7 messes ae ag he d'A A A A DS 0 0 0 "0 0 2 PO OT POPO IT IA TT ICT IT TTC TITI TL TTL RERROEE ELITE NE TETE TENT ACT NE EE RE NO) Prat Ne. | LES % w L Fr} 1 e 4) HE de CRU ER NE SARA A MX i AR FRS ù AA APR En k : AE si ee nl : AT “ or d à LE LS COQ AR GE LANCE FRAC ON pa OL Es & PR CU NN e | A 2 eh S'y pa "2 + Fa Fa f + PO UND VIN SÉRIE LONRNce Pet, ANNALES SCIENCES NATURELLES HUITIÈME SÉRIE BOTANIQUE L'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE ET LA CLASSIFICATION DES VÉGÉTAUX VIVANTS ET FOSSILES PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION DE _ M. PH. VAN TIEGHEM TOME X. -_ Nwd et2 PARIS MASSON ER CE ÉDITEURS LIBRAIRES DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE 120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN 1899 —— —_—_—_—— PARIS, 30 FR. — DÉPARTEMENTS ET ETRANGER, 92 FR. Ce cahier a été publié en septembre 1899. Les Annales des Sciences naturelles paraissent par cahiers mensuels. HUITIÈME HU BOTANIQUE | Publiée sous la direction de M. P#. VAN Dre “ L'abonnement est fait pour 2 volumes, chacun d'environ 400 pages, avec les planches et 1e D. Re le texte Mode à aux mémoires. Ces volumes paraissent en ne fascicules ne alerte dune année. TS Les tomes I à IX sont complets. ZOOLOGIE oo Publiée sous la direction de M. A. MIENE- EDWARDS. L'abonnement est fait pour 2 volumes, chacun d'environ 400 pages, avec les planches corréspondant aux mémoires. Ces volumes paraissent en plusieurs fascicules. dans l'intervalle d’une année. Les tomes I à VIII sont ne Prix de l'abonnement à 2 volumes : Paris : 30 francs. — Départements et Union postale : 32 francs. ANNALES DES SCIENCES GÉOLOGIQUES Dirigées, pour la partie géologique, par M. HÉBERT, et pour la partie paléontologique, par M. A. MILNE-EDWARDS. Tomes I à XXII (1879 à 1891). Chaque VOlUIHe +. ou 15 fr. | Cette publication ést désormais confondue avec celle des Annales des Sciences naturelles. | Prix des collections. PREMIÈRE SÉRIE (Zoologie et Botanique réunies), 30 vol. (Æare). DEUXIÈME SÉRIE (1834-1843). Chaque partie 20 vol. 9250 fr. TROISIÈME SÉRIE (1844-1853). Chaque partie 20 vol. 250 fr. QUATRIÈME SÉRIE (1854-1863). Chaque partie 20 vol. 950 fr. CINQUIÈME SÉRIE (4864-1874). Chaque partie 20 vol. 950 fr. SIXIÈME SÉRIE (1875 à 1884). Chaque partie 20 vol. 950 fr. SEPTIÈME SÉRIE (1885 à 1894). Chaque partie 20 vol. 300 fr. GÉOLOGIE, 22 VOLUMES LC PNR PR Ne et , 330 fr. ANNALES SCIENCES NATURELLES HUITIÈME SÉRIE BOTANIQUE CORBEIL. — IMPRIMERIE ÉD. CRÉTÉ. ANNALES SCIENCES NATURELLES HUITIÈME SÉRIE BOTANIQUE COMPRENANT L'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE ET LA CLASSIFICATION DES VEGETAUX VIVANTS ET FOSSILES PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION DE M. PH. VAN TIEGHEM TOME X PARIS MASSON ET Cr, ÉDITEURS LIBRAIRES DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE 120, Boulevard Saint-Germain 1899 L'ASSENELATION CHLOROPHYLLTENYE LA COLORATION DES PLANTES Par M. ED. GRIFFON INTRODUCTION «Je pense, a dit Claude Bernard, que c’est une erreur ou une illusion de toutes les écoles anatomistes, d’avoir cru que l'anatomie expliquait directement la physiologie (1). » L'illusire savant avait, il est vrai, plus particulièrement en vue la physiologie animale ; mais ses paroles n’en conservent pas moins la même vérilé quand on envisage les fonclions des plantes. Parmi ces fonctions, il en est une, l’assimilalion du car- bone, qui s'exerce le plus souvent par l'intermédiaire d’une malière colorante verte, la chlorophylle, laquelle se trouve contenue généralement dans de pelits organites de nature protoplasmique et qu’on nomme /eucites ou plastides. La pré- sence des leuciles verts ou chloroleucites est alors, pour l’analomiste, un signe que la fonction assimilatrice, qu consiste dans la fixalion de carbone avec dégagement (1) Claude Bernard, La science expérimentale, p. 105. ANN. SC. NAT. BOT. xd D: 2 ED. GRIFFON. d'oxygène, peut s'exercer à la lumière dans les cellules qui les contiennent. | Mais il ne faut pas oublier que le protoplasme des cellules vertes, comme celui des cellules incolores, est doué de la fonction respiratoire. Or, celte fonction, au point de vue des échanges gazeux, est précisément l'inverse de l'assimilation chlorophyllienne ; par elle, de l'oxygène est absorbé et de l'acide carbonique dégagé. : D'autre part, dans une feuille, dans une plante entière surtout, il y a des cellules incolores qui respirent et n’assi- milent pas, et parfois aussi des cellules verles qui, situées dans les profondeurs des tissus, ne reçoivent qu'une lumière très affaiblie dans ses rayons actifs. Or, l’anatomie est-elle toujours capable, par ses moyens propres, d'apprécier dans celte feuille, dans cette plante entière, l'intensité de chacune des deux fonclions, et de prévoir quels seront le sens et la valeur de la résultante des échanges gazeux opposés? Il faut bien avouer que non. M. G. Bonnier (1), dans ses recherches sur la biologie des Phanérogames parasites, a mis en évidence ce fait que des plantes vertes, comme l'£wphrasia officinalis par exemple, ne dégagent pas d'oxygène à la lumière ; non que l’assimi- lation y soit nulle, mais elle est trop faible et par suite masquée par la respiralion. M. Bonnier fait alors remarquer avec juste raison « quels sont les graves défauts que peut avoir la méthode ana- tomique lorsqu'on veut en tirer des conclusions physio- logiques ». Il voit dans ses recherches un exemple à ciler, auquel on pourrait en joindre beaucoup d’autres, pour opposer des objections sérieuses à ce que cerlains auteurs ont appelé « l’Anatomie physiologique ». Les plantes vertes peuvent donc avoir des énergies assi- milatrices tellement différentes qu’à la lumière les échanges gazeux soient renversés. L'anatomie ne peut pas toujours (4) G. Bonnier, Recherches physiologiques sur les plantes parasites (Bull. scient. du nord de la France et de la Belgique, t. XXV, 1893, p. 77). L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 3 prévoir ces fails. Elle est également désarmée quand il s’agit d'apprécier, chez les plantes vertes qui dégagent de l'oxygène, l'énergie avec laquelle l'acide carbonique est décomposé. Le problème si important et si complexe, mais encore si peu exploré, de l'assimilation spécifique, n’a donc pas à attendre d'elle sa solulion. Bien plus, les résultats expérimentaux une fois trouvés, elle est même souvent incapable de les interpréter d'une manière satisfaisante. C’est ainsi que M. Bonnier, dans le travail cité plus haut, se voit obligé d'admettre que les différences d’assimilation doivent être fonction d’une autre variable que la structure qui serait peut-être la nature de la chlorophylle, ou les matières sura- joutées modifiant son rôle absorbant pour les radiations. La chlorophylle, en effet, n’est pas, comme on le croit généralement, une substance unique commune à toutes les plantes. Depuis que les deux Rouelle préparèrent pour la pre- mière fois une dissolution alcoolique de ce qu'ils appelaient la « fécule verte », depuis surtout les travaux de Pelletier et Caventou sur ce principe, auquel ils donnèrent le nom de «chlorophylile », presque tous les savants qui l'ont étudié ont cru se trouver en présence d'une substance verte toujours la même, mais qui se modifie rapidement sous l'influence de la lumière et de l'air. D'ailleurs, jusqu'en 1877, aucune analyse précise n'avait élé donnée de la chlorophylle. Il est juste cependant de dire qu’en 1854 Angstrüm (1), par des recherches spectrosco- piques, avait été conduit à admettre que la chlorophylle des Phanérogames n’est pas la même que celle des Algues, ce que confirma l’année suivante Horstmar (2), au point de vue purement chimique. Herapath (3), en 1869, pensait même _ que chaque plante doit posséder une chlorophylle spéciale. Mais ces travaux n’eurent aucun écho. (1) Angstrôm, Pogg. Ann., t. XLILL p. 475, 1854. (2) Hortsmar, Jbid., 1855. (3) Herapath, Ber. d. deutsch. Chem. Gesell., t. IT, p. 382, 1869. ED. GRIFFON. ES En 1877 (1), A. Gautier fit cristalliser pour la première fois la chlorophylle de l'Épinard:; en 1879 (2), il en donna la composition chimique, qui différait d’ailleurs de celle de la matière verte des Graminées, obtenue d'une autre facon par Hoppe-Sevyler (3). Ce dernier auteur pense qu’il a isolé du Ray-Grass la chlorophylle, mais modifiée, el il donne le nom de chlorophyllane au produit oblenu ; selon lui, les cristaux verts de A. Gautier, de même que ceux. de Rogalski (4), seraient des mélanges de chlorophyllane, de cire et de carotine. Mais M. A. Gautier persiste à admettre que la chlorophyllane de Hoppe-Sevyler est bien la chlorophylle des Graminées (Monocotylédones), et qu’elle diffère alors de celle des Épinards (Dicotylédones). Ayant de plus observé en 1875 que la chlorophylle des Fougères brunit très vite, même à la lumière diffuse, 1l en conclut que la matière verte des Cryptogames n'est pas la même que celle des Phané- rogames, el que chez les Phanérogames :ïil y a lieu de distinguer celle des Monocotylédones et celle des Dico- tylédones (5). M. Élard, qui depuis plusieurs années se livre à des recherches très précises sur la matière verte des plantes, a moniré, en s’aidant à la fois de l'analyse chimique et de la spectrométrie, qu'il existe dans le règne végélal un grand nombre de chlorophylles, et qu'il peut même y en avoir plusieurs pour une espèce donnée. C’est ainsi que, d’un extrait sullo-carbonique de feuilles de Luzerne, il a isolé la médicagophylle « (6), el d’un extrait alcoolique, la médica- [A] gophylle 6 (7) qui ont des constitulions chimiques et des spectres différents. Il opère sur des poids considérables de feuilles sèches, ) A. Gautier, Bull. Soc. chim., t. XX VIIE, p. 147. 2) Id., C°R: Acad. t. LXXXIX, p. 865. (3) Hoppe- Seyler, Ber. d. deutsch. Chem. Gesell., 1°7 sept. 1879. ) Rogalski, C.R. Acad., 12 av. 1880. 5) A. Gautier, Remarques à propos d'une communication de M. Etard (C. R. Acad., 1895). (6) Étard, C. R. Acad. des sc., t. CXIX, p. 289. (7) Id., Ibid... t. CXX, p. 328. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. à) 10 kilogrammes environ, afin de pouvoir effectuer facilement toutes les séparalions el purifications nécessaires. Selon lui (1), le sulfure de carbone ne dissout que des chloro- phylles se rapprochant par leur composilion des corps gras et pauvres en oxygène et en azote; les filaments tordus ou aiguilles vertes, longtemps connus sous le nom de chla- rophyllane, seraient constitués par un substratum d'espèces chimiques variées teint par des millièmes de chlorophylle. Quant à l'alcool, il enlève à son tour des chlorophylles plus oxygénées et plus azolées, et dont tout un groupe a des pro- priélés qui dépendent de l'espèce botanique et même des variétés, des lieux d’origine et des stades de croissance. M. Étard pense que sa méthode analytique contribuera à augmenter presque indéfiniment le nombre des chlorophylles. On le comprendra sans peine, si on sait que M. Étard, dans les extraits sulfo-carboniques et aicooliques d’une plante, isole six groupes de chlorophvilles dont chacun peut même être complexe. Tous ces groupes agissent-ils dans l’assimi- lalion? On l’ignore. Il n’est pas impossible que dans certaines plantes des groupements actifs fassent défaut en partie, sinon en totalité; mais ce n’est là qu’une supposilion pure- ment gratuite. M. Étard est aussi arrivé, par la méthode spectroscopique, à différencier les chlorophylles. La diversité de ces dernières se démontre par les longueurs d'onde des axes des bandes d'absorption préexistantes ou provoquées par l’action des réactifs (2). UE faul bien dire que celte diversité des chlorophylles n'implique pas nécessairement une influence sensible sur l'énergie de décomposition de l'acide carbonique, et nous n'avons encore, à l'heure actuelle, aucun résultat expéri- mental concernant cette importante question. M. Étard, se plaçant à un autre point de vue, pense que les actions de la (4) Étard, Les chlorophylles (Ann. de chim. et de phys., 7e série, t. XII, avril 4898). (2) Id:, C.R. Acad. des sc., t. CXXIV, p. 1351. (9 ED. GRIFFON. synthèse végétale conduisant à des corps gras insolubles dans l’eau et à des matériaux éminemment solubles, le tout par l'intermédiaire des matières vertes à absorption, une seule chlorophylle ne saurait suffire à ces travaux. Certaines chlo- rophylles solubles dans le pentane sont, par leurs dédou- blements dans les cellules, les instruments de la production chimique des essences et des huiles. D’autres, insolubles dans les carbures, déjà miscibles à l’eau et très riches en oxygène, tendent, en se dédoublant, à produire des hydrates de carbone, les tanins et les extraits. Une autre question se pose maintenant : les chlorophylles sont-elles les seules substances assimilalrices qu'on ren- contre chez les plantes? Les recherches microspectrosco- piques de M. Engelmann tendent à faire eroire qu'il y à d'autres chromophylles que les substances vertes, capables de servir à la décomposilion du gaz carbonique; par exemple, la bactériopurpurine des bactéries pourprées, la phycoérvy- thrine, la phycophéine et la phycocyanine des Algues; mais les résultats si importants obtenus par ce savant physiolo- giste n'ont pas encore pu être vérifiés par les méthodes directes. De plus, dans le cours de ce travail il ne sera surtout question que des Phanérogames. Celles-ci d’ailleurs ne sont pas toujours vertes. Il en est d'incolores comme l’Orobanche, le Monotropa, et quise com- portent par conséquent dans leur nutrition comme les Champignons. Jamais M. Engelmann n’a pu meltre en évi- dence de dégagement d’oxygène par le plasma, comme le voudrait la théorie de Pringsheim, el les méthodes directes confirment ses résullats. Il en est d’autres qui ont le feuil- lage coloré par une substance dissoute dans le suc cellulaire el qui laisse parfaitement intacts les chloroleucites. Quelle est l'énergie assimilatrice de ces plantes rouges? Nous ne possédons sur ce point qu'un {rès petil nombre de rensei- gnements, qui seront rapportés plus loin. | Dans les chloroleucites même, il y a, en dehors de la chlo- rophylle, une matière colorante jaune, la ranthophylle, qui L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 1 possède trois bandes d'absorption dans la moitié droite du spectre. Cette substance a-l-elle un rôle assimilateur ? M. En- gelmann (1) l’affirme, mais les expériences directes failes Jusqu'ici sur les plantes éliolées par MM. Bonnier et Man- gin (2) ont donné des résultats négatifs. Or les feuilles dites panachées dorées, comme celles du Sureau, ne renferment guère que de la xanthophylle; sont-elles capables, à la lumière, de décomposer l'acide carbonique ? Enfin Ja coloration des plantes n’est pas seulement fonc- ton de leur nalure propre; depuis longtemps déjà on a observé qu’un certain nombre de conditions de milieu influent sur elle. Les recherches de Morphologie expérimen- tale exécutées dans ces derniers temps l’ont prouvé à bien des reprises ; le milieu, en effet, modifie la structure, aug- mente ou réduit la matière verle, si même il n'en change pas la nalure. Que devient alors l'énergie assimilatrice? Nous n'avons encore sur ce point que les résultats obtenus par M. de Lamarlière(3) sur les feuilles qui ont crà à l'ombre et au soleil, et ceux de M. G. Bonnier (4) sur l’assimilalion comparée des plantes développées dans la plaine et sur les hauteurs des Alpes. Je me suis proposé de répondre aux queslions qui vien- nent d’être soulevées et qui, toutes, comme on le voil, ont trait aux relations entre l'énergie assimilatrice et la coloration des plantes. Or les différentes coloralions que présentent les végélaux tenant, comme il a déjà élé dit, soit à la nalure de ces der- niers, soit aux conditions dans lesquelles ils ont vécu, mon travail se trouve naturellement divisé en deux parlies. Dans la première, je m'occupe tout d'abord de l’assimila- (4) Engelmann, Les couleurs non vertes cles feuilles et leur signification pour la décomposition de l'acide carbonique sous l'influence de la lumière (Archives néerlandaises, t. XXII, 1888, p. 1-57). (2) Bonnier et Maugin, Respiration des tissus sans chlorophylle (Ann. Sc. nat. Bot., 6° série, t. XVIIE, p. 293). (3) L. Géneau de Lamarlière, Rev. gén. le Bot., 1892. (4) G. Bonnier, Ann. Sc. nat. Bot., 7° série, t. XX, p. 217. 8 ED. GRIFFON. tion comparée des Phanérogames qui ne sont ni saprophytes ni parasiles ; j'envisage parmi ces plantes : 1° celles qui, bien qu'appartenant à des variétés ou espèces voisines, se distin- guent neltement par l'intensité de la teinte verte de leur feuillage ; 2° celles qui sont colorées autrement qu’en vert et présentent des teintes rouges, brunes, violettes, jaunes ou blanchâtres. J’aborde ensuite l'assimilation des Phané- rogames saprophytes ou parasites, lesquelles sont, soit franchement vertes, soit plus ou moins complètement déco- lorées. Quant à la seconde partie, elle est consacrée à l’influence exercée indirectement par le milieu sur l'énergie assimila- trice en modifiant la coloration et la structure des feuilles. Or, les conditions de milieu sont nombreuses et très varia- bles ; J'ai donc dû forcément me limiler. Je me suis occupé seulement de quelques points concernant l’action de la lumière, de la chaleur et des sels. Voici d’ailleurs un tableau résumant le plan que jai adoplé. Chap. I. — Plantes à feuillage coloré en | SECTION I. vert. jre Partie. — Colora- \ Plantes ni saprophytes : tions inhérentes à la ni parasites. | ion PE es s'en . nature des plantes. feuillage coloré autre- ment qu'en vert. SECTION II. Chap. [ — Plantes parasites ou saprophytes. 2e Partie. — Colora- { Chap. I. — Action de la lumière. tions enrapportavec | Chap. IT. — Action de la chaleur. lemilrenrre tee l Chap. IT. — Action des sels. Il Quelques mots maintenant, avant de terminer cette intro- duction, sur les procédés expérimentaux que j'ai employés. Mes recherches ayant porté sur des feuilles entières ou fraclionnées, sur des segments de tiges herbacées, j'ai pu L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 9 me servir d'éprouveltes de faibles dimensions en longueur. Ces éprouvettes étaient cylindriques ou aplalies, suivant la forme des organes à étudier. Les éprouvettes aplaties sont pour ainsi dire indispensables quand on étudie l’assimi- lation chez les feuilles isolées, qui sont larges et peu épaisses; tous les points de la surface du limbe reçoivent alors les rayons lumineux sous la même incidence, ce qui est une condition essentielle pour que les expériences soient com- parables. Comme il me fallait en outre obtenir des dégagements d'oxygène notables afin que les comparaisons fussent aussi exactes que possible, je plaçais les feuilles dans de l'air con- tenant de 5 à 10 p. 100 d’acide carbonique. Cet air élait préparé à l'avance et mis en réserve sous une cloche renversée sur le mercure. Cette cloche se trou- vait en communication avec un appareil à prises de gaz. Les feuilles fraîchement cueillies étaient placées dans les éprouveltes en queslion que je remplissais ensuite de mer- _eure. À l’aide de l’appareil à prises, et après brassage de l'air de la cloche afin de maintenir le mélange homogène, j'in- troduisais une certaine quantité de cet air dans l’éprouvette. Puis je faisais passer à l’aide d’une pipette reconrbée un peu d’eau dislillée sur la surface libre du mercure, afin d’em- pêcher le dégagement des vapeurs de ce métal, lesquelles sont toxiques pour les feuilles. Celles-ei se maintenaient faci- lement dans l’éprouvette en reposant sur le mercure par leur pétiole préalablement entouré de mastic Golaz. Les éprouvettes contenant les feuilles à comparer élatent placées côte à côte, renversées sur de petites cuvettes à mer- cure, soit à la lumière diffuse, soit en plein soleil; mais dans ce dernier cas je les recouvrais d’une cloche à double paroi dans laquelle l’eau se renouvelail continuellement ; la lem- péralure alors n’a jamais dépassé 25 degrés; après un quart d'heure ou une demi-heure d'exposition, une grande partie de l'acide carbonique se trouvait décomposée. Au début de chaque expérience, je prenais un échan- 10 ED. GRIFFON. üllon de l'air employé; on remarquera que celui-ci était rigoureusement le même dans chaque éprouvette, ce qui est encore une condilion nécessaire pour que les résultats soient comparables. À la fin de l'expérience, les éprouvettes étaient rapportées au laboratoire et renversées sur la cuve à mercure; une faible parlie de l’air qu’elles contenaient élait alors transvasée dans une pelile éprouvelte. J'avais donc ainsi des échantillons de l’air initial et de l'air final que j'analysais à l’aide de l'appareil Bonnier et Mangin. Les résultats analytiques, joints à la connaissance du volume de l’air employé et de la surface des feuilles, me permettaient de calculer facilement les quantités de gaz émis par unité de surface et d'établir par suite les rapports des énergies assimilalrices, lesquels seront souvent désignés dans ce travail sous le nom de rapports d'assimilation. Pour étudier la respiration 1l suffit de placer les feuilles dans des éprouvelles quelconques renfermant de l’air atmos- phérique sous un volume qu'on mesure ensuite, d'exposer les éprouvettes à l'obscurité et de faire l'analyse des gaz à la fin de l'expérience. L'appareil à prises n’est donc pas né- cessaire. Les dégagements d'acide carbonique sont rapportés, suivant les cas, soil au volume, soit au poids sec ou au poids frais. Tous ces procédés sont, comme on le voit, très expéditifs. Grâce à eux, j'ai pu exécuter le nombre relativement con- sidérable d'expériences nécessitées par le sujet que J'avais entrepris. PREMIÈRE PARTIE COLORATIONS INHÉRENTES A LA NATURE DES PLANTES SECTION I Plantes ni parasites ni saprophytes. CHAPITRE PREMIER PLANTES A FEUILLAGE COLORÉ EN VERT Un certain nombre de plantes appartenant à des espèces voisines ou à des variétés d’une même espèce ont un feuil- lage semblable où plus ou moins différent au point de vue de l'intensité de la teinte verte. Je me suis proposé de rechercher quelle influence cette intensilé peut avoir sur l'énergie assimilatrice des feuilles. J'espérais en même temps, grâce à la grande variété des plantes employées, rencontrer des cas dans lesquels‘ les différences d’assimila- tion ne pussent s'expliquer simplement par la structure, ce qui m'aurait amené à invoquer l'action d’autres facteurs : la nature des chlorophylles, l’activité propre des leuciles par exemple. Les espèces ou variétés qu'il s'agissait de comparer étaient choisies de telle façon qu'elles aient le même âge, qu'elles aient vécu côte à côte dans le même sol et exposées aux mêmes conditions météoriques, la nalure des plantes seule faisan{ sentir son influence sur Ja coloration, la struc- ture et l'énergie assimilaltrice. Les influences individuelles 12 ED. GRIFFON. étaient éliminées en répétant l'expérience sur un certain nombre de pieds différents. J'ai comparé ainsi des variétés ou espèces voisines de Céréales, de Laitues, de Fuchsias, de Spirées, de Pêchers, de Pruniers, de Vignes, de Rosiers, de Bégonias, de Chry- santhèmes, de Cannas, etc. Les résullats que J'ai obtenus m'ont permis de grouper ces plantes dans un cerlain ordre que je vais précisément reproduire en décrivant les expériences. Céréales. — Je dois à l’obligeance de M. de Vilmorin une liste de variétés de Blé, de Seigle, d’Avoine et d’Orge dont le feuillage est manifestement soil vert foncé, soit vert pâle. La voici. CÉRÉALES A FEUILLAGE ER ©" Vert foncé. Vert pâle. "Blé. Bordieu. Talavera de Bellevue. Roseau. Blanc de Colorado. Crépi. Blé Suisse. Canadian express. Goldendrop. Blé de l'Ile de Noé. Blanc à paille violette. Seigle. Seigle Émeraude. | Seigle d’Ile. Avoine. Avoine noire de Russie. Avoine noire de Brie. — blanche de Pologne. — grise de Houdan. — noire d’Ossitic à trois — blanche. grains. Orge. Orge Chevalier. | Orge d'Italie. — nue du Japon. — nue grosse. BLÉ (Triticum sativum). — Mes expériences ont porté sur le Blé de Crém et le Blé de Noé à feuillage foncé, et le F6 Suisse à feuillage blond. Ces variétés avaient été semées côle à côte dans le Jardin du Laboratoire de Biologie végétale. | En avril, alors que les plantes avaient 50 centimètres de L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 13 hauteur, on distinguait très nettement de loin les variétés d'après la coloralion du feuillage ; mais l’examen en masse ne donne pas d'indicalion précise, ainsi que l’avail déjà remarqué Georges Ville (1), dans ses recherches sur l'analyse du sol par les plantes. La coloration varie en effet suivant la place qu'occupe l'observateur par rapport au soleil, suivant l’état de l’atmosphère, l'heure de la journée, etc. Des différences très neltes de loin, sont à peine visibles quand on examine les feuilles isolément et par réflexion. La colo- ration est d’ailleurs iniluencée par les cires épidermiques, qui n’ont rien à voir avec la fonction chlorophyllienne. Cependant, si on regarde par lransparence, la comparaison des intensilés de coloralion prend une assez grande fixité et concorde parfaitement avec le résultat de l’examen micros- copique de coupes également épaisses. Une autre difficulté tient à la prise des échantillons servant aux expériences; 1l faut en effet que les feuilles qu'on met à assimiler aient le même âge; or, chez les Graminées, ces organes évoluent assez rapidement, et à des époques peu éloignées ils dégagent des quantités sensiblement différentes d'oxygène. De plus, les Céréales sont {rès souvent attaquées par des maladies cryptogamiques (Oïdium, Septoria, Rouille, etc.). Disons en passant que c’est avec les feuilles de Graminées que l'emploi des petiles éprouvetles plates est précieux; il arrive souvent que les deux moitiés du limbe tendent à se rapprocher en tournant autour de Fa nervure médiane qui sert de charnière; et, si ce phénomène qu'on ne peut em- pêcher dans les éprouveltes à seclion circulaire, ne se pro- duisait pas avec la même intensilé et au même moment pour les deux feuilles à étudier, il en résulterait des varialions d’assimilation tenant à l'inégalité d'incidence des rayons lumineux, et non à la nature même de la plante. Voici le résumé de quelques expériences : (4) Georges Ville, L'analyse du sol par les plantes (Paris, Imprimerie Na- tionale, 1894). 14 ED. GRIFFON. _ Deux feuilles, l’une de Blé de Crépi, l'autre de Blé Suisse, sont mises à assimiler dans de l'air dont la composition est la suivante : CO SRE ANNEE EEE Rx 720 OR HR Rene 18,31 APE, MINE CRD NE nee 714,4 La première dégage 0”,062 d'oxygène par cenlimètre carré, el la seconde 0,058, ce qui nous donne comme rap- port d'assimilation en prenant l'énergie de la feuille à teinte ve 0,058 foncée commeunité (À) : 0.062 Dans une autre expérience, ce rapport s’est abaissé à 0,90. Les différences de teinte sont très nettes entre les deux Blés, et les feuilles de la variété blonde (Blé Suisse) sont plus larges que celles de la variété foncée (Blé de Crémi). La diffé- rence de coloration tient à ce que chez le Blé Suisse, le mé- sophyvlle est un peu moins épaiset les faisceaux Hibéro-ligneux plus rapprochés et par conséquent plus nombreux pour une surface donnée. Avec le Blé de l'Ile de Noé, qui est glauque et très foncé, et le Blé Suisse, le rapport d’assimilation est voisin de 0,80. Mais les différences de teinte sont plus marquées que pré- cédemment. Les faisceaux sont plus éloignés dans le P/6 de Noé, et le mésophylle mesure 137 & au lieu de 113 (PI. I, fig. 1 et 2). SEIGLE (Secale cereale). — Le Seigle Emeraude et le Seigle d'Ile ne m'ont pas donné de différence appréciable dans l’é- nergie assimilatrice. La première variélé est d’un beau vert luisant pourtant à la face inférieure, tandis que la seconde est glauque et plus pâle. Les cellules du Seigle d'Ile sont un peu moins riches en chlorophylle, et surtout les faisceaux sont plus développés el plus rapprochés, et cela, bien entendu, aux dépens du tissu 00 (4) I en sera toujours ainsi au cours de ce chapitre. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 15 assimilateur. Cette variété devrait donc dégager moins d'oxygène que l’autre, mais son mésophylle est plus épais (255 pau lieu de 135). À / OrGE (Hordeum vulgare,. — Avec l’'Orge Chevalier et l'Orge nue grosse, J'ai trouvé des rapports d’assimilation voisins de 0,90. L'Orge Chevalier à des feuilles plus étroites, mais plus foncées que celles de l’'Orge nue; son mésophylle mesure 120 w au lieu de 110. AVoinE (Avena sativa). — L'Avoine notre de Brie et V'A- voine notre de Russie se comportent comme les deux Orges précédentes, au point de vue de l'énergie assimilatrice. En somme, à part le 5/6 de Noé comparé au Blé Suisse, toutes les Céréales éludiées, bien que présentant des inten- sités de coloration nettement différentes, ont des énergies assimilatrices très voisines, ces dernières étant rapportées à l’unité de surface foliaire. Tous les résultats expérimentaux sont cependant d'accord avec les déductions tirées de la structure, mais il n'en reste pas moins ce fail, qu'il n'y a pas concordance complète entre l'intensité de la coloration des feuilles et l’aclivilé avec laquelle l'acide carbonique est décomposé. Laitues et Romaines (Lacluca saliva). — On cullive dans les jardins des variétés de Laitues et de Romaines qui se distinguent fort bien par la coloration de leurs feuilles. Je citerai par exemple la Lailue blonde rnaraïchère et la Laitue grise où plate maraîchère, qui sont d’un vert pâle, alors que la Laitue d'Alger et la Laitue Palatine sont foncées. Il y a aussi des Romaines blondes et des Romaines brunes. Or, en comparant entre elles des feuilles de ces salades blondes et brunes, on obtient des rapports d'assimilation voisins de 0,80. Ainsi j'ai trouvé 0,80 avec une Lailue blonde et une Romaine brune, 0,83 avec deux Romaines, 0,79 avec deux Lailues. On peul remarquer d’ailleurs que les pieds de salades blondes, surtout chez les Romaines, n'alteignent 16 ED. GRIFFON. pas un aussi grand développement que les pieds de salades brunes. Les augmentalions de poids sec en un temps donné con- cordent d’ailleurs entièrement avec tous ces faits. Dans des planches de Laitues blondes el de Romaines brunes, J'ai arraché dix pieds de chaque variélé, et après les avoir soi- gneusement lavés, Je les ai desséchés à l’éluve, puis j'en ai pris les poids secs. Les dix pieds de Laitue pesaient 307 mil- ligrammes, elles dix pieds de Romaine 415 milligrammes. Après quinze jours, le poids sec de dix autres pieds de Laitue s'élevait à 587 milligrammes, alors que pour les Romaines il atteignait 947 milligrammes. Les Romaines avaient donc augmenté de 532 milligrammes, et les Laitues de 280 milligrammes seulement. Si l’on rapporte les gains de matière sèche aux poids iniliaux, on voit que, dans le même temps, 100 parties de matière sèche ont gagné 94 chez les Lailues et 109 chez les Romaines, soit un rapport hein d'augmentaliow de Font Ce rapport s'est abaissé à 0,80 el même à 0,75, en s'adressant à des plantes plus jeunes. J'ai oblenu des nombres voisins de ceux que Je viens de ciler, en comparant des Laitues entre elles et des Romaines entre elles. Cette méthode des augmentations de poids secs a déjà élé employée pour délerminer l'énergie assimilatrice d’un cer- lain nombre de plantes (7ropæolum majus, Phaseolus multi- florus, Ricinus commris, Helianthus annuus el diverses variétés de Zea Mays), par Weber (1). L'auteur rapportail les gains de malière sèche à l'unité de surface des feuilles. Au point de vue analomique, les feuilles des variétés de salades brunes et blondes étaient notablement différentes. Ainsi la feuille d’une Romaine brune mesure 400 w d’épais- seur; les cellules de l'assise palissadique ont 100 vw de longueur ; Les chloroleuciles sont très gros (7 à 8 ») et lrès (4) Weber, Ueber specifische Assimilationsenergie (Arbeit. d. bot. Inst. in Wuürtzburg, t. IL, p. 346). L'ASSIMILATION CHLO ROPHYLLIENNE. 17 verts. La feuille de la variété blonde est un peu moins épaisse (370 y); son parenchyme est peut-être plus serré que celui de la variété brune, mais les chloroleucites sont bien plus petits (4 à 6 v), el leur teinte verte moins foncée. Mèmes remarques anatomiques pour les Laitues. En résumé, chez les salades étudiées, ce sont les variétés brunes qui assimilent le plus par unité de surface, et ce résultat est en rapport élroit avec le nombre, la dimension et la teinte des chloroleucites d’une part, le développement et la diffé- renciation du mésophylle d'autre part. Fuchsie (Fuchsia). — Mes expériences ont porté sur trois variétés, connues en horticullure sous les noms de Mazeppa, Blanche de Castille et Champion. La première seule a les feuilles d'un vert foncé; la seconde les à d’un vert pâle, mais un peu terne, avec les nervures blanchâtres ; les feuilles de la troisième sont d'un vert peu foncé aussi, mais brillant, el leurs nervures sont colorées en rouge. Dans Irois expériences, j'ai trouvé les dégagements d'oxygène suivants par centimètre carré : Mazeppa. Blanche de Castille. Champion. 10 0,216 0,194 0,179 20 0,061 0,050 0,056 30 0,115 0,073 0,080 La variété Mazeppa, qui est la plus foncée, assimile aussi le plus ; mais les variétés Blanche de Castille et Champion, également pâles, assimilent différemment. Voyons maintenant comment ces faits s'accordent avec l'anatomie. Les variélés Mazeppa et Planche de Castille ont des feuilles de même structure ; mais les chloroleucites dans la seconde variété sont moins nombreux el surtout moins verts; leurs granulations incolores sont lrès apparentes. Quant à la variélé Champion, ses feuilles sont moins épaisses ; le mésophylle mesure 180 y» environ au lieu de 240: son parenchyme en palissade se trouve réduit proportionnel- lement; par contre les chloroleucites, un peu moins verts ANN. SC. NAT. BOT. Xe 2 18 : ED. GRIFFON. que dans la variélé Mazeppa, le sont bien plus que dans la variété Blanche de Castille, et surtout on n'y distingue pas de granulations incolores. Ainsi donc, la variété Mazeppa est très verte à cause de son épaisseur el de sa richesse en chlorophylle, et c’est eile qui assimile le plus. La variélé Planche de Castille, bien qu'ayant un mésophylle identique à celui de la première, est moins verte par suile du plus petit nombre, des dimensions plus faibles et de la teinte moins accentuée de ses chloro- leucites; son énergie assimilatrice est aussi moindre. La variété Champion a des feuilles moins épaisses que celles des deux précédentes; mais les feuilles sont aussi vertes, sinon plus, que celles de la variété Blanche de Castille, en raison du nombre, des dimensions et de la teinte des chlo- roleucites dans chaque cellule; la faible épaisseur du méso- phylle se trouve ainsi compensée et au delà, en sorte que l'assimilation est plus intense. Bégonie (Begonia). — Deux variétés ont été étudiées ; l’une à feuillage très pâle dégage 0,030 par centimètre carré, et l’autre très foncée 0,052, ce qui donne un rapport d’assimilation de 0,58. Le mésophylle de la première mesure 95 w et celui de la seconde 135 » ; le lissu palissadique a le même développement dans les deux feuilles, mais dans la variété à feuillage foncé, les chloroleucites sont plus gros (8 & au lieu de 5 à 6). Vigne { Vütis vinfera). — J'ai opéré sur des feuilies de Gros Colmann, qui sont d’un vert foncé, et de Chasselas, qui sont d’un vert tendre. J'ai obtenu comme rapport d’assimi- lation 0,92. Ce chiffre paraît assez élevé si l'on examine la structure des feuilles. En effet, bien que l’assise palissadique ait la même épaisseur dans les deux variétés, le parenchyme spongieux est moins développé dans le Chasselas, ce qui fait que le mésophylle n’a qu'une épaisseur de 145 y au lieu de 167; en outre, les chloroleucites sont-moins verts el d'appa- L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 19 rence plus granuleuse. On voit par là quel rôle considérable joue le parenchyme en palissade dans l’asssimilation. Rosier {/tosa). — En expérimentant sur des variétés à feuilles blondes comme Céline Forestier, Aimée Vibert, el à feuilles foncées comme M**° Alfred Carrière et Reine Marie- Henriette, J'ai obtenu des rapports d’assimilation voisins de 0,80. Les chloroleucites ont les mêmes dimensions et la même teinte de part et d'autre; mais l’assise palissadique est moins développée dans les feuilles blondes (54 w au lieu de 62). Troëne (Ligustrum japonicum). — Avec le Troëne nous allons trouver des feuilles très vertes assimilant moins que des feuilles à teinte pâle. J'ai rencontré en effel sur un certain nombre de pieds de ZLiqustrum japonicum des feuilles d'un vert foncé dégageant moins d'oxygène que d’autres feuilles adultes du même pied et dont la teinte était plus pâle. Le rapport d’assimilalion devint égal à 1,15. Mais la feuille très verle avait un mésophylle aont l’épais- seur était de 243 w avec deux assises palissadiques mesu- rant ensemble 116 y, alors que chez la feuille pâle ces dimensions étaient 324 & el 175 w ; seulement, dans cette dernière feuille les chloroleucites, quoique très nombreux, étaient peu colorés el leurs granulalions très apparentes. Somme loule, Jusqu'ici, les différences d'énergie assimi- latrice ne sont nullement contradictoires avec la structure, bien qu'on puisse rarement en prévoir le sens et l'importance à cause des nombreuses compensations qui se produisent. I n’en est plus de même pour les plantes suivantes : Balisier |Canna). — Certaines variétés de ces plantes ont un feuillage vert foncé, bleuâtre même. D'autres ont des feuilles d’un vert clair et plus pâle. Or, en faisant assimiler les unes et les autres j'ai obtenu des dégagements d'oxygène très voisins. Ainsi J'ai trouvé 20 ED. GRIFFON. 2,20 et 2*,14 dans une première expérience; 0°,833 et 0,816 dans une seconde; 0,943 et 0*,921 dans une troisième, etc. Cependant le mésophylle de la feuille verte est plus épais (178 y au lieu de 135) et ses chloroleucites sont un peu plus gros et bien plus verts (fig. 1 et 2). De telles Fig. 1 et 2. — Canna. — À, feuille foncée. B, feuille pâle. — ep.s., épiderme supérieur; À, hypoderme; p.pa, parenchyme en palissade. différences de structure et de coloration, d'après ce que nous étions habitués à voir, eussent dû faire varier davan- lage les énergies assimilatrices. Je me suis demandé alors, comme dans tous les cas qui vont suivre, et je le dis ici une fois pour toutes, si la respi- ration, dont l'intensité varie souvent avec la nature de la plante, ne pouvait pas expliquer ces résultats. Mais j'ai cons- taté qu’il y avait proportionnalité entre le volume des feuilles et les quantités d'acide carbonique dégagé. Les pigments verts seraient-ils distincts dans les deux variétés et leur spécificité retentirait-elle sur l'énergie assi- milatrice ? Le substratum vivant des chloroleucites n'aurait il pas la même activité ? Autant de questions qui s'imposent L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 21 à l'esprit, mais qui, dans l’état actuel de la science, restent sans réponse. Chrysanthème (Chrysanthemum coronarium). — Une va- riété à feuilles très foncées dégage un peu moins d'oxygène qu'une autre variélé à feuilles pâles : 0,053 au lieu 0°,060 dans une première expérience; 0”,146 au heu de 0",154 dans une seconde. Et pourtant la feuille verte est plus épaisse (420 w contre 360) et ses chloroleucites sont plus colorés; elle a même une assise palissadique contre l’épiderme inférieur el qui n'existe pas dans l’autre feuille (PI. 1, fig. 3 et 4). Il faut ajouter toutefois que la partie centrale de son mésophylle est très pauvre en matière verte; celte région qui respire comme les autres assimile donc très peu et il n’en pas ainsi dans la feuille pâle. Cette particularité, qu'on rencontre, mais beaucoup plus exagérée, chez les plantes grasses, contribue peut-être dans une cerlaine mesure à rendre compte des échanges gazeux observés (1). Spirée (Spiræa). — Le Spiræa Billardi à les feuilles blondes ; celles du Sniræa Revesiana sont glauques et à teinte plus foncée. Les différences d'assimilation sont cependant très faibles. Ainsi la feuille très verte dégage 0,039 d'oxygène et l’autre 0°,035. Dans une seconde expérience J'ai trouvé les nombres suivants : 0,045 et 0,042. La feuille foncée est deux fois plus épaisse, mais ses leuciles ne sont pas plus verts que ceux de la feuille pâle ; son parenchyme en palissade est composé de quatre assises de cellules mesurant en tout 108 y, soit 17 w par cellule, alors que celui du Spéræa Billardine comprend qu'une assise _ qui mesure à elle seule 46 w. Peut-être pourrait-on conclure de là que toutes con- ditions élant égales d’ailleurs, une grande cellule est Deau- (4) Aubert, Recherches sur la respiration et l'assimilation chez les plantes grasses (Rev. gén. de Bot., 1892). 2 ED. GRIFFON. coup mieux adaptée à la fonction de décomposition de l'acide carbonique que de petites cellules superposées ayant en- semble la même dimension en longueur. Pêcher (Amyqgdalus Persica). — Les variétés diles Bru- gnons qui donnent des fruits non duveteux et à chair adhé- rente au noyau, ont des feuilles en général d’un vert pâle. Or, en faisant assimiler ces feuilles concurremment avec celles de la variété dite Grosse-Mignonne et qui sont très foncées, j'ai obtenu des différences peu importantes dans les dégage- ments d'oxygène ; par exemple 0,940 pour la feuille verte, et 0*,880 pour la feuille pâle. Il est vrai que celle-ci est plus épaisse (216 v au lieu de 189), etses deux assises palissadiques sont proportionnellement plus développées, mais ses chloro- leucites sont moins verts el leurs granulalions plus marquées. Il y a donc à peu près compensation entre ces deux facteurs opposés, plus grande épaisseur du mésophylle et réduction de la chlorophylle, ce qui fait que les énergies assimilatrices de deux feuilles de nuances verles irès différentes sont pres- que identiques. Mais deux autres variélés de Pêcher m'ont donné des résullats plus curieux. Ce sont la variété Va/dy à feuilles très vertes et la variété Béri Robin à feuilles blondes. Les feuilles de ces variétés ont la même épaisseur, la même structure, et malgré leur différence très accusée de colora- tion elles assimilent autant l’une que l’autre (PI. IT et IV, fig. La et 10. La teinte blonde de la seconde variété tient à ce qu'il y a des plages de cellules régulièrement disposées, les unes plus nombreuses contre l’épiderme inférieur, les autres dans toule l'épaisseur du mésophylle, et qui sont moins vertes que le parenchyme environnant (PI. IF, fig. 5); il en résulte néanmoins que le lissu palissadique est à peu près le même dans les deux feuilles comme développement et comme coloration; or ce tissu joue un rôle très important dans l'assimilation; mais il n’en reste pas moins ce fait singulier L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 93 que deux plantes de même structure, mais inégalement riches en chlorophylle, ont la même énergie assimilatrice. Prunier (Prunus insitilia). — La même remarque s’ap- plique à des résullats oblenus avec la Reine-Claude dorée à feuilles vert foncé et la AReine-Claude diaphane à feuilles blondes. Les feuilles ont la même structure dans les deux variétés, la même énergie assimilatrice, et pourtant la feuille blonde a des chloroleuciles moins verts. Conclusions. — Les colorations vertes plus ou moins fon- cées que présentent normalement les feuilles adultes de plantes appartenant à des variétés ou à des espèces voisines el développées dans les mêmes condilions de milieu, ne per- mettent pas toujours de prévoir el quelquelois même d’ex- pliquer Vintensité de la fonction chlorophyllienne. Si très souvent les feuilles d'un vert foncé ont une énergie assimilatrice supérieure à celle des feuilles d’un vert pâle (Céréales, Lailues et Romaines, Bégonias, Fuchsias), il arrive aussi : 1° Que des feuilles ayant la même teinte verte assimilent différemment (Fuchsia) ; 2° Que des feuilles d’un vert pâle assimilent autant et même plus que des feuilles d’un vert foncé (Pêcher, Prunier, Balisier, Chrvsanthème, Troëne). L’épaisseur du mésophylle, sa structure et en particulier le développement du tissu palissadique (1), le nombre, la dimen- sion et la feënte des chloroleucites dans chaque cellule sont autant de facteurs dont les variations ont sur la coloration verle des feuilles et sur l'énergie assimilatrice des elfels, soit concordants, soit opposés. En ce qui concerne la dé- _composition de l'acide carbonique, ces effets ont une résul- (4) M. de Lamarlière, dans ses Recherches sur l'assimilation spécifique chez les Ombellifères (C. R. Acad., juil. 1891), a montré que les feuilles très dé- coupées de certaines espèces ayant des assises en palissade plus nom- breuses que les feuilles entières ou peu découpées, assimilent d'ordinaire beaucoup plus que ces dernières à surface égale. 24 ED. GRIFFON. tante que l'expérience seule peut faire connaîlre dans son sens et sa grandeur. Celle résultante semble même, dans certains cas, en contradiclion avec les données de l’ana- tomie (Pècher, Prunier, Spirée, Balisier). Il y a donc, en dehors des modifications de la structure, d'autres causes (peut-être l’activité propre des leuciles ou la nature des chlorophylles) gui font varier l’assumilation. CHAPITRE Il PLANTES A FEUILLAGE COLORÉ AUTREMENT QU'EN VERT On cultive dans les jardins et dans les parcs un certain nombre de plantes dont le feuillage est normalement coloré, soit en rouge, soit en violet ou en brun, soit en jaune. Il en est d’autres qui rougissent parfois accidentellement ou ré- gulièrement au printemps ou à l’automne. D'auires enfin, bien connues aussi des horticulteurs, ont des feuilles dites panachées (1) et dont la teinte toujours assez pâle varie du Jaune franc ou verdâtre au blanc jaunâtre et même au blanc argenté. Je me suis proposé de rechercher comment se compor- tent les feuilles de ces plantes au point de vue de la décom- position de l’acide carbonique, et je les ai comparées sous ce rapport aux feuilles appartenant à des variétés vertes de la même espèce. S 1. — Plantes rouges. a. La substance rouge. Si nous examinons des feuilles de Hêtre pourpre, de Coleus, de Perilla Nankinensis, de Lobelia ignea, etc., nous voyons que le mésophylle est entiè- rement vert, mais que les cellules des deux épidermes sont pour la plupart colorées en rouge. (1) Cette expression pouvant être interprétée dans des sens différents sera plus loin l’objet de quelques explications. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 25 Dans une Petterave rouge, un Prunus Pissard, etc., la matière colorante se rencontre dans tous les Lissus de la feuille ; elle existe donc dans des cellules à chlorophylle; mais comme elle est localisée dans les vacuoles, elle n’est pas en contact avec les chloroleucites et ne peut par suite les allérer. Enfin, dans beaucoup d’autres plantes on ne a trouve guère que dans les cellules palissadiques. La substance rouge existe donc concurremment avec la chlorophvlle qui, absolument intacte, remplit sa fonction normale de décomposition de l'acide carbonique. Elle masque seulement, suivant sa concentralion dans le suc cel- lulaire el sa répartition dans les issus, la teinte verte ordi- naire et communique aux feuilles ces tons si variés qui sont tant recherchés dans l’ornementation. Cette matière colorante, soluble dans l’eau, porte indiffé- remment aujourd’hui le nom d'éryfhrophylle (1) ou d'antho- cyanine. Elle'est bleue quand le suc cellulaire est alcalin, rouge quand il est acide, violet quand il est neutre. C'est cette substance que l’on rencontre dans un grand nombre de fleurs bleues, violettes ou rouges; mais dans ce cas le nom d'anthocyanine seul est employé. Comme on le voil, la coloralion des plantes supérieures à feuilles rouges est différente de celle des Algues. Chez les Floridées, par exemple, ce sont les chromoleucites qui ren- ferment dans leur substance protoplasmique incolore un principe supplémentaire rose vif, soluble dans l’eau, inso- luble dans l'alcool et l’éther, la phycoérythrine, et qui masque complètement la chlorophylle, donnant ainsi à la plante sa couleur propre. Ce principe colorant aurait, selon M. En- gelmann, ainsi qu'il a déjà été dit, un rôle assimilateur, tandis qu'il n’en est rien pour l’anthocyanine. (1) Ne pas confondre celte matière colorante avec l'érythrophylle de Bourgarel, qui n’est autre que la carotine d’Arnaud, carbure d'hydrogène qui accompagne la chlorophylle et prend en solution sulfocarbonique une- belle teinte rouge. 26 ED. GRIFFON. Les plus anciennes observations vraiment dignes de ce nom concernant la substance rouge, remontent au physio- logiste genevois Senebier (1). Il montra que dans le Cyclamen, l’épiderme des feuilles seul est coloré en rouge; mais 1l ne s’est pas rendu compte, pas plus d’ailleurs que de Saussure (2), qui quelques années après faisait assimiler des feuilles d’Atripler hortensis var. rubra, de la nature de la matière colorante ni de son état dans les cellules. Ch. Morren(3), en 1827, reconnut que dans la plupart des taches de l’Orchis latifolia, c'est encore l’épiderme seul qui est coloré. Il trouva en outre que la substance rouge, à cause de l'identité des réactions obtenues, devait être la même dans les macules des feuilles, de la tige, des bractées et des fleurs. À ceite époque, l'attention des bolanistes et des chimistes se porta surtout sur la nature de la substance rouge. Le manque de connaissances précises sur l’analomie des feuilles colorées et le mode d'apparition de cette substance, des expériences chimiques mal interprétées, conduisirent à for- muler la célèbre théorie de la Chromule, qui fut en faveur dans la science pendant un certain temps. En effet, Guibourt (4), en 1827, annonça que la bn rouge est un principe qui remplace la matière verte. Macaire Princeps (5), en 1828, ayaut trouvé que les feuilles jaunes en automne ne dégagent plus d'oxygène, admit que la matière jaune était de la chlorophylle oxygénée ; et, comme dans un certain nombre de cas le rouge succède au: jaune, il considéra la substance rouge comme un terme supérieur d’oxygénation de la matière verte. Il montra en (1) Senebier, Physiologie végétale, dans Encyclopédie méthodique. Paris, 1791, article : COULEUR DES PLANTES. (2) De Saussure, Recherches chimiques sur la végétation. Paris, 1804, p. 56. (3) Ch. Morren, Responsio ad questionem : Quæritur Orchidis latifoliæ des- criptio botanica et anatomica. Gand, 1827. (4) Guibourt, Journ. de Pharmacie, 1827, p.21. (5) Macaire Princeps, Sur la coloration automnale (Soc. de Phys. de Ge- nève, vol. IV, p. 50). L ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 21 outre, ce qui confirmait le travail de Ch. Morren, que la matière rouge des bractées, des calices et celle des pétales de Salvia splendens, présentent les mêmes propriétés que la substance colorante des feuilles qui rougissent à l'automne. Ayant trouvé de plus que les acides ramènent la malière verte des plantes au jaune, puis au rouge, alors que les alcalis font verdir les feuilles de Peuplier, qui jaunissent en octobre, et les feuilles rouges du Sumac, il conclut qu’il n’y avait dans les plantes qu'une seule matière colorante fondamen- tale, la Chromule, qui par son degré d’oxygénalion devait déterminer toules les autres couleurs. Deux autres chimistes, Schübler et Funck (1), étaient aussi arrivés à celle conclusion. La théorie de la CAromule fut adoptée par de Candolle, qui la développa dans son Traité de Physiologie végétale ; et, de là, elle passa dans tous les écrits des botanistes contemporains, Lindiey, Agardt, Link, etc. Selon de Candolle, la chromule verte des feuilles tend au rouge par le jaune et l’'orangé quand elle est plus oxydée, et l’ensemble des couleurs ainsi obtenues constitue la série æanthique ; elle tend aussi au rouge par le bleu et le violet en perdant de l'oxygène : c’est la série cyanique. Celte théorie fut d’ailleurs vite attaquée. Berzélius avait isolé la matière colorante rouge des feuilles el montré qu'on la retrouve dans les fruits et dans un grand nombre de fleurs rouges; c’est lui qui nomma cette substance érythrophylle. Alors en 1835, Marquart (2) prouva que l'érythrophylle est voisine du principe bleu des fleurs qu'il nomma anfho- cyanine, réservant le nom d’anthoxanthine pour la malière colorante jaune des pétales. II combattit la Théorie de l’oxy- dation de de Candolle, Schübler et Macaire, mais il arriva au même résultat en faisant dériver l’anthocyanine de la chlorophylle par soustraction de l’eau; on aurait eu alors (1) Schübler et Funk, Untersuchungen über die Farben der Blüthen.In-8°, Tu- bingen, 1825, p. 32. (2) Marquart, Ucber die Farben der Blüthen. Bonn, 1835. 28 ED. GRIFFON. une matière bleue qui se colorerait en rouge par les acides ou l’oxygène. Selon Hope (1, la matière colorante rouge résulte de l’action d'un acide sur un principe incolore, le chromogène, source de toutes les couleurs des organes. Ce chromogène serait formé de deux principes, l’un qui produit le rouge sous l'influence des acides, l’érythrogène, et l'autre qui, en se combinant avec les alcalis, devient jaune ou vert, le zan- thogène. En 1854, Frémy el Cloëz (2) décelèrent dans les fleurs l'existence de quatre principes colorants : 1° la cyanine, substance bleue qui correspond à l’anthocvanine de Mar- quart ; 2° une autre matière colorante rose, qui n’est que de la cyanine virée au rose dans un acide; 3° deux principes jaunes, l’un insoluble, la xanthine; Vautre soluble, la xan- théine. Pour ces savants chimistes, les fleurs bleues ont un suc neutre et les fleurs et feuilles rouges un suc acide. L'éry- throphylle de Berzélius peut être considérée comme un acide faible, et l’anthocyanine de Marquart, ou cyanine de Frémy et Cloëz, comme une combinaison de cet acide ana- logue au bleu de tournesol. Quant à cette coloration verte obtenue par Macaire et Schübler en plongeant des feuilles rouges dans un alcali, elle n’a rien de commun avec la chlorophylle, comme Ber- zélius l’a montré. D'ailleurs Martens (3), en 1855, expliqua celle coloration verte du suc cellulaire rouge sous l'influence des alcahis; l’érythrophylle vire au bleu et se mélange avec un principe dissous que les alcalis font passer au jaune, et qui parait identique à la xanthéine de Frémy; le bleu et le jaune engendrent alors la coloration verte, mais dans le suc cellu- laire seulement et indépendamment de la chlorophylle. ( 1) Hope, Institut, 15 fév. 1837, p. 59. (2) Frémy et Cloëz, C. R. Acad., t. XXXINX, p. 194. 3) Martens, Nouv. rech. (Bull. Acad. royale de Bruxelles, t. XXII, part. I, 4155 p- 195-157). L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 29 Ainsi, la substance rouge ne dérive nullement de Ja chlo- rophylle, comme le voulait la théorie de la CAromule. Les anatomistes étaient aussi arrivés à celte conclusion. C'est Mohl (1) qui le premier montra que la malière rouge se forme en dehors de la malière verte. On la voit en effet dans des cellules où il n’y a jamais eu de chlorophylle, comme dans l’épiderme par exemple ; quand, dans les jeunes feuilles d'un bouton, la chlorophylle disparaît et la substance rouge se forme, ces deux phénomènes sont entièrement distincts ; enfin, en agissant par l'acide sulfurique sur la partie infé- rieure des feuilles de Sempervivum tectorum, celte parlie qui était incolore devient rouge, et il est facile de reconnaitre que c’est le suc cellulaire qui s’est coloré. En 1855, Kützing (2) observa que la substance rouge ou bleue ne colore pas le protoplasme dans les baies d’Actæa spicata el dans les cellules des étamines de Tradescantia virqinica. En 1857, Chevreul (3) montra que dans les taches foliaires de Pelargonium zonale, la couleur brune est due à la pré- sence dans le suc cellulaire d’une substance rouge qui, une fois isolée, laisse aux feuilles la teinte verte normale. Ed. Morren (4), en 1858, étudia anatomiquement un grand nombre de plantes rouges, et put formuler la conclusion suivante qui est l'expression parfaite de la réalité : « L'ob- servation prouve que partout dans les feuilles rouges, dans les fruits el dans les fleurs, l’érythrophylle se forme direc- tement, soit dans les cellules où 1l n’a jamais existé de chlo- rophylle, soit en laissant celle-ci intacte à côté d'elle. Dans les feuilles rougies à l’automne, alors qu'une apparence trompeuse et une observalion superficielle peuvent induire (4) Mohl, Recherches sur la coloration hibernale des feuilles (Ann. Sc. nat., 2e série, t. IX. Trad. de Buchinger). (2) Kützing, Anat. und Phys. d. Pflanzen, 1855, p. 109. (3) Chevreul, Explication de la zone brune des feuilles du Geranium zonale (C. R. Acad., XLV, p. 397). (4) Ed. Morren, Dissert. inaug. sur les feuilles vertes et colorées. Gand, 1858. 30 ED. GRIFFON. en erreur, la matière colorante rouge se forme pendant que la chlorophylle jaunit et disparaît, mais ces deux phéno- mènes sont indépendants. » [Il montra, lui aussi, que la substance rouge est dans le suc cellulaire, el qu'elle ne peut altérer les chloroleucites, qui sont, eux, dans le pro- toplasme. Par quelles actions chimiques la substance rouge prend- elle naissance ? On ne le sait pas bien encore à l'heure actuelle. Pick (1) admet, comme Hope, l'existence d’un chromo- gène dans le suc cellulaire. Ce chromogène serait du groupe des tanins. Tout récemment, Overton a publié dans Nature, les résultats d’un travail sur le rougissement automnal ; pour cet auteur, l’anthocyanine serait un glucoside résullant de la combinaison de sucres en excès avec les tanins du suc cellulaire. | Il faudrait ajouter, pour être complet sur cette question de Ja coloration, qu'à la suite des travaux de Verdeil (2), qui prélendait avoir trouvé du fer dans la chlorophylle, on rap- procha celle substance de l'hémoglobine et on édifia une nouvelle théorie sur la chromurgie des plantes. Raspail (3) regardait la chlorophvylle comme un « caméléon végétal », «une combinaison de potasse qui abonde dans la sève et du manganèse que l’on retrouve dans les surfaces, ou du fer qui dans cerlains cas serait succédané du manganèse, combi- naison qui, dans nos laboratoires, passe par loutes Îles nuances possibles du spectre solaire sous l'influence variée de l’oxygénation ». Les recherches de Gris concernant l'in- fluence des sels de fer sur la formation de la chlorophylle, donnèrent à celte théorie un moment de force. On élail d’ailleurs porté à croire, par suile des expériences de Lémerv, (1) Pick, Ueber die Bedeutung des rothen farbstoffes bei den Phanerogamen und die Beziehungen desselben zur Stärkewanderung (Bot. Gentral., t. XVI, 1883, p. 281, 314, 343, 375). (2) Verdeil, Recherches sur la matière colorante verte des plantes et sur la matière colorante rouge du sang (G. R. Acad., 22 déc. 1851). (3) Raspail, Nouv. système de Phys. végét., p. 273. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 31 de Geoffroy, de Menghini, que le fer jouait un grand rôle dans la coloration des êtres. Bien avant Raspail, Haüy avail dit : « Lorsque la nature prend le pinceau, c’est toujours le fer qui garnit sa palette. » Mais ce qui est en partie vrai pour les minéraux, ne l’est pas forcément pour les animaux el les plantes. De nombreuses matières colorantes orga- niques ne contiennent pas de fer; d'ailleurs Brande (1), Vauquelin (2), Schérer (3), Mulder et van Goudæver (4), prouvèrent que ce n’est pas le fer qui communique à l’hé- moglobine sa coloration rouge, et plus tard Armand Gautier et Hoppe-Seyler (5) montrèrent que ce métal n'existe pas dans la molécule chlorophyllienne. | Je donnerai plus loin quelques indications sur les pro- priétés physiologiques de la substance rouge el sur sa signi- fication biologique, bien que celte dernière question ne rentre que très accessoirement dans le cadre de ce travail. Au reste, en ce qui concerne le rôle de l’anthocyanine,je puis dire dès maintenant que la plupart des biologistes qui en ont parlé ont plutôt émis des considérations téléologiques qu'ils n’ont fourni d'explication vérilable. D. Znfluence de la substance rouge sur le verdissement et la décomposition de l'acide carbonique. — Dans les cpemences d’assimilation que j'ai exécutées sur les plantes rouges, j'ai élé amené à étudier anatomiquement un grand nombre de variétés. Très souvent j'ai été frappé de ce fait que dans les cellules dépourvues d’anthocyanine, et aussi dans celles dont le principe colorant s'était diffusé dans l’eau de la prépa- ration, les chloroleucites apparaissaient avec une teinte verte peu prononcée, tirant parfois sur le jaune comme dans le Prunus Pissardi en élé et cerlains Coleus, alors que dans (1) Brande, Ann. de Chimie, XCIV, p. 52. (2) Vauquelin, Ann. de Chim. et de Phys., &. E, p. 9. (3) Schérer, Ann. d. Chem. und Pharm., XL, 1 (4) Mulder et Van Goudæver, Milne- Edwards, Lecons de Physiol., t. HI, 0e p. 17 (5) Loc. cal. 32 ED. GRIFFON. les variétés ou espèces voisines qui ne sont pas rouges, ces leucites étaient d’un vert plus intense. A quoi cela tient-il? Dans le précédent chapitre, j'ai signalé un certain nombre de plantes vertes qui, bien que très voisines, diffèrent entre elles par l'intensité de colo- ration de leur feuillage. Or, j'ai montré que dans bien des cas cette différence de teinte a sa source dans celle des chloroleucites eux-mêmes. | Sommes-nous en présence d’un fait analogue chez les plantes rouges; aulrement dit, la faible coloration des chlo- roleucites tient-elle à la nature même de ces plantes ? Si l'hésitation n'est pas possible pour les plantes vertes, il n’en est plus de même «a priori pour les plantes rouges. On peut se demander, en effet, si l’anthocyanine ne gêne pas le verdissement. Pick (1) a montré que cette substance absorbe, dans la lumière blanche notamment, tous les rayons jaunes et une partie des rayons verts, depuis la raie D (=0,59) jusquà la raie 000,52). Engelmann (2), avec sa méthode microspectroscopique, a trouvé soit une bande d'absorption dans le jaune et le vert el limitée par les longueurs d'onde x —0,59 el 1=0,50 (Lobelha, Cissus), soit trois bandes dont la première très foncée entre 1—0,600 et —0,575, la seconde moins foncée entre À =0,588 el 1= 0,533, et la troisième très faible entre 1=0,520 el 1=0,495 (Tradescantia zebrina, T. discolor ; Erythrotes Beddomei). Kraus (3) avait déjà obtenu ces résultats pour le Trades- cantia, Sauf qu'il n'avait pas vu la troisième bande. On remarquera que les radiations absorbées sont préci- sément celles qui favorisent le plus le verdissement (Gardner, Guillemin, Sachs, Wiesner):. La courbe qui figure l'in- fluence de la réfrangibililé sur ce dernier phénomène a son HIPickulocicr: (2) Engelmann, loc. cit. (3) Kraus, Zur Kenntniss d. Chloroph. u. s. w. Stuttgart, 1872. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 33 maximum de hauteur dans le jaune, un peu à droile de la raie D dont la longueur d’onde est 1=0,589 ; cette courbe s’abaisse brusquement ensuite dans Îles deux moitiés du spectre. — On peut donc se demander si Ia lumière blanche dépouillée de ses rayons les plus actifs est capable de pro- voquer un verdissement aussi intense dans les feuilles rouges que dans les feuilles vertes. J'ai cherché à résoudre cette question expérimentale- ment. À cet effet, J'ai eu recours à un procédé analogue à celui qui a été employé par Kny (1) pour mettre en évidence le rôle protecteur de l’anthocyanine contre la destruction de la chorophylle, et par Pick (2), pour démontrer que cette substance favorise la migration de l'amidon. J'ai extrait la malière colorante des feuilles de la Betterave rouge ; et, après l'avoir étendue d'eau distillée de façon que la concentration soit faible, j'en ai empli une auge en verre à faces parallèles ; la solution, très lransparente, d’un beau rouge pâle, se trouvait ainsi sous une épaisseur de 2 centimèlres environ. Une autre auge sem- blable à la première fut remplie d’eau pure, et toutes deux furent placées dans une boîte en bois Fig..3. Cour transversale de la à deux comparliments séparés caisse employée dans les expérien- ; Lt ces sur les propriétés delasubstance par une cloison verticale, de rouge. — 4, éprouvette ou plante facon à former une face laissant étiolée ; b, auge en verre confenant la substance rouge. passer la lumière (fig. 3). Cette boîte était dans une serre exposée à une lumière très diffuse. - Deux plants de Maïs étiolés furent placés, l’un derrière _l’auge à liquide coloré, l’autre derrière l’auge à eau distllée ; A. un troisième plant de Maïs se trouvait à côté de la boîle (1) Kny, Zur physiologischen Bedeutung des Anthocyans (Estratto dagli Atti del Congresso Bot. Internat. di Genova, 1892). (2) Pick, loc. cit. no. ANN. SC. NAT. BOT. X, 9 94 ED. GRIFFON. servant de lémoin. Au bout de deux jours, ce dernier plant élait d’un vert intense ; celui qui se trouvait derrière l’eau dis- lillée était vert également, mais avec une teinte un peu moins foncée ; derrière le liquide rouge, le verdissement avait été extrêmement faible; or la disposition de l'expérience montre que la cause de celte différence doit être recherchée unique- ment dans l'absorption de radialions par l’anthocyanine (PI IT et TV, 2. 6 el 60) Mais l’auge à liquide rouge examinée au spectroscope absorbait complètement Le jaune et le vert, et assez forte- ment le bleu et le violet ; le rouge seul passait assez bien. On comprend alors pourquoi le verdissement derrière cetle auge a été si peu intense: Or, d’après les recherches de Pick et surtout celles d'En- selmann faites sur les cellules rouges elles-mêmes, il résulte que dans la moilié droite du spectre, l'absorption est très faible. Par conséquent, le liquide que j'ai employé, à cause de la grande épaisseur traversée, n’élail pas assez dilué. J’ai alors ajouté de l’eau distillée de façon que le spectre d’ab- sorption soit sensiblement le même que celui qui a été observé par Engelmann ; mais dans ce cas, la différence de verdissement derrière les deux auges fut à peine sensible. On ne peut donc pas dire que dans les feuilles l'absorption de certaines radiations par l'anthocyanine nuise d'une manière appréciable à la formation de la matière verte. D'ailleurs, quand l’épiderme seul est coloré, on esl très souvent en présence d’un parenchyme aussi riche en chloro- phylle que celui des feuilles appartenant aux variétés vertes (Arroche rouge, Hêlre pourpre, certains Coleus, etc.). Passons maintenant à l'influence directe de la substance rouge sur la fonction chlorophyllienne. Pick, Engelmann, Stahl (1) ont insisté beaucoup sur ce fait que le spectre d'absorption de l’anthocyanine est sensi- (4) Stahl, Ueber die bunte Laubläiter (Ann. du Jard. botan. de Buitenzorg, vol. XIII, 2, p. 137-216, m. 2 Taf. Analyse par Kienitz-Gerloff in Bot. Zeit., 1896). “4 L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 39 blement complémentaire de celui de la chlorophylle et que, par conséquent, dans les feuilles, [a matière rouge ne peut nulle- ment affaiblir l'énergie assimilatrice. Il faut pourtant remar- . quer qu'entre la raie D et la raie se trouvent les radiations qui correspondent aux bandes IIT et IV de la chlorophylle; or ces radiations sont absorbées par l’anthocyanine ainsi qu’une partie de celles qui produisent les {rois larges bandes dans la moitié la plus réfrangible du spectre. On ne peut donc nier a pricri que la substance rouge ne doive se montrer dans une certaine mesure défavorable à la fonction chloro- phyllienne. Mais, d'autre part, Pick admet que la substance rouge favorise la migration de l’amidon formé dans les feuiiles en absorbant les rayons de lumière blanche qui s'y oppo- sent; or on sait, d'après Sachs et Saposchnikoff, que quand l’amidon reste en place, l'assimilation s’arrête ; il en résullerait que lPanthocyanine doit favoriser indirectement de ce chef la décomposition de l’acide carbonique. Stahl est arrivé à la même conclusion ; mais, pour lui, la migration de l’amidon se trouverait favorisée grâce à la chaleur provenant des radiations absorbées par l’anthocya- nine. Il a montré par des recherches thermo-électriques et par des expériences de fusion d’un enduit gras appliqué sur les feuilles, que les parties rouges absorbent plus de chaleur que les parties vertes. Kny a obtenu le même résultat ; ainsi, en plaçant dans un flacon à glaces parallèles des feuilles rouges, et dans un autre des feuilles verles, et en exposant le tout à la lumière blanche dépouillée de ses rayons calorifiques par une dissolution d’alun, on voit que le thermomèlre plongé dans la masse de feuilles rouges marque par exemple 4 degrés de plus que celui qui est en- {ouré de feuilles vertes. Et maintenant, au sujet de celte action favorable ou défavorable de l’anthocyanine sur l'assimilation, consultons l'expérience directe. Je me suis servi à cet effet de la caisse à deux comparti- 30 ED. GRIFFON. ments dont il a été question plus haut. Une auge était remplie du liquide rouge extrait des feuilles d'Achyranthes; une autre ne contenait que de l’eau dislillée. Deux feuilles de Troëne, aussi identiques que possible, étaient mises à assimiler dans deux éprouvettes renfermant le même ar chargé d'acide carbonique. L'une de ces éprouvettes fut pla- cée derrière le liquide rouge et l’autre derrière l’eau distillée. Dans une première expérience, après quatre heures d’expo- sition à la lumière diffuse, la feuille placée derrière le liquide rouge dégagea 2*,550 d’oxygène, et l’autre 5,58 ; ce qui 2,55 5,98 Or,auspectroscope, comme dans l'expérience sur Le verdis- sement, l’auge à liquide coloré éteignait le jaune el Le vert et assez fortement Le bleu et le violet. En ajoutant au liquide son volume d’eau dislillée, le rap- port d’assimilation devint 0,62; en faisant la même opéra- tion pour le second liquide, j'obtins comme rapport 0,75. Au spectroscope l’absorplion était cette fois localisée surtout dans le jaune et le vert. Il paraît donc acquis que, par la radiation qu’elle absorbe, la substance rouge des feuilles ne peut que nuire à l'assimi- lation. Le Mais cette aclion nuisible variera avec l'intensité de coloration des cellules à anthocyanine, le nombre de ces dernières et leur répartition. Il ne faut pas oublier que presque toujours, quand l’épiderme est coloré, il y a des groupes plus ou moins importants de cellules qui sont dépourvus de substance rouge ; il en est d’ailleurs de même pour le pa- renchyme. C’est précisément pour apprécier l'importance de cette action nuisible que je me suis proposé de comparer l'énergie assimilatrice des feuilles rouges à celle des feuilles vertes de la même espèce. donne comme rapport d’assimilalion : — (210! c. L'énergie assimilatrice des feuilles rouges. — Je ne m’oc- L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 7 ( cuperai ici que des feuilles qui présentent d'une facon nor- male des teintes rouges dans tout le cours de leur dévelop- pement. J’examinerai à part les cas de rougissement qui se produisent régulièrement ou accidentellement chez certaines plantes au printemps ou à l’automne. De Saussure (1) est le premier expérimentateur qui se soit occupé de l'assimilation des feuilles rouges. Selon lui, s'il est vrai, comme l’a montré Senebier, que les parties non vertes lelles que le bois, les racines, la plupart des pétales, les panachures blanches des feuilles et les feuilles devenues jaunes ou rouges en automne, ne dégagent pas d'oxygène à la lumière, il ne faut pas en inférer que la couleur verte soit un caractère essentiel aux parties qui décomposent l'acide carbonique, ni un résultai nécessaire de cette décomposi- tion ; car, ajoute-t-il, la variété rouge de l’Afrinler hortensis lui a fournit sous l’eau de source, dans l’espace de cinq ou six heures, sept ou huit fois son volume de gaz oxy- gène, la variété verte lui ayant donné un résultat identique. De Candolle {(2)a vu que l’U/va jurpurea, une Algue rouge, dégage de l'oxygène à la lumière. Aug. Morren (3) a observé le même phénomène pour la Palmelle rouge. Mais de Saussure et de Candolle voyaient dans la subs- tance rouge ou jaune la cause du phénomène assimilateur, de même que dans la matière verte. Mohl (4), le premier, a montré que les plantes, quoique rouges, possèdent de la chlorophylle tout à fait semblable à _celle des feuilles vertes, mais masquée par l’anthocyanine. Il a été amené à penser alors que les échanges gazeux chez les plantes rouges confirment les rapports qui unissent la chlorophylle au dégagement d'oxygène. _(1) De Saussure, Recherches chimiques sur la végétation, p. 56. (2) De Candolle, Physiol. végét., t. I, p. 119. (3) Aug. Morren, Recherches sur l'influence de la lurnière, 1836. (Æ) Loc. cit. 38 ED. GRIFFON. Cloez (1) combattit à nouveau l'interprétation de de Saus- sure qui avait été reprise par Corenwinder (2). Il montra que l'Arroche rouge est très riche en chlorophylle. De plus, en expérimentant sur les parties rouges et les parties Jaunes des feuilles d'Amaranthus tricolor qui ne renferment pas de chlorophylle, 1l n’a pas trouvé de dégagement d'oxygène, alors que ce gaz était produit en abondance avec les parties vertes de la même feuille. Si donc une feuille rouge ou jaune décompose l'acide carbonique, cela ne tient pas à sa couleur, mais à ce qu'elle renferme de la chlorophylle, dont la teinte est masquée par un principe colorant supplémen- taire dissous dans le suc cellulaire. En 1890, M. Jumelle (3) songea à comparer l'assimilation chlorophyllienne des arbres à feuilles rouges avec celle de leurs congénères à feuilles verles. En rapportant les quan- ütés d’acide carbonique décomposé par de jeunes arbres à l’unité de poids sec des feuilles, il trouva que dans les variétés rouges ou cuivrées, l’assimilation est toujours plus faible que dans les espèces correspondantes à feuillage vert, et que les différences d'intensité peuvent être assez grandes. Ainsi, par exemple, le Hêtre cuivré, le Sycomore pourpre assimilent six fois moins, toutes conditions égales d’ailleurs, que le Hêtre et le Sycomore ordinaires. M. Jumelle ajoute que ces faits expliquent pourquoi les arbres à feuilles rouges ont un accroissement beaucoup moins rapide que les mêmes arbres à feuilles vertes. Toutelois 11n’étudie pas anatomique- ment les feuilles ayant servi aux expériences et il ne cherche pas la raison de cet affaiblissement de la fonction chlorophyllienne. Enfin, en 1894, M. Jünsson (4) montra que la coloration rouge, très accentuée chez les Muscinées développées à la lumière, a pour effet de retarder beaucoup la respiration et (1) Cloez, C. R. Acad., 16 nov. 1863. (2) Corenwinder, €. R, Acad. , t. LVIT, p. 266, et Note, p.915. (3) Jumelle, C. R: Acad, 4° sept. 1890. (4) Jünsson, C. R. Acad., t. CXIX, p. 440. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 39 l'assimilation. En rapportant au poids sec, l’auteur a trouvé des rapports d’assimilation voisins de 0,70. Mais chez les Mousses ce sont les membranes qui se colorent en rouge et le contenu protoplasmique est lui-même modifié. J'ai repris cette question de l’assimilation comparée des feuilles rouges et des feuilles vertes, mais en rapportant les quantités d'oxygène dégagé à l'unité de surface. J’ai exa- miné en outre la structure anatomique de chaque feuille et jai fait porter mes expériences sur un grand nombre de plantes ligneuses et herbacées. Arroche (Atripler hortensis). — Deux feuilles de même surface, l’une de la variété rouge d’Atriplex hortensis, l’autre d'Arroche blonde, ont dégagé, exposées pendant une heure à la lumière directe du soleil et dans une atmosphère conte- nant 8,01 p. 100 d'acide carbonique, la première, 5,52 p. 100 d'oxygène et la seconde 5,47. Il v a donc égalité d'énergie assimilatrice entre les deux variétés, ainsi que l'avait d'ail- leurs montré déjà de Saussure. Les deux feuilles ont la même épaisseur ; on rencontre même de temps en temps des feuilles rouges plus épaisses que des feuilles vertes,ce qui est assez fréquent aussi chez le Hêtre. L’anthocyvanine n'existe que dans les deux épidermes ; quelques cellules du parenchyme facuneux en contiennent, mais on n’en trouve jamais dans le parenchyme en palis- sade et l’'épiderme supérieur est très peu coloré; enfin le tiers environ des cellules épidermiques ne renferme pas d'anthocyanine. Quant aux chloroleucites ils sont aussi nom- breux, aussi gros el aussi verts dans les deux variétés. La substance rouge n’exerce donc chez l’Atriplex aucune action sensible ni sur le verdissement ni sur l'assimilation. Épine-Vinette (Berberis vulgaris). — La variété rouge a des feuilles identiques comme structure à celles de la variété verle ; il n'y a pas non plus de différence à signaler dans les chloroleuciles. La substance rouge se rencontre par plages 40 _ ED. GRIFFON. souvent assez éloignées dans l’assise palissadique ; ces plages ont une teinte très pâle. Or l'énergie assimilatrice est la même dans la variété rouge et dans la variété verte. | | Épipacte (Æpipactis latifolia). — Cette Orchidée a la partie inférieure de sa lige colorée en violet; l’anthocyanine n'exisle que dans l’épiderme. Sous ce dernier se trouve un parenchyme chlorophyllien. Si on compare un segment de tige pourvu de substance rouge avec un segment d’une autre tige restée verte, on trouve qu'à surface égale l'assimilation est la même. Hêtre (Fagus silvatica). — Celte plante présente deux variélés rouges : Faqus silvalica var. purpurea ou Hêtre. pourpre, el Faqus silvatica var. cuprea où Hêtre cuivré. En comparant la variété pourpre au Hêtre ordinaire, j'ai obtenu des rapports d’assimilation voisins de 1 et quelquefois même supérieurs à { (1). Or la structure est identique dans les deux plantes ; les chloroleucites sont aussi nombreux el présentent les mêmes dimensions et la même intensilé de coloration. Il n’y a d’anthocyanine que dans les deux épidermes, et encore la Me Are ne moilié des cellules en est dépour- derme seul renferme de la subs- Vue (fig. 4). Les rapports d’as- tance rouge. — Mêmes lettres + -7 ,. : Co Corel similation dépendent donc uni- quement de l’épaisseur du méso- phylle et de son degré de différenciation. Quand j'ai trouvé des nombres supérieurs à 1, c’est que la feuille rouge élait plus épaisse que la feuille verte. Avec le Hêtre cuivré, le rapport s’est abaissé à 0,60, mais dans ce cas la feuille verte a un mésophylle plus épais (94 p 9 Q r . . . . . e e (1) C’est toujours l'énergie assimilatrice de la feuille verte qui est prise comme unité dans le cours de ce chapitre. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 41 au lieu de 81); son parenchyme en palissade est proportion- nellement plus développé (40 & au lieu de 30) et les chloro- leucites sont plus gros et plus verts. L’anthocyanine, chez le Hêtre cuivré, est encore localisée dans l’épiderme; elle n'a évidemment pas plus dans cette variélé que dans Île Hêtre pourpre, d'influence sur le verdissement et la décom- posilion du gaz carbonique; c’est à la nature de la plante seule qu'il faut attribuer la structure moins différenciée de la feuille et la plus faible coloration des chloroleucites. Les rapports d'assimilation trouvés par M. Jumelle ont élé de 0,93 avec le Hêtre pourpre et de 0,17 seulement avec le Hêtre cuivré. Betterave (Beta vulgaris). — La comparaison entre la variélé rouge et la variété verle présente d'assez grandes difficultés à cause des feuilles cloquées inégalement et dont on ne peut évaluer la surface avec certitude, et aussi parce que ces feuilles ne sont pas souvent, en raison de leur mode d'évolution, dans des états physiologiques identiques. Si j'ajoute que l’épaisseur des feuilles.est 1rès variable, on comprendra que j'aie pu trouver des résullats fort différents. Ainsi, dans une première expérience, le rapport d’assimi- lation s’est élevé à 0,93 ; dans une seconde il a été de0,65 et dans une troisième de 0,90; mais dans deux autres il s’est abaissé à 0,40 et 0,35. Les rapports les plus élevés correspondent à des feuilles rouges plus épaisses que les feuilles vertes (442y contre 337). Quantaux nombres 0,35 et 0,40 ils ont élé oblenus avec des feuilles ayant la même épaisseur. La structure du mésophylle est identique dans les variétés rouges el dans celles qui sont vertes. Mais dans les pre- - mières les chloroleucites, qui parfois même sont plus nom- breux, sont toujours plus pâles et à granulalions incolores peu apparentes. . L'anthocyanine est très abondante; on la rencontre par plages dans tout le mésophylle. 42 ED. GRIFFON. Prunier (Prunus Pissardi). — J'ai comparé pendant le mois d’Aoùût cette espèce au P. Myrobolana. Les deux feuilles sont absolument identiques comme structure. Mais, dans l'espèce à feuilles rouges, %ZS es chloroleucites sont moins ---/Jl2 nombreux et surtout moins verts ; ils ont même une teinte un peu jaunâtre, voisine de celle que er, Nous observerons plus loin chez D certaines variétés de Coleus. La cellules en pointillé renferment substance rouge se rencontre par Fu Memes plages dans l'épiderme et le méso- phylle (fig. 5). Aussi les rapports d’assimilalion dans les différentes expériences n'ont-ils pas dépassé 0,25, chiffre le plus souvent trouvé. M. Jumelle donne comme rapport 0,77; mais on se rap- pelle qu'il expérimentait sur de jeunes arbres entiers et qu’il rapportait à l’unité de poids sec. De plus, il a comparé le P. Pissardi au P. domestica, dont les feuilles sont très diffé- rentes comme structure de celles de la variété rouge. On sait que le P. Pissardi n’est, comme le P. Myrobolana, qu'une variété du ?. divaricata. Erable Sycomore (Acer pseudo-Platanus). — La variété rouge de cette plante ne contient d’anthocyanine que dans l'épiderme inférieur ; les chloroleucites sont plus jaunâtres que dans l’espèce verte; aussi la feuille, à sa partie supé- rieure, est-elle d’un vert moins frais ; ajoutons que le méso- phylle est aussi un peu moins épais. Le rapport d’assi- milation est d'environ 0,60 (0,17 selon M. Jumelle). Or l’anthocyanine se trouvant dans l’épiderme inférieur n'a pu nuire au verdissement et à la décomposition de l'acide car- bonique dans le parenchyme en palissade. Bouleau {Berula alba). — La variété rouge que j'ai étudiée avaitun mésophylle plus épais que dans la variété verte (159 y au lieu de 121). Mais le tissu palissadique et le parenchyme L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 43 lacuneux étaient développés suivant la même proportion dans les deux cas. La feuille rouge eût donc dû assimiler davantage que la verte; mais ses chloroleucites, quoique de même dimension, étaient d’un vert jaunâtre, et c’est ce qui explique la faiblesse du rapport d’assimilalion qui est de 0,62 environ (0,33 d'après M. Jumelle). Cette fois, c'était l’épi- derme supérieur seul qui renfermait de l’anthocyanine. Coudrier (Corylus Avellana). — Le rapport d’assimila- tion est le même que dans le Bouleau et le Sycomore, 0,61 en moyenne. L’anthocyanine se rencontre dans les deux épidermes; sa teinte est plus foncée que dans le Bou- leau, et les chloroleucites de la variété pourpre sont moins jaunâtres; mais le mésophylle est moins épais que dans la variété verte el Le tissu palissadique est proportionnellement moins développé. Balisier (Canna). — Les Cannas cultivés dans les jardins présentent de nombreuses variétés rouges, ainsi que des variétés vertes, dont les unes sont à feuillage foncé, bleuâtre, et les autres, d’un vert pâle. Les feuilles vertes et rouges que j'ai comparées avaient la même structure. Dans les feuilles rouges, qui ne possèdent d’anthocyanine que dans l’épiderme, les chloroleucites sont aussi nombreux el aussi gros que dans celles des variétés vertes, mais leur teinte est moins foncée et leurs granula- lions incolores, plus apparentes. Les rapports d’assimilation ont varié entre 0,55 et 0,65. Dans les Cannas et le Coudrier on peut donc encore expliquer les résultats obtenus, sans faire intervenir la substance rouge. Achyranthe (Achyranthes). — Ceite plante herbacée est d’un rouge très foncé, ce qui rend son emploi fréquent en mosaïculture. N'ayant malheureusement pas à ma disposi- tion de variétés vertes, je n’ai pu la comparer qu'à l’Ama- ranthus retroflexus. 