ANNALES DIT MUSÉE ROYAL D’HISTOIRE NATURELLE DE BELGIQUE Tome I I3K K l'UiHia Mil! min k l'mmn K fi M PU '%lt ANNALES DU MUSÉE ROYAL D’HISTOIRE NATURELLE DE BELGIQUE TOME I DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES DES ENVIRONS D’ANVERS PAR M. P.-J. VAN BENEDEN COMMANDEUR DE L’ORDRE DB LÉOPOLD, DE L’ORDRE LE N.-D. DE LA CONCEPTION DE VILLA VICIOSA, DE L*ORDRB DE LA ROSE DU BRÉSIL, CHEVALIER DE L’ORDRE DE L’ÉTOILE POLAIRE, DOCTEUR EN MÉDECINE ET EN SCIENCES, DOCTEUR EN DROIT DE L’UNIVERSITÉ D’ÉDIMBOURG, MEMBRE DE ïf ACADÉMIE ROYALE DES SCIENCES, DES LETTRES ET DES BEAUX-ARTS DE BELGIQUE, MEMBRE HONORAIRE DE L'ACADÉMIE DE MÉDECINE DE BELGIQUE, CORRESPONDANT DE L’INSTITUT DE FRANCE, DE LA SOCIÉTÉ ROYALE DE LONDRES, DES ACADÉMIES DES SCIENCES DE BERLIN, DE SAINT-PÉTERSBOURG, DE MUNICH, DE LISBONNE ( DE BOLOGNE, DES PAYS-BAS, DE MONTPELLIER, DE CALIFORNIE, DE L’ACADÉMIE DE MÉDECINE DE PARIS, DF. LA SOCIÉTÉ LINNÉENNE DE LONDRES ET DE BORDEAUX, DE LA SOCIÉTÉ DIS SCIENCES DE BATAVIA, DE HARLEM, DE LIÈGE, ETC. PREMIÈRE PARTIE (Avec un atlas de 1S planches in-piano ) PINNIPÈDES ou AMPHITHÉRIENS. BRUXELLES F. HATEZ, IMPRIMEUR DE L’ACADÉMIE ROYALE DE BELGIQUE ÉDITEUR n O rvY! MDCCCLXXVIl mi.. vtroval d'histoi! àieAcadémie, iü le grave «jkMusées’ :ifcrl restreint. jition avec 1; à Le 31 man àe Muter ràÉ lest '«te Du Bus i wi Le Musée royal d’histoire naturelle a pour origine le Cabinet de physique et d’histoire naturelle que l’ancienne Académie, fondée par Marie-Thérèse en 1772, avait été autorisée à former, en fai¬ sant un choix dans les collections réunies par le prince Charles de Lorraine. Ce Cabinet, placé dans l’ancienne abbaye de Cortenberg, près de Bruxelles, et confié à la garde de l’abbé Mann, l’un des membres distingués et les plus actifs de l’Académie, devint, par suite des événements politiques de la fin du siècle dernier, la propriété de la ville de Bruxelles. Installé, sous le gouvernement des Pays-Bas, dans les bâtiments de l’ancienne Cour où il se trouve encore, le Musée s’enrichit de dons variés, mais, malgré quelques munificences princières, il demeurait fort restreint. Une Convention avec la ville de Bruxelles rendit en 1842 l’État propriétaire des collections communales. Le 31 mars 1846 seulement, un arrêté royal, contre-signé par Sylvain Van de Weyer, ministre de l’Intérieur, procéda à l’organisation du Musée, afin d’établir dans le pays une institution qui réunît les ressources propres au développement de la science. La direction fut confiée à feu le vicomte Du Bus de Ghisignies. La tâche était difficile, car bien des efforts et beaucoup de temps étaient nécessaires pour créer les collections qui faisaient défaut et les services compliqués que l’administration d’une telle insti¬ tution réclame. Le Musée était, du reste, encore pourvu de moyens fort insuffisants, malgré l’accrois¬ sement donné aux locaux et les allocations budgétaires notablement supérieures à celles que la Ville lui avait précédemment allouées. Aussi l’organisation définitive ne fut entreprise que bien des années plus tard, lors de l’avénement de M. Pirmez au ministère de l’Intérieur en 1868. Mon prédécesseur donna d’abord particulièrement ses soins aux collections d’oiseaux qui com¬ mencèrent à prendre un sérieux développement. Il rendit bientôt à la science un service qui lui donne droit à notre reconnaissance. Dès que les travaux militaires furent commencés vers 1860 autour d’Anvers, il mit son activité à préserver et à faire recueillir d’immenses quantités d’ossements fossiles de Cétacés qui y étaient mis au jour. Plus de deux cents mètres cubes de ces ossements furent transportés au Musée et bon nombre d’entre eux purent être conservés en groupes, comme ils avaient été exhumés. ■UMMH ■arawÉant M. Du Bus avait aussi réuni une importante série de Thalassothériens des mers du globe pour servir de point de départ à l’étude de ces faunes fossiles, et il s’appliqua, pendant plusieurs années, à faire figurer et à décrire les Célodontes d’Anvers. Sa mort, survenue en 187-4, l’empécha de mener à bonne fin cette œuvre importante. Ayant été appelé en 1868 par M. Eudore Pirmez, ministre de l’Intérieur, à la direction du Musée, je fus mis en mesure de donner un nouveau développement à l’institution. Le personnel scientifique fut renouvelé et considérablement augmenté. Sept conservateurs furent mis à la tête des sections, à mesure que celles-ci s’organisaient; elles comprenaient les trois règnes de la nature. Plusieurs de ces sections étaient à créer, notamment celles des mollusques, des radiaires, des végétaux fossiles et de stratigraphie. Nos collections, entre les mains des naturalistes distingués à qui elles étaient confiées et avec le concours d’un grand nombre de savants qui voulurent bien nous seconder, prirent bientôt l’exten¬ sion qui était désirable et furent soigneusement étudiées. Le travail de détermination qui, jusqu’alors, avait été à peu près complètement négligé, fit des progrès rapides et ininterrompus. Nous fûmes mis en possession de locaux récemment améliorés et agrandis, et au bout de sept ans, le nouvel établissement put être ouvert au public. Le programme du Musée devait comprendre à la fois la diffusion et l’avancement de la science. En vue de réaliser le premier point, tous les groupes de collections sont, autant que le permet l’espace dont nous disposons, exposés dans des armoires vitrées où ils peuvent être étudiés directe¬ ment et sans l’intermédiaire du personnel. Ils portent des étiquettes détaillées sur lesquelles sont indiqués les renseignements que l’objet comporte. On y a adjoint des aperçus graphiques pour en faciliter l’étude et pour indiquer la voie et les tendances que suit la science. J’ai été ainsi amené à faire placer, à côté de l’étiquette de détermination des espèces vivantes, un petit planisphère figurant l’aire géographique de l’espèce. Cette méthode, destinée en même temps à faire entrer la géographie animale dans une voie plus positive, fut bien accueillie par les naturalistes et promptement imitée dans plusieurs Musées étran¬ gers. Je l’appliquai pour la première fois en 1871 aux collections recueillies dans nos cavernes. Elle fut installée en 1875 dans une grande partie de nos collections et, durant la même année, sur les plantes de pleine terre du Jardin botanique de l’État dont j’ai dirigé la réorganisation. Ce procédé fut introduit l’année suivante dans l’ouvrage étendu que M. Dubois, conservateur de la sec¬ tion des vertébrés, consacre à la faune belge, et il sera sans doute souvent utilisé dans les Annales du Musée. Le même ordre d’idées me porta à compléter les renseignements scientifiques d’autres collec¬ tions par des diagrammes. Les Cétacés fossiles reçurent des vignettes représentant le squelette d’espèces encore vivantes et chaque groupe d’ossements y est teinté en couleur pour indiquer la partie du squelette qui a été recueillie. Quelques-uns de ces diagrammes sont reproduits dans l’éminente description des Amphithériens fossiles qui forment le premier volume de nos Annales. Les végétaux fossiles sont également accompagnés de vignettes représentant le végétal restauré, sur lequel on a nai colorié les parties conservées dans les collections. Le figuré des coupes géologiques sert de son côté de base au classement des roches du pays. Nous croyons par ces moyens poursuivre avec quelque efficacité l’une des destinations que l’on est en droit d’attendre du Musée, celle d’aider à la diffusion des connaissances en histoire naturelle. Cependant, en même temps que des collections générales étaient réunies et mises scientifique¬ ment en ordre, il y avait lieu de donner une attention particulière aux collections qui sont de nature à apporter leur contingent aux progrès de la science. C’est là évidemment un but qui n’est pas moins de l’essence de ces sortes d’institutions. Le Musée, possédant peu d’occasions de faire explorer des régions lointaines, ne pouvait arriver qu’accidentellement à réunir des collections étrangères, suffisamment complètes et assez pourvues d’éléments nouveaux pour être l’objet de monographies étendues. Je crus donc devoir choisir un théâtre qui nous fût plus accessible et où on était d’ailleurs certain d’aboutir à des résultats sérieux. Tous les éléments relatifs à l’histoire naturelle de la Belgique sont activement recueillis par les Conservateurs de chacune des sections de l’établissement, mais nos terrains, par leur variété et par leur richesse en fossiles, offrent surtout un large champ pour atteindre notre but. Les recherches, entreprises jusqu’aujourd’hui dans cette voie, semblent justifier complètement cette détermination. Les collections ethnographiques et paléonlologiques recueillies de 1864 à 1872 dans nos cavernes, la faune quaternaire des Flandres et de la province d’Anvers, les innombrables silex taillés du Hainaut occupent trois de nos salles. Les travaux militaires exécutés à Anvers ont fourni la prodigieuse collection d’ossements de Thalassothériens que je rappelais plus haut et dont le seul classement par le personnel a exigé près de deux ans. Par son étendue, elle dépasse la plupart des collections T^Ièontologiques qui aient encore été réunies; par sa composition, elle reste sans rivale. Les restes de poissons, les crustacés, les mollusques et les radiaires sont également nombreux et variés dans les dépôts tertiaires d’Anvers; le Musée en possède d’importantes séries. Nos autres terrains tertiaires, plusieurs étages de nos terrains secondaires et primaires présentent des faunes qui sont célèbres dans la science. Nous en possédons de nombreuses collections parmi lesquelles se trouvent les mollusques et les radiaires tertiaires et la faune du calcaire carbonifère qu’on peut mettre au rang des plus riches éléments de l’institution. Nos flores fossiles ne sont pas moins abondantes, et notre terrain houiller réclame en particulier des recherches qui ne peuvent manquer d’être fécondes. Une publication spéciale était nécessaire pour faire porter leurs fruits à ces importantes res¬ sources, beaucoup trop étendues pour que leur description pût prendre place dans les recueils scientifiques existant déjà dans le pays. C’est à cette fin que M. Delcour, ministre de l’Intérieur, sur ma proposition fortement appuyée par le Conseil de surveillance de l’établissement, a créé les Annales du Musée. --.— - Nos savants les plus distingués se sont empressés de répondre à notre appel, qu’ils fissent partie du personnel du Musée, ou qu’ils n’y fussent pas attachés. La description de plusieurs des collec¬ tions qui viennent d’être citées, pouvait être immédiatement entreprise, mais il nous a paru que quelques-unes d’entre elles devaient jouir du droit de priorité, vu la célébrité des auteurs qui ont accepté le soin de les faire connaître. Aussi une partie des ressources de l’établissement ont été employées depuis plusieurs années à rendre ces collections dignes des travaux dont elles allaient être l’objet et qui prendront des proportions considérables. M. P.-J. Van Beneden s’est chargé de publier la description des ossements d’Anvers. M. L.-G. de Koninck a entrepris la description de la faune du calcaire carbonifère. M. Nysl est occupé à décrire la conchyliologie de nos terrains tertiaires. Les autres parties de la paléontologie belge, notamment l’ethnographie de nos âges de la pierre, seront successivement mises en œuvre et prendront place dans le même recueil. Notre gouvernement, en demandant à la Législature les crédits nécessaires, vient de prendre une mesure appelée à donner un nouvel essor à ces travaux et à y apporter la coordination désirable. Il a décidé qu’une Carte géologique détaillée du royaume sera levée à l’échelle du 20,000 e par les soins du Musée et publiée par le Dépôt de la guerre auquel le pays doit ses belles cartes topogra¬ phiques. Les travaux de paléontologie marcheront ainsi parallèlement avec l’étude stratigraphique de notre sol. Celle-ci sera à son tour complétée par l’étude microscopique des roches. Un nouveau service vient d’être établi au Musée dans ce but, conjointement avec le service du levé de la carte. Les Annales du Musée ont donc pour cadre spécial l’histoire naturelle de la Belgique. Elles embrasseront surtout la description stratigraphique, paléontologique et lithologique du pays, et la Carte géologique détaillée de notre sol, au 20,000 e et en 430 feuilles, viendra s’y adjoindre, d’après une récente décision, comme la base de l’ensemble du travail. E. DUPONT, DIRECTEUR DU MUSÉE. Bruxelles, le 8 juin 1877. PRÉFACE. Il y a longtemps que les richesses paléontologiques des sables d’Anvers sont connues des naturalistes. II en est question déjà dans quelques auteurs du siècle dernier, mais ce vaste ossuaire, enfoui à peu de profondeur, n’a pris une importance véritable que depuis les grands travaux de Cuvier sur les ossements fossiles en général. Au commencement de ce siècle (1809), en creusant le grand arrière-bassin à flot, les ouvriers mirent au jour quelques ossements qui furent envoyés à Paris par le premier inspecteur général du génie, M. le comte Dejean; ils sont conservés encore aujourd’hui au Muséum d’histoire naturelle, comme les plus précieuses reliques de ces terrains sablonneux. C’est avec quelques-uns de ces matériaux que le grand naturaliste du Muséum a créé le genre Ziphius. A la suite de travaux exécutés par des particuliers, nous avons reçu, il y a près de cinquante ans, diverses pièces qui nous ont décidé à faire, en 1835, une communication à l’Académie des sciences de Paris. En 1852, on a construit des fortins en avant de l’enceinte de la place, et, grâce à l’intelligente activité du général de Lannoy, qui commandait ces travaux, des colonnes vertébrales de Cétacés de plusieurs mètres de longueur ont été conservées avec de nombreuses dents et des ossements de toutes les grandeurs. Les travaux d’une écluse maritime construite, en 1854., pour faire déboucher le canal de jonc¬ tion de la Meuse à l’Escaut sous Anvers, ont mis également au jour des trésors cétologiques. Mais ce sont surtout les grands travaux militaires exécutés dans ces dernières années en vue d’y établir la base de la défense nationale et auxquels notre métropole commerciale doit aujourd’hui ses principaux embellissements, qui ont fait connaître plus particulièrement la prodigieuse richesse de cet ossuaire. Le sol a été creusé sur une longueur de quatorze mille mètres pour l’établissement du fossé de l’enceinte et de dix-sept mille mètres autour des forts détachés. Les coupes géologiques, descendant jusqu’à huit mètres en moyenne, en ont été publiées par M. Ad. Dejardin, alors capitaine en premier du génie. Les derniers travaux ont été pratiqués au Kattendyk, et comme il y a encore des forts à établir, nous pouvons espérer de voir encore sortir du sol bien des richesses paléontologiques. Notre regretté confrère le vicomte Du Bus, dans un discours qu’il a prononcé comme directeur de la classe des sciences de l’Académie royale, le 17 décembre 1867, proposait d’exécuter des fouilles au fond des fossés, et nul doute qu’elles ne fournissent de nouveaux matériaux scientifiques aussi importants pour la paléontologie, que les objets d’art sortis des ruines de Pompéi et d’Her- culanum l’ont été pour l’histoire. Anvers est bâti au milieu d’un estuaire s’étendant sur une surface très grande et au fond duquel des couches de sables noirs, verts, gris et jaunes se sont successivement déposées. Chacune de ces couches renferme des ossements d’animaux marins qui nous permettent de lire les changements survenus dans la mer et dans ses habitants. Les faunes successives que formaient ces animaux contrastent avec celle des temps actuels. Des Phoques de toutes les dimensions animaient ces plages; des Baleines et des Dauphins sans nombre remplissaient ces eaux; des Tortues grandes comme des Éléphants, des Requins de cinquante pieds de longueur vivaient au milieu de ces animaux littoraux et pélagiques. Et ces reliques de la fin de I. 1 9 PREFACE. la période tertiaire se trouvent entassées dans les mêmes couches de sable, depuis les bords de la Meuse jusqu’au Mecklenbourg d’un côté, de Norfolk et de Suffolk en Angleterre de l’autre. L’Angleterre était encore unie au continent et pendant des temps géologiques fort longs les courants et les vents dominants poussaient les cadavres flottants de l’Atlantique et de la mer du Nord dans la même direction. Il s’est formé là le plus vaste ossuaire qui existe au monde. La mer du Nord de celte époque, le commencement de l’âge pliocène, n’était pas sans ressem¬ blance avec la baie de Bafïîn et le détroit de Behring de nos jours, où tous les ans des pêcheurs de différentes nations vont tuer encore des Baleines, puis des Phoques pour compléter leur charge¬ ment. 11 suffît de jeter un coup d’œil sur le livre intéressant et instructif que vient de publier 31. Henry W, Elliot, pour se faire une idée des légions de ces animaux qui couvrent certaines plages dans des contrées peu explorées. On dirait des armées d’Otaries prenant leurs ébats sur les bords des îles S f -Paul et S'-Georges dans la mer de Behring. Tous ces os fossiles des environs d’Anvers proviennent d’animaux complètement différents de ceux qui vivent encore aujourd’hui, et pour donner une idée de la quantité qui a été rassemblée au Musée royal d’histoire naturelle, nous dirons que deux ouvriers ont mis cinq mois à les transporter dans une salle nouvellement construite, et que cette salle, de 65 mètres de long sur 11 mètres de large, n’était pas, à beaucoup près, suffisante pour les étaler convenablement sur le plancher. L’ensemble des restes de Cétacés transportés au Musée mesure un volume de deux cents mètres cubes à peu près. Et nous ne parlons que des os dont nous avons entrepris la détermination. Comme il appartient à l’historien de fouiller les archives, à l’archéologue de fouiller les tombeaux, il appartient au paléontologiste de fouiller le sol pour faire revivre les faunes et les flores qui ont habité le pays avant nous. Quand l’homme cesse de parler, il faut accorder la parole aux pierres et aux os, et écouler avec un respect religieux le langage du Tout-Puissant qui a créé le ciel et la terre. Ces os ont été recueillis pour la plupart à l’époque où la direction du Musée était confiée à notre savant confrère le vicomte B. Du Bus. Qu’il nous soit permis d’exprimer nos regrets que notre dœne confrère n’ait pu recueillir le fruit de ses dernières années de recherches. Il avait préparé un grand travail sur les Ziphioïdes, et si ce travail n’a pas vu le jour, c’est que l’auteur a voulu mettre trop de soins à sa confection. Il espérait toujours faire mieux qu’il n’avait fait, et il était rarement satisfait de ce qu’il avait terminé. Nous devons en tous cas lui rendre cette justice, qu’il a mis le plus grand soin à la conservation des objets et, si l’on s’aperçoit aujourd’hui que certains renseignements font défaut, il faut l’attribuer au temps où ces fouilles ont été entreprises. Ce n’est que dans ces dernières années que l’on a compris le besoin d’annoter avec précision les couches de sable dans lesquelles les os ont été découverts. Ce monde fossile a pu être sauvé, grâce au concours actif et assidu des officiers du génie, qui ont conduit ces travaux; et grâce à l’intelligente activité du directeur du Musée royal d’histoire naturelle, M. Dupont, et du contrôleur des ateliers, M. De Pauw, nous avons été mis à même d’entreprendre cette publication. Ceux qui ont pu voir ces amas d’ossements recueillis pendant les travaux et entassés dans les caves du Musée peuvent seuls se faire une idée des efforts qu’il a fallu pour effectuer les triages et pour rapporter ensuite chaque os à son genre et à son espèce. Nous commençons la description des ossements fossiles des environs d’Anvers par les Phoques et après eux nous publierons les Cétodontes ou Cétacés a dents, puis les NIysticètes ou Cétacés a fanons. Et si Dieu nous prête vie, nous espérons faire connaître successivement les quelques débris d’oiseaux que le sable renferme, les Tortues dont quelques-unes se distinguent par leur forme comme par leur taille, et enfin les poissons osseux qui n’ont laissé malheureusement que peu de débris. Les poissons plagiostomes ont été étudiés par le capitaine Le Hon, qui y a consacré les dernières années de sa vie. gff lj DESCRIPTION DES DES ENVIRONS D’ANVERS. ■ J Q PREMIÈRE PARTIE. SOMMAIRE : Genres et caractères; Place h part dans les carnassiers; Affinités avec les Loutres; Supériorité sous le rapport de la taille; Abondance des ossements à Anvers; Contraste avec les vivants; Mélange avec les cétacés; Dépôt d’Elsloo; Matériaux à notre disposition; Procédé; Difficultés; Aire géographique; Plan. Les Phoques n’ont formé pendant longtemps qu’un seul genre dans l’ordre des carnassiers; mais ce genre est devenu aujourd’hui une section, sous les noms de Carnassiers amphibies, de Pinni- grades, de Pinnipèdes et d’Amphitériens ; nous préférons cette dernière dénomination. On trouve leurs caractères indiqués dans tous les livres et il n’y a pas une espèce parmi les vivants dont la place ait été un instant douteuse pour personne. Les seuls genres que l’on ait voulu leur adjoindre et sur le rapprochement desquels on n’est guère d’accord, sont les Squalodons et les Zcuglodons. Les Amphitériens occupent une place à part par leur organisation comme par leur genre de vie et, depuis l’état embryonnaire jusqu’à l’âge de la décrépitude, ils se font remarquer par des caractères particuliers. Tous les zoologistes s’accordent à les placer dans l’ordre des carnassiers et les caractères de leur placenta ont confirmé ce rapprochement; mais, parmi les carnassiers, quels sont les genres dont ils se ... -■■-r. rntm K DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES rapprochent le plus? Ce sont évidemment les Loutres et parmi elles la Loutre marine. Quand on regarde le squelette de ce singulier carnassier, on ne peut qu’être frappé de ce rapprochement. Par les Loutres, les Phoques se rattacheraient ainsi aux carnassiers vermiformes, c’est-à-dire à tout ce qu’il y a de plus sanguinaire dans l’ordre. Nous croyons pouvoir, jusqu’à un certain point, répéter avec Nillson que, si les Phoques véritables tiennent des Carnassiers, les Otaries tiennent plus ou moins des Dauphins elles Morses des Cétacés herbivores, et si le savant professeur de l’Université de Lund avait été à même de voir leurs membres postérieurs et leur marche plantigrade, il aurait facilement reconnu qu’elles tiennent encore plus des Ours. Il est probable que Nillson n’avait vu ni Otarie ni Morse en vie. Quand, dans un groupe naturel, des genres où des espèces aquatiques prennent place à côté d’espèces terrestres, les premières sont généralement supérieures en taille, mais inférieures en organisation. En est-il ainsi des Phoques par rapport aux autres carnassiers ? Ils dévient évidemment de la règle générale, au moins sous le rapport de la supériorité des espèces terrestres. Il est bien difficile de dire si les Phoques ou les Otaries sont supérieurs ou inférieurs aux autres; mais quant à leur taille, personne n’ignore que les Amphitériens com¬ prennent des espèces qui atteignent plus de vingt pieds de longueur et qui dépassent par conséquent plusieurs fois la grandeur des plus fortes espèces terrestres. Les ossements de Phoques recueillis à Anvers se rapportent à quelques centaines d’animaux qui ne forment pas moins d’une quinzaine de genres. Ce nombre est fort grand, surtout si on le compare aux animaux de ce groupe qui hantent aujourd’hui nos côtes. Nous ne voyons actuellement que le Phoque vitulin depuis la côte de Norwége jusqu’au détroit de Gibraltar, et cette espèce va se mêler à d’autres dans la Baltique, dans le canal Saint-George, la Méditerranée et la mer Noire. Il y a donc un contraste frappant, sous le rapport du nombre comme sous le rapport de la variété et des dimensions, entre les espèces vivantes de nos plages et les espèces fossiles qui autrefois habitaient l’estuaire d’Anvers. Une différence fort grande sépare la faune fossile de nos contrées de la faune vivante, et pour trouver un exemple de l’assemblage de tant d’espèces dans les mêmes lieux, nous devons le chercher dans des parages éloignés, peu ou rarement visités. En comparant les ossements des Phoques à ceux des Cétacés recueillis en même temps sur les mêmes lieux, le contraste n’est pas moins grand, puisque les os de ces Carnassiers sont de véritables raretés au milieu des autres. Il est assez remarquable que, pour les Cétacés comme pour les Pinni- grades, il n’y a plus aujourd’hui qu’une espèce que l’on peut considérer comme propre à nos côtes. Ces ossements d’Amphilériens, mêlés avec ceux de Cétacés véritables, sont pour nous un indice que ces animaux ne sont pas morts sur place, et que leurs cadavres ont été apportés de loin par les courants. En effet, les Phoques sont des animaux littoraux que l’on rencontre surtout dans les estuaires, tandis que les Cétodontes, les Ziphioïdes comme les Mysticètes, ne se trouvent jamais qu’au large et dans des eaux profondes. Notre ossuaire principal est à Anvers et ses environs; mais nous avons également quelques débris de Phoques, de la même époque à peu près, dans la vallée de la Meuse, à Elsloo près de Maestricht. Ce dépôt d’Elsloo correspond aux couches les plus anciennes des environs d’Anvers, puisqu’on y trouve les os de Siréniens mêlés avec les os de Squalodon et des débris de Palœophoca Nyslii. A Anvers, les restes de Siréniens ne se trouvent que dans l’argile rupelienne et le Squalodon avec le Palœophoca Nyslii dans le sable noir à Panopœa Menardi. Pour juger de la valeur d’un travail, il est bon de savoir quels sont les matériaux que l’auteur a eus à sa disposition. Nous devons 1 avouer, peu de naturalistes se sont trouvés jusqu’à présent devant une collection d’ossements fossiles aussi riche et en même temps devant une collection aussi complète de squelettes d’espèces suivantes; pour faire la comparaison nous nous sommes trouvé dans les conditions les plus favorables. Nous avons pu, en démontant les squelettes, juger par la compa- DES ENVIRONS D ANVERS. 5* raison des os semblables, des modifications que chacun deux subit dans les genres voisins ou éloignés. La rareté de têtes et de dents parmi les ossements fossiles nous a obligé de chercher dans les principaux os la base des divisions génériques et spécifiques. Voici comment nous avons procédé : après avoir réuni tous les os de Phoque, qui sont toujours faciles à reconnaître par leur forme comme par leur texture, nous avons réuni tous les os de même nature, c’est-à-dire les humérus, les fémurs, et ainsi les autres. Après cette première opération, nous avons réparti les os longs d’après leur taille, ayant devant nous les mêmes os des espèces vivantes. Si l’on considère que la plupart des pièces d’une même espèce se répètent plusieurs fois, il n’est pas difficile de les répartir par groupes et d’établir parmi eux des coupes génériques et spéci¬ fiques. Quand cette opération est faite pour les os, comme les humérus et les fémurs, qui sont les pièces les mieux conservées, on leur rapporte les autres os, en se guidant d’abord d’après leur dimen¬ sion, et l’on finit par distinguer par combien d’individus chaque groupe spécifique est représenté. Il y a des os qui sont répétés une trentaine de fois et qui n’offrent pas la moindre différence entre eux. Nous avons étalé alors devant nous les humérus, les fémurs, les vertèbres, etc., des diverses espèces européennes, et nous nous sommes assuré de quelles espèces vivantes nos Phoques fossiles se rapprochent le plus. En répétant la même opération pour les autres os, nous sommes arrivé ainsi à composer nos espèces, et à en établir un certain nombre avec une certitude entière. Il y a loin de là à faire la description d’un ou de quelques os séparés qui tombent sous la main et que l’on décrit sous un nom quelconque. Nous ne craignons pas de le dire, nous croyons l’établissement de ces genres et de ces espèces aussi bien fondé, que si nous avions ces mêmes animaux dans les conditions où les voyageurs naturalistes les recueillent habituellement. Nous ne nous faisons cependant pas illusion sur les difficultés de déterminer rigoureusement les Amphitériens : un naturaliste éminent, M. le docteur Burmeister, a montré dernièrement combien il est difficile souvent de reconnaître même les espèces vivantes. C’est que certains Pinnigrades varient considérablement d’après l’âge et le sexe, et le savant directeur du Musée de Buenos-Ayres parle même de différences sensibles entre les deux moitiés du corps de certaines Otaries. Si l’on donne un coup de scie dans l’axe de quelques têtes, les deux moitiés du même animal pourraient être rapportées à des espèces ou même à des genres différents. Deux crânes de mâle adulte d 'Eumetopias Stelleri diffèrent tant entre eux, dit à son tour un savant zoologiste des États-Unis d’Amérique, M. Allen, que l’on ne pourrait les réunir en une seule espèce, si l’on ne connaissait positivement leur origine et leurs mœurs. Il en est de même du Callorhinus ursinus. M. Burmeister a fait cette observation curieuse que les femelles ont entre elles plus de ressemblance que les mâles, et que ce sont elles qui portent le mieux les caractères spécifiques. 11 y a encore des Otaries comme YOtaria falklandica, dit Burmeister, dont on ne connaît pas jusqu’à présent la femelle. Il n’est pas étonnant d’après cela que la synonymie de certaines espèces comme YOtaria Jubata , ne comprenne pas moins de quinze noms. Nous n’avons cependant pas remarqué une grande diffé¬ rence dans le crâne d’une demi-douzaine de ces Otaries d’âge et de sexe différents que nous avons trouvés dans le guano du Pérou. Peron disait déjà au commencement du siècle : « Sous le nom d’Ours marin, il existe réellement plus de vingt Phoques décrits, figurés ou indiqués dans les divers auteurs. » Que dirait Peron aujourd’hui? M. Burmeister a réduit une demi-douzaine d’Otaries des côtes de l’Amérique du Sud à deux, et qui s’étendent sur la côte Est, entre 34° et 40° Sud. Les Olavia Leonina, Jubata, Byronia, Goddefroyi et Ulloœ ne sont qu’une seule et même espèce. On comprend donc que nous avons eu de grandes difficultés à vaincre; mais la quantité d’ossements de certaines espèces est telle, que nous pouvons établir les types avec une certi¬ tude complète, ainsi que nous le disons plus haut. Quand un os se répète vingt-cinq ou trente fois avec les mêmes caractères et la même taille, on peut bien dire que tous se rapportent c DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES à une même espèce; ce qui ne veut pas dire que nous ne pourrions à la rigueur nous tromper sur les différences sexuelles dans la comparaison de deux séries d’ossements el séparer spécifiquement les mâles des femelles. Il est a remarquer aussi, que si la répartition géographique est d’une haute importance sous le rapport systématique, l’aire géographique de certains animaux marins a notablement changé, même depuis les temps historiques. Le Lamantin se rendait jadis beaucoup plus au Nord qu’aujourd’hui dans l’Amérique du Nord, et le Morse par contre se rendait beaucoup plus au Sud. On trouve des représentations en terre cuite du Lamantin, au nord de la Floride, dans des endroits où on ne le voit plus arriver aujourd’hui, et tout fait croire que le Manatus antiquus de la formation post¬ pliocène de l’Ashley-River, dans la Caroline du Sud, n’est que l’espèce ordinaire. Les Lamantins remontaient autrefois le Mississipi comme ils remontent aujourd’hui encore l’Amazone. On peut en dire autant de certains Cétacés et de plusieurs Phoques du Groenland. Notre but principal en publiant ce travail est, comme nous l’avons dit, de faire connaître les ossements fossiles qui ont été découverts dans les sables des environs d’Anvers; mais, avant de procéder à leur description, il nous paraît indispensable de jeter d’abord un coup d’œil sur les Phoques vivants et de dire quelques mots de leur squelette et de leurs dents, de leur taille, de leur genre de vie et de leur distribution géographique, et surtout de faire l’énumération des espèces qui habitent encore aujourd’hui les mers d’Europe. Ce n’est que par les vivants que nous pouvons apprécier les fossiles. CHAPITRE I. PHOQUES OU AMPHITÉRIENS VIVANTS. PREMIÈRE SECTION. SQUELETTE. Le squelette des Phoques se distingue facilement de celui des autres mammifères par le bassin, par les membres, par la colonne vertébrale comme par la forme du crâne. Plusieurs os importants font défaut, puisqu’il n’y a ni clavicule, ni coracoïde, ni lacrymal et, en général, pas d’os sésa- moïdes dans tout le groupe des Otaries ( ] ). Les sinus frontaux, maxillaires et sphénoïdaux man¬ quent également. Les os des carnassiers amphibies qui nous occupent ne sont jamais fistuleux et dans le jeune âge le tissu osseux est moins spongieux qu’à l’âge adulte. Les os longs ont d’abord le même aspect au centre qu’à la circonférence; plus tard le centre devient plus spongieux et à la fin il devient de nouveau plus dur. On observe le même phénomène chez les Cétacés. Les épiphyses se soudent chez tous ces animaux fort tard. Nous avons sous les yeux un radius d'Otaria jubata de vingt-deux (') Les Phoques comme les Morses ont deux os sésamoïdes à chaque articulation métacarpophalangienne et méta- tarsophalangienne; les Otaries n’ont qu’un os lenticulaire à la même place surtout au grand doigt interne des mem¬ bres antérieurs; c’est du moins ce que nous observons dans YOtaria jubata des îles Chincha. DES ENVIRONS D’ANVERS. 7 centimètres de long et dont l’épiphyse inférieure est encore libre, tandis que la supérieure est com¬ plètement soudée. La soudure des épiphyses n’a pas lieu en même temps dans tous les os; comme dans les Cétacés, il y a sous ce rapport de grandes différences; mais nous n’avons pu nous assurer si, dans la région caudale, la soudure est également plus précoce que dans les autres régions. La boite crânienne est fort grande et arrondie; la paroi interne présente des impressions digitales profondes et elle est toujours moulée sur les circonvolutions du cerveau. La tente du cervelet est ossifiée. Le plancher est large, le sphénoïde antérieur très-étroit. La selle turcique est à peine distincte. Les trous optiques sont fort rapprochés, dans les Otaries surtout. Le canal palatin antérieur ou canal de Stenon est extrêmement développé. Chaque os incisif est percé d’une gouttière distincte dont les parois postérieures sont formées par le bord antérieur du maxillaire. Cette disposition est très-prononcée déjà dans les jeunes. Les orbites sont fort grandes et l’espace interorbitaire est réduit à une mince cloison. Les apophyses sus-orbitaires sont très-étendues dans les Otaries et manquent dans les autres. Les cornets olfactifs sont fort développés et remplissent toute la cavité des fosses nasales, laissant tout au plus un passage libre à l’air. La tète des mâles, dans les Otaries surtout, diffère beaucoup de celle des femelles par le volume comme par les crêtes. Les différences ne sont pas moins grandes d’après J’àge comme d’après le sexe. Souvent il existe même, comme nous l’avons vu plus haut, de grands défauts de symétrie dans la boite crânienne. Les Àmphitériens sont Diphyodontes, et la première mue se fait plus ou moins complètement avant la naissance. Les canines qui tombent toujours les dernières se voient souvent encore en place dans le jeune âge. Les dents, dites de lait, subissent les mêmes changements dans les Phoques que dans les Otaries. Les incisives sont au nombre de trois dessus et trois dessous ('); les canines de une sur une et les molaires, comme les incisives, de trois de chaque côté et à chaque mâchoire. Les premières dents ont été observées dans les Phoca vitulina, barbata et groenlandica, YHali- clioerus grypus, le Cyslophora crislata, le Cystophora proboscidea, le Trichecus rosmarus, \(Maria pusilla , et Y Otaria jubata. Dans le Morse, dont le système dentaire est si peu régulier, on a reconnu les mêmes dents de lait, à l’exception d’une incisive supérieure, qui tombe sans doute plutôt que les autres. Ces dernières observations sur les dents de Morse sont dues surtout à Rapp, Blasius, Peters et Malmgren. Dans deux jeunes têtes d 'Otaria jubata, que nous supposons à terme et qui sont toutes les deux exactement au même degré de développement, les dents définitives sont au complet; mais, de chaque côté et à chaque mâchoire, on aperçoit encore la canine de lait, c’est-à-dire, la première canine avant la mue, en place à côté de la canine définitive. Cette dent est fort grêle dans toute sa lon¬ gueur, y compris même la couronne. Dans une de ces têtes, une des canines inférieures est tombée naturellement. Ces deux têtes ont été retirées du guano avec les autres os qui étaient encore dans la peau. Dans une tête un peu plus avancée, nous trouvons encore la première canine également en place. C’est la dent dont la chute est la plus tardive. Il y a quatre prémolaires en comptant comme prémolaires celles qui succèdent à d’autres et une molaire seule chez les adultes. Mais cette base est évidemment erronée. Les trois molaires caduques sont remplacées par les trois molaires de milieu et, en prenant pour vraie molaire, celle qui n’est pas précédée par une autre, la première et la dernière mériteraient au même titre le nom de molaire; les trois dents de milieu seraient trois prémolaires. Il faut abandonner cette expression de dents de lait et considérer leur succession comme une mue. Les dents appartiennent à une (') Nous avons hésité pour mettre trois dessus et trois dessous, mais nous avons pu constater positivement ce nombre dans une tète de fœtus de Phoque que nous conservons. 