\ RAS | SES “+ ANNALES ES SCIENCES NATURELLES SIXIÈME SÉRIE BOTANIQUE € PARIS. — IMPRIMERIE DE E. MARTINST, RUB MIGNON, 2 SCIENCE RELLES SIXIÈME SÉRIE BOTANIQUE COMPRENANT L'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE ET LA CLASSIFICATION DES VÉGÉTAUX VIVANTS ET FOSSILES PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION DE M. J. DECAISNE TOME V PARIS G. MASSON, ÉDITEUR LIBRAIRE DE L’ACADÈMIE DE MÉDECINE Boulevard Saint-Germain et rue de l’Éperon EN FACE DE L'ÉCOLE DE MÉDECINE 1878 AAA EN EMAUT: ANNALES DES SCIENCES NATURELLES BOTANIQUE RECHERCHES SUR L'ANATOMIE COMPARÉE ET LE DÉVELOPPEMENT DES TISSUS DE LA TIGE DANS LES MONOCOTYLÉDONES Par M. le D'° A. GUELELAUED, Professeur agrégé à la Faculté de médecine de Montpellier. INTRODUCTION. L’anatomie générale des Monocotylédones a déjà été l’objet de nombreux et importants travaux, consignés, soit dans des traités spéciaux, soit dans des ouvrages d’un “caractère plus étendu. Depuis quelques années surtout, cet embranchement a, d’une façon toute particulière, attiré l'attention et l’activité des botanistes. Bientôt, je l’espère, nous connaîtrons aussi bien la structure des Monocotylédones que celle des Dicotylédones, et dans nos idées d'ensemble sur le règne végétal, nous n’aurons plus si exclusivement en vue ces dernières plantes. En apportant ici ma faible part d'observations et d'idées, en venant exposer ma façon de voir, discuter à mon tour certains points indécis, il m'est un devoir de rappeler d’abord les principaux écrits qui, 6 A. GUILLAUD. dans les vingt ou trente dernières années, ont amené nos con- naissances à leur état actuel. En Allemagne, longtemps après l’ouvrage si classique et si fondamental de H. von Mohl sur les Palmiers, est venu le mé- moire de M. Nägeli : Sur l'accroissement des tiges et des racines dans les plantes vasculaires (1858). Outre d'excellentes don- nées générales, on y trouve la description de quelques types, comme le Chamædorea elatior Martins, qui complète pour l’époque les connaissances sur les Palmiers; comme le Calo- dracon Jacquini Gôpp., premier exemple anatomiquement exa-- miné de Monocotylédones à accroissement continu ; car Mobl, en parlant du Dracæna cernua et en constatant son grossisse- ment annuel, n'avait point éclairé son mode de croissance au moyen d’un anneau formaüf : il rattachait, du reste, les Dra- cena au type des Palmiers. — Vers la même époque commence toute cette littérature qui se rapporte à la théorie de Schacht et Sanio sur l'anneau d’'accroissement, anneau qui revêt chez les Monocotylédones des caractères très-particuliers. Les diverses opinions émises à ce sujet ont été assez longtemps un objet de vives discussions ; et si finalement la majorité des botanistes allemands à paru convaincue que l'anneau d’accroissement ne pouvait exister dans les conditions et dans la portée première- ment énoncées, 1l n’en était pas moins vrai que certains tissus de la tige étaient d’une provenance génétique équivoque. Pour n'avoir pas reçu de solution péremptoire, pour ne s'être pas terminée par un oui ou un non, la question débattue n’en a pas moins porté ses fruits. — Dernièrement (1874) a paru un grand et beau mémoire de M. Schwendener, actuellement professeur à Tubingue, sur le Principe mécanique dans la structure ana- tomique des Monocotylées. Get ouvrage, des plus importants et des plus originaux, envisage surtout les faits anatomiques au point de vue physiologique et fonctionnel; l’auteur subordonne les éléments, les tissus aux conditions physiques, surtout méca- niques de la vie végétale, comme des effets à leur cause directe ; mais ce point de vue, aussi général que possible, ne l’empêche pas de discuter dans le détail éléments et tissus avec une rare ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 7 compétence. Nous reviendrons assez souvent par la suite sur ce travail de M. Schwendener, pour ne pas y insister davantage. En France, sans remonter non plus à Desfontaines et aux promoteurs de l’endogénie, sans rappeler l’époque où l’on dis- cuta si fort à l’Institut sur des observations incomplètes (Gau- dichaud, Mirbel. Dupetit-Thouars, etc.), nous avons eu (1865) le travail de M. Millardet sur la zone d’accroissement des Dra- cæna et Yucca, contenant des observations plus étendues que celles de M. Nägeli sur le même sujet; divers mémoires de M. Van Tieghem, notamment ses Recherches sur la structure des Aroïidées, Typhacées et Pandanées (1866), et sur la symétrie de structure des plantes vasculaires (1871). — Mais c’est sur- tout notre excellent anatomiste, M. Duval-Jouve (de Mont- pellier), qui a le plus contribué chez nous à l’étude particulière des Monocotylédones. Depuis 1856, il a publié sans relâche un grand nombre d'articles sur l'anatomie des Glumacées, articles épars çà et là dans les recueils périodiques, surtout dans le Bulletin de la Société botanique de France; plus récemment (1874) il a fait paraître un mémoire assez étendu (Étude histo- taxique des Gyperus de France), où il a résumé les résultats les plus généraux de ses longues recherches. Mais pour peu que l’on parcoure les divers écrits que nous venons de citer, ainsi que tous ceux qui ont été publiés sur le même sujet, on sera frappé du peu d'accord qui existe entre leurs auteurs dans le mode de description et de dénomination des mêmes tissus ou des mêmes régions anatomiques, dans l’appréciation de leur nature, origine et développement. L'un appelle liber ce qu'un autre nomme bois, ce qu’un autre encore refuse de nommer de peur d'établir des assimilations erro- nées (1); l’un rattache au faisceau ce qu’un autre regarde comme tout à fait indépendant : l’un, par exemple, appelle zone limite, ce qu'un second appelle gaine du plérome, ce qu'un troisième appelle zone nourricière (2), etc., ete., chacun ayant (1) Voy. art. Pseudoliber. (2) Voy.art. Gaîne fasciculaire (Schutzsch e). 8 : A. GUILILAUE adopté l'expression ou lexplication la plus conforme aux états anatomiques qu’il a eus sous les yeux, ou celle que lui suggérait une analogie plus ou moins lointaine et une anatomie comparée incomplète et limitée. Voilà pour l’anatomie pure et de détails. Au point de vue de l’anatomie générale et comparée, nos desi- derata ne sont pas moins grands. Tout le monde à peu près a voulu, à l’exemple de Mohl, assimiler topographiquement la constitution des faisceaux des Monocotylédones à celle des fais- ceaux des Dicotylédones pris pour type. C’est là, comme nous le verrons, un assez mauvais point de départ, tant qu'on ne modifiera pas un peu la façon actuelle de comprendre le fais- ceau type des Dicotylédones. L'analogie de composition elle- même est hors de cause, et ce n’est que la façon de l’établir qui laisse à désirer. En outre, bien d’autres données de Mohl demandent à être modifiées assez profondément pour s s’appli- quer au plus grand nombre de plantes, notamment en ce qui regarde la course des faisceaux et leur distribution dans la tige. La course des faisceaux de Monocotylédones formulée telle qu'elle l'est généralement, par opposition à la course directe des Dicotylédones, consacre une idée fausse, et constitue une large contre-vérité qui, jointe à cette autre ayant aussi cours, que les premières ont des faisceaux fermés et les secondes des faisceaux ouverts, semble isoler anatomiquement les deux embranchements. Or un tel isolement a lieu de surprendre, étant donnée la parenté morphologique si grande des unes et des autres plantes. On regrette de ne pas voir plus d'unité anato- mique et d’en être encore réduit à noter des différences pro- fondes, presque radicales, là où la morphologie n’accuse que des degrés divers. Sans vouloir prétendre qu’il n’y ait pas de différences notables entre les Monocotylédones et les Dicotylé- dones au point de vue de leur structure, différences qui peu- vent se retrouver au même degré entre Dicotylédones elles- mêmes, on peut bien dire qu’au fond il ne saurait y avoir deux anatomies , l’une pour le premier et l’autre pour le second embranchement. Les grandes différences autrefois établies, ou sont tombées devant les faits, ou ne sont pas aussi prononcées ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 9 qu'on l’a prétendu, quand elles existent réellement, et qu’elles ne sont pas à chercher dans une autre direction. Enfin la grande objection générale qu'on peut faire, c'est que jusqu'ici, dans un sens et dans Pautre, on « beaucoup plus fuit d'histoloqie proprement dite que de véritable anatomie; qu'ons’est beaucoup plus attaché à des variantes, à des quantités de tissus, qu'au groupement de ceux-ciensystèmes ou régions anatomiques. Dans l’état actuel des idées sur le règne végétal, il n’est pas permis non plus d'accepter la pensée que Mohl formule tout au début de son grand ouvrage, à savoir : que c’est dans les Pal- miers que les plantes monocotylédones rencontrent lexpres- sion la plus pure de leurs caractères, qu'ils sont plus favo- rables que d’autres plantes pour nous instruire du type de structure et des lois de végétation de la classe tout entière. Tout au contraire leur énorme développement, lom de prou- ver en faveur de leur perfectionnement, serait presque regardé aujourd’hui comme une monstruosité végétale, ou tout au moins comme une exagération des caractères végétatifs dans un groupe spécialisé, isolé par la suite des âges du type an- cestral et du reste de son embranchement. Du reste, la masse organique ne prouve rien en faveur de l’état de perfection- nement des tissus. Nous verrons même que, pour ce qui concerne la structure propre des faisceaux et l’état évolutif de leurs tissus, ceux des Palmiers sont à un degré d’infério- rité remarquable par rapport à ceux des autres Monocoty- lédones. Pour ce qui est de la course générale de ces fais- ceaux, elle constitue, comme nous venons de le rappeler, plutôt l’exception que la règle, ou tout au moins ne s'applique qu’à une certaine partie des faits. Enfin une formation qui joue un rôle des plus importants, le méristème secondaire et la zone spéciale qui lui succède entre l'écorce et la région centrale, ne semblent pas exister chez les grands Palmiers, en tant qu'on s’en rapporte aux descriptions de Mohl : autre état d'infériorité d'organisation. Il me semble qu'avant tout l’anatomie des Monocotylé- 40 A. GURLE AUD. dones à manqué jusqu'ici d’une étude généralisée, s'étendant à un nombre d'espèces et de familles diverses, assez grand pour permettre de juger avec plus de sûreté quels sont les üssus et les systèmes les plus constants, quelles sont la nature et la somme de leurs variations ; qu’on à surtout trop négligé d'y jomdre les renseignements que peut nous fournir lPhis- toire du développement des tissus. C’est à l’origine seulement des choses qu’on peut en bien saisir la nature et les rattacher à leur série naturelle de faits. On peut avancer que la notion de tissu et de système de tissus doit être désormais liée à celle d’origine commune et de développement commun. Aussi ai-je fait entrer pour une large part dans mes recherches examen des états primordiaux d’un tissu, de sa naissance, de la marche de la différenciation des éléments dans une région anatomique donnée. C’est à ces deux sources, anatomie comparée et anatomie évolutive, qui, fortement appuyées sur le principe ou fait de la dérivation, sont aujourd’hui les deux plus puissants leviers de Phistoire naturelle, que j'ai voulu concurremment puiser en les élargissant le plus possible, per- suadé que le nœud de beaucoup de controverses était là, que beaucoup d'opinions et de systèmes généraux n’ont pu durer parce qu’ils s’étaient trop spécialisés, soit dans les confins d’une même famille de plantes, soit dans l’emploi d’une méthode trop exclusive d'observation. On pourra discuter mes résultats ; dans quelques années même il se trouvera dans ce que j'écris aujourd'hui, comme invariablement dans tout ce qui s’est écrit jusqu’àprésent, plus d'erreurs et de vues fausses que de vérités, mais on ne pourra pas du moins contester la valeur de ces principes, dont d’autres feront peu à peu meilleur usage. Par rapport à l’objet lui-même de mes recherches, sans vouloir établir une distinction factice entre le rhizome, por- tion souterraine et vivace des tiges monocotylédonées en général, et le chawme, portion aérienne, florale et tempo- raire, 1l est incontestable cependant que le type d'organisation des Monocotylédones doit se montrer plus à clair dans le rhi- zome, partie végétative par excellence et véritable axe de ces ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 11 plantes, que dans les chaumes, qui, quelque développés qu’ils soient, n’ont la plupart du temps que la signification de pédon- cules floraux. C’est pour cela que j'ai presque toujours choisi le rhizome d’une plante pour l'étude de celle-ci, par la même raison que, dans les recherches anatomiques sur les tiges des Dicotylédones, on s'adresse toujours au corps de la plante plutôt qu’au support floral; c’est aussi parce que dans cette portion de la tige le développement des tissus est plus lent, plus varié, plus complet, et d’un examen matériel bien plus facile. En m'adressant surtout aux rhizomes, je n'ai pas eu d’autres pensées visant plus haut, et tendant, comme quelques études de M. Chatin, par exemple, à leur accorder une organisation ana- tomique spéciale. Il serait grandement possible d'établir que le chaume des Graminées, que la hampe des Monocotylédones herbacées, représentent morphologiquement le pédoncule floral d’un Palmier où d’un Dracæna, par exemple ; que par contre, le stipe de ces arbres a son analogue dans la seule partie sou- terraine, rhizome ou bulbe des premières, ainsi que À. Richard l’a indiqué dès 1885 dans ses Éléments de botanique ; de prouver que chez les Monocotylédones l'opposition entre ces deux parties est plus grande que dans les Dicotylédones, etc. Mais, je le répète, tout ceci n’a qu’un intérêt morphologique plus ou moins grand : anatomiquement parlant, il ne peut y avoir ni rhizome, ni chaume, mais seulement des tiges, et l’ana- tomiste est libre de choisir la partie qui convient le mieux à ses recherches. Ainsi, c’est des rhizomes dont il sera surtout question dans ce travail. Pour limiter encore mon sujet à un autre point de vue, je ferai remarquer que je ne m'occupe que des Monocotylédones ordi- naires, à accroissement limité à la première année, autrement dit du premier état anatomique stable de la tige, tel qu’il dérive directement ou indirectement du méristème primitif. Quelques remarques préliminaires et certaines données générales brièvement rappelées rendront mon exposition plus 49 A. GUILLAUD. simple et plus rapide. Comme dans l’état actuel de la glosso- logie anatomique, le sens des termes dont on se sert pour désigner les tissus est loin d’être bien fixé, je dois aussi fournir quelques mots d'explication sur leur emploi. Le sommet de tout bourgeon est, comme on sait, contitués par le méristème primitif (Urmeristem, Nägeli), tissu grisâtre et trouble lorsqu'il est vu en masse, à très-petites cellules complé- tement remplies de protoplasma et munies de parois claires, en multiplication très-active et contenant en puissance tous les autres üssus des plantes. Le méristème primitif subit par places limitées plusieurs évolutions dont la principale, et la première en date, est l'apparition dans sa masse des premiers faisceaux de procambium, d'où dériveront par la suite les faisceaux fibro- vasculaires. La différenciation normale et la fin directe du méristème primitif non employé est le tissu ou le parenchyme fondamental de la zone corticale et de la région centrale. Le méristème primitif achève très-rarement, directement et à lui tout seul, Pédifice anatomique. I intervient alors des mé- risièmes secondaires où de perfectionnement, répondant à cer- tains besoins fonctionnels ou de croissance, même lorsque l’accroissement de la tige est limité à la première année. Les ‘plus importants de ces derniers sont : Le sclérogène. — Les couches sous-épidermiques, consistant assez souvent en sclérenchyme dans les Monocotylédones, sont toujours précédées d’un méristème spécial d’où elles dérivent, méristème qui n’est point un reste de méristème primitif per- sistant à la périphérie de la tige, mais une véritable formation secondaire, tardive. Je me suis servi pour ce méristème du nom de sclérogène (voy. pl. 5, fig. 4 et 5). Le périméristème ou mieux propériméristème. — Au niveau du cercle externe des faisceaux centraux, vers la ligne de sépa- ration de la moelle et de l’écorce, se forme, postérieurement et aussi indépendamment du méristème primitif, une bande an- nulaire d’un tissu clair, à divisions très-constantes, progressant en dehors, d’où procède une grande variété de tissus, mais surtout un anneau prosenchymateux puissant dans les branches ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 13 aériennes, bande de méristème assez mal connue sous le nom de Verdickungsring, ou d’anneau d'accroissement. C’est cette zone de méristème ou ses produits qui, lorsqu'ils existent, établissent une limite réelle entre la zone corticale envelop- pante, et le corps central enveloppé. On pourrait lui donner le nom de périméristème, si cette dernière expression ne devait pas être réservée pour la zone d’accroissement qui survient plus tard dans certaines tiges, comme chez les Dracæna, les Aloe, etc., par analogie avec la couche parente, le pericam- bium (Cambiumring) des arbres dicotylédonés. En raison de certains rapports d’origine qu’ont avec notre bande de méri- stème le périméristème et le péricambium (car elle est aussi sénérale dans les Dicotylédones que dans les Monocotylédones), j'ai employé pour sa désignation le mot dérivé de propérimé- ristème. Le centralméristème. — Au centre même de la moelle, on rencontre, dans quelques cas très-rares il est vrai, d'abord un cordon ou une lame de méristème secondaire sans lien direct avec le méristème primitif et débutant assez exactement comme le propériméristème ; puis, plus tard, un tissu plus ou moins endurei. Ge méristème, très-curieux par sa position, peut re- cevoir le nom de centralméristème; quant à son produit qui est une sorte de tissu lhibérien, il doit rentrer dans le groupe des pseudolibers. Sortis de la période formative, la tige et ses tissus passent à l’état durable, stable, qu'ils gardent toujours. Le groupement des tissus adultes de la tige en systèmes ou en régions anatomiques a été tenté plusieurs fois déjà et de diverses façons. Le plus simple, à mon avis, le plus naturel, celui qui répond le mieux à tous les faits de l’histoire du développe- ment, est celui qu’a suivi M. le professeur Sachs. FI distingue trois systèmes de tissus : le système cutané, le système fascicu- laire et le système fondamental. Ajoutons que dans les plantes, relativement peu nombreuses, à zone d’accroissement continu, les tissus provenant du péricambium ou du périméristème for- ment un quatrième système tout à fait à part. C’est la division 14 A. GUELLAUD. que je compte suivre, en partageant toutefois le système fonda- mental en ses trois régions naturelles parfaitement définies : la zone exlerne ou corticale, en dehors du cercle externe des fais- ceaux centraux et des produits du propériméristème ; la zone intermédiaire, issue de ce propériméristème; et la région cen- trale ou la moelle, en dedans du cercle externe de faisceaux centraux et des produits constituant la zone intermédiaire. Non-seulement les besoins de description et de précision anato- miques autorisent cette dernière démarcation, mais elle répond absolument à la réalité de la structure des tiges. Si je ne dis- lingue pas encore une région tout à fait axile pour le central- méristème et ses produits, c’est que celui-ci n’est, à proprement parler, qu'un accident, tandis que l'établissement d’une zone intermédiaire entre l'écorce et la moelle est le cas ordinaire dans toutes les plantes supérieures. Si des systèmes nous passons aux tissus eux-mêmes, voici ceux sur lesquels j'ai quelques remarques à faire : Sclérenchyme, sclérification. — Tai employé l’expression de sclérenchyme pour désigner seulement les couches hypoder- miques à éléments parenchymateux, à peu près isodiamétraux, mas fortement épaissis et durcis, se colorant jusqu’au rouge foncé dans une légère solution d’aniline, toujours issus du sclé- rogène. D'accord avec plusieurs anatomistes, je ne m'en suis point servi pour d’autres tissus durs, bien que M. Sachs, d’après Mettenius, recommande d’en généraliser l'emploi et de l’ap- pliquer à tous les éléments épaissis et durcifiés, prosenchyma- teux ou parenchymateux, et que ce conseil ait été générale- ment suivi en Allemagne. Il y aurait de nombreux inconvénients à agir ainsi; le moindre serait de rendre la valeur de l’expres- sion à peu près nulle, puisqu'elle ne consacrerait plus que l'opposition entre les tissus mous et les tissus durs. Il vaut beaucoup mieux en faire un tissu véritable. Limité comme je l’entends, ce mot a un sens analogue à celui de collenchyme, üssu qui se trouve le plus souvent à la même place sous l’épi- derme, qui doit être aussi dans un certain lien génétique avec ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLEDONES. 15 le sclérogène, et qui n’est, à vrai dire, qu'une forme parente à épaississements localisés et d’une autre nature. Selérenchyme et collenchyme peuvent passer graduellement à des formes de tissus prosenchymateuses ou à des formes à parois cellulaires minces, qui reçoivent alors d’autres noms. — Lorsqu'un épais- sissement cellulosique postérieur envahit un tissu fixe, durable, et qu’il n’est pas, à proprement parler, un terme de son évolu- tion normale, ce qui se reconnaît le plus souvent par sa loca- lisation très-restreinte et par sa venue très-tardive, c’est une sclérification. Gest le sens donné à ce mot, notamment par M. Vesque (1). La selérification peut gagner tous les tissus bien différenciés, parenchyme, vaisseaux, cellules grillagées, etc. La subérification postérieure et sur place, la cuticularisation, la cormfication des éléments, sont des phénomènes analogues. Dans ces cas 1l n’y a jamais de méristème préparatoire ; c’est un travail surtout chimique qui n'intéresse pas le fond même de la structure, comme les tissus primitifs et issus de méristèmes secondaires, dont il reproduit le type. Gaîne fasciculaire (Schutzscheide).— Bien souvent, dans le cours de mes descriptions, j'ai employé, pour plus de précision, le second mot à la place du premier. Ce nom, d’un usage général et très-connu en Allemagne, est aussi celui qui fut employé pour la première fois par M. Caspary pour désigner cette assise si particulière de cellules, munies en général de points noirs latéraux et souvent à parois très-fortement épais- sies, qui se rencontre, soit autour du corps central des racines, soit autour du corps central ou des faisceaux des tiges, spé- cialement des rhizomes de Monocotylédones. Les trop longues discussions engagées autour de cette assise de cellules en ont tellement obscurei la notion, qu'à l'heure actuelle il n’y a peut-être pas moins de érente expressions diverses pour la désigner. Au point de vue de l'anatomie comparée des tissus, ce qu'on peut avancer de plus général, c’est que c’est une gaine, complète ou non, et que cette gaine est sous la dépendance (1) J. Vesque, Ann. sc. nat., 6° sér., t. IL. 16 A. GUALLAU. absolue des faisceaux ; de là l'expression de gaîne fasciculaire (Strangscheide, Sachs), qui, à défaut du nom originel, peut être employée. On signale sous l’épiderme des gaînes à cellules munies de points noirs latéraux : histologiquement, il peut y avoir là des ressemblances; mais, au point de vue de l’anatomie comparée, je doute, s’il s’agit bien d’une gaîne nouvelle, qu’elle ait beau- coup d’analogie avec celle qui nous occupe. Pseudoliber. — Parmi les produits les plus constants du pro- périméristème, et aussi des méristèmes secondaires en général, setrouvent des éléments prosenchymateux, effilésaux deux bouts, plus ou moins allongés, plus ou moins épaissis, ressemblant enfin par tous leurs caractères anatomiques aux gros éléments épaissis du liber, au dichwandiger Bast des auteurs allemands. On a beaucoup discuté sur leur nature, et beaucoup hésité à leur donner un nom définitif; leur place dans la série des tissus n’est pas encore fixée. Je crois tenir compte de toutes leurs conditions d'existence en leur appliquant Le nom de pseudoliber, qui s'étend à tous les tissus à forme de liber qui n’appartien- nent pas aux faisceaux, qui ne proviennent pas de cambiums, mais de méristèmes secondaires. Le pseudoliber se distingue du gros liber (tissu libérien) par son origine et son dépôt; il est d’une autre famille, d’une autre race ; il forme générale- ment des bandes ou des anneaux. Méristémiforme. — Un autre tissu, produit des méristèmes secondaires et parent du précédent, avec lequel il montre tous les passages, est caractérisé par des cellules en général paren- chymateuses, variables de forme et de dimensions, se touchant sans méat et à parois claires; 1l semble n’être souvent que du méristème dfeint : en tout cas c’est le tissu durable le plus voisin de l’état de méristème dont il conserve la texture. Je lai appelé méristémiforme. I y à du méristémiforme #ou, à parois tendres, et il y en a de dur, à parois plus épaisses et plus solides ; il en est à cellules isodiamétrales et même tangen- ielles, et à cellules allongées, presque prosenchymateuses, sui- vant l’état du méristème ancestral au moment de sa formation. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 17 C'est le périméristème qui fournit en dedans de la gaine fas- ciculaire (Schutzscheide) les plus beaux exemples de méri- stémiforme. Faisceaux, faisceaux caulinaires. — M. Nägel (4) a distin- gué dans la partie aérienne des plantes trois classes de fais- ceaux : des faisceaux communs (Gemeinsame), appartenant à la fois à la feuille et à la tige par leur trajet; des faisceaux foliaires (Blaticigene), propres à la feuille; et des faisceaux caulinaires (Stammeiqene), propres à la tige. Le périméristème donne régu- hèrement naissance à des faisceaux caulinaires, petits, anasto- mosés, obliques ou horizontaux, qui se trouvent principalement vis-à-vis des nœuds, en dehors ou sur Le plan tangentiel des fais- ceaux communs les plus externes, c’est-à-dire du cercle ordi naire de ces faisceaux. Les faisceaux communs des tiges, les plus importants de beaucoup, quand laccroissement est limité à l’année, se dif- férencient tous, en règle générale, en deux régions anatomi- ques qui sont les suivantes : Xylème el phloème (Xylem und Phloem).— C'est ce que nous avons appelé chez nous bois et liber, en tant qüe ces mots sont pris dans un sens général et veulent désigner des groupes ana- tomiques. Les deux mots créés par M. Nägeli, d’un usage général maintenant en Allemagne, désignent, l’une par rap- port à l’autre, les deux régions adultes du faisceau qui se sont différenciées dans le procambium, et qui renferment, la pre- mière, des vaisseaux, du libériforme, du parenchyme ligneux ou mieux xyleux; la seconde, des cellules grillagées, du liber, du parenchyme Hbérien ou mieux phloeux. Dans l’intention exprimée par l’auteur, ces mots ont été destinés à remplacer, en allemand, ceux de Holz (bois) et de Bast (liber, tissu libérien), qu, pris à la fois dans le sens général de région anatomique et dans le sens particulier de tissu, prêtent à confusion, et sont contraires à la netteté et à la propriété de la bonne langue scientifique. En français, les inconvénients sont les mèmes. (1) Beirage sur swiss. Bol., EHeft, p. 25. 6 série, Bor. T. V (Cahier n° 1). ? Lez 18 A. GUELLAURB. Tout le monde conviendra que ce n’est que par abus de langage qu'on peut désigner sous le nom de bois une partie de la masse centrale charnue des Radis, des Carottes ou des Navets, et que le mot Lber, qui signifie proprement des fibres longues et textiles, puisse s'appliquer à certaines écorces qui n’en contiennent point. Du reste, les mots xylème et phloème ré- pondant à des notions nouvelles, et étant les premiers en date, je ne vois aucune raison de les remplacer. Il y a peut-être eu là, du reste, une méprise. On n’a peut- être vu dans le phloème et le xylème que la notion, que le fait topographique exprimé par les mots liber et bois appliqués aux Dicotylédones, que a répétition ou là traduction grecque de ces mêmes mots. Îl ne faudrait pas s’y tromper, phloème et xylème sont autre chose, sont anatomiques avant tout. Le phloème est caractérisé par des cellules grillagées, le xylème par des vaisseaux. Ce n’est qu'à partir de M. Nägeli (1858) que les cellules grillagées ont pris de Pimportance à côté du tissu libé- rien, que seul on opposait alors aux vaisseaux du bois. Aujour- d’hui le tissu hbérien des auteurs n’est qu’un accessoire dans le faisceau ; il se rencontre autour des vaisseaux ou des cellules grillagées, fait partie du xyième ou du phloème, ou bien le plus souvent ni de l’un ni de l’autre. Enfin la topogra- phie de ces deux parties du faisceau n’est pas fixe ; elle varie avec les groupes de plantes, c’est surabondamment prouvé au- jourd’hui; et du moment que le phloème ne se trouve plus sur le même rayon, en dehors du xylème détaché de lui, du mo- ment que dans les Dicotylédones elles-mêmes on connaît assez d'exemples de phloème, inclus dans liniérieur du xylème, que dans toutes les Monocotylédones et les Cryptogames cette rela- tion de position est normalement changée, 1l n’est plus possible d'employer sans inconvénients, à leur place, les mots liber et bois. Cambiforme. — M. Nägeli ayant abandonné ce mot pour le tissu qu’il désignait d’abord ainsi, je le reprends aujourd’hui, dans le même sens qu'il lui donnait autrefois, de cambium arrêté, éteint, pour certains états de faisceaux adultes, à masse non différenciée ou très-peu différenciée, et dans lesquels xylème ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 19 et phloème ne sont pas reconnaissables, pas limitables du moins. De plus, dans les faisceaux normalement développés, 11 y a parfois des éléments indifférents, qui sont encore voisins de l’état de cambium. C'est, si l’on veut, un arrêt de dévelop- pement, mais en tout cas un tissu incapable de développement ultérieur, un tissu stable. Moelle. — Dans les Dicotylédones ordinaires on sait exacte- ment ce que c’est que la moelle. C’est la masse centrale de parenchyme fondamental, exactement limitée par l'anneau habituel de faisceaux, dont la partie interne porte le nom d’étui ou de gaine médullaire. Ges faisceaux sont-ils séparés par des rayons, les parties internes de ces rayons au niveau de l’'étui médullaire, quoique formées de tissu fondamental direc- tement issu du méristème primilif, comme celui de la moelle et celui du reste du rayon, se distinguent des deux et s’ap- pellent liens médullaires. L'apparition d’un anneau cambial vient encore plus tard préciser ces limites. Mais dans les Mono- cotylédones on n’a jamais bien défini ce que devait être la moelle. Le défaut d’une comparaison exacte entre les deux types de tiges explique cela en partie. Il est évident que les faisceaux externes de la région centrale des tiges de Monoco- tylédones, toujours plus ou moins disposés en cercle, représen- tent l’anneau des faisceaux bien moins nombreux des Dicoty- lédones. Leur course est la même, c’est-à-dire directe, sans courbure vers l’axe de la tige; c’est à leur niveau que naît, dans les unes comme dans les autres plantes, un propériméristème, précédant l’anneau d’accroissement qui survient dans les tiges à développement continu, et s’éteignant lui-même en une zone intermédiaire de tissus spéciaux dans toutes les plantes an- nuelles. À cause de la forme arrondie, de l’irrégularité de gise- ment des faisceaux du cercle extérieur, à cause de la présence d’une grande quantité d’autres faisceaux plus centraux, les liens médullaires ne sont pas à chercher ici; mais, à l’état adulte, tout le tissu fondamental situé en dedans de ce cercle, interposé aux autres faisceaux ou formant une masse centrale libre, tout ce tissu, comme la moelle des Dicotylédones, pro- 20 A. GUELEAU. vient directement du méristème primitif et a même significa- tion. Partant la moelle des Monocotylédones peut se confondre jusqu’à un certain point avec la région centrale, etje me servirai de ces expressions comme équivalentes, faisceaux mis à part. CHAPITRE PREMIER. DESCRIPTIONS ANATOMIQUES PARTICULIÈRES. $ 1. — TABLEAU DES TYPES DÉCRITS. Ir Type. — Pas de zone intermédiaire entre la moelle et Pécorce. Ex. : Polygonatum vulgare Desf. Ile Type. — Üne zone intermédiaire représentée par des Lissus divers : 1° Produits de la zone intermédiaire réduits à des faisceaux caulinaires. Ex. : Jris florentina L. % Produits de la zone intermédiaire réduits à du méristémiforme. Ex. : Chamædorea elalior Mart. 3 Produits de la zone intermédiaire réduits à la gaine fasciculaire (Schutzscheide). Ex. : Epipaciis palustris Cr. 4° Produits de la zone intermédiaire consistant à la fois en gaine fasci- culaire, en méristémiforme, en faisceaux caulinaires, etc. Ex. : Acorus cülamus L., Convallaria maialis L., Canna indica L., Scirpus lacustris i.., Funkia, ete., etc. Ille Type. — Un seul cercle externe de faisceaux avec une puissante zone inter- médiaire à Son niveau. Ex. : Luzula campestris DC., Paris quadrifolia L. IVe Type. — Faisceaux communs en deux groupes : lun au centre, l’autre for- mant le cercle ordinaire, bien séparé du premier, avec une puissante zone intermédiaire à son niveau. Ex. : Tradescantia virginica L. Ve Type. — Formation d’une masse centrale de tissu secondaire au moyen d’un centralmérisitème. Zone intermédiaire bien développée. Ex. : Triglochin maritimum L. VIe Type. — Faisceaux munis de plusieurs phloèmes distincts. Ex. : Tamus communis L. $ 2. — PREMIER TYPE. Pas de zone intermédiaire entre la moelle et l'écorce. Ex. : Polygonatum vulgare Desf. Le premier type que nous examinerons, comme ayant la structure la plus simple, c’est-à-dire les régions anatomiques et les tissus les moins compliqués et les moins différenciés, est ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 21 celuique nous présentent la plupart des espèces dugenre Po/ygo- natumT.,notamment P.vulgare Desf., P. multiflorum Al., ete. I. Érar DURABLE. — Sur la section transversale fraiche du rhizome on aperçoit, vers le centre, des points plus foncés qui sont les faisceaux fibro-vasculaires. Ces points, assez rares en dedans, deviennent plus nombreux en dehors, et les plus ex- ternes, disposés en cercle régulier, jalonnent, à une petite dis- tance de l’épiderme, une ligne régulièrement inscrite qui par- tage la coupe en deux régions : une zone externe corticale enveloppante et un corps central enveloppé. 1° L’épiderme est constitué par une assise de cellules peu différentes, comme forme et dimensions, des cellules sous- jacentes de parenchyme fondamental. Leurs parois sont minces comme dans ce dernier, sauf la paroi externe euti- cularisée, qui est plus épaisse. Vu par sa face extérieure, cet épiderme a ses cellules étendues en tous sens, à peu près aussi longues que larges. On reconnait cependant, à la disposition relative des parois et à leur différente épaisseur, des cellules épidermiques primitives étendues dans le sens de l’axe du rhi- zome ou obliques, soit à droite, soit à gauche, qui ont été divi- sées en divers sens par des parois postérieures. Ces parois sont plus ou moins nombreuses, selon la portion de rhizome que l’on examine. Cet épiderme est encore remarquable par ses gros et nom- breux stomates. On est habitué à rencontrer de préférence les stomates sur les organes verts, feuilles et tiges herbacées. On les a même considérés comme des appareils propres à l'échange de gaz qui à lieu par les feuilles sous linfluence des rayons solaires. Je doute cependant qu'aucune feuille n’en présente de plus développés que les rhizomes du Polygonatum vulgare. La perfection de ces stomates, la largeur de leur ouverture, leur forte saillie à la surface de l’épiderme, leur grand nombre, per- mettent de croire qu'ils jouent, à cette place, un rôle impor- tant pour la vie du rhizome (1). (1) M. Trécul a signalé la présence de stomates sur le rhizome de certaines Fougères. 929 A. GUELLAU. 2% La faible zone externe ou corticale sous-jacente à l’épi- derme est purement parenchymaieuse, sans faisceaux fibro- vasculaires, et tout entière constituée par le tissu fondamental externe, sauf dans quelques-unes de ses assises les plus internes qui reviennent sans doute au périméristème, quoique sem- blables aux autres. De distance en distance, et régulièrement espacées, des cellules plus larges du double et trois ou quatre fois plus longues, avec un gros faisceau de raphides au centre. Dans les portions plus âgées du rhizome, on trouve bien sou- vent, à la place de ces cellules, des espaces lacuneux, plus larges encore, avec des débris de parois déchirées à l’entour et des raphides désagrégées. En coupe longitudinale, ces lacunes ne sont guère plus longues que les cellules cristallifères. On s'explique aisément leur nature et leur origine. 3° Entre les faisceaux plus ou moins espacés qui forment le cercle externe, limite de la zone externe et du corps cen- tral, le parenchyme précédent passe au parenchyme central sans transition aucune. Cependant on observe çà et là, sur- tout dans les points où sort une racine, des cellules plus claires, situées immédiatement en dehors du cercle vasculaire, vis-à-vis des faisceaux ou entre eux, plus étendues dans le sens tan- gentiel que dans le sens radial, et qui présentent encore une ou deux cloisons tangentielles fines et droites. Ceci n’est que le reste du périméristème, la trace d’un tissu méristémiforme tel que nous le trouverons généralement développé dans la plupart des autreS rhizomes. | % Le tissu fondamental central ou médullaire est en tout semblable au parenchyme de la zone corticale. Mêmes cellules à raphides et mêmes lacunes. La partie centrale est libre de tout faisceau, comme chez les Dicotylédones. 9° Venons aux faisceaux. Bien plus rares au centre, comme: nous l'avons vu; ils y sont, en revanche, plus gros, à section transversale plus circulaire, tandis qu’à Pextérieur ils sont plus pets, moins circulaires, hémisphériques. Certains sont même très-petits Chacun d’eux présente deux régions anatomiques bien ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 23 distinctes : l’une, extérieure, enveloppante, sous forme d'un anneau plus épais à sa partie interne qui regarde la moelle ; l’autre, enveloppée, sous forme d’un cylindre inscrit, excen- trique en dehors. La première, composée de vaisseaux et de cellules plus ou moins larges et longues, est le æylème du fais- ceau ; la seconde, composée de cellules grillagées et de cellules prismatiques allongées, à plus faible lumière, est le phloème du faisceau. Souvent, surtout dans les gros faisceaux de l’in- térieur, le côté du xylème qui regarde la moelle se prolonge comme une sorte d'éperon, intéressant bien plus les cellules xyleuses que les vaisseaux ; c’est à peu près ce qu'Hillier nom- mait la couronne dans les faisceaux fibro-vasculaires des arbres dicotylédonés. Les éléments du xylème, vaisseaux et cellules xyleuses, sont moins épars et moins entremèêlés que dans les Dicotylédones en général. Les vaisseaux constituent des groupes plus ou moins gros et plus ou moins nombreux, trois ou quatre en gé- néral, disposés en demi-cercle ou en une sorte de fer à cheval prolongé ou non en arrière, et situés au milieu des cellules xyleuses qui forment en dehors et en dedans une couche de parenchyme en contact, d’un côté avec le tissu fondamental, de l’autre avec le phloème. Entre les groupes vasculaires, les deux couches de parenchyme xyleux se réunissent; elles se confondent, du reste, sur la face antérieure du faisceau, qui ne présente jamais de vaisseaux. En coupe longitudinale, les cellules xyleuses sont allongées, ont deux ou trois fois la longueur des cellules du parenchyme fondamental, un peu étendu lui-même en longueur dans le voisinage des faisceaux; mais, en revanche, elles sont beau- coup moins longues que les éléments du phloème. Leurs parois transversales, toutes à peu près de même épaisseur, sont, les unes obliques, par rapport aux parois longitudinales, les autres à peu près perpendiculaires. Ge caractère permet de dis- tinguer encore les cellules primitives des cellules produites par cloisonnement postérieur et perpendiculaire à la direction générale. Une cellule primitive de xylème a sensiblement la 24 A. GUILLAUD. même longueur qu'un élément vasculaire et qu’un élément primitif du phloème, L’arc vasculaire et les groupes vasculaires englobés dans le parenchyme xyleux, avec ou sans éperon postérieur, sont tou- jours plus épais du côté qui regarde la moelle. fs ont en ce point toujours deux et parfois trois et quatre vaisseaux d’é- paisseur, tandis qu’en avant ils n’en ont généralement qu'un. Les vaisseaux de l’éperon ou du groupe postérieur sont plus petits; ce sont des trachées ou des vaisseaux déroulables ; les autres sont plus grands rayés ou ponctués, non dérou- lables. L'examen direct de ces vaisseaux à parois assez épaisses est facile; mais on donne à l’arc vasculaire une netteté plus grande encore par la solution d’aniline, qui colore exclusive- ment les parois vasculaires en beau rouge ; de façon que si les vaisseaux sont en contact avec le parenchyme xyleux, 1l n°y à qu'une partie de la paroi qui se colore. L’aniline sert aussi parfois à décomposer des groupes vasculaires, en rendant visibles des cellules xyleuses incolores quipourraient être prises dans la masse pour des vaisseaux. Le phloème, sous forme d’un cylindre plein, est composé, en coupe transversale, d'éléments plus petits que ceux du xylème, surtout vers le milieu, à parois naturellement un peu épaisses, claires, brillantes sous le microscope, et se gonflant encore sous l'influence de l'acide sulfurique dilué, dont l'emplor est d'autant plus profitable qu'il contracte et rend visible sous forme de cordon gris et granuleux le contenu de ces éléments. En coupe longitudinale, les cellules du phloëème sont allongées, prisma- tiques, à parois supérieures et inférieures nettement transver- sales ; il y a çà et là des parois obliques. Iei, comme dans le xylème, il faut distinguer des éléments primitifs tels qu'ils proviennent du procambium, et des éléments dérivés par cloi- sonnement secondaire. Ce cloisonnement s’est surtout produit au pourtour du phloème. Les cellules grillagées, un peu rudimentaires en général, sont englobées dans le reste du phloème, qu’on peut nommer parenchyme phloeux (parenchyme libérien des auteurs fran- ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 25 çais), par opposition au parenchyme xyleux (parenchyme ligneux des mêmes auteurs). Il. DÉVELOPPEMENT. — Suivons maintenant le développe- ment de cette structure à partir de l’état de méristème primitif. Un périmérisième très-étroit s’est produit non lom de la surface extérieure, sous les insertions foliaires, de façon à ne laisser en dehors de lui que quelques assises de méristème pri- mitif destinées à la zone corticale. C’est là la raison immédiate du peu d'épaisseur de cette zone. Les insertions foliaires, très- rapprochées, ne laissent aucune place pour un épiderme pri- mordial. Ensuite le périméristème disparaît très-rapidement, et de bonne heure il n’en reste plus de traces. Ses propres cellules passent toutes à la forme du tissu fondamental. À peine quelques éléments encore eloisonnés imdiquent-ils çà et là ce périmé- ristème. On n’en doit pas moins reconnaître qu'entre le tissu fondamental cortical et le tissu fondamental central, tous deux issus directement du méristème primitif, il y a une bande de tissu fondamental intermédiaire, au niveau du cercle externe de faisceaux qui à une autre provenance. Aucune production ni évolution secondaire n'intervenant en- suite, c’est à la faculté de multiplication du méristème primitif, se continuant dansles cellules du tissu fondamental, qu'il faut attribuer presque en entier l’épaississement total du rhizome. Cette multiplication est encore considérable, comme on peut en juger par le fait suivant. Les cellules cristallifères apparaissent de très-bonne heure au sortir du méristème primitif. Ces cellules, ne subissant plus de divisions, s'étendent seulement en longueur et en largeur, suivant le degré de croissance générale, et peuvent justement donner la mesure exacte de cet accroissement. Ainsi, comme elles sont deux fois plus larges et trois fois plus longues que les cellules environnantes, cela prouve que les cellules du tissu fondamental ont subi encore au moins deux divisions transver- sales et une division longitudinale depuis la spécialisation de ces éléments cristallifères d’abord semblables aux autres. Plus 26 A. GEUILLAUD. tard la membrane des cellules cristallifères, cessant de suivre le développement général, se déchirera, et l’on aura des lacunes à bords déchiquetés. Le développement des faisceaux doit principalement attirer noire attention, parce que nous y trouvons une confirmation éclatante des deux régions que nous y avons distinguées. La différenciation des éléments commence déjà dans les faisceaux procambiaux encore situés dans le méristème primitif. Presque en même temps apparaissent : 1° au centre même, les premiers éléments du phloème par épaississement notable des parois cellulaires ; ils revêtent dès lors ce caractère si constant du phloëme dans les Monocotylédones, à savoir : ces mem- branes hyalines en coupe transversale, grisâtres, réfractant plus fortement la lumière, non divisées en deux lamelles et semblant communes aux deux cellules en contact; le contenu granu- leux de ces cellules apparaît aussi dès le début. Ainsi, ces mêmes cellules, appelées autrefois vaisseaux propres, cambi- forme, sont des premières à se différencier dans le faisceau de procambium ; 2° le premier ou les premiers vaisseaux, tou- jours déroulables, situés dans la partie postérieure du faisceau qui regarde la moelle, loin du phloème dont ils sont séparés par des cellules procambiales, et à distance du bord du faisceau de procambium et du tissu fondamental, dont ils sont également séparés par d’autres éléments procambiaux. La différenciation continue ensuite. La production du phloème est centrifuge, c’est-à-dire qu’elle rayonne en tous sens à partir de son centre. La production vasculaire, s'il s’agit de l’épaississement des groupes formés, est centripète, par rapport à l’axe du faisceau, et marche à la rencontre du phloème; s’il s’agit de la naissance de nouveaux groupes, elle est latérale, c’est-à-dire s’avance tangentiellement en avant par deux branches, l’une à droite, l’autre à gauche, de façon à constituer un arc brisé de vaisseaux. Les groupes les plus récents sont aussi plus rapprochés du centre et du phloème que le premier, formé en arrière. Tandis que les nouvelles cellules de phloème ressemblent ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 97 beaucoup aux premières, tout en étant un peu plus larges, les nouveaux vaisseaux, au contraire, ne sont plus dérou- lables. Dans quel sens marche cette différenciation suivant la lon- gueur? Dans toute la portion courbée vers l’axe elle a lieu à peu près simultanément. Elle marche de là de haut en bas dans la partie terminale ramenée à la périphérie, et de bas en haut dans la partie supérieure qui gagne la feuille en traversant la zone corticale. La succession longitudinale des éléments est assez variable pour que les coupes transver- sales d’un même faisceau, à divers niveaux, varient beaucoup ; les groupes vasculaires y changent de nombre et de forme. IT. TRAJET DES FAISCEAUX. — Il nous reste encore à traiter du trajet ou de la succession longitudinale des faisceaux et à compléter ce que nous avons dit de leur distribution trans- versale. Le rhizome du Polygonatum vulgare n’a que des faisceaux communs ; par conséquent leur disposition tant longitudinale que transversale est subordonnée à l’état des feuilles et à leur mode d'insertion. Un schéma en dit souvent plus que la description la plus longue. Les faisceaux de premier ordre, en petit nombre, plus gros, après s'être brusquement courbés vers le centre au sortir de chaque feuille ou grosse écaille, reviennent lentement vers la périphérie pendant l’espace de deux entrenœuds, en croisant la direction des faisceaux primaires plus anciens. Au troisième entrenœud inférieur, ils sont arrivés dans le cercle extérieur, où 1ls se terminent en général tout de suite en s’ac- colant aux autres. Leur calibre à diminué en proportion. Les faisceaux de second et de troisième ordre, bien plus nombreux mais plus petits, ne décrivent qu’une faible courbure vers le centre, ou n’en décrivent point du tout et descendent direc- tement, au sortir de la feuille, dans le cercle externe; cir- constance qui augmente considérablement leur nombre à cette place, parce que les faisceaux de plusieurs feuilles suc- cessives s’y trouvent à la fois rassemblés. Au bout de deux ou 28 A. GUELLAUD. trois entrenœuds, ils se terminent également en s’accolant aux anciens. Ces accolements successifs ont lieu à divers niveaux, aussi bien aux nœuds que dans leur intervalle, et, comme ils consti- tuent les seules réunions ou anastomoses vasculaires où puis- sent naître les racines, celles-ci sont souvent distribuées tout le long du rhizome, sans place fixe et normale. En coupe transversale, les gros faisceaux de premier ordre forment, vers le centre, un arc de cercle à un petit nombre de jalons limitant irrégulièrement la partie libre de la moelle ; les faisceaux de dernier ordre constituent, à la périphérie, un cercle complet, très-fourni et très-régulier. Entre eux on peut trouver encore un autre cercle ou portion de cercle variable avec les niveaux. Les divers entrenœuds du rhizome n’ont pas un nombre égal de faisceaux, et cela dépend aussi des écailles foliaires. Chaque pousse annuelle à une large base d’origine sur la tête de l’article précédent, qui porte le sceau ou l'empreinte de la tige florale. Cela provient de ce que le bourgeon de rempla- cement, déjà bien formé à l’époque tardive de l’épaississement sigilliforme, y participe par sa base. À quelques entrenœuds plus loin, le rhizome reste petit : c’est son col apparent. Malgré sa grosseur relative, c’est la portion basilaire de chaque pousse qui contient le moins de faisceaux fibro-vasculaires, ainsi que cela se rencontre dans tous les rhizomes. Pourquoi? Parce que les écailles de cette région sont les plus faibles et contiennent, la première point, les deux suivantes peu de faisceaux. La portion rétrécie, au contraire, en contient davantage, parce que c’est à son niveau que s’insèrent les plus fortes et les plus nombreuses écailles, pourvues chacune de nombreux faisceaux de premier et de second ordre. En résumé, ce type, assez simple, bien propre à l'étude, peut servir à donner une idée générale de la structure des tiges de Monocotylédones (partie végétative). L'absence des produc- tions secondaires ordinaires, issues du périméristème, la dis- ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 29 tibution très-régulière, soit en coupe transversale, soit en coupe longitudinale, des faisceaux fibro-vasculaires, leur sépa- ration en faisceaux de premier ordre et en faisceaux de second ordre, relativement peu abondants, vu la masse du rhizome, la distinction fort nette des régions et des éléments du faisceau préparé par l'acide sulfurique dilué et la solution alcoolique d’aniline, sont autant de caractères qui se trouvent rarement réunis avec une telle évidence dans une même plante. A ce mème type appartiennent presque toutes les espèces du genre Polygonatum : P. latifolium, P. anceps, P. verticil- latum AI, etc.; de sorte que la description anatomique de l’une convient exactement à l’autre; les Luzula maxima, Bu- tomus umbellatus, ete. Parmi les Aroïdées décrites avec beaucoup de soin par M. Van Tieghem (1), il y a un certain nombre de tiges végé- tatives qui appartiennent aussi à notre premier type, surtout dans son premier et son troisième groupe, indiqués comme sans zone génératrice permanente, notamment les genres Alo- casia, Philodendron, Arum, Anthurium et Pothos. Le périmé- ristème y est passé tout entier au tissu fondamental. $ 3. — DEUXIÈME TYPE. Une zone intermédiaire représentée par des tissus divers. 1° Produits de la zone intermédiaire réduits à des faisceaux caulinaires. Ex. : Zris florentina L. Ce deuxième type offre un degré de complication de plus que le premier. Le périméristème, s’il passe en grande partie au tissu fondamental, laisse cependant après lui, à la face inférieure du rhizome, des faisceaux particuliers, nés tout entiers de lui. Nous le rencontrons dans les {ris du groupe des ris germa- nica L., I. pallida, Iris florentina L., etc. L'espèce que nous avons étudiée est VI. florentina var. à odeur de violette. (1) Recherches sur la structure des Aroïdées, in Ann. des sc. nat., 5° sér., 1866, t. VI. 30 A. GUELELAUD. I. — Sur la section transversale fraiche du rhizome d’un an, on distingue à l’œil nu : 4° une enveloppe extérieure de 4 millimètre ou 2 d'épaisseur, d’une teinte foncée; ®% la zone externe ou Corticale de parenchyme privée de faisceaux fibro-vasculaires, à l'exception de ceux qui la traversent obli- quement à certains niveaux pour se rendre aux feuilles : cette zone est assez épaisse et plus à la face supérieure qu’à la face inférieure du rhizome ; 3° l'absence de zone intermédiaire ap- parente ; 4° une région centrale non régulièrement inscrite, séparée de la zone corticale par une ligne ellipsoïde, très- finement ondulée, ce qui tient à ce qu’elle est simplement jalonnée par les faisceaux fibro-vasculaires les plus externes ; 5° cette région renferme de nombreux faisceaux espacés vers le milieu, plus serrés à la périphérie, surtout en bas et par côté; sur la face mférieure, à la limite de la région centrale, sont des traits allongés de quelques millimètres représentant des faisceaux obliques anastomosés. Reprenons une à une chacune de ces régions : 4° L’enveloppe extérieure est constituée par deux sortes de tissus : en dehors, du tissu scléreux ou sclérenchyme en couche faible; en dedans, du tissu subéreux ou liége en couches épaisses. L’épiderme manque totalement, non pas, comme on pourrait le croire, parce qu'il a été rejeté par la formation subéreuse et qu’il s’est exfolié, mais par la bonne raison qu’il n’a jamais existé à la surface du rhizome. L'insertion des feuilles adultes a lieu en effet de telle façon, par de larges bases obliques, qu’elles se touchent immédiatement et recouvrent complétement l'axe; à langle d’imsertion, l’épiderme d’une feuille passe directement à l’épiderme d’une autre feuille ; :l n’y à même pas l’épaisseur d’une cellule entre deux feuilles suCCeSSIves. Voici quelle est la structure de ce sclérenchyme et de ce liége. La couche de sclérenchyme, en contact immédiat avec le sol, épaisse de trois ou quatre cellules et plus, est formée d'éléments à parois fortement épaissies, sombres, à contenu remplacé par de Pair. Par la forme et l’arrangement, ces élé- ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 31 ments sont un peu différents de ceux du parenchyme ordi- naire. [ls sont plus petits, à angles nets, sans méats inter- cellulaires, et un peu disposés en files longitudinales. En dehors ils ont été visiblement déchirés, ce qui donne du reste à la surface du rhizome un aspect chagriné spécial. — Les couches subéreuses sont formées de deux, trois et quelquefois quatre séries de cellules provenant chacune d’une seule cellule mère et radialement superposées. À la face inférieure du rhizome, là où le liége est plus épais, ces séries sont mieux développées. En coupe transversale, elles arrivent toutes, du côté du paren- chyme cortical, au même niveau, à une cellule près, et ont pour la plupart leur dernière cellule hémicyclique, la paroi bombée tournée en dedans. Cette dernière paroi n’est pas subé- rifiée ; elle a l'épaisseur et l'aspect des parois des cellules du tissu fondamental qui lui font suite ; elle se comporte du reste de la même façon sous l'influence des réactifs. 2° La zone externe ou corticale est constituée uniquement par du parenchyme à peu près uniforme, à cellules larges, polyé- driques, isodiamétrales, avec méats intercellulaires constants, sans texture bien indiquée, quoique la disposition radiale puisse se reconnaître çà et là, et qu’une coupe mince se laisse beau- coup moins facilement déchirer dans le sens tangentiel que dans le sens radial. Les parois cellulaires sont assez épaisses. Par l’emploi de la potasse ou de acide sulfurique faible, les angles, en face des méats, se gonflent considérablement et jus- qu’àaintercepter cesméats eux-mêmes et à faire une forte saillie à l'intérieur ; ce qui donne à tout le tissu l’aspect d’un véritable collenchyme. Ce collenchyme existe même sans préparation sur de vieuxrhizomes. La cloison du fond des pores est aussi rendue très-visible par ce procédé. Toutes ces cellules renferment en abondance de gros grains d’amidon. Cà et là et régulièrement espacés s’observent à la place d’un méat, sur une coupe transversale, des points plus obscurs : ce sont les sections des gros cristaux isolés qui semblent au premier abord extracellulaires. Ils possèdent cependant une membrane d’enveloppe rendue visible par la solution alcoo- 39 A. GUELEAUD. lique d’aniline qui la colore faiblement en rose sur toute sa surface. 3° À la face supérieure du rhizome, il n’y a pas de zone intermédiaire. Mais à la face imférieure elle est représentée sur le plan des faisceaux les plus externes ou un peu en dehors d'eux par de petits faisceaux particuliers, anastomosés entre eux, qui sont des faisceaux caulinaires nés dans la couche de périméristème et les seuls témoins persistants de cette couche, dont tous les autres éléments sont passés, comme à la partie supérieure, au tissu fondamental. Ces nouveaux faisceaux sont courts et aplatis, transversaux ou obliques, anastomosés entre eux et avec les faisceaux communs en réseau ; de sorte que tout le long de la face inférieure du rhizome règne une espèce de lacis vasculaire sur lequel naissent en abondance les racines adventives, qui ne se développent jamais ailleurs. Entre leurs mailles, les parenchymes communiquent. La structure de ces faisceaux est plus simple et plus réduite que celle des autres ; en dedans, une lame @e cellules vascu- laires courtes, rayées ou ponctuées, représente le xylème; en dehors, quelques éléments de phloème, ou mieux de cambi- forme, se perdent immédiatement dans le parenchyme. 4 Dans la région centrale, outre les faisceaux fibro-vascu- laires, il y a le tissu fondamental qui leur est interposé et qui forme une petite portion médiane libre. | Ce tissu est en tout semblable au parenchyme fondamental externe. Ses éléments et sa texture sont les mêmes; un peu moins de ponetuations sur les parois des cellules ; çà et là des cristaux allongés tout aussi nombreux. La moelle libre n’est visible que par niveaux, parce que les plus gros faisceaux de premier ordre, bien que plus épars dans cette région, s’égarent souvent jusqu'au centre même. o° Sur une coupe transversale tous les faisceaux sont à peu près de même grandeur. Ceux qui occupent la partie centrale de la région sont cependant un peu plus gros d’une façon géné- rale, et l’on observe çà et là quelques fraisceaux bien plus petits que les autres. Tous sont à peu près circulaires. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 33 Le xylème enveloppe le phloème. Il est constitué en dehors des vaisseaux par une seule assise de cellules, quelquefois deux ou plusieurs par places. Ces cellules ont une paroi en contact avec les éléments du parenchyme fondamental, une paroi en contact avec les vaisseaux. Leur section trans- versale est polygonale et moins large que celle des cellules du parenchyme. En direction longitudinale, elles ont quatre à cinq fois et plus la longeur de ces dernières, se terminent en pointes très-obliques, prosenchymateuses, et sont ordinaire- ment partagées dans le sens longitudinal par plusieurs parois horizontales, plus minces et postérieures à leur allongement. Elles présentent des ponctuations surtout du côté du paren- chyme extérieur. Sur la coupe transversale, on confondrait peut-être ces cellules avec celles du parenchyme. Mais leurs parois ne se gonflent ni sous l’influence de la potasse, ni sous l'influence de l'acide sulfurique ordinaire. Il est même curieux de voir le gonflement par la potasse s'arrêter brusquement aux dernières cellules du parenchyme et occuper la moitié seule- ment des parois de contact. C’est la meilleure façon de pré- parer cette assise. L'histoire du développement montre du reste qu’elle dérive du procambium fasciculaire, et son examen en coupe longitudinale est décisif. Les vaisseaux forment ordinairement en dedans de cette assise un anneau vasculaire interrompu en plusieurs points, rarement complet. Il y a trois, quatre groupes constituants et plus, égaux ou inégaux, et lorsque l’anneau parait complet, on reconnait à l’aide de l’aniline, entre deux groupes dont les bords sont rapprochés, des éléments xyleux aplatis qui ne sont pas vasculaires et qui ne se colorent pas en rouge. Lorsque les oroupes sont plus écartés, ces éléments xyleux interposés et normalement développés établissent une communication entre l’assise xyleuse sus-indiquée et une autre assise de même nature située en dedans des vaisseaux. Les groupes vasculaires, soit en bande arquée de un ou deux vaisseaux d'épaisseur, soit en amas plus épais, n’ont pas de position fixe par rapport à l'orientation du faisceau. Ils varient 6° série, RoT. T. V (Cahier n° 1). ? 3 34 A. GUILLAUD. et changent de place. Cependant les plus forts groupes ou segments occupent de préférence le côté interne, puis les côtés latéraux, et les plus faibles le côté externe. On trouve encore parfois ce côté externe dépourvu de vaisseaux ; il n’y a alors qu'un demi-anneau vasculaire interne, et le xylème paraît ouvert en avant, par rapport aux vaisseaux seulement, car ses autres éléments font le tour du phloème. Ces faisceaux à arc vasculaire ouvert se rencontrent à la périphérie. D’une façon générale les faisceaux périphériques ont moins de groupes vasculaires et des groupes plus espacés que ceux du milieu, fait qui correspond avec leur grosseur relative. Tous les vaisseaux ont sensiblement le même calibre d’ou- verture, à section polygonale. La plupart sont des vaisseaux rayés ou uniformément ponctués, indéroulables. Les vaisseaux déroulables, trachées en général, réunis trois ‘ou quatre en- semble, occupent le groupe le plus en arrière. Les vaisseaux déroulables sont tout aussi larges que les autres, mais un peu plus longs seulement. La potasse colore les parois vasculaires en jaune et l’aniline en beau rouge. Dans une paroi mitoyenne avec les autres élé- ments xyleux, cette dernière ne colore que la partie qui appar- tient au vaisseau ; l’autre reste blanche. On voit alors que celle-e1 est beaucoup plus mince que l’autre. La potasse d’un côté, et l’aniline de l’autre, isolent les cellules de l’assise externe du xylème et les rendent d’une netteté parfaite, Les cellules de xylème qui sont entre les groupes vasculaires ou qui formentune seconde assise en dedans d'eux, ressemblent aux autres par leurs dimensions, leurs parois minces et leur cloisonnement transversal. Leur limite vers le phloème est indiquée par l'épaisseur plus forte des parois cellulaires de ce dernier. La deuxième région du faisceau, ou le phloëme, en occupe le centre. C’est une masse d'éléments les uns plus grands, Îles autres plus petits. Parfois il y a dans cette masse un ou deux éléments bien plus larges que les autres. Je n'ai point à m'ar- rôter beaucoup sur ce phloème si semblable partout à lui: ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 39 même dans les Monocotylédones. Tel nous l’avons vu dans le Polygonatum, tel nous le retrouvons ici. Ses parois lon- gitudinales sont droites ou longuement ondulées. Ses parois transversales apparaissent parfois comme des épaississements lenticulaires, plaques criblées jeunes. — Quant au contenu des cellules, 1l apparaît sur une coupe fraiche comme une sub- stance grisàtre, granuleuse, que l'alcool dissout en partie et que l’acide sulfurique concentre. Les rares éléments très-grands sont toujours vides. IT. — Dans l'histoire du développement il nous faut recher- cher l’origine et le développement du sclérenchyme et du liége, l’origine et le mode de formation des faisceaux caulinaires anastomotiques, et enfin la différenciation des faisceaux pro- cambiaux communs. Pour ce qui est du sclérenchyme, si l’on examine au moyen de coupes radiales la jeune pousse nouveile qui fait suite au rhi- zome d’un an et qui porte les feuilles vertes, on se rend aisé- ment compte de sa naissance et de ses états successifs. Il n’est pas un simple épaississement et durcissement de certaines cel- lules du tissu fondamental, mais il procède d’une sorte de mé- ristème secondaire périphérique, d’un scÆrogène. Près du sommet où se trouvent les plus jeunes feuilles, une ligne de démarcation assez nette sépare de très-bonne heure le tissu fondamental de l’axe de celui des feuilles : les cellules, dans l’axe, sont allongées dans le sens d’élongation du bour- veon et renferment déjà de nombreux grains de fécule; les cellules des feuilles sont au contraire allongées dans une di- rection à peu près perpendiculaire ou oblique en haut par rapport aux premières et ne renferment pas de fécule. Entre elles se trouve une couche de une ou deux cellules, à peu près isodiamétrales et sans direction, mais directement superposées les unes aux autres et manquant aussi de fécule. Elles ont, sous le microscope, cet aspect clair et réfringent qui caractérise les méristèmes secondaires. C’est cette couche, ou selérogène, qui engendre le sclérenchyme en se divisant d’abord et en épaississant ses cellules ensuite. 36 A. GUBLLAUE. Une fois le sclérenchyme établi, fixé, on voit apparaitre au- dessous de lui, dans une assise sans fécule qui lui fait suite en dedans, les premières divisions tangentielles de liége. Ces divi- sions augmentent rapidement en nombre, et cette première assise de cellules mères de liége s’épuise assez vite. Elle est alors remplacée par les cellules voisines de tissu fondamental, qui perdent aussi leur fécule avant de commencer à se diviser. Ces nouvelles cellules mères, si elles sont moins actives que les premières, durent plus longtemps et fournissent un plus grand nombre de divisions. Sous les feuilles qui commencent à jaunir, la formation subéreuse est très-avancée, et les feuilles complé- tement desséchées se détachent à la plus faible traction. La for- mation scléreuse avait respecté les faisceaux fibro-vasculaires, la formation subéreuse les à envahis et a provoqué ainsi la chute de la feuille. Les cellules de liége provenant de la même cellule mère sont très-nombreuses ; 1] y en a de huit à dix et plus dans les secondes séries. La succession de ces cellules est centripète, c’est-à-dire que c’est toujours la cellule la plus interne de la série qui se divise depuis le commencement jusqu’à la fin, en gardant tou- jours l'épaisseur première de ses parois, qui se conserve du reste dans les parois latérales des nouvelles cellules de liége ; cette cellule, tête de file, ne se subérifie qu’à la fin, lorsque son activité est épuisée. De l'étude de ces deux formations secondaires extérieures il ya à retenir : l’au point de vue anatomique, l'apparition de sclé- rogène et de phellogène sous les insertions foliaires, conséquence de la morphologie spéciale de cette plante ; des faits analogues doivent se passer dans les Palmiers, Dracænu, Aloe, Yucca, ete., chez lesquels l'insertion des feuilles embrasse également toute la circonférence de l'axe; 2 au point de vue physiologique, la formation d'un véritable mur de séparation entre le paren- chyme des feuilles à peine développées et le tissu fondamental de laxe, ce qui limite aux seuls faisceaux fibro-vasculaires le transport des substances de la feuille à l’axe, et récipro- quement. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 37 Le périméristème ne constitue jamais un anneau bien actif ; ses divisions cessent de bonne heure, surtout à la face supé- rieure. À la face inférieure il y naît de nouveaux petits faisceaux de procambium, transversaux ou obliques, aplatis en lames. C’est l’origine des faisceaux caulinaires anastomosés. Tout le méristème secondaire non employé par eux repasse au tissu fondamental. L'histoire du développement et la marche de la différencia- tion dans les faisceaux fibro-vasculaires ou procambiaux com- muns confirment de tous points les faits que nous avons énu- mérés, et par rapport à leurs relations avec le tissu ambiant, et par rapport à leur structure propre. Les premiers éléments qui se différencient dans l’épaisseur d’un faisceau de procambium stationnaire sont, ici encore, les plus petits éléments du phloème au milieu et quelques trachées en arrière. Celles-ci ne sont jamais à la périphérie du procam- bium, mais dans son intérieur et laissent toujours en dehors d'elles une couche de cellules procambiales. Parfois naissent encore d’autres trachées isolées sur les côtés et dans une situa- tion analogue. À ces trachées, point de départ des premiers groupes vasculaires, s'ajoutent ensuite d’autres vaisseaux non déroulables. Les groupes vasculaires primitifs s’avancent prin- cipalement vers l'avant du faisceau. Il en nait aussi d’autres sans trachées et formés de seuls vaisseaux indéroulables dans cette même direction, et sur la face antérieure même du fais- ceau; de sorte que l’anneau brisé se complète successivement d’arrière en avant. Ce mode de développement des vaisseaux peut être désigné comme bilatéral centripète (1), et l’état du faisceau par rapport à ses points vasculaires comme friarche, tétrarche, polyarche, suivant le cas. Il n’est jamais monarche, rarement diarche. 11 y a assez souvent fusion de deux groupes vasculaires, ou du moins accolement par leurs extrémités, qui (1) Il est utile de se reporter au mémoire fondamental de M. Nägeli (Ueber das Wachsthum des Stammes und der Wurzel bei den Gefässpflanzen, in Beit. z. wiss. Botanik, 1 Heft, p. 10), auquel je suis obligé de faire souvent allusion. 38 A. GUILLAUD. marchent à la rencontre l’une de l’autre. C’est ce qui amène parfois la formation d’un anneau complet dont les principales parties constitutives ne sont indiquées en arrière que par des trachées espacées. La différenciation du phloème et la formation du paren- chyme xyleux suit la même marche que dans les faisceaux du Polygonatum. IT. — A cause de leur grand nombre, la course longitudi- nale et la distribution transversale des faisceaux ne présente pas la même régularité que dans le Polygonatum, et l'on ne peut les suivre avec autant de sûreté. Leur genre de courbure est difficile à apprécier, parce qu’ils ne restent pas dans un même plan radial pendant leur des- cente. Tous, du reste, ne reviennent pas à la périphérie après s'être courbés vers le centre. Beaucoup s’accolent dans cette région centrale aux faisceaux des feuilles inférieures, accole- ment qui a lieu à la face postérieure de ces derniers. C’est ce qui fait qu’on rencontre sur les coupes transversales de plus gros faisceaux qui semblent se dédoubler par interposition de tissu fondamental dans leur milieu. Il y a simplement jonction locale de deux faisceaux; dans sa course postérieure descen- dante, le faisceau qui a reçu l’autre n’en est pas modifié le moins du monde. Gette jonction a eu lieu de très-bonne heure, dès l’état de méristème primitif, entre deux faisceaux de pro- cambium. Ge mode de terminaison des faisceaux communs, même des faisceaux de premier ordre, est assez fréquent dans les gros rhizomes, très-riches en faisceaux; c’est un mode normal, on peut dire, et nous le rencontrerons souvent par la suite. Parmi les Aroïdées sans zone génératrice, c’est-à-dire sans traces du périméristème, décrites par M. Van Tieghem, il y en a qui présentent des faisceaux caulinaires anastomotiques, sinon sur une de leurs faces en entier, du moins vis-à-vis des nœuds. Les plantes de son deuxième groupe, comprenant les Monsté- rinées et n'ayant qu'une moitié de zone génératrice sur leur face ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 39 inférieure, présentent d’après les figures de l’auteur une com- plication plus grande que notre type de l’fris florentina, en ce sens qu'il y à autre chose que des faisceaux caulinaires, le péri- méristème y ayant en outre laissé du méristémiforme et peut- être aussi une gaine fasciculaire (Schutzscheide). 2 Produits de la zone intermédiaire réduits à du méristémiforme. Ex. : Chamædorea elatior Mart. J'ai choisi cet exemple du rhizome de Chameædorea elatior, d’abord parce que le tissu que j'appelle méristémiforme peut y être très-facilement distingué, et ensuite parce qu’on pourra apprécier dans quel sens l’anatomie des Palmiers doit être désormais envisagée. l. — Au-dessous de lépiderme vient une large zone externe ou corticale, séparée de la région centrale par une épaisse bande de faisceaux serrés les uns contre les autres. Il n’y a pas de moelle libre, et toute la région centrale est parsemée de nom- breux faisceaux. 4° L’épiderme est constitué par de petites cellules, trois ou quatre fois moins larges que les cellules du parenchyme fonda- mental sous-jacent et bordées en dehors d’une cuticule très- épaisse. Vues de face, elles sont allongées. 2% La zone corticale est formée d’un parenchyme fonda- mental assez uniforme, à éléments isodiamétraux, polyédriques, arrondis, laissant entre eux de petits méats. Comme la région centrale, elle est parsemée de nombreux faisceaux communs, mais qui ont une structure différente. En dehors et en dedans, une couche de cinq ou six cellules d'épaisseur reste privée de ces faisceaux, qui se trouvent ainsi placés à une certaine distance de l’épiderme et de la région centrale. Ces faisceaux sont, les uns pelits, les autres plus gros, tous entremêlés ; les plus gros sont cependant de préférence à la partie interne. Leur structure est simple. Tous représentent un groupe de fibres allongées, épaissies, ou gros liber. Çà et là on rencontre de ces faisceaux qui ont encore au centre un petit groupe de phloème à parois 40 Û A. GUILLAUD. minces non colorées par l’aniline. Parfois aussi il y en a qui ont un vaisseau. 3° La zone intermédiaire ou du périméristème est représentée dans la bande externe de faisceaux centraux serrés les uns contre les autres par le tissu qui leur est interposé. La couche de parenchyme qui sépare les faisceaux corticaux de ces der- niers dérive (?), elle aussi, du périméristème; mais les cellules, par leurs caractères extérieurs, leurs méats, sont entièrement passées au tissu fondamental. Iei le périméristème a formé autour des faisceaux des lames d’un tissu spécial, à éléments gros ou petits, variables de formes et de direction, se touchant sans méats, les uns encore sectionnés, en un mot rappelant un méristème arrêté dans son développement, un méristème éteint. Le nom de méristémi- forme convient parfaitement à ce tissu. Le méristémiforme n’est pas qu'interposé aux faisceaux externes du corps cen- tral, 1l forme encore en dehors d’eux une assise unicellulaire qui les sépare du tissu fondamental externe. Le méristémi- forme est ici un peu épaissi et lignifié, ce qui lui arrive souvent, et Ce qui ne se rencontre jamais dans le tissu fon- damental provenant du méristème primitif : c’est un méri- stémiforme dur ; il peut être coloré par la solution d’aniline, à l'exclusion du tissu fondamental, ce qui le met parfaitement en évidence et fixe ses limites en dedans et en dehors. La nuance de sa coloration diffère de celle des faisceaux dont les éléments sont du reste plus petits, et toute confusion avec ces derniers est ainsi impossible. En coupe longitudinale d’ailleurs, tous les éléments des faisceaux sont prosenchymateux, ceux du méristémiforme sont parenchymateux. % Le tissu fondamental central interposé aux faisceaux est très-limité par rapport à ces derniers et réduit à des bandes de une ou deux cellules d'épaisseur. Les éléments sont semblables à ceux du tissu fondamental externe, mais dirigés suivant le sens dans lequel la pression des faisceaux s’est fait sentir. Vers le milieu, 1l y à un tout petit espace parenchyma- teux à éléments régulièrement polyédriques et vers lequel ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 7 tous les faisceaux environnants présentent leurs trachées. 5° En coupe transversale, les faisceaux sont arrondis et à peu près de même grosseur. L’aniline isole les diverses parties du faisceau en colorant tout ce qui n’est pas phloème et en laissant ce dernier absolument intact et blanc. Le xylème entoure complétement le phloème; il est plus épais en arrière et en avant, plus mince latéralement. Il n’y a de vaisseaux qu’en arrière. Ils forment trois groupes distincts. Directement en arrière, très-loin du phloème, sont deux ou trois petits vaisseaux déroulables, trachées ou vaisseaux annelés, plongés dans les autres éléments xyleux. Sur les côtés, les deux autres points vasculaires sont représentés chacun par un large vaisseau rayé, placés en face l’un de Pautre et séparés par quelques éléments un peu aplatis par leur développement exagéré ; une assise d'éléments xyleux les sépare encore du phloème. Le reste du xylème n’est pas uniforme ; tout autour du faisceau les éléments sont larges et plus épaissis; autour des groupes vasculaires, et surtout des deux larges vaisseaux, les éléments sont plus petits et un peu moins épaissis. En avant du faisceau, les éléments sont tous assez larges, mais diffèrent par leur épaississement : ce sont les plus rapprochés du phloëme qui sont les plus épais et qui se colorent le plus fortement par laniline ; ils appartiennent encore au xylème; les autres, plus antérieurs et plus larges, moins colorés, appartiennent à un revêtement fibreux. Le phloème forme un groupe, non pas arrondi, mais un peu étendu transversalement. Les éléments sont, les uns plus grands, les autres plus petits, entremèêlés sans ordre, à parois plus minces que dans le phloème ordinaire des autres Mono- cotylédones que nous avons vues. Ils sont encore plus rappro- chés de leur état cambial, et représentent aussi bien un cam- biforme qu’un vrai phloème. IT. — L'histoire du développement nous montre, dès le début, un épais périméristème dans lequel courent directement un grand nombre de faisceaux venant des feuilles; d’autres fais- ceaux, un peu plus petits, sont restés dans le méristème pri- 49 A. GUILLAUD. mitif externe, plus tard tissu fondamental cortical, et s’y dé- veloppent entièrement : ce sont les faisceaux corticaux. Au début, ces faisceaux corticaux touchent presque le périméri- stème, preuve que la couche de eimq ou six cellules qui les en sépare plus tard tire son origine du jeu externe du périméri- stème. La différenciation est autre pour les faisceaux corticaux et les faisceaux centraux, tout à fait semblables à l’état de procambium. Dans les faisceaux corticaux, il ne se forme que très-rarement du phloème et des vaisseaux, mais seulement du gros liber. Dans les faisceaux centraux, ce sont en arrière les trachées et au milieu quelques cellules de phloème qui appa- raissent en premier lieu; viennent ensuite les deux gros vais- seaux latéraux, et enfin le liber postérieur d’abord, antérieur ensuite. IT. — Quant à leur course, les faisceaux corticaux et les faisceaux de second ordre du corps central sont presque recti- lignes ; les autres décrivent une courbe très-allongée. Il faut encore signaler dans ce type l'apparition de faisceaux cauli- naires anastomoliques aux nœuds et de couches subéreuses au-dessous de l’épiderme, également vis-à-vis des nœuds. Sur la structure des Palmiers en général, on peut faire les remarques suivantes : 1° Mobl, appliqué surtout à réfuter Desfontaines et la théorie française de l’endogénie, a cru à tort que tous les faisceaux sans exception décrivaient une courbe semblable vers l’intérieur de l’axe ; que tous les faisceaux périphériques n'étaient que la partie inférieure de faisceaux d’abord courbés vers le centre et revenus ensuite à l’extérieur; que les changements de structure, si exactement décrits par lui dans les divers points du trajet de ces faisceaux courbés, suffisaient à expliquer toutes les diffé- rences que pouvaient montrer les faisceaux sur une même coupe transversale, ete. Il admet bien (p.18) qu'il y a des faisceaux extérieurs (nos faisceaux corticaux) qui se rendent directement au pétiole sans décrire de courbure, et cite les Cocos comme ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 43 exemple ; mais il les regarde comme absolument fibreux dans leur portion située dans la tige, et n’acquérant de vaisseaux que dans le pétiole. Nous avons vu que quelques-uns des faisceaux corticaux du Chamædorea elatior avaient vaisseaux et phloème. Il ne peut y avoir entre les faisceaux fibreux et les autres de différences absolues, anatomiquement parlant, et ces différences existeraient-elles, que cela ne prouverait rien quant à la course des uns et des autres. Évidemment Mohl a exagéré sur ce point. Si dans les Pal- miers un grand nombre de faisceaux venus des feuilles décrivent une courbure centrale et reviennent ensuite du centre à la périphérie, ce qu'explique la force des feuilles, 1l y en a encore beaucoup d’autres, corticaux et centraux, qui ne décrivent pas cette courbure et qui descendent plus ou moins directement. Une chose frappe : c’est le nombre infiniment plus grand des faisceaux périphériques du corps central; mais Mohl attribuait ceci, soit à des divisions des faisceaux vers leur terminaison, soit à ce que, restant longtemps à la périphérie avant de se ter- miner, les faisceaux issus de diverses feuilles s’y trouvaient concurremment réunis. Ce ne seraient pas là des raisons suffi- santes pour tous les cas donnés. 2 Moldenhaver ayant parlé d’une ligne de démarceation entre l'écorce et la partie centrale occupée par les faisceaux chez le Phœnix dactylifera, Mohl repousse cette idée, ayant eu presque toujours affaire à des Palmiers appartenant à notre premier type de structure, sans zone intermédiaire. Nous voyons. cependant dans les planches de Mohl (tab. À, fig. 4, Cocos botryophora : tab. B, fig. 4, Corypha cerifera; tab. C, fig. 4, Leopoldinia pulchra; tab. D, fig. 3 et #4, Corypha frigida et Cocos coronata) que les faisceaux forment une bande très- serrée, à une distance plus ou moins grande du cortex, une sorte de pourtour-limite régulier, en dehors duquel ils devien- nent brusquement plus espacés et plus petits. C’est en dehors de ces faisceaux plus serrés et mieux ordonnés et à leur contact qu'il faut placer la limite entre la zone corticale et la région centrale. Dans les rhizomes qui ont aussi des faisceaux dans la 44 A. GUILLAUD. zone corticale, mais avec une limite bien nette et une zone intermédiaire de gaine fasciculaire (Schutzscheide) et méri- stémiforme, comme par exemple dans le Canna indica, Acorus Calamus, ete., les mêmes relations de position et de caractères existent en coupe transversale entre les faisceaux centraux et les faisceaux corticaux. En outre, dans Mohl, la figure #, tab. A, du Cocos botryophora, présente, interposées à cette rangée de faisceaux plus serrés et immédiatement en dehors d'eux, des cellules un peu allongées tangentiellement, un peu épaissies, qui répondent parfaitement au méristémiforme du Chameædorea elatior. Ges réserves faites et ces modifications apportées aux idées de Mohl, les Palmiers, les grands Palmiers j'entends, ceux dont le stipe représente un rhizome, rentrent, soit dans le type de structure que nous avons décrit pour l’Iris florentina, soit dans le type du Chamædorea elatior. 3° Produits de la zone intermédiaire réduits à la gaine fasciculaire. Ex : Epipactis palustris Crantz. I. — Cette plante a un faible et long rhizome, arrondi en cordon. En coupe transversale, ce rhizome présente une large zone corticale, une petite région centrale contenant les faisceaux fibro-vasculaires, et tout à fait au milieu un espace médullaire libre. 1° L’épiderme manque à la surface extérieure ; il s’est exfolié. Il est remplacé par une rangée de cellules du tissu fondamental un peu plus petites que les autres, mais de contours analogues. Chacune des cellules est plus ou moins bombée en dehors, et leur paroi externe s’est jaunie et cuticularisée. 2° La zone corticale est constituée par un tissu fondamental uniforme à larges éléments, ayant des contours arrondis et lais- sant entre eux de larges méats. Elle ne renferme pas de fais- ceaux, mais on en rencontre par-Ci par-là un ou deux sortis de la région centrale, qui se rendent aux feuilles en yséjournant un peu. Ces faisceaux sont entourés dans leur trajet cortical d’une ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 45 gaine fasciculaire qui communique avec celle qui enveloppe la région centrale. 3° La zone intermédiaire ou du périméristème est fort réduite. Elle ne consiste, à proprement parler, qu’en une seule assise de cellules, plus petites que celles du tissu fondamental externe, munies de points noirs sur les parois latérales de contact, non épaissies, mais se colorant cependant en rouge par l’aniline ; elle forme un cercleirrégulier : c’est une gaine fasciculaire à un degré de développement moins avancé que d'ordinaire, Celle gaine fasciculaire est en contact immédiat avec les éléments des faisceaux les plus externes, et dans leur intervalle aucun tissu particulier ne la sépare du tissu fondamental interne. Elle se trouve ainsi être la seule production secondaire du périméri- stème, Vis-à-vis des nœuds, il n’y a même pas de faisceaux cau- linaires anastomotiques. Tout le périméristème non employé à former cette gaine fasciculaire a donné du tissu fondamental en dedans comme en dehors. 4 Le tissu fondamental central et médullaire est semblable à celui de la zone corticale. 9° Les faisceaux sont relativement peu nombreux, légèrement pressés les uns contre les autres, à coupe transversale un peu irrégulière. Le xylème entoure encore le phloème ; mais tandis qu'en avant 1l n’a qu’un rang ou deux de cellules xyleuses, en arrière il ÿ en à un gros groupe avec tous les vaisseaux. Ges faisceau xprésentent aussi une sorte de couronne tournée vers la moelle. Il y a deux ou trois points vasculaires : le groupe postérieur ou les vaisseaux postérieurs de chaque groupe sont plus petits, déroulables ; les autres sont de larges vaisseaux, ponctués surtout, à contours anguleux. Le reste du xyième forme un parenchyme à parois minces dont quelques cellules durcies se colorent par l’aniline. Quant au phloème, 1l forme à l'avant du faisceau un groupe arrondi de petites cellules irrégulières de contour, nettement distinct et séparé des vaisseaux par de larges éléments xyleux. Dans les faisceaux les plus externes, le xylème peut être ouvert en avant. À ce type de gaine fasciculaire isolée et représentant seule le 46 A. GUESLLAUD. périméristème, appartiennent les rhizomes allongés de l’Heme- rocallis graminea. Là aussi elle touche immédiatement les fais- ceaux externes et le tissu fondamental central; ses cellules, petites, arrondies, sont un peu épaissies sur toutes leurs faces. Les faisceaux ont de nombreux groupes vasculaires qui les entourent comme d’un anneau. Les gros rhizomes du Veratrum album ont aussi une gaine fasciculaire, souvent à deux rangées de cellules très-épaissies, saufsur la paroi externe, el immédiatement bordée en dehors et en dedans par le tissu fondamental. Cette gaine fasciculaire ne touche cependant plus les faisceaux; le périméristème très- abondant de cette plante a donné une bande de tissu fonda- mental qui l’en sépare. On trouve aussi vis-à-vis des nœuds quelques faisceaux caulinaires horizontaux, également séparés de la gaine par du tissu fondamental de nature secon- daire. Les faisceaux de cette plante ont un anneau vasculaire complet et puissant; les groupes réunis ne sont plus distincts; leur phloème est une sorte de cambiforme. On voit souvent certains vaisseaux s’épaissir considérablement, se sclérifier. Dans les faisceaux qui se terminent en s’accolant à la face pos- térieure des autres, toute la portion terminale se transforme en xylème dur ou en liber à gros éléments. 4° Produits de la zone intermédiaire consistant à la fois en gaîne fasciculaire, en méristémiforme, en faisceaux caulinaires, etc. Ex, : Acorus Calamus, Convallaria maialis, Canna indica, ete. Ce sous-type est le plus nombreux, et c’est celui qu'on ren- contre communément dans les rhizomes de Monocotylédones. À ce titre nous en décrirons plusieurs exemples. Acorus Calumus. — Dans l’Acorus Calamus, sur une coupe transversale, on distingue à l'œil nu, en dedans de l’épiderme, une zone externe et une région centrale nettement séparées par une ligne circulaire, La zone externe ou corticale est très-développée, et plus en haut qu’en bas, de façon que la région centrale n’y est pas régulièrement inscrite. L'une el l’autre région renferment de nombreux faisceaux fibro- vasculaires. > ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 47 1° L’épiderme est composé de petites cellules, serrées les unes contre les autres, superposées au nombre de trois ou quatre à chaque cellule du parenchyme sous-jacent, et plus larges dans le sens du rayon. Elles sont revêtues d’une épaisse cuti- cule bosselée. Vues de face, ces cellules sont allongées dans le sens de l’axe, et chaque cellule primitive a subi de nombreuses divisions postérieures, soit longitudinales, soit transversales ou obliques. Je n’y ai pas vu de stomates. 2 Le parenchyme cortical offre au-dessous de lépiderme une couche de quatre où cinq cellules transparentes, isodiamé- trales, se touchant sans méats et en files longitudinales de trois ou quatre. Gette couche de parenchyme doit être distinguée du tissu fondamental. Celui-ci, qui constitue le reste de la zone, a des cellules aux contours arrondis, avec des méats d’abord petits vers l’extérieur, ensuite plus grands, et finalement rem- placés par de larges et longues lacunes, limitées par de simples murs unicellulaires anastomosés entre eux. Les lacunes de- viennent de nouveau plus petites en s’approchant de la zone intermédiaire. Aux angles de contact des cellules réunies en murs ou en files, existent de petits méats en forme de trous qui débouchent latéralement dans les grandes lacunes. On trouve souvent le long des lignes d’anastomoses de ces murs cellulaires, des cellules de même forme que les autres, mais présentant un contenu spécial, globuleux, tantôt réfringent, tantôt granu- leux et absorbant l’aniline à en devenir rouge noir. Ge sont des sphéro-cristaux dont l'étude serait fort intéressante. 