De 71 PART È #3 PRES siritiiees HE ss: HSE FE RRFENES 23 HO 2À = - = TA: # LE NA M DU ATEN ur ÉMANES AO Mu 4H MALE FHIETTUA HER ) ONE DAT ft) ia ANNALES DES SCIENCES NATURELLES NEUVIÈMNE SÉRIE ZLOOLOGIE ANNALES DES SUIENCES NATURELLES ZOOLOGIE COMPRENANT L'ANATOMIE, LA PHYSIOLOGIE, LA CLASSIFICATION ET L’'HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX PUBLIÉES SOUS LA DIRECTION DE M. EDMOND PERRIER NEUVIÈME SÉRIE TOME XVIII PARIS MASSON ET Ci, ÉDITEURS LIBRAIRES DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE 120, Boulevard Saint-Germain 1913 Aer À. és = y + … 1: ét 2 x < " 42 » | # fe L | Tous droits de reproduction, de traduction et d'adaptation 5) SP ES 5 | réservés pour lous pays. = & à PENRUE * * L “ ‘ 2 1% # ñ = ’ * : + ÿ oi ù Were x À ’ i CRE CET Lens « PR . # LE: .. É s 5 - F 4 . ‘ = = US 4 pu v : »Æ. à En PERLE 27 de ri Pet Tr à fs #1 sr 4 4 RARE se. Fa CE SVT - Ce 2 ET = ee … dt PEUT ep t Û Her Ë RECHERCHES SUR LES CONDITIONS DU DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES Par M. André MARTIN CHEF DE TRAVAUX À L'ÉCOLE NATIONALE VÉTÉRINAIRE DE TOULOUSE. INTRODUCTION Nous avons entrepris, avec M. Jammes, une série de recherches expérimentales ayant pour but le déterminisme du développement des Nématodes parasites des Vertébrés homo- thermes. Dans les ouvrages de Zoologie et de Parasitologie, il est dit que ce développement est subordonné à des conditions parücuhières — conditions favorables — réalisées ou non dans les milieux où se trouvent les œufs. La recherche de ces « con- ditions favorables » a été, presque toujours, dominée par le désir de préciser l’évolution de ces parasites. Cette con- naissance est nécessaire à la pathologie, à la prophylaxie et à l'hygiène ; ainsi s'explique la direction donnée à ces travaux. D'autre part, l'anatomie, l'histologie et l’embrvologie de ces ani- maux ont excité pendant longtemps la curiosité des chercheurs. La biologie des Nématodes parasites, envisagée en dehors de toute préoccupation médicale, reste à peu près mexplorée, et le nombre des travaux qui s’y rattachent est des plus res- treints. Il nous à paru utile d'orienter nos recherches de ce côlé. Les expériences faites en collaboration avec M. Jammes ont servi de base à ce travail; leurs résultats généraux ont été publiés dans une série de notes (44) à l'Académie des Sciences et à la Société de Biologie, depuis l’année 1906. J'ai fait, en outre, les expériences et des observations personnelles qui m'ont ANN. DES SC. NAT. ZU0OL., 9e série, LES XVI 1 > ANDRÉ MARTIN permis de préciser un certain nombre de points et d'ajouter des faits nouveaux et intéressants à ceux que nous avions publiés en commun. | L'intérêt qui s'attache à ces questions est considérable, lin- fluence des agents physico-chimiques du milieu sur les êtres vivants et sur les phénomènes de la vie apparaissant chaque jour plus évidente. Les recherches exposées dans ce travail ont été faites aux laboratoires de Parasitologie de l'École vétérinaire et de Zoologie de la Faculté des Sciences de Toulouse. Je dois exprimer ici mes remerciments à tous mes maîtres : M. le pro- fesseur Neumann de l'École vétérinaire, auprès de qui je rem- plis les fonctions de chef de travaux. Avec lui, J'ai acquis le désir de l'exactitude et la conscience dans la recherche qui caractérisent tous ses travaux ; il a été pour moi le maitre aux critiques sévères mais précieuses et aux encouragements inces- sants et je lui conserve une affectueuse reconnaissance ; — M. le professeur Moquin-Tandon quim'afaitl’accueille plus cordial; — M. le professeur Jammes qui, en acceptant ma collaboration, a provoqué les premières recherches d'où ce travail devait sortir. Qu'ils reçoivent tous deux l'expression de ma gratitude. M. le professeur Prunet à bien voulu présider la soutenance de cette thèse; je le remercie de l'honneur qu'il me fait. M. le professeur Nicolas, de l'École vétérinaire, m'a donné d'utiles indications pour la partie physico-chimique de ce travail; je l'emremercie bien vivement. Les matériaux de cette étude m'ont été obligeamment fournis par mon confrère, M. Sabalté, vétérinaire-directeur des abat- toirs de Toulouse; qu'il reçoive lui aussi mes meilleurs remer- ciments. | La structure de l'œuf mür des Nématodes parasites est con- nue. La cellule-œuf, avec ses matières de réserve, est entourée par la membrane vitelline et par la coque ; elle évolue à l'inté- rieur de cette double enveloppe. La coque est formée de minces couches de chitine superposées ; elle a une épaisseur variable : très épaisse chez les Ascarides, dont les embryons n'éclosent pas dans le milieu extérieur, elle est plus mince DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 3 chez les Strongylidés, dont l'embryon devient libre au dehors; elle est encore plus réduite chez les Nématodes vivipares en général. C’est elle qui donne à l'œuf sa forme particulière, sphérique, ovoïde, ellipsoïdale, etc. La membrane vitelline est plissée à la face interne de la coque ; elle est bien visible sur les œufs d’Ascarides; après l'éclosion de l'embryon, elle fait souvent hernie par lorifice de la coque. Le protoplasme de la cellule-œuf est riche en matières nutri- tives; il est tantôt brillant, tantôt sombre ; ce dernier aspect s’observe surtout sur l'œuf de l’Ascaride du Veau. Parfois, la segmentation a lieu dans l'utérus de la femelle où l'embryon se développe et éclôt (Filaires, Trichine); parfois la division cellulaire commence et s'arrête au stade six, huit, dix blastomères, pour ne se poursuivre qu'après la ponte (Scléro- stomes, Ankvlostomes, etc.). Enfin, dans un grand nombre de cas (Ascarides, Hétérakis, Trichocéphales, etc.), lasegmentation ne commence pas dans les voies maternelles ou n'y débute que très exceptionnellement. Les Nématodes ovipares des Mammifères el des Oiseaux, et surtout ceux dont l'embryon n’éclôt pas dans le milieu exté- rieur, seront seuls envisagés dans ce travail consacré à l'étude des conditions physico-chimiques du développement de l'œuf. Celui-ci est rejeté dans les milieux les plus divers, où il subit l'influence de facteurs physiques et chimiques auxquels son évolution ultérieure et sa destinée restent subordonnées. Après avoir séjourné au dehors un temps variable, pendant lequel l'embryon peut se développer, l'œuf est introduit dans le tube digestif d’un Vertébré, où il rencontre des conditions nouvelles et de nouveaux agents, les diastases. Nous examinerons l’ac- tion de ces différents facteurs et les réactions que l'œuf leur oppose. | Les recherches ont porté sur l'œuf d’un certain nombre de Nématodes. Celui d'Ascaris ritulorum a été pris pour type; il n'a Jamais été étudié, et, d'autre part, ce ver est très fréquent sur les veaux sacrifiés à l'abattoir de Toulouse. Les expériences ont été étendues à l'œuf d’'Ascaris suis, d'Ascaris canis et d'As- L'HEPEE ANDRÉ MARTIN caris equorum. Bien que ce dernier ait fait l'objet d’un certain nombre de travaux, son étude biologique m'a donné quelques résultats nouveaux et intéressants. L’œuf d’'Heterahis columbae etde Trichocephalus depressiusculus ont été soumis aux mêmes expériences, mais le matériel m'a souvent fait défaut. J'ai aussi utilisé les œufs de Sclerostomum equinum et de Sclerostomum vulqare. | Ce travail comprend trois parties : Dans la première sont exposées les expériences sur les con- ditions physico-chimiques du développement de l'œuf. Celui-ci est envisagé dans le milieu extérieur, puis dans l'organisme de: l'hôte. L’embryon devenant libre dans le tube digestif, l'étude des facteurs de sa mise en liberté fait l'objet d’un chapitre spécial. La deuxième partie est consacrée à l'étude critique de l'action des facteurs physiques et chimiques dans le développement et la conservation de l’œuf. J’examine successivement l'action des agents chimiques {corps en dissolution dans le milieu, oxygène, eau), le rôle de l'enveloppe ovulaire, et enfin l’action de la température. Dans la troisième partie, j'essayerai de montrer comment, à l'aide de ces résultats expérimentaux, il est possible d'expliquer le mécanisme de l’infestation, la conservation et la destruction de ces parasites dans le milieu extérieur. Des exposés d'expériences sont toujours fort arides; aussi, pour en faciliter la lecture, je dresserai de nombreux tableaux. Ils feront suite à l'étude du développement dans chaque milieu et syvnthétiseront les résultats obtenus avec les œufs des divers parasites. PREMIÈRE PARTIE EXPÉRIENCES SUR LE DÉVELOPPEMENT DE L ŒUF CHAPITRE PREMIER ÉTUDE DES CONDITIONS PHYSICO-CHIMIQUES DU DÉVELOPPEMENT Lorsqu'il est parvenu dans le milieu extérieur, l'œuf subit l'influence d’un certain nombre de facteurs physico-chimiques : température, humidité, réaction et composition chimiques du milieu, aération, etc. Des milieux de culture très simples ont élé employés pour étudier l'action de ces différents agents. L'eau distillée a servi d’étalon; avec ce liquide, il a été préparé des solutions de corps variés qui réalisent les réactions acide, alca- line et neutre que les œufs rencontrent au dehors et qui per- mettent aussi d'étudier l'action propre de chacune des substances dissoutes : acide chlorhydrique pur liquide du commerce en solution à 2 p. 1000; acide lactique à 1, 2 et 10 p. 1000; bicarbonate de sodium à 2, 4, 6 et 8 p. 1000; carbonate de sodium à 8 p. 1 000 ; chlorure de sodium à 8 p. 1 000. D’autres corps ont été également étudiés : ammoniaque, aldéhyde formique du commerce, glycérine, chlorure de potassium, chlorure de magnésium, chlorure de calcium, etc. Ces solutions étaient laissées à la température du laboratoire (150 environ) ou maintenues dans deux étuves réglées, l'une à 340, l’aulre à 380. Les œufs utilisés pour ces recherches ont été pris dans l'utérus de vers frais, souvent mème vivants ; ils étaient toujours exa- minés au microscope pour s'assurer de leur intégrité, puis placés sous une couche de liquide de 2 centimètres à 2 cen- timètres et demi d'épaisseur. Les prélèvements étaient faits avec des pipettes très fines ; à chaque flacon était destinée une pipette soigneusement flambée avant et après chaque prise, afin de détruire les germes et les œufs qui auraient pu s’y trouver. Malgré ces précautions, 6 ANDRÉ MARTIN à plusieurs reprises, des cultures furent envahies par un cham- pignon, ce qui permit d’ailleurs de faire quelques observations intéressantes. Enfin, les flacons destinés à recevoir les cultures étaient passés à l’autoclave à 120 degrés. l. — DÉVELOPPEMENT DE L’'ŒUF DE L’ASCARIS VITULORUM L'’œuf de l'Ascaris vitulorum est ovoïde, sa coque est épaisse et ornée de petites fossettes; la membrane vitelline est plissée à l'intérieur de l'œuf; au centre, le vitellus forme une grosse sphère brun foncé. 14° Développement dans l’eau distillée. a) Température du laboratoire. — À la température du labo ratoire (159 environ) les œufs restent longtemps inertes. Au bout d'un mois, ils sont encore intacts et sans aucun indice de segmentalion. b) Température de 330. — Le développement est assez rapide. Le douzième jour, la culture contient beaucoup d'œufs qui n'ont pas encore commencé à se diviser, mais un assez grand nombre sont en voie de segmentation et offrent tous les stades depuis deux blastomères jusqu'aux morules à gros blastomères. Vers le seizième jour, apparaissent des morules à petits blas- tomères, dans lesquelles on distingue les feuillets ; dans la même prise, on voit aussi quelques embryons incurvés en haricot. Le développement s'accélère ensuite, et, le dix-septième jour, on aperçoit des embryons enroulés et mobiles dans leur coque. L'évolution de l'œuf de lAscaris rilulorum est donc possible dans l’eau distillée, à la température de 339; le stade embryon enroulé est atteint le dix-septième Jour. A partir de ce moment, les embryons s’allongent, acquièrent leur organisation définitive et muenñt dans la coque. L'évolution dans l’eau distillée pure est assez irrégulière ; dans la même goutte de culture, tous les stades sont parfois repré- sentés, et l’on a alors sous les veux les phases successives de l'embryogénie de l'Ascaris vitulorum. c) Température de 389. — La segmentation commence dès les premières heures. Au bout de vingt-quatre heures, presque tous DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 7 les œufs sont divisés et contiennent deux blastomères. Le troi- sième jour, on compte de 8 à 12 blastomères, et le quatrième se montrent quelques grosses morules dont le nombre augmente jusqu’au sixième. Dès ce moment l'évolution ne progresse plus; elle est définitivement arrêtée. 2° Développement en milieu acide. L'acide chlorhydrique pur a été utilisé en solution à 2 p. 1 000 dans l’eau disüllée. a) T'empérature du laboratoire (15°). — À la température du laboratoire, le développement est très lent. Vers le quinzième jour, et dans un petit nombre d'œufs seulement, apparaissent deux et quatre blastomères. Les embryons ne sont complète- ment développés qu'au bout de trois mois. | b) Température de 339. — À cette température, l’évolution se précipite avec une régularité des plus remarquables. Vingt-quatre heures après la mise en culture, tous les œufs sont en segmentation et montrent deux ou quatre blastomères ; le deuxième jour, cinq à douze blastomères; le troisième jour, tous ces embryons sont au stade morule à petits blasto- mères, du quatrième au cinquième Jour, les feuillets se délimitent et quelques embryons s’incurvent en arc; le sixième jour, ils s’enroulent en 8 et s’agitent dans la coque. Les jours suivants, leur développement se parachève. Au moment où 1lss’enroulent, leur corps est court, large et grossièrement granuleux ; de jour en jour il s’allonge, se rétrécit et devient plus finement granu- leux, en même temps, la lumière du tube digestif apparaît. Bientôt ils subissent wne mue dans la coque. À ce moment leur développement est terminé. Ils restent enfermés dans la cuticule exuviale qui leur constitue une gaine. Cette cuticule est bien visible aux deux extrémités du corps de l'embryon lorsqu'ilse contracte dans son intérieur. Les délais que Je viens d'indiquer sont les plus habituels; dans les nombreuses incu- bations suivies, il nes’est produit que des variations peu impor- tantes, lorsque, par ailleurs, les conditions de l'expérience n'étaient pas modifiées. c) Température de 389. — L'incubation, à cette température, donne des résultats imprévus. La segmentation est plus lente ; 8 ANDRÉ MARTIN les stades deux et quatre blastomères n'apparaissent que le deuxième jour ; les morules à gros blastomères se forment du troisième au cinquième jour. Puis, l'évolution s'arrête sans dépasser ce stade, et, au bout de quelques jours, les germes dégénèrent. J'ai fait de très nombreux essais de développement à cette température ; il ne na jamais été possible d'obtenir un seul embryon. On pourrait penser à une action spéciale de l'acide chlorhydrique qui, à ce degré de chaleur, détruirait les blasto- mères et arrèterait l’évolution. Les expériences en milieux alcalin et neutre nous montreront qu'iln’en est rien. Il convient de faire remarquer aussi qu'à cette température de 380, la segmentation est toujours moins régulière qu'à 330 et que beaucoup d'œufs ne se divisent même pas. TagLEau |. — Développement de l'œuf de l’Ascaris vitulorum en milieu acide. 2-3-4 5-10 MORULES For EMBRYONS | EMBRYONS blastomères.|blastomères . RACE He AS A incurvés. enroulés. Solution d'HCI à 2 p. 1000. DORE ee ee 24 heures.|#8 heures. 3e jour.|#e-5e jour.|6e-7e jour. SO er ie 48 heures. 3e-5e jour L'évolution estarrètée et ne dépasse pas ce stade. 3° Développement en milieu alcalin. Le milieu de culture utilisé est la solution de bicarbonate de sodium à divers degrés de concentration, 2 p. 1000, 4 p. 1000, 6 p. 1000 et 8 p. 1000. a) Température du laboratoire. — Dans la solution de bicar- bonate de sodium à 8 p. 1000, la segmentation est très lente: les embryons ne sont développés qu’au bout de trois mois comme dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000. b) Température de 339. — La marche de la segmentation est parallèle dans les quatre solutions. On voit de nombreux stades deux et quatre blastomères au bout de vingt-quatre heures; du DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 9 troisième au quatrième jour, des morules à petits blastomères apparaissent ; les cinquième etsixième jours, les embrvonss’in- curvent, et le septième jour, quelques-uns s’enroulent en 8 ; les embryonsenroulés deviennent plus nombreux les jours suivants; leur structure se perfectionne ; ils acquièrent leurs caractères définitifs et muent dans la coque. On remarque parfois, au début de la segmentation, des différences dans sa rapidité, qui semblent liées au degré de concentration de la solution ; lévo- lution est d'autant plus rapide que ce degré est plus élevé. Mais bientôt elle s'égalise et l'enroulement des embryons se produit à peu près en même temps. c) Température de 389. — La segmentation est d'abord rapide ; dans les vingt-quatre heures on voit des stades quatre blastomères ; le troisième Jour, les morules à gros éléments apparaissent; du cinquième au septième jour, de rares morules à petitséléments se montrent etcommencent à s’incurver. Puis, la segmentation s'arrête et, au bout de quelques jours, beaucoup d'œufs deviennent clairs, réfringents, et leurs blastomères se dissocient. Bientôt tous les œufs sont atteints, et la culture est entièrement détruite quinze à dix-huit jours après la mise en expérience. Le résultat est constant quel que soit le degré de concentration de la solution (2, 4,6 ou 8 p. 1000). Parfois, dans les cultures à 8 p. 1 000, on observe au début, comme à 330, une légère accélération du développement, mais les cinquième, sixième jour, cette avance disparaît et la marche devient parallèle dans les quatre solutions. 10 ANDRÉ MARTIN. Tasceau Il. — Développement de l'œuf de l’Ascaris vitulorum en milieu alcalin. 2-3-4 5-10 MORULES |MORULES à petits [EMBRYONS | EMBRYONS | blas- ; blas- bl à, 8708 blas- incurvés. | enroulés. omêéres. oméres. astomères. | t5mères. Solutions de CONaH à 24 h. 48 h. 3e-4e ]. — — — 24 h. 48 h. 3e jour. je-7e j. (très rares). 380 /1000 ges Si 6/1000 — \ 8/1000 — L'évo- Jution s'arrête à ce stade. A0 Développement en milieu neutre. La solution de chlorure de sodium à 8 p. 1000 à servi de milieu de culture. a) Température du laboratoire. — Le développement est très lent ; les embryons ne sont complètement formés qu'au bout dé trois mois, comme en milieu acide et en milieu alcalin. b) Températüre de 339. — La segmentation est rapide. Le deuxième jour, les stades quatre blastomères sont les plusnom- breux; les morules à gros blastomères apparaissent dès le troi- sième jour ; les morules à petits bastomères du quatrième au cinquième jour; du sixième au septième, les embryons s'incurvent ; ils s’enroulent en 8 les septième et huitième Jours. Puis, comme en milieu acide et en milieu alcalin, ilss’allongent, achèvent leur développement et muent. L'évolution est très. régulière et presque tous les embryons se forment au même moment. c) Température de 38°. — La segmentation est d’abord aussi rapide qu'à la température de 33° ; le deuxième jour; elle atteint les stades deux et quatre blastomères ; du troisième au cinquième jour, celui de morule à gros blastomères. Quelquefois le déve- DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 11 loppement continue et aboutit à la formation de quelques rares morules à petits blastomères. Mais Jamais la segmentation ne . dépasse ce stade ; elle s'arrête le plus souvent à la phase morule à gros blastomères. Malgré. de nombreuses tentatives, 1 a été impossible d'obtenir la formation des embryons à cette température. Les morules dégénéraient toujours au bout d’un temps plus ou moins long. TagLEau Ill. — Développement de l'œuf de l'Ascaris vitulorum en milieu neutre. MORULES | MORULES 2-3 -4 5-10 : à petits | EMBRYONS | EMBRYONS blastomères.|blastomères. É IRDE blas- incurvés. enroulés. blastomères. | {omères. Solution de NaCI à 8/1000. 48 heures.| 48-72 h. 3e jour. 4e-5e j. |6e-7e jour.|7e-8e jour. 48 heures.| 48-72 h. | 3e-5e jour. L'évolution s'arrête à ce stade. Ces premiers résultats permettent de mettre en évidence deux faits importants : 19 La réaction chimique du milieu n’a pas d'influence marquée sur le développement de l'œuf de l’Ascaris ritulorum. Que la solution soit acide, alcaline ou neutre, l'embryon se forme toujours à peu près dans les mêmes délais. Dans l’eau distillée, le développement est plus lent. Les corps en dissolution dans le milieu (HCT, COSNaH, NaC1), accélèrent donc l’évolution. 20 La température est un facteur extrêmement important dans le développement de l'œuf de l'Ascaris vitulorum. La limite optima est 339, A la température plus basse du laboratoire (159 en moyenne), le développement reste possible, mais 1l est considérablement ralenti. À la température de 389, qui est cependant très voisine de celle de l'hôte, l'embryon ne se forme pas ; la segmentation commence mais s'arrête bientôt. On verra plus loin quelles conséquences découlent de ces résultats. 12 ANDRÉ MARTIN Expériences complémentaires sur l'influence de la température et de la nature chimique du milieu dans le développement de l'œuf de l’Ascaris vitulorum. 19 INOCULATIONS À DES INVERTÉBRÉS ET À DES ANIMAUX A SANG FROID. Des œufs d'Ascaris vitulorum, pris dans l'utérus et non seg- mentés, sont injectés dans la cavité générale du Ver de terre {Lumbricus agricola), dans la cavité péritonéale du Triton (Tr1- ton cristatus, T. marmoratus), dans les sacs Ivmphatiques de la Grenouille ({ARana viridis). Mème après de longues périodes, les œufs ne présententaucun indice de segmentation. Dans la cavité périlonéale du Triton et dans les sacs Iymphatiques de la Gre- nouille, de nombreux phagocvtes digèrent la coque. Il est probable que, indépendamment de la température de ces hôtes exceptionnels, leur puissance phagocytaire est un obstacle à l'acclimatation dans leur organisme des parasites des animaux à sang chaud. 20 [NOCULATIONS A DES ANIMAUX A SANG CHAUD. Des œufs pris dans l'utérus et non segmentés sont injectés dans le tissu conjonctif sous-cutané et dans les muscles de la cuisse du Cobaye. Dans le tissu conjonctif sous-cutané, quatre jours après l’in- jection, on voit, noyés dans le pus de l’abcès consécutif, de nombreux œufs en voie de développement, et contenant deux, trois, quatre, et jusqu'à quatorze blastomères. Un nouvel exa- men, faitle vingt-septième jour après l'injection, permet de constater des stades morules à gros blastomères. Aucun œuf n'a dépassé ce stade, et les blastomères sont brillants et en partie dégénérés. Dans les muscles, les phénomènes sont superposables à ceux qui se produisent dans le tissu conjonctif sous-cutané. La seg- mentalion ne dépasse pas le stade morule à gros blastomères. Mais, au bout de vingt-sept à trente-neuf jours, la coque des œufs est amincie; elle finit par disparaitre, digérée par les dia- stases des tissus et du pus dans lequel baignent les œufs. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 13 30 DÉVELOPPEMENT DANS DES SOLUTIONS D ACIDE LACTIQUE. a) Température de 33°. — Dans des solutions d'acide lactique à 1 p. 1000 et 2 p. 1000, la segmentation est très régulière. En vingt-quatre heures, les œufs sont aux stades deux, trois, quatre blastomères ; le deuxième jour, à celui de morule à gros blastomères ; du troisième au cinquième, à la phase morule à petits éléments ; du sixième au septième, à celle d’embrvyon incurvé; ils atteignent le stade d’enroulement du hui- tième au neuvième Jour. Avec une solution d'acide lactique à 10 p. 1 000, la marche de la segmentation est parallèle à celle des solutions à 1 et 2 p. 1000, jusqu'au stade morule à petits blastomères, puis l'évolution s'accélère ; dans presque tous les œufs, les embryons incurvés apparaissent du cinquième au sixième Jour, les embryons enroulés du septième au hui- tième. b) Température de 389. — Dans les solutions à 1 p. 1000, 2 p. 1000 et 10 p. 1 000, la segmentation estpluslente qu'à 330. Les stades deux et quatre blastomères n'apparaissent que le deuxième jour, et les morules à gros blastomères du troisième au cinquième. Puis l'évolution s'arrête. Les blastomères dégé- nèrent dans leur coque au bout de quelques jours; le dévelop- pement est impossible à cette température. TagEau IV. — Développement de l'œuf de l’Ascaris vitulorum dans la solution d'acide lactique. 2-3-% 5-10 MORULES OP UCES ble (si : à petits |[EMBRYONS | EMBRYONS Se blas- DRENOS blas- incuryés. enroulés. tomères. | tomères. | blastomères. | {imères. 1/1000 DIN et oraace | 10/1000 1/1000 8h. |3 jour: | 3e-5° jour. | 10/1000 > 2 L'évolution s'arrête à ce stade. 14 ANDRÉ MARTIN 49 DÉVELOPPEMENT DANS DES SOLUTIONS DE FORMOL. Des œufs d’Ascaris vilulorum, dont la segmentation avait été amorcée dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000, à 330, sont mis, le deuxième jour, dans une solution à { p. 1 000 d’aldéhyde formique du commerce, et maintenus à cette même température de 330. La segmentation continue régu- lièrement et, au bout de deux semaines, la cullure renferme un assez grand nombre d'œufs avec des embryons enroulés et vivants. Dans une solution d’aldéhyde formique du commerce à 5 p. 100, à la température de 339, la segmentation commence et atteint la phase morule en quelques jours: puis les blas- tomères sont tués et dégénèrent dans la coque. Dans l'aldéhyde formique pure du commerce, à la tempé- rature de 330, la destruction des embryons est rapide et com- plète en moins de vingt-quatre heures, sans que le vitellus ait pu se diviser. La possibililé du développement dans des solutions de for- mol est, du reste, démontrée par l'observation suivante. Au mois de juin 1906, des Ascarides du Veau avaient été mis dans de l’eau formolée non titrée, pour y être conservés. Le 25 octobre 1906, J'ai constaté que, sur une femelle de ce lot, presque tous les œufs avaient évolué dans l'utérus même ; la plupart étaient au stade morule, quelques-uns renfermaient des embryons enroulés. IT m'est arrivé assez souvent depuis de trouver des œufs en segmentation dans l'utérus de vers conservés dans l’eau formolée depuis plusieurs mois. 59 DÉVELOPPEMENT DANS DIVERS SELS. a) Solulion de carbonate de sodium cristallisé à 10 H20:. à 8 p. 1000. — À la température de 330 le développement est rapide. Le deuxième jour, la presque totalité des œufs sont aux stades deux, quatre, six et huit blastomères; le cinquième jour, lévolution atteint la phase morule à éléments moyens ; le septième jour, celle de morule à petits élé- ments et d'’embryon incurvé; ces derniers commencent à DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 15 s’enrouler le neuvième jour et deviennent de plus en plus nombreux jusqu'au douzième. À ce moment le développement s'arrête ; le seizième jour, les œufs qui contiennent des embryons incurvés ou des morules sont brillants, vacuolaires et en voie de désagrégation ; le trentième jour, les embryons enroulés ont succombé. ; . b) Solution de chlorure de potassium à 8 p. 1000. — Le déve- loppement estmoins rapide que dans COS Na?. A 339, le deuxième jour, à côté de nombreux œufs non segmentés, on aperçoit des stades deux et quatre blastomères ; le cinquième Jour, presque tousles œufs sont en segmentation et montrent toutes les phases jusqu'aux morules à gros éléments qui sont rares ; le septième ‘jour, celles-ci sont très nombreuses ; elles sont remplacées, le douzième, par des morules à petits éléments et des embryons incurvés ; les embryons enroulés apparaissent le seizième. Un mois après le début de l'expérience, les œufs qui ne renferment pas d’embryons enroulés sont dégénérés et la culture tout entière est détruite le trente-huitième jour. c) Solution de chlorure de calcium à 8 p. 1000. — Dans ce milieu, la segmentation est plus lente. À 330, pendant les neuf premiers Jours, les œufs se divisent peu et ne dépassent pas le stade quatre blastomères. Puis l'évolution devient très rapide, et, le douzième jour, on voit des morules à petits éléments, mais moins nombreuses que dans la solution de chlorure de potas- sium. Le seizième jour, elles sont abondantes et quelques-unes commencent à s'incurver. Les embryons enroulés se forment ensuite lentement ; ils sont très rares au bout d’un mois. Le trente-huitième jour, leur nombre à augmenté; mais tous les œufs arrêtés aux phases embryon incurvé ou morule à petits blastomères sont détruits. Cinquante-trois jours après le début de l'expérience, des embryons sont encore intacts dans la coque et des éclosions se sont produites ; les embryons libres dans la culture sont morts. d) Solution de chlorure de magnésium à 8 p. 1000. — Le développement, à 339, présente à peu près les mêmes parti- cularités que dans la solution de chlorure de calcium. Le cinquante-troisième jour, toute la culture est détruite. A la température de 380, dans ces quatre milieux, le dévelop- 16 ANDRÉ MARTIN pement commence, mais ne dépasse pas le stade morule à gros blastomères. | A la température du laboratoire, les embryons sont enroulés, dès le deuxième mois, dans les solutions de chlorure de calcium et de chlorure de potassium. Dans la solution de chlorure de magnésium les œufs ne sont pas segmentés au deuxième mois et beaucoup sont dégénérés. Quant à la solution de carbonate de sodium, elle à été envahie par un champi- gnon, et l’évolution s’est arrêtée au stade trois, quatre blastomères. TagcEau V. — Développement de l'œuf de l'Ascaris vitulorum dans différents sels. 2-3-4 5-10 MORULES blas- blas- à gros 5 tomères. | tomères. |blastomères.| jomères. incurvés. EMBRYONS enroulés. EMBRYONS Solution de CONa? 8/1000 . [3 jour.| 4e jour. | 6e-7e j. | 7e jour. | 9% jour. | Caci* 8/1600 REV EON ( 12-16 j.116e jour.|21e-98e j. Le « } MeCE 8/1000 j 38 de jour. = _ = Ll , KCI 8/1000 è de-7ej. |12e jour:12e jour.|16e jour. COSNa? 8/1000 \ CaCI? 8/1000 | A cette température, l’évolution s’arrète au stade | MgCl? 8/1000 \ morule à gros blastomères. KCINB/1OOQ ER ENT ) | | | | 380 69 DÉVELOPPEMENT DANS L'EAU DE MER. Il élaitintéressant de voir la marche de la segmentation dans un liquide tenant en dissolution des substances salines diverses: l'eau de mer à été utilisée, en raison de son importance en bio- logie ; elle provenait du laboratoire de zoologie de Banyuls. a) Température du laboratoire. — L'œuf de l'Ascaris vitu- lorum évolue dans l’eau de mer à la température de 150 environ, mails là segmentation est très lente. Les premières: divisions n'apparaissent que le dix-septième jour, les stades quatre blastomères le trente-quatrième. Au bout de trois mois, de nombreux œufs renferment des morules à gros éléments ; après quatre mois et demi, des morules à petits éléments; les DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRÉ DES NÉMATODES PARASITES 17 embryons commencent à s’enrouler à la fin du cinquième mois. b) Température de 339. — A la température de 330 le déve- loppement est beaucoup plus rapide, mais la destinée des œufs et des embrvons est plus précaire. Le quatrième jour, les stades deux, trois, quatre blastomères sont assez nom- breux; les morules à gros éléments apparaissent le dixième jour, et les embryons incurvés le treizième. Un petit nombre seulement de ceux-ci poursuivent leur évolution et donnent des embryons enroulés vers le vingtième jour. Mais, à cette date, la plupart des œufs sont en voie de désintégration. Un mois après la mise en expérience, la culture tout entière est détruite. Afin de maintenir constant le degré de concentration pendant toute la durée de l'expérience, de l’eau distillée, en proportion convenable, était ajoutée à la. culture pour com- penser l'évaporation. TagrEau V bis. — Développement de l'œuf de l’Ascaris vitulorum . dans l’eau de mer. è MORULES 2-3-4 5-10 à gros MORULES EMBRYONS |EMBRYONS blastomères. | blastomères. blas- à pelits incurvés. | enroulés. tomères blastomères. Eau de mer. 330 4 jour. |6e-10e jour. [109 jour.|11e-12 jour.|13° jour.|20° jour. À Température du laboratoire rec : “ : 5e ] : Fe : = A SE : Uresi jour.| 51e jour. de Lee 1 &e-5e mois. | 5e mois. [5-6e mois. 150. | | Les résultats de cette nouvelle série d'expériences sont super- posables à ceux de la série précédente. La température exerce l'influence prépondérante. Lorsqu'elle est inférieure de quelques degrés seulerñent à celle de l'hôte du parasité, le développe- ment embryonnaire de celui-ci est possible et rapide. Lors- qu'elle est égale ou très rapprochée de celle de l'hôte, l'embryon du parasite commence son évolution, mais ne peut la terminer : il est figé en quelque sorte au stade morule qu'ii ne dépasse pas. Dans l'organisme des vertébrés à sang froid et chez le ver ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 9e série. 1943, XVII, 2 24 18 ANDRÉ MARTIN de terre, la segmentation est impossible. Dans le tissu sous- cutané et les muscles du cobaye, dont la température est de 390,5, le développement commence, puis, comme dans les cultures maintenues à 389, il s’arrête au stade morule. Quant à la nature chimique du milieu, elle à peu d'influence sur le développement. Il commence, en effet, dans le tissu con- jonctif sous-cutané et dans les muscles du cobaye, et il se poursuit aussi bien dans les solutions d'acide lactique que dans le formol. Seul le degré de concentration de certains corps a une action manifeste qni dépend encore de la température : à 330, la solution de formol à 5 p. 100 tue bientôt le vitellus en évolution ; le formol pur agit avec plus d'énergie encore, puis- | qu'il le détruit en quelques heures. Par contre, à la température du laboratoire, le formol en solution à 5 p. 100 ne gêne pas le développement. L'influence de la concentration du milieu peut être mise en évidence d’une façon encore plus précise par l'expérience sui- vante. Des œufs d'Ascaris vilulorum sont placés dans la glycé- rine pure à 330 et à 380. Il n'y à pas de segmentation. Au bout de vingt-quatre heures, la membrane vitelline est détachée de la face interne de la coque et s’affaisse sur le vitellus; celui-er a perdu sa couleur sombre, s’est éclairei et rétracté. La culture tout entière est détruite en lrois, quatre jours. Il est cependant des cas où le degré de concentration ne suffit pas à expliquer l'impossibilité du développement. Ainsi, dans une solution de lactose à 8 p. 1000, à 330 et à 380, les œufs de l'Ascaris vitu- lorum ne se segmentent pas. La nature des substances en dissolution dans le milieu aurait donc une certaine action. Il est assez difficile d'expliquer l'absence de segmentation dans le lactose; les œufs utilisés dans cette expérience ne présentaient aucune altération et avaient des caractères normaux. Il était intéressant de faire une étude comparative du développement de l'œuf de quelques autres nématodes parasites. De nouvelles séries d'expériences ont porté sur l'œuf de l'Ascaride du porc, de l'Ascaride du cheval et de l'Ascaride du chien, de l'Hétérakis du pigeon, du Trichocéphale du chien et des Sclérostomes du cheval. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 19 Il. — DÉVELOPPEMENT DE L'ŒUF DE L'ASCARIS SUIS Les œufs de ce ver ne sont pas segmentés au moment de la ponte. Ils sont ovales, plus petits que ceux de l’Ascaride du veau, du cheval et du chien ; le vitellus est clair, brillant ; la d'Ascarides, est entourée d’une couche albumineuse épaisse. Ce parasite est peu fréquent sur Les pores sacrifiés à l'abattoir de Toulouse. Aussi n'a-t-il pas été possible de faire sur lui des expériences aussi étendues que sur l’Ascaris mitulorum. Mais, bien que peu nombreuses, ces expériences ont donné des résultats intéressants. 1° Développement en milieu acide. (Solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000). a) Température de 339, — À cette température, l’évolution est très régulière ; le troisième Jour, tous les œufs sont au stade morule à gros blastomères ; le cinquième jour, ils ont atteint celui de morules à petits blastomères etles feuillets commencent à se délimiter ; le septième jour, les embryons sont incurvés, et le neuvième ils sont enroulés. À partie de ce moment, ces embryons, comme ceux de l'Ascaride du veau, perfectionnent leur structure. Ils s’allongent, deviennent plus finement granuleux, le tube digestif se creuse. Ils subissent ensuite une #ue dans la coque, mais restent enfermés dans la cuticule détachée, qui leur forme une sorte de fourreau ou de gaine. Cette gaine est visible sur l'embryon éclos, elle apparaît distinctement aux deux extrémités du corps de l'embryon qui s’agite dans son intérieur. À cette tempé- rature, le développement est d’une régularité caractéris- tique. Tous les œufs, à peu d’exceptions, sont au même stade, et les embryons apparaissent tous au même moment. b) Température de 389. — Les phénomènes sont tout différents. La segmentation est d’abord extrêmement lente et très irrégulière. Le troisième jour, les deux tiers environ des œufs n'ont pas commencé à se diviser, l’autre tiers est au stade deux blastomères ; il. y a done un retard énorme sur la 20 ANDRÉ MARTIN culture maintenue à la température de 339. Ce retard devient définitif et la-segmentation ne dépasse pas le stade deux blasto- mères dans le petit nombre d'œufs où elle a commencé. Nous observons encore ici l’action retardatrice et nocive de la température voisine de celle de l'hôte du parasite dont nous avons déjà étudié les effets sur l'œuf de l'Ascaris vitulo- rum. L'œuf de lAscaride du Porc est encore plus sensible : la division s’arrête au stade deux blastomères, tandis que, dans les mêmes conditions, l'œuf de l'Ascaride du Veau évolue Jusqu'au stade morule à gros blastomères. Les œufs de l’Ascaride du Porc ne supportent pas longtemps cette température élevée ; le douzième jour, quelques-uns présentent des signes de dégé- nérescence : leur vitellus devient plus clair, réfringent, et se creuse de vacuoles. Ces altérations s’accentuent de jour en jour, et vers le vingt-cinquième, tous les œufs sont détruits. TagcEau VI, — Développement de l'œuf de l'Ascaris suis en milieu acide. u Ë = MORULES 2-3-4 5-10 IMRUCE $ we EMBRYONS | EMBRYONS Fe AR RO à gros à petits ’ ir. lé blastomères. blastomères. blastomères. | Plastomères. incurvés, enroulés. a —— * ———_— Solution d'HCI à 2 p. 1000. 330 | 3e jour. je jour. 1e jour. | 9° jour. 3e jour. Stade \ 2 sur 1/3 des œufs. ) L'évolution est arrêtée à ce stade. 389 2° Développement en milieu neutre. (Solution de chlorure de sodium à 8 p. 1 000). a) Température de 339. — La segmentation est plus lente qu'en milieu acide et aussi moins régulière au début; des morules à gros blastomères apparaissent le troisième jour; mais 11 y à aussi des stades deux, quatre, six blastomères ; l'évolution subit ensuite un temps d’arrêt jusqu’au huitième ou neuvième Jour. À ce moment, la segmentation s'accélère, et le dixième jour, la culture renferme de nombreux embryons DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 21 incurvés; en même temps, le développement paraît s’unifor- miser; dans les œufs qui étaient en retard, la division devient plus rapide, et le treizième jour de nombreux embryons sont enroulés. [ls s'accroissent ensuite, acquièrent leur aspect défi- nitif et subissent une mwe dans la coque sans abandonner leur dépouille exuviale. b) Température de 380. — L'évolution offre les mêmes parti- cularités qu'en milieu acide ; elle est lente et irrégulière, la plus grande partie des œufs ne se segmentent pas, les autres ne dépassent pasle stade deux blastomères, à l'exception dequelques uns, très rares, qui atteignent le stade quatre blastomères. Le développement s'arrête alors; mais les œufs restent plus long- temps intacts que dans la solution d'acide chlorhydrique ; la désagrégalion n'est apparente que vers le vingt-septième jour. Tasceau VIE — Développement de l’œuf de l'Ascaris suis en milieu neutre. ». MORULES ORULE 2-3-4 5-10 à gros = ti EMBRYONS | EMBRYONS : = (TE ë tits : à £ blastomères. blastomères. blas- È PE 3 incurvés. enroulés. tomères. blastomères. ———— RE RE PPT MER | EN | à Solution de NaCl à 8 p. 1 000. 330 | 3e jour. Ge jour. 10e jour. | 13° jour. 3e jour. 1/3 des œufs est au stade 2. L'évolution s'arrête à ce 38° «stade Quelques œufs très rares atteignent le stade 4 dans les jours qui suivent. I Il. — DÉVELOPPEMENT DE L'ŒUF DE L’'ASCARIS EQUORUM L'œuf de l’Ascaris equorum ne ressemble ni à celui de lAscaris citulorum, ni à celui de l'Ascaris suis. Il est plutôt sphérique qu'ovoide ; la membrane vitelline est fortement plissée à la face interne de la coque qui est très épaisse. Au centre FA ANDRÉ MARTIN de la cavité ovulaire et isolé de la membrane vitelline, se trouve le vitellus, qui a l'aspect d’une sphère relativement petite, claire et brillante. 1° Développement dans l’eau distillée. a) Température du laboratoire. — À la température du labora- toire (159 environ) le développement est lent. Les morules à gros blastomères apparaissent le neuvième jour ; les feuillets se délimitent le dix-neuvième ; les embryons s’incurvent le quarante-quatrième ; ils s’allongent lentement, prennent la forme d’un fer à cheval, puis d’un anneau, et enfin commencent à s'enrouler; leur développement est terminé en quatre mois et demi. L'évolution est très homogène ; à cette date, tous les œufs contiennent un embryon. b) Température de 339. — A latempérature de 330, le dévelop- pement présente une rapidité remarquable. Le deuxième Jour, la culture renferme de nombreux embryons incurvés en arc et des morules à petits blastomères. Le quatrième jour, les em- bryons sont enroulés et s'agitent dans la coque. 2° Développement en milieu acide. a) Température de 339. — La segmentation est rapide; le deuxième jour, beaucoup d'œufs contiennent des embryons incurvés, les autres des morules à petits blastomères; le troi- sième jour, des embryons enroulés et mobiles apparaissent dans tous les œufs: ces embryons achèvent leur développement les jours suivants. b) Température de 389. — La segmentation suit une marche à peu près parallèle à celle des cultures maintenues à 330. Le deuxième jour, l'évolution atteint le stade morules à petits blas- tomères,on aperçoit même desembryons incurvés. Letroisième Jour, les embryons s’enroulent et se meuvent dans la coque. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 23 TagceaAu VIIL — Développement de l'œuf de l'Ascaris equorum en milieu acide. 2-3-4 | 5-10 MORURES PURBPES EMBRYONS EMBRYONS à gros à petits RL) Blastomeres MIND tomes incurvés. enroulés. et | | es | ns Solution d'HCI à 2 p. 1000. qu'à 33°. ( qu'à 330. 330 | 2e jour. | 2e jour. | 3e jour. LI | ( 2 jour. 3e jour. 380 2e Jour. | plus rares jou rares \ | 3° Développement en milieu alcalin. (Solutions de bicarbonate de sodium à 8 p. 1000 et à 4 p. 1000). a) Température de 339. — La segmentation est rapide; dès le lendemain, presque tous les œufs sont au stade morule à gros blastomères ; le deuxième jour, quelques morules à petits blasto- mères apparaissent; le troisième jour, on voit dans la culture à 8 p. 1000 des embryons incurvés et des embryons enroulés: ces derniers sont extrêmement nombreux le cinquième jour. Il existe une légère différence dans la rapidité de l’évolution sui- vant le degré de concentration. La segmentation est plus rapide dans la solution à 8 p. 1 000 que dans la solution à 4 p. 1000: les embryons enroulés n'apparaissent dans celle-ei que le sixième Jour. b) Température de 389. — Au début, la segmentation est plus lente qu à 339. Le premier Jour les blastomères sont au nombre de deux ou quatre dans la plupart des œufs et quelques morules à gros blastomères sont aussi formées ; le deuxième jour, le développement s'accélère, de nombreuses morules à petits élé- ments et quelques embryons incurvés apparaissent; le troisième jour, les embryons incurvés sont nombreux, et le cinquième jour, presque tous les œufs contiennent un embryon enroulé. Dans les deux solutions, la marche de la segmentation est sen- siblement la même. ts ANDRÉ MARTIN TagrEau IX. — Développement de l'œuf de l'Ascaris equorum en milieu alcalin. 2-3-4 5-10 MORULES | MORULES | gmMBRYONS | EMBRYONS à 3 à gros à petits ; : ; blastomères. | blastomères. |}jastomères. |blastomères. | incurvés. enroulés. Solution de COSNaH. 8 p. 1000 24 heures.| 2e jour. | 3e jour. |3°-4 jour. ) 330 ! 4 p. 1000 4 heures.|2e-3e jour.|5e-6€ jour.| 6° jour. 8 p. 1000/24 heures.|24 heures.|24 heures.|2e-3° jour.| 3e jour. |3°-4° jour. 380 (rares). £ 4 p. 1000124 heures.|24 heures.|24 heures.| 2e jour. | 3e jour. |3°-4 jour. (rares). 4° Développement en milieu neutre. (Solution de chlorure de sodium à 8 p. 1 000). a) Température de 339. — La segmentation est rapide. Le deuxième jour, tous les œufs sont en division ; la culture ren- ferme tous les stades jusqu'aux morules à petits blastomères et aux embryons incurvés; on voit aussi quelques embryons enroulés ; le troisième jour, ceux-ci sont très nombreux. b) Température de 380. — La marche de la segmentation est la même qu'à 330. Le troisième jour, les embryons enroulés sont nombreux et se meuvent dans la coque. À ce moment, ils sont relativement courts et épais; leur corps est un amas de granulations où l'on ne distingue aucun organe ; la queue est. courte et obtuse, le bouton céphalique indistinct. Si, par écla- tement de la coque, on les fait sortir de l'œuf, ils sont peu actifs et n'effectuent que de lents mouvements d’oseilla- tion ou d'incurvation d'une de leurs extrémités. De jouren Jour, leur organisation devient plus parfaite, le corps s’allonge et se rétrécit, le tiers antérieur est plus finement granuleux. Le cinquième jour, si on fait éclater la coque, les embryons devenus libres sont très acüfs, quelques-unes sont en train d'effectuer leur mue; on aperçoit la cuticule ancienne qui forme une gaine dans laquellese meut le ver ; cette dernière est surtout visible en avant, où elle est soulevée latéralement par l'extrémité orale de l'embryon en mouvement; le bouton céphalique est plus apparent ; les jours suivants la lumière du DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 29 tube digestif est visible ; l'œsophage devient distinct, sa paroi est plus épaisse, sa lumière plus nette. Quant à l'intestin, il est représenté par un fin canal logé dans une bande granuleuse allant du tiers antérieur jusqu’à une petite distance de l’extré- mité caudale, qui est obtuse. | Tasceau X. — Développement de l'œuf de l'Ascaris equorum en milieu neutre. 2-3-4 5-10 MORULES | MORULES | EMBRYONS | EMBRYONS s 2 à gros à pelits . 4 s blastomères. |blastomères.|Ejastomères.|blastomères. | incurvés. enroulés. ne | Solution de NaCI 8 p. 1000. 390 2e jour. 2e jour. £eour. |(P2ejour-1N2e-jour. 3e jour. 3e Jour. 2° jour. 2 jour. 2e jour. | 2e jour. 2e jour. 5° Développement dans divers sels. a) Solution de carbonate de sodium cristallisé à 10H20, à 8 p. 1 000. — À la température de 380, l'œuf de l’Ascaris equo- rum se développe rapidement. Au bout de vingt-quatre heures, tous les œufs contiennent des morules à gros blastomères ; Le troisième jour, les embryons enroulés sont nombreux ; dès le septième Jour, les morules commencent à dégénérer, et les embryons enroulés eux-mêmes donnent des signes de désagré- gation dès le douzième. La destruction est complète le vingt- et-unième Jour. b) Solution de chlorure de potassium à 8 p. 1000 à 389. — Dans ce milieu, la segmentation atteint en vingt-quatre heures le stade morule à gros blastomères ; mais ces dernières sont peu nombreuses, et la cullure montre toutes les phases Jusqu'à celle de morule ; le troisième jour, on voit beaucoup d’embryons enroulés ; leur nombre augmente Jusqu'au septième. À ce moment, les embryons incurvés et les morules dégénèrent; la destruction frappe les embryons enroulés dès le douzième jour, et la culture tout entière est détruite Le vingt-et-unième. c) Solution de chlorure de calcium à 8 p. 1 000, à 389. — Le développement est aussi rapide que dans les deux milieux pré- 26 ANDRÉ MARTIN cédents ; au bout de vingt-quatre heures, la culture ne renferme que des stades deux, quatre et huit blastomères, mais, dès le troisième Jour, les embryons enroulés sont nombreux. Le dou- zième, les morules et les œufs moins avancés dégénèrent. Au bout d'un mois, la plupart des embryons sont encore intacts et vivants; la culture Lout entière est détruite le quarante-cin- quième Jour. | e) Solution de chlorure de magnésium à 8 p. 1000 à 389. — L'évolution est comparable à celle que l’on observe dans la solution de chlorure.de calcium. Les embryons se forment dans les mêmes délais, mais la destruction est un peu plus rapide, et le quarantième jour la culture est détruite. Pour étudier l'influence du degré de concentration de ces sels sur le développement de l'Axscaris equorum, j'ai utilisé les solutions demi-normales de NaCI, KCI, CaCP, MgCB; ces nou- veaux milieux ont été maintenus à la température de 380. 19 Solution demi-normale de KCT (37,25 p. 1000). — Le développement est rapide. Dès le deuxième Jour, tous les œufs renferment des embryons incurvés; quelques-uns sont en fer à cheval; ces embryons sont enroulés le quatrième jour. 20 Solution demi-normale de MGjCP (25,825 p. 1000). — Le deuxième jour, les morules à petits éléments dominent, les embryons incurvés sont rares; mais le quatrième, lesembryons enroulés sont nombreux. 39 Solution demi-normale de NaCT (29,25 p. 1000). — Le deuxième jour, les morules à petits éléments sont abon- dantes et les embryons incurvés plus nombreux que dans la solution de MgCP; les embryons enroulés apparaissent le sixième jour. 40 Solution demi-normale de CaCP (27,77 p. 1000). — Les morules à petits éléments dominent dès le deuxième jour; les embryons incurvés sont rares; les embryons enroulés sont développés le quatrième jour. Le degré de concentration de la solution n'a qu'une influence peu marquée sur la segmentation ; c'est à peine s’il lui impose un retard d'un à trois jours. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 27 TasrEau XI. — Développement de l'œuf de l'Ascaris equorum dans les différents sels. 2-3-4 5-10 MORULES MORULES | EMRRYONS | EMBRYONS soc VD] Re à gros à petits 3 2 É blastomères. | blastomères. | }1astomères. blastomères.| incurvés. enroulés. Solutions de : 24 heures.| 3e jour. | 3° jour. | 3° jour. 24 heures.|24 heures.|24 heures.| 3° jour. | 3e jour. 3e Jour. 24 heures.|24 heures.|24 heures.| 3e jour. 3e Jour. ge Jour. (rares). 2% heures.|24 heures.|24 heures | 3e jour. 3e jour. 3e jour. (rares). 2e jour. | 2e jour. | 5°-6° jour 29 95 0 (moins (29, L00) nombreux). N CacF 2e jour. | 2 jour. |4°-6° jour. 380 | bo7 770 (rares). ( (27,71 100) 2 : . A0 MgCF > 2e jour. | 2 jour. |4°-6° jour. (23,825 0/5) (rares). AN KCI GI 2e jour. 2e jour. |#4:-6° jour. (37,25 °/00) 6° Développement dans l’eau de mer. Température du laboratoire. — L'œuf de l'Ascaris equorum se développe beaucoup plus vite dans l’eau de mer que celui de l'Ascaris vitulorum. Au bout d’un mois et demi, les embryons commencent à s’enrouler dans les œufs; à la fin du second mois, ils sont complètement développés et vivants. Au début de l'expérience, beaucoup d'œufs présentent un décollement de la membrane vitelline accompagné de la formation de mé- nisques; puis l'équilibre s'établit et la segmentation com- mence. Température de 339. — Le niveau du liquide est noté et maintenu soigneusement constant par addition d’eau distillée 28 ANDRÉ MARTIN pendant toute la durée de la segmentation, afin de compenser l'évaporation et d'empêcher la concentration du milieu. Le deuxième jour, des œufs en assez grand nombre con- tiennent deux et quatre blastomères. Les autres sont clairs et non segmentés; Ja membrane vitelline est détachée de la face interne de la coque et forme un ou deux ménisques. Ce décollement de la membrane vitelline s'’accentue, et l’évolution reste stationnaire jusqu'au neuvième jour. À ce moment, il semble que l'équilibre osmotique entre l'œuf et l'eau de mer s'établisse. La segmentation recommence ; les stades quatre blas- tomères sont plus nombreux. Le treizième Jour, beaucoup d'œufs contiennent des embryons enroulés qui augmentent en nombre les jours suivants. Ces embryons restent longtemps vivants dans l’œuf; le quarante-quatrième jour, on les voit encore s’agiter dans la coque. TagrEau XT Lis. — Développement de l'œuf de l'Ascaris equorum dans l'eau de mer. 2-3-4 5-10 MORULES | MORULES | EMRRYONS | EMBRYONS à gros à petits blastomères. |blastomères. blastomères.|blastoméres incurvés. enroulés. 2 — Eau de mer, 2% jour. 13° jour. Température du À | un mois laboratoire et demi. 159. Deux faits se dégagent de cette expérience : a) au début, la perte d’eau de l'œuf et la lenteur de la segmentation ; b) l'éta- blissement de l'équilibre osmotique et l'accélération consécutive de la segmentation. 7° Développement dans la glycérine pure. Les phénomènes sont identiques aux températures de 330 et de 389. Au bout de vingt-quatre heures, la membrane vitel- line est détachée de la face interne de la coque et un ou plusieurs ménisques apparaissent dans l'œuf ; mais, à l'inverse de ce que nous avons noté chez l'Ascaris vitulorum, la segmen- DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 29 lation est rapide, et des morules à petits blastomères existent dans un grand nombre d'œufs ; le deuxième jour, ces morules ont donné des embryons incurvés, qui s'enroulent le troisième Jour. Le décollement de la membrane vitelline augmente en même temps que la segmentation se poursuit et, dès le neuvième jour, les embryons sont morts dans les œufs. Le vitellus résiste done à l’action déshydratante de la glycérine assez longtemps pour que l'embryon puisse se développer. 8° Développement dans la solution de lactose à 8 p. 1 000. À 330 et à 380 les résultats sont parallèles. Au bout de vingt-quatre heures, dans les deux cultures, la membrane vitelline est intacte et quelques œufs contiennent deux blasto- mères. Le deuxième jour, la segmentation n'a guère pro- gressé ; des stades trois et quatre blastomères apparaissent çà et là dans le champ du microscope au milieu d’un très grand nombre d'œufs dont le vitellus n’est pas divisé. Un accident de culture m'a permis de faire à ce moment une observation très intéressante. Le ferment lactique a envahi la culture maintenue à 380 et s y est abondamment développé en formant un voile dans lequel quelques œufs ont été retenus. Or, tandis que les œufs tombés au fond du tube n'étaient généralement pas segmentés ou contenaient seulement deux à quatre blastomères, les œufs emprisonnés dans le voile avaient tous dans leur intérieur un embryon enroulé. Le lendemain, — troisième jour —, là culture maintenue à 330 était à son tour envahie pat le ferment lactique et les mêmes phénomènes se reprodui- saient. Au fond du tube, la plupart des œufs n'étaient pas divisés ; ceux dont la segmentation avait commencé ne contenaient que deux, trois où quatre blastomères ; les œufs pris dans le voile montraient des embryons enroulés. Au- dessous du voile, le développement ne fit aucun progrès, le neuvième Jour on retrouvait les mêmes stades que le troisième ; le vitellus et les blastomères ne paraissaient cependant pas altérés. L'influence de la nature chimique du milieu est ici démontrée d'une façon élégante par le ferment lactique lui-même. Comme J'utilisais une pipette spéciale pour chaque flacon et que cette 30 ANDRÉ MARTIN pipette était flambée avant et après chaque prise, je n'ai pu introduire dans ces flacons des œufs embryonnés provenant d’autres cultures. Ces observations — l'action du ferment lactique mise à part — sont comparables à celles qui ont été faites sur l'œuf de l'Ascaride du Veau. L'embryon de ces deux parasites n’a pu se développer dans la solution de lactose à 8 p. 1000 ; tandis que l'œuf de l'Ascaride du Veau ne se divise pas, celui de l'Ascaride du Cheval ébauche toutefois un commencement de segmentation. IV. — DÉVELOPPEMENT DE L'EMBRYON DE L'4 SCARIS CANIS Par leur aspect, les œufs de ce parasite se rapprochent de ceux de l’Ascaris equorum : ils sont globuleux, leur vitellus forme au centre de l'œuf une sphère claire, mais leur coque est un peu moins épaisse et creusée de fossettes semblables à celles d'un dé à coudre. 1° Développement en milieu acide. (Solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000.) a) Température du laboratoire. — À la température du labo- ratoire (159 environ), l’évolution est régulière. Le troisième jour, le plus grand nombre des œufs renferment des morules à blastomères moyens. Le neuvième Jour, presque tous les œufs contiennent des embryons incurvés, et le onzième des embryons enroulés. Leur développement complet est terminé quelques Jours plus tard, après une mue dans la coque. b) Température de 339. — À la température de 330, la seg- mentation est rapide. En vingt-quatre heures, la presque tota- lité des œufs contiennent un embryon enroulé dont l’organisa- lion va devenir plus parfaite les jours suivants et qui subira une mue. c) Température de 389. — Cette température permet aussi un développement rapide. Les embryons incurvés apparaissent en vingt-quatre heures et sont enroulés le deuxième jour; puis leur structure se perfectionne et ils muent. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 31 2° Développement en milieu alcalin. a) Température de 339. — Dans la solution de bicarbonate de sodium à 8 p. 1 000, la segmentation est aussi rapide qu'en milieu acide. Les embryons enroulés sont développés le deu- xième jour dans la plupart des œufs. b) Température de 389. — L'évolution est exactement super- posable à celle de la culture maintenue à la température de 330. 3° Développement en milieu neutre. (Solution de chlorure de sodium à 8 p. 1000.) a) Température de 339. — Dans cette solution, la segmentation est moins rapide au début ; le premier jour, ce sont les morules à petits blastomères qui prédominent; il n’y à qu'un petit nombre d'embryonsincurvés. Mais ce retard n’est que passager, la segmentation s'accélère, et le deuxième jour, comme en milieu acide et en milieu alcalin, les embryons sont enroulés. b) Température de 389. — L'évolution est d’abord ralentie ; le premier Jour, les embryons incurvés sont peu nombreux: les morules à petits blastomères abondantes ; mais, dès le len- demain, ce retard à disparu et des embryons enroulés s’agitent dans la plupart des œufs. TagLEau XIL. — Développement de l'œuf de l'Ascaris canis en milieux acide neutre et alcalin. 2-3-4 5- 10 MORULES MORULES EMBRYONS | EMBRYONS EN : à gros à petits : ñ 2 blastomères. | blastomères. blastomères. blastomères. incurvés. enroulés. es | es | memmmmt | pemememmmmce | semsmmemnnseme | cut Solution d'HCI à 2 p. 4000. 330 ; 24 heures. | 48 heures. 24 heures. | 48 heures. Solution de NaCI à 8 p. 1 000. 330 24 heures. | 24 heures.| 48 heures. (rares). 380 24 heures. | 24 heures.| 48 heures. (rares). Solution de COSNaH 8 p. 1 000. 3390 48 heures. 389 | | | | 48 heures. 32 ANDRÉ MARTIN V. — DÉVELOPPEMENT DE L’HETERAKIS COLUMBÆ Le genre Heterakis appartient à la famille des Ascaridés et est voisin du genre Ascaris. Quelques expériences ont été faites avec Heterakis columbae de l'intestin grêle du Pigeon domestique. Les œufs de ce ver sont ovales, leur coque est bien moins épaisse que celle des œufs d’Ascaris; au moment de la ponte, le vitellus n'est pas segmenté. 1° Développement en milieu acide. a) Température de 339. — Dans la solution d'acide chlorhy- drique à 2 p. 1000, le développement est régulier. Au bout de vingt-quatre heures, presque tous Les œufs sont en segmentation el contiennent deux, quatre ou six blastomères; ce dernier stade prédomine. Le troisième jour, tous les œufs renferment des morules à petits blastomères; quelques-unes commencent à s'incurver, et, dès le sixième jour, la plupart des embryons sont enroulés. Comme ceux des Ascaris, les embryons d’/Zete- rakis sont d’abord courts et trapus, mais de jour en Jour ils s'allongent, se rétrécissent et subissent une mue dans l'œuf. b) Température de 389. — Au début la marche de la segmen- tation est à peu près parallèle à celle de la culture maintenue à la température de 330. En vingt-quatre heures, presque tous les œufs sont en segmentation et aux stades deux, quatre ou six blastomères; ces derniers paraissent les plus nombreux. Le troisième jour, la plupart des œufs contiennent des morules à petits blastomères. Le cinquième jour, quelques rares embryons incurvés se montrent. À partir de ce moment, l'évolution s'arrête; le contenu des œufs se désagrège, devient clair, brillant, vacuolaire, à contour irrégulier, et, en moïns d'un mois après la mise en incubation, toute la culture est détruite. L'embryon de l'Hétérakis du Pigeon ne parvient pas à se déve- lopper à la température de 389. Ce fait biologique est à rappro- cher de celui que présentent les œufs des Ascarides du Veau et du Porc, qui ne donnent pas non plus d’embryons à 380. L'évo- lution est cependant poussée plusloin chez l'œuf de l'Hétérakis, DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 33 qui atteint le stade morule à petits blastomères et même embryon incurvé; l’œuf de l’Ascaride du Veau ne dépasse pas le stade morule à gros blastomères, et l'œuf de l'Ascaride du Porc celui de deux, quatre blastomères, Tagceau XIIL — Développement de l'œuf de l’Heterakis columbae en milieu acide. 2-3-4 »-10 RES MARORES EMRRYONS EMBRYONS = s à gros à petits : , À blastomères. | blastomères. ETS A incurvés. nroulés. blastomères. | blastomères. cuves RDEOULES Solution d'HCI à 2/1000. 24 heures. 3e jour. | 3°-5° jour. 6e jour, 24 heures. 3e jour. 3e jour. je jour, (très rares). L'évolution ne dépasse päs ce stade. 2° Développement en milieu neutre. (Solution de chlorure de sodium à 8 p. 1000.) a) Température de 339. — Dans ce milieu, le développement est complet en seize Jours. À ce moment, les embryons enrou- lés sont bien formés; mais l’évolution est moins homogène qu'en milieu acide. Dans un très grand nombre d'œufs, la seg- mentation s'arrête au stade morule à petits blastomères ou embryon incurvé et ces œufs dégénèrent. Les embryons com- plètement développés se conservent intacts pendant douze jours, puis ils meurent. Si le degré de concentration de cette solution s'élève, le déve- loppement reste encore possible. Les embryons évoluent dans une solution demi-normale de chlorure de sodium (c’est-à-dire à 29,25 p. 1 000), mais ils sont moins nombreux que dans la solution précédente ; la segmentation s'arrête de bonne heure dans la plupart des œufs qui sont rapidement détruits. Les embryons enroulés eux-mêmes meurent beaucoup plus tôt. b) Température de 389. — À la température de 389, la seg- mentation suit une marche à peu près parallèle à la précédente. Pendant les trois premiers jours, il n°v a aucun indice de divi- ANN. DES SC. NAT. ZOOL., % série. 1913, xvIn, 3 34 ANDRÉ MARTIN sion. Puis l'évolution commence, etle sixième jour, la plupart des œufs contiennent des morules à gros blastomères. À ce moment le développement s'arrête. Le treizième jour, de très nombreux œufs sont en voie de destruction ; cette désagrégalion s’accentue de plus en plus, et bientôt la culture tout entière est détruite. 39° Solution de carbonate de sodium cristallisé à 10 H°0O à 8 p. 1000. A la température de 330, les embryons se développent en treize jours, mais ils sont peu nombreux. Les œufs qui ren- ferment des morules ou des embryons incurvés sont arrêtés dès ce moment dans leur évolution, meurent et se désagrègent. Les embryons enroulés périssent eux aussi, plus rapidement que dans la solution de chlorure de sodium à 8 p. 1000. La plupartsont dégénérés en huit Jours. Le développement de l'embryon de l’/eterakis du Pigeon se fait aussi à la température extérieure. Unterberger (15) a pu voir les œufs de ce parasite évoluer à la température du labora- toire. I les a placés sur du papier brouillard humide enfermé dans un flacon, et il a suivi leur évolution ; l'embryon était bien formé au bout de dix-sept jours. VI. — DÉVELOPPEMENT DU 7RICHOCEPHALUS DEPRESSIUSCULUS L'œuf des Trichocéphales estellipsoïde, pourvu d’une coque assez épaisse qui forme aux deux pôles une sorte de goulot surmonté d'un bouton peu apparent, Au moment de la ponte le vitellus n’est pas segmenté. 1° Développement en milieu acide. (Solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000.) a) Température de 339. — Le développement est régulier. Des morules à petits blastomères apparaissent en trois jours et deviennent très nombreuses du cinquième au septième Jour. Le neuvième, des embryons enroulés sont formés. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 39 2° Développement en milieu neutre. (Solution de chlorure de sodium à 8 p. 1000.) a) Température de 339. — L'évolution est régulière et assez rapidé. Le sixième Jour, la plupart des œufs sont au stade morule à petits blastomères et les feuillets sont délaminés. Le onzième Jour, les embryons sont incurvés, et le quatorzième les embryons enroulés sont nombreux. Parfois le déve- loppement est un peu plus rapide, et les embryons sont enrou- lés vers le dixième Jour. Comme ceux des Ascarides, les embryons de Trichocéphale, au début de leur enroulement, sont relativement courts et épais; ils achèvent de se développer pendant les jours suivants. b) Température de 389. — À cette température, l'évolution semble moins homogène qu'à 339. Un assez grand nombre d'œufs ne se segmentent pas. Dans les autres, la segmentation suit une marche parallèle à celle de la culture maintenue à la température de 330. Le sixième jour, il ÿ a des morules à petits blastomères ; le dixième jour, les embryons sont incurvés; le treizième, quelques-uns sont enroulés dans Ja coque. L'œuf du Trichocéphale du Chien évolue donc à la tempéra- Lure de 389, qui est celle de son hôte; néanmoins il paraît être plus sensible à cette température élevée que l'œuf de FAscaris canis; dans la culture, les embryons sont peu nombreux et beaucoup d'œufs ne se segmentent pas. L'œuf du Trichocéphale du Chien peut se développer à la température du milieu extérieur, mais l'embryon ne se forme que lentement. Railliet (2) a vu des œufs conservés dans l'eau mettre cinq mois à évoluer Jusqu'à la formation complète de embryon. 36 ANDRÉ MARTIN VII — DÉVELOPPEMENT DE L'ŒUF DES SCLÉROSTOMES (SCLEROSTOMUM EQUINUM ET SCLEROSTOMUM VULGARE) Par leur évolution, ces parasites s’éloignent beaucoup des Ascarides, des Hétérakis et des Trichocéphales ; 1l était intéressant de faire évoluer leurs œufs dans quelques milieux minéraux simples afin de les comparer avec ceux des autres Nématodes. Les œufs des Sclérostomes sont ovales, à coque mince ; la segmentation commence dans l'utérus et, au moment de la ponte, ils renferment huit à dix blastomères. a) Milieu acide. — Dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000 et à la température de 389, les embryons sont en- roulés en vingt-quatre heures. b) Milieu neutre. — Dans la solution de chlorure de sodium à 8 p. 1000, à la température de 380, le développement est aussi très rapide, les embryons sont enroulés en vingt-quatre heures. À la température du milieu extérieur la formation de l'embryon est un peu plus lente. Baillet (1) a toujours réussi à faire développer dans l'espace de trois à six ou huit jours le plus grand nombre des œufs de Sclérostomes qu'il avait recueillis dans les utérus des femelles ou dans les crottins du Cheval, en les maintenant dans l'eau à la température ordi- naire de 12 à 20 ou 259, pendant la belle saison. J'arrive ainsi au bout de cet exposé assez aride des expé- riences personnelles sur le développement de l'œuf de quelques espèces de Nématodes parasites. Avant d'en analyser les résultats, 1l me paraît utile de rappeler en peu de lignes les faits qui, dans les recherches effectuées par d'autres auteurs sur l'évolution des Nématodes parasites, se rattachent aux questions abordées dans ce travail. Développement de l’œuf de l’Ascaride lombricoïde. L'œuf de l'Ascaride de l'Homme évolue, dans un milieu humide, avec une rapidité variable suivant lélévation de la température ambiante. En prenant pour base une douce température, lembryon est constitué au bout de trente à DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 37 quarante Jours (Railliet) (2,. Davaine (3), qui s’est beaucoup occupé de ce parasite, écrit : « Lorsque la température n’est pas supérieure à 20°, l'œuf du Lombric reste six, huit mois et même un an sans se fractionner ; s’il est soumis d’une manière permanente à une température voisine de 409, son dévelop- pement est relativement très rapide ; mais, dans ces conditions mème, je n'ai point vu l'embryon apparaitre avant un mois à dater de Ja ponte. L'influence de la température, qui n’est pas très manifeste lorsqu'elle ne dépasse pas 20 à 250, le devient au contraire beaucoup à mesure qu'elle s'élève vers 409 ». Enfin Leuckart (13)dit avoir vu, au gros de l’été, desembryons complè- tement formés au bout de quatorze jours. Développement de l’œuf des Syngames. Les Syngames sont voisins des Sclérostomes et des Ankv- lostomes. « Les œufs du Syngamus trachealis Siebold acquièrent un degré varié de développement dans les utérus de la femelle, selon l’âge et la taille de celle-ci. Quand elle a de 20 à 22 milli- mètres de longueur, lembryonestcomplètement formé (Cobbold, Mégnin).… En évitant les autopsies tardives, Raïlliet n’a trouvé dans le vagin que des œufs non embrvonnés, mais simplement en voie de segmentation. Les œufs, embrvonnés ou non, se répandent sur le sol humide, dans les flaques d’eau, y évoluent et peuvent y éclore au bout de sept à quarante jours, selon la température (Neumann). (#4) » Des recherches montrent que l’évolution du ver fourchu se fait comme celle des Sclérostomes dans l’eau etle sol. Mégnin (5), au mois de Juillet et par une température moyenne de 259 environ, à constaté que, dans l’eau, 28 à 30 jours suffisent pour la formation de cet embryon et pour son éclosion. A l’étuve, à une température de 35° environ, la formation et l’éclosion des embryons étaient accélérées de quinze jours, et, dans les œufs où les embryons étaient tout formés, cette éclosion se faisait en quelques instants. Raïlliet (6) a vu que, en chambre humide, les œufs du Syngame trachéal sont embryonnés en trois semaines; au bout d’un mois, il y a déjà un certain nombre d’éclosions. Mais il est probable que l'embryon du Syngame peut se déve- lopper à la température du corps de Oiseau Les jeunes Faisans 38 ANDRÉ MARTIN malades expulsent souvent dans les accès de toux des Syngames remplis d'œufs qui sont aussitôt happés par les autres Faisan- deaux. Quinze jours à trois semaines après, ces derniers pré- sentent les premiers symptômes de la maladie. On peut, il est vrai, objecter que, en milieu infesté, le sol et l’eau sont riches en œufs qui évoluent et dont les embryons ou les larves sont repris facilement par lescompagnons des malades; il n°y aurait donc que lPillusion d’une infestation par ingestion des vers entiers rejetés. Uneexpérience de Mégnin détruit cette objection. Il fit prendre à une Perruche callopsite quatre couples de Syn- games recueillis au moment sur de jeunes Faisans morts de la gape qu'il venait de recevoir. Vingt et un jours après, cet Oiseau commençait à tousser et à bâiller, et trente-quatre jours après, il mourait étouffé par les nombreux Syngames dont sa trachée était bourrée. Les embryons du Syngame trachéal peuvent done se former à la température du corps des Oiseaux. L'évolution de l'œuf du Syngamus bronchialis Mühlig de lOre estsemblable à celle de l'œuf du Syngamus trachealis. Raïlhet (6), mettant des œufs en incubation le 12 mars, à obtenu des em- bryons le 26 mars sur lame de verre : en verre de montre, les premiers embryons ont apparu le 2 avril dans l’eau pure, le > avril dans de l’eau chargée de mucosités et de débris divers. L'épaisseur de la couche d’eau qui recouvre les œufs aurait donc une certaine importance : quand elle est trop grande l'évolution est ralentie. Ne serait-ce pas la plus ou moins grande quantité d'oxygène arrivant au contact des œufs qui jouerait le rôle principal dans cette accélération ou dans ce retard? Comme l'œuf du Syngame trachéal, celui du Syngame bronchial peut former un embryon à la température du corps de lOiseau. Mühlig (49) à vu, sur des oiseaux malades, un exsudat épais répandu dans les sacs aériens; et avec lui, se trouvaient, dans les sacs, des œufs en état de segmentation plus ou moins avancée et des embryons libres. Développement de l’œuf de l’Ankylostome duodénal. En raison de la grande importance de ce parasite au point de vue pathologique etsocial, son évolution à été beaucoup étudiée. Au moment où il quitte l'intestin de l'Homme, l'œuf de l'An- DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 39 kylostome duodénal est déjà en segmentation et contient deux à douze blastomères, mais jamais 1l ne renferme d'embryon développé. L'évolution de cet œuf à été suivie de préférence dans des milieux solides, principalement dans le milieu de Looss (matières fécales incorporées à du noir animal). On à vu que la température la plus favorable à l’évolution est comprise entre 200 et 309, l'optimum étant voisin de 250. Mais, à des températures supérieures à 309 et inférieures à 209, l’évolution est encore possible. Elle est plus rapide au-dessus de 300 et plus lente à mesure que la température s’abaisse au-dessous de 209, Lagage (7) prétend n'avoir jamais obtenu la segmentation de l'œuf dans des matières fécales placées à l'éluve à 370; mais Lambinet (8) déclare que « à la température ultime de 380 il à pu obtenir, après vingt-quatre, quarante-huit heures, le déve- loppement et l’éclosion des embryons ». Tous les expérimenta- teurs s'accordent aussi à reconnaître l'influence de l'humidité et de l’aération sur le développement de lembrvon; il est bien plus rapide dans les couches superficielles de la culture que dans les couches profondes. Quelques auteurs, Leichtenstern, Grassi, Perroncito, Looss: Lambinet, déclarent que l'œuf ne se développe pas dans l’eau : pour les uns il y périrait, d’après Lambinet il SV main- tiendrait en état de vie latente. Lagage n'a pas même obtenu de développement avec le sérum physiologique, à une tempé- rature supérieure à 220, pendant vingt-trois Jours. Cependant Alessandrin: (9) a fait deux observations qui démontrent la pos- sibilité du développement en milieu liquide. Le liquide de dilu- tion de fèces contenant des œufs d’'Ankvylostome fut centrifugé, puis décanté. Le liquide de décantation, placé dans un verre de montre et examiné après centrifugation, au bout d'un mois, contenait des larves müûres et encapsulées. Dans la seconde observation, des Ankylostomes adultes furent laissés au labora- toire, dans une solution de chlorure de sodium. Vingt-six jours après il ne restait d'eux que la cuticule remplie d’une grande quantité d'œufs, d'embryons et de larves à toutes les périodes de l’évolution, vivantes et très agiles. Looss (10), parlant des facteurs qui influencent le développe- ment de l’œuf de ce parasite, dit que quelques embryons se déve- 40 ANDRÉ MARTIN loppent et éclosent dans l’eau pure, à la condition qu'elle soit en couche mince. Quelles conclusions peut-on rer de cet ensemble de recher- ches et de faits expérimentaux ? : Il faut remarquer d'abord que ces dernières observations sont plutôt la constatalion de faits isolés que le résultat de recherches systématiques sur les facteurs de l'évolution des Helminthes. Cependant les notions qui s'en dégagent sont parallèles à nos propres observations et les conclusions restent les suivantes. 1° L’œuf des Nématodes parasites des animaux à sang chaud possède, chez de nombreuses espèces, une indifférence relativement grande à l'égard du milieu dans lequel il est jeté et des substances qui S'v trouvent. Il peut ainsi se segmenter et donner un embryon dans les milieux les plus divers. Cette indifférence varie avec les parasites ; elle est plus grande chez l'A scaris equorum que chez l'Ascaris vilulorum ; Vœuf du premier évolue Jusqu'à la formation de l'embryon dans la gly- cérine pure, qui empêche le développement de l'œuf du second et le tue de bonne heure; ilcommence à se segmenter dans la solution de lactose à 8 p. 1 000, tandis que l'œuf de P'Ascaride du Veau ne s’y divise pas; enfin 1l peut s'embryonner faci- lement dans l’eau de mer à la température de 339, tandis que l'œuf de l'Ascaride du Veau n°v parvient que difficilement. Il y à, du reste, une différence profonde dans le vitellus des œufs de ces deux espèces. Celui de Pœuf de l'Ascaris vitulorum est sombre, brunâtre et occupe presque toute la cavité ovu- laire; celui de l'œuf de lAscaris equorum est clair, réfringent et rétracté en une sphère éloignée de la coque et située au centre de la cavité de l'œuf. Cette différence d'aspect est peut-être due à une différence dans la teneur en eau, qui serait plus abon- dante dans l'œuf du parasite du Veau. Le degré de concen- tration de la cellule-œuf serait moins élevé et la déshydratation plus facile. Les échanges osmoliques qui se font à travers la coque seraient aussi modifiés par celle proportion d'eau plus élevée et la segmentation subirait le contre-coup de ces chan- gements ; ainsi S'expliquerait peut-être sa rapidité inégale chez ces deux espèces d'Ascarides. L’œuf de l'A scaris canis ressemble DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 41 à celui de l'Ascaris equorum; le vitellus est clair et brillant, il est rétracté au centre de la cavité ovulaire, en une sphère éloignée des parois ; il offre la même particularité de se déve- lopper rapidement. | 20 L'action de la température sur le développementembryon- naire est constante. En règle générale, elle accélère la forma- tion de l'embryon à mesure qu'elle s'élève, jusqu'à une cer- taine limite. C’est dans cette limite que siègent ces différences surprenantes que l’on observe sur des parasites parfois très voisins. À la température du milieu extérieur, à 15° en moyenne, le développement de l'embryon est possible, mais très lent. À la température de 330, ilest au contraire très rapide. À 380, c'est-à-dire à un degré voisin ou égal à celui de l'hôte, des variations apparaissent. Les œufs de lAscaris vilu- lorum, de l'Ascaris suis et de l'AÆHeterakis columbae commencent leur évolution, puis s'arrêtent à un stade plus ou moins avancé, et l'embryon ne parvient Jamais à se former. Au contraire, les œufs de lAscaris equorum, de lAscaris canis, du Trichocephalus depressiusculus, des Sclérostomes se développent rapidement à cette température. Il en est de même pour les œufs de l'Ascaride lombricoïde, des Syngames, de l'An- kylostome duodénal. IL faut remarquer que la formation de l'embryon est souvent plus rapide dans les œufs qui peuvent évoluer aux tempéra- tures de 382 et au-dessus que dans ceux qui sont inaptes à se développer à ce degré. ITY à là Loute une échelle d'adaptations et un certain nombre de particularités intéressantes, qui feront l’objet d'un chapitre spécial. 42 ANDRÉ MARTIN CHAPITRE II L'OEUF DANS L'ORGANISME DE L'HÔTE Nous avons vu, dans le chapitre précédent, à quellesinfluences d'ordre physique et d'ordre chimique l'œuf des Nématodes parasites est soumis dans le milieu extérieur et de quelle façon il réagit. Suivant le cas, 1lse segmente, forme un embryon, reste inerte, en état de vie latente, prêt à évoluer lorsque des conditions physico-chimiques différentes s'offriront à lui; ou bien 1l est incapable de résister à l'action des facteurs extérieurs, et 1] meurt et dégénère, La durée de son séjour dans le milieu extérieur est variable et il peut parvenir plus ou moins rapidement dans le tube digestif d'un Mammifère ou d’un Oiseau. Ce passage a lieu d'une manière toute passive. Les œufs sont répandus dans les flaques d'eau, les ruisseaux, les mares où les animaux s’abreuvent, sur les fourrages, les fruits qu'on leur distribue ; ils sont pris avec ces aliments ou ces boissons. Au moment où il est ingéré, l'œuf se trouve dans l’un des états suivants : 19 1l n'est pas segmenté, 20 il est en évolution, 30 1l renferme un embryon, 49 il est dégénéré. Lorsqu'il est parvenu dans ce nouveau milieu que représente l'organisme du Vertébré — qui peut être son hôte ou un hôte fortuit — l'œuf subit l’action d'un certain nombre de facteurs physiques et de facteurs chimiques. Il importe donc de rechercher de quelle façon 1l réagit. Parmi les agents physiques, nous retrouvons la température, variable suivant l'hôte et toujours plus élevée que celle du dehors ; l'humidité, constante puisque l'œuf baigne dans les liquides digestifs ; les phénomènes osmoliques, variables avec la concentration du contenu intestinal. Les agents chimiques sont représentés par les sucs digestifs avec leurs réactions diverses, les gaz des fermentalions intestinales et les dias- tases dont le rôle est généralement considéré comme prépon- dérant. L'action de ces différents facteurs a été étudiée au moyen de digestions artificielles avec les sucs digestifs du Chien et du DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 43 Veau. Le pouvoir digestif de chacun de ces sucs était contrôlé par des expériences parallèles dans lesquelles on leur faisait digérer de la viande. Ils ont agi sur des œufs en segmentation, sur des œufs embryonnés et sur des œufs non segmentés, pré- levés dans l'utérus des Vers au moment de l'expérience. Mes recherches ont porté sur trois espèces d’Ascaris, l'Ascaris vitu- lorum., V'Ascaris equorum, V'Ascaris canis. Dans une deuxième série d'expériences divers animaux, (Chien, Rat, Souris, Cobayes), ont ingéré des œufs d'Asraris vilulorum et d'Ascaris equorum. Ces œufs étaient embryonnés, ou en division, ou non segmentés. L'intérêt qui s'attache à ces recherches n’est pas inférieur à celui que présente l'étude de l’action des agents du milieu extérieur sur l'œuf. Les ouvrages classiques affirment, en effet, que lorsque les œufs des parasites sont ingérés, la coque est dissoute par le sue gastrique et l'embryon mis en liberté. IF + à bien, à l'encontre de cette affirmation, desexpériences de Davaine que je rapporterai plus loin, mais elles semblent oubliées et ont été d’ailleurs inexactement interprétées par leur auteur. Plus récemment, des physiologistes se sont incidemment occupés de celte question et ont constaté que les sues digestifs n'ont pas d'action sur la coque chitineuse des œufs. F. de Klug (11), dans des expériences sur la résistance des para- sites animaux aux sucs digestifs, a vu que des coupes micro- scopiques d'Ascaridesdel Homme et du Cheval, plongées dansune solution de pepsine de Chien additionnée de 0,2 p. 100 d'acide chlorhydrique, sont digérées au bout de six heures à + 409, à l'exception de la ecuticule, des œufs et d'une partie de Pépi- thélium intestinal. Au bout de vingt-quatre heures, Pépithélium intestinal a également disparu. En expérimentantavee descoupes microscopiques d'Ascarides soumises au préalable à ébullition, de Klug à obtenu des résultats analogues. La digestion trvplüique prolongée pendant six heures ne laisse intacts que la cuticule, les œufs et quelques restes d’épithélium intestinal. La cuticule fraiche ou bouillie n’est pas dissoute, en sa qualité de membrane chitineuse non attaquable par les sucs digestifs ; les enveloppes des œufs résistent également, ainsi que les œufs à enveloppe intacte. Si l’on entame la coque de l'œuf, la cellule est digérée. ANDRÉ MARTIN = = En dehors de toute expérience, l'observation attentive des faits semble bien indiquer que les sucs digestifs ne doivent pas avoir d'action sur la coque de l'œuf. Les œufs des Nématodes parasites de l’æsophage et de l'estomac sont pondus dans ces viscères et respectés par le suc gastrique, ils cheminent dans toute la longueur de l'intestin grêle, au milieu du suc pancréa- tique et du suc intestinal, et on les retrouve intacts dans les fèces. Il suffit d'examiner les déjections des animaux porteurs de Strongles de la caillette et de l'intestin pour acquérir cette certitude. Mais on peut objecter que, pendant le séjour de l'œuf dans le milieu extérieur ou au cours du développement embryon- naire, la coque subit peut-être des modifications dans sa struc- ture intime, modifications qui la rendent attaquable par les sues digestifs ; le coque de l'œuf qui n'a pas évolué serait, dans cette hypothèse, seule capable de résister aux diastases de l'estomac et de l'intestin. Ici encore l'examen attentif des faits permet de répondre à cette objection. Certains Nématodes parasites de l’œsophage et de l'estomac pondent des œufs qui renferment un embryon; or Railliet (2) à constaté que les œufs du Spiroptère ensanglanté, parasite de l'œsophage du Chien, ne perdent pas leur coque dans tout le trajet du tube digestif de cet animal. Il étaitintéressant de faire des recherches systématiques pour étudier l’action des sues digestifs sur les œufs des Nématodes. Ce sont ces expériences que Je vais rapporter. I. — ACTION DES SUCS DIGESTIFS « IN VITRO ». DIGESTIONS ARTIFICIELLES. . Dans mes premières recherches, J'ai utilisé du suc gas- rique, du sue pancréatique et du sue intestinal de Chien, obtenus par macération du pancréas et des muqueuses stoma- cale et intestinale. Le suc gastrique était additionné d'acide chlorhydrique dans la proportion de 2 p. 1000. Ces sucs agissaient sur des œufs prélevés dans l'utérus, qui n'étaient pas segmentés, dont la coque était bien développée, et sur des œufs qui renfermaient un embryon. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 49 4° Expériences avec des œufs non segmentés. a) Suc gastrique. — Des œufs d’Ascaris mitulorum sont mis à l’étuve à 389 dans du suc gastrique. Au bout de sept jours, les coques sont encore intactes et ne présentent aucune trace d’érosion ; leur épaisseur est normale sur toute leur surface, dont les détails sont très apparents. Le vitellus est en segmen- tation. Des œufs d’Ascaris equorum sont soumis à l’action du suc gastrique dans les mèmes conditions. Les coques ne sont pas attaquées ; seule, l'enveloppe albumineuse a disparu. La seg- mentation est aussi rapide qu'en milieu minéral; le einquième jour, on voit des embryons enroulés dans de nombreux œufs. Avec les œufs de l'Ascaris canis, les résultats sont analogues ; les coques résistent au suc gastrique, le vitellus se segmente, et le deuxième jour, les embryons s’enroulent dans les œufs. b) Suc pancréalique. — Après un séjour de vingt-quatre heures dans le suc pancréatique, la coque des œufs de l'Ascaris equorum ne présente aucune trace de digestion et Ta segmentation commence. c) Sucinteslinal. — La coque des œufs de PAscaris mtulorum reste intacte ; le vitellus se segmente et le septième Jour des morules à petits blastomères apparaissent. Ce suc est également sans action sur la coque des œufs de l'Ascaris equorum ; elle résiste, et à son intérieur, l'embryon se développe et s'enroule le cinquième Jour. Si l’on place dans ce suc des œufs de l'Ascaris canis, les embryons sont enroulés au bout de quarante-huit heures, tandis que la coque ne présente aucune trace d'action diges- tive: d) Mélange de suc pancréatique et de suc intestinal. — L'action du suc pancréatique activé par l’entérokinase du suc intestinal est en tout point comparable à l’action du suc pancréatique pur. La coque des œufs de l'Ascaris equorum et celle des œufs de l'Ascaris canis ne sont pas digérées dans ce liquide. Des fragments d'utérus qui avaient été mis intentionnellement avec les œufs sont, par contre, attaqués ; les cellules de la 46 ANDRÉ MARTIN paroi utérine sont dissociées, leur contour est irrégulier et érodé au bout de vingt-quatre heures. e) Dyspeptine de Hepp — Avecles œufs de lAscaris vitulorum, la dyspeptine de Hepp a donné les mêmes résultats que le suc gastrique. Les coques ne sont pas attaquées, la segmentation commence et s'arrête au stade morule comme dans le suc gas- trique. Nous avons vu en effet, en étudiant l'évolution de l'œuf de ce parasite dans les solutions minérales, que l'embryon ne se forme pas à la température de 389. 2° Expériences avec des œufs contenant un embryon. a) Suc gastrique. — Des œufs d’Ascaris canis embryonnés à 389 dans la solution de chlorure de sodium à 8 p. 1 000 sont placés dans du suc gastrique, à la température de 380. Les coques restent intactes ; dès le second jour, de nombreux embryons meurent dans l'œuf, deviennent brillants et de nombreuses vacuoles apparaissent dans le protoplasme : le septième jour, la plupart sont complètement détruits et lrans- formés en un amas de vacuoles dans lequel il est impossible le plus souvent de retrouver aucune trace d'embryon. Aucune éclosion ne se produit. Je n'ai Jamais vu une seule coque s'ouvrir pour livrer passage au jeune Ver. b) Sue pancréalique. — Des œufs d'A scaris canis embryonnés dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000, à 339, sont mis dans du suc pancréatique, à 380. Les coques ne présentent aucune trace d'action digestive, leur contour conserve sa régu- larité; mais, dès le deuxième Jour, un grand nombre d'œufs s'ouvrent, les embryons s'échappent vivants et s'agilent énerqi- quement dans le liquide. c) Suc pancréalique agissant après le suc gastrique. — Dans cette expérience, les œufs sont pris dans l'utérus d’une femelle d'Ascaris canis et mis dans du suc gastrique, à 380. Le deuxième jour, lous les œufs contiennent un embryon enroulé. Le cinquième jour, la plus grande partie du suc gastrique est enlevée et remplacée par du suc pancréatique alcalinisé avec du bicarbonate de sodium. Deux jours après, les coques sont intactes, sans trace d'érosion, mais de nombreux embryons éclos s'agitent dans le champ du microscope. Le développement DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 47 embryonnaire complet et l’éclosion de l'embryon de l'Ascaris canis peuvent donc être obtenus en sept jours dans du suc qas- drique et du suc pancréatlique, sans que les coques soient digérées par les diastases de ces sues. d) Mélange de suc pancréatique et de suc intestinal. — Des œufs pris directement dans l'utérus et placés dans du suc intes- tinal à 380 contiennent des embryons enroulés en quarante-huit heures ; le cinquième jour, du suc pancréatique est, ajouté ; deux jours après, tandis que les coques ne sont pas érodées, de nombreuses éclosions se produisent et les embryons s'échappent moants el actifs. Comme dans l'expérience précédente, le déve- loppement embryonnaire complet et l’éclosion de l'embryon ont eu lieu en sept Jours. : e) Pancréatohinase du commerce. — Avec les œufs de l'Ascaris vitulorum, il n°y a pas de digestion de la coque et les embryons éclosent. 3° Expériences avec les sucs digestifs du Veau. Pour étendre les observations faites avec les sues digestifs du Chien, une seconde série d'expériences a été instituée en utilisant les sucs du Veau et les œufs de PAscaris vitulorum. a) Suc gastrique. — Ce suc à été obtenu par macération de la muqueuse de la caillette ; son pouvoir digestif a été contrôlé avec de la viande. Des œufs en évolution dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000 à la température de 330, el présentant tous les stades depuis l'œuf non segmenté jusqu'à l'embryon enroulé, sont placés dans ce suc gastrique à l’étuve, à 380. Les coques des œufs ne sont pas digérées ; un -mois aprèsla mise en expérience, elles sont intactes, inattaquées, mais le contenu des œufs est détruit ; aucune éclosion ne s'est produite. b) Mélange de suc pancréatique et de suc intestinal. — Des œufs provenant de la même culture que ceux de l'expérience précédente sont placés dans un mélange de suc pancréatique et de suc intestinal de Veau. Les coques ne-présentent aucune trace de digestion ; un mois après la mise en expérience, elles ont conservé leur contour et leur épaisseur. Le contenu des œufs est détruit. Aucune éclosion ne s'est produite. Le milieu 48 ANDRE MARTIN est cependant favorable à la sortie de l'embryon, ainsi que l'ont montré les expériences faites avec le suc pancréatique et le suc intestinal du Chien. Cetle absence d’éclosion provient de ce que, dans la culture utilisée, les embryons, bien qu'en- roulés, n'avaient pas encore atteint leur complet dévelop- pement, en sorte que cette expérience met en évidence une condition importante de l'éclosion, la maturité de l'embryon. L'exactitude de cette remarque est d’ailleurs démontrée par l'expérience suivante : Des œufs d’Ascaris vitulorum, qui avaient évolué dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1 000 à 33° et contenaient un embryon arrivé au terme de son dévelop- pement, sont placés à l’étuve, à 389, dans du suc duodénalde Veau recueilli à l'abatage de l'animal, entre deux ligatures : les coques ne sont pas digérées, mais de nombreur embryons éclosent. De cette série de digestions artificielles se dégagent, quelques faits importants. Ni le suc gastrique, ni le suc pancréatique, nile sue intestinal, ni le mélange de ces deux derniers ne digèrent la coque des œufs des Ascaris; que ces œufs soient prélevés directement dans l'utérus et non segmentés, qu'ils soient en voie de développe- ment, ou que l'évolution embryonnaire soit terminée, les résultats sont identiques : la coque chitineuse résiste aux diastases de l'estomac et de l'intestin. Il est done inexact d'invoquer la dissolution de la coque pour expliquer la mise en liberté de l'embryon dans l'organisme de l'hôte. L'éclosion de l'embryon des Ascaris vitulorum, equorum et canis ne se produit que dans le suc pancréatique, dans lesuc intes- tinal ou dans le mélange de ces deux sucs. Jamais l'embryon ne quitte sa coque dans le suc gastrique. Cette constatation permet de prévoir le point du tube digestif où l'embryon devient libre dans les conditions de l’infestation naturelle. Ces expériences indiquent aussi comment se fait l’éclosion. L’embryon sort par une ouverture qui, vue en coupe optique sur la coque vide, à l'aspect d'un V à sommet central. C’est une fente qui intéresse la moitié environ de la circonférence de l’œuf et dont les bords sont écartés par le jeune ver au moment où il sy engage pour sortir. Cet écartement persistant après l’éclosion, DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 49 la fente prend son aspect en V. Les lèvres de cette ouverture sont rectilignes et donnent l'impression d’une rupture par écla- tement de la coque. Une action digestive se traduirait par leur irrégularité. Or, sur les nombreuses coques examinées, J'ai toujours constaté des bords nets, rectilignes. La segmentation des œufs dans les sucs digestifs est un phé- nomène intéressant. La marche de cette segmentation est tout à fait superposable à celle du développement en milieu minéral et offre les mêmes particularités. On retrouve l'indif- férence si remarquable de l'œuf à l'égard de la nature chimique et dela réaction du milieu, et l'influence si particulière de la tem- pérature. Tandis que les embryons de lAscaris equorum et ceux de l'Ascaris canis se forment rapidement, en cinq jours et en deux jours, dans ces sucs maintenus à 38°, les embryons de l'Ascaris vitulorum s'arrêtent au stade morule à petits blasto- mères, quelques-uns atteignent le stade d’embryon imcurvé en are avec feuillets distincts, puis l’évolution cesse, comme en milieu minéral. On peut se demander si, dans les conditions de linfestation naturelle, les Ascarides du Chevaletdu Chien ne peuvent pas se développer sur place dans l'hôte lui-même. Pour cela 1l suffirait, semble-t-il, que l'œuf séjournàt quelque temps dans le tube digestif après avoir été pondu. Ce séjour est certainement réalisé chez les grands herbivores, en raison de longueur de l'intestin et des replis de la muqueuse, où des œufs peuvent être retenus pendant longtemps. Cette évolution sur place n’a jamais été observée, et elle est très probablement impossible ; j'en donnerai les raisons dans un autre chapitre. Je rappelle toutefois ici que certains parasites nous offrent des exemples de ce développement sur place. Ainsi, l’on admet que l'œuf de l'Oxryuris vermicularis se développe et que embryon devient libre dans le gros intestin de l’homme. Ce développement est bien nié par beaucoup d'helminthologistes pour qui l'œuf ou l'embryon doit passer dans le milieu extérieur et rentrer ensuite dans le tube digestif par la voie buccale. Cependant Vix (48) a vu, dans le mucus rectal, des embryons d'Oxyure en voie d'éclosion; et, d'autre part, des faits cliniques semblent indiquer la possibilité de cette évolution in situ; des personnes ANN. DES SC. NAT. ZOOL. 9 série. 1913, XVIIL, 50 ANDRÉ MARTIN adultes hébergent des Oxyures pendant de nombreuses années, en dépit de tout traitement, sans que l’auto-infestation par les doigts, souillés après grattage de la marge de l'anus, puisse être invoquée. Je pourrais citer le cas d’une homme âgé de plus de cinquante ans, qui, depuis son enfance, héberge ces parasites et ne peul réussir à s’en débarrasser; tous les traitements sont restés inefficaces, et, malgré toutes les précautions, les Oxyures continuent à pulluler dans son intestin. Ces cas se laissent difficilement interpréter dans la théorie classique de Leuckart; ils reçoivent une explication tout à fait rationnelle avec la possi- bilité du développement sur place. C2 Il. — EXPÉRIENCES D’INGESTION Ces expériences ont été entreprises dans le but de contrôler les résultats des digestions artificielles. Divers animaux (Rats, Souris, Cobayes, Chiens) ont ingéré des œufs d’Ascaris vitulorum el d'Ascaris quorum. n’a pas été possible d’expérimenter sur RNEauetsurierCheyaloo Expérience 1.