8 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES première ou à une seconde mue et la première a lieu chez les Pinnigrades, comme la première mue des poils, avant la naissance. Les dents incisives définitives supérieures ont leur forme particulière de selle dans les Otaries avant leur sortie de l’alvéole. Les incisives exlernes sont souvent plus fortes que les autres avec une couronne caniniforme et une racine qui montre une tendance vers la bifurcation par un sillon longitudinal. Il n’y a pas de différence notable entre les molaires antérieures et les autres; toutes ont deux racines. Les osselets de l'ouïe présentent des différences très-grandes dans les Phoques en général et dans les Otaries; ils sont beaucoup plus petits dans ces dernières. Sous ce rapport les Phoques véritables se rapprochent davantage des Siréniens qui ont les osselets les plus volumineux. Nous regrettons de n’avoir pu jusqu’à présent trouver un os temporal d’Amphitérien fossile pour nous assurer des caractères de ces osselets. La colonne vertébrale se compose de sept vertèbres cervicales, quinze dorsales, cinq lombaires et de onze à seize caudales; il y a quinze côtes s’articulant directement avec le sternum, cinq indirectement ou pas du tout. Le corps des vertèbres cervicales, dans les Otaries surtout, est tronqué en biais et une grande espace les sépare Le sternum est fort long et étroit comme celui des autres carnassiers; il est composé de huit pièces dans les Otaries, de neuf dans les autres. Les auteurs leur en accordent généralement une de plus. La première comme la dernière de celles du milieu par une forme particulière. Le manu¬ brium est fort, l’appendice xiphoïde long et large. Il n’y a pas d’épiphyses aux sternèbres. Blainville a figuré le sternum de YOtaria jubata et n’indique, avec raison, que huit os. Nous avons trouvé le même nombre. La première paire de côtes est insérée au milieu du corps de la première ster- nèbre, c’est-à-dire du manubrium, tandis que les autres côtes s’insèrent toutes entre les sternèbres. Blainville a figuré l’os hyoïde du Morse et du Phoque ordinaire et n’a pas connu, sans doute, celui de Y O t aria jubata. Nous l’avons trouvé dans une jeune peau retirée du guano et il a la composition ordinaire; seulement, le corps lui-même est, comparativement à celui du Morse et du Phoque commun, notablement plus fort. On voit trois os en avant dans la composition des cornes et un os en arrière. Les côtes véritables ne présentent rien de remarquable ; les côtes sternales sont à tout âge cartilagineuses. Les os du bassin sont placés de manière que le pubis et l’ischion forment un angle aigu avec la colonne vertébrale. Au fond de la cavité cotyloïde on voit un quatrième os dans tous les bassins, os cotyloïdien d’après Straus-Dürkheim. Le trou sous-pubien est fort grand, de forme ovale par suite du grand allongement de l’ischion et du pubis. La symphyse du pubis est située très-loin en arrière, et nous voyons les Loutres, sous ce rapport, occuper le milieu entre les mammifères terrestres et ceux qui nous occupent. Les os longs des membres sont tous courts, surtout le fémur; les phalanges des mains et des pieds sont au contraire fort longs; les mains et les pieds dépassent la longueur des bras et des avant-bras, des cuisses et des jambes. Le cubitus des Otaries est terminé inférieurement en pointe; celui des autres Pinnigrades est tronqué. Chez tous les Amphitériens il y a trois os dans la première rangée du carpe; le premier, le radial, est formé de la réunion du scaphoïde et du sémi-lunaire ; le second est le pyramidal ou mieux le cubital ; le troisième os est un pysiforme. La seconde rangée est formée de quatre osselets ordinaires dont le quatrième représente deux osselets soudés. ■BSnESaBBBBmBSIBBHBI 1 DES ENVIRONS D’ANVERS. 9 Les Phoques ont les cinq doigts des membres antérieurs et postérieurs terminés par des ongles; les Otaries n’ont pas d’ongles aux doigts des membres antérieurs et trois seulement aux postérieurs; ces ongles sont portés par les trois doigts du milieu. Les deux autres, l’interne et l’externe, montrent à la place de l’ongle une petite dépression, visible à la surface de la peau. Tout le membre antérieur des Amphitériens fait penser à celui des Cétacés; il y a cependant encore des différences assez grandes et il y en a même d’assez notables entre les Phoques proprement dits et les Otaries. Ce ne sont sans doute pas les membres qui ont fait penser au professeur Gegenbaur que les Cétacés se rattachent aux Artiodactyles. Le pouce est le plus long des doigts; les autres doigts diminuent successivement, de manière que le cinquième est le plus petit. Le pouce a deux phalanges, mais elles sont toutes les deux fortes, ainsi que le premier métacarpien ; les autres doigts ont chacun trois phalanges. 11 y a une différence assez notable entre les os du carpe des Phoques proprement dits et ceux des Otaries; dans ces derniers, le scaphoïde est très-grand ainsi que le pisiforme, et les quatre mésocarpiens sont placés avec plus de régularité au-devant de leurs métacarpiens respectifs. Dans les Otaries, le trapèze est placé à coté du trapézoïde et non pas en dessous comme dans les autres. Les cinq doigts des Otaries ont à peu près la même longueur aux membres postérieurs, tandis que ceux des Phoques diffèrent notablement entre eux sous ce rapport; le doigt interne et l’externe sont les plus longs, le second et le quatrième les plus courts; le troisième, celui du milieu, est le plus court de tous. L astragale a sa surface tibiale creusée en poulie dans les Otaries, relevée en dos-d’âne dans les Phoques; il est pourvu en avant et en dedans d’une apophyse qui lui donne une certaine largeur; il se distingue facilement de celui des Otaries. Les Otaries ont la dernière phalange des membres pectoraux fort élargie. L os pénial de plusieurs espèces est connu depuis longtemps. Celui du Morse a été pris autrefois pour celui de la Baleine à cause de sa dimension et c’est ce qui a fait dire par erreur, à plus d’un naturaliste, que la Baleine a un os pénial (*). Cet os est toujours fort grand relativement à la taille de l’animal; il est plus ou moins courbé et sa face inférieure est sillonnée dans toute sa longueur pour le canal de l’urèthre. A sa base il est plus large qu’au sommet qui est tronqué. On peut dire que chaque espèce a, comme les autres carnassiers, un os pénial propre. Nous connaissons celui du Morse, de 1 Eumetopias Stellen, de 1 Olaria jubata, jeune et adulte, du Stenorhynchus leptonyx, du Pagophilus groenlandicus, du Callocephalus vitulinus et du Plioca pontica. Blainville a figuré, pl. VII, celui du Morse, de YOlaria jubata? et d’un jeune Callocephalus vitulinus. 31. Allen a figuré celui de YEumetopias Stelleri ( â ). Nous avons eu 1 occasion d’étudier celui du Pagophilus groenlandicus qui est énorme, fort com- ' primé et fortement courbé; celui du Callocephalus vitulinus qui est, au contraire, droit et arrondi, semblable a celui du Stenorhynchus leptonyx ; ce dernier est conservé au squelette du Muséum à Palis. Nous avons liou\e 1 os pénial de 1 Otaria jubata dans le guano du Pérou. II est arrondi, dioit et sans îenflcment sensible a sa base. Nordmann fait mention de l’os pénial de Phoca ponticu , mais il ne le figure pas, ce que nous regrettons. D’après ce qu’il en dit, il se rapproche plus de celui de YOlaria jubata , figuré par Blainville, que de celui du Phoca vitulina. Les os principaux qui traduisent le mieux les caractères propres des espèces et que l’on pour¬ rait appeler caractéristiques, ce sont l’astragale et le calcanéum, l’os iliaque et le fémur. (') Cette erreur est encore reproduite par Gegenbauer dans son remarquable Manuel d’anatomie comparée, traduit par Cari Vogt, p. 846. ( 2 ) Allen, On the eared Seuls, witli an account of thc Northern Fur Seals, by Captain Charles Bryant. Bulletin of tue Muséum of Comp. Zoology, Harvard College. Cambridge, Mass. Vol. H, n° 1. I. 2 10 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES L’astragale est, comme nous venons de le dire, en dos-d’âne dans les Phoques véritables, de manière que la surface articulaire du tibia s’applique sur le côté de cet os et non à la surface; dans les Otaries, celle surface articulaire est aplatie, forme une poulie, et reçoit toute la surface articu¬ laire de l’os de la jambe. Il y a en même temps dans les Phoques un talon qui manque dans les autres. Le calcanéum des Otaries est pourvu d’un talon achilléen large et tronqué. L’os iliaque porte sa crête en dehors; sa face externe est creusée et fort peu étendue eu avant dans les Phoques véritables, tandis que dans les Otaries la crête de l’os iliaque est en avant, la face externe peu creusée et l’os assez allongé. Le fémur a son grand trochanter à la hauteur de la tête dans les Otaries ; dans les autres, ce trochanter la dépasse notablement. Cette apophyse s’élève à mesure que l’animal devient plus aquatique. La cavité sous-trochanlérique est aussi plus prononcée dans ces derniers, et l’os est plus large et plus aplati avec des condyles plus saillants. En un mot, pour distinguer si le Phoque est pinnigrade ou plantigrade, il faut observer si la surface articulaire de l’astragale est en dos-d’âne ou à poulie, si le talon du calcanéum dépasse l’astragale, si le grand Iranchanter du fémur est élevé, si le tibia a une surface articulaire infé¬ rieure plane et si l’os iliaque est court, à crête tournée en dehors et creusé à sa face externe. Comment se comportent les Amphithériens actuels sous le rapport de la taille, si on les compare aux autres Thalassothériens? Il y a une diversité très-grande chez eux, mais qui ne va pas aussi loin que dans les Cétacés. Les plus petits Amphithériens peuvent être comparés aux plus petits Cétacés et les plus grands n’atteignent pas même le tiers des grandes espèces. Et cependant les plus grandes de celles-ci, qui sont des Balénoptères, sont ichtyophages comme les Phoques. Les mâles sont toujours un peu plus forts de taille que les femelles. Ces animaux ont de commun avec les Cétacés d’être très grands en venant au monde, puisqu’ils ont, à la fin de la gestation, le tiers du volume de leur mère. Ils ont aussi de commun la mue des poils pen¬ dant la gestation. Ils diffèrent notablement par les dents, puisque les Cétacés sont monophyodontes. Les plus grandes espèces dans le groupe qui nous occupe sont le Morse, le Stemmatopus cristatus et le Phoca barbata dans l’hémisphère boréal; les deux premiers atteignent jusqu’à vingt pieds, le dernier la moitié de cette longueur. Le Phoca barbata de notre hémisphère a jusqu’à dix pieds, le Groenlandica quatre ou cinq, YHalichœrus grypus de quatre à six, comme le Phoque ordi¬ naire et le Phoca hispida trois pieds. C’est la plus petite espèce. Dans l’hémisphère austral, le plus grand est le Morunga, ou Éléphant de mer, animal simi¬ laire du Stemmatopus et auquel on accorde jusqu’à vingt et même trente pieds. Il en a quatre ou cinq en venant au monde et en atteint dix-huit ou vingt au bout de deux ou trois ans. Quelques Otaries deviennent aussi fort grandes. Les Otaria jubata, iirsina, forsteri et cinerea ont de sept à dix pieds. On accorde jusqu’à quinze pieds à l 'Eumetopias Slelleri. Le Musée de Berlin a reçu dernièrement des iles Kuerguelen un squelette complet dont la tète seule a un demi-mètre de longueur. Le Musée de Bruxelles a reçu, sous le nom A'Eumetopias Slelleri, du Musée de Saint- Pétersbourg, des côtes qui ne sont pas beaucoup moins grosses que celles de la Baleine franche. On accorde au Stenorhynchus des South-Shetlands une longueur de onze pieds. On a fait une guerre si active à tous ces animaux, dans l’un comme dans l’autre hémisphère, que l’on ne trouve plus guère des individus ayant toute leur taille. Les directeurs des musées ont beau promettre aux pêcheurs de grandes récompenses pour des squelettes complets et adultes des grandes espèces, ils ne peuvent en obtenir. En leur qualité de carnassiers aquatiques, les Amphitériens comptent, conformément à la règle, de plus grandes espèces que les carnassiers terrestres. DES ENVIRONS D’ANVERS. il DEUXIÈME SECTION. GENRE DE VIE. ( Habitat, pâture, amours, parasites . ) Les Phoques sont des animaux marins, mais, comme certains Cétacés et même certains Squales il y en a qui habitent des fleuves et d’autres des lacs. La mer Caspienne, aussi bien que le lac Ladoga et celui de Raikal au cœur de l’Asie, en nourrissent. On cite une espèce dans les lacs de Finlande. On n’en voit pas dans ceux de Scandinavie. Le lac Raikal en nourrit, d’après quelques voyageurs, en assez grand nombre pour que leur graisse et leur peau fassent un objet de commerce d’une certaine importance. On peut dire que ces animaux ne sont pas tous aquatiques au même degré et leur organisation trahit môme ceux qui sont plus ou moins terrestres. Le Morunga ou Éléphant de mer est le plus aquatique de tous et l’on peut en dire autant de l’espèce similaire de notre hémisphère, le Cystophora cristata. Dans notre hémisphère une autre espèce, le Morse, est comptée parmi les moins aquatiques et sous ce rapport il se rapproche des Otaries. C’est, comme nous venons de le dire, dans les os des extrémités postérieures, surtout l’astragale et le calcanéum, le fémur et l’iléon, que l’on peut le mieux reconnaître le caractère terrestre. II n’y a pour ainsi dire point de talon chez ceux qui, comme les vrais Phoques, ne peuvent plier le membre sous l’abdomen. Quelques-uns d’entre eux habitent pendant un certain temps hors de l’eau. Le capitaine Scammon qui a tant contribué dans ces dernières années à étendre nos connaissances sur l’histoire naturelle des Thalassotériens, nous apprend qu’à l’époque des amours les Otaries passent des semaines et même des mois à terre sans prendre aucune nourriture et sans se rendre dans l’eau. Ils arrivent dans les breedinggrounds fort gras, mais à la fin de la saison ils sont émaciés. Les jeunes, en venant au monde, ont même, au dire des pêcheurs qui ont fait la chasse aux Otaries dans les mers du Sud, une certaine appréhension d’entrer dans l’eau. On cite ces animaux pour leur voracité. Un Lion marin ( Otaria jubata), tenu en captivité à San Francisco ( Woodward’s Garden ), prenait quarante livres de poissons par jour ( 1 ). Leur nourriture consiste généralement en poissons vivants. Us ne dédaignent point cependant les autres mammifères, pas plus que les oiseaux, les crustacés et même les mollusques. Pernettya reconnu dans leur estomac des oiseaux et des plantes marines; Péron y a reconnu des Céphalopodes. On a trouvé ces derniers surtout dans les Sténorhynques. M. Heuglin a vu, dans un estomac de Phoque de trois pieds et demi de longueur, des poissons et des crustacés. II y a tout lieu de croire que les plantes marines font parfois partie de leur nourriture. On a reconnu dans l’estomac d’un Morse, tué à côté d’un cadavre de Baleine, de la chair de ce cétacé, quoique en général la pâture de ce Pinnigrade consiste principalement en plantes marines [fucus) et en mollusques bivalves qui les recouvrent ( 2 ). Les Phoques aussi bien que les Otaries et les Morses portent des pierres assez grandes dans leur estomac, non des cailloux avalés accidentellement, mais des pierres qu’ils introduisent volon¬ tairement comme le font les oiseaux. Elles remplissent sans doute l’usage de dents pour triturer les (*) Charles M. Scammon, The marine mammals of the North-Western Coasl of North America. San Francisco, 1874, p. 13S. ( 2 ) R. Brown, Notes on the Hislory and geographical Relations of the Pinnipedia frequenting the Spitzbergen and Groenland Sens. Proc. Zool. Soc., 18G8, n° XXVII. 12 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES aliments; celui de ballast pour atteindre plus aisément les profondeurs de la mer leur a été également attribué. Un fait notoire, dit Lesson, est l’usage constant qu’ont ces Amphibies de se lester en quelque sorte avec des cailloux dont ils se chargent l’estomac pour aller à l’eau et qu’ils vomissent en revenant au rivage. Ces pierres finissent par s’arrondir commes des cailloux roulés, mais nous avons tout lieu de croire qu’on peut les distinguer de ceux-ci à certains caractères propres. On pourrait leur donner le nom de Gastrolithes. Ces animaux semblent tous vivre en polygamie et, à l’époque des amours, les mâles se livrent des combats à mort. On voit jusqu’à onze et quinze femelles pour un mâle, et l’on en a cité même qui en avaient quarante-cinq. Ces observations ont été faites sur diverses espèces d’Otaries et l’on a pu s’assurer que les Morunga ont des mœurs semblables. Fr. Cuvier, jugeant tous les Phoques d’après ce qu’il a observé dans l’espèce commune, dit qu’il est impossible de croire ce que Dampicrre affirme, et ce que Bufïon répète, que les femelles s’asseyent pour allaiter leurs petits (’). Nous ferons remarquer que Dampierre a probablement observé des Otaries, et, depuis que l’on a pu voir l’attitude de ces Amphitériens dans les Jardins zoologiques, celte assertion n’étonnera plus personne. Les Phoques comme le Morse et les Otaries sont habituellement couverts de poux comme les Mammifères terrestres. Ils sont également sujets à une némalose causée par des pelotes de Néma¬ todes qui remplissent l’estomac et l’intestin. Au retour de son premier voyage au Nord, M. Bessels m’a remis des Ascaris osculata et des Dibothrium hians ( 2 ) qu’il avait trouvés en abondance dans le tube digestif des Phoca barbata. TROISIÈME SECTION. DISTRIBUTION GÉOGRAPHIQUE. Les Phoques ne sont pas comme les Cétacés confinés dans leur hémisphère; il y a des espèces qui passent l’équateur et qui sont répandues sur une étendue considérable, tant en longitude qu’en latitude. On trouve, par exemple, le Morunga ou Éléphant de mer ( Cystophora proboscidea), depuis le grand Océan austral, jusqu’à la côte de Californie, à moins dadmettre, comme le suppose le savant directeur du Musée de Berlin, M. Peters ( 3 ), que l’on confond diverses espèces sous le même nom. M. Peters croit qu’il y en a quatre au lieu d’une dans l’hémisphère austral. Ces Morunga se trouvent sur les côtes des îles Kerguelen, Georgia, Juan Fernandez, South Shetland, Falkland ou Malouines, c’est-à-dire entre les 35 et 55 lat. sud. Il est à remarquer que, dans plusieurs parages, ils étaient encore abondants il y a quelques années et qu’aujourd’hui ils sont rares partout. Certaines espèces, comme YOtaria jubata , qui est connue sous tant de noms divers, sont réparties tout autour de l’Amérique Méridionale, à l’Est comme à l’Ouest, et quelques naturalistes prétendent même que cette Otarie s’étend au nord du Pacifique jusqu’aux îles aléoutiennes. (’) Fr. Cuvier, Obscrv. zool. sur les fac. phys. et intell, du Phoque commun. Ann. du Muséum d’iiistoire naturelle, t. XVII, p. 377. ( 2 ) Nous en avons fait le type d’un genre nouveau sous le nom de Conobothrium. ( 3 ) Le Musée de Berlin vient de recevoir des des Kerguelen trois espèces remarquables : le Stenorhynchus dont M. Peters propose de changer le nom générique en Ogmorhinus, le Cystophora leonina, et YArclophoca gazella. DES ENVIRONS D’ANVERS. 13 V Otaria Delalandn vit d’un côté aux îles Saint-Paul et d’Amsterdam, et, d’un autre côté, elle est l’espèce commune du cap de Bonne-Espérance. Dans l’hémisphère boréal plusieurs de ces animaux ont une répartition non moins remarquable; ainsi le Morse , comme le Phoca barbata et le Pagophilus groenlandicus , habitent toute la calotte arctique, depuis les côtes du Groenland et du Spitzberg jusqu’au détroit de Behring et même les côtes du Japon. C’est l’aire géographique de la Baleine franche, Balœna mysticetus. C’est aussi la répartition de la petite Balœnoptera rostrata, que l’on voit comme la Baleine franche, non-seule¬ ment à l’Est comme à l’Ouest du Groenland, mais assez loin dans l’Atlantique et la mer du Nord comme dans le Pacifique. On l’a vue jusque dans le golfe de Gascogne et nous ne doutons pas que ce ne soit le même animal qui fréquente la côte de Californie sous le nom de Balœnoptera Davidsonu. Une espèce similaire de cette petite Balénoptère est répandue dans le grand Océan austral. Le British Muséum en a reçu un squelette complet, avec son sternum en croix latine, de la Nouvelle-Zélande. Deux Phoques à poil, VEumelopias Stelleri du Nord Pacifique s’étend depuis la Californie jusqu’aux côtes de Kamschatka; le Zolophus Gillespii, depuis les côtes de Californie jusqu’au Japon. M. Clark cite les espèces suivantes comme propres à l’Australie : Otaria forsteri, Nouvelle-Zélande; Otaria cinerea, Kanguroo Island; Olaria albicollis , King George’s Sound; Otaria hooheri, Auckland. Il y a encore d’autres Pinnipèdes dont l’aire géographique est fort étendue : le Phoque vitellin de notre hémisphère se trouve au nord de l’Atlantique, sur les côtes d’Amérique et d’Europe, dans la Manche et sur la côte du Portugal, dans la mer du Nord et la Baltique, la Méditerranée et la mer Noire. 11 manque malheureusement des matériaux pour comparer, avec un soin suffisant, les Amphité- riens de l’hémisphère austral avec ceux de notre hémisphère; il est évident qu’il y a des genres et même des espèces parfaitement similaires, mais il y en a aussi dont les caractères communs sont difficiles à reconnaître; le genre Cystophora, qu’il comprenne une ou plusieurs espèces, est évidem¬ ment représenté dans notre hémisphère par le Cystophora crislata du Groenland; le genre Sleno- rhynchus du grand Océan austral correspond bien au Pelagius monachus de la Méditerranée. C’est ce qui nous explique comment des dents fossiles de Pelagius ont pu être attribuées au Sténorhynque. Notre Halichœrus grypus est bien une espèce similaire du Zolophus lobalus. Ce qu’il y a de plus remarquable dans cette répartition, c’est que si les divers types de notre hémisphère sont bien représentés dans l’hémisphère austral, celui qui est le mieux caractérisé, le Morse, ne l’est pas. Jusqu’à présent on n’a trouvé aucun Amphitérien avec des caractères de Trichecus. Cette absence d’un type si distinct est d’autant plus extraordinaire que tous nos Cétacés, à l’exception de la Baleine franche, ont également leurs espèces similaires. On n’a même pu jusqu’à présent trouver de différence entre les squelettes de trois espèces bien remarquables, le Cachalot, le Globiceps et le Dauphin ordinaire, qu’ils viennent d’Europe ou d’Australie. Ces animaux vivent-ils, en leur qualité de carnassiers, isolés par couples comme leurs congénères terrestres ou se réunissent-ils en grand nombre comme les carnassiers aquatiques? Et voit-on, dans les mêmes parages, plusieurs espèces se rassembler? Comme nous trouvons à Anvers un singulier mélange de genres et d’espèces, il importe de s’assurer comment ces animaux se répartissent actuellement et s’il existe des localités où ils se réunissent à plusieurs pour vivre les uns à côté des autres. Nous l’avons vu plus haut, nous ne trouvons régulièrement sur nos côtes, depuis la Norwége jus¬ qu’en Portugal, qu’une seule espèce de Phoque. Niais est-ce le résultat d’une répartition naturelle, ou est-ce l’effet de la destruction par les pêcheurs? Il n’y a pas de doute : un grand nombre de main- AafiBWA wn mil i 14 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES mifèrcs et d’oiseaux ont déjà été exterminés par la cupidité de l’homme et il yen a bien d’autres qui sont sur le point de disparaître. Aussi serait-il plus utile, à notre avis, de former une Société interna¬ tionale pour la protection des espèces que pour la protection des individus. Peut-être sauverait-on encore quelques espèces. N’est-ce pas une honte pour notre siècle de voir détruire des Phoques, des Siréniens et des Cétacés qui ont fait pendant longtemps la richesse de certaines nations? Le grand Sirénien du Nord Pacifique a été exterminé lors qu’il était à peine connu des natura¬ listes. La Baleine, que les Basques ont harponnée dans la Manche pendant des siècles, n’est plus connue que par quelques rares individus, qui semblent perdus dans les régions tempérées du Nord Atlantique. La Baleine franche des glaces polaires, que l’on a détruite d’abord au Spilzberg, ensuite presque exterminée dans la mer de Balïîn, n’est plus guère représentée que par quelques rares ani¬ maux. La seule Baleine qui compense encore les frais d’armement pour cette pêche, c’est la Baleine des côtes du Japon. Les côtes de Norwége sont le séjour régulier de plusieurs espèces de Phoques qui y vivent ensemble; indépendamment du Phoque commun, ou y voit le Cystophora cristata, le Pagophilus groenlandicus et le grand Plioca barbata. La Baltique est le séjour de trois espèces qui apparaissent toutes les trois sur les côtes de la Finlande : le Phoque ordinaire, YHalichœrus grypus et le Pagomys hispida. On en lue un grand nombre en hiver sur les bords des îles Aland, dit Nordmann. Il paraît qu’il y a aussi des Phoques dans le lac Saymen (Saymensee), en Finlande, mais nous ne savons à quelle espèce ils se rapportent. Sur les côtes d’Ecosse et d’Irlande on voit encore en permanence, indépendamment du Phoque ordinaire, YHalichœrus grypus. L’apparition du Pagomys hispida , comme celle du Pagophilus groenlandicus , est un simple accident. Les côtes du Groenland nourrissent à la fois le Callocephalus vitulinus, le Pagomys hispida, le Pagophilus groenlandicus, le Plioca barbata, YHalichœrus grypus, le Trichecus rosmarus et le Cystophora cristata. On voit les mêmes espèces sur les côtes du Spitzberg, de la Nouvelle-Zemble et de la mer Blanche, à l’exception toutefois de YHalichœrus grypus. Le Cystophora cristata, le Pago- philus groenlandicus , ainsi que les Plioca barbata, sont des espèces ordinaires dans ces parages. Quant aux changements survenus sous le rapport de la quantité d’individus et d’espèces, sur les différentes côtes où ils ont été l’objet d’une pèche régulière, il suffit de consulter les rapports des baleiniers. Partout la diminution des Phoques a suivi celle des Baleines. Quand les pêcheurs ne trouvaient plus assez de Baleines, ils complétaient leur chargement par les Phoques. Les grandes espèces marines, Cétacés, Phoques et Siréniens, ont diminué partout en nombre, si pas en taille, par la même cause. L’homme est impuissant à détruire les petits, mais les grands disparaissent partout où il porte ses pas. Nous avons reçu, par l’obligeance de M. Mac Intosh, des renseignements sur la pêche des Phoques et des Baleines dans le détroit de Davis, et nous trouvons dans des tableaux officiels qu’en 1872 onze navires de Dundee et onze de Peterhead ont capturé ensemble 50,584 Phoques, dont ils ont rapporté les produits. En 1873, douze navires de Dundee et dix de Peterhead en ont capturé 74,222, et en 1874, 52,825. Un seul navire du port de Dundee, Y Esquimaux , en compte pour sa part 10,210. Pallas rapporte que même dans la mer Caspienne on a pris dans une seule année jusqu’à vingt mille Phoques. Dans l’espace de cinq ans les baleiniers ont tué, d’après des rapports authentiques, soixante mille Morses dans la mer de Behring et l’Océan arctique. DES ENVIRONS D’ANVERS. 15 La pêche des Phoques, si abondante dans les hautes latitudes australes, fut, dès la fin du siècle dernier, très importante, surtout pour les États-Unis d’Amérique. Les diverses côtes furent tour à tour visitées depuis le cap Horn, la Terre des Étals, la Nouvelle-Hollande comme la Nouvelle- Zélande, les des Malouines, la Tasmanie, le nouveau Shetland jusqu’aux des désertes des grands Océans. Sur l’abondance des Phoques et sur leur diminution dans certains parages de l’hémisphère austral, on peut consulter l’intéressant mémoire du capitaine Jouan de Cherbourg ('), et surtout le rapport de Henry Elliol sur la pèche des Otaries au Nord Pacifique. Ce ne sont pas des trou¬ peaux, mais des légions qui sortent de l’eau aux îles Aléouliennes et qui vont ensemble prendre leurs ébats sur les rochers qui bordent la mer ( 2 ). En 1803, on avait capturé dans les parages de l’ile Saint-Paul, 800,000 individus, dit Henry Elliot. Aujourd’hui on se contente de 75,000. On comprend qu’après ces grandes destructions, il y a eu pendant des années une diminution notable dans cette population amphibée. Le même auteur nous fait connaître aussi qu’autour de ces des Saint-Paul et Saint-George, on trouve quatre espèces de Pinnipèdes, une Otarie à duvet ( Callorhinus ursinus ), un Lion marin ( Stemmatopias slelleri ), un Morse et un Phoque à poil, voisin de notre Phoca vitulina. Les témoignages des divers baleiniers s’accordent parfaitement avec celui de H. Elliot. En 1800, on tua à la Nouvelle-Géorgie 150,000 Phoques ( 3 ). En 1829, on les considérait comme détruits dans les parages de Tristan d’Acunha. En 1823, le capitaine Robert Johnson rapporta des îles Auckland 13,000 peaux d’Otaries à duvet pour le marché de New-York. Lord Macartney nous apprend que des pêcheurs (trois français et deux anglais) avaient réuni dans une seule campagne 25,000 peaux d’Otaries pour le marché de Canton ( 4 ). Les Anglais rapportaient des îles Malouines, il y a quelques années, jusqu’à cent mille peaux d’Otaries (connues dans le commerce sous le nom de peaux de Loutres). Scammon estime le nombre de Phoques à duvet, rapportés du Nord Pacifique, en un an (1873), à 145,000, des îles Saint-Georges et Saint-Paul et de la mer de Behring, 100,000, des îles de Behring et de Cuivre 25,000, des côtes de Californie, du territoire de Washington, de la mer d’Okhotsk, des îles Shetland Sud, du cap Horn et d’autres lieux, 20,000. Les animaux qui nous occupent, sont-ils sédentaires sur certaines côtes, ou ont-ils des stations comme les Baleines, et ne les voit-on qu’à certaines époques de l’année? Quoiqu’ils semblent peu propres à faire de grands voyages et qu’on les considère généra¬ lement comme des animaux côtiers, la plupart, si pas tous, voyagent et il y en a qui parcourent périodiquement de très grandes distances. On en a la preuve dans ces phoques capturés, qui portaient encore dans les lianes les harpons qui leur avaient été lancés dans des parages fort éloignés. L ’Eumetopias Stelleri voyage depuis les régions d’Alaska jusqu’à la côte de Californie et l’on en a capturé en juin sur les côtes de Californie qui portaient encore des harpons lancés par les pêcheurs des côtes d’Alaska. Les Otaries de la mer de Behring font des voyages périodiques au Sud et au Nord, passant à (*) Notes sur quelques animaux et végétaux rencontrés dans les mers australes et dans les îles du grand Océan. Mém. de la Société des sciences natur. de Cherbourg, (. XVIII, p. 80, 1874. ( 2 ) Report on the Prybilov grovp, or Seal Islands of Alaska, by Henry W. Elliot, Washington, 1873. (°) Fannikg, Voyages round the world ivith selccted sketsches of voyages to the South-Sea, 1792-1832. New-York, 1835, p. 299. ( 4 ) Proc. Zool. Soc., 1875, p. 6o2. i(i DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES des époques déterminées de l’année dans certains parages, où ils deviennent l’objet d’une pêche régulière. Les îles Auckland sont visitées par deux espèces d’Otaries, l’une à duvet, l’autre à poil; elles y sont toutes les deux fort abondantes; elles émigrent au mois de janvier. Au cap Horn, on voit également deux espèces : VOlaria jubata, espèce à poil, et YOlaria falklan- dica, espèce à duvet, mais on ne nous dit pas si on les y trouve pendant toute l’année. Aux îles Saint-Paul et Amsterdam, les Otaries sont plus abondantes en été qu’en hiver, quand elles gagnent les eaux profondes, disent les pêcheurs. Le capitaine Charles Scammon nous apprend que l’Éléphant marin est plus abondant sur les côtes de Californie, depuis le mois de février jusqu’au mois de juin. Il paraît que cet animal s’étend dans l’hémisphère Nord, depuis le cap Lazarov (lat. 24° 46' Nord, long. 112° 20' Ouest) jusqu’à 38° Nord et 122° 38' Ouest, et dans l’hémisphère Sud, on le voit dans l’Atlantique, le Pacifique et l’Océan indien, autour de la Patagonie, de la Terre de feu, des îles Crozets et Kerguelen. Nous trouvons ces détails dans le livre remarquable,si plein de faits,que le capitaine Scammon a publié il y a trois ans. C’est lui aussi qui nous apprend qu’on voit des Otaries à cinquante et à soixante pieds au-dessus du niveau de la mer au milieu des rochers, pendant l’époque des amours, et qu’elles restent pendant plusieurs semaines sans prendre aucune nourriture. M. R. Brown, en parlant des Phoques du Groenland, cite plusieurs exemples de migrations périodiques de ces animaux ( 1 ). Burmeister fait connaître un autre fait curieux : on ne voit pas toujours les deux sexes dans les mêmes parages, et il cite, comme nous l’avons dit plus haut, des Otaries des côtes du Brésil dont on n’a pu découvrir jusqu’à présent qu’un seul sexe. QUATRIÈME SECTION. ESPÈCES D’EUROPE. Il est généralement admis aujourd’hui que les Mammifères terrestres fossiles d’une région, surtout les Mammifères les moins anciens, possèdent les mêmes caractères que ceux qui l’habitent encore; on sait, par exemple, que les Singes américains fossiles ont, comme les vivants, une dent molaire de plus que les autres; on sait aussi que les Mammifères fossiles d’Australie sont tous marsupiaux, même les plus grands en taille. Nous devons nécessairement nous demander s’il en est de même des Amphithériens, et, à cet effet, nous devons faire le relevé exact des espèces qui habitent les mers d’Europe. Nous pouvons faire cette revue avec d’autant plus «le certitude que nous avons eu l’occasion d’étudier les divers squelettes, et nous avons pu les conserver sous les yeux, pour la comparaison avec les ossements fossiles, pendant toute la durée de notre travail. (i) R. Brown, On the Mammalian Fauna of Groenland et Noies on the Ilistory and Geograficat Relations of the Pinnipedia frequenting the Spitzbergen and Greenland. Se as. Proc. Zool. Soc., 1868. DES ENVIRONS D’ANVERS. 17 Dans le nord de l’Atlantique vivent sept espèces, bien connues par leurs caractères propres comme par leur genre de vie et dont l’aire géographique est parfaitement établie ; ces espèces sont : Le Morse . Trichecus rosmarus. Le Bonnet rabattu (Klapmütz) . . . Cystophora cristata. Le Phoque gris . Halichœrus grypus. Le Phoque annelé . Pagomys hispida. Le Phoque commun . Calloceplialus vitulinus. Le Phoque à croissant de Buffon . . Pagophilus groenlandicus. Le grand Phoque de Buffon .... Phoca barbata. Les deux premières et les deux dernières espèces sont les plus grandes; le Pagomys hispida est la plus petite. Nous allons dire un mot de chacune d’elles : Le Morse, Trichecus rosmarus , est un animal essentiellement polaire, qui habite l’Océan Glacial arctique, depuis la haie de Hudson et le détroit de Davis, les côtes du Spitzberg et de la Nouvelle- Zemble, jusqu’au détroit de Behring et à la mer Pacifique. On en a vu jusqu’à la presqu’île d’Alaska. Il y a des auteurs qui pensent que le Morse du Nord Pacifique est assez différent de celui du Groenland, pour en faire une espèce distincte. Nous ne partageons pas cet avis. Les modifications sont assez peu importantes et nous croyons pouvoir les mettre sur le compte de variations locales. Cette répartition géographique du Morse n’est, du reste, pas une exception; elle correspond, comme nous l’avons dit plus haut, à celle de la Baleine franche, du Pago¬ philus groenlandicus et du Phoca bar¬ bata. On voit ces animaux au Nord Pacifique et dans la mer Glaciale, avec les mêmes caractères qu’au Spitzberg et au Groenland. On peut dire qu’ils han¬ tent les côtes circumpolaires d’Europe, d’Asie et d’Amérique. Il est assez remarquable, ainsi que nous l’avons déjà fait remarquer, que le Morse, qui forme un type exceptionnel, n’ait point, comme les autres Thalassotériens, son représentant ou son espèce similaire, dans l’hémisphère austral. Le Phoque à capuchon (Klapmütz), Cystophora cristata , ou milrata de Camper et de Cuvier, est une grande espèce du Groenland, qui atteint de sept à huit pieds de longueur, et qui a son représen¬ tant dans l’Éléphant marin, Cystophora proboscidea, de l’hémisphère austral. Ce Phoque se trouve également sur les côtes d’Islande, de Norwége et des États-Unis d’Amérique. On en a vu quelquefois s’égarer dans nos régions tempérées. En 18-43, un jeune Phoque à capuchon a été capturé sur la côte ouest de France, à file d’OIéron. M. Gervais( f ) a reproduit le dessin fait par Werner d’après le vivant, mais nous nous demandons si ce dessin représente bien l’animal échoué à l’ile d’OIéron. Les os sont conservés au ( f ) Pau. Gervais, Zoologie et Paléontologie françaises, Paris, t8o9, pl. 42, p. 270. I. 5 18 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES Muséum et ne laissent pas de doute au sujet de l’espèce. On a eu l’occasion d’en voir un mâle et une femelle dans un aquarium à Londres en 1870. VHalichœrus grypus est considéré par les naturalistes comme un animal des régions tempérées. C’est l’espèce ordinaire des îles Hébrides; on la trouve aussi régulièrement sur les côtes d’Écosse et d’Irlande; elle habite également au sud de l’Islande, les côtes de Norwége et de Suède jusqu’au fond de la Baltique; on a signalé également sa présence au Groenland. Ce Phoque atteint de quatre à six pieds. On a eu aussi l’occasion de l’observer en vie dans des aquariums à Londres. Nordmann a étudié les dents de lait de cette espèce et a pu constater qu’elles tombent, comme dans les autres, avant la nais¬ sance. En venant au monde, leurs dents de la seconde mue sont incomplètement développées. La femelle met bas au mois de février; le jeune a une robe épaisse, blanche et soyeuse. Le même auteur fait la remarque que des oiseaux, comme le Larus glaucus, font la chasse à ces jeunes amphibies. Le Pagomys hispida (’), le Lièvre de mer des Russes, le Phoque à croissant de Buffon, que les naturalistes ont appelé également Phoca fœtida et annellala, les baleiniers anglais, Floe rat, vit en abondance sur les glaçons au Groenland, et, d’après Pallas, dans la mer Glaciale, à l’embouchure delà Léna, de l’Obi et du Jéniséï. On le trouve toute l’année au détroit de Davis, à la latitude de 76 à 77 degrés (R. Brown). On l’observe également sur les côtes d’Islande, de Norwége et même d’Écosse et il pénètre dans la Baltique. C’est le même animal, ou une espèce très-voisine, qui habite le lac Baikal, au centre de l’Asie, et celui de Ladoga en Finlande. Nordmann fait remarquer que, chez les individus du lac Ladoga, les molaires sont plus écartées et que la seconde, comme la troisième molaire d’en haut, n’a guère de dentelure sur son bord antérieur. Il se demande comment se comportent ces dents chez les individus du lac Baikal. Nous avons examiné une tête, provenant de ce lac, au Muséum de Paris, mais sans remarquer quelque chose de particulier aux molaires. Il est vrai que notre attention n’avait pas été fixée sur ce point au moment où nous avions cette tête entre les mains. Nordmann s’est assuré que les dents de lait de cette espèce tombent, comme dans les autres, avant la naissance. On a vu du temps de Cuvier un individu s’égarer sur les côtes de France; Fréd. Cuvier en a fait mention sous le nom de Calocéphale marbré ou Phoca discolor ( a ). Il a vécu pendant quelque temps au Jardin des Plantes à Paris. (') M. W. Flower propose de donner la préférence au nom spécifique de hispida. ( 2 ) Fréd. Cuvier, Hist. nat. mammif., t. I, IX, 1819. DES ENVIRONS D’ANVERS. 