3° La zone intermédiaire se compose, en dehors, d’une gaine fasciculaire régulière, bien qu'interrompue çà et là, à petites cellules cuboïdes, un peu allongées dans le sens tangentiel, munies de points noirs sur les côtés, mais à parois minces, ni épaissies, ni durcies en aucun point. Elle ne se colore pas en rouge par l’aniline, mais en jaune rougeâtre terne; les points latéraux se colorent plus fortement. Les lacunes du paren- chyme cortical n'arrivent jamais jusqu’à elle; elles en sont séparées au fnoins par une assise de larges cellules. En dedans de la gaine fasciculaire (Schutzscheide) viennent 48 4. GURLLAUD. une assise ou deux de cellules se touchant sans méats, allongées dans le sens tangentiel, à parois plus claires et en général sans fécule; aucune d'elles ne présente le contenu globuleux particu- lier que nous avons signalé dans le tissu fondamental externe et qui se retrouve aussi dans le tissu fondamental central, Elles coustituent une faible couche de xéristémiforme mou, une trace minime d’un épais périméristème très-développé à l'état jeune, mais dont la plus grande partie non employée, est passée au parenchyme fondamental interne. En outre, vis-a-vis des nœuds foliares, se trouvent en abondance des faisceaux cau- linaires anastomotiques, petits, aplatis, et formés de quelques cellules vasculaires et de quelques cellules de phloème. 4 Rien de particulier à dire du parenchyme central. Les lacunes y acquièrent vers le milieu un grand développement, en longueur surtout. Il y a au centre un assez grand espace libre enveloppé d’un cercle régulier de faisceaux. 9° Comme partout, les faisceaux sont moins nombreux et plus gros au centre, plus nombreux et plus petits vers la limite de la zone centrale. Les gros faisceaux centraux se composent à leur pourtour d’une couche de petites cellules nettement séparées du paren- chyme central à gros éléments. Cette couche, qui fait com- plétement le tour du faisceau et qui est plus épaisse en arrière qu'en avant, se rapporte au parenchyme xyleux. Il n’est pas rare qu'il y ait tout à fait en arrière du liber dur. En dedans de cette couche viennent un grand nombre de points vas- culaires isolés, réduits souvent à un seul vaisseau, et formant tout autour du faisceau un anneau simplement jalonné. Ce sont de grands vaisseaux indéroulables, à l'exception de quelques trachées en arrière; l’aniline les fait admirablement appa- raitre. Le parenchyme xyleux passe entre ces vaisseaux ou groupes de vaisseaux pour venir se placer entre eux et le phloème. Nous avons vu dans les autres faisceaux qu'il n°y avait généralement qu'une assise ou deux de ce parenchyme xyleux en dedans des vaisseaux. Ici il est bien plus puissant à cause de la dimension du faisceau; mais toutes les cellules qui sépa- ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 49 rent le phloëme bien défini des vaisseaux ne lui appartiennent pas en réalité; ce n’est encore qu'une sorte de cambiforme. Le phloëme occupe le centre du faisceau sous forme d’un cylindre plein, plus ou moins gros, et bien isolé du xylème. Il est formé de parenchyme phloeux à parois claires, un peu épaissies, comme il s’en rencontre d'ordinaire. Au milieu de ce paren- chyme phloeux on rencontre souvent un petit groupe de véri- tables fibres libériennes, colorées en rouge par Paniline. Certains éléments plus grands paraissent être des cellules grillagées. En somme le xylème et le phloème, bien définis lun et l’autre par leurs éléments les plus caractéristiques et placés de façon que le premier enveloppe complétement le second, sont séparés par un cambiforme moins différencié. Il arrive presque toujours que les faisceaux du centre sont entourés d’une assise régulière de cellules du tissu fondamental, que l’on pourrait prendre au premier abord pour une gaine fasciculaire. Mais il faut remarquer que cette assise n’est due qu'aux lacunes qui entourent le faisceau. Elle est, pour ainsi dire, la propre paroi de ces lacunes. Les faisceaux extérieurs de la région centrale, au niveau desquels s’est développée la zone de périméristème, diffèrent de ceux dont nous venons de parler, en ce que le parenchyme xyleux du pourtour est souvent réduit à une seule assise de petites cellules et en ce que le phloème y est plus différencié et mieux dessiné. Beaucoup de leurs éléments sont devenus des fibres hbériennes. En outre 1l n’y a plus de cambiforme qui sépare les deux régions. Les faisceaux corticaux sont encore plus différents. I y en a de deux sortes : des gros vers la gaine fasciculaire, dont ils sont toujours assez éloignés, des petits vers le dehors; mais ne s’avançant jamais dans la couche de parenchyme sans méats qui vient sous l’épiderme. Les gros sont allongés tangentielle- ment, avec un fort parenchyme xyleux mou en arrière, quelques vaisseaux vers le milieu, et du phloème en avant, le tout enve- loppé d’une bande épaisse de liber dur qui étreint le faisceau. Les petits sont arrondis, purement fibreux, c’est-à-dire en- Ge série, Bor. T. V (Cahier n° 1). 4 % 50 A. GUILLAUD. tüièrement formés de liber, ou munis de un ou deux vaisseaux sans phloème. Pareils petits faisceaux fibreux se rencontrent aussi dans la région centrale où ils vont s’accoler à la face pos- térieure des gros faisceaux. IE. — Comme développement, il y a les remarques suivantes à faire sur les divers tissus de ce rhizome. La distinction entre le méristème primitif et le tissu fonda- mental qui en dérive est moins marquée qu’elle ne l’est géné- ralement ailleurs. La couche sous-épidermique de parenchyme elur est de for- mation secondaire. Elle apparait de bonne heure au-dessous des insertions foliaires. Au début, cette couche tranche encore plus fortement sur le reste du tissu fondamental par ses cel- lules à parois claires, remplies de protoplasma. Ces cellules subissent surtout des divisions transversales qui les ordon- nent en files longitudinales. Par le mode de développement ce n'est pas autre chose qu'un selérogène. Pour cette raison nous considérerons cette couche comme un sclérogène éteint et arrêté dans son évolution, qui n’est pas allé jusqu’à la for- mation de sclérenchyme. Le périméristème, très-puissant à un moment donné, se dépense ensuite rapidement et surtout en tissu fondamental. Vis-à-vis des nœuds, il donne naissance à des faisceaux cauli- naires. La gaine fasciculaire n'apparait qu'en dernier lieu et lorsque le périméristème est fort réduit. Elle nait dans ses cel- lules externes, encore petites, irrégulièrement disposées d’abord et qui peu à peu se réunissent sur une même ligne circulaire. Les cellules de périméristème qui restent encore en dedans d'elle demeurent dès lors telles et augmentent seulement de dimensions. C’est là l’origme de la couche de méristémiforme de la 3one intermédiaire. La différenciation dans les faisceaux de procambium est la même que celle que nous avons déjà décrite dans ses traits principaux. Apparition en premier lieu de quelques trachées en arrière, et du phloème au milieu du faisceau. La for- mation vasculaire s’avance ensuite latéralement d’arrière en ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 91 avant. Le parenchyme xyleux et le liber dur se dessinent les derniers, aussi bien dans les faisceaux corticaux que dans les faisceaux centraux. lei il est bien sûr que le liber dur (Bast- zellen, Prosenchymescheide des auteurs allemands) appartient au faisceau et dérive de la portion périphérique de la masse de procambium, car ce dernier, avant toute différenciation, est déjà entouré de lacunes avec assise de tissu fondamental limi- tante, au milieu de laquelle il se montre comme une masse uni- forme et arrondie. Je fais cette remarque paree que M. Schwen- dener (1) a prétendu que le revêtement de Bast, ou le liber dur des faisceaux de Monocotylédones était complétement indé- pendant, surajouté au faisceau; ce qui est insoutenable lors- que l’on considère le développement. IT. — Cette plante offre, comme le Polygonatum vulqure, une étude plus facile que la plupart des autres Monocotylédones pour la disposition et le trajet des faisceaux. À part un ou deux gros faisceaux qui s’avancent parfois isolés vers le centre, les autres, correspondants à une même feuille, se disposent en cercles ou arcs de cercles réguliers. Ces faisceaux centraux dé- crivent une courbe très-allongée et ne reviennent à la périphérie qu’au bout de deux entre-nœuds. Là ils descendent encore pendant deux autres entre-nœuds, parallèles et collatéraux à des faisceaux de second ordre qui ne se sont point courbés vers le centre et qui n’ont guère abandonné la région périphérique du corps central. Ces derniers sont les plus nombreux. Quant aux faisceaux corticaux, ils n’ont même pas atteint à leur sortie des feuilles la zone de périméristème et sont descendus en dehors, plus ou moins directement. Tous ces faisceaux se terminent en s’accolant à des faisceaux nés de feuilles précédentes. I peut même se faire que des faisceaux courbés vers le centre ne reviennent pas à la périphérie, lorsqu'ils rencontrent dans cette région d’autres faisceaux auxquels ils s’accolent. Convallaria maialis. — Le rhizome de cette plante est formé d’une succession de très-longs entre-nœuds à la partie (1) Schwendener, op. cit. 52 A. GUELEAUR. postérieure d'une pousse annuelle, et de très-courts à sa partie antérieure, au voisinage etau-dessous du chaume florifère. Dans l'intervalle sont des entre-nœuds moyennement développés ; ce sont ces derniers qu'il faut choisir pour Pexamen. LE. — Au-dessous de l’épiderme est une forte zone de paren- chyme cortical sans faisceaux, bien plus développée que la région centrale, étant donnée la petitesse relative du rhizome. Entre le parenchyme cortical et la région centrale s'étend une zone intermédiaire continue, très-visible à Poœil nu. La région centrale renferme des faisceaux en nombre restreint; la plupart sont rangés en cercle à la périphérie et quelques-uns seulement sont épars dans le milieu. La portion libre de parenchyme mé- dullaire se trouve par suite agrandie. 1° L'épiderme, en coupe transversale, a de grandes cellules aussi épaisses que larges et de mêmes dimensions que le tissu fondamental sous-jacent. Elles sont revêtues d’une épaisse cuti- tule. En coupe longitudinale, elles sont fort allongées dansle sens de l'axe du rhizome. Elles n’ont subi que peu de divi- sions postérieures et uniquement dans le sens transversal. On y trouve des stomates globuleux réduits à leurs deux cel- lules de bordure et placés en travers au milieu d’une longue cellule ordinaire d’épiderme. L'ouverture du stomate est amsi transversale, ce qui n’est pas le cas ordinaire dans les stomates des rhizomes. 3 La zone corticale de tissu fondamental contient des cel- lules arrondies en coupe transversale, de grandeur variable, avec de petits méats interposés. Elles sont plus ou moins allon- gées dans le sens de l’axe et disposées en files longitudinales. 3° La zone intermédiaire dérivée du périméristème se com- pose : En dehors, d’une gaine fasciculaire régulière à petites cel- lules, très-fortement épaissies sur les côtés latéraux et internes, minces sur la paroï externe. Leur coloration est d’un jaune foncé. Elles sont quelquefois très-allongées, toutes rayées et ponciuées. L’acide sulfurique concentré-ne les dissout pas. En dedans de cette gaine viennent d’abord une assise qui ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 53 semble être sa doublure exacte, puis deux ou trois assises et plus de cellules claires, un peu épaissies et un peu plus larges dans le sens tangentiel, mais assez longues. Vis-à-vis des nœuds il y a en outre, en dedans de la zone et entre les faisceaux communs. des faisceaux caulinaires transversaux, anastomosés et à cellules vasculaires très-courtes, ponctuées. % Le parenchyme fondamental de la région centrale ou parenchyme médullaire est semblable à celui de la zone cor- ticale. 9° Les faisceaux, en coupe transversale et au point de vue de la structure, sont de deux sortes. Ceux qui sont isolés au centre sont arrondis avec quelques assises de parenchyme xyleux au pourtour, un anneau complet de gros vaisseaux généralement ponctués ou rayés, quelques-uns seulement déroulables en ar- rière. Ces vaisseaux ont des parois épaisses. Au centre est un cylindre de parenchyme phloeux à aspect ordinaire. Les fais- ceaux qui sont rangés en cercle à la périphérie ne représentent qu'une moitié pour ainsi dire-des derniers, comme si l’on en avait enlevé la partie antérieure. [ls sont un peu plus étendus dans le sens tangentiel, avec un parenchyme xyleux et un demi- arc de vaisseaux seulement en arrière : en avant, le phioème semble libre et en contact avec le parenchyme de la zone inter- médiaire ou avec le méristémiforme. Il. — L'examen du développement nous donne les rensei- gnements suivants sur ces divers tissus et régions anatomiques : Le méristème primitif est très-hmité. Le périméristème acquiert une certaine puissance vis-à-vis des nœuds, au point où se développent les faisceaux caulinaires anastomotiques, et plus tard les racines adventives. Les assises externes donneront le méristémiforme et la gaine fasciculaire. Cette gaine elle-même naît d'abord simple, avec des points noirs Caractéristiques et des parois minces. Elle apparait dans les cellules déjà parenchymateuses qui bordent er dehors les dernières cellules du périméristème. Elle est souvent pré- cédée d’une division préliminaire des cellules formatrices. Les cellules s’épaississent ensuite assez fortement, et lorsqu'il n°v a 94 A. GUILLAUD. encore qu'une seule rangée à la gaine. Cette première rangée épaissie, une seconde située en dedans d'elle commence à s'épaissir également et de la même façon, c’est-à-dire sur toutes les parois, à l’exception de lexterne. Cette seconde assise prend où non des points noirs. Elle dérive directement des cellules du périméristème. Pour ce qui est encore de la différenciation des faisceaux, on peut très-bien voir sur de jeunes pousses allongées l'apparition première du phloème au centre même du faisceau et des vaisseaux déroulables du côté de la moelle. Les autres vaisseaux apparaissent eusuite par points latéraux et antérieurs qui se rejoignent plus tard en anneau complet. HI. — Le trajet des faisceaux est plus facile à suivre ici qu'ailleurs, vu leur petit nombre (8 à 10 en coupe transver- sale) et la longueur des entre-nœuds. Quelques-uns décrivent une petite courbure vers le centre, puis reviennent brusque- ment en dehors, où ils cheminent sous la zone intermé- diaire l’espace d’un entre-nœud ou deux. D’autres restent toujours ë la périphérie depuis leur sortie des feuilles jusqu’à leur terminaison. Les uns et les autres s’accolent ensuite à des faisceaux inférieurs.‘ Voyons maintenant ce qui se passe pour l'anatomie de cette plante suivant que les entre-nœuds sont où plus longs ou plus courts. Les plus longs entre-nœuds, à l'arrière de la pousse annuelle, ont tous leurs tissus fortement tirés en longueur; les cellules du parenchyme fondamental, de la gaine fasciculaire, du méristémilorme, de l’épiderme, sont toutes très-allongées. En outre, les nœuds ne portent que desécailles, et les faisceaux qu'elles fournissent restent tous périphériques; aucun n’ac- complit de courbure. Elles en fournissent du reste fort peu. - D’unautre côté, tous les faisceaux des feuilles supérieures mieux développées étant revenus à la périphérie, il n'y a pas de fais- ceaux centraux dans cette partie du rhizome, et la moelle libre y acquiert tout son développement. Pour les entre-nœuds très-courts qui se trouvent à la partie ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 99 antérieure du rhizome, c’est tout le contraire qui se produit. Les cellules de tous les tissus deviennent courtes et cubiques, isodiamétrales. Les feuilles se développant bien, il y a un très- grand nombre de faisceaux, beaucoup de courbés vers le centre et fort peu de moelle libre. En outre, à cause du rapproche- ment des nœuds, les faisceaux caulinaires anastomotiques se rejoignent tous et forment comme une couche réticulée con- tmue. Le méristémiforme est aussi plus abondant et à cellules nettement tangentielles. Canna indica L.— T. Le rhizome fort gros se compose d’une étroite zone corticale contenant des faisceaux communs cor- ticaux, d’une mince zone intermédiaire et d’une forte région centrale très-abondamment fournie de faisceaux comme la zone externe. 1° L’épiderme dans le jeune âge est formé de petites cellules tabulaires provenant d’un cloisonnement de cellules primitives plus grandes. Ces petites cellules tombent de bonne heure ou s’aplatissent de façon qu’on les prendrait volontiers pour une cuticule, s’il n’y en avait çà et là quelques-unes dont la lumière ne disparait pas complétement. On le ferait d'autant plus facilement que l’assise sous-jacente de tissu fondamental, à cel- lules anguleuses, reconstitue une sorte de nouvel épiderme au moyen dé divisions secondaires qui ont toujours lieu dans le sens du plus grand diamètre de ses cellules, ce qui donne une rangée irrégulière de petits et de grands éléments, bosselés en dehors et bien distincts par leurs dimensions du tissu fonda- mental qui les à produits. 2° La zone corticale est remarquable, parce qu’elle renferme de très-nombreux faisceaux qui ne s’avancent cependant point jusqu’à l'extérieur, mais qui laissent en dehors d’eux une couche de parenchyme sans méats, sorte de sclérenchyme avorté. Le reste du parenchyme est à cellules plus ou moms larges, isodiamétrales, avec méats entre elles. On y rencontre de gros grains d’amidon, pas de cristaux, mais çà et là des cel- lules plus petites à contenu granuleux spécial. 96 A. GUELLAUR. 3 La mince zone intermédiaire présente en dehors une gaine fasciculaire irrégulière, plus par les cellules elles-mêmes qui la composent que par son contour général. Par places ce sont des séries tangentielles de petites cellules cubiques qui offrent sur leurs cotés un petit point noir caractéristique; puis plus loin de grandes cellules anguleuses comme celles du tissu fondamental, munies également de points noirs. Parfois la gaine fasciculaire se trouve interrompue et reprend un peu plus loin. En dedans de la gaine se trouvent une assise ou deux de cellules à direction plus ou moins tangentieile, les unes petites, les autres fort grandes, surtout dans l'intervalle des faisceaux les plus externes ; enfin par endroits limités sont des cellules vasculaires transversales, en petits groupes, qui mdi- quent des rudiments de faisceaux cautmaires. % Le tissu fondamental central ressemble en tous points au parenchyme externe. Ses cellules sont mème plus grandes et 1l y a de grands méats anguleux. 5° Les faisceaux sont distribués dans toute la région centrale à peu près uniformément. Quoique plus nombreux à la péri- phérie, ils n°y forment point une zone concentrée comme dans les autres rhizomes. Vers le centre, leur structure est la suivante : Leur section transversale est allongée dans le sens du rayon, et leurs éléments nettement distincts du tissu fondamental par leurs moindres dimensions. La différenciation du faisceau lui-même n’est jamais très-avancée ; 1l y a eu, pour ainsi dire, arrêt de déve- loppement. Vers son milieu ou sa partie postérieure, 1-3 gros vaisseaux très-dilatés représentent le premier et le seul pomt vasculaire : ce sont des trachées ou des vaisseaux annelés; 11 n°y en à pas de non déroulables. Un peu en avant de ce point vasculaire, certaines cellules prennent parfois les parois un peu épaisses et brillantes du phloème mou et parenchymateux. Tout le reste du faisceau forme un abondant cambiforme englo- bant le peu de xylème et de phloème dont nous venons de parler, et les séparant lun de l’autre. En coupe longitudinale, ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 97 les éléments du phloème sont petits, obliques à leurs extré- mités, postérieurement cloisonnés ; les éléments qui représen- tent une sorte de cambium éteint sont tous allongés, à parois supérieures et inférieures nettement transversales. Les vais- seaux sont fort longs. D’autres faisceaux centraux ont subi une curieuse transfor- mation. La première trachée formée s’est considérablement agrandie et a donné naissance à un canal gommeux sécréteur. Le phloème n’est pas apparu et le cambiforme donne successi- vement naissance à de petits éléments arrondis, à peine munis d’une paroi extérieure, qui bordent le canal dans lequel 1ls tom- bent en donnant de la gomme. Peu à peu tout le faisceau subit cette transformation; le canal s'agrandit à mesure, devient énorme et cesse de donner de la gomme lorsqu'il est arrivé aux cellules du tissu fondamental. Suivant que la formation du canal gommeux a eu lieu plus ou moins tôt, et que son activité est plus ou moins grande, il y a autour de lui une épaisseur variable de cambiforme. Vers la limite de la zone intermédiaire 1 n’y a plus qu’une seule trachée dans les faisceaux. Un moins grand nombre d’entre eux se transforment en canaux gommeux. On trouve parfois à la partie postérieure de ces faisceaux, au centre comme à la périphérie, des cellules de liber, à parois épaissies et dures, qui se colorent en rouge par laniline. C'est un rudiment de ce que nous allons retrouver dans les faisceaux corticaux, ou encore la trace de l’accolement d’un faisceau supérieur qui se termine par cette sorte de tissu libérien. Les faisceaux corticaux ne présentent jamais de canaux gom- meux. Les plus rapprochés de la gaine fasciculaire sont plus gros que ceux de la périphérie de la zone centrale, et ne le cèdent même pas comme masse aux plus gros faisceaux centraux. [ls possèdent un ou plusieurs vaisseaux déroulables; dans leur milieu peu ou point de phloëme, mais du cambiforme. En revanche, soit en avant, soit en arrière, plus souvent en avant, quelquefois sur ces deux faces à la fois, ou bien sur tout le 58 A. GUILLAUD. pourtour, s’ajoute un revêtement de liber dur et épaissi, faisant corps avec le reste du faisceau et inséparable de lui. Les fais- ceaux corticaux les plus externes ne consistent qu'en cordons plus ou moins gros de liber. Il y a des transitions entre Îles deux états. I. — L'histoire du développement de ce rhizome se confond pour ainsi dire avec la description anatomique que nous venons de donner, puisque nous avons vu les Lissus arrêtés dans leur évolution, surtout en ce qui concerne les faisceaux. Le méristème primiüf n’a point, comme dans la généralité des cas, de limite indiquée; il se confond avec le tissu fonda- mental qui en provient. Dans la zone externe la différenciation est un peu plus avancée, tant pour le parenchyme que pour les faisceaux. Le périméristème débute près du sommet, se dépense très-vite en tissu fondamental interne ou externe, et n’est bientôt plus réduit qu’à une couche de deux cellules d'épaisseur au plus, sans contenu féculent, et par cela même plus apparentes. La gaine fasciculaire nait très-tard, dans une assise de cellules qui subissent quelques divisions pour se disposer en cerele régulier. Dès le début, les faisceaux procambiaux sont, les uns arron- dis et plus petits, les autres ovales et allongés, en coupe trans- versale. Les premiers passent vite à l’état d'appareil sécréteur après l’apparition de la première trachée. Il y a aussi des fais- ceaux ovales, qui deviennent plus tard des appareils sem- blables. Les faisceaux communs corticaux sont en tout sem- blables à ceux du centre, et il semble que le périméristème soit venu simplement s'établir entre eux et les partager en deux régions. Le liber dur ne se montre que très-tard dans les fais- ceaux corticaux, bien longtemps après les vaisseaux et le peu de phloème qu'ils peuvent contenir. C’est là un fait que nous retrouvons partout. Le liber dur ne se différencie du procam- bium qu'en dernier lieu. C’est ce qui explique pourquoi ses éléments sont toujours assez larges. Ils ont eu le temps de croître avant leur épaississement. Nous les trouvons aussi cloi- sonnés, mais moins cependant que le parenchyme xyleux ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 59 restant mou; et le plus souvent ils se terminent par des parois fort obliques. IT. — Le trajet des faisceaux n'offre rien de nouveau. Les faisceaux corticaux descendent des feuilles plus ou moins en droite ligne, tandis que les faisceaux de premier ordre décrivent une forte et longue courbure, et ne reviennent que très-tard à la périphérie. Entre ces deux étatsil y en a d’autres intermédiaires. La préparation des tissus de cette plante, justement à cause de leur jeune état, demande quelques soins. Les coupes jaunissent et s’obseurcissent rapidement dans Pair et dans l’eau. Il faut les traiter immédiatement par le chloro-iodure de zinc ou la potasse. Cette dernière les jaunit d’abord fortement à les rendre opaques; mais le séjour dans l’eau emporte complétement cette coloration. Il faut aussi faire les coupes avec de l'huile pour éviter que le rasoir ne les noircisse fortement. D’autres rhizomes présentent encore des faits intéressants. Tofieldia paniculata.— Certaines particularités de structure tenant au mode de végétation et aux entre-nœuds tous très- courts. Les faisceaux sont très-nombreux au centre, et quel- ques-uns ont une couronne de liber dur. À la périphérie de la région centrale, les faisceaux sont encore plus nombreux, et quelques-uns sont des demi-faisceaux. La gaine fasciculaire est à deux rangs de petites cellules, et lorsqu'un faisceau s’in- eurve dans la feuille, elle [ui forme une gaîne dans la zone cor- cale; mais elle n’a plus alors qu'une seule rangée. Paren- chyme fondamental ponetué. Snilacina stellata. — En tout semblable au Convallaria maialis L. Faisceaux arrondis vers le centre et hémisphériques en dehors. Gaine fasciculaire à une ou deux rangées de cellules. Lloydia serotina. — Très-petit rhizome. Rien que des demi- faisceaux réunis à la périphérie. Gaine à trois rangées de cel- lules très-épaissies. Uvularia flava: — Rhizome plus charnu. Faisceaux très- nombreux vers le centre, avec peu de parenchyme xyleux en 60 A. GUELLAUD. dehors des vaisseaux. Gaine fasciculaire à une ou deux assises de cellules cuboïdes, épaissies sur toutes leurs parois. Le Scirpus lacustris, outre son parenchyme cortical si curieux, à cause de ses cellules arrondies, munies de prolongements tubuleux, a des faisceaux dont le xylème consiste en un revête- ment complet de hiber dur, plus épais en arrière. En dedans, à la place où se trouve d'ordinaire du parenchyme xyleux à parois minces, il y a, en contact avec les vaisseaux et le phloème, une seconde couche de cellules encore plus épaissies, plus dures et plus jaunes de couleur. Les vaisseaux présentent le type si commun dans les Graminées et que nous avons déjà trouvé dans le Chameædorea elatior, e’est-à-dire qu'il y a trois groupes vasculaires : le postérieur, formé de quelques vaisseaux déroulables ; les deux latéraux, n'ayant chacun qu’un gros vais- seau indéroulable, qui s'amplifie beaucoup et qui comprime les éléments voisins. L'Asparagustenuifolius L. a de très-courtes et grosses pousses annuelles, dont la partie supérieure se mortifie chaque annéeavec la tige qui vient de fleurir. La plus grande partie du paren- chyme cortical de la moitié encore vivante se mortifie également. Les faisceaux sont très-gros, bien séparés du tissu fonda- mental, avec une épaisse couche de parenchyme xyleux au pourtour et des groupes vasculaires épais formant le plus souvent un anneau complet. Les vaisseaux sont très-épaissis et durecifiés. Le phloème, séparé des vaisseaux par une ou deux assises de parenchyme xyleux, est admirablement distinct et isolé au milieu du faisceau. Souvent, au voisinage de la partie mortifiée, ses éléments se durcissent tous et sont alors colo- rables par l’aniline, ce qui n’arrive jamais pour le parenchyme xyleux. Ce mode de préparation quasi naturel des faisceaux ne laisse aucun doute sur le type général de structure que nous avons cherché jusqu'ici à établir. Le Ruscus aculeatus L. à un rhizome demi-ligneux qui ne subit pas de mortification prématurée, mais qui rappelle le précédent par ses faisceaux munis d’un puissant anneau vas- culaire et par ses vaisseaux très-épaissis el durcis. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 61 Les tiges aériennes persistantes de cette plante nous pré- sentent des faisceaux non arrondis en coupe transversale, allongés au contraire dans le sens du raybn, qui ont subi une différenciation remarquable, venant encore à l'appui de nos idées sur le faisceau des Monocotylédones. Le xylème est très-puissant en arrière, et le phloëme réduit à un petit cylindre aplati, tout à fait excentrique en avant. Tout le pourtour est occupé par du liber très-épaisst et duret, en revêtement con- ünu. La grosse masse postérieure de xylème est une sorte de parenchyme xyleux, à cellules allongées, mais à parois un peu épaisses et dures, avec des vaisseaux en petit nombre. Le üssu libérien, très-épaissi, s’introduit sous forme d’une lame de deux ou trois cellules d'épaisseur entre cette masse posté- rieure de xylème et le cylindre de phloème, qu'il sépare. Dans ce point nous rencontrions ordinairement un parenchyme xyleux à parois minces. Le Smilax aspera a des rhizomes dont le mode de croissance n'est pas très-différent de celui de ses branches aériennes per- sistantes. Certains faits de structure plus directement placés sous l’influence du milieu, comme le développement d’une gaine fasciculaire à parois très-épaissies, les distinguent cependant. Mais l’aspect des faisceaux est semblable dans toute la tige; ils ont subi partout une différenciation pareille. Ge sont des fais- ceaux arrondis ou un peu allongés dans le sens du rayon, avec un abondant liber dur pour revêtement, et trois points vas- culaires, un postérieur avec trachées et deux latéraux réduits chacun à un seul gros vaisseau amplifié. Dans le phloème fort réduit sont deux ou trois lacunes qui ont remplacé des éléments plus larges que les autres. Dans le Narthecium ossifragum L., nous trouvons des fais- ceaux, surtout à la périphérie du corps central, dont ‘tout le phloème est représenté par de petites cellules de Hiber épäissies. Ce phloème occupe le milieu du faisceau, complétement en- touré de larges cellules xyleuses et de vaisseaux isolés, à parois minces, enveloppés eux-mêmes de liber dur, à larges éléments. La gaine fasciculaire à de une à trois cellules d'épaisseur, sui- vant les niveaux, et le méristémiforme est dur. 69 A. GUILLAUD. Dans les ris amœna, Iris sibirica, on rencontre, dans la région centrale, à côté des faisceaux normalement différenciés, d’autres faisceaux qui n’ont qu’un cordon de lhiber dur, à cellules courtes, amincies aux extrémités, fortement épaissies et ponctuées. Ges cordons viennent, dans leur course descen- dante, s'appliquer contre la face postérieure des autres fais- ceaux. La région centrale peut done posséder, elle aussi, comme la zone centrale des faisceaux purement fibreux, tels que Mohl n’en voulait voir que sous l’épiderme ou le cortex. En outre, ces deux plantes ont un sclérogène à la surface extérieure. La gaine fasciculaire accompagne les faisceaux qui sortent dans le parenchyme cortical. Les diverses espèces du genre Eriophorum (E. latifolium, E. angustifolium, etc.) sont des plantes cespiteuses, à tout petit rhizome. Là aussi nous rencontrons dans la région cen- trale certains faisceaux parfaitement isolés, et qui sont complé- tement fibreux. [ls sont très-développés, et comme le paren- chyme est très-friable, on peut les disséquer et les isoler avec une pointe d’aiguille. Les autres faisceaux ont un revêtement complet de parenchyme xyleux, à cellules larges et à parois épaisses, mais assez éloignées de l’état de liber dur, des vais- seaux isolés qui jalonnent un anneau, et enfin un gros phloème à petits éléments au centre. L’Iris Pseudo-A ‘orus et le Funkia ovata sont encore deux exemples excellents à citer et à recommander pour l'étude; le premier pour la différenciation de son volumineux phloème, le second pour la formation tardive de la gaine fasciculaire. $ 4. — TROISIÈME TYPE. Un seul anneau externe de faisceaux avec une puissante zone intermédiaire à son niveau. Ex. : Luzula campestris DC. L. — Une coupe transversale fraiche du rhizome montre au- dessous de l’épiderme une petite zone corticale sans faisceaux, et une large région centrale également sans faisceaux. Entre les ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 63 deux se trouve une petite zone intermédiaire très-prononcée en couleur et séparée de chacune d’elles par une assise de cellules très-épaissies; c’est dans celle-ci que se trouvent réunis tous les faisceaux. Il n’y en à que de périphériques dans cette plante. 1° Le véritable épiderme n'existe plus à l’état adulte. I est remplacé par une assise de cellules plus petites que celles du tissu fondamental sous-jacent, variables entre elles et angu- leuses. En dehors elles forment une surface régulière revêtue d'une sorte de cuticule épaisse, qui ne se colore pas par la solution d’aniline, comme d'habitude. Les autres parois sont identiques à celles des cellules du parenchyme. Vues de face, ces cellules ne rappellent pas non plus l'aspect d’un épiderme ordinaire. 2 Le tissu fondamental cortical est composé de cellules, Les unes grandes, les autres petites, se touchant sans méats et à parois un peu épaisses. Quelques-unes, de distance en distance, sont plus grandes que les autres et sont même remplacées par des lacunes. D’autres encore renferment un contenu spécial. Cette zone ne renferme pas de faisceaux propres, et si lon en rencontre de temps en temps, munis d’un abondant liber dur et épaissi, ce sont des faisceaux communs qui se rendent assez obliquement de la zone intermédiaire aux feuilles. 3° La zone intermédiaire présente une gaine fasciculaire externe, du méristémiforme, des faisceaux communs, et une fausse gaine interne. La gaine vraie est en contact avec le tissu fondamental cortical. Elle forme un cerele régulier autour du rhizome, et est constituée par une seule assise de cellules très-épais- sies sur toutes leurs parois, excepté sur la paroi externe. Rarement il y a deux assises par places. En coupe transver- sale, ses cellules sont très-petites par rapport à celles du tissu fondamental, et il en faut souvent trois ou quatre pour faire la largeur d’une de ces dernières. En coupe longitudinale, elles sont allongées, terminées en pointe ou par des plans très-obli- ques; elles ne sont pas du reste régulièrement superposées. 64 A. GUILLAUR. Elles sont encore munies de ponctuations et de quelques lignes noires latérales. Leur coloration est d’un brun foncé. Le méristémiforme occupe tout lintervalle entre les deux gaines et forme comme une gangue dans laquelle les faisceaux sont plongés. Les cellules sont très-variables de grandeur et de contours. Elles ont des parois claires, un peu épaisses, mais non durcies. Leur longueur est plus où moins grande ; il y en a de cuboïdes. | Les faisceaux, par cela mème qu'ils sont tousréunis dans une fable zone et pressés les uns contre les autres, sont un peu déformés et leur diflérerciation en a été modifiée. Il y en a cependant quelques-uns d’arrondis avec un anneau de xylème bien développé, consistant en cellules xyleuses au pourtour et en vaisseaux relativement larges, épaissis et isolés au milieu des cellules de xylème. Ils sont tous indéroulables, et il est rare d'y rencontrer des trachées. Il y à au centre du faisceau un corps de phloëème à très-petits éléments. D'autres faisceaux, les plus Internes, sont très-petits, et n’ont que peu de vaisseaux souvent directement en contact avec le méristémiforme; quel- quefois même ils manquent de phloème. Le liber dur manque chez tous. La gaine interne, ou fausse gaine fasciculare, limite la zone intermédiare en dedans et la sépare du tissu fonda- mental central. Elle ne forme pas comme l’externe un cercle régulier, parce qu'elle est par-e1 par-là repoussée vers linté- rieur par un des plus gros faisceaux. Elle n’a également qu'une seule assise de cellules, rarement deux, qui sont épaissies sur toutes leurs parois, lexterne comme les autres, à un degré un peu moins prononcé que celles de la gaine externe, mais elles sont tout aussi fortement colorées. Elles sont aussi allongées, terminées en pomte et munies de ponctuations; mais les traits noirs latéraux manquent. Comme nature, ce sont de simples éléments fibreux, du reste accidentels. Dans d’autres espèces, 11 y a une couche de ces éléments, et non pas une seule assise. 4° La région centrale n'est ici qu'une large moelle sans fais- ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 65 ceaux, limitée par la fausse gaine interne. Son tissu fonda- mental est, comme celui de la zone corticale, sans méats, mais à cellules plus larges, anguleuses, minces de parois. Gà et là des lacunes de cellules plus larges et des cellules à contenu spécial, les unes à sphéro-cristaux. Ce parenchyme est très- friable et se détruit facilement sous la pression du rasoir. I. — En suivant le développement du rhizome, on constate que le premier épiderme était composé de grandes cellules plus étendues dans le sens radial et n’ayant pas encore subi de divi- sions secondaires. Le périméristème naît très-rapproché de l'insertion des feuilles et augmente beaucoup d'épaisseur. Tous les faisceaux à leur sortie des bases foliaires tombent dans le périméristème et y continuent leur course. Aucun n’accomplit de courbure vers le centre. Ils descendent plus ou moins bas. Le trajet des faisceaux de cette plante est donc très-simplifié. Il n’y a que des faisceaux d'ordre secondaire, comme il s’en trouve généralement à la même place dans la zone ou au contact de la zone intermédiaire. À peine les plus forts s’avancent-ils un peu plus que les autres en dedans. On voit combien la loi générale de la courbure des faisceaux de Monocotylédones serait fautive dans ce cas, où 11 n’y en aurait pas un seul dans les conditions voulues. En admettant, comme c’est la réalité, qu'il y a des faisceaux de premier ordre courbés vers le centre et des faisceaux de second ordre sans courbure, nous n’avons plus affaire qu’à une simple modification de la règle générale. La gaine fasciculaire vraie naît la première, non dans les cellules du parenchyme externe, mais dans les dernières assises du périméristème lui-même, de façon à en laisser parfois quel- ques cellules en dehors d'elle, La limite étant très-nette entre le périméristème et le parenchyme cortical, il n’y a pas le moindre doute à cet égard. Elle est précédée en général de divi- sions radiales des cellules mères, et c’est sur ces parois nou- velles qu'apparaissent les lignes noires caractéristiques. Plus tard il y a épaississement d’abord, puis coloration des parois. La gaine interne, ou fausse gaine, apparaît plus tard dans 6: série, Bor. T. V (Cahier n° 2).1 5 66 A. GUILLAUD. les couches internes du périméristème, alors que les faisceaux sont déjà différenciés ; elle n’est précédée de divisions d’au- eune sorte et ne porte pas non plus de traits noirs sur les côtés des cellules, ni dans son jeune âge, ni plus tard. Les cellules du méristémiforme lui sont en tout semblables, sauf le manque d’épaississement. Le Luzula pilosa et quelques autres Luzules appartiennent à ce même type de structure. Paris quadrifolia L. — Le rhizome est petit, en forme de cordon charnu, allongé et toujours simple. Chaque pousse an- nuelle à une grosseur à peu près uniforme d’un bout à l’autre, à peine renflée sous la tige, et ne porte que trois où quatre écailles et aucune feuille verte. I. — Une coupe transversale d’un entre-nœud montre un épiderme, une zone corticale large, renfermant un cercle de petits faisceaux, une zone intermédiaire peu prononcée, bordée en dedans d’un anneau de très-gros faisceaux, enfin une région centrale ou plutôt une moelle assez large, dépourvue de toute espèce de faisceaux. 1° L'épiderme que nous rencontrons à l’état adulte, bien qu'à peu près régulier et revêtu de la plupart des caractères des vrais épidermes, n’est pas l’épiderme primordial qui est tombé, mais un épiderme secondaire formé aux dépens de lassise la plus externe du tissu fondamental cortical. L’épiderme primordial était à grands éléments, plus étendus dans le sens radial que dans le sens tangentiel, avec la paroï externe seule cuticularisée, formant une surface plus uniforme, et en outre sans épaississe- ments collenchymateux aux angles internes des cellules. L’épi- derme secondaire, au contraire, est formé d'éléments à peine moins larges que les cellules du tissu fondamental, formant une assise assez régulière, mais d’une régularité qui se retrouve dans les rangées voisines du parenchyme cortical. Les cellules sont du reste un peu proéminentes en dehors et ont des angles rentrants en dedans. Leur paroi extérieure est plus épaisse que les autres, cuticularisée, mais d’une cuticularisation qui en= ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 67 vahit les parois et souvent les assises voisines du parenchyme. Ces cellules présentent encore aux angles des épaississements collenchymateux, comme celles qui sont sous-jacentes. En coupe longitudinale ou vues de face, ces cellules de faux épi- derme sont allongées, mais plus courtes que les cellules du tissu fondamental, se terminent par une face oblique, ou deux faces obliques en toit, et ont subi chacune une ou deux divisions postérieures nettement transversales, On n’observe à la surface aucune trace de stomates. % Le tissu fondamental cortical présente sous le faux épi- derme quatre ou cinq assises plus régulières de cellules rec- tangulaires à petits méats interposés, plus petites elles-mêmes que les cellules du reste du parenchyme et légèrement épaissies aux angles. Elles constituent là une sorte de revêtement collen- chymateux. Ce collenchyme se retrouve encore dans toute la zone corticale autour'des faisceaux. Les autres cellules du tissu fondamental cortical jusqu’au contact de la zone intermédiaire sont grandes, régulièrement polygonales et séparées par de larges méats. Les parois sont un peu épaisses d’une façon générale. Certaines cellules plus grandes encore renferment des raphides. En coupe longitudinale toutes ces cellules, collenchymateuses ou non, sont allongées, terminées par des faces obliques ou en toit, plus larges au milieu qu'aux extrémités. Chacune à subi une ou deux divisions transversales qui se reconnaissent encore à leurs parois plus minces, et qui occupent le ventre de la cellule primitive. Les faisceaux corticaux sont petits et arrondis en coupe transversale. En arrière, le xylème, avec un groupe ou deux de petits vaisseaux, les uns déroulables, les autres non, enve- loppés de parenchyme xyleux à parois minces. En avant, un peu, très-peu de phloème à parois légèrement épaisses et brillantes ; ce phloème est séparé du tissu fondamental par des cellules à parois minces. Ces faisceaux, plus ou moins nombreux, for- ment un cercle régulier autour de la tige et plus ou moins rapproché de la surface suivant les niveaux de la coupe. Ils 68 A. GUILLAUD. peuvent se rapprocher vers le sommet des entre-nœuds jusqu’à quelques cellules du faux épiderme. Ils se continuent avec les faisceaux de la zone intermédiaire ou faisceaux communs dont ils ne sont que la partie supérieure. 9° La zone intermédiaire renferme du méristémiforme, une gaine fasciculaire et tous les faisceaux rangés en cercle à son niveau. Le contour externe de cette zone, quoique très-régu- lier, n'en est pas plus apparent, parce que la gaine, non épaissie et peu apparente par elle-même, n'est pas à la limite, mais dans l’intérieur de la zone intermédiaire même, au milieu du méristémiforme. Au tissu fondamental cortical succèdent en dedans deux assises de cellules plus petites, plus étendues dans le sens tangentiel, à contours arrondis et à parois notablement plus épaisses, brillantes et jaunâtres sous le microstope, avec de tout petits méats noirâtres nichés dans les coins. En coupe longitudinale ces cellules sont allongées, terminées en pointe prosenchymateuse, ou par une toute petite face plane, et trois ou quatre fois cloisonnées. C’est une sorte de méristémiforme allongé. En dedans vient ensuite une troisième assise de cellules plus nettement tangentielles et disposées bout à bout en cercle concentrique à peu près régulier. C’est la gaine fasci- culaire, que rien ne distingue presque du méristémiforme à l’état frais; lépaississement des parois n’est pas plus pro- noncé, et il faut de lattention pour voir les minces traits noirs latéraux des faces radiales de contact. Mais si l’on traite les coupes par la solution d’aniline, toutes les parois se colorent faiblement en rouge, tandis que le méristémiforme reste parfaitement incolore, et la gaine apparait alors très-nettement dans tout son pourtour à la fois. En coupe longitudinale, les cellules de la gaine sont allongées et terminées par des faces planes, nettement transversales. On peut encore préparer cette gaine à l’aide de l'acide sulfurique ordinaire, qui ne res- peete que ses cellules en les gonflant. Accolées à la face interne des cellules de la gaine fasci- ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 69 culaire et la séparant des faisceaux, se trouve une autre assise, rarement deux par places, de cellules de même forme et de mêmes dimensions, à parois épaissies de la même façon et à extrémités effilées, qui appartiennent à une couche interne de méristémiforme. Parmi les faisceaux rangés en cercle au bord interne de la zone intermédiaire, les uns sont gros en coupe transversale, à section ovale et tangentiellement dirigée; ceux-là font saillie dans la région centrale; les autres sont petits, aplatis, inter- posés aux gros et comme accolés au méristémiforme. Il y a des transitions entre ces deux états. La structure des plus gros faisceaux est la suivante : Au pourtour et leur donnant surtout leur aspect, un anneau vascu- laire, anneau interrompu, formé de groupes ou de vaisseaux isolés, parfois réunis sur tout un segment. Ces vaisseaux sont larges, rayés ou réticulés. Il existe parfois des trachées, isolées et plus petites, sur la face tournée vers la moelle. En dehors de l’anneau vasculaire sont des cellules (une assise ou deux) plus petites que celles du parenchyme fondamental, à parois un peu épaisses et brillantes et qui représentent du parenchyme xyleux jeune ou du tissu cambiforme. Entre les groupes vasculaires ces cellules communiquentavec celles qui occupent l’espace circonscrit par eux et qui forment un corps de plus petits éléments, un peu irréguliers et divers de grandeur, épaissis et brillants comme le phloème ordinaire dans la partie médiane. C’est une sorte de phloème-cambiforme non encore nettement différencié. Les petits faisceaux n’ont que des groupes internes de vais- seaux, le reste se confondant avec le méristémiforme, dont le phloème diffère peu, si ce n’est par la moindre dimension des cellules. Il ya même des groupes vasculaires isolés, directe- ment appliqués contre le méristémiforme. Cette disposition des vaisseaux du Paris quadrifolia avait déjà frappé M. Schwendener (1), qui l'indique en passant. (1) Pour nous, il n’y a là rien de bien particulier; mais, en comprenant le faisceau comme autrefois, c’est en effet un type bien frappant. Je cite le 70 A. GUILLAUD. 4 La région centrale est composée du même tissu fonda- mental que la zone corticale. [lv à absence complète de fais- ceaux. C’est le type ordinaire de la moelle libre. IT. — L'histoire de la différenciation du méristème primitif et de l'établissement d’un anneau de méristème secondaire au niveau des faisceaux, est une des plus intéressantes à suivre chez cette plante. Nous y reviendrons plus tard. L'évolution des faisceaux, nous l'avons vu, est peu avancée. Mais malgré le peu de développement des tissus ordinaires du faisceau, l’évolution périphérique du xylème n’en est pas moins indiquée par son caractère le plus indiscutable, la présence des Vaisseaux. La couche de méristème restant encore non employée en dehors des faisceaux, se transforme peu à peu en méristémi- forme tel que nous l’avons trouvé. Une assise au milieu de cette couche externe devient plus régulière; ses cellules se placent bout à bout, et donnent naissance à la gaine fasciculaire. La différenciation de la portion des faisceaux communs courant dans la zone externe précède celle de l’autre portion, est plus complète et un peu différente. Elle est semblable à la différenciation ordinaire des faisceaux communs : le phloème en avant et les trachées en arrière apparaissent d’abord et en même temps. Le parenchyme xyleux qui les enveloppe s'établit le dernier. JE. — On se rend déjà compte après ces détails de la suc- cession longitudinale et de l’arrangement transversal des fais- ceaux. Tous les faisceaux communs cheminent d’abord dans la zone externe corticale. En nombre variable suivant les écailles, ils descendent tous avec une même obliquité peu accentuée de la base d'insertion, cheminent d’abord un certain temps sous l’épiderme ou les assises qui le remplacent, gagnent assez brus- passage de M. Schwendener : « .... In den Rhizomen von Paris quadrifolia ist die Lagerung der Gefässe eine so eigenthümliche, dass sie sich einer characte- ristischen Bezeichnung, etwa durch ein paar Worte, vollständig entzieht; man kann hôchstens sagen : die Gefässe sind theilweise in Cambiform und zartwan- diges Xylem eingetaucht. » (Schwendener, loc. cit., p. 140.) ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. til quement le milieu de la zone corticale où ils reprennent une direction oblique en se rapprochant de plus en plus de la zone intermédiaire. Soit vers le milieu de lentre-nœud inférieur à leur feuille d’origine, soit à un certain niveau de la moitié inférieure de cet entre-nœud, soit même tout près du nœud suivant, ces faisceaux, arrivés à quelques assises de la zone intermédiäre, tournent de nouveau assez brusquement pour se jeter dans cette zone. Tous les faisceaux n’accomplissent pas ce trajet au complet; mais seulement 6-8 d’entre eux, les plus forts. Les plus petits après un trajet variable se rap- prochent des gros et se réunissent à eux latéralement. En coupe transversale on à, par suite, suivant le niveau de l’entre-nœud par où la coupe passe, soit un cercle externe de faisceaux plus fourni et plus rapproché de l'extérieur, soit un cercle d’un plus petit nombre de faisceaux plus rapproché de la zone intermédiaire. Le trajet ultérieur de ces faisceaux dans la zone intermédiaire est à peu près rectiligne. $ 5. — QUATRIÈME TYPE. Faisceaux centraux formant deux groupes : l’un au centre, l’autre péri- phérique, bien séparé du premier et formant le cercle ordinaire, avec une puissante zone intermédiaire à son niveau. Ex. : Tradescantia virginica L. I. — La surface du rhizome est recouverte d’une couche noirâtre de cellules mortifiées. La zone corticale, sans faisceaux, est étroite. À l’œil nu la zone intermédiaire n’est indiquée que par un cercle de faisceaux occupant la périphérie du corps central. Ce cercle périphérique est tout à fait isolé, et en dedans de lui vient une zone de tissu fondamental central dépourvue de faisceaux. Tout à fait au centre se trouve un nouvel anneau de faisceaux. 1° L’épiderme fait défaut sur le rhizome adulte et n'est point remplacé par une assise du tissu fondamental. Ce dernier tissu, au contraire, semortüfie successivement et tombede lui-même. Il 79 A. GUIEELAURB. y à toujours trois ou quatre assises en train de se détruire. Une grande partie de la zone corticale finit ainsi par disparaitre. % Le tissu fondamental cortical est composé de très-grandes cellules à parois minces et hyalines, isodiamétrales et polyé- driques, avec de grands méats interposés. Elles sont variables de dimensions et ont parfois des contours ondulés. Certaines renferment des paquets de très-fines raphides, d’autres un con- tenu granuleux spécial, sorte de sphéro-cristal. Des lacunes interviennent encore plus tard à la place des cellules eristal- lifères. Toute la zone extérieure au cerele périphérique de fais- ceaux n'appartient pas au tissu fondamental cortical ; souvent près de la moitié revient au méristémiforme. 3° La zone intermédiaire, relativement très-développée, com- prend, en dehors et par places, des assises nombreuses de mé- ristémiforme, une gaine fasciculaire non continue ; en dedans, du méristémiforme un peu différent du premier. Le méristémiforme extérieur à la gaine succède parfois sans limite bien nette au tissu fondamental cortical. Il est constitué par des files radiales de dix à douze cellules au plus. Ges cellules sont étendues dans le sens tangentiel, se touchent sans méats, et ont des parois plus épaisses, plus régulières et d’une autre nuance que celle du tissu fonda- mental. Elles ont encore des dimensions bien moindres et moins variables. Dans cet état, elles rappellent les formations de liége, mais ne sont point du tout subérifiées. Des files simples en dedans se dédoublent parfois en dehors; en outre, des parois secondaires sont encore intervenues dans divers sens et suivant le plus grand diamètre des éléments. Cette couche est tout à fait semblable à la zone d’accroissement continu des Dracæna et Yucca, si ce n’est qu’elle est arrêtée, éteinte, et que ses éléments ne se multipliant plus, ont subi un léger épaississement. En dedans les files s'arrêtent à la gaine fasciculaire ou à son niveau tangentiel dans l'intervalle des faisceaux. En général, la gaine en question est formée de bandes tan- sgentielles unicellulaires de six à douze éléments, placées en face ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 73 des faisceaux du cercle périphérique auxquels elles se rap- portent, puisqu'elles se relèvent à chaque extrémité en demi- arc. Très-rarement les portions de gaine de deux ou trois faisceaux voisins se réunissent et constituent une bande plus prolongée. Les éléments sont semblables à ceux du méristémiforme externe, plus petits seulement, quand une divi- sion radiale est intervenue; on voit souvent que de deux cellules sœurs l’une est entrée dans la constitution de la gaine, tandis que l’autre à formé du méristémiforme. Leur seul caractère distinctif est d’avoir de gros points noirs sur les côtés ou sur la face par laquelle elles se touchent les unes les autres, lorsqu'elles sont irrégulièrement agencées. C’est ainsi que ces points noirs peuvent occuper soit la paroi posté- rieure, soit un angle des cellules. À l'état naturel, à cause de son irrégularité et de son fractionnement, cette gaine peut passer inaperçue. En traitant la coupe par la solution d’ani- line, on change les points noirs en points rouges foncés et l’on colore également un peu toutes les parois, ce qui est un excellent mode de préparation. On peut encore employer l’acide sulfurique concentré, qui ne laisse subsister que les seules bandes noires. Malgré sa proximité et son adjonction aux fais- ceaux, la gaîne en est toujours séparée par une assise de méri- stémiforme. Outre cette dernière assise, il y a encore, en dedans du niveau tangentiel de la gaine fasciculaire et dans l'intervalle de ses diverses portions, un méristémiforme à éléments plus petits, polyédriques et non disposés en file, mais irrégulièrement distribués, qui s’avance entre les faisceaux jusqu'à leur bord interne. Ce méristémiforme, quoique distinct du premier par sa structure, lui ressemble par les caractères des parois des éléments et par l'absence des méats. Il passe directement au parenchyme fondamental central. Nous avons encore à signaler en dedans de la gaine fascicu- laire, qui se trouve alors plus éloignée du faisceau à qui elle sert d’enveloppe, des traces de faisceaux caulinaires anasto- motiques, réduits à quelques cellules vasculaires transversales. 74 A. GUILLAUD. % Le tissu fondamental central, soit dans la zone qui est entre les deux cercles vasculaires, soit dans le petit espace mé- dullaire que circonscrit le plus interne, possède de larges éléments hyalins à parois minces, avec de très-grands méats, des cellules à raphides et à contenu spécial. 9° La structure des faisceaux varie un peu dans les deux cereles vasculaires. Les faisceaux du cercle interne ou médullaire, ceux qui constituent un premier éfui médullaire, pour employer unterme consacré, sont les uns gros, les autres petits, non arrondis en coupe transversale, mais allongés et ovales. La plupart ont une sorte de couronne tournée directement vers l’axe de la moelle ; d’autres sont placés de travers. Autour du faisceau, une assise ou deux de grandes cellules xyleuses à parois plus épaisses, que la potasse faible gonfle encore. Dans la moitié postérieure, d’autres grandes cellules xyleuses à parois minces, et restant telles sous l'influence de la potasse, au milieu desquelles se trouvent trois ou quatre groupes vasculaires, souvent réunis les uns aux autres ou séparés par des cellules xyleuses apla- tes. Le groupe postérieur, triangulaire, proémine en arrière dans la couronne quand elle existe, et est formé de petits vais- seaux déroulables. Les autres groupes n’ont que de fort grands vaisseaux indéroulables. Les cellules xyleuses à parois minces s’avancent vers l'avant, deviennent plus petites et s’interposent, une assise où deux, entre le xylème à larges cellules, à parois épaisses, et le corps du phloème, comme elles sont interposées aussi entre le phloème et les vaisseaux. Le corps du phloème, assez développé et excentrique en avant, se compose de petites cellules régulièrement polygo- nales en coupe transversale, à peu près égales de dimensions, el à parois un peu épaisses et jaunâtres, surtout après l’action de la potasse. Les faisceaux qui sont sans couronne dans cet étui médul- laire, n’ont pas non plus de trachées ou vaisseaux déroulables. Les petits, que l’on trouve isolés, n’ont au contraire qu’un groupe de trachées enveloppé de petites cellules xyleuses à parois ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 75 minces, sans phloème. Il semblerait que les uns sont le com- plément des autres et en représentent la couronne détachée. Mais leur position relative ne permet pas de penser qu’ils dé- rivent d’un même faisceau de procambium dont la partie inter- médiaire serait passée au tissu fondamental. Tout se borne à des différenciations particulières dans des faisceaux de pro- cambium de diverses grosseurs. Les faisceaux du cercle externe ou périphérique sont arrondis ou hémisphériques, aussi gros que les plus gros des précédents et uniformes. Le parenchyme xyleux à parois épaisses n’occupe que la partie postérieure sous forme d’un demi-arc aminei à ses extrémités latérales. Le parenchyme xyleux à parois minces vient souvent, au contraire, se placer entre le phloëme et la gaine fasciculaire, à la partie antérieure du faisceau. Des groupes vasculaires nombreux, ou même des vaisseauxisolés, représentent également un demi-arc postérieur entouré de parenchyme xyleux à parois minces. Tous les vaisseaux sont indéroulables, de larges vaisseaux rayés ou réticulés généra- lement. Le phloème, sous la forme d’un cylindre aplati, est semblable comme éléments et structure au phloëme des autres faisceaux. IL. — L'examen du développement des tissus et régions ana- tomiques montre que. les faits déjà cités de chute d’épiderme et de mortification du tissu fondamental cortical commencent de très-bonne heure. Le premier épiderme était à cellules radiales, longues et uniformes, fortement cuticularisées. - Le périméristème, apparu assez tard, acquiert rapidement une grande puissance, et persiste longtemps sous forme d’un large anneau clair dans lequel plongent une partie des fais- ceaux immédiatement après leur sortie de la base de la feuille. En dehors ses divisions se font presque toutes dans le sens tan- sentiel, mais à partir d’un certain moment seulement et non dès le début. En dedans elles ont lieu dans tous les sens. A la fin, sa faculté de multiplication s’arrête, et toutes ses cellules qui ne sont pas transformées en tissu fondamental secondaire, ou qui n’ont pas servi vis-à-vis des nœuds à la formation de quel- 76 A. GUILLAUD. ques faisceaux caulinaires anastomosés, passent à l’état de mé- ristémiforme, en conservant leur agencement respectif. Peu avant cette extinction complète, certaines cellules, en dehors et en regard des faisceaux communs, se sont agencées, après avoir où non subi desdivisions radiales ou tangentielles prélimi- naires, en des lambeaux de gaine fasciculaire. Cet agencement ne se fait pas partout, et certaines celiules, tout en gardant leur alternance tangentielle, prennent sur divers points de gros traits noirs caractéristiques. La différenciation de la gaine ne va Jamais plus loin que l'établissement de ces traits noirs et le durcissement peu prononcé des autres parois, et on ne la disungue bien au milieu des autres cellules que par. la faible coloration que lui donne la solution alcoolique d’aniline. Ici, pas le moindre doute que la gaine fasciculaire n’appartienne au périméristème et n'en tire directement son origine, puis- qu'elle n’est pas à sa périphérie, mais dans son intérieur, aussi séparée que possible de l’un et de l’autre tissu fondamental. J'insiste sur ce fait parce qu'on lui donne généralement pour origine le tissu fondamental de l'écorce. IT. — Le trajet des faisceaux de cette plante est bien distinct de tout ce que nous avons vu jusqu'ici, et constitue un type par- üculier, comme le Luzula campestris, mais d’une façon diffé- rente. Chaque base de feuille donne des faisceaux de premier ordre et des faisceaux de second ordre complétement séparés, sans qu'il y en ait d’intermédiaires. Les premiers faisceaux, moins nombreux, se courbent ou plutôt gagnent assez directe- ment le centre. Is s’inclinent alors en formant un angle presque droit et descendent parallèlement côte à côte et en ligne droite, l'espace de l’entre-nœud inférieur, plus rarement de deux entre-nœuds. Avant d'arriver au nœud suivant, chacun se divise en deux petites branches qui vont à droite et à gauche se réunir aux faisceaux premiers qui arrivent de la feuille mférieure, et ainsi de suite d’un bout à l’autre du rhizome. Ces divisions de l'extrémité inférieure des faisceaux et la descente jusqu'au nœud suivant de quelques-uns rendent compte, soit des petits faisceaux que l’on rencontre en coupe transversale à certains ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. pri niveaux, soit des irrégularités d’agencement et de position des faisceaux de l’étui médullaire. Les faisceaux de second ordre, plus nombreux, ne s’avancent jamais plus loin que la face interne du périméristème ; sortis des feuilles sur le même plan que les premiers, ils sin- clinent aussi à angle droit, une fois arrivés au périméristème, s’y développent l’espace d’un entre-nœud et se terminent soit en se divisant aussi en deux petites branches, qui vont s’acco- ler aux faisceaux secondaires de la feuille inférieure, soit en s’accolant par une pointe unique au faisceau le plus voisin. I y a ceci de particulier dans les uns et les autres, que si un faisceau se divise avant de se terminer, ses deux extrémités vont s’accoler sur les faces latérales des autres faisceaux dont elles modifient momentanément la forme en les déviant latéralement ; sil ne se divise pas, sa pointe unique s’accole à la face postérieure d’un faisceau inférieur en lui formant une sorte de couronne. Ce qui distingue encore les deux cercles vasculaires, c’est que l’un, le médullaire, a des trachées, tandis que Pautre n’en a pas. Toutes les espèces du genre Tradescantia et Commelyna semblent présenter le même type de structure, pour Pétat de la gaine fasciculaire, comme pour l’agencement longitudinal et transversal des faisceaux. Nota. — Après un nouvel examen, il se pourrait que la distribution des faisceaux soit un peu plus compliquée que je ne l’indique. $ 6. — CINQUIÈME TYPE. Formation d’une masse centrale de tissu secondaire au moyen d’un centralméristème. Zone intermédiaire bien développée. Ex. : Triglochin maritimum. I. — Le rhizome est ramifié, cespiteux, couvert des débris des anciennes bases foliaires. Les feuilles sont distiques et forment deuxrangées latérales, emboîtées comme dans les Jris. Leur insertion recouvre presque toute la surface de la tige. Sous 78 A. GUILLAUD. ces feuilles le corps du rhizome est petit, arrondi. En coupe transversale, on rencontre en dehors une couche de cellules très-épaissies; puis une zone corticale sans faisceaux propres, une légère zone imtermédiaire, un corps ou région centrale avec des faisceaux régulièrement espacés, enfin au centre même de la moelle, une masse d'éléments épaissis, transversa- lement étendue dans le plan d'insertion des deux rangées de feuilles. 1° L’épiderme faisant défaut, la première couche dont nous avons à nous occuper est celle des cellules épaissies extérieures. C’est une couche de sclérenchyme à petites cellules, polygonales en coupe transversale, à lumière arrondie par suite de l’épais- sissement. Dans le sens longitudinal, ces cellules sont en files plus ou moins longues, et toutes terminées par des faces planes. L’épaisseur de cette couche un peu irrégulière varie de trois à cinq cellules. Par endroits, aux angles d'insertion des feuilles, l'épaisseur est bien plus considérable. Toutes les cellules ne se colorent pas en rouge par l’aniline. L’assise extérieure reste jaune comme à l’état naturel, ce qui indique, je crois, qu’elle est com- plétement morte, tandis que les parois qui absorbent l’ani- line sont encore vivantes. J'ai rencontré des faits du même genre dans le liége : celui qui ne se colore pas est détérioré, mort, comprimé par les tissus vivants; celui qui est encore vivant et en place, comme dans l’/ris florentina L., se colore au contraire fortement. Semblable chose pour le parenchyme fondamental. Le rhizome de l’Asparaqus tenui- folius L. a la plus grande partie de son parenchyme cortical mortifié; les parois ne se colorent pas non plus dans la solution d'aniline. 2° Bien que la zone corticale n’ait pas de faisceaux, il n’est pas rare sur les coupes transversales d’en rencontrer qui la traversent obliquement pour gagner d’un côté les bases des feuilles, de l’autre la zone intermédiaire. Ces faisceaux sont très-chargés en liber dur, et conservent comme revêtement externe la gaine qu'il leur faut traverser pour sortir de la région ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLEDONES. 79 centrale. Nous avons déjà signalé ce fait de gaine fasciculaire dans l'écorce. Le tissu fondamental cortical a de petites cellules, à paroisun peu épaisses, arrondies en coupe transversale, un peu allongées et terminées par des faces planes en coupe longitudinale, avec des méats. Pour éclaircir ce tissu chargé de petits grains de fécule ou d’autres substances, l'acide sulfurique est plus profitable que la potasse, qui laisse les choses en leur état naturel. 3° La zone intermédiaire présente en dehors une gaine fasci- culaire d’une seule rangée de cellules, plus petites que celles du tissu fondamental de l'écorce, inégales, les unes cuboïdes, les autres allongées dans le sens tangentiel, mais toujours courtes dans le sens longitudinal, épaissies fortement sur cinq de leurs parois, et minces sur la sixième, lexterne. Cette gaine forme un cercle continu, mais non tout à fait régulier. Au-dessous d'elle viennent quelques assises de méristémi- forme, à cellules dirigées en divers sens, avec des parois hya- lines plus minces que celles des cellules du tissu fondamental, et sans méats entre elles. C’est un méristémiforme mou qui s’avance Jusqu'entre les faisceaux communs périphériques qu’il entoure même parfois. Les faisceaux caulinaires anastomotiques sont abondants, à cellules vasculaires courtes, finement rayées et réticulées., [ls s’avancent parfois jusqu'au contact de la gaine fasciculaire, # Le tissu fondamental central est à cellules plus grandes que celles du tissu fondamental cortical ; les parois sont plus ondulées et les méats interposés plus grands, o° Les faisceaux de la région centrale sont à peine plus nombreux à la périphérie que vers le milieu mème de la région, gros et petits en section transversale, tous arrondis et presque toujours coupés obliquement, ce qui indique peu ou point de descente verticale. Comme structure, ils ont chacun un xylème annulaire aussi épais en avant qu'en arrière et consistant en une assise de parenchyme xyleux à petites cellules au pourtour; puis en un 80 A. GUILLAUD. anneau de vaisseaux isolés et en petits groupes. Le groupe le plus en arrière contient seul quelques vaisseaux déroulables plus petits; les autres vaisseaux sont tous de même ouverture, à parois épaisses, indéroulables, rayés ou réticulés. En coupe longitudinale, on voit que ce ne sont presque que des cellules vasculaires placées bout à bout. En dedans des vaisseaux, une nouvelle assise de parenchyme xyleux à petites cellules et à parois minces. Tout à fait au centre un groupe abondant de phloème, à parois de cellules un peu épaisses et réfringentes et à contenu granuleux que lacide sulfurique contracte et ne dissout pas. Certains faisceaux latéralement placés dans la direction des extrémités de la bande centrale de tissu dur sont purement fibreux, colorables au pourtour par l’aniline, mais non à leur centre, quiestmortifié. D’autres cordons de liber plus petits sont isolés çà et là dans la coupe et viénnent s'ajouter inférieurement à la face postérieure des autres faisceaux; supérieurement, ils se transforment assez brusquement en faisceau ordinaire. Les gros cordons latéraux, au contraire, conservent leur structure jusque dans la base de la feuille, et il n’est presque pas question pour eux ni de vaisseaux ni de phloème. 6° Le corps fibreux central, dans lequel les gros cordons fibreux latéraux viennent se terminer inférieurement et oblique- ment, a des contours irréguliers et variables suivant les niveaux. Les extrémités latérales peuvent être arrondies ou former quatre pointes, deux de chaque côté. Il est parfois épais au milieu, parfois aminer. Ge qui ne varie pas, c’est son gisement aplati et transversalement étendu d’une ligne d'insertion foliaire à l’autre, sans s'approcher jamais cependant de la zone intermédiaire. Sa structure, comme celle des cordons fibreux en général, représente une masse de cellules très-épaissies et ne con- servant plus qu'une faible lumière. Les cellules externes sont tout aussi épaissies que celles du centre, mais elles se colorent encore par l’aniline et sont encore vivantes, tandis que celles du centre, déja mortfiées, restent jaunes. En coupe longitudi- nale, ce sont de courtes fibres, terminées en pointe, renflées au ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 81 milieu, et munies de fortes ponetuations ou raies. Aucune n’a subi de cloisonnement postérieur. Liber (tissu libérien) par la forme, issu d’un méristème secondaire, ce tissu rentre dans le groupe des pseudolibers. Telle est cette masse centrale, semblable à une tige: solide s'étendant d’un bout du rhizome à l’autre, et sur laquelle viennent s’arc-bouter de chaque côté et de distance en distance des branches de même nature qui pénètrent dans la côte mé- diane de chaque feuille pour la soutenir. Il y a dans cette dis- position tout un système mécanique fort remarquable, sans doute nécessaire à la plante dans son genre de vie. Sem- blable tissu pareillement situé existe dans les Cryptogames, chez les Marsilea. IL. — L'histoire du développement démontre qu'il existe de bonne heure, sous les Insertions foliaires, une couche étroite de tissu plus clair que le reste, granuleux comme un mé- ristème, et en état de divisions continues. Ces divisions sont surtout transversales et superposées. Ge méristème ou scléro- gène persiste ainsi dans un état de jeunesse et sans subir vers la fin beaucoup de divisions jusqu’à ce que les dimensions longitudinales et transversales du rhizome soient à peu près fixées. Les cellules s’épaississent alors rapidement dans les assises extérieures. Les assises internes s’épaississent peu à peu et plus tard. Quelques-unes cependant passent par endroits au tissu fondamental. Les premières assises épaissies meurent avant les autres et constituent le sclérenchyme toujours jaune, qui n’absorbe plus l’amiline. L'irrégularité de la face interne du sclérenchyme s'explique par la marche non uniforme de l’épaississement sur ce côté. Le périméristème, apparu et bien développé dès le début, donne en dedans et en dehors des assises de tissu fondamental longtemps distinctes de celles qui proviennent du méristème primitif. Dans son intérieur plongent ies faisceaux communs de second ordre, non courbés vers le centre, et s’établissent des faisceaux caulinairesanastomotiques. La gaine fasciculaireappa- raît sans divisions préliminaires et simplement par formation de 6e série, BoT. T. V (Cahier n° 2). ? 6 82 4. GUALE AUD. points noirs sur les parois latérales des cellules dans la dernière des assises fournies au tissu fondamental cortical par le péri- méristème, c’est-à-dire dans celle qui est encore en contact avec lui. À partir de ce moment, la faculté de division du périmé- ristème s'éteint, et ses cellules non employées persistent telles qu'elles sont en donnant du méristémiforme à parois très- minces. Plus tard les cellules de la gaine s’épaississent, et les points noirs semblent disparaître sous la coloration jau- nâtre que prennent les parois; mais on les retrouve toujours en traitant une coupe transversale par l'acide sulfurique con- centré, quidétruit l’épaississement et ne conserve que la mince paroi primitive à points noirs latéraux. Par la suite aussi les autres assises de tissu fondamental fournies par le périméristème, qui étaient à petites cellules d’abord, se fondent complétement dans la zone corticale. La différenciation des faisceaux ordinaires suit la marche normale. Au centre exact d’une masse arrondie de procambium se forme en premier lieu le phloème, qui acquiert rapidement toute sa grosseur avant que l’anneau vasculaire, qui a débuté en arrière par quelques trachées et qui a continué par des branches latérales, ne se soit refermé en avant. Cet anneau, nous l’avons vu, n’est jamais complet à l’état adulte; il n’est que jalonné par des vaisseaux isolés ou des groupes vasculaires. Dans le jeune âge ces groupes sont encore plus distincts. Le parenchyme xyleux restant plus longtemps à l’état procambial, ses cellules augmentent un peu plus leurs dimensions trans- versales à mesure du grossissement général et se cloisonnent ensuite à mesure de l’élongation générale. C’est là tout le secret, dans ce rhizome comme dans les autres, de l’état du parenchyme xyleux, à cellules plus larges, à parois plus minces et à cloisonnement plus considérable. Dès qu’une cellule s’é- paissit un peu, elle devient incapable de divisions ultérieures. Les gros faisceaux destinés à devenir fibreux persistent à l’état de procambium pendant que la différenciation en xylème et phloème gagne les autres faisceaux, et ce n’est même que lorsque celle-ci est achevée qu'ils évoluent en liber dur, qui ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 83 débute par leur centre. Les terminaisons purement fibreuses des faisceaux ordinaires ne s’établissent aussi qu’en dernier lieu. Le mode de développement du corps fibreux central est le suivant : Deux des faisceaux d’ordre primaire, issus de deux feuilles successives opposées, très-fortement courbés l’un et l’autre vers le centre et situés dans le même plan radial, arri- vent presque à se toucher. Les feuilles qui suivent en four- nissent de semblables, et ainsi de suite d’un bout à l’autre. Dans l’angle ouvert en haut que forme chaque paire de faisceaux très- rapprochés, le tissu fondamental se transforme en lame de mé- ristème, appuyée à droite et à gauche sur chacun des faisceaux arqués. Ce méristème s'étend ensuite et gagne en épaisseur. Les paires de faisceaux rapprochés étant continues, il est aussi continu. Au sommet il ne rejoint jamais le méristème primitif, dont il est séparé par du tissu fondamental évolué. C’est bien là un méristème secondaire, il n°y à pas à en douter. De même que la production de ce méristème central a été centrifuge, de même l’épaississement successif des cellules et la transformation en pseudoliber dur est aussi centrifuge. Cette transformation commence en même temps que dans les faisceaux dont le rapprochement a été le point de départ du tissu, et marche de bas en haut, de la base vers le sommet du rhizome. IIL. — On comprend combien le trajet et la disposition transversale des faisceaux ont dû subir de modifications à la suite de ces accolements nombreux et de ces productions se- condaires. Il y a des faisceaux de premier ordre plus ou moins fortement arqués vers le centre, qu’ils gagnent très-obliquement, et des faisceaux de second ordre, dont les uns, ayant à peine traversé le périméristème, yreviennentimmédiatement après un très-faible trajet courbe, et dont lesautres descendent directement. De tous les faisceaux primaires fortement arqués, aucun ne revient à la périphérie, la plus grande partie finissant dans le corps central de pseudoliber, et les autres s’accolant entre eux après un faible trajet longitudinal. Les faisceaux périphériques ne descendent 84 A. GUILLAUD. pas non plus très-bas, s’amincissent rapidement, se terminent aussi par simple accolement, en général sans se transformer en liber à leur extrémité inférieure. On ne peut non plus s'étonner de ce qu’en coupe transver- sale les faisceaux ne soient pas plus nombreux, ou guère plus nombreux, à la périphérie que vers le centre, comme c’est la règle ordinaire. La zone périphérique ne contient jamais que les faisceaux de second ordre; les faisceaux de premier ordre ne venant plus s’y terminer, le nombre est diminué d’autant. D'un autre côté, le trajet restreint de ces faisceaux périphé- riques ne superpose plus ceux de nombreuses feuilles suc- cessives. Je ne sais pas si beaucoup d’espèces du genre Triglochin présentent le même genre de structure; mais on retrouve encore un méristème central et ensuite une masse centrale de pseudoliber dans le Triglochin palustre, bien que le rhizome ne soit pas épais et dur, mais composé de pousses annuelles à extrémité postérieure longue et mince, rapidement détruite, et à extrémité antérieure ne portant d’abord qu’une rosette de feuilles et plus tard une tige. C’est cette dernière seule qui présente une masse centrale de pseudoliber au milieu de la moelle, moms développée et plus irrégulière encore que dans le Triglochin maritimum, à éléments plus courts, plus obliques et moins épaissis. Parmiles autres plantes qui présentent encore ce tissu, on peut citer le Schænus nigricans L. Là, non-seulement il occupe le centre, mais il s’avance entre les faisceaux les plus voisins réunis en étui médullaire et en enveloppe quelques-uns, tendance qui existait déjà dans le Triglochin palustre L. Ges faisceaux englo- bés conservent leur forme arrondie en coupe transversale, mais le tissu hibérien arrive jusqu’à leur anneau de vaisseaux. Le Schœnus nigricans L. est d’ailleurs remarquable à d’autres points de vue, et notamment à raison du trajet et de la dispo- sition transversale des faisceaux communs. Comme dans les Tradescantia et Commelyna, les faisceaux d’ordre primaire et ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 89 les faisceaux d'ordre secondaire forment deux systèmes séparés par une zone de tissu fondamental libre de tout faisceau, le système des faisceaux primaires au centre, le système des fais- ceaux secondaires à la périphérie. $ 7. — SIXIÈME TYPE. Faisceaux munis de plusieurs phloëmes distincts. — Type du Polygonatum vulgare pour le reste. Ex. : Tamus communis L. Je dois d’abord faire observer que les rhizomes de la plante cultivée dans les jardins diffèrent, pour la forme et le mode végé- tatif des rhizomes, de la plante sauvage. Ces derniers sont sou- vent très-gros, arrondis, peu longs. Les autres, croissant dans une terre meuble, s’allongent beaucoup et n’atteignent pas la grosseur du petit doigt. Je me suis servi de ces derniers rhi- zomes longs provenant du Jardin botanique de Munich. En outre, ce sont les tiges ou branches aériennes qui ont principalement des faisceaux à plusieurs phloëmes distincts. Quelques faisceaux du rhizome ce aussi deux COrpS de phloème ; mais en général il n’y en a qu’un. . — La coupe transversale ne présente aucune zone parti- culière, sauf celle des assises extérieures sous-épidermiques, qui est irrégulière et peu prononcée. On ne voit point de fais- ceaux se grouper de façon à former un cercle-limite quel- conque ; ils s’avancent plus ou moins et sans ordre jusqu’à une petite distance du bord extérieur. 1° L’épiderme n'existe plus depuis longtemps à la surface du rhizome adulte ; il à disparu par suite des productions secon- daires qui se sont formées de très-bonne heure au-dessous de lui. Ces productions, caduques elles-mêmes, consistent d’abord en une couche de sclérenchyme de quatre ou cinq cellules d'épaisseur, recouverte en dehors de cellules très-grandes, mortes et ratatinées, ayant appartenu aux écailles foliaires. Les cellules de ce selérenchyme sont plus petites que celles du parenchyme fondamental, à parois deux ou trois fois plus 86 A. GUILLAUD. épaisses, polygonales en coupe transversale et parfois ulté- rieurement divisées par une cloison tangentielle, plus longues que larges, et disposées en petites files de troisou quatre cellules, celles du milieu à parois terminales nettement transversales, celles des extrémités des files à parois terminales obliques. L’aniline colore fortement ce tissu en rouge. Le selérenchyme lui-même n’existe pas toujours, ou du moins tout à fait intact à la surface du rhizome; il se desquame assez souvent et est alors remplacé par du tissu fondamental dont les cellules subissent des divisions tangentielles subéreuses, se mortifient et tombent à leur tour par plaques. Même avec le sclérenchyme en place, on observe immédiate- ment au-dessous et par endroits limités une faible formation subéreuse qui ne dépasse pas en série radiale trois ou quatre cellules, provenant toutes d’une seule cellule mère. La cellule mère peut n'avoir qu'une division tangentielle; quelquefois même elle se développe fortement dans le sens radial sans qu’il survienne de divisions subéreuses. 2%, 3° et 4° Le tissu fondamental, à part quelques assises qui apparaissent sous le selérenchyme et le liége, et qui sont un peu irrégulières et à cellules tangentielles, est très-uniforme de struc- ture de l’extérieur au centre. En coupe transversale, ce sont des cellules très-régulièrement polygonales, grandes et petites entremêlées, à parois assez épaisses et ne laissant entre elles que de tout petits méats nichés aux angles et dans l’épaisseur des parois. C’est le seul parenchyme fondamental que j'aie ren- contré qui se colorât un peu par la solution d’aniline. Quelques cellules renferment ou de gros cristaux, ou un contenu spécial. Les cellules à raphides, si nombreuses dans les écailles foliaires, manquent à peu près dans le rhizome. En coupe longitudinale, toutes les cellules sont très-allongées, presque prosenchyma- teuses, plus grandes vers leur milieu et plus ou moins obli- quement terminées. Chaque cellule primitive a subi des divi- sions transversales postérieures. Les parois sont criblées de petits pores transversaux ou obliques dans le mème sens. 5 La structure des faisceaux diffère notablement de ce que ANATOMIE DE LA TIGE DES. MONOCOTYLÉDONES. 87 nous avons rencontré dans la plupart des autres rhizomes, en ce sens qu'on ne peut fixer que par analogie la position et les limites du phloème et du xylème, ou plutôt que, en dehors des vaisseaux, la différenciation n’est pas assez complète pour éta- blir avec sûreté une telle division de la coupe transversale ; nous avons littéralement affaire à du cumbiforme dur. En section transversale, ces faisceaux sont arrondis ou un peu allongés dans divers sens, mais surtout dans le sens du rayon. La portion médiane est occupée par une forte masse de gros vaisseaux entremèlés de plus petits. Cette masse est par- tagée en deux groupes latéraux, l’un à droite, l’autre à gauche, en partie séparés par une rangée de cellules plus petites. Parfois cette rangée de cellules disparait par aplatissement. La plupart de ces vaisseaux sont très-grands, de contours variés, irréguliers, anguleux, et à parois minces; l’aniline les colore peu, assez cependant pour les faire encore bien ressortir. Ils sont tous in- déroulables, les plus petits rayés, les gros finement et très- abondamment ponctués, tellement qu’ils en sont gris cendré. Au-dessus des deux groupes se trouvent quelques (?) trachées formant comme le pôle postérieur du faisceau. En arrière des vaisseaux et vis-à-vis de la rangée cellulaire qui sépare leurs deux groupes, se trouve un amas de toutes petites cellules à parois plus épaisses et plus dures, simulant une petite couronne. À droite et à gauche, des cellules plus grandes, distinctes du tissu fondamental, font le lour des groupes vasculaires qu’elles enveloppent. En avant des vaisseaux sont en assez grande abondance des cellules larges, polygonales, en relation avec les cellules posté- rieures, soit par la rangée intermédiaire, soit par les cellules qui contournent les groupes vasculaires. Enfin, tout à fait à la partie antérieure, encore un groupe ou amas assez puissant de toutes petites cellules, opposé au pôle postérieur et presque en contact, comme lui, avec le tissu fondamental. Ce dernier groupe a parfois quelques éléments très-épaissis. Tous ces éléments du faisceau autres que les vaisseaux sont allongés, prosenchymateux et cloisonnés. De petits faisceaux 88 A. GUILLAUD. que l’on trouve disséminés çà et là parmi les gros n’ont qu’un groupe vasculaire et pas de couronne postérieure. Cette cou- ronne peut manquer même dans les gros. IT. — L'histoire du développement est intéressante chez cette plante à cause de cette particularité curieuse, que tous les tissus, les méristèmes comme les autres, sont naturellement fermes, durs, et permettent de faire sans dessiccation préalable des coupes fines. Un méristème primitif abondant, uniforme, oceupe tout le jeune sommet d’un rhizome, flanqué de petites écailles em- boitées, minces et chargées de cellules à raphides qui, en se superposant, simulent de petits faisceaux. Sur ces écailles se produisent de petits poils bi- ou tricellulaires sur lesquels on peut admirablement étudier l’apparition des nouvelles parois. Le méristème primitif passe en longue transition au tissu fon- damental. Les faisceaux de procambium se succèdent très- rapidement. Sont-ce bien tous des traces foliaires? Il est pro- bable que non, les écailles du rhizome étant peu développées et ne possédant jamais qu’un petit nombre de faisceaux. Un épiderme primordial, à petites cellules, se développe d’abord entre les Insertions foliaires. Il est fugace. Au-dessous le tissu reste en division permanente et forme une zone péri- phérique de sclérogène peu limitée en dedans, où elle donne des assises au tissu fondamental. Le tissu fondamental commun, issu du méristème primitif, ne conserve pas longtemps sa faculté de division; par contre, ses éléments se développent beaucoup en longueur et en lar- geur, et c’est ainsi qu'ils assurent la grosseur et l’élongation normale ou anormale du rhizome. La différenciation propre des faisceaux de procambium offre certaines particularités remarquables. Au début un groupe arrondi de procambium à petits éléments uniformes. Les éléments qui sont en avant et en arrière, aux deux pôles radiaux, sont frappés d’un arrêt de développement, ce qui est déjà une différenciation, bien qu’ils conservent leurs minces parois procambiales ; ils sont rendus incapables d’ac- ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 89 croissement. Les éléments médians au contraire s’élargissent et repoussent ces pôles qu'ils éloignent de plus en plus l’un de l’autre. Parmi ces éléments qui s’élargissent, les uns, les futurs vaisseaux, dépassent de bonne heure les autres, tout en gardant leurs parois minces. Ces vaisseaux naissent presque tous à la fois sans qu’on puisse reconnaitre un point de départ pour chaque groupe. Plus tard les petits éléments des pôles posté- rieur et antérieur s’épaississent. Quant aux éléments agrandis qui ne sont pas devenus des vaisseaux, ils demeurent à parois minces ou ne prennent qu’un épaississement analogue aux cel- lules du tissu fondamental. En résumé, on voitapparaitre d’abord un point de (?) phloème vers la partie antérieure du faisceau procambial et un point de (?) trachées dans la partie tournée vers la moelle; puis il y à apparition simultanée de larges vaisseaux indéroulables. Dans les tiges ou rameaux aériens, les faisceaux communs ont des trachées à la partie postérieure. Leur caractère bien spécial est d’avoir plusieurs corps de phloème enveloppés par un anneau de vaisseaux et plongés dans la masse xyleuse. Le développement montre que chaque faisceau provient d’une masse procambiale simple et n’est pas le résultat d’une agglo- mération, comme on l’a prétendu. Au type du Tamus se rattachent tous les Dioscorea et peut- être d’autres plantes voisines. En terminant ici la description des divers types de structure des rhizomes de Monocotylédones que j'ai cités, je n’ai pas la prétention d’avoir épuisé un tel sujet, et bien d’autres particu- larités intéressantes récompenseront encore les anatomistes qui voudront s’en occuper. J'ai recueilli pour le moment assez de faits pour modifier dans une certaine mesure la théorie anatomique générale des Monocotylédones, trop étroite et trop vague, telle qu’elle est généralement admise. 90 A. GUALIL AUD. CHAPITRE IL. DES SYSTÈMES OU RÉGIONS ANATOMIQUES ET DES TISSUS EN PARTICULIER. $ 1: — LES DIVERS ÉTATS, SYSTÈMES ET TISSUS. Je me suis proposé, dans ce second chapitre, d'envisager dans leur ensemble les faits anatomiques que nous venons de passer en revue, de les discuter concurremment avec les idées avancées par d’autres observateurs, et aussi de revenir sur cer- taines questions qui n’ont pu trouver une place suffisante et être développées à l’occasion des exemples particuliers. Ce sera donc à la fois un résumé et un complément, des conclusions si l’on veut. En anatomie générale, 1l y a d’abord une première grande distinction à établir entre l’état formatif ou de méristème pri- milif, et ce qu'on peut appeler l’éfat durable, stable d’un organe (1), comme la tige ou le rhizome. Une seconde grande distinction estencore à faire entre les plantes, relativement peu nombreuses, à grossissement contmu au moyen d’un anneau secondaire d’accroissement survenant après la première année, et les plantes infiniment plus nombreuses où cet anneau n’ap- parait pas et où le grossissement se trouve limité à la première période végétative. N'ayant pas eu à m'occuper de plantes à grossissement continu, je les laisserai un peu de côté dans les considérations qui vont suivre. L'état formatif ou de méristème est à l’organisation adulte exactement ce qu'en morphologie le bourgeon est aux organes de la plante développée. Il contient, soit déjà ébauchée, soit en puissance, toute la structure future. C’est la source commune, jamais épuisée et se renouvelant d'elle-même, des matériaux employés pour un édifice végétal. Malgré cela, le méristème pri- mitif n’exerce pas une prépondérance complète sur l’état du- (A) Voy. Nägeli, Beiträge zur aviss. Bot. 1 Heft, p. 2. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 91 rable, sur l'architecture, pour ainsi parler, des plantes, du moins en ce qui concerne les tiges; et s’il faut remonter jusqu’à lui pour avoir la raison d’être de certains faits anato- miques, il ne faudrait pas lui demander absolument le cadre des tissus de la plante, c’est-à-dire l’indication préalable des sys- tèmes ou régions anatomiques et de leurs rapports, ainsi que l’a fait Hanstein pour les racines, lorsqu'il a distingué, dès l’état de méristème primitif, un dérmatogène, un périblème et un plé- rome, Sources dès l’origine spécifiées de l’épiderme, de la zone corticale et du corps central comprenant les faisceaux et la moelle. Tout le méristème primitif est à peu près à l’état indif- férent et peut se différencier en n’importe quel tissu. En ce qui concerne lallongement des racines, cette idée d'Hanstein, de remplacer le développement au moyen d’une cellule apicale (Scheitelzelle) par un noyau de trois systèmes emboîtés, dont les cellules mères seraient déjà différenciées dès le plus jeune état embryonnaire et sans aucun lien génétique entre elles ; cette idée, dis-je, a été combattue par MM. Nägeli et Schwendener (1) au nom même de l'existence, en partie démon- trée aujourd’hui et en partie probable, d’une cellule apicale dans les racines des Phanérogames elles-mêmes. L’épiderme, la zone corticale, les faisceaux, la moelle des racmes, s’élaborent par degrés de la base vers le sommet, à mesure que le méristème terminal avance et que la cellule apicale ou le groupe de cellules apicales leur fournissent des matériaux. Ce n’est que bien au- dessous du sommet que l’on peut dire, voilà des cellules pour la moelle, pour l’épiderme, pour les faisceaux, etc. ; mais alors c’est déjà l’état durable qui commence. Auparavant on ne peut s’en tenir qu'à cette prévision nécessaire, qui veut que l’épi- derme naisse à la périphérie et les faisceaux vers le milieu. Du reste ces divisions en dermatogène, périblème et plérome, n’ont jamais été pratiques, et l’on n’a jamais pu fixer de limites anatomiqués entre elles. Dans les tiges où l’on a voulu les trans- porter, elles sont encore moins à leur place; car là 1l faut tou- (1) Nägeli et Schwendener, Das Mikroskop, 1877, p. 574. — Nägeli, Commu- nication au Congrès des naturalistes allemands à Munich, septembre 1877. 99 A. GUILLAUD. jours beaucoup compter avec les organes appendiculaires qui introduisent, en partie du moins, un nouveau plan de struc- ture élaboré du sommet vers la base et satisfaisant à d’autres conditions organogéniques, mécaniques et physiologiques. En outre, elles ne tiennent absolument pas compte des méristèmes secondaires dont l'influence est si grande dans les tiges. Dans le méristème primitif on peut distinguer d’abord la partie apicale, avant-garde végétative et réunion d’un moindre nombre de cellules, sous le nom de point végétatif. C’est un mamelon plus ou moins surbaissé ou conique, détaché du reste. C’est dans ce sommet que doit se placer naturellement la cellule apicale, ou le groupe de cellules apicales, si l’on veut en admettre plusieurs; cette question elle-même d’une ou plu- sieurs cellules apicales est pour l’heure impossible à résoudre. Au-dessous du sommet ou point végétatif se place le phyllo- gène. Ge nom, eréé par Mirbel, peut avantageusement servir pour désigner la portion du méristème primitif qui donne successivement naissance aux organes foliaires. Dans les Mono- cotylédones, les feuilles ou les écailles apparaissent au début comme des bourrelets de méristème primitif directement em- boités les uns dans les autres, quise referment au sommet et en- capuchonnent le point végétatif, de même que dans les ovules la primine et la secondine enveloppent la nucelle. Ge n’est que par la suite qu’elles s’écarteront plus ou moins les unes des autres ; mais elles conserveront toujours de ce premier état, à de rares exceptions près, leur mode d'insertion circulaire et engainant. La partie postérieure au-dessous du phyllogène forme, à propre- ment parler, le corps du méristème primitif, qui gagne successi- vement en longueur et en largeur. La limite inférieure du mé- ristème primitif ne peut être fixée avec précision. On peut dire en général qu'il se termine par un plan courbe ouvert vers la base de la tige, c’est-à-dire que sa partie médiane passe plus tètà l’état durable que ses bords, qui descendent un peu plus bas. Ces bords eux-mêmes sont peu à peu rognés au fur et à mesure de la croissance et complétement transformés en tissu durable. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 93 Le méristème primitf est-1l une masse homogène, sans agen- cement de cellules et sans structure? Peut-être dans sa partie supérieure où travaillent les cellules apicales et où s’élaborent les bourrelets des organes foliaires ; mais certainement non dans la partie postérieure ou corps du méristème. Là les éléments, tout en étant à peu près de même forme et de mêmes dimen- sions, sont agencés en séries, en files suivant certaines direc- tions. En dehors, ces files sont perpendiculaires à la surface arrondie du bourgeon; vers le centre, elles se recourbent en bas, puis se perdent; de sorte qu’à partir d’un noyau central elles s’étalent en gerbe sur tout le pourtour. D’un côté elles vont se terminer sous les insertions foliaires, de l’autre elles tombent sur la partie la plus élevée du tissu fondamental différencié. En coupe longitudinale diamétrale, elles forment éventail (1). Cette disposition, bien claire parfois, et que le mode de grossissement premier du bourgeon explique assez, est des plus importantes à connaitre, parce qu’elle rend compte d’un des faits les plus frappants de l’organisation des Monocotylédones, à savoir : la courbure des premiers faisceaux communs formés, des fais- ceaux du premier ordre, vers le centre de la tige. Le méristème primitif ne laisse après lui que deux produits directs : 1° des faisceaux communs ; 2° du tissu fondamental. 1° Antérieurement à toute différenciation et passage du mé- ristème primitif en tissu fondamental durable, sont apparus daus son intérieur les premiers faisceaux de procambium, souvent en si grand nombre, comme dans l’Jris florentina, qu'ils réduisent le méristème primitif non employé par eux à n'être que de minces couches de cellules interposées. On comprend combien il est difficile de juger du point précis, de la marche et du mode d'apparition du procambium. M. Nägeli lui-même, à qui ce genre d'étude est Le plus familier, a jugé de l’apparition des faisceaux de procambium par la marche de la différenciation vasculaire bien postérieure. Il (1) Voy. J. Sachs, Ueber die Anordnung der: Zellen in jüngsten Pflanzén- theilen. Würzburg, 1877. 94 A4. GUILELAUD. pose en principe (1), que la formation vasculaire dans le fais- ceau procambial suit la même marche que la formation du procambium lui-même. Or dans les Dicotylédones il a observé que la production des vaisseaux se fait de haut en bas d’un côté, de bas en haut de l’autre, à partir d’un certain point situé vers la base de la feuille ou à son insertion. La partie caulinaire et la partie foliaure d’un faisceau commun se diffé- rencient en sens opposés. Il en conclut que le procambium est apparu et s’est développé de la même façon. Si ce prin- cipe était général, il faudrait admettre que dans les Monoco- tylédones la formation du procambium a lieu de bas en haut, et de haut en bas, à partir d’un point situé dans l’intérieur de la tige, au niveau de la courbure du faisceau ; car au sommet du faisceau la production vasculaire marche de l'intérieur de la tige vers la surface. Mais M. Nägeli a fait de grandes réserves pour les Monocotylédones, vu le peu d'observations qu'il possédait (2). Il me semble qu’on peut reconnaitre l'apparition de la pre- mière place de procambium par une donnée moins éloignée que celle de la différenciation vasculaire, et plus générale, à savoir : par la grosseur relative au début du faisceau procambial dans ses divers points. Dans ce cas, dans les Monocotylédones comme dans les Dicotylédones, ce serait à l'insertion foliaire, mais plus dans la feuille que dans la tige, dans la base littérale de la feuille, que se ferait la première apparition de procambium, parce que c'est là que le faisceau est d’abord le plus gros. Il marche en- suite très-rapidement de ce point vers la tige, c’est-à-dire de haut en bas, moins rapidement vers le sommet de la feuille, c’est-à-dire de bas en haut. Je ne veux pas dire qu'il y ait un point mathématique d'apparition ; c’est plutôt une ligne plus ou moins longue. Ce qui est certain, c’est que le procambium n’ap- parait pas en même temps d’un seul jet dans la feuille et dans la tige, et qu'il suit une loi de développement subordonnée nm on à certains états du méristème primitif (1) Beiträge zur wiss. Botanik, 1 Heft, p. 34. (2) Ibid., p. 37. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 95 La raison qui, en dehors des faits d'observations, devrait faire admettre le point de départ des faisceaux procambiaux dans la base de la feuille, c’est qu’au moment de leur apparition, la feuille et sa base sont bien plus avancées dans leur évolution morphologique et histologique que la partie du bourgeon cor- respondant à l’insertion. Au début, c’est la feuille qui prend de l'avance sur la tige ; plus tard le contraire se produit. Descen- dant d’une feuille, le faisceau envahit les cellules quise trouvent devant lui et gagne aimsi la région centrale en décrivant une courbe. Il est guidé dans ce trajet par les files cellulaires courbées qui l’amènent peu à peu à la direction verticale. Tout ceci se passe très-rapidement. Il y a alors une sorte d'arrêt relatif dans la marche du faisceau, une fois sa portion mfléchie vers l’axe formée et arrivée à la base du méristème primitif. Suivant l’état des files de cellules au moment de l'entrée d’un faisceau commun dans la tige, 1l sera plus ou moins arqué vers le centre, et cela plus ou moins obliquement. Les premiers fais- ceaux apparus sont aussi les plus rapprochés de l’axe, parce qu'ils sont tombés sur les files supérieures qui les ont conduits dans un point plus médian. Il suffit de savoir quelle est la règle dominante de ces courbures pour s'expliquer tout de suite leurs diverses particularités. Cette sorte d'état fœtal qui se per- pétue ensuite dans l’état adulte a de l’analogie avec ce qui se voit dans les animaux. La courbure de l'aorte, par exemple, n’est explicable que par un certain état embryologique. Un tel système de courbures, une fois établi, est respecté par toutes les différenciations postérieures et par tous les modes de crois- sance qui peuvent survenir dans les tissus ambiants. Que le parenchyme fondamental s’élargisse ou s’allonge, se divise ou non, le faisceau reste en place. Il y a mème des plantes chez lesquelles cet état premier des faisceaux dominetellement, qu’ils paraissent rayonnants comme les files cellulaires qui les ont produits. Les bulbes et tiges globuleuses à sommet très-surbaissé sont dans ce cas. Mohl (1) (1) Mob}, Loc. cit. : Decursus fibrarum fasciculorum in caudice, $ 5. 96 A. GUILLAUD. cite à ce sujet la singulière méprise de Hayne, qui, dans un Corypha cerifera, Palmier à tige grosse et courte où cette dis- position rayonnante des faisceaux est très-frappante, avait cru reconnaître, dans le parenchyme interposé, des rayons mé- dullaires analogues à ceux des tiges de Dicotylédones. La différenciation du méristème primitif en procambium (1) n’est pas autre chose au fond que l'allongement d’un certain nombre de cellules qui ne subissent plus de divisions transver- sales, mais uniquement des divisons longitudinales. Leur lon- gueur augmente continuellement par le fait de l’accroissement général qu’elles suivent, et leur largeur reste stationnaire ou diminue même relativement à la largeur des autres cellules, parce que les divisions successives qu’elles subissent dans ce sens les empêchent de s’élargir. Elles ne prennent d’accrois- sement en largeur que lorsque ces divisions ont cessé. Les files de cellules du méristème primitif avaient déjà une tendance à croître en longueur. La formation du cambium n’est qu’une augmentation de cette tendance, à laquelle se joignent des divi- sions longitudinales actives. Toutes les cellules qui doivent en- trer dans la formation d’un faisceau procambial ne sont pas entrainées à la fois dans ce changement de vie. Autour de quel- ques cellules centrales il s’en ajoute d’autres voisines. Il y a envahissement latéral en même temps que division longitudinale dans le processus évolutif du procambium ; d’où une grosseur relative plus accentuée dans les points du trajet les premiers établis, mais seulement au début, car plus tard l'épaisseur relative change. 2 En dehors de cette formation primitive de procambium, il n’y a plus qu’un seul autre mode de différenciation pour le méristème primitif. Tout ce qui n’est pas employé par ce pro- cambium passe successivement, à la partie postérieure, en un jeune parenchyme fondamental qui conserve plus ou moins longtemps la faculté de se diviser. Cette différenciation se fait par l'agrandissement des cellules, dont le contenu commence (l) Nägeh, doc. ct., p. 2 et 3. — Sanio, Bot. Zeitung, 1863, p. 359. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 97 à ne plus remplir toute la cavilé, par un premier épaississement des parois et par des modifications dans l'agencement des cel- lules. Tout ceci se traduit sous le microscope par un change- ment plus ou moins sensible d'apparence et de nuance. Le ussu devient moins clair. La faculté de division ne s’abolit pas dans un sens pour s’exagérer dans l’autre, comme pour le pro- cambium; elle reste indécise, mais elle est supplantée par la croissance Individuelle des éléments. Suivant le degré de pré- dominance de la croissance individuelle sur la faculté de divi- sion, le passage au tissu fondamental est ou plus brusque, ou plus lent. Un autre fait anatomique indiquant sûrement que le méris- tème primitif est passé à létat de parenchyme fondamental, c’est la formation de cellules cristallifères et à contenu spécial espacées dans la masse. Les cristaux apparaissent dès la sortie du méristème primitif et mdiquent déjà une complication plus grande dans les phénomènes chimiques de la vie végétale. Enfin, le dernier caractère important, c’est la formation de méats intercellulaires qui se remplissent immédiatement d'air et qui, par leur couleur noire, sous le microscope donnent aux tissus déjà différenciés un aspect tout autre, les séparant exactement, à une cellule près, des méristèmes. Quant à la formation des méristèmes secondaires les plus im- portants, tels que le selérogène, Le propériméristème, le central- méristème, elle est complétement indépendante du méristème prinnmtif, moins par le fait d’une séparation toujours très- nette, à cause de certaines apparences de continuité qui sem- blent les y rattacher dans quelques cas, que par la direction des divisions, par l'épaisseur propre qu'ils acquièrent, tandis que le méristème primitif est en voie de disparition, et enfin par le rôle tout nouveau, rèle de perfectionnement qu'ils sont appelés à jouer. Les méristèmes secondaires naissant d’un tissu fonda- mental déjà établi appartiennent à l'état durable; ils peuvent faire défaut. L'état durable commence avec Parrivée du tissu fonda- 6° série, BoT. T. V (Cahier n° 2). 3 7 98 A. GUILLAUD. mental, et, comme nous venons de le voir, lorsque la faculté de multiplication des éléments du méristème primitif ayant beau- coup diminué, ceux-ci commencent à augmenter de dimensions individuelles, et lorsqu'ils n’ont plus, pour ainsi dire, qu'à par- faire cette nouvelle et dernière phase vitale pour amener l’état adulte de la tige. L'état durable, dans sa phase première qui fait suite au mé- ristème primitif, hérite de certaines dispositions de celui-ci et en prend de nouvelles. Il reçoit des matériaux pour quelques régions el en crée souvent de nouveaux, soit pour achever une région commencée, soit pour en établir une nouvelle. Parmi les régions qu'il reçoit au complet du méristème primitif il y a la zone corticale et la région centrale où médullaire. Une région qu'il crée de toutes pièces est la zone intermédiaire; une autre qu'il perfectionne est le système des tissus cutanés. Les fais- ceaux sont très-souvent encore renforcés par des apports secon- daires. Dans l’état durable il faut distinguer deux choses : des svs- tèmes ou régions anatomiques et des tissus. M. Sachs a justement fait faire un grand pas et jeté beaucoup de clarté sur l'anatomie végétale en fondant ses trois systèmes : cutané, fasciculaire et fondamental. Chacun de ces grands groupes peut ensuite comporter quelques sous-régions. C'est ainsi que le système fondamental se trouve le plus souvent seindé en deux régions de tissu fondamental, la zone corticale et la moelle, par Papparition d’un méristème circulaire qui n'est pas une zone accroissement et qui donne naissance à une zone intermédiaire, à tissus bien distincts. C’est ainsi encore que le faisceau se partage partout et toujours en deux sous-régions, le phloème et le xylème, très-nettement distinctes par leurs tissus, et souvent en trois, lorsqu'’au pourtour des deux premières viennent s'ajouter des masses de liber, formant un anneau de ussu prosenchymateux et épaissi. Ges systèmes ne sont pas établis à priori; 1ls reposent tous sur le fondement le plus solide qu'on puisse leur donner, les faits du développement. Une région ou système anatomique, peut-on dire, est un ensemble ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 99 de tissus ayant même origine dans un cambium ou dans un méristème, doué d’une évolution isolée et particulière, et don- nant constamment certaines sortes de produits similaires ; c’est- à-dire que les mêmes tissus se répètent dans les mêmes sys- tèmes, les uns exclusifs à certains, les autres répandus dans plusieurs. Leur nombre est fixe et réduit, et leurs rapports de position ne varient pas. Par contre, un tissu, en anatomie végétale, ne signifie jamais qu'un ensemble, amas ou couche d'éléments sinon semblables, caractérisés du moins par la prédominance d’une forme donnée et composant un à un, deux à deux, ete., les systèmes ou les organes. Leur nombre est multiple et variable, de même que leurs rapports réciproques de position. La notion de tissu doit aussi être liée à celle d’origine commune et de développe- ment commun, aussi bien qu'à celle de caractères extérieurs, identiques d'éléments, réunis en groupe notable et uniformé- ment agences. En somme, nous aurions frois grands systèmes et cinq régions anatomiques (le système fondamental se subdivisant en trois), en nous fondant sur le développement : 1° le système cutané (Hautgewebe, Sachs) (pro parte sclérogène) ; le système fonda- mental; 2 zone corticale (méristème primitif); 3 zone inter- médiaire (propériméristème); 4° moelle (méristème prünitif) ; 5° le système fasciculaire (procambium). L’énumération des üssus viendra plus tard. Il est imutiie de faire remarquer que toutes ces régions ont un développement et une différenciation indépendante, très-avancée pour les unes et dans certaines plantes, s’arrêtant en route pour les autres. Chacune d'elles a des tissus spéciaux qui lui appartiennent en propre et qui sont en nombre variable : tels que l’épiderme, le sclérenchyme, etc., pour le système cutané; le méristémi- forme, la gaine fasciculaire, ete., pour la zone intermédiaire ; les parenchymes xyleux, phloeux, les vaisseaux, ete., pour le faisceau. Beaucoup de ces tissus sont d’origine et de formation secondaire. Deux régions seulement, la zone corticale et le 100 A. GUELLAUR, corps central, n'ont qu'un tissu unique, le parenchyme fonda- mental commun, qui dérive en majeure partie du méristème primitif dont il est la fin directe. Une petite portion de ce parenchyme fondamental, dans Les plantes dont l’accroissement n'est pas illimité, est de formation secondaire comme les autres tissus et peut dériver de n'importe quel méristème. De telles divisions sont essentiellement anatomiques et fon- -dées, je le répète, sur l’histoire du développement. Il y a une autre manière d'établir des systèmes dans la structure des plantes, c’est de se placer au point de vue physiologique, ainsi que l’a fait M. le professeur Schwendener lorsqu'il a établi et développé le principe mécanique des éléments épaissis. Tous ces éléments, dits mécaniques, sont groupés par lui en un système particulier, quelle que soit leur provenance; dans un chapitre morphologique consacré à leurs diverses formes, il a même fait ressorur leur parenté en faisant valoir les états de passage du collenchyme, par exemple, au üissu Hbérien, du tissu libérien au libriforme, etc. Avec un tel point de départ il me semble qu'on arrive plutôt à constituer des appareils fonc- tionnels comme on en reconnait en zoologie, tels que Fappareil de la locomotion, l'appareil de la station, de latitude ou de résistance aux chocs et tractions, l'appareil protecteur externe ou cutané, elc., que de véritables systèmes de tissus. IT y a bien des cas, en zoologie même, surtout chez les animaux inférieurs, où le système et lPappareilse confondent: par exemple, le système musculure et l'appareil locomoteur, le système cutané et lap- pareil protecteur externe. Mais les deux idées sont toujours dis- tinctes el, en général, dans les animaux supérieurs un appareil utilise plusieurs systèmes anatomiques. La station et Pattitude, tant des plantes que des animaux, sont une fonction qui exige un appareil de soutien, mécanique en un mot. Tous les tissus épaissis des plantes jouent ce rèle mécanique et constituent un appareil de soutien, de résistance aux chocs extérieurs, aux diverses tractions ordinaires où accidentelles auxquelles une plante peut être soumise, mais ne forment peut-être pas un système anatomique comme nous devons l’entendre. Gela dit ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 101 sans vouloir, bien entendu, combattre l'idée du principe méca- nique dans les plantes, qui est une idée neuve, brillante, que M. Schwendener aura eu le grand honneur de développer le prenuer. $ 2. — SYSTÈME CUTANÉ. M. Sachs (1) à eu grandement raison lorsqu'il a réuni dans un seul groupe, sous le nom de Hautgewebe (tissu cutané), toutes les couches tégumentaires de lécorce distinctes du tissu fon - damental sous-jacent. Ce système comprend des tissus mul- tiples, tels que Pépiderme, le hége, ete., jouant principalement un rôle protecteur à la périphérie et issus de méristèmes par- ticuliers, développés plus ou moins tard. Dans les rhizomes de Monocotylédonesil se développe souvent, immédiatement sous l’assise périphérique et sous les insertions foliaires, un méristème plus puissant que les autres, qui par la suite fournit surtout du sclérenchyme. Je l'ai désigné sous le nom de selérogène. Mais il ne faut pas oublier que, dans quel- ques plantes, ce méristème existe sans donner du scléren- chyme; les cellules conservent leurs parois minces, incolores. Du reste, ce méristème se trouve pour ainsi dire Hé à lassise extérieure qui doit former l’épiderme. — Ajoutons que la façon dont se développent les feuilles influe beaucoup sur la nature de l’épiderme des tiges. Les Insertions foliaires, toutes circu- laires, se touchent 2mmédiatement au début, de façon à ne pas laisser entre elles l'épaisseur d’une cellule. Get état de choses persiste jusqu’à ce que la feuille soit déja bien formée, et longtemps après la différenciation du méristème primitif. La couche épidermique fixée ne peut done être en continuation avec la couche superficielle du sommet végétatif qu'en con- tournant et doublant les feuilles. D'un autre côté, lorsque les bases des feuilles s’écartent, lépiderme des entre-nœuds formés, ou de la tige, se développe à mesure sur place, aux dépens d’une partie de la couche épidermique encore à l’état lormatif de la face inférieure de la feuille. (1) Trailé de botanique. 102 A. GUILLAUD, Tous ces faits tendraient à établir pour tout le système cutané un méristème (origine unique, à marche centripète et dont la dernière activité serait la formation du liége (phellogène). Un mot conviendrait tout à fait à ce méristème régional, celui de dermatogène, si déjà M. Hanstein ne s’en était servi dans un tout autre sens, comme on sait. Je n'ai pas assez d'autorité pour faire prévaloir cette nouvelle acception du mot et de la chose, et je continuerai à me servir du mot sclérogène dans un sens restreint. Quelques détails plus précis sur le mode de développement du sclérogène, ? du dermatogène. Ce méristème, qui donne naissance au système cutané (du moins en partie), se développe partout dans des conditions premières identiques, qui sont les suivantes : sur le sommet végétatif, arrondi ou allongé, s’implantent circulairement et perpendiculairement à sa surface un certain nombre de feuilles, disons-nous, emboitées les unes dans les autres et se touchant immédiatement. Sous ces feuilles se différencie aux dépens du méristème primiuf le tissu fondamental cortical, qui commence déjà à apparaitre sous l’avant-dernière ou la deuxièmeavant-dermière ; cette différenciation s’avance en même temps dans les feuilles, en commençant par la partie dorsale de leur insertion, de sorte que le milieu de leur épaisseur est occupé par du tissu fondamental (deux ou trois assises), tandis que sur leurs deux faces une assise superficielle et une sous- assise persistent en état de prolifération ou de méristème. Au lieu d'insertion de ces feuilles, pendant que le tissu fondamental médian de chacune communique largement avec le tissu fonda- mental de la zone corticale, le méristème de la face supérieure de l’une se recourbe et se continue avec le méristème de la face inférieure de celle qui vient au-dessus : soit deux assises qui se doublent en s'appliquant immédiatement les unes sur les autres à l'angle de séparation de deux feuilles. Tel est létat premier de tous les bourgeons de rhizomes; d’épiderme et de zone dermique, il n'en saurait être question encore; matériel- lement ils n'existent pas; une épaisseur de cellule sépare à ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 103 peine deux feuilles, et dans ces feuilles elles-mêmes l’épiderme n'est pas établi, car lassise superficielle se divise comme l’assise sous-jacente et ne représente qu'un jeune tissu très- actif. Les phénomènes qui suivent élant variables suivant les plantes, nous allons prendre des exemples : Dans certains Carex, C. hirta par exemple, à mesure que la tige grossit et s’allonge, sa surface prend là forme cylin- drique, et les feuilles s’écartent et se distribuent sur cette sur- face, en gardant leur inclinaison première, pour ainsi dire, par rapport à l’axe de la tige. Elles étaient insérées perpendiculai- rement à la surface conique du bourgeon, par conséquent for- maient un angle aigu, ouvert en haut, avec son axe, tandis que la partie de la surface du bourgeon occupée par elles formait au contraire, comme cette surface elle-même, un angle aigu, ouvert en bas, avec ce même axe. Dans l’état développé et lorsque la surface de la tige est devenue cylindrique, parallèle à l'axe, la direction des feuilles et leur surface d'insertion n’ont pas changé dans le transport latéral qu’elles ont subi et conservent leurs rapports premiers avec l'axe. Quant à lintervalle plus où moins grand qui sépare deux feuilles, lentre-nœæud, on peut observer que tout le tissu superficiel, lépiderme et les couches sous- jacentes, n’est que la continuation des assises superficielles de la face inférieure de la feuille, le résultat de leur élongation. La cellule qui occupait l’angle de réunion de lassise super- ficielle inférieure d’une feuille avec assise superficielle supé- rieure de celle venant au-dessous reste avec cette dernière et ne l’abandonne pas, pendant que les cellules voisines de l’as- sise superficielle inférieure citée se multiplient et finalement forment la couche superficielle de lentre-nœud. En un mot, des deux branches de langle, la supérieure s’arrondit de plus en plus et s’écarte, le sommet restant en place. Plus tard, lorsque l’élongation est avancée, cette branche, qui n’était autre primitivement que la face inférieure de la première feuille, se coude, un pli se forme à un certain point qui fixera la nouvelle place d'insertion de cette feuille, et dès lors les deux feuilles, au 104 A. GUIELAUD. lieu d’un angle, sont séparées par une droite, à savoir la surface de lentre-nœud. Comme lassise superficielle épidermique, l’assise de méri- stème sous-jacente s’est développée en longueur, et de plus elle s’est multipliée beaucoup de dehors en dedans. Au lieu d’une seule assise sous-épidermique, nous avons à un moment donné une couche épaisse, toujours à Pétat de méristème. De plus, on se rappelle qu'au début le tissu fondamental des feuilles com- muniquait largement avec le tissu fondamental cortical; plus tard, cette communication est interceptée par du méristème qui s'établit entre les couches méristématiques superficielles de chaque entre-nœud et qui les réunit les unes aux autres bout à bout, de sorte qu'un revêtement complet et épais de méristème secondaire, ou de selérogène, enveloppe la tige. Dans le Canna indica et l'Acorus Calamus, 1 se forme de la même façon un selérogène puissant de 6-19 cellules d'épaisseur. Dans Pris amæna, dans le Triglochin maritimum, le sclé- rogène naît par un processus au fond semblable au précédent, mais avec les différences de détails suivantes : les feuilles s’é- cartent moins sur la tige, leur base elle-même se dilate beau- coup; la surface de lentre-nœud parait toujours la continuation directe de la face superficielle inférieure des feuilles. La couche sous-jacente à Passise épidermique est moins épaisse, trois à quatre cellules au plus. Comme la base de linsertion foliaire s’est 101 agrandie, on peut voir que le méristème, qui intercepte toute communication entre le tissu fondamental de la feuille et celui de la zone corticale, et qui réunit entre eux les revête- ments méristématiques des entre-nœuds, part de Pangle pri- mitil de séparation des feuilles, du groupe de cellules qui se rattachent à la couche superficielle supérieure de chacune d'elles, et qu'il descend de là jusqu'à la rencontre du méri- stème d’entre-nœud formé aux dépens de la couche superfi- cielle mférieure. Le groupe de cellules correspondant à l’angle primitif de séparation des feuilles est celui qui se multiplie le plus. Dans l’Jris florentina, les feuilles, par une circonstance ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 1405 curieuse, ne s'écartent pas et demeurent en contact comme dans le jeune bourgeon. L’angle de séparation adulte est le même que l’angle de séparation primitif. La surface d'insertion de la feuille seule s’est étendue et a participé à Pélongation du rhizome. La formation du sclérogène part encore ici du groupe de cellules situées à l’angle même et va de là rejoindre l'angle d'insertion situé au-dessous, en traversant la base de la feuille par envahissement et transformation en méristème de cellules du tissu fondamental, qui se dédoublent ensuite par divisions propres. Il existe donc ici un sclérogène, bien qu'il n’y ait jamais ni épiderme, ni surface libre à la périphérie du rhizome. Dans beaucoup d’autres rhizomes, enfin, le sclérogène n’acquiert pas cette importance ou ne se développe pas du tout ; il n'y à que le méristème épidermique. Au début, ces rhi- zomes ne diffèrent pas des autres ; les jeunes feuilles se touchent immédiatement, leur tissu fondamental médian communique avec celui de la zone corticale, leurs faces ont chacune deux assises de méristème qui se rejoignent aux angles, d’une feuille à l’autre. Lorsque vient l’élongation de la tige, les cellules angulaires restent en place, et ce sont des cellules appartenant à la face inférieure des feuilles qui donnent naissance aux assises superficielles des entre-nœuds. Mais ici assise sous- jacente à l’épiderme, au lieu de donner naissance à une couche de méristème secondaire, se transforme elle-même en tissu fon- damental ; l’assise superficielle reste seule à l’état de méris- ième, se multiplie par des divisions transversales et longitu- dinales, mais non tangentielles, de sorte qu’il n’y a jamais qu'une assise de méristème superposée au tissu fondamental cortical. Inutile de dire que ce dernier communique toujours avec le tissu fondamental des feuilles dont 1l n’est jamais séparé, et que cette assise de méristème donne lPépiderme. Un tel pro- cessus s’observe dans le Convallaria maialis. Ainsi, dans les rhizomes de Monocotylédones, le seléro- gène, lépiderme et les couches dermiques sous-jacentes, s’il en existe, sont sous la dépendance directe des feuilles, tirent 106 A. GUILLAUD. leur origine de la face inférieure de celles-ci, et ne proviennent point directement du méristème primitif. La feuille exerce son influence sur la structure anatomique des tiges, non-seulement par les faisceaux fibro-vasculaires communs, mais aussi par les tissus tégumentaires. Le selérogène fournit avec le méristème épidermique la zone dermique du début, c’est-à-dire toute la zone dermique pour la majorité des plantes. Dans quelques-unes seulement cette première zone est renforcée par la suite, et cela relativement tard, par une production accessoire, le liége, qui naït dans le tissu fondamental cortical, immédiatement au-dessous des assises dermiques développées. On sait que le méristème secon- daire, qui préside à la formation subéreuse, a reçu de M. Nägeli le nom de phellogène. Le phellogène intervient comme dou- blure, comme couche de renforcement du derme et du sciéro- gène, ou bien encore comme couche de remplacement, lorsque le derme se détruit, normalement ou accidentellement, Ces deux cas de production du liége sont bien à distinguer. Suivant la division classique le système cutané peut se par- tager, à l’état adulte, en épiderme, hypoderme (collenchyme, méristémiforme, sclérenchyme) et périderme (Hége), suivant les tissus existants. Indiquons maintenant les caractères généraux de ces tissus, tels qu'ils ressortent des plantes que nous avons étudiées. Épiderme— Le véritable épiderme n’est jamais représenté que par une seule assise de cellules, plus ou moms allongées suivant l’axe de la tige. Ces cellules ont presque toujours reçu postérieurement des cloisous transversales et longitudinales, ce qui fait qu’on doit y distinguer des cellules primitives à parois terminales obliques et des cellules secondaires, contenues dans les premières en plus ou moins grand nombre. Les cloisons nouvelles sont souvent minces. Je n’ai jamais observé, dans les cellules de lépiderme des rhizomes de Monocotylédones, de cloisons tangentielles qui établiraient un épiderme à deux ou plusieurs assises, et je suis fondé à croire qu’un tel épiderme n’y existe pas. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 107 Les cellules du véritable épiderme sont toujours bien dis- tinctes de forme et de dimensions des éléments sous-Jacents. Le faux épiderme qui remplace parfois le premier qui à dis- paru, à des cellules irrégulières, divisées ou non en divers sens. Ce dermer seul peut acquérir deux et plusieurs assises d’é- paisseur. Un caractère assez constant dans le véritable épiderme, c’est la présence de gros stomates, généralement en saillie. Si les cellules primitives de l’épiderme ont subi un certain nombre de cloisonnements, l’ouverture des stomates est longi- tudinale et située au milieu d’un appareil propre de cellules. Si les cellules de l’épiderme ne se sont au contraire que peu divisées, le stomate n’a que ses deux cellules de bordure et son ouverture est transversale. La cuticule qui revêt l’épiderme est en général épaisse. Elle peut pénétrer entre les cellules. Son meilleur réactif est la solution alcoolique d’aniline qui la colore en beau rouge et permet d’en fixer les limites avec la plus grande précision. Le faux épiderme à ordinairement toutes ses parois cuticularisées ous ubérifiées. Les productions épidermiques sont nulles dans les rhizomes. Tissu fondamental. — Le parenchyme fourni au tissu fon- damental externe par le selérogène est ordinairement limité à quelques assises qui se confondent avec la zone corticale. Mais parfois, lorsque le sclérenchyme manque, presque tout le sélérogène se transforme en une couche assez épaisse de tissu parenchymateux qui est distincte du tissu de la zone corticale. Méristémiforme.— Dans certaines Aroïdées, M. Van Tieghem a signalé souvent une division de la région externe en deux sortes de parenchyme ; Mohl aussi dans certains Palmiers. Dans l’Acorus Calamus et le Ganna indica, nous avons retrouvé le même fait. Dans ces plantes 1l est de toute évidence que la partie externe de parenchyme différente de l’autre dérive d’un méristème sous-épidermique occupant la place du sclérogène, ou sclérogéne lui-même. Au début, on voit même la zone de parenchyme cortical issue du méristème primitif et dont les 108 A. GUILLAUD. cellules sont déjà grandes, bordées de deux méristèmes en très- orande activité, le sclérogène en dehors et le périméristème en dedans (Acorus Calamus L.). En outre, dans cette dernière plante les caractères différentiels des deux parenchymes sont bien plus accusés à cause des grandes lacunes et méats qui envahissent la véritable zone corticale. Les cellules de méristémiforme issues du selérogène sont plus petites, à parois plus réfrmgentes, se touchent sans méats. Elles sont généralement superposées en files longitudinales, n’ont presque point de cellules cristallifères ou à contenu spécial, surtout dans leurs assises externes formées les der- nières (Acorus Calamus, Ganna indica, etc.). Collenchyme.— Au lieu de donner du parenchyme fonda- mental ordinaire, le sclérogène peut produire du collenchyme, c’est-à-dire cette sorte de parenchyme dont les cellules, épaissies dans les angles, peuvent se gonfler sous l'influence des réactifs, de Peau, de la potasse, par exemple. Le Paris quadrifolia a du collenchyme en dehors. Sclérenchyme. — Le tissu auquel nous avons spécialement réservé ce nom forme une couche sous-épidermique plus ou moins épaisse de petites cellules fortement épaissies, alternant entre elles en coupe transversale, mais superposées en petites files dans le sens longitudinal. Dans les rhizomes de Monocotylédones et leurs analogues, ce tissu acquiert un grand développement normal. L’épaissis- sement qui caractérise ses cellules n’est pas accidentel, secon- daire, c’est-à-dire survenu dans un état adulte stable. IT les envahit immédiatement à leur sortie de l’état de méristème et se produit rapidement. Get épaississement est uniforme et de même nature sur tous les points des parois. Il est bien distinct des faux selérenchymes, ou tissus ultérieu- rement sclérifiés, qui ne reçoivent leur épaississement que bien longtemps après leur naissance, et pour aiusi dire au moment de leur mort. Ces faux sclérenchymes ne constituent presque jamais des couches régulières. Le plus souvent ce sont de petits groupes ou des éléments isolés. L’épaississement survenu est ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 109 d'une nature différente de celle de la paroi antérieure. Les parois des vraies cellules scléreuses sont uniformément colorées par la solution alcoolique d’aniline; dans les fausses cellules scléreuses la paroi première et l’épaississement ajouté ont des nuances de coloration très-distinctes, ce qui indique tout au moins des états chimiques divers. Un autre caractère des vraies éléments scléreux parenchy- mateux, c’est d'avoir peu ou point de ponctuations. Quand il y en a, elles sont petites en comparaison des larges ponctuations ou raies de certains autres éléments épaissis. Liége. — Le liège se développe assez souvent dans les rh1- zomes et toujours tardivement, au moyen d’un méristème ou phellogène issu du tissu fondamental. Sa puissance est des plus variable. Lorsqu'il se produit au-dessous et à l'abri du sclé- renchyme, il s’organise alors en véritable tissu, de plus en plus épais et centripète par son mode de formation (ris floren- tina L.). Lorsqu'il n’est protégé par rien, qu'il est en contact direct avec les nulieux, il se développe de la même façon ; mais comme 1l se détruit en dehors à mesure, il n’en reste jamais qu'une mince couche, revètue des débris des cellules mortifiées. La formation de liége peut être localisée à certains points de la périphérie, en petits amas isolés (Tanus communis) et vis-à-vis des nœuds seulement (Chameædorea elatior M.). Dans les rhizomes même où 1l forme un revêtement complet, il est toujours plus épais sur un côté que sur l’autre, sur la face inférieure principalement. La production des parois subéreuses se fait de dehors en dedans; elle est centripète; la paroi la plus Jeune est toujours la plus interne et ressemble en tout aux précédentes. La solution alcoolique d’aniline colore fortement les parois subéreuses en rouge, si ces parois sont encore vivantes et ne se sont pas noircies et mortifiées. Dans ce dernier cas l’absorp- tion d’aniline n’a plus heu. 110 A. GUILLAUD. € S 3. — ZONE CORTICALE. La zone corticale est plus spécialement la continuation di- recte de la partie périphérique du méristème primitif, de même que la moelle est la continuation de la partie centrale de ce même méristème. C’est par Parrivée du périméristème divisant la masse ou le système du tissu fondamental en deux portions, plus ou moins égales suivant les espèces, que la zone corticale et la moelle sont en même temps délimitées. Le propériméristème n'apparait-1} pas, comme dans le Tanus communis L. (rhizome), etn'y a-t-1l pas d’anneau de faisceaux, la zone corticale et la moelle se confondent. Apparait-l, au contraire, mais sans laisser de produits persistants spéciaux (autres que du tissu fondamental), comme dans le Polygonatum vulqare, 1 n'y a plus, pour ainsi dire, entre les deux régions, qu’une limite vague jalonnée par les faisceaux du cercle externe. Inutile de répéter que rien, dans Pétat de méristème primitif, n'indique à Pavance la limite en question. Ainsi donc l’origine de la zone corticale est dans la partie périphérique du corps de méristème primitif et dans le tissu fondamental, qui en est la suite. Une petite portion, en dehors seulement, peut provenir d’un méristème cutané secondaire. Sa forme est toujours celle d’un anneau régulier, également épais dans tout son pourtour, ou plus épais à la face supérieure des rhizomes qu'à la face inférieure, comme dans l’{ris floren- tina L. Sa! composition est des plus simples. Souvent ce n’est que du tissu fondamental uniforme, à grandes cellules abondam- ment remplies de fécule. D’autres fois elle contient des fais- ceaux fibro-vasculaires disséminés, comme la zone centrale, mais en moins grand nombre. Son rôle est un rôle de pro- tection et de réservoir alimentaire. Le lissu fondamental externe a les mêmes caractères que le tissu fondamental interne. Les éléments sont les mêmes, et ils ont ce caractère général d’avoir çà et Ia, dans leur masse, des cellules spéciales renfermant des cristaux ou un contenu gra- ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 111 nuleux spécial. Parfois, cependant, les cellules du tissu fon- damental externe se distinguent par des prolongements spéciaux, comme dans le Scirpus lacustris L. Une évolution curieuse de ce tissu, c’est lorsqu'il passe peu à peu à l'extérieur en tissu subéreux bientôt détruit. Toute la région corticale disparait par ce procédé. Il peut y avoir encore mortification partielle de cette zone (Asparaqus officinalis), les cellules restant en place, ou mortification totale avec désagré- gation. La zone centrale, la zone intermédiaire et les faisceaux forment alors un cylindre libre dans une gaine d’épidérme qui résiste à la destruction $ 4. — ZONE INTERMÉDIAIRE. La zone inmtermédiure (= verholzte Verdichungs-oder Cam- biumring Schacht (1); Holzcylinder Karsten (2); Scheide- gewebe, Aussenscheide Samio (3); zone génératrice Van Tie- ohem (4), etc.), qui, dans les rhizomes arrivés à leur complet développement, sépare ordinairement la moelle de lPécorce, forme une bande annulaire plus ou moins large, englobant les faisceaux centraux les plus externes, ou bien située entre eux et un peu en dehors; dans tous les cas, elle est très-distincte du reste du système fondamental. C’est une zone bien connue depuis longtemps de tous les anatomistes, et qui n’est même pas spéciale aux Monocotylédones. Elle se retrouve dans nombre de plantes appartenant aux grandes familles des Dicotylédones, telles que les Ghénopodées, les Synanthérées, etc., plantes dont l'accroissement cesse au bout de la première année. Elle se montre quelquefois aussi dans des plantes à accroissement continu; là elle est plus tard disloquée et rompue par le fait de cet accroissement. Mohl, M. Sanio, et plus récemment (1) Lehrbuch der An. und Phys., Lt. 1, p. 296-507, (2) Die Vegetationsorgane der Palmen, 1847. (3) Bot. Zeit., 1863, p. 372 et 384; et 1864, p. 222. (4) Recherches sur la structure des Aroidées (Ann. sc. nat., Bot, 5° sér., 1866, t. VI. 112 A. GUBLE AU. M. Schwendener, en ont cité divers exemples remarquables dans cet embranchement. L'origine, la nature et le rèle de cette zone ont été l’objet de longues discussions, soit à l’occasion des Monocotylédones, soit des Dicotylédones. Tant qu'on n’a pas distingué entre les divers tissus formatifs, c’est-à-dire entre les cambiums d’une part, et les simples méristèmes de l’autre, il a été toujours dif- ficile de se faire une opinion nette sur ce sujet, toujours com- pliqué, d’ailleurs, de la question de l’origine des premiers faisceaux fibro-vasculaires dans le bourgeon. La plupart des auteurs déjà cités font jouer un très-grand rôle au périméristème dans l’organisation des tiges, et infi- niment plus grand qu'il n’est en réalité ; ils en font pro- venir tous les faisceaux, ainsi que le tissu fondamental (rayons médullaires) qui les sépare; ce qu'il en reste plus tard d’une façon apparente constitue la zone intermédiaire, limite entre l'écorce et la moelle primaires. C’est ainsi que, selon Karsten (1), Schacht (2) et Mohl (3), un anneau de cambium se confondant au sommet de la tige avec le parenchyme primitif sépare d’abord la moelle de l'écorce; dans cet anneau naissent les faisceaux fibro-vasculaires. Dans les Monocotylédones notamment, cet anneau, en se déplaçant vers l’extérieur, abandonne succes- sivement dans la région centrale les faisceaux qu'il produit, jusqu'à ce que son activité s’éteigne ou qu'il se lignifie. M. Hanstein (4) pensa d’abord que le sommet végétatif, consis- tant en cambium, se différenciait en une partie externe passant au tissu durable, et en un cylindre central de cambium passant lui-même, par la suite, à l’état de tissu fondamental, à l'exception de certains points qui persistaient en cambium et formaient les faisceaux. Ceux-c1 restaient réunis entre eux par de faibles ponts de tissu cambial; de là un anneau de cambium. (t) Loc. cit. (2) Die Pflanzenselle, p. 246. (3) Bot. Zeit., 1858, p. 85 et suiv. (4) Plantarum vascularium folia, caulis, radix (Diss. inaug., 1848, p. 44). ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 113 Plus tard (1) il modifia son opinion, et fit naître les faisceaux dans le parenchyme primitif même, et ce n’est que par la suite qu'ils étaient réunis par des ponts de cambium. Gette dernière donnée se rapproche plus de la vérité. M. Nägeli (2), à qui nous devons la distinction si impor- tante des méristèmes et du cambium, a, le premier, exposé en détail un ensemble d'idées toutes différentes et bien plus exactes. Avec lui, un grand pas a été fait. Les faisceaux naissent tous isolément dans le méristème primitf; plus tard seulement ils se trouvent réunis en anneau complet par suite de Parrivée de l’anneau ordinaire de cambium, ou encore par suite de la persistance du méristème primitif et de divisions actives entre eux; mais le plus souvent le méristème primitif se transforme partout en tissu fondamental, aussi bien entre les faisceaux que dans l'écorce et la moelle. Pour ce qui est des Monoco- tylédones (3), il dit notamment que, dans le Chamædorea elatior Mart., la division des cellules du parenchyme cesse à peu près en mème temps sur tous les points de la section transversale, et qu'il ne peut être question, pour cette plante, d’anneau d’accroissement ou d’anneau cambial (Verdickungs- oder Cambiumring de Schacht) ; mais que chez d’autres Pal- miérs cet anneau n’est sans doute rien autre que du méristème primitif qui persiste à la limite entre la moelle et l'écorce, et qui se différencie un peu plus tard en méristème secondaire et en faisceaux, de la même manière que dans le milieu de la tige, phénomène qui se retrouve dans les racmes de Pandanus. L'anneau de méristème ou le périméristème qui sépare la moelle de l’écorce n’est, d’après lui, qu'une couche annulaire de méristème primitif qui, en dehors des faisceaux, persiste à l’état d'activité formatrice ; 1] peut durer aussi longtemps que la vie de la plante dans le type du Calodracon Jacquini Güpp., ou des Dracæena. (1) Unters. über d. Bau und d. Entwickelung der Baumrinde, p. 8 et 89. @) Beiträge zur wiss. Botanik, 1 Heft, p. 1-20. (3) 1bid., p. 21. 6* série, BoT. T. V (Cahier n° 2). 4 8 114 A. GUILLAUD. Entre ces deux groupes d'opinions très-tranchées, Sanio (1) émet une théorie et cherche une vérité intermédiaire qui ne me parait pas très-claire. I fait d’ailleurs, comme Schacht et Mohl, jouer un rôle prépondérant à l’anneau d’accroisse- ment. Dans PEvonymus latifolius (2), cet anneau, d’après lui, commence d’abord ‘en quatre points (répondant plus tard aux faisceaux fibro-vasculaires), qui s’élargissent par la suite et marchent à la rencontre les uns des autres à travers une bande de tissu à cellules larges, mais cependant encore distinctes de celles de la moelle et de lécorce; ces points finissent par se réunir en un anneau complet. Il arrive ici que les premiers vaisseaux et les premiers éléments de liber apparaissent avant la fermeture complète de l’anneau d’ac- croissement ; en un mot, que la différenciation commence dans les points où se trouveront les faisceaux avant l'achèvement de l’anneau lui-même. Dans l’Ephedra monostachya (3), par contre, il a observé que l'anneau d’accroissement formé le premier et issu directement du parenchyme primitif, avec lequel il se continue, se différenciait en faisceaux de cambium et en tissu intermédiaire. Il pense que l’anneau d’accroisse- ment, même en commençant par les faisceaux, devient plus tard homogène et est un point de départ nouveau, primitif, pour les tissus qui en dérivent. Ainsi (4), dit-il, Nägeli aurait raison, en tant que la formation de l'anneau d’accroissement apparait d’abord en certains points qui, à la vérité, doivent devenir des faisceaux de cambium, pour s'étendre ensuite tangentiellement jusqu’à la formation d’un anneau complet; il aurait tort, par contre, en pensant que la transformation du parenchyme primitif en cambium n’a lieu qu'à la place où doivent se trouver les faisceaux, et que le parenchyme primitif imterposé ne subit pas de divisions avant (1) Vergleichende Unters. über d. Zusammensetzung d. Holzkôrpers, in Bot. Zeit., 1863, p. 357 et suiv. (2) Ibid., p. 360. (3) 1bid., p. 371. (4) Ibid., p. 382. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 115 d’avoir formé les rayons médullaires, et en regardant le paren- chyme qui sépare les faisceaux chez les plantes herbacées comme directement issu du méristème primitif et comme iden- tique avec celui de la moelle. Karsten, Schacht, Mohl, de leur côté, auraient entièrement raison de dire que les faisceaux sont réunis en anneau, et qu’une formation de cellules qu’on doit distinguer avec soin précède leur apparition et en est indé- pendante : cette première formation est ce qu'ils appellent anneau d’accroissement ou anneau de cambium ; mais ils n’ont pas vu que parfois la formation des faisceaux, et même la dif- férenciation de leurs éléments, commencent avant le complet achèvement de l’anneau d’accroissement. C’est pourquoi la donnée qu'un anneau complet de cambium précède toujours la formation des faisceaux, ne correspond pas, dans sa géné- ralité, à la nature des faits. Cette manière d'envisager les choses soulèverait contre M. Sanio plusieurs objections si l’on ne savait aujourd’hui, à n’en pas douter, que les faisceaux naissent plus tôt dans le méristème primitif, et non dans l’anneau dit d’accroissement, qui n’est que postérieur à eux. Dans les Monocotylédones, M. Sanio a examiné les Ruscus Hy- poglossum et racemosus (4), et là aussi il conclut, avec Karsten et Mohl, à l'existence d’un anneau d’accroissement bien plus actifencore que dans les Dicotylédones, et dans lequel se forment successivement, de dedans en dehors, les faisceaux cambiaux. Le parenchyme interposé aux faisceaux, qui résulte du même processus, n’est pas identique avec celui de la moelle, puisqu'il nait de l’anneau d’accroissement, tandis que ce dernier est issu du parenchyme primitif. A la fin, les dernières cellules de cet anneau, lorsque tous les faisceaux sont formés, commencent à s’épaissir et à se transformer en anneau d'éléments solides, séparant exactement l’écorce du système fibro-vasculaire, sans mème attendre que les derniers faisceaux soient compléte- ment élaborés. C’est à un tel tissu de même provenance que (1) Loc. cit., p. 384. 1416 A. GUILLAUD. M. Sanio a déjà donné, dans les Dicotylédones, le nom de Schei- degewebe, qui conviendrait encore ici, mais auquel, en raison de son état particulier, il est préférable de donner un nom spécial. Le nom d'anneau d'accroissement lignifié (verholiter Verdickungsring), employé par Schacht, est tout à fait acceptable. Dans une publication postérieure (1), M. Sanio revient sur cette zone des Monocotylédones et l’assimile à la formation nommée par lui Aussenscheide, qu'il a trouvée dans les Pipéracées (Chavica). Telles sont, en résumé aussi exact que possible, les opinions soutenues sur cette question et qu'il était nécessaire de con- naître. L Pour mettre un peu d'ordre dans un sujet assez embrouillé, je veux d’abord envisager l’origine de ce périméristème primitif et son développement, puis sa différenciation et ses divers produits ; enfin, rechercher sa signification anatomique et ses rapports avec les zones d’accroissement continu, tant des Monocotylédones que des Dicotylédones, puisque dans ce cas, comme dans tous les autres, on ne saurait raisonnablement isoler les deux embranchements. Il est incontestable, je le répète, que les faisceaux communs naissent tous dans le méristème primitif, comme l’a établi M. Nügeli, et cela de fort bonne heure, avant que son passage à l’état de tissu fondamental durable ne soit même indiqué. Leur apparition et formation première est complétement indé- pendante du périméristème qui va suivre. S'il y a une relation entre les faisceaux (le cercle externe de faisceaux) et le péri- méristème, c’est dans l’ordre inverse de ce qu’on a cru en gé- néral : le périméristème est l'effet, la suite du groupement des faisceaux. Dans les gros rhizomes de Monocotylédones, à sommet végé- tatif surbaissé, à entre-nœuds plus ou moins courts et con- densés, et à très-nombreux faisceaux fibro-vasculaires, tels que (1) Ueber endogene Gefässbündelbiidung (Bol. Zeit., 1864, p. 222). ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 117 les divers rhizomes du genre Jris, notamment de l’I. floren- tina, de l’T. Pseudo-Acorus, etc., que ceux du Canna indica, de l'Acorus Calamus, etc., ete., le méristème primitif interposé aux faisceaux se transforme en tissu fondamental à peu près en même temps sur toute l'étendue de la section transversale, en commençant, il est vrai, en deux endroits séparés, tou- jours un peu en avance : au centre même, point de départ de la moelle, et au pourtour sous les insertions foliaires, point de départ de l'écorce. Seulement, au niveau du cercle exté- rieur des faisceaux centraux, où ceux-ci sont toujours plus serrés entre eux, et où leur nombre est beaucoup supérieur, il reste dans leur intervalle un anneau restreint de méri- stème primitif qui ne se différencie pas en tissu fondamental, comme le reste, et qui persiste d’abord sous cette forme. Mais bientôt, à mesure que l’épaississement de la tige se pro- duit par le seul fait du développement normal du tissu fon- damental (amplification des cellules et divisions nouvelles), à mesure que les faisceaux de procambium grossissent dans le cercle externe, et que ceux qui étaient d’abord courbés vers le centre, reviennent à la périphérie et en augmentent encore le nombre, cet anneau de méristème primiuf entre en prolifé- ration très-active, s’accuse davantage par cela même et par le contraste qu'il forme avec le tissu fondamental de la moelle et de l’écorce, passe par-devant ou en dehors des faisceaux rangés en cercle, envahit une assise ou deux de cellules déjà diffé- renciées en tissu fondamental, et finit par former ainsi une bande annulaire plus ou moins épaisse. Souvent tout le cerele extérieur de faisceaux se trouve, à un moment donné, englobé dans cette production nouvelle, où ils ne se perdent pas cepen- dant et où on les reconnait toujours. Get anneau de méristème tend naturellement à s’accroître davantage en dehors, sans dé- passer cependant une certaine limite, toujours restreinte. Au début, les divisions de cellules ont lieu en tous sens, puis des divisions plus nettement tangentielles s’établissent en dehors. Ainsi, dans ces cas, cet anneau de méristème ou périmé- ristème, tout en ayant un lien génétique avec le méristème 118 A. GUILEAUD. primiüf, dont la différenciation s’est trouvée retardée par la circonstance de l’accumulation des faisceaux, revêt cependant un caractère tout particulier de formation nouvelle, et est en réalité un pur méristème secondaire. Des différences notables existent entre les plantes qui peuvent se rapporter à cette catégorie, quant à la rapidité et à l’inten- sité du développement du périméristème. Il y a même des dif- férences, sous ces rapports, entre les individus d’une même espèce ou les divers bourgeons d’une même plante. Une seule loi parait influer sur lui : l’écartement ou le rapprochement des faisceaux du cercle externe. Ainsi, dans ceux de ces rhi- zomes dont les faisceaux périphériques sont relativement peu nombreux et peu serrés, comme dans le Polygonatum vulgqare, il ne persiste pas toujours de méristème primitif entre eux, et le périméristème se développe peu et seulement à certaines places, toujours au niveau des faisceaux et spécialement vis-à- vis des nœuds où se trouvent des anastomoses fasciculaires. Certains bourgeons n’ont même pas du tout de périméristème. Dans le Canna indica, les faisceaux sont très-nombreux dans toute l'étendue de la coupe transversale, aussi bien dans l'écorce que dans la moelle. Le cercle ordinaire de faisceaux est assez peu marqué, et entre eux 1l ne persiste pas de méri- stème primitif, ou à peine; mais ensuite deux ou trois assises situées immédiatement en dehors d'eux s’établissent comme périméristème complet. Dans les /ris, un anneau assez épais de méristème apparait entre les faisceaux externes et un peu en dehors d'eux, régulier sur tout son pourtour dans lIris Pseudo-Acorus, bien plus puissant sur la face mférieure du rhizome, parce que les faisceaux y sont infiniment plus con- densés que sur la face supérieure, dans l’Jris florentina. Dans l’Acorus Galamus, le périméristème, bien qu’en connexion avec le méristème primitif persistant entre les faisceaux, n’acquiert une grande activité que bien au-dessous, ce qui lui donne ici tout à fait l'apparence d’une formation indépendante. Il englobe alors tous les faisceaux, forme en dehors une couche épaisse, et acquiert ainsi une grande puissance. Par suite de la diffé- ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 119 renciation rapide du tissu fondamental de cette plante, aug- mentée encore par la présence précoce de lacunes, le périmé- ristème forme un anneau clair, une sorte de zone lucide très-apparente. Dans certaines autres plantes, notamment dans les Ruscus, cités par Sanio, Ruscus aculeatus, Ruscus Hypophyllum, ete., les circonstances de l'apparition du périméristème sont diffé- rentes. Ici, le bourgeon est plus proéminent, plus allongé; comme de règle aussi les faisceaux de procambium nés dans le méristème primitif sont plus nombreux et plus serrés en dehors, au niveau du cercle extérieur. La différenciation du méristème primitif n’a pas lieu sur tous les points d’une même section en même temps, mais se fait d’une manière successive et rela- tivement prolongée. Au centre, cette différenciation commence d’abord entre les faisceaux plus espacés de cette région, puis s’avance peu à peu en dehors entre les faisceaux qu’elle dégage successivement, pour ainsi dire, du méristème primitif, jusqu’à ce qu’elle atteigne le parenchyme fondamental cortical qui, de son côté, s’est différencié d’une façon indépendante sur tout le pourtour, en commençant sous les insertions foliaires à un niveau supérieur au point de départ central et en arrivant tout de suite à la limite du cercle extérieur des faisceaux. Par suite de ce processus, on voit, en coupe longitudinale, des coins de méristème primitif qui, de chaque côté, se prolongent infé- rieurement en s’amincissant de plus en plus, et qui dispa- raissent à la fin. Bien que dans l'écorce et dans le centre de la moelle, points où elle a d’abord commencé, la différenciation conserve une certaine avance sur la région intermédiaire ; il n’en est pas moins vrai qu'à un moment donné il ne reste pas de méristème primitif sur toute la coupe transversale, et qu’un certain état du tissu fondamental s'étend à toute l'épaisseur de la tige. On voit très-nettement, sur les coupes transversales de ce niveau, que la moelle et l’écorce communiquent ouver- tement entre elles par des ponts situés entre les faisceaux du cercle externe. IL est permis de faire remarquer que ce mode de différen- 120 A. GUILLAUD. ciation du méristème primitif, qui occupe une assez longue portion du bourgeon, à pu en imposer et laisser croire à un véritable anneau d’accroissement se déplaçant de dedans en dehors; mais ce n’est qu’une fausse interprétation et une 1llu- sion. Dans cette hypothèse, du reste, la zone intermédiaire de la tige adulte ne pourrait être le produit final de cet anneau, puisque celui-ci s'évanouit en entier et qu’il y a solution de continuité entre cette zone et lui. Le périméristème ne commence à apparaitre que plus tard, à mesure que les faisceaux du cercle externe grossissent, que l'intervalle qui les séparait diminue, et que les faisceaux plus centraux, en revenant vers la périphérie, viennent augmenter leur nombre. Alors, entre les faisceaux d’abord, en dehors d’eux ensuite, sur une épaisseur de deux assises à peu près, les cellules repassent à l’état de méristème clair, granuleux et grisàtre d'aspect, se divisant activement en tous sens. En un mot, il naît tout autour de la tige et au niveau du cercle externe des faisceaux un périméristème de toutes pièces, nouveau, secondaire, et sans lien génétique direct avec le méristème pri- mitif. Dans les divers rhizomes des Ruscus, la puissance de ce périméristème est toujours assez limitée, mais 1l se développe davantage dans les branches aériennes. Entre ces deux types de développement du périméristème, appartenant à un même genre de tige quant à l'ordonnance des faisceaux, en ce sens qu'ils sont très-nombreux sur tous les points de la coupe transversale, très-dispersés, et rangés en un cercle seulement vers lextérieur, 1l serait très-facile de trouver des intermédiares. Il peut arriver, d’une part, que le méristème primitif présente divers degrés de persistance à la limite entre l’écorce et la moelle, suivant qu'il est protégé ou non contre la différenciation par les causes dont nous avons parlé; d'autre part, que la formation du périméristème soit plus rapprochée du sommet, par suite d’un grossissement plus précoce des faisceaux, ou de toute autre cause. Alors le péri- méristème tend plus ou moins à se confondre avec le méristème primitif, et à ne pas laisser communiquer la moelle et lécorce ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 1921 dans l'intervalle des faisceaux. Dans les bulbes, par exemple, ce rapprochement attemt son maximum. Les petits rhizomes minces, allongés, comme ceux du Convallaria maialis, du Paris quadrifolia, de la plupart des Carex, ete., ete., se ressemblent tous en ceci, c’est que presque tous les faisceaux communs sont groupés en un cercle à la péri- phérie de la région centrale, comme dans les Dicotylédones ; _on peut dire qu'il en reste peu ou pot du tout dans la moelle. Ces conditions autres sont très-instructives pour le mode de formation du périméristème. Le cas suivant se présente dans les rhizomes du Convallaria maiulis. Le bourgeon terminal a la forme d’un sommet conique, allongé; le méristème primitif, très-restreint et limité à une toute petite portion finale, passe très-rapidement et de très- bonne heure au tissu fondamental médullaire et cortical. Les premières coupes transversales montrent 7-8 faisceaux serrés les uns contre les autres et occupant toute la tige. Un ou deux d’entre eux se trouvent être enveloppés par les autres tout à fait périphériques. Entre ces faisceaux, la différenciation du méristème priniuf a déja commencé, et des bandes noirâtres séparant les masses procambiales claires vont de la périphérie jusqu’au centre. Tous ces premiers faisceaux paraissent appar- tenir à une seule feuille. Sur une coupe inférieure, le nombre des faisceaux à doublé ou triplé, et leur distribution change. Tout à fait au centre, un espace libre, la moelle centrale. Autour de ce centre, 4-5 faisceaux espacés, disposés, si l’on veut, en cercle. En dehors, un véritable cercle de faisceaux, très-fourni, déjà éloigné de Pépiderme par une assez large zone de parenchyme fondamental cortical. Tous ces faisceaux sont complétement isolés les uns des autres par des bandes de tissu fondamental très-nettement différencié, qui font communiquer l'écorce et la moelle. Ge parenchyme fondamental est aussi uni- forme que possible sur toute la largeur de la coupe transversale. À ce moment donc il n'existe plus du tout de méristème primiuf, et le périméristème n’est pas encore formé. Quelques coupes 122 A. GUIELELAUD. plus bas, le nombre des faisceaux n’a pas beaucoup augmenté, mais ceux du cercle extérieur commencent à se réunir les uns aux autres par la transformation du parenchyme fondamental interposé en nouveau méristème. Bientôt faisceaux et méristème ne forment plus qu’une seule bande annulaire, uniforme en apparence sous un faible grossissement, mais laissant toujours reconnaitre les masses procambiales si l’on emploie un grossis- sement plus fort. En dedans, cette bande n’est pas circu- lurement limitée; au niveau des faisceaux, elle se renfle vers la moelle. En dehors, au contraire, son bord représente un cercle parfait. Au début, elle ne dépassait pas la face externe des faisceaux, mais ensuite elle a envahi les assises adjacentes de parenchyme fondamental cortical, et, s’avançant ainsi en dehors, les a recouvertes d’une couche de méristème de trois ou quatre cellules tangentiellement alignées. Cette croissance centrifuge de périméristème s'éteint bientôt dans les entre- nœuds. Vis-à-vis des nœuds, elle persiste davantage; aussi l'épaisseur du périméristème y devient-elle plus grande qu’ail- leurs. Ici il n’y a pas le moindre doute que le périméristème ne soit une production secondaire complétement distincte du mé- ristème primiif. Mais une plante encore plus propre par le nombre restreint de ses faisceaux, par la nature de ses tissus et par l’élongation de son sommet végétatif, à démontrer ce mode d'apparition du périméristème, c’est le Paris quadrifolia, dont je recommande l’étude comme une des plus faciles et des plus concluantes. Le point végétatif des jeunes bourgeons examinés vers la fin du printemps est très-conique, enveloppé de faibles et minces écailles foliaires. Le méristème primitif est limité à l’extrème sommet, et, de plus, son passage au parenchyme fondamental, très-facile à reconnaitre et à préciser, soit par lélargissement des cellules avec leur contenu consistant en grains d’amidon, soit par l’aspect noirâtre des tissus dû à de Pair qui s’introduit dans les méats intercellulaires. Dans les coupes transversales menées à travers le méristème primitif, si l’on est assez heureux ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 193 pour en obtenir, on peut apercevoir déjà de 5-8 faisceaux de procambium tout à fait à leur début, distribués de façon que l’un d’eux occupe le milieu de la coupe et que les autres soient rangés en cercle autour de lui. Ce ne sont encore que de simples points procambiaux relativement espacés. Ces points grossissent, et par ce fait se rapprochent les uns des autres. Le méristème primitif non employé par eux passe en même temps à l’état de parenchyme fondamental sur toute la largeur de la coupe à la fois, et, comme les faisceaux ont gardé leur agen- cement, il semble former des mailles arrondies, à bandes étroites, noirûtres, qui emprisonnent les masses procambiales très-claires d'aspect. Un peu au-dessous, la distribution des faisceaux change : le faisceau central s’affaiblit, devient moins gros que les autres, et enfin se déplace vers le dehors; une moelle centrale se trouve alors libre, petite d’abord, plus large ensuite ; la zone corticale s'étend de son côté, et à un moment donné nous avons un anneau bien défini de faisceaux, dont le nombre, momentanément augmenté par l’apport d’une feuille, revient immédiatement au nombre primitif, ou à peu près. Mais ces faisceaux sont encore complétement séparés par des ponts de tissu fondamental très-bien défini, faisant commu- niquer la moelle et l’écorce. Par la suite, à mesure que la tige gagne en épaisseur et que son accroissement général s’accuse, les masses procambiales, d’abord arrondies, s’élargissent dans le sens tangentiel, se rapprochent ainsi, sans cependant arriver à se toucher. | Ce mouvement d'extension latérale et tangentielle des masses procambiales ne se borne pas là; il en entraine un autre avec lui. Les cellules intermédiaires de tissu fondamental finissent par passer à l’état de méristème, en premier lieu les plus rapprochées et celles qui sont en contact avec les faisceaux, les autres ensuite; de sorte que l'extension latérale com- mencée dans les masses procambiales s’achève par du méri- stème, qui les réunit bientôt toutes en un anneau commun, complet et non interrompu, de tissu formatif clair des plus apparents. En dedans, le méristème ne dépasse pas le bord 124 A. GUILLAUD. interne des faisceaux, il ne latteint même pas tout à fait; mais en dehors il arrive tout de suite au niveau de leur bord externe, dépasse ensuite ce bord et s’avance au devant d'eux, en envahissant les assises du tissu fondamental adjacent et en se multiphant encore par des divisions nettement tangentielles. Ainsi, le périmiéristème nait de toutes pièces dans le tissu fon- damental depuis longtemps différencié ; il débute sur le côté tangentiel des faisceaux et à leur contact direct, remplit leur intervalle en se rejoignant avec le méristème qui s’est formé sur le côté du faisceau voisin, puis s’avance au devant d’eux, par envahissement d’abord, par sa propre activité ensuite : telle est, en résumé, cette formation dans le Paris quadrifolia. On peut remarquer une certaine analogie avec le développement de l’anneau d’accroissement, tel que le décrit M. Sanio pour l'Evonynus latifolius, interprétations de l’auteur mises à part, bien entendu. À côté du Convalluria maialis et du Paris quadrifolia, je pourrais citer beaucoup de Graminées (Poa, notamment) et de Gypéracées, dont le périméristème se forme aussi mdépendam- ment du méristème primiuf. Du reste, soit qu'il se continue ou non avec ce dernier, 1l n’en est pas moins toujours une for- mation distincte par son activité et son jeu centrifuge. Jusqu'à présent nous avons vu que le périméristème primilif, tout en ayant tendance à dépasser en avant le cercle de fais- ceaux, reste toujours en contact avec eux. Il peut cependant s'avancer tellement en dehors, qu'il finisse par se détacher d'eux par suite de sa marche envahissante dans la zone cor- ticale. Le bourgeon du Triglochin maritinum est à sommet très- surbaissé, gros. La différenciation du méristème primitif et son passage au lissu fondamental se font à peu près suivant une ligne horizontale pour toute la région centrale. Les faisceaux sont distribués en quantité égale sur toute la largeur de la coupe transversale, à peine plus nombreux en dehors, où Îles derniers forment un cercle extérieur mal ajusté. Néanmoins, au niveau de ce cercle, commence de bonne heure et sans con- ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 125 tinuité avec le méristème primitif, un périméristème très-actif, qui ne tarde pas à s’avancer en dehors des faisceaux exté- rieurs par simple envahissement du tissu fondamental cortical d’abord, puis par divisions plus ou moins tangentielles de ses propres cellules. Ge périméristème repassant par la suite au tissu fondamental sur sa face interne, avant que sa limite externe soit arrêtée, il abandonne les faisceaux, en dehors des- quels il se trouve toujours à l’état adulte. I s'éteint enfin. I y a là un pas de plus que dans les périméristèmes cités jusqu'à présent, et qui rappelle ce qui se passe dans plusieurs Dicoty- lédones, d’après MM. Sanio et Schwendener. Dans ces der- mères plantes, il arrive parfois qu'un puissant anneau prosen- chymateux se trouve placé au milieu de la zone corticale. Deux faits ressortent surtout des observations que nous venons de rapporter : la dépendance sous laquelle se trouve le périméristème par rapport aux faisceaux qui constituent l’an- neau habituel de toutes les Phanérogames ; puis le rôle insi- gnifiant qu'il joue comme zone d’accroissement. À ce dernier point de vue, c’est un méristème passif. En résumé, le propériméristème de toutes les Monocotylé- dones (on peut ajouter aussi de beaucoup de Dicotylédones) est un anneau plus ou moins épais de méristème secondaire, qui se place entre les régions corticale et centrale, et qui plus tard, grâce à ses produits, leur sert de limite. Parfois il ne constitue que la moitié longitudinale d’un cylindre creux, comme dans l’Iris florentina et certaines Aroïdées ; parfois encore les limites interne et externe sont assez irrégulières, soit par suite du développement même, soit par suite de retours localisés et pré- coces au tissu fondamental (Paris quadrifolia, Tradescantia). Une fois établi et toute activité cessant, le périméristème entre en différenciation. Suivant les plantes, le mode et le degré de cette différen- ciation, les produits qui en dérivent et l'agencement de ces produits entre eux, varient assez; il y a de nombreux pas- sages, de nombreux intermédiaires d’un état à l’autre. Néan- 126 A. GUILELAUD. moins voici les principaux cas qui peuvent se présenter : 1° Le périméristème revient en tout ou en partie à l’état de tissu fon- damental, ne laissant ça et là que quelques traces de son existence; il donne alors un {issu fondamental secondaire, qui est toujours à distinguer du tissu fondamental issu directement du méristème primitif. 2 Le périméristème‘donne naissance, dans sa masse et partie externe, immédiatement en dehors des faisceaux communs rangés en cercles, à de nouveaux petits faisceaux, courts et anastomosés entre eux en tous sens, anasto- mosés également avec les faisceaux communs : ces petits fais- ceaux sont des faisceaux caulinaires. 3 Le périméristème se trouve remplacé par un tissu de cellules petites, claires, à parois minces, blanches, sans méats interposés entre elles et rappelant beaucoup les méristèmes par leur agencement : on peut donner à ce tissu le nom de méristémiforme. 4° Le périméristème se transforme, en tout ou en partie, en éléments allongés, effilés aux extrémités, épaissis el durs, colorés, tout cela à divers degrés, et rappelant plus où moins exactement les éléments libériens des faisceaux : on peut appeler ces éléments et leur üssu pseudoliber. 5° Enfin, dans le plus grand nombre de rhizomes, une assise du périméristème, lassise extérieure, ou une des assises extérieures en général, se transforme en gaine fasciculaire ou Schutrscheide, lassise bien connue de M. Caspary. Reprenons maintenant un à un chacun des tissus dont nous venons de parler, pour les mieux définir et pour citer des exemples : 1° Tissu fondamental secondaire. — D’après Karsten, Mohl et M. Sanio, comme nous l'avons dit, la moelle primitive des Monocotylédones, c’est-à-dire la portion qui est directement issue du méristème primitif, serait fort réduite, et presque tout le tissu fondamental central proviendrait de l'activité secon- daire de l’anneau d’accroissement (Verdickungsring), notam- ment tous les intervalles des faisceaux. On sait combien il faut en rabattre de cette puissance de l'anneau d’accroissement, c’est-à-dire du périméristème, comme souree de tissu fonda- ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 127 mental aussi bien que de faisceaux communs: Si cet anneau n’est pas exactement limité à l'intervalle des faisceaux qui forment le cerele extérieur, il ne les dépasse jamais beaucoup vers l’intérieur. Il ne peut donc donner lieu qu’à une assez faible zone de parenchyme fondamental secondaire. Karsten avait déjà remarqué que dans les Palmiers, ainsi que dans des Pandanées, Aroïdées, Orchidées et Graminées, les couches de cellules provenant de la partie extérieure de l'anneau d’accroissement et comprises dans son Holzcylinder (cylindre ligneux}, pouvaient ressembler tout à fait aux cellules de l’écorce et de la moelle qu’elles réunissaient l’une à l’autre, formant ainsi un tissu analogue aux rayons médullaires des Dicotylédones (1). Mohl (2), qui cherche à démontrer que les cellules lignifiées de l'anneau d’accroissement ne sont qu'une modification de parenchyme, dit aussi que bien des fois on ne peut distinguer les cellules de cet anneau de celles de la moelle et de l’écorce, et cite des exemples. Il est rare, en effet, que le périméristème ne donne pas nais- sance, par sa face interne, à plus ou moins de tissu fonda- mental secondaire. C’est même, avec la gaine fasciculaire, un des produits les plus constants. Dans les Polygonatum, tout le périméristème qui s’est formé repasse peu de lemps après à un tissu fondamental absolument semblable à celui de la moelle et de l'écorce. Aucune trace du périméristème ne subsiste, sauf çà et là, au contact et en avant de quelques fais- ceaux, une ou deux cellules tangentiellement allongées. On est réduit, pour limiter la moelle et l’écorce, à prendre Île niveau du bord extérieur des faisceaux externes rangés en cercle. Dans l’Jres florentina, même passage complet du pé- riméristème au tissu fondamental, sans laisser aucune trace à la face supérieure du rhizome. Sur la face inférieure, il reste, un peu en dehors du cercle externe des faisceaux communs, de nombreux petits faisceaux caulinaires anastomosés, entre les mailles desquels les parenchymes de la moelle et de lé- (1) Cité par Mohl, Bot. Zeit., 1858, p. 193. (2) Mohl, ébid., p. 194. 128 A. GUBLEAUIR. corce communiquent. Dans l’Acorus Calamus, le périméri- stème, assez largement développé, revient en dedans et entre les faisceaux à un tissu fondamental que l’on ne peut dis- tinguer de celui de la moelle. I reste seulement, à l'extérieur, une gaine fasciculaire, et en dedans de cette gaine une ou deux assises de méristémiforme, sur lesquelles s'appuient les faisceaux les plus externes. C’est presque un caractère général que la gaine fasciculaire, où elle est développée, retient presque toujours immédiatement en dedans d'elle une ou deux assises de méristémiforme, qui résistent à la tendance sénérale que peut avoir le reste du périméristème à se trans- former en tissu fondamental. Les rhizomes gros, charnus ou peu durs, sont en général ceux dans lesquels le périméristème donne le plus de tissu fondamental secondaire; c’est une conséquence naturelle. Les rhizomes durs, très-allongés, minces, sont au contraire ceux où 1l en donne le moins, peu, ou même pas du tout. Un cas tout à fait en dehors de l'ordinaire se présente dans les Luzules. Dans le Luzulu albidu, entre autres, le périmé- ristème, qui forme au début un puissant anneau ininterrompu englobant tous les faisceaux, ne donne de tissu fondamental ni par sa face interne, ni par sa face externe; c’est du pseudo- liber qui se forme de chaque côté à l'extrême limite, pendant que la partie intermédiaire reste à l’état de méristémiforme. Mais de distance en distance l'anneau se brise, se partage en petits segments, et de larges ponts de tissu fondamental secondaire établissent une communication entre la moelle et l'écorce. Dans d’autres espèces voisines, ces ponts sont très- nombreux et isolent de petits groupes de faisceaux réunis au nombre de 2-4. On dirait de courts rayons médullaires de Dicotylédones. IT est à remarquer aussi que, dans certains gros rhizomes, comme ceux de l’Acorus Calanius, la gaine fasciculaire se trouve interrompue par places d’une façon analogue, et que le tissu fondamental de la moelle commu- nique aussi avec celui de l'écorce. Comme caractère anatomique, le tissu fondamental secon- ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 129 daire ressemble complétement au tissu fondamental primitif de la moelle et de l’écorce, ayant, comme lui, des espaces intercellulaires, des cellules de contours analogues remplies de fécule, mais manquant cependant d'éléments cristallifères ou à contenu spécial; parfois ses cellules se présentent comme un peu plus petites et moins riches en fécule. 2% Faisceaux caulinaires. — Les faisceaux dont il va être ici question sont connus depuis longtemps, du moins dans cer- tains cas des plus remarquables ; mais la généralité avec laquelle ils sont répandus, surtout dans les rhizomes des Monocoty- lédones, ne me parait pas avoir été suffisamment remarquée. Le lacis fasciculaire qui occupe les nœuds des chaumes des Graminées est très-frappant. Mohl dit, en parlant de la com- paraison que lon pourrait être tenté de faire entre les tiges arundinacées des Palmiers et celles des Bambous, que les pre- mières manquent de vrais nœuds, ’est-à-dire qu’à l'insertion de la feuille les faisceaux fibro-vasculaires ne se divisent pas de façon à former un lacis (1). M. Schleiden (2) dit aussi que de tous les faisceaux qui traversent les nœuds des Graminées par- tent de petits rameaux formant, vis-à-vis du nœud, un plexus entrelacé qui passe en grande partie dans le bourgeon axillaire. Il donne une figure à l’appui. Ainsi il n’y aurait donc là que des ramifications des faisceaux ordinaires. Mais Mobhl (3) est revenu sur ce point. Pour combattre l'opinion de Schacht, qui déclarait que de nouveaux faisceaux ne naissaient jamais de toutes pièces dans un tissu formatif secondaire, il cite juste- ment le lacis fasciculaire des nœuds, soit de Monocotylédones, par exemple les Graminées, soit de Dicotylédones, par exemple le Ricin. Une coupe longitudinale du bourgeon terminal de ces plantes lui montre que la formation de tels nœuds n'arrive que relativement tard, et qu'on n’en trouve d’abord aucun indice dans le tissu cellulaire interne et axile, toute la moelle étant conslituée par un jeune parenchyme uniforme. Bien au-dessous (1) De Palmarum structura, $ 2, 1, (2) Grundzüge, 3° Auf, I, p. 158. (3) Bot. Zeit., 1858, p. 197. 6° série, BorT. T. V (Cahier n° 3).! 9 130 A. GUILLAUD. seulement, dit-il, se forme par le travers de la tige, dans les couches qui correspondent aux nœuds, un cambium secondaire (méristème !), et dans ce cambium se développent des faisceaux diversement entrelacés, qui s’anastomosent avec les autres faisceaux de la tige. De tels faisceaux ainsi formés, non plus limités aux nœuds, mais s'étendant aux entre-nœuds et à toute la longueur des rhizomes, dans une foule de Monocotylédones où le périméri- stème s’est assez fortement établi, rentrent dans cette catégorie des faisceaux caulinaires. Ts n’ont en effet aucune relation avec les feuilles ; ils naissent sur place et par un processus distinct, postérieurement aux faisceaux communs, dans un méristème secondaire et non plus dans le méristème primitif. [ls ont tout à fait les caractères que M. Nägeli (1) assigne aux faisceaux caulinaires. Dès le début, ils se montrent toujours de telle façon qu'ils courent obliquement entre les faisceaux communs et qu'ils se réunissent de préférence en direction tan- gentielle pour former un réticulum à mailles allongées. Dans les rhizomes de Monocotylédones, ces faisceaux ne contiennent, en général, qu'une petite lame ou masse arrondie de cellules vasculaires poreuses, plongée dans le méristémi- forme ou dans le tissu fondamental secondaire issus du péri- méristème, sans autres éléments de xylème et sans phloëme apparent. Tout au plus, dans quelques cas, peut-on regarder comme phloème quelques éléments situés en avant des cellules vasculaires et difficiles à séparer du méristémiforme. Les cel- lules adjointes aux cellules vasculaires et groupées avec elles dans ces petites masses forment plutôt une sorte de cambi- forme. Ces faisceaux naissent dans le périméristème de bas en haut, et successivement d'un entre-nœud à l’autre. Trop courts et trop peu épais pour Jouer un grand rôle dans la structure de la tige, ils n'ont guère d'importance matérielle que pour la naissance et la distribution des racines adventives qui se développent en général sur leurs anastomoses, mais qui ne sont pas, du reste, absolument sous leur dépendance. (t) Beiräge zur wiss. Bol., Heft F, p. 36. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 151 Certains rhizomes, comme ceux des Polygonatum, du Canna indica, n’ont pas de faisceaux caulinaires périphériques. L’Iris florentina en a abondamment, mais sur sa face inférieure seule, où 1ls sont un peu en dehors du cercle des faisceaux communs. Dans les Jris amæna, sibirica, Pseudo-Acorus, dans les Fun- kia, ete., ete., ils existent en couche continue tout le long de la tige, entre les faisceaux communs externes ou un peu en dehors d'eux. Dans le Triglochin maritimum, la couche con- ünue qu’ils forment est assez éloignée des faisceaux. L’Aco- rus Calamus n’a de faisceaux caulinaires que par places isolées et larges. Le Convallaria maialis n’en à que vis-à-vis des nœuds ou sur un espace continu, si les nœuds se rapprochent. Les nœuds des Palmiers n’en sont pas tous dépourvus; j'en ai trouvé, en petite quantité 1l est vrai, vis-à-vis des nœuds du rhizome du Chamædorea elatior Mart. Je n’insiste pas davantage; on peut en trouver dans la plupart des Monoco- tylédones. Dans certains cas on pourrait prendre cés faisceaux, soit pour des terminaisons ramifiées des faisceaux communs, soit pour l'épanouissement des faisceaux des racines, se répandant en éventail dans la zone intermédiaire et venant y former leurs anastomoses. Mais la différence de structure anatomique (les faisceaux communs ont des terminaisons fibreuses), et surtout leur reticulum bien évident, éloignent toute pensée de cetordre. Dans le Triglochin maritimum, les faisceaux cauli- naires n’ont que peu de relations avec les faisceaux communs et en sont tout à fait indépendants. Le mode et l’époque de leur formation sont encore, à ce point de vue, fort concluants. 3° Mérisiémiforme. — J'ai donné le nom de méristémiforme aux assises de la zone intermédiaire les moins différenciées, celles qui rappellent encore le périméristème par la forme, la nature des parois et l’agencement de leurs cellules. Cest encore un tissu essentiellement parenchymateux et à parois de cellules non épaissies et claires. On trouve, il est vrai, tous les passages entre lui et le prosenchyme ou pseudoliber issu du périméristème, et les deux tissus se fondent Fun dans l’autre. 132 A. GUILLAUD. On ne doit pas moins cependant les tenir pour distincts, la présence de l’un excluant, en général, celle de l'autre. Les cellules du méristémiforme peuvent être de toutes dimen- sions, plus petites ou plus grandes que celles du tissu fonda- mental voisin, isodiamétrales ou allongées tangentiellement et longitudinalement, uniformes ou non. Il n°y à pas entre elles de méals imtercellulaires. Les parois sont blanches, réfringentes. dures ou non, chargées ou non de ponetuations, et bien des fois colorables par laniline, ce qui permet de séparer ce tissu du parenchyme fondamental. Outre Pabsence de cellules cris- tallifères et à contenu spécial, le méristémiforme renferme peu ou point de fécule. Par tous ces caractères, c’est bien un tissu particulier, ne se confondant avec aucun. Son mode d’origine suffit, du reste, à lui donner le rang de tissu. Le méristémiforme se trouve, en règle générale, en dedans de la gaine fasciculaire, appliqué à sa face interne. Il peut acquérir de 1-8 cellules d'épaisseur, arriver jusqu'aux faisceaux communs, pénétrer entre eux et même les envelopper. Il peut être séparé de la gaine par du pseudoliber (Luzula campestris), ou exister sans gaine (Chamcædorea elatior) ; enfin, il peut être contenu entre deux lames de pseudoliber sans gaine fascicu- laire (Luzula altbida). D’autres cas peuvent se présenter. Rarement, 1l est vrai, la gaine fasciculaire laisse du méristé- miforme en dehors d'elle, et le plus souvent elle est elle-même la limite externe, nette et régulière, de la zone intermédiaire. Gela tient à ce qu'elle nait à la limite même du tissu fonda- mental cortical. Cependant, dans le Tradescantia virginica, on rencontre en dehors de la gaine des files radiales de cellules, qui ont les caractères du méristémiforme et qui sont issues du périméristème. Dans le Paris quadrifolia, 1 y a également, en dehors d'elle, deux assises de cellules distinctes du tissu fonda- mental cortical et semblables aux autres assises de méristémi- forme. Dans les Cyperus, M. Duval-Jouve (1) signale la persis- tance habituelle de quelques assises appliquées sur la gaine (l) Étude histotaæique des Cyperus de France, pl. XX, fig. 2 et 3. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 133 fasciculaire, lorsque, ce qui arrive assez souvent, la zone cor- ticale se détruit. Ces cellules plus résistantes se rattachent sans doute aussi à la zone intermédiaire et à une sorte de méristémiforme assez voisin du tissu fondamental. Dans le Cyperus rotundus, la gaine fasciculaire est revêtue, en dehors, de quatre ou cinq assises de cellules parenchymateuses, très- épaissies, qui proviennent aussi, à n’en pas douter, du périmé- ristème. 4 Pseudoliber. — C’est surtout lorsque les cellules du péri- méristème s’épaississent fortement et s’allongent, qu’elles ont attiré l’attention des anatomistes. M. Schwendener, dans son récent travail sur le Principe mécanique dans la structure anatomique des Monocotylédones, n'avait garde d'oublier un tel tissu. Il le nomme souvent Bastring (anneau libérien), et le regarde comme une formation à part, indépendante des autres tissus par sa forme et sa situation, comme le représen- tant mdubitable du vrai tissu mécanique (1). Bien que cet état d’anneau lignifié soit fréquent pour le périméristème, on ne saurait néanmoins l’envisager à part et isoler ce tissu des autres tissus de la même famille, du méristémiforme surtout, avec lequel il offre tous les passages. Son origine ne permet pas de le confondre avec les tissus analogues appartenant aux faisceaux, malgré l’identité de forme qui se rencontre bien des fois dans les éléments. Suivant les diverses situations qu'occupe ce périméristème à cellules prosenchymateuses et épaissies par rapport à l'anneau externe des faisceaux communs ou à la gaine fasciculaire (Schutzscheide de M. Gasparvy), il a reçu, tant dans les Monoco- tylédones que dans les Dicotylédones, les noms les plus divers. M. Caspary (2) le désigne comme Basteylinder (cylindre libé- rien), sil est isolé dans l'écorce loim des faisceaux, ou comme Scheidenschicht (couche engainante), s’il nait immédiatement en dehors de la gaine fasciculaire. Si ce tissu prosenchymateux apparaît en dedans de la gaïîne, 1l le regarde comme apparte- (1) Loc. cit., p. 75. (2) Die Hydrilleen (Pringsheim’s Jahrbüch., 1. F, p. 44% et 447). 