possèdent en particulier des spores immobiles, considérées, il y a peu de temps encore, comme asexuées. (1) Monatsb. d, Bert. Acad... oct. 1869, trad. Ann. des se, nat, 5° série, t. XI, p. 191. 124 M. CORNU. 1] faut donc chercher à voir cette copulation des zoospores. Faut-il la chercher avant l'introduction des zoospores dans la plante hospitalière ou après cette introduction ? Dans l’un et l’autre cas, de grandes difficultés se présentent, qui semblent à peu près insurmontables à l’aide des seules es- pèces que l’on connaît maintenant. Faut-il considérer comme des zoospores confondues par accouplement en une seule, ces zonspores monstrueuses, et qui ont été représentées par MM. de Bary et Woronme (1)? Le double globule oléagineux serait-1l l'analogue du double point oculiforme chez les Pandorina ? Si l'on cherchait cette copulation après l'introduction des corps agiles, cela serait moins déraisonnable peut-être qu’on ne pour- raitle croire au premier abord. Les zoospores ne conservent- elles pas leur constitution assez longtemps à l'intérieur de la cellule nourricière sans s'environner d’une membrane ? Il est important de choisir des plantes commodes pour cette observation si délicate. Les Chytridinées parasites sur des Algues présentent des spores immobiles trop rares ou trop faciles à con- fondre avec de jeunes sporanges; la chlorophylle, d'ailleurs, obscurcit la cellule où masque la vue. Les espèces dont les sporanges sont extérieurs pourraient peut-être rendre quelques services (2) (Chytridium Olla, Phlyctidium vagans), mais les organes sont bien petits. Les Synchylrium sont remarquables par la taille de leurs spores immobiles; 1ls le sont aussi par un fait d’une importance considérable ici : c’est que, vers la saison froide, à la fin de l’au- tomne, les spores immobiles sont en nombre de beaucoup supé- rieur à celui des sores ou capsules à sporanges (du moins dans l'unique espèce que j'ai observée, le S. Stellariæ Fuck., il en est ainsi). On est certain alors de pouvoir, dans le plus grand nombre des cas, observer le développement des spores immobiles. On voit fréquemment que le globule, qui doit donner une spore (1) Loc. cit. (Ann. des sc, nat., p. 244, pl. 9, fig. 40 ; pl. 40, fig. 7). (2) Les spores immobiles sont internes; on peut citer encore le PAlyctidium anatropum et plusieurs formes voisines, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 129 immobile, n'est pas simple, mais qu'il est accompagné d’un autre à peu près de même taille que lui, et aucun d’eux n’est muni d'une membrane; ils sont jaunâtres avec quelques gra- nules de nature oléagineuse. Plus tard on ne voit plus aucune trace du deuxième globule, qui accompagne l’autre. Ceci s’est présenté à moi un grand nombre de fois, et il y a tel dessin que je pourrais présenter, exécuté d’après une portion de tissu épidermique d'une feuille de Stellaria, dans lequel il y a plus de six exemples de ce double globule. Toutes les cellules étaient remplies de spores immobiles adultes, jeunes, ou en voie de formation, et j'ai représenté une portion quelconque du tissu. Je donne du reste ce fait pour ce qu'il vaut, sans y ajouter une trop grande importance. Dans les poils du Stellaria media, où l’observation est plus facile, on ne trouve pas toujours ce double globule. Peut-être alors le globule simple est-1l destiné à donner un sore ? Dans tous les cas, le deuxième globule est bien distinct du nucléus, qui est beaucoup plus pâle que lui. Doit-on considérer comme un organe sexuel une certaine cel- lule, qui est accolée à la spore immobile à l’époque de sa matu- rité, et qui est vide alors (pl. 3, fig. 10 et 12, et pl. 4, fig. 4)? On ne la rencontre que dans les Chytridinées de notre premier groupe, c’est-à-dire les Chytridinées non adhérentes (genre Olpi- diopsis). On verra plus loin des détails sur le développement de cette cellule, qui semble n'être pendant longtemps qu’une spore immobile plus petite et moins avancée. Cependant, à la maturité, elle se distingue de la spore à laquelle elle est soudée par sa membrane lisse ou munie d’échinules différentes. Les dents de la spore sont déjà formées qu’elle ne s’est pas encore vidée, ce qui pourrait faire supposer encore que l’enveloppe échinée n’est peut- être qu'un oogone auquel se souderait ultérieurement l’oospore. Cette cellule adjacente ne se retrouve pas dans les espèces des autres groupes. Doit-on la prendre pour une anthéridie ? est-elle au contraire une formation de peu d'importance? Je me contente de la signaler, n’osant pas aller plus loin, car c’est un organe qui ne se rencontre que dans un petit nombre d'espèces. Chez le Chylridium endogonum Schenk, chez lequel j'ai ren- 126 M. CORNE. contré les spores tinmobiles, elles sont munies, comme les spo- rauges, d'une sorte de cellule-souche, d’où partent les radicelles. La cellule dont 1l vient d’être question ne serait-elle pas tout simplement l’analogue de celle-ci, qui manquerait dans les spo- ranges des Olpidiopsis. Quel est le rôle ultérieur de ces spores immobiles? Il est pro-- bable qu’elles doivent servir à perpétuer la plante et à produire de nouveaux germes au bout d’un temps assez long. On trouve parfois dans les pulvinules attaqués et abandonnés depuis long- temps quelques-unes de ces spores flottant librement. Elles ne sont jamais vidées, ainsi que l’a remarqué M. Pringsheim (1) ; elles exigent vraisemblablement, pour germer, des circonstances par- ticulières et surtout un certain temps d'arrêt après leur maturité. Il est probable qu’elles doivent donner des zoospores, comme les sporanges; mais de quelle manière? C’est ce qu’il est permis de se demander. M. Woronine (2) a montré que les spores immo- biles chez les Synchytrium germaient de deux facons diffé- rentes suivant les espèces. On trouverait peut-être ici des résul- tats analogues. En tout cas, les données manquent entièrement. Cela tient à plusieurs causes : aux difficultés propres à ces ger- minations, d'une part; de l’autre, à la grande rareté des spores. Ces deux conditions suffisent pour expliquer l'absence de notions exactes sur ce sujet. L'étude des espèces qui vont suivre a une importance réelle : elle soulève d'importantes questions relatives, soit à la féconda- tion des Saprolégniées, mal connue ou mal interprétée, soit à la fécondation des Chytridinées, sur laquelle on ne sait rien en- core. Les idées presque entièrement théoriques émises sur ce dernier sujet n'ont pas grande valeur en elles-mêmes; elles auront peut-être celle d'appeler l'attention des observateurs sur des questions très-dignes d'intérêt, mais ardues. Il est possible que la solution, qui parait encore assez éloignée, puisse être rendue moins difficile par des espèces se prétant mieux à l’obser- vation. Cependant les Saprolégniées présentent, à cause de (1) Jahrbuech. fuer wiss. Bot., 11, p. 225. (2) Bot. Zeit., 1868, p. 99. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 197 l'absence de matière colorante et la facilité avec laquelle l'opa- cité du plasma se dissipe sous l'influence de l’ammoniaque, des parasites dont l'étude est relativement plus aisée que partout ailleurs. Il faut prouver avec soin que les formations dont nous nous occupons sont des parasites et non des organes sexuels : on y insistera longuement. Les raisons justifiant cette opinion, et qu'il est toujours bon de redire, sont nombreuses; c’est : 1° L'analogie des espèces des divers groupes avec des Chytri- dinées déjà connues, et la forme identique des zoospores dans tous ces parasites des Saprolégniées. 2° La présence d'organes sexuels nets et certains sur les indi- vidus attaqués. 3° Le double mode de reproduction des parasites. l° Leur apparition tout à fait accidentelle. ° Leur présence simullanée sur plusieurs espèces ou genres habitant ensemble, tandis que rien de pareil ne se montrait au- paravant sur les espèces types décrites par les auteurs: 6° Les changements, perturbations, hypertrophies qui se pré- sentent dans la plante nourricière. Cn yinsistera à proposde chaque espèce, et l'on répétera toutes ces raisons et toutes ces preuves, sans crainte de redire des choses déjà expliquées. I est indispensable de ne laisser dans l'esprit du lecteur aucun doute, aucune hésitation. Premier groupe. = CHYTRIDINÉES NON ADHÉRENTES. Genre OLPIDIOPSIS.7| O. SaproLEGNIÆ (A. Br.), INDEX, INCRASSATA, FUSIFORMIS, APHANOMYCIS. C’est par le Chytridium Saprolegniæ À. Br. et le groupe auquel il appartient, qu'il est bon de commencer : c’est le groupe le plus simple, dans lequel le parasitisme est le plus facile à démontrer et à concevoir; c’est en même temps suivre l’ordre chronolo- gique. Le développement en est assez bien connu, maintenant 128 M. CORNE. que quelques lacunes importantes sont comblées. Quand toutes les espèces auront été étudiées, le lecteur, retrouvant dans cha- cune d'elles la preuve que ces formations ne sont pas des organes reproducteurs, acceptera plus facilemeni le parasitisme singulier des espèces du second et du troisième groupe. Historique. — M. Nægeli (1) a, le premier, signalé et décrit l’une des espèces dont nous nous occupons; il la considérait comme une sorte de sporange dû à une formation libre. A la représente, soit à l’état adulte et émettant des spores agiles, soit à l'état jeune et se formant au sein de traînées et d'amas plasma tiques. Tantôt 1l y a plusieurs sporanges, tantôt un seul, et dans ce cas les parois peuvent même se souder avec celles du fila- ment, la cloison étant simple et la paroi double (2). Mais ce cas-là se rapporte à un autre parasite, le Rozella septigena, dont 1l sera question plus loin, A fit ses observations sur un Saprolegnia indéterminé, qu'il appelle improprement Achlya prolifera. M. Al. Braun (3) ne croit pas que ces sporanges libres appar- tiennent réellement au Saprolegnia, et révoque en doute l’exis- tence simultanée de sporanges dont les parois se soudent à celles du Saprolegnia. M. Cienkowski (4) considère aussi ces conformations comme constituant un second sporange de l’Achlya prolifera. I en décrit et représente le développement avec exactitude; cependant son mémoire laisse beaucoup à désirer, comme a dit plus tard M. AL Braun. Il ne sait si les corps agiles germent ou non, car Qils s'agitent et se mêlent avec les autres zoospures ». Il re- présente les spores immobiles sans les mentionner, et semble les considérer comme une variété des autres sporanges. M. AL. Braun (5), dans un mémoire spécial sur le genre Chy- tridium, parle d’une de ces productions qu'il considère comme dues à un parasite; 1l la nomme Ch. Saprolegniæ. Elles sont trop (4) Zeitschrift fuer wiss. Bot., p. 29, pl. IV, fig. 1-8, (2) Loc. cit., fig. 7 et 8. (3) Verjuengung, p. 286 et 287, (A) Bot. Zeit., 1855, p. 801, pl. XIT, (5) Ueber Chytridium,, p. 61, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 129 rares et trop accidentelles pour être les organes du Saprolegnia ; la petitesse des spores agiles représentées par M. Nægeli ne per- met pas de leur assigner la fonction de zoospores. Quel est leur rôle? se demande-t-il. On connaît déjà les sporanges ordinaires avec spores agiles, analogues aux zoospores des Algues ; les spores immobiles contenues dans des conceptacles perforés natu- rellement, ce qui rend très-vraisemblable que ces spores soient fécondées ; el enfin des rameaux sinueux aualogues aux corni- cules des F’aucheria. Que viendrait faire un quatrième appareil reproducteur ? La ressemblance avec les autres Chytridium est très-grande d’ailleurs. Mais M. AL. Braun n'a pas vu les zoo- spores, et 1l conseille de nouvelles recherches sur la nature de ces zoospores, comme pouvant seules, dans l’état des choses, décider la question ; 1l constate que M. Cienkowski ne dit pas un mot du globule caractéristique des zoospores des Chytridinées, et qu'il n'a pu voir de @il. Il a été dit plus haut (1) que les observations deM. Cienkowski avaient fortement ébranlé l'opinion de M. AI. Braun, dont l’article se termine par uue conclusion bien diffé- rente de celle de la première partie. Un passage en a été cité à propos de la théorie de M. Pringsheim sur la sexualité des Saprolégniées. M. Pringsheim attribua au Chytridium le rôle d’anthéridie : il n'en parle qu'incidemment dans son premier mémoire sur les Saprolégniées (2j; dans son second, au contraire, il y consacre plusieurs pages; il en a fait l'étude et reproduit ses observations. — Nous avons analysé (3) la partie où 1l expose sa théorie : on y constate la difficulté qu'il éprouve à interpréter favorable- ment pour elle tous les faits qu'il a rencontrés, principalement l'existence des spores échinées. — Si les conclusions sont peu nettes ou erronées, les observations dont l’auteur n’a pas tiré parti demeurent bonnes et exactes, sauf sur quelques points : elles peuvent cependant être complétées, principalement en ce (1) Page 73. (2) Jahrbuech., t, 1, p. 96. — Ann. des se, nut., 4° sévie, 1859, t. XI, p. 362. (3) Page 78, 5° série, Bot. T, XV, (Cahier n° 3.) 1 9 150 M. CORNE. qui regarde le premier développement des sporanges et des spores immobiles, et la constitution de ces dernières. J'ai observé plusieurs fois ces productions, qui sont rares et accidentelles, comme dit M. Al. Braun; elles ont beaucoup de rapport entre elles dans tout le groupe, aussi sera-t-il bon, pour éviter les redites, de faire d’un seul coup l’histoire des deux modes de reproduction, en comprenant toutes les formes dans une seule et même description. Les différences entre les espèces, peu con- sidérables d’ailleurs, seront signalées plus loin ; on pourra juger, d'après les dessins qui en sont donnés, de Panalogie de ces divers parasites. Sporanges, leur développement. — Zoospores. — Les sporanges et les spores immobiles sont contenus ensemble dans l'intérieur de certains filaments renflés el non cloisonnés. Ces renflements, dus à la présence du parasite, sont assez divers : tantôt ils se produisent à l'extrémité mème du filament, tantôt à quelque distance, et, suivant que la portion supérieure ou inférieure prend ou non part au renflement, on arrive à des formes très- diverses. Ces tubes sont donc ou sphériques, presque comme des oogones (pl. 3, fig. 1, 2, 6, 10), ou renflés en massue (pl. 4, fig. 3), ou ovoides, dissymétriques courbés, etc. Je passe des formes pour lesquelles des périphrases très-longues seraient nécessaires, mais inutiles à signaler ; en dernier lieu, seulement, citons les cas variables encore, où le filament se dilate sur une assez grande portion de sa longueur (pl. 3, fig. 3). Tout cela change d'un filament à l’autre et n'est soumis à au- cune règle fixe. Cependant on peut dire que les tubes des Sapro- legnia sont plus souvent renflés en sphère que ceux des Achlya, dont les parois semblent moins dilatables et plus résistantes. On peut à ce propos voir les planches 3 et A et les explications qui les accompagnent. Les sporanges sont libres dans l’intérieur de ces renflements ; comme eux, 1 sont de forme très-variable, sphériques, ovoides, plus ou moins allongés, réniformes, semi-lunaires, etc. Leur nombre, aussi, oscille entre des limites assez étendues : is sont parfois solitaires; M. Pringsheim en à compté jusqu'à MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 151 vingt: Jeu ai rencontré plus de cinquante. Tantôt ils sont tous égaux, c'est ee qui à lieu quand leur nombre n’est pas trop considérable; tantôt, au contraire, on en voit quelques-uns beaucoup plus gros au milieu d’un groupe de très-petits. Quand ils sont solitaires, ils sont sphériques ou ovales, et en général for- tement développés (pl. à, fig. 10). Voici quelles sont les dimensions en général. Ces sporanges doivent être mesurés après l'évacuation des zoospores; sans cela on ne serait pas sûr qu'ils sont adultes. Les plus petits ontun diamètre longitudinal de + de millimètre (d’après M. Pringsheim, + de millimètre) ; les plus gros ont un diamètre longitudinal de + de millimètre (d’après M. Pringsheim, ;: de millimètre); les moyens ont un diamètre longitudinal de de millimètre (d’après M. Pringsheim, à Z de milli- mètre). La différence entre les dermiers nombres provient probable- ment de ce que les individus que J'ai observés contenaient en général des parasites plus nombreux. Ces sporanges sont entourés d’une membrane très-nette, sur- tout lorsqu'ils se sont vidés de leur contenu; les parois en sont lisses, les contours réguliers ; on n'y remarque mi plis ni rides. Les phénomènes que l’on observe pendant le développement sont les suivants : Le contenu paraît un peu plus sombre dans l'intérieur de l'extrémité déjà notablement renflée, et, en cer - tains points, il y a encore accumulation de plasma. On ne remarque pas de nucléus, mais un amas diffus et rayonnant : l’aspect du filament n’est pas le même que celui qu'il prend lors de la formation des sporanges, il ne présente pas de teinte un peu jaunâtre, mais paraît plus foncé. Les centres de condensation deviennent plus nets ; le reste du sporange se dégarnit de plasma et s'éclaireit : on aperçoit alors des traînées qui réunissent les points sombres entre eux et aux parois (pl. 3, fig. 1, et pl. 4, fig. 1), en formant des réseaux plus ou moins grêles et entremêlés; on y remarque des cou- rants de sens divers. Ces centres d’accumulation laissent enfin apercevoir un corps central sphérique ou ovoïde, petit encore, 182 M. CORNE. mal défini et peu visible au milieu de la masse opaque qui l’en- toure, et qui peu à peu s’accroît en diamètre. Enfin le plasma disparaît presque en entier ; il n’existe plus dans l’intérieur du filament, dont le volume s’est fortement ac- cru, que quelques rares granules où des cordons plasmatiques grèles et déliés, partant de tous les points du jeune sporange ; ilest muni d’une paroi nette et facile à discerner, au moins à son coutour extérieur (pl. 2, fig. 2, et pl. 4, fig. 2). Les observateurs précédents n'ont pu se rendre compte de l’état du jeune sporange avant la disparition du plasma, car la présence des granules nombreux empêche toute transparence : mais il ya un moyen de faire disparaître cette opacité. Si l’on fait agir l’ammoniaque, on voit les filaments plasmatiques et les traînées de granules se rompre, disparaître, et l’ensemble devenir transparent. On aperçoit alors les très-jeunes spo- ranges constituant des globules souvent jaunâtres, dont le plasma est réfringent. Is sont en petit ce qu'on les voit plus tard, lorsque le filament est entièrement débarrassé de son con- teou ; ils n’en diffèrent que par la taille. Il est assez difficile de décider s'ils sont ou non entourés d’une membrane ; le contour est très-net, mais il est simple. On sait que quand une cellule est pleine d’un liquide très-réfringent, le contour intérieur est fort _ifficile à voir ; cela se remarque bien dans les oogones des Rhipidium interruptum et continuum, où le contour interne de la membrane épaisse s'aperçoit seulement après l’écrasement. L'ammoniaque et les autres réactifs semblent sans action sur ce plasma réfringent et comme oléagineux. Dans quelques cas, quand le contenu du filament n’est pas trop obscur, on peut apercevoir, sans réactifs, le sporange très- jeune ; et si le plasma de ce dernier n'est pas trop réfringent, on constate alors avec certitude qu'il à déjà atteint une taille consi- dérable sans étre encore muni de membrane; le sporange à cet état est donc encore purement plasmatique. Il est rempli de globules oléagineux, inégaux, de forme irrégulière et anguleuse ; tout en étant d’une taille très-restreinte, ils sont cependant d'un diamètre bien supérieur à ceux du plasma qui les en- MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 133 vironne. Les réactifs rendent ces globules sphériques sans alté- rer en rien la forme du jeune sporange. Ce:i a été observé sur un Achlya très-allongé, très-grèle, peu riche en plasma, qui nourrissait l'O. fusiformis. On retrouve d’ailleurs ces globules oléagineux dans les formations chytridiennes, par exemple chez le Woronina polycystis, mais jamais dans les Saprolégniées saines on n'en rencontre de pareils. La masse du plasma, sans membrane encore, appartenant au parasite, se distinguait aisé- ment du reste du filament. Quand le sporange a absorbé tous les éléments nutritifs, il est muni d'un contour simple, comme dans le cas précédent et qui ne devient double que lorsque le contenu de ce sporange se modifie. Il perd alors cet aspect de goutte d'huile qu'il avait auparavant (pl. 3, fig. 8-6, et pl. 4, fig. 25.) Il est formé d’un liquide clair, dans lequel nagent un grand nombre de globules oléagineux ; la couleur est devenue plus fon- cée et s’est rapprochée de celle du plasma des Saprolégniées. De grandes vacuoles se montrent : elles sont en petit nombre; il n'y en à parfois qu’une seule, dont le diamètre peut atteindre la moitié de celui du sporange. Ces grandes vacuoles disparaissent ensuite, et font place à un plus grand nombre de petites, toutes égales ou à peu près, qui donnent au sporange un aspect écumeux (voy. pl. 3, fig. 8 c, et pl. 4, fig. 3 5). Presque sans transition, le contenu s'organise en petites masses sphériques, futures zoospores, et en quelques minutes les vacuoles ont disparu ; le sporange est alors rempli de sphé- rules qui s’agitent et produisent parfois des courants dans l’in- térieur. Pendant que le plasma offre cet aspect écumeux et caracté- ristique que nous retrouverons dans toute la série, le sporange émet en un point quelconque, plus ou moins éloigné de la parot, en général au point le plus rapproché, un prolongement (pl. 3, fig. 8, d), qui, après une course diversement flexueuse, atteint cette paroi. La direction qu'il a suivie est le plus souvent recti- ligne ; elle est quelquefois très-oblique (pl. 3, fig. 6). 43 MA. CORNE. L’extrémité du prolongement s'applique perpendiculairement sur la membrane de la plante hospitalière et la perfore ; une courte portion sort au dehors, mais s’allonge à peine à l’exté- rieur. La perforation a lieu, comme dans les autres Chytri- dinées, par dissolution ou résorption, et non par pression. On en à une preuve évidente dans les sporanges développés soli- tairement à l'extrémité d’un filament : les parois du sporange, s’il est symétrique, sont également distantes des paroïs (à con- tours le plus souvent réguliers dans ce cas) du filament renflé ; à aucun instant de l’allongement du tube, la distance ne diminue d’un côté ou de l’autre (pl. 3, fig. 4). I y a donc dissolution de la paroi, et non perforation par suite d’une pression; car le pre- mier effet de la pression aurait été de repousser du côté opposé le sporange libre dans la cavité. Le filament perforateur porte un léger étranglement à l’en- droit où 1l traverse la paroi. M. Pringsheim eite et représente deux prolongements présentés par un même sporange ; M. Nægeli aussi. Mais ce fait est peu fréquent, et plus rarement encore ils s'ouvrent tous les deux; je n’en ai vu que peu d'exemples. Parmi les autres Chytridinées, on rencontre aussi parfois des sporanges se vidant par plusieurs ouvertures (Chytridium roseum, et les Synchytrium) ; nous verrons plus lom que le Rozella septigena et le Woronina polycystis sont aussi dans ce cas. Le prolongement est rempli d’un contenu qui ne ressemble pas à celui de l’intérieur du sporange ; il est un peu trouble, sans granules et non divisé en petites masses. Peu de temps après que l'extrémité du prolongement est parvenue de l’autre côté de la membrane, à l'extérieur, cette extrémité se crève subitement et les zoospores sont brusquement lancées en dehors avec impétuosité, une à une, quoique le diamètre du tube puisse faire croire qu’il en pourrait passer davantage. Elles restent immobiles une se- conde ou deux à l'orifice, puis se dispersent dans toutes les direc- tions (pl. 3, fig. 4 et 8). Celles qui sont restées dans l'intérieur du sporange s’agitent impétueusement, se choquent aux parois et finissept par s'échapper aussi. Chaque sporange en contient des centaines, | ; MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 135 Le temps employé pour la sortie dépend beaucoup de l'état de santé de la plante; il est environ de cinq minutes, et encore les dernières zoospores ne sont-elles jamais aussi agiles que les autres. Suivant l’état de la plante, leur forme est aussi très-variable. Quand elle est en bon état, elles ont une forme normale, qu'on retrouve dans toutes les espèces parasites sur les Sapro- légniées : c'est, du reste, celle que M. Pringsheim a décrite. Ce sont de petits bâtonnets (pl. 3, fig. 5 et 9 a) deux ou trois fois plus longs que larges, un peu courbés, ayant environ —— de millim. de diamètre, ayant parfois deux dimensions transversales différentes, c’est-à-dire qu'ils sont quelquefois aplatis latéralement. On n’y remarque aucun granule, mais une extrémité plus claire et une plus foncée, formée d’une substance un peu trouble, très-différente de l’autre; c’est à cette extrémité trouble qu'est, du côté de la concavité, d’une façon dissymé- irique par conséquent, attaché leur cil unique (pl.3, fig. 9 a, ils ont la forme normale; fig. 5, ils sont un peu altérés). M. Pringsheim n'avait pu distinguer s'il y avait un cil ou deux ; il n'y en à jamais qu’un dans les circonstances normales. IL est difficile à saisir sur les zoospores en mouvement; mais avec un éclairage suflisant et de bonnes lentilles on peut le voir à certains instants : mais pendant une seconde au plus, lorsqu'elles s’ar- rêtent un moment pour repartir ensuite de nouveau. Le mouvement de ces petits corps est saccadé, comme celui des zoospores des autres Chytridinées ; ils changent brusquement de direction en pivotant sur l'extrémité de leur al. C'est, lors de leur arrêt brusque, qu’on peut bien les voir, surtout lorsqu'ils se sont reposés à la surface inférieure du verre mince. Ils ne restent en mouvement qu'un temps fort court. Au bout de quatre ou cinq minutes aprés le commencement de la sortie, il y en à déjà un grand nombre d’immobiles. Ils sont devenus sphériques ou un peu irréguliers. Les deux substances se sépa- rent plus nettement l’une de l’autre. La ligne de séparation est probablement ce que M. Pringsheim à vu, qu'il appelle un dessin vague et mal défini, et qu'il compare aux apparences de filaments 436 M. CORNU. que M. Nægeli a cru apercevoir dans les anthérozoïdes des Flori- dées (1). Ils se décomposent rapidement sans germination ; ce fait n’est pas rare chez les Chytridinées. Nous en avons vu plus haut l’ex- plication. M. Pringsheim dit qu'après vingt-quatre et quarante- huit heures, ils ne présentent aucune trace de développement. Je n'ai jamais pu les conserver aussi longtemps dans une prépa- ration; au bout de peu d’instants, ils se résolvent d'ordinaire en granules très-petits, qui s'éparpillent dans le liquide. Dès l’état de repos de ces zoospores, le cil est devenu rapidement indistinct. Quand le sporange n'est pas en très-bon état, ce qui est fré- quent, les zoospores, au lieu de présenter l'aspect de petits bâ- tonnets, sont sphériques, avec des vacuoles analogues à celles qu'on voit sur les zoospores parvenues à l’état de repos. Leurs mouvements, tantôt sont vifs, quand elles ne sont pas trop alté- rées ; tantôt, c'est le eas le plus habituel, ils sont très-lents : de telles zoospores ne s’agitent qu'une minute ou deux et périssent dès leur sortie hors du sporange. Il n’est pas rare d’en trouver de pareilles, même dans des sporanges en bon état ; ce sont les der- nières qui restent, et souvent elles ne peuvent pas sortir (pl. 3, fig. 4). Leur eil unique est alors visible pendant quelques mi- nutes. Parfois on en trouve plusieurs soudées ensemble d’une façon plus ou moins complète, mais ce sont des cas peu dignes d'intérêt, car ces assemblages ne tardent pas à périr sans se mouvoir Jamais. De toutes les espèces de Chytridinées, celles de ce groupe sont certainement les plus difficiles à observer. En général, la seule pression du verre mince écrase les renflements, qui sont d’un diamètre notable, des filaments attaqués; les sporanges compri- més, même très-légèrement, donnent des zoospores altérées ou n'en donnent pas du tout. On est obligé, le plus souvent, de rom- pre les filaments pour les détacher de leur substratum : le con- tenu se mélange à l’eau, les sporanges changent de place et s’altèrent. La culture sur la lame de verre est presque impossible : (1) Jahrbuech. fuer wiss. Bot., Il, p, 228. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 137 au bout d’une demi-heure, c’est tout à peine si l’on peut encore voir la déhiscence d’un sporange dans une préparation (1). Spores immobiles : leur développement (pl. 3, fig. 10 et 11 ; pl. 4, fig. 4, 2, 3, 4). — Le deuxième mode de reproduction est constitué par des spores échinées, brunâtres, situées au mi- lieu des sporanges dans les filaments renflés ; elles sont parfois isolées dans les filaments renflés de même : ce sont les spores immobiles. M. Nægeli ne les a pas vues. M. Cienkowski les figure, sans s'expliquer à leur sujet. M. AL. Braun n'en dit rien après lui ; 1l ne les a pas vues non plus. M. Pringsheim les a observées et ne sait comment interpréter leur présence; il les compare, avec exactitude, à ces sphères hérissées de pointes qu'on rencontre dans les Algues munies de echlorophylle, Vaucheria, Sprro- gyra, etc., et qui, d’après lui, ne sont sans doute autre chose que les spores immobiles de parasites, vraisemblablement de Chy- tridium, Rhizidium où Pythium (loc. cit., p. 295). Il trouve sin- gulier, si ces corps appartenaient à un parasite, que le déve- loppement normal du contenu de la cellule ne souffrit aucune perturbation remarquable : nous reviendrons plus loin sur cette affirmation. Les sporanges seraient, dans ce cas, les organes mâles, et les spores échinées, les organes femelles de ce parasite. M. Cienkowski semble considérer ces dernières comme une variété des sporanges ; cependant on ne les voit jamais vides. . Les spores immobiles se distinguent des sporanges par leur (1) N'est-ce pas à un changement de place des sporanges par pression que M. Prings- heim doit de croire qu’ils sont situés, à l’état jeune, profondément au bas du filament, et qu'ils remontent ensuite ? Il m'a semblé qu'ils se tenaient au milieu du renfle- ment développé plus ou moins au-dessous de l’extrémité ou à l'extrémité même. M. Pringsheim (Jahrbuech. f.wiss. Bot., t. II, p. 221, en note) n’est pas d'accord avec M. Cienkowski sur un point. Ce dernier représente les filaments déjà renflés dès la première apparition des sporanges ; M. Pringsheim prétend que cela n’est pas exact, et que le gonflement suit et imite toujours la formation du sporange. [1 à raison quand il n’y à qu'un très-petit nombre de sporanges; mais quand il y en a un grand nombre (et c’est le cas représenté par M. Cienkowski, Bot. Zeit., 1855, pl. XIL, fig. 5), le trouble apporté dans le filament est considérable dès le début, et il y a gonflement, 158 M. CORNE. contenu, leur couleur et leurs échinules. Elles sont générale- ment sphériques où ovales, d’une couleur brun marron ou brun violacé; leur membrane est médiocrement épaisse et munie de dents très-nombreuses et courtes ; suivant les espèces, ces dents sont plus ou moins grandes ou larges à la base, par conséquent moins ou plus nombreuses. Leur forme est conique, mais très-aiguë ; elles sont disposées en très-grand nombre à la surface de la spore, mais il est possible que, si, dans certainesespèces, ellesétaient moins nombreuses, elles formassent des crêtes ou des dessins (comme dans les Péronosporées), dont on pourrait tirer des caractères spécifiques. Les apparences sont les mêmes, chez toutes les espèces, dans la coupe optique passant par le centre; mais à la surface de la spore, les ornements peuvent fournir des indications utiles. Pour s’en rendre compte, ! il suffira de jeter un coup d’œil sur les spores représentées (pl. 3 et 4, Olpidiopsis, et celles de la pl. 7, fig. 22, a et b, Chytridium glomeratum, parasite d’un F’aucheria). À cette spore échinée on trouve accolée, quand la position permet de la voir, une petite cellule vide, dont j'ignore le rôle, mais que je désignerai sous le nom de cellule adjacente, ce qui ne préjuge rien (1). Elle est soudée avec la spore d’une façon non douteuse et semble avoir déversé son contenu dans l'intérieur de cette spore. Lorsque les échinules sont un peu développées (O. fusiformis), on reconnaît sur le contour que les parois sont soudées avec deux de ces dents, qui s'appliquent sur elles et la maintiennent (pl. 4, fig. 4). La membrane est médiocrement épaisse et ressemble à celle d’un sporange. Malgré cette appa- rence de soudure, qui ne peut tromper, malgré le développement des spores immobiles, qui la montre grossissant parallèlement à l’autre ei se modifiant aussi, il m'était resté quelques doutes. En examinant d'anciennes préparations, je trouvai, sur une espèce que je confondais avec l'O. Saprolegniæ (A. Br.), des spores immobiles avec une cellule adjacente échinée (pi. 5, fig. 41). Elle était parfaitement vide et munie à la surface de dents courtes et très-visibles. (4) Voy. pl. 5, fig. 10, a et 11, a; et pl. 4, fig. 4, a. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 139 On pourrait objecter que c’est peut-être une spore plus petite écrasée et vidée accidentellement, mais le dessin formé par l’en- semble des dents ne se ressemble pas dans les deux cas : sur la spore, elles sont extrêmement nombreuses en chaque point; sur la cellule adjacente, elles semblent clair-semées et à base plus large : on ne peut les confondre. Je propose de désigner cette espèce sous le nom d'O. index. On conçoit maintenant que cette cellule peut, comme la spore, fournir des caractères spéci- fiques excellents. Quel est le rôle de la cellule adjacente ? sert-elle à la féconda- tion? Nous avons plus haut agité cette question, qui n’est pas encore résolue, mais qui mérite d’être prise en considération, surtout depuis les travaux de M. Pringsheim sur la fécondation dans le Pandorina Morum. Le développement des spores immobiles n’a pas été observé encore, et cela tient à ce qu'on ne peut les distinguer nettement que lorsque le filament commence à se dégaruir de plasma, c’est-à-dire à un point voisin de leur état adulte. il faut joindre à cela que la forme des sporanges est à peu près la même, et qu'il est souvent impossible de décider si c’est à l’une ou à l’autre des productions que l’on à affaire; l'observateur ne sait s’il a sous les yeux un jeune sporange ou une jeune spore. Une espèce per- met cependant de les reconnaître sans difiiculté : c’est 'Olpi- diopsis fusiformis. Les jeunes sporanges sont allongés et le plus souvent linéaires et grêles, et ne peuvent être confondus avec les jeunes spores qui sont sphériques. Lorsque le plasma disparaît (pl. 4, fig. 2) du renflement de la plante nourricière, leur développement est déjà fort avancé ; il faut les prendre bien avant cette époque. En faisant agir lam- moniaque, on aperçoit, outre les sporanges, qui sont linéaires, comme il a été dit, de petits globules sphériques de plasma oléa- gineux. Il est difficile de décider, comme pour les jeunes spo- ranges, s'ils possèdent ou non une membrane : leur contenu est jaunâtre ; on y voit quelques granules rassemblés au centre. Ils ne sont pas isolés, mais ils se présentent toujours accompagnés d'un autre globule plus petit, plus clair, ayant à peu près la 110 MI. CORNU. mème apparence et la même forme et contenant un nombre moindre de granules : c’est lui qui constituera la cellule adjacente. Ils grossissent simultanément en conservant des volumes à peu près dans le même rapport. L'un est environ le double de l’autre: le plus gros, celui qui est destiné à se transformer en spore, devient trouble et opaque, il est rempli d’un grand nombre de globules oléagineux, etson aspect est grisâtre ; l’autre demeure, au contraire, jaunâtre et oléagineux, avec quelques granules à son centre. La jeune spore paraît bientôt alors munie d’une membrane à double contour : cela tient peut-être à ce que cette membrane se forme à cette époque, ou devient seulement visible par suite du changement de réfringence du plasma interne. La membrane est alors entourée à l'extérieur d’une auréole mco- lore, claire et transparente, sans granules et comme gélati- neuse. : C’est à l'intérieur de cette auréole que se forment les pointes qui hérissent la spore. Elles apparaissent d’abord très-transpa- rentes, faiblement indiquées et comme formées par la conden- sation de ce mucus (pl. 4, fig. 3); elles ont déjà le contour qu'elles garderont plus tard et leur grandeur définitive. Le contenu de la cellule adjacente à conservé le même aspect que précédemment. Pendant ce développement, les sporanges pré- sentent d’abord de grandes vacuoles, ensuite un contenu écumeux caractéristique et se disposent à émettre leurs zoospores. A aucune époque, la spore et la cellule adjacente plus claire ne montrent une seule vacuole. L'autonomie de cette cellule est donc bien prouvée par le développement lui-même, fait d’un autre ordre, s’ajoutant à ceux qui ont été cités plus haut. En résumé, ce n’est donc ni une spore immobile, puisqu'elle est parfois entièrement lisse, ni un sporange, puisqu'elle ne prend pas l’aspect écumeux et que sa membrane est quelquefois échinée. Les dents de la spore finissent par acquérir une forme plus définie et des contours plus nets; la spore elle-même se colore en brun; mais c’est plus tard seulement que la petite cellule se vide (pl. 4, fig. 4). Cela donnerait à penser que, s'il y a fécon- MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. ti dation, la membrane échinée ne serait peut-être qu'une enve- loppe contenant la spore ; en un mot, un oogone. On distingue mal le contenu de la spore dans la coupe optique ; il est opaque et les échinulesempèchent d’en distinguer les détails. Quel est le sort ultérieur de ces spores ? Elles sont évidemment destinées à germer plus tard, après un long repos, comme les spores des Synchytrium ; les filaments qui les contiennent se flétrissent et s'ouvrent ; elles s’échappent alors : on en rencontre quelquefois flottant librement dans l’eau; on ne les trouve jamais vidées, même à cet état. La germination n'en a pas été observée ; elles sont trop peu nombreuses pour qu’on puisse, avec de sérieuses chances de succès, en entreprendre la culture. Il est probable qu'elles s’entr'ouvrent pour émettre des zvospores, mais on ne peut que faire des conjectures sur le mode de déve- loppement. Démonstration du parasitisme des Olpidiopsis. — 1] est néces- saire d'établir d'une façon irréfragable le parasitisme des pro- ductions dont nous venons de parler, et chez lesquelles nous l’avons admis jusqu'ici. Il fallait d'abord en faire l’histoire com- plète auparavant, afin de pouvoir faire une discussion en con- naissance de cause. Je dis que nous l'avons admis jusqu'ici, quoique ce qui à été dit (page 81) à propos de la sexualité des Saprolégniées puisse être considéré comme une preuve suffi- sante. On ne peut soutenir que ce sont des organes sexuels, puisqu'on les a rencontrés sur des plantes qui en possèdent déjà. Cette considération seule suffirait à démontrer que ce sont des para- sites. Les plantes déjà munies de branches latérales, sur les- quelles elles ont été trouvées, sont l’Achlya leucosperma, l'A. racemosa Hild., le Dictyuchus monosporus Leitgeb, et en outre le Saprolegnia de M. Al. Braun (1). M. Pringsheim parle plusieurs fois de la simultanéité de ces productions et des oogones. Elle est tout à fait fortuite; on les rencontre souvent sans qu'aucun oogone les accompagne. II (4) Ueber Chytridium, pl. V, fig. 22 et 23 : S. spiralis (?). 142 M. CORNE. dit lui-même, du reste, qu’elles en précèdent la formation et qu’il yen à ensuite une deuxième apparition. On voit que ce fait même est assez défavorable à la thèse qu'il soutient. À quoi servira ient des anthérozoïdes développés abondamment pour ne rien féconder ? L'objection la plus grave à toutes les hypothèses contraires au parasitisme, c’est la présence des spores immobiles. Depuis le mémoire de MM. de Bary et Woronine sur les Chytridinées, les spores immobiles sont mieux connues, et la nécessité du double mode de reproduction de ces plantes est établie. I n’y a rien à répondre à ce fait, qui, joint aux précédents, est suffisant pour convaincre les plus incrédules. Mais il y a d’autres raisons tirées de la nature de ces plantes elles-mêmes, et qui ont aussi une grande valeur. Leur apparition est tout à fait irrégulière et, de plus, la même espèce se rencontre sur des plantes diverses (ex. : O. fusi- formis sur l'Achlya leucosperma vivant sur un Ver de la farine, et sur l'A. racemosa Hild., développé sur une brañche). La forme des sporanges est des plus variables dans le même filament, ainsi que leur nombre; les uns sont déjà adultes et énormes; les autres encore très-jeunes, d’une taille très-faible, et n’ont plus de nour- riture, comme s'ils étaient venus trop tard après les autres dans l'intérieur du filament, L'utricule qui les contient est renflée de façons diverses, tandis que Îes oogones et les sporanges onttoujours à peu près la même forme. Il est singulier que dans ces renflements irréguliers, si peu en rapport avec ce qu'6n remarque généralement, et les accumulations plasmatiques extraordinaires chez les Saprolégniées, M. Pringsheim voie un développement normal et régulier. Il est permis au moins de s’en élonner. La forme des sporanges est celle des Olpidium, et la petitesse des zoospores est en outre un caracière qui avait déterminé M. Al. Braun à placer dans ce genre les productions qui nous occupent. Joignons à cela que ces zoospores présentent un cil unique et un mouvement saccadé. Tout cela range les Olpi- diopsis dans les Chytridinées. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 143 Si les corps agiles ne germent pas dans l’eau, objection que M. Pringsheim reproduit sans cesse, ce n’est pas une raison pour leur refuser le rôle de zoospores : on a insisté plus haut sur ce fait, que chez les Chytridinées entophytes elles ne s’'en- tourent d’une membrane que longtemps après leur pénétration dans l’intérieur de la plante nourricière (p. 116). Quant à l'opinion qui voudrait que les corps agiles fussent des anthérozoïdes, les sphères échinées étant les organes femelles, elle ne repose sur aucun fondement. Les corps agiles sont pro- duits souvent en grand nombre, sans qu’on aperçoive le dévelop- pement simultané d’une sphère échinée. Et par où pénétreraient ces anthérozoïdes si petits et si délicats? Du reste, les filaments non perforés contiennent ces spores échinées en même temps que des sporanges, qui déversent ces corps agiles non pas dans l'intérieur, mais bien au dehors. — Comment alors aurait lieu cette fécondation ? Du reste, M. Pringsheim n'a pas l'air d'attacher beaucoup d'importance à cette vue de l'esprit, et ne S'y arrête pas. Pour terminer, il ne sera pas inutile de eiter le passage du livre de M. de Bary (1), où il juge ces productions et la théorie à laquelle elles ont donné lieu. « Une autre opinion que le même auteur réfute, voudrait que ces corpuscules fussent des parasites venus du dehors dans les cavités du Saprolegnia et fructifiant aux dépens de son proto- plasma; ce sentiment s'appuie principalement sur la grande ressemblance de ces corpuscules avec certains parasites véri- tables, tels que les Chytridium. I peut s'étayer également de ce que M. Pringsheim a observé près des corpuscules dont il s’agit, et dans leurs conceptacles, des globules finement hérissés, semblables à ceux qui ont été souvent rencontrés chez les Spirogyra, V'aucheria et autres Algues, et qui appartiennent sans conteste à des végétaux parasites de celles-ci. Les raisons que M. Pringsheim apporte contre cette appréciation, et qu'il serait trop long de reproduire ei, doivent avoir perdu de leur A) Morph. und Phys. der Pilse, p. 1573 el Ann. des sc. nat, 5° série, 1866, t. V, p. 346. 1h M. CORNE. valeur à la suile des nouvelles observations qui ont été faites sur la biologie de ces parasites microscopiques, et tout semble devoir étre remis à l'étude. » C'est cette étude que J'ai entreprise, et mes conclusions sont contraires à la théorie de M. Pringsheim. Étude systématique. — J'ai rencontré plusieurs fois des spo- ranges d'Olpidiopsis non accompagnés de spores immobiles, sur des Saprolegnia, des Achlya et sur le Dictyuchus monosporus Leitgeb ; dans ce cas, on ne peut savoir avec certitude à quelle espèce les rapporter : ce sont elles seules, en effet, qui peuvent décider du nom spécifique. Cela n'empêche pas, vu l'analogie de toutes ces formes, de les représenter pour l'explication du texte, car elles ont souvent offert des matériaux plus complets que les espèces déterminables spécifiquement. Sur un Crapaud mort trouvé dans les bassins du Muséum, au mois de mars 1869, végétait un Saprolegnia fortement attaqué par un Olpidiopsis. Les filaments étaient renflés en sphère ou en massue, ou dilatés sur une grande partie de leur longueur. Les sporanges étaient tantôt tous égaux et ovoides; tantôt on en voyait quelques-uns très-gros et un grand nombre de beaucoup plus petits (1). I y avait alors une variété de formes considé- rable ; les uns étaient oblongs, d’autres réniformes, et d’autres ovoïdes. Aucune autre fois je n'ai vu des différences aussi grandes, et il était nécessaire de les citer. M. Al. Braun a décrit, sous le nom de Ch. Saprolegniæ, une espèce que des éléments incomplets ne lui ont pas permis de aractériser : ce nom mérite cependant d'être conservé, l’auteur ya droit; ce sera de plus un hommage rendu à la sagacité du célèbre professeur, qui détermima un parasite avec des maté- riaux aussi imparfaits et presque à priori. Le nom qu'il a donné, si l’on ne considérait que les sporanges, pourrait s'appliquer aux trois premières espèces d'Olpidiopsis. Une seule d’entre elles vient sur un Saprolegnia; ce sera donc à celle-là que nous limi- (4) Planche 5, fig. 1-7. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. US terons l'espèce de M. AT. Braun. Îl est possible que dans la suite on la rencontre sur des espèces du genre Achlya ; mais avant tout il faut donner un nom raisonnable, et il serait singulier d'appe- ler maintenant O0. Saprolegniæ une espèce venant sur ur Achlya. Olpidiopsis Saprolegniæ (A. Br.) (pl, 3, fig. 40). Il à été rencontré sur un petit Sapro!legnia développé sur un Puceron du Rosier jeté dans l’eau. Cette petite forme rappelait celle qui à été représentée par M. Cohn (2). Les filaments renflés ne contenaient qu'un seul sporange, comme dans l'espèce de M. AT. Braun; un seul tube de sortie se montre sur le côté dans la figure donnée 1c1, pl. 3, fig. 10. Les sporauges étaient sphériques; vides, ils n'avaient ni plis ni rides, et étaient d’une régularité parfaite. Les spores immobiles étaient munies d’échinules très-petites et extrêmement nom- breuses; elles étaient accompagnées d’une cellule adjacente, à parois lisses (2). C’est uniquement à cette espèce qu'est désormais restreint le nom d'O. Saprolegniæ (A. Br.). La forme des sporanges, si variable dans les espèces de ce groupe, n’est pas forcément sphé- rique ; elle peut probablement varier : le caractère de l'espèce n'est pas tiré de là, mais de la présence d’une cellule adjacente lisse, accolée à une oospore munie d'échinules nombreuses, isolées et non formées par des crêtes. L’indétermination spéer- fique du Sapro!egnia est peu importante, car les espèces d'Olpi- diopsis ne semblent pas rigoureusement confinées dans une seule. Olpidiopsis Indeæ (pl. 3, fig. 14). Cette espèce se développa sur un Achlya végétant sur des insectes, en novembre 1868; les sporanges étaient elliptiques, comme ceux de la fig. 4, souvent solitaires et d’une taille assez considérable. Elle fut conservée dans une préparation ; ce n'est (1) Nova Acta nat. eur, ,LNXIV pl. 17, fig. 4 et 2. Elle végétait sur une Daplnra. (2) On en voit quelquefois deux, mais c’est un cas rare (pl. 3, fig. 19, «). 5° série, Bor. T. XV. (Casier n°3. 2 10 146 vi. d'A. que beaucoup plus tard que j'apercus la cellule adjacente échi- nulée. Elle constitue ainsi une espèce nouvelle. Cette cellule échinulée et vide, différant par là des sporanges ou des spores inmobiles, avec lesquels on pouvait la confondre, a done une grande importance. Je propose, à cause de cela, d'appeler l'es- pèce qu'elle caractérise, O. fndex. Les spores immobiles sont munies d’échinules très-petites et très-nombreuses. On ne voit pas de dessins ou de crètes à la surface ; les échinules de la cellule adjacente sont beaucoup plus elair-semées, plus larges et plus courtes. Olpidiopsis incrassatla (pl. 4, fig, 12). J'en ai trouvé une seule fois deux échanüllons, I vivait dans les filaments d'un À. racemosa Hiid., développé sur des branches tombées daus l'eau, en avril 1869, à Villeherviers (Loir-et-Cher). Ce qui distingue cette espèce des autres, é’est la forme ovale de ses spores immobiles non échinulées. Leur couleur est jaune brunâtre; le contenu est épais, granuleux sur les bords, plus clair au centre et muni parfois de gouttelettes oléagimeuses. La paroi est eñtourée à l'extérieur d'un épaississement irrégulier, qui paraît être constitué par une matière analogue à celle qui forme les dents chez les autres espèces. I n’y avait pas de cel- lüle adjacente visible, à moins que l’une des cellules claires qui touchent la spore supérieure n’en soit une (fig. 19, a). Où pourrait peut-être se demander si ce ne seraient pas des sporanges d'une autre espèce arrêtés dans leur développement etenvirounés de plasma contracté. À cela on peut répondre que les sporanges étatent tous vides, même les plus petits, d’ordi- uaire tués où affamés par les gros, qui absorbent tout le plasma ; les spores sont justement d'une taille supérieure à ces spo- ranges et auratent dû êfre en avance sur eux, comme il a été dit plus haut (page 142). Ne seralent-ce pas des spores immobiles arrêtées dans leur dé- veloppement? Cette cause, quiles aurait tuées, n'a pas empêché les sporanges d'éneitre leurs zoospores; donc elle aurait été MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 147 postérieure à leur évacuation; mais à cette époque les spores immobiles sont à peu près arrivées à létat adulte. Ces deux hypothèses sont done également inadmissibles. Ce qui motive cette discussion, c’est que cette espèce, rencontrée en si rares échantillons, est la seule, parmi les parasites des Saprolégniées, qui présente des parois lisses. Ce fait n’est cepen- dant pas rare chez les autres Chvtridinées ; on peut citer comme exemple les Phlyctidium vagans et decipiens (1). (Voy. p. 121.) Olpidiopsis fusiformis (pl, 4, fig. 1-1). Cette espèce a été rencontrée sur l'Æchlya leucosperma, en juillet 1869 ; sur l'A. racemosa Hild., récolté dans l’eau sur des branches, près de Romorantin (Loir-et-Cher), dans les mares de Longueville en mai 1871 ; sur un Achlya indéterminé, très-gréle et peu riche en plasma, qui végétait sur des branches, en octo - bre 1874, près de Romorantin. Les sporanges sont caractéristiques dans cette espèce, 1ls sont presque tous très-allongés, fusiformes où réniformes linéaires. Quand ils sont jeunes, ils sont linéaires et grèles; plus haut 1l a été question des avantages que présente celle espece pour l’étude, à cause de la différence entre les spores immobiles et les sporauges. Le renflement au milieu duquel ils se trouvent est trés-allongé et le filament longuement conique à la partie supé- rieure ; jamais on ne voit de dilatation ovale ou sphérique, Les spores immobiles (fig. A) sont assez différentes de celles qui ont été signalées plus haut dans les deux premiéres espèces, quoiqu’elles en soient voisines cependant. Les dents sont coni- ques, subulées. formées d’une substance incolore, beaucoup plus larges et plus longues à la base que dans les autres cas : elles sont par contre moins nombreuses. Un coup d'œil jeté sur la planche suffira pour faire comprendre là différence. La cellule adjacente est lisse, située entre les dents, qui se soudent à sa paroi du côté où elles la touthent. C'est sur cette espèce que le développement des spores immobiles a pu être suivi : elle a donc aussi une assez grande 1mporlance. 148 M. CORNE. Olpidiopsis Aphanomycis (pl. 4, fig. 11). {la été rencontré dans les bassins du Muséum, en juillet 1869, sur un Æphanomyces indélerminé, développé sur le squelette sxterne abandonné par.une Tipule; je ne l'ai pas retrouvé de- puis ; les spores immobiles sont inconnues: Les sporanges sphé- riques ou ovoïdes se rencontrent dans l'intérieur de renflements situés à l'extrémité de courts rameaux (fig. 5), ou bien sont intercalaires ; 1ls sont solitaires où groupés par trois au plus. Le développement est le même que dans les autres cas; les tubes pour la sortie des zoospores (fig. 10 et 11) paraissent relative- ment plus gros. Le développement des zoospores n’a pas été vu, non plus que leur sortie ; mais tout semble être identique avec ce qui à lieu chez les autres espèces. Malgré les lacunes très-con- sidérables que contient l'étude de ce parasite, 1l paraît difficile de le ranger parmi l’une des espèces précédentes. Le genre Achlya en nourrit trois, le genre Saprolegnia au moins une, et il ne semblera pas derarsonnable de séparer sous le nom d'O. Aphanomycis un parasite qui s'éloigne notablement des autres. La position, le plus souvent intercalaire, des sporanges, qui sont généralement isolés, et le diamètre assez considérable de leur tube de sortie, sont, à mon sens, des raisons qui justifient suffisamment l'établissement de cette espèce. Deuxième groupe. — CHYTRIDINÉES ADHÉRENTES. Genre ROZELLA. R. Movogzepnambis, Rairibit SPINOSI, APODYÆ BRACHYNEMATIS, SEPTIGENA, Généralités. —- Ce genre, qui comprend quatre espéces, est constitué par des parasites dont la paroi du sporange se soude avec le filament qui les nourrit, de telle sorte qu'il est impos- sible de découvrir deux couches au point où la membrane est cependant double. Quelquefois la soudure n'a pas lieu sur toute la surface du MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES, 149 sporange ; c’est le cas des espèces qui peuvent développer des sporanges dans une partie moyenne des filaments attaqués; c’est un cas normal chez le À. Monoblepharidis, une exception chez le R. septigena. Lorsque le sporange du parasite occupe lextré- mité d’un filament, il se soude entièrement avec la paroi, sauf sur une petite surface qui reste libre et simule une cloison. On dirait qu'on à affaire à un sporange de la plante attaquée, mais les modifications du contenu ne ressemblent en rien à ce qu'on observe chez les Saprolégniées et rappellent en tout point ce qui a été décrit chez les Olpidiopsis. Les zoospores s'échappent par une ouverture circulaire qui provient de la dissolution d’une papille, représentant le tube de sortie des espèces libres, et dont elle est, pour ainsi dire, le rudiment. Ce qui distingue le R. septigena des autres espèces, c'est qu'il développe ses sporanges dans des portions de filament non mo- difiées, et que plusieurs d’entre eux peuvent être situés à la suite les uns des autres et simuler ainsi une série de cloisons naturelles. Quand le sporange est solitaire, suivant qu'il est terminal ou intercalaire, il établit la transition entre les différentes espèces. Le développement du parasite et la soudure avec les parois sont dus à des phénomènes spéciaux. Le Rozella, comme les Olpidiopsis, mais d’une façon plus saisissante, vit longtemps à l'état de plasmodium, dans l’intérieur du filament, au milieu du plasma; il ne s’entoure d’une membrane que quelque temps après qu'il en a atteint les parois. Nous y reviendrons en étu- diant le /?. septigena. Les spores immobiles sont sphériques, munies d’échinules ; elles sont toutes semblables entre elles, non munies de cellules adjacentes, et, sauf cela, sont très-analogues à celles des Olpi diopsis (A). Leur développement est identique; elles proviennent d’un globule renfermé dans une portion renflée, quelquefois accidentellement cloisonnée, qui se nourrit aux dépens du plas- ma environnant.Les échinules naissent au milieu d’une auréole claire, exsudée par le globule déjà entouré d’une membrane lisse. (4) C’est pour cela que je n’attribue pas une très-grande importance à la celtui adjacente. 150 ®E. d'HRUE . Les spores sont trop rares pour que le développement ultérieur ait pu en ètre recherché. Le parasilisme de ces formations sera démontré à propos de chaque espèce. 1. Rozella Monoblepharidis polymorphe (pl h, fig. 13-18). Ce parasite à été rencontré au mois de juin 1869, sur le Monoblepharis polymorpha, cultivé depuis les premiers jours de mai. Le Monoblepharis, apres avoir bien végété pendant quel- ques jours, devint de moins en moins florissant; je finis par le laisser de côté. C'est en cherchant, après un mois, à me rendre compte de l'état dans lequel il se trouvait, que j'observai le parasite. Le Rozella était déjà trop avancé ; les sporanges avaient émis leurs zoospores, mais je fus assez heureux pour découvrir les spores immobiles. Quoique assez incomplète, l'histoire de ce parasite est une de celles dont on peut tirer les conséquences les plus importantes. Les sporanges ne sont pas situés, comme dans les espèces pré- cédentes, à l'extrémité des filaments, mais en un point quel- conque. Leur présence détermine des renflements considérables qui vont jusqu'à huit fois le diamètre primitif du filament (pl. 4, lis. 43); leur forme est ovoïde. Mais ici un fait nouveau se présente : leur membrane est soudée latéralement avee la paroi du Monoblepharis ; la portion supérieure et la portion inférieure de la membrane denieurent libres et plus ou moins planes ou convexes. Le fait de cette soudure entre les parois de deux plantes si différentes, qui nous apparaît pour la première fois, est très-sin- oulier ; 1 est mis hors de doute par certains sporanges et parti- culièrement par celui qui est représenté fig. 13, b. On voit la membrane du Rozella et la paroi du Monoblepharis arriver au contact; mais une fois ce contact établi, la soudure est si intime et si complète, que les meilleurs objectifs ne peuvent les sépa- rer; l'emploi même des objectifs à immersion ne met pas en évidence que la paroi est double. On connaît des exemples de soudure aussi mtime, mais seule- ment entre des membranes de la même plante : ils se présentent MONOGRAPHIE DES SAPROLEGNIÉES, 151 chez les espèces à sporanges prolifères, chez tous les Saprolegnia, chez quelques Pythium et le Monoblephäris prolifera: mais jamais entre des membranes d'origine aussi dissemblable. L'ouverture du sporange se voit sur le côté (fig. 15, p). Elle est assez étroite, à bords nettement limités; c’est le premier exemple des ouvertures que nous rencontrerops chez tous les parasites qui nous restent à étudier, Quoique je ne l’aie Jamais observé, je n'hésite pas un seul instant à affirmer que cette ou- verture doit succéder à un organe dont nous parlerons plus loin et qui existe dans les autres espèces, je veux dire une papille. Elle est de forme constante dans toute la série et est l'organe qui représente le tube de sortie émis par les sporanges libres. Les tubes de sortie, qui doivent livrer passage aux zoospores, ont un double rôle à remplir : d'abord alteindre la paroi de la plante hospitalière, c'est ce qui détermine leur allongement, et ensuite perforer cette paroi; mais dans le cas où la paroi est directement en contact et même soudée avec la membrane du parasite, le second rôle reste seul à remplir : c'est dans ce cas que se montre la papille; elle est done, comme il a été dit, le représentant du tube de sortie des zoospores réduit à sa partie perforatrice. La constitution des papilles explique ainsi celle des tubes de sortie, et réciproquement : elle permet de décider quelle est la portion qui perce la paroi de la plante hospitalière ; c'est l'extrémité seulement, cette portion remplie d’un plasma non granuleux et assez clair, qui est de forme hémisphérique et termine le tube. C’est cette portion qui a le même aspect et en partie le même rôle chez le Pythium Cystosiphon et chez les P. utriforme et imper/fecium. Il n'a pas été démontré encore que nous ayons bien affaire à un parasite et non à un organe de reproduction du #onoble- pharis. Les organes sexuels du A7. polymorpha sont connus, ils ont été décrits plus haut, quant aux formations qui nous occu- pent, elles n’ont pas trait à la reproduction, puisque la plante hospitalière est déjà munie de ses deux sortes d'organes. On pourrait invoquer qu'on a peut-être là une autre espèce; mais ces formations ayant été trouvées sur des filaments déjà por- 152 M. CORNE. teurs des organes de reproduction, 11 n'y à pas d’ambiguité possible (fig. 45: 0, oogone ; a, anthéridie); 1l faut donc aban- donner cette hypothèse. La présence des spores immobiles vient encore confirmer ce fait du parasitisme, qui ne peut faire désor- mais l'objet d’un doute. I fallait msister sur cette démonstra- tion, car le premier développement de ce Rozella n'a pas été observé, non plus que la sortie des zoospores. Les spores immobiles (fig. 15-18) sont sphériques, brunes, à parois hérissées de potes nombreuses, et différent assez peu de celles des espèces précédentes ; il n°y à pas de cellule adja- cente. Elles sont situées, en général, au centre d’un filament renflé du Monoblepharis (fig. 16) ; quelquefois à la base d’une bifurcation ou d'un rameau (fig. 47); quelquefois elles ont dé- terminé une dilatation irrégulière (fig. 18), et sont placées en un point quelconque de cette dilatation. — N'ayant eu affaire qu'à une plante qui avait terminé sa végétation et peut-être un peu altérée, je ne puis rien dire de leur développement. Les divers états que j'ai rencontrés me permettent cepen- dant d’aftirmer qu'il paraît être le même que dans les spores immobiles de toute la série; la membrane est primitivement lisse (fig. 15) ; plus tard elle se charge d’épines en s’épaississant un peu. Le contenu tel qu'il est représenté (fig. 16 et 17) dans l’intérieur des spores adultes est vraisemblablement altéré. Cette espèce se distingue des autres, d’abord par son habitat, et ensuite par la soudure intime d’une partie du sporange avec le filament nourticier. — L’étroitesse du filament n’est pas la cause de celte soudure: l'Olpidiopsis Aphanomycis (fig. 5-11) le prouve sans réplique. Ce parasite, malgré les lacunes que contient l'histoire de son développement, est l’une des espèces les plus importantes de la série que nous étudions : il nous fait passer du groupe des Chytridinées libres dans l'intérieur des filaments, aux espèces entièrement soudées; c’est un intermédiaire précieux et dont la valeur néchappera à personne; Je propose de le nommer Rozella Monoblepharidis. H° vivait sur le M. polymorpha, végé- tant parmi un certain nombre d’autres espèces; aucune ne se MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 153 montra attaquée par ce champignon, qui paraît spécial au Monoblepharis. Si nous cherchons à nous rendre compte avec quelles espèces notre parasite à le plus d’analogie, nous trouvons, d'une part, qu'il rappelle l'Olpidiopsis Aphanomycis par la position des sporanges, qui ne sont pas situés à l'extrémité des filaments, mais en un point quelconque ; d'autre part, il rappelle certaines formes du Rozella sepligena, celle par exemple qui est figurée pl. 6, fig. 8, 9 et 17, g, où les sporanges sont situés en un point quelconque des tubes du Saprolegnia. On voit par là quel lien réunit entre elles les espèces, et comment l’une peut servir à expliquer l’autre. Il est fort regrettable, surtout en présence de ce qui a été vu chez le À. septigena, que la formation des sporanges n'ait pas pu être observée. 2. Rozella Rhipidii spinost (pl. 5, fig. 1-9). L'étude du Rhipidium spinosum n’a pu être menée à bonne fin; ce futen partie à cause de la présence d’un parasite : c’est ce parasite dont il va être question 1e1. (Voy. p. 15.) Les sporanges du Rhipidium sont les seules parties qui le con- tiennent; il s'y développe en deux sortes d'organes reproduc- teurs : les zoospores et les spores immobiles. Comme ce Rhipi- dium est imparfaitement connu, on peut se demander si je n’ai pas pris pour un parasite l’un des modes de reproduction de la plante; nous verrons plus loin que non. Les sporanges de l'O. Saprolegniæ (A. Br.) et des espèces voi- sines sont libres dans l’intérieur des filaments attaqués ; ceux du R. Monoblepharidis sont en partie soudés aux parois de la plante nourricière; ici le Rozella est complétement soudé dans toutes ses parties avec la membrane du fèhipidium, et l'observa- tion directe ne permet pas plus de séparer la ligne de suture que dans l'espèce précédente. Il occupe un article terminal ren- flé de façon à simuler un véritable sporange. Les sporanges remplis par le parasite se distinguent des spo- ranges normaux assez difficilement au premier abord; l'aspect 15/1 M. d'ORXNU. du plasma dans le développement ultérieur et la présence de la papille spéciale aux Chytridinées donnent cependant de bonnes indications. Il y a aussi quelquefois une légère différence de forme ; tandis que les sporanges sains sont plus où moins régulièrement allongés ou ovoïdes, les autres sont en général piriformes ren- versés. Dans le premier âge (fig. 1), les sporanges attaqués res- semblent aux jeunes sporanges ordinaires el ne présentent rien de saillant ; mais plus tard, après la formation de la cloison, on constate dans le plasma un changement notable ; on voit appa- raître un certain nombre de vacuoles (fig. 2), gouttelettes d’un liquide clair au milieu du plasma trouble : le sporange prend cet aspect écumeux caractéristique de nos parasites el qu'on ne rencontre Jamais dans les sporanges des Saprolégniées. Les vacuoles diminuent ensuite en diamètre et augmentent en nombre ; le contenu devient plus trouble et plus foncé ; bientôt après 1l se dispose en petites sphérules (fig. 4), indiquées d'abord par des espaces clairs. Ces sphérules prennent un contour de plus en plus net, ce sont les futures zoospores. Elles s'agitent dans lin- térieur, d'uu mouvement d’abord lent et vague et glissent les unes sur les autres en restant à la même place, puis se déplacent les unes par rapport aux autres; et quand ce mouvement est devenu rapide, elles sont sur le point de s'échapper du sporange. L'ouverture par laquelle se fera la sortie est indiquée par une papille de forme particulière (fig. 2, p)}, que nous retrou- verons chez les espèces suivantes. La place de cette papille est constante, elle est située au sommet du sporange; elle est hé- misphérique, formée par le repli de la portion là plus interne de la paroi, qui sort au dehors; la membrane en est très-mince. Le contenu est clair et sans aucun granule; il rappelle celui qui termine les tubes d'émission des Pythium à sporanges munis de tubes de sortie. La papille ne se rompt pas tout d’un coup, elle se dissout avec lenteur, pendant que les phénomènes décrits plus haut se passent successivement, et devient alors indistincte. Lorsque les zoospores s'agiient, la papille à déjà disparu, et cependant la MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 159 sortie n'a pas lieu : il semble que le sporange soit encore fermé par du mucus invisible, comme cela se présente avec des modi- fications particulières chez le Chytridium roseum de Bary et Wor. (1); elle disparaît en laissant à sa place une ouverture circulaire très-nette (fig. 3 0). Le moment de la sortie arrive enfin. Les zoospores sont lan- cées par l'ouverture une à une avec une assez grande force; elles s'arrêtent à une demi-longueur du sporange; elles y restent quelques secondes sans mouvement et comme enveloppées dans un mucus qui les rend immobiles : on voit leur eil unique, roide et sans mouvement, qui est sorti apres là partie plasmatique (fig. 3). Elles commencent, après une où deux minutes, à s’agiter, d'abord lentement, puis par des mouvements brusques et sacca- dés, et se délivrent à la fin. Quand un certain nombre sont déjà délivrées, les autres s’échappent, et nagent aussitôt après leur sor- tie, sans aucun temps d'arrêt; il semble alors que le mucus Invi- sible, qui arrêtait les premières, ait été dissous ou dispersé. Ces zoospores sont rémformes (fig. 3 d), munies d’un seul cil, égal à trois fois environ leur longueur et dont elles se servent comme les zoospores des autres Chytridinées. Leur mouvement est saccadé et ne dure que quelques minutes. Elles sont formées d’un plasma pâle contenant quelques granules vers les extrémités et surtout à la base du cil. On en voit aussi de sphériques et d’elliptiques. Somme toute, la forme est très-variable chez ces petits corps. La forme normale est presque identique chez tous les parasites des Saprolégniées, mais ils s’altérent avec la plus grande faci- lité, à cause de leur grand nombre et de la pression qu’ils su- bissent, des conditions défavorables dans lesquelles se trouvent les touffes arrachées et dissociées qu’on étudie, etc. Ces zoospores deviennent ovales ou sphériques et s'arrêtent ; elles se décomposent ensuite sans germination : on pourrait se demander encore si ce sont bien réellement des zoospores ; cette question à été plus haut spécialement examinée. (4) Comptes rendus de la Société des naturalistes à Fribourg en Brisqau, vol, HE livr, 1, trad, Anx, se, nat., Bor., 5° série, 1865, & IIL, p. 263. 156 M. CORNU. L'ouverture du sporange a la forme d'un cercle dont le dia- mètre est de beaucoup supérieur à celui de la zoospore ; là ausst il doit y avoir une gaîne de mucus incolore, qui rétrécit l'ou- verture et ne laisse le passage libre que pour un seul de ces petits corps. On a remarqué un fait analogue chez les Synchytrium de Bary et Wor. (1). Les bords de l'ouverture sont très-nets et sont situés sur le contour même du sporange ; 11 n°y a pas la moindre trace de prolongement, comme on en rencontre dans les spo- ranges sains du Rhipidium spinosum abandonnés par les z00- spores. Les organes échinés (fig. 4) du Rhipidium nourrissent aussi le Rozella : seulement la papille n’est pas toujours visible ; elle est située à la partie supérieure, et se trouve ainsi parfois enga- gée au milieu des épines et cachée par elles. On constate donc le rôle identique que jouent, vis-à-vis du Rozella, les deux sortes de cellules échinées ou non; ceci est intéressant à noter, surtout parce que J'ai rencontré peu de don- nées sur la fonction de ces organes munis d’épines. C’est en par- tie pour cette raison que Je les considère comme des sporanges du Rhipidium. Il a été dit plus haut que la membrane du sporange du Rozella se soudait intimement avec celle du sporange du Rhipidium. de sorte que les deux membranes soudées devenaient indis- tinctes. Mais on peut donner une preuve de ce fait. Elle réside dans la constitution de la cloison du sporange attaqué. Nous avons vu que la cloison est formée par un dépôt de cellu- lose (2) dans le canal de l’étranglement situé sous le sporange : cette cloison atteint une épaisseur parfois supérieure à deux fois son diamètre (fig. 5). Or, ici, il n'y a rien de semblable; l’'étranglement, dont les parois s’épaississent en général, à gardé le diamètre ordinaire ; la cloison n’est pas formée par un long et grêle cylindre de cellulose, mais par une membrane mince, qui semble la continuation de la paroi du sporange. Il y a donc une différence considérable avec ce qui se montre d’or- (4) Loc. cit, (2) Voy. 17€ partie, p. 15. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 157 dinaire: cette membrane mince serait la portion libre du spo- range du parasite; elle correspond à l’une des surfaces hibres du Æ. Monoblepharidis. Cette membrane se montre lorsque le sporauge à déjà atteint la grandeur normale. Il y a là unedilli- culté à résoudre : lé sporange du Rozella a-t-1l existé, avec sa propre membrane et libre de toute adhérence, dans l'intérieur du Rhipidium ? La question se posera à propos du Rozella septi- gena, où le développement a été suivi de plus près, et elle est résolue par la négative. Le développement de la papille à lieu très-probablement, comme cela a été observé chez cette dernière espèce, par la sor- tie au dehors de la membrane propre du Rozella. La grande minceur de la paroi montre que ce n'est plus celle du Rhipi- dium; il n’a cependant pas été possible, comme dans l'exemple cité, de séparer; même dans le voisinage de la papille, les deux parois de la plante nourricière et de son parasite. Deuxième mode de reproduction (pl. 6, fig. 6-9), — Le Rozella qui nous occupe à été rencontré aussi à l’état de spores immo- biles, et c’est de ce second mode de reproduction qu’on tire des preuves irréfragables du parasitisme. Les spores immobiles sont pareilles à celles qui ont été signa- lées dans les Olpidiopsis Saprolegniæ (A. Br.), Index et Mono- blepharidis, avec de légères différences; elles sont sphériques, et munies de petites échinules. Leur couleur est d’un brun jau- uâtre ou rougeâtre, le contenu est trouble. On voit que par leur forme et leur constitution, elles ne rappellent en rien les oospores des Saprolégniées. Voici comment elles se forment. Au milieu du plasma dis- posé en trainées plus ou moins nettes el rempli de vacuoles, se montre un globule plus sombre et un peu brunâtre (fig. 6 sp, bete); l'ammoniaque dissout à peu près tout le plasma qui l’en- toure et le met assez clairement en évidence. I est formé d’une matière transparente et réfringente, dans laquelle sont accu- mulés uu grand nombre de granules qui donnent à l'ensemble une couleur foncée spéciale : c’est le début, la première appa- 158 M. CORNL. rence de la spore. Est-elle déja environnée d'une membrane? Cela est difficile à décider, quoique peu probable; mais les con- tours en sont déjà nets, et l’ammoniaque n'en disperse pas les éléments comme ceux du plasma environnant. Avec le temps, ce globule s'accroît et devient un peu plus foncé ; les matières qui l'euvironnent disparaissent ; elles ne sub- sistent à la fin que sous la forme de longues traînées maigres et déliées (fig. 9 4), qui finissent par devenir indistinctes; 1l ne reste bientôt qu'une couche plasmatique plus ou moins épaisse sur les parois du Rhipidium. À cet instant, le gros globule, qui joue assez bien l'aspect de la gonosphérie d’un oogone de Sapro- légmée, s'est souvent rapproché de la parot (fig. 7 et 9). En cinq ou six heures, sur le porte-objet, 1l regagne le centre et se montre plongé au milieu d'uu liquide clair, peu granuleux et très-peu réfringent. Des modifications très-notables vont se montrer désormais. Le plasma, quiétait condensé sur les parois du faux oogone, se disperse en granules dans tout l'intérieur : on aperçoit alors qu'il est muni d'une membrane mince. Bientôt le globule du Rozella parait entouré d'une auréole claire, formée d'une matière inco- lore et d'apparence gélatineuse, qui semble exsudée par lui (fig. 8 et 9 b). L'intérieur du globule est toujours trouble et rempli de granules très-petits ; puis, dans l'auréole claire se montrent çà et là (fig. 8) des lignes déliées, figurant des rayons très-grèles ; elles deviennent de plus en plus nettes et finissent par se mion- trer sur tout le contour (fig. 9 6). L’auréole s’élargit, de sorte que les stries, futures échinules, sont englobées dans la masse qui s'étend au delà de leur extrémité. Ce mucus, très-visible, paree qu'il est sans granules, refoule les parties plasmatiques granuleuses, ou bien ces dernières sont absorbées par la nutri- tion de la spore. Quoi qu'il en soit, le résultat est le même, l'auréole devient diffuse, les granules disparaissent, et la spore acquiert la forme et la couieur qu'elle à à la maturité, et qui est décrite plus haut. Pendant que ces phénomenes s'accomplissent, il n’est pas rare de voir le canal de l'étranglement S’oblitérer et se fermer. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 159 Mais cette formation est si variable de nature et de position (fig. 8 et 9), qu'on reconnait un développement anormal, sorte d'hypertrophie irrégulière de la membrane, déterminée par la présence du parasite. De même que les zoospores, les spores immobiles se rencontrent dans l’une et l’autre sorte de sporanges ; mais les spores dominent surtout dans les sporanges échinés, tandis que les zoospores se montrent surtout dans les sporanges lisses. C’est du moins ce que m'ont présenté mes échantillons. J'ai promis de donner une preuve irréfutable que ce corps appartient bien à un parasite et nullement au Rhipidium. On pourrait prendre le globule dont nous venons de parler pour une gonosphérie, et la cellule qui le contient pour un oogone ; comme le second appareil de reproduction est inconnu dans l'espèce qui nous occupe, on pourrait s'arrêter à cette hypothese. La forme des spores adultes, si différente de celle des ÆRhipi- dium, si semblable au contraire à celle des autres Chytridinées, suffirait déjà pour l'écarter ; mais il y a d’autres preuves tirées des organes en litige eux-mêmes, et qui prouvent, sans autre con- sidération, que nous avous bien affaire à un parasite et nulle- ment à des organes reproducteurs. Pour pouvoir, avec juste raison, considérer comme une gonosphérie le globule cité plus haut, 11 faudrait qu'il existàt un organe fécondateur dans le voisinage ou en un point quelconque de la plante. Nous voilà amenés à nous demander si ces corps agiles, qui naissent dans certains faux sporanges, ne seraient pas des anthérozoïdes destinés à féconder la gonosphérie. Nous nous trouvons de nouveau en présence de l’une des hypothèses de M. Pringsheim, mais avec une modification tenant à la posi- üon spéciale des organes attaqués du Rhipidium. Si cette hypothèse était exacte, il faudrait d’abord que le prétendu oogone fût fermé par une cloison ; dans toutes les Saprolégniées, comme dans les espèces de la classe des Aloues, la gonosphérie n'est jamais libre dans le filament, mais formée dans une cellule spéciale. Dans les Algues on trouve toujours des oogones séparés du reste du filament. Ex.: les F’aucheria. Ici, au contraire, les articles qui contiennent les gonosphéries 160 M. CORNE. sont fréquemment dépourvues de cloison (fig. 6 et 7). Il faudrait surtout, et ceci est d’une importance capitale, que cet organe fût perforé pour livrer passage aux anthérozoïdes : nous avons vu ces perforations dans les Saprolégniées (Monoblepharis) ; elles se montrent dans toutes les Algues qui possèdent des anthéro- zoïdes, OEdogoniées, Vaucheria, Sphæroplea. Or, ici, rien de semblable : la membrane ne présente aucune solution de conti- nuité, ét ce n'est pas l’anthérozoïde qui, dans toute la série des Cryptogames, Fougères et groupes voisins, Mousses, Hépatiques, Champignons, Algues, quand il y existe, est toujours une forma- tion très-délicateet très-altérable, qui pourrait perforer une mem- brane aussi épaisse : C'est pour cela qu'il a toujours à féconder un globule placé dans un sac largement ouvert, ou muni d’une ou plusieurs perforations, ou même un globule entièrement libre. I résulte de ces dernières preuves que, d’après la conforma- tion des organes sexuels dans la série, les organes qui nous occupent ne peuvent être considérés comme sexuels ; 1l faut douc absolument les rapporter à un parasite. En rapprochant ces considérations des précédentes, il ne reste plus le moindre doute. Je vais reprendre brièvement les raisons qui me déterminent à attribuer à un parasite les organes qui viennent d'être étudiés ; il est important de ne laisser aucune hésitation dans l'esprit du lecteur, car nous aurons plus loin à décrire d’autres formations (A. septigena et Woronina polycystis), où les difficultés seront plus grandes encore. On peut d'abord raisonner par analogie en comparant ce dé- veloppement de nos sporanges à celui des sporanges des Chytri- dinées bien reconnues, Olpidiopsis Saprolegmæ, et autres; le plasma écumeux à certains moments, la forme et la taille des corps agiles, l'aspect et le développement des spores immobiles, sont autant de traits d'union entre ces espèces ; les analogies avec le Rozella Monoblepharidis sont encore plus grandes. On peut considérer, d'autre part, le rôle et la constitution de ces organes : les sporanges en litige ne sont pas, comme les sporanges ordi- naires des Rhipidium, fermés par une cloison épaisse (fig. 5), mais par une membrane mince (fig. 2), qui est le prolonge- MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 161 ment de la portion la plus interne de la paroi (membrane du parasite). Les parties qui contiennent les spores immobiles ne sont pas toujours fermées par une cloison et ne peuvent être considérées comme des oogones ; elles ne portent en outre la trace d'aucune perforation, qui puisse permettre la pénétration des anthérozoïdes. De plus, la constitution des spores immobiles est fort différente de celle des oospores des Rlipidium et en général des Saprolégniées. Nous allons voir que sur l'Apodya brachynema Hild. sn montrent parfois des formations analogues et tellement sémbla- bles, que, sans des raisons qui me semblent sérieuses, j'aurais réuni les deux parasites sous le même nom : or, chez l’Apodya brachynema, les oospores sont connues et ont la plus grande ressemblance avec celles des Rhipidium ; les spores échinées ne peuvent donc pas être attribuées à une Saprolégniée. Ainsi, en résumé, ces divers organes, différant de ceux des Saprolégniées par leur forme et leur constitution, analogues au contraire à ceux des Chytridinées, appartiennent bien à un parasite voisin des espèces étudiées plus haut. 5. Rozella Apodyæ brachynematis (fig. 10-14). Ce parasite fut rencontré en avril 1869, sur l’Apodya (Lepto- mitus) brachynema Hild. ; il occupait la plupart des cellules ter- minales, et la formation des zoospores était en partie empêchée par sa présence. Il offre avec l'espèce précédente les ana- logies les plus grandes. I fut étudié avant elle, mais moins complétement : les deux espèces concordent tellement, que l’une est pour ainsi dire l’image fidèle de l'autre. De légères différences existent cependant entre elles ; les spores immobiles ne sont pas tout à fait identiques ; les échinules semblerit être IC un peu plus courtes que dans le /&. Rhipidir. Sauf cela, tout le reste est identique. Elles sont l’une et l’autre parasites dans l’intérieur d’un sporange, et soudent leur propre paroi à la sienne: les spores immobiles occupent une position analogue. 5e série, Bor. T, XV, (Cahier n° 3.) 3 il 162 %E. CORNE. Le développement du plasma est le même dans l’un et l'autre cas. Ce dernier prend l'aspect écumeux et se résout en z00- spores; elles s’échappent au dehors après la dissolution d’une papille terminale (fig. 10 «, p), qui laisse à sa place un orifice circulaire dont les bords sont d’une grande netteté. Les z00- spores sont allongées, munies d’un seul cil; elles ont été moins bien vues que dans l'espèce précédente (fig. 10 b, 44); le développement des spores immobiles n’a pu être suivi, cepen- dant j'ai reconnu que la membrane est mince au début et lisse (fig. 12); c’est plus tard seulement qu'elle se couvre d’échi- nules (fig. 4h a). La cellule à laquelle la membrane du parasite est soudée est un sporange, avons-nous dit. On pourrait objecter que c’est peut- être simplement un article renflé et hypertrophié. La présence dans le Rozella Rhipidii d'épines sur certains des articles ter- minaux attaqués ne permet pas de s’arrèter à cette idée; les épines ne se montrent pas ailleurs quesur les sporanges ; du reste il n'ya pas dans le Rhipidium spinosum d'articles nombreux, comme dans l’Apodya. Ce sont done bien des sporanges et non des articles renflés chez le Rhipidium ; chez l'Apodya 11 en doit être de même par analogie. La cloison qui ferme le sporange attaqué n’est pas très-différente de la cloison ordinaire; dans ce genre, les particularités relatives aux eloisons s’observent du reste avee difficulté. La grande analogie de cette formation avec la précédente fait qu'on peut se dispenser de répéter les raisons qui doivent en faire admettre le parasitisme; on n'a qu'à se reporter plus haut. Aux raisons qui y sont données, on doit joindre la présence bien constatée des oogones et des oospores. Les oospores sont sphériques ou un peu irrégulières, à parois épaisses, très-blanches et entièrement soudées avec celles de l'oogone. Les oogones sont fréquemment fixés à la base de larges filaments d’Achlya, vivant dans la même toufle, et les articles qui les supportent le sont aussi. On aperçoit ainsi un grand nombre d'oospores, mais les anthéridies sont très-peu nettes; elles se distinguent mal des filaments, qui portent les oogoues voisins, Malgré l'état incomplet des observations, il MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 165 n'en reste pas moins acquis que l'A. brachynema possède des oospores pareilles à celles des autres Saprolégniées, et notam- ment du Saprolegnia monoica et des Rhipidium, et que les spores échinées, si semblables à celles des autres parasites, ne lui appartiennent en rien. Le Rozella À podyæ constitue ane espèce distincte de la précé- dente. Cela est évident par les différences (auoiqu'elles soient légères) qui existent entre les deux parasites ; mais une preuve meilleure peut en être donnée. Sur la branche où vivait le Rlipidium spinosum végétait aussi l'Apodya brachynema ; le premier élait entièrement attaqué par le Rozella, tandis que le second n’en présentait pas trace. Si le parasite avait pu vivre sur la seconde plante aussi bien que sur la première, 1l s’y serait transporté comme 1l s'était répandu sur tous les sporanges du Éhipidrum : 11 n’en fut rien, Donc l'espèce qui vit sur le Rhipidium diffère de celle qui vit sur l'Apodya. C’est par un fait analogue que M. de Bary a réconnu que l'Uromyces de la Fève n'est pasle même que celui du Haricot (1), malgré la grande analogie exté- rieure des deux parasites et des plantes nourricières. Disons, du reste, en terminant, que les deux Chytridmées qui nous restent à étudier, le R. septigena et le Woronina polycystis, vivaient également bien aux dépens de deux espèces : Achlya polyandra et Saprolegnia spiralis, qui végétaient sur le même substratum ; e'est l'exemple inverse : 1l montre que, si quelques parasites se localisent sur une plante unique, il en est d’autres qui se nourrissent indifféremment aux dépens de plusieurs espèces. à. Rozella septigena (pl, 6). Historique. — Évolution du sporange adulte. — Zoospores. — Le premier qui fit mention de ee parasite est M. Nægelt (2); 1l le (1) Développement des Champignons parasites (Ann. des se, nat, , 4 série, & XX p. 89). (2) Zeitséluift fi wiss. Bot., p: 29, pl. IV, fig. 7 et 9, u] 46h M. CORNU. rencontra sur une espèce Indéterminée de Saprolegnia, et le con- sidéra comme une deuxième forme de sporange. Il le regarda comme une modification de ces formations qui rentrent dans notre genre Olpidhopsis, et le crut tantôt adhérent, tantôt non adhérent (1). M. Pringsheim le rencontra ensuite sur un Saprolegnia dépourvu de branches latérales et lui attribua un rôle impor- tant dans la fécondation, le rôle d’anthéridies. Cette théorie a été examinée plus haut (page 7h), elle ne peut tenir devant les faits ; il a parfois lui-même trouvé ces productions sur un Saprole- gnia munide branches latérales, rarement, mais il les trouva. Il essaya d'indiquer dans les branches latérales certaines diffé- rences avec les branches latérales normales, mais le doute peut subsister dans l'esprit du lecteur (2). Une lacune laissée par M. Pringsheim, mais qui est naturelle dass l'ordre d'idées où 1} se trouvait, c’est le manque de détails sur le développement primordial de ces’ prétendus organes sexuels et la formation de ces singulières cloisons qui partagent le filament attaqué. J'ai repris cette étude, mais je n’ai pu réus- sir à tout observer ; les faits seront indiqués tels qu'ils ont été vus et les points qui restent à découvrir seront signalés. Le Rozella septigena n'est pas beaucoup plus rare que les para- sites de la première section; on en trouve souvent des cas isolés. Je l'ai rencontré abondamment et se prétant à l'étude, en décembre 1869, dans un étang de Chaville, sur l'Achlya race- mosa Hild.; en novembre 1871, dans le même étang, sur un Achlya indéterminé (dans les deux cas les Saproléguiées vivaient sur des branches de Peuplier), et surtout en avril et mai 1871, sur le Saprolegnia spiralis et l’Achlya polyandra Hild., végétant sur du biscuit de munition, dans un bassin à l'École normale supérieure. Les filaments attaqués, parfois renflés irrégulièrement, par- fois non modifiés (fig. 10 et 43), sont munis de distance en dis- (4) C'est probablement de celte espece qu'il est question dans le mémoire de M, Al Braun (Ueber Chytridium, p.63), dans un passage cité iei page 46. (2) Jahrhuech. fuerwiss. Bot., t. 1, p. 209, pl. XXI, fig. 6, 4. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 165 tance, à partir du sommet, quelquefois presque jusqu'à la base, d'un certain nombre de cloisons qui semblent être dues à un développement normal. Les cellules, ainsi formées, subissent une évolution régulière de haut en bas en général, et présentent tous les phénomènes décrits dansles Chytridinées précédentes. Le plas- ma se remplit de vacuoles (fig. 4 et 11) et prend l’aspect écu- meux ; il se sépare ensuite en un grand nombre de petites masses, qui deviennent de plus en plus nettes et finissent par s’agiter d’un mouvement vague. Avant que le contenu ait subi ces transformations, on voit naître, en un ou plusieurs points de l'article, un mamelon d'apparence claire (fig. 10, 14, 17), tout à fait identique avec ceux que lon voit dans le À. Rhipidü spinosi. Il constitue une papille qui se dissout peu à peu, et laisse à sa place une ouverture ronde, à bords très-nets (fig. 5 et 6). Tout à coup les zoospores sortent brusquement et se répan- dent dans le liquide. Quand elles sont normales (fig. 2) et bien développées, elles ne sont plus sphériques, comme dans la cel- lule, mais allongées, dissymétriques et courbes, munies d’un cil unique égal à trois ou quatre fois leur longueur. La substance qui les constitue est claire et homogène avec un espace plus sombre près de la base du eil. Elles ressemblent sous tous les rap- ports aux zoospores des autres parasites; leur mouvement est le même, il est inutile d'y insister. Leur taille est très-variable ; les figures 3 a et b montrent les petites masses dont se sont for- mées les zoospores de deux cellules différentes; cela entraine une grande variation de diamètre dansla forme normale. Sur un même filament la taille semble cependant être constante dans tous les sporanges. Les altérations ne sont pas rares chez ces petits corpssidélicats. Les zoospores représentées (fig. 2) sont les zoospores normales, observées sur des plantes en bon état; mais on peut voir (fig. 4) l'aspect que présentent des zoospores anormales, et ce sont elles que J'avais d'abord vues ; elles ont été dessinées en décembre 1869 d’après des sporanges qui donvérent lieu à un développement médiocre de zoospores. Elles ont été observées à l’aide d'un objectif à immersion n° 10, de M. Hartnack, peu de minutes 166 M. CORNE. après leur sortie. Elles étaient immobiles ou à peu près, et s'é- taient à peine agitées : leur forme est sphérique; elles sont munies d'une vacuole en général unique et d’un espace plus sombre; elles présentaient un ou deux cils, parfois un plus grand nombre : c'est ce qui explique probablement l'hésitation de M. Pringsheim à propos du nombre des cils; quelques-unes étaient manifestement formées de zoospores soudées, ce qui per- met de le conclure pour les autres. C’est ainsi qu’on peut com- mettre des erreurs en étudiant des plantes qui ne sont pas dans un parfait état de vie etde santé. M.Roze en a signalé quelques- unes, différentes, mais dues à la même cause. dans l'observation d'anthérozoïdes des Cryptogames surériezres étudiées dans de mauvaises conditions. Les zoospores normales s'arrêtent au bout ae peu de temps et se décomposent rapidement sans germer dans l'eau. On à suflisaniment insisté (p. 145) sur ce fait, qui se présente fré- quemment chez les Chytridinées. Le mouvement des corps agiles horsdes cellules dure peu ; mais quand cette sortie n’a pas lieu, on les voit s’agiter pendant long- temps pour s’efforcer de s'échapper : dans ces conditions l’agilité peut se prolonger beaucoup. Je trouvai un filament dont deux cellules étaient remplies de zoospores, qui s'agitaient avec une grande rapidité ; 1l était onze heures et demie du matin : à six heures moins un quart — après six heures et quart — le mou- vement était encore très -rapide. Forcé de quitter l'observation, je tâchai de conserver la préparation ; mais elle se dessécha. Cette longue durée dans des circonstances analogues n’est pas un fait isolé dans la famille, M. Al. Braun en cite un exemple autrement remarquable chez le Phlyctidium decipiens (1). Le mouvement dura plus de cent huit heures. Examen des faits cités par M. Pringsheim. — Démonstration du parasitisme. — Jusqu'à présent les faits seulementontété rap- portés sans qu’on mentionnàt ce qu'avait dit M, Pringsheim ; (4) Ueber Chiytridium, p. 56. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 4167 nous allons maintenant signaler les inexactitudes qu'il a com- mises, et prouver que nous avons bien affaire à une Chytridinée parasite. | La papille occupe une place très-variable ; elle n’est pas tou- jours terminale. comme le croit M. Pringsheim, et d'aprèsce qu’on a dit, on voit qu'elle ne ressemble en quoi que ce soit (comme il affirme) à l'extrémité tronquée et vide du sporange qui livre passage aux zoospores des Saprolegnia. Elles sont en effet hémi- sphériques, remplies d’un contenu homogène et clair ; elles sont situées plus ou moms sur le côté de la portion terminale du filament : il y en a deux le plus souvent par article. fl n’y a donc aucune analogie entre le point de sortie des petits corps agiles décrits plus haut et celui des zoospores des Saprolegnia (voy. pl. 6, fig. 5, 6 et 7.) On voit des portions de filament d'Achlya S'isoler par une cloison aussi souvent que des filaments de Saprolegnia. On ne rencontre pas exclusivement dans ce dernier genre, comme le croyait M. Pringsheim, ces prétendues anthéridies ; et le paral- lélisme qu'il pensait pouvoir établir entre les anthéridies des Saprolegnia et des Achlya, et les sporanges de ces deux genres, tombe ainsi de lui-même (voy. pl. 6, fig. ?,un 4chlya; ettig. 11, un Saprolegnia). Ces formations ont été en effet observées, comme il a été dit, sur les Achklya racemosa et polyandra, sur le Saprolegnia spiralis etune autre espèce de Saprolegnia indéter- minée. Elles ne caractérisent pas non plus les espèces dénuées de branches latérales, comme l’affirme encore M. Pringsheim, car le Saprolegnia ferax ne m'a rien montré de pareil, et lui-même n'en parle pas dans son étude sur cette plante (1); MM. Thuret (2), de Bary (3), n'en disent rien non plus. Bien plus, les trois espèces citées plus haut sur lesquelles j'ai ren- contré le Rozellu sepligena sont toutes pourvues de branches latérales. On pourrait peut-être objecter qu’on a affaire à une deuxième (4) Entwickelung der Achlra prolifera (Sapr. ferax), (2) Ann. des se. nat., 3° série, t. XIV, p. 229, pl, 22, (3) Bot, Zeit, (1892), p, 473, 168 5. CORNE. forme d’anthéridies destinée à subvenir à l'insuffisance de l'autre mode de fécondation ; mais l'Achlya polyandra est très- richement muni de branches latérales, et les deux espèces d’Achlya citées ne possèdent aueune perforation qui püt per- mettre l’introduction dans loogone d’un anthérezoïde venu de l'extérieur. Ainsi, les corps agiles, qui n'existent pas forcément, quand manquent les branches latérales, et qui se montrent par- fois quand ces dernières existent, ne peuvent être destinés à les remplacer. [ls n’ont donc aucun rapport avec la fécondation ou la sexualité et appartiennent à un parasite, comme dans les cas précédents. Ils se développent non-seulement dans les filaments ordinaires, mais encore dans les filaments destinés au deuxième mode de reproduction, dans l'intérieur des oogones ou des branches laté- rales. M. Pringsheim a représenté ce dernier cas, qui est fort remarquable, On peut voir 101 (fig. 11) un oogone très-jeune du Saprolegnia spiralis, né à l'extrémité d’un filament qui a traversé un sporange vide : l'oogone et son support ont été envahis par le Rozella sepligena ; la mème chose a été observée dans les 00- gones et les branches latérales de l'Achlya polyandra. Ainsi, loin de servir à la reproduction, ces formations l’entravent. Le parasitisme est suffisamment démontré par ces faits ; on peut cependant continuer l'examen des raisons données par M. Pringsheim. H affirme qu'il se montre simultanément avec les oogones : cela est inexact pour le Saprolegnia ferax, qui donne fréquem- ment des ouspores sans qu'aucun filament soit partagé par des cloisons. On voit en outre fréquemment, dans une culture, les filaments cloisonnés émettre leurs corps agiles pendant plusieurs semaines, sans qu'un seul oogone apparaisse. Les filaments cloi- sonnés et les oogones n’ont donc aucun lier entre eux. Quant à la régularité du développement de haut en bas, elle peut s'expliquer aussi bien par le développement normal de la plante que par celui de son parasite En dernier lieu, le fait le plus probant pour la démonstration du parasitisme, c'est l'existence de spores spéciales, constituant MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 169 comme dans les autres espèces le deuxième mode de reprodue- tion d’une Chytridinée. Pour les mêmes raisons que plus haut (voy. p. 143) et qu'il est inutile de reprendre encore, on ne peut attribuer un rôle sexuel à ces spores échinées, et la seule inter- prétation possible est celle du parasitisme. Développement du sporange. — Le parasitisme du R. septi- gena étant bien établi, 1! va être question de son premier déve- loppement: il était nécessaire de n’en parler qu'après la démons- tralion du parasitisme, car on rencontre des faits très-différents de ceux auxquels on est habitué d’ordmaire, et les conclusions qui vont s'en déduire auraient pu paraître incertaines sans cela. Ce développement à été suivi sur l'A. polyandra Hild. et le S. spiralis, ainsi que sur une espèce d’'Achlya indéterminée, récoltée à Châteauneuf-sur-Loire, et qui ne fructifia pas. Le procédé employé dans observation fut la culture d’une petite touffe soigneusement détachée, avec son substratum, de la touffe générale; on put suivre ainsi au microscope des fila- ments déterminés et les retrouver le lendemain plus avancés ; j'ai pu garder ainsi des sporanges trois jours complets. Le plasma s'accumule à l’extrémité des filaments; ilest plus ou moins foncé et rempli de granules: une cloison se forme dans la masse noire, une portion plasmatique restant en dehors et ainsi de suite du haut en bas. J'ai été assez heureux pour assister à plu- sieurs de ces formations d’une facon très-nette. Elles le sont surtout quand la cloison est la dernière qui se formera. Toute la matière granuleuse et sombre se rassemble et prend un contour arrêté; il est parfois régulier et transversal, parfois au contraire anguleux où oblique. Le bord est plus clur et réfringent. Il semble qu’on ait sous les veux une goutte d'huile qui se sépare du reste du plasma. Après quelques minutes le contour prend encore de la netteté et finit par être formé d’une ligne double : la cloison est cependant encore molle et plasmatique (fig. 13). Parmi les irrégularités que présente la cloison, on peut signa- ler celle qui est représentée fig. 8 mm: la cloison m est oblique ; 170 M. CORNE. dans la figure L m, la cloison supérieure du parasite est irrégu - bèrement ondulée. Dans la figure 9 n, une portion est séparée du reste v, par un étranglement considérable : cette modification de la forme normale est la plus complète que j'aie rencontrée ; elle n'a pas cependant entravé le développement de ce spo- range irrégulier à deux lobes; il a donné des zoospores, comme si ses parois s'élaient régulièrement formées et soudées avec les parois de la plante nourricière : en w on voit le repli de la mem- brane du parasite. Cet exemple montre bien qu’elle s'est formée autour d'une matière visqueuse accidentellement séparée en deux globules confluents. Ainsi, le développement du sporange du parasite ressemble en tout pont à une formation propre de l'espèce attaquée; le plasma semble appartenir à la plante hospitalière, mais il appar- tient en réalité au parasite; voilà ce qu'il fallait bien établir. Il en résulte donc que le plasma du Rozella est répandu dans le filament au milieu d'un autre plasma et qu’il y subit une évolu- tion régulière, de façon à tromper l'œil le plus exercé. En der- nier lieu, il s'entoure d'une membrane, usurpant ainsi en appa- rence toutes les fonctions de celui aux dépens duquel il vit. Ilest bien sûr et bien certain qu'il n'y à aucune espèce de membrane avant la formation de la cloison ; c’est seulement vers l'époque de la reproduction qu'on voit apparaître le double contour : on à done affaire à un sporange qui acquiert du pre- mier coup son volume définilif, et non pas à une cellule, qui s'accroit jusqu'à se souder aux parois du filament. On peut chercher s’il ne resterait pas des traces de cette sou- dure, ou si lon ne pourrait pas la mettre directement en évidence, sans avoir besoin d'observer le développement du parasite. M. Pringshein dit que cette manière de voir est formellement contredite par les faits, ce que nous avons dit montre qu'il se trompe. La cloison est manifestement double, formée de deux mé- nisques, qui, tous les deux ne se raccordent pas toujours exac- tement au même niveau avec la paroi latérale; 1l en résulte fréquemment qu'un petit espace de la paroi demeure simple. I MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 171 se produit quelquefois une rupture en ce point; les deux mé- nisques se séparent, et la portion de paroi latérale libre montre nettement le raccord des deux membranes appartenant, l'une au parasite, l'autre à la plante nourricière. El est possible aussi, dans certains cas, surtout près de la papille, de constater un dédoublement de la paroi, mais ce cas est rare (pl. 2, fig. 7). Cette soudure intime ne doit pas trop nous étonner; dans les espèces à sporanges prolifères la soudure des membranes juxta- posées est souvent si parfaite, qu'il est impossible de reconnaitre Jusqu'à trois membranes juxtaposées. La forme irrégulière de la cloison prouve aussi que le parasite est bien muni de sa paroi propre, différente de celle du filament. M. Nægeli (i) considère de même la formation de ce sporange comme due à une cellule dont les parois se soudent à celles du filament:; mais il n’en signale qu'un seul et non plusieurs disposés en file. L'emploi des réactifs n’est pas aussi utile qu'on pourrait le croire pour la séparation des deux éléments cellulaires. On sait que chez les Champignons les membranes ne se colorent en bleu, sous l’action du réactif cellulosique, que dans des cas spéciaux : les Saprolégniées constituent un de ces cas (le genre Monoble- pharis fait cependant exception). Chez les Chytridinées, la cellu- lose est au contraire très-rare et on ne la rencontre qu’en des points circonscrits de quelques espèces (2). Le Rozella septigena est cependant coloré en bleu par le chloroïodure de zinc; il est donc impossible de se servir de ce caractère pour séparer les deux membranes. Mais les réactifs peuvent, d'une autre manière, être employés (4) Zeëlschr,, loc. cit. (2) Les espèces sur lesquelles j'ai pu l'observer ont le Chytridium zylophilum (voy. p. 116)etle Chytr, anatropum, dans les deux cas à l'orifice du sporange. M. Woro- nine (Bot. Zeil., 1868, p. 88) la signale dans les membranes du Synchytrium Mercu- rialis, qui ne présente que des spores immobiles. On la retrouve dans la membrane du sore du Synchytrium Stellariæ Fuck., l'une des espèces que j'ai pu observer, et dans celle des spores immobiles. Dans la membrane du sore, c’est une petite zone très-restreinte entourant un cercle qui se dissout; c’est très-probablement la papille du sore, non remarquée jusqu'ici, mais que M. Woronine à décrite et figurée sans paraitre y attacher grande importance, dans la germination des spores immobiles du Syach. Mercurialis (Bot. Zeit., 4868, p. 88, pl. I, fig. 13 et 14). 177 M. CORNE. avec fruit : ils permettent de distingner le plasma du para - site. L’ammoniaque rend très-clair celui de la Saprolégniée et laisse sans altération celui du parasite; on aperçoit alors ce dernier, non pas jaunâtre et oléagineux, comme il était dans le premier groupe, mais plus pâle et peu distincts il a cependant la forme générale qu’il aura plus tard; il ne lui reste plus qu'à s'étendre. Fai vu dans un filament jusqu’à deux de ces globules, mais ils sont difficiles à bien mettre en évidence. Il y à un deuxième mode de cloisonnement sur lequel j'ai con- servé des doutes, mais qu'il est cependant utile de signaler, pour qu'on tâche d'en vérifier l'exactitude par des observations ulté- rieures, C'est celui qui est représenté fig. 40, On voit les cloisons æ,y, 3,très-nettes, landis que les deux espaces w, v, paraissent être des cloisons en voie de formation, qui semblent devoir se développer dans l’article déjà formé d, limité par æ. 1 y a peut- être ainsi trois sporanges : les trois papilles p, qui se moutrent déjà, le feraient croire. Je n'ai pu éclaircir ce point, qui touche de si près cependant à la constitution du parasite. L'existence du plasma du Rozella, où plutôt de son plas- modium dans l'intérieur du filament, est mise hors de doute par les détails qui ont été donnés plus haut; on a vu les consé- quences qui en ont été tirées el les affinités que présentent les Chytridinées et les Myxomycètes; mais pour lespèce qui nous occupe il reste encore plusieurs questions non résolues. Comment se forment ces sporanges disposés en file? provien- nent-1ls d’une zoospore unique ou de plusieurs zoospores? Le plasmodium se segmenterait-il en plusieurs fragments, vivant ensuite d'une manière indépendante? L'âge plus ou moins avancé des divers sporanges se voit dans leur développement successif; ils émettent leurs zoospores assez régulièrement de haut en bas, de sorte que chacun d’eux est moins âgé que celui qui lui est irimédiatement superposé. Cela peut provenir de deux causes : soit de ce qu'il est issu d’une zoospore qui aura péné- tré plus tard dans le filament, soit encore qu'il procède, par frac- üonnement, du plasma, qui à formé le sporange supérieur. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 173 Dans ce dernier cas il v aurait une sorte de gemmation rappe- lant ce qui se passe chez les animaux inférieurs, les Hydres par exemple, où 1e nouvel animal atteint, au bout d’un mtervalle plus ou moins long, la taille de celui qui lui a donné naissance. C'est à l'hypothèse du fractionnement que je me rangerais le plus volontiers, l'autre paraissant moins vraisemblable (1). On sait en effet que les Chytridinées pénètrent surtout dans les organes jeunes, gorgés de sucs nutritifs et dont les mem- branes sont plus faciles à traverser : les Synchytrium en sont un bon exemple. I en résulle en général que les parties supé- rieures des végélaux sont de préférence attaquées. Ce fait se retrouve dans nos espèces. Les plus jeunes sporanges, s'ils pro- venaient des zoospores introduites en dernier lieu, devraient donc se montrer à la partie extrême, c’est-à-dire la plus jeune du filament : c’est justement le contraire qui à lieu. La famille des Chytridinées renferme une espèce déjà connue, qui à plus d’un rapport avecle Rozella septigena : c'est celle que MM. de Bary et Woronine (2) ont appelée Olpidium simulans et qui vit dans l'intérieur des cellules du Taraæacum officinale Wigg. Les sporanges, disposés en file, remplissent entièrement la cellule reuflée ou non et y produisent de fausses cloisons : ils émet- tent leurs zoospores par un petit orifice, qui est circulaire, vu de face. L'adhérence des parois du sporange avec celles de la cel- lule semble assez grande. Je regrette de n’avoirjamais rencontré, et de ne connaitre que par le mémoire cité, ce parasite, dont la comparaison plus approfondie avec le À, septigena serait très- intéressante. Deuxième mode de reproduction. — Le deuxième mode de reproduction que M. Pringsheim ne connaissait pas, consiste en spores immobiles, analogues à celles qui ont été observées dans (1) Ce fait correspundrait, chez les Myxomycètes, à un fait entièrement analogue et qui semble très-probable d’après ce qu'on sait de ces singuliers végétaux. Les mouve- ments amiboïdes du plasmodium permettent d'en supposer un fractionnement normal en dehors des causes accidentelles. (2) Loc. cit, 174 NI. CORNA. les espèces précédentes; mais il y a iei une modification parti- cubère des filaments qui contiennent ces spores. Les altérations produites dans le filament par la présence des sporanges du Rozella sont souvent insignifiantes ; il n'en est pas de même pour les spores immobiles : il y a production d'une sorte d'organe latéral spécial ayant la forme d’un oogone. C'est là que se développent les spores immobiles, et pas ailleurs (fig. 45-17). C'est un renflement sphérique à lextrémité d’un court rameau, ce qui le fait ressembler aux oogones des Saprolé- gniées; le diamètre est le même que ehez ceux du #. spiralis, plante sur laquelle il a été observé. Mais on ne peut le confondre avec eux : le support. en effet, est rectiligne et non contourné en spirale ; il n’y à aucune branche latérale, aucune trace même d'arrêt de développement de ces prolongements. La cloison de ce faux oogone manque fréquemment el n'est jamais qu'ac- cidentelle; les parois n'offrent à aueune époque la moindre discontinuité ou perforation : ce n’est donc certainement pas un oogone du Saprolegnia ou de toute autre espèce. Cette analogie de forme est très-singulière et ne se rencontre que dans cette espèce de Rozelia. Ces renflements se montrent, en général, sur les filaments qui présentent déjà des sporanges. Les figures 15 et 17 le montrent avec évidence; sur la figure 47 ils sont contenus entre deux cloisons : je ne vois pas, du reste, comment expliquer ce dernier fait. ils sont toujours situés au-dessous des sporanges. Nous re- trouverons le même fait dans l'espèce suivante, le Woronina polycystis. Il est probablement lié à la formation et à la féconda— tion des spores immobiles. il était important de signaler que les deux sortes d'orgaues du Roxella sont le plus souvent en rapport l'une avec l'autre sur le même filament, afin de bien montrer qu'ils appartiennent au même parasite, Les sporesimmobiles sont sphériques(fig. 15,16 et 17), munies d’échinules nombreuses et très-petites ; elles ont un diamètre va- riable, qui est, en moyenne, un peu supérieur au demi-diunètre du faux oogone qui les contient, Quand elles sont adultes, 11 n°y MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 175 a pas la moindre apparence de plasma dans la portion qui les renferme ; ellessont plongées dans un liquide ayant l'apparence de l’eau. Leur couleur est brune : le contenu est opaque, trouble et finement granuleux ; sur quelques-unes on distingue une endo- spore, mais assez difficilement. On voit que cette constitution est la même que celle de la plupart des spores des autres parasites étudiés précédemment. On n’aperçoit pas de cellule adjacente. Leur développement est le suivant. Les faux oogones pré- sentent une sorte de noyau sombre, environné de traînées de plasma; à mesure qu'il grossit, le plasma disparaît de plus en plus, et produit ainsi des vacuoles de plus en plus considérables. Le globule s’est pendant ee temps entouré d’une membrane nette (fig. 16 a), puis d'une auréole claire et large, formée d’une sub- stance d'apparence muqueuse, transparente et homogène : quelques points de cette auréole se relient aux parois par des cordons plasmatiques (fig. 46 b). Dans cette auréole se forment peu à peu les échinules, qui apparaissent sous la forme de courtes lignes, faiblement indiquées çà et la dans la masse transparente; puis elles deviennent plus nettes, et l’auréole, plus vague, disparaît peu à peu (fig. 16 «et 47 a). Les trainées s’effacent ; enfin, la spore arrive à l’état de développement com- plet et ue se modifie plus avec le temps. Ce deuxième mode de reproduction est extrémement rare : sur un nombre considérable d'individus attaqués, couvrant un morceau de biscuit de munition, long et large de 5 centimètres, je nai trouvé qu'une seule toufle dans cet état, composée seule- ment d’une trentaine de filaments fructiféres : ils furent con- servés pendant une semaine et étudiés avec soin. Les faits observés coïncident entièrement avec ce qui a été décrit chez les autres parasites, le lecteur le remarquera sans peine; mais on peut concevoir quelle méprise aurait pu se pro- dure, si l’on avait examiné légèrement et sans être prévenu les spores immobiles développées sur des filaments ainsi attaqués. En ne lenant pas beaucoup compte des objections que la présence des cloisons sur le filament pouvait soulever, et rapprochant ceci du mode de fructification du Saprolegnia ferax, qui est 176 ME. COMRNU. dépourvu de branches latérales, un esprit un peu aventureux eût pu établir des théories, qui n'auraient pas peu contribué à em- brouiller encore l’histoire de la fécondation chez les espèces dépourvues de branches latérales; histoire qui, après les tra- vaux de M. Pringsheim, présentait des complications assez em- barrassantes. Jai considéré le développement fort singulier de ces renfle- ments latéraux comme dû à un parasite. De leur forme même on peut conclure que ce ne sont pas de vrais oogones, détournés de leur rôle ordmaire : la forme, d’une part ; l’absence totale de branches latérales ou de rudiments même de ces productions, ne permettent pas de s'arrêter à cette idée. Commentet pour quelles causes ce renflement se montre-ll? Quels en sout les débuts? Ce sont autant de questions qui restent, malheureusement encore, à résoudre. Les rapports du Rozella septigena avec les autres parasites du même groupe sont évidents; comme eux, il soude la membrane de son sporange à celle de la plante nourricière : les R. Rhipidü et Apodyæ oceupent l'extrémité du filament de la plante attaquée et sont contenus dans un seul article ; le À. Monoblepharidis est situé au milieu du filament. Mais, si l'on imagine une série de pareils sporanges, on arrive au À. septigena. Troisième groupe. — CHYTRIDINÉES PRÉSENTANT DES SORES. Genre WORONINA. WokRoONINA POLYCYSTIs (pl. 7). Historique. — Sporanges. — Démonstration du parasitisme. — Le genre ne contient jusqu'ici qu'une seule espèce. M. Pringsheim est le premier qui ait sigralé cette formation ; la rencontra sur un Achlya dépourvu de branches latérales (A. prolifera) et qu'il nomma A. dioica (1). Dans la théorie (4) Je rapporte cet Achlya à VA. prolifera Nces, parce que, dans l'étude qu'il en aite{Bot. Zeit,, 1852), M. de Bary considère Ie denxième mode de reproduction MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 177 sexuelle examinée plus haut (p. 77), il lui attribue le rôle d'or- gane mâle. Il donne quelques détails sur cette plante, mais 1l en a mal vu le développement, et il avoue lui-même qu'il y a encore bien des lacunes à combler. Le W. polycystis est rare ; je ne l'ai rencontré que trois fois en tout: à Chaville, près de Versailles, dans l'étang Vert, en mars 1870, en échantillons isolés et très-imcomplets sur l'Achlya racemosa Hild.; en avril 1871, sur le Saprolegnia spiralis et PAchlya polyandra, dans le bassin de l’École normale, en compa- gnie du Rozella sephigena, et en juin 1871, sur V4. racemosa Hild., pres de Romorantin, dans l’eau d'anciennes marnières, à Lon- gueville. J'ai pu réunir ainsi quelques matériaux pour l'étude de cette plante, mais 1ls ont été malheureusement incomplets. Si, d’une part, j'ai été assez heureux pour rencontrer des faits que n’avait pu observer M. Pringsheim, par contre je n'ai pu vérifier tous ceux qu'il a chservés ; je les admets donc sans restriction. Cette lacune est d'autant plus regrettable, que cette espèce est la plus compliquée du groupe, et constitue un genre parallele au genre Synchytrium, dont l'histoire est assez bien connue ; les rappro- chements et les comparaisons faites plus complétement et de plus près auraient eu le plus grand intérêt. Les filaments attaqués sont parfois un peu renflés où contour- nés, irréguliers (fig. 1-5) et de forme différente de la forme normale ; le nombre des cloisons n’est jamais si considérable que éonime semblable à celui du Suprolegniu ferax,. Les oogones sont munis de perfora- tions véritables, les oospores sont identiques ; il ne dit pas qu'il y existe des branches latérales, Ges caracteres sont justement ceux que M. Pringsheim signale pour son Achlya divica. Outre cette especé, en fait d'Achlya à dogones munis de véritables perforations, je ne counais que l'A. leucosperma sp. nova (voy. p. 24), chez lequel le nombre des branches latérales, leur forme et la blancheur des oospores frapperaient l'observateur le plus superficiel. Ce n’est donc pas cette espèce. Les autres Achlya sont les A. racemosa; lignicola et polyandra découverts par M. Hildebrandt, etles À, contorla et recurva novæ species (voy. p. 22 et 25), dont les 00gones ne sont pas perfares. 11 est singulier que les deux seules éspeces dënuées de branches latérales aient été l'ustement observées les premières, 5e série, But, T, XV, (Cahier n° 4.) 1 12 178 M. CORNE. chez le Rozella septigena. Dans lintervalle de ces cloisons se trouvent des sphérules en nombre variable (fig. 6, 8, 9, 10, 46, A7), disposées suivant un amas, qui remplit imparfaitement l’ar- ticle; on voit parfois dans la partie libre flotter des granules oléagineux (fig. 9 a). Le nombre et le diamètre des sphérules oscillent entre des limites assez étendues. Il est assez difficile de compter le nombre de celles qui se trouvent dans une cellule, à cause des couches successives qu'il faudrait traverser : un coup d'œil jeté sur les figures permettra d'en. juger. Quant au dia- mètre, il suffira de considérer les figures 46 et 17 dessinées à la chambre claire au même grossisseinent, pour avoir une idée de ses variations : il va de 0"",04 à 0°",62. Les sphérules présentent bientôt les mêmes états que les spo- ranges des autres parasites: M. Pringsheim le fait remarquer et y insiste plusieurs fois. On leur voit prendre l'aspect écumeux, et le contenu se segmente en globules, qui deviendront les corps agiles ; en même temps chaque sphérule, selon M. Pringsheim, émet un prolongement ou col de sortie : les corps agiles sortent successivement de chaque sphérule et se répandent dans l’inté- rieur de la cellule qui les contient. Vers cet instant, une papille, qui se dissout lentement, laisse béante une ouverture par laquelle ils s'échappent au dehors; il y a donc deux sorties successives, l'une hors de la cellule mère, l’autre hors de la cellule générale. Je n'ai pas constaté que toutes les sphérules portassent un pa- reil prolongement. M. Pringsheim dit que l'orientation empêche souvent de lapereevoir. Dans le groupe représenté fig. 8, on n'en remarque que trois (s); On n'en voyait qu’un pareil nombre dans le groupe représenté fig. 40, dont les détails sont reproduits fig 41, 12 et 43, et cependant un seul est favorablement placé. Dans certains cas, il semblait que les sporanges fussent disposés en file où par plans, et que le terminal fût seul muni d’un col de sortie ; mais il faut renoncer à cette manière de voir, car M. Prings- heim affirme que chacune des sphérules se vide dans l’intérieur du filament. On sait d’ailleurs que, dans les capitules d’4chlya, ces ouverlures, quoique régulièrement orientées, sont difficiles à voir foules, — Je n'ai pas observé la sortie des zoospores. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 179 La papille n'est pas forcément unique, la fig. 36 p en montre quatre pour un même article ; elle n’est pas non plus forcément apicale dans l’article terminal (Hg. 10, 16 et 17). Je n'ai du reste pas pu bien observer ees papilles avant leur disso- lution, les filaments attaqués étant très-peu nombreux, et cet organe ne pouvant être étudié que quand il se présente de profil ; mais la place qu’il occupe d'ordinaire et l'ouverture qu'il laisse après sa dissolution étant identique avec celle des papilles des Rozella, on peut sans erreur conelure à l'identité de toutes ces formations. il est possible, par exemple, que le prolongement s, fig. 7, doive être rapporté, non pas à la sphérule, mais à une papille. Je n’ai pu acquérir aucune certitude sur ce point. Les corps agiles sont au nombre de vingt à trente dans chaque sphérule. Après leur sortie, on remarque qu'ils ont la même forme que ceux qu'on observe chez le Saprolegnia dioica Pringsh.; c'est-à-dire qu'ils sont identiques avec ceux du Rozella septi- gena. M. Pringsheim y revient à plusieurs reprises. Le dévelop- pement qui a lieu, ici aussi, régulièrement de haut en bas, lui prouve qu'on a bien affaire à un organe de la plante et non à un parasite. On a vu ce qu'il faut penser de cet argument. Après s'être agités quelque temps, les corps agiles s’arrètent et dépérissent sans germination. Îl en conclut que ce sont des anthérozoïdes. Une fois les zoospores sorties, les sphérules apparaissent comme de petites enveloppes claires et transparentes, non com- primées les unes sur les autres et parfaitement sphériques (fig. 10). Il est possible qu'elles soient adhérentes entre elles, mails en aucun cas elles ne semblent polyédriques comme les enveloppes laissées par les zoospores du Dictyuchus; du reste, en face de chaque enveloppe, on ne voit pas de perfo- ration dans la paroi, comme chez les faux dictyosporanges (voy. p. 12). Ajoutons que l'observation est très-difficile par transparence et qu'on ne juge pas bien de leurs rapports, car les parois des filaments sont fréquemment souillées par des impuretés et couvertes d'Infusoires ; tout eela enlève une grande partie de la netteté. 150 M. CORNE. M. Prmgsherm fait remarquer qu'il y a entre ce mode de sortie et celui qui se présente chez le S. dioica la même différence qu’il yaentre le genre Saprolegnia et le genre Achlya. Toutes ces rai- sons ingénieuses, et qui semblent convaincantes au premier abord, ne peuvent résister à un examen sérieux. Ces productions, loin de caractériser le genre Achlya, se ren- contrent aussi sur les Saprolegnia. A m'est arrivé de les observer sur des représentants de l'un et l’autre genre, en même temps que ie Rozella septigena (prétendu organe mâle du S$. dioica), qui ne caractérise non plus ni l’un ni l’autre. 1 est faux aussi qu'elles ne se montrent que sur les espèces dépourvues de branches latérales; car les Achlya racemosa Hild. (fig. 15), polyandra Hild. et le S. spiralis, les présentaient concurrem- ment avec des branches latérales. On les rencontre parfois occupant l’intérieur des filaments porteurs d’oogones et d’anthé- ridies, et empêchant ainsi la formation des oospores, loin d’y concourir. On n'a du reste qu'à se reporter à ce qui a été dit à propos du À. septigena. Pour l’une et l'autre formation, M. Prings- heim, en voulant démontrer leur rôle sexuel, se servit des mêmes raisons et donna les mêmes preuves; on les rétorquerait par les mèmes arguments : après ce qui vient d’être dit, il n’est plus possible de s'arrêter à l'opinion du savant professeur. | Je ne rappellerai que pour mémoire les preuves qu'il tirait de la régularité du développement, de la position des papilles, de l'absence de germination des corps agiles : tous ces faits ont été expliqués etne prouvent rien pour sa théorie. Il reste encore à dire, pour lui porter le dernier coup, que le second mode de reproduction du parasite a été rencontré; et que le rapport de ces spores avec les sphérules, c’est-à-dire les sporanges, est hors de doute (voy. fig. 14-18). Maintenant que le parasitisme en est bien établi, nous allons passer à l’histoire du développement du Woronina ; on y verra encore des faits semblables à ceux qui ont été décrits chez le R. sepligena. La grande analogie de ces deux Chytridinées et leur parallélisme avaient été bien devinés par M. Pringsheim, seulement 1 se trompa dans l'interprétation des organes. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 181 Développement. — Le développement a été suivi de la même manière que dans le cas précédent (A. sepligena) en cultivant une touffe mise à part. Les filaments altaqués présentent à leur extrémité une con- centralion plasmatique considérable, coïncidant souvent avec un renflement. Le plasma est beaucoup plus foncé et opaque que lors de la formation du sporange; on y distingue des espaces plus clairs, analogues à ceux que Unger a nommés areola. On n’y voit, au centre, aucun corpuscule, aucun globule autour duquel ait lieu la concentration (fig. 4, 2, 3, 4, 5). La partie inférieure du plasma se limite par un arc dont la concavité est tournée vers Ja partie inférieure : à cet instant aucune cloison n’est for- mée, ainsi que le montrent les réactifs, qui contractent le tout en une masse épaisse et opaque. Puis une cloison se forme dans la masse sans que l'arc infé- rieur soit mieux délimité (fig. 2); puis une seconde, puis une troisième. 11 arrive même que la cloison se forme (fig. 3) au-dessous d’un point où le plasma est concentré, et qu’elle limite ainsi un espace relativement clair et hyalin ; c’est ce qu’on observe aussi dans l'espèce précédente : c’est en général au dernier article formé. On voit donc trois ou quaire) cloisons successives apparaitre de haut en bas. Ainsi, le premier développement du W. polycystis est à peu près le même que celui du À. septigena ; il semble qu'il y ait là aussi une formation due au filament lui-même, tandis qu’elle est due au parasite. On pourrait en tirer les mêmes conséquences que plus haut. Il arrive souvent, quand la plante n'est pas dans de bonnes conditions de vie et de santé, que le développement s'arrête là : on croirait avoir affaire à ces sortes de conidies signalées par M. Bail et qui sont analogues à celles des Érysiphés : avec le temps, les cellules se désarticulent et se dispersent dans Île liquide; mais il faut être en garde contre de pareilles ressem- blances. J'avais trouvé plusieurs fois, soit hbres, soit encore atta- chées au filament, ces singulières cellules remplies d’un contenu foncé, et une fois, les rencontrant abondamment, je tentai de les 152 37. CORNE. faire germer comme les auires : je ne pus y réussir, quoique je les eusse placées dans les meilleures conditions : l’une de ces sortes de cellules se transforma en sporange de #7. polyeystis. — Le fait me parut si étonnant, que je recherchai d’une façon plus précise et plus nette les débuts du oronina. Y'observai ainsi pendant plusieurs jours le mème filament, afin d’être bien sûr de ne pas me tromper. On peut voir (fig. 5 et 6) l’un de ces filaments. Les légères différences de forme tiennent à ce qu'il était un peu irrégulier et ne se présentait pas toujours du même côté. On peut remarquer que tous les filaments ne se développent pas ainsi dans la toufle, mais seulement un petit nombre; 1l semble que ce parasite soit fort altérable. On voit certaine- ment des exemples de cet arrèt de développement sur les Sapro- légniées lignicoles de date déjà ancienne et dont la culture marche mal, Si ces fausses spores paraissent assez communes, leur transformation normale en sphérules est au contraire assez rare. Reprenons le développement du filament de la figure 5. Le premier jour (4° mai 1871), il était formé de deux articles a et b, montrant une ou deux vacuoles; le plasma était opaque sans aucun noyau ou centre de formation : le reste du filament présentait uu plasma peu abondant. Le lendemain, dans l’ar- ticle supérieur a, les deux vaeuoles avaient disparu ; les parties les plus opaques avaient changé de place : le second article b montrait la formation de sphérules encore un peu engagées dans une masse plasmatique. Au-dessous de ce second article s'en trouvait un troisième, c, dont il n'y avait aucune trace la veille, et qui présentait des sphérules à peu près au même état que le précédent. Le jour suivant, les sphérules de cet article s'étaient vidées ; celles du précédent, uon plus sphériques, mais polyédriques par pression, contenaient des zoospores déjà for- mées (fig. 7): aucune papille ne se montrait sur les parois des articles; cela était peut-être dû à la position défavorable du filament. Les sphérules, sauf une seule, 4, ne présentaient aucun prolongement: le seul qui fât visible était d'une taille eonsidé- MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES, 165 rable (s, fig. 7) et presque égal à celle de la sphérule (1) ; le plasma en était clair et finement granuleux : toute la journée se passa à attendre la sortie des corps agiles ; le jour suivant, les sphérules étaient vides. L'article supérieur ne subit aucun développement. Cette circonstance, toute défavorable qu'elle fût, ne laissa pas que d'avoir son Intérêt, car elle montra d’une façon irrécusable que les sphérules sont formées aux dépens d’un plasma qui s’or- ganise directement. Quelquefois, comme le fait remarquer M. Pringsheim, tout le plasma n’est pas employé, et il reste quel- ques globules oléagineux çà et là : nous en avons parlé plus haut; on peut en voir un exemple fig. 9 4. Cette mêine figure montre la transformation du contenu des articles en train de s’accomplir. La formation ayant lieu comme dans le R. septigena, on peut se proposer de rechercher des traces de la membrane due au Woronina et qui vient doubler la paroi de la plante nourricière. On ne voit pas aisément dans lespèce précédente si la paroi est double; les cas pareils sont très-rares, même sur un nombre considérable d'individus: ici où les filaments attaqués sont en petit nombre, rien de pareil n’a pu être rencontré. En revanche on voit se produire fréquemment un fait plus rare dans l’autre espèce ; les articles se détachent les uns des autres plus ou moins complétement (fig. 9). Les cloisons se séparent suivant les deux feuillets qui la constituent ; mais souvent aussi cette rupture est imparfaite et les parties sont encore assez fortement adhérentes entre elles pour ne pas devenir libres, même après plusieurs jours : le filament représenté était contenu dans la même toutfe que celui de la figure 5, et il resta dans cet état tout le temps des observations, quoiqu'il partageât les tractions et la pression subies par les autres. Dans ce cas, on aperçoit le lambeau (Hg. 9 2) de la paroi de la plante nourricière, qui dépasse le contour de la cloison. On voit de même, au point où les deux cloisons se raccordent avec là paroi, ce qui n’a jamais lieu très- (4) C'élait peut-être la papille, peu favorablement placée pour l'observation, 18 VI. CORNE. exactement, les trois membranes laisser entre elles un petit méat, comparable à ceux qu'on observe au point de rencontre de trois cellules dans les tissus des plantes (fig. 3 et 4, m). Remarques. — Le premier développement du R. sepligena est presque identique avec celui du HW”, polycystis ; mais une diffé- rence profonde ne tarde pas à s'établir entre les deux. Tandis que le contenu de la cellule formée par le premier s'organise directement en zoospores, chez le second ce contenu se frac- lionne en sporanges nombreux : la membrane formée au début chez l’un appartient à un sporange, chez l’autre elle constitue une enveloppe générale, qui contient plusieurs sporanges. Il y a donc entre ces deux parasites une différence considérable. Ces sporanges groupés dans une enveloppe générale se re- trouvent dans un autre genre de la famille des Chytridinées, le genre Synchytrium, établi par MM. de Bary et Woronine; ils ont donné à l’ensemble le nom de sore. Dans ce genre, qui ren- ferme plusieurs espèces, la membrane générale contenue dans une cellule hypertrophiée de la plante nourricière se rompt sous l'action de l'humidité. Ces parasites, attaquant des plantes ter- resires, se trouvent dans des conditions de nutrition et de milieu extrêmement différentes de celles du oronina : malgré cela, les analogies sont très-étroites entre les deux genres, et sont, par conséquent, fort remarquables. Nous retrouvons donc dans la fanille des Chytridinées des parasites, vivant sur des plantes aquatiques, analogues à ceux qui vivent sur des plantes ter- restres, les Rozella et le W. polycystis constituant une série parallele au Chytridium simulans et aux Synchytrium. C'est une preuve qui s'ajoute par surcroît à celles que nous avions déjà du parasitisme de nos prétendus organes sexuels ; et cette analogie aurait peut-être pu mettre quelques observateurs sur la voie de ces recherches. La différence entre notre W’oronina et les Synchytrium est assez faible. Chez le premier, l'enveloppe générale du sore se soude avec les parois de la plante nourricière, et les sporanges, réunis en groupe, sont libres dans l’intérieur. Dans le genre MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 185 Synchytrium, au contraire, l'enveloppe est assez étroitement appliquée sur les sporanges, les rend polyédriques par pression et n’est pas adhérente à la cellule qui contient le sore : la cou- leur du plasma est en outre orangée. Dans chaque cellule attaquée par les Synchytrium, il n'y a qu'un sore; sur les Saprolégniées, 1l y a plusieurs sores dévelop- pés à la file et successivement. Proviennent-ils du même plas- modium qui s’estsegmenté, ou de plusieurs plasmodium distincts à l'origine et développés isolément ? Je ne saurais le dire; le lec- teur pourra se reporter à ce qui a été dit pour le À. sepligena, où la même question est effleurée, mais non résolue (voy. p. 172). L'étude du Woronina peut servir à mieux connaître les Syn- chytrium. MM. de Bary et Woronine n'ont pas indiqué par quel mécanisme se produisait la rupture de la cellule hypertrophiée qui renferme le sore; le #oronina nous mettra sur la voie. En traitant par le chloroiodure de zinc des sores de Synch. Stellariæ Fuck., j'ai remarqué dans la membrane une ouverture circulaire étroite, dont les bords se coloraient en rouge brique ou rouge violacé sous l'influence du réacuf. Ce trou est évidem- ment l'emplacement d’une papille analogue à celle du Foro- nina; elle doit servir à perforer la paroi de la cellule nourricière et y déterminer une première ouverture, qui s'agrandit par déchirure; les sporanges sont mis en liberté, ou bien les z00- spores peuvent s'échapper au dehors si les sporanges ont pu, sous l’action de l’eau, leur donner naissance. Dans cette dernière hypothèse on voit que le rôle des papilles dans les deux genres serait identique. M. Woronine (L) a rencontré dans le développement des spores immobiles du Synchytrium Mercurialis une papille analogue, présentant les mêmes résultats après l'action des réactifs ; l’hypo- thèse précédemment émise n'a rien que de très-plausible : l'étude de notre plante à donc ainsi permis de découvrir un organe difficile à observer directement et qui avait échappé à deux obser- vateurs très-distingués. (1) Bot. Zeitung, 1868, p. 88, pl. IL, fig, 8 et 14; pl. II, fig. 18. 156 VW. CORNE. Spores imimobiles (fig. 14-19). — Le deuxième mode de reproduction du parasite est constitué par des spores immobiles (fig. 14) contenues dans un article renflé- &iles sont très-rares, mais se rencontrent en général sur jes filaments qui contiennent déjà les sporanges ; elles sont disposées en file et non pas latéra- lement, comme dans le À. septigena. M. Pringsheim ne les a pas observées. Leur couleur est d’un brun verdâtre : elles portent à leur sur- face des ornements formés de sortes de pyramides courtes soudées en un réseau élégant ; la paroi qui les porte est d’un ton un peu plus clair. À travers cette enveloppe on ne peut rien voir du contenu, sinon qu'il est opaque (fig. 1h). Cette spore se développe dans un article renflé, tantôt presque sphérique (fig. 15), tantôt seulement ovoïde (fig. 17). Quand cet article est terminal, il n’est pas rare que ce soit une portion placée au-dessous de l'extrémité, qui se renfle, de façon à donner l'apparence de la figure 19 : quand cette spore se forme, elle est d'abord constituée par un globule noirâtre, situé au milieu du contenu opaque de l'article; dans certains cas même (fig. 18 c) on ne l’apercoit pas. I grossit ensuite et devient plus apparent ; le plasma se dispose autour de lui en traînées et présente les phé- nomènes décrits lors de la formation des sporanges des Olpi- diopsis; il s’entoure bientôt d’une membrane qui finit par se couvrir de ces singulières verrues polyédriques ; à la fin, il ne reste plus aucune trace de plasma, tout celui de l'article ayant été absorbé. Les dimensions de cette spore sont très-variables et ne dé- pendent pas toujours de celles des filaments qui les contiennent : les figures 15, 16, 17 et 18 montrent ces variations, qui sont assez considérables dans un même tilament. Le diamètre oscille entre 0"°,042 et 0%°,140, du simple au triple et même plus. Ces spores se forment toujours dans l’intérieur d’un article, du moins celles qui se sont présentées à moi étaient dans ce cas; parfois la cloison était très-éloignée, mais elle existait cepen- dant, Dans la figure 19, la cloison, qui n’a pas été reproduite, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES, 187 était située au-dessous du renflement à une distance égale envi- ron à six fois le diamètre de ce dernier. Dans les Synchylrium, rien de pareil ne se montre; quand deux spores immobiles naissent dans la même cellule, elles ne sont jamais séparées par une cloison : cependant la présence du parasite détermine dans les cellules attaquées des segmenta- tions en nombre considérable. La présence du Pythium gracile Schenk (P. reptans de Bary) détermine sur les ’aucheria la formation de cloisons spéciales ; dans quelques cas, rares du reste, on observe des cloisons acel- dentelles dans les cellules qui contiennent les spores immobiles des espèces du genre Rozella, ainsi que dans les filaments pré- sentant un grand nombre de sporanges de l'Olpidiopsis Sapro- legniæ. N'y aurait-il pas ici un fait semblable ? Qu'on me permette cependant de citer une Chytridimée qui montrait quelque chose d’analogue à ce qui a lieuchez le W.po- lycyshs. Le parasite vivait aux dépens des F’aucheria sessilis el lerrestris récoltés sur un sol humide, à Châteauneuf-sur-Loire (Loiret), au mois de mai 1871. Je n’y rencontrai pas de sporan- ges, mais seulement des spores échinées (fig. 21 et 22). Elles étaient contenues entre deux parois. On voit (fig. 20 et 21) la suite du développement: en « (fig. 20), le parasite est très- jeune et l’on voit à peine le premier état des sphérules plongées au milieu d’une substance opaque ; en b, il y a déjà une mem- brane autour de chacune d'elles ; en e, les spores sont presque müres; dans la figure 22, on voit des spores de forme et de taille différentes. Je propose de lui donner le nom de Chytridium glo- meratum, le nom de genre devant être donné ultérieurement avec plus d’'exactitude (1). (1) Dans la famille des Chytridinées, c'est la considération de la manière d’être des sporanges et l'émission des zoospores qui caractérisent le genre, Dans les cas où les sporanges manquent normalement, il faut, pour le déterminer, obtenir la germination des spores immobiles, Le parasite cité ici pourrait probablement être rapporté à un type dénué de sporanges. Ex.: Synchytrium Mercurialis. Dans la classe des Algues, le Sphwroplea annulina présente le même fait, et les z00spores ne se montrent que dans la germination des oospores, 185 WI. CORNE. L'aualogie avec le HWoronina eonsisterait dans ce fait, que les spores immobiles se forment dans l'intérieur d’une cellule, aux dépens d’un plasma uniformément répandu dans son intérieur, à ce qu'il semble ; les parois dela cellule devant être attribuées, soit au filament nourricier, soit à son parasite. Dans quelques cas, les spores 1mmobiles se présen \érent sur des filaments de Saprolégniées munis déjà d'oogones et de branches latérales. On voit (fig. 15) l'Achlya racemosa Hild., dont les oogones et même les oospores en voie de formation ont été tués par le Woronina. Cependant, en @, la spore immobile n'a pu réussir à se développer, et la cellule qui devait la con- tenir ne renferme qu'un plasma trouble et peu granuleux, évidemment altéré. Dans tous les cas observés, où les deux modes de reproduction du parasite existaient simultanément, les spores immobiles se montrèrent comme dans le À. sepiigena, toujours au-dessous des sporanges; cette situation invariable indique la dépendance et le lien de ces deux formations, et montre que l’une et l’autre appartiennent à la même plante : cela prouve aussi que le plasma de ce (fig. 16), qui ne ae pas, peut-être à cause de son opacité, présenter de globule plus sombre, est destiné, d’après sa position, comme d (fig. 18), à donner une spore immobile née postérieurement à celle e qui est située au-dessus. En résumé, malgré les lacunes et les imperfections de l’histoire du Woronina, on peut dire qu'il constitue l'espèce la plus intéressante de tout le groupe des parasites étudiés ei. Ce qui prouve qu'on a bien affaire à un parasite, c'es: 1° L'hypertrophie et l’altération des filaments. 