44 ED. GRIFFON. Or, il n'existait aucune différence dans la teinte des chloroleucites, bien que l’anthocyanine fût répandue chez l’'Achyranthe, dans un très grand nombre de cellules. Il est vrai que chez lAmaranthus les feuilles sont d’un vert pâle ; mais dans cette espèce, les feuilles sont moins épaisses, les cellules palissadiques très étroites et pauvres en chloro- leucites; alors le rapport d’assimilalion a été supérieur à l'unité (1,40 environ). C'est la feuille rouge qui assimile le plus. Gouet (Arum maculatum). — On sait que les feuilles de celle plante présentent très souvent des taches noires d'une cerlaine étendue. J'ai découpé de petits carrés de 1 centimètre de côté dans ces macules et dans les parties avoisinantes restées vertes. En comparant les dégagements d'oxygène de ces frag- ments de feuilles, j'ai obtenu comme rapports des nombres compris entre 0,67 et 0,70. Mais, dans les parties tachées, les cellules palissadiques sont moins allongées que dans les parties vertes (90 w au lieu de 120) et le mésophylle tout entier est moins épais ; les chloroleucites sont moins gros et un peu moins verts, surtout Fig. 6 et 7. — Arum maculalum.— À, Partie tachée ; B, partie verte. Les cellules, mêmes lettres que précédemment. dans l’assise en palissade, qui seule, contient l’antho- cyanine (fig. 6 el 7). L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 45 Pelargone (Pelargonium). — J'ai fait la même expérience sur des variélés de Pelargonium qui ont des bandes brunes sur les feuilles. Maisiciles rapports d’assimilation ont été plus élevés (0,77 à 0,80). Les parties tachées présentent encore de la substance rouge dans l’assise palissadique et les chlo- roleuciles sont moins verts que dans le reste de la feuille : mais la structure est la même, ce qui explique que les rapports d’'assimilation soient plus élevés que chez l’'Arum. Laitues et Romaines {Lactuca saliva). — Des variétés de Laitues, dites brunes, possèdent de l’anthocyanine dans les deux épidermes et aussi dans un cerlain nombre de cellules des assises sous-épidermiques. En comparant des Laitues brunes et des Laïlues vertes qui ont Ia même structure, on trouve, comme rapports d’assimilation, 0,80. Si l’on compare ces mêmes Laitues colorées à des Romaines vertes dont le mésophylle est plus épais, le rapport s’abaisse à 0,65. Or, dans les variétés colorées, les chloroleucites sont moins gros el moins verts. Les différences d'énergie assimilatrice s'expliquent donc chez ces plantes, de même que chez le Pelargonium et l'Arum, sans que l’on puisse attribuer à l’anthocyanine une influence sensible sur la décomposilion de lacide car- bonique. Golée (Coleus). — Les variétés de Coleus sont, comme nous le verrons, fort intéressantes à étudier. Mon attention s’est portée plus particulièrement sur trois d’entre elles. 1° Coleus PBruanti, à feuilles très foncées, vertes et _ rouges en dessus, et d'un vert pâle en dessous. 2 Var. Hippolyte Jamin, à feuilles moins foncées, vertes et jaunes en dessus, Jaunâtres en dessous. 3° Coleus Verschaffeltü, à feuilles entièrement rouge marron en dessus, et rouge violacé en dessous. Or, la seconde variété assimile six fois moins, et la {roi- 46 ED. GRIFFON. sième sept fois moins que la première. Les différences d'énergie assimilatrice sont donc très grandes. Pourtant les feuilles ont à peu près la même structure. L’anthocyanine ne se rencontre que dans l’épiderme, et nous savons déjà par de nombreux exemples que, dans ce cas surtout, elle ne joue aucun rôle nuisible appréciable dans le verdissement n1 dans l'assimilation. Mais le Coleus Bruanti a sous l’épiderme coloré des chloroleucites très verts et 1l assimile beaucoup. Dans les deux autres variétés ces leuciles sont très pâles ; leur teinte est même d'un jaune ochracé dans la variété Hippolyte Jamin ; 11s sont en outre, moins nombreux. Il y a des variétés dans lesquelles les taches rouges sont transparentes; les cellules du mésophylle sous-jacent sont alors dépourvues de matière verte. [nutile de dire que ces régions ne décomposent pas l'acide carbonique et affaiblis- sent d'autant l'énergie assimilatrice de la feuille entière. Cloëz (1) a signalé des faits analogues chez l’Amaranthus tricolor, dont les feuilles sont panachées de vert, de jaune et de rouge; les parties vertes seules dégagent de l'oxygène à . la lumière; les autres, qui ne contiennent pas de chloro- phylle, ne peuvent qu’émettre de l’acide carbonique. Quant à l'Amnaranthus caudatus, qui a les trois couleurs verte, jaune el rouge mélangées, ses feuilles décomposent l'acide carbonique, mais avec moins d'énergie que les feuilles vertes. Observations Sur les expériences précédentes. — Les résul- {ats qui viennent d’être exposés s’éloignent parfois nota- blement, comme on à pu le voir, de ceux trouvés par M. Jumelle. Il y a à cela plusieurs raisons : 1° M. Jumelle a rapporté les échanges gazeux au poids sec des feuilles, et non à leur surface ; on comprend alors (1) Cloez, loc. cit. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 47 qu'avec des bases de comparaison aussi différentes, — et elles le sont d'autant plus que les structures des feuilles sont moins voisines, — les résultats ne soient pas identiques. Ainsi des feuilles de même surface du Prunus Myrobolana et du Prunus Pissardi ont les mêmes poids secs, mais il n’en est pas de même pour celle dernière espèce et le P. domestica employé par M. Jumelle. Le poids sec d’une feuille de P. Myrobolana ou de P. Pissardi élant dans un cas de 40 milli- srammes, celui d’une feuille de P. domestica s'élevait à 70 milligrammes. Or, il n y à nullement proportionnalité directe entre le poids sec et l'énergie assimilatrice. 2° M. Jumelle, il est vrai, a opéré sur de jeunes plants, el il lui était difficile de calculer la surface de toutes les feuilles. L'emploi de ces jeunes plants est aussi une cause de diffé- rence notable. J'ai remarqué en effet que la quantité de chlorophylle et la répartition de la substance rouge varient plus ou moins avec l’âge de la plante el des feuilles. Il est en oulre difficile d'obtenir des plants ayant des feuillages bien comparables comme importance et qui soient dans le même étal physiologique, et on ne peut, en lout cas, répé- ter facilement les expériences sur un grand nombre de pieds différents. D'ailleurs, même en opérant sur des feuilles aussi compa- rables que possible de plantes adultes, on peut trouver des résultats notablement divergents. J'ai observé, sur le Prunus Pissardi par exemple, qu’un rapport trouvé en Septembre, n'est pas le même que celui obtenu en Juillet; faible en été, il tend à se rapprocher de l'unité au commencement et à la fin de la végétation. Cela tient aux varialions de la respira- lon et de l’assimilation avec l’âge et aussi aux change- ments survenus dans la coloration des chloroleucites ; ainsi, en Mai ou Juin, les feuilles adulles du Prunus Pissard ont des chlorolencites aussi verts que ceux du Prunus Myrobo- _lana, ce qui montre bien, disons-le en passant, que la sub- stance rouge ne gène pas le verdissement ; ces feuilles sont alors d’un rouge moins franc qu'en été el les rapports d’as- 48 ED. GRIFFON. similalion sont voisins de 0,90 ; en Septembre, ces rapports sont de 0,70 environ. Il est donc nécessaire d'étudier chaque fois, anatomiquement, les feuilles mises en expé- rence. 3° Il est possible enfin que les intensités lumineuses aux- quelles sont exposées les feuilles fassent varier dans une certaine mesure les rapports d’assimilation. On ne peut prétendre, «a priori, que ceux-ci soient forcément les mêmes à la lumière solaire directe et à la lumière diffuse. Corenwinder (1) a trouvé que le Noisetier pourpre, le Chou rouge, le Tabac, le Soleil, le Lupin, le Colza, dégagent de l'acide carbonique à l’ombre. Ce terme d'ombre, il est vrai, est très vague; pourtant, si les expériences de Coren- winder sont exactes, le Noisetier pourpre, le Chou rouge, exposés à la lumière diffuse, quand celle-ci est voisine de ce qu’il appelle l'ombre, doivent assimiler moins, de ce chef, que les variétés vertes. Les différences d'énergie assimila- trice entre plantes rouges et plantes vertes seraient donc plus marquées à la lumière diffuse qu’à la lumière directe. Pour m'en assurer, J'ai répété à la lumière diffuse mes expériences sur les plantes rouges quand elles avaient été faites à la lumière directe, et réciproquement. Or, Je n'ai en général pas obtenu de différences notables dans les rapports d’assimilation. La Betterave rouge seule a dégagé de l'acide carbonique à l'ombre, alors que toutes les autres plantes mises en expérience émellaient de loxygène. Ces conclusions, suffisantes au point de vue auquel je suis placé, n'infirment nullement d’ailleurs celles qui ont été formulées par Corenwinder. L'ombre à laquelle j'ai opéré pouvait n’êlre pas suflisamment intense pour que chez les plantes dont cet auteur fait mention (Chou rouge, Tabac, etc.), il y ait dégagement d'acide carbonique. Conclusions. — Les feuilles des plantes rouges ont géné- (4) Corenwinder, Recherches sur l'assimilation du carbone par les feuilles des végétaux (Ann. de chim. et de phys., 3° série, 54, 1858). L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 49 ralement une énergie assimilatrice inférieure à celle des feuilles appartenant aux espèces vertes correspondantes (Betterave rouge, Prunus Pissard, Sycomore pourpre, Bou- leau pourpre, Balhsier, ete.). Il en est de même pour les laches brunes de cerlaines plantes comme l’Arun maculalum el des variétés de Pelar- gonium. Assez souvent l'énergie assimilatrice des feuilles rouges se trouve comprise entre la moitié et Les trois quarts de celle des feuilles vertes. Avec le Prunus Pissardi, comparé au Prunus Myrobolana, le rapport d’assimilation s’abaisse Al [ U Le Q Y il à … mais en été seulement, et chez certains Coleus à = et même Parfois, la raison de cette infériorité tient à une plus faible épaisseur du mésophylle (Coudrier) ; mais, d'une manière générale, il faut la chercher dans la richesse moins grande des chloroleucites en matière verle. Chez un certain nombre de plantes comme l’Arroche rouge, le Hêtre et V'Épine-Vinette pourpres (les deux pre- mières ayant de la substance rouge dans l’épiderme seule- ment, et la troisième dans l’assise palissadique), l'énergie assimilatrice est égale à celle des espèces vertes correspon- dantes. Mais alors l'épaisseur des feuilles est la même et les cellules sont également riches en chlorophylle. De l’ensemble de ces fails on peut déduire que dans les plantes rouges l’anthocyanine parait n'exercer, par les rada- Lions qu'elle absorbe, aucune influence sensible sur l'intensité du verdissement et de l'assimilation chlorophyllienne. . Ces conclusions n’impliquent nullement que les arbres à feuilles rouges doivent se développer moins rapidement que leurs congénères à feuilles vertes. Les renseignements qui mont élé fournis par des horticulteurs très compétents (André Leroy, d'Angers ; Transon,d’Orléans: Morlet, de Fon- lainebleau; de Vilmorin), me permettent d'affirmer qu'en ANN. SC. NAT. BOT. X, 4 20 ED. GRIFFON. général il n'y a pas de différence de vigueur entre Îles variétés rouges el les variétés vertes. Quand parfois on en _ observe, cela lient à ce que les variétés rouges proviennent de greffe et non de semis. d. Æougissement printanier et automnal. — Un grand nombre de plantes, ainsi que j'ai déjà eu l'occasion de le dire, ont des feuilles qui rougissent plus ou moins fortement au printemps et à l’aulomne. J'ai étudié, parmi celles qui se colorent au printemps, certaines variétés de Pivoines et le Chêne. Chez ce dernier, la substance rouge se forme dans le üissu palissadique seu- lement, et les feuilles qui en contiennent sont celles que frappe directement la lumière. L’allernance des nuits froides et des journées ensoleillées paraît être la condition essen- tielle de l'apparition de l’anthocyanine ; je reviendrai d’ailleurs sur ce point plus loin. Les feuilles rouges ont la même structure que les autres, et cela se comprend facilement, étant donné le mode de formation brusque de l’anthocyanine ; mais les chloroleu- cites de leurs cellules palissadiques ont une teinte verte peu foncée. Aussi l'énergie assimilatrice des feuilles co- lorées est-elle inférieure à celle des feuilles restées vertes. Les rapports d’assimilation sont voisins de 0,80. On remarquera que ce chiffre est le même que celui qui a été trouvé pour les taches brunes du Pelargonium, com- parées aux parties vertes. Or il y avail entre ces taches et les parties vertes les mêmes différences qu'entre les feuilles rouges de Chêne et celles du même arbre qui étaient dépourvues d’anthocyanine. Avec les Pivoines, peu de temps avant la disparition de l’anthocyanine, les rapports d’assimilation ont aussi été de 0,80 ; la substance rouge se rencontrait exclusivement encore dans les cellules palissadiques. Parmi les plantes qui rougissent à l'automne, les unes ont des feuilles caduques, comme la Vigne-vierge, le Sumac, le L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 51 Coudrier sanquin, etc., et qui finissent par prendre une teinte rouge éclatante; les autres ont des feuilles persis- tantes qui rougissent chez le Mahonia, la Joubarbe, l’'Orpin, le Vaccinium, ou deviennent d’un brun plus ou moins jau- nâtre ou roux chez le Buis et différents genres de Conifères : Taxus, Pinus, Abies, Juniperus. Le rougissement automnal a été étudié surlout par Mohl (1), puis par Kraus (2), Haberlandt (3), Frank (4), Mer (5) et E. Overton (6). Quand les feuilles sont caduques, la substance rouge apparaît dans le suc cellulaire, et en même temps la chlo- rophylle tend à disparaître. C’est pour cette raison que chez la Vigne-vierge on voit les feuilles passer du vert au rouge écarlate par le brun rougeâtlre ; lorsque la feuille tombe, il n’y a déjà plus de matière verte. On admet au- Jourd’hui, depuis les recherches de Mohl, que ces deux phénomènes, rougissement et disparition de la chlorophylle, sont indépendants. Si les feuilles sont persistantes comme dans le Mahonia, la chlorophylle n'est pas altérée, et elles peuvent assimiler pendant l'hiver comme celles qui ne rougissent pas. L’an- thocyanine apparaît dans l’assise palissadique seulement ; toutefois, 1} arrive assez souvent que les parties qui se sont colorées finissent par périr et ne reverdissent pas au prin- temps. Chez les Conifères et le Puis, il y a brunissement des feuilles. Kraus a montré, par des études spectroscopiques, que la xanthophylle des chloroleucites n’est pas altérée ; # (4) Mobhl, loc. cit., 1838. — Vermischte Schriften. Tubingen, 1845, p. 375. (2) Kraus, Einige Beobachtungen über die winterliche Färbung immergrüner Gewächse (Sitzung. d. phys. medic. Soc. z. Erlangen, 19 déc. 1871 et 11 mars 1872). (3) Haberlandt, Sitzung. d. Akad. d. Wiss. z. Wien (Vol. 72, Abtheïl. I, Aprilheft). | (4) Frank, Pringsheim's Jahrbücher (Vol. IX, p. 159). (5) Mer, Bull. Soc. bot. de France (t. XXII, p. 231, et t. XXIV, p. 105). (6) E. Overton, Experiments on the autumn Colouring of plants (Nature, 26 janv. 1899, p. 296). D2 ED. GRIFFON. quant à la matière verte, elle se transforme en une substance particulière de couleur brune, probablement de la chloro- phyllane, mais elle reparaît au printemps. C'est le froid sur- tout qui provoque cette modification de la chlorophylle. Si on coupe par un froid d'hiver une branche de Buis, et si on la met dans un flacon plein d'eau qu’on place dans une chambre chauffée, la coloralion brune disparaît, et au bout de huit jours les chloroleucites reprennent leur teinte normale (Kraus). La même expérience a été faite par Sachs chez le Thuya. Notons que le reverdissement s'opère très bien à l'obscurité; c’est donc la chaleur seule qui intervient. Le rougissement automnal est engendré par suite de l’action de la lumière et du froid, selon Mohl et Haberlandt ; Askenasy n'’admel que l'influence de la lumière, et Kraus celle du froid seul. M. Mer se range à l'opinion de Kraus; il ne croit pas à l'influence directe tout au moins de la lumière : il a vu des feuilles de Cissus quinque/folia rougir à l'obscurité. Si en pleine lumière, pendant l'été, des feuilles de Vitis ou de Cissus rougissent; si en automne les branches bien appa- rentes de Conifères jaunissent, alors que celles qui sont cachées restent vertes, cela tient à ce que la lumière active l’évaporation ; il en résulterait alors un élat maladif pro- voquant la coloration du feuillage. D'ailleurs, les rameaux extérieurs de Conifères se refroidissent beaucoup plus que ceux qui sont au centre. M. Mer reconnaît cependant que pour les plantes normalement rouges, comme les Co/eus, le Hêtre pourpre, etc., la lumière est généralement nécessaire à la formation de l’anthocyanine. La vérité est que nous ne possédons sur celte question des causes de rougissement, que des observations éparses, trés incomplètes, el qui n'ont pas loujours été soumises à une critique rigoureuse. C’est à l'anatomie expérimentale, en déterminant les conditions dans lesquelles l’anthocyanine apparaît, qu'il appartient surtout de donner la solution. Et à ce sujet je ne puis passer sous silence les remar- SN TO 20 PT L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 99 quables recherches exécutées récemment par M. G. Bonnier, sur la production expérimentale des caractères alpins chez les plantes, el dont il sera d’ailleurs question assez longue- ment plus loin (voir 2° parlie, chap. Il). M. Bonnier, en exposant des pieds de Teucrium Scorodonia, pendant la Journée, à la lumière directe du soleil, et pendant [a nuit, dans une étuve entourée de glace, a provoqué l'apparition de l'anthocyanine dans les feuilles, alors que le rougissement élait nul pour les pieds restés constamment au froid. Ï est à remarquer que dans le mémoire que j'ai déjà cité à plusieurs reprises, Mohl émettait l’idée que c’est l'alter- nance des Jours chauds et des nuits froides qui provoque le rougissement chez les plantes des Alpes. Enfin M. Overton (1) vient d'établir expérimentalement qu on peut faire rougir les feuilles en leur faisant absorber un excès de glucose; cet excès se combinerait au lanin du suc cellulaire pour engendrer un glucoside qui ne serait autre que la substance rouge. Il pense alors que l'excès d'hydrates de carbone produits pendant une insolation intense et prolongée, ne pouvant émigrer par suite du re- froidissement nocturne au printemps ou en aulomne et acci- dentellement en élé, donne naissance à l’anthocyanine en se combinant avec les tanins. Que devient l'assimilation chez les organes qui se colorent ainsi à l'automne ? De Saussure (2) rapporte que selon Senebier les feuilles devenues tolalement rouges ou jaunes en automne par l'altération de leurs sucs, n’exhalent pas de gaz oxygène à la lumière. Macaire Princeps (3) a observé que les feuilles vertes se comportent de même un peu avant de prendre leur teinte rouge ou feuille morte, mais que l'absorption d'oxygène se continue encore pendant un certain temps. (4) Overton, loc. cit. (4) De Saussure, loc. cit. (3) Macaire Princeps, loc. cit. 94 ED. GRIFFON. J’ai repris cette question de l’assimilation chez les feuilles qui se colorent à la fin de la végétation. Mes expériences ont porté sur la Vigne-vierge et le Mahonia, deux plantes qui rougissent communément en septembre et en octobre; la première à feuilles caduques, la seconde à feuilles per- sistantes. J’ai également étudié un phénomène de rougis- sement purement accidentel qu’on observe en Août et Sep- tembre dans la Vigne. Ce phénomène, qui est provoqué par des conditions météoriques spéciales, constilue une affection connue généralement sous le nom de ÆRougéeot. Enfin je me suis occupé des Conifères qui brunissent en hiver. Vigne-vierge (Ampelopsis hederacea). — Quand les feuilles commencent à se teinter de brun rougeâtre à la face supé- rieure, l’anthocyanine a envahi l'assise palissadique et les chloroleucites en même temps commencent à se décolorer. En comparant des feuilles semblables à celles qui sont restées vertes, J'ai trouvé comme rapports d’assimilation des nombres compris entre 0,60 et 0,70. Très rapidement il vient un moment où la respiralion et l'assimilation se balancent. Puis bientôt la respiration seule persiste; la chlorophylle a disparu, la xanthophylle aussi, et l’antho- cyanine a envahi toutes les cellules. Les feuilles alors prennent cette teinte d’un rouge éclatant qui produit un si bel effet décoratif dans les tonnelles et sur les murs et les arbres contre lesquels grimpe la plante. À ce stade, les feuilles ont un pétiole flétri, et 1l suffit de les toucher pour. qu'elles tombent. Mahonie (Mahonia aquifolium). — ci encore c’est le tissu palissadique, lequel comprend deux assises, qui se charge d’anthocyanine, et les chloroleucites, en même temps, su- bissent une légère décoloration. Les feuilles, qui ont pris alors une teinte d’un brun rouge, décomposent moins acti- vement l’acide carbonique que celles qui sont restées vertes ; les rapports d’assimilation sont voisins de 0,60. Ces feuilles L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. DD passent l'hiver sous cet état, et au printemps l’anthocyanine disparaît. Mais il arrive aussi que, comme chez la Vigne- vierge, la substance rouge envahit le reste du parenchyme pendant que la malière verle disparaît ; les feuilles sont alors d’un rouge vif et ne dégagent plus d'oxygène; elles respirent seulement et sont condamnées à périr. Vigne alleinte de Rougeot. — « Au moment des fortes chaleurs, quand soufflent avec violence des vents secs ou qu’il se produit des abaissements subits de température (1) », on voit dans les vignobles des feuilles présenter brusque- ment des taches rouge brun qui peuvent se réunir et envahir le limbe tout entier. Le péliole même se dessèche parfois. Au bout d’un cerlain temps, les feuilles atteintes passent au rouge clair; il n’est pas rare de rencontrer sur un même limbe, par suile de la différence d'âge des taches, les deux teintes en question. Si l’on examine les taches rouge brun, on voit que le tissu palissadique a ses cellules remplies d’anthocvanine ; il en est de même aussi pour quelques cellules siluées contre l’épiderme inférieur. Les chloroleucites sont en outre un peu moins verts que dans les tissus dépourvus de substance rouge. Dans les taches rouge clair, l'anthocyanine à envahi toutes les cellules et ia chlorophylle à disparu. En somme, on retrouve ici les mêmes stades que dans la Vigne-vierge, ce qui n’a rien de surprenant, étant donné le degré de parenté de cette plante avec nos Vignes cultivées. On est donc en présence d’un phénomène de rougissement automnal hdtif et accidentel; hâtif parce qu'il à lieu en pleine végétation, accidentel parce qu'il est provoqué par des circonstances météoriques spéciales et chez des variétés de Vigne où normalement il ne se manifeste Jamais. J'ai fait assimiler des fragments de surfaces égales dé- - (4) P. Viala, Les maladies de la vigne, 3° édit. Paris-Montpellier, 1893, p. #72. 56 | ED. GRIFFON. coupés dans un limbe, les uns dans des taches rouge brun, les autres dans les parlies restées vertes. Les rap- ports obtenus ont varié entre 0,50 et 0,60, chiffres déjà trouvés pour la Vigne-vierge, le Mahonia el bien d'autres plantes dont le feuillage est normalement coloré en rouge, en automne; mais les parlies qui sont rouge vif, comme dans la Vigne-vierge encore, ne dégagent pas d'oxygène, ce qui est naturel, puisque la chlorophylle a disparu. Conifères et Buis. — Mes expériences ont porté sur des rameaux feuillés de Thuya et de Buis ayant bruni à la suite des froids. Elles ont été faites à la campagne pendant l'hiver dernier ; comme Je n'avais pas à ma disposition d'ap- pareil à analyses de gaz, Je me suis conlenté d'exposer ces rameaux à la lumière solaire dans de l’eau chargée d’acide carbonique. Or jamais je n'ai obtenu de dégagement d’oxy- gène, alors que des rameaux feuillés identiques, mais n'ayant pas bruni, ont émis des quantités notables de ce gaz. J'ai examiné les feuilles colorées au microscope ; la chlorophylle avait disparu; on ne rencontrait plus dans les cellules que des leucites colorés en Jaune terreux. Conclusions (1). — Les feuilles qui rougissent au. prin- temps (Chène, Pivoine) ont une énergie assimilatrice infé- rieure à celle des feuilles restant vertes. Les feuilles qui rougissent à l’automne avant de tomber (Vigne-vierge) cessent de dégager de l'oxygène peu de temps après que la coloration apparaîl; les chloroleucites perdent alors complètement leur malière verle et se désorganisent ; l’anthocyanine envahit presque toutes les cellules et les (4) On remarquera que les conditions de milieu jouant un rôle considé- rable dans le rougissement printanier et automnal, j'ai néanmoins traité cette question dans la première partie de mon travail et non dans la se- conde. C’est qu’au point de vue de l'assimilation, les plantes qui se colorent au commencement ou à la fin de la vésétation, se comportent comme celles qui sont rouges pendant tout le cours de leur développement; d'autre part, l'anthocyanine ne peut apparaître que chez des végétaux de nature parti- culière (Vigne-vierge, Chêne, Mahonia, elc.). L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 57 feuilles prennent une belle {einte d'un rouge éclatant; elles respirent encore puis se flétrissent et meurent. Les feuilles de Vigne atteintes de « Æougeot » pendant les mois d’Aoùûl et de Septembre ont leur tissu palissadique en- vahi par l’anthocyanine ; les chloroleucites perdent une partie de leur chlorophylle, ce qui affaiblil l'énergie assimilatrice ; puis les parties rouges finissent, au bout d’un lemps variable, par subir le même sort que celles de la Vigne-vierge. Chez les feuilles persistantes comme celles du Mahonia, quand l’anthocyanine apparaît dans les cellules palissa- diques, les chloroleucites se décolorent un peu et la décom- position de l'acide carbonique se fait avec moins d'énergie. Si Ja feuille est âgée, elle perd toute sa chlorophylle, rougit et périt. Dans le cas contraire elle redevient verle au prin- temps et continue à fonctionner. Enfin chez les Conifères et le Buis, les feuilles qui ont bruni cessent de dégager de l'oxygène à la lumière; mais quand la température redevient favorable, elles reverdissent et la fonction assimilatrice se manifeste à nouveau. e. Remarques sur la signification biologique de la substance rouge. — Bien que la question de la signification biologique de la substance rouge ne rentre pas directement dans le cadre de ce travail, je crois néanmoins bon de faire con- naître ici les réflexions qui m'ont été suggérées à son sujet par les résullats expérimentaux que j'ai obtenus avec les plantes rouges. Je rappelle que, selon Pick (1), la substance rouge /avorise la migration de l'amidon en absorbant les radiations qui s'opposent à ce phénomène. Slahl (2) admet aussi cette action ulile à la plante, maisil l’attribue à l'augmentation de température constatée également par Kny (3) et qui serail produite par la transformation en chaleur des rayons lunu- (4) Pick, loc. cit. (2} Stahl, loc. cit. (3 Kny, loc. cit. 58 ED. GRIFFON. neux absorbés par la substance rouge. Enfin Green (1) pense que l’anthocyanine agit en protégeant la diastase chargée de dissoudre l’amidon. Mais d'autre part, Sachs et Saposchni- koff ont montré que si la migration de l’amidon est favo- risée, l'assimilation l’est en même temps. Or celte conclu- sion qu’entraînent nécessairement les résullats.obtenus par Pick n’est nullement vérifiée par mes expériences; quand la structure et la quantité de chlorophylle ne diffèrent pas dans la feuille verte et dans la feuille rouge, il y a égalité d'assimilation, malgré la présence de l’anthocyanine; mais si au contraire l'énergie assimilatrice n'est pas la même, on constate des différences dans la structure des feuilles et dans la coloration des chloroleucites, suffisantes pour rendre compte des résultats obtenus, ce qui oblige à conclure que la substance rouge exerce une influence très faible ou nulle sur l’assimilalion. Ewart (2) d’ailleurs admet que dans les feuilles rouges les chloroleucites décomposent moins éner- giquement que dans les feuilles vertes lacide carbonique. J'ai montré que ce fait tient à leur richesse moindre en chlorophylle. En outre, Kerner von Marilaun (3) et Kny ont été amenés à penser que l'anthocyanine protège la chlorophylle contre les rayons solaires trop intenses. Slahl, il est vrai, nie cette action et admet plutôt un ré/e protecteur contre le refroidisse- ment nocturne; ainsi il couvre la moitié d’une feuille pen- dant la nuit et ïil voit que cette moilié ne rougit pas tandis que l’autre se charge d’anthocyanine ; or la partie non colorée a pourtant été exposée comme l’autre à la lumière pendant le jour; elle aurait donc dû rougir, ce qui n’a pas eu lieu. D'autre part, sil'anthocyanine protège contre le froid on comprend qu'elle ne se soit pas formée dans cette partie de feuille qui était recouverte et par conséquent à l'abri du rayonnement. (1) Green, Philosophical Transactions, série B, vol. CLXXX VIII, 1897. l (2) Ewart, Journ. Linnean Society, vol. XXXI. (3) Kerner von Marilaun, Pflanzenleben (1887-1891), t. Il, p. 504. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 09 Il ne semble pas cependant que la théorie de Stahl soit plus exacte que celle de Kny. Dans les expériences de M. Bonnier sur la production expérimentale des caractères alpins, et dont j'ai déjà parlé, des plantes restées constamment dans des étuves froides, comme le Teucrium Scorodonia, n’ont pas rougi alors que les mêmes espèces qui ont été soumises aux conditions alternes de température {en plein soleil pendant le jour et dans l’étuve froide pendant la nuit) ont produit de l’anthocyanine. Ce n’est donc pas le froid qui a provo- qué l'apparition de l’anthocyanine, mais bien l'alternance des températures extrêmes. L'explication donnée par Overton est certainement bien plus satisfaisante. On comprend en effet qu’une feuille assi- milant beaucoup dans la journée, à cause de la forte inten- silé de l’éclairement, accumule des quantités considérables d'hydrates de carbone, dont l’excès ne pouvant émigrer à cause du refroidissement nocturne, se combinerait aux lanins pour engendrer ce glucoside qu'est la substance rouge. Cetle explicalion, qui concorde très bien avec l'expérience de M. Bonnier, a en outre l’avantage d’être débarrassée du finalisme auquel il semble que les auteurs cités plus haut aient trop sacrifié. Parce qu’une substance prend naissance quand les condilions nécessaires à sa formation sont réalisées, il ne s'ensuit pas nécessairement que cette substance doive avoir un rôle ulile pour la plante qui la produit; si même il est prouvé qu'elle présente des inconvénients, ceux-ci ne sont pas nécessairement non plus accompagnés par des avantages compensateurs. Dira-t-on, par exemple, que le Chêne, parce que son feuillage rougit, résiste mieux aux jours ensoleillés et aux nuits froides du printemps; que le Hêtre pourpre est mieux adapté que l'espèce verte à une forte intensité lumineuse el au refroi- dissement nocturne, ou encore que la substance rouge apparaît quand son rôle protecteur devient nécessaire ? Les expériences que j'ai rappelées plus haut n'aulorisent nulle- 60 ED. GRIFFON. ment de telles hypothèses. 11 suffit que l’anthocyanine ne gêne pas trop l'assimilation ou toute autre fonction impor- lante pour que les plantes qui rougissent ne succombent pas dans la lutle pour la vie, et le fait que celte subslance rouge apparaissant chez une plante sous l’influence de certaines condilions méléoriques, ne nuise pas aux fonctions physio- logiques, constitue la seule adaptation, très importante, il est vrai, que l’on soit en droit d'admettre dans l’état actuel de la science. [faut bien remarquer d’ailleurs que certaines expériences de Pick et de Kny sont faites dans des condilions qui s’éloignent notablement de celles qui sont réalisées dans les feuilles. Ainsi Kny fait traverser à la lumière une solution de substance rouge contenue dans une cuvetle à faces parallèles, et cette lumière va ensuite frapper un flacon rempli d'une dissolution alcoolique de chlorophylle; il ob- serve alors que la matière verte se décompose moins vite que si la lumière n’a traversé qu'une cuvette remplie d’eau pure. En opérant d’une façon analogue, j'ai trouvé moi- même (voir p. 36) qu’une pareille solution d'anthocyanin gène notablement l'assimilation (1). | Mais en va-t-il ainsi dans les feuilles, où la lumière ne tra- verse qu'une ou deux assises de cellules à anthocvanine? Cerlainement non, au moins en ce qui concerne l'énergie assimilatrice, car J'ai montré que celle-ci n’est influencée que faiblement ou pas du tout par la substance rouge. Pour ce qui est du rôle protecteur contre le froid ou contre. la trop forle intensité lumineuse, du rôle favorable à la migralion de l’'amidon, 1l faudrait voir si réellement ces pré- tendus rôles s’exercent dans les feuilles, grâce à la substance rouge qui y est contenue. IL faudrait en outre connaitre les réactions chimiques qui (1; C'est probablement pour cette raison que Pick, en plaçant des feuilles ou des moitiés de feuilles derrière une solution de substance rouge, trouve que celle-ci favorise la migration de l’amidon; l'assimilation aura été af- faiblie et il se sera formé très peu de grains d’amidon. 1, ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 61 engendrent celle substance et préciser les conditions de milieu dans lesquelles elle prend naissance. Les recherches d’'Overton, de M. Gaston Bonnier, et celles que j'ai exécutées moi-même me paraissent donc contribuer à résoudre cette importante question de la signification bio- logique de la substance rouge, mieux que {outes les déduc- tions les plus ingénieuses des anatomisles ou les générali- sations trop hâtives de résultals expérimentaux obtenus par quelques biologistes. Ces recherches, évidemment encore très insuffisantes, sont, à mon sens, orientées dans la seule voie qui soit féconde et au bout de laquelle on puisse trouver la cerlitude. S 2. — Plantes panachées. Un certain nombre de plantes possèdent des feuilles qui, bien que développées à la lumière, sont plus ou moins com- plèlement dépourvues de chlorophylle et même de xantho- phylle ; la teinte de ces feuilles peut varier du blanc au Jaune des plantes éliolées. On dit que de telles feuilles sont panachées. Mais il y à encore panachure quand, à la coloration verte normale, s'ajoute du brun, du rouge ou du jaune; on veut alors faire entendre que la feuille présente différentes couleurs plus ou moins irrégulièrement distribuées Co/eus, Amaranthus, etc.). Or, à proprement parler, dans les feuilles contenant de l’an- _thocyanine, il y a coloration ou rubéfaction, et, dans celles qui sur toute la surface du limbe ou sur une partie seulement sont jaunâlres ou blanches par disparition de la matière verte, il y à variégation. On peut donc distinguer, en dehors des feuilles vertes, des feuilles colorées (/o/ia colorata) et des feuilles variées (/olia variegata). Cependant l'usage à prévalu de désigner en français les dernières sous le nom de /ewlles panachées. Encore distingue-t-on parmi elles deux modes de variégalion ou de panachure : ou bien les feuilles ren- ferment de la xanthophylle et peut-être un peu de chloro- 62 ED. GRIFFON. phylle dans les parties Jaunes, se rapprochant comme teinte des feuilles étiolées, et elles sont dites dorées (folia variegata aurea), ou bien elles ne contiennent dans les parties déco- lorées ni matière jaune ni malière verle, et c'est la pana- chure proprement dite. a. Feuilles panachées dorées. — D'après ce qui précède, on voit que les feuilles dorées qu'on rencontre dans des variétés d'Aucuba, de Sambucus, de Negundo, doivent être rap- prochées des plantes éliolées qui ne contiennent que de la xanthophylle. Mais Pringsheim et Tsirsch admettent que dans les feuilles éliolées la malière Jaune qui se forme est de l’éfioline et non de la xanthophylle, comme le veulent Wiesner et Kraus ; car, en solulion épaisse, les bandes [ et IV apparaissent, et la bande If se dédouble ; toutefois Hansen croit que ces bandes surnuméraires sont dues à une pelite quantité de chlorophylle mêlée à l’étioline, qui alors se confond avec la xanthophvlle. Selon Timirjazeff (1), les plantes étiolées renferment une substance qu'il a obtenue en réduisant la chlorophylle et qui aurait la propriélé d’engendrer celle-ci par oxydalion ; celle substance, qu'il nomme protophylline, incolore et non fluorescente, se transformerait en chloro- phylle sous linfluence des acides; elle ne serait autre, selon M. A. Gautier, que l’étioline de Tsirsch. Mais Monteverde (2) pense qu'elle n'existe pas chez les plantes étiolées ; celles-ci renferment de la xanthophylle et. de la protochlorophylle, substance légèrement jaunâtre et possédant une fluorescence rouge el qui se transforme pro- gressivement sous l'influence de la lumière et des acides en malière verte. Or la xanthophylle possède trois larges bandes db: (4) Timirjazeff, La protophylline des plantes étiolées (GC. R. Acad., 2 sept. 1889). (2) Monteverde, Ueber das Protochlorophyll (Acta horti Petropolitani, 1894). L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 63 sorplion dans la moitié droite du spectre ; la protophylline présente dans son spectre les bandes IT et IV de la chloro- phylle et la protochlorophylle la bande ITT, plus une bandeIl qui lui est propre. On peut donc se demander si ces matières colorantes à absorplion ont le pouvoir assi- milateur. M. Engelmann (1) le croit, contrairement aux résultats oblenus jusqu'ici par tous les physiologistes. Mais on sait que sa méthode microspeclroscopique ne met en évidence le dégagement d'oxygène que d'une façon indirecte ; aussi Timirjazeff (2), en 1885, se montrail-l sceptique en ce qui concerne le rôle assimilateur de la xanthophylle. Les expériences exécutées par MM. Bonnier et Mangin sur la respiration des tissus sans chlorophylle semblent d’ailleurs infirmer les conclusions de M. Engelmann. Ces deux savants physiologistes ont fait respirer à la lumière et à l'obscurité un certain nombre de plantes éliolées ; ils ont observé que ces plantes placées à la lumière ne verdissent pas de suite, en sorte qu'on peul étudier leur respiration sans avoir à craindre de trouble produit par la fonction chloro- phyilienne. Si l’on examine les résultats de leurs expériences, on voit que la lumière n’influe pas plus sur la’respiration que s’il _s’agissait de plantes entièrement décolorées comme les Cham- : 2 pignons, c'est-à-dire que le rapport —— ne varie que fai- (8) _blement pour une plante donnée et que l’action retardatrice à 1 : | n'est pas importante (5 environ, alors que chez les Cham- : Ne il pignons elle est souvent voisine de :) (1) Engelmann, loc. cit. (2) Timirjazeff, État actuel de nos connaissances sur la fonction chlorophyl- lienne (Ann. des Sc. nat. Bot., 7° série, t. IT, p. 99, 1885). (3) Bonnier et Mangin, Recherches sur la respiration des tissus sans chloro- phylle (Ann. Sc. nat. Bot., 6° série, t. XVIIL, p. 293). 64 .. ED. GRIFFON. L'assimilation paraîl donc devoir êlre considérée comme nulle chez les plantes étiolées. J'ai voulu m'assurer s’il en est de même chez les feuilles S dorées. J’ai étudié à ce point de vue le Sureau doré (Sam- bucus nigra var. aurea) et le Négondo doré (Negundo fraxinifolium var. aureum) (PI. II et IV, fig. 3 et 4). Le Sureau doré présente des feuilles et quelquefois des pousses entières qui ont une teinte variant du jaune pâle au blanc légèrement jaunâlre. Ce sont celles qui tirent sur le ] jaune qui sont à proprement parler des feuilles dorées. Le lissu palissadique renferme des leucites très granuleux et colorés en grande partie par de la xanthophylle ; Engel- mann (1) les a étudiés et il a constalé une absorplion très faible depuis le rouge jusqu’au vert A —0,54). La bande I de la chlorophylle est très peu prononcée ; les bandes IT et IT ne sont pas distinetement développées ; la bande IV,, carac- téristique de la chlorophvllane, n'existe pas, non plus d’ailleurs que la bande IV, ; les leucites sont donc surtout colorés par de la xanthophylle el ils renferment un peu de matière verte. Or, à la lumière diffuse, de pelils segments jaunes atlirent les bactéries, beaucoup moins, il est vrai, que des segments identiques découpés dans les parties vertes ; si l'intensité lumineuse augmente, le nombre des bactéries s'accroît, sans égaler toutefois celui quis’accumule autour des segments verts. Engelmann ajoute qu'il lui paraît alors que Ia xantho- phylle doit assimiler, mais il fait celle réserve qu’on ne pourra se prononcer qu'à la suite de recherches quanti- lalives détaillées. De plus, 1l croit que la question ne sera pas résolue en expérimentant sur des feuilles entières, parce qu'elles renferment toujours des cellules dont les chromalo- phores sont en voie de dégénérescence. Je crois cependant que la méthode directe que MM. Bon- nier el Mangin ont employée pour étudier la respiralion des (4) Engelmann, loc. cit. es | L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 65 issus sans chlorophylle, permet de voir, en comparant les échanges gazeux à la [lumière et à l’obscurité, si l’assimi- lalion se manifeste d’une façon appréciable. J'ai exécuté alors de nombreuses expériences sur des feuilles entièrement dorées. Ces feuilles, mises dans de l'air contenant 8 p. 100 d'acide carbonique, ont, à la lumière, augmenté la proportion de ce dernier gaz, et il en a été de même dans l’air normal. Voici d’ailleurs quelques résultats : à CO2 CO2 dégagé. © ‘ Lumière diffuse.... 4,150/, 0,820}, Obscurité 4; 1,38 0,85 Air contenant 8 p. 100 de CO?. Lumière diffuse.... 1,79 0,80 Obscurité. ........ 2,05 0,83 Lumière diffuse.... 0,58 0,82 | Obscurilér sisi 0,69 0,83 DIMOBnA Le: 0 À en une ) Lumière diffuse.... 0,64 0,81 \ Obscurité ......... 0,77 0,84 Le Négondo doré à aussi des feuilles jaunâtres, mais la teinte est un peu moins prononcée que pour le Sureau, et le plus souvent on voit de fins liserés verts chlorophylliens le long des nervures. En prenant des échantillons dépourvus de ces liserés, J'ai obtenu des résultats semblables à ceux que m'a fournis le Sureau. Ainsi, dans une expérience à la lumière el avec de l’air normal, il ÿ a eu un dégagement de 0,85 p. 100 d'acide carbonique ; dans une aulre expérience à l’obscurité, ce dégagement a élé de 1,09 p. 100 ; le 2 rapport —— élant de 0,87 dans la première, et de 0,93 dans 0 la seconde. En somme, ces résultals sont absolument analogues à ceux qui ont été obtenus par MM. Bonnier et Mangin chez les plantes étiolées. Les méthodes directes ne permettent pas d’altribuer à la xanthophylle la facullé de décomposer l'acide carbonique. ANN. SC. NAT. BOT. X, D 66 ED. GRIFFON. Feuilles panachées proprement dites. — De nombreux expérimentateurs, et en particulier de Saussure (1), Engel- mann (2), Cailletet, Bonnier et Marngin (3), ont établi que ces feuilles sont dépourvues du pouvoir assimilateur. Elles ne renferment d’ailleurs ni chlorophylle ni xanthophylle. Les lenciles ne sont pas absents pour cela. M. Zimmer- mann (4) à montré qu'ils sont beaucoup plus répandus qu'on ne le croit généralement, mais leurs dimensions sont réduites ; cependant certaines cellules absolument incolores n’en contiennent pas. b. Feuilles panachées argentées ou argyrescentes. — Enfin, il est des feuilles dont la panachure argentée est due à ce que l’épiderme est soulevé par places, emprisonnant ainsi de l'air entre lui et le mésophylle. C'est ce qu'on voil dans les feuilles du Begonia ex, du PBegonia argyrostigma, du Sonerilla magarilacea, du Tradescantia zebrina, du Lamium maculatum. Ed. Morren (5) a donné à cette panachure le nom d'argyrescence; elle est différente, comme on voil, de celle qui est produite par des poils, comme chez l'Argentine, l’Ansérine, des Molènes, des Céraistes, des Gnaphales, des Centaurées argentées, etc. J'ai comparé dans le Lamium maculatum des parties panachées el des parties vertes au point de vue de la décomposilion de l'acide carbonique; j'ai trouvé que l'énergie assimilatrice des parties argentées est les trois quarts ou les qualre cinquièmes de celle des parlies vertes. Cette différence ne tient nullement au décollement de l’épiderme ; dans les échantillons que j'ai employés, en eflet, (4) De Saussure, loc. cit. (2) Engelmann, Couleur et assimilation (Ann. Sc. nat., 6° série, t. AV, p- 361). (3\ Bonnier et Mangin, loc. cit. (4) Zimmermanu, Ueber die Chromatophoren in panachirten Blätlern (Ber. d. deut. Bot. Gesell., avril 4890). (5) Ed. Morren, Seconde notice sur la duplication des feups et la panacliu ue du feuillage. Gand, 1868, p. 16. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 67 le mésophylle des parties panachées était moins épais que celui des parlies vertes. D'ailleurs, avec d’autres échantitlons, assez rares il est vrai, dans lesquels il y avait égalilé d'épaisseur, l'énergie assimilatrice n’a pas présenté de variations appréciables. Mêmes résullats pour le Begonia Rex. Conclusions. -— Les feuilles panachées dorées (Sureau, Négondo) ne dégagent pas d'oxygène à la lumière ; elles se comportent en a comme les feuilles éliolées, dont elles se rapprochent par la couleur, et comme les feuilles vanachées proprement dites.— La xanthophylle ne paraîl donc pas douée du pouvoir assimilaleur, au moins d’une façon appréciable par les méthodes directes. Le décollement de l’épiderme, qu’on rencontre chez des feuilles dites panachées argentées (Lamium maculalum, Begonia Rex) n'exerce aucune influence sur l'énergie assimilatrice. SECTION II CHAPITRE UNIQUE PLANTES PARASITES OÙ SAPROPHYTES _ Iexiste chez les végétaux supérieurs des espèces vertes ou plus ou moins complètement décolorées et qui sont parasites ou saprophytes. Ces plantes appartiennent pour la plupart aux familles suivantes : Loranthacées, Santala- cées, Monolropées, Orobanchées, Convolvulacées, Cylinées, Orchidées. Pendant longlemps, les physiologisies n'ont pas soup- conné le parasitisme de certaines plantes vertes lerrestres. Dé Candolle (1}, par exemple, divisait les parasites en deux groupes : 1° végétaux implantés sur les liges ou branches aériennes et ayant de la chlorophylle dans leurs feuilles (Gui et autres Loranthacées) ; 2° végélaux implantés sur les tiges souterraines ou sur les racines el qui son dépourvues de matière verte (Orobanche, Cuscute). Mais, en 1847, Mitten (2) fil voir que les différentes espèces de Z'hesium, Santlalacées vertes el qu'on ne croyait pas parasiles, vivent en réalité sur les racines d’autres plantes. Puis, Decaisne (3) démontra qu'il en est de même pour les Rhinanthacées, plantes qui sont également pourvues de chlorophylle. Quand le parasitisme des plantes vertes fut découvert, les biologistes émirent l'opinion que l’hôte lirait tout son carbone de l'atmosphère, la plante hospitalière ne four- (1) De Candolle, Physiol. végét., p. 140%. (2) Mitten, Journ. of Botany, 1841, p. 146. (3) Decaisne, Sur le parasilisme des Rhinanthacées (Ann. Sc. nat. Bot., Jsérie, tt. VITE, p.5). DÉS L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 69 nissant que l’eau et les matières minérales. Telle est par exemple la conclusion formulée après de Candolle par Pitra (1) en ce qui concerne les Loranthacées, et que M. Bonnier (2) a vérifiée expérimentalement pour le Gui. Mais il n’en est plus de même pour les Rhinanthacées. M. Bonnier a montré récemment que ces dernières pouvaient être divisées en deux groupes : 1° Celles dont le parasilisme est presque complet : 2° Celles dont le parasitisme est incomplet. Dans le premier groupe, il faut ranger Partsia alpina, Rhinanthus Crista-Galli qui ont une assimilation très faible ef ne pouvant l’emporter sur la respiralion qu'à la condition que la lumière soit intense et la température peu élevée. Même dans ce cas, à égalité de surface foliaire, les plantes assimilent douze fois moins que le Veronica Chameædrys ; enfin, chez l'Euphrasia officinalis 11 v a loujours égalité entre la respiralion et l'assimilation et, par conséquent, jamais de dégagement d'oxygène. Dans le second groupe, la décomposition de l'acide carbonique a toujours lieu à la lumière, mais son intensité n'est que le cinquième de celle de la Véronique chez les Thesium humifusum et pratense et chez le Pedicularis silva- hca. Ce rapport s'élève aux deux tiers chez les Me/ampyrum pratense el silvalicum. il résulte, par conséquent, de ces recherches sur Îles Rhinanthacées, les Santalacées et les Loranthacées « qu'au point de vue des échanges gazeux, les végétaux parasites à chlorophylle présentent lous les intermédiaires entre une plante puisant presque exclusivement le carbone dans l'hôte qu'elle attaque et une plante qui assimile presque exclu- sivement par elle-même et ne profile guère que des substances minérales puisées dans les racines de l'hôte(1).» Certes, les données anatomiques tirées de ces plantes vertes ne permeltent pas RE de tels résultats: Je (4 ) 6. Bonnier, loc. cl. (2) G. Bonnier, loc. cit. 70 ED. GRIFFON. voudrais monlrer qu’elles y contribuent cependant dans une cerlaine mesure. En effet, le Lissu assimilateur des feuilles de Rhinanthus et de Bartsia est moins différencié que chez les Véroniques. Celui des feuilles d'£Ewphrasia l'est, par contre, plus que chez le Mélampyre el pourtant cette seconde plante assimile beaucoup plus que la première; mais on peut remarquer que chez l'Euphrasia les cellules des feuilles sont assez lâchement unies entre elles, ce qui diminue l’impor- lance du lissu assimilateur. D'un autre côlé, chez les plantes herbacées, les tiges qui sont vertes contribuent pour une part souvent assez considérable à la décomposilion de l'acide carbonique par la plante tout enlière; or, le parenchyme corlical des Véroniques est très homogène el composé de quatre ou cinq assises de cellules riches en chlorophylle ; chez l£uphrasia, au contraire, le paren- chyme renferme peu de matière verte (fig. 8 et 9). Nous ALI at OR eee ne © D = Le Ce 08 (ee) | > | Ve { à . 2 Li (eee) @ |f0o9 00 ele SES] O E où | ON SAS oo (@) (Ce 00 OO o° Fig. 8 et 9. — A, Veronica Chamædrys (tige). — B, Euphrasia officinalis (tige). — ep, épiderme; p. co, parenchyme cortical; ed, endoderme. verrons plus loin un fait anatomique analogue en examinant la tige de deux Orchidées, l£hipactis latifulia et le Limo- dorum abortivum et qui aura un retentissement considérable sur la décomposilion du gaz carbonique. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. vi | Chez le Æhinanthus, le parenchyme cortical est très Jacuneux et doit done assimiler fort peu. Il en est de même dans la zone externe de celui du Partsia alpina et du Pedicularis palustris ; en oulre, ce parenchyme renferme des chloroleucites peu nombreux et épars. L’assimilation chlorophyllienne chez les Orchidées terrestres et en particulier chez le « Limodorum abortivum». — On sait qu'un certain nombre d’Orchidées terrestres possèdent des racines courtes, renflées, d'aspect coralloïde, et dont les cellules corticales renferment chacune une petite pelote de filaments mycéliens. M. Frank a donné à ces racines spéciales, qu'on relrouye avec les mêmes caractères chez les Ericacées, et avec des caractères différents chez les Conifères et les Cupulifères, le nom de mycorhizes. Ce savant considère comme un fait de symhose el non de parasilisme l’associalion d’une racine el d’un mycélium ; pour lui, le Champignon reçoit de son hôle des substances qu'il ne peul élaborer, comme des hydrates de carbone, des sucres, de l’amidon, etc. ; mais, en revanche, il lui fournit de l’eau et de la matière azolée qu'il puise dans l'humus. Les Orchidées à feuilles vertes et qui poussent dans des sols pauvres en humus doivent vraisemblablement puiser presque tout leur carbone dans l'air ; ce sont des plantes qui se suffisent complètement à elles-mêmes; lPÆpypacths lali- foli& qu'on rencontre à Fontainebleau, par exemple, dans les boues sablonneuses du bord des chemins est parfois dans ce cas. Les autres Orchidées à feuilles verles, mais croissant dans des sols humifères, comme les différentes espèces du genre Orcras, sont, si la théorie de M. Frank est exacte, un peu saprophytes, c’est-à-dire qu’elles vivent dans une cerlaine mesure aux dépens de l'humus, que leurs parties vertes, quoique dégageant de l'oxygène à la lumière, ne fournissent pas à la plante lout le carbone qui lui est nécessaire. Mais aucun fait expérimental ne le prouve jusqu ici. 12 ED. GRIFFON. J'ai précisément voulu voir si dans cetle catégorie de plantes, quelques-unes d’entre elles dont le saprophytisme ne paraît pas douteux, ne présenteraient pas des échanges gazeux à la lumière, de nature à meltre en évidence le rôle des mycorhizes dans l'assimilation du carbone. On a vu plus haut que par celte méthode, M. Bonnier à pu, de nouveau, démontrer le parasilisme des Rhinanthacées. Je me suis adressé en parliculier au Goodyera repens, plante qui à des rosetles de feuilles, un rhizome grêle, lon- guement traçant, et qu'on rencontre sous les Pins, dans la couche d’humus. Or, toujours, à la lumière, les rosettes de feuilles vertes ont décomposé l'acide carbonique avec une intensité comparable à celle des Orchidées non ou peu humicoles : c'est ainsi que des mêmes poids secs de feuilles de Goodyera et d'Epipactis dégagent des quantités à peu près égales d'oxygène. J'ai oblenu des résultats analogues avec les Orchis latifolia, purpurea, morio, mascula et bifoha. Le rôle des mycorhizes dans l’assimilalion de la matière organique carbonée, qui existe vraisemblablement, n'est néanmoins pas mis en évidence par ce procédé. Mais 1l y a des Orchidées non vertes, lelles que le Vooftia Nidus-avis, le Corallorhizu innata, el qui sont forcément saprophyles; elles ont de nombreuses mycorhizes et tirent tout leur carbone des matériaux de lhumus. Le MNeottia, il est vrai, d’après les observations de MM. Wiesner (1) et Prillieux (2), renferme un peu de chlo- rophylle dans ses tissus. Engelmann (5) a pu montrer que lés leucites bruns qui renferment le pigment vert, dégagent, comme ceux de la Cuscute, de l'oxygène à la lumière; mais la quantité de chlorophylle est, en somme, si faible qu’elle joue un rôle peu important dans l'assimilalion, ainsi que cela ressort des expériences de MM. Bonnier el Mangin (4). Wiesner, Jahrbücher f. wiss. Bot., VII, 1872, p. 576. (1) ) Prillieux, Ann. des Sc. nat. Bot., 1874. ) ) 1 (2 (3 (4 Engelmann, Farbe und Assimilution (Bot. Zeit., 1883). Bonnier et Mangin, Respiration des tissus sans chlorophylle; loc. cit. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. y Ces savants, en effet, ont montré que l’action retardatrice de la lumière sur la respiration chez le Neotlia, est plus grande que chez les plantes franchement dépourvues de chloro- phylle comme le Wonotropa et les Champignons, ce qui tendrait à faire admettre l'existence d’une légère action chlorophylienne (1); mais, d'autre part, le quotient respira- 2 toire — est le même à la lumière et à l'obscurité, ce qui (8) ne devrait pas avoir lieu si la fonclion chlorophylienne se manifestait d'une façon sensible et venait, par conséquent, changer le résultat de la respiration. On peut donc voir dans le Neoftia une plante entièrement saprophyte, comme tes Champignons. Il est enfin une autre Orchidée, le Limodorum abortivum qui, au point de vue de l'assimilation du carbone, occupe une place spéciale entre les Orchidées vertes et celles qui sont complètement décolorées. Le Limodorum est une plante des clairières des bois mon- tueux, des forêts, des pelouses élevées inculles et dont le port ressemble à celui d'un Orobanche ou du MVeottia. La lige, robuste, qui atteint de 0",40 à 0",80 de hauteur, esl colorée en violet plus ou moins foncé; cette coloration s'élend aux fleurs et aussi aux feuilles, lesquelles sont réduites à l’état de grandes bractées engaînantes. Si l'on examine la partie souterraine, on ne trouve nulle trace d’adhérence avec les racines des arbres: la plante est donc saprophyte comme le Veottia. L.-C. Richard, qui la nommée le premier, la considérait comme parasile, ainsi qu'en témoigne le terme de Limodorum (xy&dns, affamé); de Can- dolle partageait celte opinion. Or, M. J. Chatin (2), en 1874, mit le premier en évidence la présence de la chlorophylle dans le Limodorum. Sous (4) O0. Drude, par ses expériences, avait été amené à dire que le Neottia décompose en effet un peu d'acide carbonique (Die Biologie von Monotropa Hypopitys und Neotlia Nidus-Avis. Gottingue, 1872). (2). J. Chatin, Sur la présence de la chlorophylle duns le Limodorum abor- tivum (Rev. des Sc. nat. Montpellier, 1874). 14 2 ED. GRIFFON. l’épiderme coloré en violet de la tige, on voit, en effet, un ‘parenchyme cortical dont les cellules renferment des chlo- roleuciles ; on retrouve ceux-ci dans le parenchyme des faisceaux libéro-ligneux et dans la moelle. Les feuilles en contiennent et la paroi ovarienne en est parliculièrement bien pourvue. Üne section transversale de tous ces organes apparaît d’ailleurs avec la teinte verle caractéristique; celte teinte n’est masquée extérieurement que par l’anthocyanine des cellules épidermiques. Parlant de cette observation, M. Chatin crut pouvoir con- clure que « le Limodorum n’a nul besoin d’une existence parasile, qu'il n’a même pas un besoin indispensable des matériaux de l’humus au moins quant au carbone. » Or, une (elle conclusion, basée uniquement sur un fait anatomique est-elle légitime a priori? Non, évidemment ; et les résultats signalés plus haut, oblenus par M. Bonnier, sur les Rhinanthacées, qui sont parasiles quoique verles, Île prouvent. Tout d'abord, à cause de l’absorplion de la lumière par les lissus et surtout par les tissus verts (1), la chlorophylle du cylindre central ne peut servir à l’assimila- lion. Reste celle de l’écorce; mais les chloroleuciles, épars dans chaque cellule, ne sont en somme, pas nombreux. Si nous ajoutons la possibilité de se trouver en présence d'un pigment vert spécial, on voit qu’il y a lieu de se demander quels sont le sens et la valeur de la résultante des Den fonclions inverses : l’assimilalion et la respiration. J'ai alors exposé à la lumière, dans de l'air contenant 8 p. 100 environ d'acide carbonique, des pousses enlières, des portions de Liges, de feuilles, des ovaires de Limodorum, el toujours J ai obtenu un dégagement de gaz carbonique. Toutefois, la lumière relarde d’une façon notable la respira- 9 21 tion (dans la proportion de 4 à 3) et le rapport © qui est (4) Atsusuke Nagamalz, Beilräge zur Kenntniss der Chlorophyllfunktion (Arbeit. d. Bot. Instit. in Würtzburg, vol. IL, p. 389), et recherches inédites de l’auteur. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 410 d'environ 0,95 au soleil, pour un fragment de tige, par exemple, est de 0,83 à l'obscurité; ces deux résultats montrent, comme il fallait s’y altendre, que l’assimilation existe; mais la respiralion l'emporte sur elle, en sorte que le Limodorum, malgré sa chlorophylle, est saprophyte el doit prendre la plus grande parlie de son carbone dans l’humus. Or, l'Epipactis latifolia, dont j'ai déjà parlé, a une tige qui ressemble beaucoup à celle du Limodorum; son épiderme est coloré en violet et on trouve de la chlorophylle dans le cylindre central. L’écorce, il est vrai, esl proporlionnelle- ment moins épaisse que dans le Limodorum et la seclion transversale de loute la lige ne paraît pas plus foncée; elle l'est même un peu moins au centre, la moelle étant très pauvre en pigment vert. Mais celte écorce comprend trois où quatre assises de cellules dont les chloroleucites sont très nombreux et situés le long des parois radiales comme dans les cellules en palissade des feuilles (PI. IT; fig. 6 et 7). Le parenchyme corlical semble donc très bien disposé pour remplir, comme cela a lieu dans un grand nombre de plantes, le rôle de tissu assimilateur, et c’est précisément ce que l'expérience vérifie. Des portions de lige d'Æ£prpactis dégagent de l'oxygène à la lumière, alors que pour le Limodorum, c'est de l'acide carbonique qui est émis. Il n’est donc pas douteux que la quantité et la répartition des chloroleucites dans l'écorce, n'ait joué un grand rôle, le seul rôle peut-être, pour changer le sens de la résultante de la fonction chlorophyllienne et de la respiralion. _ Conclusions. — Au point de vue de l'assimilation du car- bone, les Orchidées terrestres paraissent présenter tous les intermédiaires, depuis les espèces vertes, comme lÆ£pipactis qui tirent la plus grande partie sinon la tolalilé de leur carbone de l'air, et les espèces décolorées, comme le Neottia, qui sont entièrement saprophytes et qui, grâce à leurs mycorhizes, puisent le carbone dans les malériaux de l’humus. 76 ED. GRIFFON. Le ZLimodorum abortivum, malgré la chlorophylle qu'il renferme, doit êlre placé dans la série des Orchidées ter- restres, au voisinage des saprophytes complets. Par suite, en effet, de la mauvaise répartilion des chloroleucites, du nombre relalivement faible de ces derniers dans le paren- chyme corlical et peut-être aussi de la nature spéciale du pigment vert, celle plante décompose peu d'acide carbo- nique, el sa respiration est toujours notablement supérieure à l’assimilation. DEUXIÈME PARTIE COLORATIONS EN RAPPORT AVEC LE MILIEU CHAPITRE PREMIER ACTION DE LA LUMIÈRE. a. Formation de la chlorophylle à l'obscurité. — On sait que, d’une manière générale, les radialions lumineuses sont indispensables à la formation de la chlorophylle. Si on cul- tive une plante à l’obscurité, elle demeure incolore ou jau- nâtre et ses tissus ont une structure particulière; on dit qu'elle est éfolée. Il y a cependant des exceptions à cette règle en ce qui concerne le verdissement. Un certain nombre d’observateurs (1) ont remarqué depuis longtemps que les cotylédons des embryons de Pins et d’au- tres Conifères sont verts tout en se développant à l’abri de la lumière. M. Flahaull (2) a repris cette question en 1879 et 1880. II a rappelé que l'embryon de certaines plantes phanérogames, qui pourlant est protégé par des léguments épais, renferme de la chlorophylle; que des frondes de Fougères développées à l'obscurité complète n'en prennent pas moins leur colora- tion verte normale. Mais J. Bœhm et après lui M. Flahault ont montré que la malière verle des embryons enfermés dans les graines (1) Sachs est le premier qui ait fait cette remarque (1859) (Vorles., 2° édit. 1887, p. 549). (2 ) Flahault, Nouvelles obser valions sur les modifications des végétaux sui- vant les conditions physiques de milieu (Ann. Sc. nat. Bot., 6° série, &. IX, p. 169). 78 ED. GRIFFON. (Acer, Astragalus, Viola tricolor, Geranium lucidum, Citrus, Viscum album, Pistacia vera, Evonymus japonicus, Rapha- nus Raphanistrum, Cephalaria, ele.) ne se forme pas si les graines se développent à l’abri de la lumière. En suivant le développement de l'embryon, on voit (Viscum album, Tropæolum majus, Viola tricolor, etc.) que les téguments de la graine et du fruit sont au débul très transparents et que la chlorophylle se forme ainsi dans l'embryon, grâce à la lumière. Plus tard, les téguments deviennent opaques, et la matière verte se conserve parfailement. Mais chez les Fougères, c'est bien dans l'obscurité com- plèle que les rhizomes donnent naissance à des frondes vertes. Chez les Conifères, les Le deviennent verts dans les mêmes conditions. Il est juste d'ajouter que quand les réserves de l’albumen sont épuisées, la chlorophylle com- mence à s'allérer et elle disparaît au bout d’un certain temps. C'est ce qui fait que Schmidt (1) avait pu contester le verdissement à l'obscurité, au moins en partie. M. Flahault a montré en outre que des bulbes d’Alum Cepa placés pendant l'hiver à l’obseurité et dans un endroit sec possèdent au printemps des feuilles de 3 à 5 centi- mètres de long et remplies de chloroleucites. Des bulbes de Crocus vernus plantés à l'abri de la lumière lui ont donné des pousses dont les extrémités élaient vertes. M. d’Arbaumont (2), au centre des fruits du Potron jaune gros, dans de grandes cellules à parois amincies qui en- tourent les filaments vasculaires, a trouvé de nombreux chloroleucites en voie de division. On remarquera que la formalion de la chlorophylle à l'obscurité est liée à l'utilisation des substances de réserve contenues dans la graine (Pinus), les rhizomes (Fougères), (1) Schmidt, Ueber einige Wirkungen des Lichts auf Pflanzen. Breslaus 1870. (2) D'Arbaumont, Note sur la production de la chlorophylle dans l'obscurité (Bull, Soc. Bot. de France, 12 mars 1880). PCA | L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 79: les bulbes (A //zum, Crocus), les fruits (Potiron). Quand ces réserves sont épuisées, si la plante continue à se développer à l'obscurité, la chlorophylle est attaquée et finit par dis- paraître. | | D’autres cas de verdissement à l'obscurité ont été signa- lés chez des plantes quelconques quand il y à une certaine quantité d'hydrogène dans l'air ambiant. Senebier (1) fit croître des plantes dans des récipients clos et obscurs, mais contenant une forle proportion d'hy- drogène ; les plantes obtenues élaient moins éliolées, avaient des tiges moins longues et une couleur verte. De Humboidt(2) a descendu dans les galeries souterraines des mines de Freyberg des louffes de Poa annua, P. com- pressa, Plantago lanceolata, Trifolium arvense, Cheiranthus Cheiri el un lichen, ÆRhizomorpha verhicillata. Les touftes nouvelles montrèrent une coloration verdâlre; or l'air de ces galeries renfermait une quantité considérable d'hydro- gène. Mais de Candolle (3), étudiant l'influence du gaz hydro- gène sur l’éliolement, obtint des résullats négatifs. Kraus (4), par l'emploi de l'alcool méthylique, provoqua le verdissement à l'obscurité; mais les jeunes plants, en germant avec les vapeurs d'alcool, ont fini par périr. Enfin,récemment, M. Bouilhac (5) a constalé que le Nostoc punctiforme se développe lui aussi à l'obscurité totale, à la condition qu'il trouve à sa disposilion un hydrale de car- bone, le glucose par exemple; il prend alors une couleur vert pâle. Peut-être même y a-t-il des plantes vertes entièrement adaptées à la vie sans lumière. Ainsi, on sail qu'au-dessous de 200 mètres dans la mer, les rayons lumineux sont com- 1) Senebier, Encycl. méth. et Pysiolog. végét., AV, p. 275). 2) De Humboldt, Gren's Journ. d. Phys., 1792, p. 196. 3) De Candolle, Physiol. véaét., t. IT, p. 892. (4) Kraus, Ueber küutsliche Chlorophyllerzeugung in lebenden Pflanzen ber Lichtabsehlens (Landw. Vers. Stat., 1877, XX, p. #15). (5) Bouilhac, C. R. Acad., 31 mai 1898. 80 ED. GRIFFON. plètement absorbés, et c'est ce qui fait qu'on ne rencontre plus d’'Algues. Cependant, lors de l'expédition du Plankton, des dragages opérés entre 1,000 et2,000 mètres dans l’Atlan- tique ramenèrent à la surface une Algue verte, Halosphæra ouidis. Celle Algue, ou une espèce voisine, fut retrouvée en 1890 pendant l’expédilion de la Po/a. b. L'assimiliation chlorophyllienne chez les plantes qui ont verdi & l'obscurité. — Et maintenant plusieurs questions se posent. La matière verte qui s’est ainsi formée sans lumière, est-ce réellement de la chlorophylle? Celle chlorophylle a-t-elle le pouvoir assimilateur; et, si elle l’a, dans quelle mesure, comparativement à celle qui se forme normalement à la lumière ? Le simple examen anatomique montre quon a bien affaire à des chloroleucites normaux et qui ne paraissent différer en rien, si ce n’est parfois par leurs dimensions plus pelites et leur teinte moins foncée, de ceux qui se dévelop- pent sous l’influence des radiations lumineuses. M. Flahaull à étudié au spectroscope des dissolutions alcooliques de matière verte provenant des embryons de graines dont il a élé question plus haut. Toutes ces disso- lutions présentaient les bandes d'absorption caractéristiques de la chlorophylle, et notamment la bande T'très foncée siluée entre Bet €. Mais ce résultat n’est pas surprenant, aliendu que la malière verte, dans ce cas, s’est en réalité développée à la lumière et qu’elle ne fait que se conserver à l'obscurité. M. Flahault à essayé en outre de faire assimiler des em- bryons de Viola, de Viscum, comparativement à des feuilles d’Ælodea; mais il ne put, à cause de la petile quantité de gaz produile par les embryons, montrer que ce gaz était bien de l'oxygène. Quant à la chlorophylle des plantes bulbeuses (Oignon, Safran) et des cotylédons de Conifères, el qui a été réelle- ment formée à l'obscurité, elle possède aussi le pouvoir assimilateur. Mais les expériences de M. Flahault manquent en L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 8! de précision en ce qui concerne Îles comparaisons faites avec les mêmes plantes ayant verdi à la lumière. Il ne suffit pas en effel de constater que la matière verte formée à l'obscurité sert à l'assimilation; il faut encore savoir si sous ce rapport elle différe peu ou beaucoup de celle qui apparaît normalement à la lumière. Il peut fort bien se faire qu'on soit en présence de chlorophylles diffé- rentes el dont la spécificité retentisse plus ou moins sur l'énergie assimilatrice. Je me suis alors adressé au Pin Pignon (Pinus Pinea) pour avoir des échantillons aussi comparables que possible. J'ai remarqué que toujours les cotylédons provenant de la chambre obscure présentaient, même avant Ja résorption complète de l’albumen, une teinte verte moins foncée que chez ceux qui s’élaitent développés à la lumière (PE IFet EV, Ho el»). J'ai fait de très nombreuses expériences d’assimilation afin d'éliminer loutes les causes d'erreur qui auraient pu provenir de la forme, des dimensions, de l’enchevêlrement des colylédons. Les rapports d’assimilalion se sont trouvés compris entre 0,45 et 0,75. C’est qu’en effet les différences de Lente sont plus ou moins grandes. Dans deux expériences ces rapports se sont abaissés à 0,27 et 0,30. Mais sur vingl expériences, douze m'ont fourni des résullats voisins de 0,75. Parmi toutes ces expériences, je ne cite que la suivante : COS NES AR Er 8,61 APPARUE, (O ERT RSR AS PEUR RATE RE RAP 18,98 AT A Da 12,41 Echanges gazeux dansles échantillons développés : À la lumière. A l'obscurité. NON ESA 8,72 SU) M 112 OO = nee 8,61 1 CO Fer 1,01 Volume de l’air — 12 cent. cubes. Volume de l’air — 11 cent. cubes. O dégagé... 0,42 X 8,72 — 1,04. Ordégagé, «10,14 7,01=—=00;78. Rapport d’assimilation — = 0,75. ANN. SC. NAT, BOT. x 0 82 ED. GRIFFON. Si l’on examine les sections transversales des cotylédons employés, on voit que chez ceux qui proviennent de l’obscu- rilé le tissu assimilaleur est moins imporlant, les chloro- leucites sont moins nombreux et moins verls que ceux qui se sont développés à la lumière et les différences observées sont, autant qu’on en peut juger, de même valeur que celles qui ont été signalées au sujet des Lailues el des Romaines, Fig. 10 et 11. — A, cotylédon de Pin Pignon (obscurité), — B, cotylédon de Pin Pignon (lumière). — ep, épiderme ; , hypoderme ; p.co, parenchyme cortical; ed, endoderme. par exemple, ces dernières plantes ayant fourni, elles aussi, des rapports d’assimilation voisins de 0,75 (fig. 10 et 11). Quand ces rapports se sont abaissés à 0,30, les chloro- leuciles formés à l'obscurité étaient jaunâtres, légèrement teintés de vert, ce qui explique facilement la faiblesse de l'énergie assimilalrice. C'est ce chiffre que j'ai obtenu presque toujours quand, dans une autre série d'expériences, je me suis servi de plantules ayant depuis quelques jours épuisé leurs réserves. Je me suis rendu compile en outre que l'intensité respira- toire est la même dans les échantillons venus à l’obscurité ou à lalumière, en sorte queles différences d'énergie assimilatrice L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 83 constatées ne peuvent être atlribuées qu'aux chloroleuciles. Enfin, j'ai exéculé un cerlain nombre d'expériences d'assi- milalion en plein soleil et à une lumière très diffuse ; et, pour les mêmes échantillons, j'ai obtenu des rapports iden- liques d'énergies assimilalrices, ce qui démontre que les chlorophylles formées à l'obscurité ne sont pas, au moins en ce qui concerne la décomposition de l'acide carbonique, adaptées à une intensité lumineuse faible. On se rappelle qu'une pareille observalion a déjà été faite au sujet de [a malière verte des plantes rouges. Conclusions. — Les organes qui oni verdi à l'obscurité complèle sont capables d’assimiler quand on les expose à la lumière. Leur énergie assimilatrice, comparée à celle des mêmes organes qui ont verdi à la lumière, paraît ne dépendre que du développement des tissus chlorophylliens, ainsi que du nombre, des dimensions et de la teinte des chloroleucites dans chaque cellule. On peut se demander maintenant quelle est bien la signifi- cation de ces chlorophylles qui se forment ainsi et ne peu- vent remplir leur fonction essentielle, puisque la lumière fait défaut. Faut-il considérer celle qui se forme chez le Nostoc, par exemple, comme un de ces organes témoins si fréquents dans le domaine de la Biologie, qui ne jouent aucun rôle, mais qui persistent quand certaines conditions sont réalisées ; ou bien, au contraire, cetle matière verte ne contribuerait-elle pas à transformer le sucre absorbé (1) el sans lequel elle ne se forme pas en d’autres produits orga- niques ? Est-ce également un organe témoin dans lAalo- sphæra viridis, race d’Algues adaptée à la vie dans l’obscu- rité? Dans l’état actuel de la science, ces questions, pourtant si importantes, ne comportent pas de réponse positive. (4) Bouilhac, lc, ci. 84 ED. GRIFFON. c. L'assimilation chorophyllienne chez les plantes ayant crû dans des lumières inégalement réfrangibles. — Des recher- ches de Gardner, Draper, Daubeny et Guillemin par la mé- thode du spectre, de celles de Gardner, Sachs, Wiesner par la méthode des écrans absorbants, il résulte que les radia- lions qui sont le plus lumineuses pour notre œil, celles dont la longueur d'onde est moyenne et qui correspondent par conséquent au jaune, favorisent le plus le verdissement. L'ac- lion verdissante décroit de chaque côté tout en persistant Jusqu'à une certaine distance dans l’ultra-violet et l'infra- rouge. D'autre part, la nature des radiations, ainsi que cela ressort d'un lravail encore inédit de M. Teodoresco (1) a une influence marquée sur la structure; on comprend alors qu'en faisant développer des plantes dans des lumières inégalement réfrangibles, on puisse obtenir des teintes très variées tirant soit sur le vert, soit sur le jaune. Je me suis proposé de rechercher quelles relations il y a entre ces colorations différentes et l'énergie assimilatrice. Mes expériences ont porté sur des feuilles de Maïs et d’Arachide mises obligeamment à ma disposition par M. Teo- doresco. Les pieds de Maïs et d’Arachide s'étaient développés complètement dans des cases placées côte à côte, séparées par des cloisons opaques, et dont les faces latérales et supérieure étaient formées de verres colorés. Ces verres, au nombre de trois : bleus, rouges et verts, ont été étudiés au spectroscope. Les premiers laissaient passer toute la partie la plus réfrangible du spectre Jusqu'au milieu du jaune; les seconds n'étaient perméabies qu'aux radiations rouges ; enfin les troisièmes laissaient passer le vert avec très peu de jaune. C’est dans la lumière bleue que les feuilles ont acquis la teinte verte la plus foncée ; dans la lumière rouge, elles sont un peu moins vertes; enfin, dans la lumière verte, les (1) Le travail en question paraîtra prochainement. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 85 feuilles sont presque jaunes (PI. IT et IV, fig. 10,, 10, et 10,). Arachide (Arachis hypogæa). — Les trois feuilles sont mises à assimiler chacune dans une éprouvelte contenant de l'air dont la composition est la suivante : CORSA PR ARE ARR 9,34 ON ant dresse ds 18,30 INT AN EE DO RIRE ON Re 72,36 Au bout d’une demi-heure, en plein soleil, la feuille pro- venant de la lumière bleue avait dégagé 0,054 d'oxygène ; celle qui provenait de la lumière rouge 0°,041, et enfin celle qui provenail de la lumière verte 0°°,027. Les différences de teinte n'ont pas une influence aussi sensible qu’on eût été porté à le croire; en effet, avec la feuille jaunâtre et la feuille très verte, le rapport d'assimi- lation s’est élevé à 0202 — 0,50: | 0,054 Dans la lumière bleue, le tissu palissadique est formé de deux assises de cellules très allongées ; la différenciation de ce tissu est très imparfaile dans les deux autres feuilles, sur- tout dans celle provenant de la lumière verte (1). Les chlo- roleucites sont très foncés et à contours lrès nets dans les deux feuilles les plus vertes ; ils sont très peu colorés au contraire dans la feuille jaunâtre, et même on voit de temps en temps la chlorophylle à l’élat diffus dans le protoplasme. Maïs (Zea Mays). — Les différences de teinte ont été plus marquées qu'avec l’Arachide, ce qui influe d'autant sur Île pouvoir assimilateur. Ainsi, jai trouvé comme quantités d'oxygène dégagé les chiffres suivants : 2°,4%; 1°°,60 et 0,82; les rapports d’assimilalion, en prenant pour unité le volume de gaz émis par la feuille la plus verte, ont été de 0,66 et 0,33 seulement, alors qu'avec l’Arachide ils s'élevaient à 0,75 et 0,50. (1) Ces renseignements anatomiques m'ont élé fournis par M. Teodo- resco. 86 ED. GRIFFON. Dans la feuille provenant de la lu mière bleue, les chloro- leucites sont nombreux, bien verts, quoique très granuleux ; leurs dimensions varient de 5 à 8 w. Dans les deux autres feuilles, ils sont plus petits (3 à 4 &); très verts dans la feuille provenant de la lumière rouge, ils sont moins nombreux et jaunâtres dans celle qui provient de la lumière verte. De telles différences anatomiques, comparées à celles qui ont été signalées chez l'Arachide, rendent très bien compte des variations correspondantes dans les rapports d’assimilation. Conclusions. — L'intensité du verdissement et la struc- ture variant avec la réfrangibilité, les plantes qui se déve- loppent dans une lumière bleue contenant toutes les radiations de la moitié droite du spectre sont plus vertes que celles qui ne reçoivent que des rayons rouges, ces der- nières élant elles-mêmes beaucoup plus foncées que celles qui se développent dans la lumière verte. Si l'on fait assimiler ces plantes inégalement colorées, on voit que l'énergie avec laquelle elles décomposent l'acide carbonique concorde parfaitement d’une part avec l'intensité de la teinte verte, el d'autre part avec la structure el ia quan- tité de chlorophylle. Nota. — Je n’ai pas la prélention, par les questions qui viennent d'être étudiées, d'avoir dit tout ce qu'il y a d’es- senliel sur l'influence de la lumière. Il faudrail encore envi- sager le rôle de l'intensité et celui de Ja continuité et de la discontinuité de Ia radiation. Mais ce sujet, sur lequel nous n'avons guère que les résullals expérimentaux obtenus par MM. G. Bonnier et Géneau de Lamarlière (1) (voir Zntro- duclion, p. 7), est extrêmement vasle, el bien que Je l’aie (1) De ces résultats, il découle en particulier que le développement du tissu palissadique exerce une influence considérable sur l'énergie assimilatrice; c'est d’ailleurs ce qui ressort très nettement de la plupart des conclusions contenues dans le présent travail. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 87 abordé en plusieurs points, j'ai dû le laisser de côté afin de ne pas donner à ce travail une trop grande élendue. CHAPITRE TH ACTION DE LA TEMPÉRATURE. La température exerce aussi une action puissante sur la structure et la coloration des plantes, et par suitesur l'énergie assimilatrice. a. L'énergie assimilalrice des plantes développées à des températures différentes. — Dans des expériences encore inédites concernant l'influence de ia chaleur sur la structure, M. Gaston Bonnier a cultivé un certain nombre d'espèces variées dans deux armoires situées côte à côte et à la même exposition nord. L'une de ces armoires avait ses parois entourées de glace, en sorle que sa température était en moyenne de 9 degrés inférieure à celle de l’autré. Les plantes de chaque espèce mises en expérience provenaient d’un même pied qu'on avait divisé en deux, ou d’une même branche si c'était une bouture ; on éliminait ainsi les in- fluences individuelles, el dans ces conditions les différences observées dans la structure et aussi dans la coloration des feuilles ne pouvaient être attribuées qu'à la température. Après trois mois de séjour dans les armoires, quand les plantes furent bien développées, je pris des feuilles adultes de chaque espèce aussi comparables que possible, et je les mis à assimiler dans les mêmes condilions d'éclaire- ment et de température. Sur 8 plantes, 6 accusèrent des différences assez notables dans l'énergie assimilatrice, ainsi qu’en témoigne le tableau suivant : | ANT NILIA IE 0 88 ED. GRIFFON. | QUANTITÉS D'OXYGÈNE DÉGAGÉ | PAR UNITÉ DE SURFACE RAPPORTS PLANTES k Sn oe U D ASSIMILATION Armoire chaude. Armoire froide. CAC: CAC? LE Stachys silvatica- 0,097 0.060 0.62 Agrimonia Eupatoria.... 0,040 0,024 0,60 Carpinus Betulus. ...... 0,018 0,014 0,77 Ouercus Robure ere 0,035 0,028 0,80 Tropæolum majus...... 0,017 0,013 0,76 Geranium Robertianum . 