134 M. GUIELAUD. nant encore à l’écorce, mais ne lui donne pas de nom spécial. M. Sanio (1) insiste sur ces cellules prosenchymateuses situées en dedans de la gaine, ets’applique à les en séparer en leur donnant le nom de Aussenscheide, parce qu'il les considère comme une formation adjointe au côté externe des faisceaux, issue de Pan- neau d’accroissement et analogue à une formation que ce même anneau a laissée derrière lui au côté interne des faisceaux, et qu'il appelle fnnenscheide (gaine interne). Nous avons vu qu'il n’y a aucun rapport entre les deux formations. Je cite ces déno- minations parce qu'elles sont les premières en date. Mais depuis lors il s’en est produit d’autres que je renonce à énumérer. Chaque auteur à employé un nom nouveau sous prétexte qu'il répondait mieux à la nature des choses, et c’est ainsi qu’on s’est embarrassé dans des mots (2). Je ne veux reconnaître d'autre gaine que la Schutzscheide de Caspary dont je vais parler tout à Pheure, parce qu’elle seule peut être spécifiée. Toutes les autres formations prosenchymateuses appelées gaines en général sont des revêtements de cellules épaissies plus ou moins indéterminés et indéfinissables, locaux et variables de situation et de dépôt. Il n’y à aucun intérêt à conserver des termes si vagues, qui embarrassent lPanatomie ; il vaut mieux les oublier que de les discuter. Les éléments seuls, comme tissu, peuvent recevoir un nom, mais non pas les dépôts qu'ils forment. Mais quel nom choisir et quel rang leur donner dans la série des tissus? Link (3) et Kieser (4) en ont fait du liber (tissu libé- rien, Bast). Mohl (5) dit qu’on se tromperait beaucoup en assi- milant l’anneau libérien des Liliacées et autres Monocoty- lédones au liber des Dicotylédones, parce que dans beaucoup de plantes les cellules en sont larges, à membranes moins épaisses, et qu’elles passent visiblement aux cellules parenchy- (1) Bot. Zeil., 1864, p. 223. (2) Voy. Sachs, Lehrbuch der Botanik, 4° édit., et Bot. Zeit., 27 mars 1877. (3) Element. philos. Bot., p. 140. (4) Phytot., p. 72. (5) De Palmarum str'uctura, $ 39. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 135 mateuses ; que partout où il se rencontre, cet anneau n’est pas bien limité en dedans et passe peu à peu au parenchyme de la tige; qu’enfin, dans beaucoup de Dicotylédones herbacées, cet anneau est juxtaposé au liber des faisceaux. Les objections de Mohl sont très-justes. M. Schwendener (1), en démontrant qu'il n'existe pas de différences anatomiques entre un tel tissu et le vrai liber, pas plus qu'entre le liber et le libriforme, voire même aussi le collenchyme, propose le nom de stéréome pour les tissus mécaniques en général, et celui de stéréides pour les éléments mécaniques eux-mêmes. Il peut y avoir intérêt, au point de vue général et physiologique, à l'emploi de ces déno- minations; mais, comme M. Schwendener le remarque lui- même, elles ne peuvent suffire aux besoins des descriptions anatomiques, et l’on ne peut s’en servir exclusivement sans ris- quer de tout confondre. Tout en reconnaissant la nécessité de grouper ensemble les tissus qui jouent un rôle mécanique dans la structure des plantes, on ne doit pas moins s’appliquer à en distinguer les diverses sortes, séparables les unes des autres par leur dépôt et surtout par leur origine. Quoique, au fond, le libriforme de M. Sanio ne diffère pas absolument du liber (tissu libérien), sa distinction anatomique et descriptive est très- importante. Il en est de même du tissu épaissi qui nous occupe. Pour rappeler l’analogie de forme des éléments du péri- méristème devenu prosenchymateux et lignifié avec le liber (tissu libérien) et le libriforme, et pour indiquer à la fois leur diversité d’origine et de dépôt, pour ensuite ne pas multiplier les termes nouveaux, j'ai appelé pseudoliber le tissu en ques- tion et fibres pseudolibériennes les éléments pris à part. Pseudo- liber peut s'appliquer à tous les tissus à forme de liber (tissu libérien) issus de méristèmes secondaires et n’ayant aucun lien génétique avec les cambium ou avec les faisceaux fibro-vascu- laires auxquels le liber et le hibriforme peuvent seulement appar- tenir. Cette expression est aussi nécessaire que celle de seléren- chyme, et elle a même valeur, forme des éléments mise à part. (1) Loc. cit., p. 3 et 155. 136 - A. GUILLAUB. Les deux sortes de tissus ainsi désignés semblent appartenir au tissu fondamental, mais en réalité ils proviennent de méristèmes secondaires qui les précèdent et dont ils sont le résultat final. Je ne parle que de tissus véritables, jouant un rôle important dans l'anatomie des plantes et nés d'assez bonne heure. Quant aux cellules isolées qui se sclérifient ou qui se librifient plus tard çà et là, elles ont une autre signification. Nous pourrons avoir du pseudoliber non-seulement comme produit du périméristème (propériméristème et périméristème même), mais aussi comme fin dernière d’un méristème central (Triglochin, Schæœnus). Bien développées, les fibres pseudolibériennes sont plus ou moins longues, à section transversale petite ou large, amineies et effilées à leurs extrémités, qui s’enchevêtrent les unes dans les autres. Leurs parois peuvent acquérir une grande épaisseur, jusqu’à intercepter la cavité de la cellule. Ces parois sont mu- nies d’abondantes ponctuations et revêtent une coloration plus ou moins foncée, que l’aniline transforme en rouge plus ou moins intense. Ces fibres ne sont presque jamais cloisonnées. En un mot, elles ont tout à fait les caractères du liber ordinaire des faisceaux de Monocotylédones. Le pseudohber est très-abondant, très-développé, dans Îles petits rhizomes à longs entre-nœuds, principalement des Cypé- racées et des Graminées. Limité en dehors par la gaine faseicu- laire, il s’avance en dedans entre les faisceaux externes qu'il enveloppe bien des fois. Rarement son bord interne est nette- ment circonscrit. Dans les entre-nœuds il peut occuper toute la zone intermédiaire, mais vis-à-vis des nœuds il est rem- placé le plus souvent par du méristémiforme. Dans certains cas nous lui trouvons des dispositions spéciales. Dans le Con- vallariu maialis, une seule assise d'éléments épaissis, prosen- chymateux, borde en dedans la gaine fasciculaire : on croirait avoir affaire à une gaine à double rangée; mais lassise exté- rieure seule mérite le nom de gaine. Dans les Luzula, il arrive souvent qu'une couche de pseudoliber limite en dedans et en dehors la zone intermédiaire, l'intervalle étant occupé par les faisceaux communs et du méristémiforme. Certaines ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDOXES. 137 espèces (L. campestris) ont en dehors une gaine sans pseudo- liber, et en dedans une seule assise de pseudoliber simulant une gaine fasciculaire interne, ainsi que nous l'avons vu. Cette dernière disposition se retrouve dans le Cyperus serotinus (1), avec cette différence que le pseudoliber constitue en dedans une couche plus où moins épaisse et non plus une simple assise. Ces dernières dispositions rappellent tout à fait ce qui existe chez certaines Pipéracées dans une zone lignifiée correspon- dante, que M. Weiss (2) rapporte à la gaine externe de M. Sanio, et qui est assurément un périméristème différencié. 9° Gaine fasciculaire (Strangscheide de M. Sachs), ou bien Schut:scheide. — V1 s’agit uniquement ici de l’assise si particu- lière de cellules mise en relief et désignée dès 1858 sous le dernier nom par M. Caspary (3), assise dont l'existence est générale dans les rhizomes de Monocotylédones, où elle enve- loppe tous les faisceaux de la région centrale. Pour la spéer- fier encore davantage, j'ajouterai qu'il s’agit presque toujours d’une gaine faseiculaire commune (Gesammtschutzscheide). Les principaux caractères de la gaine fasciculaire, depuis longtemps reconnus, sont : l'agencement des cellules en une assise circulaire ; la présence de points où de traits sombres, noirs, sur leurs parois latérales de contact, c’est-à-dire au milieu des parois radiales; plus tard, l’épaississement et la coloration foncée de ces mêmes parois, en tout ou en partie ; enfin, la persistance de la membrane primitive, ou tout au moins des points noirs latéraux sous l'influence de lacide sulfurique concentré, qui détruit tous les tissus environnants. A ces divers caractères, qui souffrent presque tous des exceptions, Jen puis ajouter encore un autre : c’est la coloration rouge plus ou moins intense que la solution alcoolique d’aniline donne aux membranes épaissies où non des cellules de la gaine ; les points latéraux, surtout, se colorent très-fortement, et eux (1) Duval-Jôuve, loc. cit., pl. XX, fig. 8. (2) Weiss, Wachsthumoverhältnisse und Gefässbündeloerlauf der Piperaceen, p. 17et18 (in Flora, 1876). (3) Di’ Hydrilleen, in Pringsheim's Jahrbücher, © 138 A. GUILLAUD. seuls, dans les gaines très-jeunes. Ce dernier réactif, très-sen- sible, permet d'étudier la gaine fasciculaire dès son début et de la découvrir là où elle pourrait passer inaperçue. Dans les rhizomes de Monocotylédones, les cellules qui composent cette gaine sont courtes, cubiques, ou bien longues, mais alors terminées à chaque bout par des surfaces planes, aussi larges ou plus petites que les cellules du parenchyme fon- damental de la plante; parfois elles sont tangentiellement étendues. Les parois peuvent être minces, claires, ou bien épaissies et très-jaunes, mais rarement toutes ensemble ; le plus souvent il arrive que la paroi externe reste mince, pendant que les autres, et surtout la paroi postérieure, s’épaississent jusqu'à boucher la cavité cellulaire ; de là, en coupe transver- sale, un aspect hémicyclique très-fréquent. Les cellules ne sont pas toujours en rangée régulière ; quelquefois elles forment une ligne ondulée, irrégulière, variables qu’elles sont de grandeur et de position ; en ce cas, les points noirs ne sont plus toujours sur les faces latérales radiales, mais dans les angles ou sur les faces antérieures et postérieures, en un mot au point où les deux cellules voisines d’une gaine irrégulière sont en contact. Jamais les caractères des cellules de la gaine fasciculaire ne s'étendent à deux assises concentriques ou plus; il n’y a pas de gaine double ou triple; elle reste simple, mais on trouve par places deux cellules en alternance, l’une en avant, l’autre en arrière, qui lui appartiennent. Enfin, la gaine peut n’être pas continue, mais interrompue et brisée, réduite même à des lambeaux isolés, placés au devant et vis-à-vis de chacun des faisceaux externes (Tradescantia virginica). L'origine de la gaine fasciculaire, ou plutôt la question de savoir si elle se développe aux dépens des cellules de l'écorce ou de la moelle, et si elle appartient en fait à l’une ou à l’autre, a été jadis discutée. D’après M. Caspary (1) et M. Sanio (2), elle appartiendrait à l'écorce, et elle naîtrait de lassise la plus interne du parenchyme cortical. Gette opinion a été souvent re- (1) Loc. cit., p. 446. (2) Bot. Zeit., 1864, p. 222 224, et 1866, p. 175. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 139 produite depuis, surtout par M. Nicolaï (1) et M. Pfitzer (2), dans des travaux spéciaux. D’après les anciennes vues de Schacht et Karsten, au contraire, la gaine commune rentrerait dans l'anneau d’accroissement lignifié et n’aurait rien de commun avec l'écorce. Voilà deux modes d’origine très-tranchés. Mais déjà Pfitzer, se trouvant dans les Æquiselum en face de gaines diverses entourant tous les faisceaux et situées dans la région centrale, admit à peu près qu’elles pouvaient provenir du tissu fondamental commun. La gaine fasciculaire, en général, par les caractères anato- miques de ses cellules, par le rèle qu’elle joue, par ses rapports de dépendance vis-à-vis des faisceaux, est essentiellement à dé- tacher de l’écorce. La gaine commune, comme les autres, est une propriété des faisceaux; elle tombe dans le champ d'action qu'ils exercent autour d'eux. Bien qu'elle ne dérive pas du procambium des faisceaux qu’elle entoure, pas de fais- ceau, pas de gaine, ni spéciale ni commune. Pour nous éclairer sur ce que peut être cette gaine fasci- culaire commune, si frappante par sa position et ses allures indépendantes dans le plus grand nombre des rhizomes et dans toutes les racines des Monocotylédones, nous avons Île cas bien instructif du Tradescantiu virginica. Sur les coupes transversales faites au niveau des entre-nœuds, les faisceaux du cercle externe sont un peu espacés. Vis-à-vis de chacun d'eux, en dehors, se trouve un lambeau arciforme de gaine, dont les bords rentrent en dedans de chaque côté, comme pour entourer le faisceau; mais ces bords se terminent brusque- ment sur le côté. Il y a donc pour chaque faisceau une demi- gaine particulière externe, et toutes ces demi-gaines se placent sur le même plan tangentiel. Dans les coupes plus rapprochées des nœuds, les faisceaux se resserrent, deux gaines placées côte A à côte se réunissent par leurs extrémités en regard, qui re- (1) Wachsthum der Wurzel (Schriften d. phys. œconom. Gesellsch. zu Künigsberg, 1865, p. 54). (2) Ueber die Schutzscheide der deuischen Equisetaceen, in Pringsheinvs Jahrb.,t. VE. 140 A. GUELLAUD. viennent alors sur le plan tangentiel général, au lieu de rester recourbées en dedans; deux faisceaux se trouvent, par suite, entourés d’une même gaine; trois, quatre de ces gaines particu- lières, ou plus, peuvent ainsi se réunir; enfin, sur certaines coupes des nœuds toutes les gaines particulières se trouvent réunies en une gaine continue et commune, très-régulière, comme celle que lon rencontre d'ordinaire. Dans d’autres cas où la gaine, sans jamais cesser d’être commune, se trouve ce- pendant interrompue de loin en loin (Acorus Calamus, Luzula campestris, etc.), les bords se replient également en dedans autour d'un faisceau. D’après cela, on peut conclure que la gaine fasciculaire commune est partout composée de demi- gaines particulières externes, réunies dès leur origine, agencées en assise circulaire à plus ou moins de distance des faisceaux extérieurs et tout à fait sous leur dépendance. Si elle dépend absolument des faisceaux, la gaine n’a rien à faire avec l'écorce. En réalité, 1l suffit d’examiner une coupe transversale d’un rhizome pour voir que la gaine fasciculaire a plus de rapports avec les tissus qui apparaissent en dedans d'elle qu'avec ceux qui la limitent brusquement en dehors, qu'elle est plutôt de la famille des premiers. Mais, dans cette question, Pétat adulte, tant probant soit-il, ne saurait avoir l'autorité quis’attache ici au mode de développement, à l'examen de la naissance même de la gaine, et c’est cet examen dont je veux maintenant m'occuper. Étant donné qu'une production nouvelle ne procède jamais simplement d’un tissu préexistant, tant qu'il ne s’agit pas d’un travail de morüfication, et que le tissu fondamental, quoique le moins différencié de tous, est par nature incapable de se transformer directement en un autre tissu spécial, on peut déjà dire à priori que la gaine fasciculaire, cette assise st particulière, ne provient point du parenchyme cortical adulte, et que, puisqu'elle naît justement à la limite de ce parenchyme fondamental déja vieux et du périméristème à cellules très- jeunes, il y a bien des apparences pour qu'elle naisse de ces dernières. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 141 Je sais bien que les auteurs précités, M. Caspary, entre autres, font Imtervenir une division préliminaire des cellules formatrices, division qui aurait pour résultat d'établir une sorte de méristème préparatoire. Mais ces divisions n’ont pas toujours lieu. Lorsqu’elles se produisent, elles n’ont pour but que d'amener un agencement plus régulier des cellules en les plaçant direetement bout à bout. Ce qui le prouve, c’est que ces divisions ne sont pas régulières, qu'elles ne retranchent souvent qu'une parte restreinte, qu'un angle trop saillant de la cellule mère, et que, lorsqu'il y à de vraies divisions tangentielles établies par le milieu, c’est tantôt la cellule interne, tantôt la cellule externe des deux cellules filles produites qui entre dans la composition de la gaine, celle qui se trouve le plus en ligne avec les cellules voisines destinées comme elle à former un cercle régulier. C’est à quoi se réduisent le plus souvent ces divisions préliminaires qui deviennent aussi quel- quefois radiales, lorsque les cellules primitives s'étendent trop, et qui n'interviennent nullement si les cellules sont déjà en assise sensiblement régulière, où si la gaine doit rester à cel- lules minces, mal agencées, et pour ainsi dire à létat em- bryonnaire (Paris quadrifolia, Funkia ovata, Canna indica, Tradescantia virginica, ete.). A côté de ces raisons d'ordre théorique il y à même, à n’en- visager que l’état adulte, des cas péremptoires où la gaine fasciculaire n’a pas pu se développer, comme on le voudrait, dans le parenchyme fondamental cortical, mais bien dans le périméristème : c’est lorsqu'elle se trouve englobée dans du méristéniforme. Dans tous les cas où il y a en dehors de la gaine des éléments épaissis de pseudoliber, il en est encore ainsi. Dans le Paris quadrifolia, la gaine est revêtue de deux assises ou plus de cellules, différentes du parenchyme cortical et semblables à celles qui viennent en dedans d'elle, en un mot appartenant à une sorte de méristémiforme. Dans le Tra- descantia virginica, la gaine est souvent revêtue, en dehors, de 10-15 cellules produites par divisions tangentielles du périméristème et encore disposées en files radiales. 142 A. GUELLAUD. Ailleurs, enfin, par l’examen direct, on voit nettement la gaine fasciculaire naître d’une des assises du périméristème. Je vais citer quelques cas. Dans l’Acorus Calamus, la limite entre le périméristème et le tissu fondamental cortical est très- nette. Les cellules de ce dernier sont relativement grandes, à parois plus épaisses, et il v a entre elles des méats remplis d'air. Les cellules du périméristème sont petites, à parois très- minces et sans méats. La gaine avec ses points noirs naît de la couche externe du périméristème, 1l n’y a pas de doute à avoir, et bien longtemps encore après son apparition ses cellules gardent leurs parois très-minces, comme dans leur état de méristème. Dans le Triglochin maritimum, même limite nette entre le tissu fondamental de l'écorce et le périméristème, les cellules du tissu fondamental étant bien plus grandes. L’assise externe du périméristème se transforme en gaine fasciculaire, et les cellules de cette gaine restent toujours bien plus petites que celles du tissu fondamental adjacent. Dans le Luzula campestris, les cellules du périméristème sont allongées, tandis que celles du tissu fondamental cortical adjacent res- tent isodiamétrales. La gaine nait dans la dernière assise de méristème, et ses éléments sont aussi très-allongés comme ceux du pseudoliber que donne plus tard le périméristème. Fait semblable dans les entre-nœuds allongés du Convallaria maalis, mais moims évident, parce que le tissu fondamental allonge aussi un peu ses cellules. Dans lfris Pseudo-Acorus, la gaine fasciculare ne nait pas de Passise extrême du périmé- ristème, mais de l’avant-dernière ou d’une autre assise plus interne; puis, toutes les cellules laissées en dehors de cette gaine passent à un tissu fondamental qui se confond avec celui de l’écorce. L'opinion de M. Caspary sur l’origine de la gaine fascicu- laire, basée sur l'étude des Hydrillées, a besoin d’être modifiée. Après les faits que nous venons de citer, elle n’est plus sou- tenable. Les Hydrillées, du reste, comme toutes les plantes vraiment aquatiques, ont une organisation si modifiée, qu’on peut rarement élablir sur elles des données générales. M. Sanio ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 143 remarque quelque part qu'il y a entre elles et les plantes ter- restres les mêmes différences qu'entre un poisson et un oiseau. C’est absolument juste. Donc la gaine fasciculaire commune nait du périméristème et fait partie de la zone intermédiaire. Je ne parle ici, bien entendu, que pour les rhizomes. Pour les racmes de Monocoty- lédones, où cette même gaine ne manque jamais, je n’ai rien à en dire. Il faudrait, pour cela, entrer dans des considérations anatomiques spéciales à cet organe, qui ne peuvent trouver place ici. Quel est le rôle et la signification propre du périméristème dans les tiges de Monocotylédones à accroissement limité à la première année ? Comme source de tissu fondamental et comme cause d’ac- croissement en épaisseur des rhizomes, le rôle du périméristème est fort réduit. Où il manque et où son existence n’est qu’é- phémère (Polygonatum vulqare, Iris florentina, ete.), la gros- seur adulte n’est pas inférieure à celle des plantes où il intervient avec le plus d'activité. C’est même dans les petits rhizomes filamenteux qu'il est le plus puissant. À l'écorce sur- tout, ilne donne rien ou presque rien. Pour la région centrale, son champ d'action est limité aux alentours du cercle externe des faisceaux communs. Il peut favoriser le développement de ces mêmes faisceaux en longueur et en grosseur, alors que le tissu fondamental est trop différencié pour permettre ce dé- veloppement ultérieur. Il permet, en outre, la formation des petits faisceaux caulinaires, destinés surtout à établir des rela- tions entre les faisceaux de la racine et les faisceaux communs de la tige, et par là il favorise le développement plus ou moins abondant des racines adventives. Enfin, il joue, par rapport au corps central, un rèle protecteur à l’aide de ses tissus épaissis spéciaux (gaine fasciculaire, pseudoliber), et, par la même raison, un rûle mécanique et de soutien pour toute la plante. Par ce qu'ils ont appelé anneau d'accroissement (Verdichungs- ring), 1 est clair que Schacht, M. Sanio et autres, ont voulu 144 A. GUILLAUD. désigner et ont eu en vue notre propériméristème. Mais le rôle qu'ils lui ont fait jouer dans l’organisation des plantes est com- plétement exagéré et erroné. Pour les Dicotylédones à accroissement limité à l’année, qui forment la très-grande majorité, de nombreuses observations de Mohl, M. Sanio et autres, permettent de dire qu'elles possèdent un méristème secondaire analogue, développé dans les mêmes conditions et donnant les mêmes produits. M. Sanio a trouvé des faisceaux caulinaires surajoutés dans certaines Ombellifères et autres plantes. Sauf peut-être une gaine faseiculaire ou Schutz- scheide, aucun tissu de notre zone intermédiaire n’y fait défaut. Les Dicotylédones à accroissement continu, à anneau de cam- bium (nos arbres), commencent aussi, pour la plupart, par revêtir, la première année, un semblable méristème dans la masse duquel s'établit ensuite Panneau cambial. M. Sachs (1) a aussi figuré, dans le Ricinus communis qui vient de germer, une zone (?) génératrice, qui n’est autre, je pense, qu'un périméristème. Les rapports de ce méristème très-général, identique dans les Monocotylédones et les Dicotylédones, et qui parait être une propriété de la première année de la plante, avec la zone d’accroissement continue qui intervient ensuite, varient suivant l’'embranchement. Dans les Dicotylédones, la zone intermé- diaire issue du propériméristème est représentée par du tissu fondamental ou par du méristémiforme et du pseudoliber. Dans les deux cas, le péricambium s'établit au milieu même de cette zone, ainsi que le dit M. Sauio, non pas par continuation des divisions de l’ancien méristème, mais par une évolution nou- velle, indépendante. Dans les Monocotylédones, le périméri- stème d'accroissement se développe au contraire en dehors du propériméristème et peut-être dans ses couches externes ; mais là non plus il n'est pas probable qu'il soit simplement sa continuation : après arrêt du premier périméristème, et peut-être aussi pour les Dracæna après son retour au tissu (1) Lehrbüch der Botanik, 3° Auf. (fig. 92 A. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 145 fondamental, nait le périméristème d’aceroissement également comme évolution ultérieure. Ainsi le propériméristème, le péricambium et le périmé- ristème sont trois choses différentes et non assimilables ; Les deux derniers ne sont pas la continuation pure et simple du premier. L’un répond à son rôle de tissu de perfectionnement pour une structure fixée, du moins momentanément ; les autres interviennent pour un développement ultérieur. $ 4. — MOELLE. La moelle ou région centrale comprend tout l’espace circon- serit par la zone intermédiaire et semble être la portion prinei- pale des tiges autour de laquelle toutes les autres zones sont successivement disposées. En coupe transversale, elle est formée d’un espace médian, axile, privé de faisceaux, auquel vien- nent se rattacher des bandes épaisses, agencées en réseau, qui circonserivent dans chacune de leurs mailles une petite région fasciculaire. La moelle libre est plus ou moins déve- loppée, suivant que ces faisceaux sont plus ou moins rapprochés du centre; elle peut disparaître ou acquérir une grande puis- sance. Dans le Tammus communis (rhizome), elle fait défaut. Dans le Luzula campestris et le Paris quadrifoliu, elle constitue à elle seule toute la région centrale. R Son origine principale est dans la partie centrale du corps de méristème primitif et son origine accessoire dans le jeu interne du périméristème. Sa composition, comme celle de la zone corticale dont elle semble la répétition anatomique, est très-simple; c’est un pa- renchyme fondamental à peu près uniforme, tissu de remplis- sage et d'isolement pour les faisceaux, tissu de nutrition à raison des grandes réserves de fécules et autres aliments qu’il contient en abondance. Le tissu fondamental interne a de grands éléments, à parois molles et minces, isodiamétraux ou allongés en prisme, laissant entre eux des méats ou des lacunes, spécialisés çà et là en cel- lules cristalifères. Un caractère qu’il revêt parfois, comme aussi 6° série, Bor. T. V (Cahier n° 3), ? 10 146 A. GUILLAUD. le tissu fondamental externe, c’est d’avoir des cellules primitives à parois terminales plus ou moins obliques, postérieurement cloisonnées dans le sens transversal. Ceci se produit sous l’in- fluence d’un allongement exagéré des entre-nœuds. Le tissu fondamental n’est jamais coloré par la solution d’aniline. Une formation curieuse et fort inattendue se trouve être d’abord le méristème secondaire et plus tard le tissu épaisst et dur qui se développe au milieu de la moelle, dans laxe même de quelques Triglochin (T. maritimum, T. palustre), aux dépens du tissu fondamental. Gette formation, à laquelle j'ai donné le nom de centralméristème, est à rapprocher, par son évolution, des périméristèmes. Le tissu final qui en résulte se compose de cellules allongées, à parois épaisses, dures et fortement colorées ; en un mot, c’est un pseudoliber. $ 5. — SYSTÈME FASCICULAIRE. — F'AISCEAU. Ainsi que nous l’avons déjà vu, 1l y a dans les tiges de Mono- cotylédones deux sortes de faisceaux : 1° des faisceaux cauli- naires appartenant tout entiers à la tige et réunis par leurs deux extrémités en un ensemble réticulé; 2% des faisceaux communs s'étendant à la tige et à la feuille, ou plus exacte- ment les parties de ces faisceaux connues sous le nom de #ruces foliaires (Blatispuren). Envisagés ainsi dans leur seul parcours tigellaire, les faisceaux communs forment de nombreuses petites régions anatomiques distinctes, parallèles ou non entre elles, libres à leur extrémité supérieure qui entre dans la feuille, et réunies toutes par leur extrémité inférieure en un système ra- mifié où il n’y a que des branches et pas de corps principal. Toutes ces régions, qui ne sont que la répétition les unes des autres, constituent le système fasciculaire. On peut, dans une étude générale, n’en envisager qu'une, et dire simplement la région fasciculaire ou le /aisceau. Le faisceau procède uniquement du tissu formatif connu sous le nom de procambium, qui nait au début dans le méri- stème primitif, mais qui plus tard peut aussi naître dans un méristème secondaire, tel que le périméristème. Le procam- ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 147 bium ne ressemble en rien aux tissus formatifs des autres régions. [l se forme dans les méristèmes, non comme une différenciation ordinaire, mais comme un tissu formatif nou- veau. C’est un degré d'évolution supérieur, si l’on veut. Le faisceau adulte n’a-t-1l point dans quelque partie une autre provenance que la masse première du procambium? Une opinion assez généralement répandue, c’est que, lorsqu'un fais- ceau est enveloppé d’une couche de cellules allongées, épais- sies, cette couche provient non du cambium, mais du tissu fon- damental immédiat. En tout cas, ce ne serait pas du tissu fondamental tout à fait fixé, mais du tissu fondamental encore très-jeune, peut-être aussi du méristème primitif lui-même, que proviendrait cette gaine prosenchymateuse, comme on l’ap- pelle; car lorsque ces éléments prosenchymateux et durs doi- vent exister, ils sont déjà imdiqués de très-bonne heure sous forme de méristème confondu avec le procambium, et cela avant que toute différenciation n’apparaisse dans ce dernier. Dans bien des rhizomes, où cependant l’évolution des tissus est relative- ment lente, il en est ainsi, et jamais le tissu fondamental ne cède d'éléments à la masse fasciculaire après le début de la diffé- renciation et surtout pendant que celle-er s’achève. C’est plutôt le contraire qui a lieu, c’est-à-dire que les masses cambiales peuvent, dans certains cas, se transformer sur quelques points du poutour en tissu fondamental. En somme, la question revient à celle du ‘développement des masses procambiales elles-mêmes, développement que l’on connaît très-peu, si ce n’est peut-être quant à la direction qu'il suit. Je ne puis que me contenter d'ajouter les quelques remar- ques suivantes à ce que J'ai dit plus haut. Au début, ilest hors de doute qu’un faisceau de procam- bium n’a pas pour origine, dans le méristème primitif, une seule rangée, une seule et unique file de cellules placées bout à bout, se multipliant successivement par divisions longitudinales jusqu’à épaisseur voulue du faisceau; ceci ne peut s’admettre à la rigueur que pour de petits filaments fasciculaires. Pour les gros faisceaux, surtout dans leur grosse portion médiane, 148 A. GUILLAUD. plusieurs cellules de méristème, placées côte à côte, concourent à former la masse procambiale. Ce passage des cellules du méristème au procambium n’est pas simultané. À mesure que les premières transformées se divisent longitudinalement un certain nombre de fois, et forment pour ainsi dire le noyau du faisceau de procambium, ce faisceau croît également au pour- tour par envahissement et par transformation cambiale de nouvelles cellules. Cet envahissement latéral peut continuer plus ou moins longtemps, suivant l’épaisseur que doit acquérir le faisceau et suivant que l’état du méristème, par son pas- sage tardif et par sa lente évolution en tissu fondamental, s’y prêtera mieux (Palmiers). L'établissement du faisceau de procambium peut être lent ou rapide, suivant les cas, et suivra en général la différenciation du méristème primiuf. Dans certains cas donnés, les dernières cellules cambialisées, la dernière couche périphérique de cambium formée par en- vahissement gardera certains caractères spéciaux : ce ne sera pas du cambium aussi typique que le premier formé; 1l sera incapable, par exemple, de produire des faisceaux ou des cel- lules grillagées, et ne donnera qu’une forme de liber à gros éléments. On peut dire qu’un faisceau, trainée fusiforme de vrai cambium au début, s’allonge et s’épaissit ensuite par l'apport d’un cambium accessoire, moins parfait, donnant seulement du prosenchyme et du tissu libérien. Ce dernier cambium, formé tard et par envahissement, peut s'appeler posteambium. Xl nous expliquera la plupart du temps ces gaines prosenchymateuses des faisceaux de Monocotylédones, s’il apparait sur tout le pourtour du faisceau primitif à la fois; ou bien ces arcs prosenchymateux postérieurs, antérieurs ou latéraux, qui semblent plus ou moins surajoutés au corps du faisceau. Mais, je le répète, tout cee1 se passe dès l’état de méristème primitif, et une fois le tissu fondamental bien établi, le faisceau n’augmente plus par envahissement. La forme des faisceaux de Monocotylédones, en coupe trans- versale, est variable, mais ce sont généralement des espaces plus ou moins arrondis. Au centre des tiges, la coupe est sou- ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 149 vent circulaire, rarement ovale dans le sens du rayon. À la périphérie du corps central, elle peut être semi-cireulaire ou ovale dans le sens tangentiel. Les faibles faisceaux caulinaires des rhizomes sont souvent aplatis de dedans en dehors en forme de lames. Les faisceaux à coupe circulaire ou ovale peuvent présenter, à leur partie postérieure tournée vers l’axe, une pointe de tissu, un prolongement anguleux, correspondant à ce que Hillier, et après lui Mohl, ont appelé la couronne du fais- ceau (1). Du reste, la forme du faisceau varie dans les divers points de son trajet, de même que son épaisseur relative et sa composition. À sa terminaison il est toujours très-faible, par- fois déformé. Bien souvent, s’il y a des faisceaux communs cor- ticaux, ils diffèrent des autres et deviennent plus où moins anguleux sur leur pourtour. La marche de la différenciation dans le faisceau procambial doit être étudiée dans le sens transversal et dans le sens lon- oitudinal. En outre, elle n’est pas la même dans les faisceaux communs et les faisceaux caulinaires. Il y a encore à distinguer sous ce rapport entre les divers faisceaux communs, surtout entre les faisceaux centraux et les faisceaux corticaux. Avant que toute différenciation transversale commence dans les faisceaux communs, l’extension par envahissement et la multiplication par division longitudinale des éléments de procambium s'arrête dans toute l'épaisseur, dans toute la masse à la fois, pour un niveau donné. M. Nägeli (2) à dit que, d’une façon générale, les divisions longitudinales cessaient en premier lieu à la périphérie d’un faisceau de procambium, pendant qu’elles se continuaient encore au centre, où la multiplication des éléments s’éteignait en dernier. C’est par suite de cette idée que, dans les Monoco- tylédones, il avait appelé la partie centrale du faisceau cambi- forme (3), en remplacement du nom provisoire de vasa propria (1) De Palmarum structura, N 42. (2) Beiräge zur wiss. Bot., 1 Heft, p. 8 et 9. (3) Loc. cit., p. 20. 150 A. GUILLAUD. employé par Mohl. Il voyait dans la petitesse relative des cel- lules et dans la minceur de leurs parois des raisons suffisantes pour admettre leur formation postérieure, mème en l’absence de toute preuve plus directe. Plus tard, cependant, il a aban- donné ce nom de cambiforme, parce qu’il a reconnu la présence constante de cellules grillagées dans le tissu en question, ainsi qu’un degré de différenciation plus avancé qu'il ne lavait d’abord pensé. Aujourd’hui il appelle simplement cette partie du faisceau du phloème. Que le faisceau des Monocotylédones soit de très-bonne heure une masse fixe, la preuve en est en ce que la diffé- renciation ne commence pas à l'extrême périphérie du fais- ceau, mais dans les cellules centrales elles-mêmes que M. Nà- gel croyait les plus jeunes; qu’elle à lieu presque en même temps dans un point plus excentrique, postérieur, mais ce- pendant encore contenu dans la masse même du cambium, pour les premiers vaisseaux ou trachées; que, ultérieure- ment, elle s’avance très-rapidement, pour le phloème comme pour le xyième, dans diverses directions, déterminées 1l est vrai, mais intéressant toute la masse procambiale à la fois ; que, enfin, la forme adulte du faisceau entièrement diffé- rencié est exactement semblable à celle de son état pro- cambial. Ainsi fixé dès le début, le faisceau de procambium se dif- férencie, dans les Monocotylédones comme dans les Dicotylé- dones, en deux sous-régions principales très-distinetes : le phloème et le xylème, qui se le partagent topographiquement et anatomiquement. Nous sommes obligés de voir dans ce fait persistant une grande loi générale de structure répondant à un intérêt physiologique du premier ordre pour les plantes supé- rieures. On doit donc inscrire cette division dominatrice en tête de toute description anatomique du faisceau, et lui subor- donner tous les autres détails. À ces deux parties s’en joint souvent une troisième, surajoutée : le revêtement prosenchy- mateux. Quelques objections ont cependant été faites à cette façon ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 151 d'envisager le faisceau. M. Schwendener (1), désirant démon- trer, au point de vue morphologique, l’analogie de tous les élé- ments épaissis et dureis des plantes, qu'ils appartiennent ou non au faisceau, pour en constituer un seul système physiologique, un système mécanique, ne regarde les notions de xylème et de phloème que comme secondaires € plus topographiques qu’ana- tomiques », et cela, même dans les Dicotylédones, où la lame de cambium interposée et plus tard la zone d’accroissement ne créeraient qu'une limite factice. Il prétend que, dans l’opi- nion première de M. Nägeli, qui a établi cette division aussi bien que les mots, il ne s'agissait pas de tissus différents, mais d’une simple position relative. Ce n’est pas exact. € Dans les Dicotylédones, dit M. Nägeli (2), les produits caractéristiques du côté externe du cambium sont des cellules criblées ou gril- lagées et du hiber; du côté interne, des vaisseaux et du bois. Je donnerai à ces deux parties de tissus durables qui se sont formées du cambium vers l'extérieur et vers l’intérieur les noms de phloème et de æylème. Le phloème consiste en paren- chyme, liber, hiber mou et cellules grillagées ; le xylème, en vaisseaux, bois, aubier et parenchyme ». Voilà pour le fond même de la question. Quant au transport de ces notions dans les Monocotylédones, dont le système mécanique l’occupe sur- tout, M. Schwendener le trouve très-malheureux (Loc. cit., p. 4) et leur substitue (/0c. cit., p. 18) une division du faisceau en deux autres parties ou régions, basée sur le rôle physiologique et mécanique des éléments qui le composent. Il appelle la région centrale et tout ce qui n’a pas de parois fortement épaissies ou durcies, la partie conductrice du faisceau ou le Mestome, et la partie périphérique, lorsqu'elle est constituée par des cellules mécaniques non conductrices, la gaine du mestome ou Mestomscheide. Si un faisceau est tout à fait dépourvu de cel- lules mécaniques, ce n’est qu’un faisceau de mestome ou Mestomstrang. On comprend que si l'on ne veut voir dans le phloème et le (1) Das mecanische Princip, etc., p. 4. (2) Beiträge zur wiss. Bot., 1 Heft, p. 9. 152 A. GUILLAUD. xylème que des relations topographiques de deux parties acci- dentelles du faisceau telles qu’elles se présentent chez les Dicotylédones, il soit un peu difficile de les retrouver dans les Monocotylédones. Il en est autrement si l’on s'attache à la nature des éléments anatomiques et à leur mode d’origine. Pour ne pas se faire identiquement de la même façon et sous les mêmes rapports de position que dans le premier embran- chement, la division topographique et anatomique du faisceau de procambium en phloème et en xylème n’en existe pas moims et avec toute sa valeur dans les Monocotylédones, pour celui qui cherche à s'expliquer l’état adulte par la marche du déve- loppement des tissus. Pour comprendre le faisceau des Monocotylédones, même dépouillé d’une enveloppe fibreuse, il faut abandonner tout à fait le point de vue préventif de vouloir retrouver les mêmes tissus à la mème place et dans les mêmes rapports de position que dans les Dicotylédones. IT faut se placer uniquement en face des faits adultes et aussi de développement. Alors l’ana- logie cherchée pour en être plus détournée n’en devient que plus réelle, les éléments se classent et s’assimilent d’eux- mêmes, les embarras comme les noms distinctifs s’évanouis- sent. Dans les faisceaux de Monocotylédones, la région du phloème n'est pas tout à fait en avant, mais au milieu même du faisceau; la région du xylème west pas seulement en arrière, mais tout autour; elle enveloppe complétement le phloème comme d'un anneau. Voilà le fait essentiel, dominant, et qui lève bien des obseurités, bien des incertitudes. J'ai d'abord suivi le développement du faisceau depuis le jeune état du procambium jusqu’à sa différenciation complète dans de petites pousses latérales et allongées du rhizome de Polygonatum vulyare, qui se prètent très-bien à ce genre d'observations. J'ai répété ce même minutieux travail sur le Convallaria maialis, sur l'Iris amæna, et sur une foule d’autres rhizomes à faisceaux munis où non d'un anneau vasculaire complet. Partout le développement d’un faisceau commun se fait de la mème facon, et tel que nous Pavons décrit longuement ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 1953 à l’occasion de notre premier type, le Polygonatum vulgare. Le phloème se place, dès le début, au milieu du faisceau, et de premier point de xylème consistant en vaisseaux déroulables, à l'arrière. Ensuite le xylème s’avance des deux côtés en demi- cercle et finit par se refermer en avant du phloème, qui se trouve ainsi entouré. Gette seconde portion du xylème ne con-" siste plus qu’en vaisseaux indéroulables, poreux, et en cellules principalement ligneuses. Entre le phloème et le xylème existe longtemps une sorte de couche intermédiaire, cambium ou cambiforme, qui est envahie peu à peu par le phloème de dedans en dehors, par rapport à l’axe du faisceau, et par Île xylème de dehors en dedans. Dans les faisceaux en si grand nombre qui ont un anneau complet de vaisseaux, Jalonné ou continu, ces relations réci- proques de position du xylème et du phloème ne sauraient faire le moindre doute, même à l’état adulte. Pour ceux qui n’ont qu'un demi-anneau vasculaire postérieur, ou bien trois points vasculaires, un postérieur et deux latéraux, ou même un seul groupe postérieur de vaisseaux déroulables, et seulement des éléments durs ou mous en avant du faisceau, il semble qu'on retombe dans lPembarras à propos de la nature de ces der- niers. Mais il y à tant de transitions entre ce second état et le premier, tant de rapports entre les éléments périphériques qui sont en avant et ceux qui sont en arrière et sur les côtés, qu'on ne peut que les rattacher tous au xylème, dont la forma- tion vasculaire s’est arrêtée en route. Du reste, ces éléments n'ont aucun rapport de développement avec le vrai phloème, le phloème mcontestable à cellules grillagées, qui naît de bonne heure au centre, tandis qu’ils en ont beaucoup avec le xylème autre que les vaisseaux. Indépendamment du phloëme et du xylème, bien des fais- ceaux de Monocotylédones possèdent une troisième région qui n’est peut-être pas aussi indépendante, aussi étrangère au fais- ceau, que le veut M. Schwendener, mais qui, en tout cas, est entièrement distincte des deux autres. Il s'agit de ces revêle- ments fibreux bien connus, gaines prosenchymateuses (Prosen- 154 A. GUILLAUD. chymscheide, Innenscheide, Sanio ; Mestomscheide, Schwen- dener), dont il a été déjà parlé plus haut. Aussi bien il y a longtemps qu’on discute sur ce tissu fibreux. Mohl en avait attribué une partie au phloëme et une partie au xylème, sans prendre garde à la similitude des éléments dans lun et Pautre cas. On sait, en effet, qu'il en faisait du liber en avant et du bois en arrière du faisceau, ou tout au moins, dans ce dernier cas, un annulum prosenchymatosum posteriorem (1) distinct du hber. Mais, pour peu que l’on sorte des Palmiers, pareille distinction perd même toute apparence. Pour échapper à cette contradiction, on a depuis tourné ces éléments en tous sens; On en a fait tantôt du bois, tantôt du liber, puis on à fini par leur donner le nom de gaine prosenchymateuse, qui ne pré- juge rien, mais qui ne dit pas grand’chose. M. Schwendener apporte en apparence une solution en rangeant sous le nom de Mestomscheide ces mèmes éléments dans le système mécanique ; ce qui, au fond, n’en dit pas plus et même moins, puisque tout élément épaissi et durci joue un rèle mécanique quelconque. La question demeure entière. Il faut pourtant que ces éléments soient quelque chose, et quelque chose qui ait son représentant direct dans le premier embranchement; car les Monocotylédones, dans la série dérivée des plantes, ne sont pas si éloignées des Dicotylédones que leur anatomie générale puisse présenter d’autres éléments, se décrire à part et avec d’autres notions et termes. Les gaines en question sont plus ou moins développées, plus ou moins régulières ; souvent même ce ne sont que des amas isolés d'éléments placés en avant ou en arrière du faisceau et même sur les côtés. Tout ce prosenchyme épaissi naît de la partie périphérique du procambium après linstallation du phloëme et du xylème. De même, dans les Dicotylédones, un très-grand nombre de faisceaux sont munis d’une semblable gaine prosenchymateuse (Ombellifères), d’autres n’ont égale- ment que des dépôts périphériques isolés de tels éléments en (1) De Palmarum structura, $ 60. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 159 arrière du faisceau, ou plus spécialement en avant, du côté du phloème, Ce dernier dépôt isolé se développe souvent seul et constitue le liber (tissu libérien) des faisceaux dicotylédonés, le liber à parois épaisses (dichwandiger Bast des auteurs alle- mands). Même tissu, du reste; éléments et structure parfaite- ment identiques dans les deux embranchements. Ce que l’étude comparée du dépôt et l'anatomie spéciale du tissu réunissent doit porter le même nom. Ces gaines et dépôts prosenchymateux ne sont pas autre chose que du tissu libérien véritable, du liber à parois épaisses, partout où elles se rencontrent. Considéré dans l’ensemble de son gisement, ee liber à parois épaisses constitue véritablement une région à part, accessoire si l’on veut, mais liée encore au faisceau par son origine, M. Schwendener a introduit dans la science le nom de s{éréome pour désigner les tissus mécaniques en général. Je propose d'employer la variante sféréème, par consonnance avec phloème et xylème, pour désigner la région spécialement mécanique du faisceau, c’est-à-dire le Hiber épais. Les rapports topographiques de ces trois régions varient dans les faisceaux des Monocotylédones. D'abord nous avons les faisceaux qui manquent de stéréème. Un deuxième type est celui où le phloème est au milieu, entouré de deux anneaux superposés, l’un de xylème, l’autre de stéréème ; un troisième, celui où le phloème est encore au milieu, avec un anneau de xylème plus puissant en arrière et encore un anneau complet ou brisé de stéréème ; enfin, on peut avoir un xylème en arrière d’un phloème, et par-dessus le tout un anneau de stéréème. Ce dernier type se rapproche de celui des Dicotylédones (0m- bellifères). Pour avoir un exposé plus eirconstancié des divers états ana- tomiques du faisceau commun en coupe transversale, je ne puis que renvoyer à chacun des types précédemment déerits. On y trouvera diverses variétés qui r’altèrent en rien le fond général. Une remarque générale à faire, c’est que dans les Monocotylédones l’état des tissus, les vaisseaux mis à part, est bien moins avancé que dans la majorité des Dicotylédones; il 156 A. GUILLAUD. semble que l’évolution du faisceau soit allée comparativement moins loi et se soit arrêtée en général à un degré plus voisin du procambium. Il ne faut donc pas s'attendre à trouver dans le xylème et le phloëme des éléments ni aussi variés, ni aussi complets. On devra se contenter souvent des plus caracté- ristiques, et penser que le cambium ou le cambiforme n’est jamais bien éloigné. Il est des faisceaux, comme ceux du Canna indica, qui, à part un ou deux vaisseaux déroulables, ne sont qu'une masse uniforme de cambium éteint. D’autres, comme dans lAcorus Calamus, n'ont de distincts que leurs vaisseaux, quelques éléments de phloème et quelques cellules xyleuses allongées et épaissies ; tout le reste est encore dans un état trop jeune pour être classé. On ne peut qu’affirmer que si la diffé- renciation faisait un pas de plus, ce seraient telles ou telles cellules qui deviendraient, les unes du xylème, les autres du phloëème, et cela suffit. Dans d’autres encore, c’est tantôt la région du xylème, tantôt la région du phloème, qui est la plus complète. Suivant les faisceaux et leur niveau même, la puis- sance respective de ces deux sous-régions varie. Enfin, vers les terminaisons des faisceaux et souvent sur presque toute la longueur de ceux qui courent dans la zone corticale, le sté- réème l’emporte sur le phloème et le xylème et finit même par faire disparaître ceux-c1. La différenciation longitudinale des faisceaux communs n’est pas uniforme d’un bout à l’autre. Malgré l’assertion de M. Nägeli reproduite plus haut, il ne semble pas qu’elle suive exactement la marche de production du cambium. Elle est plutôt sous l'influence du degré de développement général de la portion de tige et du tissu dans lequel le faisceau se trouve plongé. Beaucoup de faits parlent dans ce sens. Elle n’est pas, du reste, la même pour tous les tissus du faisceau, et il faut toujours s’en tenir à l’envisager uniquement sous le rapport de l’apparition des premiers éléments différenciés, les vaisseaux déroulables d’une part, les premiers éléments centraux du phloème de l’autre. On s'aperçoit bien vite, en voyant l’irré- gularité avec laquelle les mêmes éléments du faisceau se suc- ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 157 cèdent en coupe longitudinale, que des forces diverses ont influencé cette succession. Une étude détaillée, très-détaillée de ce sujet, serait à désirer, et quelques exemples particuliers ne peuvent nous suffire, parce qu'ils n’engagent qu'eux. D’une façon générale on peut dire des Monocotylédones, que dans les faisceaux courbés vers le centre de la tige, les premiers vaisseaux et le premier phloème apparaissent vers le milieu de la courbure et marchent de là de bas en haut vers la feuille, de haut en bas vers la partie descendante du faisceau. La diffé- renciation commencerait donc pour eux dans la tige et non dans la feuille, contrairement à ce qui aurait lieu pour la pro- duction de leur procambium. On peut assez bien s’expliquer le fait. Si, au début, l’évolution des tissus de la feuille est plus avancée que celle de la partie sous-jacente de la tige, un peu plus tard, les tissus de la feuille restant un moment stationnaires, ce sont ceux de la tige qui sont en avance, et la portion du fais- ceau qu'ils contiennent entre la première en différenciation, au moment où le tissu fondamental la gagne. Pour tous les autres faisceaux non courbés, je ne puis que me montrer d’une grande réserve sur la direction de la différenciation, tout en croyant cependant qu’elle aussi reste soumise à l’état général de développement des tissus ambiants. La distribution longitudinale et transversale des faisceaux communs dans les tiges ou rhizomes adultes est le résultat de plusieurs facteurs, dont le principal est la disposition des feuilles ou des écailles foliaires, point de départ obligé de ces faisceaux. Mon intention n’est pas d'étudier en détail l'influence des feuilles, suivant leur nature, leur mode d'insertion et leur arrangement sur la tige. Il nous suffit de savoir que cette influence est prépondérante pour le nombre, la qualité et le groupement des faisceaux communs. M. Nägeli est entré dans un long exposé à cet égard et a cité de très-nombreux exem- ples, auxquels nous renvoyons le lecteur (1). (1) Beiträge zur wiss. Botanik, 1 Heft, p. 36-51. 158 A, GUILLAUD. Un faisceau commun comprend deux parties, l’une située dans la feuille, et l’autre, la seule dont nous nous occupions, dans la tige. M. Hanstein a désigné cette dernière sous le nom fort juste de trace foliaire (Blattspur) ; de là l'expression de Blatt- spurstränge souvent employée en allemand pour désigner les faisceaux de la tige qui se rendent aux feuilles, expression d’au- tant meilleure qu’elle indique cette influence dont nous venons de parler, autrement dit la part effective que prennent Îles feuilles à l'édification de la tige. M. Nägeli (1) fait remarquer que les faisceaux ne sont pas les seules traces foliaires que porte la tige, et que Kützing (2) a déjà employé le même mot de Blatispur pour les gibbosités, dépressions, sillons, angles, etc., que les feuilles laissent à la superficie des tiges. On doit donc, suivant lui, distinguer des traces foliaires internes et des traces foliaires externes. Rien de plus juste, et ce sont surtout ces traces foliaires externes dont nous avons fait voir l'importance dans la formation de l’épiderme et des couches sous-Jacentes des entre-næuds, en parlant du système cutané. Nous allons maintenant parler des traces foliaires internes. La participation des feuilles à l'édification de la tige, Pin- fluence de celles-ci sur l’entre-nœud ou les entre-nœuds qui viennent au-dessous, la considération que dans le jeune bour- geon il n’y a pas d’entre-nœuds, que ceux-ci manquent souvent même à l’état adulte, qu'il y en a ensuite à tous les degrés d’élongation, tout ceci nous amène à ne pas voir en eux un fait fondamental dans le plan du végétal; l’entre-nœud n’est qu'un fait secondaire. Au point de vue anatomique comme au point de vue organographique, il n°y faut voir que l'allongement plus ou moins considérable d’une section donnée de tissus sous l’in- sertion foliaire. De là ces longs éléments des entre-nœuds ne dépassant pas les feuilles et remplacés à leur niveau par de plus courts. De là aussi certaines particularités des systèmes ana- tomiques eux-mêmes vis-à-vis des nœuds. Le trajet des faisceaux des tiges de Monocotylédones a été, (1) Tbid., p. 46. (2) Kützing, Philos. Bot., t. Il, p. 130. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 159 comme on le sait, un sujet de vive discussion, lorsque Mohl vint établir la courbure vers le centre de la tige de tous les faisceaux à leur sortie des feuilles, puis leur retour vers la périphérie dans leur partie descendante, ce qu'on a appelé simplement la décussation des faisceaux, ceux d’une feuille croisés par ceux d’une feuille supérieure. « Quisque vasorum » fasciculus Palmarum certo quodam cursu a peripheria ad axin, » et inde retro ad peripheriam decurrat (1). » Mohl ne faisait d’exception que pour certains petits faisceaux corticaux, qui se rendaient tout droit à leur feuille et qu’il regardait pour cette raison comme d’une nature toute différente, les appelant faisceaux fibreux (2). La théorie contraire de l’endogénie ou du développement interne des faisceaux, ceux d’une feuille par rapport à ceux de la précédente, ne s’est pas relevée de- puis lors. Il s’en faut pourtant du tout au tout que la loi de décus- sation soit aussi importante que le pensait ce grand anato- miste. Dans l'application qui en a été faite aux autres Mono- cotylédones, les deux parties de la loi précédente sont fausses dans leur généralité, en ce sens que bien des faisceaux ne décrivent pas de courbure centrale, et que tous ceux qui se sont courbés ne reviennent pas à la périphérie. M. Schleiden avait déjà parlé de faisceaux non courbés. Dès 1858 (3), M. Nägeli indiquait que, dans le Chameædorea elatior Mart., il y avait bien, sortant de la feuille et rentrant dans la tige, deux sortes de faisceaux : des faisceaux fibreux (Bast- stränge) qui restaient dans l'écorce, et des faisceaux fibro-vas- culaires (Fibrovasalstrüänge) qui pénétraient dans la région centrale (Mark) ; mais, parmi ces derniers, les uns, provenant de la face extérieure de la gaine foliaire descendaient vertica- lement dans la partie la plus externe de la région centrale, les autres s’avançaient plus ou moins loin dans la moelle, décrivant soit une courbure très-faible, soit une courbure plus forte (1) De Palmarum structura conspeclus. (2) Ibid., $ 48, note 1. (3) Beiträge zur wiss. Bot., p. 129. 160 A. GUELLAUD. à tous les degrés. Ainsi, 1l n’y avait pas séparation entre les faisceaux corticaux verticalement dirigés et les faisceaux les plus fortement courbés, mais tous les intermédiaires possibles ; qui plus est, certains faisceaux centraux eux-mêmes étaient à direction verticale, sans décussation par conséquent. Depuis, M. Schwendener (1) a dit de même : « Il est à remarquer que le trajet schématique de Mohl ne correspond à la réalité des choses que dans certaines Monocotylédones, dans celles où les entre-nœuds demeurent très-courts, comme les Palmiers, Dra- cénées, Pandanées, et autres semblables. Et même là ce ne sont que les plus grosses traces foliaires (Blatispurstränge) qui décrivent la courbure connue ; les faisceaux riches en fibres de la périphérie, en qui consiste principalement le système mécanique des plantes nommées, descendent parallèlement entre eux et avec l’axe de la tige, ou à peu près parallèlement. » Je puis ajouter, de mon côté, qu’en prenant les tiges de Monocotylédones dans leur ensemble, il y a au moins la moitié, souvent plus de la moitié des faisceaux communs qui des- cendent à peu près verticalement, qui courent parallèlement à l’axe et qui ne sont point décussés. On peut même dire ceci, c’est que le cercle externe des faisceaux centraux est avant tout formé de faisceaux sans courbure, c’est-à-dire non inclinés d'abord vers l’axe et ramenés ensuite à la périphérie; ces fais- ceaux non courbés arrivant des feuilles n’entrent pas dans la moelle et descendent directement, parallèles à l'axe : c’est ainsi qu'ils représentent exactement l’anneau ordinaire de faisceaux des tiges de Dicotylédones. Il peut bien se mêler parmi eux des terminaisons de faisceaux courbés, mais en petit nombre ; car celles-ci ne reviennent jamais tout à fait à la périphérie; elles restent en dedans des faisceaux non courbés. Enfin, les faisceaux corticaux que l’on rencontre dans un assez grand nombre de plantes descendent aussi parallèlement à l'axe. En conséquence, par rapport à leur état et à leur distribution dans la tige, 1l ya heu de distinguer trois ordres de faisceaux com- (1) Das mecanische Princip, p. 139. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 161 muns : ceux d'ordre prümaire, arqués vers le centre; ceux d'ordre secondaire, non arqués et formant un cercle périphé- rique ; et ceux d'ordre fertiaire, encore plus externes et situés dans Pécorce ; ces derniers peuvent S'appeler corticaux et les autres centraux, expressions déjà employées plus haut. Entre les faisceaux centraux primaires les plus fortement courbés vers le centre et les faisceaux centraux secondaires non courbés se placent toujours de nombreux intermédiaires dans les casordi naires. Suivant les plantes, le rapport de nombre de ces cleux sortes de faisceaux varie. Peu de Monocotylédones, à part les arbres, ont un grand nombredes premiers. La majorité d’entre elles, tous les petits rhizomes filamenteux, comme ceux du Convallarin maialis, les rhizomes gros, charnus ou ligneux, du Polygonatum vulgare, du Ruseus aculeatus, ete., ete, ont autant et plus de faisceaux d'ordre secondaire que de faisceaux d'ordre primaire, et ceux qui accomplissent une orande courbure sont en nombre assez restreint; de là des moelles libres plus ou moins puissantes. La difficulté est de reconnaître dans un enchevêtrement continu et dans la suc- cession rapide des apports foliaires, les uns et les autres fais- ceaux. Cette difficulté disparaît dans certains cas. D’abord, il est plusieurs plantes (Funkia ovata, ris amcæna, Butomus umbellatus, ete.) dans lesquelles les faisceaux primaires courbés ne reviennent pas, du moins en grande partie, à la périphérie, mais se terminent au centre en s’accolant aux faisceaux anté- rieurs. C'est un commencement de la séparation des deux sys- tèmes. Pour ceux-là done, la décussation disparaît. Tous les faisceaux périphériques sont d'ordre secondaire, non courbés, et certainement 1ls sont en plus grand nombre que les autres, Dans le Tradescantiu virginica et les Comméiynées, dans le Schœnus nigricans, les deux sortes de faisceaux sont très- distinctes et forment deux systèmes séparés en coupe transver- sale par une bande annulaire de parenchyme fondamental central, libre de tout faisceau. Les faisceaux primaires, en plus petit nombre, très-fortement courbés vers le centre, y descendent parallèlement à laxe et s'y anastomosent d’une 6° série, Bor. T. V (Cahier n° 3.) 8 11 162 A. GUILLAUD. feuille à l'autre sans décussation aucune. Les faisceaux secon- daires, en bien plus grand nombre, non courbés, restent à la périphérie, y descendent aussi parallèlement à Paxe et se terminent dans les faisceaux inférieurs, sans plus de décussa- tion que les autres. Ici, les intermédiaires disparaissant et les extrèmes accentuant encore leurs caractères, nous pouvons nous rendre compte, par cet exemple simplifié, de ce qui existe partout. Enfin, nous avons d’autres plantes (Luzula campes- tris, ete.) dont tous les faisceaux sans exception sont périphé- riques, non courbés, non décussés, et qui descendent verti- calement, parallèles entre eux et à Paxe de la tige; 1l n°y a plus qu'un seul système de faisceaux secondaires. On peut done conclure que la tendance des faisceaux communs à se courber et à se décusser ne prédomine pas dans les Monocotylédones, et que la loi de courbure n’est pas générale, mais secondaire. Est-ce à dire maintenant que le principe de l’endogénie doit être repris en tout ou en partie? En aucune façon. La vérité n’est pas souvent, comme on le dit, entre deux idées, mais à côté. En sciences naturelles surtout, la question se pose mal d'abord, et une solution ne peut mtervenir dans les termes donnés. Dé- placer la question et changer la formule à résoudre, lorsque les faits nous l’indiquent, telle est la règle à suivre. Qu'il me soit cependant permis de dire, à l’excuse de Fancienne École botanique française, qui se recommande des noms et des idées de Desfontaines et de De Candolle, qu'à un certain point de vue la théorie de lendogénie n’est pas plus fausse que celle de la décussation. Eu effet, la décussation est un rapport entre des faisceaux de deux feuilles successives, d’abord imfléchis vers le centre de la tige, puis réfléchis vers la périphérie. En ne prenant que les faisceaux d'ordre primaire de lune et de l’autre, cette théorie est vraie; en ne prenant que les faisceaux d'ordre se- condaire, elle est tout à fait fausse. Mais en considérant les faisceaux d'ordre primaire d’une feuille supérieure, par rapport aux faisceaux d'ordre secondaire d’une feuille inférieure, c’est l’'endogénie, à son tour, qui est vraie, et la décussation qui de son côté est fausse ; par exemple, dansle Tradescantia virginica, ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 163 tous les faisceaux primaires d’une feuille sont endogènes d’un bout à l’autre, par rapport aux faisceaux secondaires de la feuille ou des feuilles inférieures. Je me hâte d'ajouter que lune et l’autre théorie ne se rapportent qu’à des cas restreints, et, comme on le voit, qu'à une partie de la vérité, qu'à la plus faible partie des faisceaux communs de la tige. Il n’y a pas un mode unique de succession fongitudinale de ces faisceaux, mais plusieurs modes ou rapports différents, soumis à des lois variables en influence. M. Nägeli a indiqué ies principaux cas qui peuvent se pré- senter sous ce rapport aussi bien dans les Monocotylédones que dans les Dicotylédones; je saisis Poccasion de les rappeler sommairement. Un même faisceau ne descend pas toujours dans un plan longitudinal-radial, mais souvent prend une direction oblique et tangentielle, c’est-à-dire que si on le projette sur un plan tangentiel formé par la surface de la tige, par exemple, il'court obliquement à droite ou à gauche en spirale, par rapport à celui qui reste dans un plan longitudinal radial. De tels faisceaux obliques se rencontrent dans l’Iris florentina, dans le Yucca recurva, etc. La descente des faisceaux peut ensuite, selon le cas, être radiale-verticale (radialsenkrecht) où radiale-oblique (ra- dialschief), si, dans un plan longitudinal-radial, ils sont ou non parallèles à la surface de la tige; tangentielle-verticale (tun- gentialsenkrecht) ou tangentielle-oblique (tangentialschief), si, projetés sur le plan tangentiel de la surface de la tige, ils sont parallèles à son axe ou forment un angle avec cet axe. Des faisceaux de feuilles superposées, radiaux-obliques, de plans différents, formentune décussation radiale (décussation de Mohl); de mème plan ils s’accolent. Semblablement, si les fais- ceaux sont tangentiels-obliques, ils se croisent ou se réunissent, suivant qu'issus de feuilles successives, 1ls ont ou non une même ligne de projection (1). Nous avons ainsi la cause et l’explication des accolements nombreux qui se produisent à tout niveau, ça et là, dans chaque (1) Loc. cit., p, 47, 164 A. GWUBLE AU. rhizome de Moconotylédones, mais spécialement dans certaines plantes à faisceaux groupés dans un espace restremt. A la suite de cette circonstance, beaucoup de faisceaux primaires ne re- viennent point à la périphérie ou ne dépassent même pas la longueur d’un entre-nœud. En un mot, nous nous rendons parfaitement compte des terminaisons anormales des faisceaux et de la façon suivant laquelle elles ont lieu. En effet, un faisceau radial-oblique ou tangentiel-oblique quicourt dans le même plan qu'un autre qui l’a précédé ne peut rencontrer ce dernier que par sa face postérieure, autrement 1l ne serait pas dans le mème plan, il passerait à côté et le croiserait. C’est, en effet, ce qu'on observe toujours dans les accolements qui ont leu dans la région centrale; ils se font toujours à la face postérieure des faisceaux qui reçoivent l’accolement, et jamais latéralement, ni en avant. Des faisceaux partis de deux faces opposées de la tige et situés dans un même plan, non pas seulement radial, mais diamétral, peuvent également, si leur courbure est assez forte, s’accoler au centre même de la tige, et si, dans certaines conditions spé- ciales, ce nouveau mode de réunion des faisceaux est constant et régulier, provoquer la formation d’un corps central de mé- ristème. C’est ce que nous voyons à peu près réalisé dans le Triglochin maritinrum. La terminaison inférieure normale des faisceaux communs diffère de celle dont nous venons de parler, qui n’est qu'acci- dentelle par le lieu et le mode employé. Après un trajet plus ou moins long suivant les plantes, trois ou quatre entre-nœuds et souvent beaucoup plus, les faisceaux d’une mème feuille sont presque tous rassemblés à la péri- phérie au voisinage de la zone intermédiaire. Is se sont amincis et effilés. Alors successivement ils s’inclinent chacun vers le faisceau latéral le plus voisin, c’est-à-dire situé à ce niveau dans le même plan tangentiel ou à peu près, et s'accolent à son côté, soit à droite, soit à gauche. Parfois la courbure tangen- üelle qui les amène au contact de ce faisceau est brusque, parfois c’est un angle très-allongé, ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 165 Dans les gros rhizomes ou grosses tiges, on trouve épars dans la région centrale des faisceaux fins, purement fibreux, qui vont aussi s'accoler aux faces latérales de faisceaux anté- rieurs. C’est un mode de terminaison normal changé de lieu et se rapportant à des faisceaux primaires qui ne sont pas revenus à la périphérie, des faisceaux radiaux-verticaux, par exemple, ou tangentiels-verticaux. Les faisceaux corticaux, fibreux ou non, s’accolent égale- ment les uns aux autres par le côté. La distribution transversale des faisceaux communs n’est que la figure d'ensemble et les rapports de position qu'ils pré- sentent sur une section transversale de la tige ; c’est l'expression de leurs relations communes à un niveau donné. Après tout ce que nous avons dit de l’état des faisceaux en succession longi- tudinale, on voit à combien de variantes doit être soumise cette coupe de distribution, suivant les plantes et les niveaux. Mohl avart déjà avancé que, malgré le désordre apparent dans le corps central des Monocotylédones, les faisceaux issus d’une même feuille devaient former en coupe transversale des lignes circulaires concentriques autour d’un point médullaire ; leur grand nombre seul brisait une telle régularité et em- pêchait de la reconnaître. Il avait en partie raison et en partie tort. Si tous les faisceaux venus d’une feuille entrent dans la tige et y descendent suivant un ou plusieurs plans tangen- üels, verticaux, obliques ou plus ou moins contournés, ils formeront évidemment des lignes circulaires à tous les niveaux où l’on fera passer une section transversale, étant donné que le mode d'insertion de la feuille est circulaire etembrasse toute la tige, c’est-à-dire qu’elle fournisse des faisceaux à tout le pourtour. Mais il peut se faire que des faisceaux entrés dans un même plan, comme ceux que nous venons d'indiquer, n’y res- tent pas par suite de différences de croissance et d’évolutions de tissus sur les diverses faces de la tige. De là une première cause d'irrégularité. Une autre, plus grande, c’est que les fais- ceaux peuvent entrer dans la tigeisolémentsans former ni lignes, ni plans disunets ; les plus forts vont au centre, les plus faibles 166 A. GUILLAUX. à la périphérie, et les autres se distribuent sans ordre dans tout lintervalle. Donc, la disposition transversale circulaire des faisceaux peut exister où ne pas exister. Elle ne s’observe pas dans les Palmiers; elle se rencontre dans le Polygonatun vulgare, dans lAcorus Calamus, etc. Dans cette dernière plante, elle existe même pour les faisceaux corticaux. Mais, si dans Île centre les faisceaux sont souvent irrégulière- ment disposés, 11 arrive toujours qu'à la périphérie du corps central, à la limite de la zone intermédiaire, les plus externes forment un cercle, un anneau plus ou moins riche en faisceaux régulièrement agencés. On doit dire que ce cercle n’est régu- lèrement jalonné qu’en dehors, et qu'il n’est pour ainsi dire que la hmite de la zone oceupée par les faisceaux. C’est une réunion de faisceaux secondaires pour la plus grande part et d'un petit nombre de faisceaux primaires réfléchis en dehors, provenant en général les uns et les autres de diverses feuilles successives. L’analogie de ce cercle ou de cet anneau de fais- ceaux avec le cercle ordinaire des Dicotylédones est frappante. Si l’on prend pour terme de comparaison une tige de Mono- cotylédone à nombre restreint de faisceaux tous réunis à la périphérie, comme chez le Paris quadrifolia, ou avec très- peu de faisceaux courbés vers le centre, comme dans le Con- vallariamaialis, on ne peut faire autrementque de les assimiler. Enfin, pour ce qui est de la détermination et de la dénomi- nation des tissus qui entrent dans la composition de la région fasciculaire où du /wisceau des Monocotylédones, tissus assez indécis jusqu’à présent, cette nouvelle façon d'envisager la position relative du phloème et du æylème, et de plus, la création imposée d'une troisième division naturelle, le ste- réème, comprenant les masses prosenchymateuses mécaniques circonjacentes, nous permettent de nous en faire une meilleure idée. Ces divisions sont surtout fondées sur l’histoire du déve- loppement. Nous l'avons dit, les seuls caractères anatomiques et chimiques, c’est-à-dire la forme et les réactions des éléments constituants, ne peuvent suffire à déterminer un tissu. En se ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 167 plaçant, en outre, au point de vue physiologique, on n'établit que des groupes très-vagues, forcément multiples, de véritables appareils fonctionnels et non des tissus. La notion de ceux-ci doit se lier, d’une part, à une origine et à un développement commun, de lPautre, à des relations correspondantes de posi- tion, tout autant qu'aux caractères propres des éléments. Ceci est vrai surtout de la région qui nous oceupe. — Nous allons passer brièvement en revue les divers tissus du faisceau, en nous bornant pour chacun d'eux, à une courte diagnose et en renvoyant, pour plus de détails, aux exemples particuliers déjà décrits. 1° PaLoËëME. — Il n°y à presque jamais qu'un seul corps plus ou moins central de phloème, autour duquel S'ordonnent les deux autres régions ; cependant, dans les genres Tamus et Dioscorea, on trouve plusieurs petites masses distinctes de phloëme, espacées dans Pintérieur d’un cercle jalonné par les vaisseaux. Les tissus du phloème sont les suivants : Cellules qgrillagées. — Ges cellules, dont je ne veux ici que rappeler l'existence, se rencontrent en plus où moins grand nombre dans la masse du phloème, isolées, et remarquables parfois par leur plus grande largeur. Liber (tissu libérien). — Le Liber ordinaire, caractérisé par de longues cellules terminées en pointe, à assez faible lumière et à parois modérément épaissies, se rencontre assez souvent au centre même du faisceau et du corps de phloème, mais réduit à un petit nombre d'éléments (Acorus Calamus, Iris anæena, elC.). Liber mou. — Tout ce qui n’est pas cellules libériennes ou grillagées constitue en général du liber mou. Cambiforme phloeux. — Bien distinct de ce que M. Nägeli avait nommé d'abord cambiforme, qui n’étaitautre chose que le corps même du phloème, celui-er est un état moins avancé qui remplace accidentellement soit tout ce corps, soit la partie externe seulement. 2° XYLEÈNE. — Le plus souvent le xylème entoure compléte- ment le phloème, même lorsque les vaisseaux sont limités à la 168 A. GUILLAUD. partie postérieure tournée vers l’axe; seulement, dans ce der- nier cas, il est bien moins puissant en avant qu’en arrière. Rarement 1l ny a réellement de xylème que sur les parties laté- rales et postérieure du faisceau, en arrière du phloème, qui se trouve ainsi dégagé de son anneau xyleux ordinaire. Les tissus sont : Vaisseaux. — Rarement réunis en masse, le plus souvent isolés ou en très-petits groupes. Vaisseaux déroulables en peut nombre, 1-3, situés du côté de l'axe; vaisseaux i#déroulables souvent très-nombreux, sur les côtés et en avant du faisceau, les uns et les autres toujours complétement englobés dans le reste du xylème et jamais placés sur les bords de celui-cr. En général, dans les faisceaux communs, ce sont de véri- tables vaisseaux plus ou moins allongés. Dans les petits fais- ceaux caulinaires, ce ne sont que de courtes cellules vas- culaires. Il y a encore à distinguer les vaisseaux mous à parois minces et les vaisseaux durs à parois épaisses. Parenchyme æyleux. — Les vaisseaux sont souvent plongés dans un tissu à cellules allongées, ayant subi de nombreux cloisonnements postérieurs ; les cellules primitives seules ont des parois terminales obliques, mais non effilées en pointe ; leurs parois sont molles, minces, et n’ont jamais l'aspect erisâtre réfringent des éléments du phloème. Ces cellules sont vides ou renferment d'assez gros grains de fécule, ce qui les distingue encore du phloème habituel, en même temps que leur plus grande largeur. Dans les Dicotylédones, pareil tissu a été étudié dans le corps ligneux de nos arbres par M. Sanio (1) ; il a été appelé Holzparenchym par Schacht (2), Holzstump- zellen par M. Caspary (3). C’est encore le parenchyme ligneux des auteurs français. Dans l’état actuel des choses, lé nom de (1) Vergleichende Untersuchungen über die Elementarorgane des Holz- kôrpers. (Bot. Zeit., 1863, p. 93). (2) Planzenzelle, 1852, p. 205, et Grundniss der Anat. und Phys., 1859, p. 99. (3) Pringsheims Jahrbüch. für wiss. Botanik, t. IV, 1864, p. 122. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONCCOTYLÉDONES. 169 perenchyme æyleux est celui qui me paraît le plus simple et celui qui prête le moins à confusion. Le parenchyme xyleux touche, d’un côté, au phloème, de l’autre, au tissu fondamental; mais il est souvent séparé de ce dernier en tout ou en partie par des éléments épaissis, sté- réomateux. Enfin, il peut être aussi, en tout ou en partie, remplacé par du hbriforme ; il peut arriver ainsi que le paren- chymeé xyleux soit relégué à l'arrière du faisceau, entre les tra- chées ou dans la zone la plus rapprochée du phloème. Dans les cas de son plus grand développement, 1 est divisé par les vaisseaux, figurant un cercle jalonné où un anneau plu- sieurs fois brisé, en parenchyme æxyleux externe, occupant la périphérie du faisceau où bien venant sous le stéréème, et en parenchyme æyleux interne, formant une autre couche en dedans des vaisseaux. Les deux couches communiquent par des ponts de même nature entre les vaisseaux isolés ou entre les groupes de vaisseaux. Libriforme. — Tissu à éléments allongés, épaissis et durcis à divers degrés, peu cloisonnés en sens transversal, terminés par des faces très-obliques ou même des pomtes effilées. Ge sont, dans les Dicotylédones, les Holzspitzzellen de M. Cas- pary (1), les Holzzellen de Schacht (2), les Libriformfasern de M. Sanio (3), les fibres ligneuses ou hbriforme des auteurs français. Dans les Monocotylédones, ce tissu se distingue presque toujours des revêtements fibreux, du gros lhiber (tissu libérien), par ses éléments plus longs, moins larges, moins poreux et surtout moins fortement épaissis, enfin, par la coloration diffé- rente qu'il prend sous l’influence de la solution alcoolique d’aniline. Il est toujours situé autour et entre les vaisseaux, à la même place que le parenchyme xyleux qu'il remplace et avec lequel 1l offre des transitions. . D’après son état physique on peut distinguer du libriforme mou et du libriforme dur, comme pour le liber (tissu libérien). (1) Loc. ci. (2) Planzenzelle, p. 195. (3) Loc. cit., p. 101. 170 A. GUILLAUD. Cambiforme æyleux. — Tissu moins différencié que les pré- cédents, dont 11 occupe la place dans certaines plantes, en dehors où en dedans des vaisseaux. On peut l'appeler cambi- forme xyleux, parce qu'en cas d'évolution plus avancée il serait infaulliblement devenu du xylème, et qu’il relève malgré son état de cette région, indiquée par les vaisseaux. 3° STÉRÉÈME. — [l est devenu aujourd’hui absolument né- cessaire de séparer le liber (tissu Hibérien) à gros éléments épaissis, le gros liber (dickwandiger Bast des auteurs alle- mands), de le séparer, dis-je, des autres tissus du faisceau oroupés en phloème et en xylème. Dans les Dicotylédones, ce gros liber n’est souvent très-développé qu’en avant du faisceau seulement; mais on le trouve aussi en arrière des trachées, vers l'axe et la moelle; on le trouve même, dans les grandes üges herbacées, tout autour du faisceau. Dans les Monocoty- lédones, où ce dernier cas est très-commun, on lui a donné, comme nous savons, d'autres noms; mais ce sont absolument les mêmes cellules que dans les Dicotylédones, et, pour com- pléter lanalogie, nous trouvons aussi dans le second embran- chement des dépôts de ces éléments, non plus périphériques, par rapport au faisceau, mais isolés, localisés, soit en avant (Hiber des Palmiers, Mohl), soit en arrière ; ils peuvent aussi manquer tout à fait, aussi bien que dans les Dicotylédones. Le gros liber se développe à la périphérie du faisceau de procambium, au contact du phloème comme du xylème, et d’une façon très-variable suivant les plantes, suivant les faisceaux et suivant le niveau longitudinal d’un faisceau. Comme origine, bien des auteurs le regardent comme issu directement du tissu fondamental; dans certains cas, M. Nägeli croit que ce n’est pas impossible. De là à le re- garder comme étranger au faisceau il n°y à qu'un pas. L’his- toire de son développement dans les Monocotylédones montre cependant que, s'il peut être regardé comme spécialement issu d’une sorte de cambium secondaire, d’un postcambium formé de très-bonne heure par envahissement, 1l se développe et se différencie assez tard, après les premiers vaisseaux et le ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 171 premier phloème et toujours aux dépens de la masse uniforme de cambium. C’est donc encore une partie intégrante du faisceau. Comme caractère histologique, Mohl dit que Kieser et Mol- denhawer regardaient ces cellules comme sans cloisons. On y en trouve cependant. Les cellules sont courtes ou longues, plus ou moins effilées, et diversement épaissies, mais le plus souvent très-fortement. L’acide sulfurique concentré éclaireit lépaissis- sement, mais ne le fait pas disparaitre. L’aniline le colore for- tement et lui donne une nuance spéciale s’il est en contact avec d’autres éléments épaissis et prosenchymateux. 4° CAMBIFORME COMMUN. — Il est des faisceaux adultes si peu avancés dans leur différenciation, encore si rapprochés de l’état procambial, qu'on ne peut donner à la masse commune que le nom de cambiforme. Ainsi dans le Canna indica il ne se différencie souvent qu'une où deux trachées, le reste restant à l'état indifférent. D'un autre côté, entre le phloème et le xylème marchant à la rencontre l’un de l’autre, on voit persister souvent une zone neutre qui peut encore passer pour du cam- biforme commun. Tous ces divers tissus et groupes de tissus sont susceptibles de se remplacer sur le trajet d’un mème faisceau. La partüicu- larité la plus remarquable à cet égard est celle qui se montre vers la terminaison inférieure même. On y voit d’abord le xylème disparaître, puis le stéréème ou gros liber prendre plus de développement et entourer d’une façon immédiate, comme d’un anneau, le corps du phloème; ce phloème s’effile et dis- parait à son tour; le stéréème, resté seul, va s’accoler à des faisceaux venus des feuilles inférieures. $ 6.— TABLEAU DES RÉGIONS ANATOMIQUES ET DES TISSUS. I. — État formatif. { Faisceaux de procambium, Méristème primitif. ...... DT onda ine La 179 A. GUILLAUD. I. — État durable. Épiderme. | Sclérenchyme (hypoderme). Liége ou suber (périderme). Collenchyme. Zone corticale........... Tissu fondamental cortical. Gaine fasciculaire ou Schutzscheide. | Faisceaux caulinaires anastomosés. } Pseudoliber. \ Méristémiforme. Moelle-eser mure Tissu fondamental central. Cellules grillagées. Liber. ; 4° Phloème.. { Liber mou. | Cambiforme phloeux. Système cutané.......... ) Zone intermédiaire... .... { Cambiforme commun. T—- \ Faisceau. Te Cambiforme xyleux. 2 Xyleme.r. Le 2 Parenchyme xyleux, Vaisseaux. \ Libriforme. | 3° Stéréème.. Liber épais des auteurs. POST-SCRIPTUM. J'ai connu trop tard, pour pouvoir les utiliser, les mémoires de M. Russow (Vergleichende Untersuchungen betreffend die Leitbündel-Cryptogamen, Académie de Saint-Pétersbourg) et de M. Falkenberg (Vergleichende Untersuchungen über den Bau der Vegetationsorgane der Monocotyledonen, 1876). Je le re- grette vivement, surtout pour ce dernier, qui traite à peu près le même sujet que le mien. Certainement il m'eût évité bien des longueurs de travail, si sa lecture, au début de mes recherches, ne me les eût pas fait abandonner. Du reste, d’après le simple aperçu que j'en ai pris, il nous est arrivé, ce que l’on pouvait prévoir, de travailler chacun dans une direction différente. Par exemple, je ne me suis presque exclusivement occupé que de l’anatomie des tiges rhizomateuses, et j'en ai dit ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 173 la raison, tandis que M. Falkenberg à surtout étudié les plantes dans tous leurs organes vévétatifs ; J'ai réservé une bonne moitié de mes recherches à l’histoire du développement des tissus de la tige, M. Falkenberg au contraire à fait surtout l'anatomie du tissu adulte. Le simple hasard, où plutot la nature des matériaux que lPon a habituellement à sa disposition, nous a fait souvent prendre les mêmes espèces et, chose cu- rieuse, reproduire parfois les mêmes figures ; nous donnons notamment chacun une figure de la coupe transversaie d’un faisceau d’Acorus Calanus. Le travail de M. Russow m'aurait été utile à un autre point de vue. Le savant auteur a surtout étudié le développe- ment des tissus, et je puis dire que j'ai cherché à fatre pour les Monocotylédones ce qu'il a lui-même fait pour les Cryptogames vasculaires. EXPLICATION DES PLANCHES. Nota. — La coloration rouge des vaisseaux et autres tissus à été obtenue au moyen d’une solution alcoolique d’aniline. PLANCHE 1. Fig. 1. Coupe transversale du rhizome du Polygonatum vulgare. Fig. 2. Partie externe de la coupe précédente, montrant le passage direct de la zone corticale à la région centrale ou moelle, sans zone intermédiaire : ©, cellules cristallifères du tissu fondamental ; {, lacunes ; f, faisceaux fibro- vasculaires du cercle externe, entre lesquels le parenchyme cortical et le parenchyme médullaire communiquent. Fig. 3. Coupe transversale d’un faisceau fibro-vasculaire de la même plante : ph, phloëme ; æ, xylème ; {, trachées ou vaisseaux déroulables ; v, vaisseaux indéroulables ; p, parenchyme fondamental. Fig. 4. Coupe transversale du rhizome de liris florentina : fs, face supé- rieure ; ft, face inférieure avec de petits traits indiquant l'emplacement des faisceaux caulinaires. Fig. 5. Partie externe de la coupe précédente, montrant le système cutané et le passage de la zone corticale à la région centrale ou moelle sur la face supérieure du rhizome : scl, sclérenchyme; s, liége; f, faisceaux communs entre lesquels les deux parenchymes communiquent ; les points noirs distri- bués dans le parenchyme indiquent des cristaux. 174 A. GUELELAUE. Fig. 6. Zone intermédiaire de la face inférieure du même rhizome, pour montrer les faisceaux caulinaires : p, parenchyme fondamental médullaire ; p', paren- chyme fondamental cortical; fc, faisceaux caulinaires anastomosés; f, fais- ceaux communs externes. Fig. 7. Coupe transversale d’un faisceau commun de la même plante. Mêmes lettres que pour la figure 3. Fig. 8. Coupe transversale du rhizome du Chamædorea elatior. Fig. 9. Zone intermédiaire de la coupe précédente, montrant le tissu appelé méristémiforme : p, parenchyme médullaire; p', parenchyme cortical ; im, méristémiforme séparant les deux parenchymes et interposé aux faisceaux centraux externes, qu'il revêt en dehors d’une assise continue ; f, faisceaux communs, les uns corticaux, les autres centraux. Fig. 10. Coupe transversale d’un faisceau commun central de la même plante : ph, phloème; x, xylème postérieur; æ', xylème antérieur ; {, trachées ou vaisseaux déroulables ; v, vaisseaux indéroulables ; sf, stéréème distinct du xylème antérieur par la nuance de sa coloration. Fig. 11. Coupe transversale d'un faisceau commun cortical de la même plante, muni d’un corps de phloëme ph, et d'un anneau de stéréème st, sans xylème. Fig. 12. Coupe transversale du rhizome de l’Epipactis palustris. Fig. 13. Zone intermédiaire de la coupe précédente : p, parenchyme médul- laire; pl, parenchyme cortical; gf, gaine fasciculaire en contact immédiat avec les faisceaux externes f. Fig. 14. Coupe transversale d’un faisceau de la même plante. Mèmes lettres que pour la figure 5. PLANCHE 9. Fig. 1. Partie externe de la coupe transversale du rhizome de l'Acorus Calamus : e, épiderme; scl, sclérenchyme arrêté dans son développement ; p', paren- chyme cortical avec lacunes. Fig. 2. Zone intermédiaire de la même coupe : p, parenchyme médullaire ou central; p', parenchyme cortical ; gf, gaine fasciculaire ; m, meristémiforme ; f, faisceau externe ; €, cellules à contenu spécial. Fig. 3. Coupe transversale d’un faisceau central de la même plante : ph, phloème ; æ, xylème ; {, trachées ou vaisseaux déroulables ; ©, vaisseaux indéroulables ; p, parenchyme fondamental. Fig. 4. Coupe transversale d’un faisceau central du Canna mndica : cb, cambi- forme commun ; £, trachées ou vaisseaux déroulables ; st, stéréème ; p, pa- renchyme fondamental. Fig. 5. Coupe transversale d’un faisceau central du Convallaria maialis. Lettres comme pour la figure 3. Fig. 6. Zone intermédiaire et faisceau externe de la mème plante : gf, gaine fasciculaire avec sa coloration naturelle, doublée d'une assise de cellules épaissies ; #, méristémiforme ; les autres lettres comme pour la figure 3. ANATOMIE DE LA TIGE DES MONOCOTYLÉDONES. 175 Fig. 7. Coupe transversale d’un faisceau commun du rhizome du Scirpus lacustris, montrant le stéréème, st, distinct du xylème, x, par la nuance de coloration qu'il prend sous l'influence de la solution d’aniline ; les autres lettres comme pour la figure 3. PLANCHE 9. Fig. 1. Coupe transversale du rhizome de Luzula campestris. Tous les faisceaux sont contenus dans la zone intermédiaire. Fig. 2. Zone intermédiaire de la même coupe : p, parenchyme médullaire ; p', parenchyme cortical; gf, gaine fasciculaire avec sa coloration naturelle ; pl, pseudoliber formant une fausse gaine interne ; m, méristémiforme rem- plissant l'intervalle et englobant les faisceaux communs, f. Fig. 3. Coupe transversale du rhizome du Paris quadrifolia. Fig: 4. Zone intermédiaire et faisceau de la même plante : gf, gaine fascicu- laure située entre deux couches de méristémiforme ”; p, parenchyme médul- lire; p', parenchyme cortical; f, faisceau; ph, phloème; æ, xylème; L, vaisseaux déroulables. Fig. 5. Coupe transversale de la zone intermédiaire du rhizome du Trades- cantia virginica : p, parenchyme médallaire; pl, parenchyme cortical ; m, méristémiforme ; f, faisceaux du cercle externe ; gf, gaine fasciculaire. Fig. 6. Coupe transversale d’un faisceau central de la même plante : ph, phloème ; æ, Xylème ; v, vaisseaux ; p, parenchyme fondamental. PLANCHE 4. Fig. 1. Coupe transversale d’un faisceau du rhizome du Tamus communis : ph, phloème ; æ, xylème; £, vaisseaux déroulables ; v, vaisseaux indérou- lables ; p, parenchyme fondamental. Fig. 2. Coupe transversale d’un faisceau de la tige aérienne de la même plante, montrant deux corps de phloème isolés au milieu du xylème ; coloration due à l’action de la potasse ; mêmes lettres que pour la figure précédente. Fig. 3. Coupe transversale du rhizome du Triglochin marilinum : c, masse centrale de pseudoliber. Fig. 4. Partie centrale de la coupe précédente, montrant la masse de pseudo- liber avec sa structure et sa coloration naturelle : f, faisceau; £, vaisseaux déroulables: p, parenchyme fondamental. Fig. 5. Coupe transversale d’un faisceau commun. de Yucca recurva ph, phloëme; æ, xylème ; v, vaisseaux ; p, parenchyme fondamental. Fig. 6. Coupe transversale d'un faisceau central du rhizome du Ruscus acu- leatus. Lettres comme pour la figure précédente. Les vaisseaux, v, sont forte- ment épaissis. Fig. 7. Coupe transversale d’un faisceau de la tige aérienne de la même plante : ph, phloëme, et æ, xylème, séparés par des cellules fibreuses et recouverts d’un anneau commun de stéréème, sl. 176 A. GUILELAUM. Fr PLANCHE 9. Fig. 1, 2 et 3. Naissance des faisceaux et naissance du périméristème dans le Paris quadrifolia. — Fig. 1. Disposition des premiers faisceaux formés dans le méristème primitif. — Fig. 2. Faisceaux isolés dans le tissu fondamental déjà différencié. Ceux du centre sont disposés en cercle; ceux du pourtour sortent d’une feuille. L'épiderme et lassise sous-épidermique sont encore à l'état de méristème. —— Fig. 3. Les faisceaux du cerele central sont réunis par un anneau de méristème développé à leur niveau, où périméristème. Fig. 4 et 5. Naissance du sclérogène dans le Carex hirta. — Fig. 4. Tissu fondamental recouvert de l’épiderme et d’une assise sous-épidermique à l'état de méristème. — Fig. 5. État plus âgé : le tissu fondamental est recouvert, en dehors, d’une couche épaisse de méristème, ou sclérogène. Fig. 6. Différenciation d’un faisceau de procambium dans le Convallarix imnaialis : apparition en premier lieu du phloème, ph, au centre de la masse procambiale, et des trachées, v{, en arrière. PLANCHE (6. Fig. 1. Trajet schématique des faisceaux dans le rhizome du Convallaria 5 J maialis : f!, faisceaux de premier ordre (les rouges), courbés vers le centre ; f>, faisceaux de second ordre (les bleus), non courbés; fc, faisceaux cauli- naires anastomosés. Fig. 1". Coupe transversale du schéma précédent. Fig. 2. Trajet schématique des faisceaux dans le rhizome d’Acorus Calamus : f', faisceaux de premier ordre ; f?, faisceaux de second ordre ; f#, faisceaux de troisième ordre ou corticaux ; fc, faisceaux caulinaires. Fig. 2". Coupe transversale du schéma précédent. Fig. 3. Trajet schématique des faisceaux du Tradescantia virginica : f\, fais- ceaux de premier ordre ; f?, faisceaux de second ordre. Fig. 3. Coupe transversale du schéma précédent. Fig. 4. Trajet schématique des faisceaux du rhisome de Luzula campestris, qui n’a que des faisceaux de second ordre, non courbés, f?. Fig. 4’. Coupe transversale du schéma précédent. DL OV UE Par M. Eug. WARMENG, Professeur à l’université de Copenhague, En 1844, Ad. Brongniart écrivit : © IT y aurait donc deux » origines différentes pour les ovules : lune appartenant à » l’immense majorité des végétaux phanérogames, dans laquelle » les ovules naïîtraient du bord mème des feuilles carpellaires » et représenteraient des lobes ou dentelures de ces feuilles ; » l’autre, propre à un petit nombre de familles telles que les » Primulacées, les Myrsinées, les Théophrastées et probable- » ment les Santalacées, dans lesquelles les ovules correspon- » draient à autant de feuilles distinctes portées sur la prolonga- » tion de l'axe floral... Le nucelle est une production nou- » velle, un mamelon celluleux développé à la face supérieure » de ce lobe de la feuille et dans le fond de la cavité qu'il » à formée (1). » M. Cramer (2) admet cette manière de voir, qu'il confirme par de nouvelles recherches. M. Van Tieghem et M. Celakovsky partagent la même opinion, à cette restriction près que pour eux tous les ovules sont des lobes de feuilles, et qu'il n’existe pas de feuilles ovulares indépendantes. J’admets moi-même la théorie de Brongniart. Dans tout ovule nous avons considéré deux parties essentiellement diffé- rentes, le funicule et les téguments qui sont de nature foliaire, et le nucelle, qui est une création nouvelle, un sporange, un «sore » composé d’un seul sporange, comine dirait M. Prantl. J’écarte pour le moment la question de savoir s’il existe ou non (1) Archives du Muséuin, t. IV, p. 59. (2) Cramer, Biüldungsabweichungen, 1864. Les titres complets de la plupart des travaux cités sommairement dans le texte se trouvent à la fin de ce mémoire rangés par ordre alphabétique. Ge série, BorT. T. V (Cahier n° 3). 