2° L'existence, sur les plantes qui le présentent, d'organes sexuels complets, oogones et branches latérales, les organes élant parfois par cela même altérés et mis à mort. 3° L'absence de ces productions dans les espèces types dé- crites par Hildebrandt (A. racemosa et polyandra). h° La présence simultanée d’une autre formation également accidentelle (22. sepligena) sur ces mêmes espèces; n1 lune ni l’autre ne caractérisant plutôt tel genre que tel autre. MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 189 5° La présence de spores immobiles, ou deuxième mode de reproduction d'une Chytridinée. 6° Le parallélisme de ces formations avec d’autres parasites connus, les Synchytrium. On peut ainsi affirmer, en terminant, que toutes les produc- tions que M. Pringsheim considérait comme des anthéridies, sont les sporanges de parasites appartenant à des genres divers de la famille des Chytridinées, dont les spores immobiles sont connues désormais, et dont les zoospores (prétendus anthéro- zoïdes), ne germant pas dans l'eau, concordent en cela avec la plupart des zoospores des Chytridinées. Nous pouvons enfin conclure que chez les Saprolégniées, la reproduction sexuée s’accomplit suivant deux types seulement. La fécondation s'opère, dans l'un au moyen des branches laté- rales, dans l’autre au moyen d’anthérozoïdes semblables aux z00spores. Ces deux types, considérés à un point de vue un peu géné- ral, différent à peine: chez l’un, l’élément mâle, non doué de mouvement, est déversé par l'organe mâle dans la gonosphé- rie ; chez l'autre, il est muni de cils, et pénètre dans l’intérieur de l’oogone et se fond dans la gonosphérie, sans le secours d’au- un organe. Dans les deux cas, l'élément mâle est plasmatique ; il a pour effet de déterminer autour de la gonosphérie la production d'une membrane cellulosique et de changer ce globule en o0spore. | 190 M. CORNE. EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE 1. Fig. 1. Achlya polyandra Kid. Anthéridies déjà formécs à l'extrémité des branches latérales entourant un oogone non encore séparé par une cloison. — Grossisse- ment : 225 fois, Fig. 2-8, À. racemosa Hild. Fig. 2. L'oogone n'est pas encore muni de sa cloison; l'anthéridie a est déjà formée ; b, branche latérale née sur l’oogone qui ne produisit aucune anthéridie. Elle per- mit de retrouver l’oogone le lendemain, au milieu de la touffe conservée à part. — Grossissement : 225 fois. Fig. 3. Le même oogone le lendemain : deux gonosphéries se sont formées ; l'anthé- Le) D Le] 2 ridie a émis deux prolongements qui se dirigent chacun vers l’une d'elles. — Gros- sissement : 225 fois. Fig. 4. Autre oogone nonisolé encore par une cloison. Il est muni de vacuoles, premier indice de la séparation du plasma : les vacuoles ne s: montrent pas près des bords, t, anthéridie déjà complétement formée, — Grossissement : 2925 fois. Fix, 5. Le même, le lendemain. Deux gonosphéries se sont formées, et chacun des deux prolongements, nés de l’anthéridie, se dirige vers l’une d'elles. — Grossisse- ent : 225 fois, Fig. 6 et 7, Formation des gonosnhéries, — Grossissement : 287 fois. Fig. 8. Autre oogone renfermant une gonosphérie unique : l'anthéridie émet un pro- 8 J L longement unique qui s'enfonce dans la gonosphérie. — Grossissement : 170 fois. Fig. 9-45, Achlya contorta Nobis. — Grossissement : 370 fois. Fig, 9 et 10, Anthéridies en train de se vider dans les gonosphéries : le contenu est purement plasmatique ; le mouvement d’épanchement est très-lent, Les prolonge- ments émis par les anthéridies s'enfoncent dans les gonosphéries. Fig. 11, Détails de l’oogone 10 à «4, &, anthéridies dont les prolongements sont dessi- nés à part, Fig, 12, Oogone muni d'un grand nombre de gonosphériess Fig, 13-15. Détails des prolongements émis par les anthéridies, pour montter que les rameaux se dirigent, non pas au centre du groupement des gonosphéries, mais vers les gonosphéries elles-mémes: (Pour plus de clarté, l'épaisseur de la membrane des &nthéridies été exagérée,) PLANCHE 2, Fig. 1-6. Monoblephoris Sphærica Nobis, -— Grossissement : 800 fois, sauf dans la figure 1. Fig, 1. Port de la plante, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉESe 191 Fig. 2. Oogone en voie de formation. Fig. 3. Oogone plus âgé : p, papille de l’oogone ; 4, anthéridie. Fig. 4. Oogone dontla papille s’est dissoute : le contenu s’est rassemblé vers l’orifice ; les anthérozoides se disposent à sortir de l’anthéridie a ; l'ouverture de cette dernière, située dans un autre plan, n’est pas visible. Fig. 5. Oogone chez lequel la fécondation est sur le point d’avoir lieu, Les anthéro- zoïdes s’échappent de l’anthéridie; deux d'entre eux /,/, sont fixés sur elle, La gonosphérie est située au milieu de l’oogone. (La pénétration des anthérozoïdes ne fut pas observée.) Fig, 6. Oogone avec oospore müre; l’anthéridie est vide ; 0, ouverture de l’anthéridie. Fig, 7-32, Monoblepharis polymorpha Nobis. Fig, 7. Oogone 7, sur le point de montrer la fécondation ; les anthérozoïdes sont tous sortis, sauf un seul, de l’anthéridie a. 0, orifice de l’oogone; k, partie antérieure claire, tache germinative (Ketmfleck). — Grossissement : 800 fois, = Fig. 8. Oogone dans le même élat que le précédent, — Grossissement : 800 fois. — Mémes lettres. Fig. 9, Le même, 10 minutes après. Deux anthérozoïdes f se sont fixés sur lui ; la gonosphérie s’est contractée et s’est portée vers la partie supérieure; la fécon- dation eut lieu environ un quart d’heure après. — Grossissement : 800 fois. Fig. 10. Oogone incomplétement ouvert dans lequel se trouve une gonosphérie en état d’être fécondée ; k, tache germinative. Les anthérozoïdes rampent à la surface de l’oogone ; /, anthérozoïde dont le eil est visible; ”, autre dont le cil n’est pas visible parce qu'il se projette sur la gonosphérie, qui est de couleur un peu foncée. — Grossissement : 550 fois. Fig. 41-17, Mouvement amiboïde d’un même anthérozoide sur la surface de l’oo- gone. Changements de forme, —- La figure 10 a été dessinée à 40 heures moins # minutes. Fig. 11. 10 lhcures 37 minutes, Fig, 12, 38 minutes. Fig. 13, 38 minutes et demie. Fig, 44, 39 minutes. Fig. 145, 40 minutes, Fig. 16, 41 minutes et demie. Fig, 17. 44 minutes, (14-17, le grossissement est un peu supérieur à 550 fois.) Fig, 18. Oogone de la figure 10 à 41 heures 10 minutes. (18-32, grossissement : 550 fois.) Fig, 49, 11 heures 11 minutes, Fig. 20. 13 minutes et demie. Fig, 21, 15 minutes et demie. Le mouvement des anthérozoïdes sé poursuivit jusqu'à 4 heures 20 minutes, et je ue le vis pas s'arrèéter; la préparation sé déssécha ultérieurement, 192 M. CORNU. Fig. 22. Oogone intercalaire, forme rare. Il est sur le point d’être fécondé : k, tache germinative. Il fut dessiné à 6 heures moins 2 minutes. /, anthérozoïde fixé sur lui. Fig. 23-27. L'anthérozoide s'épanche sur la gonosphérie. Fig. 27, 6 heures. Fig. 28-31, Sortie de la gonosphéric fécondée. Fig, 98. 6 heures 5 minutes. La gonosphérie commence à s'épancher, Fig. 29. 8 minutes. Fig. 30. 40 minutes. Fig. 31, 13 minutes. Fig. 32. Le lendemain à midi 38 minutes, Une membrane est nettement visible autour de la gonosphérie définitivement constituée en oospore. Les figures 1-9 ont été dessinées d'apres des échantillons récoltés en avrii 1869 à Villehervicrs, près de Romorantin (Loir-et-Cher), Les figures 10-32, d’après des échantillons récoltés dans les étangs du bois de Meudon, en janvier 4870, PLANCHE 3. Olpidiopsis gen, nov. Fig. 4, Filament de Saprolegnia, renflé en sphère et contenant des sporanges d'O/pr- diopsis en voie de développement, au milieu de trainées plasmatiques. — Grossisse- ment : 340 fois. Fig. 9, Sporanges plus avancés ; le plasma, moins abondant, à été en partie absorbé, — Grossissement : 340 fois. Vig. 3. Filament de la méme espèce avec sporanges de grosseur et de forme très< diverses : a, s’est vidé déjà; il a un contour sphérique. — Grossissement : 170 fois. Fig. 4. Sortie des z0ospores: p, sporanges beaucoup plus pelits ef moins avancés, — Grossissement : 470 fois. Fig, 5. Zoospores ayant à peu près la forme normale ; « surtout, — Grossissement plus considérable, Fig. 6 ct 7. Filaments diversement renflés du mème Saprolegnia, contenant des sporanges vidés d’Olpidiopsis : on peut remarquer les variations de forme et de taille des sporanges, du col de sortie des zoospores etc... Les figures 1-7 repré- sentent le même parasite sur la même espèce récoltée au Muséum en mars 1869. Fig, 8, Filament de Dictyuchus monosporus Leitgeb, avec sporanges de tailles diverses. L'un d'eux, a, émet des zoospores. On voit avec évidence qu'ils ne sont pas tous au même état de développement : b, sporange adulte; en c, il présente des vacuoles nombreuses et l'aspect écumeux caractéristique ; d, sporange plus avancé encore. Fig. 9, Zoospores du sporange de la figure 8 : en a, elles ont la forme normale; ë montré ce qu’elles deviennent lorsqu'elles se sont arrêtées, =- Grossissement considérable, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 193 Fig, 40.-O/pidiopsis Saprolegniæ (A. Br.). — sp, spore immobile; 4, cellule adjacente lisse. — Grossissement : 70 fois. Fig. 41. O. Index Nobis. — sp, spore immobile à cellule adjacente échinée. — Grossissement : 170 fois. [Le Dictyuchus de la figure 8 fut récolté à Chàteauneul-sur-Loire (Loiret), sur un Limax tombé dans l’eau d’une fontaine, en octobre 1871.] PLANCHE 4. Fig, 1-4, Olpidiopsis fusiformis Nobis, — Grossissement : 440 fois, sauf la figure 4. Fig. 4. Filament d’Achlya leucosperma Nobis, avec jeunes sporanges s d’O/pidiopsis et une spore immobile o encore englobés dans le plasma. Fig. 2. Olpidiopsis un peu plus avancé : le plasma a presque disparu, — 0, spore immobile; &, cellule adjacente. Fig. 3. Sporanges présentant déjà l'aspect écumeux qui caractérise les Chytridinées parasites des Saprolégniées; les spores immobiles o sont à peu près adultes; la cellule adjacente 4 ne s’est pas encore vidée de son contenu. Fig. 4. 0, spore immobile adulte; 4, cellule adjacente lisse; elle s’est enliérement vidée. Elle est soudée avec deux des dents qui l'entourent étroitement, — Grossis- sement : 550 fois. Fig. 5-11. Olpidiopsis Aphanomycis Nobis. — Grossissement : 340 fois. Fig. 5, Formation d’un sporange à l'extrémité d'un rameau renflé, — {, trainées plas- matiques rayonnantes. Fie. 6, Sporange un peu plus avancé, développé à la base d’une ramification, Mig. 7, a, sporange solitaire; b, trois sporanges inégaux, Fig. 8 et 9. Sporanges en divers points des filaments. Fig. 10 et 11. Sporanges commençant à émettre des tubes de sortie pour les zoospores. Fig. 12, Olpidiopsis incrassatu Nobis. — s, sporange; 0, spores immobiles ovales, entourées d’une matière amorphe ; a, cellule adjacente (?). — Grossissement 340 fois. Fig. 13-18. Rozellu Monoblepharidis polymorphæ Nobis. Fig. 13. Filament de Monoblepharis polymorpha Nobis. — 0, oogouce ovoide piri- forme ; 4, anthéridie; b, sporange du Rozella ; p, ouverture laissée par la papille. lig. 14. D, autres sporanges, Les parois latérales, formées en réalité de deux couches, paraissent, comme dans la figure précédente, n’être formées que d’une seule. Fig. 15. Spore immobile jeune à paroi encore lisse. Fig. 16-17, Spores immobiles adultes, Fig. 18. Spore immobile développée dans un filament renflé excentriqucment : ec développement latéral S’'exagère et devient normal chez le Rozella sepligenn, (Noyez pl. 6, fig. 17.) 9€ série, Bor, T: XV, (Cahier n° 4.) { 15 19/4 BE. CORNE, PLANCHE 5. Fig. 1-9. Rozella Rhipridit spinost Nobis. — Grossissement: 430 fois, sauf dans la figure 3/. Fig. 4. Jeune sporange; Le plasma du parasite ne se distingue pas dans l’article jeune qu'il remplit déjà probablement. Fig, 2. Sporange du Rozella présentant de nombreuses vacuoles et l'aspect écumeux caractéristique. — p, papille; c/, cloison mince, formée par la membrane propre du parasite. Fig. 27. Autre exemple de cloison mince, Fig. 3. Mème sporange qu'en 2, mais apres une heure et demie environ; sortie des Z00spores. Fig, 3% Zoospores normales très-fortement grossies. Fig. 4, Sporange échiné du Rhipidium spinosum Nobis, rempli de zoospores du Rozella, — cl, cloison mince. Fig. 5, Cloison normale des Rhpidium; le canal de létranglement s’est un peu rétréci, puis oblitéré par un dépôt de cellulose, Fig. 6. a, sporange vidé du parasite; c/, cloison très-mince; #, globule de plasma, assemblage monstrueux de zoospores soudées, — b, sporange échiné du Rlupidium contenant une spore immobile sy en voie de développement; c, sporange lisse dans le même cus; / et g ne présentent pas de cloison. Fig. 7. Spore immobile en voie de formation ; ancune cloison en /. Fig. 8, Sporange échiné du Rhipidium contenant une spore immobile, entourée de l'auréole claire dans laquelle se forment les échinules. — c/, cloison anormale ; h, autre cloison anormale. Fig, 9. Sporanges échinés avec deux spores immobiles : —4, en voie de formation; b, spore presque adulte ; c/, cloisons anormales. [Ces figures ont été dessinées d’après des individus récoltés à Châteauncuf-sur-Loire (Loiret), au mois de mars 1871.] Fig. 10-44, Rozella Apodyæ brachynematis Nobis. — Grossissement : 550 fois, Fig. 10. a, sporange du parasite presque muür ; p, papille ; b, sporange émettant ses z00spores. Fig. 44. Autre sporange émettant des zoospores, N. B. — Les zoospores élaient un peu altérées, la plante n'étant pas dans un état très-florissant de vie et de santé. Fig. 142. Spore jeune à membrane encore lisse. Coupe optique. Fig. 13, Spore jeune à membrane encore lisse, qui a péri à cet état. Fig, 14. Spore adulte dans un renflement #4 porté par un autre renflement 4, MONOGRAPHIE DES SAPROLÉGNIÉES. 195 [Les dessins ont été faits d’après des échantillons d’Apodya brachynema Hild., récoités en avril 1869, à Villeherviers (Loir-et-Cher).] PLANCHE 6. Rozella septigena Nobis. Fig. 4. Filament d’Achlya polyandra Hild. attaqué par le parasite.— 4, b, c, d, e, spo- ranges à divers états. En 2, la paroi du sporange ne s’est pas soudée avec celle du sporange supérieur, elle est irrégulièrement ondulée, En @, les zoospores sont en train de s'échapper ; ce présente l'aspect écumeux caractéristique. — Grossissement : 470 fois. Fig. 2. Forme normale des zoospores. — Grossissement : 9550 fois environ, — Elles présentent une matière plus dense vers la base du cil ; quelquefois elles en présentent également à la portion antérieure de leur masse. Fig. 3. a et b, différence de diamètre entre les masses plasmatiques qui vont se chan- ger en Zoospores; elles ont été dessinées peu de temps avant leur sortie du sporange. — Grossissement: 550 fois. Fig. 4. Zoospores anormales aussitôt apres leur sortié du sporange, elles étaient à peu près inertes. — Grossissement : 860 fois. (Figure dessinée à l’aide d’un objectif à immersion.) Fig. 5. Sporange vidé du parasite, — 0, 0, ouvertures laissées par la dissolution de la papille ; elles n’ont aucune analogie comme forme et comme situation avec les ouver- tures normales des sporanges des Saprolegnia ou des Achlya. La même remarque pourrait se faire à propos des figures 6 et 7. — Grossissement: 170 fois. Fig. 6. Filament de Saproleqnuia montrant les ouvertures o par lesquelles sont sorties les zoospores du Rozella. — Grossissement : 170 fois. Fig. 7. Sporange du parasite avec les deux papilles de sortie p, p, non encore dis- soutes : la membrane peut se dédoubler aux environs de ces deux points, mais non sur toute la longueur de la double paroi. Le sporange paraissait altéré, Fig. 8. Sporanges intercalaires, — a émet ses zoospores, l'ouverture n’est pas visible sur le contour ; b, sporange très-jeune dont le plasma est rempli par les premières vacuoles ; #2, cloison oblique. — Grossissement : 340 fois, Fig. 9. a, sporange à deux lobes, » et v, séparés par un étranglement ; les zoospores 2. s y sont cependant développées et se sont en partie échappées par une ouverture non placée sur le contour ; #, paroi irrégulièrement formée ; b, sporange très-jeune rem- pli par un plasma sans granules ; il est presque entièrement occupé par une énorme vacuole; €, sporange qui s’est vidé par l'ouverture 0, — Grossissement : 340 fois. Fig. 10, Filament de Saprolegnia spiralis Nobis. — x,y,z, cloisons très-nettes des sporanges a, b, e, qui sont définitivement formés ; w,v, «&, futures cloisons (?) dans l'intérieur de la cellule 4; p, p,p; trois papilles correspondant à ces trois (?) nou- veaux sporanges. — Grossissement : 340 fois. Fig. 11, Filament de S, spéralis, accru au travers d’un sporange vidé dont les parois sont visibles en #, 7/, rl, et terminé par uu jeune oogone 4, 4, b, c, d, Sporanges 196 A. CORNE. jeunes; p, papille du sporange 4. Noter l'aspect écumeux du sporange &. — Gros- sissement : 340 fois. Fig. 42. Filament de S. spiralis. — a, sporange muni d’une papille p ; b, sporange très- jeune; r,s, cloisons véritables ; pl, trainée plasmatique, — Grossissement : 340 fois Fig. 13. Filament d’A4. polyandra Hild., premier état du Rozella. — {, grande vacuolc. Grossissement : 440 fois, Fig. 44. Le même filament le jour suivant; le contour n'est pas toutà fa le même parce qu'il n’a pas été vu du même côté. La vacuole / a disparu. Le lendemain avait émis ses zoospores. Fig. 15. Spores immobiles du Rozella sur un filament de S. spiralis présentant en outre des sporanges qui n’ont pas tous émis leurs zoospores. — 0, ouvertures de ces sporanges; les renflements simulent des oogones ; ret s ne sont pas munis de cloisons. Fig, 46, Filament de S. sptralis présentant des spores immobiles d: Rozella non encore adultes. — 4, spore dont la membrane est encore lisse et entourée d’une auréole qui se relie aux parois par des trainées plasmatiques ; D, spore plus avancée, les échinules commencent à apparaitre dans la substance de lauréole; les trainées sont plus grèles; 72, cloison accidentelle, Ces renflements ne sont pas perforés comme les oogones du Saprolegnia. -— Grossissement : 340 fois. Fig. 17. Filamenut du S. spiralis avec spores immobiles. En 4, l’aurtole est encore visible, quoique les échinules soient formées définitivement ; en », elle à pour ainsi dire disparu. De ces deux renflements, lun est muni d’une cloison douteuse #; l'autre communique avec la cellule Ÿ fermée par deux cloisons ; g, sporange très- Jeune, muni de sa papille p, montrant le rapport des deux sortes de formations. — Grossissement : 340 fois. (Les figures 2, 8-15, ontété dessinées d’après des individus altaqués, végétant sur du biscuit de munition jeté daus un bassin à l'École normale supérieure à Paris (avril 1871). Le filament de la figure À végétait sur un Felix mort, récolté dans la même localité et qui nourrissait les mêmes espèces: Saprolegnia spiralis Nobis et Achlya polyandra Hd. Les figures 3-7 représentent des filaments qui végétaient sur des branches récoltées dans l’étang Vert, en décembre 4869, dans le bois de Meudon, près de Chaville (Scine-et-Oisc), ] PLANCHE 7. Woronina polyoystis Nobis, Fig. 4-6. Premier développement des sores. Fig. 4. Accumulation du plasma à l'extrémité d'un filament. Aucune membrane n'existe encore. Fig. 2. Une membrane est visible en p; la partie inférieure du plasma est encore libre dans le filament. Fig. 3. Deux cellules se sont formées: l'inférieure à est moins riche en plasma que la MONOGRAPIHE DES SAPROLÉGNIÉES. 207 supérieure 4 91, méal intercellulaire au point de rencontre des {rois membranes Fig. 4. Trois cellules sont formées : 4,h,c La paroi inférieure p de la dernière « présente une irrégularité, ; [Les filaments des figures 1-4 appartiennent au Saproleqnia spiralis.] Fig. 5. Deux cellules se sont formées, a et b. Fis. 6. Le même filament le lendemain. La cellulea s’est un peu modifiée; le contenu de à s’est contracté en sphérules encore engagées un peu dans le plasma logé entre elles; la cellule c, dont il n’y avait pas trace la veille, présente des sporanges entièrement développés les sphérules sont plus nettes qu’en D; le sore est presque mür. Fig. 7. Portion de la cellule b de la figure précédente. — € s'était vidé ; a ne s'était pas transformé en sphérules. Les zoospores sont déjà séparées; les sporanges sont polyédriques par pression. s, tube de sortie de la sphérule & (ou papille de la mem- brane générale du sore). — Grossissement : 340 fois. (Les figures 5 et 6 proviennent du même filament d’Achlya polyandra MHild. S'il ne présente pas le même contour dans les deux figures, cela tient à ce qu'il n’est pas vu du même côté.] Fig. 8. Sore adulte. s,s, sphérules avec tube de sortie pour les zoospores; s/, tube aplati contre la membrane ; les autres sporanges ne présentent aucun changement de forme, — Grossissement : 340 fois. Fig. 9. Filament d'Achlya polyandra avec sores à divers états, —-4, sporanges en partie ya PO 8 E vidés ; il reste quelques granules oléagineux du plasma initial, qui ne s’est pas transformé ; b, c, d, sporanges imparfaitement formés. Tous ces sores sont désarticu.- lés en partie, mais adhèrent encore les uns aux autres, /, portion de la paroi propre de l’Achlya. C'est cette paroi, qui, n'étant pas partout rompue, les retient encore ensemble. — Grossissement : 140 fois. Fig. 10. a, sore développé dans un renflement terminal du Sapr. spiralis ; b, futur sore ; 0, ouverture dans la paroi. Fig. 41, 42, 13. Plans successifs des Sphérules ; il n’y a que /, # et » qui portent des ouvertures visibles. — Grossissement : 340 fois. Fig. 14. Spore immobile de taille moyenne. — Grossissement : 340 fois. Fig. 45. Filament d'Achlya racemosa Hild. muni d’oogones et d’anthéridies, renfer- mant en outre trois spores immobiles du Woronina. — a, cellule dans laquelle la spore immobile ne s’est pas développée. Les oogones et leurs oospores ont péri sous l'influence du parasite. — Grossissement : 140 fois. Fig. 46, Filaments avec sore a, et spore immobile adulte b; c, cellule qui doit donner naissance à une spore immobile; p, ouvertures de la membrane générale par où le sore s’est vidé. — Grossissement : 140 fois. Fig. 17. Deux sores à et b; deux spores immobiles c et d ; p, ouverture de la mem- brane du sore. — Grossissement : 140 fois. Fig. 18. Filament avec quatre spores immobiles. — 4 et 4 ne sont qu'indiquées pour permettre de placer la figure précédente; €, spore adulle ; 4, spore en voie de for- mation, — Grossissement : 140 fois. Fig. 49. Spore immobile en voie de formation : une cloison se trouvait au-dessous du 198 HI. CORNE. renflement, à une distance égale à environ à huit fois le diamètre de ce dernier. — Grossissement : 440 fois. [Les figures 15-19 représentent des filaments d'Ach/ya racemosa Hild.] Fig. 20-22, Chytridium glomeratum Nobis. Fig. 20. Filament de Vaucheria, — a, premier étit du parasite : les globules qui représentent les jeunes spores sont indistinets ; à, jeunes spores à membrane déjà formée, mais encore lisse. — Grossissement : 449 fois. Fig. 21. ce, spores immobiles adultes. — Grossissement : 440 fois, Fig. 22. Spores adultes plus fortement grossies. — 4, coupe optique; b, formes diverses des spores et crêtes qu'elles présentent. -— Grossissement : 550 fois. (Les figures 1-7 et 9-13 ont été dessinées d’après des individus végétant sur du biscuit de munition jeté dans un bassin de l’École normale supérieure à Paris (avril- mai 1871), Le filament de la figure 8 végétait sur un Helix mort récolté dans la même localité et qui nourrissait les mêmes espèces: Saprolegnia spirals Nobis et Achlya polyandra Mid. Les figures 14-19 représentent un Achlya racemosa Hild. attaqué, récolté dans l’eau d'anciennes marnières à Longueville, près de Romorantin (Loir-et-Cher), en juin 1871. Les figures 20 et 21 sont faites d’après des filaments de Vaucheria terrestris et sessilis récoltés sur de la terre humide, à Châteauneuf-sur-Loire (Loiret), en mai 1871. RECHERCHES MORPHOLOGIQUES SUR L’'ASCOBOLUS FURFURACEUS Pers. Par RE. Edouard DE GLINKA JANCZERSEHKI. Le genre Ascobolus, créé par Persoon en 1797 (1) et devant former une famille spéciale, ne peut cependant encore être rangé parmi les Champignons, dont la structure et le développement nous sont bien connus. Les recherches dont il a été l’objet ont été généralement poursuivies dans le but de décrire des espèces nouvelles et de nous faire mieux connaître les espèces an- ciennes (2); aussi l'anatomie et l’organogénie n'y sont-elles que superficiellement traitées. Le mémoire de M. Woronine (3) fait seul exception ; 1l est exclusivement consacré à l'étude de la struc- ture et du développement de lAscobolus pulcherrimus. C’est la pensée de contribuer à une meilleure connaissance de ces Discomycètes qui m'a fait entreprendre ce travail, exécuté dans le laboratoire de M. le professeur A. de Bary. L'ordre que je pense suivre dans ce mémoire sera le suivant : dans la première partie, je traiterai de la structure d'une cupule complétement développée, dont les spores sont mûres; dans ja seconde, je passerai à son développement; enfin dans la troisième je présenterai quelques considérations qui résultent de mes ob- servations. (1) Persoon, Tent, disp. meth. Fung., p. 35. (2) Coemans, Sur les Ascoboles de la Belgique (Spicilége mycol., n. 4, 4862). — Crouan, Notes sur quelques Ascoboles nouveaux (Ann. des se. nat., Le série, t. VII, X). — Crouan, Florule du Finistère, 1867, p. 55.— Boudier, Mémoire sur les Ascobolées (Ann. des se. nat., 5° serie, t. X, p. 191). (3) De Bary et Woronine, Beiträge z, Morph, und Phys. d, Pilze, Meft HI, 200 EH. HDI GLENMRA JAN ZINSME. Anatomie de la cupule.— La forme de la cupule de l Æscobolus furfuraceus est discoïde, quelquefois un peu süpitée. Comme dans les Pezizes, elle se compose du réceptacle proprement dit et de l’hyménium occupant sa face supérieure. Une mince coupe longitudinale laisse bien reconnaître sa struc- ture anatomique et nous permet de distinguer, dans le récep- tacle proprement dit, trois tissus plus ou moins différents. À. Le üssu cortical (fig. 1, a) se compose de cellules à mem- branes minces et colorées en jaune; leur contenu est éminem- ment aqueux, pauvre en matière protoplasmatique, se colorant par la solution 1odée en lilas ou rouge brun. Il recouvre de deux ou trois couches le réceptacle et entoure les bords de l'hymé- nium. Les dimensions de ses cellules différent selon la place qu'elles occupent; grosses dans la partie basilaire du réceptacle, elles deviennent assez petites dans sa partie supérieure. B. Le tissu pseudo-parenchymateux (lg. 1, b) constitue souvent la masse la plus considérable du réceptacle. I est composé de eel- lules incolores à membranes minces et de dimensions différentes. Dans la partie basilaire, elles sont grosses et offrent une grande vacuole dans leur protoplasma, où une quantité de petites qui leur donnent un aspect écumeux, tandis que celles de la partie supérieure sont plus serrées, toutes gorgées de protoplasma et de dimensions assez petites. Entre ces deux formes, on trouve toutes les gradations : ce n’est qu'un seul tissu dont les cellules sont de diverses grosseurs et différemment riches en protoplasma, qui se teint dans tous les cas en rouge brun par la solution 1odée (1). Entre les cellules de ce tissu, on réussit parfois à trouver quel- ques hyphes et le scolécite, sur lesquels je reviendrai plus tard. (1) Cette réaction identique avec celle de l’épiplasma des thèques a été déjà indiquée par M. le professeur de Bary (Fruchtentioickelung der Ascomyceten, 1863, p. 23) RECHERCHES SUR L'ASCOBOLUS FURFURACEUS. 201 C. La parle supérieure du tissu pseudo-parenchymateux est recouverte par le tissu sous-hyménial (fig. 1, c), qui est formé d'hyphes ténues, rameuses, s’entrecroisant mutuellement et se dirigeant plus ou moins horizontalement. Les cellules de ces hyphes sont remplies d'un liquide aqueux ou de protoplasma se colorant en jaune par la solution iodée. Il est à peine nécessaire d’ajouter que là où les deux tissus sous-hyménial et pseudo-parenchymatique se touchent, les élé- ments de l’un se mêlent à ceux de l’autre. L'hyménium se compose : 1° de thèques, 2° de paraphyses, et 3° d’une substance gélatineuse qui réunit les deux organes. Cette substance, nommée gélin par MM. Crouan, est colorée dans cet Ascobole en jaune-soufre ; la solution iodée la teint en bleu clair. Les paraphyses sont des tubes minces, cloisonnés, à membra- nes très-ténues, à protoplasma contenant des vacuoles et se co- lorant par la solution iodée en beau violet ou rouge brun. Elles sont ramiliées dans leur partie basilaire et placées, aussi bien que les thèques, perpendiculairement au plan de lhyménium. Développement et structure des spores. — La structure de la thèque et la formation des spores sont dignes de fixer notre atten- tion, d'autant plus que ce dernier phénomène n’a pas toujours été correctement interprété (1). Il est réellement facile de mé- connaitre la vérité, parce que l’eau agit très-promptement sur le contenu de la thèque et détruit l'arrangement naturel des molé- cules du protoplasma. Pour éviter cet inconvénient, j'at eu re- cours à une solution concentrée d’albumine, méthode appliquée aux observations embryogéniques par M. le professeur Stras- burger ; elle m'a rendu des services considérables, car ce n’est qu'avec son aide que j'ai pu observer le même objet plus d’une heure, sans le moindre changement. Une jeune thèque qui se prépare à la formation des spores se présente sous forme de massue; elle est toute gorgée de protoplasma fortement réfringent, mais non homogène dans (1) Boudier, oc. cit, p. 198. Zu E. DE GELINKA FANCANNSKE. certaines régious, car il contient des vaeuoles. La partie supé- rieure en est tout à fait dépourvue, et par conséquent parfaite- ment homogène; elle renferme un nucléus sphérique faiblement réfrmgent, avec un nucléolule (4). Le reste de la thèque contient une ou deux vacuoles assez grandes pour que le protoplasma se trouve réduit à une couche pariétale assez mince; ou bien il contient un grand nombrede vacuoles, dont les plus petites sont réunies dans là partie médiane de la thèque et lui donnent un aspect écumeux, tandis que les plus grandes se trouvent dans sa partie basilaire (fig. 3). Dans cet état, la solution iodée colore le protoplasma de la thèque en jaune et la membrane en bleu (2). D'abord les thèques s'allongent dans leur partie supérieure sans rien perdre cependant de leur structure. Mais à un moment donné, le nucléus disparaît, et les spores commencent à se former dans la partie supérieure (fig. 4), là où le protoplasma est complétement homogène. Je n'ai jamais réussi à trouver une formation de nucléus secondaires qui auraient précédé l’appa- rltion des spores, comme l'a chservé M. de Bary chez quelques Pezizes (3). Les spores, qui apparaissent toutes à la fois, sont d’abord des portions sphéroïdales de protoplasma faiblement réfringent (fig. 4); au milieu de chacune d'elles se trouve un nueléus avec un nucléolule présentant le même aspect que le nucléus primitif de la thèque et difficile à reconnaître à cause de sa transparence. Leur forme change bientôt, elle devient ovoïde (fig. 5); il n’y a pas encore de membrane, et l’ammoniaque les détruit com- plétement. Elles ne tardent pas cependant à s’entourer d’une membrane de cellulose (fig. 6) d'abord très-mince, et qui se colore, comme la membrane de la thèque, en bleu par la solu- tion 1odée, tandis que le protoplasma des spores et celui qui n'a pas été employé pour leur formation se colorent en jaune. Cette (43 Gctte struelure du nucléus à été observée dans un grand nombre de Discomy- cètes, el même dans cet Ascobole, par M. de Bary (/oc. cit., p. 21); elle est peut-être générale dans ce groupe de Champignons. (2) Voy. Coemans (oc. cit., p. 6) et de Bury (Morph. und Physiol, d. Pilze, p. 108). (3) Loc. cit., p. 101 ct suiv. RECHERCHES SUR L ASCOBOLUS FURFURACEUS. 203 réaction disparaît bientôt : le protoplasma entourant les spores commence à prendre la réaction caractéristique de lépiplasma ; il se teint par la solution iodée en beau violet ou en rouge brun. À iesure que les spores se développent, l’épiplasma disparaît de plus en plus, et, quand elles parviennent à leur maturité par- faite, il n’en reste qu’une couche pariétale extrèmement mince. Les changements qu'éprouvent les spores depuis le moment où elles présentent une membrane jusqu'à leur parfaite ma- turité, consistent essentiellement en ce qu'elles gagnent sans cesse en volume ; leur contenu devient finement granuleux et la membrane passe par une série de transformations : elle s’épais- sit, se dédouble ensuite (fig. 7), reçoit un appendice gélati- neux (fig. 8), et ce n'est qu'à la fin qu'apparait une membrane violette remarquable par sa couleur et ses dessins (fig. 9). Une spore parvenue à sa maturité parfaite se compose donc du contenu protoplasmatique, de l’endospore incolore à deux couches, de l’exospore violet et de l’appendice gélatineux (fig. 10). Ce dernier constitue la partie la moins durable de la spore, conime on pouvait l'induire à priori de sa consistance. fl suffit de retarder la projection des spores pour le voir disparaître même à l'intérieur de la thèque. La membrane violette paraît striée dans le sens longitudinal et oblique (fig. 9, 10). À l’aide d’un fort grossissement, on reconnait qu’elle n’est pas lisse, mais toute recouverte de saillies; les stries de couleur plus intense re- présentent les endroits où la membrane est plus épaisse, les stries plus pâles les endroits où la membrane est plus mince, mais toujours elose; ces stries ne sont donc point des fissures, comme on l’admettait jusqu'à ce Jour. M. Boudier a été le premier à constater, dans son important travail, que cette membrane a une consistance fragile (4); 1l suffit en effet de rouler des spores entre deux plaques de verre pour reconnaître qu’elle se détache de la spore sous forme de masse amorphe et non sous forme de membrane, tandis que le (1) Loc, cit, p. 203, tab. 6, fig. 22. 20/ HE. DE GLENKA JANCZENSHE. reste de la spore se maintient tout à fait intact. Cependant, ni cette constitution, ni la belle couleur violette, ne sont durables. En quelques jours, soit que la spore ait été conservée humide ou sèche, lexospore prend une couleur brune et une constitution différente. I ne se laisse plus réduire en masse amorphe et se détache de la spore sous la forme de membrane avec sa struc- ture primitive, facile alors à constater. Les réactifs chimiques se comportent différemment à l'égard de l'exospore normal et de l’exospore bruu. La potasse caustique et l’'ammoniaque sont très-efficaces à l'égard de la spore nor- male. La partie gélatineuse disparaît en un elin d'œil, l'exospore violet se gonfle et se décolore en quelques secondes. Il semble être alors d'apparence gélatineuse, à contours peu réguliers et difficiles à saisir: il se dissout peu à peu dans ces liquides, landis que la spore reste intacte pendant toute l'opération. Les acides nitrique et chlorhydrique agissent d’une manière sem- blable, mais l'exospore ne se gonfle pas autant. Quand l’exospore est déjà brun, ces acides ainsi que l’'ammo- niaque sont sans effet. Mais la potasse caustique, comme alcali plus énergique. provoque une dilatation en direction tangentielle, c'est-à-dire que l’exospore seul se distend et forme ainsi un sac renfermant la spore, d’un volume beaucoup moimdre que le sac. Si le réactif est concentré et agit pendant un certain lemps, alors la couche extérieure de l’endospore se distend aussi et pro- duit des boursouflures sur sa surface (fig. 13), si la dilatation n’est que locale; ou bien, si elle est générale, la désunion est complète. L'acide sulfurique produit en tout cas dans la spore une désorganisation sensible. Si l'exospore est violet, il passe par la couleur indigo à une teinte cendrée, perd ses stries caractéris- tiques, se distend aussi en direction tangentielle et se plisse sou- vent transversalement (fig. 11), tandis que l’exospore brun n'af- fecte que les changements que produit la potasse caustique (fig. 12, a). Dans les deux cas, la spore, c’est-à-dire son proto- plasma, et lendospore se dissolvent peu à peu (fig. 12), et après quelque temps il n'en reste plus de vestige. RECHERCHES SUR L ASCOBOLUS FURFURACEUS. 205 Ce coup d'œil sur la manière dont se comportent les spores à l'égard des réactifs chimiques m’a paru indispensable, afin de démontrer la nature particulière de l’exospore, et de faire comprendre certains phénomènes qui accompagnent la germi- nation. Germaination des spores. — Quiconque s’est occupé des Asco- boles se rappelle sans doute que leurs spores ne germent point, quelles que soient les conditions dela culture, et qu'ilsne peuvent être multipliés qu'à l’aide de leur mycélium {1). M. Boudier a cependant réussi à faire germer les spores de l’Ascobolus viridis ; les phénomènes de cette germination se trouvent décrits dans son mémoire (2). Mais l’Ascobolus viridis est une espèce humi- cole et carbonicole, qui vit dans des conditions tout autres que les espèces stercoraires. ler une question se présente: ces der- mères germent-elles de la même manière et à quelles conditions ? Toutes mes cultures artificielles n'ayant donné que des résul- Lats négatifs, il a fallu imaginer une méthode différente de celle adoptée par mes prédécesseurs. Je mêlai à cet effet, à la nourri- ture d’un lapin, une forte portion de spores brunes et violettes; les crottes furent ensuite soumises à l'investigation, et jy retrouvai les spores : je pus dès lors me rendre témoin des phénomènes de leur germination. Ils consistent en ce que la spore, en traversant le canal digestif, gagne considérablement en volume, ce qui pro- voque l'apparition d’une ou deux vacuoles dans son contenu (lg. 14, a). Lorsque l'exospore est brun, il se distend seulement, ou bien il se détache partiellement de la spore (fig. 14, e), sa struc- ture restant toujours intacte (fig. 14,/); tandis que l'exospore violet sedissout complétement sous l'influence des sucs digestifs, Les spores, ainsi disposées à la germination, l'accomplissent indé- pendamment des conditions extérieures, et aussi bien dans l’eau (4) M. Coemans (/oc.cit,, p. 6) prétend au contraire que les spores germent facile- ment dans l'humidité, et donnent naissance à un mycélium produisant des couidies en forme de Penicillium et de Torula, On ne peut pas prêter foi à ces observations ; non- seulement tous les botanistes qui s’en sont occupés (MM. de Bary, Woronine, Brefeld et moi-même) n’ont obtenu que des résultats négatifs pour beaucoup d'espèces, mais encore M. Coemans ne décrit pas la manière dont s'opère la germination (2) Loc. cit., p. 207, pl. 5, IV, fig. 13, 14, 15. 206 EH. IDE GEINKA JAVCZENNSHE. que dans les crottes elles-inêmes. Elles engendrent des tubes my- céliens qui prennent naissance à l’une ou à l’autre extrémité, quelquetois aux deux, ou à n'importe quel point de la surface, et dans lesquels passe tout leur protoplasma. La membrane de ces tubes est la continuation immédiate de la couche extérieure de l’endospore ; 1} en résulte que les germes ont besoin de percer la couche extérieure de l’endospore, et de lexospore, s’il existe. Ces tubes se cloisonnent bientôt, se ramifient, et constituent un mycéllum qui n'est sujet à aucune production conidienne. Mes observations se trouvent donc en parfait accord avec celles de M. Boudier sur F'Ascobolus viridis. Toute la différence con- siste en ce que l’exospore violet se dissout sous l'influence des sucs stomacaux et intestinaux, fait qui était à prévoir d’après l'efficacité des réactifs chimiques. Quelle est la cause résidant dans le tube digestif qui déter- miue la germination des spores? Il est encore impossible d’y ré- pondre. de suis cependant porté à croire que cette propriété ne doit pas être aitribuée à une seule cause, mais à la combinaison des diverses conditions que les spores y rencontrent. il La partie de nes recherches la plus importante pour la mor- phologie est incontestablement lorganogénie de la cupule. C’est à M. Woronine que la mycologie doit la découverte des phéno- mènes qui accompagnent les premiers étais de développement de la cupule chez l’Ascobolus pulcherrimus (4). H a trouvé que le premier indice de la cupule est un corps vermiforme nommé scolécite par M. Tulasne, naissant des filameuts mycéliens. Le scoléeite se compose d’une rangée de cellules courtes, mais dont le diamètre dépasse de beaucoup celui du mycélium. Les fila- ments voisins émeltent ensuite des ramuscules dont les cellules terminales s'appliquent si fortement à la parle antérieure du scolécite, qu'il n’est pas facile, qu’il est même impossible de les (4) Loc, cit, p. L et suiv. RECHERCHES SUR L'ASCOBOLUS FURFURACEUS. 207 en détacher. Puis, le scolécite et les organes fécondateurs pol- linodes s’entourent d’hyphes rameuses qui se dirigent et s'entre- croisent en tout sens, en prenant naissance dans le mycélium voisin, de sorte qu’elles forment une pelote au milieu de laquelle se trouve le scolécite. Ces pelotes se développent de plus en plus, et deviennent de jeunes cupules dans lesquelles, lorsqu'elles étaient toutes jeunes, on n'observait aucune thèque. . Woro- nine a retrouvé le scolécite, dont les cellules antérieures avaient sensiblement grandi et étaient appliquées au nombre d’un à trois immédiatement à la surface inférieure de lhyménium. Quel est le rôle du scolécite ; se trouve-t-1l en quelque relation avec les éléments de l’hyménium? M. Woronine n’a pu le décider : il n’a jamais réussi en effet à retrouver le scolécite dans des cupules parvenues à leur développement complet. M. Tulasne (1) a constaté la présence du scolécite chez lAs- cobolus furfuraceus, et le faisait sortir par pression des jeunes cupules. En ce qui concerne le phénomène de la fécondation et e rôle du scolécite, M. Tulasne ne la pas décidé, et M. Bou- dier (2), en confirmant l'observation de M. Tulasne, n’a apporté aucun fait nouveau, relativement au rôle du scolécite. Telles sont les connaissances que nous avions du développe- ment des Ascoboles. L’Ascobolus furfuraceus est une espèce très-favorable à beau- coup de recherches ; mais malheureusement les phénomènes de la fécondation y sont très-difficiles à observer. La cause en est qu'il ne se prête pas à la culture sur des lames de verre et que ses cupules se développent avec une rapidité extraordinaire. Mes propres observations concordent assez bien avec celles de M. Wo- ronine. Le scolécite est ici un peu plus grand et plus ou moins courbé en virgule (fig. 16); les cellules, au nombre de 8 à 45, y sont toutes gorgées de protoplasma finement granuleux. La fé- condation s’opère de cette manière : une branche venant du voi- sinage se ramifie à son extrémité et embrasse de ses ramuscules (4) Ann. des sc. nat., 5° série, t. VI, p. 245, (2) Loc, cit., p. 208, 205 M. BE GEINRA JANC£ZENSEHE. pollinodes la partie antérieure du scoléeite (fig. 15). Mais si une copulalion réeile à lieu entre le scolécite et le pollimode, je n'ai pu le décider. Le pollinode ne diffère de la sorte en rien des branches du mycélium ; 1l ne s'en distingue pas morphologique- ment, et ce n’est que l’analogie de la fonction qui nous autorise à lui attribuer le rôle d’organe fécondateur. Ensuite tout cet appareil se trouve entouré de filaments ramifiés et entrecroisés qui viennent du voisinage et forment une pelote incolore au mi- lieu de laquelle on aperçoit le scolécite, dont le côté convexe regarde le sommet. Quand le tissu de cette pelote s'est un peu accru, 1! est facile d'en isoler le scolécite ; une légère pression détermine le déchi- rement du tissu de la pelote, et l'on voit sortir par cette fente le scolécite en apparence tout à fait intact (fig. 16). Ses cellules sont gorgées de protoplasma et n'ont gagné qu’en volume. C'est le tissu filamenteux de la pelote qui devient bientôt le siége d'un accroissement considérable, tandis que le scolécite conserve pour toujours ses dimensions, et ce n’est qu'une des cellules dont 1l est constitué qui est susceptible d’un développement spécial. L'enveloppe filamenteuse c’est le tissu de la cupule future ; elle s'accroît dans toutes les directions, mais surtout dans sa par- ie supérieure. C'est par cette raison que le scolécite, au lieu d’occuper le centre de la pelote, se trouve bientôt dans sa moitié inférieure. Les couches extérieures de la pelote ne tardent pas à se transformer sur toute sa périphérie en tissu corcal coloré en jaune ; elles changent donc leur structure filamenteuse en pseudo- parenchymateuse. C’est à l'abri de cette écorce que se développe lhyménium (fig. 21), comme l'ont déjà trouvé MM. Coemans (1) et Woronime (2), sans en signaler l'importance. Depuis ce moment, les Jeunes cupules sont opaques et jaunes ; pour étudier les métamorphoses qui ont lieu dans leur intérieur, il faut les rendre transparentes à l'aide de la glycérine ou de l’am- moniaque, et, quand elles sont plus âgées, en faire des coupes (Loc pe7: (2)#Zoc-tcit pl IS fig: RECHERCHES SUR L'ASCOBOLUS FURFURACEUS. 209 longitudinales. On voit bientôt que le tissu filamenteux et inco- lore se transforme aussi en pseudoparenchyme. Cette métamor- phose s'opère graduellement de la base au sommet. Dès qu’elle en a envahi la plus grande partie, les paraphyses commencent à paitre de sa partie supérieure restée jusque-là filamenteuse. De la surface qui est en contact immédiat avec le Uussu cortical naissent de petits ramuscules qui se dirigent tous vers le som- met de la pelote. Ce sont des paraphyses qui se ramifient dans leur partie basilaire, s’allongent considérablement, excrètent le gélin, et forment bientôt l’'hyménium encore dépourvu de ses éléments les plus importants, qui sont les thèques (fig. 24). Dès le premier moment de l'apparition des paraphyses, le sco- lécite éprouve des changements considérables, A lexeeption d'une seule, toutes les cellules du scolécite perdent leur proto- plasma et restent étrangères à tout développement ; leur mem- brane s’épaissit sensiblement. Mais la troisième ou quelquefois la quatrième cellule du bout antérieur gagne en volume et en- gendre des hyphes sur sa surface libre de soudure avec les cel- lules voisines du scolécite. Ces hyphes, dans lesquelles passe tout le protoplasma de la cellule qui leur donne naissance, apparais- sent d’abord sur le côté qui regarde le sommet de la cupule ; leur développement s'arrête à cet endroit, ou bien 1l envahit toute la surface. Ces hyphes se dirigent cependant toutes en haut, et sont plus ou moins étalées, ce qui dépend de la position plus ou moins profonde du scolécite dans le tissu du réceptacle. Quand leur longueur dépasse certaines limites, elles se cloisonnent, se ramifient un peu, el, quand elles ont atteint la surface d’où s'élèvent les paraphyses, elles prennent une direction horizon- tale. Leur ramification y devient considérable ; de là naît le tissu que j'ai nommé tissu sous-hyménial, à travers lequel passent les paraphyses. Les hyphes du tissu sous-hyménial donnent naissance aux thè- ques d’une manière très-simple. Ses cellules produisent une excroissance latérale qui grossit, s’allunge, se sépare ensuite de la cellule mère par une paroi transversale. La jeune cellule ainsi formée, en se développant, acquiert peu à peu la forme d’une 5° série, Bor, T. XV. (Cahier n° 4.) ? 14 210 EH. DE GLINKA JANCZENSHE. thèque et absorbe tout le protoplasma de la cellule mère (fig. 20) qui reste remplie de liquide aqueux. Lorsque la jeune thèque a atteint une certaine dimension, on y voit apparaître le nucleus. Mais, comme cette production peut être considérée comme le prélude de la formation des spores, les métamorphoses ulté- rieures du contenu de la thèque ont été décrites dans le déve- loppement des spores. Le rôle que joue dans le développement de la cupule la cel- lule particulière du scoléeite me permet de lui attribuer la déno- mination de cellule ascogène, tandis que les hyphes qui y pren- nent naissance et engendrent les thèques, doivent être nommées hyphes ascogènes. Je n'ai jamais réussi à trouver plus d’une cellule ascogène dans le même scolécite. Cependant il w’a été donné de découvrir une jeune cupule contenant deux scolécites dont chacun avait une cellule ascogène propre. est en vérité très-difficile de savoir précisément s’il existe réellement une pareille connexion entre les thèques et la cellule ascogène. Les coupes des cupules développées ne sont que très- rarement propres à une démonstration rigoureuse ; le cours des hyphes ascogènes étant irrégulier, 1l est impossible de les suivre sur une étendue quelque peu considérable dans une tranche assez mince. Le moyen le plus pratique est d'isoler le scolécite par la pression au moment où apparaissent les premiers rudi- ments des thèques. Quand la cupule doit rester petite, les hyphes ascogènes sont stériles sur un-espace assez limité ; alors on réussit parfois à obtenir le scolécite en connexion avec les hyphes asco- gènes (fig. 19), ce qui écarte tous les doutes à cet égard. Le développement définitif de la cupule consiste en ce que ses éléments gagnent en volume et en quantité, C’est exclusivement l'apparition et l’évolution rapide des thèques dans lhyménium qui augmentent son volume au point que le tissu cortical qui le recouvre n'est plus en état de résister à la pression qui en résulte, et qu'il se déchire enfin pour laisser à nu la couche hyméniale. Ses débris se décomposent en cellules et disparaissent totale- ment, de sorte que la cupule prend sa forme typique. Le scolécite RECHERCHES SUR L'ASCOBOLUS FURFURACEUS. 911 peut toujours s’y retrouver, même dans une cupule parfaite- ment adulte. Dans ce but il est indispensable d'en couper des tranches longitudinales successives et de les rendre transparentes à l’aide de la glycérine ; dans une de ces tranches, on trouvera la cellule ascogène accompagnée d’autres cellules scolécitaires qui ont conservé leur forme caractéristique avec cette différence seulement, que les membranes de la cellule ascogène et des par- ties basilaires des hyphes ascogènes sont beaucoup plus épaisses qu'auparavant. Ii Les faits acquis par mes observations ayant été exposés, qu’on me permette d'y ajouter quelques remarques générales sur le sujet que je traite. Je rappellerai d'abord que c'est à M. de Bary que la myco- logie doit l’idée ingénieuse de la sexualité des Ascomycètes. Dans deux mémoires classiques sur P£rysiphe et l'Eurotium (1), il a démontré la corrélation des thèques avec l’organe femelle. Je me sens heureux de pouvoir ajouter maintenant à cette théorie un nouveau fait relatif à un autre ordre des Ascomycètes, aux Discomycètes, bien qu'il existe entre l’ascogone de l'Erysiphe et de l’Eurotium d’une part, et le scolécite de l’Ascobolus de l’au- tre, cette différence importante, qu'ici ce n’est qu’une cellule d’un organe femelle pluricellulaire qui donne naissance aux thè- ques par l'intermédiaire des hyphes ascogènes. L’Ascobolus furfuraceus étant un Discomycète typique et ayant des paraphyses, mon mémoire pourra peut-être contribuer à la solution de la question, de savoir si ces organes tirent leur ori- pine de l'organe femelle, comme les thèques, ou bien s'ils dérivent du tissu du réceptacle ? Il en résulte que les paraphyses qui appartiennent au tissu de ce dernier, n'ont rien de commun avec les organes sexuels, et doivent être considérées comme d’origine aseæuelle. (1) De Bary et Woronine, Beiträge z. Morph. und Phys. der Pilze, Heft, IT 212 Bi. DE GEINKA JANCANNSEKE. Mais, que devons-nous regarder comme genre Ascobolus ? C’est une question qu'il est encore impossible de résoudre. Dans leur état parfait, les Ascoboles sont si proches des Pezizes, que les traits caractéristiques à l’aide desquels on espérait les distin- guer se sont montrés insuffisants. Ainsi nous possédons bon nombre d’Ascoboles à spores incolores et quantité de Pezizes à déhiscence operculaire de la thèque. La proéminence des thè- ques que M. Boudier réserve aux Ascoboles se retrouve aussi chez quelques Pezizes et n’est qu’une différence quantitative, par con- séquent peu naturelle, à mon avis; l’organogénie pourra seule jeter quelque lumière sur cette question délicate. La forme des organes sexuels et la manière dont s'opère la fécondation pour- raient peut-être l’élucider ; mais la difficulté des observations et l’imperfection de nos connaissances à cet égard y mettent ob- stacle. Disons toutefois que le scolécite a été déjà trouvé chez les Ascobolus pulcherrimus, furfuraceus, carneus, saccharinus et pulosus. Une autre différence dans le développement de ces Champi- gnons est beaucoup plus facile à reconnaitre. Elle consiste en ce que chez les Ascoboles l’hyménium s'engendre dans le tissu de la cupule sous une eouche corticale que la déhiscence et la désorganisalion mettent à nu: 4. pulcherrimus furfuraceus, carneus, saccharinus, pilosus et Kerverni; tandis que chez les Pezizes, à ma connaissance, lhyménium apparaît tou- jours sur la surface de la cupule, qu’elle soit plane où même convexe : Pyronema confluens, où d'abora concave et commu- niquant avec l'air ambiant, à l’aide d'une petite ouverture : Peziza nivea ? scutellata, F'uckeliana et Sclerotiorum. Cependant, je l'avoue, le nombre des faits sur lesquels s'appuie ma convic- ton est encore trop restreint pour l'ériger en théorie incontes- table. Si ces faits se trouvent constatés et généralisés, il me sera agréable de voir mes idées confirmées. Le réceptacle de lAscobolus ne peut nullement être désigné comme gymnocarpe dans le sens strict de ce mot. Enfin je dois appeler l'attention sur ce fait, que l'existence des Ascoboles stercoraires dépend de la vie animale d’une manière RECHERCHES SUR L'ASCOBOLUS FURFURACEUS. 913 différente de celle de beaucoup d'autres Champignons sterco- raires (par ex. Sordaria), qui se développent immédiatement sur le fumier. L'organisme animal fournit leur nourriture aux uns comme aux autres, mais la reproduction des Ascoboles serait impossible si une fonction physiologique, la digestion, n’interve- nait et n'occasionnait la germination des spores. Cette dépen- dance rappelle en quelque sorte les rapports des Insectes avec la fécondation des Phanérogames, bien que les deux phénomènes soient d’une nature toute différente. EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE 8. Les figures ont été dessinées à la camera lucida. Fig. 4. Coupe longitudinale d’une cupule adulte. La cellule ascogène est visible aussi o I Le] o 3 bien que les hyphes ascogènes.— a, tissu cortical ; b, tissu pseudo-parenchymateux ; c, tissu sous-hyménial, — Grossissement, 70 diamètres. Fig. 2. a, b,c, divers états des jeunes thèques encore dépourvues de nucléus. — Grossissement, A90 diamètres. Fig. 3. a, b, c, jeunes thèques avec des nucléus. — Grossissement, 490 diamètres, D ? 7 2 d 2 Fig. 4. Apparition des spores, elles sont sphéroïdes et encore sans membrane, — Gros- sissement, 490 diamètres, Fig. 5. Les spores adoptent la forme ovoïde, mais n’ont pas encore de membrane, — Grossissement, 491 diamètres. Fig. 6. Apparition de la membrane de cellulose autour des spores.— Grossissement, 490 diamètres, Fig. 7. a, dédoublement de cette membrane, l’épiplasma commence à disparaitre ; b, une spore d’une grosseur anormale à deux nucleus prise dans une thèque où le nombre en était moindre que 8. — Grossissement, 490 diamètres. Fig. 8. Thèque avec peu d'épiplasma ; les spores ont reçu les appendices gélatineux. — Grossissement, 490 diamètres. Fig. 9. Thèque aux spores parvenues à leur maturité, — Grossissement, 330 dia- mètres. (Les figures 2-9 sont vues dans la solution d’albumine.) Fig. 10. Spore normale vuc dans l’eau ; l’appendice est gonflé, — Grossissement, 490 diamètres. Fig. 11. Spore violette traitée par l'acide sulfurique, il n’en reste que l’exospore. — Grossissement, 330 diamètres. 211 HE. IDE GHINKA JANCZENSKE. Fig, 12. Spores brunes traitées par le même réacif. — 4, l’exospore est distendu; à, la spore commence à se dissoudre, et en ç il n’en reste aucune trace.— Grossissement, 330 diamètres. Fig. 43, Spores brunes traitées par la potasse caustique ; l’exospore s’est distendu en forme de sac, tandis que la couche externe de l’endospore n’a éprouvé qu’une distension locale en forme de boursouflure latérale. — Grossissement, 330 diamètres, Fig. 44. Germination des spores, — 4, immédiatement après l’extension, son exospore a disparu, aussi bien que sur les spores à, c, d, tandis que e le conserve partiellement et f demeure intact. b, c, d, e, f, sont vues vingt-quatre heures après avoir été mangées par le lapin. — Grossissement, 330 diamètres. Fig. 15. Scolécite fécondé par le pollinode. — Grossissement, 490 diamètres. Fig. 16. Scolécite d’une pelote incolore isolé par la pression. — Grossissement, 330 dia- mètres. Fig, 17. Parties de scolécites plus avancés, La cellule ascogène émet des hyphes ascogènes. — Grossissement, 330 diamètres. Fig. 18. Cellule ascogène aux byphesen partie rompues; celles qui sont restées, sont partagées en cellules et gorgées de protoplasma. — Grossissement, 400 diamètres. Fig. 19. Scolécile isolé aux hyphes détachées, à l’exception d’une seule qui porte deux jeunes thèques a et D; c, d, branches naissantes, — Grossissement, 490 dia- mètres. Fig. 20. a, b, hyphes ascogènes isolées d’une jeune cupule. Le contenu des thèques est altéré par le séjour dans l’eau. — Grossissement; 490 diamètres. Fig. 21. Tranche longitudinale (schématisée) d’une cupule encore close.— Grossisse- ment, 410 diamètres. Fig. 22, Faisceau de jeunes paraphyses, dont la transition en pseudoparenchyme est évidente. — Grossissement, 490 diametres. NOUVELLES NOTES SUR LES FUNGI TREMELLINI ET LEURS ALLIÉS, Par MM. TULASNE (1). L. — Quand une organisation spéciale ou une certaine struc- ture est commune à un très-grand nombre d'êtres différents, il est évident que les moindres modifications de cette organisation ou de cette structure méritent l'attention de l'observateur ; et celte proposition est surtout vraie s’il s’agit d’un appareil impor- tant, comme est celui de la reproduction envisagé dans la mul- titude des Champignons basidiophores. Tel estle motif de l'intérêt particulier quis’attache, dans cette grande famille, au petit groupe des Trémelles et des espèces analogues, Les Fungi Tremellini, en eflet, ne se distinguent pas seulement des autres Basidiomycètes par leur consistance mu- queuse, qui leur est d’ailleurs commune avec certains Mérules ; ils offrent encore dans la structure de leur hymenium des carac- tères particuliers qui les font aisément reconnaître. Leurs basides ou cellules hyméniales et sporophores sont, ainsi que nous l'avons montré autrefois (2), construites suivant deux types dis- tincts : les unes, celles des Dacryomyces et du Guepinia Peziza Tul., sont étroitement claviformes, puis elles s’allongent en deux bras ou processus épais et divariqués, qui portent chacun une {(t) Ges Notes ont été d'abord publiées en anglais, au commencement de l’année 4874, dans le tome XIII (p. 31-42) des Procès-verbaux de la Société Linnéenne de Londres; depuis, des dessins que nous croyions perdus ont été retrouvés, et il nous est accordé de les donner ici, soit pour aider à l'intelligence du texte, soit pour offrir des termes de comparaison avec les ohjets que ces Nofes concernent plus spéciale ment, (2) Voyez les Ann, des se, nat,, 3° série, t, XIX (1853), p, 193-231, pl. 19-13, 216 TUELASNE. spore réniforme et cloisonnée. Sous cette apparence fourchue, les basides des Dacryomyces se distinguent encore aisément des basides également dispores, mais obtuses, de certains Hypo- chnus et autres Hyménomycètes non mucilagmeux. Le second type de basides s’observe chez les Trémelles pro- prement dites, où ce sont des cellules globuleuses, sinon même tout à fait sphériques, quile plus souvent se partagent de haut en bas en quatre parts égales ; ces segments se dissocient ou restent unis, mais $'allongent chacun pareillement en un long stérigmate filiforme qui gagne la périphérie de la plante et y produit dans l'air une spore réniforme et ordinairement indivise. Si, malgré l'opinion contraire de M. Fuckel, on admet, comme les anciens mycCologues, la parenté des Auriculaires avec les Trémelles, 11 faudrait noter ici une troisième sorte de baside fort distincte des précédentes, celle que M. de Bary a fait connaître dans l’Auricularia sambucina Mart. (Hirneola Auricula Judæ Berk.), et qui consiste en un tube droit et épais, divisé par des cloisons transversales en quatre loges ou tronçons, dont chacun émet par son extrémité un long spicule sporophore. (Voy. de Bary, Morph. und Physiol. der Pilze, etc., p. 116, fig. 47, a-c.) Une circonstance commune à ces trois types, c’est que la baside et ses appendices sont remplis d’un plasma grenu et peu transparent qui est employé tout entier à la formation des spores, de façon qu'à la maturité de celles-ci, les organes qui les ont produites sont absolument vides et diaphanes. On remarque en outre que les spicules sont généralement beaucoup plus épais que chez la plupart des autres Hyménomycètes. IT. — Puisque nous avons mentionné en premier lieu lorga- nisation hyméniale des Dacryomyces, nous parlerons aussi d'abord d’un petit Champignon qui présente la même structure anatomique, mais que sa forme mieux définie et stipitée rapproche des Leotia ou Mitrula de la tribu des Heyderia. H ressemble même tellement à ceux-ci, qu'on voudrait le leur associer, n’était son mode tout à fait exserte de fructification qui le retient forcément parmi les Basidiomyeèles et au nombre des Fungi Tremellini. FUNGI TREMELLINI ET LEURS ALLIÉS. 217 . Le nom que nous proposons pour le désigner rappellera cette double analogie. DACRYOMITRA PUSILLA (PI. IX, fig. 5-7.) Fungillus totus dilute luteus solidusque, natura et intima fa- brica genuinarum Tremellarum ac maxime Dacryomycelum æmulus, forma autem minimarum T'yphularum seu Mitrula- rum, 8-10 millim. altus, rectus et rigidulus, e stipite gracili, tereti, semipellucido levique, et elavula coloris nonnihil opacioris, ovato-conica, continua, 4-5 millim. longa et 4"°,5-2 mullim. crassa. Densam stipitis compagem filamenta constituunt exilis- sima, nimirum 0"",002 vix crassa, mucosa, quasi sine lege ramosa, achroa et parcissime septifera. Filamenta illa, ubi im clavulam transierunt, quadantenus Incrassantur et brachia 1te- ratis vicibus bifarca presso ordine extrorsum agunt. Brachiola hæc clavulæ in modum extrema tument, basidia fiunt, singu- latimque sterigmata duo 0"",013-095 longa, acuta modiceque divaricata exserunt. Sterigmata, de more, suam fere totam longi- tudinem adepta sunt priusquam fertilia, monospora scilicet, evaserint. Sporæ initio ovatæ, maturescendo cylindricæ et cur- vulæ fiunt, septis tribus transversis dividuntur, 0°",013 longi- tudine, 0"",003 crassitudine pleræque vix excedunt et plasmate æquali primum referciuntur. Gregarius viget in ligno Castaneæ vescæ corruplo nobisque ineunte augusto mense (anno D. MDCCCLX) prope Cadvillam Versaliorum, in medio trunco, solo tenus jamdiu exciso, sub umbra sylvæ opacæ udæque eccurrit; ex hoc autem tempore eumdem ne iterum quidem offendimus. Fungillus a vertice ad radices arte dissectus substantiam mi- nime lacunosam, i. e. prorsus continuam ostendit, ita ut stipitis compages clavulæ axim longe attenuata fingat ; clavula ipsa fer- us Dacryomycetibus pulviniformibus propior natura est. Id substantiæ sporophoræ ab axi clavulæ minime secedit. Fungillus propterea Heyderiam Abielis Fr. (Mitrulam Heyderi Pers.) 1mi- 218 T'ULASNE. tatur, omneim si licet adhibere fidem Persoonianæ illustra- tioni quam videas in Tentamine disposit. methodice Fungorum (pp. 36 etA7), tab. 1x, fig. 12 a-c (4). UN. — Un hymenium comparable à celui des Dacryomyces appartientaussi aux Calocera, que leur forme linéaire a longtemps fait confondre avec les Clavaires, mais dont les affinités réelles sont aujourd’hui comprises par les mycologues les plus autorisés, tels que MM. de Bary (op. modo eit., p.115) et Fackel (Symb. mycol., p. 30), de la même manière que nous les avons jadis interprétées nous-mème (voy. les Ann. des sc. natur., 3° sér., t. XIX (4853), p. 224). Dans le Tremella helvelloides DC., fort belle espèce dont la structure était restée inconnue, nous avons vu des basides à peu près fourchues comme celles des Dacryomyces, mais presque aussi globuleuses que celles des vraies Trémelles. Ce Champignon que M. Fries à justement transporté des Trémelles dans son groupe des Guepinia, diffère cependant de ceux-ci en ce qu'il n’est fertile qu’à la face mférieure de son chapeau. Dans notre Guepinia Peziza, par exemple, l'hyménium n’est effectivement étendu que sur la face supérieure ou cupuliforme de la plante, exactement comme chez les Pezizes (2). Qu'il nous soit permis de placer iei une courte description du Guepinia helvelloides Fr. GUEPINIA HELVELLOIDES. (PI. X, fig. 11-13.) Guepinia helvelloides Fr., El. Fung., part. alt., p. 34: 8. veg. Seand., p.531. — Tul. in Actis Soc. Linn. Lond., part. bot., (1) Tout ce que nous disons ici du Dacryormnitra pusilla manque à l'édition anglaise de notre mémoire ; car lorsque nous la préparions, nos notes et dessins relatifs à ce petit Champignon n’étaient pas à notre disposition. (2) Voyez les Ann, des sc. nat., Bor., 3° sér., t, XIX (1853), p. 223 et 224, et la planche IX, fig. 1-4, ci-jointe, FUNGT TREMELLINI ET LEURS ALLIÉS. 219 t. XIII, pp. 32-33. — Desmaz., PI. Crypt. de Fr., ser. alt., fase. xiv (1859),n. 661. — Rabenh., Fung. Europ. eæsicc., ed, alt., ser. 11, cent. alt. (1860), n. 131. Tremella helvelloides DC., F1. fr., t. HE, p.95, n° 241. — Fr. Syst. myc., t. alt., p. 211. Tremella rufa Jacq., Miscell. austr., t. FT (4778), p. 1h43 (Fungus subalpinus IX), tab. x1v. Gyrocephalus juratensis Pers. in Actes Soc. Linnœæanæ Paris, ad ann, 1824, p. 77. Fungus gelatinoso-carnosus, tenax, pileatus, stipitatus, terres- tris, totus carneï, aurantiaco-r'osei s. purpurascentis coloris, gre- garius; pileus tenuisculus, primo quasi spathuliformis et unilate- ralis, adultus autem semi-orbicularis v. obovatus, diametro 1-2- pollicaris, maxime repandus aut saltem conchatus, cireum-eirca attenuato-recurvus, in stipitem lateralem, omnino consubstan- tialem, compressum, sæpius canaliculatum, verticalem aut obli- quum, alitudine varium, sæpius autem circiter pollicarem ba- sique velutinum desinens; pagina superiore tandem ob papillas lineares dense erectas velutina albicante et quasi farinosa, cæte- rum sterili, nec nisi rarissime parcissimeque sparsim sporophora ; infera contra pagina, quæ scilicet deorsum ad terram conversa spectat, coloris vulgo saturatioris, tota glabra et fertili, inter- dum vero, maxime ad margines, venis paucis prominulis, obtu- sissimis et quasi Inordinate anastomosantibus, Meruliorum, more, instructa; basidia obovato-globosa tandemque bipartila in ste- rigmata duo linearia longa divaricata desinunt quibus singulis spora ovata v. brevissime oblonga, quadantenus curvula, utrin- que tandem obtusissima, levissima, 0""01 longa et 0"",004-007 crassa, debito tempore insistit. Crescitseroautumno in pinelis et fagetis montanis sæpissimeque series describit lineares ; tali ordine gregarium frequentemque vidimus in sylvis Carthusianis prope Gratianopolim Delphinen- sium, exeunte septembri a, S. 1857, longe rariorem contra a. 1859, mense eodein, 220 TULASNE. Fungi membrana lineam et ultra crassa, ex gelatina quasi achroa simul ac fibris ramosis et laxe implexis tota constat. Sporæ forma et crassitudine variant; pulveris instar albidi posticam s. inferam pile faciem humidæ cumulatæ velant, quam cultelli acie si raderis hanc farinam sine negolio colliges. Sporæ recentes basi acutiusculæ quidquam sterigmatis aliquando reti- nent, ocellumque pallidum sub medio tegmine monstrant ; endo- chroma s. plasma contentum in guttam oleosam crassam me- diamque tandem pro maxima parte vertitur. Sporæ ab alterutro apice, rarius a latere, germen filiforme protrudunt, ex quo semen secundi ordinis aliquando extremum oritur. . Fungus truncis aut quisquilis foliisve putridis sæpius insidet, ejusque mycelio albido et parco involvi quandoque suspicati sumus lapillos illos s. calcareas concretiones quas trunet 1sti corrupti (maxime abiegni) suis in pevetralibus fovebant ; cæte- rum hi lapilh albidi, Hcet nucis avellanæ et quod excedit crassi- tudine, oblongi autem et varie compressi, ejusdem omnino naluræ videbantur atque nucler longe minores quos in Tre- mella s. Nœmatelia quadam mauritanica olim videramus. (Conf. Ann. sc. nat., ser. 3, t. XIX, p. 204.) IV.— Depuis notre premier travail sur les Champignons dont nous parlons ici de nouveau, nous avons constaté dans les Tre- mella frondos& Ball. et Tr. albida Huds., un appareil hyménaal ou fertile semblable, quant aux basides tétraspores, à celui du Tremella mesenterica Retz. Les beaux groupes de Tremella fron- dosa vivant que nous avons rencontrés aa mois de Janvier 1863, sur le tronc desséché d’un Chêne de la forêt de Meudon, ne me- suraient pas moins de 45 à 20 centimètres en diamètre ; 1ls étaient d'une couleur de chair très-pâle, tirant sur le jaunâtre; la membrane du Champignon, mince, gaufrée et chiffonnée, se résolvait en un mucilage diffluent. Chaque baside est formée de trois ou plus souvent de quatre cellules globuleuses finalement presque libres de toute adhérence et qui se terminent chacune en un spicule flexueux, long de 0"",03-05 ; les spores sont briève- ment ovoides et deviennent à peu près sphériques en germant. FUNGI TREMELLINI ET LEURS ALLIÉS. 221 Dans le Tremella albida Huds., que nous avons observé au mois de décembre (1861) sur l'écorce du Sycomore (Acer Pseudoplatanus), les éléments des basides restent unis et les spores ont la forme d’un croissant émoussé aux deux bouts. Après l'examen attentif de tant de Trémelles différentes, nous ne pouvons nous empêcher de soupçonner M. Fuckel de s'être mépris quand 1l à cru voir dans le Tremella foliacea Pers. une forme conidiophore du Bulgaria inquinans Fr. (1). Cette appréciation, en effet, donnerait lieu d'affirmer que ce Tre- mella foliacea n’est nullement une Trémelle légitime, s’il était vrai que M. Fuckel eût réellement eu sous les Yeux la plante de Persoon ; mais, d'autre part, nous aurions peine à comprendre que l’épithète de foliacea eût pu être appliquée au véritable Bul- garia inquinans conidiophore, tel que nous lavons observé jadis et décrit dans ce recueil. (Voy.les Ann. des sciences nat., sér. 3°, t. XX [1853], p. 160-164, pl. xv, fig. 1-7.) Nous ferons ici mention d’une Trémelle singulière qui croît en parasile sur le Spheæria strumella Fr., auquel sans nul doute elle a valu cette qualification bizarre; mais personne que nous sachions, ne s’est autrement avisé Jusqu'ici de sa présence habi- tuelle sur les pulvinules vieillis de cette Sphérie. Ce n’est pas cependant qu'il n'ait été déjà question de Trémelles parasites, mais plusieurs de celles qui sont estimées telles, semblent de na- ture douteuse (2). Rien de semblable au contraire touchant notre T'remeila neglecta dont l’organisation imite absolument celle des l'remella frondosa et albida; pourtant il nous faut avouer que nous n'avons pas encore réussi à voir ses basides globuleuses ou quadriparlites s’allonger en spicules et produire des spores. Cette lacune sera certainement comblée quelque jour et ne nous doit point empêcher de décrire 1e1 brièvement le nouveau Champignon. 