19 Ene femelle a vécu à Londres pendant huit jours et a mis bas pendant ce temps. Ses fœtus y sont conservés. A l’occasion d’un animal de la même espèce qui a été capturé en Angleterre sur la côte deNorwich, en 1846, et dont la peau et le squelette sont conservés au Musée de cette ville, M. Flower a publié une notice fort intéressante, dans les Proceedings de la Société Zoologique de Londres ( 1 ). Des ossements du même Phoque ont été trouvés dans les Kiôkmôdling de Danemark (Katlegat), mêlés avec des os de Castor et de Dos primigenius. En Écosse, on en a trouvé des squelettes presque complets dans une couche d’argile de l’époque dite glaciaire, à plusieurs pieds au-dessus du niveau actuel de la mer et à une certaine distance des côtes. Le Phoque du lac Raikal esl-il une espèce particulière? Est-il le Phoque ordinaire, ou le Pagomys liispida? En naturaliste, M. Dyhowski, qui a étudié la faune de ce lac, est d’avis que ce Phoque, dont il fait connaître les mœurs et dont il figure le crâne, doit former une espèce à part sous le nom de Plioca baicalensis (-). Le même naturaliste a étudié les animaux des autres classes qui habitent ce lac et il a reconnu que les mollusques gastéropodes forment presque tous le type de genres nouveaux : Benedictia Hydrobia , Valvala, Limnorea , Leucosia, Ligea et Choanomphalus. Il s’y trouve vimrt-cinq espèces de mollusques fluviatiles. Ce Phoque, qui existe là si loin dans l’intérieur des terres et que l’on poursuit avec une grande acti¬ vité, esl-il venu de la mer Glaciale en remontant le cours du fleuve,ou y est-il resté, comme celui de la mer Caspienne, depuis l’époque où ces terres étaient sous eau? Nous préférons cette dernière explication. L’espèce commune, depuis la côte de Norwége jusqu’au détroit de Gibraltar, est le Callocephalus vitulinus des auteurs. Elle habite à la fois les côtes du Groenland, des États-Gnis d’Amérique comme celles d Europe, et pénètre dans la Raltique, la Méditerranée et la mer Noire. D’après quelques zoologistes, c’est elle aussi qui habite la mer Caspienne; mais Nilsson est d’avis que le Phoque de la mer Caspienne est une espèce distincte. Le Phoque regardé par Cuvier comme un jeune Plioca leporina et qui a vécu au Jardin des Plantes, n’est qu’un Plioca vitulina d’après Nilsson. Il en est de même du Phoque à fortes mous¬ taches venant de l’Amérique du Nord et qui est également conservé au Muséum d’histoire naturelle (•'). Cette espèce habite bien la Méditerranée, mais elle n’y est pas commune. 31. le professeur Em. Cornalia ( 4 ) fait mention d’un individu du Musée de Trieste, qui a été capturé a Cherso; il cite un second de la côte de Galalone (Terre d’Otrante) et un troisième de Monle-Rosso, sur la rive orientale, qui est conservé au Musée de Gènes. Les Esquimaux connaissent cette es¬ pèce à Pondsbay, et R. Brown fait obser¬ ver que ce Phoque se nourrit de poissons et de crustacés. Il remonte souvent, dit- il, les fleuves à la poursuite du Saumon. On capture par an dans les posses¬ sions danoises du Groenland 70,000 Phoques, en y comprenant le Pagomys liispida. (*) Proc. Zool. Soc., juin 1871. ( 2 ) Archiv. fur Anal, vnd Phys., 1873. Moi. de l’Acad. de Saint-Pétersboikg, 7 e sér. t. XXII, 1873. O Nilsson, Wiegmann’s Archiv, 1841, p. 311. ( ) Fauna d Italia, parte prima, Calatoyo descrittivo dei mammiferi. Milano. 20 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES C’esl l’espèce qu'on a été le plus souvent en mesure d’observer en vie. On s’est assuré qu’elle perd également ses premières dents avant la naissance. Le Pagophilus groenlandicus est une grande espèce de l’Océan arctique, qui atteint de quatre à cinq pieds et qui habite les côtes de Groenland, de Jean Mayen, le Spitzberg, la Nouvelle- Zemble et les côtes est de l’Amérique méridionale. On a vu à diverses reprises des indi¬ vidus de cette espèce s’égarer sur les côtes d’Écosse, et Blasius fait mention d’un crâne qu’il a reçu de Nordernev. On le trouve dans la Mer polaire au nord de l’Europe, de l’Asie et de l’Amérique; les vieux ne quittent pas les régions polaires, dit Nilsson, mais on en trouve quelquefois de jeunes jusqu au Kattegat et le canal Saint-Georges. Comme nous l’avons dit plus haut, on l’a reconnu, comme le Morse et le Phoca barbata, au nord du Pacifique sur les côtes de Kamschatka. A diverses reprises on a conservé des males et des femelles de cette espece en v ie au Jaidin Zoologique de Regent’s Park à Londres. Dans les Transactions philosophiques de 1822, Everard Home fait mention d’un individu de cette espèce, qui a été tué près des Orcades et dont on lui a envoyé le squelette. Cuvier en parle dans ses Ossements fossiles (Note Y, l re partie, p. 205) et croyait pouvoir rapporter la tête au Phoca oceanica de Lepechin. Le Phoca barbata atteint sur les côtes du Groenland jusqu’à huit et même dix ou douze pieds et s’étend jusqu’au Japon; on l’a vu au détroit de Davis comme au détroit de Behring. Il ne quitte guère les hautes latitudes. Avec le Stemmatopus et le Morse, il appartient aux grandes espèces. Pennant parle d’un Phoque de douze pieds, tué au nord de l’Écosse, qui est probablement le Barbata ( 1 ). On en a vu sur les côtes de Norwégc et l’on croit même l’avoir observé sur les côtes de la Manche (Bâillon). Cette espèce est beaucoup moins répandue que le Pagophilus groenlandicus. A cette liste nous n’avons qu’à ajouter le Phoque à ventre blanc de Bullon, Pelagius monachus de Herman, pour avoir la liste complète des espèces européennes, à moins de considérer le Phoque de la mer Caspienne comme espèce propre à cette mer. Le Pelagius monachus est reconnaissable à tous les os de son squelette, mais c est surtout pai les dents qu’il se distingue facilement de tous les autres. La forme de la tête n’est pas moins particulière. Blainville en a représenté tout le squelette dans son Ostéographie. Plusieurs naturalistes ont été à même de faire une étude particulière de cet animal d’après des individus que l’on a de tout temps exhibés au public. (*) Phoca barbata, an Oceanic Seal, and onc of the species slaughtered by the Sealers. DES ENVIRONS D’ANVERS. 21 En 1777, on en montra un à Nimes, qui avait plus de six pieds et que l’on conservait dans un cuvier rempli d’eau. A la voix de son maître, il prenait telle position qu’il lui ordonnait et venait le caresser et le lécher ( 1 ). Un autre a été exhibé à Strasbourg et a été étudié avec soin par Herman. Nous en avons vu un au Boulevard à Paris, vers 1860, de fort belle taille et qui était plein de vie. Nous croyons que c’est le même qui est allé mourir à Berne et dont le squelette est conservé dans ce Musée. Nous avons vu ses os exposés après la macération. Nous en avons vu un cette année (1875), exposé à la foire de Louvain. Cette espèce n’a été vue encore que dans la Méditerranée, l’Adriatique et la mer Noire. C’est sur la côte de Dalmatie et de Grèce qu’on l’observe le plus souvent. Nordmann assure qu’il en a tiré lui- même dans la mer Noire près de l’île Leuce, et qu’il n’y est même pas rare ( 2 ). Le Phoque de la mer Caspienne que Pallas a désigné sous le nom de Phoca canina, varietas caspica ( 5 ), forme, d’après Nilsson, une espèce propre à cette mer, et il lui a donné le nom de Phoca caspica ( 4 ). Pallas croyait que c’était la même espèce que celle qui habite la mer Noire et l’on a été longtemps à croire à l’existence de conduits souterrains qui faisaient communiquer ces mers entre elles. Au sujet des Phoques communs à ces lacs, Pallas exprime une autre pensée et avec plus de raison, à notre avis : ces mers (Méditerranée, mer Noire et mer Caspienne) en ont formé une seule, peuplée jadis des mêmes animaux qui ont continué à y vivre après leur séparation. Ce Phoque devient plus gras que le Phoque ordinaire, il est autrement coloré, il possède des moustaches plus fortes, des dents plus petites et une autre forme de tête, dit Nilsson. Ce naturaliste trouve le Phoque de la mer Caspienne plus voisin du Pagomys hispida que du Calocephalus vitulinus. Il se trouve en si grande abandance dans cette mer que le comte Schuvalolï, d’après le témoignage de Pallas, en laissa prendre dans une seule année vingt mille, pour leur huile. (') Blffon, Lettre de M. Sabarat, Nimes, 3 janvier 1780. ( 2 ) Noudmann , Paléontologie Sud, Russlands, Helsingfors, 18S8, p. 298. ( 5 ) Zoograh. Rosso-Asiatic, 1, p. 116. ( 4 ) Wiegman’s Archiv., 1841 , p. 314. 22 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES CINQUIÈME SECTION. CLASSIFICATION. Jusqu’à présent, on a divisé les Phoques d’après la présence ou l’absence du pavillon de l’oreille, d’après le nombre et la conformation des dents et d’après quelques autres caractères. On a négligé, à notre avis, le caractère principal, celui d’être plus ou moins terrestre, et qui se traduit dans divers os du squelette : les Phoques terrestres ont un talon au calcanéum et replient leurs membres posté¬ rieurs sous le ventre comme les autres mammifères, tandis que les Phoques aquatiques ont un calcanéum dont le talon ne dépasse pas l’astragale et qui les empêche de plier les membres comme les précédents. On se représentait si mal les extrémités pelviennes de ces Mammifères amphibies, y compris les Morses et les Otaries, que Nilsson, qui a étudié ces animaux avec tant de soin, croit pouvoir introduire, comme caractère distinctif, l’impossibilité des membres postérieurs de porter le corps pour marcher, c’est-à-dire, de pouvoir se replier sous le ventre comme les Mammifères terrestres. Les Otaries et les Morses sont cependant bien des animaux qui portent leurs membres comme les autres quadrupèdes, et nous allons même nous servir de ce caractère pour répartir les animaux de celte section en deux catégories : ceux qui les replient et ceux qui ne les replient pas ; les premiers comprennent ceux qui passent une partie de la vie sur les rochers ou sur les glaces hors de l’eau et marchent avec le secours des membres postérieurs; les seconds, tout en sortant de l’eau, ne marchent pas, les membres postérieurs ne pouvant concourir à la locomotion terrestre. Mais voyons d’abord quelles sont les classifications qui ont été proposées et qui reposent presque toutes sur le système dentaire. Les Phoques ne formaient d’abord qu’un seul genre, lorsque Peron proposa, d’après l’indication de Buffon, de prendre pour base d’une division la présence ou l’absence d’une conque auditive. Blainville, de son côté, prit pour base les dents incisives et Fr. Cuvier Je suivit dans cette voie, croyant ce caractère préférable à celui qui est tiré de l’oreille. Le Phoque commun a un rudiment de conque, dit-il ('). Cuvier, dans ses Recherches sur les ossements fossiles, admet la division de Peron en Phoques proprement dits et en Otaries. En 1828, Brookes proposa trois divisions de même valeur, les Otaries, les Phoques et les Morses. Cette classification est encore généralement suivie. En 1837, le patriarche des zoologistes, Nilsson, après une longue étude faite dans les Musées, propose deux sections, en prenant pour hase les racines des vraies molaires qui sont simples ou doubles : une première dans laquelle il place avec raison les Slenorhynchus et les Pelayius à côté des Phoques véritables, et une seconde dans laquelle il croit pouvoir réunir les Cyslophora et les Halichœrus aux Otaries et aux Morses. En 1818, le professeur Turner arriva par l’étude du crâne à une répartition plus naturelle et qui serait la nôtre, s’il n’avait pas fait une section particulière pour les Morses. 0 Description zoologique d’un Phoque moine., Ann. du Muséum, p. 592. DES ENVIRONS D’ANVERS. 23 Voici le tableau représentant les onze genres qu’il adopte (') : I. Arctocephalina II. Trichecina . . ^ Otaria. ( Ardocephalus. Trichecus. I Morunga. Cystophora. Halichœrus. Omatophora. III. Phocina. \ Lobodon. I Leptonyx. Stenorhynchus. Phoca. La classification de ces animaux doit subir un changement complet; au lieu de trois groupes, il n’y en a que deux, l’un qui comprend les Phoques demi-terrestres est en même temps Planti¬ grade ; l’autre qui comprend les aquatiques est Pinnigrade , et ces différences dans le genre de vie se traduisent parfaitement, comme nous l’avons dit plus haut, dans les diverses parties du squelette, surtout dans l’astragale, le calcanéum, le tibia, le péroné et les iliaques. Les Plantigrades comprennent les Otaries véritables ou les Otiphoques, que l’on peut diviser, comme M. J.-A. Allen l’a proposé dans son remarquable travail sur ces animaux, d’après leurs poils, en Tricophoques (sans duvet) et en Oulophoques (à duvet). Les Morses forment la seconde division des Plantigrades ( 2 ). Les Pinnigrades comprennent les Monachus, les Macrorhynus , les Cystophora et les Phoca. M. James Mûrie s’est occupé du mode de progression des Phoques dans son article sur le Phoca yroenlandica. Il reconnaît dans la progression terrestre Ycibdominale et la quadriplantigrade , et trouve une locomotion intermédiaire dans le Phoca yroenlandica. Mais cette progression du Phoque de Groenland n’est intermédiaire entre les deux modes de locomotion que par les membres anté¬ rieurs. (*) Turner, Proc. zool. Soc., 184-8. ( 2 ) M. Allen a déjà dit : « A remarkable siinilarity of habits seems to pervade the whole group of eared seals,— a similarity which in many respects exlends also to the Walrus and the Sea Eléphant (Macrorhynus elephantinus'). J. A. Allen, On the Eared Seuls, Bullet. of the Mus. of comparut. Zoology.... vol. 11, n° 1, p. 2. » r mm 21 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES CHAPITRE II. AMPHITÉRIENS OU PHOQUES FOSSILES. HISTORIQUE. Plusieurs auteurs, parmi lesquels nous pouvons citer Esper, Targioni, Tozetti et Buffon, ont attribué à des animaux marins des ossements de certaines cavernes, et ils ont même cru recon¬ naître des os de Phoques dans quelques restes d’Éléphants, de Rhinocéros et d’Ours. Rien n’est plus rare que des os de Phoques parmi les fossiles, disait Cuvier il y a cinquante ans, et, après avoir signalé les erreurs commises par ses prédécesseurs, le grand naturaliste en commet une à son tour, que Blainville a eu la bonne chance de relever. Cuvier avait reçu des ossements fossiles d’Angers et avait cru reconnaître un Phoque dans deux fragments d’un même os de Sirénien. Blainville a fait mention de quelques ossements de Phoque fossile, dans son Ostéographie; mais, de tous les os qu’il figure, il n’y a que le pied du Musée de Pesth qui appartienne positivement à ce groupe. Les dents de Scilla, qu’Agassiz a rapportées à un animal de ce genre, sous le nom de Pho- codon, proviennent probablement d’un Zeuglodon . Le pied de Phoque du Musée de Pesth, dont nous venons de parler, a fait l’objet, en 1860, d’un mémoire intéressant, écrit par le professeur Bruld (*). Ce savant en a fait une étude particulière, et, après l’avoir comparé au pied de Phoca vihdina , de Pelagius monachus et de Trichecus rosmarus, il exprime le même avis que Cuvier et Blainville, c’est-à-dire, que le Phoca halitchensis , comme il l’appelle, se rapproche plus du Phoca vitellina que de toute autre espèce. Ce pied est connu depuis fort longtemps; il provient du Leithakalk du bassin de Vienne, correspondant à l’étage sarmatique, qui est le commencement du pliocène. Dans ces mêmes couches, on a trouvé, près de Kertsch, des restes de Cétacés. A Osnabrück, on a découvert depuis longtemps, dans les marnes tertiaires, des dents et des ver¬ tèbres que II. von Meyer a rapportées à un Phoque nouveau, sous le nom de Phoca ambigua, tout en reconnaissant que, par son système dentaire, il se rapproche du Phoca vitulina ( 2 ). Sous le nom de Phoca rugidens, le même paléontologiste a établi une autre espèce, d’après des os recueillis à Neudorff, près de Presbourg ( 5 ), et c’est sous ce même nom qu’on a désigné un Phoque, dont on a trouvé des restes à l’île de Gozzo (groupe de Malte). Nous ne serions pas surpris de voir ces os se rapporter plutôt à un Squalodon. Pictet a figuré dans son atlas des dents ( 4 ) qu’il rapporte au Phoca ambigua, mais, à en juger par ses dessins, nous ne croyons pas que ce rapprochement soit heureux. Le savant paléontologiste de Genève parle de la rareté de ces carnassiers et ajoute : « On n’a, jusqu’à présent, pas trouvé (') C. B. Brühl, Mittheil. A. d. k. k. Zool. Institute der Univcrsitàt Pest ; in-4°. Wien , 1860. ( 2 ) Gr. Munster 's Beitrarjc zur Petrefact, III, pl. VU. ( 3 ) II. von Meyer, Jahrbuch, 1845, p. 509. (*) Traité de paléontologie. DES ENVIRONS D’ANVERS. m beaucoup d’amphibies fossiles, et les espèces n’en ont point été clairement déterminées. L’état de nos connaissances, relativement à la plupart des amphibies actuels, s’oppose même à ce que l’on puisse faire toutes les comparaisons nécessaires pour arriver à des déterminations exactes. » Les os de Moeskircb, que le même paléontologiste a rapportés à un genre nouveau, sous le nom de Pachyodon, appartiennent à un Squalodon et non à un Phoque (*). Dans le lit de la Meuse, à Elsloo, près de Maestricht, on trouve des restes de Phoque que M. Staring a fait connaître le premier ( 2 ); ils y sont enfouis avec des débris d’Halitherium, de Squalodon et de Dauphin. M. Staring les rapporte au Phocaambigua; mais, d’après les dents que nous possédons, et des restes de la collection de M. Rosquet, ce n’est pas au Phoca ambigua qu’il faut les rapporter, mais au Palœopltoca Nystii, que nous trouvons également à Anvers. En 1834, Eschwege a fait mention de dents de la molasse miocène en Portugal, qu’il attribue à un Amphitérien; mais, à en juger par les dessins que Vandelli en donne, ces dents nous sem¬ blent devoir se rapporter plutôt au Delphinus Cortesii, ou Delphinus acutidens de Herman von Meyer ( 3 ), qu’au Phoque. M. Paul Gervais a signalé la présence d’ossements de Phoques en France, dans les sables marins pliocènes de Montpellier ( Prisliphoca occitana), dans les faluns de Romans (Drôme), dans les sables marins miocènes de Poussan (entre Montpellier et Clermont l’Hérault), dans la molasse à Uzès (dép. du Gard), à Fausson (dép. de l’Hérault). Quelques-unes de ces pièces ont toutefois besoin d’être étudiées de nouveau. Il y en a parmi elles qui se rapportent, nous semble-t-il, plutôt à un Squalodon et d’autres qui sont plutôt Delphinide ou Ziphioïde. Ces ossements sont décrits et figurés par M. Paul Gervais, d’abord dans les Mémoires de l’Académie des sciences de Montpellier , ensuite dans la Zoologie et la Paléontologie françaises ( 4 ). Le Phoca Pedroni du bassin de Rordeaux, établi sur une dent isolée, se rapporte probablement à un Ziphioïde (P. Gervais) ( 5 ). Dans ces dernières années, on a fait la découverte de nouveaux ossements de Pinnipèdes dans diverses autres localités. M. Delfortrie a fait connaître tout récemment dans une note la découverte de dents dans les faluns aquitaniens, qu’il attribue à deux espèces d’Otaries, YOtaria Oudriana et YOtaria Leclercii. Ces dents de YOtaria Oudriana me semblent bien se rapprocher de celles de Pelagius monackus. Elles ont été trouvées dans la molasse à ossements de Saint-Médard-en-Jalle, près de Bordeaux ( 6 ); Le dépôt de Baltringen (Wurtemberg) renferme des dents de Phoque, avec des restes de Cétacés et de Squalodon. Nous en avons fait mention dans un mémoire sur ces ossements ( 7 ). Les dents dont parle Boue ( 8 ), comme trouvées dans des couches qui peuvent être comparées à la formation crayeuse, aussi bien que les os trouvés en Égypte et figurés par Blainville ( 9 ), ne nous paraissent pas devoir se rapporter à des Phoques. En 1859, 31. Steindachner a signalé dans l’argile sarmatique des environs de Vienne des débris (>) Jahrbuch, 1858, p. 414-, Gr. Munster s’ Beitrâge z. Pelref., III, 2, 8. ( 2 ) Bodem van Nederland. ( 3 ) Guilherme Barôo Eschwege et Al. Ant. Vandelli, Mémoires Acad, de Lisbonne, 185t. ( 4 ) Acad. sc. de Montpellier, t. II, p. 208. 1832, Zoologie et Paléontologie françaises, deuxième édit., 1839, p. 272. ( 3 ) Zool. et paléont. françaises, pl. XLI, fig. I. ( c ) Delfortrie, Les Phoques du falun aquitanien, Act. Soc. Linn. de Bordeaux, 1872. ( 7 ) Les Thalassothériens de Baltringen, Bull, de l’Acad. roy. de Belgique, 5 mc série, t. XLI, mars, 1876. ( 8 ) Journal de géologie, III, p. 51. ( 9 ) Ostéographie...., X, P? Æggptiaca antiqua. I. 4 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES 2(5 de Phoques, mêlés comme à Anvers avec des restes de Cétacés, de Trionyx et de Poissons ('). Le cabinet de minéralogie de Vienne possède divers os de ces animaux trouvés dans l’argile à Nussdorf et à Hernals. C’est la même couche qui renferme les os de Pachyacanthus. Ils ne sont malheureusement pas nombreux ni surtout assez bien conservés pour qu’on puisse les déterminer avec certitude. Nous avons parlé plus haut d’un pied de Phoque trouvé dans le bassin du Danube sur la fron¬ tière qui sépare l’Autriche de la Hongrie. Depuis quelques années, on a reconnu des restes de ces animaux dans des contrées voisines. Eichwald rapporte à une espèce nouvelle, sous le nom de Phocapontica, des ossements recueillis près de Kischinew en Bessarabie dans des crevasses du calcaire tertiaire, remplies de terre d’allu- vion et dans une argile ferrugineuse de la Montagne de Mithridale à Rertsch. Il en a figuré les prin¬ cipaux os ( 2 ). Ce Phoca pontica se rapproche beaucoup du Phoca groenlandica, dit Eichwald. Nordmann a également fait connaître des ossements de Phoques de la Bessarabie et de Kerlsch; il admet le Phoca pontica et le Phoca mœotica. Il donne trois planches de figures pour ces os ( 3 ). Nous avons vu au Muséum à Paris et au Britisch Muséum à Londres, des ossements de Phoques de la Bessarabie, qui ont été donnés par Nordmann. Les os, trouvés dans les crevasses autour de Kischinew, sont mêlés de restes de Thalassictes, de Luira, de Delphinus , de Manalus , de Ceto- therium, de Balcena, de Trionyx et d 'Oiseaux. Les ossements de Kerlsch sont moins bien conservés; Nordmann en a eu trois cent cinquante pièces isolées. Ils appartiennent au Phoca pontica; les os ne dépassent pas la dimension de ceux du Vilulina. Les autres se rapportent au Pclagius Monachus. Nordmann croit avoir reconnu parmi ces derniers deux et jusqu’à trois formes qui se distingueraient par des membres de diverses longueurs. Il serait important de faire la comparaison de ces ossements avec ceux du Pelagius monachus et du Phoca vilulina; malheureusement les dessins ne sont pas suffisants pour celte comparaison et il est difficile de réunir les objets pour les comparer entre eux. Nordmann donne les proportions du pénis du Phoca pontica, mais ces mesures, pas plus que la description, ne correspondent aux caractères du Phoca vitulina. Des recherches dans la terre d’Otrante non loin de Naples ont fait connaître, dans ces derniers temps, une tète de Phoque d’un très-haut intérêt. Le professeur G. Guiscardi en a fait l’objet d’un travail spécial dans les Mémoires de l’Académie des sciences de Naples ( 4 ). Il le désigne sous le nom de Phoca Gaudini. En comparant le dessin qu’il a donné de la tète avec celle du Phoque moine de la Méditerranée, on ne peut s’empêcher de trouver entre elles une fort grande ressem¬ blance; certains naturalistes diraient que le Phoca Gaudini doit être l’ancêtre du Phoque moine. Les dents molaires présentent la même couronne, le même collet et les mêmes tubérosités, mais, au lieu d’être obliquement rapprochées les unes des autres, elles sont situées dans l’axe même du bord avec un léger espace entre elles. Leur nombre est également de cinq. Les incisives du Phoque moine sont fortes et au nombre de quatre, celles du milieu un peu moins fortes que les autres, tandis que, dans l’espèce fossile, elles sont six. Cette belle pièce provient d’une caverne située à trois kilomètres à l’est de Roccamorice. Elle a été donnée au Musée de Naples. (') Sitzungsbcrichte der malhem.-naturw. Classe der kais. Akademie der Wissenschaften, 1859. ( 2 ) Lethea rossica. Stutlgarl, 1855, p. 591, pl. XIII, fig. 1-57. (■") Nordhan x , Paléontologie Sud-Rassland. Ilelsingfors, 1858. ( 4 ) Guiscardi, Sopra un teschio fossile di Foca, in-4°. Napoli, 1871. DES ENVIRONS D’ANVERS. 27 On a trouvé aussi dans le pliocène de la Toscane, avec des Cétacés, des Trionyx et des poissons, des dents incisives et canines que M. Rob. Lawley ( j ) rapporte au même Phoque que M. P. Gervais a signalé dans le midi de la France, sous le nom de Pristiplioca occitana. Nous venons de parler des restes de ces carnassiers amphibies dans le bassin de la mer Noire et dans celui de la Méditerranée; on en trouve, et même plus abondamment que partout ailleurs, dans le bassin de la mer du Nord. Indépendamment de ceux d’Osnabruck dont nous parlons plus haut, nous trouvons à Anvers des restes nombreux de ces animaux dont nous avons fait mention en premier lieu en 1853 (-). Nous en avons parlé de nouveau en 1859 ( 3 ), en 1871 ( 4 ) et en 1876 dans les Bulletins de l’Académie ( 8 ). En 1859, M. le docteur Van Racmdonck informait l’Académie que l’on venait de découvrir des ossements fossiles nombreux à Saint-Nicolas, et, parmi ces ossements, nous avons reconnu des restes d’Àmphitériens. Nous avons proposé le nom de Palœophoca, pour désigner ce genre nouveau de carnassier amphibie, dont nous possédions déjà une dent molaire des sables d’Anvers. Nous avons reconnu à cette même époque le même animal dans le dépôt de sable noir d’Elsloo. Plus tard, nous avons établi le genre Trichecodon d’après une dent canine et nous avons reconnu en même temps des vertèbres, qui ont une grande ressemblance avec le Morse actuel. Nous possédons quatre genres de Phoques dans le sable d’Anvers, disions-nous dans une notice sur un Sirénien nouveau en 1871 ( 6 ) : le Trichecodon Koninckii; l’ Alachtherium Cretsii; le Palœophoca Nystii; le Phoca vitulinoïdes. Dans un discours qu’il a prononcé comme directeur de la classe des sciences et président de l’Aca¬ démie, le vicomte B. Du Bus disait : Mon intention n’est pas de vous faire connaître dès aujourd’hui les nombreuses espèces fossiles de Phoques récemment découvertes dans notre pays, mais je ne peux m’empêcher, ajoute-t-il, de signaler un type générique nouveau et extrêmement remarquable, auquel il donne le nom d 'Alachtherium Cretsii; il veut s’acquitter d’un devoir de gratitude envers le capitaine Crets, à qui l’on doit la conservation de ce précieux morceau ( 7 ). Moins connus encore que les Cétacés, ajoute-t il encore, les Phoques ont laissé dans nos depots pliocènes des débris tou¬ jours disséminés et souvent roulés. On les trouve dans les couches supérieures du crag. Leurs os, en grande partie très-compactes, sont ordinairement bien conservés, mais ceux du crâne, qui sont très-minces, font complètement défaut. Quelques dents et deux ou trois fragments de mâchoires inférieures sont les seules parties de tète qui ont été recueillies. Nous avons parlé plus haut de dents de Phoque que M. Staring avait reconnues à EIsloo longtemps avant nous. Nous les avons vues réunies, avec les autres richesses paléontologiques des Pays-Bas, au Musée du pavillon de Harlem, où Staring avait rassemblé tous les produits de ses recherches, il y a quelques années. Nous y avons trouvé, indépendamment des dents, une phalange onguéale de Phoque recueillie près de Swilbroek par Jonkheer von Winter, en 1859; des os métatarsiens de la grandeur des métatarsiens de Phoque ordinaire, venant de Koerboom, avec des fragments de fémurs et d humérus des mêmes localités. Nous ferons remarquer que tous ces os avaient été recueillis à côté de restes de Squalodon. O Pesci ed altri vertebrali fossili del pliocène Toscano, Pisn, 1875. ( 2 ) ISote sur une dent de Phoque fossile du crag d’Anvers, Bulletins de l’Académie royale de Belgique, 2 mo série, t. XX, n° 9, p. 255, 1853. ( 3 ) Bulletins de l’Académie royale de Belgique, 2 mo série, t. VIII, p. 145, 1859. ( 4 ) Ibid., 2' série, t. XXXII, p. 5. ( s ) Ibid., t. XLI, n° 4, avril, Patria belgica, 1873. ( G ) Ibid., 2- série, t. XXXII, p. 164. ( 7 ) Ibid., 1867, p. 562. 28 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES En Angleterre, R. Owen ne cite, parmi les mammifères fossiles britanniques, aucun débris de Phoque, et nous ne connaissons que ceux qui ont été signalés par M. Ray Lankaster, sous le nom de Trichecodon (*). The name Trichecodon was proposed to tlie author hy M. Van Beneden, dit M. Ray Lankaster. Ce nom indique suffisamment les affinités avec les Trichecus. Les naturalistes américains ont fait connaître également des ossements fossiles de Phoques recueillis dans les États-Unis d’Amérique. Un des premiers est celui auquel M. Joseph Leidy a donné le nom de Phoca Wymani et que Wyman avait signalé déjà en 1850 ( 2 ). Dans ces derniers temps, le savant naturaliste de Phila¬ delphie, dans sa faune fossile de Dakota et de Nebraska, a établi plusieurs espèces, mais elles ne reposent pas toutes sur des pièces bien-caractérisées. Le Phoca debilis du sable de Ashley-River, Caroline du Sud, et le Phoca modesla de la même localité ne sont connus, le premier que par trois dents, le second que par une dent; l’auteur les a fait représenter, tout en exprimant lui- même des doutes sur cette détermination ; il suppose qu’une de ces dents pourrait bien provenir d’un Squalodon. C’est aussi l’avis du professeur Cope. Le Lobodon vêtus, genre créé par M. Cope pour une molaire de New-Jersey, est cité par 31. J. Leidy comme une quatrième espèce de Pin- nipède. Il fait mention ensuite de Phoca groenlandica et de Trichecus rosmarus, le premier du quaternaire du 3Iaine et du Canada, le second de New-Jersey et de Virginie ( 3 ). 31. Cope fait remarquer que le genre Lobodon est voisin du genre Stenorhynchus. Ne serait-ce pas l’espèce similiaire du Pelagius Monachus de la Méditerranée ? Dans cette faune fossile de Dakota et de Nebraska figurent des dents, sous le nom de Delphi- nodon mento, pl. XXX, qui nous semblent provenir plutôt du Phoque que du Dauphin. Nous venons de signaler des ossements de Phoques, rapportés à des espèces vivantes, provenant du 3laine et du Canada, ainsi que de New-Jersey et de Virginie. Nous en trouvons dans les mêmes conditions en Europe et en Australie. On connaît depuis longtemps ( 4 ) des squelettes de ces amphibies, en Écosse, dans une couche d’argile, à quatre-vingt-six et à cent cinquante pieds au-dessus du niveau actuel du Forth et à seize pieds de profondeur dans le sol. Knox en a fait mention d’abord, mais c’est tout récem¬ ment qu’ils ont été l’objet d’un travail intéressant dû à la plume du professeur Turner. Ces sque¬ lettes sont conservés au Musée d’Édimbourg où nous avons pu les étudier. M. Turner les rapporte au Phoca hispida ( 5 ), la plus petite espèce de tout le groupe, qui n’abandonne guère les glaces du Groenland, et que les baleiniers anglais et américains désignent sous le nom de Floerat. Nous partageons complètement l’avis du savant professeur d’Édimbourg, comme nous avons déjà eu l’oc¬ casion de le dire dans un travail antérieur sur les Phoques fossiles d’Anvers ( 6 ). En Norwége, le D r Kinberg a signalé également des ossements de Phoque enfouis dans les mêmes conditions qu’en Écosse et que ce savant rapporte au Phoca groenlandica. Cet enfouisse¬ ment date probablement de l’époque glaciaire. On sait que le Phoca groenlandica ne quitte plus guère les glaces des régions arctiques, pas plus que le Phoca hispida ( 7 ). (*) E. Ray Lankaster, On the sources of the mammalian fossils of the Red cray ., Quart. Journ. geol. Soc., 1865, p. 221. ( 2 ) Wyman, Phoca Wymani, Leidy, Am. Journ. Sc., 1850, X, 229. ( 5 ) Leidy, The extinct mammalian Fauna of Dakota and Nebraska. Philadelphia, 1869. (Q Knox, Memoirs of Wernerian Society, t. Y, p. 572. ( s ) Professor Turner, On the species of Seal formed in Scolland in beds of glacial clay, Journal of Anatomy and Piiysiology, vol. IV. ( e ) Les Phoques de la mer scaldisienne, Bulletins de l’Académie royale de Belgique, 2 e série, t. XXXII, 1871. ( 7 ) Om arktiska Phocacecr funna,uti mellersta Svcriges glaciallera, Ofv. af Kongl. Vet. Akad. Fôrhandlingar, 1869. DES ENVIRONS D’ANVERS. 29 Dans ces derniers temps, le D r Haast, de Canlerburry, Nouvelle-Zélande, a trouvé, à côté d’os de Moa cassés et en partie brûlés, des restes de Chiens et de Phoques (Otaries), avec des silex semblables à ceux d’Amiens ( 1 ). Sur le bord de la Méditerranée on a signalé dans ces derniers temps des restes de Phoques également mêlés aux divers os dans des cavernes, mais ils n’ont point, que je sache, été déter¬ minés. D’après ce que nous venons de voir, on a reconnu des ossements de Phoques fossiles dans le bassin de la mer Noire et du Danube en Hongrie, en Autriche et en Bavière, dans le bassin de la Méditerranée en Égypte, en Italie, à Malte, dans la vallée du Rhône et dans le golfe de Gascogne; enfin, dans le bassin de la mer du Nord et ses affluents, en Angleterre, en Écosse, en Hollande et en Belgique. Leur présence a été signalée également aux États-Unis d’Amérique et en Australie. La présence de ces carnassiers amphibies est donc reconnue aujourd’hui dans presque toutes les localités où l’on a mis au jour des dépôts marins de la fin de l’époque tertiaire. Comme les Cétacés, ces carnassiers amphibies apparaissent partout, d’abord dans le miocène supérieur, puis dans le pliocène. Chez tous les caractères des Pinnigrades actuels sont parfaite¬ ment dessinés. CONDITIONS DANS LESQUELLES SE TROUVENT CES OSSEMENTS A ANVERS. A quelle époque les Phoques ont-ils fait leur apparition? On a parlé de Phoques recueillis dans des terrains de l’époque secondaire, mais il y a lieu de croire à une erreur, soit dans la détermination des os, soit dans l’appréciation des terrains qui les renferment. Nous ne connaissons guère ces animaux avant la fin de l’époque miocène, en Europe comme hors d’Europe. Le plus ancien nous paraît avoir été recueilli dans le miocène de l’Amé¬ rique du Nord, le Phoca Wymanni. « In a miocene formation at Richmond, Virginia, » dit M. J. Leidy ( 2 ). Avant de faire connaître les ossements, il est indispensable d’exposer la succession des couches dans lesquelles ceux des environs d’Anvers sont conservés. Nous suivrons dans cette exposition la marche indiquée par Dumont. 11 a fait de l’anatomie descriptive en géologie. Il a laissé à d’autres le soin de paralléliser les couches bien observées et il a pu se dire : on changera bien les termes, on discutera sur l’ancienneté relative des couches dans divers bassins, mais on ne fera pas que mes observations sur le terrain que je décris soient en défaut; je ne sais si réellement le bruxellien est l’analogue du calcaire grossier de Paris; si l’argile rupelienne est miocène ou oligocène, mais ce que je puis affirmer, c’est que le bruxellien est plus ancien que le laekenien et que le rupelien a été déposé avant le scaldisien. Nous avons dans les environs d’Anvers un horizon bien défini : l’argile de Boom ou argile rupelienne. Au-dessus de celte argile se trouvent plusieurs couches de sable, séparées et définies par leur couleur, par leurs fossiles et souvent par des couches de cailloux roulés. (*) Bull. Acad., Berlin, 1869, p. 752. ( 2 ) J. Leidy, The extincl mammalian fauna. Philadelphia, 1869, p. 415. 50 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES La couche de sable noir d’Edeghem, dans laquelle nous avons trouvé, à côté d’une faune de mollusques très-riche, le Placoziphius, est la plus ancienne. M. Nyst a publié dans les Bulletins de l'Académie.... la liste des fossiles recueillis à Edeghem, avec l’indication des différentes localités d’Europe où ils ont été rencontrés. — C’est avec ceux d’Italie, c’est-à-dire de Turin, de Tortone, d’Asti, de la Calabre et de la Sicile qu’ils semblent avoir le plus d’affinité. — Ils en ont peu avec ceux d’Allemagne ('). Une seconde couche de sable de même couleur et qui s’étend probablement jusqu’à Saint-Nicolas, parait succéder à la précédente; c’est le sable de Vieux-Dieu qui renferme des Dauphins à long rostre, des Ziphioïdes et des Cétacés à fanons. La couleur noire change insensiblement en vert et en gris. On a assimilé le dépôt vert au diestien et M. Mourlon en fait du miocène, jusqu’au sable vert inclusivement. Au-dessus de ce sable, noir d’abord, vert ensuite, se trouve le sable gris passant au jaune ou au rouge qui est le crag proprement dit, la continuation du crag des comtés de Norfolk et de Suffolk. Il renferme à Anvers des Cétodontes et les grands Mysticètes, voisins des Balénoptères et des Baleines actuelles; ce sont tous animaux marins, et, contrairement à ce qui existe en Angleterre, il est fort rare à Anvers de trouver, au milieu d’eux, des ossements d’animaux terrestres. Immédiatement au-dessus de ce crag, nous voyons le quaternaire, qui renferme abondamment les grands mammifères terrestres, Mammouth, Rhinocéros, Bos primigenius , Renne, Megaceros avec des restes d’Hyène et d’autres carnassiers. Nous aurons soin avec le concours de M. Mourlon, après la description de chaque os, de faire connaître, indépendamment de la localité, le sable dans lequel il a été trouvé. On a souvent négligé d’en tenir note, mais, en fouillant les trous des os, on parvient généralement à recueillir assez de grains de sable pour en déterminer la nature. Nous exposerons plus loin les résultats des observations faites par M. Mourlon sur la nature du sable et la succession des espèces. On est généralement d’accord sur l’âge relatif de ces sables, mais quand il s’agit de les rattacher à d’autres bassins, l’accord n’est plus aussi complet. Ainsi M. Vandenbroeck fait commencer le pliocène avec le sable noir inférieur et regarde l’argile sur laquelle il repose, comme limite. MM. Nyst et Mourlon pensent, au contraire, que le sable vert est la limite et que le pliocène ne commence qu’avec le sable gris. Au sujet de la place assignée au diestien dans les environs d’Anvers, une opinion nouvelle a été émise récemment et d’après laquelle le diestien devrait être considérablement rajeuni; il corres¬ pondrait à la couche supérieure, celle de Calloo et non à l’inférieure, comme on l’a cru jusqu’à présent. Le diestien serait placé immédiatement sous le campinien. Cette opinion a été émise par un savant géologue, M. Gosselet, à la suite d’une excursion qu’il a faite dans la province d’Anvers. Un jeune naturaliste, M. Cogels, qui habite Anvers, a fait sur les lieux des observations nom¬ breuses et suivies et reconnaît trois zones paléontologiques : la zone à Panopœa Menardi, dans les sables d’Edeghem, la zone à Isocardia cor , dans le sable gris des bassins, et la zone à Fusas antiquus, dans le sable de Calloo. La mer qui recouvrait Anvers à l’époque où la plupart de ces animaux marins s’enfouissaient dans le sable, s’étendait jusqu’aux bords de la Meuse, recouvrait une grande partie de la Hollande et occupait une partie de l’Allemagne, au moins jusqu’au Mecklenbourg. En Angleterre, elle recouvrait les duchés de Norfolk et de Suffolk; toute cette région semble avoir été sous eau jusqu’à la fin de l’époque tertiaire. A en juger par les ossements connus, ces eaux se sont retirées lentement et les ( f ) Notice sur un nouveau gite de fossiles se rapportant aux espèces faluniennes du midi de l’Europe, découvert à Edeghem, près d’Anvers, Bulletins de l’Académie royale de Belgique, t. XII, 1861, p. 29. DES ENVIRONS D’ANVERS. 