4 12 178 E. WARMING. des feuilles ovulaires (par exemple dans l’'If). Je doute même que le funicule doive être considéré partout comme une foliole ; dans certains cas, il n’est peut-être autre chose qu'un métablastème issu d’une feuille ; ce qui est essentiel, c’est qu'il n’est jamais un bourgeon. Dans ce qui va suivre, j'envisagerai la question surtout au point de vue de l’histogenèse, tout en communiquant quelques faits de morphologie comparée de lovule. Mon travail se divise en trois chapitres : 4° Premier développement de la foliole ou du #7amelon ovu- laire. 2° Naissance du nucelle. 3° Formation des téguments sur le mamelon. CHAPITRE PREMIER. HISTOGENÈSE ET VALEUR MORPHOLOGIQUE DU MAMELON OVULAIRE. I. — Depuis que Mirbel a décrit le premier développement d’un ovule, on sait et on a constaté qu'il apparait d’abord sous la forme d’un mamelon peu élevé, à peu près hémisphérique. Des travaux de MM. Hofmeister, Schmitz, Barcianu, Strasbur- ger (1), Reuther et des miens (2), 1l ressort qu’en général on doit attribuer son origine à des divisions cellulaires qui s’opè- rent au-dessous de l’épiderme. De nouvelles recherches nr'ont confirmé dans cette manière de voir. Dans certains cas, ces divisions se manifestent dans l’assise ou tout au moins dans les cellules situées immédiatement au- dessous de lépiderme. Exemples : Senecio vulgaris (pl. 192, fig. 2 et 3), Gesneria (pl. 19, fig. 19 et 20), Begonia heraclerfolia (pl. 9, fig. 7), Reseda luteola, Centradenia floribunda, Dro- sera, Lobelia, Epilobium, Escallonia, Cuphea, Agrostemma, et beaucoup d’autres, auxquelles s'ajoutent les Orchidées et le Monotropu. | Dans les ovules très-petits, comme ceux du Gesneria, deux (1) Coniféres. (2) Ramification(Botan. Zeitung, 1874). DE L'OVULE. 179 ou trois cellules sous-épidermiques seules se divisent ; j’ignore si ces quelques cellules dérivent d’une seule primordiale. D’autres fois les divisions cellulaires s’opèrent surtout dans la troisième assise (la deuxième au-dessous de lépiderme). Exemples : Ribes (pl. 7, fig. 6 et 8), Viola. Ficaria, Gewm, Lamum, Symphytum, Verbascum, etc. L’assise qui touche immédiatement à l’épiderme est simplement soulevée sans que ses cellules se divisent autrement que par des cloisons radiales. Enfin, il est des cas où la deuxième et la troisième assise subissent le même sort, soit que les cellules se rangent nette- ment en assises, soit qu’elles se distribuent sans ordre et se multiplient de même, sans aucune régularité. Exemples Malva, Pisum, etc. Toutes ces différences ont apparemment peu d'importance ; je crois même savoir qu'elles peuvent se présenter indistinete- ment dans une seule et mème espèce. Jamais je n'ai vu l’ovule se former uniquement par la divi- sion des cellules épidermiques; même dans les plus petits l’'épiderme a été soulevé sans aucune division tangentielle, Hofmeister a dit (1) que Povule d'Orchis prend son origine dans la division d’une seule cellule épidermique, et il indique ensuite les divisions ultérieures qu’on y observe. M. Strasburger (2) démontre l’inexactitude de cette descrip- tion. D’après cet observateur, Povule prend naissance dans la division transversale d’une cellule située au-dessous de l'épi- derme; ces cellules multiphiées par des divisions réitérées con- stituent plus tard la file médiane qui occupe laxe de l’ovule, recouverte seulement par l’épiderme. L’ovule des Orchidées et du Monotropa est, dans son origine, le plus simple connu. On ne sait pas toutefois jusqu'où peut aller la simplicité de ce mode de formation. Il est possible que sous ce rapport les Balanophora dépassent encore les Orchidées (3). (1) D'abord en 1849, dans Entstehung des Embryo, p. 1 et 58, plus tard dans Neue Beiträge, t. M, p. 653. (2) Coniferen, p. 421. (3) Voyez, à ce sujet: Hofmeister, Neue Beiträge, t: 1, p. 585; Eichler, Con- grès international, 1867, p. 150. 180 E. WARNING. Je ne serais pas étonné qu’un mamelon ovulaire, quoique l’'homologue d'un lobe de feuille, püt naître comme un tri- chome; peut-être faudra-t-l admettre qu'il en est dans les- quels il faudra reconnaitre des métablastèmes plutôt que des parties de feuilles. L'important, j'insiste sur ce point, c’est que ce mamelon ovulaire n’est pas un bourgeon. Il est regrettable que M. Solms-Laubach n'ait pu poursuivre le développement des ovules dans les «cavités intercellulaires du Brugmansia (1) ». Les divisions cellulaires qui s’accomplissent dans l’intérieur du mamelon sont principalement tangentielles relativement à l'organe qui porte l’ovule, horizontales par rapport au ma- melon lui-même ; la région interne de celui-ci se trouve donc bientôt occupée par un nombre variable de files de cellules ver- ticales et indépendantes les unes des autres. Exemples : Ribes (pl. 7, fig. 9 et 10), Passiflora (pl. 7, fig. 16 et 17), Helian- D . (pl. Aret 2; Fa 10), Peperomia (pl. 8, fig. 5 et 6). Il n'existe pas de cellule qu'on puisse qualifier « d’apicale » ou qui fonctionne comme telle pour la production de Pépi- derme ou du mamelon tout entier. La figure 3, planche 10, représente le sommet du mamelon vu d'en haut dans la Rhu- barbe (Rheum) ; il en est de même pour le Ribes (pl. 7, fig. 7), l’Aristoloche (pl. 8, fig. 12). Souvent le nombre des files de cellules intérieures qui appa- raissent sur les coupes longitudinales médianes est d’une fixité remarquable : par exemple, six dans lovule de lAristoloche (pl. 8, fig. 10,11, 15), cimq dans Ribes (pl. 7, fig. 9 et 10) et dans Verbascum (pl. 13, fig. 1, 23), ne le Senecio (pl. 19, fig. #4, 5, 6, 7 et 8). Par suite du développement du mamelon ou funicule qui représente maintenant un Cône plus ou moins allongé (2), les cellules épidermiques elles-mêmes se trouvent rangées en files longitudinales ; en effet, chacune des cellules de l’épiderme (1) Brugmansia, etc, p. 465 et suiv. Comparez : CGelakovsky, Bot. Zeit., 877, col. 175 à 182. /2) Voyez quelques-unes dé mes figures. DE L'OVULE. 181 soulevé par le mamelon, sauf celles qui occupent le sommet, se divise par des cloisons sensiblement perpendiculaires à Paxe du jeune funicule (pl. 11, fig. 43, aspect latéral du mamelon dans le Lamium). Tant que le mamelon ne doit pas s’accroitre en épaisseur, il ne s’y formera pas de cloisons longitudinales. L'origine et le mode de développement du mamelon ovulaire sont donc tout à fait semblables à ceux des feuilles, des lobes de feuilles, des métablastèmes, des émergences et des bourgeons, comme je les ai décrits dans mon mémoire sur la fleur des Composées (1). L’histogenèse ne nous éclaire pas sur la nature morphologique du mamelon ovulaire ; elle nous apprend seu- lement de quelle manière, en partie déterminée, le mamelon apparaît sur le placenta comme création nouvelle. On pourrait être tenté de croire que parce qu'il est une création nouvelle, il doit être morphologiquement différent du placenta qui le porte; il n’en est rien. Les bourgeons sont de création nouvelle sur laxe auquel ils sont 'morphologiquement identiques, les lobes des feuilles sur la feuille. Dans l’un et dans l’autre exemple, le Jeune organe provient d’un nouveau foyer de formation. Il ee adresser à d’autres caractères pour arriver à l’in- terprétation morphologique du mamelon ovulaire. IT. Nature morphologique du carpelle et du placenta. Ovule terminal el placenta central libre. — Pour résoudre la ques- tion de la valeur morphologique de l’ovule, on s’est surtout préoccupé de la position de cet organe dans l'ovaire. Je n’ai pas l'intention de retracer l’histoire des travaux relatifs à la mor- phologie du placenta. Il me suffit de rappeler au lecteur que les uns l’ont considéré partout comme étant de nature axile (Payer, Schleiden, M. Trécul, M. Wigand); les autres, plus nombreux, y reconnaissent tantôt un axe (placenta central libre), tantôt le bord d’une feuille; quelques-uns enfin le regardent partout comme un organe de nature foliaire (2). (1) Ueber die Blüthe der Compositen. (2) Treviranus, et après lui Pécole de M. Hanstein, croient que beaucoup de placentas, même pariétaux, sont distincts des carpelles ; cette manière de voir ne me semble reposer sur aucune preuve sérieuse. 189 E. WARMING. M. Van Tieghem, et surtout M. Gelakovsky, ont soutenu cette dernière théorie avec beaucoup de talent. Je me contente de renvoyer au mémoire de M. Gelakovsky (4) et à ses autres travaux qui s’y rattachent (2). D’après cet auteur, les carpelles sont partout des organes foliaires en forme de cornets en partie soudés avec Paxe, et les placentas sont toujours formés par les parties marginales ou ventrales de ces carpelles. Cela est vrai, même pour les placen- tas centraux libres et pour les ovules terminaux. C’est surtout l’ovule terminal par rapport à l’axe de Ia fleur, qui a été considéré comme bourgeon (3), et ce cas particulier a servi de point de départ pour Pexplication des autres ovules. Mes propres recherches sur le premier développement de l’ovule, et surtout de l’ovule terminal, devaient entrainer l'étude de sa position, du développement et de la valeur morpholo- gique du placenta. Les conclusions auxquelles est arrivé M. Celakovsky sont de nature à réclamer avant tout de nouvelles recherches histo- génésiques, ayant pour but de découvrir des faits concluants pour ou contre celte théorie. Mes observations m'ont cepen- dant bientôt persuadé de la stérilité de ce genre d’études. Je vais citer quelques faits qui ont trait aux relations entre le mamelon ovulaure et le placenta; je renvoie d’ailleurs aux travaux de M. Celakovsky, que le lecteur doit connaitre pour bien comprendre ce qui va suivre. Geum urbanum. — Chaque carpelle indépendant renferme ordinairement un seul ovule fixé sur la face ventrale. Le carpelle se forme comme les feuilles ordinaires (4), par des divisions dans les tissus sous-épidermiques : primitivement sa forme est celle d’un court tubercule conique ; bientôt il s’élar- git relativement à son épaisseur, ses bords s'étendent latérale- (1) Vergleichende Darstellung der Placenten in den Frucht knoten der Pha- nerogamen, 1876. (2) Ueber terminale Ausgliederungen, etc. (3) MM. Strasburger, Eichler, Braun. (4) Voyez mon mémoire, Ueber die Blüthe der Gompositen, pl. 9, fig. 1 à 6, figure de la feuille d'Hippuris, etc. DE L'OVULE. 183 ment de bas en haut, de sorte que la section transversale de la base prend la figure d’un eroissant. Sa coupe longitudinale est représentée pl. 7, fig. 4. En regard de la ligne médiane de cette feuille et devant sa face supérieure, de nouvelles divi- sions cellulaires se manifestent au-dessous de lépiderme (pl. 7, fig. 2); il se forme ainsi, non pas un bourgeon, mais simple- ment la face ventrale du carpelle qui ressemble dès ce moment à un cornet coupé obliquement. La multiplication cellulaire se poursuit sur les bords, et ceux-ci ne tardent pas à se rejoin- dre (pl. 7, fig. 3, 4), ainsi que l’a décrit Payer (1). Enfin une autre série de divisions à la face ventrale et au- dessous de la suture constitue la première ébauche de lovule, le mamelon ovulaire (pl. 7, fig. 5). La morphologie comparée, la tératologie, ete., nous apprennent que nous avons affaire à une vraie feuille ; le parcours des faisceaux fibro-vasculaires ne saurait infirmer ce résultat. Mais cette feuille a la forme d’un cornet comparable à celle du Nelumbium, dont elle ne se distingue que par ses bords tronqués obliquement. Au centre de la feuille, les divisions cellulaires sont plus paresseuses qu’à la périphérie. On peut observer le même mode de développement dans les Renonculacées, par exemple. Jai figuré (pl. 10, fig. 22-24) des coupes du jeune carpelle de Ranunculus acris; il ya quelques années, j'ai déjà représenté (2) des états plus jeunes du même carpelle: les figures sont exactes, mais l'interprétation du mamelon désigné par ov doitêtre modifiée ; ce n’est pas l’ovule, mais la partie ventrale du carpelle. D'autres plantes, comme les Malva, Pircunia (Phytolaccée), avec des ovaires semblables, ne s’'écartent pas essentiellement de ce type (3). Je passe immédiatement à des plantes qui ont des carpelles terminaux avec un seul ovule, et je choisis comme exemple le (1) Orgamogénie, p. 502, pl. 100. (2) Ramification, ete, pl. x1, fig. 6, 7. (3) Comparez Celakovsky, Placenta, p. 19 à 93, et p. 25 et suiv. du tirage à part. 184 E. WARMING. Ficus Carica (pl. 9, fig. 4 à 6). Après Papparition du périanthe (pp, fig. 4), le sommet de Paxe s'élève au milieu de la fleur en un petit mamelon presque hémisphérique, dont les cellules, au-dessous du dermatogène, ne dénotent aucun arrangement régulier dans la fleur femelle. Ge mamelon donne naissance au carpelle (cp, fig. 2) par des divisions sous-épidermiques qui s’opèrent d'abord du côté supérieur. Le centre même de la fleur reste intact au commencement. Le développement est du reste le même que dans le Geum, le Ranunculus, ete., la posi- tion du carpelle seule varie ; ilest terminal au lieu d’être latéral, et le cornet carpellaire est tronqué moins obliquement. Bientôt la face ventrale devient plus épaisse que la face dor- sale (fig. 3), quoiqu'elle soit moins élevée. C’est là que se forme l’ovule épitrope (fig. #, ov) (apotrope dans Geum et dans Ranun- culus). La face ventrale occupe plus d'espace au sommet de l'axe que la face dorsale, et l’ovule se trouve ainsi disposé pres- que sur le prolongement de l'axe géométrique. Gomme dans le cas précédent, le carpelle est une feuille en forme de cornet, mais qui, cette fois, est terminale au lieu d’être latérale : cela ressort en partie de celte circonstance qu'on observe à la fin des divisions cellulaires sous-épidermiques éxactementau centre du cornet, divisions toutes semblables à celles qui engendrent la feuille; mais, plus clairement encore, de la comparaison avec le Geum, etc., pour laquelle je puis renvoyer aux travaux de M. Celakovsky. Le mode de développement et la comparaison avec les types voisins à carpelles semblables et latéraux montrent que l’ovule appartient à la face ventrale de la feuille carpellaire, qu'il n’est pas axile et terminal; plus tard 1l remonte même le long de la face ventrale et va se placer encore plus loin du fond de l'ovaire que ne l’indique la figure 6. La description du déve- loppement du pistil est inexacte dans Payer (1). Le dermatogène joue lui-même un rèle important dans la constitution du carpelle. Sur le bord de la face supérieure du (1) Organogénie, p. 286-287, pl. 61, fig. 12-15. DE L'OVULE. 185 carpelle ses cellules se divisent par un grand nombre de parois tangentielles (fig. 45). Au Ficus se rattache directement le Pouzolzia sherioides (Urticée) ; le carpelle est terminal; l’ovule l'est encore plus que dans l’exemple précédent, et persiste dans cette position, tout en étant un peu plus voisin d’une face de l’ovaire que de l’autre ; de plus il est orthotrope (pl. 7, fig. 29). Pour un troisième exemple d’un carpelle terminal uniovulé, je m'adresse à une espèce de Peperomia. M. Schmitz (1) con- sidère ce carpelle comme une feuille dont la face dorsale serait tournée vers la bractée. Selon lui lovule, rigoureusement cen- tral, est une création nouvelle de signification purement phy- siologique et qu’on ne peut doter ni du nom de bourgeon, ni de celui de feuille (ni caulome, ni phyllome, ni trichome). M. Baillon (2) dit au contraire des Pipérées que « leur ovule » n'est pas exactement basilaire, mais un peu latéral, inséré » très-près de la base, mais non à la base même de la loge ». L’ovule occupe, selon lui, la place d’un bourgeon axillaire (3). Voici ce que j'ai observé moi-même : La figure 1, planche 8, représente une coupe longitudinale médiane de la jeune fleur. Le carpelle commence à se former par des divisions cellulaires suivant une zone annulaire qui entoure le sommet de l'axe; les cellules a-a qui occupent le centre restent encore intactes, comme l’a vu M. Schmitz (pl. 7, fig. 19), ou comme je l'ai dit pour le Ficus (pl. 9, fig. 2) et le Geum (pl. 7, fig. 1). Les bords du carpelle s'élèvent peu à peu, comme le figure M. Schmitz, et enfin les cellules 4-« sont entrainées dans le mouvement général, se divisent, et forment ainsi le mamelon ovulaire (pl. 8, fig. 3, 4). Celui-ci, issu des cellules terminales, n’occupe pourtant pas toujours lui-même une position terminale ; souventilest inéga- lement développé dans différents sens, ou même nettement fixé (1) Piperaceen, 1872, p. 64. (2) Adansonia, t. X, p. 139. (3) Comparez l'appréciation critique de M. Schmitz, loc. cit., p. 66 à 68. 186 EH. VVARDMEEING. sur la face ventrale (opposée à la bractée du carpelle) (pl. 8, fig. b). Cependant il est plus terminal que dans le Focus. Je crois donc conclure de là, comme M. Schmitz, que le ma- melon ovulaire du Peperomia est une création nouvelle, et de plus, en m'appuyant sur les recherches comparées, une partie du carpelle terminal qui occupe tout le sommet de la tige. Je passe aux Gomposées (1). Les deux jeunes carpelles sont séparés par un sillon assez étroit et à parois escarpées. Le fond en est uni (pl. 19, fig. 1) ou légèrement incliné du carpelle postérieur au carpelle antérieur (2); bientôt il se penche de plus en plus d’arrière en avant, et sur ce plan incliné nait lovule par la division tangentielle d’un certain nombre de cel- lules sous-épidermiques (pl. 49, fig. 2, 3). M. Cramer se trompe en disant de sa figure #4, pl. 44 (3) : «On ne voit pas de trace de l’ovule (4).» Le réceptacle et Île fond de l'ovaire ne présentent jamais cet aspect quand lPovule n'est pas encore né. Quelquefois, mais rarement, l’ovule peut être fixé franche- ment sur le carpelle postérieur, comme je lai vu dans le Dahlia (pl. 12, fig. 44). L'espace entre l’ovule et le carpelle antérieur est toujours beaucoup plus profond, plus étroit et plus aigu qu'entre cet organe et le carpelle postérieur, vers lequel il s’in- féchit plus tard. Il est donc plus voisin du carpelle antérieur, comme l'ont dit plusieurs auteurs (5). Quelques botanistes considèrent cet ovule comme un bour- geon terminal, par exemple M.Schleiden (6); d’autres comme le bourgeon axillaire de lun des carpelles: M. Eichler est de cet avis (7) ; d’autres comme une feuille ovulaire indépendante (1) Warming, Blüthe der Compositen, p. 26. (2) Compositen, pl. v, fig. 32, Bellis. (3) Bildungsabweichungen, p. 131. (4) Textuel : Von einem Eï ist noch nichts zu sehen. ; (5) Voyez: Hiünlein, Compositenblüthe, pl. x, fig. 31, 32, Broteroa; fig. 33 à 36, Bellis; fig. 38, Doronicum: fig. 41, Anthemis. — Mon mém. sur la Rami- licalion, pl. 11, fig. 5 et 14. — Kühne, Compositen, plusieurs figures, etc. (6) Grundz, p. 500. (7) Diagramme, p. 292. DE L’OVULE. 187 (Gramer, Kôühne, Hänlein). M. Celakovsky n’y voit autre chose qu’une fohole appartenant à l’un des carpelles. Je dois me ranger à cette opinion; l’étude comparée de l'ovaire des Phanérogames y oblige: on peut poursuivre pas à pas toutes les transitions en partant des exemples tout à fait certains jusqu’à ces cas plus obscurs, comme chez le Peperomia et ceux qui nous occupent en ce moment, qui paraissent diffi- ciles à comprendre au premier abord. Mais à quel carpelle appartient l’ovule? D’après M. Gelakovsky (4) au carpelle antérieur; les exemples d’axes traversant la fleur, décrits par M. Cramer, le prouve- raient. Celui-ci à trouvé dans un grand nombre d’ovaires du Senecio vulgaris un bourgeon qui n’occupait pas la place de lovule, mais qui était situé entre celui-ci et le carpelle poste- rieur. Cependant il ne me semble pas prouvé du tout que ce bourgeon soit Paxe de la fleur; il pourrait être une création nouvelle de nature purement pathologique, comparable à ces pousses que M. Celakovsky a observées lui-même sur des car- pelles transformés en feuilles (2). Chez les Primulacées, on trouve également des poussesanor- males entre les parties dorsale et ventrale du carpelle (3). A mon avis, il serait difficile d'admettre que la sommité de l’axe püt remonter aussi haut, sur la paroi postérieure de lovaire, qu'ilseraitnécessaire, par exemple dans ma figure1#, planche 12 ou dans les figures de M. Hänlein citées plus haut (Broteroa, Bellis). Là où la pente du fond de l'ovaire est moins forte, on aurait pu comprendre chose semblable. Toujours la plus pro- fonde cavité se trouve entre le carpelle antérieur et l’ovule, et l'étude du développement nous apprend que cet espace doit être la cavité primitive qui existait avant que le fond de lovaire eût pris sa direction inclinée. Même si l’on admettait, avec M. Celakovsky, M. Eichler (4), etc., que les deux carpelles ne (1) Flora, 1874, p. 229. (2) Voyez, par exemple, Bot. Zeit., 1877, p. 156. (3) Voyez, par exemple, Gelakovsky, Placenten, p. 51. (4) Diagramme. 188 E. VVAMRMENG. sont pas équivalents, que l’un, antérieur, occupe le sommet géométrique, et l’autre, postérieur, plus petit, est latéral, on ne devrait pas trouver le bourgeon terminal qui traverse la fleur derrière l’ovule montant le long de la paroi postérieure, mais au centre même de lPorgane, dans le fond de la loge ovarienne. Quelques faits qu'on observe dans les familles voisines des Gomposées sont en apparence opposés à ma manière de voir. Dans les Dipsacées, l'ovule est inséré sur la paroi postérieure de l’ovaire, mais à un niveau très-élevé voisin du sommet; le carpelle postérieur est apparemment très-peu développé (1), de sorte qu'il parait difficile de croire que c’est lui qui porte l’ovule; cependant cela n’est pas impossible, et alors 11 serait placé sur la partie ventrale de ce carpelle, partie qui est située, comme dans les Mesembrianthemum (2), verticalement au- dessous de la dorsale. Le problème est difficile à résoudre Grèce à lobligeance du savant botaniste M. le docteur Glaziou, 1l m'a été permis d’exa- miner une Calycérée, l’Acicarpha spathulata. Cette étude ne n'a pas donné la clef de la solution. L’ovule se développe sur la paroi postérieure, près du fond de l'ovaire; à un état plus avancé, il remonte plus haut et devient apotrope, comme dans les Dipsacées (3). Dansle Blitum Bonus-Henricus, lovaire apparait comme des organes foliaires autour du sommet hémisphérique de laxe (pl. 11, fig, 7). Le sommet lui-même porte l’ovule, qui se développe ici en mème temps que l'ovaire et plus tôt que dans les cas précédents. Quand on se contente d’un examensuperficiel, on est done amené à croire que le sommet de l’axe lui-même se transforme en ovule. Souvent on reconnait cependant que l’ovule, quoique terminal, est une création nouvelle (fig. 8) due à un mode de ) Eichler, Diagramme. ) Payer, Organogénie, pl. 80. (3) Je saisis l’occasion de la correction des épreuves pour faire remarquer que MM. Eichler et Celakovsky pourraient avoir raison en affirmant que la pousse anormale s'élève toujours au centre de la fleur et efoule lovule vers la face antérieure. ({ (2 DE L'OVULE. 189 division cellulaire différent de celui qui est habituel à l’accrois- sement de laxe. Dans certains cas je n’ai pas observé ceci avec certitude ; alors il faut renoncer à la méthode histogénésique. l'ovaire s’accroit par son bord, et la prolification de ses tissus intérieurs est accompagnée de nombreux eloisonnements (tan- gentiels et autres) des cellules du dermatogène, comme je lai observé dans le Ficus. La paroi ovarienne est plus élevée d’un côté que de l’autre ; Povule se recourbe, eLson sommet s’écarte de la paroi la plus élevée (fig. 9). En ceci je suis d'accord avec Payer (1). Le tégument prend son origine sur le côté convexe de l’ovule; finalement celui-ei est anatrope, et sa situation au milieu de l’ovaire est un peu excentrique (fig. 12); mais dans d’autres espèces, comme par exemple le Beta maritima (2), il remonte le long de la paroi, comme dans les Dipsacées, les Calycérées, le Ficus, ete. Les raisonnements de M. Celakovsky me paraissent tout à fait convaincants; dans ce cas, comme dans les autres, l’ovule est une dépendance d’un carpelle. Il conserve plus nettement sa position centrale, apicale, parce qu'ilse forme plus tôt (3). Dans une foule d’autres familles on trouve un ovule qui est, au moins pendant quelque temps, exactement symétrique et central, et qu’on à considéré en général comme la terminaison de l’axe. Tel est le cas, par exemple, pour l’ovule des Plomba- ginées qui, d'après M. Reuther (4), est la terminaison de l'axe de la fleur. Cet ovule n’est du reste exactement central que dans sa première jeunesse ; plus tard, comme dans le Blitum, il devient excentrique en se recourbant (5). L’anatropie de ces ovules et de beaucoup d’autres concorde, ce me semble, bien mieux avec la nature foliaire qu'avec la nature axile de l'organe; même dans certains cas où l’ovule terminal ne devient pas anatrope, 1l prend un développement (1) Organogénie, pl. 66, fig. 5 à 12. (2) Payer, loc. cit., pl. 66, fig. 12. (3) Voy. Celakovsky, Placenten, p. 36; Terminale Ausglieder., p. 29-30 : Das morphologische Geselz der zeillichräumlichen Verkehrung. (4) Page 457. (») Comparez les figures 52 et suivantes de Reuther. 190 HE. VVARRAEIN:. tout à fait oblique, comme par exemple dans le Pouzolzia (pl. 7, fig.22). Dans cette catégorie d’ovules terminaux qu'on a déclarés axiles, je citerai encore ceux des Polÿgonées, des Balano- phorées (1), des Naïas (2), des Gnétacées et de certaines Coni- fères (3), des Pipéracées, etc. J'ai fait quelques observations sur le Rheum. Les trois car- pelles naissent de la manière ordinaire, par des divisions sous- épidermiques surtout tangentielles. Ges carpelles sont égaux et le restent. L’ovule naît de bonne heure (pl. 40, fig. 4 et 2), comme dans le Blitum ; il est rigoureusement apical et reste, comme on sait, atrope. Au-dessous du sommet du mamelon, comme autour d'un sommet d’axe, se développent les tégu- ments, ainsi que cela se passe dans les Nuius. Malgré l'apparence extérieure, des préparations, comme celle qui est figurée pl. 10, fig. 2, m'ont clairement démontré que l'ovule est une création nouvelle provenant uniquement de la division des cellules situées immédiatement au-dessous de l’'épiderme. Même à des états plus avancés, comme planche 10, fig. 4, on peut encore poursuivre facilement les limites de cette couche dont les cellules se rangent en files verticales régu- lières (4). Les résultats de ces quelques observations sur l’origine de l'ovule m'ont convaincu que l’histogenèse seule ne peut pas résoudre la question de la nature morphologique du mamelon ovulaire ; presque partout elle nous montre une création nou- velle sans pouvoir nous renseigner sur sa nature. Îl n'est qu'une seule méthode qui puisse conduire au but, celle qu'a suivie M. Celakovsky, l'étude graduée des formes voisines, la comparaison, en s'appuyant sur (ous les moyens dont dispose le morphologiste. (4) Voyez, par exemple, Eichler, Congrès international, 1867. (2) Magnus, Naïas. (3) Hooker, Strasburger’. (4) Dans la partie gauche de la figure on reconnaît encore très-nettement la limite interne du carpelle. DE L'OVULE. 191 * La plupart des savants qui s'occupent de morphologie (1) reconnaissent aujourd'hui qu'il peut y avoir des membres ter- minaux (2), tels que des feuilles, des métablastèmes terminaux par rapport à l'axe, des métablastèmes terminaux par rapport à la feuille ou à la foliole (3). I est done possible qu’il y ait des ovules terminaux, même s'ils étaient des feuilles ou seule- ment des parties de feuilles. Si nous partons des cas où la nature foliaire des carpelles et des ovules (sauf des nucelles) est rendue évidente par la comparaison, les antholyses, l’ana- tomie, etc., nous serons également obligés de considérer les mamelons ovulaires terminaux comme des appareils de nature foliaire, car le passage des uns aux autres se fait insensible- ment. Les quelques exemples que je viens de faire connaître lindiquent suffisamment, de même que les travaux de M. Cela- kovsky (notamment celui qui traite des placentas), auxquels je ne saurais assez renvoyer le lecteur. Si les carpelles des Renon- culacées et des Rosacées sont des feuilles, les mamelons ovu- laires des folioles ou des parties de ces feuilles, il doit en être de même pour le Ficus et d’autres Urticinées, pour les Pipéracées, les Plombaginées, enfin pour les Polygonées, etc. La position plus ou moins exactement apicale du mamelon ovulaire dans le carpelle terminal uniovulé dépend de l’époque de sa forma- tion. Je reviendrai sur ces considérations à la fin du présent inémoire. Il me reste quelques mots à dire dés placentas centraux libres. M. Van Tieghem le premier, en 1869, est arrivé à ce résultat, principalement par la voie anatomique, « que le pla- » centa des Primulacées est formé par des sortes de talons des (1) MM. Celakovsky, Strasburger, Eichler, Müller Arg., Kôhne, Engler, Hieronymus, Buchenau. (2) Terminale Ausgliederungen. Dans les Coniferen und Gnetaceen, p. 402 et 430, M. Strasburger dit : Nous voyons à ces exemples, d’une manière péremp- toire, que la disposition dans l’espace (Raumbeziehungen) ne peut pas servir à la détermination de la nature morphologique; que, par exemple, une feuille peut continuer directement un caulome sans être caulome elle-même. M. Strasburger admet également des feuilles staminales terminales. (3) Comparez Celakovsky, Terminale Ausgliederungen, p. 3, 4 et suiv. 199 E. WARMING. » cinq feuilles carpellaires, désormais indépendants de ces » feuilles, mais unis entre eux au centre de la fleur en une » colonne libre, et que les ovules sont des lobes transformés » de ces feuilles carpellaires » (1). De cette manière la placentation centrale des Primulacées a été ramenée au cas ordinaire, ce qui était déjà une précieuse garantie pour la justesse de cette interprétation (2). Ce résultat obtenu par le raisonnement et par l’anatomie pure, M. Cela- kovsky, suivant une tout autre marche, l’a confirmé d’une manière brillante tout en acceptant l'intervention de l'axe dans la formation du placenta (3). Le «talon » de M. Van Tieghem devient, pour M. Celakovsky, la partie ventrale de son carpelle en forme de cornet, qui est si profondément divisé des deux côtés, qu'il ne se forme pas de cloisons dans l'ovaire; l’axe cen- tral est tapissé par les parties ventrales. L’anatomie, le parcours et la structure des faisceaux, la tératologie, la méthode com- parée, ont fourni tout ensemble, et d’un commun accord, un résultat que rien ne saurait désormais ébranler. Ge cas, si bien étudié, répand une vive lumière sur d’autres placentations et confirme les idées que nous avons pu nous en former. Sans m'abandonner à l'espoir de pouvoir séparer anatomi- quement les parties ventrales des carpelles de laxe qu'elles tapissent, J'ai cependant voulu poursuivre le développement du placenta dans le WMyrsine. Il s’'accroit d’abord comme l'axe et en continuation avec son premier mode d'accroissement, sans qu'il puisse être question d’une création nouvelle (pl.13, fig. 10). Plus tard les files verticales des cellules qui constituent le plérome, et qu’on peut poursuivre assez loin dans la base de la fleur, se recourbent vers la surface en forme de gerbe en se divisant par des cloisons longitudinales : de cette façon, le pla- centa grossit considérablement; mais 1l n’est pas un fait qui prouve qu'il est composé de deux parties morphologiquement ea (1) Ann. sc. nat., 5° série, t. XIL, p. 329. (2) Decaisne, Bull. Soc. bot., 1857, p.341, et Trailé gén. bot., 1868,p. 52). (3) Placenten, p. 46 et suiv. DE L'OVULE. 193 distinctes. On est amené à croire que le placenta est la termi- naison de l’axe élargi. Je ne puis me dispenser de rappeler ici la colonne anthéro- phore du Cyclanthera, qui naît et s’accroit d’une manière ana- logue, sans devenir aussi puissante (1). Autrefois je considérais ce cas comme un axe doué de la faculté de produire du pollen ; aujourd'hui, après les recherches de MM. Celakovsky, Eichler et Reuther, j'admets qu'elle est formée, à linstar du pla- centa des Primulacées et de ses congénères, par un axe et des feuilles. L’histogenèse du placenta du Myrsine permet pourtant de déduire que le noyau du placenta, se continuant si mani- festement avec la moelle de laxe, est réellement axile, comme l’a dit M. Celakovsky. Dans le même ordre d'idées, le placenta central des Santa- lacées est d’un intérêt particulier. D’après M. Van Tieghem, il se compose, comme dans les Primulacées, des parties ventrales des carpelles, dont chacune porte à son sommet un ovule (2). Quoique le placenta apparaisse avant la paroi ovarienne (3), Je suis pourtant tenté de me ranger du côté de M. Van Tieghem; le caractère, le contenu, la disposition des cellules, permettent souvent, en effet, de distinguer le placenta comme formation nouvelle de l’axe sous-jacent. Gela est vrai non-seulement pour lesplacentas très-jeunes (pl. 14, fig. 1 qui montre nettement la limite inférieure de la création nouvelle), mais également à un âge plus avancé, comme je l'ai figuré par exemple pl. 14, fig. 6, qui représente le fond d’un vieux placenta. Ses cellules sont rangées en files longitudinales qui s'arrêtent brusquement à la base ; il semble que tout le placenta provienne de la première assise sous-épidermique. Je dois avouer que dans d’autres cas l'axe avait l'air de se continuer dans le placenta; estl, pour cela, impossible que le placenta soit une création nouvelle re- présentant la partie ventrale des carpelles (4)? Je crois que non. La position des ovules sur le placenta confirme eette manière (1) Voyez mon Pollenbildende Phyllome, p. 64, pl. vr. (2) Van Tieghem, Santalacées (Ann. sc. nat., .5° série, XIE. p. 342 et suiv.). (3) Voy. Baïllon, Adansonia, IX, p. 5, pl. 1, fig. 23-28. (4) Voy. Gelakovsky, Terminale Ausglieder, p. 9. 6° série, BoT. T. V (Cahier n° 4).1 13 194 E. NVARMENG:. de voir: dans le Santalum, les ovules sont opposés aux car- pelles, de même que les premiers ovules sur le placenta d’une Primulacée ou les deux dans un Lophophytum (1). Selon mot, le placenta des Santalacées se distingueraït de celui des Pri- mulacées et des familles voisines, en ce qu'il est entièrement de nature foliaire (opinion de M. Van Tieghem) sans intervention de l’axe. M. Hofmeister (2), en parlant de l’affinité entre les Santa- lacées et les Loranthacées, dont M. Decaisne venait de démon- trer la réalité, dit € qu'on devrait peut-être refuser au porte- » ovules des Santalacées le nom de placenta. On peut admettre » des productions ovulaires (3) ramifiées comparables aux an- » thères ramifiées que Payer nous à fait connaître dans le » Mesembrianthemum et d'autres plantes. » On peut encore comparer ce placenta aux pointes de feuilles portant trois sporanges dans le Psilotum, d’après M. Prantl. Le placenta des Santalacées est encore intéressant à un autre point de vue. Il peut servir à nous éclairer au sujet de l’ovule unique exactement terminal dans un ovaire composé de plu- sieurs feuilles carpellaires, tel que celui des Polygonées. Auquel des trois carpelles appartient en effet l’ovule placé symétri- quement au milieu d'eux? Si la théorie de la connexion de l’ovule et du carpelle est vraie, on doit nécessairement se poser cette question, et M. Celakovsky la fait. Je considère cet ovule comme un placenta de Santalacée for- tement réduit: dans les Santalacées, un seul des trois ovules devient généralement fertile ; il y a done déjà là un indice de développement unilatéral. Que cette tendance abortive se ma- nifeste à un état plus jeune, que les deux prolongements car- pellaires stériles se développent en même temps très-peu ou point, le prolongement carpellaire fertile deviendra terminal et son nucelle prendra une position centrale (4). (1) Eichler, Congrès, p. 143. (2) Neue Beilräge, & 1, p. 562. (3) Textuel : Eisprossen. (4) Conformément à la loi de M. Celakovsky, « Der zeillichräumlichen Vor- kehrung ». DE L'OVULE. 195 L’ovule des Polygonées, etc., n'appartient certainement qu’à un seul des trois carpelles, au moins dans la plus grande partie de sa masse. Il est à regretter que les cas tératologiques observés jusqu’à ce Jour ne puissent pas nous renseigner à ce sujet (1). HT. Nature morphologique du mamelon ovulaire. — Je laisse provisoirement de côté les téguments et ie nucelle (et ce sera permis, car ils ne se forment que sur le mamelon ovulaire et après lui) pour m'occuper de la nature, de la valeur mor- phologique du mamelon ovulaire. Ge mamelon, plus tard funi- cule plus chalaze, est-il caulome ou phyllome ? À. Nous avons vu que létude du développement, le mode de division et la structure cellulaire restent muets à ce sujet; le caulome, le phyllome, le métablastème (trichome et émer- sence dans le sens de M. Gelakovsky) (2), même exception- nellement la racine (celle de Noottia) (3), peuvent naitre de la même manière. Même si nous avions prouvé, comme cela ‘arrive dans cer- tains cas, que l’ovule est une création nouvelle sur le sommet de l'axe arrêté dans son développement ordimaire, il n’est pas dit pour cela que cet ovule n’est pas un organe de nature cau- lomatique; on pourrait Passimiler à un bourgeon terminal, comme j'ai été obligé de le faire pour la fleur des Composées, qui se forme probablement souvent sur le point végétatif étemt de l’axe principal. Pour prouver que lovule n’est pas un bourgeon, M. Cramer a allégué que le bourgeon adventif, tel que le serait nécessaire- ment lovule issu d’une feuille, devrait être endogène et non exogène (4). Gette raison est insuffisante, car on connait au- (1) Voy. Peyritsch, Pringsh. Jahrb., t. VIT, et Teratologie der Ovula, 1876. (2) Comparez Warming, Compositen, p. 66 à 72. (3) Voy. Prillieux, Ann. scienc. nal., 4° sér., EL XV, et Warming, Videnska- belige Meddelelser de la Soc. d’hist. nat. de Copenhague, 1874, p, 26 à 39, avec une planche et résumé français. (4) Cest ainsi que je comprends Je passage de Bildungsabweichungen, p. 119, n° 6. 196 Œ. WWARBRING. jourd’hui plusieurs exemples de développement superficiel de bourgeons sur les feuilles (4). B. L'étude comparée des carpelles et de la placentation dans tout le règne végétal, l'examen scrupuleux des antholyses et du parcours des faisceaux, conduisent donc, comme Pont proruvéécemment M. Celakovsky et M. Van Tieghem, à cette con- elusion que les carpelles et les placentas sont partout des phyl- lomes, que le mamelon ovulaire est un lobe de feuille (2). j'ignore si, dans certains cas, on ne doit pas plutôt les regarder comme des métablastèmes ; mais cette différence entre lobe de feuille et métablastème n’est pas essentielle et ne peut être soutenue partout, comme je l'ai montré dans mon travail sur la fleur des Composées. La certitude de la nature foliaire de lorgane qui porte l’ovule, même quand celui-ci est terminal, est de la plus haute impor- tance pour la détermination de la nature morphologique de l’ovule lui-même. (1) Par exemple : dans le Bryophyllum, d'après M. Berge (Entwickelungsge- schichte von Bryophyllum Zurich, 1876) ; dans quelques Fougères, Hofmeister, (Allgemeine Morphologie, p. 422, 423); dans des Begonia (mème des forma- tions épidermiques), Fr. Regel (Jenaische Zeitschr., t. X, 1876) ; dans l’Hyacin- thus, écailles du bulbe, Magnus (Bot. Verein Brandeburg, 1874, année XVD ; dans Malaxis, etc. A ces exemples je crois pouvoir joindre les bourgeons sur les feuilles de Drosera et de Cardamine. Les tiges peuvent également donner naissance à des bourgeons exogènes: par exemple, dans le CGalliopsis versicolor (Braun et Magnus); dans les Utricularia (Pringsheim, Monatsb. d. Berliner Akad., 1869), auxquels viennent se joindre certainement des bourgeonnements sur l'axe hypocotylé, comme par exemple dans certains Euphorbia ; on en connaît même sur les racines chez le Neo bia (rsmisch Bremer naturwiss. Vereins-Abhandl., 1877). Al. Braun (Polyembryonie, p. 181 et suiv.) cite un certain nombre de re- cherches sur le développement de bourgeons sur la feuille. Nous pouvons y ajouter quelques autres : Germain de Saint-Pierre, sur les feuilles gemmipares chez quelques Allium (Bull. de la Soc. bot. de France, t. Il, p. 183), Schleiden, Knospen an den Blättern von Malaxis und. Ornitho- galum ; Wiegmann, Orchid., vol. IL, p.298 ; Trécul, Drosera (Ann. sc. nal., 2e sér., XIV, p. 14). (2) Pour les placentas anormaux du Brugmansia, voyez Solms-Laubach Comparez Celakovsky, Bot. Zeit., 1877, n° 9. DE L'OVULE. 497 Quoique des bourgeons puissent apparaître normalement sur les feuilles, 1l n’en est pas moins vrai que ce sont là des exceptions. Jamais la métamorphose essentielle de la plante ne sera liée à la formation de pareils bourgeons. Il est donc beaucoup plus naturel de considérer les mamelons ovulaires comme des lobes de feuilles. M. Strasburger croit réfuter cette objection en disant qu’il a démontré par l’homologie et l’histoire du développement que les ovules des Conifères sont des bourgeons (1); qu’alors ils doivent être des bourgeons partout, même dans les plantes où ils naissent sur les feuilles : ce serait là le premier cas connu de bourgeons aussi stables. On ne peut pas se dissimuler combien est suspecte cette explication reposant sur une exception unique. À cette diffi- eulté vient s'ajouter une autre. Dans les Primulacées, dont le placenta est axile d’après la théorie Braun-Strasburger, les mamelons ovulaires naissent dans un ordre basipète. Ceci ne devient conforme à la règle ordinaire que quand on les consi- dère comme des lobes de feuilles : on sait que les divisions des feuilles peuvent se développer aussi bien de haut en bas que de bas en haut. Dans les étamines composées, les anthères naissent le plus souvent dans l’ordre basipète (2). Les ovules sur le pla- centa des Primulacées ressemblent à ces feuilles staminales, comme les ovules disposés sur les bords d’un carpelle ordi- naire ont de l’analogie avec les folioles d’une feuille pennée. Payer à publié une foule d'observations au sujet de l'ordre d'apparition des mamelons ovulaires (Organogénie). M. Van Tieghem les a réunies d’une manière synoptique (3), et il en résulte qu'il n'existe pas de loi générale, à pemme quelquefois une règle, ainsi que cela arrive pour l’ordre d'apparition des folioles ou des lobes sur la feuille (4). (1) M. Strasburger, ainsi que M. Gelakovsky, partent de l’idée que les ovules ont partout la même valeur morphologique. (2) Par exemple dans les Hypéricinées, les Malvacées, les Tiliacées, les Cis- tinées, etc. (Voy. Payer, Organogénie.) (3) Structure du pistil, p. 209 à 214. (4) J'ai essayé de trouver une règle pour les courbures apotropes et épitropes 198 EE. WABMWMING. C. Comment se comporte enfin le mamelon ovulaire dans les transformations tératologiques ? Nous possédons, à ce sujet, un grand nombre d'observations de MM. Brongniart, Caspary, Rossmann, Celakovsky, Cramer, Van Tieghem, Braun, Mas-ters, etc. Dans tous les cas étudiés avec soin, on a reconnu que l’ovule s’est transformé en une foliole, un lobe de feuille, sur lequel le nucelle existait tantôt et tantôt manquait. M. Strasburger qui, dans son excellent ouvrage : Les Coni- fères et les Gnétacées, représente l’opinion diamétralement op- posée à la mienne, avoue (1) : € que la transformation de lovule » en feuille ou en lobe de feuille est si fréquente, si constante, » qu'on peut à peine y voir un phénomène simplement fortuit ; » on croirait plutôt qu'elle trahit la véritable nature morpholo- » gique de l’ovule ». Mais 1l ajoute : « Selon moi, 1l n’en est » pourtant pas amsi; je la classe plutôt parmi les transfor- » mations anormales auxquelles conduit avec une sorte de des ovules ; pour l'explication de ces termes, consultez Agardh, Theoria syste- malis plantarum, 1858. Nous voyons que ces caractères ont peu d'importance au point de vue systématique; des plantes voisines se comportent différemment à cet égard. Ainsi M. Buchenau a montré que Fovule de lAlisma natans est épitrope, tandis que ceux de toutes les autres Alismacées sont apotropes. Il est pourtant possible qu'on découvrira la cause de ces différences. Lorsque les ovules sont disposés en deux lignes le long de la suture ventrale, comme dans les Liliacées, les Crassulacées, Delphinium, Menyanthes, ete., ils se recourhent généralement de manière à regarder les deux côtés; lorsqu’au contraire ils couvrent une surface assez étendue, comme dans les Gesnériacées, les Bignoniacéesles Bégonia- cées, etc., on les trouve rangés ordinairement en lignes plus ou moins exacte- ment alternantes, comme les poils sur la corolle des Menyanthes, ou les poils crochus sur le calice de PAgrimonia, ou les cils glanduleux sur la feuille du Drosera (voyez Warming, Sur la différence entre les trichomes et les épibla- stèmes d’un ordre plus élevé. Vidensk. Meddelelser de la Soc. d'hist. nat. de Copenhague, 1872, avec figures) ; les ovules dirigent leur face antérieure vers la périphérie, en prenant le placenta pour centre. Il est évident que les ovules ont la tendance d'occuper la place disponible de manière à se gêner le moins possible. La comparaison m'a permis d'établir que la plupart des ovules nés dans l’ordre acropète sont épitropes, et que lorsqu'ils naissent dans l’ordre basipète, ils sont apotropes (pl. 11, fig. 13). Cependant je n'ai pu découvrir la finalité de cette règle, qui, du reste, ne manque pas d’exceptions. (1) Page 424. DE L'OVULE. 199 » préférence l’état intime de certaines phases de développe- » ment (1). » Ce serait done le retournement du bourgeon ovulaire (car ce ne sont jamais que les ovules plus ou moins anatropes qui subissent la métamorphose en feuilles ou en parties de feuilles) et le mode de développement des téguments sur le dos du ma- melon ovulaire recourbé qui favorisent la transformation téra- tologique. « Supposons, dit M. Strasburger, que le tégument » unilatéral qui naît sur le dos du mamelon ovulaire recourbé (2) » se transforme en feuille, il est bien elair que cette feuille por- » tera le nucelle latéralement sur sa face. » ILest vrai que l’anatropie semble favoriser [a transformation de l’ovule, car la métamorphose d’un ovule atrope est une chose excessivement rare en partie déjà parce que les ovules atropes ne sont pas fréquents eux-mêmes. Malgré cette parti- cularité, l’ovule dénote ici sa vraie nature; le funicule lui- même (l'axe, d’après M. Strasburger) se transforme le plus souvent en feuille et se fusionne avec le tégument unique ou double et avec le carpelle. Personne ne croira à la possibilité d’une transformation où le sommet de laxe, le nucelle, se trouve apposé sur le reste de la tige, élargi en forme de feuille et confondu avec une feuille, où les faisceaux du carpelle entrent dans cette partie transformée en feuille et s’y ramifient sans qu'ils pénètrent dans le nucelle, dont la position ne coïneide même pas toujours avec la terminaison d’un faisceau. Personne ne trouvera, dans ces cas tératologiques que M. Celakovsky a examinés avec le plus grand soin et interprétés avec beau- coup de sagacité, un argument en faveur de la théorie Braun- Strasburger. La seule circonstance sur laquelle on puisse s’ap- puyer pour soutenir cette doctrine, est la formation, plusieurs fois observée, de véritables bourgeons à feuilles ou à fleurs sur l’ovule monstrueux. Dans ces bourgeons on a voulu voir l’axe de l’ovule (funicule et nucelle) traversant les téguments qui (1) Textuel: Vielmehr rechne ich dieselbe zu den durch das Verhalten gewisser Entwickelungszustände begünstigten Bildungsabweichungen. (2) Selon lui, l'équivalent morphologique d’une feuille. 200 E. WARMING. sont transformés en feuilles. MM. Cramer et CGelakovsky ont montré séparément que ces bourgeons sont de nature pure- ment pathologique, et ils ont pu découvrir le nucelle intact sur la foliole ovulaire garnie d’un bourgeon; celui-ci n’est l'homologue d'aucune partie de lovule, il lui est Lout à fait étranger. La transformation foliaire si fréquente du mamelon ovulaire, qui sera plus tard le funicule, et sa fusion avec le carpelle, est une preuve irrécusable que cet organe est véritablement un lobe de feuille, conclusion qui était déjà rendue bien vraisem- blable par la position et l’ordre d'apparition des ovules. Les ovules ne sont pas des bourgeons ; je ne connais aucune trans- formation tératologique bien étudiée ou complète qui confirme d’une manière absolue le contraire, et j'ose ajouter qu’on n’en découvrira pas. Le mamelon ovulaire est donc.un lobe de feuille ; nous ver- rons que d’autres faits le prouvent encore. CHAPITRE IT. LE NUCELLE. I. — Histogenèse du nucelle. EL. — Qu'est-ce que le nucelle? La définition ordinaire me parait trop étroite; la voici : Le nucelle est la partie de lPovule située au-dessus des téguments et renfermant le sac embryonnaire (1). Chez les Gycadées et d’autres Gymnospermes, le sac embryonnaire est situé primiti- vement bien au-dessous de l’insertion des téguments (2), l’ex- trémité du nucelle seule (Kernwarze) est libre. Selon moi, le nucelle renfermant le sac embryonnaire et les autres cellules qui trouvent leurs homologues dans les cellules du sporange des Cryptogames est la partie de l’ovule qu’on doit regarder (1) Voy. Hofmeister, Entstehung des Embryo, p. 58 ; Schleiden, Grundzüge der wissensch. Botanik, p. 508, etc. (2) Warming, Cycadées (résumé), p. 2. DE L'OVULE. 201 comme l’homologue du sporange, que cette partie soit abso- lument libre au-dessus de la foliole ovulaire, comme dans la plupart des Angiospermes, ou plus ou moins enfoncée dans ses tissus, comme cela arrive, à mon avis, dans la plupart des Gymnospermes et des Gnétacées, et peut-être dans quelques Angiospermes. Déjà Brongniart (1844) a déclaré catégoriquement que le nucelle estune création nouvelle sur la foliole ovulaire. Vingt ans après, M. Cramer a repris cette opinion qui a été partagée dans les derniers temps par MM. Celakovsky, Van Tieghem et par moi-même (1). Des voies différentes nous ont conduits au même résultat. Je vais essayer de fonder cette doctrine sur des recherches anatomiques et histogénésiques. Nous avons laissé le mamelon ovulaire sous forme d’une saillie hémisphérique ou plus ou moins conique; dans quelques cas, il prend des dimensions relativement considérables avant qu'il s'introduise une modification dans sa croissance. Par exemple : Cuphea (pl. 9, fig. 11), Passiflora (pl. 7, fig. 15), Seduin, Viola tricolor, etc. Ce mamelon ovulaire est souvent désigné sous le nom de nucelle, même jusque dans les derniers temps (2); il n’est pas identique avec lui, le nucelle naît sur le mamelon ovu- laire, ainsi que le disait déja M. Cramer. Voici de quelle manière : IL. —Je choisis comme premier exemple le Ribesnigrum. La figure 6 (pl. 7) représente la coupe longitudinale du mamelon à sa naissance; la figure 7 le montre d’en haut. Le mode de développement est bien clair. Dans la figure 8 il s’est allongé ; l’intérieur, composé dans cette coupe de deux files de cellules, s’est agrandi, et les cellules de l’assise sous-épidermique qui occupent le sommet de l’organe se sont fortement allongées dans le sens du rayon. Cette élongation est le commencement de (1) Bot. Zeit., 1874. (2) Par exemple, Braun, qui écrit dans Cycadeen, 1875, p. 353 : «Je consi- dère comme un fait irrécusable que c’est le nucelle qui donne naissance aux téguments. » M. Peyritsch (Teratol. der Ovula, 1876) est du même avis 202 E. WARMING. la formation du nucelle. La coupe longitudinale (fig. 9) rend compte des prochains changements : en 2 2, le long d’une zone située environ au niveau de la base des cellules sous-épidermi- ques allongées, commence le développement des téguments ; les cellules allongées elles-mêmes se sont divisées par des parois tangentielles et à un degré moindre par des parois radiales. À la suite de ces divisions apparaît une grande cellule inté- rieure #, située un peu de côté dans le voisinage de l’axe déjà un peu courbé de lovule, et quin’est autre chose que la cellule mère primordiale du sac embryonnaire (1). On la retrouvera facilement dans les figures 10 et 13, et on verra en même temps que de nouvelles divisions se sont opérées, les unes en dehors de la cellule mère, les autres à ses côtés, dans des cellules qui dépendent comme elle de la première assise sous-épidermique. Dans le dos de lovule on découvre des cloisonnements multi- pliés au-dessous du tégument et qui sont en rapport avec la courbure de Povule. On peut encore poursuivre avec certitude les limites de l’épi- derme et de la couche sous-épidermique. Il ressort de tout ceci que le nucelle doit son origine à un certain nombre de cellules sous-épidermiques ; que lune de ces cellules, distin- guée parmi les autres, devient la mère d’une cellule sexuée #, qui est la plus intérieure de la file issue des divisions tangen- telles de la cellule mère primitive sous-épidermique. Ce n’est que par exception qu’on voit apparaitre deux cellules filles du premier degré, primitivement de mème taille (fig. 1 4). Ges cellules » etn sont presquesemblables; plustard mn seule produit un sac embryonnaire dans la figure 43, la cellule » est presque aussi grande que #, qui est la préférée. La figure T1 4 repré- sente le tissu situé en dehors des deux cellules prineipales ; on voit qu'outre les divisions tangentielles qui sont mvisibles, 1l (1) Je lappeile ainsi pour rester conséquent avec les expressions adoptées dans mon mémoire : Ueber pollenbildende Phyllome, ete. Les cellules filles de premier ordre intérieures des cellules sous-épidermiques sont les cellules mères primordiales ; les cellules qui en proviennent sont les cellules mères qui se divisent finalement en quatre pour former les grains de pollen. DE L'OVULE. 203 s’est effectué respectivement deux et une division radiale. De plus, on remarque que la base du nucelle est située à peine plus bas que la ligne d'insertion supérieure du tégument interne 4 ? (fig. 10 et 13), ou à la mème hauteur (fig. 9). Beaucoup d’autres plantes ressemblent au Ribes, sous le rapport de la formation du nucelle. Comme deuxième exemple, je citerai lAristolochia Clematitis (pl. 8, fig. 410 à 27). La figure 10 représente le mamelon ovu- laire avant son inflexion, qui se fera dans le sens de la flèche et avant la formation des téguments. La structure intérieure n’est pas aussi régulière que dans le Æibes. Il n’est pas très- visible non plus si la formation du nucelle à commencé, quoi- que le volume des cellules sous-épidermiques du sommet le fasse supposer. La figure 44 est plus instructive ; le centre du nucelle est évidemment un peu latéral par rapport à la ligne médiane de l’ovule, de même que le tégument mtérieur en voie de formation, à t. Un grand nombre de divisions se sont déja produites dans les cellules sous-épidermiques. Dans la figure 45 on les trouve encore plus nombreuses ; un nombre assez considérable de cellules participent à la formation du nucelle: dans cette coupe longitudinale on en compte emq. La figure 42 montre le sommet du nucelle : 11 n’existe pas de cellule apicale. Les figures 13 et #sont des coupes transver- sales prises à différents niveaux ; dans cette dernière, on recon- nait une grande cellule centrale, la cellule mère primordiale du sac embryonnaire; le tégument 2 » est atteint par la coupe. Dans les figures 11 et 45, 1l est encore impossible -de distin- ouer la cellule mère parmi les autres ; il n’en est pas de même dans la figure 48, où elleest nettement différenciée par ses dimensions et son contenu protoplasmique. Elle est évidemment la cellule fille du premier degré, la plus intérieure d’un com- plexus dérivant d'une seule cellule mère sous-épidermique J'ai pu voir assez nettement que l’ordre de division de ce com- plexus est centrifuge, ainsi que lindiquent les numéros des cloisons. Le sac pollinique se forme exactement de la même manière : 204 E. WVARMING. les cellules mères primordiales du pollen sont les plus internes cellules filles du premier degré ; les cloisons apparaissent, dans les cellules pariétales externes, dans un ordre presque tou- jours centrifuge (1). La différence qui existe sous ce rapport entre l’anthère et l’ovule n’est que quantitative. Dans le sac pollinique, 1! apparaît un grand nombre de cellules mèrespri- mordiales sexuées; dans l’ovule, une seule. Je parlerai plus loin des divisions des cellules-mères primordiale et spéciale sexuées. I n'est pas difficile de découvrir la cellule mère primordiale du sac embryonnaire dans les ovules plus âgés (fig. 49, 20, 21) ; elle se distingue par son contenu protoplasmique ; la coiffe cellulaire qui la recouvre augmente progressivement d’épais- seur. Au début, la limite mterne de assise sous-épidermique était située un peu au-dessous de la ligne d'insertion supérieure du tégument (fig. 11 et 15); plus tard elle se trouve plus élevée, parce que les cellules placées au-dessous du tissu sous- épidermique se divisent, comme le montrent les figures 18 et21, et que par suite le nucelle est brièvement pédicellé. Les coupes transversales (fig. 13 et 14) complètent les explications que j'ai données sur des coupes longitudinales. À ce type se rattachent directement quelques autres exem- ples que je me borne à citer; j'espère que le lecteur com- prendra facilement les figures sans que j'insiste longuement sur les explications. Passiflora (pl. 7, fig. 15 à 21). — Le mamelon ovulaire arrive à une taille extraordinaire avant que le nucelle com- mence à se développer (fig. 15 et surtout fig. 17). Dans cette dernière figure, un assez grand nombre de cellules situées au- dessous de l’épiderme se sont divisées tangentiellement ; la base de ces nouvelles files de cellules se trouve au niveau de la ligne d'insertion du tégument interne. On remarque dans la figure 18 deux cellules plus grandes superposées : j'ignore laquelle des (1) Voy. Warming, Pollenbildende Phyllome. Mes résultats ont été confirmés et étendus, surtout par M. Engler (Antherenbildung). Depuis la publication de ce mémoire j'ai pu moi-même confirmer sur un grand nombre de plantes les règles que jy indique. DE L'OVULE. 205 deux deviendra la cellule mère primordiale du sac embryon- naire; une seule cellule plus grande existe dans les figures 19 et 20 (1). L’arrangement régulier des cellules environnantes témoigne de la conformité du développement de ce nucelle avec celui du type étudié précédemment, conformité qui est d’ailleurs prouvée par les figures 17 et 18. Peperomia (pl. 8).— Le développement du nucelle ne diffère pas des exemples précédents. Dans la figure 5 4, on remarque déjà au sommet du mamelon une cellule sous-épidermique qui se distingue nettement des autres par ses dimensions : c’est elle qui donnera naissance au sac embryonnaire. Dans la figure 6, 1l s’est opéré une division tangentielle, la cellule mère primordiale du sac embryonnaire est formée en #. Dans la figure 7, la cellule # est encore plus visible et la cellule sœur externe s’est partagée par les cloisons 2 et 3. Les figures 8 et 9 montrent des cloisonnements multipliés dans les cellules qui environnent la mère du sac embryonnaire, et ces cellules se sont disposées de cette manière en files rayonnantes ; la cellule mère du sac embryonnaire est située bien plus haut que l'insertion du tégument (fig. 9\. Les tissus qui séparent ces deux parties proviennent de la multiplication régulière des cellules déjà très-visibles dans les figures 6 et 7 (2). Il s’est ainsi formé une espèce de pédicelle, comme nous l'avons déjà vu, si l’on veut prendre pour limite inférieure du nucelle celle du sac embryonnaire lui-même. Il semble pour- tant qu'on pourrait considérer ce pédicule comme appartenant au nucelle même, puisqu'il y a des sporanges pédicellés, le pédicelle faisant partie de l’organe même. Mais c’est là une question sans importance. Le Viola tricolor nous fournit un exemple très-instructif de la formation du nucelle. Les figures 14 et 15, (pl. 10,) montrent au sommet du mamelon plusieurs cellules allongées dans le (1) Je m'occuperai plus loin des épaisses cloisons transversales qu’on aper- çoit dans la figure 20. (2) I semble que la cellule m dans les figures 6 à 8 doive se transformer en sac embryonnaire, sans subir de nouvelle division. 206 EH. VWVARMING. sens radial et partiellement divisées, parmi lesquelles il est encore impossible de reconnaitre la cellule mère primordiale du sac embryonnaire; 1l ne semble pas impossible qu'il existe plus d’une de ces cellules, quand on envisage les deux (ou même plusieurs, dont quelques-unes en dehors de la coupe) cellules de volume à peu près égal. Dans le Sparmannia (fig. 26, pl. 40), les deux grandes cel- lules renfermaient le même protoplasma qui distingue ordi- nairement la cellule unique différenciée comme cellule mère du sac embryonnaire. On comprendra sans difficulté la figure 6, pl. 9, qui repré- sente le jeune ovule du Ficus. Quant à la partie intérieure du nucelle avec le sac embryonnaire, je ferai remarquer que les cellules situées immédiatement au-dessous de Pépiderme divisé n'étaient pas rangées rigoureusement en une seule assise (voy. fig. 9) ; c'est pour cette raison que l’arrangement des cel- lules dans le nucelle n’est pas aussi régulier qu'ailleurs. On retrouve le mode ordinaire de formation du nucelle dans le Cuphea (les cellules sous-épidermiques sont un peu allon- gées), dans le Convallaria (pl. 44, fig. 1%), dans le Funkia cor- data (4), dans P'Helianthemum (pl. 40, fig. 10) et le Blitum (pl. 21, fig. (40 et 41) Le Geum parait s’écarter de ce type (pl. 10, fig, 25) en ce qu'une cellule fille externe appartenant à une assise qui dérive des cellules sous-épidermiques devient la cellule mère primor- diale du sac embryonnaire. Mais je n'ai pas encore approfondi ce cas particulier. Des singularités semblables ont été observées dans les Iris, mais elles s’accorderont probablement avec ce qui a été observé pour le Peperomia. J’ai étudié plus haut l’origine du mamelon ovulaire du Rheun (p.180, voy. pl. 4, fig. 2 et 4b). Le nucelle possède une structure différente du type ordinaire et semblable à ce qu’on voit dans Le Geum. Au centre on trouve un noyau composé d'environ quatre files de cellules ou davan- (1) Voyez la figure 36 dans le Trailé de botanique de Sachs, traduction de Van Tieghem, p. 653. DE L'OVULE. 207 tage, longitudinales, régulières et parfaitement limitées; ce cordon central est recouvert d’une coiffe de cellules disposées en files radiales partiellement divisées: c’est à lune de ces files située dans la ligne médiane qu’appartient le sac em- bryonnaire. J'ai déjà publié quelques observations sur le développement de l’ovule dans les Euphorbia, Glrysosplenium, Myogalum, Zan- nichellia (1), d'où il résulte que ces ovules concordent parfai- tement avec ceux que je viens de décrire. Une foule d’autres ovules plus ou moins bien étudiés se comportent de la même manière. II. — Toutes les plantes dont je me suis occupé jusqu'à pré- sent appartiennent aux Dialypétales, aux Apétales, ou aux Mo- nocotylées. Les ovules de ces groupes de plantes appartiennent en effet au même type, quand on les considère collectivement, car il y à certainement quelques exceptions. Ge type est carac- térisé par deux téguments de faible épaisseur souvent com- posés seulement de 2, 3, # ou 5 assises de cellules. Le nucelle se forme par la division d’un grand nombre de cellules sous-épi- dermiques et prend dans la suite un développement considé- rable; la cellule mère primordiale du sac embryonnaire, située, au moins dans sa plus grande partie, plus haut que le tégu- ment, est une cellule filleintérieure du premier ordre; le sac embryonnaire lui-même est ordinairement entouré pendant longtemps par le tissu du nucelle. En raison du nombre des téguments, je donnerai à ce type le nom de {ype dichlamydé. Les Conifères et les Gycadées, avec leur gros tégument pourvu de faisceaux fibro-vasculaires, avec leur volumineux nucelle, selon moi enveloppé en grande partie dans le tégument, c’est- à-dire enfermé ou enfoncé dans la foliole ovulaire (2), consti- tuent un second type, le type gymnosperme. Là le nucelle se développe d’une tout autre manière que dans les Angiospermes, Je n'ai pas l'intention de m'en occuper dans ce mémoire. Les Gamopétales représentent un froisième type. HW n'existe (1) Ramification des Phanérogames, 1872, pl. x et xt, (2) Voyez mes Cycadées. 208 E. WARMING. qu'un seul tégument (voyez plus loin les exceptions), dont l’as- sise interne prend très-souvent un développement particulier (en forme de tapis). De mème que ce groupe, que je crois dérivé en dernier bieu des Dialypétales, est très-naturel et bien délimité sous d’autres rapports, le nucelle trahit dans son développement une dégé- nération de la structure de la majorité des autres Angiospermes. Il est extrêmement réduit et ne doit son origine qu’à un très- petit nombre de cellules sous-épidermiques. Souvent la cellule mère primordiale du sac embryonnaire ne parait pas être une cellule fille intérieure du premierordre, mas la transformation directe d’une cellule sous-épidermique sans division. Le sac embryonnaire qui, comme dans le type dichlamydé, est situé au- dessus des téguments, déplace de bonne heure les autres cel- lules du nucelle. Je donne à ce mode de formation le nom de type monochlamydé. Le Verbascum phœniceum peut nous fournir le prenuer exemple du type monochlamydé (pl. 13, fig. 1 à 6). Aussitôt que le mamelon ovulaire est arrivé à un certain développement on voitune cellule située au sommet de l'organe et sous l’épiderme prendre des dimensions de plus en plus con- sidérables. C’est cette cellule unique qui soulève peu à peu l’épiderme et constitue tout le nucelle. Dans la figure 2 on voit les cellules voisines s'élever un peu le long de la centrale; il en est de même dans les figures 3 et 6. Dans cette dernière, l’épiderme a déjà cédé en se rejetant sur les côtés. Les cellules sous-épidermiques ne prennent qu'une faible part à la forma- ton du nucelle; sur la coupe transversale on trouve la cellule # entourée d’une seule assise de cellules, l’épiderme; la division tangentielle de ces cellules semblable à celle des dichlamydées se présente rarement ou pas du tout. Les épaisses parois trans- versales qui se sont montrées dans la cellule mère spéciale du sac embryonnaire ont une tout autre signification, ainsi que nous le verrons plus tard (1). 4 (1) L’ovule du Scrofularia est semblable à celui-ci. Voyez Ramification, pl. x, fig. 27 à 30. DE L'OVULE. 209 Le Senecio répète exactement la même série de phénomènes (pl. 40, fig. À à 13). Pai déjà déerit la formation du mamelon ovulaire ; dans les figures # et 5 on reconnait déjà la cellule mère primordiale du sac embryonnaire #1; 1l semble qu'il y ait eu une division tangentielle dans la figure 6, ce qui n’est pas le casordinaire (fig. 7). Dans la figure 8, on la reconnait net- tement sous la forme d’une longue cellule qui constitue presque seule tout le nucelle; quelques-unes seulement des cellules voisines s’amincissent pour se glisser le long de la cellule cen- trale ; la coupe transversale est représentée dans la figure 9. Plus tard la cellule centrale se divise tangentiellement (fig. 40, 44, 19). Les figures 16 et 18 représentent la coupe longitudinale de lovule du Lobelia Dortmanna ; les figures 17 «& à d sont des coupes transversales du sommet à la base. Quelques cellules basilaires soulèvent ici la cellule mère primordiale du sac embryonnaire. Aux plus petits ovules monochlamydés appartiennent ceux des Gesnériacées dont J'ai figuré quelques exemples (pl. 49, fig. 20 à 25). Les différentes phases du développement se passent ici comme dans les exemples précités. Dans tous ces cas un très-petit nombre de cellules (en dehors de l’épiderme) prennent part à la formation du nucelle, Il existe cependant des ovules monochlamydés plus compli- qués, par exemple dans le Syringa (pl. 13, fig 45 à 17). On voit à côté de la cellule mère du sac embryonnaire plu- sieurs autres cellules qui s’allongent, mais qui ne se divisent tangentiellement que d'une manière parcimonieuse. Le Sym- phytum est exactement dans le même cas; le nucelle y est encore plus volumineux par suite de plusieurs divisions tangen- üelles (pl. 15, fig. 48 à 20); la présence très-précoce de quel- ques petits granules dans les cellules épidermiques facilite beaucoup la découverte du sommet du nucelle (1). Quoique les Primulacées et les familles voisines (Myrsinées © el (1) Dans la figure 17 il s’est établi une cloison tangentielle dans la grande cellule sous-épidermique. 6° série, BorT. T. V (Cahier n° 4). ? 14 210 E. WVARMING. et Plombaginées) diffèrent de la plupart des autres Gamopé- tales en ce que leur ovule possède deux téguments, elles se rapprochent cependant très-franchement du type monochla- mydé par la formation de leur nucelle. On trouve, dans les figures 8 et 9, pl. 43, quelques cellules » qui se sont allongées à côté de la cellule mère primordiale du sac embryonnaire. Si nous Comparons à ces ovules monochlamydés vrais les très-petits ovules dichlamydés, nous trouverons bien un rap- prochement quant au volume du nucelle, mais nous décou- vrirons certaines différences sous le rapport des divisions cel- lulaires, telles que le cloisonnement tangentiel plus constant dans la cellule d’où provient le sac embryonnaire, les divisions radiales progressives dans la cellule fille externe, divisions que je n'ai jamais observées dans les ovules monochlamydés (1). Dans le Drosera rotundifolia, par exemple, le nucelle est presque semblable à celui du Lobelia; en outre, son épiderme prend un développement comparable à celui de l’assise interne du tégument des monochlamydés. [l faut citer enfin, sous le rapport de la petitesse, mais appar- tenant néanmoins au type dichlamydé, les Orchidées (2). D’après les recherches récentes de M. Strasburger (3), la cellule supérieure de la file médiane se divise en deux : lPin- terne devient le sac embryonnaire; l’externe se divise encore une fois pour former la paroi, comme dans les dichlamydés. IV. — Si je résume brièvementlesrésultats de ces recherches sur le développement du nucelle, j'énonce la règle suivante valable pour la grande majorité des plantes. La première apparition du nucelle consiste toujours dans l'allongement radial d’un certain nombre de cellules situées au sommet du mamelon ovulaire, immédiatement au-dessous de l’épiderme. Dans les ovules monochlamydés, le nombre de ces cellules est faible, quelquefois il n’y en a même qu’une seule; ces cellules se divisent peu ou point. Dans les dichlamydés, (1) Voyez les coupes longitudinales de l’ovule de Begonia, pl. 9, fig. 7 à 10. (2) Voy. Sachs, Lehrb., 4° édit., p. 554, trad. franç., p. 652. (2) Befrüchtung und Zelltheilung, 1878. DE L'OVULE. 211 au contraire, lenombre en est plus considérable, et ses cellules se divisent d’une manière régulière, surtout par des cloisons tangentielles. Une seule des cellules filles internes, provenant des premières divisions tangentielles, devient la cellule mère primordiale du sac embryonnaire; elle ne subit pas, comme ses voisines, de nouvelles divisions immédiates, et si plus tard elle se divise, les cloisons qu’on y voit apparaître sont d’une nature particulière (1). Il peut cependant arriver que les cel- lules filles internes voisines de la grande cellule centrale ne se divisent pas et qu’elles prennent un développement semblable à la cellule centrale ; dans ce cas, l’ovule renfermerait plusieurs ébauches de sacs embryonnaires. Les cellules filles primaires externes se divisent par des cloi- sons tangentielles et radiales (ou obliques surtout quand ces cellules sont plus ou moins éloignées de la ligne médiane de l’ovule), et ces divisions se succèdent généralement de l’inté- rieur vers l’extérieur. Celui qui connaît mes recherches sur le développement de l’anthère sera frappé de la similitude de ces deux modes de développement. La figure 15, pl. 8, qui représente le jeune ovule d’Aristoloche, pourrait aussi bien servir à expliquer le développement de l’anthère. Comme je l'ai déjà dit dans le Bot. Zeit., 1874, et plus tard dans ma note sur les Cycadées, l’anthère des Angiospermes est au nucelle comme le micro- sporange est au macrosporange. Dans les deux cas, 1l se forme de la même manière un certain nombre de cellules filles sous- épidermiques du premier ordre qu’on peut considérer comme homologues et qui deviennent toutes « potentialiter » les cel- lules mères, primordiales de cellules sexuées. Dans l’anthère comme dans le microsporange, toutes se développent ; dans le nucelle comme dans le macrosporange, une seule se différencie des autres. Les cellules filles externes de premier ordre sont les cellules (1) Dans les monochlamydés très-réduits, la cellule sous-épidermique peut devenir directement la cellule mère primordiale du sac embryonnaire, où peut être le sac embryonnaire lui-même. 212 E. WARMING. mères de la paroi externe de l’anthère (lépiderme non compris) et du nucelle. Comme l’ovule dichlamydé est le plus riche en cellules, et par conséquent le plus semblable à lanthère, je le considère comme Île type primitif; l’ovule monochlamydé est la forme postérieure dérivée. I. Nature morphologique du nucelie. EL — M. Hänlein dit, dans Compositenblüthe, p. 166 : « Si » M. Warming considère le nucelle comme une création nou- » velle, en ce sens qu’il naïtseulement sur lébauche primitive » de l’ovule, il semble que ce soit sans raison, parce qu'il ne » se produit aucune interruption, aucun arrêt dans le dévelop- » pement du bourgeon ovulaire. » Il n’est pas nécessaire qu'il se produise un arrêt. Dans la fleur ou dans le bourgeon végé- tatif en voie d’accroissement, 11 n’y a pas d'arrêt non plus, et cependant les pétales, les étamines, les feuilles, sont des créa- tons nouvelles sur laxe. Combien grand est le nombre des poils et des émergences qui se développent sur le Jeune organe en pleine croissance ; personne n’hésitera à leur donner le nom de « créations nouvelles ». Lé caractère essentiel de la création nouvelle, ou d’une manière générale d’une ramification d’un ordre quelconque, réside en ce que le mode de division cellu- laire qui lui donne naissance ne peut pas être regardé comme la continuation directe de celui qui à été observé dans l'organe mère, mais qu'il a des qualités nouvelles qu'on ne saurait décrire que pour chaque organe en particulier. La formation du nucelle est dans ce cas ; 1} apparait un nouveau mode de division abso- lument différent de celui du mamelon ovulare. M. Celakovsky a critiqué mes idées sur la formation du nu- celle dans une note (4) : € Après la description que M. Bar- »cianu (2) donne du développement de lovule du Gaura » biennis, et que M. Warming m'a recommandée, dans une (1) Termin. Ausglieder., p. 10 du tirage à part. (2) Onagrareen, pl. Vu, fig. 19 à 24. DE L'OVULE. 213 » lettre, comme très-fidèle, après l’examen des dessins inédits » de Passifloru, que je dois à l’obligeance de M. Warming, je » ne peux plus admettre la mamière dont M. Warming inter- » prète ces divisions cellulaires (qui se produisent dans l’assise » sous-épidermique du mamelon ovulaire et qui m'ont conduit » à considérer le nucelle comme une création nouvelle), car » le nucelle et les téguments du Gawra existent déjà à l’état » d’ébauche avant que ce nouveau mode de division commence ; » celui-ci ne produit donc pas le nucelle, mais il en continue » le développement (1). » Les loges de l’anthère, comparées au nucelle, existeraient de même avant l'apparition du nouveau mode de division dans l’assise sous-épidermique. Il est tout à fait indifférent que les téguments préexistent ou non avant les divisions sous-épider- miques, de même que la présence ou l’absence de lindusie dans les Fougères est sans importance; les sporanges sont néan- moins des créations nouvelles. Pour savoir si le nucelle existe avant les divisions caracté- ristiques, il faudrait d’abord en tracer la limite inférieure. M. Barcianu a étudié le développement de l’ovule sans égard pour les divisions sous-épidermiques. D'après ses figures 921 à 25, la limite inférieure du complexus de cellules provenant de l’assise sous-épidermique parait se trouver au même niveau que la ligne d'insertion supérieure du tégument; dans la figure 24, elle est plus haut :1l se formerait par conséquent une espèce de pédicelle au-dessous de ce complexus. Je n’ose pas décider si ce pédicelle appartient au véritable nucelle (spo- range) ou s’il fait partie de la foliole ovulaire. Gomme je lai déjà dit, cette question ne me parait pas essentielle (2). Ge qui est important, c’est que le sac embryonnaire n’est pas, comme on l’a cru jusqu’à présent, une cellule quelconque de la partie de l’ovule située au-dessus du tégument, partie qui (1) Der Eikern wird nicht angelegt, sondern nur ausgebildet. (2) Placer la limite du nucelle exactement au niveau du tégument me parait être un acte tout à fait arbitraire. J’ignore quelle considération à pu guider ceux qui l'ont fait. 91 4 E. VYARMENG. ne serait que le sommet du mamelon ovulaire produit par la continuation du même mode de division cellulaire. I est encore important de savoir que la partie qui renferme cette cellule provient d’une multiplication cellulaire d’un genre particulier différent de celui qui a produit le mamelon ovulaire ; par con- séquent, cette partie au moins, telle que je la définis, est une création nouvelle, Si l’on démontrait qu'il faut ajouter quelque chose à la base, rien ne serait changé pour M. Celakovsky, qui considère aussi le nucelle comme une création nouvelle. Tout ce que je viens de dire s'applique également à l’an- thère (1). Il est singulier qu'aucun des observateurs qui ont étudié l’ovule au point de vue de sa structure cellulaire n'ait pas reconnu le véritable mode de développement du nucelle, ni M. Kny (2), qui a du reste très-fidèlement représenté le déve- loppement de Povule d'Œnothera, ni M. Reuther (3), qui dit de l’ovule des Cucurbitacées que c’est la cellule extrême du €plérome », tournée vers le sommet du nucelle, qui devient le sac embryonnaire, ni M. Strasburger, qui s’est occupé spéciale- ment de la formation du nucelle, et qui dit (4) : «Il me parait » suffisamment établi par les exemples cités que, dans tous les » Cas, le sommet du jeune bourgeon ovulaire devient le nu- » celle. » La théorie de Cramer (il aurait dû dire de Brongniart- Cramer) ne trouverait donc pas de base dans l’histoire du développement. Je crois au contraire que la théorie de Bron- gniart se trouve maintenant appuyée sur l'histoire du dé- (1) M. Celakovsky paraît admettre un enfoncement des cellules pollinifères dans l’étamine, dans le genre d’un sporange d’Ophioglossum. D'une manière générale cela est impossible. D’après mes recherches, chaque loge d’anthère est une espèce d’émergence très-plate et qui paraît d'autant plus basse qu’elle est insérée sur une plus large surface. Il est bien possible que dans certaines plantes les sacs polliniques ne fassent aucune saillie au milieu du tissu foliaire environnant, ou qu'ils soient même dépassés par ces tissus accrus en même temps qu'eux; mais cela ne changera absolument rien à la signification mor- phologique du sac pollinique. (2) Wandiafeln. (3) Bot. Zeit., 1876, p. 419. (4) Coniferen, p. 422. DE L'OVULE. 915 veloppement que je viens de décrire, et dont j'attends avec impatience, de la part d’autres auteurs, la confirmation et l'extension. Elle se trouve en concordance parfaite avec les cas tératologiques soigneusement étudiés par MM. Celakovsky, Cramer, Brongniart, etc., dans lesquels l’ovule, le funicule et les téguments sont transformés en une foliole sur la face de laquelle on reconnaît le nucelle sous la forme d’une petite proéminence création nouvelle) conique. De quelle nature est maintenant cette proéminence? Un bourgeon sans feuille né sur la foliole, ou un lobe appartenant à la foliole, ou enfin un métablastème plus indépendant inséré sur la foliole ovulaire? Dans les deux premiers cas 1l serait singulier que dans les cas de transformation en feuille le nucelle se présente (tou- jours?) sous forme d’un petit mamelon incolore, translucide, différent de l’aspect de la feuille, et qu'il ne renferme jamais de faisceaux. Rien ne prouve, rien ne pourrait même faire croire que le nucelle est un bourgeon. J'ai déjà dit que MM. Cramer et Cela- kovsky ont reconnu que les bourgeons nés sur la foliole ré- sultant de la transformation anormale de l’ovule (1) sont sim- plement des créations nouvelles pathologiques (2). Tout parle en faveur de l’idée que le nucelle est un organe homologue du sporange des Cryptogames vasculaires, par con- séquent une espèce de métablastème, une émergence. Pour le bien faire comprendre, je suivrai la marche suivante : d’abord je constaterai l’homologie entre le sac pollimique et le micro-sporange ; ensuite Je traiterai de la concordance dans le développement du sac pollinique et du nucelle; enfin je con- clurai que ces organes sont homologues, respectivement com- parables aux micro et aux macrosporanges. (1) Observés par MM. Wydler, Wigand, Peyritsch, Braun, Schimper, etc. (2) M. Masters déclare qu'il a vu souvent «a leafy shoot in the place of the nucleus »; mais il n’a pu décider si c’étaitun développement du nucelle ou a newgrowth distinct from that body ». 216 E. WVARMANG. I. — L'homologie entre la microspore et le grain de pollen est un fait acquis, confirmé encore dans les derniers temps par M. Strasburger (1); les enveloppes qui les renferment sont donc probablement homologues elles-mêmes (ce qui n'exclut pas la possibilité de lenfoncement du sporange dans la sub- stance de la feuille). D'un autre côté, la morphologie comparée partant des sores dorsaux des Fougères, surtout de celles dont le sore, comme chez les Marattiées (2), ne renferme qu'un petit nombre de sporanges, nous conduit aux feuilles staminales des Gycadées, dont les sacs polliniques, disposés également en groupes, sont nettement dorsaux, à celles des Araucaria, des Daninara, des Taxus et des Cupressimées, pour arriver dans les Abiétinées aux élamines pourvues de deux sacs polliniques. Tous ces sacs polliniques sont dorsaux. Personne ne doutera de lPhomologie entre les sacs polli- niques des Angiospermes et ceux des Conifères, même quand il faudra reconnaitre que dans les Angiospermes ils appar- tiennent au bord de la feuille staminale et à la face supérieure, car dans les Fougères nous avons déjà des variations de position des sores ou des sporanges : en haut, en bas, sur les bords (3). Quant à la position des quatre sacs polliniques dans les Angio- spermes, je renvoie aux travaux de M. Engler (4) et de M. Cela- kovsky (5) : ce dernier à mgénieusement essayé de comparer létamine à la feuille bilaminaire d’'Ophioglossum ; la feuille staminale serait composée de deux limbes, d’un postérieur et d’un antérieur, comme dans lOphioglossum, seulement tous les leux fertiles et soudés entre eux. Il serait intéressant de fournir des bases solides à cette manière de voir ; je doute qu'elle soit l'expression de la vérité, mais, dans tous les cas, la question attend sa solution ; on ne possède qu'un très-petit nombre de faits propres à la soutenir (6). (1) Befrüchtung und Zelliheilung. (2) Voy. Braun, Cycadeen, p. 316. (3) D’après AL Braun. (4) Antherenbildung, (Pringsh. Jahrb. X). (5 ( Teralolog, Beiträge, (Pringsh. Jahrb. XV). 6) Comparez également Al. Braun, Cycadeen, p. 345 (note). DE L'OVULE. 217 À mon avis, il en est de même pour cette autre question, si le sac pollinique, tel que nous le trouvons dans les Angio- spermes, doit être assimilé à un seul sporange ou à un €sporo- cyste », nom que M. Strasburger donne à un organe composé de plusieurs sporanges confondus (1). Les anthères divisées en un grand nombre de loges que M. Engler décrit dans les Mimo- sées et dans les Rhizophora, auxquelles il faut ajouter la division en logettes découverte par M. Barcianu dans! ŒÆnothera, seraient alors des cas d’atavisme (2). Pour nous ces questions n’ont que peu d'importance ; il nous suffit que l’homologie du sac pollinique et du sporange soit établie, et nous venons de voir qu’elle l’est au point de vue de la morphologie comparée. Au point de vue histologique et génésique, il existe aussi des coïncidences qui prennent une grande importance dans cette question. On sait que dans les Polypodiacées et dans d’autres Filicinées inférieures, le sporange provient d’une seule cellule épidermique. Dans le sporange lui-même on peut distinguer trois parties : &. la partie externe formée par une seule assise de cellules qui constitue une sorte d’épiderme ; b. une couche plus interne, simple ou divisée, le manteau (3), qui se dissout plus tard, et c. la cellule centrale (Russow et d’autres auteurs) tétraédrique, ou cellule mère primitive des spores, ou les spores elles-mêmes, selon l’état de développement. Le sporange se constitue essentiellement de la même manière dans quelques formes plus élevées, par exemple dans le Pilularia (4). Chez les Marattiacées, le développement s'élève à un degré supérieur : ce n’est plus une seule, mais un grand nombre de cellules épidermiques qui prennent part à la formation du spo- range, peut-être même quelques cellules situées au-dessous de l’épiderme ; mais nous reconnaissons encore dans tout le spo- (1) Bot. Zeit., 1878. (2) Les étamines de Sempervivum et d’autres plantes garnies d’ovules, que M. Engler étudie, s'accordent avec cette interprétation. Comparez en outre Al. Braun, Cycadées, p. 351. (3) Mantelschicht, Sachs. (4) Sachs, Lehrb., 4e édit, p. 449, fig. 322; trad. franc., p. 521, fig. 298. 218 E. WARMING. range les trois parties suivantes : les cellules reproductrices à l’intérieur ; une couche pariétale externe correspondant à un épiderme, et une couche pariétale interne de plusieurs assises, dont la plus intérieure, ordinairement seule, contiguë des cel- lulesg inératrices, se comporte d’une manière particulière. Dans le Marattia, par exemple, elle est gummifère, et c’est d'elle que procède la résorption des tissus qui entourent les spores (1). Je reconnais dans cette couche lassise à laquelle j'ai donné le nom de « {apete », la couche de «revêtement » dans les An- glospermes, et qui recouvre les cellules reproductrices. Chez les autres Cryptogames vasculaires élevées nous retrou- vons essentiellement la même structure définitive, par exemple dans la Sélaginelle (2), dans ie Botrychium etl'Ophioglossum, et enfin dans les Conifères (3) et chez les Angiospermes (4-5). Tandis que dans les Marattiacées le sporange provient en- tièrement ou en grande partie de lépiderme, nous voyons dans les plantes plus élevées le tissu sous-épidermique jouer un rôle de plus en plus considérable ; finalement, le sporange s'élève, chez les Angiospermes, au rang d’une émergence, de la même manière que la feuille qui est une production de l’épiderme ou des cellules superficielles chez les Cryptogames supérieurs et qui naît du tissu sous-épidermique chez les Angiospermes. Malgré ces différences, le mode de formation reste le même : au-dessous de l’épiderme déjà formé se développe un tissu qui ne tarde pas à se différencier en cellules sexuelles et en cellules pariétales ; de ces dernières se détache une couche, d’une ou de plusieurs assises, très-fugace et contiguë aux cellules repro- (1) Luerssen, Entwickelungsgeschichte der Farn-Sporangien, dans Schenk und Luerssen Miltheilungen aus der Botanik, Bd. I, p. 313. (2) Sachs, Lehrb., 4° édit., fig. 337, p. 471 ; trad. franç., p. 542, fig. 310. — Strasburger, Bot. Zeit., 1873. — Russow, Vergleichende Untersuchungen (Mém. de V'Acad. impér. de Saint-Pétersbourg, 1872, p. 132-193); Lycopo- dium, p. 138; Selaginella, p. 124-126. (3) Strasburger, Coniferen, p. 122. (4) Voyez mon Pollenbild. Phyllome. (5) La figure 47, pl. xv de M. Strasburger (nucelle d'Ephedra), et celle de M. Russow, loc. cit., pl. vin, fig. 170 (de Botrychium), dénotent une ressem- blance curieuse. DE L'OVULE. 919 ductrices : ma couche de revêtement, « tapete » le « manteau » de M. Juranyi, la couche « limitative » (1) de M. Strasburger. M. Celakovsky pense que les sacs polliniques sont des spo- ranges enfoncés dans le tissu d’une feuille ; mais l'observation ne confirme pas cette opinion : la faible saillie et la large base peuvent donner lieu à cette erreur quand on se contente d’un examen superficiel. Laissant de côté la question des sporocystes et de leur ana- logie avec les étamines, je regarde comme une chose évidente l’homologie entre les sporanges et les sacs polliniques. Les sporanges des Cryptogames vasculaires sont partout, même chez les Sélaginelles, attachés à la feuille ; 1l est évident, d’un autre côté, que l’immense majorité des étamines des Pha- nérogames sont des feuilles : 1l sera donc difficile d'admettre que les étamines puissent être autre chose que des phyllomes ; celles qui ont été considérées comme des caulomes peuvent être interprétées autrement (2), avec le secours de la morphologie comparée. HI. — J'arrive maintenant au nucelle. Les recherches de MM. Hofmeister, Braun, Strasburger, ont fait admettre lho- mologie du sac embryonnaire et de la macrospore. Il semble qu’on doive en déduire comme une simple conséquence celle du nucelle avec le sporange, et beaucoup d'auteurs l’ont fait. Cependant il est nécessaire de démontrer aussi exactement que possible cet accord vis-à-vis de l'incertitude et de l'obscurité qui enveloppent la nature de l’ovule. Le nucelle est l’homologue du sac pollinique; je viens de décrire la similitude entre leurs modes de développement, et je ne doute pas qu’il ne soit permis d’assimiler ces deux organes. Les divisions cellulaires se succèdent régulièrement de la même manière, et elles sont particulières au sac pollinique et au nu- celle ; il est vrai qu’il y a des différences : dans le nucelle, une seule cellule fille devient reproductrice; dans le sac pollinique, il y en à un grand nombre. Il fallait s’y attendre, vu les rela- (1) Grenzschicht. (2) Je le reconnais maintenant. (Voyez Pollenbildende Phyllome.) 