— Un Surmulot (Ms decumanus) âgé de 67 jours reçoit, comme ration, un morceau de pain très sec el très dur, sur lequel avaient été déposés, deux jours avant, un très grand nombre d'œufs embryonnés d'Ascaris equorum qui avaient évolué dans la solulion de bicarbonate de sodium. L'animal mange une partie du pain infesté et est autopsié le len- demain. Dans l'estomac, sont des débris d’ouate qui se trouvaient dans la cage, des poils et du pain en partie digéré. L'examen micro- scopique fait découvrir des œufs à coque intacte et dans lesquels l'embryon se présente avec ses caractères normaux ; on voit aussi quelques coques déchirées irréqulièrement et quelques embryons libres, mais morts, certains même déjà altérés. Dansle duodénum, sont des œufs intactset quelques embryons libres, morts et déjà désagrégés, Vers le troisième quart de l'intestin grèle, se trouvent de nombreux œufs dont la coque n’a pas élé attaquée par les sucs digestifs el dont les détails de la surface sont très apparents : au milieu de ces œufs, sont des embryons éclos, la: plupart DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES D vivants, mobiles sur le porte-objet dans le champ du micro- scope. Dans l’iléon, les éclosions sont beaucoup plus nombreuses, et les embryons sont vivants el agiles. V'ai assisté, sous le micro- cope, à la sortie de l’un d'eux, et j'ai constaté que embryons s'échappe par une ouverture de la coque à bords nets, offrant, en coupe ôptique, l'aspect d'un V à sommet interne. La coque ne présente aucune trace d'action digestive ; son épaisseur est Ta même sur toute son étendue. Du reste, dans le contenu intes- tinal sont de nombreuses coques vides, qui montrent toutes l'ouverture caractéristique et dont la surface ne présente pas la moindre trace de digestion. Dans le cæcum, il n’a été rencontré que des œufs dont la coque et l'embryon étaient intacts. Expérience 9. — Une Souris (Mus musculus) reçoit comme ali- ment du pain très sec el très dur sur lequel ont été déposés des œufs d'Ascaris vitulorum en évolution dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000 à 330 et offrant tous les stades du développement (4-6 blastomères, morules à gros et à petits blastomères, embryons incurvés en haricot et embryons enroulés dont quelques-uns seulement ont atteint leur complet développement). L'animal est sacrifié seize heures après le début de l'expérience et autopsié aussitôt. Dans l'estomac, les œufs possèdent encore leur coque intacte, inattaquée par le suc gastrique. Cependant, on rencontre quelques coques vides, rompues, mais l'ouverture est {rès grande et très irrégulière. Pas d’embryons libres dans le liquide stomacal. Dans l'intestin grêle, sont des œufs intacts et des coques vides ayant toutes une ouverture en forme de V ; leur surface est régulière, leur épaisseur normale, elles ne présentent aucune trace de digestion. Quelques embryons libres, mais morts, baignent dans le chyle. La culture ingérée ne contenait qu'un petit nombre d’embryons complètement développés ; or, il y à dans lintestin grèle. peu de coques vides et d’embryons éclos. Les œufs intacts retrouvés en grand nombre dans le tube digestif de la Souris étaient aux stades 4-8 blasto- mères, morules, embryon incurvé ou embryon au début de 52 ANDRÉ MARTIN l'enroulement. Les coques des œufs qui contenaient un embryon arrivé au terme de son évolution se sont seules ouvertes. C'est une constatation analogue à celle qui à été faite dans les expé- riences avec les sucs digestifs 47 vitro. Zrpérience 3. — Une Souris recoit du lard sur lequel ont été déposés des œufs d’Axscaris vilulorum provenant de Ia culture utilisée dans l'expérience 2 et aux mêmes stades de dévelop- pement. Elle est sacriliée quatre heures et demie après le début de l'expérience. L'animal à peu mangé. Dans l'estomac et dans l'intestin grêle, sont de nombreux œufs dont la coque est intacte et inattaquée. Pas de coque vide, pas d’embryon libre. Expérience 4. — Une Souris ingère des œufs d'Ascaris vilulorum provenant de la culture utilisée dans Les expériences 2 et 3 et déposés sur du lard. Elle est sacrifiée seize heures après le début de l'expérience. L’autopsie à lieu aussitôt après. Dans l'estomac, sont de très nombreux œufs dont la coque ne présente aucune altération, aucun indice d'action diges- tive. Pas de coque ouverte, ni d’embryon libre. Dans l'intestin grêle, un embryon est surpris au moment de son éclosion. Il sort de la coque par une fente en V. Dans cette partie du tube digestifet dans le cæcum, se trouvent beaucoup d'œufs dont la coque est intacte. Les blastomères de ces œufs apparaissent au microscope avec leurs caractères ordinaires, sans trace d'altération. La pénurie d’éclosions et d’embryons libres est due, comme dans l'expérience 2, au matériel dont le développement était inachevé. Expérience 5. — Un Cobaye, à la diète depuis vingt-quatre heures, ingère, avec du son, une culture d'œufs d’Ascaris vitu- lorum dans laquelle sont des stades morule, embryon incurvé et des embryons enroulés bien développés. Cette culture avait été faite dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000 à 330. L'animal est sacrifié et autopsié huit heures après le début de l’expérience. Dans l'estomac, sont de nombreux œufs dont la coque: est normale et dont l'embryon est vivant et mobile. Pas de coque vide, ni d'embryon éclos. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 93 Dans l'intestin grêle, mêmes constatations. Il est probable que l’animal à été sacrifié trop tôt, avant que les éclosions aient pu se produire. Expérience6. — Un Cobaye, à la diète depuis quatorze heures, ingère, avec du son, une culture d'œufs d'Ascaris vitulorum aux stades morule, embryon incurvé et embryon enroulé. L'animal est sacrifié et autopsié vingt-six heures après. L’estomac contient encore une certaine quantité de matières alimentaires au milieu desquelles sont des œufs dont la coque estinaltérée, sans aucune trace d’érosion. Malgré de laborieuses recherches, je ne puis trouver ni coques vides, ni embryons libres. Les deux premiers tiers de l'intestin grèle sont vides. Dans le produit de raclage de la muqueuse se trouvent quelques œufs aux stades morule où embryon incurvé en haricot, dont la coque n'a nullement souffert de l’action des sucs digestifs, et aussi quelques coques vides avec une ouverture en V, mais pas d’embryon libre. Dans l'iléon, qui contient une assez grande quantité de chyle, les œufs renfermant une morule ou un embryon incurvé sont plus nombreux ; leur coque est intacte, et l'embryon en développement parait avoir conservé toute son intégrité. Un embryon enroulé s’agite dans sa coque inaltérée. Les coques vides, fendues sont nombreuses, mais on ne voit pas les embryons libres. Le cæeum contient beaucoup d'œufs aux stades morule et embryon incurvé dont la coque est intacte; il Y a aussi des coques ouvertes et en partie détruites, mais pas d’embryons libres. Dans le côlon et le rectum, sont des œufs dont la coque et le contenu (morule ou embryon incurvé) sont inaltérés. Au niveau du côlon, J'ai mème trouvé un embryon à moitié sorti de sa coque par une ouverture offrant les caractères déjà indiqués. Les résultats de cette série d'expériences d'ingestion con- firment ceux des digestions artificielles. Le sue gastrique de Rat, de Souris et de Cobaye n'’attaque pas la coque chitineuse de l'œuf de l'Ascaride du Cheval et de 54 ANDRÉ MARTIN l’Ascaride du Veau, et les embryons n'éclosent pas dans l’es- tomac. Dans quatre expériences, malgré de nombreuses prépa- rations, je n'ai pu voir, dans ce viscère, aucune coque ouverte et vide, et aucun embryon mis en liberté. Les expériences 1 et 2, sur un Surmulot et une Souris, ont donné un résultat différent ; mais on va voir qu'elles n'infirment en rien les conclusions qui précèdent. L'estomac de ces deux animaux contenait en effet quelques embryons éelos et quelques coques ouvertes. Cette constatation était en opposition avec les résultats des digestions arlificielles et aussi avec ce que l’on sait de la résistance de la coque des œufs aux sues digestifs. Mais deux points retenaient l'attention : le nombre relativement faible de coques ouvertes par rapport au nombre immense d'œufs intacts qui se trou- vaient dans l'estomac, l'aspect anormal des coques ouvertes. Au lieu de présenter, comme dans l'intestin et dans les sucs pancréalique et intestinal #n vitro, une fente en V, les coques étaient irrégulièrement déchirées en des points quelconques de leur surface ; souvent, il n’en existait que des débris dont l'épaisseur restait normale. Si cet état résultait d’une digestion réelle, la plupart des œufs baignant dans le chyme auraient dû être attaqués et même en partie digérés. Or, des examens répélés ne m'ont montré rien de pareil : les œufs, en très grand nombre, étaient en parfait état, ou les coques en nombre infime étaient déchirées irrégulièrement; entre ces deux extrêmes, il n’y avait pas d’intermédiaire. L'état du pain très sec et très dur sur lequel les œufs avaient été déposés permet de comprendre ces faits, les efforts de mas- cation qu'il avait nécessités ayant rendu possible la déchirure de quelques coques par les dents des animaux. Dans de nou- velles expériences, le pain fut remplacé par du lard et du son ; dans ces conditions, je n'ai plus retrouvé dans l'estomac ni coque déchirée, ni embryon Hibre. Ces derniers résultats semblent indiquer que les coques ouvertes rencontrées chez les deux premiers animaux ont été déchirées au cours de la mastication. Toutes les recherches s'accordent donc pour démontrer que le suc gastrique n’a pas d’action digestive sur la coque des œufs d’Ascarides et que ceux-ci peuvent impunément traverser l'estomac. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 95 Une dernière remarque doit être faite au sujet de l'action du suc gastrique. Les embryons libres trouvés dans l'estomac élaient tous morts, quelques-uns même dégénérés. Au contraire, - dans le jéjunum et l'iléon du rat de l'expérience 1, le plus grand nombre des embryons éclos étaient vivants et s’agitaient acti- vement dans le champ du microscope. Il semble que le milieu gastrique soil nuisible à l'embryon qui v devient libre et le détruise rapidement ; contrairement à l’idée courante, l'estomac jouerait le rôle d’un organe de défense contre les parasites, lorsqu'ils ne sont pas protégés par une coque résistant à la pepsine. Des résultats intéressants ont déjà été obtenus sur ce point par Griglio (12) avec Le Cysticercus bovis. En faisant des expé- riences de digestion ix vitro et in vivo, il a constaté que le Cysticerque complètement désinvaginé subit l’action du suc gas- trique et perd la propriété de se transformer ultérieurement en Ténia. | Dans les expériences 2, 3, #4, 5 et 6, faites avec les œufs de l'Ascaris vitulorum, les embryons éclos étaient tous morts dans l'intestin. Il est possible qu'en raison de l'alimentation spéciale des Veaux, cet embryon soit plus sensible à un changement d'hôte que celui de l’Ascaris equorum utilisé dans l'expérience 1. Jai déjà signalé sa sensibilité plus grande à la température et à certaines autres conditions de milieu. Sa faible plasticité s’accuse à nouveau dans les changements d'hôtes. Ces résultats relatifs à l’action du suc gastrique et la consta- tation de ce fait que l'embryon ne sort pas de sa coque dans l'estomac sont en contradiction avec une observation faite par Leuckart sur l'Ascaris felis. Leuckart (13) a trouvé, dans l'estomac d'un Jeune Chat de huit semaines, quarante à soixante embryons de Nématodes de 0,4 à 0,6 millimètres, pas plus gros par conséquent que les embryons d’Ascaris felis encore inclus dans l'œuf. Ce Chat avait été laissé pendant six jours dans un quartier infesté par les Ascarides ; dans l'intestin grêle, se trouvaient des embryons encore plus gros que ceux qui séjour- naientdans l'estomac et plusieurs Ascarides de 3 à 4 millimètres de long. De ces constatations, Leuckart à cru devoir conclure que les embryons libres et agiles qu'il a rencontrés dans l'estomac sont des embryons d’Ascaris felis. I ajoute que 56 ANDRÉ MARTIN ce parasite reste à son premier stade de développement jusqu’à ce qu'il pénètre dans son hôte définitif ou, en d’autres termes, qu'il y parvient à l'état d'embryon (als Embryo an der Ort ihrer Bestimmung gelangt). Quelques lignes plus loin il écrit que, malgré de laborieuses recherches, il n’a pu trouver ni coque ovulaire, n1 débris animaux dans le contenu de lestomac et de l'intestin. Ces observations du savant helminthologiste allemand sug- gèrent quelques observations. En premier lieu, l’auteur recôn- naît lui-même avoir été frappé par l'absence, dans l'estomac, de coques vides entières ou de leurs débris. Siles éclosions s'étaient vraiment faites dans l’estomac, ce viscère aurait dû présenter, à côté des embryons en liberté, un certain nombre de coques vides ; il est difficile, en effet, d'admettre que toutes les coques aient été entraînées par le courant digestif et que seuls les em- bryons soient restés; d'autant que leurs caractères, notés par Leuckart, sont ceux qu'ils présentent au moment de l’éclosion. D'autre part, dans une seconde expérience, Leuckart fait ingérer à un autre Chat une grande partie de la muqueuse gastrique du premier avec les embryons qui s'y trouvaient et, le lendemain, il retrouve ceux-ci à peine modifiés dans son estomac. De même que le second Chat a recu les embryons du premier, il n’est pas impossible d'admettre que le premier les ait ingérés après leur éclosion dans le milieu extérieur, On sait, en effet, que Baillet (1) a signalé la sortie dés embryons de l’Ascaride du Chien en dehors de l'hôte. Cette observation de Leuckart reste unique en parasitologie chez les animaux supérieurs, Toutes les constatations faites par de nombreux auteurs sont en concordance avec les résultats de mes recherches. Davaine (1%) a vu que Le suc gastrique de Lapin et de Chien est - incapable de dissoudre la coque de l'œuf de l'Ascaride de l'Homme, malgré un contact de trois et quatre jours. Raïlliet (2) a constaté « que les œufs du Spiroptère ensanglanté ne perdent pas leur coque dans tout le trajet du tube digestif du Chien ». Balbiani (18) n’est pas parvenu à faire éclore les œufs embryonnés de l'Eustrongle géant dans l'intestin du Chien, du Lapin, de divers Poissons (Anguilles, Carpes, Cyprins dorés), DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES o71 des Couleuvres, des Tritons, ni de la Crevette des ruisseaux. Unterberger (15) a vu que, si on faisait prendre à des pigeons bien sains des œufs d'AHeterakis colunibae immédiatement après leur expulsion avec les excréments ou leur sortie des oviductes, ces œufs ne se développaient pas et ils étaient rejetés avec les fèces, presque intacts où un peu digérés (?). Sur une oïe infestée parle Syngame bronchial, Raïlliet (6) a rencontré des œufs dans les bronches, la trachée et toute la longueur du tube digestif. Les œufs des Strongles de la caillette des Ruminants, ceux des Spiroptères de l'estomac du Cheval sont pondus au milieu du suc gastrique et se retrouvent en abondance, avec leur coque intacte, dans les déjections des animaux parasités. IE y a là un ensemble de faits qui militent puissamment en faveur de la résistance des coques au suc gastrique. L'enveloppe chitineuse des larves de l'Ankylostome duodénal offre également une résistance considérable au suc gastrique. Les recherches de Lambinet (16) sont, à cet égard, démonstratives. Cet auteur a constaté qu'après cinq heures de séjour à l’étuve, dans du suc gastrique de Chien seul ou additionné d'acide citrique ou d'acide tartrique, des larves d’une quinzaine de jours élaient encore vivantes et avaient une capsule parfai- tement intacte. Après vingt-quatre heures de séjour à l'étuve, les larves sont encore vivantes, mais la capsule est dilatée, chiffonnée, et flotte autour du corps de la larve. Le suc-gas- trique, mis en présence de larves tuées au préalable par lébul- lition, n'arrive pas à dissoudre la capsule après vingt-quatre heures ; cette membrane n’est que ramollie et dilatée. À ce moment, les larves peuvent l’abandonner, ainsi que Lambinet l'a constaté avec des larves vivantes. A l'exception du cas de Leuckart, toutes les observations sont concordantes. Je crois donc pouvoir conclure que le suc gastrique est sans action sur la coque des œufs des Nématodes parasites des Mammifères et des Oiseaux, et que les embryons ne sont pas mis en liberté dans l'estomac. | Examinons de près les résultats fournis par l'étude miero- scopique du contenu intestinal du Rat, des Souris et des Cobayes qui ont fait l'objet de mes recherches. Dans cette partie du tube digestif, les constatalions des autopsies ont été 58 ANDRÉ MARTIN univoques. Les coques des œufs résistent au suc pancréatique et au suc intestinal et, de plus, les embryons deviennent libres dans le jéjunum et surtout dans liléon: ils sortent de œuf par une déchirure de la coque, s’échappent vivants et conservent leur motlité pendant assez longtemps. Il y a concordance absolue entre ces constations d’autopsie et les résultats des digestions artificielles faites avec les sucs pancréalique et intestinal. L'éclosion n'est donc pas fonction de l’activité digestive des sucs de l'intestin. Les Cobayes ont donné des résultats moins nets que les Rats et les Souris. La raison en paraît assez simple. Dans l'expé- rience 5, l’autopsie a été faite huit heures seulement après l'ingestion des œufs. Ce laps de temps est probablement insuf- fisant pour que l'embryon puisse devenir libre. Dans l'expé- rience 6, au contraire, l’autopsie à été faite vingt-six heures après l’ingestion. Malgré un grand nombre de préparations et l'exploration minutieuse de toute la longueur de l'intestin, Je n'ai retrouvé qu'un petit nombre d'œufs, et ces œufs étaient tous aux stades morule ou embryon incurvé en arc. La culture ingérée était, cependant, riche en œufs contenant un embryon enroulé, vivant, dont le développement était terminé; je n’a retrouvé aucun œuf dans cet état, mais beaucoup de coques vides. De nombreuses éclosions se sont donc produites, mais. les jeunes vers, inaptes à se développer dans l'intestin du Cobave, ont dû périr rapidement. Ces éclosions des embryons d’Ascarides dans l'intestin d’ani- maux bien différents de leur hôte habituel confirment les observations anciennes et trop oubliées de Davaine (17). Cet illustre médecin à réussi à faire éclore des œufs de lAscaride lombricoïde de l'Homme dans l'intestin du Ratetdu Chien. Après avoir constaté que le suc gastrique du Lapin et du Chien est incapable de dissoudre la coque de l'œuf de l’Ascaride lombri- coïde, il présume que cette coque ne peut être dissoute ou ramollie que par les sucs intestinaux et, pour vérifier cette présomption, il fait des expériences surle Chien, la Vache et le Rat. Il introduit dans l'estomac d’un Chien des œufs d’Ascaride lombricoïde, les uns embryonnés, d’autres non segmentés, DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES D9 enfermés dans de très petits flacons dont l'ouverture était fermée par une simple toile. Ces flacons, recueillis deux jours après dans les matières fécales, ne contenaient plus que les œufs non segmentés, les œufs embryonnés avaient disparu ; un certain nombre d'embrvons étaient libres dans les matières du flacon. Davaine conclut de ces faits « que la coque de l'œuf n’est pas dissoute par les sucs intestinaux, puisque les œufs non fractionnés se retrouvaient intacts dans les flacons, mais qu'elle est ramollie suffisamment pour que les embryons, rendus actifs par la chaleur des intestins, puissent la percer et s'éloigner ». Une expérience d’ingestion, par une Vache âgée d’un an, des œufs du même parasite ne donna pas de résultats. Mais, avec un Rat, Davaine put faire des constatations intéressantes. L’ani- mal, à jeun depuis vingt-quatre heures, prit, dans du lait, un grand nombre d'œufs d’Ascarides conservés depuis cinq ans. Douze heures après, le Rat fut tué :le lait occupait tout le tube digestif depuis l'estomac Jusqu'au cæcum. « Dans l'estomac et dans la première moitié de l'intestin, écrit Davaine, je retrouvai tous les œufs intacts; dans la seconde moitié, mais presque exclusivement à la fin de l'intestin grêle, je trouvai des embrvons sortis de l’œuf et bien vivants, et d’autres qui n'étaient qu'à moitié hors de leur coque. Un de ceux-ci, que j'examinai pen- dant quelque temps sous le microscope, acheva de sortir à mes yeux. Beaucoup d'œufs étaient encore intacts. Je constatai clai- rement que la coque n'est point dissoute. Les embryons sortent par une extrémité de l’ovoide où il m'a paru qu'il existe un petit opercule ; ils se replient en dehors sur la coque, et s’en servent comme de point d'appui pour achever d'en sortir. On demandera ce que deviennent les embryons restés libres dans l'intestin du Rat; on peut prévoir que ces Vers, incapables de se développer chez le Rat, doivent être expulsés avec les fèces; c'est en effet ce résultat qui a été obtenu dans l'expérience sui- vante : » Un Rat fut nourri pendant huit jours exelusivement de lait renfermant des œufs d’Ascaride lombricoïde ; les fèces ayant été recueillies chaque jour, l'examen microscopique montra que les embryons sont expulsés avec ces matières et qu'ils arrivent 60 ANDRÉ MARTIN au dehors encore vivants. Cette expérience a donné un autre résultat intéressant, c'est que beaucoup d'œufs sont expulsés avant que l'embryon ne soit sorti de la coque ou pendant qu'il est en train d'en sortir ; d’où l’on peut conclure que, si les œufs faisaient un plus long séjour dans l'intestin du Rat, ou bien, ce qui revient au même, si l'intestin du Ratétait plus long, tous les œufs écloraient dans le tube digestif de cet animal. » A la fin de son mémoire, Davaine conclut que deux condi- tions sont nécessaires sans doute à l’éclosion : « le ramollisse- ment de la coque par les sucs intestinaux et l'activité de lem- bryon sous l'influence d’une chaleur de 400 environ. Quel que soit l'animal qui fournit ces conditions, l'œuf éclôt s'il fait dans l'intestin un séjour suffisamment prolongé ; toutefois l'embryon ne tarde pas à être expulsé et à périr si l'animal n’est pas celui chez lequel le Ver peut acquérir son développementultérieur. » Davaine (3) fit avec l'œuf du Trichocéphale de l'Homme des constatations semblables. Il placa dans de tres petits flacons fermés par une toile, des œufs embryonnés d’Ascaride lombri- coiïde et des œufs non développés de Trichocéphale ; 1l intro- duisit ces flacons dans l'estomac d’un Chien. Les œufs du Tri- chocéphale, écrit, « beaucoup plus petits que ceux de l'Ascaride lombricoïde, pouvaient sortir plus facilement à travers les mailles de la toile; cependant la plupart de ces derniers avaient disparu, tandis que je retrouvai intacts les œufs de Tri- chocéphale ». Au cours de mes recherches, l'occasion s'est offerte à maintes reprises de vérifier l'exactitude rigoureuse de ces anciennes observations, Davaine trouve lui aussi, dans l'estomac du Rat, des œufs intacts et ne constate aucune éclosion dans ce viseère. En faisant ingérer les œufs dans du lait, il avait créé des condi- tions analogues à celle de mes expériences où le véhicule était du lard. Ces observations apportent une preuve de plus en faveur de cette hypothèse que les coques ouvertes que J'ai rencontrées dans l'estomac du Rat ont été déchirées par la dent de l'animal pendant la trituration du pain très see et très dur sur lequel les œufs avaient été déposés. Davaine constate aussi que les éclosions sont surtout nombreuses dans la partie termi- nale de l'intestin grêle et que la coque n’est pas dissoute par les DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 61 sucs intestinaux. Je n'ai pas observé le ramollissement de la coque qu'il considère comme une condition nécessaire de l'éclosion, ni vu d'opercule sur les œufs des Ascarides du Veau, du Cheval, du Chien et du Porc. Ces deux ou trois pointsde détail mis à part, les expériences de Davaine et les miennes restent concordantes. Il est permis d'étendre à l'Ascaride de l'Homme les conclusions fournies par les Ascarides des animaux. Les constatations de Baillet (1) viennent encore à l'appui de ces faits : cet auteur dit avoir fait quelques expériences sur le Chien et sur le Porc, qui l’autorisent à présumer que les jeunes Ascarides sortent de l’œuf dans l'intestin de l'hôte chez lequel ils doivent arriver à l’état adulte. Ces éclosions d’'embryons d’Ascarides dans l'intestin d’ani- maux si éloignés de leurs hôtes habituels et leur courte survie dans ces milieux si différents sont intéressantes à retenir au point de vue de la biologie générale. Elles nous indiquent dans quel sens devront être dirigées les recherches sur le mécanisme de l’adaptation des Nématodes au milieu intestinal des animaux supérieurs. L’embryon, pouvant éelore et vivre quelque temps dans le tube digestif de nombreuses espèces, possède une indif- férence plus grande qu'on ne pouvait le supposer, et qui n’est peut-être qu'un écho des premières étapes de l'adaptation de ces êtres à la vie parasitaire. C'est en partant de cette indiffé- rence initiale qu'il faudra rechercher les moyens mis en œuvre par les parasites pour s'’accommoder des milieux si variables que leur présentent les nombreuses espèces d'animaux dans l'organisme desquels ils pénètrent et pour réaliser les adap- tations assez étroites que nous constatons actuellement. Le mécanisme se réduit à une série de réactions du jeune Nématode envers le milieu intestinal qui l'influence. Nous commençons déjà à pénétrer quelques parties de ce mécanisme; la connais- sance du pouvoir bactéricide présenté par certains Helminthes, la sécrétion d'une antikinase par les Ascarides sont les premiers pas faits dans cette étude du mécanisme de ladaptation parasitaire. Cette indifférence originelle de l'embryon vis-à-vis du milieu intestinal se manifeste dans le développement des parasites sur 622 ANDRÉ MARTIN des hôtes dits exceptionnels, et elle permet de donner un com- mencement d'explication de ces conditions particulières. Tel parasite peut, au cours de ses migrations, rencontrer un milieu intestinal assez peu différent de celui qui lui est habituel pour que son séjour y reste possible. Au bout d’un certain temps, 1l sera devenu capable d’y subir son évolution. Cette adaptation nouvelle s'accompagne de changements plus ou moins impor- tants de son organisation, qui traduisent l’action du nouveau milieu sur le parasite et les réactions de ce dernier. Giard à longuement insisté sur cette particularité que possèdent les animaux de présenter des variations suivant les conditions de développement qui leur sont offertes; la fixation des caractères ainsi acquis sert à créer des variétés et sans doute plus tard des espèces nouvelles. La double série d'expériences rapportées au début de ce cha- pitre met en évidence un troisième point : c’est que, seuls éclo- sent les embryons dont le développement est complètement terminé. J'ai déjà attiré l'attention là-dessus en exposant les expériences à vitro. Dans les autopsies, je ne rencontrais guère, au niveau du cæcum, du côlon et du rectum, que des œufs au stade morule ou embryon incurvé en haricot ; les œufs conte- nant un embryon enroulé étaient rares. Les blastomères, plus ou moins nombreux, paraissaient avoir conservé leur intégrité. Les œufs non embryonnés d’Ascarides peuvent donc traverser toute la longueur du tube digestif des animaux autres que leur hôte ordinaire sans être altérés. Quelques œufs embryonnés peuvent se conduire de la même façon. Il ne m'a pas été pos- sible de rechercher s'ils conservent leur faculté évolutive après ce passage, mais leurs caractères objectifs n'indiquent aucune modification, et l'observation faite par Davaine sur les embryons de l'Ascaride de l'Homme qui sortent vivants du tube diges- tif du Rat, soit libres, soit encore inclus dans l'œuf, laisse soupconner qu'ils sont capables de continuer leur évolution. Il y à une exception à faire en faveur de l’Ascaris vitulo- rum. L'embryon de cette espèce ne se développe pas à la température de 380, qui détruit les blastomères au bout d'un certain temps. Dans les fèces d’un Chien qui avait pris. après administration d'un anthelminthique, des œufs DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 63 d’'Ascaris vitulorum, les uns embryonnés, les autres non seg- mentés, j'ai pu trouver, trois Jours après, des wufs non seq- mentés, avec coque et vitellus intacts. Cinq et huit jours après l'ingestion, on en rencontrait encore quelques-uns, mais, si la coque était intacte, le vitellus était dégénéré. Je n'ai pas retrouvé d'œufs embryonnés, ni d’embrvons libres; selon toute vraisemblance, les embryons avaient dû éclore dans l'intestin, puis mourir et être digérés. Ces résultats concordent avec les expériences en milieu minéral : nous avons vu, en effet, que l’œuf de l’Ascaride du Veau ne résiste pas à l'action de la tem- pérature de 389. IL semble donc qu’un Vertébré, ingérant accidentellement des œufs non embryonnés d'Ascaride, puisse à un moment donné les rejeter intacts et capables d'évoluer dans le milieu extérieur ; il devient ainsi un agent de dissémination de ces parasites. Cette remarque s'étend sans doute aux autres Nématodes parasites des Mammifères et des Oiseaux. CHAPITRE II L'ÉCLOSION. — FACTEURS DE LA MISE EN LIBERTÉ DE L’'EMBRYON. Les expériences rapportées dans le chapitre précédent con- duisent à cette conclusion que l’éclosion n’est pas sous la dépen- dance de l’action diastasique des sues digestifs. Il faut mainte- nant rechercher quels sont les facteurs de la mise en liberté de l'embryon. Un élément dont il est facile de prévoir le rôle important c'est la fempérature. L'éclosion des embryons d’Ascarides dans l'intestin du Rat, du Cobave, du Chien, et dans les sues digestifs, l’étuve, indique que le degré de chaleur doit intervenir pour une large part dans ce phénomène. Mais, d'autres conditions sont aussi nécessaires, car on ne comprendrait plus pourquoi les embryons ne deviennent pas libres dans l'estomac. En tenant compte de l'absence d'éclosions dans ce viscère, de leur fréquence dans l'intestin et de la non-intervention des diastases, on est porté à se demander si la réaction chimique du milieu 64 : ANDRÉ MARTIN n'est pas une deuxième condition nécessaire pour la mise en liberté de l'embryon. Il en en est enfin une troisième, signalée au cours de l'étude de l'action des sues digestifs, le dévelop- pement complet de l'embryon. Pour isoler chacun des facteurs qui interviennent dans ce phénomène de l'éclosion eten préciser l'action, J'ai eu recours aux milieux de culture si simples utilisés pour étudier les con- ditions du développement de l'embryon : eau distillée pure ou additionnée d'acide chlorhydrique dans la proportion de 2 p. 1000, de chlorure de sodium dans la proportion de 8 p. 1000, de bicarbonate de sodium dans la proportion de 2 et % p. 1000. Ces solutions étaient maintenues aux températures de 330 et de 380-400; les expériences ont porté sur des œufs embryonnés d'A scaris viutulorum, equorum, canis etsuis, d'Hete- rakis columbae, de Trichocephalus depressiusculus, de Sclero- stomum equinum et vulqare. 4° Éclosion de l’embryon de l’Ascaris vitulorum. a) Milieu acide. — Vans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000, aux températures de 339 et de 380-400,/es embryons n’éclosent pas. Bien plus, ils ne tardent pas à mon- lrer, au sein de leur coque, des signes de désorganisation ; ils deviennent clairs, réfringents, la partie granuleuse du corps se fragmente, et l'embryon n’est bientôt plus représenté que par un amas de vacuoles dans lequel on ne reconnait que diffi- cilement sa forme et sa nature. La destruction est complète en une quinzaine de jours, et bien peu d'embryons v échappent. Le milieu acide, si favorable à la formation de l'embryon à la température de 330, ne permet ni son éclosion, ni sa conser- valion. | b) Milieu alcalin. — Des embryons, formés dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000, lavés plusieurs fois dans l’eau distillée, puis placés dans une solution de bicarbonate de sodium à 2 et # p. 1000, à la température de 389-400, éclosent au bout de un à six jours. Le même résultat est obtenu avec des embryons formés dans la solution de bicar- bonate de sodium à 339, et maintenus dans ce milieu. c) Milieu neutre. — La solution de chlorure de sodium DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 65 à 8 p. 1000 constitue un excellent milieu pour léclosion. Des embryons de l'Ascaride du Veau, développés en milieu acide, sont placés dans la solution physiologique, à la température de 330. Quatre jours après, quelques-uns ont abandonné leur coque ets’agitent vivement dansle liquide. Lorsque les embryons évoluent dans la solution de NaCI à 330 etsont maintenus dans ce milieu et à cette température, les éclosions commencent parfois à se produire dix jours après la mise en incubation, mais elles sont rares, un très pelit nombre d’embryons ayant terminé leur développement. Elles deviennent un peu plus fréquentes les jours suivants. Néanmoins, leur nombre reste toujours rela tivement faible par rapport au nombre immense d'œufs embrvonnés contenus dans le tube de culture. A la température de 380-400, le phénomène acquiert une intensité toute particulière. Qu'ils se soient développés dans la solution chlorhydrique ou dans la solution de chlorure de sodium, les embryons éclosent en grand nombre vingt-cinq jours après la miseen incubationet on les voit s’agiter activement dans le champ du microscope. Placés en chambre humide, 1ls conservent leur énergie pendant vingt-quatre heures. J'ai essayé de faire éclore ces embryons dans l'ex distillée. Malgré un séjour prolongé dans ce milieu, à la température de 380-400, aucune éclosion ne s'est produite. 20 Éclosion de l’embryon de l’Ascaris equorum. a) Milieu acide — Dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1 000, aux températures de 339 et de 389, les embryons de lAscaride du Cheval ne quittent pas la coque ovulaire. À 33°, ils restent assez longtemps actifs, et j'en ai vu s’agiter dans l'œuf trente-sept jours après la mise en culture. À 380, la mort des embryons survient beaucoup plus tôt, et la plupart d'entre eux sont dégénérés dix-neuf jours après le début de la culture. b) Milieu neutre. — La solution de chlorure de sodium à 8 p. 1 000 constitue un bon milieu. Les embryons formés à ia température de 339, et maintenus à ce degré de chaleur, éclosent au bout de vingt jours ; les éclosions deviennent nom- breuses vers le trentième jour après la mise en incubation et ANN. DES SC. NAT, ZOOL., 9% série, 1913 vin 66 ANDRÉ MARTIN les embryons s'agitent vivement dans le liquide. Les embryons formés à 389 et maintenus à cette température n’éclosent pas, ils dégénèrent en moins d’un mois. Mais, si on porte à 380 des embryons développés à 330, les éclosions sont nombreuses en l'espace de quelques jours. Il + à là une influence particulière et remarquable de la température, qui sera examinée dans la deuxième partie de ce travail. c) Milieu alcalin. — Je n'ai pas de résultats précis pour ce milieu ; les embryons qui y avaient évolué ont été utilisés pour l'étude de l'action des sucs digestifs, ou pour des expériences d'inoculation. 3° Éclosion de l'embryon de l’Ascaris canis. a) Milieu acide. — Les embryons, maintenus dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000, aux températures de 330 et 380, ne sortent pas de leur coque. Je n'ai pas pu me rendre compte de la durée de leur survie dans ce milieu, la culture ayant été utilisée pour d’autres expériences. b) Milieu alcalin. — Dans la solution de bicarbonate de sodium à 8 p. 1000, à la température de 330, quelques embryons réussissent à sortir de la coque ; mais ils sont en petit nombre. Le trente-seplième Jour après la mise en incubation, ces embryons sont portés à 389; deux jours après, la culture ren- ferme de nombreux vers éclos, vivants et très actifs. c) Milieu neutre. — La solution de chlorure de sodium à 8 p. 1 000 est aussi un milieu favorable à l’éclosion de l'em- bryon de l'Ascaride du Chien. Aux températures de 330 et de 389, les embryons abandonnent leur coque dans les mêmes délais qu'en milieu alcalin. > 4° Éclosion de l’embryon de l’Ascaris suis. a) Milieu acide. — Dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000, à la température de 330, aucune éclosion ne se produit. Le vingt-septième jour après la mise en incubation, des embryons commencent à présenter des signes de désagré- gation. La destruction s'accentue ensuite, et la culture tout entière est dégénérée au bout de deux mois. b) Milieu neutre. — L'eau disüllée a été utilisée. Le vingt-et- DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 67 unième Jour de leur évolution en milieu acide à 33°, des œufs con- tenant un embryon enroulé sont placés dans de l’eau distillée, el portés à 389. Onze jours après ces changements de milieu et de température, des embryons sont éclos. Dans une prise, on voit des embryons libres et mobiles et d'autres en train d’éclore. « La coque des œufs de ces quatre espècesd’Ascarides s'ouvre par une fente à bords rectilignes, écartés, qui se présente en coupe optique avec l'aspect d'un V à sommet central. Par cette ouverture, la membrane vitelline déplissée fait souvent hernie. Les coques ouvertes ont conservé leur épaisseur et l'ornemen- tation de leur surface est intacte. 5° Éclosion de l’embryon de l’Heterakis columbae. a) Milieu acide. — En solution chlorhydrique à 2 p. 1000, aux températures de 339 et de 389, les embryons de ce para- site ne sortent pas de l'œuf. Après vingt-deux jours d’étuve à 330, beaucoup d'entre eux montrent des signes de dégéné- rescence à l'intérieur de leur coque. b) Milieu neutre. — Des œufs, évolués en milieu acide à 330 et dont les embryons avaient atteint leur complet dévelop- pement, sont placés dans la solution de chlorure de sodium à 8 p. 1000. À la température de 339, trois jours après ce passage en milieu neutre, quelques embryons ont abandonné leur coque. Cette culture est alors portée à 389, et, dès le lendemain, les éclosions se multiplient. Les embryons d'Hété- rakis sortent de l'œuf vivants et conservent leur activité pendant quelque temps. 6° Éclosion de l'embryon du Trichocephalus depressiusculus. En milieu neutre, etàla température de 380-400, les embryons éclosent. Les coques s'ouvrent à une extrémité, au niveau du goulot. On voit le jeune ver faire saillie par cet orifice, puis s'échapper et devenir entièrement libre. 7° Éclosion de l’embryon des Sclérostomes. J'ai expérimenté avec les embryons du Sclerostomum vul- qare et du Sclerostonum equinun. 68 ANDRÉ MARTIN a) Milieu acide. — Les embryons de ces parasites, main- tenus dans la solution chlorhydrique à 2 p. 1000, à 380, n'éclosent pas et meurent dans leur coque au bout de vingt- quatre heures. ‘ b) Milieu neutre. — Dans la solution de chlorure de sodium à 8 p. 1000, à 389, ils éclosent en vingt-quatre heures et con- servent leur activité pendant un certain temps. 8° Expériences complémentaires sur léclosion de l’embryon. Afin de préciser davantage les conditions de la mise en hberté de l'embryon, j'ai essayé de faire éclore des embryons d’Ascarides dans le tissu conjonctifsous-ceutané de différents ani- maux. Expérience 1. — Des œufs embryonnés d’Ascaris vitulorum sont injectés dans le tissu conjonctif sous-cutané de deux Cobavyes. Un abcès se forme au point d'inoculation. Le neu- vième Jour une ponction permet d'y retrouver des œufs conte- nant un embryon encore intact, des œufs dont l'embryon est mort et désagrégé, et aussi une assez grosse proportion d'embryons éclos ou en train d’éclore; quelques-uns de ces derniers sont morts et en dégénérescence, d’autres sont vivants et se meuvent activement au milieu des globules de pus. Le vingt-deuxième jour, une nouvelle ponction permet de voir des embryons éclos, vivants, et qui ont commencé d'évoluer ; ils mesurent en effet de 400 à 500 v; le tube digestif est beaucoup plus distinct et présente une différenciation assez marquée ; l’œsophage, bien délimité, occupe les deux cinquièmes de la longueur totale. Au milieu de ces embryons éclos, il y a aussi des coques vides, qui présentent toutes la fente caractéristique. Expérience 2. — Des œufs d’Ascaris vitulorum, ayantévolué, les uns dans l'aldéhyde formique à 1 p. 1000, les autres dans le chlorure de sodium à 8 p. 1000, sont injectés sous la peau d’un jeune Chien. L'évolution avait été irrégulière et les cultures renfermaient tous les stades du développement; les embryons enroulés et bien formés étaient peu abondants. L'autopsie est faite le seizième jour. Au niveau de chaque point d’inoculation, il s'est formé une collection purulente, dans laquelle sont DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 69 quelques coques ouvertes, fendues, suivant le procédé ordinaire et quelques embryons libres, moins évolués que sur les cobayes, et déjà morts. Les œufs au stade morule où embryon incurvé ne se sont pas ouverts. Expérience 3. — Des œufs d’Ascaris equorum, embryonnés dans la solution chlorhydrique à 2 p. 1 000, sont lavés dans la solution de NaCI à 8 p. 1000 et injectés sous la peau d’un Jeune Rat. L'animal meurt le vingt-et-unième jour. Dans la collection purulente se trouvent de nombreux œufs à coque-intacte, con- tenant un embryon mort, vacuolaire, dégénéré, des coques ouvertes avec la fente en V, et des embryons libres, mais morts. Expérience 4. —Des œufs embryonnés d’Ascaris equorum sont injectés sous la peau d'un Cobaye. L'animal est sacrifié le qua- rante-et-unième jour; tous les embryons sont éclos; les coques ouvertes sont éparses au milieu du pus. Les embryons sont morts, ils ont les mêmes dimensions qu'au sortir de l'œuf, ils n’offrent aucun indice d'aceroissement ni de modification de leur organisation. Les coques ouvertes présentent la fente avec son aspect habituel; mais, de plus, elles sont amincies comme si elles avaient été dissoutes lentement. Nous savons que le pus renferme des diastases; ces ferments solubles peuvent, sans doute, à la longue, attaquer la chitine et en amener la dissolution. Mais cette action est extrêmement lente ; dans l'expérience présente l'injection remontait à quarante el un Jours ; el, d'autre part, les coques s'étaient ouvertes avant leur dissolution; la fente qu'elles présentent l'indique manifestement. Ces diverses expériences nous permettent de retenir trois conditions fondamentales nécessaires à la mise en liberté de J'embryon : la réaction du milieu, la température, le dévelop- pement complet de l'embryon. Examinons de plus près chacune d'elles. RÉACTION DU MILIEU. — L'embryon de tous les parasites que j'ai étudiés ne sort pas de la coque en milieu acide; dès que la réaction du milieu change, les éclosions deviennent abondantes. L'acidité contrarie la mise en liberté de l'embryon ; le milieu alcalin et le milieu neutre la favorisent ; les solutions de bicarbonate de sodium, la solution physiologique de chlorure 70 ANDRÉ MARTIN de sodium, l'eau distillée conviennent bien. I y à un paral- lélisme complet entre l’action des solutions minérales et l'action des sucs digestifs. Dans le suc gastrique acide, Îles éclosions n’ont pas lieu, dans les sucs pancréatique et intestinal alcalins elles sont abondantes: dans l'estomac des animaux d'expérience, milieu acide, les embryons restent enfermés dans leur coque; dans l'intestin, milieu alcalin, ils s’échappent vivants. Mais le parallélisme s'étend aussi au procédé par lequel se fait l'éclosion. Dans les sucs digestifs x vitro, dans l'intestin des animaux, dans les solutions alcaline et neutre et dans l’eau distillée, l'embryon sort de la coque par le même mécanisme. La coque n’est pas dissoute ; elle éclate et s'ouvre en un point variable avec sa structure, et peut-être aussi avec sa forme. Tous les détails d’ornementation de sa surface sont apparents, etsa résistance n’est pas modifiée. Sion comprime des coques vides entre lame et lamelle, il faut exercer une pression relativement grande pour les écraser, elles résistent autant que les coques non ouvertes ; il faut donc éloigner l'idée d’une action digestive et d'un ramollissement des couches de chitine. L'’embryon du Trichocéphale du Chien sort de la coque par un des pôles ; à ce niveau, se trouve un petit goulot obturé par une matière que les auteurs regardent comme de nature muqueuse. Si ce bouchon oblurateur était réellement muqueux, il devrait être dissous par les sucs digestifs. Je n'ai pu faire d'expérience pour vérifier ce point; mais Je puis citer l'obser- valiôn ancienne de Davaine. Cet auteur fait ingérer à un Chien des œufs non développés du Trichocéphale de l'Homme enfermés dans un petit flacon et il les retrouve intacts. Il fait mgérer à un Rat des œufs du mème Trichocéphale conservés depuis cinq années et renfermant un embryon vivant : « N'ayant à ma disposition, dit-il, qu'un petit nombre de ces œufs, j'en retrouvai très peu dans les matières intestinales et dans les fèces. Je ne vis aucun embryon libre ou sortant de la coque ; mais un examen attentif et l'écrasement de l'œuf ne pouvaient laisser de doute sur l'intégrité et l'état de vie de ces embryons (17). » Ces observations montrent bien que le bouchon polaire des DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 71 œufs de Trichocéphale n’est pas digéré par les sues digestifs. Est-il réellement de nature muqueuse ? Les embryons de l'Hétérakis du Pigeon s’échappent par une fente située entre le pôle et l'équateur de l'œuf. Cette condition chimique, réaction alcaline ou neutre du milieu, apparait donc comme un fait général, que des recherches ultérieures permettront probablement d'étendre à tous les Nématodes. Les éclosions des embryons d’Ascarides sous la peau du Rat, du Cobaye, du Chien constituent aussi des faits très importants qui, avec les résultats des expériences en milieux minéraux alcalins et neutres, démontrent bien que les sucs digestifs, ex tant qu'agents diastasiques, ne sont pas nécessaires pour la mise en liberté de l'embryon. Les digestions artificielles et tes inges- ions avaient mis en lumière ce faitimportant que les embryons éclosent seulement dans lintestin; les expériences exposées dans ce chapitre en laissent entrevoir la raison : l'alcalinité du nuülieu. I est probable que cette conclusion s'applique non seulement aux embryons, mais encore aux larves de Néma- todes. Les observations de Lambinet (16) sur la résistance de la capsule des larves de l’Ankylostome duodénal au suc gastrique confirment cette manière de voir. Les embryons ou les larves des Nématodes parasites de l'estomac et de l'œsophage doivent être mis en liberté dans l'intestin et remonter ensuite dans ces viscères. On ne conçoit guère une différence dans l'action du suc gastrique sur des coques ou des capsules de même nature el de même composition chimique. Si la capsule de la larve de l'Ankvlostome duodénal résiste au suc gastrique, celle de la larve de l'Ankvylostome du chien, des larves des Sclérostomes, des Strongles de l'estomac et de l'intestin doit posséder les mêmes propriétés; mais des recherches restent à faire pour en apporter la preuve. Il est même possible d'étendre ces conclusions à tous les parasites de l'appareil digestif et d'admettre que les coques abritant les éléments parasitaires les plus divers ne s'ouvrent que dans l'intestin. Les observations à l'appui de cette opinion sont encore peu nombreuses ; Je puis cependant citer les sui- vantes faites sur des Sporozoaires. 1 9 2 = ANDRÉ MARTIN Au cours de ses recherches sur l'£imeria cuniculi, Metzner (19) a vu que, pour observer in vitro la mise en liberté des sporozoïtes, il faut employer du suc pancréatique de Chien ou de Lapin; /e suc gastrique n'a aucune aclion. Les mêmes phénomènes se passent #2 rivo quand on inocule les kystes müûürs directement dans le duodénum d’un Lapin. Les sporozoïtes sortent d’abord du sporocyste, puis de l’oocyste, par les micropyles respectifs ; les parois de ces kystes ne sont pas dissoutes pour assurer la sortie de leur contenu. Marianne Plehn (20), recherchant les conditions de la mise en liberté des sporozoïtes du Lentospora cerebralis, Myxosporidie des jeunes Truites arc-en-ciel, à constaté que les deux capsules polaires, situées côte à côte, renferment des filamerts qui ne sont pas dévaginables par les acides et que le suc gastrique du Poisson est sans action ; mais ils sont dévaginables par les alcalis étendus. Marianne Plehn suppose que l'infection se fait per os et que les sporozoïtes deviennent libres dans l'intestin. Miller (21) étudiant le développement de lÆepatozoon per- riciosum des leucocytes du Rat blanc, a observé que les sporo- cytes renfermant les sporozoïtes se forment chez le Lelaps eclidninus. Pour amener la rupture spontanée des sporocytes, il faut les mettre dans une solution de pancréatine à 5 p. 100 dans Peau salée physiologique ou dans du suc duodénal de Rat: de plus, dans ce second cas, les sporozoïtes mis en liberté sont très mobiles. Comme l'infection du Rat se fait par les voies digestives, les sporozoiïtes doivent sortir dans l'intestin grêle. Auerbach (22), dans ses recherches sur une Mvyxosporidie de Gadus virens, est arrivé à des résultats analogues. En faisant des infestations artificielles, il a vu que, dans l'estomac, le germe n’est pas mis en liberté, et que les filamentsdes capsules polaires ne sont pas dévaginés ; l'éclatement de la spore à lieu dans le duodénum. Des observations de cette nature deviendront sans doute de plus en plus nombreuses. Il est digne de remarquer que, chez les Coccidies, comme chez le parasite endoleucocytaire du Rat et chez la Myxosporidie de la Morue, les kystes ne sont pas dissous par les sucs digestifs, mais éclatent ou s'ouvrent par leurs micropyles quand ils en sont pourvus. Il v à parallélisme DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 13 complet avec l'ouverture des coques des œufs des Nématodes. Chez les Cestodes, les observations précises sur le mode de mise en liberté de l'embryon font défaut. On sait cependant, par une expérience de Dévé (23), que les sues digestifs ne sont pes indispensables pour libérer Fembryon hexacanthe. Cet auteur inocule sous la peau d’un lapin douze anneaux mûrs de Ténia échinocoque. Trois mois après, il trouve, dans le tissu conjonctif, au point inoculé, un petit kyste de 3 millimètres de diamètre dont l'examen histologique montre qu'il s'agit d'une vésicule échinococcique ; les autres œufs sont rétractés et dégénérés. Par cet ensemble de faits, je suis amené à conclure que la coque des œufs des Nématodes n'est pas dissoute par les sucs digestifs; qu'elle éclate pour livrer passage à l'embryon ; et que cet éclatement a lieu dans l'intestin où le milieu est alcalin. C'est là que l'embryon s'échappe vivant. TempéRaTURE. — L'éclosion est liée à des conditions de température. Pour les espèces étudiées dans ce travail, la température oplima est celle du corps de hôte ou même un degré un peu plus élevé; elle oscille entre 389 et 409. Nous avons vu, en effet, que les éclosions étaient surtout nombreuses lorsque les œufs embryonnés étaient portés à ces températures. C'est d’ailleurs la règle chez les Nématodes vivipares, qui sortent de l’œufdanslecorpsmêèmede la femelle. Toutefois, nousn'obser- vons pas, même chez ces derniers, une dépendance très étroite à l'égard de la température nécessaire à l’éclosion. La Trichine, par exemple, hôte de l'intestin des Mammifères, peut vivre dans l'intestin des Oiseaux, s'y développer et y pondre ses embryons. Or, Legros et Goujon ont réussi à la faire évoluer chez des Salamandres maintenues à la température de 30° cen- tigrades environ. La Trichine est cependant un parasite en apparence étroitement adapté à la vie chez les Mammi- fères. Les embryons des Ascarides du Veau, du Cheval, du Chien et du Pore éclosent aussi à des températures inférieures à celles de leurs hôtes et notamment à 339; les embryons de l'Hétérakis du Pigeon deviennent libres dans les mêmes conditions. Mais, à ce degré, les éclosions sont rares, 14 ANDRÉ MARTIN et on ne rencontre qu'un petit nombre de Vers en hberté dans le liquide de la culture. Ceci indique que les embryons de ces parasites, bien que n’abandonnant généralement pas leur coque dans le milieu extérieur, peuvent cependant, dans certains cas, y devenir libres. Et, en effet, des éclosions y ont été constatées par divers observateurs. Baillet (1) déclare qu'il lui est arrivé plusieurs fois de trouver des embryons libres et bien vivants dans l'eau, dans la terre humide ou sur les lames de verre où 1l avait déposé des œufs embryonnés d'Ascarides. «Ce fait s’est produit assez souvent, dit-il, pour les œufs de l'Ascaris mystar (Leder) et de l'Ascaris megalocephala (Cloquet), et plus rarement pour ceux de l'Ascaris marginala (Rud.) ; nous ne l'avons jamais observé pour ceux de lAscaris suilla (Duj.). Cette éclosion, si tant est qu’on puisse lui donner ce nom, n'a Jamais lieu pour un grand nombre d'œufs à la fois dans une même préparation. On rencontre seulement çà et là quelques œufs qui s'ouvrent pour livrer passage aux embryons qu'ils renferment. » Hallez (47), répand des œufs d’Ascaris equorum qui renfer- maient des embryons bien développés et bien vivants, à la sur- face de la terre de pots à fleurs exposés à l'air et au soleil, mais posés dans des assiettes contenant de l'eau, de manière à main- tenir la terre dans un état d'humidité convenable. IT constate, au bout de deux mois (du 18 juin au 17 août), un certain nombre d'éclosions ; beaucoup d'embryons sont en partie seulement sortis de leur coque. Les jours suivants, les éclosions se multi- plient et un grand nombre d’Ascarides se meuvent librement à la surface de la terre. Des œufs semblables, conservés à sec sur une lame de verre pendant tout le temps que dure lexpé- rience, ne peuvent éclore, bien que les embryons conservent leur vitalité à l’intérieur de la coque. Il en est de même pour des œufs conservés sous l’eau. Hallez transporte aussi de jeunes Ascarides nouvellement éclos sur des feuilles de salade mouillées, sur des tranches de poires, de prunes, ete., et 1l constate que, dans ces conditions, la vie de ces animaux peut se conserver au delà de trois semaines. Sous l’eau ils meurent beaucoup plus tôt. Des Ascarides nouvellement éclos, aban- donnés sur une lame de verre, se dessèchent et ne présentent DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 19 pas le phénomène de la réviviscence quand on leur rend de l'humidité. Cobbold (2), Rivolta (2) ont aussi vu les embryons de l'Ascaris equorum éclore dans le milieu extérieur. Baillet ne dit pas à quel moment de l’année 1l à fait ses observations ; mais Hallez déclare avoir expérimenté du 18 juin au 17 août et les jours suivants, c’est-à-dire à l’époque des plus fortes chaleurs, et les pots à fleurs qu'il utilisait étaient exposés au soleil. Il est vraisemblable que la température de la terre sur laquelle les œufs avaient été déposés était voisine de 330 et dépassait même ce degré. C’est pourquoi les éclo- sions se sont multipliées. Quant aux embryons des Sclérestomes, des Ankylostomes, des Syngames, ils éclosent au dehors dans les conditions de l'infestation naturelle. Ces éclosions sont plus nombreuses et plus rapides en été, et tous les auteurs ont signalé l'influence accélératrice de la température. Si elle atteint 350, l’éclosion des embryons du Syngame trachéal est immédiate (Mégnin). Leichtenstern à constaté le même fait avec les œufs de F'Anky- lostome duodénal à la température de 380. J’aiindiqué, qu'à 389, les embryons des Sclérostomes se développent et éelosent en vingt-quatre heures. Le degré de chaleur nécessaire à ce phénomène n’est donc pas rigoureux et précis ; iloscille dans des limites assez étendues, et, à cet égard, l’œuf des Nématodes possède une plasticité rela- tivement grande. Mais cette plasticité n’est pas la même pour toutes les espèces. Les embryons d’Ascarides, d'Hétérakis et de Trichocéphale sont plus exigeants que ceux des Ankylo- stomes, des Sclérostomes et des Syngames. Ils ont besoin d'une température voisine de celle de leur hôte, et, pour que le phéno- mène se produise dans toute son ampleur, il faut un degré de chaleur égal à celui de ce dernier. C’est une des raisons pour lesquelles ils n’éclosent pas ordinairement dans le milieu extérieur. Quant au mécanisme de l’action de la température, il m'est impossible de le préciser. Pourquoi l'embryon des Ascarides sort-il si rarement au dehors tandis que celui des Sclérostomes y devient libre avec la plus grande facilité, dans les mêmes 76 ANDRÉ MARTIN conditions? Peut-être faudrait-il chercher les raisons dans les propriétés de la coque, propriétés variables avec chaque espèce. Il est probable, qu'au cours du développement embryonnaire, la coque subit, dans sa structure intime, des modifications qui rendent sa déchirure possible à un moment donné; la produc- ion de cette déchirure serait alors fonction de la température. Peut-être faut-il invoquer une intervention directe de l'embryon; je n'ai pas réussi à la mettre en évidence. Ceci me conduit à parler d'une troisième condition de l'éclosion, intrinsèque celle-là : le développement complet de l'embryon. DÉVELOPPEMENT COMPLET DE L'EMBRYON. — Cette condition est la plus importante et, tant qu'elle n'est pas réalisée, l'em- bryon ne quitte pas la coque et celle-ci ne s'ouvre pas. À plusieurs reprises, j'ai étudié léclosion avec des cul- tures d’Ascarides contenant des embryons dont le déve- loppement n'était pas terminé et qui n'avaient pas encore accompli leur mue. Ces embryons ne sont jamais éclos, bien que les conditions de milieu et de température fussent très favorables. Au début de ces recherches, j'utilisais les embryons dès qu'ils s'étaient enroulés. J'étais surpris de n’observer aucune éclosion ; en revanche, j'assistais au perfectionnement de la struc- ture de Pembryon et à sa mue; puis, après un délai variable avec l'espèce, les embryons éclosaient en grand nombre. Dès lors je n'utilisai plus que des embryons ayant mué, et les éclo- sions se produisirent beaucoup plus vite. Les œufs contenant un embryon incurvé en haricot ou une morule ne s'ouvrent jamais dans les conditions les plus favorables à léclatement de la coque. Il semblerait résulter de ces observations que l'embryon intervient d’une manière active dans l'ouverture de cette der- nière. Mais de quelle façon agirait-11? Ce sont deux points inté- ressantsde la physiologiede l'embryon qu'il ne m'a pas été possi- ble d’élucider.Jen’ai pu faire qu'une constatation certaine, c’est que l'embryon n’éclôt que lorsqu'ilest complètement développé. En résumé, l'étude de l’éclosion conduit à formuler les con- clusions suivantes : La mise en liberté de l'embryon d’Ascaride, d'Hétérakis et de Trichocéphale est sous la dépendance de trois facteurs, un intrinsèque et deux extrinsèques : 10 le déve- loppement complet de l'embryon; 20 un milieu de réaction DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 77 alcaline ou neutre; 39 une température élevée égale à celle de l'hôte du parasite. La rareté des éclosions de ces parasites dans le milieu extérieur est due au degré de la température exté- rieure, qui est trop inférieur à celui de la température de l'hôte. L'action des sucs digestifs n’est pas une action diastasique ; ils ne dissolvent pas la coque pour libérer l'embryon; celle-ci éclate, et le procédé de l’éclosion est identique dans le tube digestif et dans le milieu extérieur. L'éclosion n'a pas lieu dans l'estomac, parce que le milieu est acide ; elle se fait dans l'in- testin, parce que le milieu est alcalin. DEUXIÈME PARTIE ÉTUDE CRITIQUE DES FACTEURS DU DÉVELOPPEMENT DE L'ŒUF La première partie de ce travail est consacrée à l'étude du développement de l'œuf d'un certain nombre des Nématodes parasites dans des milieux divers et à des températures variées. Les ressemblances et les différences offertes par l’évolution de l'embryon dans les multiples conditions où l'œuf à été placé ont été notées, et lerôle des facteurs chimiques et physiques qui agissent sur lui à été mis en évidence. Il est intéressant d’exa- miner de plus près la part qui revient à chacun de ceux-ci et d’en faire une étude critique. Ce sera l’objet de la deuxième partie. Dans un premier chapitre, j'envisagerai les facteurs chimiques et l’action particulière de chacun d'eux ; comme tous les facteurs agissent sur le protoplasme de l'œuf inclus dans la coque chiti- neuse, un deuxième chapitre sera consacré à l'étude de cette membrane; dans un troisième, Jj'examinerai l'action de la température. CHAPITRE PREMIER LES FACTEURS CHIMIQUES I. — SUBSTANCES EN DISSOLUTION DANS LE MILIEU Les milieux liquides employés peuvent être rangés dans trois groupes : 19 Ceux qui ne.contiennent aucun corps en dissolution (eau distillée, glvcérine pure). 20 Ceux qui tiennent en dissolution des corps quise dissocient en ions (les acides, Les sels divers). 30 Ceux qui tiennent en dissolution des corps qui ne se dissocient pas (lactose). J'examinerai successivement l’action de ces trois groupes de milieux sur le développement de l'embryon, sur sa conserva- tion et sur son éclosion. 80 ANDRÉ MARTIN A. — Action des corps en dissolution sur le développement de l’embryon. La marche de l’évolution est différente dans chacun de ces trois groupes de milieux. Premier groupe. — L'œuf des Nématodes étudiés ici évolue dans l’eau distillée pure. La rapidité du développement est fonc- ion de la température. A la température du laboratoire, la formation de l'embryon exige une longue durée, un à plusieurs mois. Au contraire, à 330, les embryons apparaissent rapidement ; ceux de l'Ascaride du Veau en dix-septjours, ceux de l’Ascaride du Cheval en quatre jours. La glyvcérine pure est un milieu peu favorable au dévelop- pement. À la température du laboratoire, les œufs de l'Axcaris outulorum n'y évoluent pas; dès le deuxième Jour, un grand nombre sont déshydratés, ont perdu leur couleur sombre et sont devenus clairs et brillants : la membrane vitelline se détache de la face interne de la coque. La déshydratation s’accentuedejouren jouret tous les œufs succombent. À 3530, le phénomène est encore plus rapide ; la destruction est complète en trois, quatre jours. L'œuf de l'Ascaris equorum est plus tolérant. À 330, l'embryon s’enroule dès le quatrième jour, malgré la déshydratation et le décollement de la membrane vitelline. Si les embryons sont maintenus à cette température, ils périssent rapidement; si elle baisse, la survie est plus longue. À la température du labora- toire, la segmentation est impossible et, en quelques jours, les œufs, déshydratés, sont complètement détruits. L'huile d'olive pure constitue un milieu aussi peu propice au développement que la glvcérine pure. Mais l'œuf conserve son aspect el ses caractères pendant longtemps. Ainsi les œufs de l’Ascars vitulorum maintenus dans ce milieu à la température de 339 ne se segmentent pas, ou ne dépassent pas le stade deux blastomères. Après trois mois, la plupart paraissent intacts : quelques-uns seulement sont clairs, brillants et vacuolaires. En l'absence de tout corps en dissolution dans un milieuliquide, le développement embryonnaire est souvent impossible ; 1 est en tout cas toujours lent. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 81 Deurième groupe. — Le développement est {oujours possible quand les conditions de température sont réalisées. Les solu- tions employées renferment des corps divers, à des degrés de concentration différents. Ces corps sont des acides, minéral (acide chlorhydrique) ou organique {acide lactique), et des sels de sodium, de calcium, de potassium et de magnésium. Ces acides et ces sels se dissocient dans leurs solutions en ions qui deviennent libres. Ces ions libres influencent l’évolution ; c’est à leur action directe qu'il faut rapporter les modalités que l’on observe dans le développement et dans la rapidité de la forma- tion de l'embryon. | A 330, l'embryon de l’Ascaris ritulorum apparait : En 17 jours dans l’eau distillée. — 7 —- dans la solution d'acide lactique à........ 10 p. 1000. CE ans la solution dACINA. Ne 2 — dans la solution de tNa GIF a 2 Een EME SR Se danstiie solutiontde CONaHta- "0 Ste EU _ PE EE de LS PRE — 12 — dansla solution de COSNa? crist. à 40H20 à. 8 — dans lacolutiondenRKOMAE ER RC EN SE D danstlassolution de Catane” SR — — 30 — dans la solution de MgCPE à..... 8 — En prenant comme terme de comparaison l'eau distillée, on voit que, pour une même température et un même degré d’aéra- tion, les substances expérimentées se laissent répartir en deux catégories ; les unes (acide lactique, acide chlorhydrique, chlorure de sodium, bicarbonate de sodium, carbonate de sodium) accélèrent l'évolution; les autres (chlorure de calcium, chlorure de magnésium) la retardent beaucoup. Le chlorure de potassium est à la limite et, par rapport à l'eau distillée, n'exerce aucune influence sur la segmentation. L'acide lactique se dissocie relativement peu, mais tous les autres corps sont beaucoup plus dissociés. Les chlorures libèrent l'ion CI et les ions Na, K, Ca, Mg; le carbonate de sodium les ions CO* et Na; le bicarbonate de sodium libère en plus lion H: l'acide chlorhydrique répand dans la solution les ions El et CI. Or, en étudiant le tableau comparatif de la formation de l'embryon dans ces différents milieux, on es conduit à rapporter aux ions métalliques l'accélération ou le ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 9e série. LORS VII 0 82 ANDRÉ MARTIN ralentissement de l’évolution. Ainsi, dans les milieux chlorurés, la durée du développement varie du simple au double et presque au quadruple suivant le cas : de huit jours dans la solution de chlorure de sodium, elle passe à seize jours dans le chlorure de potassium, pour atteindre trente Jours avec le chlorure de calcium et le chlorure de magnésium. Dans chacun de ces quatre milieux il y a un ion commun, Cl, et un ion différent, Na, K, Ca, Mg; les différences observées ne peuvent être rapportées qu'à ce dernier ; et il faut conclure que l'ion Na accélère le développement de l'œuf de lAscaride du Veau, que l'ion K ralentit la segmentation et que les ions Ca et Mg lui imposent un long retard. L'ion H exerce une grosse influence sur la segmentation. Dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1 000, le développement est rapide et très régulier ; dans l'acide lactique, où cet ion se retrouve encore, l'évolution est aussi rapide et aussi régulière. Enfin les différences présentées par le bicarbonate de sodium et le carbonate de sodium sont peut-être dues en partie à ce même élément. Il faut maintenant rechercher pourquoi l'embryon se forme plus lentement dansla solution de carbonate de sodium que dans la solution de chlorure de sodium. L'ion Na paraît cependant très favorable au développement. Ici intervient sans doute un facteur nouveau, l'alcalinité très marquée du milieu ; les solu- tions de chlorure de sodium sont neutres au tournesol, celles de carbonate de sodium sont au contraire très alcalines. En raison de la constitution particulière de ce sel formé par l’asso- ciation d'un acide faible et d’une base forte, 11 y a prédominance de l'élément basique ou, si l’on veut, des ions OH qui le caractérisent. Or, les ions OH sont peu favorables à l'évolution. À 330, dans une solution de NaOH à 8 p. 1000, les œufs de l'Ascaris vitulorum atteignent en cinq jours le stade embryon incurvé ; mais quelques-uns seulement s’enroulent et parviennent à se développer complètement. Tous les autres sont détruits; leur désagrégation commence vers le douzième jour. I était intéressant d'étudier l’action du mélange de cescorpssur le développement des œufs. Voici les résultats de cesexpériences. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 83 1° Le septième jour de l'incubation, il est prélevé 10 centi- mètres cubes d’une culture d'œufs d’Ascaris milulorum à 3539, dans la solution de carbonate de sodium à 8 p. 1000, aux stades morules à petits blastomères etembryons incurvés. À ces 10 centimètres cubes, on ajoute 4 centimètres cubes d’une solution de chlorure de magnésium à 8-p. 1 000. Ce mélange est maintenu à 33° comme la culture témoin. L'examen comparatif de ces deux cultures indique une différence appréciable dans la marche du développement: des embryons enroulés apparaissent cinq Jours après dans les deux milieux ; mais, tandis que dans COSNa?seul, l’évolution s'arrête dès ce moment, elle se poursuit dans CONa? + MeCl?, où les embryons enroulés deviennent de plus en plus nombreux. 20 On prélève 25 centimètres cubes d'une culture d'œufs d'Ascaris vitulorum dans la solution de chlorure de magnésium à 8 p. 1000, à 339, ne renfermant que quelques rares stades deux blastomètres. À ces 25 centimètres cubes, on y ajoute 5 centimètres cubes d’une solution de carbonate de sodium à 8 p. { 000 ; cette nouvelle culture est maintenue à 330 comme la précédente. À l'examen comparatif, on constate une accé- lération de la segmentation dans le milieu MgCP + COSNa? ; le cinquième jour, les embryons incurvés y sont nombreux, tandis que le milieu MgCË seul ne contient qu'une faible pro- portion de morules à petits blastomères, et le huitième jour, des embryons enroulés ÿ apparaissent. 30 On prélève 20 centimètres cubes d’une culture d'œufs d'Ascaris vilulorum dans la solution de chlorure de calcium à 8 p. 1000, à 33°, ne contenant que de rares stades deux blas- tomères. A ces 20 centimètres cubes sont mélangés 10 centi- mètres cubes d’une solution de chlorure de potassium à 8 p. 1000; cette nouvelle culture est également maintenue à 33°. Dans ce milieu CaCP + KCI, la segmentation est rapide ; le deuxième jour, tous les œufs ont évolué et beaucoup sont à la phase morule à gros blastomères, le cinquième jour, les em- bryons incurvés sont nombreux, et quelques-uns commencent à s’enrouler. Dans le milieu CaCF seul, on ne voit à cette date qu'un petit nombre de morules à petits blastomères. Le tableau suivant résume ces développements. 84 ANDRÉ MARTIN TagLEau XIV. — Tableau comparatif du développement des œufs de l'Ascaris vitulorum dans les mélanges de sels. (Les jours sont comptés à partir du jour de mise en cullure dans les solutions à un seul sel.) TEMPÉRATURE 2-3-4 SA = SE Let ae EMBRYONS E de 330 blastomères. 1 © = &n9 à petits Es enroulés. © 2 EE blastomères. = = À = = 4 3N2 4 DUO, 48 heures.| 3° jour.| 4e jour.| 6e-7e jour. | Te jour.| 12 jour. | 306 j. Addition de \ 12e jour MgCl? Le mélange et ils à 8/1000 est fait à deviennent (4 c.c.) à ce stade de plus 30€ j. Ca?NO3 l'évolution nombreux à 8/1000 le 7e jour. que dans (10 c.c.) COSNa? seul pe un | 48 heures. 9e jour.| 12-16e j. |16e jour.| 21e-9$e j. | 50e j. Addition de | COSNa? Le mélange à 8/1000 | est fait à (5 c.c.) à ‘ce stade de 12e jour. [1% jour.| 15e jour. | 2®)j MgCl? l'évolution à 8/1000 le 7° jour. (25%c.c.}0 / | CaCl? | à 8/1000. (48 heures. 12e-16€ j. |16e jour.| 21e-2$e j. | 53°] Addition de : KCL . Le mélange à 8/1000 est fait à (10 c.c.) à ce stade de| 9% jour.| 9 jour. 12e jour.| 12e jour. | 23e j: CaCl ph à 8/1000 le 7e jour. (20 c.c.) L'examen de ce tableau permet de retrouver l'influence par- üculière de chacun des métaux Na, Mg, Ca et K. MgCP ajouté à COSNa? ne relarde pas l’évolution déjà avancée, mais 1l atté- nue la nocivité de COSNa? {qui sera examinée plus loin) et les embryons se forment en nombre plus grand que dans le milieu COSNa? seul. Ce dernier sel, ajouté à MgCP dans la proportion de 4 à 5 au début de la segmentation, active le développement et les embryons incurvés apparaissent beaucoup plus tôt que dans le milieu MgCP seul. Mais l'action retardatrice de Mg n’est pas complètement neutralisée et l’évolution est moins rapide que dans COSNa? seul, où même dans COSNa? -+ MeCË lorsque ces deux corps sont dans la proportion de 2,5 p. 1. Il est indiqué de rappeler ici que le carbonate de sodium précipite les solu- Hions de chlorure de magnésium en donnant de l'hydrocarbo- v DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 89 nate de magnésium; mais, en même temps que ce corps inso- luble se forme, il reste en dissolution un peu de bicarbonate de magnésium et du chlorure de sodium. Il est probable que l'accé- lération du développement qui est manifeste par rapport à la solution de MgCP seul est due au chlorure de sodium. Mais, dans les proportions du mélange (1 p. 5), ce selse forme en petite quantité, et il reste assez de magnésium dans le liquide pour neutraliser cette action accélératrice et imposer au déve- loppement le retard évident par rapport à la solution de COSNa? seul. Le mélange CaC + KCI offre des particularités analogues. Le développement est accéléré par KCLet les embryons s’en- roulent lorsque, dans le milieu CaCRË seul, l’évolution n'est qu'au stade morule à petits blastomères. L'œuf de lAscaride du Cheval ne montre pas une sensibilité aussi marquée aux corps en dissolution dans le milieu. J'ai déjà signalé sa plasticité plus grande relativement aux condi- tions de température ; elle se retrouve dans sa faculté d'adaptation aux conditions chimiques du milieu. L'évolution se poursuit avec la même rapidité dans toutes les solutions quel que soit le degré de concentration ; les différences obser- vées sont insignifiantes. Ainsi les embryons enroulés appa- rassent à 380. En 3-4 jours dans l’eau distillée. — 3 dans la solution LHC oi Rp 1000 — 3-5 ,— _ NACRE. 8 — Le #- NACRE: DORA UE — 5-6 — — COINSRETE pare 8et4 — =.3 — — COSNacrist.à10H20 8 — a — — LRQ ee LP ET RENE 8 — —- 3 — — MORE SERA EEE ENS SITES — Ut — — MES LE ce 8 — — — MECS RE 23,825 — 3. 1, — — CAC MAL Pre 8 — — 4 — _ CAC Er ET TEE C'est le Na qui retarde le plus l'évolution de Fembryon de l'Ascaris equorum. L'élévation du degré de concentration de MgeC, CaCP et NaCl ralentit un peu le développement ; 1l faut tenir compte, il est vrai, de la rapidité avec laquelle l’em- bryvon se forme dans l’eau distillée, et, dans ce cas, un retard même léger à son importance. Le mélange de certains de ces 86 ANDRÉ MARTIN milieux donne des résultats assez peu précis. J'ai employé la solution dans laquelle J. Loeb faisait évoluer les œufs fécondés d'oursin (Strongylocentrotus purpuratus) dont la composition : RS AR e est la suivante : 100 centimètres cubes de NaCl Sie 2 centi- T mètres cubes CaClË — + 2,2 centimètres cubes KCI rs 0] r 2 2 x 7 ù l r | Z 10 centimètres cubes MgCË = ; et dontle degré de concentration : . . . … : ee correspond à celui de certaines des solutions que j'avais utilisées T T T LC CN + N mL. (NaCI = 29,25 p. 1000, CaCl= 27,77 p. 1000, KCI = Le 7 N F r F4 31,291p. 1000 ; MeCP — — 23,825 p. 1 000). La segmentation accuse un léger retard sur les quatre solutions demi-normales, et ce retard se maintient jusqu'à la fin du développement. Faut-il le mettre sur le compte du Na qui domine dans le mé- lange ? L'eau de mer a des effets différents sur l'œuf de lAscaris vitu- lorum et sur celui de l'Ascaris equorum. À la température de 330, le premier évolue très irrégulièrement et les embryons enroulés sont très rares vers le vingt-septième jour; à ce mo- ment beaucoup d'œufs au stade morule dégénèrent ; un grand nombre d’entre eux ne se segmentent pas. Au contraire l'œuf de l'Ascaris equorum s'accommode de ce milieu ; à la même température (339), ilse produit d’abord des phénomènes osmo- tiques qui se traduisent par le décollement de la membrane vitelline et la formation de ménisques, puis l'équilibre s'établit dans beaucoup d'œufs; ils évoluent dès lors rapidement et les embryons se forment en quatre jours. L'eau de mer employée provenait du laboratoire de zoologie de Banyuls. L'eau de la Méditerranée a, par litre, la composition suivante (d’après Würtz, Dictionnaire de Chimie) : Grammes. NOR TRS RUES RES LR Dee Lente er Eee 11,706 GRR RE a Re PGA ee RE 20,527 MESSE ER ASE EPA CEE EN 1,3104 BE RER CNRS ERA OC ie AT EE ie IO 0.0 dpi O Dot DC 0,4411 KO RE eee 2 ee TR SRE EE TRE 0,2643 DOS su De sien OT AR RE ER EEE EN 2,943 ES PE A OC ENR mE R Ear U iG e ce yo cenote à 0,454 OT RER EE NS nee O0 ner co da 0,0679 PORT RE ee APP AE PIRE PET ET MORE TO 0,0028 DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 87 Le sulfate de magnésium est, après le chlorure de sodium, le corps que l’on trouve dans ces eaux en plus grande quantité : outre ces deux sels et Le sulfate de calcium, l’eau de mer contient d'une manièreconstante des sels de potassium ({ gramme à 15,5 par litre) et des bromures (4 à 6 décigrammes). A l'exception de SO2, Br, et Fe, les autres ions existaient dans les milieux simples utilisés dans mes expériences. Troisième groupe. — Dans ce dernier groupe, prennent place les corps qui ne se dissocient pas dans leurs solutions : le lac- tose et la glycérine, par exemple. L'œuf de l'Ascaris vilulorum ne se segmente pas dans une solution de lactose à 8 p. 1 000, à la température de 330. L'œuf de l’Ascaris equorum ne dépasse pas le stade 4 blastomères dans le même milieu. J'ai signalé, dans la première partie de ce tra- vail, que des cultures en lactose avaient été envahies par le ferment lactique et que les œufs emprisonnés dans le voile avaient donné un embryon en quarante-huit heures. L'accélé- ration de l’évolution et sa rapidité au milieu des bactéries sont le résultat de la formation de l'acide lactique ; l'influence des ions H se manifeste aussitôt et la segmentation s'accompht avec une vitesse et une régularité tout à faitremarquables. B. — Action des corps en dissolution sur la conservation de l’embryon. Après avoir constaté l'influence de ces divers corps sur le développement de l'œuf, il faut envisager leur action sur la conservation de l'embryon. Quel que soit le milieu, la vie de l'embryon est, avant tout, sousla dépendance de la température : plus celle-ci est élevée, plus tôt l'embryon succombe. Ces moda- lités de l’action de la température seront étudiées au chapitre IE. Je me borne à signaler le fait, car 1l domine les résultats enre- gistrés 101. A la température de 339, les embryons de l’Ascaris vitulorum meurent au bout d'un temps variable avec la nature des sub- stances en dissolution dans le milieu de culture. La mort sur- vient Du 20° au 30€ jour après la mise en incubation dans la SOLUTION ALES ASIE PUR En A Ne 2 p. 1000 ss Ç ANDRÉ MARTIN Le 30€ jour après la mise en incubation dans la solu- Lionde COS NA NA EE 0. in TE) Ra ve 8 p. 1000 Le 38° jour après la mise en incubation dans la solu- Dion de AR RES TR PERTE AE RR RRNEPEE 8 — Le 50€ jour après la mise en incubation dans la solu- tionide MSC FER SE RAT PER TRE RS Le 53° jour après la mise en incubation dans la solu- ton/de CaGif a ere RAR Hi OT .… 8 — Mais, dans la solution de NaCI à 8 p. 1000 et dans les solu- üons de COSNa à 2, 4, 6 et 8 p. 1000 les embryons se conser- vent longtemps et éclosent, surtout aux températures de 389-400. L'action du carbonate de sodium est un peu surprenante ; on pouvait s'attendre à des résultats semblables à ceux du bicarbonate de sodium. Ils sont tout différents. La segmenta- ton, rapide au début, s'arrête bientôt dans la plupart des œufs, eUun petit nombre d’embryons achèvent seuls leur évolution. Les œufs dont le développement est arrêté ne tardent pas à présenter des signes d’altération ; leur contenu devient bril- lant, irrégulier dans ses contours, de grosses vacuoles y appa- raissent el la destruction en est bientôt totale. Cette désorgani- sation commence dès le neuvième jour de l'incubation, lorsque l'œuf à atteint le stade embryon incurvé. Dans les œufs qui résistent, les embryons continuent à se développer et s’en- roulent, mais leur survie est courte ; un mois après la mise en culture, ils sont tous complètement détruits et transformés en un amas irrégulier de vacuoles brillantes. L’œuf de l'Ascaris equorum el celui de l'Heterakis columbae présentent la même sensibilité à l’action de ce corps. Il semble vraisemblable que cette toxicité est due à l’alcalinité très forte des solutions de carbonate de sodium — alcalinité bien plus grande que celle des solutions de bicarbonate (carbonate acide) — dans les- quelles, pour des raisons précédemment exposées, prédominent les ions OH, caractéristiques des bases. La toxicité du carbonate de sodium pour les œufs de lAsca- ride du Veau est plus grande que celle de l'acide chlorhydrique ; dans ce dernier milieu (HCI à 2 p. 1 000) les embryons meurent en moins d’un mois après la mise en incubation; mais la presque totalité desœufs évoluent rapidementetdéveloppentunembrvon:; on ne constate pas ces nombreuses destructions -des œufs au cours de la segmentation. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 89 Le chlorure de potassium, le chlorure de magnésium et le chlorure de calcium agissent beaucoup plus lentement. Dans les milieux qui les contiennent, les œufs de l'Ascaride du Veau évo- luent, mais on n’y retrouve plus l'homogénéité qui caractérise le développement dans l'acide chlorhydrique, par exemple. Beaucoup d'œufs s'arrêtent au stade morule à petits blasto- mères ou embryon incurvé, et dégénèrent. Cette destruction est manifeste un mois après la mise en incubation dans la solution de KCI; elle est visible quelques jours plus tard dans les solutions de MgCP et de CaCP. Les embryons enroulés résistent plus longtemps; ils sont morts et dégénérés vers le trente- huitième jour dans la solution de KCI; dans MgCP, la dégéné- rescence n'est totale que vers le cinquantième Jour: avec CaC, quelques embryons sont encore intacts à ce moment et, de plus, quelques éclosions se produisent. CaCR est donc, après NaCI et COSNaH, le corps qui permet la plus longue survie de l'embryon de l'Ascaris vitulorum. Si l’on examine dans leur ensemble les tableaux précédents, en mettant à part les corps tels que COSNa et NaCÏl avec . lesquels les éclosions sont nombreuses, on remarque que les corps qui accélèrent le développement sont toxiques pour l'embryon et le détruisent rapidement à une température élevée Ceona80): L'influence des corps en dissolution sur la conservation de l'embryon est encore mieux mise en lumière dans les mélanges des divers milieux. En exposantl’action de ces différentssels sur le développement, j'ai indiqué l’antagonisme qu'ils présentaient. Cet antagonisme se manifeste aussi dans la durée de la conservation de lem- bryon (Voir tableau XIV, p. 84). Le mélange MeCP et COSNa dans les proportions et les conditions de l'expérience 1 (p. 82), ne retarde pas la destruction des embryons. Le mélange des mêmes corps dans la proportion de 25 centimètres cubes de MgCEË à 8 p. 1000 et de 5 centimètres cubes de COPNa? à 8 p. 1 000 effectué au début de la segmentation hâte la mort des embryons, qui est totale vingt-trois jours plus tôt que dans la solution de MgCi seul. Le même phénomène est offert par le mélange de 20 centimètres cubes de CaCPË à 8 p. 1000 et 90 ANDRÉ MARTIN de 10 centimètres cubes de KCI à 8 p. 1000. La destruction est complète vingt-six jours plus tôt que dans CaCË seul. Il résulte de ces faits que l’action antagoniste d’un sel est surtout marquée quand elle s'exerce dès le début de la segmentation. Les divers corps dont nous venons d'étudier le rôle dans la conservation de l'œuf et de l'embryon de l'Ascaris vitulorum exercent une influence analogue sur ceux de l'Ascaris equorum. Le tableau suivant résume les résultats de mes expériences sur ce Nématode. Les embryons meurent : 50-60 jours après le début de l'incubation dans l’eau distillée à 38°. NE LE COSNa? à. 8 p. 1000 à 38e. 150 = KCLATRREeS — 20 = — CIRE — 20 = — COSNaHà. 8 et 4 — 2% — _ Na CEA een — 30 — — HG ER — 330. HAN OH Le MoCB à..,8- ERRe 45 — = CaCI2 a 7..8 — Avant de comparer ce tableau à celui qui à été établi pour lAscaris vitulorun, 11 faut remarquer que la température des expériences n’est pas la même dans les deux cas. L'œuf de l’As- caride du Veau a évolué à 339, celui de l’Ascaride du Cheval à 380. Or, cette différence de 59 est très importante à envisager et hâte beaucoup la destruction des parasites. Ainsi, en milieu chlorhydrique, l'embryon de l'Ascaride du Cheval développé à 380 est détruit dix Jours plus tôt que lorsque l’évolution a lieu à 330, [Il meurt en vingt-quatre jours dans la solution de NaCÏ à 8 p. 1 000, à 380; il est vivant au bout de deux mois dans le même milieu, à 339. Cette restriction faite, 1l est facile de voir que les substances étudiées exercent, à peu de chose près, la même influence sur la conservation de l'embryon de ces deux parasites. L'acide chlorhydrique détruit rapidement l'embryon de l’Ascaris equorum. Les sels de sodium le maintiennent long- temps en vie à la température de 330. Mais à 389, il succombe à bref délai, plus tôt dans la solution de COSNa? que dans les milieux NaCI et COSNaH. Le CONa? est encore, dans ce cas, plus toxique que le CONaH et Le NaCI. Les chlorures de potas- sium, de magnésium et de calcium ont des effets comparables sur lembryon des deux parasites. KCI est Le plus toxique, DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 91 et sa nocivilé se rapproche de celle de CONa?; MgeCP et CaCr2 assurent une longue survie à l'embryon ; CaCP est le milieu le plus favorable; pareille constatation a élé faite avec l'em- bryon de PAscaris vitulorum. C. — Action des corps en dissolution sur l’éclosion. En étudiant les conditions de ce phénomène, nous avons vu, que l'embryon devenait libre en milieu neutre et en milieu alcalin. Si on ne considère que le développement dans un milieu unique, NaCI, CONaH et CaCP® (parmi les sels envisagés dans ce travail) permettent seuls la sortie du Jeune Ver. Elle n'a pu être obtenue dans MgCP, malgré l’innocuité de ce corps. KCI et surtout COSNa? tuent les embrvons beaucoup trop tôt pour qu'ils puissent devenir libres. Faut-il attribuer ces diffé- rences à la nature même des métaux ou sont-elles sous la dépen- dance du degré de concentration? Pour répondre à ces ques- tions. 1l faudrait connaître le mécanisme intime de l'éclosion. Mais, dès à présent, 1l semble que la nature des corps a une influence sur ce phénomène ; ainsi les embryons quittent la coque en très grand nombre dans la solution de chlorure de sodium à 8 p. 1 000 et dans la solution de bicarbonate de sodium à 2 et 4 p. 1000, tandis que les éclosions sont très peu abondantes dans l'eau distillée. En résumé, le développement etla conservation de Fembrvon des Ascaris vitulorum et equorum sont influencés par la nature chimique des substances dissoutes dans le milieu, lorsque la température est égale ou assez rapprochée de celle des hôtes de ces parasites (380 et 330 dans mes expériences). Mais la pré- sence de substances dissoutes n’est pas #ndispensable à la for- mation de l'embryon. Certains corps (HCI, NaCI, COSNaH, COSNa?,KCI) accélèrent l’évolution; d’autres (CaCB, MgCP) la ralentissent, et ces variations sont vraisemblablement dues aux cations hibres dans la solution. Mais l'influence accélératrice ou retardatrice d’un même ion varie avec l'espèce du parasite ; l'œuf de l'Ascaris vilulorum est à cet égard beaucoup plus sen- sible que celui de l'Ascaris equorum. Lorsque l'embryon est développé, l'action de ces corps sur les deux parasites est comparable ; les échelles de survie varient 92 ANDRÉ MARTIN dans les mêmes limites. NaCI, COSNaH, CaCB, et MgCP sont les sels qui permettent la plus longue conservation; KCI, COSNaË et HCI détruisent, en peu de temps, les embryons de ces deux vers. Les sels présentent, les uns à l'égard des autres, un anta- gonisme évident lorsqu'ils sont introduits dans la même solu- tion. Ainsi CONa?ajouté à MgCPaccélère l'évolution ; KCI ajouté à CaCP donne le même résultat; MgCP diminue la toxicité de CONa2, et CaCP celle de KCI. Ces expériences sont intéressantes pour la physiologie géné- rale et la connaissance de l’action des substances chimiques sur les phénomènes de la vie. Le rôle biologique des sels à été surtout étudié par J. Loeb sur les animaux marins ; certains des résultats consignés dans ce travail peuvent être rapprochés de ceux que le physiologiste américain à publiés. D'une manière générale, les œufs des Ascarides sont beaucoup moins exigeants que ceux des animaux marins étudiés par Loeb. En recherchant les conditions nécessaires au développement des œufs du Strongylocentrotus lividus, Loeb (25) à vu que, en première ligne, NaCI, KCI, CaCP sont indispensables; en l'absence d’un de ces sels, la segmentation ne se produit pas, même si tous les autres constituants de l'eau de mer sont pré- sents dans la solution. Une substance comme COSNalT, capable de maintenir l'alcalinité de la solution, est également néces- saire pour le développement de ces œufs. Mg est utile si lon veut avoir un développement parfait, mais son absence est loim d'être aussi nuisible que celle de Na, Ca ou K; d’autres consti- tuants de l’eau de mer, Fe, PO#, sont sans importance. L'alca- linité de la solution est une condition du développement et de la croissance ; les acides ont une action défavorable. Les œufs des Ascaris vilulorum et equorum sont beaucoup moins sensibles à des modifications chimiques du milieu; leur développement à lieu dans un milieu acide, alcalin ou neutre, dans une solution ne renfermant que l’un des sels étudiés, et dans une solution où ils sont mélangés, comme aussi dans l'eau de mer. Mais le nombre des embryons qui réussissent à se constituer varie beaucoup et semble être en rapport avec la nature des sels, et c’est en cela que des animaux aussi diffé- rents que les Oursins et les Ascarides peuvent être comparés. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 93 L'action antagoniste des solutions de différents sels à été étudiée par Loeb (25) sur l'œuf d’un petit poisson osseux, le Fwn- dulus. Si on met des œufs du Fundulus, immédiatement après la fécondation, dans une solution pure de NaC! et d’une con- centration correspondant à peu près à celle de ce sel dans l'eau NT Ro de mer — c'est-à-dire = ou = N — aucun de ces œufs ne peut former un embrvon. Les œufs commencent à se segmenter ; ils peuvent aller Jusqu'au stade 6%, mais ils meurent après cette série de divisions. Si on ajoute à la même solution de NaCl une certaine quantité d’un sel d’un métal bivalent, on obtient autant d’embryons que dans l’eau de mer normale. Or, et c'est là ce qu'il y a de plus frappant, cet effet n'est pas produit seu- lement par les sels des métaux bivalents contenus dans l’orga- nisme ou inoffensifs : Ca, Mg, Sr, mais aussi par des cations toxiques : Ba, Co, Zn, Pb, ete. Ce qui vient d'être dit pour une solution de NaClest vrai pour les solutions de tous les sels de métaux monovalents : Na, K, NH, Li. Si on prépare différentes solutions de l’un de ces sels, on découvre vite une concentration à laquelle ce sel est toxique et ne permet à aucun œuf frai- chement fécondé de former un embryon. Mais si, à cette solu- tion toxique du sel à cation monovalent, on ajoute une pro- portion déterminée d’un sel à cation bivalent, les œufs forment des embryons qui peuvent se développer pendant un certain temps. Des cations trivalents : Cr, Al, peuvent aussi « désem- poisonner » la solution des sels à cation monovalent. La même action « antitoxique» ne peut pas être obtenue avec T des anions polyvalents. Si on ajoute à une solution de NaCT = un sel de Na à anion polyvalent — par exemple, Na?SO4 — la formation de l'embryon ne se produit pas, ou ne se produit que très exceptionnellement; un seul groupe d'ions — géné- ralement les cations — produit un effet déterminé ; les ions du signe opposé sont inactifs ou agissent dans le sens contraire. Il est remarquable que, si les solutions de sels à cation mono- valent (Na) peuvent être « désempoisonnées » par un sel à cation bivalent (Zn), l'action inverse se produit également. Pour expliquer le mode d'action des cations à fonction anti- 094 ANDRÉ MARTIN toxique, Loeb émet l'hypothèse que les sels de métaux bivalents peuvent diminuer la vitesse de la diffusion de sels de métaux monovalents vers l’intérieur de l'œuf, et réciproquement, et que des quantités très faibles de sel bivalent suffisent à produire, à cet égard, le même effet que des quantités très fortes de sel monovalent. Les résultats que j'ai obtenus avec lAscaris vilulorum ne sont pas comparables à ceux auxquels Loeb est arrivé avec l'œuf du Fundulus. L'œuf du Nématode se développe en présence des cations monovalents ou bivalents, avee une rapidité variable ; le nombre desembryons quise forment varie aussi avec chaque cation. L'addition d’un cation à un autre — au degré de con- centration de mes expériences — accélère ou ralentit l'évo- lution, suivant l'influence propre de chacun d'eux, lorsque le mélange est fait au début de la segmentation; ainsi COPNa? hâte le développement, quand il est ajouté à MeCBË; KCI agit de même lorsqu'on l'ajoute à CaCP. Mais l’action toxique de COSNa? mélangé à MgCP se manifeste, et les embryons suc- combent plus tôt que dans MgCB seul ; le même résultat est obtenu avec KCI mélangé à CaCP. Ces résultats laissent entrevoir l'intérêt que présentent les recherches sur l’action des corps dissous dans les milieux où évoluent les œufs des parasites. Il 4 a là certainement une voie nouvelle, féconde en faits importants, et dans laquelle je me propose de revenir incessamment pour compléter les données consignées dans le présent travail. Il. — ROLE DE L'OXYGÈNE Le protoplasme ovulaire respire et, comme toute substance vivante, il a done besoin d'oxygène. Tous les auteurs qui se sont occupés du développement de l'embryon des Nématodes ont insisté sur la nécessité de ce gaz. Hallez (2%) a signalé que la privation d'oxygène empèche la formation de l'embryon de l'Asearis equorum. Bataillon (26) à vu que, dans de l’eau où pullulent des bactéries aérobies, les œufs du même parasite s'arrêtent définitivement au stade deux ou quatre éléments. Les embryons de l'Ankvlostome duodénal évoluent plus rapide- DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 99 ment dans les parties superficielles de la culture, où l'oxygène est abondant, que dans les parties profondes, où sa quantité est plus réduite. J'ai fait des constatations analogues avec l'œuf de l’Ascaris vitulorum. Maintenus, à 339, dans de l’eau soumise au préalable à une longue ébullition et introduite dans des tubes de verre effilés et fermés à la lampe, les œufs de ce para- site ne présentent aucune division au bout de trois mois et demi. Le trente-huitième jour, l’un de ces tubes est ouvert et les œufs sont placés dans une solution de carbonate de sodium à 8 p. 1000 à 330. Beaucoup se segmentent aussitôt, et, en douze jours, les embryons enroulés apparaissent, mais de nom- breux œufs ne se divisent pas. Après un séjour de deux mois et demi dans ce milieu privé d'air, les œufs ont perdu leur faculté évolutive ; placés dans une solution de KCI à 37,25 p. 1000, et dans une solution de CO8Na? à 8 p. 1 000, à 330, ils ne se segmentent pas. Dans l'huile d'olive pure, à la même température, le développement est impossible. Trois mois et demi après, aucun œuf n’est segmenté. Fauré-Frémiet (27) a étudié la respiration des œufs de l'Ascaris equorum pendant le développement embryonnaire. Les phéno- mènes respiratoires s’accomplissent aux dépens de ses propres réserves ; l'œuf perd en moyenne 5,6 p. 100 de son poids sec pendant le développement, et est capable de brûler totalement ses réserves graisseuses. Pendant toute la première partie de la segmentation, l'œuf brûle surtout des graisses; lorsque cette segmentation active se ralentit, lorsque l'embryon ne fait plus que s’allonger et devenir plus nettement vermiforme, les hydrates de carbone continuent seuls à être brûlés, ainsi que l'indiquent l'étude des variations du quotient respiratoire et l'étude histologique. La combustion des graisses et des hydrates de carbone de l'œuf libère une quantité d'énergie assez consi- dérable, voisine de 300 calories par gramme d'œuf (poids sec). Cette énergie hbérée est vraisemblablement transformée en travail physique, chimique et mécanique pendant la segmen- tation. Les phénomènes de division sont, en effet, étroitement hés à cette hbération d'énergie. Le besoin d'oxygène au cours du: développement est général. Loeb a mis en évidence son rèle dans le développement des 96 ANDRÉ MARTIN œufs fécondés d'Oursins et de Poissons. et Goldlewski dans celui des œufs de Grenouille. Ce gaz est indispensable aux Nématodes ovipares dont l'œuf évolue dans le milieu extérieur (1); mais, à mesure que le parasilisme devient plus étroit, Le besoin d'oxy- gène libre s’atténue. Les Nématodes vivipares, en effet, vivent dans des cavités ou des tissus où loxygène est rare, intestin (Trichine), nodules de la paroi œsophagienne ou stomacale (Spiroptère ensanglanté du Chien, Spiroptère mégastome du Cheval), cavité péritonéale (Filaire équine, Filaire à lèvres papil- leuses du Bœuf), tendons des membres et ligament cervical (Onchocerques du Cheval et du Bœuf). Les embryons se déve- loppent dans l'utérus, et souvent y éclosent. Il est probable qu'ils puisent l'oxygène qui leur est nécessaire dans la décom- position de divers corps que lon trouve dans leur organisme. La respiration de ces êtres est fort mal connue; elle doit se rapprocher de Ta vie anaérobie des levures et des ferments. On sait qu'ils peuvent présenter une richesse extrême en glyco- gène, qui constitue parfois le tiers ou la moitié de leur poidssee. Or, en soumettant les Ascarides à l'inanition, on assiste à la disparition du glycogène avec formation de CO? et d'acide valé- rianique (Weinland) (28). Ces processus anoxybiotiques dans lesquels les animaux continuent à produire et à excréter de l'acide carbonique en l'absence d'oxygène, ont été étudiés aussi chezle Ver de terre par Lesser (29). Chez les Vers de terre vivant à l'abri de l'air, ilse forme des acides gras en quantité cinq à six fois plus considérable que chez les Vers vivant à l'air, et la sub- stance génératrice de l'acide gras est probablement un hydrate de carbone (glycogène?) Quel que soit le mécanisme de la respi- ration, 1l est bien évident que la nécessité de l'oxygène libre s'atténue de plus en plus, et finit par disparaître chezles Néma- todes les plus étroitement adaptés à la vie parasitaire ; le besoin relatif de ce gaz diminue aussi, sans doute, dans une large (4) Certains faits portent à se demander s'il est bien nécessaire que l'œuf ait à sa disposition une quantité considérable d'oxygène. Ainsi que je l'ai déjà mentionné, j'ai souvent constaté que le développement embryonnaire est pos- sible dans l'utérus d'Ascarides du Cheval et du Veau plongés entiers dans des solutions conservatrices de formol ou de formol-alcool. Les embryons y attei- gnent leur complet développement. La quantité d'oxygène, qui arrive jusqu’à eux est certainement très faible ; dans ces conditions, la segmentation doit être bien lente et les échanges respiratoires bien réduits. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 97 mesure ; l'animal s'adapte à la vie anaérobie qui lui est offerte ; l'œufse développe dans un milieu privé d'oxygène, et l'embryon en évolution s'accommode de la petite quantité provenant des décompositions qui s’opérent au sein de l'organisme maternel dans lequel 1l se forme. Il. — ROLE DE L'EAU L'eau est un des facteurs chimiques les plus importants du développement embryonnaire des Nématodes parasites. En présence de l’eau, lœuf évolue; en son absence, il meurt. Mais, à cet égard, des différences apparaissent, même chez des parasites très voisins. Davaine (30) dit que les œufs de F'Ascaride du Chien «ne se développent point dans l'eau et qu'ils finissent même par y perdre la facullé de se développer ; celte faculté ne sy conserve guère au delà de deux mois ». En laissant à sec les œufs de ce parasite il obtenait la formation dun embryon dans chacun d'eux en dix ou douze jours, à la tempé- rature de 170-200, L'Ascaride lombricoïde et le Trichocéphale de l'Homme ne lui ont pas permis de faire pareille constatation. Hallez (24) écrit que «les œufs fécondés d’Ascaris equorum retirés de l'utérus se développent très régulièrement en les conservant à see dans un verre de montre; suivant la tempé- rature, le développement à sec est achevé au bout de quinze à vingt-cinq Jours ». Mes expériences ne me permettent pas d'être aussi affirmatif. En laissant, à la température du laboratoire, des œufs d’Ascaris equoruin complètement à sec, sans jamais les humecter, Je n'ai obtenu qu'un très petit nombre d'embryons ; la plupart des œufs périssaient. La membrane vitelline se détachait de la face interne de la coque ; le vitellus, devenu plus brillant, plus clair, se rétractait par suite de la perte d’eau. Si elle n'est pas indispensable, l'eau est, du moins, extrêmement favorable au développement de ce ver. Il n’est pas nécessaire que l'œuf soit placé dans l'eau ; une atmosphère humide suffit. Baillet avait signalé ce fait. En maintenant, en chambre humide, à 359, des œufs de ce parasite placés dans un verre de montre, jai obtenu, en quatre Jours, le développement complet de fous ces œufs. ANN. DES SC. NAT, ZOOL., de série, 1913, XVIII, 4 98 ANDRÉ MARTIN L'œuf de l'Ascaris vitulorum est plus sensible à la dessicca- tion que celui de lAscaris equorum. Laissé complètement à sec à la température du laboratoire, 1] commence à se segmenter, puis l’évolution s'arrête et le vitellus dégénère. Dans ces con- ditions, la faculté évolutive ne persiste pas longtemps : après une dessiccation de quarante jours, la plupart des œufs de ce parasite, placés à 330 daus de l'eau distillée, ne se développent pas ; les modifications du protoplasme sont définitives et 1l ne peut pas récupérer l’eau qu'il a perdue. Les quelques œufs qui ont résisté à cette dessiccation évoluent et les embryons apparaissent en douze jours. Mais ils meurent aussitôt et dégé- nèrent dans la coque. La dessiccalion diminue la résistance du protoplasme ovulaire et le rend beaucoup plus sensible aux ‘agents extérieurs, en l'espèce à la tempéralure. A 330. à sec. les œufs de l'Ascaride du Veau sont tous détruits en sept Jours. D’après ces constatations, Je crois que l'eau est nécessaire au développement de lembryon de ces parasites. Dans un milieu dépourvu d'humidité, la segmentation commence, Peau contenue dans le vitellus suffit à l’assurer ; mais dès que cette eau à disparu, l’évolution s'arrête. À cet égard, les œufs des divers parasites présentent des différences : ceux de lAscaris equorum sont plus résistants que ceux de PAscaris vilulorumn ; même complètement privés d'eau, quelques-uns d’entre eux peuvent former un embryon, mais le plus grand nombre meurent. L'ernbryon de lAscaris rilulorum ne se développe pas dans ces conditions. Ce besoin d'eau est assez limité ; l'humidité du milieu suffit à assurer l'évolution ; en humectant simplement, de temps en temps, les œufs, pour les examiner au microscope, on leur fournit la quantité d’eau dont ils ont besoin et le développement s’accomplit. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 99 CHAPITRE IT PROPRIÉTÉS ET ROLE DES ENVELOPPES OVULAIRES La coque, qui constitue l'enveloppe externe, offre une épaisseur variable chez les différentes espèces de Nématodes parasites. Elle est tapissée à l’intérieur par la membrane vitelline; c'est au sein de cette double enveloppe que la cellule-œuf évolue. La coque à un rôle de protection. Lorsqu'elle est absente et que la membrane vitelline existe seule, l'œuf est rapidement détruit. À son intérieur, le développement embryonnaire s’accomplit lorsque les conditions nécessaires sont réalisées, et l'embryon, protégé par elle, peut demeurer longtemps vivant. Les auteurs qui ont étudié le développement des Nématodes ont tous été frappés de la résistance considérable que présentent les œufs. Baillet (1) écrit : « La coque oftre une telle résis- tance et une telle imperméabilité qu'elle ne peut être attaquée que par les agents chimiques doués d’une certaine énergie, et que, dans la plupart des cas, elle suffit pour protéger le contenu de l'œuf contre tous les corps qui, dans les circonstances ordi- naires, pourraient l'altérer. Dans de nombreuses expériences que nous avons faites pour étudier l’évolution du germe chez les Némaloïdes, nous avons souvent retrouvé les enveloppes des œufs des Sclérostomiens parfaitement intactes plusieurs mois après l'éclosion des jeunes Vers qu'elles renfermaient. Dans d’autres circonstances, le vitellus ou l'embryon avant été tué par une cause quelconque dans des œufs d’'Ascarides, d'Oxyures ou de Trichocéphales, nous avons vu ces œufs se conserver avec leur forme, bien que leur contenu fût altéré, pendant une année et au delà à la faveur de la résistance considérable de la coque. Mais ce n’est pas tout, et les œufs des Helminthes ont le pouvoir de résister à des causes de destruction’ qui offrent bien plus de puissance encore, car, d’après M. Van Beneden, on a pu voir se développer des embryons dans des œufs tirés de préparations anatomiques 100 ANDRÉ MARTIN conservées depuis plusieurs années dans l'alcool ou même plongées dans l'acide chromique ». É Verloren (46) à pu conserver pendant plus de douze mois des œufs de lAscaris canis dans lesquels les embryons, formés dès le quinzième Jour, sont restés vivants, bien qu'ils aient été exposés à toutes les rigueurs de l'hiver et aux chaleurs de Pété. Baillet à observé des faits analogues pour les œufs de l'Ascaris felis, de l'Ascaris equorum el de l'A scaris suis. Munck (2) a trouvé des embryons d'Ascaris canis vivants, à l'intérieur de la coque, au bout de quinze mois, dans une solution de carbonate de potasse à 2 p. 100. Nelson (45) a vu les œufs du même parasite se développer dans l'alcool, l'acide chromique, l'essence de térébenthine. Heller (2) à pu obtenir l'évolution d'œufs du Tri- chocéphale de l'homme qui avaient été gelés pendant plusieurs Jours, et Davaine (17) à conservé pendant cinq ans des œufs de ce parasite dont l'embryon était resté vivant. Hallez (31) a constaté que les œufs de tous les Nématodes ovi- pares qu'il à eu loccasion d'étudier ne se laissent pénétrer par les liquides qu'avec la plus grande difficulté ; il a vu des œufs continuer à évoluer dans l'acide osmique à 1 p. 100: toutefois l'acide chromique les fixe en quelques heures, surtout si l'on à soin de chauffer très légèrement. Jammes (32) signale lui aussi la résistance des œufs d’Asca- rides. Les embryons de ces parasites, entourés de leur coque, vivent dans la Hiqueur de Ripart et Petit, qui contient de l'acide acélique, du chlorure de cuivre et de l’acétate de cuivre ; un certain nombre d'entre eux, soumis, à plusieurs reprises et pendant des périodes de temps variées, à l'influence de cette liqueur, n'en paraissent pas gènés ; ce n’est que plusieurs jours après des montages divers qu'ils deviennent immobiles. Jammes constale aussi que la coque est imperméable à l'alcool absolu et qu'elle résiste aux solutions phéniquées. Les œufs montés dans la gélatine phéniquée évoluent, etles embryons développés ne sont pas incommodés par des solutions phéniquées à diffé- rents Litres, la plus forte étant au centième. Balaillon (26) revient sur cette question de la résistance des œufs d'Ascarides. constate que les œufs de l'Ascaris equorum évoluent dans là liqueur de Flemming, dans l'acide sulfurique DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES {01 à 1 p. 5, dans l'acide acétique à 1 p. 3, dans le nitrate d'argent à 2 p. 100, dans l'alcool à 50 p. 100. Un tel matériel ne se laisse évidemment pas pénétrer par ces liquides. Des recherches précises ont été faites aussi sur la résistance des œufs et des larves de PAnkvylostome duodénal aux agents physico-chimiques par Lambinet, Calmette, François et Breton, etc. Lambinet (33), diluant dans diverses solutions des matières fécales qui contenaient des œufs, constate que l'évolution n'est pas empêchée par un contact d'une heure avec une solution de sublimé à 2 p. 1000, d’une heure avec de l’eau de chaux, d'une heure à vingt-quatre heures avec une solu- tion à # p. 100 d'acide phosphorique à 44° Baumé, d'une heure avec le Ivsol à 3 p. 100, le liquide de Fernbach (solution de 100 grammes de chlorure de chaux du commerce dans 1200 grammes d’eau) dilué au dixième où même pur, le liquide de Labarraque, l'eau de Javelle. L'évolution est simplement relardée dans ces divers milieux. Les solutions colorantes ne peuvent arriver à pénétrer les œufs d’Ankylostome si on ne modifie pas la coque et son contenu par l'alcool fort et l'acide acélique glacial. Les larves encapsulées d’'Ankvlostome offrent aussi une grande résistance. Les recherches de Lambinet, qui a expéri- menté avec les divers antiseptiques utilisés couramment, montrent que le sublimé à 2 p. 1000 ne les tue pas, que le phénosalv! à 3 p. 100 arrête leurs mouvements après une heure et demie à deux heures ; le liquide de Fernbach au dixième ne les immobilise pas après une heure; le liquide pur agit en un quart d'heure; l'acide sulfurique à 5 p. 100 les tue après trois quarts d'heure; la solution saturée de carbonate de sodium ne les tue pas après deux heures, n1 l'eau de Javel en une heure: le pétrole camphré exagère leur vitalité ; le Iysol à 3 p. 100 les lue en une heure. Les désinfectants volatils ont une aclion efficace. Le chloroforme, l'ammoniaque et le sulfure de carbone tuent infailliblement les larves au bout de vingt- quatre heures ; les vapeurs de formol ne les tuent pas après ce délai. L'eau salée à 30 p. 100, la glycérine épaisse produisent une plasmolvse très forte et tuent les larves. Calmette, François et Breton (3%) ont confirmé l'action toxique 102 ANDRÉ MARTIN du sel marin sur les larves d’Ankylostome et montré que l'influence du sel n'est réellement efficace et rapide qu'à une concentration élevée. Tous les auteurs sont donc d'accord pour reconnaitre la grande résistance de la coque de l'œuf des Nématodes et de la capsule chitineuse des larves d’Ankvylostome. J'ai observé l’évolution de l'œuf de PAxscaris vitulorum dans le formol à lp. 1000; dans le formol à 5 p. 100, à 339, la segmentation commence, mais Fœuf est bientôt détruit; à la température du laboratoire, des œufs de ce parasite ont évolué dans l'utérus même de vers conservés pendant cinq mois dans une solution de formol à 5 p. 100 environ. Jai fait une obser- vation analogue avec l'Ascaris equorum. En examinant les œufs de vers conservés depuis plusieurs années dans de l’eau for- molée à % p. 100 alcoolisée, j'y ai vu des embryons complète- ment développés; ils étaient morts etcommencaient à dégénérer. La résistance de la coque relève des propriétés chimiques de la substance qui la constitue; la protection de l'œuf et de lem- bryon dépend à la fois des propriétés chimiques et des pro- priétés physiques de la coque. Nous allons les examiner succes- sivement. A. — Propriétés chimiques de la coque. La coque est formée de couches superposées de chitine ; celte substance (35), très répandue chez les Vers et les Arthropodes, est extrêmement résistante. Les acides et les alcalis étendus et bouillants ne l’attaquent pas ; l'acide sulfurique concentré la dissout; elle est insoluble dans l'alcool, dans l'acide acétique. Depuis les travaux de Stædeler, on la regarde comme un glyco- side, et, en effet, parmi les produits de décomposition de la chitine sous linfluence de l'acide chlorhydrique concentré, Ledderhose a trouvé de la glycosamine. Pour Sundwick, la chi- line serait un dérivé amidé d’un hydrate de carbone du type (C6 1005)"; il fait remarquer que la résistance de cette sub- stance à l’action des acides et des alcalis étendus et bouillants est en désaccord avec ce que lon sait sur le dédoublement ordi- nairement si facile des glucosides. Fondue avec la potasse ou traitée par l'acide sulfurique concentré, la chitine se com- DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 103 porterait, d'après Sundwick, comme un hydrate de carbone. En même temps qu'elle résiste aux dissolvants ordinaires et aux acides, la chitine est imattaquable par les sues digestifs. Fermi (36) a constaté que les larves de Mouche ne sont pas attaquées par la trypsine. Léon Frédéricq (37) à observé que l'Ascaride du Chien peut séjourner impunément pendant des journées entières dans du suc gastrique artificiel quand on l'y plonge intact, tandis qu'un Ascaride coupé en morceaux est digéré presque complètement dans le même hiquide, /e équment hyalin, la cuticule, échappe à la digestion el se retrouve intart. Les expériences de F. de Klug (11) établissent la résistance au suc gastrique et au sue pancréatique de la coque des œufs d'Ascarides, de la cutieule et de l'épithélium intestinal qui, on le sait, est tapissé par une couche de chitine. Enfin mes recherches in vivo et in vitro démontrent aussi que la coque des œufs intacts d'Ascarides est inattaquable par les diastases des sucs digestifs. À l'intérieur d’une enveloppe qui possède une résis- tance si remarquable, la cellule-œuf et embryon peuvent se conserver pendant très longtemps dans les miheux les plus divers et dans des conditions très variées. Les propriétés chimiques de la coque nous donnent bien la raison de la longue conservation de l'œuf. Mais elles ne nous expliquent pas les variations présentées par le développement de Pœuf d'un même parasite dans les divers milieux, ni la des- truction du contenu ovulaire dans des conditions où il devrait rester intact. Les propriétés physiques de la coque vont nous permettre de les comprendre. B. -- Propriétés physiques de la coque. Au point de vue physique, les enveloppes ovulaires repré- sentent des membranes d'épaisseur variable tendues entre le protoplasme de l'œuf ou de l'embryon et le milieu extérieur. On a recherché si ces membranes ne sont pas perméables à l’eau et à certains des corps qu'elle tient en dissolution, et si des phénomènes osmotiques ne se produisent pas, par leur inter- médiaire, entre le contenu de l'œuf et le milieu extérieur. Suivant les résultats de leurs observations, les auteurs ont tour 104 ANDRÉ MARTIN à tour considéré les enveloppes ovulaires comme imperméables ou comme semiperméables. Davaine, Van Beneden, Baillet, Hallez avaient déjà noté que la coque se laisse difficilement traverser par de nombreux réactifs. Jammes (32), dans son travail sur « l’organisation et le développement des Nématodes », est revenu sur cette question. IL a constaté que les embryons des Nématodes libres meurent assez vile sous l’action des réactifs ; ils se laissent facilement colorer et il semble indiscutable que de légères parties de liquide peuvent pénétrer à leur intérieur. Il en est autrement chez les Nématodes parasites. La coque des Oxvures est bien moins perméable; certains réactifs la traversent très lentement el vont colorer les embryons (carmin boracique et chlorhy- drique) ; d'autres sont arrêtés et ne parviennent pas jusqu'à l'embryon (hématoxyline, bleu de quinoléine et quelques autres). C’est chez les Ascarides que la résistance semble portée au plus haut degré. L'acide acétique, le chlorure de cuivre, l'alcool, l'acide phénique ne traversent pas la coque. Jammes écrit : « Ces observations, jointes aux faits de même ordre signalés depuis fortlongtemps par de nombreux auteurs, me permettent de conclure à l'inperméabilité presque complète du chorion des Ascaris. » Plus récemment Bataillon (26) a cherché à déterminer les facteurs de la résistance du chorion des œufs de l'Ascaris equo- rum. « Des œufs embrvonnés, évolués dans la liqueur de Flemming, sont élalés sur des lames de verre et exposés pen- dant vingt-quatre heures à l’étuve sèche à 350. Si on les monte au baume, on constate qu'ils n'ont pas perdu d’eau en quantité appréciable ; les embryons s'agitent dans leur milieu non mo- difié. Des lames intactes gardées à la température ordinaire pendant plusieurs mois permettent d'observer à volonté les mêmes faits. Par conséquent ces œufs paraissent présenter à l'élimination d'eau la mème résistance qu'à la pénétration des liquides. » Mais cette imperméabilité à des limites assez pré- cises ; Bataillon les à déterminées en employant des solutions salines de CaCF et NaCT représentant des pressions osmotiques croissantes. « Lorsqu'on arrivera, pour le sel marin, à 15 p. 100 environ, on conslatera une véritable plasmolyse portant sur DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 109 le milieu intérieur où nage lébauche. De la coque chitineuse on verra se détacher un chorion membraneux imitant un mé- nisque dont la taille répond à un certain volume de liquide extrait. L'équilibre étant établi, c'est-à-dire la pression osmo- tique intérieure étant devenue égale à celle du milieu extérieur, le ménisque ne s'accroît plus et l'éro/ution continue. Pour l'arrè- ter, 1] faut arriver à des concentrations de 28 ou 30 p. 100 (à la Er < } | | température de 389), avec une plasmolvse portant sur 30 du volume total. Avec CaCR, la limite sus-indiquée et correspon- dant à #5 p. 100 de NaCI se trouve reportée vers 28 p. 100. En prenant pour base les chiffres donnés par de Vries et Hamburger pour des concentrations beaucoup plus faibles, on verra que les solutions sont approrimalivement isotoniques. Les pressions osmotiques fournies par le sucre de canne étant à celles données par NaCI comme 0,59 est à 5,96, on peut prévoir que le sucre ne donnera pas de résultat; et en effet, les solutions sucrées les plus concentrées ne déterminent pas trace de plasmolvse. Et comme 15 p. 100 de NaCÏ répondent à une pression osmo- tique considérable (plus de 100 atmosphères), le contenu fluide d'un œuf d'Ascaris doit être extrêmement riche en matériaux dissous. » Bataillon résume les résultats de ses observations dans les phrases suivantes : « La résistance des œufs d’Ascaris à la dessiccation comme à la pénétration des divers liquides plus ou moins toxiques parait relever de deux facteurs essentiels : «1° Existence à l'intérieur de la coque d’un chorion mem- braneux qui réalise une paroi semi-perméable des plus par- faites; «20 Concentration extrême du fluide intérieur qui représente une pression osmotique énorme. » Ces conclusions paraissent trop rigoureuses. Je ne crois pas que l'enveloppe interne de l'œuf possède la semiperméabilité des plus parfaites dont parle Bataillon. Il faut distinguer dans les enveloppes ovulaires deux parties bien différentes ; la coque proprement dite et la membrane vitelline : chacune d’elles à des propriétés physiques particulières. Si l’on place dans de l’eau distillée ou dans les solutions que 106 ANDRÉ MARTIN DK) J'ai utilisées des œufs d'Ascaride du Veau dépourvus de coque et ne possédant que la membrane vitelline, ils absorbent de l'eau et se gonflent démesurément ; le vitellus, disloqué, se résout en granules et, souvent, sous la poussée du liquide, la membrane distendue à l'excès éclate. Le résultat est sensiblement le même quelles que sotent la nature de la solution et la température. Au contraire, lorsque l'œuf de l'A scaris cilulorum est entouré de la coque bien développée, 1l n'absorbe jamais d'eau; Va nature du milieu n’a aucune influence, les constatations sont identiques avec l'eau distillée et les solutions acides, alcalines ou neutres, aux divers degrés de concentration et aux tempé- ‘atures du laboratoire, de 339 ou de 38°. La coque arrête donc l'eau et l'empêche d'arriver au contact de la membrane ritelline. Le vitellus et embryon ne sont pas protégés par la semi- perméabilité du chorion membraneux, où membrane vitelline, qui double la coque à son intérieur, mais par linperméalililé de cette dernière. Au reste, la semiperméabilité des plus parfaites dont parle Bataillon est un cas limite, « un cas extrême, idéal, dont la réalité se rapproche plus où moins » (Dastre). Les membranes de précipitation elles-mêmes ne possèdent qu'une semiperméa- biité relative; en général, elles sont traversables par tous les acides, puis par les sels d'acides monobasiques, puis, diffier- lement, par les sels d'acides polvhasiques. Les enveloppes de l'œuf ne sauraient donc être rigoureusement semiper- méables. L'imperméabilité de la coque n'est d'ailleurs ni absolue à l'égard de toutes les substances, n1 continue dans le temps pour une substance donnée. Hallez (24) a signalé que les membranes périvitellines de l'œuf de lAscaris equorum sont très perméables aux gaz, mais très peu aux liquides ; le développement embryonnaire est, en effet, impossible sans oxygène: ce gaz parvient donc au contact du protoplasme en évolution ; et d'autre part, l'acide carbonique résultant de la respiration ovulaire s'échappe à travers la coque. La méthode des solutions barvtiques faibles colorées à la phta- léine, dit Bataillon (26), atteste un dégagement d'acide carbo- nique. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 107 L'ammoniaque traverse aussi la coque des œufs, ainsi qu'en témoignent les expériences suivantes. Des œufs d’Ascaris vrtulo- rum sont placés à 330 dans une solution à 5 p. 1000 de l’am- moniaque à 229 du commerce; ils se divisent en donnant des blastomères inégaux qui offrent des dimensions très variables : vers le cinquième jour, l'évolution s'arrête, les œufs prennent un aspect irrégulier et dégénèrent; d'autres œufs du même Ver, placés à 330 dans des solutions ammoniacales à 10 et 15 p. 1000, ne se segmentent pas, mais présentent, en quelques heures, des marques non équivoques de désorganisa- tion. De même, des œufs en cours d'évolution dans lacide chlorhydrique à 2 p. 1000, transportés dans une solution am- moniacale à 10 p. 1000, présentent, environ vingt-quatre heures après, des signes de dégénérescence qui augmentent les jours suivants, jusqu'à destruction complète du contenu ovulare. Tous ces phénomènesse produisent rapidement; ils ne s'accom- pagnent pas du gonflement du protoplasme qui caractérise la pénétration d'eau en excès : il faut done admettre que l'ammo- niaque elle-même passe à travers les membranes ovulaires. La toxicité de cette substance serait la cause directe de la mort de l'embryon en voie de développement. Les enveloppes ovulaires des Ascarides sont done pénétrées par les gaz ; et cette pénétration permet d'expliquer les consta- talions faites par divers observateurs. Ainsi Davaine (38) a noté qu'un séjour trop prolongé, de plusieurs mois par exemple, dans l'urine ou dans des matières putréfiées fait perdre à Pœuf de l’Ascaride lombricoïde la faculté de se segmenter ou tue l'embryon qu'il renferme. La mort du vitellus ou de l'embryon doit être rattachée à la présence des gaz toxiques qui prennent naissance dans ces milieux facilement putrescibles. De même Looss(10), parlant des facteurs qui agissent sur le développement de l'Ankylostome duodénal, écrit : « Il m'est arrivé plusieurs fois, dans des selles très liquides et sentant fortement, de voir une proportion de germes succomber. On peut remédier à cela en délayant les excréments avec une quantité égale de noir animal. Non seulement la mauvaise odeur disparait, mais tous les œufs se développent assez rapidement. » Encore ici les gaz de putréfac- tion des fèces traversent la coque ovulaire et détruisent les œufs, 108 ANDRÉ MARTIN J'ai observé le ralentissement et l'arrêt de la segmentation sur des œufs maintenus dans de Peau distillée sentant mauvais par suite de la présence de quelque fragment d'utérus ou de Ver; il suffit de remplacer cette eau souillée par de Peau distillée pure pour que l'évolution redevienne normale. J'ai fait la même constatation avec la solution de NaCI à 8 p. 1 000. Avec la solution chlorhydrique cette éventualité n'est pas à redouter: c'est peut-être une des raisons pour lesquelles le déve- loppement y est si régulier el si rapide. L'acide chlorhydrique agirait comme antiseptique. L'imperméabilité des enveloppes ovulaires n'est dont pas parfaite ; les gaz diffusent facilement à travers ces membranes. I faut rapprocher de ces faits les observations déjà mdiquées de Lambinet sur la toxicité du chloroforme, de l'ammoniaque et du sulfure de carbone à légard des larves encapsulées de l'Ankylostome duodénal. Les sels, les acides en dissolution dans le milieu traversent aussi la coque et la membrane vitelline dans certaines condi- lions et sous certaines influences que nous allons maintenant examiner. La comparaison des tableaux du développement dans les divers milieux, montre des différences dans la rapidité de l'évolution du même parasite placé à une température donnée, différences qui ne peuvent être attribuées qu'aux substances contenues dans ces milieux. Ces faits se laissent difficilement interpréter si l’on admet limperméabilité absolue de la coque et la semiperméabilité presque parfaite du chorion. L'Ascaris vilulorum donne les résultats les plus nets. Ainsi, à 339, les em- bryons sont enroulés en huit jours dans le chlorure de sodium à 8 p. 1 000, en sept à huit jours dans les solutions de bicarbo- nate de sodium, en onze jours dans le carbonate de sodium, en quinze dans le chlorure de potassium, tandis qu'ils n’attei- gnent le même degré de développement qu'en un mois dans le chlorure de calcium et le chlorure de magnésium. Dans Peau distillée, les embryons enroulés apparaissent vers le dix-septième Jour. Cetle accélération et ce retard de la segmentation traduisent l'influence spéciale des sels en dissolution, que j'ai attribuée aux ions métalliques. Ces ions traverseraient la coque et la DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 109 membrane vitelline et influenceraient directement la cellule- œuf et les blastomères qui en proviennent. Tant qu'ils ne seraient pas arrivés au contact de l'œuf, la segmentation serait lente, analogue à celle que lon observe dans l’eau distillée ; dès qu'ils auraient traversé les enveloppes ovulaires, la division serait accélérée où ralentie suivant l’action propre de chacun d'eux. La survie des embryons dans les différents milieux est une autre preuve de l'apparition de Ia perméabilité de la coque. Si on fait évoluer des œufs d’Ascarides dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1 000, à 330 ou 380, ou obtient des embryons complètementdéveloppés en unlaps de temps variable avec les espèces. Ces embryons, maintenus dans ces milieux et à ces tempéralures, ne lardent pas à s’immobiliser dans leur coque et à dégénérer. Cette destruction est fatale, elle survient plus où moins tôt, mais aucun embryon n'y échappe. Au con- traire, les embryons développés dans les solutions alealines ou neutres (chlorure de sodium à 8 p. 1 000, bicarbonate de sodium à 2, 4,8 p. 1 000), à 33° ou 380, el qui sont maintenus à ces températures ou portés de la première à la seconde, éclosent, et restent vivants pendant quelque temps dans ces milieux. Il en est de même des embryons évolués en milieu acide à 339 puis transportés dans une solution neutre à 380. Ces faits sont inconciliables avec l'idée de l'imperméabilité permanente des enveloppes ovulaires, Si la coque restait imper- méable, le contenu de Pœuf devrait être constamment protégé, ou, s'il était détruit, cette destruction devrait être la consé- quence de l'action de Fa température. Mais alors, pour un degré de chaleur donné, les embryons d’un parasite devraient sue- comber dans les mêmes délais, quel que soit le milieu. Or, les embryons meurent toujours plus tôt en milieu acide que dans la solution de chlorure de sodium ou de bicarbonate de sodium, de chlorure de calcium et de chlorure de magnésium. Il faut nécessairement admettre que la coque laisse passer les corps dissous ; l’action toxique de chacun d'eux s'ajoute alors à l'action de la température. ëxaminons sous quelle influence l'imperméabilité s'atténue ou disparait. A la température du laboratoire (159 environ), 110 | ANDRÉ MARTIN les embryons dont l’évolution est très fente restent vivants très longtemps. Ceux de l'Axsraris vilulorum le sont encore après quatorze mois de séjour dans la solution d'acide chlo- rhydrique à 2 p. 1 000. Il suffit de comparer ces résultats avec ceux des cultures maintenues à 339 dans le même milieu (page 88) pour voir dans quelles proportions l'élévation de la température hâte la disparition de l'imperméabilité des enve- loppes ovulaires. La perméabilité semble parfois s'exagérer dans les premiers jours du développement; les substances dissoutes traversent alors facilement la coque et la membrane vitelline et, si elles sont Loxiques, arrêtent le développement. Ce phénomène est quelquefois présenté par les œufs d'une même culture sans qu'on puisse en entrevoir la cause. L'observation suivante à été faite sur l'Hétérakis du pigeon. Une culture à 33°, dans l'acide chlorhydrique à 2 p. 1 000, renfermait uniquement des morules ou des embryons enroulés, mais pas de stades intermé- diaires. Or, tandis que les embryons enroulés acquéraient leurs caractères définitifs, les morules n'évoluaient pas, se désagré- geaient. Il est difficile d'expliquer l'arrêt subit de la segmenta- tion de ces œufs si l’on n’admet pas une modification de la coque. On ne peut pas invoquer l’action de la température, elle ne se manifeste que beaucoup plus tard. J'ai observé des faits de même ordre avec les œufs des Ascarides, surtout dans les solutions d'acide chlorhydrique, de carbonate de sodium, de chlorure de potassium, qui renferment des corps toxiques pour les embryons. La coque se modifie done au cours du développement, elle devient largement perméable et l'apparition de cette perméabi- lité étendue estsous la dépendance très étroite de la température. Il peut paraitre étrange que la pénétrabihité de la coque, à la fin de l’évolution, ne s'étende qu'aux corps en dissolution dans le milieu, et que Je n'aie pas constaté la pénétration de leau dans l'intérieur de l'œuf. On sait que beaucoup de membranes animales ne laissent pas passer l’eau, mais sont pénétrées par les sels. J. Loeb (25) à fait sur le Fundulus les observations sui- vantes. Les œufs de ce Poisson, qui est exclusivement marin, peuvent être laissés dans l’eau distillée sans que leur vie, leur DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES A11 développement ou la durée de leur existence en soient le moins du monde influencés ; par conséquent l'eau disüllée ne peut pas traverser rapidement la membrane de l'œuf. Et cependant des sels pénètrent dans Pœuf, notamment les sels de potassium, car le cœur de l'embryon du Fundulus s'arrête dans Peau de mer à laquelle on les à ajoutés ; les acides tuent les œufs à une concentration très faible ; 1l en est de même des bases, bien qu'elles soient moins toxiques. J'ai indiqué que des œufs à coque bien développée, plongés dans l’eau distllée ou dans les solutions peu concentrées, n'absorbent pas d'eau. Mais, si l'eau du milieu ne peut pénétrer dans l'œuf, celle du protoplasme peut en sortir. Même à la température du laboratoire, les œufs plongés dans la glvcérine pure deviennent clairs el brillants, la membrane vitelline se détache de la face interne de la coque, s'applique sur le vitel- lus et un ou plusieurs ménisques apparaissent. Ces modifica- tions sont surtout bien visibles sur l'œuf de PAscaris ritulorum dout le vitellus est très sombre ; mais on les observe aussi sur celui de PAscaris equorum. La glvcérine, corps très avide d’eau, agit vraisemblabiement comme déshydratant et non par action osmotique. Une observation analogue peut être faite avec l'œuf de l’Ascaris equorum placé dans l'eau de mer. A la température de 339, dès ie deuxième jour, la plupart des œufs sont clairs, la membrane vilelline est séparée de la coque et forme des ménisques ; la segmentation est très lente ; cet état se main- ent Jusqu'au neuvième jour: à ce moment, l'équilibre osmo- tique s'établit, et la segmentation reprend avec sa rapidité habi- luelle; en quatre Jours, les embryons enroulés sont formés dans tous les œufs. À la température du laboratoire, les phénomènes sont iden- tiques ; il n'y à de différence que dans la lenteur du dévelop- pement. Toulefois, les œufs de lAscaris vitulorum ne se déshydratent pas dans l'eau de mer à la température du laboratoire ou à 330, Bataillon (39) à fait des constatations analogues avec l'œuf de lAscaris equorum. En employant des solutions de chlorure de sodium graduées entre 15 p. 100 et 35 p. 100, à 38o, il a constaté un retard progressif dans l’évolution, particulièrement 112 ANDRÉ MARTIN. aceusé entre 21 p. 100 et 30 p. 100. À 30 p. 100, l'évolution s'arrête au stade morule. Les mêmes résultats ont été obtenus avec le chlorure de calcium. À 30°, dans une solution à 30 p. 100, le stade embryon incurvé en cercle complet n'est atteintqu'en six jours, alors qu'à 20 p. 100 le même stade est obtenu en quatre jours. La plasmolvse est en rapport avec la teneur en sel. À la température ordinaire, les diffé- rences de pression osmotique sont plus faibles et l'équilibre beaucoup plus lent à s'établir. Aussi pourra-t-on obtenir à 30 p. 100 de chlorure de sodium le développement complet auquel on n'arrive pas à 380. De même il est facile de constater la perte d’eau sur les œufs laissés à sec dans un verre de montre. La membrane vitel- line se détache de la face interne de la coque, le vitellus devient clair, brillant et dégénère; la coque elle-même se racormit, perd ses contours réguliers et devient angulense. Ces moditi- cations sont surtout marquées sur Pœuf de l'Ascaris vitulorum. À 33° cette dessiccalion est beaucoup plus rapide, et l'œuf perd sa faculté évolutive en quarante-huit heures. À 38°, d'après Bataillon, deux jours suffisent à entrainer la mort de lébauche ou de l'embryon de l'Ascaris equorum dans lœuf laissé com- plètement à sec. Il résulte de cet ensemble de faits que l'œuf peut perdre de l'eau et que cette déshydratation entraine sa mort. La coque est donc perméable de dedans en dehors; l’eau du protoplasme peut sortir à travers la coque, Peau du dehors ne peut y pénétrer. En résumé, la coque de l'œuf des Nématodes constitue une membrane très résistante à l’action des substances du milieu extérieur et inatlaquable par les sucs digestifs. La membrane vitelline qui la double intérieurement se laisse pénétrer par l’eau et parles substances qu'elle tient en solution. La coque s'oppose à la pénétration de l’eau dans l'œuf, mais elle est impuissante à empêcher Ia déshydratation du vitellus. La coque n’est pas rigoureusement imperméable. Les gaz la traversent, et cette perméabilité aux gaz est nécessaire à la respiration de œuf et de l'embryon. Dans les conditions ordi- naires de la vie des Nématodes ovipares parasites, l'œuf, sépour- nant un temps plus ou moins long dans le milieu extérieur, DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 113 n'est exposé qu'à des températures moyennes peu élevées, et la coque peut être regardée commeimperméable aux acides, bases et sels dissous dans le milieu. Si cette imperméabilité n’est pas parfaite et si la coque est pénétrable, ces substances ne doi- vent la traverser que très lentement. C’est là une des causes de la longue conservation de l'œuf dans le milieu extérieur. En maintenant les œufs à destempératures voisines ou égales à celles des hôtes, il est facile de faire disparaitre l'imperméa- bihté de la coque; les corps dissous la pénètrent alors avec une rapidité variable et agissent directement sur l'embryon en développement, d'où accélération ou ralentissement de la seg- mentalion, longue survie ou mort rapide de l'embryon. La température est donc le principal facteur des modifica- tions constatées dans les propriétés physiques de la coque. Ces recherches laissent entrevoir la grande importance de la coque en biologie parasitaire et l'intérêt qui s'attache à son étude. Les propriétés de cette membrane présentent des moda- htés diverses chez les différents parasites, ainsi que certaines expériences encore trop peu nombreuses semblent l'indiquer. Ces modalités traduisent une adaptation spéciale des coques propre à chaque espèce et faisant partie de ses caractéristiques physiologiques. Cette adaptation spéciale est probablement en rapport avec la faculté que possède le protoplasma ovulaire de se segmenter à des températures très variées. La chitine, qui constitue la coque, est l’un des facteurs qui ont rendu possible le parasitisme si étendu des Nématodes. A mesure que le parasitisme devient plus étroit et que toute phase de vie libre est supprimée dans le cycle évolutif des Nématodes ovipares dont les œufs évoluent au dehors, la coque augmente d'épaisseur et devient de moins en moins per- méable. Elle est très mince chezles Nématodes libres et se laisse facilement pénétrer (Jammes). Elle reste peu épaisse chez les Nématodes qui éclosent au dehors dans des milieux souillés (Sclérostomes, Ankylostomes), sa perméabilité s'atténue mais est large. Les embryons de ces Vers sont adaptés à la vie libre, leur sensibilité aux agents physiques et chimiques du milieu extérieur est faible; ils sont assez près de l’état de vie errante de leurs ancêtres, et la coque a conservé quelques- ANN. DES SC. NAT. ZOOL., %%e série, : 1913, xvir, 8 114 ANDRÉ MARTIN uns des caractères qu'elle présente chez les Nématodes libres. Chez les Ascarides, au contraire, le parasitisme est plus étroit, l'embryon n’éclôt pas dans le milieu extérieur, 1} est inapte à y vivre et à s’y développer ; une enveloppe assurant une pro- tection efficace est nécessaire; la coque devient très épaisse et très difficilement pénétrable à la plupart des substances du dehors. Enfin, chez les Nématodes vivipares, où l'œuf est pro- tégé par les tissus maternels, la coque devient extrêmement mince. Il est digne de remarque que la chitine se rencontre sur- tout dans lés groupes qui possèdent le plus d'espèces parasites : les Némathelminthes et les Arthropodes. Si la présence de la chitine à rendu possibles les premières adaptations à la vie parasitaire, le parasitisme, à son tour, à développé la faculté chitinogène. L’épaisseur de la coque s’est accrue ; celle de la cuticule des larves et des adultes a subi le même développement, et l'intestin lui-même s’est recouvert d'une couche de celte substance protectrice CHAPITRE I ACTION DE LA TEMPÉRATURE La lempérature à un rôle extrêmement important dans le développement embrvonnaire des Nématodes parasites des Vertébrés à sang chaud. On peut caractériser son action en disant qu’elle accélère la formation de l'embryon, qu’elle favo- rise l'éclosion, et qu'elle détruit rapidement l'œuf et l'embryon. Cette action présente des modalités spéciales à des parasites déterminés. Jexaminerai successivement l'influence de Ja lempérature sur le développement et l'éclosion de embryon, et sur la conservation de l’œuf et de lembrvon. 1° Action de la température sur le développement et l’éclosion de l’embryon. La rapidité de la segmentation est fonction de la tempéra- Lure. Quand celle-ci s'abaisse au-dessous d’un certain degré, DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 115 l’évolution est impossible; elle commence à la température moyenne du dehors, où elle est lente, puis elle s'accélère à mesure que la chaleur augmente, Jusqu'à un degré déterminé, variable avec les espèces et qui en est une des caractéristiques physiologiques. Quand la température est très basse, au-dessous de 109, l'œuf ne se divise pas, mais il ne périt pas ; il reste en état de vie latente. Sa résistance au froid est, du reste, tout à fait remar- quable; il conserve son pouvoir évolutif même par des froids inférieurs à 00, Heller (40) a pu observer l'évolution d'œufs du Trichocéphale de l'Homme qui avaient été gelés pendant plu- sieurs Jours. La même constatation a été faite sur l’œuf de l'As- caride lombricoïde. Il suffit de soumettre des œufs en segmen- talion à l’action d’une basse température pour qu'aussitôt l’évolution s'arrête ; elle reprend ensuite dès que la température s'élève. On peut renouveler à plusieurs reprises ces alternances de froid et de-chaleur, avec arrêt et reprise du développement, sans détruire l'embryon. À une température supérieure à 100, l'embryon se forme, mais très lentement. À la température du laboratoire (15° environ), dans l’eau distillée les embryons de lAscaris equorum sont complètement développés au bout de quatre mois. Dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000, les embryons de l'Ascaris canis s’enroulent le onzième jour, ceux de lAscuris vituloruin exigent plusieurs mois. De nombreux auteurs ont fait des constatations de même ordre sur différents parasites. Hallez (24), cultivant sous l’eau à la température de laboratoire les œufs de FAscaris equorum, n'obtient des embryons allongés, mûrs pour l’éclosion, qu'au bout de huit à dix mois. Davaine écrit que l'embryon de l’Ascaris lumnbricoides demande toujours un long espace de temps pour se former. Celui de P'£ustron- qylus gigas se développe, en hiver, en l'espace de cinq à six mois; celui des Sclérostomes évolue en huit jours. Railliet (2) a montré que les œufs du Trichocéphale du Chien mettent cinq mois pour évoluer dans l’eau jusqu'à la formation complète de l'embryon. Il serait facile de multiplier les exemples. À partir de ce degré de chaleur, la rapidité de la segmenta- lion est fonction de l'élévation de température, jusqu'à une 116 ANDRÉ MARTIN limite au-dessus de laquelle L: développement devient impos- sible. C'est ce degré limite qui varie avec les différents para- sites. Sion maintient à380 des œufs d'Ascarides du Veau, du Porc, du Cheval et du Chien, dans l'un quelconque des milieux indi- qués dans la première partie de ce travail, les résultats sont très différents. Tandis que les embryons de lAscaride du Cheval sont enroulés en trois à cinq Jours, ceux de l’Ascaride du Chien en deux Jours, lasegmentation commence dansles œufs des Ascarides du Veau et du Porc, mais s'arrête bientôt au stade morule à gros blastomères pour le premier, au stade deux blas- tomères pour le second. En dépit de nombreuses tentatives, les embryons de ces deux parasites ne se sont jamais déve- loppés à ce degré Lrès voisin de celui de leur hôte (1). Il fallait chercher une température plus basse qui permit à l'œuf d’accom- plir toute son évolution. Une diminution de 5° est nécessaire, et, à la température de 33°, les embryons de l'Ascaride du Veau se développent en sept-huit jours, ceux de l’Ascaride du Porc en neuf-treiz: Jours. Quant aux œufs des Ascarides du Cheval et du Chien, ils se développent aussi rapidement à 339 qu'à 38°. Ces quatre espèces d’Ascarides, très voisines les unes des autres, habitant Loutes l'intestin de Mammifères, ont donc des œufs inégalement sensibles à la température. Au-dessus de 339, le développement de l'embryon de VAs- caride du Veau devient impossible. À 340, en milieu acide (HCI à 2 p. 1000), la segmentation atteint, en six Jours, le stade embryon incurvé; de {rès rares embryons s’enroulent, et l’évolution est suspendue chez tous les autres qui dégénèrent rapidement. Dans l'eau distillée, un très petit nombre d'œufs atteignent le stade embryon incurvé, la plupart meurent à celui de morule à petits blastomères. À 350, le développement se poursuit encore jusqu'aux embryons incurvés; mais, dans chacun de ces deux milieux, ceux-ci sont moins abondants qu'à 349. À 369, la division atteint péniblement le stade morule à petits blastomères, et à 310, elle s'arrête à celui de morule à gros éléments. (1) La température rectale moyenne du Veau est de 399-400, celle du Porc est de 399-399,5 ; celle du Cheval de 37°,5-38, et celle du Chien de 38°,5-390. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 117 A ces températures dysgénésiques, la segmentation est peu homogène. Les ébauches ont des contours irréguliers, souvent, la division est plus active à l’un des pôles qu'à l’autre, et l'embryon, formé de grosses cellules dans une moitié, de petites cellules dans l'autre, devient monstrueux. Ce trouble de la segmentation se produit surtout au moment où les morules à petits blastomères vont se former. À des stades plus avancés, on ne l’observe plus. Il est curieux de constater que les œufs des Ascarides du Veau et du Porc, dont les hôtes ont une température moyenne plus élevée que le Cheval et le Chien sont arrêtés dansleur évo- lution par un degré voisin de celle-ci. Jai fait une série d'expériences pour étudier le mode d'action de la tempéra- ture de 380 et le moment où les œufs perdent leur faculté évolutive. Des flacons contenant des œufs d'Ascaris vitulorum dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000 étaient placés à 380, et, chaque jour, l'un d'eux était porté à 339. Après vingt-quatre heures de séjour à 380, les œufs se développent très régulièrement et, en sept jours, renferment un embryon enroulé. Après quarante-huit heures, 1l se forme beaucoup d’embryons incurvés, mais aucun œuf ne dépasse ce stade. Après trois et quatre Jours, les embryons incurvés sont de moins en moins nombreux; après cinq à huit jours, l'évolution ne dépasse pas le stade* morule à petits blasto- mères, et celles-ci sont d'autant moins abondantes que le séjour à 380 a été plus long. Au delà de huit jours, la segmentation ne dépasse pas le stade morule à gros blastomères. Une expé- rience analogue avec une culture dans la solution de chlorure de sodium à 8 p. 1000 donne des résultats identiques. Si, au moment du passage d’une température à l’autre, les œufs sont changés de milieu — par exemple du milieu acide dans le milieu neutre — on obtient encore les mêmes résullats. La température de 389 exerce done une action inhibitoure sur l'œuf de l'Ascäris vitulorum ; elle arrête le développement embryonnaire au stade morule à gros blastomères et il est impossible d'obtenir un embryon. Cette action imhibitoire se manifeste dès le second jour de l'incubation ; elle est défini- tive, et les œufs influencés ne parviennent pas à former un 118 ANDRÉ MARTIN embryon, même si on les porte à la température très favorable de 29e. L'examen microscopique de ces œufs ne permet de déceler aucune modification ; les blastomères paraissent normaux. L'action de la température doit porter sur la constitution intime du protoplasme ovulaire et du noyau. Taëcrau XV. — Action inhibitoire de la température de 38° sur l'œuf de l'Ascaris vitulorum. Durée du séjour d : RE ter Plus des œufs à 389 avant 24 heures. 48 heures. 3 et 4 jours. 5 à 8 jours. de 8 jours. le passage à 35°. a — —— —————_—_—_— Rte nn. Bron Morule à pe- : ne tits blasto- Stade atteint par|,. ‘| mères. Morule , k = |[Embryo ëmbryor sauce ; le développe-|" Dao E ue REA (Les morules|à gros blas- ment ere à 5 ; ‘|| 4 ; PL €! sont de tomères. atteint) plus en plus EN Ai rares.) L'œuf de l'Ascaris suis présente des particularités du même ordre. Une culture dans l'acide chlorhydrique à 2 p. 1000 et à 380 ne contient, le huitième jour, que quelques rares phases deux blastomères, la plus grande partie des œufs n'est pas segmentée. À ce moment, elle est divisée en deux lots : lun est maintenu à 380, l’autre porté à 330. Le lot témoin ne se segmente pas et, treize jours après, l'évolution est au même point. Dans le second lot, deux jours après le changement de température, presque tous les œufs sont au stade huit blas- tomères et leur développementest homogène et régulier ; le qua- lrième jour, des morules à gros éléments se montrent dans tous les œufs, le neuvième jour de nombreux embryons incurvés apparaissent qui sont enroulés le treizième jour. L'œuf de l'Ascaride du Porc maintenu à 389 conserve sa faculté évolutive plus longtemps que celui de l'Ascaride du Veau. Après avoir subi pendant huit jours l'action de cette tempéra- ture, il se développe, s'il est porté à la température eugéné- sique de 339. L’œuf de 'Ascaride du Veau perd cette propriété au bout de deux jours, dans les mêmes conditions. Si l'œuf de l'Ascaride du Porc reste plus longtemps à 389, 1! perd son pouvoir évolutif. Le dix-neuvième jour de l'incubation, DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 119 une culture en milieu acide (HCI à 2 p. 1000) à 380 est divisée en deux lots, l'un témoin, l’autre placé à 330; la segmentation ne continue dans aucun de ces deux lots; le vitellus meurt et dégénère en quelques Jours. L'action inhibitoire de la température de 380 se manifeste aussi à une phase avancée de l’évolution. Une culture d'œufs d'Ascaris suis dans l'acide chlorhydrique à 2 p. 1000, à 359, donttousles œufs contiennent des embryons incurvés est divisée, lé huitième jour, en deux lots; l'un est conservé à 339, l'autre porté à 380. Deux jours après, dans le lot Lémoin, des embryons sont enroulés ; la segmentation n'a pas fait de progrès sensible dans le deuxième et, après neuf Jours d'é- tuve à 389, les germes sont morts et en dégénérescence. On obtient des résultats analogues avec l'œuf de lAscuris vitulorum. Le neuvième jour de l’incubation, une culture dans’ la solution de CO3Na? à 8 p. 1000, à 339, renfermant de nom- breux embryons incurvés, est divisée en deux lots : lun gardé à 330, l’autre porté à 380. Trois jours après, le lot témoin à atteint le stade embryon enroulé ; le deuxième n'a pas évolué, et commence à dégénérer. Les œufs de ces deux Nématodes réagissent donc d’une ma- nière analogue à la température; il n'y a entre eux qu'une dif- férence de degré. La température de 380, voisine de celle de leurs hôtes, est dysgénésique pour eux. Mais son action inhibi- toire se fait sentir plus tôt sur l'œuf de l'Ascéris vitulorum que sur celui de l'Ascaris suis. L'œuf de l'Heterakis columbae se rapproche des deux précé- dents. L'embryon ne se forme pas à la température de 389: mais l’évolution atteint le stade plus avancé de morule à petits éléments ; quelques embryons incurvés réussissent même à s'ébaucher ; puis la segmentation s'arrête. Je n'ai pu, faute de matériel, faire passer les cultures d’une température à l'autre. Il est toutefois remarquable de constater cette sensibilité à la chaleur sur l'œuf du parasite d'un oiseau dont la température moyenne est de 420, La famille des Ascaridés renferme done cinq parasites — quatre Asraris très voisins et un Heterakis — dont l’évolution est semblable et sur lesquels la température agit différemment. 120 ANDRÉ MARTIN Les œufs de l'Ascaride du Cheval et de l'Ascaride du Chien évoluent à la température du corps de leur hôte et aux tempé- ratures plus basses du milieu extérieur; ceux de l'Ascaride du Porc, de l’Ascaride du Veau et de l'Hétérakis du Pigeon n'évoluent pas à une température voisine de celle du corps de leur hôte, mais seulement à un degré beaucoup plus bas. Les trois derniers parasitent des animaux dont la température moyenne est plus élevée que celle des hôtes des deux pre- miers. Cette opposition entre la température élevée à laquelle l'œuf se forme et la température beaucoup plus basse à laquelle seulement il peut se développer est très remarquable, et cons- litue réellement wn caractère physiologique de ces parasites. Ces constatations, encore beaucoup trop peu nombreuses, laissent entrevoir la grande diversité des phénomènes de la vie chez les Nématodes, et l'intérêt que présente l'étude phy- siologique complète de tous les parasites, même de ceux que l'on considère comme les mieux connus. La température à une action identique sur l'éclosion de l'embryon des espèces étudiées dans ce travail. Les embryons des Ascarides, de l'Hétérakis et du Trichocéphale du Chien ne sortent de la coque que lorsque la température atteint un degré assez élevé. Dans mes expériences, ces parasites deviennent libres à 339; mais les éclosions sont toujours peu nombreuses. Au contraire, quand la température est égale où même un peu supérieure à celle de l'hôte (38-409), les éclosions se multiplient. Cette température de 380-409 est aussi nécessaire aux em- bryons des Ascarides du Veau, du Porc et de P'Hétérakis, qui se forment à un degré bien inférieur, qu'à ceux de l’Ascaride du Cheval, du Chien et du Trichocéphale, qui évoluent aux tempé- ratures plus élevées. L'action des températures du milieu exté- rieur et de 389, sur le développement et l'éclosion des œufs des trois premières espèces de parasites, présente un contraste curieux. À 380, le développement s'arrête, mais l'éclssion est facile et rapide ; à Ja température du milieu extérieur, l’évolution est possible, mais non l’éclosion. L’œuf en segmentation et l’'em- bryon complètement développé possèdent done une sensi- bilité différente à l'égard de la chaleur; celui-ci supporte DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 121 un degré égal ou supérieur à celui de son hôte, degré qui le détruit au cours de son évolution. Il est dès lors facile de comprendre pourquoi l'œuf de ces trois parasites ne se segmente pas dans l'organisme de l'hôte et pourquoi l'embryon y éelôt. .. Les embryons du Sclerostomum eguinum et du Selero- stomum vulgare éclosent très vite et très facilement à la tempé- rature de 380. Mais ils sont beaucoup moins exigeants que ceux d’'Ascarides, d'Hétérakis et de Trichocéphale ; ils deviennent libres à des températures de 12 à 20 et 25 degrés, et ils éclosent au dehors dans les conditions de Le ion naturelle. Les Ankylostomes, les Syngames, les Strongles des voies digestives offrent aussi cette particularité. Néanmoins l'élévation de la température hâte beaucoup leur éclosion. Mégnin l'a observé sur le Syngame trachéal, dont l'embryon éclôt immédiate- ment s'il est porté à 350. Leichtenstern à constaté des faits analogues avec l'Ankylostome duodénal. Tous ces Strongylidés ont une période de vie larvaire libre à l'extérieur; 1ls sont moins étroitement parasites que les Ascarides, les Hétérakis et les Trichocéphales, dont lévo- lulion ne comporte pas cette période de liberté. Ce parasitisme plus large est marqué par une indifférence plus grande à la température. L'influence de ce facteur nous apparaît donc très importante dans l'adaptation des Nématodes au parasi- üsme sur les Vertébrés supérieurs. 2° Action de la température sur la conservation de l’œuf et de l’embryon. Cette question est en rapport étroit avec Fun des points les plus importants de la biologie parasitaire, celui du mécanisme de la conservalion des parasites au dehors. C’est de cette con- servation que dépend la dissémination de l'espèce et sa perpé- tuation. J'ai indiqué, en étudiant les propriétés de la coque ovulaire, qu'elle est un puissantélément de protection pour l'œuf et l'embryon. L'étude de l'action de la température va nous montrer que ce rôle de protection est sous la dépendance immédiate de ce facteur. Tous les cas de longue survie des œufs ou des embryons cités 129 ANDRÉ MARTIN dans les chapitres précédents se rapportent à du matériel laissé à la température du laboratoire; c'est dans ces conditions que l'on à pu le conserver dans des solutions très actives comme l'acide sulfurique au cinquième ou la liqueur de Flemming. Mais, si on élève la température du milieu dans lequel se trouvent les œufs et les embryons, on observe, même dans des solutions très diluées, des modifications importantes. À 330, en milieu acide (HCI à 2 p. 1000), les embryons de l'Ascaris vilulorum se développent en sept jours, mais quinze. à vingt Jours après, la plupart d’entre eux sont morts, désa- grégés el transformés, dans la coque, en un amas informe de granulations et de vacuoles brillantes. Dans les mêmes conditions, les embryons de lAscaris equorum résistent beaucoup plus longtemps : un mois après leur formation, le plus grand nombre d’entre eux sont encore intacts; ceux de PAsraris suis meurent dix-sept à vingt jours après leur apparition ; ceux de l’Heterakis columbae commencent à dégé- nérer vingt-trois jours après leur enroulement, et meurent bientôt après. Dans la solution de chlorure de sodium à 8 p. 1000, à 339, les embryons résistent davantage : ceux de l’Ascaris equorum sont vivants cinquante jours après leur formation, et un certain nombre éelosent; ceux de lAxscaris suis sont dégé- nérés en grand nombre au bout de trente-neuf jours. Si la température à laquelle se fait la segmentation s'élève encore davantage et devient égale ou très rapprochée de celle de l'hôte, la survie est encore abrégée. En milieu acide {solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000), à 380, les embryons de l'Ascaris equorum sont détruits quatorze jours après leur com- plet développement. Dans la solution de chlorure de sodium à 8 p. 1000, la plupart d’entre eux sout morts dix-neuf jours après leur enroulement. En milieu alcalin (solution de bicar- bonate de sodium à 4 et à 8 p. 1000), les embryons sont lués quinze jours après leur formation. Ces derniers résultats paraissent surprenants et en contra- diction avec ce qui a été exposé dans le chapitre consacré à l'éclosion. J'ai en effet établi que, pour atteindre toute son ampleur, l’éclosion des embryons des Ascarides nécessite un DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 123 milieu alcalin ou neutre, et une température égale ou même un peu supérieure à celle des hôtes: cette température optima est comprise entre 38° et 400. Or, nous venons de voir que, dans ces milieux alcalins et neutres, à la température de 389, les embryons de l'Ascaris equorum dégénèrent dans leur coque en quinze à vingt jours. Cette contradiction n’est qu'appa- rente et l'explication en est facile. Toutes les expériences sur l’éclosion des embryons d'Ascarides ont été faites avec des œufs qui avaient évolué à la température de 339. Lorsque les ‘em- bryons étaient développés et avaient subi une mue dans l'œuf même, en un mot lorsqu'ils étaient mürs pour l'éclosion, ils étaient portés à la température de 382-400; ils abandonnaïent alors leur coque pour passer dans le liquide de la culture et ils y restaient vivants et mobiles pendant un temps plus où moins long. Dans les expériences dont je discute les résultats, les œufs se développaient à la température de 389, Nous avons vu que les embryons de lAscaris equoruin se forment aussi bien à 389 qu'aux températures plus basses. Or, lesembryonsdéveloppés à 389 et laissés ace degré élevéde chaleursuccombentrapidement, sans éclore, dans les milieux favorables à leur mise en hberté: au contraire, les embryons évolués à 339 et maintenus à cette température restent longtemps vivants et quelques-uns éclosent ; si on les porte à 380-400, ils quittent en grand nombre les enveloppes ovulaires. La température du corps du Cheval est favorable au déve- loppement de lembryon de FAscaride de cette espèce, mais son action prolongée lui est funeste. Les éléments cellulaires du jeune Ver sont détruits, et l'animal ne tarde pas à dégénérer en un amas de vacuoles ; cette destruction se manifeste au moment où l'embryon, complètement développé, est capable d’éclore. L'action si particulière de la température du corps de l'hôte sur l'embryon de lAscaride du Cheval est à rapprocher de celle qu'exerce le même degré de chaleur sur l'œuf de lAsca- ride du Veau au cours de la segmentation. L'œuf de ce dernier commence son évolution, la poursuit jusqu'au stade morule à gros blastomères, puis, brusquement, cesse de se segmenter et meurt ; l'œuf de lAscaride du Cheval forme un embryon, qui 12 19 4 ANDRÉ MARTIN succombe rapidement. Il n’y a, entre ces deux actions, qu'une différence de degré; la mort survient plus tôt dans un cas que dans l’autre; la destruction des deux parasites est fatale dans les deux cas. Mais l'œuf de l'Ascaris equorum possède une tolé- rance et une plasticité beaucoup plus grandes à l'égard de la” température que celui de l'Ascaris vitulorum; et, à ce point de vue, ilest plus nettement adapté au parasitisme. Chez les Néma- todes, en effet, le terme ultime de l'adaptation parasitaire est réalisé par les Vers dont l'œuf se développe et éclôt dans les voies génitales de la femelle au sein de l'organisme de l'hôte, par suite sous l’action d’une température de 380 et au delà. Avec l'Ascaride du Pore, j'ai pu faire des constatations qui confirment ce que je viens d'écrire. L’œuf de ce parasite n'évolue pas à la température de 389 (p. 19). Le huitième jour de l’incubation à 389, une culture en milieu acide est portée à l'évolution arrêtée reprend immédiatement, et, en dix à onze jours, les embryons sont enroulés: abstraction faite du retard dû à l'action de la température dysgénésique de 389, le développement est aussi rapide que celuides œufs placés dès le début à 339 dans le même milieu. Mais, à ce moment, des diffé- rences importantes apparaissent. Dans la culture, maintenue à 330 pendant toute la durée de l'expérience, la destruction des embryons ne commence que le dix-seplième jour après leur enroulement:; dans celle qui a été placée à 38°, puis portée à 330, presque tous les embrvons sont détruits sir jours après leur apparition. D'autre part, l'évolution y est moins régulière que dans la première, et beaucoup d œufs meurent au te em- brvon incurvé où morule à petits blastomères. Les œufs et les embryons qui ont subi pendant huit jours l'in- fluence de la température de 389 périssent done beaucoup plus tôt que ceux dont l'évolution s’est accomplie à 330. Le milieu étant le même dans les deux cas, ces différences sont dues au degré élevé auquel l'une des deux cultures à été soumise au début de l'expérience. La température*de 389 influence donc profondément la cellule-œuf de l'Ascaris suis ; elle lui imprime des modifications durables dont l'effet se fait sentir longtemps après que l'œuf a été soustrait à son action. Une température égale ou très rapprochée de celle du corps DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 125 de l'hôte exerce la même action sur l'œuf de quelques autres Nématodes. Les embryons des Sclérostomes se développent et éclosent en vingt-quatre heures à 380, dans la solution de chlorure de sodium, mais meurent rapidement. D'après Lam- binet (8), les œufs de l'Ankvylostome duodénal, émis avec les matières fécales, subissent, dans le milieu demi-solide où ils se trouvent, une évolution d'autant plus rapide que la tempéra- ture est plus élevée ; leur développement peut se faire à partir de 199, jusque même à 379 et 380. Toutefois, à cette température extrême de 380, un petit nombre seulement éclosent dans le milieu de Looss (matières fécales additionnées de noir animal) ; les mouvements des embryons sont plus lents; beaucoup sont imimobiles et ont besoin, pour se ranimer, d'une température plus basse. Suivant Leichtenstern (41), des cultures faites à 310-389 donnent lieu très rapidement à la sortie des embryons, qui passent après deux à trois Jours à l’état de larves enkystées, mais beaucoup d'œufs el de larves périssent. « Les embryons du Syngame trachéal, dit Mégnin (5), vivent dans l’eau, mais nous n'avons jamais pu en conserver-vivants pendant plus de huit à dix jours dans nos cristallisoirs, à la température assez élevée de 200 à 250, tandis qu'à une tempéra- ture plus basse {au-dessous de 150), ils v ont vécu de longs mois, près d'un an. » Les œufs et les embryons de ces trois Nématodes sont donc influencés comme ceux des Ascarides par une température élevée. L’'embryon de l’Ascaride du Chevalse développe très vite à la température de 380, mais 1l dégénère dans la coque au lieu d'en sortir; les œufs de l'Ankvylostome duodénal évoluent rapidement à 380, mais beaucoup d’embryons périssent; ceux mêmes qui éclosent donnent des larves dont la destinée est incertaine et qui, pour la plupart, succombent avant l’enkystement ou peu après. Or, c’est sous forme de larve enkystée que le parasite pénètre dans l'organisme humain, où il trouve une température de 379, égale à celle qui lui est si fatale dans les expériences de Lambinet et de Leichtenstern. S'il peut la supporter et poursuivre son développement, c'est parce que les premières phases de son existence se sont effectuées lentement à la température basse du 126 ANDRÉ MARTIN dehors. La température de 380, agissant dès le début de la segmentation, entraîne la mort précoce de l'embryon. L'étude plus complète de la biologie des parasites mettrait certainement en évidence des faits de même ordre chez de nom- _ breuses espèces. Elle nous donnerait peut-être l'explication d'un grand nombre de particularités de la vie parasitaire, en les faisant relever de causes physico-chimiques simples. Ainsi disparaitraient du langage biologique ces expressions vagues de conditions favorables ou défavorables, dont nous nous accommodons trop facilement et qui ‘ont pour effet d’'ar- rêter les recherches en nous donnant l'illusion d’une explication scientifique exacte et précise. Lorsque la température dépasse celle de l'hôte, la cellule- œuf peut encore la supporter sans périr, tant que la différence n'est pas trop grande. Ainsi l'œuf de l’Ascaride lombricoïde résiste à une température de 420, en conservant sa faculté évo- lutive. Mais si le degré s'élève encore davantage, la mort survient ; à 459, les œufs de l’'Ascaride du Cheval sont tués (Hallez). De cet ensemble de faitsexpérimentaux découlent un certain nombre d'idées générales qui formeront les conclusions de ce chapitre. Une température élevée, supérieure à 300 et inférieure à 459, exerce une double action sur l'œuf des Nématodes ovipares parasites des Mammifères et des Oiseaux. Elle active le déve- loppement embryonnaire; mais, en même temps, elle fait subir aux cellules en division des modifications encore inconnues dans leur nature, qui entraînent rapidement leur mort et leur désintégration. L'œuf et l’embryon de ces Vers sont done encore incomplètement adaptés aux températures élevées, égales à celles de leur hôte. Des températures plus basses sont nécessaires pour leur évolution. À cette condition seule- ment, ils peuvent se conserver longtemps dans le milieu extérieur et supporter ensuite le degré de chaleur de leur hôte. En envisageant l’ensemble des Nématodes parasites des Manmifères et des Oiseaux, il est possible d'établir une série d’adaptations progressives à latempérature du corps des hôtes. A la base, se placent les Nématodes dont les embryons ne peu- DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 127 vent se former qu'aux températures inférieures à celles de l'hôte. Danscettecatégorierentrent Ascaris vitulorum, Ascaris suis, Hete- rakis columbae ; est très probable que de nouvelles recherches viendront en augmenter le nombre. L'embryon de ces Vers ne se développe pas à la température de 389; il se forme en peu de jours à 339; il évolue aux températures encore plus basses du laboratoire et du dehors ; l’évolution v est seulement beau- coup plus lente. Immédiatement au-dessus se trouvent les Nématodes dont les embryons se forment aussi bien à la température de l'hôte qu'à des températures moins élevées. Ceux-cisont nombreux : Ascaris equorum, Ascaris canis, Sclerostonum equinum, Sclerostomum oulgare, Trichocephalus depressiusculus, qui ont servi à mes recherches. Leurs œufs évoluent aussi bien à la température de 38° qu'à celle de 339; le développement se fait aussi à celles du laboratoire et du dehors, mais 1l est considérablement ralenti. Des constatations analogues ont été faites par divers observateurs sur Oxryuris vermicularis, Ankylostomum duode- nale, Syngamus trachealis, Syngamus bronchalis, ete. La carac- téristique de ce deuxième groupe, c'est que l'évolution devient possible à des degrés plus élevés. Une troisième catégorie comprend les Nématodes dont les embryons se forment normalement à la température de l'hôte. Ce sont les parasites dont les œufs se développent dans l'organe où ils ont été pondus; par exemple, le Suongylus vasorum du cœur droit et de l'artère pulmonaire du Chien, dont les œufs vont évoluer dans le poumon, et Lous ceux qui pondent des œufs embryonnés ou des embryons libres : les Spiroptères, les Filaires, la Trichine, ete. Il est encore possible d'établir une division entre ces derniers : les uns, comme les Filaires, passent leur phase larvaire chez des Insectes (Moustiques) ou des Crustacés (Cyclops) à une température voisine de celle du milieu extérieur; les autres, comme la Trichine, restent toujours sur des animaux à température élevée. Ces derniers représentent le terme ultime de l’adaptation parasi- laire aux températures des hôtes, En comparant el en rapprochant ces faits, il est possible de comprendre par quelles étapes les Nématodes se sont 128 ANDRÉ MARTIN adaptés aux animaux à sang chaud. Avant de se fixer sur ces derniers, les ancêtres des parasites actuels ont dù évoluer à la température du milieu extérieur. La nécessité actuelle, pour certains Vers, d'accomplir leur développement embryonnaire à des tempéralures relativement basses, apparait ainsi comme une persistance d’atlaches aux conditions premières. L'élévation du degré limite est la première étape vers ladap- tation définitive au parasitisme sur les animaux supérieurs. Cette plasticité constituerait l’un des rouages du mécanisme complexe et encore obscur par lequel le parasite s’est accom- modé aux conditions physico-chimiques imposées par l'hôte. Cet état se trouve définitivement réalisé quand les embryons arrivent à évoluer dans les voies maternelles sans quitter l’ani- mal habité par leur générateur. L'adaptation la plus étroite a lieu quand l'embryon naît dans le corps de la mère. La viviparité semble donc ici pouvouw se déduire d'une question de température. Nécessité d’une température relativement basse, indifférence à l'augmentation progressive de celle-ci, subordimation à la température de l'hôte, état vivipare, se présentent donc comme les phases successives de la lente évolution par laquelle le parasite s’est adapté à la lempérature élevée des animaux supérieurs. TROISIÈME PARTIE APPLICATION DES RÉSULTATS EXPÉRIMEN- TAUX AUX CONDITIONS DE LINFESTATION NATURELLE Les expériences rapportées dansla première partie de ce tra- vail et l'interprétation qui vient d'en être faite permettent de coordonner d'une facon simple les divers phénomènes qui se sue- cèdent au cours de l’évolution des Nématodes parasites des Ver- tébrés à sang chaud. L'existence des Nématodes ovipares, qui sont plus spécia- lement visés ici, comprend deux phases bien différentes : l’une embrasse la vie embryonnaire seulement, ou bien la vie embryonnaire et la vie larvaire ; l’autre conduit l'embryon ou la larve à l’état adulte. Il est possible de ramener à un certain nombre de conditions physico-chimiques simples, les phéno- mènes qui se passent au cours de chacune de ces périodes. Lorsque l'œuf abandonne l'organisme de l'hôte, 1l tombe dans le milieu extérieur et les corps en dissolution dans ce milieu exercent sur lui leur influence spéciale. Nous avons constaté que l'œuf possède une indifférence relativement grande à leur égard; il évolue dans un grand nombre de milieux, et maints expérimentateurs ont fait remarquer la résistance extrème qu'il offre à des substances avec lesquelles la vie est généralement incompatible (acide sulfurique, acide osmique, acide chromique, etc.). La coque ovulaire, "par ses propriétés chimiques et physiques, rend possible cette rési- stance. Dans mes recherches, j'ai utilisé surtout les milieux liquides, parce qu'il était plus facile d'isoler chaque corps pour en étudier les effets, mais beaucoup d'auteurs ont suivi l'évolution de l’œuf dans des milieux solides divers. J'ai aussi obtenu le développement des œufs de l'Ascaris equorum à la température de 339, dans du sable, du terreau, du crottin de cheval légèrement humectés avec une solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000. Au bout de trois, quatre jours, beaucoup d’embrvyons étaient enroulés. ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 9e série. 1915, XVI, 9 130 ANDRÉ MARTIN Dans les conditions naturelles, l'œuf peut donc se segmenter et évoluer un peu partout {flaques d'eau, terre humide, sol humide des étables, des chenils, eau des canalisations, etc.). J'ajoute le mot « humide » parce que le développement de beau- coup d'espèces est impossible sans eau, ou tout au moins sans un cerlain degré d'humidité. Les œufs les plus résistants, ceux de lAscaris equorunr par exemple, évoluent à sec, mais très peu d’embryons se forment, et la plupart succombent rapide- ment. S'il n'est pas nécessaire que l'œuf se trouve constam- ment dans l'eau, il est indispensable qu'il soit humecté de temps en temps; la dessiccation absolue le détruit vite, même à la température du dehors. L'aération du milieu extérieur est généralement suffisante pour que l'œuf y trouve loxygène nécessaire à son dévelop- pement. IT est cependant des circonstances où l'oxygène est peu abondant, ou mème manque tout à fait; c'est le cas des fosses d’aisance, des fosses à purin, des fumiers laissés long- temps entassés; la segmentation devient alors impossible, les gaz des fermentations putrides, qui diffusent facilement à travers la coque détruisent l'œuf. Dans le milieu extérieur dont la composition chimique, le degré d'humidité el d'aération sont si variables, l'œuf est éga- lement exposé aux fluctuations de la température, qui impriment à l'évolution de nouvelles modalités. La segmentation est impossible aux basses températures ;: aux températures movennes, la formation de lembryon demande parfois plusieurs mois (Ascaride) ; au contraire, aux températures élevées, quelques jours suffisent. De là l'état de vie latente où l'œuf reste parfois et les rapidités inégales de son développement, le ralentissement bien connu de la segmen- tation en hiver el son accélération pendant l'été. La sensibilité de certains parasites (Ascaris vilulorum, Ascaris suis et Helerahis columbae), à une température voisine de celle de l'hôte, permet de comprendre pourquoi l'œuf ne se développe pas dans l'organisme de ce dernier : Fembryon ne se forme pas à 380. Malgré un séjour prolongé dans l'intestin du Veau, du Porc et du Pigeon, l'œuf de ces trois Nématodes ne peut pas y évoluer et linfestation par des œufs non DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 131 embryonnés est impossible pour raison de température. Le passage par le milieu extérieur, à un degré de chaleur bien inférieur à celui des hôtes, est nécessaire au développement de l'embryon et à la propagation de ces Vers. Mais les œufs de beaucoup d’autres Nématodes évoluent aussi bien à la température du corps de Phôte qu’à des tempé- ratures inférieures. Leur développement direct dans l'intestin semblerait possible ; 1l n’en est rien cependant et l'étude de l'action de la température en donne la raison. Lorsque l'em- bryon d'Ascaride s’enroule dans l'œuf, il n’est pas encore capable de se Hibérer; sa maturation exige une incubation plus longue, pendant laquelle sa structure se perfectionne et se complète. Or, la température de 38° détruit rapidement les embryons qui se sont développés à ce degré. En supposant possible leur formation dans l'intestin, ils seraient tués au moment où 1ls devraient éclore. Ces remarques s'appliquent également aux Sclérostomes, dont l'embryon apparait et éclôt si vite à 380, mais est aussi rapidement détruit. La conser- valion de l'embryon est sous la dépendance étroite de la tem- pérature à laquelle il s’est développé ; le passage dans le milieu extérieur est donc également nécessaire à l'œuf capable d'évo- luer à la température du corps de l'hôte. Lorsque l'embryon est formé, il doit sortir de Fœuf pour se transformer en larve, puis en Ver adulte. Des différences appa- raissent alors parmi les Nématodes ovipares. Les uns ont des œufs à coque mince et leurs embryons éclosent dans le milieu extérieur (Sclérostomes, Ankvlostomes,certainsStrongles, ete. ): les autres ont des œufs à coque épaisse que l'embryon ne quitte pas au dehors (Ascarides, Hétérakis, Trichocéphales). Ces variations sont liées à des conditions de température. Les embryons des Vers du premier groupe éclosent à des tempé- ratures relativement basses (159, 209 et 259). Les embryons des Vers du second groupe ne sortent de l'œuf qu'aux tempé- rature de 380-400, égales ou très rapprochées de celles de leurs hôtes. Test vrai, qu'avec ces mêmes parasites, plusieurs obser- valeurs (Baillet, Hallez, etc.) ont vu quelques éclosions se faire dans le milieu extérieur ; mais il importe de noter qu'Hallez, par exemple, à expérimenté entre la mi-juin et la fin 132 ANDRÉ MARTIN d'août, c'est-à-dire au moment où la température atteint son maximum, et qu'en outre les œufs étaient exposés au soleil. Les éclosions éparses, obtenues à 339 et rapportées dans le chapitre IT de la première partie de ce travail, donnent la raison de ces éclosions exceptionnelles survenant pendant la saison chaude et les ramènent toujours à une question de tempéralure. Après un séjour dans le milieu extérieur, dont la durée est variable, l'œuf est introduit dans le tube digestif de son hôte. On admet généralement que les diastases des sucs digestifs dissolvent la coque et déterminent ainsi la mise en hberté de l'embryon. Les expériences rapportées dans le chapitre con- sacré à l'étude de l’éclosion établissent qu'elle est indépendante de l’action diastasique de ces sucs et qu'elle relève de deux facteurs extrinsèques, la réaction alealine du milieu et la tem- pérature. Le défaut de naissances dans les solutions acides et leur abondance dans les solutions alcalines indiquent que les embryons n'éclosent pas dans l'estomac parce que le milieu est acide, et qu'ils deviennent libres dans l'intestin parce que des conditions d'alcalinité y sont souvent réalisées. Grâce à la résistance opposée par la coque aux sues digestifs, les œufs peuvent traverser lestomac et l’inteslin sans allé- ralion et être rejetés intacts. Et ainsi, un Vertébré supérieur, ingérant des œufs non embrvonnés de Nématodes, devient lui- même un agent de dissémination de ces parasites. Dans l'intestin, l'œuf rencontre les gaz des fermentations intestüinales, dont la plupart (ammoniaque, hydrogène sulfuré, méthane) sont toxiques et diffusent à travers la coque. Par contre, l'oxygène nécessaire au développement fait défaut ou est en très faible proportion. L'action de ces gaz délétères s'ajoute à celle de la température de l'hôte, et nous trouvons là encore une autre raison de l'impossibilité du développement sur place des œufs des Nématodes ovipares. De tout temps, les helminthologistes ont été frappés par le nombre immense d'œufs produits par un seul ver. Les évalua- lions, si approximatives qu'elles soient, donnent des chiffres extraordinaires. Leuckart estime à dix millions la quantité d'œufs que peuvent contenir les deux utérus de l'Ascaride DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 133 lombricoïde. Or, on ne peut s'empêcher de mettre en opposi- tion avec cette fécondité vraiment effrayante, le nombre relati- vement très restreint de parasites qui arrivent à atteindre l'âge adulte. La presque totalité des œufs disparait au dehors. Exa- minons les circonstances dont dépend cette destruction. I faut placer en première ligne la dessiccation. Je n'ai pu obtenir le développement des œufs d’Ascaris vitulorum ussés complètement à sec dans un verre de montre, à la température du laboratoire ; non seulement l'évolution n'a pas lieu, mais les œufs sont détruits au bout de quelques jours et incapables de se segmenter lorsqu'on leur rend de l'eau. Les œufs de PAscaris equorum évoluent dans ces conditions, mais en pelit nombre, el les embryons succombent en deux mois. Sur le sol, les mêmes phénomènes se produisent, surtout pendant l'été ; beaucoup d'œufs dégénèrent sans avoir pu se diviser et un grand nombre d'embryons succombent aussr. Lorsque les œufs sont rejetés dans un milieu humide et que toutes les conditions physico-chimiques du développement sont réunies, le déchet peut encore être énorme. Les observa- lions suivantes le démontrent. Il m'est arrivé quelquefois, de n'obtenirque des cultures peu homogènes avec des œufs parais- sant normaux et provenant de vers en très bon état. Certains ne se segmentaient pas, d'autres commencçaient à se diviser, puis l'évolution s’arrèlait à des stades divers, morule ou embryon incurvé, d’autres enfin se développaient régulière- ment et l'embryon enroulé apparaissait. L'Ascaris vitulorum et l'Ascaris equorum m'ont offert ces particularités ; dans un cas, une culture d'œufs de FAscaride du Cheval dans lacide chlorhydrique à 2 p. 1000, à 380, ne dépassa pas le stade deux blastomères. Ces arrêts seproduisentdansles diverses solutions, dansle sable, le terreau, et à toutes les températures. On peut admettre que les œufs qui ne se segmentent pas n'ont pas été fécondés. Lorsque l'évolution commence et s'arrèle aux stades deux, quatre, huit, douze blastomères, ne serait-on pas, là aussi, en présence d'œufs non fécondés, mais qui se déve- lopperaient par parthénogenèse à la faveur des acides ou des sels en dissolution dans le milieu? La segmentation s’arrêterait de bonne heure et n'aboutirait pas à la formation de l'embryon. 134 ANDRÉ MARTIN Hallez (31) à fait des observations analogues sur l'œuf de FAs- caris equorum. « J'ai plusieurs fois observé, dit-il, au milieu d'œufs normaux fécondés, des œufs, Ltoujours en petit nombre, qui présentaient comme les autres leurs différentes couches péri- vitellines et le premier globule polaire, mais chez lesquels le deuxième globule n'existait pas et paraissait remplacé par un assez grand nombre de petites sphères hyalines. Ces œufs peuventse segmenter en deux, mais Jamais je ne les ai vus se développer davantage : ils peuvent rester dans cet état pendant des mois entiers, tandis que leurs voisins évoluent d'une manière régulière. Ce sont les seuls renseignements que Je puis donner sur ces œufs anormaux. » Je n'ai pu faire les observa- ions d'Hallez sur les globules polaires ; mais J'ai bien souvent constaté l'arrêt de l’évolution sur un grand nombre d'œufs lorsque toutes les conditions élaient réunies pour permettre le développement le plus régulier. Les arrêts à des phases déjà avancées de la segmentation (morules à petits blastomères, embryons incurvés) sont pro- bablement liés à des changements précoces dans les propriétés “de la coque. Au cours du développement embryonnaire, la coque se modifie, son imperméabilité s'atténue, etles substances du milieu pénètrent jusqu'aux blastomères, qui sont détruits si ces substances sont toxiques. Les gaz provenant de la fermentation des déjections ou de la putréfaction des matières organiques détruisent les œufs. L'action de lammoniaque à été déjà signalée à L'occasion de l'étude des propriétés de la coque ovulaire ; celle des produits de la putréfaction est encore plus marquée. Des Ascaris canis furent oubliés au laboratoire dans un flacon. Environ trois mois après, ils furent retrouvés complètement putrétiés. Les œufs baignaient dans un liquide sanieux et fétide ; tous étaient détruits depuis longtemps. La coque était intacte, son épaisseur normale : mais le vitellus n’était plus représenté que par une petite masse claire, vacuolaire, réfringente ; il était impossible de voir si la segmentation avait commencé. L'influence exercée sur les œufs par des milieux en fermen- lation ou en putréfaction a du reste été souvent notée. Baillet dit que le développement des œufs des Ascarides ne se fait pas DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 139 ou est suspendu quand on les met dans de l'eau qui s'altère et qui prend une odeur fétide par suite de la décomposition des matières organiques qu'elle renferme, mais il est rare qu'ils perdent tous leur vitalité dans ces conditions; le plus ordi- nairement il suffit de les ürer du milieu infect dans lequel ils se trouvent pour voir aussitôt l’évolution commencer ou se poursuivre. Davaine (38) fait remarquer qu'un séjour trop pro- longé, de plusieurs mois par exemple, dans l'urine ou dans des matières putréfiées fait perdre à l'œuf de l'Ascaride lombri- coïde la faculté de se diviser ou tue l'embryon qu'il renferme. Mais, sous ce rapport encore, ajoute-t-1l, on observe d'assez grandes varialions et l'on ne peutrien dire de général. Looss (10), étudiant les facteurs qui agissent sur le développement de l'Ankylostome duodénal, éerit : « La nature chimique et la réaction des fèces ont une grande influence; il m'est arrivé plusieurs fois, dans des selles très liquides et sentant fortement, de voir une grande proportion de germes succomber. On peut remédier à cela en délayant les excréments avec une quantité égale de noir animal. Non seulement la mauvaise odeur dispa- rait, mais tous les œufs se développent assez rapidement. » J'ai fait, maintes fois, des observations analogues avec l’eau distillée et la solution de chlorure de sodium : l’évolution était stationnaire et la culture exhalait une odeur fétide ; il suffisait de changer l’eau distillée ou l’eau salée pour que la segmenta- tion recommencàt aussitôt après. En présence de tous ces faits, il parait inexact d'admettre que les œufs se conservent dans les fosses d’aisance, dans les fosses à purin, dans les fumiers, et qu'ils évoluent lorsque ces malières sont utilisées comme engrais et répandues dans’les Jardins et les pâturages. Il est certain du moins qu'un très grand nombre d’entre eux sont détruits. La durée du séjour des œufs dans de pareils milieux domine évidemment cette destruction ; plus cette durée est courte et plus sont nombreux les œufs qui conservent leur intégrité. Le passage des gaz à travers la coque, à des températures basses, est lent, et ce n’est qu'après un laps de temps assez long que la quantité de gaz nécessaire pour produire l'intoxication de la cellule-œuf peut parvenir à son contact. 136 ANDRÉ MARTIN A côté de ces divers agents physiques où chimiques, qui empêchent le développement des œufs et les détruisent avant la formation de l’embrvon, il en est d’autres dont le rôle paraît important, bien qu'il n'ait pas été signalé Jusqu'icr. Je veux parler des Champignons qui vivent en saprophytes dans les milieux où les œufs ont été rejetés. À plusieurs reprises, mes cultures furent envahies par un mycélium floconneux, blanc. Ce mycélium se développait aussi bien à la température du laboratoire qu'à 33° ou à 380. Les filaments mycéliens appa- raissaient dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1 000, dans la solution de chlorure de sodium à 8 p. 1000, dans la solution d'acide lactique à 10 p. 1000, où évoluaient des œufs de l'A scaris equorum et de l'Ascaris vitulorum. Deux cultures d'œufs d’'Ascaris vitulorum, dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000, furent placées sur la fenêtre du laboratoire; dans chacune d'elles, un champignon végéta abondamment. Un an après, la segmentation n'avait pas encore commencé. Or, dans les mêmes conditions, en l'absence des flocons mycéliens, le développement embryonnaire est terminé en quelques mois. Il eût été intéressant de savoir si ces œufs avaient conservé leur faculté évolutive. Cette recherche n'a pas été faite; elle était d’ailleurs rendue très difficile par la souillure du milieu, la solution stérile dans laquelle il aurait fallu les placer aurait été ensemencée et le développement empêché. Le mycélium se développe parfois lorsque l'évolution est commencée: dès qu'il est abondant, elle s'arrête. Des œufs restent inclus dans le feutrage mycélien; leur coque devient très mince et le vitellus est détruit el se désagrège: A la température de 330, les mêmes phénomènes se pro- duisent. Dans une expérience, quatre cultures d'œufs d’Ascaris vitulorum dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000 sont maintenues à 33°; deux sont ensemencées avec du mycé- lium apparu accidentellement dans une autre culture. Ce mycé- lium se développe abondamment en quelques Jours. Le qua- irième Jour, dans les deux cultures ensemencées, beaucoup d'œufs n'étaient pas encore segmentés, les autres n'avaient pas dépassé Le stade huit blastomères; les deux cultures pures DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 137 contenaient beaucoup de morules à petits blastomères. Le neuvième jour, ces dernières renfermaient des embryons euroulés; les premières ne dépassaient pas le stade morule à gros éléments; elles contenaient beaucoup de stades trois, quatre, six blastomères, et un grand nombre d'œufs n'étaient pas encore divisés. Les mêmes constalalions ont été faites sur l'œuf de l'A scaris equorum. Des flocons d'un mrycélium blanc se développent abondamment dans une culture dans la solution de chlorure de sodium à 380. Le quatrième jour, l'examen des œufs montre beaucoup de stades deux, et quelques rares stades quatre et six blastomères ; le huitième jour, l'évolution n’a fait aucun pro- grès, elle est complètement arrêtée, tandis que des cultures pures en mème milieu contiennent, le troisième jour, des embryons enroulés. À la température du laboratoire, en milieu acide (HCI à 2 p. 1 000)'un champignon arrête aussi l'évolution de l'œuf de PAscaris equorum, qui, en cinq mois, ne dépasse pas le stade morule à gros éléments. La culture de ce mycélium sur gélose, à donné une abon- dante récolte de Sterigmatocystis rigra Van Tieghem (1) moisis- sure assez commune el qui viten saprophvte, en général sur des substances végétales. Ce Champignon se trouve à la surface du corps des Vers ou dans leur tube digestif ; les manipulations nécessitées par le prélèvement des œufs amènent parfois la souil- lure des instruments ou celle des cultures. Le mode d'action de ce Champignon est difficile à préciser ; il peut gêner et arrêter le développement des œufs, en épuisant le milieu auquel il enlèverait les corps en dissolution; mais cette modification serait insuffisante, car les œufs évoluent dans l'eau distillée ; il peut agir en absorbant rapidement l'oxygène de la culture et, en l'absence de ce gaz, la segmentalion ne se ferait pas; il peut agir aussi en sécrélant des acides nouveaux. Celle hypothèse ne peut guère être acceptée, en raison de l'influence favorable qu'exercent les acides sur la formation de l'embryon et de l'indifférence des œufs pour ces corps. Enfin, les fila- (1) Les cultures de ces champignons et leur détermination ontété faites par M. Dop, chargé de cours de Botanique, à qui je suis heureux d'adresser mes bien vifs remerciments. 138 ANDRÉ MARTIN ments mycéliens développent parfois des suçoirs qui attaquent la coque; dans ce cas, la destruction de l'œuf est certaine. Des œufs de l'Ascaris equorum m'ont permis de faire une observation curieuse. Ils avaient évolué, en chambre humide, à 380, sur un verre de montre. Ils furent maintenus dans ces conditions de température et d'humidité, et, le dixième Jour, des filaments mycéliens apparurent. Le trente-cinquième jour, les embryons étaient encore en vie dans la coque, le mycélium était très abondant et végétait en un duvet noirâtre. L'examen microscopique montra que les filaments mycéliens formaient, sur les coques, un réseau à mailles assez serrées. Certaines coques étaient altérées et présentaient une boursouflure, au niveau de laquelle les lames cuticulaires stratifiées, distendues, s'écartaient les unes des autres. La structure de la coque appa- raissait très nettement. Ces altérations se présentaient à des degrés divers; tantôt, un petit nombre seulement de lames culiculaires périphériques étaient distendues et écartées; tantôt la coque était à moitié dissociée, quelquefois enfin elle était presque entièrement disloquée. Ces gonflements élaient loca- lisés à un quart de la circonférence de l'œuf, ou étendus à la moitié de celle-cr. En cultivant ce mycélium sur gélose, il fut possible d'isoler deux champignons, l'Aspergillus nidulans Eidam et un Penicil- lu indéterminable par suite de labsence de périthèce, mais paraissant voisin du Pernicillaun asperqgilliforme Baimer. Ces champignons ne paraissent pas avoir de suçoirs ; il n’a pas été possible de les mettre en évidence sur des préparations colorées. Par suite d’une absence de longue durée, ce matériel fut perdu; mais il y a tout lieu de penser que la coque aurait été détruite et que l'embryon aurait succombé à son tour. Des phénomènes analogues doivent se produire dans la nature ; les milieux dans lesquels se trouvent ordinairement les œufs sont des plus favorables au développement de nombreux champignons saprophytes et la lutte pour l'existence, dont les cultures nous ont rendu témoin, se produit à chaque instant au dehors. Beaucoup d'œufs doivent périr dans ces conditions. L'embryon qui a pu résister aux causes de destruction que je viens d’énumérer el rester vivant dans une coque intacte doit, DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 139 pour atteindre l’état adulte, parvenir dans le tube digestif de son hôte, Mammifère ou Oiseau, et y éclore; ce passage dans l’hôte est entièrement soumis au hasard. L’embryon éclôt dans l'intestin; il se trouve dès lors dans un milieu auquel son espèce est adaptée depuis une longue série de générations, et il pour- suit son développement jusqu'à l'état adulte. Cette évolution est la conséquence : 19 De la possibilité pour l'embryon d’éclore dans l'intestin et à la température de l'hôte: 20 De la possibilité de supporter cette température, parce qu'il s’est développé à la température plus basse du milieu extérieur. Dans le groupe des Nématodes ovipares dont les embryons ne quittent pas l'œuf au dehors, l’éclosion se produit dans lin- testin, et la température éle vée des hôtes est une des con- ditions de ce phénomène. Les espèces étudiées dans ce travail obéissent, à cet égard, aux mêmes lois; leurs embryons sortent parfois de la coque dans le milieu extérieur, c’est-à-dire à des températures inférieures à celles de leurs hôtes: mais ces éclosions sont loujours rares et exceptionnelles. Elles sont néanmoins importantes à constater, car elles relient ces para- sites (Ascarides, Hétérakis, Trichocéphales) aux Nématodes dont les embryons éclosent toujours au dehors (Ankylostomes, Selérostomes, Syngames, Strongles de l'appareil digestif). Nous sommes ainsi conduits à les regarder, dans leur para- sitisme plus étroit, comme descendant de formes qui avaient une période de vie libre dans leur eyele évolutif. En s'adaptant de plus en plus à la vie parasitaire, ces vers ont perdu leur plas- ticité originelle, la phase de liberté a disparu et l'éclosion dans le milieu extérieur est devenue tout à fait exceptionnelle. Très souvent, l'œuf embryonné est ingéré par un animal différent de son hôte habiluel. Dans ce milieu nouveau, l'embryon va rencontrer des conditions physico-chimiques qui s'éloignent de celles que lui offre son hôte. Si cet hôte acct- dentel est un Vertébré à sang chaud, l'embryon pourra devenir libre et vivre pendant assez longtemps. Jusqu'à ce mo- ment, il est remarquable par son indifférence à l'égard du milieu intestinal des divers animaux. 