4) Voy. Fuckel, Symb. mycol, p. 286, (2) Voy. Fries, Syst. mycol., t, alt., p. 219. 299 ŒULASNE. TREMELLA NEGLECTA ul. Tremella neglecta Tul., in Achis Soc. Linn. Lond., t, XHI, p. 4. Tremella est pulvimulis natura de more gelatinosis, globosis, perexiguis, sordide albidis, strato mucoso crasso superne vestitis ; basidiis (supra dicto strato retectis) breviter pedicellatis, globo- sis aut nonnihil piriformibus, primum integris et obtusissimis, postea autem ad basim usque quadripartitis, divisuris tandem plus minus divaricatis, quadantenus sursum acutatis et verisi- militer in sterigma sporophorum singulatim productis. Parasilatur hiemali tempore in cespitibus obsoletis Sphæriæ strumellæ Fr. ribicolæ cujus rostris porrectis vulgo asperatur, quum autem amplius crevit eadem rostra immersa aut plus minus latitantia arcte fovet. Sexcenties vidimus in ramis et sarmentis emortuis ÆRibis rubri sylvesiris, cirea Cadvillam Versaliorum, locis sylvarum opatis udisque. Fungus nisi adoleverit et jove pluvio favente intumuerit, ægre dignoscitur, sæpissime vero latens adest; semper nutricem suam quasi strumosam eflicere videtur. Hujusce conceplacula solita, non obstante T'remella insita, rite informantur, paucas autem sporas, ni fallimur, pleraque, maturare valent. V.— Des basides fort analogues à celles des Trémelles ont été observées par M. Frédéric Currey dans un Æydnum particulier, de nature gélatineuse comme elles, et qualifié pour ce motif d'Hydnum gelatinosum par Scopoli (4) (voy. le Journal of the Proceed. of the Linn. Soc., Bot.,t. V (1860), p. 181-182). Celte ressemblance, siremarquable qu'elle soit, ne saurait faire mettre en doute l'étroite parenté de ce Champignon avec les Æydnum les plus légitimes; cependant elle à déterminé M. Currey et ses amis, MM. Berkeley ef Broome, à faire de ce singulier Æydnum (4) Cfr Fri, Syst mycol., I, p: 407: FUNGI TREMELLINI ET LEURS ALLIÉS. 29258 gélatineux le type d’un genre spécial, sous le nom de Æydno- glœæa, et M. Currey doit, paraît-il, faire connaitre bientôt une autre espèce du même type. (Voy. les Ann. and Mag. of nat. Hist. pour le mois de décembre 1870, sous le n° 1297.) VE. — Il nous a semblé devoir prendre le même parti vis-à-vis de deux Champignons rapportés Jusqu'à présent au groupe des Théléphores, et qui se trouvent posséder entièrement la struc- ture hyméniale des Trémelles. Nous voulons parler d'abord du Corticium incrustans Pers. (Obs. myc., part. L, p. 39, n° 82), que les auteurs modernes ont rangé parmi les T'helephora, sous lesnoms de T'heleph. incrustans (Fr. Syst. myc., t. 1, p. LAS: Elench., part. 1, p. 214), et Th. sebacea (Fr. Elench., 1. c.; Berk., Outl. of Brit. Fung., p. 440, pl. XVIL fig. 6). C'est un Champignon assez fréquent autour de Versailles, dès la fin de l'été, dans les bois humides et obseurs ; il rampe sur la terre et y adhère ; il s'applique aussi sur tous les corps, inertes ou vivants, qu'il rencontre; on le voit recouvrir de ses expansions la base desarbres ou des arbustes, et même s’é- lever çà et là, sans support intérieur, en manière de colonnettes ou de clavicules informes, libres ou soudées, épaisses, obtuses et glabres ou terminées par des houppes hérissées, ce qui lui a valu les noms de Clavaria laciniata Pers. (in herb. Thuill.), et de T'helephora clavarioides Thuill. (in suopte herb.). L'hymenium fertile de ce singulier végétal se voit surtout là où il prend une teinte jaune ou jaunâtre plus foncée, et où sa surface est le plus lisse ; ailleurs on ne trouve habituellement que le lacis filamen- teux dont sa trame se compose. Les éléments de ce tissu sont des filaments rameux uniformes très-fins et rarement cloisonnés ; l'hymenium est formé des cellules terminales qui naissent des dernières branches de ces filaments. Ces basides sont ovoïdes- globuleuses comme celles des Trémelles ; elles mesurent environ 0"".013 en un sens, et 0"",01, dans l’autre, et chacune se partage longitudinalement en deux ou trois segments qui s’al- longent en autant de stérigmates filiformes. Ceux-ci divergent peu et leur longueur atteint 0"",015 à 0"",03. Les spores qui 22/ FULASNE. sont légèrement réniformes et simples, différent à peine pour la formeetles dimensions de celles du T'remella mesenterica Retz., et ne dépassent guère À centième de millimètre dans leur lon- gueur; beaucoup en germant produisent des spores secondaires, à la manière des spores du Tremella violacea Relh. (voy. les Ann. des se. nat., 3° série, t. XIX, pl. XIE, fig. 12). Si M. Bo- norden avait réellement étudié notre Champignon, il se serait tout à fait mépris en lui accordant des basides tétraspores entiè- rement semblables à celles des Basidiomycètes ordinaires, tels que les Agarics, les Clavaires, etc.; mais nous avons lieu de pepser qu'il n’a pas eu sous les Yeux le véritable Thelephora seba- cea Fr. dont nousparlons 101 (voy. son Handb. der Myk., p.336, pl. XIE, fig. 253). Un autre Corticium, du même auteur que le précédent, le C. cœsium Pers. (Obs. mycol., part. F, p. 15, pl. I, fig. 6) ou Thelephora (Phullacteria) cœsia Fr. (Syst. myc., &. KE, p. 49, n. 2), offre une structure très-analogue ; 1l s'étale sur le sable humide, nu ou moussu, des forêts, mais il est beaucoup plus mince et plus fragile et sa couleur obscure est d’un bleu cendré. Nous ne l'avons point vu nor plus envahir, à la manière du T'helephora incrustans, les souches des herbes ou des arbris- seaux, ni surtout produire de sa surface des clavules d'aucune sorte. Son aspect est tout à fait celui d’une Théléphore appli- quée ou résupinée. Cependant son hymenium est aussi formé de basides globuleuses qui se partagent longitudinalement en deux, trois ou quatre parties égales, pour produire ensuite autant de stérigmates linéaires quatre ou cinq fois plus longs qu’elles- inêmes. Ses spores ressemblent absolument à celles du Corti- cium incrustans Pers. Les deux Corticium dont nous venons de parler offrent donc une structure commune qui les distingue des T'helephora légi- times ; nous proposons pour eux le nom générique de Sebacina. Voici de nouvelles diagnoses de ces Champignons : FUNGI TREMELLINI ET LEURS ALLIÉS. 295 À. SEBACINA INCRUSTANS Tul. (PL. X, fig. 6-10.) Sebacina incrustans Tul., in Diarii Londin. tomo sup. cit., p- 96. _ Corlicium incrustans Pers., Observ. mycol., parte 1, p. 39, n: 02. Thelephora incrustans Pers., Syn. Fung., p. 577. — Fr, Systumuc., ti, p.448, n.27. T'helephora ? incrustans Fr., S. Veg. Sce., p. 854. L'helephora sebacea Pers., Champ. Comest., p. 71; Muc. europ., t. 1, p. 135. —- Fr., Elench. Fung., part. E, p. 214; Epicr. syst. myc., p. 542, n. 38. — Letell., Suppl. à Bull., tab. 607. — Berk., Oul. of Brit. Fung., p. hA0, tab. XVI, fig. 6. —- Laschio in Klotzschi erb. viv. mycol., cent, XIX (4854), n, 1814. — Fuck., Symb. mycol., p. 29. T'helephora clavarioides Thuill. mse. in suopte Herb. nunc e tbesauris Musæi Bot. parisini. ; Clavaria laciniata Pers. msc. in herb. Thuilleriano ; minime autem T'helephora laciniala Pers., neque etiam Clavaria cristata aliorum. Fungus recens natus Atheliam vel Himantiam niveam fin- git, tenuis est ambituque fimbriatus s. laciniatus, pedetentim autem incrassatur, longius circum circa protenditur et in medio sordide luteolus fit. Simul etiam in conulos vel elavulas irre- gulares, obtusas et integras alias, laciniatas s. cristatas alteras, sparsin emergit; nunc solo tenus undique applicitus obrepit, nunc sæpiusque quisquilia herbas lapillosque simul investit. Basidia fertilia in partubus saturatius fucatis tantummodo generantur ; hyphis exilbus de more terminalia ovatoque globosa insistunt, 0°°,013 hinc, 0°",01 illinc æquant, adultaque ætate sterig- mata quatuor, rarius duo tantum filiformia, erassa, 0"",025- 055 longa, et initio subfasciculata ex apice agunt, simul præ- terea in partes totidem coadunatas ipsa longitrorsum vulgo 8° série, Bor., T. XV (Cohier n° 4), à 45 226 TULASNE. dividuntur. Sporæ ovato-oblongæ et nonnihil rentformes plasma granosum et lacunam v. guttam ocelliformem mediam fovent, quæ ub1 deciderint, in germen crassum, loco tempore- que faventibus, protrahuntur, unde etiam, si brevius constiterit, spora nova, secundaria, nasCitur. Haud infrequens provenit, jove pluvio, in humidis et opacis sylvarum, secus ambulacra quidem et fossas, sera æstate autum - noque, et in agro Cadvillensi Versaliorum jampridem quotannis nobis occurrit. L Hyphæ quibus tela fungina constat, ubique similique modo tenuissimæ sunt, ramosæ et parcissime septiferæ ; earumdem brachia in strato fertili peculiariter crebra et contorto-intricata reperiuntur; ubi brachium quodcunque ibidem in basidium desinit, plerumque surculum seu brachium alterum sub basidio ipso agere satagit. CI. Fuckelius, loco sup. cit., candide fatetur se sporas T'he- lephoræ sebaceæ nondum vidisse; Fungus enim sæpissine totus sterilis aut parcissime sporophorus invenitur. 2, SEBACINA CÆsiA Tul. Sebacina cœæsia Tul., loc. cit., p. 37. Corticium cœæsium Pers., Obs. mycol., parte E, p. 15, tab. ur, fig. 6 (saltem ut videtur). Thelephora cæsia Pers., Syn. F., p. 579; Myc. europ., LE, p. 115 (sub Th. fusco-cinerea, f murina). Thelephora (Phyllacteria) cœsia Fr., Syst, myc., {. I, p. 449. Fere tota byssma est et coloris cinereo-cæsi1, arenæ inter Huscos repens hæret et passim etiam in pulvinulos obtusos ac deformes incrassatos prominet ; cæterum de basidiorum quæ 2-partila v. A-partita item deprehenduntur, forma et crassi- tudine Sebacinam incrustantem prorsus imitatur ; sporæ paulo minores et contractiores pleræque videntur. FUNGI TREMELLINI ET LEURS ALLIÉS. 227 Nascitur in sylvis arenosis et umbrosis, octobrique (anno 1861), Fontebellaqueo (loco dicto Butte à Gay) nobis primum obvia est. Utrum Fungillus noster admodum idem ïipse sit atque Persoonianus citatus, necne, ægre decernendum est, ejusdem vero naturæ videtur. Habitu saltem et structura fertili congener præcedenti omnino est. Merisma fastidiosum Pers. ad Sebacinas jure spectare, liben- ter ob solitum et fastidibilem habitum suspicamur ; quod qui- dem vivum olim non semel Cadvillæ et Modoni agri Versaliensis vagantes reperimus, minime autem attentis oculis et vitrorum ope scrulatos fuisse recordamur. Quasi grandis Sebacinæ incrus- tantis forma, nisi nos fallit memoria, omnino videtur. Lorsque nous publions ces Votes l'hiver dernier, il nous seni- blait difficile de conserver les Sebacina auprès des vraies Thélé- phores; aujourd’hui, malgré les dissemblances de ces deux types génériques, fondées pourtant sur des caractères du pre- mier ordre, nous noserions mettre entre eux une grande distance. Notre hésitation, qui eût pu naître de la considéra- tion del’Æydnum gelatinosum Scop., mentionné plus haut, croit pouvoir s’autoriser maintenant des particularités de structure offertes par l’hymenium du Corticium incarnatum Fr. (pinicola), où sur des basides globuleuses comme celles des Trémelles, mais entières, naissent des stérigmates ovoïdes et épais qui simulent de grosses spores avant de s’allonger pour devenir fertiles. Ce Corlicium incarnatum semble donc à certains égards intermé- diaire entre les Sebacina et les Corticium ou Thelephora ordi- naires. (Voyez notre pl. X, fig. 3-5.) VIL.— Quand on arrête son attention sur l'appareil fertile ou l’hymenium des Auriculaires, on ne peut méconnaitre la res- semblance des basides linéaires et cloisonnées qui le composent avec le promycelium sjoridifère des Puccinies et des Podisoma. Ces basides rappellent encore les filaments fertiles de notre Hypochnus purpureus [in Annales des se. natl., 5° sér., t. IV 228 __ MULASNE, [1865], p.295 (1)}, mais ceux-ci sont courbés en crosse au lieu d'être rectilignes et dressés. Si l’on a égard à la nature byssoïde et à la forme indécise ou effuse de cet Hypochnus, caractères par lesquels il se rapproche des T'helephora incrustans el Th. cœæsia dont nous avons parlé plus haut, peut-être semblera-t-1l vis-à- vis des Auriculaires ce que sont les Théléphores par rapport aux vraies T'remella. Comme une analogie conduit souvent à une autre, on nous pardonnera de faire remarquer que les crosses fertiles de l’Æy- pochnus purpureus imiteraient celles du Ptychogaster albus Cord. et des Pilacre Fr., si leurs spores n'étaient pas si longuement süipilées ; et pour mettre le lecteur en état de faire lui-même ce rapprochement, nous ajoutons à ce mémoire les dessins analy- tiques que nous avons faits il y a quelques années tant de l’'Hypochnus purpureus que des deux genres de Gastéromycètes que nous venons de nommer (2). Le texte que ces dessins devaient accompagner à d’ailleurs été publié dans ce recueil (5° sér., t. IV [1865], p. 290-996). VIE, — La structure hyméniale des Trémelles et de leurs alliés se complique en outre de la présence habituelle d’un appareil spermalophore dont les éléments sont tantôt mêlés à ceux de l'hymenium sporophore, tantôt au contraire groupés séparément sur des points déterininés de la surface du Champignon ; cette double disposition peut se rencontrer dans le même individu, comme nous l’a surtout montré le Tremella mesenterica Retz. (1) Hypochnus sailicet filamentis exilibus (0% ,005-007 crassis), prælongis, multi ramosis, articulatis, in telam tenuem, orbicularem, late longeque eflusam s. porrec- tam, adpressam et e purpurco tandem cinerascentem, dense implexis, apices obtusos circinantibus et ex unco istius modi sterigmala 2-3 erecta, valida, monospora, singu- lis extrorsum eénitentibus; sporis autem ovatis, nonnihil arcuatis, utrinque obtusis, contipuis, OMM,01-013 longis, 0®%,0065 crassis. Oritur verno tempore in corticibus vivis arborum (v. gr. Ulmorum, Fraxinorum), solo tenus, locis udis et umbrosis syl- varum, Cadvillæ nostræ minime frequens, (Cfr, tab. nostram X, fig, 4 et 2.) Colore et habitu mirum in modum imitatur Thelephoram Mouyeotianam Kr, abieti- colam. (2) Voyez les planches X (fig, À et 2) et XI ci-jointes, FUNGI TREMELLINI ET LEURS ALLIÉS, 299 Les spermaties de cette espèce sont de petits corps sphériques très-abondants; celles de l'Exidia spiculosa Sommerf. et du Dacryomyces deliquescens Dub. sont plutôt ovoïdes, et leur pré- sence est souvent difficile à constater. Depuis nos premières recherches nous avons rencontré un magnifique appareil spermatophore dans une Trémelle rose qui croît sur le tronc mort des Cerisiers. Là, les surfaces produc- irices de spermaties sont orbieulaires, concaves et bordées, de facon à imiter le disque d'autant de Pezizes groupées qui repo- seraient sur les lobes inférieurs de la plante. Les spermaties elles-mêmes sont cylindriques, courbées en arc, et, réunies trois ou quatre ensemble, elles forment de petits capitules au sommet légèrement claviforme des filaments fertiles. Le Champignon dont il s’agit est d’ailleurs assez intéressant à tous égards pour mériter 101 une description. TREMELLA CERAst Schum., (PI. XL) Tremella Cerasi (Schum.) Tul., loc. cit., p. 39. Tremella mollis, levis, dilute rosea, pulvinulis diffusis, valde repandis et corrugatis, pollices 1-2 erassis, sæpeque in imo ambitu sparsim vel congestim mirum in modum foveolatis; foveolis autem s. urceolis orbicularibus vel oblongis et inæqua- libus, velo fugaci limboque s. margine incrassato ac saturatius fucato donatis, in disco contra abunde spermatiophoro dilutius purpurascentibus ; basidiis in omni fungi pariete, præter foveolas spermatiophoras, confertim solitoque ordine instructis, globosis aut nonmihil ovatis, 0"",01-013 crassis, sterigmata filiformia quatuor de more ex apice enitentibus; sporis oblongis, curvulis, 0"",01-02 longis et 0"°,005-01 crassis; spermatiis cylindrieis, lunulatis, utrinque obtusis, 0°*,606-01 longitudine æquantibus nec 0"",002 crassioribus, supra summas hyphas vix incrassalas congestim insistentibus, nec nisi in urceolis supra dictis generalus. 230 TULASNE. Nascitur in cortice putrescenti Cerasi vulgaris, autumno, nobisque jampridem occurrit in agro lugdunensi prope pagum dictum Pomey, haud procul a castello S. Symphorien-sur-Coise, octobri meunte (a. D. 1855). Fungus ex corticeæ matricis fissuris erumpit et liher expan- ditur; modo dicti uréeoli omni attentione digni, discos fer- tiles Urceolariæ scruposæ habitu quodammodo mentiuntur ; nunc Fungi parieti plano sessiles imponuntur, nunc contra prominent; quocumque autem modo se habeant margine incrassato defi- piuntur initioque velo purpurascenti tenui et continuo obdu- cuntur; id veli postea medio dirumpitur ejusque residua in margine propterea quasi lhimbato aliquantulum persistunt. Hyphæ spermatiophoræ tenues et quasi dichotome ramosæ in corymbos densos abire videntur quorum extrema brachia brevissima et vix ac ne vix Capitata denso spermatiorum fasci- culo singula coronantur. Spermatia mire exigua sæpius quater- patim coadunantur; nonnulla tamen, ni fallimur, sparsim solitaria deprehenduntur quæ sic dictarum T'uberculariarum conidia de origine æmulantur. Spermatia cæterum omnia sporis longe minora et multo magis Incurvata, quum origine, tum forma et exiguitate ab tisdem sine negotio discriminantur. Germina quælibet ex his spermatiis exire nunquam vidimus. Sporæ e basidiis rite enatæ omnino genuinæ s. tremellinæ sunt, itemque quum germinaverint sporas secundarias aliquando enituntur, IX. — Puisque nous récapitulons ici sommairement tous les genres d'organes qui servent à la reproduction des Fungi Tre- mellini, nous ne pouvons omettre de rappeler que l’un d’entre ces Champignons, le Dacryomyces deliquescens Dub., se résout parfois tout entier en une infinité de gemmes ou conidies, et que les individus dont tel est le sort affectent un aspect parti- eulier qui les trahit sur le champ aux yeux de l'observateur attentif; ce qui d’ailleurs ne permet pas de penser que ces indi- vidus spéciaux constituent une espèce différente du type nor- mal, c'est qu'ils conservent souvent pour une partie la structure FUNGI TREMELLINI ET LEURS ALLIÉS. 231 régulière de ce type. (Voy. les Ann. des se. nat., 3° sér., t. XIX, p. 216-249, pl. 13.) Si nous ne nous trompons, il y a lieu de tenir pour fort ana- logue au Dacryomyces deliquescens conidiophore, une production trémelloïde qui croît sur l'écorce des rameaux morts du Salix caprea. Elle se présente aussi sous la forme de petits pulvi- nules globuleux ou irréguliers, à peine du volume d’une graine de Gesse, et d’une couleur rouge carminée ; la substance de ces petites masses pulpeuses est toute formée de cellules ovoïdes, lisses et transparentes, associées bout à bout en filaments mo- nillformes et ramifiés de façon à imiter les chapelets des Hor- miscium où ferments. Ces cellules ou conidies se dissocient avec une extrême facilité, et imitent assez exactement, non- seulement par leur forme et leur volume, mais encore par leur disposition, les conidies de l’Agaricus racemosus Pers. Nous n'avons rencontré ce Dacryomyces qu'une seule fois, dans les bois humides de Chaville, près de Versailles, au mois de jan- vier. En voici une courte diagnose en style technique : DACRYOMYCES PURPUREUS Tul. Dacryomyces purpureus Tul., loc. cit., p. 10, pulvinulis exi- guis, erumpentibus, paucis gregariis, imo solitariis, primum compressis et acutis s. cristatis, postea autem deformibus et jove pluvio collabentibus, natura pulposis totisque fere e coni- diis s. cellulis ovatis, levibus, simplicibus et primum catenatis, catenis autem abunde ramosis. Nascitur, hiberno tempore, ex emortuo fissoque cortice Sa- licis capreæ, ac nobis semel hactenus occurrit in umbrosis syl- varum, Cadvillæ ad Versalias, anno S, 1865, mense januario inuente. Nuperiori tempore eumdem Fungillum, ni fallimur, obvium habuisse æstimamus nec quidem infrequentem, in asseribus pineis jamdiu sub dio degentibus, apud Venetos Armoricæ aui- tralis, decembri mense (1870). 232 TULASNE. X.— A tous les caractères que nous venons d’énumérer les Trémellinées joignent la double faculté qu'ont leurs spores de produire en germant, soit de simples filaments, soit des spores secondaires ou sporidies. Celles-ci, en outre, sont ou solitaires et comme l’image à peine amoindrie des spores-mères, ou beau- coup plus exiguës, d’une forme spéciale et très-nombreuses, ainsi que celles observées depuis chez divers Ascomycetes, tels que les Peziza, Bulgaria, Dothidea, ete. (Voy. notre Sel. Fung. Carpol., tomes IF et HE.) XI.— Les Trémellinées étant done, d’après tout ce qui précède, si abondamment pourvues de corps reproducteurs de diverses natures, qu’elles l'emportent à cet égard sur toutes les autres familles de Basidiomycètes, on a peine à comprendre qu'elles aient été rangées par M. Fuckel parmi les Fungi imperfecti, c'est-à-dire parmi les Champignons dont le cycle reproducteur est incomplet ou autrement dont la forme fertile la plus par- faite est encore inconnue. M, Fuckel croit justifier ce sentiment en disant que la dépendance génésique incontestable de quel- ques Trémellinées vis-à-vis des Ascomycètes rend justement suspecte l'autonomie de toutes les autres (4). Ce raisonnement serait spécieux s'il s'agissait ici de Trémellinées vraies ; mais de ce que, par exemple, le Coryne sarcoides affecte sous l’une de ses formes l'apparence d’une Trémelle, et que dans cet état imparfait il à été pris pour une Trémelle sincere, 1l ne suit pas nécessairement que toutes les Trémellinées doivent être assimilées à celte production si longtemps ambiguë. Si l'on compare l'organisation du Goryne sarcoides gemmipare ou sper- matifère à celle du Tremella mesenterica et de ses congénères, on ne pourra sans doute ne pas reconnaître diverses ressem- blances, mais on se refusera justement à admettre une analogie véritable jusqu’à ce que l’une ou Pautre au moins des deux cir- constances que nous allons supposer ait élé sûrement observée, à savoir, l'existence, chez le Coryne dont il s’agit, d’un appareil (4) Voy. Fuckel, Symb. mycol., p. 4, 5, 10, 402, 403, et passèm. FUNGI TREMELLINI ET LEURS ALLIÉS. 233 de basides bispores ou tétraspores analogue à celui des Trémel- linées, ou la présence, soit dans le Tremella mesenterica, soit dans quelque autre Trémelle vraie, de disques ascophores, comme sont les cupules des Pezizes, et notamment celles du Peziza (Coryne) sarcoïdes. Tant que rien de semblable n'aura point été vu, il vaut mieux tenir les Trémellinées pour des Champignons aussi complets et aussi bien connus, pour le moins, que les Agaricinées ou tout autre groupe de Basidiomycètes. XIE. — Avant de finir peut-être convient-il de mentionner un Champignon tout à fait trémellin par sa consistance, mais que sa forme branchue et sa fructification paraissent tenir éloigné des vraies Trémelles. Nous voulons parler du Ceratium lyydnoides Alb. et Schw. (1), production presque éphémère que tous Îles mycologues connaissent bien, sans avoir jamais pu lui découvrir une parenté incontestable. Ses rameaux simples ou dichotomes et qui se détruisent au moindre attouchement, sont tout hérissés de petits spicules monospores : c’est une organisation qui rap- pelle assez celle des Rhopalomyces de M. Berkeley ; or, ceux-ci ne sont bien vraisemblablement que des appareils secondaires de fructification pour des Champignons d’un rang plus élevé ; faudra-t-il supposer que telle est aussi la condition du Ceratium ? Cependant nous n'avons encore rien à produire qui soit sérieu- sement un commencement de preuve de cette hypothèse. Les spores ovoides du Ceratium grossissent beaucoup et deviennent presque sphériques en germant; les germes eux-mêmes sont épais, très-obtus et se ramifient promptement. EXPLICATION DES FIGURES, PLANCHE IXe Fig. 4. Groupe de Guepinia Peziza Tul., né sur un jeune tronc de Chène mort et dépouillé de son écorce ; d’après des échantillons observés dans la forèt de Meudon (près la fontaine des Lins), en mars 1860. (1) Tremella hydnoides Yacq., Mise. Austr., LT, p. 445 (Fung, subalp. XI et ultim.), tab, XVII. 23/1 TULASNE. Fig. 2 et 3. Quelques-uns de ces Champignons coupés verticalement, Ces figures et la précédente sont grossies 20 fois environ, Fig. 4. Fragment très-mince emprunté au bord de la coupe du Champignon, et mon- trant à la fois la structure de l’hymentium h et de la face extérieure ou inférieure e de la plante. Ge fragment est vu sous un grossissement de 380 diamètres, FARPE Fig. 5. Notre Dacryomitra pusilla, ci-dessus décrit (p. 217), représenté de grandeur naturelle à la surface du tronc nu et coupé où il végétait, Fig. 6. Le même, grandi, Fig. 7. Eléments de l'hymenium et spores. vus isolés, sous une amplification de 380 diamètres, PLANCHE \, Fig. 4, Filaments rameux et fertiles de l'Hypochnus purpureus Tul., vus sous un gros- sissement de 380 diamètres; quelques spores sont détachées de leurs spicules ou stérigmates. Fig. 2, Autres spores du même Champignon qui.ont commencé de germer, LEE Fig, 3. Groupe de basides du Corticium incarnatum Fr. (pinicola). Au centre sont des basides jeunes et nres; celles des bords portent des stérigmates encore impar- faits. Fig, 4, Trois autres basides où les spicules sont à des états divers de développement ; sur l’une d'elles, ces spicules se sont complétement allongés et portent des spores qui seront bientôt müres. Fig. 5, Spores isolées et germées; le germe donne naissance à une spore secondaire terminale où le plasma se condense, tandis que la spore elle-même est entièrement vidée, + # % Fig, 6, Quelques filaments basidiophores empruntés à ‘l'hymenium du Sebacina incrustans Tul, Les basides, globuleuses et remplies de matières plastiques, sont encore indivises, Fig. 7-10, Basides et spores du même Champignon, vues isolées. Les basides sont entières comme les précédentes, ou plus ou moins distinctement partagées en deux ou quatre parties el allongées en autant de stérigmates linéaires; quelques-unes, bien que spiculifères, semblent être restées indivises, L'une des spores germées à donné naissance à une spore secondaire. EEX Fig. 44. Guepinia helvelloides Fr., dessiné de grandeur naturelle à la Grande- Chartreuse, près de Grenoble, le 25 septembre 1857, FUNGI TREMELLINI ET LEURS ALLIÉS, 235 Fig. 42, Fragment de l’Aymentum, vu au microscope composé, sous un grossissement de 380 diamètres. Fig, 13, Spores isolées et germées, grandies comme la précédente figure, PLANCHE XI, Fig. 4, Tremalla Cerasi Schum, (Tul.), figuré de grandeur naturelle, Fig. 2, Fragment du même, grandi, montrant à sa partie inférieure les cupules sper- matophores, Fig. 3. Fragment mince et très-grossi de l'une de ces cupules à microspores; il a été obtenu par une coupe perpendiculaire à la surface du disque fertile. Fig. 4. Filaments fertiles de l’Aymenium sporophore, vus sous le même grossissement que la précédente figure. ; Fig. 5. Spores isolées, grandies 380 fois en diamètre, PLANCHE XII Fig, 4 et 2. Ptychogaster albus Cord., représenté à peu près de grandeur naturelle, d’après des échantillons recueillis dans les environs de Berne, et que M, G, Otth nous a obligeamment communiqués en 1865, Fig. 3, Autre échantillon plus jeune et coupé verticalement, Fig. 4. Filaments fertiles et spores isolées, vus sous un grossissement de 480 dia- mètres. Les filaments présentent ce genre d’articulation que les mycologues alle- mands ont qualifié de schnallenfürmig, et qu'on observe aussi très-bien dans notre t Hypochnus .centrifugus, diverses Théléphores, le mueus de la volve du Phallus impudicus, etc. (Gfr. de Bary, Morph. und Physiol, der Pilse, p. 15, fig, 6,) CEE Fig. 5, Pilacre Petersit Berk, et Br., figuré environ quatre fois plus grand que nature, d’après des échantillons recueillis en Angleterre (Hainaut Forest) et recus de M. Broome en mars 1865, Fig. 6. Filaments fertiles dont se compose la gleba ou le tissu feutré qui remplit tout le capitule du Champignon; leur mode d’articulation rappelle le Pfychogaster abus. Cette figure est vue sous an grossissement de 380 diamètres, OBSERVATIONS ANATOMIQUES SUR LE COTYLÉDON DES GRAMINÉES, Par ME. Ph, VAN FTIEGNEEN, En cherchant à déterminer comment s'opère, dans les Mono- cotylédones, le passage anatomique de la racine principale à la tige, sujet qui sera développé dans un autre travail, j'ai été amené à étudier chez les Graminées le mode d'insertion de la première feuille de la plante, et ce sont les résultats de cet exa- men que je publie aujourd'hui {#). Mais avant d'entrer dans le détail des observations anatomiques et d'exposer la solution qu'elles donnent au problème, il me parait nécessaire de jeter un coup d'œil sur les opinions que l'étude de la forme et de la situation extérieure des parties de l'embryon a suggérées aux nombreux auteurs qui se sont occupés de cette question (2). l Historique, Malpighi a, le premier, analysé l'embryon du Blé etde l’Avoine, et la vraie signification de quelques-unes de ses parties ne lui à pas échappé. Pour lui, lécusson est la feuille séminale unique ; (4) Ge travail est terminé depuis trois ans. Sa place dans le plan général de mes recherches anatomiques était marquée dès le 18 janvier 4869 (Comptes rendus, t, LXVII, p. 451), et le résultat principal en était indiqué, en passant, le 26 avril suivant (+bid.), J'ai pu, depuis cette époque, cn vérifier à plusieurs reprises les points essentiels. (2) En attendant que nous en ayons fixé la nature morphologique, nous donnerons, avec tous les auteurs depuis Gærtrer, à celte partie de l'embryon qui est appliquée DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 237 mais il découvre de l’autre côté de la tige, à l'endroit où se trouve l’autre feuille séminale chez les plantes qui en ont deux, le rudiment d’une seconde feuille entourant ce côté de l'axe comme d’un étui. « Zn Tritico ef Avenaceis videlur plantula unico, hocque obscuro, jolio prædita ....; loco aulem deficientis fol Natura fortasse radici involucrum addidit (1). » Gærtner, trop préoccupé peut-être de la comparaison de la graine avec l'œuf des animaux qu'il eut le mérite d'établir le premier, et voyant dans le tissu farineux un albumen, admet que l’écusson n'est autre chose qu'un tissu outriif de nature spéciale, situé entre le corps de l'embryon et l'albumen; il l'assimile, en un mot, au vitellus de l'œuf, et luien donne le nom. Cependant, une fois cet organe rangé dans la classe des vitellus, il n'échappe pas à Gærtner que ee vitellus des Graminées est d’une espèce toute particulière. Il est en effet relié d’un côté au corps de l'embryon par une entière continuité de üissu, tandis qu'il se trouve, sur l’autre face, com- plétement indépendant de l’albumen. € Neœus denique cum albu- mine nuilus, vel sallem non organicus, sed merè superficialis, contrà autem cum embryone archssimus el semper propè radiculæ initia conspicuus, ut ibi scutelli atjue embryonis substantia in unum corpus indiscrelum confusa sit (2). » Ce singulier vitellus des Graminées fait donc partie intégrante de l'embryon, et l’au- teur ne tarde pas à l’assimiler au cotylédon des autres plantes, quand il dit, à quelques lignes du passage précédent : « Singula- rem hanc vilelli speciem proprio scutellt cotyledonei nomine dis- linguimus ». Généralisant ensuite cette manière de voir, il rap- proche des vitellus tous les cotylédons hypogés, qui ne peuvent cependant ni ne doivent, suivant lui, être séparés des cotylédons que la germination produit à la lumière ; en sorte que la Nature contre l’albumen et qui a pour role physiologique de le liquéfier et de l’absorber, le nom d'écusson, nom liré de la forme de l'organe et qui n'en préjuge pas la valeur. Avec Mirbel, nous appellerons lobule la languette opposée à l’écusson, el péléole la coiffe de la gemmule, (1) Malpighi, Analome pluntarum, t, 1, p. 77, fig. 324 et 325. (2) Gwrtner, De fructibus et seminibus plantarum, 1788, t. T, p, CxLIX: 238 PH. VAN TIEGHEM. lui paraît avoir procédé de lalbumen au vitellus, et de celui-ci aux cotylédons souterrains, pour atteindre en définitive les coty- lédons les plus parfaits (4). Ainsi donc, pour Gærtner, certains vitellus, et il en est ainsi chez les Graminées, ne sont autre chose qu’une forme particulière de cotylédons hypogés ; de sorte qu’au fond l’écus- son est pour lui le cotylédon de la plante. Il l'appelle, en effet, dans toutes les descriptions particulières, « scutellum cotyledoneum ». Mais où son opinion diffère de celle de Malpi- ghi, c’est qu'il ne regarde pas l’écusson comme le cotylédon tout entier. Il figure en effet, dans le Blé (2), la petite languette que Malpighi regardait comme une feuille avortée, et la désigne par les mots : « lacinula carnosa e scutello oriunda ». Ce petit appendice est done une dépendance de l’écusson. De plus, il appelle la gaine conique qui recouvre la gemmule « vagina cotyledonea » ; il la rattache donc encore à l’écusson et au coty- lédon. Il semble, en résumé, que dans la pensée de Gærtner, dégagée de la notion confuse et inutile du vitellus, l’écusson, la languette opposée, et la coiffe conique de la gemmule, ne sont que les trois parties d’un tout qui constitue le cotylédon de la plante, A. L. de Jussieu paraît avoir admis, comme Malpighi, mais sans s'expliquer sur ce sujet, que l’écusson est le cotylédon ; il le désigne simplement sous le nom de lobus, qui signifie sans doute lobe cotylédonaire (3). La question en était là, lorsqu'elle fat agitée, en l’année 1808, devant l’Académie des sciences, dans une diséussion demeurée célébre entre L. CI. Richard et Mirbel, et que Cuvier a résumée dans ses Rapports annuels sur les progrès des sciences phy- siques et naturelles (4). L. CI. Richard, appelant blaste la partie cylindroïde du corps de l'embryon, qu’il suppose dans ses descriptions placée hori- (1) Gærtner, ibid., t L, p. cut (2) Ibid. €. II. (3) A. L. de Jussieu, Genera plantaritm; ps 92 ét 28; (4) Œuvres complètes de Buffon, supplément, 1828, . III, p 23 etsuiv. DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 239 zontalement, l’écusson en bas, désigne conséquemment cet écusson sous le nom d’hypoblaste. Cet hypoblaste n’est pas autre chose pour lui qu’un renflement latéral de la radicule. « N’est-il pas raisonnable, dit-il, de regarder l’hypoblaste des embryons macropodes comme un renflement ou une expan- sion particulière de la radicule? (1). » Et plus loin: «Puisque tous les effets évolutifs de la germination se manifestent au-dessus de l’hypoblaste, sans que son volume et sa forme en paraissent changés, il est évident qu’on ne peut le rappor- ter qu'au gros corps radicuiaire auquel j'ai donné le même nom dans les embryons macropodes. Il est donc convenable de le regarder aussi comme la radicule, ou, du moins, comme une expansion extraordinaire de l’extrémité de celle-ci ; dès lors il constitue la base ou la partie la plus inférieure de l'embryon des Graminées. Cette dernière position, que sa comparaison avec les autres hypoblastes lui assigne avec certitude, repousse sutfi- samment le nom de coiylédon qu’on lui a donné (2). » Richard se fait d’ailleurs une idée très-inexacte de l'opinion de Gærtner. « Gærtner, dit-il, a eu raison de regarder l’hypoblaste comme un organe particulier, en le désignant sous le nom impropre de vitellus ; mais 1ls’est trompé lorsqu'il l’a pris pour un corps dis- tinct de l'embryon. Jussieu et ses sectateurs me paraissent s'être plus écartés de la vérité en faisant de ce corps le cotylédon des Graminées, » (P. 475.) Gærtner, nous venons de le voir, savait fort bien que l’écusson est en continuité de tissu avec le corps de l'embryon, et s’il lui accordait une certaine indépendance par rapport à l'embryon, c'est une opinion qu'il étendait au mème titre à tous les autres cotylédons. Le petit appendice vu par Malpighi et Gærtner à l’opposite de l’écusson du Blé et de l’Avoine, a été étudié avec soin par L. CI. Richard, et très-bien représenté par lui dans ses belles figures. I le nomme épiblaste, et le décrit dans plusieurs autres genres. « Je dois parler, dit-il, d’une partie externe et accessoire du (1) L. CI, Richard, Anülysé botanique des embryons endorhüizes (Ann, du Mus., 1816, t. XVII, p. 455), (2) lbid,, p. 473, 240 BE. VAN TERGEHIENE,. blaste, à laquelle j'ai donné le nom d’épiblaste. appelle ainsi toute substance qui, interrompant transversalement la face anté- rieure du blaste, sépare sa partie ascendante, qu’elle recouvre plus ou moins, de son extrémité inférieure à laquelle elle sunit. L'épiblaste de l'Avena et du Triticum consiste en un petit bord libre qui, paraissant n'être qu'un processus de la substance superficielle de la partie inférieure du blaste, s'applique sur la base de la partie supérieure ou ascendante. L’épiblaste du Pharus n’est indiqué que par le petit bord qui ceint obliquement le milieu du blaste. Dans l'Olyra, c’est un disque soudé avec l'hypoblaste par le centre de la face postérieure et libre par tout son contour. Dans le Riz, l'épiblaste est soudé avec l’hypoblaste en un sac clos. » (P. 467.) Mais l'auteur est loin d'attribuer à cet organe la valeur d’une feuille, comme le voulait Malpighi ; ilen fait, avec Gærtner, une simple dépendance de lécusson. « Si je cherche, dit-il, l'origine de l’épiblaste, je crois l'entrevoir dans un prolongement de l’hypoblaste. La substance du premier parait être une continuation de celle du second. Cette continuité de substance se manifeste plus complétement (1) dans l'embryon du Riz que dans les autres épiblastes. Mais ce qui rend cette origine de l’épiblaste plus probable, c'est son défaut de déve- loppement dans la germination. » (P. 469.) Arrivant ensuite à la tunique en forme de cône qui enveloppe la gemmule, Richard y voit la première feuille de la plante, son cotylédon. La principale raison qu'il en donne, c’est que dans les autres Mouocotylédones la gemmule est enveloppée dans le cotylédon qu'elle perce pour se montrer à jour. QI est incontestable que le tube du Scirpus et du Canna appartient au cotylédon ; donc celui des Graminées est aussi formé par le caty- lédon. » (P. 474.) Telle est la valeur attribuée par L. CI. Richard aux diverses parties de la plantule des Graminées, Mirbel, au contraire, compare l’écusson des Graminées au cotylédon des Asperges, des Balisiers et de quelques autres (4) I y a dans le texte «plus rarement», expression incompréhensible; c'est sans doute «plus complétement, plus intimement», qu'il faut lire, DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 2h Monocotylédones, où ce cotyiédon ne prend aussi aucun aecrois- sement pendant la germination, et il conclut de cette compa- raison que l'écusson des Graminées est précisément leur coty- lédon. Il signale en outre, à l’opposite du cotylédon, l'existence d’un petit appendice qu'il regarde comme une feuille rudimen- taire, comme le rudiment d’un second cotylédon, et qu'il appelle lobule : c'est l'involucrum de Malpighi, la lacinula carnosa de Gærtner, l'épiblaste de Richard : « L’embryon est quelquefois muni d’un lobule, rudiment de feuille qui se développe du côté opposé au cotylédon sous la forme d'une lame charnue. La petitesse du lobule est cause que peu de botanistes ont remar- qué cet organe. Il représente imparfaitement une seconde feuille cotylédonaire. I se montre dès avant la germination dans le Lolium, l'Ægülops, le Blé, l’Avoine. (PI. 59, fig. 4) » (4). Quant à la signification du cône qui recouvre la gemmule, Mirbel s'exprime ainsi dans son £æamen de la division des vé- gélaux en Endorhizes et Excrhizes, lu à l’Académie, le 8 oc- tobre 1810 : «Sans doute, on pourrait considérer la gaîne qui recouvre la plumule des Graminées, comme une feuille primor- diale. J’avaisembrassé cette opinion dans mes premiers mémoires, mais il est plus conforme à la théorie de ne voir, dans la gaîne dont il s’agit, qu'une portion dilatée du cotylédon, semblable à celle qui se développe en cône dans la plupart des Monocotylé- dones à l’époque de la germination. Ceci rétablit complétement l'analogie entre les graines des Graminées et celles des autres plantes à une feuille séminale (2). » Mais le peu de fondement de cette assimilation purement théorique, et qui est en contra- diction avec sa manière d'envisager le lobule, n’a pas tardé à frapper Mirbel, car quelques années plus tard, dans ses Æ/éments de physiologie végétale (i845), il l'abandonnait, implicitement, il est vrai, pour revenir à son prenuer sentiment. Il y appelle en effet ce cône « piléole ou feuille primordiale », tandis qu’il donne le nom de coléoptile à la gaine ascendante du cotylédon des (4) Mirbel, Éléments de physiologie végétale, t. 1, p. 65. (2) Ann. du Muséum, t. XUI, p. 424, en note. 9° série, Bor. T. XV (Cahier n° 4), 4 16 242 PES, VAN RENGEREN. autres Monocotylédones avec laquelle il la confondait autrefois. € La plumule de l’Hordeum zeocriton à une feuille primordiale piléolaire (1). » En résumé,dans opinion définitive de Mirbel, qui ne fait en somme que préciser davantage celle de Malpighi, l’écusson, le lobule et la piléole sont trois feuilles distinctes et successives, et la première feuille verte est le quatrième appendice de la tigelle, tandis que, pour Richard, l’éeusson et le lobulene comptant pas, la piléole se trouve être le premier et la première feuille verte le second appendice de la tigelle. La manière de voir de Mirbel à été appuyée par Poiteau (2), en 1809, dans un travail sur la germination des Graminées. Un peu plus tard (4819), Turpin l’a adoptée dans son mémoire sur l'inflorescence des Graminées ; il y insiste beaucoup sur la lan- guette opposée à l’écusson, et il la considère mème, en er exagé- rant beaucoup l'importance et en forçant l'expression de Mirhel, comme un second cotylédon opposé au premier. « Ces deux coty- lédons opposés, qu'on retrouve dans les embryons de plusieurs Graminées, sont presque égaux dans les Bambous, très-mégaux dans le Blé et l’Avoine, presque réduits à un seul dans l'Orge, où l’on remarque pourtant encore, à la place de celui qui disparait, une petite cicatricule qui en est le dernier rudiment. Ce deuxième cotylédon des Graminées a été qualifié comme tel, pour la pre- nuère fois, par mon ami M. Poiteau, dans un mémoire qu'il à publié dans les Ænnales du Muséum en 1818 (3) ». Turpin con- sidère d’ailleurs, comme Mirbel, le cône supérieur comme «la première gaine pétiolaire de la gemmule », c’est-à-dire comme la troisième feuille de la plante. Les auteurs plus modernes, sans chercher à introduire dans la question un élément nouveau qui permit de décider entre les trois opinions divergentes que l'étude de la forme et de la posi- tion des organes avait suggérées à Malpighi, à Gærtner et à Richard, se sont bornés à suivre, avec quelques légères modi- (1) Éléments de physiologie végétale, & 1, explication de la planche 58: (2) Ann. du Muséum, & XUI (3) Mémoires du Muséum, 1819, L. V, p. 4492. DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 218 fications, les uns l'avis de Richard, les autres celui de Malpighi développé par Mirbel. Passons une revue rapide de ces deux séries de botanistes. Adrien de Jussieu abandonne le sentiment de son père pour revenir, en en changeant un peu les termes, à l'opinion de L. CI Richard. A la radieule il substitue seulement la tigelle. Pour lui, « l’écusson n’est qu'une excroissance latérale de la ügelle, analogue à celle qui se rencontre dans quelques Zostéra- cées, et la coifle supérieure de la gemmule est le cotylédon « (4). Ainsi modifiée, l'opinion de Richard à rallié, comme nous allons le voir, les suffrages d’un grand nombre de botanistes modernes. M. Lestiboudois, étudiant l'insertion anatomique des premières feuilles des Graminées, ne fait aucun doute sur la nature coty- lédonaire de la gaîne conique, et ne parle même pas de l’écus- son et de la languette opposée. Pour lui, la gaine conique est la première expansion folaire de la tige, et c’est d'elle qu'il parle en ces termes : «Le Maïs à un cotylédon qui n’a que deux ner- vures; elles se réunissent vers le sommet du cotylédon en s’in- fléchissant.… Dans le Blé, la gaine cotylédonaire à aussi deux nervures semblables à celles du Maïs (2). » Il n’est peut-être pas sans intérêt, au point de vue anatomique, de rappeler 1e1 lasser- tion générale s'appliquant à toutes les Monocotylédones, à l'appui de laquelle l’auteur cite la structure du prétendu cotylédon du Maïs. « Les fibres cotylédonaires naissent dans l'intervalle des faisceaux caulinaires ; elles peuvent donc être considérées comme formées par gémination, ainsi que cela a lieu chez les Dicotylé- dones. Tous les faisceaux caulinaires concourent à la formation d’une seule expansion foliacée, au lieu de former deux feuilles opposées; c’est là la différence caractéristique que présente l'ordre des Monocotylédones. La conséquence de cette disposi- tion, c’est que le cotylédon de ces plantes naîtsolitarement, comme les feuilles alternes, qu’il n’a pas de nervure médiane, que son (4) Adr. de Jussieu, Éléments de botanique, 17€ édition, p. 497. (2) Lestiboudois, Phyllotaxie anatomique (Ann. des se. nat., 3° série, 1848, t. X, p. 141). 21h PH, VAN TIRGHENM. sommet répond à un faisceau caulinaire au lieu de répondre à un de leurs intervalles, et qu’à l’opposite est encore un faisceau séparant les deux côtés de la feuille. Sa symétrie est done tout à fait différente de celle d’un cotylédon d’une plante dicotylé- donée ; à voir sa composition, on dirait qu'il est formé de deux cotylédons soudés par leurs bords, deux faisceaux latéraux avoisinant la ligne de jonction, qui devient la ligne médiane, et le sommet répondant à cette ligne (4). » J'ai combattu ailleurs (2) cette manière de voir en tant qu'elle s'applique aux Monoco- tylédones en général ; on verra par le travail actuel que le coty- lédon des Graminées a toujours une nervure médiane. M. Hofmeister partage le sentiment d’Adr. de Jussieu : « L’ex- croissance du tissu de la tigelle qui produit l'écusson commence, dit-il, longtemps avant l'apparition de la première feuille, du vrai colylédon» (3); et il le professe encore dans son dernier ouvrage (4). Tout récemment, M. Julius Sachs exprime le même avis : «La gemmule des Monocotylédones, dit-il, est entourée d’une première feuille en forme de gaine (cotylédon). Ce cotylédon reste souvent, après la germination, à l’état de gaîne incolore (Graminées, Palmiers). La partie terminale du cotylédon demeure souvent engagée dans la graine comme organe de succion (Pal- miers); mais chez les Graminées, c'est au contraire un corps (scutellum) qui se développe sur le premier entre-nœud, sous le cotylédon qui demeure dans la graine et qui joue ce rôle (5). » Entin, M. À. Gris à émis son avis sur ce point dans des termes qui laissent indéeis, st c'est à l’idée ancienne de Richard, ou bien à cetteidée, modifiée par Adr. de Jussieu, qu'il se rattache. « D’a- près ce que nous avons vu lors des premiers développements de la jeune plante, nous avons été conduits à adopter l'opinion (1) Loc. cit., p. 137. (2) Sur la structure des feuilles des Monocotylédones (Comptes rendus, & LXVII, 18 avril 4869). (3) Neucre Beobachtungen über Embryobildung.— Pringsheim's Jahrbücher, 4858, t. 1, p. 154. (4) Handbuch der physiologischen Botanik, 1868, t T, p. 589. (5) Lehrbuch der Botanik, 1868, p. 474. DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 215 d'Adrien de Jussieu, c’est-à-dire à considérer le scutelle comme une expansion latérale d’une partie de l'axe, moditiée de ma- nière à devenir le principal organe d'absorption du germe (1). » Dans ses Éléments de botanique, M. Duchartre se borne à signa- ler la divergence des opinions sur ce point, sans se prononcer nettement (2). Cependant, à la caractéristique de la famille, il paraît pencher pour la théorie de Richard, car il s'exprime ainsi : «Embryon complexe appliqué par une grande expansion dor- sale contre l’albumen (3). » Toutefois l'opinion la plus ancienne, celle de Malpighi et de Mirbel, n'est pas sans avoir, elle aussi, tout au moins en ce qui concerne la nature de l'écusson et de la gaîne gemmulaire, ren- contré parmi les botanistes modernes de nombreuses et puis- santes adhésions. Elle se trouve cependant modifiée en un point important, et rapprochée ainsi de celle de L. CI. Richard : la languette opposée au cotylédon n’est plus, en effet, considérée comme une feuille autonome, mais elle est, ou passée sous si lence, ou regardée comme une simple dépendance de l’écusson, de sorte que la première feuille verte devient la troisième feuille de la plante, au lieu d'en être la quatrième. M. Schleiden décrit {4) la germination de lAvoine, et pour lui P’écusson est le cotylédon ; le cône externe de la gemmule est la feuille primordiale, et, par conséquent, la seconde feuille de la plante. Il regarde la languette triangulaire opposée à l'écusson comme une portion de la gaîne cotylédonaire. De même Schacht (5), étudiant la germination de l’Agropy- rum fastuosum, appelle l’écusson le cotylédon, et la gaîne conique de là gemmule la première feuille binerviée de la plante. Il figure le petit appendice opposé à l’écusson, mais le tient, comme M. Schleiden, pour une partie du cotylédon., M. Decaisne, de son côté, regarde l’écusson comme le cotylé- (4) Ann. des sc. nat., 5° série, 1864, t. If, p. 71. (2) Duchartre, Éléments de botanique, 1867, p. 906. (3) Ibid., p. 903. (4) Scbleiden, Grundzüge, 1846, 22 édition, t. 11, p. 185. (5) Schacht, Lehrbuch, 4859, t. II, p. 462; et Ze Microscope, 1861, p. 213. 246 PH. VAN TIEGNEM. don de la plante, et la coiffe de la gemmule comme sa feuille primordiale enroulée (1). Enfin, MM. Endlicher, Kunth, A. de Saint-Hilaire, etc., ont professé la même manière de voir (2). Telles sont, en résumé, les diverses opinions qui se partagent l'adhésion des botanistes et qui sont fondées sur les différentes manières d'apprécier les analogies de forme et les rapports de position des organes qui constituent l'embryon des Graminées. Dans la première, l’écusson est le cotylédon tout entier ; le lobule opposé est une seconde feuille mdépendante, la piléole une troisième feuille à 180 degrés de la seconde ; enfin, la pre- miere feuille verte se trouve être le quatrième appendice de la plante (Malpighi, Mirbel, Poiteau, Turpin, etc.). Dans la seconde, l’écusson est encore le cotylédon, mais Île lobule en est une dépendance; la piléole est la seconde feuille de l'embryon ; la première feuille verte en est la troisième (M. Schleiden, Schacht, M. Decaisne, etc.). Dans la troisième, c’est la piléole qui représente le cotylédon tout entier, l’écusson et le lobule n'étant que des expansions inférieures de la tigelle ou de la radicule; la première feuille verte se trouve être alors le second appendice du végétal (L. CL. Richard, Adr. de Jussieu, MM. Lestiboudois, Hofmeister, Sachs, etc.). (1) Traité général de botanique, bp. 605. (2) Ajoutons que M. Germain de Saint-Pierre a essayé de concilier l'avis de Richard et celui de Mirbel dans une opinion mixte assez singulière, qu'il exprime ainsi : « Le résultat de mes propres observations est de me faire considérer l'hypoblaste comme représentant à la fois le cotylédon et la radicule primordiale, » ( Guide du botaniste, 1859, €. IF, p. 494). Et plus loin, à l'arlicle HypoBLasre : « En présence des opinions divergentes professées simultanément par des observateurs d’un si haut mérite, je me suis livré à des recherches assidues sur l'embryon des Monocotylédones el particulièrement des Graminées, et je suis parveuu à reconnaitre que l’hypoblaste est un Corps composé d’une partie qui correspond à une feuille ou cotylédon et d’une partie que l’ensemble des faits que j'ai été à même d'observer me porte à considé- rer comme une tigelle ct une radicule, Ce résultat explique comment les partisans de l'une et de l’autre opinion qui divisaient les physiologistes pouvaient de part et d'autre, appuyer leur sentiment sur de bonnes observations, sans pour cela parvenir à porter leur conviction dans l'esprit de leurs adversaires, » (P. 624.) Pour M, Germain de Saint-Pierre, le lobule à aussi la valeur d'une feuille, et son opinion se rattache ainsi à celle de Mirbel, et nou à celle de Schleiden, DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 97 La quatrième manière de voir, enfin, accorde à la fois au coty- lédon les différentes pièces que les trois premières lui donnent séparément : lécusson est la partie médiane du cotylédon, le lobule en est une dépendance opposée, la piléole en est la gaine ascendante, et ces trois organes ne composent qu’une seule et même feuille cotylédonaire. La première feuille verte se trouve done être la seconde feuille de la plante (Gærtner, Mirbel à une certaine époque). Remarquons tout de suite que l’on peut faire à chacune des trois premières solutions en présence une objection capitale : 41° La languette opposée à l'écusson ne peut être considérée comme une feuille indépendante que si elle reçoit de l'axe un faisceau vasculaire, et il est facile de s'assurer qu'il n’en est pas ainsi; d’ailleurs ce lobule manque dans un très-grand nombre de cas. 2° L'écusson étant considéré, avec le lobule opposé, quand il existe, comme le cotylédon, c’est-à-dire comme la première feuille de la plante, si l’on admet que la piléole est une seconde feuille indépendante, il faudra, d’après tous les faits connus, qu'il y ait, entre celte première et cette seconde feuille, une certaine divergence. Or, cette gaîne est exactement superposée à l’écusson. 3° Enfin, il ne peut être vrai de dire que l’écusson est une excroissance latérale de la ügelle ou de la radicule, que si, de deux choses l’une: ou bien cette excroissance est purement parenchyma- teuse, et résulte d’une simple proéminence locale du parenchyme cortical; ou bien elle est vasculaire, et alors les faisceaux qu’elle recoit y forment une anse, et après y être montés 1ls s’infléchis- sent vers le bas pour revenir daus la tige ou dans la racine, et y reprendre leur course verticale. Or, il est facile de s'assurer que l’écusson possède un système vasculaire, et que ce système, une fois entré dans l'organe, s’y distribue sans faire désormais retour à la tige ou à la racine. Frappé de ces objections, et convaincu par là qu'aucune des trois opinions qui se partagent l'adhésion des botanistes modernes ne saurait être l'expression complete de la vérité, et que l'accord 2h PH, VAN MIEGEHEN. ne peut s'établir que sur un terrain nouveau, j'ai résolu de chercher par l'étude du système vasculaire des plantules en voie de germination la solution de ce problème intéressant. Je n'ai pas tardé à voir que la question est plus complexe et plus difficile qu'on ne pouvait le supposer, parce que les Graminées présentent dans la partie inférieure de leur tige trois modes d'or- ganisation bien différents, et qui paraissent, au premier abord, exiger autant de solutions distinctes et incompatibles. Aussi n’est- ce qu'après de longs efforts que j'espère avoir compris comment ces trois modes d'organisation dérivent lun de l’autre, et com- ment ils sont susceptibles d’une seule et même solution. II Exposé des observations anatomiques, Je diviserai donc l’exposé de ces recherches anatomiques en trois parties, en considérant successivement les Graminées où la piléole s’insère sur la tigeile immédiatement au-dessus de l’écusson, puis celles où la piléole est séparée de l’écusson par un intervalle de tige plus ou moins long, et parmi lesquelles nous aurons encore deux modifications à distinguer. 4. La piléole s’insère sur la tigelle immédiatement au-dessus de l'écusson. — Nous prendrons pour exemples dans cette division, d’abord le Stipa pennala, qui ne forme en germant qu'une seule racine dans le prolongement de la tigelle, puis le Blé, le Seigle et l’'Orge, qui produisent de chaque côté de cette racine prinei- pale plusieurs racines adventives (pl. 13, fig. 1-7). Stipa pennata. — Suivons, sur une série de sections transver- sales pratiquées depuis la coléorhize jusque dans le bourgeon terminal,'la structure d’une plantule eu voie de germination. Le parenchyme brunâtre de la coléorhize se réunit d’abord au paren- chyme cortical de la racine, après quoi le système vasculaire de cette racine se transforme et prend les caractères qui conviennent au système vasculaire de la tige. Bientôt après, le parenchyme cortical de la tige, se développant davantage en arrière du côté DU COTVLÉDON DES GRAMINÉES. 219 de l’écusson, s’aplatit, devient prismatique, et la partie inférieure et descendante de l’écusson, ainsi constituée, commence à se séparer par ses bords du tissu qui entoure le cylindre central. En même temps, sur la face opposée, une languette exclusivement parenchymateuse s’isole complétement du parenchyme cortical et entoure tout le côté antérieur de la tige en venant toucher les bords de l’écusson. Un peu plus haut et après la séparation complète de ce lobule, un faisceau libéro-vasculaire quitte le cylindre central de la tige au point qui correspond à la ligne médiane de l'écusson. Ce faisceau se dirige horizontalement en dehors et se tri furque au moment oùil entre dans le parenchyme cortical. Sa branche médiane continue la direction primitive, et pénètre dans l’écusson qui se détache aussitôt de la tigelle par la con- fluence des lignes de séparation de ses deux bords ; elle s’y élève et parcourt l'organe dans toute sa longueur sans s’y diviser. Les branches latérales divergent horizontalement à droite et à gauche, contournent le cylindre central et viennent se relever, trachées en dedans, dans la zone externe du parenchyme cortical, presque en face l’une de l’autre, mais cependant plus rapprochées du côté de l’écusson. Aussitôt après, cette zone externe du parenchyme cortical se sépare circulairement de l’écorce interne, et constitue une gaîne blanche munie de deux faisceaux à trachées internes, presque diamétralement opposés, et qui demeurent indivis et sans communication entre eux jusqu'au sommet de l'organe. Cette gaine conique, ou piléole, enveloppe d’abord la gemmule de l'embryon, mais elle se fend à la germination pour la laisser passer, et cette déhiscence s'opère du côté opposé à l’écusson. Un peu plus haut. la première reuille verte, diamétralement op- posée à l’écusson, se détache à son tour avec sept faisceaux prin- cipaux et deux marginaux plus grêles; puis, la seconde feuille verte, à l'opposite de la premiere. Deux conséquences découlent de ce qui précède. D'abord l'écusson reçoit de la tige un faisceau libéro-vaseulaire; il est donc la première expansion vasculaire de cette tige, 1l en est la pre- mière feuille, le cotylédon. Mais on voit, en même temps, qu'il 250 PES, VAN FIRGHERE. n’en est pas le cotylédon tout entier. Sans compter la languette parenchymateuse antérieure, qui n'est qu’une dépendance des bords de l’écusson, les deux faisceaux de Ja piléole ne sont autre chose que les deux branches latérales du faisceau trifurqué que la tigelle envoie au cotylédon. GCelte piléole n’est done pas une feuille simple autonome, comme cela a été admis par tous les auteurs, ni un composé de deux feuilles autonomes, mais une dépendance bilatérale de l’écusson, dépendance qu'on doit re- garder comme formée de deux stipules soudées bord à bord, tant en avant qu'en arrière, en une gaîne fendue au sommet du côté opposé à la feuille, comme sont soudées, par exemple, les stipules des Polygonum. Ainsi, lécusson est le limbe de la feuille cotylédonaire qui demeure hypogé ; la piléole en est une double stipule axillaire et engaînante, que la germination développe et amène à la lumière, et qui n’acquiert de chlorophylle et de stomates que le long de ses deux nervures. Éeusson, lobule et piléole sont les diverses parties de la première feuille de la plante, de son cotylédon. La première feuille verte est donc la deuxième feuille du végétal, située à 180 degrés de la première. Trilicum sativum. — Outre la racine principale, l'embryon du Blé forme ordinairement de chaque côté de l’écusson deux racines superposées, Ces quatre racines latérales ne viennent s’insérer sur l'axe principal que lorsque celui-ci, après s'être réuni à la coléorhize, a déjà perdu ses caractères de racine pour acquérir ceux de la tige; elles sont done adventives. Les sections faites au niveau où elles s’insèrent montrent que. du côté de l’écusson, le parenchyme cortical de la tige s’aplatit en une lame creusée d’un sillon eu son milieu et dont les bords deviennent de plus en plus libres à mesure qu’on s'élève. L'écusson est donc ici, comme dans le Stipa, muni d'une partie descendante intimement unie avec le parenchyme cor- tical de la tige et qui joue le même rôle absorbant que la partie supérieure libre de l’organe (1). En même temps que cette (1) Ceite partie descendante de l’écusson, revèlue, comme l'autre, d’un épiderme DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 251 partie inférieure de l’écusson se détache de plus en plus par ses bords, on voit, du côté antérieur de l’embryon, une lan- guette purement celluleuse se séparer entièrement du paren- chyme cortical : c’est une simple dépendance de l’écusson. Enfin, quand on est parvenu au-dessus de l'insertion des deux racines latérales supérieures, on voit un faisceau s'échapper du cylindre central de la tige en face de la ligne médiane de l’écus- son. Ce gros faisceau se trifurque immédiatement. La branche médiane se dirige horizontalement en dehors à travers le paren- chyme cortical ; elle pénètre dans l’écusson, quise sépare aussi- tôt complétement de la tige, et s'y relève pour le parcourir dans toute sa longueur sans se diviser. Les deux branches latérales divergent immédiatement à droite ét à gauche, contournent le cylindre central et serelèvent, en définitive, dans la zone externe du parenchyme cortical, à peu près en face l’une de l’autre, mais plus rapprochées cependant du côté de l’écusson. Aussitôt cette zone externe se sépare circulairement du parenchyme intérieur, et forme la gaine binerviée ou piléole. La tige forme plus haut sa première feuille verte du côté opposé à l’écusson, et elle lui fournit sept faisceaux principaux, séparés l’un de l’autre par trois faisceaux plus petits. Il en est de même des deux feuilles suivantes, qui ont trois faisceaux de chaque côté de leur nervure médiane. Comme les feuilles vertes qui la suivent, la piléole du Blé possède fréquemment, et du côté de l’écusson, un bourgeon un peu dévié latéralement; nous reviendrons avec détail sur ce point en parlant de lOrge. Les choses se passent dans le Seigle (Secale cereale} comme dans le Blé. Hordeum vulqare. — L'Orge émet souvent, outre sa racine prineipale, huit racines adventives, trois de chaque côté de l'écusson, et deux en avant. On traverse d’abord la partie des- cendante de l’écusson qui, privée de faisceaux, fait saillie à la absorbant à cellules allongées perpendiculairement à la surface, se prolonge fort loin et s'étend jusque sur la coléorhize, 252 PIE. VAN TIRGHEN. surface du parenchyme cortical et dont les bords se séparent de plus en plus à mesure qu'on s'élève ; puis on voit s'échapper du cylindre central de la tige un gros faisceau qui se divise tout de suite en deux moitiés dans le plan du rayon. La moitié externe se bifurque immédiatement, et ses deux branches pénètrent à la fois dans l’écusson qui se sépare aussitôt; elles v cheminent côte à côte en se divisant (1). La moitié interne se bifurque de la même manière, et ses deux branches divergent tout de suite à droite et à gauche, contournent le cylindre central, et viennent se relever dans la zone externe du parenchyme cortical presque en face l’une de l'autre, mais cependant plus rapprochées du côté de l'écusson. Aussitôt cette zone externe se sépare circulai- rement de la tige et forme la gaine binerviée. Aucune trace ici de la languette antérieure que nous avons rencontrée dans le Stipa et dans le Blé. La gaine bistipulare de l'Orge porte constamment un bour- geon à son aisselle, c’est-à-dire du côté de l’écusson. Ce bour- geon n'est pas tout à fait dans la ligne médiane, mais un peu rejeté latéralement, et nous comprendrons tout à l'heure la cause de cette déviation. Les feuilles vertes qui suivent portent aussi chacune un bourgeon dévié, et l'on remarque que, par rapport à la nervure médiane, les bourgeons des feuilles successives sont alternativement déviés à droite et à gauche. Si l’on observe, d'autre part, que dans ces feuilles successives, c’est alternative- ment le bord droit etle bord gauche qui recouvre l’autre, et que le bourgeon d’une feuille est toujours déjeté du côté de son bord recouvert, c’est-à-dire du côté du bord recouvrant de la feuille suivante, on verra que les choses se passent comme si le bord recouvrant d’une feuille, en chevauchant sur son congénère, repoussait devant lui le bourgeon axillaire de la feuille qui pré- cède et qui lui fait obstacle. Telle est aussi, sans doute, la cause de la déviation latérale du bourgeon, tant pour la gaîne cotylé- donaire que pour les feuilles suivantes. [résulte de ce qui pré- (4) Sur quelques plantules, j'ai vu la branche externe pénétrer simple dans l’écusson, mais elle s’y bifurque aussitôt, DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 253 cède que, si l’on place l'œil dans le plan qui contient les ner- vures médianes de toutes les feuilles, on verra toutes les moi- tés recouvrantes situées du même côté, tandis que tous les bourgeons sont déviés du côté opposé du plan. Ainsi, le cotylédon de l’Orge possède d'ordinaire, comme les feuilles suivantes, un bourgeon situé, non pas à l’aisselle de l’écusson, mais à l’aisselle de la gaîne bistipulaire (4). 1 n’est pas rare de rencontrer à l’aisselle de cette gaine deux bourgeons situés côte à côte, du côté de l'écusson. Ces deux bourgeons commencent chacun par uue feuille binerviée et double tournée vers l’axe et fendue vers la feuille mère, et la feuille suivante est dans chacun d’eux tournée vers l'extérieur, de sorte que les deux premières feuilles simples des deux bourgeons se présentent leurs fentes; de plus, les bords recouvrants sont situés du côté de l’axe. Ces bourgeons sont souvent Inégaux ; le plus développé et le plus ancien se trouve alors constamment du côté recouvert de la feuille, et l’autre du côté recouvrant. Quand il n’y a qu'un bourgeon dévié latéralement, la disposition de ses parties est la mème; c’est-à-dire que la première feuille binerviée et double est postérieure, et que la seconde feuille simple est située du côté où le bourgeon est dévié; de plus, c’est la moitié de cette feuille située vers l’axe qui recouvre l’autre. Îl en résulte que dans ce rameau, où dans ces deux rameaux collatéraux, qui ont le plan des nervures médianes de leurs feuilles perpendiculaire au plan foliaire de la tige, tous les bourgeons prinerpaux sont situés, par rapport à ce plan, du côté de la feuille mère (2). Cette (1) C’est aussi la place qu’occupe le bourgeon dans les Polygonum, les Rumex, ete., et en général dans toutes les plantes à stipule axillaire. (2) Le distique du rameau étant transversal, on voit que le sens de l’enroulement de sa première feuille simple est déterminé par rapport à la feuille-mère. Le dis- tique de l'embryon étant, comme nous verrons plus loin, longitudinal par rapport à la bractée-mère de la fleur qui le produit, le sens du premier enroulement sera-t-il encore déterminé par rapport à cetle bractée-mère, et, par conséquent, constant dans toutes les plantules, L'observation de douze plantules montre que non; le sens de la déviation du bourgeon piléolaire ou du bourgeon principal, quand il y en a deux, ou, ce qui revient au mème, le sens de l’enroulement de la première feuille verte, varie suivant les plantules, sans qu’il n'ait été encore possible de trouver la cause qui le détermine dans une plantule donnée. 254 PH. VAN TIEGHEM. dualité des bourgeons, ainsi fréquemment offerte par la gaine cotylédonaire, se rencontre quelquefois dans les feuilles vertes ordinaires avec la même disposition relative des éléments. On voit donc, en somme, que le cotylédon présente dans sa gaine bistipulaire toutes les propriétés gemmaires des feuilles ordinaires de la plante (1). En résumé, dans les plantes que nous venons d'étudier, il se détache du cylindre central de la tige, au niveau de l'insertion de l'écusson, un faisceau destiné à former la première expansion (4) C'est peut-être ici le lieu de se demander quelle est la nature de la première feuille du rameau foliaire ou floral des Graminées, première feuille qui est binerviée comme la piléole, ou, plus exactement, qui est munie de deux nervures principales accompagnées chacune de quelques fascicules latéraux, On sait que cette préfeuille, aplatie contre l'axe, est ouverte en avant et que les feuilles suivantes sont latérales, Cette préfeuille est-elle une feuille unique situce à 180 degrés de la feuille mere, en sorte que le distique du rameau s’établirait d’abord longitudinal, pour devenir brusquement transversal dans les feuilles suivantes, comme l’admettait Bravais, ou bien est-elle formée de deux parties distinctes comme la piléole, parties dis- tinctes qui seraient, non pas des stipules, mais bien des feuilles autonomes insérées en face l’une de l’autre et faisant partie des deux séries latérales des feuilles supé- rieures ? Le développement des bourgeons qui se forment quelquefois, comme par exemple dans le Coix lacryma, à l’aisselle de la préfeuille et qui sont tout autrement disposés que dans la piléole, va nous montrer que cette préfeuille est double en réalité. La préfeuille du Coëx lacryma porte en effet assez souvent deux bourgeons situés exacte- ment aux extrémités du diamètre transversal du rameau, c’est-à-dire occupant la posi- tion qui reviendrait aux nervures médianes de leurs deux feuilles mères, si elles n'étaient pas rapprochées et soudées en arrière, La dualité et l'opposition des bourgeons attestent ainsi la composition binaire de la préfeuille. Quelquefois, un seul bour- geon se développe ; il n’est nullement postérieur, comme il conviendrait à la feuille postérieure unique, mais latéral, et il occupe la place d’un des bourgeons, quand il y en a deux, Nous avons montré ailleurs, que chez certaines Aroïdées (Monstérinées) où les feuilles, distiques en réalité, ont une position anomale et se trouvent toutes rappro- chées sur la même face de la tige, les bourgeons conservent leur position normale et sont situés sur deux générafrices opposées, marquant ainsi la place réelle qui revient à léurs feuilles mères. Contrairement à l'opinion de Bravais, le distique s'établit donc immédiatement transversal sur le rameau des Graminées. La préfeuille du rameau des Graminées, sans avoir la même nature morphologique que la piléole, participe cependant de sa structure binaire, et elle joue le même rôle protecteur ; elle est en quelque sorte la piléole du rameau végétatif, Il en est de même de la préfeuille du rameau floral, appelée glumelle supérieure, et qui a la même nature morphologique que la préfeuille du rameau végétatif. La glumelle supé: rieure est la piléole de la fleur: DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 255 loliaire de cette lige. Ce faisceau se trifurque au point même où il quitte le cylindre centra!; la partie médiane seule, quelquefois bifurquée comme dans l'Orge, pénètre dans l’écusson, et les deux branches latérales vont constituer immédiatement une gaine bistipulaire à l’aisselle de laquelle se développent un ou quelquefois deux bourgeons. Le cotylédon est donc formé, sans compter la petite languette cellulaire opposée à l’écusson, qui manque quelquefois, comme nous l'avons vu dans l’Orge, de deux parties distinctes : une médiane, hypogée, sans accroissement à la germination, chargée d’absorber l’albumen, l’écusson ; et une autre, d'origine bistipulaire, ayant la forme d’une gaine et la fonction de protéger la gemmule, grandissant à la germination, pour devenir épigée, la piléole. 