51 Thalassothériens riverains animaient encore le vaste estuaire d’Anvers que le sol s’émergeait du côté du Limbourg et de la Baltique. Les Siréniens et les Phoques abandonnaient l’intérieur des terres à mesure que les golfes et les bassins se rétrécissaient. On découvre dans le lit de la Meuse à EIsloo des restes de Squalodon, d ’Halitheriuvn et de Phoques, qui sont en tout semblables à ceux de l’argile rupelienne et du sable noir de Saint-Nicolas. Ce sera une étude bien intéressante par la suite que celle des communications de la mer du Nord et la Baltique, de la mer Noire et la Méditerranée, à l’époque où tous ces grands Cétacés et ces nombreux Phoques occupaient le cœur de l’Europe. La vallée du Danube, depuis la mer Noire jusqu’au lac de Constance, renferment des ossements de tous ces grands animaux marins, et, comme à Anvers, on voit partout des débris d’animaux pélagiques mêlés avec des restes d’animaux litto¬ raux. Mais il reste à déterminer quels sont les rapports des espèces et des genres qui hantaient ces mêmes mers, qui sont aujourd’hui si complètement séparées. Nous examinerons plus tard les communications qui devaient exister entre la mer du Nord de cette époque et la Baltique, la mer Noire et la Méditerranée. Les ossements d’animaux marins mis au jour en Suisse, dans le Wurtemberg, ainsi que dans la vallée du Danube, à Linz, à Vienne et à Peslh, indiquent clairement les pays que la mer recouvrait à cette époque des temps tertiaires. On a reconnu depuis longtemps déjà, d’après les mollusques marins, la réunion, à l’époque miocène, du bassin de Vienne avec celui de Constance et de Berne. Il y a plusieurs observations à faire au sujet de l’ensemble d’animaux fossiles des environs d’An¬ vers. On y trouve des Foraminifères, des Bryozoaires, des Mollusques et des Vertébrés, et presque tous ces animaux, si pas tous, sont à régime animal. Comme aujourd’hui le régime végétal est une rare exception dans la mer et ceux qui habitent le littoral peuvent seuls se nourrir de végétaux. Mais, parmi tous ces carnassiers, ce sont précisément les plus voraces qui semblent avoir été les plus abondants, surtout parmi les poissons. Les dents de Plagiostomes sont extraordinairement répandues et le Carcharodon megalodon est moins rare que le poisson osseux le plus commun. La rareté des animaux qui ont dû servir de pâture s’explique aisément si l’on tient compte du régime particulier de certaines classes. Quelle était la pâture de ces nombreux Ziphioïdes, de ces Dauphins à longue et à courte sym¬ physe, de ces Baleines de toutes les dimensions et de ces Phoques amphibies? Les Ziphioïdes ne poursuivent actuellement que des Céphalopodes, surtout de la famille des Calmars; les Baleines véritables ne mangent guère que des Mollusques gastéropodes et ptéropodes, ainsi que de petits Crustacés; les Dauphins et les Balénoptères recherchent, comme les Phoques, les poissons osseux. Ces Mollusques céphalopodes aussi bien que les autres Mollusques et les Crustacés n’ont guère de parties solides à conserver et les poissons osseux n’acquièrent pas une taille assez grande pour que leurs débris soient facilement recueillis. C’est ce qui nous explique l’abondance des uns et la rareté des autres. 11 existe dans ces sables un mélange d’animaux dont il n’est guère facile au premier abord de se rendre compte. II est évident que les Ziphioïdes ne pouvaient vivre à côté des Phoques; tous les Ziphioïdes sont Teutophages, a dit depuis longtemps Eschricht, c’est-à-dire que leur pâture consiste en Céphalo¬ podes et ces 3Iollusques ne se rencontrent guère qu’en pleine mer. Les Phoques, au contraire, sont Ichthyophages et c’est dans les baies et les criques qu’ils pèchent avec le plus de succès. Quelques naturalistes ont cru pouvoir expliquer le mélange et l’abondance de ces animaux, en admettant que la pâture soit plus riche près des côtes; mais, en supposant qu’il en soit ainsi, cela n’explique pas leur mélange. 32 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES Les environs d’Anvers recèlent, à la fois, des restes d’animaux qui n’abandonnent pas le littoral, à côté de débris d animaux qui ne quittent pas la haute mer. Ces animaux littoraux et pélagiques n’ont pu vivre les uns à côté des autres. Les Ziphioïdes n’auraient pas trouvé, en leur qualité de Teutophages, c’est-à-dire de mangeurs de Calmars, leur pâture dans des bas-fonds le long des côtes, comme les Phoques n’auraient pu vivre et pêcher en liante mer; il leur faut, au contraire, des baies et des criques pour vivre dans l’aisance. Ce mélange est pour nous une preuve que les cadavres flottants des animaux de haute mer ont été poussés pendant un long laps de temps dans la même direction au milieu des animaux côtiers et qu’ils ont été ensevelis par ce moyen les uns à côté, des autres. Le vent dominant encore aujourd’hui est celui de Nord-Ouest, et, si l’on barrait l’entrée de la Manche, on verrait encore bien de grands Cétacés venir échouer sur nos côtes. Nous avons vu, du reste, depuis quelques années, plusieurs exemples de Balénoptères blessées ou mourantes venir expirer sur notre littoral, après avoir été blessées par les bombes-harpons , qui sont les engins à l’aide desquels on les chasse aujourd’hui. Tout naturaliste se rappelle la grande Balénoptère trouvée en mer en 1827 par les pêcheurs d’Ostende, et à quelques années d’intervalle nous avons vu échouer sur nos côtes la Balénoptère du Jardin zoologique d’Anvers, la Balénoptère de Scheveningen qui est au Musée de Bruxelles et la Balénoptère que mon fils a eu le courage de sauver à l’entrée de l’Escaut après quelque semaines de putréfaction. Nous ne parlons pas des nombreux Rorquals échoués depuis quelques années sur les côtes Est et Sud d’Angleterre. Les conditions dans lesquelles ces ossements sont entassés à Anvers font croire que les sables qui les renferment ont été déposés dans des eaux peu profondes et que les Amphitériens seuls ont pu y habiter. Les ossements, enfouis dans le sable à Anvers et en Angleterre, ne se trouvent pas dans les mêmes conditions. Les deux comtés de Norfolk et de Suffolk nous montrent les ossements roulés et mêlés à des restes d’animaux terrestres, souvent d’une époque antérieure et quelquefois môme postérieure. A Anvers, les os sont très rarement roulés et il est fort rare aussi de trouver parmi eux des débris d’animaux terrestres. Ce qui montre du reste l’action violente des eaux sur les côtes Est d’Angleterre, ce sont les amas d’ossements, surtout de Mammouth, qui sont déposés au fond de la mer. Ces Mammouths y sont si abondants que, dans certains endroits, les pêcheurs d’huîtres surtout ne peuvent jeter leurs dragues sans en retirer des os. Au fond de notre estuaire d’Anvers, les cadavres étaient successivement enterrés dans le sable, tandis que les côtes d’Angleterre étaient battues par les vents et les os roulés par les marées. Y a-t-il parmi ces ossements d’Anvers des débris d’animaux vivant encore aujourd’hui, soit dàns nos régions tempérées, soit dans d’autres régions plus chaudes ou plus froides? On peut répondre non, sans hésiter; du moins quant aux espèces qui sont enfouies dans les sables, il n’y a pas une seule forme qui ait continué à vivre jusqu’au temps actuel. Les animaux supérieurs sont, sous ce rapport, comme on l’a remarqué depuis longtemps, bien différents des animaux inférieurs! Plus un être est élevé en organisation, plus il a de peine à s’accommoder des changements qui surviennent dans le milieu ambiant. Nous croyons pouvoir répéter avec assurance qu’il n’y a pas, dans les sables d’Anvers, une espèce de Phoque ou de Cétacé, de poisson osseux ou de Plagiostome qui soit encore en vie. Nous con¬ naissons assez bien la faune actuelle des côtes d’Europe pour oser assurer que tous les Vertébrés des sables noirs, gris ou jaunes appartiennent à des formes complètement éteintes depuis l’époque qua¬ ternaire. Toutefois les poissons plagiostomes, de l’époque rupelienne déjà, rappellent les genres qui abondent encore dans la mer du Nord, comme les Lamna, les Spinax et surtout les Squalina. DES ENVIRONS D’ANVERS. 35 II n’en est plus de même des nombreux Mollusques répandus dans les sables avec tant de profu¬ sion. On peut en citer beaucoup qui vivent encore aujourd’hui : M. Gwyn Jeffreys, en faisant la comparaison entre les Mollusques fossiles de nos sables et ceux qui habitent encore l’Atlantique et la Méditerranée, a trouvé que, sur trois cent seize espèces du crag corallin, il en vivait encore deux cent soixante-quatre. Ainsi il n’y a que cinquante-deux espèces éteintes et encore faul-il admettre que l’on en découvrira plus d’une en vie. De longues et consciencieuses recherches ont conduit depuis longtemps notre savant et laborieux confrère M. Nyst au même résultat. Déjà dans la liste de fossiles d’Edeghem, dont nous parlons plus haut, il a indiqué plusieurs mollusques Gastéropodes et Acé¬ phales qui sont dans ce cas. Les Bryozoaires ont été étudiés comparativement avec le même soin que les autres mollusques : sur quatre-vingt-quinze espèces, il y en a soixante-cinq qui sont éteintes. Ainsi trente espèces du crag vivent encore dans nos mers. Des cinq Brachiopodes il n’y a qu’une seule espèce éteinte. Il n’en est plus de même des espèces qui ont laissé leurs dépouilles dans les terrains quaternaires : à Anvers, comme en Norwége et en Écosse, aux États-Unis d’Amérique comme à la Nouvelle- Zélande, on trouve des ossements d’Amphitériens que l’on ne saurait distinguer de ceux (pii hantent encore les parages voisins. Nous avons reconnu le Morse à Anvers; on l’a trouvé sur la côte Est d’Angleterre et sur toute la côte Est de l’Amérique septentrionale. Dans les formations quaternaires, au Maine comme au Canada, on trouve des restes de Phoques que les naturalistes américains rapportent au Plioca groenlandica. Les couches qui les renferment datent de l’époque glaciaire (Logan). Jos. Leidy a publié une notice curieuse sur les restes de Morse trouvés sur les côtes des États-Unis d’Amérique, dans une formation fort récente, à New-Jersey ; c’est, une tète très distincte avec des dents ( 1 ). Nous n’y voyons pas de différence avec le Morse actuel. Lyell a trouvé sur la côte N.-E. de l’Amérique, dans les schistes tertiaires de l’ile Martha- Vineyrard, une canine, que R. Owen attribue au Plioca proboscidea ( 2 ). Mais celte détermination aurait besoin d’être vérifiée, et si elle se confirmait, il y aurait lieu de s’assurer s’il n’y a pas d’er¬ reur au sujet de son origine. Nous pouvons remonter, dans plusieurs localités, des mammifères marins de l’époque actuelle à ceux qui ont cessé d’exister; mais, si nous remontons sans interruption aux espèces quater¬ naires, il n’en est plus de même pour les espèces tertiaires. De grands changements ont eu lieu brus¬ quement en passant du quaternaire au tertiaire. Mais ce qui est surtout digne de l’attention du naturaliste et qui excite l’étonnement, encore plus que l’identité de certaines espèces, c’est que souvent ces squelettes s’accumulent et se superposent dans des couches de nature diverse, qui s’élèvent parfois à quelques centaines de pieds au-dessus du niveau de la mer. Ce phénomène a été signalé depuis longtemps pour les Cétacés, et il se répète pour les Phoques dans les mêmes conditions. Et ce n’est pas seulement autour de la mer du Nord, en Écosse comme en Scandinavie, mais autour de la Méditerranée comme autour de la mer Noire, sur les côtes des États-Unis d’Amérique comme sur celles d’Australie. C’est à la suite d’affaissement ou de soulèvement des côtes que nous voyons dans divers pays des animaux marins enterrés dans ces conditions extraordinaires. 11 y a eu de ces soulèvements depuis l’époque où les premiers mammifères marins ont fait leur (') J. Leidy, Notice of Remains of the Walrus, Trans. amer. phil. Soc., vol. XI, 1856, pl. IV, fîg. 1-2, et pl. V, fig. 1 . ( 2 ) London and Edinburghphilosoph. mag ., 1845, p. 187. Pictet, Traité de paléontologie, vol. I, p. 235. I. 5 5i DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES apparition en Europe, c’est-à-dire depuis la fin de l’époque miocène, et l’on en cite des exemples remarquables du commencement de l’époque quaternaire et même des temps historiques. On cite même des cas d’oscillations du sol et parmi celles-ci on a fait mention particulièrement de la mer Aralo-Caspienne, comme nous le verrons plus loin. Certains ossements de Phoques et de Cétacés enfouis au-dessus du niveau de la mer ont été trouvés accompagnés d’objets de l’industrie humaine et de restes de canots. Lyell cite plusieurs découvertes de ce genre, et il n’est pas éloigné de croire que plus d’un soulèvement peut avoir eu lieu depuis la domination romaine. Il est vrai, certains Amphitériens, comme les Otaries, abandonnent la mer à certaines époques et montent sur les rochers à cinquante et à soixante pieds au-dessus du niveau de la mer; mais cela n’est possible qu’aux Otaries et peut-être aux Morses. Tous nos Phoques d’Europe sont trop aqua¬ tiques pour quitter la plage, même pour remonter des dunes. Du reste, la présence des Cétacés dans les mêmes conditions est une preuve que ces animaux n’ont pas été enfouis hors de l’eau comme des animaux terrestres. Le Musée d’Edimbourg possède des ossements de Phoques, trouvés près de Camelon, Falkirk, dans un lit d’argile, à quatre-vingt-dix pieds au-dessus du niveau actuel du Forth. Ils ont été signalés d’abord par le D r Robert Knox, qui croyait devoir les rapporter au Phoca vitulina. J. Fleming a fait également mention de restes de Phoca vitulina dans le diluvium marin à l’entrée de la rivière Forth. Le professeur Turner a reçu des ossements entourés de coquilles arctiques de Grangemouth, près de Falkirk, trouvés à quatre-vingts pieds au-dessus du niveau de la mer et à un mille de l’estuaire du Forth. Ces os sont bien conservés et doivent être attribués au Phoca hispida. Leur dépôt date de l’époque glaciale ( 1 ). En Suède, un autre squelette, presque complet, a été trouvé en 1857 à Stratheden, Fife, à cent cinquante pieds au-dessus du niveau de la mer, à seize pieds de profondeur dans le sol et à cinq milles environ de la côte. En 1859, on en a découvert un second dans la même localité. Le D 1 ' Kinberg a fait une étude spéciale des Phoques de l’époque glaciaire en Suède, et arrive à cette conclusion que ces ossements appartiennent à la même espèce, qui est connue aujourd’hui sous le nom de Phoca groenlandica (-). Le D r Eug. Robert a signalé un fragment de bassin trouvé dans un tuf coquillier d’Islande avec des Cyprina lslandica. Blainville suppose qu’il provient d’une espèce actuelle. Ce Phoque corres¬ pond par la taille au Phoca barbata ( 3 ). On trouve en Crimée et tout autour du bassin actuel de la mer Noire des ossements de cétacés et de Phoques avec des coquilles qui indiquent une diminution insensible dans la salaison de l’eau; plusieurs de ces ossements se rapprochent évidemment, comme Nordmann le suppose, des espèces actuelles. Le bassin de la mer Noire a été le théâtre d’un de ces phénomènes dont on a pu étudier les elîets sur une grande échelle. Ce bassin formait d’abord un immense golfe de la mer Glaciale du Nord et il en a été graduellement séparé à une époque qui correspond probablement à la période glaciaire diluviale. Vers la fin de la période pliocène, les eaux étaient encore saumâtres et occu¬ paient les bassins de Vienne et de Hongrie, la Transylvanie, la Valachie, l’Esclavonie, la Croatie, le bassin aralo-caspien et la majeure partie de l’archipel grec. C’était la mer Sarmate ( 4 ). (*) On the Species of Seal fourni in Scotland in becls of glacial clay, Journ. of anatomy and physiology; vol. IV. ( 2 ) D r Kinberg, Ont arctiska Phocacees, fauna uli mellersta Sveriges glaciallera, Ofversigt af Kongl. A k. forh., 1 869. ( 3 ) Blainville, Ostéographie. Carnassiers, p. 45. (9 Comte Marshall, Mondes, janv., 187 6 . Schmick, Oscillations périodiques du niveau de la mer Arabo-Caspienne. DES ENVIRONS D’ANVERS. 5S Aux Etats-Unis d’Amérique, où l’on voit des soulèvement semblables, nous avons signalé une tête de Megaptera trouvée à la Nouvelle-Orléans, dont le poids est de six cents livres et qui était enfouie à cent soixante milles de la mer et à soixante-quinze pieds de hauteur ( 1 ). À la Nouvelle-Zélande ( Bank’s peninsiila) le docteur Haast a constaté dans une caverne, immergée pendant que le sol était isolé (île) et émergée en partie depuis l’apparition de l’homme, à côté d’ossements humains, de Chien et de Moas, des restes de Ziphioïdes, de Cétodontes et d’Amphi- tériens, parmi lesquels il cite le Stenorynchus leptonyx, VArctocephalus lobatus et cinereus? et le Gypsophoca subiropicalis. Cette île s’est soulevée à la hauteur d’une vingtaine de pieds. L’entrée de la caverne est aujour¬ d’hui de treize ou quatorze pieds au-dessus du niveau de la mer. Il y a trois chambres qui se suivent. Le sol de la première chambre renferme des restes de mollusques comestibles, et indique le séjour d’Européens. Le sol est séparé en deux couches bien distinctes; la supérieure renferme des coquilles (-). MUSÉES QUI IIENFER31ENT DES OSSEMENTS FOSSILES DE PHOQUES. Il n est pas sans importance de connaître les 3Iusées ou les collections particulières, où des pièces rares sont déposées. C’est dans le but de les faire connaître que nous écrivons ce chapitre. Il mon¬ trera en même temps les progrès qui ont été réalisés dans la connaissance des Phoques fossiles depuis la publication de l’Ostéographie de Blainville. L’illustre successeur de Cuvier n’a pu figurer, comme reste de Phoque fossile d’origine certaine, que le pied du .Musée de Pesth, qui se trouve depuis le siècle dernier dans le Musée de cette ville. Ce pied, parfaitement conservé, provient d’un animal voisin du Phoca vitulina, ou de cet animal lui-même, qui aujourd’hui encore se rend dans la Méditerranée et la mer Noire. 11 a été trouvé dans la vallée du Danube non loin de la frontière qui sépare la Hongrie de l’Autriche. Nous avons vu au Musée géologique de Vienne (Autriche) un humérus complet, parfaitement con¬ servé, d’un Amphitérien de la taille du Morse et que l’on croyait provenir du lit du Danube. Sa couleur permet de le confondre avec des ossements fossiles. Par le concours bienveillant de M. von Pellzeln, cette pièce nous a été confiée à Louvain et nous avons pu nous assurer qu’elle ne provient pas d’un Morse, comme on le croyait, mais d’une Otarie de grande taille. Le cabinet de minéralogie (Hof mineralien cabinet), sous la direction de 31. Czermak, possède divers restes de Phoques fossiles, provenant de l’argile deNeussdorf et de Hernals, que nous avons pu étudier, grâce à l’obligeance de 31. Fuchs, le conservateur de ce riche 31 usée. Ces ossements proviennent du terrain qui renferme les Pachyacanthus. Il ne nous a pas été possible de comparer ces restes pour en déterminer l’espèce. Le temps et les éléments de comparaison nous faisaient défaut pendant notre séjour dans la capitale de l’Autriche. Dans divers musées d’Allemagne, on conserve des débris de Thalassolhériens sous le nom de Phoca ambigua, nom qui leur a été donné par II. von Meyer. Nous en avons vu plusieurs au Musée (0 Van Beneden et Geuvais, Ostéographie des Cétacés, Paris, ..., p. 118. ( 2 ) Notice lue à l’Institut philosophique de Canterbury, Nouvelle-Zélande. Nature, octobre, 1876. m 36 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES d’histoire naturelle de Stuttgart qui sont pour la plupart originaires de Baltringen. Le révérend pasteur Probst a recueilli avec le plus grand soin les ossements fossiles de cette célèbre localité et il a bien voulu nous confier pour un certain temps une grande partie de sa collection, qui est conservée à Unteressendorf, non loin du Lac de Constance. C’est un gisement extrêmement remar¬ quable d’ossements d’animaux marins. On y trouve des Phoques et des Squalodons à côté de Cétodontes et de nombreux poissons Plagiostomes. Nous espérons que l’on découvrira bientôt d’autres restes de ces carnassiers Amphibies, qui permettront de reconnaître l’espèce qui remontait si loin la vallée au Danube, disions-nous dans une notice publiée l’année dernière ('). Nous reproduisons le dessin des incisives fossiles que le pasteur Probst a bien voulu nous confier. Au 31 usée de Helsingfors, Nordmann a déposé le plus grand nombre des ossements fossiles de Phoques qu’il avait rapportés de Bessarabie. Ces ossements ont dû être très abondants dans ces localités où Nordmann les a recueillis, puisqu’il en a remis à plusieurs autres 3Iusées. Ainsi le 3Iusée de l’Académie des sciences de Saint-Pétersbourg en possède un certain nombre parmi lesquels se trouvent deux omoplates provenant de deux espèces distinctes. On voit également de ces ossements de Phoques recueillis en Bessarabie dans les 3Iusées de Munich, de Paris et de Londres. Les deux Phoques fossiles de Crimée sont représentés au British Muséum par quelques ossements bien conservés, qui indiquent une taille pareille à celle des ossements donnés au 3Iuseum de Paris. Le British 3Iuseum possède également des restes de 3Iorse, pêchés au Doggersbank, et un fémur du crag bien conservé, provenant de Happisburgh, Norfolk. Quelques dents du crag rouge de Suflblk, attribuées au Delphinus orcoïdes et au Delphinus uncidens, nous semblent devoir se rapporter à des Phoques plutôt qu’à des Dauphins. Dans ces derniers temps, 31. Ray Lankaster a signalé des dents de Trichecodon de grande dimen¬ sion dans quelques collections particulières, entre autres dans celles de 31. Whincop, de Wood- bridge, de M. Packard à Westerfield et dans la sienne propre ( 2 ). Il y avait aussi une grande dent entre les mains d’un marchand à Londres, il y a une dizaine d’années. Au 3Iusée de Trinity-College, à Cambridge, on conserve les intéressantes dents fossiles de 3Ialte, figurées d’abord par Scilla et que l’on a longtemps rapportées, sous le nom de Phocodon, proposé (') Les Thalassolhériens de Baltringen (Wurtemberg), Bull, de l’Acad. royale de Belg., 2° série, t. XLI, 1876. ( 2 ) Ray Lankaster , On the Sources of the Mammalian Fossils of the Bed Crag, and on the discovery of a new Mammal in thaï deposit, allied to the Walrus , Quart. Journ. geol. Soc., vol. XXI, pl. X et XI, 1865. DES ENVIRONS D’ANVERS. 57 en 1841 dans le Répertoire de Valentin par L. Agassiz, à un Phoque. Nous regrettons beaucoup de n’avoir pu les étudier à notre passage dans cette ville ; les conservateurs n’ont pu les découvrir. Depuis que l’on a signalé des Zeuglodon en Europe, nous croyons devoir leur rapporter ces dents de Scilla. Au Musée de la ville d’Edimbourg, on conserve plusieurs squelettes de Phoques conservés encore dans l’argile (') et qui se rapportent au Pagomys hispida. Ces squelettes datent de l’époque glaciaire ( 2 ). Nous avons vu également au Musée de Liverpool, mêlé à des ossements d’Ours et de Chèvre, un radius de Phoque qui ne peut avoir qu’une origine récente. C’est à l’une ou à l’autre espèec vivante qui visite encore de temps en temps ces côtes, qu’il faudra le rapporter. L’Italie possède également quelques ossements de Phoques fossiles. Les plus remarquables sont déposés au Musée de géologie de l’université de Naples. C’est une tête presque complète qui rappelle le Pelagius monachus et que le professeur G. Guiscardi a fait connaître. Celle tête a été découverte à Roccamorice dans les Ahruzzes. M. Rob. Lawley est en possession de quelques dents de Phoques, recueillies, en Toscane, dans le pliocène inférieur, correspondant au sable marin de Montpellier ( 5 ). Il rapporte ces dents au Pristiphoca occitana de P. Gervais. D’après des renseignements qui m’ont été fournis par le professeur Strobel, le Musée de Parme renferme également quelques restes de Phoques fossiles, recueillis en Italie. A Bordeaux, M. Delfortrie a dans sa collection des dents de Pinnigrades que ce zélé paléontologiste a fait connaître dans les Actes de la Société linnéenne de cette ville. Elles proviennent du falun aquitanien et il les rapporte à deux espèces d’Otaries, Olaria Oudriana et Otaria Leclercii (f). Je crois qu’il faudra d’autres pièces avant d’accepter ces déterminations. A Louvain, nous conservons plusieurs ossements intéressants des environs d’Anvers, parmi lesquels nous pouvons citer surtout une dent canine, des phalanges et une vertèbre dorsale de Triche- codon Koninckii, l’extrémité inférieure d’un humérus de grande dimension se rapportant à YAlach- therium Cretsii, le sacrum complet et adulte de Phocanella minor, une phalange et un calcanéum de Callophoca obscurci, un autre calcanéum provenant probablement de Gryphoca similis, un atlas, un humérus et une apophyse olécranienne de Phoca vitulinoïdes et quelques dents de Palœophoca Nystii. Nous possédons aussi plusieurs dents et ossements de Palœophoca Nystii, recueillis à Elsloo, près de Maestricht, et quelques ossements de Baltringen (Wurtenberg). A Anvers, M. Cogels a formé une collection fort intéressante dans laquelle nous avons reconnu un sacrum, une vertèbre lombaire, un humérus et radius, deux fémurs et une tête de fémur de Phoca vitulinoïdes ; un humérus, un olécrane, une phalange, une vertèbre dorsale et une lombaire, avec un maxillaire fort intéressant, de Palœophoca Nystii. Nous avons remarqué aussi dans sa collection un humérus complet de Mesotaria ambigua. Dans une collection particulière formée à Bruxelles par M. Lefebvre, nous avons distingué un fémur complet, un tibia et un péroné des environs d’Anvers. Le Musée de l’Université de Liège possède également quelques restes de Phoque des environs d’Anvers, parmi lesquels nous citerons une vertèbre cervicale de Trichecodon Koninckii. (*) Professor Turner, On the species of seul found in Scolland in beds of glacial clay, Journal of anatomy and PIIYSIOLOGY, Vol. IV. ( 2 ) Edinburgh. Nat. hist. dep. of the Muséum of science and art. ( 3 ) Pesci ed altri vertebrati fossili del pliocène Toscano. Pisa, 1875, p. 15. ( 4 ) Les Phoques du falun aquitanien, par Delfortrie, vice-président de la Société linnéenne de Bordeaux, Actes de la Société. t. XXVIII, 1872. 38 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES Au pavillon de Haarlem, on conserve quelques ossements et des dents de Phoques, recueillis en Hollande (Gueldre) avec des os de Cétacés et de Squalodon. M. Staring en a fait mention dans le Bodem van Nederland. Ces ossements fossiles de Gueldre étaient réunis au pavillon à Haarlem par M. Staring, et sont conservés aujourd’hui, si nous ne nous trompons, au Musée de Leide. La collection de M. Bosquet, pharmacien à Maestricht, renferme quelques fragments de Palœophoca Nystn , surtout des dents, qui ont été recueillies dans la vallée de la Meuse à Elsloo. Le Musée royal de Bruxelles, où les immenses collections recueillies à Anvers pendant les travaux de fortification ont été réunies, renferme aujourd’hui, à lui seul, une collection d’osse¬ ments de Phoques plus riche qu’aucun autre musée du monde. Nous en comptons dix-huit pla¬ teaux et environ cinq cent dix-sept pièces, qui se rapportent à seize espèces, réparties en douze genres. Tous les os du Musée royal portent un numéro; ils sont inventoriés et, en les reproduisant, l’on reconnaîtra facilement ceux qui ont servi à l’établissement des genres et des espèces. En dehors de l’Europe nous ne connaissons que les Musées des États-Unis d’Amérique et de la Nouvelle-Zélande qui renferment des restes fossiles de ces animaux. A la Nouvelle-Zélande, le Musée de Canlerhury est en possession des débris d’Amphitériens qui ont été recueillis dans une caverne de la péninsule de Banks par le docteur Haast; nous les avons mentionnés plus haut. ■m tHàerm. DES ENVIRONS D’ANVERS. 39 DESCRIPTION DES OSSEMENTS. Les ossements fossiles d’Amphitériens des environs d’Anvers se répartissent en deux familles : les Trichécidés et les Phocidés. Nous nous occuperons d’abord de la première. FAMILLE DES TRICHÉCIDÉS. Nous trouvons à Anvers des débris de trois genres de cette famille, les genres Trichecus, Triche- codon et Alachterium. Nous allons faire connaître successivement les débris que nous avons eus à notre disposition. Ainsi, nous trouvons, dans l’hémisphère boréal, trois sortes de Morses dont une est encore vivante, tandis que, dans l’hémisphère austral, il n’y a pas de représentant de ce groupe. TRICHECUS ROSMARUS. (PI. VIII, fis. 7-9.) Diagramme monlrant les parties du squelette de Trichecus rosmarus, dont l’auteur a disposé. Les erreurs, commises au sujet de la détermination des os de Morse fossile, sont nombreuses, et les plus grands naturalistes s’y sont trompés. On aurait pu se prémunir contre ces appréciations erronées, en tenant compte des lieux habités par cet animal et de son genre de vie au milieu des glaces. La première mention faite de cet Amphitérien fossile est celle de Giuseppe Monti (*), qui a pris une mandibule de Rhinocéros pour une mandibule de Morse. On ne doit pas perdre de vue que les Musées n’étaient pas riches en squelettes à l’époque où le savant Bolonais s’occupait de paléon¬ tologie. Georgi ( 2 ) a fait mention du Morse dans son Histoire naturelle de Russie, puis Eichwald ( 3 ) et 0) Monti, J., Demomimento diluviano nuperin agi o bononiensi cletecto, Bononiæ, 1717 (d’après Capellini). ( 2 ) Gf.ougi, Naturhist. Beschreibung von Russland, 1855, t. III, p. 590 et 591. ( a ) Eichwald, P (déontologie de la Russie, Lethea, p. 590,1855. 40 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES Nordmann, mais on ne trouve pas plus de Morse fossile dans le bassin de la mer Noire que dans celui de la mer Morte. Cuvier fait également mention de Morse fossile au sujet de vertèbres et de côtes qui lui ont été envoyées d’Angers (*). S’il y a de vrais Morses parmi les fossiles, dit-il, en parlant des Phoques fossiles (p. 234), ii est probable qu’il faudra les chercher, comme les Lamentins et les Phoques, dans des couches essentiellement marines. Ces os sont encore conservés dans les collections du Muséum à Paris, et Blainville trouve que les côtes ont, entre autres, la taille et l’amincissement de la partie supérieure caractéristiques de cet os dans les Morses ( 2 ); aussi regarde-t-il celte détermination de Cuvier comme probable. Il figure également (pl. X) une côte de Sirénien provenant d’Angers ( 3 ). On prétend également avoir trouvé en Allemagne des restes de Morse et qui proviennent, comme en France, de Siréniens. Nous citerons, entre autres, les dents et les côtes recueillies dans la Molasse de Ballringen et attribuées par Jager à un Trichecus molassicus ( 4 ). Le même doute existe au sujet de quelques ossements trouvés à Dax (Landes) ( 3 ) et d’une dent molaire de Romans (Drôme), que M. Paul Gênais a figurée planche XX, figure 13. Le savant professeur du Muséum reconnaît qu’elle est plus petite et que sa racine est proportionnellement plus longue ( 6 ) que dans le Morse. Nous ferons remarquer en passant que les dents molaires de Morse ne sont pas sans analogie, quant à l’usure de leur couronne, avec les dents de Béluga, avec lesquelles on pourrait facilement les confondre. Le Trichecus fossilis deM. Iluot doit être également supprimé. Il repose, dit M. Paul Gervais ( 7 ), sur un humérus qui ne provient pas de Pinnigrade. C’est avec raison que M. Paul Gervais, en parlant de la famille des Trichécidés, ne croit pas à l’existence de restes fossiles de ces animaux en aucun point du littoral de France ( 8 ). M. Duvernoy a cru voir des dents d’un animal nouveau intermédiaire entre les Phoques et le Morse, dans une brèche osseuse des environs d’Oran ( 9 ). Elles se trouvaient dans la même brèche que des dents de poissons. Nous avons tout lieu de douter de l’exactitude de cette déter¬ mination. On a trouvé à Montrouge, près de Paris, il y a quelques années, un crâne dont on s’est beaucoup occupé et que Gratiolet a décrit sous le nom d 'Oclobénothère ( 10 ). Lartet l’avait remis à Gratiolet. Nous avons examiné cette tête avec tout le soin nécessaire et nous partageons complètement l’avis que M. Paul Gervais a exprimé à son sujet dans la Zoologie et la Paléontologie françaises, c’est-à-dire, que ce crâne fracturé et qui a subi l’action du feu, n’est autre chose qu’un crâne de Morse vivant qui a été rapporté du Nord ( H ). Nous avons étudié cette pièce avec M. Paul Gervais, ayant devant nous tous les éléments de (') Cuvier, Ossements fossiles, t. V, part. 2, p. 521. ( 2 ) Blainville, Ostéographie, p. 43. ( 5 ) Ibid. (i) Jager, Fossile Sàugeth. Wurlemb., 1. — Bronn, Lelh. Geognost., 11,840 et Jahrb., 1837, p. 752. — Giebel, Fauna der Vorwelt, 1847, vol. I, p. 222. ( 5 ) Pictet, Paléontologie, t. I, p. 189. ( 6 ) Gervais, Zoologie et Paléontologie françaises, p. 518. (?) Ibid , p. 275. (8) Ibid., p. 275. ( 9 ) Journal l’Institut, 1857, p. 547. ( 10 ) Gratiolet, Bulletin de la Société géologique, 2 e série, t. V, 1858. (< ') Gervais , Zoologie et Paléontologie françaises, p. 88. DES ENVIRONS D’ANVERS. U comparaison que possède le Muséum et c’esl après avoir sérieusement hésité si l’Odobénothêre est un Morse ou non, que nous nous sommes rangé de l’avis de notre savant confrère. Cet Odobénothère repose sur un fragment de crâne dont la cavité cérébrale a été utilisée pour un usage quelconque et qui aura été apporté dans cet état par quelque pêcheur du Nord. C’esl le coté droit et non le côté gauche qui est conservé. Celui qui se trouve devant ce fragment de crâne et qui a devant lui un choix de sections des diverses régions de la tète, comprend aisément comment Gratiolet a pu se tromper. L’importance que Le Mon a attachée à la présence de cette tête dans le Diluvium rouge, tombe ainsi complètement; à propos de la période glaciaire, Le Hon avait accordé une grande valeur à cette prétendue découverte de gratiolet ('). En Allemagne on a fait récemment une découverte semblable : dans la ville de Cologne, à deux pieds sous le pavé, on a trouvé un demi-crâne de Morse. Il a pu y avoir d’abord quelque doute sur son ancienneté, mais le professeur Schaffhausen a bien vite remarqué que c’est une portion de crâne, séparée avec un instrument tranchant et dont la présence à Cologne date probablement du moyen âge. La substance cartilagineuse est encore conservée. On peut présumer que cette pièce aura été apportée avec les dents pour y être travaillée. M. Schaffhausen en a fait l’objet d’une com¬ munication à la Société du Bas-Rhin ( 2 ) Mais si jusqu’à présent on ne connaît pas, d’une manière certaine, des restes de Morse sur le conti¬ nent européen, il n’en est pas de même sur les côtes des Iles Britanniques et de l’Amérique du Nord. On voit au Musée Britannique une mandibule qui, sous ce rapport, est bien intéressante pour nous; elle est placée à côté des ossements fossiles du Crag; elle a été recueillie en draguant au Doggersbank, dans la mer du Nord. Drcdged [rom the Doggersbank, Eastern coast, dit l’étiquette. La mandibule est assez complète, quoique fortement corrodée par les eaux; toutes les dents sont tombées. Elle a tous les caractères de la mandibule des Morses actuels et nous n’hésitons pas à la rapporter au Trichecus rosmarus, d’autant plus que le professeur R. Owen nous a assuré qu’on l’a trouvée avec des restes de Rhinocéros tichorhinus. Celte pièce provient d’une collection particulière. Charles Lyell a lu au mois de février 1843, à la Société géologique de Londres, une notice sur les couches tertiaires de l’ile Marlha’s Vineyard, Massachusetts (États-Unis d’Amérique). Dans cette notice, il fait mention de restes fossiles de Thalassothériens, parmi lesquels il cite des vertèbres de Baleines et de Cétodontcs (Hypéroodon), un crâne de Morse différant du Morse actuel par le nombre de dents molaires, ainsi que par la forme de la défense. Les molaires sont de chaque côté au nombre de six au maxillaire inférieur, et la canine est plus arrondie, ajoute-t-il, que dans le Morse vivant ( 5 ). Charles Lyell fait mention dans les mêmes couches d’une dent canine, qui tient beaucoup également, d’après le professeur Owen, du Cystophora proboscidea. A côté de ces fossiles se trouvaient des dents de Carcharias megalodon, dents qu’il a observées aussi en Virginie près d’Evergreen, des coquilles de Tcllina et de Mya. Le savant géologue considère ces fossiles de Martha’s Vineyard comme miocènes, quoiqu’ils proviennent de dépôts superficiels. Quant à l’espèce, nous ne pouvons voir, d’après les différences indiquées, une raison d’en faire un animal distinct. On a découvert des restes de Morse dans deux autres localités des États-Unis d’Amérique; d’abord en Virginie (Accomac County), puis à New Jersey (Monmouth Counly) ( i ). En Virginie on a trouvé une partie de crâne avec des canines transformées en agate et qui ne diffère guère du (') Le IIon, L’homme fossile, 1807, p. 504. — lu., Mouvement des mers...., p. 48, 1870. ( 2 ) Schaffhausen, Séance de la Société du Bas-Rhin, 11 octobre 1876. ( 3 ) Cii. Lyell, Proc, ijeol. Soc., 1842-1845, vol. IV, part. 1,p. 51. Voyages dans VAmérique du Nord. Traduc¬ tion de Wolff, 1846, tabl. 5, fig. 1. ( 4 ) De Kay, Natur. hist. of New York, part 1, Zoology, p. 56, pl. XIX, tig. 1, a 6; Jos. Leidy, Notice of remains of the Walrus, Tiunsact. amer, philos. Society. Philadelphia, 1857. I. 6 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES 42 Morse actuel. Cette pièce est conservée dans le cabinet de New York Lyceum , sous le nom de Trichecus virginianus . Ce sont MM. Mitchill, J.