0,025 0,016 0.64 Peldigonumi een 0,014 0,015 1 ErADGTA DESCARTES 0,037 0,036 4 Si l’on parcourt ce tableau, on voit que le Pelargoniuum el le Fraisier ont présenté la même énergie assimilatrice dans les deux armoires. D'ailleurs, la coloration verte était la même pour les deux températures et la structure aussi. Les chloroleucites étaient en même nombre et avaient les mêmes dimensions et la même leinte. Considérons maintenant les autres plantes avec lesquelles se sont manilestées des différences notables. Le Stachys qui provient de l'armoire chaude a des feuilles très vertes ; l'épaisseur du mésophylle est de 86 y; les chlo- roleucites sont nombreux, et leur diamètre moyen est de 5 ou 6 v. Celui qui provient de l'armoire froide a des feuilles moins vertes; cela lient à ce que, d’une part, le mésophylle. est moins épais (70 v), les cellules palissadiques sont moins allongées et moins serrées, el que, d'autre part, les grains de chlorophylle sont, surtout dans ces dernières, moins nom- breux, moins verls el à granulalions incolores plus appa- rentes (ie PAM Pre PINS TAN EAU EE CSS La struciure anatomique, moins favorable à lassimilation dans la feuille provenant de l'armoire froide, et la plus faible leneur en chlorophylle, suffisent donc parfaitement à expli- quer le rapport d’assimilation 0,62. L'examen des feuilles de Geranium, de Chêne, de Charme, de Capucine, d’Aigremoine révèle des faits absolument ana- L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 89 logues à ceux qui viennent d’être rapportés. Mais avec le Charme, le Chêne et la Capucine, les différences structurales sont moins grandes qu'avec le Stachys, V'Aigremoine el le Fig. 12 et 13. — Feuille de Stachys silvatica. — À, armoire chaude; B, armoire froide. Mêmes lettres que précédemment. Greranium, ce qui explique que les rapports d’assimilation solent plus élevés. Conclusions. — La température, au moins dans de cer- taines limites, favorise à la fois et la formation de la chloro- phylle et le développement et la différenciation du paren- chyme des feuilles (recherches de M. Bonnier). Ces modifications, qui accentuent la teinte verte de ces der- nières, contribuent en même temps à accroître leur énergie assimilatrice. b. L'énergie assimilatrice chez les plantes qui ont élé sou- mises dans le cours de leur développement à l'alternance de températures extrêmes. — Les expériences qui précèdent ne portent que sur des différences de température relativement faibles. M. G. Bonnier (1), cherchant à provoquer artificiel- lement les caractères alpins chez les végétaux, a eu l’occasion précisément de culliver des plantes recevant journellement dans le cours de leur développement des quantités de cha- leur très différentes. Les expériences ont porté sur des plantes vivaces el des plantes annuelles. Les premières provenaient pour chaque (1) G. Bonnier, Expériences sur la production des caractères alpins des plantes _par l'alternance des températures extrémes{C. R. Acad.,t. CXXVIT, p.307 ; 1898). 90 ED. GRIFFON. espèce du même pied, afin d'éliminer, ainsi qu'il a déjà élé dit, les caractères individuels (Trifolium repens, Teucrium Scorodonia, Senecio Jacobæa). Les secondes étaient issues de graines récollées sur le même plant {Vicia sativa, Avena sativa, Hordeum vulgare). Un premier lot fut placé dans une étuve entourée sur ses trois faces de glace fondante renouvelée deux fois par jour, les plantes étant exposées au nord ; les températures extrêmes étaient 4° et 9°, et la moyenne 7 degrés. Un deuxième lot fut placé dehors, les températures extrêmes étant 15° et 30°, la moyenne 20 degrés. Enfin, un troisième lot passait régulièrement la nuit dans l'étuve à glace et la journée dehors, comme le lot n° 2. Au bout de deux mois, les caractères alpins étaient ap- parus dans le lot n° 3 soumis aux conditions allernantes de tempéralure, c’est-à-dire que les entre-nœuds élaient pro- porlionnellement plus courts, les liges robustes, les feuilles plus petites, plus épaisses et plus fermes, la floraison plus hâlive, les fleurs plus colorées. M. Bone a montré en outre que l’état hygromélrique n'est pour rien dans ces modifications. En faisant [a comparaison des feuilles dans les trois lots, il apparaissait nettement que la coloration verte la moins foncée se rencontrait toujours dans le lot n° 3 (plantes aux caracières alpins). Les feuilles provenant de l’étuve à glace (lot n° 1) étaient glabres ei d’un vert foncé, mais gai, {tandis que celles du dehors (lot n° 2) étaient d’un vert foncé, mais terne. Les plantes du lot n°3, en ce qui concerne la coloration du feuillage, n'avaient donc pas acquis complèlement tous les caractères alpins, quelque condition sans doute n'ayant pas été convenablement remplie. Or, M. Bonnier (1) a montré que dans les montagnes les feuilles sont plus épaisses et d’un vert plus foncé que dans la plaine, que le tissu assimilateur (1) G. Bonnier, loc. cit. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 91 yest mieux disposé pour la fonction chlorophyllienne, laquelle est par suite ioujours plus intense par unité de surface. J'ai précisément exécuté un lravail analogue sur les feuilles des plantes ayant servi à l'expérience qui à été rapportée plus haut (1). Toutefois, je n'ai cru pouvoir opérer qu'avec les feuilles des plantes vivaces (T'eucrium Scorodonia, Senecio Jacobæa, Trifolium repens), car. avec les plantes annuelles, surtoul avec les Graminées qui ont été altaquées par Ja rouille, 11 m'était pour ainsi dire impossible d’avoir des échantillons comparables. Germandrée {T'eucrium Scorodoniu).— Les feuilles ont une coloration d'un vert frais et foncé dans le lot n° 1, comme je l'ai dit plus haut, d’un vert foncé et terne dans le lot n° 2 el dhunvert pile dans le-lot n°3 (PL IILet IV, fig. 9,9, 9.) Mais c’est dans ce dernier lot que le mésophylle est le plus épais (caractère alpin) ; il mesure 67 y, alors qu'il varie entre 40 et 45 w dans les deux aulres. En outre, dans ce lot n° 3, la feuille a deux assises palissadiques très nettes, dont la première mesure 30 & environ, tandis que dans les lots n° 2 et n° 1 il n'y a qu'une assise semblable de 18 à 20 w. Ajoutons que dans le lot n°1 les cellules de cette assise sont très larges par rapport à leur longueur, Île mésophylle tout entier élant en somme peu différencié, comme dans les feuilles très Jeunes développées au dehors. Les chloroleucites ont à peu près parlout les mêmes dimen- sions, mais ils sont peu colorés et très granuleux dans le lot n° 3. [ls sont au contraire serrés dans le lot n° 2 (PI. Hi, nes, 9.10). J'ai fail assimiler ces feuilles dans de l'air ayant la composilion suivante : CORRE Ur. 8,80 OR le à o 18,72 AN le elec leo totales ele 9 72,48 (1) G. Bonnier, Caractères anatomiques et physiologiques des plantes rendues artificiellement alpines par l'alternance des températures extrêmes (G. R. Acad., t. CXXVIIL p. 1143; 1899). 92 ED. GRIFFON. Après une demi-heure d'exposition au soleil, la tempé- rature étant de 22°, la feuille du lot n° 1 avait dégagé 0,200 d'oxygène par centimètre carré; celle du lot n° 2 0,265, et celle du lot n° 3 0,271. Trois autres expériences m'ont fourni des chiffres qui sont dans les mêmes rapports que les précédents. Les feuilles aux caractères alpins, quoique moins vertes, assimilent donc un peu plus que celles qui se sont déve- loppées au dehors, etnotablement plus que celles qui provien- nent de l'étuve à glace, et dont la coloralion est pourlant très foncée. L'épaisseur du mésophylle et le développement plus parfait du tissu palissadique ont compensé, et au delà, la diminution de la chlorophvylle dans chaque cellule. Si ce dernier phénomène avait été évité, on aurait certainement retrouvé, avec les lots n° 2 et n° 3, les résultats obtenus par M. Bonnier sur l'assimilation comparée des plantes de la plaine et de la montagne. Séneçon (Senecio Jacohæa).— Les feuilles des lots n°2et n°3 ont dégagé 0,060 d'oxygène par centimètre carré, et celles du lot n°1, 0°°,042 seulement. Les différences de structure el de coloration élaient très neltes: c’est ainsi que le tissu palissadique était très développé dans le lot n°3 (135 contre 80 dans le n° 2); mais les chloroleucites élaient plus petits (3 w au lieu de 5 à 7) el beaucoup moins verts. Le mésophylle, dans le lot n° 1, était peu différencié ; les chloro- leucites y mesuraient 4 de diamètre ; ils étaient plus verts que dans le lot n° 3, mais moins cependant que dans le lot nor Toutes ces différences anatomiques s’accordentdoncencore parfaitement avec celles qui ont élé mises en évidence dans l'énergie assimilatrice. Trèfle (7Yifolium repens). — C'est toujours la feuille la plus pâle, celle du lot n° 3, qui assimile le plus; elle a dégagé en effet 0°°,067 d'oxygène par centimètre carré; mais, celle fois, L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 93 la feuille du lot n° 2 n’a émis que 0°°,050 d'oxygène, alors que celle du lot n°3 en a dégagé 0,061 ; c’est donc le contraire de ce qui s’est produit dans les deux plantes précédentes. Mais dans le lot n° 1 les feuilles se sont trouvées aussi épaisses que dans le lot n°3 (150 à 160 z), alors que celles du lol n° 2 ne mesuraient que 90 ». Les feuilles du lot n°5 n'ont eu l’avantage, au point de vue assimilateur, sur cel'e; du lot n° 1, que grâce au développement plus parfail, dans un mésophylle de même épaisseur, du issu palissadique. Conclusions. — L’alternance des températures extrêmes engendre, comme l’a montré M. Bonnier, les caractères alpins des plantes : en particulier, elle augmente l'épaisseur des feuilles, accentue le développement du tissu palissadique. Elle rend en même temps la fonction chlorophyllienne plus active. Mais l'intensité de la coloralion verle ne concorde pas iri, au moins dans les expériences qui viennent d’être rapportées, avec l’intensilé de l’assimilation ; c’est ainsi que les feuilles les plus pâles, celles qui ont été soumises aux condilions alternes de température, décomposent plus aclivement que les autres le gaz carbonique, la réduction de la chlorophylile dans chaque cellule ayant été plus que compensée par le développement et la différenciation du mésophylle. CHAPITRE I ACTION DES SELS. Un certain nombre de sels ont une influence très marquée sur la production de la chlorophylle, et par suite sur la coloration et l'énergie assimilatrice. Parmi ces sels, les uns gènent la formalion de la matière verle, les autres la favorisent. On sait également que l’action nuisible ne se manifeste qu'à parlir d’une dose variable avec la nature du sel employé et que l'action 9% ED. GRIFFON. favorable finit par changer de sens quand la dose incorporée au sol ou au liquide nutritif dépasse un certain maximum. Il n'entre pas dans le cadre de ce travail d’expérimenter sur tous les principaux types de sels successivement et d'examiner leur influence sur la coloration et lénergie assimilalrice des plantes. Je veux me borner à commenter brièvement, etgrâce à quelques expériences que J'aiexécutées à celte occasion, les faits les plus importants se rattachant à l’action des nitrates, des sels de /er et de cuivre ; j'expo- serai ensuite les recherches que j'ai entreprises sur l’assimilation chlorophyllienne chez les plantes croissant dans les terrains su/és des bords de la mer et chez celles qui deviennent chlorotiques, notamment dans les terres trop riches en calcaire. a. Action des nitrates. — Depuis les expériences de Bous- singault, Vilmorin, Kuhlmann, Lawes et Gilberl, on connaît le rôle considérable exercé par les nitrates sur le verdissement et le développement des plantes, et en parti- culier des Graminées. Il n'est pour ainsi dire pas d'agri- culteur aujourd'hui qui ignore l'influence bienfaisante du salpêtre du Chili, le nifrate de soude, sur les Céréales au sortir de l’hiver. Avec des doses de 300 à 500 kilogrammes à l’hectare, on provoque la formation d’un feuillage abondant et d’une teinte verte très foncée. Les nitrates, à la condition, bien entendu, que la base ne soit pas Loxique, sont donc de puissants agents du verdissement. La teinte verte {rès foncée qui se produit ainsi est bien due à l'abondance de la chlorophylle. Si l’on examine en effet des feuillages de Graminées qui ont crû dans des sols pauvres, on voit que les chloroleucites sont moins nombreux, moins gros el surtoul moins verts que ceux des feuilles des mêmes plantes ayant subi l’aclion des nitrates. D'autre part, l'énergie assimilalrice de ces feuilles très vertes est notablement supérieure à celle des feuilles restées pâles par suite du défaut d'azote nitrique. J'ai cultivé dans la L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 95 terre sableuse el peu fertile du Laboratoire de Biologie végétale (Sables de Fontainebleau) des carrés d’Avoine et de Blé dont les uns ont été arrosés à l’eau pure et les autres avec des solutions contenant du nitrate de soude; les doses de nitrate employées ont varié entre 300 et 1 000 kilo- grammes à l'hectare. Or, les rapports d’assimilation des feuilles ont été compris entre 0,65 et 0,45 ; les arrosages au nitrale ayant élé effectués quand les plantes avaient acquis déjà un cerlain développement, la structure des feuilles n’a pas été modifiée quant à l'importance el à la différenciation du parenchyme assimilateur; mais les chloroleucites se sont multipliés, ont grandi et surtout sont devenus très verts. Les variations de l'énergie assinulatrice s'accordent donc aussi bien que possible avec celles de la coloration. Ces résullats semblent, au premier abord et dans une certaine mesure, en contradiction avec ceux qui ont élé obtenus par Gilbert (1), à Rothamsted. Ce savant agronome, en effet, a montré que les quantités de carbone assimilé ne sont pas proportionnelles aux quantités de chlorophylle formée sous l'influence des engrais ; ainsi, du Blé el de l'Orge qui n’ont reçu que des sels ammoniacaux renferment plus de chlorophylle et d'azote, et cependant les poids de carbone assimilé à l’hectare ont été moindres qu’en employant comme engrais des sels ammoniacaux et des sels minéraux. Mais, n'oublions pas qu’en employant des engrais différents et dès le début du développement, on modifie la structure des plantes (2) et par conséquent l'énergie assimilatrice. Deux feuilles de même surface, et dans le même état physio- logique, contenant la même quantité de chlorophylle, mais ayant des structures différentes, peuvent fort bien décom- poser l'acide carbonique avec des inlensités très inégales. Enfin, il n’y à pas proportionnalité rigoureuse entre les énergies assimilatrices des feuilles isolées el les gains de (1) Gardener’s Chronicle, 1885. (2) Dassonville, Influence des sels sur la structure des végétaux (Thèse de Doctorat. Paris, 1898). 96 ED. GRIFFON. carbone faits par les plantes enlières, d’une part, entre la quantité de chlorophylle d’une feuille et l'intensité de la teinte verte, d'autre parL. b. Action des sels de fer. — L'influence des sels de fer sur la formation de la chlorophylle, malgré les controverses si nombreuses auxquelles elle à donné lieu, est aujourd’hui hors de doute. Eusèbe Gris (1), dès 1845, traitait la cLlorose des plantes en incorporant au sol des cristaux de sulfate de fer ou en pulvérisant sur les feuilles malades des solutions de ce sel. Arthur Gris (2) a montré ensuile que les feuilles qui ont reverdi grâce au fer conliennent des grains de chlorophylle plus nombreux, à contours très nets et de teinte foncée. Le fer favorise donc le‘verdissement. M. Ad. Chalin (3) à prélendu cependant que le rever- dissement chez les plantes chlorotiques est dû non à la formation de chlorophylle, mais de tannale de fer insoluble qui se fixe à la manière des teintures sur l'enveloppe cellu- losique des tissus. Mais cetle assertion est fausse. Decaisne (4) et après lui de nombreux expérimentateurs ont vérifié l’exactitude des expériences de Gris. Aussi, depuis un certain nombre d’années, l'emploi du sulfate de fer pour le traitement de la chlorose est entré dans le domaine de la pratique agricole et horticole. Les insuccès oblenus par quelques expérimentateurs tiennent sans doute à la nature du sol, aux doses employées qui, trop faibles, n'agissent pas, et, trop fortes, luent les plantes ; ils tiennent aussi à ce fait que la chlorose peut êlre produile par des causes très différentes contre lesquelles le fer ne doit pas toujours lutter seul. (1) Eusèbe Gris, C. R. Acad., 1845, p. 1386. (2) Arthur Gris, Recherches microscopiques sur la chlorcphylle (Thèse de Doctorat. Paris, 1857, 29). (3) Ad. Chatin, Bull. Soc. but. de France, 2° série, t. VII, 1886, p. 343. (#) Decaisne, Revue horticole, 1868, p. 221. PAT i PRET Ps L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 97 En réalité, nous connaissons encore mal l’étiologie de la chlorose, et lous les troubles qu’elle engendre chez les plantes, mais l'influence des sels de fer sur la formation de la chlorophylle est incontestable. D'ailleurs, on sait aujourd'hui, surtout depuis les expé- riences de Salm Horstmar (1) et de Sachs (2), que les végélaux qui se développent dans un milieu dépourvu de fer deviennent vile chlorotiques et finissent par périr. Si l’on ajoute à ce milieu l'élément ferrugineux qui fait défaut, les plantes reverdissent ef prospèrent. En cullivant des plantes dans une solution de Knop privé de fer et en ajoutant au bout d'un certain temps 1/1000 de sulfate de fer, j'ai pu constater sur la Luzerne et le Maïs les mêmes phénomènes. Zimmermann (3) a montré récemment que par l'apport du fer les chloroleuciles se multiplient, prennent une colo- ration plus intense et que leurs fonctions deviennent plus aclives. J'ai vérifié facilement celte dernière assertion en faisant assimiler comparativement des feuilles de Maïs qui, s'étant développées dans un milieu privé de fer, sont devenues jau- nâtres, et des feuilles de la même plante qui ont reverdi par l'addition au liquide nutrilif de 1/1000 de sulfate de fer. Les rapports d'assimilalion ont été compris entre 0,35 et 0,40 et ils correspondaient à des différences histologiques de même ordre que celles qui ont élé signalées par Zim- mermann. Celte action du fer, constatée 1l y a quarante ans, s’ac- cordait d’ailleurs très bien avec les recherches de Verdeil (4), puis celles de Boussingault (5), d’après lesquelles la chloro- phylle renfermerait du fer, comme l’hémoglobine des glo- bules rouges du sang, On comparail la chlorose des plantes 4) Salm Horstmar, Ann. de chim. et de phus., 3° série, t. XXXIE, p. 460 (2) Sachs, Arbeiten. d. bot. Instit. in Würtzburg, vol. IT, p. 433. 3) Zimmermann, Beitrage zur Morphologie urd Physiologie der Pflanzen- zelle, 1890-1893. (4) Verdeil, loc. cit. | (5) Boussingault, Agronomie, t. V, p.151. ANN. SC. NAT, BOT. ST ( — 98 ED. GRIFFON. à l’anémie humaine et il paraissait tout à fait logique que les composés ferrugineux fussent le remède commun à ces deux affections. Mais des recherches ultérieures, celles de M. A. Gautier notamment, en 1873, et qui ont élé vériliées par Molisch en 189%, ont montré que la molécule de chloro- phylle est dépourvue de fer. Alors ceux qui niaient l’action du fer sur la formation de la matière verte ont cru pouvoir triompher. | Il paraît établi, en effet, surtout depuis les travaux de Hayem (1), que le fer, dans le traitement de l’anémie, est bien absorbé par le tube digestif, el qu'il est réellement employé à la formation d’hémoglobine qui contient cet élé- ment; mais on voudra bien remarquer qu'il n’est nullement absurde de concevoir que le fer puisse favoriser la forma- üon et le développement des leucites destinés à verdir et dans la constitution desquels il entre, ainsi qu’exciter le proto- plasma à produire de la chlorophylle sans pour cela faire partie intégrante de la molécule de cette dernière subs- tance. En résumé, il est incontestable que le fer a une influence marquée sur la production de [a chlorophylle. Les feuilles qui reverdissent sous l'influence des ferru- gineux ont dans chaque cellule des chloroleucites plus nom- Preux, plus gros et plus colorés, et leur énergie assimilatrice se trouve accrue dans de notables proportions. c. Action des sels de cuivre. — De nombreux expérimen- taleurs et en particulier Naegeli, Haselhof, Lœw, Otto, Coupin, ont montré que les sels de cuivre sont loxiques pour les racines, même à une dose {rès faible. Cette question de la toxicité des sels de cuivre a beau- coup préoccupé dans ces derniers temps les agronomes el les physiologistes. Aujourd'hui, en effet, on pulvérise des solutions de sulfate de cuivre à 3 ou 4p. 100 sur les champs (1) Hayem, Lecons de thérapeutique, 2° série. Paris, 1890. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 99 de céréales afin de détruire cette mauvaise herbe si envahis- sante qu'on appelle la Sanve ou Moutardon (Sinapis arvensis); les feuilles délicates et poilues de la Crucifère sont vite brûlées alors que celles des Céréales résistent parfaitement. On sait aussi que les sels de cuivre sont très employés pour combaltre les maladies cryptogamiques ; les différentes préparations connues sous le nom de bouillies (bouillie bor- delaise ou à la chaux, bouillie bourguignonne ou à la soude, bouillie au savon, bouillie sucrée, etc.) font merveille contre les Péronosporées parasites des feuilles et en particulier contre le Plasmopara viticola qui cause le mildiou de la Vigne, le PAytophthora infestans qui atlaque la Pomme de terre, le Bremia Lactucæ ou champignon du Meunier des Laitues. Mais il résulle en oulre d’un cerlain nombre d’observa- tions que les sels de cuivre appliqués sur les feuilles auraient, en dehors de leur action anticryplogamique, une influence bienfaisante sur la végétation. M. Rumm (1) notamment, a montré que les feuilles trai- tées à la bouillie bordelaise prennent une teinte verte plus accentuée par suite de l'augmentation de la chlorophylle. Des horticulteurs affirment qu'ils obtiennent de belles plan- tes à feuillage foncé grâce à des pulvérisations de sels de cuivre. De nombreux viliculleurs ont remarqué que les vignes sont souvent plus vigoureuses et plus vertes les années de ma- ladie, quand les sulfatages ont été énergiques, qu’en temps ordinaire où, par suite de l'absence de mildiou, on ne pulvé- rise pas sur les feuilles de bouillie cuprique. M. Rumm, par des recherches spectroscopiques, n'est pas arrivé à mettre en évidence la présence du cuivre dans les feuilles trailées; mais on sait que la méthode électrolytique est plus délicate et que c’est grâce à elle qu'on à pu {rouver des traces de cuivre dans un grand nombre de plantes croissant - (4) Rumm, Ueber die Wirkung der Kupferpreparate bei Bekämp/ung der sogenannten Blattfallkrankheit der Weinrebe (Berich. d. deutsch. Bot. Gesell., 1893, Bd. XI, p. 79). 100 ED. GRIFFON. naturellement; celte méthode aurait peut-être permis de déce- ler la présence du cuivre dans les feuilles qui ont reçu des pul- vérisations de bouillies cupriques. Mais il est encore possible que les quantités de cuivre absorbé soient si faibles que l'analyse ne puisse les révéler; à cette dose infime, loin d'être un poison pour la plante, le cuivre exciterail celte dernière à produire de la chlorophylle (1). Frank et Krü- ger (2) qui ont aussi observé l’action bienfaisante des sels de cuivre sur la végétalion, sont portés à l’attribuer à des phé- nomènes oligodynamiques dans le sens de Naegeli. Mais cette influence du cuivre sur la formation de la matière verte est-elle bien réelle ? Jai sulfalé des carrés de Pommes de terre et de Salades et des treilles de Vigne ; j'ai observé que les plantes témoins étaient moins vertes que celles qui avaient élé traitées. Mais il ne faut pas oublier que les Pommes de terre, les Salades, la Vigne, sont très sou- vent atlaquées par les Péronosporées dont J'ai parlé plus haut : el alors, ilest difficile de dire si l’action bienfaisante des pulvérisations s’est ou non bornée à préserver les feuilles du parasilisme des Champignons. J'ai expérimenté ensuite sur la Vigne-vierge. qui, elle, élait absolument saine, mais les résultats n’ont pas élé suffisamment concluants. Mais, d’un autre côté, J'ai cultivé des Fèves et du Maïs dans du liquide de Knop auquel j'ai ajouté de faibles quan- lités de sulfate de cuivre. Quand la dose élait si minime, 1/20 000 par exemple, que les racines étaient peu attaquées, je n’observais aucune influence sur le verdissement. À la dose de 1/10 000 au contraire, les feuilles prenaient une teinte très foncée ; les racines, 1l esl vrai, se développaient à peine et les dimensions des plantes et en particulier des feuilles se lrouvaient notablement réduites (3). | (4) L. Mangin, Revue de viticulture, t. IE, p. 29. (2) Berich. d. deutsch. Bot. Gesell., 1894, 8. (3) Il n’est pas inutile de rappeler ici ce qui a été observé par de nom- breux expérimentateurs au Laboratoire de Biologie végétale de Fontaine- bleau, à savoir que les plantes cultivées dans l’eau distillée sont moins développées mais plus vertes que celles qui croissent dans le Knop normal. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 101 Ces feuilles m'ont fourni alors une plus grande quantité d'oxygène dégagé en rapportant à l'unité de surface, que celles des plantes qui s’élaient développées dans le Knop normal. Le rapport d’assimilation pour les Fèves élail voisin de 0,79 et pour le Maïs de 0,86. Les chloroleucites, surtout chez la Fève, étaient dans chaque cellule non pas plus nom- breux, mais plus gros, plus colorés et à granulalions très peu apparentes (PI. IF, fig. 11). Ainsi donc le Cuivre, à des doses très faibles, 1/10 000 par exemple, absorbé par les racines que néanmoins il attaque, augmente la quantité de chlorophylle dans les cellules des feuilles et fait croître par là même et l'intensité de la colo- ration verte et l'énergie assimilatrice. d. Acfon du chlorure de sodium. — L'énergie assimila- trice chez les plantes du littoral. — Les lerrains salés, que l’on rencontre soit sur le bord de la mer, soil encore en plein continent, où ils constituent le fond d'anciens lacs d’eau saumâtre, présentent, on le sait, une flore carac- téristique. On y rencontre aussi des espèces dites whiguistes, c'est-à-dire qui, dans le cas dont nous nous occupons, croissent aussi bien sur les sols riches en chlorure de sodium que sur ceux qui en sont dépourvus. La plupart de ces plantes ont un aspect lout parliculier et que M. Costantin (1), dans une étude sur la flore du lit- loral, caractérise ainsi : « Le développement des plantes dans les terrains salés délermine un épaississement des feuilles, des tiges el des fruits, un changement dans la nuance verte de la plante et, dans quelques cas, une pro- duction abondante de poils sur tout lindividu. » Ces con- clusions ont été vérifiées et développées depuis par M. Le- sage (2) qui a comparé analomiquement un grand nombre L'augmentation de l'intensité de la teinte verte tient à la présence d’un peu de cuivre dans l'eau distillée. (1) Costantin, La flore du littoral (Journ. de Bot., 1887, n°° 3 et 4). (2) Lesage, Influence du bord de la mer sur la structure des feuilles. (Thèse de Doctorat, Paris, 1890). 102 ED. GRIFFON. de plantes des bords de la Manche à des individus de même espèce venus au jardin botanique de Rennes ou croissant spontanément dans l'intérieur des terres. En outre, par des cultures expérimentales, en arrosant des plantes avec des dissolulions assez concentrées de chlorure de sodium dont les tissus s’enrichissent (1), M. Lesage a pu montrer que c'est bien ce sel qui produit les modifications de structure observées; modifications qui peuvent êlre, d'après ses recherches, résumées de la facon suivante : d’une part, augmentation de l'épaisseur du mésophyvlle, développement plus parfait du tissu palissadique et réduction des lacunes : d’aulre part, formation moins abondante de chlorophylle, ce qui détermine chez les feuilles une coloration vert pâle ou vert jaunâtre caractéristique. Au point de vue de la fonclion chlorophylilienne, ces deux sortes de modifications sont nettement antagonistes. Si une feuille, en effet, a une épaisseur plus grande, un mésophylle plus riche en tissu palissadique et des lacunes moins déve- loppées, 1l semble qu'elle doive assimiler davantage, et c’est ce que pensait Henri Lecoq (2) qui, à propos des feuilles épaisses et charnues des plantes du littoral, disait que le sel « donne à ces organes une plus grande vitalité et une plus grande puissance de décomposition pour l'acide car- bonique ». Mais, en revanche, si les chloroleuciles sont moins nombreux, moins gros et surtout moins verts dans chaque cellule, il y a lieu de se demander quelle influence celle diminution de chlorophylle peut exercer sur l’assimi- lation, et quelle sera la résullante de ces deux effets opposés. Brick (3), Lesage (4), Schimper (5) ont montré que la formation de l’amidon est plus ou moins entravée chez les plantes halophytes ; mais aucune expérience directe n'ayant (1) Lesage, C. R. Acad.,t. CXIV, p. 143. (2) Henri Lecoq, Géographie botanique, t. ILE, p. 327, 1854. (3) Brick, Bot. Centralbl., t. XXXIX, 1889. (4) (5) Lesage, C. R. Acad., 31 mars 1891. Schimper, Indo-Malayische Strandflora, 1891, p. 26. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 105 élé faite sur la décomposilion de l'acide carbonique, je me suis proposé de combler celte lacune. J'ai opéré sur desfeuilles de plantes ubiquistes appartenant aux espèces suivantes : Aripler hastata, Bela maritima, Lycium barbarum, Plantago major, Tussilago Farfara, Senecio vulgaris, Polygonum aviculure, Medicago Lupulina. Pour que les comparaisons fussent exactes, il me fallait obtenir des échantillons dans le même état physiologique. Les plantes maritimes que je dois à l’obligeance de M. Cos- tantin, m étant envoyées de Criquebœuf (Calvados), ne pou- vaient évidemment servir aux expériences qu'un certain temps après leur cueillette. Les échantillons de l'intérieur des terres devaient donc êlre aussi récollés à l'avance. Pour que la similitude des conditions fût aussi complète que pos- sible, à un jour et à une heure fixés à l'avance, des feuilles d'une même espèce étaient recueillies d’une part sur le bord de la mer, et, d'autre part, à Fontainebleau, enlourées de mousse humide, puis placées dans une boîte en fer-blane où elles restaient jusqu'au moment où on les ulilisait au Laboratoire. Parmi mes expériences, Je ne cilerai avec détails que la suivante : Deux feuilles de Lycium barbarum sont placées dans deux éprouvettes contenant de l’air avec 7 p. 100 d'acide carbo- nique. L’exposilion à la lumière solaire directe dure vingt minutes, la température ne dépassant pas 21 degrés. La composition de l'air initial est la suivante : CO SR A nées 7,00 DR me ue 19,05 NN — LS OR eme: 13,9à Celle de l’air final est : Pour la feuille du bord | ON 20 Pour la feuille de Fon- } co CO? — 6,00 de la mer(surface de | lainebleau (surface LE. À 19:70 O7 20,10 la feuille : 3°4; vo- Az —7390l de la feuille : 241; | ae — 73 90 lume d’air : 4ce,5). TE volume d'air : 5°°). mt 104 ED. GRIFFON. On déduit facilement des analyses et des données ci- dessus que la feuille maritime a dégagé par centimètre carré, 0®,0097 d'oxygène et la feuille terrestre 0°°,0250 ; le rapport d'assimilation est donc de 0,40. : En examinant les deux feuilles au microscope, j'ai observé que la première avail un mésophylle à tissu palissadique très serré, et dont l'épaisseur était de 283 v; pour la seconde, cette dimension s’abaissait à 170 up; mais les chloroleucites y étaient plus nombreux, plus gros et plus verts. Le plus grand développement du parenchyme en palissade n'arrive donc pas à compenser l’affaiblissement de la fonclion chlorophyllienne causé par la réduction du pigment vert : la plante marine assimile moins par unité de surface que celle de l'intérieur des terres. D’autres expériences faites avec la même espèce, et dans lesquelles presque tout l'acide carbonique a été décomposé, m'ont fourni des rapports d'assimilation compris entre 0,39 el 0,45. Pour le Senecio vulgaris, j'ai oblenu 0,68, 0,65, 0,70. Avec le Tussilago Farfara, 0,40, 0,37, 0,35 ; les différences de coloration et surtout de structure étaient d’ailleurs très frappantes el en tout conformes à celles qu'a observées M. Lesage. Même conclusion pour le Plantago major ; lous les résullals trouvés sont des nombres compris entre 0,35 ét0/#01re Mets PIAlTRetIN-- fie areter) Pour le Beta marilima, J'ai trouvé des rapports voisins de 0,85; d’ailleurs, les feuilles étaient peu différentes comme coloralion; celles récoltées à Fontainebleau provenaient de Beta Rapa; mais on sait que cette plante, comme la pre- mière, n'est qu'une variété de Beta vulgaris. En ce qui concerne le Po/ygonum aviculare, le rapport à élé de 0,60. Avec le Medicago Lupulina, 11 s'est élevé à 0,90. Dans les recherches de M. Lesage, celle plante faisait exception à la règle, relalivement à la structure; la variété terrestre aval la plus grande épaisseur; mais dans les échantillons L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 105 que J ai éludiés, il n’en était pas ainsi. Les feuilles prove- nant des bords de la mer avaient 180 w d'épaisseur; celles de Fontainebleau, 120 » seulement, et, chez les premières, l'assise en palissade située immédiatement sous l’épiderme avait des chloroleuciltes moins nombreux et moins verts. B Fig. 14 et 15. — Plantago major. — A, feuille maritime ; B, feuille de l'intérieur des terres. Mêmes lettres que précédemment. Enfin, avec l’Atriplex hastata, le rapport d’assimilation s'est élevé à 1,25 ; mais les feuilles marilimes, bien qu'ayant peu de chlorophylle dans chaque cellule étaient beaucoup plus épaisses que celles ‘provenant de Fontainebleau (1360 w contre 127). Remarquons toutefois qu'au point de vue de la plante entière, l’assimilalion reslait néanmoins inférieure, à cause du faible développement des feuilles en surface. | Avant de conclure, disons que selon Stahl (1), la cause (1) Stahl, Bot. Zeit., 1894, p. 233. 106 ED. GRIFFON. des faits observés par Schimper, à savoir la diminution de l’'amidon dans les feuilles des plantes maritimes, réside dans la fermeture des slomates el par conséquent dans laffai- blissement de Ïa transpiration, ce dernier phénomène ayant été mis en évidence par Sachs et Plefler, chez les plantes cultivées dans une solution de chlorure de sodium. Mais 1l est difficile d'admettre qu’une diminution de la (ranspiralion, surtout chez des feuilles isolées et placées dans un milieu saluré d'humidité, ainsi que la fermelure des stomates aient une si grande influence sur la fonction chlorophyllienne. D'ailleurs Diels, dans une étude récente, nie toute action du sel sur les cellules stomatiques (1). D'autre part l’énergie assimilalrice d’une feuille ne peut se mesurer rigoureusement par la quantité d’amidon trou- vée à un moment donné. S'il en était ainsi, l'assimilation chez les plantes halophyles serait extrêmement faible, puisque Schimper a observé que par suite de l’action du chlorure de sodium, l’amidon ne se forme qu’en très pelite quantité, ou même pas du tout (Malcolmia maritima, Datura, Métel, Mais, Cresson, etc.). | Je crois donc que les différences observées dans l’inten- silé des dégagements d'oxygène chez les plantes maritimes el les plantes terrestres, et qui ne sont nullement propor- tionnelles à celles qu’on constate dans les quantités d’ami- don formé, doivent s'expliquer surtout par les modi- fications de structure et Ia diminution de la matière veRLe: | Conclusions. — Les feuilles des plantes maritimes subis- sant une réduction de la chlorophyllé sous l'influence du sel marin, ce qui leur donne une teinte vert pâle ou vert jaunûtre, acquièrent par contre une épaisseur plus grande et un développement plus marqué des tissus assimilaleurs ; mais cette modification de structure, qui est favorable à la (4) Diels, Stoffwechsel und Structur der Halophyten (Jahrb. f. wissen. Bot. Band XXXII. Heft 2, 1898, p. 309). L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 107 décomposition de l'acide carbonique, n'arrive pas à compen- ser l’action nuisible que produit le sel. L’assimilalion, rap- portée à l'unité de surface, reste en effet toujours moindre pour les feuilles d’une plante maritime que pour les feuilles comparables de la même espèce, croissant dans l’intérieur des terres. e. Action du carbonate de chaux. L'énergie assimilatrice chez les plantes chlorotiques. — Un grand nombre de végélaux, et en particulier des arbres fruitiers comme le Poirier, se développent mal dans les sols riches en calcaire, surtout si cet élément se trouve dans un état physique tel que les eaux d'infiltration chargées d'acide carbonique puissent le dissoudre facilement. Ces végélaux perdent leur vigueur, et leur feuillage présente une feinte jaunûtre; on dit qu'ils sont chlorotiques. Les vignes américaines sont aussi très sujettes à la chlorose ; aussi, dans les pays phylloxérés, le problème de la reconstitution rencontre-t-il de grandes difficultés, quand le sol est calcaire. Poirier (Pirus communis). — J'ai eu l’occasion d’obser- ver, à l’École d’agricullure du Chesnoy (Loiret), des Poiriers (variélé Beurré de Diel) qui, végélant sur le calcaire de Beauce inférieur, lequel est constitué par des marnes riches en carbonate de chaux très allaquable, présentent tous les ans de la chlorose. Un grand nombre de feuilles sont absolument jaunes sur les deux faces ; on ne voit de chloro- phylle que le long des nervures. Entre les feuilles presque complètement jaunes et celles qui ne sont pas atteintes de chlorose, on rencontre tous les intermédiaires (PL HI el IV ; He et 2) Je me suis proposé de rechercher quel rôle jouent ces feuilles jaunes, nettement chloroliques, dans l'assimilation, et je les ai comparées, sous ce rapport, aux feuilles restées vertes. Tout d'abord, à ma grande surprise, Je l'avoue, j'ai trouvé 108 ED. GRIFFON. que ces feuilles chlorotiques dégagent de l'oxygène à la lumière. Leur teinte, très voisine de celle des plantes étiolées, permettait en effet de supposer que la résultante de l’assi- milalion et de la respiration se trouverait être en faveur de cette dernière fonclion; or, c’est le contraire qui a lieu, el les feuilles les plus chlorotiques, qu'on prendrait de loin pour des feuilles panachées, m'ont donné des résultats analogues. En expérimentant sur de telles feuilles et sur d'autres qui étaient restées vertes, j'ai trouvé presque toujours, comme rapports d’assimilation, des nombres compris entre 0,15 el 0,20. | Chez les feuilles chlorotiques le mésophylle élait iden- tique comme épaisseur et comme différenciation à celui des feuilles vertes ; mais les chloroleucites du tissu palissadique élaient très décolorés, sauf cependant le long des nervures. Dans le parenchyme spongieux, au contraire, la décolora- lion des grains de chlorophylle élait très faible. M. Zimmermann (1) prétend que dans les cas de chlorose movenne, les chromoleuciles n’assimilent pas. Il esl vrai- semblable qu’il doit en être ainsi pour la plupart de ceux du tissu palissadique; en tout cas, ceux qui se trouvent dans le parenchyme spongieux et dans les cellules avoisinant les nervures doivent, par suite des résultats expérimentaux qui précèdent, avoir conservé la propriélé de décomposer l'acide carbonique. : Vigne | Vitis vinifera). — Le cépage malade élait le Pineau, (1) Zimmermann, loc. cit. Les conclusions de M. Zimmermann sont basées sur ce fait qu’on ne constate pas de formation d'amidon à la lumière. Mais on admet aujour- d'hui, grâce à la connaissance des propriétés des diastases et contraire- ment à l'opinion de Sachs, que les hydrates de carbone provenant de l’assi- milation ne passent pas nécessairement par la phase amidon (Duclaux Traité de microbiologie, t. I, p 74. Paris, 1899). Aussi on ne peut apprécier avec précision l'énergie assimilatrice des feuilles en déterminant les quantités d'amidon qu’elles contiennent à un moment donné. J'ai déjà eu l'occasion de le faire remarquer au sujet des plantes végétant dans les ter- rains salés (Voy. p. 106). L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 109 si répandu en Bourgogne. Il provenait de vignobles de lAvai- lonnais situés sur le lias supérieur. La chlorose, dans ce cas, n'était probablement pas due au calcaire, au moins d'une manière exclusive, mais peu imporle la cause, au point de vue où je suis placé. Les feuilles atteintes étaient jaunâtres, mais on voyait des lisérés verts sur le limbe, le long des nervures, plus larges que ceux dont il à été question chez le Poirier. Au micros- cope, le tissu palissadique était presque complètement décoloré, mais le parenchyme lacuneux présentait encore une teinte verte à peu près normale. Les expériences m'ont donné alors, comme rapports d'as- similation, des nombres voisins de 0,30. Robinier (/obinia pseudo-Acacia). — On rencontre sou- ventsurles Robiniers {Aobinia pseudo-Acacia), et notamment sur ceux qui sont jeunes, des rameaux entiers dont les feuilles sont chlorotiques, alors que tous les autres rameaux de même âge sont parfaitement verts. ei, ce n’était certai- nement pas le calcaire qui engendrait la maladie, puisque ces Robiniers croissaient sur les sables de Fontainebleau. Comme toujours, les folioles chloroliques avaient leur Lissu palissadique décoloré, mais le long des nervures il y avait des bandes vertes très foncées et assez larges. Aussi les rapports d’assimilalion ont-ils oscillé entre 0,40 et 0,50. Aïlante (Aÿ/antus glandulosa). — On rencontre très souvent aussi des rameaux de Jeunes Ailantes (A?/antus glandulosa) altaqués par la chlorose. | Mais ici le parenchyme en palissade n’est pas dépourvu de malière verte. Il y a des chloroleucites dans toutes les cellules du mésophylle, seulement ils sont peu foncés; le long des nervures aussi se trouvent des lisérés verts. Néan- moins, à l'aspect, les différences de coloralion entre les feuilles chlorotiques et les feuilles saines sont aussi grandes que chez le Robinier. Nous retombons alors dans le cas de 110 | ED. GRIFFON. végélaux verts appartenant à des variétés ou à des espèces voisines el qui diffèrent entre eux par l'intensité de colora- tion de leur feuillage. Aussi les rapports d’assimilation se sont élevés jusqu'à 0,80, chiffre souvent lrouvé dans les expériences rapportées au chapitre premier (1* partie, Section |). Conclusions. — La chlorose est une affection qui peut être altribuée à des causes multiples et notamment à un excès de calcaire. Elle se manifeste par une coloralion Jaunâtre des feuilles due à la disparition de la chlorophylle, et spéciale- ment de celle du tissu palissadique, sauf en général le long des nervures. L'état chlorotique étant plus ou moins accusé, les feuilles malades se trouvent influencées plus ou moins fortement dans leur fonction chlorophyllienne. Mais des feuilles de Poirier, franchement jaunâtres et présentant par conséquent une chlorose très forte, décomposent encore l'acide carbo- nique à la lumière; leur énergie assimilatrice est même le à ou le - de celle des feuilles saines. J Nota. — Les Poiriers chlorotiques dont il vient d'être queslion élaient réellement dépérissants. Ils ne donnent plus de fruits, et, conservés en place, ils sont condamnés à périr. On en est réduit à les arracher et à les planter dans un autre endroit; on les remplace par des jeunes qui pros- pèrent bien tout d’abord, tant que leurs racines se trouvent dans la lerre rapportée et pauvre en calcaire. Mais au bout d'un cerlain temps, quand ces racines atteignent le sol qu'on à laissé en place, la chlorose apparait intense et les arbres doivent subir le sort de leurs devanciers. Si l’on rapproche, au point de vue de la fonction chloro- phyllienne, ces végétaux chlorotiques comme le Poirier, la Vigne, de certains végélaux à feuilles rouges, ou à feuilles panachées, on est frappé de ce fait que les premiers sont dans un état pathologique qui amène presque invariable- L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 111 ment la mort au bout d'un temps plus ou moins long, alors que les seconds semblent jouir d’un parfait état de santé; el pourtant ceux-ci ont un feuillage qui n’assimile souvent pas plus énergiquement que celui des autres. On peut dire que ces arbres rouges où panachés et qui sont des variétés d’arbres à feuillage vert, sont adaptés maintenant à une assimilation faible et que les Poiriers et la Vigne ne le sont nullement. Mais il n’est pas non plus impossible que les causes qui engendrent la chlorose pro- voquent dans la biologie des plantes d’autres troubles que ceux qui consistent dans un ralentissement de la fonclion chlorophylilienne. CONCLUSIONS GÉNÉRALES Le feuillage des végétaux supérieurs présente des colo- rations infiniment variées. La teinte verte, due à la chloro- phylle et qu'on rencontre presque loujours, est plus ou moins foncée suivant les espèces et les variélés ; son inten- silé dépend surlout de l'épaisseur et de la différenciation du mésophylle, du nombre, des dimensions, de la coloration et de la répartition des chloroleucites, Lous facteurs qui ont . une influence marquée sur l'énergie assimilatrice. La coloration verte peut être masquée plus ou moins complètement par une substance soluble dans le suc cellulaire, variant du rouge au bleu et qu'on nomme anthocyanine où érythrophylle. De là ces tons rouge brun, rouge carmin, rouge violacé qui sont si recherchés dans l’ornementalion des parcs et des Jardins. Des feuilles entières d’un végétal ou des portions de feuilles peuvent être dépourvues de chlorophylle, el alors elles sont dites panachées. Certaines Phanérogames mêmes sont lotalement dépourvues de matière verte, comme les Champignons. Le milieu, d'autre parl, influe beaucoup sur la structure des plantes et le développement de la chlorophylle et par suile sur la coloration. Aussi des individus d’une même espèce présentent-ils des teintes différentes suivant les conditions dans lesquelles ils ont vécu. Mes recherches ont eu précisément pour objet de faire connaître l'intensité avec laquelle l'acide carbonique est décomposé chez les plantes qui présentent les coloralions si diverses que je viens de rappeler ; je reproduis ici, dans l’ordre même de mon travail, les différentes conclusions auxquelles je suis arrivé. L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 1135 COLORATIONS INHÉRENTES A LA NATURE DES PLANTES. I. — Plantes ni parasites ni saprophytes. 1° Plantes vertes. Un grand nombre de plantes vertes appartenant à des variétés ou à des espèces voisines, et développées dans les mêmes conditions de milieu, diffèrent entre elles par l’inten- sité de coloration de leur feuillage. Or, si très souvent les feuilles d’un vert foncé ont une énergie assimilatrice supérieure à celle des feuilles d’un vert pâle (Céréales, Lailues el Romaines, Bégonia, Fuchsia), il arrive aussi que des feuilles ayant la même teinte verte assimilent différemment (Fuchsia), el que des feuilles d’un vert pâle assimilent autant et même plus que celles d’un vert foncé (Pécher, Prunier, Canna, Chrysanthème, Troène). Aussi, les rapports d’assimilation de deux variétés voisines et qui sont exprimés par le quotient obtenu en divisant l'énergie assimilatrice (1) des feuilles de la variété foncée par celle des feuilles de la variété pâle, ont-ils pu êlre égaux à 1, et même quelquefois à 1,15 ; en général, cependant, ils ont été compris entre 0,60 et 0,90. Ces rapports, qui peuvent être inférieurs ou supérieurs à l'unité, s'expliquent néanmoins en tenant comple de l’épais- seur du mésophylle, de sa struclure et en particulier du développement du tissu palissadique, de la dimension et de la teinte des chloroleucites, lesquels sont tous des facteurs dont les varialions diverses ont sur la coloration verte des feuilles et sur l'énergie assimilatrice des effets tantôt concor- dants, tantôt opposés. En ce qui concerne la décomposilion de l'acide carbonique, ces effets ont une résultante que l'expé- rience seule peut faire connaître dans son sens el sa grandeur. Toutefois, cette résultante semble dans quelques cas en (1) Je rappelle que l'énergie assimilatrice d'une feuille est mesurée par la quantité d'oxygène dégagé en un temps donné par unité de surface. ANN. SG. NAT. BOT. X, 5 114 ED. GRIFFON. contradiction avec les données déduiles de l'anatomie (Péchier, Pruner, Spurée, ete.). 1 y a donc en dehors des varialions de la structure et de la quantité de malière verte d'autres causes dont il sera parlé plus loin et qui influent sur l'énergie assimilatrice. 2° Plantes colorées autrement qu’en vert. Plantes rouges. — Parmi les plantes dont le feuillage est coloré en rouge, les unes ont une énergie assimilatrice inférieure à celle n mêmes espèces vertes dont elles ne sont que des variétés (Betlerave rouge, Coudrier pourpre, Prunus Pissardi, Sy nn pourpre, Canne, Arum et Pelar- gonium à feuilles maculées). Assez souvent, l'énergie assimilatrice des feuilles rouges se trouve comprise entre la moilié et les trois quarts de celle des feuilles vertes. Dans le Prunus Pissardi comparé au Prunus Myrobolana, le rapport s’abaisse à un quart en été et chez cerlams Coleus à un sixième et même à un septième. Parfois, la raison de cette fénionité tient à une épaisseur moindre du mésophylle; mais, d’une manière générale, il faut la chercher dans la plus faible coloration verte des chloroleucites, par conséquent dans la pauvreté dela feuille en DD ft Par contre, d'autres plantes, comme j'Arroche rouge, le Hétreetl Épine- Vinette pourpres (les deux premières ayant de la matière rouge dans l’épiderme seulement et la troisième dans l’assise palissadique), ont une énergie assimilatrice égale à celle des plantes vertes de la même espèce. Mais pe on des feuilles est la même et les cellules sont aussi riches en chlorophylile. Dans ce dernier cas, on voit que la substance rouge n’a exercé aucune action nuisible sur le verdissement el sur l'assimilation. Il est donc vraisemblable d'admettre, et l’ex- périence le prouve, que chez les autres plantes rouges qui L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 115 renferment davantage d’anthocyanine, cetle action n'est pas importante et que les différences d’assimilalion avec les plantes vertes tiennent en grande partie soit à la plus faible épaisseur des feuilles, soit à la richesse moindre des cellules en chlorophylle. D'ailleurs, examen du spectre d’absorplion de l’antho- cyanine, qui est sensiblement complémentaire de celui de la chlorophylle, œinsi que mes expériences exécutées sur la substance rouge, montrent que celle-ci ne peut exercer dans les feuilles qu'une action nulle sur le verdissement, et assez faible sur la décomposition de l'acide carbonique. Les feuilles qui rougissent à l'automne avant de tomber, comme la Vigne-vierge, dégagent de l’acide carbonique à la lumière peu de temps après que la coloration rouge apparait; l'assimilation n'est pas nulle pour cela, mais elle est masquée par la respiration. Les chloroleucites déjà un peu alfaqués perdent ensuite complètement leur matière verte et se désorganisent; l’anthocyanine envahit presque toutes les cellules, et les feuilles prennent alors une belle teinte d'un rouge éclatant ; elles respirent encore, puis se fléfrissent et meurent. | Les feuilles de Vigne, qui normalement ne rougissent pas, prennent cependant parfois en août ou septembre une teinte analogue à celle de la plante précédente. Leur tissu palissadique est tout d’abord envahi par l’anthocyenine, et les chloroleucites perdent une partie de leur matière verte, ce qui affaiblit l'énergie assimilatrice (dans la proportion d’un demi à un tiers environ); puis, les parlies rouges finissent par subir au bout d’un temps variable le mème sort que les feuilles de la Vigne-vierge. Cetle affection, connue sous le nom de « Rougeot», consiste donc en réalité dans un phénomène de rougissement automnal apparu accidentellement el prématurément sous l'influence de certaines condilions méléoriques chez une plante où il ne se produit pas d'habitude. Chez les feuilles persistantes comme celles du Afakonia, 116 ED. GRIFFON. quand l’anthocyanine apparait dansles cellules palissadiques, les chloroleuciles prennent une teinte verte moins foncée el l'énergie assimiialrice diminue (dans une proportion d’un tiers environ). Si les feuilles sont âgées, elles finissent par perdre toute leur chlorophylle, rougissent complètement et périssent; dans le cas contraire, elles redeviennent verles au printemps et continuent à fonctionner. Enfin, chez les Contfères et le Buis, les feuilles qui ont bruni pendant l'hiver par suite de l’altéralion de la chloro- phylle, ef non par formalion d’anthocyanine, cessent de dégager de l'oxygène à la lumière; mais, quand la tempé- ralure redevient favorable, elles reverdissent et la fonction assimilatrice se manifeste à nouveau. Plantes panachées. — Les feuilles panachées dites dorées (Sambucus, Nequndo), riches en xantholeuciles comme les feuilles étiolées, ne dégagent pas plus que ces dernières d'oxygène à la lumière. La xanthophylle n'est donc pas douée du pouvoir assimilateur d'une facon appréciable, au moins par les méthodes directes. Quant aux feuilles argyrescentes (Begonia Rex, Lamium maculalum) qui doivent leur panachure au décollement de l'épiderme, elles ont une énergie assimilatrice égale à celle des feuilles dépourvues de parties argentées. II. — Plantes parasites ou saprophytes. Au point de vue de l’assimilalion du carbone, les Orchi- dées terrestres paraissent présenter lous les intermédiaires depuis les espèces vertes qui tirent la plus grande partie sinon la totalité de leur carbone de l'air, et les espèces dé- colorées comme le Veoftia qui sont entièrement saprophytes et qui, grâce à leurs mycorhizes, sont capables de puiser le carbone dans les matériaux de l’humus. Le Limodorum abortivum, plante d'aspect violacé, doit être placé, bien qu'il conlienne une quantité notable de chlorophylle, au voisinage des saprophytes complets. Par + dt gts En | de bob: ne L' ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 117 suite, en effet, de l'insuffisance du nombre des chloroleuciles dans le parenchyme corlical (ceux du cylindre central ne recevant que des radiations lumineuses très affaiblies), et peut-être aussi de la nalure spéciale du pigment vert, celle plante décompose peu d'acide carbonique et sa respiration est toujours supérieure à l'assimilation. Le Limodorum se lrouve done à peu près dans le même cas que ces Rhinanthacées, comme l’£uphrasia officinals, qui, malgré leur coloration verte, ne dégagent pas d'oxy- gène à la lumière, ainsi que l’a démontré M. Bonnier COLORATIONS EN RAPPORT AVEC LE MILIEU. 1° Achon de la lumière. Bien que la lumière soit en général indispensable au _ verdissement, il y a des plantes chez lesquelles la chloro- phylle peut se former à l'obscurité. Ces plantes, le Pin Pignon par exemple, exposées à la lumière, décomposent l’acide carbonique avec une énergie qui paraît en rapport étroit avec le développement du tissu assimilateur et la quantité de matière verte. Il en résulte que si la chlorophylle qui se forme ainsi à l'obscurité est différente de celle qui prend naissance à la lumière, cette différence n'aurait pas d'in- fluence sensible sur l'assimilation. L'intensilé du verdissement et la structure variant avec la réfrangibilité, la coloralion se trouve alors influencée dans des proportions qui peuvent être considérables (recherches inédites de M. Teodoresco). Des plantes qui se développent dans une lumière bleue contenant les radiations de la moilié la plus réfrangible du spectre sont plus verles que celles qui ne reçoivent que des ravons rouges, ces dernières étant elles-mêmes beaucoup plus foncées que celles qui se développent dans la lumière verte. Si l'on fait assimiler ces plantes inégalement colorées, 118 ED. GRIFFON. on voit que l'énergie avec laquelle elles décomposent l'acide carbonique concorde parfailement avec l'intensité et la teinte verte d'une part, avec la structure et la AS de cool d'autre part. 2 Action de la chaleur. La chaleur, au moins entre certaines limites, augmente l'épaisseur et la différenciation du mésophylle des feuilles, ainsi que le nombre, les dimensions et la teinte des chloro- leucites ho oie inédites de M. Bonnier). Toutes ces modifications ont pour effet d'accroître l'intensité de la coloration verle et en même femps l'énergie assimilalrice. Si l’on expose des plantes pendant tout le cours de leur développement au froid durant la nuit et en plein soleil du- rant le jour, celle allernance des températures extrêmes, ainsi que l’a montré récemment M. Bonnier, provoque l'apparition de caraclères propres aux végélaux alpins. La taille est ré- duile, mais les feuilles sont plus épaisses el leur lissu palissa- dique est plus développé. Comme dans les expériences de M. Bonnier, les feuilles des plantes naines étaient restées, contrairement à ce qui à lieu dans les Alpes, moins vertes que celles des plantes ayant végélé constamment dans une éluve froide ou au dehors dans les conditions normales, il s'ensuit que l’énergie assimilatrice n'a pas varié dans le même sens que la coloration. La réduction de la chloro- phylle dans les cellules des feuilles chez les plantes naines a été plus que compensée par le développement de tout le mésophylle et spécialement du tissu palissadique ; ainsi, les feuilles les plus pâles sont précisément celles qui dégagent le plus d’acide carbonique. 3° Aclion des sels. Il est établi depuis longtemps que les nwrales et les sels de fer favorisent la production de la chlorophylle, et par suite L ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. T9 augmentent l'intensité de la coloration verte des plantés. Or cette coloration plus foncée correspond toujours à une éner- gie assimilairice plus élevée. Les sels de cuivre ajoutés aux solutions nutritives dans des doses très faibles (1/20 000 à 1/10 000), Lout en attaquant les racines et en retardant la croissance, augmentent les dimen- sions el la teinte des chloroleuciles et par suite l'intensité de la coloralion verle, el, en même temps que celle-ci, l'énergie assimilatrice. Le chlorure de sodium, au contraire, est défavorable à Ja formation de la chlorophylle, et c’est ce qui donne aux feuilles des plantes du littoral de la mer leur teinte vert jaunâtre ou vert pâle caractéristique. Mais on sait en outre qu'en même temps l’épaisseur du mésophylle est augmentée et le tissu palissadique plus différencié. Néanmoins, cette modification de structure qui est favorable à la décomposi- tion de l'acide carbonique n'arrive pas à compenser l’ac- üon nuisible que produit le sel. L’assimilation reste en effet toujours moindre pour les feuilles d’une plante maritime que pour les feuilles comparables de la même espèce crois- sant dans l'intérieur des terres. L'excès de calcaire, ainsi que beaucoup d’autres causes d’ailleurs, engendre la chlorose chez un cerlain nombre de plantes. Or des feuilles nettement chlorotiques et qui pré- sentent une temte jaune décomposent encore, contrairement à ce qu'on aurait pu penser, l'acide carbonique à la lumière : leur énergie assimilatrice s’est montrée le sixième et mème le cinquième de celle des feuilles saines chez le Poirier, et le tiers chez la Vigne. La chlorophylle existail encore dans toute l'épaisseur du mésophylle avoisinant les ner- vures ; le tissu palissadique, par contre, était complèlement décoloré. RÉSUMÉ. — Les résultats expérimentaux qui précèdent conduisent, comme on le voit, à la connaissance : 1° cerlain nombre de renseignements précis relalifs à lesw- d'un 120 ED. GRIFFON. milation spécifique {variélés ou espèces voisines de plantes verles parasiles ou saprophytes, plantes rouges el pana- chées); 2° du rôle de quelques substances colorantes (antho- cyanine, xanthophvlle) dans l'assimilation ; 3° de l'influence de diverses conditions de milieu se rapportant à la lumière, à la tempéralure el aux sels, sur la coloralion el la struc- Lure des plantes, et par suile sur l'énergie assimilatrice. En outre, on peut dégager de ces résullals deux consé- quences importantes : 1° L'énergie assimilatrice considérée chez les Phanéro- games dans ses rapporis avec les substances colorantes paraîl ne dépendre exclusivement que des chlorophylles contenues dans les organes assimilateurs, quelle que soit d’ailleurs la couleur de ces derniers ; de plus, si cette cou- leur est verte, ce qui estle cas normal, il n°v à pas de relation directe et nécessaire entre son inlensité el l’aclivilé avec laquelle l'acide carbonique est aécomposé. Quand le milieu modifie la teinte verle, les variations observées dans l'intensité de la fonction chlorophyllienne s'expliquent assez bien en tenant compte de la structure et du développement du mésophylle et particulièrement du issu palissadique, ainsi que des dimensions, de la coloration, du nombre el de la répartition des chloroleuciles ; mais 1! peul en être autrement quand le degré de la nuance verte tient à la nalure même des plantes. Il arrive parfois, en effet, que les résullais expérimentaux sont en contradiclion avec les déductions tirées de l'anatomie, d'où la nécessité d'invoquer d'autres facteurs qui pourrarent, eux aussi, faire varier l’assi- milation. Quels sont ces facteurs ? Peut-être la nature même des chlorophylles, la mulliplicité de ces dernières ne faisant plus de doute depuis les travaux de MM. Armand Gautier et Elard”? peut-être aussi et surlout l’activilé propre de la matière vivante des leuciles verls considérée dans ses rapports avec la décomposilion de l'acide carbonique ? 2° On s’exposerait le plus souvent à de graves erreurs si L'ASSIMILATION CHLOROPHYLLIENNE. 121 l'on voulait, à l’aide des données anatomiques seules, prévoir l'intensité des fonctions physiologiques et spécialement celle de la résultante de deux fonclions opposées, comme la res- piralion et l'assimilation chlorophyllienne. C'est à l'expérience qu’il fauls’adresser pour connaître avec certitude cette résultante ; encore faut-il que, dans ce cas, la méthode employée porte sur lamesure deséchanges d'acide car-- bonique et d'oxygène entre la plante et l'atmosphère ambiante. La méthode qui repose sur l’évaluation des quantités d'amidon formé à la lumière ne présente, comme on l’a vu, aucune ga- rantie d’exactilude ; elle a conduit différents expérimentateurs à formuler au sujet de l’énergie assimilatrice des plantes rou- ges, des plantes vivant dans les lerrains salés et des plantes chloroliques, des conclusions qui s’écartent notablement de celles auxquelles je suis arrivé par la comparaison des échan- ges gazeux. [Il faut remarquer, en effet, que ies hydrates de carbone provenant de l'assimilation chlorophyllienne ne se transforment pas nécessairement dans leur lotalilé en grains d’amidon, comme le croyait Sachs (1); la production de ces derniers, comparable en quelque sorte à celle des cris- aux dans une solution salurée, fait que la quantité d'amidon sous forme de grains produile en un temps donné dans deux feuilles différentes n’est pas forcément proportionnelle à Ja quantilé d'acide carbonique décomposé qui, elle, sert par définition à mesurer l'énergie assimilatrice. Ce travail a été fait au Laboratoire de Biologie végélale de Fontainebleau, dirigé par M. Gaston Bonnier, à qui je Lémoigne ici loute ma reconnaissance pour les excellents conseils et les nombreux encouragements qu'il n'a cessé de me prodiguer. J'adresse aussi mes plus sincères remerciements à M. Léon Dufour, directeur adjoint, pour les précieux ren- seignements qu'il m'a donnés au cours de ces recherches. (1} Duclaux, loc. cit. EXPLICATION DES PLANCHES RENSEIGNEMENTS COMMUNS AUX PLANCHES. ep. s., épiderme supérieur. ep. ti, épiderme inférieur. p. pa, parenchyme en palissade. p. co., parenchyme cortical. p. s., parenchyme spongieux. Les chloroleucites ne sont représentés dans toute l’épaisseur du paren- chyme que dans une ou deux rangées de cellules seulement. Les figures 1, 2, 3, 4, 6, 7, 11 ont élé dessinées à un grossissement de 250 diamètres. . La figure 5 est une figure schématique. Pour les figures 8, 9 et 10, le grossissement est de 350. PLANCHE I Fig. 4. — Coupe transversale d’une feuille de Bié de Noé. Fig. 2, — — Blé Suisse. Hrossr —- — Chrysanthème à teinte foncée. Fig. 4. — — —- à teinte pâle. PLANCHE IT Fig. 5. Coupe transversale schématique d’une feuille de Pécher (var. Béti Robin). — pl, plages de parenchyme à teinte pâle; f, faisceaux libéro- ligneux. Fig. 6. — Coupe transversale de l'écorce du Limodorum abortivum. Mens — de l’Epipactis latifolia. Fig. 8. — Coupe transversale d’une feuille de Teucrium Scorodonia, la plante s'étant développée à des températures extrêmes et allernes. Fig. 9. — Même coupe, la plante s'étant développée dehors. Fig. 10. — Même coupe, la plante s'étant développée dans une éture froide. Fig. 11. — Cellules palissadiques d’une feuille de Faba (a, culture dans le Knop normal; b, culture dans le Knop contenant du cuivre). PLANCHES TX ET IV 0 / 1b. — (var. Béti Robin). ta. Feuille de Pêcher (var. Valdy) EXPLICATION DES PLANCHES. 123 . Feuille de Poirier non chlorotique. _ chlorotique. Feuille de Sureau doré. — de Négondo doré. . Pin Pignon ayant verdi à la lumière. — ayant verdi à l’obscurité. . Plant de Maïs ayant verdi dans la lumière blanche. ES — derrière une cuvette remplie d'une solution d’anthocyanine. ra. Feuille de Plantago major (le pied provenant de l'intérieur des terres). . Feuille de Plantago major (le pied provenant du littoral). . Feuille de Stachys silvatica (le pied s'étant développé dans l'armoire chaude). . Feuille de Stachys silvatica (le pied s'étant développé dans l'armoire Iroide). - Feuille de Teucrium Scorodonia {le pied provenant du dehors). RE — (le pied provenant de l’étuve froide). Te — (le pied ayant élé soumis aux condi- tions alternes de température). - Feuille de Faba vulgaris (le pied s'étant développé dans la lumière rouge). . Feuille de Faba vulgaris (le pied s'étant développé dans la lumière bleue). . Feuille de Faba vulgaris (le pied s'étant développé dans la lumière verte). Ann. des Se. nal. 8° Série. Bot. ‘Tome X; PI. T. 0 1e) ÀsA po 2 7 Lee | en GS FO se © COURSE ? À A F : 2 de No ®. ,0 oi perse BE v @ ue) eus À NE | FX) 2 ) 00 , < = l ie vs 07 @) ) eh, O0 LEA RS : | | JL. L | | = a ES = Eu EE © EEE CR RER E Ed. Griffon del. Masson et Cie, édit. 5 * S Y LI “ » ., 1 = $ 5e ‘) Blé de Noé (1°. Blé Suisse (2). Chrysanthème à feuiiles foncées (3). Chrysanthème à feuilles päles (4). Ann. des Sc. nat. 8 Série. Bot. Tome X, P1. 2 Ed. Griffon del. Masson et (re, édit. Pécher (5). Limodorum (6). Epipactis (7). Teucrium (8, temp. alt. — 9, dehors. — 10. froid). Faba (11.a, sans cuivre; b, avec cuivre). Ann.des Scienc. rat. 0 © Serte. J. Poinsot, del | VE | | Feuilles de Pécher (14, 14); Poirier (2 a, 98); Sureat (79) Plantain (7a 7b); Æpiaire (Sa, 8h); D AC EU CS PTE CAE EE CARS, SEE Editeurs. rentes tentes. nde 14); Pin Pignon (15a, 56): Mai (6a, 6); nanee (92.98. 9e.): Fève (0e, 106, ec); ë A TÉL SUR LES COULACÉES Par M. PH. VAN TIEGHEM ( Lorsqu'elle fut établie, 1l y a bientôt quatre ans (2), la famille des Coulacées se réduisait au seul genre Coule (Coula Baïllon), originaire du Gabon. Depuis, on y à rat- taché successivement, d’abord, en 1896, le genre Minquart (Minquartia Aublet), de la Guyane française, puis, en 1897, le genre Ochanostache (Ochanostachys Masters), de la Ma- laisie. Aujourd'hui, on se propose de montrer qu'il faut aussi y incorporer, d'une part le genre Enduse (£ndusa Miers), du Pérou, de l’autre, le genre nouveau Eganthe (Eganthus), du Brésil, ce qui augmente encore l'extension géographique déjà très grande de ce petit groupe. . Rappelons d’abord les caractères principaux de la famille, tels qu’ils résultent de l'étude de la tige, de la feuille, de la fleur et du fruit des trois genres qui la composaient Jus- qu'ici, puis les caracières différentiels de ces trois genres. 1. Caractères communs aux trois genres Coule, Ochano- stache et Minçquart. — Ge sont des arbres à feuilles isolées disliques, dont les jeunes pousses sont couvertes de poils roux. Les feuilles sont simples, sans stipules, péliolées, à pétiole légèrement décurrent sur le rameau, à limbe entier, ovale allongé, atlénué brusquement en pointe au sommet, penninerve à nervures latérales recourbées vers le haut et bien marquées. (1) Journ. de botanique, XIE, 1899. (2) Ph. van Tieghem, Sur le Coula edulis (Bulletin du Muséum, I, p. 266, 1895). 126 PH. VAN TIEGHEM. La tige a son épiderme forlement culinisé, muni dans le jeune âge de poils pluricellulaires unisériés, ramifiés à la base en forme de bouquel, qui tombent plus tard. L’écorce, dont l’endoderme n'est pas nettement différencié, renferme cà et là des cellules à cristaux prismatiques d’oxalate de calcium, des cellules scléreuses, isolées ou par petits grou- pes, des tubes rameux et non cloisonnés, remplis d’un latex épais, incolore et finement granuleux, et des poches sécré- trices, pleines d’une résine brune, se colorant en bleu par l’eau de Javel. Le péricyele a de nombreux paquets de fibres, bientôl réunis en une couche scléreuse continue par la sclérose des cellules interposées. Le liber secondaire, dé- pourvu de fibres, renferme de nombreuses cellules à cris- taux, des tubes laticifères, et aussi, plus tard, des cellules scléreuses, solitaires ou groupées. Le bois est normal, avec des rayons unisériés et de larges vaisseaux à cloisons trans- verses permanentes et fortement obliques. La moelle est hélérogène, formée de grandes cellules hyalines et de cel- lules plus élroites renfermant une malière brune ; on y voit aussi des tubes laticifères rameux et, çà et là, quelques cel- lules scléreuses, mais pas de poches sécrétrices. Le périderme se développe dans l’assise sous-épidermi- que et son liège est hélérogène, les assises de cellules à parois minces y alternant avec des assises de cellules à mem- brane fortement épaissie sur les faces externe, latérales et transverses. La feuille prend à la lige trois méristèles, dont les deux latérales quittent la stèle un peu au-dessous du nœud. Au nœud même, la méristèle médiane se trifurque d’abord et ses deux branches latérales se placent vis-à-vis dela branche médiane en tournant en dehors le bois de leur faisceau libé- roligneux. Puis les deux méristèles latérales viennent occuper les intervalles entre la branche dorsale et les branches laté- rales, de sorte que le tout forme désormais une large mé- rislèle unique, à face interne plane, à face externe convexe, qui passe telle quelle dans le péliole et s y continue jusqu'à SUR LES COULACÉES. 127 la base du limbe. L'épiderme, l'écorce et la méristèle du pétiole ont d’ailleurs la même structure que les parties cor- respondantes de la tige. Le limbe n’a de stomates que dans l’épiderme de sa face inférieure. Son écorce à son assise supérieure palissadique, le reste formant une couche lacuneuse à cellules arrondies, dans laquelle on observe çà et là des poches sécrétlrices à résine brune et, aussi, surlout au pourtour des méristèles, des tubes laticifères rameux. Les méristèles et leurs bran- ches de divers ordres ont un arc fibreux au-dessous du liber et au-dessus du bois de leur faisceau libéroligneux. L'inflorescence est un épi axillaire, couvert de poils roux. Chaque bractée de l’épi produit ordinairement, côte à côte, plusieurs fleurs brièvement pédicellées, formant ensemble une petite cyme. La fleur est normalement pentamère dans le calice, la corolle et l'androcée, le plus souvent lrimère dans le pisul par avortement complet de deux des cinq carpelles. Le calice est court, gamosépale à cinq dents et persistant. La corolle est épaisse, caduque et gamopétale, à la base seulement dans le Coule et l'Ochanostache, sur une plus grande longueur et campanulée dans le Minquart. L’an- drocée, concrescent au tube de la corolle, a tantôt vingt éta- mines, cinq épisépales et quinze superposées trois par trois aux pétales (Coule), tantôt quinze élamines, par avortement des cinq épisépales (Ochanostache), tantôt dix étamines seu- lement, cinq épisépales et cinq épipétales (Minquart). Les anthères sont courtes, basifixes, à quatre sacs qui s'ouvrent latéralement en long. Le pislil du Coule et de lOchanostache est formé de trois carpelles, fermés dans toute leur lon- gueur, ne s'ouvrant que sous la base du style et concrescents en un ovaire triloculaire, surmonté d’un gros style conique à sligmate faiblement trilobé ; dans le Minquart, 1l y a nor- malement cinq carpelles, réduits souvent à quatre par avor- tement du cinquième, dont la loge reste visible. La paroi de l'ovaire est très épaisse, surtout dans [a région inférieure 128 PH. VAN TIEGHEM. où elle offre un renflement annulaire. Les diverses feuilles florales, notamment celles qui composent le pistil, renfer- ment dans leur écorce à la fois des tubes laticifères rameux, anastomosés çà et là en réseau, particulièrement abon- dants dans le renflement basilaire de l’ovaire, et des poches sécrétrices à résine noirâtre. Chacune des loges de l'ovaire contient, attaché au sommet de l’angle interne, un ovule anatrope pendant à raphé dor- sal, épinaste par conséquent. Il a deux téguments ayant l’un et l’autre cinq ou six assises de cellules, l’externe plus court, à bord aminci et largement ouvert, l’interne plus long, à bord épaissi et traversant l’exostome pour produire au dehors son étroit endostome. Le nucelle est mince et entièrement résorbé par l'endosperme à l'épanouissement de la fleur. En un mot, l’ovule est ténuinucellé, bitegminé et endo- pore (1). Le fruit, à la base duquel persiste le pelit calice non accres- cent, et dans lequel ne se développe qu'un seul des (rois ovules, est une drupe sphérique de la grosseur d’une prune dans le Coule,. d’une cerise dans les Ochanostaches. Il est encore inconnu dans le Minquart (2). Dans cette drupe, l’exo- carpe charnu, moins épais que l’endocarpe ligneux, ren- ferme un grand nombre de tubes lalicifères et de poches à résine, avec çà el là quelques petils nodules scléreux. L’in- térieur de ce fruit n’est connu jusqu'ici, à l’état de matu- rité, que dans le genre Coule. Il se compose d'un volumi- (1) M. Valeton a décrit et figuré l’ovule des Ochanostaches comme pourvu d'un seul tégument épais (Critisch Overzicht der Olacineæ, p. 100, fig. 7h et Ti, 1886). Il a certainement pris le tégument interne pour un gros nucelle, comme il est arrivé très fréquemment à beaucoup d’auteurs dans des cas analogues. Il y a là uneerreur à corriger. (2) Baillon a fait remarquer depuis longtemps que le fruit attribué à cet arbre par Aublet (Histoire des plantes de la Guyane française, IX, Suppl., p. k, pl. CCCLXX, 1775), ne lui appartient certainement pas (Bull. de la Soc. linnéenne de Paris, p. 585, 1886). Aussi peut-on s'étonner que M. Engler se soit, tout récemment encore, appuyé sur la nature de ce prétendu fruit pour refuser d'admettre l'incorporation, pourtant nécessaire, du genre Minquart à la famille des Coulacées (Nat. Pflanzenfam., Nachtrag, p. 149, 1897). Rs er ANNALES ENCES NATURELLES HUITIÈME SÉRIE COMPRENANT \ OM, LA. | PHYSIOLOGIE ET LA CLASSIFICATION DES EG JÉTAUX VIVANTS ET lOSSILES _ PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION DE _ M. PH. VAN TIEGHEM Mes N°" 3 dr | MASSON ET Ci. ÉDITEURS LIBRAIRES DE L'ACADÈMIE DE MÉDECINE La 120, BOULEVARD SAINT-GERMAIN 1899 horanous | PARIS, 30 FR. — DÉPARTEMENTS ET ÉTRANGER, 32: FR. cs a été publié en octobre 1899. ales des Sciences naturelles paraissent par cahiers mensuels. HUITIÈME SÉRIE BOTANIQUE Publiée sous la direction de M. Pu. Van Tikçuem L'abonnement est fait pour 2 volumes, chacun d’environ 400 pages, avec les planches et les figures dans le texte correspondant aux mémoires. | cn Ces volumes paraissent en ni. fascicules dans l'intervalle d'une année. Les tomes I à IX sont complets. à | ZOOLOGIE Publiée sous la direction de M. À. MINE ED WaRDS. L'abonnement est fait pour 2 volumes, chacun d' environ 409 pages, avec les planches correspondant aux mémoires. Ces volumes pen en site RÉPICU dans l'intervalle. d'une année. : Les tomes I à IX sont complets. Prix de l'abonnement à 2 volumes : Paris : 30 francs. — Départements et Union postale : 32 francs. ANNALES DES SCIENCES GÉOLOGIQUES Dirigées, pour la partie géologique, par. M. HésEerr, et pour la partie paléontologique, par M. A. MILinE- EDWARDS. Tomes I à XXII (1879 à 1891). Chaque volume... SAS TES Cette publication est désormais confondue avec celle des Annales des Sciences naturelles. Prix des collections. PREMIÈRE SÉRIE (Zoologie et Botanique réunies), 30 vol. (Rare). DEUXIÈME SÉRIE (1834-1843). Chaque partie 20 vol. 250 fr. TROISIÈME SÉRIE (1844-1853). Chaque partie 20 vol. 250 fr. QUATRIÈME SÉRIE (1854-1863). Chaque partie 20 vol. 250 fr. CINQUIÈME SÉRIE (1864-1874), . Chaque partie 20 vol. 250 fr. SIXIÈME SÉRIE (1875 à 1884). Chaque partie 20 vol. 250 fr... SEPTIÈME SÉRIE (1885 à 1894). Chaque partie 20 vol. 300 fr. : GÉoLociE, 22: volumes. ee eu ee SO Fr. : | ; oi + # 13 j ; SUR LES COULACÉES. 129 neux albumen, creusé d’une cavité axile et renfermant dans sa région supérieure un pelit embryon à radicule supère (1). Cet albumen est intimement réuni à l'endocarpe par une couche subéroïde, dissociée en petites écailles composées _ de cellules brunâtres et écrasées. L'origine de celte couche devra être précisée par l'étude du développement. Si elle provient de la zone interne de la paroi cvarienne, partielle- _ ment digérée par l'albumen, il n’y a pas de graine, le fruit est inséminé: c'est ce que j'ai admis. Si, au contraire, il venait à être démontré qu’elle procède de la zone externe _ du tégument ovulaire externe, elle consliluerait un tégu- ment séminal, et le fruit devrait être regardé comme ren- fermant une graine soudée au péricarpe. _ Quoi qu’il en soit, l’albumen a toutes ses cellules bourrées de grains d’amidon sphériques, à l'exception de son assise périphérique, qui en est dépourvue. Formée de cellules plus petites, à membrane épaissie et eutinisée sur la face externe, cette assise constitue ict une assise digestive, aussi nettement différenciée que celle des Graminées. L’albumen contient d’ailleurs aussi de la matière grasse et laisse, après écrasement, des laches, durables sur le papier. Il est donc oléo-amylacé et c’est par erreur que Baillon l'a décrit comme étant simplement charnu (2). On sait que les indigènes de l'Afrique occidentale s’en nourrissent ; son goût rappelle celui de la Châtaigne; d'où la plante a reçu son nom spécifique de Coule comestible (Couwla edulis Baillon). Situé dans la région supérieure de l'albumen et com- …._ plèlement enveloppé par lui, l'embryon a une grosse tüigelle renflée en boule, terminée en haut par une courte radicule, en bas par deux colylédons appliqués, minces et (4) L'existence de cette cavité axile a conduit Baillon à penser que le tissu nutritif en question est d’origine purement nucellaire, en un mot, est un périsperme (loc. cit., p. 63). Pour qu'il en fût ainsi, il faudrait que cette . cavité axile fût en continuité directe avec celle où est logé l'embryon, ce qui n’est pas. Ce Lissu a tous les caractères d'un véritable albumen, (2). Adansonia, IE, p. 63 et p. 64, 1862. ANN. SC, NAT. BOT. es 130 PH. VAN TIEGHEM. élroils ; il a donc la forme d’une poire; en un mot, il est macropode. Comme l’albumen, il est oléo-amylacé. 2. Caractères dfférentiels de ces trois genres. — Ayant ensemble lant de caractères communs, ces lrois genres se trouvent être très voisins l’un de l’autre, séparés seulement par de faibles différences, qu'il faut maintenant préciser. Le genre Coule {Coula) a été décrit et figuré en 1862 par Baillon, qui l’a rattaché aux Olacacées (1). L'étude que j'en ai faile en 1895 m'a conduit à le séparer des Olacacées pour en faire le type de la famille qui est l’objet du travail actuel (2). La corolle y est faiblement gamopétale, ce qui explique que Baiïllon y ait cru les pétales libres et les éta- mines indépendantes des pétales. L’androcée compte vingt élamines, concrescentes à la base avec le tube de la corolle, cinq épisépales et quinze disposées lrois par trois devant chaque pétale. Le pislil n’a que trois carpelles, formant un ovaire triloculaire. On n’en connaît qu'une espèce, le Coule comestible (Coula edulis Baillon), qui croît au Gabon ou Congo français, dont les indigènes le nomment n’coula, etaussi, d'après M. Engler, au Kameroun, où on l'appelle 7 gouma. Le genre Ochanostache (Ochanostachys) à élé établi en 1872 par M. Masters, qui l’a classé dans les Olacacées (3). IL a été constitué de nouveau en 1883 par M. Beccari, sous le nom de Pefalinia (4), puis éludié plus complètement, en 1886, par M. Valelton, qui y a constaté notamment l'exis- tence de {ubes laticifères et de poches à résine (5). L'examen de l'échantillon de son herbier, que M. Beccari a mis obli- geamment à ma disposition, m'a conduit, en 1897, à retirer (1) Baillon, Deuxième Mémoire sur les Loranthacées (Adansonia, IN, p. 61, pl. IT, 1862). (2) Ph. van Tieghem, Sur le Coula edulis (Bulletin du Muséum, I, p. 266, 1895). (3) Dans Hooker, Flora of British India, 1, p. 576, 1872. (4) Beccari, Malesia, I, p. 257, 1883. (5) Valeton, Critisch Overzicht der Olacineæ, p. 100, 1886. SUR LES COULACÉES. 19 ce genre des Olacacées pour le classer fout à côlé du Coule, dans la famille des Coulacées (1). La corolle y est faiblement gamopétale, ce qui explique que les pétales aient pu y êlre décrits comme libres par les trois auteurs précédents. L’androcée à quinze élamines, superposées trois par lrois aux pétales; les cinq étamines épisépales du Coule font ici défaut. Le pistil n’a que trois carpelles, concres- cents en un ovaire triloculaire. Ce genre comprend deux espèces, savoir : l'O. amentacé (O. amentacea Masters), de Malacca ef de Bornéo, et l'O. de _ Banca (0. bancana Beccari), de Sumalra, Banca et Lienga, où les indigènes le nomment petaling. Le genre Minquart (Minquartia) a élé fondé dès 1775 par Aublet, qui n'en a pas vu les fleurs et lui a attribué ur fruit qui ne lui appartient pas (2). Il a été constitué à nou- veau en 1862, sous le nom de Secretania, par Müller, qui Va classé dans les Euphorbiacées de la tribu des Phyllan- _thées (3). C’esl encore sous ce nom el à cette place qu'il figure en 1890 dans le grand ouvrage de M. Engier (4). Pourtant Baillon en avait, dès 1886, mieux compris les caractères et mieux apprécié les affinités lorsqu'il l'avait rattaché aux Olacacées, en le regardant comme voisin des Heistéries (Heisteria) (5). En l'étudiant à mon tour en 1896, j'ai montré qu'il doit être certainement retiré des Olacacées et rangé à côlé du Coule, dans la famille des Coulacées (6). La corolle y est forlement gamopétale el campanulée; aussi est-il difficile de comprendre comment Baillon à voulu y voir une corolle dialypélale. L’androcée, longue- (1) Ph. van Tieghem, Sur les Phanérogames sans graines formant la division des Inséminées (Bull. de la Soc. bot., 26 février 1897, XXXIV, p. 125). (2) Aublet, Histoire des plantes de la Guyane françuise, I, Suppl, p. #, -pl. CCCLXX, 1775. (3) A.-P. de Candolle, Prodromus, XV, p. 2, p. 227, 1862. (4) Engler, Nat. Pflanzenfam., UE, 5, p. 27, 1890. Sal (5) Baillon, La place du Minquartia d'Aublet (Bull. de la Soc. linnéenne de _ Paris, p. 585, 1886). (6) Ph. van Tieghem, Sur les Phanérogames à ovule sans nucelle formant le groupe des Innucellées ou Santalinées (Bull. de la Soc. bot., 27 novembre 1896, XXXIIL, p. 564). 