2. La puéole s’insère sur la tigelle à une certaine distance de l'écusson, maïs elle demeure toutefois dans l'intervalle reliée à l'écus- son, à travers le parenchyme cortical, par un faisceau libéro-vas- culaire. — Pour l'étude de cette modification, nous prendrons d’abord quelques espèces à racine unique, puis quelques autres à racines multiples (pl. 15, fig. 8-20). Lolium italicum. — A la premiére catégorie appartient le Ray-grass d'Halie. La plantule n’a qu’une seule racine principale qui produit de nombreuses radicelles à sa surface. L'insertion de l’écusson y est séparée de celle de la piléole par un inter- valle de 14 à 48 millimètres. Examinons une série de sec- tions transversales commencées au-dessous de lécusson et menées à travers toute cette région critique jusqu’au-dessus de la piléole. À peu de distance de la limite qui sépare la racine principale de la tige, nous verrons s'échapper du cylindre central de la üigelle un faisceau qui, dans son trajet à travers le parenchyme cortical, se dédouble dans le plan du rayon. La branche externe a ses trachées en dedans; elle se dirige horizontalement en dehors, pénètre dans l’écusson qui se sépare aussitôt, sy relève et le parcourt dans toute sa région ascendante et libre, 296 Pi. VAN R'ANGEAHENE. La branche interne demeure en place et s'élève dans la zone moyenne du parenchyme cortical de la üigelle. Elle est formée comme l'autre d’un groupe de cellules libériennes et d’un groupe de vaisseaux, mais le premier est tourné en dedans et le secoud en dehors. En outre, les vaisseaux annelés les plus externes se résorbent de bonne heure et sont remplacés par une lacune. Dans tout l'intervalle entre l’écusson et la piléole ce fais- ceau conserve cette position et cette singulière orientation. Arrivé sous la piléole, il se rapproche du eyhindre central et vient se replacer à sa périphérie. Au moment même où ce contact s'opère, le faisceau se bifurque et ses deux branches se dirigent horizontalement en sens inverse, contournent le cylindre cen- tral élargi, et viennent se relever, trachées en dedans, dans la zone externe du parenchyme cortical, presque en face l’une de l’autre, mais cependant un peu plus rapprochées du côté de l’écusson. Cette zone externe se sépare aussitôt de la tige et forme la piléole binerviée. En mème temps, et brusquement, les caractères anatomiques du cylindre central changent. À partir du point de départ du faisceau cotylédonaire, en effet, le cylindre central à pris et il à conservé, dans tout l'intervalle entre l’écusson et la piléole, des caractères singuliers. Les vaisseaux y forment une sorte d'étoile à quatre branches. Chaque rayon commence par un large vais- seau contigu à la périphérie du corps central, et se continue par plusieurs vaisseaux étroits qui viennent toucher au centre ceux des autres rayons. Les intervalles entre les branches sont occu - pés par des cellules étroites et longues, de nature libérienne. C'est vis-à-vis du plus large de ces intervalles que se trouve le faisceau cortical inverse. Immédiatement au-dessous de l’inser- tion de la piléole, ce système s’élargit brusquement, se dissocie en un certain nombre de faisceaux libéro-vasculaires séparés par du parenchyme, et prend ainsi les caractères définitifs de la tige. Nous comprendrons tout à l'heure la raison de ce changement de structure. Ainsi, malgré l'intervalle de tige qui sépare ces deux organes, l'écusson et la piléole n’en demeurent pas moins unis vasculaire- DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 257 ment l’un à l’autre par la même relation anatomique que daus le Blé. Cette connexion anatomique présente, en effet, dans tous les cas trois temps successifs qui caractérisent le nœud d'insertion du cotylédon tout entier sur la tigelle : 4° Le faisceau s'échappe du cylindre central, se dédouble d'avant en arrière en une branche externe à trachées en dedans et une branche interne à trachées en dehors, et la branche externe se rend à l’écusson. 2° La branche interne se divise à son tour latéralement en deux moitiés qui divergent aussitôt horizontalement à droite et à gauche, en rasant les flancs du cylindre central. 3° Enfin, ces deux branches achè- vent de contourner le cylindre central, se relèvent presque en face l’une de l’autre, et pénêtrent dans la piléole, qui se détache aussitôt. Dans le Stipa, le Blé, le Seigle, l’Orge, etc., ces trois temps se suivent sans interruption, c'est-à-dire qu'il ne se fait pas entre eux d’accroissement Intercalaire, et par conséquent le nœud cotylédonaire est très-court. Dans le Ray-grass, au con- traire, et dans les nombreuses Graminées que nous verrons se comporter de même, il y à un intervalle assez considérable entre le premier et le second temps, tandis que le second et le troisième sont presque simultanés; en d’autres termes, il s’y fait un puissant accroissement intercalaire sur la partie de la con- nexion comprise entre le dédoublement antéro-postérieur du faisceau cotylédonaire et la bifurcation latérale de sa branche interne, pendant que cet accroissement est nul sur les autres parties. Ilen résulte que le nœud cotylédonaire y acquiert une grande longueur, et qu'il possède un faisceau cortical inverse. Ce nœud commence par l'insertion de la partie médiane de la feuille cotylédonaire et se termine par l'insertion de sa gaîne bistipulaire. Ce n’est donc pas un entre-nœud, comme on serait porté à le croire, qui existe entre l’écusson et la piléole, mais bien un nœud ällongé qui unit l’un à l'autre, et cette circon- stance explique l’organisation singulière de la tige dans cet intervalle. Un grand nombre de genres de Graminées appartenant à plu- sieurs tribus différentes se comportent comme l’Ivraie, c’est- à-dire possèdent entre l’écusson et la piléole un intervalle de o série, Bor. T. XV. (Cahier n° 5.) 1 17 258 PES. VAN TIRGHENM. tige plus ou moins long avec faisceau cortical inverse, et ne déve- loppent qu'une racine principale à la germination. Nous citerons : parmi les Festucacées, les Bromus mollis, Festuca elatior, Brizu gracihs, Poa pratensis, etc.; parm les Agrostidées, lAgrostis stolonifera; parmi les Phléoïdées, ‘Alopecurus pratensis ; parmi les Phalaridées, les Phalaris canariensis (pl. 13, fig. 16-20), Anthoæanthum odoratum; parm les Oryzées, l’'Oryza saliva ; parmi les Avénacées, enfin, les Lagurus ovatus, Holcus lana- dus, etc. C'est encore absolument de mêr e que les choses se passent dans l’Avena sativa (pl. 13, fig.8-15), avec cette seule différence que la tigelle de cette plante produs a sa base, au-dessous de lin sertion vasculaire de l’écusson et de chaque côté, plusieurs racines adventives. L’Avoine forme souvent trois racines latérales super- posées et deux en avant, en tout huit racines adventives. Elle présente comme le Shpa, le Blé, eic., à l'opposite de l’écusson, une languette exclusivement parenchymateuse qui se trouve déjà entièrement séparée de la tige au-dessous du point de départ du faisceau cotylédonaire. Le cylindre central du nœud allongé y est plus large que dans la plupart des Graminées précédentes ; aussi les vaisseaux étroits qui relient les quatre gros vaisseaux périphériques ne confluent-1ls plus au centre ; ils forment deux V, l'un en avant, l’autre en arrière et entre les pointes de ces V se trouve un tissu formé de cellules conjonctives allongées. Le cylindre central des plantules de Riz présenté le même déve- loppement. En outre, la gaîne bistipulaire de l'Avoine possède ordinairement, comme les feuilles suivantes, un bourgeon dévié. La même conclusion s'applique donc à toute cette nombreuse série de Graminées, et Les faits anatomiques qu'elle présente dé- rivent de ceux de la première série par un puissant accroissement intercalaire qui porte sur une certaine région du nœud cotylé- donaire et qui dissocie les deux parties constituantes du cotylé- don, sa partie médiane appelée écusson, de sa gaine bistipulaire appelée piléole. C'est par un semblable accroissement intercalaire, mais por- 25 D © DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. tant sur une région un peu plus élevée du nœud, que la troi- sième’série de Graminées diffère, cemme nous allons le voir, des deux précédentes. à. La piléole s'insère sur la tigelle à une certaine distance de l’écusson, mais elle n’est pas, dans l'intervalle, reliée à l’écusson par un faisceau libéro-vasculaire cortical, — Le Maïs, le Sorgho, le Panis et l'Eleusine, avec une racine principale sans racines adventives, et la Larmille, avec des racines adventives latérales, nous serviront d'exemples pour cette troisième modification (pl. 14, fig. 21-35). Zea Mays.— Pratiquons dans une plantule de Maïs en voie de germination une série de coupes à partir de la coléorhize jus- qu’au-dessus de l'insertion de la piléole (pl. 14, fig. 21-98). Une section transversale qui traverse la coléorhize au-dessus de sa déchirure nous montre : 4° la racine principale avec ses nombreuses (15-20) files vasculaires centripètes, dont quelques- unes (5-7) seulement sont munies d’un gros vaisseau intérieur séparé des autres par quelques cellules allougées, ses nom- breux groupes de cellules libériennes alternes avec les rayons vasculaires, et son tissu conjonctif qui réunit l'un à l’autre les deux systèmes de faisceaux et remplit toute la partie centrale; 2° la coléorhize, exclusivement cellulaire, mais plus épaisse du côté opposé à l’écusson; 3° la région inférieure de la par- tie descendante de l’écusson encore dépourvue en ce point de faisceaux vasculaires, adhérant à la coléorhize seulement par ses bords et libre sur tout le reste de sa face interne, où elle.est divisée presque complétement en deux par un sillon médian. On sait que cette bifurcation de la partie descendante se ren- contre fréquemment dans les cotylédons d’autres végétaux, notamment dans ceux des Amentacées. Ÿ Une section un peu supérieure au passage anatomique de la racine principale à la tige montre l'écusson en continuité de tissu avec le parenchyme cortical de la tige sur toute sa face posté rieure et libre seulement par ses extrèmes bords. Il est par- 260 PM. VAN TIEGHEN. couru par une dizaine de faisceaux descendants qui se perdent plus bas en s'amincissant, et dont nous allons tout à l'heure re- trouver le point d’origine. Le parenchyme corücal de la tige pré- sente une forte proéminence en avant entre les deux bords de l'écussor. Si l'on s'élève à partir de ce niveau, on voit qu’il se détache bientôt du cercle vasculaire, au point correspondant à la ligne médiane de l’écusson, un faisceau qui se trifurque aussitôt; sa branche médiane traverse horizontalement le parenchyme cor- tical et pénètre dans l’écusson, tandis que les latérales divergent et viennent se replacer sur les côtés sans quitter le cylindre cen- tral. L’écusson est libre à cette hauteur sur presque toute sa surface et ne tient à la tige que par sa région médiane où pénètre le faisceau. Parvenu dans l’écusson, ce faisceau se montre pourvu de trachées, non-seulemerit sur la moitié interne de son pourtour avec une pointe médiane qui rentre en dedans, mais encore au milieu de son bord externe. Il produit d’ailleurs immédiatement quelques branches qui descendent aussitôt dans la partie inférieure et plus où moins adhérente de l’écusson, tandis qu'il s'élève lui-même en demeurant simple dans la par- tie ascendante et entièrement libre de cet organe. Un peu au- dessus du niveau où s'échappe le faisceau destiné à l’écusson, la bosse parenchymateuse que la tigelle projette en face de lui cesse brusquement, de sorte que l'axe présente en ce point un étranglement subit. Ainsi, premier point élabli, l’écusson du Maïs est bien le coty- lédon unimervié de la plante. Mais est-ce tout le cotylédon ? C'est ce qui nous reste à examiner. Au-dessus de l'émergence du faisceau cotylédonaire, la tige possède une structure remarquable. Tous les faisceaux libéro- vasculaires sont réunis par leurs éléments hbériens en un cylindre continu enveloppé par la membrane protectrice, mais interrompu cependant en face de l’écusson, où l'espace vide est en partie occupé par un pelit fascicule libre. Les vaisseaux forment trois pointes sallantes dans le parenchyme conjonetif central. Cette structure singulière se conserve dans toute la longueur DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 961 de lintervalle entre l’écusson et la piléole, sans que le paren- chyme cortical présente en aucun point de faisceau solitaire inverse. Sous la piléole les choses changent brusquement. D'abord on voit s'échapper du cylindre central à droite et à gauche, du côté de l’écusson, un gros faisceau qui se relève dans le parenchyme cortical; ces deux faisceaux partent de deux points non diamé- tralement opposés, mais beaucoup plus rapprochés du côté de l'écusson. Bientôt après, la zone externe du parenchyme se sépare eirculairement du reste de l'écorce, emportant avec elle ces deux faisceaux qui paraissent alors presque diamétralement opposés et qui présentent la même forme et la même organisa- tion que celui de l’éeusson; la piléole est désormais distincte. En même temps le système libéro-vasculaire de la tige, jusque-là confondu en un cylindre creux, se dissocie en multiples fais- ceaux libéro-vasculaires qui sont indépendants les uns des autres dans la moelle centrale, et qui se rendent aux feuilles vertes SUCCESSIVES. Les deux faisceaux de la piléole du Maïs paraissent donc n'avoir aucun rapport avec le faisceau de l’écusson et s'échapper de l’axe, chacun de son côté, et indépendamment. Mais rappe- lons-nous que dans le Blé et dans toutes les Graminées de la première section, les deux branches latérales du faisceau trifurqué rasent d'abord lasurface du cylindre central avant de s’en déga- ger pour entrer dans la gaine, et que dans les Graminées du second groupe ces deux branches, longtemps réunies en un seul faisceau cortical inverse, se comportent de même sous l'insertion de la piléole. Nous verrons alors qu'il suffit qu'entre le second et le troisième temps de la connexion anatomique du Blé un inter- valle se produise pendant que le premier et le second temps demeurent presque simultanés, en d’autres termes, que lac- croissement intercalaire porte exclusivement sur la région du nœud où les branches latérales sont encore en contact avec le cylindre central, mais sur le point de s’en dégager, pour que l’on obtienne l'organisation en apparence si différente du Mais. L'intervalle qui sépare l’écusson de sa gaine bistipulure n’est 2692 PH. VAN TIEGHEM. donc pas un entre-nœud, mais simplement le nœud cotylédo- paire fort allongé, ce qui explique sa structure. Sorghum vulgare. — Comme le Maïs, le Sorgho (fig. 29-35) ne développe à la germination qu'une seule racine principale. Entre l’écusson et la gaine il y a aussi un intervalle qui peut dé- passer 6 centimètres de longueur. L'écusson présente une partie descendante, indépendante de la coléorhize sur laquelle elle s'étend, et qui paraît dépourvue de branches vasculaires. En remontant peu à peu, on dépasse la limite entre la racme et la tige, puis on voit se détacher du cylindre central un fais- ceau qui traverse horizontalement l'écorce et pénètre dans l’écus- son, où ilse relève sans se diviser; ce dernier se sépare aussitôt. Après le départ de ce faisceau, le cylindre central demeure lar- gement ouvert au point correspondant. Dans tous les autres points les faisceaux se trouvent intimement unis par leur partie libérienne, et cette union se conserve jusque sous la piléole. Là on voit s'échapper de chaque côté un faisceau qui vient se relever dans la zone externe de l'écorce; ces deux faisceaux ne sont pas diamétralement opposés, mais plus rapprochés du côté de l’écus- son. Puis cette zone externe se sépare du reste de l’écorce et la gaine est libre avec ses deux faisceaux. En même temps le sys- tème vasculaire de la tige se dissocie en faisceaux séparés, et sept d’entre eux émergent pour former la première feuille verte. Dans le Panicum miliaceum et l’Eleusine Coracana, les choses se passent exactement comme dans le Maïs et le Sorgho, c’est- à-dire que Pintervalle entre l'écusson et la piléele y est dépour- vu de faisceau cortical inverse. Les deux points d’émergence des faisceaux de la piléole y sont fort rapprochés l’un de l’autre en face de l’écusson. Coix lacryma.— Enfin, la Larmille présente un mtérêt particu- lier, parce qu'elle produit, outre sa racine principale, deux racines adveutives insérées à droite et à gauche de Pécusson. L'écusson y recoit encore uu faisceau, et le cylindre central demeure däns tout intervalle entre l’écusson et la gaïne, ouvert au point correspondant, sans trace de faisceau cortical. Sous la gaine un DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 263 faisceau s'échappe du cylindre, de chaque côté, pour se rendre dans la zone externe de l'écorce, qui se sépare immédiatement. En même temps les faisceaux de la tige s'isolent et se rendent plus haut en nombre impair dans chacune des feuilles succes SIvEs. Aucune des plantes qui précèdent n’a de languette opposée à l’écusson, et je n'ai pas vu de bourgeon à la piléole. En résumé, les cinq genres que nous venons d'étudier, Zea, Sorghum, Panicum, Eleusine, Coix, forment dans la famille des Graminées une troisième section caractérisée par une disposition anatomique spéciale, et qui se relie à la seconde section de la même manière que celle-ci à la première, c’est-à-dire par un allongement du nœud cotylédonaire. Seulement cet allon- gement du nœud porte sur une région différente, et il a pour résultat de dissocier d’une facon plus considérable que dans la seconde section, les deux parties essentielles du cotylédon, sa parte médiane hypogée (écusson) et sa gaine bistipulaire épigée (piléole). Cette dissociation est telle que si l’on n'avait commencé par étudier successivement les plantes de la première et de la seconde section, il eût été impossible de retrouver dans celles de la troisième le lien de dépendance qui unit ces deux parties et la signification nodale de l'intervalle de tige qui les sépare. Avec l’étude seule des plantes de cette troisième section, la question que nous avons posée au début fût demeurée sans solution. h. Résumé et conclusions. — Le cotylédon des Graminées pré- sente donc dans toutes les plantes de la famille les mêmes carac- tères fondamentaux et la même relation essentielle avec la tige. Il est toujours formé : 4° d’un limbe hypogé plus ou moins engai- nant et uninervié (écusson ,hypoblaste), qui détache souvent la partie opposée de sa gaine sous forme d’une petite languette ou colierette libre et exclusivement cellulaire (lobule, épiblaste) ; 20 d’une double stipule unie bord à bord en avant et en arrière en une gaîne blanche épigée qui protége la gemmule (piléole). Cette gaîne bistipulaire possède deux faisceaux libéro-vasculaires 26h PH. VAN TERGHENM. qui ne sont, en définitive, que des branches latérales du faisceau cotylédonaire total, dont la nervure de l’écusson est la branche médiane. Stérile quelquefois, le cotylédon ainsi constitué porte dans certains cas, comme les feuilles suivantes, un bourgeon axillaire plus ou moins dévié, situé à Vaisselle de sa gaîne bisti- pulaire, ou même deux bourgeons collatéraux. Mais, sous le rapport de son mode d'insertion, le cotylédon des Graminées préseute trois modifications anatomiques. Tantôt le nœud cotylédonaire est très-court et la gaîne s’insère immédia- tement au-dessus de l’écusson (T'riticum, Stipa, Secale, Hordeum, Æguops, ete.). Tantôt le nœud cotylédonaire s’allonge par suite d'un accroissement intercalaire, et alors de deux choses l’une : Ou bien cet accroissement Intercalaire porte sur la région infé- rieure de la connexion anatomique; la gaïîne est alors séparée de l’écusson, mais elle lui demeure reliée à travers le paren- chyme cortical du nœud par un faisceau libéro-vasculaire à vais seaux externes qu’on peut regarder comme provenant de l'union des deux branches latérales du faisceau cotylédonaire (Lolium, Bromus, Agroshs, Alopecurus, Phalaris, Oryza, etc., etc.). Ou bien l’accroissement intercalaire porte sur une région de la con- nexion située plus haut; alors la gaîne est encore séparée de l'écusson par un long intervalle, mais sans conserver avec lui de lien vasculaire à travers l'écorce, et l’on pourrait croire que son insertion sur la üge se fait d’une manière indépendante (Zea, Panicum, Sorghum, Eleusine, Coix, etc.). Tel est le résultat de l'étude anatomique des plantules grami- nées. Si l’on se reporte à l'historique, on verra que c’est à peu près la manière dont Gærtner paraît avoir couçu la nature com- plexe du cotylédon, bien qu'il n’ait donné aucune explication à cet égard, et que sa considération inutile du vitellus ait jeté sur le sujet une confusion où l'on a quelque peine à retrouver sa véritable pensée. Les autres observateurs, au contraire, parais- sent n'avoir entrevu qu’une partie de la vérité. L'écusson est bien le cotylédon, comme l’admettaient Malpighi, Mirbel, ete. mais il n'est pas le cotylédon tout entier, même si l’on y joint, avec Schleiden, Schacht, etc., la petite languette opposée. La piléole DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 265 est aussi le cotylédon, comme le voulaient L. CI. Richard et ses adhérents; mais elle n’est pas le cotylédon toutentier (1). Écusson avec le lobule opposé, quand il existe, et piléole, sont deux par- ties de la même feuille, qui est le cotylédon de la plante. Des lors disparaissent les objections qui rendent inadmissibles toutes ces solutions partielles, et qui ne s'adressent qu’à ce qui manque à chacune pour être complète. [IT Comparaison de la feuille cotylédonaire avec les autres feuilles de la plante. La composition de la feuille cotylédonaire des Graminées étant bien comprise, cherchons à la rattacher aux autres appendices de la plante, notamment à la feuille végétative et à la feuille mère du rameau floral. La feuille végétative des Graminées se compose d’une gaine, d'un limbe et d’une ligule insérée au point de jonction de la gaîne et du limbe. Cette dernière partie est ordinairement peu développée, privée de chlorophylle et de stomates, et exclusi- vement parenchymateuse; mais dans quelques cas, comme M. Duval-Jouve l’a montré récemment pour le Psamma arena- ria, elle atteint jusqu’à A centimètres de longueur, et possède alors des nervures latérales le long desquelles se forment de la chlorophylle et des stomates. La ligule représente donc bien une double stipule axillaire et engaînante. De ces trois parties constitutives de la feuille, c’est la gaîne que se forme la dernière, et elle est produite par un accroissement intercalaire qui sou- lève le limbe et la ligule. Comparée à cette feuille végétative, la feuille cotylédonaire se montre dépourvue de gaîne, c’est-à-dire de cette partie qui se (4) Nous avons cité, page 240, la phrase suivante de L. CI. Richard: «lIlest incon- testable que le tube du Canna appartient au cotylédon; donc celui des Graminées est aussi formé par le cotylédon, » [analogie qui a frappé L. CI. Richard est parfaitement juste, et il suffit de l’exprimer d’une manière plus rigoureuse, en écrivant: @Il est incontestable que le tube du Canna appartient au cotylédon, donc eciui des Grami- nées appartient aussi au cotylédon», pour énoncer la vraic solution, 266 PIE. VAN TIEGHINNE. développe en dernier lieu par l'effet d’une rapide multiplication des cellules à la base même de l'organe. Elle est frappée d’un arrêt de développement. Son limbe sessile s’allonge peu et se transforme pour donner l’écusson. Mais, en revanche, sa ligule, également sessile, atteint une dimension beaucoup plus grande que dans la feuille végétative de la plupart des plantes et de même ordre que la ligule des feuilles du Psamma arenaria ; elle est pourvue de deux nervures latérales le long desquelles elle acquiert de la chlorophylle et des stomates ; elle constitue la piléole. De son côté, la feuille mère, du rameau floral ou, comme on l'appelle généralement, la glumelle inférieure de la fleur, se com- pose de trois parties distinctes, dontun récent travail de M. Duval- Jouve (1) nous à fait mieux connaître la structure, le mode de développement et la valeur morphologique. La région de l'or- gane inférieure au point d'insertion de l’arête est munie de trois nervures et correspond à la gaîne de la feuille végétative. L'arête qui reçoit le faisceau médian de la gaine correspond au limbe de la feuille végétative. Enfin, la région de l'organe supérieure au point d'atiache de l’arête, souveut bifide, toujours dépourvue de nervure médiane et où se prolongent les deux nervures laté- rales de la gaine, est une ligule plus développée que celle de la feuille végétative, semblable par sa structure à celle du Psamma arenaria. De ces trois parties constitutives dont le développement relatif est très-inégal suivant les plantes, les deux dernières, e’est- à-dire larête et la ligule, apparaissent tout d'abord et en même temps. La région inférieure à l'insertion de l’arête ne se forme que plus tard,et même dans certaines plantes elle ne s’allonge que très-peu où pas du tout, de sorte que l’arête et la région supé- rieure de la glumelle y sont et y demeurent sessiles. Dans ce der- nier cas l’analogie de composition est complète entre la feuille cotylédonaire et la feuille mère du rameau floral. L'éeusson de l’une répond à l’arête de l’autre, et la piléole de la première cor- respond, avec un développement encore plus grand, à la ligule binerviée de la seconde. (4) Étude anatomique de l'aréle des Graminées (Mém. de l'Acad, des sciences et lettres de Montpellier, A8TA), DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 267 De la feuille végétative on passe done à la glamelle inférieure de la fleur par une transformation du limbe, un plus grand développement de la ligule et un moindre allongement de la gaine, et il suffit de faire un pas de plus dans la même voie pour passer de la glumelle inférieure de la fleur au cotylédon de l'em- bryon. Il y a unité de composition. Néanmoins nous savons que la feuille cotylédonaire présente chez un grand nombre de Graminées un caractère singulier et dont je ne connais pas d'exemple dans les autres feuilles des plantes de cette famille. C’est la dissociation du limbe (écusson) et de sa ligule bistipulaire (piléole), provoquée par un accroisse- ment intercalaire de la tige, par une élongation du nœud coty- lédonaire, dont le limbe occupe le bord inférieur et la ligule le bord supérieur. IV Orientation de l’embryon sur la plante mère. Nous venons de voir que, dans toutes les Graminées, la feuille cotylédonaire, formée de deux parties, ne reçoit de la tige qu’un faisceau trifurqué. La seconde feuille reçoit ordinairement sept faisceaux, dont un médian, et elle est insérée à 180 degrés de la première ; ainsi des autres. Toutes les feuilles de la tige principale ayant ainsi leurs nervures médianes dans un seul et même plan, il n’est pas sans intérêt de rechercher quelle est Ja position de ce plan des feuilles de la plante nouvelle : 4° par rapport au plan de symétrie de la graine; 2° par rapport à la bractée-mère de la fleur de l'organisme ancien qui a produit cette graine, Le sillon de la graine marquant la position du raphé, on voit que le plan qui contient l'axe de la tigelle et la nervure médiane du cotylédou, et par conséquent le plan des feuilles de la plante nouvelle, coïncide avec le plan de symétrie de la graine, c’est-à- dire du lobe-de la feuille carpellaire dont la transformation à produit l'ovule. Ensuite, si nous redressons cet ovule, nous voyons que le cotylédon se trouve inséré, sur la tigelle renver- sée, à 180 degrés du lobe séminal. La premiére feuille de l'être nouveau fait done, avec le lobe foliaire de l'être ancien où il 268 PH. VAN TIEGHEM. estné, un angle de divergence de 180 degrés, divergence qui se conserve ensuite entre toutes les feuilles successives de cet être nouveau. Considérons maintenant les choses par rapport à la bractée mère de la fleur. La graine présente son sillon, et par conséquent l'embryon tourne son cotylédon du côté de la bractée posté- rieure ct bmerviée de la fleur (glumelle supérieure). Si done, négligeant tous les intermédiaires, nous passons de la bractée mère ou glumelle inférieure, à l'embryon dressé qui se trouve à son aisselle, nous voyons que la première feuille de cet embryon est, sur sa ligelle, située à 180 degrés de la braciée mère. Le plan des feuilles de la plante nouvelle coïncide ainsi avec le plan des feuilles du rameau qui la porte, et dans le passage de l’un à l’autre la divergence se conserve. En d’autres termes, sur l’em- bryon considéré comme production axillaire de la bractée mère de la fleur, le distique s'établit longitudinal, avec une diver- gence de passage de 180 degrés, tandis que sur un rameau végé- taf il s'établit transversal par rapport à la feuille mère, avec une divergence de passage de 90 degrés. V Sur le cotylédon des Cypéracées. L'organisation et le mode d'insertion du cotylédon des Gra- minées étant bien connus par ce qui précède, il est nécessaire de rechercher maintenant si les choses se passent de même dans les Cypéracées. Comme celui des Graminées, l'embryon des Cypéracées possède, en effet, un écusson latéral appliqué contre l’albumen, et sa gemmule est coiffée par une gaine conique ou piléole superposée à l’écusson. Comme dans les Graminées, la valeur morphologique de ces deux parties a été et est encore aujourd'hui très-diversement appréciée. Ainsi, par exemple, Mir- bel tient l’écusson pour le cotylédon tout entier et la piléole pour la seconde feuille de la plante, tandis que pour Adr. de Jussieu, l’écusson n'étant qu'une expansion latérale de la tigelle, la piléole devient le cotylédon tout entier. DU COLYLÉDON DES GRAMINÉES. 269 Pour décider la question, cherchons en prenant pour exemple le Cyperus refleæus, comment le système vasculaire se distribue dans la plantule en voie de germination. Entre l’écusson, qui demeure inclus dans la graine, et la piléole, qui est amenée à la lumière, il se développe dans le Souchet, comme dans la majorité des Graminées, un intervalle de tige qui, dans l'espèce considérée, peut atteindre un centimètre de longueur (1). C’est toute cette région critique, comprise entre la base du pivot et l'insertion de la première feuille verte, qu'il faut étudier avec soin. La limite entre la racine principale et la tige est nettement . accusée au dehors, car on passe brusquement de l’épiderme gri- sâtre et hérissé du pivot à l’épiderme blanc et lisse de la tigelle. Un peu au-dessus de cette limite, il s'échappe du cylindre cen- tral de la tigelle un faisceau libéro-vasculaire qui traverse le pa- renchyme cortical et se rend dans l'écusson. Après y être entré, ce faisceau se dédouble dans le plan du rayon, et tandis que la branche externe continue la direction primitive et s'enfonce de plus en plus profondément dans la graine, l’autre revient dans la tige, et s’y relève dans le parenchyme cortical en tournant en dehors ses quelques vaisseaux aunelés et en dedans ses cellules libé- riennes. Ce faisceau cortical inverse parcourt tout l'intervalle entre Pécusson et la piléole sans contracter aucun lien avec le cylindre central. Parvenu à l’insertion de la gaîne piléolaire, il s'y rend tout entier, chemine dans toute sa longueur sans se diviser, et vient se terminer dans un petit prolongement libre superposé à l’écusson. C’est au niveau d'insertion de la piléole que prennent naissance les racines adventives : la première ap- paraît sous la piléole, la suivante sous la première feuille verte qui reçoit de la tige trois faisceaux, et ainsi des autres. On voit qu'il existe entre l’écusson et la piléole des Cyperus un lien vasculaire qui fait de ces deux parties superposées une seule et même feuille, le cotylédon de la plante, et que l'intervalle de tige qui sépare ces deux parties du cotylédon est dû à une simple (1) Il en est de même dans les Carex. Voyez Mirbel, one 1815, pl, 59, fig. 5. 270 | PH. VAN TIEGHEM. élongation du nœud, Les choses s'y passent donc comme dans les Graminées de la seconde section, c’est-à-dire comme dans la majorité des plantes de cette famille. Il n’y a qu’une différence, c'est qu'ici le faisceau cortical inverse se rend directement, sans se dédoubler n1 changer de direction, dans la piléole uni- ner viée. Cette piléole n’en est pas moins une gaîne bistipulaire, car si nous nous rappelons que les branches vasculaires latérales de deux feuillesopposées peuvent s’unir deux à deux pour former les ner- vures médianes de deux foholes bistipulaires alternes avec ces feuilles, comme dans le Galium cruciatum, par exemple, nous concevrons facilement que les deux branches vasculaires laté- rales de la même feuille puissent s'unir en face d'elle pour former une gaîne bistipulaire uninerviée, superposée à cette feuille. VI Sur le cotylédon de quelques autres Monocotylédones. Nous venons de voir que dans les Graminées et les Cypéra- cées le cotylédon ne reçoit de la tige qu'un seul faisceau qui se partage aussitôt entre le limbe hypogé et la gaine bistipulaire ascendante, de manière que chacune de ces deux parties ait désormais son système vasculaire propre. Il n’est pas sans inté- rèt de rechercher, en terminant ce travail, comment s'opère dans quelques autres Monocotylédones l’insertion vasculaire du cotylédon sur la tigelle, et comment le système vasculaire du co- tylédon se distribue dans les diverses parties qui peuvent entrer dans la composition de cet organe. Rappelons-nous d’abord les principales différences que les Monocotylédones présentent dans leur mode de germination. Ces différences dérivent de deux sources distinctes : la présence ou l’absence d’une tigelle hypocotylée et l'organisation variable du cotylédon lui-même. Quelquefois, en effet, la tigelle se développe au-dessous de la base du cotylédon, qu'elle reporte à une assez grande distance de la limite qui sépare la racine principale de la tige (Asphodelus DU COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 274 tenuifolius, Tradescantia virginica, Commelyne stricta, Tigridia pavoniu, Alisma Plantago). Le plus souvent, au contraire, l’al- longement de la tigelle est nul, et le cotylédon s'insère très- près de cette limile (Allium Cepa, Lilium Martagon, Aspho- delus ramosus, Phæœnix dactylifera, Richardia africana, Iris Monieri, etc.). D'autre part, le cotylédon se compose de trois parties : une gaîne inférieure, un limbe qui la continue, et une manchette in- sérée au point de jonction de la gaine inférieure et du limbe, manchette que j'appellerai gaine supérieure du cotylédon parce qu'elle n'est que le prolongement de la gaine inférieure au- dessus du point de départ du limbe. Mais le développement relatif de ces trois parties du cotylé- don, pendant la germination, est très-inégal, et 1l en résulte des différences d'organisation qu'on peut classer comme il suit : 1. La gaine supérieure ne se développe pas. A. La gaine inférieure prend un accroissement notable, a. Le limbe s’allonge beaucoup, se produit à la lumière et verdit. Ex. : Allium Cepa, Lilium Martagon, Juncus bufonius, Asphodelus tenuifolius, Alisma Plantago. b. Le limbe s'allonge peu et demeure inclus dans la graine. Ex.: Phænix dactylifera, Richardia africana, Asphodelus ramosus, Alpina speciosa. B. La gaine inférieure ne prend pas d’accroissement. Le limbe s’allonge peu et demeure inclus. Ex.: Seaforthia elegans, Arum vulgare. 2. La gaine supérieure se développe. À. La gaine inférieure prend un accroissement notable. Le linbe s’allonge peu et demeure inclus. Ex. : Bulbine annua, T'radescantia virginica, Commelyne stricta. B. La gaine inférieure ne prend pas d’accroissement. Le limbe s’allonge peu et demeure inclus. Ex. : Zris Monieri, Tigridia pavonia, Y'ucca gloriosa, Asparagus officinalis, Canna indica. 272 PH. VAN TIEGHEM. C’est à cette dernière catégorie qu’on peut rattacher les Gra- minées et les Cypéracées. Cela posé, cherchons quelle est dans ces divers cas la distribu- tion du système vasculaire dans le cotylédon. S'iln’y à pas de gaine supérieure, tous les faisceaux vasculaires que la tigelle envoie au cotylédon se rendent directement au limbe après avoir traversé la gaîne mférieure. Tantôl le cotylédon re- çcoit un seul faisceau qui reste indivis (J'uncus bufonius), ou qui se fend en deux moitiés qui demeurent rapprochées par leurs pointes vasculaires (4llium Cepa, Lilium Martagon), où qui se bifurque en divisant aussitôt chacune de ses branches, de manière à former, par exemple, huit nervures dans le limbe (Seaforthia elegans). Tantôt il recoit deux faisceaux émanés du cylindre central en deux points fort éloignés (Asphodelus ra- mosus), tantôt trois (4sphodelus tenuifolius), tantôt un plus grand nombre (Phænix dactyhfera). S'il va une gaîne supérieure, ou bien cette gaîne est exclusi- vement parenchymateuse, et les choses se passent comme plus haut avec un seul faisceau (Zris Monieri), où deux (Bulbine annua), ou trois (Asparagus officinalis); ou bien cette gaîne con- tient des faisceaux vasculaires, et alors, au moins pour les quel- ques cas de ce genre qui me sont connus, ces faisceaux sont tou- jours les mêmes que ceux que l’on rencontre dans le limbe. Ainsi, par exemple, dans les Tradescantia et Commelyne, la tigelle envoie deux faisceaux au cotylédon. Ces deux faisceaux montent dans Ja gaine inférieure ; mais l’un d'eux, parvenu vers la moitié de la longueur totale de la gaîne, s’incurve dans le limbe cotylédonaire, qui s’insère par conséquent sur un des côtés de sa gaîne, tandis que l’autre s'élève jusqu’au sommet de la gaine supérieure, s’y réfléchit en arcade, et redescend dans là direction du premier faisceau pour pénétrer à son tour dans le limbe inclus. Dans le Canna indica, les deux faisceaux médians de la gaîne inférieure pénètrent tout de suite dans le limbe inclus, les autres remontent jusqu’au sommet de la gaine supérieure, puis redescendent en arcade pour entrer avec les premiers dans le Himbe. Les Graminées et les Cypéracéesse distinguent donc desautres COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 278 Monocotylédones, au moins de toutes celles que nous venons de passer en revue, par une spécialisation plus grande, une sépara- tion plus profonde entre le limbe et la gaîne supérieure. Cha- cune de ces parties du cotylédon y a, en effet, ses faisceaux propres qui ne font pas retour à l’autre, tandis que chez les autres Monocotylédones, même quand la gaîne supérieure est le plus développée possible et pourvue de faisceaux vasculaires, ces faisceaux font toujours retour au limbe. Il n’en est pas moins vrai qu'il y a toute une série de transitions entre les deux états extrêmes présentés par le cotylédon des Monocotylédones, celui où la gaîne supérieure n'existe pas, comme dans l’Ail et le Lis, et celui où cette gaine supérieure prend par rapport au limbe non-seulement une grande prédominance, mais encore une 1n- dépendance presque complète, comine dans les Gramimées et les Cypéracées. s EXPLICATION DES FIGURES. PLANCHE 13. Triticum sativum. Fig 4. Section transversale de la plantule au-dessus de l'insertion des racines adven-. tives de germination, — e, bords libres de la partie descendante de l’écusson ; t, tigelle contenant dans son parenchyme cortical trois nouvelles racines adventives très- jeunes. Le cylindre central de la tigelle, enveloppé par la membrane protectrice p, a ses vaisseaux disposés en un certain nombre d’arcs superposés à autant de groupes de cellules libériennes ; il est donc formé de faisceaux libéro-ligneux encore contigus. Fig. 2. Section transversale de la plantule passant par le point d'émergence du fais- ceau cotylédonaire — e, écusson,; t, tigelle ; f, faisceau trifurqué s’échappant du cylindre central ; la branche médiane se rend à l’écusson, les deux latérales vont se relever dans la piléole. Fig. 3. Section supérieure à la précédente, — e, écusson entièrement libre avec son faisceau médian; p, piléole entièrement séparée de la tige é, munie de deux fais- ceaux libéro-vasculaires qui proviennent du même faisceau primitif que la nervure médiane du cotylédon. Dans ces trois figures, le lobule antérieur a été supprimé. Hordeum vulgare, Fig, 4. Section transversale de la plantule passant par le point d’émergence du fais- ceau cotylédonaire.— e, partie descendante de l'écusson, dont les bords seuls sont 59 série, Bor, T. XV (Cahier u° 5). ? 18 97h PH. VAN MIRGHEN. libres; elle est revètue, comme la partie ascendante, &’un épiderme à cellules allon- gées perpendiculairement à la surface; cet épiderme spécial se retrouve sur lécus- son de toutes les Graminées. Le faisceau cotylédonaire se divise en quatre au point même où il émerge; Les deux branches externes se rendent à l’écusson où elles se relèvent côte à côte; les deux internes se dirigent horizontalement en sens inverse, rasent le cylindre central et se relèvent presque en face l’une de l’autre dans la piléole; 7, r, jeunes racines adventives. Fig. 5. Écusson, libre désormais, avec ses deux faisceaux, qui ne tardent pas à se diviser latéralement. Fig. 6. Section de la plantule immédiatement au-dessus de l'insertion de l'écusson. — p, piléole séparée de la tige € et munie de ses deux faisceaux libéro-vasculaires ; d, bourgeon axillaire de la piléole, un peu dévié latéralement. Fig. 7. Section transversale d'une autre plantule au même niveau, — La piléole p est munie de deux bourgeons collatéraux 6, b'; chacun d’eux a sa première feuille simple tournée du côté où il est dévié. Avena sativa. Fig. 8. Section transversale de la plantule au niveau d'émergence du faisceau coty - lédonaire.— e, écusson ; /, lobule; #, tigelle. Le faisceau cotylédonaire simple f se dédouble d'avant en arrière eu traversant le parenchyme cortical. Fig. 9. Section suivante. — Le dédoublement cst opéré. La branche externe c s'élève, trachées en dedans, dans l’écusson, qui ne tient plus à la tigelle que par une petite surface, et s’en sépare aussitôt, La branche interne d s'élève, trachées en dehors, dans le parenchyme cortical. Fig. 40. Section de l'intervalle de tige qui sépare l'insertion de l'écusson de celle de la piléole, en son milieu.— d, faisceau corlical inverse; il tourne ses vaisseaux eu dehors, son liber eu dedans, et sur son bord externe on voit une lacune cylindrique provenant de la résorption des vaisseaux annelés les plus externes. Fig. 11. Au voisinage de l'insertion de la piléole, le faisceau cortical 4 se rapproche du cylindre central. Fig. 42. Il se met en contact avec le cylindre qui s'élargit en même temps, ct aussi tôt il se bifurque; ses deux branches 2,4, se dirigent horizontalement en sens inverse, et vont se relcver dans la piléole, qui se sépare aussitôt. Fig. 13, Section suivante, — La piléole p est séparée de la tige {, et munie de deux foisceaux ?, ?, presque diamétralement opposés, mais plus rapprochés en arrière, du côté de l’écusson, Fig. 44. Section d'une autre plantule, immédiatement au-dessus de la séparation de la piléole.— b, bourgeon situé à l’aisselle de la piléole du côté de l’écusson et un peu dévié latéralement. Fig. 45. Section d’une autre plantule au-dessus de la séparation de li première feuille verte F.— &b/, bourgeon axillaire de cette première feuille verte, dévié latéra- lement et rejeté du cèlé où la deuxième feuille verte étendra son bord recouvrant. COTYLÉDON DES GRAMINÉES. 279 Phalaris canariensis, Fig, 16. Section transversale de la plantule au-dessous de la limite entre la racine principale et la tige.— c, coléorhize ; e, partie descendante de l'écusson unie à la coléorhize et revêtue, comme toujours, d’un épiderme à cellules perpendiculaires; r, racine principale. Fig. 17. Section passant par le point de départ du faisceau cotylédonaire,— e, écusson qui n’adhère plus à la ligelle que par sa partie médiane; #, tigelle; /, faisceau coty- lédonaire simple, qui se dédouble d'avant en arrière dans son trajet à travers le parenchyme cortical. La branche externe se rend à lécusson qui se détache aussi tôt. L'autre se relève, vaisseaux en dehors, dans la région moyenne du parenchyme cortical. Fig. 18. Section de l'intervalle de tige qui sépare l’écusson de la piléole,— d, faisceau cortical tournant son liber en dedans, ses vaisseaux en dehors. Fig, 49. Sous l'insertion de la piléole, il se replace à la périphérie du cylindre cen- tral élargi. Aussitôt il se bifurque, et ses branches 7, à, divergent horizontalement pour se relever dans la piléole. Fig. 20. La piléole p se sépare aussitôt avec ses deux faisceaux 4,1, rapprochés en arrière du côté de l’écusson; F,K/, première et seconde feuilles vertes de la plante, PLANCHE Ah: Zea Mays. Fig. 21. Section transversale de la plantule à quelque distance au-dessous de la limite entre la racine principale et la tige.—e, partie descendante de l'écusson sépa- rée de la coléorhize, sauf dans le voisinage des bords, et sillonnée sur sa face interne; €, coléorhize fort épaissie en avant; >, racine principale. Fig, 22. Section transversale passant par le point d'émergence du faisceau cotylédo- paire.— €, écusson n’adhérant à la tigelle que par le milieu de sa face interne. Le faisceau cotylédonaire se trifurque en émergeant; sa branche médiane f se rend à l’écusson, où elle se relève et qui achève aussitôt de se séparer, ses branches laté- rales #, {, rasent le cylindre central, mais, sans le quitter, elles se relèvent sur ses flancs. Fig, 23. Section de l'écusson au moment où il vient de se séparer.— Son faisceau, où les vaisseaux présentent une disposition curieuse, émet des branches qui s’incurvenut et se rendent dans la partie descendante de l’écusson. Fig, 24. Section transversale de l'intervalle de lige qui sépare l’écusson de la piléole, immédiatement au-dessus de l'insertion de Pécusson, Fig. 25, Section du même intervalle en son milieu. La disposition des vaisseaux s'y est un peu modifiée. Fig. 26. Section de la tige sous l'insertion de là piléole,— 2,7, branches latérales du 976 PI. VAN FIEGMENM. faisceau cotylédonaire, ayant séjourné jusque-là dans le cylindre central, et qui s'en échappent pour se relever dans la zone externe du parenchyme cortical. Fig. 27, Section suivante. — Les faisceaux 7,7, sont relevés; sauf le groupe externe qui manque ici, la disposition des vaisseaux y est la même que dans la nervure de l'écusson. En même temps que s’échappent les branches #, 1, les éléments libériens et vasculaires du cylindre central s’ajustent en faisceaux libéro-vasculaires séparés et rangés dans le parenchyme conjonctif. Fig. 28, Section suivante. — La piléole p est séparée de la tige avec ses deux fais- ceaux t,2, presque diamétralement opposés. F, première feuille verte avec nervure médiane opposée à l’écusson; 4, tige. Sorghum vulgare. Fig. 29. Section transversale de la plantule à quelque distance au-dessous de la limite entre la racine principale et la tige. — e, partie descendante de l’écusson, entièrement indépendante de la coléorhize qu’elle engaine ; c, coléorhize ; r, racine principale. Fig, 30. Section de la plantule au niveau d'insertion de l’écusson.— La partie médiane du faisceau cotylédonaire total se rend à l’écusson, qui ne tient à la tigelle £ que par un isthme fort étroit. Les deux branches latérales se relèvent de chaque côté à la périphérie du cylindre central. Fig. 31. Section de l'intervalle de tige qui sépare l’écusson de la piléole, immédiate- ment au-dessus de la séparation totale de l’écusson. Fig. 32. Section du même intervalle vers son milieu; la disposition des vaisseaux s’est un peu modifiée. Fig. 33. Section de la tige sous l'insertion de la piléole.— Les deux branches latérales ä,t, du faisceau cotylédonaire trifurqué, émergent et vont se relever presque en face l’uue de l’autre dans la piléole. En même temps les éléments vasculuires et libériens du cylindre central se réunissent en faisceaux libéro-vasculaires distincts. Fig. 34. Section suivante. — p, piléole avec ses deux faisceaux; #, tige. Fig. 35. Section un peu plus haut. — y», piléole; F, première feuille verte; F7, F7, seconde et troisième feuilles vertes. Si le bord recouvrant de la première feuille verte est à droite, le bord recouvrant de la seconde est à gauche, et ainsi de suite. Cette alternance s’observe dans toutes les Graminées. x Fig. 36. Section transversale de la base du rameau développé à l’aisselle de la seconde feuille verte d’une plantule de Coix lacryma, — p, préfeuille du rameau avec son double système de faisceaux latéraux ; D, bourgeon de droite de la pré- feuille ; 6’, bourgeon de gauche. Ces deux bourgeous sont diamétralement opposés. lt, axe du rameau. ÉTUDES sUR LA VÉGÉTATION DU SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE Par le eomte Gaston de SAPORTA. SUPPLÉMENT 1. RÉVISION DE LA FLORE DES GYPSES D'AIX. I PARTIE GÉNÉRALE. Plusieurs motifs nous ont déterminé à entreprendre une révi- sion totale de la Flore des gypses d'Aix. C’est d’abord son im- portance, soit à raison du nombre de ses espèces, soit par suite de sa position sur la limite de deux âges, à la fin de l’éocène proprement dit et au seuil du tongrien ; c’est encore la quantité de documents nouveaux réunis entre nos mains au moyen d’ex- plorations répétées. Effectivement, les lits à empreintes végé- tales d’Aix ne sont restreints n1 à un seul point, ni même à une seule assise; ils se composent de strates de nature très-variée, qui se prolongent, sur une distance de plusieurs kilomètres, du quartier de Saint-Donat à la montée d'Avignon, et plus loin encore jusque dans les environs d'Eguilles. Dans tout ce péri- mètre, les lits en question fournissent des empreintes dès que le marteau peut les atteindre, c’est-à-dire partout où les coupures du sol et les accidents de l’exploitation agricole en mettent au jour des affleurements. La quantité des échantillons recueillis depuis dix ans est si considérable, que la physionomie de l’en- 278 &. DE SAPORTA. semble, telle que je l'avais présentée en premier lieu, s’en trouve sensiblement modifiée; de sorte qu’un simple supplément n’au- rait pas sufli à l’exposé des changements devenus nécessaires. Un troisième motif doit être tiré de la méthode que nous avons tâché d'appliquer à l'étude des plantes fossiles, pour la faire sortir de plus en plus de l’état de vague et, pour ainsi dire, de caprice individuel auquel elle se trouvait livrée lors de nos débuts. Par cela même qu'il était question des flores tertiaires, l'observateur paraissait, aux yeux du savant sérieux, affranchi de toute règle. Les dénominations génériques étaient souvent appliquées d'après des analogies si peu raisonnées, qu'il était impossible d'en saisir le sens et de préciser ce qui avait pu dé- terminer l’auteur à adopter telle opinion plutôt que telle autre. Il s’est manifesté à cet égard, jusque dans ces derniers temps, il faut l’avouer, une facilité déplorable, et cependant, comme nous l'avons affirmé dès le premier jour, il existe une filiation natu- relle et un enchaînement des phénomènes dont il est absolument besoin de se rendre compte, si l’on veut éviter de tomber dans une confusion complète. Le succès, dès qu'il s’agit de botanique fossile, tient à la persistance et à la multiplicité des efforts ap- pliqués à la poursuite de la réalité; mais il demeure précaire st, au préalable, on n’a soin de circonscrire le champ que l’on par- court dans des bornes rationnelles, en considérant l’ancienne végétation comme solidaire de celle de nos jours, et l'Europe des âges géologiques comme ayant été liée en divers temps aux ré- gions qui l'entourent médiatement ou immédiatement. Cette dernière liaison, il est naturel de le remarquer, a dû être d’au- tant plus efficace autrefois, que le climat n’était pas alors, comme aujourd'hui, un obstacle à ce que notre continent reçût des terres attenantes ou qu'il leur transmit les formes qui l'ont suc- cessivement habité. Les liens analogiques qui rattachent la végétation de l'Europe tertiaire à celle de certains pays commencent à se laisser analy- ser, et leur vrai sens se dégage de plus en plus. Variables selon les âges, prédominant tantôt dans une direction, tantôt dans une autre, ces sortes de rapports se renferment presque constamment LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 279 dans un périmètre régional, dont ilsera possible plustard de fixer les limites pour chaque période en particulier; et déjà même, dans certains cas, amsi que nousle démontrerons, ces limites deviennent visibles. D'ailleurs, l'Europe éocène, il est bon de le rappeler, constituait sans aucun doute une région tropicale suè generis, au même titre que l'Afrique intérieure, l'Amérique cen- irale et les îles indiennes. À ce ütre, elle possédait une physio- nonue végétale qui lui était propre et qu’elle a perdue ensuite, après qu'elle se fut graduellement altérée; en sorte que, pour retrouver les traits épars de cette physionomie primitive, il est paturel de s'adresser aux régions moins ravagées qu’elle ne l'a été par l’abaissement de température survenu postérieurement. C’est pour cela que la Louisiane et la Floride, les Canaries, l'Afrique, l’Asie orientale ou méridionale et le Japon ont souvent fourni des termes de comparaison excellents avec l’ancienne flore européenne. Ces pays ont gardé quelque chose de ce que nous possédions jadis en commun avec eux. La région euro- péenne, centrale par rapport à ceux-ci, a été dévastée presque entièrement, mais sur les frontières extrêmes de cette région, une partie au moins des éléments constitutifs de la végétation fossile subsiste et peut servir à reconstruire l'ensemble. Cette marche est parfaitement logique, et c’est celle que nous avons adoptée. — Mais tenter l’inverse, c’est-à-dire croire retrouver, en dehors de toutes les prévisions et sans preuves d’aucune sorte, daus l’ancienne Europe, des spécimens typiques emprun- tés aux régions les plus excentriques, comme le Brésil, le Pérou et le Chili; transporter sur notre sol, sur la foi d'empreintes faiblement caractérisées, des groupes entièrement étrangers à notre zone; y introduire le type des Mélastomacées ou celui des Faqus antarctiques et des Æpacris australiens, comme l’a fait M. Unger (1), en basant son opinion sur l’observation d’une seule feuille très-peu concluante, c’est dépasser, à notre sens, (4) Voy. Die foss. F1. von Kumi auf d. ins. Eubæa, p. 28, tab. &, fig. 49; et Neu- Holland in Europa, p. 70, fig. 26. 280 G. DE SAPORTA. toutes les bornes du raisonnable et risquer de faire échouer une science pleine d'avenir contre de misérables écueils. Quelquefois, il est vrai, l'erreur provenant d’une attribution hasardée s'explique d'elle-même par l'effet d’une découverte heu - reuse. C'est ainsi que le Getonia petreæformis Ung. (1) et l'Ela- phrium antiquum (2) du même auteur, observés isolément à Ra- dobo], se sont trouvés réunis à Aix dans la même fleur, et répon- dent en réalité à un genre éteint d’Anacardiacées,ce qui fait dis- paraître de la nomenclature fossile un genre tropical américain dont rien ne Jjustifiait la présence dans l'Europe tertiaire. Au contraire, l'existence constatée du genre A?/antus n'a rien qui doive surprendre, lorsqu'on songe qu'il se montre aujourd'hui sur divers points de l'Inde, aussi bien qu’en Chine et au Japon. Mais, avant de faire admettre que l’on ait rencontré à l’état fossile le type péruvien des Cinchona, il faudrait pouvoir alléguer, ce que n’a pas fait M. Unger, des indices beaucoup plus sérieux que de simples feuilles sans caractères tranchés ou d’informes débris d’inflorescence. Il ne s’agit pas de nier par là la présence pos- sible et même probable de Rubiacées frutescentes au milieu de l'Europe tertiaire, mais de ne pas affirmer sans preuve décisive qu’elle possédait jadis de vrais Quinquimas; or, notre continent pouvait très-bien comprendre des types particuliers de Rubia- cées, de même que le Pérou de nos jours a les siens. -- Ne pas affirmer sans preuve ou du moins sans un commencement de preuve, et surtout s'appuyer, dans les hypothèses qu'on propose, sur la vraisemblance, nous paraît devoir être la grande règle de la botanique fossile. Aux assimilations hasardées auxquelles divers savants se sont laissé entrainer, il convient d’ajouter celles qui con- cernent la végétation actuelle de l’Australie. Qu'il y ait effec- tivement entre l'Australie moderne et l’Europe éocène des liens analogiques de plus d’une sorte, que l'on considère les (4) Chlor. protog., p. 439, tab. 47, fig. 43, et Syll. pl. foss., TE, p. 55, tab. 17 fig. 4-5. (2) Sy. pl. foss., 1, p. 47, tab. 24, fig. 47-22. LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 281 animaux ou les plantes, cela nous paraît peu contestable, et il semblerait à plusieurs égards que l'Australie, au lieu de se trans- former comme les autres contrées, soit demeurée stationnaire et donne aujourd’hui le tableau d’une portion du monde conser- vant la physionomie qu'avait autrefois le reste du globe; pour elle, l'aiguille du temps se serait arrêtée ou du moins aurait marché moins vite sur le cadran des siècles. Cela posé, il nous semble que l'assimilation à établir entre l'Australie et l'Europe éocène ne va guère au delà d’un simple parallélisme et d’une correspondance de formes déjà assez remarquable par elle-même pour que l’on se garde d’en exagérer la portée. C’est ce qu'on fait lorsqu'on suppose la présence dans notre hémisphère de types australiens qui vraisemblablement n’y ont jamais paru, tandis que notre sol a fort bien pu nourrir autrefois des genres de végétaux voisins de ceux d'Australie ou simplement analo- gues à eux par leur facies et quelques-uns de leurs caractères, sans que cette ressemblance, dont il est maintenant très-difficile d'apprécier le degré, soit cependant allée jusqu’à lidentité. Si l’Europe tertiaire avait possédé de vrais Banksia, des Dryandra proprement dits et des Æucalyptus, les feuilles tronquées au sommet des premiers, les lobes caractéristiques des seconds, la nervation aisément reconnaissable des derniers, enfin, par-des- sus tout, les fruits des uns et des autres seraient certainement venus jusqu'à nous, au moyen d'empreintes non douteuses. Or, aucune des espèces fossiles de Banksia où Banksiles, signalées jusqu'ici, n’a reproduit assez nettement les caractères propres à ce genre australien pour faire évanouir les doutes attachés à sa déter- mination ; on peut en dire autant des Dryandra fossiles, puisque le seul dont on ait découvert les fruits ({ Dryandra Schrankii Heer) s’est trouvé être un Comptonia (Comptonia dryandreæ/folia Brngt). Enfin, aucune feuille d'Eucalyptus, parmi celles qui ont été pu- bliées sous ce nom, ne présente rien de plus qu'une ressemblance vague avec celles des Zucalyptus vivants, et les organes figurés par M. d'Ettingshausen, dans sa Flore de Hwring, comme se rap- portant à des calices et à des fruits de ce genre, ne sont en réalité 282 G. DE SAPORTA. pas autre chose que des empreintes de coussinets et des cicatrices d'insertion de radicules de Nymphéacées, sortes de vestiges des plus répandus dans la plupart des localités tertiaires. Tels sont les principes qui nous ont constamment dirigé dans la révision dont nous allons exposer les résultats. Un examen plus rigoureux, appuyé d’un plus grand nombre d'échantillons pour chaque espèce, l'expérience de dix années de travaux cor- stants, l'étude comparée du réseau veineux des feuilles fossiles et vivantes, nous ont permis d'opérer un classement général moins imparfait, que nous avons lieu de croire définitif sur beaucoup de points. Nous aurons soin, du reste, d'exprimer les doutes et les réserves qui s’attachent encore à la détermination de cer- taines espèces; nous nous sommes pourtant efforcé d’en res- tremdre le nombre dans les plus étroites limites, tout en aug- mentant d'une soixantaine environ le chiffre total de celles que nous décrivons. La flore d'Aix devient ainsi une des plus riches et à notre sens des mieux connues que l’époque tertiaire nous ait transmises. C'est pour cela qu'avant d’énumérer toutes les espèces qu'elle renferme, en insistant sur celles qui sont nouvelles ou à propos desquelles nous avons des erreurs et des négligences à relever, il nous paraît indispensable d'examiner cette végétation dans son ensemble, d'en apprécier les divers éléments, et de formuler les considérations auxquelles cet examen donnera lieu, et dont la portée sera d'autant plus grande qu'il s’agit, non-seulement de quelques formes isolées, mais d’une réunion presque aussi nombreuse et certainement aussi variée que les collections de plantes apportées de certames régions lointaines, après une con- sciencieuse exploration. Il est temps de ne pas cacher un dernier motif de notre révi- sion ; il tient à l'introduction dans le corps de notre premier tra- vail d’un petit nombre d'espèces fabriquées par un faussaire (4) (1) Le nom du faussaire est connu; mais sa mort, qui remonte à plusieurs années, rend inutile toute récrimination. Adroit, instruit, bon dessinateur, il fabriquait des médailles, des manuscrits, des fossiles, et répandait ses contrefaçons chez les mar LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 283 à une époque antérieure à nos premières recherches Nous avons hâte de faire disparaître ces espèces adultérines du giron de la science, où elles se sont malheureusement glissées. Ce sont les suivantes: 4° Betula gypsicola (folium), Ét. sur la végét.tert., À, Ann. sc. nat., L° série, t. XVII, pl. 6, fig. 4 B. — La feuille attribuée à cette espèce est falsifiée ; sa provenance n’avait du resterien de commun avec celle de lasamare (/. c., fig. A A), dont l'authenticité demeure incontestable. Cette feuille paraît avoir été calquée sur celles de l’Amelanchier vulgaris. 2 Alnus antiquorum (folium), L. e., pl. 7, fig. 1 A. — La feuille seule est fabriquée; elle paraît modelée sur celles du Salix caprea, L. 3° Oleracites convolvuloides, !. c., pl. 7, fig. 8. — Feuille imitée de celles du Convolvulus arvensis, L. Le Parthenites priscus, L. c., pl. 10, fig. 4.— Feuille qui, malgré cer- taines différences, paraît imitée de celles du Chrys. Parthenium, DC. 5° Hieracites Salyorum, 1. e., pl. 11, fig. 11. —Fragment de feuille imité de celles du Taraxacum vulgare, L. 6° Valerianellites capitatus, l. c., pl. 10, fig. 3. — Tige imitée de celles des Valerianella. 7° Babes Celtorum, L. c., pl. 11, fig. 6. — Feuille imitée de celles du Groseillier des Alpes, mais avec certaines divergences. 8° Acer ampelophyllum, L. e., pl. 12, fig. 4. — Feuille imitée des plus petites feuilles du Vifis vinifera. chands dans le seul but de tromper les acheteurs. IL suffira de dire quelques mots sur le procédé qu'il a employé dans l’imitation des empreintes végétales. IL choisissait des plaques où se trouvait le plus souvent quelque débris de plante ou quelque insecte véritable, et décalquait par-dessus, à l'aide d'une encre grasse, l’objet qu'il voulai reproduire et qui était généralement assez bien choisi, puisque plusieurs des feuilles qu'il a simulées appartiennent à des groupes réellement signalés à l'état fossile. II appliquait ensuite un acide qui mordait partout, sauf sur les points où l’encre grasse avait été déposée, et l'empreinte imaginaire se détachait légèrement en relief avec ses contours et ses nervures colorés en brun. Ces fausses empreintes n’ont jamais la netteté des vraies. Elles ont un air dégradé et comme rongé par les agents atmosphériques, elles sont dépourvues de résidus charbonneux et ne montrent aucune trace de réseau veineux, Une fois averti de la fraude, on la reconnait aisément.— Nous affirmons la par- faite authenticité de toutes Les espèces comprises dans notre révision, et dont la presque totalité sont le fruit de nos recherches personnelles, unies à celles de notre col- lègue et ami M. le docteur Marion. 28h G. DE SAPORTA. 9° Cratægus nobülis, L. c., pl. 14, Gg. 3. — Feuilles calquées sur celles du C. oxyacantha, L. 10 Colutea parcefoliata, L. c., pl. 14, fig. 5.— Feuille imitée de celles du Coronilla glauca. Ces dix espèces doivent donc être éliminées, les deux premières en ce qui concerne les feuilles qui leur avaient été attribuées, les huit autres en totalité. Malgré ce retranchement nécessaire et à la faveur de nos re- cherches, la flore des gypses d'Aix comprend un nombre total de 231 espèces, dont voici le tableau : Tableau général de In flore des gypses d'Aix. CRYPTOGAMES, 12. FAMILLESe GENRES. pue Gupbean, 1 Champignons... ssosose Sphærid............ dauttr Characées...,,..,... sue à CRETE ETS . 4 CRYPTOGAMES CELLULAIRES, 6... : Marchantiées. .,....... Marchantia. soso 1 MOUSSES , sesseresoeeoe Muscites. ..,..... ee CLIQ PERS A crie ioleiehe 1e 3 CRYPTOGAMES VASCULAIRES, 6., Fougères, ...s.....ese Cheilanthes........... 4 Lygodium... se Ha ÈNE LT | PHANÉROGAMES, 219. Callitris, .o.sosssosee 8 Cupressinées. « «.oseee Widdringlonia.. so « | Juniperites. .... ose 4 GYMNOSPERMES, 17.,....,....... Abiétinées. .....sssosee PINUS. uses ss ose e 7 Taxinées..o..eseoocsee POdOCATPUS. css ssves e 6 Graminées. ....sssesce Poacites. ...sosse see 1140 Cypéracées....,........ Cyperiles....o 0 Ses ets NA Gentrolépidées......... Podostachys.........e 4 Rhirocaulées Rhisocaulon. .. 000 4 F0 M Re gt à Pseudophragmites, + « » » « 4 Flabellaria. .. ose 8 Palmiers.. 300000 Sabalites. ...,..,.., oo 4 É 4 Palmacites... DOM OUU 2 MONOCOTYLEDONES, 35.......,.. Asparaginées. .ocssesee . Dracænites. 1... à Smilacées. ,.ssoocsose SMALL ere chose APN | Alismacées..ossesseece Alismaciles.. eee 1 Hydrocharidées. ..,.,.,, Vallisnerit. ....09 0» Gb | L Typha. tetes 4 Typhacées. ,.0e 2e À SpargANUM. à ee uno se g Naïadées. sense ss POAMOQELON = 0 s'ectelee se ES Musacées. ...0060000 0 0 Musophyllum. .....s.0 À LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 285 FAMILLES, GENRES, MYrICÉES ere ln etralielersie I MUC otste ste lalele atete el a AO Bétulacées. ......,.... (Clethropsis. .......... OsErYA TS Re Eee eteee Quercus.. 1.5.0... Ulmacées...,......... Microplelea. ...,.....,e Morées. ... se... A RMICUSE ententes sit DAlICINÉES eee ae eee IPODUIUS TS NS erete latelare ! APÉTALES, 52.../ Oléracées..,.......... Oleracites 2e ER LOUrUS EE Tete Cinnamomum. ..... L Leplomerin. 4: ee see ÉTAT ARRET CO A EEE Thymélées..,.... 4:17... DApANE. 5.00. PNOLEOIES ES eireteteela etats GREVULER Se sers ce ocre LOMAUES M INT Embothrites set COMPOSÉ re 2 erete la ee MUUPSENIES Se atele sales Jasminées.. se. JasSminum......,..... (DÉS ae at ea DT DE Sr Ne ApoCynées etes een ENERIUM esse lets Solanacées. ......... NN OIONUES se eee slelerelelele Myrsinées, .....o..0.0 Myrsine...., Lobbe' non é Sapotaciles ...,..,..,. DICOTYLÉDONES, Sapotacées. eng. tit tt 169. Ébénacées. ........... Di0spyros. ........... Ericacées, ,.........ee ANÜTOMETG. se eos one Vacciniées. ....:.....: VUCCINUMe ner eee see Araliacées. ...,...... ATGlite......, Ho OO AO Gornées.. 4.2. hieltiee MUOTNUS Ses sialeise à 21310 Nymphéacées.'....,..,, Nymphæa. .....,.,,,, Magnoliacées, .....,.., Magnolid..,,...,,,.., BOMbGD a ste ee RENE | Sterculia. ...,..,,..., ACÉTINÉES AT sale ere ares eu ACET el rien ee NES Sapindacées. sous SAPÜMAUS. se sos ce Pittosporées. .......... Pittosporum, .., Célastrinées. ,......... (Celastrus...., ICINÉES 24e sissiee rie LEDels eee Slot Paliurus....,...:.,° Zixyphus. ..... Gupulifères.....,......, { Laurinées,...... Dodo Protéacées. .......... GAMOPÉTALES, 36. 1 Sterculiacées, .,....... OM 00e Rhamnées, ........,.. Palæocarya. .......... = \ DALYPÉTALES, 81. Juglandées, ...,..,..... RRUS SPEARS HeLerOCAL SE SR NS Anacardites. ..., 00 Ailantus..…. Callistemophyllum.. Myrtus...... Pomacées, s..ess90000e COLONEGSIET. ne soso pere Caragana. ......., HOUTON SOS OBOBOOR Phaseoliles. .. 0 SOphora. . ..sssvooouee Micropodium. ...,..,... GERCIS SR NT ENNNE Cæsalpinites. .... 4, Gleditschia.. use. Mimosa. ....ssossssee ACGCI. sr rooooneose ie Leguminosiles + » o + 0 oo v 03e Anacardiacées.. ,. 