220 HE. VVARMHENG. tions entre le macrosporange et le microsporange. [l y a cer- taines Angiospermes, les Mimosées, chez lesquelles, d’après M. Engler et moi, les cellules mères primordiales du pollen sont formées isolément. Là la concordance avec les ovules est encore plus grande. Une autre différence réside dans le développement ultérieur de la paroi : l'apparition de cellules fibreuses et du « tapete » avec sa forme caractéristique dans Panthère. Ges différenciations ne sont cependant que le résultat de ladaptation à un but phy- siologique déterminé, comme la déhiscence de l’anthère et le développement libre des grains de pollen, et ne sauraient attemdre les règles fondamentales de l'anatomie. Comme le nucelle est le seul sporange du règne végétal qui ne s'ouvre pas, il n’a pas besoin du mécanisme de déhiscence des autres spo- ranges ou d’une couche de revêtement jouant un rôle dans la déhiscence et la dissémination des spores ou des grains de pollen. Mais il y a d’autres différences plus importantes. J'ai donné à la cellule fille interne de premier degré dans le sac pollinique (1) le nom de cellule mère primordiale, parce qu’elle commence ordinairement parse diviser en un nombre variable de cellules (2) qui sont des cellules mères et produisent les tétrades. Les mêmes dénominations peuvent s'appliquer du reste au sporange de la plupart des Filicinées et d’autres Cryptogames vasculaires. La cellule tétraédrique intérieure qui est restée dans une Polypo- diacée, après la formation du deuxième cycle de cellules pa- riélales, correspond à la cellule mère primordiale ; le nombre plus ou moins déterminé de cellules auxquelles elle donne naissance sont les cellules mères. ai donné le même nom de cellule mère primordiale à cette cellule fille mterne de premier ordre appartenant à l’assise sous-épidermique qui se distingue de ses voisines par différents caractères ; il faut donc se de- mander si dans le nucelle la cellule mère primordiale se divise en cellules mères et si des tétrades apparaissent dans celles-er. (1) Pollenbild. Phyllome. (2) Voyez en outre Engler, Sur les grains de pollen des Mimosa (Pringsh. Jahrb.,X). DE L’OVULE. 291 Plusieurs fois déjà j'ai fait sentir qu'il se forme des cloisons transversales d’une nature particulière dans la cellule mère primordiale. Elles ne se laissent pas assimiler à ces parois minces que Hofmeister à figurées dans le sac embryonnaire de quelques Scrofulariées, Labiées, ete., et qui sont en rapport avec la formation de l’endosperme. Dans mon cas, il n’existe pas encore de sac embryonnaire complet et normalement déve- loppé ; la fécondation serait impossible. Ces parois transversales présentent un aspect particulier ; on les trouvera figurées pl. 7, fig. 13, 14, et surtout 20 (Ribes et Passiflora), pl. 8, fig. 19, 20 (Aristolochia), pl. 19, fig. 10 à 49 (Senecto), où elles ne se dissolvent évidemment pas toutes avant la formation du sac embryonnaire. Je les ai observées dans beaucoup d’autres espèces, par exemple très-caractéristiques dans le Salix nigricans, Steriphoma paradoxum, Blitun Bonus- Henricus, Drosera, Saxifraga crassifolia, Agrostemma Githaÿo (jusqu’à trois cloisons épaisses et réfringentes dans la cellule mère primordiale), des Anemone, Ranunculus, Begonia, Centra- denia, Epilobium, Geum, Malva, Oxalis, Pittosporum, Eccremo- corpus, Tidæa, Lamium, Leucopoqon, Lobelia, Syringa, Ver- bascum, Iris, Arum, plantes prises dans les différentes divisions des Angiospermes et appartenant à des types ovulaires variés. Je ne voudrais pas soutenir que ces parois existent partout, je ne les ai pas trouvées dans tous les ovules. Souvent elles sont courbées, comme sielles étaient plus grandes que la section transversale de la cellule. Dans mes pré- paralions généralement traitées par la potasse, elles prennent presque toujours un aspect particulier, gonflé, et elles pos- sèdent une forte réfringence. Toutes ces particularités appar- tiennent également aux cellules mères du pollen dans l'anthère ; je me crois en droit de considérer les cellules filles comme les homologues des cellules mères du pollen, que la cellule mère primordiale soit d’ailleurs, comme dans les dichlamydés, la cellule fille interne d’une cellule sous-épidermique, ou qu’elle soit cette cellule sous-épidermique elle-même, comme dans les monochlamydés. 229 E. VWWARMING. L'une de ces cellules devient le sac embryonnaire; les parois transversales se résorbent, et uneseule cellule plus grande re- prend la place du petit groupe et s'étend de plus en plus en repoussant plus ou moins vite les autres cellules du nucelle.. Quant aux transformations qui s’'opèrent dans le contenu cellu- laire, quant au nucléus, surtout dans les cellules transversales qui se réunissent de nouveau, je ne puis pas donner de rensei- gnements sur ce sujet intéressant, qu'il est réservé à l'avenir d’élucider. Il est fort possible qu’on découvre des indications d’une division en tétrades ; Je crois pourtant que cette division fait défaut: ce serait un désaccord avec l’anthère reposant sur une réduction facile à comprendre. M. Sachs regarde les cel- lules antipodes comme un prothalle rudimentaire. Si cela était vrai, il n’y aurait pas de rapport entre ces vésicules et des tétrades ; cependant il y a lieu de rechercher si l’on ne pourrait pas les considérer, de même que les vésicules embryonnaires, comme des spores (1). Il existe donc une concordance évidente entre l’anthère et le uucelle ; les différences ne sont que quantitatives et reposent sur une réduction plus ou moins avancée. En passant, je dois rendre attentif à la formation possible de plusieurs sacs embryonnaires. D'abord plusieurs cellules filles sous-épidermiques peuvent devenir cellules mères primor- diales (2) ; alors nous obtiendrons plusieurs sacs collatéraux, comme M. Tulasne (3) l’a vu dans le Cheiranthus. À. Braun a réuni (4) les faits connus de cette nature. Outre le Cheiranthus, il faut citer (le Rosa Hofmeister), (le Persea ndica Schacht), et récemment M. Engler (5) a trouvé parmi les ovules nés sur les étamines du Sempervioum quelques-uns renfermant deux sacs embryonnaires. M. Strasburger (6) parle également de plusieurs (1) Voyez la note à la fin de ce mémoire. (2) Voyez Ribes, pl. T, fig. 13; Aristolochia, pl. 8, fig. 15; Viola, pl. 10, fig. 14-15; Sparmannia, pl. 10, fig. 26. (3) Ann. sc. nat., 3° sér., t. XIT, 1849, p. 61, pl. 6. (4) Polyembryonie. (5) Antherenbildung, p. 312. (6) Befrüchtung und Zelltheilung, p. 36, pl. vu, fig. 72 à 75. € O DE L’OVULE. 293 sacs embryonnaires dans le ARosa livida. Ses figures et ses observations s'accordent parfaitement avec ma manière de voir et avec la règle du développement des ovules dichlamydés. D'un autre côté, la multiplicité des sacs embryonnaires dans un seul ovule de Viscum n’est qu'apparente, parce que chacun de ces sacs embryonnaires appartient à son ovule. Un autre cas pourrait se présenter, celui où plus d’une des cellules filles verticales de la cellule mère primordiale se transformeraient en sacs embryounaires; mais cela ne doit pas se présenter, car on conçoit difficilement la fécondation de plusieurs sacs embryonnaires superposés les uns aux autres. Hofmeister a vu que dans le Taæus et le Pinus il existe géné- ralement deux outroissacsembryonnaires superposés, mais dont unseul arrive à son complet développement. M. Strasburger (1) dit que dans le Ginkgo le sac embryonnaire procède d’une cel- lule différente des autres par son contenu, qui se diviseen quatre et dont une seule se développe. J’ai vu moi-même des choses analogues dans le Juniperus Sabina. Toutes ces observations s’accordent avec ce qui a été dit. L’ovule des Gymnospermes se développe du reste, d’après ce qui m'est connu, tout autrement que celui des Angiospermes. Dans les Gycadées, et d’après mes quelques observations, dans un certain nombre de Conifères (Chamæcyparis obtusa, Thuia occidentalis), 11 se forme une grande quantité de cellules mères égales ; mais une seule, cen- trale, devient sac embryonnaire. Tout le sporange ou nucelle se développe d’une autre manière, à peu près comme dans l’Ophioglossum (2), La partie libre du nucelle (Kernwarze) est composée, dans quelques Gymnospermes, de cellules régulière- ment disposées en files radiales ef recouvertes ou non d’un épiderme (3). (1) Goniferen, p. 290. (2) Voyez mes Cycadées. (3) On reconnait, dans la construction du nucelle, le même enchaînement de types que dans celle du sac pollinique. Dans les Angiospermes, cette partie de l’ovule est une émergence; dans quelques Gymnospermes, de même; dans d’autres, il naît d’un grand nombre de cellules épidermiques : par exemple, Ephedra (Stasburger, p. 83). 99% EH. VWVARMENG. L'homologie du sac pollinique avec le nucelle est enfin con- firmée par certaines transformations tératologiques, telles que le développement de pollen dans lovule, dont l’étude minu- tieuse, surtout au point de vue anatomique, serait du plus haut intérêt (1), ou inversement d’ovules sur la feuille staminale, par exemple dans le Sempervioum tectorum (2). D’après ce dernier cas anormal, on serait tenté d’assimiler le sac pollimique à toute une série d’ovules (3) ; 11 donnerait également un appui à la supposition déjà citée de M. Celakovsky, qui se représente l’'étamine comme composée de deux limbes, un antérieur et un postérieur, unis par leurs faces supérieures. IV.— En résumé, l’histoire du développement et la térato- logie nous ont montré : 4° Que le nucelle est une création nouvelle sur le mamelon ovulaire, qui n’est lui-même qu’un lobe du carpelle. 2 Que le sac pollimique et le nucelle sont identiques quant à leur mode de développement, ce qui est ici une preuve d’une véritable homologie, confirmée du reste parune étude comparée de ces organes dans tout le règne végétal et par une série de cas tératologiques. 3° Que le sac pollinique, ainsi que le sporange, la forme fondamentale commune du sac pollimique et du nucelle, est partout lié à la feuille. Conformément à cette vérité, nous nous sommes assuré, en procédant d’une tout autre manière, que le mamelon ovulaire est en effet de nature foliure. À ces faits (1) Voyez Maxwell F. Masters, On polliniferous Ovules in a Rose (Seeman's Journ.of Botany, 1867, t. V, p. 318). — James Salter, On a sexual Monstruosity, consisting in the development of polliniferous Ovules in two species of Passi- flora (Transactions of the Linnean Society, 1864, 1. XXIV, p. 143). On a observé également la formation d’étamines dans l'ovaire, par exemple: dans le Bæciia diosmæfolia (Masters, Linnean Society's Journal, vol. IX, p. 334); dans un Hyacinthus (Moquin-Tandon, Élém. térat. végét., p. 218); dans le Primula acaulis (Schimper, Flora, 1829, p. 424). Ce qui est étonnant dans ce dernier cas, c’est que l’étamine est fixée sur la face interne de la paroi ovarienne. @) Mobl, Vermischte Schrift., p. 3%, pl. 1, fig. 15 à 25.— Engler, Antheren- buduns. (3) Braun, Cycadeen, p. 551. DE L'OVULE. 295 se rattachent enfin les résultats auxquels à conduit Pétude des Cycadées (1). Ces végétaux, qui constituent l'échelon inférieur des plantes à fleurs, se rapprochent en beaucoup de points des Fougères; comme celles-ci ont des sporanges toujours at- tachés aux feuilles, cela sera vrai également pour les Cycadées. On à eu raison de considérer comme de vrais carpelles les feuilles des Gycadées garnies d’ovules nus ; les ovules sont des sporanges enfoncés dans la feuille, à peu près comme dans l’'Ophioglossum (2). Dans le Cycas, il n’y à que cela de particu- lier, que le nucelle est recouvert d’un tégument qui fait défaut à l’Ophioglosse. Il n'existe, à mon avis, aucun fait qui soit de pature à faire croire que le sporange des Cycadées est inséré ou enfoncé dans un bourgeon né sur une feuille. Ge qui est vrai pour le Cycas doit l'être également pour les Comfères, dont l’ovule est construit de la même manière (3). Par ces raisonnements nous arrivons enfin à ce résultat déjà énoncé par d’autres observateurs (4), que les organes qui pro- duisent les cellules reproductrices sexuées, spore, pollen, sac embryonnaire, sont partout, dans toutes les plantes vascu- laires, des métablastèmes (dans le sens de M. Celakovsky) ; dans les formes inférieures, ils proviennent uniquement d’une cellule épidermique; pour peu qu'on s'élève à des échelons supérieurs, on les voit formés par plusieurs cellules épider- miques : dans les deux cas ce sont des trichomes; dans les formes les plus élevées ce sont des émergences. Le trichome et l'émergence sont les types inférieur et supérieur du méta- blastème. J'ai déjà montré ailleurs (5) que le même organe peut être tantôt l’un, tantôt l’autre. (1) AL. Braun, Cycadeen, et mon travail sur le même sujet. (2) La feuille carpellaire d’un Cycas est si semblable à la partie fertile d’une feuille d'Ophioglossum, qu'on ne peut pas douter de l’homologie des organes reproducteurs marginaux. (3) Les Cycadées et les Conifères sont véritablement des Gymnospermes, malgré toutes les raisons qu'oppose M. Strasburger. (4) Je citerai surtout Cramer, Bildungsabweichungen, p. 128 ; Van Tieghem et Gelakovsky. (5) Composilen. 6° série, BorT. T. V (Cahier n° 4). 5 15 296 E. WARMING. De plus nous avons reconnu que ces métablastèmes repro- ducteurs sont partout fixés sur des phyllomes, et non sur des caulomes. La nature morphologique est donc ainsi élucidée. Il ne me reste plus qu’à étudier les téguments, mais avant de le faire je m’occuperai encore de quelques questions relatives au nucelle. V. Le nucelle est-il terminal ou latéral par rapport au ma- melon ovulaire? — Quelques savants déclarent que le nucelle est terminal, par exemple M. Strasburger (1), qui conclut en ces termes : « Les exemples cités prouvent suffisamment que, dans tous les cas, le sommet du jeune bourgeon ovulaire devient le nucelle. » I s'appuie surtout sur la disposition des cellules dans le jeune ovule ; il trouve en effet que les files de cellules médianes du funicule se continuent directement dans la pointe du nucelle, mème quand lPovule est anatrope ou courbé. Le même résultat à été obtenu par plusieurs autres ob- servateurs : Hofmeister, Orchis; M. Magnus (2), Naïas, Begonia, Bellis, Solanum, Gapsella, etce.; M. Barcianu, Ona- grariées (3); M. Hänlem, Composées; M. Schenk (4); M. Kôhne (5), Composées, Sons Fuchsia, Begonia, ete.; M. Kny (6}, M. Buchenau (7), M. Eichler (8). M. Cramer, au contraire, après avoir étudié le développe- ment et la tératologie, dit que le nucelle est latéral au moins dans l’ovule anatrope. M. Sachs (9) est du même avis, et M. Celakovsky le considère également comme typiquement la- téral : QI est vrai que le nucelle est quelquefois terminal sur » les ovules transformés en feuilles, mais cent fois plus souvent »il est latéral; ce qui prouve en même temps qu'il est une (1) Coniferen, p. 422. (2) Naïias, p. 30, Anm. (3) Page 117. (4) D’après Sachs, Lehrb., 4° édit., p. 555, Anm. 1. (5) Composilen, p. 65. (6) Text zu den Wandtafeln, p. 55. (7) Bot. Zeit,, 1872, p. 393. (8) Congrès international, 1867, p. 141 (9) Lehrb., 4° édit., p. 555. DE L'OVULE. 997 » partie morphologiquement différente de la foliole ovu- » laire (1). » Cette question me parait peu essentielle, surtout depuis que M. Celakovsky a montré dans son Terminale Ausgliederungen que le même organe peut être termimal ou latéral, selon le volume qu'il possède dès sa naissance et l’époque à laquelle il apparaît (2). Elle a pourtant joué un grand rèle dans l’inter- prétation morphologique de l’ovule, et M. Strasburger, croyant avoir démontré que le nucelle est terminal par rapport au ma- melon ovulaire, et que le sac embryonnaire « est la cellule su- périeure du plérome » (de la file de cellules internes), ajoute que « les idées de M. Cramer perdent amsi leur base organo- génésique. » En partant de ce fait que le sac embryonnaire est situé dans la ligne médiane du mamelon ovulaire, parce que c’est laqu’on trouve l’élongation la plus intense des cellules et d’une manière générale le centre du développement, je trouve ce qui suit : Le sac embryonnaire est situé exactement sur la ligne mé- diane du mamelon ovulaire, et le nucelle est terminal dans les ovules orthotropes de Riheum, Peperomia (pl. 8, fig. 5 a, 6, 9), Helianthemum (pl. 10, fig. 10, 11), Arum, etc. À cette même catégorie appartient une série d’ovules anatropes, probable- ment ceux des Orchis et Monotropa (3). Mais sans doute dans le plus grand nombre des ovules anatropes le sac embryonnaire n’est pas rigoureusement médian, mais un peu latéral. Ceci se voit le plus nettement dans les ovules très-simples ne possédant qu'un petit nombre de files cellulaires internes et dans les ovules monochlamydés : Gesneria (pl. 10, fig. 21, 29); Be- gonia (pl.9, fig. 7, 8), où le sacembryonnaire appartient évi- demment à la face convexe de l’ovule ; Senecio (pl. 19, fig. 4), où le sac embryonnaire est la cellule terminale de l’une des quatre files qui apparaissent ordinairement sur la coupe longi- (1) Bot. Zeit., 1877, p. 146, 147. (2) Das Geselz der Seitlich-räumlichen Umkehrung. Comparez Term. Ausgl., p. 27. (3) D’après léës recherches de MM. Hofmeister, Strasburgér, Sachs (Lehrb., 4e édit., p. 554, fig. 397, trad, franç., p. 692, fig. 307). 228 Hi. VYARMIENG. tudinale; Aristolochia (pl. 8, fig. 410) ; Ribes (pl. 7, fig. 9, 10), et beaucoup d’autres, comme Æpilobium, Pr ie Pisun, lris, etc Le sac es est encore plus latéral dans le Syrinqa (pl. 13, fig. 45,17), Verbascum (pl. 43, fig: 4, 2), Delplu- HN, Rhodode ndron, les Gucurbitacées (D), ete. larriveordinairement, dans ce cas, que le tégument interne ou unique nait sur le sommet du mamelon ovulaire, comme on le voit dans le Syringa (pl. 13, fig. 17), ou dans le Ver- bascum (pl. 13, fig. T, 2). D'une manière générale il faut pourtant considérer le nucelle comme terminal, par rapport au mamelon ovulaire, même si son centre, le sac embryonnaire, n’est pas situé exactement dans la ligne médiane. P’un autre côté, les cas tératologiques le montrent presque toujours latéral sur la face supérieure de la foliole ovulaire et sembient indiquer les vrais rapports entre ces deux organes, ou tout au moins leurs rapports primibfs. VI. Divisions dans l'épiderme du nucelle. — M. Strasburger a déjà vu des divisions tangentielles dans l’épiderme du nucelle de Delphinium (2) et des Primulacées (3); mais pour cette der- nière famille 1l me reste un doute, car je n’ai pas pu les voir, el ces divisions sont en général très-rares dans les monochlamydés. Dans le Symphytum j'en ai trouvé un très-petit nombre (pl. 13, fig. 20). Chez les dichlamydés à nucelle beaucoup plus grand, elles sont au contraire très-fréquentes ; on les tronve en quan- té variable d’une plante à l’autre. La division ne s'étend que sur un petit nombre de cellules situées au sommet du nucelle et se borne à 2 ou 3 cloisons nouvelles dans l’Aristolochie (pl. 8, fig. 19, 20, 21), Fobes (pl. 7, fig. 14), Sparmannia (pl. 10, fig. 26), Blum, Shimmia, Saxifraga, Rheum, Anemone, Aponogeton, Centradenia, etc. Dans d’autres plantes, elle s'étend à lafois sur toutes les cellules épidermiques du nucelle, et les divisions sont tellement nombreuses, du moins au sommet, (1) D’après les figures de M. Reuther (Bot. Zeil., 1876, pl. vi, fig. 39 à 41). (2) Coniferen, p. #16. (3) Loc. cil., p. 420. DE L'OVULE. 229 qu'il en résulte des files d’un grand nombre de cellules réguliè- rement superposées. De cette manière il se forme souvent une coiffe assez puis- sante d’origine épidermique qui recouvre le nucelle depuis le sommet jusqu'à la base : Geum urbanum (pl. 10, fig. 25), ris Pseudoacorus, Agrostenuna (pl. 7, fig. 23), où la coiffe dépasse en volume le reste du nucelle; les divisions s’y succèdent en général dans l’ordre centrifuge. Je ne connais rien dans les anthères qui puisse se comparer à ce phénomène. Dans son nouvel ouvrage (1), M. Strasburger celte des divisions dans l’épiderme du nucelle, qui donnent naissance à des embryons (fait étonnant) dans des plantes polyembryonnées, comme le Cælebogyne (2). (1) Ueber Befruchtung und Zelltheilung. (2) J'ai observé dans quelques plantes des divisions tangentielles de l'épi- derme interne de la paroi ovarienne ; je saisis cette occasion pour les indiquer, car les divisions tangentielles de l’épiderme sont encore peu connues. Dans le Skimmia, j'ai trouvé jusqu'à trois assises produites par des divisions tangen- tielles et radiales de l’épiderme qui s'étendent jusque sur le raphé. Dans le Cor- rea, il en existe également, et M. Famintzine, Beitrag zur Keïmblattlehre im Pflanzenreiche (Mém. de l'Acad. impér. de Saint-Pétersbourg, t. XXIT, 1875), les cite comme fréquentes dans un grand nombre de Légumineuses, où elles donneraient naissance à ia couche dure. M. Pftzer (Pringsh. Jahrb., VIT) à réuni les cas connus d’épiderme divisé ; je peux y ajouter l’épiderme de plu- sieurs Acanthacées, de la face supérieure de la feuille de l'Empetrum nigrum, du Vochysia oppugnata,-d'un Vellozia (voy. Warming, dans Botaniska Notiser, publiées par Nordstedt, Lund, 1876, p. 191, 192). M. Famintzine dit (loc. cit.) que plusieurs tissus que M. Pfitzer a comptés parmi les vrais hypodermes dépendent de l’épiderme. J'ai, du reste, fait com- prendre combien il est difficile de distinguer les divisions épidermiques n'ayant pour but qu'une espèce de multiplication de ce tissu, d'autres divisions qui sont le point de départ d’un nouvel organe. Les cellules épidermiques de la face interne de la paroi ovarienne sont sou- vent rangées en groupes qui ne renferment que des cellules parallèles entre elles. Évidemment toutes les cellules d’un même groupe descendent d’une seule et même cellule épidermique, par exemple dans le Ribes (pl. T, fig. 12), POdon- tiles rubra, etc. D'autres fois, comme par exemple dans l’Adoæu, des cellules analogues sont plus nettement distribuées en files longitudinales. Dans le Gesneria, j'ai remarqué des divisions épidermiques à la face interne du funicule. 930 E. WARMING:. CHAPITRE IE LES TÉGUMENTS. I. Histogenèse el structure des téquments. — Les travaux de MM. Schmitz, Barcianu, Strasburger, Drude (1), Reuther, Kny (2) et les miens ont déjà posé quelques jalons de lhis- toire des téguments. On sait que dans quelques cas ils procè- dent uniquement de l’épiderme; dans d’autres, en même temps de l’épiderme et des tissus sous-jacents; dans une troisième série enfin, principalement ou exclusivement des tissus sous- jacents. Que le tégument soit externe, qu’il soit interne ou unique, sa provenance est essentiellement la même. Le tégument interne, là où 1l y en a deux, naît principalement du dermatogène seul ; celte règle s'applique aussi au tégument unique de l’ovule mo- nochlamydé. Quant à la primine des ovules dichlamydés, c’est le dermatogène avec participation du tissu sous-épidermique qui lui donne naissance. Voici de quelle manière l’épiderme produit un tégument : Certaines cellules du dermatogène, rangées suivant une zone annulaire sur le mamelon ovulaire, commencent par s’allonger dans le sens radial (Viola, pl. 10, fig. 15 et 17). Comme les cellules épidermiques sont disposées en files longitudinales sur le mamelon ovulaire (fig. 17), ce mème arrangement doit se retrouver dans la structure du tégument; lorsque les cellules épidermiques s’allongent sur une zone plus large, le tégument sera plus épais et comptera, dès le début, plusieurs assises de cellules: on trouvera, sur la coupe longitudinale, de chaque côté, plusieurs cellules alignées en files. Dans la suite cette structure persiste, et l’on trouve le tégument composé d’autant de parties longitudinales juxtaposées qu'il y avait au commence- ment de files de cellules initiales ; cependant les bipartitions de ces assises peuvent se présenter comme on le voit dans le Viola (pl. 10, fig. 18, surface d’un tégument) ; plus tard la structure (1) Kny, Wandtafeln. DE L'OVULE. 231 du tégument devient plus irrégulière. Quand on fait une coupe transversale du tégument (pl. 45, fig. 4), on retrouve encore les cellules ou des ensembles de cellules disposées en files radiales; il n’est pourtant pas rare de rencontrer une structure irrégu- lière (pl. 8, fig. 14). Sur la coupe longitudinale du jeune ovule de Viola (pl. 10, fig. 15), on voit de chaque côté plusieurs cellules épidermiques qui se sont allongées; j'ignore si toutes ces cellules provien- nent d’une seule divisée longitudinalement, jai cependant trouvé des exemples de cette nature (Begomu, pl. 9, fig. 8, la cellule en , et pl. 8, fig. 5 «, où la cellule plus grande à gauche, en ?s, donnera naissance au tégument) (1); les divisions longi- tudinales se produisent aussitôt. Ainsi lorsqu'une zone de cellules épidermiques s’est allongée radialement, il s’y opère d’autres divisions cellulaires: tantôt ondécouvre des parois tangentielles, tantôt des parois obliques; après celles-là, d’autres tangentielles, radiales ou obliques, sans qu’il soit possible de fixer une règle (2). Mes planches fournissent un grand nombre d'exemples de ces divers cloisonnements. Ghez le Viola, par exemple (pl. 40, fig. 15), 1l s’est formé dans le tégument, à droite, d’abord une cloison tangentielle, ensuite la cellule fille externe s’est divisée par une cloison radiale ; à gauche, on remarque dans une cel- lule une cloison oblique, dans une autre une cloison tangen- tielle ; dans la figure 16, on ne voit que des cloisons tangen- tielles et une oblique. Le lecteur comprendra facilement sans explication une foule d’autres figures (pl. 7, fig. 9,40, 46, 17; pl:8; fig. 6, 14,15 ; pl. 9, fig. 11, 19, 14; pl. 19; fig. 5, 6, 7, 16, 22, 97, etc.). Les téguments internes des dichlamydés, procédant unique- ment de l’épiderme, ne consistent généralement qu’en deux assises de cellules (Passiflora, pl. 7, fig. 48; Convallaria, pl. 47, (1) M. Strasburger dit des Orchidées que les téguments vus sur la coupe lon- gitudinale commencent par une seule celluie de dermatogène. (2) Les divisions radiales-perpendiculaires sont rares et ne se présentent que lorsque le tégument doit s’accroître fortement en épaisseur. 252 E. VWVARUWENG. fig. 44,49; pl. 8, fig. 7,9; Begonia, pl. 9, fig: 10). Quand on observe le bord de ces téguments sur une coupe longitudinale, on trouve souvent une cellule située si exactement au milieu de Parète, qu’elle ressemble tout à fait à une cellule apicale bifaciale se divisant par des cloisons imclinées alternativement en dedans et en dehors (pl. 7, fig. 18 à gauche; pl. 8, fig. 7, à gauchés pl 9 fs 40:pl410: 855 6 %;2ple Tes u): Malgré cette apparence, il ne peut être question d’un tel mode d’accroissement. On trouve des ovules où le tégument se com- porte différemment à droite et à gauche de la même coupe: dans la fig. 7, pl. 8 (Peperomia), le côté gauche offre une cel- lule margimale très-nette, Le côté droit une autre moins nette; il en est de même dans la figure 10, planche 9. Dans d’autres ovules, les deux subdivisions longitudinales du tégument diffè- rent entre elles : par exemple, planche 40, fig. 5et6 (Papaver). Dans la figure 6, on ne voit absolument pas de cellule margi- nale sur le tégument interne ; sur le tégument externe, comme dans la figure 5 # et plus encore dans la figure 7, il parait ven avoir une, Les deux figures 15 «& et b sont également prises sur le même tégument. Les deux assises du tégument se compor- tent, comme je lai décrit en détail dans « Die Blüthe der Com- positen », de la même façon que les files de cellules indépen- dantes dont se composent les corpuseules de laigrette; tantôt elles restent de force égale, tantôt lune devient plus forte que l’autre et sa cellule terminale passe par-dessus sa voisine ou ses voisines et occupe une position plus ou moins terminale. L’accroissement se fait comme celui de Paigrette des Com- posées, surtoutau sommet; il estiei marginal, par division suc- cessive des cellules terminales appartenant à des files verticales indépendantes : c’est pour cette raison que les parois transver- sales de deux files collatérales alternent avec une régularité remarquable (voy. fig. 18, pl. 7, Passiflora, le tégument in- terne, ou fig. 1, pl. 7). Une autre preuve de l'absence totale d'une véritable cellule marginale monarchique, comme elle existe dans les Crypto- games, nous est fournie par le tégument assez puissant, d’ori- DE L'OVULE. 233 gine épidermique, qu’on rencontre par exemple dans un grand nombre d’ovules monochlamydés. Dans la fig. 19, pl. 7 (Sym- plylum), on reconnait nettement de chaque côté que le tégu- ment se compose d’un grand nombre de files de cellules indé- pendantes; dans la figure 20, qui représente le même ovule à un âge plus avancé, on distingue encore ces files malgré la multitude de divisions en éventail qui se sont opérées. La même observation s'applique à la figure 15, pl. 7 (Syringa), et fig. 9 (Primula), ete. (4). Dans les téguments de provenance sous-épidermique, lépi- derme prend part à l’accroissement de la manière que je viens de décrire. Quant aux divisions sous-épidermiques, elles sont presque toujours tangentielles ou obliques, plus rarement radiales ; 1l s’en est produit évidemment dans le Ficus (pl. 9, fig. 6) et sous le tégument externe de l’Aristolochia (pl. 8, fig. 15, 16). Ordinairement la courbure de lovule anatrope entraîne la division de quelques cellules sous-épidermiques, même au- dessous du tégument interne purement épidermique. Ces divi- sions n’appartiennent pas au tégument même, car la limite inférieure de l’épiderme se poursuit sans altération sous le tégu- ment : pl. 9, fig. 8 (Begonia); pl. 13, fig. 4 et 2 (Verbascum) ; pl. 12, fig. 5, 6, 7 (Senecio) ; pl. 10, fig. 14 et 15 (Viola), etc. La courbure est due à un accroissement et un cloisonnement plus fort dans les régions dorsales que dans la partie ventrale de l’ovule ; quelquefois (Begonia, pl. 9, fig. 8, 9; Centradenia, fig. 14) les cellules épidermiques sont plus grandes sur le dos que sur la partie ventrale. Il est difficile de tracer une limite nette entre les divisions qui sont la cause de l’inflexion du funi- cule et celles qui appartiennent au tégument d’origine sous- épidermique. Il peut arriver aussi, dans le tégument purement épider- mique, que les divisions radiales et tangentielles engendrent (1) Qu'il me soit permis d'exprimer, à cette occasion, un doute sur l’acerots- sement de la gaine d'Equisetum par une cellule marginale bifaciale-cunéiforme. 923% E. WARMING. au milieu un ensemble de cellules qui prend l'apparence d’un tissu originairement sous-épidermique. Les téguments purement épidermiques sont rares; on les trouve dans les Orchis, le Monotropa (d'après M. Strasburger), Begonia, Peperomia (pl. 8, fig. 7, 8), Centradenia floribunda, Primulachinensis, Lysimachia verticillata(Strasburger) ete.(1). Parmi les téguments composés en grande partie par l’épiderme, on doit compter ceux des ovules monochlamydés, malgré leur épaisseur (Symphytum, Lamiun: album, Senecio, Verbascum, Odontites, Syringa, Lonicera, Menyanthes, Jasione, Lobelia, Eccremocarpus, Gesneria, Primula, tous plus ou moins com- plétement étudiés), et les téguments internes des ovules dichlamydés. J'ai examiné : Drosera, Helianthemum, Malva, Reseda, Epilobium, Guphea, Oxalis, Papaver, Brassica, Auri- mia, Gunnera, Rheum, Sedum, Sparmannia, Steriphom«, Thomasia, Viola, Aristolochia, Æsculus, Blitum, Agrostemma, Convallaria, Iris, Alisma, ete. Les téguments, en plus grande partie de provenance sous- épidermique, se trouvent dans Le Juglans (pl. 7, fig. 14% où la structure interne est esquissée), le Gunnera, Aucuba, Del- phinium Staphisagria. Le tégument externe du Tropæolum est dans le même cas au début; plus tard il s’y joint un grand nombre de divisions épidermiques (pl. 10, fig. 8 et 9). Je ne puis m'arrêter aux transformations que subissent les téguments après la fécondation, quant à leur puissance et à la nature de leurs cellules; je veux seulement mentionner une modification qui se présente souvent, surtout dans le tégument interne des ovules dichlamydés, avant la fécondation, et qui consiste dans l’épaississement du bord de ce tégument par des divisions tangentielles qui ont pour résultat le rétrécissement du micropyle (exemple, Peperomia, pl, fig. 9; Senecio, pl.12, fig. 10); Arum, Geranium, Helianthemum, etc.). Le nombre primitif des assises peut également augmenter beaucoup avant la fécondation, par exemple dans POxalis cer- (1) Je ne connais pas de tégument composé d’une seule assise de cellules, comme Hofmeister l'avait indiqué autrefois pour l’Orchis. DE L'OVULE. 239 nua, Viola tricolor, etc. Dans le Brassica campestris, le tégu- ment interne devient très-épais par la division de l’assise interne primitive. Dans les ovules monochlamydés, les cellules de lassise interne du tégument tournées vers le nucelle s’allongent ra- dialement et se cloisonnent par des parois horizontales ; il se constitue de cette manière une espèce de « couche de revête- ment» en contactimmédiat avec le nucelle, ou, aprèsson dépla- cement par le sac embryonnaire, avec ce dernier. Cette couche de revêtement n’est naturellement pas comparable à celle des sporanges et des anthères. Elle est figurée, planche 19, figure 10, en coupe longitudinale (Senecio), au commencement de sa différenciation, et figure 11 et 12, plus développée et im- médiatement contiguë aux cellules mères du sac embryon- naire; la figure 43, planche 192, la représente vue de devant et à l’intérieur. J'ai constaté la présence de cette couche dans les plantes suivantes : Gamopétales : Senecio, Lamiuwm, Leucopogon, Jasione (pl. 12, fig.15), Eccremocarpus, Limnanthemum, Lobelia, Loni- cera, Verbascum, Gesnériacées, Lysimachia, Primula, Lyonia. M. Strasburger la figure dans le Scabiosa (1), Hofmeister la représente aussi (2). — Dialypétales : Cajophora, Escallonia, d’après Hofmeister dans Bartonia (3). Je la considère comme un caractère exclusif des mono- chlamydés, car elle fait toujours défaut aux dichlamydés. Avant la fécondation on ne trouve généralement dans l’ovule que le seul faisceau qui traverse le funicule (4). Dans le Lim- nanthemum j'ai vu ce faisceau se continuer dans le tégument qu'il parcourait presque jusqu’à son extrémité (p.19, fig. 19). Dans l’Acicarpha spathulata 1 se divise en deux. Dans le Sun- (1) Befruchtung und Zelliheilung, pl. 1x, fig. 3 à 5. (2) Entstelhung des Embryo, 1849, pl. v, fig. 10. (3) Loc. cil., pl. 11, fig. 36. (4) Je laisse en dehors de ces considérations les Cycadées, Conifères et Gné- tacées. Consultez, pour ces plantes, M. Strasburger, M. Van Tieghem et mes propres recherches, 236 EH. SV AZRRBENE. seviera zeylamea on louve des ovules apotropes anatropes, un dans chaque loge; le raphé renferme deux faisceaux. Pour les ranufications des faisceaux dans la graine, voyez les recherches de MM. Van Tieghem et Le Monnier (1), et de Hof- meister (2). H. Existe-t-il des ovules dont le nucelle n'est pas recouvert dun téqument? — À différentes époques on a décrit comme privés de téguments un certain nombre d’ovules, comme ceux d’Hippuris, de Myriophyllum, de Coffea (Schacht), de Dipsacus et d’Asclepias (Saint-Hilaire), de Callitriche (Hegelmayer), des Rubiacées, Dipsacées, Cuscutées, Asclépiadées (Schleiden), des Acanthacées (Planchon), de quelques Amarvyllidées (Pril- lieux, Cramer, Braun, etc.), et avant tout ceux des Santalacées, des Loranthacées, des Balanophorées et des plantes voisines. Les familles citées en premier lieu appartiennent toutes au type monochlamydé, et lon comprend facilement qu'un très-fin ca- nal micropylaire conduisant au sac embryonnaire, avant dé- placélenucelle, aitéchappé à l'attention des observateurs. Quant aux Santalacées et aux Balanophorées, ce sont les seules plantes qui manquent peut-être de téguments; cependant je m'attends à ce que des recherches minutieuses finissent par en découvrir un rudimentaire. J'ai étudié à ce point de vue Îe Thesium ebracteatum (PLAT, fig. ? à 6). Après la formation de la columelle (voy. p. 193), il se développe à son sommet trois ovules opposés aux carpelles: d’abord la columelle produit aux trois côtés un petit mamelon dont plusieurs ceilules ne tardent pas à s’allonger fortement dans le sens longitudinal (fig. 3); ces cellules indiquent la ligne médiane du futur ovule ; au-dessus de celles du milieu, l'épiderme se distingue par son contenu granuleux, et l’une des cellules allongées sous-épidermiques devient la cellule mère du sac embryon- naire. De très-bonne heure les cellules épidermiques eirconvoisines (1) Ann. des se. nat., 5° sér., 1872, t. XVI. (2) Pringsh. Tahrb., 1, p. 98. DE L’OVULE. 237 des cellules à contenu granuleux se divisent tangentiellement (fig. 3, 4),etil se développe ainsi une assez forte couche de cellules de provenance épidermique (fig. 5) qu’on doit consi- dérer comme un tégument. On pourrait prendre ces divisions pour une formation de coiffe épidermique que nous avons étudiée ailleurs, parce qu’elles prennent leur origine non pas au-dessous des cellules mères du sac embryonnaire, mais sur le nucelle lui-même ; cependant ilne faut pas oublier que la coiffe commence généralement à se former précisément au sommet du nucelle, où elle présente sa plus forte épaisseur, tandis que dans le cas présent, qui serait absolument isolé, le centre reste exempt de divisions épidermiques. Je préfère considérer ce nouveau {issu comme un tégument rudimentaire, et alors il faudra bien admettre que le sporange fortement réduit est (comme dans les Gymnospermes) enfoncé dans le tissu de la foliole ovulaire, en supposant toutefois que ce tégument soit l’homologue de celui des Angiospermes. Du reste J'ai dû me borner à une étude imparfaite de l’ovule de Thesium, et je dési- rerais vivement qu'elle fùt reprise. Même si l’on parvenait à démontrer que cet ovule ouun autre est dépourvu de tégument, je n’y verrais aucune raison pour abandonner ma théorie du mamelon ovulaire et du nucelle ; le nucelle resterait simplement sans tégument comme les sores d’un Polypodium ou d'un Osmunda sans mdusium. IL. Où et quand se développent les téquments ? Formation de lobes. — Il n’est pas douteux que les téguments se développent sur le mamelon ovulaire quand on excepte les cas, comme le Thesium et les Conifères où le nucelle semble leur don- ner naissance lui-même (1). Les antholyses qu’on a obser- vées jusqu’à présent font sortir les téguments du funicule. (1) D’après M. Strasburger (Coniferen, p. 71), l'enveloppe interne dans l’Ephe- ‘ra est mince, privée de faisceaux, et se trouve fixée sur le nucelle. Je reconnais dans cette dernière circonstance un signe de l’homologie de cette enveloppe avec le tégument des Conifères et des Cycadées; elle n’est pas, comme le veut M. Strasburger, une enveloppe supplémentaire, tandis que l’externe serait le vrai tégument. J’interprète de la même manière le tégument de Welwilschia, qui est de plus bilohé. 235 E. WARMING. Cependant je dois faire observer qu’il est des cas où la base du tissu sous-épidermique qui donne naissance au nucelle est située un peu plus bas que la ligne d'insertion des téguments et qu'on trouvera sans doute des passages insensibles aux cas extrèmes, comme le Thesium et les Gymnospermes. Il faut maintenant se demander lequel se forme d’abord, le tégument ou le nucelle. Cela varie d’une plante à lautre, peut-être d’un individu à l’autre appartenant à la même espèce. Quand les cellules sous-épidermiques s’allongent pour former le nucelle, avant qu’on puisse découvrir aucune trace des téguments, je crois pouvoir dire que le nucelle est antérieur aux téguments : par exemple le Ribes (pl. 7, fig. 8), l'Helianthe- mu (pl. 10, fig. 10 et 12, quoiqu’elles représentent un état plus avancé), Symphytum, Aurinia saxatilis, Brassica campestris, Convallaria, Lris, Senecio, Lobelia, Verbascum, Viola, Pou- zolzia, Malva, Reseda, etc. Ces deux parties commencent à s’ébaucher en même temps dans le Seduin, Jasione, Epilobiun, Gesneria, Helleborus, Gun- nera, Delphinium Staphisagria, Ficaria, Prünula, ete. I peut arriver aussi que le tégument est visible avant que le nucelle ait commencé à se former, par exemple Cuphea (pl. 9, fig. 11), mais dans tous les cas la différence est très-faible. J'ai souvent remarqué que les conditions qui entourent l’ovule dans l'ovaire exercent sur son développement une in- fluence manifeste. C’est ce qui arrive quand Fovule rencontre la paroi ovarienne, comme le montrent les figures 26 à 28,pl.12 (Rihododendron). Les trois ovules, de même âge, sont de forme variée: dans la figure 28, le nucelle est formé, mais particu- lièrement allongé et recourbé, parce qu'il touche àla paroi ova- rienne cp; pour cette même raison, les cellules épidermiques dorsalesse sont aplaties et lon ne trouve pas encore de tégument, tandis qu'il existe déja dans l’ovule de même âge représenté fig. 27. Dans d’autres ovules, le nucelle, arrêté par la paroi ova- rienne, s’est recourbé en $. La plupart des téguments naissent unilatéraux ; prenant leur origine sur la face dorsale de l’ovule, ils s'étendent de proche DE L'OVULE. 939 en proche et embrassent le funicule en forme de fer à cheval : tantôt l’anneau se ferme ; tantôt au contraire, dans l’ovule ana- trope, le tégument, imparfaitement annulaire, est complété par le funicule. Dans quelques cas, surtout dans l’ovule hémi- anatrope, on observe une combinaison des deux dispositions. Le tégument des ovules monochlamydés et l’externe des dichla- mydés est, presque sans exception, unilatéral dans l’origine, quand l’ovule est anatrope ; ordinairement 1ls persistent dans cet état, ouverts du côté du funicule (1). Quant au tégument interne des ovules anatropes, parfaitement annulaire, il n’est pas rare qu'il ait une origine unilatérale, mais souvent aussi il est annulaire dès le début. Il est originairement unilatéral, par exemple, dans l'Œnothera biennis (2), Primula chinensis }Lysi- machia verticillata (3), Orchis (4), Ribes (encore visible pl. 7, fig. 9), Begonia (pl. 9, fig. 8), Cuphea (pl. 9, fig. 11, 12), Pepe- roma (pl. 8, fig. 5 a), Aristolochia (pl. 8, fig. 11), Viola (pl. 10, fig. 14), Mahernia (pl. 10, fig. 20, 21), Blitum (pl. 14, fig. 10, 11), Agrostemma Githago, Aurinia saxatilis, Centradenia, Drosera, Ficus Garica, Epilobiun, Oxalis, Sedumn, Lris, ete. . La raison pour laquelle le tégument commence si souvent à se développer sur le dos de lovule me parait être de nature pu- rement mécanique ; il ya là plus de place pour un nouvel organe que de l’autre côté. Les ovules de Viola (pl. 10, fig. 14 et 15) semblent l'indiquer; faute d'espace, l’ovule fig. 44 s’est plus fortement courbé que l’ovule de même àge fig. 15. Dans la figure 1#, le tégument interne n'existe pas encore à la face ven- trale; de plus, dans la figure 44, la distance qui sépare les deux téguments est bien plus considérable que dans la figure 15. Les bords des téguments s’accroissent uniformément; ce n'est que très-rarement qu'on y observe une division en lobes (5). Parmi les Angiospermes , citons le Symplocarpus (1) Voy. Pringsheim, Bot. Zeit., 1851, p. 115. (2) Kny, Wandtafeln, I, p. 54, pl xIx: (3) Strasburger, Conif., p. 420. (4) Hofmeister, Sachs et moi. (5) Les trois, quatre ou plusieurs lobes qui entourent le micropyle des Cycä- dées (Warming, Cycadeen, résumé, p. 2, pl. un, fig. 29, et pl. iv, fig. 5-7) 240 LH. VYARMENG. fœtida, où le bord du tégument interne est divisé en quatre lobes triangulaires connivents (1); le Lagarosiphon Schwein- furthii, qui possède €un exostome divisé en # ou 5 dents iné- » gales, tantôt aiguës triangulaires, tantôt obtuses. Cette dispo- » sition m'a rappelé vivement le bord du tégument unique dans » cerlames Conifères, aussi irrégulier, lobé, denté, apparence » qui à contribué à faire croire à quelques botanistes modernes » que le tégument unique des Conifères est un ovaire composé » de plusieurs carpelles (2) ». D’après M. Caspary, les téguments du Berteroa incana, Thlaspi, etc., seraient quelquefois lobés. Jai observé le même fait dans le Choësya ternata, Helianthemum (ovules orthotropes, pl. 10, fig. 15), Polyqala comosa (2 grands lobes latéraux, comme Payer les décrit dans le Polygala speciosa et Treman- dra) (3), Cuphea platycentra, où le tégument interne est pro- longé en plusieurs processus obtus ; certainement, partout ces lobes sont le produit d’un accroissement secondaire. en at trouvé de très-grands dans le Juglans regia (pl. 15, fig. 11 à 43). Je n'ai pas eu, jusqu'à présent, l’occasion d'étudier exactement le développement de lovule de cette plante, et je ne puis dé- cider si les lobes du tégument volumineux issu presque entière- ment du tissu sous-épidermique ne procèdent pas de points primordiaux isolés; ils sont généralement au nombre de 2 ou de #, dont les deux plus grands correspondent aux arêtes de l’ovule un peu comprimé. IV. Ordre de formation des téquments. — On admet comme un fait acquis que les téguments, quand ils sont au nombre de deux, se succèdent dans l’ordre basipète. Les fleurs femelles de l’inflorescence femelle du Gnetum font exception ; leurs tégu- peuvent être comparés à ceux des Angiospermes et à ceux que l’on rencontre ailleurs parmi les Gymnospermes. Voyez, à ce sujet, Caspary, De Abietinarum floris feminei structura; Strasburger, Coniferen. Le tégument unique du Welhvitschia qui, d'après cet auteur, ne serait pas l’homologue de celui des Conifères, présente également deux lobes. (1) Hofmeister, Embryobildung, & A, p. 661, pl. van, fig. 6. (2) Caspary, Bot. Zeit., 1870, p. 89. (3) Organogénie, pl. 31 et 29. DE L'OVULE. 241 ments se succèdent de bas en haut (1). Les deux téguments sont presque de même âge, ou « l’interne se montre très-peu avant l’autre », dans lPAconitum, d’après M. Strasburger (2), et peut-être dans les Primulacées (3), où « externe semble pré- céder l’interne ». Le tégument externe est tout au moins con- temporain de l’autre, s’il ne le devance pas un peu, dans le Benincasa, d'après M. Reuther (4); j'ai reconnu moi-même une succession franchement acropète dans l'£uphorbia (5). Depuis, jai examiné un grand nombre d’ovules, la règle s’est partout confirmée ; je n'ai trouvé que les exceptions suivantes : Cuphea: la comparaison des figures 41 et 12, pl. 9, permet de conclure que le tégument externe peut se montrer avant l’in- terne. Mahernma glabrata (pl. 10, fig. 19 à 21) ; lexterne se montre, au moins quelquefois, avant linterne. Helianthemum (pl. 10, fig. 12) : l’ordre d'apparition est moins net, mais les dimensions du tégument externe sur le très-Jeune ovule sem- blent l'indiquer chez le Reseda luteola; quelquefois lexterne précède très-nettement linterne. J’ignore si ce fait est con- stant. Il en est de même pour le Centradenia floribunda (pl. 9, fig. 14), et peut-être pour le Pisum sativum. IL n’y a done à la règle ordimaire qu’un très-petit nombre d’exceptions, et alors même que le tégument externe apparait d’abord, il ne précède l’autre que d’un temps très-court. Très-rarement on trouve le nucelle recouvert de trois tégu- ments; on ne sait même pas si l’un d’eux ne doit pas être con- sidéré comme un arille. La troisième enveloppe d’Asphodelus luteus et creticus me semble se rapprocher le plus d’un vrai tégument; cependant je crois devoir le considérer comme un arille. Ce cas a été décrit par Brongmiart et Hofmeister. En 1849, ce dernier écrivit (6) : «Ge serait pour moi le seul exemple (1) Strasburger Coniferen, p. 112. (2) Loc. cit., p. 417. 3) Loc. cit., p. 420. (4) Bot. Zeit.; 1876, col. 417. (5) Ramification, 1872, p. XXXV, pl. x, fig. 17, LS, 19. (6) Entstelhung des Embryo. 6° série, BorT. T. V (Cahier n° 4). 16 242 E. WARMING. connu de trois téguments .» En 1864 (1), il est tenté de con- sidérer le troisième tégument comme un arille. Peut-on réelle- ment tracer une limite morphologique nette entre un arille et un tégument (2)? D’après Braun (3), 1l pourrait exister anor- malement une production indéfinie de téguments se succédant dans un ordre acropète. M. Schimper dit avoir vu un troisième tégument dans le Nigella et le Reseda lutea. En général, le tégument externe s’insère immédiatement au- dessous de l’interne: par exemple pl. 8, fig. 45,16 ; pl. 40, fig. 5 à 7, etc. Plus rarement ils sontséparés, dès l’origine, par une bande de cellules immuables entre les deux zones initiales : par exemple Cuphea (pl. 9, fig. 12), Passiflora (pl. 7, fig. 17). Ces différences ne sont pas essentielles, car les ovules peuvent se comporter différemment à cet égard dans des plantes appar- tenant à la même espèce, comme je lai montré plus haut pour le Viola (pl. 10, fig. 14, 15). Inversement, les deux téguments peuvent être tellement rapprochés, qu'ils s'accroissent simultanément comme un seul organe, ainsi qu'on le voit déjà dans le Viola (pl. 40, fig. 15), mais plus nettement dans d’autres ovules, tels que ceux du Focus (pl. 9, fig. 6), Convalluria, Orchis (4), dont se rapproche en plusieurs pots le Begonia (pl. 9, fig. 8, 9). Cette disposition est surtout visible dansle Tropæolum (pl. 10, fig. 8, 9) ; le tégument interne, assez épais, d’origine principalement épidermique, et lexterne, issu surtout du tissu sous-épidermique, s'élèvent en même temps, et plus tard on ne croit voir qu'un seul tégument profondément fendu sur son bord (fig. 9). M. Strasburger a œ e O étudié le développement du tégument dans le Delphinium (5) : (1) Beiträge zur Embryobildung, Monocotyl., p. 662. (2) Les arilles paraissent presque toujours destinés à attirer l'attention des oiseaux sur les graines ; c’est pour cela qu'ils sont charnus et colorés comme les fruits succulents. Les graines arillées restent ordinairement longtemps enfer- mées dans la capsule déjà ouverte ; quelquelois celle-ci est elle-mème colorée, comme dans Evonymus et Myrislica. (3) Polyembryonie, p. 192. (4) Voy. Sachs Lehrb. (5) Conifer., p. 415 et suiv. DE L'OVULE. 243 il est d’origine sous-épidermique et s'élève d’abord comme une unité ; plus tard on trouve une fente au sommet, et finalement on reconnait les bords de deux téguments ; dans sa partie dor- sale le tégument est épais de 7 ou8 assises de cellules. L’Aco- nitum Napellus possède réellement deux téguments, l’un de 4 ou 9 assises, l’autre de 2 ou 3, en tout de 6 à 8, comme celui du Delphinium. M. Strasburger conclut de ces faits que le tégument du Delphinium se compose de deux téguments réunis, et il se demande si cette fusion de deux téguments ne pourrait pas se présenter chez d’autres Dicotylées à tégument en apparence unique. Le tégument simple du Delphinium peut être expliqué ainsi, et cette mème explication peut être appliquée peut-être à d’au- tres cas où un tégument unique apparaît dans une famille à ovule dichlamydé ; mais ce serait une grande erreur que d’ériger cette idée en principe. Le Peperomia, par exemple (pl. 8, fig. 7, 9), n’a qu’un tégument composé de deux assises de cel- lules, qui ressemble tellement à un tégument interne, qu’on ne saurait douter de l'absence pure et simple du deuxième tégu- ment qu’on trouve dans le Piper dichlamydé. Dans le Tropæolum, au contraire, l'explication par la fusion de deux téguments a plus de vraisemblance. Pour le tégument unique des ovules monochlamydés, il ne peut être probablement question d’une fusion, car 1l procède en plus grande partie de l’épiderme, tandis que le tégument externe est surtout d’origine sous-épidermique. Cependant les deux téguments de Primula (pl. 13, fig. 8,9) sont de nature épidermi-- que. On pourrait admettre que ce genre et les types voisins repré- sentent un degré antérieur plus ancien, tandis que les vraies Gamopétales sont plus récentes avec les deux téguments con- fondus. J’incline pourtant à considérer ce tégument comme l'homologue d’un tégument mterne, non-seulement pour la raison anatomique mentionnée ci-dessus, quoique son épaisseur le rapproche davantage du tégument externe, mais aussi parce que le tégument interne est le premier en date, par consé- quent le seul restant en cas d’avortement; de plus, c’est lui 244 E. WARNING. qui persiste le plus longtemps dans les cas de transformation tératologique. D'une manière générale, on doit admettre que le tégument véritablement unique apparent à un type primitif, car il se présente chez les Cryptogames (Pindusium) et les Phantro- games les plus simples (Cycadées, Conifères) ; dans certains cas, déjà cités, d’un tégument dédoublé au bord, on peut aussi bien croire à la fissure d’un seul primitif qu’à la fusion de deux téguments originaux. Il me semble impossible, en ce moment, de répondre d’une manière complète à toutes ces questions ; nous ne possédons pas jusqu'à présent une quantité suffisante d'observations comparatives. Je crois utile de rattacher à ces considérations un aperçu de la distribution des deux types ovulaires parmi les Angio- spermes. [est vrai que je n'ai pu examiner qu’un nombre d’es- pèces relativement très-restreint, mais ces espèces, je les ai choisies dans tous les groupes importants, et de cette manière il me sera possible de tracer au moins les grands linéaments de cette question. Ge que je n’ai pu voir de mes yeux, j'ai cherché à le compléter par la littérature ; mais dans les ouvrages systématiques les ovules sont, ou bien très-superficiellement décrits, ou même inexactement figurés. J'espère pouvoir publier un jour un aperçu plus exact, plus sûr et plus détaillé. Toutes les Dicotylées gamopétales (en admettant les limites fixées par M. Eichler, (1) ont des ovules appartenant au type monochlamydé, excepté les Primulacées, Myrsinées, Plomba- oinées et Gucurbitacées, qui ont deux téguments. Les Primu- lacées se rapprochent cependant du type monochlamydé par le développement de leur nucelle et par Passise de revêtement \ > indique leur âge respectif. Le nucelle ne se forme pas encore ; il commencera, comme ailleurs, par l’élongation radiale et la division des cellules apicales sous-épidermiques. Fig. 15. Coupe transversale à travers le tégument externe, composé, conime l’interne, de deux assises de cellules. PLANCHE 10. Fig. Là 4. — Rheum compactum Lin, Fig. 1. Le jeune ovaire vu d'en haut (37/1). Fig. 2. Coupe longitudinale du jeune mamelon ovulaire avec les parties avoi- sinantes du carpelle. Fig, 3. Sommet du mamelon ovulaire vu d'en haut. DE L'OVULE. 262 Fig. 4. Coupe longitudinale d'un maimelon ovulaire plus âgé, avec les carpelles. Fig. 5 à 7. Papaver Argemone Lin. — Coupe longitudinale des téguments ; les figures 3 et 6 sont obtenues sur la même préparation en variant la mise au point. Fig. 8 et 9. Tropæwolum Lobbianuin. — Coupes longitudinales de jeunes ovules. La limite de l’épiderme et des tissus qui en proviennent est indiquée par des lignes. Fig, 10 à 15. — Helianthemum lavandulæfolium Pers. Fig. 10. Coupe longitudinale d’un jeune ovule. Les téguments commencent à se former ; le nucelle est déjà plus développé. Fig. 11. Coupe longitudinale d’un ovule sur le placenta. L’arrangement interne des tissus est indiqué par des lignes. Fig. 12. Développement des téguments (coupe longitudinale). Fig. 14 à 18. — Viola tricolor Lin. Fig. 14 et 15. Deux ovules en coupe longitudinale, Dans chacun on voit trois files internes au-dessous de l’assise sous-épidermique. La courbure et la for- mation des téguments sont différemment avancées dans les deux ovules. Fig. 16. Développement des téguments. Fig. 17. Ovule vu de dehors. On reconnait le jeune tégument suivant une zone transversale. Fig. 18. Tégument externe vu de la face inférieure du funicule. Les cellules épidermiques de celui-ci sont rangées en files longitudinales qui se continuent dans le tégument en devenant plus larges et en se fendant longitudinalement. Fig. 19 à 21. Mahernia glabrala. — Jeunes ovules. Fig. 22 à 24. Ranunculus acris Lin. — Coupes longitudinales de jeunes ear- pelles avec leurs ovules. Fig. 25. Geum urbanum Lin. — (150/1). Coupe longitudinale d’un ovule, un peu schématique. Fie. 26. Sparmannia africana. — Deux cellules intérieures se distinguent par leur contenu protoplasmique ; on ne peut pas prévoir laquelle des deux de- viendra plus tard la cellule mère primordiale du sac embryonnaire. PLANCHE 11. Fig. 1 à 6. — Thesium ebracteatum Havne. Fis. 1. Coupe longitudinale de a jeune fleur : p, périanthe:; sl, étamine; © Oo 4 , Ï pl, placenta. Les cellules situées au-dessous de celui-ci se distinguent par leurs parois foncées ; elles ne sont pas disposées en rangées. Fig. 2. Placenta plus âgé; les ovales ont commencé à se développer. Coupe entière de la fleur. 9264 E. NVARMINS. Fig. 3. Placenta encore plus âgé. En ës, divisions tangentielles ayant pour but le développement du tégument; en nc, contenu granuleux dans les cellules épidermiques. Les cellules sous-épidermiques s’allongent et constituent le rudiment du nucelle. Fig. 4 et 5. Etats plus avancés. Fig. 6. Base d’un placenta plus âgé. Les files de cellules verticales s'arrêtent brusquement sur une ligne qui correspond à la limite inférieure de l'assise sous-épidermique. Fig. 7 à 12. — Blilum Bonus-Henricus Mey. Fig. 7. Ébauche d’une coupe longitudinale. La cavité qui sépare l’ovule du carpelle est plus grande à droite qu’à gauche (150/1). Fig. 8. Structure intime d’une partie de la figure précédente. Fig. 9. État plus avancé; l'ovule se recourbe déjà. Fig. 10. État encore plus avancé. L'arrangement des tissus dans l’ovule est ébauché ; le tégument interne commence à se développer. Fig. 11. Structure histologique d’un ovule correspondant à peu près à la figure précédente ; le tégument interne apparait tout autour. Fig. 12. Aspect général d’un état plus avancé, L'ovule est plus rapproché d’un côté que de l’autre. Fig .15. Lamium album Lin. — Aspect superficiel d’un ovule montrant lesdivi- sious qui se sont produites dans les cellules épidermiques primitives. Fig. 14 et 15. — Convallaria Polygonalum Lin. Fig. 14. Ovule dont le nucelle et le tégument interne sont déjà établis ; l’externe est en voie de formation. Fig. 15. Coupes longitudinales des parties marginales de deux téguments assez àgés. PLANCHE 12. Fig. 1 à 19. — Senecio vulgaris Lin. Fig. 1. Coupe longitudinale de la jeune fleur. Le calice, la corolle et les éta- mines existent déjà; les carpelles sont en voie de formation. Fig. 2 et 3. Jeunes mamelons ovulaires avant le développement du nucelle. ie. 4. Mamelon ovulaire dont le nucelle commence à se former : la cellule # est déjà visible. Fig. D, 6, 7. Ovule plus âgé. Les téguments ont pris naissance ; au-dessous du tégument on voit des divisions dans la couche sous-épidermique, en rapport avec la courbure de l’ovule, et qu'on peut à peine compter comme appartenant au tégument. Fig. 8. L'ovule est déjà tout à fait anatrope. DE L'OVULE. 265 Fig. 9. Coupe transversale du nucelle d'un ovule semblable à celui de la figure 8. Fig. 10. Ovule plus âgé. La cellule » de la figure 8 est cloisonnée ; le tégu- ment est devenu puissant, et les cellules de son assise interne, en contact avec le nucelie, commencent à s’allonger radialement et à se diviser. Fig. 11, 12. Base du nucelle avec l’assise de revêtement appartenant au tégument. Les cellules épidermiques du nucelle sont en partie refoulées par le sac eni- bryonnaire. Fig. 13. Aspect de face de l’assise de revêtement Fig. 14. Dahlia sp. — Coupe longitudinale de la fleur : st, étamine. Fig. 15. Limnanthemum sp. — Coupe longitudinale de l’ovule. Le sac embryon- naire a refoulé le tissu du nucelle et touche à l’assise de revêtement Le fais- ceau fibro-vasculaire s'étend jusqu’au micropyle. Fig. 16 à 18. -— Lobelia Dorlmanna Lin. Fig. 16. Coupe longitudinale d'un jeune ovule. Fig. 17. a, aspect du sommet du nucelle; b, c, d, coupes transversales. Fig. 18. Coupe longitudinale d’un ovule plus avancé, déjà tout à fait anatrope. Dans la grande cellule sous-épidermique du nucelle on voit une cloison courbée comme dans le Senecio (fig. 10). Fig. 19 à 25. Gesneria hybrida. (Tydœu sp.). — Coupes longitudinales d’ovules: — Mig. 24, coupe transversale du nucelle avec tégument d’un ovule de même âge que dans la figure 23. Dans la figure 23 la cellule m est indivise; elle o est divisée par deux cloisons courbées dans la figure 25 Fig. 26 à 28. Rhododendron hirsulum. — ‘Très-jeunes ovules en coupe longi- tudinale, tous à peu près au même degré de développement, mais difié- remment conformés. PLANCHE 15. Fig. 1 à 6. — Verbascum phæniceum Lin. Fig. 1. Mamelon ovulaire en coupe longitudinale. Le nucelle est indiqué par la cellule #. Une division tangentielle dans l’assise sous-épidermique, au-dessous du futur tégument, est, selon moi, en rapport avec la courbure de Povule. Fig, 2 et 3. Etats plus avancés. Mg. 4. Coupe transversale du nucelle avec tégument d’un ovule semblable à celui de la figure 8. Fig. 5. Nucelle dans lequel la cellule » de la figure 3 est divisée par des cloisons gonflables recourbées. Fig. 6, Nucelle plus âgé, dans lequel une cellule mère du sac embryonnaire refoule les autres; l’épiderme du nucelle a été en partie réservé ; l’assise de revêtement du tégument est en voie de développement. Fig. 7à 9. — Primula officinalis Jacq.. — Coupes longitudinales de jeunes 266 EH. VVARMWMENG. ovules : fig. 7, avant le développement des téguiuents et du nucelle; fig. K, après leur formation; à côté de la cellule #, les cellules y s'allongent égale- nent un peu, Fig. J. Le nucelle et les téguments sont déjà devenus très-grands. Fig. 10. Myrsine africana (150/1). —— Toutes les préparations, comme celle-ci, montrent qu'au point de vue histogénésique le placenta en partie est la continuation directe de laxe ; les files de cellules de la moelle s'y continuent directement. Fig, IT à 14, — Juglans regia Lin. Mig. 11 et 12. Deux ovules avec un tégument lohé. Fig. 13. Ovule vu d'en haut. iig. 14. Coupe longitudinale d’un ovule. L'arrangement des cellules est indiqué par des lignes. Fig. 15 à 17. Syringa vulgaris Lin. — Coupes longitudinales d’ovules à ditfé- rents àges. Fig, 18 à 20. — Symphytum orientale Lin. lig. 18. Coupe longitudinale d'un ovaire ; aspect général et ovule plus forte- ment gross; les cellules épidermiques, remplies de granules, en ne, indiquent le sommet du nucelle. Fig. 19 et 20. Coupes longitudinales de deux ovules plus âgés ; développement du tégument, | SUR'BES CAUSES DES FORMES ANORMALES DES PLANTES QUI CROISSENT DANS L'OBSCURITÉ Par N. VW, P. RAUWENHOFT (4). On sait depuis longtemps que les plantes placées dans l’obs- eurité, où mème dans un endroit mal éclairé, non-seulement se décolorent, mais montrent encore d’autres changements remar- quables. Les anciens traités de physiologie végétale, tels que ceux de De Candolle, de Meven. de Treviranus, énoncent que, dans ces circonstances, les tiges deviennent généralement plus longues et les feuilles restent plus petites que d'ordinaire. D'ailleurs, qui n’a pas remarqué plus d’une fois ce phénomène sur les pousses que développent au printemps les Pommes de terre conservées dans les caves? En examinant les choses de plus près, on reconnait toutefois que les plantes ne se comportent pas toutes de la même ma- nière, lorsqu'elles se trouvent dans Pobseurité, Il y en à dont les tiges ne s’allongent que peu ou point au delà de la mesure ordinaire; il y en à d’autres dont les feuilles, dans l'obscurité, ne restent guère en deçà des dimensions des feuilles nor RER formées à la lumière; bien plus, certaines feuilles s’allongent alors démesurément. On voit des fleurs et des fruits qui se parent des mêmes couleurs, également brillantes, à abri comme sous l'influence de Ja lumière; d’autres dont le calice ou la corolle prennentun développement musité en longueur, ou bien restent (1) Extrait des Archives Néerlandaises, t. XL. 268 P, RAUWENHOTF. petits comme les feuilles ordinaires. En un mot, aucune régu- larité ne semble plus présider à la végétation dans l’obscurité. Les plantes soustraites à l’action de la lumière présentent des phénomènes si anomaux, qu'on serait tenté de croire qu'elles n'obéissent plus aux lois générales de la croissance, mais qu’elles déterminent tout à fait arbitrairement, chacune à leur manière, la srandeur relative et absolue de leurs organes. Il n'entre pas dans mon plan de décrire en détail ces phéno- mènes. [ls sont bien connus, et je me contente de renvoyer Île lecteur au mémoire de M. Sachs (1). Les principaux faits de cet ordre y sont classés sous les titres suivants : «Développe- ment des feuilles ordinaires étiolées» (p. 11 du tirage à part) ; € Allongement des entre-nœuds étiolés » (p. 44) ; « Torsion » (p. 46); « Développement des fleurs » (p. 17). Sans insister sur ces faits, je crois devoir rappeler sommai- rement les essais d'explication qui en ont été donnés. Hales avait déja émis l’idée que, siles Haricots croissant dans l'obscurité s’allongent outre mesure, c’est qu'ils restent plus longtemps mous et succulents. De Gandolle fait dépendre le phénomène de l'assimilation. « Puisque les parties, dit-il » (Physiol. végét., UK, p.1076), qui combinent plus de carbone » deviennent plus dures, elles doivent tendre plus vite à ce degré » de solidité qui les empêche de s’allonger; par conséquent les » vécétaux fort exposés à la lumière, s'ils sont plus durs, sont » aussi proportionnellement plus courts et plus trapus; tandis » que ceux qui vivent à une moindre lumière, ou même à l’obs- » curité, sont nécessairement plus faibles, mais plus allongés. » M. Sachs, dans le travail ci-dessus cité, incline vers la même opinion. Îl remarque très-justement que ce sont surtout les organes contenant de la chlorophylle qui changent de forme dans l'obscurité, et il lui paraît assez naturel de supposer que la lumière produit cet effet par l'intermédiaire de la chloro- phylle elle-même; mais il ne saurait dire de quelle manière cela a lieu. En effet, on connait bien la fonction de la chlorophylle, (1) Ueber den Eïinfluss des Tageslichts auf Neubildung und Entfallung verschiedener Pflanzenorgane, publié dans la Bot. Zeitschr. 1863; Beilage. DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 269 qui est de produire de la fécule, et l’on sait que cette foncüon est liée à la présence d’une certaine quantité de lumière, de sorte qu'on serait conduit à regarder le phénomène comme la consé- quence d’un trouble de la nutrition (dû au manque de fécule et par conséquent de matériaux propres à la formation des parois cellulaires) ; mais cette explication ne conviendrait qu'aux organes éliolés qui restent petits. Elle ne rend pas compte de l'allongement excessif des tiges, et elle ne s'applique pas da- vantage au cas des plantes germées, chez lesquelles les coty- lédons eux-mêmes s’étiolent et se détruisent, bien qu'ils soient gorgés de fécule et d’autres substances nutritives. Une étude spéciale des causes de ce phénomène a été faute pour la première fois, en 1869, par M. Kraus, qui en a com- muniqué les résultats dans un mémoire intéressant (1). M. Kraus arrive à la conclusion que l’étiolement esten réalité, comme l'avait présumé M. Sachs, la conséquence d’un déran- sement dans la croissance des organes occasionné par le défaut de matériaux ou de force pour l’agrandissement des parois cel- lulaires; ce dérangement toutefois n'avait pu être remarqué jusqu'alors, parce qu’on ne connaissait, ni la nécessité de la nutrition des feuilles par des produits d’assimilation locale, ni le mode spécial de croissance des organes caulinaires qui se trouvent à un état de forte tension. La feuille, suivant M. Kraus, ne reçoit de la tige que la quantité de matériaux nutritifs nécessaire pour lPamener au jour, après quoi elle doit suffire elle-même à son entretien : aux dents et près des nervures, bientôt aussi en d’autres points, la fécule se forme par assimilation dans la chlorophylle, et par là devient possible l'accroissement ultérieur de la feuille. Dans l’obscurité, au contraire, les feuilles s'arrêtent, par suite de l'absence de matériaux, au degré de développement auquel elles étaient parvenues en sortant du bourgeon. Cette explication toutefois se trouve en défaut pour les co- tylédons de différentes plantes, lesquels cessent de croître dans (1) Pringsheim, Jahrbücher für wiss. Bot., t. VIE, p. 209-260. 270 P. RAUVWWENHONEF. l'obscurité, bien qu'ils soient encore tout remplis de fécule ou d'huile. Lei Faetion de la lumière parait être nécessaire pour transformer la fécule en cellulose. Quant à la nature de cette aclion, quant à savoir S'il s'agit d’une influence directe de a lumière, ou bien de l'intervention d’autres matières ou d’autres fonctions, également dépendantes de la lumière, nous sommes encore dans une ignorance absolue. En contraste avec ce faible développement des organes fo- lüures, se présente Le phénomène remarquable de Pallongement excessif de la tige dans l'obscurité. Pour apprendre à connaitre le ben qui unit ces deux phénomènes, on doit porter son atten- tion moins sur la grandeur de la tige que sur sa structure mté- rieure. On constate alors que la tige, quant à son évolution anatomique, s'est arrêtée, tout comme les feuilles, à un degré inférieur, Tant par rapport au nombre et au développement des faisceaux fibro-vasculaires qu’en ée qui concerne le nombre et l'épaisseur des éléments de la moelle et de Pécorce, la tige éliolée et allongée offre l’image d’une jeune tige normale, qui n'aurait pas dépassé les premières phases de son développe- ment. Mais à quoi faut-1l attribuer la longueur anormale de la tige étiolée? Pour le démèler, M. Kraus à d’abord recherché st l'allonge- ment est la conséquence d’un accroissement de longueur des cellules constituantes, où bien d’une augmentation du nombre de ces cellules. Des mesures multipliées (moyen déjà essayé antérieurement par M. Sachs, mais sans succès) ont appris à M. Kraus que les cellules des entre-nœuds étuiolés sont bien loujours, en moyenne, beaucoup plus grandes et notamment plus longues que celles des plantes vertes de la même espèce, mais que l'allongement ne saurait pourtant être rapporté exclue sivement à cette cause. En partie, bien qu'en petite partie, 1l est dù aussi à la multiplication extraordinaire des cellules. L'allongement anormal des cellules (laccroissement insolite de leur nombre étant négligé) pourrait, suivant M. Kraus, S'opérer de la manière suivante : SES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 271 Dans les jeunes entre-nœuds de la tige à peme sortie du bourgcon, les divers tissus ont par eux-mêmes une longueur inégale : les périphériques (écorce et bois) sont plus courts, les centraux (moelle) plus longs; s'ils paraissent, unis Les uns aux autres, avoir la même longueur, c’est que les tissus les plus longs étirent les plus courts, Jusqu'à ce qu'ils aient à peu près les mêmes dimensions. Dans le cours de l'allongement de lentre-nœud, cette diffé- rence ne s'efface pas, attendu que la moelle croit toujours plus rapidement que les autres tissus, et devient par là, dans la pre- mière période de laceroissement, la partie vraiment active de l'entre-nœud, Peu à peu, toutefois, les éléments des anneaux ligneux et hbérien commencent à épaissir leurs parois, prennent plus de solidité et opposent une plus grande résistance à la meælle, qui tend à les étirer. Cette dernière est alors entravée dans sa crois- sance longitudinale, et en quelque sorte soumise à une com- pression permanente par suite de la diminution d’élasticité des üssus lignifiés; de sorte que finalement e’est l'accroissement du bois et du hber, non celui de la moelle, qui détermine la lon- oueur de Pentre-nœud. Or, les tiges étiolées restent toute leur vie dans la première phase d’accroissement dont 1l vient d’être question : les élé- ments du faisceau fibro-vascülaire n’épaississent pas leurs parois, du moins d’une manière sensible, et conservent ainsi, même à un âge avancé, un haut degré d’élasticité. La moelle au con- taire, qui, à l'inverse des autres tissus, continue à croître dans l'obscurité, pourvu qu'elle reçoive suffisamment d'humidité, s'allonge incessamment et étre les autres parties, qui en consé- quence sont allongées passivement au fur et à mesure. De là résulte, suivant M. Kraus, lallongement anormal de la tige placée dans Pobscurité : la moelle détermine alors la grandeur définitive de Pentre-nœud, et cette moelle devient non-seule- ment aussi longue qu'elle pourrait le devenir étant soumise à linsolation, mais elle attemt mème, par suite du surcroit d'ab- sorplion, une longueur encore plus considérable, 272 P. RAUVWENHON. Cette explication de M. Kraus, en ce qui concerne la uge, n'a été, que je sache, ni combattue ni confirmée par d'autres ob- servateurs. Seul M. Ludwig Koch (1), voulant connaitre les causes de la verse des céréales, et ayant étudié dans ee but les modifications que détermine dans la croissance des tiges du Seigle la soustraction partielle de la lumière, à trouvé des résultats conformes à ceux obtenus par M. Kraus (2). Pour ce qui est des feuilles, au contraire la théorie de M. Kraus a été rejetée par M. Bataline (Bof. Zeit, XAÏX, n° 40, 6 oct. 1871). Celui-ci regarde d'abord comme peu compatible avec cette théorie (suivant laquelle les feuilles étiolées ne peuvent croître parce qu'elles ne sont pas en état d'assimiler de la nourriture sur place, M. Kraus n'ayant en effet jamais rencontré de la fécule dans ces feuilles) le fait que tant de cotylédons refusent absolument de se développer dans l'obscurité et meurent, bien qu'ils soient tout remplis de fécule. M. Kraus à lui-même senti cette difficulté, et il a supposé que dans ces cas la fécule ne peut se transformer en cellulose sans l'intervention de la lu- mière. Mais par cette hypothèse on ne fait que déplacer la diffi- culté, car il faut alors montrer la raison qui s'oppose dans ces cas à la formation de la cellulose aux dépens de la fécule pré- existante, tandis que dans beaucoup d’autres cas (tels, par exemple, que le développement des bulbes, des tubercules, etc.) cette formation se fait bien certainement dans l'obscurité. Une objection plus grave toutefois, selon M. Bataline, se pré- sente lorsque l'on considère les changements que subissent dans l’obscurité les feuilles des Graminées et d’autres Monocotylé- (1) Abnorme Aenderungen wachsender Pflanzenorganc durch Beschatlung;, avee 4 pl. lith. Berlin. (2) I donne des figures très-expressives de la différence d'épaisseur des parois cellulaires dans le Scigle couché et dans le Seigle s’élevant vigoureusement; il prouve que la verse des grains, si redoutée en agriculture, n’est pas due, comme on le croyait jusqu'alors, au manque de silice dans les chaumes, mais à linsuf- fisance de la lumière à leur pied, par suite d’une croissance trop serrée : aussi est-ce surtout la portion inférieure du second entre-nœud qui fléchit ou se rompt, parce qu’elle est trop faible pour porter la charge du haut. DÉS PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. QE dones. Dans ces circonstances, comme on sait, ces feuilles deviennent beaucoup plus longues que d'habitude, tandis que la largeur reste quelquefois la même, mais plus ordinairement elle est moindre que celle des feuilles eroissant à la lumière. Le pouvoir de former de la cellulose existerait donc ici dans une direction, mais non dans la direction perpendiculaire, ce qui n’est guère admissible. Enfin, l'explication de M. Kraus est aussi en désaccord avec l'observation que les plantes germantes étiolées contiennent en général moins de cellulose que les plantes normales du même àge. M. Bataline à donc cherché une autre cause pour les phéno- mènes en question, et1l est arrivé à conclure que la plupart des feuilles ne croissent pas dans l’obscurité, parce que, dans ces conditions, les cellules ne se divisent plus; la grandeur de la feuille est en effet proportionnelle au nombre des cellules, et la feuille croît précisément dans la mesure où elle produit de nou- velles cellules. Voier comment M, Bataline a essayé d'établir cette proposition : La division des cellules s'opère mieux, comme on sait, à une lumière fable, qui n’est pas encore suffisante pour engendrer de la chlorophylle et provoquer l'assimilation. Prenant donc des plantes en germination et qui s'étaient déve- loppées dans l’obscurité, 1l en exposa une partie pendant peu de temps (15 à 3 heures) à une lumière diffuse très-faible, tandis que le reste était laissé dans l’obscurité. Dans le premier lat, les petites plantes germantes contimuèrent à croître réguliè- rement jusqu'à la chute des cotylédons; le limbe des feuilles étuit 4 à 7 fois, dans certains cas même 12 fois plus grand que celui des plantes soustraites à l’action de la lumière, bien que ces feuilles fussent restées tout à fait jaunes (le « jaune » du cercle chromatique de Chevreul), de sorte qu'il ne s'était pas formé de chlorophylle et que la multiplication des cellules avait seule été possible. M. Bataline en conclut que lachlorophylle ne joue aucun rôle dans le développement des feuilles ; que celles-ci peuvent croître aux dépens des matières nutritives mises en réserve dans la 6° série, Bor. T. V (Cahier n° 5). 2 18 274 M. RAUVWÆENHONE. graine, et que leur assimilation propre ne devient nécessaire que lorsque lesdites matières ont été consommées; que dans l'obscurité Loutelois, les feuilles cessent de croître, parce que les cellules sont incapables de se diviser, division qui s'opère déjà à une lumière de si faible intensité, que la formation de la chlorophyile. et certainement celle de la fécule, ne peuvent sv ellectuer. | La production de feuilles longues et étroites chez les Grami- nées éliolées trouve aussi, selon M. Bataline, son explication dans cette manière de voir. Ce qu'il rapporte à Pappui (Pexis- tence, dans le parenchyme palissadé, de cellules en biscuit qui seraient divisées dans les feuilles vertes, mais non dans les feuilles étiolées) me parait toutefois peu convameant. En contradiction directe avec cette manière de voir est l’ob- servation récente de M. Prantl (1), qui a montré par des mesures spéciales que, chez la feuille qui se développe dans une obscu- rité complète, il se fait bien certainement un grand nombre de divisions cellulaires. Sur la largeur de la feuille primordiale d'un Phaseolus le nombre des cellules s'élevait en effet dans la graine non germée à 343, chez la plante étiolée de 1375 à 9371, chez la plante verte normale de 1429 à 2973. On le voit, st la théorie de M. Kraus prète à des objections. celle de M. Bataline ne résiste pas non plus sous tous lesrapports a un examen sévère. En ce qui concerne cette question, nous sommes encore dans l'incertitude sur beaucoup de points. M. Sachs déclare mème dans la dermière édition de son traité de botanique (2) qu’une explication complète de Pinfluence différente exercée par la lumière sur des organes végétaux di- vers, — explication qui montre comment, en chaque cas parti- culier, l’organisation d'une plante est modifiée de telle manière, et non d'une autre, par les vibrations de léther, — nous manque entièrement jusqu'ici, de sorte qu'il est à peine pos- sible de présenter une théorie bien coordonnée de la dépen- dance existant entre la végétation et la lumière, Reconnaissant (1) Arbeiten des botan. Instituts 3u Würzburg, fase, UE, p. 584. (2) Lehrbuch der Bot., 4° édit., ». 805 et 807. DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 279 la justesse de cette remarque, Je ne me flatte pas de résoudre le problème en question. Mais, d’un autre côté, 11 ne faut pas oublier que les phénomènes de létiolement, si compliqués et si obscurs, pourront singulièrement contribuer, une fois bien connus et bien compris, à nous donner une idée d’une des fonctions les plus importantes de la vie végétale. Tout tra- val qui produit, relativement à ces phénomènes, un fait bien constaté, où qui tend à épurer ou compléter les théories pra- posées, peut donc être considéré comme apportant une pierre pour la construction du futur édifice. C’est ce qui m'engage à soumettre les recherches suivantes, bien qu'elles ne fournissent pas une solution définitive au jugement des botanistes. Il y a déjà plusieurs années que ce sujet a attiré mon atten- lion : en partie pour vérifier les faits signalés par M. Sachs en i863, en partie parce que d’autres recherches m'y conduisaient, J'ai à différentes reprises cultivé des plantes dans l’obscurité et noté les phénomènes qui se produisaient. Comme mes résultats s’accordaient avec les descriptions données par M. Sachs, je ne Jugeai pas nécessaire alors de publier mes observations. Avec un vif intérêt Je pris ensuite connaissance du mémoire cité ci-dessus, dans lequel M. Kraus essaye de pénétrer la cause de ces phénomènes; mais, quoique très-prévenu en faveur de ce travail, je ne pus réprimer un doute sur quelques-unes de ses conclusions, de sorte que Je résolus d’en contrôler l'exactitude. Ce sont ces recherches dont je vais rendre un compte suceinet, en traitant séparément de la tige et des feuilles. Ÿ 1. — Changements de forme de la tige. Dans l’examen des anomalies que présente la tige développée à l'abri de la lumière, deux points sont surtout à considérer : l'allongement exagéré et la direction verhicale des entre-nœuds. L’excès d’ailongement dans lobscurité est attribué par M. Kraus, comme nous l'avons vu, à l’excès de croissance de là moelle combiné avec le développement imparfait des élé- ments du faisceau vasculaire et avec le faible épaississement de 276 P. RAUWENHOFF. leurs parois. Quant à ce dernier phénomène, je dois donner pleinement raison à M. Kraus. Jai toujours trouvé dans la tige étiolée une différence de structure anatomique qui rappelait un état moins avancé que celui correspondant à la dimension extérieure. Chez le Rosa centifolia, par exemple, j'ai étudié comparativement une branche verte et une branche qui avait crû dans l’obscurité. La première avait 7 entre-nœuds et 3 feuilles développées ; la seconde, 8 entre-nœuds et 3 petites feuilles ; toutes les deux se terminaient en un bouton floral qui, dans la branche étiolée, était plus long et plus grèle que d’or- dinaire. Tandis que la branche verte avait une longueur de 9 centimètres, l’autre atteignait une longueur totale de 49 cen- timètres, et était en outre, sur la section transversale, un peu plus épaisse que la première. Par contre, la structure interne montrait en elles un développement tout différent. Déjà à un faible grossissement, même à la simple loupe, on reconnaissait dans la branche étiolée la moindre épaisseur du faisceau vas- culaire, en même temps que l'étendue plus grande occupée par l'écorce et la moelle. Les figures 4 et 2 (pl. 14) peuvent donner une idée de cette différence, mais elle s’accuse encore mieux par la mesure des parties constituantes d’entre-nœuds du même rang. À un gros- sissement de 20 fois, j'ai obtenu, comme moyennes de dif- férentes mesures prises dans des directions diverses, les nombres suivants pour lépaisseur des parties de l'axe sur la section transversale : Branche verte Branche étiolée. Diamètre de la branche. . . . . . . .. 41,3 47,5 Parenchyme cortical. . . . ... . : : . 5,5 5,15 Anneaumasculaires 7 2: 0. 9,2 4,9 MoeleneR ne 20 91 Les nombres représentent des divisions du micromètre ocu- laire. Comme on le voit, la moelle et l’écorce sont ici notablement plus épaisses dans la branche étiolée, tandis que l’anneau des DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 274 faisceaux vasculaires est au contraire plus mince. Chez le Rosa, comparé à d’autres plantes ayant crù dans l'obscurité, ces dif- férences sont d’ailleurs relativement petites. Dans les entre- nœuds les plus âgés de la branche, les fibres du liber et du bois ne sont mème guère moins épaissis chez la branche étiolée que chez la branche verte normale. Des modifications analogues s’observent aussi dans la struc- ture des tiges du Phaseolus multiflorus, lorsque l’on compare des plantes qui, à partir de la graine, ont végété dans Fobscurité, à d’autres de la même espèce qui ont crù à la lumière. Bien que les tiges blanches et brillantes des premières surpassent plu- sieurs fois en longueur celles des plantes vertes et ne le cèdent pas non plus en diamètre, elles sont beaucoup moins déve- loppées à l’intérieur, et l’anneau ligneux notamment est dans un état moins avancé que celui de la plante normale. Mais les : particularités offertes sous ce rapport par le Phaseolus ont déjà été décrites si souvent (entre autres par M. Sachs, dans un mémoire spécial), qu'il paraît inutile de s’y arrèter plus long- temps. Je traiterai plus en détail des modifications importantes que l'absence de lumière détermine chez le Fuchsia globosa. Lors- qu’on place, au printemps, un pied de cette espèce dans l’ob- scurité, les bourgeons d'hiver développent des pousses blanches et relativement longues qui ne se portent pas, comme les jets normaux et courts de la plante verte, dans des directions di- verses, dépendantes de la position du bourgeon et de la tige, mais qui sontau contraire toutes verticales. Quelqueloison peut même observer ce phénomène chez des Fuchsias qui ont passé l'hiver dans un coin peu éclairé d’une orangerie, et ÿ ont bour- geonné aux premiers jours chauds du printemps. Chez les plantes soumises intentionnellement à l'expérience, J'ai vu ces pousses blanches se développer et attemdre une lon- oueur de 15 à 18 centimètres, en moyenne avec quatre entre- nœuds, dont l’inférieur était toujours le pluslong. Aux nœuds se formaient de petites feuilles d’un jaune pâle, longues tout au plus de 2 à 3 millimètres. Les pousses apparaissaient d’abord au 278 P. RAUWENHOFF. haut des branches de la plante. Plus tard, à mesure que les premières nées commençalent à dépérir (ce qui dans chaque pousse avait lieu de bas en haut et était reconnaissable au des- séchement et à la coloration brune des parties mourantes), de nouveaux jets se développaient successivement plus bas ou plus près de l’axe principal, jusqu'à ce qu’enfin toute la réserve alimentaire étant épuisée, la plante entière succombàt. En comparant la structure anatomique d’une branche verte avec celle d’une branche étiolée de mème âge, on trouve des différences marquées. La branche verte (vue sur la coupe trans- versale) présente : 1° un épiderme ; 2° un parenchyme cortical de 6 à 7 rangées de cellules dans la direction radiale, cellules dont la rangée externe ressemble beaucoup, quant à la forme et à la grandeur, aux cellules de l’épiderme, tandis que celles du dedans deviennent peu à peu plus grandes et montrent des parois ondulées. Viennent ensuite les faisceaux fibro-vascu- laires, rassemblés en anneau complétement fermé, et à rayons médullaires à peine visibles. En dehors, les faisceaux vascu- res touchent au parenchyme cortical par une rangée unique et fréquemment interrompue de fibres Hibériennes peu épais- sies, à l’intérieur desquelles on trouve un parenchyme de petites cellules à parois minces et des vaisseaux cribreux à peine distincts. Le corps ligneux, entouré d'une très-mince couche de cambium, se compose de séries radiales de vaisseaux et de cellules ligneuses assez épaisses, au nombre de 19 à 15 dans les rangées où manquent les vaisseaux. Pris en totalité, le tissu fibro-vasculaire a, dans la direction radiale, environ la même largeur que le parenchyme cortical. Enfin, la moelle forme un cylindre de 10 à 14 cellules sur le diamètre de la coupe trans- versale, lesquelles cellules deviennent successivement plus srandes vers le centre, de sorte que les plus internes surpassent au moins trois fois en diamètre les cellules médullaires externes, celles qui touchent aux faisceaux vasculaires. Notablement différente est la structure de la branche étiolée de même âge. Celle-ci est plus épaisse sur la coupe transver- sale, mais, nonobstant ces dimensions supérieures. presque DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 279 tous les éléments offrent un caractère de plus grande jeunesse. L'anneau ligneux suriout est moins développé, le nombre des cellules ligneuses est plus petit dans la direction radiale, et aucune trace de fibres Hibériennes épaissies n’est encore visible. Il est à remarquer, en outre, que toutes les cellules du paren- chyme, et spécialement celles de la moelle, qui atteignent d'ailleurs une grandeur inaccontumée, sont très-pauvres en contenu solide et organisé. Les différences qui viennent d’être signalées ressortent du reste clairement des nombres ci-dessous, résultats movens de mesures prises dans des directions différentes : Branche verte. Branche étiolée Epaisseur de la branche. . . . . . .. 1,7 à 1,9 mm. 1,9 à 2.9 min. Épaissenr radiale de l’épiderme et de l'écorce primaire. . . . . AUS, 20 54 Nombre des rangées de cellules dun pa- renchyme cortical, dans la direction RAONONTS EN ONRENERn : 9 À, ü à 10 Epaisseur radiale du cb fibro-vas- CIRE PASSA NS a) EU 38 29 Diamètre de la moelle. . . . .. 90 140 Nombre des cellules médullaires sur ce OURIANEI TOP TP NRRE AIRE RO AEE E 10 à 14 12 à 15 Longueur des cellules médullaires. . . 13 à 14 17 à 24 longueur des cellules du parenchyme COUICAR Re nue do + à eee» 26 à 21 27 à 43 Le tout exprimé en divisions du micromètre oculaire, qui représentent une grandeur de 67 millimètres. Les différences sont encore plus frappantes chez deux bran- ches un peu plus âgées, où la production du liége à commencé et où une partie de l’écorce est détachée La branche développée à la lumière montre ici, sous les débris de l’épiderme et des cellules les plus extérieures de l'écorce, une dizaine de rangées de cellules subéreuses (alter- nativement cubiques et tabulaires, voy. fig. 5) formées par des partitions tangentielles de cellules mères immédiatement sous l'anneau interrompu des fibres libériennes, formation par suite 280 P. RAUVVENHOFEF. de laquelle l’écorce primaire s’est entièrement subérifiée, a pris une couleur brune et est déjà tombée en grande partie. Sous l'enveloppe de tissu subéreux on voit quelques rangées de cel- lules parenchymateuses assez larges, alternant avec des vais- seaux cribreux à parois déjà affaissées en grande partie, et çà et là un canal très-ample, probablement rempli de matières sécrétées. L’anneau ligneux est composé de 45 à 20 séries ra- diales de cellules ligneuses assez épaisses, à section transversale carrée, entre lesquelles on voit dans certaines séries quelques trachées placées en une rangée unique près de la moelle; les séries de cellules ligneuses sont séparées par des rayons médul- laires consistant en une seule rangée de cellules qui, sur la section transversale, différent peu des cellules Higneuses. Le passage de l’étui médullaire à la moelle est formé par un grand nombre de petites cellules 1rrégulièrement placées, dont les parois fortement épaissies se sont soudées entre elles, de sorte que l’ensemble offre l’aspect d’un collenchyme scléreux. Les cellules de la moelle même, successivement plus larges vers le centre, ont des parois médiocrement épaissies et à peine ponctuées. Tout autres sont les caractères de la branche étiolée (voy. fig. 6). Au même point que dans l’autre (à savoir immédiate- ment sous les quelques fibres libériennes) a commencé la pro- duction du liége, par suite de laquelle l’écorce primaire et l’épiderme, qui ici existent encore en majeure partie, sont subérifiés et colorés en brun. La couche subéreuse elle-même n’est composée que de # à 6 rangées de cellules (alternativement cubiques et tabulaires, quoique moins distinetement que dans la branche développée à la lumière), et passe insensiblement au phloëème à parois restées minces, qui n’a pas plus d’une couple de rangées de cellules d'épaisseur, et qui souvent ne se distingue presque pas du eambium auquel il doit naissance. L’anneau lisgneux, de faible épaisseur radiale, ne contient pas plus de 6 ou 7 rangées de cellules et un très-petit nombre de vaisseaux, à part ceux qui consüituent l’anneau médullaire. Les cellules ligneuses sont plus larges que dans la branche normale, mais DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 281 leurs parois sont moins épaissies, quoique tout aussi réfrin- sentes, En dedans de l’étur médullaire, on trouve quelques cellules qui paraissent s'être divisées par des cloisons en plu- sieurs autres plus petites ; c’est évidemment l’ébauche du tissu existant dans la partie correspondante de la branche normale, mais où l’épaississement des parois ne s’est pas produit. Enfin, la moelle est composée de cellules égalant en nombre celles de la branche développée à la lumière (10-14 sur un diamètre) et augmentant aussi en grandeur vers le centre ; mais la largeur absolue des cellules étiolées est beaucoup plus considérable et leurs parois sont encore moins épaissies, tandis que la lon- oueur absolue des cellules est au contraire la même dans les deux cas. Les résultats moyens des mesures prises sur ces deux branches sont les suivants : Branche normale. Branche étiolée, Épaisseur radiale de la couche corticale morte, subérifiée, repoussée par éme AMAR 22 24 — de la couche subéreuse. . 