140 ANDRÉ MARTIN Cette indifférence initiale a eu un rôle très important, dans l'adaptation des Nématodes à la vie parasitaire. Il est rationnel d'admettre, qu'à l’origine, les formes libres, d’où descendent les espèces parasites, possédaient une indifférence à peu près complète, qui leur a permis de s’accommoder des conditions qui leur étaient offertes par de nombreux Vertébrés. C'est certainement là le point de départ de l'extension du parasitisme dans ce groupe d'animaux. L'adaptation est devenue de plus en plus étroite, mais l'indifférence initiale n’a pas encore com- plètement disparu; elle se retrouve chez les Ascarides, et assure leur éclosion et leur survie momentanée dans l'intestin d'animaux autres que leur hôte habituel. Elle est ainsi à la base de l'adaptation des Nématodes aux hôtes dits « exceptionnels -ou accidentels ». Ordinairement, les hôtes exceptionnels sont, dans l'échelle zoologique, voisins des hôtes ordinaires du parasite, et la similitude des milieux organiques permet de comprendre son développement et sa vie chez les premiers. Mais, lorsque l'embryon est ingéré par un animal appartenant à un groupe éloigné de celui de l'hôte, les conditions de milieu, liées au régime, sont très différentes, et une adaptation nouvelle s'impose pour que le ver parvienne à l'état adulte. | Si nous pouvons comprendre le mécanisme de léclosion et la courte survie de l'embryon dans l'organisme de ce nouvel hôte, nous sommes encore bien peu fixés sur celui de l'adap- lation définitive du parasite à un animal donné. On à invoqué l'action protectrice de la chitine, st abondante chez les Néma- todes. La résistance remarquable de cette substance aux sues digestifs assure au Ver une proteclion réelle, mais cependant insuffisante pour lui permettre de s'accommoder au milieu intes- ünal : l'embryon de l'Ascaride du Cheval, éclos dans l'intestin du Rat, meurt bientôt. L'adaptation complète, qui amène le Ver à l’état adulte, est donc réalisée par d’autres moyens: nous commençons seulement à les entrevoir : l'embryon éclos éla- borerait dans ses lissus des substances propres à assurer sa protection. Quelques-unes de ces substances sont connues et étudiées. Dastre et Stassano (42) ont mis en évidence, chez les Ascarides et les Ténias, une antikinase qui inhibe la kinase DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 141 intestinale et supprime le pouvoir digestif du suc pancréa- tique. Jammes et Mandoul (43) ont montré le pouvoir bactéri- cide des Ténias et leur curieuse adaptation à la vie intra-intes- tinale ; en présence des nécessités communes, les Cestodes s'identifient physiologiquement à la paroi intestinale des hôtes. Les propriétés de certaines de ces substances varient avec les parasites et sont certainement en rapport avec le milieu où ils vivent. Le changement d'hôte, obligeant le parasite à vivre dans un milieu différent, entraîne la nécessité pour ce dernier de modifier la nature des substances protectrices qu'il séerète. La mesure dans laquelle cette modification est possible est à la base de l'adaptation aux hôtes nouveaux el exceptionnels. CONCLUSIONS Les résultats des recherches exposées dans ce travail peuvent être résumées dans les conclusions suivantes : I. — Le développement, l'éclosion, la conservation de l'œuf et de l'embryon des Nématodes parasites des Mammifères et des Oiseaux sont sous la dépendance des facteurs physiques et chimiques du milieu et des propriétés physiques et chimiques des enveloppes ovulaires. IL. — La température exerce une influence prépondérante. Elle accélère l’évolution à mesure qu'elle s'élève jusqu'à une limite au-dessus de laquelle le développement est impossible. Cette limite est variable pour les divers parasites. Les embryons de certains Nématodes (Ascaris equorum, Ascaris cars, Trichocephalus depressiusculus, Sclérostomes, Ankvlo- stomes) se forment rapidement à la température de leur hôte ou à une température voisine. Les embrvons de l'Ascaris nilulorum, de lPAxscaris suis, de l'ÆHeterakis columbae ne se forment jamais à 380. Si le degré de chaleur s'abaisse à 339, le développement devient possible, et l'embryon est con- situé en quelques jours. IT. — L'œuf de ces trois derniers parasites présente une sensibilité remarquable à la température de 389. La seg- 1492 ANDRÉ MARTIN mentation commence, mais s'arrête aux stades morules à gros blastomères (Ascaride du Veau), deux blastomères (Ascaride du Porc), morules à petits blastomères (Hétérakis). Ce degré de chaleur exerce une action imbhibitoire sur l'œuf et la faculté évolutive disparait ; porté à la température eugéné- sique de 330, ilne se développe plus. Inversement, si on porte à 380 des œufs en évolution à 339, la segmentation s'arrête aussitôt, elles embryons ne par- viennent jamais à se constituer. IV. — La sensibilité de l'œuf des Ascaris cilulorum el'suis el de l'Heterakis columbue à la température de 389 est une des caractéristiques physiologiques de ces Nématodes. V. — Aux températures moyennes du milieu extérieur, le développement est toujours possible, mais il est très ralenti. La formation de l'embryon de certains parasites demande plusieurs mois dans les milieux les plus favorables. VI. —— Aux basses températures, l'œuf est indifférent aux substances en dissolution dans le milieu, à l'exception des gaz. VII. — Quand la température s'élève jusqu'à 339 et 380, la segmentation présente des particularités qui sont sous la dépendance des corps dissous ; elle est tantôt accélérée, tantôl ralentie ; cette accélération et ce retard sont dus aux ions métalliques existant dans les solutions. L'acide chlorhydrique, la chlorure de sodium, le bicarbonate et le carbonate de sodium, le chlorure de potassium, activent le développement; le chlorure de calcium, le chlorure de magné- sium le ralentissent. L'accélération et le retard varient avec les parasites ; 1ls sont plus grands pour Fœuf de PAscaride du Veau que pour celui de l'Ascaride du Cheval. VIII. — Les sels manifestent à l'égard les uns des autres un antagonisme qui se traduit par des variations dans la durée du développement et de la survie de l'embryon. IX. — Le degré de concentration à peu d'importance ; pour que ses effets se manifestent, il faut atteindre des concen- rations excessives que les œufs ne rencontrent pas dans les circonstances de leur évolution naturelle. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NÉMATODES PARASITES 143 X. — Les œufs del’ Ascaris vilulorum et de l’Ascaris equorum se développent dans l’eau de mer à la température du labora- Ib et 00 XI. — L'oxygène libre est indispensable au développement de l'embryon des Nématodes ovipares. Dans un nuleu qui en est privé, l'œuf ne se segmente pas. Mais ce besoin d'oxygène libre doit s’atténuer et disparaitre chez les Nématodes vivipares qui se fixent dans des organes où il fait défaut. XIE. — Un certain degré d'humidité est nécessaire à la for- mation del'embryon. Les œufs de quelques espèces (Ascarisequo- rum) évoluent parfois à sec, mais les embryons qui arrivent à leur complet développement sont très peu nombreux ; la plupart des œufs sont détruits par la dessiccation prolongée el complète. L'embryon de l'Asraris ritulorum ne se forme pas à sec. En humectant les œufs de temps en temps, on ralentit la perte d’eau et l’évolution est ainsi assurée. XIII. — La coque de l'œuf n’est pas dissoute par les sucs digestifs et l'éclosion n'est pas due à l’action de leurs dia- stases. XIV. — L'éclosion n'a pas lieu dans l'estomac; elle se produit dans l'intestin grèle, surtout dans son dernier tiers. XV. — Les conditions de la mise en liberté de l'embryon des Ascaris, des Hétérakis et des Trichocéphalessont au nombre de trois : 10 réaction alcaline ou neutre du milieu ; 2° tempé- ture élevée égale à celle de l'hôte ; 39 développement complet de l'embryon. À un degré inférieur (330), ces Vers peuvent quitter leur coque, mais les éclosions sont toujours peu nombreuses. D'autres parasites (Sclérotomes, Ankylostomes, Syngames) sont moins sensibles aux conditions de température et éclosent dans le milieu extérieur. XVI — L'embryon des Ascaris vilulorum, equorum, cars el suis sort de l'œuf par une déchirure régulière de la coque: celui de l'Hétérakis du Pigeon s'échappe par une fente analogue: celui du Trichocéphale par le goulot polaire. L'éclosion se produit par le même mécanisme dans les solutions salines, dans l'intestin et dans le tissu conponctif sous-cutané des animaux d'expériences. 144 ANDRÉ MARTIN XVI — La conservalion de l'œuf est subordonnée à la présence de la coque, à ses propriétés physiques etchimiques et à la température. XVII. — La coque est constituée par de la chitine; cette substance résiste aux agents chimiques les plus divers et aux sucs digestifs. Aux températures relativement basses du dehors, elle ne se laisse pénétrer que très lentement par les corps en dissolution dans le milieu. De là découle la notion d'imper- méabilité qui à été admise pendant longtemps. XIX. — L'imperméabilité n'est pas absolue ; les gaz diffusent facilement à travers la coque. Lorsque la température s'élève, les substances dissoutes dans le milieu la traversent davantage et, suivant leur aclion propre sur la cellule-œuf, le développe- ment est accéléré, ralenti ou complètement arrêté. NX. — Sous l’action prolongée d’une température élevée (330 et 380), l'imperméabilité de la coque s’atténue encore plus, les corps dissous et les gaz la traversent plus facilement, et la destinée de l'embryon dépend alors de leur degré de toxicité. XXI. — Au cours du développement, la température im- pose à la coque des modifications qui la rendent plus facile- ment pénétrable. Ces modificalions apparaissent plus ou moins {ot suivant les parasites; les œufs d'un même parasite présentent aussi à cet égard des différences notables. La chitine à rendu possibles de multiples accoutumances. En parüiculier, chez les Nématodes des animaux bomæothermes, les manifestations parasitaires se montrent nettement liées aux propriétés physico-chimiques de la chitine. La chitine représente une barrière, jamais entièrement close, interposée entre l’œufetle milieu extérieur. Elle s'ouvre de plus en plus à mesure que la température s'élève, ce qui cor- respond, dans les conditions naturelles, à la rencontre de l'hôte définitif. Ainsi se trouve réglée l’action des substances des diffé- rents milieux sur la conservation et le développement de l'œuf. XXIT. — Parmi les corps étudiés dans ce travail, le chlorure de sodium, le bicarbonate de sodium, le chlorure de calcium et le chlorure de magnésium sont les plus favorables à la conser- valion de l'embryon à la température de 330. DÉVELOPPEMENT EMBRYONNAIRE DES NEÉMATODES PARASITES 145 XXII. — Indépendamment des modifications qu'elle entraine dans les propriétés de la coque, la température exerce une action directe sur l'embryon. Plus elle est élevée, plus la survie de ce dernier est courte, dans les milieux les plus favorables. L'embryon del'Ascarisequorum, développé à 389 dans la solution de chlorure de sodium à 8 p. 1 000, meurt dans l'œuf en vingt jours s'ilest maintenu à ce degré. Au contraire, à la tempéra- ture dulaboratoire (159environ), l'embryon reste vivant pendant longtemps dans des solutions toxiques. Celui de l'Ascaris vitulo- rum survit quatorze mois dans la solution d'acide chlorhydrique à 2 p. 1000. Mais, lorsque l’évolution s'est faite à une tempé- rature relativement basse, l'embryon supporte le degré de chaleur de son hôte et l'éclosion devient possible. Ainsi les em- bryons des Ascaris vitulorum, equorum, suis et d'Heterahis, columbae formés à 339 et portés à 380 restent vivants et éclosent. XXIV. — L'étude comparative de l'influence de la tempéra- ture sur le développement de l'œuf des Nématodes parasites des Vertébrés supérieurs permet de saisir les diverses étapes de l'adaptation de ces parasites à la vie sur les Mammifères et les Oiseaux. L'adaptation la plus complète est réalisée chez les Nématodes vivipares ; leurs embryons se développent toujours aux températures élevées des hôtes, dans l'utérus maternel et pendant la vie parasitique du ver. La viviparité estdonc fonction de la température. XXV. — Ces données expliquent les- divers phénomènes de linfestation naturelle par les Nématodes ovipares. L'indifférence de l'œuf à la nature chimique du milieu et la quasi-imperméabilité de sa coque à la température peu élevée du dehors lui permettent de se conserver longtemps et de se développer lentement dans le sol, les eaux, les étables, etc. Quand il est ingéré par un Vertébré, il reste protégé par la coque chitineuse -contre l’action des sues digestifs et 1l peut être rejeté intact s’il ne séjourne pas trop longtemps dans lin- testin. S'il renferme un embryon, celui-e1 éclôt dans l'intestin grêle, où les conditions de réaction alcaline et de tempéra- ture se trouvent réunies. XXVI. — Les œufs pondus dans l'intestin ne se développent pas sur place : 19 parce que la température élevée de l'hôte rend ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 9e série, 1913, xvrrr, 10 146 ANDRÉ MARTIN la formation de l'embryon impossible (Ascaris vitulorum et suis, Heterahis columbae), ou détruitde bonne heure l'embryon qui a évolué à ce degré (Ascaris equorum, Ankylostomum duodenale) ; 20 parce que l'oxygène libre manque, ou n'existe qu’en trop faible quantité ; 39 parce que les gaz provenant des fermentations intestinales, diffusant à travers la coque, détruisent l'œuf et l'embryon à bref délai. XXVII. — Les causes de destruction de l'œuf dans le milieu extérieur sont nombreuses. La dessiccation entraîne la mort de la cellule-œuf; la perméabilité de la coque aux gaz assure le passage de ceux qui sont toxiques (ammoniaque, méthane, hydrogène sulfuré, etc.); un grand nombre d'œufs doivent périr de cette facon dans les fosses d'aisances, les fosses à purin, les fumiers entassés, les milieux en putréfaction. XXVIIL. — Les champignons qui végètent en saprophytes dans les milieux où les œufs ont été déposés empêchent le développement, attaquent souvent la coque et détruisent ‘le vitellus. XXIX. — Cette étude montre que des Nématodes très voisins les uns des autres réagissent différemment aux agents phy- siques et chimiques qui les influencent. Ces variations, d'ordre physiologique, sont encore peu connues; leur étude apparait cependant comme très importante pour la biologie générale. Leur connaissance plus précise nous donnera peut-être un Jour le moyen de préciser le mécanisme encore si obscur de l’adap- tation parasitaire. 6. 1 10. 16. Aire . GRIGLIO (G.). 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James (L.). — Recherches sur l’organisation et le développement des Néma- todes (Thèse de doctorat ès sciences naturelles. Paris, Reinwald et Cr, 1894). 33. LamBiner (J.). — Recherches sur la résistance des œufs et des larves d'Ankylostomes aux agents physico-chimiques (Bull. Acad. roy. de méd. de Belgique, 4 Sér., Vol. XV, 1901, p. 397). 34. CALMETTE, François ET BRETON. — Contribution à l’étude de l'influence du sel marin sur l’évolution des œufs et des larves d'Ankylostome dans les galeries de mine de houille (Bull. Acad. de méd., 3° Sér., Vol LIV, 1905, p. 157). 35. WürTz (A.). — Dictionnaire de Chimie. Article CHimine, T. [, p. 854. 4er Supp., 40. 31. T. IX, p. 448. — 2e Suppl., T. Il, p. 1076. . Fermi. — Cité par F. de Klug![11]. FrépéricQ (L.).— Bull. de l’Acad. roy. des sc. de Belgique, Vol. XLVIL, 1878, 2 le . Davaine (C.). — Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales. 2e série, T. II], Article LomBric, p. 87. . 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Rend. du Congrès des soc. savantes, 1907, p. 162). — Les conditions du développement en milieu artificiel de l'œuf de quelques Nématodes parasites (Compt. Rend. de la Soc. de biol., Vol. LXIV, 1908, p. 208). — Nouvelles expériences sur le délerminisme du développement des Helminthes (Ibid., Vol. LXV, 1908, p. 123). — Sur l'adaptation des Nématodes aux températures des hôtes {(Compt. rend. de l’Acad. des se., Vol. CE, 1910, p. #18). — Rôle de la chitine dans le développement des Nématodes parasites (Ibid., Vol. CLI, 1910, p. 250). 45. NELSON (H.). — On the reproduction of Ascaris mystax (Philos. transact., T. I, 1852, p. 563). 46. VERLOREN. — Eijeren van A. mystax. Anfecken-Utrecht-Genootsh. Sectie en Geneeskde, 1854-55, p. 41. 47. Hazcez (P.). — Sur le développement des Nématodes. 2 note (Compt. rend. de l’Acad. des sc., T. CI, p. 831). 48. Vix. — Ueber Entozoen bei Gasteskranken insbesondere über die Bedeu- tung, das Vorkommen und die Behandlung von Oxyuris vermicu- laris (Allgem. Zeitschr. f. Psychiatrie, Vol. XVIL, 1860, p. 1, 149 et 225). 49. Müauic. — Syngamus bronchialis (Deutsche Zeitsch. f. Thiermed. u. Ver- gleich. Path., Vol. X, 1884, p. 265). TABLE DES MATIÈRES Pages INTRODUCTION" EEE AE A EN SRE ARR AA : 1 PREMIÈRE PARTIE Expériences sur le développement de l’œuf............ RÉ at - 5 CHAPITRE PREMIER. — Étude des conditions physico-chimiques du dévelop- APANIPEoc a ar béoe Le docs 80e 0 Hosue AE RSR to à oc à) 1. — Développement de l'œuf de l'Ascaris vitulorum. ....... RO 0 : 6 1° Développement.dans l'eautdistillées tee me PC: 6 2» Développementen milieuvacides "Tr MRC CE RECRUE 7 30 Développement en milieu alcalin................ Le Ph TRS PEER 8 49 Développement en milieusneutre 1." 12642 NRC : 10 Expériences complémentaires sur l'influence de la température et de la réaction chimique du milieu dans le développement de l'œuf del’Ascars Dululorum rs 2e RER EN ee de ee CURE 12 1° Inoculations à des invertébrés et à des animaux à sang froid.... 12 20 Inoculations à des animaux à sang chaud............. D 12 39 Développement dans des solutions d’acide lactique. ............. 13 49 Développement dans des solutions de formol................... 14 50 Développement dans divers sels.......... LE RRES NE TORRES 45 60 Développement dans l'eau denmer "2h00 AR RER RTE 16 II. — Développement de l'œuf de l'Ascaris suis........... 19 1° Développement en milieu acide. MECS RESESE PR ESC EREr 19 29 Développement en milieu neutre. .....:....... RM rec. 20 Ul. — Développement de l'œuf de l’Ascaris equorum..... RE 21 1° Développement dans l’eau distillée.............. se RUE 22 20,Développement.en-milieuracide. 2m SO ENTER Ce 22 39 Développement.enmilieu alcalin.t. 2. 2650 OM ER REP 23 40 Développement en milieu neutre................. SANS S'SEANLME 24 59,Développement dans divers sels 2. nm ir eee 25 6° Développement dans l’eau de mer...... e mou PT NL CE EE PA 1°" Développement dans la glycérime pure. "tn eee 28 80 Développement dans la solution de lactose à 8 p. 1000.......... 29 IV. — Développement de l'œuf de l’Ascaris canis......... ALT Doc 30 4° Développement en) mileuacide: 7... 2R eee CARRE 30 20 Développement en milieu alcalin........ SDS ACTES SON ele 31 3° Développement en milieu neutre...... PNA CP PRE cu re nn V. — Développement de l'Heferakis: columbae...". 2.20 EURE 32 10 -Déeloppement en milieusaeide:: ere LPS SSP PRE RER 32 20 Développement en milieu neutre........ RÉ NO. M eo eo ES 3° Développement dans la solution de carbonate de sodium à 8p.1000. 34 VI. Développement du Trichocephalus depressiuseulus................ 34 1° Développement en milieu acide........... FRE no nr de 34 20 Développement en milieu neutre..... A se a DU SR RES VIL. — Développement de l'œuf des Sclérostomes.…. SN Re 36 Développement de l’œuf de l’Ascaride lombricoïde de ART ER RP SAN EEE 36 TABLE DES MATIÈRES Lo Pages Développement de l’œuf des Syngames........................... 37 Développement de l'œuf de l'Ankylostome duodénal............... 38 GHAPrrRE 1. = Lœuf dans l'organismerde hôte... Emi 42 "Action dessucs dires DIS eDUnONe 2. Den. JR Tete 44 1° Expériences avec des œufs non segmentés..................... 45 20 Expériences avec des œufs contenant un embryon............. 46 39 Expériences avec les sucs digestifs du Veau.................... 47 RD RIen GES d'INPES LION. nv dent. see qusls due pineeee seen 50 CHapirre IL. — L'éclosion. Facteurs de la mise en liberté de l'embryon. ..... 63 1° Éclosion de l'embryon de l’Ascaris vitulorum...........,........ 64 20 Éclosion de l'embryon de l’Ascaris equorum..............,...... 65 30 Éclosion de l'embryon de l’Ascaris eanis........................ 66 4° Éclosion de l'embryon de l’Ascaris suis. ........................ 66 50 Éclosion de l'embryon de l’Heterakis columbae.................. ñ 6° Éclosion de l'embryon du Trichocephalus depressiusculus.. ....... 67 1° Éclosion de l'embryon des Sclérostomes........ TE CI 67 8% Expériences complémentaires sur l’éclosion. . :..............\. 68 Donditionside éClos one er enr TR nee ei RP R 69 Reaction du:milieu.:7#5290.%% RS Dee on sise cela EC Re 69 MORTRÉ NE UROR RAA Me Dane di ame Due ne à class ES 73 Béveloppementcomplebtdel'embryon. 7174.74 124.: 0... , 800 76 DEUXIÈME PARTIE Étude critique des facteurs du développement de l’œuf.......... 79 CHAPITRE PREMIER. — Les facteurs chimiques. .... RO DDC DIE 79 1. — Substances en dissolution dans le milieu...................... 79 A. Action des corps en dissolution sur le développement.......... 80 B. Action des corps en dissolution sur la conservation de l'embryon. 87 C. Action des corps en dissolution sur l’éclosion........ ASE EE 91 Role de L'onpoenes er UT 20 den Ne es cos PT UE 94 I ee ROME ENS RE RE ER 97 Cnapirre Il. — Propriétés et rôle de l'enveloppe ovulaire. ............ EE D SÉPFODRIELESICDINIqUues dela coques RIRE ont... 102 BFPropriétésiphysiques dela coques Me Re me mul 103 Crabe SAC tonrdela température ER LE. No 114 1° Action de la température sur le développement et l’éclosion de HONOR RS STE Che de ee mien IN den so ne 115 20 Action de la température sur la conservation de l’œuf et de RTE) ON RER A A Re acte date 424 TROISIÈME PARTIE Application des résultats expérimentaux aux conditions de PROS AO nn Are Me CE ces 129 NS} rs ee ic AE EE a FA 4 PALICS der & fs F3 CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES Par Paul MARCHAL INTRODUCTION Mes recherches sur la biologie des Aphidiens appartenant à la tribu des Chermides(Chermes lat. sensu) se limitent à l'étude des espèces que j'ai rencontrées aux environs de Paris sur les Pins et sur les Sapins proprement dits (Abies). Avant d’en aborder l'exposé, je crois indispensable de rap- peler les principaux points actuellement connus du eyele 6vo- lutif de ces Insectes. Si l’on excepte en effet les notes prélimi- naires assez nombreuses que J'ai publiées sur la biologie des Chermes, tous les travaux écrits sur ce sujet si complexe sont parus en Allemagne ou en Russie et aucun naturaliste ne s’est encore occupé en France de la question, soit pour apporter au travail d'ensemble sa contribution personnelle, soit même pour faire connaître d’une façon suffisante la valeur des matériaux qui ont été déjà prélevés dans ce champ d'étude par Blochman, Dreyfus, Cholodkovsky, Nüsslin et Bürner : ils méritent pour- tant au plus haut point l'attention du biologiste et constituent de précieux éléments pour la solution de divers grands pro- blèmes tels que ceux de la formation des espèces, de la sexualité et de la parthénogénèse indéfinie. CARACTÈRES GÉNÉRAUX DU CYCLE DES CHERMES. On sait que les espèces de l’ancien genre Chermes, qui a été démembré par Bôrner en toute une série de genres nouveaux, (1) La table des matières qui se trouve à la fin du présent mémoire donne le plan suivant lequel il a été conçu. ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 9e série. LOTS VENT AARI 191 PAUL MARCHAL présentent un cycle évolutif très spécial (fig. 1) qui, {ypique- ment, se trouve caractérisé de la facon suivante : 19 Il exige pour son achèvement deux années successives. 20 Les générations qui se succèdent pour constituer le eyele présentent un polymorphisme remarquable (pentamorplie, hexamorphie ou heptamorphie) et chacune des formes se trouve spécialisée pour Jouer un rôle distinct. Sexuales É Sexupara Hôte definitif Hôte intermédiaire (Picea) (Larix, Abies ou Pinus), Sa sÆExsul 2 / 4 Fundatrix | | Ÿ \ } \ / A Exsul ! | ùS | Gazlicols (Migrans a/atà rt Fig. 1. — Schéma du cycle typique des Chermes. 39 L'ensemble des générations qui composent le cycle ne se déroule pas. sur une espèce végétale unique, mais se partage en deux séries successives qui se continuent l’une l'autre et qui vivent chacune sur une essence de Conifères distincte : il y a donc diæcie; lune de ces séries, compor- tant la génération sexuée, évolue sur un Conifère Jouant le rôle d'hôte définitif et qui est toujours un Épicéa (Picea); l’autre série, formée exclusivement de générations parthéno- génétiques, évolue sur une espèce de Conifères Jouant le rôle d'hôte intermédiaire et qui, suivant les espèces de Chermes, CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 199 peut être un Sapin(Abies), un Pin (Pinus) où un Mélèze (arir).L 49 Tandis que l’aptérisme caractérise, d'une facon générale, les générations qui continuent à se reproduire sur l'hôte où elles ont pris naissance, le passage de l'hôte définitif à Phôte intermédiaire ou le retour en sens inverse, se fait au moyen de migrations aériennes régulières, à l'accomplissement desquelles sont préposés des individus ailés, spécialisés à cet effet. Ces ailés ont, dans la succession cyclique des générations, un numéro d'ordre déterminé. Ceux qui sont chargés d'opérer la migration d'aller, c’est-à-dire la migration partant de l'Épicéa pour joindre Fhôte intermédiaire, se développent à l'intérieur de galles sur l'Épicéa et constituent toujours la seconde géné- ration à partir de l'œuf fécondé : ce‘ sont les gallicoles ou migrantes alatae. Les ailés chargés d'opérer la migration de retour, qui à lieu la deuxième année du cyele et qui s'effectue à partir de la plante intermédiaire pour rejoindre l'hôte définitif, se développent au printemps. à découvert, sur les aiguilles de la plante intermédiaire (Sapin, Pin, Mélèze); puis, abandon- nant cette dernière, ils vontse fixer surl'Épicéa pour y engendrer les sexués ; aussi les désigne-{-on sous le nom de sexupares. 50 Tandis que les émigrants ailés (wigrantes alatae) const tuent, ex général, à eux seuls, toute une génération homomorphe et que, par conséquent, après leur départ hors des galles, l'Épicéa se trouve entièrement libéré de l'espèce de Chermes qui le parasitait, au contraire les sexupares font le plus souvent partie d’une génération mixte composée à la fois d’aptères non sexupares et d'ailés sexupares et les aptères continuent à se multiplier indéfiniment par parthénogénèse sur la plante inter- médiaire : il en résulte que celle-ci ne se trouve à aucun moment abandonnée par l'espèce parasite et il se constitue ainsi sur elle un evele parthénogénétique et monœæecique qui évolue parallèlement au eyele amphigonique et diæcique. FORMES DES GÉNÉRATIONS SUCCESSIVES. Les différentes formes qui se succèdent à partir de l'œuf fécondé, pendant ce cyele évolutif biennal, sont les suivantes : 19 La fondatrice (/undatrir) sortant toujours de l'œuf fécondé 156 PAUL MARCHAL avant l'hiver et passant la fin de l'été, l'automne et la saison hivernale à l’état de larve primaire dormante spécialement différenciée à cel effet. La fondatrice est toujours aptère, d’une extrême fécondité ; elle passe par quatre stades successifs séparés par trois mues et est fixée d’une façon permanente sur l'Épicéa, tantôt à la base des bougeons, tantôt sur les bour- geons eux-mêmes, tantôt sur l'axe de l’une des pousses de l'année. Elle pond au printemps un grand nombre d'œufs d’où sortent les gallicoles. 29 Les gallicoles ou émigrants ailés ({migrantes alatae) (1). Issus au printemps de la fondatrice, ils vont se loger, dès leur sortie de l'œuf, entre les jeunes aiguilles du bourgeon sur lequel ou dans le voisinage duquel se trouve lamère fondatrice : sous l'influence des piqüres de ces gallicoles s'ajoutant à l'influence de la fondatrice elle-mème, le bourgeon d'Épicéa se transforme, en totalité ou en partie, en une galle dont la forme varie suivant les espèces, mais est toujours caractéristique d’une espèce donnée. Les gallicoles subissent quatre mues successives séparant cinq stades. Lorsqu'ils sont arrivés à l’état nymphal (4° stade), la salle s'ouvre par écartement de ses éléments et, de toutes les petites loges correspondant aux parties basilaires des aiguilles, s’échappent les gallicoles qui subissent aussitôt leur quatrième et dernière mue, puis apparaissent sous forme de pucerons ailés destinés à émigrer sur la plante intérmédiaire (migrantes alatae). Hs ont de grands veux composés et des antennes multi- articulées. Atlirés vers la plante intermédiaire (Pinus, Abies (1) Les gallicoles ont été aussi désignés par Bürner sous le nom de cellares. Le nom de migrantes alatae a en effet l’inconvénient de ne pas s'appliquer à tous les gallicoles des Chermes. Chez certaines espèces, telles que Chermes abietis, il existe en effet des gallicoles qui, au lieu d'émigrer, restent sur l'Épicea pour continuer à s'y multiplier par parthénogénèse : ce sont les alatae non migrantes de Cholodkovsky. Les noms de gallicoles et de cellares conviennent aux Chermes, mais non à tous les Pucerons migrateurs, et c'est en vue de cette généralisation que Bürner a été conduit plus tard à leur subs- tituer un nom plus vague, celui de fundatrigenia, qui n'implique qu’une chose : l’origine de cette forme qui est directement engendrée par la fondatrice. I nous parait plus clair, dans le langage courant, d'adopter le nom de galli- coles pour cette génération chez les Chermes : nous les désignons aussi sous le nom de migrantes alatae où d'émigrants ailés, lorsqu'ils sont parvenus à l’âge adulte et que nous avons particulièrement en vue l'acte de la migration. \ CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 197 ou Larir), par suite d'un tropisme particulier, ils se fixent par leur rostre sur ses aiguilles, sucent sa sève et pondent un nombre d'œufs considérable. De ces œufs sortent des indi- vidus répondant au type suivant : 3° Les parthénogynes, ou ezsules (1). Ce sont des individus aptères, se multipliant par parthénogénèse sur la plante inter- médiaire, de façon à y constituer une série indéfinie de géné- alions successives. La première de ces généralions issue des migrantes alatae sera celle des ersules 1 (emigrans où fundatrix spuria de Cholodkovosky), puis viendront ensuite les ersules 2, les exsules 3... le nombre des générations, au cours d’un cycle annuel, étant souvent variable suivant les années et sui- vant les conditions climatériques locales. Chez certaines es- pèces, telles quele Chermes pini, la première génération annuelle de ces ersules (celle qui porte le n° 2 dans la figure 1) peut comporter un certain nombre d’ailés ressemblant beaucoup à leurs frères, les sexupares; mais, contrairement à ces derniers, ils restent sur la plante intermédiaire au lieu d'opérer une migration de retour, et engendrent sur cette plante de nouveaux exsules parthénogénétiques et aptères : ces ailés sont les ersules alatae. 4° Les sexupares. — Ce sont des individus aïlés, issus au printemps de la lignée d’ersules aptères qui a hiverné. Ils sont plus petits et moins féconds que les gallicoles ou »grantes alalae, mais présentent des caractères morphologiques très analogues; la génération printanière dont ils font partie est mixte et, outre la lignée des sexupares, elle comprend une lignée sœur et parallèle formée d’aptères (ersules 2), parfois aussi d’ersules alatae qui continuera sur la plante intermé- diaire la multiplication des ersules, lorsque les sexupares l’auront abandonnée, pour opérer leur migration de retour sur l'Épicéa. Arrivés sur l'Épicéa (l'hôte définitif) les sexupares, (1) Les noms donnés aux individus de cette forme par les différents auteurs sont assez nombreux. Blochman les a d’abord désignés sous le nom d'alie- nicolae, ce qui, comme le terme d’exsules, implique qu'ils vivent sur un hôte intermédiaire; Dreyfus les a appelés virgines, tandis que Cholodkovsky les désigne sous le nom d'exsules, réservant toutefois à la première génération issue des migrantes alatae le nom d’emigrantes ou de fundatrices spuriae. Bôrner enfin les a désignés d’abord, comme Dreyfus, sous le nom de vir- gines, puis ensuite sous celui de virginogeniae. 158 PAUL MARCHAL qui ont un petit nombre de gaines ovigères par rapport aux formes précédentes, se fixent par leur rostre sur les aiguilles et pondent des œufs toujours moins nombreux que ceux des migrantes alatue ; de ces œufs pondus par les sexupares sortent les sexués. 50 Les sexués sont aptères, de très petite taille, caractérisés par de courtes soies rostrales el des antennes de quatre articles, au lieu de trois comme chez les autres formes aptères. Les mâles sont plus mobiles que les femelles: ils ont des pattes et des antennes plus longues, Pextrémité postérieure plus conique. Bien qu'ils n’atteignent qu'une taille très réduite, les sexués se nourrissent en se fixant par leur rostre sur les aiguilles de l'Épicéa, et ils s'accroissent faiblement pendant leur évolu- tion, qui s'effectue, comme pour les ailés, au moyen de quatre mues successives, La femelle fécondée pond un œuf unique, le plus souvent sous les écailles qui sont à la base des pousses de lÉpicéa; elle meurt à côté de l'œuf dont elle s’est déchargée et d'où la fondatrice ne tarde pas à sortir. PozycyciiE ou PArAcYoLIE (1). A. — Polycyclie sur la plante intermédiare. A côlé du grand cycle biennal, impliquant la reproduction bisexuée et exigeant les migrations qui partent de l'Épicéa pour aboutir à une autre espèce de Conifères jouant le rôle d'hôte intermédiaire, nous avons déjà vu qu'un second evele annuel, sans cesse renaissant de lui-même, est constitué par les ersules quise multiplient par parthénogénèse indéfinie sur l'hôte imter- médiaire (Abies, Pinus, Larir). Or cette polycyclie peut encore se compliquer par suite d’une scission du cyele des ersules en 2 cvcles secondaires. Bürner a en effet montré — et le fait est actuellement bien établi — que les ersules, chez certains (1) Ce terme de polycycelie avait été adopté par Bürner pour désigner lexis- tence de plusieurs cycles se déroulant parallèlement pour une même espèce de Chermes, Nüsslin a proposé de le remplacer par le terme de paracyclie, celui de polycyclie ayant été déjà employé par Weismann pour désigner l'alternance d’une génération sexué et d’une série de générations parthénogé- nétiques chez les Entomostracés. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 159 genres de Chermides (Cnaphalodes, Dreyfusia, ete.), présentent un dimorphisme très net; les deux formes (qui non seulement appartiennent à une même génération, mais peuvent tirer leur origine d'une mère parthénogénétique unique) ont été désignées par Bürner sous le nom d’Aiemales et d'estivales, parce que les premiers paraissent spécialement adaptés pour passer l'hiver en restant à l’état de larves dormantes (Beharrungslare, Latenzlarve de Nüsslin (1), tandis que les seconds évoluent pendant la période de végétation. Les caractères de ces deux formes sont distincts dans l'œuf et, avant l’éclosion, on peut déjà les reconnaitre au travers de la coque transparente. Les Aiemuales, pendant leur premier stade larvaire, sont plus chitinisés que les estivales, et leur tégu- ment présente des aires glandulaires qui offrent une disposi- tion très spéciale n’existant pas chez les estivales. J'ai, de plus, montré que les estivales présentent quatre mues tandis que Îles hiemales n'en présentent que trois. Il s'agit donc d’un dimor- phisme très net et incontestable, profondément implanté dans l'espèce. En réalité, la forme dite hiemalis n'est pas, au moins pour toutes les espèces de Chermes où ce dimorphisme se présente, une forme spécialement adaptée à l'hiver. Nüsslin et moi- même, au cours de recherches simultanées, avons reconnu que pour le Ch. piceae, elle évolue normalement dans le cours de la belle saison. Le caractère biologique important qu'elle présente n’est pas d’être une forme hivernale, mais d’être une forme de résistance, pouvant rester à l'état dormant pendant une période plus ou moins longue, au cours de la première phase de l’évolution larvaire. C’est pour cette raison que j'ai proposé les noms de sistentes et de progredientes pour les sub- stituer # ceux de Aiemales et d’estivales de Bôürner, et c’est par ces termes que je désignerai ces deux formes d’ezsules dans le cours de ce mémoire. Par une convention terminologique analogue à celle qui à été adoptée par Grassi pour les Phyl- loxériens, nous donnerons à la larve primaire des sis{entes le (4) Nüsslin en 1903 a mis le premier en évidence l’existence de ces larves dormantes chez les Chermes : plus tard Bôürner a montré leur différenciation morphologique, et par suite le dimorphisme Jarvaire des exsules. 160 PAUL MARCHAL nom de neosistens et à la larve primaire des progredientes le nom de neoprogrediens. Enfin, lorsque la clarté du texte lexi- gera, la génération des sis{entes destinée à passer l'hiver sera désignée sous le nom d’Aiemosistentes; par contre, ceux dont la phase d'arrèt coïncide avec une période estivale, de durée variable, mais ne se prolongeant pas jusqu’à l'hiver, seront désignés sous le nom d’esivosistentes; mais il importe de rete- nir que les différences qui peuvent exister entre les iémosis- tentes et les estivosistentes ne peuvent être que légères et de l'ordre des variations fluctuantes : seuls les sis{entes et les pr'o- yredientes représentent des entités morphologiques distinctes dont l'origine primitive est sans doute à rechercher dans un phénomène de mutation. Les deux lignes parallèles d’'ersules (sistentes d'une part et progredientes de l'autre) peuvent être considérées comme accomplissant chacune, au cours de l'année, leur cycle parti- culier émanant de l’Aiemosistens. Celui-ci, après avoir passé l'hiver à l’état de larve primaire dormante, évolue en effet au printemps et, après trois mues, donne une ponte parthénogénétique d'où sortent à la fois des sistentes et des progredientes. Si les sistentes qui viennent d’être ainsi engendrés sont des hiemosistentes, ils restent à l’état de larves primaires dormantes (neosistentes) depuis le printemps où ils ont pris naissance jusqu’au printemps suivant et le cycle annuel des sistente est formé d'une seule génération (fig. 2 A). S'ils sont des estivo- sistentes, ils évoluent après un stade de repos estival plus ou moins long et engendrent, par ponte parthénogénétique, une ou plusieurs générations de sistentes dont la dernière est destinée à passer l'hiver (kiemosistentes) (fig. 2 B). De toutes facons, un premier cycle annuel (mono-bi- ou polygénétique) se trouve ainsi constilué par les s- lentes. Quant aux progredientes, ils sont également engendrés au printemps par l’hiemosistens, qui à passé le précédent hiver fig. 2 A et 2 B). En subissant 4 mues, ils évoluent à côté des sistentes et des sexupares qui ont la même origine maternelle, puis ils engendrent à leur tour des sistentes qui sont soit CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 161 Sexueles S. Hôte définitif Hôte intermédiaire (Picea) Probrediens Fundatrix éMHiemasistens Gallicola (Migrans al/atà Fig. 2 À. — Schéma du cycle d'un Chermes avee polycyclie sur l'hôte intermédiaire ; ler type, sans génération estivale de séstentes. Sexual/es Sexupara Hôte intermédiaire Hôte définitif (Picea) ogrehens à Fundatrix Estivosistens Ga icola{Migrans a/ata Fig, 2B. — Schéma du cycle d'un Chermes avec polycyclie sur l'hôte intermédiaire ; 2e type, avec génération estivale de sistenles. 162 PAUL MARCHAL des hiemosistentes (fig. 2 A), soit des estivosistentes MED Er) TE Les progredientes, les seruparaeet les ersules alataene sont que trois formes d'une même lignée printanière engendrée par l’hiemosistens et ne se différenciant les unes des autres qu'au Hiemosistens adulte 17 Stade fl neopragrediens) 4°Stade Sistens adulte Ÿ. : SR [ Hiemosistens ou Estivosis tens) \ À S Progrediens adu/te Exsuy/ a/ata Sexupara Fig. 3. — Descendance directe de l’hiemosistens constituée par la lignée des sis- lentes présentant 4 stades successifs et celle des progredientes présentant 5 stades successifs. La deuxième lignée, celle des progredientes, se différencie dans deux directions différentes : celle des aptlères, qui conservent le nom de progredientes et celle des ailés, qui, eux-mêmes, évoluent en sexupares ou en exsules alatae: [L'établissement de ce schéma nous a obligé à préciser le point où se sépare chacune des branches des progredientes : mais il est possible que la détermination de ces formes s’établisse à un stade plus précoce que celui indiqué sur ce schéma.| cours de leur évolution larvaire ou nymphale (fig. 3) : elles partent d’un même stade larvaire commun le neoprogrediens qui s'oppose au #60sistens. La succession des générations qui émanent de l’hivernant (4) Peut-ii exister plusieurs générations successives de progredientes ? Il en serait ainsi pour certaines espèces (Chermes strobilobius) d'après Bôrner. Mais l'existence des eslivosistentes n'était pas établie au moment où Bôürner a publié ses résultats (1908) et il importerait de vérifier si les générations suc- cédant à la première lignée printanière de progredientes (4 mues) ne sont pas exclusivement formées de sistentes (3 mues). Quoi qu'il en soit à cet égard, les générations successives qui émanent, au cours de l’année, de la lignée printanière des progredientes comportent un nombre d'individus conformes au type hiemosistens de plus en plus grand et, à la fin de la saison, il arrive un moment où il n'y a plus que des hiemosistentes à l’état de larves dormantes destinées à passer l'hiver. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 163 et qui naissent sur l’hôte intermédiaire peut donc être, d’une facon générale, schématisée par le tableau suivant : çon & ' Hiemaosistens reasistentes necprogredientes hemosistne] Estivasistentes Pragredientes Exsules alatæ \Sexuparæ Jgénération | Y APRES RE Cr A necsistentes necsistentes egprogredientes reosistentes hemas/stentes/shvosisteneemesstenesstvosistene. Papredlentes emsstnaEtcstente 2° génération ï 1 l 1 1 | EE LS PRES ESS RTE RE SEL 22 = nensistentes Aeasistenfes] : 7eos!s{erles] Z. = 4 lemosislenfe, NEmoS/STeNE: ! HEMOSISTENES L 3° génération | | Li ï Y Les ersules d'une même espèce vivant simultanément sur un même arbre, tout en présentant des caractères très semblables, peuvent donc, d'après ce qui précède, avoir un patrimoine héré- ditaire très différent. Ceux qui ont pour ascendant printanier un progrediens où un exsul alata ne sont pas dans les mêmes conditions, au point de vue de leur plasma germinatif et de la procréation, que ceux qui ont pour ascendant un sistens, et il ny aura pas lieu d'être surpris, si lon isole en culture pure, comme j'ai eu l’occasion de le faire, les descendances d’indi- vidus isolés, d'obtenir des races biologiques avant dans leur evele évolutif des caractères distincts. B. — Polycyclie sur l'hôte définitif (Kpicéa). D'après Bôrner, pour certaines espèces (CA. abietis, Ch. stro- bilobius), les ailés gallicoles n'émigrent que partiellement sur l'hôte intermédiaire : et deux catégories d’ailés gallicoles se trouvent ainsi constituées : 10 les ailés migrateurs, el par con- séquent dieciques (migrantes alutae), abandonnant F'Épicéa pour aller se reproduire par parthénogénèse sur la plante intermé- diaire (Mélèze) ; 20 les ailés non migrateurs, et par conséquent monæciques, restant sur l'Épicéa pour y donner directement 164 PAUL MARCHAL par parthénogénèse des fondatrices qui engendrent l’année sui- vante de nouveaux gallicoles. D'après les données plus anciennes de Cholodkovsky ce dédoublement des gallicoles d’une même espèce en deux lignées, l’une monœcique, l’autre diweique, n'’existerait pas; mais on aurait à faire à deux espèces biologiques distinctes : l’une, émigrant de l'Épicéa sur la plante intermédiaire (C4. viridis, {Sexupara Sexuales ; Sexuales Lellaris monæc}x [Alata non mIgrans 2 fiemalis fSistens ) Gal//ico/a (Migrans 218 Fsllere der Migrans aletä) Fundatrix Fig. 4. — À et B.— Cycles du Chermes viridis (A) et du Chermes abietis (B), d'après les données de CHOLODKOVSKY. C.— Cycle du Chermes abietis, réunissant les deux précédents, d'après les données de BÜRNER. Ch. strobilobius) ; l’autre se multipliant indéfiniment par parthénogénèse sur l'Épicéa et y produisant des galles au printemps (Ch. abietis, Ch. lapponicus). Bürner réunit donc deux espèces de Cholodkovsky en une seule : il remplace les schémas A et B correspondant au Ch. viridis, et au CA. abietis de Cholodkovsky par le schéma C correspondant à son C4. abielis (fig. 4) ; de même, aux schémas À et B de la figure 5, correspondant au CA. strobilobius et au Ch. lapporicus de Cholodkovsky, il substitue le schéma C correspondant à son Ch. strobilobius. Cette manière de voir a CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 165 été combattue par Cholodkovsky, qui maintient le bien-fondé de ses anciennes descriptions et qui récemment à précisé ses premières observations avec assez de détails pour que l'inter- prétation qu'il en a donnée ne soit pas rejetée d’une façon aussi absolue que Bürner a pensé devoir le faire. \ D'autre part les observations de Bürner, elles aussi, parais- sent être exactes, et Cholodkovsky lui-même, en déplaçant Sexzales Sexupara Picea Cellerrs moræc < = A 207 10 : fundatrix spuria RATE) Fundatrix Fundaérix vera A Gallico!z Cellaris diæcà (Wigrans a/ata) (Migrans 2/at2) Gallicafz \f{4/ata non mgran B Fundatrix Fig. 5. — A et B. — Cycles du Chermes strobilobius et du Chermes lapponicus, d'après les données de Caoconkovsky. C. — Cycle du Chermes strobilobius, réunissant les deux précédents, d'après les données de BüRNER. le siège habituel de ses observations et en quittant la Russie pour la Suisse, à pu constater que, dans ce pays, il existe bien, suivant la thèse de Bôrner, un Chermes morphologiquement identique ou très semblable au C4. abielis qui possède à la fois des gallicoles monœciques et des gallicoles diœciques. Il arrive ainsi à conclure quele CA. abietis qui a été observé par Bôrner en Allemagne est la même race que celle que lui-même, Cholodkovsky, a observée en Suisse, et il lui donne le nom de Chermes occidentalis. Ce Chermes occidentalis, bien que morpho- logiquementidentique au Chermes abietis de Saint-Pétersbourg, a 166 PAUL MARCHAL un cycle double (monœeique et diœcique) correspondant à la fois au cycle monœcique du C4. abietis de Saint-Pétersbourg et au cycle diæcique du CA. vridis de la mème région. Nous nous trouvons ainsi, d'après lui, en présence de trois espèces ou races biologiques distinctes : D'une part, le Chermes occidentalis (ou Ch. abietisorcidentalis), ayant un double cycle monœcique et diœcique conforme au schéma € de Bürner : 1l se rencontre dans les forêts de l'Europe occidentale où le Mélèze et l'Épicéa indigènes (Larir ewropaea) et Picea excelsa) crôissent côte à côte ; D'autre part, le Chermes ahielis etle C'hermes viridis, résultant d'une sorte de dédoublement par ségrégation géographique du Chermes occidentalis et qui se trouvent dans les forèts du Nord et de l'Est exclusivement formées d'Épicéas (1), ou bien dans lesquelles notre Mélèze indigène (Larir europaea) se trouve remplacé par le Larir siberica. Le Ch. abietis (stricto sensu de Cholodkovsky), exclusivement parthénogénétique, n’a qu'une génération annuelle de gallicoles qui restent sur l'Epicéa pour y produire des fondatrices engen-. drant les gallicoles de l'année suivante : ila conservé les carac- tères morphologiques et notamment la coloration jaune du Ch. occidentalis. Le Ch. viridis, ayant au contraire des gallicoles qui sont tous destinés à émigrer sur les Mélèzes pour constituer, d’une plante à l'autre, le evele biennal, a acquis, en raison sans doute de son adaptation au Larir siberica, des caractères nouveaux (coloration vert foncé des œufs et des larves, coloration rouge des ailes, éclosion précoce des galles). En ce qui concerne le Chermes strobilobius (lato sensu de Bôürner), il semble bien que des faits analogues à ceux dont nous venons de parler pour le CAermes abielis doivent aussi se présenter. Sous ce nom se groupent aussi sans doute plusieurs races où espèces biologiques [CX. strobilobius (stricto sensu de Cholodkovsky), Ch. lapponicus praecor (?), Ch. lapponicus tardus|. Mais la morphologie et l’évolution de ces espèces ou races ne sont pas encore suffisamment connues pour que les (1) Dans ce cas le Ch. abietis peut seul se développer. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 167 données qui les concernent puissent actuellement servir à l'interprélalion générale de l'histoire biologique des Chermes. ESPÈCES PARTHÉNOGÉNÉTIQUES. Certaines espèces de Chermes sont privées de la génération sexuée ou n'ont qu'une génération sexuée rudimentaire et se multiplient par parthénogénèse indéfinie. Ces espèces ont un cycle qui se trouve représenté par lune ou par l’autre des deux moiliés du evele des Chermes migrateurs. Pour certaines d'entre elles, c’est la moitié correspondant à l'Épicéa (hôte défi- nitif) et le cycle de ces espèces ne comporte alors que des gallicoles et des fondatrices s'engendrant mutuellement les uns les autres. C’estee que nousobservons pour les cveles du CAermes abielis et du Chermes lapponicus, tels qu'ils sont décrits par Cholodkovsky. Pour d’autres espèces parthénogénétiques, le cycle est au contraire représenté par la moitié correspondant à la plante intermédiaire (Abes, Larir, Pinus) et est formé par les ersules dont les générationsse succèdent d’une facon indéfinie [| C4. piceue sur l'Abies, Ch. viridanus sur le Mélèze, Ch. strobi et Ch. pini (races indigènes) sur les Pins!. : Pour certaines de ces espèces, il peut arriver d’ailleurs que le cycle ne comporte pas exclusivement des exilés aptères, mais encore des exilés ailés et mème des ailéssexupares donnant lieu à une migration el à une reproduction sexuée rudimentaire, qui reste sans descendance (races indigènes du CA. strobi et du Ch. pini). Bôrner nie l’existence des espèces parthénogénétiques au sens de Cholodkovsky. I admet bien — car de nombreux faits le démontrent — que la parthénogénèse peut se poursuivre d’une facon indéfinie, sans affaiblissement pour l'espèce ; mais il ne pense pas que chez une espèce dite parthénogénétique la repro- duction bisexuée soit complètement et irrémédiablement obli- térée. Tout d'abord, 1l y a une catégorie d'espèces parthéno- génétiques qui est inexistante pour Bürner, c’est celle des espèces vivant exclusivement sur l'Épicéa et dont le cycle a été décrit par Cholodkovsky |Ch. abietis (stricto sensu), Ch. lapponicus|: 168 PAUL MARCHAL ce ne sont en effet, pour lui, que les lignées monæciques et paral- lèles de gallicoles appartenant à une espèce migratrice. C'était là d’ailleurs l’ancienne théorie des lignées parallèles de Dreyfus. Il reste la seconde catégorie d'espèces parthénogénétiques, celles vivant sur la plante intermédiaire (Conifère autre que l'Épicéa), et dont le eycle correspond aux générations succes- sives d’ersules : Bürner n'admet leur existence qu'avec cette réserve que la faculté de produire une génération bisexuée n'est pas abolie chez elles : une espèce peut en effet se reproduire par parthénogénèse exclusive pendant des centaines d'années et même indéfiniment, si les conditions nécessaires à la repro- duction sexuée ne sont pas réalisées; mais il n’yaurait rien, dans cette parthénogénèse prolongée, qui puisse faire perdre à l'espèce la faculté de la reproduction sexuée ; celle-ci resteraitseulement à l’état latent et lamphigonie réapparaitrait dès que les condi- lions requises (climat, nature de la plante) se trouveraient réalisées. D'autre part, la parthénogénèse étant réputée contraire à l'apparition de caractères nouveaux, Bôürner n’admet pas que la multiplication parthénogénétique exclusive puisse être Porigine de nouvelles espèces. Ce point de vue, bien que très discutable, peut être théoriquement soutenu. Il ne peut en tout cas servir d'argument pour nier l'existence des faits observés et, plus l'histoire biologique des Chermes fait l’objet d'études approfon- dies, plusilse confirme que des espèces ou des races parthénogé- nétiques se sont constituées aux dépens d'espèces primitivement amphigoniques. TECHNIQUE. La plupart de mes expériences concernant l'étude du cycle évolutif des Chermes ont été faites à Fontenay-aux-Roses dans un jardin où j'ai installé un laboratoire de plein air pour l’étude de la biologie des Insectes. Il importe de se procurer un ou deux ans d'avance, chez un horticulteur, les arbres que l’on se propose d'utiliser et de les mettre à l'abri des causes de conta- mination ; si on le juge nécessaire, on les désinfecte avant le départ de la végétation par une fumigation d’acide cyanhy- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 169 drique. Pour être maniés facilement, les arbres destinés aux expériences ne doivent pas avoir une hauteur de plus de 70 à 80 centimètres ; ils doivent être plantés dans de grands pots el, pour qu'il n'y ait pas de retard de végétation susceptible de compromettre l'expérience, il convient que la mise en pot ait eu lieu au moins au début de l’année précédente; les arbres devront avoir été déplantés pendant le repos de la végétation et livrés avec une motte de terre pour que la reprise se fasse le Fig. 6. — Laboratoire de plein air pour l'étude des Chermes, à Fontenay-aux-Roses (Seine). — En avant, sont disposés différents modèles de cages ou de sacs servant à recouvrir les Conifères en expérience. plus facilement et le plus rapidement possible. Pour conserver ces arbres pendant longtemps en bon état, on doit enterrer les pots dans lesquels ils se trouvent plantés, tant que les nécessités de l'expérience le permettent, et, pendantle reste du temps, on remédiera à l'excès d’évaporation qui se produit à la surface du vase en plaçant ce dernier dans un pot plus grand et en remplissant de terre l’espace laissé Hibre entre les deux parois, ou bien encore en l’entourant de foin, de paille ou d’étoffes que l’on arrose de temps en temps. Le matériel utilisé consiste surtout en cages de tailles diverses formées d’un bâti de bois tendu de mousseline fine et d’un tissu régulier ; sur l’un des ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 9e Série. 1913, xvinr, 12 170 PAUL MARCHAL côtés, se trouve une porte mobile de haut en bas dans une glissière et qui, pour les plus grandes cages, permet d'introduire facilement la tête et le bras à leur intérieur. Pour éviter le décollement de l'étoffe par l'humidité, une couche de peinture doit être passée sur le bois, après la pose des parois de mousseline, de facon que les bords de cette dernière soient fixés par la peinture. Une fois la cage mise en place sur les arbres, la terre doit être soigneusement buttée Fig. 7. — Modèles de cages divers utilisés pour les expériences. Entre les deux grandes cages se trouve un jeune Pin en pot dont la cime est enfermée dans une cloche à raisin (dite de Hollande) dont l'orifice inférieur a été tamponné et dont l'ouverture supérieure est recouverte de mousseline. tout autour. Je me suis servi aussi avec avantage dans bien des cas de simples poches ou de ballons de mousseline dans lesquels des arbres ou des branches étaient emprisonnés. Pour certaines expériences concernant les migrations des Chermes, ces sacs sont mème préférables aux cages, parce que la mousseline se trouve en contact plus étroit avec le feuillage et que les Chermes ont plus de chances de se fixer. Un jeune Pin ainsi enveloppé de mousseline à été représenté dans la moitié droite de la figure 6. Les dispositifs employés ont du reste été variables suivant les circonstances, et on trouvera tous les détails utiles à ce propos au compte rendu de mes expériences (p. 294). Il suffira de CONTRIBUTION À L'ÉTUDE. DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 171 signaler encore les cloches percées à leurs deux extrémités, uotamment celles qui sont vendues dans la commune sous le nom de cloches à raisin, et les larges verres de lanternes qui permettent d'emprisonner une branche où une cime d’arbuste, en tamponnant l'étroit orifice inférieur autour de la tige et en garnissant le large orifice supérieur d’une mousseline tendue. Ce dispositif est représenté entre deux grandes cages sur la figure 7. Suivant les cas et la nature des expériences que l’on se propose de réaliser, la contamination des arbres mis à l'étude se fait soit à l'aide d’un autre arbre déjà contaminé placé sous la même cage, soit à l’aide de galles ou de rameaux envahis par les Chermes et recueillis en plein air ou provenant d'une expérience précédente. Pour me mettre à l'abri des causes de contamination exté- rieure, et pour faciliter l'observation journalière, j'ai utilisé aussi plusieurs chambres de ma maison de Fontenay comme pièces d'isolement. Les fenêtres restant constamment ouvertes étaient garnies de mousseline et les arbres mis en expérience placés devant elles; chaque pièce était consacrée à une expé- rience distincte. Ces chambres d'isolement sont fort utiles pour l'étude du eyele des Chermes ; elles permettent de laisser les arbres sans enveloppe de mousseline, une fois que la contami- nation a été réalisée, et de suivre avec commodité toute l'évo- lution des Insectes. Pendant l'hiver et les périodes où l'on n’a pas à faire d'observations suivies, les arbres sont redescendus au Jardin etles pots mis en terre, en les abritant, s’il y a lieu, sous une cage de mousseline qu'il est bon de protéger elle-même au moyen d'un grillage métallique. Il CHERMES VIVANT SUR LES ABIES Genre DREYFUSIA Bôürner (1). Nous avons étudié dans ce groupe deux espèces de Chermes : le Chermes Nüsslini Bürner et le Chermes piceae Ratzeburg. IL (17 Dans un but de simplification nous conserverons, au cours du texte, l’ancien terme générique de Chermes. 172 PAUL MARCHAL comprend, en outre, parmi les types indigènes, le Chermes pecti- nalae Chol. (CC. coccineus Chol.), dont le cycle évolutif n’a été étudié qu'en Russie par Cholokovsky et qui émigre de l'Épicéa commun (Picea excelsa) sur Abies pectinata, A. balsamea, ete. Il faut ajouter enfin le Chermes funitectus Dreyfus, espèce assez problématique et qui aurait été observée en Europe sur le Tsuga canadensis. Peut-être est-elle identique au C'hermes Nüsslin. Au point de vue morphologique, les deux premières espèces, qui seules vont nous occuper, sont extrêmement voisines el peuvent être considérées comme des espèces sœurs ; mais elles se distinguent nettement par leur biologie : car le Chermes Nüsslini présente des migrations s’effectuant en partant des Épicéas (Picea orientalis) pour aller aux Abies (A. nordman- niana, À. peclinata), avec toute la série des formes que com- porte le eyele migrateur biennal (fundatrices, migrantes alatae, seruparae, seruales), tandis que le Chermes piceae se multiplie indéfiniment par parthénogénèse sur les écorces des Abies et notamment de lAes pectinata. Pendant longtemps les migrations de la première espèce furent totalement ignorées et les deux formes restèrent con- fondues par les auteurs sous le nom de CA. piceae Katz. En 1903, Nüsslin s’'apercut que les Chermes vivant en Allemagne sur les Abies et dont il pensait pouvoir identifier tous les représentants au Chermes piceae étaient susceptibles de présenter des migrations sur l'Épicéa indigène (Picea ercelsa) ; il constatait toutefois que ces migrations étaient rudimentaires, que les sexués avortaient toujours, de sorte que l’on n'obte- nait jamais de galles correspondant à ces Chermes sur le Picea ercelsa et que le cycle se trouvait ainsi toujours interrompu. Cholodkovsky (1) attira l'attention sur ce fait qu'il devait y avoir, sous le nom de Ch. piceae, deux espèces confondues par les auteurs qui s'étaient occupés de la question et notamment par Nüsslin : l’une de ces deux espèces, le véritable Chermes pnceae Ratz., vivait indéfiniment sur l’Abies pectinata sans migrations ; l’autre, qu'il estime pouvoir identifier au CA. funitectus ancien- (1) Zool. Anz., XXVIL, 1904, p. 478 ; et Die Coniferen Läuse Chermes, 1907, p. 26. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 173 nement décrit par Dreyfus, présentait les migrations rudimen- daires indiquées par Nüsslin (1). Pour démontrer la réalité de l'existence de ces deux espèces instituées aux dépens de ce que l’on appelait alors le Ch. piceue, Cholodkovsky donna des preuves morphologiques : il ft remarquer que le premier stade larvaire hivernant du vrai Ch. piceae Ratz., vivant par parthénogénèse exclusive sur les écorces de l’Abies pectinata, différait par cerlains caractères structuraux du premierstadelarvaire hivernant de son CA. funi- - dectus (= Ch. Nüsslini Bürner). En 1906 (2), je démontrai que ce Chermes funitectus de Cholodkovsky [— Ch. Nüsslini Bôrner] ne pouvait être consi- déré comme une espèce à génération sexuée rudimentaire, dont la migration n'aurait plus été qu'un geste inutile, comme Île pensait Nüsslin ; je fis voir que, chez cette espèce, la migration s’effectuait au contraire d'une façon normale et régulière, si elle avait à sa disposition le Picea orientulis au lieu de notre Épicéa indigène (Picea ercelsa), sur lequel la génération sexuée est en effet condamnée à avorter. En 1907 (3), je distinguai en France, comme Cholodkov- sky le faisait en Russie et en Allemagne, deux espèces pré- sentant des caractères morphologiques et biologiques distincts dans l’ancien Chermes piceae : une dont il vient d'être ques- tion et dont je faisais connaître les migrations; l’autre se multi- pliant indéfiniment par parthénogénèse sur les A0tes peclinala et que j'avais observée dans des régions éloignées de tout parc (1) De plus Cholodkovsky annonçait que ces migrations ne devaient pas être rudimentaires dans fous les pays; car il avait reçu depuis longtemps (Zool. Anz., 1899) des galles sur Épicéa provenant du Caucase, galles très analogues à celles de Ch. coccineus et d'où étaient sortis des migrantes alatae dont les caractères étaient identiques à ceux de Ch. funitectus (Ch. Nüsslini Bürner). Il admit donc que cette espèce présentait des migrations régulières et effectives dans le Caucase, région qui représentait sans doute son pays d'origine, mais que, dans le nord de l’Europe et l'Europe occidentale, elle avait perdu l'habitude de ces migrations qui ne restaient plus qu’à l’état de rudiments biologiques, ainsi que l'avait indiqué Nüsslin; elle avait dû ainsi s’habituer à se maintenir uniquement par parthénogénèse. (2) Bull. de la Soc. Zool. de France, p. 111. Dans cette note, le Chermes funi- tectus, qui deviendra plus tard le Ch. Nüsslini de Bürner, est encore désigné sous le nom de Ch. piceae. Je ne signale les deux formes comme distinctes que l’année suivante, en 1907. (3) C. R. Soc. Biol., 1907, p. 368. 174 PAUL MARCHAL pouvant contenir des Picea orientalis. Cette dernière forme était évidemment le C. piceae Ratz., et je la désignai sous ce nom; quant à la première, qui devait plus tard être décrite sous le nom de Ch. Nüsslini par Bürner, je lui conservai le vom de CX. funitectus qui lui avait été attribué par Cholodkov- sky, tout en faisant remarquer que l'identification avec le véritable Ch. funitectus de Drevfus était douteuse et que le nom de Ch. nordmannianae Eckstein (nomen nudum pour Bôr- ner) serait plus justifié. En 1908, paraît le grand mémoire de Bôrner sur les Chermes. Cet auteur ne semble pas avoir eu connaissance de mes notes antérieures et il eonfond à nouveau les deux espèces distinguées par Cholodkovsky et par moi-même dans l'ancien C. piceue. | Peu de temps après, Nüsslin (1) reconnait que son Chermes piceae (comprenant en réalité C. piceae + C. Nüsslini) se pré- sente sous deux formes différentes, Fune (Jungtriebelaus) vi- vant sur les jeunes pousses vertes, sur les bourgeons et sur les aiguilles d'Abies pectinala el d'A bies nordmanniana, plus rare- ment sur les écorces des grosses branches et du tronc, et don- nant lieu à des migrations rudimentaires avortant sur l'Épicéa ; l'autre (Altenrindenlaus), cantonnée exclusivement sur les vieilles écorces du tronc ou des grosses branches, né formant pas d’ailés, n'ayant pas de migrations, et se multipliant indéfi- niment par parthénogénèse sur le Sapin (Abies). Il considère la deuxième forme comme une simple race dérivée de la première el adaptée à vivre sur les écorces du tronc ou des grosses branches des Sapins, sous l’épais ombrage de la forêt : elle se serait formée par la conservation de la génération hivernante qui seule se rencontre sur les vieilles écorces et par perte de la génération estivale spécialisée pour vivre sur les Jeunes pousses de l’année. Le principal caractère de cette race vivant sur le tronc des grands Abies des forêts serait, d'après Nüsslin, l'incapacité dans laquelle elle se trouverait de fournir au prin- temps des individus vivant sur les jeunes pousses et sur Îles aiguilles et par suite de procréer des ailés, puisque ceux-ci ne peuvent se développer que sur les aiguilles. (4) Stuttgart, 1908, p. 205. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 179 Si l'interprétation de Nüsslin, ainsi que nous le verrons, est inexacte, son travail indique toutefois que ses observations l'ont mis en présence de faits semblables à ceux qui avaient antérieurement frappé Cholodkovsky et moi-même et qui nous avaient conduits à admettre deux formes spécifiquement dis- linetes, morphologiquement très voisines, mais à cycles biolo- giques très différents, dans l’ancien Chermes piceue. Bürner (1), frappé des observations de Nüsslin, reprit la question et retrouva dans les forêts de Sapins des Vosges la forme paraissant vivre exclusivementsur les vieilles écorces, que Cholodkovsky avait reçue d'Allemagne, que moi-même J'avais observée en France et que Nüsslin avait considérée comme une race de son CA. piceae. Il étudia avec soin ses caractères morphologiques comparativement à ceux de l’autre forme qui, tout en se multipliant sur les écorces plus ou moins âgées, jouit en plus de la propriété de fournir au printemps de nombreux ailés sur les aiguilles, et il reconnut que les premiers stades larvaires des deux formes étaient différents, ainsi que Cholod- kovsky et moi-même l’avions déjà avancé, sans toutefois don- ner à ce point de vue tous les détails descriptifs désirables. Bürner laissa alors avec raison à la forme exclusivement par- thénogénétique de l'Abies peclinata, qui était bien la forme observée à l’origine par Ratzeburg, l'ancien nom de piceae Ratz. et il donna à la forme dont Nüsslin avait reconnu les migrations non aboutissantes sur l'Épicéa indigène, et dont j'avais décrit le cycle complet avec migrations régulières sur Picea orientalis, le nom de Néss/ini. L'exposé historique précédent, qui se trouve assez compliqué par les questions de synonymie et par les retouches diverses que les auteurs travaillant d’une facon simultanée et indépen- dante ont dà faire subir à leurs travaux antérieurs, était utile pour mettre au point la question des Chermes vivant en Europe sur les Abies. J'aborde maintenant, d'après mes observations et mes expé- riences, l'étude des deux espèces dont j'ai constaté la présence en France : Dréyfusia Nüsslini Bürner et Dreyfusia piceae Ratz. Pour éviter l'obscurité dans les descriptions, je rappellerai au (4) Zool. Anz., 1908, p. 737. 176 PAUL MARCHAL fur et à mesure et confirmerai, s’il y a lieu, les faits qui ont été signalés par mes devanciers, mais j'insisterai surtout sur les phases du eyele évolutif de ces deux espèces qui n'avaient pas encore été élucidées, en particulier sur les migrations et la reproduction sexuée du Ch. Nüss/ini, ainsi que sur la formation et les caractères biologiques des aiïlés du Chermes piceae. DREYFUSIA NUSSLINI Bürner 1908. SYNONYMIE. Chermes obtectus, RATZEBURG, ad part., 1844. — funitectus, Dreyrus (Tageblatt der 61 Versammlung deutschen Naturforscher... in Kôln), 1889. — — Dreyrus (Zool. Anz, XIIL), 4890. — nordmannianae, EcksreIx, 4890. — funitectus, Cnocopkovsky, (Zool. Anz.), 1899. — piceae, Nüsscix, ad part. 14903, 1905, 1908. — funitectus, Cuocopkovsky (Zool. Anz.), 14904. De En Cnocopkovsky, Die Coniferen. Läuse Chermes, 1907. — piceae, Marcaz (Bull. Soc. Zool. Fr.), 1906. — funitectus. Marcnaz (C. R. Soc. Biol., LXIIT, 14907. (Le nom de nordmannianae est indiqué en même temps comme pouvant être plus justifié). Dreyfusia piceae, Bôrxer (Arbeit. K. Biol. Anstalt. für Land und Fortwirtschaft. Berlin.), 1908. — Nüsslini, Bürner (Zool. Anz. XXXIII, p. 737). 4908. Contrairement à Bôrner, nous ne nous pensons pas autorisé à rejeter complètement de la synonymie le nom de Chermes funitectus donné par Dreyfus. La description et les observations de Dreyfus correspondent en effet assez bien au Chermes Nüsslini; mais il n’a signalé son espèce que sur l’Abies [Tsuga| canadensis ; or jamais un Chermes n’a été retrouvé sur cet arbre: dans les pépinières où j'ai fait mes observations, et où le Chermes Nüsslini était abondant, les Tsuga canadensis et Douglasi étaient nombreux; or tous étaient indemnes. On doit donc penser, ou bien que Dreyfus a fait une erreur de détermination pour la plante, et que les arbres sur lesquels il a observé son Chermes funitectus étaient en réalité des Abies nordmanniana, ou que le Chermes funitectus de Dreyfus est une espèce différente du Chermes Nüsslini, vivant effectivement sur le Tsuga canadensis, mais qui n’a pas été retrouvée, Si la première hypothèse, qui me parait assez vraisemblable, se vérifiait, on devrait restituer à cette espèce le nom de funitectus. Dans le doute, il est pré- férable de lui donner le nom de Nüsslini qui lui a été attribué par Bôürner. Observations préliminaires. — T'ai observé le Chermes | Drey- fusia] Nüsslini aux environs de Paris, où il se multiplie par parthénogénèse sur les Abies nordmanniana et les À. pectinata, avec une préférence pour la première essence ; je n'ai rencontré d'autre part ce Chermes que dans des pépinières ou des pares CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 177 où se trouvaient des À. nordmanniana et généralement aussi des Picea orientalis. Dans la pleine campagne, en Normandie par exemple, où l’Abies pectinata est si répandu qu'on l'appelle souvent en France Sapin de Normandie, c’est toujours le Chermes piceae que j'ai rencontré sur cette essence. On est donc en droit de penser que le Chermes Nisslini n'est pas une espèce indigène, mais importée, sans doute avec l'A bies nordmannian«, qui croît dans la région du Caucase en même temps que le Picea orientalis. Nüsslin et surtout Bürner ont montré que les générations de celte espèce qui se succèdent dans le cours de l’année sur les Abies (ersules) comportent deux catégories d'individus distincts et différenciés déjà dans l'œuf, que Bôrner à désignés sous les noms d’Atemnles et d'estivales et que, pour des raisons exposées dans l'introduction de ce mémoire, nous appelons sistentes et progredientes. Nüsslin à d'ailleurs expérimentalement démontré qu'une seule et même femelle parthénogénétique hivernante donne naissance à la fois à l’une et à l’autre forme. Il à enfin fait voirque, parmiles œufs pondus parles femelles hivernantes, ceux qui éclosent au début du printemps (avril, commence- ment de mai) donnent surtout des progredientes, landis que plus tard il y à un mélange des deux formes, puis uniquement des sistentes (1908, p. 213). Mes observations concordent, sur ces différents points, avec celles de Nüsslin. CYCLE ÉVOLUTIF ET BIOLOGIE DE DREYFUSIA (CHERMES) NüssLinr. Ce Chermes hiverne sur les Abies à l’état de larves primaires (neosistentes), sous la forme de très petits boucliers noirs ellip- tiques, auréolés d’une frange blanche de bâtonnets cireux et portant aussi sur la ligne dorsale médiane une crête formée de bâtonnets semblables (fig. 8) ; on distingue aussi parfois, plus ou moins marquées suivant les individus, des lignes formées de sécrélions cireuses disposées en franges et correspondant à la Jonction des différents segments ; ces larves primaires se trou- vent fixées sur les branches d’âges divers, ou même sur les bourgeons ; au printemps, elles commencent à grossir, sentourent d’une sécrétion cireuse d'aspect cotonneux et 178 PAUL MARCHAL subissent trois mues séparant quatre stades. Arrivés à leur développement complet, les sistentes pondent un gros paquet d'œufs jaune brunâtre, entouré d’une sécrétion cotonneuse très insuffisante pour les masquer entièrement, et, lorsque la ponte est assez avancée, les œufs régulièrement disposés forment une agglomération de couleur jaune brun en arrière du corps de l'animal. Le nombre de ces œufs, avant que les larves aient commencé à éclore, arrive à dépasser la centaine et la descen- dance d’une seule femelle peut atteindre Lrois ou quatre cents individus. En enlevant les œufs déjà pondus en arrière de l'Insecte, J'ai pu évaluer le nom- bre des œufs évacués en un jour : il varie beaucoup suivant la température et Pafflux de la sève ; le 49 avril, la ponte d’un in- dividu en 24% heures s'est élevée à 12; comme moyenne du 19 au 25 avril, J'ai trouvé une quinzaine d'œufs pour 24 heures. Mous meta Les œufs, que l’on voit s’accumuler en primaire delapar- arrière des Insectes à partir de la fin de thénogyne sistante ne : (neosisiens) hiver- mars et dans le courant d'avril, donnent nantsurles Abies. au commencement de mai une légion de larves qui envahissent les pousses vertes de l’année et se répandent aussi sur les écorces. Ces larves, au premier stade, sont de deux catégories : les unes, sem- blables à celles qui ont passé l'hiver (fig. 8), évolueront con- formément au type sistens; elles se fixent sur les axes des jeunes pousses ou sur les écorces des rameaux plus âgés, mais jamais sur les aiguilles, puis elles s'arrêtent dans leur dé- veloppement et, sauf quelques exceptions, passent ainsi im- mobiles tout l'été ainsi que l'hiver suivant, pour ne reprendre par conséquent leur évolution que onze mois environ après s'être fixées. Ces larves, tant qu’elles sont au premier stade, sont des neosistentes. Les larves de la deuxième catégorie évolueront d’une façon immédiate conformément au type progrediens : tant qu'elles sont au premier stade, ce sont des neoprogredientes : morpho- logiquement, elles diffèrent surtout des neosistentes par l'absence CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 179 de facettes glandulaires différenciées sur les plaques spinales et sur les plaques marginales (fig. 28, p. 207), ainsi que par la forme des ganglions cérébroïdes (Nüsslin) ; biologiquement, elles se font remarquer parce qu'elles vont se fixer sur les aiguilles et parfois surles jeunesaxes; mais elles se distinguentsurtout parce qu'elles se mettent immédiatement à évoluer au lieu de rester à l’état dormant comme les neosistentes el, après quatre mues, elles se Sexuazles , Gallicofz {A/2te non migrans Ja \ Fundatrix : Estivosistehs s//iemasistens Gallico!s {Migrans z/ata) Fig. 9. — Schéma du cycle évolutif du Chermes Nüsslini. transforment soit en ailés sexupares destinés à émigrer (seru- parue) (pl. F, fig. 3) soiten femelles parthénogénétiques aptères (progredientes) (pl. E, fig. 2) qui, au point de vue morphologique, sont légèrement mais nettement différentes des sistentes. résulte de mes observations que la transformalion des neoprogredientes soit en ailés soit en progredientes adultes se fait toujours au moyen de quatre mues séparant cinq stades successifs, landis que la transformation des neosistentes en sistentes adultes ne se fait qu'au moyen de trois mues séparant quatre stades successifs. Les neoprogredientes sont tous semblables entre eux, quelle que soit leur destination future, c'est-à-dire qu'ilssoient destinés 180 PAUL MARCHAL à évoluer en progredientes (femelles parthénogénétiques aptères ‘été) ou en ailés, et la différence de ces deux formes ne se Fig. 10. — Chermes Nüsslini: progrediens, 2 stade; recueilli sur feuille d'Abies pectinata, le 4 mai 1909 ; fixation par sublimé acétique chaud et séjour dans le même liquide refroidi, pendant deux jours. Gr. — 270. On voit les ébauches de 4 ovariules de chaque côté du tube digestif vers le milieu de la moitié postérieure du corps. manifeste nettement par des caractères ex- térieurs qu'à partir du troisième stade (1).Les figures 10, 11 (p. 180, 182) et la figure 19 (p. 200) représentent différents stades de l'évolution du progre- diens. Les progredientes (fe- melles parthénogéné- tiques aptères d'été) parviennent à leur complet développe- mentdans la deuxième moitié de mai et pon- dent des œufs en nom- bre beaucoup moins nombreux que les sis- tentes; ces œufs res- tent enveloppés dans la masse cotonneuse qui recouvre complè- tement en outre Île corps de la mère, et toute la masse ainsi constituée présente l'aspect d'un petit tam- (4) Il est très probable que le début de la différenciation a lieu d'une façon plus précoce. D'après Nüsslin la forme du cerveau permettrait de reconnaître les sexupares des progre- dientes (estivales) dès la fin du premier stade (Biol. Centralbl., 1910, p. 35). Ce caractère ne s'exprimant en aucune façon sur les mues, et sa constata- tion nécessitant la mort de l'animal, il nous parait toutefois difficile de dire avec certitude que deux larves au premier stade, présentant de légères différences dans la forme de leur cerveau, évolueront l'une dans le sens progrediens, l'autre dans le sens sexupare. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 181 pon d’ouate arrondi et bien tassé (pl. I, fig. 2). Les larves issues des œufs précédents éelosent rapidement et dès le début de juin se répandent sur les rameaux : toutes sont conformes au type neosistens; elles se fixent, soit sur les Jeunes axes, soit sur les rameaux plus âgés ou sur le tronc qu'elles n’en- vahissent généralement qu'après avoir stationné quelque temps sur les Jeunes axes. D'une façon générale, on peut dire que ces neosistentes de seconde génération restent à l’état dormant toute la fin de K saison et l'hiver suivant, pour ne se développer et évoluer qu'au printemps de l’année suivante. Is s'ajoutent aux neosistentes de première génération nés et fixés au commencement du prin- temps, se mêlant et se confondant avec eux sur les axes de la plante, sans que rien permette dès lors de distinguer les deux lignées. Il arrive parfois en été, surtout en septembre, que certains individus, après une période de repos au premier stade plus ou moins longue, se développent, subissent des mues et se mettent à pondre : en observant les mues laissées par ces indi- vidus dont la présence peut se révéler dès Ia fin de juillet (4), j'a constaté qu'elles répondaient à celles du type sistens. Dans ce cas, les sistentes, sous leur première forme larvaire (neosistentes), sont donc sortis avant l'hiver de leur état dormant pour évoluer et se reproduire : ce sont des estivo-sislentes. On peut se demander quelle est la raison d’être du neosistens qui reste à l’état dormant pendant la plus grande partie de l'année sur les À hies pour n’évoluer qu'au printemps de l’année suivante. Elle me paraît résider surtout dans l'utilité que cette particularité présente pour l'espèce en lui assurant une grande force de résistance. Les neosistentes, grâce à leur taille très réduite, leurs téguments coriaces, leur état presque desséché, échappent certainement aux causes de destruction si nombreuses qui assaillent en été les progredientes, que leur grosse taille et leur nature succulente désignent naturellement à la voracité des nombreux prédateurs qui attaquent les pucerons pendant cette saison. La différenciation de l’espèce en deux types, les sistentes el les progredientes, nous apparaît done comme avant (4) No 4, 28 juillet 1908. 182 PAUL MARCHAL une importance considérable au point de vue de sa perpétua- Fig. 11. — Chermes Nüsslini : progrediens, 4° stade, recueilli sur feuille d'Abies pec- tinata, le # mai 1909; fixation par sublimé acétique chaud, puis séjour dans le même fixateur refroidi pendant deux jours. On voit de partet d'autre du tube digestif les ovariules dont le nombre s'est réduit à deux ou trois de chaque côté. Gr. = 270. lion sur les Abies, et l'existence des sis{entes passant la plus CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 183 grande partie de l’année à l’état dormant sous uue forme inapparente, inattraclive et très bien protégée (neosistens), constitue à ce point de vue une garantie de premier ordre. Les ailés sexupares (seruparae), ainsi que nous l'avons dit plus haut, dérivent avec les progredientes d'une forme larvaire primaire commune (reoprogrediens). Ce n’est qu'à parür du troisième stade, c’est-à-dire après la deuxième mue, que l’ailé sexupare et le progrediens peuvent être distingués l’un de l’autre par des caractères extérieurs : le futur ailé se distingue en effet alors par l'absence des glandes spinales. La nymphe se déve- loppe sans s'entourer de sécrétion cotonneuse et, par unedernière mue, se transforme en ailé, dans les derniers jours de mai ou les premiers jours de juin. En dehors des données concernant le nombre des mues chez le sistens (hiemalis de Bürner) et chez le progrediens (estivalis de Bôrner), toutes mes observations précédemment exposées concordent avec celles de Bürner et de Nüsslin et viennent les confirmer. Je passe maintenant à l'étude de la migration sur le Picea orientalis que J'ai découverte et dont j'ai pu observer toutes les phases aux environs de Paris ; J'examinerai en même temps le cycle des générations qui se succèdent sur le Picea orientalis et qui ont pour point de départ la migration précédente, puis enfin la migration de retour sur les Abies. MIGRATION SUR LE Paicea orientalis. —- LES SEXUPARES. Les ailés sexupares s’envolent de l'A 4tes nordmanniana ou de l’A. pectinata sur lesquels 1ls ont pris naissance à la fin de mai et au commencement de juin, puis ils émigrent sur les Épicéas (1). Au moment où 1ls apparaissent sur l'Abies nordmanniana, 11s éclosent parfois en nombre assez grand pour que, sur certains (4) La date est variable suivant les années : en 1907, le 8 juin, on trouvait des ailés fixés sur les Epicéas, notamment sur les Picex orientalis ; néanmoins l’éelosion des ailés sur les Abies n'était pas encore terminée. En 1909, année dont les mois d'avril et de mai furent particulièrement chauds, j'observai les premiers ailés venant de se transformer sur les Abies dans le commen- cement de la deuxième quinzaine de mai: mais le grand moment de leurs éclosions coïncida avec la période s'étendant du 29 mai au 2 juin. 184 PAUL MARCHAL jeunes arbres, les aiguilles soient couvertes de Chermes ailés placés en une file longitudinale depuis la base de l'aiguille jusqu'à son extrémité; les vieilles aiguilles placées au-dessousdes pousses où sont éclos les ailés sont souvent ainsi entièrement garnies ; les aiguilles des jeunes pousses peuvent l'être également. Ils se fixent sur les aiguilles de notre Épicéa indigène (Picea excelsa) où sur celles du Picea orientalis, ainsi que je l'ai constaté, soit en plein air, soit dans mes expériences; mais, ainsi que nous allons le voir, tandis que le eycle n'aboutit pas sur l'Épicéa indigène, il se poursuit au contraire d'une façon com- plète sur le Picea orientalis. Les ailés se fixent sur les aiguilles des Épicéas, tantôt sur celles del'année, tantôt sur des aiguilles plus âgées (pl. HE, fig. 3); ils s'orientent parallèlement à la longueur de l'aiguille, I tête le plus souvent tournée vers la base; peu de temps après que l'Insecte s'est fixé et qu'il a implanté son rostre dans la profon- deur de l'aiguille, il se développe sur son thorax et sur sa tête une sécrétion cireuse formant des cordons qui s’'enroulent sur eux-mêmes d'une facon fort caractéristique : ceux qui sont placés en avant sur la tête forment notamment deux longues cornes qui s'incurvent en dehors en forme de crosses. Sous leurs ailes légèrement enfumées, ne tardent pas à s’en- tasser des œufs de couleur brun Jaune et qui, au même moment, ne sont pas au nombre de plus de 8 ou 9, en arrière du corps de l’Insecte. Ces œufs commencent à éclore avant que la ponte de la mère soit encore terminée et, les larves se dispersant aussitôt, on ne peut guère se rendre compte du nombre total des œufs pondus pour un même individu qu'en comptant les coques vides abandonnées par les larves au moment de leur éclosion ; ce nombre ne dépasse pas habituellement douze à quinze. La fécondité de ces sexupares est donc relativement assez faible et ils n'ont que trois ou quatre gaines ovigères. Dans les expériences en captivité il y a un déchet considé- rable d'individus qui refusent de se fixer, fait semblable à celui que lon peut constater pour le Chermes pini, et qui, {très vraisemblablement, tient en grande partie à ce que l’exer- cice résultant du vol de la migration en plein air est néces- saire à la maturation des œufs destinés à évoluer en sexués. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 185 C’est ainsi que dans l'expérience n° 1 (1907), les sexupares ne se fixaient que dans la proportion de un sur quatre (une ving- taine sur quatre-vingts), et dans l'expérience n° 1 His (1908) la proportion numérique des individus qui se fixèrent sur l'Épicéa fut encore plus faible. Dans la nature, bien que le déchet soit certainement beaucoup moins considérable, les sexupares ne sont pas non plus infailliblement conduits par leurs tropismes sur l'arbre qui doit assurer le développement de leur descen- dance, et J'ai trouvé en 1906 et 1907 des ailés de Ch. Nüsslin parfaitement caractérisés avec leurs crosses de sécrétion cireuse, fixés sur des aiguilles de Pinus sylvestris et de Pinus strobus, en mélange avec des Chermes puni ; il est à noter d’ail- leurs que, dans le voisinage immédiat, se trouvaient des Abies contaminés par le Chermes Nüsslini. Ces ailés égarés pondent des œufs ; mais les larves qui en naissent meurent et se des- sèchent. Il importe, d'autre part, de faire remarquer que les ailés du Chermes Nüsslini qui prennent naissance sur les Abies ne se dédoublent jamais en deux séries, l’une sexupare etmigratrice, l'autre virginipare et sédentaire, comme cela se présente pour d’autres espèces de Chermes : en d’autres termes, il n'existe pas chezle Chermes Nüsslini d'ersules alatae, c'est-à-dire d’'ailés qui, au lieu d'émigrer sur les Épicéas pour y produire des sexués, restent au contraire sur les Abies pour y engendrer des femelles parthénogénétiques. Jamais, en effet, je n'ai remontré dans la nature d'ersules alatae de Ch. Nüsslini sur les Abies et je n'ai pu obtenir non plus leur fixation sur ces arbres dans mes expériences (Exp. 3, #). Onue peut donc expliquer la non-fixatian d'un nombre plus ou moins grand des ailés sur les Épicéas dans les expé- riences par une prédestination de ces individus à rester sur les Abies. LES SEXUÉS ET L'ŒUF FÉCONDÉ. Les larves des sexués issues des œufs des sexupares éclosent en moyenne vers la fin de la première quinzaine ou le commen- cement de là deuxième quinzaine de juin. Elles se dispersent ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 9e série. 1913, xvur, 13 186 PAUL MARCHAL aussitôt sur les pousses, n'étant pas retenues, comme celles du Ch. pini, par la sécrélion cotonneuse de la mère, puis elles ne lardent pas à se fixer et à implanter leurs soies rostrales pour se nourrir de la sève de F'Épicéa. C’est surtout à l'extrémité des pousses, et en particulier sur les aiguilles encore rapprochées en pinceau qui se trouvent à leur sommet, que se fixent ces larves de sexués (pL LE fig. # et 5); elles subissent quatre mues successives pour arriver à l’âge adulte. Les figures 23-27 (p.102) se rapportent à divers stades de évolution des sexués du Ch. Nüsslin. Au cours de cette évolution, qui est lente et se prolonge pendant un mois environ, l'Insecte ne s'accroît que fort peu ; à son extrémité postérieure, on voit le plussouvent une gouttelette limpide et les mues qu'il a abandonnées : le nombre de ces dernières permet de préciser avec assez de facilité le stade auquel se trouve l’Insecte. Aux environs de Paris, j'ai toujours rencontré les femelles en beaucoup plus grand nombre que les mâles. Si les sexupares se sont fixés sur notre Épicéa indigène (Picea excelsa), les sexués avortent en général dans le cours de leur développementetse dessèchent; cette constatation résulte des observations faites dans la nature. Il peut pourtant se faire que, sur le Picea excelsa, les sexués arrivent au terme de leur évolution, que les femelles pondent des œufs fécondés et que ces œufs donnentdes fondatrices, mais les fondatrices n'arrivent pas à former de gailes au printemps suivant etle eycle est ainsi tôt ou tard interrompu (Exp. 2). Nüsslin avait observé cet avortement des sexués sur l'Épicea et n'avait pu obtenir qu'une fois une femelle arrivée à matu- rilé, mais jamais d'œufs fécondés pondus, ni aucun des stades ultérieurs de l’évolution. C’est ce qui le conduisit à cette con- clusion que, chez cette espèce de Chermes, la reproduction sexuée n'existait plus qu'à l’état rudimentaire, n'aboutissant à aucun résultat. | Bürner observaune fois une fondatrice issue d’un œuf fécondé: mais, en raison de l'absence des galles auxquelles de telles fon: datrices peuvent donner naissance, il conclut comme Nüsslin à l'avortement de la génération sexuée du Chermes Nüsslim. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 187 Cette conclusion, justifiée pour cette espèce, lorsqu'elle n'a à sa disposition que des Picea ercelsa, ne l’est plus lorsqu'elle à à sa disposition le Picea orientalis, sur lequel le eycle se conti- nue d’une facon normale (1). C'est vers le milieu de juillet que les femelles arrivent à maturité; elles renferment dans leur corps un œuf unique volu- mineux, et on les voit alors descendre Le long des rameaux, puis se disperser sur l'arbre. La ponte commence aussitôt, et l’on trouve toujours les œufs fécondés pondus à la base d’une pousse de l’année, sous les écailles qui forment à ce niveau une sorte de manchon (pl. VI, fig. 21) : l'œuf est jaune brun ou brun rouge, entouré d’un réseau lâche et léger de sécrétion cotonneuse ; la femelle meurt après la ponte et reste souvent desséchée dans le voisinage immédiat de l'œuf fécondé. LA FoNDATRICE. L'œuf fécondé, qui doit donner naissance à la fondatrice, se développe aussitôt après la ponte; au bout de quelques Jours l'embrvon est déjà formé et l'on peut voir à la loupe ses deux veux noirs. Dès le commencement d'août, il y à des fondatrices écloses et fixées sur les bourgeons du Picea orientalis : elles sont pla- cées, soit sur la partie basilaire du bourgeon, soit au niveau de son insertion ou très peu au-dessous. Elles restent ainsi : fixées pendant toute la fin de la saison à l'état de premier stade larvaire (neofundatrir) et très semblables au neosistens (fig. 8 et 12) ; elles se présentent à la loupe avec l'aspect de (4) Il peut arriver, surtout certaines années, que les sexués meurent en grand nombre au cours de leur développement, même sur le Picea orientalis ; ce fait pourrait donner l'illusion d’une reproduction sexuée rudimentaire; en réalité, les Chermes sont décimés par une maladie, probablement de nature imicrobienne. [l convient d'autre part de faire remarquer qu'en Allemagne, comme en France, le Picea orientalis est planté dans les pares et, siles galles y étaient aussi communes que dans la localité où j'ai fait mes observations, il ne serait guère admissible qu’elles aient échappé à l'attention des observa- teurs (Nüsslin et Bürner). Il se peut donc que, pour des causes climaté- riques ou d'une autre nature, le développement des sexués, des fondatrices ou des gallicoles du Chermes Nüsslini soit enrayé en Allemagne, même en présence du Picea orientalis. De nouvelles observations faites sur ce point dans ce pays sont évidemment nécessaires. 188 PAUL MARCHAL petits boucliers noirs elliptiques entourés d’une auréole formée de courts filaments blancs et radiés ; sur la ligne médiane et dorsale se trouve une crête formée de filaments blancs sem- blables. Elles passent dans le même état tout l'hiver et n’évoluent qu'au printemps suivant: cette évolution a lieu d’ailleurs d’une facon très précoce. En 1907, sur les Picea orientalis eu plein air, Jai trouvé, dès le 1€T avril, les fondatrices arrivées à leur développement complet. Comme les sistentes, les fonda- trices ne subissent que trois mues pour arriver au terme de: leur développement (pl. VI, fig. 22 et 23, et texte, fig. 14et 15). Elles sont alors de teinte noire, garnies de tuberecules saillants disposés en rangées transversales correspondant aux segments et surmontés chacun d'une petite tache blanche formée de sécrétion cireuse. En arrière de l’Insecte se trouve une très petite quantité de sécrétion cireuse, les trois mues abandonnées etun paquet d'œufs jaune brun serrés les uns contre les autres, et qui, à la fin de la ponte, devient très volumineux. Le nombre des œufs ainsi pondus par les fondatrices est très considérable et dépasse certainement 500; le 23 avril 1911, en arrière de l'une d’elles, avant que léclosion fût commencée, j'ai pu dénombrer 520 œufs, quantité très probablement inférieure à la ponte Lotale; car la ponte de l’Insecte ne paraissait pas encore terminée. Il est très remarquable que, pendant les quatre stades de son évolution, la fondatrice se montre morphologiquement semblable aux exilés du type sistens qui passent lhiver sur les Ahes. Je n'ai pu trouver entre eux aucune différence de structure appréciable. Peut-être la fécondité de la fon datrice est-elle un peu supérieure à celle du sistens; mais Je n'ai pas d'observations assez précises sur ce point pour pouvoir l'affirmer. LES GALLICOLES ET LA GALLE DANS LAQUELLE ILS ÉVOLUENT SUR LE Paicea orientalis. — MIGRATION SUR LES Ates. Les larves issues des œufs pondus par la fondatrice éclosent dans les premiers Jours de mai et elles se logent entre les aiguilles du bourgeon du Picea orientalis; ces aiguilles com- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 189 mencent à peine à cette époque à s’écarter les unes des autres, et, en même temps que se fait l’envahissement par les Chermes, le bourgeon se transforme en galle. Ainsi que Bürner l’a indiqué pour les Chermes qui se fixent directement sur les bourgeons, la fondatrice joue un rôle considérable dans la formation de la galle ; il est très exagéré toutefois de lui accorder à ce point de vue un rôle exclusif : les gallicoles ont une influence impor- tante et même prépondérante pour certaines espèces, telles que le Chermes pinr. Les galles produites par le Chermes Nüsslini (pl. IE, fig. 6 4, 66,6c,et pl. VE fig. 24 a, 24 0, 2% c) ressemblent à celles du Ch. pectinatae (coccineus) décrites par Cholodkovsky. Chaque écusson, correspondant à un coussinet d’aiguille hypertrophié par suite de la piqûre des Insectes, se termine par une pointe très aiguë représentant l’aiguille elle-même avortée, mais restée bien plus longue que pour la galle de €. coccineus. Cette dispo- sition lui donne l’aspect d'un minuscule artichaut, el ce carac- tère persiste lorsque la galle vieillit et que les pointes se des- sèchent en constituant de petites épines. Lorsqu'elles sont encore jeunes el petites, les galles présentent en général une belle teinte carminée comparable à celle d’une fraise; à partur du milieu de mai, beaucoup d'entre elles perdent en parte leur coloration rouge et prennent une teinte vert clair, les pointes des écailles, surtout vers l'extrémité de la galle, restant pourtant teintées de rose. La zone lisière bordant les lignes de jonction des écailles conserve aussi le plus souvent une coloration pourprée. Ces galles ne sont pas recouvertes d'une efflorescence cireuse : elles sont à peu près glabres; cependant la partie basi- laire et renflée des écussons présente un aspect lustré, pruineux, dû à des poils extrèment courts et qui ne sont perceptbles qu’à la loupe. J'ai observé ces galles en très grand nombre en 1906, 1907, 1908: fort rares en 1909, elles redevinrent plus communes EnAlOAIOet 1911 Elles étaient surtout nombreuses sur les petits Picea orien- talis exposés en plein soleil et groupés en pépinière à côté les uns des autres; certains en étaient chargés comme de véri- tables fruits ; le 22 juin 1906 j'en ai cueilli 120 sur un petit 190 PAUL MARCHAL arbre qui n'avait pas plus de 70 centimètres de haut. Sur les grands Paicea orientalis elles sont en général beaucoup plus clairsemées. J'ai obtenu dans une de mes expériences (Exp. n° 1) la for- mation de trois galles de Chermes Nüsslini complètement déve- loppées, en contaminant en 1907 la cime d’un petit Picea orien- lalis avec des sexupares de Chermes Nüsslini. Le résultat fut le le suivant : Les premières fondatrices résultant des œufs pondus par les femelles fécondées apparurent à partir du 15 juillet. Au com- mencement d'août on pouvait en voir un petit nombre dis- séminées sur les bourgeons : elles passèrent ainsi l'hiver; quel- ques-unes succombeèrent soit pendant l'hiver, soit au début du printemps; à la fin de mars trois fondatrices avaient déjà atteint toute leur taille et présentaient un amas d'œufs derrière elles; quelques autres, moins avancées, n'avaient pas encore pondu. A la fin de mai, il y avait trois galles bien conformées et une rudimentaire. Une autre fois J'ai expérimentalement obtenu seize galles du €. Nésslini sur Picea orientalis (Exp. 1 bis). La taille des galles du Chermes Nüsslini est fort variable, ainsi que le nombre des gallicoles qu'elles renferment. Elles commencent à s'ouvrir pour laisser sortir les ailés un peu avant le milieu de juin : en 1907 presque toutes les galles avalent fourni leurs éclosions le 22 Juin ; on pouvait pourtant en trouver encore quelques-unes non ouvertes dans les premiers jours de juillet. Pendant que les galles grossissent et évoluent, les gallicoles fixés à la base des aiguilles modifiées subissent {rois mues succes- sives pour se transformer en nymphes. La maturité de la galle ne larde pas alors à se produire, et bientôt les aiguilles s’écartent les unes des autres en même temps que les loges basilaires qui abritent les nymphes s'ouvrent vers l'extérieur. Les nymphes quittent alors leurs berceaux et se posent sur les aiguilles du rameau qui porte la galle, rangées en grand nombre les unes derrière les autres. Là, les gallicoles subissent une quatrième mue, et abandonnent leur euticule nymphale sous forme d’une dépouille blanche adhérant à l'aiguille qui supportait la nymphe. Au moment des éclosions les aiguilles voisines des galles se CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 191 trouvent ainsi garnies sur toute leur longueur d'une série des dépouilles blanches abandonnées par les gallicoles et corres- pondant aux mues nymphales (pl. HT, fig. 9). Les [Insectes parfaits qui se dégagent de ces dernières n'ont pas encore les ailes déployées, celles-ci étant seulement représentées par des moignons recroquevillés, très remarquables par leur coloration d'un jaune vif; cette couleur, qui tranche avec la teinte d’un brun rouge du reste du corps, est très fugitive el se dissipe rapidement, à mesure que les ailes se déploient, pour faire place à la teinte légèrement enfumée que les ailes conservent d’une facon définitive. Les gallicoles (migrantes alatae) (pl. IF, fig. 8), après avoir stationné quelques heures sur les aiguilles du rameau où se trouve la galle d'où ils sont sortis, prennent leur vol el vont normalement émigrer sur les Abies nordmanniana el les Abies pectinala. Celle assertion résulte : 19 d'observations faites en plein air; 20 des expériences 3, 5 et 5 4. Dans les conditions expérimentales les ailés gallicoles (migrantes alatae) se fixent sur les Abies pectinala où nordman- niana que l'on met à leur disposition, avec une facilité beau- coup plus grande que les ailés sexupares ne se fixent sur les Épicéas. Si l'on place par exemple, vers le milieu de juin, dans une cage,un Abies nordmanniana où un Abies pectinata avec un certain nombre de galles prêtes à éclore, on constate au bout de quelques jours que le feuillage de l'arbre est chargé d’ailés gallicoles définitivement fixés (pl. IE, fig. 7); et, si le nombre des galles mises en expérience a été assez considérable, les pousses pectinées de larbre, garnies en dessous de ces ailés qui ne tardent pas à développer leurs sécrétions en crosses el à effectuer leur ponte, présentent un aspeet fort original et tout à fait remarquable. La fécondité de ces ailés gallicoles est beau- coup plus grande que celle des ailés sexupares. Le nombre des gaines ovigères est le plus souvent de 13 en tout pour les deux ovaires, el chacune d’entre elles présente en arrière de la chambre lerminale deux ou trois œufs distincts, celui qui est le plus voisin de loviduete étant déjà développé au moment où l'ailé gallicole vient d’éclore. Ils pondent en dessous de leurs ailes une quarantaine d'œufs. 192 PAUL MARCHAL Ainsi que nous venons de le voir, les ailés gallicoles émigrent normalement après leur éclosion de l'Épicéa sur l'Abies nord- manniana où sur l'A bies peclinata. Il peut arriver exceptionnellement pourtant que les ailés galli- coles du Ch. Nüsslin restent sur les aiguilles du Picea orientalis, y implantent leurs rostres ety pondent ; mais ils n°y donnent en tout cas jamais de descendance viable. C’est ce qui résulte d’abord de l'observation suivante : le 14 juin 1907, quelques jours à peine après le commencement de l’éelosion des ailés gallicoles, je trouvai dans une pépinière de Châtenay, sur une pousse de Picea orientalis, un grand ailé de CA. Nüsslini qui, vu sa taille, et vu l’époque, ne pouvait être qu'un ailé gallicole. La pousse fut récoltée et conservée, en faisant baigner dans l'eau la partie inférieure dela tige. Le 25, je comptaiau-dessous de l’ailé gallicole 25 à 30 œufs qui donnèrent des larves n'ayant aucune tendance à gagner l'extrémité des pousses; après avoir erré quelque temps, ceslarves se fixèrent d’une façon quelconque sur les aiguilles et prirent l'aspect caractéristique des neosis- tentes, c’est-à-dire de petits boucliers noirs ornés d’une crête blanche longitudinale et d’une bordure blanche; puis elles ne tardèrent pas à se dessécher et à mourir. D'autre part, le 28 juin, dans la même pépinière, sur un petit Picea orientalis chargé de galles de Chermes Nüsslini presque toutes écloses, je trouvai 7 ailés gallicoles sédentaires et défi- nitivement fixés : plusieurs se trouvaient groupés sur la même aiguille, ou assez voisins les uns des autres, ce qui semble indiquer que certaines galles ont une plus grande tendance que d'autres à donner de ces ailés sédentaires. En tout cas, leur nombre est extrêmement faible par rapport à l'énorme quantité des ailés gallicoles émigrants et, sur un grand nombre de galles. ilne doit s’en présenter qu'une très faible proportion quidonnent quelques individus passant à l’état d’ailés gallicoles sédentaires. Les expériences 3, 4, 6, 7 a, 9 confirment les observations précédentes faites en plein air. Dans l'expérience n° 4, 40 galles fournissent le 17 et le 18 juin un essaimage d’ailés qui n'ont à leur disposition, pour se fixer, qu’un Picea orientalis : dans ces conditions, 3 ailés gallicoles sédentaires se montrent sur l'Épicéa : ils développent d'ailleurs les sécrétions en crosses nor- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 193 males et effectuent leur ponte ; mais toutes les larves auxquelles ils donnent naissance périssent. Si nous estimons à 60 le nombre moyen des ailés sortis d’une galle, chiffre qui paraît inférieur à la réalité, nous aurons une proportion de 3 sur 2 400, soit de 1 pour 800 individus susceptibles de se fixer sur l'Épicéa et d'y pondre, sans toutefois que les jeunes issus des œufs puissent se développer. Dans l'expérience n° 3, où un rameau de Picea orientalis et un rameau d'A bies pectinata sont mis à la fois à la disposition des ailés gallicoles, aucun ne se fixe sur l'Épicéa et un grand nombre se fixent sur l'Abies. En 1911, dans l'expérience T 4, j'obtins un ailé sédentaire avec ponte. L'examen microscopique des larves issues des ailés gallicoles sédentaires montre qu'elles ont de très longues soies rostrales (1200 y environ) et tous les caractères de structure des neosis- tentes. En résumé, il résulte des observations faites soit dans la nature, soit dans les conditions expérimentales, que les ailés gallicoles émigrent normalement sur les Abies nordmanniana el pectinala, mais que parfois un petit nombre d’entre eux peuvent passer à l'état d’ailés sédentaires et pondre sur le Picea orientalis dont ils sont originaires, mais leur descendance ne se développe pas (Exp. 7). Malgré leur rareté et malgré l’avorte- ment de leur progéniture, ces ailés sédentaires (alatae non migrantes) présentent un grand intérêt, et l’on peut voir dans leur apparition un phénomène rudimentaire représentatif d’un cycle monœæcique semblable à celui décrit par Bôrner pour le Chermes abietis. Un tel cycle, chezle Chermes Nüsslini, paraissait avoir d'autant plus de chance de se réaliser qu'il ne semble pas y avoir de différences morphologiques entre les larves issues des ailés gallicoles et les larves de fondatrices. GÉNÉRATION ISSUE DES AILÉS GALLICOLES ÉMIGRANTS. FERMETURE Du CycLe (Exr. 3 et 4 a). Les œufs pondus sur les aiguilles des À Lies par les ailés gal- licoles (migrantes alatae) éclosent en général à la fin de juin ; l'éclosion se termine en tout cas dans la première quinzaine de 194 PAUL MARCHAL juillet. Les larves qui sortent de ces œufs répondent toutes au type neosistens, avec de longues soies rostrales présentant au repos les deux boucles caractéristiques et mesurant environ 1200 w. Mises en présence de l'Épicéa, elles périssent toutes (Exp. 3, 6, 7, 7 a, 8,9) et n’évoluent que sur les Abies (Ades nordmanniana et A. peclinala). à Sur les Abies peclinata, elles se fixent surtout sur les jeunes axes de l’année ; sur les Abies nordmanniana, qui conviennent le mieux à l'évolution de cette espèce, elles se fixent partout, aussi bien sur les pousses vertes que sur les branches plus âgées ou sur le tronc; cette fixation se produit dans le courant de juilletet, sauf quelques exceptions (1), les larves restent ainsi au premier stade (reosistens), sous la forme de petits boucliers noirs entourés d'une auréole blanche pendant la fin de la saison et tout l'hiver jusqu'à la fin de mars (fig. 8) ; elles poursuivent alors leur développement, suivant le mode caractéristique des sistentes, &'est-à-dire en n'effectuant que trois mues; puis elles pondent, en avril et mai, des œufs d’où sortent les deux types de larves primaires, les neoprogredientes et les neosistentes. MorPHOLOGIE EXTERNE DE DreyrusiA (Chermes) NüssLinr. FOoNDATRICE (Fundatrir). 