0, Zanthoxylées.. ...,.,:.. Myrtacées, . .. ss. 0000. Légumineuses,. «50000 & © æ CE en En de (O 2 de A el RO à O9 RO Fæ OD KO Fe D En be dm De Mn PE bn me M ND M Où O) Er © æ où Er cù en æ Pe RO À O1 RD > de > RO EN LO ED DE Ex à O1 > > 286 &. DE SAPORTA. Peu de flores fossiles comptent un aussi grand nombre d’es- pèces décrites ou signalées provenant du même horizon et d’une seule localité. Cependant, OEningen, la plus considérable de toutes, a fourni jusqu'ici 465 espèces; Radoboj, d’après le der- nier recensement donné par Unger, 380; mais Hæring n’en comple que 180, parnn lesquelles plusieurs sont incertaines ; Sotzka, un peu plus de 400; Le Monod seul, 174; Bilin, en se bornant aux espèces des couches de Kutschlin, la plus riche des trois flores locales, 203 ; enfin, Armissan, malgré l’extrème abondance des matériaux, n'excède pas jusqu'à présent 170 à 180 espèces au plus. La flore d'Aix tient donc le troisième rang au point de vue du nombre ; de plus, elle comporte assez peu de . doubles emplois, et si aux espèces dont nous venons de don- ner le tableau on joignait celles dont l'attribution nous a paru trop entachée d'ambiguïté pour entrer en ligne de compte , nous arriverions aisément au chiffre de 250. Toutes ces plantes se rapportent, non-seulement à la même localité, mais à un même ensemble delits superposés pendant le dépôt desquels la végétation a conservé sensiblementle même caractère et possédé les mêmes espèces dominantes et caractéristiques. Cependant cette unifor- mité n’est pasabsolue; il est évident que la succession destrates qui correspond au dépôt des gypses d’Aix a exigé un temps fort long, probablement plusieurs milliers d'années, pendant lesquelles bien des changements partiels ont dû s’opérer, et telle espèce que l’on rencontre vers la base assez fréquemment n’a jamais été remarquée dans la partie exploitée, qui est supérieure à l’autre. Nous avons eu soin, en décrivant chaque espèce, de marquer sa provenance, soit de la base, soit du sommet de la formation. Du reste, nos recherches personnelles ont porté à peu près exclusivement sur les lits inférieurs, qui soft à décou- vert sur bien des points, tandis que l'intervention des ouvriers est nécessaire pour l'exploration des marnes gypsifères et des schistes feuilletés, intercalés dans le banc que l’on exploite à l’aide de galeries souterraines. On peut dire que le hasard seul des circonstances, agissant à travers un temps très-long et aidé des variations mêmes qui se LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 287 sont produites au milieu de la végétation locale, a influé sur la conservation de la plupart des espèces fossiles. Celles-c1, en effet, tout. en étant également comprises dans un même ensemble contemporain, ont dû pourtant ne laisser arriver leurs dépouilles dans les lits en voie de formation que successivement, au fur et à mesure que leurs mdividus se trouvaient placés d’une manière favorable pour amener ce résultat. Trop de liens généraux rat- tachent ensemble les divers éléments de la flore, fondus en un tout complet et harmonieux, pour que l’on puisse songer à la scinder en deux ou plusieurs subdivisions. On aboutirait à une distribution entièrement artificielle, tellement il est visible que, malgré un certain nombre de substitutions d'espèces, on a tou- jours devant soi le même fond de végétation, que l’on se place au début ou à la fin de la période correspondant au dépôt des diverses assises de la formation. L’épaisseur totale de celle-ci peut être évaluée à une trentaine de mètres, quarante au plus. On sait qu'elle comprend trois groupes de gypse, dont les deux supérieurs sont seuls exploités, entremêlés de calcaires mar- neux et de schistes marneux feuilletés, alternant plusieurs fois. Considérons l’ensemble de cette végétation, telle que nous la connaissons, c’est-à-dire d'une facon incomplète et partielle, comme s'il s'agissait d’un canton récemment exploré de la Nouvelle-Calédonie, et voyons ce que nous apprendra cet examen. Nous laisserons de côté les Cryptogames, trop peu nombreuses pour qu’il en soit tenu compte. La proportion relative des Monocotyiédones et des Dicotylé- dones, en y comprenant les Gymnospermes, est de 15,06 pour les premières, et de 84,92 pour les secondes, sur 100. Cette proportion s'écarte fort peu de celle qui existe actuellement, en considérant le monde entier, et qui est, selon Lindley, de 17 pour les Monocotylédones et de 83 pour les Dicotylédones, en nombre rond. La proportion donnée par M. Heer pour l’ensemble des quatre étages de la molasse suisse est de 16 pour 400 de Monocoty- lédones et de 84 de Dicotylédones. Tous ces chiffres concordent 288 G. DE SAPORTA. si bien, qu'ils doivent exprimer un rapport vrai: il faut donc constater une prépondérance assez sensible des Dicotylédones sur les Monocotylédones pour l’époque des gypses d'Aix, pré- pondérance relative qui n’est pas dénuée de signification, ainsi que nous allons le voir. En effet, lorsque, au lieu de considérer l’ensemble de la végé- tation contemporaine, on examine les flores locales et réglo- pales, on observe de très-grandes différences dans la proportion relative des deux grandes classes de Phanérogames. La propor- tion des Monocotylédones peut s'élever jusqu'à 30 sur 400 et celle des Dicotylédones s’abaisser d'autant. C’est ce qui arrive dans les régions très-humides. En général, l'humidité tend à accroître la proportion des Monocotylédones et à diminuer celle des Dicotylédones ; l’abaissement de la température produit le même effet : en sorte que, toutes choses égales d’ailleurs, et sauf de nombreuses exceptions dues à des influences locales, une contrée sèche et chaude aura une proportion plus forte de Dico- tylédones qu'une contrée chaude et humide, et surtout qu'une contrée à la fois humide et froide. Les chiffres proportionnels les plus rapprochés de ceux de la flore des gypses nous sont fournis par les îles Canaries (82,8 Dicotyl. et 17,2 Monocotyl.), les îles du Cap-Vert (82,8 Dicotyl. et 17,9 Monocotyl.), Java (82,9 Dicotyl. et 17,4 Mono- cotyl.); enfiv, dans un district élevé et desséché de l’intérieur de la région du Cap, on trouve, d'après la collection Drège, 16,9 Monocotylédones et 83,1 Dicotylédones sur 100 Phanérogames. En combinant ces divers documents et invoquant surtout le dernier, on doit conjecturer que la région des gypses d'Aix était à la fois chaude et sèche, hypothèse que nous allons voir se confirmer par tous les indices qu'il nous sera donné de produire. Däns le nombre total des Dicotylédones, les Apétales entrent pour 30,6, les Gamopétales pour 21,5, et les Dialypétales pour k7.9 sur 100, proportion qui s'éloigne assez peu de celle qui existe dans la flore de la molasse suisse, sauf que les Apétales y jouent un plus grand rôle, à cause de l'extension des Amen- LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 289 tacées dont le développement se fait à peine sentir à l’époque des gypses d'Aix. Les familles de Phanérogames inscrites jusqu’à présent sont au nombre de 54, dont 15 appartiennent aux Monocotylédones et Al aux Dicotylédones, en y joignant les trois familles de Gymno- spermes. Dans ce nombre, les deux tiers au moins compren- nent exclusivement des végétaux ligneux, arborescents ou fru- tescents, et la proportion est encore dépassée, si l’on ajoute les tribus de Légumineuses qui sont dans le même cas, comme les Sophorées, Cæsalpiniées et surtout les Mimosées. Les familles exclusivement herbacées sont généralement des plantes aqua- tiques, comme les Alismacées, Naïadées, Hydrocharidées et Nymphéacées, ou des Monocotylédones, soit marécageuses, soit terrestres, comme les Graminées, Cypéracées, Centrolépidées. La présence d’un certain nombre de Dicotylédones terrestres de nature herbacée doit cependant être considérée comme probable, quoique non prouvée. Les exemples en sont fournis par des Composées, une Solanée de type ambigu, une Chéno- podée?, eufin un Trifolium? et une Viciée. En résumé, on peut dire que les types purement herbacés, dont l’ancienne exis- tence peut être admise comme certaine, se réduisent, parmi les Dicotylédones, aux seules Nymphéacées, à qui leur habitat aqua- tique enlève toute signification à l'égard de la question en litige; en sorte que pour cette flore aussi bien que pour la plupart de celles de l’âge tertiaire, on demeure forcément dans l'incertitude au sujet du rôle dévolu aux plantes herbacées dans l’économie végétale d'alors. Il n’est pas invraisemblable d'avancer cependant que les groupes exclusivement herbacés, si abondants en espèces dans l’ordre actuel, surtout en Europe, comme les Ombelli- fères, les Labiées, les Composées et les Lotées, étaient alors plus ou moins subordonnés. On le prouve au moins indirec- tement. En effet, les fruits d'Ombellifères auraient eu autant de chance de conservation que ceux des Araliacées, si le pre- nier de ces groupes avait élé répandu alors comme aujour- d'hui, et pourtant nous avons plusieurs spécimens de ces der- piers et aucun des autres. Les Composées, représentées par 5° série, Bor. T. XV. (Cahier n° 5.) 3 19 290 &. DE SAPORTA. leurs fruits à aigrette, comptent 21 espèces à OEningen et 2 seu- lement à Aix (4); les Lotées n’ont laissé dans cette dernière localité que des traces imsignifiantes, tandis que les Mimosées y présentent dix espèces et les Sophorées au moins deux, basées sur des fruits. Il est donc impossible, même en faisant toutes les réserves lé- gitimes, de ne pas admettre pour l’âge éocène et jusque dans le tongrien et le miocène inférieur, une prépondérance énorme des familles de végétaux ligneux sur les groupes de plantes pure- ment herbacées, c'est-à-dire le contraire de ce qui existe main- tenant. C'est là du reste ce que l’on observe aujourd’hui encore dans les régions qui.semblent reproduire avec le plus de vérité l'aspect de l'Europe tertiaire, comme la Nouvelle-Zélande, l'Aus- tralie et encore plus la Nouvelle-Calédonie.— Des 54 familles qui habitaient alors les environs d'Aix, une est entièrement éteinte, celle des Rhizocaulées, qui se rattache pourtant de fort près aux Restiacées et aux Ériocaulées ; 14, auxquelles il convient de joindre les Mimosées, se sont éloignées de l'Europe : ce sont les Centrolépidées, Musacées, Protéacées, Myrsinées, Sapotacées, Ébénacées, Magnoliacées, Sterculiacées, Sapindacées, Pittospo- rées et Zanthoxylées. Les Centrolépidées et les Protéacées sont maintenant reléguces dans Phémisphère austral, mais les plantes terliaires classées sous ces dénominations ne sont pas encore as- sez bien connues pour permettre de déterminer la nature exacte du lien qui les unissait à celles qui leur correspondent le mieux dans l’ordre actuel. Toutes les autres sont des familles amphigées, c’est-à-dire répandues à la fois dans les deux continents, et dont l'existence actuelle est par conséquent en rapport avec leur an- cienneté présumée. Les Magnoliacées ainsi que les Myricées doi- vent compter parmi les groupes dont l'origine remonte certaine- ment au delà des temps tertiaires. Parmi les familles que notre continent à conservées, il est digne de remarque que 8 au moins, savoir, les Palmiers, Taxinées, Myricées, Morées, Laurinées, (4) Une troisième espèce vient d’ètre recueillie au moment de l'impression du mé- moire. LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 291 Araliacées, Juglandées, Myrtacées, se trouvent réduites mainte- nant à une espèce européenne unique, et tendent par consé- quent à disparaître. On pourrait y Joindre les Ilicinées, puisque V1. balearica Desf. ne constitue guère qu’une race, et même les Pittosporées et les Myrsinées, dont les îles Canaries, non loin de l’Europe, renferment encore des représentants isolés. La prépondérance numérique de certaines familles, disposées dans l’ordre de leur importance relative, jusqu'à concurrence de la moitié du nombre des Phanérogames fournit un moyen d'investigation que nous ne saurions négliger. — Dans la flore des gypses d'Aix, ces familles sont disposées dans l'ordre sui- vant : : ; Papilionacées. ,... 19 Légumineuses. .... RACE ce æÆ Un 10 29 Anacardiacées.. ..sessocssoss DÉS DIS ue 13 Protéacées ce nlMeE a ee io ie 143 Myricées............. Set clore de ao 0 GLAMINÉ SENS Eee eleele lee es à D A a Es 10 Ebénacées................., SR CE AS ' 10 Abiétinées....... ns later nreient ere CRE DRE D ETC 7 Pomacées. ......., D DORE DES Re NU Te 7 99 Viennent ensuite, avec 6 espèces chacune, les Palmiers, Taxi- nées, Cupulifères, Myrsinées, Éricacées, Araliacées.On voit qu'en comptant à part les Mimosées, il faut énumérer au moins 11 fa- milles pour obtenir la moitié des Phanérogames. Ce résultat permet d'affirmer que la flore des gypses d'Aix était riche en espèces d’une manière absolue, puisque, d’après une loi formu- lée par M. À. de Candolle (1), plus une flore est riche, plus il faut énumérer de familles, en commençant par les plus nom- breuses, pour englober une moitié du nombre total des Phané- rogames. Il en faut 16 au Japon, 12 au pays d’Assam, 17 à la (1) J'avertis une fois pour toutes que les détails de statistique végétale et tous les chiffres sur lesquels je m’appuie, sont empruntés à l'ouvrage de M. Alphonse de Can- dolle, intitulé : Géographie botanique raisonnée, ou Exposition des faits principaux et des lois concernant la distribution géographique des plantes de l'Europe actuelle. Paris et Genève, 4855. 299 G. DE SAPORTA. Nouvelle-Grenade et 11 à Timor, région auprès de laquelle nous pouvons, sous ce rapport, ranger notre flore fossile. Il faut seulement 9 familles pour parvenir au même résultat dans la flore des quatre étages réunis de la molasse. 1 semble- rait donc que la variété des formes ait été plus grande, aux environs d'Aix, vers la fin de l’éocène que plus tard en Suisse, dans le miocène ; nous sommes tenté d'accepter ces conclusions, tellement la diversité nous paraît être le caractère dominant de la végétation dont nous traçons le tableau. Dans la flore des gypses d'Aix, non-seulement les Légumi- neuses occupent le premier rang, comme dans la plupart des flo- res intertropicales actuelles de l’ancien et du nouveau contment, mais elles atteignent une proportion de 15 pour 100, pour l’en- semble des Phanérogames, proportion parfaitement en rapport avec celle de 12 sur 100 qui est fréquente, selon M. de Candolle, dans certaines régions chaudes, telles que Timor, le Congo, ete. La proportion des Graminées relativement au total des Phanéro- games, qui est de 4,5 sur 100, est en rapport avec les minima relatifs de cette famille, tels qu'on les observe à la Nouvelle- Guinée et à la Nouvelle-Grenade. La proportion des genres par familles, qui est de 4,5 à 1,6, est à peu pres celle que l’on re- marque actuellement à l'île de Keeding, dans celle de Norfolk (1,6) et à l’Ascension (1,8). — Le nombre des espèces, dans la flore des gypses, s'élève actuellement en moyenne à 2,5 ou 2,6 par genre de Phanérogames. Cette même proportion est indiquée par M. de Candolle, pour les environs de New-York, le Calvados, le territoire de Padoue, la presqu'île du Sinaï et Madère; c’est aussi le chiffre de la Nouvelle-Zélande (2,5). Mais il est juste d'observer que l'énumération précédente, sauf en ce qui concerne le dernier pays, s'applique à des régions parfaite- ment explorées, où aucune espèce n'a échappé aux naturalistes, ce qui ne saurait être le cas de la flore fossile d'Aix. La compa- raison serait plus juste avec la Nouvelle-Zélande dont le chiffre proportionnel atteindra sans doute 2,8 ou 2,9, lorsque le pays sera mieux Connu. Nous allons maintenant aborder l'étude des geures en parti- LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 293 culier, c'est-à-dire une des parties les plus sérieuses de notre examen. Mais nous devons en premier lieu préciser le plus pos- sible le caractère et les conditions de cette étude, afin de la serrer de près et de retirer d'elle toutes les conséquences qu’elle comporte. Pour cet objet, tous nos genres, au nombre de 89, sont loin d’avoir la même valeur. Plusieurs sont vagues et artiti- ciels, comme les Poacites, Anacardites, Lequminosites, Cæsalpi- nites, etc. ; nous devons les laisser entièrement de côté ; d’autres sont entachés d'incertitude bien que probables, Olea, Myrtus, Daphne, où bien manquent de précision et constituent plutôt des cadres propres à renfermer les espèces que des types déterminés, Aralia, par exemple : nous les négligerons comme les premiers. Nous n’insisterons pas non plus sur certains types de Cryptogames et de Monocotylédones aquatiques ou marécageuses, Cara, Marchantia, Sparganium, Typha, Potamogeton, universellement répandus et dont la présence dans la flore tertiaire n’a rien qui doive surprendre. Enfin, pour rester dans le vrai, nous ne prendrons pas même tous les genres, tels qu'ils figurent sur notre liste ; plusieurs d’entre eux se divisent en deux ou plusieurs types distincts, et l’un de ces types a pu être représenté dans la flore des gypses, tandis que l’autre en était exclu. Dans ce cas, men- tionner le genre ne suffit pas évidemment et un exemple servira à le démontrer. Le genre Quercus existe à Aix, mais représenté par des formes à feuilles persistantes, plus ou moins coriaces, dont aucune ne rappelle nos Æobur, tandis que l’une d'elles appartient évidemment au type de nos lex et coccifera ; c’est donc ce dernier type que nous devons signaler et non pas celui des Chènes en général. Voici une liste, dressée sur ces bases, de 25 genres ou types, dont l'existence dans la flore d'Aix a été constatée d’une ma- pière certaine ou au moins très-probable, qui tous sont demeurés européens et dont la plupart sont encore indigènes de la région provencale. Pleris. Smilax. Cheilanthes. Vallisneria. Pinus (type des Pinaster). Myrica. Juniperus (type desJ, sabina et phœænicea). |Quercus (type des Q. ex et coccifera). 29/4 G. DE SAPORTA. Ostrya. Nympliæa (type des Castalia). Ficus. Acer. Populus (type du P, euphratica). liex. Osyris. Paliurus. Laurus. Pistacia. Nerium. Rhus. Andromeda. Cotoneaster, Vaccinium. Cercis, Cornus. L'’immense majorité de ces genres ou de ces types, lorsqu'il s’agit de genres comprenant plus d'un type, se trouvent main- tenant réduits à une seule espèce, au plus à deux ou trois, en Europe. Ceux qui comptent plus de trois espèces, dans l'Eu- rope centrale, sans être divisés en plusieurs types, sont au nombre de quatre seulement Pinus, Vaccinium, Acer, Fhus. Quelques- uns se sont réfugiés sur le haut des montagnes, comme les An- dromeda, dans certaines stations, comme les Vaccinium ; deux d’entre eux, les Myrica et Ostrya, n'existent plus en Provence, mais un plus grand nombre sont caractéristiques pour la végé- tation méditerranéenne, et nous devons noter spécialement les Cheilanthes, Juniperus, Laurus, Nerium, Cornus, Nymphea, Paliurus, Pistacia, Cotoneaster et Cercis de l'ancienne flore, comme représentant des formes alliées de trop près à celles qui persistent encore au centre du même pays, pour que la filiation des unes par les autres ou la descendance des unes et des autres d'un ancêtre commun, assez peu antérieur à l’âge des gypses, pe s'offre pas à la pensée comme l'expression la plus naturelle des faits. Onze de ces types, environ les deux cinquièmes du nombre total, pénètrent encore en Scandinavie, où sept d'entre eux dépassent même les limites au cercle polaire. Le genre A7- dromedu est un de ceux qui s'étendent le plus loin dans toutes les directions, puisqu'il est à la fois arctique et tropical; sa linute boréale passe par le Groenland, le Cap nord et la Sibérie, en lais- sant pourtant de côté l'Islande. Faire des Vaccinium, encore plus étendue vers le nord que celle des Andromeda, puisqu'elle comprend même l'Islande, occupe, à l’aide de représentants plus où moins dispersés, non-seulement les îles de l'Afrique, Madère, Madagascar, mais encore l'Inde boréale et jusqu'aux îles Sandwich.— Le genre Myrica, dont l'extension est immense, LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 295 du Pérou à Java et à la Nouvelle-Holiande, du Mexique au Japon, de Madagascar à la Bothnie septentrionale, s'arrête vers les limites de la Laponie. Nous ne parlons pas du genre Pers, encore plus universel, n1 des Pinus, qui occupent l'hémisphère boréal tout entier, ni des Populus, partagés d’ailleurs en plu- sieurs types. L’extrème limite des Acer peut être fixée à Pitte, un peu au delà du 65° degré ; les Cornus ne dépassent pas en Ostrogothie le cours d’eau qui déverse dans la Baltique le trop- plein du lac Wetter ; enfin les Z/ex, extirpés récemment du sol suédois, n'existent que dans les parties méridionales de la Nor- vége. — Le type des Castalia S'avance, par contre, jusqu'aux îles Lofoden en Scandinavie, et dans la région britannique jus- qu'aux Shetland, sans atteindre ni les Féroé, ni l'Islande. — Le genre Cotoneaster ne va pas aussi loin dans la direction du nord que le précédent, mais il présente une distribution géographique tellement en rapport avec sa présence durant la végétation tertiaire, qu'il mérite l'attention. Il ne comprend au plus qu'une vingtaine d'espèces. Au nord, son aire embrasse une partie de la Suède jusque vers le 65° degré; mais en Angleterre on ne l’observe plus que sur un seul point du pays de Galles, et, à l’est, ils’arrête sur les bords de la Narowa, en Esthonie, au 58° degré ; il se montre ensuite dans la Sibérie altaique et dans la Daourie, à l'extrême occident; 1 existe au Mexique, puis sa limite méri- dionale passe par l'Atlas, le Liban et rejoint le Népaul. Son aire décrit ainsi, vers le centre de l'hémisphère boréal, un ellipsoïde irrégulier, étendu dans le sens des longitudes, tracé à l’aide d’une ceinture de stations disjointes. Nous signalerons bien d’autres exemples de cette disposition géographique parmi les genres dont l’origine constatée remonte haut dans le passé. La limite méridionale des Cornus suit, à travers l’ancien continent, à peu près la même direction, puisque au sortir de l'Amérique elle passe par le Portugal et les rivages sud-méditerranéens, pour aller atteindre le Népaul et les Indes. Les Z/ex ont des attaches tropicales plus marquées : répandus jusque dans l'Amérique du Sud, on les retrouve aux Acores, Madère, Canaries, el, depuis l’Afrique boréale jusqu'à l'extrémité opposée de ce continent, 296 G. DE SAPORTA. on les suit à travers Madagascar, Maurice, Java, jusqu’en Chine, au Japon et dans la Nouvelle-Calédonie. C’est là un des genres les plus diffus et les plus fractionnés qu'il soit possible de signaler. Les autres types, encore Imdigènes, s'arrêtent tous main- tenant au-dessous du 50° degré et la plupart ne dépassent pas le 45°; mais le tracé des limites boréales de leur aire présente, pour beaucoup d’entre eux, des particularités que d'anciennes connexions géographiques suflisent seules à expliquer. Ainsi, la limite du type des Quercus lex, Suber et coccifera touche à Nantes, descend à Bayonne, passe entre Alais et Villefort (Gard), ensuite à Montélimart, traverse lIstrie, la Dalmatie, la Thrace, puis l’Asie Mineure et le Kurdistan, la Perse, l’Afhganistan, pour aller aboutir au Népaul et au Japon. La limite méridionale s'é- carte assez peu de la première par le sud de l'Espagne, l'Algérie, l'île de Chypre et les environs de Jérusalem ; elle dessine une ligne subparallèle à la première, qui donne lieu à une zone dont la partie la plus large correspond au bassin de la Méditerranée. Dans le sens des longitudes, ce type pénètre au delà même du Japon, jusque sur le rivage opposé de l'Amérique, dans les pa- rages de la Californie. On peut en dire autant des genres Cercis, Paliurus, Pistacia, dont les aires actuelles sont constituées par des lignes étendues dans le sens des méridiens et ne se compo- sent que de stations disjointes, qui partent de l'Amérique pour aboutir à l'extrême Asie. Les Paliurus et Pistacia vont du Mexique à l'Asie orientale en englobant la région méditerra- néerne et la Perse, les Cercis du Canada à la Chine et au Japon, avec une seule station intermédiaire sur les bords de la Méditer- ranée, dont les points les plus avancés au nord sont, en France, les environs de Narbonne et ceux de Montélimart.— Les Ostrya sont limités par une ligne analogue de la Virginie à l’Istrie, puis à travers la Carniole jusqu’au Taurus et au Népaul. Les Nerium, plus restreints, partent des deux rivages opposés de la Méditer- ranée, Saint-Tropez et Nice au nord, l'Algérie au sud, pour occuper la Perse et aboutir aux Indes et à Java. Enfin, les Lau- rus embrassent actuellement, avec les Açores et les Canaries, le bassin entier de la Méditerranée, sans dépasser au nord les envi- LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 297 rons de Toulon et de Montpellier, à l’état spontané, et s'arrêtent à l'orient en Asie Mineure. Ces exemples prouvent la ténacité de certains types qui depuis un temps excessivement long ont persisté aux mêmes lieux sans jamais varier beaucoup. Est-il nécessaire d’insister sur la coïn- cideuce naturelle des tracés de la plupart de ces aires d'habitation, coïncidence bien propre à révéler entre les types eux-mêmes des affinités en rapport avec une communauté présumée d’origine et une distribution géographique déjà ancienne, due à des circon- stances sans liaison avec les phénomènes auxquels nous assistons. La distribution géographique actuelle serait ainsi le résultat de causes qui depuis longtemps auraient cessé d'agir et s’explique- rait uniquement par elles. Elle serait peu compréhensible au contraire, si l’on ne voulait admettre aucun lien de filiation entre les formes actuelles et les formes fossiles, en les supposant créées chacune isolément, et les premières dispersées sans raison apparente sur une immense étendue de pays. _ Les genres éteints, et par conséquent appartenant en propre à la végétation tertiaire, formeraient sans doute un des éléments importants de la flore des gypses d'Aix, si celle-ci était parfaite- ment connue ; mais à ce point de vue il est fort difficile de se procurer des éléments de détermination qui ne soient pas incom- plets, puisque, d’une part, les feuilles isolées ne suffisent presque jamais pour justifier l'établissement d'un genre particulier, etque, d'autre part, sans le secours de l'analyse intérieure, on demeure incertain bien souvent au sujet de la véritable affinité des fruits et des semences qui ne paraissent pas directement assimilables aux organes Correspondants des genres actuels. Les échantillons de ces sortes d'organes sont assez répandus pour faire croire à l'existence d’une série de genres plus ou moins distincts de ceux de l’ordre actuel. Les frondes des Palmiers notamment, réunies sous la dénomination commune de Ælabellaria où de Sabalites, sont loin de rentrer aisément dans les sections connues aujourd’hui; l’Europe d'alors a dû posséder des types spéciaux de Palmiers. Il doit en être de même de quelques-unes au moins des plantes réunies sous la dénomination de Protéacées, particulièrement 9298 G. DE SAPORTA. des semences nommées Æmbothrites. Les Anacardites dénotent aussi la présence de types dont le degré d'analogie avec ceux de nos jours, ne saurait être défini avec précision. Le nombre des genres éteints se trouve ainsi diminué de tous ceux dont il est impossible de saisir les vrais caractères. Il reste cependant les neuf types suivants qui paraissent susceptibles d'être déterminés avec une certaine précision. Podostachys Mar. Solanites Sap. Palæovarya Sap. Rhizocaulon Sap. Aralia calyptrocarpa Sap. | Heterocalyx Sap, Pseudo-phragmites Sap. Bombax sepultiflorumSap. | Micropodium Sap, Ces types ont une valeur des plus inégales. Les uns, comme les Bhaizocaulon, représentent à eux seuls une tribu où même un ordre. Les Podostachys, encore rares dans la flore des gypses, mais dont le rôle a été considérable dans le tongrien et le mio- cène inférieur, paraissent se rattacher au petit groupe austra- lien des Centrolépidées, sans rentrer dans aucun de leurs genres actuels. La fleur du Solanites révèle un type ambigu, voisin des Solanées et des Borraginées, constituant peut-être un terme moyen entre ces deux familles. La place de l'Aralia calyptro- carpa et du Bombax sepultiflorum est plus aisée à définir. Ce sont là des sous-genres dont les caractères différentiels, basés sur l’examen des organes de la reproduction, peuvent être rigou- reusement précisés. Les fruits du genre Wicropodium annon- cent une Sophorée qui ne saurait être bien éloignée des Cercis et des C'alpurnia. Les Palæocarya viennent se ranger auprès des Engelhardta, avec lesquels on les à cependant confondus à tort jusqu'ici. Enfin les Æeterocalyx (Trilobium olim) constituent un genre d’Anacardiacée bien distinet de ceux de nos jours, qui n'est pas sans rapport avec deux types brésiliens de cette famille. Ce sont là, on le voit, des analogies trop diverses et trop inégales pour donner lieu à aucune conclusion générale, sinon que l’ancienne végétation européenne, lorsque l’on remonte un peu Join dans le passé, renfermait, à l’exemple des autres con- trées équatoriales, des éléments qui lui étaient propres, à côté de ceux qu'elle possédait en commun avec d’autres pays, On peut LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE, 299 ajouter cependant que cette catégorie, si peu nombreuse que soit encore la liste à laquelle elle donne lieu, fournit des indices curieux d’un phénomène plus accentué peut-être autrefois que maintenant, mais dont l'ordre actuel renferme aussi denombreux exemples. Nous voulons parler du parallélisme des formes qui établit entre les deux hémisphères, l'austral et le boréal, une correspondance de leurs éléments végétaux respectifs. Ce ne sont pas des groupes identiques avec ceux qui caractérisent la zone boréale qui reparaissent dans celle du sud, mais des groupes similaires ou simplement analogues, qui cependant jouent le même rôle et tiennent la même place, avec des divergences plus ou moins sensibles. C'est ainsi que le type des Fagus antarctiques est distinct de celui des Hêtres arctiques ; c’est ainsi encore que le genre Sequoia fait place dans le sud aux Arfhrotaris, et que les Callitris S'y trou- vent remplacés par les Frenela et les Libocedrus. C’est le même phénomène par lequel les Protéacées et les Cycadées africaines ne sont pas congénères de celles d'Australie, et que les Epacridées jouent dans la Nouvelle -Hollande le rôle des £rica del'ancien con- tinent, On pourrait multiplier ces exemples tirés de l’ordre actuel, mais ilest probable que silestemps anciens étaient mieux connus, la liste s’en accroîtrait encore. Les Cycadées secondaires euro- péennes, autant que l’on peut en juger, ont été vis-à-vis des Cycadées du Cap et de l’Australie, ce que ces dernières sont les unes par rapport aux autres, c’est-à-dire des types non congé- nères, bien que pourvus d’une structure sensiblement analogue. Il est admissible qu'il en a été de même des Protéacées de l'Eu- rope tertiaire, qui semblent avoir constitué un groupe plutôt ressemblant que vraiment identique avec celui de l’hémisphère austral. Les Rhizocaulées, qui tiennent une si grande place parmi les plantes aquatiques, dans l'Europe tertiaire, avant le dévelop- pement des Cypéracées, ont dû correspondre aux Restiacées, dont elles se rapprochent par le mode d’inflorescence. L'Europe d'alors, nous venons de le voir, possédait des Centrolépidées et pro- bablement des Palmiers qui lui étaient propres; les Paleocarya répondaient aux Ængelhardtia, dont ils se distinguent pourtant, 300 G. DE SAPORTA. Notre continent a donc été successivement dépouillé de plusieurs des traits qui contribuaient autrefois à l'originalité de sa phy- sionomie végétale. Les genres actuellement exotiques, presque aussi nombreux d'une façon absolue, dans la flore des gypses, que ceux qui n’ont pas quitté le sol de l’Europe, dépassent ces derniers en importance et les égalent même numériquement, si l’on consent à faire abstraction à la fois, et des types qui se retrouvent presque partout à la surface du globe, et de ceux que nous retranchons comme entachés d'obscurité. La liste suivante comprend 24 genres dont la détermination nous paraît offrir des garanties sérieuses d'authenticité, ou du moins chez lesquels se révèlent des indices d’aflinité trop sen- sibles avec ceux de l’époque actuelle, pour être tout à fait trom- peurs. Nous avons enlevé à plusieurs de ces genres la terminaison ites que nous leur conservons dans la description des espèces, par un excès de précaution, afin de donner un plus grand degré de précision au tableau des liaisons probables de la flore des gypses avec la végétation exotique du monde actuel. Lygodium Sw. Cinnamomum Burm. Sapindus L. Callitris Vent. Leptomeria R. Br. Pittosporum L. Widdringtonia Endl. ? Grevillea KR. Br. Z'izyphus Tournef. Podocarpus Hérit. ? Lomatia R. B. Ailanthus Desf, Dracæna 1. (type du D. | Myrsine L. Caragana Lam. draco L.), Dinspyros L. Mimosa Adans. Musa L. Magnolia 1. Acacia Neck. Clethropsis Spach. Sterculia L. Microptelea Spach. Bombax (type spécial). IL est impossible de soumettre ces genres à un mode d'examen uniforme ; non-seulement ils diffèrent entre eux dans une large mesure, leur valeur absolue étant loin d’être la même, ainsi que leur importance relative, mais leur distribution actuelle varie essentiellement, les uns étant répandus dans les régions inter- tropicales du monde entier, tandis que les autres n’occupent sur la lisière des tropiques que des stations isolées, ou constituent des groupes disjoints, relégués dans un étroit espace et restreints à une seule région ou à un petit nombre de points. Ce qu’il nous importe de rechercher, puisque aucun de ces LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 901 genres n'habite encore le sol européen, c’est seulement leurs re- lationsavec ce sol, et par conséquent l’état actuel de ces relations comparé à l’état ancien. Ces genres ont été éliminés, les uns plus tôt, les autres plus tard ; mais, puisque nous les retrouvons dans d’autres pays, il est naturel de se demander si leur présence dans ces pays n’a pas sa raison d'être dans d'anciennes connexions qui auraient eu pour conséquence la possession commune des mêmes éléments de végétation par ces pays et le nôtre. Il nous importe donc de déterminer le pont le plus rapproché de l'Eu- rope méridionale où l'on rencontre ces genres. Au lieu de dire d'eux qu'ils se sont retirés, 1l serait plus exact d’aflirmer qu’a- près avoir disparu de notre sol, ils ont persisté ailleurs sous l’em- pire de conditions demeurées favorables, ou bien encore qu'ayant eu autrefois la possibilité de s'étendre jusque dans nos contrées, leur limite septentrionale a dû ensuite opérer un mouvement de retrait vers le sud. Dès lors l'amplitude du retrait, si nous par- venons à la connaître, pourra nous dévoiler la nature du climat dont jouissait notre pays, en le comparant à ceux chez lesquels on observe la plus nombreuse réunion de ces genres. On conçoit donc que dans cet examen nous ayons plusieurs choses à con- sidérer : d’abord où existent maintenant les genres devenus exotiques, et particulièrement par où passe leur limite boréale actuelle; ensuite à quelle élévation en latitude cette même limite doit être raisonnablement reportée en Europe, vers le mi- lieu des temps tertiaires ; quel est l’écart probable entre ces deux limites, et quelles sont enfin les conséquences qui en résultent au point de vue de la température d’auirefois. En dernier lieu nous devrons rechercher si la distribution actuelle des genres exoti- ques de la flore d'Aix n’entraine pas quelque signification sous le double rapport de la permanence des types et de la filiation des formes comprises dans chacun d'eux. Un pareil examen pour être sérieux doit tenir compte, non-seulement des genres consi- dérés en eux-mêmes, mais surtout des affinités particulières de chaque espèce fossile vis-à-vis de celles de l’ordre contemporain; en un mot, il est nécessaire de tenir compte en même temps ou plutôt concurremment de toutes les analogies que nous dévoile 302 G. DE SAPORTA. l'étude de la flore des gypses. — C’est ainsi que nous allons pro- céder. Avant tout, nous devons distinguer dans la liste donnée plus haut deux sortes de genres qui se retrouvatent aussi parmi ceux qui sont demeurés indigènes : les uns très-diffus, les autres res- tremts, isolés où composés uniquement d'espèces rares et dis- jointes. Les Smilar, Pleris, Andromeda, Ilex, nous, ont déjà oîlert des exemples de la première catégorie; les Ostrya, Paliu- rus, Pistacia, Cercis, de la seconde. Les genres exotiques nous présentent cette même division. Le genre Lygodium, presque entièrement intratropical, compte cependant encore, dans la Virginie, le Delaware et la Pensyl- vanie, une espèce qui s’avance jusqu'au 44° lat. La limite du genre redescend ensuite pour atteindre le Congo, vers 10° lat. S.; elle court par le Népaul et la Chine, pour aboutir au Japon, près de Nangasaki, vers 82° lat. N., dessinant ainsi une courbe allongée, dont l'Europe méridionale occupe le centre. La limite boréale des Podocarpus touche, comme la précé- dente, au Népaul, traverse la Chine et aboutit au Japon vers A lat. N.; mais dans la direction de l’ouest, après avoir coupé PAbyssiie vers 14° lat. N., elle se termine à la Jamaïque, vers TOP At, IN, Les Musa appartiennent exclusivement à l’ancien monde. A l'état spontané, ils s’'écartent peu de la zone intertropicale. Partie de la côte occidentale d'Afrique, la limite passe certainement par l’Abyssinie, où se montre, vers 15° lat. N., le magnifique Musa Ensete Gmel.; elle traverse ensuite l'Inde septentrionale, la Cochinchine et la Chine méridionale. Les Cinnamomum s'étendent encore moms vers l'occident que les Musa ; ils sont exclusivement sud-asiatiques : leur centre principal doit être placé à Ceylan, Java, Sumatra; leur limite septentrionale est cependant le même que pour les précédents ; elle part du Népaul, traverse la Chine et aboutit au Japon, vers 90° lat. N. Les Myrsine, répandus dans les parties chaudes des deux hémisphéres, ont leur limite extrême dans les Açores et les Ca- LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 908 naries ; cette limite traverse ensuite l’Abyssinie, l'Arabie, ef va aboutir au Népaul, comme dans la plupart des cas précédents. Les formes avec lesquelles les espèces fossiles montrent de la haison habitent maintenant, les unes les îles de l'Afrique et la région du Cap, les autres l'Arabie ou les Indes orientales. Les Diospyros sont répandus sur un très-grand espace, du Brésil à la Virginie, de la région du Cap au bord de la Méditer- ranée, des iles de la Sonde au Japon. La limite extrème coïncide à peu près avec le 40° lat.N. en Amérique, en Europe et au Japon; wais ces derniers Prospyros sont des espèces à feuilles caduques qui diffèrent plus ou moins de ceux des gypses d'Aix, quireprodui- sent visiblement le type des Diospyros tropicaux de l’île Maurice, de l'Inde et de la Chine méridionale. Les Diospyros à feuilles caduques se montrent à l'époque tertiaire dans la flore arctique, jusqu’au 70° degré. Le genre a donc reculé d'environ 30 degrés, et les formes alors indigènes du Groenland se sont réfugiées sur les bords de la Méditerranée, tandis que celles des environs d'Aix ne se retrouvent plus que dans les Indes; dans le second cas, l’écart entre l’état ancien et l’état actuel est toujours d’au moins 20 degrés en latitude. La limite boréale actuelle des Magnolia, qui comprennent, comme les Diospyros, des espèces à feuilles caduques et d’autres à feuilles persistantes et coriaces, s’écarte peu de celle de ce der- nier genre, sauf que la région méditerranéenne y demeure étrangère, de manière à constituer une lacune complète entre l'Amérique du Nord et le Népaul. Le point le plus septentrional en Amérique est le Niagara (44° lat.) et la Pensylvanie pour le type à feuilles caduques, et la Caroline du Nord(35° lat.) pour le Magnolia grandiflora, dont se rapproche l'espèce des gypses par ses feuilles évidemment persistantes. La limite dans l’ancien monde passe par le Népaul, la Chine, et aboutit au Japon. Dans l’âge tertiaire moyen, ce même type se montrait dans l’île Disco, au Groenland, par 70° lat. C'est encore un écart d’envi- ron 30 degrés entre l'extension ancienne et celle qui existe maintenant. Les Sterculia, compris universellement dans la zone intertro- 30! G. DE SAPORTA. picale, au Mexique, à la Sénégambie, dans l'Afrique occidentale et dans les Indes, ne s'en écartent que par une seule de leurs es- pèces, le $S. platamfolia, mdigène dela Chine, qui est cependant sensible au froid des hivers rigoureux dans le midi de la France. Les Bombacées, plus exclusivement tropicales, constituent un groupe dont l'espèce d'Aix faisait partie au même titre que les genres ou sous-genres qui y sont actuellement compris. La limite du groupe, représenté en Amérique par des Bombar, Chorisia, Pachira, en Afrique par l'Adansonia, de la Sénégambie en Abys- sinie, ne dépasse pas etsouvent même demeure en deçà de la ligne du tropique. En Asie, les £riodendron et Salmalia ne sortent pas davantage des parties centrales de l'Inde. L'écart est toujours de 20 à 25 degrés au moins. Les Sapindus sont répandus dans toute la zone intertropicale. Une seule de leurs espèces s'avance jusque dans la Nouvelle-Géorgie et le Texas; elle constitue une forme subtropicale qui ne supporterait pas le climat européen. La limite boréale des Zzzyphus, dans l’ancien continent, longe le bord méridional de la Méditerranée, en Barbarie, en Egypte, pour gagner la Syrie et ensuite la Chine; mais si lon consulte l’'affinité de l’espèce d'Aix et des autres espèces du même âge, on voit qu'elles rappellent de très-près le type des Zzyphus celtidifolia DC. (Java et Timor), #moriensis Dcene (Timor) et venulosa Wall. (Indes), c’est-à-dire les formes les plus exclusi- vement tropicales du genre. À cette époque, les Zizyphus péné- traient jusque dans le Groenland septentrional, vers 70° lat., et le type de ceux de Java et de Timor arrivait jusque dans la Côte-d'Or, où l'espèce d'Aix a été recueillie par 47° 39/ lat, N. L'écart entre l’ordre ancien et l’ordre actuel se traduit donc encore par une différence d'au moins 25 degrés. Les Mimosa, qui sont aujourd’hui exelusivement intertropi- caux, donnent lieu aux mêmes observations. On en a observé des folioles conjuguées au sommet d’un pétiole commun, non-seu- lement à Aix, dans l’éocène supérieur, mais encore à Ronzon, dans le tongrien inférieur, et même dans les lignites du Bas- Rhin, près de Bonn. Deux empremtes bien caractérisées de cette dernière localité ont été figurées par MM. Ph. Wessel et Otto LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 305 Weber, l’une comme étant un fruit d’Zsatis, l'autre comme se rapportant à une aile de Coléoptère. Les Mzmosa s’avançaient done alors au delà du 59° degré de lat., et l'écart vis-à-vis de l’ordre actuel est d'environ 30 degrés. La limite boréale actuelle, dans l’ancien continent, du groupe immense des Acacia, suit en Afrique le bord du grand désert, sans s'écarter beaucoup du Tropique, pénètre en Egypte, en Syrie, el s'élève dans l'Asie centrale, à l’aide de l'A. Julibrisin jusqu'aux approches du 40° degré; mais les espèces des gypses d'Aix, dont les fruits sont connus, rappellent évidemment les formes tropicales du genre, surtout celles de la côte occidentale d'Afrique, des îles africaines et de l'Irde. Le même résultat se présente, remarquons-le iei, lorsque, au lieu de considérer l'aire absolue des genres demeurés indigènes qui ont cependant leur station principale entre les tropiques, on recherche seulement les affinités particulières de leurs espèces. On voit alors que le Snilax des gypses d'Aix ressemble à une forme de l’île Maurice, le Vallisneria à une forme des Philippines ; la plupart des Myricées se trouvent avoir leurs similaires dans l’Abyssinie et l'Afrique australe ; les Æicus ressemblent à ceux du Capet de Java; enfin les Araliacées se rapprochent des Cussonia et Gihibertia plutôt que des autres sections du groupe. Nous allons voir se manifester les mêmes liaisons à l’aide des genres aujourd'hui restreints, amoindris ou fractionnés, dont il nous reste à faire l'examen. Le genre Callitris est limité à une aire comprise entre PAtlas et la mer, dans le Maroc et l'Algérie. — Le genre Widdring- tonia ne s’observe que dans une région peu étendue de l'Afrique austro-orientale qui embrasse le Cap, la terre de Natal et Mada- gascar. — Le type du Dracwna draco L. se trouve, à l'occident, confiné dans les îles Canaries et Madère, où il atteint 33° lat; il reparaît à Madagascar, Maurice et Bourbon, où il est représenté par les D, reflera Lam., cernua Jaq. et marginata Lain.; dans les Indes, au Silhet, avec le D. ensifolia; à Java, à Amboine, on rencontre encore le D. angustifolia Roxb., et à Timor le D. timoriensis Kunth. 3° série, Bor, T. XV, (Cahier n° 5.) 4 20 506 G. DE SAPORTS. Le genre Pittosporum suit exactement la même marche. Une espèce isolée se montre encore aux îles Canaries ; il faut ensuite recourir à la région du Cap, aux îles Bourbon et Maurice, tra- verser l'Inde et aboutir au Japon, pour en observer un certain nombre d'espèces, tandis que le gros du genre est plus particu- lièrement australien. — Le genre Aÿ/antus se montre pareille- ment, d'une part dans l'Inde, où il fournit plusieurs espèces tropicales, ets’étend jusqu'au pied de l'Himalaya, d'autre part en Chine et au Japon. Il ne comprend en tout qu'un petit nombre d'espèces et doit avoir été bien plus répandu autrefois, si l’on en juge d'après le nombre des formes tertiaires déja signa- lées.— Enfin, les Caragana, qui représentent pour ainsi dire des Hobiniu à feuilles parfois coriaces et subpersistantes, habitent l'Asie centrale et orientale, particulièrement la Chine. On voit combien la route que nous avons souvent parcourue se trouve jalonnée de nouveau par les colonies éparses et frac tionnées de tous ces types. — Entre les deux groupes A/nus et Betula se trouvent plusieurs sous-genres ou types secondaires qui servent à les relier et marquent la souche d’où ces deux genres ont dû autrefois émerger, pour revêtir peu à peu les caractères qui contribuent à accentuer leur physionomie res- pective. Les Betulaster pour les Betula, les Clethropsis pour les Alnus, constituent des groupes prototypiques qui paraissent avorr précédé dans le temps les Betula et les Alnus proprement dits. Le Betula Dryadum Brngt, d’Armissan, à été dernièrement reconnu pour être un Betulaster, c’est-à-dire un Betula à feuilles fermes, semi-persistantes et à bractées fructifères non caduques en même temps que lessamares. La samarede notreancien Betula gypsicola nous paraît, de son côté, représenter un C/erhropsis, c'est-à-dire un À/nus à feuilles fermes, semi-persistantes et à sa- mare entourée d’une aile membraneuse, semblable à celle des fruits de Betula. Les Clethropsis de Spach forment une section parmi les A/nus, propre au Népaul et au Japon (A/aus jirma Sieb., Clethropsis Jirma Sp.) et qui par conséquent ne s'étend guère au delà du 35° degré, ou pénètre tout au plus jusqu’au 10° degré. LE SUD-ÉST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 307 On peut dire la même chose des Microptelea, qui sont des Ulmus prototypiques, à feuilles semi-persistantes, et sensi- bles au froid, avec une légère différence de structure dans le fruit. Ils habitent maintenantl'Inde boréale, la Chine et le Japon. Les Leptomeria, Grevillea et le type des Lomatia tertiaires sont maintenant restreints à la Nouvelle-Hollande ; mais il n’est pas bien certain, à notre sens, que les types fossiles décorés de ces noms doivent être réellement identifiés avec ceux qui les portent de nos jours. ‘Trois seulement des genres précédents : Diospyros, Magnolia, Zizyphus, ont été signalés dans la flore fossile du Groenland au 70° degré, et ce sont justement ceux qui s’avancent maintenant le plus loin dans la direction du nord, puisqu'ils touchent au 16° degré par quelques-unes de leurs espèces. Il faut encore remarquer que ces genres comprennent à la fois des espèces à feuilles caduques et d’autres à feuilles persistantes. —La flore fos- sile de la région baltique, située par le 55° degré, aux environs de Danzig, nousfournit un point de repère plus avancé vers le sud de 15 degrés. Sur ce point, lors du miocène inférieur, et à une époque peut-être déjà un peu plus froide que celle où nous sommes transportés par les gypses d'Aix, on rencontre les genres Cinnamonum, Diospyros, Myrsine, Sapindus, Zizyphus, très- probablement aussi Sterculia, si, comme nous le croyons, le Ficus tiliæfolia Al. Br. doit être rapporté à ce groupe, et de plus des Scitaminées, des Apocynées, accompagnées d’un bon nombre de Srnilax, Ficus, Myrica et Andromeda, d'affinité évidemment tropicale. Cependant les Palmiers paraissent avoir été absents de la région baltique. — La flore de Skopau, dans la Saxe thurin- gienne, dont l'horizon géognostique se rapproche sensiblement de celui des gypses d'Aix, nous fournit un Palmier, Aresoneuron plicatum Meer (1), vers 51° 30/ lat.; ce Palmier est accompagné des genres Lygodium, Myrsine, Diospyros (avec fruits), Ster- culia, auxquels il faut joindre des Ficus, des Laurinées et un Nerium (Apocynophyllum nerüfolium Meer), — La flore du bassin de Bilin, placée vers le 50° degré parallèle, conduit aux (4) Voy. Hecer, Beitr. zur Sachs, Thuring. Braunk. Berlin, 1861, 908 &. DE SAPORTA. mêmes résultats, bien que son âge soit plus récent. On voit reparaître dans cette flore les genres Musa, Podocarpus, Wid- dringtonia, Macroptelea (Ulmus plurinervia Ung.), Cinnamo- num, Leptomeria, Myrsine, Diospyros, Magnolia, Bombar, Sterculia, Sapindus, Püttosporum, Zizyphus, Acacia, c’est-à-dire un ensemble tres-analogue à celui qui existait en Provence à l'époque des gypses. — L'étude des plantes fossiles des lignites du Bas-Rhin et de Wétéravie (1) (Salzhausen, Munzenberg, Rockenberg, Rott, Nidda, environs de Bonn, etc.), qui corres- pondent au 51° degré, permet de constater la présence des mêmes éléments comprenant les genres Lygodium, Musa, Cal- litris, Podocarpus, Macroptelea, Cinnamomum, Myrsine, Dros- pyros, Magnolia, Sterculia (Dombeyopsis), Sapindus, Zrzyphus, Palæwocarya, Acacia, ete. — Nous sommes donc assurés que vers le milieu des temps tertiaires la végétation européenne pré- sentait un aspect sensiblement uniforme, une physionomie tro- picale, et se composait à très-peu de chose près des mêmes types, jusqu’au 55° degré environ. Salzhausen marque le pomt le plus écarté dans la direction du nord où le genre Callitris, si carac- téristique pour les gypses d'Aix, ait été observé ; mais 1l paraît y avoir été fort rare. La distribution de ce genre et de quelques autres, comparée avec leur aire actuelle, dénote évidemment l'existence d'anciennes connexions continentales, modifiées depuis par le temps et les révolutions survenues, sans avoir pu cependant en effacer tous les vestiges. On observe le Callitris Brongnarti Eudl., non- seulement au nord jusqu'en Wétéravie, mais à Paris même, dans le calcaire grossier, particulièrement au Trocadéro. I se retrouve ensuite dans la plupart des localités du midi de la France, soit tongriennes, soit aquitaniennes et jusque dans les argiles de Marseille, où M. le docteur Marion l'a recueilli der- nièrement, A l’est, le Callitris se montre dans les localités soit (4) Voy. Const. d'Eltingshausen, Foss. FU, d, üll. Braunkohlenf. d. Weterau, et comp, avec Tertiärfl. d. niederrhein. Braunkohl. von D. Olto Webber, in Palæontogr., I, et Neuer Beitr.z. tertiärfl. d. niederrhein. Braunkohlenform. von Ph. Wessel und D' Otto Weber, in Palæwontogr., IV. LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 309 éocènes, soit tongriennes où aquitaniennes, qui dépendent de la terre péninsulaire alors constituée par la région des Alpes et placée entre la mer nummulitique italienne (voyez la carte de l'Europe éocène) et celle qui s’étendait de Genève à Vienne, à travers la Suisse : ces localités sont monte Bolca, Salcedo, Hæring. Le Callitris abonde encore à Sagor en Carniole, à Radoboj en Croatie; il a été rencontré à Coumi, dans l’île d'Eubée, et ces divers points étaient situés sur la grande terre formée de llyrie, de la Hongrie, de la Roumanie et d’une portion de la Grèce, que M. Heer a proposé de nommer pennino-carnienne, en admettant sa continuité avec la précédente. — Le Callitris, au contraire, ne se montre ni dans les flores suisses, ni dans celles de l'Allemagne méridionale ou centrale, n1 dans le bassin de Vienne. Il faut conclure de ce fait qu’alors comme aujour- d'hui la végétation, obéissant à des influences dont l’éloigne- ment nous dérobe la connaissance, tendait à s’uniformiser, de facon à présenter des formes semblables sur tout le périmètre d’un même bassin. C'est par cette raison, selon nous, que les localités assises dans le voisinage plus ou moins immédiat de l'ancien golfe nummulitique, qui des environs de Nice et de la Corse orientale s’étendait librement jusqu’au pied des Alpes et aux confins de l’Adriatique, couvrant non-seulement une grande partie de l'Italie, mais dépassant, par Tunis, l'Égypte et la Syrie, les limites de la Méditerranée actuelle, possèdent à peu près toutes le Callitris, tandis que les dépôts correspondants aux revers septentrionaux de cette même terre pennino-carnienne, en Suisse, en Hongrie, en Autriche, ainsi que les portions du continent allemand, qui formaient ensemble les plages du bas- sin nummulitique centro-européen, tout à fait distinct du précé- dent, paraissent, jusqu'ici du moins, en avoir été dépourvus. Dans la France éocène, le Callitris a pu s'étendre librement du nord au sud le long des bords de l’ancien golfe parisien; dans le midi de notre pays, il abondait auprès des jaes qui furent si nombreux durant l’éocène supérieur, le tongrien et laquita- nien. Il est fort probable qu'à la même époque les terres du midi de la France se prolongeaient dans la direction de la Corse etde la 310 G. DE SAPORTA. Sardaigne, de manière à communiquer, avec l'Afrique septen- trionale ; de plus, la correspondance des roches nummulitiques des deux côtés du détroit de Gibraltar montre que l'Algérie était alors soudée avee Murcie, Grenade et une partie de l’An- dalousie; les sinuosités que décrivait la mer nummulitique en entourant celte terre au nord et à l’ouest sont encore bien visibles. De quelque façon que l'on considère les choses, la région actuelle du Callitris devait être sinon immédiatement attenante, du moins bien voisine des terres qui continuaient la France méridionale et disposée sur le pourtour de la même mer intérieure. Le Callitris quadrivalvis, encore indigène dans la partie la plus reculée vers le sud de l’ancienne région dont nous venons de tracer les linéaments, ne serait ainsi que le der- Der représentant d'un genre en voie de retrait, éliminé peu à peu de partout ailleurs que du sol africain. Le temps de son exten- sion la plus grande doit être placé à l'époque du tongrien et de l’aquitanien ; depuis lors, sans émigrer nulle part, il aurait perdu constamment du terrain, si nos conjectures sont exactes, et n’au- rail finalement réussi à se maintenir que dans la seule Algérie. Les mêmes considérations s'appliquent aux Dracæna, dont la présence, dans le midi de la France se trouve attestée, soit à Armissan, soit à Aix, non-seulement par des empreintes de feuilles, mais par des tronçons de tige. Ces Dracæwna appar- tiennent évidemment au même type que le D. draco des îles Canaries, et la continuité de cet archipel, de Madère et des Açores en une terre réunie à l'Espagne occidentale et en com- munication directe avec la France méridionale, explique très- bien cette affinité du Dracæna draco, aujourd’hui sur le point de disparaître, avec les espèces tertiaires congénères, dont ricu alors ne limitait l’extension vers nos contrées. La Provence éocène et tongrienne possédait encore des Hyr- sine, reproduisant le type des A1. africana et retusa Vent., des Pütosporum et des Myrica, dont les formes africaines actuelles peuvent passer pour les derniers représentants ; or, à l’exemple de ce que nous avons remarqué pour le Callitris, les Pittosporum se montrent à Hæring aussi bien qu'à Aix, et les Myrsine cal- LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE, 311 qués sur le modèle du AZ. africana (Myrsine spinulosa Sap., D. celastroides EU., MT. subincisa Sap., M. radobojana Ung.) reparaissent successivement à Hæring, à Radoboj et dans plu- sieurs localités de Provence. La région végétale dont le midi de la France faisait ainsi par- tie, lors de l’éocène, et dont nous venons d’esquisser les limites, dut voir plus tard s’effacer peu à peu ses caractères particuliers, par suite des changements qui s’opérèrent en Europe, à l’époque de la molasse, et lorsque notre continent se rapprocha graduel- lement de sa configuration actuelle. Toutefois quelques-uns des traits que celte région possédait originairement persistèrent plus ou moins longtemps, et peuvent être signalés, à ce qu’il semble, avec d'autant plus de raison, qu’ils concordent à merveille avec les aperçus précédents. Ainsi, le groupe si curieux des Rhizocaulées, dont nousretrou- vons partout des vestiges dans le midi de la France, pendant l’éocène, le tongrien et l’aquitanien, a dû caractériser la région dont 1l est question et dans laquelle il se montre dès le temps de la craie santonienne, puisqu'il abonde dans les liguites de Fuveau. Si ce groupe avait été partout répandu comme en Pro- vence, il aurait certainement attiré ailleurs l'attention des savants, Ce qui n'a pas eu lieu jusqu'ici. Ce groupe parait donc avoir été plus ou moins localisé. — Le type des Lomattes se montre dans les lits du Trocadéro (éocène parisien). En Pro- vence, non-seulement il abonde à Aix, mais il reparaît à Bon- nieux, à Manosque, et a été rencontré dans les dépôts de Radobo) et de Coumi, où M. Unger Pa signalé sous le nom de Grevillea Æymeana. Cest là encore un des types caractéristiques de la ré- gion botanique dont la Provence faisait partie (1) à l’époque des (4) 11 faut citer, à l'appui des affinités présumées des types végétaux de la région française, lors de la période éocène, avec la flore africaine actuelle, un exemple remarquable, emprunté aux grès des environs du Puy, dans la Haute-Loire, dont l’âge s'éloigne assez peu de celui des grès du Soissonnais. Un Palmier recueilli dans ces grès, le Phœnicites pumilus Brongt (Tab, des genres, p. 118), est représenté par une fronde pinnée accompagnée du rachis entier de l’inflorescence mâle. L'analogie des caractères oblige de rapporter celte espèce au même type que les Phœnix actuels, dont le genre est propre à l'Afrique boréale subtropicale, al2 G. DE SAPORTA. gypses ; pas plus que le Ca/litris, les Lomatites n'ont été encore observés en Suisse, ni en Allemagne. Mais les Rhizocaulées et les Lomatites n'ont pas survécu à l’ancien monde, comme le Callitris. Ces types ont péri complétement après un déclin, sans doute fort long, et sans doute aussi, avant de disparaître pour jamais, ils ont dû s’amoindrir graduellement, et se comporter sur notre sol de la même façon que les Dracæna, les Pitiosporum, les Myrsine et quelques autres types se comportent aujourd’hui dans l'archipel des Canaries. Signalons encore comme ayant plus particulièrement caracté- risé cette même région végétale certaines Araliacées, voisines des Cussonia et des Gilibertia, et à d’autres égards des Oreopanax, qui se montrent à la fois à Aix et à Coumi, à Armissan et à Ra- doboj (Aralia multifida Sap., Cussonia polydris Ung., Arala Hercules Sap.) ; des Diospyros à calices extérieurement rugueux, qui se montrent à Aix, à Radoboj et à Coumi et dont il n'y a que peu ou point d'exemples dans les flores fossiles de l'Europe cen- trale ; la fréquence des Palæocarya (Engelhardtia | Carpini sp. auct. |), absents, à cequ'il paraît, de la Suisse miocène ; la présence du Zyziphus paradisiaca Heer, qui abonde dans les gypses d'Aix, se montre plus au nord à Brognon (Côte-d'Or), ainsi qu’à Rado- boj et à Sotzka, mais qui n’a jamais été signalé en Suisse ; enfin le genre Cercis, qui a été observé, non-seulement à Aix et à Manosque, mais encore à Brognon, et qui reparaît de même à Radoboj, tandis qu'ailleurs, et particulièrement en Suisse, il n'en a été recueilli que des empreintes douteuses. On voit par ce dernier exemple que l'aire actuelle du genre correspondrait encore en grande parte avec l'aire ancienne, et le retrait vers le sud aurait été presque insignifiant. C'est done là un indice frappant de la ténacité de certains lypes, aussi persistants que peu variables. En résumé, il existe desérieux motifs pour admettre que vers la fin de l’éocène 1l existait sur les pourtours du large golfe numinulitique italien et subalpin une région végétale des mieux caractérisées, dont nous avons fait ressortir les attenances maté- LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 313 rielles et les aflinités botaniques avec l'Algérie et les archipels africains. Dans la direction du sud-est, la mer nummulitique, sauf une ile allongée, correspondant à l'Italie centrale et se prolongeant par la Calabre jusqu’en Sicile, s’étendait sans obstacle vers la Libye et l'Égypte, qu'elle recouvrait en grande partie, entrant ainsi en communication directe avec l'océan fndien. La première terre que nous rencontrons dans cette direction est l’Abyssinie, qui, réunie aux masses cristallines du haut Soudan, formait cer- tainement alors une région continentale à laquelle les grès de Nubie récemment émergés servaient de ceinture. Cette terre li- mitait au sud la mer nummulitique dont nous suivons les traces et se trouvait disposée vis-à-vis de l’Europe éocène à peu près comme la Tunisie et l'Algérie le sont par rapport à l’Europe con- iemporaine, c'est-à-dire qu'elle constituait la plage méridionale d’une Méditerranée très-agrandie, si l’on compare la Méditerra- née nummulitique à celle de nos jours. Il n’y a done rien de sur- prenant que, conformément à ce qui se passe encore sous nos yeux, la végétation se soit uniformisée, en présentant, soit les mêmes éléments, soit des éléments analogues sur les rivages opposés et d’un bout à l’autre de ce grand bassin intérieur, dont le diamètre, entre le Soudan et les Alpes, mesurait environ 30 de- grés où plus de 700 lieues, dimension double de celle de notre Méditerranée entre le fond de la grande Syrte et le golfe de Gênes. C'est là, selon nous, la véritable raison d’être des types et des formes abyssiniens ou sud-africains que l’on remarque dans la flore des gypses d'Aix, puisque rien ne s’opposait alors à ce que les pays limitrophes d’une mer englobée totalement dans la zone intertropicale recussent partout la même population végétale. Les éléments possédés en commun par la Provence éocène et l'Afrique orientale et austro-orientale consistent principalement dans les genres Musa, Podocarpus, Widdringtonia (ce dernier actuellement confiné dans un étroit espace comprenant le Cap, la terre de Natal et Madagascar) (1), de nombreux Myrica, des (4) D'après une note récente de M. Fischer, relative à des fossiles rapportés de 31 G. DE SAPORTA. Araliacées, des Bombacées, des Myrsine et des Andromeda, des Célastrinées, des Rhamnées, des P{osporum, et enfin des Acacia et Mimosa. Ce que nous venons de dire de la région africaine s'applique également à la partie boréale de l'Hindoustan que la même mer nummulitique baignait certainement de ses flots (consultez le planisphère), puisque les dépôts de cette mer peuvent être suivis sur une immense étendue, de la Syrie et de Bagdad au golfe Persique et à l'extrémité orientale de l'Arabie, et plus loin, à tra- vers le Béloutchistan, jusqu’au delà des embouchures de l'Indus ; puis, en remontant au nord, les mêmes dépôts se montrent dans Pundjab, le pays de Lahore et la vallée de Cachemire, tandis que, dans la direction de l'est, ils se prolongent jusque dans le Bengale oriental et la province de Silhet. C’est là un fait géolo- gique incontestable, parfaitement en rapport avec nos propres remarques, et dont on peut tirer cette conséquence, qu'à l'époque où la mer éocène baignait au nord la péninsule in- dienne, les parties centrale et méridionale de cette péninsule, constituées presque partout par des masses cristallines ou des terrains depuis longtemps émergés, formaient un grand conti- nent qui se prolongeait vers l’ouest et rejoignait probablement l'Afrique, aucune trace de dépôts nummulitiques ne se montrant le long de la côte de Malabar. Les éléments végétaux que l'Inde a retenus, et qui lui étaient sans doute communs avec la France méridionale, sont plus particulièrement les genres Clefhropsis, Microptelea, Cinnamomum, Nerium, Ailantus, des formes de Drospyros, de Bombacées et Sterculiacées, des Magnolia, enfin le type des Ængelhardtia, représenté dans l'Europe ancienne par un type extrêmement voisin, celui des Palæocarya. West à remarquer que beaucoup de ces types existent également au Japon ou à la Madagascar par M. Grandidier, l'existence du nummulitique à Madagascar serait incon- testable : la mer éocène, caractérisée par des Terebellum, des Alveolina et le Neritina Schmidelliana, déjà trouvé dans le nummulitique d'Europe, de l'Égypte et de l'Inde, se serait étendue au-dessous de l'équateur et aurait baigné la côte sud-ouest de Mada- gascar, vers la montagne de Manouhoué, à l'est de Fullear. Celte découverte, il n’est pas besoin de le dire, est entièrement favorable à nos dédnctions. (Voyez le planisphère qui représente l'étendue présumée de la mer nummulitique.) LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE: 319 Chine et que les affinités de la flore d'Aix ne s'arrêtent pas non plus à l'Inde, mais s'adressent plus loin encore aux îles de la Sonde et même aux Philippines, aussi bien qu'à la Chine et au Japon. Mais il est juste de dire que les dernières observations relatives à la mer nummulitique signalent ses dépôts dans ces mêmes contrées, notamment à Bornéo, aux Philippines et au Japon, quoique d’une manière encore trop vague pour donner lieu à des conclusions définitives. Les nôtres, après ce long exposé, seront celles-ci : Les phénomènes phytologiques concordent trop exactement avec les faits géologiques pour ne pas répondre à quelque loi générale qu'il est possible d’entrevoir, sinon de for- muler rigoureusement. Les affinités de l’ancienne végétation des gypses, en fait de communauté de genres, d’analogie de formes et de similitude de composition, avec un certain nombre de flores régionales actuelles, se trouvent en rapport parfait avec la disposition de ces mêmes régions le long des plages de l’ancienne mer numinulitique, immense Méditerranée allant du Maroc jusqu’au Japon, à Bornéo et aux Philippines, de la haute Égypte au pied des Alpes, etentièrement comprise dans la zone tropicale du monde éocène, qui s’avançait au delà du 50° degré paral- lèle. — Si les genres actuels, identiques avec ceux de la flore des gypses, et les espèces vivantes assimilables à celles qui caracté- risent cette flore, avaient été, sur les divers points du globe où on les observe maintenant, l'objet d’une création spéciale indépendante, et qu'ils fussent exempts de tout lien d’origine avec ceux dont l'existence antérieure sur notre sol se trouve ainsi constatée, il est impossible d'admettre que la distribu- tion actuelle de ces genres et de ces formes püût coïncider si bien avec celle des continents et des mers de l'époque éocène; le hasard seul n'aurait pu produire une correspondance aussi complète. Au contraire, si l’on admet que tous ces types re- montent vraiment jusqu'à l’âge éocène et qu'ils étaient alors disposés, aussi bien les européens fossiles que les autres, les pre- miers au nord, les seconds au sud de la grande Méditerranée num- mulitique, il devient parfaitement concevable que les uns aient été décimés par le fait des révolutions subséquentes, tandis que les 316 G. DE SAPORTA. autres ont dû survivre, là où l’abaissement de la température ne s’est pas fait sentir. Tout s'explique des lors de la façon la plus naturelle, puisque les identités de genre et les similitudes d’es- pèces se manifestent justement en raison de la proximité et du degré même de liaison matérielle des régions où l'on observe ces sortes de phénomènes et que les données qui gouvernent encore aujourd'hui la distribution des végétaux à la surface du globe se trouvent applicables à l’étude des anciennes périodes. Rien ne s'oppose, en définitive, à ce que des genres d’aflinité tropicale, autrefois indigènes de notre continent, s'ils habitaient en même temps des contrées plus écartées vers le sud et ayant continué à jouir d’une température élevée, se soient maintenus dans ces contrées, alors qu’ils périssaient en Europe, sinon tous, du moins la plupart d’entre eux, un certain nombre, plus robustes, ayant effectivement survécu. Il est temps de considérer ces végétaux en eux-mêmes et de rechercher leur vraie signification au triple pont de vue du climat, de la composition de la flore et de l'aspect que présentait l’ancienne localité tertiaire. La température alors régnante était plus ou moins semblable à celle des régions tropicales, on doit le conclure d'une foule d'indices réunis. Nous avons déjà reconnu que la proportion relative des différentes classes et la prépondérance de certaines familles, particulièrement des Légumineuses, révélaient un climat sec et chaud ; l’analogie, sous ce rapport, par la proportion des éléments floraux, nous à ramené assez naturellement vers les Canaries, les îles du Cap-Vert, le Congo, certains points de l'Afrique australe, Timor, Java et le pays d’Assam. Un certain nombre de groupes signalés à Aix, spécialement les Musacées etBombacées, les Mémosa, les Myrica et Diospyros à feuilles co- riaces, ne s'écartent pas aujourd’hui de l'isotherme de 25 degrés centigrades, où bien, comme les Dracæna, Sapindus et Sterculia, ne s’en écartent que par une seule de leurs espèces ou par un très-petit nombre, comme les Lygodium et les Myrsine. Quoi- qu'il n’yait rien d’absolu dans ces sortes d'examens, on peut dire qu’en dehors même de l'existence desgenres aujourd’hui à peu près LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE, 317 exclusivement tropicaux, la physionomie de beaucoup d’espèces, particulièrement celle des Vallisneria, Ficus, Aralia, Zizyphus, Myrsine, Andromeda, qui se rattachent évidemment à des formes intertropicales, ainsi que la prépondérance des Palmiers, Cinna- momurm, Araliacées, Acacia, constituent une série d'indices vrai- ment frappants de la chaleur du climat. — La rencontre au milieu de la végétation des gypses de certains types alliés de près à ceux de la zone tempérée n’estpas en désaccord avec ces mêmes résultats. En effet, si nous prenons pour exemple le genre Microptelea, dont la détermination basée sur l’examen de la feuille et du fruit ne laisse place à aucun doute, nous voyons d’après des renseignements dus à l’obligeance de M. le D'J. Dal- ton Hooker, que, dans le Sikkim, le Microptelea Hookeriana PI. (Wicroptelea parvifolia, herb. Kew), dont l’espèce d’Aix se rapproche beaucoup par le fruit, croît à une élévation de h000 à 5000 pieds anglais (1200 à 1500 mètr.), c'est-à-dire en dessous de la limite des genres tempérés, bien que plusieurs d’entre eux, entre autres les /?wbus, Fragariaet Quercus, descen- dent plus bas encore le long des contreforts de l'Himalaya. A cette hauteur, dans le Sikkim, la végétation arborescente consiste sur- tout dans des Légumineuses, des Gordonia, Cedrela, des Sapin- dacées, et comprend encore des groupes éminemment tropicaux, comme les Pothos, C'alamus, Gnetum, Vits, des Araliacées, des Bignoniacées, ete. [n’est pas besoin d’insister sur les rapports de celte végétation avec celle de l’ancienne localité tertiaire. Le Microptelea se montre aussi dans le Boutan et les montagnes du Khasia, d’ouildescend jusqu'au niveau de la mer.