152 PH. VAN TIEGHEM. ment concrescent au tube de la corolle, na que dix élamines, cinq épisépales et cinq épipétales; ce sont les dix étamines superposées par paires aux flancs des pétales qui avorlent ici. On verra tout à l’heure par quelle sorte d'erreur Baillon a pu assigner à ce genre quinze élamines, cinq épisépales el dix superposées par paires aux pétales. Le pistil a normalement cinq carpelles concrescents en un ovaire à cinq loges, souvent réduit à quatre par avortement d'une loge, dont on relrouve cependant la trace. L’ovule offre sur la face externe du funicule, au niveau du hile, une pelite protubérance en forme de corne. La feuille renferme dans son écorce des sclérites à mem- brane lignifiée, dont le point de départ est l'arc fibreux supraligneux des méristèles et dont quelques-unes traversent l'assise palissadique et viennent ramper sous l’épiderme, sclérites qui font défaut dans le Coule et POchanostache. Enfin, ce genre est encore remarquable par ce que le tronc âgé v offre de nombreuses et profondes excavations, tapissées par l'écorce, qui, parfois même, le traversent de part en part; celte singulière conformation n’a pas été observée dans les deux autres genres. Il ne comprend jusqu'ici qu'une seule espèce, le Minquart de la Guyane (Minquartia quianensis Aublet = Secretania loranthoidea Müller), qui croît à la Guyane française (Ka- rouany, Maroni, île Portal), où les indigènes le nomment Mincoa. 3. Sur le genre Enduse, considéré comme membre nouveau de la famille des Coulacées. — Reconnu dès 1851 par Miers, qui n’a fait que le nommer parmi les autres genres dont il composait sa famille des Olacacées (1), le genre Enduse (Endusa) à été relégué parmi les genres douteux, à la suite des Olacacées, par MM. Bentham et Hooker, en 1862, principalement à cause de sa corolle gamopétale et de son (4) Miers, Observations on the affinities of the Olacuceæ (Ann. nat. hist., 2e série, VIII, p. 172, 1851). SUR LES COULACÉES. 133 ovaire complèlement quadriloculaire (1). En 1886, M. Radiko- fer, qui l’a maintenu pourtant dans les Olacacées, en a donné une description générique exacte et complète, suivie d’une description spécifique de la plante récoltée au Pérou (Chicoplaya) par Pavon, qu'il a nommée E. ponctué (£. punctata Radl.) (2). M. Engler n’en a pas moins considéré, en 1897, ce genre comme encore insuffisamment connu, bien qu'appartenant probablement aux Olacacées (3). J'ai pu récemment, grâce à l’obligeance de M. Autran, éludier à mon {our la plante de Pavon, conservée actuelle- ment dans l’Herbier Boissier, et Je me suis assuré qu’elle possède, dans toutes ses parties, tous les caractères de forme et de structure décrits plus haut comme appartenant en commun aux trois genres Coule, Ochanostache et Min- quart. Elle offre notamment dans ses divers membres, comme l’a signalé M. Radilkofer, à la fois ces tubes latici- fères non cloisonnés, anastomosés çà et là en réseau, et ces poches sécrétrices à résine brune, dont la coexistence carac- térise d’une manière si frappante ces trois genres, comme il a été dit plus haut. L’inflorescence, la conformation de la fleur, la structure du pistil et celle des ovules sont aussi de tout point semblables. Le fruit en est encore inconnu. Il est donc bien certain que ce genre doit être reliré des Olacacées et classé, à côté des trois précédents, dans la famille des Coulacées. I ne diffère même de ces lrois genres que très peu, à peu près aulant que ceux-ci diffèrent entre eux. D'abord, l'écorce de la feuille renferme des sclériles à membrane lignifiée, dont bon nombre traversent verlicale- ment la couche palissadique pour venir s'appuyer el même ramper sous l’épiderme; de là une ressemblance avec le Minquart, où les sclérites sont pourtant moins développées (1) Bentham et Hooker, Genera, 1, p. 345, 1862. (2) Radlkofer, Neue Beobachtungen über Pflanzen mit durchsichtig punktirte Blätter (Sitzungsber. der Akad. der Wiss. zu München, XVI, p. 311, 1886). (3) Engler, Nat. Pflanzenfam., Nachtrag, p. 149, 1897. 134 PH. VAN TIEGHEM. qu'ici. La corolle y est fortement gamopélale et les élamines y sont longuement concrescentes au tube de la corolle, comme dans le Minquart. Comme dans ce genre aussi, les élamines sont au nombre de dix, cinq épisépales et cinq épipétales. Enfin l'ovaire est, ici aussi, normalement à cinq loges, se réduisant souvent à quatre, il est vrai, par avor- tement de la cinquième dont on retrouve pourtant la trace. L'ovaire devient uniloculaire tout en haut, au-dessus de l’inserlion des ovules, sous la base du style, et le sommet du placente s’y termine en un cône, contre lequel vient s'appliquer un bouchon cylindrique de tissu conducteur qui descend de la base du siyle. En outre, l’ovule est dépourvu de la prolubérance dorsale qu'il possède dans le Minquart. Celle légère différence dans la structure du pistil et de l'ovule, même jointe à quelques autres d'aussi faible impor- tance dans le détail desquelles on ne saurait entrer ici, suflil- elle à justifier la séparation générique de la plante du Pérou et de celle de la Guyane ? Il faut convenir, en tout cas, que ces deux genres sont extrêmement voisins. Le genre Enduse _n'a d’ailleurs aussi qu'une seule espèce : l'E. ponclué (En- dusa punctata Radl.). 4. Sur le genre nouveau Eganthe, de la famille des Cou- lacées. — Pæœppig a récolté au Brésil occidental, sur la rive gauche de l’Amazone, à Ega (Teffé), et distribué sous Île n° 2880, une plante que Baillon a identifiée à tort, en 1886, au Minquart de la Guyane (1). Elle lui ressemble, en effet, mais elle ressemble tout autant à l'Enduse du Pérou, et elle diffère de ces deux genres à la fois par des caractères qui suffisent à définir un genre nouveau, que je nommerai Eganthe (Æ£qanthus), d’après son lieu d’origine ; l'espèce sera l’'Eganthe de Pœppig (£ganthus Pœppigu). On y relrouve d’abord, dans la forme et dans la struc- Lure, tous les caractères possédés en commun par les quatre genres précédents, notamment la présence simultanée d'un (1) Baïllon, Loc. cit. Ro SUR LES COULACÉES. 135 ‘système de tubes rameux à latex incolore et d’un système de poches sécrélrices à résine noirâtre, et aussi la confor- mation si remarquable du pistil et des ovules. C’est donc bien une Coulacée. La feuille n'offre pas dans son écorce les sclérites que l'on rencontre, plus ou moins développées, dans le Minquart el dans PEnduse. La corolle est fortement gamopétale et l'androcée est concrescent au tube de la corolle. Il y a quinze élamines, cinq épisépales et dix superposées par paires aux pélales ; ce sont donc ici les épipétales médianes qui avorlent, landis que dans l’Ochanostache c'étaient les épisépales, et que dans le Minquart et l’Enduse c'étaient les épipétales latérales. C’est sans doute pour avoir étudié l’'androcée dans cette plante, qu'il lui croyait identique, que Baïllon a attribué au Minquart quinze étamines, comme il a élé dit plus haut. Le pistil n’a que trois carpelles, par avortement des deux autres, comme dans le Coule et l’'Ochanostache. Le fruit en est inconnu. Ainsi caractérisé, le genre Eganthe ressemble beaucoup plus à l’Ochanostache qu'à l'un ou l’autre des deux genres américains dont il sépare les aires géographiques. 5. Constitution actuelle de la famille des Coulacées et affi- nités de cette famulle. — La famille des Coulacées comprend done actuellement cinq genres, tous très voisins l’un de l'autre, les deux plus voisins, puisqu'ils ont même androcée et même pislil, étant le Minquart de la Guyane et l'Enduse du Pérou, les autres se distinguant facilement par la confor- mation de l’androcée, comme le montre le tableau suivant : / D ORÉAMINES. CN Ne ALES Pere Coula. à 3 loges, URI toutes épipétales. Ochanostachys. ’ 15 étamines MS AUREe me COULACÉES. dont 5 épisépales. Eganthus. Ovaire à 4-5 loges. à protubérance dorsale...... Minquartia. 10 étamines. Ovule | sans protubérance dorsale.... Endusa. Très homogène, comme on voit, ce petit groupe à pour- 136 PH. VAN TIEGHEM. tant une aire géographique très étendue, puisqu'elle com- prend la Malaisie et la presqu'île malaise, l'Afrique occiden- tale, la Guyane, le Brésil et le Pérou. : Si l’on cherche maintenant à préciser les affinités de celte famille, on voit que c’est à côté des Heistériacées qu’elle doit prendre place. Elle possède, en effet, un système de tubes laticifères semblable à celui qui est bien connu chez les Heistériacées. La corolle y est gamopélale, comme chez les Heistériacées. Le pistil a aussi la même conformalion et les ovules la même structure que chez ces plantes. Enfin, le fruit, pour autant qu'il est connu, y est également une drupe inséminée. | Il y a cependant entre ces deux familles des différences, qui suffisent à les maintenir dislincles. Les Heistériacées ne possèdent pas les poches sécrétrices à résine brune des Coulacées. Le calice yestplus ou moins accrescent autour du fruit el, dans ce dernier, l’albumen est exclusivement oléagi- neux, au lieu d’être oléo-amylacé, comme chez les Coulacées. [Il n'en resle pas moins que ces deux familles doivent être placées l'une à côté de l’autre dans le groupe des Insémi- nées ténuinucellées bitegminées à corolle gamopétale qui conslitue l'alliance des Heistériales. Remarquons, en lerminant, que la coexistence de deux appareils sécréteurs aussi différents que le sont les tubes lalicifères rameux à suc incolore et les poches sécrélrices schizogènes à résine brune, telle qu'on la rencontre chez les Coulacées, est un caractère très rare et qui ne se retrouve peut-être nulle part ailleurs chez les Dicotylédones. On observe bien quelquefois ces deux appareils dans la même famille, mais ils s’y remplacent, se suppléent l’un l’autre, de tribu à tribu, sans coexister. Ainsi, par exemple, chez les Composées, les Liguliflores ont des réseaux laticifères, pas de canaux sécréteurs oléifères, tandis que les Radiées ont des canaux sécréteurs oléifères, pas de réseaux laticifères. À mon sens, c'est là surtout ce qui donne aux Coulacées un grand intérêt au point de vue de la Science générale. SUR LES GENRES ACTINIDIE ET SAURAVIE CONSIDÉRÉS COMME TYPES D'UNE FAMILLE NOUVELLLE, LES ACTINIDIACÉES Par M. PE. VAN TIEGHEM. Les affinités des Aclimidies (Actinidia Lindlevy) el des Sau- ravies (Saurauia Willdenow), ainsi que la place qu'il convient de leur attribuer dans la Classification des Dicotylédones, ne sont pas encore définitivement fixées. Ces deux genres sont, en effet, Llantôt séparés dans des familles distinctes, le premier parmi les Dilléniacées, le second parmi les Ternstræmiacées, nommées aujourdhui Théacées (Endlicher, 1840; Bail- lon, 1867 et 1873), lanlôl réunis côle à côle dans la même famille, soit chez les Dilléniacées {(Engler et Gilg, 1895), soit chezles Théacées (Bentham et Hooker,1863; Solereder,1898). En introduisant dans la question un caractère nouveau, l'étude de la structure de l’ovule vient apporter au problème une solution précise et inaltendue. Elle montre, en effet, que, si ces deux genres se ressemblent entre eux sous ce rapport, ils diffèrent trop profondément à la fois des Dilléniacées et des Théacées pour pouvoir être maintenus dans l’une ou l’autre de ces. deux familles. Ils doivent donc consliluer ensemble une famille autonome, et cette famille nouvelle doit prendre place dans la Classification assez loin des deux précédentes. 1. Sur le genre Actinidie. — Fondé en 1836 par Lindley, le genre Aclinidie comprend actuellementune douzaine d’'es- pèces, croissant dans l'Inde, en Chine et au Japon. Ce sont 138 PH. VAN TIEGHEM. des arbustes à tige ordinairement volubile, à feuilles isolées, simples el sans stipules, "pÉDO ee à limbe penninerve entier ou denté. Ressemblant aux Dilléniacées par l'abondance des cellules à raphides qui sont disséminées dans loutes les parties du corps, ces plantes en diffèrent déjà netlement, comme on sait, par leurs anthères dorsifixes et oscillantes, par leurs carpelles nombreux et concrescents jusqu’à la base des styles en un ovaire multiloculaire, enfin par leur grand embryon. La différence devient beaucoup plus profonde encore si l’on considère la structure des ovules, ce qui n’a pas été fail jusqu'ici. Dans le pislil dialycarpelle des Dilléniacées, les ovules anatrope sont un gros nucelle persistant, recouvert de deux téguments, tantôt également épais, complant quatre à six assises chacun (Delima, Tetracera, elc.), lantôt d'inégale épaisseur, l’externe plus mince n’ayant que deux (Hibbertia) ou trois assises (Candollea), tandis que l’interne en a trois ou quatre (Æibberha, elc.) et jusqu'à six (Candollea). En un mot, l'ovule de ces plantes est crassinucellé bitegminé. Dans le pistik gamocarpelle des Théacées, les ovules ana- tropes ont un nucelle mince et lransitoire, ayant disparu autour de l’endosperme au moment de l'épanouissement, enveloppé de deux téguments épais, dont linterne traverse l’exostome sans le dépasser notablement. En un mot, l’ovule de ces plantes est ténuinucellé bilegminé. Dans le pistil des Actinidies, qui est gamocarpelle comme celui des Théacées, les ovules, insérés en une seule série à l'angle interne de chaque loge, sont anatropes horizontaux. Ils n'ont qu'un seul tégument très épais, dont l’épiderme in- terne, formé de cellules courtes et allongées radialement, est nettement différencié. Très mince dans le jeune âge, où il est réduit à une seule file de cellules enveloppée par l’épiderme, le nucelle est entièrement résorbé par l’endosperme bien avant la formation de l'œuf. En un mot, l’ovule de ces plan- tes est {énuinucellé unitegminé. SUR LES GENRES ACTINIDIE ET SAURAVIE. 139 Par la structure de leur ovule, les Aclinidies diffèrent donc profondément à la fois des Dilléniacées et des Théacées el doivent être séparées de ces deux familles. 2. Sur le genre Sauravie. — Créé en 1801 par Wildenow, le genre Sauravie comprend aujourd’hui uñe soixantaine d’es- pèces croissant dans les régions tropicales de l’Asie et de l'Amérique. Ce sont des arbres ou des arbustes à feuilles isolées, simples et sans slipules, pétiolées, à limbe ovale penninerve souvent denté. Comme les Aclinidies, ces plantes ont dans toutes les par- lies du corps de nombreuses cellules à raphides; comme les Actididies aussi, elles ont les anthères dorsifixes et oscil- Jantes, les carpelles concrescents jusqu'à la base des styles et un grand embryon. La ressemblance apparaît plus frap- pante encore si l’on étudie la structure des ovules. Insérés en grand nombre sur un placente saillant à l'angle interne de chaque loge de l'ovaire, les ovules des Sauravies sont anatropes. Ils ont un seul tégument épais, dont l’épi- derme interne, formé de cellules courtes et allongées radia- lement, est nettement différencié. Ce tégument recouvre un nucelle mince el transitoire, qui a complètement disparu autour de l’endosperme dès avant la formation de l'œuf. En un mot, l’ovule de ces plantes est ténuinucellé unitegminé. __ Par cette structure de l’ovule, les Sauravies s’éloignent, _ tout autant que les Aclinidies, des Dilléniacées et des Théa- cées et, comme elles, ne peuvent plus désormais être clas- sées ni dans l’une ni dans l’autre de ces deux familles. Conclusion. — Les genres Aclinidie et Sauravie ayant en commun, outre la présence de raphides, les étamines à anthères oscillantes. les carpelles concrescents en un pistil gamocarpelle, et surtout la remarquable conformation de l'ovule, qui est ténuinucellé unitegminé, doivent être séparés désormais des Dilléniacées et des Théacées, et réunis dans une même famille, qu'on nommera les Ac/onidiacées. 140 PH. VAN TIEGHEM. Cette famille prendra place dans l'ordre des Ténuinucel- lées unilegminées, tandis que les Dilléniacées font partie de l'ordre des Crassinucellées bilegminées et les Théacées de l'ordre des Ténuinueellées bitegminées. INFLUENCE DES DIRFÉRENTES RADIATIONS LUMINEUNES SUR LA FORME ET LA STRUCTURE DES PLANTES Par M. E. TEODORESCO. INTRODUCTION Parmi les facteurs qui agissent le plus sur les plantes, la lumière est, sans contredit, l’un des plus importants. Les rayons lumineux pénèlrent, en effet, dans l’intérieur du corps des végétaux à des profondeurs variables avec leur intensité et leur réfrangibilité ; là, leur énergie est employée à l’accomplissement des divers phénomènes physiques et chimiques. On comprend donc que l'influence de la lumière ait été l’objet de l'attention de nombreux botanistes. Les premières recherches qui ont été faites à ce point de vue sont d'ordre à peu près exclusivement physiologique. Ce n'est qu'un peu plus tard, quand on se ful rendu comple de importance qu'avait l'influence du milieu sur la structure des végétaux, que l'on songea à déterminer dans quelle mesure les radialions lumineuses élaient susceptibles de produire des modifications anatomiques dans le corps des organismes végélaux. D'autre part, les anatomistes et les physiolo- gistes étudièrent, comme il élait naturel, l'influence de la lumière blanche, telle qu’elle nous vient du soleil ou d’une source arlificielle. Mais ce n’était là qu'une parlie de Ja question : la lumière blanche est, en effel, formée par la réunion de rayons lumineux de différentes couleurs, qu'il est 142 E. TEODORESCO. facile d'isoler par divers procédés, pl d’un prisme par exemple. Partant de celte considération, les botinises songèrent à comparer l’action de chaque rayon, pris isolément, à celle de la lumière lotale. Là, encore, les premières recherches ont été failes par des physiologistes, et jusqu à présent ce sont à peu près les seules qui nous aient fourni des résultats importants. À ma connaissance, en effet, aucun auteur na étudié, d’une manière suivie, l'influence des radialions des diffé- rentes réfrangibilhités sur la forme et surtout sur la structure des divers organes de la plante. Celte question a élé négligée, et, cependant, analyser le phénomène de l'influence de la lumière sur la structure est, Je crois, au moins tout aussi important qu'analyser le phénomène de la production de la chlorophylle, de l'assimilation de l'acide carbonique, de la transpiration, etc., sous l'influence du même agent. Il est bien éidenl que, connaissant l’action des différentes radiations sur la décomposition de l’acide carbonique, on ne peut pas en déduire que les changements de structure doi- vent varier dans le même sens, et cela pour plusieurs motifs. Dans son classique Manuel de Botanique, Sachs (1) résume, comme il suit, le rôle des différentes radiations sur les phénomènes qui se passent dans la plante: « Tous les phénomènes chimiques, tous ceux au moins qui dépendent de la lumière, sont provoqués exclusivement ou principale- ment par des radiations de faible ou de moyenne réfrangi- bilité, c'est-à-dire par des radialions que notre œil voit rouges, orangées, jaunes ou vertes ; il en est ainsi de la pro- duclion de la chlorophylle, de la décomposition de l’acide carbonique, de la formation de l’amidon, de la production des sucres, des substances grasses, etc. Au contraire, les radiations fortement réfrangibles, les unes visibles, comme les bleues et les violettes, les autres invisibles, comme les (1) Sachs, Lehrbuch der Botanik, 4° Auflage, 1874. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 145 radialions ultravioleltes, délerminent exclusivement ou principalement des changements mécaniques, tous ceux au moins qui dépendent de la lumière : ce sont, en effet, ces radiations qui modifient la vilesse de la croissance, qui influent sur les mouvements du protoplasma, qui impriment aux mouvements des zoospores une direction déterminée, qui modifient enfin a tension des tissus dans les organes moteurs de beaucoup de feuilles et qui changent, par consé- quent, la situation de ces feuilles. » Les recherches qui ont été faites depuis sont venues mo- difier en parlie, d'autre part compléter les énoncés de Sachs. C'est ainsi que, dans le spectre visible, le maximum de la formalion de la chlorophylle correspond à peu près au mi- nimum de l'énergie assimilatrice et vice versa. L’assimilation des substances minérales est variable avec la nature des radiations : ainsi, de nouvelles recherches semblent démon- rer qu'il n’y à pas assimilation de l'azote nitrique par les feuilles vertes placées derrière une solution de bichromate de potassium ou de sulfate de quinine ; mais celle assimilation est très active sous une solution de sulfate de cuivre ammo- niacal ou sous l’eau. Avec les feuilles blanches de la même espèce de plante, il n’y a qu’une assimilation minime et peut-être nulle de l'azote ammoniacal à travers les solutions de bichromate de potassium où derrière une solution de sulfate de quinine, tandis qu'à lravers l’eau ils’en produit une consi- dérable. L’assimilation de l’ammoniaque et des nitrates est donc stimulée par les rayons ultraviolets. Or, étant donnée l'importance de l'azote dans la synthèse des substances albu- minoides, el l'influence qu'exercent les radiations sur l’assi- milation de ce corps, il est à présumer que celte action retentira sur la structure des plantes exposées à des radia- Uüons différentes. D'autre part, ainsi que nous allons le voir dans l'aperçu historique, la production de substance organique parait varier également avec la nature des radiations; c'est ainsi qu'on prétend que la plus grande parlie des substances 144 E. TEODORESCO. organiques se forme, par ordre d'importance décroissante, dans le jaune, le rouge et le bleu. On voil, en résumé, que toutes les radiations n ‘agissent pas dans le même sens, les unes accélèrent un phénomène et en diminuent un autre, tandis que les radiations voisines font précisément l'inverse, etc. Le simple raisonnement ne suffit done pas à faire deviner comment chaque radiation modifie la structure anatomique des plantes, el des recher- ches spéciales n’ont pas encore été failes pour résoudre cette question. Le présent travail à pour but d'essayer de combler celte lacune. Dans ce qui suit, je donnerai d’abord un aperçu historique des principales recherches relatives à l’action des diverses radiations sur la morphologie générale des végétaux. J'expo- serai ensuite les résultats de mes propres expériences; je terminerai en énonçant les conclusions générales el en m'efforeant de les interpréter. | APERÇU HISTORIQUE Mon intention n'est pas de passer en revue toutes les recherches qui ont été faites jusqu'à présent concernant l'influence des radiations de différentes réfrangibilités sur les plantes. Je laisserai de côté tout ce qui a trait à la phy- siologie proprement dite, et surtout les phénomènes photo- chlorophylliens, la respiration et la transpiration, qui ne touchent qu'indireeltement à mes recherches; je résumerai seulement les travaux qui s'occupent du développement des plantes, de leur forme et de leur structure, ainsi que des différentes substances qui se forment dans les cellules. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 145 ÏI. — Germination. Pfeffer (1), qui à fait des expériences sur les propagules de Marchantia polymorpha, Leitgeb (2) sur les spores des Hépatiques (Duvalia, Preissia), Borodine (3)sur les spores des Cryplogames vasculaires, de Polytrichum commune et les propagules de Marchantia polymorpha, élaient unanimes à admettre que la lumière est indispensable à la germination. Mais dernièrement Forest Heald (4) a trouvé que les spores des Mousses el des Hépaliques ne germent qu'à la lumière si elles n’ont à leur disposilion que des substances minérales ; mais si les solutions nutrilives contiennent des substances organiques (sucre, peptone), les spores peuvent germer aussi à l'obscurité. D’après le même auteur, les spores des Équi- sélacées germent à l'obscurité, même si elles sont semées dans des solulions minérales. Il en est de même des spores des Fougères, pourvu que la lempérature soil assez élevée(32°). D'après Peyritch et Wiesner (5), les graines de Viscum album ne germent pas à l’obscurité. Quant aux graines des autres Phanérogames, il semble qu'en général leur germination est indépendante de la lumière. Mais il faut bien dire que les résullats oblenus par les différents expérimentateurs sont contradictoires. C'est ainsi que les anciennes recherches de A. von Humboldt (6), Senebier (7), Ingen-Houss (8), Hunt (9), elc., avaient donné (1) Pfeffer, Studien ueber die Symmetrie, etc. (Arbeïten d. bot. Inst. zu Würzburg, Bd I, p. 93). (2) Leitgeb, Die Keimung der Lebermoossporen (Sitzungsber. d. Akad. d. Wiss. Wien, |, 1876). (3) Borodine, Bull. de l'Acad. de Saint-Pétersbourg, 1868, XII, p. 432. (4) Forest Heald, Condition for the Germination of the spores, etc. (Botani- cal Gazette, XX VI, 1898). (5) Wiesner, Die heliotropischen Erscheinungen im Pflanzenreiche, Y Theil, 1878, p. 42. (6) A. von Humbold, Aphorismen (Deutsch von Fischer, 1794). (7) Senebier, Physiologie végétale, t. HE, p. 396. (8) Ingen-Houss, Versuche mit Pfianzen, BdIl, 1788, p. 25. (9) Hunt, Untersuch. ueber d. Einfluss d. Sonnenstrahlen auf d. Wachstum d. Pfanzen (Botanische Zeitung, 1851, p. 304). ANN. SC. NAT. BOT. x 010 146 E. TEODORESCO. comme résullal que les graines germent plus vite à l’obscu- rilé. . Th. de Saussure (1), au contraire, croit pouvoir conclure de ses expériences que rien ne démontre que la lumière ail, abstraction faile de la chaleur qui l’accompagne, une in- fluence nuisible sur la germinalion. Depuis de Saussure, un assez grand nombre d’auleurs se sont occupés de l'influence de la Iumière sur la germinalion; mais je ne mentionnerai que les travaux les plus récents. C'est ainsi que Slebler (2) avait prétendu que l'obscurité relarde considérablement la germination des différentes Graminées,; pour le Poa nemoralis, par exemple, la propor- lion des graines ayant germé à l’obscurité à été de 3 p. 100, tandis qu’à la lumière ce nombre s'élevait à 62 p. 100. Mais Nobbe(3), qui a repris les expériences de Stebler, a lrouvé, contrairement à l'opinion de ce dernier auteur, que les graines de Graminées germent plus vite, plus unifor- mément el mieux à l'obscurité qu à la lumière. Adrianowsky (4) arrive, pour d'autres plantes, aux mêmes résullats que Nobbe. D'après lui, les graines qui germent en un jour présentent une différence souvent très grande en faveur de l’obseurité. Ainsi, par exemple, le rapport des graines germées à la lumière el à l'obscurité a élé, pour le Cannabis sativa 9 : 12, pour le Brassica Napus 17 : 62, pour le Holcus lanatus 24:53, etc. Quand la germinalion dure plusieurs jours, on observe le même fait pendant toute la durée de la germination. Seules les graines qui germent très vite, comme par exemple celles du Sperqula arvensis, émettent leur radicule en même temps à la lumière et à l'obscurité ; cependant, à une basse tempéralure, la germination a lieu, même dans ce dernier cas, plus rapidement à lobscurité. ) Th. de Saussure, Recherches chimiques sur la végétation, 1804, p. 24. } Stebler, Botan. Centralblatt, Bd VI, 1881, p. 157. ) Nobbe, Uebt dus Licht einen vortheilhaften Einfluss auf die Keimung der Grassamen ? (Landw. Versuchsstationen, Bd XX VII, 1882, p. 347). (4) Adrianowsky, Wirkung des Lichtes auf die Keimung, résumé dans Île Bot. Centralbl., 1884, n° 29, p. 73. (4 (2 (3 INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 147 L'influence des radiations de différentes réfrangibilités sur la germinalion des graines a été l’objet des recherches de nombreux botanistes. Senebier a obtenu des résultats qui ont élé controuvés par Zantedeski (1). Dans les expériences de Senebier, la rapidité de la germination va en croissant du violel au rouge; dans les observations de Zantedeski, elle croît, pour les graines de l’Iberis amara, du rouge au jaune. De même, le développe- ment de la pousse des bulbes de l'Oxalis multiflora, croît du rouge au jaune el au violet. | Les résultats obtenus par d’autres auteurs anciens, comme Morren (2), Pieper (3), Hunt (4), sont {out aussi conlradic- loires. Faivre (5) a trouvé que les graines, placées dans la lumière jaune, oblenue par une solution de bichromate de potassium, développent leur chlorophylle plus rapidement que dans la lumière bleue, obtenue par l’oxyde de cuivre ammoniacal, et il prétend déduire de ce fait que la période de germination a élé plus courte dans le premier cas que dans le second. Dans le travail d’Adrianowsky (6) cité plus haut, on trouve, comme moyenne de vingt expériences, les résultats suivants : Lumière blanche. Obscurité. Violet. Bleu. Vert. Orangé. Rougr. Graines sermées. 350/, 580), 1 560, . 490), :990/, «480/, 470ÿ Par conséquent, les graines germeraient plus vite derrière les verres colorés que derrière le verre incolcre, mais moins vite que dans l'obscurité; dans la moitié la plus réfran- (4) Zantedeski, De l'influence qu'exercent sur la végétation des plantes et lo germination des graines les rayons sulaires transmis à travers des verres colo- rés (C. R. de l’Acad. des Sc., t. XVII). (2) Morren, Sur l'influence des rayons colorés sur la germination (Ann. des Sc. nat., 1832). (3) Cité par Fleischer, Beiträge zur Lehre von dem Keimen der Samen der Gewächse, 1851. (4) Cité par Fleischer, loc. cit, (5) Faivre, C. R. de l’Acad. des Sc., 24 février 1879. (6) Adrianowsky, Loc. ci. 148 E. TEODORESCO. sible du spectre, les graines germent un peu plus vile que dans la moilié la moins réfrangible, et surtout que dans le vert, dont l'influence retardalrice est plus grande que celle de la lumière blanche. | Enfin M. Flammarion (1) assure que pour « les semis qui ont été fails en mai, les plantes avaient germé en même temps dans les différentes serres en verres colorés, tandis que pour les semis faits à l'aulomne et au commencement du printemps, les différences de température, observées dans les serres, avaient fait varier l’époque de la germinalion. C'est ainsi que le Ray-grass, semé le 13 novembre, à germé à des époques différentes : dans la serre blanche le 5 décembre, dans la serre rouge le 7, dans la serre verte le 8, et dans la serre bleue le 15 ». | Quant à la germinalion des spores des Mousses, Forest Heald (2) a montré que Îles radiations les moins réfrangibles sont les plus actives ; dans la lumière bleue, les spores déve- loppent un peu de chlorophylle, mais elles ne germent pas. Il. —— Croissance. A. Tige. — Je n'insislerai pas sur le fait bien connu que la lumière à une action retardatrice sur la croissance ; je citerai cependant une exceplion à cette règle générale, celle du Viscum album, signalée par Pevyriteh et Wiesner (3). Non seulement l’obseurilé, mais encore une lumière faible, dont l'intensité est égale à 10,8 bougies normales, empêche tota- lement la croissance de l’axe hypocotylé de cette plante. En ce qui concerne l'influence des différentes radiations sur la croissance de la tige, les plus anciennes recherches paraissent être dues à Senebier (4). Il s’est servi de cloches (1) C. Flammarion, Rapport sur la station climatologique agricole de Juvisy (Bull: du Minist. de l’Agricult., 1896, n° 2, p. 276). (2) Forest Heald, loc. cit. (3) Wiesner, Die heliotropischen Erscheinungen im Pflanzenreiche, L Theil, 1878, p. 43. (4) Senebier, Mémoires physico-chimiques, t. II, 1792, p. 55 et suiv. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 149 à double paroi, dont il a imaginé pour la première fois la construction {« bouteilles dont le fond est repoussé dans le ventre »), el qu'il remplissait de diverses solutions colorées, Il a observé que les Lailues les plus grandes ont été celles qui ont élé exposées aux radialions jaunes, ensuite celles qui ont reçu les radiations violettes, puis celles qui ont été éclai- rées par les radiations rouges ; nous verrons que les résul- tals de Senebier ont été confirmés, à une seule exception près, par les recherches récentes et plus exactes de Wiesner. D'après les expériences de Zantedeschi {1}, qui s’est servi de verres colorés, la croissance de la tige de l'Oxalis multi- flora est retardée plus dans le rouge que dans le violet et dans le jaune moins que dans le violet. Pour l’£chinocactus, l'ordre du retard est le suivant : violet, jaune, rouge. Il est à noter que les auteurs précédents se sont servis de verres ou de solutions colorées, sans prendre soin de les ana- lyser au speclroscope. Sachs (2) a mis de la précision dans la méthode, en faisant cel examen préalable, qui seul peut fournir des données certaines sur la nature des radiations auxquelles sont soumises les plantes en expérience. Il a cons- laté que les liges du Linum usitalissimum et du Sinapis alba, après leur levée à la surface du sol, se développent plus vite dans la moitié la moins réfrangible du spectre (solution de bichromale de potassium), que dans la moitié la plus réfran- gible (solution de sulfate de cuivre ammoniacal) ; dans le der- nier cas, les cotylédons mettent 4 à 5 jours de plus que dans le jaune pour bien s’étaler, et leur surface est de 2 à 3 fois plus pelile que dans le jaune, et en même temps plus pelite qu'à la lumière blanche. Sachs compare l’action de la lu- mière jaune à celle de la lumière totale faible, et l’action de la lumière bleue à celle de la lumière blanche très faible. Adolph Mayer (3) cullivait des plantes dans des boîtes (1) Zantedeschi, loc. et. (2) Sachs, Wirkungen farbigen Lichtes auf Pfianzen (Bot. Zeitung, 186#). (3) Adolph Meyer, Production von organischer Substänz, etc. (Landwirth. Versuchsstationen, Bd IX, 1867, p. 136). 150 E. TEODORESCO. pyramidales de deux sortes : les unes avaient leurs parois formées par des verres colorés en jaune par l’oxyde de fer, les aulres à parois formées par des verres incolores sur les- quels il avaitcollé des bandes de papier noir, éloignées les unes des autres de manière que dans les deux sortes de boîtes l'intensité de la lumière fût la même. Il a noté que la tige du Vicia avait la même longueur dans les deux boîles, tandis que celle du Pisum élait un peu plus longue dans la lumière Jaune. Paul Bert (1) a expérimenté d’abord sur de jeunes plants de Mimosa pudica, et ensuile sur 25 espèces de diverses Phanérogames ou Cryplogames. Tous les résultats qu'il a obtenus sont concordants, à savoir que les plantes les plus allongées sont celles qui ont poussé à la lumière blanche. Après elles viennent, en ordre décroissant, les plantes de la lumière rouge, puis celles de la [lumière jaune ; ilajoule que dans les lumières bleue et violette, les liges ne se sont pas allongées du tout. Selon Rudolph Weber (2), après la lumière blanche, ce sont les rayons verts qui retardent le plus la croissance des üges, puis viennent les rayons violets et rouges, qui ont la même aclion, ensuile la lumière bleue et enfin la lumière Jaune. Remarquons qu'il n y a pas lieu d’invoquer l'intensité de la lumière comme facleur de ce phénomène, car, d’après les mesures exécutées à l’aide d’un photomètre Bunsen, la lumière blanche élait de 14,03 bougies normales, la lumière verte .de 0,68, la lumière violette de 0,73, la lumière rouge de 2,74, la lumière bleue de 0,70 et la lumière jaune de 8,33. Kraus (3), qui à fait des cultures d’Urtica,alrouvé que dans la lumière bleue les liges avaient acquis 3 centimètres en longueur, dans la lumière verte 4 centimètres, et dans la (1) Paul Bert, Influence de la lumière verte sur la Sensitive (C. R. de l’Acad. es SC., t. LXX, 1870); — Influence de diverses couleurs sur la végétation (Ibid., MED XXI, 1874). @ R. W eber, Ueber den Einfluss CenLécnes etc. (Landw. Versuchsst., Bd XVIIE, 1875). (3) Kraus, Botanische Zeitung, 1876, p. 303 et suiv. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 191 lumière jaune 6 centimètres. Par conséquent, ce seraient les radiations les plus réfrangibles qui retarderaient le plus la croissance des tiges, et les radiations les moins réfrangibles qui la relarderatent le moins, tandis que les radiations de moyenne réfrangibilité auraient une aclion intermédiaire. Morgen (1) n’a fait des recherches que sur le Lepidium salivum ; il dit qu'après la lumière blanche, c’est la lumière jaune, puis la lumière bleue qui retardent le plus la croissance. | Les résultats oblenus par les divers auleurs cités sont done tout à fait discordants. D'après les uns (Senebier, Morgen), c'est la moilié la moins réfrangible du spectre qui retarde le plus la croissance de la tige. D'après les autres (Sachs, P. Bert, Kraus, Weber), c’est le contraire. Quant aux radiations de moyenne réfrangibilité, la plupart des au- teurs (Zantedeschi, P. Bert, Kraus) ont trouvé que leur action retardatrice est intermédiaire entre celles des radiations les plus réfrangibles et celles des radiations les moins réfran- gibles, tandis que d’autres (Senebier, Weber) disent que ce sont ces mêmes radiations qui retardent le moins la crois- sance. M. Wiesner (2) a repris ensuite la question et l’a éludiée avec plus de précision. Il part de ce fait que l'héliotropisme est en relalion avec la croissance et que, d’après ses recherches antérieures (3), pour les plantes les plus sensibles, on n'observe aucune flexion dans le jaune, que cette flexion commence dans le vert et va croissant jusqu à la limite du violet et de l'ullraviolet, où elle est maximum ; que d’autre part, si du jaune, où l’action est nulle, on se dirige vers l’ex- lrémité la moins réfrangible du spectre, la flexion commence à se manifester dans l’orangé, puis devient plus forle dans le rouge, pour atteindre, dans l'infrarouge, un second maximum (4) Morgen, Ueber die Assimilationsprocess in d. Keimenden Kresse (Bot. Zeilung, 1877). (2) Wiesner, Die heliotropischen Erscheinungen im Pflanzenreiche, IL Theil, 1880, p. 10. (3) Wiesner, Ibid., I Theil, 1878, p. 44. 152 E. TEODORESCO. beaucoup moins élevé que l’autre. Il s’est proposé de recher- cher si l'influence relardatrice des différentes radialions n'est pas analogue à l’aclion héliotropique. Des expériences faites par cet auteur avec Mikosch, à l’aide des solutions co- lorées, préalablement analysées au spectroscope, il résulte les données suivantes, qui peuvent êlre considérées comme les plus exactes de toutes celles obtenues jusqu'à présenl : 1° toutes les radiations du spectre, y compris les infrarouges, ont une aclion relardatrice sur la croissance, même celles (les jaunes) qui n’ont aucune action héliotropique ; 2 plus une radiation provoque aclivementlesflexions héliotropiques, plus elle retarde la croissance ; 3° ce sont les radiations jaunes qui agissent le moins ; à partir du jaune, l'aclion va augmentant faiblement vers le rouge et l’infrarouge, où elle atleint un premier et faible maximum. Elle augmente plusrapi- dement vers l'extrémité la plus réfrangible du spectre visible, où elle atteint un second maximum beaucoup plus élevé. Dernièrement, M. Flammarion (1) arepris celle queslion ; il se sert d’un spectre et, surtout, de verres colorés (« verre rouge, presque monochromalique, ne laissant passer qu'un peu d’orangé ; verre vert, moins salisfaisant ; verre bleu très voisin du violet, qui ne laisse traverser que les rayons de l'extrémité droite du spectre »). Dans la majorité des cas, il trouve que c’est dans la lumière rouge que les tiges sont plus longues ; la longueur de cet organe va en décrois- sant jusqu’au violet. Dans quelques cas (Cosmos) (2), 1l a ob- servé que c’est dans la lumière verte que la tige avait la plus grande longueur. De plus, en comparant l’action dé la radia- tion totale avec celle des diverses lumières colorées, il dit que les plantes éclairées par la lumière blanche sont plus longues que celles qui ont poussé derrière les écrans bleu, vert et même rouge. Nous verrons plus loin comment il faut expliquer ces résultals contradictoires. (1) C. Flammarion, Bulletin du ministère de l'Agriculture, 1896, n° 2 ; 1897, HSE 1098; mor (2) Ibid,, 1898, p. 787. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 193 B. Racine. — Examinons maintenant l'influence de la lu- mière sur la croissance de la racine. On sait que la radiation lotale et équilatérale a une influence variable sur la crois- sance des racines. Pour la plupart des observateurs, cette action est nulle ; c’est-à-dire que les racines ayant poussé à la lumière et celles ayant poussé à l'obscurité ont approxi- mativement la même longueur. Cependant Strehl (1), Fr. Darwin (2), Devaux (3), ont observé des cas où la lumière relarde la croissance de la racine; d'autre part, Famin- Izine (4) el Lazaref (5) ont noté que les racines du Lepidium sativum restent plus courtes à l’obscurilé qu’à la lumière. Nous possédons peu d'observations relativement à l’action quexercent les différentes radiations sur la croissance de la racine. Senebier (6) dit qu’il y à une certaine corrélation entre les ramifications des racines et le développement des feuilles, c’est-à-dire que les racines, qui appartiennent aux plantes ayant des tiges effilées el pourvues de feuilles pelites (par exemple chez les plantes qui ont poussé dans la lumière jaune), sont courtes et possèdent peu de chevelu. Celle observation a été vérifiée avec des Lailues, des Épinards et des Haricots. D'après les observations de Morren (7), qui a fait des cullures avec le Lepidium sativum, les « radicules se déve- loppent le moins et avec le plus de lenteur dans les rayons colorés du plus grand pouvoir éclairant; sous les rayons colorés d’un pouvoir éclairant faible, les radicules prennent un développement semblable à celui qu'elles atleignent à l'obscurité ». Morgen (8) affirme que les racines du Lepidium sativum (1) Strehl, Untersuchungen ueber das Längenwachstum der Wurzel, 1874. - (2) Fr. Darwin, Arbeiten d. bot. inst. zu Würzburg, Bd 1V, 1880, p. 521, (3) Devaux, De l’action de la lumière sur les racines (Bull. de la Soc. bot. de France, 1888). 4) Famintzine, Mélanges biologiques Saint-Pétersbourg, t. VII. 5) Lasaref, in Botan. Juhresbericht, Bd IL, p. 775. 6) Senebier, Mémoires physico-chimiques, t. Il, 14792, p. 55 et suiv. ï) Morren, Ann. des Sc. nat., 1832, p. 201. 8) Morgen, loc. cit. 154 E. TEODORESCO. sont plus courtes dans la lumière bleue que dans la lumière Jaune. M. Flammarion (1), qui a étudié un plus grand nombre de plantes (Sensitive, Maïs, Pois, Blé, etc.), soutient que Île système radiculaire est très réduit dans les plantes de la serre rouge el presque nul dans celles de la serre bleue. Le poids des racines (frais probablement) a été trouvé pour la Sensitive de 5 grammes dans la serre blanche, de 15,60 dans la serre rouge, de 08,09 dans la serre verte et de 08,05 dans la serre bleue (2). C. Feuille. — En ce qui regarde la feuille, il faut d'abord mentionner qu’en ce qui concerne l’intensilé de la lumière totale, les expériences de M. Dufour (3) ont démontré qu'à un éclairement plus intense les feuilles arrivent à des dimensions plus grandes, et cela dans tous les sens, en sur- face comme en épaisseur ; il a constaté que parfois les feuilles pouvaient acquérir une surface double de celle qu'elles atteignent à l'ombre. Il en est de même pour l'épais- seur. Stahl (4) avait indiqué comme un fait général qu'à l'ombre les feuilles ont une surface plus grande qu’au soleil, et que cette surface serail d'autant plus grande que l'endroit où les plantes croissent est plus ombragé, et cela jusqu’à une certaine limile, à partir de laquelle, la quantité de lumière devenant insuffisante, le développement cesse d’être normal ; il se produit alors les phénomènes caractéristiques de l’étiolement. Slahl reconnait d’ailleurs que des causes autres que l'intensité lumineuse peuvent intervenir pour modifier la surface de la feuille. C’est ainsi que Sorauer (5) et plus tard M. Dufour (6) ont montré qu’à une plus grande (1) C. Flammarion, loc. cit., 1896, p. 276. | (2) Loc. cit., 1897, p. 443. (3) L. Dufour, Influence de la lumière sur la forme et la structure des feuilles (Ann. des Sc. nat., 7e série, t. V, 1887). (4) Satkl, Ueber den Einfluss des sonnigen oder schattigen Standortes (Je- naische Zeitschr, f. Naturwiss., XVI, 1883). (5) Sorauer, Bot. Zeitung, 1873, n° 10 ; 1878, n° 1. (6) Dufour, loc. cit., p. 350. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 1) humidité du sol, toutes choses égales d’ailleurs, corres- pondent des feuilles plus grandes. Senebier, dans ses Mémoires (1), dit que les feuilles de Laitue exposées aux rayons rouges furent moins larges et moins lisses que celles qui avaient été exposées aussi bien aux rayons violels qu'à la lumière blanche, mais elles étaient plus larges que celles qui furent éclairées par les rayons jaunes. Sachs (2), faisant germer des graines de Linum usilatissi- mum et de Sinapis alba, derrière une solution de bichro- mate de potassium ou de sulfale de cuivre ammoniacal, a observé qu'après «la sorlie de la tige au-dessus de la surface du sol, les plantes qui étaient sous les cloches à sulfate de cuivre ammoniacal avaient le limbe des cotylédons deux à trois fois plus pelit que celles qui s'étaient développées derrière une solution de bichromate de potassium. Sachs fait observer que les choses se passent absolument de la même facon comme si la lumière jaune était remplacée par de la lumière blanche faible, et la lumière bleue par de la lumière blanche à intensité très atlénuée. Il a observé aussi que les feuilles des plantes qui poussent dans la lumière jaune ont ieurs bords recourbés vers le bas, de manière que la feuille présente une face convexe dirigée vers le haut. Cette épinastie a été d’ailleurs observée également pour les feuilles des plantes qui sont cullivées à l'obscurité. Adolph Mayer (3), employant le dispositif déjà exposé à propos de la lige (p. 150), a constaté que derrière le verre jaune le diamètre transversal des feuilles du Posum salivum est le même que pour les plantes qui poussent à la lumière blanche de même intensité, et plus petit que celui des plantes cultivées dans la lumière totale plus intense; tandis que pour le Vicia, ce diamètre est plus grand dans la (1) Senebier, Mémoires physico-chimiques. (2) Sachs, Bot. Zeitung, 186%. (3) Adolph Mayer, loc. cit. 156 E. TEODORESCO. lumière jaune que dans la lumière blanche de même inlen- silé où d'intensité plus grande. Les résultals oblenus par M. Flammarion ne sont pas concordants. Les feuilles sont tantôt plus grandes dans la lumière rouge que dans la lumière blanche (Sensilive, Greranium) (1), tantôt à peu près égales (Coleus, Alternan- thera) (2). De même les feuilles éclairées par la lumière bleue sont tantôt égales {Geranium) (3), tantôt plus petites que dans la lumière totale. Le nombre des feuilles déve- loppées sous l'influence des différentes radiations n'est pas non plus conslant; c’est ainsi que pour des pieds d’une Fougère, M. Flammarion a constaté qu'ils avaient 3 feuilles dans le rouge, 7 dans la lumière blanche, 3 dans la lumière verte, 1 dans la lumière bleue, tandis que pour la Vigne il trouve qu’il s’est formé 16 feuilles dans le rouge, 16 dans le bleu, 12 dans la lumière blanche, 8 dans le vert. D. Fleur.— Les expériences de Senebier (4), Sachs (5),elc., prouvent que les fleurs peuvent se former à l’obsecurité, pourvu que la plante ait des réserves suffisantes. Les Tulipes, les Jacinthes, les Crocus, les Raves fleurissent à l'obscurité grâce aux substances accumulées dans leurs bulbes ou leurs tubercules. De même, d’après Sachs, certaines plantes (Tropæolum, Cucurbita Pepo) peuvent donner des fleurs si une partie suffisante de l'appareil végétalif reste exposée à la lumière. M. Flahault (6), cullivant des Jacinthes bleues el rouges, n a pas vu de différences appréciables dans l'éclat des fleurs épanouies à l’obseurilé el au soleil; au contraire, d’après ) G. Flammarion, loc. cit., 1897, p. 438; 1897, pl. IL. ) Ibid., 4897, pl. 1 et IL. (3) 1014, M8 018 DIU jSenebier, loc. cit. ) Sachs, Bot. Zeitung, 1863, 1865. 6) Ch. Flahault, Développement des matières colorantes des fleurs (Ann. des Sc. nat., 1878). 5) INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 157 Askenasy (1), la forme des fleurs des Jacinthes serail peu modifiée à l'obscurité, mais la coloralion serait plus pâle dans ce dernier cas. Dernièrement, Vôchting (2) a étudié d'une manière plus délaillée l'influence de la lumière sur les fleurs et a montré que l'appareil floral de Mimulus Tilingi se réduit au fur et à mesure que l'éclatement diminue, et qu'au-dessous d'un certain minimum la plante reste stérile. Ce minimum est d’ailleurs {rès variable, suivant que les espèces recherchent l'ombre ou le soleil. C’est ainsi que l’/mpatiens parviflora, qui est une plante ombrophile, peut fleurir à un éclairement qui permet à peine l’apparilion des boutons floraux chez le Malva vulgaris, plante héliophile. Parfois même les fleurs n'apparaissent plus et alors toute l’aclivité de la plante est employée à la production d'organes végélatifs surabondants : feuilles, rameaux, elc. En recherchant l’action de la lumière sur les diverses parlies de la fleur, l’auteur a observé qu'assez souvent la radialion agit uniformément sur toutes les parties de l'organe (Mimulus), que dans certains cas la corolle seule est modifiée, qu’enfin les organes sexués paraissent relalive- ment moins sensibles à l’action de la lumière que les enve- loppes florales. Chez certaines plantes (Stellaria media, La- mium), la corolle ne s'ouvre pas et la fleur devient cléistogame. Enfin, en ce qui concerne les fleurs zygomorphes, il a observé l'avortement des deux pétales supérieurs chez le 7ropæolum majus et la réduction de la lèvre supérieure chez le Mimulus Tilingi, quand l'intensité de la lumière diminue. M. Curtel (3) vient de confirmer les résultats de Vôüchting, en les complétant par l'étude anatomique des organes floraux, développés à des lumières d’intensités différentes. L'influence des différentes radiations sur la formalion de la fleur a été moins éludiée. (4) Askenasy, Bot. Zeitung, 1876. (2) Vochting, Ueber den Einfluss des Lichtes auf die Gestallung und Anlage der Blüthen (Jahrb. für wiss. Botanik, Bd XXV, 1893). (3) Curtel, Recherches physiologiques sur la Fleur. Thèse de Paris, 1899. 158 E. TEODORESCO. Senebier (1) dit que sous l'influence des rayons violets les Haricols fleurissent à peu près pendant le même temps que ceux qui avaient élé cultivés à la lumière totale; ceux qui élaient exposés aux radialions rouges ont fleuri dix Jours plus lard; mais il n’a pas répété l’expérience el 1l fait celte restriction que peul-être d’autres circonstances ont put influer sur ce retard. Sachs (2) a cullivé comparativement des plantes, d'une part derrière une couche d’eau pure, de l’autre derrière une solulion de sulfate de quinine, qui, comme on Île sait, absorbe les radiations ultraviolettes (chimiques). De ses expériences, faites avec le Tropæolum majus, 1 résulle que : l° derrière une solulion de sulfate de quinine, les plantes, cultivées dès la graine, ne peuvent pas produire des fleurs, mais seulement de petits boutons floraux, qui s’arrêlent dans leur développement el qui périssent ensuite ; 2° les Liges ont à peu près la même longueur que derrière une couche d’eau pure; 3° le nombre des feuilles est un peu plus grand chez les plantes qui ont poussé derrière l’eau ; 4° il en est de même pour le poids de la substance fraiche. Il déduit de ses expériences que les radiations ultraviolettes provoquent la formation d'une substance florigène (blüthenbildende Substanz); celle substance se formerait dans les feuilles, d'où elle émigrerait pour aller dans les parties où se forme- ront les fleurs. Par substance florigène, il n’entend pas la totalité des substances (albuminoïdes, etc.) qui forment la fleur ; ce serail une substance qui agirait, comme les fer- ments, sur de grandes quantités d'autres substances, tandis que sa quantité, très petite, resterait constante M. C. de Candolle (3), qui a répété les expériences de Sachs, est arrivé aux mêmes résultats. Il s’est servi, pour l'absorp- lion des radiations ultravioletles, des solutions de sulfate de (1) Senebier, loc. cit. (2) Sachs, Ueber die Wirkung der ullravioletten Strahlen, etc. (Arb. d. bot., Inst. Würzburg, Bd IIT, 1888. (3) C. de Candolle, Étude sur l'action des rayons ultraviolets, etc. (Arch. des Sc. phys. et nat., t. XXVIII, 1892). INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 199 ‘quinine ou d'esculine; d'après lui, les différences ne portent pas seulement sur la formation des fleurs ; les plants de Tropæolum majus, qui ont poussé en l'absence des radiations ultravioietles (sulfate de quinine), élaient moins développés et avaient un poids sec plus petit que les plantes témoins. Les expériences faites avec le Lobelia Erinus,derrière une solution d'esculine, ont donné des résultats moins safisfaisants, parce que, d'après l’auteur même, les causes d'erreur ont élé moins bien écartées. Cependant, derrière les solutions d’es- culine, les plantes étaient moins développées, mais des fleurs normales se formèrent. M. de Candolle ne croit pas que les radiations ultraviolettes contribuent à la formation d’une substance spéciale florigène, comme le pense Sachs, mais ces radiations auraient une aclion stimulante sur le déve- loppement général de la plante. Enfin, des expériences de M. Flammarion (1) il paraît ré- sulter que le Pois et le Haricot ne peuvent fleurir que dans la serre rouge, et non dans la serre bleue. Mais on peut remarquer que les radiations chimiques étant nulles dans la moitié la moins réfrangible du spectre, il résulte des expé- riences de cet auteur que les radiations ultravioleltes, loin d’être indispensables, sont plutôt nuisibles à la formation des fleurs. III. — Structure. _ Je ne connais rien de précis relativement à la structure des divers organes des plantes cultivées sous l'influence des radiations de différentes réfrangibilités. M. Flammarion (2 dit : « Si nous examinons au microscope des coupes trans- versales des tiges de Sensitive, la structure et le diamètre sont différents pour les plantes de la serre rougeet dela serre blanche. L’épiderme est plus épais, les vaisseaux du bois plus nombreux dans la tige de la serre blanche; la moelle y est beaucoup moins développée, les cellules mieux formées et à (1) G. Flammarion, loc. cit., 1897, p. 44 Es ho | J. l (2) CG. Flammarion, loc. cit., 1897, p. 4x 160 E. TEODORESCO. parois plus épaisses; pour ces différentes raisons, la tige des plantes de la serre blanche est plus résistante à la flexion. » 1V. — Poids sec. Il y a déjà longtemps, Hunt (1) avait montré que le poids de la substance (Holzfaser) varie avec la nature des radia- lions ; il est plus faible dans la lumière bleue que dans Îles lumières jaune, rouge et blanche. Adolph Mayer (2), qui a expérimenté de la manière indi- quée plus haut, dit que pour le Pois {au bout de dix semaines el demie de végétalion) et la Vesce (au bout de neuf semaines) le poids sec de la plante entière (lige, racine, feuilles), a élé trouvé plus grand dans la lumière Jaune que dans la lumière blanche de même intensité. D'autre part, Macano (3) cultivant des Fèves, trouve qu’au boul de trois semaines le poids sec diminue dans l’ordre sui- vant : lumière Lotale, lumière violette, lumière rouge, lumière jaune. Séparant, des cendres, la substance organique, il trouve que le poids de cette dernière diminue dans le même sens. | En même lemps, Sachs (4) a observé que pour l’Helian- {lus annuus, le poids sec est plus grand dans la moitié la moins réfrangible que dans la moitié la plus réfrangible du spectre, ce qui est en désaccord avec les données de Macano. Mais, contrairement à ce que prétend Adolph Mayer, tant Sachs que Macano ont observé que dans la lumière blan- che le poids sec augmente toujours plus que dans n’imporle quelle lumière colorée. (1) Hunt, loc. cit. (2) Adolph Mayer, loc. cit. (3) Macano, Bot. Zeitung, 1874, p. 544. (4) Sachs, in Pfeffer, Die Wirkungen farbigen Lichtes auf die Zersetzung der Kohlensatre in Pflanzen (Arb. d. bot. Inst. Würzburg, Bu I, 1874, p. 56). INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 1061 Kraus (1), Morgen (2) et Wollny (3), arrivent aux mêmes résultats que Sachs ct Hunt, à savoir que c’est dans la moilié la moins réfrangible du spectre que se forme la plus grande quantité de substance organique. Morgen explique les résul- lats obleaus par lui en disant que le poids de la substance sèche est proportionnel à la quantité d'acide carbonique décomposé par la plante. M. Flammarion (4) à aussi porté son altention sur la même queslion; voici, à litre d'exemple, les poids frais qu'il a oblenus avec les feuilles de Mimosa pudica : lumière rouge 05,250 ; lumière verte 08,150; lumière bleue 08,095. - Quant à l'influence des radiations ultraviolettes sur le poids de la substance de la plante, nous n’avons guère que les don- nées de Sachs (5), confirmées par celles de M. C. de Can- dolle (6). 11s ont lrouvé lous les deux que le poids sec des plantes qui poussenter l'absence des radiations ultravioleltes est plus faible que celui des plantes cultivées derrière une couche d’eau. V. — Contenu des cellules. A. Amidon. — Sur la relation qui existe entre la forma- tion de l’amidon et les différentes radiations lumineuses, Je citerai d’abord les observalions de Famintzine (7) relatives au Spirogyra orthospira. Ce savant à constaté que l’amidon ne se forme que dans la moitié la moins réfrangible du spectre visible (derrière une solution de bichromate de potassium), tandis que dans l’autre moitié, non seulement l’amidon ne se (4) Kraus, loc. cit. (2) Morgen, loc. cit. _ (3) Wollny, Untersuch. ueber d. Einftuss der Lichtfarbe auf das Produclions- vermôgen u. die Transpiration der Pflanzen (Fortschr. auf dem Gebiete der Agriculturphysik, Bd XVIT, 189%). (4) Flammarion, loc. cit., 1897, p. 439. (5) Sachs, Arbeiten d. bot. Instit. Würzburg, BdIIT, 1888. (6) G. de Candolle, Loc. cit. (7) Famintzine, Die Würkung des Lichtes auf Algen, etc. (Jahrb. F, wiss. Bot., Bd VI, 1867-1868). ANN-USCL NAT: BOT Xe 41 162 E. TEODORESCO. =æ= produit pas, mais même celui qui existe dans les cellules se détruit comme à l'obscurité. | Kraus (1) a répété les expériences de Famintzine, non seulement sur le Spirogyra, mais encore sur le Funaria hy- grometrica, el a constalé que dans les chloroleucites de la première plante, l’amidon se forme toul aussi rapidement el en même quantité dansla moilié la moins réfrangible que dans Ia lumière blanche; dans la moitié la plus réfrangible du spectre, contrairement à ce qu'avait dit Famintzine, il a observé que l’amidon se forme également, quoique moins vile elen moindre quantilé. Pour le Funcria, les résultats sont les mêmes, avec cette différence que sous l’action des radiations les moins réfrangibles, l’'amidon ne se forme pas aussi vile, ni en aussi grande quantité, qu'à la lumière blanche. À peu près en même temps que Kraus, M. Prillieux (2) à répété les expériences de Famintzine sur l'influence de la lumière bleue, et est arrivé aux mêmes résullats. Vines (3) a fait des cultures avec des Phanérogames et a constaté que dans les feuilles exposées à la lumière qui à traversé une solulion de sulfate de cuivre ammoniacal, l’ami- don ne se forme que dans les cellules stomatiques. B. Ferments solubles. — MM. Downes et Blunt (4) ont cons- laté qu'une macération filtrée de levure de bière devenait incapable d’interverlir le sucre, après une exposition de durée suffisante au soleil. Si les solutions de sucrase sont pures, c'est-à-dire débarrassées de matières organiques étrangères, M. Duclaux (5) a trouvé que « leur fragilité à la lumière est (1) Kraus, Einige Beobachtungen ueber d. Einfluss des Lichtes und Wärme auf die Stürkeerzeugung im Chlorophyll (Jahrb. f. wiss. Bot., Bd VIT, 1869-1870). (2) Prillieux, Influence de la lumière bleue sur la production de l’amidon dans la chlorophylle (CG. R. de l'Acad. des Sc., t. LXX, 1870). (3) Vines, The Influence of Light upon the Growth of Leaves (Arb. d. bot. Inst. Würzburg, 14878, p. 120). (4) Downes and Blunt, Proceedings of the R. Society, t. XXNI; 1871; t. XX VFIT, 4878. (5) Duclaux, Microbiologie, t. I. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 163 très grande » (sucrase de l’Aspergillus niger). Mais Fern- bach (1)a montré que la lumière n'a aucune influence sur la sucrase, dans le vide, que par conséquent c’est à une action combinée de la lumière et de l'oxygène qu'est due la destruction de la diastase. L'influence des radialions lumineuses dediverses réfrangi- bilités a élé peu éludiée ; jusqu à présent, à ma connaissance, il n ya que les amylases qui aient fait l'objet de recherches de la part de M. Green (2). Cet auteur a trouvé que les solutions aqueuses des amylases famylase du malt, de la sslive, des feuilles de Fève, etc.), ainsiqueles amylasesdes feuilles vivan- tes, se comportent de deux manières différentes vis-à-vis de la lumière. Quelques régions du spectre accélèrent l’aclivilé diastasique, aussi bien en solution aqueuse que dans les feuilles vivantes ; ces régions transforment le zymogène en enzyme. D'autres régions du spectre ont, au contraire, une action nuisible. L’aclion diastasique est représentée, pour les diverses radiations, par Îles nombres suivants : infra- rouge + 10,8; rouge + 53,5 ; orangé + 4,7; vert — 15,7 ; bleu + 20,8. Se basant sur ces résultats, il soutient Ia {héo- rie que l’érythrophyle qui se trouve dans les feuilles rouges aide la migration de l’amidon, en absorbant les radiations qui sont nuisibles à la formation des amylases. Engelmann (3) a montré, en effel, que les feuilles qui contiennent de l’éry- throphylle absorbent, en général, les radiations complémen- taires aux radiations qu’absorbe la chlorophylle. Le rouge, le bleu et le violet, qui sont absorbés au plus haut degré par la _chlorophylle, passent très bien à travers une solulion d’éry- throphylle. Le maximum d'absorplion de cette dernière sub- stance correspond au minimum d'absorption de la chloro- phylle, c’est-à-dire se trouve dansle vert. D'autre part, Pick (4) (1) Fernbach, Ann. de l’Institut Pasteur, t. LIT, 1889. (2) Green, On the Action of Light on Diastase (Philosophical Trans. of the R. Society of London, série B, vol. CLXXX VIIT, 1897. (3) Engelmann, Bot. Zeilung, 1887. (4) Pick, Ueber die Bedeutung des rothen KFarbstoffs bei den Phanerogamen und die Beziehungen desselben zur Stärkewancderung (Bot. Centralbl., XVI, 1883). 164 E. TEODORESCO. a conslaté que la migration de l’amidon se fait plus rapidement quand la feuille contient de l’érythrophylle, et il avait émis l'opinion que la migration estdue à l'augmentation de l’action dediastases.Stahl{1),se basant surlefail quelesfeuilles rouges, ou les taches rouges des feuilles panachées, absorbent plus de chaleur que les feuilles vertes. ou les parties vertes des feuil- les panachées, soutient que c’est la chaleur absorbée par l'érythrophylle qui facilite les transformations des substan- ces et leur migration. Les recherches de M. E. Overton (2) viennent compléler Jusqu'à un certain point les résultats obtenus par les auteurs précédents. Il à trouvé une relation entre la présence de l’érvthrophylle, des sucres el de la température. Plus la tempéralure est basse et plus la quan- üilé de sucre est grande dans les feuilles, plus la quanlité de substance rouge augmente. VI. — Thallophytes. a Les expérimenlalteurs sont unanimes à reconnaîlre que la germination des spores des Champignons est absolument indépendante de la lumière. La croissance des Champignons varie, sous l'influence des différentes radiations, dans le même sens que celle des plan- Les supérieures. Vines (3), qui a fait des expériences avec le Phycomuyces nitens, a observé que ce sont les radiations les plus réfrangibles du spectre qui retardent le plus la crois- sance des filaments mycéliens. Passons à la formalion des organes de reproduction. D'après Sorokin (4), le Mucor Mucedo ne produit pas de spo- ranges dans la lumière blanche, mais en produit dans la lumière rouge, Jaune et violette. (1) Stahl, Ueber bunte Laublätter (Ann. d. Jardin bot. de Buitenzorg, XIII, Le ee Overton, Beobachtungen u. Versuche üb. d. Auftreten®v. roth. Zellsaft bei Pflanzen (Jahrb. f. wiss. Bot., 1899, XXXIII). (3) Vines, The Influence of Light upon the Growth of unicellular Organs (Arb. d. bot. Inst. Würzburg, Bd If, 1878). (4) Sorokin, Bot. Juhresbericht, 1874, p. 214. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 165 Brefeld (1) assure que le Pilobolus microsporus ne peut pas former des sporanges dans la lumière jaune n1 à l'obscurité, mais seulement sous l'influence de la lumière blanche ou des radiations de la moilié la plus réfrangible du spectre. Ludwig Klein (2), cultivant des Botrytis cinerea, à observé que la moilié la moins réfrangible du spectre accélère la pro- duction des conidies de celle plante, tandis que les radia- tions les plus réfrangibles retardentou bien empêchent com- plètement la formation de l'appareil conidien. D'après Elfving (3), l'influence de la lumière sur la forma- tion des conidies varie avec le milieu nutritif. Il remarque d’abord que le PBriarea et le Penicillium fructifient dans la lumière comme à l'obscurité ; le mycélium se forme en plus grande quantilé dans l’obscurilé que dans la lumière, el les conidies, dont la production est liée à celle du mycélium, sont en moins grand nombre à la lumière. Or ces résullats, d’après Elfving, ne devraient pas être attribués à l’action direcle de la lumière sur les organes reproducteurs, mais à l’action qu'exercent les radialions sur la nutrition générale ; c'est-à-dire que la synthèse des substances organiques serait d'autant plus faible que le milieu nutrilif employé se rappro- cherait moins de la conslitulion du proloplasma. Les rayons ultraviolets, comme les rayons visibles, agiraient dans le même sens el pour les mêmes raisons. Parmi les radiations visibles, les moins réfrangibles sont les plus favorables. _ Dernièrement Lendner (4) a montré également, pour d’autres Champignons, que la cause qui détermine la for- malion des sporanges réside plutôt dans un phénomène de nutrilion que dans la lumière. En cultivant des Mucorimées sur des substratums solides, il a observé la formation des (1) Brefeld, Ueber die Bedeutung des Lichtes für die Entwickelung der Pilze (Sitz. der Gesellschaft naturf. Freunde zu Berlin, 1877). (2) Ludwig Klein, Ucber Gie Ursachen der Sporenbildung von Botrytlis cinerea (Bot. Zeitung, 1885). (3) Elfving, Siudien ueber die Einwirkung tes Lichtes auf die Pilze, 1890. (4) Lendner, Des influences combinées de la lumière et du substratum, ele. Ain. des Sc. nat., 1° série, t. IL, 1896): 166 E. TEODORESCO. sporanges à l'obscurité, à la lumière blanche, et dans les diverses lumières colorées. Sur les milieux liquides, la pro- duction de ces organes est variable avec l'espèce et parfois avec la nature du milieu nutritif. C'est ainsi que le Æhizopus nigricans produit des sporanges dans tous les liquides nutri- fs, mais leur maturation subit un retard dans l'obscurité. le jaune et le rouge. Le Mucor flanidus, cultivé dans le liquide Raulin, ne forme pas de sporanges dans l’obscurité, le jaune el le rouge, et, si Le liquide est très étendu, ilne s'en forme nulle part. Dans le liquide de van Tieghem, les spo- ranges se forment en plus grand nombre à l’obseurité, dans le rouge et dans le jaune. | Les radialions ultraviolettes n’ont, d’après cet auteur, aucune action sur la formalion des sporanges des Muco- rinées. à La formation des zoospores el des éléments sexués chez les Algues ne paraît pas être en relation étroile avec la nature des radiations. Ainsi Klebs {1}, qui s'est servi des solutions colorées, à remarqué que les zoospores de Vauchera repens el de V. clavata se forment derrière les solutions qui laissent passer la moilié la moins réfrangible, aussi bien que der- rière celles qui ne laissent passer que la moitié la plus réfrangible. Cependant, [a production de ces éléments asexués est moins enlravée par les solutions jaunes et rouges que par les solulions bleues ; ces dernières ont Ia même action que la lumière blanche faible, ou que lobscurité. Les or- ganes sexués se forment à peu près avec autant de rapidité derrière les solutions bleues et violettes que dans la lumière blanche, si l'Algue est cultivée dans une solulion contenant du sucre; derrière les solutions Jaunes et rouges, les mêmes organes se forment plus lard ou pas du tout. L'absence des rayons ultraviolets est, en général, indifférente. (1) Klebs, Die Bedingungen der Fortpflanzung bei einigen Algen u. Pilzen, 1896. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 167 EXPOSÉ DES RECHERCHES MÉTHODE EMPLOYÉE. Pour se rendre compte de l'influence que les radiations de différentes réfrangibilités exercent sur les plantes, on peut employer deux méthodes : la méthode des spectres el la méthode des écrans absorbants. La première méthode donnerait évidemment les résultats les plus précis. Mais la produclion d'un spectre permettant des expériences sur les plantes en voie de croissance ren- contre un grand nombre de difficullés, à peu près insur- montables. Tout d’abord, dans le spectre produit par un prisme, les diverses régions lumineuses ne présentent pas la même dis- persion ; celle-ci est d’aulant plus considérable que les radiations sont plus réfrangibles. La dispersion élant iné- _gale, les différentes régions du spectre ne contiennent pas, sur la même élendue, un nombre égal de radiations; c’est ainsi qu'il y en a plus dans le rouge que dans le bleu. Le spectre produit par un prisme n’est donc pas normal. Le seul moyen d'obtenir un spectre normal est de se servir d’un réseau. Mais un tel spectre est pratiquement beaucoup trop petit ou peu intense ; jusqu’à présent, on n'a pas essayé d’ob- lenir un speclre de réseau qui remplisse les condilions permetlant de faire des cultures de plantes dans ses diffé- rentes parties. La même objeclion d’ailleurs peut être faite au spectre du prisme, quoique ce dernier puisse être obtenu d’une manière plus favorable que le spectre de réseau. Ensuile, pour que le spectre de prisme soil aussi pur que possible, 11 faut que la fente par où entre le faisceau de lumière totale, avant de tomber sur le prisme, soil élroile ; mais dans ce dernier cas l’intensité des diverses radiations est Lellement diminuée que leur effet sur la plante est très 168 E. TEODORESCO. faible. Si au contraire on élargit la fente, ce qui augmente l'intensité des radiations, el par conséquent les effets pro- duits, le spectre est impur, les diverses radiations empié- tant les unes sur les autres, et la méthode perd par suite toule sa rigueur. Enfin, si à ces inconvénients on ajoute celui que dans une même journée l'expérience esl soumise à des intermittences, le spectre disparaissant dès que le soleil est caché par les nuages, on voit que l'emploi d'un spectre est à peu près impossible, pour faire des cultures de longue durée. C’est pourquoi le plus grand nombre des expérimentateurs qui se sont occupés de l'influence des radiations sur Îles plantes, ant eu recours aux écrans absorbants. Jai choisi aussi celle méthode, qui est la plus pralique au point de vue de la facilité d’expérimentalion. Les écrans absorbants peuvent être soit des solutions, soil des verres colorés. Or, l'emploi des solutions colorées pré- sente de nombreux inconvénients, parliculièrement les sui- vants : 1° certaines solulions se décomposent assez vile (couleurs d’aniline, dissolution de chlorophyile, elc.); 2° les parois des cloches de Senebier, telles qu'on les construit, ne sont pas parallèles, de telle sorte que la partie supérieure est beaucoup plus épaisse que la partie inférieure, etil serait très difficile d'en faire faire remplissant les conditions vou- lues ; 3° la hauteur de ces cloches esl très peu élevée, ce qui limite beaucoup la variété des plantes que l’on peut y cul- liver. Pour ces différents motifs, jai été obligé d'employer des écrans en verres colorés. Ceux-ci sont cependant loin d’êlre à l'abri de toutreproche ; la plupart ne sont pas monochro- matiques; en effet, à l’exceplion du verre rouge, qui ne laisse passer, et encore faut-ii qu'il soit bien choisi, que les radialions rouges et infrarouges, tous les autres verres sont fraversés, en même temps, par plusieurs sortes de radialions. Mon intention n’a pas été d'étudier l’action des sept prin- INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 1069 cipales régions qui composent le spectre visible, mais de choisir trois espèces de radiations faciles à isoler : les unes, bleues, très réfrangibles; les autres, rouges, peu réfran- gibles ; et enfin les vertes, de réfrangibilité moyenne. Voici comment je suis arrivé à ce résultat. Le choix du verre rouge est très facile, car le verre coloré au protoxyde de cuivre est monochromalique, ou à peu près; cela dépend de la couleur plus ou moins foncée et de l'épaisseur du verre. Celui que j'ai choisi laissait passer les radiations comprises entre la raie B de Fraunhofer et la longueur d'onde x = 613 ; les plantes élaient donc éclairées par les radiations rouges et une faible partie des radialions orangées. Pour les verres bleu el vert, j'ai procédé de la manière suivante : j'ai pris un verre vert, le plus foncé que j'ai pu me procurer, ayant la même épaisseur que le verre rouge; analysé au spectroscope, il laissait passer non seulement le vert, mais encore le jaune et une partie du bleu. Pour isoler les radiations vertes, j'avais à ma disposition deux procédés : ou bien me servir de verres plus foncés, où employer deux verres superposés (1). Avec l’un ou l’autre des deux moyens employés, j'ai obtenu exclusivement les radialions vertes comprises entre les longueurs d'onde 1—568 et 1=524. Pour le verre bleu, j'ai procédé de la même manière que pour le vert. Les radiations obtenues étaient comprises entre les longueurs d'onde 1=— 522 el À = 426. En résumé, on voit, par les chiffres que J'ai donnés el par le schéma (PI. V), que les trois sorles de verres ne lais- sent passer aucune radiation commune. Ajoutons cependant que les limites que j'ai indiquées ne sont pas rigoureusement précises, parce que les régions de passage présentent toujours au spectroscope un peu (1) Ces méthodes sont analogues à celles qu’on emploie pour les solu- tions colorées; en effet, pour qu'une solution ne laisse passer que des radiatious déterminées, on peut faire varier soit la concentration, soil l'épaisseur de la couche que la lumière doit traverser. 170 E. TEODORESCO. de flou, comme on peut voir par les figures (PL V). J'ai dit plus haut que pour les radiations de moyenne et de grande réfrangibilité, j'ai superposé quelquefois deux plaques de verre ; mais alors l'intensité de la lumière était diminuée, parce qu’une parlie est absorbée par la substance même du verre. Dans ce cas, pour obtenir des résultats comparables, j'ai superposé au verre rouge un verre inco- lore, choisi de manière que l'épaisseur totale du verre rouge et du verre incolore soit égale à l'épaisseur des deux plaques des verres vert ou bleu. En comparant les spectres d’absorplion des verres colorés que J'ai ulilisés, avec le spectre d'absorption de la chloro- phylle (PI. V), on constate que l'ensemble des radiations que traversent les {rois sortes de verres colorés, ne correspon- dent pas à toutes les radiations, qui sont absorbées par la chlorophylle. | En effet, le verre rouge laisse passer les radiations qui correspondent aux bandes Let Il (1); celles qui traversent le verre vert correspondent seulement à la bande [V; enfin celles tamisées par le verre bleu correspondent aux bandes V et VI. Par conséquent, les radiations correspondantes aux bandes IIT et VIT ne passent par aucun des verres que jai employés. Plusieurs auteurs, qui se sont occupés de l'influence que les lumières colorées exercent sur les plantes, ont prétendu que pour juger de l'effet produit, il faut que l'intensité de ces lumières colorées soit la même, et on a cherché à la mesurer à l'aide d'un photomètre, comme on le fait quand on veut comparer les intensités de la lumière blanche. Mais Sachs (2) a montré, avec raison, que dans ces cas on confond l'intensité des différentes régions du spectre visible avec leur éclat (Helligkeit, Leuchtkraft). En eflet, l’éclat cest l'intensité subjective, c'est-à-dire l'action des diffé- Le spectre d'absorption de la chlorophylle est dessiné d’après Kraus. (4) ) Sachs, Die Pflanze und das Auge als verschiedene Reagentien für das l (Arbeiten d. bot. Institut in Würzburg, vol. I, 1872, p. 278). 2 Lich INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 171 rentes régions du spectre sur la rétine, landis que l’inten- sité objective est mesurée par la force vive des ondulations de l’éther. Le seul moyen dont on dispose pour comparer l'intensité objective des diverses ondulations de l’éther, c’est de considérer celle intensité comme proportionnelle à la quantité de chaleur qui se développe par l'absorption de ces différentes sortes d'ondulations. Or si l’on compare l'éclat, effet produit sur la rétine, avec l'intensité réelle, on constate qu'il n’y à pas de proportionnalité entre ces deux éléments. En effet, le maximum de chaleur se trouve dans l’infra- rouge, c'est-à-dire dans la partie obscure du spectre, tandis que le maximum de l'éclat se trouve dans le jaune (1). Pour ces motifs, je n'ai pas déterminé à l’aide du pholo- mètre l'éclat de la lumière qui traversait les verres colorés dont je me suis servi. Je vais exposer maintenant les principaux résultats de mes expériences, en ce qui concerne la feuille, la tige et la racine. CHAPITRE PREMIER FEUILLE. À. — Morphologie externe. 1. Faba vulgaris (Fève de marais). Dans cette plante, les deux premières feuilles de la base de la lige avortent ; elles ne sont représentées que par des slipules concrescentes au milieu desquelles on observe une petite arête, qui est le représentant de la vrille des autres Papilionacées. Les autres nœuds portent des feuilles com- posées paripennées. Les observalions ont été faites après (rente Jours de végé- lalion. À ce moment, les plantes venues respeclivement à la (4) Helmholtz, Handbuch der physiolog. Oplik., 1867, p. 3816. 172 E. TEODORESCO. lumière blanche, à l'obscurité et aux lumières colorées (rouge, verte et bleue), définies comme je l'ai dit plus haut, possédaient chacune quatre feuilles. J'ai mesuré les surfaces de ces quatre feuilles, et j'ai obtenu les nombres indiqués dans le tableau suivant : N°S D'ORDRE LUMIÈRE LUMIÈRE LUMIÈRE LUMIÈRE DES FEUILLES ROUGE VERTE BLEUE BLANCHE CESCURIEE millim. car. millim. car. millim. car. millim. car. millim. car. 1 D44 125 762 780 60 2 140 136 800 916 10 3 468 128 592 1.001 50 4 420 122 405 1.096 45 Par ce tableau, on voit que partout, sauf à l'obscurité, les surfaces des feuilles successives vont d’abord en augmentant, quand on part de fa base, et qu'on s'élève vers le sommet de la lige ; l’augmentalion est plus sensible dans les lumières blanche, bleue et rouge ; elle est insignifiante dans la lumière verle. Mais tandis que dans la lumière blanche les feuilles con- lüinuent à augmenter de dimension jusqu’à la quatrième, dans les lumières colorées, le maximum de surface est atteint par la deuxième feuille, et de là les dimensions vont toujours en diminuant jusqu'à la dernière. | Comparant maintenant entre elles les surfaces des feuilles des plantes qui ont élé exposées dans les lumières de diffé- rentes réfrangibilités, on observe que c'est sous l’action des rayons bleus que les plus grandes surfaces sont obtenues; c'est ensuite la lumière rouge qui a le plus d’aclion ; enfin les feuilles éclairées par les radiations vertes ont une sur- face beaucoup moindre que les précédentes. Ces feuilles, à cause des faibles variations de surface qu'elles présentent aux divers entre-nœuds, ne sont pas sans avoir une certaine analogie avec celles qui ont été cultivées dans l’obscurilé complète. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES, 173 Les cultures de Fève que j'ai faites pendant lPhiver, quand les jours sont plus courts et l’éclairement solaire moins intense, mon! donné des résullals analogues ; seulement, les différences de dimensions entre les feuilles des plantes qui ont végélé derrière les verres colorés étaient plus faibles. 71 Fig. 1. — Faba vulgaris; développement des feuilles; les chiffres placés le long de la ligne des abscisses indiquent les entre-nœuds successifs; la longueur des ordonnées est proportionnelle à la surface des feuilles correspondantes. — O, obscurité; V, lumière verte; R, lumière rouge; B, lumière bleue; L, lumière blanche. La figure 1 montre d’une manière frappante le degré de développement des feuilles dans les conditions men- lionnées. Les diverses courbes de cette figure, de même que celles qui seront données plus loin, ont élé construites de la manière suivante : la ligne des abscisses représente la üge ; les nombres 1, 2..., placés à des distances égales, cor- respondent aux nœuds successifs. À chaque point ainsi dé- terminé, J'ai élevé une ordonnée proportionnelle à la surface de la feuille considérée. 174 E. TEODORESCO. 2. Lupinus albus (Lupin blanc). J'ai fait avec cette plante trois cultures ; une commencée en mai, qui à pris fin au bout de (rente Jours, une autre en juillet, qui a continué pendant vingt-cinq jours, et une lroi- sième en décembre, qui à fini après trente el un Jours. Quoique les différences dans l'intensité de la lumière soient assez grandes de l’une à l’autre de ces époques de l’année, les résultats obtenus ont été tout à fait concordants. Dans toutes les expériences, les plantes avaient développé un nombre variable de feuilles, de 2 à 4. Voici, à litre d'exemple, les nombres fournis par la culture du mois de juillet; les mesures ont été prises sur la feuille la plus âgée. je Foliole médiane ........ 916 millim. carrés. Lumière blanche.... Res or 100 Se ce Da — lmédidne pre 04 == Bree — extrémei three 45 — 10 rte UNE CUme ane Er 48 — SNA CLOS MS TOO LEA NE 28 = us boue Ni médiane, arr 70 — DE LOS ORAN: EUR D — pr — médiane rer 0 — Obécurité An eue “ Rs is ei) Comme on le voit, les résultats sont les mêmes que pour la Fève. En commençant par les plantes qui ont les feuilles les plus grandes, nous avons la succession suivante : lumière blanche, lumière bleue, lumière rouge, lumière verte et obscurité. | 3. Polygonum Fagopyrum L. (Sarrasin). Les observations sur cette espèce ont été faites au bout de lreize jours de végélalion seulement. Pendant ce temps, les plantes n’ont développé que quelques feuilles très petites, surtout dans la lumière verte. Les colylédons, au contraire, jouent un rôle très important pendant les premières phases de INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 179 la végélation ; ils s’accroissent beaucoup et tiennent la place des feuilles dans l'assimilation chlorophvllienne. Aussi je n'ai mesuré queles cotylédons. J'aurais pu laisser les plantes con- linuer leur végélation jusqu’à ce que les feuilles eussent acquis _une grande surface; mais, pour resler dans des conditions où les comparaisons sont exactes, il faut interrompre les cultures après l’épuisement complet des réserves de Ja graine. À partir de ce moment, en effel, les différences de nutrition entre les plantes exposées à des lumières de diffé- rentes réfrangibililés sont trop grandes, et peuvent donner des résultats contradictoires, el cela surtout en ce qui con- cerne la croissance de la tige el de la racine, comme je le montrerai plus loin. J'ai mesuré dans cette plante, non seulement la surface des cotylédons, mais encore la longueur de leurs pétioles, et j'ai obtenu les nombres ci-joits. Par ce tableau, on voit que les diverses lumières agissent sur les cotylédons du Sarrasin, comme sur les feuilles des espèces précédentes. Mais ici, un second fait est mis en évidence : la longueur du pétiole varie dans le même sens que la surface du limbe cotylédonaire. Ce résultat est d'autant plus intéressant à noter que dans beaucoup d'espèces les pétioles se comportent comme des liges. Ici, au contraire, ils réagissent physiologiquement comme des limbes des feuilles. ie ccublasc he Surface des cotylédons.. 