1eT stade. — 1 est très remarquable que chez Dreyfusia Nüsslini le 1er stade larvaire de la fondatrice est semblable à celui des sis{entes vivant sur les Abies (fig. 8, 12 et 13). Les glandes marginales et les glandes spinales offrent notam- ment une disposition semblable dans les deux cas. Les glandes spinales du segment céphalique (A), du méso- thorax (C), du métathorax (D) et des quatre ou cinq premiers segments abdominaux sont divisées en trois secteurs séparés par des crêtes; ie médian (Grübchen de Bôrner) est plus nettement (1) Parmi les larves issues des migrantes alatae, il peut y en avoir quelques- unes qui, au lieu de passer l'hiver à l’état de neosistentes, muent et commen- cent à s'entourer de sécrétion cotonneuse ; mais elles n'arrivent pas à l’état parfait avant l'hiver et la ponte ne se fait qu'au printemps suivant. Je me suis assuré que ces individus à évolution prématurée répondaient au type sistens. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 195 circonscrit que les autres et très apparent; il présente aussi des DA D] #} Pete IS 27 | 440 S, S Ÿ ?\, VE =. L Ne av & Fig. 12. — Chermes Nüsslini : fundatrix, 17 stade, à la base d’un bourgeon sur Picea orientalis, Châtenay (Seine), 28 septembre 1206. Glandes spinales le long de la ligne médiane ; glandes marginales visibles seulement à gauche. Gr. — 255. rie 15. — Chermes Nüsslini : derniers segments de l'abdomen de la fundalrix au 1 stade (d'après une mue ‘abandonnée par une fundatrix sur Picea orientalis, S mai 1906). aréoles glandulaires à contour plus accentué que les'autres. Les glandes marginales et spinales s'étendent jusqu'au septième 196 PAUL MARCHAL segment abdominal. Les deux plaques spinales du 7e segment abdominal étant confondues, les glandes spinales se fusionnent également à leur partie postérieure. Les glandes spinales du prothorax se présentent sous formes d'une étroite bordure. 2e stade. — La dépouille | correspondant au 2e stade de la fondatrice est repré- sentée fig. 14; 1l n'existe aucune différence sensible entre le 2° stade de la fondatrice et le 2e stade du sislens. Fig. 14. — Chermes Nüsslini : dé- Fig. 15.— Chermes Nüsslini : dépouille corres- pouille correspondant au 2 stade pondant au 3 stade de la fundatrix. de la fundatrix (abandonnée par Gr. — 90. la fundatrix au 3° stade). Gr. — 90. 3e stade. — La dépouille correspondant au 3 stade de la fon- datrice est représentée fig. 15. Il n'existe aucune différence sen- sible entre le 3% stade de la fondatrice et le 3€ stade du sistens. 4stade. — La fondatrice adulte est très comparable et presque identique au sistens ; d'une façon générale sa conformation répond à la figure donnée par Bürner pour son hiemalis (Monog. 1908, fig. 27, p. 140) ; les glandes marginales postérieures et en particulier le groupe impair terminal comportent seulement CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 197 un nombre d'éléments notablement plus élevé que celui qui a été représenté par cet auteur ; mais le nombre des éléments glandulaires est très variable pour les glandes marginales des sistentes, et chez certains d'entre eux on trouve un nombre de ces éléments approchant beaucoup de celui de la fondatrice et arrivant peut-être à l'égaler. En moyenne, toutefois, les glandes marginales postérieures paraissent avoir des éléments plus petits et plus nombreux chez la fondatrice que chez le sistens. GaLLicoLE (Gallicola où Migrans alata). Ainsi que l’on peut s'en rendre compte par l'examen des figures, le gallicole (fig. 16 el 164) présente avec le sexupare (fig. 29) une analogie de con- formation très grande. La taille est seulement Fig. 16 a. — Chermes Nüsslini : Fig. 16, — Chermes Nüsslini ; migrans alata, vu antenne de migrans alalta. Ex : S ; : " . — F98 par la face dorsa Gr, = 90. Gr. = 525. 198 PAUL MARCHAL plus grande et les massifs glandulaires sont composés d’é- léments plus nombreux. PARTHÉNOGYNE SISTANTE (Sistens, où Ersul sistens). 1 stade (Neosistens). — Caractérisé par les aires elandulaires très apparentes qui se trouvent sur les plaques spinales et les plaques marginales, il a été bien étudié par Bürner (Zoo!. Anz. XXXIIT, n° 22-23, 22 dé- cembre 1908, p. 739, fig. 1a). Fig. 17. — Chermes Nüsslini : antenne Fig.18.— Chermes Nüsslini: extrémité du 4er stade d’un sistens sur Abies pec- postérieure de l'abdomen d’une parthé- fhinata (expér. 5, exemplaire recueilli le nogyne sistante (sis{ens) à l'état adulte. 31 juillet 1908, sur l’axe d’une pousse). Très grossi. Gr.— 540. Il est du reste semblable au 1er stade de la fondatrice que j'ai complètement représenté (fig. 12). L'antenne est représentée fig. 17. La boucle des soies rostrales examinée aussitôt après l’éclo- sion, avant que l’Insecte se soit fixé, est très longue et dou blement repliée à l'intérieur du corps ; sa partie voisine de l'extrémité postérieure du corps est rejetée du côté gauche. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 199 2 stade. — Incomplètement décrit par Bôrner sous le nom de Chermes piceae (Monogr. p. 139). Voir ci-dessus la figure 14 représentant le 2e stade de la fon- datrice identique au 2e stade du sis{ens. 3e stade. — 1 diffère du stade précédent par sa taille et le nombre plus grand des éléments glandulaires. Voir la figure 15 représentant le 3€ stade de la fondatrice, identique au 3e stade du sistens. 4e stade (forme adulte}.— Déerit et complètement représenté par Bürner sous le nom de CA. piceae (p. 140, fig. 27). L’antenne raccourcie, mais à 3€ article cependant plus long que chez le Pineus pini, à été également représentée par le même auteur (p. 142, fig. 30 c); Les rhinaria restent relativement assez éloi- gnés de lextrémité. PARTHÉNOGYNE ÉVOLUANTE (Progrediens où Exrsul progrediens). 1 stade [Neoprogrediens). —Wdiffère très nettementdu terstade du eosistens en ce qu'il ne présente pas d’aires glandulaires apparentes sur les plaques spinales et les plaques marginales. Les plaques sont elles-mêmes faiblement chitinisées, petites et écartées les unes des autres. Ces caractères sont très facilement percepübles sur les mues abandonnées par les progredientes qui sont fixés sur les aiguilles. La boucle des soies rostrales est courte et non rephiée sur elle-même : examinée surles individus venant d'éclore, elle n'atteint pas l'extrémité postérieure du Corps. 2e stade. — Je lai complètement représenté [sans traitement par la potasse comme pour les précédents, mais après fixation par le sublimé alcoolique et montage dans le baume du Canada) (fig. 10). Antenne peu ou pas raccourcie par rapport au 1e stade ; soie terminale beaucoup pluscourte qu'au {erstade : troisième article notablement plus allongé que sur la figure de Bôrner 31 4 (1). (1) Observations faites aussi bien sur les Insectes eux-mêmes que sur les mues abandonnées par des individus parvenus au quatrième et au cinquième stade. Il ne peut donc être question de différences entre des individus des- tinés à donner soit des ailés, soit des aptères. — La différence existant entre 200 PAUL MARCHAL Glandes marginales à facettes distinctes, au moins pour les Fig. 49. — Chermes Nüsslini: parthénogyne Fig. 20. — Chermes Nüsslini : antenne évoluante adulte (progrediens)recueillie en de la parthénogyne évoluante adulte juin sur feuilles d’A bies peclinata. Gr. = 65. (progrediens). Gr. = 460, derniers segments abdominaux, mais le plus souvent aussi sur la plus grande étendue du corps. Fig. 21. — Chermes Nüsslini : massifs glandulaires des 3° et 4° segments abdominaux {côté droit) d'une parthénogyne évoluante adulte (progrediens). Gr. = 270. 3 stade. — Antenne très analogue à celle qui a été figurée par Bürner pour le 2 stade. Glandes marginales et céphalo- les indications de Bürner et les miennes tient sans doute à ce que Bürner a comparé un individu du deuxième stade jeune à un individu avancé du pre- mier stade. — De mon côté, au contraire, c’est l’âge extrême du deuxième stade que j'ai observé. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 201 breuses. En général pas de glandes spinales ou pleurales à facettes distinctes ; parfois pourtant, sur l'abdomen, quelques- unes d’entre elles peuvent être représentées par une facette isolée et assez large, à contour souvent incomplet. 4e stade (fig. 11). — Antenne plus longue qu'au stade précédent (notamment le 32 article) ; elle est généralement plus ou moins écailleuse, relevée de façon à présenter un bord supérieur légèrement concave ; sur les mues elle se montre plus grèle, plus cylindrique qu'au 3° stade. Les glandes marginales sont grandes et richement fournies : mais le caractère principal différenciant nettement du 3e stade est la présence de glandes pleurales et spinales à facettes distinctes sur l'abdomen et le thorax (fig. 11); chacune de ces glandes ne présente d'ailleurs qu'un très petit nombre de facettes glandulaires (1 à 3), qui sont généralement de grande taille. 5° stade (fig. 19, 20, 21). — Antenne très écailleuse, à der- nier article cylindrique, légèrement cintré avec concavité supé- rieure, allongé. Facettes glandulaires beaucoup plus nombreuses qu'au stade précédent : les spinales et les pleurales du céphalo- thorax sont pourtant à peine indiquées où en nombre très réduit. SEXUPARE (Serupara). 187 stade. — Mèmes caractères que ceux de la parthénogyne estivale. 2° stade. — Presque semblable au 2e stade de la parthénogyne estivale. Les glandes marginales m'ont paru seulement moins développées : elles sont faiblement indiquées par quelques rares contours de facettes indistinctes. D’après cette donnée, la différenciation du sexupare et de la parthénogyne estivale aptère parait donc se traduire morphologiquement à l'extérieur à par- ür du 2stade. 3° stade. — Antenne allongée, conforme au dessin de Bôrner (fig. 31 /). Facettes glandulaires nulles, sauf les marginales des cinquième, sixième et septième segments abdominaux, qui sont généralement elles-mêmes assez indistinctes ; on aperçoit aussi ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 9e série. 1913, xvuI, 14 202 PAUL MARCHAL parfois très indistinctement quelques facettes sur le qua- trième et même sur le troi- sième segment abdominal. 4° stade (Nymphe). — Décrit et représenté"par Bôrner (Monogr.. p.144 fig. 29), sous le nom de CA. piceae. 3° stade. — Décrit par Bôrner (Monogr., p. 144). Je l'ai représenté (fig. 22 et pois) SEXUÉS (Seruales). FEMELLF, 4€7 stade. —=%a grande brièveté des soies rostrales différencie facile- ment cette forme. L’'an- tenne est représentée fi- gure 284: Fig. 22. — Chermes Nüsslini : sexupare G ; F +. oC2 1e U / 1 vu du côté dorsal. Gr. — 90. 2 stade. Antenne Fig. 23. — Chermes Nüsslini : antenne de sexué. — à, au {® stade ; D, au 2° stade (d’après une mue abandonnée par le 3 stade}; €, au 3° stade (Q) (d'après une mue abandonnée par le 4 stade); 4° stade (Q); à l'intérieur de ce dernier, on voit l'an- tenne du stade adulte © ; a, préparation au baume de Canada: 4, e, d, traitement à la potasse et eau glycérinée. Gr. — 408. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 203 (fig. 23 D), plus épaisse que celle ‘du stade précédent, à 39 ar- ticle conique terminé par une soie beau- coup plus courte que celle du 1€ stade. 3e stade. Assez semblable au précé- dent, mais de taille plus grande; l'antenne “est représentée fig. 23 c, les facettes glandu- laires sont encore peu nombreuses (fig. 24). 4 stade. — L'antenne est représentée fig. 23 d, son dernier article est plus allongé que dans les stades précédents, et souvent légèrement arqué à son extrémité. A Ja fin de ce stade, on peu voir facilement la forme adulte à son intérieur. o€ stade (femelle adulte) [fig. 25]. — De forme assez régulièrement ovalaire, elle pré- sente de chaque côté du corps une rangée Fig. 24. — Chermes Nüsslinti Q : 3 stade (d'après une mue abandonnée par la femelle au 4 stade); bord des segments abdominaux. Gr. — 27 de glandes mar- sS SL Fig. 25. — Chermes Nüsslini : femelle adulte, vue du côté dorsal, après traitement. par la potasse (culture pure, exp. 1, exemplaire recueilli le 9 juillet 1907). Gr. — 240. 204 PAUL MARCHAL ginales, une de glandes pleurales et une de glandes spinales. Les glandes marginales sont les plus développées et existent sur tous les seg- ments, le segment anal se terminant par une glande marginale im- paire assez bien fournie. Les glandes pleurales sont très pelites et ne Fig.26. — Chermes Nüsslini: mâle adulte, après fixation au sublimé acéto-alcoolique et montage au baume du Canada (culture pure, expér. 1, exemplaire recueilli le 9 juillet 1907). Gr. — 240. comportent chacune qu'un à deux éléments: elles s'étendent du prothorax au septième segment abdo- minal. Les glandes spinales sont mieux fournies que les pleu- rales et, sauf celles des seg- ments thoraciques et des premiers segments abdo- minaux, comportent en moyenne de trois à cinq élé- ments. Les glandes pleu- Fig. 27. — Chermes Nüsslini : antennes des rales et spinales des sixième sexués très grossies ; 4, antenne de la femelle À Je (côté droit, face dorsale); b, antenne du mâle etseplième segments abdo- (côté droit, face ventrale). Gr. = 560. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 209 minaux sont très réduites ; elles font complètement défaut sur les huitième et neuvième segments. L'antenne (fig. 27 à) pré- sente un dernier article allongé cylindrique, seulement un peu plus court que le troisième ; le rhinarium étant assez éloigné de l'extrémité (environ à l'union des deux cinquièmes antérieurs et des trois cinquièmes postérieurs de la longueur de l’article). MALe (fig. 26). — Un peu plus petit que la femelle, 1l est de forme plus allongée, plus rétrécie en arrière. Pas de glandes tégumentaires distinctes. Les antennes el les pattes sont longues. L'élongation de l'antenne (fig. 27 D} porte surtout sur la partie basilaire du troisième article qui est rétrécie ; troisième article ayant une longueur à peu près triple du second ; quatrième et dernier article plus allongé que chez la femelle, rétréci à la base, avec une extrémité assez acuminée et s’éten- dant bien au delà du rhinarium. DREYFUSIA PICEAE (Ratz.) Bürner. SYNONYMIE. Chermes piceue, Ratzeburg, 1843. _—— Nüsslin (ad part.), 1903, 1905. _ var. Bouvieri Cholodovsky, 1903. — Cholodkovsky, Die Coniferen Laüse, p. 96, 1907. — Marchal, (C. R. Soc. Biol., LXIIL, p. 368), 1907. = Nüsslin (ad part.), (Verh. deutsch. Zool. Ges., XVIII, Stutt- gart), 1908. Dreyfusia piceae (Hungerform auf Abies nobilis), Bürner (Arbeiten aus d. K. biol. Anstalt für Land und Fortwirstchrift, Berlin), 1908. -— Bürner, (Zool. Anz., XXXIIL), 1908. Cetteespèce, anciennementéonnue,asouventattürél'attention des naturalistes et des praticiens : elle se trouve mentionnée dans la plupart des livres d'entomologie forestière. Entourés de leur sécrétion cireuse, ces Chermes parsèment souvent de taches ou de trainées laineuses le tronc et les grosses branches du Sapin blane ou Sapin des Vosges (Abies pectinala, pl. I, fig. 1). Confondue par Nüsslin et par Bôrner avec le Chermes Nüsslini (funitectus de Cholodkovsky), elle en à été distinguée ensuite par Cholodkovsky et par moi-même; puis Bürner, adoptant la même manière de voir a précisé ses caractères morpholo- giques différentiels. Jusqu'à mes observations, le Chermes piceae 206 PAUL MARCHAL (st. sens.) n'avait été étudié qu'en Allemagne, et ce sont des échantillons provenant de ce pays que Cholodkovsky à eus à sa disposition. Je l'ai observé aux environs de Paris ; mais il s'y trouve sou- vent en mélange sur les arbres avec le CA. Nüsslini. Pour avoir l'espèce à l’état de pureté, ce qui était mdispensable pour étudier son cycle évolutif, il fallait le recueillir dans une localité où l'Abies peclinala était en quelque sorte indigène, poussant librement dans la campagne et dans des endroits où ne se rencontrent pas les arbres sur lesquels s'effectue le cyele normal du Ch. Niss- lini, c'est-à-dire l'Ahies nordmanniana et le Picea orientalis. J'ai donc recueilli mes matériaux d'étude sur les écorces d'Abies pectinata se trouvant en pleine campagne, à Clères (Seine-Inférieure), dansla Normandie. J'ai faitdans cette localité quelques observations sur place, à différentesépoques de l’année ; mais j'ai surtout poursuivi cette étude en me servant d'écorces fraiches chargées de Chermes piceue et recueillies en Normandie pour contaminer des Abies en pots, reconnus préalablement indemneset maintenus à l'écartdetoutesource de contamination. CYCLE ÉVOLUTIF ET BIOLOGIE DE DREYFUSIA (CHERMES) PICEAE. Ces Chermes passent l'hiver à l’état de neosistentes, c'est-à- dire à l’état de larves primaires correspondant au type hiemalis de Bürner. Leur aspect est très analogue à celui des CA. Nüss- lini au même stade; mais elles sont en général un peu plus petites, les plaques glandulaires de structure différente permel- tant seules d’ailleurs de reconnaitre avec certitude les deux espèces (fig. 28). Sur les grands arbres on trouve ces larves hivernantes entre les fissures des écorces du tronc ou des grosses branches. Sur les jeunes arbres que l’on met en expé- rience, l'écorce du tronc et des branches est trop lisse pour offrir des abris aux larves; aussi un grand nombre vont-elles se loger à la base des pousses de l’année ou le long de leur parcours ; beaucoup aussi vont se fixer sur les bourgeons dormants et l'attaque peut être alors si vive que ces bourgeons sont arrêtés au printemps dans leur évolution et se gonflent sous l'influence des piqûres des Chermes, de façon à produire des CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 207 déformations rappelant, avee de moindres proportions, celles que le même Insecte développe sur PAes nobilis. Bien que l'hivernation à l'état de larves primaires soit la règle, 1l peut arriver qu'un nombre plus où moins considérable aient mué avant le printemps et soient pendant l'hiver au deuxième stade. C'est ainsi que pendant la saison hivernale 1911-1912, qui a été particulièrement douce, un très grand nombre se trouvaient au deuxième stade dans la première quinzaine de février et il est probable qu'ils devaient se trouver à cet étai depuis longtemps déja. Auprintemps, lé- volution des Insec- tes qui ont hiverné se produit à une époque variable ,sui- vant les conditions s Re : .: Fig. 28. — Piaques glandulaires spinales du neosistens climaté riques etsui- (d’après Bôrner). — a, b,c,d, chez Chermes piceae ; vant l'état de végé- 4’, b’,c’, d’, chez Chermes Nüsslini : a et a”, 1" pla- ‘ : que spinale de l'abdomen du côté droit; b et4”, 2e pla- tation des arbres que spinale de l'abdomen du côté droit ; e etc”, 2 pla- ‘considérés. Si par que spinale thoracique du côté droit; d'et d’, 3 plaque ; ; ra spinale thoracique (d, du côté droit chez Chermes pi- suite d’une trans- ceae; d’, du côté gauche chez Chermes Nüsslini). plantation ou d’une circonstance d’une autre nature, un arbre se trouve en retard, les Chermes qui vivent sur lui le seront également. C’est ainsi que, sur mes arbres en expérience, c'élaient tantôt les Clermes Nüsslini, tantôt les Chermes piceae qui se trouvaient prendre les devants, suivant l’état plus ou moins avancé de la végéta- tion des arbres qui les hébergeaient. Pour arriver à maturité, le sistens du Ch. piceae subit en tout trois mues. La ponte commence en moyenne dès la première quinzaine d'avril; la sécrétion qui enveloppe lIn- secte est alors peu abondante, réduite à une pruinosité blanche, et les œufs restent à découvert, formant un paquet de 208 PAUL MARCHAL plus en plus volumineux à mesure que la ponte s'effectue (pl. IT, fig. 10). Lorsque les arbres sont conservés dans une serre ou dans une chambre, la masse cotonneuse est en général plus abon- dante el est surtout bien apparente au début de la ponte. Avant que l'éclosion des larves commence, l’amas d'œufs entassé derrière B la femelle s'élève : déjà à un nombre très considérable etqui peut attein- dre 140; ensuite, malgré les éclo- SIONS qui se pro- duisent, le nom- bre des œufs s'accroît encore, el j'ai compté, au mois d'avril, en arrière d'un CAer- mes piceae, 250 œufs non encore éclos, plus un certain nombre (environ une vingtaine) de co- Fig. 29, — Disposition des soies rostrales chez le progrediens A LAS ATERS de Chermes piceae, aussitôt après son éclosion : A, après ques vides : la traitement par la potasse; longueur des soies rostrales ponte d'ailleurs — 600 y environ; B, après fixation par le bichlorure de ,, . ! mercure alcoolique et montage au baume du Canada: était encore loin CG, vue de profil, après traitement par la potasse : c, cer- d’être terminée veau ; d, boucle dorsale des soies rostrales. : ne pour cetindividu, el, en isolant, un exemplaire sur un rameau trempant dans l'eau, puis en retirant au fur et à mesure et par paquets suc- cessifs, les œufs au cours de la ponte, j'ai compté, du 21 avril au 15 mai 1911, 420 œufs pour la ponte d'un seul Chermes. Cet Insecte, mis en expérience sur un rameau coupé, se trou- vant moins Copieusement nourri que dans les conditions nor- males, on peut considérer que le chiffre précédent est un mini- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 209 mum et que la ponte des hiemosistentes du CA. piceae comporte un nombre d'œufs notablement supérieur à #00. La ponte s'é- chelonne pendant une longue période, et l'éclosion des larves, également très échelonnée, se continue pendant toute la durée des mois de mai el de juin. Ces larves issues des individus avant hiverné répondent aux deux types sistens el progrediens. Les véritables progredientes de Ch. piceae avaient échappé à l'attention des observateurs; car ceux que Bôürner considère comme tels, en les dési- gnantsous le nom d'estivales , ne sont évidemment que des exliro- sistentes. Les pro- gredientes sont caractérisés, pen- dant la première phase larvaire, parleurfaible chi- Unisalion, leurs re . Fig. 30. — Disposition des soies rostrales d’un neosistens de sclérites relati- Chermes piceæ aussitôt après l’éclosion : A, neosistens vement réduits montrant par transparence la disposition des soies ros- A 4 ae trales; B, schéma de la disposition des soies rostrales; l'absence de pla- ss’, extrémités adhérentes des soies rostrales; {, extré- landulaires mités libres des mêmes soies ; d, boucle dorsale ; quesglandulaires à cerveau. apparentes etsur- tout par la brièveté de leurs soies rostrales dont la longueur ne dépasse guère 600 » (fig. 29). Ces progredientes sont en petit nombre et peuvent même faire défaut ; ils éclosent des premiers œufs pondus par la mère ayant hiverné. On pourra les observer en isolant, pendant la première quinzaine d'avril, des femelles ayant commencé à pondre. En isolant ainsi une femelle avec sa ponte, au début d'avril de 1912, j'ai constaté que les premières éclosions du 9 au 10 avril étaient toutes formées de progredientes ; il v eut ensuite pendant quelque temps un mélange de progredientes et de sistentes; puis les 210 PAUL MARCHAL progredientes cessèrent complètement de se montrer dans les éclosions à partir du 25 avril, et il n°v eut plus ensuite que des neosistentes à longues soies rostrales (1300 à 1500 »). Pendant la fin d'avril etle commencement de mai, les neosistentes pré- sentent pourtant souvent des caractères peu marqués : 1ls sont relativement peu chitinisés, avec des sclérites abdominaux ar- rondis, largement espacés les uns des autres, des plaques glan- dulaires faiblement indiquées ; chez certains exemplaires, les soies rostrales sont aussi de moindre longueur (fig. 31). Ensuite, Fig. 31. — Passages entre la forme neoprogrediens et la forme neosistens dans la descendance des hivernants. Dans l’exemplaire A, la longueur des soics rostrales est de 820 y. Dans l’exemplaire B, la longueur des soies rostrales alteint presque celle des neosistentes typiques et mesure environ 4350 pu. — c, cerveau ; d, boucle dorsale. les sistentes {piques (fig. 28 et 30), à système glandulaire très apparent et à très longues soies rostrales, à téguments forte- ment chilinisés, deviennent de plus en plus nombreux, et, dans le courant de juin, on ne trouve plus que ces »eosislentes typiques. Ce sont eux d’ailleurs qui constituent l'immense majorité de la descendance des hivernants. Les neoprogredientes du Ch. piceue se lixent sur les aiguilles ou parfois sur les jeunes axes et subissent quatre mues succes- sives. À partir de la deuxième mue, ils se différencient d'une facon visible dans deux directions différentes : les exilés aptères du type progrediens et les ailés dont nous étudierons ultérieure ment la destination. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 211 L'absence de cette lignée de progredientes Vivant sur les ai- guilles et se dédoublant en exilés aptères et en ailés, avait été considérée comme une marque caractéristique du Chermes picene. J'ai pour la première fois fait connaître son existence dans une note du 10 octobre 1910. Cette lignée est très peu nombreuse par rapport à celle des sistentes, ce qui explique qu'elle avait été jusqu'ici méconnue. Elle peut ne pas se mani- fester dans la nature, en raison des causes de destruction aux- quelles sont exposés Les individus qui la composent, et il est même possible qu'elle fasse défaut d'une facon complète certaines années. [m'a été possible, en tout cas, d'obtenir ses représentants en abondance assez grande, en élevant en cul- ture pure, sur un À es pectinata, La descendance d'un progre- diens entouré de sécrétion cotonneuse, que j'avais trouvé en pleine campagne normande sur une aiguille de la mème essence (Exp. 13). ExILÉS APTÈRES DU TYPE Progrediens. Le 11 juin 1906, dans un bois d’Abies peclinata de la Nor- mandie, Je vis pour la première fois, un exemplaire de cette forme fixé sur une aiguille. Il était entouré d'une sécrétion cotonneuse abondante et se trouvait dans le voisinage de la cime d'un petit arbre ayant environ 2 mètres de haut et qui croissait dans une clairière. Il avait pondu un petit nombre d'œufs qui donnèrent directement naissance à des sistentes. Presque en même temps d’ailleurs, sur un de mes arbres d'expérience à Fontenav-aux-Roses, je trouvai quelques exem- plaires dans le même cas. Enfin, dans mon élevage, fait avee la descendance de cetindividu de Normandie sur des Abies pecti- nala en pots, j'ai obtenu, en 1910, 1911 et 1912, de nombreux exemplaires de ces progredientes, en mème temps que des indi- vidus ailés. Les neoprogredientes qui évoluent en exilés aptères du type progrediens ne peuvent être distingués au premier stade de ceux qui doivent évoluer en ailés; il en est de même au deuxième stade; la différenciation extérieurement visible s'établit au troisième stade, après la deuxième mue : si l'on a affaire à un 212 PAUL MARCHAL exilé aptère, il présente un système glandulaire bien développé, qui fait au contraire défaut au troisième stade de l'ailé. Le meilleur moyen de contrôler cette différenciation est d’exami- ner les mues qui se trouvent en arrière d’une nymphe et celles qui se trouvent en arrière d’un exilé aptère. L'évolution des exilés aptères du type progrediens estbeaucoup plus lente que celle des ailés et ils ne deviennent adultes que dans la première quinzaine de juin, alors que les ailés sont déjà disparus ; ils S'accroissent peu, surtout pendant les pre- miers stades, ainsi qu'on peut s’en rendre compte par les différences de taille assez faibles qui existent entre les trois premières mues. Pendant les trois premiers stades, ils secrètent peu de sub- stance cotonneuse et ce n'est que pendant le quatrième et surtout pendant le cinquième, au moment de la ponte, qu'ils s'entourent d'une masse cotonneuse abondante. Au cinquième stade, en raison de cette sécrétion, ils se présentent avec l'aspect de petits tampons cotonneux, arrondis, fixés sur les aiguilles. Leur taille reste toujours réduite par rapport à celle des sistentes et ils ont une faible fécondité, le nombre de leurs œufs ne paraissant pas dépasser 10 ou 12. Les descendants de ces progredientes, même les premiers éclos, m'ont toujours présenté les caractères typiques des sistentes. I résulte de l'expérience 13 que ces sistentes directement issus des progredientes évoluent et se reproduisent dès le mois de septembre : ce sont done des estivosistentes. IIS pondent des œufs assez nombreux qui donnent naissance à une nouvelle génération de larves destinées à passer l'hiver et qui sont par conséquentdes /iemosistentes. Ailés. L'une des différences biologiques les plus frappantes entre le Ch. piceue et le Ch. Nüsslini semblait résider dans l'absence des ailés chez la première espèce et leur présence au contraire chez la seconde. Or, bien que labsence ou la grande rareté des ailés chez le Ch. piceae soit la règle dans la nature, j'ai reconnu pourtant qu'ils peuventapparaître dans certaines circonstances. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 213 Ainsi semblait s'ouvrir pour celle espèce, connue comme se reproduisant seulement par parthénogénèse, une voie vers la migration et vers la reproduction sexuée : or, ainsi que nous allons le voir, cette dernière reproduction ne peut arriver pourtant à se réaliser: car les ailés n’émigrent pas sur d’autres arbres que les Abies pectinala et, une fois fixés sur ces derniers, ils y engendrent de nouveaux individus parthénogénétiques du tvpe sistens : ce ne sont donc pas des sexupares, mais bien des ersules alatae. Je fus mis sur la voie dela découverte des ailés du C#. pireae par celle des progredientes Hixés sur les aiguilles. Sachant en effet que, chez le CA. Nüsslini, seuls les progre- dientes qui se fixent sur les aiguilles sont susceptibles d'évoluer en ailés, on pouvait, par analogie, conclure de la découverte d'un progrediens de Ch. piceae fixé sur une aiguille d'A Dies pecti- nala que chez cette espèce la formation des ailés était réalisable. Dans le courant de juin 1909, outre quelques progredientes typiques fixés sur les aiguilles de mes arbres en expérience, Je trouvai, sur l'Abies pectinata 11, une larve, également fixée sur une aiguille, qui ne s’entourait pas de susbtance cotonneuse, bien qu'ayant déjà mué deux fois ; elle pouvait donc être con- sidérée, avec beaucoup de vraisemblance, comme un individu parvenu au troisième stade et destiné à évoluer en ailé. Pour suivre avec plus de sécurité son évolution, je coupai le rameau sur lequel il se trouvait (17 mai), de façon à le conserver en laissant tremper sa partie inférieure dans un flacon rempli d’eau. Le tout fut disposé sous une cloche percée à sa partie supérieure. Le 21 mai, le Chermes était à l’état de nymphe ; le 29 mai, l'ailé était formé et en repos sur une aiguille ; le 1.7 juin, il avait abandonné son rameau et était mis dans l'alcool pour l'étude. Son examen démontra que ses caractères étaient bien ceux du Ch. piceae (petit nombre d'éléments dans les massifs glandulaires) et que, par conséquent, ilne pouvait être question d'une larve de Ch. Nüsslini qui aurait été accidentellement entraînée par le vent sur mon arbre d'expérience envahi par le Ch. piceae. Le fait de la possibilité de l'apparition des ailés chez le Ch. piceae, était donc acquis. J’ai pu d’ailleurs me les procurer 214 PAUL MARCHAL ultérieurement en assez grande abondance et voici dans quelles conditions : Estimant que les progredientes qui évoluent sur les aiguilles en femelles parthénogénétiques aptères et qui S'y entourent de sécrétion colonneuse constituent un acheminement vers la for- mation des ailés, j'ai pensé que leur descendance pouvaitavoir plus de chances d'évoluer en cette forme que celle des individus fixés sur les axes. J'ai doncc reueilli et isolé le progrediens sur aiguille que J'avais trouvé le 11 juin 1909 en Normandie, de facon à obtenir sur un Ates pectinala en pot (Exp. 13) une culture pure de sa descendance : deux eslivosistentes issus de ce progrediens se fixèrent sur cet arbre, restèrent à l’état de larve primaire dormante pendant les mois de juillet et d'août et évoluërent en septembre : ils pondirent alors et donnèrent naissance à une lignée d’Atemosistentes assez nombreuse. Ceux- ci évoluèrent en mars 1910 el commencèrent à pondre vers le milieu de ce mois pour produire une génération abondante composée à la fois de jeunes larves du type estivosistens et du type progrediens. Or, et c'est à le fait remarquable, de nombreuses larves du type progrediens (neoprogredientes) se fixèrent sur les aiguilles dans la première quinzaine d'avril, et les unes évoluèrent en femelles parthénogénétiques aptères à sécrétion cotonneuse abondante, du type progrediens, landis que les autres évoluèrent en ailés. Un voyage que Je fis à cette époque en Tunisie ne me permit pas de suivre le cours de cette expérience d'une façon aussi complète que Je l'aurais désiré ; mais Je confiai sa surveillance, ainsi que celle de mes autres arbres en observation, à M. Le Cerf, préparateur au Muséum. Le 19 mai, M. Le Cerf vit quatre ailés et en mit un dans l'alcool que jexaminai plus tard et qui présentait bien les caractères du Ch. picene. Le 28, il vit un ailé fixé sur une aiguille de l’année précédente. A mon retour, le 5 juin, il n'y avait plus d’ailés, ni libres, ni fixés : mais plusieurs aptères du type progrediens entourés d'une secrélion cotonneuse abondante étaient fixés sur les aiguilles vers l'extrémité des rameaux. L'arbre quiavaitservi pour ces observations de 1910 fut observé de nouveau en 1911 : Au mois d'avril de cette année, sa conta- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 279 mination était très intense et wne grande quantité de larves se fixèrent sur les aiguilles : le plus grand nombre d’entre elles se développèrent en nymphes el, vers le 10 mai, les premiers ailés apparurent ; ils étaient déjà nombreux le 12 mai. Le 13 mai je remarquai qu'un certain nombre de ces aïlés s'étaient fixés sur les aiguilles de P'Abies peclinata et avaient pondu quelques œufs. Le 1% mai, les ailés étaient toujours très nombreux. Je notai toutefois qu'un certain nombre, cédant à leur tropisme lumineux, s'envolaient de larbre sur lequel ils étaient nés pour se rendre vers fa vitre devant laquelle le Sapin mis en expérience.se trouvait placé. Üne bonne partie resta pourtant sur les aiguilles de PAVes pectinala pour y déposer des œufs; ces ailés fixés sur le Sapin et évoluant en ersules alatae prennent une teinte brun foncé qui les différencie de ceux venant d’éclore et qui sont d’un rouge grenat; en outre leurs ailes ont une teinte enfumée et des petites crosses cireuses se développent sur la tête et sur le thorax. Tous les essais que j'ai faits en 1911 pour faire reproduire les ailés, soit sur le Pirea excelsa, soit sur le Picea orientalis, ont été négatifs (Exp. 14). Une fois pourtant, après avoir entouré, le 12 mai, dans un même sac de mousseline, la cime d’un Piceaorientalis etquelques pousses de PA bies pectinala n°9 1% garnies de nymphes et d’ailés, je trouvai, le 28 mai, deux ailés fixés sur les aiguilles du Pirea orientalis. L'un était mort sur son aiguille, sans avoir développé de sécrétion eireuse avec un seul œuf sous ses ailes: l'autre était encore vivant, mais n'avait pas développé plus de sécrétion cireuse que le premier : il avait pondu deux œufs visibles par transparence sous ses ailes. La fixation de ces ailés sur l'Épicéa était-elle accidentelle ? Devait-elle être, au contraire, considérée comme l'ébauche d'une tendance sexupare? Il était intéressant, à ce point de vue, d'examiner les larves issues des trois œufs pondus par ces ailés. Or ces larves ne présentaient pas les caractères de celles des sexués. Deux d’entre elles avaient en effet de très longues soies rostrales, 1470 et 1500, par conséquent d'une longueur équivalente à celle des soies rostrales des sistentes ; les caractères du système glandulaire tégumentaire étaient également ceux des sistentes {Ypiques. La troisième avait des soies rostrales plus 216 PAUL MARCHAL courtes que les deux autres; mais ces soies avaient pourtant encore une longueur de 910%, c'est-à-dire très supérieure à celle des sexués, ou même des sexupares et des progredientes au stade correspondant. Quant aux larves issues des ersules alalae, elles présentaient tous les caractères nettement indiqués des sistentes avec de longues soies rostrales (1500 y) (fig. 30). En 1912, le mêmé Ates pectinata en pot sur lequel s'étaient développés les ailés de Ch. piceae en 1910 et 1911, donna de nouveau naissance, en avril, à une légion de neoprogredientes ; l'arbre, étant épuisé par l'attaque des sistentes qui les avaient engendrés, ne donna que quelques pousses nouvelles, sur les aiguilles desquelles se développèrent à la fois des ailés et des aptères du type progrediens. Dans de telles conditions le maté- riel eût été insuffisant ; mais des rameaux avaient été coupés en avril sur lAbies pectinata n° 13, et ces rameaux chargés de sistentes avecleurs pontes, avaient été employés pour contaminer trois Abies nordmanniana (1); je pus obtenir ainsi sur les aiguilles de ces arbres des ailés en nombre assez grand, en même lemps que des aptères da type progrediens. 1 me fut impossible toutefois, en 1912, d'obtenir comme en 1911 la fixa- üion des ailés sur Aies pectinata où sur Abies nordmanniana : Jemprisonnai à cet effet dans la mousseline les rameaux sur lesquels ils devaient prendre naissance, ou bien encore Je trans- porlai, après leur éclosion, des ailés dans des vases où se trouvaient des pousses d’Alies pectinata: les résultats furent négalifs et, si je n'avais pas eu des résultats positifs nombreux et incontestables l'année précédente, je ne pourrais m'appuyer sur aucune expérience biologique pour conclure que les ailés du CA. piceae ont la signification d'ersules alatae. Pourquoi la preuve biologique de ce fait manqua-t-elle en 19412, tandis qu'elle fut au contraire manifeste en 1911? IL est dif- ficile de donner à cet égard une précision. L'influence qu'il me semble le plus naturel d'invoquer est pourtant le fait du déve- (4) Des Aüies pectinata se seraient contaminés d'une façon plus intense et plus facilement que des Abies nordmanniana; mais j'avais, à ce moment, choisi cette essence pour rechercher si une mutation spécifique ne pourrait pas se produire par passage de l’Abies pectinata sur l’Abies nordmanniana. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 217 loppement des ailés sur l'Abies nordmanmiana, qui se trouve en 1912 expérimentalement substitué à l'Aes pectinala hôte intermédiaire habituel du CA. piceae. Ha dù en résulter pour l'espèce une perturbation qui permet d'expliquer la tendance plus grande à émigrer chez les ailés observés en 1912-que chez ceux observés en 1911. Je répétai d'autre part, en 1912, mes essais de 1911 pour obtenir la fixation sur les Épicéas (P. orien- talis et P. excelsa) : d'une façon générale les résultats furent également négatifs et les ailés refusèrent de se fixer sur les Épicéas, comme ils refusaient de se fixer sur les Abies. Quatre d'entre eux pourtant, emprisonnés d’une facon fort étroite dans un manchon de verre entourant un rameau d'Épicéa, semblèrent faire exception. Un se fixa sur une aiguille de Picea excelsa (Exp. 20), développa des crosses cireuses thoraciques rudimentaires et pondit un œuf. Mais cet œuf isolé donna une larve ne présentant aucun des caractères des sexués, mais ceux des sistentes avec de très longues soies mesurant au moins 1500 y. Trois autres ailés, mis en expérience (Exp. 21), furent également trouvés fixés sur les aiguilles de Picea excelsa ; deux d’entre eux étaient morts sans avoir pondu; le troisième pondit trois œufs dont l'un avorta et dont les deux autres fournirent deux larves: l'une fut égarée, l’autre présenta les caractères typiques des sislentes, avec de très longues soies rostrales mesurant environ 1500 et encore repliées sur elles-mêmes, en décrivant les deux grandes boucles caractéristiques. Il n’est donc pas douteux que les quelques ailés que J'ai observés en 1911 et 1912 sur les Épicéas dans des conditions artificielles s'étaient fixés sur ces arbres d'une facon purement accidentelle (1). La repro- duction sexuée nous apparaît ainsi comme complètement obli- térée chez le Chermes piceae et la seule trace qui subsiste encore de sa présence primitive se trouve dans lapparition des ailés, ceux-ci étant assez rares dans les conditions naturelles pour que l’on ait pu croire à leur inexistence : ces ailés d’ailleurs ne sont pas des sexupares, mais se comportent comme des exsules alatae; tout au plus pourrait-on trouver dans les (4) Je rappelle à ce propos que les ailés du Ch. Nüsslini, espèce très voisine du Ch. piceae, peuvent, même dans la nature, se fixer accidentellement sur les aiguilles des Pins où leur descendance se trouve fatalement condamnée. ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 98 série. LOS VITE 218 * PAUL MARCHAL caractères de quelques-uns de leurs descendants {soies rostrales d’une longueur légèrement inférieure à celle des sistentes Lypiques) un léger rappel de la direction sexuée. En dehors de loblitération de la reproduction sexuée chez le Ch. piceae, 1 v à dans les expériences qui précèdent un autre fait intéressant qu'il convient de faire ressortir, c’est l'influence des causes internes (hérédité) sur l'apparition en nombre plus ou moins grand de l’une des différéntes formes de l'espèce. Nous avons vu, en effet, que lAVies pectinata n9 13 à produit pendant les trois années 1910, 1911 et 1912 un nombre d’ailés très considérable. La différence frappante existant à ce point de vue entre cet arbre et les autres ne peut s'expliquer que parce que tous les Chermes qui le parasitaient descendaient d’une femelle parthénogénétique du tvpe progrediens fixée sur aiguille (1). Il convient en effet de noter qu'un autre Aies pectinata contaminé par le CA. piceae (n° 11), fut placé comme témoin, en 1911, dans une chambre, et dans des conditions tout à fait analogues à celles du n° 13 :or il ne présenta aucun ailé dans le cours de l’année 1911. D'autre part, en 1910, 1911 et 1912, quelles que fussent les conditions expérimentaleset même en faisant passer les Insectes du n° 13 sur une autre essence (A. nordmanniana au heu de A. pectinata), le résultat fut toujours le même et le nombre des ailés produits demeura exceplionnellement grand, Nous sommes donc en droit de con- clure que, dans cette expérience, le progrediens sur aiguille de 1909, qui à engendré toutes les générations ultérieures, a légué à sa descendance une aptitude exceptionnelle à la produe- Lion de noeprogredientes capables de se fixer sur les aiguilles de Abies pectinata et par suite à la production des ailés. L'hérédité a done agi en augmentant le nombre des neoprogredientes qui seuls sont capables d'évoluer en ailés. Notre expérience n'exclut nullement la possibilité d’une action des causes externes (tempé- (1) En 1941, j'ai rencontré des aïlés sur d’autres arbres que le n° 13, mais {toujours en quantité bien moindre. C'est ainsi que le 28 mai, en pleine cam- pagne normande, à Clères, dans le bois d’Abies pectinata dont j'ai déjà parlé, j'ai trouvé cinq ou six nymphes de Ch. piceae sur les aiguilles de quelques jeunes arbres. Quatre de ces nymphes transportées à Fontenay étaient trans- formées en ailés le 31 mai. À la même époque, quelques nymphes ou ailés furent aussi récoltés sur les divers Abies pectinata contaminés par le Ch. piceae que j'avais dans mon jardin. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 219 rature, lumière) pour déterminer la différenciation des 2e0pro- gredientes en progredientes (aptères) et en ailés ; mais elle n’en démontre pas moins l'influence déterminante de l'hérédité sur la production des ailés; car le progrediens de 1909 à légué à un trèsgrand nombre de ses descendants printaniersses caractères de progrediens et il s'est ainsi produit une augmentation con- sidérable dans la proportion des reoprogredientes qui assurent d'une facon exclusive le recrutement des ailés. Sislentes DE PREMIÈRE GÉNÉRATION ISSUS DES HIVERNANTS ET LEUR DESCENDANCE. Nous avons vu que les premiers œufs éclos des hivernants fournissent des progredientes aptères ou des ailés, ces derniers pouvant être considérés phylogénéliquement comme la forme typique, dont le progrediens aptère est une forme secondai- rement dérivée. Tous les œufs qui éclosent ensuite (fin avril, mai, juin) donnent deslarves répondant au tvpe sis{ens, c'est-à- dire avec de très longues soies rostrales, qui, au moment de l'éclosion, sont repliées sur elles-mêmes de façon à décrire deux boucles disposées d’une façon caractéristique et s'étendant du côté dorsal de l'animal, leur longueur s’écartant peu, en géné- ral, d'une moyenne de 1500 » (fig. 30). Le système glan- dulaire des plaques marginales et spinales présente la disposi- lion aréolée typique indiquée par Bôrner pour ses hiemales (ie.29 a, 6, c, di. ILest à noter que, pendant la période qui succède immédia- tement à celle de l'apparition des progredientes, on trouve un certain nombre de larves qui pourraient être à la rigueur con- sidérées comme intermédiaires entre le type progrediens et le type sistens: elles présentent souvent des soiïes rostrales dont la longueur peut ne pas dépasser 800 à 900 » (fig. 31); la chi- tinisation des sclérites est faible et l’aréolation du système glandulaire tégumentaire peu marquée. Toutefois, par leur évo- lution ultérieure, qui ne se poursuit pas sur les aiguilles et qui mn à paru ne présenter que trois mues, ces larves semblent se raltacher plutôt ou type sistens qu’au type progrediens. Les sistentes issus des individus ayant hiverné, contrairement 290 PAUL MARCHAL à ce qui a lieu généralement pour le CA. Nüsslini, évoluent dans le cours de la saison; on ne peut donc les appeler des hiemales, suivant la désignation de Bôrner, et c’est pour cette raison que J'ai substitué le terme de sistentes à celui de hiemales (1). L'évolution de ces sistentes (eslivosistentes) se fait, suivant les individus, en juin-juillet, où d’une facon plus tar- dive encore, en août-septembre. La phase de repos par laquelle passe la larve primaire (neosistens) est plus courte pour les sistentes les moins nettement caractérisés et qui tiennent la tête de la lignée : c’estce que l’on peut constater par l'examen de la première mue de ceux qui évoluent ainsi d’une facon précoce et dont les soies rostrales peuvent ne pas mesurer plus de 900 ». Dans l'expérience 11, où les écorces contaminatrices ont été prélevées à une date relativement tardive, le 21 mai 1908 (2), c'est-à-dire à un moment où les pontes de Chermes piceae n'avaient encore fourni que très peu d’éclosions, j'ai obtenu un assez grand nombre d'individus appartenant à cette catégorie et qui se fixèrent en maJorité à la base des jeunes pousses de l’année, sous la collerette écailleuse qui se trouve à ce niveau, pour évoluer dans le courant de juin et pondre en juillet. Dans une autre expérience, où les écorces contaminatrices furent prélevées d’une facon beaucoup plus tardive, le 13 Juin 1909, c’est-à-dire à un moment où la très grande majorité des éelo- sions avait déjà eu lieu, toutes les larves issues des œufs qui restaient encore demeurèrent à l’état dormant jusqu'au mois d'août; quelques-unes évoluèrent dant le courant d'août et d'autres en septembre: celles qui furent examinées avaient une première mue présentant les caractères des sistentes Lypiques. La série des sistentes à caractères intermédiaires, dont il a été précédemment question et qui fait immédiatement suite à la courte série des progredientes, comporte une quantité variable de représentants suivant les circonstances. Dans les conditions naturelles, ils m'ont paru assez abondants ; au contraire, lorsque (1):C7TR'2A0.5Sc--M0ioe: 4910: (2) Cette date, qui pourrait être considérée comme tardive dans un jardin ensoleillé aux environs de Paris, est au contraire hâtive pour les frais abris que donne un bois de sapins de la campagne normande et en 1908, l’éclo- sion des pontes paraissait alors à peine commencée dans la localité de Clères où furent prélevés les échantillons qui servirent pour l'expérience 41. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 221 J'ai eu affaire à la descendance pure d'un progrediens sur aiguille (Exp. 13, 17), les estivosistentes à caractères intermé- diaires ont été peu nombreux et aucun eslivosistens ne s’est développé à la base des jeunes pousses, en dedans de la colle- rette écailleuse, mais au contraire en dehors de celle-ci, sur le bois de l’année précédente. En un mot, la lignée des progre- dientes vrais paraît, dans ce cas, s'être substituée d'une facon presque complète à celle des eslirosistentes à caractères intermé- diaires. La localisation des estivosistentes {piques de première géné- ration est variable. Dans la nature, ils se fixent sous les exfolia- tions écailleuses de l'écorce du tronc et des grosses branches. Sur les jeunes arbres mis en expérience, où ces exfoliations sont rares, ils se fixent en grand nombre au niveau des fourches des rameaux et surtout au niveau du nœud corres- pondant à la jonction du bois de l’année précédente et des pousses de l’année, ou encore, en abondance, sur les bourgeons qui ont avorté dans leur développement au printemps, sous l'influence de lattaque des Chermes. Les eslirosistentes issus des individus ayant hiverné sont d'une taille réduite et sont d’une faible fécondité: ceux en par- liculier qui se fixent à la base des pousses de l'année, en dedans de la collerette, ne produisent que quelques œufs qui éclosent au fur et à mesure d’une ponte très lente. Tous ces estivosistentes pondent dans le cours de l'été à une époque variable suivant les individus, et les œufs donnent des larves qui répondent encore au type sis{ens; la plupart d’entre elles, et peut-être même la totalité, évoluent dans le cours de la saison, à la fin d'août et en septembre-octobre, donnant ainsi naissance à une seconde légion d’'estivosistentes qui se garnissent d’une sécré- lion cotonneuse assez dense et atleignent tout leur développe- ment à l'automne. Ces estivosistentes de seconde génération sont notablement plus féconds que ceux de première et donnent une ponte abondante fournissant des larves qui se fixent sur les axes et sur les bourgeons pour passer l'hiver (Aiemosistentes). Ce n'est pas seulement dans mes élevages de 1908, 1909, 1910, 1911 et 1912 que J'ai observé une génération du type 222 PAUL MARCHAL sistens évoluant en août-septembre. J'ai encore constaté son existence en 1908. aux Grandes-Dalles, dans la Seine-Inférieure. Pendant tout le mois d'août de 1908, les Chermes piceae qui se trouvaient sur les écorces des grands Abies pectinata communs dans cette région, étaient tout à fait inapparents : les larves primaires (neosistentes) élaient cachées dans les fissures ou sous les exfoliations. Ce ne fut que vers la Picea Abies fin d'août que les larves commencè- rent à muersel, Las 7 dans les derniers jours du mois, on les rencontrait à l'état de 2€ ou de 3e stades avec sé- Fxsula/eta | Hiemasistens Estivosistens: Fig. 32. — Schéma du cycle du Chermes piceae. crétion cotonneuse. Leur évolution se continua en septembre; mais Je dus quitter le pays, avant qu'elle fùt entièrement terminée; il n'est pas douteux d’ail- leurs, étant données lépoque et les observations faites aux environs de Paris, que cette génération pondit en septem- bre et donna naissance à des hiemosislentes qui passèrent hiver à l’état de larves primaires. A la fin d'octobre, il n'existe plus que ces #c0-hiemosistentes fixés sur les bourgeons et sur les axes et qui sont issus des Chermes avant pondu dans le cours de l'été ou en automne. La figure 32 résume d’une facon schématique, le eyele du Ch. piceae tel que nous l’avons exposé. MORPHOLOGIE EXTERNE DE DREYFUSIA (Cuerues) PICEAE PARTHÉNOGYNE SISTANTE (Sis{ens). 1er stade (neosistens). — Le neosistens du Chermes piceae a été bien décrit par Bôrner (Zoo!. Anz., XXX, 1908, p. 742) et cel auteur a fait connaître les caractères différentiels qui per- meltent de le distinguer du neosistens de Ch. Nüsslini. La CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 2923 figure 28) (p. 207, rappelle ces caractères. Le principal consiste dans la disposition des glandes spinales. Elles ont des facettes glandulaires plus larges, moins nombreuses, limitées par un contour plus fin que chez CA. Nüsslini; de plus, le groupe médian du mésothorax, du métathorax et des premiers segments abdo- minaux ne présente pas aspect cupuliforme à contour arrondi très accentué que l'on rencontre chez CA. Nüsslini. Chez l'estivosistens, Ta larve primaire (neo-estivosistens) pré- sente des glandes spinales et marginales du même type que chez l’Aiemosistens; mais elles sont souvent beaucoup moins apparentes el on trouve tous les intermédiaires entre celles qui ont un système glandulaire aussi net que les Liemoïistentes, el celles qui ont un système glandulaire très indistinct. Ce sont ces eslivosistentes qui ont été décrits par Bôürner comme esti- ovales. Rappelons enfin la grande longueur des soies rostrales (en moyenne 1500 ») chez le neosistens. 2 stade. — Antenne à troisième article allongé et eyvlin- drique. Plaques spinales du thorax et du premier segment abdominal fortement développées et chitinisées, transversale- ment allongées, irrégulièrement quadrangulaires; glandes marginales à éléments peu nombreux et plus grands que chez Ch. Nüsslini, celles des derniers segments abdominaux étant les plus fournies, mais ne comptant pourtant pas plus de dix à douze éléments etse réduisant chez beaucoup d'individus au nombre de quatre à six éléments. Les autres groupes glandu- lures, sauf les pleuraux des premiers segments abdominaux, sont peu apparents. Je stade. — Antenne à troisième article conique, d’une lon- gueur égale à plus du double du deuxième article. Glandes marginales à éléments moins nombreux et plus grands que chez Ch. Nüsslini, la tulle et le nombre de ces éléments étant d'ailleurs variable, comme au 2€ stade. Autres groupes glan- dulaires généralement peu développés, plus où moins appa- rents suivant les individus et présentant souvent des éléments à contours indistinets. 4 stade (adulte) (fig. 33). — Antenne courte, conique, assez semblable à celle du 32 stade. Plaques céphaliques séparées seulement de celles du prothorax par un sillon transversal et 224 PAUL MARCHAL constituant avec elles un grand bouclier céphalo-prothoracique bombé. Les groupes glandulaires des trois séries marginale, pleurale et spinale sont plus ou moins apparents el il y a à ce su- jet, suivant les individus, de gran- des variations ; le nombre des élé- ments glandulaires, comparé à celui que l’on observe au 2€ et au 3e stade, n’augmente que faible- ment, et il n'arrive guère à dépas- ser une douzaine pour les plaques marginales; souvent même leur nombre reste très au-dessous de cette estimation et chez certains individus les glandes marginales les mieux fournies ne présentent one ne pas plus de sept à huit éléments; disposition des massifs glandu- [es spinales font défaut à partir du laires abdominaux (face dor- Het : 5x sale, côté gauche). sixième ou du cinquième segment abdominal : il peut arriver que le nombre des glandes apparentes soit très réduit et que l'on n'a- percoive que çà et là quelques facettes distinctes, les autres étant imapparentes ou étant très effacées. PARTHÉNOGYNE ÉVOLUANTE (Progrediens). 17 stade (neoprogrediens) (fig. 29). — I diffère du neosistens par les caractères suivants : chitinisation faible; selérites relativement réduits; pas d’aires glandulaires apparentes. Soies rostrales très courtes, leur longueur ne dépassant pas 600 ; la boucle, observée chez les individus qui ne se sont pas encore fixés, s'étend, sans se replier sur elle-même, jusqu'à l'extrémité postérieure du corps. Encéphale très développé et se prolon- geant en arrière. Le neoprogrediens se différencie donc, à ce dernier point de vue, du neosistens chez le Ch. piceae, par des caractères de même ordre que ceux qui ont été mis en évidence par Nüsslin pour le CA. Nüsslini (1). Contrairement à ce qui a (1) Biol. Centralbl., 1910, p. 35. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 225 lieu pour cette dernière espèce, on rencontre de rares individus intermédiaires entre les neoprogredientes et les neosistentes. 2 stade. — Antenne à troisième article allongé et cylin- drique. Massifs glandulaires apparents, mais ne présentant qu'un nombre d'éléments assez réduit, quatre à huit en moyenne pour les marginales abdominales; le massif du dernier seg- ment est composé de dix à douze éléments. 3 stade. — Antenne conique, troisième article mesurant plus du double du deuxième. Glandes marginales formées d’élé- ments inégaux, dix à douze au plus pour les postérieurs qui sont les mieux fournis; glandes pleurales abdominales présentes seulement pour les premiers segments et formées de un à deux éléments; glandes spinales des segments abdominaux indis- üinctes. 4e stade. — Antenne de forme très voisine de celle du stade précédent. Système glandulaire avec éléments apparents plus nombreux qu'au stade précédent, et notablement plus déve- loppé et plus fourni que chezle sistens; glandes pleurales et spinales bien distinctes et formées de quelques éléments, sauf pour les derniers segments abdominaux où elles sont absentes. 5e stade. — Antenne conique de forme à peu près identique à celle du 4€ stade. Système glandulaire fortement développé et bien apparent; les glandes marginales en particulier, surtout les postérieures, formées de nombreux éléments (une vingtaine) de taille très inégale. Le progrediens adulte présente, au point de vue du nombre des éléments glandulaires apparents, une différence très notable avec le sisens. AILÉ (Alata) représentatif du Sexupare!. 1eT stade. — Mèmes caractères que ceux du progrediens au premierstade. 2 stade. — Semblable au 2€ stade du pragrediens; le système glandulaire apparaît déjà pourtant comme étant moins déve- loppé et les facettes sont plus rares et plus indistinctes. 3 stade. — Massifs glandulaires absents; seulement quelques facettes indistinctes au niveau des marginales posté- rieures,. 4e stade (nymphe). — Aucun caractère ne paraît différencier 296 PAUL MARCHAL sensiblement la nymphe de celle de Dreyfusia MNisslint. 5e stade. — M se distingue de l'ailé du Dreyfusia Nüsslini b Fig. 34. — Chermes piceae : an- 35 —y assif glandulaire marginal du tenne gauche d'’ailé vue par la 8e segment abdominal chez l’ailé se développant face ventrale (individu éclos au printemps sur les Abies : a, chez le Cher- le 29 mai 1909 et provenant de mes Nüsslini (côté droit, vue dorsale); b, chez l'Abies peclinata de l’expé- le Chermes piceae (cûté gauche, vue dorsale). HÉNnCeM) ACL 06! Gr 1800: par le nombre réduit des éléments glandulaires (fig. 35 b). L'antenne est représentée (fig. 34). Il CHERMES VIVANT SUR LES PINS Genre PINEUS Bürner PINEUS PINI (L.) Bôrner. Chermes pini L. Le Chermes puni est une espèce très commune vivant sur le Pin sylvestre et dont les générations parthénogénétiques se suc- cèdent toute l’année sur cet arbre, en recouvrant le trone, les rameaux el les jeunes pousses de leur sécrétion cotonneuse. Pendant longtemps la reproduction sexuée de cette espèce CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 2 resta méconnue. En 1895, Cholodkovsky prépara la découverte de la sexuparité du Chermes pin en faisant connaitre d'une facon complète le cyele évolutif du CA. sibericus qui peut être considéré comme une espèce sœur du C4. pini : il montra que cette espèce se mullipliait indéfiniment par parthénogénèse sur le Pin Arole (Pinus cembro) el reconnut qu'à la fin de mai ou au début de juin des ailés sexupares émigrent du Pinus cembro sur lÉpicea commun (Picea ercelsa), pour produire sur cel arbre des sexués ; il constata, de plus, qu'après l'accouplement chaque femelle donnait un œuf fécondé, d'où sortait à la fin de la saison une fondatrice; enfin il observa que celle-ci donnait naissance, au début du printemps, à des gallicoles habitant à l'intérieur d'une galle caractéristique, qui, au moment de la maturité de cette dernière, se transformaient en ailés (rigrantes alatae), destinés à émigreren sens inverse pour retourner sur le Pinus cembro. Le Chermes pini avant une ressemblance étroite avec le Ch. sibericus, 1 était naturel de se demander S'il ne présentait pas un cycle analogue. Cholodkovsky découvrit en effet les sexupares de cette espèce en 1889 sur les jeunes pousses de l'Épicéa commun, dans les grandes forêts de Russie où les deux essences Pins et Épicéas croissent côte à côte ; enveloppés d'un coton abondant, ils ressemblaient beaucoup extérieurement aux sexupares de CA. sibericus, et, sous leurs ailes, 1l observa les sexués, groupés les uns contre les autres, qui, par leur suc- cion, délerminaient le jaunissement partiel de laiguille sur laquelle le sexupare s'était précédemment fixé. Jamais toutefois Cholodkovsky ne put conduire ces sexués jusqu'à la ponte de l'œuf fécondé, et il ne réussit pas davantage à trouver, dans les conditions naturelles du plein air, Fœuf ou -la fondatrice qui aurait dù en sortir. La galle elle-même, à laquelle cette fonda- Lrice aurait dù donner naissance, resta introuvable, en dépit des nombreuses et attentives recherches que l’auteur russe fit pen- dant une série d'années sur les Épicéas des forèts de son pays. On pouvait, dans ee qui précède, trouver des arguments pour conclure que chez le Chermes pini le evele de la génération sexuée n'aboulit pas et est passé en quelque sorte à l'état de phénomène biologique rudimentaire. Certains faits tendaient 298 PAUL MARCHAL pourtant à démontrer que, dans certains cas tout au moins, le cycle de la génération sexuée du Chermes du Pin pouvait abou- Ur sur le Picea ercelsa : C'est ainsi que Nitsche mentionne qu'il a trouvé sur Picea excelsa des exemplaires hivernants de fondatrices qu'il rapporte au Chermes orientalis (Pineus piri) où au Chermes sibericus. Cholodkovsky (190%) décrivitetfigura aussi sur Picea ercelsa une galle qu'il trouva dans le parc de Waiwara (Estland) et qu'il rapporla au Chermes orientalis, espèce qui, comme nous le verrons, se confond avec le Chermes pin. Enfin, en 1905 et 1906, Bôürner, aux environs de Berlin, trouva, après de nombreuses recherches, sur les Picea ercelsa, quelques galles semblables à celles de CA. sibericus el qui lui firent admettre que, dans des circonstances rares, des fonda- trices issues des sexués de Chermes pini peuvent se développer d’une façon normale sur notre Picea ercelsa et produire des gallicoles. Il n’en est pas moins vrai que ce fait doit être bien exceplionnel et, pour ma part, malgré la très grande abon- dance du Cermes pini aux environs de Paris, jamais Je n'ai rencontré de galles qui lui correspondent sur le Picea ercelsu. Dans les conditions naturelles, 11 faut en conclure que, sous notre climat, le Chermes pini se multiplie, soit exclusivement, soil presque exclusivement par parthénogénèse, ainsi que l'ad- mettent d'ailleurs les autres auteurs qui ont étudié la question, notamment Cholodkovsky et Bürner; après une telle étude, on ne peut, en effet, qu'avoir la complète conviction que la repro- duction sexuée ne joue ici aucun rôle appréciable dans la perpé- luation de l'espèce, les générations se succédant les unes aux autres sans aucune diminulion de fertilité, malgré son absence. On peut se demander pourtant si linexistence de la généra- lion sexuée sous notre climat ne lient pas à l'absence de con- ditions nécessaires à son développement qui peuvent se ren- contrer ailleurs, par exemple à l'absence d'une autre espèce d'Épicéa mieux appropriée à son évolution que notre Épicéa indigène. Il existe, en effet, en Russie méridionale, et notamment dans la région du Caucase, un Épicéa connu sous le nom de Picea orientalis, qui croit dans les forêts en mélange avec les Pins CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 229 (Pinus montana, Pinus syloestris) et qui peut héberger d’une facon normale et courante la génération sexuée d’une forme primitivement désignée sous le nom de Chermes orientalis, puis reconnue ensuite comme morphologiquement identique au Chermes pini. C'est en avril 1888 que Dreyfus (1) trouva le premier la fondatrice de cette espèce, entourée de son petit tampon ouaté sur les aiguilles du Picea orientalis ; mais, 1gn0- rant de quel cyele pouvait faire partie cette fondatrice, 11 Ta rapporta à une espèce nouvelle, sous le nom de Chermes orien- lalis; plus tard, sans avoir, semble-t-il, fait d'expériences à ce sujet, il conclut à l'identité morphologique de cette espèce avec le Chermes pini; ne publia pas d'ailleurs le résultat de ses observations fort incomplètes, mais se contenta de le transmettre à Cholodkovskvy. Ce dernier auteur, n'adoptant pas la manière de voir de Dreyfus, continua à admettre que l'on se trouvait en présence de deux espèces distinctes : Pune, le 1 Chermes orientalis, dont le eyele et les migralions restaient inconnues, et qui peut-être se multiphait par parthénogénèse exclusive et sans migration sur le Picea orientalis (2) ; Pautre, le Chermes pini, évoluant exclusivement par parthénogénèse sur le Pin sylvestre. Diverses observations ultérieures qu'il eut l'occasion de faire (3) le conduisirent pourtant bientôt à envisa- ger les choses d’une facon différente (4). Il estima que primiti- vement, Chermes orientalis et Chermes pini constituaient une espèce unique, spéciale aux régions montagneuses, qui effec- tuait des migrations régulières des Epicéas aux Pins el vice- versa, de la même facon que le Chermes sibericus émigre du Picea ercelsa sur le Pinus cembro. Mais plus tard, cette espèce se (1) Drevrus, Ueber neue Beobachtungen bei den Gattungen Chermes L. und Phylloxera Boy. de Fonsc. (Tageblatl. der 61 Versamml. deutsch. naturfol. und Arzte in Küln; Wissensch. Theil. Küln, 1889, p, 57 et 61). (2) Cnoropkovskv, Monographie, IE, 1896, p. 35. (3; Ces observations sont les suivantes : 19 Migrations rudimentaires pour le Chermes pini indigène du nord de la iussie, ayant lieu du Pinus sylvestris au Picea excelsa ; 29 Découverte de deux galles de Chermes orientalis (que Cholodkovsky considérait comme une espèce speciale au Pirea orientalis) sur Picea excelsa ; 39 Observation des ailés sortis des galles précédentes, qui engendrèrent des larves ne présentant pas les caractères des fondatrices sur Épicéas, mais les caractères des femelles parthénogénétiques du Chermes pini vivant sur le Pin (Zoo!. Anz., XXVI, n° 693, 1903 ; et 1bid., XXVII, n. 4, 1903). / (4) Zool. Auz., XVVIL, n° 15, 1903, p. 477. 230 PAUL MARCHAL scinda, d’après Cholodkovskv, en deux lignées différentes, dont l’une (le Chermes orientalis actuel) se limita au Caucase et principalement aux régions montagneuses du Sud, en conser- vant les habitudes migratrices de la souche primitive, tandis que l’autre constituait le Chermes pini des forêts du Nord, et en même temps perdait complètement ou presque complète- ment la faculté de produire des galles. Avec la disparition des galles, le phénomène de la migration à, suivant l'auteur russe, naturellement régressé et est passé à l’état de rudiment biolo- gique, les sexués pouvant, 1lest vrai, arriver parfois à se déve- lopper, mais étant, en tout cas, en nombre insignifiant, affablis, et condamnés à disparaître sans produire de fondatrices. L'état de la question en élait arrivé à ce point lorsque, en juillet 1906, je publiai ma première note sur le cycle évolutif du Chermes pini, lel que je l'avais observé aux environs de Paris. Je décrivais dans cette note les migrations du CA. pimi allant du Pinus sylvestris sur les Épicéas et j'avancais ce fait que le cycle ne se poursuit d'une facon régulière et complète que si le Chermes pini à à sa disposition le Picea orientalis, tandis que sur le Picea ercelsa la génération sexuée avorte.Sur le Picea orientalis, j'observais les sexués, les œufs pondus par les femelles fécondées, les fondatrices qui en proviennent et qui sont destinées à passer l'hiver, enfin les galles et les gallicoles Onigrantes alatae) et j'obtenais la migration de ces derniers sur les Pins (Pinus sylvestris et Pinus strobus). Dans une seconde note (19 octobre 1907),je montrais que, tandis que ces »grantes alatue donnent naissance à une descendance normale, se perpé- luant par parthénogénèse sur le Pinus sylvestris, au contraire, sur le Pinus strobus, les larves issues des rugrantes alatae périssent el le evele est brusquement interrompu. La preuve expérimentale des migrations allant du Picea orientalis au Pinus sylvestris, que Cholodkovsky avait prévues d’après l'examen de larves issues (en verre de montre) des gallicoles, se trouvait ainsi faite, et il était bien établi que le cycle de ce Chermes vivant alternativevement sur le Picea orientalis et sur le Pinus sylvestris élait entièrement comparable à celui du Chermes sibe- ricus étudié par Cholodkovsky et vivant alternativement sur le Picea ercelsa et sur le Pinus cembro. Une question pourtant 177 CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 923 n'était pas encore complètement élucidée, celle de savoir s'il y avait identité complète entre notre Chermes pini indigène et le Chermes orientalis. Si l'on se place uniquement au point de vue spécifique, on ne peut guère douter que le Chermes pan el le Chermes orien- lalis forment une seule et même espèce. J'ai en effet comparé morphologiquement des femelles par- thénogénétiques, des sexupares et des sexués provenant d'une part de Chermes pini indigènes recueillis en forêt loin de tout Picea orentalis, etprovenant d'autre part de C4. piniqui avaient été procréés en culture pure par des #igrantes alatae issues de galles sur Piceaorientalis, et j'ai toujours reconnu qu'il \ y avait identité morphologique entre les Insectes des deux origines Les Picea orientalis étant, d’une facon à peu près de obtenus par semis chez les pépimiéristes et les galles se trouvant assez communément sur cet arbre, partout où il se rencontre, même lorsqu'il n’est représenté dans un pare que par quelques exemplaires, où parfois par un seul, on ne peut guère concevoir que la contamination de ces Picea orientalis ait pu se faire autrement que par le Ch. pini commun sur tous les Pinus syl- vestris. Bôrner (1908) est entièrement de mon avis sur cette question d’origine. Il cite d’ailleurs le cas suivant : la station 2 TENUE de Berlin possède un champ d'expériences où ne se trouve qu'un petit exemplaire de P. orientalis qui, audébut, portait pas de Chermes. Mais en 1905, qui succéda à une année où les sexupares s'étaient posés et multipliés sur ses bourgeons, apparurent une douzaine de galles de Ch. orientalis. En 1905 et 1906, Bôürner put en outre récolter sur le Pirea excelsa quelques galles semblables à celles du Picea orientalis et qu'il prit d'abord pour celles de CA. sibericus ; maïs il reconnut que les gallicoles (mugrantes alatae) sortis de ces galles étaient rigoureusement semblables à ceux qui sortent des galles de Picea orentalis. I identifia donc les deux formes et, par des expériences semblables à celles que j'avais faites précédemment, obünt expérimentalement la migration sur les Pins, puis 1l compara la succession de toutes les formes dont ül fit ainsi l'élevage avec Les formes correspondantes du Chérmes pini et il reconnut leur identité avec ces dernières, soit qu'elles vinssent LE 2 PAUL MARCHAL des galles si rares de Pirea ercelsa, soit qu'elles eussent pour origine les galles si communes du Picea orientalis. Bürner (p. 267) conclut en disant que son opinion est con- forme à la mienne au point de vue de l'identité spécifique du Ch. puni et du CA. orientalis. Cette manière de voir n'exclut pas toutefois la possibilité de l'existence de races biologiques distinctes, etde nouvelles expé- riences succédant aux premières que J'avais faites en 1907 m'ont même conduit à admettre que le Chermes pini, aux environs de ’aris, comporte deux races biologiques assez séparées l’une de l'autre pour que le passage de l’une à l’autre ne puisse être obtenu d'une facon immédiate : ces deux races sont d’une part le Chermes pini. qui se multiplie indéfiniment par parthéno- sénèse sur les Pins de nos forêts, d'autre part le Chermes pini qui, dans les parcs, émigre alternativement des Pins au Picea orientalis. | Nous appelons la première le Chermes indigène du Pin et la seconde le Chermes oriental du Pin. Nous exposerons plus loin, avec les détails qu’elles comportent, les expériences etles obser- valions qui nous ont conduit à cette interprétation des faits : elle se rapproche en somme beaucoup de celle quia été exprimée par Cholodkovsky : nous ne pensons pas toutefois que les deux races en question soient irrévocablement fixées et séparées l’une de l’autre partout où elles se trouvent. Cycze ÉVOLUTIF ET BIOLOGIE DE Pineus (Chermes) pin. Après cet historique général, nous allons maintenant faire l'étude du eyele biologique du Chermes pini, tel qu'il résulte des observations que j'ai faites aux environs de Paris. Habituellement, dans notre région, le Chermes pini se multiphie exclusivement par parthénogénèse sur le Pin sylvestre ; la géné- ration sexuée qu'il peut occasionnellement présenter et qui se développe alors sur le Picea ercelsa est rudimentaire ; car elle reste sans descendance et le cycle ne peut aboutir. Cette espèce de Chermes estextrèmement répandue et je l'ai observée en abondance sur des Pins placés en pleine forêt de Montmorency dans des endroits qui se trouvaient souvent très CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 233 écartés de tout Picea orientalis pouvant assurer le eyele de la reproduction sexuée. HIVERNANTS. La génération qui passe l'hiver sur les Pins sylvestres hiverne à un stade assez avancé : les Insectes ont mué deux ou trois fois, et, entourés d’un duvet cotonneux et cireux, ils forment des petits amas blancs logés soit à la base des aiguilles, soit sur les rameaux ou même sur le tronc, où 1ls sont en géné- ral abrités par une esquille d'écorce ou par un bour- Le geon. L'Insecte ne ; devient adulte que vers la fin de mars, après avoir effec- tué 4 mues dont &,/co/a/mgrensa la quatrième, au moins, à eu lieu après l'hiverna - tion. La ponte commence dès le début du printemps à la fin de mars ; à ce moment, les Chermes fournissent une abondante masse de sécrétion cireuse qui enveloppe les œufs et, en avril, les arbres fortement contaminés se recouvrent rapidement d’une multitude de petits amas cotonneux. La ponte n’est pas encore terminée au milieu de mai, et elle continue encore, alors que l’éclosion des premiers œufs pondus est depuis longtemps commencée. On peut évaluer à plus de 125 le nombre des œufs composant la ponte des femelles parthénogénétiques ayant hiverné (1). Sexuales Fundatrix Fig. 36. — Schéma du cyele du Chermes pini orientalis. : (4) Le 8 mai 1911, j'ai trouvé, par exemple, sous une de ces femelles 70 œufs + 55 coques vides : soit un total de 125 œufs, et la ponte n'était pas terminée. ANN. DES SC. NAT. ZOUL., 9e serie. 1913, xvit, 16 234 PAUL MARCHAL GÉNÉRATION PRINTANIÈRE ISSUE DES HIVERNANTS. Absence de dimorphisme ab ovo ; Différenciation en ailés et en exilés aplères. — Les larves issues de la génération hivernante éclosent dans la deuxième quinzaine d'avril et le courant de mai, envahissant alors les Jeunes pousses qui émanent des bourgeons. Vers le milieu de mai, on trouve ces pousses souvent très allaquées el enveloppées d’un revêtement blanc d'aspect cotonneux, sécrélé par les Chermes qui les garnissent. Les larves fixées sur les Jeunes pousses et issues des Chermes ayant hiverné sont toutes semblables entre elles et elles évoluent toutes en subissant quatre mues successives, suivant le type progre- diens : le type sis{ens, que nous avons rencontré chez les Dreyfusia, n'existe paschezles Pineus pini et, d'une facon géné- rale, dans le genre Pineus. Toutes ces larves, conformes, à leur naissance, au même {ype progrediens, se partagent suivant la règle, au cours deleur évolution, en deux séries différentes : les exilés aptères et les ailés. Les exilés aptères continuent à se multiplier par parthéno- génèse sur le Pin (ersules). Les ailés ont deux destinations diffé- rentes : les uns émigrent sur les Épicéas communs qui peuvent se trouver dans le voisinage et y pondent des œufs évoluant en sexués qui avortent, ou qui ne peuvent en tout cas continuer le evele évolutif n1 procréer de fondatrices: ce sont les sexupares; les autres restent sur le Pin sylvestre el y donnent naissance à des individus parthénogénétiques semblables à ceux qui S'y trouvaient déjà : ce sont les ersuwles alatae. À partir du 2e stade, la génération issue des femelles hiver- nantes, et qui évoluera soit en exilés aptères soit en ailés, commence à présenter des caractères qui la différencient légère- ment de la génération hivernante, caractères qui ont été surtout étudiés par Bôrner (1). Mais, ainsi que l’a montré cet auteur, c’est au troisième stade que la différenciation des exilés 4) C'est en raison de ces caractères différentiels qui apparaissent au 2e stade, que Bürner continue à distinguer, chez le Pineus pini, les deux types morphologiques d'hiver et d'été, sous le nom de hiemales et de aestivales. Leur homologation avec les hiemales (sistentes) et avec les aestivales (progredientes) de Dreyfusia Nüsslini et de Dreyfusia piceae nous paraît inacceptable ; nous préférons ne pas adopter une nomenclature qui implique cette homologation. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 2399 aptères et des ailés s'effectue, et l'on peut alors reconnaître le futur ailé à ses antennes plus longues que celles de lexilé aptère (aestivalis de Bürner) : les antennes de ce dernier se raccour- cissent en effet et deviennent plus épaisses. Enfin, au quatrième stade, la différenciation est nettement établie etse poursuit de chaque côté dans une direction opposée. Chez l'exilé aptère, la forme devient plus élargie qu'au troi- sième stade, les groupes glandulaires sont plus fournis et le dernier article de l'antenne, qui s'est encore raccourci, est à peine plus long que large ; quant au futur ailé, 1l est passé à l'état nymphal. Les détails concernant l'étude morphologique des stades seront donnés plus loin (p. 277). J'ai attiré l'attention sur ce fait remarquable que l'évolution précédente chez le Pineus pini se poursuit toujours en cinq stades successifs séparés par quatre mues, qu'il s'agisse des individus d'hiver ou des individus d'été ; tandis que, dans le genre Dreyfusia (D. Nüsslini et D. pireae), les sistentes évoluent seulement en quatre stades séparés par trois mues, les progre- dientes au contraire évoluant en cinq stades séparés par quatre mues. — Cette particularité me parait avoir une réelle impor- tance pour montrer que lexistence, dans le genre Dreyfusia, de deux types distincts, les sistentes et Les progredientes, constitue une différenciation morphologique bien spéciale qui n'est pas manifestée dans le genre Pineus. LES EXILÉS APTÈRES DE PREMIÈRE GÉNÉRATION ET LEUR DESCENDANCE. Les exilés aptères de la première génération printanière se fixent en grand nombre sur l'axe des jeunes pousses et s’en- tourent d'une sécrétion cotonneuse abondante ; parvenus au cinquième stade, ils pondent des œufs qui restent enveloppés dans cette masse filamenteuse ; ils sont en nombre notable- ment moins grand que ceux des hivernants. Plusieurs généra- tions annuelles se succèdent ainsi sur le Pin, et la dernière, présentant les caractères des hivernants, passe l'hiver. La multiplication continue de même façon les années suivantes, sans que la fécondité des Insectes paraisse aucunement s'a- moindrir, malgré labsence de toute reproduction sexuée. 230 PAUL MARCHAL En ce qui concerne le nombreetles caractères morphologiques ou biologiques des générations parthénogénétiques aptères et pinicoles qui se succèdent pendant l'intervalle de deux généra- tions hivernantes successives, mes observations sont concor- dantes avec celles de Bôrner. Le nombre de ces générations est variable suivant les conditions climatériques. En captivité, dans une serre ou dans un appartement aéré, la multiplication est rapide etles générations sont certainement nombreuses ; comme la ponte de chacune d’elles dure longtemps, elles chevauchent les unes sur les autres et l’on rencontre à la fois tous les stades. En plein air, la multiplication se poursuit d’une façon plus ente, el c’est, en général, semble-t-1l, la troisième génération succédant aux parthénogynes du dernier hiver écoulé qui passe l'hiver suivant. Il est extrêmement probable que des individus de la deuxième génération en retard sur leurs congénères n'’ar- rivent pas à se reproduire avant l'hiver et passent aussi l'hiver en mélange avec ceux de la troisième et parfois peut-être aussi d’une quatrième génération ; quant à la possibilité, pour certaines larves de la première génération (sœurs des ailés), d’esüver et d'attendre pendant tout l'été, pour hiverner ensuite et ne se reproduire qu’au printemps suivant, comme cela se présente chez d'autres espèces de Chermes, elle ne peut être admise, ainsi que cela résulte des observations faites en Allemagne par Bürner et des miennes faites aux environs de Paris. Ce fait que tous les individus de la première génération printanière et pini- cole du Ch. pini évoluent immédiatement pour se multiplier dans le cours de la même année est en rapport avec la non-différen- clation des sistentes chez le Ch. pini. Il est à noter que les individus qui composent les générations estivales ou automnales succédant à celle qui est issue des hivernants sont caractérisés par leur petite taille, le faible développement des glandes génitales, une sécrétion cotonneuse assez réduite et leur fécondité restreinte. Ils sont si petits qu'on les prendrait pour des individus incomplètement déve- loppés, si l’on n’apercevait en arrière de leur corps les quelques œufs auxquels ils donnent naissance. C’est seulement pour les individus qui auront passé l’hiver et qui se multiplhieront au printemps suivant que l’ancienne fécon- CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 237 dité se trouvera rétablie : mais alors elle le sera d'une facon complète, sans qu'il reste trace de la dégénérescence transitoire de l'été et de l'automne. On pourrait se demander si cette sorte de dégénérescence qui se produit à l'arrière-saison, évidemment sous l'influence d'une nourriture moins abondante, n’aboutit pas à la forma- tion de sexués vivant sur le Pin et précédant les hivernants. Mais, de même que mes devanciers, je n'ai jamais rencontré, parmi ces individus pinicoles, que des femelles parthénogénétiques. Les AILÉS (fig. 37). Apparition des ailés. — Les ailés se développent au prin- temps sur les jeunes pousses du Pin sylvestre, côte à côte de leurs frères les exilés aptères. Au cours de leur développement, ils se distinguent facilement de ces derniers parce qu'ils ne sont pas entourés d’une masse blanche cotonneuse aussi abon- dante. Ils apparaissent à l’état parfait sur les pousses du Pin sylvestre pendant une période qui s'étend environ du 25 mai au 5 ou 10 Juin (1). Depuis 1906, j'ai observé tous les ans la formation de ces ailés en nombre considérable sur les pousses de Pinus sylrestris, aussi bien dans les forêts que dans les pares. En 1912, ils ne sont appa- rus pourtant qu'en quantité réduite. Certaines années, telles que 1906 et 1909, peuvent être plus favorables que d’autres à leur grande multiplication ; mais on ne peut pas dire que, aux environs de Paris, l’essaimage des ailés ne se fasse que de temps à autre et que, comme Cholodkovsky parait l'avoir observé à Saint-Pétersbourg, ils puissent faire presque défaut certaines années. Au moment où les ailés viennent d'abandonner leur dépouille nymphale, leurs ailes sont encore recroquevillées et présentent une teinte jaune assez vive; mais celte couleur se dissipe très” vite; le corps lui-même, au moment de l'éclosion, est d’une couleur rouge jJaunâtre, la partie médiane de l'abdomen étant (4) En 1907, du 30 mai au 5 juin; en 1908, derniers jours de mai et premiers jours de juin ; en 1909, l’essaimage commence le 20 mai dans la nature ; il finit au contraire à la même date pour mes élevages en captivité portant sur la race orientalis (Exp. H), et en 1911 je commence à trouver des ailés le 23 mai. 238 PAUL MARCHAL plus foncée. Très peu de temps après leur apparition, les ailés déploient antérieurement leurs ailes et grimpent en haut des aiguilles ; on les voit alors ordonnés en files indiennes, les uns derrière les autres, sur une même aiguille ; et ce qui montre bien que, pendant cette période d'attente précédant la migra- tion, ils nese nourrissent pas, c’est qu'on peut les trouver ainsi rangés et prêts à prendre leur essor, aussi bien sur des aiguilles vertes que sur des aiguilles mortes et desséchées. Lorsque le soleil donne avec une force suffisante, ils prennent leur vol et se répandent dans la campagne, tantôt au loin, tantôt dans le voisinage immédiat du point où ils ont pris naissance. Les journées chaudes et ensoleillées favorisent beaucoup cette sortie des aïlés et leur permettent d'arriver en grand nombre à leur destination. Différenciation et destination des ailés. — Ainsi que nous l'avons dit, la destination des ailés prenant naissance au prin- temps surle Pin est variable. Les uns (sexupares) vont émigrer sur les Épicéas, où ils donnent naissance à des sexués : d’autres se fixent sur les aiguilles mêmes des Pins sylvestres (ersules alatae) ; un certain nombre enfin s’égarent ou vont se fixer sur des bourgeons de Conifères divers (Cèdres ou autres) sur lesquels ils ne peuvent fournir de descendance viable. On croyait, il y a peu d'années, que tous les ailés qui se forment au printemps sur les pousses du Pin appartiennent à la catégorie des sexupares. En 1903, Cholodkovsky trouva pourtant, dans le courant de juin, des aïlés de Chermes pini fixés par leurs rostres sur des pousses de Pin et illes mit en observation : ces ailés pondirent et leurs œufs se développèrent pour donner naissance à des larves pourvues de longues soies rostrales (langer Rüsselborsten- Schlinge) répondant au type des générations qui se nourrissent sur l'écorce du Pin. On pouvait se demandersi ces ailés n'étaient pas des migrantes alatae ayant pris naissance dans les galles alors problématiques du Chermes pini et étant venus se fixer sur le Pin; mais leur taille à peine supérieure à celle des sexupares et le petit nombre [4] de leurs gaines ovigères n'étaient pas en faveur de cette hypothèse. Cholodkovsky donna donc à ces ailésnon sexupareset engendrantsans émigrer des individus par- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 239 thénogénétiques sur le Pin le nom d'ersules alatae. D'après lui ils apparaissaient 2 à 3 semaines plus tard que les sexupares. En 1907, toute- fois, Bürner nia l'existence des er- sules alatae et, d'a- près lui, les ailés fixés sur le Pin que Cholodkovsky avait observés ne pouvaient être que des migrantes «ala- (ae. L'existence des exsules alatae est incontestable. Je les ai observés tous les ans depuis 1906, soit en li- berté, soit dans mes élevages ; en 1906, et surtout en 1909, ils ont été très abon- dants. Fig. 37. J'ai signalé leur HAS existence en 1908 dans des conditions expérimentales d'élevage (1) qui ex- cluaient d'une façon complète l'hypothèse d’une confusion avec des migrantes alatae retournés de l'Épicéa sur le Pin. Et, en 1909, je les ai obtenus encore sur trois Pinus sylvestris en pots qui, conservés dans une chambre, avaient été enveloppés d’un manchon de gaze ou emprisonnés dans des cages. Soit en liberté, soit dans mes élevages, les exsules alatae furent si abondants en 1909, que certaines pousses de Pin en étaient couvertes : sur une grande pousse Chermes pini (race indigène) : exsul alata , 7 juin 1908); traitement par la potasse. (1) G. R. Séances. Soc. Biol., LXV, p. 229. 240 PAUL MARCHAL de Pinus sylvestris cueillie en plein air le 1€T juin, j'en ai compté une soixantaine, déjà tous entourés d'une riche sécrétion cotonneuse et avant de 6 à 12 œufs sous leur corps. Sur cerlaines pousses, presque toutes les aiguilles portaient un exilé ailé formant une tâche blanche et j'en ai compté jusqu'à six sur la même aiguille. On peut en trouver aussi, mais généralement en moins grand nombre, sur les vieilles aiguilles quise trouvent immédiatement au-dessous de la jeune pousse de l’année. La figure 16 (pl. IV) représente un rameau de Pin chargé d’ersules alatae (les plus gros amas cotonneux) et d’aptères à des stades moins avancés (petits amas blancs). La localisation de ces ailés sur certaines pousses, qui en sont chargées à l'exclusion des autres, indique bien que ces ersules alatae se forment souvent sur place et sont assez sédentaires pour rester (sans doute par temps calme et frais) sur la pousse oùils sont nés : les pousses où ils se trouvent en nombre sont d’ailleurs garnies de sécrétion cotonneuse laissée par les larves et les nymphes qui leur ont donné naissance. Je n'ai pas observé, comme Cholodkovsky, deux temps d'éclo- sion séparés par un intervalle de deux à trois semaines, le premier pour les sexupares, le second pour les exsules alatae. Mais, aussi bien dans mes élevages qu'en liberté, j'ai constaté une continuitè dans le temps d’éclosion des ailés, sauf les arrêts accidentels qui tiennent à une série de jours frais et pluvieux. J'ai noté toutefoisque les premiers de Fessaimage avaient une tendance marquée à former des sexupares, tandis que les derniers ne formaient que des ersules alalae où mouraient sans se fixer (1). Il est donc fort possible que, si une période froide et pluvieuse vientà couper en deux la période d’essaimage, (1) En 1909 notamment, alors que l’essaimage des sexupares et leur fixation sur les Piceuorientalis se produisaient surtout du 22 au 25 mai, les exsules alatae ne commencaient àse fixer sur le Pin que le 27 mai, et leur nombre augmen - tait les jours suivants, pour arriver à un maximum vers le 1% juin. D'autre part, le 28 mai, en pleine période de fixation des exsules alatae, j'ai suspendu aux branches de grands Pins sylvestres, chargés de Pineus pini et présentant déjà des eæsules alatae, desflacons remplis d’eau où trempaient des rameaux de Picea orientalis; or, dans ces conditions, aucun sexupare ne se fixa sur les pousses d'Épicéa; au contraire le nombre des exsules alatae ne fit que s’'ac- croître sur les Pins. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHÉRMES 241 on ait deux séries d’ailés, la première formée surlout ou exclu- sivement de sexupares et antérieure à la période froide el pluvieuse, la seconde formée surtout ou exclusivement d'ersules alatae, succédant à cette même période. Ainsi s'expliquerait le fait rapporté par Cholodkovysky. Ici se pose une importante question, celle de savoir si Les sexupares et les ersules alatae sont, dès leur apparition, déter- minés comme tels, ou bien sic'est au contraire le fait d'émigrer sur l’Épicéa et de s'en nourrir qui détermine l’ailé comme sexu- pare, tandis que le fait de rester sur le Pin le déterminerait comme virginipare. Les éléments qui sont à la disposition de l'observateur pour résoudre la question sont de deux sortes : morphologiques et biologiques. Au point de vue morphologique, 1l n'existe pas de différence constante de structure appréciable entre les ersules alataeet les sexupares ; les antennes, le système glandulaire, qui fournissent habituellement les principaux caractères différentiels sont les mêmes dans les deux cas. Les ersules alatae sont toutefois en Fig. 58. — Chermes pini : plaque marginale droite du 4° segment abdominal ; a, chez le sexupare (fixé et ayant donné des sexués sur Picea orientalis, exp. 49, récolte du 23 juillet 1909); b, chez l'exsul alata (fixé sur Pinus sylvestris, exp. 35, 7 juin 1908). — Gr. — 460. moyenne un peu plus gros que les sezupares et leurs massifs glandulaires offrent des facettes généralement plus nombreuses (fig. 38); mais 1l existe de très grandes variations à cet égard et la taille maxima des serupares est supérieure à la taille minima des ezsules alatae. J'ai aussi fait la numération des gaines ovigères d'une façon comparative chez un grand nombre de sexupares et d'ezsules alatae récemment fixés et pris dans des conditions diverses; il n’y à pas davantage, à ce point de vue, de différences tranchées, pourtant le nombre des gaines ovigères est en moyenne supérieur chez les ersules alatae. 