— Il est évident que dans le calcul de l'élévation probable de la température à l’époque des gypses d'Aix, nous ne pouvons obtenir, en combi- nant ces divers indices, qu'une sorte de moyenne approximative. Nous avons essayé d'y parvenir en relevant les températures moyennes des régions qui paraissent offrir le plus de rapports avec la Provence éocène, au point de vue des éléments végétaux, Ce sont les contrées suivantes, échelonnées dans l’ordre croissant du degré moyen de température de chacune d'elles, à partir du Japon, qui est la moins chaude et la plus avancée vers le nord, 318 G. DE SAPORTA. jusqu’à Java et Timor, qui sont situés sous la ligne. Les chiffres que nous donnons sont des nombres ronds, dont nous avons retranché les fractions. Kathmandu (Népaul).......,....,...., 0170 Japon méridional (Nangasaki) ............. 18 Région du)CAp. 53: ce eteteheent 20 CAN ATIES A enr eee ec eee 21 Tes:du! Cap-Vert: map NL IL Cure 24 HINdOUS TAN EE RE ec cnaliLe Maurice.nh} tete See Ne ete AU er | 25 BRINPPINES. ere ceicines ele Re Frot Abyssinie........,... cel ide 26 Java et Timor....... RATER NA ARTE Ah La moyenne serait 22 degrés centigrades, et cette moyenne, quoique peut-être un peu faible, ne doit pas s'écarter beau- coup de l’ancienne réalité. Les températures de 18, 20 et même 21 degrés centigrades, ne rendent pas compte de tous les phé- nomènes ; celle de 26 degrés exclut trop absolument les formes tempérées; C'est entre 22 et 24 que se rencontre probablement la vérité. Pour retrouver les conditions de climat auxquelles les plantes des gypses d'Aix étaient adaptées, c’est surtout leur faciès et leurs aptitudes que nous devons interroger. Nous savons déjà combien cette flore était variée et quelle richesse de types et de formes elle comprenait réunis sur un étroit espace. Mais ce qui frappe dans Pensemble, c'est le faible développement des organes appendiculaires et souvent la petitesse des différentes parties comparées à celles qui leur correspondent le plus directement dans l’ordre actuel, Rien de plus rare que des feuilles offrant de l'ampleur ; les plus grandes sont celles de quelques Araliacées, qui sont pourtant loin d'égaler l'A. Æercules Ung., d'Armissan. Les feuilles du Magnolia Diane Ung., qui doivent compter ensuite parnu les plus grandes, n’excèdent pourtant pas en tout un décimètre de longueur. Le Sterculia tenuiloba Sap., pren- drait place parmi les plus médiocres du genre par la faible éten- due de ses feuilles, et l’on peut faire la même observation en ce qui touche les Lygodum, Nerium, plusieurs lus, la plupart des Quercus et des Myrsine. Les fruits du Paleurus tenuifolius LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 319 mesuraient à peine un centimètre en diamètre, et un autre exem- plaire trouvé récemment est encore plus petit. Il en est de même de la samare du Wicroptelea, et de beaucoup de cônesde Pinus. Les rameaux de ces derniers arbres, qui sont venus parfois jus- qu’à nous, sont menus, peu ramifiés, quoique munis de longues feuilles ; ils se terminent généralement par un seul bourgeon, et s’allongeaient dans certains cas pendant plusieurs années, sans produire de ramifications, circonstance qui annoncerait, à ce qu'il semble, des arbres grèles et de taille médiocre. C’est là une sorte de caractère propre à l'ensemble de la flore, auquel il faut joindre la consistance coriace, le contour ordinairement étroit, souvent épineux sur les bords, et la complication extrême du réseau veineux, presque toujours plus fin dans les empreintes fossiles qu'à la surface des feuilles vivantes congénères. On est presque invinciblement amené à croire qu'à l'exemple de l’Aus- tralie et de la Nouvelle-Calédonie, la végétation des gypses d'Aix renfermait beaucoup d’arbustes de petite taille, confusément associés et uniformes d'aspect, bien que distincts par les genres très-variés auxquels ils appartenaient. Les feuilles à consistance souple, membraneuse, et à parenchyme délicat, devaient être excessivement rares, et je ne saurais guère citer qu'un Acer, VA. sertianum, qui ait été dans ce cas, le Ceres antiqua lui- même, paraissant avoir eu des feuilles plus ou moins coriaces, à l'exemple du Cercis japonica actuel. Ce serait pourtant tomber dans un excès opposé que de vouloir généraliser ce qui précède et de considérer la végétation qui se pressait autour du lac gyp- seux comme composée exclusivement d'arbres nains ou dépour- vue de formes plus vigoureuses que celles des groupes corres- pondants de l’ordre actuel. Les feuilles d'un Laurus ont à peu près la dimension de celles de notre Laurus nobilis L. Les Cinnamomum offrent des proportions intermédiaires entre les moindres et les plus amples du genre. Il en est de même des Myrica, alors si multiphiés, des Ficus comparés aux espèces du Cap, des Protéacées rapprochées des Leucadendron, des Gre- vllea et des Lomatia, enfin du Zizyphus paradisiaca Meer, qui figurerait parmi ceux dont les feuilles sont les plus grandes. 320 G. DE SAPORTA. Si les Palmiers n’annoncent que des dimensions médiocres, un Dracæna, le D. Bronçgnarti, semble taillé sur un patron encore supérieur en grosseur à celui du D. draco L. Le Juniperus ambiqua Sap. avait la dimension de notre Sabine; le fruit da Populus Heerü égale ceux du P. euphratica, son proche voisin, etle Lentisque d'Aix, Pistacia aguensis Sap., avait certaine- ment des feuilles munies de folioles plus longues et plus nom- breuses que celles de notre Lentisque. Les plantes aquatiques, que les conditions atmosphériques devaient peu affecter, attei- gnaient à d'assez grandes dimensions. Ainsi, le Val/lisneriu bro - meliæformis Sap. dépassait par la largeur de ses feuilles toutes les formes vivantes ; le Typha latissima présentait, comme lin- dique son nom, des feuilles supérieures à celles de notre Typha, etle Nymphea gypsorum Sap. aurait pu le disputer au N. alba, par l’ampleur de ses feuilles, tandis qu'il lemportait par l'épais- seur de ses rhizomes, dont les Mammifères amis des marécages étaient sans doute friands. Les grands arbres étaient loin d'être absents, comme nous le verrons bientôt ; seulement ils se tenaient généralement à l'écart, et leurs fleurs, leurs fruits, plus rarement leurs feuilles ou leurs folioles, sont parvenus jusqu’à nous en nombre restreint, tandis que la lisière de végétaux qui entourait immédiatement les approches de lancien lac était plutôt com- posée d’arbustes, dont les feuilles abondent nécessairement dans les lits éocènes. Si l’on consulte, dans le but de déterminer la nature probable du climat à l’époque des gypses, les affinités manifestées par les espèces de l’ancienne flore, avec l'Afrique d’une part, l'Asie austro-orientale de l'autre, il est possible de dresser les deux tableaux suivants : À AFFINITÉS ASIATIQUES. ESPÈCES lOSSILES, ESPÈCES VIVANTES ANALOGUES, 4. Podocarpus Lindleyana Sap...... P. nerüfolia R. Br. — Népaul. 2. Dracænites minor Sap.........,. Dracæna angustifolia Roxb. — Java. 3. Vallisneria bromeliæformis Sap.. Vallisneria Sp. — Philippines. &. Myrica aquensis Sap............. M. longifoha Teysin. et Binendj, — Java, 5. Clethropsis antiquorum Sap....,. C. firma Sieb. et Zucc. — Japon. 6. Mcroptelea Mariont Sap......... M. Hockeriana PI. — Sikkim. LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. ESPÈCES FOSSILES, . Ficus pulcherrima Sap........... Cinnamomum polymorphum Heer. MC ISELUIANUMNS AD: RENE ET . Myrsine recuperata Sap.......... MispinulosaiSapiezth Renan . Diospyros discreta Sap.......... . D. ambiqua Sap RD MPUTOSANSapSE RARE ET . Bombax sepultiflorum Sap....... . Pillosporum Fenzlit Ett . Zizyphus paradisiaca Sap........ AUQMIUS prisca) SAP. 15... 2 me à . À. lancea Sap Cotoneaster assimilanda Sap..... . C. major Sap 921 ESPÈCES VIVANTES ANALOGUES. Ficus tenax BI. — Java. Cinnamomum Camphora L.—Jndes, Japon. C. zeilanicum N. — Indes. Myrsine capitellata Wall, — Indes. M. bifaria Wall. — Indes, Diospyros reticulata DC. — Indes. D, ramiflora Roxb. — Indes. D. lanceolata Roxb. — Indes. Bombax Gossypium L. — Indes. P. tetraspermum Wight et Arn, — Indes, Z. celtidifolia DC... Z. timoriensis Dne.. Atlantus malabarica DG. — Indes trop. A. excelsa Roxb. — Indes trop. Cotoneaster affinis L. — Népaul.i C. frigida Bot. reg. — Népaul. Ile Timor, Des ae { Acacia modesta Wall. — Pundjab. . Acacia poinsianoides Sap........ À À. catechuoides Benth. — Indes bor. 2° AFFINITÉS AFRICAINES. ESPÈCES FOSSILES, ESPÈCES VIVANTES ANALOGUES. 4. Callitris Brongniartir Endi....... Callitris quadrivalvis Vent. — Afrique bor.. 2. Widdringtonia brachyphylla Sap.. W. cupressoides Endl. — Afrique austr. 3. Dracæna Brongniartii Sap...... Pat 7 4 Ten) PISE MIE UN Dracæna draco L, — Iles Canaries. 5. Smilax rotundiloba Sap........ e Sage PERS No Gi En one : Sm. semiamplexicaulis Boj. — Maurice, 6. Myrica Saportana Schimp.. . ..…. DAMES inUGtGASape. AMAR Ne : abs ! sN'pr ne Sap at UNIS DD Myrica œthiopica L, — Afrique australe. OPEN icHOTITASaps.. RAA LOPAMGCUeRtR)Sape Le MR LRe 11. M. Matheront Sap............ Myrica salicifolia Hochst. — Abyssinie, 12. M. pseudo-drymeja Sap........ 13, Ficusvenusta Sap....:........1 Ficus capensis Thb. — Afrique australe, 14, Laurus primigenia Ung......... Laurus canariensis Webb. — Canaries. 15. Proteoites extincta Sap......... Leucadendri sp. — Afrique australe. 16. Daphne relicta Sap............. Daphne viridiflora Wall. — Maurice. 1EOlemprotimaiSap. LAN EN. Olea lancea Lam. — Maurice. 18. Myrsine emarginata Sap........ Myrsine sp, — Maurice. APM near SE SA A MEN M. angustifolia KE. Mey. — Afrique austr, 20 21 - Andromeda pulchra Sap....... . À, sublerranea Sap Andromeda salicifolia Benth. — Maurice. 22PMAPAGTATIAN SAP. RCE RU 29 ATUNEMIS SAP. dr ane. À. littoralis Humb. — Madagascar. 24. Diospyros rhododendrifolia Sap... Royena lucida L, — Afrique australe. 2OPMRD: CONNUS api NL R. villosa L, — Afrique australe. 26. Aralia rediviva Sap........ c Cussonia paniculata Eckl.—Alrique austr. 27. Pittosporum pulchrum SAPEsresne lee Pillosporum undulatum DC. — Maurice. 28, Celastrus pseudo-Bruckmanni Sap. Celastrus brevifolius Lam.—Afrique austr. 29. C. adscribendus Sap............ C. pyracanthus L. — Afrique australe. 30. C, venulosus SEE dot De SN C. serratus Hochst. — Abyssinie, 31. C, banksiæformis. ............. Hartogia capensis L, — Afrique australe. 32. Rhus minutissima SENTE SDS Rhus oxyacanthoides Lam.—Afrique austr, à’ série, Bor. T. XV. (Cahier n° 6.) 1 21 222 GG. DE SAPHHTA. ESPÈCES FOSSILES. ESPÈCES VIVANTES ANALOGUES, 33. Rhus gracilis Sap.....,..,..... Rhus dioica Boiss. — Afrique boréale. 34. Cotoneaster obscurata Sap....... C. nummularia Yrichm. — Afrique bor. 35. Phaseolites clitoriæformis Sap.... Clitoria Ternaten Li. — Moluq. 36. Acacia obscura Sap............. Acacia fallax E. Mey. — Afrique australe. DMC ANS AD SRE ANT A. triacantha Hochst. — Abyssinie. sale À. mellifera Benth. — Abyssinie. 38: N AL 0reDIOMISape RE Reel COLE A. Vérek Guilm. et Perrot. — Sénégal. 39.4. GquEensiS Sapin Albizzia sericocephala Benth. — Abyssinie. 40... 4. longinqua-Sapr es À. eburnea L, — Afrique tropicale. Les formes africaines dépassent donc de beaucoup en nombre les formes asiatiques dans la végétation des gypses d'Aix. Leur nombre s’accroîtrait encore, si l’on voulait y comprendre celles qui habitent à la fois l'Afrique boréale et le midi de l'Europe, comme les Péeris, Laurus, Nerium, Quercus (type des lex), Paliurus et Pistacia, etc. On arriverait ainsi à un chiffre plus que suffisant pour démontrer les attaches africaines de la flore que nous examinons. — De ces formes, à se rapportent aux Canaries, 8 à l'Afrique centrale où à l'Abyssinie, 46 à l'Afrique australe et 10 aux îles de l'Afrique orientale, surtout à Mau- rice. On voit par là combien, en tenant compte des distances, soit dans le temps, soit dans l'espace, la conformité de physio- nomie est étroite entre la Provence éocène et la partie de l'Afrique qui s'étend de l'Abyssinie au Cap. C’est là évidemment le pays qui nous offre Le tableau le plus ressemblant de ce que devait être le midi de la France, et c’est aussi vers ce même pays, ne l’oublions pas, que nous avons été ramenés par l'examen des autres éléments de la flore, spécialement par la proportion relative des deux grandes classes et des familles prédominantes. Dans la région du Cap, la Cafrerie, et généralement dans l’A- frique austro-orientale, le ciel est serein, les pluies sont rares, périodiques, réservées à certains mois, inconnues durant les autres. Il en est de mème aux Canaries, ainsi que dans l'Afrique boréale. D'ailleurs les types dominants de la flore des gypses, Calliris, Widdringlona, Pinus, Acacia, Zizyphus, etc., s'ac- commodent, st l’on a égard à leurs représentants actuels, d’un climat sec et chaud, et il en est de même du Âracæna draco, dans les îles Canaries. 2] LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 929 Il suffit, pour achever cette démonstration, de considérer à la suite de quels événements ces types ont cessé d’être répandus aux alentours des lacstertiaires, et par quelles essences ils furent remplacés presque partout, dans la période qui suivit le ton- grien, c’est-à-dire dans laquitanien et le miocène propre- ment dit. | Les genres Calhtris,et Widdringtonia, qui dominent à Aix sur les autres Cupressinées et s’y trouvent accompagnés de Pénus et de Podocarpus seulement, reparaissent dans les mêmes condi- tions à Saint-Zacharie et à Saint-Jean de Garguier. Dans les gypses de Gargas, le Callitris est associé au Libocedrus salicor- nioides, type des plus curieux, encore imparfaitement connu, qui se montre également à Armissan et à Radobo], qui est tres- rare dans la molasse suisse, mais dont M. Heer a signalé dernie- rement plusieurs spécimens dans ia flore miocène du Spitzherg. Les Sequoia, dont les aptitudes pour un climat et un terrain arides sont parfaitement connues, ne se montrent encore nulle part en Provence. Ils ont dû venir de proche en proche par le nord et par l'est (4). Les premiers paraissent dans la terre penno- carnienne, à monte Promina, à Sotzka (Sequoia Sternbergü), à Hæring en Tyrol(Sequoia Sternberqü et Hardti). Le Sequoia Langsdorfi existe à Radoboj (T'uxites phlegetoneus Ung., Ico- nogr.), mais 1l y est encore très-rare. Il abondeau contraire dans l’aquitanien de Suisse, d’où nous avons dit que le Callitris parais- sait exclu. En revanche, le Sequora Sternbergii Heer est à peu près inconnu en Provence. Une forme qui s’en rapproche beau- coup existe pourtant à Ceylas (Gard), en compagnie du Comp- tonia dryandræ/olia Ung., et ensuite à Manosque. Le Sequoza Tournali, qui diffère peu du S. Langsdor/fi, abonde à Armissan, ainsi que le S. Couttsiæ Heer, qui rappelle le Sequoia gigantea actuel. Mais ces deux essences admettent encore à côté d’elles le Callitris Brongniartii, de même qu'à Hæving et à Radoboj. À Armissan, vers la base de l'aquitanien, la lutte se trouve donc engagée entre les deux types rivaux, mais les Seguora taxiformes (1) Consultez la carte de l'Europe éocène pour tous les détails qui suivent, 52h &. IH SAPORTA. (S. Tournali et Langsdorfii), qui représentent le S. sempervirens actuel de Californie, lemportent bientôt non-seulement sur le Callitris, mais sur leurs propres congénères du type araucari- forme (S. Sternbergü), qu'ilssupplantent presque partout, et que pourtant on retrouve à Bilin, en plein miocène. Auxdivers Sequoia vient se Joindre un type probablement arrivé par le nord, conne les précédents, puisqu'on l’observe dans toutes les flores arc- tiques, c’est le Glyptostrobus (G. europœus AT. Br.), dont les exigences relativement à un sol et à un climat humides sont plus explicites, et qui se multiplie partout avec une extrême abondance. Les rares Glyptostrobus actuels vivent au sein des marécages de la Chine où du Japon, et constituent un type allié, mais fort distinct des Tarodium. Ceux-ci, dont les aptitudes pour les stations aquatiques n’ont pas besoin de preuves, se multiplient en Europe à la même époque; ils arrivent en Pro- vence à la suite du Glyptostrobus; mais, comme celui-ci, Île Taxodium suit la route du nord, où son existence a été plusieurs fois constatée. Depuis ce premier âge, il a si peu varié, que, soit par les fruits, soit par les rameaux, on ne saurait séparer l'espèce fossile de celle de la Louisiane. Rien de plus net que cette marche, et la prospérité croissante des types amis d’un ciel pluvieux et d’un sol inondé explique le déclin corrélatif de ceux qui s'étaient auparavant accommodés d’une atmosphère sereine et de stations soustraites à l’action immédiate des eaux. Dans ia France méridionale, c’est-à-dire dans la région qu'af- fectionnaient le Callitris et les plantes qui lui étaient associées, parüculièrement les Palmiers du type des Æ/abellaria, les Wid- dringtonia, les Lomatites, les fèhizocaulon, les Diospyros à calyces rugueux, les Myricées du type sud-africain, la lutte se prolongea longtemps, et le Callitris, si l’on peut s'exprimer ainsi, défendit le terrain pied à pied coutre les envahisseurs venus des régions polaires ou boréales. À Armissan, nous l’avons déjà dit, le Ca//i- tris se trouve en possession d’une partie du sol, eu présence des Sequoia, ses rivaux, et mème du Taxodium ; mais nous sommes seulement à la fin du tongrien, et le G/yptostrobus est encore absent. À Manosque, l'heure du déclin a sonné pour le type afri- LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 395 cain ; les Sequoia et le Glyptostrobus europœus occupent la plupart des points, et Le Callitris, relégué sur le dernier plan, n’a laissé de lui que de faibles débris qui attestent pourtant sa présence; celle des Æhizocaulon et des Lomattes n’est pas moins certaine. Le dépôt contemporain de Bonnieux nous montre également le Callitris toujours accompagné de ces mêmes types, mais l'expo- sition de la localité semble avoir été plus chaude et moins humide que celle de Manosque. Pour ce qui est des Myrica du type sud- africain, ils ont disparu partout pour faire place à ceux du type dryandroides, mieux appropriés, à ce qu'il paraît, aux condi- tions climatiques de l’époque. Enfin, dans les argiles de Mar- seille, récemment explorées par M. Marion, et dont l’âge est cer- tainement postérieur à celui des dépôts précédents, les Sequoia, Taxodium et Glyptostrobus n’exeluent pas encore le Callitris, bien que la physionomie de l’ensemble se soit presque entière- ment renouvelée. Le mouvement que nous signalons était alors général, et à Coumi, en Eubée, malgré bien des divergences locales, on retrouve les mêmes Sequoia et Glyptostrobus domi- nant comme à Manosque, tandis qu'à côté d'eux les Callitris et Widdringtonia persistent bien réduits d'importance, mais tou- jours accompagnés, comme en Provence, des Lomattes et des Diospyros à calyce rugueux. Il est donc bien certain que les types éocènes ont soutenu la lutte pour l’existence, avant de disparaître, et qu’au lieu d’avoir été remplacés brusquement, ils ont été éliminés d’une facon graduelle à la suite d’un temps très-long. Il n’est pas moins cer- ain que l'humidité croissante doit être considérée comme la vraie cause de cette élimination, dont le résultat définitif a été l'effacement des anciennes limites qui avaient partagé l'Europe éocène en plusieurs régions végétales, et par suite l’umiformité de la flore dans la partie centrale de notre continent, et l'extension, devenue à peu près générale, de certains types de Conifères, tels que les Sequoia, Chameæcyparis et Glyptostrobus. Nous serions entrainé trop loin si nous voulions suivre dans tous ses détails ce grand mouvement, et rapporter toutes les preuves qui attestent son caractère et son universalité. Il nous 326 G. IN SAPOIRTA. faut pourtant insister sur quelques points essentiels. La consti- tution d’un climat plus humide, plus favorable à l'essor de la végétation et à l'ampleur du feuillage, fut suivie plus tard, c’est- à-dire après la première moitié du miocène, d’un abaiïssement lent et progressif de la température en Europe. Cet abaissement, d'abord très-peu sensible, s'accentua de plus en plus dans l’âge pliocène, et tendit à faire prévaloir des zones climatériques dis- posées dans le sens des latitudes, élevant une barrière entre le nord et le sud de notre continent. Il se peut qu'il y ait eu quel- que connexité entre l'humidité croissante du début de l’époque miocène, et l’abaissement calorique de la fin de cette période; on aurait tort cependant de confondre les deux phénomènes : en réalité, ils ont agt séparément, quoique concurremment, et les effets de l'humidité croissante du climat sont bien distincts de ceux qu'a engendrés la diminution de chaleur, bien que ces effets aient pu coïncider dans beaucoup de cas. Il nous semble, à cet égard, que l'établissement d’un climat humide a dû être originairement indépendant de l’abaissement de la température, et que l'influence de ce dernier phénomène a dû être d’abord nulie ou à peine sensible. Dans tous les cas, l'humidité a produit ses effets naturels bien avant que le refroidissement ait fait agir les siens, et, en particulier, les espèces qui vinrent du nord, à un moment donné, semblent avoir été favorisées dans leur mou- vement bien plus encore par l'extension des conditions propres aux climats humides, auxquelles ces essences étaient depuis longtemps adaptées, qu'à un abaissement quelconque de tem- pérature. On peut puiser la preuve de cette manière de voir dans ce fait que les formes polaires se répandirent alors en Europe à côté d’autres végélaux, comme les Laurinées (Laurus, Persea, Cinnamomum), qui ne provenaient pas des régions du nord et auxquels cependant elles demeurèrent associées dans un même ensemble, de sorte que, dans un âge relativement récent, c'est- à-dire en plein pliocène, on les retrouve côte à côte aux envi- rons de Lyon, aussi bien qu’en Italie, et que les uns et les autres ont fini par disparaître à peu près en même temps. — Seule- \ ment nous sommes porté à admettre que lun des premiers fl LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE, 927 résultats du refroidissement, lorsqu'il devint sensible, fut d’ac- centuer les latitudes et d'introduire en Europe des diversités auparavant inconnues, de manière à revêtir la végétation du sud et du nord de ce continent de différences de plus en plus accentuées. Ainsi, la limite de la zone tropicale, qui se place au 55° degré de latitude, à la fin de l’éocène, a dû successivement descendre. OEningen n'accuse guère, à la fin du miocène, qu'un caractère subtropical ; dans le pliocène inférieur, les environs de Lyon possèdent seulement quelques traits tout à fait propres aux pays chauds, avec les genres Bambusa, Persea, Laurus (1). Plus tard on les observe, encore amoindris, en Provence, où le Lau rier des Canaries à opéré une dernière étape avant de quitter entièrement le sol de l’Europe continentale. C'est donc par voie de retrait ou d'élimination que les derniers types tertiaires ont été chassés de notre pays : mais à l’époque où s’accomplit ce dernier phénomène, ce n’était plus seulement les variations d’'hu- midité ou de sécheresse relative qui le déterminaient ; la grande cause était le froid, le froid toujours plus accentué dans le sens des latitudes, et non pas le climat pluvieux ou serein. Ce qui le prouve effectivement, c’est que, devant ce phéno- mène développant de plus en plus ses conséquences fatales, tout a été balayé, les éléments anciens comme ceux qui étaient plus récents, les essences venues du nord à un moment donné, aussi bien que celles dont l’origine sur notre sol remontait aux temps éocènes. Toutes ont été plus ou moins, comme dans les âges antérieurs, quoique par suite d’une cause différente, repoussées (1) De récentes découvertes, dues au zèle intelligent de M. Rames, géologue dis- tingué d’Aurillac, prouvent que cet ensemble s’étendait, sans variations bien sensibles dans la physionomie, jusqu'aux montagnes du Cantal, dont il remontait les pentes. Des Laurinées, dont une ressemble prodigieusement au Phœbe barbusana des îles Canaries, associées à une Tiliacée (Télia subintegra Sap.), à un Bambou et à un Aune pareil aux variétés à feuilles larges et orbiculaires de notre À. glutinosa (A. glutinosa Willd., var. B denticulata Regel, in DC, Prodr.,t. XVI, p. 137), se montraient à 600 ou 800 mètres d'altitude ; au-dessus croissaient un Hêtre, un Charme, un Planera et un Abées; ce dernier difficile à distinguer de l'A, Pinsapo, si l'on en juge par la forme des écailles de ses cônes, seule partie de cette espèce qui soit encore connue, Les vestiges de cette végétation sont restés ensevelis sous les cendres basaltiques des volcans du Cantal. 328 &. DK SAPPHRAA. peu à peu et reléguées finalement dans des limites qu’elles ne sauraient plus désormais franchir, à moins d'un retour partiel des anciennes conditions, éventualité qui n’est guère admissible. Grâce aux découvertes de M. O. Heer sur la flore arctique du miocène inférieur, complétées par les études du même savant sur la végétation de la région baltique à la même époque, 1l est facile de démontrer que les espèces caractéristiques qui rempla- cèrent en Provencela plupart des types dominant lors de l’éocène sont réellement venues du nord, plusieurs même de l'extrème nord. Non-seulement, en effet, les Sequoia taxiformes (S. Langs - dorfii Heer, S. Norsdenskioldi Heer, S. brevifolia Heer) et le Taxodium distichum miocenicum se trouvent universellement répandus dans ces régions, où existe également le Glyptostrobus europæus (Alaska, Mackenzie, Groenland), mais la plupart des essences qui se répandirent peu à peu à travers l'Europe miocène s’y montrent également, entre autres le P/atanus aceroides Gæpp. (Alaska, Mackenzie, Groenland, Islande, Spitzherg), le Liqui- aambar europœum Al. Br. (Alaska, Groenland), le Planera Ungeri Ettingsh. (Alaska, Groenland, Islande), le Carpinus Heeri Ett. (Alaska, Groenland), les Salir macrophylla Heer (Alaska, Islande), varians Gœpp. (Alaska), Lavateri Heer (Alaska), le Diospyros brachysepala Meer (Groenland), le Liriodendron Pro- caccinit Ung. (Islande), l'Acer otopteryx Gœpp. (Groenland, Islande), espèces auxquelles on pourrait joindre le type des ik, alors si répandus dans l'extrême nord et longtemps inconnus dans la plus grande partie de l’Europe.— Il est remarquable que toutes ces espèces n’ont pénétré en Provence que successivement, quelques-unes fort tard, peut-être même jamais. Leur marche par la direction du nord peut être constatée sans trop de diffi - culté. Les Taxodium, Glyptostrobus et Sequoia se trouvent dans la région baltique, ainsi qu’à Bilin. La première de ces régions possède une portion notable des espèces que nous avons citées, la seconde presque toutes, et de plus un magnifique 77/4 (CT lignitum EU.). L'Acer otopteryx et ua autre Tolia ont été ren- contrés à Striese, en Silésie, et presque toutes les autres formes abondent à Schossnitz, où domine le Taxodium disticluun. LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 329 La liste entière de ces mêmes espèces se trouve inscrite dans la flore de la molasse suisse, où cependant aucun Tilia n'a été encore signalé, Nous avons vu comment,'dans le midi de la France, les Sequoia se montraient d'abord à Ceylas (Gard), puis à Armis- san, en compagnie du T'axodium, et ensuite à Manosque, asso- ciés au Glyplostrobus. Des autres espèces que nous avons citées, comme probablement descendues de la région arctique, on ne rencontre dans la flore de Manosque que le Carpinus Heerü EU. (C. grandis Ung.), dont nous avons découvert dernièrement le fruit soutenu par un court mvolucre, le Planera Ungeri Ett. et le Salix Lavateri Heer, ces deux derniers encore très-rares. Dans les argiles du bassin de Marseille, où les T'axodium, Sequoia, Glyptostrobus ahondent comme à Manosque, sans exclure le Ca/- ltris (A), les Salix varians Gœpp. et Lavateri Heer deviennent fréquents, et la série provençale se termine brusquement à ce niveau, sans permettre de constater si le Platane, le Liquidambar et lesautres essences miocènes propres à l’Europe centrale fran- chirent jamais l’espace qui sépare la Suisse et l'Auvergne de la Pro- vence. La mer de la molasse, qui remplissait alors toute la vallée du Rhône, à pu opposer un certain obstacle à cette introduction ; ce qui est certain, c'est que ces formes et d’autres, que nous avons passées sous silence, ont persisté en Italie, Jusque dans le pliocène avancé, et que lestufs de Meximieux, près de Lyon, à peu près contemporains de ceux de Toscane, comprennent encore, à côté d’un certain nombre d'espèces actuelles, le Glyptostrobus europæus, le Platanus aceroïdes et le Liquidambar europæum. Ces trois types étaient alors sur le point de disparaitre après avoir longtemps occupé un espace énorme dans notre hémisphére, depuis laGrèce, dans la direction du sud, jusqu’au dela du eercle polaire, et peut-être plus loin jusqu'au Spitzberg septentrional, dans la direction opposée, c’est-à-dire une étendue de 35 à 40 degrés dans le sens des latitudes. A l’époque des gypses d'Aix, ces événements étaient très-loin (1) Ces observations sc rapportent à des découvertes récentes dues à M, le docteur Marion, 390 G. DH SAPOERTA. de leur accomplissement ; il aurait été même impossible de les prévoir. La mer nummulitique, dont nous avons marqué l’éten- due approximative, se desséchait, tout en persistant sur un cer- tain nombre de points, probablement sans communication avec le reste de l'Océan, et y conservait ses caractères propres et la plupart des types qui contribuent à accentuer sa physionomie. Dans la Provence en particulier, le bras de mer qui, de Nice, s’étendait à Barcelonnette et dans le haut Dauphiné, disparaissait progressivement, tandis que la vallée du Rhône ne donnait pas encore accès aux eaux de la mer molassique. Mais, pour mieux saisir l’état présent des choses, au moment où se déposaient les gypses d’Aïx, il nous faut revenir en ar- rière et relater une suite d'événements antérieurs. — Un très- grand lac, communiquant avec une série de lacs semblables, se prolongeant par le bas Languedoc et l’Ariége jusqu'au cœur de l'Espagne, avait existé avant la fin de la craie dans la vallée de l'Arc, au sud d'Aix et de la montagne de Sainte-Victoire. Ge lac, converti, tantôt en un estuaire traversé par un courant rapide, tantôt en une immense lagune tourbeuse, tantôt en une nappe profonde et calme, avait aussi varié d’étendue, selon les temps, et, après avoir occupé en premier lieu un vaste périmètre, du pied du revers sud de Sainte-Victoire au revers nord de la Sainte- Baume, et de Saint-Maximin à l'étang de Berre, il avait vu res- serrer ses eaux, toujours puissantes, dans un espace moindre, limité vers Aix à la partie centrale et septentrionale de la vallée (4). (4) Consulter, pour tout ce qui concerne la série des formations infra-nummulitiques d’eau douce du midi de la France, les excellents travaux de M. Philippe Matheron, notamment : Recherches comparatives sur les dépôts fluvio-lacustres tertiaires des environs de Montpellier, de P Aude et de la Provence. In-8, Marseille, 1862. — Note sur l’âge des calcaires lacustres à Strophosioma lapicida des environs d'Aix et de Montpellier et sur la position de l’élage de Rognac, par rapport à la série des dépôts crétacés fluvio-lacustres du bassin de Fuveau (Bull, de la Soc. géol., 2° série, t. XXV, p- 762). — Notice sur les Reptiles fossiles des dépôts fluvio-lacustres crétacés du bas- sin à ligniles de Fuveau (extr. des fiémoires de l’Académie impériale des sciences belles-lettres et arts de Marseille). Paris, Savy, 1869. — L'auteur, qui se trouvait en face d’une question entièrement nouvelle, n’est arrivé que par degrés, et à l’aide d’une suite d'observations comparatives, à formuler son opinion définitive sur les étages en question, a qe mm LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 994 Les dépôts, souvent énormes par leur épaisseur, qui se formèrent au sein de ces eaux, consistèrent, tantôt dans des amas détri- tiques marneux ou bréchoïdes, tantôt dans des assises calcaires. Ils se subdivisent assez naturellement en quatre groupes. Le plus ancien est celui des lignites mêmes de Fuveau, qui repose sur une base saumâtre, et se trouve par elle en communication directe avec la craie santonienne sous-jacente. Ce groupe représente lui-même la craie blanche à /noceramus Crispi. Le deuxième groupe, celui de Rognac, est placé par notre éminent ami au niveau de la craie de Maestricht. Au-dessus, le troisième groupe, ou étage du Cengle, S'identifie avec le garumnien de M. Leymerie et la partie supérieure du groupe d’Alet, décrit par le regrettable d’Archiac. Il paraît être le dernier terme de la série crétacée en Provence, et correspond, à ce qu’il semble, au dantien ou pisolithique. Un quatrième groupe, celui des calcaires du Mon- taiquet, sur les bords de l’Arc, commence la série tertiaire, et se trouve, par conséquent, être l’équivalent plus ou moins précis de la période à laquelle appartiennent la mer nummulitique et celle du calcaire grossier parisien. La série, déjà si longue, se termine supérieurement par un cinquième groupe, moins dé- veloppé que les précédents, celui de Cuques, que M. Matheron est porté à considérer comme synchronique des calcaires de Provins et de l’âge des Lophiodons. Nous savons qu’à cette der- nière époque, la végétation différait assez peu dans les environs de Paris, par sa physionomie et ses éléments principaux, de ce qu’elle était en Provence du temps des gypses. C'étaient, des deux parts, les mêmes types de Ca/hitris, Myrica, Lomattes, Nerium, Zizyphus, Aralia, c’est-à-dire la plupart des traits caractéristiques de la région végétale dont la Provence et les alentours du golfe parisien devaient faire également partie. Si l'énorme ensemble de couches purement fluvio-lacustres que nous venons de mentionner, était aussi riche en empreintes végétales que celui qui lui succède au nord de la ville d'Aix, nous posséderions une connaissance parfaite des phases que le monde des plantes a dû traverser depuis la dernière partie de la craie Jusqu'à l’âge des Paléothériums. Malheureusement il n'en 352 G. DE SAPORTA. est pas ainsi, et, bien que les Mollusques terrestres et les restes de Vertébrés amphibies abondent à certains niveaux, les plantes sont absentes, sauf un très-petit nombre, recueillies vers la partie moyenne de l'étage des lignites de Fuveau. Ces plantes ne sont pas sans rapport avec celles des gypses d'Aix, puisque les Æ?hizocaulon dominent parmi elles (A. ma- crophyllum Sap.) et présentent les mêmes caractères que les espèces congénères de l’éocène et du tongrien. Le lien fourni par le genre Æhizocaulon n'est pas le seul; non-seulement le type des Osmunda, mais aussi celui des Lygodium, se montrent à Fuveau, le premier sous une forme analogue à l'O. Hugeliana Presl, le second représenté par des folioles éparses qui rappellent les Lygodeum hastatum Desv. et scandens SW. A à été encore ren- contré dernièrement dans les mêmes lits l'empreinte d’un Pisha voisin du P. stratiotes L.; enfin, les fruits trigones et revêtus d'une enveloppe filamenteuse d’un Mipa de petite dimension (Nipadites provincialis Sap.) y abondent sur bien des points. — C’est là, si l’on ajoute quelques vestiges de Typhacées, une asso- ciation fort naturelle de Fougères et de Monocotylédones amies des eaux ou des plages inondées. Les Dicotylédones demeurent trop insignifiantes pour nous arrèter. À ceite flore aquatique correspondent non-seulement une riche collection de Mollusques d’eau douce, Paludines, Mélanies et Mélanopsides, Unios el Cyrènes, du caractère le plus tranché, mais aussi des coquillesterrestres, certaines de très-grande taille (Ampullaria proboscidea Math.), Bulimes, Auricules, Cyclo- stomes, dont la présence est certainement l'indice d’une riche végétation. Il faut y joindre des Chéloniens (P/eurosternon pro- vinciale Math.), et des Crocodiliens (Crocodilus affuvelensis Math., Crocod. Blavieri Gray). Les groupes suivants sont absolument dépourvus de plantes, mais chacun d’eux est caractérisé par la présence d’une faune plus ou moins remarquable. Celui de Rognac présente non-seu- lement des Lychnus, genre éteint de physionomie tropicale, qui semble avoir immédiatement précédé les Æ/e/ix, des Bulimes, des LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 9399 Pupas, des Mégaspires et beaucoup de Cyclostomes, mais 1} a encore fourni des restes de Chéloniens, de Crocodiliens et de plusieurs autres Reptiles gigantesques, parmi lesquels 11 faut distinguer l’Hypselosaurus priscus Math., et un Dinosaurien, Rhabdodon priscum Math., voisin de l’Zquanodon par sa den- tition, et par conséquent phytophage comine celui-ci. Ces divers indices tirés du règne animal attestent l'abondance des végé- taux terrestres contemporains. Les Auricules, Strophostomes, Cyclostomes, Bulimes, etc., continuent à se montrer dans Îles étages suivants et donnent lieu à des conclusions paralléles. La seule florule du midi de la France susceptible d’être intercalée dans ce grand espace vertical est celle des calcaires concrétionnés de Saint-Gely, près de Montpellier : c’est un dépôt d’origine ter- restre, c’est-à-dire dû à des eaux saturées de carbonate de chaux et coulant en cascade. Il est certainement antérieur à l’âge des Paléothériums, mais sa superposition directe sur le néocomien ne fournit ancune lumière sur le niveau précis auquel il se rap- porte, et ses espèces sont trop peu nombreuses et irop mal carac- iérisées pour donner lieu à quelques conclusions. On y remar- que (1) une Hépatique (Marchantia sezannensis Sap.), une Fougère voisine de l’A/soplala thelypteroides Sap., de Sézanne, un Palmier (Æ/abellaria gelyensis Sap.), analogue à des espèces du suessionien de Paris, de grandes feuilles largement lancéolées linéaires qui reproduisent le type de nervation des Eucalyptus et ressemblent au Myrtophyllum Geinitzsi Heer, de la craie de Moletein (2), deux espèces de Diospyros (D. styracifolia Sap., D. raminervis Sap.), et peut-être un Magnolia à très-larges feuilles. Sans vouloir formuler une opinion qui ne reposerait sur aucune base certaine, il paraîtrait que cette flore, au moins aussi ancienne que celle de Sézanne, à qui elle se lie de plusieurs côtés, se rapprocherait plus encore de la craie que cette dernière. Après le dépôt du plus récent des cinq groupes que nous avons (4) Voy. Bull. de la Soc, géol., 2° série, & XXV, Réunion à Montpellier, p. 892: Note sur les calcaires concrétionnés à empreintes végétales de Saint-Gély (Hérault), par M.G, de Saporta. (2) Voy. Hecer, Beitr. 5. Kreideflora von Moleléin in Mahren, p. 2%, = II &. HN SAPOREE. signalés dans la vallée de l'Arc, celui de Cuques, les eaux ter- aires changèrent complétement de cuvette, et un bassin tout à fait nouveau s'établit au nord de la ville d’Aïx, dans l’espace qui s'étend de cette ville à la rive gauche de la Durance actuelle. Nous avons marqué les sinuosités encore visibles de ce bassin dans la carte, que nous avons donnée précédemment, de la région des lacs tertiaires en Provence. Les bords en étaient fort découpés; son plus grand diamètre de l'est à l’ouest, entre Venelles et Saint-Canpat, n’excédait pas 18 kilomètres, et d’Aix à la Durance, dans la direction sud-nord, on en compte que 16 à 17. Mais ce petit lac a dû être des plus profonds : l'épaisseur des dépôis va sur certains points à plus de 200 mètres, et le fond de la cuvette, soit auprès d’Aix, soit entre le Puy et Meyrargues, est occupé par des masses détritiques formées d'argiles, de marnes, de débris anguleux ou roulés de roches calcaires, tantôt confusément entassés, tantôt reliés par un ciment, et constituant des brèches et des poudingues d’une consistance très-inégale. Il est évident que la violence des eaux futirès-grande à un moment donné de la période gypseuse, particulièrement à l’origine, avant que la contrée dans laquelle venait de se produire la dépression nouvelle eût acquis son assiette et recouvré son équilibre. Plus tard ces mouvements s'apaiserent; lés cours d’eau se creusèrent un lit, et par suite la nappe lacustre devint plus limpide. Ilest cer- tain qu'au moment où les assises qui comprennent les empreintes végétales et le gypse commencèrent à se déposer, tout annonce un calme profond et une transparence des eaux du lac qui n’é- tait troublée que de temps à autre, à l'époque des crues qui ame- naient une certaine proportion d'un limon très-blanc et tres- fin; de là les sédiments marneux et calcaréo-marneux, tantôt réduits à de simples feuillets minces comme du papier, lorsque l'apport était faible ou insensible, tantôt plus au moms épais ou même correspondant à des lits boueux ensuite consolidés. Les eaux du lac étaient plus ou moins calcarifères; elles contenaient aussi de la silice dissoute qui se déposait en rognons et en gâteaux et abondait plus ou moins, selon les assises que l’on examine. Les gypses, toujours associés à une certaine proportion de marne, LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 999 se sont précipités au sein de ces mêmes eaux, de manière à don- ner lieu à des banes épais qui ne sont jamais continus sur une grande étendue, mais apparaissent à trois niveaux successifs sous forme d'amandes et de nids, abondants sur les points exploités, nuls ou réduits ailleurs à de faibles indices. Il semble que les gypses, de même que la silice, aient été le produit de sources thermales dont l’abondance et la richesse auraient varié selon les temps. Dès lors les eaux thermales actuellès ne seraient encore aujourd'hui qu'un prolongement affaibli de ces anciens phénomènes. L'action des eaux courantes servant de véhicule aux plantes fossiles, action exercée au moyen de sources pures et profondes, surgissant le long de l’ancien httoral et se déver- sant au milieu du lac, ressort d’une fonle d'indices. Cette action s’exerçant d’une manière continue, n'exclut ni celle des crues, ui les apports dus aux pluies; seulement l’une de ces influences était permanente, l’autre accidentelle ou périodique. L'action des vents, pour tous les organes légers entraînés de loin, doit être également admise. On peut se demander encore où était situé et comment était configuré le rivage le long duquel croissaient les plantes dont les débris sont venus jusqu'à nous. Depuis l’époque vers laquelle ces débris nous reportent, les lieux ont été boule- versés ; il suffit de jeter les yeux sur la coupe que nous donnons pour en être assuré. Les mouvements du sol qui accompagnèrent l'invasion de la mer de la molasse, et les dislocations encore plus prononcées qui suivirent le retrait de cette mer, ont changé ‘entièrement l'économie de la contrée, telle qu'elle existait au temps du lac gypseux, et aujourd'hui c'estseulement sur un point situé au nord-est de la ville, à la butte des Moulins, que l’on observe la trace de l’ancien littoral, accusée par un lambeau de lias moyen ; de cet endroit la ligne du rivage passait sous lempla- cement où s'élève la ville d'Aix, en dessinant une courbe sinueuse. Îlest probable que cette ligne correspond à celle le long de laquelle surgissent maintenantles eaux thermales, et qu’en dessous s'étend une fracture à l’endroit même où se terminait le lac éocène. Le sol de la plage était formé par le calcaire du Montaiguet, émergé 386 di. APE) SARA. antérieurement, alors plus où moins incliné dans la direction du lac, affaissé depuis, lors de la dislocation qui permit aux eaux de la molasse de s'établir sur ce point et d’y former un étroit et pro- fond estuaire. Il est évident que la partie de la formation à gypse comprise entre le plateau d'Entremont et le rivage de la mer molassique, encore très-reconnaissable, a dû se relever lors de l'envahissement de cette mer, puisque les eaux de celle-ci n’ont pu la recouvrir (voyez la coupe); d'autre part, ce premier re- dressement n’a consisté que dans une ondulation assez faible, puisque la molasse marine et sa base détritique, quiest le grès d Helix, se montrent sur le plateau d'Entremont, aussi bien qu'à Aix mème, avec uve différence respective de niveau qui n’a pu exister originairement. 1 y a donc eu un ou plusieurs redresse- ments successifs qui se sont opérés d’une façon inégale. Dans la zone située au sud de l’escarpement des plâtrières et corres- pondant à l'ancienne plage lacustre, la dislocation qui amena les eaux de la molasse et rompit la continuité des lits précédem- ment déposés, dut être très-prononcée, puisqu'elle transforma en bras de mer un soi précédemment émergé et doué d’une cer- tain relief. Quelque étroit que l’on suppose ce bras de mer, il faut admettre qu'il était en même temps profond, les son- dages opérés aux portes d'Aix, près du mont Perrin, ayant tra- versé, sans atteindre le fond, 50 à 60 mètres de couches. La présence des Unios et des Potamides indique l'influence d’une embouchure etdes eaux par moments saumâtres. Après le dépôt de la molasse surmontée par une formation lacustre qui à fourni des restes de Mastodontes, le relief général de la contrée se ‘pro- nonça davantage dans le sens actuel, par l'agrandissement de la faille qui a rejeté en sens inverse les strates de l'escarpement des pltrières inclinées dans la direction du nord et la portion de ces mêmes strates qui plonge au sud sous la ville, tandis que la molasse elle-même, avec l'étage lacustre qu’elle supporte, était disloquée et reportée à un niveau de plus en plus élevé.— On voit combien tout s’est modifié par l'effet du temps; les empreintes végétales sont là pourtani comme autant de témoins permanents du voisinage des anciennes plages lacustres dans la direction LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TÉRTIAIRE. 337 du Sud. Leur ordre, leur fréquence relative, nous fournissent des détails curieux sur la manière dont la végétation éocène se trou - vait composée. Les eaux limpides, probablement des eaux de source, car ce sont des lits purement calcaires ou des schistes minces qui en fournissent le plus d'exemples, étaient peuplées de Vallisneria, de Potamogeton filiformes et de Chara, entièrement submergés. A la surface s’étalaient les feuilles de deux Nymphéacées, l’une plus rare, analogue à nos Castalia, l'autre d'un aspect plus exo- tique, aux larges feuilles orbiculaires, pourvue de rhizomes épais et éharnus. Les Rhizocaulées avec leurs tiges élancées et mul- tiples, enchevètrées de radicules aériennes, dressaient à côté leurs colonies serrées; en ajoutant le cortége inévitable des Typha, Sparganium et de rares Cypéracées, on aura reconstitué l'ensemble de la flore aquatique. — Sur terre, les essences les plus voisines du bord étaient celles dont on observe des débris à peu près dans toutes les couches : ce sont principalement des Callitris, Widdringtona, Pinus, auxquels étaient associés une Protéacée (Lomatites aquensis Sap.), un Camphrier (Cinnamo- mum lanceolatum Heer), un Cercis (C. antiqua Sap.), et pro- bablement un Palmier (Flabellaria Lamanonis Brngt), dont les frondes sont trop fréquentes pour que sa station n'ait pas été située à portée de la plage. Le Zizyphus paradisiaca et le Pista- cia aquensis Ont dù aussi à certains moments habiter fort près des eaux. Cependant les fruits de ce dernier n’ont jamais été ren- contrés, et le premier est inconnu dans les lits inférieurs. Les Callitris, divers Pinus, le Lomatites aquensis, le Flabellaria Lamanonis et le Cercis antiqua doivent être placés en première ligne dans l’ordre de la fréquence ; ils constituent évidemment les espèces que l’on aurait rencontrées le plus souvent en par- courant l’ancienne plage. Les autres croissaient sans doute plus à l'écart ; leurs débris sont moins communs, souvent mêmeon n’a d'elles que leurs fleurs, leurs fruits ou leurs semences, ou bien le contraire arrive, comme pour l'Acer sexlianum, dont la samare estencore inconnue. Dans d’autres cas ce sont des empreintes uni- ques, dues sans doute àuu heureux hasard, La plupart des espèces 5° série, Bor. T. XV (Cahier n° 6), ? 22 990 &. DE SAPORTA. de cette dernière catégorie ont dû croître dans un périmètre plus ou moins reculé de la région tertiaire. On peut distinguer, dans l'ensemble, des plantes “herbacées, des arbustes, des plantes grimpantes ou volubiles, enfin de grands arbres forestiers. Il existait peu de grands arbres parmi ceux qui entouraient immédiatement l’ancien lac. Nous avons déjà remarqué la sta- ture grêle ei probablement peu élevée des Pins; le Widdring- tonia se rangerait parmi les plus petites formes du genre par la ténuité de ses ramules, et la Sabine éocène (Juniperus ambiqua) n'a rien qui la distingue essentiellemeut de notre Juniperus sabina, dont la croissance est fort lente et qui constitue rare- ment un arbre. Le Callitris Brongniarti Fait exception; ses rameaux sont généralement plus gros, plus feuillus et toutes ses proportions plus grandes que dans le €. quadrivaluis, qui s'élève fort haut en Algérie, lorsque les circonstances le favo- risent. M. le docteur Marion, notre ami, en a observé dernière- ment des pieds irès-vigoureux sur les talus escarpés des gorges de la Chiffa, au. bord des ruisseaux retombant en cascades. C'était là probablement aussi le genre de station propre au Callitris Brongniart, sur la lisière des eaux jaillissantes qui abondaïent auprès du lac gypseux; il constituait sans doute un arbre de première grandeur, de forme pyramidale, aux rameaux multiples et entrelacés, ressemblant en grand à l'Oxycèdre, sujet comme lui à se dégarnir par le bas. On ne peut guère attribuer aux Palmiers de ce temps une haute stature, à cause de la médio- crité de leurs frondes, comparablesà celles du Chamwrops excelsa Hort., ou Palmier de Chusan ; mais quelques-uns des Dracæna (D. Brongniarti ont pu devenir gigantesques, tout en conser- vant un tronc très-court, à l'exemple du D. draco, des îles Canaries, auquel ils ressemblent beaucoup. Le Cercis antiqua Sap. s’écarie trop peu de son congénère actuel pour permettre de croire qu’il en ait beaucoup différé par le port; mais au nombre des formes dont la taille était sans doute supérieure à celle de leurs analogues connus, il faut ranger le Pestacia aguensis, qui doit avoir donné lieu à un arbre plus élancé, plus vigoureux et plus étoffé que notre Lentisque, auquel il correspond. La fré- LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 989 quence deses folioles annonce qu'au moins à certains moments sa station n’était paséloignée des rivages del’ancien lac. Les arbustes principaux ont dû être, en sé renfermant dans un rayon rappro- ché du littoral, des Myrica à feuilles étroites, coriaces et épi- veuses(Myrica Saportana Schimp., M. lineuris Sap.),.de petits Chènes à feuilles saliciformes et persistantes, rappelant les Quercus phellos et cinerea d'Amérique (Q. palæophellos Sap.), des Camphriers, des Andromeda du type Leucothoe, plusieurs Vaccinium et Celastrus, un Térébinthe (Pistacia reddita Sap.), des Zizyphus, Paliurus, Cotoneaster, et enfin PRES Légu- mineuses frutescentes. Les grands arbres se tenaient sur un plan un peu nus reculé; ils constituaient sans doute une vaste forêt, dont il est encore possible. de retrouver les principaux élémenis. C'est à aide d'organes isolés, surtout de fruits, de samares, de semences légères, emportés par le vent ou charriés par les eaux que nous avons eu connaissance de cette partie de la végétaüon éocène des environs d'Aix. L’étendue et la richesse des lits explorés nous l'ont permis, car dans les conditions ordinaires, les em preintes recueillies ne se rapportent qu'aux espèces tout à fait dominantes, ou à quelque vestige isolé de celles qui ne erois- saient pas sur le lieu même que l’on explore. Voici une liste des principaux de ces arbres, disposés. dans l’ordre de leur importance probable, avec l'indication de ceux de leurs organes qui sont arrivés jusqu’à nous.:. Diospyros L. — 10 espèces, 6 connues par leurs feuilles, 4 par leurs fruits ou leurs calyces persistants. (Il y a une réduction PORGPe à opérer par suite des doubles emplois. }} * Acatia Neck.— 9 espèces, 8 connues HE leurs fruits, ? par une foliole isolée unique. : Atlanthus Desf. — 3 espèces isprétentéost par leurs samares ; tuiles inconnues. Laurus L. — 3 espèces représentées par un très-petit nombre de feuilles. Bombax L.— Corolles détachées et folioles LAS du pétiolé com- mun. Ficus L, —h espèces représentées chacune par une seule feuille. 3h10 G. DE SAPORTA. Microptelea Sp.— Samare et feuille uniques. Clethropsis Sp. — Samare et strobile uniques, feuille inconnue. Heterocalyx Sap. — Calyces scarieux et fruits, feuilles inconnues. Palæocarya Sap.— Involucre fructifère unique, feuilles inconnues. Sapindus L.— Folioles détachées très-rares. Sterculia L.— Üne feuille unique. Magnolia L. — Une seule feuille. Tous ces genres constituent dans les régions chaudes des types de haute taille etsilvicoles ; ilfaut admettre qu'il en était de même autrefois en Provence. Deux d’entre eux, Heterocalyx et Palewo- carya, sont éteints, mais les types actuels dont ils se rapprochent incontestablement, les Anacardiacées des pays chauds, et les Engelhardtia, particulièrement ces derniers, comptent parmi les arbres forestiers les plus élevés. Six de ces genres, remarquons- le, nous sont connus par des organes légers et scarieux, corolle, samare, involucre, calyce, que le vent a pu emporter, ou qui ont dû joncher le sol en assez grand nombre, pour que les eaux courantes aient pu s’en emparer. Les Diospyros et les Acacia qui paraissent avoir dominé par le nombre comme par l'impor- tance de leurs espèces dans la forêt tertiaire, ont dû, à l’époque de la maturité de leurs fruits, disséminer ces organes en énorme quantité, circonstance qui explique leur fréquence relative, fort restreinte pourtant, en ce qui concerne les Acacia, dans les strates éocènes. Peut-être cette dispersion coïncidait-elle avec la saison des pluies, tandis que les feuilles de ces mêmes arbres. tombaient à un autre moment, moins favorable à leur conser- vation. Îl faut le croire ainsi, pour expliquer la rareté des feuilles de Diospyros etl'absence presque complète des folioles d’Acaca, si aisément transportables par le vent. Mais, cette même parti- cularité démontre d’une facon tout à fait évidente la situation écartée de la station qu'ils habitaient. La même remarque s’ap- plique aux Aëantus, Clethropsis el Palæocarya, dont les feuilles nous sont encore inconnues, ainsi qu'au Âficroptelea, dont la simare, trouvée une seule fois, ne provient pas des mêmes lits que la feuille également unique. Un heureux hasard nous a seu permis de connaître les Magnolia, Sapindus, Sierculia et Ficus, LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 9/1 dont les feuilles sont excessivement rares ou même entièrement isolées. Il est donc probable que beaucoup d’espèces, associées aux premières dans la même forêt, ne sont pas venues jusqu’à nous, et que, même en tenant compte des découvertes posté- rieures, nous ignorerons toujours l'existence de plusieurs d’entre elles, surtout de celles dont les fruits étaient lourds, coriaces, pulpeux ou non cadues, et dontles feuilles ne se sont pas trouvées sur le passage des eaux courantes qui se rendaient dans le lac. Les arbustes ou essences ligneuses de deuxième et troisième grandeur, associés aux grands arbres que nous venons de signa- ler, étaient principalement des Myricées, des Protéacées?, un Peuplier (Populus Heerü Sap.), un Nerium, un Cornus, des Pitiosporum, de grandes Araliacées, un Érable, un Paliurus, des Sapotacées ? et Myrsinées, des ARhus, Ilex, Myrtus, et plu- sieurs Légumineuses. Il faut y joindre une Musacée dont nous possédons les feuilles, un Dracæna de petite taille, un Palmier, qui devaient se cacher au fond du bois. De toutes ces espèces, le seul Acer sextianum présente des feuilles assez analogues à celles des formes boréales du genre, pour que l’on admette sans difficulté, qu’elles étaient membraneuses et caduques. Les herbes terres- tres, sauf plusieurs Graminées et quelques Fougères des genres Pleris et Cheilanhtes, n'ont laissé que de rares et faibles ves- tiges. On pourrait cependant ranger dans cette catégorie, bien qu'avec doute, les Cypselites, qui dénotent des Composées, une Chénopodiacée (Oleracites beta-prisca Sap.), le Solanites Bron- gniartii Sap., qui dénote un type voisin des Solanées et des Bor- raginées (1), enfin deux Légumineuses signalées sous les noms de Trifolium et d’Ervites ; mais aucune de ces attributions n’en- traine une véritable certitude. Les lianes ou plantes à tiges enroulées:et grimpantes n'étaient pas inconnues, mais en l’état elles se réduisent à un très-petit * (4) D'après une note de M, Giard, élève distingué de l'École normale, qui m'est communiquée à l'instant, l'étude des Insectes du gypse d'Aix l'aurait conduit à des indications utiles relativement à la flore herbacée contemporaine. Des Charançons, très-voisins de nos Cionus et de nos Centorhynchus, dénoteraient l'existence probable des Scrofulaires, des Verbascum, et sans doute aussi des Labiées et des Borraginées. 342 &. DE SAPORTA. nombre, sans doute à cause de. limperfection de nos moyens d'exploration; on doit cependant citer deux Lygodium, un Smilax (S. rotundifolia) et deux Phaséolées (Phaseolites obco- nicus et chtorieformis Sap.). Les types à rameaux épineux, dont la présence est en harmonie avec le caractère général de la flore, les feuilles étroites et coriaces, les arbrisseaux à stature rabougrie, devaient être fré- quents. Les principaux étaient des Célastrinées, des Houx, des Nerpruns, des Pahures, des Jujubiers; mais la présence des Bombacées, des Magnolia, des Nerium, des Cercis, et, au sein des eaux, des Nymphéacées, démontre que les belles et grandes fleurs ne faisaient alors nullement défaut. Il existait aussi des baies et des drupes plus ou moins succulentes, charnues ou sucrées, susceptibles de servir ‘de nourriture à des animaux fru- givores, On peut citer spécialement les Musa, Myrica, Eaurus, Diospyros, Vaccinium, Cornus, Zizyphus, Pistacia, Myrtus, Cotoneaster, comme rentrant dans cette catégorie. Plusieurs cônes de Pins portent la ‘trace de la dent.des Rongeurs, qui en ont dévoré la-partie extérieure jusqu’à l'axe. Les Insectes, dont il existe au moins cent espèces décrites, outre beaucoup d’autres encore inédites, fournissent des indica- tions précieuses sur la nature de la végétation contemporaine, et tendent à confirmer en bien des points, d’une facon indirecte, les notions tirées des plantes. M. Heer, dans ses Æecherches sur le climat et la végétation du pays tertiaire, mentionne 22 Coléo- ptères dont plusieurs Carabiques et 414 Curculionides, 2 Ortho- ptères, 4 Thysanoptère, 2 Névroptères, 12 Hyménoptères dont 5 Fourmis, 6 Lépidoptères dont deux diurnes, 25 Diptères et 18 Rhynchoies ou Hémiptères, Le plus célèbre des Lépidoptères d'Aix, Cyllo sepulta Boisd., appartient à un genre dont les espèces, assez peu iomibienees) sont confinées aujourd’hui dans les îles de l'archipel indien, où elles voltigent à l'état parfait à l’entour des Palmiers, dont peiits êtré se nourrit leur larve. Un autre diurne, le Thaites Rumi- niana Heër, est très-voisin de nos Thais, dont la chenille vit sur l’Aristoloche. Nous n'avons pas encore rencontré d’Aristolochia LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 343 dans les gypses d'Aix; mais l’existence du genre dans le ter- taire moyen ne saurait être mise en question, depuis que nous avons entre les mains une superbe empreinte de Radoboj (Aristolochia venusta Sap.}, qui dénote une forme voisine des Aristoloches à feuilles persistantes et demi-coriaces, comme VA. reticulata Nuit. de Virginie. Un genre de Curculionides, Hipporhinus, est maintenant limité à la Nouvelle-Hollande ; deux autres paraissent éteints ; tous les autres appartiennent encore à la région méditerranéenne ; mais ce sont des genres très-éten- dus dont la présence à Aix n’a rien de caractéristique. Huit espèces paraissent communes à Aix et à Radoboj. — D'après M. Heer, la plupart des Insectes proviennent d’une plage humide, comme les Staphylins, les Bembidium, les Stenus, Lithocharis, Xantholinus, Philontus et Cleone, qui sont des Coléoptères coureurs, ou ont vécu à l'ombre des bois, comme les Limno- bius, Xylophaqus, Mycetophila, Bibio, et d’autres Diptères dont les larves vivent dans le bois pourri, fréquentent les endroits frais ou se nourrissent de la chair des Champignons. Les Pachy- merus Murchisonii et Bojeri (Hémiptères) ont dû s'attacher aux Pins si répandus autour de l’ancien lac; le Bythoscopus musca- rèus et l'Aphrophora Spumifera aux feuilles d’une Salicinée, par conséquent du Populus Heerii. Le Pseudophana amatoria dénote la présence des Chênes, qui comptent effectivement plusieurs espèces. Le Thrips antiqua et V Hilarites bellus permettent à M. Heer de présumer avec raison que la forêt tertiaire était peu- plée de belles fleurs. Le Cassida Blancheti lui fait croire à l'existence des Synanthérées, dont nous rapportons la preuve répétée, et enfin l'Aeferogaster antiquus l'amène à soupçonner une Ortie qui est encore à découvrir. Il nous reste à examiner ce qui concerne l’ordre probable des saisons, et l’époque de floraison des {principales espèces. Les plaques à empreintes du dépôt des gypses d'Aix étant généra- lement de petite dimension, et ne présentant que très-rarement plusieurs organes réunis, il est beaucoup plus difficile d'arriver par leur considération aux conclusions presque rigoureuses que M. Heer a pu déduire de l'examen des riches spécimens d'OEnin- ähl &. DE SAPORTA. gen, et que celui des dalles non moins riches d’Armissan nous a permis de développer. I est cependant possible de distinguer à Aix trois catégories de végétaux séparées par leur mode de floraison respective. Les uns, comme les Micropteleu, Populus, Laurus, Camphora, Pistacia, Cercis, présentent une floraison précoce, c'est-à-dire sortant de bourgeons particuliers, placés sur le vieux bois, et se développant avant les feuilles nouvelles ; nous donnerons à ce mode de floraison le nom d’Aibernale, parce que rien ne s'oppose à ce que, sous un climat doux, elle ait lieu en plein hiver. D’autres essences développent leurs inflo- rescences presque en même temps que les feuilles : ce sont des genres chez qui les fleurs et les feuilles sont renfermées dans les mêmes bourgeons, et dont le jet annuel s'effectue au prin- temps par un mouvement très-rapide. Les C/ethropsis, les Quercus, les Ostrya, parmi les genres de la flore d’Aix, doi- vent être rangés dans cette deuxième catégorie. La troisième comprend les genres à floraison estivale, dont la fleur succède au développement des feuilles, c’est-à-dire chez qui l’apparition des fleurs est postérieure à l’évolution du jet annuel. Nous devons signaler, en fait de genres appartenant à cette dernière catégorie, les Nerium, Magnolia (type à feuilles persistantes), Pültosporum, Diospyros, et bien d’autres. — Enfin, en dehors de ces trois séries de genres, 1l existe dans la flore d'Aix une Bombacée dont les fleurs se montraient sans doute sur les ra- meaux dépouillés de leurs feuilles. C’est ce qui arrive effective- ment à beaucoup de Bombacées tropicales, qui, après avoir perdu leurs feuilles par l'effet de la trop grande chaleur, fleurissent avant d’en revêtir de nouvelles, sous l'influence de la saison des pluies. Il en est ainsi d’un grand nombre d’Acacia dont les feuilles tombent à la fin de lété, en sorte que les arbres demeurent chargés de leurs légumes, dont les valves s’écar- tent pour disséminer les graines, et se détachent ensuite au moment où la végétation se ranime. Cette marche élait proba- blement celle qui présidait aux saisons, à l'époque des gypses d'Aix; c’est celle qui s'applique avec le plus de vraisemblance aux faits observés. LE SUD-EST DE. LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 35 La chaleur jointe à la sécheresse devait être extrême et avoir pour résultat de suspendre la végétation durant la seconde . moitié de l'été, et de dépouiller beaucoup d’essences forestières de leurs feuilles, à l’égal de ce que fait notre hiver, et conformément à ce qui existe dans les pays chauds actuels où l’année se divise en deux périodes, l’une de sécheresse, l'autre caractérisée par des pluies continues et périodiquement amenées. Le niveau des eaux lacustres tertiaires devait diminuer de hauteur, d’une manière sensible, pendant la saison sèche, ainsi qu 1l arrive de nos jours aux lacs africains, et la plage était mise à nu jusqu'à une assez grande distance des bords. Le fendillement de la sur- face exposée d’abord au soleil, recouverte ensuite par le limon d'une crue subite, qui reproduit en relief toutes les fissures, constitue un phénomène souvent signalé en géologie, et visible sur bien des points de la formation des gypses. Après une interruption plus ou moins longue, plus ou moins complète, c'était à la suite de. l'influence exercée par la saison des pluies que la végétation reprenait peu à peu son activité. C'était alors, c’est-à-dire à une époque de l’année correspondant à notre hiver, que le Bornbax sepultiflorum Sap. fleurissait, et que les C/ethro- psis, Microptelea, Populus, la plupart des Myrica, les Quercus et Ostrya, les Palæocarya (Engelhardtia), Laurus, Cinnamo- mum, Pistacia et Cercis développaient successivement ou simul- tanément leurs fleurs, puis leurs feuilles. A cette première période suecédait celle déjà plus chaude et‘plus sereine, corres- pondant à notre printemps, pendant laquelle se montraient les fleurs des Nymphiea, Musa, Nertum, Magnolia, Pitlosporum, Aralia, et'autres plantes à floraison vernale ou estivale ; puis venait l'été proprement dit, durant lequel les fruits mürissaient, et les graines commencçaient à se disséminer, tandis que, par l'effet de la chaleur croissante jointe à la sécheresse, la végéta- tion s’alanguissait de plus en plus. Ce qui prouve le calme de la saison chaude, c’est le petit nombre de fruits samariformes ou de semences légères quisont arrivés jusqu'à nous, l’action des vents s'étant fort peu fait sentir, tandis qu'à Armissan les samares de Betula et les involucres de 3116 G. DE SAPORTA. Palæocarya (Engelhardtia), si rares dans le gypse d'Aix, par- sement la surface des lits en quantité imnombrable. Ce fait seul est l'indice d’une différence de climat entre les deux époques ; il nous fait saisir combien la nature et l’ordre des phénomènes atmosphériques avaient dû changer dans l'intervalle. Il est vrai qu’obéissant à la même impulsion, la végétation s'était aussi renouvelée dans son aspect, comme dans ses éléments consti- tutifs. En réunissant tous les traits que nous venons d’esquisser, il n'est pas impossible de se figurer l'aspect de la contrée qui s'étendait vers la fin des temps éocènes, sur l'emplacement main- tenant occupé par la ville d'Aix. — Un lac limpide à niveau variable, selon les saisons, aux bords escarpés sur quelques points seulement, dominé à droite par une sorte de promon- toire liasique, limité à cet endroit par des blocs épars battus par le flot, bordé au sud par une plage sinueuse, dessinant une baie peu profonde où des sources thermales mêlaient leurs eaux à celles du lac; plus loin une plaine qui s'élevait insensiblement pour disparaître sous une vaste forêt, {tantôt impénétrable, touf- fue et fleurie, tantôt presque entièrement dépouillée : tel était le cadre. La végétation elle-même aurait ménagé bien des sur- prises et découvert à son visiteur une foule de contrastes. Il aurait aperçu des Pins, des Thuias (Calhtris), des Sabines mêlées à des Palmiers grêles, çà et là des Dragonniers courts et massifs, tout un ensemble d’arbustes épineux, variés de ton, d'aspect et de port. Il aurait remarqué la rareté des plantes her- bacées, et au sein des eaux des colonies pressées de ces bizarres Rhizocaulées aux tiges dressées et multipliées, soutenues et comme étançonnées par des myriades de radicules qui descendent de tous côtés en se frayant un passage à travers les feuilles. Un peu plus loin dela plage et probablement au milieu d’une campagne déjà accidentée, mais au-dessus de laquelle se dressait le rocher de Sainte-Victoire, formant peut-être alors une mon- tagne plus considérable que de nos jours, il faut placer des forêts composées surtout d'Acacias au feuillage grêle et menu, de Diospyros, de Juglandées tropicales, d'Ailantes, de Magnolias, LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 3/47 de Laurinées et d’Anacardiacées. — Ces forêts verdissent ou se dessèchent selon les mois ; une foule d’arbrisseaux et d’arbustes se pressent sous leur ombre ; des Fougères, pareilles à notre Fou- gère commune, couvrent le sol sur certains points ;sur d’autres, au pied des rochers ou sur le bord des ruisseaux, les Lygodium en- lacent leurs tiges délicates, les touffes de Cherlantes se suspen- dent aux fissures. La fraîcheur est médiocre au sein de cette nature, les formes présentent toujours quelque chose de dur, de chétif; mais la variété, l'originalité, la multiplicité, ne faisaient pas défaut à la végétation éocène, et le botaniste transporté au milieu d'elle aurait recueilli sans peine une riche moisson de faits et une nombreuse suite d'espèces et de types. plus tard disparus. Si l’on replace dans le paysage qui vient d’être esquissé la faune de Mammifères qui lui était propre, on la trouve en rap- port parfait avec les espèces végétales dont elle. se nourrissait. Il existe même, on peut le dire, une harmonie curieuse entre les avalogies respectives du monde des plantes et de celui des Mam- mifères d'alors avec ce que nous laissent voir certaines régions du monde actuel. Ce sont les mêmes tendances des deux parts. Chez les Mammifères, comme chez les plantes, les uns sont demeurés indigènes; les autres, en bien plus grand nombre, toujours-en considérant les genres, n’ont plus, dans les régions étrangères et voisines des tropiques, que des représentants indirects, amphigés, comme les Tapirs que l'Amérique et l'Asie méridionale possèdent également, diffus.et fractionnés, comme les Chevrotains, dont une espèce habite la Guinée, une autre l'Asie centrale et l'Inde boréale, et d’autres encore les îles de la Sonde, ou les Damans, qui se montrent dispersés depuis la Syrie jusqu’au Cap. Seule- ment, tandis que les identités génériques ne sont pas rares dans la flore des gypses d'Aix, où les types éteints sont moins nom- breux que les autres, la proportion est renversée en ce qui con- cerne les Mammifères, chez lesquels les formes ambiguës, ser- vant de lien entre des ordres, des tribus et des genres aujourd’hui distincts, dominent d’une façon à peu près exclusive. Évidem- ment l’évolution de la classe, et surtout celle des ordres qui la 8118 G. DE SAPORTA. divisent, sauf en ce qui concerne les Chiroptères et les Rongeurs, était encore éloignée de son terme; l'élaboration et le développe- ment progressif des caractères de structure devenus propresaux Proboscidiens, aux Équidés, aux Porcins et aux Ruminants, se poursuivaient peu à peu pour n'être achevés que beaucoup plus tard. L'adaptation, de plus en plus rigoureuse, des organes à un réglhne et à des habitudes déterminés ; la spécialisation croissante des divers groupes s’écartant graduellement d’une souche commune entachée d'ambiguité; la division du travail organique s’opérant à l’aide d’une complication croissante des parties caractéristiques et de Pélimination ou de la réduction à l'état rudimentaire de celles qui deviennent inutiles, telle doit être la formule qui résume la transformation qui a eulieu chez les Mammifères. Ce mouvement, un des plus curieux et des plas com- plets qu'il ait été donné à la science de constater, était en voie d'accomplissement vers la fin de l’'éocène ; 1l est essentiellement lié, comme l'observation le démontre, au monde des végétaux, dont les Mammifères éocènes tiraient presque tous leur subsis- tance. La connaissance de leur régime résulte donc de l'étude des plantes contemporaines. Les Mammifères comprenaient alors, comme aujourd’hui, des carnassiers, des insectivores, des rongeurs et des phytophages ; mais les proportions entre ces différents. groupes étaient loin d’être les mêmes, L'Hyænodon et le Cynodon, V'un qui tient à la fois des Félidés et des Didelphes.carnassiers de l'Australie, l’autre intermédiaire aux Canidés et aux Civettes, constituent à peu près les deux seuls types de Mammifères carnassiers de l'époque. Les Insectivores, dont la présence est parfaitement justifiée, comptaient à Aix au moins une Chauve-souris ( Vespertiho ayuensis Gerv.). Les Rongeurs comprenaient des Écureuils (Sciwrus fossilis Gieb.) et des Loirs (Myozus spelœus Fisch., M, parisiensis Gieb.). La flore d’Aix leur fournissait en abondance des cônes de Pin, des glands, des fruits de Palmier et de Jujubier, dont ces animaux sont particulièrement friands. Leur régime n’a, LE SUD-EST DE LA FRANCE A L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 349 du reste, rien d’exclusif; ils dévorent également les pousses tendres, et à l’occasion les œufs d'oiseaux et les insectes. Tous les autres Mammifères éocènes, dont l'existence a été constatée dans le midi de la France et spécialement à la colline de Sainte-Radegonde, près d’Apt, sont des Pachydermes proto- typiques. Les uns sont tridactyles, avec des tendances vers les Tapirs, les Damans et les Rhinocéros, comme les Palæotherium et les Paloplotherium, ou vers les Équidés, comme l’Anchithe- rium ; les autres sont artiodactyles, c’est-à-dire pourvus de deux doigts médians égaux, comme les Bisulques actuels, avec des doigts latéraux plus ou moins inégaux ou rudimentaires : ce sont des Porcins primitifs qui tendent, soit à revêtir les carac- tères des Porcins proprement dits, soit à devenir de vrais Rumi- nants. Mais aucun de ceux même qui se rapprochent le plus de ces derniers n'a encore les os métacarpiens et métatarsiens sou- dés en canon, ni le mode de dentition spécial et surtout l’ab- sence d’incisives-à la mâchoire supérieure des Ruminants pro- prement dits. Ils se rapprochent au contraire des Chevrotains, qui sont les plus imparfaits de tous les Ruminants actuels, et dont une espèce africaine, l'Æyæmoschus aquaticus de Gray, présente même des os métacarpiens et métatarsiens divisés. Sous le rapport du genre de vie et du régime alimentaire, ces animaux éocènes peuvent être partagés en deux groupes. Les uns baugeaient comme le Tapir et le Sanglier, fréquentaient le bord des eaux, les marais, les lieux humides et inondés : c’étaient surtout les Pal/æotherium, qui ressemblaient beaucoup aux Tapirs et en avaient sans doute les mœurs. À l'exemple de ceux-ci, ils devaient fouiller le sol avec leur trompe, arracher les herbes flot- tantes, labourer la vase pour en retirer les rhizomes charnus, broyer les tiges succulentes, et sattacher particulièrement aux Nymphœa et aux Rhizocaulées, sur les rhizomes desquels on observe si fréquemment des parties lacérées. L’Anoplothertum avait des mœurs semblables, mais plus exclusives; 1l était na- geur, selon Cuvier, et s’éloignait peu de la lisière des eaux, Le Palæotherium, au contraire, recherchail probablement les forêts autant que les lieux inondés; il partageait son temps entre 300 &. DE SAPORTA. plusieurs stations différentes, marchant à certaines heures à travers les fourrés, avide de fruits de toutes sortes, de racines, de feuillage et même d’écorce tendre. Les Chæropotamus, qui précèdent les Anéhracotherium et forment, avec ce genre et celui des Æyopotanus, un petit groupe fort naturel, ont des affinités plus marquées queles précédents avec les Porcins et les Hippopotames. Ils vivaient près des eaux, au milieu des tour- bières et des marécages, et ne s’en écartaient que pour recher- cher des fruits ou déterrer des racines. D'autres Mammifères de cette époque, ce sont ceux qui forment le second groupe, avaient plutôtles habitudes purement terresires et l'apparence extérieure des Damans et des Chevrotains. C'é- taient les T'aprrulus (T°. hyracinus Gerv.), qui avaient la taille des Damans et semblent faire la transition des Anoplotherium aux Tapirs, l'Aphelotherium Duvernoyi, Ÿ Acotherulum saturninum Gerv. (Débruge), le Cainotherium, mais surtout le Xiphodon, qui doit avoir eu l’agilité du Chevreuil. Ces animaux, à exemple des Chevrotains, vers lesquels leurs principaux caractères ten- dent. à opérer un passage en voie d'accomplissement, broutaient les bourgeons, les feuilles et les rameaux des arbustes, alors si variés et si multipliés. Les Chevrotains vivent de nos jours de la même façon, isolés sur les rochers escarpés des vallées monta- gneuses, couvertes de bois épineux ; leur nourriture, exclusive- ment végétale, se compose, en Sibérie, de plantes marécageuses, de feuilles d'Arbutus, de Rhododendron et de Vaccinium. devait en être ainsi pour les Ap4odon du temps des gypses, à qui s’offraient en foule des Éricinées et un Vaccènium à peine distinct du V. Veñs-idæa L., si recherché par les Moschus de Sibérie. Nous terminons iei ce tableau préliminaire, que nous avons tâché de rendre aussi complet que possible et dont nous avouons pourtant l'insuffisance à bien des égards. À côté des déductions rigoureuses que nous avons pu formuler dans quelques parties en nous basant sur des chiffres proportionnels et des notions plus ou moins précises, il est d’autres considérations purement conjecturales où qui ne s'appuient que sur un commencement de LE SUD-EST DE LA FRANCE À L'ÉPOQUE TERTIAIRE. 