128 millim. car. Longueur du pétiole.... 1% millim. ra he Re ( Surface des cotylédons.. 59 millim. car. t Longueur du pétiole.... 7 millim. a A \ Surface des cotylédons. -.. 23 millim. car. t Longueur du pétiole.... 5 millim. ia A AS PRES ( Surface des cotylédons.. 64 millim. car. t Longueur du pétiole.... 9 millim. DRE on . ( Surface des cotylédons.. 11 millim. car. ‘##51 Loneueur du pétiole..... 2 millim. 176 E. TEODORESCO. 4. BRicinus sanquineus (Ricin). Chez celte plante, commechez la précédente, les cotylédons prennent un grand développement, et, après la consommation des réserves, continuent à s’accroître et acquierent l'aspect et la fonction des feuilles, el cela même après que de nom- breuses feuilles se sont formées. Après vingt el un Jours de culture, les plantes présentent aux diverses lumières, outre les cotylédons, quelques petites feuilles, tandis qu'à l’obscurité, non seulement il ne se forme pas de feuilles, mais encore des colylédons arrivent à peine à sortir de la graine, La longueur du pétiole cotylé- donaire présente, chez le Ricin, les mêmes variations que chez le Sarrasin; en effet, les cotylédons des plantes cul- tivées à l’obscurité ont le pétiole le plus court; puis viennent ceux des plantes des lumières verte, rouge, bleue et blanche, comme on peut voir par les nombres consignés dans le tableau suivant : Surface des cotylédons.. 1105 millim. car. Dies enene | Longueur du pétiole...: 38 millim. ARC ( Surface des cotylédons.. 503 millim. car. Ch En | Longueur du pétioie .... 18 millim. ca Re ( Surlace des cotylédons. 209 millim. car. LA | Longueur du pétiole.... 16 millim. Re pe Surface des cotylédons.. 600 millim. car. RE Longueur du pétiole.... 20 millim. se Surface des cotylédons.. 53 millim. car. DUSCIRANÉ csv Longueur du pétiole.... 5 millim. 5. Paæonia officinalis (Pivoine) (PL MIS, BR, V) Une même louffe très grande de Pivoine a élé divisée en plusieurs fragments, égaux autant que possible, et chacun d'eux mis en pot. Quand, au printemps, les bourgeons oni commencé à se développer et à sorlir de la terre, j'ai choisi parmi les pieds précédents ceux dont les bourgeons pré- INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 177 sentaient le même état de développement, et je les ai mis en expérience. Au bout de soixante Jours de végélation (avril, mai), la culture à pris fin. À ce moment, les plantes pos- sédaient chacune cinq feuilles bien développées ; la sixième feuille, au-dessus de laquelle la tige se terminait par un bourgeon floral rudimentaire, était encore très petite. Au- dessous de la première feuille bien conformée, s’en {rouvaient une ou deux réduites à leur gaine. Dans le tableau ci-joint, je n'ai pas indiqué la surface des limbes foliaires ; les feuilles élant, en effet, découpées en de nombreux segments, J'ai préféré mesurer le diamètre transversal du lobe médian, ce qui donne une idée aussi exacte que les surfaces générales des feuilles, comme on peut se convaincre en examinant les figures (PI. VI, L, B, R, V.) Comme pour les deux espèces précédentes, je donne également, dans le tableau suivant, les longueurs des pétioles des feuilles successives. LUMIÈRE LUMIÈRE LUMIÈRE ROUGE VERTE BLEUE millim, millim. ! millim. ee Cimpesirre se 14 11 47 tédeule. : Déiole, 121 140 60 à CÉImMpé-ree 19 11 20 À 2 feuille. Détioles ie. 125 151 72 ' Lrimbert eut. At 20 15 23 3° feuille. Pétolem et 123 14% 80 Le feuill ( Limbe. ARR Se 19 A1 20 nr éPétioles 012.7: 96 126 66 LFP Éimbe 17 10 19 ve feuille. Pétiole ti: 83 116 52 C'est donc encore la lumière bleue qui produit les limbes les plus grands, et c’est sous l'aclion de la lumière verte qu'ils sont les plus réduits. Les longueurs des pétioles varient en sens inverse; par conséquent, ces parties de la ANN. SC. NAT. BOT. X, 12 ne De où _ E. TEODORESCO. feuille se comportent comme des tiges et non comme des limbes. Les courbes R, V, B de la figure 2, construiles commeje l’ai indiqué précédemment, montrent la marche du dévelop- Fig. 2. — Pæonia officinalis, développement des feuilles ; les chiffres placés le long de la ligne des abscisses indiquent les entre-nœuds successifs ; la longueur des ordonnées est proportionnelle à la surface des feuilles correspondantes. — V, lumière verte; R, lumière rouge ; B, lumière bleue. pement des cinq feuilles successives dans les diverses lumières colorées. Comme dans les exemples que j'ai décrits précédemment, les feuilles cullivées derrière l’écran rouge se rapprochent beaucoup plus de celles qui ont poussé dans la lumière bleue que de celles éclairées par la lumière verte. Les courbes de la figure montrent cela nettement. : INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. #79 \ 6. Œnothera biennis (Onagre). Cette plante étant bisannuelle, j'ai pris un cerlain nombre de rosetles de premiere année, qui ont élé mises dans des pots en automne. L'année suivante, j'ai cultivé celle plante sous l’action de trois lumières colorées, dont je me suis servi dans mes expériences ; la cullure a pris fin après cinquante- cinq jours, quand les individus exposés dans ces conditions avaient chacun 14 feuilles. Les feuilles de cette plante sont, comme on le sait, ailongées-lancéolées, et leur limbe se rétrécit vers la base, pour passer insensiblement en péliole, Comme pour l'espèce précédente, j'ai mesuré le diamètre transversal maximum des feuilles. D'autre part, la limite entre le limbe et le péliole n’élant pas assez nette, je ne donne pas les longueurs de celui-ci. Voici maintenant les résullats des mesures prises, en ce qui concerne le diamètre transversal du limbe. N° D'ORDRE DES FEUILLES LUMIÈRE ROUGE LUMIÈRE VERTE LUMIÈRE BLEUE millim. millim. millim. 1 EU ea Ge A A et 14 8 Œr CU à SE APRES PAR ES AE EE 19 9 21 D is a ne 18 10 21 Eee Be ET ee as rs 15 11 21 Li UT AIMER SNSER ER AT 9 21 LÉ SEE A ARE 15 9 20 HN ARE Ra Tr to 14 8 18 FE A qe A Et 15 8 17 A Te D Andes de Ne 12 7 15 (CENTER ASE 16 7 47 AL MSA M AE TE 41 6 47 APRES RSS RAS 43 n 17 ARRET EN RATE A RE ee à 14 3 19 A/R RE Per ARE PR ARTE UT RER T 3 13 De l'examen de ce tableau et de la figure 3, qui montre la marche générale du développement de la feuille dans les trois 180 E. TEODORESCO. sortes de lumières, on constate les mêmes variations des. Et En a le 0 eee mme ee = me Dee le le otf em me le = | [ ! | | [ ! I | ; [ AN [ l | l i | | l | Fe | [ ! | | ( [ 1 I | | [ l ! | | | ! 1 l [ I | I | ( ! : | | 1 I Û I | I ! Î ! | ! ! | Ü I ! l 1 I ! ! { 5 6 PAT CON et 1 Fig. 3. — OEnothera biennis; développement des feuilles ; les chiffres placés le long de la ligne des abscisses indiquent les entre-nœuds successifs ; la longueur des ordonnées est proportionnelle à la surface des feuilles correspondantes. — V, lumière verte; R, lumière rouge; B, lumière bleue. dimensions du limbe et du pétiole que dans les espèces de plantes précédemment décriles. 1. Rubus fruticosus (Ronce). (PL CVLL,,-B4R,, V,, (0) Le dernier exemple que je vais décrire au point de vue de la feuille, c’est la Ronce. Cette plante est d'autant plus inté- ressante que ses pélioles ne se comporlent pas comme ceux des espèces précédentes. ss Diamètre transversal du limbe.... 5 millim. DT boncueur'dupétoler ere 30 — io Diamètre transversal du limbe.... 50 — Eurméretlancne Éoneteueduapétiol es eee 100 — Doc Diamètre transversal du limbe.... 40 — Be oneueurdupétiole 80 — er Diamètre transversal du limbe.... 18 — dE DéecRre Longueur dupétiole 27e Æ0 — VOTES Diamètre transversal du limbe.... 45 — CUS Lonsueuridupétiole tree 90 — INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 181 On voit par ce tableau qu’au point de vue de la longueur, les pétioles de la Ronce se classent dans l’ordre croissant suivant : radiation (lolale, lumière bleue, lumière rouge, lumière verte, obscurité. Les tiges, au contraire, se classent, comme on le verra plus tard, dans l’ordre exactement inverse. Par conséquent, ici, les pélioles se comportent comme les limbes et non comme les tiges. 8. Sempervirum teclorum (Joubarbe des toits). (1. Vi-R, VB L) On sait qu’en général, chez les plantes qui ont les feuilles groupées en roselte à la base de la tige, ces feuilles se dis- posent de manière que leur limbe soit horizontal (Plantago major, Draba, Teesdalia, Capsella, etc.). Celle position est déterminée par la lumière, dont l'effet, dans les conditions naturelles et pour un objet situé à la surface du sol, peut être considéré comme se faisant sentir verticalement. La preuve que cette disposilion des feuilles radicales est due à l’action de la lumière, c’est que si on cultive les plantes à l'obscurité, comme ont fait beaucoup d’expérimentateurs, on constate que ces feuilles de la rosette prennent une direction verticale ; elles sont donc, dans ce cas, négativement géotropiques. Chez le Sempervirum tectorum, les feuilles étant très nom- breuses et épaisses, ne peuvent se disposer toutes dans un plan horizontal; elles sont plus ou moins dressées. En outre, elles présentent une légère courbure el ont une face concave supérieure, et une autre convexe inférieure ; elles sont donc, comme on dit, hyponastes. Cette plante a été cultivée dans la terre; J'ai choisi dix rosettes, aussi égales que possible, et je les ai plantées dans des pots remplis d'un mélange de terre et de sable. Tous les individus ont été récoltés d’un même endroit, un rocher du jardin du Laboratoire de biologie végétale de Fontainebleau. Après deux mois de culture, j'at observé les plantes qui MS con E. TEODORESCO. ont été exposées aux différentes lumières colorées, en: les comparant avec celles qui ont été laissées dans la lumière blanche. Je donne d'abord dans le tableau suivant, pour une dizaine de feuilles, en commençant par les plus grandes, qui sont les plus rapprochées de la base : 1° la longueur et la largeur ; 2° le rapport de la première de ces dimensions à la seconde ; 3° la surface — ou plulôt une quantité sensible- ment proportionnelle à la surface, — oblenue en multipliant la longueur par la largeur. LUM. BLANCHE LUMIÈRE ROUGE- | LUMIÈRE VERTE LUMIÈRE BLEUE RS CR. CN NS D EL NUMÉROS BE == = — BE HE 52 nT | Ne a ne ee Pr D 7 TS 3 = = 3 5 TD mm. mm. mm mm. mm. mm. mm. mm 1 22 40 28 6 32 6 24 8 2 22 8 21 6 30 6. 24 8 5) 21 92 21 ne 27 8 24 8 4 21 9 23 9 27 6 24 7 b) 21 9 25 ) 24 6 23 9 6 21 9 22 8 24 is) 23 9 7 21 9 22 7 24 8 23 q) 8 20 9 20 8 22 8 23 8 9 20 9 20 8 22 8 » » 10 » » 20 8 » » » » Moyenne....| 21 S) 2357 25 6 23 8 RS D DU. A DU. Cd DURE re 180 HO 150mna . 184mma Rappor de la iongueur à la largeur... . . 2739 3,28 4,16 2 Oo Nous voyons en premier lieu par ce tableau, qu’en ce qui concerne la surface, l'effet des diverses lumières est le même chez les feuilles en rosette, que chez les feuilles ordi- naires. C'est la lumière blanche qui produit la plus grande surface; viennent ensuile la lumière bleue et la lumière rouge, et c’est enfin dans la lumière verle que les feuilles sont les plus petites. En second lieu, la forme elle-même des feuilles varie un peu suivant la. réfrangibilité de la lumière. Le rapport de INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 183. la longueur à la largeur est le plus petil dans Ia lumière ordinaire, et le plus grand dans la lumière verle; c'est- à-dire que dans les conditions ordinaires d’éclairement, la feuille a une forme élargie, tandis qu’elle tend à devenir plus élancée dans la lumière verte. Les cas intermédiaires pour le rapport de la longueur à la largeur de la feuille sont fournis dans l’ordre décroissant par la lumière rouge et la lumière bleue. Enfin, comme on peut le voir par les figures (PL V, R, V, B, L), la différence de croissance entre la face supé- rieure et la face inférieure n’est pas la même et donne aux feuilles un aspect particulier. En effet, tandis que chez les feuilles de la lumière blanche la croissance de la face infé- rieure est plus grande que celle de la face supérieure, chez les feuilles qui ont été éclairées par les lumières colorées, on observe le contraire : c’est la face inférieure qui est concave, la face supérieure qui est convexe. Les feuilles sont donc hyponasles dans le premier cas, épinastes dans le second. En outre, l’épinastie n'est pas également accentuée dans les diverses lumières colorées : elle est le plus marquée dans le vert, le moins dans le bleu, tandis que dans le rouge le phénomène de l’épinastie présente un caractère intermédiaire. Parmi les plantes ayant à la base de la tige une rosette de feuilles plus où moins péliolées, j'ai éludié parliculière- ment les Valerianella, Lactuca et Barkhausia. Parlout on ob- serve, aux diverses lumières, le même sens dans les varia- lions de dimension du limbe et du pétiole, que chez Ja plupart des aulres espèces étudiées. Dans l'exemple précédent (Sempervirum), les feuilles de la rosette, verti- cales et hyponasles à la radiation totale, deviennent hori- zonlales et épinasles aux lumières colorées; ici, au con- traire, les feuilles, qui dans les conditions naturelles d'éclairement sont horizontales, prennent une position plus ou moins verticale, suivant la nalure des radiations. 184 E. TEODORESCO. En résumé : vrs 1° Sous l'influence des radiations de différentes réfran- gibilités, les feuilles des plantes que j'ai étudiées se com- portent différemment; 2° Le limbe présente toujours le maximum de surface chez les plantes exposées à la lumière bleue; c’est sous l’action des radiations vertes que cette surface est la plus petite, tandis que dans la lumière rouge les limbes ont des surfaces intermédiaires. Ce sont par conséquent les feuilles des plantes qui poussent dans la lumière bleue qui se rap- prochent le plus, par la surface de leurs limbes, des feuilles qui se sont développées à la lumière blanche; l'effet pro- duit par la lumière verte se rapproche le plus de l'effet produit par l'obscurité ; | 3° Quant à la longueur du pétiole, on peut distinguer deux groupes de plantes : a. Chez la plupart des espèces que j'ai étudiées, les pétioles se comportent comme les tiges : les pélioles les plus longs appartiennent aux tiges les plus longues et aux limbes les plus réduits. Ce sont donc les radiations vertes qui pro- duisent la plus grande taille, et les bleues la taille la plus courte; dans la lumière rouge, l'effet obtenu est intermé- diaire. Exemples : Pæœonia, Œnothera, etc. b. Dans d'autres espèces, on observe précisément le con- iraire : les pétioles les plus longs apparliennent aux tiges les plus courtes el aux limbes les plus grands. C’est chez les plantes éclairées par la lumière verte qu’on trouve les pétioles les plus courts; viennent ensuite, dans l’ordre croissant, la lumière rouge et la lumière bleue. Exemple : Bubus fruticosus, Polygonum Fagopyrum, Ricinus, ete. La manière dont se comportent les pélioles dans ce der- nier cas est-elle due à une propriété spéciale de ces organes chez les plantes citées, ou bien cela tient-il à la nulrition? Chez le Ricin, le Sarrasin, quand les feuilles et les cotylédons commencent à se développer, l’albumen est complèlement consommé, et par conséquent dès ce INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 185 moment-là la plante doit suffire elle-même à son entre- tien. Or, comme la plante se développe mieux dans le bleu que dans le rouge, et dans le rouge mieux que dans le vert, on pourrait peut-être expliquer par une inégale élabo- ration de substances nutritives le fait en apparence con- tradictoire que les pétioles des plantes citées ne se com- porlent pas comme des liges. D'ailleurs, si l’on compare des plantes qui ont poussé à l'obscurité avec celles qui ont été cultivées à la lumière tolale, on peut distinguer, quant à leur pétiole, également deux groupes de plantes. Les unes dont le pélicle est plus long à l’obscurité qu’à la lumière (Pæonia, Œnothera, elc.), les autres dont les pétioles sont plus longs à la lumière que dans l'obscurité (ÆRicinus, Poly- gonum Fagopyrum, elc.). La comparaison des deux schémas (1 et Il) de la figure 4 (e) L R V B II Fig. 4. — Développement de la tige et des diverses parties de la feuille; les ordon- nées & indiquent les longueurs des tiges ; les ordonnées p, les longueurs des pétioles ; les ordonnées /, les surfaces des limbes, dans la lumière totale (L), à l'obscurité (0), aux lumières rouge (R), verte (V) et hleue (B). Les longueurs des tiges varient toujours en sens inverse des surfaces des feuilles ; en 1, les pétioles varient comme les tiges; en I, ils varient comme les limbes. monlre nettement le sens dela croissance du péliole par rap- pori à la tige d’une part, au limbe de l’autre. Les ordonnées élevées aux points : O, L, R, V, B, sont respectivement proportionnelles aux dimensions des pélioles, des limbes et des tiges, à l'obscurité, dans la radiation lolale, el dans les lumières rouge, verte, bleue. Les courbes £, p, l repré- sentent la marche de la croissance de la lige, du péliole et du limbe, en fonction des radialions. Les deux courbes 4 1867 E. TEODORESCO. (tige) el: (limbe) ont des allures exactement inverses ; quant à ce qui concerne les pétioles, on voit qu'en I la courbe p (pétiole) est parallèle à la courbe f, tandis que en IT elle est parallèle à la courbe / (limbe). Aïnsi donc, les pétioles se comportent tantôt comme des Liges, tantôt comme des limbes. 4 Quand la plante présente à la base 4 la tige une roselte de feuilles charnues et dépourvues de péliole, ces feuilles s’accroissent en longueur comme des tiges, mais l'effet est notablement moindre. Les feuilles les plus lon- gues appartiennent aux plantes éclairées par la lumière verle, les plus courtes aux plantes ayant poussé derrière l'écran bleu, tandis que les feuilles éclairées par la lumière rouge présentent une longueur intermédiaire. En même temps, ces feuilles sont d'autant moins larges qu'elles sont plus longues. Elles se distinguent aussi par ce fait qu’au lieu d'être dressées et hyponastes, comme cela arrive sous la radialion totale, elles sont horizontales et toujours épinasles. B. — Morphologie interne. 1. Faba vulgaris (Fève de marais). Pour celte plante, et il en sera de même pour les autres que j'étudierai plus loin, je donne d’abord un tableau four- nissant l'épaisseur des divers issus de la feuille, el le nombre des stomates par unité de surface. Je décrirai en- suite, pour chaque espèce de lumière, les caractères mor- phologiques de ces lissus. Dans l’estimalion du nombre des stomates, j'ai pris pour unité la surface du champ microscopique, le grossissement étant le même; les épaisseurs des tissus sont données en millièmes de millimètre (u). INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES-SUR LES PLANTES, 187: LUMIÈRE LUMIÈRE LUMIÈRE LUMIÈRE BLANCHE ROUGE VERTE BLEUE Epaisseur de la 1'° assise palissadique. 1... 113 78 30 T8 Epaisseur de la 2e assise palissadique.: :/. 2: 56 51 27 54 . Epaisseur totale du tissu »'ibalissadique:: : :...:: 169 129 62 132 Epaisseur du tissu lacu- ROUE nee 502 199 181 297 Epaisseur de la feuille. 671 30 297 332 Nombre des / A la face su- stomates périeure .. 3 5 à 6 8 Zà 5 par unité de } A la face in- surface. férieure... 4 ? 12 î Voici maintenant les caraclères morphologiques des di- vers issus de la feuille, suivant la nature des radiations. 1° Lunuèëre blanche (PL. VIH, L). — Pour nous faire une idée juste de l'influence que les différentes espèces de radiations ont sur la structure de la feuille, je décrirai, tout d’abord, la morphologie interne des feuilles des plantes qui ont élé exposées à la lumière blanche, mais, à part cela, dans des conditions identiques que pour les plantes cultivées derrière les écrans colorés. L'épiderme supérieur est composé de cellules en général isodiamétriques, quand elles sont vues en coupe transver- sale. Observées de face, ces cellules nous apparaissent allon- gées, avec un contour très sinueux et mélangées avec des Stomales dont le nombre moven par champ microscopique est detrois. Ces stomates mesurent 48 » de longueur sur 32 de largeur. ; Sous l’épiderme supérieur se trouve une première assise palissadique, composée de cellules cylindriques, et dont la longueur représente un quart de l'épaisseur tolale de la feuille. La plupart de ces cellules sont cylindro-coniques, ayant leurs extrémités internes moins larges que les extré- milés externes. Elles laissent entre elles de grands espaces 188 E. TEODORESCO. intercellulaires, qu'on peut voir sur les coupes transversales et surtout sur les coupes tangenlielles. La deuxième assise palissadique est formée de cellules ayant une forme assez irrégulière. Le caractère constant de ces cellules est d’avoir une base externe très large et s'appuyant, dans la plupart des cas, sur les extrémités internes de deux cellules palissadiques de l’assise externe. Les extrémilés internes des cellules de la deuxième assise palissadique sont au contraire très rétrécies. Les méats de celte assise sont plus développés que ceux de l’assise précédente. _ Le tissu lacuneux occupe la plus grande partie de l’épais- seur de la feuille ; il est composé de cellules tout à fait irré- gulières, présentant des prolongements de longueur va- riable, qui se juxtaposent pour former un réseau à mailles irrégulières. Le système aérifère est de beaucoup plus développé que dans le tissu palissadique, ce qu’on peut voir surlout sur les coupes langentielles. Dans ce dernier cas, on peul constater que les trois quarts de l'unité de sur- face sont occupés par les lacunes. L'épiderme inférieur est formé de cellules plus petites que celles de l’épiderme supérieur; elles sont en général isodiamétriques, à parois latérales tout aussi sinueuses que dans l’épiderme de la face supérieure. Les stomates mesu- rent 54 w de longueur sur 32 w de largeur; ils sont donc un peu plus allongés que ceux de la face supérieure de la feuille. | 2° Lumière rouge (PI. VIT, Rj. — La première diffé- rence qu’on constate en observant les coupes transversales de la feuille, c’est que son épaisseur est, relativement au cas précédent, très réduite. Vues en coupes transversales, les cellules de l’épiderme supérieur se montrent conformées iden- tiquement comme celles des plantes éclairées par la radia- üion {otale. Mais si on observe l’épiderme de face, les cellules apparaissent moins allongées et avec des parois latérales moins ondulées. En même temps les stomates, dont le nom- INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 189 bre est plus grand par unité de surface, sont plus pelites; ils n'ont que 40 v de longueur et 27 w de largeur. Remar- quons que celte augmentalion du nombre des stomates par unité de surface lient simplement à ce que la surface de la feuille est moins étendue et à ce que toutes les cellules épi- dermiques sont plus pelites. Cela ne veut pas dire que le nombre total des stomales de la feuille est augmenté par la lumière rouge. L’assise palissadique, qui vient immédiatement au- dessous de l’épiderme supérieur, occupe un quart de l’épais- seur totale de la feuille. Les cellules ne sont pas cylindro- coniques, comme chez les plantes cullivées dans la lumière blanche, et les espaces inlercellulaires sont moins dévelop- pés que dans ce dernier cas, comme on peut le constater sur les sections transversales et tangentielles de la feuille. La . deuxième assise palissadique présente des cellules à peine plus longues que larges, et formant une assise régulière. Les espaces qu'elles laissent entre elles sont très pelits. & Fig. 5. — Faba vulgaris. — Tissu lacuneux vu de face (lumière rouge). Le” tissu Jlacuneux {he..5) :(PI. VIE R), occupe, ici aussi, la plus grande partie de l'épaisseur de la feuille; ses 190 +. : ! E. TEODORESCO. cellules sont ovales, très peu irrégulières, el ne présentent pas des prolongements, comme chez les plantes exposées à la lumière blanche. Les espaces aérifères que ces cellules limi- tent sont moins développés que dans le cas précédent ; faible développement peut être constaté lant sur les coupes transversales que tangenlielles ; ces espaces n'occupent d’ailleurs que deux tiers de l’unité de surface. L’épiderme inférieur présente les mêmes particularités que l’épiderme supérieur, mais les stomates sont relalive- ment plus longs que larges (51 x de longueur sur 27 y de largeur). à 3° Lumière verte (PL VII, V). — Léa totale de la feuille est encore plus faible que chez les plantes qui ont poussé derrière l'écran rouge. Les rapports entre l’épi- derme supérieur et l’épiderme inférieur restent les mêmes que dans les cas précédents, seulement les cellules épider- miques de la face supérieure ont leurs parois latérales beau- : coup moins sinueuses. Les stomales, dont le nombre par unité de surface augmente, sont encore plus petits que dans la lumière rouge, leurs dimensions étant 40 & de longueur sur 24 L de largeur. Ce qui frappe surtout quand on observe les coupes trans- versales d’une feuille qui à élé éclairée par la lumière verte, c’est que tous ses tissus sont très compacts. En effet, l’assise palissadique, qui se trouve immédiatement sous l’épiderme supérieur, a ses cellules, dont ja longueur atteint à peine la moilié de ce que nous avons vu dans la lumière rouge, intimement unies les unes aux autres ; à cause de ce fait, il n'existe presque pas d'espaces aérifères, ce qui est visible surtout dans les coupes tangentlielles. D'autre part, celle première assise palissadique n'occupe que le hui- ième de l'épaisseur lotale de la feuille. Comparons maintenant, au point de vue du contenu, une de ces cellules avec les cellules de la même assise des plantes cullivées en lumière blanche. Dans ce dernier cas, on voit très bien dans l'intérieur de [a cellule {PI. VIE A < INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 191 ‘un très grand nombre de chloroleucites ovales, à contour très net, franchement colorés en vert et disposés réguliè- _rement dans la couche de protoplasma pariétal. Dans les cellules des plantes qui ont élé exposées à la lumière verte (PI VII, o), l'emploi des mêmes réaclifs colorants que précédemment ne décèle pas de leucites à contour net, comme ceux décrits plus haut; les contours restent vagues et le pro- toplasma parail uniformément teinté. À l’état frais, aucun leucite n'est distinct. Ces observations sont applicables pour toutes les cellules du tissu assimilateur de la feuille. La deuxième couche palissadique est encore ‘plus régu- lière que dans la lumière rouge ; elle est formée de cellules polygonales ou ovales, un peu allongées perpendiculaire- ment à la surface du limbe. Le tissu lacuneux (fig. 6) (PL. VIT, V), présente chez Fig. 6. — Faba vulgaris. — Tissu lacuneux vu de face (lumière verte). les plantes éclairées par la lumière verte un aspect tout à fait caractéristique. Sur les coupes transversales, 1l est composé de cellules, qui sont pour la plupart allongées parallèlement à la surface de la feuille; entre ces cellules, 1l ne reste que 192 E. TEODORESCO. de très petits méats. Mais si on observe les coupes tangen- tielles, on constate que les cellules du lissu lacuneux sont faiblement ramifiées, et les espaces intercellulaires occupent à peu près la moilié de l'unité de surface. L'épiderme inférieur présente entre ses cellules un plus srand nombre de stomates que chez les plantes qui ont poussé derrière l'écran rouge ; leurs dimensions sont : 40 y de longueur, sur 24 de largeur. 4 Lumière bleue (PI. VIT, B). — Si nous examinons maintenant les plantes qui ont été éclairées par les radia- tions de la moitié la plus réfrangible du spectre, on cons- {ate qu’au point de vue de la structure de leurs feuilles elles présentent des caractères intermédiaires entre ceux que nous avons vus pour les plantes cullivées en lumière blanche et en lumière rouge. L’épiderme supérieur, par la forme, les dimensions et le contour sinueux des parois latérales de ses cellules, se rap- proche plus de celui des plantes éclairées par les radiations rouges. Les stomates, dont le nombre est de 4 à 5 par unilé de surface, mesurent 40 & en longueur et 27 x en largeur. L’assise palissadique sous-épidermique a la même épais- seur que dans le rouge, mais le système aérifère y est plus développé. Le contenu des cellules palissadiques se rapproche plus de celui des plantes qui ont été exposées à la lumière blanche, que de celui des plantes qui ont été exposées à la lumière rouge. En effet, chez les plantes de la dernière catégorie, les chloroleucites sont (PI. VII, 7) en pelit nombre, à contour et de grandeur irréguliers et dis- posés sans ordre. Chez les plantes de la lumière bleue, ces corpuscules sont plus nombreux, leur contour est ovale, régulier (PI. VIT, 6); 1ls sont disposés régulièrement dans la couche du protoplasma pariélal et ils recouvrent à peu près {oute la surface interne de la membrane cellulaire. La deuxième assise palissadique a également la même épaisseur que dans la lumière rouge, mais ses cellules pré- INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 193 sentent la forme tronconique décrile chez les plantes éclairées par la lumière blanche. Leur extrémité externe, plus large, s'appuie souvent, en même temps, sur deux cel- lules de l’assise palissadique externe. Le reste du mésophylle est formé par un tissu lacureux nettement caractérisé, formé par des cellules irrégulière- ment ramifiées et laissant entre elles de larges espaces aéri- Fig. 7. — Faba vulgaris. — Tissu lacuneux vu de face (lumière bleue). fères. Ces espaces occupent plus de deux tiers de l’unité de surface (fig. 7) (PI. VII, B). | Les cellules de l’épiderme inférieur ont leurs parois lalé- rales plus ondulées que dans la lumière verie, tout aussi ondulées que dans la lumière rouge, mais moins que dans la lumière blanche. Les stomates, dont le nombre est de 7 par unité de surface, mesurent 48 w de longueur et 29 en largeur. 2. — Arachis hypogæa. Le tableau suivant présente les dimensions des différentes assises cellulaires de la feuille, ainsi que le nombre des sto- mates par unité de surface du limbe. ANN. SC. NAT. BOT. x, 13 194 : _E. TEODORESCO. LUMIÈRE LUMIÈRE | LUMIÈRE LUMIÈRE BLANCHE ROUGE VERTE . BLEUE -Épaisseur de la 1'° assise “palissadique PePPe 30 29 24 30 Epaisseur de la 2° assise “palssatdique- ess 31 21 21 28 Épaisseur totale du tissu . valissadique. 2 027 67 56 45 58 Epaisseur du tissu lacu- LIMOUSIN CE SRE 96 48 39 51 Epaisseur de la couche in- FCOÏOPES een re 60 67 D4 45 Epaisseur totale de la feuilles remets 243 216 207 216 Face supé- Nombre des | rieure 12 18 20 13 stomates. [ès infé- FEULE 12 18 20 13 1° Lumière blanche. — Dans les cellules de l'épiderme supérieur, observées de face, on distingue un nombre variable de leucites, uniformément disposés dans la masse protoplasmique. En coupe transversale, le {issu palissadique se montre formé de deux assises d'épaisseur à peu près égale, l’externe étant cependant composée de cellules un peu plus longues que l’interne, comme on peut en juger par le tableau précédent ; la première assise a 1/6, la deuxième 1/7 de. l'épaisseur totale de la feuille. Les cellules d'une même assise ne se touchent que très peu par leurs parois longitudinales : les espaces aérifères, qui facilitent les échanges gazeux, sont donc très développés. Le tissu lacuneux, qui représente à peu près le quart de l'épaisseur de la feuille, est formé de cellules irrégulière- ment arrondies, et les méats sont naturellement bien plus développés que dans le tissu palissadique. Dans toutes les cellules du tissu assimilateur, on observe un contenu protoplasmique abondant et très granuleux, dans l’intérieur duquel se trouvent de nombreux chloro- INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 1495 leucites, ovales, ayant un contour très net, et dispersés le long des parois. Le reste de l'épaisseur du mésophylle, un quart à peu près, est formé par des cellules très grandes, incolores, un peu allongées parallèlement à la surface du limbe et laissan{ entre elles de très grandes lacunes. 2° Lumière rouge. — L'épiderme supérieur ne présente pas, par rapport au précédent, de différences importantes en ce qui concerne la forme des cellules ; mais iln’en est pas de même pour leur contenu. En effet, les leuciles sont groupés Fig. 8.— Arachis hypogæa.— Cellules épidermiques vues de face pour montrer la répartition des leucites : R, à la lumière rouge; V, à la lumière verte; B, à la lumière bleue; 7, noyau.’ dans le protoplasma qui entoure le noyau (fig. 8, R), formant autour de celui-ciune sorte d’auréole. Le nombre des stomates par unité de surface esl beaucoup plus grand que chez les plantes cultivées dans la lumière blanche (18 au lieu de 12). La première assise pa- lissadique n'a que 1/7 nées ARC Ly et la deuxième que eo 4/8 de l'épaisseur totale à © CE) s 0e de la feuille ; leurs > OX () O2 cellules se touchent par > co DES Ô ) la plus grande partie D je De OT ODA tudinales (fig É 9), de Fig. 9. — Arachis hypogæa. — Tissu palissa- de leurs faces longi- dique vu de face (lumière rouge). telle sorte que les espaces aériferes sont moins développés qu'à la lumière blanche. 196 E. TEODORESCO. Le issu lacuneux reste sans changement apparent, occu- pant toujours à peu près Le quart de l'épaisseur de la feuille, mais la couche incolore est modifiée ; relativement aux autres lissus, aussi bien qu’en valeur absolue, l'épaisseur de cette couche est plus grande que dans les plantes qui ont élé exposées à la lumière blanche. | | Les cellules du tissu assimilateur ont un contenu proto- plasmique pauvre en granulalions ; les chloroleucites y sont vert pâle et disposés sans ordre dans l'intérieur de la cellule. 3° Lumière verte. — Dans les deux séries précédentes (lumière blanche, lumière rouge), les stomates présentent très tôt leur état définitif ; les deux cellules annexes y son! égales et la cellule mère primordiale du stomate est devenue indistincte. Au contraire, ce qui frappe surtout quand on examine l’épiderme des feuilles éclairées par la lumière verte, c’est l’état peu avancé du stomate : les cellules an- nexes y sont encore inégales, et le contour général de la cellule mère primordiale est nettement distinct. Le nombre des stomates par unité de surface est plus grand encore qu’à la lumière rouge. Les leucites des cellules épidermiques affectent la même disposition en groupe autour du noyau (fig. 8, V), mais ces éléments sont plus petits que dans la lumière rouge et surtout dans la lumière blanche. Le lissu palissadique est encore moins déve- loppé que dans le cas pré- cédent : c’est ainsi que la première assise n'a que Fig. 10. — Arachis hypogæa. — Tissu palis- Lo . la deuxième 179 de sadique vu de face (lumière verte). ] épaisseur de la feuille ; ce lissu est compact et ne laisse presque pas d'espaces aérifèresentreses cellules (ig.1 0). Quant au lissu lacuneux, il perd son principal carac- INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 197 tère et cesse presque d'être lacuneux, tant les espaces intercellulaires sont peu développés; il n'a que 1/5 de l’épais- seur de la feuille. Dans le tissu assimilateur, l'emploides mêmes réactifs colorants que précédemment ne décèle pas de leuci- tes à contour net, comme ceux décrilsplus haut ; les contours restent vagues et le protoplasma paraît uniformément teinté. A l’état frais, aucun leucile n’est distinct. Enfin l’assise de cellules incolores acquiert ici une épais- seur relalive encore plus grande que dans la lumière rouge (un tiers de celle de la feuille). 4 Lumière bleue. — L'épiderme supérieur présente des caractères intermédiaires entre ceux que nous avons vus dans la lumière rouge et [a lumière blanche, et le nombre des stomates est à peu près le même que dans ce dernier cas. Quoique la plupart des leucites soient rassemblés dans le protoplasma périnucléaire, on en observe cependant un assez grand nombre dispersés dans le reste de la cellule (fig. 8, B). Le tissu palissadique est, relativement à l'épaisseur de la feuille, un peu plus développé que dans la lumière rouge, la première assise ayant 1/7, le deuxième 1/8 de cette épais- seur. Il en est de même pour les espaces aérifères. Le tissu lacuneux représente un quart de l'épaisseur de la feuille. Le contenu des cellules assimilatrices est abondant, gra- nuleux ; les chloroleucites ont un contour net, et ils sont dispersés, pour la plupart, régulièrement le long des parois. L’épaisseur relative de l’assise incolore est plus réduite que dans la lumière rouge. Par ce qui précède, on voit que le développement des tissus de la feuille d’Arachis, sous l'influence des radiations de différentes réfrangibilités, varie dans le même sens que pour la Fève. Après la lumière blanche, c’est encore dans les lu- mières rouge et bleue que le tissu assimilateur (surtout palis- sadique) et les espaces aérifères acquièrent le plus grand développement, landis que sous l’action des radiations vertes ce développement est beaucoup plus faible. Le nombre des 198 + A E. TEODORESCO. stomates par unité de surface esl au contraire plus grand chez les plantes éclairées par la lumière verte, plus faible chez les plantes exposées à la lumière rouge et surtout à la lumière bleue. En outre, on trouve dans la feuille de cette plante un autre tissu qui subit des modifications différentes dans les diverses lumières colorées ; c’est le tissu incolore, constitué de très grandes cellules qui se trouvent sous l’épiderme infé- rieur : son épaisseur atleint le plus grand développement relatif dans la lumière verte. À remarquer aussi la disposition des leucites dans les cel- lules épidermiques ; dans les lumières rouge el verte, ces cor- puscules sont tous groupés dans le protoplasma qui entoure le noyau, formant autour de celui-ci une sorte d’auréole, landis que dans la lumière bleue on en observe, en outre, un assez grand nombre dispersés dans le reste de la cellule. Il y a peut-être une relalion entre la dispersion des leucites et la présence de l’amidon dans les cellules; en effel, M. Arthur Meyer (1) a observé que dans le parenchyme de réserve des Angiospermes les « anaplastes » se trouvent uniformément réparlis dans le protoplasma, quand les cel- lules contiennent des granules d'amidon; mais après la dissolution de ceux-ci, les « anaplastes » se groupent (pour la plupart du moins) aulour du noyau. Ce bolamisie a observé le fait surtout dans l’/ris, l'Adoxa Moschatellina el l'Orchis fusca. 3. Ricinus sanquineus (Ricin sanguin). Au bout de vingt-deux jours de végétation, cetle plante n'avait pas encore de feuilles, ou du moins celles-ei étaient très peliles ; j'ai étudié les cotylédons qui étaient très bien développés et présentaient un méscphylle bien caractérisé. Le tableau comparatif des dimensions des différentes régions et le nombre des stomates est le suivant: | (4) Arthur Meyer, Das Chlorophyllkorn. Leipzig, 1883, p. 55. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 199 LUMIÈRE LUMIÈRE LUMIÈRE LUMIÈRE | BLANCHE ROUGE VERTE BLEUE Épaisseur du tissu palis- M SHqUe se ....,. 94 09 04 62 Epaisseur du tissu lacu- neue en: 202 143 108 150 Epaisseur totale de la Euler ec. 346 256 218 297 Nombre des { Face supé- stomates riéure.... 2 6 10 6 par unité de ) Face infé- | surface. rieure . .. 2 ( 10 6 | 1° Lumière blanche. — Vu de face, l’épiderme supérieurdes cotylédons se présente composé de cellules à parois latérales ondulées ; entre les cellules ordinaires, on en observe d’au- ires un peu plus grandes, ayant un aspect glanduleux, à contenu plus abondant et plus granuleux; autour d'elles, les autres cellules épidermiques sont disposées radialement, ce qu'on peut bien voir en regardant l’épiderme de face. Dans ce dernier cas, les cellules glanduleuses peuvent être distinguées non seulement grâce à leur contenu, mais encore par le fait que la surface de leurs parois externes est bien plus petite que celle des autres cellules épidermiques. Sur les coupes transversales, ces cellules particulières sont moins faciles à distinguer. Le tissu palissadique n'est représenté que par une seule assise de cellules, mais elle est relativement très épaisse, occupant un quart de l'épaisseur du cotylédon. Les cellules palissadiques sont cylindriques; elles laissent, entre elles, des espaces aérifères assez développés, et sont pleines de chloro- leucites discoïdaux à contours très nels. Le tissu lacuneux est également {rès bien caractérisé; ses cellules sont irrégulièrement étoilées, et les méats sont très bien développés. Si on observe les coupes transver- sales ou tangenlielles, on constate que les espaces aérifères occupent 2/3 de la surface. Le tissu Tacuneux représente 200 E. TEODORESCO. à peu près la moitié de l'épaisseur lotale du cotylédon. L'épiderme inférieur possède le même nombre de sto- males par unité de surface, les mêmes cellules glanduli- formes, que l’épiderme supérieur, mais les parois latérales de ses cellules sont plus sinueuses. 2° Lumière rouge. — Les cellules de l’épiderme supérieur ont leurs parois relativement très peu onduleuses; les cel- lules glanduleuses, que j'ai décrites plus haut, sont, chez les plantes éclairées par les radiations rouges, beaucoup plus grandes relalivement aux autres cellules épidermiques, ce qu’on peut voir en regardant les cotylédons aussi bien de face qu’en coupe transversale. Dans ce deruier cas, on peut se convaincre que les cellules glanduliformes se prolongent beaucoup au-dessous du niveau de l’épiderme, et que leurs extrémitésinternes, c'est-à-dire tournées vers le centre du mésophylle, font saillie dans Le tissu palissadique; à cause de cela, les cellules de ce tissu sont moins longues à l’en- droit des cellules glanduleuses. Sur l'unité de surface, on peut compter rois fois plus de stomales que chez Les plantes qui ont été cultivées à la lumière blanche. L’assise palissadique représente, comme dans le cas pré- cédent, un quart de l'épaisseur du cotylédon, mais ses cellules sont seulement moitié moins longues. Ces cellules sont inti- mement unies les unes aux autres, formant un tissu com- pact dans lequel les espaces aérifères sont très peu développés. Le tissu lacuneux, qui occupe à peu près la moitié de l'épaisseur du cotylédon, commence par une assise compacte, composée de cellulesisodiamétriques, au-dessous de laquelle viennent plusieurs autres assises de cellules irrégulièrement arrondies, un peu allongées parallèlement à la surface de la feuille. Ces cellules ne présentent pas des portions étroites et allongées aussi marquées que dans la lumière blanche, surtout en coupe transversale. Les espaces intercellulaires, facilitant les échanges gazeux, sont donc beaucoup moins grands, comparativement à ce que nous avons vu dans les colylédons des plantes exposées à la lumière blanche. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 201 L’épiderme inférieur a les mêmes caractères que l’épi- derme supérieur. 3° Lumière verte. — Les cellules glanduleuses de l’épiderme supérieur sont ici encore plus grandes relativement aux cel- lules environnantes. Elles ont la forme de grandes vésicules, et la surface de leur parotï externe est même plus grande que celle des autres cellules épidermiques. Au-dessous de chaque cellule glanduleuse, on voit 8 à 9 cellules palissadiques, au lieu de 6 à 7 comme dans la lumière rouge, et de 4 comme dans la [lumière blanche. Le nombre des stomates, par unité de surface, est cinq fois plus grand qu’en lumière blanche, et deux fois plus qu’en lumière rouge. Par rapport à l'épaisseur du colylédon, le tissu palissa- dique représente, comme dans les deux cas précédemment décrits, un quart de cette épaisseur, mais son développement est moins avancé. Les cellules sont, en valeur absolue, moins longues encore que dans Ia lumière rouge. _ Le tissu lacuneux occupe la moitié de l'épaisseur du coty- lédon; il est conslilué de cellules isodiamétriques, ou bien un peu plus allongées perpendiculairement à la surface de la feuille ; ces cellules sont accollées par leurs parois, de ma- nière qu'il ne reste que de très petits espaces aérifères aux angles. Dans tout le tissu assimilateur, les chloroleuciles ne sont pas visibles, ni sur des coupes fraîches, n1 dans celles qui ont élé traitées par des réactifs colorants. 4° Lumière bleue. — Les épidermes possèdent les mêmes particularités que dans la lumière rouge, mais le reste de la feuille présente des caractères intermédiaires entre ceux que l'on a trouvé pour la lumière rouge et la lumière blanche. C'est ainsi que le tissu palissadique, quoiqu'il occupe tou- jours le quart de l'épaisseur de la feuille, a ses cellules plus longues et les espaces aérifères plus grands que chez les plantes éclairées par les radiations rouges. Tandis que dans les deux cas précédents, el surtout dans la [lumière verte, les cellules du lissu lacuneux élaient à peu 202 E. TEODORESCO. près régulièrement isodiamétriques, ou un peu ovales, ici, dans les plantes éclairées par les radiations bleues, les cel- lules du tissu lacuneux sont tout à fait irrégulières ; elles ont des prolongements plus ou moins longs, qui limitent des lacunes assez développées. Ce qui est caractéristique pour les cotylédons du Ricin, c'est la manière dont se comportent les chloroleuciles sous l'action des différentes radiations. Tandis qu’à la lumière blanche, comme je l'ai indiqué plus haut, ces corpuscules sont très nets, 1l est impossible de les voir, en employant les mêmes réactifs, chez les plantes éclairées par les lumières rouge, verte et même bleue. Les différences pour les diverses lumières se manifestent cependant au point de vue du contenu protoplasmique, qui est très pauvre sous Îles radiations vertes, plus riche à la lumière rouge, et surtout à la lumière bleue. En résumé, les divers tissus du cotylédon du Ricin se comportent de la même manière, sous l'influence de diverses lumières colorées, que ceux des feuilles des plantes précé- demment décrites. 4. Lupinus albus (Lupin blanc). Les principaux résullats, quant aux dimensions des différentes assises de cellules et au nombre des stomates par unité de surface, sont consignés dans le tableau ci-Joint. Les caractères morphologiques des divers tissus sont les suivant(s : 1° Lumière blanche (fig. 11). — Les feuilles de cette plante ont une partie des cellules de leur épiderme inférieur pro- longées sous forme de poils unicellulaires. Les autres cellules sont en général isodiamétriques, quelques-unes un peu aplalies. Toutes les cellules de l’épiderme supérieur sont, au contraire, plus larges que hautes. Mais, landis que la paroi externe des cellules de ce dernier épiderme est plane ou très INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 203 peu bombée, celle des cellules de l’épiderme opposé est en général papilleuse. Le tissu assimilateur palissadique est composé de trois assises d’inégale épaisseur. L’assise externe occupe 1/6 de D : que AN ep. Li. Fig. 11. — Lupinus albus. — Feuille à la lumière blanche; ep.s, épiderme supé- rieur; p, parenchyme en palissade; /, tissu lacuneux; ep.i., épiderme inférieur. l'épaisseur totale de la feuille; ses cellules ne sont pas toutes de même longueur. La deuxième assise palissadique occupe 1/8, et la troisième 1/9 de l'épaisseur de la feuille. Cette dernière assise, qui est formée de cellules très peu allongées perpendiculairement à la surface de la feuille, fait le passage du tissu palissadique au tissu lacuneux sous-jacent. 204 E. TEODORESCO. Celui-ci forme un peu plus de la moitié de l'épaisseur du mésophylle ; ses cellules sont irrégulières et non disposées én assises ; il resle entre elles de larges espaces aérifères. Dans toutes les cellules du mésophylle, les chloroleucites ont un contour très net, et dans les cellules palissadiques ils sont disposés régulièrement le long des parois latérales. LUMIÈRE LUMIÈRE | LUMIÈRE | LUMIÈRE À OBSCURITÉ | BLANCHE | ROUGE VERTE BLEUE Épaisseur de la d'e assise “ipalissadique ne "120 56 27 22 37 13 Epaisseur de la 2° assise Hpalssadique 2-00 40 22 18 29 13 Epaisseur de la 3° assise ‘palissadique.. 1... 35 22 18 24 13 Epaisseur totale du tissu! : Mpalhssadiques eee ee 131 TA 58 90 39 Epaisseur du tissu lacu- lNÉUX ne Et ee 167 75 75 AL% 48 Epaisseur de la feuille...| 352 210 195 274 121 Nombre des { Face supé- stomates rieure:... 10 26 30 20 39 par unité de ) Face infé- surface. PICULER A. 14 31 38 25 42 2° Lumière rouge (fig. 12). — Si nous comparons la struc- ture des feuilles des plantes qui ont été cultivées en lumière blanche avec celle des plantes qui ont été exposées à l’action des radiations de différentes réfrangibilités, on constate tout d’abord que, de trois assises palissadiques, l’externe seule conserve son caractère propre ; Les deux autres ont perdu, à un degré plus ou moins grand, leur aspect palissadique. Si nous nous rapporlons au tableau ei-joimt, on peut y voir que, dans la lumière rouge, la première assise palissa- dique occupe 1/7 seulement de l'épaisseur de la feuille ; la deuxième et la troisième représentent chacune 1/9 de cette même épaisseur. Le tissu lacuneux est composé de cellules aplaties paral- lèlement à la surface de la feuille. Elles sont généralement chez les plantes éclairées par la INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 205 ovales, disposées en assises régulières, el laissent peu de méats entre elles. En ce qui concerne les chloroleucites, ils sont moins nom- breux que dans la lumière blanche, tant pour le tissu palis- AN sadique que pour le tissu lacu- : neux. Ces corpuscules sont à peu près de même grandeur et leurs contours sont tout aussi nets que radiation totale. Mais ils sont moins verts dans les cellules vivantes, et dans les cellules traitées par des réactifs ils pren- nentunecoloration moinsintense. Les cellules épidermiques, aussi bien de la face supérieure que de la face inférieure, sont très papilleuses, comme on peut le voir par la figure; la portion papilleuse occupe le Liers jusqu’à A & Fig. 12. — Lupinus albus.— Feuille la moitié de la hauteur de la cel- Ÿ''iumière ie A Vin lule. derme supérieur; p,parenchyme À de en palissade; /, tissu lacuneux; 3° Lumière verte (fig. 13). — ep, épiderme inférieur. Vus en coupe transversale, les épidermes inférieur et supérieur ne présentent pas de diffé- rences notables par rapport à celles que nous avons signalées chez les plantes qui ont poussé derrière l'écran rouge. Mais il n’en est pas de même si l’on observe ces épidermes de face : les cellules sont beaucoup plus petites dans la lumière verte; leur nombre, ainsi que le nombre des stomales par unité de surface, est bien supérieur à celui du cas précédent. L'assise palissadique externe occupe 1/8 de l'épais- seur lotale de la feuille. Ses cellules sont intimement réunies par leurs parois longitudinales, ce qui fait que les espaces aérifères, nécessaires à la circulation des gaz, sonl 206 . E. TEODORESCO. irès réduits. Ces cellules présentent, sur une coupe paral- lèle au limbe, une base carrée, un peu arrondie aux angles; elles sont par conséquent prismatiques et non cylindri- ques, comme dans les deux cas précédents. Les chloroleu- cites sont encore moins nombreux que chez les plantes exposées à l'influence de la lumière rouge. Mouse La deuxième et la troisième assise palissadique occupent chacune 1/10 de lépaisseur de la feuille. Le tissu lacuneux est encore plus compact, ses cellules plus régu- lières et disposées en | assises plus nettes que D — … dans la lumière rouge. ept: ÈS Fig. 13. — Lupinus albus. — Feuille Fig. 14. — Lupinus albus. — Feuille à la : à la lumière verte; ep.s., épiderme lumière bleue; ep.s., épiderme supérieur; supérieur; p, parenchyme en pa- p, parenchyme en palissade ; /, tissu lacu- lissade ; Z, tissu lacuneux; ep.i., neux; ep.1., épiderme inférieur. épiderme inférieur. 4° Lumière bleue (fig. 14). — Les feuilles de la lumière bleue sont celles qui se rapprochent le plus, tant par leur INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 207 structure que par leur épaisseur, de celles des plantes culti- vées en lumière blanche. Les cellules épidermiques de l’une et l’autre face n’ont pas leurs parois externes si papilleuses que dans la lumière rouge et verte. Le lissu palissadique laisse entre ses cellules de larges espaces aérifères ; 1l est un peu plus développé que chez les plantes éclairées par la lumière rouge, quant aux dimensions absolues et relatives de ses diverses assises. Par leur disposition régulière le long des parois longitudinales et par leur nombre, ainsi que par leur grosseur, les chloroleucites se rapprochent plus de ceux des plantes cultivées en lumière blanche. Les stomates, aussi bien de la face supérieure que de la face inférieure, sont plus grands et leur nombre, par unité de surface, est plus petit que dans les deux cas précédemment décrits. | 5° Obscurité (fig. 15). — Les plantes qui ont poussé à l'obs- curilé présentent les caractères con- | | nus. À remarquer que les cellules de l’épiderme ont leurs parois externes à peu près planes, comme à la lumière blanche, el non papilleuses, comme chez les plantes éclairées par les diffé- rentes lumières colorées. Nous verrons plus loin quelle importance il faut attacher à ce caractère. Le mésophylle est un tissu absolu- ment compact, les diverses assises ont toutes à peu près la même épais- mie rare seur, et les cellules sont isodiamétri- ‘?*° À nie ques, à l'exception de celles de l’assise en palissade; 2, tissu palissadiqué sous-épidermique, qui jnncur/t» Piterme sont plus longues que larges. Les stomates sont {rois fois plus nombreux, par unité de surface, et ils sont beaucoup plus petits que dans la lumière blanche. Remarque. — À cause du développement très différent 208 E. TEODORESCO. des lacunes dans les diverses lumières, il peut être inté- ressant, pour apprécier l'importance relative d’un tissu, de considérer non pas son épaisseur, mais le volume de ses cellules. Pour arriver d’une manière précise à ce ré- sultat, je procède de la manière suivante. Je dessine les coupes à la chambre claire, et je les photographie sur une plaque de verre. Je puis alors projeter ces reproductions sur une grande feuille de papier et tracer les contours des cellules. Sur ces grands dessins, je puis évaluer directe- ment les surfaces occupées par l’ensemble des tissus que je compare. Je puis encore découper chaque cellule; le poids de la partie découpée est évidemment proportionnel à la surface de la cellule correspondante. Ces données me permettent de déterminer le développement relatif du tissu palissadique et du lissu lacuneux, en laissant les méats de côlé. On peut ainsi se rendre compte que l'épaisseur plus grande de la feuille (dans le bleu que dans le vert par exemple), n’est pas due seulement à l’augmentation du sys- tème aérifère, À ne considérer que le volume de l’ensemble des cel- lules, ce volume est plus grand dans le premier cas que dans le deuxième, abstraction faite des lacunes. Les résultats obtenus, quant à la morphologie interne de la feuille, peuvent être résumés de la manière sui- vante : 1° Les diverses lumières colorées dont je me suis servi sont moins favorables au développement des tissus de la feuille que la lumière totale; 2° Les épaisseurs des tissus palissadique et lacuneux, ainsi que la largeur moyenne des lacunes aérifères, ont un minimum de développement dans le vert. Ces diverses dimensions sont plus grandes dans le rouge, et plus grandes encore dans le bleu. Le développement du tissu assimila- teur el du système aérifère varie donc dans le même sens INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 209 que l’action retardalrice des différentes radiations sur la croissance de Îa tige ; 3° Les chloroleucites présentent, quant à leur volume, leur nombre et leur disposition, des variations analogues à celles énoncées pour le issu assimilaleur : ils sont dans la lumière verte plus pelits, moins nombreux, à contours vagues, disposés sans ordre dans la cellule et sont moins veris que dans les lumières bleue et rouge. Dans ces der- nières lumières, les chloroleucites sont toujours neltement visibles, plus grands et disposés plus régulièrement le long des parois de la cellule. Ils sont plus gros et plus verts dans le bleu que dans le rouge, dans celui-ci plus que dans le vert; 4° Le nombre des stomates par unilé de surface est plus grand dans le vert que dans le rouge et dans le rouge plus grand que dans le bleu. Mais cela ne veut pas dire que le nombre total des slomates est plus grand sur une feuille qui a été éclairée par la lumière verte que sur une feuille qui a poussé dans le rouge ou dans le bleu. Ce nombre est en réalité le même pour les lrois espèces de lumières colorées, parce que les cellules se divisent avec la même rapidité, et par conséquent Île nombre Lotal des cellules est, approximalivement, le même dans les trois sortes de feuilles, comme je l'ai constalé par des mesures spéciales. Cela est d’ailleurs en concordance avec les faits observés, en comparant les feuilles étiolées avec les feuilles cultivées en pleine lumière : 11 y à beaucoup plus de sto- mates par unité de surface dans Île premier cas que dans le second. Or, Prantl (1) a montré que chez la feuille qui se développe dans une obscurité complète, et qui a son limbe très réduit, il se fait un grand nombre de divisions cellulaires. Sur la largeur de la feuille primordiale de Phaseolus, le nombre des cellules s'élevait, en effet, dans la graine non germée à 343, chez la plante étiolée de 1 375 à 2571, chez la plante verte normale de 1429 à 2273. (1) Prantl, Arbeiten des bot. Inst. zu Würzburg, fase. TI, p. 384. ANNASS CO NAT BOT: X, 14 210 E. TEODORESCO. CHAPITRE IT RACINE. A. — Morphologie externe. On sait que la radiation totale et équilatérale a une influence variable sur la croissance de la racine. Trois cas différents ont, en elfel, été constatés. Le plus souvent, cette action est nulle, c'est-à-dire que les racines, qu’elles aient poussé à la lumière ou à l'obscurité, ont sensiblement la même longueur. Parfois, comme l'ont constaté Strehl (1), F. Darwin (2) et Devaux (3), la radiation {otale retarde la croissance de la racine, qui alors est plus longue à l’obscu- rité qu'à la lumière. Plus rarement enfin, conformément aux observations de Faminizine (4) et Lasaref (5), relatives au Lepidium sativum, c'est à la lumière que la racine est la plus longue, contrairement à ce qui arrive pour les tiges de cette même plante. J'ai observé moi-même ces trois cas, soit pour les plantes citées par les auteurs précédents, soit pour d’autres espèces. Toutes les plantes sur lesquelles ont porté mes obser- vations ont été cultivées dans une solution nutritive (hqueur de Knop). Ces cultures ont été faites de manière que les échantillons étaient exposés entièrement, racine et tige, soit à l'obscurité, soit à la lumière. Dans les tableaux qui suivent, j'ai consigné en même temps la durée de la végélation. Il est en effet important d'arrêter les expériences au moment où les réserves de la graine sont épuisées, car, après ce moment, l'assimilation 1) Strehl, Untersuchungen uever das Längenwachstum der Wurzel, 1874. 2) Fr. Darwin, Arbeiten des bot. Inst. Würzburg, Bd IV, 1880, p. 521. 3) Devaux, De l’action de la lumière sur les racines (Bull. Soc. bot. de France, 1888, p. 305). (4) Famintzine, Mélanges biologiques. Saint-Pétersbourg, t. VIIL. (5) Lasaref, in Botanischer Jahresbericht, Bd II, p. 775. { \ INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 211 chlorophyllienne des plantes exposées à la lumière étant le facteur le plus important dont dépend la vie de la plante, fait que les conditions de deux sorles de plantes ne sont plus comparables. C’est ainsi que pour une espèce, par exemple, les racines sont au début plus longues à l’obs- curité qu'à la lumière. Mais, dès que les réserves des cotylédons sont épuisées, l'assimilation chlorophyllienne pro- duit naturellement une plante beaucoup plus vigoureuse, et il n'est pas étonnant, dès lors, que les racines elles- mêmes deviennent plus longues à la lumière qu’à lobscu- _rité. Mais, comme on le voit, c’est un phénomène d’un autre ordre, relalif à une nouvelle phase de la vie de la plante, phase que nous n'éludions pas. Ceci posé, les tableaux suivants fournissent les résultats que J'ai obtenus. 1. Plantes dont les racines ont à peu près la même longueur à la lumière qu'à l'obscurité. LONGUEUR MOYENNE LONGUEUR MOYENNE DES RACINES DES RACINES A LA LUMIÈRE. A L'OBSCURITÉ. Ricinus sanguineus (11 jours)..... | 230 millim. 232 millim. — (22 jours) os | 250 — Viciu Sativa (S jours). -.:-..:..-.. |. 450 .: — 145 — — (AS jours 2 — | | LONGUEUR MOYENNE LONGUEUR MOYENNE DES RACINES DES RACINES A LA LUMIÈRE. A L'OBSCURITÉ. Lupinus albus (47 jours). ..:..... 152 millim. 360 millim. Habalvdulgaris (30 jours). F0 199 — 262 — Phaseolus multiflorus (33 jours)... 185 — AU 242 E. TEODORESCO. 3. Plantes dont les racines sont plus courtes à l'obscurité qu’à la lumière. LONGUEUR MOYENNE LONGUEUR MOYENNE DES RACINES DES RACINES À LA LUMIÈRE. A L'OBSCURITÉ. ER Lepidium sativum (10 jours)...... 115 millim. 25 millim. On voit donc que, suivant la plante, les effets de la lumière sont très différents, même opposés. Cela ne serait- il pas dû à ce que les diverses radiations qui composent la lumière blanche n'ont pas le même effet sur toutes les espèces? Pour essayer de répondre à cette question, étu- dions à diverses lumières monochromatiques les plantes dont nous avons parlé plus haut. Dans la première catégorie, celles où les racines ont à peu près la même longueur à la lumière et à l’obscurité, nous avons {rouvé par exemple Vicix sativa. Cultivons cette plante dans les lumières rouge, verte et bleue. Nous trouvons qu’au bout de vingl-deux jours les racines ont res- pectivement les longueurs suivantes : Lumière rouge.....:..... 135 millimètres. + MANN Re Cp 132 — ble REP PES 140 _ En un mot, les diverses radiations produisent des lon- gueurs sensiblement égales. Pour la seconde catégorie, comparable à celle où les racines sont plus longues à l'obscurité qu’à la lumière, les tableaux suivants nous fournissent les résultats obtenus pour les lumières colorées. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 213 1. Phaseolus multiflorus (16 août-6 septembre). Nature des radiations. Longueur de la racine. 90 millimètres. , 95 5 lumière rouge: ..2:.:0.1 ) 90 a 100 — Moyennes 93 == 140 — 425 — Éumière verte. :......... 80 — 90 — CRAHIO0 _— Moyenne... 107 — 70 = us 80 — Pumière bleue: ere j 90 4 Cr) — Moyenne... 178 — 2. Faba vulgaris (6-30 juiliet). Nature des radiations. Longueur de la racine. \ 220 millimètres. Lumière rouge: 0... 225 — door = Moyenne. 238 _— | 300 — Lumière/verté.::%.::.7.7. 220 — 2960 Moyenne ce... 260 —— \ 180 — Lumière bleue: 2.1.2... ) 220 — 190 _ Moyenne", 196 — 3. Polygonum Fagopyrum (19 août-2 septembre). Nature des radiations. Longueur de la racine. [100 millimètres. 110 — 120 — Pumière rouge + .:.1.3;. 115 — 105 — 90 —— 100 —- Moyennes: 106 — 139 — 115 — x 130 — ÉUMMErCMNERIEAMMAER AE 140 131 — 125 — Moyénnerrmeiits.. 129 — ES 214 E. TEODORESCO. 105 millimètres. \ 105 — ce ° 65 SEE Lumière bleue... Q4 a 110 = PO n Moyenne"... 93 — Lci, c'est dans la lumière verte que les racines sont les plus longues ; elles sont déjà plus courtes chez les plantes éclairées par les radialions rouges, plus courtes encore dans la lumière bleue: Arrivons à la troisième catégorie, celle où les racines sont plus courtes à l’obscurilé (Lepidium sativum). Les radiations des différentes réfrangibilités produisent les effets consignés ci-dessous. Lepidium satioum (12-13 avril). Nature des radiations. Longueur de la racine. 65 millimètres. 65 = 71 — 67 — 65 — 65 === Cuntière rouse "00; PR... Moyennes? 66 — ÉnmMieremveLIe een © © | Noyennene Es) = Lumieretblene terme 74 me MOPEnNE Eee 71 Par le tableau précédent, on voit donc que c'est dans la lumière verte que les racines ‘sont les plus courtes; INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 215 elles sont déjà plus longues dans la lumière rouge; elles sont plus longues encore dans la iumière bleue. Si nous rapprochons ces derniers résultats de ceux qui ont été obtenus dans la comparaison entre la lumière blanche et l'obscurité, nous constatons que les trois cas signalés plus haut se retrouvent dans la comparaison des lumières colorées : 1° Pour une plante chez laquelle la lumière blanche retarde la croissance de la racine (Lupinus albus, Faba vul- garis, Phaseolus multiflorus, etc.), c'est la lumière bleue qui la retarde le plus, et alors c’est à la lumière verte, comme à l'obscurité, que les racines atteignent leur plus grande longueur ; 2° Quand au contraire les racines d’une espèce sont plus longues à la lumière blanche qu'à l'obscurité (Lepidium salivum), c'est dans la lumière bleue qu’elles sont égale- ment les plus longues et c’est sous l’influence des radialions vertes qu'elles atteignent leur plus faible dimension ; 3° Quand, enfin, il n’y a que peu de différences entre les longueurs à la lumière totale et à l'obscurité, 11 y en a également peu entre les longueurs obtenues aux diverses lumières monochromatiques { Vicia sativa, ele.). La comparaison des schémas suivants (fig. 16) montre nettement l'ensemble de ces résultats. En A,, l’ordonnée 0 représente la longueur de la racine à l’obscurité, et l'or- donnée L la longueur de cet organe à la lumière. En B,, les ordonnées R, V, B, sont respectivement proportionnelles aux mêmes longueurs dans les lumières rouge, verte el bleue. On voit que l’ordonnée V est plus longue que R et B, de même que 0 est plus grande que L. Dans les sché- mas A,B,, l’'ordonnée O est plus petite que l’ordonnée L, de même que l’ordonnée V est plus petite que les ordon- nées R et V. EL enfin, dans les schémas A.,b,, les ordon- nées O et L étant sensiblement égales, il en est de même pour R, Vel B. En résumé, la lumière bleue est celle dont l’action se 216 E. TEODORESCO. rapproche le plus de celle de la radiation totale; la lumière verte est au contraire celle qui produit l’effel le plus voisin de l'effet de l'obscurité ; la lumière rouge, enfin, nous appa- raît comme intermédiaire entre les deux précédentes. R V B R V Ë Fig. 16. — Accroissement en longueur de la racine. — Comparaison entre la lumière totale et l'obscurité (A;, A, A3); en A,, la racine est plus longue à l’obscurité ; en A), elle est plus courte ; en A3, elle est sensiblement de mème longueur qu'à la lumière. — Comparaison entre les lumières rouge, verte et bleue (B,, B:, B;); en B,, c’est à la lumière verte que la racine est le plus longue ; en B:, c'est à cette lumière qu’elle est le plus courte; en B3;, les lon- gueurs sont à peu près les mêmes aux diverses lumières. Si donc nous avons obtenu à la lumière blanche comparée à l'obscurité trois résultats différents, et que l’on pourrait croire contradictoires, cela paraît Lenir à ce que les radia- tions simples qui entrent dans la composition de celle lumière agissent différemment sur les diverses espèces de plantes. B. — Morphologie interne. Nous avons vu précédemment que les plantes soumises à l'action des rayons de différentes réfrangibilités présentent des changements dans la croissance et dans l'aspect exté- rieur de leurs racines. Examinons maintenant la structure de ces organes et voyons quelles sont les modifications des divers tissus. Mais avant d'aborder l’élude de ces modifications, je con- signeral, pour chaque espèce, les résultats obtenus en me- INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 217 surant l'épaisseur de l'écorce, ainsi que le diamètre du cylindre central et de la racine entière. J'indiquerai tout d’abord la manière que j'ai employée pour faire les mesures de ces trois régions. Pour obtenir le diamètre du cylindre central, je n'ai pas pris comme limite externe l'endroit où l’endoderme et le péricyele se touchent, mais les vaisseaux les plus externes du protoxvlème, quand la racine ne ren- fermait que des formalions primaires; quand la couche géné- ratrice libéroligneuse avait déjà fonctionné et produit un anneau de bois secondaire entourant complètement le bois primaire, J'ai pris comme limite externe du cylindre central les derniers vaisseaux secondaires formés. Cette limite est par conséquent tout à fait conventionnelle; ce qui m'a obligé d’avoir recours à cela, ce sont les variations d'épaisseur du péricycle de la racine, variations qui n’ont, en général, aucun rapport avec le développement plus ou moins grand du cylindre central. En effet, le péricycle étant, chez les Pha- nérogames, l’assise rhizogène, celle-ci ne présente pas lou- jours a même épaisseur sur loule son étendue, dans la région où les radicelles commencent à se former ; les plages rhi- zogènes ayant des épaisseurs différentes aux différents niveaux, empêchent d'apprécier bien les dimensions du cylindre central. Pour obtenir l'épaisseur de l'écorce, j'ai pris les limites normales de celle région. On comprend dès lors que dans les tableaux suivants le diamètre tolal de la racine ne sera pas nécessairement égal à la somme du diamètre du cylindre central et du double de l'écorce; il sera plus grand en général. Ceci posé, passons en revue les principales espèces sur lesquelles j'ai expérimenté. 1. Faba vulgars. Les épaisseurs des principales zones de la racine et son diamètre total aux diverses lumières sont fournies par le tableau suivant : 218 E. TEODORESCO. NATURE DIAMÈTRE DU ÉPAISSEUR DIAMÈTRE TOTAL DES RADIATIONS. CYLINDRE CENTRAL. DE L'ÉCURCE. DE LA RACINE. millim. © millim. millim. ROSES EEE 0,230 0,495 4,705 Merntes ra een 0,491 GS OS ET . | bleues mines se sr 6,445 | 0,726 DA Ces chiffres nous montrent que, loules choses égales d’ailleurs, les dimensions de l'écorce et du cylindre central, el par conséquent aussi de la racine entière, présentent un minimum dans la lumière verte, et deux maxima, l’un, qui est plus faible, dans la Di rouge, l’autre, Lee élevé, dans la Ho bleue. Passons maintenant à la description des divers tissus. 1° Lumière blanche. — Je vais suivre la structure de a racine de cetle plante, du sommet vers la base. À une distance de 15 millimèlres du sommet, on observe que le cylindre central de la racine principale comprend 4 à 5 fais- ceaux ligneux (le plus souvent 5), disposés sous forme de lames radiales, et alternant avec autant de faisceaux libé- riens. À ce niveau, les faisceaux vasculaires primaires, com- posés de 7 à 9 vaisseaux, ont fini leur évolution et les formations secondaires commencent à s'établir. Dans le liber primaire, il y a des îlots de fibres, qui séparent chaque faisceau en deux et se composent d'éléments à paroi épaissie et lignifiée ; la portion externe du liber primaire se trouve écrasée entre ces îlots de fibres et Le péricycle. ; La couche génératrice libéroligneuse, qui est ondulée et embrasse par ses angles rentrants le liber primaire, présente le maximum d'épaisseur en face de ce dernier tissu, tandis qu'en face du bois primaire cette couche génératrice n’est composée que d’une seule cellule procambiale, divisée en deux par une paroi tangentlielle. À cause de ce développement inégal de la couche génératrice, la différenciation des élé- ments secondaires commence d’abord dans la portion inlra- INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 219 libérienne; les premiers vaisseaux secondaires formés ont quelquefois leurs parois lignifiées, mais le plus souvent la lignification ne s’est pas encore produite et l’on ne distingue ces vaisseaux qu'à cause de la large lumière des cellules qui les constituent. 2o Lumière rouge. — A la même distance du sommet des racines principales des plantes qui ont été éclairées par la lumière rouge, on n’observe dans le cylindre central que des formations primaires. Ces lissus sont moins développés que dans la lumière blanche ; c’est ainsi que les faisceaux ligneux sont composés seulement de 4 à 5 vaisseaux, parmi lesquels les trois externes seuls ont leur paroi bien lignifiée ; pour les derniers vaisseaux primaires, qui occupent le centre de la racine, les parois sont très minces et la lignification commence à peine. Dans les faisceaux libériens, les cellules correspondant à celles qui, dans Ia lumière blanche, sont transformées en fibres, ne présentent pas, dans la lumière rouge, des épaisseurs de parois les distinguant des autres éléments libériens. La portion du liber qui se trouve en contact direct avec le péricyele, et qui, dans la lumière blanche, est écrasée, se compose ici de cellules très régu- lières, et qui non seulement ne sont pas aplaties tangentiel- lement, mais encore sont allongées dans le sens radial. 3° Lumière verte. — On observe, au niveau mentionné, à peu près la même structure que chez les plantes qui ont été exposées aux radiations rouges. Seulement, si on poursuit la série de coupes en s'éloignant de plus en plus du sommel de la racine, on constate que les formalions secondaires apparaissent à une distance plus grande de ce sommet dans la lumière verte que dans la lumière rouge, el que, par con- séquent, le développement se fait moins vite dans le premier cas que dans le dernier. 4° Lumière bleue. — La structure de la racine principale, sur les coupes failes au même niveau, présente à peu près les mêmes caractères que dans la lumière blanche, tant au point de vue des formalions primaires que secondaires. 220 E. TEODORESCO. Éludions maintenant les coupes faites au milieu de la longueur de la racine principale. | 1° Lumière blanche. — À ce niveau, la couche génératrice libéroligneuse a fonctionné et a produit des tissus secon- daires bien caractérisés. Le bois secondaire est formé de séries radiales de 5 vaisseaux, en général; ce bois est juxta- posé latéralement au bois primaire et forme avec lui un seul anneau Jigneux continu. Les îlots de fibres libériennes sont composés d'éléments à paroi très lignifiée et le liber pri- maire, qui se trouve en dehors de ces îlots, est entièrement écrasé, à ce point qu'il est impossible de voir les contours des cellules. La portion de la couche génératrice qui se lrouve en dehors du protoxylème est épaisse et composée de séries radiales de 5 à 6 cellules de méristème. | 2 Lumière rouge. — L'assise génératrice est continue comme dans la lumière blanche, mais les divers tissus sont moins développés. C’est ainsi que le bois primaire, qui dans les plantes exposées à la radiation totale était composé de faisceaux de 8 à 9 vaisseaux, esl ici à peu près au même état que dans celui décrit plus haut pour les coupes faites tout près du sommet de Îa racine ; cependant les vaisseaux primaires, les derniers formés, ont leurs parois plus épaisses et bien lignifiées. Le hois secondaire est constitué de séries de cellules pré- sentant généralement deux vaisseaux et ces vaisseaux sont peu lignifiés. En outre, les bois primaire el secondaire ne forment pas un anneau complet, comme dans la lumière blanche, mais au contraire discontinu. I n'y a pas ici dans le liber primaire d’îilots scléreux; loutes Les cellules restent à paroi mince et cellulosique. Enfin la portion du liber primaire qui s'appuie directement sur le péricycle n’a pas élé détruite, mais ses éléments, à paroi on- dulée, ont été seulement comprimés dans le sens tangentiel. 3° Lumière verle. — Les formations secondaires com- mencent à peine à s'établir ; la couche génératrice n’a pas encore produit d'éléments définitifs, si ce n’est un seul INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 221 vaisseau qu'on peut reconnaître par son grand calibre, mais dont les parois ne sont pas du tout lignifiées. Les tissus pri- maires présentent les caractères normaux, les fibres libé- rennes manquent, el les éléments libériens sous-péri- cycliques ne sont pas du tout déformés par la compression des tissus plus internes. 4° Lumière bleue. — Les racines des plantes qui ont été éclairées par celle lumière présentent, au point de vue de leur structure, des caractères intermédiaires entre ceux des plantes de la lumière rouge et ceux de la lumière blanche. En effet, la couche génératrice fonctionne depuis longtemps; elle a donné naissance à de nombreux vaisseaux secondaires qui forment avec le bois primaire un anneau complet. Les îlots de fibres libériennes sont conslitués par des cellules à paroi épaisse et lignifiée, mais ce caractère est un peu moins accentué que dans la lumière blanche. Enfin la portion du liber qui se trouve entre ces îlots et le péricycle est complètement écrasée. 5° Obscurité. — Si l’on compare la structure des racines précédentes avec celle des plantes qui ont été cullivées dans l’obscurité complète, on constate que la différenciation est encore moins avancée que dans la lumière verte, C'est à peine si on voit quelques cellules isolées, divisées en deux langenliellement, indiquant le début du fonctionnement de la couche généralrice. En résumé, on constate pour les racines de la Fève les modifications suivantes, produites par les trois espèces de lumières colorées : 1° Le diamètre du cylindre central et l'épaisseur de l'écorce ne présentent pas les mêmes dimensions chez Îles plantes exposées dans les diverses radiations : le maximum de ces dimensions est alleint dans les lumières bleue el rouge, le minimum dans la lumière verte. Comme pour l'épaisseur de la feuille, les dimensions de l'écorce et du cylindre central de la racine présentent un maximum plus faible dans le rouge que dans le bleu. 220 E. TEODORESCO. 2° On distingue des différences analogues pour le dévelop- pement du bois et du liber, le fonctionnement äe Passise génératrice libéroligneuse, la lignification des parois. Dans les radiations vertes, le bois primaire présente très peu de vaisseaux et il n’y a pas de paquets fibreux dans le liber primaire, les éléments conducteurs secondaires ne sont pas encore différenciés. Ce sont les racines de la lumière verte qui se rapprochent le plus, par leur structure, de celles de l'obscurité. A la lumière rouge, la différenciation est déjà plus considérable ; enfin, dans la lumière bleue, les racines présentent des caractères de structure qui les rapprochent beaucoup de ceux des plantes exposées à la lumière blanche. 2. Ricinus sanguineus (Ricin sanguin). Les résultats obilenus en mesurant les dimensions de l'écorce, du cylindre central et de [a racine entière sont consignés dans le tableau suivant : ns NATURE DIAMÈTRE DU ÉPAISSEUR DIAMÈTRE TOTAL DES RADIATIONS. CYLINDRE CENTRAL.| DE L'ÉCORCE. DE LA RACINE. millim. millim. millim. ROUGES PP ARE RAR 0,364 0,616 1,683 VERS er re | 0,330 0,580 1,630 Blétes tetes ess | 0,374 0,605 1,705 Comme pour la plante précédente, les dimensions en épaisseur de l'écorce, du cylindre central et par conséquent aussi de la racine entière présentent un minimum dans le vert, et deux maxima, l’un dans le rouge, l’autre dans le bleu. | Les {issus nous montrent les modifications suivantes : 1° Lumière blanche. — Dans la lumière blanche, les for- mations libéroligneuses secondaires sont très développées. L'assise génératrice, composée de séries de 8 à 10 cellules, INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 293 est continue, et a donné naissance à des gros paquets de bois secondaire qui, en s’unissant latéralement aux faisceaux ligneux primaires, forment un anneau complet. En dehors des faisceaux ligneux primaires, l’assise génératrice libéro- ligneuse, quoique très épaisse et composée de séries radiales de 7 à 8 cellules, n'a pas encore donné de vaisseaux secon- daires. Enfin, le bois de la racine occupe toute la partie centraie de celle-ci, de sorte qu'il n'existe pas de moelle. 2° Lumière rouge. — Dans la lumière rouge, comme d’ailleurs dans toutes les autres lumières colorées, les for- mations secondaires sont beaucoup moins développées. Le cylindre central est constitué de 4, rarement de 5 faisceaux ligneux primaires, dont chacun contient 7 à 12 vaisseaux ; le nombre total des vaisseaux primaires qu'on voit sur les sections transversales faites au milieu de la longueur de la racine est de 35 environ. Les faisceaux ne se réunissent pas au centre, de sorte qu'il reste une région médullaire com- posée d'éléments à parois minces et non lignifiées. L’assise génératrice hbhéroligneuse ne fait que commencer à fonctionner et se présente sous forme d’arcs intralibériens ; en dehors du protoxylème, elle est interrompue. Ces arcs générateurs sont composés d'une assise de cellules, dont chacune est divisée en deux par une cloison langentlielle. 3° Lumière verte. — Chez les plantes éclairées par &ette lumière, les racines présentent une structure encore plus simple. Les faisceaux ligneux sont formés chacun de 5 à 6 vaisseaux; le nombre total de ceux-ci étant, en terme moyen, de 30 par section transversale. La moelle est, ici aussi, composée d'éléments non lignifiés. La couche géné- ratrice libéroligneuse est moins développée que dans le cas précédent; en effet, elle ne forme même pas des ares complets, mais on observe seulement, à la partie interne des faisceaux libériens, des cellules isolées qui commencent à se cloisonner tangentiellement. 4° Lumière bleue. — Les racines des plantes qui ont été exposées à celte lumière présentent à peu près la même 224 E. TEODORESCO. structure que dans la lumière rouge, mais les faisceaux vas- culaires sont plus développés ; ils sont composés chacun de 9 à 12 vaisseaux et leur total est, en terme moyen, de 40. La couche génératrice hbéroligneuse est formée d’ares intra- libériens, et composée, dans chaque série radiale, approxi- malivement d’un même nombre de cellules que dans la lu- mière rouge. 3. Lupinus albus (Lupin blanc). L’épaisseur de l'écorce, du cylindre central et de la racine entière présente les mêmes rapports que dans les espèces précédemment décriles, comme on peut voir par le tableau suivant. : | NATURE DIAMÈTRE DU ÉPAISSEUR DIAMÈTRE TOTAL DES RADIATIONS. CYLINDRECENTRAL. DE L'ÉCORCE. DE LA RACINE. millim. millim. millim. HOEesS er retArre 0,418 0,374 4,320 Vertes EU ELR REX DEAR 0,319 0,220 0,891 | pléuesa esse 0,473 0,393 1,342 1° Lumière blanche.