2492 PAUL MARCHAL Tandis qu'il est le plus souvent de #4 chez les sexupares, rarement de 5 ou 6, le nombre des gaines ovigères atteint au contraire très souvent 5 ou 6 chez les exsules alatae ; 1 descend rarement au-dessous de # chez ces derniers récemment fixés, tandis qu'il s'abaisse assez souvent à 3 et même parfois à 2 chez les sexupares. On peut done admettre que les individus présen- tant une taille au-dessus de la moyenne et portant un nombre de gaines ovigères inférieur à # ont en général une tendance à émigrer sur les Épicéas et à y constituer des serupares, tandis que les ailés ayant une taille au-dessus de la moyenne et ayant un nombre de gaines ovigères supérieur à 4 sont en général destinés à rester sur le Pin et à v devenir des ersules ala- (ae. IL est à remarquer, d'autre part, que les ailés de petite taille et à gaines ovigères peu nombreuses présentent aussi, au moment de leur transformation en imago, des œufs qui sont,en moyenne, moins avancés dans leur développement et moins chargés de vitellus que ceux des individus de grande taille et à gaines ovi- sères nombreuses examinés dans les mêmes conditions. On est ainsi conduit à penser que le fait d'accumuler des réserves plus abondantes se lie chez lailé à un instinct sédentaire et le porte à évoluer en ersul alata, tandis que la pénurie dans l'emmagasinement des réserves l’aiguillerait au contraire vers la sexuparité. Entre les deux termes extrêmes d’ailés nettement prédestinés dès leur apparition, soit comme sexupares {et picéitropes), soit comme ezsules alalae (et pinitropes), il y a place vraisembla- blement pour une série d'individus intermédiaires qui ne seraient pas plus déterminés pour une direction que pour l'autre : c’est parmi eux que doivent se recruter ces égarés que l’on voit, dans la nature, se fixer sur des Conifères divers inca- pables d'assurer le développement de leur progéniture et dont J'ai notamment rencontré d'assez nombreux représentants sur le Cèdre. Il est possible que, dans la nature, ces ailés à tendances incertaines deviennent, suivant les hasards de la migration, picéicoles et sexupares, ou pinicoles et virginipares; mais il parait bien difficile de donner la preuve de cette non-prédesti- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 243 nation de certains ailés pour la sexuparité où la virginipa- rité (1). Dans les élevages en captivité du Chermes pini, il existe toujours un très grand nombre d'ailés qui ne se fixent ni sur les Pins, ni sur les Épicéas mis à leur disposition : sollicités par le tropisme lumineux qui les porte sur le côté le plus éclairé de la mousseline dont ils sont entourés, ils y station- nent d'une facon indéfinie et meurent sans s'être fixés. I y a lieu de penser que ces ailés, qui refusent en captivité pendant toute leur existence de se fixer, sont prédestinés comme sexupares à une migration active : s'ils refusent de se fixer, alors qu'ils ônt à leur disposition à la fois le Pinus sylvestris, le Picea orientalis et le Picea excelsa, faut logique- ment en conclure qu'il existe, entre l’éclosion d’un ailé sexu- pare sur le Pin et sa fixation sur l'Épicéa, un acte à accomplir, constituant une condition nécessaire à sa maturation et dont la captivité entraîne la suppression plus ou moins complète cet acte, à mon avis, ne peut être que le fait mème de la mi- gration. Mon attention a été attirée sur l'importance que devait avoir le travail mécanique de cette migration par l'occasion que j'ai eue, en 1909, d'observer dans d'excellentes conditions l’essai- mage des ailés du Chermes pini en plein air. Le 22 mai, par un soleil ardent et un temps parfaitement calme, je vis au- dessus d'une petite plantation de jeunes Picea orientalis, assez voisine de grands Pins sylvestres, tourbillonner une véritable nuée d'ailés sexupares du Pineus pini. Partis des Pins, ces Chermes étaient attirés en quantités prodigieuses par les Épicéas et relenus par leur présence dans le voisinage; mais ce qui était surtout remarquable, c'était que, au heu de (1) Il est certes impossible, une fois qu'un ailé s’est fixé sur l'Épicéa, de le faire fixer sur le Pin, ou inversement; mais le fait seul que le Chermes s'est fixé sur l’une des deux essences à beaucoup de chances de rendre plus dif- ficile ou même impossible la fixation sur la plante opposée, alors même que, à son éclosion, l’Insecte eût été, àce point de vue, indifférent. J'ai aussi essayé de provoquer la fixation des ailés sur les Pins en les maintenant, depuis le moment de l’éclosion, dans une obscurité relative ou complète, ou à une température assez fraiche dans un sous-sol; mais je n’ai obtenu aucun ré- sultat probant. Après avoir placé une cage garnie d’étoffe noire sur un Pin où se formaient de nombreux ailés, j'ai constaté, au bout de quelques jours, que ceux-ci étaient morts et s'étaient desséchés sur les aiguilles. 244 PAUL MARCHAL s'abattre immédiatement et définitivement sur eux, ces minus- cules aïlés, suspendus dans l’espace lumineux, se livraient pen- dant des heures à une danse vertigineuse, faisant vibrer leurs ailes avec une extrême rapidité sous les rayons brülants du soleil. Cel essaimage el cette danse sont d'autant plus remar- quables que, tous les individus étant ici des femelles parthéno- génétiques, on ne peut les interpréter comme des phénomènes préliminaires du rapprochement des sexes. D'autre part, nous nous trouvons conduit à rapprocher ces faits de la constata- ion faite plus haut que le nombre des sexupares qui se fixent sur les Épicéas en captivité est relativement faible par rap- port à celui qu'on trouve au même moment en plein air, el cela malgré la très grande quantité d'individus mis en expé- rience : 1} vient alors naturellement à la pensée que le travail mécanique de la migration en plein soleil et les phénomènes physiologiques qui en sont la conséquence (oxydation, déshy- dralation), suivis d’une abondante absorption de sève au moment de la fixation sur les jeunes pousses de l'Épicéa, doivent jouer un rôle important pour amener les ailés à létat qu'ils doivent présenter pour engendrer des sexués. Ces condi- lions de la migration nous apparaissent comme intervenant pour achever la différenciation dans le sens sexupare, diffé- rencialion qui, ainsi que nous l'avons démontré d'autre part, se trouve, au moins pour un grand nombre d’ailés, amorcée avant le fait de la migration. Les facteurs qui entrent ici en cause nous semblent en somme devoir être considérés comme jouant un rôle analogue à ceux qui sont représentés par les con- ditions de l’arrière-saison pour d’autres animaux. Il m'est arrivé, dans des circonstances assez rares 1l est vrai, d'observer des ailés manifestement intermédiaires entre les sexupares el les exsules alatae. Ces ailés, tout en se fixant sur F'Épicéa, évoluent néanmoins d'une façon anormale attestant qu'ils se sont arrêtés en che- min dans la différenciation sexupare : ils développent une sécrétion cotonneuse moins abondante, pondent des œufs qui tardent à éclore, et enfin, fait capital, n’engendrent pas de sexués, mais produisent des petites larves destinées à périr, qui présentent des soies rostrales ayant une longueur beaucoup plus CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 245 grande (fig. 39) que celle des soies des sexués au même stade évolutif (fig. 42) et parfois atteignant presque la longueur de celles des larves parthénogynes engen- drées sur le Pin par les ersules alatae (fig. 41) : j'ai, dans une note antérieure, désigné ces larves sous le nom de /ar- ves intermédiaires. Dans la très grande majorité des cas, ces larves, mal adap- tées, sont destinées à avorter sur l'Épi- céa. Une fois pourtant, sur cet arbre, dans un de mes élevages, j'ai trouvé une forme très singulière ayant des antennes de sexué (femelle) et des moignons alaiï- res, forme par conséquent morphologi- quement intermédiaire entre un sexué et un sexupare (fig. 22). Rp L'existence des larves intermédiaires stade (forme intermé- dont il vient d’être question est un fait a se Lu s parthénogynes). méritant d'attirer l'attention, parce qu'il indique d'une façon manifeste qu'il n'existe pas de démarca- Lion tranchée, même au point de vue biologique, entre les sexu- pares et les ersules alatae, et les aïilés qui engendrent ces larves intermédiaires constituent ainsi eux-mêmes des êtres réelle- ment intermédiaires entre les ersules alalae (virginipares et pinicoles) et les sexupares. Les formes dont il vient d’être question ayant été observées dans mes élevages en captivité, c’est-à-dire dans des conditions telles que le phénomène de la migration ne pouvait s'accom- plir sans entraves, on pourrait se trouver ainsi porté à voir dans l'existence même de ces formes intermédiaires un nouvel argument en faveur du rôle actif de la migration dans la diffé- renciation du sexupare. Nous considérons toutefois comme plus vraisemblable que l'état intermédiaire de ces ailés était déjà définitivement fixé au moment de leur éclosion, et, dans ce cas, 11 y aurait alors, outre les deux prédestinations nor- males pour les ailés, une troisième prédestination anormale et rare, celle des ailés à descendance intermédiaire. Sila migration joue un rôle dans la différenciation sexupare, 246 PAUL MARCHAL il est ne tout cas certain qu'elle ne la détermine pas à elle seule. Cette détermination commence, en effet, avant la migra- tion et se manifeste dans la tendance plus ou moins grande Fig. 40. — Chermes pini (race indigène) : forme anormale intermédiaire entre le sexu- pare (ailé) et la femelle sexuée (récoltée morte sur Picea orientalis le 1e juillet 1909 expér. n° 44, artificiellement élargie par compression). Gr. = 120, que présente l’ailé à opérer cette migration ; si la tendance est nulle, l'ailé devient un exsul alata virginipare. Il est probable que cette tendance, très variable suivant les individus et qui, dès l’éclosion, aiguille déjà les uns dans la direction sexupare et les autres dans la direction virginipare, est liée à la nature des germes que contiennent les aïlés : pour la seconde catégorie (virginipares), la nature des germes serait telle qu'ils évo- lueraient facilement par parthénogénèse, et pour la première catégorie (sexupares), la nature des germes serait, au contraire, telle qu'ils ne pourraient évoluer par parthénogénèse qu'après l'excitant de la migration. La différenciation en sexupare nous apparaît ainsi comme un acheminement vers la différen- ciation sexuée. L'œuf, chez le sexupare, se développe moins facilement que dans les générations parthénogénétiques précédentes ; 1} n’est pourtant pas complètement imhibé comme l'œuf de Ia repro- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 247 duction sexuée, et il lui suffit de l’excitant de la migration pour qu'il poursuive son évolution. Après avoir étudié la différenciation des ailés et leur destina- tion, nous avons maintenant à retracer, à partir du moment où ils se fixent, soit sur le Pin, soit sur l'Épicéa, la biologie des deux catégories d'ailés (ersules alalae el sexupares), ainsi que les cycles des formes successives auxquelles ils donnent nais- sance. E XSULES ALATAE. Lorsque les ersules alatae se sont fixés sur les aiguilles du Pin sylvestre, ils pondent environ chacun une douzaine d'œufs, en s’entourant d’une masse floconneuse et abondante de sécrétion cireuse. Toutes les larves qui sortent de ces œufs, au bout de quelques jours, sont très différentes de celles issues des sexu- pares et elles s’en distinguent d’une façon manifeste par la lon- gueur de leurs soies rostrales caractéristique des larves à desti- nation parthénogénétique (fig. 23); les autres caractères de ces larves primaires issues des ezsules alalie sont également d'ailleurs ceux que l’on rencontre chez tous les individus des lignées pinicoles du Cherimes pini el lon constate notamment que les amas glandulaires font défaut sur le huitième et le neuvième segments abdominaux, tandis que ces amas sont, au contraire, présents sur les mêmes segments des larves pri- maires des sexués. Il résulte de la constatation même de cette détermination morphologique, et aussi de l'expérience 28, que les larves issues des ezsules alatae ne peuvent pas se développer sur lÉpicea. comme le font celles des sexupares. Elles avortent fatalement sur cet arbre. Voyons maintenant comment évolue la descendance des exsules alatae sur le Pin, c'est-à-dire dans son habitat normal. L'expérience 29 nous renseigne à cet égard et nous pouvons en déduire ce qui suit : Les larves issues des ersules alatae (fig. 41) se fixent souvent sur les aiguilles elles-mêmes en un point quelconque de leur longueur; elles peuvent se fixer à leur base au niveau de leur insertion, ou bien encore sur les rameaux, en dessous des 248 PAUL MARCHAL exfoliations de l'écorce. Les œufs pondus par les ersules alatae mettent un temps notablement plus long à se développer et Fig. 41. — Chermes pini : larve primaire issue d'un exsul alata, Vue par la face dorsale; le rostre et la boucle des soies rostrales sont vues par transparence Glycérine gélatinée. Gr. = 306. à éclore que ceux des sexupares. Vers la fin de juillet, certains individus de cette première génération issue des exsules alatae arrivent à maturité et commencent leur ponte; la plupart d’entre eux toutefois n’effectuent leur ponte qu’en septembre, et les œufs qui ont été déposés donnent alors naissance à la CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 249 deuxième génération de larves issues des ersules alatae et qui est destinée à passer l'hiver : elle correspond donc au point de vue de l’ordre de succession, à la génération des fondatrices qui émane des sexupares par l'intermédiaire de sexués et qui se trouve au même moment sur les Epicéas. La multipli- calion se poursuit ensuite conformément à ce qui à élé dit plus haut pour le eyele du Chermes pini, sans que les générations issues des exsules alatae puissent se distinguer des autres. La fécondité des individus issus des ersules alatae s’est, en général, dans mes expériences, montrée au-dessous de Ja moyenne et les individus hivernants n’atteignirent au prin- temps qu'une petite taille; 1ls ne présentaient que quatre gaines ovigères, landis que huit est le nombre habituel pour les hivernants ; une mortalité assez grande fut aussi constatée sur les larves pour les premières générations; mais il se peut que le transfert de la descendance des ersules alatae sur le jeune Pin mis en expérience dans l'expérience 29, ait réalisé pour les Chermes un changement de milieu défavorable, au moins pendant les premières générations (1). En tout cas, rien ne peut autoriser à dire que la lignée issue desersules alatae est destinée à s’éteindre: j'ai suivi la succession des générations de 1907 à 1909 et, au printemps de 1909, j'ai même obtenu des ailés parmi lesquels se trouvaient des exsules alatae. SEXUPARES. C'est dans les derniers Jours de mai et les premiers jours de juin que se fail habituellement la fixation des ailés sexupares sur les jeunes pousses des Épicéas. En 1906, je remarquai les premiers sexupares fixés sur les Picea orientalis le 30 mai : la lixation avait dù commencer à se produire un ou deux jours avant; le grand essaimage eut lieu Le 31 mai, jour très chaud et orageux. En 1907, je constatai les premières fixations le 26 mai. En 1908, bien que le nombre des ailés éclosant sur les Pins parût assez considérable, il n°y en eut que très peu, sans (1) I existe des variations assez grandes dans les Pins sylvestres et j'ai remarqué que certains individus sont plus réfractaires que d’autres à l’enva- hissement par les Chermes. ANN, DES SC. NAT. ZOOL., 9e série. 1913, xvurr, 17 250 PAUL MARCHAL doute en raison du temps défavorable, qui se fixèrent sur les Épiceas et je ne remarquai les premiers que dans les premiers jours de juin. En 1909, année remarquable par la chaleur et le temps sec du mois d'avril et de mai, les conditions furent particulièrement propices pour l’essaimage et la fixation des ailés ; le premier Jour de fixation eut lieu le 20 mai ; les 22, 23, 24 mai, jours parüculièrement chauds et ensoleillés, l'essaimage battit son plein, et c'est alors que j'observai le grand tourbil- lonnement des ailés autour des Picea orientals, dont j'ai parlé ci-dessus. La sécrétion cotonneuse se développa très vite après la fixation, etau bout d’un Jour ou deux, certains petits arbres, sur lesquels les Chermes s'étaient abattus, en étaient tellement couverts qu'ils paraissaient chargés de givre; ces aïlés for- maient sur beaucoup de pousses un revêtement presque continu. Les jours suivants, Je vis encore des ailés, mais en plus petit nombre, voler autour des Épicéas. Le premier juin, l’essaimage était définitivement terminé et l’on ne pouvait plus trouver d'ailés nouvellement fixés, facilement reconnaissables à l'absence de sécrétion cotonneuse. Il est remarquable pourtant qu'il y avait encore, dans la campagne, des ailés en train d’éclore sur les pousses du Pinus sylvestris el, les trois Jours précédents, 29, 30 et 31 mai, ces éclosions d’ailés avaient même été très abon- dantes. La fin du vol des ailés ne donna donc pas des sexupares, mais il fournit des exsules alatae dont je vis les premiers le 27 mai. Les sexupares montrent une élection toute particulière pour les bourgeons d'Épicéa fraichementépanouis et dont les aiguilles ne sont pas encore (rès écartées les unes des autres. Le Picea orientalis les attire surtout d’une façon très intense. Tous les Épicéas de même espèce dans un endroit donné, même les P. orientalis, ne sont pas d’ailleurs également attaqués et l’on constate à ce point de vue de grandes différences même pour des arbres très rapprochés. A l’époque où les sexupares se posent sur les bourgeons, 1l y a en effet, pour les Épicéas, detrèsgrandes variations individuelles au point de vue de l’état plus ou moins précoce ou tardif de la végétation. Il y en à qui sont trop en retard et dont les bour- geons ne sont pas suffisammentouverts; d’autres, au contraire, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 2951 qui sont trop en avance et dont les bourgeons se sont entière- ment développés en longues pousses. Or, ce sont les bourgeons présentant un état intermédiaire et fraichement épanouis qui présentent le maximum d’attraction pour les sexupares. Ils se glissent, tête première, entre les aiguilles qui com- mencent à s’écarter les unes des autres et se fixent, la tête dirigée vers la partie axiale de la pousse ; ils se trouvent alors souvent complètement dissimulés ou ne laissent apparaître que les extrémités postérieures de leurs ailes et ce n’est que les jours suivants qu'ils deviennent bien apparents en laissant émerger la petite houppe cotonneuse qui prolonge la partie postérieure de leur corps ; ensuite le bourgeon s’épanouit complètement, les aiguilles s’écartent et s’espacent, et ils sont mis complètement à découvert. Peu de temps après s'être fixés par leurs rostres sur l'Épicéa et avoir commencé à se nourrir de sa sève, les sexupares se meltent à pondre des œufs que l’on peut trouver, au début de juin, réunis en paquets et entièrement masqués sous les ailes et la sécrétion cotonneuse qui englobe l'animal; on peut en trou- ver de six à quinze par exemple. Ce dernier chiffre toutefois n'exprime pas le total des œufs pondus par le sexupare ; car les premiers œufs pondus commencent à éclore avant que la ponte de l'Insecte soit achevée. Pour établir le total des œufs pondus par un sexupare, on peut, à la fin de la période de ponte, compter les coques transparentes des œufs déjà éclos et ajouter au nombre obtenu celui des œufs qui restent à éclore : on arrive ainsi à un totalde vingt à vingt-cinq œufs. Cette ponte s'échelonne pendant une période assez longue, de deux à trois semaines environ; ‘et l’on peut trouver des œufs sous les sexupares pendant la plus grande partie du mois de Juin. lei se posait la question de savoir si le changement de nourri- ture (Pin pour Épicéa) retentit d’une facon perceptible sur les organes de la reproduction des sexupares et si, dans les modifi- cations qui pourraient être ainsi déterminées, ne résiderait pas l'une des causes de la différence si remarquable qui existe entre les descendances respectives des sexupares picéicoles et des exsules alatae pinicoles, malgré l'identité apparente de ces deux catégories d’ailés. 252 PAUL MARCHAL En 1908, j'avais cru constater que le passage des ailés sur le Picea orientalis détermine la régression de leurs gaines ovigères. En 1909, les circonstances ayant été beaucoup plus favorables pour l'observation qu’en 1908, j'ai examiné un grand nombre de sexupares, les uns dès le début de leur fixation, les autres à des périodes plus avancées. Je n'ai pu alors constater une diminution dans le nombre des gaines ovigères qu’à la fin de la période de ponte. Chez presque tous les individus, leur nombre tombe alors à trois, à deux, et même à l'unité. À ce moment toutefois, la grande majorité des œufs est pondue el il est bien évident que ce qui est en cause dans la déter- mination de ce phénomène de régression, ce n’est pas le chan- gement de régime, mais simplement l'épuisement de l’Insecte parvenant au terme de son activité reproduetrice. Il est par suite impossible de voir dans le phénomène de la régression des ovaires un fait corrélatif d’une action exercée par le changement de régime du sexupare sur sa descendance. On rencontre d’ailleurs souvent, dans la nature, des ailés de Chermes pini égarés sur d’autres essences, sur le Cèdre par exemple ; or, dans ce cas, J'ai trouvé parfois des œufs pondus par ces égarés qui ont donné naissance à des larves déter- minées comme sexuées et portant la courte boucle rostrale caractéristique. Nous nous sommes d’ailleurs expliqué plus haut sur la différenciation en sexupare et nous avons vu que la détermination de l’ailé vers la sexuparité se manifeste déjà avant la migration et dès son apparition sur le Pin. LES SEXUÉS. Quelques jours après avoir été pondus, les œufs des sexu- pares éclosent et donnent naissance aux petites larves des sexués (fig. 42) : celles-ci, comme Îles travaux de Cholodkovsky et de Bürner nous l'ont appris, diffèrent nettement des larves issues des virginipares par la brièveté de la boucle de leurs soies rostrales, qui n’atteint pas l'extrémité du rostre (fig. 42). Il est clair par conséquent, ainsi d’ailleurs que cela résulte de ce qui précède, que la détermination comme sexuée de la progéniture des ailés est faite dans le corps même des parents, avant l'éclosion des Jeunes. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 253 Nous avons vu que, dans les conditions artificielles des expé- riences (peut-être aussi accidentellement dans la nature), il ÿ a, parmi les ailés qui se fixent sur l'Épicéa, des individus à diffé- rencialion sexupare incomplète qui engendrent un certain nombre de larves non destinées à évoluer en sexués, et pouvant présenter des caractères intermédiaires (fig. 39). J'ai fait quelques expériences pour rechercher si ces larves ne pouvaient pas, au moins partiellement, évoluer en femelles Fig. 42. — Chermes prni : Fig. 43. — Chermes pini: sexué, au début du #° sexué, 1 stade larvaire. stade, vu par la face ventrale; l'ovaire droit est Gr. — 120. en voie de régression. Gr. = 145. parthénogénétiques. J'ai, à cet effet, mis en rapport avec des Pins sylvestres de nombreuses pousses d'Épicéa garnies de sexupares au moment de la ponte ; quelques jours après, les pousses des Pins se trouvaient envahies par les nombreuses larves qui sortaient des sexupares et qui étaient obligées de fuir les pousses d'Épicéa en voie de desséchement. Toutes ces larves ne tardèrent pas à mourir en refusant de se fixer sur l'Epicéa ; dans deux expériences pourtant, Je vis trois ou quatre larves muer et poursuivre leur évolution en femelles parthéno- génétiques (Exp. 27 et 53). Il semble donc bien que, dans la progéniture des sexupares, puissent se trouver accidentelle- ment des individus parthénogénétiques. J'ai fait aussi l'expérience inverse, consistant à placer au 25% PAUL MARCHAL milieu de pousses d’un Picea orientalis indemne des aiguilles de Pin détachées el portant des ersules alatae avec leurs œufs. Lorsque les larves de ces ersules alatae vinrent à éclore, elles se répandirent sur les pousses du Picea orientalis; mais, ne les trouvant pas à leur convenance, elles ne tardèrent pas à périr et à se dessécher. On devait d’ailleurs s'attendre à ce résultat d'après la structure de la larve des ersules alatae, nettement différente de celle des sexupares. Évolution des serués. — De la ponte jusqu'au moment où les sexués sont arrivés à l’état parfait, l'évolution dure un mois environ. Ils sont groupés à côté les uns des autres sous les ailes et la masse cotonneuse du sexupare qui leur a donné naissance (pl. IV, fig. 19 « et 19 4, et pl. VI, fig. 27); par la succion et lirritation qu'ils déterminent, ils provoquent la déco- loration circulaire de l'aiguille au niveau où ils se trouvent placés. Bien que l’évolution soit longue, l'accroissement de l'Insecte depuis sa première phase larvaire (fig. 42) jusqu'à l’âge adulte esttrès faible ; au cours de ce lentdéveloppement, l'Insecte passe pourtant par cinq stades successifs séparés par quatre mues. L'existence de ces cinq stades, conformes à ce qui à été démontré par Grassi pour le Phylloxera, ne peut faire aucun doute : les sexués en effet ne changent de place qu'à la fin de leur évolution, et l’on peut trouver en arrière de leur corps, réunies entre elles en une sorte de chapelet, les mues qui leur correspondent. Derrière le quatrième stade, qui précède le stade adulte, on peut aisément, par exemple, trouver les trois mues des stades précédents. La manière de procéder la plus simple est la suivante : on enlève avec précaution l’ailé et on découvre ainsi les sexués; or ceux qui ont dépassé le premier stade portent derrière eux un petit amas formé par les mues qu’ils ont abandonnées ; si l’on enlève avec la pointe d’une aiguille l’un de ces sexués, on entraine en même temps ce paquet enveloppé de quelques filaments cotonneux. Il suffit alors de mettre le tout dans un peu d'alcool à 909, puis de transporter dans de la glycérine diluée. Un individu au quatrième stade porte ainsi derrière lui ses trois mues reliées en chaîne, la première étant la plus éloi- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 259 gnée et la troisième celle qui touche à la partie postérieure de l'Insecte. À la fin de juin (1), ou dans les premiers jours de juillet, on Fig. 44. — Chermes pini : femelle adulte, vue par la face dorsale ; exemplaire récolté le 3 juillet 1908 sur Picea orientalis, expér. 35. — Gr. = 145. voit les sexués parvenus à l’état parfait (fig. 4% et 45) sortir de la masse cotonneuse adhérente au sexupare qui lui à donné naissance el qui est déjà arrivé au terme de son existence ou sur le point d'y parvenir. Les sexués courent alors de côté et d'autre sur les aiguilles et sur les diverses parties de la plante. Les mâles surtout sont très actifs. Ces derniers sont abondants dans les élevages qui ont pour point de départ des galles recueil- lies sur Picea orientalis VYannée précédente. Au dehors, aux environs de Paris du moins, les femelles sont beaucoup plus nombreuses que les mâles, et j'ai constaté ce fait même dans les parcs où se trouvent des Pirea orientalis ; enfin les femelles (4) En 1909, par exemple, on commençait à en trouver au dehors, sur les Picea orientalis, le 20 juin; dans les expériences en captivité (race orientalis) il y avait une avance considérable, et à la même date on trouvait déjà de nom- breux œufs fécondés à la base des pousses. 256 PAUL MARCHAL existent à l'exclusion des mâles, ou ceux-ci n'apparaissent que d’une facon exceptionnelle dans les forêts où le Chermes pim s’est toujours multiplié dans les conditions indigènes de notre pays, c'est-à-dire sans avoir à sa disposition le Picea orientalis pour effectuer sa migration. Nous reviendrons d’ailleurs sur ce Fig. 45. — Chermes pini : mâle, vu par la face dorsale ; l'un des exemplaires récoltés sur Picea orientalis dans les expériences 49 et 50, le 20 juin 1909; les stigmates du côté droit sont vus par transparence. — Gr. — 145. phénomène de la suppression ou de l'extrême rareté des mâles dans la génération bisexuée (phénomène de la spanandrie), en étudiant d’une façon comparée le cycle des deux races du Pineus pin, la race orientale et la race indigène. Après la fécondation, la femelle va chercher une retraite à la base des pousses, en se dissimulant sous les écailles qui forment à ce niveau une sorte de collerette : là elle dépose l'œuf fécondé, de teinte jaune foncé, qui est entouré d’un duvet léger mais encore assez abondant. C’est surtout sur le Picea orientalis que l’évolution des sexués se poursuit de la façon la plus complète et la plus régulière. Ils sont protégés et maintenus en place par la sécrétion cotonneuse des sexupares qui est plus abondante sur cette essence que sur CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 257 notre Épicéa indigène. Toutefois, même sur le Picea orienta- lis, un bon nombre de sexués s'égarent et se dispersent à un stade plus ou moins précoce de leur évolution en sortant de dessous l’ailé qui les abrite, puis ils ne tardent pas à périr : d'autres s'arrêtent à l’un ou à l’autre des stades du développe- ment et périssent sans que l’on puisse toujours définir la cause de la mort. Cette mortalité, fort inégale suivant les arbres ou les pousses que l’on considère, ne doit pas toujours être attribuée à une faiblesse physiologique des sexués corrélative d'un état rudi- mentaire de la reproduction bisexuée chez le Pineus Pini. Elle est due, dans bien des cas, à des ennemis des Chermes, et en parüiculier à de petits Acariens passant facilement inapereus à cause de leur exiguité, et aussi à des maladies parasitaires. Sur le Picea ercelsa, pour lequel le CAermes pini se trouve moins bien adapté que pour le Picea orientalis, c'esten masse énorme que les sexués périssent au cours de leur évolution. J'ai pourtant pu observer sur ces arbres un certain nombre de femelles parvenues à leur développement complet (voir notam- ment l'expérience 49). FONDATRICE. Les œufs fécondés abrités sous la collerette d'écailles qui se trouve à la base des pousses sont assez fréquemment piqués et détruits par les Acariens dont j'ai parlé plus haut et que l’on aperçoit très souvent lorsque l’on soulève ces écailles dans le cours de juillet. Lorsqu'ils échappent aux causes de destruc- Uüion dont la précédente me paraît la plus importante de toutes, ils donnent naissance, dans un délai assez court, à une larve fondatrice, c’est-à-dire destinée à fonder l’année suivante une colonie gallicole sur FÉpicéa où elle a pris naissance. Cette larve éelôt bien avant l'hiver. En 1907, le 18 juillet, et en 1911, le 17 juillet, je trouvais déjà des fondatrices au pre- mier stade larvaire, fixées à la base des aiguilles des Picea orientalis. La fondatrice du Pineus pini (pl. UE, fig. 14) est toujours fixée au niveau du petit coussinet qui occupe la base d’une des aiguilles d’une des pousses de l’année, jamais à la base des 258 PAUL MARCHAL bourgeons dormants, contrairement à ce que nous avons vu pour le Dreyfusiau Nüsslini. Peu de temps après son éclosion, elle se montre régulièrement garnie de baguettes cireuses, légèrement aplaties en lanières recourbées sur elles-mêmes el assez semblables à du verre filé (pl. TT, fig. 12, 13); ces baguettes, qui donnent à l’Insecte un aspect très original, cor- respondent aux plaques glandulaires qui garnissent sa région dorsale (texte fig. 47). A la fin de septembre, bien que les fondatrices soient encore au premier stade larvaire, la sécrétion cireuse est plus abon- dante qu'en juillet et prend l'aspect d’un feutrage blanc et frisé qui enveloppe l’Insecte ; elles deviennent alors très facilement perceptibles pour l'observateur et elles apparaissent à la base des aiguilles où elles se trouvent placées comme de petits points blancs saillants : c’est ainsi qu'elles passent l'hiver (pl: HT, fig. 14). Dès le début du printemps, dans la deuxième quinzaine de mars, la fondatrice effectue sa première mue, et son développe- ment se poursuit alors avec rapidité. Il est très remarquable qu'il s'effectue seulement en quatre stades séparés par trois mues, contrairement à ce qui a lieu pour toutes les autres formes de la même espèce (virginipares pinicoles, sexupares sexués, mügrantes alalae) qui évoluent en cinq stades séparés par quatre mues. Ce phénomène de tachygénèse ou d’abréviation dans le développement me paraît en rapport avec le maximum de caractérisation parthénogénétique qui se trouve réalisé par la fondatrice et qui succède immédiatement à la reproduction bisexuée. Dans le genre Dreyfusia, nous rencontrons le même phénomène de tachygénèse non seulement chez la fondatrice, mais encore chez les sis{entes, qui ne sont d’ailleurs, au point de vue morphologique, qu'une doublure de la fondatrice sur la plante intermédiaire. Dans la première quinzaine d'avril, on peut déjà trouver des fondatrices ayant atteint leur taille complète et ayant effectué leurs trois mues. Aussi bien pendant le cours de son évolution que lorsqu'il a atteint son développement complet, l’Insecte est enveloppé d’une sécrétion cotonneuse dense figurant une petite boule d’ouate, faite d’un feutrage très serré et occupant la base CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 259 d’une aiguille (pl. I, fig. 11 & et 15, f et j'). La fondatrice elle-même (texte, fig. 49) est noire, globuleuse: dès le 14 avril (en 1906), elle avail commencé à pondre des œufs d’une colo- ration brun rouge. Ces œufs sont pondus en très grande abon- dance. GALLICOLES. Les jeunes larves issues des œufs de la fondatrice envahissent les bourgeons (pl. IL, fig. 15) qui terminent le rameau sur lesquels elles se trouvent, au moment où ils viennent de débourrer, et se logent entre les jeunes aiguilles. La fondatrice étant toujours placée à une certaine distance de l'extrémité du rameau, les larves parcourent cette partie terminale et vont se distribuer dans le bourgeon unique ou dans les deux ou trois bourgeons qui occupent l'extrémité du rameau. Il se développe alors autant de galles (pl. IF, fig. 11 « et 110) qu'il y à eu de bourgeons envahis; s’ily en a plusieurs, le central, généralement plus épanouï que les autres au moment de l’envahissement des larves, formera une galle volumineuse et compacte ; les latéraux, moins développés et moins ouverts, ne peuvent le plus souvent héberger qu'un très petit nombre de larves dont la présence n’entraine alors que la déformation de quelques aiguilles. Contrairement à ce qui a lieu pour Le plus grand nombre des autres Chermes, la fondatrice ne peut avoir, chez le Pineus pin, qu'une influence secondaire dans la formation de la galle, et ce sont surtout les gallicoles qui en sont issus qui déterminent les déformations. La piqüre du jeune gallicole à la base de l'aiguille détermine une hypertrophie du coussinet de cette dernière et ce coussinet se développe en une sorte de bouclier qui abrite le Chermes logé dans une cavité incomplètement close. Vers le milieu de juin ces galles, déjà décrites par d’autres auteurs, prennentsouventune belle teinte pourprée ou carminée (pl. VI, 28 à); leur déhiscence commence, suivant les années, du 15 au 20 juin (1). Depuis le moment de leur apparition jusqu’à cette époque, les gallicoles passent par cinq stades suc- (4) Le 12 juin, en 1911, année très en avance. 260 PAUL MARCHAL cessifs séparés par quatre mues. Au moment de la maturité des galles, les nymphes sont mises en liberté; la mue des nymphes se fait immédiatement à la sortie des orifices de la galle et les dépouillles nymphales blanches restent accrochées, après l'éclosion, à la galle originelle el non pas aux feuilles du rameau, comme pour le Dreyfusia Nüsslini. La figure 28 b de la planche VI représente une galle au moment de l'éclosion. MIGRATION ET REPRODUCTION DES Migrantes alatae. Les gallicoles entièrement développés sont devenus les migrantes alatae. Libérés de leur dépouille nymphale, ils ne tar- dent pas à prendre leur vol et, abandonnant les Épicéas orien- taux, ils vont se fixer sur les Pins. Jamais ils ne se fixent sur le Picen orientalis, et leurs larves sont incapables de s'y déve- lopper : le premier point résulte de mes nombreuses observa- ions faites dans la nature et dans les élevages ; le deuxième résulte plus spécialement de l'expérience 33. Par conséquent il n'existe pas, chez le Pineus pini, d'ébauche d'un cyele monœ- cique comparable à celle qui peut se rencontrer chez Dreyfusia MNusslinr. Un fait très remarquable, c'est que les migrantes alatae se fixent en quantité très grande, parfois même en totalité, sur les Pins ou branches de Pin que l'on met à leur disposition en cap- tivité, même dans un espace très restreint. Ils se comportent donc, à ce point de vue, d'une façon fort différente de celle dont se comportent les sexupares vis-à-vis de l'Épicéa dans les mêmes conditions. Dans le cas des igrantes alatae, la migration à l'air libre n'apparaît plus comme un fait utile en lui-même à la con- Uünuation de l’évolution biologique, et le cycle se poursuit nor- malement alors même que l'exercice mécanique qu'elle entraîne fait défaut. Je n'ai pas constaté dans quelles conditions se fait le volde la migration de retour en liberté, mais je serais surpris, en raison de ce qui vient d’être dit, si les migrantes alatae, avant de se poser sur les Pins, se livraient à une danse aérienne sem- blable à celle qu'exécutent les sexupares avant de se poser sur les Épicéas. Dans les expériences que j'ai faites (31, 45), les migrantes alatae se fixent aussi bien sur le Pinus strobus que sur le Pinus CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 261 sylvestris, et ils y font une ponte également abondante; mais, tandis que sur le Pinus sylvestris les larves poursuivent leur évolution, elles avortent complètement et refusent de se fixer sur le Pinus strobus. C’est pendant la deuxième quinzaine de juin que s'effectue la fixation des migrantes alatae sur le Pin sylvestre, tantôt sur les aiguilles de l’année, tantôt sur les aiguilles plus anciennes; 1ls ne tardent pas alors à développer une abondante sécrétion cotonneuse se présentant sous la forme de houppes recouvrant le thorax et l'abdomen, mais laissant les ailes libres en arrière ; cette masse blanche et filamenteuse est moins longue que chez les sexupares fixés sur les pousses de Picea orientalis et les ailes restent presque toujours dégagées, se faisant remarquer par leurs reflets assez fortement irisés. La puissance reproductrice de ces migrantes est notablement supérieure à celle des sexupares. Les gaines ovigères sont au nombre de 18 à 20; au moment où ils émigrent, on trouve dans chaque gaine un œuf paraissant mür et deux en arrière plus ou moins chargé de vitellus: ils pondent des œufs abondants et, 10 jours environ après leur fixation, on peut trouver sous leur corps de 20 à 40 œufs d’un jaune brun foncé. Ces œufs commencent à éclore vers le 12 juillet. GÉNÉRATIONS PINICOLES ISSUES DES Migrantes alatue. L'éclosion des larves issues des œufs des #mnigrantes alatae se poursuit dans le courant de juillet; ces larves évoluent immé- diatement et subissent quatre mues sucessives pour se trans- former en exilés aptères ou parthénogynes; versle milieu d'août ces exilés ont déjà commencé à pondre : la ponte se fait d’une facon progressive et les éclosions d’une même ponte s'éche- lonnent sur une assez longue période : c’est ainsi, par exemple, que l’on peut trouver sous le même individu, à cette époque, une dizaine d'œufs plus ou moins avancés dans leur dévelop- pement, une ou deux jeunes larves venant d’éclore et des coques d'œufs déjà éelos correspondant à des larves dispersées. La génération qui passera l'hiver, d’après ce qui précède, ne sera pas celle issue directement des migrantes alatae, mais celle qui en est issue au second degré. 262 PAUL MARCHAL Il peut même se présenter, au moins dans les expériences en chambre, une autre génération partielle avant celle qui doit hiverner : en ce cas, les larves de deuxième génération, écloses en août, parviennent à l’état adulte en septembre et se mettent encore à pondre des œufs d'où sortiront des larves issues au troisième degré des migrantes alatae et qui passent l'hiver. Les individus des générations diverses, dont nous venons de parler, sont entourés d'un épais duvet cotonneux et sont fixés le plus souvent à la base des vieilles aiguilles, abrités par la collerette écailleuse qui sertit ces dernières; assez souvent on les rencontre aussi sur les rameaux eux-mêmes, plus rarement sur les aiguilles. LES DEUX RACES DU CHERMES DU PIN Nous avons expérimentalement montré, dans nos notes anté- rieures et dans ce qui précède, queles ailés des galles du Chermes décrit par Dreyfus sous le nom d'orientalis, et que l’on rencontre sur le Picea orientalis, émigrent sur le Pin commun (Pinus syl- vestris), pour Y formerdes générations parthénogénétiques, mor- phologiquement identiques à celles du Chermes pini de nos forêts et s'y succédant d’une façon semblable. Malgré ces résultats confirmés par Bürner, qui nous paraissent établir l'identité spécifique du Chermes pini indigène et du Chermes orientalis, Cholodkovsky (1) suppose que nous sommes en présence de deux espèces distinctes, bien que non morphologiquement recon- naissables, résultant de la scission d’une espèce primitive ; l'une de ces deux espèces, le Ch. pini indigène de nos forêts, ne conserverait plus la génération sexuée qu'à l’état de rudiment infonctionnel sur le Picea excelsa; l'autre, ayant un cycle complet avec génération sexuée normale sur le Picea orientalis, se serait cantonnée dans la région montagneuse de l'Europe orientale et méridionale, dans la patrie de l'Épicea oriental. Cette séparation existe-t-elle en réalité et, si elle existe, à quel degré les deux lignées sont-elles aujourd’hui séparées l’une de l’autre? Étant données mes observations en France, suivies de celles de Bôrner en Allemagne, il paraît difficile de s'expliquer l'ap- (1) Die Coniferen-Läuse Chermes, Berlin, 1907, p. 30 et 33. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 263 parition, dans nos régions, de galles répondant au type CA. orientalis sur les Épicéas du Caucase plantés dans les parcs, autrement que par une contamination venant de notre Chermes pini indigène, et ceci paraît d'autant plus problable que ce der- nier, contrairement à ce que l’on pourrait croire, préfère d'une façon marquée l'Épicéa oriental (Picea orientalis) à l'Épicéa indi- gène (Picea ercelsa) (Exp. 36, 52, 54). Le Chermes pini indigène et le Chermes orientalis semblent donc bien être spécifiquement identiques; mais il ne s'ensuit pas qu'ils ne puissent constituer des lignées ou des races biologiquement distinctes. Les expé- riences et les observations nouvelles que j'ai faitesme con- duisent même à conclure à l'existence, aux environs de Paris, de deux lignées du Chermes pini dont Cholodkovsky avait eu intuition pour la Russie : ces deux lignées sont représentées par une race indigène correspondant à la forme des forêts du nord de la Russie et se multipliant indéfiniment par parthénogénèse. sur les Pins, et par une race orientale correspondant à la forme du Caucase avec migrations régulières du Pin au Picea orientalis. Si le fait de l'existence de ces deux races me paraît bien établi, je considère pourtant qu'il est loin d'être démontré que ces deux lignées ont la valeur de deux espèces physiolo- giques absolument séparées et je suis au contraire porté à penser que l’une ou l’autre de ces deux races prend naissance, dans un pays donné, en raison de l'absence et de la présence de l'Épicéa oriental. Voici les observations et les expériences qui m'ont conduit à admettre l'existence des deux races du Chermes pin. Dans une première série d'essais, j'ai élevé la descendance pure du Chermes pini orientalis en contaminant des Pins avec des galles de ce Chermes récoltées sur Picea orientalis (Exp. 48, 43-49, 45-50), et dans une seconde série, J'ai élevé sur d’autres Pins sylvestres la descendance pure de Chermes pini mdigènes provenant de pousses de Pin récoltées dans la forêt de Mont- morency (Exp. 34-51, 52). Or, J'ai constaté que le Chermes pri de la première origine ne se comportait pas de tous points comme celui de la seconde ; ils ont chacun des caractères biologiques particuliers : 19 Le Chermes pini orientalis (issu de galles récoltées l’année 26% PAUL MARCHAL précédente sur Picea orientalis, par contamination d’un Pin au moyen de nigrantes alatae) donne, d’une part, un grand nombre de sexupares dont une forte proportion se fixent en captivité sur le Picea orientalis et, d'autre part, une quantité nulle ou très réduite d'ezsuwles alatas se fixant sur le Pinus sylvestris. Au contraire, le Chermes pini indigène, récolté en forêt, ne donne qu'un pelit nombre de sexupares se fixant en captivité soit sur le Picea orientalis, soit sur le Picea exrcelsa (1); 1l four- nit, par contre, un grand nombre d’exsules alatae. Les conclusions précédentes se déduisent des expériences d'élevage en culture pure déjà mention- aa nr nées 48, 43-49, 45- exua/is = (9) 50, pour le Chermes Picea Pinus du Pin oriental et 34-51, 52, pour le | Chermes du Pin in- Exsu au 2. digètie 17 “elles hivernan © A x | Fred copy] de contrôle à | l'expérience 35 por- xsu/ Fe tant sur le Chermes | du Pin indigène Fig. 45. — Schéma du cycle évolutif du Chermes pini, (mais non recueilli en forêt, et par con- séquent d'un caractère plus incertain au point de vue de la pureté) : cette expérience 35 était en effet déjà très suggestive au point de vue du grand nombre des ersules alatae et de la rareté des sexupares fixés. Une seconde démons- tration des mêmes faits a été donnée par les essais de contami- nation d'Épicéas et de Pins sylvestres au moyen d’ailés pris en train d’éclore sur des pousses de Pin cueillies en forêt en pleine 5°) période d’essaimage ; j'ai constaté que les ailés qui se fixent race indigène. (1) En forêt, le Pineus pini n'a à sa disposition, pour la reproduction sexuée, que le Picea excelsa ; or, non seulement je n'ai jamais trouvé de galles cor- respondant à cette espèce sur cet arbre aux environs de Paris, mais encore je n'ai constaté que rarement la présence de quelques exemplaires de sexu- pares sur le Picer excelsa dans le voisinage des Pins attaqués par le Pineus pini indigène de la forêt de Montmorency. L’attraction exercée sur les ailés du Pineus pini indigène par le Picea excelsa parait faible, même en pleine liberté. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 265 dans ces conditions soit sur le Picea orientalis, soit sur le Picea exvcelsa, sont en quantité relativement faible ou même nulle [Exp. 37, 38, 39, 54, 35 (section 1)] (1); au contraire, des exsules alatae assez nombreux peuvent prendre naissance, alors que les sexupares fixés font complètement défaut dans une même expérience (Exp. 38). 20 Les sexupares qui sont issus du Chermes pini orientalis (originaire de galles récoltées l’année précédente sur. Picea orientalis) donnent sur l'Epicéa oriental une abondante descen- dance de sexués composés de mâles et de femelles, et celles-e1 produisent des œufs fécondés très nombreux, fournissant autant de fondatrices destinées à former des galles l’année suivante (Exp. 48, 49, 50) (2). Au contraire, les sexupares, qui sont issus du Chermes du Pin indigène donnent sur l'Epicéa oriental et sur lEpicéa commun une descendance limitée de sexués (3), parmi lesquels jé n'ai jamais trouvé que des femelles (Exp. 35, 51, 52, 54). L'existence de deux races biologiques du Chermes pini étant établie, il s’agit de rechercher si, dans certains cas, l’une ne peut pas naître de l’autre, ou bien, au contraire, si le degré de séparation auquel elles sont parvenues est tel qu'elles arrivent à constituer deux espèces biologiques, ou sous-espèces, ne pou- vant plus se confondre quelles que soient les influences exté- rieures. Bien que cette question ne me paraisse pas pouvoir ètre encore tranchée d’une façon définitive, j'ai pourtant (1) Dans l'expérience 54, le nombre des sexupares fixés est plus considérable sur le Picea orientalis que dans les autres essais analogues; mais il est nul sur Picea excelsa; la proportion des individus qui se sont fixés sur l’Epicéa oriental dans cette expérience est d'ailleurs très inférieure à celle des sexu- pares fixés dans les expériences faites avec la race orientale directement issue des galles de Picea orientalis. (2) F’ai aussi obtenu dans les mêmes conditions, sur le Picea excelsa, des sexués provenant de sexupares de Chermes pini orientalis (Exp. 49) : mais ces sexués qui peuvent évoluer jusqu’à l’âge adulte sont en nombre beau- coup moins grand; beaucoup s’égarent et se dessèchent ; enfin je n'ai obtenu ni fondatrices ni galles dans ces conditions ; ce fait peut tenir soit à l'absence des mâles, soit à un avortement très précoce des fondatrices ; c'est un point toutefois que mes notes ne me permettent pas de préciser, (3) Cette lignée de sexués, même pour la race indigène, est notablement plus abondante sur l'Épicéa oriental que sur l'Épicéa indigène, contrairement à ce que l’on pourrait croire ; et il y a là encore un fait qui tend à prouver que c'est le Picea orientalis et non le Picea excelsa qui représente l'hôte pri- mitif du Chermes pini. ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 9e série. 1913, xvirt, 18 266 PAUL MARCHAL recueilli des données utiles pour sa solution et, par la voie de mes expériences en cours, 11 semble bien que ce ne soit qu'une question de temps pour y parvenir. Si lon considère que les Épicéas orientaux sont fort clairsemés dans les pares et qu'ils sont, d'une façon très générale, peut-être même toujours, issus de semis, si l'on songe, d'autre part, à la fréquence des galles du Chermes pini sur le Picea orientalis, on à peine à concevoir l'apparition originelle de ces galles dans les parcs des environs de Paris en dehors de l'intervention de notre Chermes pini indi- gène. [ne serait pas impossible pourtant que, dans certains pares, la race indigène et une race orientale réellement d’ori- gine exotique et importée avee des Épicéas ou des Pins d'Orient existent côte à côte el que ces races évoluent d’une facon absolument distincte et indépendante, tout en ayant l'apparence de se confondre en une seule en raison de leur identité morphologique. Aussi ne m'a-t-il paru possible de trancher cette question délicate, mais d’un grand intérêt, qu'en plantant des Picea orientalis reconnus indemnes dans une forêt et dans le voisinage de Pins exclusivement contaminés par le Chermes pini indigène. L'expérience est encore en cours. Les conditions sont les sui- vantes : Au printemps de l’année 1909, après entente avec le garde forestier, j'ai transporté dans la forêt de Montmorency un Jeune Picea orientalis en pot, ayant environ 70 centimètres de haut et présentant de nombreux bourgeons sur le point de s'épanouir. Cet arbre fut planté dans une clairière, sur la lisière d’un massif de Pins sylvestres assez fortement envahis par le Chermes pin el fournissant annuellement de nombreux ailés de celte espèce (1). Je plantai en outre, à la fin de la même année e{ dans la même localité, mais dans des expositions différentes par rapport au massif de Pins, quatre autres Épicéas orientaux. Or, jusqu'à présent, sur ces arbres en expérience, qui prennent un accroissement régulier, je n'ai vu apparaître, au cours des années 1909, 1910, 1911 et 1912, ni fondatrices, (1) Pour ne pas retarder la végétation, l'Épicéa ne fut pas retiré de son pot; mais ce dernier fut simplement placé dans un trou creusé en terre ; à l’au- tomne suivant le pot fut brisé pour permettre aux racines de s'étendre. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 267 ni galles permettant de conclure à la formation de la race orientalis aux dépens de la race indigène. Il est à remarquer d’ailleurs que des ailés assez nombreux se sont fixés sur ces arbres ; mais ceux-ci pourtant étaient loin d'en être chargés comme les Picea orientalis le sont souvent dans les pares. Les ailés venant des Pins du voisinage, qui se fixèrent ainsi sur ces Picea orientalis, donnèrent de nombreux sexués, surtout en 1911, sur l'Épicéa le plus anciennement planté et, au mois de juin, les sexués étaient groupés d’une façon très apparente, formant au niveau des verticilles supé- rieurs, sur le tronc ou à la naissance des rameaux, des amas ou un pointillé rouge plus ou moins dense. Tous ces sexués étaient caractérisés comme femelles ; 1! me fut impossible de découvrir un seul mâle. On ne peut évidemment conclure de ce qui précède à la séparation complète des deux races biologiques, Chermes du Pin indigène et Chermes du Pin oriental, et à l'impossibilité pour la première de se convertir dans la seconde ; car, étant donné le temps trop court qui s'est écoulé depuis le début de l'expérience et la surface d'attraction fortréduite que fournissent les cinq petits arbres nouvellement plantés, il se peut très bien que les sexupares n'aient pu encore se fixer en assez grand nombre pour que les très rares chances d’une génération bisexuée effective et aboutissant à la formation de galles se soient réalisées. Si donc la possibilité de la formation de la race ortentale aux dépens de la race indigène subsiste toujours, nous voyons en tout cas qu'il ne suffit pas de mettre des Épi- céas orientaux à la disposition de la seconde, même dans les conditions favorables de la liberté, pour que cette race orien- tale prenne immédiatement naissance. La multiplication par parthénogénèse sur le Pin, pendant de nombreuses générations, a causé dans l’espèce un état d'équilibre biologique tel que l'adaptation à l'Épicéa des sexupares et de leur descendance est devenue tout au moins plus difficile, sinon impossible, et que la génération bisexuée a régressé par extinction plus ou moins complète de son composant le plus différencié au point de vue sexuel, c'est-à-dire le sexe mâle. 2638 PAUL MARCHAL LA SPANANDRIE CHEZ LE CHERMES DU PIN J'ai donnéle nom de spanandrie au phénomène de la dispa- rition ou de l'extrême rareté des mâles dans une lignée qui est nettement spécialisée pour la reproduction bisexuée et qui succède à un cycle de générations parthénogénétiques. Nous venons de voir que ce phénomène, qui aboutit à l’oblitération de la reproduction sexuée, existe chezle Chermes pini chez lequel je l'ai pour la première fois signalé. Nous aurons encore à mentionner sa présence chez une autre espèce le Clermes strobn. (Voir ci-dessous). Dans tous les élevages en culture pure de la race indigène du Chermes du Pin. soit sur Picea orientalis, soit sur Paicea excelsa, je n'ai pu rencontrer que des femelles et lavorte- ment de la descendance de la lignée sexuée, ainsi que la rupture du cycle sur l'Épicéa qui en est la conséquence, est en rapport direct avec cette absence ou cette rareté des mâles. II est fort possible néanmoins que, dans certaines conditions, des mâles puissent apparaître chez la race indigène du Chermes du Pin, et c'est alors que la race orientale se constituerait aux dépens de cette dernière. Mais, ainsi qu'il résulte de l'exposé ci-dessus, ce fait n'a pas encore été démontré par mes expériences. Même dans les localités où existe la race orientalis (pépinières de Châtenay), j'ai constaté une prédominance très grande du sexe femelle sur le sexe mâle. C’est surtout en 1911 que mon attention a été attirée sur cette particularité. Pendant les mois de juin et de juillet, sur le Picea orientalis des pépinières de Châtenay, j'ai observé des légions de femelles innombrables: les mâles au contraire ont été tellement rares que je n'ai pu en découvrir un seul et, si je n'avais trouvé un cerlain nombre d'œufs pondus et ultérieurement une quantité fort restreinte d'ailleurs de fondatrices issues de ces œufs fécondés, j'aurais eu l'impression de l’absence complète du sexe mâle. Voici dans quelle conditions, j'ai fait ces observations sur la spanandrie, observations qui ont été singulièrement facilitées par ce fait que, en dehors des pépinières de Châtenay où Je me CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 269 rendais très fréquemment et où le phénomène se manifestait avec la plus grande intensité, j'avais à ma disposition, dans mon jardin, un petit Épicéa oriental qui avait attiré à la fin de mai un grand nombre de sexupares et qui me permit ainsi de suivre d'une facon quotidienne l’évolution de la génération sexuée. Le 12 juin donc, en faisant une visite aux pépinières de Châte- . nay, je constate que les Picea orientalis sont à ce point garnis de sexupares qu'ils semblent couverts de givre. L'évolution des sexués issus de ces sexupares est elle-même déjà fort avancée, un grand nombre sont sous leurs corps à tous les états de déve- loppement ; on voit en outre sur les jeunes arbres, au niveau des verticilles des branches, de grandes taches d'un rouge grenat disposées circulairement autour du tronc ; ces taches sont formées par des amas de femelles entièrement développées, qui, groupées par milliers, chevauchent les unes sur les autres, sur une épaisseur de plusieurs millimètres, de façon à former une masse rouge et grouillante masquant entièrement l'écorce. C’est surtout au niveau des deux ou trois verticilles placés au-dessous de la cime de l'arbre que se trouvent ces aggloméra- hions; la partie inférieure du tronc en est entièrement dépourvue; sur les verticilles où on les rencontre, les Insectes se groupent en masse plus dense au niveau des fourches for- mées par les insertions des branches ;"tout autour de l'arbre, ils constituent ainsi à ce niveau une sorte d’anneau formé par la juxtaposition des agglomérations qui correspondent aux fourches d’un même verticille. En outre, le long du tronc, entre deux nœuds successifs, des femelles disséminées par- courent l'arbre et pointillent l'écorce de rouge d’une façon très apparente. La structure rugueuse et écailleuse de l'arbre au niveau des insertions des branches facilite évidemment beaucoup le stationnement et l'accumulation des femelles. Dans mon jardin, sur un Picea orientalis, je constate à la même date un amoncellement de sexués semblable au niveau de l'un des verticilles. De même que sur les arbres des pépinières de Châtenay, il m'est impossible d'y découvrir un seul mâle. Ceux-ci, par leurs allures vives et leurs longues antennes sont pourtant facilement reconnaissables, et il eût été facile de les reconnaitre à l'œil nu, au milieu des agglomérations de femelles. 25 PAUL MARCHAL D'ailleurs, à différentes dates, j'ai brossé avec un pinceau les écorces au niveau où les Insectes se trouvaient rassemblés, de facon à les faire tomber dans des flacons contenant de l'alcool et à les examiner ensuite à loisir. Jamais, dans ces conditions, il ne ma élé possible de rencontrer un seul mâle. L'aspect des rassemblements de femelles par un temps chaud et au soleil est particulièrement curieux : c'est un inexprimable grouillement el toutes ces femelles fécondables, condamnées pourtant à la virginité, s'enchevêtrent les unes dans les autres, forment des pelotes qui se meuvent et qui parfois, bien que rarement, se détachent de l'arbre et tombent sur le sol. Les agglomérations que Je viens de décrire ont persisté pen- dant tous le mois de juin et la première moitié de juillet. Du 13 au 23 juin, elles étaient particulièrement riches en individus ; à partir de cette date, en raison du temps pluvieux, elles se désagrégèrent et se réduisirent d’une façon très notable. Le 29 juin, Jour chaud succédant à une période fraiche et plu- vieuse, les amoncellements se reconstituèrent avec leur richesse primitive; mais ils diminuèrent graduellement pendant la première quinzaine de Juillet, etle 16 juillet. dans les pépinières de Châtenay, on ne voyait plus sur les Picea orientalis que quelques femelles errantes extrèmementrares. J'ai constaté la présence des agglomérations de femelles en 19114, non seulement sur les Picea orientulis des pares ou jardins des environs de Paris, mais encore sur les jeunes Épicéas orientaux que j'avais plantés en 1909 dans la forêt de Montmo- rency, pour y recueillir les sexupares et les sexués émanant du Chermes du Pin indigène ; le nombre des sexupares fixés sur ces arbres ayant été toutefois beaucoup moins grand que dans les pépinières de Châtenay, le nombre des sexués (femelles) fut aussi bien moins considérable. Les femelles étaient groupées d’ailleurs, au niveau des verticilles, d'une facon tout à fait sem- blable à celle que l’on observait à Châtenay, mais en constituant des agglomérations moins étendues et moins denses. Enfin j'ai constaté aussi des rassemblements de femelles sur certains Picea excelsa, mais infiniment moins abondants et moins four- nis que ceux des Picea orientalis. Pendant toute cette longue période qui s’est écoulée du 12 juin CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 271 au 15 Juillet, les agglomérations n'ont pas été toujours cons- tituées par les mêmes individus ; leur population s’est cerlai- nement plus d'une fois renouvelée ; car la ponte des sexupares est très échelonnée et, à la fin de juin, on rencontrait encore sous leur corps de très nombreux sexués en voie de dévelop- pement. Si je n'ai pu constater la présence des mâles pendant toute celte période, on pourrait en rechercher la cause dans une courte durée de l'existence des mâles et supposer qu'ils se dis- persent ou se dissimulent de facon à échapper facilement à l'attention. Mais j'airecherché leur présencenon seulementsurles écorces, mais encore sur toutes les parties de l'arbre. De plus, J'ai isolé dans des flacons ou dans des capsules de Petri de nombreuses pousses de Picea orientalis, cueillies à différentes époques, du 12 juin à la fin de juillet, et chargées de nombreux sexués en voie de développement : ils ont tous évolué en femelles dont j'ai obtenu les éclosions par centaines. D’après tout ce qui précède, il faut bien admettre que les males du Ch. pini n'ont pu apparaitre en 1911 qu'en quantité tout à fait infime par rapport aux femelles qui furent extrêmement abondantes. Bien que relativement très rares, les mâles n'ont pas élé toutefois entièrement absents. J'ai en effet constaté la présence d'œufs pondus à la base des pousses à partir du 25 juin, ainsi que l'apparition de fondatrices issues de ces œufs et fixées à la base des aiguilles, à partir du 2 juillet. I faut donc admettre, ou bien que les femelles différenciées pour la reproduction bisexuée sont capables de donner des œufs évo- luant sans avoir été fécondées, ou bien qu'un certain nombre de mâles des Chermes du Pin sont apparus sur les Picea orien- lalis pendant les mois de juin ou de juillet, sans que j'aie pu constater leur présence. La première hypothèse, très invraisemblable, doitêtre écartée ainsi que le démontre l'expérience suivante. Pour me rendre compte en effet de la stérilité des femelles qui stationnaient indéfiniment sans qu'aucun mâle vint répondre à leur attente, J'ai recueilli à la fin de la période des éclosions, le 5 juillet, plusieurs centaines de femelles sur le tronc d'un Picea orientalis et je les ai mises en rapport avec un jeune Épicéa oriental en 272 PAUL MARCHAL pot, qui avaitété maintenu jusque-là à l'abri et sur lequel aucun sexupare ne s'était fixé. Toutes furent placées sur le même rameau et elles ne tardèrent pas à se disperser sur les différentes parties de ce râmeau ou du rameau voisin. Mais pas une ne se fixa ; aucun œuf ne put être trouvé à la base des pousses et aucune fondatrice n’apparut ultérieurement. Ainsi done les femelles qui erraient ou stationnaient en quantités énormes sur le Picea orientalis à la fin de juin ou au commencement de juil- let, en 1911, étaient bien condamnées, faute de mâles, à périr sans descendance. Pour expliquer la présence d’un petit nombre d'œufs de sexués et l'apparition de fondatrices, en dépit des circonstances précédentes, il ne nous reste done qu'à admettre que les mâles, bien que rares, n’ont pas complètement fait défaut en 1911; un petit nombre de femelles ont été fécondées d’une façon précoce par des mâles passés inaperçus; puis cette première série de femelles et de mâles est rapidement disparue pour faire place À une innombrable légion de femelles destinées à rester vierges el stériles. Confrontons maintenant les faits précédents avecles données qui nous sont fournies par nos expériences sur la race orientale et la race indigène du Chermes du Pin et qui se résument dans les deux propositions suivantes : 19 Le Chermes du Pin issu des galles sur Picea orientalis (race orientale) donne l’année suivante des sexupares qui engendrent un nombre normal de mâles (reproduction bisexuée typique). 20 Le Chermes du Pin qui, depuis un grand nombre de générations, ne se multiplie dans nos forêls que par parthé- nogénèse (race indigène) donne des sexupares dont la descen- dance est exclusivement ou presque exclusivement composée de femelles (spanandrie). — En nous basant sur ces faits, nous nous trouverons alors conduits à admettre que, dans les jardins ou pares des environs de Paris où se présente l'Épicéa oriental, la race orientale et la race indigène se trouvent en mélange : à la première, correspond la courte série formée de mâles et de femelles destinées à être fécondées ; à la seconde, correspond l'innombrable série exclusivement formée de femelles stériles, qui se prolonge jusque vers le milieu de juillet. Entre ces deux CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 273 races, ilest vraisemblable que tous lesintermédiaires se présen- tent, suivant que les Chermes se multiplient, depuis un temps plus ou moins long, par parthénogénèse exclusive, sans être passés par l'Épicéa. Si l’on considère l'abondance des Pins sylvestres aux envi- rons de Paris par rapport au Picea orientalis, ainsi que le très petit nombre de galles qui arrivent à se développer annuelle- ment sur ces derniers, ilest évident que les sexupares qui repré- sentent la descendance issue des galles développées au cours des dernières années doivent constituer une très faible mino- rité par rapport aux sexupares qui sont issus d'individus se multipliant exclusivement par parthénogénèse sur le Pin depuis un très grand nombre d'années. Il n’est done pas étonnant, dans ces conditions, de voir la spanandrie, qui caractérise la race indigène, prédominer dans une large mesure sur la repro- duction bisexuée, qui caractérise la race ortentale. J'ai essayé, dans ce qui précède, decoordonner les faits obser- vés de facon à en tirer l'interprétation qui me parait la plus acceptable. Mais il serait très désirable, pour généraliser et tirer des conclusions définitives, que d’autres observalions soient faites en d’autres pays dans lamême direction. Suivant les climats, suivant la fréquence relative des Épicéas et des Pins, le mélange plus ou moins intime des deux essences dans une même localité, 1l'est en effet possible qu'il se présente des races biologiques ayant des caractères différents. Ilest, à ce point de vue, trèsremarquable, d'une part, que les auteurs alle- mands ou russes n'aient signalé rien d’analogue à la spanandrie dans leur pays, et, d'autre part, qu'ils aient trouvé parfois, bien que rarement, des galles de Chermes pini sur le Picea excelsa. Morphologie externe de Pineus pini. Foxbarrice (Fundatrir). 17 stade. — Bien décrit par Bôrner (p. 178), sauf l'aspect extérieur de l'animal vivant et en place sur la plante, avec ses baguettes de sécrétion cireuse, que j'ai signalé dans le cours oi textereltreprésenté (pl Hbifis192%et"13); J'ai figuré la disposition EL des plaques du 1€T stade de 224 PAUL MARCHAL la fondatrice (fig. 47 et fig. 48). Peu de temps après la fixation de l’Insecte qui venait d’éclore, j'ai constaté que le nombre des facettes glandulaires qui accompagnent le pore des plaques céphaliques et protho- raciques élait souvent de trois ; au contraire, à la fin du stade, et notamment sur la dé- pouille exuviale corres- pondant à ce stade, on constate que le nombre des facettes glandulaires qui ac- compagnent ce pore est toujours de deux, conformément à la descriplion de Bürner. Or J'ai remarqué que, dans le cours de l'évo- lution du 1€7 stade, on peut trouver des pla- ques présentant une. condition intermédiai- Fig. 47. — Chermes pini orientalis : Fundatrix au le entre les précéden- premier stade, très peu de temps après sa fixa- AO PRES ; < tion à la base d'une aiguille de Picea orientalis, Les ; certaines de ces 44 juillet 1907; vue dorsale. Cet individu est le plaques montrent en UN CR glandulaires à con- tours très nets réfringents et foncés, c'est-à-dire avec leurs caractères normaux et en outre une autre facette glandulaire dont l'aspect est tout à fait intermédiaire entre celui d'une facetie normale et celui d’un des champs polygonaux voisins. Il semble donc bien que certaines des facettes glandulaires existant au début s'oblitèrent ensuite et se confondent avec les champs polygonaux. 2e 3€ et 4€ stades. — Ils sont caractérisés par la très grande fragmentation des massifs glandulaires, poussée bien plus loin que chez les parthénogynes hivernantes ou estivales. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 279 9 stade. — Antenne figurée par Bôrner (p. 178, fig. 60, 0). — Les massifs glandulaires sont déjà, à peu de chose près, aussi nombreux qu'aux 3€ et au 4€ stades el ont une disposition semblable; mais ils sont environ trois fois plus petits qu'au Fig. 48.— Chermes pini orientalis : Fundatrix au 1er stade, parties droites de la tête et du prothorax vues du côté dorsal; la base de l'antenne est vue par transparence. Gr: —"290: stade suivant et ont des éléments glandulaires notablement moins nombreux. ge stade. — Entièrement représenté par Bôrner (p. 179, fig. 62). L'antenne, plus trapue et raccourcie qu'au stade précé- dent, a été également figurée par le même auteur (p. 179, fig. 60, c). L'aspect et la disposition du système glandulaire ressemble étroitement à ceux du 4€ stade. 4 stade. (Fondatrice adulte). — J'ai représenté la disposition de l'appareil glandulaire dorsal chezla fondatrice adulte (fig. 49); les glandes s'étendent en outre sur la face ventrale. Le bouclier céphalothoracique dorsal est formé de sclérites correspondant à chacun des massifs glandulaires ; bien qu'ils soient très rapprochés les uns des autres, ils sont cependant 270 PAUL MARCHAL généralement distincts et non fusionnés par soudure en un bouclier commun ; chez certaines fondatrices pourtant la mem- Le É= Fr Les = R® <) ä) 07 or us ® gs Se EE € see Le Set CEE Re re <= Fig. 49. — Chermes piniorientalis : Fundatrix adulte, vue du côté dorsal. Exemplaire récolté sur Picea orientalis le 14 avril 4906. — Gr. = 90. brane qui réunit les sclérites s épaissit et il y à fusionnement plus ou moins prononcé. Les glandes s'étendent sur la partie ventrale du thorax et des segments abdominaux jusqu'au quatrième segment inelusive- ment. Les glandes coxales sont très développées, étalées en largeur et dissociées en plusieurs groupes; les glandes anten- naires sont réduites. | [ES] 1 CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 4 GALLICOLE (Gallicola où Migrans alata). 1er stade. — Semblable au 1€T stade larvaire des parthéno- gynes hiémales ou estivales, ainsi que l’a constaté Bürner. 2 et 3e stades. — Non étudiés. 4 stade (nymphe). — Décrit par Bürner (p. 181 etpl VII, fig. 45). 5e stade (migrans alata). — Décrit et figuré par Bôrner (p. 182 ; fig. 63, p. 180 ; glandes et antenne, pl. VIIL, fig. 204, 26 et 37 ;-pl. IX, fig. 53). PARTHÉNOGYNE (£rsul) . A. GÉNÉRATION HIVERNALE. — €7 s{ade. — Bürner (p. 172). 2e stade. — Bürner (p. 173). 3e stade. — Etudié et représenté par Bôrner (fig. 56, p. 174; fig. 59, & et b, p. 176; antenne, pl. VIL, fig. 16 4-c; plaques glandulaires du bouclier, pl, VIE fig. 7). Le bouclier céphalothoracique est nettement limité en arrière et ne présente pas un sillon séparant les deux parties céphalique et prothoracique aussi marqué que dans le stade précédent; la fusion est à peu près aussi marquée qu'au stade suivant. 4 stade. — C'est le stade qui a dû être omis par Bôrner. Il ressemble beaucoup au 5€ stade et n’en diffère guère que par l'absence de l’armure génitale. La fusion de la tête et du pro- thorax est opérée ; le bouclier estfortement chitinisé etnettement limité en arrière. € stade (Parthénogyne hivernante adulte). A été bien étudié, mais sous la désignation de 4€ stade, par Bôrner. Glandes et antennes représentées (pl. VIT, &ig. 16 de; pl. VIIT, fig. 47). Facettes glandulaires du bouclier céphalothoracique nom- breuses et fragmentation très marquée des massifs en ilots secondaires ; antenne très raccourcie; glandes marginales et pleurales de l'abdomen dissociéesengroupessecondaires, souvent lesmarginalesen deuxetles pleuralesen deux outrois. Les spinales font au contraire défaut sur presque tous les segments abdomi- naux; on peut en rencontrer toutefois des représentants très réduits sur les deux premiers. 278 PAUL MARCHAL B. — GÉNÉRATIONS ESTIVALES. — f€T sfade. — Ne diffère pas du premier stade de la parthénogyne hivernante. 2 stade (fig. 50). — Partiellement étudié par Bôrner. Il à figuré l'antenne moins rac- courcie que chez le stade correspondant de la parthé- nogyne hivernante (fig. 17 4, pi VE. Le bouclier céphalothora- cique est séparé par un sillon marqué en une partie cépha- lique et une prothoracique. Sa limite postérieure est plus nettement arrètée que dans les stades suivants et sur les mues ce bouclier céphalothoracique apparait nettement chitinisé et plus opaque que pour les autres Fig. 50. — Chermes ne (race indigène) : stades. Les glandes margi- parthénogyne estivale, mue correspon- nales s'étendent jusqu'au dant au 2 stade (abandonnée par le 3 ., ., L stade), partie droite de la région anté Sixième segment abdominal ; rieure, tête, prothorax et mésothorax ; ellés ne présentent que trois vue dorsale, les parties masquées de l'antenne et des deux pattes sont repré Ou quatre éléments ; elles sentées en pointillé. Juin 1908 — : à Gr: — 970. existent seules sur labdo- men, sauf sur le premier et le deuxième segment, où l’on rencontre de petites glandes spinales et pleurales rudimentaires. Sur la face ventrale, on rencontre des glandes coxales ou des glandes antennaires. Les trois articles de l'antenne sont bien distincts ; le dernier, cylindrique, relativement allongé par rapport aux stades suivants. 3e stade (Hg. 51). — Sommairement étudié par Bürner : il parle seulement des antennes qui se raccourcissent à ce stade chez l’estivalis Tandis qu'elles s’allongent chez le sexupare (fig. 17 6, pl. VIT). Le sillon quisépare le prothorax de la tête est moins accentué que dans le stade précédent. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 279 Sur la tôte et le thorax, le nombre des facettes glandulaires augmente, surtout pour les massifs éloignés de la ligne médiane ; au contraire pour les massifs Re à la ligne médiane (glandes spinales), beau coup restent identiques à ceux du 2€ stade, ainsi qu'on peut le constater par l'examen des mues d'un même individu (fig. 51). Les glandes marginales s'étendent jusqu'au septiè- me segment abdominal et comprennent un nombre d'éléments plus grand qu'au stade précédent (6-8): dans la région abdominale, les olandes spinales n'existent en général que sur les deux premiers segments et Îles glandes pleurales que sur Fig. 51. — Chermes pini (race indigène) : les trois premiers SES parthénogyne estivale, mue correspondant ments : elles sont d'ailleurs "st fatandennes pas saue) du detaille fort réduite. même région, mèmes observations. Gr. Æ stade (fig. 32-33). — Omis par Bôrner. Ressemble beaucoup à la forme adulte. La fusion complète du bouclier prothoracique et du bouclier céphalique s’est opérée. Le nombre des éléments glandulaires a augmenté et la frag- mentation des massifs marginaux s’est accentuée Les glandes spinales continuent à rester identiques à celles du 2€ et du 3€ stade (fig. 52-53). Les glandes marginales s'étendent jusqu'au septième segment abdominal, comme au stade précédent, mais avec des éléments un peu plus nombreux (une douzaine par exemple pour les premiers groupes); elles commencent à se fragmenter en îlots secondaires. Les glandes pleurales s'étendent jusque sur le cinquième segment de l'abdomen. Comparativement au stade correspondant de la parthéno- 280 PAUL MARCHAL gyne hivernante, le bouclier céphalothoracique est moins fortement chitinisé et moins nettement limité en arrière: la disposition de glandes est tout à fait analogue; les éléments glandulaires sont toutefois un peu moins nombreux. Fig. 52. — Chermes pini (race indigène): parthénogyne estivale, 4 stade; partie gauche de la région céphalique vue par la face ventrale. Les grands massifs glandulaires sont dorsaux et supposés vus par transparence. Juin 1908. — Gr. — 408. ; € stade (parthénogyne estivale adulte). — Complètement décrit et figuré par Bôrner, sous la désignation de 4 stade. Le nombre des facettes glandulaires à augmenté partout : même dans les glandes spinales antérieures l'augmentation du nombre des éléments est très notable. Les glandes marginales s'étendent jusqu’au septième segment abdominalet se sont frag- mentées en deux ou trois îlots : le nombre de leurs éléments a considérablement augmenté et s'élève à une vingtaine. Les glandes spinales ne s'étendent pas plus loin que le deuxième segment abdominal, et encore celles du deuxième peuvent-ellesêtrerudimentaires. Desglandes pleurales bien déve- loppées (10-15 éléments) se trouvent jusqu’au sixième segment abdominal. Un très petit groupe de glandes ventrales peut se rencontrer sur les premier et deuxième segments abdominaux. Comparativement au stade correspondant de la parthé- nogyne hivernante, les éléments glandulaires sont moins nom- breux ; de plus, la dissociation desilots des glandestégumentaires CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 281 n'intéresse généralement que les marginales qui se divisent en deux groupes, tandis que les pleurales et les spinales restent simples. On constate cette différence d'une facon très manifeste Fig. 53. — Chermes pini (race indigène) : parthénogyne estivale, mue correspondant au 4° stade (abandonnée par le 5e stade ou adulte) du même individu que celui dont les autres mues ont été représentées aux figures 50 et 51. Vue dorsale, le rostre et la base des pattes sont représentés en pointillé et supposés vus nes transparence. Gr 270; à la fois sur le bouclier céphalothoracique, sur le métathorax et sur l'abdomen. Pour ce dernier en particulier, on observe que la fragmentation en îlots secondaires n'intéresse, chez la par- thénogyne estivale, que les massifs marginaux qui se partagent en deux groupes, tandis que les pleuraux restent simples : ilen résulte donc la formation de trois amas glandulaires pairs pour les segments abdominaux qui n’ont pas de glandes spinales; au contraire, pour la parthénogyne hivernante, non seule- ment les nn marginaux, mais encore les massifs pleuraux prennent part à la fragmentation, et le nombre des amas glan- dulaires arrive ainsi à s'élever à cinq ou à six d’un côté du corps pour un seul segment abdominal. ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 9% série. 19143, xvirr, 19 289 PAUL MARCHAL SEXUPARE (Sexrupara) (fig. 55-57). v IT et 2€ stades. — Is se confondent avec ceux de la parthé- nogyne estivale. 2e stade. — Étudié par Bürner (p. 176). i Fig. 54. — Chermes pini (race indigène): parthénogyne estivale adulte (3° stade); même individu que celui dont les mues ont été représentées aux figures 50, 51 et 53. a, Sillon séparant le prothorax du mésothorax. Gr. — 270. On retrouve les deux grandes plaques céphalothoraciques séparées l’une de l'autre par un sillon longitudinal médian que l’on rencontre également à ce stade chez la parthénogyne hivernante et chez la parthénogyne estivale; mais le sillon transversal entre la tête et le prothorax persiste au 3€ stade chez le sexupare, tandis qu'il disparaît chez la parthénogyne. 4 stade (nymphe). — Décrit par Bôrner (p. 177); la CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 283 nymphe du Pineus strolt, à laquelle celle de Pineus pini res- semble étroitement, a été représentée par cet auteur (p.185, fig. 66). 3e stade (forme adulte ailée). — Décrit par Bôürner ‘{p.° 176). J'ai représenté : 19 l'antenne (protil et Fig. 55. — Chermes pini orientalis: Fig. 56. — Chermes pini orientalis: antenne de sexupare ; a, de profil; 6, abdomen d'un sexupare vu du côté vue par la face dorsale ; -exemplaire dorsal ; exemplaire récolté le 23 juillet récolté le 18 mai 1908 et éclos sur le 1909 sur le Picea orientalis de l'expé- Pinus sylvestris de l'expérience 31 rience 49 sur lequel il s'était fixé et (culture pure). Gr. = 380. avait engendré des sexués. face dorsale), d’après un échantillon dela race ortentalis (Hig. 55); 20 l'abdomen (face ventrale, disposition des massifs glandu- Fig. 57. — Chermes pini orientalis : plaques spinales du 1‘ segment abdominal d'un sexupare fixé sur Picea orientalis. laires), d'après un sexupare fixé sur Picea orientalis etayant déjà donné naissance à des sexués (fig. 56); 284 PAUL MARCHAL 30 les plaques spinales du premier segment abdominal (orien- talis) (fig. 57). 49 Ja plaque marginale du quatrième segment abdominal comparée avec celle d’un exilé ailé (ersul alata) (fig. 38). SEXUÉS (Seruales). FEMELLE. €T stade (lig. 42). — Amas glandulaires sur les huitième et neuvième segments abdominaux, ce qui, avec la brièveté des soies rostrales, différencie facilement cette première forme larvaire de celle des parthénogynes pini- coles. 92e stade. — A diffère du stade précédent par son antenne plus épaisse, à troisième article moins grêle, - terminé par une soie moins longue (fig. 58). Les digitules des pattes sont aussi moins longs, moins robustes et bien moins apparents. L'Insecte est de forme plus élargie. Les glandes génitales sont également développées de chaque côté du corps et forment une petite masse piriforme se prolongeant en arrière en un filament qui aboutit à l'invagination vaginale Fig. 58. — Chermes pini (fig. 62). rientalis : antenne gau- c A AN MR mu 3e stade. — Il ressemble beau- che d’une femelle au 2° stade (d'après une mue coup au précédent; mais est de taille abandonnée par une fe- XP melle au % stade), vue plus forte; les deux glandes génitales Re “entral. Sont encore d'un volume sensiblement égal. 4 stade (lg. 43, p. 255, et fig. 59). — Le dernier article de l'antenne est plus allongé que dans les stades précédents, légèrement arqué à son extrémité. A l'intérieur de ce 4€ stade, on voit souvent le 5e stade, c’est-à-dire la forme sexuée définitive, et l'antenne de cette dernière est incluse dans celle du 4€ stade comme dans un sac notablement plus large. Pendant la durée de ce stade, l’un des ovaires régresse progressivement, sans disparaître entièrement; l’autre ovaire est formé d’un ovariule contenant un Jeune ovule, le tout CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 289 étant coiffé de l’amas de cellules germinales (fig. 43 et 63). 5e stade (femelle adulte). — Elle est complètement repré- , A À \ sp HEC À Jp t À ep; ‘ 1 re AY NES Le Fig. 59. — Chermes pini : femelle au 4 stade, vue par la face dorsale : les stigmates, le rostre, une partie des pattes et des antennes sont vus par transparence. Traitement par la potasse caustique. Gr. = 255. sentée après fixation des tissus internes (fig. 44) et après trai- tement par la potasse (fig. 60). Forme ovalaire; système glandulaire assez complètement représenté. Les glandes marginales sont les plus développées et se présentent sur tous les segments, le nombre de leurs élé- ments étant en moyenne de 8 à 10; la glande impaire du seg- 286 PAUL MARCHAL ment anal est réduite et formée seulement de trois ou Fig. 60. — Chermes pini : femelle à l’état adulte, vue par la face dorsale ; traitement par la potasse et montage dans la glycérine gélatinée. Gr. = 143. Fig. 61. — Chermes pini : femelle adulte, partie postérieure de l'abdomen, vue par la face ventrale ; traitement par la potasse et montage dans la glycérine gélatinée. 0257 quatre petits éléments. Les glandes pleurales, comportant au plus quatre à cinq éléments, sont disposées sur un rang depuis CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 287 le mésothorax jusqu'au septième segment abdominal; les glandes spinales sont également disposées sur un rang du Fig. 62. — Chermes pini : organes génitaux d’une femelle au 2 stade. Gr. = 270. mésothorax au sixième segment abdominal, les dernières Fig. 63. — Chermes pini : organes génitaux d'une femelle au 4 stade vus par la face dorsale. L'ovaire droit est en voie de régression. étant très réduites et formés de un ou deux éléments. Le nombre des massifs glandulaires est de trois pour la tête 288 PAUL MARCHAL et de cinq à six pour le prothorax. Sauf pour les massifs margi- naux, le nombre des élements Nr qui constituent les glandes cé- Lee phaliques et prothoraciques est Na assez réduit. ee L'antenne (fig. 64 a), écail- NEA) 5 ï : : R'—+ leuse, présente un dernier ar- \ _ | A licle court et épais, égalant l = a URIN Cas FF, LE { AS Vas) 0) Ce ds | ee | PS | =. ee CS: 7 nerf RS ] \ à (ès # al ar co es = | \ + ms) à | AN is, ES à. Te RTS | S î Ne ft =) { LA | A —#) A ta = | su ; Rue ve Fig. 64. — Chermes pini: antennes des Fig, 65. — Chermes pini: male adulte; sexués ; &, antenne de la femelle; pb, extrémité postérieure de labdomen antenne du mâle. Très grossies. vue de profil. Gr. = 380. environ en longueur les trois quarts de l’article précédent; le rhinarium est voisin de l'extrémité. Mace. Évolution. — Je n'ai pas suivi d'une façon complète l'évolution du mâle. La différenciation des deux sexes ne m'a paru se manifester extérieurement qu'à partir du 32 stade, les individus mâles étant plus grèles et le dernier article de lan- tenne étant plus allongé chez les mâles. 5e stade (mâle adulte) (fig. 45, p. 256). — Un peu plus petit que la femelle. Forme ovalaire, allongée, avec la partie postérieure conique. Pas de massifs glandulaires sur le Corps. Antennes et pattes longues. Les antennes (fig. 64 0) pré- sentent un 32 article très allongé, mesurant près de emq fois la longueur du deuxième, et sinué dans sa région médiane. Le 4€ et dernier article est relativement plus allongé CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 289 et plus cylindrique que chez la femelle et le rhinarium est placé moins à l'extrémité. L'abdomen et l'appareil génital Fig. 66. — Chermes pini : mâle ; extrémité postérieure de l'abdomen, vue par la face ventrale, le pénis étant en extension et rejeté de côté. Gr. = 290. externe du mâle sont représentés [fig. 65, 66, 67). @ f 2 Ÿ 4 ? < Ve à die o Pa RER 4 à Rae À £ À Fu 4 % p æ ss & 7 \ DS RON î Ÿ He Se Pret. À D" > - ÿ * 2 2 ‘4 QE \ NGC Ps T X " Ne Fig. 67. — Chermes pini : mâle: extrémité postérieure de l'abdomen vue par la face D ventrale. L'anus représenté en pointillé est du côté dorsal et vu par transparence : la partie basilaire du pénis en extension est seule représentée. Gr. = 510. PINEUS STROBI (Hartig) Bürner. Cycle évolutif et biologie du Pineus strobi. Cette espèce de Chermes, très voisine de Pineus pint, Ni sur un Pin à cinq feuilles d’origine américaine, le Pinus strobus. actuellement très répandu en Europe et communément désigné par les horticulteurs sous le nom de Pin Wevmouth ou de Pin du Lord. On voit souvent sur le tronc et les branches des arbres 290 PAUL MARCHAL de cette espèce une abondante sécrétion blanche due à la pré- sence du Chermes qui nous occupe. En 1841, Hartig lui donna le nom de Chermes strobi, mais sans indiquer aucun caraétère qui permit de le différencier du Chermes pini; ce Chermes stroln d'Hartig semblait donc n'être qu'une espèce nominale établie pour le Pineus pini Vivant sur le Pinus strobus au lieu de vivre sur le Pinus sylvestris ; c'est du moins la manière de voir qui fut adoptée par les auteurs ayant eu à s'occuper de la question, notamment par Cholodkovsky et par moi-même : le Chermes strobi était done considéré comme identique au CA. puni, lorsque Je publiai les résultats de mes expériences démontrant que son cycle évolutif était complètement indépendant de celui du Chermes pini (19 octobre 1907 et 18 octobre 1909). J'avais en effet constaté que les aïlés qui se développent au printemps sur les pousses du Pinus strobus refusent de se fixer sur l'Épicea commun et sur le Picea orientalis, contrairement à ce qui à lieu pour le Chermes pnni. L'expérience m'avait également démontré que les Migrantes alatae du Chermes pini, quoique susceplbles de se fixer sur Pinus strobus et dv effectuer leur ponte, ne peuvent fournir de descendance viable sur cet arbre. La génération de larves issues des œufs des migrantes meurent en effet sur les écorces du Pinus strobus, sans se fixer Exp 61,45): L'indépendance des deux espèces s/robi et pini ne tarda pas à être confirmée par Bürner qui s'appuya pour l'établir sur des caractères morphologiques résidant principalement dans la structure des plaques cirières (Voir p. 292). Le evele du Chermes strohi se poursuit aux environs de Paris de la facon suivante : La génération qui passe l'hiver sur le Pinus strobus achève son évolution au début du printemps et, dès la fin de mars ou les premiers jours d'avril, la ponte commence: les Chermes enveloppés d’une masse blanche cireuse se montrent alors sous la forme de petits tampons cotonneux à la base des aiguilles, sur les rameaux ou sur le tronc lui-même, en général abrités par une esquille d'écorce ou par un bourgeon. Lamultiphieation et l'évolution des générations sur le Pin se continue d’une façon très analogue à ce que nous avons vu pour le Chermes pau. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 291 Les ailés apparaissent sur les pousses du Pinus strobus dans les derniers Jours de mai et les premiers jours de Juin, avec un léger retard sur ceux du Chermes puni, qui se montrent vers la même époque sur le Pinus sylvestris. Contrairement à ce qui a lieu pour le Chermes pini, les exsules alatae, S'ils existent, sont, en tous cas, fort rares chez le Chermes strobi, et Je n'ai aucune observation positive en ce qui les concerne. Les ailés sont donc tous, ou presque tous, des sexupares et comme, d’une façon très générale, ils n’ont pas à leur disposition en Europe l'espèce d'Épicea sur laquelle ils peuvent émigrer et engendrer les sexués, ils se perdent au moment de l’essaimage sans pouvoir laisser de descendance. Les exilés aptères qui restent sur les Pins assurent alors seuls la reproduction par parthénogénèse indéfinie sur le Pinus strobus. Jusqu'ici le Chermes strobi n'était connu que par ses géné- ralions parthogénétiques. Or, dans un parc où se trouvaient des Picea nigra (Épicea d'origine américaine) placés dans le voisinage de Pinus strobus couverts de Chermes, j'ai trouvé en juin de très nombreux sexupares du Chermes stroln fixés sur les aiguilles et en tram de pondre. J'ai de plus expérimen- talement fait émigrer sur le Picea nigra des sexupares recueillis sur les pousses de Pinus strobus (Exp. 57) ; ces sexupares pon- dirent et donnèrent des sexués assez nombreux qui évoluèrent complètement; mais ces sexués appartenaient tous au sexe femelle (spanandrie). Ainsi donc, même en fournissant de Chermes stroli le Picea nigra quiattire ses sexupares et permet leur reproduction, le cycle de ce Chermes ne s’en trouve pas moins interrompu et aucune galle n'apparaît sur le Picea nigra: dans ces conditions, ce cycle nous apparaîtcomme entièrement superposable à celui du Chermes pini imdigène. Il reste main- tenant à observer le Chermes strohi dans sa patrie d’origine et dans les forêts où le Pinus strobus se trouve en mélange avec les espèces d'Épicéas susceptibles d'attirer ses sexu- pares tels que le Picea nigra. XL est très probable que dans ces conditions, la reproduction sexuée comporte à la fois des mâles et des femelles et qu'elle aboutit par l'intermédiaire de fondatrices à la formation de galles donnant des muügrantes 292 PAUL MARCHAL alatae. On se trouverait ainsi pour le Chermes stroh en pré- sence d'un cyele complet avec migrations alternatives, et entiè- rement comparable à celui de la race orientalis où Chermes pini. Morphologie externe du Pineus strobi. Les caractères morphologiques qui différencient les généra- tions parthénogénétiques du Pineus strohi de celles du Pineus pirni ont été mis en évidence par Bürner, ce qui nous dispen- sera d'entrer dans des détails sur cette question. Le caractère qui parait le plus tranché et le plus constant pour le Pneus strobi, surtout chez le sistens (vurgo hiemalis de Bürner), est celui des facettes glandulaires du bouclier céphalothoracique limi- tées par les mailles d'un réseau polvgonal foncé (fig. 68) au lieu Fig. 68. — Chermes strobi : massif Fig. 69. — Chermes pini : massif glandu- glandulaire céphalique postérieur droit laire céphalique postérieur droit d'un d'un sexupare fixé sur Picea nigra sexupare fixé sur Picea orientalis. var. Doumeli: Châtenay, 12 juillet 1909. d'être séparées et cerclées chacune pour son compte, comme chez le Pineus pini (fig. 69). Pour les ailés sexupares, la même particularité différencie très bien les deux espèces, si l'on exa- Fig. 70. — Chermes strobi : plaques spinales du 1% segment abdominal d'un sexupare fixé sur Picea nigra var. Doumeti; Chätenay, 12 juillet 1909. mine le premier anneau abdominal (fig. 70) : celte différencra- tion par contre se perd sur les anneaux suivants, surtout sur les groupes non marginaux. Au premier stade, j'ai trouvé le groupe céphalique de glandes spinales postérieures présent aussi bien chez Pneus CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 293 pini que chez Pineus strobi, tandis que, d’après Bôrner, 1l manquerait chez Pineus pini et serait présent chez Pineus strobr. En maniant de nombreux exemplaires de Pineus pini et de Pineus strobi, on constate qu'il y a une différence de taille moyenne très notable entre les deux espèces, ceux du Pieus strobt élant en moyenne plus petits. Les caraclères de forme donnés pour les antennes (fig. 71) ne sont pas toujours facilement appré- ciables à cause de la variabilité que pré- sentent ces appendices dans les deux espè- ces. On peut noter toutefois pour les ailés que, chez le Pineus strobi, le dernier arti- cle de l’antenne est en général plus court, moins oblong que chez Pineus pin ; ce n'est pas toutefois un caractère qui paraisse constant. L'étranglement basi- laire des articles an- tennaires peut être aussi accentué chez Pineus pini que chez PP Sstrobreblonvne peut trouver dans cette particularité structurale un carac- tère permettant de différencier les deux espèces. Par contre, A Fig. 71. — Chermes stro- ( a d bi: antenne droite d'un |J’antenne parail LOU RES TERRES Chermes sexupare fixé sur Picea : a strobi : antenne de la nigra var. Doumeti, : JOUTS plus grossière- femelle : exemplaire face dorsale; Châte- RS ” récolté sur Picea ni- ie juillet 4609. ment écailleuse chez gra. Expérience 57. Gr. = 340. Pineus stroh que Très grossi. chez Pineus pin et surtout les membranes sensorielles ou rhinaria sont cerclées par un cadre plus haut, faisant saillie sur la coupe optique d'une facon très accentuée. Chez Pineus strohi, les écailles sont moins nombreuses et limitées par des crêtes plus épaisses, 294 PAUL MARCHAL ce qui donne à l'antenne une structure d'apparence plus gros- sière; on compte environ trois crêtes entre la base du dernier (5€) article et le rhinarium de cet article, tandis que chez Pineus pini on en compte cinq ou six ; de même, chez P. strobi, on compte environ cinq de ces lignes entre la base de l’avant- dernier arliele et le rhinarium correspondant, tandis que chez P. pini, on en compte environ huit. Chez la femelle sexuée, on rencontre des caractères différen- tels de l'antenne analogues (fig. 72). La surface est grossière- ment écailleuse et le dernier article est notablement plus court et plus arrondi à son extrémité que chez Pineus pini; sa forme est celle d’un ovoïde légèrement resserré vers la base. TABLEAUX DES EXPÉRIENCES EXPÉRIENCE 1 (Dreyfusia Nüsslin). Faits principaux. — Développement de la génération sexuée et formation des galles sur le Picea orientalis. Disposition. — Le 1€T juin 1907, la cime d'un Picea orienta- lis en pot, jusqu'alors conservé à lPabri de toute contamination, est entourée d’une cloche percée recouverte de mousseline, et une trentaine d'ailés de Chermes Nüsslini récoltés sur des Abies, dans un parc assez éloigné, sont introduits : un bon nombre d'entre eux sont, à l’aide d’un pinceau, directement placés sur les pousses. Une vingtaine sont encore introduits les jours suivants, et enfin une trentaine le 5 juin. Pendant toutes ces opérations, l’arbre est conservé dans une chambre elose et il y est maintenu jusque vers la fin de juillet. Observalions el résultats. — Le 1% juin, je vois une ving- taine d'ailés sexupares fixés sur les aiguilles du Picea orientalis, et ayant développé leurs sécrétions cireuses en forme de crosses si caractéristiques. Le 18 juin, des larves engendrées par les sexupares sont écloses et se sont dispersées sur les pousses : elles sont fixées sur les aiguilles et se nourrissent; beaucoup d’œufs restent encore à éclore. Jusqu à la fin de juin, les sexués continuent à se développer : ils sont placés surtout à l'extrémité des pousses CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 295 et à la base des aiguilles, disposés isolément, la tète générale- ment tournée vers la base; à la partie postérieure de l'Insecte perle une gouttelette à côté des mues qu'il à abandon- nées. Le 10 juillet, la cloche est retirée et un examen plus complet peut être fait. Beaucoup de sexués arrivés à leur développe- ment complet sont alors descendus le long des pousses et l’on en trouve notamment en assez grand nombre au niveau de la tubulure par laquelle la branche entre dans la cloche; cette tubulure avait été obturée avec de l’ouate et dans celle-ci un certain nombre de sexués se sont trouvés pris. Des femelles fécondées se sont arrêtées pour pondre sous le petit manchon d'écailles qui enveloppe la base des pousses; en soulevant ces écailles de façon à dégarnir cette base, je trouve des œufs pondus par les femelles : ils sont jaunes ou brun-rouge; on voit dans certains d’entre eux deux points noirs correspondant aux yeux des embryons; ces œufs sont entourés d’un petit réseau cotonneux. À la base d’une pousse je trouve sept de ces œufs provenant de femelles fécondées ; dans leur voisinage on remarque souvent les cadavres desséchés des femelles qui les ont déposés. Le 1er août, 1l y a des fondatrices issues des œufs fécondés et fixées à la base des bourgeons; mais elles ne sont pas très nombreuses. Elles passent toute Ja fin de la saison au 1€T stade larvaire. Le 27 mars 1908, 11 y a trois fondatrices ayant déjà atteint toute leur taille et portant en arrière d'elles un paquet d'œufs; quelques autres paraissent arrêtées dans leur développement. Dans le courant d'avril, les œufs continuent à s’amonceler der- rière les fondatrices, puis les larves éclosent et envahissent les bourgeons à la base desquels se trouvait la fondatrice qui leur a donné naissance. En mai, trois galles bien conformées et une rudimentaire se développent. Les trois premières arrivent à maturité. EXPÉRIENCE 1 bis (D. Nüsslini). Faits principaur. — De même ordre que ceux de l'expé- rience précédente : fixation des sexupares, développement de 296 PAUL MARCHAL la génération sexuée et formation des galles surle Picea orien- talis. Disposition. — Le 30 mai 1908, un Picea orientalis en pot est placé à l'extérieur (laboratoire de plein air) sous un grand sac de mousseline verte (1). Je Le contamine en versant dans le sac de nombreux ailés récoltés dans la matinée sur Abies nordmannian« et en Y joignant quelques pousses de cet Abies couvertes de nymphes et d’ailés. Le 1T juin, de nouveaux ailés sont ajoutés en assez grand nombre: ils ont été recueillis en passant sur les pousses des arbresotils se trouvaient un pin- ceau de grosse taille et très souple, de facon à faire tomber, sans les endommager, les Insectes dans une boîte maintenue au-dessous des branches. Observations et résultats. — Après la mise en expérience et les jours suivants, il fut remarqué que les ailés, en raison sans doute de la coloration verte de la mousseline, ne station- naient pas sur celle-ci, et restaient généralement dissimulés dans le feuillage. Un examen de l'arbre mis en expérience, qui fut fait le 11 juin, montra pourtant que, étant donné le très grand nombre des ailés mis en expérience, la proportion de A N .. Frs . nn = : . « . . r . . ceux qui s'étaient fixés sur le Picea orientalis était relativement faible par rapport aux non-fixés et certainement inférieure à celle de l'expérience n° 1. Les aïlés qui se fixèrent donnèrent pourtant une génération normale de sexués et ceux-ci pro- créèrent des fondatrices qui, en 1909, donnèrent naissance à seize galles sur l'arbre mis en expérience. (1) En employant une mousseline de cette couleur, mon but était de cher- cher à diminuer la tendance que les aiïlés ont à se porter et à stationner indéfiniment sur les parois du sac dans lequel ils sont emprisonnés, au lieu de se fixer sur la plante où la reproduction sexuée doit s’accomplir. Empri- sonnés sous une mousseline verte, les sexupares se sont en effet montrés beau- coup plus calmes et moins portés à quitter leur prison pour s'épuiser contre les parois de mousseline; mais, d'autre part, ainsi qu'on le voit dans l’expé- rience relatée sous ce numéro 1 bis, la proportion des sexupares fixés sur le Picea orientalis ne s'est pas trouvée augmentée par cette circonstance et est même restée inférieure à celle de l’expérience n° 1. Peut-être ce fait est-il attribuable à ce que la mousseline verte, déterminant une diminution de la mobilité des sexupares, empêchait ces derniers d'effectuer en captivité le tra- vail mécanique nécessaire pour compenser celui de la migration en plein air. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 297 EXPÉRIENCE 2 (D. Nüsslini). Faits principaux. — Développement de la génération sexuée et des fondatrices sur le Picea excelsa; les galles ne se déve- loppent pas sur cet arbre. Disposition. — Le 2 juin 1907, la cime d'un Picea excelsa en pot, jusqu'alors conservé à l'abri de toute contamination exté- rieure, est entourée d'une cloche percée recouverte de mousse- line; une trentaine d'ailés sexupares de Ch. Nusslim sont introduits et placés sur les pousses, le 3 et le # Juin. Mêmes conditions que dans l’expérience n° 1. Observations et résultats. — Le 14 juin une dizaine d’ailés sont fixés et montrent leurs sécrétions en crosses caractéris- tiques. Un nombre considérable de sexués se développent les jours suivants. Le 5 juillet, un assez grand nombre d’entre eux sont morts ; mais en écartant les aiguilles terminales des pousses, on en voit encore un bon nombre qui sont logés à leur base, entièrement cachés et bien vivants. Le 12 juillet, un certain nombre de sexués ont achevé leur évolution et des femelles ont pondu des œufs fécondés sous les écailles qui se trouvent à la base des pousses. Le 15 juillet, il y a déjà quelques foudatrices fixées à la base des bourgeons terminaux des pousses. Elles sont observées encore dans le courant d'août, de septembre et d'octobre, et sont bien vivantes. Ces fondatrices sont encore retrouvées au mois de mars 1908 ;'le 27 mars, quelques-unes ont même effectué leur première mue. Elles s'arrêtent alors dans leur développement et meurent; les galles ne se développent pas. EXPÉRIENCE 3 (D. Nüsslin). Fais principaux. — Fixation des migrantes alatae el élevage de leur descendance sur Abies pectinala. Aucun individu de cette descendance ne se développe sur Picea orientalis. Disposition. — Le 16 juin 1907, un Picea orientalis et un Abes pectinala en pots sont rapprochés l’un de l’autre ; un rameau du premier est lié avec un rameau du second de facon à constituer un seul faisceau, et ce faisceau est introduit dans une cloche à raisin par son petit orifice; ce dernier est obturé ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 9e série. 1913, xvir, 20 308 PAUL MARCHAL avec du papier et de l’ouate. Le grand orifice est recouvert de mousseline maintenue par un caoutchouc. Avant de fermer, une galle unique de Chermes Nüsslini est introduite (cette galle se trouvait isolée’ au bout d’un rameau et présentait une fondatrice unique à sa base). Observations et résultats. — Les migrantes alatae éclosent de la galle les jours suivants ; le 25 juin, beaucoup sont fixés et en train de pondre sur les feuilles d'Abies peclinata, beaucoup aussi sont morts sans se fixer. Aucun ne se trouve sur le Pirea orientalis. Dès le 12 juillet, 11 ÿ à un grand nombre de larves issues des zigrantes alatae fixées sur les axes de l'A bies pecti- nata ; elles ne tardent pas à présenter l'aspect caractéristique des neosislentes : petits boucliers noirs avec crète blanche et bordure blanche et frangée. Sur les axes de Picea orientalis, qui étaient intimement mélangés à ceux Abies, ces Pr font au contraire entièrement défaut. Les larves précédentes passent l'hiver et, au printemps, se développent en femelles parthénogénétiques très apparentes, qui, vers le 20 mai, ont pondu de gros paquets d'œufs. Dès la seconde quinzaine, de mai, des larves issues des œufs précé- dents se fixent sur les feuilles et se développent en femelles parthénogénétiques (exilés aptères) ; les ailés (sexupares) qui pourraient se développer pendant cette génération, paraissent faire défaut; en tout cas, ils ne sont pas observés. Dès le milieu de juin 1908, les larves issues des exilés se sont fixées sur les jeunes axes et présentent la teinte noire et les fimbriatures blanches habituelles. Ces larves, conformément au type /iemosistens, passent en cet état tout l'été, automne et l'hiver suivant pour se dévelop- per, en avril 1909, en femelles parthénogénétiques. ExPÉRIENCE 4 (D. Nrsslini) Faits principaux. — Parmi les ailés issus des galles, un très petit nombre peuvent, au lieu d'émigrer, se fixer sur le Picea orientalis, et pondre des œufs ; leur descendance n'est d’ailleurs pas viable sur cet arbre. Disposition. — Le 16 juin, un Picea orientalis, maintenu jusque-là à l'abri, est mis en serre sous une cage de mousse- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 299 line, et en même temps sont introduites une quarantaine de galles de Ch. Nüsslini récoltées le 1% juin, dans les pépinières de Châtenay, sur des Picea orientalis ; ces galles sont arrivées à maturité presque complète et quelques-unes commencent même à s’ouvrir pour laisser sortir des ailés. Observations et résultats. — Le 17 et le 18 juin, un grand essaimage d’ailés issus des galles mises en expérience se produit dans la cage. Le 28 juin, je procède à l'examen du Picea orientalis qui a été placé sous la cage, et, malgré le très grand nombre d’ailés qui ont volé dans la cage, Je n'en trouve que trois qui se soient fixés sur les aiguilles de l'Épicéa et qui aient pondu. La descen- dance de ces ailés avorta complètement, et aucune galle ne se développa sur l'Épicéa l'année suivante. EXPÉRIENCE 5 (D. Nüsslini). Faits principaur. — Fixation des migrantes alatae et élevage de leur descendance sur AVies nordmannianx. Disposition. — Le 17 juin 1907, un Ahes nordmanniana est placé dans une cage en mousseline et 35 galles de Chermes Nuüsslini, récoltées le 14 juin sur des Picea orientalis, sont intro- duites et placées, soit sur la terre, soit en majorité sur les rameaux de lAes. (Ces galles ne sont pas encore ouvertes, en raison de la température relativement peu élevée et parce que, depuisle {4 Juin où elles ont été récoltées, ellesont été maintenues au frais dans un bocal recouvert de mousseline.) Observations et résultats. — Une grande éelosion de migrantes alatae se fait dans la cage dès le lendemain de la mise en expé- rience. Le 25 juin le feuillage de l’A bies nordmanniana est chargé de migrantes alatae qui se sont définitivement fixés ; un petit nombre seulement errent sur les parois de la cage. Le 29 juin, l’éclosion des larves issues des migrantes alatae est commencée et un certain nombre sont déjà fixées sur les rameaux. Dans les premiers jours de juillet je fais une grande destruc- tiens d’ailés fixés et de leurs œufs pour empêcher une contami- nation trop considérable. Malgré cette précaution, en août, l'arbre est couvert de petites larves au 1€T stade (neosistentes), 300 PAUL MARCHAL qui sont fixées aussi bien sur les Jeunes axes verts, sur les rameaux de l’année précédente et sur les grosses branches que sur le tronc. Elles sont réparties d’une façon plus dense sur le tronc, notammentsurles partiesinférieures, que partout ailleurs. Presque toutes vont ainsi passer l'hiver et n’opéreront leur première mue qu'au printemps ; quelques-unes pourtant effectuent leur première mue en octobre. A la fin d'octobre, une destruction partielle est pratiquée à l’aide d'eau savonneuse additionnée de jus de tabac. Les larves se développent à partir de la fin de mars; vers le 10 mai 1908, la ponte des individus qui ont hiverné est très avancée et les larves se répandent. Le 19 mai, en prévision d'une éclosion d'ailés sexupares, l'Aies nordmanniana est mis sous une cage avec un Picea excelsa et un Picex orientalis. Mais je ne constate aucun vol d'ailés; sur les pousses, ni nymphes ni ailés ne peuvent être d'ailleurs observés et aucune contamination des Épicéas ne se produit. Sur les aiguilles de VA lies nordmanniana, seuls les exilés aptères (progredientes) se développent, entourés de leur petit tampon cotonneux caractéristique. Ils donnent naissance à de nombreuses larves qui se fixent surles axes(sistentes) et \ restent pour la plupart sans muer Jusqu'au printemps suivant (Liemo- sislentes) ; sur le vieux bois, Je trouve pourtant, dès Les premiers jours d'août, quelques individus avancés dans leur évolution entourés de coton et en train de pondre; ils représentent une génération estivale partielle très réduite (estivosistentes). La même observation est faite sur le même arbre l’année suivante, le 25 septembre. Les mues de ces individus, complètement évolués et pondant avant l'hiver sont examinées: celles du 1er stade répondent au type sistens. EXPÉRIENCE 54 (D. Nüsslini). / Fais principaux. — Fixation de migrantes alatae et élevage de leur descendance sur Abies pectinata. Disposition. — Le 18 juin 1907, une galle de Chermes Nüsslini récoltée sur Picea orientalis est mise en rapport, dans une cloche à raisin, avec un rameau d'un Abies pectinata en pot. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 301 Observations et résultats. —- Le 25 juin, la grande majorité des #rigrantes alatue qui sont éclos de la galle se sont fixés sur les feuilles d’Abies. Le 12 juillet, l'éclosion des œufs pondus par les migrantes alatre est, à peu de chose près, terminée et de nombreuses larves issues de ces œufs sont fixées sur les axes des pousses de l'année. Elles ne se développent qu'au printemps de l’année 1908. A Ja fin de mars, toutes sont déjà assez avancées dans leur évolu- tion ; mais la ponte n'a commencé que pour quelques-unes d'entre elles. Le 11 mai, la branche contaminée est garnie de Chermes complètement développés, en arrière desquels se trouvent des paquets d'œufs entourés de substance cotonneuse ; l'éclosion des larves est commencée et elles se répandent sur- tout sur les aiguilles et les axes de la branche primitivement contaminée et aussi, mais en moins grand nombre, sur les rameaux Voisins. Ces Insectes passent l'hiver à l’état du 127 stade larvaire et se reproduisent en avril 1909 ; à lafin d’avrilles jeunes pousses sont déjà garnies des larves issues des œufs pondus par les précé- dents. Dans les premiers jours de mai les nymphes peuvent être distinguées avec leurs moignons alaires. Le vol des ailés (serupares), qui se produit à la fin de mat et en juin, n'est pas très considérable ; beaucoup ont péri pendant leur évolution. Les exilés fixés sur les feuilles de FAbies sont en revanche nom- breux et donnent une abondante descendance de larves qui se fixent sur les axes pour passer l'hiver. Excéptionnellement quelques-unes muent et évoluent avant l'hiver. Le 20 sep- tembre 1909, j'examine la mue du 127 stade de l’une de ces dernières ; elle est tout à fait caractéristique du type de Nésslin. La même constatalion est faite à la fin de l’année 1910. La mul- üplication pendant trois années successives de D. Nüsslin sur lAbies pectinala n'a donc pas modifié l’espèce et ne l’a pas rapprochée de D. piceae. | EXPÉRIENCE 6 (D. Nüsslini). Faits principaux. — La descendance des mugrantes alatae n'aboutit pas sur les Picea orientalis. Disposition. — Le 18 juin 1907, un Picea orientalis en pot est 302 PAUL MARCHAL mis en expérience. L'un de ses rameaux est mis en rapport avec une galle de Chermes Nüsslin cueillie sur Picea orientalis, à l'intérieur d'une cloche à raisin. Observations et résultats. — En général, les migranltes alatae qui éclosent de la galle les jours suivants ne se fixent pas ou se fixent mal sur les pousses du Picea orientalis mises à leur dispo- sition ; un certain nombre pourtant se posent sur les extrémités des pousses qui touchent la mousseline fermant la eloche à sa partie supérieure ; ils restent immobiles et présentent par rapport à l'aiguille la même disposition que ceux qui se fixent normalement sur les Abies; mais ils ne développent pas les crosses cireuses que ces zugrantes alatae développent en celte dernière circonstance. Ces ailés, anormalement posés sur les pousses de Picea orientalis, pondent même des œufs ; mais ils sont seulement au nombre de 1, 2 ou 3 par individw; des œufs sont aussi déposés sur le verre en bordure de la mousseline. En raison du nombre assez grand de #igrantes alatae éelos de la gaile mise en expérience, la ponte ainsi produite est encore assez considérable. Dans le cours de juillet, le plus grand nombre de ces œufs se dessèchent sans éclore; une partie pourtant donnent des larves; mais ces larves périssent aussitôt après leur éclosion. L'arbre, surveillé jusqu’au printemps de l’année suivante, est reconnu indemme. Aucune contamination ne s'est produite. La descendance des migrantes alalae n'a done pas abouti sur le Piceu orientalis, c'est-à-dire sur l'espèce végétale où ils ont eux-mêmes pris naissance et évolué à l'intérieur des galles. EXPÉRIENCE 7 (D. Nüsslin). Faits principaur.— 1 existe exceptionnellemen des individus ailés issus des galles qui n'émigrent pas et pondent sur l'Épicéa. Ces ailés, qui mériteraient le dom d’alatae non migrantes, ne donnent pas de descendance viable sur lEÉpicéa. Disposition. — Le 28 juin 1907, un Picea orientalis est mis en expérience. Deux extrémités de rameaux sont enfermées dans deux petits cylindres de verre fermés à leur extrémité hibre à l'aide d’une mousseline tendue et à leur autre extrémité au moyen d’un tampon d'étoffe et d’ouate glissé entre la tige et CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 303 le verre. Dans l'un des cylindres (le plus grand, qui emprisonne trois jeunes pousses) sont introduits, avec les aiguilles coupées qui les portent, cinq aiés qgallicoles de Ch. Nüsslin ercep- tionnellement sédentaires, qui ont été recueillis le Jour même dans un parc sur des petits Picea orientalis chargés de galles dues au même Chermes ; ces cinq individus étaient parfaitement fixés sur les aiguilles de ces Épicéas et avaient pondu des œufs assez nombreux. Dans l'autre cylindre {le plus petit, qui empri- sonne une seule pousse), est introduite une ponte d’un autre ailé gallicole exceptionnellement sédentaire, recueilli dans les mêmes conditions et fixé sur une aiguille : elle comporte une trentaine d'œufs. Obsercations et résultats. — Dans les premiers Joursde juillet, les œufs de ces ailés qallicoles alatae sédentaires éclosent et les larves qui en sortent errent sur les pousses où sur le verre. Elles ne se fixent pas ou ne se fixent que d’une facon tempo- raire, se détachent et meurent. Une seule, fixée à la base d’une aiguille qui se trouve près du bourgeon terminal, prend laspect caractéristique de larves primaires que l’on trouve à la même époque sur les Abies et qui ne reprennent le cours de leur évolution qu'après l'hiver : petit bouclier noir avee crêle mé- diane et fimbriature périphérique blanche. Le 17 août, cette larve est toujours à la même place; mais elle parait soulevée, non adhérente et très probablement morte. Au printemps suivant la larve est disparue ; rien ne se déve- loppe sur là pousse correspondante, ni sur aucune autre partie de l'arbre. La descendance des gallicoles, exceptionnellementsédentaires et fixés sur Picea orientalis, n’a donc pas abouti sur cet arbre. EXPÉRIENCE 74 (D). Nrüsslini). Faits principaux. — W existe exceptionnellement des indi- vidus aïlés issus des galles, qui n'émigrent pas et qui pondent sur l'Épicéa. Ces ailés, qui mériteraient le nom d'wlalue non migrantes, ne donnent pas de descendance viable sur l'Épicéa. Expérience analogue à la précédente. Disposition. — À la fin de juin 1911, un Picea orientalis en pot, qui porte déjà quelques galles de Ch. Nisslini arrivées à 304 PAUL MARCHAL maturité, est enfermé dans un grand sac de mousseline avec d'autres galles de la même espèce et recueillies dans un parc de la région. Observations el résultats. — Le sacayantété enlevé le 14 juillet, je découvre un ailé {alata non migrans) qui est resté sédentaire et s'est fixé en développant des crosses cireuses ; au-dessous de son Corps se trouvent une vingtaine de coques d'œufs déjà éclos et une larve venant d’éclore, à longues soies rostrales. Aucune larve ne se développe sur le Picea orientalis. EXPÉRIENCE 8 (D. Nüsslini). Faits principaux. — La descendance des migrantes alatae avorte complètement sur le Picea orientalis. Disposition. — Le 30 juin 1907, un Picea orientalis est mis en expérience. Une pousse d'A bies nordimanniana, cueillie sur l'arbre n°5, est placée entre les pousses d’une branche de cet Épicéa; cette pousse d'Abies est chargée de igrantes alatae de Ch. Nüsslini (plus de 150) rangés en file les uns derrière les autres sur les aiguilles, avec les amas d'œufs qu'ils ont pondus. Le 5 juillet, pour éviter que les larves issues des œufs de nugrantes alatae ne se fixent sur la pousse d'Abies qui, bien que coupée, conserve encore sa fraicheur, Je détache les aiguilles chargées de migrantes alatae de l'axe sur lequel elles sont insérées, el seules, ces aiguilles, avec les Chermes et les œufs qu'elles portent, sont remises en rapport avec la branche d'Épicéa. Observalions et résultats. — Le 25 juillet, quelques larves paraissant mortes se trouvent sur l'Épicéa; les parois de la cloche sontcouvertes de larves qui se sont disséminées dans tous les sens et qui sont mortes pour la plupart. Rien ne se développe ultérieurement sur l'Épicéa. La descendance des rigrantes alalae n'aboutit donc pas sur le Picea orientalis (confirmation de l'expérience 6). EXPÉRIENCE 9 (D. Nüsslini). Faits principaux. — Expérience portant sur une galle tar- dive à caractères anormaux et sur sa descendance; celle-ci ne se développe ni sur Abies pectinata ni sur Picea orientalis. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 30) Conditions particulières. — Cette expérience, dont le résultat est négatif, porte surles #igrantes issus d'une galle très vraisem- blablement rapportable au Chermes Nüsslini, mais offrant pour- tant quelques particularités distinctives. Cette galle, recueillie sur un petit Picea orientalis dans les pépinières de Châtenay, était en train de fournir l’éclosion de ses ailés le 6 juillet 1907 : elle élait donc nettement en retard sur les galles de la même espèce se trouvant la même année dans la même localité. De plus, ses éléments étaient notablement plus gros que ceux des autres galles, et les aïlés qui en sortaient avaient une taille également au-dessus de la moyenne; la sécrétion cotonneuse de lextré- mité postérieure était plus abondante, etles nymphes, au moment de leur transformation, présentaient des étuis alaires colorés en vert parfois très vif, au lieu d'offrir la coloration orangé qui se rencontre habituellement pour le C. Nüsslini. Toutefois des variations de coloration peuvent aussi être constatées dans les nymphes issues des galles habituelles du €. Nésslini, et, n'ayant pu constater de différences morphologiques, notamment en ce qui concerne la structure des antennes, entre les »igrantes alatae dont il s’agit et ceux du C. Nüsslini, je pense devoir les rapporter à cette dernière espèce, malgré le résultat négatif assez déconcertant, qui est enregistré ci-dessous. Disposition. — Le 6 juillet 1907, un Aes pectinata el un Picea orientalis sont mis en expérience. Deux rameaux, l’un de Picea orientalis, Yautre d’Abies pecti- nala, sont insérés dans une cloche; la galle dont il à été question ci-dessus est en même temps introduite et enfermée dans la même cloche que ces deux rameaux. Les jours suivants, de nombreux ailés, éclos de la galle, se fixent sur PAbies, mais un nombre plus grand encore tombent au fond de la cloche et périssent sans se fixer. Aucun ne se fixe sur le Picea orientulis. Les larves issues des migrantes alatae sont observées, fixées sur le rameau d’Abies, à la fin de juillet et dans le courant d'août : elles présentent les caractères habituels aux larves de C. Nüsslini placées dans les mêmes conditions; mais elles sont relativement en assez petit nombre. Au printemps sui- vant (1908), aucune contamination sur le rameau. Ce résultat 306 PAUL MARCHAL négalif, en ce qui concerne l’Abies peclinata, me parait devoir être attribué à une particularité individuelle ou de race inhé- rente à la fondatrice de la galle mise en expérience et ne lui permettant pas de fournir une descendance viable sur l'A bies pectinala. K'est à noter en effet que sur le même arbre et sur un rameau voisin, l'expérience semblable, faite avec une autre galle à caractères ordinaires de C4. Nüsslini (Exp. n° 3), a donné un résultat positif. | Sans mème mettre en cause le caractère un peu spécial de la galle mise en expérience, on peut considérer comme très admissible que l'Abies nordmanniana étant l'arbre de choix et l'hôte intermédiaire primitif du Chermes Nüsslini, diverses fon- datrices de cette espèce lèguent à leurs descendants des qualités adaplatives inégales vis-à-vis de PAbies pectinata; les fonda- trices qui n'ont pas dans leurs ascendants d'individus évolués sur PAbies pectinata doivent évidemment fournir à ce point de vue les descendancesles plus réfractaires. L'inégalité adaptative vis-à-vis de l'Abies pectinata des individus descendant de galles différentes élait en somme un fait à prévoir, et l'opposition des résullats obtenus dans les expériences 3 et 9 trouve natu- rellement en-lui son explication. Quant au résultat négatif en ce qui concerne le Picea orien- talis,1l n'est que la confirmation de ce que nous savons déjà : la descendance des migrantes alatae du Ch. Nüsslini ne peut se développer sur le Picea orientalis. Dans l'expérience actuelle, celte épreuve était nécessaire pour écarter une hypothèse qui venait naturellement à l'esprit : celle que la galle à caractères anormaux mise en expérience appartenait à une lignée monœ- cique (alatae non migrantes) vivant exclusivement sur l'Épicéa. EXPÉRIENCE 10 (D. Nüsslini). Fuits principaux. — Fixation des zrigrantes alatae et élevage de leur descendance sur Abies nordmanniana. Disposition. — Le 12 juin 1912, la cime d'un A%es nordmanniana en pot est enveloppée d'un sac et dedans sont mises quatre galles de Chermes Nüsslini, prètes à donner des éclosions et récoltées sur Picea orientalis. | Observalions et résultats. — Le détail de cette expérience n'a CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 307 pas été noté; mais d’une façon générale, ses résultats sont les mêmes que ceux de l'expérience 5, avec contamination moins intense. EXPÉRIENCE 11 | Dreyfusia (C'hermes) piceae]. Faits principaux. — Contamination d'un Abies pectinala en pot par le Chermes piceae à l’état pur, recueilli dans la campagne normande; succession des générations sur cet arbre. Disposition. — Le 21 mai 1908, des morceaux d'écorces chargés de CA. piceae avec leurs pontes sont récoltés sur les troncs de grands Aies pectinata à Clères, en Normandie {Seine- Inférieure), en pleine campagne et dans un endroit sûrement très éloigné de Picea orientalis. W s’agit donc uniquement de Chermes piceue, et aucun mélange avec le Chermes Nüsslini n’est possible, Le 22 mai. de retour à Fontenay-aux-Roses, je contamine un Jeune Abies peclinala en pot avec les écorces récoltées la veille en Normandie. Les morceaux d’'écorces sont attachés contre le tronc de l'arbre, ou placés sur les rameaux entre les feuilles ; souvent des feuilles sont ramenées au-dessus d'eux et maintenues par un fil, pour rendre le contact intime. L'arbre ainsi préparé est, à partir de ce moment, conservé dans une chambre dont la fenêtre ouverte a été tendue de mousseline pour empècher l'accès des Syrphides ou des Coccinellides, grands destructeurs de Chermes. Observations et résultats. — Les jours suivants, l’éclosion des œufs qui se trouventsurles écorces contaminatricesse fait d’une façon lente et progressive, et l’on voit quelques larves errer sur les feuilles et les axes de PAbies. Néanmoins la présence d'aucun He du Lype progrediens n'est remarquée. °n juin, les larves se fixent eu majeure partie à la base 18 pousses vertes, en dedans des écailles, qui forment à ce niveau une sorte de collerette ; d’autres se fixent encore sous les exfo- liations écailleuses de l'écorce. Elles répondent au evcle estiro- sis{ens. À la fin de juillet, au moins une partie des individus de cette 308 PAUL MARCHAL génération arrivent à maturité; à la base des pousses abritées par la collerette écailleuse, je rencontre notamment un assez grand nombre d'individus qui ont déjà pondu. Ces femelles parthénogénétiques sont d’ailleurs petites, inapparentes, mas- quées par les écailles de la collerette et de faible fécondité : on ne rencontre Jamais à côté d'elles que quelques œufs. Les Jeunes issus de cette première génération ne tardent pas à se fixer sur les axes et à constituer une deuxième génération d'estivo-sistentes : dans la première quinzaine de septembre, ils ont atteint tout leur développement; leur ponte est alors com- mencée et les larves de troisième génération, destinées à devenir les hivernants (4iemo-sistentes), sont même partiellement écloses. Leur éclosion continue pendant le cours de septembre, et au début d'octobre l'attaque de l'arbre par la multitude de larves qui l'envahissent de toutes parts se fait avec une telle intensité qu'un grand nombre de pousses se dessèchent et rougissent. Je les débarasse en grande partie avec un pinceau imbibé d'alcool et d'éther. Il est très remarquable que quelques.pousses de la cime présentent déjà des renflements axiaux rappelant les galles produites sur l'Abies nohilis par le Chermes Bourieri. L'arbre passe l'hiver 1908-1909 en plein air dans le jardin et il y reste ultérieurement. La ponte de la génération de Chermes ayant hiverné ne commence que dans la deuxième quinzaine d'avril 1909; dans les premiers jours de mai ies Insectes portent derrière leur corps d'énormes paquets d'œufs qui sont à décou- vert dans presque toute leur étendue, la sécrétion cotonneuse peu abondante ne les recouvrant pas. Le T mai, l’éclosion des larves issues de ces œufs est commencée, mais encore très peu avancée. Il est à noter que les bourgeons de l’année surchargés d'Insectes ne s'ouvrent pas: ceux de la cime sont gonflés, les axes de l’année précédente sont aussi très courts et des défor- mations se forment ainsi à l'extrémité des rameaux. Celte condition est défavorable à l’évolution des progre- dientes, qui ont une élection pour les jeunes aiguilles; mais dès les premiers Jours de mai 1909, au moment où les larves commencent à peine à éclore, un nouvel Ales pectinata est mis en rapport avec le n° 11 et sur cet Abies (112), la suc- cession normale des générations peut alors être suivie. Le CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 309 nouvel arbre mis ainsi en expérience, et dont les rameaux sont liés avec du raphia à ceux du n° 11, recueille sur ses pousses fraîchement épanouies les jeunes larves qui éclosent en grand nombre de ce dernier. La plupart de ces larves, dans le courant de mai, se fixent sur les jeunes axes à l’état de neosistentes (première génération d'estivo-sistentes); j'en remarque une pourtant faisant exception et qui se fixe sur une aiguille (type progrediens) et présente Les caractères d’un ailé au troisième stade. Le rameau est récolté et conservé en faisant tremper sa partie inférieure dans un flacon rempli d’eau. La nymphe est formée le 21 mai; l’ailé, le 29 mar. Dans le courant de juillet et d'août les estivo-sistentes de première génération se développent et se mettent à pondre ; ceux qui se sont fixés à la base des jeunes pousses en dedans de la collerette écail- leuse, sont déjà arrivés à l’âge adulte le 15 juillet et effectuent leur ponte; ceux qui se sont fixés à découvert, sur les axes, se développent en août. Les larves issues de cette première géné- ration et qui constitueront la deuxième génération d’estivo- sistentes Se répandent à la fin de juillet et en août; elles se fixent sur les axes, et cette deuxième génération d'estivo- sistentes évolue au début de septembre pour donner dans le courant du mois el en octobre une troisième génération de sistentes destinés à passer l'hiver à l'état larvaire (Liemo-sistentes). . A la fin d'octobre, il n'existe plus que des larves à l’état primaire (neosistentes) fixées sur les bourgeons et sur les axes. En 1910, la ponte des individus qui ont passé l'hiver est déjà commencée le 18 mars (larbre a été mis à l'abri pendant celte saison, dans une serre non. chauffée). En avril, un très - petit nombre de progredientes se fixent sur les aiguilles ; leur évolution d’ailleurs ne se poursuit pas. Par contre, une multi- tude d’estivo-sistentes se fixent le long des axes et sur les bour- geons dormants, ils évoluent déjà et commencent à pondre dans la première quinzaine de juin. Sur l’Aies pectinata 11, qui a servi à contaminer l’Abies 11a, les générations de Chermes ont, d'autre part, continué à se succéder. En 1909, la deuxième génération d’estiro-sistentes, issue des hivernants, à pris naissance en juillet et s’est déve- loppée dansles premiers jours de septembre. Le 25 septembre, 310 PAUL MARCHAL les Chermes étaient dejà à maturité complète et en pleine reproduction, avec pontes abondantes: mais les ennemis natu- rels et en particulier les larves de Syrphides en réduisirent alors beaucoup le nombre. Les larves issues de cette deuxième génération d’estivo-sistentes passèrent l'hiver à l’état de neosis- tentes. Il est à remarquer que l'arbre 11 est resté en plein air d'une facon constante, depuis l'automne 1908 jusqu'à l’année 1910. Le cycle des trois générations successives d’aptères, tel qu'il a été observé, n’a done pas été sensiblement influencé par des conditions artificielles d'élevage. EXPÉRIENCE 12 (1). piceae). Faits principaux. » analogue à la précédente. Disposition. — Le 21 mai 1908, donc le même jour que celui de l'expérience {1 et dans des conditions semblables, un second Ares peclinata en pot est contaminé avec des écorces chargées de Chermes piceae provenant de la même localité [Clères (Seine- Inférieure) |. L'arbre, au lieu de passer l'hiver 1908-1909 en plein air, reste à l'abri dans une serre aérée et non chauffée, etil y est maintenu jusqu'au commencement d'août. Observations et résultats. — En raison de la circonstance ci- dessus mentionnée, dès le début du printemps, la génération de- Chermes ayant hiverné prend une avance sur le n° 11 qui est en plein air, et, le 10 avril, beaucoup de ces Chermes ont en arrière de leur corps une masse d'œufs considérable. Les œufs sont plus entourés de duvet cotonneux que eeux de l'arbre 11, eXposé aux UE L'éclosion des larves est commencée le 28 avril. Ces larves, après leur éclosion, se portent en grande partie sur les aiguilles des pousses de l'année précédente (les: bourgeons de l’année, très en retard, n'étant pas encore débourrés). Elles les quittent ensuite pour se fixer sur les axes correspondants. Le % août, cette première génération, issue des hivernants, est arrivée à maturité : elle se trouve seulement sur les rameaux Jeunes (bois de l’année précédente, pousses de l’année et bour- geons dormants) : le vieux bois paraît indemne. Les individus qui constituent ir génération sont alors en pleine reproduc- CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 31 tion; ils sont petits, des œufs jaunes peu nombreux sont en arrière de leur corps et des larves sont en train d'éclore de leurs pontes. L'arbre est alors mis en plein air. Le 7 septembre, la deuxième génération annuelle constituée par les larves issues de la précédente est en cours de développe- ment (premier, deuxième et troisième stades) : elle est arrivée à pleine maturité le 25 septembre et sur les rameaux se trouvent de nombreux Chermes accompagnés de leurs amas d'œufs ; l'évolution des Chermes parait alors au même degré pour le n° 12 que pour le n° {1 et, malgré l'avance initiale du premier, la succession des générations annuelles s’est poursuivie d’une facon assez similaire sur les deux arbres. L'attaque pourtant à été moins forte sur le n° 12 et aucune déformation notable ne s'est produite. EXPÉRIENCE 13 (D. piceae). Faits principaux. — Cette expérience porte sur la descen- dance d'un progrediens (ypique qui avait été récolté en pleine campagne normande le 10 juin 1909 sur une aiguille d’Abies pectinal«. La fixation sur une aiguille représentait une condition excep- tionnelle pour le Chermes piceae et paraissait indiquer, pour l'individu observé, une différenciation dans le sens sexupare : il était donc, à ce point de vue, intéressant de savoir comment se comporterait sa descendance élevée en culture pure. Le fait principal mis en évidence: dans ces conditions particu- lières d'expérience est une abondante production d’ailés au printemps, et cela pour une espèce qui, en raison de la rareté habituelle de ses ailés, avait été considérée comme ne présen- tant que des aptères: ainsi que le montrera ce qui suit, parmi ces ailés, aucun ne se comporta en sexupare; un bon nombre, au contraire, se comportèrent en erswles alatae. Disposition. — Le progrediens mis en expérience fut rap- porté de Clères (Seine-Inférieure) le 10 juin avec la pousse sur laquelle il se trouvait : celle-ci fut conservée dans l'eau jusqu'au 20 juin, pour laisser à l’Insecte Le temps d'achever son développement et de pondre. A cette date, l'aiguille qui, outre le Chermes, portait cinq à six œufs pondus par ce der- SN D PAUL MARCHAL nier, fut mise en contact avec l'extrémité d’un rameau d’un jeune Abies pectinata en pot; le Chermes d’ailleurs fut retiré pour être examiné et les œufs qui se trouvaient sur l'aiguille coupée furent seuls utilisés pour la contamination de l'arbre mis en expérience. Observations et résultats. — En juillet, je trouvai, sur le petit rameau à trois pousses auquel laiguille contaminatrice avait été altachée, trois larves noires à crêtes blanches du type neosistens : une d’entre elles fut prélevée pour l'examen; des deux autres, l’une était fixée sur le trajet de l’axe d’une des deux pousses latérales, l’autre à la base de la même pousse, sous la collerette écailleuse. Pendant le mois de Juillet et le mois d'août, ces larves pri- maires restèrent à l'état dormant ; mais, au début de septembre, elles commencèrent à perdre leur aspect aplatiet à se gonfler; le 12 septembre, elles avaient mué et s'étaient recouvertes de sécrétion cotonneuse. Les larves, issues du Chermes mis en expérience évoluaient done suivant le type estiro-sistens. Il est à noter d’ailleurs que les conditions dans lesquelles l'A bies con- laminé se trouvait placé se rapprochaient de celles de la nature et qu'une trop grande chaleur avait été évitée : l'arbrese trouvait en effet placé dans une chambre au nord, devant une fenêtre constamment ouverte et tendue de mousseline. Le 25 septembre, les deux Insectes constituant la première génération issue du Chermes initial avaient atteint leur com- plet développement; ils étaient entourés d'une masse coton- neuse abondante et avaient pondu des œufs nombreux. Dans le courant d'octobre, l’éclosion des œufs s’effectua, et le 26 du même mois, des larves primaires assez nombreuses s'étaient déjà fixées, soit sur les bourgeons, soit sur les axes de la pousse contaminée, ainsi que sur ceux des petits rameaux voisins appartenant à la même branche. L’éclosion continua et le nombre des larves qui se fixèrent pour passer l'hiver aug- menta encore les jours suivants : c’est done la deuxième géné- ration de larves issues du progrediens mis en expérience qui passa l’hiver : elles répondaient au type Liemo-sistens. En mars 1910, les Liemo-sistentes poursuivirent leur dévelop- pement, et le 18 mars la ponte était déjà commencée ; en avril t CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 9313 et mai, élant en voyage, je transmis la surveillance de l’obser- vation à M. Le Cerf, préparateur au Muséum; au début d'avril, des larves nombreuses se fixèrent sur les aiguilles, et le 10 avril des ailés apparurent; cinq ou six furent remarqués à ce moment, et, à en juger par les nombreuses larves qui se fixèrent sur les aiguilles, sans se garnir de sécrétion coton- neuse, il est probable qu'un plus grand nombre d’ailés prirent naissance ; l’un des ailés fut conservé dans l'alcool : il présen- tait bien les caractères du Chlermes piceae. Un certain nombre de progredientes, entourés d'une épaisse masse cotonneuse, se développèrent aussi sur les aiguilles. En juillet, l'arbre présentait encore quelques Chermes entourés de sécrétion cotonneuse sur les aiguilles et des larves primaires abondantes disséminées sur les axes. Au printemps de l'année 1911, 11 fut mis à l'abri sous un hangar, puis ensuite dans une chambre fermée, derrière une fenêtre ; sa contamination était alors devenue très intense, et le 20 avril les Chermes dont il était chargé avaient déjà pondu des œufs abondants. Dès que les bourgeons de l’Ales s'épanouirent, ils furent envahis par les larves récemment écloses (fin avril), et bientôt les jeunes pousses furent abondamment chargées de petites larves brunes de Chermes, absolument comme s'il s'agissait du Dreyfusiu Nüsslini. La vérification par les caractères morpho- logiques fut naturellement faite au microscope à diverses reprises, de façon à être certain qu'un mélange accidentel des deux espèces ne s'était pas produit. En même temps que les jeunes larves de progredientes et d’ailés évoluaient ainsi sur les aiguilles, on voyait en outre, à celte époque, de jeunes larves de sistentes issues comme les précédentes des individus ayant hiverné et fixées sur les axes des nouvelles pousses; de plus, les hivernants qui avaient engendré toutes les larves précé- dentes, et qui se trouvaient principalement fixés au niveau des fourches et des bourgeons n'étaient pas encore arrivés au terme de leur existence et portaient en arrière de leur corps des grappes d'œufs très abondants. Le 12 mai, de nombreux ailés étaient éclos sur les aiguilles des jeunes pousses. Le 13 mai, un certain nombre de ces ailés ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 9% série. 19143, xvux, 21 , * Fr TUE PAUL MARCHAL étaient fixés sur les aiguilles de PAtes et avaient pondu des œufs. Le 24 mai, le nombre des ailés fixés avait considérable- ment augmenté et l’on entrevovait sous leurs ailes les œufs qu'ils avaient déposés. Ainsi donc la plupart des ailés du Ch. piceae évoluaient en ersules alatae. Quelques-uns pourtant, au lieu de se fixer, abandonnaient les pousses de l'Épicéa et se portaient contre la vitre de la fenêtre; J'ai vainement essayé de les faire développer en sexupares en provoquant leur fixation sur les Épicéas. Au début de juin, les progredientes qui s'étaient développés parallèlement aux ailés sur les aiguilles étaient entourés d’une abondante sécrétion cotonneuse et avaient déjà pondu, mais ils étaient moins nombreux que les ailés; d’autres progredientes se trouvaient sur les jeunes axes et surtout sur les bourgeons de l'année précédente qui ne s'étaient pas épanouis au prin- temps; enfin, de très nombreuses larves primaires du type sistens, qui avaient été engendrées par les individus avant passé l'hiver, étaient fixées sur les jeunes axes. Vers le 20 juin, les progredientes avaient pondu des œufs assez nombreux, et des larves de deuxième génération issues de ces progredientes commencaient à se répandre. Toutes présen- taient les caractères de sistentes et je n’eus pas à constater, par conséquent, l'existence d’une seconde génération de progre- dientes Le 14 juillet, l'infection de l'arbre était extrême : il portait de très nombreuses masses cotonneuses correspondant pour la plupart à des estivo-sistentes dont la larve primaire n'avait pré- senté qu'une courte phase sistante; en outre, les axes élaitent chargés d'innombrables larves sistantes qui ne devaient évo- luer que plus tardivement à l'automne. Les larves nées de la génération automnale passèrent l'hiver 1911-1912 qui fut par- ticulièrement doux ; en février, un certain nombre d’entre elles avaient déjà mué. Ce qui est surtout remarquable dans cette expérience, c'est la grande production d'ailés qu’elle permit d'obtenir. ne parait pas douteux que l'héredité ait joué à ce point de vue un rôle important, puisque tous les Chermes qui ont été produits au cours de ces deux années descendaient d'un CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 319 progrediens fixé sur une aiguille, condition rare dans la nature pour le CA. piceae. L'année 1911 fut, il est vrai, en outre assez favorable à la production des ailés du CA. picene ; toutefois, dans la campagne, ou sur mes autres arbres en expérience, même les plus contaminés, je n’en trouvai que d'une façon exceptionnelle et isolée. Un de ces arbres, le n° 11, placé comme témoin dans une chambre, dans des conditions tout à fait ana- logues au n° 13, ne présenta aucun ailé au cours de l’année 1911. On doit en conclure que pour le n° 13, qui en porta un grand nombre, une autre influence que celle du milieu extérieur était en cause, et c'est dans les causes internes qu'elle doit être recherchée. EXPÉRIENCE 14 (D. piceae). Faits principaux. — Cette expérience est destinée à rechercher la destination des ailés du Chermes piceae. L'observation n'a pas révélé l'existence parmi eux de sexupares ; au contraire, un bon nombre se sont comportés en ersules alatae. Disposition (Hg. 73). — Le 12 mai 1911, lAVes pectinata de l'expérience précédente (n° 13) est utilisé en vue d’une nouvelle expérience. Depuis sa première contamination, qui à eu lieu le 10 juin 1909, cet arbre est resté à l'abri de toute nouvelle con- taminalion, et depuis le début de mai 1911 il a été maintenu dans une chambre devant une fenêtre fermée. Au moment où les ailés apparaissent sur cet arbre, c'est-à- dire le 12 mai, j'interpose entre lui (A) et la fenêtre (F) un Picea orientalis (B), qui jusqu'alors avait été maintenu bien à l'abri sous une cage de mousseline. La cime de ce Picea est ensuite enveloppée dans un sac de même étoffe, et dans ce sac J'emprisonne en même temps quelques pousses de PA Vies per- linata garnies d’ailés et de nymphes, en les faisant pénétrer par un orifice latéral (fig. 73). Les autres pousses très nombreuses du Picea orientalis sont laissées libres et sont prêtes à recevoir les ailés qui pourraient s'envoler des autres branches de l'Abies pectinata, c'est-à-dire de toutes celles qui n’ont pas élé emprisonnées dans le sac de mousseline. : Observations et résultats. — Le 13 mai, des ailés se sont fixés 316 PAUL MARCHAL sur l'A bies pectinata, el ont même commencé à pondre ; mais aucun ne s'est fixé sur la partie libre du Picea orientalis et aucune tendance à émigrer n’est perceptible chez ces aïlés. Fig. 73. — Disposition de l'expérience 14 (figure schématique) : A, Abies pectinala contaminé par Chermes piceae et portant des ailés en voie d'évolution; B, Picea orientalis; F, fenêtre ouverte tendue de mousseline. Le 14 mai, quelques aïlés sont aperçus sur les vitres de la fenêtre. Mais, ni à cette date, ni ullérieurement, aucun ne se fixe sur les rameaux libres du Picea orientalis. Le 28 mai, j'enlève le sac, dans lequelse trouvaientrenfermés à la fois la cime du Picea orientalis et les rameaux d'A bies pec- linala qui ont servi à produire les ailés dans cet espace clos. Je {rouve alors deux ailés fixés sur le Picea orientalis. L'un est mort sur son aiguille et n’a pondu qu'un seul œuf qui se trouve entre ses ailes. L'autre est bien vivant, mais n'a pas de sécrétion cireuse développée, et l’on entrevoit seulement un ou deux œufs sous ses ailes. Le premier est conservé pour CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 917 l'étude ; l'œuf qu'il a pondu est isolé et éclôt le 30 mai, et Ia larve qui en est sortie est préparée en vue de l'examen. Le second est laissé en place et pond encore quelques œufs ; le total de la ponte ne dépasse pas 5 ou 6 œufs qui sont tous éclos avant le 12 juin; une larve née de ces œufs s’est fixée et parait assez gonflée: le petit rameau sur lequel se trouvent cette larve ainsi que l'ailé qui lui à donné naissance, est coupé el mis dans une capsule de Petri. Parmi les quelques larves issues des ailés qui s'étaient fixés sur le Picea orientalis, trois ont pu être examinées ; or elles ne présentaient pasles caractères des larves sexuées : deux d’entre elles avaient en effet de très longues soies rostrales, 1470 % et 1500 &, c'est-à-dire d’une longueur équivalente: à celle des soies rostrales des sistentes ; les caractères du système glandulaire étaient également ceux des sistentes typiques. La troisième avait des soies rostrales plus courtes que les deux autres ; mais ces soies avaient pourtant encore une longueur de 910 z, donc très supérieure à celle des sexués où même des sexupares et des progredientes au stade correspondant. Deux autres aïilés, provenant du même Abies peclinata avaient été placés, le 14 mai, sur une des pousses du Picea orientalis et celle-ci avait été entourée d’une petite cage faite d’un manchon de verre et de mousseline; l'examen ice pousse, fait le 30 mai, montra que les deux ailés ne s'étaient pas fixés. Enfin six ailés emprisonnés dans un sac avec une cime de Picea excelsa furent dans le même cas. La fixation des ailés du C. piceae sur les Épicéas s’est done montrée exceplionnelle, etles individus issus de ces ailés qui ont été examinés n'ont pas présenté les caractères des sexués. EXPÉRIENCE 15 (D. piceae). Faits principaux. — Cette expérience avait pour but de voir comment se comporterait le Dreyfusia piceae vis-à-vis de VA bies nordmanniana qui est l'hôte intermédiaire d'élection pour le Dreyfusia Nüsslini, et de rechercher notamment si, sous l'in- fluence de cette plante, une modification du Dreyfusia piceae ou même une mutation de cette espèce en Dreyfusia Nüsslini ne pourrait pas être réalisée. Le résultat fut à ce point de vue 318 PAUL MARCHAL négatif. Je ne crois pasinutile toutefois de donner ici le résumé de cette expérience qui peut avoir son intérêt au point de vue des recherches de mème ordre qui pourront être entreprises sur les Chermes. 17e Disposition. — Le 20 juin 1910, un Abies pectinata très envahi par le Dreyfusia piceae (le n° 11 a) est mis en rapport avec un Abies nordmanniana destiné à être contaminé par lu. A cet effet l’Abies pectinata porteur de Chermes est entouré d’un grand sac de mousseline et une des branches de l’Abies nord- manniana est, en même temps, engagée dans ce sac par un trou latéral, de telle facon que les rameaux des deux essences se trouvent en contact et mélangés entre eux. Tout le reste de l'Abies nordmanniana se trouve protégé par une cage dont une des parois de mousseline a été percée pour laisser passer la branche qui se trouve en contact direct avec l’A Lies peclinata. Au niveau où cette branche quitte la cage pour s'engager dans le sac de mousseline voisin, un tampon d'ouate et des liens placés au niveau des orifices complètent la fermeture. Le but de cette disposition était de n’avoir qu'une contamination partielle de l’Abies nordmanniana, de facon que toute la partie de l’arbre non en rapport avec l'Ahes pectinala püût servir de témoin. Observations. — Le 26 septembre, les Chermes sur l'Abies pectinata sont devenus très apparents : c’est ls moment où les estivo-sistentes ont pris tout leur développement etles œufs qu'ils ont déjà pondus donnent des larves qui se répandent de tous côtés : le moment est donc très favorable pour que les rameaux de l’Abies nordmanniana qui se trouvent mélangés avec ceux de l'Abies pectinata se contaminent. Quelques larves se trouvent d'ailleurs déjà fixées sur l'A Vies nordmanniana dans les fissures. des bourgeons ou à l’aisselle des aiguilles qui se trouvent à la base de ces derniers ; mais elles sont fort rares. De façon à augmenter les chances de contamination, j'enlève le sac et je lie ensemble un certain nombre de rameaux des deux arbres ; puis, coupant quelques pousses de l'Abies pecti- nata, je les attache sur celles de lAbies nordmanniana, en me limitant toujours d'ailleurs à la mème branche qui se trouvait primitivement emprisonnée avec lAltes pectinata. Cette CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 319 branche est dès lors, à tout point de vue, dans d'excellentes conditions pour être contaminée par le C4. piceue, et le sac de mousseline est remis en place, puis retiré avant l'hiver. Malgréces conditions favorables, àla fin de l'automne, quelques larves seulement se sont fixées sur l'A bies nordmanniana, tandis qu'elles sont au contraire nombreuses sur l'Abies pectinata ; il y à donc, à ce moment, une préférence marquée pour ce dernier arbre. De plus, au printemps suivant, les larves avortent sur lAbes nordmanniana ; un seul Chermes, le 15 avril, est arrivé à se développer sur ce dernier arbre et présente deux œufs derrière lui ; mais le bourgeon sur lequel il est placé s'arrête dans sa croissance, ce qui contrarie sans doute l’évolution de l’Insecte : en tout cas, ce dernier ne tarde pas à périr et les deux œufs qu'il a déposés, englobés dans du miellat, périclitent égale- ment (1). 2 Disposition. — Toute chance de réussite de l'ancienne con- tamination de 1910 paraissait alors être disparue. Des dispo- sitions nouvelles furentdonc prises le 5 mat, en vue d’un second essai de contamination. Le même Abies nordmanniana qui avait servi à l'essai précé- dent fut utilisé ; mais l'Abies pectinata qui avait été mis alors en expérience se trouvant, par suite de l'intervention des ennemis naturels des Chermes dans des conditions défavorables, je pris cette fois comme arbre contaminateur un autre À bies pectinata, le n° 13, qui était chargé de nombreux Insectes ayant hiverné et pourvus de pontes extrêmement abondantes ; il présentait en outre des Jeunes pousses complètement épanouies et chargées de larves du type progrediens dont beaucoup devaient plus tard évoluer en ailés. Le 5 mai 1911, cet Adies pectinata n°13 et l’Abies nordman- niana sont donc placés à côté l’un de l’autre sur une table, dans une chambre, et devant une fenêtre. (1) Un autre Chermes fut aussi trouvé sur une branche opposée à celle qui avait élé mise en rapport direct avec l’Abies pectinata ; mais il fut reconnu plus tard, enexaminant la première mue, que c'était un Dreyfusia Nüsslini et non un Dreyfusia piceae ; sa présence résultait évidemment d’une contami- nation accidentelle qui, malgré les précautions prises, avait dû se faire l’année précédente. 320 PAUL MARCHAL La cime de l'Afies nordinanniana présente des bourgeons assez avancés par rapport à ceux des branches plus inférieures ; les aiguilles commencent pourtant à peine à se montrer. C’est cette cime seule qui est mise en rapport avec l'A bies pectinata en reliant au moyen de liens les pousses de la première aux pousses du second. La tige de cette cime est cerclée d'ouate et par-dessus celle-ci est appliquée une bande de papier recouverte d’un mélange gluant (adhésite); Loutes les dispositions sont prises d'autre part pour limiter les chances de contamination aux rameaux de cette cime, à l'exclusion des autres branches main- tenues à l'écart. Observations et résultats. — Dans le courant de mai, un cer- tin nombre de larves du type sistens se fixèrent sur les jeunes axes des pousses de l’année de VA bies nordmanniana, en nombre beaucoup moins grand toutefois que sur l'A bies pectinata; quel- ques rares progredientes slalionnèrent sur les aiguilles, mais ne continuèrent pas à s'y développer. Vers le milieu de juin, il n'y avait sur VA. nordmanniana que des larves primaires dor- mantes du type sis{éns sur les jeunes axes qui avaient été liés avec les pousses de lAbies pectinata; elles étaient d’ailleurs peu nombreuses. Vers cette époque l'arbre fut définitivement séparé de l'Abies peclinala contaminateur et replacé dans le jardin, sous une cage de mousseline. Le 14 juillet, quelques-unes des larves qui se trouvaient fixées sur l'A. nordmanniana furent recueillies et préparées pour l'examen microscopique : leurs caractères répondaient bien au type sistens du Chermes piceae. Le 31 juillet 1911, elles étaient toujours au même stade pri- maire, à l'état dormant, et passèrent ainsi l'hiver 1911-1912. Au printempsles Chermes piceae se développèrent etse multiplèrent avec une intensité normale sur l'A bies nordmanniana, et pendant tout le cours de l’année 1912 les générations se succédèrent sur cet arbre el conservèrent sans’ variation les caractères de l'espèce. Des ailés assez nombreux apparurent en mai sur les pousses contaminées, ce qui s'explique par ce fait que tous les Insectes ayant servi à la contamination de l'A bies nordmanniana descendaient du progrediens de l'expérience n° 13. Il résulte de cette expérience que, si la contamination de L''Abies nordmanniana par le CA. piceae est, dans certains cas, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 3921 difficile au début, l'espèce arrive néanmoins à s'adapter à cet arbre au bout de quelques générations et s'v multiplie alors avec intensité, sans que les caractères se modifient d’une facon appréciable. EXPÉRIENCE 16 (D. piceae). Faits principaur. — Cette expérience a été instituée en vue de rechercher l'influence que pourrait avoir sur le Chermes piceae (évoluant sur À bies peclinala) son passage sur l'A Dies nordman- niana et de s'assurer notamment si, dans ces conditions, une mutation de l'espèce donnant par exemple la forme Nwss/ini ne pourrait pas se produire. À ce point de vue, le résultat fut négatif, ce qui concorde avec le résultat de l'expérience 15. Disposition. — Le 11 avril 1912, un Abies nordmanniana en | pot, complètement indemne et présentant des bourgeons en train de débourrer, est mis en expérience. L'expérience est divisée en sept parties correspondant chacune à une petite branche bien isolée du susdit A /ies nordmanniana. L'isolement de chacune des sept branches est obtenu en plaçant vers sa base un manchon d’ouate en arrière duquel se trouve en outre une ceinture de papier recouverte d’un mélange gluant connu dans le commerce horticole sous le nom d’adhésite. Chacune des branches ainsi isolées est ensuite contaminée avec des fragments de rameaux portant des Chermes piceae avec leurs pontes et provenant de PAbies pectinata n°9 13 : cinq de ces contaminalions sont faites le 11 avril: les deux autres le 20 avril. On peut voir que les conditions de cette expérience diffèrent surtout de celles de l'expérience 15 par deux points : 19 par ce fait qu'elle a été commencée à une époque précoce, à un moment où les Chermes piceae servant à la contamination étaient encore susceptibles de produire des progredientes destinés à envahir les aiguilles ; 20 par sa fragmentation sur une série de branches isolées les unes des autres, ce qui facilitait le contrôle et per- mettait de vérifier que tous les individus se trouvant sur un rameau donné avaient bien été engendrés par un ou plusieurs Chermes répondant au type C4. piceae sans mélange accidentel avec une autre espèce. 3292 PAUL MARCHAL Observations et résultats. — Dans le courant d'avril et de mai un assez grand nombre de larves de Chermes (type neoprogre- diens) se fixèrent et se développèrent sur les aiguilles de quatre des rameaux mis en expérience, donnant naissance à des ailés et à des exilés aptères du type progrediens. Les sistentes de pre- mière génération produits en grand nombre ne se fixèrent par contre qu'en quantité relativement faible sur les axes ; présen- tant une très grande tendance à émigrer loin de leur point de naissance, 1ls périrent parcentaines dans les barrières d’ouate ou sur les ceintures d'adhésite destinées à isoler les branches. Un bon nombre d’entre eux pourtant arrivèrent à se fixer au niveau de l'ouate destinée à les arrêter. En septembre l'arbre pré- sentait un degré de contamination modéré ; les Chermes fixés au niveau des ceintures étaient entourés d’un épais duvet cireux ; ils paraissaient peu féconds et ne produisaient qu'un petit nombre d'œufs; dès le milieu de septembre quelques larves errantes furent observées sur les rameaux. Toutes les larves qui furent examinées répondaient au ty} e Ch. piceae. EXPÉRIENCE 17 (D). piceue). Faits principaur. — Cette expérience est du même type que les deux précédentes et concerne l'élevage sur Abies nordman- nana de Ch. piceae provenant d’A bies pectinata. Disposition. — Le 11 avril 1912, un Abies nordmanniana, paraissant indemne, mais qui, pour plus de sûreté, avait été traité par les vapeurs d'acide cyanhydriqnue (1) est mis en expérience. Deux branches isolées de la même façon que celles de l'expérience 16 sont contaminées avec des rameaux provenant de l’Abies pectinata n° 13 et chargés de CA. piceae avec pontes. Observations et résultats. — Dans cette expérience la conta- mination se fit d’une façon beaucoup plus intense que dans l'expérience 16. Les aiguilles se couvrirent d'abord de progre- dientes qui évoluèrent en ailés dans la première quinzaine de mai ; les progredientes aptères fixés sur aiguilles apparurent plus tard que les ailés, et leur développement s’effectua d’une façon beau- (1) Dose de 7 grammes de cyanure de potassium par mètre cube; durée : 45 minutes. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 323 coup plus lente, de sorte qu'ils ne se révélèrent d’une façon manifeste avec leur revêtement cotonneux qu'après la période d'apparition des ailés, à la fin de mai ou au commencement de juin : ils furent d’ailleurs peu nombreux. Contrairement à ce qui fut constaté pour l'expérience 16, les reosistentes de première génération furent assez abondants et se localisèrent surtout à l'extrémité du bois de l’année précédente, soit Le long de l'axe, soit au point de convergence des pousses de l’année qui terminent les rameaux. Au milieu de septembre la contami- nation de l'arbre était devenue très forte et sur les écorces des branches se trouvaient à la fois de nombreuses larves primaires (neosistentes) et des Chermes avant mué à différents stades et entourés de leur revêtement cotonneux. Beaucoup d’entre eux avaient des pontes, et des larves primaires fraîchement écloses représentaient une nouvelle génération issue des es/100- sistentes. Les caractères constatés furent toujours ceux du C. piceae. Cette expérience tend en outre à montrer que la difficulté que le Chermes piceae peut rencontrer à passer de lAtes pecti- nata sur l'A bies nordmanniana (Exp. 15) tient plutôl à une diffé- rence dans l’état de végétation des deux arbres qu'à la diffé- rence de leurs essences. EXPÉRIENCE 18 (D. p eue). Expérience concernant la destination des ailés. Le 11 mai 1912, cinq ailés de Ch. piceae, recueillis le même jour sur l’Abies nordmanniana 16, sont mis sur un rameau d'un Picea orientalis en pot, qui a été isolé dans une chambre devant une fenêtre. Le rameau sur lequel ont été placés les Chermes a lui-même été isolé dans un manchon de verre fermé, d’une part, à sa base, au moyen d'un bande d’étoffe enroulée sur elle-même autour du rameau, et d'autre part, à sa partie libre, avec une mousseline retenue par un caoutchouc. Les jours sui- vants aucun des ailés ne se fixe ; le 21 mai, les cinq sont retrouvés morts sur le fond d’étoffe qui ferme en bas le manchon. 24 . PAUL MARCHAL ExPÉRIENCE 19 (D. piceae). Expérience concernant la destination des ailés. — Le 12 mai 1912, cinq aïlés du Ch. piceue, recueillis le même jour sur l’Abies nordmanniana n°9 16, sont mis sur un rameau d'un Picea orientalis. Le dispositif et l'arbre mis en expérience sont les mêmes que dans l'expérience 18. Même résultat négatif. EXPÉRIENCE 20 (D. piceae). Expérience concernant la destination des ailés. —Le10mai1912, un ailé de CA. piceae récolté sur l'A bies pectinata n° 13 (1), dans le sac de mousseline qui entourait l’une des branches, est placé sur une pousse d’un Picea excelsa; celle-ci est isolée dans un étroit cylindre de verre tamponné à la base et recouvert de mousseline. Le 18 mai, l’ailé est trouvé fixé sur une aiguille de la pousse et a pondu un œuf; mais il meurt l’un des jours sui- vants sans déposer de nouveaux œufs. L'œuf isolé donne une larve ne présentant pas les caractères des sexués, mais ceux des sistentes avec de très longues soies rostrales (environ 1500 y). EXPÉRIENCE 21 (D. piceue). Expérience concernant la destination des ailés. — Le 11 mai 1912, quatre ailés éclos le jour même ou la veille sur l'A bies pectinala n°9 13 sont placés sur le bouquet de pousses terminal de l'un des rameaux d’un jeune Picea ercelsa en pot. Le dispositif est analogue à celui des expériences précédentes : isolement de la portion terminale du rameau dans un manchon de verre assez étroit pour que les pousses du rameau le frôlent de toutes parts et le remplissent presque entièrement. Les jours suivants trois ailés se fixèrent sur les aiguilles du Picea excelsa; deux d’entre eux moururent sans avoir pondu ; le troisième pondit trois œufs dont l’un avorta, tandis que les deux autres fournirent deux larves ; l’une fut égarée, l’autre présenta les caractères typiques des neosistentes avec de très longues soies rostrales (environ 1500). _(4) Get arbre était utilisé à ce moment pour la seconde partie de l’expé- rience 15 (5 mai). CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 325 EXPÉRIENCE 22 (D. piceae). Expérience concernant la destination des ailés. — Le 11 mai 1912, quatre ailés de CA. piceae, prélevés le même jour sur l'Abies nordmanmana 16, sont mis en expérience dans un bocal où sont placées en même temps quatre extrémités de rameaux avec jeunes pousses fraiches de Picea excelsa, de Picea orientalis, d’'Abies pectinata et d'A bies nordmannianu. D'autre part, le 10 mai, troissailés de CA. piceae éclos le jour même sur l'Abies nordmanniana 15 sont mis en expérience dans un second bocal et dans des conditions semblables aux précé- dentes; le 11 mai, deux ailés nouveaux sont ajoutés à ce deuxième lot. Les deux bocaux dans lesquels se trouvent ren- fermés les pousses vertes des Conifères etles ailés sont suffisam- ment clos avec des disques de verre pour que l’évaporaltion soit fortement retardée el pour queles pousses se conservent fraiches assez longtemps. Les neuf ailés qui furent ainsi mis en expérience moururent sans se fixer. EXPÉRIENCE 23 (D. piceae). Expérience concernant la destination des ailés. — Le 12 mai, cinq ailés de Ch. piceae éclos sur l'Abies pectinata 13 sont trans- portés sur l’un des rameaux d'un Picea orientalis en pot. Ce rameau, en vue de l'emprisonnement des Insectes, avait été préalablement passé dans un manchon de verre dans des conditions analogues à celles des expériences 18 et des suivantes ; dans le même manchon toutefois avait été également passée une pousse d’un-jeune Ates peclinata ; ce dernier arbre étant de très petite taille, le pot dans lequel il se trouvait planté avait été haussé à l’aide d’un support à la hauteur de la branche du Picea orientalis mise en expérience. Aucun des cinq ailés ne se fixa ni sur PA bies pectinata, ni sur le Pirea orientalis. EXPÉRIENCE 24 (D. piceae). Faits principaux. — Etude de Ia descendance des esline- sislentes sur Abies peclinala. 396 PAUL MARCHAL Disposition. — Le 10 juin 1912, contamination d'un Abies pectinata (1) en pot à l’aide d’un rameau coupésur l'Abies nord- mannana 17 et portant seulement deux estivo-sistentes avec leurs œufs; le rameau contaminateur est mis au milieu des rameaux de lAies peclinata qui sont rapprochés au moven d'une ligature. | Observations. — Les fils reliant les rameaux ayant été enlevés le 27 Juin, je constate la présence de sistentes fixés à la base des aiguilles des jeunes pousses et sur les bourgeons terminaux. Le 17 août, l’un d'entre eux s’est entouré d'une sécrétion coton- neuse abondante et a mué au moins une fois. Les autres sont encore à l'état de neosistentes. Le 13 septembre, la plupart des Chermes issus des es{ivo-sistentes. el qui se sont fixés en juin sur l'Ahies pectinata sont arrivés à maturité, se sont entourés d’une abondante sécrétion cotonneuse et ont pondu des œufs nombreux : le nombre des individus, en raison du rapproche- ment de certains d’entre eux, est assez difficilement appré- clable; 1l peut être de seize à vingt. Tous ces individus adultes (es/ivo-sistentes de 2€ génération) sont fixés sur les bourgeons terminaux où à la partie axillaire des trois derniers verticilles. En outre, quelques larves pri- maires ou à divers stades se trouvent sur les bourgeons et à la base des aiguilles. EXPÉRIENCE 25 (Pineus pini). Faits principaux. — Etude de la migration du Chermes du Pin sur les Epicéas. Avortement de la génération sexuée. Disposition. —— Le 26 mai 1907, 1 Picea orientalis, 1 Picea ercelsa, À Pinus strobus, À Pinus sylvestris sont mis en expérience. Ces arbres en pots et tenus antérieurement à l'abri de toute contamination extérieure sont placés ensemble sous une grande cage. Le même Jour, des pousses de Pinus sylvestris, recueil- lies dans la campagne environnante (Plessis-Piquet, Chàtenay) et chargées de nymphes et d’ailés fraîchement éclos de Ch. pini, sontintroduites sous la cage. Pour éviter un dessèchement trop (1) Ha été traité le 26 mars 1912 par l’acide cyanhydrique à la dose de 7 grammes de cyanure par mètre cube ; durée de la fumigation, 45 minutes. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 327 rapide, les pousses de Pin ont été disposées de facon à tremper dans des flacons remplis d'eau par leur partie inférieure. Le 31 mai, de nouvelles pousses sont ajoutées. Les éclosions d'ailés se font en assez grand nombre pendant les derniers jours de mai et les premiers de Juin; mais l'introduction de larves parasites (Scymnides, Syrphes) avec les pousses de Pin entraine aussi la destruction d'un grand nombre d’entre eux pendant leur évolution. Observations et résultats. — Le 12 Juin, le Picea orientalis est reliré de la cage. Un bon nombre de ses jeunes pousses portent des ailés sexupares de CA. pini qui se sont fixés et ont déve- lppé une abondante sécrétion cotonneuse. La contamination s'est faite pourtant d’une facon beaucoup moins intense qu'au dehors (sur les Picea orientalis des pépinières de Chàtenay). Dans le courant de jui, les sexués se développent en dessous des sexupares, au niveau de la zone décolorée de l'aiguille. Le 12 juillet, presque tous les sexués en voie d'évolution ont dis- paru ou sont desséchés. Malgré une recherche minutieuse sous Jes écailles de la base des pousses, aucun œuf pondu par un sexué n'est trouvé. Les examensultérieurs, faits en octobre ét au printemps 1908, confirment ce qui précède : la génération des sexués n'a done pas abouti. Parmi les autres arbres mis en expérience, le Picea ercelsa et le Pinus strobus n'ont pas présenté trace de contamination, c'est-à-dire que les ailés éclos des pousses coupées de Pinus sylvestris ne se sont pas fixés sur eux, et qu'aucune génération de Chermes n'apparut sur ces arbres nien 1907, ni l’année suivante. Pour Le Pinus sylrestris la contamination parut d’abord nulle et je ne trouvai aucun ailé fixé sur cet arbre qui, n'ayant pas des bourgeons de l'année débourrés, était d’ailleurs dans d'assez mauvaises conditions pour recevoir des ersules alatae. En 1908 toutefois, ce Pinus sylvestris se montrait contaminé par le Chermes pini et portait d'assez abondantes masses coton- neuses au niveau de la base des vieilles aiguilles et sous les lames éculleuses des écorces : la présence de ces Insectes peut s'expliquer par une infection due aux larves issues des aptères qui accompagnaient les nymphes. 328 PAUL MARCHAL EXPÉRIENCE 26 (P. pini). Faits principaur. — Destination des ailés. Fixation d’Exrsules alatae sur Pinus austriaca. Disposition. — Le 1€ juin 1907, un rameau d'un Pinus austriaca qui se trouve dans mon jardin est emprisonné à lin- térieur d'une cloche de verre percée, sur la grande ouverture de laquelle une mousseline a été tendue, et dont la petite ouver- Lure, qui à servi à introduire la branche, a été tamponnée avec de l’ouate glissée entre le verre et l'écorce. Le même jour, à l'intérieur de la cloche, une douzaine d’ailés de Chermes pini, récoltés dans la campagne sur les pousses de Pinus sylvestris, sont introduits ; le 5 juin, huit autres sont ajoutés Observations et résultats. — Le 1% juin, un des ailés s’est fixé sur une jeune aiguille et a développé une abondante sécrétion cotonneuse; trois où quatre autres, avec sécrétion plus rare, mais ayant pondu quelques œufs, sont moins complètement fixés et se détachentles jours suivants. Le 25 juin, la cloche est enlevée pour prendre une connaissance plus exacte des résul- tats. Il y à deux ailés complètement fixés, qui ont pondu des œufs sous leur corps, et qui sont entourés d’une abondante sécrétion cotonneuse : l'un, mentionné ci-dessus, est sur une aiguille de l’année, l'autre sur une vieille aiguille. Un certain nombre d'œufs ont déjà donné des larves et lune d’entre elles, fixée sur l'axe d’une pousse de l’année, est entourée d’un petit tampon cotonneux. Nous avons donc affaire à des ersules alatae capables de donner naissance à une progéniture sur le Pin. EXPÉRIENCE 27 (P. pin). Faits principaur. — Dans la descendance des sexupares peuvent se trouver quelques rares larves à détermination parthé- nogénétique et susceptibles de se fixer et d'évoluer sur les Pins. Disposition. — Le 10 juin 1909, un petit Pinus sylvestris en pot, dans la crainte d’une contamination antérieure, est entiè- rement badigeonné avec un mélange à parties égales d’éther et d'alcool. Il est ensuite abondamment arrosé et séché. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 9329 Au centre de la couronne d’aiguilles qui termine l’un des rameaux, est alors déposée une petite pousse de Picea orientalis chargée d’une dizaine d’ailés de Pineus pini avec leurs œufs en voie d’éclosion; puis, au moyen d’un fil, les aiguilles du Pin sont rapprochées les unes des autres de façon à emprisonner au milieu la pousse de Picea orientalis. Le 15 juin, une dizaine de pousses de Picea orientalis pouvant porter 50 à 60 ailés de Pineus pini sont insérées de la même facon dans les couronnes terminales de trois autres rameaux du même Pin sylvestre. Observations et résultats. — L'immense majorité des larves qui naissent des œufs pondus par les ailés sur les pousses de Picea orientalis, étant des sexués, meurent et se dessè- chent après avoir erré sur les aiguilles du Pinus sylvestris, ou bien semblent se fixer, mais meurent quelques jours après. À partir du 20 Juin toutes les larves paraissent mortes et desséchées. Ce n'est que le 28 juillet que je remarque deux femelles parthénogénétiques très développées (3e el 4° stades) entourées de leur substance cotonneuse. L'une et l’autre sont fixées sur une aiguille du Pin sylvestre ; enfin, sous les écailles. à la base d’une jeune pousse, un Chermes ayant commencé à pondre et quelques larves nouvellement écloses, groupées à côté de lui, sont encore remarqués. Cette expérience tend à démontrer que la progéniture issue des ailés qui se fixent sur le Pinus orientalis (sexupares) n’est pas exclusivement formée de sexués destinés à évoluer sur Picea orientalis, mais qu'elle présente aussi quelques rares indi- vidus susceptibles d'évoluer sur le Pin sylvestre en femelles parthénogénétiques. Notons, d’ailleurs, que, sur l'Épicéa, ces individus auraient avorté, puisque les sexués sont déterminés dès le premier stade larvaire. Dans la crainte d’une contamination étrangère à l'expérience que le badigeonnage à l’alcool-éther n'aurait pas entièrement fait disparaître, J'ai fait comme contrôle une nouvelle expé- rience en 1909 (Voir Exp. 53). : EXPÉRIENCE 28 (P. pini). Faits principaux. — La descendance des ersules alatae est exclusivement formée de larves à destination parthéno- ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 9e série. 1913, xvinr, 22 —— 330 PAUL MARCHAL génétique qui ne peuvent évoluer sur le Picea orientalis. Disposition. — Le 12 juin 1907, un Picea orientalis en pot est mis en expérience, Il a été tenu jusque-là isolé; ses pousses commencent à se développer et sont au stade de végétation le plus favorable à l'évolution du Chermes pini. Dans les quatre pousses terminales, le 12 Juin, j'insère cinq ersules alatae avec les morceaux d’aiguilles de Pin sylvestre sur lesquelles ils sont fixés. Ces ersules ont été récoltés la veille en détachant de l'arbre les aiguilles sur lesquelles ils se trouvaient ; Les aiguilles ont été ensuite coupées de facon à ne conserver de chacune d’elies que le segment sur lequel est fixé le Chermes abritant de ses ailes les œufs qu'ila pondus. C'est la partie d’aiguille ainsi préparée supportant l’Insecte el ses œufs qui est insérée dans une jeune pousse de Picea orientalis. | Observations el résultats. — L'éclosion des œufs se fait len- tement; les larves qui en naissent errent pendant quelque temps sur les pousses de l'Épicéa, puis elles meurent et se des- sèchent. Pas une ne se développe. Ce résultat concorde d’ailleurs avec ce que nous savons au sujet de la différenciation, au pre- mier stade, des sexués et des jeunes issus des ersules alatae, ces derniers étant tous des larves à longues soies rostrales, c'est-à-dire à destination parthénogénétique. EXPÉRIENCE 29 (P. pini). Faits principaux. — Élevage de la descendance des exsules alalae; succession des générations de cette descendance. Disposition. — Le 11 juin 1907, un Pinus sylvestris en pot est désinfecté : il est immergé dans un bain de jus de tabac à 10 p.100, additionné de 20 p. 100 d'alcool, puisest laissé toute la nuit dehorssous une pluie battante ; lé lendemain, 12 juin, il est encore baigné dans un baquet rempli d’eau, puis badigeonné complètement avec un mélange à parties égales d'alcool et d'éther. Après un nouveau bain, il est mis en expérience. Sept ersules alatae, récoltés dans la campagne sur des Pinus sylvestris, sont insérés, avec les aiguilles ou morceaux d’aiguilles sur lesquelles ils sont fixés, au milieu des pousses de l'année. Le 15 Juin, trois autres ersules alatae sont ajoutés. Tous ces CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 331 exsules sont accompagnés des œufs qu’ils ont pondus sur les aiguilles auxquelles ils sont.adhérents. Observations et résultats. — Les jours suivants beaucoup de larves issues des ersules alatae meurent et se dessèchent. A partir du 25 juin, je vois trois individus fixés s'entourer de sécrétion cotonneuse, muer et se développer graduellement en femelles parthénogénétiques. Ils sont directement fixés sur des aiguilles appartenant aux pousses au milieu desquelles ont été placés les ersules alatae. Le 18 juillet, ces femelles parthéno- génétiques issues des exsules alatae ont elles-mêmes commencé à pondre. Le 30 juillet, je vois deux autres individus bien développés entourés de sécrétion cotonneuse et fixés sur des aiguilles appartenant à des pousses de l’année, placées au-dessous de celles qui ont été mises directement en rapport avec les ersules alatae. Un autre Chermes ayant commencé à pondre est égale- ment découvert à la base d'un groupe de deux vieilles ai- guilles. Il est établi, par ce qui précède et par d’autres expériences analogues, que les ezsules alatue donnent bien naissance à une descendance viable évoluant en femelles parthénogénétiques sur le Pinus sylvestris. Cette descendance a, en outre, été sui- vie sur cet arbre pendant plusieurs générations. Au début de septembre, les individus signalés en juillet sont encore vivants et en train de reproduire; mais la génération qui en est issue est encore inapparente et cachée à l’état de larves primaires sous les écailles, à la base des aiguilles. L’évo- lution est donc beaucoup plus lente que pour les lignées di- rectement issues des m#igrantes alatae. Au début d'avril 1908, quelques rares Chermes entourés de leur masse cotonneuse deviennent apparents à la base des aiguilles ; un grand nombre’de larves ont donc dû périr, soit en raison de circonstances climatériques, soit en raison d'une faiblesse naturelle aux descendants d’ersules alatae, soit pour toute autre cause. Il est à noter d’ailleurs que les femelles par- thénogénétiques se montrent peu fécondes au printemps et que les échantillons examinés n’ont que quatre gaines ovi- gères. DZ PAUL MARCHAL En mai 1908, une nouvelle génération se développe à la base des aiguilles des pousses de l'année : elle se présente sous la forme de jeunes Chermes, entourés de petits amas coton- neux : c’est la première génération annuelle, issue des hiver- nants, celle qui peut évoluer en exilés aptères et en ailés (seru- parae, exsules alatue). Or, dans le cas actuel, des exilés aptères sont seuls observés : ils sont de petite taille, ne présentant que un ou quelques œufs en arrière de leur corps; leurs gaines ovigères sont, en général, au nombre de quatre et ne con- tiennent que peu d'œufs. A la fin de mai, les exilés aptères pondent quelques œufs et ceux-ci évoluent en une deuxième génération qui se développe en juin et Juillet, soit à la base des aiguilles, soit sur les aiguilles elles-mêmes. Dans le cours de l'été enfin, une troisième géné- ration et peut-être une quatrième génération partielle proies naissance pour passer l'hiver. Au printemps de 1909, la première génération annuelle com- porte des ailés et, le Pin étant mis dans une cage, 1l se déve- loppe des ersules alatae. Outre les indications qu’elle fournit sur la descendance des exsules alatae, celte erpérience montre que chez le Pineus pini, l'hérédité n'intervient pas comme cause déterminante dans l'appa- rition des ailés, ce qui s'explique par l'absence du dimorphisme sistens-progrediens qui se rencontre au contraire chez les Drey- fusia. EXPÉRIENCE 30 (P. Pini orientalis). Faits principaux. — Les migrantes alatae ne donnent pas de descendance sur le Picea orientalis. Disposition. — Le 20 juin 1907, un jeune Picea orientalis en pot est mis en expérience : sa cime est entourée d’une cloche à raisin et mise en rapport avec une galle de Chermes pin qui a été récoltée sur Picea orientalis dans les pépinières de Châte- nay. À partir du 25 juin, tous les ailés éclos de la galle errent sur les parois de la cloche et sur la mousseline; un seul se fixe sur le Picea orientalis; mais il meurt comme les autres sans avoir développé de sécrétion cotonneuse et sans avoir pondu. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 333 Tous sont morts dès les premiers Jours de juillet. Les grantes alatae de P. pini ne se sont donc pas fixés el n'ont pas donné de descendance sur le Picea orientalis, c'est-à-dire sur lespèce végétale même où ils ont pris naissance et où 1ls ont évolué à l'intérieur des galles. EXPÉRIENCE 31 (P. pini orientalis). Fais principaur. — Fixation des rigrantes alatae sur le Pinus sylvestris et le Pinus strobus; non fixation sur le Picea orientalis. Élevage de la descendance des migrantes alatae sur le Pinus sylvestris; avortement de cette descendance sur le Pinus strobus. Disposilion. — Le 20 juin 1907, sont mis en expérience ensemble sous une grande cage disposée en plein air : 10 un Pinus sylvestris; 29 un Pinus strobus; 39 un Picea orientalis. (Ce Picea orientalis est celui qui est utilisé pour l'expérience 30; mais celte expérience 30, portant sur un seul rameau empri- sonné dans une cloche, ne peut être troublée par l'expérience actuelle et 1l en est réciproquement de même pour cette der- nière.) Une quinzaine de galles de Chermes pin, récoltées la veille dans des pépinières ou parcs des environs sur Picea orentalis et en train de fournir leurs éclosions d'ailés sont mises sous la cage. Observations el résultats. — Le 23 juin, il v a déjà de nom- breux rugrantes alalae tixés sur les Pins. En raison de sa situa- tion orientée vers la plus grande lumière, et surtout en raison de sa haute cime qui touche Je plafond de mousseline de la cage où stationnent surtout les ailés, le Pinus strobus se trouve plus garni de migrantes alatae fixés que le Punus sylrestris. Pour égaliser les chances de contamination pour les jours sui- vants, le niveau du Pinus sylvestris est légèrement surélevé en sortant de terre le pot dans lequel il se trouve. Le 25 juin, le Pinus syloestris et le Pinus strobus sont forte- ment garnis d'ailés, et ceux-ci ont développé une abondante sécrétion cotonneuse. Aucun ailé ne s’est fixé sur l'Épicéa qui est définitivement retiré le 30 juin. Sur les Pins, les éclosions des œufs pondus par les #igrantes alatae se font en abondance pendant la deuxième quinzaine de DL PAUL MARCHAL juillet, tant sur le Pinus strobus que sur le Pinus sylvestris. Le 27 juillet, les larves issues de ces œufs ne se sont pas fixées sur le Pinus strobus; elles sont mortes et desséchées. Au con- traire, sur le Pinus sylvestris, de nombreuses larves se sont fixées, principalement au niveau des bourgeons, et déve- loppent sous les écailles une abondante sécrétion cotonneuse. Cette constatation est la première qui me porte à penser que le Chermes que lon rencontre habituellement sur le Pinus strobus (Ch. strobi) constitue réellement une espèce distincte du CA. pini. En septembre, une nouvelle génération issue de la précé- dente s’est développée : l'attaque du Pinus sylvestris est alors si considérable que, pour conserver l'arbre, Je détruis par écra- sement un grand nombre de Chermes. En octobre, certains individus de cette deuxième génération commencent à pondre, la plupart des œufs toutefois sont pondus au printemps sui- vant par des Chermes qui achèvent leur évolution après l'hiver. A la fin de mars 1909, la contamination est si intense qu'il devient nécessaire de détruire encore un bon nombre de Chermes, surtout près des bourgeons. Vers le 10 mai, les œufs sont en nombre prodigieux et les jeunes larves qui en sortent se mettent à circuler sur les pousses; un grand nombre sont détruites par écrasement ou mème par badigeonnages, dans la crainte de voir l'arbre périr. Les Jours suivants, les larves qui continuent à éclore se fixent sur les pousses et s'entourent d’une abondante sécrétion cotonneuse. Le 18 mai, dans cette innom- brable population, je remarque que beaucoup de nymphes se sont formées, et l’éclosion des ailés est même déjà commencée. Les femelles parthénogénétiques aptères qui se développent parallèllement aux ailés et qui font partie de la même généra- tion (première génération issue des Insectes ayant hiverné sont petites et n’ont que quelques gaines ovigères peu dévelop- pées ; elles sont mélangées avec les nymphes, à peu près de même taille et abritées sous l’abondante séerélion cotonnèeuse qui garnit les pousses. Il est à noter que, depuis la fin de l’année dernière, le Pin contaminé a été conservé à l'abri dans une serre non chauflée et très aérée au moyen de baies grillagées; celte circonstance à pu, malgré ces dernières conditions, CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 339 hâter dans une certaine mesure l’évolution des Chermes. Les générations habituelles se succèdent sur le Pin sylvestre contaminé pendant l’année 1908. Au printemps 1909, il est assez fortement envahi; beaucoup moins pourtant qu’au prin- temps de 1908. L’éclosion des ailés, soigneusement surveillée, commence le 21 mai; elle est donc assez fortement en retard sur celle de l’année précédente. L'avance observée en 1908 peut être attribuée, soit à ce qu'il s'agissait d'une descendance de migrantes alatae de l’année précédente, soit à ce que le Pin a été abrité en 1908, au lieu d'être placé à l'air libre comme en 1909, soit encore aux deux influences. Pendant les années 1908 et 1909, le Pinus strobus qui à été mis en expérience en 1907 continue à rester andemne. EXPÉRIENCE 32 (P. pini orientalis). Faits principaur. — Expérience de même ordre que la pré- cédente. Élevage de la descendance des rigrantes alatae sur le Pin sylvestre. Très forte attaque. Disposition. —- Le 21 juin 1907, la cime d'un Pinus sylvestris de très petite taille est enfermée dans une cloche à raisin, le grand orifice étant tourné vers le haut et fermé avec de la mousseline tendue; seul le verticille inférieur reste en dehors de la cloche. À l’intérieur de cette dernière une galle unique et müre de Chermes pini recueillie sur Picea orientalis est introduite. La cloche se trouve ainsi en grande partie comblée par le feuillage du petit arbre, et pendant toute l'expérience une humidité abondante règne à son intérieur, l'eau se condensant sur les parois; cette dernière condition est généralement assez mauvaise, les ailés pouvant se coller contre le verre mouillé et se trouver ensuite dans l'impossibilité de se dégager. Néan- moins tous les ailés se fixent les jours suivants et effectuent leur ponte. Le 5 Juillet, ils sont tous fixés sans exception sur les aiguilles du Pin sylvestre et au-dessous de leur corps se trouvent des œufs abondants. L'éclosion des larves issues des rigrantes alatae commence le 12 juillet etse poursuit les jours suivants. Elles se fixent et évoluent aussitôt. A la’ fin de juillet, elles sont déjà d'assez grosse taille (deuxième et troisième stade) et entourées de 330 PAUL MARCHAL sécrétion cotonneuse; un grand nombre sont descendues et se sont accumulées au point d'attache de la cloche, là où un tam- pon d’étoffe bouche le trou inférieur et comble l'espace annu- laire laissé entre la tige de l'arbre et le verre. Le 17 août, cette génération (première issue des #migrantes alatae) à pondu et des larves de deuxième génération sont en train d’éclore ; ces larves poursuivent leur évolution pendant la fin d'août et le mois de septembre ; une partie d’entre elles, au moins, arrive à maturité et pond des œufs en septembre, d’où sort, avant l'hiver, une troisième génération qui n’est peut-être que partielle et qui ne pondra qu'au printemps sui- vant. La succession de ces générations multiples aboutit à la formation d’un nombre immense d'individus. L'arbre en est enlièrement couvert. Le 18 septembre, l'attaque paraissant trop forte et les aiguilles commençant à tomber, un grand nombre de Chermes sont détruits par écrasement. L'arbre, néanmoins, ne peut survivre et est mort au printemps suivant. EXPÉRIENCE 33 (P. pin orientalis). Faits principaur. — La descendance des igrantes alatae avorte complètement sur le Picea orientalis. Disposition. — Le 5 juillet 1907, un Picea orientalis est mis en expérience : douze #igrantes alatae de Pineus pini fixés sur le Pinus sylvestris de l'expérience 32 et ayant une ponte abon- dante en arrière de leur corps sont récoltés avec les aiguilles sur lesquelles ils se trouvent, et celles-ci sont insérées entre les feuilles de l’un des rameaux du Picea orientalis ci-dessus men- tionné. Observations el résultats. — Le résultat est négatif : la des- cendance issue des nigrantes alatae ne peut se développer sur le Piceaorientalis EXPÉRIENCE 34 (P. pini, race indigène). Faits principaux. — Contaminalion d'un Pinus sylvestris en pot par le Chermes du Pin indigène récolté en forêt. Disposition. — Le 18 mai 1908, un Pinus sylvestris en pot conservé en réserve depuis lautomne et indemne est contaminé à l'aide de pousses de Pinus sylvestris chargées de Chermes pin CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 391 et recueillies dans la forêt de Montmorency, loin de tout pare pouvant renfermer des Picea orientalis. Ces pousses ne peuvent done présenter que des Chermes pini indigènes se multipliant sur le Pin sylvestre par parthénogénèse exclusive depuis d'innombrables générations. La contamination est réalisée, dans cette expérience, en dispo- sant les pousses de Pin contaminatrices dans des vases remplis d'eau, de façon à laisser le temps aux larves d’éclore, et les vases sont eux-mêmes placés contre la tige du Pin à conta- miner. Observations et résultats. — Le 8 août, quelques petits amas cotonneux apparaissent sur les jeunes pousses près des bour- geons terminaux : la contamination s'est donc produite; elle s’aceuse de plus en plus, et au printemps de l’année 1909 elle est très accentuée. L'arbre ainsi contaminé par le Chermes puni d'origine forestière indigène sera utilisé pour d’autres expé- riences (voir n° 44). EXPÉRIENCE 35 (P. pin). Faits principaur. — Expérience portant sur la destination des ailés qui éelosent à la fin de mai sur les jeunes pousses des Pinus sylvestris et qui peuveut devenir soit des sexupares en émigrant sur les Épicéas, soit des ersules alatae en restant sur les Pins. Faible tendance sexupare ; grande production d’ersules alatae. Disposition (fig. 74). — Le 25 mai 1908, 2 Pinus sylvestris en pots À et B, naturellement contaminés par le Chermes du Pinet dont les pousses sont garnies d’aptères et de nymphes nombreuses, sont placés dans une chambre, sur une table, devant une fenêtre ouverte tendue de mousseline. Sur la même table et à côté d'eux est placé un Picea orientalis C; ce dernier est disposé un peu en avant des Pins, contre la croisée, et de facon qu'une partie des branches soit en contact avec la mous- seline de la fenêtre. L'un des deux Pins, A, est laissé a décou- vert ; l’autre Pin, B, est complètement entouré d’un grand sac de mousseline, et dans le même sac est emprisonné en même temps et sans le couper un des rameaux (d) du Picea orienta- 338 PAUL MARCHAL lis C. Les ailés commencent à éclore et à voler le 28 ma; l'essaimage atteint son apogée le 31 mai, et il se termine le 5 juin. D'après le dispositif ci-dessus décrit, on peut voir que les ailés qui éclosent du Pin À sont mis en liberté dans la = 3° Section / 7 a TR 17 Section Fig. 74. — Disposition de l'expérience 35 (figure schématique) : A, Pinus sylvestris envahi par le Chermes pini et laissé à découvert; B, Pinus sylvestris envahi par le Chermes pini et entouré d’un sac de mousseline ; C, Picea orientalis dont un rameau d est inclus dans le sac de mousseline ci-dessus mentionné, avec le Pinus sylvestris B, et dont un autre rameau # est inclus dans une cloche à raisin. ‘chambre et ont à leur disposition pour se fixer le Pin A lui- même, ou le Piceaorientalis C, moins le rameau qui se trouve inclus dans le sac de B. Les ailés qui éclosent de B, par contre, sont retenus captifs à l'intérieur d'un sac resserré et ont à leur disposition lout le Pin B plus le rameau ({d) de Picea orientalis inclus à l'intérieur du mème sac. La même expérience se trouvera donc réalisée dans deux condi- tions expérimentales assez différentes, gràce au dispositif adopté. Pour varier encore ces conditions, et en créer une troisième, le 29 mai, un des rameaux (7) du Picea orientalis est emprisonné dans une cloche à raisin dont le grand orifice à été recouvert CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 339 de mousseline et dont le petit orifice, ivrant passage au rameau, a été obturé avec des tampons d’étoffe et d’ouate. Le 29 mai, une centaine d’ailés, recueillis avec un pinceau sur la mousseline de la fenêtre et provenant du Pinus sylrestris A, sontintroduits à l'intérieur de la cloche. Le 31 mai, 50 nouveaux ailés recueillis dans des conditions semblables sont ajoutés aux précédents. Ils se trouvent ainsi artificiellement mis en rapport direct avec un rameau du Picea orientalis. Observations et résultats. — Les résultats de l’expérience, dont le champ se trouve ainsi divisé en trois sections, furent les sur- vants : 1" section. — A l'intérieur de la cloche. — Résultat négatif ; aucun ailé ne se fixe, ni ne reproduit sur le Picea orientalis. ® section. — Pin sylvestre À et Picea orientalis (moins ses deux rameaux inclus). — Les ailés du Pin sylvestre À éclos en liberté dansla chambrese portèrent en nombre très grand sur la mousseline de Ja fenêtre; très peu s'arrêtèrent sur Le Picea orien- talis, dont les branches antérieures étaient pourtant en large contact avec la mousseline dans une région très éclairée où les Chermes s’agitaient en nombre considérable. Une fois le vol des ailés terminé, il fut constaté que même les pousses qui étaient appliquées contre le rideau de mousseline et qui avaient élé pendant plusieurs jours en rapport constant avec de nombreux ailés n'avaient retenu ces derniers. Une seule pousse pourtant en portait un qui était bien fixé et entouré d’une abondante sécrétion cotonneuse, présentant tous les caractères des sexu- pares ; sa descendance ne put arriver au terme de son évolution. Si le résultat fut presque négatif au point de vue de la fixa- tion des sexupares sur le Pirea orientalis, 1 fut au contraire positif pour la fixation des ersules alatae sur le Pin sylvestre. Malgré l'attraction que pouvait exercer sur les aïlés le grand écran blanc formé par la mousseline dela fenêtre, un assezgrand nombre des ailés éclos du Pinus sylvestris À, qui se trouvaient en complète liberté dans la chambre, se fixèrent sur cet arbre, pourtant assez distant de la fenêtre. Ces ersules alatae don- nèrent des œufs abondants d’où sortirent des larves qui se fixèrent sur le Pin. 340 PAUL MARCHAL 3e section. — Pin sylvestre B et rameau de Picea orientalis d'inclus à Pintérieur du même sac. En raison de la quantité innombrable d’ailés qui furent main- tenus par la présence du sac en rapport constant avec les arbres, les résultats furent, en ce cas, beaucoup plus positifs que dans le cas précédent. Les ersules alatae se fixèrent en très grand nombre sur le Pin sylvestre B. Toutes les branches de l'arbre en portaient, même celles qui se trouvaient du côté le moins éclairé de l'arbre et l’on pouvait en rencontrer aussi sur des aiguilles très écartées de la mousseline. Certains rameaux qui se trouvaient appliqués contre le sac dans les régions les mieux éclairées en étaient surchargés. Tous ces individus n'étaient pas d'ailleurs simplement posés, mais définitivement fixés, le rostre enfoncé dans l'aiguille et dans l'attitude caractéristique : ils développaient en peu de temps une abondante sécrétion cotonneuseet pondaïent sous leurs ailes un paquet d'œufs d'où sortaient au bout de quelques jours des larves destinées à évoluer sur le Pin. Pour ce qui concerne la branche de Picea orientalis meluse dans la même sac, les résultats furent les suivants : Quelques pousses seulement présentaient des ailés fixés et entourés de sécrétion cotonneuse. Is étaient tous groupés dans un repli d'étoffe formant une sorte de pointe avancée du côté le plus lumineux. Les ailés étaient attirés là en grand nombre ets’ yaccumulaient comme dans un piège : c'esten raison de cette circonstance que les pousses qui frôlaient la mousseline de cette région portaient des ailés définitivement fixés ; toute la partie de la branche qui ne se trouvait pas en contact direct avec cette région éclairée en était dépourvue. Un bon nombre des ailés ainsi fixés sur le Picea orientalis prirent les caractères habi- tuels des sexupares fixés sur cet arbre, développèrentune abon- dante sécrétion cotonneuse et pondirentdes œufs d’où sortirent des larves sexuées ; celles-cise développèrent, suivant la règle, sous le corps du sexupare, l’aiguille se décolorant au même niveau. En juillet je pus observer plusieurs femelles entièrement développées; par contre, aucun mâle ne fut rencontré. Le 5 août, examinant la base des deux pousses sous les écailles, Je n'y CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 341 rencontre ni femelles mortes, ni œufs pondus par elles ; aucune fondatrice ne se trouve d’ailleurs à ce moment ni ne se trouvera ultérieurement sur les jeunes axes : Le eycle est donc définiti- vement interrompu. I n'ya pourtant pas d’ennemis, pas même les Acariens qui se rencontrent d'une facon si fréquente à l'extérieur sur les pousses d'Épicéa et qui attaquent les œufs des sexués. Si le cycle est enrayé, 1} semble donc bien que la cause de cé fait réside non dans des circonstances extérieures, mais dans la nature même des Insectes mis en expérience : ces derniers nous apparaissent comme mal adaptés, et comme donnant une des- cendance de sexués trop restreinte et trop mal équilibrée dans la proportion des deux sexes pour assurer la continuation du cycle. On voit en outre que, dans cette expérience, le Picea orientalis a exercé une action très faible sur les ailés : il a fallu que le tropisme lumineux les dirigeât et les forçât à s'accumuler dans un réduit où se trouvait un rameau de Picea orientalis pour qu'ils arrivassent à s’v fixer. Dans cette expérience, les ailés ont montré une tendance beaucoup plus grande pour former des ersules alatae que pour former des sexupares. EXPÉRIENCE 36 (P. pini, race indigène). Faits principaur.