98 19 — duphloëmes ct" .1..: 20 6 — AUXVICME sh Pun . 40 4 520 — du tissu situé entre létui médullaire et la moelle. . 16 11 Épaisseur Lotale de la moelle. . . . . . . T0 126 Le tout exprimé en divisions du micromètre oculaire. Ces chiffres, de même que les figures 3 et 4, mettent pleine- ment en évidence les importantes modifications que l'absence de lumière peut déterminer dans les différentes parties de la branche de Fuchsia. I est incontestable que la moelle prend ici dans l’obseurité un développement anormal; mais, de la com- paraison des mesures relatives à la branche plus jeune et à la branche plus àgée, il paraît résulter que chez la branche étiolée les cellules médullaires s’allongent d’abord plus que chez la branche normale, et qu’ensuite elles croissent principalement dans la direction radiale (probablement parce que l’épaississe- 282 P. RAUVWENHOFF. ment des éléments ligneux occasionue alors une op grande résistance), de sorte que finalement la moelle de la branche étiolée se compose d'un plus grand nombre de cellules dans la direction de l'axe, cellules qui ne sont pas plus longues, mais beaucoup plus larges que les cellules normales. Un autre exemple e nous est fourni par l'mpuatiens tricornis. De cette espèce, J'ai examiné de jeunes plantes germées qui avaient erû à l'air libre, et d'autres, de mème âge, qui s'étaient développées sous une cloche de Sachs, au bichromate de po- tasse, Ces dernières avaient recu moins de lumière, et cette lu- mère provenait exclusivement de la moitié la moins réfran- gible du spectre. Bien que chez elles aussi les jeunes feuilles fussent devenues vertes, les phénomènes anomaux n'en étaient pas moins accusés par la circonstance que les jeunes tiges avaient atteint une longueur 2 à 3 fois plus grande que celles des plantes normales, et étaient par contre beaucoup plus ninces. Ghezles plantes étiolées, la longueur de l'axe hypocotylé était de 30 millim. et celle du premier entre-nœud de 4 décim. La srosseur des tiges vertes dépassait assez notablement celles des tiges développées à la lumière jaune, pour que l'anneau ligneux des premières format sur la section transversale un cercle aussi grand que la coupe entière des secondes. En me- surant les éléments de Particle hvpocotylé, je comptai chez les deux plantes 8 ou 9 rangées de cellules corticales entre l'épi- derme et l'anneau de cellules amylifères entourant le cercle des faisceaux vasculaires; chez toutes les deux aussi, 13 à 16 cellules médullaires sur le diamètre de la coupe transversale. Chez toutes les deux enfin, 4 faisceaux vasculaires placés en croix, qui toutefois dans la plante verte commençaient à se différencier davantage. Quant aux dimensions, au contraire les cellules parenchymateuses des deux plantes différaient considérablement. Sur la coupe transversale on trouve en effet Chez la plante Chez la plante développée normale à la lumière jaune. Grandeur des cellules corticales. . 23 à 25, mov. 24 14à 21, moy. 17 DÉS PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 283 Grandeur des cellules médullaires. 20 à 30, mov. 25 13 4 22, mov. 17 Sur la coupe longitudinale : Grandeur des cellules corlicales.. , 21 à 35, moy. 28 40 à 87, moy. 60 _ — médullaires.. 25 à 35, moy, 30 42 à 64, moy. 96 Ce qui montre que dans le tissu formé sous l'influence des rayons jaunes, les cellules de lécorce et de la moelle, mais surtout les premières, sont devenues beaucoup plus longues et plus étroites. Dans le premier entre-nœud on retrouve les mêmes écarts entre les deux plantes : elles ont en général la même structure ; mais chez la plante allongée tout est moins développé dans la direction transversale. Cest ainsi que l'épiderme a, chez la plante normale, une épaisseur de 4 divisions micrométriques, chez l’autre de 2 ; au-dessous, on voit chez la première 3 ran- gées de cellules de collenchyme, mesurant 10 à 12 divisions, chez la seconde 2 ou 3 rangées de cellules non encore épais- sies, mesurant » divisions. Viennent ensuite les cellules du parenchyme cortical, de dimensions très-imégales, mais ordi- nairement plus grandes chez la plante verte. Les deux entre- uœuds-ont chacun dix faisceaux fibro-vasculaires, semblables de forme, mais moindres en grandeur et surtout en épaisseur des parois chez la plante allongée. Enfin on voit chez cette der- nière 6 à S rangées de cellules médullaires, mesurant ensem- ble 45 à 70 divisions, et chez la plante verte 7 à 8 rangées, inesurant 90 à 100 divisions ; dans les deux cas il y a une cavité centrale, provenant de l’atrophie des cellules internes de la moelle et de accroissement prépondérant à la périphérie. Sur la coupe longitudinale, toutefois, la différence est in- verse. On trouve 11 : Chez la plante Chez la plante développée normale. à la lumivre jaune. Longueur des cellules corticales.. . 10 à 16, mov. 13 95 à 45, mov. 34 — — médullaires.. 18 à 25, moy. 21 60à 100, moy. 80 Le Pacia Fubu n'a également présenté deschangements très- 284 P, RAUVWENHOFF. remarquables dans la structure des tiges soustraites à l’action de la lumière. Des graines germées de cette plante, dévelop- pées comparativement dans l'obscurité et à la lumière, ne montrèrent pas seulement un parenchyme à cellules plus larges dans le premier cas, mais le nombre et la forme des faisceaux vasculaires étaient aussi modifiés notablement, comme on le reconnaît au premier coup d'œil jeté sur les fig. 7 et 8. Chez la plante verte, la base de la tige renferme 15 vaisseaux vascu- laires disposés en cercle et # à l'extérieur, appartenant à deux paires de feuilles ; la moelle est déchirée au milieu et manque par suite au centre. La tige étiolée n’a au contraire que 6 fais- ceaux vasculaires placés en cercle, tous plus élargis dans la direction tangentielle et faisant saillie dans la moelle, laquelle est restée entière. Gette forme différente des faisceaux vascu- laires sur la coupe transversale est peut-être imputable, d’une part à l’imperfection constamment observée du développement et de l’épaississement des éléments du faisceau vasculaire lui-même, d'autre part à la lenteur de l’accroissement de la moelle, comparé à celui des parties périphériques, phénomène qui est général chez les plantes à tiges creuses. Si en effet, par suite de l'absence de lumière, d’un côté les faisceaux vas- culaires conservent des parois minces, et de l’autre côté la moelle reste plus longtemps imbibée de sues et vivante, il doit, dès que le caractère propre de ces tiges (celui de devenir creu- ses à une certaine époque par l’atrophie de la moelle) com- mence à se manifester par la diminution d’accroissement des cellules médullaires, en résulter une tension radiale, qui mo- difiera la direction des éléments encore flexibles du faisceau vasculaire. Sous ce rapport, le Vicia Faba fournirait donc un appui à la théorie de M. Kraus concernant l'influence de la moelle. Cette théorie ne saurait s'appliquer toutefois aux entre- nœuds supérieurs, lesquels sont creux tout comme dans les tiges vertes, quoique d'ailleurs considérablement allongés. Les modifications de structure que subit dans l'obscurité le Polygonum cuspidatum ne sont pas moins dignes d'attention. Comme on le sait, le rhizome de cette plante japonaise sup- DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 285 porte très-bien l'hiver dansnos jardins. Un pied placé en pleme terre ayant développé au printemps de jeunes tiges hautes de quelques centimètres, j'en Imtroduisis quelques-unes dans des tuyaux de drainage de terre cuite, dont plusieurs furent sue- cessivement superposés l’un à l’autre à mesure que la tige grandissait, le dernier étant toujours couvert d’une grande coupe dont le bord embrassait celui du tuyau, de manière à maintenir constamment la tige dans une chambre obscure de hauteur suffisante. Ces tiges se développèrent ainsi concurrem- ment avec d’autres nées du même rhizome vivace ; mais, par suite de Ja soustraction’ de la lumière, les entre-nœuds déjà formés s’étiolèrent complétement, et les nouveaux devinrent 1, à 2 fois plus longs que ceux des tiges vertes, tandis que les feuilles restèrent très-petites et de couleur Jaune. Cel- les-e1 étaient surtout peu développées en largeur, et avaient leurs bords roulés en arrière. Lorsque les tiges, tant vertes qu'étiolées, eurent atteint leur accroissementcomplet, j'enfis des coupes à différenteshauteurs et les étudiai au microscope. On reconnaissait d’emblée qu'ici encore les faisceaux vasculaires de la plante étiolée étaient à un état de développement beaucoup moins avancé, tandis que leur nombre ainsi que l’épaisseur totale de la tige ne diffé- raient pas très-notablement dans les deux cas. L’épiderme et l'écorce primaire présentaient peu de différence sur la coupe transversale ; sur la section longitudinale, on constatait que les cellules de l’une etde l’autre partie étaient plus allongées dans la tige étiolée. Par contre, les fibres libériennes épaissies et les cellules ligneuses, touten ayant des parois beaucoup plus minces, n'étaient pas plus allongées que dans la plante normale. Les cellules médullaires s'étaient comportées comme le paren- chyme cortical : de grandeur à peu près égale sur la coupe transverse, elles avaient dans la direction de l’axe longitudinal une longueur plus que double chez la tige étiolée. Quant au creusement de la tige par atrophie de la moelle, 1l parait com- mencer un peu plus tard chez la plante étiolée, mais attemdre ensuite les mêmes proportions. Du moins un entre-nœud étiolé S 28 P. RAUWENHOFE. de ? millim. > de diamètre avait encore une moelle presque intacte; un article un peu plus âgé, de 5 millinr. d'épaisseur, présentait une cavité centrale occupant environ le Uiers de la coupe, mais plus petite que celle d'un article du même âge de la plante verte; enfin, dans les mérithalles tout à fait adultes, nv avait plus aucune différence sensible sous ce rapport. Il est encore digne de remarque que les noyaux eristallens, qui chez la plante verte occupent des cellules déterminées, tant dans l'écorce primaire que dans le phloème à parois minces el dans la partie périphérique de lamoelle, manquententièrement chez la plante étiolée : ce fait indique entre les deux plantes une différence chimique, sur laquelle nous reviendrons plus loin. Les résultats des mesures (exprimés en divisions du nncro- mètre oculaire, attendu qu'il ne s'agit pas ici de grandeurs absolues, mais seulement de grandeurs relatives) sont les su- vante : Seclion transversale. Tige verte. Tige étiolce. Épaisseur radiale du faisceau vasculaire entier... 93 55 — — du phloëme à parois épaisses. . 16 8 — _- du phloème à parois minces el du cambium.. : . . . . .. ( 12 Le = duxylèmeé:ss tape inter 29 22 _ de l’étui médullare.. . . ... 20 13 Grandeur des cellules médullures.. . , . , . .. 15,2 pl Seclion longitudinale. Longueur moyenne des cellules épidermiques. . . 9,9 13:9 ne — des cellules corticales. . . . . 1252 39,4 — — des cellules libériennes à pa- - LOIS ÉPAISSES AA RESTE 90 89 — =hiodes cellules hgneusess #05 88 88 — des cellules médullaires.. . . 29,5 62 Si ces chiffres établissent suffisaminent la réalité de la diffé- rence brièvement décrite ci-dessus, un coup d'œil sur les fi- eures 9 et 10 (pl. 15), qui représentent la coupe transversale d'un faisceau vasculaire de la tige verte et de la tige étiolée, et DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 287 qui n'ont pas besoin d'autre explication, donne immédiatement une idée des modifications anatomiques occasionnées par l'ab- sence de lunuère. Les mêmes phénomènes se produisent aussi dans les ges monocotylées. Chacun les connait chez PAsparaqus officinalis. dont les pousses printanières restent tendres et sueculentes, en prenant un allongement considérable, tant qu'elles demeurent dans l'obscurité, mais deviennent bientôt vertes et plus ou moins ligneuses, lorsqu'elles sont exposées à la lumière. Conume autre exemple Je citera le Tradescantia Zebrina. Des boutures bien enracinées de cette espèce, placées dans l'obscurité, se développèrent presque exclusivement à la partie basilaire des entre-nœuds, ce qui était mis en évidence par des points préa- lablement marqués sur ces entre-nœuds, à des distances égales et rapprochées. Du reste, les parties formées dans l'obscurité se distinguaient immédiatement à leur couleur blanche el à leur épaisseur plus grande. En comparant leur coupe trans- versale avec celle des tiges vertes, je trouvai d'abord, chez les plantes étiolées, les cellules épidermiques et les quatre où cinq rangées subjacentes de cellules parenchvmateuses à paroi beaucoup plus minces ; la partie qui vient ensuite dans lestiges vertes, le cercle d’une rangée de cellules épaissies, à parois colorées en jaune et plus épaisses, cercle qui unit les faisceaux vasculaires les plus périphériques, manquait entièrement, Le nombre des faisceaux vasculaires était le même de part et d'autre, ils ne différaient pas beaucoup non plus par le nombre de leurs éléments; de part et d'autre aussi on ne trouvait ordinairement qu'un où deux grands vaisseaux spiraux, mais, quant à la consistance et à Pépaisseur, tant des éléments du bois que de ceux du liber, il y avait une différence sensible, La supériorité de consistance était encore plus prononcée, chez la tige verte, pour les parois des cellules de la moelle, qui étaient évidemment plus tendues que les cellules médul- laires, souvent à parois ondulées, de Pentre-nœud étiolé, Bien qu'il v eût dans les deux cas des inégalités considé- rables sous le rapport des dimensions des différentes cellules 288 P. RAUVVENHOET. médullares, des cellules grandes et petites alternant toujours entre elles, je constatai pourtant, par des mesures multi- pliées, qu'en moyenne la taille, aussi bien que le nombre des cellules était un peu plus grande dans la plante étiolée. Chez celle-ci, en effet, je trouvai sur le diamètre de la coupe 22 cel- lules, mesurant en moyenne 19 divisions du micromètre ; chez la tige verte, 19 cellules, mesurant en moyenne 17 divisions : l'épaisseur plus grande de Pentre-nœud étiolé (50 millimètres au lieu de 25, comme chez la plante verte) est done entière- ment expliquée par les dimensions du tissu fondamental in- terne. Sur la coupe longitudinale, les cellules en question ne diffèrent pas sensiblement en grandeur. Chez le Spironema fragans, on observe également, après que la plante est restée quelque temps dans l’obscurité, un allon- sement considérable de la tige, les entre-nœuds formés ayant 4 à 5 fois la longueur des parties normales. L’épaisseur de ces entre-nœuds étiolés est toutefois moindre que celle des tiges vertes. Enfin, un exemple remarquable des anomalies en question nous est encore offert par le Fritillaria imperialis croissant dans lPobscurité. Le long du côté septentrional d’une des serres du jardin botanique de notre université, se trouve une ligne de bulbes de cette Lihacée, qui passent lhiver en pleine terre et poussent chaque année leurs tiges aériennes normales. Au printemps de 4875, dès que les Jeunes plantes s’élevèrent à quelques cen- tunètres au-dessus de terre, deux de celles-ci furent recou- vertes chacune de deux larges tuyaux de drainage superposés lun à l’autre et bien adaptés par le collet, puis l'ouverture du haut fut fermée par une grande coupe de terre, dont le bord recourbé embrassait le bord supérieur du tuyau. La plante, maintenue en pleine terre, était ainsi placée dans une chambreobscure, qui, de même que pour le Polygonum, pouvait au besom être exhaussée au moyen de tuyaux sup- plémentaires; elle y trouvait une humidité suffisante et un air suffisamment renouvelé pour pouvoir se développer paral- DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 289 lèlement à la plante qui végétait à l'air libre, à côté d'elle. La preuve que cela avait réellement eu lieu fut obtenue, lorsque, le 9 mai, les deux plantes voisines, développées l’une à Pabri et l’autre sous l’influence de la lumière, furent coupées et sou- mises à l'examen. Toutes les deux étaient en pleine floraison; tous les organes se montraient bien développés, les fleurs de grandeur normale, avec des étamines et des pistils bien consti- tués. Seulement, les couleurs du périanthe étaient moins vives, la tige plus longue, les feuilles moms nombreuses et plus étroites chez la plante qui avait vécu dans l’obscurité. Les dimensions de la plante étiolée et de la plante verte étaient les suivantes : Plante verte. Plante éloilée. Grosseur de la tige à la base. . . . . . . 2,3 centim. 2,3 centim. = odu.pédoncule..::..., "1. 1,1 1,0 Longueur de la tige depuis le pied jus- qu'asla premiére feuille. : 0 à 18 29 Longueur depuis la première feuille jus- qu'alaidernieres aus ten secte F6. 02 Longueur du-pédoncule.1. 5.41: 2. 43 44 Donc, longueur totale de la plante. . . . 107 125 Longueur de la feuille inférieure. . . . 16 12 Largeur de la même. . .. 1... : b) 4,0 Longueur d’une des feuilles onde LOS A PAT PA L'OEIL ES RIRES AO EES 16 16 Largeur de la même . . . . . .. me 2,9 1,0 Longueur des feuilles de la couronne qui surmonte les fleurs : Réule la plus erande... * SN 13 11 Fewlle"læ plus petites: A0 Den srS 7 10 Largeur de ces feuilles : Feuille,la plus! grande... 5 . 1, 1,5 1,8 Fewilletlasplus petites ..4.4 2060... 0,7 1,0 Nombre total des feuilles au-dessous des HEURE LA. ee ME 65 99 Nombre des feuilles qu ae COUTONNE M2 13 Nombre desleurs MMENETIOMMU MENU 1 4 On voit clairement par ces chiffres que, si la plante dévelop- pée dans l'obscurité était un peu moins vigoureuse que la plante 6° série, Bor. T. V. (Cahier n° 5). à 19 290 P. RAUVWVENHOFF. verte, tous les organes y existaient pourtant dans un état en apparence normal. Le Frotillaria fournit done un exemple frappant de ce fait, que la lumière n’est pas nécessaire à la croissance et à l'épanouissement, lorsque les organes, ainsi qu'il arrive généralement chez les plantes bulbeuses, sont déjà ébauchés dans le bourgeon. L'étude anatomique dévoila toutefois, dans ce cas aussi, différentes anomalies. Sur la coupe transversale de la base de la tige, on voit un grand nombre de petits faisceaux vasculaires, qui existent jus- qu’au centre (de sorte que la tige n’est pas creuse), et dont l’en- semble est entouré extérieurement d’un anneau continu de 6 à 10 couches de petites cellules épaissies (Schutz- scheide, Gefässbundelscheide des Allemands, gaine des fais- ceaux vasculaires). Get anneau est limité à son tour par envi- ron six rangées de grandes cellules ellipsoïdales, entre les- quelles sont disséminés de larges canaux aériens, et le tout est enveloppé d’un épiderme à parois plus épaisses à l’extérieur. Gette structure se retrouve à la fois dans la tige étiolée et dans la tige verte, mais chez celles-ci les couches cellulaires externes contienneñt de la chlorophylle, et tous ses éléments ont généralement aussi des parois plus épaisses : c’est ainsi, par exemple, que les cellules du tissu fondamental y sont des cel- lules ponctuées, ce qui n’est pas le cas chez la tige étiolée. La gaine des faisceaux vasculaires, formée chez la tige verte de 8 à 10 rangées de cellules très-épaissies et mêlées de canaux ponctués, ne renferme chez la tige étiolée que 4 à 6 rangées de cellules beaucoup moins épaisses. Le même caractère se retrouve dans le faisceau vasculaire lui-même : bien qu'il soit composé dans les deux tiges des mêmes éléments, le nombre et l’épaississement des vaisseaux sont moindres chez la tige étiolée. De [à vient que celle-ci, qui est d’un blanc clair, se laisse couper beaucoup plus facilement que la tige verte. Les cellules épidermiques ne diffèrent pour ainsi dire pas: sur les deux tiges on trouve de grands stomates, distribués avec pareimonie et remplis de grains de fécule, qui, chez la tige DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 291 étiolée, sont même encore plus nombreux et plus grands. La coupe longitudinale des deux tiges n’offre pas non plus de diffé- rences notables, si ce n’est que les cellules du parenchyme sont en moyenne un peu plus longues et à parois moins épaisses dans la tige étiolée. Les vaisseaux sont toujours principalement des Vaisseaux Spiraux. L’épiderme des feuilles possède dans les deux cas des sto- mates pareils en nombre et en grandeur. La chlorophylle manque bien entendu chez la tige étiolée, mais non la fécule. Les cellules épidermiques elles-mêmes sont, dans cette tige, beaucoup plus étroites (quelquefois seulement moitié aussi larges) et un peu plus longues. Le pédoncule montre chez les deux plantes lamême structure que la tige feuillée, en même temps que des différences ana- logues entre celui qui a crû à la lumière et celui qui s’est déve- loppé dans l'obscurité; enfin, le même type se retrouve encore, bien que simplifié, dans le pédicelle. Le tissu parenchymateux sous-épidermique est abondamment pourvu de chlorophylle chez la plante normale, complétement incolore chez la plante soustraile à la lumière; au-dessous de ce tissu se trouve chez toutes les deux l’analogue de la gaïîne des faisceaux vasculaires, qui chez la plante étiolée se distingue à peine du parenchyme extérieur, tout aussi peu épaissi. Bien que les deux pédicelles aient à peu près la même grosseur, le nombre des faisceaux vasculaires de la coupe transversale est de 3% dans le pédicelle normal et seulement de 25 dans l’autre, outre que les éléments vasculaires sont beaucoup moins épaissis. De tous les exemples qui viennent d’être décrits, on peut tirer la conclusion que, lorsque les tiges des plantes se déve- loppent dans l’obscurité, l’épaississement des parois cellulaires fait généralement plus ou moins défaut, ou reste imparfait. En réalité, cela s'applique à tous les tissus de la plante: c’est ainsi, par exemple, qu’on voit, dans l’état normal, une partie du pa- renchyme cortical former du collenchyme, ce qui, chez les 292 P. RAUVWENRONT. plantes éliolées, ne se fait qu’incomplétement ou pas du tout. Mais la différence en question s’accuse le plus dans les éléments à parois normalement épaisses du faisceau fibro-vasculaire. Chez celui-ci, à l’état étiolé, les organes élémentaires sont ordi- nairement moins nombreux et moins différenciés, de sorte que l’ensemble présente un caractère de développement imparfait, de jeunesse relative, sans toutefois ressembler entièrement à la tige normale prise à un âge moins avancé. D’après le résultat de mes recherches et de mes mesures, je dois donc donner raison à M. Kraus, lorsqu'il déclare que la tige étiolée se trouve anatomiquement à un degré plus bas que celui de la tige normale et verte du même âge. Les résultats obtenus par M. Koch sur des tiges de Seigle soustraites partiellement à la lumière sont en parfait accord avec cette affirmation. « Lorsque des organes caulinaires se dé- veloppent à l'ombre », dit-il, « l’épaississement de leurs cel- lules est entravé » (4. e., p. 9). Ses figures montrent clairement aussi celte différence. Où faut-il maintenant chercher la cause de ce phéno- mène ? M. Kraus (/. c., p. 241) attribue la minceur des parois des cellules épidermiques et collenchymateuses des tiges étolées à l'absence de la matière colorante de la chlorophylle, vu que les grains chlorophylliens jaunes, non éclairés, sont incapables d’assimilation. Le non-épaississement des éléments des fais- ceaux vasculaires est, suivant lui, la conséquence des faibles dimensions qu’atteignent les feuilles, attendu que dans l’état normal cet épaississement des parois du faisceau fibro-vascu- laire commence tard, lorsque déjà les feuilles les plus rappro- chées sont à peu près adultes. Gette explication ne me paraît pas fondée, car, en premier lieu, l’épaississement des parois fait aussi quelquefois défaut dans la moelle (voy., par exemple, ma description du Fuchsia globosa), bien que celle-ci à l’état normal ne contienne pas de chlorophylle. M. Kraus lui-même a senti la faiblesse de son argument; 1l remarque en effet qu’on lui objectera peut- DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 293 être que dans le collenchyme, précisément à l’époque où il s’épaissit et encore longtemps après, on ne peut constater la présence de la fécule dans les grains de chlorophylle; puis il essaye de lever la difficulté en supposant gratuitement que la fécule est consommée à mesure qu’elle se forme. D’un autre côté, l'explication de M. Kraus est contredite par le fait que, dans plusieurs de mes observations, les cellules du parenchyme cortical et les cellules de l’épiderme étaient, tout comme celles de la moelle, plus développées qu’à l’ordinaire. Je serais donc porté à voir ici un effet, non pas tant du défaut de matières propres à la nutrition, mais d’une modification du processus vital, par suite de l’absence du stimulant de la lumière. Peut- être certaines matières, nécessaires à l’épaississement des parois des cellules existantes, cessent-elles alors de se former. À cet égard, toutefois, on ne saurait encore rien dire de certain. En tout cas, le manque de matière colorante chlorophyllienne ne peut être un obstacle général à l’épaississement des parois, car comment se formeraient alors les tissus parfois considérable- ment épaissis de tant de racines et de rhizomes? L’explication de M. Kraus me semble donc inadmissible, bien que je n’en aie pas de meilleure à mettre à la place. En même temps que la différence de structure anatomique dont il vient d’être question, on observe en beaucoup de cas un allongement anormal de la tige étiolée. À quoi celui-ci est-il dù? M. Kraus en a donné, comme nous l’avons vu, une explication qui paraît très-simple et très-rationnelle. Dans ses recherches antérieures sur la tension des tissus (Bot. Zeil., 1867), il avait trouvé que lors du développement des entre-nœuds, la moelle est en avance sur les parties plus extérieures, qui par suite sont plus ou moins étirées. A cette extension dans la direction de l'axe longitudinal une limite est bientôt posée, dans l’état nor- mal, par l’épaississement des parois des divers éléments de l'écorce et surtout du faisceau vasculaire, de sorte que la moelle est ensuite plus ou moins retenue par la résistance des cellules de la tige, épaissies et à développement plus lent. Mais dans la tige éuiolée, où, comme nous l’apprend la structure anatomique, 294 P. RAUVWENHOFF. cet épaississement des parois ne se fait pas, la moelle a libre jeu, et atteint alors non-seulement la longueur entière qu’elle prendrait dans l’état normal si elle n’était pas retenue par d’autres éléments, mais une longueur encore plus grande, parce que les cellules médullaires s’allongent surtout par l'absorption d’eau. De cette manière il est rendu compte, semble-t-il, du fait connu, que les cellules médullaires de la tige étiolée sont plus longues que d'ordinaire, et l’explication est aussi d'accord avec les expériences de M. Sorauer (Bot. Zeit., 1874), d’après les- quelles la moelle croîtrait en longueur rien qu’en absorbant de l’eau. M. Kraus s’est ensuite demandé si l'excès de longueur des cellules médullaires suffit seul à expliquer l'allongement de la tige étiolée ; en d’autres termes, si l'allongement des cellules de la moelle est en rapport direct avec celui de la tige. Plus heureux que M. Sachs, — qui, à cause de la grandeur très- inégale des cellules du même tissu, n’avait pu arriver à un ré- sultat certain, — il a trouvé que le surallongement des cellules de la moelle expliquait bien en grande partie, mais non com- plétement, celui de l’entre-nœud ; d’où ilconclut que les cellules doivent aussi se multiplier plus qu’à l'ordinaire. Les observa- tions de M. Bataline ont confirmé cette conclusion, et moi-même j'ai obtenu des résultats analogues, que je juge toutefois inutile de rapporter, vu leur conformité avec ceux de mes devanciers. Suivant la manière de voir de M. Kraus, la moelle est donc l'agent actif de l'allongement exagéré de la tige dans l’obscurité, et cet allongement dépend de la différence de tension entre les couches de tissu internes et externes. Cela est en harmonie avec le fait que les tiges volubiles et grimpantes, chez qui la tension des tissus est extrêmement faible, conservent dans l’obscurité leur longueur normale. Il suit en outre, de cette manière de voir, que là où la moelle manque, l'allongement inusité doit aussi cesser de se produire. M. Kraus n’a pas examiné ce point, mais les résultats obtenus par M. Koch, sur des pieds de Seigle recevant une lumière insuffisante, m’avaient déjà fait douter que l’explication de M. Kraus fût applicable en ce cas. DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 295 Pour éclaircir ce doute, j'ai étudié expressément la manière dont quelques plantes à tiges creuses se comportent dans l’ob- securité. Les résultats de ces expériences ont été donnés ci- dessus pour l’Impatiens, puis pour le Polygonum cuspidatum, et enfin pour le Phaseolus multiflorus. Dans tous ces cas, il y eut surallongement de la tige, et, comme le montrent les mesures du Polygonum, non-seulement le petit nombre de cel- lules médullaires déjà formées, mais aussi et surtout les cel- lules de l'écorce et de l’épiderme avaient acquis par l’étiolement une longueur plus que double. L'office actif, dans ces cas, ne doit donc pas être attribué exclusivement à la moelle, mais pour le moins au même degré aux cellules de l'écorce. Tout au plus pourrait-il être question de la moelle comme agent actif dans la phase de première jeunesse, à raison du fait que chez la tige étiolée la moelle reste plus longtemps vivante, et par conséquent la cavité centrale de la tige atteint un peu plus tard la grandeur normale. Du reste, cet allongement exagéré des cellules corticales se montre aussi ailleurs, par exemple chez le Fuchsia et l’Impatiens tricornis. En tant qu'il s’agit de distinguer dans la tige une partie s’al- longeant activement et une autre s’allongeant passivement, je voudrais donc regarder comme partie active non-seule- ment la moelle, mais tout le tissu fondamental (Grund- gewebe de Sachs). Cela serait aussi d'accord avec les résultats fournis par les tiges monocotylédones, Chez lesquelles, surtout dans les cas où les faisceaux fibro-vasculaires s'étendent jusque dans la partie centrale, on ne saurait parler de moelle propre- ment dite. Get accroissement énergique du tissu fondamental peut d’ailleurs consister, soit dans l’allongement des cellules suivant la direction de l’axe végétal, ce qui est le cas ordinaire, soit dans leur développement dans le sens perpendiculaire à cet axe, lorsque, comme chez le Tradescantia Zebrina, la tige s’épaissit par l’étiolement. La théorie de M. Kraus, attribuant la longueur anormale de la tige placée dans l'obscurité à l’accroissement exagéré de la moelle, combiné avec le faible épaississement des organes élé- 296 P. RAUVWENHONE. mentaires du faisceau vasculaire, conduit à penser que chez les tiges étiolées la tension doit être moindre que chez les nor- males, sans toutelois devenir nulle. M. Kraus (p. 240 de son mémoire) rapporte à cet égard quelques données numériques, qui montrent que la tension est réduite dans les organes étiolés à environ la moitié de sa grandeur ordinaire, et quelquefois à moins. À ce même point de vue, il remarque que les tiges où il n'existe pas de tension à l’état normal, celles du Cucurbita par exemple, ne montrent pas non plus de surallongement dans l’obscurité, fait que j'ai vu moi-même chez l’Ipomæa. Relativement à cette tension, je n'ai d’ailleurs rien de nou- veau à communiquer, n'ayant pas fait d'expériences spéciales à ce sujet. Je dois seulement déclarer avoir plus d’une fois observé une tension évidente dans les parties étiolées de Pha- seolus, Fuchsia, Rosa, Polygonum. Quand on détachait Pépi- derme, celui-ci se courbait souvent tout autant que chez les plantes normales. À lappui de cette assertion, rappe- lons aussi l'intéressante expérience de M. Duchartre (1), répétée avec le même résultat par M. Hugo de Vries (2), sui- vant laquelle la tige du Dioscorea Batatas ne s’enroule pas dans lobscurité prolongée, mais s'élève droite le long du tuteur, jusqu'à une hauteur de 1",3 à 1",5. Nous avons ici un exemple d’une tension encore plus forte dans l’état étiolé que dans l’état normal. M Famintzine, en étudiantla germination du Lepidium sati- vum (3), atrouvé que les racines des petites plantes maintenues dans l’obscurité restaient plus courtes que celles des pieds croissant à la lumière, et cela, à ce qu’il pense, d’une quantité précisément telle, que la somme des longueurs de la racine et de la tige serait égale chez les plantes étiolées et chez les plantes vertes de même âge. Depuis, il a confirmé ce ré- sultat par un grand nombre d'observations (4). Ayant fait (1) Comptes rendus, t. LXL, p. 442. (2) Arbeiten d. AE Instituts zu Würzburg, WI, p. 928. (3) Mélanges biologiques, Saint-Pétershourg, t. VIT. (4) Bot. Zeitung, 1873, p. 367. DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 9297 germer 40 graines à la lumière et un nombre égal dans l’obseu- rité, il mesurä chaque jour séparément la longueur de l'axe hypocotylé et celle de la racine. Pendant sept Jours, la moyenne de chaque série de quarante mesures donna un résultat con- forme à la conclusion ci-dessus énoncée. À partir du huitième jour seulement, les sommes présentèrent un écart notable, parce qu'à ce moment les plantes germées dans lobscurité cessèrent de croître. Sans vouloir en rien contester l'exactitude de ces ré- sultats, qui d’ailleurs ont été vérifiés par M. Lasareff (1), je crois que l’équivalence des sommes en question (à la- quelle M. Famintzine attache de l’importance, mais qu'il ne peut expliquer) ne saurait jeter de jour sur la question qui nous occupe. Si la relation susdite entre la longueur de la tige et de la racine s’observait chez les plantes étiolées de tout âge, ce serait à coup sûr, vu le mode compliqué et dissemblable de nutrition et d’accroissement de ces organes, un phénomène extrême- ment remarquable, qui mériterait bien, en le supposant con- slants et non accidentel, de faire l’objet d’un examen approfondi Mais cette égalité des sommes des longueurs n’a été constatée pour l’axe hypocotylé et la racine primordiale que dans les pre- miers jours de la vie, c’est-à-dire pendant la période où les deux organes sont nourris exclusivement aux dépens des ma- tériaux de réserve de la graine. Ces principes nutritifs, prove- nant d’une seule et même source, étaient alors conduits, tant que la masse emmagasinée y suffisait, soit plus vers le haut, dans l’axe hypocotylé, soit plus vers le bas, dans la racine; ils l’étaient en quantité plus grande dans l’axe hypocotylé, quand l'accroissement vernal de celui-ci était soustrait à l’action ralentissante de la lumière. Dans ce cas, il restait moins de matières pour les besoins de la racine. C’est la, je crois, le secret de l’équivalence observée par M. Famintzine. En second lieu, j'ai indiqué comme une propriété des tiges (1) Just, Botan. Jahresber., I, p. 775. 298 P, RAUVWVENHONF. étiolées leur position verticale, Tandis que les plantes végétant à l’air libre ont, les unes leurs tiges et leurs branches dressées, les autres au contraire inclinées, horizontales ou même pen- dantes, les pousses développées dans l'obscurité s'élèvent pres- que toutes verticalement, et lorsque, avant d’être mises à l’a- bri de la lumière, elles avaient crû dans une autre direction, les parties jeunes et encore grandissantes ne tardent pas ensuite à se redresser suivant la verticale. De nombreuses recherches, dues à différents expérimentateurs, ont mis ce fait hors de doute. Parfois aussi on a l’occasion detrès-bien voir le phénomène, sans expérience proprement dite. Quand on visite au printemps les orangeries et les serres froides des jardins botaniques, au moment où leur contenu est porté au dehors, on trouve sans trop de peine, parmi les arbustes qui occupaient le fond, d'excellents exemples de tiges étiolées. C’est ainsi que j'ai été frappé souvent du singulier aspect de grands Fuchsias et d’autres plantes, dont les bourgeons, quelle que fût leur position première, s'étaient tous développés en pousses blan- ches verticales, de trois ou quatre entre-nœuds, à la suite des conditions défavorables de leur séjour d'hiver. Pour les plantes qui croissent au grand jour, les causes de la direction qu’elles prennent en s’allongeant ont été cherchées dans la pesanteur et dans la lumière. Déjà au commencement de ce siècle, Knight a tâché de fournir, par ses expériences de rotation, la preuve directe de l’influence de la pesanteur. Plus tard, Hofmeister, MM. Sachs, Wigandetd’autresont étudié l'influence des agents en question. Tous les deux, la lumière comme la pesanteur, ont le pouvoir de faire changer la direc- tion des parties végétales qui se développent : la première action est appelée héliotropisme, la seconde géotropisme ; l’une et l’autre peuvent être aussi bien négatives que positives, et la direction définitive de la tige est déterminée par leur résultante. La cause prochaine des flexions ou incurvations des tiges, que Hofmeister avait cherchée dans un excès d’extensibilité des parois cellulaires de l’épiderme au côté convexe, est, DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 299 d’après les recherches de M. Sachs, un excès d’accroissement à ce côté. Tandis que la direction des plantes vertes est ainsi détermi- née par le concours de différentes causes (auxquelles vient encore s’ajouter en certains cas la flexion par surcharge), le phé- nomène est plus simple chez les plantes étiolées, puisque l’un des facteurs, l’action de la lumière, fait défaut. Il ne reste plus que le géotropisme, qui agit positivement dans les racines, négativement dans les tiges. Get effet se voit déjà chez les plan- tes qui se développent dans la lumière jaune, par exemple dans celle qui est transmise par une solution de bichromate de potasse, car le pouvoir héliotropique manque à ces rayons. La direction verticale des tiges végétant dans l’obseurité est donc une conséquence immédiate du géotropisme négatif. Quant à savoir finalement à quoi doit être attribué l’allon- gement des tiges étiolées, voici comment je me représente que les choses se passent. En l’absence de l’héliotropisme, le géotropisme peut faire sentir librement son action sur le développement de la tige. Celle-ci, comme nous venons de le voir, croîtra donc sans obstacle dans la direction verticale, et les bourgeons qui affec- taient primitivement une direction différente seront bientôt, par la même cause, infléchis vers le haut. L’accroissement, c’est-à-dire la division et l'agrandissement des cellules, n’est pas lié à la présence de la lumière. II peut avoir lieu tout aussi bien dans l'obscurité, pourvu que les matériaux nécessaires à l'accroissement soient disponibles. C’est ce que nous apprennent une foule de phénomènes de la vie végétale, par exemple la formation de nouvelles racines et de bourgeons caulinaires sur les rhizomes, la production de stomates et de poils (impliquant aussi de nombreuses divisions de cellules) à l’intérieur de beaucoup d’organes où la lumière n’a pour ainsi dire aucun accès, les partitions cel- lulaires des Algues, qui se font même de préférence ou exclu- sivement la nuit, etc. Mais aucune preuve plus frappante que 300 P. RAUVWVENHOFF. le développement ci-dessus esquissé du Fritillaria, chez qui des tiges, des feuilles et des fleurs se formèrent au milieu d’une obscurité totale. L’accroissement longitudinal de la tige dans l'obscurité, regardé comme résultat aussi bien de la multiplication que de l'agrandissement des cellules, est donc parfaitement conci- liable avec nos vues actuelles. Bien plus, cet accroissement de longueur doit, suivant ces vues, être souvent favorisé par l'obscurité. Car : 1° la lumière exerce, comme l’a montré M. Sachs (1), une influence retardatrice sur l’accroissement, influence qui devient manifeste en un temps très-court. On n’a qu’à mesu- rer exactement, aux divers instants d’un jour complet, l’in- tensité de l'accroissement sous les mêmes conditions, notam- ment à température et humidité égales. On trouve alors, comme suite de l'alternance naturelle du jour et de la nuit, une élévation et une dépression périodiques de la vitesse d’aceroissement, avee un maximum à l’approche du lever du soleil et un minimum peu après midi. L’obscurité continue occasionnera donc, toutes choses égales d’ailleurs, un accroissement plus énergique, c’est-à-dire ici un allongement plus considérable de la tige en un même temps. 2 L’héliotropisme est lui-même, à proprement parler, une action retardatrice de la lumière sur l'accroissement. La flexion de l’organe végétal vers la lumière est due en effet à ce que le côté tourné vers la lumière croît moins vite que le côté opposé. L’obscurité totale, ou une lumière dépourvue d'action héliotropique, deux conditions où la flexion ne se produit pas, doivent done donner lieu à un allongement rela- tivement plus grand de la tige. La seconde partie de cette assertion est parfaitement démontrée par l'expérience communiquée ci-dessus, dans laquelle l’Impatiens, placé sous une cloche à bichromate de potasse, qui ne laissait passer que les rayons sans action (1) Arbeiten d. bot. Instituts zu Würzburg, KI. DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 301 héliotropique, poussa verticalement et se surallongea, tout en restant vert. La raison pour laquelle une tige s’allonge beaucoup plus que l’autre dans l'obscurité me parait devoir être cherchée surtout dans la grandeur différente de la tension qu'on ren- contre chez des plantes différentes, tant par rapport aux parois des cellules mêmes que par rapport aux tissus comparés entre eux. En faveur de cette opinion plaide d’abord la circonstance, justement signalée par M. Kraus, que l'excès d’allongement à l’état étiolé est nul ou extrêmement petit chez les plantes où l’on ne trouve que peu ou point de tension des membranes. D'un autre côté, je crois pouvoir invoquer les remarquables résultats obtenus par M. Traube sur des cellules inorganiques, dites cellulesartificielles (1),et ses expériences postérieures (2). Il est vrai qu'on ne peut en tirer des conséquences qu'avec une extrême circonspection, attendu qu'il y à une différence fondamentale, quant à la formation de la paroi et au mode d’accroissement, entre les cellules inorganiques et les cellules végétales ; aussi ne voudrais-je pas souscrire sans réserve à l'application que M. Traube lui-même a faite du résultat de ses expériences, pour expliquer l’accroissement de la Fève germée. Mais, entre les deux espèces de cellules, je trouve pourtant, avec M. Reimke (3), cette analogie-ci: que l'accroissement des unes et des autres exige une forte turgescence ; que cette turgescence est due à une éner- gique absorption d’eau dans les interstices des membranes, et que l’accroissement des parois se fait dans les deux cas par l'interposition des nouvelles particules entre celles qui existent déjà, après que la distance de ces dernières a été agrandie par la pression hydrostatique du fluide cellulaire. À ce point de vue, l'étude des cellules inorganiques est propre peut-être à jeter quelque jour sur ce qui se passe pour l’accroisse- ment de la tige placée dans l'obscurité. Les expériences de (1) Archiv. für Anat. und Physiol., 1867, p. 88. (2) Bot. Zeit., 1875, n°° 4 et 5. (3) Bot. Zeit., 1875, p. 425. 309 P. RAUWENHOFF. M. Sorauer (1) ont montré combien l’absorption d’eau, en aug- mentant la turgescence, favorise l’accroissement, et la pesan- teur agit, pour l'allongement des cellules de Traube, dans le même sens que le géotropisme chez la tige végétale. Un surallongement de la tige, dans l’obscurité, est encore rendu possible par la circonstance que l’accroissement en longueur n’est alors entravé, ni par un grand épaississement des parois des éléments du faisceau vasculaire, lesquels arrê- teraient dans leur développement les parties à parois minces, ni par une dépense rapide des matériaux nutritifs en couches d’épaississement de cellules existantes. Ni l’un ni l’autre, en effet, n’ont lieu dans l’obseurité. Quant à la question de savoir pourquoi 1l naît plus de cellules dans la tige étiolée que dans la tige verte, je ne saurais y ré- pondre, à moins de supposer que la division cellulaire se fait de préférence dans l'obscurité, et qu'ainsi l’absence continue de lumière permet à ce phénomène de se répéter plus souvent. Je ne puis dire non plus quelle est la vraie raison du déve- loppement imparfait du faisceau vasculaire. Nous avons, Je pense, affaire ici à un phénomène pathologique, dont la cause déterminante nous échappe, que nous ne pouvons encore déduire des données connues. D’autres facteurs entrent sans doute con- curremment en Jeu. C’est ainsi que dans la tige étiolée paraissent manquer certaines matières nécessaires à l’accomplissement normal des fonctions vitales, matières qui ne se forment que sous l'influence de la lumière. Plus loin, en parlant des modi- fications subies par les feuilles, je reviendrai sur cette présomp- tion, qui a déjà été énoncée par M. Prantl. Changements de forme des feuilles. Comme on l’a vu ci-dessus, les anomalies que présen- tent les feuilles des plantes étiolées ne sont pas expliquées de la même manière par M. Kraus et par M. Bataline. (1) Bot. Zeit., 1873, p. 145. DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 303 L’explication de M. Kraus revient essentiellement à ceci, que la feuille étiolée reste à l’état où elle se trouvait dans le bourgeon, parce qu’elle n’est pas dans la condition d’assimiler elle-même ; l'explication de M. Bataline consiste à dire que la feuille reste petite, parce que les cellules ne se divisent pas dans l’obscurité. À l'interprétation de M. Kraus, toutefois, des objections fondées ont été faites par M. Bataline; tandis qu’à son tour l’opinion de celui-ci a été réfutée par les mesures directes de M. Prantl. Que faut-il donc penser à ce sujet? À quelles causes devons-nous attribuer le développement si différent des feuilles étiolées ? D'abord, en ce qui concerne les feuilles des Graminées et d’autres Monocotylédones, qui dans lobscurité deviennent longues et étroites, elles ne paraissent éprouver de l’absence de lumière les mêmes effets que les tiges. La direction dans laquelle ces feuilles croissent, direction à peu près verticale, fait à elle seule déjà supposer que le géotropisme négatif joue ici un rôle. Cette influence, de même que chez les tiges, devient prépon- dérante lorsque, par suite du développement dans l'obscurité, l’héliotropisme ne la contrarie plus. Or, quant à cette dernière action, l’observation de M. Sachs (1) montre que chez les feuilles en question l’héliotropisme positif est très-prononcé, puisqu'elles deviennent même asymétriques quand elles ne sont éclairées que d’un seul côté. Notre présomption trouve aussi un appui dans la structure anatomique de la feuille, qui est la même à la face supérieure et à la face inférieure, et qui, chez la feuille étiolée, n’accuse qu’un faible épaississement des parois dans les éléments des faisceaux vasculaires. Chez ces feuilles étiolées le rapport entre la longueur et la largeur est ordinairement changé, c’est-à-dire que, ou bien (chez les Graminées) elles présentent un excès de longueur avec une largeur à peu près normale, ou bien (comme chez le Fritillaria) la largeur à tout au plus la moitié de sa mesure habituelle, la longueur concordant sensiblement avec celle des feuilles vertes. Chez le Fritillaria, il résulte de mes (1) Lehrb, der Botan., 4° édit., p. 808. 30% P. ARAEVVENFONM. mesures que les cellules épidermiques étaient environ moitié aussi larges et un peu plus longues que celles des feuilles nor- males, tandis que les cellules stomatiques ne différaient ni en grandeur ni en nombre, et, bien que privées de matière verte, étaient abondamment pourvues de fécule. Je crois donc que les modifications des feuilles en question peuvent être rapprochées de celles des tiges. L'opinion de M. Kraus, d’après laquelle une différence de tension dans le sens longitudinal et dans le sens transversal serait ici la cause déterminante, me parait, de même qu’à M. Bataline, non justifiée. Ce qui vient d’être dit s'applique aussi, en second lieu, aux pétioles, qui, chez beaucoup de plantes, atteignent dans lobscu- rité une longueur inusitée. Un pied feuillé de Primula chinensis par exemple, placé dans l'obscurité, ne montra pendant plu- sieurs jours aucune modification dans ses feuilles, pas même dans celles qui n'étaient pas encore tout à fait adultes. Celles-c1 cessèrent de croître ; par contre, les pétioles s’allongèrent con- sidérablement et atteignirent une longueur de 45 à 20 centi- mètres. Peu à peu les feuilles les plus âgées, et ensuite les plus Jeunes, commencèrent à se faner et finirent par tomber. En même temps il se forma, près du sommet de l'axe, des feuilles nouvelles étiolées, avec un limbe très-petit, de ? à 3 centi- mètres de largeur tout au plus, et pourvues d’un très-long pétiole. Le Pelargonium zonale présente le même phénomène, lors- qu'il végète dans l'obscurité. Les petites feuilles formées dans ces conditions avaient de très-longs pétioles, dont le parenchyme était constitué par des cellules plus longues, d’après mes mesures, que les cellules correspondantes du pétiole vert. Les cellules du bois étaient aussi moins épaissies, et les faisceaux vasculaires eux-mêmes étaient isolés etne formaient pas un anneau ligneux, comme dans les pétioles normaux. Un troisième exemple n'a été fourni par le Polygonum Bis- torta. Des rhizomes placés dans l’eau développèrent des feuilles tant à l'air libre que dans un coin obscur d’une chambre A exposée au nord. Mais ces feuilles avaient dans les deux cas DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 305 des dimensions bien différentes, commele montrentles chifires suivants : Feuilles vertes. Feuilles étiolées. Longueur de la feuille et du pétiole. . . 8,0 centim. 18,0 centim. — du limbe de la feuille.. . . . 6,0 4,5 Donc longueur du pétiole... . . . . . . 2,0 13,9 Largeur du limbe de la feuille. . . . . 2,0 0,7 Enfin, j'ai encore à communiquer un fait intéressant relatif au Rosa centifolix. Deux pieds vigoureux furent placés, au printemps, l’un à la lumière, l’autre dans l’obscurité. Tous les deux émirent une nouvelle pousse, celle du second étant, comme on le sait d’après ce qui a été dit ci-dessus au sujet de la tige, blanche et beaucoup plus longue que celle du premier. Les deux pousses portaient des feuilles. Le rameau vert, terminé par un bouton à fleur, avait trois feuilles développées, qui mesuraient en moyenne 10 centim. de la base du pétiole au sommet de la foliole terminale. Celle-er avait une longueur de 3,8 centim., sur une largeur de 3,0 centim., de sorte que le pétiole était long de 6,2 centim. Le rameau étiolé, également terminé par un bouton à fleur (qui était très-long et effilé), avait formé trois petites feuilles rudimentaires, dont la fohiole la plus grande ne mesurait que 1,7 centim. en longueur et 1,0 centim. en largeur, mais dont les pétioles, beaucoup plus redressés que chez la plante nor- male, atteignaient une longueur de 8,5 centim., et même plus. Dans le pétiole vert se trouvaient, tout près de l’extrémité, trois faisceaux vasculaires, de grandeur à peu près égale sur la coupe transversale; dans le pétiole étiolé 11 y avait également trois faisceaux vasculaires, mais, indépendamment du carac- tère ordinaire d’un épaississement moindre des parois, caractère commun aux trois faisceaux, celui du milieu présentait une section plusieurs fois plus grande que celle des deux faisceaux latéraux, de sorte que la coupe du pétiole avait un tout autre aspect. Aux parties plus anciennes du pétiole, je trouvai cinq et 6° série, Bor. T. V. (Cahier n° 5). ‘ 2) 306 P. RAUWENHOFF. quelquefois six faisceaux vasculaires dans les deux cas, mais toujours le faisceau central était, chez la pousse étiolée, rela- tivement plus grand que les autres, Je constate le fait sans pouvoir en donner d'explication. Serait-ce de nouveau une conséquence de la tendance des organes éliolés à pousser verticalement ? Le géotropisme négatit entrerait-il encore ici en jeu, et favoriserait-il accroissement des parties centrales aux dépens des parties latérales, de même qu'il parait déterminer l’allongement des organes axiles, non celui des feuilles ? Le phénomène pourrait-il être comparé à la réduction en largeur des feuilles monocotylées, dont nous avons parlé tout à l'heure ? Dans ce cas, les pétioles se ratta- cheraient donc aussi aux organes caulinaires, tant par lPaug- mentation d’accroissement en longueur que par la direction plus verticale, et par le défaut d’épaississement des parois et le développement imparfait des parties latérales. En troisième lieu, nous avons à considérer les feuilles des Dicotylédones à nervures anastomosées, qui dans l'obscurité restent généralement petites et non développées. Ici il est extrèmement dificile de rendre un compte tant soit peu satis- faisant des phénomènes qui se produisent. Pourrait-on supposer qu'il y a dans ce cas une opposition polure avec les organes caulinaires et avec les feuilles qui croissent verticalement ? que la lumière, qui partout ailleurs retarde laccroissement, fait ici tout juste le contraire et favorise le développement ? Cela est difficile à admettre, et est aussi immédiatement réfuté par l'héliotropisme des feuilles, qui est positif dans la orande majorité des cas. Aussi n1 M. Kraus, ni M. Bataline, w’ont-ils avancé cette hypothèse; au contraire, M. Bataline confirme une observation antérieure de M. Sachs, montrant qu'une lumière très-forte est nuisible au développement de beaucoup de feuilles, puisque dans ces circonstances elles restent plus petites qu'à une lumière diffuse, moins intense. L'explication doit donc être cherchée ailleurs, M. Kraus croit la trouver en ce que les feuilles ne croitraient dans l’obs- eurité qu'autant qu'il est nécessaire pour sortir de l’état de DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 307 bourgeon. Passé ce moment, elles sont destinées à assimiler elles-mêmes et à former de la fécule au moyen de la chloro- phylle. I montre l'absence de la fécule dans les feuilles étiolées, et en conclut que celles-ci restent à l’état gemmaire et, ne pou- vant se nourrir elles-mêmes, doivent bientôt cesser de croitre et mourir. Le phénomène, toutefois, n’a pas ce degré de sim- plicité. Personne ne conteste que les feuilles placées dans l’obs- curité ne soient privées du pouvoir d’assimilation, et qu’on n° trouve pas de fécule, sauf dans les cellules stomatiques et dans une rangée de cellules autour des faisceaux vasculaires. Dans mes expériences, ce fait s’est aussi constamment vérifié. Mais tout n’est pas expliqué par là. D'abord il n'est pas exact de prétendre que la feuille, après avoir quitté létat de bourgeon, doit se nourrir entièrement elle-même. Cela est en contradiction avec le fait universelle- ment connu que presque toutes les feuilles, lorsqu'elles sont séparées de la plante qui les a produites, sont incapables de continuer à croître, même lorsqu'elles peuvent recevoir ex abondance l'humidité nécessareet les matériaux nutritifs tant inorganiques qu'organiques. Une expérience spéciale, que j'ai faite il y a quelques années, met cette incapacité en pleine lumière. Dans l'été de 1867, j'ai pratiqué sur différentes plantes qui croissaient vigoureusement en pleine terre, savoir : Acer Negundo, Bignonia Catalpa, Robina Pseudacacia, Rhus Typhina, Dahlia variabilis, Gleditschia triacanthos, des incisions plus ou moins profondes au pétiole (ordinairement jusqu’au centre de celui-e1), parfois en différents points de la même plante ou du même pétiole général, puis j'ai abandonné à eux-mêmes, sur la plante, les organes ainsi lésés. Le plussouvent ilscontinuèrent à croître, mais en subissant des modifications remarquables, comme peuvent encore le montrer les échantillons séchés que j'ai devant moi, qui furent eueillis après leur entier développement. À mesure que l’incision avait été plus profonde et la feuille plus jeune, les modifications étaient naturellement plus prononcées, mais le 308 P. RAUWENHOFF. résultat général (déjà obtenu antérieurement par M. Donders) fut que la feuille ou la foliole, bien qu'entièrement intacte elle-même, était plus ou moins troublée dans son dévelop- pement aussitôt que l'apport de matériaux nutritifs par le pétiole était plus ou moins entravé. Citons un seul exemple comme éclaircissement. Une feuille pennée de Rhus Typhina, longue de 18 centim., fut incisée le 24 août, à gauche sous la première foliole, et à gauche et à droite sous la troisième paire de folioles (comptées à partir de la base). Lorsque la feuille, entièrement adulte, fut cueillie, elle avait une longueur totale de 42 centim., et, tandis que les sept paires supérieures de folioles et la foliole terminale étaient développées norma- lement, les quatre autres paires de folioles présentaient des anomalies. La foliole inérieure de gauche et les deux folioles de la 3° paire, situées toutes les trois directement au-dessus des incisions pratiquées, n'avaient atteint que les 2/3 de la grandeur normale. La 2° foliole de droite et la 4° paire tenaient, quant à leurs dimensions, le milieu entre la 3° et la 5° paire, cette dernière ayant la grandeur normale et n’accusant donc plus, d’une manière appréciable, l'influence de l’inci- sion. Les deux folioles inférieures de droite avaient au con- traire atteint une taille plus grande que d'ordinaire. Elles étaient les plus grandes de toutes les folioles de la feuille pennée. On voit donc combien une feuille déjà sortie de l’état de bourgeon à encore besoin de matériaux nutritifs apportés par le pétiole, combien elle dépend, quant à son dévelop- pement, de la quantité de ces matériaux. ILest vrai que M. Kraus mentionne une expérience où il à vu une feuille de Vitis vinifera, qu'il avait recouverte à moitié d’une feuille d’étain, ne former de fécule et n’augmenter de grandeur que dans les parties exposées à la lumière, de sorte que la feuille était devenue asymétrique. Mais, sans élever le moindre doute sur l'exactitude de cette expérience (qui toute- fois ne m'a pas réussi), J'y opposerai ce fait bien connu en horticulture, que sur des fruitsen maturation, des pêches par exemple, on peut faire apparaître des figures diverses, des DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 309 lettres ou des chiffres, en y appliquant une couverture opaque découpée à jour, telle que du gros papier. La soustraction de lumière produit alors une décoloration locale, comme chez la feuille de Vofis vènifera, mais sans que l'accroissement s’en ressente, car les fruits soumis à ce traitement ne sont pas irré- guliers ou déformés, ainsi qu'il devrait arriver dans le cas d’un arrêt local de l'accroissement. Pour en revenir à la feuille : du fait que la feuille assimile et produit de la fécule sous l’influence de la lumière, on ne saurait déduire qu'elle puisse préparer elle-même tous ses matériaux et vivre de ses propres ressources. Non-seulement les expériences citées ci-dessus, mais les nombreuses analyses de feuilles de divers âges le démontrent avec toute évidence. Sans remonter aux recherches plus anciennes, on n'a qu'à consulter les résultats des analyses des feuilles de Hêtre aux diverses phases de leur développement, analyses faites par M. Zoller (4) et plus tard confirmées et étendues par M. Riss- müller (2), pour acquérir la conviction que pendant toute là durée de son existence la feuille reçoit et élabore des matières et restitue des matières aux organes axiles, de sorte qu’à propre- ment parler on ne peut même la concevoir accomplissant ses fonctions vitales en dehors de sa liaison avec le reste de la plante. En second lieu, on peut objecter à l'explication de M. Kraus que la feuille étiolée est tout autre chose qu’une petite feuille à l’état gemmaire. La feuille née dans l’obscurité est en géné- ral petite, tout en présentant des différences assez notables de dimensions chez des plantes différentes; mais toujours elle surpasse plusieurs fois en grandeur la petite feuille de la même espèce qui vient de sortir du bourgeon. Pour s’en convaincre, on n'a qu'à comparer l’une et l’autre chez le Fuchsia, le Pe- largonium, le Phaseolus, ete. Chez le Begonia glabra, la feuille étiolée atteignit même une surface de 6 à 10 centim. carrés. Le plissement ou l’enroulement que les feuilles présentent (1) Landw. Versuchsstat., VI, p. 231. (2) Rissmüller, #bid., XVI p. 17. 310 BP. MAUVYENEEONE. dans le bourgeon ne se retrouve pas non plus chez la feuille étiolée, bien que parfois les bords de la feuille rappellent un peu cet état. Mais la preuve ta plus concluante de la différence en question est donnée par la structure anatomique de la feuille étiolée. Les divers issus y sont bien différenciés, beaucoup plus dis- inctement que chez la feuille renfermée dans le bourgeon. I à aussi un plus grand nombre de cellules dans la feuille étiolée, ainsi que M. Pranti (D) Pa établi par des mesures spéciales chez le Phaseolus vulgaris. Par là se trouve directement réfutée l'explication de M. Bataline, suivant laquelle le défaut d’ac- croissement de I& feuille étiolée serait dù à ce qu'il ne peut s’y opérer de divisions cellulaires, — explication qui était déjà rendue très-improbable par les nombreux exemples de cel- lules se divisant dans Pobscurité que nous fournit le règne végétal. Comparée à la structure de la feuille verte, celle de la feuille étiolée offre toutefois quelques différences importantes. Outre les faisceaux vasculaires, relativement peu développés, c’est surtout le parenchyme spongieux qui se trouve modifié. Tandis que l’épiderme est bien développé dans les deux cas (encore qu'il puisse v avoir quelque différence quant à la orandeur absolue des cellules épidermiques), et que le paren- chyme en palissade, quoique privé de chlorophylle, ne montre aucun retard d’accroissement, on voit dans la moitié inférieure de la feuille, au lieu de parenchyme spongieux bien connu, un üssu de cellules serrées qui souvent se distingue à peine du parenchyvme en palissade. Ces cellules ne se sont pas allongées, et les parois contigües ne se sont pas disjointes, de sorte que Jes cavités et canaux aériens font défaut. M. Kraus, qui en avait aussi déjà fait la remarque (£. e., p. 231), attribue avec raison à ce développement imparfait du parenchyme spongieux le phénomène que les bords des feuilles étiolées se roulent ordi- nairement en arrière. Selon lui, dans l’état normal, le paren- chyme spongieux se développe beaucoup plus tôt que le parenchyme en palissade, parce que les petites feuilles, en (1) Arbeiten d. bot. Instit. zu Würzburg, HE, p. 584, DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 311 sortant du bourgeon, ont d'abord une position verticale, et qu’alors leur face inférieure, tournée en dehorset recevant l’in- fluence de la lumière, est la première à former de la chloro- phylle et ensuite de [a fécule. Si les choses se passent ainsi, et je n’ai aucune raison d'en douter, il résulterait de là un nouvel argument contre la thèse de M. Kraus, qui regarde la feuille étiolée comme restée dans la période de l'état de bourgeon; car, d'accord en cela avec M. Kraus, J'ai toujours trouvé dans la feuille étiolée le parenchyme en palissade bien développé, mais non le parenchyme spongieux. En général, les feuilles qui restent petites dans l'obscurité paraissent être surtout celles où se voit un contraste manifeste (par la présence du parenchyme en palissade et du parenchyme spongieux) entre la moitié supérieure et la moitié inférieure. Telest le cas des feuilles de la plupart des Dicotylédones. Chez les Monocotylédones, où 1l existe peu ou point de différence entre les deux moitiés supérieure et inférieure, les feuilles attei- gnent généralement des dimensions relativement plus grandes. Il en est de mème chez certaines Dicotylédones, telles que le Begonia glabra, dont les feuilles ont à peu près la même structure en dessus et en dessous. Peut-être ne se risque-t-on pas trop en songeant, chez cette dernière plante, à une influence prépondérante de Pépiderme. M. Famintzine (1), en effet, a montré dernièrement que les grandes cellules limpides et sans chlorophylle, dont se compose la masse principale de la feuille, sont nées par divisions tangentielles des cellules épi- dermiques, et non, comme le croyait M. Pfitzer, de la couche cellulaire sous-jacente de lépiderme. S'il est vrai que la 4° et la 6° des couches initiales de Famintzine forment les cellules en question, lépiderme (qui dans les organes étiolés est ordinai- rement bien développé, pourvu de stomates et même de fécule) est peut-être, chez la feuille de Begonia, la cause prochaine de laccroissement relativement grand qu’elle prend dans l'obscurité. (D) Beitrag zur Keimblattlehre tm Pflanzenreich, dans Mém. de lV'Acad. imp, des sc. de Saint-Pétersbourg, T° sér., t. XIE, p. 26. 312 P. RAUWENHOFF. Si l’on demande quelle est la vraie cause du faible dévelop- pement des feuilles, je dois m’abstenir de répondre ; une expli- cation exacte et complète du phénomène ne n'est pas connue, et Je ne crois pas non plus qu’elle puisse être donnée en ce moment, attendu qu'elle exigerait, ainsi que je lai montré plus haut, la connaissance préalable de divers points non étudiés jusqu'ici. Mais si lon se borne à demander dans quelle direction il faut chercher de préférence pour se rappro- cher du but désiré, je pense qu'il y a déjà quelques indications à donner. La feuille étiolée est, à mon avis, un phénomène pa- thologique, provenant en partie, ainsi que l’a déjà remarqué M. Sachs, du défaut de l'assimilation, laquelle appartient aux fonctions normales de la plante, et en partie aussi d’autres causes qui ont de l'influence sur laccroissement. Les phéno- mènes chimiques jouent probablement dans la question un rôle au moins aussi important que les phénomènes physiques. Il convient de rappeler ici l’expérience de M. Bataline, qui, ayant mis de jeunes plantes pendant une heure et demie à trois heures, chaque jour, à une limière très-faible, vit les petites feuilles grandir sous cette influence. Cette lumière était insuf- fisante à former la matière colorante chlorophyllienne, car les cotylédons et les tigelles ne montraient pas trace de verdis- sement, ils étaient aussi pâles que ceux qui étaient restés dans l’obscurité. [ne pouvait pas non plus y avoir eu d’assimilation dans ces circonstances. Et malgré cela, les feuilles de ces plantes, exposées pendant peu de temps à un minimum de lumière, se développèrent beaucoup plus vite et plus longtemps que les autres et atteignirent par suite des dimensions bien plus considérables. Apparemment il y a eu ici formation de matières chimiques nécessaires au développement des feuilles, et dont la production exigeait l’action de la lumière, mais d'une lumière si faible, qu’elle n’était pas capable de donner naissance à la chlorophylle et encore moins, par conséquent, de déterminer l'assimilation. C'est là aussi, je présume, la raison pour laquelle les plantes qu'on fait germer dans l’obscurité meurent si souvent, bien DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 313 que les cotylédons ou l’albumen soient encore remplis de ma- tériaux nutritifs. M. Kraus pense que dans ces cas la plante est privée du pouvoir de transformer sa fécule en cellulose dans l’obseurité. Je préférerais dire, d’une manière plus générale, qu'un état pathologique est survenu, parce que certaines ac- lions chimiques nécessaires au développement normal, et qui, tout en pouvant s’accomplir à une lumière faible, ont pourtant besoin à un certain degré de l’intervention de cet agent, ou bien ne se sont pas produites, ou bien ont été modifiées. Ces modifications chimiques, dues à l'absence de la lumière, ne nous sont encore que très-imparfaitement connues. On sait que la matière colorante verte pàlit et disparait, que la fécule existante diminue et qu'il ne s’en forme pas de nouvelle; en un mot, que l’assimilation n’a pas lieu. Mais il v à encore bien d’autres actions qui ont ici de l'influence. Nous aurons donc à rechercher en premier lieu quelles sont, des matières chimiques contenues dans les plantes normales, celles qui manquent ou sont modifiées dans la plante étiolée du même âge. Peut-être trouve-t-on aussi dans cette dernière des combinaisons qui n'existent pas dans la plante verte. Tout le monde sait que les parties végétales étiolées, dont on fait usage pour l’alimenta- tion, l’Endive, la Laitue, l'Asperge, différent considérablement des parties analogues vertes, non-seulement par une consis- tance plus tendre, mais aussi par un goùt moins amer ou moins âcre. Entre les unes et les autres, 1l y a done évidemment une différence chimique. Mais je ne sache pas que des études com- paratives aient été faites concernant la nature de cette diffé- rence ou la quantité et l’espèce des matières dans les deux cas. En revanche, nous possédons quelques données importantes pour la comparaison des changements chimiques qui se pro- duisent lors de la germination des graines dans l'obscurité et à la lumière. En premier lieu, nous avons les belles recherches de M. Pfeffer sur l’asparagine (1). Gette matière azotée, décou- verte dès 1805 par Vauquelin et Robiquet dans l’Asperge ordi- (1) Pringsheim, Jahrb. für wissensch. Bot., VI, p. 557. ‘314 P. RAUWENHOFT. naire, sé forme, d’après le témoignage concordant de différents expérimentateurs, lors de la germination de diverses graines, et très-distinctement surtout chez le Lupinus luteus, aux dépens des matières albuminoïdes que ces graines renferment. Dans cette transformation, qui peut s'effectuer aussi bien sous l'influence qu'à Pabri de la lumière, de Foxygène est fixé et du carbone et de l'hydrogène sont mis en liberté. Lorsque les plantes germantes restent dans lobseurité, l'as- paragine s’accumule, jusqu’à constituer 1/5° de la matière sèche, selon MM. Schulze et Umlauft (1). Les plantes sont-elles au contraire exposées à la lumière et commencent-elles à assi- miler, on voit l’asparagine disparaitre peu à peu. Cette mfluence de la lumière, mise en question par quelques-uns, mais déjà signalée par M. Boussingault et confirmée par M. Pfeffer (2), parait consister en ce que, au moyen des hydrocarbures formés par assimilation, l’asparagine régénère les matières albumi- noïdes qui feront la base du protoplasma. Chez le Lupinus et autres plantes, toutefois, dont les graines renferment rela- üvement peu d'hydrocarbures, 1l n’en existe pas une quantité suffisante pour fournir, indépendamment de la perte due à la respiration dans l'obscurité, le sucre nécessaire à cette régé- nération. C’est pourquoi l’asparagine ne disparait pas. Ainsi done, l'absence de lumière a pour résultat que l’aspa- ragine, qui est probablement lintermédiare par lequel les parties nouvelles de la plante normale reçoivent leurs matières albumineuses, ne peut remplir ce rèle, de sorte que la forma- tion du protoplasma est aussi entravée. Une autre contribution importante, que je me bornerai à citer, est le travail de M. Rudolf Weber sur la fixation de principes morganiques par des Pois germant sous une lumière diversement colorée et dans l'obscurité (3). Gette fixation s’est (1) Landw. Versuchsstal., XVI, p: 1. (2) Voyez à ce sujet, outre le travail ci-dessus cité de M. Pfeffer (p. 557 et suiv.), l'ouvrage que vient de publier M. Robert Sachsse : Die Chemie und Physiologie der Farbstoffe, Kohlenhydrate und Proteinsubstanzen, p. 246-256. (3) Landw. Versuchsstiat., XVTE, p. 18. DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 319 montrée tout aussi dépendante de la lumière que la décompo- sition de acide carbonique par les plantes vertes, et la diffé- rence se manifestait non-seulement dans la quantité totale des matières incombustibles, mais aussi et surtout dans leur nature. C’est ainsi que sous l'influence des rayons les moins réfrangibles il se fixa beaucoup plus d'acide phosphorique, fait entièrement en harmonie avec l'abondance des matières protéiques formées dans ces conditions, tandis que sous l'influence des rayons . bleu foncé, plus réfrangibles, et plus encore dans l'obscurité, l'absorption de la potasse et de la chaux devint relativement prépondérante. Or, comme nous Pont appris les recherches de M. Zoller (1), la potasse et surtout la chaux sontles matières inorganiques qui ont les rapports les plus intimes avec la for- mation de la cellulose. Les cendres de toute paroi cellulaire en renferment une certaine quantité, et un apport copieux de ces substances favorise le développement des cellules, ainsi qu'il résulte d'expériences directes faites sur le Maïs. . Les modifications considérables que présente le phénomène chimique dans les plantes étiolées ont aussi été récemment mises en lumière, en ce qui concerne le soufre, par M. E. Schulze, de Zurich (2). Tandis que les plantes vertes possèdent, comme on sait, le pouvoir de décomposer les sul- fates au profit des matières albuminoïdes sulfurées, M. Schulze a trouvé que, chez le Lupinus luteus développé dans l'obscurité, la proportion d'acide sulfurique augmente en même temps que la décomposition des matières protéiques. L'analyse lui donna, en 100 parties de matière sèche : Dans.la graine non germée.:. .:... . … 0,385 acide sulfurique. Dans les plantes âgées de 12 jours. . . 1,510 Dans les plantes âgées de 15 jours. . . 1,703 Ainsi, pendant que les matières albuminoïdes se transfor- ment en asparagine, avec élimination de carbone et d’hydro- sène, leur soufre est oxydé et changé en acide sulfurique. Un autre fait que J'ai observé et dont on pourra peut-être (1) Regensburger Flora, 1807, p. 509. (2) Landw. Versuchsstat., XIX, p. 172. 316 P. RAUWENHOFF. ürer quelque parti, est l’absence complète de novaux cris- tallins dans les cellules des pieds étiolés du Polygonum cuspidatum, noyaux qui sont au contraire si abondants dans la plante verte. L'oxalate de chaux, dont ces cris- taux se composent, doit en eflet être considéré, d’après les recherches de M. Holzner (1), de M. Hilgers (2) et d’autres, comme un produit d'élimination, par le moyen duquel la chaux superflue et inutile à la vie de la plante est déposée sous forme solide. Cette chaux est mise en liberté par le phos- phate de chaux absorbé, lorsque celui-ci se décompose pour fournir l'acide phosphorique nécessaire aux nouvelles matières albuminoïdes qui se forment. L'acide oxalique, substance généralement répandue dans les plantes vertes, provient pro- bablement, soit de la réduction de lacide carbonique ab- sorbé, soit, d’après quelques-uns, du dédoublement de la séve assimilée, lors de la formation du protoplasma. En tout cas, cet acide apparait d’une manière assez constante au voisinage immédiat des organes qui se développent, et par suite les cristaux d’oxalate de chaux se rencontrent, d’abord petits et ensuite plus grands, dans les parties relativement jeunes des plantes. Leur absence totale dans la plante étiolée témoigne donc : 1° d’un trouble dans l'absorption ou la réduction du phosphate de chaux, ce qui est tout à fait en harmonie avec les expé- riences ci-dessus citées de M. Weber et avec le résultat obtenu par M. Pfeffer, à savoir que, dans l'obscurité, l’asparagine ne régénère pas la matière albumineuse; elle témoigne 2°, suivant qu'on adopte l’une ou l’autre des deux hypothèses concernant l’origine de l’acide oxalique, soit du défaut de réduction de l'acide carbonique, déjà connu d’ailleurs, soit d'un chan- sement dans la composition de la séve assimilée, par suite d’une modification des phénomènes chimiques. Enfin, relativement à l’acide tannique, j'ai, dans le cours d’autres recherches, étudié avec beaucoup de soin les points (1) Flora, 1867, p. 497 et 513. (2) Pringsheim, Jahrb. für wissensch. Bot., VE, p. 285. DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 317 d’analogie et de différence entre des plantes vertes de la même espèce. L’acide tannique, qui prend naissance lors de la ger- mination (il manque dans la graine non germée), se trouve ordinairement aussi bien dans les plantes étiolées que dans les plantes normales. La lumière ne parait donc pas être nécessaire à sa formation; néanmoins, sous ce rapport aussi, on constate encore quelque différence suivant que la plante a été soumise ou non à l’action de ce stimulant. En général, la quantité d'acide tannique est plus faible dans les organes étiolés, la distribution est moins régulière et la réaction, surtout avec le bichromate de potasse, un peu autre. Cest ainsi que la feuille verte du Polygonum Pistorta contient de l’acide tannique dans la plupart des cellules du parenchyme et dans les éléments du faisceau vasculaire, tandis que la feuille étiolée n’en renferme que dans ce dernier. Ainsi encore, J'ai trouvé dans le rameau étiolé du Rosa centifolia le nombre des cellules tannifères de l’écorce beaucoup plus petit que dans le rameau vert, et en outre le tannin S'y trouvait en partie sous une autre forme. Il en était de mème chez le Vicia Fabu. Comme notre ignorance est encore presque complète au sujet de l’origine et de la fonction de l'acide tannique dans la plante, les différences qui viennent d’être signalées ne per- mettent, pour le moment, aucune conclusion relativement à la question qui nous occupe; mais la circonstance que l'acide tannique, dont la présence est si générale au voisinage immédiat des organes qui se développent où qui jouissent d’une vitalité énergique, parait être, quant à sa formation, indépendant de la lumière, ou du moins n’en être modifié que dans une faible mesure (peut-être secondairement), cette cir- constance, dis-je, mérite bien d’être notée. Les faits qui précèdent, tout en montrant çà et là quelques rapports, ne sont pas à beaucoup près suffisants pour donner une explication des phénomènes de l’étiolement. Ce ne sont encore que des pierres d'attente isolées et éparses, mais qui 318 P. RAUWENHOKF. plus tard trouveront leur place et leur emploi, lorsque les matériaux seront complets et que l'architecte sera venu pour élever le monument. Aussi ne me suis-je pas proposé, je le répète, de trouver la solution du problème ; mon seul but a été de faire le triage des idées émises concernant les causes des modifications que la soustraction de lumière occasionne dans les plantes, de signaler les lacunes de nos connaissances, et d'indiquer la direction dans laquelle, à mon avis, les recherches doivent être conduites pour éclairer la question. Les résultats auxquels nous sommes parvenus peuvent être résumés de la manière suivante : 1° L'opinion de M. Kraus, suivant laquelle l’allongement anormal des tiges dans l’obscurité est la conséquence d’un excès de croissance de la moelle, combinée avec un développe- ment imparfait et un faible épaississement des éléments du faisceau vasculaire, est fondée en ce qui concerne le second point. J’en at donné la preuve, pour des plantes appartenant aux genres Rosa, Phaseolus, Fuchsia, Impatiens, Vicia, Poly- gonum, Tradescantia, Fritillaria, par une culture imtention- nelle et par de nombreuses mesures comparatives. La différence anatomique entre les tiges vertes et étiolées s’accuse surtout dans le faible épaississement, chez ces der- mères, des parois des cellules épidermiques, ligneuses et libériennes, dans le nombre et la dimension radiale des fais- ceaux vasculaires et de leurs éléments, dans l'absence de la gaine du faisceau vasculaire chez les Monocotylédones, et par contre dans le développement considérable de la moelle. % C'est à tort que M. Kraus attribue le défaut d’épais- sissement des parois de Pépiderme et du collenchyme à l’ab- sence de la matière colorante chlorophyllienne, car les cellules de la moelle ont souvent aussi des parois minces, bien qu’elles ne possèdent pas de matière colorante verte; l'hypothèse en question ne se concilie pas non plus avec le fait que les cellules parenchymateuses de l’écorce et l’épiderme atteignent parfois une grandeur extraordinaire. DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 319 3 L'allongement exagéré de la tige dans lobscurité n’est pas imputable, comme le veut M. Kraus, à l'influence pré- pondérante de la moelle seule; le rèle actif en ce phénomène doit être attribué au tissu fondamental tout entier (à lécorce aussi bien qu'à la moelle), car : a. Des tiges creuses montrent aussi cet allongement extraor- dinaire (Polygonum, Phaseolus, Impatiens). b. Souvent l’écorce est allongée anormalement, mème là où la moelle existe (Fuchsia). 4 Le développement plus énergique du tissu fondamental, surtout de la moelle, peut donner lieu à un suraccroissement dans une direction perpendiculaire à l’axe de la plante (e’est- à-dire à une augmentation d'épaisseur de la tige), là où l'ac- croissement longitudinal parait être moins actif (Fuchsia, Tra- descantia). 5° La dépendance admise par M. Famintzine entre la lon- gueur de la tige et celle de la racine n’est pas justifiée. Elle n'a été observée que pour l'axe hypocotylé et la racine primaire durant les premiers jours de la germination, alors que tous les deux doivent puiser au même réservoir limité, et ont par con- séquent à partager ensemble. Dès que l'assimilation commence, celte relation cesse. 6° La position verticale des tiges étiolées est le résultat de l'absence d’un des facteurs qui déterminent la direction dans laquelle croissent les parties des plantes, à savoir, de lhélio- tropisme. Les plantes qui se développent sous l'influence de rayons de faible réfrangibilité, lesquels ne possèdent pas fa force d’inflexion, prennent la même direction verticale, mème quand elles restent vertes (fmpatiens). 7 Les anomalies que la tige présente dans lobscurité doivent done être regardées comme l'effet du géotropisme négatif, non gêné ni modifié par l'héliotropisme et favorisé par le faible épaississement des parois cellulaires. Car : a. L'accroissement, c'est-à-dire la division et l’agrandis- sement des cellules, n’est pas lié à la présence de la lumière, 320 P. RAUVWENHOFEF. mais s'opère mème souvent de préférence dans l'obscurité. b. Le géotropisme négatif, agissant sur la tige en voie d’ac- croissement, la fait S'allonger verticalement. e. L'héliotropisme ralentit l'accroissement, puisque lin- flexion est une conséquence de laccroissement longitudinal plus faible au côté tourné vers la lumière, d. Le faible épaississement des parois des éléments du fais- ceau vasculaire ne met pas obstacle à lallongement, par ocotropisme négatif, des cellules parenchymateuses qui se développent. 8 La cause de l'inégalité que des plantes différentes pré- sentent sous le rapport du surallongement dans l'obscurité réside probablement dans le degré différent de la turgescence des cellules et de la tension relative des tissus. 9° La vraie cause du développement imparfait et du fable épaississement parlétal des éléments du faisceau vasculaire chez les tiges étiolées reste encore inconnue. 10° Les modifications des feuilles des Graminées et autres plantes, chez lesquelles ces organes deviennent plus longs et plus étroits dans l'obscurité, doivent être comparées à celles des lives, tant à raison du développement imparfait des faisceaux vasculaires qu’à raison de la direction verticale. 11° Il en est de même, probablement par des raisons semblables, des pétioles de beaucoup de plantes, amsi que me Pont montré Primula, Pelargonium , Polygonum et Rosu. 12 Les explications que M. Kraus et M. Bataline ont don- nées de l’état rudimentaire où restent dans l'obscurité les feuilles de la plupart des Dicotylédones sont l’une et l’autre insuffisantes. Celle de M. Bataline est réfutée par les résultats des mesures directes dues à M. Prantl: L’inadmissibilité de explication de M. Kraus ressort des trois propositions sui- vantes. 13° Les feuilles sorties du bourgeon sont incapables de continuer à se nourrir entièrement par assimilation propre. C’est ce que prouvent : DES PLANTES CROISSANT DANS L'OBSCURITÉ. 321 a. Les résultats que J'ai obtenus des incisions faites au pétiole de feuilles pennées. b. Ceux des nombreuses analyses de feuilles de la même plante à des âges différents. 14 Les feuilles étiolées ne peuvent être assimilées, comme le veut M. Kraus, à de petites feuilles sortant du bourgeon. Elles sont plus grandes et leurs tissus sont plus différenciés. 15° Sous le rapport anatomique, les feuilles étiolées, outre qu'elles ne contiennent ni matière colorante verte ni lécule (sauf dans les cellules stomatiques, qui renferment toujours de la fécule en abondance), diffèrent encore des feuilles vertes de la même dimension par le faible épaississe- ment des éléments du faisceau vasculaire, et surtout par le non-développement du parenchyme spongieux. 16° Les feuilles qui paraissent surtout rester petites sont celles qui montrent un contraste évident entre la face supé- rieure et la face inférieure, entre le parenchyme en palissade et le parenchyme spongieux. 47 L’explication complète de cet arrèt d’accroissement ne peut encore être donnée. La feuille étiolée est un produit pathologique dù en partie au défaut d’assimilation, en partie à d’autres actions, tant chimiques que physiques, qui ont de l'influence sur l'accroissement. 18° La raison pour laquelle, chez beaucoup de plantes sermées, les cotylédons encore remplis de matériaux nutritifs meurent dans lobscurité, parait devoir être cherchée dans l'absence de certaines actions chimiques nécessaires à l’ac- croissement, actions qui ont encore lieu, commenous l’apprend l'expérience de M. Bataline, à une lunuère très-faible, insuf- fisante pour permettre assimilation. 19° Une étude comparative, à la fois chimique et physiolo- oique, de plantes étiolées et de plantes vertes est avant tout requise pour éluecider les phénomènes de létiolement. 20° Comme matériaux de ce travail pourront déjà servir : les résultats obtenus par M. Pfeffer sur la formation de laspa- ragine et la régénération des matières albumineuses; ceux de 6° série, Bor. T, V (Cahier n° 6.) 21 322 RAUWENHOFE'. M. R. Weber sur l’absorption de l’acide phosphorique et de la chaux; ceux de M. Schulze sur la formation de l'acide sulfu- rique; enfin les miens sur la présence du tannin et des cristaux d’oxalate de chaux dans les plantes étiolées et dans les plantes vertes. EXPLICATION DES FIGURES PLANCHE 14. Fig. 1. Coupe transversale d’un rameau vert normal de Rosa centifolia. — v. l'anneau des faisceaux vasculaires. | Fig. 2. Coupe transversale d’un rameau étiolé de Rosa centifolia, du même âge que le précédent. — v, l'anneau des faisceaux vasculaires. Fig. 3. Coupe transversale d’un rameau vert normal de Fuchsia globosa. Fig. 4. Coupe transversale d’un rameau étiolé, du même âge, de Fuchsia globosa. Fig. 5. Une petite partie de la figure 5, de la circonférence à la moelle, plus for- tement grossie. — «, épiderme et cellules corticales externes subérifiés ; b, cou- che subéreuse; €, phloème ou couche corticale secondaire; d, cambium; e, xylème ou corps ligneux du faisceau vasculaire; /, étui médullaire ; g, moelle. Fig. 6. Une petite partie de la figure 4, vue au même grossissement que la figure 5. Les lettres ont la même signification que dans la figure 5. Fig. 7. Coupe transversale de la base de la tige germée du Vicia Faba L., avec indication des faisceaux vasculaires. Le cercle intérieur marque la partie creuse de la tige. Fig. 8. Coupe transversale de la base d’une tige germée étiolée du Vicia Faba, qui à la même grosseur que la précédente, mais qui n’est pas encore creuse. PLANCHE 49. Fig. 9. Coupe transversale d’un faisceau vasculaire de la tige verte aduite du Polygonum cuspidatum. — a, épiderme; b, collenchyme; €, parenchyme cortical avec noyaux cristallins; d, fibres libériennes épaissies et quelques cellules du sclérenchyme, unies en une masse solide et cohérente; €, vais- seaux cribreux et cellules parenchymateuses du phloème; f, cambium ; 4. cel- lules ligneuses; , vaisseaux; 2, cellules médullaires. Fig. 10. Coupe transversale d’un faisceau vasculaire d’une tige étiolée adulte du Polygonum cuspidatum. -- Signification des lettres comme dans la figure pré cédente. HUIT ANNÉES D'OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES FAITES AU JARDIN D'EXPÉRIENCES DE COLLIOURE Par M. Ch. NAUDIN La météorologie, science dont l’agriculture ne saurait désor- mais se passer, trouve des applications bien plus fréquentes encore dans le jardinage moderne, qui opère sur des plantes de toutes provenances et dont le nombre, énorme déjà, ne cesse de s’accroitre. Get art, qu’on a longtemps considéré comme une branche cadette de l’agriculture, et bien souvent aussi comme une simple distraction, est devenu par son progrès même l’auxi- liaire presque indispensable de la Botanique; aussi la météoro- logie se rattache-t-elle aujourd’hui à cette dernière science par des liens aussi nombreux et aussi étroits que la physique et la chimie. C'est qu’en effet les phénomènes dont la météorologie s’occupe président plus que toute autre cause à la distribution des plantes sur le globe, et que c’est par eux que s'expliquent, au moins de la manière la plus générale, les habitat divers d'espèces et même de familles entières cantonnées entre des limites qu’elles ne franchissent jamais. Connaitre ces conditions, souvent com- plexes, est déjà une partie essentielle de la science des végétaux ; 324 CH. NAUDIX. mais l'importance en devient plusgrande encore lorsqu'il s’agit, soit pour le progrès de la science elle-même, soit pour le déve- loppement de quelque industrie nouvelle, soit même pour le simple accroissement de nos collections horticoles d'agrément, de propager des plantes loin des lieux où la nature les à fait naître. On sait que de nombreuses tentatives de ce genre ont été faites depuis le commencement du siècle, sousles noms d’uccli- matation et de naturalisation, quelquefois avec succès, plus souvent sans donner de résultats. Quel qu'ait été et que puisse être encore dans l'avenir le sort de ces expériences, elles sont directement sous la dépendance des conditions météoro- logiques, qui ne sont pas seules sans doute, mais qui sont ici tout à fait prépondérantes. Mieux ces conditions seront étudiées, plus grandes seront les chances de réussite. Les preuves abon- dent et l’on pourrait les citer par centaines ; mais 1l suffira, pour appuyer cette conclusion, de rappeler deux essais contem- porains de naturalisation faits sur une grande échelle et avec le concours de l'État. L'un d'eux avait pour but d'introduire en France la culture de l’Arbre à thé. De grandes dépenses avaient été faites pour rapporter du Brésil quelques milliers de jeunes plants du pré- cieux arbuste et les distribuer aux jardins botaniques, d'où ils devaient passer dans la culture commune; les soins ne leur ont pas été épargnés, et néanmoins cette expérience, sur laquelle on fondait espoir d’une lucrative industrie, a échoué miséra- blement. L'autre essai a été celui de la naturalisation des Arbres à quinquina dans l'Inde par les Anglais et dans les îles de la Sonde par les Hollandais, et, de part et d'autre, cette grande opération a été couronnée du plus brillant succès. Pourquoi ces résultats si différents ? C’est que, dans le premier cas, on avait négligé de s'informer des conditions climatériques hors desquelles l’Arbre à thé ne saurait vivre avec profit pour le culti- vateur, et que, dans le second, on s’est fondé sur de solides observations météorologiques pour assurer aux Arbres à quin- quina dépaysés des conditions de température et d'humidité très-voisines de celles qu'ils trouvaient dans leur contrée natale, OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES A COLLIOURE. 