-A. Smith et Cooper qui ont signalé les premiers la présence de ces animaux en Virginie ( 1 ). A New Jersey, c’est également un crâne et un bout de museau qui ont été mis au jour. Le crâne a été découvert par le professeur Fraser, le bout du museau par M. Finch. M. Jos. Leidy cite dans le pliocène, à côté des restes de Trichecus virginianus, le Delphinus vermontanus, le Rorqualus ( Balœnoptera ) australis et le Manalus. Si l’on considère que l’animal qui nous occupe visitait encore régulièrement, il y a peu de temps, le golfe de Saint-Laurent, et que les différences signalées entre les ossements fossiles et l’espèce vivante sont bien faibles, nous croyons prudent d’attendre que l’on ait pu comparer ces os avec un soin suffisant, avant de les rapporter â une espèce nouvelle. Il résulte de ce que nous venons de dire, que l’on a trouvé des débris de Morse véritable, sans différence notable avec l'espèce actuelle, en Europe comme en Amérique et, dans le nouveau monde comme dans l’ancien, au milieu de couches quaternaires. Parmi les ossements recueillis pendant les travaux militaires d’Anvers et déposés au Musée royal, se trouvent un certain nombre de pièces qui ont été pendant quelque temps confondues et mêlées avec les animaux quaternaires terrestres. Les caractères extérieurs nous avaient d’abord induit en erreur; leur aspect, leur légèreté et leur taille surtout, les avaient fait placer parmi les débris quaternaires à côté des Rhinocéros. Après le triage des os d’Amphitériens et une revue atten¬ tive de ceux rapportés â des animaux terrestres, nous avons reconnu parmi ces derniers une ver¬ tèbre et un scaphoïde de Pinnigrade. Ce sont les pièces qui nous ont fait reconnaître la présence du Morse véritable à Anvers. En effet, tous les caractères fournis par ces os les rapprochent si complètement de cet animal, que nous ne saurions les en séparer. La comparaison la plus minutieuse ne nous à pas fait connaître la moindre différence. Avant de décrire ces os, voyons ce que l’on sait aujourd’hui de cet animal des régions boréales. Le Morse des temps actuels est un animal parfaitement connu, surtout depuis qu’on a eu l’occasion de l’observer en vieà Londres, et que M. J. Mûrie a pu l’étudier ( 2 ). L’habile zoologiste a observé avec soin l’appareil de locomotion en le comparant à celui des Phoques ordinaires et des Otaries et il a fait ressortir la grande différence dans la marche de ces animaux aquatiques. La coloration de la peau et d’autres dispositions propres ont également attiré son attention. Un des résultats les plus importants de ces dernières recherches se rapporte à son maintien; au lieu d’étendre les membres postérieurs comme tous les Phoques de notre hémisphère, il les fléchit comme les Otaries et devient, comme celles-ci, plantigrade. Les os des membres postérieurs, surtout le calcanéum, indiquent cette attitude. Le Morse qui a été étudié par M. J. Mûrie est un jeune mâle, mort en 1867, au Jardin zoologique du Regent’s Park ( 3 ). Ce n’est pas le premier Morse que l’on voit exhiber au public. Au siècle dernier on a vu en Angleterre un Morse vivant âgé de trois mois qui avait été amené par les Norwégiens ( 4 ). (’) Mitchill, Smith et Cooper, Ann. of the lyc. of mit. hist. of ISew-Yorh, vol. 2,p. 1, pl. 27t. — Pictet, Traité de Paléontologie, vol. 1, n° 23o. ( 2 ) Proc. Zool. Soc., 1870, p. 544. ( 5 ) Il a été acheté en 1808 pour la somme de £ 200, de MM. Alexandre Stephen de Dundee. Cet animal a été capturé dans le Détroit de Davis par le Cap. Rich. Wells, le 28 août. Un troupeau de deux à trois cents était sur la glace à la latitude de 09° N. Parmi les individus capturés était une grande femelle et quand son cadavre était à bord, le jeune mâle a voulu rejoindre le corps de sa mère à la nage et a refusé de quitter. Probablement il avait moins d’un an et mesurait huit pieds. Proc. Zool. Soc., 1867, p. 819. ( 4 ) Delaet, Description des Indes occidentales. Le second Morse, exhibé à Londres, était un jeune animal rapporté DES ENVIRONS D’ANVERS. 43 A diverses reprises on a eu l’occasion d’observer des Morses amenés vivants en Russie, mais aucun naturaliste n’avait trouvé le moyen d’en faire une étude approfondie. Dans ces derniers temps R. Brown a pu en étudier un individu en vie pendant trois mois, dans le Détroit de Davis. L’animal était jeune et tous les jours on le plongeait dans l’eau, mais, au grand étonnement des marins chargés de cette besogne, il était toujours content d’en sortir et de retourner à terre (*). On a prétendu que le Morse éjacule de l’eau par les narines, comme les vrais Cétacés. Plusieurs voyageurs l’ont soutenu, depuis Mertens et Zorgdrager jusqu’à Scoresby. Ils ont parfaitement raison ; seulement il faut dire que les Cétacés expirent simplement de l’air comme tous les autres mammifères et que cet air humide, dans les régions froides qu’ils habitent, est plus visible chez les mammifères aquatiques que chez les mammifères terrestres. M. A.-J. Malmgren a fait des observations fort intéressantes sur le Morse ( 2 ) sous le rapport de la reproduction, des dents, de la nourriture et des changements que subissent les jeunes. Nonobstant l’irrégularité des dents des Morses adultes, celles dites de lait, sont en tout semblables à celles des autres Pinnigrades. Ils ont trois incisives et trois molaires de chaque côté et à chaque mâchoire. Leurs dents molaires sont à couronne aplatie, comme les dents de Béluga, avec lesquelles on pour¬ rait les confondre, et elles s'éloignent complètement par leur forme des Phoques en général. Quel est le régime des Morses ? Ceux qui ont eu l’occasion d’ouvrir leur estomac y ont trouvé des Mollusques bivalves (surtout des Mya truncata et des Saxicava rugosa ), avec des plantes marines. Ces Mollusques du genre Mya ne vivent que dans la vase à une certaine profondeur. Les dents canines des Morses leur serviraient à déterrer cette nourriture. Henry W. Elliot, parlant de ces animaux du nord du Pacifique ( 3 ), dit avoir trouvé dans leur estomac jusqu’à un boisseau de Mya, les unes entières, les autres brisées. MM. Robert Brown et Malmgren signalent les mêmes bivalves dans le Morse de l’océan Glacial. M. Malmgren fait mention en outre d’un grand Priapulus. On cite aussi l’exemple d’un Morse tué à côté d’un cadavre de Célacé, et dont l’estomac était plein de la chair de celui-ci. M. Sclater affirme, d’après les observations qu’il a eu l’occasion de faire sur le jeune mâle de Regent’s Park, que sa nourriture est purement animale; il ne peut avaler de proie de plus grand volume qu’une noix, dit le secrétaire de la Société zoologique, et il se demande si le Morse ne remplit pas le rôle de Vautour; ses dents rappellent celles de Prolèle, dit-il ( 4 ). Nous possédons également des renseignements sur leurs crottins. Ils sont comme ceux du cheval, mais pas aussi ronds. Ils renferment du sable et du gravier (Kies and Sand ). M. Heuglin en conclut qu’ils mangent de l’herbe ( 5 ). D’après les habitants des côtes de la mer de Behring, le Morse est monogame, et on voit souvent le mâle et la femelle avec leur jeune. La gestation est de neuf mois. Les jeunes naissent sur des gla¬ çons dans l’océan Arctique; ils n’entrent dans la mer de Behring qu’à commencer du mois de juin. Il vit par bandes nombreuses sur les glaçons. Nous trouvons ces intéressants renseignements dans le rapport de Henry W. Elliot. en 1855 de Spilzbergen et qui n’a vécu que quelques jours. Il a été disséqué par R. Owen. C’est d’après ce jeune animal que Wolf a fait son beau dessin. Wolf and Sclater, Zoolog. sketches, vol. I, pl. XVIII. 0) Robert Brown, Notes on tiw History and Geoyraphical Relations of the Pinnipedia frequenting the Spilz- bergen and Greenland Seas. Proc. Zool. Soc., 1868, p. 405. — Reprinted bg Permission . with Corrections and Annotations bg the autor, Mardi, 1874. 0 Beobachtungen und Anziehungen über die Saugelhierfauna Finnmarkens und Spitzbergens. Trad. Troschel’s A Rein v, 1864, p. 63. ( 3 ) Henry W. Elliot, Report on llie pribylov Group, or seul islands, of Alaska. Washington, 1873. 0 Proc. Zool. Soc., 1867, p. 820. 0 Ofvers, K. Vett. Akad. Fard., 1863, p. 505. U DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES A en croire les Groënlandais, le Morse et l’Ours blanc se livreraient des combats et le premier cherche toujours à noyer son adversaire. Ils prétendent aussi que l’Orque les attaque, ce qui n’éton¬ nera personne. Le Morse est ordinairement couvert de vermine et un petit oiseau, le Saxicola œnanthe, remplit auprès de lui le rôle de mutualiste en le débarrassant de ses Hemalopinus. D’autres petits oiseaux paraissent également remplir ce rôle. Comme nous l’avons vu plus liant, le Morse est confiné aux régions froides de l’hémisphère boréal ; il habite les côtes circumpolaires d’Europe, d’Asie et d’Amérique, sans dépasser la latitude de 80° 30'. II paraît qu’il ne reste pas sur les côtes du Spitzberg pendant l’hiver, maison le voit reparaître à l’époque delà fonte des glaçons. R. Brown, contrairement à d’autres observateurs, prétend qu’il ne voyage pas. On en a vu s’égarer en Finmark, en Norwége dans le voisinage de Drontheim, en Irlande et en Écosse; en 181 7, on en a tué un de dix pieds de long aux îles Hébrides (Flemming) et un autre en 1823, au mois de juin, aux Orcades (Bell). On a prétendu que c’était au début de leur émigration. Il paraît qu’il visitait encore régulièrement, il n’y a pas longtemps, le golfe S'-Laurent. On ne doit pas être surpris qu’à l’époque glaciaire il ait visité l’Amérique et l’Europe à des latitudes plus méridionales que celles qu’il fréquente aujourd’hui. C’est entre 80° et 47° qu’il se tient aujourd’hui. Quand les Russes ont pris possession de ces îles, dit Henry W. Elliot, en parlant de l’ilc S l -Paul, la côte Sud était visitée par une grande quantité de Morses, qui se sont successivement éloignés, et aujourd’hui, ajoute-t-il, on n’en voit plus que sur les côtes de File qui porte leur nom, île des Morses. Il est à remarquer que ce ne sont, d’après le même observateur, que les mâles que l’on y t rencontre. Les animaux de ces régions n’ont que peu de valeur commerciale ; l’ivoire de leurs dents est jaune, poreux et de mauvaise qualité sous tous les rapports; il en est de même de leur graisse et de leur peau. Le Morse actuel atteint la taille des plus grandes espèces de cette famille; on en voit communé¬ ment de dix et de quatorze pieds et même quelquefois de vingt pieds. La défense atteint parfois jusqu’à trois pieds de longueur et un poids qui varie de dix à vingt livres. La taille varie toutefois d’après les localités et elle dépend probablement de l’abondance plus ou moins grande de nourri¬ ture. Ainsi, au nord du Pacifique, à l’île des Morses, ils deviennent beaucoup moins forts, et c’est ce que l’illustre von Bacr a lait observer depuis longtemps an sujet de la pluralité des espèces. Dans le beau rapport de Henry W. Elliot, le mâle adulte n’atteint dans ces derniers parages que douze pieds au plus et les dents canines n’ont pas plus de dix pouces à deux pieds. Le poids de ces dents varie de cinq à quinze livres. On peut juger de l’abondance de ces animaux dans certains parages par les peaux et l’huile que les baleiniers rapportent parfois au bout d’une campagne. Gmelin assure qu’en 1703 et 1706, les Anglais tuèrent à l’île de Cherry sept à huit cents Morses en six heures; en 1708, ils en tuèrent neuf cents en sept heures et, en 1710, en une journée, huit cents. On n’estime pas à moins de soixante mille le nombre de Morses détruits dans l’océan Arctique et la mer de Behring pendant ces cinq dernières années, dit le capitaine Scammon. On indique des localités où le sol est jonché de dents de ces animaux. On cite particu¬ lièrement les côtes d’Anakyr. Tous les voyageurs du siècle dernier ont été frappés de cette profusion en abordant ces parages. Ces animaux se réunissent parfois en si grand nombre sur des glaçons, que ceux-ci, étant à fleur d’eau quand ils sont dessus, s’élèvent, lorsqu’ils les quittent, au point que les Morses ne peuvent plus les aborder. DES ENVIRONS D’ANVERS. 43 Ou trouve aujourd’hui des squelettes de Morse dans tous les grands musées. C’est par le concours d’Eschricht et l’énergique activité du gouverneur du Groenland, Ilolbôll, que les musées d’Europe en ont reçu. Le Muséum de Paris n’en possédait pas lors du séjour d’Eschricht dans cette capitale. En quittant Paris, il avait promis à Cuvier de lui en procurer, ainsi que le squelette du Narval. Aujourd’hui le Muséum, sous la direction de M. Paul Gcrvais, en possède, outre le squelette complet, une vingtaine de crânes d’origine différente. Jusque dans ces dernières années, toutes les figures de Morse étaient faites d’après des peaux empaillées et représentaient l’animal avec les nageoires postérieures étendues comme les Phoques ordinaires. 11 faut cependant en excepter quelques-unes, comme celle que Blumenhach a donnée dans ses Abbildungen. On possède aujourd’hui un bon dessin de Wolf (*) d’après un jeune animal mort au Jardin zoologique de Londres, et M. Henry W. Elliot a représenté un troupeau de mâles adultes, d’après une photographie faite à Pile des Morses dans la mer de Behring. On a souvent parlé des affinités des Morses avec les Pachydermes, en se basant surtout sur la conformation des dents. C’est évidemment une erreur. Ce sont les dents de la première mue qu’il faut considérer, et celles-là ne les éloignent aucunement des autres carnassiers. Les Morses ont surtout des affinités avec les Otaries, et les autres Pinnigradcs avec les Loutres et les Ours. Ils tiennent aux Otaries plus qu’aux Phoques aussi bien par les os du tarse que par le cerveau. Nous avons pu nous en assurer par l’étude des cavités cérébrales. Nous ne croyons pas que les Morses du détroit de Behring diffèrent spécifiquement de ceux de la mer de Baffin ou de la Nouvelle-Zemble, et c’est à tort, à notre avis, que Fremery a essayé de les répartir en espèces distinctes d’après les modifications de leurs dents, von Baer s’est occupé en 1835 de cette question à l’Académie de S‘-Pétersbourg et l’illustre naturaliste m’écrivait, peu de temps avant sa mort, au sujet de la différence légère des Morses, à l’Est et à l’Ouest de la mer Glaciale, qu’il regardait les différences comme des modifications locales ( 2 ). Ce n’est pas l’avis de Henry W. Elliot, qui considère le Morse du nord du Pacifique comme un animal distinct. Il y a tout lieu de croire qu’il n’existe aujourd’hui qu’une seule espèce, et le peu de différences que l’on observe entre ceux du Groenland, de la mer Glaciale et du détroit de Behring, ne sont probablement que locales, comme le dit von Baer; elles ne portent guère que sur les dimensions. Nous ne voyons pas de raisons de rapporter à une espèce distincte les os dont nous allons parler. Les os que nous réunissons ici sous cette dénomination sont peu nombreux, mais ils se font faci¬ lement reconnaître par leur aspect et diffèrent surtout des autres ossements qui sortent du crag, par leur légèreté; ils sont au nombre de deux : l’un est une vertèbre dorsale bien conservée sauf l’arc et les apophyses, l’autre un scaphoïde . La vertèbre est une deuxième dorsale (pi. VIII, fig. 7) facile à reconnaître par sa surface articu¬ laire de la tète costale et la base de l’arc neural. Nous l’avons représentée, vue de côté. Le corps est allongé et assez sensiblement creusé vers son milieu surtout à la face inférieure; les apophyses de l’arc neural sont brisées, mais pas jusqu’à la base; on peut fort bien voir la largeur du canal vertébral et de chaque côté la base de l’arc. La face articulaire, pour l’insertion de la tète de la côte, est fort large et dénote la solidité de ces os. L’os du carpe que nous avons désigné d’abord sous le nom de pyramidal est un scaphoïde ou naviculaire, c’est-à-dire, un radial. C’est le plus grand os du carpe. Il est figuré planche VIII, ( f ) Zoological sketches, by Joseph Wolf and Sclater. 00 Les Morses des côles de Sibérie ou de l’est de l’Asie ont les dents canines plus fortes que les Morses de Spitz- herg et de Groenland, me disait-il dans une lettre. Ils mangent principalement des Fucus avec les Mollusques acé¬ phales qui y sont attachés, ajoutait-il. DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES 46 fig. 8 et 9. Si nous le comparons au radial des Phoques véritables et à celui des Otaries, nous trouvons qu’il a une ressemblance beaucoup plus grande avec ces dernières; aussi le Morse se rapproche beau¬ coup plus des Otaries par les mouvements des membres, comme nous l’avons déjà fait remarquer. Ce scaphoïde a trois surfaces articulaires fort distinctes : une supérieure convexe et qui occupe plus de la moitié de l’os; il correspond au radius; une seconde surface fort concave du côté opposé et qui n’occupe qu’un peu plus de la moitié de la largeur de l’os. Une troisième surface articulaire est un peu plus longue que large et la moitié en est creusée. Si nous comparons cet os à celui des Morses, il serait difficile de trouver une différence de quelque importance. Pour la taille, le scaphoïde mesure en longueur 120 millimètres; notre squelette de Morse, qui vient du Groenland, n’a qu’un scaphoïde de 67 millimètres. Le squelette indique cependant, ainsi que les os et les dents, qu’il appartient à un animal parfaitement adulte. D’après l’aspect et la légèreté des os, ainsi que d’après la nature du sable extrait des cavités, ces os proviennent du terrain quaternaire. La vertèbre a été trouvée sur l’emplacement de l’ancien fortin n° 1, près de Deurne; l’autre os ne porte pas d’indication de lieu, si ce n’est qu’il a été recueilli pendant les travaux dans les envi¬ rons d’Anvers. TII1CHECODOÎN KONINCKII, Van Ben. (PI. VI, fig. 8-8; pi. Vil, fig. 1-6; pi. VIII. fig. 1-6.) Diagramme montrant les parties du squelette de Trict.ecodon Koninckii, dont l’auteur a disposé. Van Beneden, Les Phoques de la mer scaldisienne, Bill, de l’Acad. nov. de Belgique, t. XXXII, p. 5, \ 87!. Ray Lankaster, Trichecodon Huxleyi, a new mammalian fossil [rom the red craej ofSuffolk, Pnoc. géol. Soc., [ebr., 1865. Van Beneden, Les Phoques fossiles du bassin d’Anvers, Bull, de i.’Acad. roy. de Belgique, t.XLI, p. 785, 1876. Il y a déjà plusieurs années, M. Nyst découvrit, pendant son séjour à Anvers, en cherchant des coquilles fossiles dans les environs de la ville, un fragment de dent (pl. VI, fig. 8), remarquable par sa forme comme par sa grandeur, et qui fut pendant longtemps une énigme pour les paléonto¬ logistes. Il ne se rapportait à aucun animal connu. Toutefois, cette dent se rapprochait surtout de la défense du Morse, et nous lui donnâmes à cause de ces affinités le nom de Trichecodon. C’était pour nous le Trichecodon Koninckii. Après une visite que nous fit M. Ray Lankaster à Louvain, parut à Londres, sous le titre de: Trichecodon lmxleyi, un nouveau mammifère fossile du crag rouge de Su/folk, une notice inté- DES ENVIRONS D’ANVERS. 47 ressante dans le Bulletin de la Société géologique. M. Ray Lankaster avait vu en Angleterre diffé¬ rentes grandes dents, provenant du crag et qui différaient surtout entre elles par leurs dimensions. Nous croyons devoir rapporter ces dents au genre Alachtherium. Depuis lors, on a mis au jour à Anvers un certain nombre de débris que nous attribuons à l’animal qui nous occupe. Il y en a dans le nombre qui indiquent une taille gigantesque, au point que la surface articulaire d’un humérus avait pu être attribué à un Plésiocètc. Nous sommes aujourd’hui en possession d’un maxillaire inférieur, de plusieurs vertèbres, d’os du bassin, d’une côte, de sternèbres, d’humérus, de métacarpiens, de fragments de fémur, de péroné, d’astragales, de calcanéum, de métatarsiens, de phalanges des membres antérieurs et postérieurs. Une branche de maxillaire (pl. VI, flg. 5-7) est tout ce que nous possédons de la tète. Les dents manquent, mais le bord est assez complet pour qu’on puisse bien juger de leurs caractères par les alvéoles. Nous pouvons, du reste, fort bien aussi apprécier la forme de cet os, distinguer sa symphyse et sa brièveté. L’os est brisé à son extrémité antérieure, la symphyse est fort courte et l’os n’a pas plus d’épais¬ seur sur la ligne médiane que sur le côté. Les alvéoles sont comparativement fort grandes : les trois dernières sont à peu près semblables, l’antérieure est la plus petite. C’est l’inverse dans le Morse. La canine devait être fort grande. 11 n’y a qu’une seule alvéole pour une dent incisive. Le corps du maxillaire est remarquable par sa courbure. Toute la partie postérieure qui consti¬ tue la branche du maxillaire manque. On voit sur la face externe trois trous mentonniers. En comparant ce maxillaire à celui du Morse vivant, on voit que la symphyse est toute différente, qu’il existe une grande alvéole pour la dent canine et des traces d’une petite alvéole pour une inci¬ sive qui restait probablement cachée sous les gencives. Dans le Morse vivant, il n’y a pas de place pour une canine au maxillaire inférieur. Le fragment de défense que nous attribuons à l’anima! qui nous occcupe, a dix-sept centimètres de longueur sur six centimètres de largeur ; nous parlons de la partie la plus large. La face que nous prenons pour externe, est bombée et unie, tandis que la face interne est légèrement creusée en gouttières d’un centimètre en largeur. A côté de ces gouttières, on voit des rainures qui suivent la même direction. Ce fragment indique une défense de trente à quarante centimètres, longueur qui correspond avec celle des Morses d’aujourd’hui. Nous sommes en possession de neuf vertèbres de cet animal, quatre cervicales et une dorsale, trois lombaires et une caudale. Les cervicales sont toutes les deux la sixième. Ces vertèbres cervicales sont remarquables par leur obliquité. Le corps est un peu plus long que large, la face articulaire antérieure est légèrement bombée et tronquée en biais aux dépens de la partie inférieure; la face postérieure est un peu concave et tronquée en biais aux dépens de la partie supérieure. La face supérieure est carénée comme la face inférieure. Les apophyses trans- verscs sont fort larges et occupent presque toute la longueur de la vertèbre. Le trou qui livre passage aux vaisseaux est fort grand et n’occupe pas moins de la moitié du corps des vertèbres. Les apo¬ physes articulaires sont fort larges et solides. Une des vertèbres cervicales appartient au Musée de l’Université de Liège. Nous pouvons dire avec assurance que ces deux vertèbres cervicales sont, l’une comme l’autre, la sixième du cou (pl. VIII, fig. 3). On peut en juger par le Morse vivant; le trou qui livre passage aux vaisseaux manque à la septième cervicale et la forme du prolongement en arrière de l’apophyse transverse indique que ce n’est point une des vertèbres qui précèdent la sixième ; c’est même la sixième cervicale qui a le corps le plus allongé et la carène la plus régulière. C’est aussi dans ces dernières vertèbres que l’obliquité du corps est le plus prononcée. 48 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES Lu vertèbre dorsale est parfaitement conservée, même son arc neural; il n’y a que l’apophyse épineuse qui manque. Les faces articulaires sont complètes. Le corps mesure d’avant en arrière huit centimètres et chaque face en mesure autant en travers, ce qui n’empêche pas que le corps semble être plus long que large. Ainsi cette vertèbre n’a pas plus d’étendue transversalement que d’avant en arrière. Les épiphyses sont complètement soudées. On voit sur le côté en avant une grande facette articulaire servant à l’articulation de la côte, aussi large que longue et qui occupe presque la moitié de la longueur de l’os. Le corps de la vertèbre est creusé en dessous et en arrière de cette facette. Sur le bord postérieur on ne voit aucune trace de facette de manière que la côte ne s’articule qu’avec une seule vertèbre. La face inférieure du corps de la vertèbre est régulièrement creusée en selle et l’on ne voit aucune apparence de carène. L’arc neural est très-solide comme dans les Morses et au-dessus de la face articulaire qui donne attache au tubercule de la côte, il y a une grande surface légèrement bombée en dedans et en avant surtout et qui a l’air d’une surface articulaire. On peut dire que l’apophyse transverse est fort courte, mais large et extrêmement solide. L’apophyse épineuse est brisée ainsi que la moitié postérieure de l’arc neural, mais on voit que celte apophyse n’a pu avoir une grande largeur. Elle est légèrement inclinée en arrière. L’arc neural se termine en avant par deux zygapophyses qui sont dans un parfait état de con¬ servation; la surface articulaire forme un cercle dont le diamètre mesure deux centimètres et demi. Cette vertèbre est une des dernières dorsales, probablement la douzième. Elle est représentée dans notre notice, vue de face et de côté ( 1 ). 11 nous serait difficile de dire en quoi elle diffère de la dorsale de iMorsc. Nous avons la moitié inférieure d’un humérus avec sa face articulaire complète, son épicondyle et son épitrochlée(pl. VII, fig. 1-2; pl. VIII, fîg. 1-2). L’os est fracturé de manière qu’on ne distingue que la partie inférieure de la crête deltoïdienne. La surface articulaire n’offre point de séparation entre la partie qui correspond au radius et celle qui correspond au cubitus et la petite tête de l’Iuimérus, où le condyle se confond avec la trochlée. L’épitrochlée est fort saillante, ainsi qu’on peut le voir pl. VII et pl. VIII, fig. 1. La cavité coronoïde est à peine distincte et la cavité olécranienne, est également peu développée. Cet humérus a les mêmes surfaces articulaires, les mêmes dépressions et jusqu’aux mêmes saillies que celui de YAlachtherium, mais par l’ensemble, cet os se rapproche davantage des Morses. Le sacrum est représenté par une vertèbre sacrée antérieure assez complète et une seconde qui la suit et qui est à moitié brisée. Ces deux vertèbres sont soudées entre elles, mais leurs limites sont bien indiquées par les trous sacrés qui livrent passage aux nerfs du même nom. Ce sacrum est représenté pl. VII, fig. 4, avec la partie postérieure en avant. Un os iliaque assez complet est remarquable par sa grande épaisseur et surtout par sa face externe qui est bombée au lieu d’être creusée. On voit la moitié de la cavité colyloïde. Cet os est figuré pl. VII, fig. 3. Il y a aussi un fragment de tibia avec portion de péroné. Une première côte, la seule que l’on ait trouvée, est figurée pl. VII, fig. 5. Elle est dessinée avec la partie sternale en avant. Deux os de sternum sont conservés. L’un est représenté pl. VIII, fig. 4. Il ne nous présente de remarquable que son volume. L’astragale et le calcanéum ont tous les deux une grande importance. L’astragale, représenté pl. VIII, fig. 3, est figuré avec la partie postérieure en avant; il est un peu mutilé en avant et en dehors, du côté opposé à celui par lequel il est représenté; il résulte de cette mutilation que le caractère principal qui le rapproche des Otaries est à peine visible. (*) Bulletin de VAcadémie royale de Belgique, t. XXXII p. 5, fig. 1 et 2. DES ENVIRONS D’ANVERS. 49 L’astragale est du membre droit. La face supérieure, qui s’articule avec le tibia, est fort large et présente une poulie pour s’articuler avec cet os. Sur le bord externe de la poulie, on voit une facette articulaire correspondant au péroné, mais qui est, comparativement, fort peu étendue. Le côté infé¬ rieur de l’os présente deux surfaces articulaires pour s’unir au calcanéum; la partie postérieure est incomplète. La tête de l’os qui s’articule avec le scaphoïde est fort large et bombée. Cet astragale, comparé à celui des Phoques, présente de très grandes différences. La surface arti¬ culaire est parcourue par une gouttière fort large qui se dirige d’abord en travers, puis, d’arrière en avant ; le corps s’étend en forme d’apophyse au-dessus de la face articulaire antérieure ; la facette correspondant au péroné est presque perpendiculaire, et derrière la poulie on voit encore un large talon. A la face inférieure, une gouttière profonde sépare obliquement les deux facettes articulaires. Cet os affecte tous les caractères de l’astragale des Otaries. Comparé à celui de l’ Alachthcrium, il est moins massif et montre quelques différences dans les surfaces articulaires, pour autant au moins que l’on puisse en juger par des os plus ou moins mutilés. Nous avons des calcanéums parfaitement conservés; ils mesurent jusqu’à vingt-cinq centi¬ mètres de longueur et sept à huit de largeur. La partie postérieure, celle qui forme le talon dépasse l’astragale en arrière et ce qui caracté¬ rise ces Phoques terrestres, c’est qu’il est en même temps tronqué obliquement. Les deux surfaces articulaires sont séparées nettement par la cavité sinueuse et la partie antérieure, qui correspond au cuboïde, est fort saillante et légèrement creusée; la partie de l’astragale qui s’articule avec le scaphoïde est très-bombée. Nous avons trouvé aussi un calcanéum fendu par un coup de bêche dans sa longueur, et qui est d’un tiers au-dessous de la taille du précédent. Le calcanéum est figuré pl. VIII, fig. 6. C’est celui de droite. Il est complet. Le talon est repré¬ senté en avant. La face supérieure est fort irrégulière; vers le milieu, on voit la face articulaire postérieure allongée et obliquement dirigée d’arrière en avant et de dedans en dehors. La seconde face articulaire, correspondant à l’astragale, a presque la même largeur, mais elle est moins longue. Elle est placée sur l’ apophyse interne clu calcanéum. Derrière la grande surface articulaire on voit un talon qui a le tiers de la longueur de l’os. La face articulaire antérieure correspondant au cuboïde n’offre rien de particulier. La voûte du calcanéum est bien prononcée. La face inférieure est inégale et légèrement concave. Comparé au calcanéum des Phoques, il ne diffère pas moins par son volume, ainsi que par un énorme talon aussi fort que long; l’apophyse interne qui soutient l’articulation antérieure de l’astra¬ gale est très-saillante et la surface articulaire antérieure du cuboïde est légèrement inclinée en dedans sans occuper tout ce côté antérieur. Comparé au calcanéum du Morse, nous trouvons le talon de YAlachtlierium plus mince et plus large, la face postérieure moins échancrée, la face articulaire du cuboïde moins large et plus creuse au milieu. Mais dans tous les deux en avant et en dedans, le bord de la saillie est creusé par une gouttière assez profonde. Cette gouttière est aussi très prononcée dans les Otaries, peu dans les autres Pinnigrades. Nous ne possédons pas le scaphoïde du pied de cette espèce, mais à en juger par les Otaries, cet os a aussi des caractères particuliers propres aux plantigrades. La face articulaire correspondant à l’astragale est régulièrement concave comme un plat. Nous sommes en possession de six métacarpiens, dont deux, le premier et le second, appartien¬ nent au membre droit et les autres au membre gauche. Les deux premiers sont ensuite suivis d’une première phalange du même côté provenant sans doute du même animal. Nous avons représenté (rois de ces os pi. VU, fig. 6, 6' et 7. Nous avons aussi vingt-deux os ou fragments d’os du pied postérieur, c’est-à-dire quatre phalanges I. 7 50 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES et dix-huit métatarsiens; parmi eux on reconnaît une première phalange du doigt interne et un second métatarsien. Ces deux os ont la même longueur, mais ce dernier est plus fort, surtout à son extrémité inférieure. Nous avons trouvé après le triage général un fragment de premier métatarsien, avec l’articulation tarso-métatarsienne complète, provenant d’un individu d’une taille gigantesque. La surface articu¬ laire qui correspond au tarse est longue de soixante-dix-sept millimètres et l’os à cette extrémité mesure soixante-douze millimètres de largeur. Les os de Trichecodon occupent deux plateaux au Musée royal; ils proviennent de la deuxième et de la troisième section, principalement des environs de Deurne, de Stuyvenberg et du fort n° 1 à Wyneghem. Ils ont été trouvés les uns dans le sable gris, les autres dans le sable rouge, comme nous l’avons déjà fait remarquer dans notre notice sur les Phoques d’Anvers. Les ossements de Trichecodon Koninckii portent, dans les collections du Musée royal, les numéros 955, 963, 1161, 1162, 1164, 1165, 1166, 1167, 1168, 1169, 1170, 1172, 1173, 1174, 1175, 1179, 1176, 1208. ALACHTHERIUM CRETSII, Du Bus. (PI. I, II, III, IV, V et VI, fig. 1-4.) Diagramme montrant les parties du squelette d ’Jlachlherium Cretsii, dont l’auteur a disposé. Vicomte Du Bus, Sur quelques mammifères du crue/ d'Anvers, Bull, de l’Acad. boy. de Belg., 2 e série, t. XXIV, p. oG2,1867. Van Beneden, Les Phoques de la mer Scalclisienne, Ibid., t. XXXII, p. 5,1871 . Van Beneden, Les Phoques fossiles du bassin d’Anvers, Ibid., t. XLI, p. 783,1876. Geuvais, Journal de zooloç/ie, t. III, n° I, p. oô, pl. XI. Dans un discours que le vicomte B. Du Bus a prononcé à l’Académie en 1867 (*), il a été question de ce genre pour la première fois. Il avait trouvé un os maxillaire inférieur assez complet avec la plupart de ses dents encore en place; ce maxillaire indiquait un animal supérieur en taille au Morse et tenant à la fois de ce dernier et des Otaries. Notre savant confrère était parvenu, à force de patient travail, à mettre à nu les dents et à dégager si complètement l’os, que l’on en découvre aujourd’hui les plus délicates saillies avec sa forme naturelle. Il était complètement incrusté quand on l’a mis au jour. Je m’acquitte avec plaisir d’un devoir de gratitude, dit le vicomte B. Du Bus, en donnant à l’espèce le nom dCAlachtherium Cretsii. Le nom spécifique est le nom du capitaine Crets, un des officiers du génie qui ont le plus contribué à faire connaître ce monde marin. (•) Sur quelques mammifères du craq d’Anvers, Bull, de l’Acad. boy. de Belg., 2 e série, t. XXIV, p. 562, 1867. DES ENVIRONS D’ANVERS. 51 On ne possédait d’abord de ce curieux Amphitérien d’autre os que le maxillaire; mais depuis lors plusieurs os importants ont dû être rapportés à ce même animal, surtout des dents, que l’on ne savait d’abord attribuer à aucun mammifère aquatique. Nous avons fait mention de cet animal en 1871, dans une notice sur les Phoques de la mer Scaldisienne (') et tout récemment dans une autre notice où nous avons résumé nos recherches sur les carnassiers amphibies du bassin d’Anvers. M. Paul Gervais a publié une figure réduite dans son Journal de zoologie, d’après le maxillaire qu’il avait fait dessiner au Musée de Bruxelles ( 2 ). Nous rapportons au même animal, c’est-à-dire à une seule espèce, le crâne que nous repré¬ sentons de grandeur naturelle, les vertèbres cervicales (cinquième, sixième et septième, cette der¬ nière représentée par deux échantillons), une quatrième lombaire, un fragment de sacrum, deux humérus droit et gauche, un fragment d’humérus droit, un fragment de cubitus gauche, un fragment de radius droit, plusieurs métatarsiens et mélacarpiens et plusieurs phalanges gauches et droits, un iléon, un fémur droit et un fémur gauche, deux tibias gauches, un astragale et des calcanéums. Plusieurs de ces os appartiennent à des animaux très adultes, mais il s’en trouve aussi qui indiquent le jeune âge; un humérus, un tibia, un métacarpien et un métatarsien sont évidemment d’un jeune individu. L 'Alachtherium Cretsii est un amphitérien plantigrade de grande taille, qui portait, comme le Morse, d’énormes canines au maxillaire supérieur, une canine ordinaire, deux incisives et quatre molaires, à couronne aplatie, au maxillaire inférieur. Il avait au moins cinq mètres de longueur. Il pliait, comme le Morse, ses pattes de derrière sous le ventre, contrairement à la position dans laquelle on représente ordinairement cet animal polaire. A en juger par la forme de ses molaires, il n’est guère douteux que sa nourriture ait été sem¬ blable à celle du Morse, c’est-à-dire consistant principalement en mollusques du genre Mya, en moules et autres bivalves que l’animal avale avec les fucus qui les portent. Nous allons passer ces os en revue en les comparant aux os des espèces vivantes; nous commen¬ cerons par la tête. En comparant la tête de Y Alachtherium avec celle du Morse, nous voyons des différences fort grandes dans la disposition de certains os. Vu par-devant (pl. I, fig. 1), le crâne de Y Alachtherium est beaucoup plus élevé et les parties latérales, formées parle temporal surtout, sont plus étendues en dehors et en dessous. Il en résulte que, par la partie supérieure, le crâne se rapproche plus de celui des Otaries et par les parties latérales du Morse. Le crâne est brisé en avant de manière que la boîte est restée entière, et les os frontaux ne prennent qu’une faible part à la formation de la cavité crânienne. Le crâne, vu par la face postérieure, montre l’os occipital s’élevant verticalement très haut comme dans certaines Otaries adultes, et les parties latérales et inférieures, formées par le temporal, sont très massives en même temps qu’elles descendent fort bas. Les deux condyles sont brisés, de manière que nous ne voyons pas le contour du trou occipital; mais, par contre, nous distinguons à l’inté¬ rieur une partie des parois formées par le sphénoïde et en avant par l’ethmoïde. Vu sur le côté (pl. II, fig. 3), le crâne présente l’aspect d’un casque; il est beaucoup plus élevé que dans le Morse et la conformation de toutes les régions est complètement différente. On voit fort bien le méat auditif. (') Les Phoques de la mer Scaldisienne, Bill, de l’Acad. roy. de Bel., t. XXXII, p. S, 1871. ( 2 ) Journal de zoologie, t. III, n° 1, pl. 11. 52 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES Tout le dessus du crâne, ainsi que la partie postérieure, est aplati et une bordure véritable sépare cette région supérieure, en avant des os de la face, sur le côté des os des tempes. Les os pariétaux sont fort bien indiqués au-devant de l’occipital et sont disposés de manière à res¬ sembler, au premier abord, à des os nasaux. Nous avons fait figurer dans leur situation respective la portion de crâne et le maxillaire infé¬ rieur, planche II, figure 4, pour montrer la grande extension que doit avoir la face encore inconnue de ce carnassier. Il n’est pas bien difficile de se figurer la conformation de la tète ; une grande partie du crâne est heureusement conservée, avec les régions latérales ou temporales; seulement les os de la face, avec les dents supérieures, font défaut. La forme du maxillaire inférieur indique une conformation toute particulière dans les os de la face. Le maxillaire inférieur ou la mandibule a été mis au jour au fort de Wyneghem en 1863. C’est bien, au point de vue systématique, la partie la plus importante du squelette. Nous n’avons qu’une moitié de mandibule, la moitié de gauche. L’animal n’est pas jeune; les deux branches restent donc séparées, contrairement à ce que nous voyons dans les Morses d’aujourd'hui et dans la plupart des Phoques et des Otaries. Cette mandibule s’éloigne aussi de toutes les autres par sa forme. Le corps, au lieu d’être hori¬ zontal, se divise en deux : une première moitié descend de haut en bas jusqu’à la symphyse; une seconde moitié s’élève dans toute la longueur de la symphyse. Cette seconde moitié est aussi plus large que l’autre. Les deux moitiés de l’os réunies forment un angle aigu au point de réunion et chacune des branches est légèrement concave par sa face interne. La symphyse est fort longue et large et sa surface occupe presque la moitié de la longueur du maxillaire. Le corps du maxillaire a une grande épaisseur, comparativement à la mandibule des congénères. La face externe est bombée dans la moitié postérieure de l’os, légèrement aplatie et même concave à sa partie antérieure. On voit un large trou mentonnier comme dans le Morse et deux autres moins grands près du bord antérieur; le premier est situé à l’origine de la symphyse. L’apophyse coronoïde est creusée à sa face externe depuis sa base en formant une excavation profonde pour loger le troisième chef du muscle masséter. Dans son Anatomie descriptive et comparative du Chat (*), Straus-Durckheim nomme celte fosse : fosse coronoïdienne. Elle est parfai¬ tement limitée en bas dans YAlachtherium. Derrière cette fosse, il y a une forte saillie en dessous du condyle articulaire. La face interne de l’os est légèrement concave dans la plus grande partie de son étendue et légèrement creusée dans la portion symphysaire. L’orifice du canal dentaire est placé loin en arrière au-devant d’une saillie apophysaire, apophyse anguline de Straus-Durckheim, qui s’observe dans tous les Phoques et qui se dirige d’avant en arrière et de dehors en dedans. L’apophyse coronoïde est fort élevée et plus étroite à sa base que dans les Morses et les Otaries. Le condyle articulaire est transverse et sa surface est légèrement échancrée au milieu et en avant. Il est séparé nettement de la saillie anguline dont nous avons parlé plus haut, par une échan¬ crure large et profonde, au-dessous de laquelle on en distingue une seconde beaucoup moins accentuée que dans les autres Phoques. Le condyle dépasse notablement les deux faces latérales de la mâchoire, surtout la face externe. (') IIerc. Straes-Dcrckheui, Anatomie descriptive et comparative du Chat, tijpc des mammifères en général... In-4°. Paris, 1845. DES ENVIRONS D’ANVERS. 