— Comme pour les plantes précédentes, je ne décrirai que le cylindre central, parce que les modi- ficalions sont plus nettes dans cette région de la racine. Sur les seclions transversales faites au milieu de la lon- gueur de cet organe, au bout de quarante-cinq jours de végétalion, on voit que le cylindre central a une structure binaire ; les deux faisceaux primaires ont fini depuis long- temps leur évolution; ils se composent chacun, en général, de 35 à 40 vaisseaux de pelit calibre et de 1 à 2 vaisseaux très larges. Ces derniers se rencontrent avec ceux du fais- ceau opposé, au centre de la racine. Le liber primaire est formé d’un îlot de fibres libériennes à parois faiblement lignifiées, tandis que les éléments qui se trouvent entre cet ilot et le péricycle sont complètement écrasés et forment une INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 295 ci ét ligne épaisse, qui au premier abord apparaît comme un épaississement de la paroi interne des cellules péricycliques. La couche génératrice libéroligneuse est représentée par deux arcs, dont chacun est composé dans sa partie moyenne de séries radiales de 6 à 7 cellules. Le bois secondaire est formé, de chaque côté de la bande ligneuse primaire, de 3 à 5 larges vaisseaux, séparés par du parenchyme ligneux intervasculaire. 2 Lumière rouge. — Au même niveau el chez Les plantes de même âge, les faisceaux ligneux primaires sont composés de 20 à 25 vaisseaux de petit calibre et d'un seul vaisseau large, qui se rencontre avec le gros vaisseau du faisceau opposé, au centre de la racine. Les éléments libériens destinés à se transformer en fibres ont encore des parois minces et cellulosiques ; les cellules libériennes qui se trou- vent au contact immédiat du péricycle sont très peu compri- mées, de manière qu'on peut encore bien voir leur lumière. La couche génératrice est constituée dans sa partie moyenne par des séries de 4 à 5 cellules cambiales ; les cellules les plus internes de celte couche commencent à se différencier, mais les vaisseaux secondaires sont encore sous forme d'éléments à paroi cellulosique et ne se reconnaissent que grâce à leur diamètre très grand. 3° Lumière verte. — Les faisceaux ligneux primaires pré- sentent à peu près le même développement et le même nombre de vaisseaux que dans la lumière rouge ; il en est de même du liber primaire; mais les formations secon- daires ne sont pas aussi avancées que dans le cas précédent. C’est ainsi que la couche génératrice est composée de séries radiales de 3 cellules etles vaisseaux secondaires ne sont pas encore différenciés, et on ne peut même distinguer les cellules qui deviendront des vaisseaux parce que tous les éléments ont le même diamètre. 4 Lumière bleue. — Les racines des plantes qui ont été cultivées dans la lumière bleue se rapprochent, par leur structure, plutôt de celles des plantes qui ont élé soumises ANN. SC. NAT. BOT. x 1Le) 296 E. TEODORESCO. à la lumière blanche. Les différences liennent à l’absence des îlots de fibres libériennes et à la plus faible lignification des vaisseaux secondaires. De même les éléments libériens qui s'appuient directement sur le péricycie sont moins écrasés que dans la lumière blanche. 5° Obscurité. — Si nous observons maintenant la racine des plantes cultivées dans l’obscurité, on constate que les divers tissus sont encore moins développés que dans la lu- mière verte. D'abord, les faisceaux ligneux primaires ne con- tiennent que 15 à 20 vaisseaux ; les derniers vaisseaux pri- maires formés à grand diamètre, qui dans les cas précédents réunissent les deux faisceaux opposés au centre de la racine, sont représentés ici par des éléments à paroi encore cellu- losique. Le liber primaire est complètement dépourvu de fibres et les cellules qui s'appuient directement sur le péri- cycle ne sont guère comprimées. Enfin, la couche génératrice commence à peine à fonctionner el aucun vaisseau secon- daire n'est différencié. 4. Cicer arietinum (Pois chiche). Les dimensions de l'écorce, du cylindre central et de la racine entière sont consignées dans le tableau suivant. ———— | NATURE DIAMËÈTRE DU ÉPAISSEUR DIAMÈTRE TOTAL | DES RADIATIONS. CYLINDRE CENTRAL. DE L'ÉCORCE. DE LA RACINE. millim. millim. millim. Rouges Pere 0,389 0,484 1,474 Vertes se CAD Ar 0,320 0,350 1,105 | Blerressr sr Resresar 0,396 0,972 1,617 Sur les coupes faites dans le tiers supérieur des racines principales, on constate les modifications suivantes. lo Lumière blanche. — Le procambium a cessé de donner du bois et du liber primaires. Le cylindre central contient INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 227 quatre faisceaux ligneux primaires, qui se rencontrent au centre de la racine, où les vaisseaux larges sont réunis par du parenchyme intervasculaire composé d'éléments lignifiés. Le système ligneux présente, sur les coupes transversales, la forme d’un carré, dont les côtés sont un peu concaves vers l'extérieur et dont les angles sont occupés par les premiers vaisseaux formés (protoxylème). Les quatre ou cinq vaisseaux qui forment les angles externes des faisceaux ligneux pri- maires sonl très élroits; tous les autres ont un diamètre très large par rapport à ce que nous verrons chez les plantes qui ont élé éclairées par les lumières colorées. Le paquet de fibres, caractéristique pour le liber des Légumineuses, est déjà bien diflérencié, et les éléments libériens situés en dehors de ce paquet ont élé loul à fait écrasés, à cause de la pres- sion exercée par le développement des lissus internes. L'assise génératrice libéroligneuse a fonctionné, produi- sant des vaisseaux secondaires qui sont situés dans les con- cavilés des côlés du carré formé par le bois primaire. Parmi les vaisseaux secondaires, les uns sont lignifiés, les autres se présentent sous forme d'éléments à grand calibre, mais à paroi encore cellulosique. L’assise généralrice est continue, c'est-à-dire qu'elle s’est établie également en dehors des extrémités des faisceaux ligneux primaires. 2° Lumière rouge. — Les racines des plantes éclairées par celle espèce de lumière présentent dans la structure du cylindre central les caractères décrits plus haul, avec cette différence que l’assise génératrice a moins fonctionné : c’est ainsi que les vaisseaux secondaires déjà différenciés sont moins nombreux et la plupart d’entre eux ne peuvent être reconnus que par leur calibre plus grand, car leur paroi est mince el encore cellulosique (PI. VIIT, R). 3° Lumière verte. — Les racines ont une structure beaucoup plus simple que:dans les deux cas précédents. Les fais- ceaux ligneux primaires ne sont composés que de vaisseaux étroils (PI. VILE, V). Les vaisseaux à grand diamèlre, qui occupent le centre de la racine dans les plantes décrites pré- 228 | E. TEODORESCO. cédemment, sont ici représentés par des éléments à paroi cellulosique. Ces faisceaux primaires ne présentent donc pas de vaisseaux lignifiés se rencontrant au centre de la racine ; cependant l'union se fait latéralement par les vaisseaux d'ori- gine secondaire. Le système ligneux a, sur les coupes trans- versales, la forme d’un carré, mais dont la bordure seule- ment est constituée par des éléments lignifiés, tandis que le centre est cellulosique. L’assise génératrice n’est pas continue ; elle est représentée par des arcs qui embrassent par leur concavité le liber pri- maire. Dans les séries radiales, les cellules cambiales sont moins nombreuses que dans les deux cas précédents. 4° Lumière bleue. — Les racines des plantes qui ont poussé sous l’action de la lumière bleue se rapprochent beaucoup par la structure du cylindre de celles de la lumière rouge. 5. Cucurbita Pepo (Courge). 1° Lumière blanche. — Si on étudie les coupes faites à 1 centimètre de la base de la racine, on constate les particu- larilés suivantes: en dedans de l’endoderme, le cylindre central commence par un péricycle simple, dont les cellules sont plus allongées dans le sens radial en face des faisceaux ligneux primaires. Ceux-ci sont au nombre de quatre, ayant chacun la forme d’un îlot triangulaire, ou bien quelquefois ils sont aplalis tangentiellement et les vaisseaux dont ils se composent sont à petit diamètre. Les faisceaux libériens sont constitués en dehors d'éléments petits, tandis qu’en dedans les tubes criblés sont à grand diamètre. Sur le bord interne de chaque faisceau hbérien, on observe un arc très épais de tissu générateur ; de semblables arcs, mais beau- coup moins développés et composés de cellules plus grandes, se sont formés en dehors des faisceaux ligneux primaires. Les arcs généraleurs infralibériens el ceux qui se trouvent en dehors des faisceaux ligneux primaires se touchent laté- ralement, formant ainsi une couche continue. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 229 Les faisceaux ligneux secondaires se composent de 4 à 6 vaisseaux, beaucoup plus larges que les vaisseaux primaires. À part le liber secondaire des faisceaux libéroligneux, on observe dans la zone périmédullaire un fiber secondaire interne. En effet, tant à la parlie interne des faisceaux Higneux primaires que secondaires, on constale que des cel- lules isolées commencent à se diviser en deux par une cloi- son tangenlielle et les deux cellules qui en résultent conti- nuent à se diviser el à produire définitivement de petits groupes libériens; le nombre de ces groupes libériens est très grand dans les racines que Je décris. 2° Lumière rouge. — Dans les racines des plantes qui ont été cullivées derrière l'écran rouge, on trouve les mêmes issus, mais leur structure est moins avancée. Ainsi, par exemple, le bois secondaire est formé d'un moins grand nombre de vaisseaux larges, quatre au plus ; en ce qui con- cerne le liber secondaire périmédullaire, on observe que le nombre des îlots est moindre que dans la lumière blanche. 3° Lunuère verte. — Chez les plantes de la lumière verte, les tissus de la racine sont encore moins développés que dans la lumière rouge. Les faisceaux ligneux primaires sont constilués par un plus petit nombre de vaisseaux, la couche génératrice est composée de séries radiales de cellules dont le nombre est moitié de ce que nous avons vu pour la lumière rouge. Dans chaque faisceau du bois secondaire, on observe quatre vaisseaux, dont deux seulement, les premiers formés, ont leur diamètre large; les deux autres, qui se sont différenciés plus tard, sont beaucoup plus petits, à peu près tout aussi petits que les vaisseaux primaires. Enfin le hber périmédullaire non seulement n’est pas encore formé, mais on ne peut observer aucun commencement de division des cellules qui doivent lui donner naissance. 4° Lumière bleue. — Les racines présentent le même état de développement que chez les plantes cultivées dans la lumière rouge. 230 E. TEODORESCO. 6. Helianthus annuus (Grand-Soleil). Pour les racines de cette plante, j’examinerai des coupes faites à deux niveaux différents, les unes plus près de la base, les autres dans la proximité du sommet. Les deux tableaux suivants montrent les dimensions relalives des différentes régions : 4. À 5 centimètres de la base de la racine. NATURE DIAMÈTRE DU ÉPAISSEUR DIAMÈTRE TOTAL DES RADIATIONS. CYLINDRE CENTRAL. DE L'ÉCORCE. DE LA RACINE. SR RUE D UEAGT DRE NS millim. millim. millim. Rougesv "pans us 0,253 0,319 0,979 MC LLOS M NEA RE N - 0,132 0,26 0,660 bleues rene 0,187 0,341 0,957 2. À { centimètre de la base de la racine. NATURE DIAMÈTRE DU ÉPAISSEUR DIAMÈTRE TOTAL DES RADIATIONS. CYLINDRE CENTRAL. DE L'ÉCORCE. DE LA RACINE. millim, millim. millim. ROUGES ee nr 0,341 0,484 1,474 Vertes ii nee 0,253 0,462 1,319 | Bleuecs 2. 0,363 0,616 1,804 Les coupes faites à 5 centimètres de la base de la racine présentent les particularités suivantes. 1° Lumière rouge. — Le cylindre central est composé de deux faisceaux vasculaires, qui alternent avec autant de faisceaux libériens. Le bois primaire est représenté à la péri- . phérie par trois à quatre vaisseaux étroits, el vers la partie cenlrale par autant de vaisseaux à grand diamètre, qui se rencontrent avec ceux du faisceau opposé pour former une bande ligneuse diamétrale. D’un côté et de l’autre de cette bande ligneuse primaire, entre celle-ci et Le liber primaire, INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 231 se trouve un arc cambial, qui a fonctionné et a produit vers l’intérieur le bois secondaire composé de 6 à 14 vaisseaux à parois lignifiées el d’autres dont la paroi est encore à l’état cellulosique. La couche génératrice n’est composée que de deux cellules en épaisseur. 2° Lumaère verte. — Dans la lumière verte, les racines ne possèdent que du bois primaire, el encore celui-ci n’est pas arrivé à son développement complet. En effet, chacun des faisceaux ligneux primaires se montre constitué par quelques vaisseaux externes (5 à 6) à pelit calibre; vers la partie centrale des faisceaux, on trouve quelques vaisseaux plus larges, mais dont les derniers formés ont leur paroi mince et cellulosique, ce qui fait que les deux faisceaux ne se réunissent au centre de la racine que par des éléments non lignifiés encore. L’assise génératrice est développée, mais elle n'a pas donné naissance à des éléments conducteurs secondaires. _ 3° Lunuère bleue. — Les racines sont à peu près au même état de développement que dans la lumière rouge. En outre des lissus primaires, on observe un grand déve- loppement d'éléments secondaires; le bois secondaire con- tient un peu plus de vaisseaux que dans la lumière rouge. Si on observe maintenant les coupes faites plus près de la base de Îa racine, à 1 centimètre de cetle base, par exemple, on constate les modifications suivantes : 1° Lumuère rouge. — 1 existe quatre faisceaux ligneux, qui se rencontrent au centre de la racine. La couche géné- ratrice, qui se présente sous forme de quatre arcs intralibé- riens, a donné naissance à de nombreux vaisseaux secon- daires, qui forment avec les vaisseaux primaires un groupe ligneux qui occupe la plus grande partie du cylindre central. 2° Lumière verte. — Comme dans la lumière rouge, on lrouve ici quatre faisceaux ligneux, mais inégalement déve- loppés. Deux d’entre eux se rencontrent au centre de la racine par des vaisseaux primaires très larges el forment une bande ligneuse diamétrale. Les deux aulres faisceaux, silués d’un 202 E. TEODORESCO. côté et de l’autre de la bande ligneuse précédente, s arrêtent à une certaine distance de cette bande, dont ils sont séparés par des éléments à paroi cellulosique. L'assise tune est au commencement de son fonc- tionnement; elle n'a produit, Jusqu'à ce moment, que très peu d'éléments conducteurs secondaires. 3° Lumière bleue. — Tous les tissus sont plus développés, non seulement que dans la lumière verte, mais encore que dans la lumière rouge; les quatre faisceaux ligneux se ren- contrent au centre, et le bois secondaire présente un très grand développement. 7. Cannabis sativa (Chanvre). Comme on peut le voir par le tableau ci-joint, les dimen- sions de l'écorce, du cylindre central et par conséquent de la racine entière présentent les mêmes variations que chez les espèces précédemment décrites. Il en est de même pour la modification des tissus, comme on le verra par la description qui suit : NATURE DIAMÈTRE DU ÉPAISSEUR DIAMÈTRE TOTAL DES RADIATIONS. CYLINDRE CENTRAL.| DE L'ÉCORCE. DE LA RACINE. millim. millim. millim, ROUES EN ARE ER 0,172 0,202 0,715 MERE EU Pete te 0,148 0,175 0,634 | ieues is rem ers 0,130 0,256 0,893 1° Lumière ëlanche. — Sur les coupes faites dans le tiers supérieur de la racine des plantes au bout de quarante jours de végétation, le cylindre central présente les carac- ières suivants. Les deux faisceaux ligneux primaires sont depuis longtemps complètement développés et réunis entre eux dans la partie centrale par de larges vaisseaux ; du hber primaire, il ne reste rien, parce qu’il a été écrasé entre le INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 9233 péricycle el les Lissus secondaires qui se sont formés en dedans. En effet, ces derniers tissus sont très développés; la couche génératrice forme un anneau complet très épais, qui a produit du bois secondaire enveloppant tout autour le bois primaire. La couche de bois secondaire est beaucoup plus épaisse sur le côté de Ia bande de bois primaire (sept fois plus épaisse que cette bande), qu'en face du protoxylème. À ce niveau, Passise pilifère est complètement détruite, tandis que l’assise corticale sous-jacente a les parois de ses cellules subérifiées. 2° Lumière rouge. — Les deux faisceaux vasculaires et libériens primaires se comportent à peu près comme dans le cas précédent; mais les lissus secondaires sont loin d'atteindre le même développement. La couche génératrice libéroligneuse ne forme pas un anneau continu, elle se pré- sente sous la forme de deux ares intralibériens qui ne se réunissent pas en dehors du protoxylème. Le bois secon- daire est représenté, dans chaque faisceau libéroligneux, par 5 à 6 vaisseaux, dont les deux derniers formés sont encore à paroi cellulosique et ne peuvent êlre distingués, sur les coupes transversales, que par leur calibre plus large. L'assise pilifère n’est pas encore exfoliée; cependant, les poils absorbants sont flétris et la plupart d’entre eux sont tombés; l’assise corticale sous-jacente est composée de cel- lules à parois subérifiées, comme dans la lumière blanche. 3° Lumière verte. — Les lissus primaires et secondaires du cylindre central présentent le minimum de développe- ment dans les racines des plantes qui ont élé éclairées par la lumière verte. Les faisceaux ligneux primaires n’ont pas encore fini leur complet développement; en effet, les derniers vaisseaux différenciés ont encore leur paroi mince el cellulosique, de manière que les deux faisceaux ligneux se rencontrent au centre de la racine par des éléments non lignifiés. D'autre part, les vaisseaux primaires sont tous beaucoup plus étroits que dans la lumière rouge. La couche génératrice libéroligneuse est tout à fait au commencement 234 E. FEODORESCO. de son fonclionnement el consiste en séries radiales de 2 à 3 cellules à peine; celte couche est interrompue en dehors du protoxylème, comme dans le cas précédent d’ailleurs. Les éléments conducteurs secondaires n'existent pour ainsi dire presque pas. | 4° Lumière bleue. — Les racines éclairées par celte espèce de lumière présentent, approximatlivement, le même élat de développement que celles de la lumière rouge. 8. Phaseolus multiflorus (Haricot blane). Les dimensions relatives des diverses régions de la racine de cette plante sont consignées dans le tableau suivant : TERRA ENT AT EERP PRET EUR ENTIER TEEAE PER (STE NATURE DIAMÈTRE DU ÉPAISSEUR DIAMÈTRE TOTAL DES RADIATIONS. CYLINDRECENTRAL.| DE L'ÉCORCE. DE LA RACINE. | millim. millim. millim, | Rouges at et 0,264 0,275 0,935 | Vertes 4 ibe, 0,233 0,240 0,860 | Blénes ct rhin ve 02349 0,440 1,364 | 1° Lumière blanche. — Le cylindre central comprend quatre faisceaux ligneux primaires, qui se touchent au centre de la racine. Le liber primaire est composé de deux régions, l’une interne, formée de fibres à parois épaissies et lignifiées, l’autre externe en dehors de l’îlot fibreux et en contact immédiat avec le péricycle. Cette dernière région, qui est composée d'éléments à paroi mince et cellulosique, est complètement détruite par écrasement. La couche génératrice libéroligneuse forme un anneau continu; elle a donné naissance tout autour à du bois secondaire. L’écorce ne présente pas de caractères importants à signaler, si ce n’est que l’assise pilifère est à peu près complètement détruile. 2° Lumière rouge. — Les quatre faisceaux ligneux pri- maires se rencontrent, comme dans le cas précédent, au INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 299 centre de Ja racine. Les îlots fibreux des faisceaux libériens sont composés de cellules à paroi moins lignifiée que dans Ja lumière blanche. La couche génératrice ne se présente pas sous la forme d’un anneau continu, mais sous forme d'arcs intralibériens, interrompus en dehors du protoxy- lème; on lrouve cependant quelquefois, en ces endroits, des cellules isolées, divisées par une cloison tangenlielle. 3° Lumière verte. — Tous les tissus du cylindre central sont moins développés que chez les plantes qui ont été cultivées derrière l'écran rouge. C’est ainsi que les faisceaux vasculaires primaires sont composés de vaisseaux moins nombreux et à diamètre plus petit que dans la lumière rouge ; 1} n'existe qu'un ou deux vaisseaux larges au centre de la racine, [à où les quatre faisceaux se rencontrent, tandis qu'il en existait de trois à quatre dans le cas précédemment décrit. La portion de liber primaire qui se lrouve en contact avec le péricycle n’est pas écrasée, comme dans les racines qui ont été éclairées par La radialion totale ou la lumière rouge. L’ilot de fibres hbériennes est composé de cellules très peu lignifiées et se colorant à peine par les réactifs caractéristiques de la lignine. La eouche génératrice est sous forme d’arcs; elle n’est pas encore différenciée en dehors du protoxylème. Les éléments conducteurs secondaires commencent à peine à se déve- lopper, çà et là. 4 Lumière bleue. — Les plantes qui ont poussé derrière les écrans bleus ont, dans leurs racines, à peu de chose près la même structure que dans la lumière rouge. En résumé, la morphologie interne de la racine nous fournit les résultats suivants : 1° Le diamètre du cylindre central et l'épaisseur de l'écorce ne présentent pas les mêmes dimensions chez Îles plantes exposées dans les diverses radiations : le maximum de ces dimensions est atteint dans les lumières bleue et rouge ; le minimum dans la lumière verle. Comme pour 236 E. TEODORESCO. l'épaisseur de la feuille, les dimensions de l'écorce et du cylindre central de la racine sont moins grandes dans le rouge que dans le bleu. 2° On observe des différences analogues pour le déve- loppement du bois et du liber, pour le fonctionnement de l’assise génératrice Hbéroligneuse, pour la hHgnificalion des parois. Au bout du même temps, dans les radiations vertes le bois primaire présente très peu de vaisseaux, la différen- cialion des éléments conducteurs secondaires est le moins avancée. Îl en est de même de la lignification des parois des vaisseaux et des cellules du tissu mécanique. Ce sont les racines de la lumière verte qui se rapprochent le plus, par leur structure, de celles de l'obscurité. A la lumière rouge, la différenciation est déjà plus considérable ; enfin, dans la lumière bleue, les racines présentent des caractères de structure qui les rapprochent le plus des racines qui ont poussé dans la lumière blanche. CHAPITRE Hi TIGE. A. — Morphologie externe. En ce qui concerne la morphologie externe des tiges des plantes que j'ai étudiées sous l'influence des différentes lumières colorées, je ne donnerai pas beaucoup de détails, et cela d'autant plus que les résultats auxquels je suis arrivé, quant à la longueur de ces organes, sont identiques à ceux obtenus par M. Wiesner; les données de ce botaniste peuvent être considérées, en effet, comme les plus exactes jusqu’à présent. Cependant, je donne, dans les tableaux qui suivent, une partie des résullats que j'ai obtenus. Les mesures de la lon- gueur des liges ont été faites toujours à la fin de la culture, qui durait un nombre variable de jours, en général de quinze à quarante. Je n’ai pas prolongé plus longlemps la durée de INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 237 Ja végétalion, entre autres pour le molif suivant: quand on cullive les plantes dès la graine, il faut arrêter l'expérience avant ou, du moins, peu après la consommation complète des réserves de l’albumen ou des cotylédons. Autrement, on pourrait obtenir, en ce qui concerne la longueur de la tige, des résultats tout à fait contraires, résultats dus aux troubles apportés par l'inégalité dans l'énergie de l’assimilalion chlo- rophylhenne ; celle-ci est, en effet, après la consommation des réserves, la principale fonction qui contribue à la nutri- tion de la plante. En effet, en cullivant une plante d’une part derrière l'écran bleu par exemple, d'autre part derrière l'écran vert, on observe que, pendant un cerlain temps, variable avec la nature de la plante, les tiges restent plus courtes dans la lumière bleue que dans la lumière verte. Mais si on laisse continuer la cullure, on conslale bientôt que les cultures entrent dans une autre phase, caractérisée par ce fait que les plantes de la première catégorie (lumière bleue), qui assimilent davantage, deviennent plus vigoureuses et que leurs tiges acquièrent wn plus grand nombre d'entre-nœuds : ces tiges égalent d’abord, et ensuite dépassent en longueur celles de la deuxième catégorie (lumière verte), ce qui est très naturel. Pendant la première phase de la végétalion [phase de la consommation des réserves), l'inégalité dans la lon- gueur des tiges éclairées par les différentes lumières colorées est due, presque exclusivement, à l'inégale action retarda- trice de ces lumières, tandis que pendant la deuxième phase (après la consommation plus ou moins complèle des réserves) l'inégalité renversée dans la longueur de ces mêmes tiges est un effel dû à l’inégale nutrition. C’est la longue durée de ses expériences qui explique, au moins en partie, les résultats obtenus par M. Flammarion. J'ai également limité la durée des cultures dans les expé- riences faites avec les plantes vivaces. La manière de pro- céder à élé la suivante : j'ai d’abord choisi un grand nombre de pieds égaux, pris dans le même terrain el ayant poussé, autant que possible, dans les mêmes condilions elimatéri- 238 E. TEODORESCO. ques. Ces plantes ont été mises dans des pois en aulomne. Au commencement du printemps suivant, après qu'elles uvaient commencé à donner des feuilles, j'ai choisi des pieds identiques et mis en culture. Pour d’autres plantes, je me suis servi de boulures (Salix, Populus, Ribes, etc.). Ces boutures, prises toujours, pour la même plante, sur le même individu, ont été faites également en automne, et mises en expérience avant le développement des bourgeons, mais cependant après avoir émis quelques racines. Tant pour les plantes cultivées dès la graine que pour les plantes vivaces, j'ai fait plusieurs expériences avec la même espèce. Dans les tableaux suivants, je donne les résultats obtenus pour chaque individu et les moyennes. Comme il y a toujours des variations individuelles, il ne faut tenir compte, en général, que de [a moyenne obtenue. Tableau I. Arachis hypogæa (Série d'expériences n° 1, du 4 juillet au 8 août.) NATURE & 2 LS Se Z o MOYENNE DES RADIATIONS. heu ere DE LA TIGE. = Z Z Z Z ee) a (3 (es Es mn}. mm. mn), mm mn. 10 6 42 49 74 » 10 6 22 30 82 » bumière rouge "#00 { À ÿ … _ . * è )) 45 A1 30 o1 45 » À 8 10 49 42 ñ » Moyenne. 9 I 30 45 69 160" 020 20 61 47 07 » 1% 14 43 00 65 ) 11 13 31 29 03 » Lumièreyerte "ee ae 11 4% 40 63 » 20 17 43 36 46 » 16 29 60 43 42 » 19 10 30 39 03 » Moyenne." | 15 16 43 44 57 1720m 8 6) 1% 30 D2 » el | Lumière bleue..:..:. ne 10 a7 28 03 » l'AS | as es Se ) | Moyenne..... | 14 7 23 39 52 13622 es INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 239 Tableau II. Cucurbita Pepo (Série d'expériences n°3, du 27 Juillet au 16 août.) NATURE DES RADIATIONS. AXE HYPOCOTYLÉ. MOYENNE. | Lumière rouge \ MRUUIUE à ; Paie a ec 132 — 146 millim. | Le \ 195 a » Pumiére verte 4 :.. 101003 157 — » / 175 — 475 millim. ( 105 == » Pumiere bleltes:.:5 M Une ANA » l Pie ee 88 millim. | Tableau III. Cannabis sativa (Série d'expériences n° 4, du 6 juillet au 16 août.) NATURE AXE 1er MOYENNE | DES RADIATIONS. HYPOCOTYLÉ. ENTRE-NOEUD, DE LA TIGE, s | . millim. | millim. millim. 107 | DA) » 94 | 23 » 79 | 48 ») HEumière rouge..-:.r...: 95 14 » 110 42 » 80 2 » 115 1 » | Moyenne... | 99 15 114 | | 160 1% » | 132 32 » | unuère verle! iii, 150 7 » 170 5 ) | | 195 18 » Moyenne-.##e | 153 20 175 | 105 18 » | 93 12 » D Dumiere bleue.::1.1.11 2e e d 105 20 ») \ 83 10 » PE 108 240 E. TEODORESCO. Tableau IV. Phaseolus multiflorus (Série d’expériences n° 1, du 16 août au 6 septembre.) NATURE AXE jer 9e LONGUEUR TOTALE DES RADIATIONS. HYPOCOTYLE. | ENTRE-NOEUD. |ENTRE-NOEUD. DE LA TIGE. miliim, millim. millim. millim. Lumière rouge..... | 186 180 100 466 Lumière verte...... 260 170 75 505 Lumière bleue...... 188 134 123 445 Tableau V. Lupinus albus (Série d'expériences n° 2, du 27 juillet au 21 août.) LONGUEUR LONGUEUR NATURE ; MOYENNE j \ DE L AXE DU DES AA EEONSe HYPOCOTYLÉ. |10r ENTRE-NOEUD.| PE LA TIGE. miilim. millim. millim. 126 50 » Luneresrouse ten 90 21 » 98 30 » Moyenne #1 | 104 35 139 | 150 48 » *. 175 46 » Lumière vérte...........) | 142 27! ») 130 32 » Moyenne tr | 149 38 187 De l’examen des tableaux qui précèdent, il résulte done que ce sont les radiations vertes qui retardent le moins la croissance, et donnent par suite les tiges les plus longues: qu'après les radiations vertes viennent les radiations rouges, et enfin les radiations bleues. | Les résultats obtenus avec le Vrcia sativa méritent d'altirer INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 241 un instant l'attention. Voici, en effet, les données qu'a fournies Vélude de cette plante : Tableau VI. Vicia sativa (Série d'expériences n° 3, du 6 au 28 juillet.) a a A a al e = Se a NATURE ss Z © Z o z © Z © Z D z © Z. © Z CR 2 F Ps 4 ! Gù 1! % 1 sr 1! o 1 et) i— ! a 1 © : a < DES RADIATIONS. cal sl cal Ë = 5 el Ë E = =. Le PO LE BEIC PR PE À EP BR RP POP AE CRE mm mm mm mm mu. | mm. | mm mm. | mm mm 96435 0):) 100176206097 he eus OA ON 5 PRES D RE ER CO PR LC LS DES LA EEE PTS 64,460 1870000047 EDS ER) tr Lumiérerouge:..1.:)49 | 38 | 66410 | 51.1 35] —|.2 |"; 10-20 1062 0109%%:640/1.991— À = RE ) CEE RQ EN ES ET EN AR En AT ES DANS E Pa Pt LR AE RS MOTO 06% 0/90 1.690 47 1,95. EN C en Moyenne...... | 9 | 48 | 56 | 96; 65 | 46 | 28 | — | __ | 318 É49 | 451 58.450 | 92 | 28 | = =") |.» 18 1:25 |:506 | 108 |:15 Re M CAS AC Mio Sri ro | 4) me) Li. Lumière verle...... \ 44) 94 60 1192 80 96. |: — À = 4 Lo RO PAU AAA (NU NÉS ee Po EN a CE a 15990047 05 158 y ne UT. en VA NOTA AOD EH ES es le el D Moyenne...... | 15:1 26 | 514,1412 | 72:40 | —:| — |; 290 D 61127 13 1200/65/60 | 46 29 ») BAR Ab 84 68 Nb, LAS 05 Ver LS nr 6 S 120 EC S0N TE)" 7. | 487123 FA Lumière bleut...... 5 5 | 20 | 70! 66 | 54 | 55 | 50 | 2 | » 7 I S80 84 56 1415 380 EE 940 Le +5 4 CA TS ED ES AS SELS) Moyenne...... 5 7 | 30 | 79) 60 | 52 | 44 93 345 35 Les données de ce tableau viennent confirmer l’idée émise plus haut, concernant la durée de la végétation, savoir que les cultures qui ont été laissées longlemps après la consom- mation des réserves peuvent donner des résultats absolument contraires. Nous voyons qu'ici les longueurs de la tige aux diverses lumières se présentent dans un ordre exactement inverse de celui trouvé pour les aulres plantes. Cet exemple nous montre que c’est dans la lumière bleue que la tige est le plus longue, dans la lumière verte qu'elle est le plus courte. ANN: SC. NAT. BOT, AN ETO 242 E. TEODORESCO. Est-ce donc une contradiction avec les résultats précé- dents? En aucune facon. Seulement, pour cette plante, j'ai précisément prolongé l’expérience au delà de la période de consommation des réserves. L'assimilation chlorophyllienne, qui seule actuellement nourrit la plante, est, comme on le sait, bien plus intense dans le bleu que dans le vert, d’où des plantes plus vigoureuses dans la première lumière. En effet, les plantes qui ont poussé sous l'influence de la lumière bleue ont acquis neuf entre-nœuds, celles qui ont été éclairées par la lumière rouge ont sept entre-nœuds, et enfin celles qui ont été cullivées derrière l'écran vert n'en possèdent que sir. Mais considérons seulementles cinq premiers entre-nœuds basilaires, pendant la formation desquels les plantes avaient encore à leur disposition les réserves de leurs cotylédons: nous verrons que les choses se sont passées pour cette plante comme pour les autres. En effet, on constate que les tiges les plus longues appartiennent aux plantes de la lumière verte; viennent ensuite celles de la lumière rouge, et enfin les tiges qui avaient élé exposées à la lumière bleue. C'est ce que montrent les chiffres suivants qui représentent les moyennes des cinq premiers entre-nœuds, moyennes faites à l'aide des données du tableau précédent (Tableau VE. Eumiere rouge" rentrer 244 millimètres. tn VÉLO Re RCA 276 — Notre conclusion est donc {rès générale, el ce dernier exemple cilé fait bien ressortir la nécessité d'arrêter la végé- tation au moment que nous avons fixé. B. — Morphologie interne. Les changements de structure produits dans la tige, sous l'action des lumières colorées, sont parallèles et analogues à ceux que nous avons exposés pour la racine. En étudiant la morphologie interne de ce dernier organe, on a vu comment | | | | | INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 243 varient les différents tissus de son cylindre central, principa- lement le bois, le liber et l’assise génératrice libéroligneuse. Je n'ai pas l'intention d'entrer dans les détails de la des- cription de ces tissus de la tige. Dans ce qui suit, J'étudierai d'une part les changements que subit le développement des autres tissus de la lige, et surtout de l'écorce de cet organe, et d'autre part les rapports qui existent entre le développement du cylindre central et celui de l'écorce. | À cet effet, j'ai étudié des plantes herbacées et des espèces ligneuses. Dans ce dernier cas, tantôt les sujets en expé- rience étaient, dès la graine, soumis aux diverses lumières, tantôt il s'agissait de petits arbres d'un ou deux ans, choisis aussi semblables que possible, et mis en culture aux diverses radiations au début du printemps, avant le développement de leurs bourgeons. Chacun des lots était toujours composé de plusieurs plants, et après un certain temps de culture j ai choisi dans chaque lot les individus qui avaient développé le même nombre d’entre-nœuds, et je les ai étudiés comparati- vement. a. — RAPPORT DU CYLINDRE CENTRAL A L ÉCORCE. Dans les tiges, la croissance en épaisseur de l'écorce et du cylindre central ne se fait pas avec la même intensité pour ces deux régions. En effet, pendant un temps assez long, et dans la généralité des Dicotylédones, le cylindre central s’épaissit beaucoup plus vite que l'écorce. L'épaisseur absolue de cette dernière région reste même quelquefois stationnaire, ou bien, dans certains cas, elle diminue, à cause de la poussée du cylindre central qui continue à s’accroître en diamètre. Il résulte que le rapport du cylindre central à l'écorce augmente avec l’âge. Si, en ellel, on suit un certain nombre d’entre-nœuds successifs, du sommel vers la base de la lige, on constate nettement cette augmentation. Un fait analogue s'observe pour les tiges des plantes qui 24% :.. TEODORESCO. ont été cultivées dans les lumières colorées. En elfet, si l’on compare ces tiges, on conslale que le rapport du cylindre central à l’écorce n’est pas le même aux diverses lumières colorées ; il est le plus grand dans la lumière bleue, plus petit dans la lumière rouge, el plus petit encore dans la lumière verte. En d’autres termes, le diamètre du cylindre central augmente plus vite dans la lumière bleue que dans la lumière rouge, el dans celle-ci plus rapidement que dans la lumière verte. Voici maintenant, à litre d'exemple, une partie des mesures que ] ai obtenues pour diverses plantes. Le tout est exprimé en divisions du micromètre oculaire. 1. Æsculus Hippocastanum. Diamètre Épaisseur Rapport du de du cylindre central cylindre central. l'écorce. à l'écorce. Lumière verte........ 101 12 7,25 — TOUTE TOO 84 9 8,00 — blene #1 96 10 8,10 — blanche ..... 111 di 8,04 2. Solanum tuberosum. Lumière verte........ 80 A1 - HAT — TOULE NN 18 9 8,06 — bleues eines 80 9 8,88 3. Fraxinus excelsior. Lumière verte........ 80 12 6,66 — TOULe Aer 12 10 7,20 — bleue... a 9 7,88 —— blanche ..... 113 112 9,41 Lumière verte ........ 47 27 1,74 == ROULÉ APR 90 21 1,85 — bleues 56 AT. 2,03 — blanche” 60 26 2,31 li en est de même pour un grand nombre d’espèces que J'ai éludiées, comme : Pæœonia, Quercus pedunculata, Syringa vulgaris, Faba vulgaris, Phaseolus multiflorus, Ricinus sangqui- neus, Arachus hypogæa, Lupinus albus, Cicer arietinum, etc. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 245 Comparons maintenant les données précédentes avec celles que j'ai obtenues en prenant des mesures sur trois entre-nœuds successifs des plantes qui ont poussé à la lumière blanche. Le premier entre-nœud est le plus jeune, le troisième le plus âgé. Comme précédemment, les mesures sont données en divisions du micromèlre oculaire (Leitz, obj. 2, oc. 2). 1. Æsculus Hippocastanum. Diamètre Épaisseur Rapport u de du cylindre central cylindre central. l'écorce. à l'écorce. 1e" entre-nœud........ 90 12 7,50 PA A Ada AS 110 Al 10,00 3e NE 116 ai 10,50 2. Solanum tuberosum. 4e" entre-nœud........ 128 10 12,80 2e er A Le 140 10 14,00 3e de Dour 160 10 16,00 3. Fraxinus excelsior. 1 entre-nœud ....... 58 ) 6,4% 2e en A D dd dns al 9 7,88 3e ONE RS 14 9 0,22 Ces trois exemples suffisent pour montrer que si, dans les tiges des plantes qui ont poussé dans les trois lumières colorées, le rapport du cylindre central à l'écorce est variable avec la nature de la lumière, cela tient à un développement plus où moins grand du cylindre central. En d’autres termes, dans les radiations vertes les tiges se comportent comme un entre-nœud Jeune, dans les radiations rouges comme un entre-nœud plus âgé, el enfin dans les radiations bleues comme un entre-nœud encore plus âgé. DORÉ CORCE: Je passe maintenant à l'étude du développement relatif des lissus de l'écorce; je prends comme exemple le Marronnier d'Inde. 246 E. TEODORESCO. Æsculus Hippocastanum. J'avais mis en expérience, au commencement du prin- temps, plusieurs pieds de celte plante avant le développe- ment des bourgeons. Au bout de deux mois, les petits arbres avaient produit trois nouveaux entre-nœuds, aussi bien dans la lumière blanche que dans les lumières colorées. Les coupes faites dans l’entre-nœud basilaire de la porlion de la tige formée pendant l'expérience donnent les résultats exprimés par le tableau ci-joint, dans lequel E représente le rapport de l'épaisseur totale de l'écorce à l'épaisseur de l’écorce primaire, et P le rapport de l'épaisseur totale de l'écorce à l'épaisseur du périderme. Épaisseur Épaisseur Épaisseur totale de lécorce du E P de l'écorce. primaire. périderme. Lumière blanche... 294 Moon 102. 1,53 2,88 — rouge 243 189 D4 1728 4,90 — Verte 3024 2594 43 1,16 1,02 ee Dieue. 288 v. 207 p. 81 1,39 3,55 Aussi bien dans la lumière blanche que dans les lumières colorées, l’assise génératrice phellogénique a fonctionné et a produit un périderme plus ou moins développé, suivant la nature des radiations. Le rapport de l'épaisseur totale de l'écorce à l'épaisseur de l’écorce primaire n’est done pas le même chez les plantes éclairées par les diverses radiations. Après la lumière blanche, c’est dans la lumière bleue qu'il est le plus grand; il est plus faible dans la lumière rouge, et plus faible encore chez les plantes exposées à la lumière verte. Cela signifie qu'au bout du même temps, par rapport à l'écorce en- tière, c’est dans la lumière verte que l'écorce primaire présente la plus grande épaisseur relative; l'épaisseur de cette écorce montre deux valeurs moins grandes, l’une plus élevée dans la lumière rouge, l’autre plus faible dans la lumière bleue. Mais cela ne veut pas dire que l'écorce primaire a loujours été plus grande dans le vert que dans le rouge, et dans le INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 247 rouge que dans le bleu. Ce résultat, obtenu au bout du même temps, tient à l’inégale précocité des formations secondaires du cylindre central. L’écorce primaire, déve- loppée sous le verre bleu, se trouve comprimée et aplatie par les formalions secondaires plus {6 que sous les verres vert et rouge. L'épaisseur absolue de l'écorce primaire est évidemment en relation avec la rapidité du développement du cylindre central. En effet, nous avons montré plus haut : Hameem Pr: ec. p. Fig. 17. — Acer Pseudoplatanus ; dévelop- Fig. 18. — Acer Pseudoplatanus ; déve- pement du périderme à la lumière loppement du périderme à la lumière blanche ; ep, épiderme ; pr, périderme ; rouge ; ep, épiderme ; pr, périderme; ec.p., écorce primaire. ec.p., éCOTCe primaire. que le cylindre central augmente en diamètre plus rapide- ment dans le bleu que dans le rouge, et dans celui-ci que dans le vert. Or, comme l’a montré M. Eberhardt (1), l'écorce peut suivre, sans se rompre, l'accroissement rapide du cylindre central. Les phénomènes dont l'écorce est le siège et les modifications qu'elle subit, sous la poussée du evlindre central, sont mulliples et variables avec les espèces. Tantôt 11 y a formation de lacunes, tantôt il se produit des cloisonnements radiaux, tantôt enfin il y a écrasement d’un certain nombre d'assises de cellules à parois minces et peu résislantes à la pression exercée par le cylindre central. Chez le Marronnier d'Inde, on observe à la fois formalion de lacunes et écrasement de cellules. Ceci étant donné, on comprend donc très facilement pourquoi l'écorce primaire, qui est formée de cellules à parois cellu- (4) Eberhardt, Modifications dans l'écorce primaire chez les Dicotylédones (C. R. de l’Acad. des Sc., 13 févr. 1899). 248 E. TEODORESCO. losiques, n’a pas la même épaisseur relative dans les diverses espèces de radiations lumineuses. Là où le cylindre central présentera le plus grand diamètre relatif, l'écorce primaire sera devenue, à un certain moment, la moins épaisse, et inversement. Or, comme le diamètre relatif du cylindre central augmente plus rapidement dans le bleu que dans le rouge, el dans le rouge que dans le vert, l'épaisseur de l’écorce primaire, par suite de son aplatisse- ep Co Ge) nn) NL he er our : : A PR Un Fig. 19. — Acer Pseudoplatanus; déve- Fig. 20. — Acer Pseudoplatanus ; éres loppement du périderme à la lumière loppement du périderme à la lumière verte; ep, épiderme ; pr, périderme ; bleue ; ep, épiderme pr, périderme ; ec.p., écorce primaire. ec.p., éCOTCe primaire. ment, diminue plus dans le bleu que dans le rouge, et dans le rouge que dans le vert. Quant au périderme, c’est dans la lumière bleue qu'il atteint le maximum d'épaisseur ; vient ensuite, dans l’ordre décroissant, la lumière rouge, la lumière verte. Ce que nous avons vu chez le Marronnier d'Inde s'applique également aux autres plantes ligneuses que j'ai étudiées, comme on peul s’en convaincre en examinant les tableaux suivants : Quercus pedunculata. Épaisseur Épaisseur Épaisseur totale de l'écorce du E P de l'écorce. primaire. périderme. Lumière blanche... 205% 143 0 62. 1,43 3,30 — Touge..... 148 1 1130 39 U. 1,30 4,22 ==h verte. et 148 0 1210 27 y. 1525 0,48 twbblenet er HMS 98 31. 1,97 3,04 Acer Pseudoplatanus (fig. 17, 18, 19, 20), Lumière blanche... : 329w 246 0 83 p. 1,33 3,96 2 ANTOULeNN EE 301 vu. 276 1 70 u. 1,27 4,68 + VOLE ou 2124. 221 LU. 45 1,19 6,04 — 11 bleue: 20022460 189. 56 p 1,29 4,37 INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 249 Syringa vulgaris. Lumière blanche... 1864. 105 2. 810. DT 2,29 mr DOUDe. ee 172 u 1354. 37 p. 1,27 4,0% LCI ORNE BE 194 0. 162% SPA 451119 6,06 tr bleue... 221 tp 150 p. Tu 1,46 9,11 CONCLUSIONS Les principaux résultats qui ont élé obtenus en étudiant l'influence des radiations de différentes réfrangibilités sur les plantes peuvent être résumés comme il suit : 1. — Feuille. 1° Le limbe présente loujours le maximum de surface chez les plantes exposées à la lumière bleue ; c'est sous l’action des radiations vertes que celte surface est le plus petite, landis que dans la lumière rouge les limbes ont des surfaces intermédiaires. Ce sont, par conséquent, les feuilles des plantes qui poussent dans la lumière bleue qui se rap- prochent le plus, par la surface de leur limbe, des feuilles qui se sont développées à la lumière blanche ; l'effet produit par la lumière verte se rapproche le plus de l'effet produit par l'obscurité. 2° Quant à la longueur du pétiole, on peut distinguer deux groupes de plantes : a. Chez beaucoup d'espèces, les pétioles se comportent comme des tiges : les pétioles les plus longs appartiennent aux tiges les plus longues et aux limbes les plus réduits. Ce sont donc les radiations vertes qui produisent la plus grande taille et les bleues la taille la plus courte; dans la Iumière rouge, l'effet oblenu est intermédiaire. Exemples : Pæonia, (ŒEnothera, etc. b. Dans d'autres espèces, on observe précisément le contraire, c'est-à-dire que les modifications sont toujours 290 E. TEODORESCO. comparables de la même manière à celles obtenues lors- qu'on compare la lumière totale à l’obscurilé complète : les pétioles les plus iongs appartiennent aux tiges les plus courtes et aux limbes les plus grands. C’est chez les plantes éclairées par la lumière verte qu'on trouve les pétioles les plus courts: viennent ensuile, dans l’ordre croissant, la lumière rouge et la lumière bleue. Exemples : Æicinus, Polygonum Fagopyrum, Rubus, etc. 3° Quand la plante présente à la base de la tige une rosetle de feuilles charnues et dépourvues de pétiole (Sem- pervioum tectorum, S. arachnoideum, etc.), ces feuilles s’ac- croissent en longueur comme des tiges, mais leffet est notablement moindre que pour ces derniers organes. Les feuilles les plus longues appartiennent aux plantes éclairées par la lumière verte, les plus courtes aux plantes ayant poussé derrière l'écran bleu, tandis que les feuilles éclairées par la lumière rouge présentent une longueur intermédiaire. En même temps, ces feuilles sont d'autant moins larges qu’elles sont plus longues. Elles se distinguent aussi par ce fait, qu'au lieu d’être dressées et hyponasies, comme cela arrive à la radiation totale, elles sont horizontales et tou- jours épinastes. 4° Les diverses lumières colorées dont je me suis servi sont moins favorables au développement des tissus de la feuille que la lumière blanche. 5° Les épaisseurs des tissus palissadique et lacuneux, ainsi que la largeur moyenne des lacunes aérifères, ont un minimum de développement dans le vert. Ces diverses dimensions sont plus grandes dans le rouge et encore plus dans le bleu. Le développement du tissu assimilateur et du système aérilère varie par conséquent dans le même sens que l’action retardatrice des différentes radiations sur la croissance de la tige. | 6° Les chloroleuciles présentent quant à leur volume, leur nombre et leur disposition, des variations analogues à celles énoncées pour le tissu assimilateur : ils sont dans la lumière INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 25 verte plus petits, moins nombreux, à contours vagues, disposés sans ordre dans la cellule et contiennent moins de chlorophylle que dans les lumières rouge el bleue. Dans ces dernières lumières, les chloroleucites sont toujours nettement visibles, plus grands et disposés plus réguliere- ment le long des parois de la cellule; 1ls sont plus gros et plus verts dans le bleu que dans le rouge, dans celui-ci plus que dans le vert. 1° Le nombre des stomates par unité de surface est plus grand dans le vert que dans le rouge et dans le rouge que dans le bleu. Mais, comme je l’ai déjà remarqué ailleurs, cela ne veul pas dire que le nombre total des stomates est plus grand sur une feuille qui a été éclairée par la lumière verte, que sur une’feuille qui à poussé dans le rouge ou dans le bleu. Ce nombre est en réalité le même pour les trois espèces de lumières colorées, parce que les cellules se divisent avec la même rapidité, et par conséquent Île nombre total des cellules esl, approximativement, le même dans les trois sortes de feuilles, comme je l’ai constaté par des mesures spéciales. Cela est d’ailleurs en concordance avec les faits observés en comparant les feuilles étiolées avec les feuilles cullivées en pleine lumière : il y'a beaucoup plus de stomates, par unilé de surface, dans le premier cas que dans le second. Or, Prantl !1) a montré que, chez la feuille qui se développe dans une obscurité complète et qui a son limbe très réduit, il se fait un grand nombre de divi- sions cellulaires. Sur la largeur de la feuille primordiale de Phaseolus, le nombre des cellules était, en effet, dans la graine non germée de 343, chez la plante étiolée de 1375 a 2571, chez la plante verte normale de 1 429 à 2 273. 8° Quant au développement du bois, du hber et du tissu cambial des nervures, ainsi que de la lignificalion des parois des cellules, la marche est la même que pour les mêmes lissus de la racine et de Ja tige, que je vais décrire. (1) Prantl, Arbeiten des bot. Inst. zu Wür:burg, fase. III, p. 384. 259 E. TEODORESCO. 2, — Racine. Si nous considérons la croissance de cet organe et si nous nous reportons aux résullats obtenus dans la comparaison de ce même organe à la lumière et à l'obscurité, nous cons- tatons que : | 1° Pour une plante chez laquelle la lumière blanche retarde la croissance de la racine (Lupinus albus, Faba vulgaris, Phaseolus multiflorus, ete.), c’est la lumière bleue qui la retarde le plus, et alors, c'est à la lumière verte que les racines atteignent leur plus grande longueur, bien qu’elles soient encore moins longues qu'à l'obscurité. 2° Quand, au contraire, les racines d’une espèce sont plus longues à la lumière blanche qu'à l'obscurité {Lepidinm salivum), c'est dans la lumière bleue qu’elles sont également les plus longues, et c’est sous l'influence des radiations vertes qu'elles atteignent leur plus faible dimension. 3° Quand, enfin, il n’y à que peu de différences entre les longueurs, à la lumière totale el à l’obscurité { Vrcia saliva, etc.); il yen a également peu entre les longueurs obtenues aux diverses lumières colorées. Quant à la morphologie interne, on constate : 4° Le diamètre du cvlindre central et l'épaisseur de l'écorce ne présentent pas les mêmes dimensions chez les plantes exposées dans les diverses radiations : le maximum de ces dimensions est atteint dans les lumières bleue et rouge, le minimum dans la lumière verte. Comme pour l'épaisseur de la feuille, les dimensions de l'écorce et du cylindre central de la racine sont moins grandes dans le rouge que dans le bleu. 5° On observe des différences analogues pour le dévelop- pement du bois et du liber, pour ie fonctionnement de l’as- sise génératrice libéroligneuse, pour la lignification des parois. Dans les radiations vertes, le bois primaire pré- sente très peu de vaisseaux, la différenciation des élé- INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 299 ments conducteurs secondaires est le moins avancée. Il en est de même de la lignification des parois des vaisseaux et des cellules du tissu mécanique. Ce sont les racines expo- sées à la lumière verte qui se rapprochent le plus, par leur stfucture, de celles qui croissent à l'obscurité. A la lumière rouge, la différenciation est déjà plus considérable ; enfin, dans la lumière bleue, les racines présentent des caractères de structure qui les rapprochent beaucoup des racines de la lumière blanche. : 3. — Tige. 1° Parmi les lrois espèces de lumières que j'ai em- ployées (rouge, verte, bleue), ce sont les radialions vertes qui retardent le moins la croissance et donnent par suite les tiges les plus longues; après les radiations vertes, viennent les radiations rouges, el enfin les radialions bleues. Cela n’est vrai, bien entendu, que si les cullures ne sont pas maintenues longtemps après la consommation des réserves; autrement les résultats obtenus ne sont plus com- parables, car l'assimilation permet aux plantes dans la lumière bleue de continuer à se développer, tandis que les plantes périssent dans la lumière verte ; 2° Le développement des éléments conducteurs primaires et secondaires, le fonctionnement de l’assise génératrice libéroligneuse, la lignificalion varient dans le même sens que pour la racine ; 3° Le diamètre du cylindre central de la tige augmente plus rapidement dans la lumière bleue que dans la lumière rouge, et dans celle-ci plus rapidement que dans la lumière verte. Par suite de la précocité plus où moins grande des formations secondaires, l'écorce primaire se trouve plus rapidement comprimée et aplatie dans le bleu que dans le rouge, dans le rouge que dans le vert: 4 Le périderme de la tige présente un minimum de développement dans la lumière verte ; 1l est plus développé dans le rouge, plus encore dans le bleu. EH. TEODORESCO. 9 OT CS COMPARAISON DES RÉSULTATS DES EXPÉRIENCES AVEC LES RÉSULTATS DÉJA CONNUS. En définitive, si nous considérons les résultats exposés plus haut, on constate que c'est toujours la lumière verte qui est la plus défavorable au développement de la plante; en outre, les plantes éclairées par cette lumière périssent souvent après un temps relalivement court, par rapport à la période de végétation de l'espèce considérée et cul- üivée dans les conditions normales. C'est dans la partie la plus réfrangible du spectre (représentée dans mes expé- riences par les radiations bleues et indigos), que les plantes poussent le mieux et présentent le maximum de dévelop- pement de tous leurs tissus. Les radiations les moins ré- frangibles (représentées dans mes expériences par les radia- lions rouges et une faible partie des radiations orangées) sont un peu moins favorables que les radiations de l’autre extrémité du spectre, mais elles permettent un développe- ment beaucoup plus grand que les radialions vertes. Tâchons maintenant d'expliquer, autant qu’il est possible, les résultats que j'ai obtenus. Pour cela, il faut nous rap- peler comment varient sous l'influence des radiations des différentes réfrangibilités les principaux phénomènes dont la plante est le siège. Je commence par le phénomène de la production de a chlorophylle. Tous les observateurs sont d'accord sur ce point que tous les ravons du spectre, pris séparément, peuvent déterminer la production de la chlorophylle D’après Reinke (1), le maximum d’aclion revient aux radia- tions ue entre les raies B et D de Fraunhofer (rouge, orangé, Jaune). [l en est de même pour Wies- ner (2), qui place ce maximum entre les raies B et E (radia- lions rouges, orangées, Jaunes et une partie des vertes). (1) Reinke, Sitzungsb. der Berliner Akau., 1893, p. 536. (2) Wiesner, Die Entstehung des Chlorophylls in der Pflanze. Wien, 1877. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 299 La moitié la plus réfrangible du spectre a une influence moindre. Cependant Wiesner (1) a montré que cela n'est vra: que pour le cas où l'intensité de la lumière n’est pas assez grande pour décomposer une solution de chloro- phylle pendant quelques heures. Il à trouvé, en effet, que dans une lumière diffuse dans laquelle une solution de chlorophylle commence déjà à se décomposer au bout de quelques heures, les plantes verdissent à peu près tout aussi vite dans les deux moitiés du spectre; enfin que les plantes éliolées verdissent plus rapidement sous l’action des radiations les plus réfrangibles que sous l’action des rayons les moins réfrangibles, si on expose les plantes en expé- rience à l'influence d'une lumière très forte (lumière solaire directe). | Wiesner explique ce phénomène de réversibilité de la manière suivante. À la lumière diffuse, la chlorophylle ne se décompose pas; toute la chlorophylle formée subsiste. Comme dans les lumières Jaune, orangée et verte, la chlorophylle se forme plus vile que dans les lumières bleue et violette : 1l en résulte qu'il y aura plus de chloro- phylle dans les plantes exposées aux premières espèces de lumières que dans les dernières. Sous l'action d’une lumière forte, la chlorophylle se décompose plus vite dans les lumières orangée, jaune el verte, que dans les lumières violette et bleue. Par conséquent, toute la chlorophylle qui se forme à la lumière diffuse subsiste, landis qu'à la lumière solaire directe, il ne reste que la différence entre la quantité pro- duite et la quantité détruite. Or, cette différence est, à une lumière très forle, une quantité plus petite dans la moitié la moins réfrangible du spectre que dans la moitié la plus réfrangible. Or, dans mes expériences, les plantes élaitent plus vertes derrière l'écran bleu que derrière l'écran rouge; cela lient (4) Wiesner, Untersuch. über die Bezieh. d. Lichtes zum Chlorophyll (Sitzungsb. d. k. Akad., Bd LXIX. Wien, 187%). 296 E. TFEODORESCO. évidemment à ce fait que mes expériences ont été faites en pleine lumière solaire. Les feuilles des plantes que j'ai cul- livées présentaient les différences de teinte indiquées dans le travail de M. Griffon (1) (PL. IN et IV, fig. 10,, 10,, 10.) (2). Quant aux plantes qui ont poussé derrière l’écran vert, dont je me suis servi, elles étaient toujours moins vertes que dans le rouge et que dans le bleu. - Étant donné ce fait que dans les trois sortes de culture, les plantes n'avaient pas la même quantité de chlorophylle, il est évident que les plantes les plus vertes doivent assi- miler plus que les autres. Ce que d’ailleurs a montré M. Griffon (3), qui, prenant des feuilles des plantes que je cullivais, et les faisant assimiler & /a lumière blanche, trouvé que pour l’Arachis hypogæa les différences étaient les suivantes. Au bout d’une demi-heure, les feuilles pro- venant de la lumière bleue avaient dégagé par unité de surtace 0,054 d'oxygène ; celles qui provenaient de la lumière rouge 0,041, el enfin celles qui provenaient de la lumière verte 0,027. Pour le Zea Mays, l’auteur a trouvé comme quantité d'oxygène dégagé, par unilé de surface, les chiffres suivants : 2 44:4%60 0,82; Or. comme la surface de l’ensemble des feuilles est Liu. pelite dans le vert que dans le rouge el dans le rouge que dans le bleu, les différences d’assimilation totale sont bien : plus grandes encore. Si l’on se rappelle, en outre, que la structure des feuilles varie dans le même sens que le ver- dissement (et sans contredit à cause de la variation même de ce verdissement), on s'explique très bien pourquoi les plantes cultivées derrière les trois espèces d'écrans colorés présentent, dans leur développement, les différences que nous avons vues. (1) E. Griffon, L'assimilation chlorophyllienne et la coloration des pare (an. des Sc. hat; , Botanique, 1899). (2) Ces figures on! été exécutées d’après des feuilles que J'ai mises à la Disposition de M. Griffon pour étudier l’assimilalion chlorophyllienne. (3) E. Griffon, loc. cit. HT AIAN7Z AGNA 1750 4 & 5% à Bo # X 1! TX Nr5e6 ANNALES | SCIENCES NATURELLES h BOTANIQUE L'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE ET LA CLASSIFICATION DES VÉGÉTAUX VIVANTS ET VFOSSILES DE unes PUBLIÉE SOUS LA DIRECTION DE M. PH. VAN TIEGHEM OM ee Nasser e. SRE cr PARIS | ."MASSON ET €, ÉDITEURS LIBRAIRES DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE 4 120, BOULEVARD SAINT-GERMAIXN 1899 PARIS, 30 FR. — DÉPARTEMENTS ET ÉTRANGER, 32 FR. Ce cahier a été publié en décembre 1899. Les Annales des Sciences naturelles paraissent par cahiers mensuels. ECS HUITIÈME SÉRIE BOTANIQUE Publiée sous la direction de M. if LA TIEGREM L'abonnement est fait pour 2 volumes, chacun d’environ 100 | be. pis avec les pores et les HEUree Dis le a CorerpoRdans au. | mémoires. | | . Ces volumes paraissent en plusieurs faseicules ‘dans l'intervalle d'une année. | Hi 0 s: Les tomes I à X sont fn te | ZOOLOGIE . Publiée sous la direction de M. A. MAN. Enwanps. L'abonnement est fait pour 2 volumes, chacun d’ environ 00 pages, us : avec les planches correspondant aux mémoires. Su Ces volumes po en phare fascicules dans l'intervalle. d'une année. | : | Les tomes T à IX sont complets. de abonnement à. 2 volumes 8 Paris : 30 francs. — Do et Union postale : 32 francs. ANNALES DES SCIENCES GÉOLOGIQUES : | Dirigées, pour la partie géologique, par M. HÉBerT, et pour la partie 2 Ha paléontologique, par M. A. MIINE- EDWARDS. Tomes I à XXII (1879 à 1891). Chaque volume. 0) Cette publication est désormais confondue avec celle des Annales Re des Sciences naturelles. Prix des collections. PREMIÈRE SÉRIE (Zoologie et Botanique réunies), 30 vol. . (Rare). | DEUXIÈME SÉRIE (1834-1843). :. Chaque partie 20 vol. 950 fr. TROISIÈME SÉRIE (1844-1853). Chaque partie 20 vol. 250 fr. | QUATRIÈME SÉRIE (1854-1863). Chaque partie 20 vol. 250 fr. CinQuUIÈME SÉRIE (1864-1874). * Chaque partie. 20 vol. 250 fr. SIXIÈME SÉRIE (1875 à 1884).. Chaque partie 20 vol. 250 fr. : me SEPTIÈME SÉRIE (1885 à 1894). : Chaque partie 20 vol. 300 fr. GÉOLOGIE, 22 volumes. . . . . D ue RÉ Te A CT 3a0m INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 257 D'autre part, M. Wiesner (1) a montré que la transpiration est plus énergique dans les [lumières bleue et violette que dans les lumières rouge, orangée et jaune, c’est-à-dire que les radiations qui retardent le plus la croissance accélèrent le plus la transpiration. Or, la transpiration a une influence importante sur la forme des plantes. Kohl (2) a montré que la longueur des entre-nœuds el la grandeur des feuilles sont en relalion avec la quantité d’eau transpirée; d’après le même auteur, la structure des plantes dépend également de la transpiration. Dernièrement, M. Palladine (3) a proposé une explication de la forme des feuilles éliolées, en admettant qu’à l'obscurité c’est la diminution de la {ranspiralion qui détermine le phé- nomène de l’étiolement. En effet, on sait depuis longtemps, et surtout depuis les recherches de Baranelzky (4) et de Wiesner (5), que les plantes transpirent moins à l'obscurité qu’à la lumière. Toutefois, d'après M. Palladine, ce qu'il im- porte de considérer pour expliquer l’étiolement, c'est moins la faible quantité d’eau transpirée à l’obseurité que la modi- fication du rapport entre la transpiralion de la feuille et celle de la tige. Considérons le Vicia Faba par exemple. A la lumière, les feuilles élant vertes, la transpiration a lieu sur- tout par ces organes, qui attirent ainsi sans cesse l’eau de la tige ; celle-ci tend donc continuellement à manquer d’eau; elle ne développe que de très courts entre-nœuds. À l’obscu- rité, au contraire, où la couleur des feuilles ne peut plus avoir d'action, c’est la Lige de la plante étiolée qui, à cause de sa grande surface, présente la transpiration la plus active. (1) Wiesner, Recherches sur l'influence de la lumière et de la chaleur rayon- nante sur la transpiration des plantes (Ann. des Sc. nat., 6° série, IV, 1877), eb Sitzungsb. der k. Akad. d. Wiss. zu Wien, LXXIV, 1876. (2) Kohl, Die Transpiration d. Pflanzen und ihre Einwirkung auf die Aus- bildung pflanzlicher Gewebe, Marburg, 1886. (3) Palladine, Transpiration als Ursache der Formänderung etiolirter Pflanzen (Ber. d. deutsch. bot. Gesellsch., VIII, 1890). (4) Baranetzky, Ueber d. Einftuss einiger Bedingungen auf die Transpiration d. Pflanzen (Bot. Zeit., 1872). (5) Wiesner, loc. cil., p. 47 ANN:K SC. NAT BOT. > (7 le 258 E. TEODORESCO. Ce sont alors les feuilles qui, à leur tour, manquent d’eau et ne se développent plus. Chez les plantes sans chlorophylle, il se produit même à la lumière, à cause de l'absence de la matière verle, ce qui n'a lieu chez le Vicia Faba qu'à l’obscu- rité. Cela s'explique par le fait que, quelque soit l’éclairement, les surfaces de transpiration seules sont à considérer, et la tige a, sous ce rapport, toujours l’avantage sur les feuilles ; les limbes de celles-ci restent donc petits, se développant d'autant moins qu elles contiennent moins de pigments chlo- rophylliens. Quelques autres exemples, cités par M. Palladine, semblent bien montrer que l’étiolement est dû à ces modifi- cations du rapport de la transpiration des différents organes. On peut citer l’expérience suivante de M. Palladine : des plantules de Vicia Faba élant placées à l'obscurité, on en- toure leur tige de caoutchouc. La transpiration de cette tige est ainsi amoindrie, l’eau n’est donc plus enlevée aux feuilles, comme précédemment; on constate alors que ces feuilles se développent normalement. Revenons aux résultats que j'ai obtenus; j'ai constaté que le limbe présente toujours le maximum de surface chez les plantes exposées à la lumière bleue; que c’est sous l’aclion: des radiations vertes que celle surface est la plus petite, tandis que dans le rouge les limbes ont des surfaces intermé- diaires. Or, aussi bien la méthode des écrans absorbants que celle du spectre donnent les valeurs suivantes pour la trans- piration en une heure (1). 1. Maïs (méthode du spectre). RouGen ne SR CR ee en eme den 35 milligr. JAUNETOTANLÉ PS PER AN PES Jr NAS ES AA TAN SL SE AR en 30 — Bleu reprenne eme DT Un 40 — OSCAR RER PR CL Ce 24 — 2. Maïs (méthode des écrans absorbants). Lumière jaune (bichromate de potasse) ..... 124 milligr. — verte (dissolution de chlorophylle). 117 — — bleu (solution cupro-ammoniacale). 134 — ODSCUTIEES Se de AS 100 — (1) Wiesner, loc, cit. INFÉUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 259 M. Van Tieghem (1) dit même qu'il est probable que la légère augmentation de la ranspiration chlorophyllienne, observée dans le vert, est uniquement due à l’augmentation de la #ranspiralion proprement dite, par ces rayons. S'il en est ainsi, la chlorovaporisation n’a pas lieu du tout dans les rayons verts. Cela est d'autant plus probable que les recher- ches de MM. Bonnier el Mangin (2), confirmées par celles de Henslow (3), prouvent que les rayons lumineux agissent dans le même sens sur la iranspiration des plantes vertes que sur celle des plantes sans chlorophylle, telles que les Cham- pignons. | Si l’on ne tient compile que de la transpiration, on peut donc expliquer la forme et même, jusqu’à un certain point, le développement des espaces aérifères du mésophylle des feuilles éclairées par les trois sortes de lumières colorées dont je me suis servi dans mes expériences. Un autre point intéressant à considérer, c’est la formation des substances albuminoïdes dans les plantes. _ Quoique, en ce qui concerne l'influence de la lumière et de l'obscurité sur la production de ces substances, les recherches soient pour la plupart contradictoires, il paraît que la synthèse des matières albuminoïdes, aux dépens des substances nutri- lives organiques ou inorganiques, se fait beaucoup mieux à la lumière qu’à l'obscurité |[Hansteen (4), Godlewski (5), Palladine (6), Laurent, Marchall et Carpiaux (7)|.0r, MM. Lau- (t) Van Tieghem, Traité de botanique, 2e édit., 1891, p. 187 (en note). (2\ Bonnier et Mangin, Recherches sur la respiration et la transpiration des Champignons (Ann. des Sc. nat., 6° série, XVII, p. 288, 1884). (3) Henslow, Transpüration of living protoplusma (Journ. of Linn. Soc. London, 1888, XXIV). (4) Hansteen, Berichte d. deutsch. bot. Gesellsch., XIV, 1896. (5) Godlewski, cité par Susuki, in Bot. Centralblatt, Bd LXXV, p. 289. (6) Palladine, Influence de la lumière sur la formation des substances azotées vivantes dans les tissus des végétaux (C. R. de l'Acad. des Se., 1. CXXVIIE, p. 377; Revue gén. de Botanique, t. XI, p. 81). (7) Laurent, Marchall et Carpiaux, Recherches expérimentales sur l'assimila- tion de l'azote ammoniacal et de l'azote nitrique par les plantes supérieures (Bull. de l’Acad. roy. des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Bel- gique, XXXII, 1896). 260 E. TEODORESCO. rent, Marchall et Carpiaux (1) soutiennent que la réduction des nitrates dans les feuilles vertes est un phénomène que domine l’action des rayons les plus réfrangibles du spectre. Il n’y a pas assimilation de l'azote nitrique par les feuilles vertes d’Acer Nequndo, par exemple, sous les solutions de bichromate de potassium ou de sulfate de quinine. Cette assimilation est très active sous la solution de sulfate de cuivre et sous l’eau. Ce sont donc les rayons ultraviolets qui interviennent dans cette assimilation. Avec les feuilles blan- ches de la même espèce, 1l n’y a qu’une assimilation minime de l'azote ammoniacal, et peut-être elle est nulle sous les solutions de bichromate de potassium ou de sulfate de quinine; sous l’eau, elle est considérable. L’assimilation de l'azote ammoniacal est donc stimulée par les rayons ultra- violets. | D'autre part, M. Palladine dit avoir constaté que les feuilles placées dans une solution de saccharose à 5 p. 100 ou à 10 p. 100 ont donné comme résultats que, dans la moitié bleue du spectre, la régénération des matières protéiques s'effectue plus énergiquement que dans la moitié jaune du spectre (2). Si les observations de MM. Laurent, Marchall et Carpiaux d’une part; de M. Palladine de l’autre, sont vraies, on com- prend encore mieux pourquoi, dans mes cultures, les plantes cultivées derrière l'écran qui laisse passer les radiations les plus réfrangibles du spectre se développent mieux que sous l’action des radiations les moins réfrangibles. Je veux mentionner encore les recherches qui ont été faites sur la formation des diastases. M. Green (3) s’est proposé de voir si loutes les radiations se comportent de la même manière vis-à-vis des diastases. Il a trouvé que les solutions aqueuses des amylases (amylase du malt, de la salive), ainsi que les amylases des feuilles vivantes, se (1) Loc. cit. (2) Palladine, Revue gén. de Botanique, t. XI, p. 81. (3) Green, loc. cit. INFLUENCE DES RADIATIONS LUMINEUSES SUR LES PLANTES. 261 comportent de deux manières différentes vis-à-vis de la lumière. Quelques régions du spectre accélèrent l’activité diastasique, aussi bien en solution aqueuse, que dans les feuilles vivantes; d’autres régions du spectre ont, au con- traire, une aclion nuisible, c’est-à-dire que les diastases se détruisent sous l’action de ces radiations. L'action diasta- sique est représentée, pour les diverses radialions, par les nombres suivants : infrarouge + 10,8 ; rouge —+- 53,5; orangé +- 4,7; vert — 15,7; bleu + 20,8. Par conséquent, ce sont les rayons verts qui sont nuisibles à la formation des diastases. Les diastases jouant un rôle très important dans les transformations des substances qui se trouvent dans la plante, on comprend encore mieux pourquoi, sous l'influence des rayons verts, les plantes non seulement se développent peu, mais encore qu’elles périssent au bout d’un temps relalivement très court, par rapport à la période de végétation de l'espèce considérée et supposée cultivée dans des condilions normales. | Nous venons de passer successivement en revue les influences des diverses radiations sur la formation de la chlorophylle, sur l'assimilation chlorophyllienne, sur la transpiration des tissus verts, sur Ta formation des ma- lières protéiques et sur la production ou la destruction des diastases. Or, si l’on ada:innne ces différents effets, pro- duits sous l'influence des radiations de diverses couleurs, on voit que la somme des résultats favorables au dévelop- pement el à la vie de la plante est plus grande dans le bleu que dans le rouge, et dans le rouge que dans Île vert. L'ensemble de mes recherches donne une démonstration directe des conséquences que l’on pouvait déduire approxi- malivement, d’après les travaux physiologiques que je viens de ciler. Mais cette démonstration directe était nécessaire; car, sans compter les faits nouveaux que j'ai pu mettre en évi- dence sur la forme et la structure des organes, je pense qu'elle apporte plus de netteté et plus de précision dans 262 E. TEODORESCO. l'analyse de l’action lumineuse. Cela tient surtout aux verres que j'ai employés, qui ne laissent passer, chacun, qu'une partie bien définie de la lumière, comprenant un groupe déterminé de radiations, qui correspondent presque exactement à un groupe de bandes d' ShEONpReR du spectre de la chlorophylle. Ce travail a été fait au Laboratoire de Biologie végétale de Fontainebleau, où j'ai pu installer mes expériences dans de très bonnes conditions. J’adresse à M. Gaston Bonnier, professeur à la Sorbonne et directeur de ce Laboratoire, et à M. Dufour, directeur adjoint, mes bien vifs remercie- ments pour les précieux conseils qu'ils n’ont cessé de me pro- diguer durant le cours de ces recherches. "A le nu ' 1 ‘ Ærarse es Ur, : u s Ac | à : > = 3 L HE ss î F ï L 2 = ‘+, FL . ‘ bai ( : L … su ei CNRS Ÿ : \ = " % 4 F F + L X h 0 # L DE LE ER - U Û 4 Es L ” DL nu | K 2 : } ; e # LL. = Ù fe . .. à - - | _ ww ». LS ” h h Q = + 2 ' “ (à Let : Eu rs ' Go h E ï — : : 1 : ‘ - L Un NA RTE ON LE: De k \ en L 2 j. L : Fe } Y = : . « æ : 3 L = nn AC . « L +2 = : ee 4 Ar : +. Fe î & A Î ‘ ï [n 2 + . e à ' Bot. Tome X, PIÈWE Se Serie. Ann. des Se. nat. “errfqdoxofun ‘NAT 91194 ‘JA9A 9J1J9A 95nO1i 9119 A 56S LR 1 *S91N71N9 S0] SUVP WNA107997 Wns1449dw9$ np Sy2odsD A ‘YU ‘4 I L « “oplydosojyo Dj 2p 1n999 n sounduwuo9 s940709 sau194 sap uonduosqn p sau190d& | È PANNES : Herincq sc. ] lCSCO (KE 10 = FE Teoû Ann. des Sc. nat. Se Serie. E, Teodoresco del. Bot. Tome X, APN Herineq se. De BACR ET Pœonia officinalis ; L,, B,, R,, V,, O, Rubus fruticosus.. Se Socrie. Ann. des Sc. nat. Bot. Tome X, PIE | à | Fe a JT TR 8 T *SUDS8INS DQDA Herincq se. E. Teodoresco del. 22 LA tn “ : CRE | ? ù ' L = ah qd : hu M t _ Ÿ ' sr y ae ' Û : i » ‘ : : ? tre 2» U me L | rie EL : “ : v, : 4" “ nv s (PE ’ À : . ea +7 5» & + # 1 , Fa J 274 Si IE { - 6 r 4 . * : va ‘ L - Es € L g y t£ «# AL (- 4 we he 4 + } sr 11, fo. L Le Er L + , Eu . L L - =. ; , 5 ar ER L 7 TE k b + ; = ; _ De het Fr = . . : d | cs : E î TEE ” ‘ L L Pa L en : foi Un ” = : 4 ï A = 0 . CRE . Fee >: , 4 : : l... E . À n e nm. ? * ; g 7%, én ; CS d FRE Me Da 07 à " 7} ; \ CRT .# : : : Ë se . ‘ Re 7 4 . ni EN 2 > : : CE Es = Le ! S # E * … 1 L Jo. , - EPS TT ‘ _ L : = DR ” . | ROLL ce le - h e : { . Le : 2 Lu _ 2 dr . : " : L ” x w L : : Dre : : 2 à Ne - "ni h CN ê > * . - 0} Bot. Tome X, PL VA RE Ses L ù A : cn = sue ER L NASA ce S A D De Ne sm 're! à De 2 F ras : ons LD . 4 : DANS 7 LA LCR IN AO 4 ) es É 1 LSUISS è RE ni pet . . RS TS CAS ec AR ; < © Neil / = À) 70010.) EXPLICATION DES PLANCHES LETTRES L, L, ou I, lumière blanche. KR, R, ou r, lumière rouge. V, V, ou v, lumière verte. B, B, ou b, lumière bleue. O, obscurité. ep. $., épiderme supérieur. p., parenchyme en palissade. L., parenchyme lacuneux. COMMUNES ep. i., épiderme inférieur. ch., chloroleucites. li. p., liber primaire. f., fibres libériennes. Z. J., Zone génératrice. b. p., bois primaire. b.s., bois secondaire. pe., péricycle. PLANCHE V Spectres d'absorption des verres colorés comparés à celui de la chlorophylle. Aspects des cultures de Sempervivum tectorum aux diverses lumières. PLANCHE VI Feuilles de Pæœonia officinalis aux diverses lumières (L, B, R, V). Feuilles de Rubus fruticosus aux diverses lumières (L,, B,, R,, V,, O). PLANCHE VIT Faba vulgaris, coupes transversales de la feuille aux diverses lumières (KR, M, B,.L, O). Faba vulgaris, cellules du parenchyme palissadique pour montrer l'aspect des chloroleucites (ch.) aux diverses lumières (1, b,r, v). PLANCHE VIII Cicer arietinum, coupes transversales de la racine, dans la lumière rouge (R) et dans la lumière verte (V). so ol LES Dot ÉD dut qu LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS Par M. C. SAUVAGEAU. Les observations de M. Reinke sur les Cutlériacées [78,2] laissaient entrevoir les relalions qui existent entre les Cuwlle- ria ct les Aglaozonia. Celles de M. Falkenberg [79,2] ont eu le mérite de les préciser davantage en montrant que l'A glaozonia fait très probablement partie du eyele de déve- loppement du Cutleria. pouvait sembler alors qu'une alter- nance de générations, régulière et nécessaire, comparable à celle bien connue des Muscinées et des Cryplogames vascu- laires, existe entre ces deux genres, le premier étant le spo- rophyte, le second le gamétophyte. Cependant, M. Falken- berg, tout en spécifiant, dans sa Liste des Algues du Golfe de Naples |79,1|, que l'indépendance du genre Aglaozonia lui paraît douleuse, cite prudemment à part les Cutleria el les Aglaozonia. M. Berthold [82], Hauck [85}, M. Ardissone [86}, ont observé la même réserve. Mais dans des livres classi- ques plus récents, publiés par M. Kjellman {93}, M. de Tom [95], etc..., ce que les auteurs originaux donnaient comme une probabilité devient une certitude, et le genre A g/aozonia est confondu dans une description unique avec le genre Cut- leria. Les recherches postérieures de M. Church 98! el de M. Kuckuck [99], bien qu'incomplètes, paraissent leur don- ner raison. Mais, d'après les observalions de ces derniers auteurs el d’après les miennes, si l'alternance de générations 266 C. SAUVAGEAU. est possible ou même fréquente, elle n’est nullement néces- _saire. Un Cutleria peut naître directement d’un Cutleria sans passer par le slade Aglaozonia, de même qu'un À q/ao- zonia peut provenir directement d’une zoospore d’A glaozonia. D'ailleurs, dans certaines régions, on trouve seulement l’une des deux plantes. Tout en considérant l'A g/aozonia ou le e ia, pris isolé- ment, comme des plantes incomplètes, il paraîl on préfé- rable, tout au moins pour le moment, de séparer leurs des- criplions dans les livres généraux et de leur conserver une diagnose spéciale; on faciliterait ainsi les délerminations et l’élude de la distribution géographique. En effet, si l’A. paroula semble bien la forme asexuée du C. multifida, VA. chilosa, qu'avec M. Falkenberg on suppose généralement représenter le sporophyte du C. adspersa, n'appartient probablement pas à cette espèce, el paraît plu- tôt un sporophyte dont on ignore le gamétophyte. L’Ag/aozo- nia du C.adspersa serait au contraire une plante méconnue Jusqu'à présent, et que je désigne plus loin sous le nom d'A. melanoidea. J'ai dil naguère [96,1] combien nos connaissances sur la reproduction des Cutlériacées sont incomplètes. Depuis, elles ont nolablement progressé ; le problème est serré de plus près. Je ne crois pas inutile, au début de ce Mémoire, de revenir sur l'historique des travaux consacrés à celte élude, pour mettre la question au point, espérant ainsi faciliter sa solulion. La reproduction des Cutlériacées, dans sa com- plexilé, n'inléresse pas seulement les algologues, mais tous ceux qui s'occupent de biologie générale; elle présente un intérêt particulier aux multiples points de vue de la sexua- lité et de la parthénogenèse, de l'alternance des générations et du polymorphisme, de l'influence des conditions exté- rieures sur le développement, et de la distr ibution géogra- phique. & LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 267 CHAPITRE PREMIER EXAMEN CRITIQUE DES TRAVAUX PUBLIÉS SUR LES CUTLÉRIACÉES. $ 1. — Travaux des anciens auteurs. Thuret [50], en montraut que les organes reproducteurs pluriloculaires du Culleria multifidu renferment des corpus- cules motiles pourvus de cils, et sont des anthéridies et des oogones, séparail des Diclyotacées le genre Cutleria, repré- senté sur nos côtes par les deux espèces C. adspersa el C. multifida, pour en faire une famille à part. Mais les oosphères observées par Thuret à Saint-Vaast-la-Hougue ger- maient constamment sans le concours des anthérozoïdes ; cette parthénogenèse pouvait s'expliquer par le très pelit nombre des individus mâles vivant dans cette localité, par rapport aux plantes femelles. Tandis que la plante adulte est une lame membraneuse, les germinations obtenues par Thuret étaient des filaments cloisonnés transversalement, non terminés en poil, et fixés par des rhizoïdes basilaires ; les cellules inférieures de cette fronde confervoïde portent des branches dressées d'apparence semblable au filament principal. Les plantules ne se développèrent pas assez pour indiquer leur sort ultérieur et Thuret s’abslient de toute con- jecture à leur sujet. D’après les frères Crouan [55|, les oosphères du C. multi- fida germent aussi à Brest sans subir de fécondation. Les observations de Derbès et Solier [56}, failes sur les bords de la Médilerranée, manquent de précision quant à la fécondation du €. adspersa, mais elles paraissent nécessaire- ment d'accord avec celles de Thuret quant au C. multifida, puisque ces auteurs ont vu seulement des plantes femelles. Toutefois, de même que les frères Crouan, ils n’ont pas suivi aussi loin que Thuret les germinations obtenues. En 1857, on ne connaissait du Zonaria collaris que son 268 C. SAUVAGEAU. thalle rampant et coriacese multipliant par des proliférations sur sa face supérieure, déjà mentionnées parM. J. Agardh!48}, mais on ignorait les vrais organes reproducteurs. On le ran- geait parmi les Dictyotées du genre Zonaria simplement à cause de l'aspect extérieur du thalle âgé. Mais les frères Crouan [57] découvrirent des anthéridies et des oogones identiques à ceux des Cutleria, à celte différence près qu'ils étaient monoïques et répartis d'un seul côté de la fronde. Ces caractères leur parurent avoir une importance générique, et ils donnèrent à la plante le nom de Zanardinia collaris, du nom de genre antérieurement proposé par Nardo (1). On admeltait, à la même époque, deux espèces dans le genre Aglaozonia(A. parvula Lan. et A. reptans Külz.), voisin du genre Zonaria d'où Zanardini l'avait reliré en 1843. Mais les frères Crouan [57] en firent les premiers connaître les organes reproducteurs. Ils les décrivent comme des sporan- ges uniloculaires dressés sur le thalle rampant, avec huit zoospores en file, ressemblant par leur taille et leur forme aux oosphères des Cutleria et du Zanardinia. Xs considèrent l'A glaozonia comme voisin de ces deux derniers, et les décou- vertes ullérieures ont confirmé cette manière de voir (2). (1) Les frères Crouan connaissaient uniquement la plante âgée, à bords rongés, ne s'accroissant plus, car ils prenaient les jeunes proliférations pour des C. adspersa épiphytes, et, en effet, le Zanardinia jeune a beaucoup de ressemblance avec le C. adspersa stérile. Zanardini [65], trouvant le bord de la fronde jeune très comparable à celui des Cutleria,et considérant, non sans raison, l’'hermaphroditisme comme un caractère insuffisant pour. juslifier la séparation d’un genre, appelait cette plante Cutleria collaris, nom sous lequel elle fut souvent désignée depuis. Toutefois, la découverte de la fronde asexuée par M. Reinke l’éloigne suffisamment des Cutleria pour autoriser la conservation du genre Zanardinia. (2) Toutefois, la raison qu'ils en donnent, à savoir que ces sporanges ren- ferment huit zoospores, et que les oogones des Cutleria et Zanardinia ont aussi huil oosphères disposées toutefois sur deux rangs au lieu d’un, est sans aucune valeur. Il s’agit là, en effet, d'organes bien différents au point de vue morphologique, puisque les uns sont uniloculaires et les autres plu- riloculaires. Mais ce que les frères Crouan cherchaïent avant tout, semble- t-il, c'était à battre en brèche l’idée de Thuret, c'est-à-dire à prouver que les Cutleria ne doivent pas être retranchés des Dictyotacées, et ils étaient conduits à faire de cette famille un groupe des plus hétérogènes. Pour eux, toutes les Algues brunes à cellules périphériques rectangulaires et alignées étaient des Dictyotacées. Ce caractère était le lien unissant une série de LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 269 Depuis, on à reconnu que les deux noms A. reptans et A. parvula sont synonymes. La plupart des auteurs em- ploient actuellement le nom d’A. replans, bien que A. par- vula, plus ancien, ait droil de priorité. Dans les pages qui suivent, j'emploierai uniquement celui d'A. parvula, auelle que soit la dénomination usitée dans les Mémoires dont j'aurai à m'occuper (1). Les anciens auteurs savaient que le bord des Cutleria et Zanardinia est rangé. M. de Janczewski [75] a montré que les jüls de la frange (2), intimement soudés à leur base, sont la continualion immédiate des séries cellulaires du thalle. Chacun possède, à sa base, un accroissement trichothallique qui, d'une part, régénère les fils usés à leur sommet et, plantes à organes reproducteurs insuffisamment connus. Thuret, au con- traire, s’appliquait à l'étude morphologique et physiologique des organes reproducteurs et fondait sur eux ses divisions des Algues brunes (Thu- ret [55]). (4) L’Aglaozonia sur lequel les frères Crouan découvrirent des sporanges uniloculaires était PA. reptans. Mais Harvey [46}, par la comparaison d'échantillons stériles d'A, reptans et d'A. parvula, et Zanardini [65], par la comparaison d'échantillons fertiles, reconnurent l'identité des deux espèces. Le nom spécifique de VA. parvula (Zonaria parvula Greville, 1828) étant plus ancien que celui de l'A. reptans (Zonaria reptans Crouan, 1833) fut adopté par raison de priorité. Mais M. Reinke, dans un paragraphe de son étude des Dictyotacées intitulé Zonaria parvula GREv., dit qu’il a trouvé à Naples, croissant souvent mélangées, deux plantes à peine distinctes l’une de l’autre, et de même mode d’accroissement, mais l’une produit des spo- ranges d’Aglaozonia et l’autre des tétrasporanges de Dictyotée. Or, !es frères Crouan n’admettent pas, dans leur Florule du Finistère [67], sans en donner les raisons, et sans citer l’Iconographia de Zanardini [65] parue deux ans auparavant, que l'A. reptans soit synonyme de l'A. parvula. M. Reinke, s'appuyant sur leur témoignage, en conclut que l’Aglaozonia de Naples pour- rait bien être celui étudié par les frères Crouau, et le Zonaria de Naples la plante décrite pour la première fois par Greville. C’est ainsi que M. Reinke substitue dans son Mémoire Ie nom d’A. reptans à celui d'A. parvula. De- puis, de nombreux auteurs, tels que Falkenberg |79, 1; 79, 2], Berthold -[82], Hauck [85], Bornet [92], Holmes et Batters [92},etc., ont fait de mème. La raison invoquée par M. Reinke ne me paraît pas valable, et je préfère, avec Kjellman [83], Ardissone [86], Batters [89], Kuckuck [99}, etc., em- ployer Le nom d'A. parvula Zanard. Il y a lieu de remarquer encore que ie Zonaria parvula Reinke n’est point une Cutlériacée comme le dit M. de Toni [95, p. 234]. — (Voy. plus loin, chap. 1, S 4.) (2) emploie ici le mot fil pour désigner chaque filament de la frange; il me paraît préférable aux mots poil et cil, souvent usités et pris aussi, comme on sait, dans une autre acception. 