325 La tentative faite enFrance n’a laissé aucune trace; la culture cimchonifère est en pleme prospérité dans les montagnes de l'Inde et de Java, où les Arbres à quinquima se comptent déjà par millions. Par son étendue du sud au nord, qui embrasse plus de 8 degrés de latitude, comme par sa situation géographique à l’ouest de l’Europe, où elle s'appuie à la fois sur POcéan et sur la Méditerranée, comme aussi par les altitudes variées de son territoire, la France continentale se partage en plusieurs régions climatériques, dont les différences s’accusent nette- ment dans les produits de son agriculture. La plus tranchée de toutes est celle qu’on désigne sous les noms caractéristiques de région méditerranéenne et de région de l’Olivier, qui lui est d’ailleurs commune avec le midi de l’Europe et le nord de l'Afrique. Son climat toutefois n’est pas aussi homogène que ces dénominations pourraient le faire supposer. Comme tous les autresilest modifié par les latitudes ; il l’est presque autant par les reliefs du sol, qui, suivant leur hauteur et leur direction, influent de diverses manières sur les courants de l’atmosphère, et don- nent lieu à ce qu'on a appelé des climats locaux, augmentant ou diminuant, suivant la partie de la région, la température de l'air, la limpidité du ciel etla quantité d’eau pluviale. À tout prendre, larégion méditerranéenne est, malgré les apparences, moins uniforme que chacune des autres régions climatériques de la France, et, comme conséquence, la végétation tant indigène que naturalisée y est incomparablement plus variée que dans ces dernières. Mème sans sortir de cette petite partie de la région méditer ranéenne qui appartient à la France continentale, et qui est proprement ce qu’on appelle le Midi, c’est-à-dire quis’étend du cap Gerbère à Menton, en suivant le contour de la mer, on trouve une série de climats locaux, encore incomplétement étudiés, mais dont les différences se trahissent au seul aspect des plantes qui peuplentles jardins botaniques ou ceux des amateurs d’horti- culture. L’Olivier est partout l'arbre dominant; mais tandis que, sur certains points, l'Orangeretle Limoniermürissent leurs fruits 326 CH. NAUDIN. à l'air libre, n'étant que rarement atteints par le froid, sur d’au- tres points ces arbres frileux ont besoin d’être abrités pendant plusieurs mois d'hiver presque autant qu'à Paris. À Montpellier, par exemple, ils périssent à toutes les expositions, même dans les hivers qu’on ne regarde pas comme exceptionnellement rigoureux. D’autres arbres, cependant plus rustiques, tels que le Laurier-rose (Nerium Oleander) et le Laurier commun (Laurus nobilis), donnent des attestations semblables dans des localités encore moins favorisées. Le Dattier et le Palmier nain (Chame- rops humilis) sont aussi très-caractéristiques à ce point de vue : tous deux abondent sur la côte ligurienne, de la Provence, mais déjà, à Marseille, ils ne passent l'hiver, le premier surtout, qu'aux expositions les mieux défendues contre le froid, Enfin il y a des plantes indigènes sur lesquelles M. Ch. Martins a récem- ment appelé l'attention (1), qui sont si frileuses qu’elles ne pourraient pas vivre, ou du moins se conserver bien longtemps en dehors de la culture, si elles étaient transportées à quelques kilomètres seulement des points où elles sont cantonnées de: temps immémorial. À quoi tiennent ces différences climatériques si sensibles ? Uniquement aux abris naturels, hautes collines ou chaînes de montagnes qui, ici ou là, arrêtent les vents du nord ou Îles détournent sur d’autres parties de la région, Et ce n’est pas seulement à la topographie locale, aux reliefs du sol les plus voisins que sont dues ces différences ; on peut dire que toute la moitié méridionale de la France contribue, D'une part, le plateau central, les montagnes d'Auvergne, les Cévennes et les Alpes, d'autre part la vallée du Rhône, largement ouverte au souffle du nord, sont les premières causes qui modifient avantageusement où détériorent l’ensemble du climat méri- dional et y dissimulent leffet des latitudes. La Méditerranée exerce aussi son influence, surtout en attiédissant les hivers, mais seulement dans son voisinage immédiat, et cette action (1) Sur l’origine paléontologique des arbres et arbustes indigènes du midi de la France sensibles au froid, etc., Montpellier 1877. OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES A COLLIOURE. 327 est d'autant plus prononcée, que la zone qu’elle réchauffe est plus resserrée entre le littoral et les montagnes qui l’abritent. C'est par la vallée du Rhône, qui court droit du nord au sud, que descendent sur le Languedoc et la partie occidentale de la Provence ces vents violents et souvent glacials qui y amè- nent les frimas, et dont l'influence directe se fait sentir prin- cipalement sur les villes d'Avignon, Arles, Nîmes, Montpel- lier et Cette. Marseille et Béziers, situées aux deux extrémités de l'évasement du courant septentrional, s’en ressentent encore, mais à un degré moindre. La Provence orientale y échappe de plus en plus à mesure qu’elle s’éloigne de ce cou- rant et qu'elle est mieux protégée par le triple rempart de l’Esterel, des montagnes des Maures et des Alpes; aussi voit- on le climat s’y améliorer rapidement à partür de Toulon. Cest là qu'on entre décidément dans ce qu’on appelle la zone de l'Oranger, parce que cet arbre y est cultivé à l'air libre en qualité d'arbre fruitier, et il y réussit d'autant mieux qu'il s'avance davantage vers l’est, quoique la latitude s’y élève sensiblement. On sait que le territoire de Nice est renommé pour ses oranges, et cet avantage est uniquement dû à la cein- ture de montagnes élevées qui en font comme une sorte d’es- palier naturel. Si maintenant nous nous portons vers l’ouest de la région, nous voyons, à partir de Narbonne, la situation climatérique se modifier. Par suite de la direction nouvelle des Cévennes, qui, sous le nom de montagne Noire, courent de l’est à l’ouest et abritent le bas pays, les vents dominants ne sont plus ceux du nord et du nord-est, mais ceux de l’ouest et du nord-ouest, un peu moins froids, quoiqu'ils soufflent souvent avec une extrème violence, Mais là aussi un nouveau relief du sol, le massif des Corbières, commence à faire sentir son influence améliorante, etelle est d'autant plus prononcée, qu'on avance davantage vers le sud. Déjà à Rivesaltes et à Perpignan, l’Oranger, qui périrait à Narbonne une fois sur trois hivers, reparait dans les jardins, toujours abrité, il est vrai, par des 328 CH. NAUDIN. constructions ou des haies serrées d’arbustes à verdure per- pétuelle, et1l n’y est maltraité que dans les hivers un peu ri- goureux. Toutefois ce n’est que dans les vallons des Albères, dernier contrefort des Pyrénées, à Céret, Collioure, Port- Vendres, Banyuls-sur-mer et autres localités de même site, qu'on retrouve un climat à peu près comparable à celui de la basse Provence, et où l’Oranger croit non-seulement loin de tout abri artificiel, mais où 11 arrive aux plus fortes porpor- tions. Moins favorisée que la côte ligurienne sous le rapport des abris naturels, cette partie extrême du Roussillon regagne quelque avantage par sa situation plus avancée d’un degré et demi de latitude vers le sud. De bonnes observations météorologiques sont faites depuis une vingtaine d'années à Perpignan par M. le D' Fines, qui a en outre organisé une douzaine de petits observatoires sur divers points du département des Pyrénées-Orientales, et c’est à lui que nous devons à peu près tout ce que nous savons de plus certain sur le climat de cette ville. Mais là, jusqu’à mon établissement à Collioure, il n'était guère possible de faire des applications de la météorologie à la culture des végétaux exotiques, réduits aux espèces les plus vulgaires, et d'ailleurs en fort petit nombre dans quelques jardins d'amateurs. C’est cette lacune que J'ai cherché à combler en réunissant dans mon jardin d'expériences de Collioure le plus grand nombre possible de plantes étrangères, et en observant avec assiduité les influences que les accidents météorologiques exerçaient sur elles. Ces plantes sont de provenances très-diverses. La plupart me sont venues des Canaries, du Mexique, du Pérou, du Chili, de l'Afrique australe, d'Algérie et de la Gyrénaïque; quelques-unes de la Perse, du nord de linde, de la Chine méridionale ou centrale et d'Australie. D’autres, arrivées d’une contrée beaucoup plus chaude, l'Amérique centrale, ont presque toutes péri dès la fin de l'automne. Gelles de eli- mats plus tempérés ont eu des fortunes diverses : suivant la rigueur des hivers, elles ont été plus ou moins atteintes, mais, OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES A COLLIOURE. 399 et ceci est à noter, l'identité du pays d’origine n’a pas toujours concordé avec leur degré de résistance au froid. Des plantes de même provenance, et auxquelles on devait supposer la même rusticité, ont très-différemment supporté les abais- sements de la température; il y a plus, j'ai vu assez souvent succomber par l'effet du froid des plantes originaires de eli- mats moins chauds que ceux d’autres plantes qui résistaient plus où moins heureusement à cette cause de destruction. La raison de ces différences est complexe : elle tient en partie à la consistance plus ou moins herbacée ou ligneuse des plan- tes, en partie à l’état de leur végétation, suspendue ou encore active, quand elles sont saisies par le froid, et aussi sans doute à ce que, dans la nature, les diverses flores empiètent les unes sur les autres, qu’elles entremêlent souvent leurs espèces, et que les espèces elles-mêmes ne sont pas toujours distribuées aux climats et aux localités qui leur conviendraient le mieux. Relativement à la faculté de résister à la sécheresse, on observe des faits entièrement analogues à ceux que je viens de citer pour ce qui concerne les variations de la température. Si nous faisons abstraction des matériaux organiques et inor- oaniques dont les plantes s’alimentent en les puisant dans le sol, pour ne considérer que les éléments météorologiques qui sont aussi pour elles des conditions d'existence, nous pourrons ramener ces éléments à trois principaux, qui sont la chaleur, la lumière et l’eau, toutes trois mesurables par nos instruments ordinaires, les thermomètres, les photomètres et les udomètres Je ne parle pas des matières alibiles contenues dant l'air, et qui sont également essentielles à la vie végétale, l'acide car- bonique, l’ammoniaque et les nitrates d’ammoniaque, dont l’évaluation exige des instruments spéciaux et des analyses chi- miques délicates qui ne peuvent se faire que dans les observa- toires complétement outillés et pourvus d’un personnel exercëê à ce genre de recherches. Je ne parle pas non plus des alterna- üives de la pression barométrique, qui, jusqu'ici du moins, ne paraissent pas exercer d'influence appréciable sur les plantes. Ce qui serait plus important, à notre point de vue, ce sont Îles 330 CH. NAUDIN. données de l’évaporomètre et du psychromètre, les variations de la quantité de vapeur d’eau contenue dans l'air, et la rapi- dité plus ou moins grande de l’évaporation de l’eau renfermée dans le sol et dans les tissus des plantes ; mais nous nous heur- tonis ici à des questions complexes et dont les rapports avec les phénomènes de la végétation sont encore à peine entrevus. Jusqu'à ce que ces dernières questions aient été suffisamment étudiées, nous devrons nous contenter d'enregistrer les quanti- tés d’eau pluviale, ainsi que leur répartition dans le cours de l'année, ce qui peut, dans une certaine mesure, mème consi- dérable, y suppléer. Jusqu'à ces derniers temps, les observations météorologiques appliquées à l’agriculture se bornaient à noter les degrés de la température, à indiquer le nombre des jours pluvieux et la quantité d’eau tombée sur la terre, laissant à peu près dans l'oubli la question de lillumination solaire, indiquée tout au plus comme un accessoire de médiocre importance. On savait cepen- dant que, sans la lumière, les plantes ne décomposeraient pas l'acide carbonique de l'air, qu’elles ne prendraient par suite aucun accroissement et ne larderaient pas à périr; mais on re- gardait comme à peu près mutile de distinguer entre la lumière directe du soleil et la lumière diffuse, entre celle d’un jour serein et celle d’un jour nébuleux. M. Marié-Davy, par ses belles expériences à l'observatoire météorologique de Montsouris, a fait voir combien cette idée était erronée et à quel degré la dose de lumière solaire directe reçue par les plantes influe sur la quantité et la qualité de leurs produits; d’où suit la nécessité de mesurer dorénavant les quantités de la lumière avec la même exactitude que celles de la température et de la pluie. L'actinométrie, c'est-à-dire l'évaluation de l'intensité et de la durée de lillumination solaire, est dès à présent une partie essentielle de la météorologie; malheureusement nos instru- ments actinométriques sont encore fort imparfaits, et, tels qu'ils sont, leur usage exige une assiduité qu'on ne peut de- mander qu'aux hommes spéciaux chargés de ce service dans les grands observatoires. A leur défaut, on y supplée par la simple OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES À COLLIOURE. 991 estime, c’est-à-dire par l'inspection du ciel plusieurs fois répé- tée dans la même journée, et par une appréciation plus ou moins arbitraire du rapport de Pillumination solaire à la nébu- losité, Toute primitive qu'est cette méthode, on arrive par l'exercice et l'habitude à des appréciations à peu près exactes pour les jours entièrement sereins ou entièrement nébuleux, mais seulement approximatives pour les autres jours. Gepen- dant, quand les observations ont été longtemps continuées, on peut admettre que les erreurs en plus et en moins se com- pensent à peu près, ct que les conclusions finales sont d’une exactitude suffisante pour en faire l’application aux phéno- mènes dela vie végétale. Ge que je me propose de donner ici est le résumé de huit années d'observations faites avec beaucoup de suite, de l’an- née 1870 à l’année 1877 inclusivement, et dans lesquelles il n'ya qu'une seule lacune d’une quinzaine de jours. Pour les raisons données plus haut, je laisserai de côté les observations barométriques, qui ne nous disent rien pour la physiologie végé- tale; je passerai de même sous silence les observations psy- chrométriques et évaporométriques, dont il n’y a non plus presque rien à tirer pour le sujet qui nous intéresse. Nous n'aurons donc à considérer le climat de Collioure que sous le rapport de la température, de la pluie et de la lumière solaire. Collioure est, après Banyuls-sur-mer, la ville française con- tinentale la plus avancée vers le sud, Elle est située à l’extré- mité méridionale du golfe du Lion, et le vent direct du nord ne lui arrive qu'après avoir traversé ce golfe dans toute sa lar- geur. Les environs en sont très-accidentés ; de hautes collines couvertes de vignobles et de bouquets de Ghênes-liéges, ferment son horizon à l’ouest et au nord-ouest; mais c’est au sud, à 8, 10 ou 12 kilomètres, que se trouvent les montagnes les plus élevées, la chaine des Albères, qui trace la limite entre la France et l'Espagne, et dont les sommets, très-abrupts, atteignent à des altitudes de 600 à 1000 mètres. Il est à remarquer que cette barrière si haute et si rapprochée de la ville ne la met point à l’abri des coups de vent du sud, qui sont 392 CBI. NAUIDEN. même les plus violents que l’on observe dans le pays, mais qui, par compensation, y ont peu de durée. La latitude de Collioure est 42° 35/; sa longitude, 0° 3$/ à l'est du méridien de Paris. Le point où mes observations ont été faites est distant de la ville d'environ un demi-kilomètre, et très-approximativement à 12 mètres au-dessus du niveau de la mer. Îl est situé au pied d’un coteau incliné vers l’est, et sans abri rapproché qui le défende des vents du nord et du nord-est. Les observations ont commencé en 1869 et se sont conti- nuées avec régularité jusqu'au commencement de 1878; elles comprennent donc huit années complètes, sauf, ainsi que je lai dit plus haut, une interruption de quelques jours en 1871. Température à Collioure. Les températures moyennes annuelles varient relativement peu; aussi pensé-je qu'on peut considérer la moyenne des huit années comme très-voisine de la moyenne normale. Elles ont été : D ARDOMISADE eee de 15°,25 0 AS TOELS TI re a 14,54 HT AE LS TO. Re TRRNER .. 44,75 18 TO ARTS PAS SATTENGNES 15,11 87e 48e uiule af s4 cad 159,22 MST unis -shnel 4 149,69 1815-1810. ess obestie AA360 STONE A É CR 15°,56 Ce qui donne pour moyenne générale des huit années, 14°,98. Les moyennes mensuelles pour les huit années ont été : Janviér.f PRIS. HOMO MR tea HS FévÉIén. er Lite raer. a aéencté 99,04 ARTE SN PM Re SN RE PT EN SR 10°,80 AVE an ee eh ee ces ne 13°,62 MAS ee Ne nee ta Dia 16°,73 PR ares en bte er nie en 20°,37 Jet En RARE A SR PREEE RUN 239,80 Aoënb ons al niunsseh daté imior230t OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES A COLLIOURE. 333 Septembre Leslie L Sa A svniu20840 OCIDbre., EU CAPARPRr RE ES Novembre! "7e. . 0. I DÉCéMDFE. : AA EN ee. à d'en ae 1-00 Les températures moyennes des saisons ont été : Hiver (décembre, janvier, février). . . . . 8°,06 Printemps (mars, avril, mai). . . . . ... 13°,72 fé (juin, juillet, aout). 202 ., 1. . 290,40 Automne (septembre, octobre, ATOME 15,81 La demi-somme des moyennes du printemps et de l'automne est de 14,76, c’est-à-dire à très-peu près la moyenne de l’an- née, dont elle ne diffère que par une fraction de degré en moins (— 0°, 21). La demi-somme des moyennes de l'hiver et de l'été est 15°,36, qui ne diffère aussi de la moyenne annuelle que d’une fraction de degré, mais en plus (+ 0°,29). Dans lasérie des huit années, décembre a toujours été le mois le plus froid. On ne juge bien du caractère d’un climat qu’en le comparant à un autre déjà connu et pris pour type. Le rapprochement que nous allons faire des températures de Collioure et de celles de Paris, telles qu’elles nous sont données par l'Annuaire méléorologique de l'observatoire de Montsouris, en fera saisir les différences au prenner coup d'œil. Températures moyennes Excès à Paris. à Collioure. Janvier. etre ee 2°,4 50,37 Révrier pistes as 100 4,04 Mars SE PPS RME ESr NCA 4°,40 ANSE EURE TN, 10°,1 30 59 LÉ A ER AM T 29,03 JUnAAUNEOAL AS AUTO, 2 90,47 Juilletà s24ae0t 18,9 4°,90 AOÛT NT UE MERE 189,9 49,71 Septembre. cs 6 1007 4,10 OCIODreNT EME ER 110 4°,38 Novembre." ris ne 6°,9 49,84 Décémbret 1.200 RONA 3v,68 Moyenne annuelle. 10°,78 + 4°,20 334 CH. NAUDIN. Moyennes Excès des saisons à Paris. à Collioure. HIVeR SE ire 3°,09 + 4,53 Printemps. 20 "0, 10°,23 30,49 Été. ah ana. subetus018020 49,26 Automné:. . - :4.. 419,14 4,64 On voit, par les tableaux qui précèdent, que la température moyenne annuelle de Collioure, pour les huit années observées, est de #,20 plus élevée que celle de Paris. La différence de latitude entre les deux localités étant très-approximativement de 6 degrés, c’est un accroissement de température de 0°,7 par dome de latitude. Ces tableaux nous montrent aussi que la différence des tem- pératures entre Paris et Collioure n’est pas umiforme d’un bout de l’année à l’autre ; qu’elle atteint son maximum en jan- vier (+ 5°,37) et son minimunt en mai (+ 2°,53). Ainsi le mois le plus froid de lhiver parisien est celui qui diffère le plus du mois similaire à Collioure, mais 1l faut observer que dans cette dernière localité, c’est décembre qui est le mois le plus froid de Pannée. Si nous comparons les saisons des deux climats, nous trou- vons que ce sont les automnes qui diffèrent le plus (4,6% de différence moyenne) et les printemps qui diffèrent le moins (3,49). C’est sur les mois d’avril, de mai et de juin que tombent lesminima différentiels les plus notables, et cet abais- sement relauf de la température s'explique par la grande prédominance des vents du nord et du nord-nord-ouest qui soufflent à cette époque de lPannée sur le Roussillon, et y amènent ordinairement de fortes pluies, La différence entre l'hiver de Paris et celui de Collioure est presque aussi grande que celle des automnes des deux localités (4°,53); celle des étés est un peu plus faible. Juillet, le mois le plus chaud de l'été parisien, est aussi, en moyenne, le plus chaud de l'été de Collioure, mais la différence entre juillet et août, dans les deux localités, n’est que de quelques dixièmes de degré : 0°,40 pour Paris, 0°,59 pour OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES A COLLIOURE. 339 Collioure. A Collioure, comme à Paris, il arrive assez souvent que la température moyenne d'août surpasse celle de juillet. La progression ascendante ou descendante de la tempéra- ture ne suit pas tout à fait la même marche à Paris et à Gol- lioure, quoique des deux côtés elle soit sujette à des alterna- tives d'accélération et de ralentissement. À Paris, la chaleur augmente pendant six mois (de février à juillet mclusivement) ; l'accroissement est plus rapide en février et avril, plus lent en mars et en mai; il se ravive en juin et reste presque station- pire en juillet. À partir de ce moment, la chaleur commence à décroître, d’abord d’une manière presque insensible en août, puis rapidement en septembre, octobre et novembre ; mais la décroissance se ralentit en décembre et janvier, pour se ter- miner dans les derniers Jours du mois. À Collioure, la chaleur est croissante pendant sept mois (de janvier à juillet inclusivement) et décroisante pendant cinq mois (d'août à décembre) ; mais, dans sa période d’accroisse- ment les oscillations sont moins fortes qu’à Paris ; on pourrait même dire que l’augmentation de la chaleur est uniforme, s’il n’y avait un saut un peu brusque de mars à avril. Cette unifor- mité est plus sensible encore dans les mois de mai, juin et juil- let, où l’accroissement mensuel est, en moyenne, à très-peu près de 3°,4. En août, commence la période décroissante, mais très-faible d’abord, puisqu'elle dépasse à peme un demi-degré dans le cours du mois; elle s'accélère ensuite remarquable- ment dans les mois qui suivent, car pour octobre, novembre et décembre elle est à très-peu près de 4°,30 en moyenne. En janvier, ainsi que nous l’avons déjà dit, la température rentre dans sa période ascendante, mais avec une certaine lenteur, puisque le gain total de ce mois sur le précédent n’est que de 0°,39. Le tableau suivant fera saisir d'emblée la marche comparée de la température à Paris et à Collioure. Les chiffres accompa- gnés du signe + exprimant les différences en plus d’un mois sur celui qui le précède; ceux qui sont marqués du signe — exprimant au contraire des différences en moins. 336 CH. NAUDIN. Croissance el décroissance mensuelle de la température à Paris et à Collioure. Paris. Collioure. Janvier. . MONO ot tibia L, 0°,39 POVNET. 0 + 2,1 +. 10,27 Mars 5 . + 149,0 + 19,76 Arles LUEUR LEE 7307 + 2,82 Mai RTE EE -æ 41 EEK Juimsser sq 001360 -L 3,64 A nier tee | EP OT + 3°,43 AOÛ 2 ae hens de = (4 —. 09,59 SEPLEINPEC.e.0,e. 0278 — 2,81 OCtobres. #0 — 4,4 + 4979 Novembre.. . . . — 40,8 = : 4,34 Décembre... . . -— 2,8 2 530.06 Tous les climats sont sujets à des irrégularités, et ces irré- oularités croissent en général avec les latitudes. Elles sont moins grandes à Collioure qu'à Paris en ce qui concerne la température; néanmoins on y observe de temps en temps des hivers relativement rigoureux, où le thermomètre descend momentanément à — 6°, — 7° et probablement davantage encore, tandis que d’autres hivers sont entièrement exempts de gelée, ou n’ont que des gelées de quelques dixièmes de degré au-dessous de zéro. La neige n’y est pas commune; c’est à peine si elle blanchit Lx plaine voisine une fois en trois hivers, et cependant c’est à Collioure que j'ai vu la plus forte neige dont j'aie été témoin dans ma vie. C’était en janvier 1870. Cette chute de neige extraordinaire a commencé dans la matinée du 21, et elle a contimué sans un instant de relàche pendant trente heures, couvrant la plaine d’une couche d’un mètre d'épaisseur, ce qui, de mémoire d'homme, était sans exemple dans le pays. Elle à interrompu la circulation sur les routes pendant une huitaine de jours, mais elle a surtout causé des dégâts dans les vergers, les olivettes et les plantations d'arbres à feuilles persistantes ; les grands Orangers eux-mêmes, malgré la rigidité de leur bois, ont perdu beaucoup de grosses OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES A COLLIOURE. 337 branches, rompues par le poids de la neige qui s’y était entassée. D’autres arbres, les Ghônes-liéges surtout, ont été curicuse- ment mutilés. Beaucoup de ceux qui étaient naturellement in- clinés ont été brisés, les uns à mi-tige, d'autres sur la souche; quelques-uns, dont la ramure était bifurquée, ont eu leur tronc divisé du haut en bas, comme Paurait pu faire le coin du bücheron. [n’a pas fallu moins de dix à douze jours pour fon- dre entièrement cette masse de neige, quoique la température fût presque constamment à plusieurs degrés au-dessus de zéro. L'hiver de 1870-71 a été d’ailleurs exceptionnellement rigoureux à Collioure comme dans les autres parties de Ta France. Nous avons compté en décembre T4 jours de gelée, la plupart dans la seconde quinzaine du mois. Le plus grand abaissement thermométrique a eu lieu dans la nuit du 23 au 2%, et il a été de — 6°,6. Ce même jour (le24), chose rare sous ce er le maximum diurne n’a pas dépassé — 0°,6, et la moyenne des vingt-quatre heures n’a été que de —%r, Les onze jours do gelée ont donné ensemble un total de 34°,6, ce qui revient pour chacun d'eux à une moyenne de —3°,16. La moyenne totale du mois a été de 5°,08. Les gelées n'ont pas été tout à fait aussi fortes en janvier, mais elles ont été plus nombreuses; aussi la moyenne générale de ce mois a-t-elle été extraordinairement basse, puisqu'elle s'arrête à 4°,03. Deux fois, le 4" et le 2, le thermomètre est descendu à —6°,0, et la totalité des degrés de froid (—32°,32), divisée par les 16 jours du mois, donne unemoyenne de—92°,02,. Une fois nous avons encore vu un maximum diurne de — (°,5 (le 13); amsi 11 gelait mème dans le milieu du jour. On imagine sans peine qu'avec des froids si rudes e£ si pro- longés, les plantes exotiques ont dû être fortement atteintes. Même devant les abris le Cereus peruvianus et FOpuntiu Ficns indica ont été gelés jusque sur la souche ; le ficinus afri- canus, tout à fait arborescent et haut de 3 à # mètres, a tota- lement péri; ilen a été de mème du Hesembrianthenmm aci- naciforme ei de quelques autres plantes aussi frileuses. Les Citronniers ou Limoniers, les Cédratiers, les Ponciriers et les 6° série, Bot. T. V (Cahier n° 6). ? 99 er 338 CH. NAUHEN. Pommiers d'Adam ont eu toutes leurs menues branches mor- tifiées; mais les Orangers et l'Agave d'Amérique, cette dernière entièrement naturalisée dans le pays, ainsi que POpuntia iner- mis, qui est employé concurremment avec elle à clore les champs, sont restés entièrement intacts. Il en à été de même du Mesembrianthemum edule, espèce voisine du M. acinaciforme, qui a complétement envahi le cimetière de Port-Vendres, et du Solanum bonariense, naturalisé de même dans celui de Collioure. Le Eivistona australis, improprement nommé Corypha par les horticulteurs, a beaucoup souffert, mais sans périr. Les Dattiers, les Jubæa spectabilis, mème très-jeunes, les Palmiers nains (Chameærops humilis), et à plus forte raison le Palmier chanvre de la Chine (Trachycarpus Fortunei), le plus rustique des Palmiers connus, sont restés à peu près indemnes, mème lom des abris. Si l'hiver fait sentir de loin en loin à Collioure des rigueurs inaccoutumées, on voit plus fréquemment encore la tempéra- ture s'élever momentanément, en été, à un degré qui n’est habituel qu'entre les tropiques ou dans leur voisinage. Des maxima moyens de 29° à 30° sont fréquents en juillet et août. Des maxima extrêmes de 35° à 37° n’y sont pas rares non plus, et le thermomètre y monte plus haut encore. Cest ainsi qu'en 1874, le 48 juillet, nous l'avons vu indiquer à l'ombre 38°,2, el le lendemain 39°,4. Cette température, déjà presque insuppor- table, a été dépassée le 98 juillet 4876, où, pendant plusieurs heures du jour, le thermomètre est resté fixé à 409,5. Avant de terminer ce que j'avais à dire des effets du froidsur les plantes introduites dans nos jardins, je crois utile de faire observer qu'il y a ici une distinction à faire entre le froid par rayonnement et le froid par convection. On peut dre d'une manière générale que le premier, au moins sous n0$ chats veuteux du Midi, est moins dangereux que le second, parce qu’il dure moins longtemps. Le froid par rayonnement ne se produit que dans les nuits sereines et par un temps calme ; 1l ne dure au plus que quelques heures, et Ie soleil, en remontant sur l'horizon, restitue aux plantes la chaleur qu'elles ont perdue OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES A COLLIOURE. 399 pendant la nuit. Le froid par convection, au contraire, est amené par les vents du nord, qui soufflent souvent avec vio- lence pendant plusieurs jours consécutifs, et très-fréquemment avec un ciel couvert. Les plantes sont alors baignées dans un air glacial incessamment renouvelé ; le froid les pénètre profon- dément, et le soleil ne les réchauffant pas pendant le jour, il arrive souvent qu'elles périssent ou tout au moins restent long- temps languissantes, quoique le froid absolu n'ait pas été con- sidérable. Jai perdu par cette seule causedes plantes qui avaient résisté, presque sans souffrir, à des froids par rayonnement beaucoup plus vifs, mais de peu de durée. Ce fait est certaine- ment une des causes, la principale même, qui rendent les abris naturels ou artificiels si utiles dans la culture des plantes qui redoutent le froid. Observations pluviométriques. Sous le ciel méditerranéen la pluie joue un rèle de première importance dans la vie des plantes. Lorsqu'elle est insuffisante, les récoltes de toute nature sont compromises; mais lorsqu'elle atteint son chiffre normal, et mieux encore lorsqu'elle le dépasse, la végétation y déploie un luxe qui n’a pas d’égal dans les autres climats de l'Europe. Nous avons vu qu'à Collioure, et l’on peut étendre cette obser- vation à tout le Midi, les températures moyennes annuelles varient comparativement peu; mais 1l en est tout autrement de la quantité d’eau pluviale, qui peut, d’une année à l’autre, varier du simple au quadruple. On en trouvera la preuve dans les chiffres suivants, qui sont le relevé de mes observations pluviométriques pendant les sept années 1871-1877. Je néglige celles de Pannée 1870 quin’ont pas été complètes. Les hau- teurs d'eato mbée sont exprimées en millimètres. Années, nullini. A0. LU SAME 664,7 TPM PE SAT UE 1200,3 0 310 CH. NAUDIN. LS OS EURE RTE ARE SE 899,0 1810: to lte dre tree ride 4013:0 ASIE TN tE TS PR DD) Q Ce qui revient, pour ces sept années, à une moyenne de 797"7,0. F Les quantités d'eau pluviale sont beaucoup plus variables encore pour chaque mois de l’année ; elles peuvent se réduire à zéro ou atteindre à plusieurs centaines de millimètres, dé- passer même la totalité de la pluie tombée dans une année entière. On en a la preuve dans ce fait qu'en 1877 la totalité des pluies des douze mois n'a fourni que 303"",5 à ludo- mètre, tandis qu’en 1876 celles du mois d'octobre seul se sont élevées à 487,9. Ce sont là des exceptions. Nous nous ferons une idée plus exacte de la répartition de la pluie en examinant les moyennes afférentes à chacun des mois des sept.années ; toutefois, eu égard à la grande irrégularité du phénomène, nous devons reconnaitre qu'une période de sept années est trop courte pour fixer ces moyennes d’une manière suffisamment approxima- tive. Quoi qu'il en soit, voici les moyennes qui résultent de mes observations : Janvier. - . - . “00190 Juillet I 20m ,90 Février +. 3154922170 AOÛ. bhérrtute 26,69 Marsa rs 167% 02 Septembre. . . 80,78 ANDRE RC 00 Octobre. 2e MMA MO nes DOmm 10 Novembre . . . 50"",38 Juin: 0.0 NAT Décembre . . . 28,58 D'après ce tableau, les mois se classeraient, dans l'ordre de la pluviosité, de la manière sulvante : 4° octobre, 2° septembre, 4 avril, #° mars, 5° juin, 6° jan- vier, 7° novembre, 8° mai, 9° février, 10° décembre, 11° août, 12° juillet. Avec de plus longues séries d'observations, cet ordre pourrait être modifié sur quelques points, mais octobre resterait le mois le plus pluvieux en moyenne, et juillet le mois le plus sec. Si maintenant nous cherchons de quelle manière Fa pluie OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES A COLLIOURE. 34 se répartit sur les saisons de l’année, nous trouverons les moyennes suivantes : HIVET RE PORN e PE QEREE MGR 1347" ,58 Printemps doter tie) 206,05 OS RAC ANS REC 110,29 AUTOMNE) AUS NE Eire 302,80 D'où il résulte que l'automne est la saison la plus mouillée et l’été la plus sèche. Le printemps vient en seconde ligne. En admettant pour moyenne annuelle de la pluie à Paris le chiffre de 516 millimètres, fousni par 54 ans d'observations (de 1819 à 1872), et la comparant à celle de mes sept années d'observations, nous voyons qu'à Collioure la quantité d’eau pluviale annuelle l'emporte de plus de 200 millimètres sur celle de Paris. Cependant le nombre des jours pluvieux, quoique variable par années, par saisons et par mois, est beau- coup moins grand à Collioure qu’à Paris; les pluies ysont plus rares, mais par cela même beaucoup plus fortes. J’ai vu sou- vent tomber en vingt-quatre heures plus de 400 millimètres d’eau ; une fois même la quantité s’en est élevée à 189 millim. (le 19 octobre 1876), et cela le lendemain d’une journée dont la pluie était déjà de plus de 100 millimètres. Le nombre des jours pluvieux à Collioure, d’après les sept années d'observation, s'élève en moyenne à 70 par an, mais je ne fais pas entrer dans ce nombre ceux où la pluie s’est ré- duite à moins d’un demi-millimètre d’eau.Je dois même ajouter que près de la moitié des jours comptés comme pluvieux n’ont fourni que des pluies insignifiantes de À à 3 millimètres, dont l'effet sur la végétation est à peu près nul. Quant à la distribu- tion de ces jours pluvieux sur les mois de l’année, nous la trouvons répartie ainsi qu'il suit : Jours. Jours. Janvier ME RUN, 5,8 Juitlcten en LH 4,0 Eévrier HLOUS. . 4,1 Août ET. fs 3, Mare pee no DTIe) à pl Septembre: 1. 9,4 NEO NU Sr TRE 1,6 Octobre. ie eur TT Mae re See TE Novembre. 01e". 9,4 JUIN: CPAM. 400 Décembre. 342 CH. NAUDIN. Une trop faible quantité de pluie, ou sa mauvaise répartition sur les saisons de l’année, amène des sécheresses extrême- ment fortes et parfois très-prolongées. Sous lardent soleil du Midi, la terre, principalement en Juillet et en août, se dessèche jusqu'à 1,50, et quelquefois ? mètres de profondeur. Presque toutes les plantes herbacées disparaissent alors, et à la ver- dure des champs succède cette teinte rousse si caractéristique du paysage espagnol à la fin de été. Mais qu'une pluietant soit peu abondante survienne en août ou en septembre, là campa- gne change d'aspect pour ainsi dire à vue d'œil; c’est comme une renaissance du printemps, et les arbres, dont la séve était endormie, se couvrent d’un nouveau feuillage et de nouvelles fleurs. Rien de plus frappant. à Collioure que ce réveil de à végétation aux premières pluies de Pautomne et que cette se- conde floraison des arbres fruitiers, presque aussi riche que la première. Mais ce beau phénomène ne se produit que dans les années où l'automne est normal, c'est-à-dire suffisamment humide. Il a complétement manqué en 1877, dont les mois d'août, septembre et octobre, n’ont fourni ensemble que Pin- signifiante quantité de 28 millimètres d’eau. Ces sécheresses excessives, si fâcheuses à certains égards pour l’agriculture, non-seulement ne nuisent pomt aux plantes indigènes et à celles de climats analogues à celui du Midi; elles leur sont au contraire favorables, on peut mème dire néces- saires, parce qu’elles leur procurent une période de repos plus complète, pour beaucoup d’entre elles, que la période hiver- nale. On en à la preuve dans la difficulté qu'on trouve à élever et à conserver, sous le climat presque constamment humide du Nord, ces plantes méridionales amies du soleil et habituées au sommeil estival. Prise en bloc, la végétation méditerra- néenne sort de sa torpeur du milieu à la fin de l’automne, et même au cœur de l'hiver les plantes fleuries abondent. Plu- sieurs mème ne fleurissent qu'à cette époque de l’année, la seule où le botaniste herborisant puisse se les procurer. Beaucoup de plantes exotiques même, celles entre autres de l'Orient méditerranéen, de PAfrique septentrionale, du cap de ‘ OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES À COLLIOURE. 343 Bonne-Espérance, du Chili et de l'Australie, suivent aussi cette marche, qui est d’ailleurs la même que dans leur pays d’ori- gine, où la période d'activité succède toujours à une période de repos amenée par la sécheresse. NMlumination solaire et actinométrie. Ainsi que je l'ai dit plus haut, des mesures actinométriques exactes ne sont possibles qu’à l’aide d'appareils spéciaux qu’on ne trouve guère que dans les observatoires complétement ou- tillés. À leur défaut, on se contente d'observer le ciel à diffé- rentes heures du jour, et de juger par estime du rapport de lillumination solaire à la nébulosité. Ce moyen, si défectueux eu égard à la précision qu'on demande aujourd’hui aux obser- vations scientifiques, donnerait encore des résultats suffisam- ment exacts si lon tenait compte,non pas seulement des jours, qu'on suppose égaux dans tout le cours de Pannée, mais du nombre variable d'heures pendant lesquelles le soleil est au- dessus de l'horizon. On comprend cependant que des observa- lions si compliquées seraient très-asservissantes et le plus souvent incompatibles avec les autres obligations de l’obser- valeur. | Ne pouvant faire mieux, je me suis borné à observer l’état du ciel et à diviser le jour, ainsi qu’on la souvent fait jusqu'ici, en quatre parties, qui ont été notées comme seremes ou nébu- leuses. Ces quarts de jour additionnés n'ont donné à peu près le rapport entre lillumination solaire et la nébulosité, ou lumière diffuse, et c'est sur cette base que j'ai construit les tableaux suivants. Je les donne tels qu’ils sont résultés de mon mode d'observation, ne me dissimulant pas qu'avec une mé- thode plus rigoureuse mes conclusions ne dussent être sensi- blement modifiées. Je les crois cependant suffisantes pour faire ressortir les différences qui existent sous ce rapport entre le climat du Midi et les autres parties de la France au simple point de vue qui nous à occupés jusqu'ici : l'influence de la lumière directe du soleil sur la population végétale des climats et sur les phénomèmes de la végétation. 344 CH. NAUDHN. Les limites dans lesquelles ce mémoire doit se renfermer ne me permettent pas d'entrer dans le détail des observations jour- nalières des huit années, ce qui d’ailleurs fatiguerait sans utilité l'attention du lecteur. Je me bornerai donc, avec plus de raison encore que pour les observations thermométriques et pluvio- métriques, à un simple résumé, c’est-à-dire à donner seule- ment les moyennes par années et par mois, et ce sera suffisant pour établir la comparaison entre le ciel de Collioure et celui d’autres localités où de semblables observations auront été faites. J'ai pris pour unité, où terme de comparaison, la nébulo- sité totale du ciel pendant une journée, parce que le ciel de Collioure étant plus souvent seremm que nébuleux, le rapport sera plus facile à saisir entre les deux états opposés du ciel. Ce que nous appelons #ébulosité n’est après tout que de la Iu- mière diffuse, une quantité, par conséquent, qui ne saurait être exprimée par zéro. Ces explications données, les chiffres qui suivent imdique- ront le rapport de lillumination directe du soleit à la nébulo- sité, toujours exprimée par 1000. Années. Ilumination solaire annuelle SE ÉR PR R ET PP EM PE PEN M APS EU 0,814 Sense er Da eh FEU 20816 RO de pe 1,167 ÉTEINT TIR ARR NR TE L.. Hat Fo RON APMMAUE MOLOAIOUUE .. 1,294 ISTSÈT en Moda a Eu 1,351 ER RE LE 1,172 CPS T 2e PRE EUR 1,522 Ainsi, sauf en 1870 et 18714, la lumière directe du soleil l’a toujours notablement emporté sur la lumière diffuse. L'année 1877, qui a été la plus lumineuse de la série, en à aussi été la plus sèche, ainsi qu’on l’a vu plus haut. La moyenne pour Îles huit années est 1,208. Le tableau suivant donne, pour tous les mois de l’année Îles moyennes de lilluminalion solaire, ainsi que les moyennes maxina et minima avec Pindication des années où elles se sont OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES A COLLIOURE. 345 produites. On y verra combien cet élément elimatologique est variable. Moyenne générale. Minimum. Maximum. Janvier. . . 1,093 0,550 en 1871 1,638 en 1874 Février... . 41,479 1,035 1872 2,200 1877 Mars. . . . 1,218 0,823 1871 2,263 1874 Avril.l... . 4,919 0,904 1873 1,926 1872 Mai. . . 1,060. 0,610. 1872 1,828 1873 Jin... 1,559 0,519 1874 2,428 1877 Juillet... 2,438 0,878 1870 7,266 1876 Aout. 0 PISE 0,878 1870 2,879 1874 Septembre. 1,435 0,714 1871 1,553 1871 Octobre . . 0,934 0,550 1870 2,024 1877 Novembre... 1,028 0,621 1870 1,264 1877 Décembre . 1,385 0,347 1870 3,960 1873 Il résulte de ces moyennes générales (première colonne du tableau) que les mois de juillet et d'août, les plus chauds et les moins humides de l'année, sont aussi les plus éclairés par le soleil, et le mois d'octobre le plus nébuleux, mais que ce dernier est suivi de près par ceux de novembre et de mai. En comparant ensemble le deux autres colonnes du tableau, on voit par les différences des moyennes d’un même mois, suivant les années, à quelles oscillations est sujette la sérénité du ciel à: Collioure. C’est ainsi, par exemple, qu’en 1870, l’illumina- tion solaire de juillet s'arrête à 0,878, tandis qu’en 1876 elle s'élève à 7,266, c’est-à-dire qu’elle devient huit fois plus forte. Terminons ce mémoire par quelques réflexions que nous sugoërent les faits rapportés plus haut : L’inégale résistance des plantes aux influences climatériques, et la distribution géographique qui en est la conséquence, sont un des problèmes les plus obscurs de la physiologie végétale, et nous n'avons aucun moyen d'expliquer, par exemple, pourquoi de deux plantes congénères et très-voisines morphologi- quement, placées dans des conditions physiquement identi- ques, l’une est entièrement détruite par le froid, tandis que Pautre n’en éprouve aucun dommage. On a souvent allégué, 346 CH. NAUDEN. pour en rendre compte, la différence de consistance des tissus, plus herbacés et plus mous dans lune, plus ligneux et plus secs dans l’autre, mais cette interprétation, acceptable dans cer- tains cas, est plus souvent encore contredite par l'expérience, car ce sont souvent les plantes dont les tissus sont les plus soli- des qui succombent les premières aux influences extérieures. Une Mousse, un Lichen, une plante herbacée des climats sep- tentrionaux résistent à des abaissements de température qui tueraient infailliblement les végétaux les plus ligneux et les plus durs de la région des tropiques. Les mêmes inégalités de résistance se manifestent relativement aux autres phénomènes météorologiques, la sécheresse ou l'humidité de l'air et du sol, l'intensité variable de la lumière solaire, etc., et ici aussi les faits restent inexplicables. Hs le sont d'autant plus, qu'on admet aujourd’hui, surtout après les travaux de M. Claude Bernard, l'unité, et l’on pour- rait presque dire l’identité du principe fondamental de tous les organismes végétaux et animaux, le protoplasma, qu'un 1llus- tre naturaliste anglais, Huxley, appelait la base physique de la vie. Et en effet, pour ne parler ici que des plantes, c’est celte matière première qui en est la partie essentiellement vivante, peut-être même la seule vivante dans le sens strict du mot. Ce protoplasma a-t-1l la même composition chimique dans tout le règne’ végétal ? Il devient alors impossible de comprendre pourquoi, sous l'influence des mêmes causes extérieures, il périt dans une plante et reste vivant dans une autre. Si l’on admet au contraire que sa composition varie d'espèce à espèce, on conçoit tout aussi difficilement qu'avec un si petit nombre d'éléments chimiques, la nature ait pu composer autant de protoplasmas différents que nous comptons d'espèces, c’est- à-dire plus de 100,000. L'hypothèse la plus vraisemblable est celle de l'identité de composition, sinon dans le règne végétal tout entier, du moins dans les groupes naturels que nous nom- mons genres et familles ; mais alors il faut reconnaitre aussi que le protoplasma, tout en restant la matière première et néces- saire de l’organisme, est sous la dépendance d’un principe OBSERVATIONS MÉTÉOROLOGIQUES À COLLIOURE, 947 inconnu et vraisemblablement inconnaissable, qui en déter- mine l’emploi et le mode d'action, et lui confère la somme de vitalité requise par les conditions cosmiques où il est appelé à remplir le rôle d'agent organisateur. Gette vue est toute téléo- logique, mais elle est conforme à ce fait capital de la prodi- gieuse variété des organismes et à leur réparütion sur des aires déterminées de la surface terrestre, où ils répondent à des milieux complexes, mais milieux également déterminés, hors desquels ils n’ont plus ni raison d’être ni possibilité de vivre. Quelle qu'ait pu être dans le principe la flexibilité de la structure végétale, il est de toute évidence qu'aujourd'hui les espèces sont fixées définitivement et incapables de se plier à de nouvelles conditions d'existence. L’acclimatation, telle qu’on la comprenait il y a quelques années, ne pouvait être qu'une illu- sion ; mais cette illusion a été de courte durée, et dès les pre- mières tentalives les esprits sont revenus à des idées plus con- formes à la réalité. Avec une certaine latitude de variabilité dans leur figure extérieure, une certaine souplesse de leur pro- toplasma, les espèces n’en sont pas moins parquées entre des limites maxima qu’elles ne franchissent pas d’elles-mêmes, et d’où elles ne peuvent sortir qu'avec le secours de l’homme, qui leur crée des milieux artificiels aussi rapprochés que possible de leurs milieux naturels. L'Europe est aujourd’hui couverte de végétaux qui lui étaient primitivement étrangers; mais si, par une cause quelconque elle se dépeuplait, ou si seulement l’homme y retournait à l’état sauvage, cette brillante végétation qui est son œuvre disparaitrait avec lui, et bientôt l'Europe serait réduite aux seules espèces qu’elle possédait aux époques antéhistoriques et avant d’être transformée par l’industrie humaine, | RECHERCHES SUR LES CANAUX SÉCRÉTEURS DU FRUIT DES OMBELLIFÈRES war ME. KR. MOYNEER DE VILLECPŒOEX. Bien qu'ayant attiré l’attention d’un grand nombre de bota- nistes, l'étude des canaux sécréteurs du fruit des Ombellifères présente encore un grand intérêt. Laissant ier de côté beau- coup de points qui feront objet d'un travail plus étendu, nous nous contenterons seulement de signaler dans les lignes qui vont suivre quelques particularités fort intéressantes du sys- tème sécréteur dans le fruit. Les bandelettes (vit{æ), toujours situées à la partie interne du péricarpe, présentent la mème structure que les canaux sécréteurs de la tige et de la racine. Elles sont toujours dépour- vues de membranes propres et ne sont en réalité que de véri- tables méats limités par une zone de cellules spéciales. Ces cellules sécrètent et déversent dans l’intérieur de ces cavités les sucs résineux et les huiles essentielles si nombreux et si répandus dans toute la plante. D'après Müller (Pringsheün"s Jüährbucher) et Van Tieghem (1) (Mémoire sur les canaux sécréteurs des plantes), l'origine des canaux sécréteurs chez les Ombellifères est la même que chez les Conifères, les Araliacées, les Térébinthacées. (4) Ann. sc. nal., 5° série, t XVI, p. 96. CANAUX SÉCRÉTEURS DU FRUIT DES OMBELLIFÈRES. 949 Le canal est toujours formé par le décollement de cellules qui tantôt se divisent, tantôt restent simples, cellules de bor- dure nettement spécialisées an point de vue physio logiquepar rapport au tissu ambiant. Les villæ diffèrent-elles des canaux que Pon rencontre dans les diverses parties, de la plante ou appartiennent-elles au même système” Leur similitude de forme, de fonetions, d'ori- oine, semble indiquer qu'on ne doit pas établir de différence entre ces deux sortes de canaux sécréteurs. Outre les vittæ situées à la partie la plus imterne du péri- carpe, autour de l’albumen, on rencontre, dans presque tous les fruits d’'Ombellifères, un canal à la face externe de chaque faisceau fibro-vasculaire formant les côtes primaires du fruit. Après avoir cherché quel est le mode de formation de ces vitlæ, nous comparerons leur structure à celle de ces derniers canaux, el nous verrons si ceux-ci dépendent du système sécré- teur de la tige, et s’il y a lieu de rattacher les bandelettes à ce système ou de les en séparer. Disons tout de suite que, de même que le faisceau fibro- vasculaire des côtes primaires envoie ses ramifications dans les pétales, de même le canal sécréteur qui accompagne ce faisceau se continue dans le pétale. Son trajet y est parallèle à celui des fais-ceaux à la face externe desquels 11 chemine, se ramifiant comme dans la feuille autant de fois qu'il y a de nervures, — Dans la généralité des Ombellifères on trouve un canal à la face externe de chaque nervure. Ge canal est séparé du fais- ceau (réduit à des trachées) par une ou deux rangées de cel- lules; celui de la nervure médiane est généralement plus déve- loppé. — Chez lErynqüun campestre, chaque pétale ne contient qu'un seul canal situé en son milieu, extérieurement à son unique nervure. Ge canal est très-développé relativement à la grandeur du himbe, surtout vers la base. La genèse des bandelettes présente une assez grande diffi- culté d'observation : en effet, dans les ovaires les plus jeunes que nous ayons pu rencontrer, nous avons presque toujours observé des bandelettes montrout un méat quadrangulaire eu 9390 MOYNIER DE VILLEPOIX. pentagonal autour duquel se groupaient quatre ou cinq cellules plus grandes, plus riches en protoplasma que celles du paren- chyme ambiant. Ainsi de très-jeunes carpelles de Pimpinetla rotundifolia de 0°°,537,5 de diamètre sur leur plus grande largeur sont déjà pourvus de bandelettes dont le diamètre extérieur est de 0"",095, tandis que celui du méat varie de 0"",005 à 0", OTO. Dans le Carum Garvi, la genèse des bandelettes semble avoir lieu de très-bonne heure. Celles-ci affectent déjà, dans un carpelle de 0,375 une forme elliptique très-prononcée, et leurs deux diamètres, suivant le grand et le petit axe de Pel- lipse, sont de 0"",090 et de 0"",040. Dimensions, on le voit, beaucoup plus grandes proportionnellement au diamètre des fruits que dans l'exemple précédent. Le Myrrhs odorata nous a montré, dans un carpelle de 0"",387, des bandelettes d'environ 0,010. Quelques-unes d’entre elles paraissent très-jeunes. Nous les avons représentées planche 17, fig. 4. Disons tout de suite qu'à l'inspection de cette figure, 1l est facile d'y recon- naitre une progression dans l’écartement des cellules de bor- dure et une augmentation du volume du méat. Ainsi en c le méat est à peine visible; il est réduit à une simple fente lon- gitudinale, tandis que les cellules de bordure sont larges et n'ont point encore rapproché beaucoup leurs parois. En & et b, au contraire, le méat devient quadrangulaire, par suite de l’écartement des cellules de bordure, et celles-ci, en s’écartant, se pressent davantage, ce qui détermine une soudure plus pro- noncée de leurs parois. Si nous comparons ces trois étâts de la bandelette à celui d’une bandelette de ce même Myrrhis odo- rata arrivée à son entier développement, nous voyons (pl, 46, fig. 4) les cellules de bordure de plus en plus écartées devenir plus nombreuses par segmentation et laisser un méat beaucoup plus grand, polygonal et non plus quadrangulaire. La plus grande irrégularité de forme et de volume se rencontre dans les bandelettes du Myrrhis, parce que le parenchyme du péricarpe se détruit en partie à la maturité, tandis que par suite du grand CANAUX SÉCRÉTEURS DU FRUIT DES OMBELLIFÈRES. 991 développement de la graine et des côtes, le tissu périphérique à l’albumen se trouve soumis à une traction dans le sens de la circonférence. Gette traction déforme et aplatit complétement les bandelettes, au point de les rendre à peu près invisibles après la dessiccation du fruit. Néanmoins il est facile de voir, d’après les deux exemples précédents, que les bandelettes se for- ment par l’écartement des cellules préalablement différenciées du reste du parenchyme par une accumulation à leur intérieur de matières plasmiques ou de produits de sécrétion, et que cette formation répond complétement à la description qu'ont donnée MM. Trécul et Van Tieghem de la genèse des canaux de la tige. Enfin, l'examen d’un très-jeune carpelle d'Œnanthe crocuta, dont l'ovaire, déjà creusé et contenant un jeune ovule, mesure environ 0",007 de diamètre intérieur, nous révèle l'absence de bandelettes dans le parenchyme ecarpellaire. Celui-ci, qui succède à une couche de cellules de bordure fort développées (pl. 17, fig. 2), ne présente encore dans son tissu cellulaire aucune trace de séparation entre les parois. Nous n'avons pu, on le voit, déterminer le moment précis de Papparition des bandelettes dans le tissu péricarpien. Les variations de grandeur des jeunes bandelettes dans les exem- ples précités semblent indiquer que l’époque de la genèse de ces Canaux peut varier, suivant les fruits, dans une certaine limite. Néanmoins il parait résulter des observations précé- dentes que l'apparition des véfie est presque simultanée avec celle du péricarpe. En un mot, ilest probable que fort peu de temps après la formation de la cavité ovarienne dans le tissu carpellaire, les canaux qui entoureront la graine commencent à se différencier du reste du parenchyme. Jusqu'ici la présence des bandeleites dans tous les fruits d'Ombellifères ne paraissait pas constante. Ainsi M. Collignon (thèse présentée à l'École de pharmacie, 4874) dit que l'As- trantia major et le Scandir Pecten-Veneris n'en possèdent point. Nous avons pu constater la présence de bandelettes dans ces deux fruits. Restait la Giguë (Conium maculatuin), que l'on 392 MOYNIEE DE VILELEPOEX. ait toujours désignée comme dépourvue de toute espèce de canaux sécréteurs. M. Trécul (Ann. se. nat.) seul avait cru voir dans le jeune fruit des viffæ en colonne filiforme. Nous avons examiné altentivement les fruits du Condum maculitun à tous les âges, depuis la formation de l'ovaire jusqu'à la ma- Lurité complète de la graine et du fruit. Voici le résultat de uos observations. 1 L'examen miciescopique montre, du dedans au dehors : 1° Un albumen formé de cellules polvgonales à parois peu épaisses, contenant des granulations signalées déjà dans les fruits du Persil, du Cumin, et attribuées par les auteurs à de l’'aleurone. Du reste cet albumen n'offre rien de particulier. 2 lest limité extérieureraent par deux zones de cellules fort caractéristiques et signalées depuis longtemps comme particu- lières au Contum maculatum. Ges cellules sont colorées en brun. H'assise la plus interne immédiatement accolée aux der- nières cellules de l’albumen, est composée d’une seule rangée de cellules tabulaires à parois minces remplies de protoplasma cranuleux. Ges cellules semblent être Ka dernière assise appar- tenant à la graine, elles sont l'unique enveloppe de Povule. Immédiatement après vient une couche de cellules plus grandes (les cellules cubiques de la Ciguë), dont Les parois latérales et internes sont très-épaisses et colorées en brun. Gette coloration, de même que celle des cellules précédentes, s'accentue quand on traite la préparation par la potasse. Les parois externes sont au contraire beaucoup plus minces. Ces cellules, toujours très- grandes, relativement aux autres éléments de la graine et du fruit, sont également remplies d’un protoplasma granuleux. Les cellules cubiques ont été désignées comme contenant de la conicine. Nous avons pu le démontrer en traitant les prépara- tions fraiches par le chlorure d’or. Dès l'application de ce réac- üf, l'or, réduit par l’alcaloïde, colore innnédiatement les cel- lules cubiques et leurs parois. Ân bout dun certain temps, la coloration violette envahit toute la préparation, ce qui s’ex- plique facilement : le rasoir, en tranchant les tissus, à permis au liquide qu'ils contiennent de s'épancher par toute la coupe. CANAUX SÉCRÉTEURS DU FRUIT DES OMBELLIFÈRES. 993 Néanmoins la zone dont nous parlons conserve toujours une intensité de ton beaucoup plus grande, tellement grande même, quand la préparation est un peu vieille, que, sous le microscope, l’œil ne peut y distinguer autre chose qu’une large bande d’un noir violet. C’est le cas d’une préparation que nous avons conservée. Avec l’azotate d'argent, nous avons obtenu le mêmé résutat. I demeure done parfaitement avéré pour nous que le plus grand emmagasinement de conicine a lieu dans Les cellules cubiques ; mais nous sommes loim de penser qu’il ne puisse s’en trouver dans les autres parties du fruit. Cette couche de cellules est séparée du péricarpe propre- ment dit par une zone de cellules tabulaires très-allongées, à parois minces, à contenu granuleux. 3° Nous arrivons alors au péricarpe proprement dit, dans le tissu parenchymateux duquel nous allons rencontrer des organes de sécrétion : nous voulons parler des bandelettes (vittæ). Immédiatement après les cellules tabulaires, com- mence le parenchyme : trois assises de cellules, quelquefois deux, et dont la première présente un développement un peu plus considérable que les autres, séparent les bandelettes des cellules tabulaires. Ces bandelettes, irrégulièrement disposées, forment une cemture Continue ; elles présentent le mème aspect que tous les canaux sécréteurs, savoir : quatre ou cinq cellules sécrétantes à contenu granuleux que la potasse colore en jaune, limitant un méat polygonal. À la maturité, ces bande- lettes ne prennent pas le développement qu’on est habitué à leur voir prendre dans les autres fruits d'Ombellifères. Elles disparaissent lentement par suite du développement du paren- chyme et des cellules cubiques. La zone, presque continue des cellules qui les composent et qu’on pourrait appeler zone sécrétante, est aplatie entre ces deux tissus; les méats dispa- raissent, et les cellules sécrétantes elles-mêmes s’aplatissent considérablement. À la maturité complète, le parenchyme péricarpien à subi une telle traction dans tous les sens, que ses cellules ont perdu presque complétement leur forme primitive, et que, pour peu que la dessiccation soit venue hâter la dis- Ge série, Bor. T. V (Cahier n° 6). 5 23 394 MOYNIER DE VILLEPOIX. sociation de ces éléments, il est complétement impossible de retrouver la moindre trace des bandelettes. Contrairement à ce qu’on a pensé jusqu'ici, le système sécréteur est complet dans la ciguë, car non-seulement on y rencontre des bandelettes, mais encore des canaux acecompa- gnant chaque faisceau fibro-vasculaire des côtes. Ces canaux, ainsi que les bandelettes, sont représentés dans la planche 47, figures 2, 3, #, 5, en coupes transversale et longitudinale. On y retrouvera également les trois couches de cellules spéciales dont il a été parlé plus haut, ainsi que les cellules de Pépi- derme dont la forme et la dimension sont remarquables. Toutes les cellules du parenchyme péricarpien du Conium maculatum ne contiennent pas indistinetement d’amidon. Les cellules amylifères occupent une zone parfaitement limitée. Cette zone se borne aux deux ou trois assises de cellules paren- chymateuses qui viennent immédiatement après la couche de bandelettes. Elle se continue en contournant extérieurement les faisceaux des côtes. Néanmoins nous ne voudrions pas attacher trop d'importance à cette observation, à cause de l'extrême variation de localisation que présente l’amidon dans l’évolution des tissus végétaux. La présence des canaux sécréteurs dans le fruit vert de la Ciguë corrobore cette observation de Manlius Smith (1), con- firmée par Harley (2), que les fruits verts non mürs possèdent plus que toute autre partie du végétal Pactivité spéciale de la plante, et qu'ils peuvent être desséchés sans perdre de leur activité. Un extrait fluide médicmal, d’une activité considé- rable, à été fabriqué avec ces fruits par Squibb, de New- York. On voit donc que lappareil sécréteur du fruit des Ombel- lifères est composé de deux sortes de canaux : les uns accom- pagnant les faisceaux des côtes, les autres entourant Palbumen, appelés vittæ où bandelettes. Doit-on voir là deux systèmes dif- (4) Trans. of the New-York Slate Medical Society, 1867. (2) The old Vegetable Narcoties. Lond., 1860. CANAUX SÉCRÉTEURS DU FRUIT DES OMBELLIFÈRES. 395 férents de conduits oléifères, ou dire que bandelettes et canaux ne sont que la continuation, dans le fruit, des canaux de la tige ? Ceux-ci, en effet, passent de la tige dans le fruit avec les faisceaux fibro-vasculaires du carpophore et Les faisceaux des côtes primaires. C’est ce que j'ai pu constater dans le fruit du Smyrnium Olusatrum. Les bandelettes, au contraire, ne pré- sentent à la base du fruit aucune communication avec les canaux sécréteurs des côtes, et partant avec ceux de la tige. J'ajouterai en quelques mots que les canaux accompagnant les côtes ne sont pas les seuls canaux oléorésineux reliés au système vasculaire que lon puisse rencontrer dans le fruit. Dans ma thèse à l'École de pharmacie, je signale avec détail la présence de canaux oléorésineux dans le carpophore, tantôt autour de celui-ci, plus ou moins séparés de ses éléments par quelques cellules, comme dans le Snyrniumm Olusatrun. tan- tôt au centre même des fibres qui le composent (Myrrhis odo- rala) ; on ne voit dans cecas qu'un canal complétement entouré de fibres ligneuses, mais quelques restes de cellules de paren- chyme médullaire démontrent que ce canal s’est primitivement formé aux dépens des cellules de ce parenchyme qui occupait le centre du faisceau, constitution qui me parait dénoter la nature axile du carpophore. Enfin, j'ai également rencontré des canaux fort développés dans le raphé du Sryrnium Olusatrum, au milieu du paren- chyme lâche qui constitue celui-ci, et disposés régulièrement aux quatre angles du faisceau nourricier de la graine. On voit donc que, dans toute la plante, le système sécréteur est parallèle du système vasculaire, On pourrait, au seul point de vue des situations, établir deux ordres de canaux : les uns pour ainsi dire reliés au système vasculaire; les autres épars dans le parenchyme ou la moelle (comme dans la tige) et complétement indépendants de ce système vasculaire. En effet, l'examen des canaux sécréteurs de la feuille et de la tige peut nous convaincre de l’existence, dans ces organes, de canaux situés dans le parenchyme ou dans la moelle, indé- pendants des faisceaux, mais tout à fait semblables, du reste, 396 MOYNIER DE VILLEPOIX. à ceux qui accompagnent ces derniers. Dans la moelle de beau- coup d’Ombellifères, et pour ne prendre qu’un exemple, dans celle de P£rynqium amethystènum, nous voyons des canaux isolés au milieu du parenchyme médullaire et présentant la même structure que ceux des faisceaux ligneux ou libériens. Si nous poursuivons cette recherche dans la feuille, nous y rencontrons la même disposition du système sécréteur. Cest ainsi qu'une coupe transversale, pratiquée dans la feuille du Créthmum maritinum (pl. 16, fig. 6) nous montre, d’une part, onze faisceaux correspondant aux nervures, accompagnés chacun d’un canal oléorésineux (le faisceau central en pré- sente même quatre). Ces canaux ne sont pas immédiatement accolés aux faisceaux dont ils sont séparés par deux ou trois rangées de cellules ; néanmoins on ne saurait dire qu'ils n’en dépendent pas. D'autre part nous trouvons des canaux figurés en c". Ceux-ci, absolument indépendants des faisceaux, sont situés dans le parenchyme, au milieu des cellules sous-épider- miques. Quelques-uns même, et c’est le cas de la figure, vien- nent immédiatement après la couche des cellules de lPépi- derme, et sont sans aucun rapport avec les faisceaux. Le parallélisme de ces deux sortes de canaux, les uns fai- sant pour ainsi dire corps avec le système fibro-vasculaire, les autres complétement Imdépendants de celui-ci, ne peut-il se continuer jusque dans le fruit ? Toutes les parties de la fleur n'étant que des feuilles plus ou moins modifiées, n'est-il pas raisonnable d'admettre que, dans la feuille carpellaire qui donnera naissance à l'ovaire, les canaux du parenchyme seront représentés par les bandelettes, tandis que le système sécré- teur accompagnant les faisceaux fibro-vasculaires se continuera dans les côtes du fruit? D'autant plus qu’en se repliant pour devenir ovaire, étamine ou anthère, la feuille modifiée, comme on l’admet généralement, présente à la surface externe du nouvel organe qu’elle forme la face inférieure de son limbe, et que précisément c’est à la face supérieure de ce limbe, c’est-à-dire à la partie interne du futur ovaire, que se rencon- trent les canaux que nous signalons ici. Nous espérons, dans CANAUX SÉCRÉTEURS DU FRUIT DES OMBELLIFÈRES. 397 des recherches ultérieures, pouvoir appuyer par de nouveaux exemples ce que nous ne présentons en ce moment que comme une hypothèse. À propos des canaux des côtes primaires du fruit, je crois utile de signaler ici quelques particularités dans leur disposi- tion. Généralement, chaque faisceau de ces côtes primaires n'est accompagné que d'un seul canal, situé à la partie externe, et plus souvent sur la partie latérale que vers la ligne médiane du faisceau (Heracleum, Bupleurum, Carum Carvi, Myrrhis odorata, Snyrnium, etc.) Dans l'Eryngium et le Scandix Pecten-Veneris, 1 n’en est pas de même. Dans ce der- nier, une coupe transversale fait voir l'aspect représenté sché- matiquement dans la planche 17, fig. 3, savoir : dans chaque méricarpe cinq bandelettes elliptiques, puis, alternant avec elles, quatre faisceaux fibro-vasculaires formant les côtes. Deux de ces faisceaux sont à la face dorsale, les deux autres forment les ailes du fruit. Le plus généralement, ces deux derniers fais- ceaux présentent à leur face externe au moins trois canaux oléorésineux ; les autres n’en présentent que deux ou un. Dans ce cas, ce canal unique est situé toujours extérieurement et dans la ligne médiane du faisceau. On n’en voit pas à la face interne. Dans le fruit représenté par la figure, les faisceaux des ailes ont d’un côté trois canaux et de l’autre deux. On voit par là qu'il est impossible d'affirmer une régularité bien grande dans la disposition de ces canaux, néanmoins le fait de leur pluralité se montre constant dans le Scandix (1). Il en est de même, d’une façon plus régulière, dans l'Eryn- gum amethystinum. Là nous voyons deux canaux accompa- oner le faisceau, lun à la face externe, l’autre à la face interne. Le canal qui regarde la périphérie du fruit se trouve complé- tement englobé dans les éléments du faisceau; celui au con- traire qui regarde l’albumen est séparé des trachées par une ou deux couches de cellules. Cependant il nous semble difficile (1) La figure 3, planche 17, représente une disposition exceptionnelle. Chaque méricarpe du Scandix possède ordinairement quatre bandelettes à sa face dorsale. 358 MOYNIER DE VILLEPOIX. d'admettre que le canal, représenté en €”, planche 16, fig. 9, puisse être considéré comme indépendant du système fibro- vasculaire. Il appartient évidemment au faisceau en regard duquel il se trouve, et non au parenchyme, d'autant plus que ce fait n’est pas spécial à tel faisceau, mais que tous les fais- ceaux du fruit sont ainsi accompagnés de canaux semblables et semblablement placés. La même particularité se rencontre, peut-être avec un peu moins de constance, dans les Ærynqium planum et maritimum, et cette disposition binaire parait être générale dans le genre. Nous avons voulu voir quels étaient, dans la tige du genre Erynqium, les rapports des canaux sécréteurs avec les fais- ceaux vasculaires, et nous avons trouvé la même dualité dans les faisceaux du bois. Une coupe de la tige de l'ÆErynqium amethystinum nous présente d’une façon à peu près constante deux canaux, lun à la partie interne, l’autre à la partie externe du faisceau ligneux. Chaque côte de collenchyme, au contraire, ne présente qu’un canal à la partie externe. Nôus avons vu le même fait se répéter dans la feuille, où chaque faisceau des nervures est accompagné de deux canaux au moins, et nous retrouvons dans la nervure médiane une dispo- sition analogue à celle des côtes primaires, à savoir, les canaux du côté externe (ils sont au nombre de 5) engagés dans le collen- chyme qui se prolonge jusqu’au faisceau fibro-vasculaire. Signalons en passant la présence, dans le genre Eryngium, de nombreux cristaux maclés sphéroïdaux, semblables à ceux que l’on rencontre dans les Rumex sanguineus et scutatus. Ces cristaux se trouvent dans des cellules spéciales dissé- minées çà et la dans la moelle et dans le parenchyme de la feuille. Ils offrent dans le fruit un curieux exemple de loca- lisation : les deux faces commissurales du fruit sont bordées sur toute leur longueur par une rangée de cellules à cristaux. L'Eryngium campestre présente une assez grande différence dans la structure du pétiole des feuilles radicales avec les deux autres représentants du genre, pour que nous croyons devoir la signaler ici. La moelle est limitée extérieurement par une CANAUX SÉCRÉTEURS DU FRUIT DES OMBELLIFÈRES. 399 zone de faisceaux libéro-ligneux, et l’on rencontre dans la masse de celle-ci un grand nombre de faisceaux assez régulièrement espacés, formant deux ou trois zones concentriques. Chacun des faisceaux libéro-ligneux possède un canal à la partie in- terne. Les faisceaux de la moelle au contraire en montrent jusqu’à trois assez irrégulièrement disposés à leur périphérie : la figure #, pl. 17, représente un faisceau libérien grossi pour montrer que le canal oléorésineux est toujours séparé des élé- ments vasculaires par une ou plusieurs couches de cellules parenchymateuses. La tige proprement dite de l'£rynqium campestre ne présente plus la même particularité que le pétiole. La moelle n’y est plus sillonnée par des faisceaux fibro-vasculaires. On trouve également dans le fruit deux canaux accompagnant les faisceaux des côtes, mais le canal externe, toujours plus développé, n’est plus englobé dans les éléments du faisceau. Si l’on examine un fruit desséché d'Ombellifère, iln’est pas rare cle rencontrer dans une coupe transversale des membranes brunâtres qui divisent en deux ou trois parties la eavité des ban- delettes. | Déjà M. Trécul, signalant ces sortes de membranes qu'il a également observées dans les canaux de certaines Composées, dit qu’elles sont d'apparence cellulaire et résistent à l’action de l'acide sulfurique à la façon des cuticules. Effectivement, leur aspect et leur coloration sont les mêmes que ceux des parois des bandelettes et des cellules environnantes souvent atssi co- lorées en brun; elles réfractent également la lumière, et il est assez difficile de déterminer leur mode d’origine d’une façon très-précise. Disons tout de suite qu'il ne faudrait cependant pas les con- fondre avec certaines productions jaunâtres d'apparence lamel- leuse qui paraissent être dues à la dessiceation des matières plas- miques ou résineuses que contenait la bandelette, productions qui forment dans quelques bandelettes de véritables ponts d’une paroi à l’autre. C’est ce que représente la fig. 6, pl. 47, dans une bandelette d’un ovaire encore jeune d’Angelica Archangelica. 360 MOYNIER DK VILLEPOIX. Quant aux autres membranes que nous citions plus haut, et dont la direction est parallèle à l'axe du fruit, on pourrait, ilme semble, expliquer leur formation par la soudure de deux ban- delettes très-rapprochées dans le jeune âge et dont la paroi commune, formée d’une ou plusieurs cellules sécrétantes, se dessèche ensuite comme les autres cellules des parois. J'ai pu recueillir quelques observations qui semblent corro- borer cette opinion. Si l’on examine les jeunes ovaires du Carum Carvi, on remarquera que presque constamment le nombre des jeunes bandelettes y est de sept par méricarpe, tan- dis que le fruit à la maturité n’en présente plus que six: deux à la face commissurale et quatre sur le reste du méricarpe. nous semble tout naturel que cette septième bandelette se soude par les progrès de l’âge avec sa voisine : tantôt la membrane de soudure peut se résorber entièrement, alors le fruit pré- sente l'aspect normal; tantôt au contraire cette membrane per- siste, comme nous l'avons pu voir dans un fruit sec de Carvum Carvi. Si nous examinons à un fort grossissement la coupe trans- versale de cette cloison, nous voyons qu’elle se bifurque en arrivant vers les deux parois de la bandelette, de façon à se réunir à celle-ci par deux cloisons laissant entre elles un espace vide à peu près triangulaire. C’est ce que l’on voit dans la fig. 7,pl. 17. On voit par là que la bandelette, qui, au premier abord, parait unique, est en réalité formée de deux vittæ accolées. — Bien que cette forma- tion de membranes parallèles à l’axe n’ait point, à notre connais- sance, été signalée dans les canaux de la tige ou de la feuille, nous croyons devoir indiquer que nous avons rencontré dans les canaux du parenchyme foliaire, chez le Crithnum maritiman, une tendance à cette soudure : comme on le voit planche 17, fig. 8, deux canaux complétement accolés n’ont pour ainsi dire qu'une cellule de bordure commune. Il est présumable que par suite de l'accroissement en diamètre, lesdeux cellules tangentes ne laisseront en s’écartant qu'une cloison commune aux deux canaux. Quoique nous ayons observé ce fait dans la feuille et CANAUX SÉCRÉTEURS DU FRUIT DES OMBELLIFÉRES. 301 non dans le fruit, il nous semble plausible d'admettre qu’il doit en être de même dans ce dernier, puisque le mode d’accrois- sement des bandelettes est le même que celui des canaux de la tige. Quant aux membranes transversales que l’on observe dans toutes les vittæ sur une coupe longitudinale, elles semblent dé- pendre des cellules de bordure. Leur coloration, leur réfrin- sence sont identiques à celles des parois de ces cellules, etrien ne parait devoir les en différencier. Dans le Conium maculatum et le Bupleurum, une coupe lon- gitudinale pratiquée près de la surface du côté de la commis- sure, laisse apercevoir au milieu de l’albumen une membrane cellulaire de même aspect que les parois des cellules de bordure, disposée perpendiculairement à laxe du fruit et reliant entre elles ces mêmes cellules. Cette membrane me parait être due à un développement exagéré de cette couche de cellules, qui se fait jour à travers cette partie de la graine. Doit-on assigner une origine analogue aux cloisons transver- sales qu'on rencontre dans les bandelettes, ou attribuer leur formation à la non-continuité de la genèse des canaux résineux? Nous penchons plutôt vers cette dermère hypothèse. Il parait en effet assez juste que le décollement des cellules de paren- chyme d’où résultera le méat ne se continue pas dans toute l'étendue du fruit, et que, de place en place, 1l reste quelques cloisons cellulaires, comme cela se présente dans la genèse des Vaisseaux. M. Trécul, dans son Mémoire sur les vaisseaux propres des Ombellifères, dit que dans lHeracleum, les vittæ ne se pro- longent pas jusqu’à la base du fruit, mais s’anastomosent vers le sommet en formant un véritable réseau à la base du style, et qu'ila vu dans le Ferula tingitana les vittæ S’anastomoser avec des canaux latéraux qui se courbent pour entrer dans le style. Enfin, le même savant rapporte € qu’il n’a pu déterminer » si les vittæ sont des prolongements des vaisseaux propres de » la tige, comme le sont ceux du côté externe des faisceaux » vasculaires de [a ige ». 302 MOYNIER DE VILLEPOIX. J'arecherché dans un grand nombre de fruits, et notamment dans l’Heracleum Sphondylinn, le Snyrnium Olusatrum, V Opo- panax Chironium, le Fœniculum dulce, Y'Helosciadium nodi- forum, le Cachrys involucrata, le Molopospermum, le Myrrhis odorata, VEryngium campestre, planum, amethystinum, mari- tinuun, ete., le trajet des bandelettes et des canaux des côtes dans le sommet du péricarpe, dans le stylopode et dans le style. Les canaux des côtes primaires suivent jusqu’au sommet du péricarpe le trajet des faisceaux vasculaires qu’ils accompagnent. On va voir quelle est leur marche dans le stylopode. Jai pra- tiqué dans un même fruit d'Opopanax Chiromum une série de coupes transversales depuis la base du stylopode jusqu’au sommet du style. J'ai reconnu que les faisceaux fibro-vascu- laires des côtes, aussitôt après l'insertion des pièces du périanthe, tendent à se réunir vers le centre de chaque carpelle. Ils se courbent, à cet effet, en montant comme les arceaux d’une voùte, convergeant à peu près vers le même point. Il se forme là un véritable lacis de trachées, dont quelques-unes se relèvent pour entrer dansle style. Les canaux oléorésmeux qui se trouvent à la partie externe des faisceaux se rapprochent peu à peu avec ces derniers de la couche de bandelettes avec lesquelles Les faisceaux alternent. Les canaux des côtes commencent alors à s’accroitre progressivement en diamètre ; quant aux bandelettes, elles se rapprochent au fur et à mesure du rétrécissement de la cavité ovarienne et se soudent bientôt entre elles (cette sou- dure est très-visible sur des coupes transversales). Enfin les canaux des côtes ne tardent pas à se réunir entre eux et avec les bandelettes par une série de canaux anastomosés en zigzag. On ne voit plus bientôt, à mesure qu’on s'élève, qu’une série de canaux autour de la cavité ovarienne, qui se réduit à une petite ouverture, et à la partie externe de ces canaux qui sont le résultat de la soudure des bandelettes et des canaux des côtes, une véritable barrière de trachées. Le nombre de ces canaux diminue par suite de soudures successives, et finalement on nerencontre plus, en arrivant dans le style, que deux ou trois CANAUX SÉCRÉTEURS DU FRUIT DES OMBELLIFÈRES. 3063 canaux répandus au milieu du parenchyme à la partie externe du faisceau vasculaire. Ces canaux se réduisent bientôt à deux, puis à un seul tout à fait au sommet, avec plus ou moins de ré- eularité. Gette disposition, je lai rencontrée dans un grand nombre d’ovaires de tous âges. Ainsi, une coupe d’'Erynqium, dont Le réceptacle est un peu creusé, montre au centre la coupe du style, et dans celui-ci les trois canaux que Je signale plus haut. Si l’on retourne cette coupe pratiquée au sommet du fruit, de façon à la voir de bas en haut, on remarque un canal horizontal reliant un de ceux que l’on voit en section transver- sale dans le style, avec les bandelettes et les canaux des côtes dont la courbure à cet endroit est accusée par une section ellip- tique allongée, et qui se réunissent d’une façon plus ou moins régulière les uns avec les autres par un lacis de canaux tortueux, cheminant horizontalement, à diverses hauteurs, dans le parenchyme. Le Smyrnium Olusatrum présente entre les canauxet les ban- delettes, entre les bandelettes elles-mêmes, des anastomoses qui sont d’une observation très-facile. Quant aux canaux des pétales, il va sans dire qu'ils commu- niquent avec ceux des côtes primaires, dont ils ne semblent qu'une ramification. J’ai vérifié cette anastomose, notamment dans l’Heracleum, où j'ai vu le même canal des côtes primaires passer jusque dans le style. Pour ce qui est du trajet des canaux dans le style, J'ai déjà indiqué qu'ils diminuaient en nombre en s’élevant dans cet organe. Leur marche est fort difficile à suivre en coupe lon- gitudinale, car ils sont plus ou moins sinueux; je dois néan- moins dire que j'en ai vu se continuer jusqu'au stigmate. D’autres canaux s’mcurvent avant de passer dans le style, et paraissent venir s'ouvrir à la surface du stylopode, à lasuperficie duquel ils sembleraient déverser les produits de sécrétion. J'ai fait cette observation sur l'Helosciadium nodiflcrum. Gette dispo- sition, assez peu facile à observer du reste, vu son irrégularité, se retrouve dans quelques autres fruits. De plus, les canaux que je signale dans le style débouchent-ils dans le stigmate? Je n'ai 304 M@YNIER DE VILLEPOIX. pu m'en assurer. Je ne présenterai donc qu’une hypothèse à ce sujet : cette disposition semblerait assigner, au moins pour certains fruits, dans le stvlopode et le stigmate, au système sé- créteur, un rôle physiologique analogue à celui du système glan- duleux qui constitue les nectaires. On voit, par les exemples qui précèdent etque je croisimutile de multiplier outre mesure, que les canaux accompagnant les faisceaux des côtes se réunissent entre eux et avec les bande- lettes dans le sommet du fruit, par une suite d’anastomoses formant dans le stylopode le réseau dont parle M. Trécul. La continuité du système sécréteur me semble donc nettement établie depuis lextrémité inférieure de la plante jusqu'au style, grâce aux soudures unissant entre eux lesdifférents canaux qui sillonnent les tissus des divers organes de la plante. EXPLICATION DES PLANCHES. PLANCHE 16. Fig. 1. Myrrhis odorata. — Fruit déjà âgé, presque mûr, montrant les bande lettes bien développées. Fig. 2. Conium maculatum. — Figure d'ensemble du fruit, montrant la dispo- sition des côtes primaires. Fig. 3. Une côte primaire plus grossie, montrant le canal sécréteur accom- pagnant le faisceau fibro-vasculaire en €. — ec, épiderme; p, parenchyme ; f, faisceau fibro-vasculaire; Cc, cellules cubiques, formant l’endocarpe; À, albumen; b, bandelettes. Fix. 4. Coupe transversale passant par une vallécule, montrant la disposition des bandelettes et leur situation dans le parenchyme (mèmes lettres que la figure précédente). Fig. 5. Coupe longitudinale passant par une bandelette (mêmes lettres qu'aux deux figures précédentes). Fig. 6. Crithmum mérilimum.— Coupe transversale de la feuille, figure d'en- semble, montrant Ja disposition des faisceaux fibro-vasculaires, des canaux qui les accompagnent et des canaux sous-épidermiques. Fig. 7. Détails d’une extrémité de la fouille. -- €, canal oléorésineux situé à la partie externe du faisceau F; p, parencyhme; e, épiderme. CANAUX SÉCRÉTEURS DU FRUIT DES OMBELLIFÈRES. 369 Fig. 8. Partie de la feuille montrant un canal sous-épidermique en C, séparé du faisceau F par plusieurs assises de cellules du parenchyme P. Lig. 9. Eryngium amethystinum.-—Kaisceau d’une côte primaire montrant deux canaux, dont l’un est englobé dans les éléments du faisceau. — cc’, canaux ; p, parenchyme ; év, trachées. Fig. 10. Eryngium campestre.—— Figure d'ensemble montrant la disposition des faisceaux dans le pétiole des feuilles radicales. — ch, cellules à chlorophylle ; f, faisceaux ; v, vaisseaux; €, canaux sécréteurs. PLANCHE 17. Fig. 1. Myrrhis odorata. — Bandelettes jeunes à divers états de leur déve- loppement. -— c, cellules sécrétantes ; », méat ; p, parenchyme. Fig. 2. OEnanthe crocata. — Ovaire très-jeune, ne présentant encore aucune trace de bandelettes. On remarquera que la couche des cellules de l’en- docarpe est déjà nettement différenciée. — p, parenchyme ; 0, ovule. Fig. 3. Scandix Pecten-Veneris. — Figure d'ensemble du fruit indiquant la pré- sence et la disposition des bandelettes et des canaux des côtes. — a, albumen; b, bandelettes ; cs, canaux; f, faisceaux; ca, carpophore. Fig. 4. Eryngium campestre. — Un faisceau du pétiole des feuilles radicales, et le canal qui l'accompagne. — e, épiderme; f, faisceaux ; c, canal. Fig. 5. Eryngium campestre.-—-Un faisceau de la moelle montrant des canaux oléorésineux plus ou moins englobés dans ses éléments. — C, canaux ; fe faisceau ; pm, parenchyme médullaire. Fig. 6. Angelica Archangelica. — Une bandelette traversée par une membrane d'apparence plasmique* — c, épiderme ; »#, membrane ; b, bandelette; cs, cel- lules sécrétantes; p, parenchyme. Fig. 7. Carum Carvi. Détail d’une membrane transversale formée par la sou- dure de deux bandelettes distinctes dans le fruit jeune. — p, parenchyme ; b, bandelette ; m, membrane. Fig. 8. Crithmum marilimum. — cec, groupe de canaux dans le parenchyme foliaire, au voisinage d’un faisceau F. La disposition des cellules de bordure tangentes semble indiquer la possibilité de la soudure des deux canaux en un seul traversé par une membrane. Fig. 9. Conium maculalum.— Fruit desséché, membrane traversant les cellules du périsperme. La coupe est tangentielle à la face commissurale. — ca, cellules de l’albumen ; e, cellules de l’épisperme ; m, membrane. TABLE DES ARTICLES CONTENUS DANS CE VOLUME. Recherches sur l'anatomie comparée et le développement des tissus de la tige des Monocotylédones, par M. A: GUILLAUD. . . . à ; De l’ovule, par M. E. WARMING . . . Fe a PARA ER 177 Sur les causes des formes anormales de: Bltes qui croissent dans l'obscurité, par N. W. P. RAUWENHOFF . . . . . 267 Huit années d'observations météorologiques faites au jardin d expé- riences de Collioure, par M. Ch. NAUDIN. . . . . 923 Recherches sur les canaux sécréteurs du fruit des Ombiellifére es, 7. M:MoyneTDEe Viglcponcisrns, OMR + ASE Fe 348 TABLE DES MATIERES PAR NOMS D'AUTEURS. GUILLAUD (A.). — Recherches sur l'anatomie comparée et le dévelop- pement des tissus de la tige dans les Monocotylédones . : 5 Moynet pe VizLeroix (R.).— Recherches sur les canaux sécréteurs des fruits des Ombellifères . . . : ; 318 NaupiN (Ch.). — Huit années dobsetYalions te pes au jardin d'expériences de Collioure. . . ; 1 323 RAUWENHOrE (N. W. P.). — Sur les causes dés (oees Snoibates des plantes qui croissent dans l’obseurité . . , . . . . . . 267 177 WarmiNG (Eug.). — De l'ovule . . 4. , , . . . , Planche 1. TABLE DES PLANCHES RELATIVES AUX MÉMOIRES CONTENUS DANS CE VOLUME. pi) 4. D 12 se 14-15. 16-17. Anatomie de la tige des Monocotylédones. Trajet des faisceaux dans la tige des Monocotylédones. Geum urbanum, Ribes nigrum, Passiflora, Pouzolzia, Agro- stemma Githago. Peperomia, Aristolochia. Ficus Carica, Begonia, Cuphea, Gentradenia. Rheum compactum, Papaver Argemone, Tropæolum, Helian- themum, Viola, Mahernia, Ranunculus, Sparmannia. Thesium ebracteatum, Blitum, Lamium, Convallarix. Senecio vulgaris, Limnanthemum, Lobelia, Gesneria, Rho- dodendron. Verbascum, Primula, Myrsine, Juglans, Seringa, Symphytum. Développement des tiges dans l'obscurité. Canaux sécréteurs du fruit des Ombellifères. FIN DES TABLES. ——— PARIS. — iMPRIMENIE 92% € MANTINET, RUE MIGNON, 4 Bot Torre S PL. L. > Ann.des Siren. nat. 6 Serre L. Cmbes.lth ee D) Sa SEE ” é =| 2 et HELD HT S n 9. Pot. Tome #71. Ann.des Seienc.nat. CSerte ae des Monacotyledones. + 2620 LR ES Ë . Ann. des Seine nat OS Serre. Pol Tome S Pl . —# > SIESIN 14 m /illaud al Anatomie de la tige des Monocotilectones. MO nn. des Screnc. rad. Of Serie. Ve Tome SD A. os 1 © A Galet dl. 1 Gbes LA. Anatomie de la tige des Monocotyledones. Combes ET. Z JL. Pot Lime S PLIS. EE EE) D x ee 4 ELEN CS Mrnese = © ? XS. Le? LY2 ro . \ ES y? … nr des Siienc nat CS Serte CIO TIC œe Do® 29, .Anatomie'de l& lige des Monocoty ledores . - L AS) AT ENE (12. é ? OR o cd TA a. TS un SEC Re DE \< ue, ÈS . { Guilaud. del. D c/nn des Scene réel O7 Jerre A Lol. Jorne 3 10 0 4 Guilde. Trajet des s farsceaux dans la lige des Minorylätenes Tran Boot A1 F5 Monipell Der Bot. Jonte J'ertre.. Ann, des Seine. nat. Ê° 1 E Ceun twbanan.- 0x luUbes riGÿT'Unt — 23 01 L'assiflor& vir'ths. ; , ; » Lousolsie 23 Agrostenine sage. Jr TN Pot, one Ann, des Seine. nat. Ê° Sert. Ses 7 del, War 2220 10.22. Arislolochia clernalilis., z. g. leperomtiez.- 3, l'arts, 7" Veille Æruapate, V2 np. À. Salnon n des Jetene. nat, CO J'erte. Pol Zome 2. 20 CreuSNCarLe 7. 0 Begonia heracleifo la. re 113, Üphea plaleenta. 14.15. Ccréadernia floriburda , 2 PERLE A = à War run de. Diop e 1. 4. Âeur conpachin. 3.7 L'apaver Argemone #8. 4 Tropeoliun Lobbianun,. 10.12. felanthemun lavarndulefolun._1416. Viola Lrivolor._ 19.21 Mahernea 22,24. Nanurcalis acri._25. Ceun.-20. Spa manrix . Ann des Seine. nat. 6° J'erce., Pot. Jome SPL, 12. | Warning del. léerre. se L J'erecto vulgaris. 14 Dalle. 15 Limnandhemun. 16018. Lobelax Dortnanra.- | 17. 29, Ces her tu lybruta._20.26, Rhododendor hrruline . 2n 2 > a LE JE 3e n PAT ets 1» p 2 7 > 7 A 10. Wyrsine afriane. Ann. des J'ecene., nat 6 J'érie NT) CS SEX OC Br CHE LIZ. lu gars regie. 215.17. Jyrth ga vulgaris. _ 18.20.J 72217777) official. é Ai < < : 2. 0 lerbascum Lhæentceunt. 7 Lrnula offictnabs. La ra Way wutng del, Ann, des Seiene. naë, 6° Série Poé, Zome 5, PL, 14, | Aauwenk aff del. Lierre. re. Developpement des. Lges à l'obreurite., . Inp, A. Salmon, r. Meile Lrtrepate,rS Parik. DEL ETN Bot, Zome Ann, des J'etene, nat C° SJerte. 17 EC ee ——_— HO See ete LOGS CS bLe eee Qi (EyA Ce O er D ATEN TZ EN Nan rs Be NX Q\ FT FE EN SOS RES cer OR: a0leee mo 000 . e. 10 Jo) de _ : (] ù O ë. o . 00 € e D à J Le p " A e 6 Û @) Ô OÙ “ Q d! 0 a cs = — SOCCER, NS o) RSS SL O7 = E OS ÈS D = = se — RESTES Cr TN ER) TTL N CRC Tu ) 2,1 Veille Lrtrapade, 25, L'art. np, À. J'atno FPS < [ | | \_ Ÿ | à ZA È SO CN LOVE D NEC TON Z 5e > À — Ô) j) “ 7 sin nie te sos Rs à {ADS Save nice 18 lo S = Aie: JR AS ù œS < te Ann, des J'eteñne. ral DE J'erce., Aoynier de liopo rx del éeléres des Or » ” ” ; Canale secr'eleurs t 7 fruit ,v Méille Lrtrapade, 15, l'art. lip, A Salmon {nr des Jetene, ral, 0, J'erte. HDol, lome 2, LL.'i Ze CARRE #00 rh Moyruier de lepoiz del. 7 agerre we: Canaux secreteurs du, frut des Ombelliferes. Le « np A. J'atmon,r, heille Lrtrapade,ls, Parts.