991 preuves. Ce n'est là, nous le comprenons, qu'un premier pas dans une voie à peme ouverte, bien qu'elle résulte de dix années d'observations et de recherches. Mais les explorations futures, poursuivies sans relâche, pourront lélargir peu à peu et nous introduire au cœur même d’un passé dont on finira, espérons-le, par déchirer tous les voiles, EXPLICATION DES PLANCHES 15 gr 16. 15, Carte sous forme de planisphère, feprésentant l'étendue présumée de la mer nummulitique dans l’ancien continent, avec le tracé des limites boréales actuelles des principaux genres exotiques, dont la présence a été constatée dans la flore. des gypses d'Aix. 46. Carte de l’Europe éocène, donnant la distribution relative des terres et des mers à l’époque nummulitique, et faisant connaître l'extension contemporaine présumée des principaux types, dont la présence sert à caractériser la végétation des gypses d'Aix. À. Coupe idéale de la vallée de l’Arce et de la formation des gypses d’Aix, pour aider à l'intelligence des événements géologiques dont l’ancienne contrée a été successivement le théâtre, PRODROMUS FLORÆ NOVO-GRANATENSIS ÉNUMÉRATION DES PLANTES DE LA NOUVELLE-GRENADE AVEC DESCRIPTION DES ESPÈCES NOUVELLES Par MS. MRHANA ct J. Æ, PLANCHON TÉRÉBINTHACÉES, RUTACÉES (1). DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. — À l'exception des Mauria, des Rhus, de deux ou trois Zanthoxylum et des Schinus, qui habi- tent dans les forêts tempérées les pentes des Cordillères, où ils atteignent quelquefois la limite inférieure de la région froide, le reste des Térébinthacées et des Rutacées grenadines se compose surtout d'arbres propres à la zone brûlante, à partir du niveau de la mer jusque vers 1200 mètres au plus d'altitude. Ces plantes se plaisent notamment dans les grandes vallées parcourues par des rivières, Parmi les Térébinthacées, les Zcica et Crepidosper- mum semblent se porter de préférence à l’orient des Andes, dans les grandes plaines qui s'étendent vers les Guyanes et le Brésil, tandis que plusieurs Rulacées suivent au contraire les vallées parallèles aux chainons de la Cordillère. Les autres plantes des deux groupes sont des régions chaudes et tempérées. Les Aurantiacées, toutes d'origine étrangère à l'Amérique, sont cultivées partout depuis le niveau de la mer jusqu’à l'altitude de 2000 mètres, où elles prospèrent. Cependant les Cédrats, les Orangers amers, peuvent alteindre les plateaux andins, où, quand ils y sont bien exposés, ils fleurissent, mais ne fructifient presque Jamais. (14) Nous complétons par la disfribution géographique notre étude de ces deux familles publiée à la page 286 el suivantes du tome XIV de ce recueil. PRODROMUS FLORÆ NOVO-GRANATENSIS. 399 I, — SIMAROUBÉES. Planch., in Hook. Lond.Journ,, V,p. 577 ; Benth.etJ. D. Hook., Gen. pl., 1, p.306. TrRig. L — PICRAMNIEZÆ Benth. et J. D. Hook., /. c., 315. I. — PICRAMNIA Sw. Endl,, Gen., n° 5941; Benth. et J. D. Hook., /. c., 315. Tariri Aubl., Guyan., 11, Suppl, p. 37, lab.:390. Aublet (Z. c.) a donné le nom générique de Tariri à une plante de la Guyane dont il n’a connu ni les fleurs ni les fruits, et dont il na figuré qu'un simple rameau. Ce rameau, nous l'avons examiné dans l’herbier du British Museum; il appartient sans con- testation au genre Picramnia, publié plus tard par Swartz. Si nous devions suivre dans toute sa rigueur la loi de priorité, nous serions obligés de changer le nom 6 Picramnia pour celui plus ancien de Tari irè. ou nous voyons encore une fois se présenter ici un de ces cas qui doivent faire fléchir la règle générale, sur laquelle nous nous sommes déjà prononcés en parlant de l’Zcica (CeXIV, p.297). Nous voyons toujours, en effet, un grave inconvénient à chan- ger, sans raison majeure, les noms établis; dans le cas présent surtout, rien ne justifierait ce changement, puisque Aublet n’a point caractérisé son genre. Toutefois, et afin de ne pas laisser le nom de Tariri dans l'oubli, nous proposons de l'appliquer au Picramnia de la Guyane (P. Tarèri). En ce qui regarde le Picramnia adopté dans tous les ouvrages et fondé sur de bounes descriptions, nous craindrions de porter le trouble dans la syno- nymie si nous le changions aujourd’hui en celui de Tariri, à peu près ignoré dans la science. Les Picramnia ne présentent pas les caractères saillants pro- pres aux vraies Simaroubées. Leurs affinités immédiates nous échappent en réalité, et nous ne saurions rien faire de mieux que de suivre l'opinion de MM. Bentham etJ. D. Hooker, qui con- 5° série. Bor. T. XV (Cahier n° 6). $ 23 301 BH. 'EEBRQNA HUE JB. M. HELARERIOEN. sidèrent ces plantes comme le noyau, au moins, d'une tribu distinete dans les Simaroubées. Nous les rapprochons des Arryris et des Térébinthacées. * Species floribus pentameris. a. Petalis donatæ. A. PicramniA CoRALLODENDRON Tul., in Ann, sc. nat., 8° sér., t. VII (1847), p. 259; Walp., Ann., t. I, p. 169. Picramnia sphærocarpa Planch., in Hook. Lond, Journ., 1. V, p. 578; Walp., Ann.,t. 1, p. 169. Picramnia KunthüTul., /. e.— Comocladia? loxensis HBK., Nov. Gen. et sp., NUE, p. 18. Vulgo : Corales où Arbol del coral (Fr., Goudot). La Enllanada, prov. d'Ocaña (Schlim, n. 662); Chiquin- quira (Purdie); près du Salo de Tequendama, dans les environs de Bogota, altit. 2600 mètr. (Goudot, Triana). L'identité spécifique des Picramnia sphærosarpa et Corallodendron nous semble évidente; mais nous ne saurions en dire autant de l’autre syno- nyme de P. Aunthii (Comocladia? loxensis) que nous ajoutons avec hési- tation. L'exemplaire type de l'espèce de Kunth, quoique très-incomplet, répond cependant assez bien à notre plante. Les noms vulgaires de Coraux où Arbre de corail font allusion aux fruits rouges de notre Picramnia, qui, à leur maturité, sont plutôt elliptiques que ronds, et ne paraissent arrondis, sur des échantillons d’herbier, que lorsqu'ils ont été récoltés avant leur maturité. C’est la raison pour laquelle nous donnons la préférence au nom de P. Corallodendron, postérieur à celui de sphæ- r'OCAr pa 2. Picramnia connaroïnes Tul., /. c., p. 261; Walp., Z. c., p.170. Dans les forêts des environs d'Ibague, prov. de Mariquita (Goudoi). Par ses feuilles courtes et coriaces, cette espèce ressemble à la précé- dente. PRODROMUS FLORÆ NOVO-GRANATENSIS. 55 3. PicrAMNIA LonGissimA Tul., 2. c., p. 257; Walp., Z c., p. 169. © € . Vulgo : Coralito. El Espinal et Apocentos, sur les bords du Magdalena supé- rieur, altit. 400 mêtr. (Tr.); près de Coyaima, prov. de Mariquita (Goudot); Turbaco, Carthagena (Bonpland). Des grappes allongées et pendantes terminent les rameaux, qui sont glabrescents; les pédicelles, à l’époque de la fructification, sont articulés vers la base. Ce sont les traits principaux qui distinguent le P. lon- gissima du P. latifolia. h. PicramniA LATIFOLIA Tul., L. c., p. 258; Walp., L c. Picramnia umbrosa Seem., Bot. of Herald, 95, t. xxiv. Entre Tocaima et la rivière du Magdalena, alt. 350 mètr. (Tr.); rio Seco, dans la mème vallée (Goudot); près de la hacienda de Juan Lanas, prov. de Panama, et à Boquete, Veraguas (See- mann). 5. PicramniA eracuis Tul., Z. c., p. 260; Walp., 11e p. 169. Entre la Mesa et Anapoima et dans les forêts tempérées du Quindio, altit. 400-100 mètr. (Goudot, Tr.). 6. Picramnia pENTANDRA SW., F7. Ind. occ., t. 4, p. 290; Planch., in Hook., Lond. Journ., i. V, p. 377. Près de Junca, Andes de Bogota, altit. 1200 mêtr. (Triana). Nous rapportons en hésitant, d’après le faciès et l'apparence 'géntrale, notre plante de Junca au P. pentandra des Antilles, qu’on a confondu quelquefois avec le P. Antidesma, et dont les fleurs sont trimères. Notre comparaison n’a pas été complète par suite du défaut de fleurs dans nos échantillons. Les fruits de notre plante, au lieu d'être rouge écarlate, comme chez plusieurs autres espèces grenadines, sont d’un violet très-foncé. 990 JB. TIREANA HA J. H, PILANCHEON. b. Apetalæ, 7. PicraMniA APETALA Tul., Z. c., p. 264; Walp., Z c., p.171: Sur les bords du rio Combeyma, près d'Ibague, prov. de Mariquita (Goudot). Le feuillage de cette espèce et son faciès rappellent le Picramnia gracilis, avec lequel on risquerait de le confondre à première vue. Les Picramnia à fleurs trimères sont étrangers à notre région. Les Picramnia sont souvent des plantes jouissant de propriétés tincto- riales. Ainsi les feuilles fraîches du Picramnia Tartri de la Guyane, humec- tées et pressées, donnent un suc vert qui, sur le coton, passe en peu de temps à la couleur violette. Le bois, d’après Aublet, exposé à l’air, devient aussi violet. Sur un échantillon d’une autre espèce de Picramnia de l'her- bier de Pavon, nommée Guarea tinctorie (Picramnia tinctoria), on trouve également cette indication : « Planta preciosa tinctorera. » C'est probable- ment cette même plante que M.F. de Castelnau a rapportée de Pebas, dans le haut Amazone, où elle est appelée Canari, et qui jouirait de la propriété de teindre en violet. Enfin, nous avons remarqué que quelques-uns de nos Picramnia, en se desséchant, ont laissé sur le papier d’herbier une empreinte rosée ou noirâtre. Ces renseignements pourront peut-être avoir un jour leur utilité pratique dans l’industrie. Tri 11 — SIMARUBEZÆ Planch. Benth. et J. D. Hook., Gen. pl., 1, 307 (exclus, gener.). il. — QUASSIA DC. Endl., Gen., n° 5962. — Benth. et J. D, Hook., /. c., 308. À. Quassra Amara Lin. f.; DC., Prodr., t. 1, p. 733 ; Planch., 126 Vulgo : Guavilo amargo à Panama (Seemann). Plante généralement cultivée dans la région chaude. Panama (Seemann, Sutton-Hayes) ; Chagres (Fendler, n. 304), Santa Marta (Purdie, Goudot, Schlim, n. 897). Le bois du Quassia amara est bien connu par son extrème amertume et par ses propriétés toniques, communes du reste aux Simarubées. On fait PRODROMUS FLORÆ NOVO-GRANATENSIS. 307 cependant usage, en général, sous le nom de Quassia amara, du bois et des copeaux du Picræna excelsa, soit comme tonique, soit pour prépa- rer les papiers ou les décoctions destinées à tuer les mouches. HT. — SIMARUBA Aubl. Endl., Gen., n° 5963 ; Benth. et J. D. Hook., Z c., 309, 1. SimaruBa GLAUCA DC., Prodr., t. EL, p.733; Planch., Z. c.; Walp., Ann., it. [, p. 164; Seem., Bot. of Herald, p.95. Simaruba officinalis Macf., Flor. of Jam. Vulgo : Aceituno à Panama (Seemann), Veraguas (Seemann), Panama (Sutton-Hayes). Le Simaruba glauca, espèce très-voisine du Simaruba officinalis, doit jouir des mêmes propriétés thérapeutiques. Les Indiens du Choco et de la côte du Darien emploient, en effet, à la manière du Cedron, un bois jaune qu'ils appellent Guaco de arbol, par opposition au Guaco, liane, ou Mikania Guaco, et il est presque certain que ce Guaco d'arbre provient des tiges d’une Simarubée, peut-être même du Simaruba glauca. IV. — SIMABA Aubl. Endl., Gen., n° 5964 ; Benth. et J, D. Hook., Z c. SIMABA CEDRON Planch., inHook., Lond. Journ.,1.V, p. 563; Walp., Ann.,t.f, p.162; Hook., Æevw. Journ. Mise., A, t. Il; Seem., Bot. of Herald, p. 95. Vulgo : Cedron. Près de San-Pablo, sur les bords du Magdalena (Purdie) ; sur les bords du Magdalena inférieur, altit. 300 mètr. (Triana); bords des rivières et de la mer au Darien, Panama et Veraguas (See- mann), Costa-Rica, etc. On savait depuis longues années, en Amérique, que les Indiens de di- verses tribus employaient les graines de C'edron contre les morsures des serpents venimeux, et qu’on leur reconnaissait aussi des propriétés fébri- fuges. En Europe, des récits merveilleux sur cette plante remarquable 308 H. MEBEANR HE J. H. ÆEANCEON. dataient au moins de l’époque des incursions des boucaniers sur les côtes de l'Amérique du Sud, c’est-à-dire vers la fin du xvu' siècle. Cependant, malgré l'intérêt qui s’attachait aux propriétés toniques et fébrifuges du Cedron, la plante qui les possède n’a été que très-récemment inscrite dans le catalogue de nos plantes connues. C'est en effet un siècle et demi après la découverte de cet arbre, que notre collaborateur, M. JE. Planchon, a donné pour la première fois, en 1849, la description abrégée du Cedron, d’aprèsles échantillons envoyés de la Nouvelle-Grenade par Purdie. Le zélé voyageur avait à cœur de retrouver une plante renommée dans le pays et dont les cotylédons, réunis en colliers appendus à certaines boutiques, sont très-estimés des voyageurs qui sont obligés de parcourir les régions insalubres où fréquentées par des reptiles malfaisants. Les habitants de ces localités apprécient en effet la valeur du Cedron et connaissent les services qu’il peut rendre. Aussi, lorsqu'ils sont mordus par un serpent, tirent-ils de leur poche la graine précieuse qu’ils râpent en quantité suflisante pour couvrir la pointe d'un couteau; ils délayent la poudre dans un petit verre d’eau- de-vie , boivent cette potion, et font des lotions sur la plaie avec le même liquide, en répétant l'opération jusqu’à ce que le danger ait dis- paru. Si, an contraire, c'est l'effet du poison paludéen qu'ils veulent combattre; ils emploient seulement l'infusion, qui triomphe toujours, dit-on, de la fièvre. Purdie, dans son excursion aux bords du Magdalena, et, d’après les indications qu’il eut à Bogota de notre botaniste, le docteur Cespedes, put recueillir les échantillons du Cedron d’après lesquels M. Planchon détermina et nomma la plante; échantillons qui servirent, en décem- bre 1850, à sir W. Hooker, qui en donna une description plus étendue daus le tome IT du Æew. Journ. Miscell., que nous venons de citer. L'année suivante, au mois d'avril, M. Lévy, à son retour de Bogota, annonçait à l’Académie des sciences (Comptes rendus, t. XXXIT, p. 510) qu'il avait réussi à extraire du Cedron un principe défini cristallisable, en soumettant la graine pulvérisée aux traitements successifs de l’éther et de l'alcool, principe actif qu’il nomma cédrine. Cependant M. Cloëz, qui à repris au laboratoire de chimie dt Muséum l'étude du Cedron, n’a pas confirmé jusqu’à présent la découverte de la cédrine ; mais il a eu l’heureuse idée d'employer le C'edron à la manière du Quassia amara pour détruire les insectes qui ravagent certaines cultures. Les expériences faites au Jardin des plantes eurent un plein succès. D'autres voyageurs ont insisté sur les propriétés du Cedron, et nous rappellerons, par exemple, l’article de Seemann dans l'ouvrage précité. On se tromperait si l’on voulait assimiler le Cedron au Quinquina, comme on l’a souvent prétendu. Cependant, quoique le C'edron ne soit PRODROMUS FLORÆ NOVO-GRANATENSIS. 5p9 pas un succédané du Quinquina, ce n’est pas une raison pour le dédai- gner. Nous croyons qu'il peut rendre de grands et importants services comme tonique amer et franc, privé de tannin, et très-propre à guérir surtout les affections du tube intestinal, etc., ainsi que nous avons eu occasion de le constater. Comme plusieurs autres amers ou toniques, le Cedron peut aussi agir favorablement dans certaines circonstances déterminées sur des fièvres intermittentes. Peut-être la rareté et la difficulté de se procurer du Cedron ont-elles contribué à empêcher que son emploi ne prenne tout le développement qu'on était en droit d'attendre de ses remarquables propriétés. Cependant rien ne serait plus facile que la culture de cette plante dans les locali- tés où elle croit spontanément ou dans d’autres analogues. Elle vien- drait rapidement et facilement après en avoir semé des graines, et en peu de temps offrirait des récoltes abondantes et rémunératrices. Les condi- tions favorables de cette culture seraient : un climat à la fois chaud et humide, un sol également humide et protégé par de grandes forêts. Ces conditions se retrouvent partout dans les vallées de nos grandes rivières ou dans nos forêts du littoral. V. — CASTELA Turpin. Endi., Gen,, n° 5956 ; Benth. et J, D. Hook., Z. c., 310, 4. Casreca pepressa Turp., in Ann. Mus. Par., t. VIE. 28 DC" Prour M ALADMSS Sur la côte de l'Atlantique. Le genre Castela avait été considéré comme formant une tribu parti- culière dans les Autaceæ, jusqu'à l'époque où M, Planchon, après une étude approfondie, l'a rangé parmi les Simarubées. Le Castela s'éloigne cependant de ce groupe par quelques caractères qui lui donnent un faciès particulier : fels sont ses ramespx spinescents, ses feuilles simples et sessiles, ses, fleurs axillaires couxement pédicellées, ses graines albumi- nées, etc. r 260 J. 'MIRIANA EUX J. H. PLANÇCHOY. VI. — SURIANA Plum. Endl., Gen., n° 5953 ; Benth. et J. D. Hook., /. e., 313, SURIANA MARITIMA L.; DC., Prodr., L. IE, p. 94. Plages de Carthagène (Goudot).—Venezuela, Caracas(Funck, n. 221). DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. — Tandis que nos Castela et nos Suriana sont des plantes du littoral dans des localités ouvertes, nos Sanaba et Simaruba végètent dans les forêts humides et som- bres de la région très-chaude, le long des grandes rivières ou au voisinage de la mer. Les Picramnia appartiennent également en grande partie à celte région chaude, mais ils s’avancent aussi dans la région tempérée jusqu’à la limite inférieure de la région froide. Le Quassia umara est cultivé comme plante d'ornement dans les jardins du pays chaud. C’est un arbrisseau à feuillage d’un vert foncé luisant, et à fleurs d’un rouge assez vif. IV. — ZYGOPHYLLEÆ R. Brown: DC. Benth. et J. D. Hook., Gen. pl, 1, p. 262. Tri. 1, — TRIBULEZÆ Endl. I. — TRIBULUS Tournef. Endl,, Gen., n° 6030. 1. Triguzus cisroides Lin.; Jacq., Schænbr., t. 113 ; DC., Prôdr.;"t: L'p. 708: Vulgo : Abrojo. Près de Mompox, sur les bords du Magdalena (Bonpland) ; lieux sablonneux et maritimes de Santa-Marta {Goudot, Schlim, n. 943). — Venezuela, Caracas (Buschel); Cumava (Funck, n. 2/6). Cette espèce, récoltée par Bonpland à Mompox, n’a pas ‘té mentionnée PRODROMUS FLORÆ NOVO-GRANATENSIS. 201 dans le Nova Genera etc.; elle abonde vers la côte de l'Atlantique, à la Nouvelle-Grenade, et dans le Venezuela, où elle a été retrouvée postérieu- rement. Les fleurs du 7’zibulus cistoides sont de grandeur variable et ses folioles sont aussi plus ou moins aigués. IL. — KALLSTROMIA Scop. Endl., Gen., n° 6031, 1. KALLSTROMIA MAXIMA Torr. et Gray. — A. Gray, Plant. Wrigth., \E, 26. Tribulus maximus Lin.; Jacq., Icon. rar., & 162; DC., L c., 704. Lieux arides et sablonneux de Carthagène, Tocaima, Mel- gar, etc., dans la vallée du Magdalena, Jusqu'à 600 mètres d'altitude au-dessus du niveau de la mer (Triana, Goudot) ; Panama (Seemann, Duchassaing). Le Æallsträmia a une grande ressemblance de port et de caractères floraux avec le 7ribulus, néanmoins les fruits des deux plantes diffèrent notablement et constituent deux types génériques. Tri. II, — ZYGOPHYLLEÆ veræ Endl, IT. — GUAIACUM Plum. Endl., Gen., n° 6041. 4. GuaracuM orricinALE Lin.; DC., Z. c., p. 707. Santa-Marta (Goudot). Notre plante de la côte de l'Atlantique est identique avec l'arbre qui fournit le Gaiac des Antilles. 2. Guaracum arBorEuM DC., Prodr., K, p. 707. Zygophyllum arboreum Jacq., Amer., 801, t. 63; HBK,., Nov. Gen. et sp., NE, p. 11. Vulgo : Guayacan où Guayacan polvillo. 802 F. TEBHANA UN J. E, HE ANCRON. Dans la vallée du Magdalena, jusqu'à Paltit. de 800 mètres au- dessus du niveau de la mer (Tr.); Carthagène (Jacquin, Goudot, Sutton-Hayes); savanes du Valle de Upar, Santa-Marta (Purdie). — Venezuela, Carabobo (Funck et Schlim, n. 536; Funck, n. 1621). Les fruits du Guaiacum arboreum diffèrent assez de ceux du G. offici- nale; is sont secs et surmontés de quatre ailes larges et membraneuses, au lieu d’être tétra- ou pentagones et à peu près charnus. Les fleurs de la première de ces espèces forment d'abondants et magnifiques bouquets Jaunes qui se voient de loin en se détachant sur le fond vert de la forêt, que dominent presque toujours ces arbres élevés; les fleurs de la seconde espèce sont au contraire bleues et moins brillantes. Le Guayacan est un arbre de haute futaie, à bois d'une couleur jaune foncé tirant au vert, et à cassure presque pulvérulente. C’est un des plus durs et des plus pesants de l'Amérique, où on le considère comme incor- ruptible et presque aussi résistant que le fer. Notre Guayacan est sans doute un bon succédané du Gaine, et on l'emploie comme tel à la Nouvelle- Grenade. La séve qui se trouve souvent au centre des grands arbres, et dans les interstices des couches ligneuses intérieures, est recommandée particulièrement comme un sudorifique puissant. Cette boisson convient, paraît-il, aux lépreux. DisrRiBUTION GÉOGRAPHIQUE. — Les Zygophyllées grenadines appartiennent toutes à la région très-chaude et ne dépassent guère 1000 mètres au-dessus du niveau de la mer. Les espèces de la première tribu forment des herbes qui rampent sur un sol aride ; celles de la seconde, tout au contraire, forment de très- grands arbres dont la cime domine les forêts tropicales. Leur bois est inestimable par les usages trés-variés auxquels on l'emploie. PRODROMUS FLORÆ NOVO-GRANATENSIS, 363 V. — MELIACEZÆ Adr. de Juss.; DC. Benth. et J, D. Hook., Gen. pl., I, p. 327. Trig. I. — MELIEÆ, Adr. de Juss, Benth. et J. D. Hook., Z. c., 332 I. — MELIA Linn. Endi., Gen., n° 5520; Benth. et J, D. Hook., 4. c., 332. 4. Merra Azenaraca Lin.; DC., Prodr., 1, 621 ; HBK., Nov. Gen. et sp., N, p. 215. Melia sempervirens SW., FT. Ind. occ., WE, p.737 ; Sw., Obs., p. 171. Vulgo : Paraiso, dans plusieurs localités de la Nouvelle- Grenade (Tr.) ; Jasinto à Panama. Cultivé dans les jardins des régions chaudes et tempérées, jus- qu’à l’altitude de 1400 mètres au-dessus du niveau de la mer. Notre plante grenadine est exactement le Melia sempervirens des An- tilles, décrit par Swartz, et qui ne diffère pas essentiellement du Melia Azedarach de V'Asie. L'espèce a été sans doute introduite en Amérique, où elle s’est complétement naturalisée; elle y forme, dans les jardins, un arbre de hauteur moyenne, presque toujours chargé de fleurs. Tri. IL — TRICHILIEÆ A. de Juss. Benth, et J. D, Hook., /. c., 332. I. TRICHILIA Lin. Benth. et J. D. Hook., Z. c., 337. Les Trichilia, dans leur acception la plus large, présentent une série d'espèces aux dépens desquelles on à constitué des genres dont la fusion a été reconnue aujourd'hui nécessaire par la gé- néralité des botanistes. En effet, le nombre des parties de la fleur et des ovules, ainsi que celui des carpelles, sont variables. 36 J. MERIANA KA J. HE. PLANCHON. Il en résulie que nos Trichilia peuvent se partager en deux grou- pes assez distincts : les Trichilia proprement dits, dont les pani- cules sont terminales et les fruits à trois valves séminifères, et les Portesia(Pholacilia, ete.), à cymes axillaires, et, le plus sou- vent, à capsules à deux ou trois valves, dont une seule séminifère. * EUTRICHILIA. 1. TricuiriA sponpiones Sw.; DC., Prodr., I, p. 622 ; HBK., Nov. Gen. et sp., NV, p. 21h; Jacq., Hort. Schœnb., X, t. 109 ; Adr. de Juss., Mem.Mus., XIX, p. 237; Walp., Rep., L, p. 432; Guidonia nucis Juglandis foliis minor, Plum., con. ined. in Bibl. Mus. Par. Dans les forêts des vallées des grandes rivières, Magdalena, Cauca, Patia, etc., jusqu'à 1200 mètres de hauteur au-dessus du niveau de la mer. Carthagène (Jacquin) ; Mompox, sur les bords du Magdalena (Bonpland); Santa-Marta (Goudot); San-Juan, Pa- nama (Seemann). — Venezuela, colonie Tovar (Fendler, n. 136- 137); la Guayra (Moritz, n. 1514). Cette espèce se rencontre aux Antilles et sur le continent; elle s’est donc constitué une aire géographique très-étendue en se répandant dans les régions chaudes et tempérées de l'Amérique. Quant à la grandeur des fleurs, elle est très-variable, et ses étamines sont libres ou plus ou moins cohérentes à la base. Le Guidonia Juglandis foliis minor, des manuscrits de Plumier, cité par Burmann, et qu'il est porté à considérer comme une variété du Guidonia nucis Juglandis foliis major (Guarea trichilioides), représente évidemment un rameau fructifère du Trichilia spondioides, et non le véritable Guarea trichilioides. Ces fruits sont presque sphériques, loculicides, trivalves, tandis que les fruits des Guarea sont tout à faits différents. 2, TricuiLiA romenrosA HBK., {Vov. Gen. ef sp., NV, p. 215; DC.. Z €. 622. Trichilia juglandifolia Kunth. hb. Juss., in Mem. Mus., XIX, p. 237; Walp., Æep., L, p. 135. Entre el Hospicio et la Mesa, altit. 1400 mètres, vallée du Magdalena (Triana); même vallée, Chaparral (Goudot). PRODROMUS FLORÆ NOVO-GRANATENSIS. 269 Les échantillons qui, dans l'herbier de Bonpland, ont été nommés 7rt- chilia juglandifolia, espèce adoptée par Adr. de Jussieu, dans sa mono- graphie, répondent exactement à la description du 7richilia tomentosa du Nova Genera. Le type est originaire des Andes du Pérou, et Spruce l’a trouvé également à l’Équateur. ** PORTESIA. 3. TRICHILIA HAVANENSIS Jacq.; DC., Prodr., I, p. 622; Adr. © de Juss., Z €. Trichiha glabra Willd., Sp., Il, p. 553. Trichilia minor Rach., Fl. Cub., p. 303, t. 33. Portesia glabra Griseb., FL. West, Ind. isl., 130. Portesia ovata Griseb. Moschozylum cuneatum, Turez., in Bull. Mose. (1858), p. 115. Entre Tena et Ibague, vallée du Magdalena, altit. 400-1400 mètres (Triana, Goudot); volcan de Chiriqui; Boquete, Veraguas (Seemann). La plante de l'intérieur de la Nouvelle-Grenade répond exactement au Zrichilia des Antilles du groupe des Portesia de Cavanilles, h. Tricaiia MoNTANA HBK., Woo. Gen. et sp. NII, p. 226; 2 Adr. de Juss., Mem. Mus., XIX, p. 237; Walp., Rep., I, p. 133. Trichilia macrophylla Benth. in hb. Spruce (Santarem). Forêts du Quindio, altit. 2000-2800 mèêtr. (Bonpland) ; Quindio, altit. 560-2500 métr. (Tr.); Vega de Supia (Goudot); Susumuco, Andes de Bogota, altit. 1000 mètr. (Tr.); Panama (Fendler, n. 139). Espèce voisine du 7, diversifolia. On ne connaissait pasles fruits du 7richilia montana, découvert dans les forêts tempérées du Quindio par Humboldt et Bonpland. Ces auteurs ne trouvèrent que la plante en fleur ; mais nous avons pu récolter dans les mêmes localités, et peut-être sur les mêmes sujets, des exemplaires en 300 J. AARAARA HA J,. Hi. EL ANRCEHŒEX. fleur et en fruit. Les fruits sont des capsules atténuées aux deux extré- mités, qui s'ouvrent en trois valves, où très-rarement en deux seulement, jaunes et pubescentes à l'extérieur et recouvertes d'écailles verruqueuses ou de petites protubérances aiguës. Chaque loge ne contient qu’une seule graine ovoide, à testa glabre et d’un brun foncé. Nous ne croyons pas le Trichilia macrophylla, Benth. mss., de San- tarém, recueilli par Sprece, distinct du 7. montana. 5. TRICHILIA GouportanA +, arborea, glabriuscula, ramulis cortice cinereo-fuscescente vestitis lenticellisque ereberrimis insperso, fois abrupte pinnatis 1-2-jugis petiolo communi puberulo, foliolis oblongo-ellipticis basi et apice attenuatis v. acuminalis glaberrimis, nervis secundaris obliquis, paniculis brevibus axillaribus pubescenti-villosis, floribus parvis sessihibus, calyce parvo hispidulo, petalis extrorsum sericeis, fructibus rotundats sæpius trlocularibus valvis extrorsum villosis exsieca- tione rufescentibus. Entre la Mesa, Copo et le Magdalena, altit. 600 mètres (Friana); Iguanima, Magdalena (Goudot). Cette espèce ressemble beaucoup au 7richilia montana, surtout par ses feuilles, mais elle s’en distingue nettement par la pubescence brune et abondante de ses inflorescences, et surtout par les valves des fruits qui ne sont pas muriquées extérieurement, mais simplement pubescentes. 6. Tricuizia excELSsA Benth., mss. in hb., arborea, ramis pube intactih veslitis cmereo-fuscis lenticellis dense inspersis, ramulis annotnis subvelutinis, foliis alternis imparipinnatis 3-4-jugis, foliolis elliptico-oblongis vel obovato-oblongis basi in petiolum brevem attenuatis apice plus minusve longe acuminatis, nervis secundartis 9-41 ascendentibus ad marginem anastomosantibus subtus prominentibus supra glabris subnitidis subtus petioloque commun pubescentibus, paniculis brevibus plurifloris exsic- catione rufescentibus, peduneulis pedicellis floribusque sericeo- puberulis, calycibus brevibus 5 dentatis. Forèts de San-Julian, prov. d'Antioquia, altit. 4806 mètres (Tr.). Notre plante grenadine s'accorde assez bien avecle 7richilia excelsa, PRODROMUS FLORÆ NOVO-GRANATENSIS. 967 Benth., récolté à Santarem, dans le Para, par Spruce. La plante se reconnaît à la pubescence veloutée jaunâtre qui recouvre les feuilles et Les rameaux. Elle rappelle par son ensemble les deux espèces précé- dentes du groupe des Portesia. Fendler (n. 137 et 139) a retrouvé à la colonie Tovar, vers la côte de l'Atlantique, dans le Venezuela, le Trichilia hirta Lin. (DC., oc. cit, 622), et le Trichilia diversifolia Adr. Juss. (266281) IT. — RUAGEA Karst. Fl, Columb. specim. select., II, 51, t. 126. MM. Bentham et 3. D. Hooker, dans leurs additions aux Mé- liacées de leur Genera plant., 1, p. 994, considèrent le genre Ruagea comme synonyme du genre Guarea. Cependant les affinités plus directes du Æwagea nous sem- blent être avec le genre Cabralea, soit par le faciès, soit par ses fleurs pentamères, dont le calice présente cinq sépales, soit enfin par la manière dont les pétales sont imbriqués, etc.; mais il en diffère néanmoins par l'absence de l'anneau cylindrique ou lobé qui entoure la base de l'ovaire. Le nouveau type générique, établi par M. Karsten, a des fruits semblables à ceux des Guarea, et conslitue ainsi une forme intermédiaire entre les deux genres Guarea et Cabralea. Les véritables Guarea se font surtout remarquer par leur calice cupulforme monophylle, et par leur fruit à parois épaisses qui ne s'ouvrent que tardivement et irrégulièrement. 1. RuaGea Purgscens Karst., /. c. Près de la Laguneta, dans les forêts de la région froide de Quindio (Goudot). — Venezuela, prov. de Caracas (Linden, n. 213); colonie Tovar (Fender, n. 166). Goudot à rapporté de la Laguneta deux sortes d'échantillons en appa- rence distincts, mais qui nous semblent appartenir à la même espèce : les uns ont des folioles plus grandes, plus larges et obtuses au sommet; 308 JS. 'MIRHANA AE J. HE. HEIANCHON. tandis que chez les autres échantillons, les folioles, plus nombreuses, sont relativement petites et plus aiguës. Mais nous savons que ces échantillons ont été récoltés à la même place sur des arbres d’àge différents et qui va- rient de 20 à 40 pieds de hauteur. Du reste, la plante du Quindio est exactement semblable à celle du Venezuela, récoltée par M. Linden. 2. RuAGEA GLaBrA +, arborea, glabra, ramulis cortice fus- cescenti verrucisque parvis Insperso vestitis, foliis imparipinnatis peduneulo communi gracili subalato 4-5-jugis, foliolis oblongis basi in petiolum brevissimum articulatum attenuatis apice obtusis v. breviter et obluse acuminatis utrinque glaberrimis, pervis primarus utrinque prominulis, paniculis gracilibus folio brevioribus parvifloris pedunculatis, peduneulo compresso, flori- bus calyce petalisque glabriusculis, sepalis 5 concavis obtusis suboliatis imbricatis, fructibus tenuibus globosis variolosis exsic- catione rufescentibus glaberrimis. Entre la Mesa et Junca, sur le versant occidental des Andes de Bogota, altit. 1200 mètres (Triana). À cause de ses fleurs à cinq pétales distincts, imbriqués, nous faisons rentrer cette plante dans le genre Æuagea. Ses fruits franchement à quatre valves, les ont relativement minces. IV. — GUAREA Lin. Endl., Gen., n° 5543; À, de Juss. L. GUAREA TRICHILIOIDES Lin., Mant., p. 228; Cav., Diss., VIE, p. 866, t. 210; HBK., Nov. Gen. et sp., V, p. 217; Adr. Juss., Mem. Mus., XIX, p. 240; Walp., Rep. 1, 43h. Trichiha Guara Lin., Spec., p. 551. Melio Guara Jacq., Amer., p. 126, t. 176, Ê. 37. Guarea grandifolia DC., Prodr., 1, 624. Guidonia nucis Juglandis foliis major Plum., Zcon. med. in Mus. Par.; Guidonia major, Samyde folüs ovalis acuminatis Burm., /con., 147, f. 2. Guarea Aubletii Juss., /. c., 241, 285. PRODROMUS FLORÆ NOVO-GRANATENSIS, . 869 Guarea surinamensis Miquel. Vulgo : Mestizo, Bilibil ; Guamo blanco où Guamo sünarron, dans la vallée du Magdalena ; Baïlador au Socorro ; Trompillo à Ocaña. — Bois rouge de Saint-Domingue. Très-répandu dans la vallée di Magdalena et dans les régions chaudes, jusqu'à la hauteur de 1400 mètres au-dessus du niveau de la mer (Tr.); Carthagène (Jacquin); Mompox, sur les bords du Magdalena (Bonpland) ; Panama (Seemann, Sutton-Havyes), Jacquin (Amer.) a publié, sousle nom de Melia Guara, une plante qui porte vulgairement à Cuba le nom de Guara, et qui abonde aux Antilles, à Carthagène et dans plusieurs autres localités du continent américain, Linné rapporta d'abord (Spec., p. 551) ce Melia de Jacquin au Trichilia, dont il fit son Trichilia Guara, mais il l’éleva plus tard au rang de genre sous la dénomination de Guarea trichilioides. Cavanilles, d’après l'étude des exemplaires provenant des Antilles, et conservés au Muséum d'histoire naturelle de Paris, exemplaires qui répon- dent rigoureusement à l'excellente description du Melia Guara, confirma les caractères du type primitif du Guarea trichilioides de Linné. Adr. de Jussieu, dans son Mémoire sur les Méliacées, adopta l'opinion de Cava- nilles, mais avec la pensée que son espèce était le Guidonia nucis Ju- glandis foliis minor des mss. de Plumier, et non pas le Guidonia nucis Juglandis foliis major du même ouvrage, devenu le Guarea grandifolia de DC., tandis qu’il est certain que ce Guidonia nucis Juglandis foliis major de Plumier répond au Guarea trichilioides (L.) tei que Cavanilles l’a défini. Cependant De Candolle (Prodr.), croyant aussi que le Guarea trichi- dioides de Linné et de Cavanilles appartenait à deux espèces différentes, représentées par les deux Guidonia de Plumier, conserva, nous ne savons par quelle raison, à la plante décrite par Cavanilles, le nom de Guarea trichilioides, de préférence à celui imposé par Linné, tandis que le Guarea trichilioides primitif de cet auteur fut nommé dans le Prodrome Guarea grandifolia, avec le synonyme de la fig. 2, t. 147, de Burmann, ou Gut- donia nucis Juglandis foliis major de Plumier. Il en est résuité un changement de noms et de synonymes fort embarrassants. Peut-être De Candolle se trouva-t-il, comme A. de Jussieu, sous l’im- pression que le Guarea trichilioides de Cavanilles était le représentant du Guidonia Juglandis foliis minor des mss. de Plumier, que Burmanu cite seulement comme variété de l’autre Guidonia Juglandis foliis major, mais sans en reproduire le dessin. 5° série, Bot. T. XV. (Cahier n° 6.) 4 24 NE 970 - J. 'HÉREANA HUE JB. M). HP, ANCEHAGN. La publication par Burmann de ce Guidonia Juglandis foliis minor aurait pu éviter la confusion, car le dessin de Plumier, que nous avons examiné avec attention, représente un fruit capsulaire à trois valves, iden- tique avec ceux du Trichilia, et non comme ceux du Guarea. Pour éviter le changement de nomis proposé par DC., et pour rétablir l'exactitude dans la nomenclature, nous croyons devoir proposer comme synonyme du G. trichilioides Lin. et Cav. le G. macrophylla, en réunissant, d'autre part, le Guidonia Juglandis foliis minor, comme nous l'avons fait, au Trichilia spondioides. Enfin, A. de Jussieu distingue son G. Aubletii du G. trichilioides par la coloration plus foncée del’écorce, qui nous semble un curactère de très- peu de valeur. 2. GuAREA SWARTZu DC., Prodr., {, p. 624. Guarea Vahliana Adr. Juss., Mem. Mus., p. 282. Guarea glabra Vah]., mss. Forêts du Quindio et de la prov. d’Antioquia, altit, 2000 mètr. (Triana). Par la consistance et la nervation des feuilles, par l’inflorescence courte et pauciflore, par les pétales glabres en dehors, nos échantillons répon- dent au Guarea Swartzü, conservé dans lherbier du Muséum, qui est le même Guarea Vahliana (Guorea glabra Vahl, in herb. Juss.). 3. GUAREA GIGANTEA +, arborea, magna, coma ampla, ra- mulis aunotinis epidermide pube intactili ferrugineo vestitis, foliis amplis abrupte pinnatis multijugis, petiolo communi supra sulcato fusco, foliolis suboppositis maximis (30-35 cent., lon- gis, 10-12 latis) lineari-oblongis basi in petiolum brevem crassum aftenuatis apice breviter acuminatis, nervis secundariis 18 prominulis, nervo medio subtus puberulo supra tenuissime granuloso, panicula ampla basi ramosa foliolis subæquanti, ramis sulcato-angulosis, inferioribus elongatis, floribus bre- vissime pedicellatis magnis (4 cent. et ultra), calyeinis lobis rotundatis, petalis extrorsum sericeis. Vulgo : Tigre {Triana). Près de San-Miguel, à lorient des Andes de Bogota, altit. 1600 mètres (Triana). PRODROMUS FLORÆ. NOVO-GRANATENSIS. 371 Les affinités directes de cette plante sont avec les Guarea megantha, et G. Perrottetiana À. de Juss. Le premier se distingue par la pubescence veloutée jaunâtre des rameaux, pétioles et pédoncules, par les grappes à rameaux courts, les fleurs un peu plus grandes et plus courtement pédicellées, ete. Chez le second, les inflorescences sont courtes, simples et spiciformes, et les calyces se divisent de bonne heure en deux parties. h. GuarEa Porpriqn +, arborea, ramulis cortice cinereo-vesti- üs, foliis abrupte pinnatis 3-5-jugis cum foliolis 4-8 superio- ribus abortivis foliolis majusculis, oppositis oblongis in petiolum brevem altenuatis apice obtusis vel acutiuseulis coriaceis gla- berrimis, nervis supra vix prominulis subtus tenuibus, panicula axillari laxiflora folio quadruplo v. dimidio breviori, floribus brevissime pedicellatis, calycibus brevibus obsolete denticulatis puberulis, petalis adpresse piloso-sericeis. Trichilia polyantha Pœpp. mss., n. 2377 B. Forêts du Quindio (Triana). Comme chez d’autres espèces, chez celle-ci les dernières paires de folioles, au nombre de trois ou quatre de la feuille composée, avortent, laissant la feuille réduite à trois ou cinq paires de folioles seulement. La panicule est aussi relativement courte; elle ne mesure guère que la moitié de la longueur de la feuille dans les échantillons de Pœæppig, et le quart dans les nôtres, qui, tout en étant très-incomplets, n’en diffèrent pas sensiblement. Notre Guarea Pæppigii rappelle le Carapa sericea Pæpp. et Endl., qui appartient très-probablement au genre Guarea. 9. GUAREA FULVA +, arborea hispida, ramulis cortice cinereo absque lenticellis vestitis, foliis 5-4-jugis petiolo communi hispido, foliolis oblongis majusculis supra glabris (salvo nervo medio) subtus villoso-tomentosis, paniculis fructiferis hispidis folium medium vix æquantibus, fructibus submaturis globosis, glabriusculis lævibus magnitudine cerasi minoris. La Mesa, sur le versant occidental des Andes de Bogota, altit. 1400 mètres (Tr.). Nos exemplaires de cette plante sont seulement en fruit, mais ces fruits, à quatre loges à parois ligneuses et dures, ressemblent tout à fait 379 J. MRAANS HE J. EH. FE ANEON. à ceux de la généralité des Guareu. L'espèce se distingue aisément par sa pubescence fauve, 6. GUAREA GLAUCA +, arborea glabra, ramulis cortice fusces- centi lenticellisque insperso, foholis abortu 2-3-jugis, foliolis oppositis majusculis oblongis basi in petiolum brevissimum attenuatis apice longe acuminatis utrinque glaberrimis glauces- centibus, nervis secundariis utrinque 8-12 subtus promivulis, pa- nicula fructifera petiolo plus minusve breviore, fructibus rotun- datis v. ellipsoideis sublignosis extrorsus verrucoso-lenticellatis quadrivalvibus, seminibus in loculis 2 superpositis, arillo rubro. Villavicencio et plaines du Meta, altit. 400 mètres (Friaua). Comme le G. apiiodora, cette plante exhale également une odeur prononcée et caractéristique. Les deux doivent être très-voisines ; mais les graines de notre G@. glauca sont beaucoup plus petites que celles du G. apiiodora. 7. GUAREA AP1ODORA Baill., Adansonia (ann. 1871), X, p. 112. Dans les plaines du Cumaral et de San-Martin, à lorient des Andes de Bogota, altit. 400 mètres. Il y a environ un an que des droguistes parisiens donnèrent à exa- miner aux botanistes du Muséum des écorces envoyées, disaient-ils, du Pérou. Ces écorces, épaisses, à épiderme fongueux, recouvrant un liber fo- liacé, et exhalant une forte odeur de Céleri ou de Mélilot, étaient accompa- gnées de quelques fleurs et d'une seule foliole. A l’aide de ces éléments, M. Baillon arriva à constituer les caractères d’une espèce évidemment nouvelle de Guarea qu'il nomma G. apiiodora. Plus récemment encore nous avons reçu, pour les déterminer, des écorces provenant de la loca- lité ci-dessus et qui nous semblent se rapporter au Guarea apiiodora ; nous la signalons dans l'espoir qu'elle pourra, à plus d’un titre, acquérir de l'importance. V. — ODONTANDRA HBK. Endl., Gen., n° 5547; Benth. et J. D. Hook., /. c., 337. MoscuoxyLum Adr. Juss., Men. Mus., XIX, p. 238. Adr. de Jussieu, ayant considéré l'Odontandra de H. et B. comme genre douteux, publia son genre Moschorylum, qui n’en PRODROMUS FLORÆ NOVO-GRANATENSIS. 373 diffère que par les seuls caractères des étamines, qui sont au nombre de 8-10, par les feuilles pinnées, mais surtout par l’o- vaire assis sur un disque plus ou moins développé, qui manque totalement dans! Odontandra.Cependant ces caractères, que nous retrouvons dans la généralité des Moschozrylum, varient dans cer- taines espèces. Par exemple, les 7. pentandrum Pœpp. et End. (Nov. Gen., WE, 39), et M. propinquum Miq., n'ont que cinq anthères. Au contraire, une plante de Bahia (récoltée par Blanchet, u. 1854) a les feuilles unifoliolées et les fleurs dépourvues de disque comme les Odontandra, tandis que les anthères dépassent le nombre cinq, comme chez les Moschoxylum. Au fond, ce serait donc la présence ou l’absence de disque qui constituerait le caractère essentiel des deux genres, s’il était con- stant ; mais dans la série d'espèces rapportées au Moschozylum, nous voyons le disque être plus ou moins développé ou dispa- raître à peu près complétement chez d’autres. En présence de ces variations, la réunion des deux genres nous semble indiquée et nécessaire. Les fruits des Odontandra sont construits sur le type de ceux des Trichilia (Portesia), c’est-à-dire qu'ils n'ont qu’un seul carpelle fertile, mais ils sont plus allongés et quelquefois presque en Imassue. * Euoponranpra. — Foliis unifoliolatis. À. OponTANDRA ACUMINATA Humb. et Bonpl. in Willd. herb.; Rœm. et Schult., Syst. vég., V, p. 511; HBK., Vo. Gen. et sp., VIE, 229, non Karst. Vulgo : Mangle blanco. Entre Turbaco et Carthagène (Bonpland, Triana). Nos exemplaires, récoltés dans la même localité que ceux de Bonpland, sont naturellement tout à fait identiques avec les siens. 2, OponrTanprA KARSTENIT. Odontandra acuminata Karst., F1. Columb. spec. select., W, p. 15, t. 120. 271 3. TREANA HE J. E. PLANCHOEN. Vulgo : Yayo colorado (Tr.). Entre la Mesa, rio Seco et le Magdalena, altit. 400-1000 mè- tres (Goudot, Triana). M. Karsten, pour confirmer la détermination spécifique de son Odon- tandra, à fait comparer, dans les herbiers de Paris, par M. Naudin, son dessin avec le type de l'O. acuminata qui s’y trouve conservé. Mais il n’a pas été facile desaisir les différences entre deux plantes représentées, d’un côté par un simple échantillon incomplet, et d’un autre côté par un dessin. Au moyen de matériaux plus complets de l’Odontandra acumi- nata, nous avons reconnu des différences qui nous semblent spécifiques : VO. Karstenii se distinguerait de l'O. acuminata par ses feuilles coriaces, dures et cassantes sur le sec, ses pétales connivents à la base, ses inflores- cences plus rameuses et à fleurs plus abondantes, disposées en glomérules supportés par des pédoncules comprimés, etc. ** MoscnoxyLum, — Folis pinnatis. 3. ODONTANDRA QUADRIJUGA. Trichilia quadrijuga HBK., Nov. Gen. et sp. N, p. 215; DC., Prodr., 1, 622 ; Adr. Juss., /. c. Près de San-Bartholome, sur les bords du Magdalena, altit. h00 mètres (Bonpland) ; rio Seco (Goudot). Par ses pétales valvaires, par le tube des étamines et par le faciès, le Trichilia quadrijuga appartient au genre Odontandra (Moschoxzylum). li. ODONTANDRA TUBERCULATA +, arbor 30-40 pedalis, ramulis subvelutinis, foliis imparipinnatis 5-7-foliolatis, rachi supra canalculata, foliolis alternis oblongis mtegris basi leviter inæ- qualit in petolulum brevem attenuatis apice acuminatis acutis subcoriaceis glabris exsiccatione fuscescentibus, nervis primartis subtransversis, aliis tenuissime reticulatis, paniculis axillaribus folio brevioribus, floribus breviter pedicellatis, calyce quadri- dentato, petalis valvatis, ovartis tomentosis, capsula immatura ovoidea leviter tuberculata. Vulgo : A/fajia (Sutton-Hayes). Dans les forêts ombreuses de la station de l’Empire, le long du chemin de fer de Panama (Suiton-Hayes. PRODROMUS FLORÆ NOVO-GRANATENSIS. 219 Cette espèce ressemble, au premier abord, à l’Odontandra quadrijuga (Trichilia UBK.), mais sa capsule, au lieu d’être allongée et lisse, est ovoide et tuberculeuse ; ses feuilles sont en outre atténuées à la base et à nervures réticulées, dont les primaires sont saillantes en dessous. L'Odontandra tuberculata présente également une grande ressemblance avec l'Aedwigia balsamifera. 5. ODONTANDRA APPENDICULATA +, arborea, ramulis teretibus coriice flavescenti-cinereo vestitis, novellis puberulis, foliis im- paripionalis 7-9-foliolatis, foliolis alternis petiolulatis ovato- oblongis v. ovatis acutis basi rotundatis breviter acuminatis integris glabris reticulato - venosis, rachi puberula ipsa basi foliolis abortivis obovatis vel linearibus appendiciformibus sti- pata, racemis terminalibus v. axillaribus elongatis laxifloris fo- lium superantibus peduneulatis, pedunculis insigniter compressis vel alternatim hinc planis inde carinatis, floribus ad apices ramu- lorum breviorum brevissime pedicellatis bracteis minutis subu- latis stipatis, calyce cupuliformi quinquedentato, petalis extus glabris vel sericeis basi cohærentibus, fructo inmaturo ovoideo tomentoso. Vulgo : Vayo blanco. Entre Tocaima et les bords du Magdalena, altit. 400 mètres (Triana) ; entre Ibague et la rivière du Magdalena (Goudot); Santa-Marta (Purdie). Cette espèce est remarquable en ce que les folioles inférieures du rachis sont réduites, soit à des lanières étroites stipuliformes, soit à des lamelles obovales. Quelque chose d'analogue a lieu chez lOdontandra pseudostipulare Auss. (sub Moschoxylo), mais les pétioles de la base des feuilles, également petites, ne se transforment pas en lanières, mais res- tent toujours foliacées, orbiculaires et sessiles. 6. ODONTANDRA PARVIFLORA +, arborea, ramis junioribus foliis pedunculis pedicellisque pubescenti-hirüis, fois imparipinnatis 3-h-jugis, foliolis oppositis ellipüco vel obovato-lanceolatis, margine subundulatis basi in petiolulum gracillimum attenuatis (foliolo impari longius petiolulato) apice acuminatis acutis mem- branaceis pellucido-punctatis supra glabris sublus ad nervos 376 J. 'REANA ET J. E. PLANCHON. pubescenti-hirtis, paniculis gracilibus axillaribus terminalibusve foliis brevioribus vel subæquilongis paucifloris, Aoribus minimis breviter pedicellatis minute bracteatis, calyce quinquedentato, dentibus deltoideis, petalis ellipticis basi leviter imbricatis. Dans la vallée du Magdalena, à l'altitude de 1300 mètres au - dessus du niveau de la mer (Tr.). Notre Odontandra parviflora forme un arbre de moyenne grandeur, à folioles membraneuses, parsemées de points et de lignes translucides, comme chez les Rutacées; ses pédoncules, pétioles et derniers rameaux sont grêles et recouverts de petits poils étalés; enfin ses fleurs sont très-petites. Ce sont autant de traits qui distinguent cette espèce de l'Odontandra elegans (Moschozylum Adr. de Juss.), avec lequel elle a de la ressemblance. La base des pétales est libre chez les deux espèces. Tris. IT. — SWIETENIEÆ. Benth, et J. D. Hook., Gen,, I, p. 338. VI. — SWIETENIA L. Endl., Gen,, n. 5549; Benth. et J. D. Hook., /. c. SWIETENIA ManaGont Lin.; DC., Prodr., p. 1, Hook., Bof. Misc., X, t. 21, Suppl. t. 16, 17; Adr. Juss., Men. Mus., XIX, t. 22,925. Vulgo : Cahobo. Sur la côte de Carthagène. C’est la plante qui fournit le bois bien connu d’Acajou. VIT. — ELEUTHERIA Rœm. Synops., 422; Benth. et J. D. Hook., Z. e., p. 339. ScamarDÆA Karst., F7, Columb. sp. select., Y, 157, 1. 98. A. ELEUTHERIA NOBILIS. Schmardea nobilis Karst., 7. c. PRODROMUS FLORÆ NOVO-GRANATENSIS. 377 Vulgo : Curito à Surata. Surata, prov. de Pamplona, altit. 1200 mètres (Fr.); Nou- velle-Grenade (Purdie). Cette espèce est très-voisine de l’Zleutheria microphylla Hook. (sub Guarea), dont les folioles sont en général plus petites. Ces fleurs forment des cymes courtes, axillaires, et les fruits sont solitaires sur des pédon- cules pendants. Trig. IV. — CEDRELEÆ. Benth, et J. D. Hook., Gen., I, p. 339. VIT. — CEDRELA Lin. Endl., Gen., n° 5556; Benth. et J. D. Hook., Z. c. A. CEDRELA ODORATA Lin., Sp., 289 ; DC., Prodr., 1, 624. Vulgo : Cedro. Sur les bords du Magdalena, aitit. 300 mètres (Bonpland, n. 1658). — Venezuela, Carabobo (Funck et Schlim, n. 625). Nous trouvons au Muséum une feuille avec des folioles détachés du Cedrela odorata, appartenant à l’'herbier particulier de Bonpland et qu'il récolta sur le Magdalena. Funck et Schlim l'ont aussi trouvé dans le Venezuela. On sait que le Cedro est un bois des plus estimés en Amérique. 2. CepreLA Bocorensis +, arborea glabra 40-50 pedalis alta, coma ampla donata, ramis annotinis lenticellis raris oblongis flavidis petioloque inspersis, foliis abrupte pinnatis 7-9-jugis, foliolis suboppositis oblongis basi rotundatis subobliquis breviter petiolulatis apice acuminatis coriaceis, uervis secundariis sub- transversis validis, supra nitidis subtus pallidioribus exsiccatione fuscescentibus, paniculis ramosis folio brevioribus, ramulis bre- vioribus puberulis eymoso-plurifloris, floribus subsessilibus, lobis calycinis obtusis vel subacutis, petalis extrorsum sericeis. Vulgo : Cedro, où Cedro colorado ou oloroso. 318 JF. 'MIREANA HE J. HN. PEANCEŒON. Croît dans les environs de Bogota, à 2500-2700 mètres au- dessus du niveau de la mer (Triana). Les affinités les plus évidentes de cette plante sont avec le Cedrela angustifolia, originaire du Pérou, et le Cedrela montana, primitivement découvert dans le Venezuela. Elle diffère du premier par ses folioles presque sessiles et non insensiblement atténuées en un long et assez grêle pétiolule, par les lobes du calyce subcarénés extérieurement et non arron- dis, etc. ; elle s'éloigne principalement du second par des folioles qui ne sont pas tomenteuses en dessous, etc. Le Cedrela bogotensis est un grand et bel arbre des forêts tempérées des Andes, à tronc droit et élancé, dont le bois odorant est d’une grande utilité dans la menuiserie, etc. 3. CEDRELA MONTANA Moritz mss. ex Turez., in Bull. Mosc., (ann. 1858), p. 415. Vulgo : Cedro. Cordillère de Bogota, altit. 2000 mètres (Tr.). — Venezuela, colonie Tovar (Moritz, Fendler, n. 140). Comme nous venons de le dire, le Cedrela montana se distingue de presque tous ses congénères par la pubescence roussâtre qui recouvre principalement la face inférieure des folioles. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE.-— La généralité des Méliées gre- nadines appartient à la région chaude, comme les Odontandra et plusieurs espèces de Guarea, Trichilia et Ruagea. Cependant on trouve dans la région tempérée, et même jusque dans la ré- gion froide, quelques espèces de ces trois derniers genres. Les Cédrélées tiennent à peu près les deux extrémités de toute la zone de végétation des Andes. L’Acajou et le Cèdre odorant se plaisent vers le niveau de la mer dans la région chaude; au lieu que nos autres deux Cèdres de montagne et le Cwrito (Eleutheria) végè- tent dans la région froide à partir de la limite supérieure de la région tempérée. Les Cèdres et l'Acajou fournissent dans les deux régions des bois très-connus et des plus estimés. PRODROMUS FLORÆ NOVO-GRANATENSIS. 219 VI. — CHAILLETIACEÆ. DC., Prodr., 1,57; Endl., Gen., p. 1104; Benth.et J. D. Hook., Gen., pl., I, 340. I. — CHAILLETIA DC. Endl., Gen., n. 5758. À. CHAILLETIA Sp. nov. Dans le bassin du Meta, altit, 300 mètres. Nous avons récolté, sur les bords du rio Meta, une espèce de Chail- letia très-probablement nouvelle, mais dont les échantillons sont trop imparfaits pour être décrits, 9. CHAILLETIA PARKERN Planch. mss. in hb, Kew. Venezuela, Silla de Caracas (Buschel). Nous citons seulement cette seconde espèce, voisine du Chaïlletia pedunculata, d’après le manuscrit de M. Planchon, conservé dans l’her- bier de Kew. I. — TAPURA Aubl. Endl., Gen., n. 5759. 1. Tapura Guranensis Aubl. ; DC., /. c., p. 58. Plaines du Meta et du Casanare. Cette plante de la Guyane doit être une de celles qui s’avancent le long des bords des affluents de l’Orénoque jusqu’au pied de la Cordillère des Andes. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. — Les Chailletiacées appar- tiennent aux contrées chaudes et tropicales ; aussi sont-elles tellement rares dans la Nouvelle-Grenade, que nous n’en avons rencontré qu’une seule espèce, à laquelle le Tapura paraît quel- quefois associé dans les plaines orientales des Andes de Bogota, où il n’est pas rare de voir certaines espèces de la Guyane 380 J. TRIANA EN J. Æ. PLANCHON. s'avancer en remontant les grands fleuves, tels que l'Orénoque et l'Amazone. En dehors de cette contrée, les Chailletiacées sem- blent manquer complétement, puisque les collections n’en ren- ferment aucun représentant originaire des Andes tempérées. VIH — OLACINEÆ Mirb. DC., Prodr., 1, p.521 ; Endl., Gen., p. 1041; Benth. et J, D. Hook., Gen. plant., I, p. 342 OLAcaceæ Lindl., Veg. Kind., edit, 3 (ann. 1853), p. 443, Sans méconnaitre l’affinité étroite qui rattache les Olacinées vraies avec les Sautalacées, les Loranthacées, etc., nous croyons qu’au point de vue systématique, nous pouvons suivre l'exemple de MM. Bentham et Hooker, en laissant les vraies Olacinées parmi les familles de plantes à enveloppe florale double et à msertion hypogynique. I. — XIMENIA Plum. Endl., Gen., n. 5490. 4. Ximenia americana L., Sp., 497; DC., Prodr., L, 533. Ximenia multiflora Jacq.; Lamk, Encycl. Ximenia montana Macfadyen, F1. Jam., K, p. 121. Ximenia Russelliana Nall., cat. n. 6784, fide Wight et Arn. Vulgo : Limoncillo à Honda (Triana). Dans le bassin du Magdalena, entre 200 et 800 mètres d’altit.; Anapoima, Honda etc. (Er.); Santa-Marta (Purdie); Panama (Seemann, Duchassaing). Espèce extrêmement répandue dans les régions tropicales de l’ancien et du nouveau monde. Elle varie à rameaux inermes ou épineux. PRODROMUS FLORÆ NOVO-GRANATENSIS. 981 Il. — HEISTERIA Jacq. Endl., Gen.,n. 5491. RuAprOSTYLUM HBK. — Endl,, Gen., n, 5713 A. HeistertA RHAPTOSTYLUM +. Rhaptostylum acuminatum MBK., Nov. Gen. et sp., WU, p#91/t..621. Villavicencio, au pied des Andes de Bogota, bassin du Meta, altit. 500 mètres ; Junca, sur le versant occidental des Andes de Bogota, altit. 1400 mètres (Triana) ; forêts de Popayan, altit. 1750 mètres (Humb. et Bonpland); station de Lion-Hill, sur le chemin de fer de Panama (Sutton-Hayes, n. 390). Nos exemplaires ont les feuilles plus longues d’un tiers que chez le type de Humboldt et Bonpland, et les mêmes feuilles sont plus arron- dies à la base et relativement plus larges. 2. HeiSTERIA CELASTRINEA +, arhorescens glaberrima, ramis flexuosis, foliis lanceolatis vel oblongis 4-8 cm. longis basi sæpius obliqua acutiusculis apice acuminatis obtusiusculis mar- gine leviter revoluto integerrimis coriaceis penninerviis reticu - lato-venosis. floribus axillaribus rachi florifero brevi incrassato dense squamoso bracteolato, pedicellis flore longioribus, calycis patelliformis dentibus 5 triangularibus acutis corollæ 2-3-plo brevioribus, petalis staminibusque glabris, stylo brevissimo, stigmate capitato. Forêts de la province d'Ocaña. Arbor altitudine mediocri, ligno duro, rami teretes, valde flexuosi, ramuli annotini angulati, folia alierna v. inferiora sæpe opposila. Bien que le fruit mûr de cette espèce nous soit inconnu, cette lacune ne laisse aucun doute sur sa détermination générique, car on distingue nettement autour des jeunes fruits les calyces accrescents. Les feuilles sèches sont dures et rappellent celles de diverses Célastrinées du Cap. © So LE D. 'MERRANA ET J. EH. PE SNCHEN. III. — SCHOEPFIA Schreb. Endl., Gen., n. 4260. À. SCHOEPFIA VACCINIFLORA Panch., mss. in herb. Kew. Près de San-Sébastien, Sierra-Nevada de Santa-Marta (Purdie). Espèce très-distincte, voisine du Æænkea flexuosa, signalée jadis en mss. dans l’herbier de Kew par M. Planchon. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. — Le Amena appartient exclusi- vement à la région chaude, tandis que de nos deux Hessteria, l’un (/7. celastrinea) habite la région tempérée, et l’autre s'étend à la fois dans la région chaude et la région tempérée (4). (4) L'un de nous n’a pris à la révision des cinq familles précédentes qu’une part des plus secondaires. 11 doit donc laisser le mérite du travail à son collaborateur, et dans ce cas au véritable auteur, M. Triana. (J. E. PLANCHON.) FIN DU QUINZIÈME VOLUME. TABLE DES ARTICLES CONTENUS DANS CE VOLUME. ORGANES AEENRE, ANANORNE ME PHIYSHOELOGEHN VÉGÉTALES. Monographie des Saprolégniées, Étude physiologique et systématique , par MÉRMAXIM ER CORNE ES NE RC D or 5) Recherches morphologiques sur l'Ascobolus furfuraceus, par M. DE GLINKA JANCZENSESS 0: Ce RS Reis Lee oo LO9 Nouvelles Notes sur les Fungi Tremellini et leurs alliés, par MM. Turasxe. ©. 215 Observations anatomiques sur le cotylédon des Graminées, par M. Ph. VAN DH MER eo 6110 Lo LOMME ON OSEO UE CI ATE MLOHRES ME GHOGIERAMPHEN EBOH'ANEDUER. Prodromus Floræ Novo-Granatensis, ou Énumération des plantes de la Nouvelle- Grenade, avec descripiion des espèces nouvelles par MM. J. Trrana et J. E. PPANGHON MERE RE SC CN RE >: + 352 PALÉONAOLOGIE VÉGHTALE. Études sur la végétation du sud-est de la France à l’époque tertiaire, par M.le comte G: de SAPORTA,, | . . DANCE DONS BD 0 GAIN TABLE DES MATIÈRES PAR NOMS D'AUTEURS. Cornu (Maxime). — Monographie des SarortA (le comte G. DE). — Études Saprolégniées. Etude physiologique sur la végétation du sud-est de la et systématique. . . . . . . . . .« D| France à l’époque tertiaire. . . . . 277 Jaxczewskr (Edouard DE GLINKA). — TRiANA (José). — Voy. PLANCHON. Recherches morphologiques sur Tuiasxe (L. R. et Ed.). — Nouvelles l’Ascobolus furfuraceus. . . . . : 199] Notes sur les Fungi Tremellini et PLANGHON(J. E.).— Prodromus Floræ JUTSRAINÉS ER Ne CCR CCE 215 Novo-Granatensis, ou Enumération Van TiEGHEm (Ph.), — Observations des plantes de la Nouvelle-Grenade, anatomiques sur le cotylédon des avec description des espèces nou- Graminees te CE er 236 Velless 21. ORDRE data 392 TABLE DES PLANCHES RELATIVES AUX MÉMOIRES CONTENUS DANS CE VOLUME. Planches 1, 2. Saprolégniées. Fécondation. 3, 4,5, 6 et 7. Parasites des Saprolégnices. 8. Développement de l'Ascobolus furfuraceus. 9. Guepinia Peziza. 10. Hypochnus, Corticium, Sebacia, Guepinia. 14. Tremella Cerasi. 12. Ptychogaster, Pilacre. 13 et 44. Cotylédon des Graminées, 45. Carte planisphère représentant l'étendue de la mer nummulitique, avec le tracé des principaux genres de la flore des gypses d'Aix. 16. Carte de l'Europe éocène servant à caractériser la végétation des gypses d'Aix. FIN DES TABLES. ne | PARIS. — IMPRIMERIE DE L, MARTINET; RUE MIGNON, 2 Ann, des Seine, nat. Ê° Serre. POELE LOL LN NT), Mar, Cornu del Piearl se: ? ” Ver) ; + FN) ” J'aprolegnieesr, Fécondation 1. Achlya polyandre Mild. 2-8 À, racemosa lild . 1 / 10-18 À, contor £a JP. ROUX. Ip. A. Salmon »Veule Lstrapade. art. 2, , 2 ” Ann, des Sezenc, nat 5 “Sert. Bot Tome 15, FL, 2, Max, Corn del, 3 Se ! Picart se. Japrolegriees. Feconrdahon. Monoblepharis. gen nov.1- 0 M sphæeriCa. 7- #2 N polymorplhe. np, À. Salmon, » Welle Estrapade,1$, Laris. _ L = { , se. ) _ \ \ | : = LS d =. LL 1 SD . PNA ? L Î s Ann, des Jezcne. nakl S° Serie Bot. Tome 15, PL. 3: Mar, Corn del, : Picart ve: l’araswwles des Japrolegriees., LE TIe Clpidiopsis .Jer: nov, 10. Ü. Japrolegrie [A Pr) 21 O: lndex Zp.2 1. Salnonr. Rele L'rtrapade, 25 Lars ZAI7172, Ces dectenc.: nat, 2, d'erre, Doél. lome 15, / 1, 4. 7 2 # 21 Max, Cornu del. Picark se. Parasiles des J'aprolegriees 2-4 Clpidopsis fuvÿformer. 522 ©. Aphanomyets. 12 V',enerassata. 17-18 Box ella{ger, nov)Monoblepharitis. ps — - 2] LIN LE J'HÉION vfreille Lsbrapade,z Laits Bot Tome 15, PL S. Mar, Corne del. Jroarl ve. C ; l'arasides. des Japrolegriees. € 1-g liokella Rhiprdi, 10-11 À. À podyæ. np. A Salmon r hele Listrabade 15. L'artr. Ze 4 : Jesene: nat °° Serce. Mar, Cornu del. larasites des S'aprolegriees . 24 , ; rorella y cplugena 1mp. A. Salmon r. Veille Ærtrapade, 19 L'art. Bol Tome 15 PL. L Prcar£ dE, 27 à. 2, Bol Jome 2 ere. f. Ann, des Seine. nat 5° Love Picar Cornu del Max. f , g/tee , 2 € ele ?, J'apr 71 Le Worontna gen. nov] polyceystus, T'AS les « 2» [a 7 Jr arte, ; p.41 J'atmonr héile Lstrapade, 7! 2 ” 7/2. 2 Q a 722 me Ann, des S'ecene. nat 5° Jérte. Bol fome 15, LL, &. Ed, Jancrewske del Développement de l'Ascobolus, jürfuraceus mp. A1 J'almon,r Nieidle Lstrapade, 15, Laris. fe. Lierre % Bot. Zome 15 14 GP Ti. Pen casa ut {4 cp 1 CG Lmp.A., Salmon, r Vetlle Lrlrapade,is, l'arrr. del. Tutawne Ann. des Seine. nat 5° Serre. Mr er Jerere nat DANerLe Bot, Tome 13, PL, 10. e del, Tulasn UePIIUR . >» VA ypochnus_ Cortcium_ S'ebactna_ 6 imp. À. S'almon r Vue Lrtrapade, 15, L'art. Bol; Tome 15, PL, 11: JE: Pierre Cerast . Tremella hror #". Leu Frtapade. J' ñ 7 DAT 1, Ja Ann, des» Seierne. nat. 5° Serre. 27 A T | Tularne del. = Lie NSP ent LS ÿem L ï i * { 1 | ; [ne < Te É Ye +) à ; PRE : ; 7 Ann, des J'ecence. nat. 3° S'érte., BolTome 19 PU)12) Tudawne. del, Prerre ve. Ltychogaster — J'uacre. np. A. Salnonr Veille Lrtrapade, 15, L'artr, Ann, des S'ecene, nat. 5° S'érre. Bot. Llome 15 PL 13, EE — ——————]—"—————— 5 ——— UNE (les eu Ph. Van Tieghen del, Ce y ledon des GCranuices. LE np. A J'almon, r Viille Estrapade, 18, Paris, Ann, des Secene. nat, 5° Serre. & | Ph, Van Tieghem del. Co lyledon des Cranunces. | Zrp.A. Salon, r Vieille Lstrapade,18, L'ariv. Bot. Tome LONLC LA, Ann. des Sciences nat. 5° Série. Bot. Tome 15, P1.15 PLANISPHÉRE représentant la limite actuelle des principaux genres signalés dans la flore des Gypses d'Aix, pou montrer la relation de ces limites avec celles: du bassin oceupé jadis par la mer nummulitique. 1=—— /imites boréale et australe de l'aire des Cotoncaster 2e— dire d'habitation dug. Callitr is. B——— Lunite boréale des Hyrsine: D — Ligne marquant la distribution des Dracæna/du type du D. draco. B———— limite boréale des Pitosporum 6 Zzrmite boréale des Bombacées 1 Lünite boréale des Lygodüemn. B———. //nite borcale des Fodocarpus. $ = ; : SV dire d'habitation des Widdringtonia. 10 /igne marquant la distribution des genres Clethropsis et Hicroptelea. WU— /unite borcale des Atlantus. Obs. Les pointillés marquent la désconténuit limites du genre par l'xterposition des mers d'espaces conténentauzx dans lesque de se. montrer: ES LL Ces st H À} Gravé par Morieu,r Vavin 87. ÿ — Tu < ASH L DES Ann. des Sciences nat. b° Série. Bot. Tome 15, PLIG. Coupe théorique du bassin d'Aix du plateau d'Entremonts au Montaiguet. Entremonts N. S. da See DE Se = SO Pre Zone Ce des plantes. Fail D, Er) ae ernes de la Molasse 9 en nee Farté-supérieure duterrair 9 CE a gypse (Aguitanter) Assises marno-sableuse correspondant au ongrien. CARTE DE à ce - Ci L'EUROPE ÉOCÈNE nn $ représentant 2 o la configuration des terres et des mers - à l'époque nummulitique Le: avec NS Paris — de l'extension des principaux types végétaux) Q 1298: de la flore des gypses d'Aix. \ = Rroénone ae / \ 9 8.° 12. \ \ Ronzono 9 Rivage de la mer de Holasse. es je \°PCale d PRES È CS PAT E- 2 ? SE aliens et de JR see. LIÉE crc Tone sup Le Spokau * "Station tropicale yes de f 1gnites ) 3. oBil: / 7 | 5 ilim D | o Wétérawie 3.6.7.9.10. | 1 Ho 1.6.7.910. ( lignites) A SLR / ee ie Æ: # Hérnee TT 14,8.89 __ Sotzka 54) V 8.10. LT So ! {| Boleao ù Feb è 1.8. 8.9.10.11.12. AU Q S \ NON RQ ES & 1 Callitris. 2 Zomatites. 3 Nerium * Myrsine/ 5 PRitosporum 6 Bombax 1 Magnolia. Zixyplhaus Monfaiguet ‘ riviere SE Péstacia. Palacocarya. Cotoneaster: 2 Crcis #1 ; e de dislocation ESA Zase détritique de lumolasse etgres à Hlelix. G 1 gypes exploités et xone des plantes 7 1 Éocène supérieur.) É red na ns : RU TI PIE Base détritique duterratn ess ( alcaire du Hontaiquet ancien & Gypse. littoral du lac gypseuæ. Gravé par Morieuwr Vavin 87. Paris Lith. Becquet, r des Voyers 37