270 C. SAUVAGEAU. d'autre part, permet l’accroissement du thalle, car les cellules formées au-dessous de la zone d’accroissement se soudent aussitôt latéralement à leurs voisines. Le thalle des Cutlériacées a donc une origine aussi remarquable qu'excep- lionnelle ; il est dû à des cloisonnements suivis de soudures. M. de Janczewski supposait que ce mode de végétation se retrouve chez le Carpomitru et le Sporochnus, et M. Johnson [91] a récemment vérifié qu'il en est réellement ainsi. Ceci indique une parenté réelle entre les Cutlériacées et les Spo- rochnacées, et rend plus désirable encore la découverte des organes pluriloculaires de ces dernières. L’accroissement du thalle de l’Aglaozonia, dont s'occupe aussi M. de Janc- zewski, est dû à un cloisonnement marginal, el n’a rien de commun avec celui des Cutleria. | S 2. — Mémoires de M. Reinke |76; 78|. La connaissance du rôle des organes reproducteurs des Cutlériacées n’avail fait aucun progrès depuis le Mémoire de Thuret, quand M. Reinke reprit la question à Naples en 1875 et 1876. Il a trouvé en oclobre le Zanardinia sous forme de lames coriaces, d’un brun noirâtre, stériles, à bords rongés, qui sont des plantes âgées. En janvier, elles produisent sur leur face supérieure, par prolifération, de jeunes thalles rajeunis- sant et multipliant la plante. Ceux-ci, ombiliqués, « en forme de Pezize », frangés, ont permis à l’auteur de donner une description de l’accroissement du thalle, concordante avec celle de M. de Janczewski, mais plus détaiilée. Les plantules adventives, d'abord en entonnoir, s’élargissent ensuile, s’étalent, prennent la forme caractéristique (1). (1) M. Reinke [78] représente sur la figure 12 (loc. cit., PI. 2 (IX)) une coupe longitudinale à travers une très jeune plantule adventive, et sur la figure 13 le schéma d’une autre plantule un peu plus âgée. Je n’ai pas étu- dié ces plantules nées par prolifération, mais la disposition des filaments, indiquée par M. Reinke, ne correspond point à la structure des plantules de germination de Cutleria que je décris plus loin (Voy. fig. 18). LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 271 Bien que le Zanardinia ne soil pas très rare dans la Médi- lterranée, Zanardini n'avait pas réussi à le rencontrer pourvu des organes reproducteurs décrits par les frères Crouan. M. Reinke, plus heureux, retrouva des individus monoïques en novembre et décembre. Les logetles des anthéridies el des oogones ont une déhiscence indépendante, comme Thuret l'avait observé pour le C. mulüfida, et les oosphères et les anthérozoïdes sont aussi très comparables à ceux de cette plante. Les oosphères ne germent, et même ne se recouvrent d’une membrane, qu'après avoir été fécondées, et l’auteur décrit en détail la fusion des corpuscules mâles et femelles. Les germinations représentées sur les figures 21 et 22 (/oc. cit.), âgées de huit semaines, sont des filaments d’une tren- laine de cellules non terminés en poil, à zone d’accrois- sement siluée un peu au-dessus de la base; sur l’un des filaments, la cellule inférieure est cloisonnée suivant la lon- gueur. [IL semble qu'elles auraient pris ultérieurement une plus grande ressemblance encore avec les germinations de Thuret; elles ressemblent aussi à un fil isolé de la frange d'un individu adulte, mais elles ne nous laissent pas sup- poser comment elles peuvent prendre la forme et l’état caractéristique du thalle à filaments fasciés (1). A la même époque, M. Reinke trouva des thalles asexués, de forme et de structure identiques aux thalles monoïques, el cette importante découverte à jeté un Jour nouveau sur la reproduction des Cutlériacées. Les sporanges forment de très larges sores à la surface des vieux thalles, ou même les recouvrent complètement ; ils sont dressés, uniloculaires, et renferment souvent 4-6 zoospores en file. Les zoospores, très semblables aux oosphères, germent facilement; elles produisent des filaments semblables aussi, mais l’auteur les a suivis plus longlemps et, après trois mois de culture, les plantules portent des commencements de ramificalion basilaire, el leurs cellules inférieures sont cloisonnées (1) Les cultures de M. Reinke furent ensuite viciées par des germinations étrangères ; j'en ai parlé autrefois 196, 1, il est inutile d'y revenir ici. 22 €. SAUVAGEAU longitudinalement (/0c. ci, PE 3 (X), fig. 8,10, 11). M. Reinke a retrouvé dans la nature, sur des coquilles, des plantules un peu plus avancées (/oc. cit., PI. 2 (IX), fig. 14), et il suppose qu'elles donneront, par leur développement ultérieur, des individus « en forme de Pezize ». Il les attribue à la germination des spores, el je n'en saisis pas la raison, puisque les germinations des œufs et des zoospores semblent identiques. Quoi qu'il en soit, tandis que les plantules adven- tives sont abondantes et en parfait élat de végétation au mois de mars, celles provenant de la reproduction sexuée ou asexuée, végélant à côté dans la mer, dépérissent et tendent à disparaître. Si l’on se rappelle que les auteurs antérieurs ont tous constaté la présence de jeunes individus adventifs sur les vieux thalles, on pourrait, semble-t-il, en induire que le Zanardinia, à Naples, se conserve et se pro- page surtout par boutures. De l'existence de deux thalles, l’un sexué, l’autre asexué, on ne peut naturellement conclure à la nécessité d’une alternance de générations. L'auteur à éludié aussi le C. multifida. Tandis que Thuret trouvait à Saint-Vaast un individu mâle pour cent femelles, M. Reinke trouve à Naples trois frondes mâles pour deux femelles, et la fécondalion est toujours nécessaire ; les oosphères, isolées des anthérozoïdes, ne germent point. L'auteur, moins heureux qu'avec le Zanardinia, décrit une fécondation par diffusion entre une oosphère et un anthéro- zoïde, pourvus chacun d’une mince membrane, qui est assu- rément le résullat d'une erreur d'observation. M. Reinke a dû interrompre ses cultures après un mois. L'œuf produit d’abord un rhizoïde, puis sa partie supérieure se cloisonne plusieurs fois transversalement, mais le filament reste court et des cloisons longitudinales apparaissent de bonne heure dans les cellules superposées. Les plantules ne correspondent donc point à celles décrites par l’auteur pour le Zanardinia, n1 par Thuret pour le Cutleria, ni aux jeunes plantules adventives qu’il a parfois rencontrées. Étant donné que les cultures de l’auteur furent plusieurs fois envahies par LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 973 des germinations de Desmotrichum, 11 est assez difficile de savoir ce qui revient exactement au Cut/eria dans ses des- criptions. Toutefois, les figures 20 à 30 (PI. 1 (VIIT)) et 1, 2, 3 (PI. 2 (IX)) paraissent bien se rapporter au Cutleria, et si l’auteur n'avait pas dû quitter Naples prématurément, il aurait vu ce que M. Falkenberg découvrit deux ans plus lard. Comme on n'a Jamais signalé de vrais sporanges sur un thalle de Cutleria, l'auteur s’est demandé si un sporophyte n'existerail pas, correspondant à celui du Zanardinia, mais assez différent du thalle sexué pour avoir été méconnu jus- qu’alors. Il a repris l’élude de l’Aglaozonia parvula, dont les sporanges décrits par les frères Crouan se rapprochent beaucoup de ceux du Zanardinia. Is renferment 4-6 zoospores disposées en file, identiques à celles du Zanardinia, qui ont germé en un filament monosiphonié (loc. cit. PI. 4 (XD, fig. 20 à 27) assez difficile à apprécier. M. Reinke a été gêné, dans la généralisation des résultats de son étude, par les impuretés (Desmotrichum) de ses cul- tures. Toutefois, à l’idée d'un Aglaozonia représentant la forme asexuée du Cuileria, 1 préfère celle d’un genre A glao- zoniæ indépendant, à organes sexués encore inconnus. Les oosphères des Zanardinia et Cutleria n’ont jamais germé sous ses yeux qu'après fécondation, mais il ne conteste pas la parthénogenèse observée à Saint-Vaast donnant, dit-il, des plantules plus ressemblantes à la plante mère que celles de Naples; le C. mullifida n'ayant point de zoospores, les oosphères parthénogénétiques les remplaceraient quand les anthéridies manquent. $ 3. — Mémoire de M. Falkenberg [79, 2]. On voit que les questions à résoudre étaient nombreuses. M. Falkenberg s'est appliqué à étudier à Naples, en 1878, la fécondation et la germination de l'œuf du C. multifida. De même que M. Reinke, il n'a Jamais oblenu de germi- ANN. SC. NAT. BOT. XL 18 274 C. SAUVAGEAU. nalions parthénogénétiques, el cinq jours au plus tard après la déhiscence, toutes les oosphères non fécondées sont mortes. La fécondation se fait par une pénétration rapide, comme dans le Zanardinia, après que l’oosphère arrêtée a perdu ses cils. Un fait bien surprenant, affirmé par M. Fal- kenberg, est que les oosphères sont encore presque toutes susceptibles de recevoir la fécondation trois jours après s'être arrêtées, et que même le quatrième jour près de # moitié sont ne cet étal. La germinalion commence aussitôt, et vngl-quatre heures après elle à déjà produit un filament de quatre cellules ; la première cloison sépare un rhizoïde qui reste court et s'élale si la plantule est fixée, ou bien s’allonge si elle est flottante. Le jeune filament dressé acquiert, par cloisonne- ment intercalaire, 8-15 cellules superposées, el l’on voit parfois apparaîlre une cloison transversale dans les cellules ainsi limitées. [l en résulte une petite co/onnetie massive (1), dont M. Reinke semble avoir vu les débuts. Bien que la ger- mination soit d'abord rapide, ce stade n'est atleint qu'après 4-6 semaines, sans période de repos. Sur les plantules de 6-8 semaines, une cellule de la base de la colonnetle dressée (parfois ee fait saillie, se di- vise, et, par des cloisonnements radiaux et tangentiels, donne une pelile /ame rampante, perpendiculaire à la colonnette, continuant à s’accroîlre par lesmêmes cloisonnements radiaux et tangentiels, tandis que, par des cloisonnements parallèles à la surface, elle prend trois épaisseurs de cellules. Pendant ce temps, la colonnette ne varie pas. La forme inaltendue de cette plantule n'esl pas pathologique, car l’auteur en a obtenu des milliers d'exemplaires et jamais d’aulres. Il en a même trouvé quelques-uns sur des rochers submergés, mais dont la colonnette est notablement plus haute que dans les plantules de cullure (/oc. cit., fig. 16). Il en a maïntenu en (1) Je préfère ce nom de colonnette à celui de pied employé par M. Fal- kenberg (Keimfuss), car au pied de ce pied va se développer autre chose, la lame rampante d’Aglaozonia. LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 275 culture pendant huit mois; la lame rampante se lobe irrégu- lièrement en s'élargissant. La plus grande plantule obtenue (loc. cit., fig. 22) avait plus d’un millimètre dans sa plus grande largeur (1). Évidemment, la colonnette est une sorte de proembryon non susceplible d’accroissement ultérieur, et la lame rampante basilaire est au contraire l’état jeune d’une plante nouvelle. Mais le mode d’accroissement marginal de celle-ci, qui n’a rien de commun avec celui d’un Cutleria, est au contraire étroitement comparable à celui de l’Ag/aozonia. Et ce dernier étant une plante asexuée, M. Falkenberg en conclut qu'il doit y avoir une alternance de générations entre le C. mulhjida comme gamétophyte, et l'A. parvula comme sporophyte. On n a jamais cité, il est vrai, de colonnette sur un À ylaozonia, mais on n'en connaît point l’état jeune. Siles plantules à lame rampante des cultures avaient pu être suiviesplus longtemps, dit l’auteur, elles auraient sans doute produit des sporanges uniloculaires, etles zoospores de l’Aglaozonia doivent germer en Cutleria. Enfin, ni M. Reinke ni M. Falkenberg n'ayant obtenu de germination parthénogénétique, et la germination des œufs fécondés donnant autre chose qu'un Cutleria, l'au- teur, oubliant que les dessins de Thuret ont la plus grande ressemblance avec ceux de M. Reinke, pour le Zanardinia, en conclut que les plantules figurées par Thurel appartiennent probablement à un Æctocarpus plutôt qu'à un Cut/eria. Nous verrons dans la suite que les plantules obtenues par Thuret sont au contraire le début d'un vrai Cutleria à (halle fascié. Les oosphères peuvent donc produire deux sortes de plantules et, pour éviter des périphrases, Je donnerai le nom de Forme Thuret aux plantules destinées à se changer en vrai Cutleria et Forme Falkenberg à celles destinées à se transfor- mer en Aglaozonia. Un fait important pour la parenté des Cutleria et À glao- zonia est indiqué par M. Falkenberg. LA. parvula, en lames (1) Mesuré sur le dessin, indiqué comme grossi 50 fois (loc. cit., p. 447) à 60 fois (Loc. cit., p. 433). 276 C. SAUVAGEAU. membraneuses, irrégulièrement lobées et incisées, ressem- blant par sa forme aux plantules de culture, et croissant comme le C. multhifida à quelques mètres au-dessous de la surface, n’est pas la seule espèce de ce genre dans le Golfe de Naples. En effet, l’auteur en a trouvé une autre, charnue, coriace, rubanée, rarement bifurquée, croissant toujours à 20-40 mètres de profondeur, comme le C. adspersa, dont elle pourrait bien être le sporophvte, et M. Falkenberg lui donne le nom provisoire d'A. chlosa. $S 4. — Mémoire de M. de Janczewski |[83.. M. de Janczewski a cherché à vérifier à Antibes, sur le C. adspersa, les faits observés à Naples par MM. Reinke et Falkenberg sur le C. mulhfida. Les oosphères non fécondées ne germent point. Leur dé- hiscence se fait de grand matin; elles arrivent au repos dans les premières heures de l’après-midi. Si la fécondation n'a pas lieu, elles se désorganisent peu après, ou seulement le lende- main, et après s'être entourées d'une membrane. Mais, lors- qu'il y a des anthérozoïdes dans les cullures, ceux-ci sont attirés par les oosphères au repos et peuvent même leur im- primer un mouvement de rotation. Toutefois, l’auteur n’a Jamais pu assister, dans des cultures cellulaires, à la fusion des protoplasmes, et la fécondation ne s’y fait réellement pas. Mais elle a lieu dans des vases plus grands, car on y retrouve des œufs à deux points rouges, et ce sont les seuls qui ger- ment. La germination commence rapidement; la première cloi- son limite une cellule radiculaire et une cellule supérieure qui se cloisonne plusieurs fois transversalement. Au bout d’une vingtaine de jours, les plantules ont 5-6 cellules: l’ac- croissement terminal est fini, mais la cellule supérieure se prolonge en un poil dressé, incolore, comme les auteurs précédents n’en ont point cité. Pendant que se forment de nouvelles cloisons transversales intercalaires, sans méristème, LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 277 des cloisons longitudinales se produisent. La plantule est un petit cylindre (oc. cit., PI. XIV, fig. 1), devenantensuite plus irrégulier; des rhizoïdes naissent en des endroits variables sur la face regardant la paroi du vase de culture, tandis que des poils semblables au poil terminal naissent sur la face opposée. Les germinations sont alors nettement dorsiven- trales (loc. cit., fig. 2). L'auteur cite même une germination plus trapue porlant une petite fouffe lalérale de poils tout auprès de laquelle le tissu du germe est plus volumineux (loc. cit., lg. 3), elilse demande si ce détail a une signification ultérieure. Les plantules les plus âgées avaient deux mois. Avec sa disposition dorsiventrale, cette forme de germi- nation ne correspond point, en apparence, à la description de M. Falkenberg ; elle ne paraît devoir donner ni un Ag/aozo- nia ni un Cutleria, et l'auteur s’abstient d’ailleurs de toute interprétalion. Elle est cependant étroitement comparable à la forme falkenbergienne obtenue à Naples. Les figures des premiers états (/oc. cit., PI. XII, fig. 18-21 ; PI. XIV, fig. 1) correspondent au début de la colonnette du €. multifida et le poil terminal paraît être une différence spécifique du C. ad- spersa. Comme on verra plus loin que les colonnettes du C.adspersa peuvent présenter plusieurs touffes de poils, celles vues par M. de Janczewski sont donc normales, et la protu- bérance de la figure 3 (oc. cit.) est le premier début de la lame rampante d’Aglaozonia. Quant à la plantule dela figure 2 (loc. cit.), sa dorsiventralité est artificielle ; elle tient à un éclairement trop unilatéral qui à amené le développement de _rhizoïdes sur la face moins éclairée. Normalement, la plantule de la figure 1, âgée seulement de 40 jours, devrait être com- plètement dressée, et le poil devrait être terminal et dans le prolongement de la colonnette, au lieu de lui être perpendi- culaire. Si cette plantule de la figure 1 avait continué à vivre, _ des rhizoïdes se seraient certainement développés à la face inférieure de la colonnette, des poils auraient poussé sur la face supérieure, el la lame d’A g/aozoma se serait étalée dans son plan et non dans un plan perpendiculaire. 278 C. SAUVAGEAU. Les germinalions de M. de Janczewski, au lieu d'être en opposition avec celles de M. Falkenberg, comme je l'avais cru d’abord {96, p. 237] sont au contraire parfaitement con- cordantes. Elles sont concordantes aussi sous le rapport de l'absence de parthénogenèse. Mais l’auteur ne nous dit rien de VA. chilosa, qui n’a pas encore été rencontré à Antibes (Bornet, 2n ltt.). $S5. — Premier Mémoire de M. Kuckuck 94]. Les gamétophytes de Cutlériacées que nous connaissons sont des lames monoïques ou dioïques à bord frangé. Mais M. Kuckuck a trouvé à Helgoland, sur des pierres draguées, mises en Culture, des plantules filamenteuses qui portent des oogones de Cutleria. Grâce à quelques cloisons longi- tudinales, la base forme souvent un petit corps cellulaire fixé par des rhizoïdes, qui se prolonge supérieurement en un filament monosiphonié, simple ou ramifié, à croissance trichothallique. L'auteur a trouvé aussi de minuscules thalles normaux de €. multifida; mais, bien qu'il annonce avoir vu des formes de passage des uns aux autres, il n’interprète point les premiers comme devant donner naissance aux seconds par coalescence, car il crée pour ses plantules fila- menteuses une variété confervoides du Cutleria mulnfida. M. Kuckuck n'a vu dans la nature ni la forme normale mi la forme confervoïde. $ 6. — Mémoire de M. Church [98|. Étant donnés les résultats obtenus dans la Méditerranée, il était intéressant de reprendre, sur un autre point de la Manche, les expériences de Saint-Vaast-la-Hougue. M. Church trouve abondamment le C. multifida en été à Plymouth; en pleine reproduclion en août, il dispa- rait en octobre. Contre un très grand nombre de plantes femelles, l’auteur a rencontré seulement deux ou {rois indi- LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 279 vidus mâles, aussi bien en 1896 qu'en 1897. Des expériences entreprises avec des individus mâles et femelles n’ont pas réussi, les plantes étant mortes. Dans des vases renfermant seulement des plantes femelles, les oosphères germent faei- lement et en abondance. Cette germination parthénogéné- tique appuie donc les affirmalions de Thuret. Toutefois, le résultat du développement est bien différent : au lieu d’être une forme thurélienne, c’est une forme falkenbergienne. Le cloisonnement d’abord transversal, puis longitudinal, donne une colonnette fixée par un ou deux rhizoïdes qui, après trois semaines, est assez massive (/oc. cit., PI. VHIT, fig. 11 à 14). Ensuile se produit l’accroissement basilaire en lame d’Aglaozonia el M. Church en représente de beaux exemples (/oc. cit., PL. IX) ; cette lame dorsiventrale est due, dit l’auteur, à un stimulus de contact, car, suivant la posi- tion de la colonnette dans la culture, il peut y avoir une seule lame, inférieure, ou une lame à chaque extrémilé, ou plu- sieurs lames en des points variés de la colonnette (1). Ces germinations appartiennent sûrement à la forme fal- kenbergienne, mais l’auteur ne signale pas un fait assez frap- pant. En effel, les colonnettes représentées par M. Falken- berg [79, 2} sont de très petites dimensions; ainsi, celle de la figure 21 (/oc. cit.), appartenant à une plantule âgée de huit mois, a seulement six étages de cellules; celles des figures 9, 13, 14, en ont, il est vrai, de dix à quinze, mais peu cloi- sonnées suivant la longueur ; enfin, si la, colonnette de la figure 16 (oc. cit.), représentant une plantule trouvée dans la (4) M. Church compare la plante de sa figure 16 (loc. cit.) aux plantules dorsiventrales de M. de Janczewski. En réalité, cétte plantule est une colon- nette très courte avec une lame d’Aglaozonia dans son prolongement. Au contraire, les plantules de M. de Janczewski sont des colonnettes longues, dorsiventrales, n'ayant pas encore développé de lame d’Aglaozonia. La com- paraison ne me semble donc pas exacte. Les plantules obtenues à Antibes, dit en outre M. Church, ont un intérêt particulier, car l’arrèt de la crois- sance terminale y est incomplet, puisqu'elles portent un filament terminal à zone intercalaire de croissance. Or, l'arrêt est complet, car ce filament est un accessoire, un vrai poil incolore, terminal, à croissance basilaire, comme il s’en forme plus tardivement en d’autres points de la colonnette du Cutleria adspersa. 280 C. SAUVAGEAU. nalure, est beaucoup plus longue et plus large que les pré- cédentes, elle le doit surtout aux plus grandes dimensions des cellules constituantes. Les colonnettes représentées par M. Church sont plus longues et plus larges, tous les eloison- nements primaires et secondaires sont bien plus nombreux et plus irrégulièrement distribués (1). Celte différence ne tient pas à une plus grande rapidité de croissance, car l’auteur reconnaît que ses plantules croissent moins vite que celles de M. Falkenberg. Nous verrons par la suite que les plantules de M. Church se rapprochent plus des plantules normales de la nature que celles de Naples. M. Church a étudié aussi l'A. parvula, dont la germination des zoospores, comme on se le rappelle, fut incomplètement suivie par M. Reinke. Les plantes, draguées le 29 mars à Plymouth, donnèrent en cullure d’abondantes zoospores qui vinrent à lasurface de l’eau du vase, et y germèrent rapi- dement. Au bout de peu de jours, les filaments produits, terminés inférieurement par un rhizoïde, ont 3-6 cellules. Ils doublent de longueur chaque semaine par un cloisonne- ment régulier, plutôt intercalaire qu'apical, tout en restant complètement flottants, car si on les submerge, ils meurent. Les plantules commencèrent à dépérir à la fin de juin, mais quelques-unes produisirent en juillet, avant de mourir, des anthéridies identiques à celles des vrais Cutleria (2). L'au- teur n’observa jamais la moindre fascialion qui, pourtant, doit être le début de la formation d’un thalle de vrai Cutleria. Au contraire, vers la deuxième ou troisième semaine de ger- minalion, les cellules basilaires de la plante confervoide deviennent plus ventrues, prennent des cloisonnements perpendiculaires comme le ferait une jeune colonnette (/oc. cit., fig. 5 à 10). Cette région basilaire est donc homologue (1) Le procédé d'indication des grossissements employé par M. Church rend impossible toute comparaison précise des dimensions. (2) La formation d’anthéridies et non d’oogones est à signaler, puisque dans la nature, à Plymouth, les Cutleria femelles sont bien plus nombreux que les mâles. M. Kuckuck [99] a obtenu, au contraire, uniquement des oogones. LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 281 d’une colonnette falkenbergienne, mais elle en diffère en ce que la partie supérieure continue à croître. Bien plus, dans la même culture, certaines de ces plantules ont, en outre, produit à leur base une lame d'A g/aozonta ; quelques-unes de ces lames atteignent même une taille remarquable (/oc. cit., fig. 4). Les zoospores d’Aglaozonia donnent donc en somme un être double : Aglaozonia par sa base, Cutleria confervoïde par son sommet, que }'appellerai Forme Church pour éviter des périphrases. L'auteur semble atlacher beaucoup plus d'importance à la formalion des filaments fertiles de Cutleria qu’à celle de la lame d’Aglaozonia (loc. cit., résumé de la page 94). C'est qu'en effet la présence de filaments fertiles prouverail l'alternance de générations, restée seulement pro- bable jusque-là. La fasciation des filaments ne serait qu’un détail, puisque M. Kuckuck a trouvé une forme confervoïde. Mais une interprétation exactement inverse de la forme Church me paraît beaucoup plus vraisemblable. En effet, le C. mulnfida et l'A. parvula étant l'un et l’autre, à Plymouth, des plantes draguées, on ne peut admettre que les germinations de la forme Church soient normalement flottantes, et que plus tard, dans la nature, elles descendent au fond de l’eau, comme le croit l’auteur. Bien souvent, lors- qu’on obtient des déhiscences de Phéosporées dans des vases de culture, un certain nombre de zoospores, au lieu de se fixer, restent à la surface et y germent : Le fait observé par M. Church a donc simplement ceci de particulier que la totalité des zoospores, au lieu d’une partie, est restée à la surface de l’eau, mais ceci doit être considéré comme un accident. Les germinations étaient donc soumises, dans les expériences précédentes, à des conditions différentes des conditions naturelles et, par suite, moins favorables à un développement normal. Or, un À g/aozonia est essentiellement rampant. On ne le rencontre jamais, dans la nature, autre- ment qu'étendu sur le substratum, et M. Church a lui-même reconnu que, dans ses germinations falkenbergiennes d'oo- 282 C. SAUVAGEAU. sphères parthénogénétiques, le début d’une lame d’A g/aozonia est favorisé par un stimulus de contact. Par conséquent, si un embryon flotlant développe une lame d’Aglaozonia, ce ne sont point les conditions extérieures qui en provoquent la formation ; c’est au contraire l'embryon qui produit cette lame malgré les condilions extérieures défavorables. Si donc les embryons cultivés par M. Church avaient poussé au fond du vase (comme ils auraient sans doute dù le faire), la for- mation de la lame eût été encore plus rapide et plus générale. La production d’un thalle d'A g/aozonia était donc le résul- lat inévitable de la germination des zoospores de la plante anglaise. L'origine de la parlie confervoïide s’interprète aussi faci- lement. Supposons de jeunes germinalions falkenber- giennes flottantes; elles s'allongeront plus que si ellesétaient submergées; elles pourront donner un ou plusieurs filaments confervoides à leur partie supérieure, tandis que la base seule représentera la colonnetle proprement dile. La base des plantules des figures 4, 8, 9, 10 (loc. cit.), n'est point une base de germination thurélienne, devant devenir un Cutleria, car nous verrons plus loin comment s'opère cette transformation; c'est une colonnette falkenbergienne plus ou moins modifiée. En résumé, la forme Church, au lieu d’être normale, parait due à des conditions spéciales de végétation. Par conséquent, quelque vraisemblable que soit l’idée que les zoospores d’Ag/aozonia doivent, par leur germination, ré- générer une forme Thuret, c’est-à-dire un vrai Cutleria, les expériences de Plymouth prouvent, à mon sens, exactement l'inverse, puisque la forme Church n'est qu'une modification de la forme Falkenberg, laquelle est supposée représenter un Aglaozonia. Les expériences de M. Church ont le grand mérite de nous prouver que l’A. paroula rentre d'une facon certaine dans le cycle du développement du C. muläfida, mais elles nous laissent ignorer dans quelle mesure il y prend part. Je ne résume pas ici l'essai dans lequel M. Church cherche LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 283 à démonirer que la végétation et l'origine des thalles de Cutleria et d'Aglaozonia sont fonction de la température, car Je ne trouve pas ses discussions thermométriques très concluantes. D'ailleurs, la distribution géographique des Cutlériacées nous avait appris déjà que le C. mulhifida sexué ne dépasse pas certaines latiludes, tandis que l'A. parvula, au contraire, vivace, s'étend plus au nord. Nous verrons aussi plus loin que les formes Thuret et Falkenberg peuvent se développer simultanément et dans des conditions iden- üques. Enfin, après avoir remarqué que le C. multifida sexué se développe en hiver à Naples, et disparait lorsque la température devient {rop élevée; qu'au contraire 1 se développe à Plymouth en été, et disparait lorsque la tempé- rature s’abaisse, l'auteur conclut que la parthénogenèse du Cutleria de la Manche (Saint-Vaast, Plymouth) pourrait bien être due à l’abaissement de la température qui, dimi- nuant la sexualité des oosphères, amènerait la plante à devenir asexuée, bien qu'elle conserve les caractères mor- phologiques de la sexualité. $S 7. — Mémoire de M. Sauvageau [98,2]. Dans une Note destinée à prendre date, j'ai annoncé que j'avais trouvé dans la nature, en abondance et simultanément, les germinalions (hurétiennes et falkenbergiennes du C. ad- spersa, en épiphyles sur cette plante. Les germinations obtenues par Thuret,bien loin d’être dues à une erreur d'expérience, comme le croyait M. Falkenberg, sont au contraire le début d’un vrai thalle de Cutleria, et j'ai pu suivre toutes les étapes de la transformation. _ Le C. adspersa développe aussi une germination falken- bergienne composée d’une colonnette et d’une lame ram- pante comme celle du €. multifida, ce que les cullures de M. de Janczewski ne laissaient entrevoir qu'imparfaitement. Mais elle possède certains caractères que ne présentent pas les plantules de Naples et de Plymouth. 284 C. SAUVAGEAU. Enfin, les deux sortes de germinalions ne sont pas dues à des différences de lieu, de saison, ni de température, puis- qu'on les rencontre simultanément et côle à côte sur un même substratum. Je n'insiste pas davantage sur ces conclusions que le pré- sent Mémoire à pour objet de développer; je les rappelle simplement pour suivre l'ordre chronologique des faits se rapportant à la sexualité et à l’évolulion des Cutlériacées. $S 8. — Second Mémoire de M. Kuckuck [99]. On connaît l’intéressante série de « Beitrâge » que M. Kuckuck consacre aux Algues d'Helgoland. Dans le plus récent de ceux-ei, paru au milieu d’août dernier, l’auteur rend compte de ses observations sur le C. multifida et l'A. paroula, dont certaines remontent à une date anté- rieure [94]. | Il ya près de vingtans, Wollny a récolté le C. multfida à Helgoland, où il le mentionne comme très rare. Depuis, malgré les recherches de M. Reinke et de M. Kuckuck, on ne l'y a point retrouvé. Mais l’A. parvula, au contraire, esl abondant. La reproduction débute à la fin de mai ou au commencement de juin; en juillet et au commencement d'août, elle est générale; en septembre, elle est complète- ment terminée. Dans une culture entreprise avec des zoospores le 11 juin 1898, la plupart des plantules ne dépas- sèrent pas un élat filamenteux simple, mais certaines prirent la forme Thurel parfaitement caractérisée; plus tard, elles se ramifient, secloisonnentau-dessous dela base des rameaux, prennent ainsi une base massive, et elles ressemblent alors à un Jeune Cutleria normal; cette formation d’un thalle aux dépens d’une plantule confervoïde, que l’auteur n'avait pas vue lors de sa publication de 1894, confirme ce que j'ai dit [98] de l’origine du thalle aux dépens des germinations thuré- tiennes. Une autre culture de zoospores, du 27 juillet suivant, ne donna que des filaments simples. Mais dans des réservoirs LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 285 où 1] avait placé des Aglaozonia avec leur substratum [94}, l'auteur recueillit de vrais C. mulhifida dépassant 1 centi- mètre de longueur, el dont certains étaient couverts d’oogones bien constitués. Ces Cutleria à filaments fasciés ne pouvaient provenir que de la germination des zoospores de l'Aglaozona. Le fait est d'autant plus intéressant que les expériences de M. Church nous le laissaient ignorer ; d’au- tant plus intéressant surtout que le C. mulhfida paraîii n'avoir qu'une existence exceptionnelle à Helgoland, comme nous l’avons dit plus haut. Mais certaines des plantules de la variété confervoides obtenues par M. Kuckuck dans ses réservoirs, ont produit à leur base une lame rampante comme dans les expériences de M. Church (1). La partie confervoïde de ces plantules, sou- vent simple au lieu d’être ramifiée (/oc. cf., fig. 10), peut cependant produire des oogones; si l’auteur n'avait pas obtenu aussi des plantules relativementlongues, filamenteuses et simples (/oc. cit., fig. 8), portant des oogones sans déve- lopper de lame d’A j/aozonia, on pourrailêtre tenté d'admettre que la partie dressée de ces formes churchiennes (/oc. cit., fig. 10) a plus de ressemblance avec une colonnette se cloi- sonnant peu ou point suivant la longueur, qu'avec un Cutle- ria var. confervoides. Mais il faut ajouter aussi que ces plan- tules, simples et filamenteuses (/oc. cit., fig. 8), donnent l'impression de germinations allongées par létiolement, déformées par la cullure. M. Kuckuck n'a pas obtenu de vraies germinations faiken- _bergiennes. Mais, quelle que soit la nature théorique de ses germinalions churchiennes, celles-ci aboutissent à la pro- duction d'un Aglaozonia, et le résultat final est le même. Dans ses réservoirs, il arencontré côte à côte (/oc. ct., PI. VIT, (1) De petites lames rampantes d'Aglaozonia peuvent aussi naître sur les rhizines des plantules; certaines de celles-ci, d’après M. Kuckuck, en portent une demi-douzaine. M. Falkenberg [79, 2] représente aussi sur sa figure 26 une plantule dont un rhizoïde porte deux renflements qu'il désigne ainsi dans l’explication des figures : « Beginnende Flachsprossbil- dung an Wurzelhaaren ». 286 C. SAUVAGEAU. fig. 9) et sur un même substratum les deux sorles de germi- nation (Thuret el Church). Par conséquent, des zoospores d'A glaozonia, de même origine el germant dans les mêmes condilions, peuvent donner un Cutleria ou un Aglaozonta. Ceei vient à l'appui de ce que j'ai dit [98] à propos du C. adspersa qui peut produire simultanément aussi les formes Thuret et Falkenberg. Nous ignorons actuellement la cause de l'orientation du développement des germinations dans un sens ou dans l’autre. Mais on conçoit, il me semble, que la forme gamétophyte ou la forme sporophyle d’un Culleria puisse se perpétuer dans une localité donnée, indépen- damment de l’autre forme. Si les conditions extérieures ne sont pas favorables au développement de l’une ou de l’autre sorle de germination, celle-ci meurt de bonne heure; si exceptionnellement ces mêmes conditions favorables sont réalisées, la plantule continue à croître, et arrive à l’état adulte. C’est ainsi que s’expliquerait la récolte à Helgoland, par Wollny, du C. mulhfida. CHAPITRE Il LES CUTLÉRIACÉES DU GOLFE DE GASCOGNE. . Dans ma Nole préliminaire sur les Algues marines du Golfe de Gascogne 97|, j'ai cité seulement deux Cutlériacées; le C. adspersa, récolté en hiver à Guéthary, et un Ag/aozonia non délerminé. J'ai dit depuis [99,1] que l’on pouvait y rencontrer aussi les deux autres Cutlériacées sexuées d’'Eu- rope : le C. multifida et le Z. collaris. Actuellement, Gué- thary et Tanger (Maroc), sont, les seules localités océaniques où la coexistence de ces trois espèces ait été signalée. $S 4. — Zanardinia collaris. Thuret, comme son herbier en témoigne, a trouvé le Za- nardinia collaris dans le fond du Golfe de Gascogne, mais je LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 287 ne crois pas qu'il ait mentionné dans quelles conditions. Lespinasse [83] le cite à Guéthary, mais cerlainement par erreur. En effet, Lloyd l’a distribué dans ses A/ques de l'Ouest de da France, n° 379, avec la mention : « Rochers, aux plus basses marées, el jeté à la côte à Guélhary (Basses-Pyrénées) où 1l a été recueilli le 8 mars 1860 par M. G. Lespinasse », et son herbier, que j'ai consulté à Angers, en renferme un certain nombre d'exemplaires ayant la même origine et la .même délermination. Mais la plante récoltée par Lespinasse, el distribuée par Lloyd, au lieu d’être le Zanardinia collaris, est le Peyssonnelia squamaria. Entre le Zanardinia el le Peyssonnelia, Fa ressemblance esl grossière, el les différences sont faciles à saisir. La ressem- blance est plus grande entre le Zanardinia jeune et le Cutle- ia adspersa non fructifié, et elle a induit les frères Crouan en erreur. [ls ont distribué ces deux espèces dans leurs Algues ma- rines du Finistère publiées à Brest en 1852. Le n° 75, Zona- ria collaris, estindiqué comme « dragué par 20 mèlres de profondeur, rade de Brest, sur diverses coquilles et pierres ; élé ; irès rare». Le n° 73, Cutleria adspersa, est indiqué comme « dragué par 20 mètres de profondeur, rade deBrest, sur le Pecten maximus, le Pinna ingens et aulres coquilles ; élé; très rare ». La simple comparaison des habitats semble indiquer que les plantes ont été recueillies près l'une de l’autre, peut-être simullanément. Or, je me suis rendu compte que le n° 73 n'est autre que l'élat jeune et cilié du n° 75, vieux, coriace et déchiqueté. Le C. adspersa n'ayant pas, à ma connaissance, été récolté depuis en Bretagne, Je crois pouvoir le supprimer de la liste des Algues bretonnes. _ Les frères Crouan indiquaient en même temps que la plante figurée par Harvey [46] comme Zonaria collaris était un synonyme de leur n° 73. Quinze ans plus tard, dans leur Florule [67, p. 168], 1ls répèlent la même synonymie, que M. Falkenberg |79,1| et Hauck [85] ont admise sur leur au- 288 €. SAUVAGEAU. torité. Mais nous venons de voir que les frères Crouan pre- paient les jeunes Zanardinia pour des C.adspersa. I serait difficile, sinon impossible, par la seule inspection des des- sins de Harvey, de dire si la plante recueillie par Miss Turner sur une plage de Jersey appartient à l’une ou à l’autre espèce. Toutefois, il s’agit très probablement du Zanardinia. En effel, la description de Harvey est une simple traduction de celle de M. J. Agardh, auteur de l'espèce, preuve sans doute qu'elle s’appliquait bien à ses exemplaires ; d’ailleurs, les échantillons figurés furent recueillis en mai,époque à laquelle. le C. adspersa eût élé fructifié. De plus, MM. Holmes et Batters [90] citent le Zanardinia comme ayant été vu par eux au sud de l'Angleterre. On peut donc conclure que ces deux espèces médilerra- néennes passent dans l'Océan et y remontent inégalement. Le Z. collaris s'élève dans le Golfe de Gascogne, sur Îles côtes de Bretagne, dans la Manche, tandis que le C. ad- spersa ne parail pas dépasser l'embouchure de lAdour. Le Z. collaris ne croît pas, à Guélhary, sur les rochers que la marée laisse à découvert, mais le 1° juillet 1898, j'ai trouvé sur la carapace d’une Araignée demer (Waia squinado), parmi un certain nombre d’Algues, une petite plante jaune brun, de quelques millimètres de dimensions, à bords eiliés, et couverte d’oogones et d’anthéridies ; elle ne pouvait êlre rapportée qu'au Zanardinia. Le 8 août suivant, la mer fut très agitée par contre-coup de la tempête qui sévit alors en Brelagne, et les pêcheurs ne purent sortir avant le surlendemain. Ce jour-là, un pêcheur qui avait laissé ces casiers à Langoustes à 50-60 mètres de profondeur, me rapporta tout un paquet d'Algues qui s’y étaient enchevêlrées. C'étaient surtout des Dictyopteris poly- podioides, Bonnemaisonia asparagoides mélangés à des Cysto- seira Montagner el Carpomitra Cabreræ en nombre moindre, et un grand et belexemplaire de Zanardinia, stérile, coriace, cilié sur les bords. Jusque-là, il n’y eut point d’Algues rejetées, mais, dans la LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 289 nuit du 10 au 11, la mer déposa un épais cordon de goémon de Guéthary jusqu’à Bidart. Ces Algues avaient certainement élé arrachées à une faible distance de la côte, car elles ap- partenaient toutes aux espèces que l’on rencontre à basse mer {Codium tomentosum, Cysloseira ericoides et fibrosa, Sac- corhaiza, Dictyopteris, Dictyota, Gelidium sesquipedale, Call- blephar isciiata, Nitophyllum, Bonnemaisonia,….. etc.) mais qui descendent aussi au-dessous de la région qui découvre. À part celles-ci, J'ai trouvé ce jour-là dans le goémon un unique Phyllaria reniformis qui, d’ailleurs, croît au large de Guéthary, et de très nombreux exemplaires de Z. collaris, en fragments d’un brun noir, coriaces, recroquevillés, lisses et stériles ; aucun ne portait de proliféralions superficielles ; cer- tains, plus jeunes, n'avaient pas perdu leur bordure frangée. Le Z. collaris appartient donc incontestablement à la Flore du fond du Golfe de Gascogne, et croît dans la région sub- littorale. Comme nous l'avons dit précédemment, celle espèce, à l’état jeune, est très semblable au C. adspersa non fructifié. Toutefois, celui-ci est souvent plus lacinié, un peu moins coriace et moins luisant, mais ces caractères sont difficiles à apprécier, etde valeur incertaine. Les fragments déchiquetés, d’un brun noir, coriaces, lisses sur la face supérieure, à rhizoïides nombreux d'un jaune rougeûlre sur la face infé- rieure, appartiennent loujours au Zanardinia, car le C. ad- spersa fructifie plus tôt, sur des thalles en voie de croissance, et vit moins longtemps. D'ailleurs, dans une localité déjà explorée et connue, on pourrait sans doute rapporter un individu stérile à l’une ou l’autre espèce, d'après l’époque de la récolte. _ Pour déterminer la plante des frères Crouan, j'ai dû exa- miner la structure des Zanardinia et C. adspersa d’un peu plus près qu'on ne l'avait fait jusqu'ici, et J'en dirai quelques mots, car je ne suis pas complètement d'accord avec M. Reinke [78,2]. L'étude a élé faile sur les exemplaires recueillis à Guéthary en août 1898, et sur des exemplaires ANN. SC. NAT. BOT. x, 49 290 C. SAUVAGEAU. stériles et en parfait élat de végétation que j'ai récoltés à la main, et en place, à Antibes, le 21 mai 1899. Le thalle des Cutlériacées se constitue d’une facon toute parliculière. En examinant la surface d’un thalle en voie d'accroissement, on constate que les rangées radiales de cellules, intimement unies l'une à l'autre, se continuent au bord du thalle, par des fils libres, monosiphoniés, riches en chromatophores, retenus seulement à leur base, et qui donnent à la plante son aspect frangé. Ces fils présentent, immédiatement au-dessus de leur point d'attache, une zone aclive d’accroissement centripète et centrifuge. L’accroisse- ment vers la périphérie répare l’usure du sommet des fils ; celui vers le centre paraît insensible à première vue, parce que les fils se soudent aussitôt l’un à l’autre el continuent les rangées radiales des cellules du thalle. L'accroissement en largeur de la plante se fait par des ramifications des fils. Ceux-ci sont done d'autant plus nombreux que le Zanwr-- dinia est plus large. : Les deux faces sont bien distinctes sur des exemplaires fruclifiés ou seulement âgés : la face supérieure porte les organes reproducteurs ; l’inférieure, d’abondants rhizoïdes. Sur les plantes jeunes, la face supérieure émet des poils assez nombreux, dispersés, isolés ou en touffes de 2-4, longtemps persistants ; ils sont moins fréquents sur la face inférieure où ils apparaissent bien avant les rhizoïdes, mais tombent d’assez bonne heure. J'ai examiné si la différen- ciation dorsiventrale élait sensible dans les parties jeunes, afin d’y chercher un caractère distinctif avec le C. «ad- spersa. La face supérieure du thalle, unie à une très petile dis- tance de la marge, est au contraire ridée au bord même, car les différents fils, avant de se souder et au moment où ils se soudent, ne sont pas sur un même plan. On voit, sur la figure 1, À, que certains fils font saillie au-dessus des autres. Mais un peu plus bas que la ligne de soudure, les cellules en retrail arrivent à se mettre au niveau des autres. Au fur et LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 291 à mesure que l’on s'éloigne de la marge, les lignes radiales de soudure deviennent moins nettes, ce? qui lient en grande partie aux cloisonnements longitudinaux et transversaux qui ont lieu dans chaque cellule. Dans une partie adulte (fig. 1, B), on suit encore fort bien:la disposition radiale, mais sans distinguer ce qui primilivement appartenait à un fil ou à l’autre. Les cellules de la figure 1, B, ne présentent L {fi LI | ii | JT fl Uk qu Re ere HE BE) un [// / Fa ff/[/, flot} . [1] su " || ESS y WT ER 17} Le 1° LH : : SE ie = se MEË) CE £ [| D I] 5 ee ES au E\| " où ee E à à Fig. 1. — Zanardinia collarisi(Antibes, mai 1899). — A, bord du thalle vu sur la face supérieure ; B, le mème vu à 1 centimètre plus loin. (Gr. 200.) d’ailleurs rien de particulier; je les ai représentées seulement pour comparaison avec celles de la face inférieure. Sur la face inférieure, la marge est identique à la précé- dente, mais à une pelite distance du bord, le long de certaines _ lignes de soudure, on aperçoit de petites cellules en forme de boutonnière, qui sont souvent légèrement en retrait sur leurs voisines (fig. 2, A). Ces cellules participent à l’accrois- sement général du thalle, comme on le voit sur la figure 2, P, prise un peu au-dessous de À. Enfin, sur la figure 2, C, prise à plus d’un centimètre de la marge, ces cellules, après cloisonnement, forment de véritables petiles plages, qui ne paraissent pas Jouer un rôle particulier dans la formation des rhizoïdes. Elles donnent à la face inférieure du Zanar- dinia un aspect caractéristique qu'on n’observe pas dans le DO C. SAUVAGEAU. C. adspersa. Mais, pour les voir nettement, il est bon de détruire partiellement le protoplasma, puis de colorer la membrane ; ces plages moins colorées ressortent vivement. D'ailleurs, à un faible grossissement, leur présence, par le dérangement qu’elles occasionnent dans la disposition radiale des cellules épidermiques, est bien plus frappante à l'œil qu'avec le grossissement employé pour la figure 2, €, sur laquelle j'ai dû indiquer le contour de ces plages par un trait plus fort, ce qui ne répond pas à la réalité. Les dimensions des cellules sur les dessins À, PB, C, faits au même grossissement, montrent que l'accroissement en surface du thalle se fait non seulement par les fils de la frange, mais aussi, après les cloisonnements postérieurs à la soudure, par l HEUERRON des dimensions de chacune des celiules unes Deux épaisseurs de fils concourent à la formation du thalle (fig. 3). On en voit parfois une troisième, médiane, mais seulement tout à fait au bord, qui s'enfonce en coin entre les deux autres ; elle est due à une ramification d’un fil qui ne s'est pas inséré immédiatement à sa place, ou à ce que, le fil inférieur et le fil supérieur n'étant pas exactement superposés, un fil voisin à été coupé ofliquement. Dès le début, on distingue la face inférieure de la face supé- rieure. Le fil inférieur ou ventral donne seulement deux assises : une assise épidermique et une assise sous- épidermique, mais plusieurs fois Jai vu trois assises. Le fil supérieur ou dorsal se divise comme le précédent en deux couches : la supérieure donne lépiderme qui plus loin se cloisonne perpendiculairement à cette première direction pour maintenir la faible hauteur de ses cellules ; linférieure, par d’autres cloisonnements parallèles au premier, augmentera le nombre des couches et constituera la majeure partie du parenchyme médian; ses cellules s'allongent comme les cellules épidermiques, mais sans se cloisonner comme elles, ou en prenant quelques cloisons cà et là. La ligne de soudure entre les deux fils reste quelque LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 293 temps distincte, à cause de sa plus grande épaisseur, mais, plus loin du bord, cette différence disparaît. Souvent, les u Ci ile Q | “ie ROLE 5 AUTRES HART C) . re seu en TS UT ne ë ET DE ce doe Ne Denon LT Scans pren Te - JAN > “ace Ë 5e | FE) Fig. ?. — Zanardinia collaris (Antibes, mai 1899). — A, bord du thalle vu snr la face inférieure ; B, le même pris un peu au-dessous de A ; C, le même thalle à 1 centimètre du bord. Les cellules, en boutonnière, sont simples en À, divisées - en B, forment de petites plages en C. Pour simplifier, on n’a figuré ni les poils ni les rhizoïdes. (Gr. 200.) : {ils qui constituent le thalle par leur soudure ne sont pas orientés exactement suivant le rayon, et l’on doit faire un assez grand nombre de coupes avant d'en trouver qui montrent neltement la Ë formation du thalle. D'après 294 C. SAUVAGEAU. M. Reinke [78, 2, p. 72}, le thalle se formerait par trois couches de fils, parfois quatre, dont le mode de division cellulaire se laisse suivre aussi facilement que celui de la surface. La figure 11 (/oc. cit., PL. 2 (IX)), qu'il en donne, ressemble singulièrement à la figure 10 (/oc. at.) qui repré- sente le bord du thalle vu de dessus ; elle laissé l'impression d’une coupe longitudinale radiale comprenant exactement trois largeurs de fils, et qui présenterait son épaisseur à l'observateur au lieu de se présenter de face. Il doit y avoir là une erreur de l’auteur, d’après lequel le €. adspersa se formerait de la même façon et aussi par trois épaisseurs de cellules. D'ailleurs, les coupes transversales confirment les coupes longitudinales. La section de la figure 4, À, a été menée tout à fait au bord: à droite, les fils sont soudés et se cloisonnent ; à gauche, ils sont encore libres. Les fils sont sur deux couches, opposées ou plus souvent alternes. À ce moment, les parois voisines sont nécessairement susceptibles d'une adhérence qui se fait par une modification pectique de la paroi, un gonflement, qui remplit ensuite les vides comme une sorte de ciment amorphe. Les fils conservent, en se réunissant, leur $ection arrondie et leur diamètre inégal, el les intervalles à combler sont inégaux. Parfois, ils laissent entre eux un espace plus large que de coutume; le remplis- sage par le gonflement des parois est alors incomplet et l’un des fils contigus pousse une petite branche dans l’espace vide. Comme on le voit sur la figure 4, À, le premier cloi- sonnement des cellules soudées, souvent parallèle à la surface, où plus ou moins oblique, lui est parfois perpen- diculaire. Quoi qu'il en soit, les cloisonnements parallèles à la surface deviennent bientôt généraux, mais, comme le montre la figure 4, PB, ils sont dès le début plus fréquents dans les cellules de Ia face supérieure que dans celles de la face inférieure. La différenciation dorsiventrale est done originelle. On remarque sur le même dessin que presque tous les fils se sont partagés perpendiculairement à la surface, LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 295 comme l’indiquaient déjà les figures 1, À, et 2, A. Les cellules incluses entre les deux couches se divisent aussi, mais dans une direction quelconque. Puis, la surface du thalle se régu- larise (fig. 4, €) par accroissement des cellules formées ; on remarque sur la figure 4, C, que le ciment pectique inter- calaire diminue d'épaisseur, mais cependant on distingue encore très bien ce qui appartient à l’une et à l’autre couche. À ce même stade, on observe déjà très nettement l’accumu- lation des chromatophores dans les rangées superficielles de cellules; les autres cellules en sont beaucoup plus pauvres; Fig. 3. — Zanardinia collaris (Antibes, mai 1899). — Coupe longitudinale radiale < menée au bord d’un thalle jeune. (Gr. 200.) celte différence se maintiendra ullérieurement. La distinc- tion des deux couches est un peu moins nette en D (fig. 4); elle devient impossible sur la coupe Æ, prise un peu plus loin de la marge, où les cellules médianes ne se recon- naissent plus. Ceci tient aux cloisonnements qui se sont continués, el surtout à ce que le ciment pectique n'existe plus que dans les angles d'union des cellules. Ce ciment, qui primitivement servait à souder les fils entre eux, est ensuite utilisé comme matière de réserve ; la plante le dépense pendant le cloisonnement, el toutes les parois sont égale- ment minces; à droite de la figure 4, Æ, on voit deux méats intercellulaires. La coupe À" à élé menée à queiques millimèlres de la marge, là où apparaissent les poils. Les cellules du paren- chyme moyen, un peu épaissies aux angles, ont légèrement augmenté de nombre, et considérablement accru leurs di- mensions ; l’épiderme inférieur et supérieur est simple, sauf en certains points où il est double. Un poil est un prolonge- 296 C. SAUVAGEAU. ment d’une cellule épidermique généralement un peu plus large qu'elle. La coupe & a été prise à la base d’un individu adulte. Les parois des cellules du parenchyme sont notablement plus épaisses. L'épiderme supérieur a multiplié ses assises et s’est recouvert d'une épaisse cuticule ; la cellule qui a produit un poil ne s’est pas cloisonnée, mais, entraînée par ses voisines, elle s’est allongée, en même temps que sa paroi s’est décol- lée; la portion externe du poil paraît encore plus large par rapport à la base immergée. L’épiderme inférieur a produit de nombreux rhizoïdes formant un feutrage dense, mais toutes les cellules ne sont pas pilifères ; les rhizoïdes sont longs, simples et articulés ; ils renferment une matière lan- nique qui leur donne leur teinte brun roux. La plupart des cellules du parenchyme renferment aussi du lannin, mais celui-ci est surtout abondant dans l’épiderme inférieur. Sa présence débute d’ailleurs dans les fils marginaux. On comparera plus loin cetle structure avec celle du €. adspersa. $S 2. — Cutleria multifida. Des trois Cutlériacées sexuées, le C. multifida est celle qui présente la distribution géographique la plus étendue. On la signalé dans toute la Méditerranée, au Maroc (Schousboe), en Portugal (De Toni, Sy/loge), à Brest, sur les deux rives de la Manche, à Helgoland (Wollny), en Norvège (Gran). Le Golfe de Gascogne formait une solution de continuité dans sa répartition. Le 14 août 1898, j'ai trouvé sur une Araignée de mer cap- turée à Guéthary dans un casier à Langoustes, parmi des Diclyola dichotoma var. implexra et des fragments de Cysto- sera fibrosa, un fragment de C. multifida de 3 centimètres de long et de { centimètre de large, couvert d’'oogones ; il était vieux et en mauvais état, comme la saison le permettait. LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 297 Fig. 4. — Zanardinia collaris (Anlibes, mai 1899). — A, coupe transversale menée tout à fait au bord de la marge ; à gauche, les fils ne sont pas encore soudés l’un à l’autre; le thalle est formé par deux épaisseurs de fils, sauf en trois points de la coupe, où l’on voit des fils intercalaires; B, G, D, E, coupes trans- versales menées de plus en plus loin du bord; F, coupe transversale à quel- ques millimètres du bord ; G, coupe transversale à la base d’un individu adulte. (Gr. 200.) 2958 C. SAUVAGEAU. Cette espèce, de même que le Zanardinia, appartient donc à la zone sublittorale du Golfe de Gascogne. S 3. — CGutleria adspersa. J'ai indiqué récemment [97] le C. adspersa comme abon- dant en hiver à Guéthary où je l'ai récolté en février et mars 1894; il existe aussi à Biarritz, mais en bien moindre quantité. J’ai dit précédemment qu’il ne semblait pas remonter plus au nord. Il apparaîl probablement en décembre ou en janvier, car le 9 mars 1898 :1l était déjà abondant et pourvu d'organes reproducteurs. Il atteint son maximum en mai, et disparaît en Juin. Les exemplaires jeunes et adultes sont très pro- pres ; les exemplaires âgés sont couverts de végétations épiphytes (£elocarpus, Ceramium, Myriotrichia,.… ete.) qui le rendent méconnaissable. Le 5 juin, je n’en ai plus trouvé qu'un pelit nombre, les uns jeunes, en voie de croissance, les autres très âgés, que le moindre effort détachait de la roche ; puis la plante disparaît complètement, probablement sous l'influence de l'élévation de la température. | D'après M. Falkenberg, le C. adspersa croît à Naples à 20-40 mètres de profondeur ; M. Rodriguez ne l’a vu qu'une seule fois à Minorque, mais près de la surface de l’eau; à Antibes, il n’est pas rare, et également près de la surface.  Guétharvy, il est accessible aux moyennes marées, où on le trouve dans des flaques ou des ruisseaux renfermant juste assez d'eau pour Île recouvrir, quand il n’émerge pas par- tellement. Il croît en compagnie des Padina, Seytosiphon,… etc. Avec un peu d'habitude, on distingue au premier coup d’œil le sexe de la plante, à la couleur des sores. Tandis que M. de Janczewski trouve à Antibes les individus de chaque sexe en nombre égal, les individus mâles sont deux à quatre fois plus abondants à Guéthary que les femelles. L'accroissement marginal se fait comme dans le Zanar- dinia, mais il est plus irrégulier, la marge est plus ridée ; LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 299 les fils se soudent à une distance plus grande et moins régu- lière de leur zone de cloisonnement, souvent après avoir subi leurs premiers cloisonnements longitudinaux. En suivant ces fils avec soin, on constate une bizarrerie que je n'ai pas vue chez le Zanardinii, mais qui pourrait s’y rencontrer. D'une manière très générale, les cellules des fils situées au- dessus de la zone d’accroissement s’allongent sans subir aucun cloisonnement longitudinal. Cependant, çà et là, on Fig. 5. — Culleria adspersa (Guéthary, mars 1894). — A, fils isolés, choisis dans la frange d’un individu adulte; ils montrent un cloisonnement longitudinal aboutissant à la formation d’un méat, puis à la bifurcation du sommet du fil; B, surface, prise à 1 centimètre de la frange. (Gr. 200.) trouve un cloisonnement en croix, où même donnant deux rangées de cellules au lieu d’une (fig. 5, À). C’est à ces cloi- sonnements que j'ai fait allusion |99, 2! lorsque j'ai comparé ces fils du Cutleria aux filaments du T#/opteris. Mais ils ne restent pas longtemps en cet état ; au fur et à mesure que l'allongement des cellules sous-jacentes les éloigne du mé- ristème basilaire, un décollement se produit le long de la cloison longitudinale, qui devient un méat quadrangulaire ou une fente en forme de boutonnière, suivant le nombre des cellules (fig. 5, A). On dirait une coupe optique dans les cellules mères d’une anthéridie de Tilopteris. En se rappro- chant de plus en plus du sommet du fil, la boutonnière élargit aussi ses cellules; puis elle devient terminale à son 300 C. SAUVAGEAU. tour, s'ouvre alors en V, et le sommet du fil est bifurqué. La figure 5, B, est une portion de la surface vue à 1 cen- timètre de la marge; elle n’a d'autre intérêt que de montrer la moindre largeur des cellules par rapport au Zanardinia. À l'inverse du Zanardinia, les deux faces inférieure et supé- rieure sont semblables. | La figure 6, À, représente une coupe transversale menée au bord d’un thalle régulièrement formé par deux rangées de fils. Dans la figure 6, B, prise au-dessous, la cloison pa- rallèle à la surface s’est bombée en verre de montre ; la cel- lulé interne est peu colorée ; la cellule superficielle, riche en chromatophores, se divise, par deux cloisonnements suc- cessifs perpendiculaires à la surface, en quatre cellules qui, vues de dessus, paraissent quatre rangées de cellules. Par opposition à ce que nous avons vu dans le Zanardinia, les cloisonnements ont la même importance dans les deux cou- ches constitutives. La disposition des fils est beaucoup moins régulière sur la figure 6, C. Sur les figures D, FE, prises à la suite de C, les cloisonnements inférieur et supérieur sontencore les mêmes. En F, un peu plus éloigné de F, les réserves pectiques ont presque disparu, et l’on ne distingue plus les fils constituants. Sur la coupe G, menée à la base d’un thalie, les deux épi- dermes sont assez semblables l’un à l’autre, et l’épiderme su- périeur ne peut être confondu avec celui du Zanardina. Les cellules du parenchyme sont plus arrondies vers la face inférieure, plus allongées vers la face supérieure ; cette dif- férence de forme et de dimensions relatives est d’ailleurs d'importance variable suivant les exemplaires, comme aussi chez le Zanardinia. Le tannin, répandu un peu partout, est moins abondant que dans cette dernière plante. Les caractères de l’épiderme inférieur vu de face, de l’épi- derme supérieur vu en coupe, sont suffisants pour distinguer le Zanardinia du C. adspersa. LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 901 Fig, 6. — Cutleria adspersa (Guéthary; A, B, en mars 1894; C à G, en mai (898). — À, coupe transversale menée tout à fait au bord du thalle ; B, coupe menée un peu au-dessous de À ; C à F, coupes prises sur un autre individu, ef menées de plus en plus loin de la marge; G, coupe menée à la base du mème individu. (Gr. 200.) : €. SAUVAGEAU. (ae, > 19 S 4. — Aglaozonia melanoidea. L’ A. melanoidea est abondant à Guéthary au niveau du C. adspersa. H forme sur les pierres etles Lithothamnion des revêtements noirs ou brun noir irréguliers, à contours arrondis limités par un liséré Jaune plus ou moins foncé. Ilest si fermement adhérent au substratum sur lequel 1l se moule qu'on le détache seulement par fragments. Sa taille est variable; les plus développés sont grands comme la main. Sur les pierres planes, il est arrondi à bords festonnés; les lestons qui semblent simples à première vue se décomposent généralement eux-mêmes en festons plus pelits chevauchant l’un sur l’autre. L'aspect est tout à fait celui d'un ARa/fsia de grande taille, el si je ne l'ai pas cité dans ma Note sur les Algues du Golfe de Gascogne [97], c’est que je l'avais pris, sans autre examen, pour un Aalfsia (1). Des toulfes de longs poils, bien visibles, croissent sur la face supérieure. Nous verrons plus loin qu'ils sont endogènes, mais endogènes à la manière des poils de Piclyota qui nais- sent ensemble sous la cuticule, comme Thuret [55; 78] Pa décrit et représenté, et non individuellement endogènes par le procédé que j'ai décrit [98,1) chez les Myrionema. J'ai suivi celte plante de mars jusqu’à octobre ; elle semble vivace comme les aulres Aglaozonia, mais je n'ai point rencontré de sporanges ; ceux-ci se forment sans doute en hiver. Le mode d’accroissement est celui des Ag/aozonia. Le cloisonnement esl très actif dans la région marginale, et le thalle y prend de suite une épaisseur importante, comparée aux deux autres espèces du genre. La cellule séparée tan- sgentiellement de la cellule imiliale se segmente en trois cellules superposées ; la cellule supérieure se divise de suite (1) Dans ce Mémoire (p. 12), j'ai cité un Aglaozonia non déterminé, sur les rochers du Casino de Biarritz. J'en avais récolté en 1894 un fragment que j'ai égaré depuis, mais, d’après mes souvenirs, il appartenait à cette même espèce. Je l'ai cherché en 1898, au même endroit, sans le rencontrer. LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 303 # Fig, 7. — Aglaozonia melanoidea (Guéthary, juin 1898). — À, coupe transversale menée très près du bord du thalle; B, coupe menée un peu au-dessous de A; C, coupe transversale menée à moins de 1 millimètre du bord; on voit les poils endogènes; D, coupe menée à 7-8 millimètres du bord; E, portion de la coupe D considérée en un point où le feston, au lieu de ramper sur un Liého- thamnion, recouvrait un autre feston ; F, coupe dans une partie plus âgée. En D, E, F, on reconnait facilement les cloisons secondaires. (Gr. 200.) 904 C. SAUVAGEAU. parallèlement à la surface et parallèlement au bord pour donner deux ou trois élages de petites cellules ; la cellule moyenne donne de grandes cellules superposées, et la cellule inférieure se divisera seulement un peu plus tardivement. La figure 7, À, représente une coupe tangentielle passant très près du bord, et déjà les couches de cellules sont plus nom- breuses que dans la région adulle d’une autre espèce d'A glaozonia. Très peu après ce stade (fig. 7, B), les parois minces et non rigides des cellules s’épaississent très légère- ment aux angles. Cet épaississement ira en s’accroissant et un méat se forme parfois au point d'union de parois en croix. La couche inférieure de cellules s’est dédoublée, et l’assise en contact avec le substralum s’est eloisonnée radialement ; souvent son cloisonnementen reste là ; parfois il se continue ; les cellules superficielles ne se modifient pas, ou émettent un rhizoïde dont la forme et la longueur varient et, dans certains cas, les rhizoïdes produisent plus tard un mince feutrage. À 1 millimètre du bord, environ, on voit déjà les rudi- ments des poils (fig. 7, €). [ls naissent en petites touffes et paraissent débuter par un décollement latéral des rangées de cellules étroites superficielles, et aussi par un décolle- ment de [a culicule qu'ils déchirent ensuite en s’allongeant. Ils sont longs, incolores, à accroissement basilaire, et per- sistent longtemps; ils donnent parfois asile, entre leurs bases, à de minuscules parasites. Sur un thalle examiné de dessus, ils paraissent insérés dans une concavité. Ce mode de for- mation des poils, qui rappelle celui des Dictyota, n'avait pas encore été signalé chez les Ay/aozonia. Je n'ai pas eu à ma disposition de matériaux assez favorables pour vérifier avec certitude leur premier élat chez l’A. paroula et VA. chalosa, mais l'aspect est tellement semblable, sur les coupes et sur les thalles vus de dessus, que Je considère ce mode d’origine des poils comme constant chez les A ylaozonia. Il a une certaine imporlance au point de vue des affinités de ces plantes. Puis, l'épaisseur des parois cellulaires s’accroît légèrement, LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 305 et les cellules s'arrondissent (fig. 7, /). A plusieurs milli- mètres du bord, un cloisonnement secondaire apparaît dans le parenchyme ; les parois nouvelles restent plus minces que les anciennes; elles sont orientées dans des directions variées et sont en nombre également variable. La figure 7, F, représente une coupe transversale dans une partie âgée; le thalle a acquis son épaisseur maximum el de nombreux eloi- sonnements secondaires divisent les cellules, surtout celles du parenchyme inférieur. La couleur noire ou brun noir du thalle del’A.melanoidea est due à la présence générale et abondante du tannin, sauf dans les petites cellules de la face supérieure et dans ur certain nombre de cellules inférieures. La moindre abon- dance de cettesubstance, dans les cellules très Jeunes, pro- duit un liséré jaunâtre sur le pourtour des festons de la plante. Les petits festons marginaux sont parfois exactement °« juxtaposés latéralement, mais d’autres fois ils empiètent l’un sur l’autre, se recouvrent plus ou moins. Dans ce dernier cas, les deux surfaces en contact deviennent adhérentes, ou plus généralement se modifient en allongeant leurs cellules qui se divisent par de nombreuses cloisons parallèles à la surface. La figure 7, Æ, qui appartient à la même coupe transversale que 2, en est un bon exemple. Lei, c'est la face inférieure qui s’est modifiée. Il est remarquable que le chevauchement l’un sur l’autre de deux festons d’un même individu d’A. melanoidea produise ce résultat, car les festons qui rampent sur tout autre substratum organisé présentent simplement un plus ou moins grand développement des rhizoïdes. : Deux festons exactement au contact l'un de l’autre sans se recouvrir, se poussent mutuellement, puis se soudent. Plus tard, un léger sillon indique la ligne de soudure, car les cellules de la face supérieure de la plante s’allongent beaucoup et comblent partiellement ce sillon (fig. 8); les bords inférieurs se recourbent vers le bas; des corps ANN. SC. NAT. BOT. 20 306 C. SAUVAGEAU. étrangers sont parfois pris entre les bords des deux festons en contact. Le cloisonnement secondaire, qui se produit d'assez bonne heure dans les cellules de l’Ag/aozonia, paraît encore plus abondant sur les coupes longitudinales, car un grand nombre de ces cloisons passent précisément par le plan lransversai. Les cellules de la région moyenne, allongées suivant le rayon, sont ainsi fréquemment partagées en 3-4 compartiments per- pendiculaires à leur longueur. J'ai recherché l’A. #relanoidea parmi les Algues saxicoles non encore étudiées que j'ai récoltées sur la côte nord de l'Espagne |97}, el je l'ai trouvé sur des Zihothamnion de San Vicente de la Barquera (septembre 1895 et 1896), Gijon (septembre 1895), Rivadeo (Villasellan, octobre 1895). I vit sans doute sur toute cette côle. Sa présence nous indique que le C. adspersa doil y exister aussi, mais je ne l'ai pas rencontré, à cause de l’époque de l’année à laquelle j'ai fait mes excursions. À ma connaissance, l'A glaozonia précédent n'a pas encore été décrit par les auteurs. La grande ressemblance qui existe entre un Zonaria et un Aglaozonia stériles pourrait justifier l’objection que la plante du Golfe de Gascogne est peut-être un Zonaria. Mais M. Bornet à bien voulu m'autoriser à rechercher dans l’Herbier Thuret si je ne trouverais pas de plantes se rapportant à la mienne. Or, le Zonaria melanoi- dea Schousboe récolté par Schousboe à Tanger en mars 1827 [Voy. Bornet, 92] lui correspond parfaitement. Il présente de même plusieurs assises de peliles cellules à la face supérieure et semblablement disposées, les mêmes cloisonnements secondaires abondants dans des cellules de mêmes dimen- sions, les mêmes soudures latérales entre festons contigus. Toutefois, les rhizoïdes, plus abondants, consliluent en cerlains points un feutrage aussi épais que la plante elle- même; de plus, les parois des 2-3 assises de cellules, situées au-dessous des petiles cellules de la face supérieure, sont notablement plus épaisses ; ces différences sont assurément LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 307 sans importance. Mais la plante récoltée par Schousboe est ferlile. Elle porte sur la face supérieure des sores très denses dont les sporanges ont la même disposition et la même forme que dans le Zanardinia et l'A. paroula |Noy. Zanardim, 65 ; Reinke, 78,2; Kuckuck, 99] ; les uns étaient pleins, les autres vidés, mais je ne puis dire combien chacun devait contenir de zoospores. La plante du Golfe de Gascogne est donc bien un A 7/aozo- Fig. 8. — Aglaozonia melanoidea (Guéthary, juin 1898). — Coupe transversale menée au point de soudure de deux festons. (Gr. 200.) nia, et je lui conserve le nom spécifique très heureusement choisi par Schousboe. L'A. melanoidea ne peut être confondu avec l’A. parvula. Celui-ci, beaucoup moins adhérent au substralum, plus mince, plus irrégulier dans sa forme, est toujours de plus petiles dimensions, 1-2 centimètres [Voy. Zanardini, 65, PI, LXVI!. Sa structure est aussi plus simple. La figure 9, À, représente une coupe lransversale dans un individu récolté par Thuret à Cherbourg le 28 janvier 1854, et la figure 9, P, une coupe dans un aulre individu, récolté aussi par Thuret 308 C. SAUVAGEAU. à Cherbourg (île Pelée), le 16 septembre 1856. La seconde plante est plus épaisse que la première; elle montre quel- ques cloisonnements secondaires. La plante nommée par Schousboe Placomamembranacea|Voy.Bornet, 92|appartient à l'A. paroula ; l'individu que j'ai étudié, récolté à Tanger en février 1828, a la structure indiquée sur la figure 9, B, mais l’épiderme inférieur n’est pas uniformément dédoublé. Sur des individus récollés à Helgoland, que je dois à l’obligeance _de M. Kuckuck, j'ai constaté que les cloisonnements secon- daires n'étaient pas rares dans les assises rapprochées de l’épiderme supérieur, mais qu'ils apparaissent surtout après la déhiscence des sporanges. | Enfin, M. Kjellman a bien voulu me communiquer trois séries d'exemplaires scandinaves stériles de l'A. parvula. Une, récollée en août 1896 (par M. Svedelius, in Bohuslän, Gullmarsfjorden), et une autre récollée par M. Kjellman en décembre 1874 (in mari Bahusiensi) correspondent à la figure 9, À. Sur le premier, j'ai vu, en certains points, près du bord des festons, une mulliplication des cellules super- ficielles (fig. 9, C), moins accenluée que dans l'A. mela- noïdea, mais indiquant probablement que FA. paroula, comme cette dernière espèce, modifie ses cellules au contact d'un autre individu. La troisième est le Padinella parvula d'Areschoug récolté (en août, in mari Bahusiensi) et déter- miné par lui-même ; sa structure correspond à la figure 9, P, mais l’épiderme inférieur est simple au lieu d'être dé- doublé (1). (1) En 1843, Areschoug a décrit (assez imparfaitement) des sporanges sur cette plante, et il a changé le nom de Zonaria parvula, donné par Greville en celui de Padinella parvula. M. Reinke (Voy. précéd., p. 269) croit que son Zonaria parvula est identique à la plante de Greville et d’Areschoug. Or, les exemplaires de Padinella distribués par Areschoug, in Algæ Scandinavicæ exsiccalæ, conservés dans l'Herbier Thuret, sont stériles; ceux que possède M. Kjellman sont dans le même état, et il a bien voulu m'’informer qu'il sSupposait que les exemplaires de l'Herbier d’Areschoug, conservé à Stock- holm, sont également stériles. Dans ces conditions, il est difficile de savoir Si les organes reproducteurs de la plante d’Areschoug correspondent à ceux de la plante de M. Reinke. Toutefois, M. Reinke [78, 1, PI. VI] décrit son Lonaria parvula comme possédant trois couches de cellules, tandis que j'en . LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 309 L’A. chilosa es encore plus différent, car, d’après M. Falkenberg |79,1|, il se présente en bandelettes simples ou fourchues, ayant souvent 6-7 centimètres de longueur et 3/4 de centimètre de largeur. Je n’ai pas vu d'échantillons Rs Fig. 9. — Aglaozonia parvula. — Coupes transversales dans une partie adulte. À, récolté à Cherbourg par Thuret, le 28 janvier 1854; B, récolté à Cherbourg (île Pelée), par Thuret, le 16 septembre 1856; C, récolté en août 1896, par M.Sve- delius {Gullmarsfjorden, Suède); cette coupe est menée dans une partie jeune et n’est pas exactement perpendiculaire aux files radiales des cellules, comme le montre la forme allongée des cellules de droite ; dans une partie adulte, la coupe serait identique à A. (Gr. 200.) de Naples, mais j'ai eu entre les mains des exemplaires récoltés par Giraudy, à Marseille (Herb. Thuret) et d’autres récoltés à Minorque, dont je suis redevable à l'obligeance de M. Rodriguez [88]. Les uns et les autres s’adaplent parfaite- ai vu 6-7 dans la plante d’Areschoug communiquée par M. Kjellman. La plante suédoise paraît donc bien être l’Aglaozonia parvula. 