— Expérience portant, comme la précédente. sur la destination des ailés qui éclosent à la fin de mai sur les jeunes pousses du Pin sylvestre. Faible tendance sexupare de la race indigène du Chermes du Pin. Disposition. — En vue d'obtenir des ailés pendantladeuxième quinzaine de mai 1908, des pousses de Pin sylvestre envahies par le Pineus pini sont récoltées dans la forêt de Montmorency, près de Chauvry, dans un endroitécarté de toutpare où puissent se trouver des Picea orientalis. Les Insectes qui sont mis en expérience appartiennent ainsi sûrement à une race qui s'est multipliée par parthénogénèse exclusive depuis un très grand nombre de générations sur le Pinus sylvestris. Sur ce point, les conditions expérimentales sont donc mieux précisées que dans la précédente expérience. 349 PAUL MARCHAL Pour laisser aux ailés le temps de se développer, et pour éli- miner aussi plus facilement les ennemis qui peuvent s’y trouver (larves de Syrphes ou de Coccinelles), les pousses sont placées isolément ou par petits bouquets dans des flacons remplis d’eau et sont observées journellement. Le 31 mai l'éclosion des ailés commence et les dispositions sont aussitôt prises pour l’expé- rience. Sous une cage de mousseline sont placés l’un contre l’autre un Piceaorientalis etun Piceaexcelsa. La cage est assez petite pour que le feuillage des deux arbres soit rebroussé contreses parois ; d'autre partle Picea ercelsa est plus haut et plus large que le Picea orientalis ; son feuillage remplit une partie plus grande de la cage etilest au moins aussi bien exposé au point de vue de la lumière. Ses pousses sont aussi belles et aussi bien déve- loppées que celles du Picea orientalis. Test donc dans d’excel- lentes conditions pour que la contamination par les ailés s’éta- blisse, si elle doit s'établir : sa taille lui donne même l'avantage sur le Picea orientalis. Les choses étant ainsi disposées, J'introduis sous la cage les pousses sur lesquelles se trouvent les Chermes en train d'éclore, en même temps que les flacons remplis d’eau destinés à les conserver fraiches ; un certain nombre de Chermes éclos dans la matinée sur les mêmes pousses et recueillis à part sont en même temps introduits. Observations el résultats. — La cage gène l'observation les jours suivants ; on peut se rendre comple toutefois que, si une contamination s’est produite, elle doit être très faible. Le 22 juin, la cage est retirée, je trouve quatre ailés seulement fixés sur le Picea orientalis et pas un seul sur le Picea ercelsa. Les aiïlés fixés sur le Picea orientalis présentent la disposition et les caractères habituels des sexupares ; ils déterminent aussi le jaunissement de l'aiguille caractéristique. Les jeunes sexués auxquels ils donnent naissance ne paraissent pas toutefois arriver à maturité. En toutcas, sur les quatre pousses marquées d’un fil blanc qui étaient occupées par les sexupares, aucune fondatrice n'apparait et Pannée suivante aucune galle ne se développe sur l'arbre. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 343; EXPÉRIENCE 37 (P. Pini, race indigène). Faits principaux. — Expérience sur la destination des ailés, analogue à celle du n° 36, mais portant seulement sur le Picea orientalis. Disposition. — Le 31 mai1908, un Picea orientalis (celui ayant servi à l'expérience n° 33 en 1907) est mis en expérience. Toute sa cime est entourée d’une cloche à raisin recouverte de mous- seline. Le même jour, une quarantaine d’ailés de Chermes pini provenant de pousses de Pinus sylvestris récoltées dans la forêt de Montmorency sont introduits dans la cloche. D’autres intro- ductions d’ailés de même provenance sont en outre faites les Jours suivants: une cinquantaine, le 2 juin; vingt-cinq, le 3 Juin; une trentaine, le 4 juin. Observations et résultats. — Résultat négatif; aucun ailé ne se fixa sur le Picea orientalis. EXPÉRIENCE 38 (P. pini, race indigène). Faits principaux. — Expérience sur la destination des ailés nés au printemps sur le Pin sylvestre ; forte tendance d’ersul alata ; faible tendance sexupare. Disposition. — Le 1° juin 1908, un Pinus sylvestris et un Picea orientalis sont mis en expérience. A l'intérieur d’une même cloche percée, sont introduits un grand rameau du pre- mier et un petit rameau du second; sur ce dernier trois ou quatre pousses seulement sont laissées en dehors. Le même jour, à l'intérieur de la cloche sont introduits une trentaine d’ailés de Ch. pini provenant des pousses de la forêt de Montmorency ; le 2 juin, vingt-cinq nouveaux sont ajoutés ; enfin le 3 juin, cin- quante-trois autres sont encore introduits. Observations et résultats. — Un certain nombre d’ersules alatae se formèrent et pondirent ; le nombre des erswles ne peut être précisé, en raison des parois humides de la cloche qui gênaient l'observation : leurs œufs donnèrent des larves nombreuses qui se répandirent sur les rameaux et les parois de la cloche. Le 6 juin, trois ailés firent une tentative de fixation sur les pousses de Picea orientalis ; mais le lendemain l'un d’entre eux avait déjà abandonné son poste, et le 8 juin, les deux autres 344 | PAUL MARCHAL s'étaient également retirés. Ainsi donc ces trois ailés, après une tentative de fixation, renoncèrent à se fixer. EXPÉRIENCE 39 (P. pini,race indigène). Fais principaux. — Expérience sur la destination des ailés nés au printemps sur le Pin sylvestre ; résultat négatif, contrai- rement à celui de l'expérience précédente. Disposition. — Le 2 juin 1908, un Pinus sylvestris et un petit Picea ercelsa sont mis en expérience (le Pinus sylvestris est le même que celui de l'expérience 31, mais l’expérience porte sur un rameau différent). Un rameau du Pin et la cime du petit Épicéa formée de pousses nombreuses en voie d'épanouissement sont inclus ensemble à l’intérieur d’une même cloche à raisin. Le même jour une cinquantaine d'ailés de Ch. pini provenant de pousses de Pin recueillis dans la forêt de Montmorency sont introduits à l'intérieur de la cloche. Le 3 Juin, une cinquantaine d’ailés de même provenance sont ajoutés. Observations et résultats. — Résultat négatif, tant sur le Pinus sylvestris, que sur l'Épicéa. Aucun ailé fixé n’est observé. Pour- quoi, dansdes conditions paraissant assez semblables, desersules alatae se sont-ils formés dans l'expérience 38, et pourquoi ne s’en est-il pas constitué dans l'expérience présente? La raison d'être d’une telle divergence ne peut se trouver que dans le dispositif même qui à été employé dans les deux cas. On remar- quera notamment que dans l'expérience actuelle la cloche était en grande partie remplie par le feuillage de l'Épicéa et que celui-ci, intimement mélangé avec les aiguilles du Pin, devait désorienter les aïlés à tendance d’ersules, et diminuer les chances de leur fixation sur le Pin; en outre, toute la partie inférieure de la cloche était vide de feuillage et formait un espace libre dans lequei le plus grand nombre des ailés dépensaient inutile- ment leur activité, en montant contre les parois de verre, puis en retombant sans cesse, sans s'être trouvés en rapport avec les aiguilles du Pin sylvestre. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 9349 EXPÉRIENCE 40 (P. pini, race indigène). Faits principaux. — Essai négatif concernant la fixation du Pineus pini sur le Pinus strobus. Disposition. — Le 4 juin 1908, dans un manchon de verre est introduite l'extrémité de l'un des rameaux d'un jeune Pinus strobus ; les deux ou trois pousses qui forment cette extrémité remplissent bien l’espace circonscrit par le manchon. Le même jour, vingt-cinq ailés de Chermes pini provenant de pousses de Pinus sylvestris recueillies dans la forèt de Montmorency sont introduits. Observations el résultats. — Résultat négatif. Rien ne se fixe sur le Pinus strobus. ExPÉRIENCE 41 (P. pini, race indigène). Faits principaur. — Expérience portant sur les exsules alatae déjà fixés et ayant commencé à pondre sur le Pinus sylvestris : elle a pour but de savoir ce qu'il adviendra s'ils sont déplacés et mis en rapport direct avec des pousses de Picea orientalis. Hs meurent sans se fixer. Disposition. — Le 6 juin 1908, un exsul alata provenant des pousses de Pinus sylvestris de la forèt de Montmorency et qui s'est fixésur l’une même de ces pousses, dans une cage d'élevage, est recueilli, après l'avoir obligé, par de légers attouchements, à dégager son rostre de l'aiguille de Pin qui lui servait de support; il est ensuite soulevé à l’aide d’un pinceau et porté dans une jeune pousse de Picea orientalis commençant à s'épanouir. Le 9 juin, six autres exsules alatae recueillis dans des condi- tions semblables sont insérés, après avoir été débarrassés de leurs œufs et d’une partie de leur sécrétion cotonneuse, dans les trois pousses terminales d’un rameau du même Picea orientalis, mais en entourant le tout d’un manchon de verre. Observations et résultats. — Résultat négatif. Les ailés, au mo- ment où on les pose sur la pousse d’Épicéa, se glissent volontiers tête première, par suile sans doute d’un tropisme lumineux négatif, entre les aiguilles de la pousse qui sont encore appli- quées les unes contre les autres, et s’y dissimulent, comme les sexupares, quand ils commencent à se fixer; mais 1ls ressortent ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 9e série. 1913, xvur, 23 346 PAUL MARCHAL au bout de peu de temps. Aucun d'eux ne se fixe. Tous meurent dans un très court délai, sans avoir pondu de nouveaux œufs. EXPÉRIENCE 42 (P. pini, race indigène). Faits principaur. — Expérience très analogue à celle du n° 41. Disposition. — Le 7 juin 1908, une quinzaine d'ersules alatae sont prélevés parmi ceux qui se trouvent en si grand nombre sur le Pin sylvestre B de l'expérience 27 : ils sont séparés de leur aiguille, à laquelle les œufs qu'ils ont pondus (six à douze par individu) restent adhérents. Après avoir été en partie débarrassés de leur sécrétion cotonneuse, ils sont ensuite placés sur de jeunes pousses venant de s’entrouvrir sur un Pirea orien- lalis à végétation tardive. Observations et résultats. — Résultat négatif. Pas de fixation des ailés. Hs meurent au bout de peu de temps sans avoir pondu de nouveaux œufs ; exception pourtant doit être faite pour l'un d'entre eux, qui meurt après avoir pondu deux œufs; ceux-ci ne donnent pas de larves viables sur l'Épicéa. EXPÉRIENCE 43 (P. pini orientalis). Faits principaur.— Migralion des migrantes alatae sur Pinus sylvestris el élevage sur cet arbre de leur descendance. Disposition. — Le 16 juin 1908, un Pinus sylvestris en pot, conservé jusqu'alors à l'abriet reconnu indemne, est enveloppé dans un grand sac de mousseline contre lequel frôlent les extrémités des rameaux. Il est relativement de grande taille. Un autre petit Pinus sylvestris (43 a) est en même temps placé dans le même sac, de façon à avoir deux sujets d'expérience au lieu d'un seul. Enfin une vingtaine de galles de Chermes pini, qui viennent d’être récoltées dans les pépinières de Châtenay et dont quelques-unes commencent à fournir des éclosions, sont introduites. Les arbres en expérience restent isolés et à l'abri dans une serre très aérée. Observations et résultats. — Les jours suivants, les »igrantes alatae issus des galles se fixent en grand nombre sur les Pins sylvestres. Le 6 juillet, ils ont presque terminé leurs pontes. L'éclosion des larves ne fait que commencer : elles se répandent CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 347 en très grand nombre les jours suivants et se fixent sur les axes ; une quantité considérable toutefois se dessèchent, peut- être en raison d'un sécheresse trop grande de Pair dans la serre et de l'absence de rosée dans la matinée. Le 5 août, la conta- mination par Les larves issues des migrantes alatae est bien appa- rente et l’on voit, à la base des vieilles aiguilles, de nombreuses petites masses cotonneuses commençant à poindre. Après une absence, Je retrouve, le 12 septembre, le grand Pinus sylvestris 43 très fortement contaminé et chargé de masses cotonneuses formées par les Chermes, Le petit Pin est moins fortement atteint. Ainsi que nous l’enseignent les expériences 31 et 32, nous sommes en présence de la seconde génération issue des migrantes alatae, qui donnera avant l'hiver une troisième géné- ration au moins partielle. Les arbres passent l'hiver à FPabri dans la serre aérée et non chauffée. En avril 1909, la contami- nation est extrêmement forte ; les branches sont littéralement blanches de Chermes. Je dois en supprimer beaucoup, pour empêcher les arbres de périr. Le 28 avril, les jeunes pousses, bien développées malgré l'attaque, sont garnies des jeunes Chermes formant la première génération annuelle issue des hivernants, et parmi eux des nymphes avec moignons alaires peuvent déjà être distinguées. Les premiers ailés apparaissent le 5 mai sur le petit Pinus sylvestris 43 4, le 8 mai surle grand Pinus sylvestris 43. L'avance est donc considérable sur léclosion des ailés dans la nature {Voir Exp. 48 et 49). EXPÉRIENCE #4 (P. pini orientalis). Faits principaux. — Même expérience que celle du n° #43, mais suivie de l'extinction de la descendance des migrantes alatae. Disposition. — Le 17 juin 1908, un Pinus sylvestris (celui déjà utilisé pour l'expérience 27) est mis en expérience, après avoir détruit par badigeonnage les quelques rares Chermes qui se trouvent sur les rameaux inférieurs. Ce Pin est enfermé dans un sac de mousseline et une quinzaine de galles de Chermes pini cueillies la veille sur des Picea orientalis de Chà- tenay sont introduites. 348 PAUL MARCHAL Observations et résultats. — Les migrantes alatae qui éclosent de ces galles se fixent en grand nombre ; néanmoins, le 5 août, la contamination par les larves auxquelles ils donnent naissance est assez faible et les masses cotonneuses sont très clatrsemées. Le 12 septembre, la contamination apparait comme nulle. Au printemps 1909, aucun Chermes ne se montre; on ne voit que les débris nombreux des rugrantes alalae qui, l'année précé- dente, s'étaient fixés sur les feuilles. Ce Pin étant resté tout le temps de l'expérience dans des con- ditions très semblables à celles dans lesquelles se trouvait le Pin de l'expérience 43, cette divergence ne me paraît pouvoir s'expliquer que par une différence de variétés des deux Pins mis en expérience. Le Pin 44 présentait, en effet, un facies assez différent de celui du Pinus sylvestris ordinaire (aiguilles plus longues, plus souples et moins glauques). Peut-être s’agis- sait-il d'une variété spéciale (1) plus réfractaire à l'attaque des Chermes pini issus de galles sur Picea orientalis. EXPÉRIENCE 45 (P. pini orientalis). Faits principaux. — Mème expérience que celles des n°5 43 et 4% avec cette différence qu'un Pinus strobus est joint au Pinus sylvestris. Les migrantes alatae se fixent sur les deux arbres; mais leur descendance n’est viable que sur le Pinus sylvestris. Disposition. — Le 24 juin 1908, dans un même sac de mous- seline sont enfermés un grand Pinus sylvestris et un Pinus strobus. Des galles de Ch. pini, recueillies sur Picea orientalis à Châtenay, sont en même temps introduites. Observations et résultats. — Les migrantes alatae se fixent sur les deux arbres. Le 5 août, sur le Pinus sylvestris, la con- tamination par les larves issues des migrantes alatae est bien apparente comme pour le n° 43. Il n'y a rien sur le Pinus stro- bus. Le 12 septembre, sur le Pinus sylvestris, la contamination est forte par places, plus faible dans d’autres. Elle est nulle sur le Pinus strobus. (1) Les variétés de Pinus sylvestris propres à diverses régions et utilisées par les horticulteurs pour les parcs sont nombreuses. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 349 Au commencement d'avril 1909, la contamination est très forte sur le Pinus sylvestris et beaucoup d’Insectes doivent être supprimés par un badigeonnage à l'alcool. Le Pinus strobus est tout à fait indemne. — {Voir n° 50). EXPÉRIENCE 46 (P. pini, race indigène). Faits principaur. — Expérience montrant que les larves issues des exilés (aptères ou ailés) de CA. pini sur Pinus sylves- tris peuvent, bien que difficilement, se développer sur le Pinus slrobus, mais que cette espèce de Chermes ne peut pourtant s'établir définitivement par cette voie sur ce dernier arbre. Disposition. — Le 25 juin 1908, un Pinus strobus est mis en rapport direct avec le Pinus sylrestris B de l'expérience 35, qui est surchargé à la fois d’exilés aptères et d’exilés ailés en pleine reproduction; les larves auxquelles ils donnent nais- sance circulent en tous sens sur toutes les parties de l'arbre. Le contact entreles deux arbres, qui sont abrités à l'intérieur d’une chambre, est rendu aussi intime que possible en rapprochant les branches à l’aide de liens. De plus, une branche du Pin svl- vestre très chargée de Chermes est coupée, puis fixée contre la tige du Pinus strobus à l'aide d’une ficelle. Observations el résultats. — À Ja fin de juillet, les liens qui rapprochent les branches des deux arbres sont retirés et je les sépare l'un de l’autre. Le trone du Pinus strobus est faiblement contaminé ; une petite branche antérieurement malade et qui présente des gerçures chancreuses porte aussi des Chermes. On constate la présence d'un grand nombre de gouttelettes rési- neuses dues sans doute aux piqüres des larves de ces Insectes. Les Chermes eux-mêmes ont la petite taille habituelle aux générations estivales : ils sont à l’état parfait avec quelques œufs sous leur corps ou à côté de lui. Le 18 septembre, aucun Chermes vivant ne peut être ob- servé el aucune trace de contamination ne reparaîit au prin- temps de 1909, ni ultérieurement. EXPÉRIENCE 47 (P. pini, race indigène). Faits principaux. — Expérience semblable à ceile du n° 46 et la confirmant. 350 PAUL MARCHAL Disposition. — Le 26 juin 1908, un petit Pinus strobus est contaminé par des rameaux coupés sur le Pinus sylvestris B de l'expérience n9 35 : ceux-ci sont attachés avec des ficelles contre la tige du Pinus strobus, en ramenant en même temps par-dessus des pousses garnies d’aiguilles, de facon que ces dernières se trouvent aussi en contact avec les Chermes. Observations et résultats. — Le 5 août, les liens qui main- tiennent attachés les rameaux coupés et desséchés sont retirés. Je constate une contamination faible du tronc du Pinus strobus et de ses jeunes axes verts ; sur ces derniers, des individus bien développés et ayant pondu quelques œufs peuvent être ob- servés. À la fin de l’année, toute apparence de contamination disparait. L'arbre reste indemne en 1909. EXPÉRIENCE 48 (P. puni orientalis). Cette expérience a porté sur les ailés (non gallicoles) descen- dant de zrigrantes alalae étlos eux-mêmes l’année précédente de galles cueillies sur Picea orientalis el mises en rapport avec Pinus sylrestris. L'arbre contaminateur, mis en expérience, à été le 43 a. Le détail de cette expérience fait défaut; mais elle à été con- duite d’une facon très semblable à l'expérience 'suivante et à donné des résultats très analogues : Pas d’ersules alatae ; beau- coup de sexupares; génération sexuée effective donnant nais- sance à des fondatrices. ExPÉRIENCE 49 (P. pini orientalis). Faits principaux. — Expérience portant sur les ailés descen- dant des migrantes alatae, ceux-ci étant eux-mêmes éclos l’an- née précédente de galles cueillies sur Picea orientalis et mises en rapport avec Pinus sylvestris. Absence des ersules alatae; abondance des sexupares ; génération sexuée effective donnant naissance à des fondatrices. Disposition. — Le 2 mai 1909, avant l'éclosion des aiïlés, le grand Pinus sylvestris n°9 43, contaminé l’année précédente avec galles recueillies sur Picea orientalis, est transporté dans une chambre, sur une table, devant une fenêtre ouverte et ten- due de mousseline (orientation sud); un peu en avant de lui CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 391 sont placés un Picea orientalis et un Picea ercelsa, ous deux ayant leurs pousses au degré de végétation préféré par les sexupares. Les rameaux des trois arbres sont disposés de facon à frôler la mousseline de la fenêtre. Le Pinus sylrestris, qui est placé en arrière, est incliné de facon que sa cime penche forte- ment en avant el arrive elle aussi, par quelques-uns de ses rameaux, en contact avec la mousseline. Observations et résultats. — Les premiers ailés apparaissent le 8 mai, le dernier jour de vol est le 21 mai. Sur le Pinus sylvestris, pas un ersul alata ne se fixe. Sur le Picea orientalis, beaucoup de sexupares se fixent et s’entourent d'une abondante sécrélion cotonneuse. Les nom- breux rameaux qui s'étalent contre la mousseline en sont chargés. Sur les autres rameaux, on rencontre aussi des sexu- pares fixés, mais en beaucoup moins grand nombre. Les ra- meaux inférieurs sont les plus chargés. À noter que, pendant l'expérience, l'arbre à été retourné, de facon à présenter à la mousseline éclairée une autre face, et pour éviter que tous les sexupares se trouvent massés du même côté. Bien qu'un très grand nombre de sexupares se soient fixés sur le Picea orienta- lis et que certaines pousses en soient toutes blanches, beaucoup d'ailés sont morts après s'être épuisés contre la mousseline, et leur nombre est même certainement {rès supérieur à celui des ailés qui se sont fixés. Sur le Picea ercelsa, un bon nombre de Chermes se sont aussi fixés sur les pousses en contact avec la mousseline ; mais leur sécrétion cotonneuse est bien moins abondante; ils sont peu féconds et leurs larves mal retenues sous leur corps par la sécrétion cotonneuse s'égarent souvent sur les rameaux et se dessèchent; un certain nombre pour- tant poursuivent d’une facon complète leur développement. Le 20 juin, de nombreux sexués sont observés sur le Picea orientalis, et il v à des œufs fécondés pondus à la base des pousses. Sur le Picea excelsa, quelques sexués, arrivés à com: plète maturité sont également rencontrés. Dans les premiers jours d'août, les arbres sont transportés au dehors. Sur le Picea orientalis, quelques fondatrices sont observées ; sur le Picea ercelsa, aucune fondatrice ne peut être trouvée. 32 PAUL MARCHAL En mai 1911, plusieurs galles se développent sur le Picea . orientalis à EXPÉRIENCE 50 (P. pu orientalis). Faits principaux. — Expérience analogue à celles des n°5 48 et 49, mais avec dispositif expérimental différent et donnant un résultat plus complet. Disposition. — Le 3 mai 1909, le grand Pinus sylvestris 45, qui à été contaminé l’année précédente avec des galles récol- tées sur Picea orientalis, et un Picea orientalis sont mis en ex- périence : ils sont entourés d’un grand sac les enveloppant à la fois et laissés à l'abri dans la serre fortement aérée. Observalions et résultats. — Le premier vol des ailés qui éclosent sur les pousses du Pinus sylvestris a lieu le 8 mai; il continue pendant les jours suivants et comporte un très grand nombre d'individus. Les conditions de l'expérience paraissent particulièrement favorables ; car des trois Pinus sylvestris (43, 43 4, 45) qui ont servi pour réaliser ce type d'expérience, c'est le n° 45 qui fournit de beaucoup le plus grand nombre de fixa- tons d’ailés sexupares. Un grand nombre de pousses du Picea orentalis portent de ces ailés, et certaines d’entre elles en sont chargées : celles qui sont contre la mousseline du côté de la lumière en sont entièrement couvertes et sont masquées par la sécrétion cotonneuse. Beaucoup de pousses éloignées de la mousseline en portent aussi, mais d’une facon bien plus clair- semée. Enfin, en enlevant le 26 mai la mousseline, je constate l'existence d’un certain nombre d’ersules alalae sur les jeunes pousses ou les vieilles aiguilles du Pinus sylrestris tournées vers la lumière. Leur taille est au-dessous de la moyenne habituelle aux ersules alalae:; ils ne pondent que quelques œufs (trois à sept) et développent moins de sécrétion cotonneuse que ne le font habituellement les ersules alatae ; ces œufs éclosent plus tardivement que ceux des sexupares fixés sur le Picea orientalis. Le 20 juin, de nombreux sexués parvenus à leur développe- ment complet peuvent être observés, et Je vois des mâles cou- rir activement sur les pousses du Picea orientalis. Des œufs fécondés nombreux ont déjà été pondus à la base des pousses. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 353 Le 5 août, les fondatrices sont très nombreuses ; elles sont au premier stade et commencent à s’entourer d’un duvet de cire frisé. Leur réparülion est très irrégulière. On peut en trouver Jusqu'à trente ou quarante sur une même pousse, d'autres en portent une ou deux. Le plus grand nombre n’en portent pas. Un nouvel examen, le 3 septembre, montre qu'elles sont toujours aussi nombreuses et au même stade évolutif. L'examen au microscope d'une de ces fondatrices, le 15 septembre, fait voir qu'elles sont encore à cette époque au premier stade; elles sont seulement gonflées et entourées d'un revêtement formé de longs filaments frisés assez épais. C'est sous cet aspect qu'elles passent l'hiver. Une certaine quantité d’entre elles périssent pendant l'hiver : mais 1l en subsiste encore un bon nombre qui, après avoir passé l'hiver, subissent leurs mues dans le courant de mars ; à la fin de mars ou au début d'avril, elles sont déjà à matu- rilé, et effectuent leur ponte dans le courant d'avril. Dès le début de mai, les galles commencent à apparaître en assez grand nombre; elles atteignent toute leur taille vers la fin de mai et commencent à s'ouvrir le 9 juin pour donner issue à un vol abondant de migrantes alatae. EXPÉRIENCE 51 (P. pinr, race indigène). Faits principaux. — Expérience portant sur les ailés non gallicoles descendant de Chermes pini, recueillis l'année précé- dente dans la forêt de Montmorency sur Pinus sylvestris et avant servi à contaminer le Pinus sylrestris n°9 34. Abondance des ersules alalae; rareté des sexupares; génération sexuée sans descendance. Disposition. — Le 20 mai 1909, le Pinus sylvestris de l'expé- rience n° 34 portant des descendants du Chermes pini de la forêt de Montmorency est placé à côté d’un Picea orientalis, et les deux arbres à la fois sont enveloppés d’un grand sac de mousseline. Ils sont laissés dans le jardin, à l'abri d'un hangar vitré faisant partie d’un laboratoire de plein air. Observations et résultats. — Le 22, le 23 et Ie 24 mai, les ailés éclosent en quantité considérable. Le 2% et le 25 mai, je con- 394 PAUL MARCHAL state déjà que quelques pousses de Picea orientalis portent un assez grand nombre d’ailés fixés; elles sont placées à la partie inférieure de l'arbre et frôlent fortement la mousseline du côté le mieux éclairé, dans un endroit où les Chermes slationnent en grand nombre. Le 29 mai, après une période d'arrêt causée par un temps pluvieux et froid, le beau temps revient, de nou- veaux ailés recommencent à sortir des pousses de Pin et un grand nombre volent à l’intérieur du sac; un nombre énorme, guidés par la lumière, se rassemblent dans une saillie du sac renfermant quelques pousses d'Épicéa. Beaucoup aussi se fixent sur le Pin. | Le 11 juin, le sac étantenlevé en le fendant sur le côté, Je con- state qu'un très grand nombre d'ersules alatne sont fixés sur le Pin svlvestre. Les pousses tendues vers la lumière en sont surtout couvertes ; ils se trouvent aussi bien sur les Jeunes que sur les vieilles aiguilles. Des sexupares normalement développés et entourés d’une riche sécrétion cotonneuse se trouvent aussi sur le Picea orien- -talis; mais ils sont en général très clairsemés. Sur certaines pousses inférieurement placées et en outre très exposées à la lumière, ils sont pourtant en plus grande abondance et cinq ou six peuvent être rencontrés sur la même pousse. Ces sexupares sont, en tout cas, beaucoup moins nombreux que les ersules alatue du Pin sylvestre et à ce point de vue le con- traste est frappant avec les résultats qui ont été donnés la même année par les descendants des galles de Chermes pin récoltées l’année précédente sur Picea orientalis (Exp. 49 et sur- tout Exp. 50). La généralion sexuée issue des sexupares reste sans descen- dance; les femelles sont seules observées : aucune fondatrice n'apparait à l'automne ou au printemps suivant sur les rameaux. EXPÉRIENCE 52 (P. pini, race indigène). Fils principaux. — Expérience analogue à celle du n° 51 et comportant des faits de même ordre. Disposition. — Le 21 mai, le Pinus sylvestris 38-39 qui à été contaminé en 1908 avec des pousses chargées de Chermes pi “ CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 35 de la forêt de Montmorency et qui est couvert de leurs descen- dants, un Picea orientalis et un Picea ercelsa sont mis en expé- rience : tous les trois sont placés sous une même cage, elle- mème à l'abri sous le hangar vitré de mon laboratoire de plein air. Les deux Épicéas sont disposés en avant, de facon que leurs pousses s'étalent contre la mousseline éclairée. Observations et résultats. — L'éclosion des ailés est moins abondante dans cette expérience que dans la précédente. Le 11 juin, l'examen des arbres montre que le nombre des ersules alatae qui sont fixés sur le Pin sylvestre est très grand par rapport à celui des sexupares fixés sur le Picea orientalis ; ceux-ci sont en très pellt nombre. La génération sexuée reste stérile. Les femelles sont seules observées. En août et sep- tembre, je ne trouve de fondatrice ni sur P. orientalis ni sur P.ercelsa. EXPÉRIENCE 93 (P. pini). Faits principaux. — Expérience analogue à celle du n° 27 el comportant des faits de même ordre. Disposition. — Au commencement de juin 1909, le Pinus sylvestris qui à déjà été utilisé dans les expériences 27 et 44 est de nouveau employé. Ce Pin est resté tout à fait indemne pendant toute la fin de l’année 1908 et le commencement de l’année 1909. IT est de nouveau soigneusement examiné el aucun Chermes n'est trouvé. Depuis l'automne dernier ce Pin a du reste été bien isolé dans la serre, où rien ne pouvait le con- taminer. Cinq branches de ce Pin sont mises en expérience : elles sont cerclées à leur base d’une bande de papier ligaturée et enduite dé vaseline ; le tronc de larbuste est muni vers sa base d'une ceinture semblable. De cette facon les branches mises en expérience se trouvent isolées des autres qui pourront servir de témoins ; toute contamination par une larve tombée sur la terre et pouvant regrimper est également écartée. Ces dispositions prises, dans les extrémités de chacune des branches mises en expérience sont insérées des pousses cueillies dans les pépinières de Châtenay surles Picea orientalis el chargées d’ailés. Pour rendre le contact aussi intime que possible, les aiguilles 306 PAUL MARCHAL de Pin formant la couronne terminale de la branche sont rap- prochées avec un fil circulairement placé, de façon à empri- sonner au milieu les pousses contaminatrices. Observalions el résultats. — Tous les Jeunes issus des ailés et qui devaient, pour l'immense majorité d’entre eux, devenir des sexués, paraissentmourir ; cependant, le 4 août, J'en trouve deux qui commencent à se gonfler et à s’entourer de sécrétion coton- neuse : ils sont placés à la base des aiguilles des jeunes pousses; lun d’entre eux se trouve même à la base de l'une des Jeunes aiguilles quioccupent la position extrème de la pousse de l’année, tout contre le bourgeon terminal. Cette situation sur les jeunes axes, el surtout à leur extrémité, exelut l'hypothèse (contraire d'ailleurs à nos connaissances actuelles) que nous pourrions nous trouver en présence de larves à développement retardé qui auraient passé l'hiver et qui commenceraient seulement à celle époque à devenir apparentes. Les deux Chermes en ques- Lion, qui sontdes femelles parthénogénétiques, ne peuvent done provenir que des ailés qui se trouvaient fixés aux pousses de Picea orientalis. L'une d’entre elles estexaminée le 3 septembre; elle à effectué toutes ses mues et est parvenue à l’âge adulte araclérisé par la présence de l’armure génitale. Cette expérience vient donc confirmer celle du n° 27 et montre que dans la progéniture des ailésfixés sur le Piceaorien- lalis, qui est presque exclusivement formée de sexués, peuvent néanmoins se trouver quelques larves susceptibles d'évoluer en femelles parthénogénéliques lorsqu'elles sont artificiellement mises en rapport avecle Pinus sylrestris. Nous avons d’ailleurs observé exceptionnellement des larves à soies rostrales de grande longueur ou de longueur intermédiaire issues des ailés fixés sur les Épicéas. EXPÉRIENCE 54 (P. pini, race indigène). Fais principaur. — Destination des ailés naissant au prin- temps sur les pousses de Pinus syloestris. Un certain nombre sont susceptibles de se fixer sur le Piceaorientalis el dv produire des sexués; mais tous ces sexués sont des femelles restant sans descendance. Disposition. — Des pousses de Pin sylvestre portant des CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 397 nymphes el des ailés du Chermes pini (race indigène) sont recueillies le 26 mai 1911 dans la forêt de Montmorency et sont mises en rapport le 27 mai, sous une cage de mousseline, avec un Picea orientalis et un Picea ercelsa, ces deux arbres ayant été jusqu'alors mis à l'abri. Observations et résultats. — En juin, il ya des aïlés relati- vement assez nombreux sur Picea orientalis du côté de la lumière ; 1] n'ya en a pas sur le Picea excelsa. Les sexupares fixés sécrètent une masse cotonneuse abondante et produisent des sexués en assez grand nombre. Tous ceux qui sont mis en observation, notamment en isolant des pousses vers la fin de l’évolution dans des capsules Pétri, évoluent en femelles ; aucun mâle n’est observé. Je ne trouve pas non plus dans cette expé- rience de larves intermédiaires, bien que les conditions (race indigène, captivité) puissent paraitre assez favorables à leur formation. EXPÉRIENCE 55 (P. pini). Fais principaux. — Expérience concernant la stérilité des femelles. Disposition. — Le 5 juillet, plusieurs centaines de femelles de CA. pini recueillies sur des troncs de Picea orientalis, dans les pépinières de Châtenay, sont mises sur une branche d'un Jeune Picea orientalis en pot qui, jusqu'au moment de l'expé- rience, à été maintenu à l'abri de toute contamination. Ces femelles proviennent des agglomérations qui ont été constatées à cette époque sur l'écorce des Picea orientalis, sans qu'aucun mâle eût pu être découvert. Étant donnée la date du 5 juillet, elles correspondent à la dernière période des éclosions, c’est-à- dire à une période où l’on peut considérer comme certain que les femelles éclosaient encore en grand nombre sans qu'aucun mâle fût présent pour les féconder. Les femelles mises en expérience furent toutes placées sur la même branche, celle-ci ayant été isolée du reste de l'arbre au moyen d’une cloche percée recouverte de mousseline; un bon nombre de ces femelles arrivèrent pourtant à abandonner cette branche et à se répandre sur le reste de l'arbre, en grim- 358 PAUL MARCHAL pant contre les parois internes de la cloche et en passant au lravers des fines mailles de la mousseline. Observations et résultats. — Le 17 juillet, la cloche avant été retirée, je procède à l'examen d'un grand nombre de pousses, tant de celles qui se trouvaient incluses dans la cloche, que de celles qui étaient restées au dehors; je ne trouve mi œufs, ni femelles fixées. L'arbre reste indemme et aucune fondatrice ne se développe à l'automne. Les femelles mises en expérience n'avaient donc pas été fécondées el sont restées stériles. EXPÉRIENCE 96 (P. puni oriental \. C7: Faits principaux.— Expérience de même ordre que le n° 31. Fixation des Migrantes alatae sur Pinus sylvestris et élevage de la descendance. Disposition. — Le 12 juin 1912, la cime d’un Pin svlvestre qui à été désinfecté par l'acide cyanhydrique en mars de la même année est enveloppée d'un sac et à son intérieur sont : placées sept galles de C. orientalis. Observations et résultats. — Les Migrantes alatae issus des galles se fixèrent sur les aiguilles du Pinus sylvestris, mais en moins grand nombre que dans l'expérience 31. Au printemps suivant la cime était garnie de Chermes assez nombreux. Un voyage m empêcha de suivre l'évolution des Insectes. EXPÉRIENCE 97 (Pineus | Chermes] strobi). Fais principaux. — Les ailés du Chermes strohi, qui se développent au printemps sur les pousses du Pinus strobus ne se fixent ni sur le Picea orientalis, ni sur le Picea excelsa :; ils ne donnent pas non plus d’ersules alalae se fixant soit sur le Pinus strobus, soit sur le Pinus sylvestris. Disposition. — Le 31 mai 1907, sont mis en expérience dans une grande cage : 1 Picea orientalis, 1 Piceu excelsa, 1 Pinus strobus et À Pinus sylvestris. Des ailés de CA. strobi assez nom- breux et éclos de la veille sur des pousses de Pinus strobus sont introduits le même jour dans la cage. Des pousses de Pinus strobus chargées de nymphes et dont la partie inférieure trempe dans des flacons remplis d’eau sont introduites en même temps. + CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 399 Observations et résultats. — Aucun ailé ne se fixa sur les différents arbres mis en expérience. EXPÉRIENCE 98 (Pineus strobi). Faits principaur. — Fixation des ailés du Clermes strohi (Pineus strobi) sur le Picea nigra. Ces ailés produisent des sexués représentés uniquement par des femelles qui évoluent complètement. Disposition. — Le 27 mai 1911, des pousses de Pinus strobus avec ailés de Chermes strohi, malheureusement trop peu abon- dants, qui ont été récoltées le 26 mar, sont mises sous une cage avec plusieurs petits Picea nigra et P. nigra Doumeti. Observations et résultats. — Le 12 juin, des ailés relativement nombreux sont fixés, entourés de leur sécrétion cotonneuse, sur les Picea nigra et P. rnigra Doumetr. Ils ont dû se fixer tous ou presque tous. Ils donnent nais- sance à des sexués qui évoluent complètement, et des femelles nombreuses se répandent les jours suivants sur les axes. Je ne vois aucun mâle. Le 2 Juillet, la cage qui recouvre les arbres est définitivement enlevée ; une invasion assez forte de Tetranychus ununquis rend en effet indispensable une bonne aération des arbres. Je ne pus trouver de femelles descendues à la base des pousses ; mais, pour ne pas diminuer les chances de succès, je ne fis porter mon examen que sur quelques-unes. Aucune fondatrice n'est aperçue au cours de l'été et de l’au- tomne. EXPÉRIENCES 99 (2. stroli). Faits principaur. — Les ailés de Chermes strobi(Pineus strobi) ne se fixent pas sur les Pins pour constituer des ersules alatae. Disposition. — Le 17 juin 1908, un Pinus sylvestris etun Pinus strobus indemnes sont mis en expérience. Dans une même cloche à raisin un rameau de lun et un rameau de l’autre sontintroduits, et, dans cette cloche, un certain nombre d’ailés de Ch. strobi sont en outre emprisonnés : une douzaine, le 2 juin ; huit, le 3 juin. 300 PAUL MARCHAL Observations el résultats. — Résultat négatif. Pas d’ersules alatae sur l'une ou sur l’autre essence. EXPÉRIENCE 60 (P. strobi). Faits principaux. — Résultat négatif concernant les exsules alatae. Disposition. — Le 31 mai 1907, sur un. Pinus strobus en pleine terre, un rameau est mis en expérience. Il est enfermé dans une cloche percée recouverte de mousseline, et quelques ailés de Chermes strobi (Pineus strobi) recueillis sur des pousses de Pinus strobus contaminées sont introduits. Le lendemain, 1er juin, sur le même arbre un autre rameau de plus grande aille est emprisonné dans une autre cloche et environ une douzaine d’ailés de Chermes strobi sont introduits. D'autres ailés de même espèce, quiéclosent dans mes vases d'élevage, sont ajoutés le 2 et le # juin (une quarantaine environ). Observations et résultats. — Pas race de fixations les Jours suivants. Les ailés mis en expérience n’ont pas fourni d'ersules alatae. ExPÉRIENCE 61 (Pineus pineoides, Bürner) (1). Faits principaur. — Succession des générations du Chermes pineoides sur les écorces de Picea excelsa. Disposition. — Le 8 août 1907, un petit Picea ercelsa en pot est mis en expérience. Des écorces fraiches recueillies dans un jardin sur un grand Picea excelsa allaqué par le Chermes pineoides sont mises en contact intime avec lui. A cet effet, la tige du petit arbre est entourée de ces morceaux d’'écorces maintenus avec une ficelle et le tout est entouré de papier de soie. Les écorces contami- natrices portent de nombreux Chermes (2° génération annuelle) avec des paquets d'œufs d'un jaune vif. Observations et résultats. — Le 18 septembre, je constate, en enlevant les liens et les écorces, que la contamination à r'ÉUssI. (4) Nous ajoutons ici, à titre d'annexe, cette expérience sur le Pineus pincoides, bien que cette espèce ne soit pas étudiée au cours de ce mémoire. * CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 361 Les Chermes (3€ génération annuelle) se sont surtout fixés vers la base de l'arbre. Une quinzaine environ, entourés d’une abondante sécrétion cotonneuse, sont bien apparents. Ces individus donnent alors une nouvelle génération (4€ géné- ration annuelle), qui passe l'hiver à l’état de jeunes larves cachées sous les écorces ; elle ne devient apparente qu'au printemps suivant : au début de mai, apparaissent en effet, sous les esquilles de l'écorce, quelques nouveaux amas cotonneux ; ces individus, qui ont passé l'hiver, donnent alors, en mai, la première génération annuelle; à la fin de mai, cette première génération est en train d'évoluer et s’entoure d'une sécrétion cotonneuse ; mais elle est encore cachée sous les esquilles de l'écorce et n'apparaît pas hbhrement à la surface. Le 16 juin, la première génération annuelle est arrivée à maturité et quelques œufs jaunes se trouvent en arrière des Insectes, entourés de leur sécrétion cotonneuse. Le 6 juillet, la première génération est morte ; quelques œufs subsistent encore; mais les larves de seconde génération, qui doivent être dissimulées dans les fissures de l'écorce, restent introuvables. Le 8 août, quelques individus entourés de masse cotonneuses deviennent apparents : ils représentent la deu- xième génération annuelle. Quelques œufs se trouvent à côté de ces Insectes : ils sont destinés à fournir les larves qui atteignent leur maturité en septembre (3° génération). Les Insectes qui passent l'hiver appartiennent au moins partielle- ment à une 4 génération el comportent peut-être aussi des individus de 3° génération plus en retard dans leur évolution. En avril 1909, de place en place, quelques masses coton- neuses se montrent à nouveau sous les exfoliations de l'écorce, et la mulliplication continue comme l’année précédente. Pendant tout le cours de cette expérience, ayant duré trois ans, le C'hermes pineoides ne s’est multiplié qu'avec une faible intensité ; 11 semblait disparaitre pendant quelque temps (stades Jeunes dissimulés sous les écorces), puis trahissait à nouveau sa présence par la production de quelques masses cotonneuses clairsemées. ANN. DES SC..NAT,. ZOOL., 9e série. 1913, xvrt, 24 362 PAUL MARCHAL RÉSUMÉ ET CONCLUSIONS À. — RÉSUMÉS DES CYCLES ÉVOLUTIFS DES ESPÈCES ÉTUDIÉES. 19 Cycle du Dreyfusia (Chermes) Nüsslin Bürner. — Voir la figure 9 (page 179), qui résume le cycle de cette espèce. Le Chermes Nüsslini ne peut pas être considéré, ainsi qu'il semblait résulter des expériences antérieures, comme une espèce se multipliant par parthénogénèse indéfinie sur les Abies et dont la génération sexuée serait fatalement destinée à avorter après une migration rudimentaire sur l’Épicéa commun {Picea ercelsa). L'Épicea commun n'est pas en effet la plante qui lui convient ; mais c’est dans l'Épicéa oriental (Picea orientalis) qu'il trouve l'hôte définitif nécessaire pour assurer l'avenir de la génération sexuée. L'Épicéa oriental est originaire du Caucase mais se trouve en France, dans les parcs, comme plante ornementale. J'ai fait connaître Le cyele biennal complet du Chermes Nüsslini avec migration alternative des Abies au Picea orientalis et inversement. Il est très remarquable que la fondatrice sur-Picea orientalis soit morphologiquement identique à la parthénogyne hiver- nante (sis{ens) sur les Abies. 20 Cycle du Dreyfusia picene (Ratz.) Bôrner [Chermes piceae — Voir la figure 32 (page 222), qui résume le cycle de cette espèce. Sous le nom de Chermes piceae ont été confondues jusqu à ces dernièresannées deux espèces : le Dreyfusia(Chermes) Nüsslini Bôrner etle Dreyfusia (Chermes) piceae (Ratz.), vivant l’une et l'autre sur les Abies (Abies pectinalaet A. nordmanniana). L'existence de ces deux espèces, établie surtout sur des faits biologiques par Cholodkovsky, puis par moi-même (26 octobre 1907), continua à être méconnue parles auteurs quis’oceupèrent de Ja question (Nüsslin, Bürner). En 1908 Bürner reconnut pourtant sa réalité et l’ét tablit sur des caractères morphologiques très délicats, mais très précis qu'il eutle mérite de découvrir. J'ai fait connaître la succession des générations parthénogé- néliques multiples du cycle annuel qui se succèdent pour cette espèce sur les Abies ; c'est parmi les premiers-nés de la lignée CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 363 printanière que se trouvent les ailés, généralement très rares, el qui, avant ma note du 10 octobre 1910, n'avaient pas encore été découverts chez cetle espèce. Les ailés que J'ai observés n’ont pas la signification de sexupares, mais celle d'ersules alatae, destinés à rester sur les Ahies. Leur existence n'implique donc pas la présence d'une génération sexuée, même rudimentaire, chez le Chermes pireue. 30 Pineus pini (L.) Bürner [Chermes pini L.]. — Voir les figures 36 et 46 (p. 233 et 264%) qui résument les cycles des deux races de cette espèce. Le Chermes du Pin n'était connu dans l'Europe occidentale que comme se multipliant par parthéno- génèse indéfinie sur les Pins. Une reproduction sexuée rudimentaire avait été pourtant signalée par Cholodkovsky surl'Épicéa commun ({Picea excelsa). Et d'autre part, dans la région du Caucase, on avaittrouvé, sur le Picea orientalis, les galles d’un Chermes que lon avait alors désigné sous le nom de Chermes orientalis et qui, bien que la preuve n'en fût pas donnée, paraissaient se rapporter au Chermes pini. Aux environs de Paris, grâce à la fréquence des Picen orientalis dans les parcs et pépinières, j'ai observé au dehors et obtenu expérimentalement dans mes élevages les migrations du Chermes pini du Pin sur le Picea orien- tatis et vice versa, ainsi que la reproduction sexuée, la forma- tion des fondatrices et la constitution des galles sur cette der- nière essence. Le Chermes pini peut donc présenter un evele complet, au moyen de migrations alternatives s’effectuant entre le Pin syl- vestre et l'Épicéa oriental : il réalise ainsi le cycle de la race orientale, tel que Cholodkovsky en avait récemment admis l’exis- tence d’après quelque données éparses et sans en avoir observé la continuité. | Par contre, dans nos forêts, Le CA. pin se multiplie par parthénogénèse exclusive sur les Pins, et l’on ne rencontre jamais ses galles sur notre Épicéa indigène. Il constitue ainsi une seconde race distincte de la première et évoluant avec des caractères biologiques spéciaux (race indigène). 4° Cycle du Pineus strobi Hart. — Sur le Pinus strobus où Pin Weymouth — Pin d'origine américaine, maintenant très 3064 PAUL MARCHAL répandu en Europe dans les parcs et même parfois planté dans les forêts — vit un Chermes, qui a été désigné autrefois par Hartig sous le nom de CA. strobi; mais aucun caractère qui permit de le différencier du Chermes jini n'avait été indiqué par cet auteur, si bien qu’il semblait y avoir là une simple espèce nominale, comme il y en à tant pour les Insectes, lorsqu'ils ont été désignés d’après les noms de plantes sur lesquelles on peut les rencontrer. C'est à cette manière de voir que s'arrêtèrent les auteurs qui s'occupèrent de la question, notamment Cholod- kovsky et moi-même, etle Ch. strobi était considéré comme identique au Ch. pini, lorsque l'expérience me démontra que les individus qui vivaient sur le Pin Weymouth (P. strobus) et ceux qui vivaient sur le Pin sylvestre exigeaient des conditions différentes pour accomplir leur cyele évolutif, les uns et les autres évoluant en un cycle complètement indépendant. Jarri- val ainsi à cette conclusion que le Chermes du Pinus strobus formait une espèce ou tout au moins une race distincte du Chermes vivant sur le Pin sylvestre. Peu de temps après la publication de ces résultats (19 octobre 1907), Bürner con- firmait l'indépendance des deux espèces strobi et pini, en signalant de légers caractères de structure permettant de diffé- rencier d'une façon constante les deux espèces. Il y a là un intéressant exemple de l'importance du crité- rium biologique dans la distinction des formes spécifiques. Le Ch. stroli n'était connu que par ses générations parthéno- génétiques sur le Pinus strobus. Importé d'Amérique avec son hôte intermédiaire, il se trouve, en Europe, séparé de l’hôte définitif (Épicéa d'espèce américaine) sur lequel il doit émi- grer en Amérique pour y réaliser la reproduction sexuée, et les ailés sexupares naissant au printemps sur le Pinus strobus s'envolent bien pour émigrer; mais, d'une façon très géné- ale, 1ls se trouvent dans l'impossibilité de remplir leur mis- sion et périssent sans pouvoir atteindre le but de leur migra- tion. J'ai constaté toutefois que les choses se passaient autre- ment si, dans le voisinage des Pins sur lesquels ils ont pris naissance, se trouvait un Épicéa également originaire de l'Amé- rique du Nord, le Picea nigra, et j'ai trouvé, fixés sur cet arbre, de très nombreux sexupares du C. strobi; J'ai de plus vu leur CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 265 migralion se réaliser sur cel arbre dans des conditions expéri- mentales, et J'ai obtenu des sexués assez nombreux, mais qui tous appartenarent au sexe femelle (spanandrie). Jamais je n’ai trouvé de galles, el par conséquent, bien que la génération sexuée soit réalisée, elle reste sans descendance, et le cycle se trouve interrompu. Le Chermes stroli reste donc, en Europe, une espèce conti- nuant à se mulüplier par parthénogénèse exclusive. Tel que nous le connaissons, 1l présente un cycle identique à celui de la race indigène du Chermes pini (fig. 46) (1). Dans les deux cas, l'espèce s'est déshabituée de la gamogénèse, à ce point que, même si on lui rend l'hôte définitif qui devait héberger primi- tivement sa génération bisexuée, elle ne peut parfaire son cycle évolutif. I'est très probable que, en Amérique, on retrouvera pour le Chermes strobi le correspondant de la race orientalis du Chermes pini, avec evele complet et migrations alternatives entre le Pinus strobus elle Picea nigra où quelque autre espèce américaine d'Épicéa. B. — ExPOoSÉ DES PRINCIPAUX RÉSULTATS DANS LEURS RAPPORTS AVEC LA BIOLOGIE GÉNÉRALE. 19 Différenciation de la sexualité. — En observant la succes- sion des générations hétéromorphes qui se succèdent au cours de l’année sur les Pins, chez le Chermes pini, on assiste en quelque sorte à une différenciation progressive (2) de la sexua- lité. La forme qui est physiologiquement la plus éloignée de la sexualité est celle qui est directement issue de-la génération sexuée, c’est-à-dire la fondatrice. C'est elle en effet qui est le plus hautement caractérisée au point de vue parthénogénétique et qui.donne, sans avoir été fécondée, la descendance la plus abondante. La fécondité parthénogénétique se trouve atténuée (1) Sauf peut-être en ce qui concerne les exsules alatae, dont je n'ai pas conslaté la présence. (2) Ce terme ne doit pas être pris dans le sens phylogénétique, mais sim- plement dans le sens de passage d'un phénomène physiologique à un autre phénomène physiologique : au point de vue de la phylogénèse, les formes parthénogénétiques nous apparaissent au contraire comme dérivées des sexuées et comme se développant corrélativement à la régression de ces dernières. 3606 PAUL MARCHAL dans les générations successives qui en dérivent (rigrantes alatae, ersules) el au printemps apparaissent les ailés sexu- pares qui constituent un acheminement vers la reproduction sexuée. Leur fécondité est très réduite et ils n'arrivent à pondre et à produire des œufs susceptibles de se développer en sexués que lorsqu'ils ont accompli une migration active sur l'Épicéa. De même que la femelle de la génération biszxuée est pré- destinée à donner un œuf qui ne pourra évoluer sans la fécon- -dation du spermatozoïde, de même le sexupare est prédestiné à réaliser, dès son éclosion, l'acte de la migration nécessaire à la production des sexués. Cette prédestination est marquée de la façon la plus nette chez le Dreyfusia (Chermes) Nüsslini qui vit sur les Aies et dont j'ai fait connaître la génération sexuée sur le Picea orientalis : chez cette espèce, la lignée d’ailés qui éclôt au printemps est formée d'individus tous pré- destinés à la sexuparité. Il n'en est plus de même chez le -Chermes du Pin où la lignée des ailés qui prend naissance au printemps sur les Pins comprend à la fois des individus desti- nés à émigrer sur les Épicéas pour y produire des sexués (sexupares) et des individus restant surles Pins pour y produire de nouveaux individus parthénogénétiques (ersules alatae). J'ai retrouvé en abondance, aux environs de Paris, ces ersules alalae, dont l'existence avait été signalée par Cholodkovsky, en Russie, mais qui avait été catégoriquement niée par Bürner, et j'ai constaté leur apparition dans des conditions expérimen- tales qui excluent d'une facon complète l'hypothèse d'une confusion avec des zigrantes alatae retournés de l'Épicéa sur JeAPine Comme les ersules alatae sont morphologiquement très sem- blables aux sexupares et qu'ils font partie de la même lignée, la question se posait de savoir si ces deux types d'ailés étaient, dès leur apparition, déterminés avec l'une ou l'autre des deux destinations, ou bien si c'était au contraire le fait d’émi- erer sur l'Épicéa et de s’en nourrir qui déterminait l'ailé comme sexupare, tandis que le fait de rester sur le Pin le déterminait comme virginipare. Malgré les apparences et la très grande ressemblance des ersules alatae et des sexupares, un examen approfondi conduit à conclure à une part très grande et indu- CONTRIBUTION A L' ÉTUDE DE: LA BIOLOGIE DES CHERMES 307 bitable de prédestination. Au point de vue morphologique, on constate en effet que les exsules alatae sont en moyenne un peu plus gros que les sexupares et que leurs massifs glandulaires offrent des éléments généralement plus nombreux ; le nombre des gaines ovigères est aussi en moyenne supérieur chez les premiers. On peut admettre que les ailés présentant une taille au-dessous de la moyenne et portant un nombre de gaines ovigères inférieur à quatre ont en général une tendance à émi- erer sur les Épicéas et à y constituer des sexupares, tandis que les ailés ayant une taille au-dessus de la moyenne et ayant un nombre de gaines ovigères supérieur à quatre sont en général destinés à rester sur le Pin et à y devenir des ersules alatae. est à remarquer d'autre part que les ailés de petite taille et à gaines ovigères peu nombreuses présentent aussi, au moment de leur transformation en imago, des œufs qui sont, en moyenne, moins avancés dans leur développement et moins chargés de vitellus que ceux des individus de grande taille et à gaines ovi- gères nombreuses, examinés dans les mêmes conditions. On est ainsi conduit à penser que le fait d’accumuler des réserves plus abondantes se lie, chez l’ailé, à un instinct sédentaire et le porte à évoluer en ersul alala, tandis que la pénurie dans lem- magasinement des réserves l'aiguille au contraire vers la sexu- parité. Il existe done sûrement, chez le Chermes pini, deux catégories d’ailés, sœurs lune de l’autre et se distinguant par une légère différenciation morphologique, lune formée d'ailés prédesti- nés comme pinitropes et virginipares, l'autre formée d’ailés prédestinés comme picéitropes et sexupares. Il est possible qu'entre ces deux catégories il existe des ailés complètement indifférents et qui, suivant les circonstances, puissent évoluer dans un sens ou dans l’autre; mais rien ne permet de laffir- mer. Si dans les élevages un grand nombre d’ailés refusent de se fixer et meurent, en s’épuisant contre la mousseline qui empêche leur essor, on ne peut en effet en conclure que, dans les conditions naturelles, ils ne se seraient pas fixés sur les Épicéas, et leur tendance à émigrer peut même au contraire être interprétée comme un signe de leur destination sexupare, à laquelle ils ne peuvent parvenir qu'après avoir réalisé une 308 PAUL MARCHAL migration active. Il existe, il est vrai, un autre fait que j'ai mis en lumière et qui pourrait être considéré comme favorable à l'hypothèse de l'existence d’ailés indéterminés : c’est la pré- sence, peu fréquente d’ailleurs, d’ailés intermédiaires, au point de vue de leur progéniture, entre les sexupares et les ersules alatae. Ces ailés, que je n’ai rencontrés que dans de rares cir- constances dans mes élevages, se fixent sur l'Épicéa ; mais ils y évoluent d’une facon anormale, attestant qu'ils se sont arrêtés en chemin dans la différenciation serupare : is développent une sécrétion moins abondante, pondent des œufs qui tardent à éclore, et enfin, fait capital, n’engendrent pas de sexués, mais des larves présentant des caractères intermédiaires entre celles des sexués et celles des individus parthénogénétiques (soies rostrales intermédiaires, pour la longueur, entre les soies ros- trales des deux types) ; ces larves, que j'ai désignées sous le nom de larves intermédiaires, sont d’ailleurs destinées à avorter sur l'Épicéa. Nous nous trouvons donc ici en présence d’ailés réellement intermédiaires entre les erswles alatae et les sexu- pares. Rien ne nous autorise toutefois à déclarer que cet état intermédiaire résulte des conditions de milieu, notamment des conditions défectueuses de la migration, car on peut également admeltre qu'au moment de leur formation sur les Pins, ces Chermes étaient déjà déterminés en tant qu'ailés intermé- diaires. Il résulte de ce qui précède que l'apparition de la sexualité chez les Chermes se montre comme en grande partie régie par les causes internes. Il y a néanmoins des conditions de milieu qui semblent nécessaires à sa production et qui sans doute ont été à l’origine déterminantes: les sexupares nous apparaissent comme une forme prédestinée à réaliser ces conditions néces- saires. Parmi elles 11 y a d’abord J'alimentation aux dépens de la nourriture pauvre des aiguilles au lieu de la nourriture riche des écorces, condition ici indépendante de la saison, mais agissant d'une façon analogue à celle de l’appauvrissement de la nour- riture sous l'influence automnale qui exerce son action chez d’autres animaux. Etc'est ainsi que chez les Chermes, contrai- rement à ce qui à lieu chez beaucoup de Pucerons et chez les CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 309 Cladocères, nous pouvons voir la sexuparité se manifester dès le printemps (1). D'autre part le sexupare nous apparaît comme marquant, au point de vue physiologique, une étape vers la sexualité. D'après notre interprétation, son œufest déjà inhibé, à un degré moindre toutefois que celui de la reproduction sexuée suivant Ia conception de Le Dantec, et, au lieu de la fécondation par unsper- matozoiïde, il lui suffit de l'excitant de la migration. C'est ce que les faits suivants tendent à démontrer. Dans les élevages en captivité du Chermes pini, il existe tou- jours un très grand nombre d’ailés qui ne se fixent ni sur les Pins, ni sur les Épicéas mis à leur disposition : sollicités par le tropisme lumineux qui les porte sur le côté le plus éclairé de la mousseline dont ilsont entourés, ils y stationnent d’une façon indéfinie et meurent sans s'être fixés. Il y a lieu de penser que ces ailés, qui refusenten captivité, pendant toute leur existence, de se fixer, sont prédestinés comme sexupares à une migration active : s'ils refusent de se fixer, alors qu'ils ont à leur dispo- sition à la fois le Pinus sylvestris, le Picea orientalis et le Picea excelsa, 11 faut logiquement en conclure qu'il existe entre l’'éclosion d'un ailé sexupare sur le Pin et sa fixation sur l'Épicéa un acte à accomplir, constituant une condition néces- saire à sa maturation et dont la captivité entraine la suppres- sion plus ou moins complète : cet acte, à mon avis, ne peut consister que dans le fait même de la migration. Les observa- tions et les raisons qui m'ont conduit à cette manière de voir ont été exposées à la page 243. Il nous suffira de rappeler ici que les conditions de la migra- tion apparaissent comme intervenant pour achever la différen- clation dans le sens sexupare, différenciation qui, ainsi que nous l'avons démontré d'autre part, se trouve, au moins pour un grand nombre d’ailés, amorcée avant le fait dela migration. (1) Il est remarquable aussi que chez les Cladocères les derniers nés d'une génération (métatoques) sont ceux qui présentent la plus grande tendance à la sexualité; au contraire, chez les Chermes, c'est parmi les premiers nés de la génération printanière (protérotoques) que se recrutent les sexupares, c'est-à-dire les individus les plus orientés vers la sexualité [voir au sujet de la reproduction des Cladocères : Papanicolau, Experimentelle Untersuchungen über die Fortpflanzung Verhältnisse der Daphniden (Biol. Centralbl., 1910, p. 430, 689, 737, 753, 185, 802). 310 PAUL MARCHAL 20 Ohlitération de la reproduction seruée. — Ainsique Cholod- kovsky l’a établi, le Chermes du Pin, dans les forêts du nord de la Russie, ne présente que des migrations rudimentaires sur notre Épicea indigène (Picea excelsa) et la génération sexuée avorte ou reste sans descendance. Il en est de même dans l'Europe occidentale et en particulier en France, de sorte que le Chermes du Pin, qui est une des espèces les plus répandues, peut être considéré comme se multipliant exclusivement par parthénogénèse dans nos forêts. J'ai fait voir, par contre, que si la reproduction sexuée du Chermes pini avorte sur notre Épicéa indigène, elle peut se poursuivre d'une façon complète et régulière sur l'Épicéa du Caucase (Pirea orientalis), qui se trouve assez fréquemment planté dans les parcs, aux environs de Paris, et l’on constate alors des migrations alternatives allant du Pin à l'Épicéa par l'intermédiaire des sexupares, et de l'Épicéa oriental au Pin par l'intermédiaire des gallicoles (nüigrantes alatae). L'Épicéa oriental, qui seul est susceptible d'héberger la reproduction sexuée d'une facon effective, faisant défaut dans nos forêts, le Chermes du Pin à perdu en quelque sorte l'habitude de la reproduction sexuée et il s'est formé une sorte de race indigène parthénogénétique du Chermes du Pin, dont la génération sexuée reste sans descendance, au moins dans la très grande majorité des cas, même lorsqu'elle à à sa disposition le Picea orientalis. Jusqu'à présent, même en plan- Lant celte dernière essence en pleine forèt, dans le voisinage de Pins très attaqués par le Chermes pini, j'ai toujours vu la généralion sexuée de Ja race indigène rester sans descen- dance. En recherchant quelles étaient les causes ou tout au moins les phénomènes connexes de l’oblitération de la reproduction sexuée chez le Chermes pini indigène, J'ai reconnu qu'elle était liée à l'absence ou à la très grande rareté du sexe mâle et j'ai donné le nom de spanandrie à ce phénomène de la disparition des mâles ou de leur extrême rareté dans une lignée qui est nettement spécialisée pour la reproduction bisexuée et qui succède à un cycle régulier de générations parthénogénétiques. En 1911, c'est par centaines de mille que J'ai vu les femelles du Chermes pini massées en grandes taches rouges sur les écorces CONTRIBUTION A L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 971 des Épicéas et condamnées, faute de mâles, à rester sans des- cendance. ; Chez le Chermes piceae Ratz., vivant surles À bies pectinata de nos campagnes, l'oblitération dela reproduction sexuée est beau- coup plus complète que dans le cas précédent et parait même êlre entièrement accomplie : il s’agit en effet d’une espèce qui se multiplie par parthénogénèse indéfinie sur les vieilles écorces des Abies et qui, jusqu’à l'étude que j'ai faite de la question, n'était connue que par sa forme aptère. Les sexupares chezles Chermes étant toujours ailés et se développant exclusivement sur les aiguilles du Conifère jouant le rôle d'hôte intermédiaire, toute voie susceplüible de conduire à la reproduction sexuée semblait donc fermée au Chermes piceae. Or, bien que l'absence ou la rareté des ailés soit la règle pour celle espèce dans la nature, j'ai reconnu pourtant qu'ils pou- vaient apparaître dans certaines circonstances. Toutefois, dans tous les cas observés, la reproduction sexuée n’a pu arriver à se réaliser, parce que les ailés apparus n'étaient pas destinés àémigrersur les Épicéas, mais à se fixer surles Abieseux-mêmes, pour y engendrer de nouveaux individus parthénogénétiques : ils n'avaient donc pas la signification de sexupares, mais bien celle d'ersules alatae. Les faits observés tendent à faire admettre que, chez les Chermes, les facteurs externes (conditions alimentaires, climat, couvert de la forêt) ont à l’origine une influence prépondérante pour déterminer là régression de a reproduction -sexuée chez une race où chez une espèce donnée (1). 30 Le polymorphisme chez les Chermes. — On connaît depuis longtemps la différenciation en cinq types morphologiques distincts (pentamorphisme) des cinq générations qui se suc- cècdent pour constituer le cycle biennal des Chermes : fundatrir, migrans alata (galicole), ersul, sexupara, sexualis. H'existe en outre pour certaines espèces de Chermes un dimorphisme déjà (4) Chez les Cladocères, les expériences de Papanicolau (Biol. Centralbl., 1910) ont attiré à nouveau l'attention sur la grande importance qu'il convient d'attacher à l’action des facteurs externes sur l'aboutissement de la reproduc- tion sexuée et en particulier sur le développement,de l'œuf de durée qui avorte ou se développe, ou bien engendre une succession de générations fortes ou faibles, suivant les circonstances. 512 PAUL MARCHAL réalisé dans l'œuf, qui à été signalé par Bürner chez lés indi- vidus parthénogénétiques vivant sur l'hôte intermédiaire (ersules) : à l'éclosion, dans la descendance d'un même individu, on distingue deux types d’ersules bien tranchés auxquels Bôrner a donné les noms de Liemules et d'estivales. J'ai confirmé l'existence de ce dimorphisme chez les Chermes des Abies (Dreyfusia) et J'ai constaté comme Bürner que, sui- vant la structure que présentaient les larves issues d’une mème mère, les unes étaient destinées à passer par une phase d'arrêt, les autres à évoluer d’une façon immédiate. Mais les observations de Nüsslin et les miennes ont montré que les larves répondant au type dit Aiemalis sont loin d'attendre tou- jours le passage de l'hiver suivant pour évoluer. Chez le CA. piceae, elles évoluent même constamment dans le cours de lété, de sorle que deux ou trois générations conformes à ce type se succèdent pendant la même année. Les désignations de Ae- males et d'estinales ne sont donc pas justifiées et je leur ai sub- sutué celles de sistentes et de progredientes. Les premiers sont principalement caractérisés par leur larve primaire pouvant rester à l’élat de repos pendant une période plus ou moins longue suivant les espèces, mais qui ne comprend pas forcé- ment la saison hivernale suivante : c’est une sorte de larve de résistance ou de durée; cette larve primaire, représentant le stade le plus important au point de vue de l'histoire biologique, doit pouvoir être désignée par un terme spécial et, par analogie avec la nomenclature adoptée par Grassi pour le Phylloxéra, je l'ai appelée neosistens, donnant par contre à la larve primaire du progrediens le nom de neoprogrediens. Cette différenciation dimorphe parail avoir un rôle très important au point de vue de la conservation de l'espèce, celui de permettre à cette dernière d’être toujours, aux différentes périodes de l’année, représentée par un nombre considérable d'individus, qui se trouvent à un stade inapparent, inattractif, très chitinisé et presque desséché, échappant ainsi forcément aux atteintes des nombreux ennemis des Chermes, tels que larves de Syr- phides et de Coccinellides. Il existe à la base du dimorphisme sistens-progrediens un fait fondamental que j'ai signalé dans une note du 10 octobre 1910, CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DÉ LA BIOLOGIE DES CHERMES 313 c'estque les aptères du type sistens ne subissent que trois mues, tandis que les aptéres du type progrediens subissent quatre mues, tout comme les ailés. Ainsi qu'il en est fait mention dans la même note, le Evpe sistens n’est pas seul à se distinguer par cette particularité de présenter trois mues au lieu de quatre : elle se rencontre encore chez la fondatrice, c’est-à-dire chez la forme parthénogénétique aptère qui est directement issue de l'œuf fécondé et qui vit sur l'Épicéa. Ces faits nous paraissent intéressants au point de vue de l'éta- blissement des affinités des différentes formes dans le polymor- phisme des Chermes. Le progrediens nous apparaît comme très étroitement allié à l’ailé et n’est qu'une modification légère par aptérisme du type primitif du Puceron; l'un et l’autre dérivent d'une forme larvaire primaire commune, évoluant en passant par cinq stades successifs séparés par quatre mues et sans phase d'arrêt. Le sistens est une forme beaucoup plus différenciée du type primitif, caractérisée par sa grande fécondité parthéno- cénétique, sa phase d'arrêt à l'état primaire et son évolution tachygénétique (quatre stades séparés par trois mues, au lieu de cinq stades séparés par quatre mues). À tous ces points de vue, elle apparaît comme ayant d'étroites affinités avec la fun- datrix, avec laquelle elle se confond d’ailleurs morphologi- quement chez Dreyfusia Nüsslini. La différenciation de la forme fundatrir dans le sens que je viens d'indiquer paraît exister chez tous les Chermes; elle se présente en tout cas chez les Dreyfusia et les Pineus que J'ai particulièrement étudiés. Par contre, la différenciation dans le même sens de la forme sis{ens est loin d’être constante et, si elle se présente dans le genre Dreyfusia, elle fait au contraire défaut dans le genre Pineus. Chez le Chermes du Pin (Pineus pini), ainsi que Bôrner l'avait d’ailleurs signalé, 11 n'existe pas de dimorphisme tranché à parür de l'œuf et toutes les larves primaires des générations parthénogénétiques qui se succèdent sur le Pin répondent à un type morphologique unique. Or j'ai constaté que, dans le cas du Chermes du Pin, le nombre des mues des individus parthénogénétiques pinicoles est toujours de %, c'est-à-dire conforme au type progrediens des Chermes des Ates. On peut donc dire que le Chermes du Pin est une 914 PAUL MARCHAL espèce présentant, au point de vue où nous nous plaçons, un caractère primitif et chez laquelle le Type sistens ne s'est pas différencié. Parmi les différentes formes parthénogénétiques qui, avec les sexués, constituent le cycle du Chermes pini, une seule se trouve très spécialisée dans l'œuf, de facon à réaliser, par comparaison avec les autres formes, un dimorphisme larvaire manifeste : c'est la fondatrice; et j'ai constaté qu'elle est la seule forme à ne présenter que 3 mues au lieu de 4. Ainsi donc, ce n’est que lorsque le dimorphisme s'exprime dans l'œuf, que nous voyons intervenir en même temps une différenciation profonde dans l’évolution postembryonnare, se manifestant par un nombre de mues différent et nousconstatons que, parmi les différentes formes qui constituent le cycle évolutif d’une espèce de Chermes, celles qui, dans l'œuf, sont morphologi- quement le plus différenciées et qui, à l'état adulte, sont le plus caractérisées au point de vue parthénogénélique sont aussi celles qui présentent le développement postembryonnaire le plus abrégé. Chez les Dreyfusia, deux de ces formes, la fundatrir et ie sistens, réalisent ces conditions et présentent 3 mues au lieu de 4. Chez les Pineus (dont le type est le Chermes du Pin), la forme sis/ens n'étant pas différenciée, une seule forme, la fundatrix, se trouve morphologiquement spécialisée pour une phase sistante et pour une fécondité parthénogénétique excep- tionnelle, et elle seule présente 3 mues au lieu de 4 (1). Ilest intéressant de constater que les deux formes les plus négatives au point de vue de la sexualité et qui possèdent la fécondité parthénogénétique la plus élevée, présentent une abréviation évolutive se caractérisant par la suppression de lune des 4 mues que doivent subir toutes les autres formes. 40 Hérédité dans le polymorphisme. — Rares ou espèces physiolo- giques. — Étant donnée une lignée parthénogénétique d’indi- vidus dimorphes ou polymorphes, chaque forme pourra-t-elle léguer à sa descendance des propriétés héréditaires différentes (4) En ce qui concerne le Chermes du Pin, on peut interpréter les faits en disant que, chez lui, le phénomène de mutation par lequel le type sistens a dû se séparer du type progrediens chez les Dreyfusia ne s’est pas réalisé; les différences morphologiques légères et nombreuses qui se rencontrent entre les divers individus du Chermes du Pin et qui sont en rapport surtout avec les conditions saisonnières ne constituent que des variations fluctuantes. CONTRIBUTION À L'ÉTUDE DE LA BIOLOGIE DES CHERMES 319 et quels seront les caractères du cyele évolutif de ces descen- dances? Le Chermes piceue, espèce exclusivement parthénogénétique, m'a fourni un sujet d'étude favorable à l'examen de celte ques- tion. Chez le Ch. piceae, le Lvpe aptère progrediens, vivant sur les aiguilles et aux dépens duquel le type ailé sexupare se dicho- tomise au printemps chez les autres espèces, est devenu très rare : inconnu avant mes recherches, 1l n'apparaît qu'en un nombre très faible de représentants qui se trouvent en tête de la première lignée printanière, et qui souvent n'arrivent pas à poursuivre leur développement: il en résulte que cette espèce, dans les conditions habituelles, se trouve exclusivement ou presque exclusivement représentée par des générations aptères du type sis{ens qui se succèdent sur les écorces. IF était intéres- sant de se rendre compte de ce qu'il adviendrait si l’on élevait la descendance pure d’un de ces progredientes, que l’on rencontre si rarement dans la nature sur les aiguilles de FA Vies pectinata, et d'examiner S'il ne se formerait pas ainsi une race de Ch. piceae différant par son cycle évolutif du C4. piceae tel que nous le connaissons dans nos forêts de Sapins. — J'ai réalisé cette expérience au mois de Juin 1909, et j'ai isolé la descen- dance d'un progrediens sur un Abies peclinata; or, après deux généralions de sistentes, dont la dernière passa l'hiver à l'état de larves dormantes, apparut la génération printanière, celle par conséquent qui était de mème ordre dans le cyele annuel que la génération du progrediens avant servi de point de départ à l'élevage, et celle, par suite, qui avait le plus de chances de porter l'empreinte héréditaire de ce progrediens. Or, en outre des larves du type sistens, elle comporta toute une lignée de larves du type progrediens, qui se fixèrent sur Les aiguilles et dont les unes évoluèrent en femelles parthénogénétiques aptères du type progrediens, tandis que les autres évoluèrent en ailés. Les générations de sistentes se succédèrent ensuite pendant toute l'année, et en 1911, la contamination de l'arbre étant devenue beaucoup plus dense qü'en 1910, il y eut une lignée très abondante de progredientes et d’ailés sur les aiguilles. Le même phénomène se reproduisit en 1912. Ainsi donc, pendant trois années successives, la descendance pure d'un progrediens de 310 PAUL MARCHAL Ch. piceae recueilli sur une aiguille d’Abies peclinata, s'est différenciée du CL. piceae, Lel que nous le connaissons habituel- lement, par une abondante production au printemps d’ailés et d’aptères du type progrediens. Nous sommes en droit de conclure que, dans cette expérience, le progrediens qui a été le point de départ de l'élevage à légué à sa descendance une aptitude exceptionnelle à la production des neoprogredientes qui seuls sont susceplibles d'évoluer soit en progredientes aptères soit en aulés. Sous le couvert des forêts il existe sans doute des conditions particulièrement favorables à la conservation et à l'évolution des sistentes sur les vieilles écorces, mais défavorables au con- traire au développement des progredientes vivant sur les aiguilles dans des endroits découverts : 1] a dù se constituer ainsi par sélection des sistentes et de leur descendance, aux dépens des progredientes, une espèce qui est le CL. piceae tel que nous le connaissons aujourd'hui et chez laquelle les progredientes et les ailés sont devenus très rares, ces derniers, lorsqu'ils se présen- tent, ayant même perdu leur signification de sexupares. ; Par une expérience analogue- à la précédente nous avons montré le rôle que jouait l'hérédité dans le dédoublement du Ch. pini en deux races : la race indigène et la race orientale, dédoublement dont Cholodkovsky avait eu déjà l'intuition. En faisant, sur le Pin sylvestre, un élevage pur de la descendance issue des migrantes alatue (À), élevage qui, par conséquent, ne comportait que des individus aussi rapprochés que possible de la génération sexuée précédente, j'ai obtenu une race de Ch. pou (Ch. piri orientalis), présentant dans les caractères de son cycle biologique des différences notables avec le C4. pini (race indigène), qui se multiplie depuis un temps infini par parthénogénèse exclusive sur les Pins de nos forêts. La race indigène est caractérisée par une prédisposition très grande à la formation d'ersules alatae, par la quantité relativement restreinte des sexupares et par un avortement de la génération sexuée, s'accompagnant de spanandrie. [en résulte que ce cycle, après avoir été ébauché sur l'Épicéa, se trouve, tout au moins (4) Aïlés parthénogénétiques sortant des galles sur Picea orientalis, pour accomplir la migration de retour sur le Pin. CONTRIBUTION A L'ÉTUDE LE LA BIOLOGIE DES CHERMES 377 dans limmense majorité des cas, brusquement interrompu, aussi bien sur l'Épicéa indigène que sur l'Épicéa oriental. La race orientale est inversement caractérisée par l'absence ou la rareté des exsules alatae, par l'abondance des sexupares, enfin par une génération bisexuée dans laquelle les deux sexes sont normalement représentés et qui donne sur l'Épicéa oriental un cycle complet (1). Il existe entre le CA. pini indigène et le Ch. pint orientalis des relations tout à fait comparables à celles quise présentent entre le Ch. pnceae et le Ch. Nüsslini. Seulement, tandis que les deux premiers ne constituent que deux races biologiques et non morphologiquement distinctes, les deux autres présentent, au contraire, des différences morphologiques légères, mais con- stantes, qui légitiment leur séparation spécifique, et les longues expériences d'élevage que j'ai faites ne m'ont Jamais permis de constater une transformation ou une mutation de l’une des deux formes dans l’autre. (1) C'est-à-dire avec fondatrice et galles d'où sortent les migrantes alatae destinés à opérer la migration vers le Pin. ANN. DES SC. NAT. ZOOL., 9% série. MS NES INDEX BIBLIOGRAPHIQUE 1. BeckER. — Zur Anatomie der Genitalien des gamogenetischen Weïbchens von Chermes orientalis Drevfus (Naturw. Zeitsch. f. Land- und Forst- wirtschaft, WX, p. 38-40, 1905). 2. Brocmaxx (E.). — Ueber die Geschlechtsgeneration von Chermes abietis L. (Biol. Centralbl., VII, p. 417-420, 1887). 3. In. — Ueber den Entwicklungskreis von Chermes abietis (Verhandl. d. naturhist.-med. Vereins zu Heideiberg, N. F., IV, 2, nov. 1888;. 4. [n. — Ueber die regelmässigen Wanderungen der Blattläuse,speziell über den Generationszyklus von Chermes abietis L. (Biol. Centralbl., IX, p. 271-284, 1889). 5. BôürNER (CarL). — Untersuchungen über Tannenwolläuse (Mitteilunygen aus der K. Biol. Anstalt für Land-und Forstwirtschaft : Bericht über die Tätigkeit.… im Jahre 1905, p. 32, 1906 ; Bericht über die Tatigkeit.… im Jahre 1906, p. 54-60, Berlin (P. Parey), 1907). 6..Jp., — Systematik und Biologie der Chermiden (Zoo!. Anz., XXXII, p. 413- 428: 1907) | Comple rendu des travaux antérieurs de l’auteur]. 7. In. — Eine monographische Studie über die Chermiden (Arbeiten aus der Kais. Biol. Anstalt für Land-und Forstwirtschaft, VI, 2, 320 pages, 101 figures et 3 planches doubles, Berlin [P. Parey}, 1908). [Cette monographie contient toute la bibliographie antérieure à 1908). 8. In. — Ueber das System der Chermiden (Zoo!. Anz., XXXIII, p. 169-173 1908). 9. Ip. — Ueber Chermesiden. 1. Zur Systematik der Phylloxerinen (Zool. Anz., XXXIII, p. 600-612, 1908). 10. In. — Ueber Chermesiden. IL. Experimenteller Nachweis der Entstehung diücischer aus monücischen Cellaren (Zool. Ang., XXXIIL, p. 612-616, 1908). 11. In. — Ueber Chermesiden. IL Zur Theorie der Biologie der Chermiden (Zool. Anz., XXXIIL, p. 647-663, 1908). 12. In. — Ueber Chermesiden. IV. Dreyfusia piceae (Ratz) und Nüsslini nov. sp. (Zool. Anz., XXAXIIL, p. 737-750, 1908). 43. In. — Ueber Chermesiden. V. Aphrastasia pectinatae (Zool. Anz., XXXIV, 1909). 44. In. — Ueber Chermesiden. VI. Cholodkovskya, Aphrastasia und Güillettia (Zool. Anz., XXXIV, p, 498-511, 1909). 15. In. — Ueber Chermesiden. VIL Cnaphalodes lapponicus (Chol.) (Zool. Anz., XXXIV, p. 554-560, 14909). 16. In. Zur Biologie und Systematik der Chermesiden (Biol. Centralblatt, XXIX, p. 118-146, 1909). 17. In. — Untersuchungen über die Chermiden (Mitteilungen der Kaïiserl. Biol. Anstalt für Land und Forstwirtsch., VII, p. 50-60, 1909). 148. In. — Untersuchungen über Chermiden (Mitteilungen aus d. K. Biol. 19. Anstalt für Land, und Forstwirtsch., Heft 11, p. 36, Berlin.[P. Parey}, 1914. Caocopkovsky (N.). — Noch Einiges zur Biologie der Gattung Chermes L. (Zool. Anz., XII, p. 60-64, 1889). INDEX BIBLIOGRAPHIQUE 379 In. — Weiteres zur Kenntnis der Chermes-Arten (Zoo. Anz., XI, p. 218-223, 1889). 20. In. — Neue Mitteilungen zur Lebensgeschichte der Gattung Chermes L. (Zool. Anz., XII, p. 387-391, 1889). 21. 1n. — Zur Biologie und Systematik der Gattung Chermes L. (Horae Societ. Ent. Ross., XXIV, p. 386-420, 1889). 22, In. — Zur Lebensgeschichte von Chermes abietis L. und Chermes strobilo- bius Kalt. (Zoo!l. Anz., XVIE, p. 434-437, 1894). 23. In. — Beiträge zu einer Monographie der Coniferen-Läuse (Horae Societ. Entom. Ross., XXX, p. 1-102 et pl. I-VIL, 4895 ; XXXE, p. 1-60 et pl. I- VI, 1896). 24, In. — Aphidologische Mitteilungen. 3. Zur Geschichte der Chermes abielis Kalt. (Zool. Anz., XIX, p. 313, 1896). 25. In. — Aphidologische Mitteilungen. 6. Zur Kenntniss von Chermes funi- tectus Dreyf. (Zool. Anz., XXII, p. 468, 1899). 26, In. — Ueber den Lebenscyklus der Chermes-Arten und die damit ver- bundenen allgemeinen Fragen (Biol. Centralbl., XX, p. 265-283, 1900). 27. In. — Ueber den männlichen Geschlechtsapparat von Chermes (Bül., Centralbl., XX, p. 619, 1900). 28. In. — Aphidologische Mitteilungen. 15. Zur Geschichte der Exsules bei Chermes-Arten. — 16. Zur Unterscheidung des CA. viridis Ratz. und Ch. abietis Kalt. (Zoo!. Anz., XXIV, p. 295 et p. 296, 1904). 29. In. — Aphidologische Mitteilungen. — 18. Chermes-Gallen auf einer Weisstanne. — 19. Zur Biologie von Chermes pini Koch. (Zoo!. Anz., XXVL, p. 259-263, 1903). 30. In. — Ueber das Erlüsschen der Migration bei einiger Chermes-Arten (Zool. Anz., XXVIL, p. 476-479, 1 fig.). 2 31. In. — Entomologische Miscellen. — 9. Zur Kenntniss der wachsbereiten- den Drüsen der Chermes-Arten (Zool. Jahrbücher. Abt. Syst. 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Kixrrer (J.-J.). — Les Chermes cécidogènes sur les Conifères dans le nord de l'Europe (Marcellia, 1, p. 30-33, 1903). #7. GiLLerTE (C.-P.). — Chermes of Colorado Conifèrs (Proceedings of the Acad. of Natur. Sciences of Philadelphia, p. 3-22, 10 planches, 1907). 48. Marcnar (P.). — Contributions à l'étude biologique des Chermes (1e note). — Le Chermes piceae Ratz. (Bull. Soc. Zool. Fr., XXXI, 26 juin 1906, Dati) 49. In. — Contributions à l'étude biologique des Chermes (2° note). — Le Chermes pini Koch. (Bull. Soc. Entom. Fr., 11 juillet 4906, p. 179-182). 50. In. — Contributions à l'étude biologique des Chermes (3e note). — Nou- velles observations sur le Chermes pini (C. R. séances Soc. biol., LXIII, p. 340, 19 oct. 1907). 51. Ip. — Contributions à l’étude biologique des Chermes (4° note). — Nou- velles observations sur les Chermes du groupe Ch. piceae Ratz. (C.R. séances Soc. biol., LXIIL, p. 368, 26 oct. 1907). . In. — Contributions à l'étude biologique des Chermes (5e note). — Les ailés non gallicoles du Chermes pini (C. R. séances Soc. biol., LXV, R. 229, 25 juillet 14908). In. — Contribution à l'étude biologique des Chermes. La génération sexuée chez les Chermes des Pins aux environs de Paris (C. R. Acad. Sc.; 48 oct. 1909, 3 fig.). 54. In. — Contribution à l'étude biologique des Chermes (C. R. Acad. Se., 10 oct. 19140). 55. In. — Contribution à l'étude biologique des Chermes (C. R. Acad. Se., 7 nov. 4910). 56. In. — La spanandrie et l’oblitération de la reproduction sexuée chez les Chermes (C. R. Acad. Sc., CLIIL, p. 299, juillet 4944). 57. Ip. — L’oblitération de la reproduction sexuée chez le Ch. piceae Ratz. (C..R. Acad. Sc., CLIN, p. 603, 25 sept. 19414). 58. Mozz (Éuir). -- Einige Bemerkungen über die durch Chermes piceae var. Bouvieri auf Abies nobilis hervorgerufenen Triebspitzengallen (Nat. Zeitsch. f. Forst-und Landw., VI, p. 151-154, 1908). . 59. Morpwirko (A.). — Beitrage zur Biologie der Pflanzenläuse, Aphididae Passerini (Biol. Centralbl., XXVIL, p. 529-550, 561-575, 631-663, 747- 167, 769-816, 1907 ; XXIX, 1909) Le mémoire en russe du même auteur a été publié dans Horae Soc. ent. Ross., XXXI, 1897 et XXXIV, 1901. 60. Muru (Fr.). — Ueber die Triebspitzen gallen der Abies-Arten (Naturw. Zeitsch. f. Land-und Forsthw., Il, p. 437-439, 1904). . Nüssuin (0.). — Die Biologie von Chermes piceae Ratz. (Naturwiss Zeitsch. für Land-und Forstwirtschaft, 1, p. 25-33 et p. 59-67, 15 figures, 1903). P 8 . In, — Zur Biologie der Gattung Chermes Htg., insbesondere über die Tannenrindenlaus Chermes piceae Ratz. (Verhandl. d. naturwiss. Vereins Karlsruhe, XVI, 20 p., 1903). . In. — Leitfaden der Forstinsektenkunde. Berlin (P. Parey), p. 415-428, 1905. . In. — Chermes funiteclus Dreyf. oder Chermes piceae Ratz. (Zool. Anz., XXXIL, p. 440-444, 1907). IXDEX BIBLIOGRAPHIQUE 381 . In. — Zur Biologie der Chermes piceae (Verh. Deutsch. Zool. 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Centralbl., IX, p. 312-317, 4889). TABLE DES MATIÈRES Introduction. Caractères généraux du cycle des Chermes Formes des générations successives Polyeyclie ousparacyclie een ti RE RE Ta RME ee Espèces parthénogénétiques22 21.59. ue TN SERRE Technique CRC MICTACIOICNOONEO °10 8 "5, 07 is (2) albtete 215 ee 0 °a,ee 2e CRC I. — Chermes vivant sur les Abies. Genre Dreyfusia a Uatale none te ee) 6e 57e eee rsfene ole le Is lerelotelo unless ets) een tie dote te tie DrEYFUSIA (CHERMES) NÜSSLINI. ............... Cycle évolutif et biologie du Chermes Nüsslini.................. Migration sur le Picea orientalis. Les Sexupares Les Sexués et l’œuf fécondé La-Fondairices 2% tes tue PRET EE EEE Les Gallicoles et la galle. Migration sur les Abies..,....... Génération issue des Gallicoles, Fermeture du cycle... CCC CC Morphologie externe du Chermes Nüsslini. Pondatrice (Furaainir) es. res ES nn ee Gallicole (Gallicola Miqrans alata). +5. SEC RER EE Parthénogyne sistante (Sis{ens ou Exsul sistens)........ Parthénogyne évoluante (Progrediens où Exsul progrediens) DEXUPDAROSETUDUNA) ER ee metelt ste eine Co ER CLEET Sexués Seules) rene Re PE TO RE DreYyrusIA (CHERMES) PICEAE s'ololele 12/6 6 06) 6 e/210 0e 02e sin latutelsts eee se ele v Cycle évolutif et biologie du Chermes piceae..........2 Les Exilés aptères du type He ESA TN TES STE Les . mms tie else te see Morphologie externe du Chermes piceae. Parthéenogyne-sistante (Sistens):422 RE Parthénogyne évoluante (Progrediens).....,.............. Ailé (Alata) [représentatif du Sexupare] jose seule e rs atsis)e) are sie I{. — Chermes vivant sur les Pins. Genre Pineus. Pixeus (CHERMES) PINI siofo ie lens nee nlslete et lee cle anetrlie e +) °Uoid eo en eee) ein Cycle évolutif et biologie du Chermes pini Les Hivernants....... Génération printanière issue des Hivernants.........,..... Les Exilés aptères de première génération et leur descen- dancer siens ‘ SU srS ele Joie et ee able e st nn mn tt TABLE DES MATIÈRES. 383 Pages LesAilés” Leurpparräonss +. Ame Lo 201 Différenciation et destination des Ailés.................. 238 EessBsiles alé (Ersulestalatae SP ere 247 ESS EXUDALE SR Sa lat ne alpes ans Ce ue 249 OSSI S NUE on me io ne ee Moi at: AT ee 252 La Fondatrice...... OPEN Ce SEC 0 257 ÉesGalltentes (fMigraniestalætae) . "NP dater. 259 Générations pinicoles issues des Migrantes alatae......... 261 Pes/deux races du'Chermes du Pin: , 1.:.:.,4: 24... ... 262 La Spanandrie chez le Chermes du Pin................. 268 Morphologie externe du Chermes pini. Bond Ce (EN ERL) EE ee LE Aer ce als NN ee 273 Galheole {Gallicola Miqgans alata} SR 271 PAUETEN OS VON CE ES M) era te Ce ete A ee Et CIE ou DEMINAREE (SCT ADUTE) ES en du es ee ne SO Se 282 DONS TN CCU LES PEER Ua eee 1 US a) One PE RE 284 PINEUS (CHERMES) STROBI. CueleenoluRe bone EL RL NE se Dr RE EE A 289 Morphologieérterne duChermessirobi. APE EEr Le 292 HI Tableaux des Expériéneos., 35,1... ie 29% Bapénencesaa O0 (ChermesNiss nn) APE ER 29% Expériences 124 (Chenmes-picede). Ar Lane nue. 307 Expériences 25/4156 (Chermes pu) es PRIS RME 326 Expériences 54460 (Clermes:strobi).. Jr Ur: 358 Expérience ble (Clermespineoutes)t SR UN EME EE 360 Résumé et ConcLustioxs. A. Résumés des cycles évolutifs des espèces étudiées... ..... 362 B. Exposé des principaux résultats dans leurs rapports avec la DID lon Ie SÉNÉCAIC RE RME ee SR RER CN EE 365 1% Diférenciation de Ta (Sexualité. "222 1.2.0. 365 29 Oblitération de la reproduction sexuée,............ PO I, 3° Le polymorphisme chez les Chermes................. 371 40 Hérédité dans le polymorphisme. — Races ou espèces DOVSIOIOS QUES SR An me me un at LE 374 INDEXESBIBLTOGRAPHIQUE SE SP ee LS RTE An Te ne ee EE 378 EXPLICATION DES PLANCHES , PLANCHE 1 Fig. 1. — Jeune Abies pectinata envahi par Dreyfusia (Chermes) piceae. X 1/2. Fig. 2. — Progredientes (exsules aestivales) de Dreyfusia (Chermes) Nüsslini entourés de leur sécrélion cireuse et fixés sur les aiguilles d’une pousse d'Abies nordmanniana. Faible grossissement. Fig. 3. — Sexupares de Chermes Nüsslini fixés sur aiguilles de Picea orientalis. Les crosses formées de sécrétion cireuse se sont développées sur la tête et le thorax. X 8. Fig. 4. — Sexué de Chermes Nüsslini en voie de développement sur une pousse de Picea orientalis ; en a, on voit en outre un ailé sexupare. X 2. Fig. 5. — Sexué de Chermes Nüsslini en voie de développement à la base d'une aiguille de Picea orientalis; en arrière (partie inférieure de la figure) se trouvent les mues qu’il a abandonnées. X 8. PLANCHE II Fig. 6a, 6b, 6c. — Galles de Dreyfusia (Chermes) Nüsslini sur Picea orientalis. Fig. 7. — Migrantes alatae de Chermes Nüsslini fixés en grand nombre à la face inférieure d’un rameau d’Abies pectinata. Fig. 8. — Un migrans alata de Chermes Nüsslini fixé à la partie basilaire d’une aiguille d’Abies nordmanniana. X 12. PLANCHE III Fig. 9, — Galle de Dreyfusia (Chermes) Nüsslini, après la sortie des migrantes alatae ; on voit sur les aiguilles voisines les mues nymphales abandonnées par ces migrantes, avant leur essaimage. X 1,5. Fig. 10. — Extrémité d’un rameau d'Abies pectinata chargé de Dreyfusia (Chermes) piceae. Ces Insectes (sistentes ayant hiverné) ont pondu en arrière de leurs corps d'énormes grappes d'œufs. X 1,5. Fig. 11 a, 110. — Galles de Pineus (Chermes) pini sur Picea orientalis; elles sont arrivées à maturité; sur 11 4 la déhiscence s’est même produite en partie et des ailés (migrantes alatae) sont sortis de la galle, abandonnant des mues blanches à sa surface, Fig. 12. — Fondatrice de Chermes pini au 1% stade, vue de profil, peu de temps après sa fixation, à la base d'une aiguille de Picea orientalis. Elle se recouvre de filaments cireux présentant à cette époque un aspect de verre filé ; 22 juillet 1909 (exp. n° 50). x 36. Fig. 13. — Fondatrice de Chermes pini au 1e stade, et au même degré de déve- loppement que celle de la figure 12, mais vue du côté dorsal et plus grossie ; 14 juillet 1909. x 100. Fig. 14. — Fondatrice (f) de Chermes pini au 1% stade, mais deux ou trois mois après sa fixation à la base d’une aiguille de Picea orientalis; avant l'hiver, elle s'est entourée d’un épais feutrage de sécrétion cotonneuse ; 29 septembre. x 3. Fig. 15. — Deux fondatrices (f, f’) de Chermes pini complètement développées (4° stade), au printemps, après l'hivernation, sur un rameau de Picea orien- EXPLICATION DES PLANCHES 389 talis. Elles sont entourées d’une abondante sécrétion cireuse ayant l'aspect d'un tampon d'ouate (exp. 50, 26 avril 1910). PLANCHE 1V Fig. 16. — Exsules alatae de Pineus (Chermes) pini fixés en grand nombre sur l'extrémité d’un rameau de Pinus sylvestris. Ils sont masqués par une abon- dante sécrétion cotonneuse et forment de grosses masses blanches; des masses blanches plus petites se trouvent aussi sur les aiguilles et corres- pondent aux exilés aptères, à divers stades de développement ; 30 juin 1909. Fig. 17. — Sexupares de Chermes pini fixés en grand nombre sur les pousses d’un rameau de Picea orientalis ; ils sont entourés d’une abondante sécrétion cotonneuse. Fig. 18. — Une pousse du rameau précédent grossie près de {rois fois et montrant les amas filamenteux correspondant aux sexupares du Chermes pin. Fig. 19 a, 19 b. — Amas de sexués de Chermes pini en cours d'évolution fixés sur aiguilles de Picea orientalis. Pour mettre à découvert ces amas de sexués, les sexupares qui les ont engendrés ont été retirés. L'aiguille est partiel- lement décolorée ; des flocons de sécrétion cotonneuse entourent les Insectes. DCR PLANCRE V Fig. 20. — Pinus sylvestris très fortement envahi par le Chermes pini (expér. n° 49.) PLANCHE VI Fig. 21. — (Œufs fécondés de Dreyfusia (Chermes) Nüsslini à la base d’une pousse de Picea orientalis. Les écailles qui entourent la base de la pousse ont été écartées et rabattues pour mettre à découvert deux œufs (brun rouge) de Chermes Nisslini; à côté de chacun se trouve le cadavre (brun foncé) de la femelle qui lui a donné naissance ; 8 juillet 1907. X 7 Fig. 22. — Fondatrice de Chermes Nüsslini complètement développée et telle qu'elle se présente au printemps à la base des bourgeons de Picea orientalis. En arrière se trouve le paquet d'œufs encore incomplet qu’elle a pondus et d'où doivent sortir les gallicoles; on distingue en outre une masse grise formée par les trois mues que la fondatrice abandonne au cours de son développement et par des flocons légers de sécrétion cireuse ; 1 avril 1907. X 920. Fig. 23. — Fondatrice de Chermes Niüsslini avec sa ponte en place, à la base d'un Déni de Picea orientalis ; 17 avril 1907. X 5. Fig. 24 a, 24 -b, 2 24 c. — Galles de Chermes Nüsslini sur Picea orientalis. Fig. 25. — Migrantes alatae de Chermes Nüsslini (avec leurs pontes vues au travers des ailes), sur une aiguille d’Abies pectinata (exp. 25 juin 1906). Fig. 26. — Migrans alata de Chermes Nüsslini, peu de temps après sa sortie d'une galle sur Picea orientalis, (fin juin). X 50. Fig. 27. — Sexués de Chermes pini en voie de développement sur une aiguille de Picea orientalis. Le sexupare qui leur a donné naissance et qui les abri- tait sous son abondante sécrétion cotonneuse a été retiré pour les mettre à découvert. L'aiguille est en partie décolorée (15 juin). X 12. Fig. 28 a, 28 b. — Galles de Chermes pini sur Picea orientalis. La galle 28 b est en train de s'ouvrir et les ailés (Migrantes alatae) qui en sont sortis s’apprè- tent à prendre leur vol après avoir abandonné les mues nymphales (blanches) à la surface de la galle. Ann. des Sc. nat. 9 Serie. LOL TEXTE PTEEE L. Bru phot. Phototypie Berthaud, Paris Chermes des Sapins (Abies) Masson & Cie, Editeurs. Ann. des Sc. nat. 9% Série. LOOL TE VITE PIE L. Bru phot. Chermes des Sapins (Abies) Masson et Cie, Editeurs Phototypie Berthaud, Paris Ann. des Sc. nat. 9 Serie. O0 TE YITIR PIS 12 P. Marchal del. et L. Bru phot. Phototypie Berthaud, Paris. Chermes des Sapins (Abies) (fig. 9 et 10) et Chermes du Pin (fg. 11-15) D Masson & Cie, Éditeurs ru “ ES Ann. des Se. nat. 9% Série ZOO XVIII PI" Montpillard et L. Bru phot Phototypie Berthaud, Paris Chermes du Pin Masson & Cie, Editeurs Ô À VEIT PE Zool.T. Série. des Sc. nat. 9 Ann. f A4 dm. TA Be aTIs Phototypie Berthaud, P Bru phot. L. Chermes du Pin Masson & Cie, Editeurs PRE er : AR ( A CO PES : : n LS Se * + = : AT | pe . r/ ù Le : . .. “4 : L 4 PNR: Le $ ra ee | \ > "® : + : 4 - Je sir 2 æ 7, th ré : s GP NT Le ., >. R 0 : ," w: D k, 6 Ê D P % , 2 « "1 Arm.des Se. nat. 9° Serre, Zoot. T: XVHI._ PL.6. P. Marchal pinx., fig. 21,22,23,25,26,97. G.Reïignier lith. Millot pinx . fg.24,28. Imp.L.Lafontaine, Paris. Chermes des Sapins lAbres) Fig. 21-26, et Chermes du Pin Fig-27,28. Masson et C éditeurs. EL LUN 5 MISE 02529 race D SARP TRAD NUE ORPNPET SP MEET EE ee ao ng rire «# ++