55 Ces deux échancrures du bord postérieur de la mandibule se retrouvent dans tous les Amphité- riens, mais moins dans les Morses que dans les autres. La mandibule de YAlachtherium tient sous ce rapport plus des Otaries que de ces derniers. Les dents sont heureusement conservées. Il y a quatre molaires dont trois sont encore en place; la quatrième est représentée par son alvéole. Elles sont toutes à couronne simple légèrement usée, conservent une forme conique et sont légèrement inclinées en avant. Ces dents ressemblent à celles des Morses et on aurait de la peine à les en distinguer, si on les trouvait isolées. Elles sont toutes les quatre également espacées; la distance qui les sépare est un peu plus grand que chez eux. La canine ne diffère guère des molaires par la forme; elle est seulement un peu plus forte. Elle en est séparée par un espace un peu plus grand que celui qui sépare les molaires entre elles. La couronne de la canine est fortement usée à sa face interne. Au-devant et en dedans de la canine, on voit une grande incisive en place et une autre plus petite dont on ne voit que l’alvéole. Celte première incisive est à peine moins forte que les molaires; elle a une forme cylindrique et sa couronne est tronquée. On a trouvé, en Angleterre, d’énormes dents dans le crag que l’on avait môme attribuées au Dinothérium et qui proviennent probablement de l’animal qui nous occupe. Une dent canine est figurée dans les Proceedings de la Société géologique de Londres de 1865, pl. XI. On conserve au British Muséum l’extrémité libre d’une de ces canines qui est remarquable par son aplatissement. Elle est longue de vingt et un centimètres, large de quatre centimètres et demi à la base. En 1865, M. Ray Lankaster a fait mention de ces dents à la Société géologique de Londres; mais, comme on ne connaissait que le genre que j’avais établi sous le nom de Trichecodon, il avait cru devoir les attribuer à une espèce nouvelle, qu’il dédia à M. Huxley, Trichecodon Huxleyi. M. Ray Lankaster trouve avec raison que ces dents ne sont pas sans ressemblance, par leur forme comme par leur dimension, à des défenses de Dinothérium; on en connaît qui n’ont pas moins de trois pieds de longueur. Au lieu d’être arrondies comme celles du Dinothérium , elles sont légèrement aplaties et leur section transverse donne un contour elliptique plutôt que circulaire. Le savant docteur de l’Université d’Oxford a fait faire des sections de la dent et leur examen micro¬ scopique a démontré leurs affinités avec les Morses. Mais comme nous avons deux genres fossiles différents de Trichécidés, Y Alachtherium et le Trichecodon , auquel des deux ces grandes défenses appartiennent-elles? Nous pensons que c’est à Y Alachtherium, qui s’éloigne plus du Morse que l’autre, et avec d’autant plus de raison que nous possédons des défenses de Trichecodon qui ont un tout autre caractère. Nous avons vu à Londres en 1862 chez un marchand, des dents trouvées dans le crag, dont un fragment, long de vingt-cinq centimètres, mesurait, à sa base, dix centimètres de diamètre. Une autre dent, brisée en deux, mais dont la pointe est intacte, avait une longueur égale, mesurant sept et demi centimètres. M. Ray Lankaster nous apprend qu’il en a vu trois grandes provenant du crag rouge et quatre autres plus petites de Sutton et de Felixtown, dans la collection de M. Wincop. II en signale égale¬ ment dans la collection de son ami M. Packard de Westerfield, ainsi que dans sa propre collection. Jusqu’à présent, on n’a pas découvert de ces grandes défenses à Anvers. Eichwald a figuré également une forte dent qui se rapproche de celles-ci par sa forme, à en juger d’après le dessin; il l’a figurée dans le monde primitif de la Russie ( 1 ). Mais il est peu probable qu’il existe des restes de Trichecodons ou de Morse dans ces parages. 31. Paul Gervais, en reproduisant une partie du discours de Du Bus, concernant Y Alachtherium, (■) Eichwald, Urwelt Russland’s, Saint-Pétersbourg, 1840, pl. II, fig. ô.—La figure 1 de celte planche indique, nous parait-il, un fragment de maxillaire inferieur de Balénide et non de Ziphius. Si DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES exprime l’opinion, que cet animal tient d’une manière évidente du Phoque à trompe (.Macrochinus proboscideus ). Nous ne pouvons partager cet avis. Ce n’est pas seulement par le nombre d’incisives que les Alachtherium diffèrent des Macrochinus, mais c’est surtout par la forme, la grandeur et la direction de leurs trois sortes de dents, par l’angle que forme le bord inférieur de l’os vers le milieu de sa longueur, par l’énorme trou mentonnier et, enfin, par l’étendue considérable de la symphyse. Celte symphyse occupe une étendue presque égale à la moitié de la longueur de l’os, comme on peut le voir p. XI, fig. 1. Nous trouvons à Anvers trois os qui peuvent fort bien provenir d’un même sternum. Le plus grand a un diamètre de quarante-cinq millimètres et une longueur de huit centimètres. L’os est parfaitement circulaire. La seconde pièce est un peu plus longue et plus étroite et la troisième est encore un peu plus étroite, mais peu différente pour la longueur. Nous avons deux humérus, à peu près de même taille et provenant évidemment de la même espèce. Ce sont deux humérus gauches. L’un des deux est complet (pl. III, fig. 1-2 et pi. IV, fig. 1-2) : il mesure quarante-trois centimètres et demi de longueur et soixante-quinze millimètres de largeur dans la région la plus étroite. La tête repose sur un col véritable. Le grand tubercule s’élève au-dessus de la tête et se prolonge par une forte crête jusqu’à la cavité coronoïde. Le petit tubercule forme une éminence assez forte, de manière qu’il s’établit une gouttière profonde dont le bord externe constitue une véritable crête. C’est de l’humérus de Morse que cet os se rapproche le plus. La partie inférieure d’un autre humérus ne diffère que par une taille un peu moins forte (pl. III, ti<ï. 3-5). La dimension est en rapport avec le crâne et les autres os; la poulie mesure en travers quinze centimètres et, dans notre squelette de Morse de Groenland, cette même poulie ne mesure que sept centimètres. Cet os long a donc à peu près le double de celui de l’espèce vivante et l’on voit également la lèvre externe de la coulisse bicipitale se perdre tout près de la poulie. L’épitrochlée est énormément développée et son contour est semblable également au sien. Le canal supra-condyloïdien, pour le passage du nerf cubital, manque; nous ferons remarquer qu’on ne le voit ni chez le Morse ni chez les Otaries. La surface articulaire trochléenne est légèrement échancrée au milieu ; elle a un peu moins d’étendue en hauteur, en avant qu’en arrière. Le bord libre de la surface articulaire en arrière est presque droit, tandis que ce bord est arrondi chez le Morse. La cavité olécranienne est large et peu profonde et la cavité coronoïde est encore moins prononcée. Une poulie d’humérus, qui ne peut appartenir qu’à l’animal dont nous nous occupons, a été trouvée au milieu de vertèbres de Cétacés; le bout inférieur de l’os seul est conservé. Il est si volumineux que l’on a pu croire un instant qu’il provenait de quelque grand Cétodonte dont les surfaces articu¬ laires étaient corrodées. La poulie a un centimètre de plus en largeur que celle de l’humérus complet. Une partie supérieure de Radius est conservée et montre toute sa surface articulaire (pl. IV, fig. 5-6). Le col est peu distinct. La tête de l’os présente une cavité, plutôt ovale que circulaire, divisée par une grande surface creusée et une petite surface inclinée en dehors. La tête de l’os mesure sept centimètres et demi de largeur. La partie inférieure du cubitus (pl. II, fig. 5) est proportionnée au volume du radius. Elle est terminée en pointe et à peu de distance de son extrémité a une épaisseur de quatre centimètres. Une partie du bassin est conservée (pl. V, fig. 5) et l’on peut estimer le diamètre de la cavité cotyloïde à dix centimètres. C’est une portion d’ischion dans un trop mauvais état pour mériter une description. Nous avons seulement à faire remarquer que, malgré la taille, la soudure ne devait pas être complète avec les autres os du bassin. Un fémur complet (pl. V, fig. 5) se fait remarquer par des caractères qui le rapprochent beaucoup DES ENVIRONS D’ANVERS. DD île celui des Otaries. Il a vingt-sept centimètres en longueur et neuf centimètres en largeur vers le milieu du corps. 11 a de quatorze à quinze centimètres de largeur aux condyles, et seulement quatre centimètres d’épaisseur. La tête est volumineuse et très-nettement séparée par un col court et cylindrique qui s’unit au corps en formant un angle obtus. Le grand trochanter est fort large, moins élevé que la tête et sans cavité trocliantérique. Celte cavité existe au contraire dans les vrais Phoques. Le petit trochanter ne consiste que dans une tubérosité rugueuse, qui fait légèrement saillie sur le bord interne, vers le tiers antérieur de l’os. La face antérieure du corps est légèrement bombée, tandis que la face postérieure est ondulée par une dépression qui prend naissance sous le grand trochanter et se perd sous Je petit. Les deux condyles sont fort bien marqués, mais c’est à peine si l’interne est plus saillant que l’autre. La surface articulaire, correspondant à la rotule, est fort large et séparée de la surface articulaire des condyles, correspondant au tibia. Les condyles montrent entre eux une forte échancrure. Les deux condyles sont fort peu saillants, surtout si on les compare aux condyles des Phoques véritables. C’est un caractère propre aux Otaries. Un fémur d’un animal de la taille du Morse a été recueilli dans le crag en Angleterre, à Hap- pisburgh (Norfolk), mais nous ne savons s’il provient de Tricliecoilon ou d 'Alaclitherium. Il est déposé au British Muséum. Nous possédons la moitié supérieure d’un tibia gauche (pi. VI, fig. 1-3), dont les caractères se rapprochent beaucoup des Otaries. L’extrémité supérieure présente les deux surfaces articulaires correspondant aux condyles du fémur et sont séparées par une profonde échancrure qui n’est ni celle du Morse ni celle des Otaries. Ce tibia mesure douze centimètres de largeur d’un bord à l’autre des surfaces articulaires et mesure encore huit centimètres vers le milieu de la diaphyse. Aussi cet os est plus droit et plus massif que dans les Morses, les Otaries et les Phoques ordinaires. Il n’est pas creusé en haut comme chez ces derniers. Le tibia gauche d’un jeune individu est représenté planche Y, figure 8. Nous avons deux péronés, mais dans tous les deux la moitié supérieure est perdue. Cet os a deux centimètres de diamètre. L’astragale et le calcanéum sont deux os fort intéressants qui dénotent à eux seuls la grande différence qui existe entre les espèces terrestres comme les Otaries et les Phoques aquatiques. Nous avons deux astragales droits (pi. VI, lig. k) : ils mesurent vingt et un centimètres dans leur plus grande longueur; la face supérieure est fort large, légèrement creusée au milieu, au lieu d’être carénée comme dans les Phoques véritables; la tête de l’os est fort large, très-bombée et se sépare du corps par une profonde échancrure. Le col est étroit relativement à la surface articulaire. A la face inférieure, les deux faces articulaires sont séparées l’une de l’autre par un profond sillon. Cet os, comparé à l’astragale de Morse vivant, est notablement plus massif dans tous ses détails et la face articulaire, correspondant au scaphoïde, est beaucoup plus étendue. Le talon est brisé. II y a des différences assez grandes dans le sillon du milieu. Un premier métacarpien gauche (pl. II, fig. 6) se fait remarquer par sa dimension : il a vingt centimètres de longueur et sept centimètres de largeur à son extrémité. Nous avons reconnu de plus un métatarsien du pouce droit, accompagné des deux métatarsiens qui suivent; un de ces os mesure seize centimètres en longueur et sept centimètres à sa hase. On a aussi trouvé des phalanges complètes de cet animal et une de ces phalanges ne mesure pas moins de vingt centimètres en longueur et sept centimètres et demi de diamètre, en haut dans sa plus grande largeur. Le cerveau a été moulé par les soins de M. De Pauw, et nous pouvons par là apprécier les affinités des Alachlherium avec les autres Amphitériens. 56 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES Il y a une différence assez notable entre le cerveau des Otaries, des Phoques et des Morses, et de quel cerveau celui des Alachlherium se rapproche-l-il le plus? Comme il était à supposer, il tient le plus de celui des Morses. Comme dans ces derniers la scissure de Sylvius sépare profondément les hémisphères, et en avant ces hémisphères, tout en étant fort étendus en largeur, sont encore plus larges en arrière. Sous ce rapport, les Morses sont plus voisins des Olaries que des Phoques. Il en est de même des trous optiques qui sont rapprochés comme dans les Morses et les Otaries. Quant à la forme générale de l’encéphale, le cerveau de l’ Alachlherium ressemble plus au cerveau des Manalus par sa division et sa grande largeur, et diffère surtout de celui du Morse vivant par le peu de développement du cervelet. Dans ce dernier, nous voyons une tente au cervelet et une cavité distincte pour le loger, non en dessous, mais en arrière des hémisphères. La selle turcique, comme les apophyses clinoïdes, ne sont pas plus développées dans les Alachlherium que dans les Morses, les Otaries et les Phoques. Ces os ont été recueillis au fort n° 1, à Wyneghem ; au fort n° 2, à Wommelghem; à la 2 e sec¬ tion, fossé capital, près de Deurne et à la 3 e section près du même village. Le plus grand nombre vient du fort n° 1 et de la 3 e section. Au fort n° 4, à Wyneghem, on a recueilli deux humérus, un radius et un cubitus, un tibia, un fémur, des vertèbres cervicales (6 e et 7 e ), des vertèbres lombaires (4 e ), un crâne sans face, et un maxillaire inférieur. Au fort n°2, à Wommelghem, des vertèbres cervicales (5 e et 7 e ). A la 3 e section, près de Deurne, des phalanges, un tibia, un astragale et la portion de bassin. A la 2 e section, également près de Deurne, un humérus et un fémur de jeune animal. Ils proviennent des crags gris et rouge. En Angleterre, ces os sortent également du sable supérieur rouge... Plusieurs pièces originales importantes se trouvent dans le cabinet de MM. Win. Reed, Esq., de York, et d’Edw. Charlesworth. Les dents de ces colleclions ont été moulées. Les ossements d 'Alachlherium Cretsii portent dans les collections du Musée royal les numéros 199, 954, 956, 957, 958, 959, 960, 964 , 962, 4429, 1176, 4477, 4478, 4480, 4484, 4482, 4183, 4484. MESOTAR1A AMB1GUA. (PI. IX.) Diagramme montrant les parties du squelette de Mesotaria ambigua, dont l’auteur a disposé. Van Beneden, Les Phoques fossiles du bassin d’Anvers, Bull, de l’Acad. roy. de Belg., t. XLI, p. 785, 1870. Nous réunissons sous ce nom un certain nombre d’ossements et quelques dents qui dénotent un animal plus grand et plus fort que le Phoca groenlandica d’aujourd’hui, et ces ossements se rap¬ portent à un type qui n’est pas sans avoir quelques caractères communs avec les Otaries. C’est pour ce motif que nous proposons le nom de Mesotaria. Ce rapprochement repose surtout sur la confor¬ mation des dents et de quelques pièces du squelette. DES ENVIRONS D’ANVERS. 57 Nous n’avons pas, il est vrai, d’Otaries dans nos régions; mais ne perdons pas de vue qu’il en existe au nord du Pacifique, à la même latitude que la nôtre, et que ces animaux y sont même tel¬ lement communs qu’ils y font l’objet d’une pêche toute spéciale. On peut voir dans une publication récente la prodigieuse abondance de ces amphibies dans la mer de Behring. Ce n’est du reste pas la première fois que l’on signale la présence d’ossements d’Otaries en Europe. Tout récemment M. Delfortrie a décrit, dans les Actes de la Société linnéenne de Bordeaux, des dents recueillies dans les faluns des environs de Bordeaux et qu’il a rapportées aux Phoques à oreilles ('). Sans avoir vu les originaux nous ne pouvons toutefois nous défendre de l’idée que ces molaires et ces incisives pourraient bien appartenir à un animal fossile voisin du Pelagius monachus de la Méditerranée. Nous espérons que l’on pourra bientôt comparer avec le soin néces¬ saire ces dents intéressantes avec les espèces voisines vivantes et fossiles et nous ne serions pas sur¬ pris de voir rencontrer certaines affinités qui échappent jusqu’à présent. Le genre Palœophoca que nous décrivons plus loin n’est pas bien éloigné des Pelagius de la Méditerranée, et la dent qui a servi de type à YOlaria Oudriana n’est peut-être qu’une prémolaire de notre Palœophoca ; celle sur laquelle est établie YOtaria Leclercii, est peut être une incisive supérieure du même animal. Nous trouvons également une certaine ressemblance entre le genre Palœophoca et le curieux Pristiphoca de Paul Gervais. Il est question d’une autre Otarie dont l’humérus est conservé au Musée de l’Institut géolo¬ gique de Vienne; nous en avons parlé plus haut; mais on ne connaît pas son origine et l’on sup¬ pose seulement qu’il a été recueilli dans le lit du Danube. Aucune indication précise n’accompagne cette pièce qui se trouvait sans étiquette dans les rayons du Musée. Cet humérus nous a été confié, grâce au concours bienveillant du directeur du Musée de zoologie (k. k. Zool. Ilof-Cab .) M. von Pelzeln, et, d’après la comparaison que nous avons pu en faire à Louvain, il a tous les caractères d’une Otarie voisine de la Jubata, s’il n’appartient pas à cette espèce. Cet os, en tout cas, n’est pas fossile. Nous ne savons s’il y a lieu de mentionner ici la tête d’Otarie trouvée par Valenciennes sur la plage du département des Landes; il en est fait mention dans la Zoologie et la Paléontologie fran¬ çaises de M. Paul Gervais (p. 276). Jusqu’à présent on ignore comment cette tête a pu se trouver dans ces parages. Une dent de la molasse miocène d’Uzès, département du Gard, attribuée avec doute au genre Otarie et figurée par M. Paul Gervais sous le nom de Otaria? prisca (pl. VIII, fig. 8) est plutôt une dent de Squalodon. Nous ne trouvons donc jusqu’à présent aucune preuve certaine de l’existence d’Otaries fossiles en Europe. Sous divers rapports, la Mesotaria ambigua est une des formes les plus remarquables des Amphi- tériens; les dents les éloignent de tous les autres genres, les os indiquent un genre de vie particu¬ lier, et leur taille atteint une dimension peu ordinaire dans le groupe qui les renferme. Nous sommes en possession de la plupart des os du squelette, de plusieurs dents et d’un os pénial. Nous comptons en effet deux canines, trois molaires, sept vertèbres du cou et un axis, six dor¬ sales : une quatrième, peut-être une cinquième, deux sixièmes et deux septièmes; sept vertèbres lombaires : une première, une deuxième, une troisième, trois fois répétées et une quatrième; un os iliaque droit, et un ischion gauche, un fragment d’omoplate, quatre humérus droits et cinq humérus gauches, un fémur gauche et un droit, des fragments de six tibias différents, un fragment de péroné et quatre métatarsiens, dont deux droits et deux gauches. Dans la collection de M. Cogels d’Anvers, se trouve un humérus fort bien conservé. (*) A des cle la Société linnéenne de Bordeaux, t. XXVII, 1872. I. 8 58 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES Les dents conservées an Musée royal de Bruxelles sont au nombre de cinq, deux canines et trois molaires. Il est à regretter que nous ne les ayons pas trouvées en place dans l’os. Les canines sont une supérieure et une inférieure du même côté gauche. Les molaires sont toutes les trois du même côté également gauche. Elles ont été recueillies séparément. Ces dents sont entières et proviennent d’un animal adulte, à en juger par les racines. La couronne des canines est conique, sans rides et sans mamelons ou tubercules au collet. Le collet n’est bien distinct que par la différence qui distingue la partie couverte d’émail de celle qui ne l’est pas. La racine est à peu près droite, très-légèrement comprimée, de manière que chaque alvéole a une forme ovale. La racine a deux fois la largeur de la couronne. Nous avons représenté trois dents sur la planche IX, fîg. 1-3. Les dents des Otaries vivantes sont fort intéressantes et les trois sortes de dents sont faciles à distinguer, les deux incisives du milieu, par leur couronne en selle et leur racine comprimée; l’incisive latérale par sa taille et sa courbure, mais surtout par son énorme racine et un sillon longi¬ tudinal, qui pourrait la faire prendre pour une molaire antérieure de Squalodon. Les canines sont remarquables par leur dimension, leur courbure et la grosseur de la racine. Les molaires, au nombre de six dessus et cinq dessous, sont à une seule racine droite, fort peu comprimée et la dernière supé¬ rieure avec une apparence de double racine. Ce dernier caractère s’observe fort bien à la racine même, aussi bien qu’à l’alvéole. On a trouvé en Angleterre dans le crag des dents que l’on a attribuées à des Dauphins et que nous croyons devoir rapporter au genre qui nous occupe. Elles nous paraissent montrer en effet tous les caractères des Mesotaria. Une de ces dents porte le nom de Delphinus orcoïcles et une autre, celui de Delphinus uncidens. Elles sont toutes les deux déposées au British Muséum. Nous espérons que les illustres savants qui sont à la tète de cet établissement modèle auront bientôt l’occa¬ sion de réunir assez d’éléments de comparaison pour élucider celte question. La région cervicale est représentée par trois vertèbres différentes, un axis, une sixième et une septième. L’axis est assez complet et se fait remarquer par sa forme massive. L’apophyse transverse des deux côtés est brisée, mais la fracture indique quelle est fort solide à la base. L’apophyse odontoïde est très-épaisse; il serait difficile de dire si les surfaces articulaires antérieures du corps s’étendent jusqu’au-dessous d’elle, comme on le voit dans YOtaria. On peut dire que les surfaces articulaires occupent obliquement toute celte surface jusqu’à la base de l’os. L’apophyse épineuse est fort large à la base. La partie antérieure est mutilée. Le corps de l’os a une crête médiane à sa face inférieure, qui se termine en arrière par un tuber¬ cule. La surface articulaire postérieure est convexe. Celte vertèbre est figurée planche IX, fîg. k et 5. La figure k représente la vertèbre vue de face, montrant son apophyse odontoïde, et la figure 5 représente la même, vue de profil; on remarque la longueur du corps et l’étendue de l’apophyse épineuse d’avant en arriére. Nous avons figuré une des vertèbres cervicales (la sixième) qui est assez bien conservée (pl. IX, fig. 6). Elle se distingue par le corps fort allongé qui la rapproche des Otaries et par le diamètre transverse qui est plus grand que le diamètre vertical. La face inférieure du corps est creusée et carénée. Les apophyses Iransverses ont un large trou à leur base. L’arc neural manque. L’omoplate (pl. IX, fig. 7) n’est représentée que par un fragment qui montre toute la cavité glénoïde. Cette cavité a une forme ovale et se termine en avant par une espèce de bec coracoïde. En arrière le bord est de même légèrement courbé. La portion de bassin (pl. IX, fig. 8) est fort bien conservée pour la cavité cotyloïde surtout et les parties des os qui la forment; celte cavité est parfaitement sphérique avec un rebord peu sail- DES ENVIRONS D’ANVERS. 59 lant, non interrompu. Le sillon du fond s’ouvre en dehors par un orifice distinct et non par une échancrure. La fossette de la cavité cotyloïde est peu profonde et linéaire. L’os iliaque est peu allongé et sa surface externe est médiocrement creusée, c’est-à-dire, que la crête iliaque est peu saillante à l’extérieur. Tout cet os tient plutôt de celui des Otaries que des Phoques et indique un genre de vie plutôt terrestre qu’aquatique. L’ischion, comme le pubis, est fort large relativement à la cavité cotyloïde, puisque ces os ont un diamètre égal à celui de cette cavité. Le premier est le plus solide. La face interne de l’iléon qui s’articule avec les vertèbres sacrées, est fort large, très irrégulière et affecte une forme ovalaire. L’humérus (pl. IX, fig. 9-11) mesure en longueur jusqu’à dix-neuf centimètres et trois centi¬ mètres et demi en largeur vers le milieu. La gouttière bicipitale est fortement accusée comme dans tous ces animaux. Il n’existe pas de trou supra-condyloïdien. Ce qui nous paraît surtout important à faire remarquer, c’est que la crête extérieure de la gouttière bicipitale ne dépasse pas en hauteur la tête de l’os. Une saillie, en travers de la crête vers le milieu de sa hauteur, rapproche cet humérus plutôt de celui des Phoques que de celui des Otaries. En d’autres termes, le grand tubercule est en contre-bas du col. Le petit tubercule est brisé dans l’humérus principal que nous possédons. Le corps de l’os est comparativement peu épais. Les cavités coronoïde et olécranienne sont peu prononcées. M. Paul Cogels a recueilli à Deurne un humérus fort bien conservé; il pense que cet os sort de la même couche de sable gris qui contenait les restes de Palœophoca Nystii. Nous avons trois fémurs assez complets qui indiquent que cet os s’éloigne par sa conformation des autres Amphitériens. La tête, ainsi que le col, tiennent de l’Otarie, comme les condyles, et le grand trochanter, peu large, ne s’élève pas au-dessus de la tête de l’os. La tête est comparativement petite. La cavité trochantérique est profonde et étroite vers le milieu de l’os et tout contre le col. Ce caractère se rapporte à la position du membre postérieur qui rapproche ainsi des Otaries l’animal qui nous occupe. Les Mésotaries étaient moins aquatiques que les Phoques actuels. Le corps du fémur (pl. IX, fig. 12-14) est fort large et légèrement courbé en avant. II est à peu près deux fois aussi large par son diamètre transverse que par son diamètre antéro-postérieur. La ligne âpre ainsi que le petit trochanter sont à peine distincts. Les deux condyles sont très-développés, l’interne plus long, l’externe plus large, avec une échancrure intercondylienne large et profonde. La trochlée fémorale est fort large, plus étroite en avant et à limites nettement tranchées. Le bord externe au-dessus du condyle est comme une crête et se termine supérieurement par une tubérosité en pointe. Le fémur a quatorze centimètres de longueur, cinq de largeur dans la partie la plus étroite, et tous les os indiquent un animal supé¬ rieur en taille au Phoca groenlandica. En comparant les fémurs entre eux, nous pouvons dire que les Mcsotaria ont le fémur large et long, les Mesophoca large et court, les Monatherium étroit et tordu en haut. Nous avons recueilli, dans le guano des îles Chinchas, des fémurs de toutes dimensions; il n’est pas sans intérêt de suivre les changements de forme que cet os subit dans le cours de son évolution; un d’eux qui n’a pas plus de deux centimètres et demi de longueur est large d’un cen¬ timètre au milieu. Nous en avons un autre de sept centimètres et il est proportionnellement beau¬ coup moins étroit à sa partie moyenne. Cet os s’étend ainsi en largeur avec l’âge. Nous avons la partie supérieure du tibia (pl. IX, fig. 15-16) sans le péroné. Les deux facettes articulaires sont séparées par un sillon qui se bifurque en avant et qui donne insertion aux ligaments. La face antérieure est convexe en dedans, et légèrement creusée au-dessous de l’insertion de la rotule. La face postérieure est fort excavée en haut, mais moins profondément que dans les Phoques véritables; de manière que cet os tient également plus des Otaries. A en juger par la facette articu¬ laire, l’animal était encore jeune, malgré la dimension de l’os. CO DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES Les quatre os métatarsiens proviennent les uns du membre droit, les autres du membre gauche. Ceux du membre droit sont le deuxième et le troisième, ceux du membre gauche le premier ou celui du pouce et le dernier ou le cinquième. Ces os n’offrent rien de particulier qui mérite d’ètre signalé. Ils sont bien conservés. Ces os ont été recueillis à la deuxième et surtout à la troisième section ; il y en a aussi de Wommelghem, fort n° 2. Un humérus de la troisième section, trouvé près de Deurne, louchant à la limite de la deuxième et de la troisième section, était mêlé avec des restes de Ziphius. Dans la collection de M. Paul Cogels, nous avons remarqué un métacarpien et un humérus; ce dernier a été trouvé aussi à Deurne. Le Mesotaria ambigua occupe deux plateaux au Musée royal. Ces os ont été trouvés dans le sable gris et rouge, surtout dans le canal d’Herenthals. Ils portent dans les collections du Musée royal les numéros : 1151, 1211 , 1201, 1158, 1156, 1251, 1159, 1152, 1157, 1155, 1196, 1113, 1109, 1110, 1111, 1154,1124, 1130, 1160, 1171, 1252, 1202. PALÆOPIIOCA N Y STI I (*). (PI. IX.) Diagramme montrant les parties du squelelte de Palœophoca Nyslii, dont l’auteur a disposé. Van Beneden, Note sur une dent de Phoque fossile du crug d’Anvers, Bull, de l’Acad. roy. de Belg., 2 e série, t.XX, 2° part., p. 255, 1855. — Sur la découverte d’ossements fossiles faite « S'-lVicolas, Ibid., 2 e série, t. VIII, p. 125,1859. — Les Phoques de la mer Scaldisienne, Ibid., 2 e série, t. XXXII, p. 5,1871. — Les Phoques fossiles du bassin d’Anvers, Ibid., 2 e série, t. II, p. 797, 1876. Nous avons fait connaître une dent de Phoque dans les Bulletins de l’Académie en 1853 ( 2 ) et en 1859 ( 3 ), à la fin d’un rapport sur les ossements fossiles découverts à Saint-Nicolas par le docteur Van Raemdonck, nous proposâmes de leur donner le nom générique nouveau de Palœo¬ phoca. Quelque temps après nous avons fait mention d’un os métatarsien et de dents incisives, canines et molaires, que l’on avait mis au jour dans les environs d’Anvers et qui se rapportent au même animal. Nous avons figuré ces pièces dans les Bulletins de VAcadémie ( / ‘). (*) M. Nyst a rendu de si grands services à la paléontologie que tous les amis des sciences verront avec plaisir son nom attaché à une des plus belles espèces de nos terrains tertiaires. ( 2 ) Note sur une dent de Phoque fossile du cracj d’Anvers , Bulletins de l’Académie royale de Belgique, l ro série, t. XX, 2 e part., p. 255, 1855. (°) 1859. — Sur la découverte d’ossements fossiles faite à Saint-Nicolas , Rapport, Ibid., 2° série, t. VIII, p. 125. ( 4 ) Les Phoques de la mer Scaldisienne, Ibid., t. XXXII, p. 5, 1871. DES ENVIRONS D’ANVERS. 61 Nous avons fait encore mention de ce Phoque dans un article qui renferme le résumé de ce que nous avons observé chez ces mammifères amphibies (*). Ce Palœophoca Nystii avait au moins le double de la taille du Phoque vitulin de nos côtes, disions-nous dans cette notice. En faisant le relevé pour la Patria belgica des animaux vertébrés fossiles trouvés en Belgique, nous avons fait mention de quatre Phoques fossiles parmi lesquels figure le Palœophoca Nystii. Nous signalions sa présence en même temps à Elsloo et dans les environs d’Anvers ( 2 ). Le triage des ossemenls des environs d’Anvers nous a fourni un bon nombre de pièces qui se rapportent à ce genre et qui le font connaître à l’égal des Phoques les mieux établis. Nous possédons, au Musée de Bruxelles, un maxillaire inférieur gauche, deux fragments, l’un de maxillaire droit, l’autre de maxillaire gauche, deux canines supérieures droites, trois canines supérieures et une gauche, une molaire de chaque côté. Nous avons en outre deux os iliaques, dont un parfaitement conservé, deux fragments de côte, plusieurs humérus des deux côtés dont un très-complet, un deuxième métacarpien gauche, un fémur gauche, un fragment de tibia et de péroné droits et un quatrième métatarsien de gauche. Nous possédons dans notre collection à Louvain des dents de cette espèce qui proviennent les unes des environs d’Anvers, les autres de la Meuse à Elsloo. Indépendamment de ces pièces, nous avons vu, dans la collection de M. Paul Cogels d’Anvers, un beau fragment de maxillaire inférieur avec des dents en place et qu’il nous a autorisé à repro¬ duire (pl. X, fig. 1-2), une dent isolée, une vertèbre dorsale et une autre lombaire, un humérus, une apophyse olécranienne de cubitus et une phalange. Il se trouve plusieurs débris de Phoques, qui se rapportent à cette espèce, au pavillon de Harlem (aujourd’hui au Musée de Leide); ils ont été mis au jour en 1859 dans le voisinage de Swilbroek et de Koerboom en Gueldre. On en a trouvé également dans le crag en Angleterre, dans le lit de la Meuse à Elsloo, en Allemagne dans le voisinage d’Osnabruck, dans le midi de la France, en Italie, dans les environs de Naples et de Florence. Nous croyons pouvoir men¬ tionner, en outre, les dents figurées par Eschwege sous le nom de dents de Dauphins trouvées en Portugal. Nous allons d’abord faire connaître les os et les dents de la collection du Musée, et nous les compa¬ rerons ensuite aux ossements des autres collections dont nous venons de parler. Le fragment de maxillaire le plus complet consiste dans la moitié antérieure, planche X, fig. 3.-4; il a conservé ses dents et ses alvéoles. Ce qui le distingue surtout, c’est qu’il est massif et qu’il s’élève légèrement en avant à la hauteur de la symphyse; c’est en arrière qu’il est le moins élevé. Ce maxillaire se rapproche beaucoup de celui du Pelayius monachus. C’est le maxillaire le plus important; il a conservé trois molaires encore en place; la première n’est indiquée que par l’alvéole, comme la dernière ou la cinquième. On voit, au-devant des molaires, une alvéole très grande de dent canine, et au-devant d’elle et un peu en dehors, deux alvéoles d’incisives. Le fragment de maxillaire, conservé par M. Cogels, présente les mêmes caractères; il y a deux dents molaires en place fortement corrodées (pl. X, fig. 1-2). Le troisième fragment de maxillaire est moins bien conservé, il est brisé en arrière de la qua¬ trième molaire; il se distingue par des dents molaires plus rapprochées (pl. X, fig. 5). Il provient sans doute d’un animal plus jeune que les deux autres. (>) Les Phoques fossiles du bassin d’Anvers, Bulletins de l’Académie royale de Belgique, 2 e série, t. Il, p. 797. ( 2 ) Patria belgica, Encyclopédie nationale ou exposé méthodique de toutes les connaissances relatives à la Belyique. Bruxelles, 1873, vol. I, p. 562. 62 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES Ce fragment de maxillaire est fort intéressant; on voit une partie de la canine en place et der¬ rière elle, on aperçoit une première molaire représentée par une seule alvéole; derrière celle-ci, deux autres alvéoles placées très-obliquement, puis une molaire complète en place suivie de deux autres alvéoles d’une quatrième molaire. C’est la mâchoire qui reproduit le mieux le caractère parti¬ culier des dents, placées obliquement, des Monachus de la Méditerranée. Nous sommes en possession des trois sortes de dents et nous en avons même plusieurs exemplaires. Nous pouvons donc parfaitement apprécier leur système dentaire. Nous avons déjà figuré une incisive dans les Bulletins de l’Académie. Elle présente deux petits lobes vers le milieu de la hauteur de la couronne, qui est légèrement courbée comme une phalange unguéale. La racine a trois fois la longueur de la couronne; elle est droite et légèrement renflée vers le milieu. La collection de M. Paul Cogels renferme une dent incisive dont le gisement a été parfaitement constaté. Elle a été recueillie dans un puits creusé à la campagne de Madame van Havre à Deurne. Ce puits présente la coupe suivante qui m’a été communiquée par M. P. Cogels : A. Terre végétale.0 ra ,6o B. Sable jaunâtre.1,04 C. — grisâtre argileux.0,56 1). — — avec gravier, j ^ ü'. — ferrugineux. . . . j E. Couche fossilifère.0,11 F. Sable glauconifère avec lingules. La dent incisive sort de la couche E. Un humérus de Mesotaria ambigua est sorti de la même couche avec de nombreuses vertèbres de Cétacés. Nous connaissons plusieurs dents canines. Les premières sont celles dont il a été question dans un article sur les Phoques de la mer Scaldisienne (*). Ce sont deux dents du même animal et du même côté, une supérieure et une inférieure. La canine supérieure gauche (pl. X, fig. 6) est longue de cinq centimètres et demi et a toute sa couronne couverte d’une épaisse couche d’émail; la surface en est lisse et unie, et le collet forme un sinus assez profond. La pointe de la couronne est tronquée, ce qui nous permet de distinguer parfaitement les couches qui la composent. L’autre canine (fig. 5) est la dent droite de dessous ; elle est beaucoup plus délicate, moins longue et avec la couronne un peu plus courbée. Nous avons plusieurs molaires dans un bon état de conservation ; sauf la première, elles sont toutes à double racine presque droites. La couronne est nettement séparée de la racine par un bourrelet qui fait tout le tour; elle est formée d’un lobe principal et, d’avant en arrière, d’un ou de deux lobes plus petits. Une de ces molaires est représentée (pl. X, fig. 8). Nous en avons déjà représenté une dans les Bulletins de VAcadémie ( 2 ), dont le lobe médian occupe à peu près le tiers de la longueur totale, et deux autres lobes la moitié; la couronne porte en outre des tubercules de même grandeur qui semblent au premier abord dépendre du collet. Il existe donc, en somme, une différence fort grande entre ces molaires et celles des Phoques vivants. (*) Bulletins de l’Académie royale de Belgique, t. XXXII, pl. II, fig. 1-2. (2) Ibid., t. XXXII, pl. II, fig. 4. DES ENVIRONS D’ANVERS. 