310 C. SAUVAGEAU. ment à la description de M. Falkenberg. La structure cor- respond à celle représentée sur la figure 9, À. Je ne crois pas que l’on connaisse les sporanges de cette espèce. Je n’ai rencontré à Guéthary où, il est vrai, je n’ai pas fail de dragages, n1 l’A. parvula, ni l'A. chlosa. Comme on sait, M. Falkenberg suppose que ce dernier est le sporophyte du C. adspersa. La raison qu'il en donne est la suivante : l'A. parvula paraît être le sporophyte du C.mul- lifida et les deux plantes vivent à Naples au même niveau, à quelques mètres au-dessous de la surface de l’eau, Or, l'A. chilosa et le C. adspersa X vivant l’un et l’autre toujours à une plus grande profondeur, à 20-40 mètres, el comme on ne connaît point à Naples d’autre Ag/aozonia ni d'autre Cuileria, et que d'autre part le sporophyte du Zanardinia est identique à son gamétophyte, il paraît probable que les mêmes relations existent entre eux qu'entre l'A. parvula et le C. mulhifida. | Mais on pourrait objecter que M. Rodriguez, qui explore avec succès les alentours de Minorque, a trouvé [88 et èn tt. le C. adspersa une seule fois, et près de la surface de l’eau, landis que, dans ses dragages, 1l ramène souvent PA. chilosa d’une profondeur de 70 à 110 mètres, toujours appliqué sur d’autres Algues, jamais sur des pierres. Aussi, M. Rodriguez, frappé par ce fait, doute-t-il de l'exactitude de la détermi- nation de son À. chilosa. Je crois, au contraire, que celte déterminalion est bonne, et que la supposition de M. Fat kenberg n'est pas justifiée. | Le C. adspersa et VA. melanoidea vivant côte à côte à Guéthary, sur une grande étendue, facile à explorer à basse mer, tandis que PA. chilosa y est absent, il semble, en effet, que ces deux plantes sont les formes sexuée et asexuée d’une même espèce. D'ailleurs, nous connaissons mainte- nant deux gamétophytes et trois sporophytes de Cutleria; il y à donc forcément l’un de ces derniers dont nous ignorons l'emploi. Et comme toutes les expériences sur le développe- ment des Cutlériacées sont encore incomplètes, nous en LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 911 sommes réduits, pour désigner le sporophyte supplémen- taire, à rechercher l'hypothèse la plus vraisemblable. D'abord, le fait qu'un Aglaozonia puisse se maintenir el se propager par lui-même, ne doit pas nous élonner, puis- que l'A. parvula agit de la sorte à Berwick, |Batters, 89) et en Norvège [Kjellman, 83|, et qu'à Helgoland il ne semble produire de €. multifida qu'exceptionnellement. L’A ÿ/aozo- na supplémentaire donnerail une plante sexuée aussi rare- meut que l'A. parvula à Helgoland, qu'elle aurait fort bien pu passer Inaperçue jusqu’à présent. Si VA. chilosa était le sporophyte du C. adspersa, il fau- drait admeltre qu'à Guéthary et au Maroc l'A. melanoidea se perpétue uniquement par zoospores, le C. adspersa uni- quement par oosphères parthénogénétiques ou fécondées. Les deux plantes vivant ensemble à Guétharvy, il semble plus logique d'admettre leur dépendance mutuelle. [est vrai que si l’on admet que l’A. melanoidea est le sporophvte du C. adspersa, la même supposition doit être faile pour Naples: Je ne vois aucune difficulté à considérer le €. adspersa de Naples comme se reproduisant indéfiniment par lui-même, mais jusqu'à plus ample informé il paraît plus prudent de supposer que l’A. melanoidea a été méconnu dans cette localité. En outre, j'ai trouvé sur le C. adspersa, à Guélharvy, de jeunes germinalions falkenbergiennes prouvant l'existence d’une forme aglaozonienne de cette espèce, et ces germina- lions, dont je vais parler dans le chapitre suivant, paraissent, autant qu'on peut en juger, correspondre par leur structure à l'A. melanoidea. En résumé, l’A. melanoidea est la forme asexuée du €. ad- spersa, et si l'A. chilosa n’est pas une variété de l'A. par- vula, mais bien une espèce distincte, ce qui paraît certain, c'est qu'il est la forme asexuée d’un Cutleria encore inconnu, ou disparu, à moins qu'il n'entre dans le cycle de végéta- tion du Zanardinia, où, peut-être plus probablement, qu'il appartienne à l’un des Cutleria des mers chaudes, C. com- 312 C. SAUVAGEAU. pressa, C. pacifica. Dans ce dernier cas, il vivrait dans la Méditerranée sans son gamétophyte, comme l'A. parvula dans le nord de l'Europe. CHAPITRE IH LES GERMINATIONS QUI CROISSENT DANS LA NATURE, A GUÉTHARY, SUR LE (( CUTLERIA ADSPERSA ), C’est seulement le 20 avril que j'ai commencé à chercher des germinations de C. adspersa sur les thalles mêmes de cette plante; j'en ai lrouvé de nombreuses, et à tous les états du développement, jusqu’à la fin de sa végétation. Depuis, j'ai inutilement exploré à ce point de vue plusieurs exemplaires, conservés dans l'alcool, que j'avais récoltés dans la même localité à la fin de mars 1894. On rencontre les plantules épiphytes sur l’une ou l'autre face des individus mâles ou femelles, sur les sores, ou sur les espaces stériles. Elles appartiennent aux deux formes Thuret et Falkenberg ; elles sont plus ou moins abondantes ou absentes, parfois mélangées l’une à l’aulre, au contact; d’autres fois irrégulièrement réparties, presqu’à l'exclusion l’une de l’autre. Autrement dit, aucune règle ne préside à leur distribution. On les trouve sur le Cutleria sans doute comme sur un substratum quelconque interposé sur Île trajet des corps mobiles reproducteurs. D'ailleurs, en déta- chant ces plantules, on enlève souvent, en même temps, des corps reproducteurs qui viennent de se fixer, ou qui com- mencent à germer, et qui, par leur taille et le nombre des chromatophores, correspondentcomplètement aux oosphères de Cutleria. Par contre, je n'ai Jamais vu ces proliférations dont parlent les auteurs à propos du Zanardinia et du C. multifida. Il me semble impossible que ces germinations soient dues à des corps reproducteurs autres que les oosphères de C. adspersa, car, bien que j'aie examiné l'A. melanoidea à LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 313 maintes reprises, je l'ai toujours vu stérile; s’il fructifie, ce ne peut être qu’en hiver. Si d’ailleurs ces germinalions étaient produites par des zoospores d’Aglaozonia, j'aurais dû les trouver plutôt sur les individus récoltés en mars. Or, on _en rencontre en mai, et au commencement de juin, sur des parties du Cutleria qui n'étaient sûrement pas développées à l'époque où l’Aglaozonia doit mûrir ses zoospores. S 4. — Forme Falkenberg. Les dessins À et P de la figure 10 représentent deux des plus jeunes germinations que j'ai observées. Ce sont de jeunes colonneltes dont les cellules superposées sont dues à un cloisonnement intercalaire irrégulier ; plusieurs cloisons longitudinales se sont formées. La colonnette À montre à son sommet le début d'un poil qui, dans le cas actuel, est inséré obliquement, mais qui, normalement, est lerminal et dans le prolongement de l’axe, comme on le voit sur la germi- nation € un peu plus avancée. Dans les points où les jeunes colonnettes ont pris des cloisons longitudinales, les nou- velles cloisons transversales n’affectent plus toule la largeur de la plantule, mais seulement telles ou telles cellules, comme on le voit bien sur le dessin Ÿ. L’accroissement et le cloisonnement des cellules, bien qu’irréguliers, main- tiennent cependant à la colonnelte sa forme approxima- tivement cylindrique à base circulaire. Toute colonnelte jeune porle à son sommet un poil qui reste souvent isolé (fig. 10, &); d’autres fois, une ou deux cellules contiguës à la cellule terminale (Æ, H) ou un peu plus éloignées (D, J) forment aussi un poil qui naît peu de temps après le premier. Plus tard, lorsque la colonnelte commence à alteindre tout son développement, deux ou trois poils apparaissent souvent vers son milieu (fig. 10, #7) ou dans sa moilié inférieure (fig. 10, J), mais peuvent man- quer (fig. 10, &; fig. 11, À). Comme on le voit, ces colonnettes sont considérablement 314 C. SAUVAGEAU. plus cloisonnées que celles obtenues par M. Falkenberg avec le C. mullifida (qui correspondent aux états À, B, C, lig. 10); elles ressemblent davantage à celles de M. Church, mais elles s'en distinguent essentiellement par la présence de poils, déjà vus par M. de Janczewski dans celle espèce sur des plantules plus grêles. Ces derniers sont de vrais poils, incolores, à accroissement basilaire ; ils m'ont tou- Jours paru exogènes. Le développement en longueur el en largeur de la colon- nette cesse alors ou devient insignifiant; les poils restent turgescents el continuent à se cloisonner sans qu'il s'en produise de nouveaux. La colonnetle est massive, et restera ainsi pendant toute son existence ; elle est formée, sur une coupe transversale (fig. 15, À), de une cellules centrales entourées d'une assise périphérique. Elle est de taille variable, courte et trapue, ou longue et grêle ; ou approxi- malivement cylindrique, ou renflée en massue à la base ou au sommet. Elle se fixe par des rhizoïdes provenant des cellules inférieures el qui s’épatent en crampons. Tout l'effort de la planiule se porte dès lors à la base de la colonnette persistante, où certaines cellules deviennent plus ventrues, el par suite rejettent les rhizoïdes sur le côté; c’esl le début de la lame rampante d’Ag/aozonia. Moins heureux que M. Falkenberg, je ne pourrais pas désigner la cellule origine de cette lame, et il m'a semblé que plusieurs cellules concourent ae cu à sa for- mation. On voit ce gonflement des cellules basilaires en G, ZT, (fig. 10); en J, elles sont déjà cloisonnées et ont produit un petit disque rampant qui va désormais continuer à s’accroître à la manière d'un Ag/aozonia. La première touffe de poils, portée par la lame rampante, est très géné- ralement située à son point d'union avec la colonnette (Hg. 11 et 12); puis d’autres touffes apparaissent près du bord (fig. 12). Le cloisonnement périphérique est actif, mais la lame, généralement circulaire au début, ne garde ordinaïi- LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 319 rement pas longtemps celte forme; elle s'étend davantage dans une certaine direction, en même temps qu'elle s’élargit Fig. 10. — Plantules falkenbergiennes épiphytes sur le Cutlleria adspersa à Gué- thary. — A à J, états de plus en plus développés ; en G, les cellules inférieures commencent à se différencier pour produire la lame rampante; elles le sont plus en H, et elles ont déjà formé un disque en J. (Gr. 200.) É progressivement, de sorte que la colonnelte est le plus souvent à l'extrémité étroite de la lame rampante. On voit 316 €. SAUVAGEAU. les différentes formes de celte lame d’Aglaozonia sur les figures 13 et 14, dontles contours sont exactement dessinés, Fig. 11. — Plantules falkenbergiennes épiphytes sur le Cutleria adspersa à Gué- thary. — A et C montrent deux plantules dont la lame rampante est un peu différente ; l’une et l’autre possèdent une petite touffe de poils sur la lame, au pied de la colonnette ; B, plantule vue de dessous ; les cellules sont plus larges que sur la face supérieure. (Gr. 200). mais dont les lignes indiquant la direction des cloisonne- ments sont approximatives. On y voit qu'en s’élargissant graduellement, la lame commence à se festonner, et l'on LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 317 conçoit qu’une plantule de cette forme puisse fournir VA. melancidea précédemment décrit. Au contraire, d’après Fig. 12. — Plantules falkenbergiennes épiphytes sur le Cutleria adspersa à Guë thary. — Sur la lame rampante de A, une seconde touffe de poils commence à se développer. En B, certaines cellules marginales de la lame rampante se développent en rhizoïdes apprimés. (Gr. 200.) la forme de l’A. chilosa adulte, on ne peut supposer que son premier élat corresponde aux plantules de Guétharvy. 918 C. SAUVAGEAU. On remarquera aussi que les lames rampantes que j'ai repré- sentées sont beaucoup moins laciniées que l'A. parvula de la figure 21 de M. Falkenberg (/oc. cf.), bien que leurs dimensions soient plus grandes. Vue de dessous, la lame rampante paraît formée de cellules plus larges (fig. 11, B) ; beaucoup d’entre elles, en particulier au voisinage du pied de la colonnelle, produisent des rhizoïdes fixateurs courts, à digilations nombreuses: cerlains sont longs et vont chercher plus loin un point d'appui. On voit parfois des cellules du méristème marginal quis’allongent elles-mêmes en rhizoïdes apprimés (fig. 12, B), et il est fort possible que leur présence n'arrête pas le cloisonnement marginal, car j'ai inutilement cherché de semblables rhizoïdes au fond des sillons qui séparent les festons. Les cellules qui les ont produits continuent proba- biement à s’accroître el à se diviser en passant par-dessus. À ja fin de mai, les lames rampantes de 3 millimètres n'étaient pas rares, el j'en ai rencontré plusieurs qui dépas- saient 4 millimètres suivant leur plus grand diamètre; on à vu que celles obtenues par M. Falkenberg avec le C. multifida après huit mois de culture sont plus courtes. Le plus grand nombre portait encore la colonnette dressée, non accrue, parfois rongée à son sommet; elle manque parfois, mais comme le moindre choc la brise à sa base avec la plus grande facilité, son absence est sans doute accidentelle, et l’on peut dire que normalement l'A g/aozonia de plus de 4 millimèires de longueur a conservé son pro- embryon dressé, lequel cependant ne peut lui être d'aucune utilité dans la nutrition, à cause de sa petite taille relative (fig. 14). La figure 15, À, représente une seclion transversale dans une colonnelle dont la lame rampante qui avait 4 milli- mètre de longueur à fourni les sections BP, C, D, de plus en plus éloignées du bord. La figure 15, Æ, est fournie par une lame de 2 millimètres; on voit une louffe de poils endogènes déjà bien développés. Et enfin la figure F appartient à un LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS, 319 Aglaozonia de 3 millimètres. Assurément l'épaisseur de la plantule est notablement moindre que celle de l'A. mela- INNÈX NS CAN ANS Fig. 13. — Plantules falkenbergiennes épiphytes sur le Culleria adspersa à Gué- thary. — On remarque Îles différences de forme et de taille de la colonnette, - qui, en M et O, est tronquée. (Les contours des plantules sont dessinés exac- _tement, mais les lignes indiquant les files radiales de cellules sont approxima- tives). (Gr, 40.) 220 C. SAUVAGEAU. noidea de la figure 7, mais on conçoit que par son dévelop- pement ultérieur elle s’en rapprochera. Ses assises sont déjà aussi nombreuses que dans l’A. parvula adulte de la figure 9, À, et dans l’A. chilosa. pa 27 ù 1 d C Fig. 14. — Plantules falkenbergiennes épiphytes sur le Cutleria adspersa à Gué- thary. — On comparera leur forme et leurs dimensions à celles de la figure ?1 donnée par M. Falkenberg. Les colonnettes des plantules B, C, D, sont tron- quées. (Les contours des plantules sont dessinés exactement, mais les lignes indiquant les files radiales de cellules sont approximatives.) {Gr. 20.) Quand la plantule falkenbergienne se développe en un point stérile et nu, les rhizoïdes s’épatent sur le substratum ; mais lorsqu'elle s'étale sur un sore, les rhizoïdes com- priment les filaments fertiles et s’'enchevêlrent avec eux par- LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 9321 fois si intimement que, sur des coupes, on pourrait les con- fondre avec eux el croire qu'ils sortent du substratum ; mais ce n'esl là.qu'une apparence. J'ai conservé dans l’eau de mer un certain nombre de ces petits Ag/aozonia séparés de leur substratum. Ils se sont accrus légèrement, mais, n'étant plus fixés, les parties A BCE o DRE Fig. 15. — Plantules falkenbergiennes épiphytes sur le Cutleria adspersa à Gué- thary. — À, coupe transversale dans la colonnette d’une plantule dont la lame rampante, qui avait {1 millimètre de diamètre, a fourni les coupes transver- sales B, C, D, de plus en plus éloignées du bord; E, coupe transversale dans une lame rampante de 2? millimètres; F, coupe transversale dans une lame rampante de 3 millimètres. (Gr. 200.) nouvelles se recourbaient par-dessous. Au bout d’un à deux mois, ils étaient morts. | Comme on le verra plus loin, la germination parthénogé- nétique des oosphères du C. adspersa donne en culture, à Guéthary, des formes falkenbergiennes, de plus petite taille que les précédentes, mais qui leur sont bien comparables. Il est donc fort probable que les plantules récoltées dans la nature proviennent aussi d'oosphères parthénogéné- tiques de la même plante. Comme, d'autre part, l'A. mela- ANN. SC. NAT. BOT. Xi 2 322 C. SAUVAGEAU. noidea est le seul À glaozonia que l’on trouve à basse mer à Guéthary, qu'il vit au voisinage immédiat du C. adspersa, et que les plantules épiphytes étudiées plus.haut paraissent avoir la même structure, autant du moins que l’on peut en juger par la comparaison de plantes adultes et de jeunes plantules, nous pouvons en conclure que ces formes falken- bergiennes sont l’origine de l’A. melanoidea. $S 2. — Forme Thuret. Les germinations de la forme Thuret sont aussi fréquentes que celles de la forme Falkenberg. Les Cutleria âgés abritant souvent d’autres végélalions épiphytes, les premiers élats ne sont pas loujours faciles à reconnaître. On les distingue des jeunes Æclocarpus, sous le microscope à dissection, parce que les filaments, plus abondamment cloisonnés transversalement, sont aussi plus souples, plus mous, plus affaissés. La plantule débute par un filament simple fixé par un ou plusieurs rhizoïdes ; les cellules situées immédiate- ment au-dessus, aussi hautes, ou presque aussi hautes que larges, sont peu colorées; pour abréger, je dirai qu'elles constituent la zone (hallogène du filament ; au-dessus est une zone aclive d'accroissement, à cellules plates, bien colorées, produisant inférieurement les cellules précédentes, supé- rieurement des cellules qui régénèrent les cellules détruites au sommet. Au début, le filament se termine en pointe obtuse; plus tard, il est tronqué et cylindrique. Autrement dit, le filament originel est identique à l’un quelconque des fils qui garnissent la marge frangée d’une plante adulte, et chacune des branches qui va naîlre a la même valeur. Aussitôt que la zone de méristème a produit entre elle et les cellules à rhizoïdes une zone thallogène de plusieurs cellules aussi hautes ou plus hautes que larges, l’une de celles-ci pousse une branche latérale qui se constitue, elle aussi, une zone de méristème centripète el centrifuge (1). (4) Le cloisonnement n'est pas strictement trichothallique; les cellules LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 9323 \ > A \i \ \ ST FE a N É\S B 8 2 = 2 = ta DE) SOS U Fig. 16. — Plantules thurétiennes épiphytes sur 1e Culleria adspersa à Guéthary. — Les plantules très jeunes, A, D, E, sont typiques et bien caractérisées; la plantule C représente peut-être une végétation churchienne. (Gr. 200.) produites (en particulier du côté libre) se divisent à leur tour perpendicu- lairement à la longueur du filament. 324 C. SAUVAGEAU. La direction de celte branche (fig. 16, À) fait au début un certain angle avec le filament mère, mais ses cellules thallo- gènes, et particulièrement l'inférieure, en prenant leurs dimensions définitives, redressent cette branche qui devient non seulement parallèle au filament mère, mais très rap- prochée de lui, apprimée contre lui. Pendant ce temps, la zone thallogène du filament primitif s’est augmentée de . quelques cellules, et a fourni une deuxième branche qui se comportera de même, et ainsi de suite. Parfois, chaque cellule de la zone thallogène porte une branche (fig. 16, Z), d’autres fois les branches sont plus espacées; elles ne naissent pas non plus nécessairement en ordre acropèle régulier. | La zone thallogène de chaque branche se comporte el se ramifie comme celle du filament mère. Chaque cellule thallo- gène produit très généralement une seule branche qui naît dans une direclion quelconque de son pourlour. Et comme la cellule inférieure de chaque branche redresse toujours celle-ci et l’apprime contre la branche mère, 1l en résulte la formation d’un pelit corps cellulaire tronconique, massif, le support, lerminé à son sommet par autant de fils hbres qu'il y a eu de branches produites. En même temps, certaines des cellules périphériques inférieures émettent un rhizoïde qui augmente la solidité de la fixation. La paroi des cellules thallogènes, d’abord mince, prend un peu plus d'épaisseur, devient probablement gluante, el les différentes zones thallogènes, réunies en ce corps tronco- nique adhérent, se soudent l’une à l’autre ; c’est là l’origine de support du thalle du C. adspersa. La soudure entre cel- lules thallogènes accolées latéralement mel un certain temps àse produire ; en comprimant une de ces plantules suffisam- ment, mais avec précaulion, entre lame et lamelle, on sépare les parlies accolées du support, et l’on juge facile- ment le mode de ramification. On constate en même temps que les cloisons longitudinales sont relativement rares dans les cellules thallogènes ; la plantule, dans son jeune âge, LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 9325 n'ulilise guère ce procédé d’accroissement et de consolida- tion. La laille que la plantule atteint par ce processusest variable, mais bientôt une double modification apparaît dans le mode A OPUS je £ È NE £ l Fig. 17. — Plantules thurétiennes épiphyles sur le Cuëleria adspersa à Guéthary, pour montrer les différences dans la forme et la taille du support. (Gr. 20.) de développement. La ramificalion, qui avait lieu dans un plan quelconque, ne se fait plus que parallèlement à la sur- face du support massif; en même temps, les fils, jusque-là dressés verticaux, s’infléchissent vers l'extérieur, et dès lors le sommet de la plantule se creuse en entonnoir. Les cellules thallogènes, au lieu de se souder en un corps massif frangé, 326 C. SAUVAGEAU. se soudent en une lame frangée continue constituée par deux couches de fils, comme au bord de la plante adulle. En même temps et désormais, les rameaux, autrement dit les fils, prennent régulièrement un cloisonnement longitudinal au- dessous du méristème, également comme dans la plante adulle. La soudure entre fils disposés en lame est plus rapide qu'entre rameaux constituant un corps massif. Enfin, le pseudo-parenchyme du support, jusque-là homo- gène, se différencie en une couche périphérique, sorte d'épi- derme,etune zone interne. Les cellules périphériques se cloi- sonnent longitudinalement et transversalement, les cellules internes restent intactes; on voit le résultat de ce cloison- nement sur la figure 18, À, représentant une coupe menée vers Le milieu d’un support d’un peu plus de 1 millimètre de hauteur, terminé par un entonnoir d'égale hauteur. On retrouve la même structure à tousles niveaux, maisau niveau même de l’ombilic le centre de la coupe est occupé par un étroit massif de petiles cellules. Immédiatement au-dessus, le centre de la coupe est creusé d’une cavité circulaire, limitée par une assise à petites cellules identiques à l’assise périphérique externe. et qui est l’épiderme intérieur de l’en- tonnoir (fig. 18, B). J'ai fait un certain nombre de coupes longitudinales dans ces plantules. Mais il est à peu près impossible d’en obtenir de dessinables à la chambre claire montrant simultanément tout ce qui est intéressant. C’est pourquoi je me suis contenté de faire le schéma de la figure 18, C, qui indique l’origine et la structure de la plantule. M. Reinke en a publié un des plantules infundibuliformes de Zanardinia nées par proli- féralion sur des thalles adultes 78, 2, PI. 2 (IX), fig. 13]. Je n’ai pas eu l’occasion d'étudier des plantules ayant celle origine, mais nos dessins ne se correspondent nullement. La plantule est alors une sorte d’entonnoir mince, frangé, porté en son milieu par un support massif. La figure 17 montre les différences de forme et de taille du support qui, LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 927 une fois formé, ne s’accroit plus. La plantule, fixée par une base étroite, oscille sous le moindre effort, se balance par le plus léger mouvement de l’eau. Plus tard, la lame infun- dibuliforme se déchire suivant une génératrice, s’élale en une ou plusieurs lames triangulaires, s’affaisse ; le long du support, et à la base de la lame, naissent des rhizoïdes qui Fig. 18. — Plantules thurétiennes épiphytes sur le Cutleria adspersa à Guéthary. — À, coupe transversale menée vers le milieu d’un support d’un peu plus d’un millimètre de hauteur, terminé par un entonnoir d’égale longueur: B, coupe transversale menée immédiatement au-dessus de l’ombilic de la même plan- tule; C,coupe longitudinale schématique dans une plantule thurétienne. (A, B. Gr. 200.) fixent la plantule plus solidement au substratum. Les parties âgées sont alors rampantes, les parties jeunes, recourbées el dressées. Un jeune C. adspersa estdonc constitué: 1° par un support, uniquement pseudo-parenchymateux au début, qui plus tard 328 €. SAUVAGEAU, se différencie une couche superficielle à petites cellules par des cloisonnements périphériques transversaux et longitu- dinaux ; 2° par une lame, d’abord en entonnoir, plus tard étalée, qui est le vrai thalle du Cutleria; cette lame est aussi pseudo-parenchymateuse, puisque deux fils se soudent pour la former, mais elle est surtout parenchymateuse à cause des nombreux cloisonnements ultérieurs. Tel est Le sort des germinations obtenues par Thuret il v a un demi-siècle. Elles deviennent de vrais thalles de Cule- ria. Il y aurait lieu de rechercher dans quelle mesure la des- cription précédente s'applique aux plantules de C.mulhfida. Mais quel est leur sort ullérieur? Les Cutleria apparus à Guéthary à la fin de l'hiver, el qui ont acquis leur plein déve- loppement en avril et en mai, disparaissent en juin. Chauffés par un soleil ardent dans les flaques peu profondes où on les rencontre à marée basse, 1l est à présumer que l’élévalion de la température n’est pas sans influence sur leur disparilion. Toutefois, les plantules poussent vigoureusement. Leur sub- stratum vieilli, dilacéré et arraché par la vague, les entraîne avec lui. Si le hasard du courant les laisse tomber vers le large, en un point plus profond, il n’est pas impossible que, soustrailes à des conditions extérieures devenues défec- tueuses, elles ne s'y fixent et y continuent leur développement. Mais alors l'inverse ne semble plus guère possible, et les thalles qui apparaissent en hiver ne peuvent provenir, en règle générale, que dela germination des zoospores de l'A. mela- noidea. Nous devons nous demander maintenant quelle est l’ori- gine des germinations épiphytes. On sait que M. Falkenberg à Naples avec le C. multfida, M. de Janezewski à Antibes avec le C. adspersa, ont uniquement oblenu dans leurs cul- tures des germinations falkenbergiennes provenant d’00- sphères fécondées ; que M. Church à Plymouth, avec le C. mulhfida, a uniquement obtenu des germinations par- thénogénétiques falkenbergiennes, et la rareté des plantes mâles dans cette localité autorise la supposition que la fécon- LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 329 dalion ne s'y fait point. Done, que la fécondation ait lieu ou n'ait pas lieu, le résultat est le même. Mais on sait aussi qu’à Saint-Vaast, Thuret a constaté une germinalion constamment parthénogénétique des oosphères du €. mulhifida, donnant une forme thurétienne. La rareté des plantes mâles de €. multifida et des thalles d'A glaozonia à Saint-Vaast, et l'habileté bien connue avec laquelle opérait Thuret, écartent, pour expliquer ce fait, la supposition d’une erreur d'expérience, De mon côté, comme on le verra plus loin, et bien que les individus mâles de €. adspersa soient plus nombreux à Guélhary que les individus femelles, je n’ai jamais obtenu en culture que des germinations parthénogénéliques d’o00- sphères, donnant des formes falkenbergiennes. La féconda- lion ne se fait pas. Or, comme nous l'avons vu dans le paragraphe précédent, les germinations épiphytes que j'ai rencontrées à Guéthary, falkenbergiennes ou thuréliennes, ne peuvent être altribuées aux zoospores d'A. melanoidea. Nous pourrions donc en conclure, d’après ceci, et d’après ce qu'a vu Thuret, que les deux formes de germination, observées dans la nature à Guéthary, proviennent d’oo- sphères parthénogénétiques. Nous verrons ultérieurement la possibilité d’une autre interprétation. $. 3. — Forme Church. J'ai isolé sous le microscope à dissection plusieurs cen- taines de germinations des formes Thurel et Falkenberg ; elles étaient parfaitement caractérisées. Mais en outre, parmi les précédentes, j'ai rencontré {rois exemplaires de la forme Church. J'en ai représenté deux sur la figure 19, qu'un simple examen suffit à faire comprendre. La figure 19, P, est une colonnette qui s’est allongée à son sommet en un filament de Cutleria, et s'est élargie à sa base en une lame rampante d'Aglaozonia. Le filament cutlérien est à cellules courtes qui sans doute s’allongeront ; il n'a pas de méri- 390 €. SAUVAGEAU. stème localisé, et déjà deux poils (non deux filaments) sont insérés à sa base. La lame rampante est normale. Sur la figure 19, À, la colonnette est moins évidente et la partie cutlérienne est plus développée ; la lame rampante est encore toute jeune. Comme j'ai dit précédemment que le support d'un thalle de Cuéleria se forme par la soudure des zones thallogènes, et que les cloisonnements longitudinaux y sont plutôt rares au début, je suis porté à croire que la plantule de la figure 16, C, n’est pas une forme thurélienne, mais une forme churchienne qui n’a pas encore développé de lame rampante ; elle porterait à quatre le nombre des formes Church rencontrées. La plantule de la figure 16, B, n'est pas d’allure très nette. Les figures 19, À, 19, B, de plantules nées librement dans la nature, paraissent bien se rapporter à des germinations falkenbergiennes modifiées. Le nombre infime des formes churchiennes, comparé à celui des autres, vient à l'appui de l'idée que j'ai émise précédemment qu’elles sont des ano- malies, mais il serait impossible de dire quelles conditions ont favorisé leur développement. La forme Church, consi- dérée comme anomalie, est intéressante au même degré qu'une fleur de Phanérogame sur laquelle on suit des méla- morphoses ou des régressions d’élamines ou de carpelles en pétales, etce..…, et lorsque les Cutlériacées seront mieux con- nues, elle nous éclairera sans doute sur leur phylogénie. La colonnette, en effet, est un organe problématique qui paraît avoir pour rôle principal de produire une lame d'Aglaozonia ; il est donc intéressant de la voir se modifier pour donner en outre des filaments de Cuileria. Je n'ai pas vu ces filaments cutlériens produire d'organes reproduc- leurs, mais M. Church et M. Kuckuck en ont observé : d'ailleurs, les filaments cutlériens sont assez reconnaissables par eux-mêmes pour que la présence d'organes reproduc- teurs ne soit pas nécessaire pour les caractériser. Si la partie dressée des plantules churchiennes de M. Kuckuck [99, fig. 9 et 10] est un filament de Cutleria, comme le croit l’auteur, LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 3931 cela prouverait que la colonnette n’est point un appareil nécessaire à la formation d’un Aglaozonia ; mais il ne me paraît pas certain qu'il en soit ainsi (Voy. précéd. p. 285). En effet, si son dessin 2 (oc. cit. fig. 10) paraît bien représenter un filament monosiphonié, cutlérien, qui a produit une es) ne D Et FA en a ne A ; = - 7) ee) tes En < vi A ee _ sen SR TAN fe ct > d SEA EE) me / (7 le LS 4 7 E ES / A ne NO RE] _ CA pi y my EG y ,, AE 6 & dE = STE ee ee Le TES) © \ à ER / 3, f Ta \\ Ke RqAÈ te ee \. ; PRIE V4 / |" ion 7e LS un RO à LR Fée, Te ie ee > ee Rose 7/4 Se @ N RÉ TA EU à NZ CRETNT RES Lo mou Fig. 19. — Plantules churchiennes épiphytes sur le Culleria adspersa à Guéthary. (Gr. 200.) lame rampante, les autres dessins (/oc. cf., fig. 9 ; À, B, C, fig. 10) paraissent plutôt une forme churchienne à colon- nette extrêmement réduite. L’A. parvoula étant fréquent à Helgoland, il ne doit pas être impossible de vérifier cette interprétation par l'étude des plantes Jeunes recueillies dans la nature ; peut-être trouverait-on des filaments cutlé- riens qui, au lieu de rester isolés, donneraient un thalle 392 C. SAUVAGEAU. fascié réduit. D'ailleurs, d'après M. Gran, on trouverait à Christiania des Cutleria sexués de petite taille, pourvus d’un point d'attache assez grand, proportionnellement à la dimen- sion de Ja plante, qui a la même forme et le même mode de croissance que celui de la plante asexuée (1). En résumé, malgré ses dimensions insignifiantes, la colonnette falkenbergienne me paraît être un organe pri- mordial, d’une grande importance théorique. Normalement, elle produit à sa base un Ag/aozonia ; accidentellement (mais peut-être habituellement à Christiania) son sommet se transforme en outre en filaments de Cutleria. Dans la forme churchienne, la production basilaire est plus déve- loppée que la production apicale; on prévoit que l'inverse pourrait aussi se présenter, l'expansion basilaire aglaozo- nienne restant rudimentaire ou nulle, l'accroissement {er- minal cutlérien devenant prédominant ; la colonnelte portant un thalle fascié ne devrait pas être confondue avec le sup- port décrit précédemment. CHAPITRE IV CULTURES DE ( CUTLERIA ADSPERSA )». Les individus mâles de C. adspersa étant deux à quatre fois plus abondants à Guéthary que les individus femelles, et M. de Janczewski ayant constaté à Antibes, où les individus de chaque sexe sont en nombre égal, que la fécondalion des oosphères est nécessaire à leur germinalion, j'en concluais, à priori, que, à l’inverse de ce qui se passe dans la Manche pour le C. multifida, la fécondation doit êlre facile et fré- quente, si même elle n’est pas indispensable à la germination. On se rappelle que M. de Janczewski n'a pas réussi à voir (1) Je cite cette observation de M. Gran (Algevegetationen à Tünsbergfjor- den, Christiania, 1893) d'après M. Kuckuck 99, p. 112], car il est regrettable que l’auteur ait écrit son Mémoire dans une langue inconnue à la plupart des botanistes. LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 393 la fécondation s’opérer sous ses yeux, bien qu'il ait constaté une remarquable altraction entre les éléments sexués. Les anthérozoïdes, dit-1l, « n’ont aucune affinité pour les oosphè- res à l’état mobile; mais silôt que ces oosphères ont perdu leur mouvement,les anthérozoïdes,se dirigeant vers la lumière el rencontrant les oosphères dans leur chemin, tombent dans leur sphère d'attraction, commencent à tourner auprès d'elles, s’en rapprochent de plus en plus, se heurtent contre elles et finissent par s’accoler à n'importe quel point de leur surface. Si un nombre plus considérable d’anthérozoïdes s’est mis en contact avec une oosphère, ils lui impriment un mouvement de rotation plus ou moins prononcé, mais dépourvu de toute régularité et bien plus lent que dans les Fucacées (1) ». Mais il n'a jamais vu la fusion des protoplas- mes dans les cultures cellulaires; elle se fait cependant dans de plus grands vases, et 1l reconnail les oosphères fécondées à la présence de deux points rouges; ce sont les seules qui germent. Je me suis proposé de rechercher si la fécondation se fai- sait, et comment elle s’opérait. Pour cela, à différentes re- prises, du 9 mars au milieu d'avril, j'ai entrepris des cullures cellulaires. Dans les unes, j'ai mis des oosphères et des anthérozoïdes recueillis à l’aide d’une pipette ; dans d’autres, des branches à oogones et à anthéridies, dans d'autres encore, de petits fragments de la plante. Or, je n'ai jamais vu de fécondation se produire, je n'ai même jamais remarqué la sphère d'attraction dont parlent M. Falkenberg et M. de Janczewski. Pendant des heures entières, J'ai suivi des oosphères en mouvement, ou récemment fixées, sans cons- tater qu’elles eussent la moindre influence attractive sur les anthérozoïdes. Bien des fois, j'ai vu des anthérozoïdes se fixer sur des oosphères, rétracter leur cil antérieur, s'accoler, s’aplatir contre elles, mais sans qu'il y eut réellement fusion. Si des oosphères semblent pourvues de deux points rouges, (1) M. Falkenberg (loc. cit., p.426) a vu, à Naples, les oosphères attirer les anthérozoïdes du C. mullifida à plusieurs centimètres de distance. J94 C. SAUVAGEAU. c'est qu'un anthérozoïde parfois déjà désorganisé s’est fixé sur elles, mais sans s’y incorporer, comme il l’eût fait sur un corpuscule étranger quelconque. Dans une cellule où les oosphères sont nombreuses, abs- traction faite de celles qui se fixent çà et là, les premières qui s’arrêlent vont se fixer au bord de la goutte d’eau, soit du côté d'où vient la lumière, soit du côté opposé à la source lumineuse (1), s’arrondissent. Puis d’autres viennent se fixer aussi sur la lamelle, en deçà des précédentes, et ainsi de suite. Au bout de quelques heures, chacune d'elles est entourée d’une mince membrane. Mais pendant ce temps, les oosphè- res s’élalent, comblent les vides, el produisent l'effet d'une sorte de mosaïque. Celles qui sont au bord de la goutte s'éla- lent davantage, fusent comme M. de Janczewski l’a observé, en laissant couler leur protoplasme lentement ou brusque- ment. Dans certaines cultures, toutes les oosphères meurent ainsi le jour même de la déhiscence, d’autres fois, la mort est plus lente, générale seulement au bout de quelques jours. D’autres fois encore, quelques oosphères restent vivantes parmi des centaines d’autres qui sont mortes, el j'ai obtenu leur germination en transportant les lamelles dans des vases plus grands. Les cultures cellulaires, comme l’a constaté M. de Janczewski, conviennent donc peu aux oosphères du C. adspersa, mais si l’on met des oosphères dans un petit godet de verre autour duquel on a disposé des lamelles ver- licales, les oosphères qui restent vivantes et susceplibles de germer sont en proportion bien plus considérable. (1) La lumière n’est certainement pas le seul facteur agissant sur la di- rection dans laquelle les oosphères vont se fixer, ou, peut-être plus exacte- ment, une même intensité lumineuse n’agit pas d’une manière uniforme sur les oosphères aux différents moments de leur existence. C'est ainsi que j'ai constaté plusieurs fois que des oosphères de C. adspersa,prises avec une pipette dans une cuvette exposée à l’air où elles étaient sur le bord le plus éclairé, se partageaient en deux groupes dans une culture cellulaire, celle-ci étant installée dans une chambre, par conséquent exposée à une intensité lumineuse moindre que la précédente cuvette. Par leur grande taille, leur abondance, la durée de leur motilité et leur sensibilité, les oosphères de U. adspersa me paraissent particulièrement à recommander pour l'étude du mouvement des organismes libres. LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 939 Ne réussissant pas à observer de fécondation dans les cul- tures cellulaires, ni même à constater entre les éléments sexués une attraction qui fût l’indice de l’existence du phé- _nomène, j'ai installé d’autres cultures, au milieu d'avril, dans des coupelles d’une dizaine de centimètres de diamèlre, avec des morceaux dela plante, soit uniquement femelles, soit des deux sexes. Je crois avoir pris les précautions nécessaires pour éviter les causes d'erreur provenant de la présence des anthérozoïdes. Je récoltais de beaux exemplaires que j'avais soin de débarrasser, sur place, des pierres ou des coquilles adhérentes, puis d’agiter forlement dans l’eau, et je les em- porlais dans des seaux, qui renfermaient exclusivement des individus mâles ou des individus femelles. À la maison, ces plantes élaient mises dans des cuvettes d’eau recueillie loin de la station des Cutleria, puis filtrée sur papier. Des fragments de ces plantes élaient alors placés dans des coupelles ou dans des verres contenant de l’eau filtrée. A la rigueur, ces pré- cautions sont même superflues, car les déhiscences se conti- nuent dans les cuvettes plusieurs jours après la récolle; en attendant plusieurs jours, on peut être certain qu'aucun an- thérozoïde ne persiste parmi les oosphères dans les cuvettes à plantes femelles. J'ai recommencé plusieurs fois ces cultures, el j'ai toujours obtenu d’abondantes déhiscences. Ün grand nombre d’oo- sphères meurent comme il a été dit précédemment, mais des milliers ont germé. Or, le résullat a toujours été le même ; qu'il s'agisse des coupelles à oosphères ou des coupelles à oosphères et anthérozoïdes, les germinations sont toujours de la forme Falkenberg, jamais de la forme Thuret. Par conséquent, dans les condilions où je me suis placé, les oosphères du €. adspersa germent uniquement par parthé- nogenèse, et les plantules sont les mêmes que celles obte- nues par M. de Janczewski avec des oosphères fécondées(1). Bien que les germinalions dans les deux séries de cul- (1) On ne pourrait pas supposer l'existence de plantes accidentellement monoïques; c'est un fait que jamais aucun auteur n'a signalé. 390 C. SAUVAGEAU. tures soient étroitement comparables, j'ai choisi pour les des- siner surtout celles provenant des cultures femelles, incon- testabiement parthénogénétiques. Les variations dans la forme extérieure des plantules paraissent tenir à un éclarage défectueux, à la gêne de germinations trop rapprochées les unes des autres, à la petitesse des vases emplovés.…., etc. L’oosphère se divise en deux; la partieimférieure s’allonge en un rhizoïde pauvre en chromalophores, court ou long, simple ou ramifié, mais généralement terminé par un épate- ment digité revêtu d’une couche de gelée, de nature pectique, qui facilite la fixation. La partie supérieure très colorée se cloisonne d’abord transversalement, puis longiludinalement, la rapidité avec laquelle apparaissent les cloisons longitudi- nales étant très variable suivant les individus. Mais toujours, dès que la plantule a quelques cellules superposées, la cellule supérieure, ou l’une des cellules supérieures, se termine en uu poil incolore (fig. 20, C'), parfois rejeté sur le côté (fig. 20, Æ, H) par suite d’une croissance défectueuse. La figure 20, J, d'une plantule âgée de quarante jours, montre trois poils au sommet de la colonnette, comme nous avons vu souvent le fait se produire sur les plantules épiphytes ; le poil terminal est le plus ancien. La plantule (fig. 20, O) âgée de quarante- deux jours, plus avancée, est de forme normale ; la colon- nette est dressée et le thalle rampant lui est perpendiculaire; c'est bien le début des plantules observées dans la nature, mais celles-ci sont de plus grande taille. Bien souvent, la plantule est déviée dans sa forme, comme on le voit sur les dessins Æ à P (fig. 20) qui représentent des plantules du même âge et de la même culture que G el J, et qui correspondent aux plantules dorsiventrales de M. de Janczewski. Tantôt, la base de la colonnette reste droite et les cloisonnements de sa moitié supérieure poussent cette partie sur le côté (fig. 20, FE, H, K); tantôt, il se fait comme un fléchissement de toute la colonnette autour des rhizoïdes : elle se penche vers le substralum (fig. 20, L, M, N) jusqu à se coucher sur lui. Les poils qui se forment ultérieurement, LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 337 Lan Fig. 20. — Plantules falkenbergiennes d’oosphères parthénogénétiques de Cutleria adspersa, obtenues en culture à Guéthary. — A, B, C, D,E, plantules âgées de treize jours (20 avril au 3 mai) ; F à P, plantules âgées de quarante jours (20 avril au ?9 mai), choisies pour montrer les différentes formes que prend la colon- nette; Q,R,S, plantules âgées de quarante-deux jours (20 avril au 31 mai); T, plantule âgée de soixante jours (20 avril au 19 juin). (Gr. 200.) ANN. SC. NAT. BOT. 29 338 CO. SAUVAGEAU. au lieu de naître en des points quelconques du pourtour de la colonnette, et de s’infléchir vers san sommet organique, naissent exclusivement sur sa face dorsale et se dressent perpendiculairement. Suivant la posilion plus ou moins cou- chée de ces colonneltes, la jeune lame rampante donne à la plantule un aspect particulier (2, S, âgées de quarante-deux jours, 7°, âgée de soixante jours). J'ai trouvé aussi un bon nombre de plantules, provenant de colonnettes couchées, qui avaient toul à fait la forme d’une carapace de tortue; la face supérieure convexe portait des poils, la face inférieure concave, des rhizoïdes ; on ne pouvait plus, dans ce cas, dis- tinguer l'extrémité antérieure de l’exlrémité postérieure, el il me paraît très probable que le développement de la lame basilaire, au lieu d’être localisé, avait dû se faire sur une beau- coup plus grande étendue. | Les plantules À, B, C (fig. 21), sont parmi les plus grandes que j'ai obtenues dans les vases à plantes femelles. La cul- ture d’où elles proviennent, d’abord remarquablement vigou- reuse, fut ensuite envahie par les diatomées. J'ai dit plus haut que les plantules sont identiques dans les cultures fatalement parthénogénétiques et dans celles à plantes mâles et femelles, mais plusieurs de ces dernières se sont maintenues plus pures et m'ont donné des plantules mieux développées. C'est ainsi que À, B, C (fig. 22), âgées seulement de quarante jours, ressemblent davantage, par leur taille et Le nombre de leurs cellules, à celles (ane dans la nature. Enfin, la figure 22, D), représente l’une des plus . “eines obtenues en live elle est âgée de près de trois mois. Le 9 mars, je mis dans une onrelles quelques fragments de plantes mâles et de plantes femelles que j'y laissai plusieurs jours. Un mois après, sur le fond de la coupelle, étaient un certain nombre de germinations peu avancées, formées seu- lement de quelques cellules superposées et d’un long rhizoïde, et non munies d’un poil; au bord de l’eau, sur la face de la coupelle la plus rapprochée de la fenêtre, les germinalions, LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 939 un peu plus avancées, formaient une bordure sombre. A la fin de mai, les premières s'étaient à peine développées da- vantage, beaucoup étaient mortes; au contraire, quelques- unes de celles en bordure s'étaient considérablement accrues, mais les colonnettes étaient en partie mortes; certaines de ces plantules avaient lèur lame rampante recourbée en des- sous ; celle que représente la figure 22, D, était l’une des Fig. 21. — Plantules falkenbergiennes d'oosphères parthénogénétiques de Cultieria a dspersa, âgées de soixante-dix jours (10 avril au 20 juin). (Gr. 200). mieux élalées; cependant, elle était plus bombée que dans les plantules trouvées dans la nature : c'est pourquoiles bords du dessin sont moins nels; on n'y voit plus qu'un poil adulte et deux poils jeunes; les aulres avaient sans doute disparu. Une des coupelles de culture, plus éloignée de la fenêtre et un peu abritée par la bordure de la tablette qui la sou- Lenait, nous montre un curieux allongement de Ia colonnette sous l'influence de l'insuffisance d’'éclairement. Cette modi- fication est particulièrement nette sur les plantules B, J, K 340 | C. SAUVAGEAU. (fig. 23) âgées de quarante-huit jours, où la colonnette est Fig. 29. — Plantules falkenbergiennes de Cutleria adspersa obtenues en culture à Guéthary. — A,B, C, plantules âgées de quarante jours (20 avril au 29 mai); D, plantule âgée de près de trois mois (9 mars au 31 mai). (Gr. 200.) cormée, sur presque toute la longueur, d’une seule série de fellules. Les plantules L du même âge, et 17, N, O, âgées LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 341 Fig. 23. — Plantules falkenbergiennes d’oosphères parthénogénétiques de Cutleria adspersa, obtenues à Guéthary, dans un vase de culture insuffisamment éclairé. — À, germinations âgées de cinq jours (10 au 15 avril); B à J, plantules âgées de quarante-huit jours (10 avril au 28 mai); M, N, O, plantules âgées de soixante- dix jours (10 avril au 20 juin). (Gr. 200.) = 342 | C. SAUVAGEAU. de soixante-dix jours, commencent à développer la lame rampante. Je n'ai jamais trouvé dans Ja nature de plantules semblablement déformées; on remarquera qu'aucune d'elles ne porte de poil terminal. Enfin, dans la plupart des cultures, un certain nombre d’oosphères, au lieu de se fixer contre [a paroi du vase, res- tent flottantes. Elles germent à la surface de l’eau et s’v élalent en prenant des formes bizarres, car les poils et les rhizoïdes sont nombreux et très longs ; ceux que portent les plantules de la figure 24 élaient au moins trois fois plus longs que sur les dessins. Certains rhizoïdes, à cellules plus courtes, sont mieux pourvus de chromatophores que les rhizoïdes ordinaires; la plantule de la figure 24, D, par exemple, se termine à une extrémité par un poil, à l’autre extrémité par un de ces rhizoïdes colorés. En somme, toutes les plantules de mes cultures peuvent se rapporter au type Falkenberg normal, ou plus ou moins dévié, comme celles obtenues autrefois par M. de Janczewski. Parmi les milliers de germinations que J'ai obtenues, aucune n'était du type Thuret ni du type Church. Je suis donc d'accord, sous ce rapport, avec M. Church, dont loutes les serminations sont aussi parthénogénétiques; d'accord avec MM. Falkenberg et de Janczewski, sous le rapport du ré- sultat obtenu, mais non sous celui de l’origine, puisque, d’après ces deux auteurs, les oosphères fécondées sont les seules qui puissent germer. Le fait que toutes mes germinations sont parthénogé- nétiques, et que les oosphères n'exercent même pas d’attrac- tion sur les anthérozoïdes, dans les cullures, est d'autant plus bizarre que les plantes mâles sont 2-4 fois plus nombreuses que les plantes femelles à Guéthary. On à vu précédemment (p. 283) que M. Church suppose que la parthénogenèse du C. multifida dans la Manche est due à l’époque de la végé- alion de cette plante, à sa disparilion sous l'influence de l’abaissement de la température. J'avoue que je ne saisis pas très bien la valeur de cetle explication : je ne vois pas com- LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 943 ment une plante qui développe ses organes reproducteurs en juillet et aoûl, c’est-à-dire pendant les mois les plus chauds de l’année, pourrait souffrir, à ce moment-là, dans sa sexualité, de ce qu’en octobre elle périra par l’abaissement de Ja température. Cependant, cette explication s'appuie sur Fig. 24. — Plantules falkenbergiennes flottantes, obtenues d’oosphères parthéno- génétiques de Cutleria adspersa, à Guéthary, âgées de cinquante jours (10 avril au 29 mai). (Gr. 200.) ce que, à Naples, le C. multifida se reproduit de janvier à mars et disparaît en avril, el je pourrais ajouter sur ce que le C. adspersa, à Antibes, se reproduit en mars et avril et disparaît au commencement de l'élé; dans ces deux loca- lités, ces plantes, dont les oosphères sont seules capables de germination, disparaissent donc lorsque là température 344 | C. SAUVAGEAU. s'élève. Autrement dit, tout s’y passe à l'inverse de Plymouth. Il y a là une relation qu’il était bon de relever, mais qui maintenant n’a plus de valeur, puisque le C. adspersa de Guéthary est parthénogénétique comme le C. multifida de Plymouth, bien qu’il disparaisse par l'élévation de la tem- pérature, comme celui d'Antibes et comme le C. multifida de Naples. Comment pouvons-nous expliquer la présence simullanée et en nombre égal de germinations épiphyles thurétiennes et falkenbergiennes sur Le €. adspersa de Guéthary? Puisque, dans mes cultures, les oosphères ont toujours el uniquement donné des germinations falkenbergiennes parthénogé- nétiques, il est légitime de penser que les plantules épiphytes du même type ont, dans la nature, la même origine parthéno- génétique. Quant aux germinations thuréliennes, puisque Thuret les a obtenues également par la parthénogenèse du C.multifida, rien ne s'oppose à ce qu’elles soient attribuables, elles aussi, à la parthénogenèse des oosphères ; il suffirait d'admettre que dans la nature, à Guéthary, se trouvent simultanément réunies les conditions réalisées isolément à Plymouth et à Saint-Vaast; les oosphères pouvant donner parthénogénétiquement l’une ou l'autre sorte de germi- nalion. Une autre explication paraîtra peut-être plus salisfaisante. Il est surprenant que des plantes mâles, en nombre plus considérable que les plantes femelles, soient sans aucune utilité pour la fécondation. Or, à Naples, M. Falkenberg voit la fécondation s’opérer sous ses yeux, les oosphères attirant les anthérozoïdes à une distance relativement considérable : à Antibes, M. de Janezewski constate une sphère d'attraction plus limitée, la fécondation ne se fait pas en cultures cel- lulaires, mais elle a lieu dans les assiettes de culture; à Guéthary, 1l n'y a point de sphère d’attraction, point de fécondation en cultures cellulaires ni dans les vases de cul- ture, mais si les oosphères ne se fécondent pas en captivité, il n’en est peut-être pas de même dans la nature, où la ger- LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 349 minalion des oosphères fécondées donnerait des plantules thurétiennes (1). Cette variation dans l'intensité de la sexualité, pour bizarre qu'elle paraisse, n’est cependant pas nouvelle dans l’histoire des Phéosporées. En effet, on sait que M. Berthold |81] a vu des copulations isogamiques se faire à Naples sous ses veux, et en nombre considérable, avec l’Ectocarpus siliculosus el le Seytosiphon Lomentaria, eltout récemment, M. Oltmanns [99] a vérifié le fait, dans la même localité, pour la première espèce; qu'au contraire, l'£. siiculosus ne m'a montré à Guéthary [96,2] que des copulations très rares, et que M. Kuckuck [98] a obtenu à Helgoland, avec le Scytosiphon, des résultats concordants avec les miens. Je rappellerai enfin que, dans cette même localité de Guéthary, j'ai obtenu avec l'Ectocarpus secundus 96, 2] de nombreuses copulations hélérogamiques,tandis qu'en me plaçant exactement dans les mêmes conditions avec l’£ctocarpus Lebelü, je n'ai jamais obtenu que des germinations parthénogénétiques, et j'ai ré- pélé les mêmes expériences en 1898 sans plus de succès. Les bizarreries que nous présentent ces Ectocarpées peuvent donc nous aider à saisir et à apprécier celles des Cutleria. Je ferai encore une remarque qui, dans une certaine mesure, vient à l'appui de l'hypothèse de la fécondation dans la nature. Partout où l’on a fait des cultures d’oosphères de Cutleria, à Plymouth, Sainlt-Vaast, Guéthary, Antibes, Naples, on à obtenu une seule sorte de germination dans ces cultures. Quand il v avait fécondation, iln’y avail pas parthénogenèse, et quand il y avait parthénogenèse il n’y avait pas féconda- tion (2). Par conséquent, puisque je trouve à Guéthary deux sortes de germinalions, et que les plantes mâles y sont abon- (1) Je reconnais que l’on pourrait aussi bien dire que, les oosphères n’exercant pas la moindre attraction à Guéthary, les germinations y seront nécessairement toules parthénogénétiques. Je me contente d'émettre des suppositions et d'envisager les choses à différents points de vue. On dira d’ailleurs plus loin qu’au point de vue de la théorie le résultat est le meme. (2) L'expérience est incomplète pour Plymouth, mais le résultat en est probable. 340 C. SAUVAGEAU. dantes, il est donc fort possible que les unes proviennent d’oosphères parthénogénétiques et les autres d’oosphères fécondées. | On choisira entre les deux hypothèses précédentes, mais, quelle que soit celle adoptée, elle vient à l'appui de lidée que je soutiens ici, à savoir, que les oosphères de Cutleria, fécondées ou parthénogénéliques, comme les zoospores d'Aglaozonia, donnent en germant ou la forme Thuret, ou la forme Falkenberg, suivant qu'agissent dans un sens ou dans l’autre des condilions que, d’ailleurs, nous ne savons point préciser. On pourrait comparer la variabilité de celte allernance à ce qui se passe chez les Urédinées. On sait que, dernièrement, M. Dietel a montré qu'un certain nombre d’Uromyces el de Puscinia annuels, qui ont à la fois des écidiospores et des té- leutospores, peuvent donner plusieurs générations successives d’écidiospores, et que, par conséquent, l’alternance de géné- rations est plus variable, moins directe qu’on croyait (1). Enfin, on sait aussi que, dans son Mémoire sur la réduction périodique du nombre des chromosomes, M. Strasburger admet que, dans les phénomènes d’alternance de générations, les noyaux dela forme sexuée possèdent moitié moins de chro- mosomes que ceux de la forme asexuée. Je n'ai aucun ren- seignement à donner sur ce sujet, mais une étude du noyau des oosphères du Zanardinia et du Cutleria el des zoospores du Zanardinia el de l’Aglaozonia, serait parliculièrement in- téressante au point de vue de la vérification des idées de M. Strasburger, et aiderait peut-être à comprendre la varia- bilité du produit de la germination des corps reprodueleurs. (1) M. Giard (Comptes rendus, 1891 et 1892) a désigné « sous le nom de pœcilogonie, la particularité que présentent certains animaux, appartenant à une même espèce, de suivre un développement ontogénique différent en divers points de leur habitat, ou même dans une localité unique, mais daus des conditions éthologiques variées ». L'auteur a surtout en vue le développement larvaire, plus ou moins dilaté ou plus ou moins condensé, d’une mème espèce, suivant les conditions dans lesquelles il vit. Le cas des Cutlériacées ne se rattache donc qu'indirectement à la pœcilogonie ; il y avait là cependant un rapprochement à signaier. LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 947 CHAPITRE V LES PLANTULES ÉPIPHYTES DU « CUTLERIA MULTIFIDA » M. Allen, directeur du laboratoire maritime de Plymouth, a bien voulu me faire adresser de très beaux exemplaires de C. mulhfida récollés dansles premiers jours d’août dernier. Tous étaient femelles. La plupart ne portaient aucune ger- minalion de Cullerin, quelques-uns en portaient çà et là, el un exemplaire de grande taille m'en a fourni un grand nombre. Toules les germinalions, sans exceplion, étaient du type Falkenberg. Au lieu d’être éparses sur le thalle, comme celles du €. adspersa à Guéthary, elles sont rassemblées, accumulées sur les sores. J'en ai vu parfois plus d’une dou- zaine sur un même sore ; elles sont insérées en des points quelconques des arbuscules reproducteurs; leurs rhizoïdes descendent vers le thalle et s’enchevêlrent ; les lames aglao- zoniennes et les colonneltes se gênent mutuellement jusqu’à se déformer ; parfois, les germinations croissent les unes sur les autres, el dans ce cas les dissections ne sont pas faciles. l'est donc de toule évidence que ces plantules falkenber- giennes proviennent de la germination parthénogénétique d’oosphères moins agiles que leurs sœurs, qui, au lieu d'aller se fixer au loin, sont tombées dans le buisson des arbuscules reproducteurs et n’en ont pas pu sortir. J'ai vu un certain nombre d’oogones dont la déhiscence n’était que partielle, et J'ai cherché si des germinations ne se seraient pas faites à l'intérieur de la logelle, comme cela arrive pour les sporanges pluriloculaires de l’Acinetospora pusilla et de plusieurs Ecto- carpées, maisje n'en ai point vu trace. La déhiscence succes- sive des logettes n’est pas de nature à surprendre, puisque nous savons que chez les Cutleria, comme chez les Sphace- laria, la déhiscence est indépendante pour chaque logette, mais elle paraît plus fréquente à Plymouth qu'ailleurs. Je ne doule pas que, dans certaines conditions défavorables, les oosphères du Cutlleria perdent leur motilité, deviennent de 9248 C. SAUVAGEAU. véritables aplanospores, autrement dit, qu’elles présentent les élats variés que nous connaissons chez l’A cinetospora pusilla, l’£ctocarpus vurescens, ele. J'ai dit précédemment (p. 274) combien les colonnettes obtenues par M. Falkenberg sont réduites comme taille et comme nombre de cellules, et j'aiinsisté (p.279) sur les plus grandes dimensions et la plus grande complication de celles figurées par M. Church. Aucune de ces germinations falken- bergiennes ne porte de poils sur la colonnelte ni sur la lame rampante. Le seul dessin de plantule aglaozonienne de €. mul- Lifida dans lequel on voit un poil est celui de la figure 10, À, donné par M. Kuckuck /99/, et encore celui-ci est-il éloigné du pied de la colonnette. M. de Janczewski, au contraire. en figure sur toutes ses plantules de C. adspersa; j'en ai représenté aussi sur tous les dessins précédents ; lorsqu'il n y a pas de poil terminal au sommet de la colonnetle, par exemple sur les plantules insuffisamment éclairées (fig. 23), il s’en développe plus tard en un autre point. Mes cultures et celles de M. de Janezewski correspondent parfaitement sous ce rapport aux plantules épiphytes falkenbergiennes s'étant accrues dans des conditions plus normales. Les plantules que J'obtenais dans une simple chambre d’hôtel concordant avec celles de la nature, j'en concluais que celles provenant de cultures établies dans deslaboraloires bien aménagés, comme ceux de Naples et de Plymouth, doivent encore bien mieux représenter les germinalions naturelles. Il y avait donc lieu d’induire que les plantules falkenbergiennes du C. adspersa et du C. mullifida sont construites exactement sur le même type, mais qu’elles diffèrent : 1° dès le début, par la présence d'un ou plusieurs poils chez les germinations du €. adspersa qui manquent complètement chez celles du C. multifida (1); 2° finalement, par la forme de la lame rampante qui dans (1) M. Falkenberg a représenté (loc. cit., fig. 16) une plantule trouvée dans la nature qui, à l'inverse des plantules de culture, se termine en pointe au sommet. Cette pointe est bizarre, mais ne ressemble guère à un poil. LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATION. 349 «, ÿ) = A \= °e SE EN 7 | | rà =? e ne Fig. 25. — Plantules falkenbergiennes épiphytes sur le Cutleria mullifida à Ply- mouth, recueilli dans la première semaine d'août 1899. — À à G, états succes- sifs des plantules ; a, origine de la lame rampante; H, colonnette bifurquée; J, colonnette de forme déviée; K, colonnette accidentellement tronquée dont Le sommet a développé de nouveaux poils. (Gr. 200.) 390 C. SAUVAGEAU. un cas prend celle de l’A. melanoidea, dans l'autre celle de l'A. paroula. Or, non seulement les colonnettes des plantules naturelles du C. multifida portent des poils, mais elles les forment à leur sommet plus (ôt et en plus grand nombre que celles du C. adspersa. En outre, certaines colonnettes du Cutleria de Plymouth sont de bien plus grande taille que celles de Gué- thary, comme on ie voit sur les figures 25 el 26 (1). La plantule 25, A, formée seulement de quelques cellules superposées, est déjà terminée par un poil bien développé ; j'ai vu un cerlain nombre de piantules de cet âge ; elles ne peuvent être confondues avec des germinations étrangères, Ectocarpus, Myriotrichia,.… etc., car on trouve toutes les formes de passage. La plantule de la figure 25, B, un peu plus avancée, a pris quelques cloisons longitudinales, qui sont plus nombreuses sur la figure 25, C, où elles ont été suivies d’un nouveau cloisonnement transversal. Sur la plan- tule 25, 1), les cloisonnements sont encore très réguliers. Sur la figure 25, Æ, 1l n°v a plus d'ordre dansles cloisonnements intercalaires, et certaines cellules, plus grandes que leurs voisines, se diviseront sans doute prochainement. Un peu au- dessus de la base, une cellule {&) à protoplasme abondant et très dense fait saillie et a déjà pris une cloison ; elle est l’ori- gine d'une lame rampante. Sur la colonnelte 25, F, plus grande, plus cloisonnée, et qui porte trois poils terminaux, l'élat de la future lame rampante est un peu plus avancé. Bien que j'aie examiné un nombre considérable de plantules de C. adspersa, je n'ai jamais vu d'exemples aussi nels du pre- mier élat de la lame rampanteque ceux-ci, quicorrespondent (1) J'aurais vivement désiré vérifier ces différences sur des plantes provenant de Saint-Vaast ou de Naples, et j'en ai demandé dans ces deux localités. Mais au moment de la végétation des Cutleria (en 1899) il n'y avait pas de botaniste au laboratoire de Naples pouvant récolter ces Algues. À Sainl-Vaast, où Thuret récoltait le C. multifida en abondance, mais sur un espace {rès limité, on n’a pas pu m'en fournir, soit que la plante ait dis- paru, soit que l’on n'ait pas su retrouver sa station. Lorsque je suis passé à Antibes à la fin de mai dernier, j'ai vu le Zanardinia en place, mais la saison était trop avancée pour trouver des Cutleria. LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 351 d'ailleurs parfaitement à la description de M. Falkenberg. Je les ai observés bien souvent au contraire, el à tous les états successifs, sur les exemplaires de Plymouth. La simple com- paraison des dessins 25, £, et 25, F, montre que cette lame rampante apparaît à un niveau variable de Ja colon- netle, ce qui tient peul-êlre à la posilion plus ou moins gènée occupée par la plantule sur les arbuscules des sores. La figure 25, F°, par sa taille, correspond aux plus grandes colonnettes de Guéthary; elle est plus grande aussi que celles des cultures de M. Church. La colonnette 25, G, la dépasse encore ; le sommet porte cinq poils ; je n’en ai jamais vu aulant sur les plantules de Guéthary, et j'en ai trouvé au maximum sept sur les colonnettes de Plymouth ; la lame rampante basilaire est encore très jeune, et les nombreux rhizoïdes qui se développent sur la colonnette vont la fixer solidement. La lame rampante est plus développée sur la figure À (PJ. EX) : j'ai vu un certain nombre de lames ram- pantes de la même taille et d’autres plus larges. On voit que sa forme première ressemble à celle des lames produites par le C. adspersa ; 1 eût élé intéressant de posséder des étals aussi avancés que ceux des figures 13 el 14% pour la comparaison des états ultérieurs, et dans ce but j'avais prié M. Allen de bien vouloir faire draguer des Cuéleria quelques semaines plus tard. Mais, à la fin d'août, le mauvais Lemps l'en a em- pêché, et en septembre on n'a pas pu retrouver la plante à Plymouth. La colonnette de la figure À (PI. IX) dépassait les dimensions du dessin de quelques rangées de cellules; on remarquera la louffe latérale de poils déjà signalée à propos du €. adspersa ; la lame rampante ne porte pas, au pied de la colonnette, la louffe que je rencontrais sur les plantules épiphytes de Guétharv, et qui paraîl toujours manquer sur les plantules de Plymouth ; c’est sans doule une différence spécifique. Cependant, les poils se forment facilement sur ces germinations de C. multifida ; j'ai vu, en effet, un certain nombre de colonneltes brisées : or, aucune ne réparait sa blessure ni ne prenail de nouveaux cloisonnements {ransver- 302 C. SAUVAGEAU. saux pour acquérir sa longueur primitive, mais presque toutes prolongeaient en poil plusieurs de leurs cellules ter- minales (fig. 25, À). Toutes les colonnettes n’atteignent pas la taille des plan- tules 25, G et (PL. IX) À ; la plantule PB (PI. IX) est de dimen- sions plus modestes. J'ai observé aussi plusieurs plantules bifurquées comme celle de la figure 25, Æ ; d’autres donnent simplement l’apparence d’une bifurcation parce qu’elles crois- sent les unes sur les autres. Enfin, j'ai représenté sur les des- sins 25, /, eL(PI. IX) C, D, FE, plusieurs cas de déformations de plantules gènées dans leur développement ; certaines d'entre elles rappellent celles que j'ai obtenues dans mes cultures où elles étaient en effet trop nombreuses (1). Les plantules falkenbergiennes précédentes, ayant sûre- ment pour origine des oosphèresdu C.multifida, sont instruc- lives, car elles nous montrent leur véritable forme dans la nature. Les plantules oblenues par M. Falkenberg étaient rabougries et incomplèles. La recherche de ces plantules épiphytes donnerait des résultats intéressants par leur com- paraison dans les différentes localités. Toutefois, il faudrait se metlre en garde contre le mélange des formes dans les localités où les deux espèces de Cutleria croissent simullané- ment. CHAPITRE VI RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS. Les Cutlériacées présentent un thalle sexué et un thalle asexué. La plante sexuée du Zanardinia, monoïque, ne dif- fère de la plante asexuée que par la nature des organes repro- ducteurs ; c’est un cas comparable à celui du Padina. La plante sexuée des Cutleria (C. adspersa, C. mullifida) est dioïque ; il y à donc trois sortes de thalles comme chez les Dictyota et Dictyopteris. Mais, à l'inverse de ce qui existe (1) Les plantules de la planche IX sont représentées au grossissement de 240; celles des autres figures au grossissement de 200. LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 393 chez ces deux genres, les thalles sexués el asexuès sont différents comme port, structure et mode d’accroissement. Le thalle à oogones ou à anthéridies des Cutleria, comme le thalle du Zanardinia, est formé par la soudure de deux couches de filaments, dont les cellules subissent ensuite des cloisonnements qui en augmentent la surface et l'épaisseur ; c'est donc à la fois un pseudo-parenchyme et un parenchyme, et Jai indiqué avec détails comment se font la soudure et les cloisonnements. Le thalle à zoospores, au contraire (A G/aozo- nia), est une lame rampante dont les cloisonnements pri- maires, radiaux et tangeniliels, sont marginaux ; la consli- tulion est donc celle d'un parenchyme, et l'apparence extérieure est celle d’un Zonaria. Les Sporochnacées (Carpomitra, Sporochnus, etc...) pa- raissent être les seules Algues où l’on trouve un mode de for- malion du thalle comparable à celui du thalle sexué des Cutleria. Leurs sculs organes reproducteurs connus sont les sporanges unmiloculaires ; le thalle qui les porte correspond donc à un thalle asexué de Zanardinia et non à un thalle asexué de Cutleria. En supposant que les phénomènes géné- raux correspondent à ceux des Cutlériacées, les thalles sexués el asexués seraient semblables, comme dans le Zanar- dinia. On à cru longtemps que le thalle à zoospores des Cutleria était un genre indépendant, nommé À g/aozonia. Puis, quand on découvrit les relations qui l’unissent au Cuéleria, on admit qu'à chacune des deux espèces de nos côtes euro- péennes correspondait un Ag/aozonia particulier : l’A. par- vula était le sporophyte du €. multifida, VA. chilosa le spo- _rophyte du C. adspersa. Le premier rapprochement paraît _actuellément indiscutable ; il n’en est pas demême du second. J'ai rencontré, en effet, à Guéthary et sur la côte nord de l'Espagne une troisième espèce d'A g/aozonia, l'A .melanoidea. que Schousboe avait déjà récollé au Maroc au commence- ment du siècle, mais dont la nature aglaozonienne n’avail pas été exactement interprétée. Or, Je crois avoir démontré, ANN. SC. NAT. BOT. X, 23 304 C. SAUVAGEAU. dans les précédents chapitres, que l’A. melanoidea est la forme asexuée du C. adspersa. Nous connaissons donc trois plantes asexuées et seulement deux plantes sexuées. Le cor- respondant sexué de l'A. chilosa est ignoré; peut-être n'exisie-t-il pas sur les côtes européennes. Si l’on devait admeltre, comme naguère, qu'entre un Cutleria el un Aglaozonia, il y a une alternance de généra- tions régulière, comparable à celle bien connue entre le gamélophyte et le sporophvte d’une Fougère ou d’une Mousse, l'affirmation précédente pourrait sembler hasardée. Mais la distribution géographique suffirait à prouver que cette alternance n’est nullement nécessaire; le C. multifida, en effet, ne remonte pas à une latilude aussi élevée que l'A. par- vula qui existe seul en Écosse et sur les côtes atlantiques de Norvège, où, par conséquent, il se reproduit constamment sans alternance de générations, ou peut-être seulement pres- que constamment, comme à Helgoland. L’A. chilosa se comporte probablement dans la Méditerranée (il n’a pas été cilé ailleurs) comme l'A. parvula dans les régions méri- dionales ; sa forme sexuée a disparu, ou bien elle est représentée par une de ces espèces exotiques, C. pacifica, C. compressa, qui sont encore très incomplèlement étudiées. D'autre part, le C. adspersa vivant dans toute la Méditer- ranée, tandis que son À g/aozonia, l'A. melanoidea, est connu seulement au Maroc et dans le Golfe de Gascogne, c'est qu’il s'y reproduit uniquement par ses oosphères, ou bien plus probablement que, malgré sa grande taille, l'A. melanoidea y à été méconnu jusqu à présent. Même dans les localités où un Cutleria vit au voisinage de son Aglaozonia, celte alternance de générations n’est nullement nécessaire; un Cuéleria peut produire un Cutleria et un Aglaozonia produire un Aglaozonia, de même aussi qu'un Cutleria peut produire un Aglaozonia et réciproque- ment. La parthénogenèse vient encore compliquer la ques- tion. On l’observe non seulement dans des localités où les individus femelles sont en nombre infiniment plus considé- LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 359 rable que les mâles, où par conséquent une fécondation générale des oosphères est matériellement impossible, mais je l’ai constatée à Guéthary où, inversement, les indi- vidus mâles sont plus nombreux que les femelles, où par conséquent on ne s’attendrait pas à la rencontrer. Et le résultat de la germination parlthénogénétique de ces 00- sphères n’est même pas constant; ici, elle donne un Cutleria, là, un À glaozoma. Aussi, ai-je pu proposer deux hypothèses pour expliquer la présence simultanée dans la nature, à Guéthary, des deux sortes de germinations thurétienne et falkenbergienne. Ou bien, ces germinations proviennent uniformément d'oosphères parthénogénéliques, ou bien, si l’on s'appuie sur le fait que les auteurs ont toujours obtenu une seule sorte de germination dans leurs cultures d’oosphè- res, et que d'autre part les oosphères parthénogénétiques m'ont toujours donné en culture des germinations falken- bergiennes, on dira que les germinations falkenbergiennes de Guéthary proviennent d’oosphères parthénogénétiques, et que les germinalions thurétiennes proviennent du déve- loppement d’oosphères fécondées. Cette seconde hypothèse a contre elle que, jusqu’à présent, les auteurs n’ont pas ob- tenu de jeunes Cuüeria dans leurs cultures d’oosphères fécondées, et que les seules germinations thurétiennes pro- venant du Cutleria connues jusqu'ici sont dues à des oosphè- res parthénogénétiques ; mais d'autre part, on admetira difficilement qu'un aussi grand nombre d’anthéridies restent sans emploi, d'autant plus que sur les C. mullifida de Plymouth (où les individus mâles sont exceptionnels), j'a. trouvé seulement des germinations épiphytes de la forme _ falkenbergienne. Et due que soit l'hypothèse adoptée, on conclura que les oosphères de Cutleria, fécondées ou par- thénogénétiques, comme les zoospores d’A g/aozonia, don- nent en german la forme thurétienne ou la forme falken- bergienne, suivant qu'agissent dans un sens ou dans l'autre des condilions que nous ne savons point préciser. Les plantules que j'ai trouvées sur le C. adspersa et le 306 C. SAUVAGEAU. C.multifida sont plus parfaites et plus développées que celles qui ont élé obtenues dans lescultures. Par conséquent, dans l'étude complexe des Cutlériacées, il sera prudent, doré- navant, de ne pas s’en tenir à l’élude de germinations dans des vases de culture, et de rechercher parallèlement celles-ci dans la nature. J'ai montré comment une germination thurétienne de C. adspersa, un simple filament, se transforme en une lame frangée et fasciée. L'évolution se fait en deux temps, car les filaments se soudent d'abord en un organe intermédiaire, que j'ai appelé le support, et qu’il y aurait lieu de rechercher sur le C. multifida et le Zanardinia. Les germinations falkenbergiennes sont plus curieuses encore. La /ame rampante a une réelle ressemblance avec un Zonaria par sa structure et son mode d’accroissement ; elle porte des louffes de poils endogènes comme celles du Dictyota (1), mais la fructification est différente de celle d’une Dictyotée. Les sporanges renferment des zoospores en nombre variable. La présence de zoosporanges, identiques sur les Zanardinia et Aglaozonia, ne se retrouve pas chez les Dictyotées, dont on considère au contraire les tétraspo- ranges comme caractéristiques, et c'est là une différence fort importante. Toutefois, M. Bornet a cité le cas du Zona- ra Tournefortii comme étant sous ce rapport une déviation au Lvpe des Dictyotées; les sporanges, complètement exserts après déchirure de la cuticule, et entourés de paraphyses, renferment huit spores au lieu de quatre, disposées à l’inté- rieur du sporange comme les oosphères d'un Fucus dans l’'oogone. On n'a vu ni la déhiscence, ni l’élat de ces spores; qu’elles soient moliles ou non, les sporanges qui les renfer- ment se rapprochent davantage des sporanges d’Ag/aozontia que les autres tétrasporanges. [l existe done des affinités réelles, mais incomplètes, entre le thalle asexué du Cutleria et celui des Dictyotées. FH (1) À ma connaissance, les poils du Zonaria n’ont pas été étudiés à ce point de vue. ci LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 997 Certains Sphacelaria présentent à leur base une lame rampante encore peu éludiée, que l’on pourrait peut-être comparer à un Aglaozonia, bien que celui-ci ne noircisse pas par l’eau de Javel. Mais le caractère d’une réaction chi- mique de la membrane ne me semble pas avoir la même importance que les caractères morphologiques. Le Battersia a un thalle crustacé sans sphacèle, comparable à celui d’un Aglaozonia, el ses sores fructifères (bien que les sporanges uniloculaires soient seuls connus), qui sont ses seules parties dressées, ne paraissent pas sans analogie avec ceux des Cutlériacées. Lorsque j'ai annoncé la présence d’anthéridies chez le Sphacelaria Hystrir |98,3| et l’'Halopteris filicina 199, 2}, j'ai fait remarquer que la siruclure et le mode de déhiscence des anthéridies el des sporanges pluriloculaires (oogones) étaient {rès comparables chez ces plantes et chez les Cutlériacées et Tiloptéridacées. La disposition en sores des sporanges uniloculaires d’'Aglaozonia rappelle les sores des Laminaires, les dimensions mises à part. Les cloisonne- ments secondaires sont assez rares chez les Phéosporées ; j'en ai mentionné d’abondants chez l’A. melanoidea et on connaît ceux de certaines Laminaires. Que l'Aglaozonia provienne de l’une ou de l'autre sorte d'éléments reproducteurs, il n’est pas un produit direct de la germinalion, mais un produil secondaire, toujours formé par un proembryon ou colonnette. On à dit que des lames d'Aglaozonia naissaïient sur des Cutleria confervoïdes, mais il m'a semblé que ces planlules étaient plutôt des colon- nettes très peu développées, produisant un Ag/aozonia à leur base, et se transformant en filaments de Cutleria à leur sommet; j'ai appelé cette sorte de plantule Forme Church, par opposilion aux formes Thuret et Falkenberg. On a oblenu en cullure des organes reproducteurs, oogones ou anthéridies, identiques à ceux des vrais Cutleria, sur des filaments portés au sommet de ces colonnelles, mais on n’a point vu encore ces filaments se transformer en thalle fascié (à moins qu'il en soit ainsi sur les plantes norvégiennes cilées 208 €. SAUVAGEAU. par M. Gran); toutefois, il est à prévoir que ce cas sera observé un jour ou l’autre. Ainsi, la colonnelte produit normalement à sa base un A glaozonia, el parfois aussi à son sommet un Cufleria. Les auteurs ont cité une multiplication par proliféralion super- ficielle sur le Zanardinia et le C. mulnfida, et le mode d’accroissement et de végéiation des Aglaozonia est très favorable à leur multiplication par boutures marginales. Au. contraire, on n’a jamais observé qu’un thalle de Cutleria pût naître par prolifération sur un thalle d'A glaozonia et réciproquement, ni qu'une colonnette fût porlée par lun ou par l’autre thalle. Il y a opposition complète entre le Cutleria et l'A glaozonia. La colonnette est au contraire un lien entre eux, bien que sa structure diffère nettement de l’un et de l’autre. Elle nous apparaît donc comme un organe essentiel et primordial, dont l'importance phylogénique est sans doute considérable, mais impossible actuellement à préciser. Bien qu'elle soit longlemps persistante sur les plantules falkenbergiennes, elle ne peut jouer qu'un rôle physiologique insignifiant à partir du moment où la lame rampante à pris un certain développement; son rôle mor- phologique est considérable, au contraire, puisqu'elle paraît être l’origine nécessaire de l'Aglaozonia. C’est un proem- bryon, mais un proembryon alavique. La détermination de sa vraie nature serait d’un aussi grand poids, pour la déter- mination des affinités des Cutlériacées, que la connaissance de l’origine du thalle et de la structure de leurs organes reproducteurs. Un Cutleria n’est pas une synthèse de deux genres, mais de trois : le Cutleria proprement dit, l’Aglao- zonia, et la colonnelte de genre inconnu. Mais je ne vois pas de genre actuel de Phéosporée ayant le mode de struc- ture et de développement de la colonnette. Toutefois, à pre- mière vue, une colonnette n’est pas sans ressemblance avec un Asperococcus jeune, mais celui-ci devient fistuleux avec l’âge, et ses poils sont endogènes, landis que la colonnelle reste pleine et porte des poils exogènes. Elle me paraît or Tlone a IH TO, Ann, des Sc. nat: 62 Serie. Ci Vi . M] er j ES) = \ : É 2 \ > 2 ed DEEE EEE Ke de ue. CE Pr ur Cuir ene CÉSEEIRS HOT Es À | LEE HET CAS RES SR LR STI TIC AR RSS MASTER CAES à ee tente é ose a oi LS pm = [] eu 5 LES CUTLÉRIACÉES ET LEUR ALTERNANCE DE GÉNÉRATIONS. 359 se rapprocher davantage des Myriotrichia et surtout des Litosiphon, qui, comme elle, sont pleins et portent des poils exogènes, mais ceux-ci sont diffus au lieu d’être localisés en touffes. D'ailleurs, l'étude de la colonnette est à son début; rien n'indiquait, dans le Mémoire classique de M. Falkenberg, qu’elle pût acquérir une taille égale à celle des plantules que j'ai représentées ici ; aussi n’avait-on point cherché à se rendre compte de sa vraie nature ni de ses affinités. De même que nous irouvons, parmi les germi- nations épiphytes, de rares plantules churchiennes qui nous éclairent sur le rôle de la colonnette, on trouvera peut-être un jour d’autres plantules anormales, dont la colonnette portera des organes reproducteurs lui appartenant en propre, el qui nous indiqueront ses affinités réelles. Je résume ci-dessous les affinités des différentes parties d'un Cutleria. Alle soxuc Thalle : £ctocarpus, Tilopteris, Carpomitra. (Cuéleria) Organesreproducteurs:Tilopteris, Sphacelaria. Colonnette Thalle : Myriotrichia, Litosiphon. J D CUTLERIA (7 | Organes reproducteurs : ?? Thalle : Battersia, Sphacelaria, Zonaria, Padina, Thalle asexué Dictyota. (Aglaozonia) Organes reproducteurs : Zonaria, Laminaria. EXPLICATION DE LA PLANCHE IX : 26. — Plantules falkenbergiennes épiphytes sur le Cutleria multifida à Plymouth, recueilli dans la première semaine d'août 1899. — À, B, plan- tules normales ; GC, colonnette correspondant à la figure 25 J, mais plus âgée ; D, E, colonnettes déformées. (Gr. 240.) INDEX BIBLIOGRAPHIQUE 48. J. Acaron, Species Genera et Ordines Algarum; vol. I (Lund, 1848). 86. F. ArDissoxe, Phycologia mediterranea; vol. I (Varese, 1886). 89. E.-A. BattTers, À List of the Marine Algæ of Berwick on Tweed (Ber- wickshire Naturalist’s Club Transactions, 1889). 81. BenrHozp, Die geschlechtliche Fortpflanzung der eigentlichen Phaeos- poreen (Mittheilungen aus der Zoologischen Station zu Neapel, vol. IF, 1881). 82. Benraon, Ueber die Vertheilung der Algen im Golf von Neapel nebst einem Verzeichnis der bisher daselbst beobachteten Arten (WMittheil- ungen,.… etc., vol. III, 1882). : 92. En. Borner, Les Algues de P. K. A. 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LespinassEe, Les Algues du sud-ouest de la France (Actes de la Société linnéenne de Bordeaux, vol. XXXVI, 1883). . Lioyp, Algues de l'ouest de la France (exsiccata). 99. F. Dante, Ueber die Sexualität der Ectocarpeen (Flora oder allgemeine Zeitung vol. LXXXV, 1899). 76. J. Reinke, Ueber das Wachsthum und die Fortpflanzung von Zanardinin collaris Crouan (Z. prototypus Nardo) (Monatsberichte der Akademie der Wissenschaften zu Berlin, aus dem Juhre, 1876). 78,1. J. Remke, Entwicklungsseschichtliche Untersuchungen über die Dic- tvotaceen des Golfs von Neapel (Nova Acla der Ksl. Leop.-Carol.- Deutschen Alkademie der Naturforscher, vol. XL. Dresde, 1878). 78,2. J. Remwke, Entwicklungsgeschichtliche Untersuchungen über die Cutleriaceen des Golfs von Neapel (Nova Acta... etc., vol. XL, 1878). 88. J.-J. RonriGuez y FEMENIAS, Algas de las Baleares (Anales de la Sociedud española de Historia natural, t. XVIT, 1858). 96,1. C. Sauvaceau, Remarques sur la reproduction des Phéosporées, et en particulier des Ectocarpus (Annales des Sciences naturelles, Botanique, 8° série, vol. II, 1896). 96, 2. C. SauvacEAu, Observations relatives à la sexualité des Phéosporées (Journal de Botanique, vol. X, 1896, et vol. XI, 1897). 97. CG. SauvacEau, Note préliminaire sur les Algues marines du Golfe de Gascogne (Journal de Botanique, vol. XI, 1897). 98, 1. C. SAUVAGEAU, Sur quelques Myrionémacées (Annales des Sciences natu- relles, Botanique, 8° série, vol. V, 1898. 98,2. C. SAUVAGEAU, Sur l’origine du ‘halle des Cutlériacées (Comptes rendus de l'Académie des Sciences, vol. CXXVI, 16 mai 1898). 98, 3. C. SauvacEau, Sur la sexualité et les affinités des Sphacélariacées (vid. vol. CXXVI, 6 juin 1898). 99,1. C. SOVA GA US Sur les Algues qui croissent sur les Araignées de mer dans le Golle de Gascogne (Ibid., vol. GXXVIIT, 13 mars 1899). 9,2. C. SauvacEau, Les Acinetospora et la sexualité des Tiloptéridées (Jowr- nal de Botanique, vol. XIIT, 1899). 3602 C. SAUVAGEAU. 99,3. C. SauvacEAu, Sur l'alternance de générations des Cutleria (Comptes rendus de l’Académie des Sciences, vol. CXXIX, 9 octobre 1899). 50. G. Taurer, Recherches sur les Zoospores des Algues et les Anthéridies des Cryptogames (Annales des Sciences natur es pure 3esérie, vol. XIV, 1850). | ile 2 THURET, Ibid. 2€ partie (1bid., vol. XVI, 1850). he | THURET, Recherches sur la fécondation des Fucacées et les Anthéri- ie des Algues, 2e partie (Ibid., 4° série, vol. III, 1855). 18. Taurer et BorNeT. Études phycologiques (Paris, 1878). 95. DE Toni, Sylloge Algarum, vol. IT; Fucoideæ, 1895. 65. G. ZANARDINI, Iconographia phycologica Her amet adriatica, vol. Il (Venise, 1865). # TABLE DES MATIÈRES CONTENUES DANS CE VOLUME L’assimilation chlorophyllienne et la coloration des plantes, par MORE CRTÉREON SR Re nt De ee à D te etais o Surles-Coulacées, par M. PH: VAN TIEGHEM. 0 ....,.:...../5..:.... Sur les genres Actinidie et Sauravie, considérés comme types d’une famille nouvelle, les Actinidiacées, par M. Px. van TIEGHEM. ...... Influence des différentes radialions lumineuses sur la forme et la structure des plantes, par M. E. TEODORESCO.. . 4 ...:..,.:.... Les Cutlériacées et leur alternance de générations, par M. C. SAUVAGEAU. TABLE DES ARTICLES PAR NOMS D'AUTEURS Grirron (E.) — L'assimilation chlorophyllienne et la coloration des plantes. :. Re Pneu de à SR A eee ec avee ‘ SAUVAGEAU (C.). — Les Cutlériacées et leur alternance de générations. TEonorEsco (E.).— Influence des différentes radiations lumineuses sur latformerellastructurecdes plantes, JL. ee... ... . TiEGHEM (Px. VAN). — Sur les Coulacées....... DD b0 CN A OAMACIE Mere Tiecueu (Px. van). — Sur les genres Actinidie et Sauravie, considérés comme types d’une famille nouvelle, les Actinidiacées........... . TABLE DES PLANCHES ET DES FIGURES DANS LE TEXTE CONTENUES DANS CE VOLUME Planches ! à IV. — Assimilation chlorophyllienne et coloration des plantes. Planches V à VIII. — Influence des différentes radiations lumineuses sur la forme et la structure des plantes. Planche IX. — Cutleria adspersa. Figures dans le texte 1 à 15. — Assimilation chlorophyllienne. Figures dans le texte 1 à 20. — Influence des différentes radiations sur la structure des plantes. Figures dans le texte 1 à 25. — Cutlériacées. Corg£iL. — Imprimerie Ep. CRÉTÉ. ne SEE ss Eu Lee Se NE : a nue” AU QE ee n ILES £ # 4 # 1 DD CA TES RAS d \reE “ &\! ay DU ile}! ÿ; AT : # F Ÿ Lt - 7. 1 Re \ - TE : V2 ù x #2 V ee is ! < jp >, x 3 es se: < k ü 2 se : Sur Î fe Ê LA « Pire <: ï 3 ; F re 7 ÿ À e > fs 0 x k ; OS 2 / NS PSN 28 APN À 2. 7 2 PS ER PS PSN PNR LP he À PA, JA PR ÿ PE TP RO RS OC ISA SC IN A A TR AS LL LL TRS tt Done talent bettttatatetsietetotetiatsatasttdtatastats = è DE re dns étsd és St RE me DO nat re mm ms move métier er de are 7 « nn ee ee eme + « = }