65 Nous connaissons ainsi le système dentaire de ces carnassiers amphibies, sous le rapport de la forme aussi bien que sous le rapport du nombre, du moins pour le maxillaire inférieur; ils ont deux incisives à la mâchoire inférieure, une canine assez forte, une première molaire, et quatre autres molaires à couronne dentelée en avant et en arrière, de manière que nous avons la formule suivante : Incisive \ canine { molaire ce qui est la formule des Phoques véritables. Pictet a reproduit dans son atlas les dents de ce Phoque (pl. VI, fîg. 1-3) sous le nom de Phoca ambigua. Nous sommes en possession de plusieurs os importants de cette espèce, parmi lesquels se trouve un humérus complet (pl. X, fîg. 10-12), à l’exception de son épiphyse supérieure et qui se dis¬ tingue par le peu de saillie et le peu de profondeur de la crête bicipitale. Le condyle interne n’est point percé pour l’artère cubitale et les cavités coronoïde et olécranienne sont peu prononcées. Cet os se rapproche du Pelagius monachus , surtout par sa face postérieure et de profil. Les os du bassin (pl. X, fig. 9) se ressemblent autant par leur dimension que par leurs carac¬ tères propres; la cavité cotyloïde a deux centimètres de diamètre. Le rebord est saillant et inter¬ rompu, et au fond de la cavité on voit une dépression ovalaire assez profonde; nous rapportons sans hésiter au même genre divers os de la ceinture pelvienne. L’iléon paraît fort peu creusé à l’extérieur, et n’a que peu de ressemblance avec celui du Pela¬ gius monachus. Le fémur (pl. X, fig. 14-16) est en grande partie corrodé; la tète et le col sont fort distincts, mais le grand trochanter ne paraît pas devoir s’élever au-dessus de la tète de l’os. Il est fort large au milieu. La trochlée fémorale en avant est fort distincte. Les tubérosités internes et externes sont incomplètes. L’échancrure intercondylienne est assez profonde. En comparant cet os au fémur de Pelagius monachus , on trouve que, par la tête comme par le col et le condyle interne, il se rap¬ proche plus du Phoque méditerranéen que de toute autre espèce. Les parties supérieures soudées du tibia et du péroné sont conservées (pl. X, fig. 17), et les deux facettes articulaires, ainsi que la fossette en arrière, le rapprochent également du Pelagius monachus, surtout par leur moitié postérieure. La face antérieure présente un sillon assez profond, mais il est plus profond encore à la face postérieure. En dedans du sillon antérieur, on voit une dépression de forme triangulaire dont la base est en haut. Les deux facettes articulaires se distinguent surtout entre elles par la grande étendue de l’externe. On a signalé, dans divers bassins géologiques, des Phoques qui se rapprochent sensiblement de celui qui nous occupe. Les premiers sont ceux que l’on a trouvés dans les Pays-Bas, les uns dans la Gueldre, les autres dans le Limbourg. 31. Staring avait réuni tous ces ossements dans le pavillon de Harlem. Ils portaient le nom de Phoca ambigua, nom qu’il avait adopté de IL von Meyer. Il y avait là une phalange unguéale de membre postérieur trouvée près de Swilbroek, des os métatarsiens, trouvés à Koerboom et divers fragments d’humérus et de fémur. Tous ces débris avaient été déterrés à côté d’os et de dents de Squalodon. Les dents et autres restes de Phoque, mis au jour à Elsloo près de Maestricht, également à côté de Squalodon et d'Halitherium , se rapportent au même animal. Nous avons des dents d’ElsIoo dans noire collection et M. Bosquet de Maestricht en possède également. Nous trouvons une grande ressemblance aussi avec les dents de Phoque de Baltringeu. Nous en avons eu entre les mains un certain nombre de la collection du révérend Probst, qui a bien voulu nous les confier pendant un certain temps. Nous avons reproduit plus haut (p. 36) quelques-unes de ces dents qui ont été recueillies également avec des restes de Squalodon et d'Halilherium. 64 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES Sous le nom de Phoca occitana, M. Gervais a établi une espèce éteinte, reposant d’abord sur une dent incisive supérieure externe trouvée dans les sables marins pliocènes de Montpellier. Il trou¬ vait de l’analogie entre cette dent et la dent correspondante du Stenorhynchus leptonyx des mers australes. M. Gervais a connu postérieurement une portion assez considérable de maxilliaire inférieur du même dépôt avec des dents molaires en place et il proposa, en 1852, d’établir un genre nou¬ veau sous le nom de Pristiphoca (*). Il faudra comparer avec soin nos débris de Phoque avec ceux du midi de la France, car ils pro¬ viennent d’animaux bien voisins, si pas identiques. La dent que M. Gervais a figurée sous le nom de Phoca Pedroni ( 2 ) et que j’avais cru devoir attribuer à un Ziphioïde, nous paraît provenir d’un animal bien voisin du genre qui nous occupe, si ce n’est pas du même animal. Dans un article sur les restes de poissons fossiles du pliocène de Toscane, M. Lawley fait men¬ tion de dents de Pristiphoca occitana, provenant du même horizon (pliocène inférieur) que celui d’Orciano et le sable marin de Montpellier ( 3 ). C’est le même animal, pensons-nous, qui a été trouvé à deux milles de Roccamorice (Naples), et qui présente des caractères fort intéressants. La tête, dans son ensemble, aussi bien que le maxillaire inférieur, offre une parfaite ressemblance avec notre Phoque d’Anvers. Il porte le nom de Phoca Gaudini et il est très voisin du Monachus actuel; tous les deux ont cinq molaires dont la première a une racine, les autres deux et la couronne présentent les mômes caractères. Il y a seulement cette différence, que les molaires se sont si fortement rapprochées, qu’elles ont dû se placer obliquement, de manière que les alvéoles, au lieu de se trouver sur une ligne droite, se trouvent sur une ligne en zigzag. Nous trouvons ces deux dispositions dans deux maxillaires d’Anvers. Une différence, en apparence importante, se remarque dans le nombre des incisives : le Monachus en a quatre à la mâchoire supérieure, tandis que le Phoca Gaudini en a six. Le maxillaire inférieur a la même hauteur et la même solidité, mais le bord supérieur ne se relève pas aussi près de la dernière molaire dans l’espèce fossile que dans l’espèce vivante. Aussi cet os est-il plus allongé dans cette dernière et les molaires ont pu régulièrement s’aligner. Les maxillaires d’Anvers correspondent parfaitement avec les deux Phoques précédents, par leur forme massive et surtout par la surface de la symphyse. Dans tous les autres Pinnigrades, ces sym¬ physes sont fort étroites et l’extrémité antérieure des maxillaires fort délicate. Il serait intéressant de comparer les ossements de Phoques de Neudôrff, près de Presbourg, qui ont servi de type pour l’établissement du Phoca rugidens, mais nous ne les connaissons pas assez pour émettre une opinion sur leurs affinités avec nos espèces. Le genre Palœophoca devra être comparé avec le même soin au Pristiphoca et au Pelagius de la Méditerranée et nous ne serions pas surpris de voir d’étroites affinités s’établir entre ces trois genres. U n’est pas impossible que des espèces très voisines aient habité, à la fin de l’époque tertiaire, la mer de crag ainsi que la mer qui a déposé les sables des environs de Montpellier de la Toscane et des Étals Napolitains. La première tâche des paléontologistes qui seront à même de réunir les éléments de comparaison, sera donc de se prononcer sur les affinités du Phoca ambigua, de IL von Meyer, des environs d’Osnabrück; du Phoca occitana ou mieux Pristiphoca occitana de Gervais, des sables marins (') Zoologie et Paléontologie françaises, Mém. acad. sc. de Montpellier, t. II, p. 208, 1852; Ann. sc. nat., t. XX, p. 281, pl. XIII, fig.8. ( 2 ) Paul Gervais, Zoologie et Paléontologie françaises, pl. XLI, fig. I. ( 3 ) Atti délia Societa toscana. Pisa, 1875, p. 66. DES ENVIRONS D’ANVERS. 65 miocènes de Paussan; du Plioca Gaudini, de Guiscardi, de Roccamorice (Naples); du Pristiphoca occitana, de Lawley, de Toscane. La plupart des os de Palæophoca proviennent à Anvers de la deuxième et de la troisième sec¬ tion, ainsi que du fort n° 2 à Wommelghem. Les ossements de Palæophoca ont été trouvés, après examen fait avec soin par M. Mourlon, dans le crag jaune et gris, d’après la couleur des os et le sable granuleux qui en provient. Ces os occupent un plateau qui comprend vingt-sept pièces. C’est l’humérus qui s’est retrouvé le plus souvent; nous en avons cinq droits et trois gauches. Ils portent au Musée les numéros 1026, 1077, 1078, 1082, 1083, 11 16, 1128, 1142, 1193, 1195, 1197, 1209, 1210. CALLOPHOCA OBSCURA , Van Ben. (P). XI.) Diagramme montrant les parties du squelette de Callophoca obscura, dont l’auteur a disposé. Van Beneden, Les Phoques fossiles du bassin d’Anvers, Bull, de l’Acad. rçy. de Belgique, 2* série, t. XLI, p. 799, 1876. Sous ce nom nous désignons un animal qui n’est représenté que par un petit nombre d’os, mais ces os ont tous des caractères qui ne permettent pas de les confondre avec d’autres espèces. Nous ne possédons du Callophoca ni dénis, ni maxillaires, ni crâne, ni vertèbres; nous en avons seulement un humérus droit et un gauche avec deux fragments, deux radius gauches, un ilion gauche, un fémur gauche, un tibia droit, un autre tibia de jeune, un astragale et un calcanéum droits. L’humérus presque complet est représenté planche XI, fig. 1-4. Nous l’avons figuré par les quatre faces. L’os est massif dans son ensemble. Il y a une faible dépression sous le col à la face postérieure. La grande crête deltoïdienne est brisée, mais on peut voir par ce qui en reste, qu’elle est très forte et qu’elle ne descend pas très bas vers la cavité coronoïde. La saillie de la tubérosité interne est très prononcée, et fort épaisse. La cavité coronoïde est peu profonde et de forme triangulaire. La partie externe de la poulie inférieure, correspondante au radius, ou facette radiale, a une surface étroite. La cavité olécranienne est détruite et la figure 2 représente l’humérus avec une cavité artificielle. Le trou supra-condyloïdien manque; on ne voit même pas une légère éminence, correspondant à la partie supérieure de l’orifice, comme dans les Otaries. Ce trou a été reconnu depuis longtemps dans certains Àmphitériens; il existe au-dessus du condyle interne, pour le passage de l’artère cubitale. Le Phoque vitulin, le Stemmatope à capuchon et beau¬ coup d’autres Phoques véritables l’ont toujours; le Pélagius de la Méditerranée et les Otaries ne l’ont jamais. Quel intérêt ce caractère présente-t-il sous le rapport systématique? Est-ce un caractère con¬ stant dans l’espèce, le genre ou la section? Nous croyons qu’il est fort important d’en tenir compte, quoiqu’il y ail des exemples de trous faiblement indiqués dans des individus d’une espèce qui habituellement n’en présente pas. Le profes- I- 9 et* DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES seur Jolin Slrulhers en cite un exemple remarquable ehez l’homme. Il découvre un jour, dit-il, dans une noie intéressante (*), ù la place occupée par le trou supra-condyloïdien, une apophyse assez déve¬ loppée pour qu’on puisse la distinguer à travers les parties molles. II s'assure ensuite que, des deux côtés, on observe la même disposition. Reconnaissant dans celte apophyse la partie supérieure du trou, dont la partie inférieure était complétée par un ligament, il voulut s’assurer si cette disposi¬ tion peu normale était propre seulement au jeune homme, ou s’il n’en trouverait pas de traces dans la famille; il fit faire des démarches auprès des membres de la famille. Le professeur Struthers a pu s’assurer que celte apophyse existe chez le père et chez quatre des sept enfants; dans trois d’entre eux elle n’existe que du côté gauche, et dans le quatrième, le sixième enfant d’après l’âge, elle existe des deux côtés, mais elle est néanmoins plus forte à gauche qu’à droite. Ce trou supra-condyloïdien existe encore dans la Loutre, le Blaireau et plusieurs carnassiers, mais il ne se trouve pas chez des rongeurs aquatiques comme le Castor. Revenons à l’humérus du Callophoca. A voir les figures 1 et 3, on croirait avoir sous les yeux un os fistuleux; cela n’est pas. Le milieu de l’os est occupé par un tissu osseux comme la périphérie, mais au centre il est plus ou moins spongieux, du moins à certaine époque de la vie. En faisant la coupe d’humérus d’âges différents, on voit que, dans les jeunes, le tissu est d’abord aussi dense au centre qu’à la circonférence et que, vers l’âge adulte, il devient spongieux au milieu, mais il n’est jamais fistuleux. Le radius est un des os le mieux conservés. Il est représenté planche II, fig. 3 et G. Comme dans tous les Amphitériens, il est aplati et fort large en bas, arrondi et fort étroit en haut, surtout au-dessous de la région désignée sous le nom de col. La tête de l’os a la forme d’un cylindre et la cavité circulaire, correspondante au condyle externe de l’humérus, occupe un peu plus de la moitié de la surface (fig. 6). A propos du radius, nous remarquons une différence fort grande entre l’époque de la soudure des épiphyses supérieure et inférieure. Nous avons sous les yeux un radius d'Otaria jubata, de vingt- deux centimètres de long et dont l’épiphyse inférieure n’est pas encore soudée. A la tête, on ne voit plus de trace de la réunion. Le fémur (fig. 8 10) a le grand trochanter brisé, ainsi que le condyle interne de la partie inférieure. Les surfaces articulaires surtout sont corrodées. Il conserve toutefois ses caractères distinctifs. Le col est peu étroit, le corps excessivement large, s’éloignant par ce caractère de tous les autres Phoques. Son diamètre antéro-postérieur, vers le milieu de l’os, n’a que la moitié du diamètre transverse. Nous rapportons à ce Callophoca un tibia, que nous avons figuré (fig. 13), mais dont les épi¬ physes sont enlevées. Il porte, au milieu de sa longueur, des lésions qui nous font supposer qu’il a été sous la dent d’un carnassier. La portion du bassin (fig. 7) est fort incomplète, mais, en tout cas, elle montre que la face externe de l’iléon est peu courbée et indique un animal moins aquatique que l’astragale ne semble 1 indiquer. On ne voit que la moitié de la cavité cotyloïde. Il est à regretter que nous ne possédions pas un os pénien de celte espèce fossile, pour voir s’il n’aurait pas quelques caractères de celui si bien connu de Pagophilus groenlandicus. L’os métatarsien, figuré dans les Bulletins de l’Académie (t. XXXII, pl. II, fig. 8 et 9) et attribué au Palœophoca Nystii, provient plutôt du Callophoca obscura. L’astragale ressemble parfaitement à celui des Phoques; la surface articulaire supérieure est divisée en deux faces, qui forment un angle saillant; la moitié interne correspond au tibia, l’autre mutilé. Il est représenté la partie postérieure en avant. (’) John Struthers, M. D. On liereditary supra-condyloïd process in mon. The Lnncet, 15 février 1875. DES ENVIRONS D’ANVERS. 67 Le calcanéum (fig. 12) est fort bien conservé. Il correspond parfaitement au précédent. Il se fait surtout remarquer par la largeur de son apophyse achilléenne. Cetle apophyse est plus étroite dans les Phoques véritables, et plus longue dans les Otaries. Nous possédons aussi à Louvain un calcanéum de cette espèce. En comparant les os que nous connaissons de cette espèce, avec ceux des Phoques d’Europe connus, c’est de ceux du Pagophilus groenlandicus qu’ils se rapprochent le plus. Sous le rapport de la taille, le Callophoca obscura a toutefois un tiers de plus que lui. Tous ces os ont été recueillis dans la troisième section. Us sortent tous du crag jaune d’après la couleur des os et le sable coquillier et graveleux qui en provient. M. Mourlon signale le crag gris avec doute. Les ossements de cette espèce portent au Musée royal les numéros H 12, 1119, 1127, 1135, 1136, 1143, 1198, 1199, 1214. PLATYPHOCA VULGARIS, Van Ben. (PI. XII.) Diagramme montrant les parties du squelette de Platyphoca vulgaris, dont l’auteur a disposé. Van Beneden , Les Phoques fossiles du bassin d’Anvers, Bule. de i.’Acad. roy. de Belgique, 2 e série, t. XLI, p. 799, 1876. Ce Phoque n’était pas des plus rares, à en juger par le nombre d’os que l’on a exhumés. Nous en comptons quatorze pièces. Ce sont un humérus gauche et un fragment d’humérus du même côté, deux fragments d’humérus droits, un bassin avec un iléon et une cavité colyloïde complète, un fémur gauche, un tibia de droite et un autre de gauche, un fragment de tibia de gauche, un fragment de péroné de droite, un deuxième métatarsien gauche, un quatrième métatarsien droit, et une seconde phalange postérieure. L’humérus (fig. 1-4) est entier, sauf les deux épiphyses supérieures de la tète et la grosse tubé¬ rosité. La soudure complète de l’épiphyse inférieure indique l’âge adulte de l’animal. Contrairement à ce que nous avons vu pour le radius, ici c’est l’épiphyse supérieure qui est la plus tardive. Les épiphyses des os qui forment le coude sont complètement soudées, quand les épiphyses à l’autre extrémité de chaque os sont encore tout à fait séparées. Cet os diffère des autres humérus par plu¬ sieurs caractères importants. La crête deltoïdienne est faiblement prononcée et c’est à peine si la lèvre de la gouttière bicipitale se recourbe pour former un canal propre au tendon du biceps. La lace externe de la crête est bombée au lieu d’être creuse et le bord de la crête ne se recourbe pas comme dans les Otaries. Le corps de l’os est fort grêle au milieu de sa diaphyse. La partie infé¬ rieure de l’humérus est fort large et présente de chaque côté une crête qui forme en dedans l’épicon¬ dyle, en dehors l’épitrochlée. Ce dernier condyle est très développé, forme une saillie considérable et montre un trou condyloïdien qui mériterait bien le nom de canal. Nous ne le voyons nulle part dans une position aussi oblique de haut en bas et d’arrière en avant. La cavité coronoïde est fort large et profonde. La surface articulaire est creusée au milieu par une gorge profonde qui sépare 68 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES la petite tête de l’humérus, correspondant au radius, de la surface articulaire du cubitus; la première est fort bombée et large, la seconde est, au contraire, étroite et inclinée depuis son bord interne. La poulie est fort étroite en dessous et en arrière, ce qui indique un cubitus avec une facette sigmoïde peu élargie. Le fémur (fig. 6-8), quoique mutilé, montre encore ses caractères propres dans toute leur évi¬ dence. La tête et le col manquent, mais on voit que le grand trochanter est fort élevé. On ne dis¬ tingue pas de cavité trochantérique. Il est excessivement large au milieu, fortement aplati d’avant en arrière et à peine voit-on sur le bord interne une crête qui est toujours très développée dans les véritables Phoques. Ses faces articulaires pour le tibia sont très saillantes et les deux condyles laissent entre eux une gouttière profonde. Nous avons deux tibias (fig. 9), mais ils sont tous les deux incomplets et sans épiphyses. Ils proviennent de jeunes animaux qui peuvent fort bien avoir été la proie des autres. Ce qui nous le fait supposer, c’est que nous trouvons des tibias d’Otaries, rongés par quelque carnassier, dans le même état au milieu du guano. Il n’y a que des carnassiers, mammifères ou oiseaux, qui aient pu arranger ainsi ces os. En l’absence d’épiphyses, nous n’avons à observer que les caractères généraux propres aux tibias. Le bassin (fig. 5), surtout par l’os des îles, offre un très grand intérêt. Ce dernier, comme nous l’avons déjà fait remarquer, est fort court dans les Phoques et recourbé en dehors, de manière que la face externe est creusée comme une valve de mollusque acéphale. Dans les Otaries, au con¬ traire, cet os est long, étroit, non recourbé et à face externe plutôt convexe que concave. L’iléon de Platyphoca ne ressemble ni à celui des premiers ni à celui des autres. Il est large, à face externe convexe plutôt que concave et sa crête ne se recourbe pas en dehors. La cavité cotyloïde est complète; son bord est saillant et le sillon du fond étroit. Une partie de l’ischion est conservée, mais il n’offre point d’importance pour faire apprécier le degré d’affinité qu’il présente avec les genres voisins. Comme pour les radius, nous remarquons que les épiphyses supérieures des tibias se soudent avant les épiphyses inférieures. Nous avons rapporté à cette même espèce un quatrième métatarsien gauche (fig. 10), et une deuxième phalange postérieure droite (fig. 11). C’est l’Amphitérien qui se rapproche le plus du Phoca barbata, mais, comme pour les autres espèces, les fossiles sont toujours un peu plus grands. Nous ferons remarquer que le Phoca barbata se nourrit surtout de moules, de crustacés et de cucumaria et que ses intestins sont toujours pleins de vers parasites. Ces os ont été recueillis dans la deuxième et la troisième section ; un humérus et un bassin viennent de Borgerhout, un fémur de Deurne. Ils sortent du sable jaune et gris, à en juger par leur couleur. Ils portent au Musée les numéros 1117, 1123, 1140, 1194, 1212, 1213. DES ENVIRONS D’ANVERS. 69 GRYPHOCA SIMILIS, Van Ben. (PI. XIII.) Diagramme montrant les parties du squelette de Gryphoca similis, dont l’auteur a disposé. Van Beneden, Les Phoques fossiles du bassin d'Anvers, Bull, de l’Acad. nov. de Belgique, 2° série, t. XLI, p. 799, 1876. Nous avons donné ce nom à une espèce fort distincte, voisine, par les caractères des os comme par la taille, de YHalichœrus grypus, que l’on trouve encore dans la Baltique et sur les côtes d’Écosse, comme nous l’avons vu plus haut. Après le premier triage, tous les os de cette espèce étaient encore confondus avec ceux du Palœophoca Nystii. Les os que nous possédons sont : deux premières lombaires, une troisième lombaire, deux sacrums, un fragment d’omoplate gauche, un fragment d’humérus droit, quatre autres d’humérus gauche, un fragment de radius gauche, un os iliaque et un iléon droit, avec trois fragments d’os iliaque, des fragments de fémur des deux côtés, un fragment de tibia droit, un astragale droit et un calcanéum gauche. L’omoplate est un des os les plus rarement conservés, et quand on le trouve il n’en reste ordi¬ nairement que la cavité glénoïde et le commencement de l’épine. Toute la partie supérieure est trop délicate pour résister. L’omoplate que nous possédons de cet animal est du côté gauche. La cavité glénoïde est entière; nous l’avons représentée planche XIII, fig. 2. Elle est concave, ova¬ laire, plus large en arrière qu’en avant et terminée par une apophyse coracoïde distincte mais peu développée. On voit l’épine (fig. 1) non loin du bord postérieur et tout indique qu’elle se ter¬ mine, comme dans les Phoques véritables, sans former autre chose qu’une épine étroite légèrement recourbée. On voit aussi que la fosse antérieure est fort grande et occupe presque autant de place que la fosse postérieure. Cet os est presque droit, très épais et n’est pas sans ressemblance avec l’omoplate de Phoca barbala. L’humérus le plus complet (fig. 3-6) est encore fort mutilé et il lui manque toute l’extrémité inférieure. Nous en voyons cependant assez pour dire que, par la forme générale, il se rapproche des Halichœrus grypus , et, par la face postérieure, des Callophoca. Nous ignorons si le trou supra-con- dyloïdien existe. La gouttière bicipitale est large et profonde; la crête deltoïdienne est brisée, mais on voit par les surfaces de la cassure que cette crête est très-forte. Le radius est trop incomplet pour qu’on en parle. 11 lui manque les deux extrémités. Nous l’avons représenté figure 7. Le bassin (fig. Il) est fort intéressant. La cavité cotyloïde a son rebord saillant avec une forte échancrure en arrière. La fossette du fond est fort large. L’iléon est très élevé et sa surface externe peu creusée, caractères par lesquels cet animal s’éloigne des Halichœrus. Tout fait supposer qu’il était moins aquatique que ce dernier. De tous nos Phoques, Y Halichœrus est celui qui a les iléons les plus courts et les plus recourbés en dehors. Nous avons la première vertèbre sacrée, mais elle est encore séparée et provient d’un individu plus jeune. Cette vertèbre est représentée planche XIII, fig. 12 et 13. 70 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES Nous possédons aussi une vertèbre lombaire bien conservée; elle est figurée pl. XIII, fig. 8 et 9. Elle provient d’un animal adulte. Le corps est un peu allongé et la face inférieure est carénée avec deux profondes fossettes latérales. La face supérieure est également carénée. Le canal vertébral est fort large. Les fémurs (fig. 14-16) ont perdu les trochanters et les condyles, de manière que l’on ne peut plus juger que de la forme de l’os. On voit qu’ils sont peu élargis et proportionnellement longs, sans subir, une forte courbure. C’est par cet os surtout que ce Phoque se rapproche des Halichœrus. Nous avons la partie supérieure d’un tibia (fig. 19-20) dont nous avons représenté séparément la face articulaire; une des facettes est fort grande relativement à l’autre. L’astragale (fig. 21), comme dans tous les Phoques véritables, au lieu d’avoir une poulie creuse, a cette surface articulaire convexe aux deux faces, dont l’une s’articule avec le tibia, l’autre avec le péroné. La crête de la poulie se trouve entre ces deux os. Derrière elle, nous voyons une apo¬ physe qui atteint la même longueur, à peu près, que le talon de l’astragale. L’astragale attribué au Phoca vilulinoïdes, que nous avons figuré dans les Bulletins de l’Académie (l. XXXII, pl. I, fig. 3), doit être rapporté plutôt au Gryphoca similis. Tous ces os sont tirés de la deuxième et de la troisième section, à l’exception d’un bassin qui est du fort n° 4 (Vieux-Dieu) et d’un fragment de fémur du fort n° 2 (Wommelghem). D’après la couleur des os et le sable qui en provient, ils se trouvent tous dans le crag jaune et le crag gris. Ces os sont indiqués au Musée sous les numéros 1079, 1081, 1084, 1086, 1087, 1091, 1093, 1097, 1120, 1133, 1134, 1143, 1242. Genre PIIOCANELLA , Van Ben. Van Beneden, Les Phoques fossiles du bassin d’Anvers, Bull, de l’Acad. roy. de Belgique, 2 e série, t. XLI,p. 799,187(3. Le genre Phocanella a été établi après les précédents. Plusieurs os avaient d’abord été mêlés avec ceux de Palœophoca et en ont été séparés, après un examen plus minutieux et un coup d’œil plus assuré. Les humérus et les fémurs se rapprochent le plus de ceux du Pagomys hispida et c’est à cause de ce rapprochement avec la plus petite de nos espèces vivantes, que nous avons proposé le nom de Phocanella. Quoique ces os ne soient pas très abondants, nous avons dû les répartir en deux espèces. Nous avons vu plus haut que le Phoca vitulina s’étend depuis les côtes de Norwége jusqu’à la mer Noire, mais le Pagomys hispida, dont ceux-ci se rapprochent le plus, s’étend depuis les côtes du Groenland, jusqu’au lac Baïkal. PHOCANELLA PUMILA, Van Ben. (Pl. XIV, fig. 1-12.) Diagramme montranl les parties du squelette de Phocanella pumila, dont l’auteur a disposé. Nous avons vingt-sept pièces, dont deux vertèbres lombaires, la deuxième et la cinquième, un humérus droit, cinq fragments de différents humérus droits et un gauche, un fragment de radius DES ENVIRONS D’ANVERS. 71 gauche, un os iliaque droit et un gauche, quatre fragments d’iliaque des deux côtés, deux fémurs droits et deux gauches, trois fragments de fémur droit avec deux fragments de tibia droit, un fragment de fémur gauche et un fragment de péroné droit. La vertèbre lombaire (pl. XIV, fig. 6) indique un animal de la taille du Phoque vitulin, mais moins robuste et plutôt plus petit. Le corps de la vertèbre est fortement caréné et l’apophyse trans¬ verse longue et grêle. L’humérus n’est pas robuste et la crête delloïdienne est surtout distincte par son peu de courbure et une surface externe à peine creusée. Il y a une échancrure pour l’artère cubitale. La grande tubérosité est au niveau de la tête. Nous avons représenté cet os planche XIV, fig. 1-4. Le radius (fig. 5) est représenté par son extrémité inférieure qui est fort épaisse et montre près de son bord supérieur les sillons qui logent les tendons des muscles. Le bassin (fig. 7) est fort incomplet. L’iléon n’est représenté que par sa base, ainsi que l’ischion et le pubis. La cavité cotyloïde est complète. La fossette du milieu est fort large au centre. Le bord est complet. Le fémur (fig. 9-11) a la tête nettement séparée par le col et le grand trochanter est large et s’élève au-dessus de la tète. En liais*, le fémur est étroit, en bas, au contraire, il est fort large et coupé obliquement, de manière que le eondyle externe s’élève beaucoup plus haut que l’interne. L’externe est aussi plus fort. Nous avons une tète de tibia soudée au péroné. La surface antérieure (fig. 12) se sépare par une crête longitudinale en une moitié interne bombée et une moitié externe creusée et un peu plus large que l’autre. La surface postérieure est fortement sillonnée. Tous ces os de Phoccinella pumila proviennent du crag jaune et du crag gris, d’après la couleur et l’aspeet roulé de quelques pièces. Ils ont tous été trouvés dans la troisième section et portent, dans les collections du Musée, les numéros 1080, 1088, 1089, 1090, 1098, 1098, 1106, 1200, 1203, 1204, 1205, 1206, 1207, 1225. PHOCANELLA MINOR. (Pl. XIV, fig. -13 23.) Diagramme montrant les parties du squelette de Phocanella minor, dont l’auteur a disposé. Van Beneden, Les Phoques fossiles du bassin d’Anvers, Bull, de l’Acad. uoy. de Belgique, 2 e série, t. XL1, p. 799, 1876. Parmi les ossements réunis d’abord au Palœophoca Nystii, nous avons trouvé, après le triage, plusieurs os qui se rapportent à une espèce plus petite que les aulres, mais conservant tous les caractères du genre Phocanella. Nous en avons trente-quatre pièces qui consistent en une treizième dorsale, une première et une cinquième lombaires, trois sacrums, deux humérus droits, neuf fragments d’humérus droits et gauches, deux os iliaques et un fragment, quatre fémurs droits, sept fragments gauches et droits du même os, un tibia avec deux fragments d’autres tibias gauches et droits, ainsi qu’un péroné droit avec un fragment du côté opposé et deux cinquièmes métatarsiens. 72 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES Une vertèbre dorsale est figurée planche XIV, fig. 17. Le corps est étroit et allongé, les apo¬ physes larges et la face inférieure carénée. Le sacrum est entier, sauf la portion neurale. Tout indique un développement complet. Ce sacrum est figuré dans les Bulletins de l’Académie (*). Le sacrum est formé de quatre vertèbres complètement soudées entre elles (fig. 18-19). Le bassin est représenté (fig. 20) par une cavité cotyloïde complète et un iléon dont la surface externe est creusée en avant et bombée au milieu. La cavité cotyloïde a le bord interrompu. L’humérus a la surface de la crête deltoïdienne (fig. 13-16) fort large et la face interne de cette crête aplatie, sinon bombée. Il a une gouttière supra-condylienne pour le passage de l’artère cubitale. Un fémur complet (fig. 21-23) nous montre une tête fort distincte séparée par un col étroit, un grand trochanter élevé, une cavité coronoïde fort large et un condvle externe plus fort et plus élevé que l’autre. Les deux condyles sont fort saillants. Le tibia (fig. 24-25) est complet. Supérieurement, il est soudé comme toujours au péroné et la surface articulaire présente un demi-cercle dont le milieu montre à peine la fossette pour les liga¬ ments. Inférieurement on voit la facette articulaire qui correspond à la face externe de l’astragale. A l’exception d’un bassin et d’un os métatarsien qui sont du fort n° 4 (Vieux-Dieu), toutes ces pièces sont de la troisième section. Elles proviennent des mêmes couches que l’espèce précédente et ont reçu les numéros 1085, 1092, 1094, 1099, 1100, 1101, 1102, 1103, 1104, 1105, 1107, 1215. PHOCA V1TULIN0IDES, Van Ben. (PI. XV.) Diagramme montrant les parties du squelette de Phoca vitulinoides, dont l’auteur a disposé. Van Beneden, Sur une découverte d’ossements fossiles fuite à S‘-Nicolas. Rapport, Bulletins de i/Acad. uoy. de Belgique, 2 e série, t. VIII, p. 125,1859. — Les Phoques de la mer Scaldisienne, Ibid., 2 e série, t. XXXII, p. 5, 1871. — Les Phoques fossiles du bassin d’Anvers, Ibid., 2 e série, t. XLI, p. 799,1876. Nous avons fait mention de ce Phoque en 1859( 2 ) d’après quelques ossements que nous avions recueillis à cette époque. Nous en possédions un atlas, un sacrum, un astragale, un cubitus et une phalange. Plus tard, nous en avons figuré quelques os ( 3 ) et, l’année dernière, nous en avons de nouveau fait mention dans notre article sur les Phoques fossiles du bassin d’Anvers (■*). C’est l’espèce la plus abondante de la mer Scaldisienne et elle se rapproche de l’espèce unique qui vit encore dans nos parages. (*) Bulletins de l’Académie royale de Belgique, I. XXXII, pl. I, fig. 2. ( 2 ) Ibid., 2 e série, t. VIII, 1859. U) Ibid., t. XXXII, 1871. ( 4 ) Ibid., t. XLI, 1876. DES ENVIRONS D’ANVERS. 75 A l’exception de la tète, le Musée royal est en possession de presque tous les os du squelette et quelques os se répètent un grand nombre de fois. C’est ainsi que nous avons jusqu’à quatorze fois le même fémur droit. Nous en connaissons cent vingt-six pièces. Nous comptons plusieurs vertèbres de la région dorsale, deuxième, troisième, quatrième et qua¬ torzième, plusieurs de la région lombaire (représentant toule la région), de,s sacrums, des os du sternum, une côte, une omoplate, des humérus droits et gauches, un radius et un cubitus, des os iliaques, des fémurs des deux côtés, des tibias et des péronés avec des os du pied. Les os proviennent pour la plupart d’individus adultes, mais il y en a aussi de jeunes animaux. La collection de M. Paul Cogels à Anvers renferme différents os du crâne avec des vertèbres et des os de membres. A Louvain, nous avons, indépendamment d’un humérus et d’un cubitus, un atlas parfaitement conservé, dont nous avons publié un dessin dans les Bulletins de l’Académie (’). L’allas est plus faible que celui du Phoque ordinaire dans la portion de l’arc neural qui occupe le milieu de l’os, disions-nous dans notre notice sur les Phoques de la mer Scaldisienne (_ 2 ). La sur¬ face articulaire qui correspond aux condyles de l’occipital est plus étroite et plus profonde, de manière que cette articulation est encore plus solide que dans le Phoque vivant. Les apophyses transverses, pour autant que l’on en peut juger par ce qui reste, sont moins solides que dans l’espèce vivante, et le trou qui se trouve à sa base pour le passage de l’artère verté¬ brale est relativement fort étroit. Nous avons trois vertèbres dorsales fort bien conservées (pl. XV, fig. 12-14). Elles ne présen¬ tent rien de particulier à signaler; elles proviennent d’un animal adulte. Les trois vertèbres lombaires que nous avons figurées (fig. 2-4-, 15-16) sont d’un animal égale¬ ment adulte, à en juger par leurs épiphyses et n’ont guère plus de la moitié de la taille des mêmes vertèbres du Phoque ordinaire. Le corps, pas plus que les apophyses, ne présente rien de particulier, si ce n’est que les apophyses transverses sont longues et délicates, et le corps un peu plus allongé. Le bassin est presque complet. La cavité cotyloïde est profonde et l’échancrure du bord fort large. Les os iliaques sont un peu plus élevés que dans le Phoque ordinaire et moins creusés à leur face externe (fig. 1 et 28). Le sacrum est formé de quatre vertèbres complètement soudées; les os iliaques sont restés libres (fig. 1 et 17-18). Le fragment d’omoplate (fig. 5) a sa cavité glénoïde complète ; elle est fortement creusée et l’apophyse coracoïde est assez développée. Le bord antérieur s’élève un peu plus haut que dans le Phoque ordinaire avant de se recourber et par là l’omoplate se rapproche davantage de YHali- chœrus. La saillie correspondant à l’acromion est aussi plus éloignée de la cavité glénoïde que dans le Phoque commun. Ce fragment montre fort bien l’origine des crêtes qui forment, l’une l’épine ordinaire de l’omoplate, l’autre l’épine secondaire, mieux indiquée dans les Otaries. On trouve cette bifurcation de l’épine bien marquée dans l’omoplate de YHalichœrus grypus. L’humérus (fig. 6-9) est droit, délicat, avec une crête deltoïdienne peu prononcée et la grande tubérosité peu proéminente. Le trou supra-condyloïdien pour l’artère cubitale existe, mais il est assez élevé au-dessus du condyle. Nous avons une tête de radius parfaitement ronde, à concavité simple (fig. 10). Le col est fort rétréci. La tubérosité bicipitale est très prononcée. Le cubitus est représenté par son olécrane. C’est un fragment fort intéressant (fig. 11). Il est fort large avec son apophyse pointue plus tournée en dehors que vers le bas. La facette sygmoïde est (') Bulletins de l’Académie royale de Belgique, t. XXXII, 1871. ( 2 ) Ibid. 74 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES disposée obliquement comme dans les Phoques et non pas transversalement comme dans les Otaries. On voit la facette radiale au-dessous de la précédente. Le fémur (fig. 19-21) est fort aplati, étroit en haut, large du côté des condyles et présentant pour l’ensemble une certaine ressemblance avec le fémur d 'Halichœrus grypus. Le grand trochanter est élevé au-dessus de la tête de l’os et la cavité trochantérienne est fort distincte. Les deux condyles diffèrent peu entre eux; seulement l’externe est notablement plus élevé que l’interne. La partie rolu- lienne est fort plate et bien marquée. Nous avons figuré un fémur (fig. 26-27), d’une forme en apparence toute différente, dont la diaphyse surtout a souffert du frottement. Un tibia avec péroné, provenant d’un animal adulte, affecte les caractères ordinaires; nous avons figuré deux autres tibias (fig. 22, 23, 24 et 25). La plupart des os de Phoques se trouvent isolés et mêlés avec les autres Thalassothériens; cet isolement est-il l’effet d’une dispersion véritable lors de l’enfouissement, ou est-il dû au mélange opéré par les ouvriers après leur extraction? Il serait difficile de le dire, mais on doit attacher d’au¬ tant plus de prix à certains os trouvés ensemble et provenant sans aucun doute du même individu, que ces exemples sont plus rares. C’est le cas de quelques os trouvés réunis dans le canal d’Hérenthals, entre le cimetière et la fabrique (fig. 1-4). Nordmann a eu trois cent cinquante ossements de Phoques des environs de Kertsch, qui se rap¬ portent à deux ou peut-être à trois espèces : une à membres longs, l’autre à membres courts; l’un est le Plioca ponlica, l’autre le Phoca maeotica, le premier étant voisin du Plioca vitulina, le second, du Pelagius monachus. Quand on compare certains os qu’il a figurés, le bassin, par exemple, avec celui du Pelagius monachus, on ne peut s’empêcher de trouver une grande ressemblance entre eux. Nordmann a eu ensuite entre les mains des restes de Phoques fossiles de diverses autres localités, situées dans le bassin de la mer Noire et qui se rapportent aux mêmes espèces. Le savant professeur d’Helsingfors a représenté sur trois planches ses principaux ossements, (pi. XXII à XXIV) (*), de Phoca. Il est à remarquer que la mer Noire nourrit aujourd’hui encore deux espèces de Phoques, le Plioca vitulina et le Pelagius monachus et que c’est précisément de ces espèces vivantes que les fossiles se rapprochent le plus. Eichwald a exprimé la même opinion que Nordmann au sujet du crâne do ces animaux. La planche XIII est consacrée à la représentation du Phoca pontica ( 2 ). Le Phoque fossile le plus anciennement connu, le Phoca lialitchensis du Musée de Pesth, décou¬ vert sur les frontières de la Hongrie et dont nous avons parlé plus haut, est également plus voisin du Vitulina que de toute autre espèce. Il en est probablement de même des os de Phoque de Hernals près de Vienne qui proviennent de la même couche de terrain que ceux de Hongrie. 11 faudra également comparer avec soin le Plioca rugidens de H. von Meyer, établi sur des dents trouvées dans le même bassin à Neudorff ( 3 ). Ces os occupent trois plateaux au Musée royal. Nous en possédons également, comme nous venons de le dire, plusieurs spécimens à Louvain et M. Paul Cogels a Anvers. Ils ont été presque tous trouvés dans la troisième section et à Borsbeek au tort n° 3. C’est dans le sable gris et rouge qu’ils ont été recueillis. Ils portent les numéros 1047, 1075, 1096, 1137, 1226, 1300. (1) Paléontologie Sud-Russlands, in-4°. Ilelsingfors, 1858. ( 2 ) Eiciiwald, Die JJrwelt Russlands. S l -Pétersbourg, 1840. ( 3 ) Neues Jahrbuch, 1845, 508. DES ENVIRONS D’ANVERS. 75 Genre MONA.THERIUM. (PI. XVI et XVII.) Van Benede.v, Les Phoques fossiles du bassin d’Anvers, Bell, de I'Acad. boy. de Belgique, 2 e série, t. XLI, p. 800, 1876. Après le triage général des os de Phoque, nous en avons trouvé un certain nombre qui se rappro¬ chaient les uns des autres; par plusieurs caractères et à cause de la longueur du corps des vertèbres et de quelques autres caractères, nous avons cru trouver des affinités avec le Pelagius monachus. En faisant ensuite l’étude comparée des os, nous les avons répartis en trois groupes dont nous avons fait des espèces. Qu’il nous soit permis d’attacher à l’une d’entre elles le nom d’un officier du génie, qui a si bien contribué à enrichir nos collections paléontologiques, le capitaine Delogne. MONATHERIUM DELOGNII. (PI. XVI, fig. 1-6.) Diagramme monlranl les parties du squelette de Monalherium Delognii, dont l’auteur a disposé. A en juger par les dimensions des os les plus importants, cette espèce devait avoir à peu près la taille du Phoca barbata, c’est-à-dire de la plus grande espèce, après le Morse et le Cystiphore. Ee Phoque est représenté par plusieurs ossements importants, parmi lesquels nous pouvons citer : une arcade zygomatique gauche, une quatorzième et une quinzième dorsale, une première lombaire, une première et une quatrième caudale, un sacrum et un fragment de sacrum, une sternèbre, un fragment de radius droit, un iléon gauche, un deuxième métatarsien gauche, un troisième et un quatiième métatarsien droit, deux cinquièmes métatarsiens droits et un gauche. Nous en trouvons en tous dix-neuf pièces. Les deux dernières dorsales et la première lombaire sont du même individu et ont été trouvées à Borgerhout. La veitèbie dorsale que nous avons fait figurer planche XVI, fig. \ , est fort intéressante; le coipsen est fort allongé; il est deux fois aussi long que large, et son diamètre transverse l’emporte sur son diamètre vertical. La face inférieure est carénée dans sa moitié antérieure et fortement creusée sur le côté, de manière à rendre la facette articulaire plus saillante par le creux qui se forme nous elle. Le tiou vertébral est fort large et le cerceau qui protège la moelle ne recouvre que la moitié de sa surface; 1 apophyse transverse est fort courte et massive, montrant une facette articu¬ laire fort large pour la côte. La première vertèbre lombaire n’est pas moins intéressante; nous l’avons figurée planche XVI, fig. 2; elle a la môme longueur que la vertèbre précédente, mais elle est plus large et le canal x ei tcbi al est devenu beaucoup plus étroit. La lace inférieure est sans carène, mais fortement creusée, surtout en dessous des apophyses transverses. Le plancher du canal vertébral, des lombaires sur¬ tout, au lieu d’être creusé comme dans les Dauphins, avec lesquels on pourrait les confondre, ce plancher, disons-nous, est plutôt bombé au milieu. 76 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES La vertèbre caudale (fig. 3) a le diamètre antéro-postérieur encore fort grand et le canal ver¬ tébral conserve une notable largeur. Ces vertèbres ne sont pas sans ressemblance avec les vertèbres correspondantes de Pelagius monackus. À l’exception du bassin du Phoca vitulinoïdes, celui de cette espèce est le bassin le moins incomplet que nous connaissions parmi nos amphitériens. L’os iliaque (fig. 3) est entier du côté gauche; il est droit, élevé, la face externe peu creusée et s’éloigne par là de tous nos Phoques vivants. La cavité cotyloïde est grande avec un rebord circulaire saillant. La portion de l’ischion se rapproche par sa conformation du Phoca vitulina. La première vertèbre sacrée est complète (fig. 6). Elle est fort massive et reproduit les caractères des vertèbres lombaires qui précèdent. La surface antérieure s’éloigne des autres Phoques vivants et fossiles. Ces os proviennent du sable qui renferme les Hétérocètes, c’est-à-dire du sable vert, à en juger d’après la couleur et l’aspect corrodé des os, les localités où ils sont recueillis et le sable graveleux verdâtre qui provient des os. Ils sont donc d’un dépôt plus ancien que toutes les espèces qui vien¬ nent d’ètre décrites. Ils ont été trouvés tous dans la deuxième et la troisième section ; fossé du ravelin, face droite et face gauche de l’ancien fortin n° 4, dans le nouveau canal d’Hérenthals et à droite de la caponnière 4-5. Ils portent les numéros 1408, 4145, 1139, 4153, 1179, 1216, 1217, 1227. MONATHERIUM AFFINE, Van Ben. (PI. XVI, fig. 7-14.) Diagramme montrant les parties du squelette de Monatherium affine , dont l’auteur a disposé. Les ossements de cette espèce ont été longtemps confondus avec ceux des espèces voisines. Nous avons cru pouvoir réunir sous ce nom une neuvième dorsale, une quatrième lombaire, un humérus complet droit, des fragments d’un autre humérus, un radius gauche et un fragment de cubitus droit, quatre phalanges des membres antérieurs, un fragment de fémur, deux fragments de tibia gauche, un astragale et un calcanéum droits. Il y a en tout dix-sept pièces. L’humérus que nous avons représenté (pl. XVI, fig. 7-9) est fort massif et la tète est compa¬ rativement grande; la crête deltoïdienne se distingue surtout par sa face externe qui est à peine creusée; ni le grand ni le petit tubercule ne s’élèvent au-dessus de la tète de l’os. Le trou supra-con- dyloïdien est fort distinct. La gouttière bicipitale n’est pas creusée très profondément. Comparées au Callophoca obscura , les surfaces de l’épicondyle et de l’épitrochlée ressemblent à cette espèce, ainsi que toute l’extrémité inférieure. Le radius est court et fort large dans sa moitié inférieure (fig. 11). On voit à peine les sillons pour loger les tendons des muscles; il ne ressemble pas complètement aux radius des autres genres. Nous avons un beau fragment de la partie supérieure du radius droit. DES ENVIRONS D’ANVERS. 77 Le cubitus n’est représenté que par son olécrane (fig. 10); la surface sigmoïde n’est pas en travers et présente une conformation particulière; la facette radiale est fort distincte et aussi large que longue. Il n’est pas sans ressemblance avec l’olécrâne du Phoca groenlandica. Un tibia assez complet montre la fracture du péroné. Les facettes articulaires, correspondant aux condyles du fémur, sont fort bien dessinées (fig. 14); la facette interne n’a que le tiers de l’étendue de l’autre. La fossette pour le ligament est peu profonde. Cet os présente la partie creusée de la face antérieure conformée d’une manière particulière, si on le compare aux espèces voisines. L’astragale a sa face articulaire à dos d’âne (fig. 12); comparée aux autres astragales, cette face présente une conformation spéciale. Le talon est comme dans d’autres espèces. Le talon du calcanéum est long (fig. 13), et l’ensemble de l’os avec son talon et ses faces articu¬ laires s’éloigne des Phoques voisins. Les phalanges n’ont pas été représentées; nous en avons quatre; elles proviennent du membre antérieur. Ces os sont tous de la troisième section, près de la porte de Turnhout, de l’emplacement de l’ancien fortin n° 1, du fossé du ravelin, près de l’aqueduc du canal d’Hérenthals, et du nouveau canal d’Hérenthals. Ils proviennent également du sable vert qui renferme les restes d’Hétérocètes, à en juger par l’aspect et la couleur des os, ainsi que par les localités et par le sable qui s’en détache. Ils portent les numéros 1114, 1118,1121, 1122, 1125, 1126, 1131, 1190, 1218. MONATHERIUM ABERRATUM, Van Ben. (PI. XVII.) Diagramme montrant les parties du squelette de Monatlierium aberration, dont l’auteur a disposé. Nous avons établi cette troisième espèce à cause des caractères de certains os et de la diffé¬ rence de leur taille; ils indiquent un animal plus grand que le Pelagius monachus. A l’époque du premier triage des restes de Phoques, tous ces os étaient dispersés et rapportés à des espèces différentes. Nous en trouvons au Musée royal une vertèbre cervicale (la cinquième), une dorsale (la cin¬ quième), une lombaire (la première), un os du sternum (le quatrième), un fragment de côte, un humérus droit, un métacarpien droit, un ischion droit, deux péronés mutilés, un astragale gauche, deux calcanéums, un droit et un gauche, deux scaphoïdes, également droit et gauche, un cuboïde droit, plusieurs métatarsiens et des phalanges des deux côtés et un os de pénis. Nous en trouvons en tout quarante-six pièces. La cinquième cervicale (fig. 9) a le corps fort allongé ; une très forte carène divise sa face infé¬ rieure dans toute la longueur; le cerceau neural a sa base réunie à l’apophyse transverse. Le trou vertébral, qui loge l’artère du même nom, entre dans un canal qui s’étend dans presque toute la longueur du corps de la vertèbre. Le corps de la cinquième vertèbre dorsale est à peu près aussi long que large (fig. 7-8); sa face 78 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES inférieure est sans carène et légèrement creusée au milieu. Il est un peu plus large que haut. Le canal vertébral esl fort large et le plancher est divisé par une crête dans le sens de la longueur. Les facettes articulaires pour la tête des côtes sont fort bien marquées en avant et en arrière, ainsi que les facettes des apophyses articulaires. Nous avons aussi une première lombaire, à corps allongé (fig. 9), et trois caudales du même individu (fig. 15-17). L’humérus (fig. 1-4) de celte espèce est bien conservé. Il ne manque que la crête deltoïde. Il a le trou supra-condyloïdien comme les autres espèces du genre, mais la poulie comme les condyles offrent une disposition particulière. La partie supérieure de l’os ressemble au Monatherium affine. L’astragale (fig. 14) est de gauche. II a sa surface articulaire principale à dos d’âne comme dans tous les Amphithériens aquatiques. Nous avons trouvé quelques os réunis qui proviennent d’un même individu : un fragment de péroné (fig. 13), bien conservé dans toute sa partie inférieure, un troisième cunéiforme avec le deuxième et le troisième métatarsien du membre gauche (fig. 12). Nous avons un cinquième métatarsien (fig. 11), suivi de sa phalange (fig. 10), provenant aussi du même individu. Mais le plus grand nombre d’os, provenant du même animal, sont représentés figures 15-29. Ce sont d’abord trois vertèbres caudales (fig. 15,16 et 17), un calcanéum (fig. 18), deux scaphoïdes (fig. 20), un cuboïde (fig. 19), deux premiers métatarsiens (fig. 22 et 23), un droit et un gauche, un deuxième métatarsien de droite (fig. 21), un troisième de gauche, un cinquième de droite, et des phalanges postérieures de droite et de gauche, avec un os pénien (fig. 29). Tous ces os sont représentés à droite de la planche XVII. On connaît l’os pénien de plusieurs espèces et, comme on pouvait s’y attendre, il y a des diffé¬ rences très grandes de taille et de forme. Nordmann a fait connaître celui du Phoca pont ica. L’os pénial du Monatherium aberratum a une longueur de treize centimètres et une épaisseur de treize millimètres vers le milieu de sa longueur. Il est légèrement courbé, un peu élargi à sa hase et conservant à peu près la même épaisseur dans toute sa longueur. Il s’éloigne beaucoup de celui du Phoca groenlandica et se rapproche pour la taille et la grosseur de celui de Phoca vitulina. Ces os ont été recueillis à Borgerhout, près de l’ancien fortin n° 1, à gauche de la caponnière établie sur le canal d’Hérenthals, entre les caponnières 4 et 5, près de la lunette 1, non loin de Deurne (les os réunis pl. XVII), dans le fossé du ravelin, en face de la fabrique, sur le canal d’Hérenthals, près de la porte de Turnhout; tous ces os proviennent de la deuxième et de la troi¬ sième section. Ils se trouvent dans la couche de sable qui renferme les Hélérocètes. Ils portent les numéros 1132,1138, 1144, 1187, 1188, 1189, 1191, 1212, 1219. Genre i»IU)PlfOCA. Van Beneden, Les Phoques fossiles du bassin d’Anvers, Bull, de i.’Acad. roy. de Belgique, 2 e série, t. XLI, p. 802,1870. Nous avons cru devoir proposer ce genre pour un certain nombre d’os à caractères distincts. Nous ne pouvons leur donner une place parmi aucune des formes précédentes. Les vertèbres sont fort allongées et prennent un caractère particulier; l’humérus a une des lèvres de la coulisse bicipitale toute droite et comprimée; le fémur est recourbé, étroit en haut, très large en bas. Les iléons sont élevés et droits. Nous avons réparti ces os en deux espèces à peu près de même taille; l’une d’elles n’est représentée que par quelques pièces. Ces Phoques diffèrent un peu plus des espèces vivantes DES ENVIRONS D’ANVERS. 79 que les précédentes qui proviennent du sable gris et jaune pliocène à Plésiocètes et du sable vert (miocène supérieur) à Hétérocètes. Leurs ossements ont été extraits des sables noirs (diestien) à Mésocètes qui, par leur faune concbyliologique, se raccordent à un terme plus ancien de la série miocène supérieure. Nous appuyant sur l’autorité non contestée de M. Nyst, nous synchronisons ces sables noirs d’Anvers à Pectunculus pilosus aux faluns de la Touraine et aux couches miocènes du bassin de Vienne. C’est également l’opinion de M. Mourlon dont nous avons cité plus haut les recherches étendues sur les dépôts d’Anvers et qui nous a fourni les éléments du classement strati- graphique des vastes collections que nous décrivons. PROPHOCA ROUSSEAU!. (PI. XVIII, fig. Ml.) Digramme montrant les parties du squelette de Prophoca Rousseaui, dont l’auteur a dispose. Nous avons dédié cette espèce au colonel du génie Rousseau dont le bienveillant concours a con¬ tribué à fonder un Musée paléontologique d’animaux thalassothériens, qui n’a pas son égal au monde. Nous en trouvons treize pièces de ce Prophoca : quatre vertèbres lombaires, un bassin avec les vertèbres sacrées, un fragment d’humérus et de radius, un fémur, deux fragments de tibia et un de péroné. Nous avons trouvé plusieurs os réunis, trois vertèbres et un sacrum avec les autres os du bassin, qui nous semblent provenir du même animal. Les trois vertèbres appartiennent à la région lombaire. Les faces articulaires du corps sont dis¬ posées obliquement. Elles sont légèrement creusées vers le milieu. La face inférieure est plus régu¬ lièrement creusée que ne l’indique la figure k de la planche XVIII. Le canal vertébral est fort large et la face supérieure du corps, qui forme le plancher du canal, est légèrement carénée au milieu. Les apophyses transverses sont fort larges et la facette articulaire postérieure fort grande. Les dernières vertèbres lombaires offrent encore de particulier, que l’on aperçoit à leur face inférieure sur les bords du disque, une facette qui rappelle parfaitement les facettes des os en V. Si ce n’est que ces vertèbres sont en place, on croirait avoir sous les yeux des premières vertèbres caudales. L’humérus (fig. 1-2) se distingue de tous les autres, parce qu’il est plus robuste et plus droit; sa crête deltoïdienne est peu courbée et la face interne est à peine creusée, tandis que, dans tous les autres Phoques, elle présente une fosse profonde. La gouttière bicipitale est aussi moins profonde et terminée en haut par la grande tubérosité qui est très forte et élevée. La face postérieure n’est pas creusée sous le col comme dans les autres genres. L’extrémité inférieure manque, ainsi que la tète. Nous avons un radius presque complet (fig. 3). La tête est notablement inclinée en dehors, le col fort distinct. On distingue, mais faiblement, la tubérosité bicipitale. Son épaisseur est à peine plus grande vers son bord interne que vers le bord externe, du moins à son extrémité inférieure. Nous ne voyons pas les coulisses pour les tendons. L’os n’est pas complet à son extrémité carpéenne. Le fémur (fig. 8-10) est fort remarquable; il est fort étroit en haut sous le grand trochanter, 80 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES s’élargit considérablement en bas et, sans avoir subi une torsion, il se courbe de manière que le bord interne devient convexe et que le condyle externe s’élève au-dessus de l’autre. La cavité du grand trochanter est très profonde. Le corps de l’os est légèrement bombé en avant. La tubérosité interne est peu saillante et c’est à peine si elle remonte en crête. La tubérosité externe fait saillie. Le condyle externe déborde l’interne. L’échancrure intercondylienne est large et profonde. La poulie rotulienne est surmontée d’une large fossette. L’iléon (fîg. 7) est complet. Il est fort élevé au-dessus de la cavité cotyloïde, peu recourbé en dehors et la surface externe plutôt convexe que concave. Le rebord de la cavité cotyloïde est saillant et interrompu en avant. La cavité est profonde et la fossette du fond très large. L’ischion et le pubis sont brisés. Le sacrum a les apophyses transverses de la première vertèbre larges et massives pour s’articuler avec les iléons. Le canal vertébral est encore fort grand, comme on peut le voir dans la figure 6. Le tibia (fig. 11) est presque droit et l’insertion du ligament qui tient la rotule est fort bien indi¬ quée. Le péroné est brisé jusqu’à sa base. Les facettes articulaires n’offrent rien de particulier. Ces os ont été recueillis dans la deuxième et la troisième section. Us viennent du fossé capital, près de Deurne, de Vieux-Dieu (Moortsel), fort n° 4-, et de Boorsbeek avec un signe de doute. D’après la couleur et l’encroûtement des os et le sable glauconifère qui en provient, tous sortent du diestien. Les vertèbres lombaires avec le bassin ont été trouvées dans un sable noir à odeur sul¬ fureuse, d’après M. Mourlon. Les ossements portent dans les collections du Musée, les numéros 1147, 1149, 1150, 1192. PROPFIOC.Y PROXLMA, Van Ren. (PI. XVIII, fig. 12-16.) A en juger par la dimension des os, cette espèce avait à peu près la taille du Phoca groenlandica. Nous en possédons cinq pièces : un fragment d’humérus droit et un autre gauche, un cubitus gauche, un radius du môme côté et un fragment de péroné droit. L’humérus (fig. 12-14) est droit comme dans l’espèce précédente et s’éloigne par là des espèces vivantes. La tête est comparativement grande et le col peu prononcé. Le grand tubercule est cor¬ rodé, mais il n’a pas l’air d’avoir eu le développement ni la hauteur des Phoques ordinaires. La crête deltoïdienne est droite, de manière que la gouttière bicipitale est peu profonde et peu ondulée. La face externe de la crête est creusée jusqu’au col. Le canal supra-condyloïdien est complet. La tubérosité interne s’élève en crête mince vers la face postérieure. L’os est brisé à la hauteur de la trochlée. La partie supérieure et postérieure de l’os ressemble particulièrement à l’humérus du Gryphoca similis. Le radius (fig. 15) est complet, à l’exception de l’extrémité carpéenne qui est corrodée. La con¬ cavité est simple, la tète ronde et tronquée obliquement, de manière que le bord interne est plus élevé que l’externe et légèrement comprimé. Le col est fort peu distinct, aussi bien que la tubé- DES ENVIRONS D’ANVERS. 81 rosité bicipitale. Son bord externe ne forme pas une courbure brusque et il n’est pas plus mince en haut que le bord externe. Ce bord ne s’amincit qu’à l’angle qu’il forme près de son extrémité libre, qui est comparativement large. La surface interne de l’os est plate dans presque toute sa longueur, la surface externe légèrement bombée et montrant en bas les coulisses pour les tendons. La surface articulaire pour le scaphoïde manque, ainsi que l’apophyse styloïde. Ces parties sont corrodées. Par sa face interne cet os ressemble au Callophoca obscurci. Le cubitus (fig. 16) est du côté gauche; par sa face externe, il ressemble à celui de YHalichœrus grypus. L olécrane manque; il est brisé à la hauteur de la surface articulaire de l’humérus. L’os est presque droit, fort large à son extrémité carpéenne, au point qu’il y a peu de différence entre les deux bouts. Il est très comprimé à sa partie supérieure. L’extrémité inférieure est large et se termine par une facette radiale fort large. Cette extrémité est large et non terminée en pointe comme dans les Otaries. Ces os ont été recueillis à Borgerhout, troisième section, sur l’emplacement de l’ancien fortin n° 1, et au fort n° 4, a Vieux-Dieu (Moortsel). On n’a pas conservé note de la localité du radius et du cubitus, si ce n’est que l’on trouve indiqué simplement : troisième section. D’après la couleur des os et le sable qui en provient, ils sortent tous du diestien. Ces ossements portent dans les collections du Musée les numéros 114-5, 1146, 1221. 82 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES ANCIENNETÉ RELATIVE DES ESPÈCES FOSSILES ET LEURS AFFINITÉS AVEC LES ESPÈCES VIVANTES. Nous allons exposer dans ce dernier chapitre l’ordre dans lequel les carnassiers amphibies se succèdent et le degré d’affinité que présentent les espèces fossiles avec celles qui vivent encore aujourd’hui. M. Mourlon a fait une élude approfondie sur les lieux mêmes des sables des environs d’Anvers, et il a formulé, dans les termes suivants, son opinion sur les rapports des couches entre elles et sur les ossements d’Amphithériens qu’elles renferment : « Les couches miocènes supérieures et pliocènes scaldisiennes des environs d’Anvers sont com¬ prises entre l’argile de Boom ou terrain miocène rupelien et les dépôts quaternaires. » Elles se présentent sous quatre faciès minéralogiques principaux qui correspondent à autant d’horizons stratigraphiques. Les dépôts de la hase sont formés de sables noirs ; ceux de la partie supérieure sont des sables jaunes-rougeûlres. Entre ces deux groupes se développent des sables gris et des sables verts. » La plus sérieuse difficulté que présentent les terrains d’Anvers consiste dans la séparation des sables gris d’avec les sables verts. » J’ai montré (Bull, de l’Acad ., 1876, t. XLII) que ces dépôts forment deux horizons paléonto- logiques très distincts : l’inférieur constituant un étage à faunes ostéologique et conchyliologique propres, tandis que le supérieur doit être rattaché, par ses ossements et par ses coquilles, aux sables jaunes-rougeâtres. M. Nyst partage complètement cette manière de voir. » L’autonomie des sables verts a été établie, non-seulement par les différences de sa faune avec celle des sables gris et jaunes-rougeâtres, mais aussi à cause de sa faune ostéologique complètement distincte de celle des sables noirs qu’ils recouvrent, et de leurs faibles rapports conchyliologiques. » Il suit de là qu’on peut établir la succession suivante dans les terrains d’Anvers, en commen¬ çant par le bas : » 1° Sable noir caractérisé par les Mésocètes, les Dauphins à longs rostres, etc., et présentant deux niveaux conchyliologiques distincts: l’un caractérisé par la Panopœa Menardi (Edeghem, Kiel, etc.), l’autre caractérisé par l’abondance du Pectunculus pilosus (Berchem, etc.); » 2° Sable vert à Ilétérocêtes dont la faune conchyliologique est caractérisée par la Terebralula grandis , le Pecten danicus , YOstrea navicularis , etc., et qui renferme des restes de poissons, tels que YOxyrhina hastalis qui paraît être spéciale à ce niveau, et le Carcharodon megalodon qui se trouve en plus grande abondance dans le sable à pétoncles sous-jacent; » 3° Crag (gris à la base, jaune-rougeâtre à la partie supérieure) caractérisé par les cétacés se rapportant aux genres Plesiocelus , Balœna, Balœnula, Balœnotus , Megapteropsis , etc. DES ENVIRONS D’ANVERS. 83 » Mes recherches à Anvers ayant été faites en vue d’obtenir le classement stratigraphique des riches faunes ostéologiques qui y ont été recueillies, je crois pouvoir donner le résultat de ces recherches en ce quic oncerne les Amphithériens. » Voici les données sur lesquelles reposent mes conclusions : » 1° Lors du dégazonnement des talus des fossés de l’enceinte que le Génie militaire m’a si généreusement permis d’exécuter en 1874 pour relever des coupes précises, j ai découvert en place un certain nombre de restes de Phoques dont la position stratigraphique se trouve ainsi nettement définie ; » » 2° Plusieurs ossements qui se trouvent dans la collection des Phoques du Musée, étaient encore accompagnés de sables avec coquilles qui permettaient de déterminer les couches dont ils prove¬ naient; » 3° La couleur et le degré de conservation des ossements sont nettement en rapport avec les couches dont proviennent ces ossements, ce que confirment mes recherches stratigraphiques et les caractères zoologiques. » Voici, d’après ces données, le classement stratigraphique des Phoques d’Anvers: TERRAIN QUATERNAIRE? Tricliechus rosmarus. TERRAIN PLIOCÈNE SCALDISIEN. (Sables jaunes et gris a Plésiocètes.) Trichecodon Koninckii, V. B. Alachtherium Cretsii, Du B. Mesotaria ambigua, V. B. Palœophoca Nystii, V. B. Callophoca obscura, V. B. TERRAIN MIOCÈNE SUPÉRIEUR. Plalyphoca vulgaris , V. B Gryphoca similis, V. B. Phocanella pumilla, V. B. — minor, V. B. Phoca vitulinoïdes , V. B. 1. Sable vert a hétérocètes. Monatherium Delognii , V. B. — aberratum, V. B. — afjînis, V. B. 2. Sable noir a mésocètes. Prophoca Rousseaui , V. B — proxima, V. B. Nous nous trouvons ainsi, dans le terrain quaternaire, en Belgique comme en Écosse et en Norwége, en présence d’ossements d’espèce encore vivante; puis, dans des sables tertiaires de plus en plus anciens, nous observons une série de genres qui ont encore des espèces plus ou moins voisines des espèces vivantes, et d’autres genres qui, sans s’éloigner sensiblement des animaux de leur ordre, ne montrent plus que des affinités éloignées avec les Phoques de nos jours. 84 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES Il est assez remarquable que plusieurs de ces animaux aient eu une zone d’habitation plus grande que celle qu’ils ont encore aujourd’hui; d’un côté, le Morse visitait jadis en Amérique le golfe S‘-Laurent et même les côtes de New-Jersey, comme en Europe la mer du Nord; le Pagophilus groenlandicus, qui ne quitte plus guère les glaces, vivait au Maine et au Canada comme en Nor- wége; d’un autre côté, le Lamantin des bords de l’Amazone se rendait beaucoup plus au Nord qu’il ne le fait aujourd’hui, comme nous avons eu l’occasion de le faire remarquer. Parmi les espèces perdues, mais qui ont conservé des caractères de leur groupe, nous pouvons citer les Trichecodon et les Alachtherium. Ils appartiennent par tous leurs caractères à la division des Morses. Ces affinités ne sont pas douteuses et ce groupe, qui avait jadis plusieurs représentants, n’en compte plus qu’un seul, le Trichecus rosmarus, répandu sur toute la calotte de notre hémi¬ sphère septentrional. Les Mesotaria forment un autre genre fort intéressant; ils rappellent par quelques caractères les Otaries d’aujourd’hui, et si ces affinités sont réelles, cette famille aurait complètement disparu de l’Europe; elle ne se serait conservée que dans l’hémisphère sud et dans le nord du Pacifique. Les Otaries sont si abondantes encore aujourd’hui aux îles S'-Paul et S-George, dans la mer de Behring, qu’elles font l’effet d’armées campées le long des côtes. Ces îles correspondent à peu près à notre latitude. Presque partout ailleurs ces animaux sont sur le point d’être détruits par les pêcheurs. Ces Pinnigrades peuvent donc fort bien avoir eu leurs espèces similaires au nord de l’Atlantique. Il est vraiment à regretter que nous n’ayons pas quelques fragments de crâne ou des dents de ce genre intéressant pour établir avec plus de certitude leur degré d’affinité. Le Palœophoca Nystii est un autre genre de nos Phoques fossiles, qui rappelle sous plus d’un rapport les Pelagius monachus. Il n’est pas sans affinités avec le genre Pristiphoca établi par M. Paul Gervais pour une espèce du Midi de la France. Le Pristiphoca occitana est connu par un maxillaire inférieur presque complet, d’après lequel on peut mieux juger des affinités. Le Pelagius monachus, Phoque-Moine de la Méditerranée, est aujourd’hui un genre isolé qui semble propre au régions tempérées. Il représente seul dans notre hémisphère, comme espèce simi¬ laire, le Stenorhynclius leptonyx. Si ces appréciations sont exactes, ce Pelagius, comme le Trichecus, ne seraient plus que des représentants isolés de groupes jadis plus nombreux. Dans les environs de Naples, le professeur Guiscardi a signalé un Phoque fossile dont nous con¬ naissons heureusement la tête et auquel il a donné le nom de Phoca Gaudini. C’est évidemment un animal voisin du Pelagius, malgré la différence du nombre de dents incisives. Dans le bassin de la mer Noire, Eichwald et surtout Nordmann ont fait connaître deux espèces de Phoques fossiles, le Phoca Pontica et le Phoca mœolica, et ce dernier nous semble devoir se rapprocher par les os qui en sont connus, également du Phoque-Moine. Il en est de même, comme nous l’avons déjà fait remarquer, des dents des environs de Bor¬ deaux que M. Delfortrie a fait connaître en les rapportant au genre Otarie. Quant au Phoca ambigua des environs d’Osnabruk, que H. von Meyer a fait connaître depuis plusieurs années, nous ne pouvons partager son avis au sujet des affinités des dents avec celles de Phoca vitulina, à moins qu’il n’y ait un mélange de dents provenant de diverses espèces. Mais celles que Pictet a reproduites dans son atlas (pl. VI, fig. 1-3) ne proviennent certes pas de Phoca vitu¬ lina et offrent au contraire une grande ressemblance avec celles de Pelagius. Pai* la taille, ce Phoca ambigua se rapprochait également plus du genre méditerranéen que du Phoque vitulin. Si ces rapprochements se confirment par les découvertes ultérieures, il en résultera que le Phoque-Moine appartient à un groupe autrefois plus nombreux, et que la mer du Crag nourrissait à la fois des espèces ayant des affinités avec celles du Midi et avec celles du Nord. DES ENVIRONS D’ANVERS. 8a Ainsi les genres les mieux caractérisés ne seraient plus que des formes isolées d’anciens groupes qui peuplaient à l’époque pliocène nos côtes et nos estuaires. Les autres ossements se rapprochent plus ou moins des espèces qui vivent encore au Nord de notre hémisphère et qui sont restées prodigieusement communes dans certains parages. Le Platyphoca vulgaris ne nous a laissé qu’un petit nombre d’os, mais il y en a assez pour que nous osions dire qu’il rappelle parfaitement le Phoca barbata du Nord. Cette espèce est, comme on sait, la plus grande de nos régions septentrionales. Le Platyphoca vulgaris était plus grand encore. Les ossements que nous avons réunis sous le nom de Callophoca obscura ont plusieurs caractères propres au Pagophilus groenlandicus qui visitait encore la Nonvége et les États-Unis d’Amérique pendant la période glaciaire. Il n’y a que la taille qui diffère un peu. Nous regrettons de ne pas avoir trouvé un os pénien de cette espèce, puisque celui du Pagophilus est si bien carac¬ térisé. Le genre que nous désignons sous le nom de Gryphoca est fort intéressant; les os rappellent YHalichœrus grypus, le plus aquatique des Pinnigrades. Nous avons vu plus haut qu’il vit partout à côté du Phoque vitulin dans la Baltique comme sur les côtes des Iles Britanniques. C’est dans le fémur et l’os des îles que les caractères propres de ce genre se traduisent le mieux. Le Pagomys hispida, c'est-à-dire la plus petite espèce de nos Amphithériens, a son représentant dans un genre que nous avons appelé Phocanella et qui comprend deux espèces bien distinctes parmi les fossiles. Les ossements les plus nombreux trouvés dans nos sables se rapportent à une espèce de petite taille et que nous avons appelé Phoca vitulinoïdes, à cause de ses affinités avec le Phoca vitulina. Cette espèce était la plus commune de nos régions. Parmi les ossements de la mer Noire, ceux désignés sous le nom de Phoca pont ica, nous semblent devoir se rapporter à ce même Phoca vitulina ou à une espèce très-voisine. Le Phoca halitschensis, aux yeux de tous ceux qui en ont étudié le pied, est très voisin également du Phoca vitulina. Ce pied, comme nous l’avons vu plus haut, la pièce de Pinni- grade la plus anciennement découverte, a été étudiée par Cuvier, Blainville et, en dernier lieu, par le professeur Bruld ; elle appartient au Musée de Pesth et a été trouvée sur les frontières de Hongrie. Les ossements de Phoques, provenant de Neussdorf et de Hernals et qui sont déposés au Musée de minéralogie de Vienne, nous semblent devoir se rapporter au même animal. Les Monatherium forment un autre genre fort intéressant pour nous. Les os que nous en con¬ naissons, surtout les vertèbres, ont une ressemblance fort grande avec le Pelagius monachus, et si ces affinités se confirment par la découverte de quelques autres os, nous aurons une raison de plus de croire à une communication directe, pendant cette partie de la période tertiaire, entre la Médi¬ terranée et la mer du Nord. Les autres ossements, recueillis à Anvers dans le sable le plus ancien, présentent des caractères communs, et nous avons proposé de les réunir sous le nom de Prophoca. Ce sont de vrais Pinni¬ grades sous tous les rapports et la différence principale avec les précédents, c’est que nous ne découvrons guère à quel genre vivant on peut les réunir. Tous les caractères propres aux Pinni¬ grades se trouvent dans ces Prophoca, et le nom que nous proposons n’a d’autre signification que d’indiquer leur âge relatif. Ainsi, nous trouvons, sur nos plages tertiaires de la mer du Nord, des ossements de vrais Siré¬ niens, des Cétacés, Cétodontes et Mysticètes, des Squalodons et des Amphithériens; aucun os de Mammifères n’a été mis jusqu’à présent au jour dans les dépôts tertiaires belges qui ne se rapporte directement et complètement à l’une ou l’autre de ces formes-types. Nous finirons par cette observation que si tous ces Thalassothériens présentent déjà les caractères 86 DESCRIPTION DES OSSEMENTS FOSSILES, etc. propres de leur groupe, la seule différence de quelque importance se rapporte à leur nombre qui est si considérablement réduit et à leur taille qui a notablement diminué. En résumé, les Morses et les Pélages ne sont plus représentés aujourd’hui que par deux espèces, dont l’une habite les régions tempérées, l’autre les régions boréales, tandis qu’à l’époque pliocène, ils avaient plus d’un représentant dans la mer du Nord. Les Otaries qui sont si abondantes encore dans la mer de Behring et qui sont aujourd’hui incon¬ nues dans les mers d’Europe, avaient probablement leur représentant dans le genre Mesotaria. A l’exception des ossements recueillis dans le sable noir, tous les autres se rapportent à des espèces qui rappellent celles qui vivaient encore dans notre hémisphère, depuis le Floe rat jusqu’au grand Phoque. Enfin, ces Thalassothériens semblent avoir perdu de leur dimension comme plusieurs Géo- thériens. TABLE DES MATIÈRES. Pages. Préface.. 1 Les Phoques ou les Amphilhériens. 5 Phoques ou Amphilhériens vivants. 6 Squelette. ib. Genre de vie. \\ Distribution géographique.12 Espèces d’Europe. 16 Classification.22 Amphithériens ou Phoques fossiles.24 Historique. ib. Conditions dans lesquelles se trouvent les ossements à Anvers.29 Musées qui renferment des ossements fossiles de Phoques.35 Description des ossements. 39 Trichecus rosmarus (pl. VIII, fig. 7-9). (b. Trichecodon Koninckii (pl. VI, fig. 5-8; pl. Vil, fig. 1-6; pl. VIII, fig. 1-6).46 Alachtherium Cretsii (pl. I, fig. 1-3; pl. II, fig. 1-6; pl. III, fig. 1-5; pl. IV, fig. 1-6; pl. V, fig. 1-7 ; pl. VI, fig. 1-4).. Mesotaria ambigua (pl. IX, fig. 1-16).36 Palœophoca Nystii (pl. X, fig. 1-17). 60 Callophoca obscurci (pl. XI, fig. 1-13). 65 Platyphoca vulgaris (pl. XII, fig. 1-11).g7 Gryphoca similis (pl. XIII, fig. 1-21).69 Genre Phoccinella . 70 Phocanella pumila (pl. XIV, fig. 1-12). n Phoccinella minor (pl. XIV, fig. 13-25). 71 Phoca vilulinoïdes (pl. XV, fig. 1-29). 72 MMMMH mm 88 TABLE DES MATIÈRES. Pages. Genre Monatherium . 7 g Monatherium Delognii (pl. XVI, lig. 1-6). i(j. Monatherium a/fine (pl. XVI, lig. 7-14). 7(5 Monatherium aberratnm (pl. XVII, lig. 1-29). 77 Genre Prophocct . 78 Prophoca Rousseaui (pl. XVIII, lig. 1-11). 79 Prophoca proxima (pl. XVIII, lig. 12-16).80 Ancienneté relative des espèces fossiles et leurs affinités avec les espèces vivantes.82 griîgsorpo *4 'I 3